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LA « SACERDOTALISATION » DANS LES PREMIERS ÉCRITS MYSTIQUES JUIFS ET CHRÉTIENS
Judaïsme ancien et origines du christianisme Collection dirigée par Simon Claude Mimouni (EPHE, Paris) Équipe éditoriale: José Costa (Université de Paris-III) David Hamidović (Université de Lausanne) Pierluigi Piovanelli (Université d’Ottawa)
LA « SACERDOTALISATION » DANS LES PREMIERS ÉCRITS MYSTIQUES JUIFS ET CHRÉTIENS Actes du colloque international tenu à l’Université de Lausanne du 26 au 28 octobre 2015 sous la direction de David Hamidović, Simon C. Mimouni et Louis Painchaud
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Image de couverture: Vitrail de Marc Chagall créé en 1960-1961 pour la face nord de la synagogue de Hadassah Hospital, Ein Kerem, à Jérusalem : symboles sacerdotaux de la tribu de Lévi
© 2021, Brepols Publishers n.v./s.a., Turnhout, Belgium All rights reserved. No part of this publication may be reproduced, stored in a retrieval system, or transmitted, in any form or by any means, electronic, mechanical, recording, or otherwise, without the prior permission of the publisher. ISBN 978-2-503-59299-2 E-ISBN 978-2-503-59300-5 10.1484/M.JAOC-EB.5.122106 ISSN 2565-8492 E-ISSN 2565-960X Printed in the EU on acid-free paper. D/2021/0095/42
TABLE DES MATIÈRES Avant-propos David H amidović , Simon C. Mimouni, Louis Painchaud . . . 9 The Priestly Struggle on the Sacred Written Authority as Reflected in the Merkaba Tradition Rachel Elior . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 13 “He Who Sits Crowned on the Throne of His Glory”: Body Posture in Hekhalot Rabbati and in Rabbinic Literature Catherine Hezser . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 41 L’ascension au ciel de Rabbi Neḥounya ben ha-Qana en Hekhalot Rabbati 13-25 (§§ 198-259): Questions rédactionnelles et pratiques rituelles Pierluigi Piovanelli . . . . . . . . . . . . . . . . . . 57 Les Otiyyot de-Rabbi Akiva version A, la littérature des Hekhalot et la « sacerdotalisation » Apolline Thromas . . . . . . . . . . . . . . . . . . 71 Liturgical Community, Priesthood, Qedusha and Synagogue: From Qumran to the Hekhalot Texts through Rabbinic Literature José Costa . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 95 La Nouvelle Jérusalem et le nouveau Temple dans la littérature apocalyptique du judaïsme antique Lorenzo DiTommaso . . . . . . . . . . . . . . . . . . 133 Sacerdotalisation et liturgisation. L’impact de la liturgie et de la communion avec les anges sur le sacerdoce dans la Liturgie angélique Michael R. Jost . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 145 La Vision de Gabriel et la mystique de la merkava David H amidović . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 165 Les « Livres d’Hermès » : des écrits de la « Maison de vie » ? Étude des liens possibles entre des Hermetica et le temple égyptien Anna Van den K erchove . . . . . . . . . . . . . . . . 183
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Effectless Prophecy, Hatred between Shepherds and Elders, and Sacrifice to Beliar – The Great Despair of The Ascension of Isaiah Markus Vinzent . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 203 Sacerdotalisation and Early Jewish Mystical Elements in the Greek Testament of Levi Jessica van ‘t Westeinde . . . . . . . . . . . . . . . . 217 Prêtres et « toit unique » (EvJud 45,6-7). Maisons célestes, sacrifice et sacerdoce dans l’Évangile de Judas Louis Painchaud . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 247 Index des sources . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 265
AVANT-PROPOS David H amidović , Simon C. Mimouni, Louis Painchaud Contrairement à l’opinion commune, la destruction du Temple de Jérusalem en 70 de notre ère n’a pas conduit à la disparition des prêtres et des sacrifices. Ces derniers perdurèrent quelques années sur les ruines du temple et les prêtres conservèrent leur statut social et symbolique dans la société juive en Judée et en dispersion. Néanmoins, le sacerdoce et les sacrifices furent au centre de débats voire de conflits dès les derniers siècles avant notre ère comme l’illustrent les manuscrits de Qumrân. Les disputes redoublèrent à la fin du i er siècle de notre ère. Les animateurs de ces âpres discussions provenaient de différents groupes sociaux établis autour du bassin méditerranéen : depuis les Sages ou rabbins jusqu’aux premiers chrétiens, depuis les partisans d’une restauration du temple aux tenants de la seule synagogue. Des traces de ces débats peuvent se lire dans les écrits laissés par ces groupes comme l’Épître aux Hébreux, l’Apocalypse de Jean, l’Homélie pascale de Méliton de Sardes, l’Évangile de Judas, les premiers écrits rabbiniques, pour ne citer que quelques exemples. Autrement exprimé, le temple étant devenu un horizon pour les juifs, il s’agit de voir comment/pourquoi/quand cette institution, alors qu’elle n’existe officiellement plus, est devenue un objet de dispute entre des groupes religieux. C’est pourquoi un projet de recherche a été noué entre David Hamidović (Université de Lausanne), Simon C. Mimouni (École pratique des hautes études, Paris) et Louis Painchaud (Université Laval, Québec) à partir de 2012. Il s’agit de comprendre les tenants et les aboutissants des débats autour du temple, des sacrifices et du sacerdoce entre ces groupes. En bref, quels sont les enjeux autour de ces éléments alors disparus ou en perte de vitesse pour les prêtres et les lévites ? S’agit-il des derniers feux d’un ancien régime ou bien les signes d’une reconfiguration de la religion juive, ses ministres et ses institutions, dans un monde juif nouveau ? Les concepts de « Templelization » 1 dans le monde anglo-saxon, de « Templisierung » 2 en Allemagne ou de « pensée du Temple »3 en France 1. S. Fine , This Holy Place. On the Sanctity of the Synagogue during the GrecoRoman Period, Christianity and Judaism in Antiquity 11 (Notre Dame (Ind), 1997). 2. D. Stökl Ben Ezra, « Templisierung: Die Rückkehr des Tempels in die jüdische und christliche Liturgie der Spätantike », dans J. Scheid (éd.), Rites et
10 DAVID HAMIDOVIĆ – SIMON C. MIMOUNI – LOUIS PAINCHAUD rendent compte de la métaphorisation du temple et ses adjuvants dans la littérature juive et chrétienne, mais ils n’articulent pas ces constats littéraires avec les groupes sociaux et religieux anciens et émergents. La présente recherche vise à mettre l’accent sur cet aspect afin de rendre compte du phénomène complexe qu’on a appelé la « sacerdotalisation » du judaïsme ancien. Les questions de recherche tournant alors davantage sur l’identité ou les identités juives en pleine reconfiguration au tournant de notre ère et dans les siècles qui suivent. Pourquoi des non-prêtres revendiquent-ils des caractéristiques sacerdotales pour légitimer leurs fonctions sociales, politiques, religieuses voire économiques ? Les premiers fruits de la recherche aperçus lors du colloque « La question de la ‘sacerdotalisation’ dans le judaïsme rabbinique, le judaïsme chrétien et le judaïsme synagogal » qui s’est tenu à l’Université Laval à Québec en septembre 2014 4 laissent voir que le phénomène est plus large que le judaïsme ancien. Le monde gréco-latin et le monde perse à la même époque connaissent un phénomène comparable même s’ils présentent chacun des spécificités en général et à l’échelle locale. Ce premier colloque a aussi été l’occasion de passer en revue les positions des différents groupes sociaux sur l’espace perçu et vécu du temple et la position alors assignée aux prêtres et aux lévites. Les groupes juifs attachés au mouvement de Jésus, les cercles des Sages ou rabbins, et la myriade de communautés locales de plus en plus tournées vers la synagogue instituée laissent voir dans leurs écrits conservés et les inscriptions une mosaïque de conceptions. Il apparaît, cependant, que les prêtres et lévites en tant que véritable caste sacerdotale restent influents plusieurs siècles après la chute du Temple de Jérusalem et qu’ils tentent même une ou plusieurs reconfigurations de leurs fonctions dans la société en érigeant des tribunaux pour les affaires religieuses et en proclamant leur prééminence ancienne dans l’étude de la Tora. On peut même se demander s’ils ne sont pas à l’origine d’une institutionnalisation de la synagogue alors davantage associée au domaine privé qu’à la vie communautaire bien que des exemples soient documentés en Égypte dans ce dernier cas. Aussi, dans les fonctions sociales susnommées, des prêtres et des lévites adoptent naturellement la posture du Sage ou rabbin avec des cercles de disciples. Dans ce cas, ils se placent en porte-à-faux des autres Sages qui visent par leurs écrits casuistiques à démontrer qu’ils deviennent des experts supérieurs ès-qualités à la dignité sacerdotale. L’étude de la Tora devient supérieure à la filiation sacerdotale bien que la dignité sacerdotale demeure comme croyances dans les religions du monde romain, Entretiens sur l’antiquité classique 53 (Genève, 2007) p. 231-287. 3. F. Schmidt, La pensée du Temple. De Jérusalem à Qoumrân (Paris, 1994). 4. S. C. M imouni – L. Painchaud (éd.), La question de la « sacerdotalisation » dans le judaïsme synagogal, le christianisme et le rabbinisme (Turnhout, 2018).
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l’attestent les tentatives de Sages de s’en parer. Une dialectique de rejet et d’intégration se met en place. D’autres mouvements appelés plus tard chrétiens, dont certains gnostiques et d’autres groupes dans le monde perse, ont eu la même tendance. Une littérature résiste à ces premiers constats : les premiers écrits mystiques juifs. On les nomme aujourd’hui la littérature des palais célestes ou Hekhalot. Ils constituent les premiers écrits mystiques juifs bien avant la Kabbale et le Zohar aux xii e et xiii e siècles. Les groupes sociaux qui portèrent ces écrits demeurent un objet de débat. À ce stade de la recherche, on peut se demander si des prêtres et des lévites n’en sont pas des rédacteurs. Ils chercheraient un nouvel accès à Dieu en l’absence du temple. Cette démarche serait alors un développement original des apocalypses juives et chrétiennes. Le rapport à l’institution synagogale semble ambigu en nombre d’écrits des Hekhalot : tantôt est exprimée une position favorable, tantôt la synagogue est décriée. Les transferts extatiques vers les cieux sont-ils aussi une forme de substitution aux sacrifices dans le temple ? La question demeure débattue. Par ailleurs, le contexte historique de la rédaction de ces textes demeure un objet de discussion. Les uns (l’école allemande avec Peter Schäfer) datent la première composition de ces textes ou de parties de ces textes à partir du v e siècle 5, alors que d’autres restent sur la position de Gershom Scholem pour en faire des textes rédigés aux ii e-iii e siècles selon une filiation directe avec les apocalypses et la littérature autour du patriarche Hénoch 6. L’identification très récente de fragments de papyrus des Hekhalot dans la synagogue du Vieux-Caire et plus largement l’étude de nombreux manuscrits des Hekhalot disséminés à travers le monde relancent ce débat. Le colloque « Les écrits mystiques des Hekhalot et la ‘sacerdotalisation’ dans le judaïsme ancien », qui s’est tenu à l’Université de Lausanne du 26 au 28 octobre 2015, visent modestement à étudier ces dernières questions. Pour examiner le phénomène sous différents aspects, il est apparu intéressant d’intégrer d’autres écrits mystiques juifs et chrétiens contemporains en plus des Hekhalot. Ainsi, le lecteur des actes du présent colloque est juge pour évaluer les originalités et les points communs, pour saisir les intertextualités au plus près des textes ou seulement allusives, pour comprendre les thématiques mystiques en contexte. Les actes du colloque ne donnent pas une réponse univoque à ces questions, car les écrits mystiques ne proviennent pas d’un seul milieu social mais d’un milieu intellectuel aux multiples ramifications. 5. R. Boustan – M. Himmelfarb – P. Schäfer (éd.), Hekhalot Literature in Context: Between Byzantium and Babylonia (Tübingen, 2013). 6. G. Scholem, Major Trends in Jewish Mysticism (New York, 31954) ; eadem, Jewish Gnosticism Merkabah Mysticism, and Talmudic Tradition (New York, 21965) ; E. Liebes a collecté des articles en hébreu de Gerschom Scholem dans Demons, Spirits and Souls: Studies in Demonology (Jérusalem, 2004).
T he P riestly Struggle on the Sacred Written Authority as R eflected in the M erkaba Tradition Rachel Elior Hebrew University of Jerusalem [email protected] Résumé Le présent article présente un nouveau point de vue sur la compréhension de la différence entre l’homme élu et la figure angélique glorifiée d’Hénoch fils de Jared (Gn 5,21-24), le scribe angélique qui a apporté le calendrier solaire et observé le char céleste, tel qu’établi dans la littérature mystique sacerdotale avant et après l'ère commune, et sa figure extrêmement humiliée et son image négative dans la littérature rabbinique. Je suggère que les traditions contradictoires doivent être comprises comme faisant partie de la lutte continue entre les cercles sacerdotaux-mystiques qui considéraient l'écriture comme la plus haute expression de la tradition angélique sacrée du char, et les nouveaux cercles des Sages de la loi orale, qui adhéraient au calendrier lunaire, en voulaient aux anges, et interdisaient la littérature sacerdotale de la poésie mystique du char et interdisait d’écrire complètement. La littérature des Hekhalot préserve la tradition mystique hénochique d’écrire la poésie angélique du char céleste qui a été créée dans la synagogue, où les prières avec les anges faisaient partie de la tradition liturgique. Les Sages, les partisans de la loi orale, dans le Beit Hamidrash, ont présenté Hénoch, l’éternel scribe sacerdotal de la tradition angélique écrite de la synagogue, comme un pécheur, fouetté et humilié dans les cieux, et puni de mort par Dieu. La littérature des Hekhalot, où Hénoch-Metatron est un héros angélique majeur, reflète cette lutte. Abstract The present article is introducing a new vantage point on the understanding of the vast disparity between the chosen man and glorified angelic figure of Enoch son of Jared (Gen 5: 21-24), the angelic scribe who brought the solar calendar and observed the heavenly Chariot, as recorded in the priestly mystical literature before and after the common era, and his extremely humiliated figure and negative image in the rabbinic literature. I suggest that the contradictory traditions should be understood as part of the ongoing struggle between priestly-mystical circles that considered writing as the highest expression of sacred angelic tradition of the Chariot, and the new circles of the sages of the oral law, who adhered to the lunar calendar, resented angels, and prohibited priestly literature of mystical poetry of the Chariot La « sacerdotalisation » dans les premiers écrits mystiques juifs et chrétiens. Actes du colloque international tenu à l’Université de Lausanne du 26 au 28 octobre 2015, sous la direction de David Hamidović, Simon C. Mimouni et Louis Painchaud, Turnhout : Brepols, 2021 (Judaïsme ancien et origines du christianisme, 22), p. 13-40 DOI 10.1484/M.JAOC-EB.5.122764 © F H G
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and prohibited to write altogether. Hekhalot literature preserves the Enochic mystical tradition of writing angelic poetry of the heavenly Chariot that was created in the synagogue, where prayers with the angels was part of the liturgical tradition. The Sages, the proponents of the oral law, in Beit Hamidrash, introduced Enoch, the eternal priestly scribe of the angelic written tradition of the synagogue, as a sinner, whipped and humiliated in heaven, and punished by death by God. Hekhalot Literature, where Enoch-Metatron is a major angelic hero, reflects this struggle.
In a comprehensive survey of the rabbinic literature dating from the first half of the first millennium of the Common Era, entitled Torah shebe-a’l-pe- peshutah ke-mashma’ah, Prof. Yaakov Sussmann, had argued that the most remarkable feature of the Sages, the highly literate creators of the Oral Law, is, in fact, their consistent fundamental principle that all their extensive halakhic deliberations will not be committed into public writing. The meaning of this decision was that their work will remain only as an oral transmission, to be taught by instructive erudite teachers to their devoted reciting students. The Mishna and the Talmud were formulated, taught, and learned by oral means alone, by those masters who possessed great memory and were able to impart their inherited oral knowledge and their analytic principles on to disciples who also possessed such remarkable skills, scholarly insight and communal commitment and responsibility. All along the course of the first half of the first Millennium ce , there was no written Halachic book available for the public for perusal. Written versions became available only in the last third of the first millennium. 1 Prof. Sussmann analyzed all the relevant references, old and new, and indicated all the explicit and alluded instances where complete prohibitions on committing rabbinic teachings into writing were found. 2 Sussmann elaborated widely on the reasons for that major pedagogic principle and on its cultural and social implications along the first half of the first Millennium. Among the reasons for this development he noted the creation of ongoing vibrant study communities of the Oral Law, that were formed around the masters of the Oral Law that taught in Batei Midrash, since there were no books of the new rabbinic teachings that enabled independent study. 1. See Y. Sussmann, “Torah she-be-al- pe peshuta ke-mashma’ah”, in Y. Suss– D. Rosenthal (ed.), Mehqerei Talmud: Talmudic Studies Dedicated to the Memory of Professor Ephraim E. Urbach, Vol. iii (Jerusalem, 2005) 209-384 [in Hebrew]. 2. See for example: : כתיב:דרש ר' יהודה בר נחמני מתורגמניה דר' שמעון בן לקיש – ) "כי על פי הדברים האלה" (שם: כז); וכתיב,"כתוב לך את הדברים האלה" (שמות לד פה אי אתה רשאי- דברים שבעל,הא כיצד? דברים שבכתב אי אתה רשאי לאומרן על פה לא כרת הקב"ה ברית עם ישראל אלא בשביל דברים: אמר רבי יוחנן.לאומרן בכתב , תלמוד בבלי," "כי על פי הדברים האלה כרתי אתך ברית ואת ישראל: שנאמר,פה-שבעל ' ס ע"א ובמקבילה בתמורה יד ע"ב; "אמר ר' אבא בריה דר' חייא בר אבא אמר ר,גיטין לפי גרסת, תמורה יד ע"ב." והלמד מהן אינו נוטל שכר, כותבי הלכות כשורפי התורה:יוחנן רש"י. mann
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In the conclusion of his study Sussmann suggested that the situation had changed and the Oral Law had been committed into a written version, due to the fear of the loss of the oral tradition as a result of the diminution of the line of transmission at the end of the Byzantine period, with the rise of Islam, when frequent wars and invasions endangered the ongoing existence of the Jewish community in the Land of Israel. These circumstances, presumably, were the only reason that might have justified the transcription of the oral law, thus, the knowledge could be passed on without relying on the continuous oral chain of tradition. It seems that there is only one point that could have been added to the exhaustive discussion concerning the prohibition of writing of the Oral Law and the Halakhic deliberations of the Sages during the major part of the first millennium: At the very same period that the Sages had canonized the Holy Scriptures, when they endowed them with an exclusive sacred literary position and prohibited the inclusion of any other sacred book except the twenty four books that created the biblical canon, all the while insisting on sole oral transmission of all religious teachings that detailed the human implication of the Divine law – there were other Jewish circles who expounded an entirely different opinion concerning writing of divine knowledge of various kinds. 3 There were different Jewish circles who considered the preservation in writing of spiritual knowledge or legal deliberations as absolutely vital and highly necessary. 4 The common denominator of these writing circles, those who defined themselves as “Bnei Zaddok ha-Kohanim, the guardians of the covenant” before the Common Era, and as “Descenders of the Chariot” after the destruction of the Second Temple, was their intense interest in 3. On the principle issue of the value of orality (that entails memory), versus the value of writing (that creates forgetfulness) in the ancient world, see: Plato, Φαῖδρος 274-275, where orality is much preferred and writing is rejected. 4. אמרו להם. ומראין לו בספר, ואדם שואל,שהיו ביתוסין כותבין הלכות בספר ʹעל פי הדברים האלה כרתי אתך ברית ואת ישראלʹ (שמות: ʺוהלא כבר נאמר:חכמים .ʺ יא)!? מלמד שאין כותבין בספר, כז); ʹעל פי התורה אשר יורוךʹ וגוʹ (דברים יז,לד The Bethosians were writing laws in a book, when a person asked they showed him the answer in a book. The sages told them, it has been written already: ‘Write down these words, for in accordance with these words I have made a covenant with you and with Israel’ (Ex. 34:27); ‘Act according to whatever they teach you and the decisions they give you. Do not turn aside from what they tell you, to the right or to the left’ (Deut. 17: 11). From that we learn that there is no writing in a book”, Megilat Taanit, V. Noam (ed.) (Jerusalem, 2004) 206-214. Different Circles that produced various written traditions along the first millennium such as Sefer Yetzira, Sefer ha-Razim Piyyut, Hekhalot, Aramaic translations of the Tora, various kinds of liturgy, Baraita demasekhet nidah, apocalyptic midrashim, Seder raba debereshit, Reuyot Yehezkel, Pierkei deRabi Eliezer, stories of the Ten Martyrs, the Vision of Gabriel, early and late midrashim and Greek literature from the Jewish diaspora, point out to the multifaceted Jewish circles that did not obey to the rabbinic instructions that prohibited writing.
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the heavenly realm and the celestial sanctuaries where eternal cycles of angelic liturgy took place in a perpetual pre-calculated order. The members of the writing circles, who had great interest in the invisible world of the Chariot, that is the world of the angels and the Cherubim, as well as in heavenly Chariots and angelic liturgy, in heavenly sanctuaries and in angels in Paradise, promulgated an opposite opinion concerning the transmission of sacred knowledge, differing entirely from the one expressed by the Sages of the Oral Law: they insisted on the preservation in writing of all the mystical traditions that were related to sacred memory, divine authority, heavenly law, divine covenant, angelic revelation, the tradition of the Heavenly Chariot, visions, dreams and holy ritual related to angelic liturgy. Mysticism, or verbal testimony committed into writing on invisible worlds and various experiences of transcending borders of time and place, which are revealed only to chosen few in a dream or a vision, is a perceptual category practiced by inspired poets and gifted story tellers, prophets or innovative visionary leaders capable to testify on a new source of mysterious authority or hidden knowledge that otherwise cannot be transmitted in more common frames of discourse or mundane experience. The mystical writing circles active before the Common Era believed in the necessity of this written transcription in regard to the legal tradition or halakhic expositions, as well as in regard to the mystical revelation and liturgical angelic traditions. These writing circles, those who subscribed only to the sacred written law, and its priestly interpretation according to the literal meaning of the biblical law, as well as to various sacred writings in prose and poetry based on divine inspiration, prophecy, dreams, visions and angelic knowledge, had resented any oral exposition related to the sacred written law based on human sovereignty, new human perception or new free interpretation. The “old” priestly-mystical opposing circles to the new human sovereignty represented by the Pharisees, were called by the resentful Sages, who promulgated precisely these new values of human freedom and human authority, by the derogatory names: Zedokim and Beitosim (Sadducees and Beithosians) in order to distinguish them from the Pharisees and the Sages of the Oral Law that began to consolidate in the last two centuries before the destruction of the Second Temple. In the centuries that followed the destruction of Jerusalem, the followers of the priestly circles who adhered to writing, were nominated with the mystical appellation yordei merkava or “Descenders of the Chariot”, 5 an expression relating to the heavenly Chariot of the Cherubim that was represented in 5. On various explanation of this concept see: A. Kuyt, The ‘Descent’ to the Chariot: Towards a Description of the Terminology, Place, Function and Nature of the Yeridah in Hekhalot Literature (Tübingen, 1995); R. Elior , “From Earthly Temple to Heavenly Shrines – Prayer and Sacred Song in the Hekhalot Literature and its Relation to Temple Traditions”, Jewish Studies Quarterly 4 (1997) 217-267.
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the Holy of Holies according to priestly biblical historiography (I Chronicles 28:18-19) after its heavenly pattern had been shown to Moses in the wake of the Sinai encounter. The heavenly pattern of the Divine Chariot had first been shown to Moses before the building of the Tabernacle in the desert (Ex. 25:9, 17-22, 40). The pattern of the golden Chariot of the Cherubim had been shown to David before the building of the First Temple (I Chr. 28:18-19) and had been shown to the exiled priest-prophet Ezekiel after the destruction of the First Temple in the vision of the Merkaba (Ez. 1, 10), known as the “Vision of the Chariot”. 6 As found in the priestly literature (known also as apocrypha or apocalyptic literature) and appearing in the Dead Sea Scrolls, Enoch son of Jared (Gen. 5:21-24) was the first human to behold the divine Chariot, when he had been taken to heaven (I Enoch 14:8-25). This priestly mystical hero, the founder of the Chariot tradition, as the mystical foundation of the Holy Place, is depicted as a “scribe of righteousness” (I Enoch 15:1) “great scribe” safra raba, or “eternal scribe” (Jub. 4:23). Enoch, the first reader and writer, the first human witness (I Enoch 81:1-3), who wrote the first testimony on the hidden divine world, after he learned to count, account and recount, is the writing hero of the Chariot tradition (Merkaba). He is the first human being who learned to read and write and count from the angels (Jub. 4:17-18), in order to bear witness on the eternal dimensions of holy cycles of time as well as on the sanctity of the heavenly Chariot of the Cherubim that will serve as the eternal pattern of the Chariot of the Cherubim in the holy of holies at the Jerusalem Temple. Enoch, the first writing witness on the invisible heavenly world, who is the first transmitter of the angelic-priestly solar calendar (I Enoch 72-82; Jub. 4:17-18) serving as the mystical foundation of holy time, and the first observer of the divine Chariot of the Cherubim as the mystical foundation of the holy place, is the sacred angelic protagonist of the Hekhalot literature, that admired writing, and the archetypical antagonist of the Sages of the Oral Law, who prohibited writing. The different mystical writers who had shaped Merkaba Mysticism in relation to the Enochic tradition, those who were interested in the heavenly sanctuaries and heavenly chariots in the world of the angels, in relation to the angelic liturgy and the divine worship in the Temple before the Common Era, were not identical to those after the Common Era. They were neither overlapping chronologically nor continuing in a direct connection, however they were interested in various similar dimensions of holy time, holy place and holy ritual connected by eternal cycles of angelic liturgy and sevenfold heavenly sanctuary, where seven eternal 6. See R. Elior , “From Earthly Temple to Heavenly Shrines – Prayer and Sacred Song in the Hekhalot Literature and its Relation to Temple Traditions”, Jewish Studies Quarterly 4 (1997) 217-267.
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divine chariots were present. The former – calling themselves “the priests from the house of Zadok, the guardians of the covenant” (Rule of the Community) or “Sons of Light” (War Scroll) – were offended by the illegitimate new-comers to the high priesthood that had deposed them from their traditional sacred office in the end of the first quarter of the Second Century bce in the time of Antiochus Epiphanes (175-164) and his heirs. The deposed priests and their covenanters became belligerent and hostile in their writings, disputing against the new illegitimate powers of their time, both the Hasmoneans and the Pharisees. They described their opponents, as the usurpers, or “Sons of Evil”, “Sons of Darkness” and “those who breach the covenant”. 7 The early writers of Merkaba Mysticism, before the Common Era, represented the ancient priestly order, as reflected in the Dead Sea Scrolls (Songs of the Sabbath Sacrifice and Berakhot) 8 and parts of the apocryphal/ apocalyptic literature related to Enoch and Jubilees, those who believed that this new regime had usurped the sacred Biblical Priesthood, defiled the holy Temple, disrupted the eternal pre-calculated cycles of divine worship based on the solar calendar, that Enoch brought from the angels, and betrayed the very foundation of the sacred covenant. Their angelic liturgy associated with the world of the Chariot, focusing on celestial holy place, divided into seven heavenly sanctuaries or seven firmaments and seven chariots, and sevenfold perpetual cycles of holy time, is best represented in Songs of the Sabbath Sacrifice and the Berakhot. 9 The later writers of Hekhalot and Merkaba literature, those who wrote in the centuries that followed the destruction of the Second Temple, when there was no high priesthood anymore and no point to struggle on its legitimacy, were submissive to the new political and religious order of the Sages. They gave up the polemical issues, now when the Temple in Jerusalem no longer existed, but retained their heavenly-angelic mystical interests relating to new-old forms of divine worship in the seven heavenly sanctuaries. They were interested in the Chariot tradition, associated with seven heavenly sanctuaries, in the sevenfold angelic liturgical calendar brought by Enoch, the scribal protagonist of the priestly tradition, and in the scribal tradition of heavenly knowledge and liturgy mediated by angels. The various writers of the mystical literature that was concerned with the world of the Chariot before and after the Common Era, shared four 7. See for example: Pesher Habakuk, B. Nitzan (ed.), (Jerusalem, 1986). 8. C. Newsom, Songs of the Sabbath Sacrifice: a critical edition (Atlanta, Georgia, 1985); C. Newsom, “4Q Berakhot”, in E. E shel – B. Nitzan et al. (ed.), Poetical and liturgical texts, in consultation with J. C. Vander K am – M. Brady, Discoveries in the Judaean Desert XI, Qumran Cave 4; 6, (Oxford, 1998) 1-73; C. Newsom, “New edition of Songs of the Sabbath Sacrifice”, ibid., 173-399. 9. B. Nitzan, Qumran Prayer and Religious Poetry (Leiden, 1994); R. Elior , The Three Temples: On the Emergence of Jewish Mysticism (Oxford, 2004).
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major principles: they believed in the ongoing existence of an open axis between heaven and earth, one which enables chosen individuals to ascend in their spirit to the heavenly realm of the Chariot and to return bearing heavenly testimony and liturgical knowledge from the angels; they ascribed great importance to angels and to shared Divine Liturgy between angels and men, corresponding to the memory of the eternal cycles of the divine worship in the Temple; they believed in an ongoing sacred writing associated with angelic revelation concerning divine liturgy and mystical visions of the heavenly sanctuaries associated with the tradition of the Chariot; and they ascribed major importance to the human-angelic scribe, EnochMetatron, the seventh antediluvian hero who was the first observer of the heavenly Chariot of the Cherubim (I Enoch 14:8-25), the ancient founder of the priestly solar calendar of the eternal cycles of divine worship (Jubilees 4:17-18; I Enoch 72-82), that which served as the foundation of holy time in the holy place, where the Chariot of the Cherubim was present in the Holy of Holies. Enoch, son of Jared, a dreamer or a visionary, the archetype of all mystical writers as witnesses on the divine realm – including paradise and angels, Cherubs, holy creatures and angelic liturgy, seven sanctuaries, heavenly throne and divine chariots – who had reported on his ascent to heaven, was known as “righteous scribe”. He was the first person who had been chosen to cross over the borders between heaven and earth in his dreams and visions in order to behold the divine Chariot of the Cherubim, that vision which later will be represented in the Holy of Holies as the foundation of the holy place, where borders between heaven and earth were transcended. These mystical writing circles that had created the various books on the vision of the Chariot of the Cherubim and the angelic calendar, those who were interested in the eternal and the perpetual expressions of the divine presence, and in various instances where borders between heaven and earth are crossed in dreams and visions, ritual and liturgy, mystical ascents and prophecy, expressed no interest in the common mundane reality that is subjugated to human sovereignty. They were interested in the ancient history of the priesthood, those who were concerned with knowledge acquired through angelic revelations; with the foundation of the Temple sanctuary in relation to the Vision of the Chariot; with the establishment of the first altars relating to divine covenants enacted in the appointed time of the Lord; and with the consecration of the first priests and their dynasty in regards to covenants and angels including the priestly laws which preceded the days of Moses. The mystical writers will be denominated henceforth as “priestly circles” due to their explicit interest in the heavenly paradigm of the various dimensions of the priestly worship: in eternal sacred heavenly sanctuaries, in angelic liturgy and perpetual heavenly service, and their paramount
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attention to holy place, holy time, holy memory and holy ritual. The various sacred instances and ritual dimensions were all patterned according to the Priestly and Levitical divine service in the Temple. The divine worship consisted of the perpetual cycles of sacrifices, incense and liturgy, marking the eternal changes of the pre-calculated cycles of sacred time and the appointed times of the Lord, as described in Leviticus 23, 25 Exodus 29-30; Leviticus 8-9, 16; Numbers 28-29 and Psalms. The mystical priestly tradition introduced angels to the biblical instructions pertaining to priests ( Jubilees, Enoch, and Songs of the Sabbat Sacrifice) and to detailed pre-calculated priestly-divine service (Scroll of Priestly Watches; The Temple Scroll; Rule of the Community; Rule of Blessings) and angelic divine service (Songs of the Sabbat Sacrifice; Scroll of Blessings; Words of the Luminaries) in the Dead Sea Scrolls. These priestly circles chose to commit all their traditions and inventions on the invisible heavenly world of the Chariot into writing during the centuries that followed the destruction of the Second Temple. They created a wide spectrum of priestly mystical literature and angelic liturgy, known as Hekhalot and Merkaba literature or as Chariot Mysticism – Hekhalot (Divine sanctuaries, a plural form of the most common name of the Jerusalem Temple in the Bible, Hekhal) and Merkaba (the Chariot of the Cherubim in the Holy of Holies in The Tent of Meeting and the Jerusalem Temple (Exodus 25:8-9, 17-22, 40; 37:7-9; I Kings 6:23-28; 8:6-7; I Chr. 28:18; II Chr. 3:11-13; Ezek. 1 and 10) – proposing an eternal commemoration in heaven of the lost Temple and its priestly divine worship on earth, ignoring altogether the rabbinic prohibition against all unauthorized writing or scribal rendition of religious deliberations in general, and disregarding the Sages prohibition on public deliberation on the Merkaba (Mishna Hagiga 2:1; Tosefta Hagiga 2:1-2; B. Hagiga 11:2) in particular. For generations, various priestly circles and their followers were writing holy books concerning holy place (the heavenly divine sanctuary where the Chariot of the Cherubim had been seen by Enoch, Moses, David and Ezekiel, as well as its earthly representation in the Holy of Holies in the Tent of Meeting and in the Temple on Mount Zion; seven heavenly sanctuaries where seven Chariots are positioned) and holy time (angelic ritual and liturgical sevenfold calendar in the heavenly sanctuary, corresponding precisely to the cycle of sacrifices and incense of the Temple calendar of weeks, Sabbath and seven holidays, fallow years and Jubilees), holy ritual (the priestly ritual cycle of sacrifices and libations, incense and liturgy in the Jerusalem Temple and its angelic ritual counterpart within the seven heavenly sanctuaries) and holy priestly memory (on the ancient beginning of written knowledge, books and libraries beginning with the seventh patriarch, founder of the priesthood, Enoch, associated with his teachers, the angels, and the angelic ritual; on the beginning of the consecration of priests and priest-
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hood, altars and sacrifices, songs of Qedusha, priestly blessings and various rituals linked with the angelic ritual. The multifaceted Hekhalot literature and Merkaba mysticism which is concerned with seven heavenly sanctuaries and divine chariots, with angelic eternal sevenfold cycles of divine worship and celestial liturgy, was founded on the assumption that there is an open axis between heaven and earth since the days of Enoch son of Jared, the seventh generation of human history (Gen. 5:21-24). This unique human being that generated many literary traditions which were written precisely because of this uniqueness, had been chosen by God to ascend heavenwards in his spirit in order to learn an entirely new form of knowledge from the angels, founded upon reading, writing and calculating, alongside observation on the invisible, commemoration of the eternal, and writing testimony on what nobody else had seen, while documenting, chronicling and recording. He was the first human being who had testified in a written form on that which he had observed and learned in heaven, that which he had seen and that which he had heard in the celestial realm, all in regard to angelic divine worship and priestly lore in the world of the Chariot associated with Paradise. Enoch is the only human being who had been chosen to be an eternal witness and an eternal scribe in Paradise, 10 and he was singled out to be the only human being who can transcend the mortal border of death in order to serve before God in the heavenly sanctuary for ever. 11 Enoch’s attestation concerning the Chariot of the Cherubim that he had beheld (I Enoch 14:8-25; 71:5-13) as well as his testimony on the divisions of sacred time that he had learned from the angels, referring to the visible solar calendar known as “heavenly chariots” (I Enoch 72-82; Jubilees 4:1718), and to the invisible sevenfold sacred divisions known as “appointed time of freedom” [moa‘ dei dror] had served as a divine paradigm for the priestly service in the earthly Temple. The writers of the Merkaba literature, known, as noted, in the first millennium as the “Descenders of the Chariot”, who chose Enoch, the “witness”, “the great scribe” or the “righteous scribe” as their heavenly 10. On Enoch see: J. C. Vander K am, Enoch, A Man for All Generations (Columbia, South Carolina, 1995); R. Elior , “Enoch Son of Jared and the Solar Calendar of the Priesthood in Qumran”, in M. Voigts (ed.), Von Enoch bis Kafka: Festschrift fur K. E. Grozinger zum 60 Geburstag (Wiesbaden, 2002) 25-42; J. C. Vander K am, 1 Enoch: The Hermeneia Translation (Minneapolis, Minnesota, 2012); J. C. Vander K am – G. Nickelsburg, 1 Enoch 2: A Commentary on the Book of 1 Enoch Chapters 37-82 (Minneapolis, Minnesota, 2012). Also see n. 17 below. 11. See 5Q13: ”] את] חנוך בחרתה מבני אדם ות[קחהו לכה להתהלך לפניכה ] לעד “[לשרת בהיכלכ]ה: E. Qimron (ed.), The Dead Sea Scrolls, The Hebrew Writings, Vol. iii (Jerusalem, 2014) 238; on the context of 5Q13: 5-6. See M. Kister , “5Q13 and the ‘Avoda’: A Historical Survey and its Significance”, Dead Sea Discoveries 8 (2001) 136-148.
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protagonist, after the destruction of the Second Temple, were well aware of his mystical-priestly revered scribal past, which had been recorded for centuries in books such as I Enoch, that includes several different booklets, II Enoch, Jubilees, Testament of Levi, Aramaic Levi document and in texts such as Ben Sira and Seder Avoda 5Q13. They were interested in contemplating the eternal divine Chariot and in the observation of the eternal cycles of the angelic liturgy, as a profound defiance against the historical atrocity of the destruction of the earthly representations of the priestly lore, when the priestly service had ceased in the Second Temple in Jerusalem due to its destruction. They challenged the historical reality and they yearned to assure themselves and their listeners and readers, that the sacred divine worship in heaven was continued to be performed by the angels as ever before even if there was no such parallel anymore on earth. The adepts, who chose the heavenly scribe and the eternal witness protagonist as their angelic teacher and guide, or those who listened to the story of their heavenly voyage upon their return, wrote their mystical testimonies, usually in an anonymous manner or with pseudo-epigraphic attribution, believing that sacred history, ancient memories, Divine Liturgy, angelic testimony, holy teachings and divine laws, as well as prophecy and priestly matters concerning the Temple order, the Temple calendar and divine worship, must be committed into writings as ever before. The adepts assumed that everything sacred, all which was derived from divine vision, prophetic inspiration or angelic revelation must be written, contending that nearly everything which had been written in Hebrew or Aramaic or which discussed divine message, prophetic revelation, religious law or angelic teaching, dating from before the Common Era as well as after the destruction of the Temple, is inevitably holy. The hundreds of scrolls that were found in Qumran in the Judean Desert, all of which are sacred writings and holy books in Hebrew and Aramaic from the last three centuries bce , discuss in detail the above mentioned matters; clearly demonstrate the importance of writing in regard to the invisible divine world which was perceived as the foundation of the priestly Temple ritual and the divine law associated with it. The numerous manuscripts of Hekhalot literature which were found in the Cairo Geniza and those preserved in various European libraries from the early centuries of the second millennium, of which only a small part had been published, demonstrate the importance of sacred writing along the first millennium. The Sages of the Oral Law introduced for the first time in Jewish history the importance of human sovereignty and freedom of human interpretation in regard to the evolving understanding of the Holy Scriptures. They consolidated the new perception alongside the centrality of consistent study of the ancient written law (Talmud Torah keneged kulam) in order to create the new oral law and a new type of human leadership.
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They maintained the superiority of human authority and free oral discussion in regard to analyzing the sacred legal tradition and elaborating its broad implications on the mundane world and concerns of the Jewish community. The Sages anchored human sovereignty of scholars in Beit ha-Midrash where they fostered freedom of interpretation and argumentation in the form of Oral Law as well as human disputes and disagreements between identifiable persons, in order to keep the written tradition authoritative, meaningful, multifaceted, vibrant, inspiring and alive. They disseminated human deliberation of the written biblical heritage in new directions and formed new analytical categories according to the oral “tradition of their fathers”, from the time of the Pharisees onward. In order to succeed in their endeavors they had to foster reading of the Tora as well as oral deliberations on its changing meaning, but they had to proscribe any new writing. In Jewish history during the first millennium bce , writing was perceived as the communication of the divine law or angelic knowledge through prophets, mystics, poets and priests, who wrote down this divine message, the angelic revelation or the sacred knowledge as revealed to them from heaven in the course of a dream or vision. The Sages canonized the Bible in the first third of the Second Century after the Destruction of the Second Temple, and insisted on the exclusive sacred position of its holy context, moved on to declare the end of divine prophecy or direct divine revelation and proscribed the validity of all divine or angelic voice or vision as a source of religious authority. They had prevented the continuity of additional biblical writings alongside the prohibition against any other religious writing, allowing only copying the biblical canonized scrolls, while insisting on the exclusiveness of oral communication of human knowledge, (divrei Hakhamim, words of the Sages). They insisted on the broad human freedom for interpretation in Halacha and Aggada, proscribing the previous priestly practice of writing the ongoing divine revelation and angelic knowledge transmitted by prophets and priests in various manners. Despite the prohibition of the Sages against writing, alongside with their declaration that the biblical period had come to an end and their resentment of ongoing prophetic revelation or angelic vision or any claim to an open dialogue between heaven and earth, the priestly-propheticvisionary-mystical-liturgical circles that maintained direct communication with the heavenly realm through dreams, visions, prophecy, divine inspiration, angelic revelation or mystical ascents, continued to endure. These priestly-mystical circles, who professed direct communication with the angelic world or the divine law, continued to write in order to transmit what they maintained had been learned from divine sources or angelic visions. They always stressed their contention that they were writ-
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ing, usually anonymously, according to divine inspiration or an angelic revelation or mystical vision revealed to them in a dream. Together, both sacred priestly literature that had been found in Qumran caves, and its partial parallels in the Apocalyptic and Pseudo-Epigraphic literature, reflect the rich literary creative activity of those priestly circles who called themselves “Bnei Zaddok ha-kohanim shomrei ha-brit” [The Priests from the House of Zadok, the guardians of the covenant], 12 who wrote in the last few centuries before the Common Era, continuing the biblical world and expanding its borders according to divine message, angelic knowledge, celestial poetic inspiration or prophetic visions. 13 In the centuries that followed the demolition of Jerusalem and the destruction of the Second Temple, as the Sages or the rabbis had emerged as the leading political and religious power and as the authorized human interpreters of the divine law in an exclusive oral form, the ancient priestly-mystical written heritage – that which was concerned with the heavenly world and the angelic liturgy, with the seven heavenly sanctuaries and the seven divine Chariots, as well as with ancient Levitical memories concerning the archaic patterns of holy time, holy place, holy memory and holy ritual, attached to the Jerusalem Temple ideal order, as well as with other forms of divine knowledge and angelic revelation on sacred time and holy place – had emerged in new forms of written expression. The Sages or the Rabbis analyzed, memorized and taught Halachic instructions or Oral Law in Beit ha-Midrash, where Priests and Levites had no special position, while the Priestly-Levitical circles wrote mystical liturgy on seven heavenly sanctuaries and angelic liturgy known as Qedusha prayers, as well as Enoch-Metatron narratives and angelic teachings, consolidated their alternative position around the synagogue, where Priests and Levites enjoy exclusive sacred priority. The Levitical circles of morim, teachers of school children, meturgemanim, translators of the Tora, soferim, copyists of the Tora, hazanim umeshorerim, cantors and poets of the synagogue, cohanim u-leveiem, Priests and Levites, that commemorated the lost priestly cycles of sacrifices and liturgy of the Temple divine worship, in the daily liturgy, all centered around the synagogue, where the biblical scrolls were kept. Many of the above mentioned occupations in the synagogue were overlapping. The synagogue that became known as the “little Temple” (Miqdash Mea’t), was the communal place open for all where the written law was taught and translated for children and young 12. See I Chr. 24:6; Ezekiel 44:15; I Chr. 5:34-41; Nehemiah 12:10-11, 26; Ben Sira 51:29; Josephus Antiquities 11.347. 13. See R. Elior , The Three Temples: On the Emergence of Jewish Mysticism (Oxford, 2004); J. C. Vander K am, The Dead Sea Scrolls Today (Grand Rapids, Michigan, 2010); J. C. Vander K am, The Dead Sea Scrolls and the Bible (Grand Rapids, Michigan, 2012).
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students by Priests and Levites. The sacred written version of the Tora was copied and guarded there carefully, as new prayers were composed in order to commemorate the lost cycle of sacrifices, and new mystical liturgical order was formed for the members of the praying community that were interested to know more about ascending to heaven and participating in the sacred sevenfold angelic liturgy in the seven heavenly sanctuaries. Notable among the priestly-prophetic circles that continued to create anonymously new religious expression in a written form, according to heavenly inspiration, mystical ascent or angelic knowledge about myth and ritual, were the anonymous or pseudo epigraphic authors of the Hekhalot literature, who had composed a wide range of sacred mystical liturgy, corresponding to the heavenly angelic divine worship, associated with the lost divine worship in the Temple. The eternal cycles of divine worship in the Temple, kept by the twenty four priestly watches (I Chr. 24), known from the priestly service that was described in detail in the Pentateuch, in Ezra and Nehemiah and in Chronicles, had been commemorated in the cycle of daily prayers and Shabbat prayers in the synagogue, and were so arranged according to the sacrificial cycles in the Temple. 14 The authors of the Hekhalot literature, known in this literature as “Descenders of the Chariot”, those that were concerned with the seven heavenly sanctuaries and their angelic servants singing in front of the seven chariots, further composed a remarkable number of mystical narratives concerning the extra-ordinary circumstances of the mystical ascent to heaven of the “Beholders of the Chariot”. The invisible divine realm in this mystical literature is always perceived as seven heavenly sanctuaries, Hekhalot, where seven heavenly Chariots of the Cherubim, known as Merkavot, are presented, encircled by numerous angelic-priestly watches who perform the daily eternal cycles of Divine Liturgy, which corresponds to the eternal daily sacrificial cycle in the Temple. The poetical mystical heritage of the priestly circles, who were interested in the heavenly temple and its seven sanctuaries and its eternal cycles of angelic divine worship include texts such as Hekhalot Rabbati, Hekhalot Zutarti, Sefer Hekhalot (or 3 Enoch), Ma’ase Merkaba, Merkaba Rabba, Masekhet Hekhalot and Shi’ur Qoma. 15 14. The daily prayers in the synagogue, Shaharit, Musaf, Arvit/Maariv are corresponding to the biblical appointed times of the daily sacrifice in the Jerusalem Temple (Olat hatamid) that took place at sunrise and sunset (Shaharit and Arvit). The Sabbath prayer is associated with the Shabbat sacrifice (Olat haShabbat) and the festival prayers known as the additional prayer Mussaf are modeled on the seven appointed times of the Lord (Leviticus 23) and relate to the additional sacrifice that marked particular days in the Jewish calendar, 18 days of the 7 holidays and the 12 days that mark the new month, as detailed in the biblical cycle of sacrifices. See Num. 28-29. 15. On Hekhalot literature, see a bibliographic selection according to chronological order: G. Scholem, “Merkabah Mysticism and Jewish Gnosticism”, in
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G. Scholem (ed.), Major Trends in Jewish Mysticism (New York, 1941); G. Scho lem, Jewish Gnosticism, Merkabah Mysticism, and Talmudic Tradition (New York, 2 1965); M. Smith, “Observations on Hekhalot Rabbati”, A. A ltmann (ed.), Biblical and Other Studies (Cambridge, 1963); E. E. Urbach, “The Traditions about Merkabah Mysticism in the Tannaic Period”, in E. E. Urbach (ed.), Studies in Mysticism and Religion Presented to Gershom Scholem (Jerusalem, 1967) 1-28; D. J. H alperin, The Merkabah in Rabbinic Literature (New Haven, Connecticut, 1980); I. Gruenwald, Apocalyptic and Merkavah Mysticism (Leiden/Köln, 1980); P. S chäfer – M. Schlüter – G. von Mutius (dir.), Synopse zur Hekhalot-Literatur (Tübingen, 1981); I. Chernus , “Individual and community in the redaction of the Hekhalot literature”, Hebrew Union College Annual 52 (1981) 253-274; I. Chernus , “Visions of God in Merkabah Mysticism”, Journal for the Study of Judaism 13 (1982) 123146; I. Chernus , Mysticism in Rabbinic Judaism, Studies in the History of Midrash (Berlin/New York 1982); P. S. A lexander , “3 (Hebrew Apocalypse of) Enoch: A New Translation and Introduction”, in J. H. Charlesworth (ed.), The Old Testament Pseudepigrapha (Garden City, New York, 1983) 223-316; P. Schäfer , GenizaFragmente zur Hekhalot-Literatur (Tübingen, 1984); I. Chernus , “The Pilgrimage to the Merkavah: An Interpretation of Early Jewish Mysticism”, Jerusalem Studies in Jewish Thought 6 (1987) 1-36; D. J. H alperin, The Faces of the Chariot: Early Jewish Responses to Ezekiel ’s Vision (Tübingen, 1988); N. Janowitz , The Poetics of Ascent. Theories of Language in a Rabbinic Ascent Text (Albany, New York, 1989); R. Elior , “The Concept of God in Merkabah Mysticism”, in J. Dan (ed.), Binah: Studies in Jewish History, Thought and Culture, Vol. 2: Studies in Jewish Thought (New York, 1989); R. Elior , “Merkabah Mysticism; A Critical Review [D. J. Halperin, Faces of the Chariot. Tübingen1988]”, Numen 37 (1990) 233-249; M. D. Swartz , Mystical Prayer in Ancient Judaism: An Analysis of Ma'aseh Merkabah (Tübingen, 1991); P. Schäfer , The Hidden and Manifest God: Some Major Themes in Early Jewish Mysticism (Albany, New York, 1992); I. Gruenwald, “Reflections on the Nature and Origins of Jewish Mysticism”, in J. Dan – P. Schäfer (ed.), Gershom Scholem’s Major Trends In Jewish Mysticism 50 Years After (Tübingen, 1993) 25-48; R. Elior , “Mysticism, Magic, and Angelology – The Perception of Angels in Hekhalot Literature”, Jewish Studies Quarterly 1 (1993) 1-53; J. Davila, “Prolegomena to a Critical Edition of the Hekhalot Rabbati”, Journal of Jewish Studies 45 (1994) 208-226; A. Kuyt, The ‘Descent’ to the Chariot: Towards a Description of the Terminology, Place, Function and Nature of the YERIDAH in Hekhalot Literature (Tübingen, 1995); M. D. Swartz , Scholastic Magic: Ritual and Revelation in Early Jewish Mysticism (Princeton, New Jersey, 1996); R. Elior , “From Earthly Temple to Heavenly Shrines: Prayer and Sacred Song in the Hekhalot Literature and Its Relation to Tradition”, Jewish Studies Quarterly 4 (1997) 217-267; R. Elior , “The Priestly Nature of the Mystical Heritage in ‘Heykalot literature’”, in P. B. Fenton – R. Goetschel (ed.), Expérience et écriture mystiques dans les religions du Livre : Actes d ’un colloque international tenu par le Centre d ’études juives, Université de Paris IV-Sorbonne 1994 (Leiden, 2000) 41-54; R. M. L esses , Ritual Practices to Gain Power: Angels, Incantations, and Revelation in Early Jewish (Harrisburg, Pennsylvania, 1998); J. Dan, Jewish Mysticism: Late Antiquity, Vol. i, (Northvale, New Jersey, 1998); N. Deutsch, Guardians of the Gate: Angelic Vice Regency in Late Antiquity (Leiden, 1999); J. R. Davila, Descenders to the Chariot: The People behind the Hekhalot Literature (Leiden/Boston/Köln, 2001); C. R. A. Morray-Jones , A Transparent Illusion. The Dangerous Vision of Water in Hekhalot Mysticism: A Source-Critical and Tradition-Historical Inquiry (Leiden/Boston/Köln, 2002);
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Interestingly, the human protagonists of Hekhalot literature, Rabbi Akiva, Rabbi Ishmael Cohen Gadol and Rabbi Nahunia ben HaKana, belong to the world of the Sages of the Oral Law, Sages who were associated with Ma‘ase Merkaba [deeds of the chariot] (see: Mishna Hagiga 2:1, Tosefta Hagiga 2:1-7, Palestinian Talmud Hagiga 77a-d, and Babylonian Talmud Hagiga 11b-16a). 16 One can only guess as to the reason for this choice. Perhaps it was their intent to gain legitimacy for priestly mystical writings that otherwise would have been defined as Sefarim Hizonim that is, prohibited “external” or apocryphal books. Or perhaps it was done in order to secure legitimacy for the priestly mystical past and to secure a measure of liturgical mystical continuity in the post-destruction new rabbinic era. The choice of these human protagonists who were linked to the generation of the “Ten Martyrs”, and whose untimely death and cruel execution in the generation of Bar Kokhba rebellion, became the justification required to breach the borders between heaven and earth and to reveal the secrets of the Descent to the Chariot, in the world of the N. Janowitz , Icons of Power: Ritual Practices in Late Antiquity (University Park, Pennsylvania, 2002); V. D. A rbel , Beholders of Divine Secrets: Mysticism and Myth in the Hekhalot and Merkavah Literature (Albany, New York, 2003); R. Elior , The Three Temples: On the Emergence of Jewish Mysticism (Oxford/Portland, 2004); R. Boustan, From Martyr to Mystic: Rabbinic Martyrology and the Making of Merkavah Mysticism (Tübingen, 2005); A. A. Orlov, The Enoch-Metatron Tradition (Tübingen, 2005); R. Elior , “The Foundations of Early Jewish Mysticism: The Lost Calendar and the Transformed Heavenly Chariot”, in P. Schäfer (ed.), Wege Mystischer Gotteserfahrung: Judentum, Christentum und Islam / Mystical Approaches to God: Judaism, Christianity, and Islam (Tübingen/Munich, 2006) 1-18; R. Elior , “The Emergence of the Mystical Traditions of the Merkabah”, in A. D. DeConick (ed.), Paradise Now: Essays on Early Jewish and Christian Mysticism (Leiden/Boston, 2006) 83-103; [many of the articles in the volume Paradise Now pertains to Hekhalot literature]; R. Elior , “Early Forms of Jewish Mysticism”, in S. K atz (ed.), Cambridge History Series: Jewish History: The Late Roman Period (Cambridge, 2006) 749-791; R. Boustan, “The Study of Heikhalot Literature: Between Mystical Experience and Textual Artifact”, Currents in Biblical Research 6 (2007) 130160; A. A. Orlov, From Apocalypticism to Merkabah Mysticism: Studies in Slavonic Pseudepigrapha (Leiden/Boston, 2007); P. Schäfer , The Origins of Jewish Mysticism (Tübingen, 2009); Y. Zini, The lexicon and phraseology of Hekhalot Rabbati (Doctoral dissertation, Hebrew University of Jerusalem, 2012) [in Hebrew]; R. Boustan – M. Himmelfarb – P. Schäfer (ed.), Hekhalot Literature in Context (Tübingen, 2013); J. R. Davila, Hekhalot Literature in Translation: Major Texts of Merkavah Mysticism (Leiden/Boston, 2013). 16. See: E. E. Urbach, “The Traditions about Merkabah Mysticism in the Tannaic Period”, in E. E. Urbach (ed.), Studies in Mysticism and Religion Presented to Gershom Scholem (Jerusalem, 1967); D. J. H alperin, The Merkabah in Rabbinic Literature (New Haven, Connecticut, 1980); I. Chernus , Mysticism in Rabbinic Judaism, Studies in the History of Midrash (Berlin/New York, 1982); A. GoshenGottstein, “Four entered paradise revisited”, Harvard Theological Review 88 (1995) 69-133.
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writers of Merkaba and Hekhalot literature. These writers, who chose the martyrs R. Akiva and R. Ishmael as their protagonists, were interested not only in the eternal continuation of the priestly-angelic service in heaven, but also in divine revenge on earth, on imperial Rome, that destroyed the Second Temple and raised Jerusalem to the ground. However, while the human protagonists of the mystical literature known as Hekhalot and Merkaba literature were chosen from among the ten martyrs, the angelic protagonist of this mystical literature, Enoch-Metatron, the seventh of the generations of men, belongs to the tradition of scribal protagonists of the various corpuses of the priestly literature, that had been found among the Dead Sea Scrolls (I Enoch, Jubilees, Levi Document, Testaments of the Twelve Tribes; Seder Avoda, Genesis Apocryphon), which were previously known or partially known from the Apocrypha and Pseudo-epigraphy. 17 Enoch son of Jared, the seventh antediluvian hero appearing in Genesis 5, the first beholder of the Chariot of the Cherubim and the first scribe, is known in this biblical name in Genesis 5:21-24 as well as in I Enoch, II Enoch and Jubilees, in Seder Avoda from Qumran (5Q13), 18 the Testaments of the Twelve Tribes and Genesis Apocryphal scroll, as well as in Ben Sira. Along the first millennium ce his name is transformed into Enoch-Metatron, in the Third Book of Enoch (known as Sefer Hekhalot or Sefer Shiva’a Hekhalot) which is the opening text of many of the manuscripts of Hekhalot literature, as well as in other Hekhalot narratives in the Merkaba literature, notably in Hekhalot Zutarti and the Praises of Metatron (Syn. Sections 341, 389-405). Enoch-Metatron is well known in this name in the Talmud, in the Piyyut and in Targum Pseudo Jonatan as well as in the Midrash on Genesis 5:2. 19 17. On the I, II and III books of Enoch, see J. H. Charlesworth (ed.), The Old Testament Pseudepigrapha (Garden City, New York, 1983) 5-316; On the Book of Jubilees that includes important Enochic tradition see J. H. Charlesworth (ed.), The Old Testament Pseudepigrapha, Vol. ii (Garden City, New York, 1985) 35-142. 18. M. K ister , “5Q13 and the ‘Avoda’: A Historical Survey and its Significance”, Dead Sea Discoveries 8 (2000) 136-148. 19. See: H. Odeberg, 3 Enoch or The Hebrew Book of Enoch (Cambridge, 1928); S. Lieberman, “Metatron, the Meaning of His Name and His Functions”, in I. Gruenwald, Apocalyptic and Merkavah Mysticism (Leiden/Köln, 1980); C. Rowland, The Open Heaven: a Study of Apocalyptic in Judaism and Early Christianity (New York, 1982) 336-337; P. S. A lexander , “3 (Hebrew Apocalypse of) Enoch: A New Translation and Introduction”, in J. H. Charlesworth (ed.), The Old Testament Pseudepigrapha (Garden City, New York, 1983) 223-316; N. Deutsch, Guardians of the Gate: Angelic Vice Regency in Late Antiquity (Leiden, 1999); M. Himmelfarb , “Heavenly Ascent and the Relationship of the Apocalypses and the Hekhalot Literature”, Hebrew Union College Annual 59 (1988) 73-100; R. Elior , “Enoch Son of Jared and the Solar Calendar of the Priesthood in Qumran”, in M. Voigts (ed.), Von Enoch bis Kafka: Festschrift fur K. E. Grozinger zum 60 Geburstag (Wiesbaden, 2002) 25-42; R. Elior , The Three Temples; On the Emergence of Jewish Mysticism
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A vast literature had been written featuring Enoch in his various transformations as a human being who had become a mystical protagonist and thus transformed into a meta-human or human-angel in the Dead Sea Scrolls and in the Apocalyptic literature, in his role as a High Priest in an ancient Seder Avoda from Qumran, and in Ben Sira, as well as in the various texts of Hekhalot literature and related texts such as Baraita deMasekhet Nida where he is nominated as Enoch–Metatron or arch-angel Metatron prince of the countenance, where he is telling about his past as Enoch son of Jared, and in number of magical and mystical writings from the Cairo Geniza where he is marked as Metatron angel of the countenance who has seventy names. The reason for this unprecedented interest in this mysterious biblical figure that is known from the verse “And Enoch walked with God: and then he was not; for God took him” (Gen. 5:24), was related to his position in the priestly apocalyptic-mystical literature, as the first and foremost eternal witness on the foundations of the ancient priestly order that relates to the divine foundations of the eternal cycles of the Temple worship. Enoch is the first “beholder of the vision of the Chariot of the Cherubim”, marking the divine essence and the celestial paradigm of the holy place (I Enoch, chapters 14 and 71, corresponding to the Cherubim of Paradise (Gen. 3:24) and the Cherubim in the Holy of Holies (Exod. 25; I Kings 6:24-32; I Chr. 28:18; II Chr. 3:11-13) and in the heavenly throne (Ezekiel 1 and 10). Enoch is known as the first student of the angelic priestly pre-calculated solar calendar, commencing in the spring, marking the foundation of holy time, known as the synchronization between the pre-calculated eternal “heavenly chariots” of 12 months, 4 overlapping seasons of 91 days in a 364 days solar years (I Enoch 72-82; Jubilees 5-6) and the sacred sevenfold divisions of weeks, fallow years and Jubilees (Jub. 4:17-18), that are the foundation of the biblical covenant (Lev. 23-25) and the basis of the eternal liturgical-sacrificial cycles of the Temple worship. Enoch is further known as the first human student and witness of the angels, being the first writer, reader and owner of books, as well as the most knowledgeable person described as an “eternal sign of knowledge for all generations” (Ben Sira 44:16; 49:20), who had crossed borders between heaven and earth, life and death, marking the foundation of sacred written memory (Jub. 4:17-19, 22-23). Enoch is described as an eternal righteous scribe who lives forever in paradise or pardes qoshta (4Q209). He is further described as the first person who had transmitted the angelic sevenfold ritual calendar and who had “offered the incense [Qtoret in Hebrew] which is acceptable before the Lord in the evening at the holy (Oxford, 2004) chapters 4-5, 10; A. A. Orlov, The Enoch Metatron Tradition (Tübingen, 2005).
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place on Mount Qater” (Jub. 4:25), 20 marking the eternal cycles of holy priestly ritual according to the pre-calculated solar calendar learned from the angels. Enoch is the first human being who had been chosen to officiate in the heavenly sanctuary (5Q13, Seder Avoda). The first and foremost “earthly” distinction of Enoch, the founder of this eternal cyclical priestly lore and myth, in all the rich literary evidence that came down to us from late antiquity, pertains to his position as a writing witness, an eternal righteous scribe or a great scribe (sofer zedek, safra raba) who writes in paradise. 21 Enoch is relating an angelic testimony of eternal authority and validity, while transmitting heavenly knowledge about holy place and holy time, holy memory and holy ritual, since he is the first human being that had learned to read, write, count and calculate from the angels (Jub. 4:17-18). Enoch alone had been chosen from among human beings to transcend the borders of life and death (5Q13) for the sake of gaining hidden heavenly knowledge on the transcendental foundations of holy place (the divine Chariot of the Cherubim that he first beheld (I Enoch 14; 71), holy time (the sacred eternal solar calendar of the fourfold “heavenly chariots'' and the twelve heavenly gates that the eternal sun is passing through them according to the priestly solar calendar, that Enoch, the eternal scribe, was first to observe and learn (I Enoch 72-82), and the sevenfold eternal sacred cycles of “appointed times of liberty” that he was first to learn (Jub. 4:17-18). Enoch is credited with initiating the eternal cycles of the holy ritual (the order of the angelic divine worship and the ritual cycle of offering incense in Paradise), and with transmitting holy memory (The divisions of time as the Foundation of human history and divine ritual (Jub. 4:18-19); the testimony on paradise as the foundation of divine revelation and human history (I Enoch 1-36). He was the first to acquire angelic written knowledge and to participate in transmitting written testimony on the past, present and future as a line of pre-determined sacred history (Jub. 4:23-24). Enoch, the eternal witness on history and meta-history, was chosen from among human beings to live forever in Paradise as an eternal scribe who seats and writes, as related by the Angel of the Countenance: “We conducted him into the Garden of Eden in majesty and honor, and behold there he writes down the condemnation and judgment of the world, and all the wickedness of the children of man” (Jub. 4:23-24). After he had transmitted all the sacred written knowledge on eternal matters to his son, Methusela (I Enoch 81:5), the founder of the antediluvian priesthood (I Enoch 81-83). Enoch, who had walked with 20. Note the editor explanation, J. H. Charlesworth (ed.), The Old Testament Pseudepigrapha (Garden City, New York, 1983) 63, on Mount Qater as a place in paradise where burning incense Qetoret, was offered by Enoch. 21. See The Testament of Abraham Recension B 11; I Enoch 12; Bavli Hagiga 15a; Targum Jonathan on Genesis 5:24).
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God or with the angels (Gen. 5:24), had been explicitly associated in the ancient priestly literature with the transcendental archaic eternal foundations of holy time, holy place, holy memory and holy ritual. Enoch, the first dreamer, who was recounting his dreams (I Enoch 14) is officiating as a heavenly scribe in Paradise for ever and ever (Jub. 4:23-24), or as a heavenly High Priest, serving in the heavenly sanctuary (5Q13), bearing written testimony on all what had happened in heaven and on earth for the benefit of the earthly dwellers. Enoch, the foremost ancient priestly protagonist, the eternal scribe who dwells in paradise forever, as the archaic founder of the angelicpriestly written ritual order of the foundations of the Temple worship and the ancient priestly memory related to the pre-calculated solar calendar, is the major angelic protagonist of various texts of Hekhalot literature and the remarkable angelic hero of the priestly Targum tradition. 22 Andrey Orlov observed: “The prominent scribal office of the seventh antediluvian hero was not forgotten in the later rabbinic and Hekhalot developments and reappeared in its new Merkaba form, as an important duty of the new hero, the supreme angel Metatron. One of the possible early attestations to the scribal career of Enoch-Metatron can be found in the Targums, where the patriarch’s name is mentioned in connection with the scribal duties of the principal angel. Targum Pseudo-Jonathan on Genesis 5:24 reads: ‘Enoch worshiped in truth before the Lord, and behold, he was not with the inhabitants of the earth because he was taken away and he ascended to the firmament at the command of the Lord, and he was called Metatron, the Great Scribe’.” 23 In a recent dissertation on the Targum, Etsuko Katsumata challenged the common assumption relating to the affinity between the world of the Sages and the world of the Aramaic translators of the Tora. She noted that the Targum tradition, where Metatron, the Great Scribe is mentioned favorably, had developed independently, outside of the tradition of the Sages of the Oral law, within priestly circles associated with the synagogue, where priests, scribes, teachers of the Tora, cantors, poets and translators, who were identified one with another and cooperated with each other in the synagogue, participated in various fields of literacy and writing. Among them: children’s classes in school for teaching Tora, and new written forms of the Aramaic translation of the Tora, that incorpo22. On the priestly nature of the Targum and its special interest in angels, priests, priestly blessing and Temple, see: E. K atsumata, Priests and priesthood in the Aramaic Targums to the Pentateuch (Doctoral dissertation, Hebrew University of Jerusalem, 2009). A further treatment of the Targum in relation to priestly mystical tradition of the chariot is found in the work of A. Damsma, The Targumic Toseftot to Ezekiel (Leiden/Boston, 2012). 23. M. Maher , Targum Pseudo-Jonathan: Genesis, the Aramaic Bible 1B (Collegeville, Pennsylvania, 1992) 36.
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rated priestly matters relating to Temple and priests, where no such content is attested in the Hebrew Masoretic version of the Tora. These circles of teachers and translators, poets and cantors, who were writing in various forms, were further engaged in writing new poetry, prayer and liturgy for the synagogue associated with the singing and praying of the angels. 24 The Sages scorned and belittled the translators and teachers that incorporated significant editions on Temple and priests into the Targum, and criticized their various scribal activities and their religious and social position. 25 The Sages of the Oral law further rejected the scribal protagonist of the translators, Enoch-Metatron, the one who had been described in Seder Avoda from Qumran as “Enoch You had chosen from among human beings, You took him to walk in front of You forever, to serve in Your sanctuary”, (5Q13), and told evil narratives and humiliating stories on him. Enoch is described as a writer of books not only in First Enoch and Jubilees but also in Second Enoch that was found in the Slavonic apocryphal tradition. Perhaps the original text of II Enoch that was written in Hebrew or in Greek, originated in the circles of Honyo/Onias Temple in Egypt, 26 where the Zadokite dynasty had established a new religious center in the Second century bce after Onias, the last Zadokite High Priest, had been deposed by Antiochus Epiphanes from his high office in the Jerusalem Temple in 175 bce . 27 In II Enoch, books and angels, sacred writing and angelic liturgy, the choice of Enoch as an eternal scribe, his vision of Paradise and the foundation of the ancient priestly myth in relation to the priestly calendar and the incense, are mentioned frequently. 28 Similar motives are found in III Enoch in the Hekhalot literature. 29 24. The ancient synagogue was the place where prayers were said, liturgy was composed, sermons were delivered and Aramaic translations of the Tora were read. See L. I. L evine , The Ancient Synagogue: the First Thousand Years (New Haven, Connecticut, 2000). 25. " קידושין מט ע"א." וְהַּמֹוסִיף – ְמ ָחרֵף ּו ְמ ַג ֵדּף,ה ַה ְמ ַת ְר ֵגּם ָפּסּוק ְכּצּורָתֹו – ַּב ַדּאי: “Anyone who is translating a verse literally is a liar; anyone who adds anything to a verse is reviling and cursing”. 26. Robert Henry Charles, the first editor of the Pseudepigrapha, thought that II Enoch was written by a Hellenistic Jew in Egypt. On the different opinions on this book see A. A. Orlov, The Enoch-Metatron Tradition (Tubingen, 2005). On the connection to Metatron in II Enoch, see A. A. Orlov, The Enoch-Metatron Tradition (Tubingen, 2005) 148. 27. See M. M. P iotrkowski, Priests in Exile: The History of the Temple of Onias and Its Community in the Hellenistic Period (Berlin, 2019). 28. See: A. A. Orlov – G. Boccaccini – J. Zurawski, (ed.), New Perspectives on 2 Enoch: no longer Slavonic only (Leiden, 2012). 29. See P. S. A lexander , “The historical setting of the Hebrew Book of Enoch”, Journal of Jewish Studies 28 (1977) 156-180; P. S. A lexander , “3 (Hebrew Apocalypse of) Enoch: A New Translation and Introduction”, in J. H. Charlesworth (ed.), The Old Testament Pseudepigrapha (Garden City, New York, 1983); A. A. Orlov, The Enoch-Metatron tradition (Tübingen, 2005).
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Most interestingly, Enoch, the prominent scribal protagonist of the priestly written tradition, who saw the Chariot of the Cherubim and the world of the angels, brought the solar calendar from the angels, and who was chosen to sit in Paradise as a righteous scribe forever (Jub. 4:23), is the foremost negative heavenly-human antagonist of the sages of the Oral Law, those who resented writing, fought against the priests from the house of Zadok that they called Sadducees, and fought against their fixed solar calendar commencing in the Spring, proscribed angels and prophecy, and subscribed to the new lunar calendar, one which is always determined by human observation, and calculated according to human sovereignty. Enoch, the priestly hero associated with angels and writing, with the fixed solar calendar brought from the angels, with priestly lore and the vision of the Chariot, with heavenly sanctuaries, with Paradise and with heavenly books transmitted by angels, before and after the Common Era, is described in the world of the Sages of the Oral law as the dethroned angelic figure of the famous story about “the four who had entered Paradise”. 30 The story concerning the dethronement and punishment of the mystical priestly hero, the eternal heavenly scribe, Enoch– Metatron, who was sitting and writing in Paradise from the seventh generation of human history – he who had been mistaken by Elisha Aher, to be an independent heavenly power in his famous statement: “There are indeed two powers in Heaven?” – as narrated by the protagonist of the Oral Law, Rabbi Akiva, who alone had survived among the four who had ascended to paradise, saw the writing angel, Metatron, and could have told the story. The scribe in antiquity, on earth or in heaven, was always sitting while writing. The various stories relating the sin of Aher and the punishment of the human-angel Enoch-Metaron, on a sin that he did not commit, focus upon his sitting or on his writing, which are one and the same in the mystical narratives associated with “Ascending to Paradise” or with “Descending to the Chariot” or with “Entering to Paradise”, which are all one and the same. Aher cut down the plantings (that is, became a heretic). Of him Scripture says: Suffer not thy mouth to bring thy flesh into guilt. What does it refer to? – He saw that permission was granted to Metatron to sit and write down the merits of Israel. Said he: It is taught as a tradition that on high there is no sitting and no emulation, and no back, and no weariness, Perhaps – God forfend! – There are two powers in heaven? [Thereupon] they led Metatron forth, and punished him with sixty lashes of fire, saying to him: Why didst thou not rise before him when thou didst see him? Per-
30. Tosefta Hagiga 2:2; Bavli, Hagiga 14b-15a; Jerusalem Talmud Hagiga 2:1.
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mission was [then] given to him to strike out the merits of Aher. A Bat Kol went forth and said: Return, ye backsliding children – except Aher. 31
A similar tradition is found in Hekhalot Rabbati, where “entrance to Paradise” in the previous narrative, is replaced by “descending to the Chariot” in the mystical version: Elisha ben Abuya cut down the plantings. Concerning him Scripture says: “Do not allow your mouth”, etc. They said: When Elisha descended to the Chariot he saw Metatron, to whom permission had been given to sit and write down the merits of Israel one hour a day. He said: the sages taught: above there is no standing, and no sitting, no jealousy and no rivalry, and no duplicity and no affliction. He meditated: perhaps there are two powers in heaven? Immediately He took Metatron outside of the celestial curtain, and you struck him with sixty fiery blows, and He gave permission to Metatron to burn the merits of Elisha. 32
In III Enoch-(Sefer Hekhalot) Enoch-Metatron relates the well-known story from his point of view concerning the human initiative “to behold the vision of the chariot”: At first I sat upon a great throne at the door of the seventh sanctuary, and I judged all the denizens of the heights on the authority of the Holy One, blessed Be He… when I sat in the heavenly court. The princes of kingdoms stood beside me, to my right and to my left, by authority of the Holy One, blessed Be He. But when Aher came to behold the vision of the chariot and set eyes upon me, he was afraid and trembled before me. His soul was alarmed to the point of leaving him, because of his fear, dread, and terror of me, when he saw me seated upon a throne like a king, with ministering angels standing beside me as servants and all the princes of kingdoms crowned with crowns surrounding me. 33
From a chosen hero of the priestly circles, who is living eternally in Paradise from the end of the seventh generation of human history, EnochMetatron was transformed within the tradition of the Sages to be the dethroned angel and the humiliated sinful servant in the story of “The four who had entered paradise”, where he is slapped with 60 lashes of fire (B. Hagiga 15a). 31. Bavli, Hagiga 15b. An almost identical form is attested in Merkava Rabba (Synopse § 672). 32. P. Schäfer – M. Schlüter – G. von Mutius (dir.), Synopse zur HekhalotLiteratur (Tübingen, 1981) 246. 33. P. S. A lexander , “3 (Hebrew Apocalypse of) Enoch: A New Translation and Introduction”, in J. H. Charlesworth (ed.), The Old Testament Pseudepigrapha (Garden City, New York, 1983) 268; P. Schäfer – M. Schlüter – G. von Mutius (dir.), Synopse zur Hekhalot-Literatur (Tübingen, 1981) 10-11, with one correction.
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The various traditions on the punishment of Enoch-Metatron, the eternal scribe associated with entrance to Paradise and descending to the Chariot, as attested in the traditions of the Sages as well as in the Hekhalot literature, are part of a long dispute between the oral faction and the writing faction that had started centuries before. Enoch who was sitting and writing in Paradise since the seventh generation of human history was associated before the Common Era as mentioned above, with various ancient written priestly traditions on holy time, holy place, holy memory and holy ritual, as well as with the pre-calculated solar calendar of 364 days. All these traditions were strongly contested in the Hasmonean period, when a new illegitimate priesthood had been appointed by the heirs of Antiochus Epiphanes, 3 4 he who had conquered Jerusalem and imposed a Greek lunar calendar. From the polemic literature that had been found among the Dead Sea Scrolls, we can learn a great deal concerning the profound dispute between two priestly houses and their supporters, the Zadokite priests and the Hasmonean priests, the latter group, being appointed by the Seleucid heirs of Antiochus had political power but no religious or spiritual legitimacy (according to the biblical order of the High Priesthood), while ruling in the Temple between 152-37 bce . The former group, who had sole legitimacy according to the biblical order of the High Priesthood, had no political power from the year 175 bce onward, when the last Zadokite High priest, Onias son of Simon, had been deposed by Antiochus Epiphanes and escaped to Egypt where he had established the Onia’s Temple. 35 In order to understand the depth of the conflict in the middle of the Second Century bce between the new ruling Hasmonean party, who was perceived as usurpers who had no written tradition or ancient written authority by their predecessors, and the old dethroned Zadokite priestly party, who officiated according to the biblical order until 175 bce and had vast sacred written tradition and longstanding biblical authority, it is sufficient to mention what is written in the Apocryphon of Jeremiah, that had been found in Qumran: ויתקרע ישראל בדור ההוא להלחם איש ברעהו על התורה ועל הברית
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This dramatic statement that had been translated in the future tense, is reflecting the present of the writer in the middle of the Second Century bce: “And Israel will be rent asunder [or torn apart] in that genera-
34. I Macc. 10:18-21; 11:57; 14:38-39. 35. See M. M. P iotrkowski, Priests in Exile: the History of the Temple of Onias and its Community in the Hellenistic Period (Berlin, 2019). 36. 4Q387 3: 7-8, E. Qimron (ed.), “Apocryphon of Jeremiah,” in The Dead Sea Scrolls, The Hebrew Writings, Vol. ii (Jerusalem, 2013) 99.
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tion, each man fighting against his neighbor over the Tora and over the covenant”. 37 Enoch, the eternal scribe, was the major protagonist of the Zadokite priestly circles, in the harsh days described as “when Israel will be torn apart in that generation, each man fighting against his neighbor over the Tora and over the covenant”. The Zadokite priests chose Enoch as their writing hero, since they perceived every holy instance as dependent on ancient sacred writing, originating in heavenly vision or in angelic revelation. Their new opponents, whether the Hasmoneans who were appointed by the Seleucids, or the Pharisees who developed the Oral Law, those who possessed no written authority or written legitimacy, were ready to change many of the sacred foundations of the priestly order, notably the pre-calculated fixed solar calendar, the angelic presence as source of divine authority and the continuation of sacred writing as an expression of divine authority and priestly supremacy. The new regime contested the priestly liturgical partnership with the angels as well as the sacred role of divine written authority. Since the first Hasmoneans were appointed as High Priests and local rulers by the Seleucid imperial rulers, Alexander Balas and Demetrius II, a culture which held to the Greek-Macedonian lunar calendar tradition, the Hasmoneans were forced to replace the solar calendar of the Temple, that commenced in the spring (Exod. 12:2), with the lunar calendar of the Seleucids that started in the autumn (Daniel 7:25). Because of this revolution the Hasmonean Jerusalem Temple was considered defiled by the Zadokite priests, who had adhered to the biblical solar calendar commencing in the spring as well as to the exclusive right of the high priesthood from the house of Zadok. The same Temple was considered sacred by the Hasmonean priests, who had subscribed to the New Greek lunar calendar commencing in the autumn and to a new “usurped” Hasmonean high priesthood. All of this polemical historical background concerning different parties who disputed on the calendar, was necessary in order to establish that the choice of Enoch-Metatron, the transmitter of the pre-calculated solar calendar that was taught by the angels, and the founder of the ancient written priestly order, as the primary angelic protagonist of Hekhalot literature, is not an accidental choice or meaningless preference in the priestly surrounding of the synagogue where the Hekhalot literature and the priestly tradition of the Chariot was written and performed in relation to the Qedusha prayers. It should be noted that the Descenders of the Chariot are instructed to transcribe what they have heard in their heavenly ascent, time and again (Syn. 228, 240). 37. D. Dimant (ed.), “Apocryphon of Jeremiah”, Qumran Cave 4 XXI, Parabiblical Texts, part 4: Pseudo-Prophetic Texts (Oxford, 2000) 191-192.
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When we assess the significance of the choice of Enoch Metatron as a central angelic protagonist in the priestly mystical Hekhalot literature, we need to recall that Enoch the scribal protagonist of the sacred mystical books of the priests before the Common Era, had become the antagonist of the Sages of the Oral Law, who knew him very well in the priestly apocryphal books, those which had been proscribed for reading and strictly prohibited by the Sages after the destruction of the Second Temple (B. Sanhedrin 10). Enoch, the eternal heavenly priest, the first scribe and the first reader, the first astronomer and the first mathematician, he who had received from the angels the pre-calculated fixed solar calendar, that which commences in the spring, in the first day of the first month (Exodus 12:2), (I Enoch 72-82; Jubilees 4) was killed by God, as a sinner, according to the tradition of the Sages, on the first day of the seventh month, which is Rosh Hashana of the alternative lunar calendar, that is, on that very day which the Sages declared that the new year will start, according to their new lunar calendar commencing in the seventh month. The antediluvian eternal writing hero of the scribal circles associated with the priesthood and the written Tora, who was described as: “Enoch You had chosen from among human beings, You took him to walk in front of You forever, to serve in Your sanctuary” (5Q13), and who was granted eternal life in Paradise (Jub. 4), had become the “executed” antagonist of the Sages of the oral law, as we learn from Bereshit Raba and Onkelos translation on Genesis 5:24. After the destruction of the Second Temple, in Yavne generation, in the days of Rabban Johanan ben Zakai, Rabbi Joshua ben Levi, Rabban Gamliel and Rabbi Akiva, the Sages of the oral law adopted the new Jewish lunar calendar commencing in the autumn, invented a new holiday known as Rosh Hashana in the first day of the seventh month (Mishna Rosh haShana 1:1), rejected the former priestly pre-calculated fixed solar calendar of 364 days commencing in the spring, in the first day of Nisan, the vernal equinox, and related slanderous narratives concerning the founder of the priestly angelic calendar, Enoch-Metatron. Metatron or Hanoch-Metatron, who was taken to heaven in the first of the first month of the spring (II Enoch 1:2), is mentioned directly 140 times in the Synopsis of Hekhalot literature, 38 or described by the Descenders of the Chariot as the Angel of the Presence or the Prince of the Countenance numerous times. He has many synonyms which are not counted here, but in all his names and functions he is described as an angelic source of knowledge of the mystery of the Chariot as well as an 38. See P. Schäfer – G. R eeg – K. H ermann – C. Rohrbacher-Sticker – G. Weyer – R. Otterbach (ed.), Konkordanz zur Hekhalot-Literature (Tubingen, 2 1988) 401-402, 405.
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angelic High priest officiating in the seventh heavenly sanctuary. He is further described as the celestial teacher of R. Akiva and R. Ishmael the High priest in Sefer Hekhalot (Third Enoch), in Hekhalot Rabati, and in Praises of Metatron (Synopsis 363-397). His grandeur is described by himself when he relates his history to R. Ishmael: “He [the Holy One]… called me, ‘The lesser YHWH’ in the presence of his whole household in the height, as it is written, ‘My name is in him’” (III Enoch 12:5). Enoch was the first beholder of the chariot (I Enoch 14 and 71) – the sages, as it is well known, had prohibited the public expounding of the chariot in Mishna Hagiga and narrated stories involving the bewilderment of the “one chosen among human beings” and further reported the sudden death, enacted by God, of that ancient person who had been granted eternal life in Jubilees and Seder Avoda, who brought the priestly fixed pre-calculated solar calendar commencing in the Spring, in the very date in which the new rabbinic lunar calendar was starting, in Rosh ha-Shana. Enoch] is not inscribed in the Book of the Righteous but rather in the Book of Evildoers […] he was obsequious, at times righteous [and] at times evil. Said the Holy One Blessed Be He, “so long as he is righteous, I shall eliminate him”. […] Said Rabbi Aibu: “On Rosh Hashana [He] sentenced him at the time when [He] sentenced the entire world”. 39
Enoch, associated with the pre-calculated solar calendar, commencing in the spring, the hero of the Sadducees hakohanim lebeit Zadok veanshei beritam, the ancient priesthood according to the biblical order, the protagonist of the books that were excluded as “external books” by R. Akiva, was humiliated by the Sages who established the new changing lunar calendar, those who detested the Sadducees, their predecessors, who held to the pre-calculated fixed solar calendar. The anonymous writers known as the “Descenders of the Chariot”, who described themselves as “R. Akiva who entered to paradise” (Bav. Hagiga 14a) and “R. Ishmael the High Priest” (Mishna, Berachot 7a), were well aware of the rabbinic resentment against Enoch-Metatron (Bav. Hagiga 14b-15a). They were well aware as well on the rabbinic criticism against the public discussion of the Chariot tradition (Mishna Hagiga 1:1) and against the continuation of sacred writing. However, despite the prohibitions in the Mishna and the Talmud and in spite of the scorning on Enoch in the Midrashim, it seems that the priestly mystical circles that were active around the synagogues, did not subjugate themselves to the new cultural order. They overlooked this new order that was characterized by prohibition of writing, resentment of angels and angelic authority, resentment of public discussion of the world of the Chariot and resentment of its foremost writing hero, Enoch, the major priestly-angelic pro39. Bereishit Rabba 25: “And Enoch walked” [Genesis 5:25].
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tagonist. These priestly mystical circles that consolidated around Mikdash Mea’t (small temple = synagogue), continued along most of the first millennium of the Common Era to write angelic narratives about holy divine names and heavenly sanctuaries, to compose angelic liturgy, to describe human descent or ascent to the Chariot and to compose Hekhalot literature that demonstrated the eternal Temple worship in seven heavenly sanctuaries where the angels, designed as priests and Levites, continue to sing and adorn in pre-fixed eternal priestly order. These priestly mystical writing circles continued to study the Chariot tradition, to write new Enoch-Metatron narratives corresponding to the High priesthood (Syn. 384-390), to compose angelic liturgy of immense beauty and to promulgate the Enoch-Chariot tradition in numerous liturgical ways. There are various ways to understand Hekhalot literature as we have learned from hundred years of research. It could be studied as part of the history of Jewish mysticism in the period of the Sages, or as part of the Apocryphal tradition, as part of history of magic, or as part of the history of prayer, further it could be understood as part of the priestly-mystical Chariot tradition that is based on transcending borders between heaven and earth, time and eternity, human and angels, earthly Temple and heavenly sanctuaries. There were always scholars who accentuated the dialectical continuity with the ancient written past, while others contended that there is no historical connection between the ancient Enochic literature and Third Enoch of the Hekhalot, or that there is no similarity between priestly writings before and after the Common Era. In the present article I suggested to view Hekhalot literature as a meaningful stage in the long dispute between the old priestly tradition – that consecrated writing pertaining to the mystical realm of the world of the Chariot, to divine revelation and to angelic instruction, and believed in the sanctity of the fixed pre-calculated solar calendar that was brought by Enoch from the angels, and the new circles of the Sages that proscribed continuous divine revelation or angelic teaching, prohibited any new sacred writing, proscribed public discussion on the Chariot and rejected any presence of angels or direct divine revelation for the sake of the enthusiastic promotion of the new oral law based on human sovereignty. This new hegemony of the Pharisees/Sages/Tannaim/Rabbis that fought against the priestly circles known as Sadducees/Cohanim/ Zedokim, or “descenders of the Chariot”, hegemony that did not allow divine or angelic revelation, holy names, angelic authority, priestly-angelic poetry, mysticism, priestly historiography on paradise or mystical narratives on the seven sanctuaries or on the heavenly Chariot, and proscribed any narratives on the angelic solar calendar that was brought from heaven by Enoch, supported the new changing lunar calendar based on human observation and rejected the priestly angelic fixed solar calendar based on
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angelic pre-calculation. Hekhalot literature, that is overloaded with all what was prohibited in the early Sages literature, is characterized by hailing writing and praising angels and holy names, by detailed descriptions of the world of the Chariot, by accentuating angelic liturgy and divine sanctuaries, by choosing and hailing Enoch the priestly mystical protagonist, and by creating hundreds of Qedushot which are based on angelichuman cooperation in chanting, praying, singing and adoring the divine realm in eternal pre-fixed liturgical order. All those mystical liturgical choices certainly reflect the echoes of the old priestly-angelic order and disregard the new hegemony that rejected angels and writing, in spite of the fact that the Hekhalot and Merkaba authors chose the Sages and the martyrs, R. Akiva and R. Ishmael, as their human mystical protagonists. Presumably, the anonymous Hekhalot writers that emerged from the mystical-priestly circles who worked around the synagogue, made this literary choice in order to prevent the censorship and the exclusion of their sacred writings of angelic liturgy as apocryphal books or Sefarim Hitzonim, that those who read them has no share in the world to come (Bav. Sanhedrin 10a), according to the exclamation of R. Akiva, the foremost protagonist of the lunar calendar according to Mishna Rosh Hashana, 2:8-9, and the major hero of the world of the Sages who is telling the story of his selfgrandeur as well as the story of the bitter punishment of the priestly hero, Enoch-Metatron, in the story about the “Four who entered Paradise”.
“He
Who Sits C rowned on the T hrone of H is Glory”: B ody Posture in H ekhalot R abbati and in R abbinic L iterature Catherine Hezser SOAS, University of London [email protected] Résumé Le langage corporel constitue une caractéristique importante de la présentation par Hekhalot Rabbati de l’expérience mystique. Cet article compare les façons dont trois types de mouvement – s’asseoir sur une chaise, se lever devant une personne de statut supérieur, se mettre à genoux et se prosterner – sont présentés dans Hekhalot Rabbati et dans les textes rabbiniques classiques. Les principales questions sont : qui aurait exécuté les mouvements respectifs et dans quel contexte ? Comment la représentation de Hekhalot Rabbati se compare-t-elle aux références rabbiniques ? Que révèle la présentation littéraire sur les préoccupations sociales et théologiques des compositeurs du texte ? Alors que les tradents et les éditeurs semblent avoir été familiarisés avec la littérature biblique et rabbinique, ils utilisent ces textes de manière éclectique et innovante, transformant les hiérarchies religieuses établies et la notion même de pratique religieuse juive. La priorité est donnée à l'expérience visionnaire du divin en tant que complément et avancement de la connaissance et de l’observance rabbinique de la Tora. Abstract Body language constitutes a prominent feature of Hekhalot Rabbati’s presentation of the mystical experience. This article compares the ways in which three types of movement – sitting on a chair, standing up before a status-higher person, kneeling and prostration – are presented in Hekhalot Rabbati and in classical rabbinic texts. The main questions are: Who is said to have performed the respective movement in which context? How does Hekhalot Rabbati’s representation compare with rabbinic references? What does the literary presentation reveal about the social and theological concerns of the composers of the text? While the tradents and editors seem to have been familiar with biblical and rabbinic literature, they use these texts in eclectic and innovative ways, transforming established religious hierarchies and the very notion of Jewish religious practice. Precedence is given to the visionary experience of the divine as a supplement to and advancement over rabbinic Tora knowledge and observance. La « sacerdotalisation » dans les premiers écrits mystiques juifs et chrétiens. Actes du colloque international tenu à l’Université de Lausanne du 26 au 28 octobre 2015, sous la direction de David Hamidović, Simon C. Mimouni et Louis Painchaud, Turnhout : Brepols, 2021 (Judaïsme ancien et origines du christianisme, 22), p. 41-56 DOI 10.1484/M.JAOC-EB.5.122765 © F H G
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Body posture is part of nonverbal communication that appears in both rabbinic and Hekhalot texts but has not been studied sufficiently for Hekhalot literature so far . 1 The study of nonverbal communication is interesting from both a literary and a sociological point of view. From the literary perspective, one can examine the ways in which nonverbal communication is used in a particular text and related to verbal communication, that is, to statements, discussions, and disputes. 2 From a sociological perspective, cultures and groups within cultures share certain similarities but also differ from each other with regard to their use of body language and its representation in the texts they produce. 3 Therefore the study of this aspect of ancient and early medieval Jewish literature may lead to interesting conclusions about the particular sets of tradents and editors who stand behind the texts. In this study I shall focus on the ways in which body movements and posture are represented in Hekhalot Rabbati in comparison with both Palestinian and Babylonian rabbinic texts from late antiquity. Can we discern differences in the types of body movements and the ways in which they are represented in the respective texts? Could these differences be based on the different contexts (e.g., academic versus priestly/liturgical) in which the compilers of these documents lived ? Is the body language of Hekhalot Rabbati closer to the Babylonian Talmud than to Palestinian texts? To answer these questions, we have to occasionally recur to biblical, Graeco-Roman, and Persian texts: biblical texts as the base texts of all later Jewish literature and Graeco-Roman and Persian texts as the broader cultural contexts in which rabbinic and Hekhalot literature emerged. 1. For a study of nonverbal communication represented in social interactions in Palestinian rabbinic texts see C. H ezser , Rabbinic Body Language: The Representation of Nonverbal Communication in Palestinian Rabbinic Literature of Late Antiquity (Leiden, 2017). On non-verbal communication in ancient Jewish liturgy see U. Ehrlich, The Nonverbal Language of Prayer: A New Approach to Jewish Liturgy (Tübingen, 2004). Nonverbal communication has been studied more as far as Greek and Roman literature is concerned, see the classical study of C. Sittl , Die Gebärden der Griechen und Römer (Leipzig, 1890); since the 1970s especially J. P. Holoka, “Nonverbal Communication in the Classics: Research Opportunities”, in F. Poyatos (ed.), Advances in Nonverbal Communication. Sociocultural, Clinical, Esthetic and Literary Perspectives (Amsterdam/Philadelphia, 1992) 237-254; J. Bremmer – H. Roodenburg (ed.), A Cultural History of Gesture. From Antiquity to the Present Day (Cambridge, 1991); A. Corbeill , Nature Embodied: Gesture in Ancient Rome (Princeton, New Jersey, 2004). 2. On body language in literature see especially S. B. Portch, Literature’s Silent Language. Nonverbal Communication (New York, 1985); B. Korte , Body Language in Literature (Toronto, 1997). Both of these works deal with modern literature, though. 3. On cultural differences in body language see especially M. A rgyle , Bodily Communication (London/New York, 21988) 49-70.
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This study shall focus on Hekhalot Rabbati, a macroform which Peter Schäfer places at the beginning of the “internal chronology” of Hekhalot texts. 4 He sees Hekhalot Rabbati as “a late rabbinic or even postrabbinic phenomenon (sixth century and later),” with the possibility that some of the material may have an earlier, late antique, origin. 5 Whether the macroform developed in a Palestinian or Babylonian environment is heavily disputed among scholars. Whereas Schäfer has argued for “at least the formative shaping” of the text in a Babylonian context, others have maintained the text’s closeness to Palestinian rabbinic culture. 6 Since there are decisive differences in body language between the Palestinian and Babylonian Talmuds, our analysis may also shed some light on the cultural environment in which Hekhalot Rabbati emerged or received its current form. The thematic focus of Hekhalot Rabbati already suggests that body language is very important here, even more than in the Palestinian and Babylonian Talmuds, where halakhic argumentation determines the flow of the discourse. Hekhalot Rabbati deals with travel to the celestial throne room and provides ritual instructions to the imagined audience and readers of the texts. 7 In the Talmuds, body language mostly introduces, supports, or supplements halakhic arguments. 8 In Hekhalot Rabbati, on the other hand, the descriptions of movement and posture are the main focus. The entire text can be seen as a verbalization and visualization of spiritual action and real or imagined rituals. 9 4. P. Schäfer , The Origins of Jewish Mysticism (Princeton, New Jersey, 2009) 243. 5. P. Schäfer , The Origins of Jewish Mysticism (Princeton, New Jersey, 2009) 245. The earliest external evidence stems from the Geniza manuscripts of the eleventh century c . e ., see J. Davila, Hekhalot Literature in Translation: Major Texts of Merkavah Mysticism (Leiden, 2013) 41. On the manuscript evidence see also A. Kuyt, The “Descent” to the Chariot: Towards a Description of the Terminology, Place, Function and Nature of the Yeridah in Hekhalot Literature (Tübingen, 1995) 127. 6. See P. Schäfer , The Origins of Jewish Mysticism (Princeton, New Jersey, 2009) 245. G. Scholem, Jewish Gnosticism, Merkabah Mysticism, and Talmudic Tradition (New York, 1965) 21-35, has argued for a Palestinian origin of at least some of the traditions integrated in Hekhalot Rabbati. For arguments in favour of a Babylonian influence see R. S. Boustan, From Martyr to Mystic: Rabbinic Martyrology and the Making of Merkavah Mysticism (Tübingen, 2005) 67-69, 230, 277-278, 288, 291. 7. For a summary of the contents see J. Davila, Hekhalot Literature in Translation: Major Texts of Merkavah Mysticism (Leiden, 2013) 4, 8-9, 37-38. 8. See C. H ezser , Rabbinic Body Language: The Representation of Nonverbal Communication in Palestinian Rabbinic Literature of Late Antiquity (Leiden, 2017). 9. On the ritual and performative aspects of the text see J. Davila, Hekhalot Literature in Translation: Major Texts of Merkavah Mysticism (Leiden, 2013) 12-13. See also J. R. Davila, Descenders to the Chariot: The People Behind the Hekhalot Literature (Leiden, 2001) 254, 258-261; M. D. Swartz , Scholastic Magic. Ritual and Revelation in Early Jewish Mysticism (Princeton, New Jersey, 1996) 218; R. M.
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Obviously, a comprehensive study of the body language represented in Hekhalot Rabbati cannot be accomplished in the framework of this paper. Because of the comparative nature of this study, I shall focus on movements and postures that appear in both rabbinic texts and Hekhalot Rabbati, albeit in characteristically distinct ways. The analysis of these postures and movements will show that the composers of the Hekhalot text were knowledgeable of rabbinic traditions which they combined with eschatological visions to transport them to a “higher” spiritual realm. In Hekhalot Rabbati the horizontal movement of ancient rabbis has given way to the vertical movement of the mystical practitioners. The earthbound authority of the rabbi who sits teaching in his “academy” is replaced by the celestial authority of the one “who sits crowned on the throne of His glory” (105). 10
I. Sitting in the Academy – Sitting on the Celestial Throne In Hekhalot Rabbati sitting is mentioned in two different contexts. The first one is similar to the sitting in rabbinic study sessions mentioned in classical rabbinic sources. The references to such study sessions are rare, however, and embedded in narratives that deal with entirely different matters. This is the case, for example, in the peculiar passage about R. Hananya b. Teradyon, a second-generation tanna who is also mentioned in rabbinic sources (H.R. 120). 11 Those who formulated the text must have been aware of the Babylonian Talmud’s presentation of Hananya as a martyr who died through fire (cf. b. Avoda Zara 18a), since there is an allusion to his death, to his executioner, and to fire in the narrative. In the Bavli version, Hananya is already said to have been “sitting and occupying himself with the Tora” when Roman officials came, wrapped him in a Tora scroll, and set him on fire to burn slowly. The executioner makes a deal with him: if the rabbi promises him entrance to the world-tocome, he will make him die more quickly. After the deal has been agreed upon, he throws himself into the fire with him: “And a bat qol exclaimed: R. Hananya b. Teradyon and the executioner have been assigned to the world-to-come” (ibid.). L esses , Ritual Practices to Gain Power: Angels, Incantations, and Revelation in Early Jewish Mysticism (Harrisburg, Pennsylvania, 1998). 10. Throughout this study I shall be using the English translation of M. Smith, Hekhalot Rabbati. The Greater Treatise Concerning the Palaces of Heaven, translated from the Hebrew and Aramaic by M. Smith, corrected by G. Scholem, transcribed and edited with notes by D. K arr , 32013, available at: http://www.digitalbrilliance.com/kab/karr/HekRab/HekRab.pdf. For an alternative translation see J. Davila, Hekhalot Literature in Translation: Major Texts of Merkavah Mysticism (Leiden, 2013) 51-158. 11. See, for example, M. Avot 3:2.
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In the Hekhalot Rabbati version R. Hananya is also briefly associated with the characteristic practices of rabbis: “He is sitting and doing wonders in the study house [bet midrash] and is teaching Tora to the mighty of Israel” (Hekhalot Rabbati 120). The reference to “wonders” already points to the different roles the rabbi assumes in this version of the story. 12 R. Hananya appears as a tool of “Surya, the Prince of the Presence” here, who dresses him up and uses him in various scenarios as a counterpart and replacement of Lupinus Caesar. The latter is beheaded instead of Hananya while Hananya rules Rome as the emperor’s replacement. 13 Rather than Hananya, in Hekhalot Rabbati Lupinus Caesar is said to have been cast into the fire. Hananya and the “mighty of Israel” are saved from destruction by the angel Zoharariel and the “heavenly court” (121). The Romans’ evil intention allegedly justified their punishment. Both the Jewish sages and the foreign rulers are presented like puppets in a theatre whose action is entirely determined by God and his angelic intermediaries here. The other reference to a “sitting” that resembles rabbinic sessions appears in Hekhalot Rabbati 202 but, again, assumes an entirely different character in this text. Like H.R. 120-121, this text (201-203) is attributed to the tanna R. Yishmael. His master, R. Nehunya Hakkana, allegedly instructed him to assemble sages before him so that he could reveal “the hidden, the concealed secrets, wonders of the ascent” to them and a ladder that reaches from the earth to the celestial “throne of glory” (201). Nehunya b. Hakkana is also known as R. Yishmael’s teacher in rabbinic sources. 14 R. Yishmael allegedly assembled the “sanhedrin” in “the house of the Lord”, that is, the Temple. Various second- and third-generation tannaim are listed and said to have attended the meeting (202), irrespective of whether they were actual contemporaries of Nehunya Hakkana (e.g., the third-generation tanna R. Eleazar b. Shammua is mentioned); teachers such as R. Aqiva are mentioned alongside their disciples. The composers and tradents may have merely picked names that were familiar to them without paying attention to the status differences between teachers and students that are so important in classical rabbinic texts. 12. For a synoptic comparison between the version in Hekhalot Rabbati 120 and another version in a post-talmudic martyrological anthology, the so-called Story of the Ten Martyrs III.40.38-42, see R. S. Boustan, From Martyr to Mystic: Rabbinic Martyrology and the Making of Merkavah Mysticism (Tübingen, 2005) 233-236. 13. According to R. S. Boustan, From Martyr to Mystic: Rabbinic Martyrology and the Making of Merkavah Mysticism (Tübingen, 2005) 238, this plot was already part of “classical rabbinic literature”, but I could not find the text in Song of Songs Rabba that he refers to. 14. See H. L. Strack , Einleitung in Talmud und Midrash, with a preface and bibliographical appendix by G. Stemberger (Munich, 61976) 121.
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Together with R. Yishmael, all of these sages are said to have “sat down before” R. Nehunya b. Hakkana, who is presented as the chairman of the session. His elevated status is also emphasized by the type of chair he was sitting on: a “chair of pure marble” that may resemble a throne. Such a precious chair is never associated with rabbis in talmudic traditions. In Roman art, such thrones with back support are commonly associated with temples and deities. In Byzantine art, Jesus and Mary are shown sitting on thrones. 15 The marble chair envisioned in Hekhalot Rabbati is unlike the comfortable wicker chair or cathedra used for reading and commonly associated with teachers and philosophers in Graeco-Roman sources. 16 It is an outward symbol of the spiritual elevation of Nehunya over other rabbis. While sitting on a marble chair in the Temple, he allegedly taught his rabbinic audience about the merkava and about ascents and descends associated with it (cf. Ez. 1). 17 Particularly interesting from the perspective of nonverbal communication and in comparison with classical rabbinic sources is the division between “the great ones of the company” and “the mighty ones of the academy” (201) who are separated spatially and with regard to the posture they assumed in the meeting. Whereas the ten named rabbis who “sat down before” R. Nehunya b. Hakkana are obviously identified as the “mighty ones of the academy,” other anonymous sages subsumed under the rubric “all the multitude of companies”, are said to have been “standing upon their feet,” with “spider-webs of fire and torches of light” constituting a separation barrier between the two groups (203). While all are taught by Nehunya, the seated and named sages are clearly seen as superior to the rest, who remain a largely invisible audience. This image of a division between more prominent scholars and inferior ones may be based on the story of R. Gamliel’s deposition, told in y. Ber. 4:1, 7c-d. As in Hekhalot Rabbati, seated sages are distinguished from standing ones there. In the Yerushalmi’s discussion following the story, a “fence” that separated the standing audience from the seated sages is mentioned: “R. Yaaqov b. Sisi said: Eighty benches were there for the disciples of sages, besides those who were standing beyond the fence [ ]העומדין לאחורי הגדרR. Yose b.R. Abun said: Three hundred were there, besides those who were standing beyond the fence” (ibid.). The described session has often been associated with the so-called sanhedrin, although 15. See A. T. Croom, Roman Furniture (Stroud, Gloucestershire, 2007) 116. 16. On this chair see A. T. Croom, Roman Furniture (Stroud, Gloucestershire, 2007) 116-117. 17. See also Hekhalot Rabbati 225, where R. Nehunya b. Hakkana is presented as someone “who rules by the light of the Tora” as well as a visionary of the merkava. On the attitude toward merkava speculation in rabbinic texts see I. Grunwald, Apocalyptic and Merkavah Mysticism (Leiden, 2 2014) 111-133.
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the Yerushalmi text does not mention a sanhedrin but the “vineyard in Yavneh”. Hekhalot Rabbati 201-203 shares the vision of a large audience with the Yerushalmi text but its core group of ten seated rabbis is smaller than the talmudic suggestions (eighty benches; three hundred). Whereas the session conjured up by the Talmud was meant to discuss halakhic issues, the session in Hekhalot Rabbati introduces sages to the higher spiritual knowledge of the merkava, truths that were believed to have been “hidden” to them beforehand. By calling some tannaitic rabbis “mighty” and by using settings known from rabbinic texts, the composers try to present themselves as following in the footsteps of these earlier scions of Tora study. At the same time, they clearly consider their own revelation of hitherto “hidden” truths superior to traditional rabbinic knowledge, which seems to be considered a mere prerequisite. Particularly embellished chairs and thrones have a great significance in Hekhalot Rabbati. The pure marble chair on which R. Nehunya Hakkana allegedly sat while teaching hidden truths about the merkava to tannaitic rabbis in the earthly sanhedrin/Temple (202) seems ordinary compared with the kind of chairs and thrones occupied by heavenly intermediaries and by God himself, in the hekhalot and in the celestial room. At the entrance to the sixth hekhal Dumiel the Prince is said to have been sitting on a “chair [wrought] of a pure gem which [has] in it the splendour of the luminaries of the firmament” (233). According to a statement attributed to R. Nehunya, a “man who deserves by reason of his righteousness to descend to the merkava” (232) is seated on a similar gemstone chair by Dumiel, who “sits beside him on his right” (233), instructing him about the basic requirements of those who desire to descend to the merkava (234). These requirements consist of the knowledge and observance of the Tora, Mishna, Midrash, Halakha and Aggada (cf. 239), all the statutes “declared to Moses at Sinai.” The combination of both knowledge and practice is repeatedly stressed. These requirements indicate that only the most knowledgeable and observant rabbinic scholars have a chance to reach the merkava. Others, whose studies and practices are less than comprehensive, need not even apply. Again, the secret truths that can be received by descending to the merkava are presented as a supplement to – and as the crown of – rabbinic scholarship here. What the scholars who reach the merkava are supposed to do is mentioned in 228: “Behold and see and give ear and write down all that which we say and all that which you hear from before the throne of glory,” that is, they are supposed to become a witness to the glory, like Nehunya Hakkana before them, and to instruct others in the truths they saw and heard. Especially interesting here is the emphasis on the visual and auditory experience which can be transmitted to others through oral testimony or writ-
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ing only. The explicit instruction to “write down” their experiences (see also 240, where scribes are said to have written down what they heard from R. Nehunya Hakkana) stands in conflict with classical rabbinic tradition, for rabbis were against note-taking and emphasized the oral transmission of their teachings. 18 The reference to writing may be based on biblical prophetic books in which God instructs the prophet to write down the words he received from him (see Jer. 30:2; 36:2, 17, 28), and also point to post-Talmudic times when writing was more common in some Jewish religious circles. 19 The location and preciousness of the chair seem to match the spiritual progress of the person allowed to sit on or stand next to it. At the top of the pyramid is the most often mentioned “throne of the glory of God.” This throne is situated in the “chambers of the palace of the seventh heaven” (82). A righteous and enlightened person able to reach this chamber is made to stand at the right hand side of this throne (ibid.; see also 172, where those who are able to descend to the merkava are said to “stand before the throne of His glory”; in 178 thousands of angels are said to stand to the right and to the left of the throne). This chamber is also the location of the “heavenly court of justice” over which God on his throne presides (92; see also 112, where the court’s judgment over Lupinus Caesar is mentioned). It is the heavenly equivalent of the “earthly court of justice” (ibid.), which is probably associated with the sanhedrin mentioned before. 20 As we have seen above, only the most prominent Tora scholars of their generation are imagined to have a chance to be seated in the earthly court. To gain a standing place in the heavenly court one needs to top up one’s rabbinic knowledge and practice with the secret knowledge which only a few select rabbis such as Nehunya Hakkana can provide. The divine throne is said to “fly and stand still” at one and the same time (97): “And even yet has your throne not rested its foot upon the firm ground of the seventh heaven, but as a bird flies it flies and stands still” (97), that is, it is suspended in the air. The throne is supported by angels who “hold it up continually with strength, might, and power” (98; see also 106, where they are called “bearers of the throne of His glory”), angels who themselves “fly and stand still” like birds (ibid.). Underneath the throne are the “cherubim and ophanim and holy beasts” (101; cf. 187: 18. See C. H ezser , Jewish Literacy in Roman Palestine (Tübingen, 2001) 95-101. 19. See D. Stern, “The First Jewish Books and the Early History of Jewish Reading”, Jewish Quarterly Review 98 (2008) 163-202. 20. P. S. A lexander , “The Family of Caesar and the Family of God”, in L. A lexander (ed.), Images of Empire (Sheffield, 1991) 276-297, esp. 293-296, has argued that some of the rituals at the heavenly court may have been influenced by court procedures on earth, suggesting that God is the true heavenly emperor. Whether the Roman-Byzantine or Sasanian court is envisioned here remains uncertain but the latter is more likely.
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at the four feet of the throne). The throne of glory is considered God’s eternal dwelling place, from the time of creation onwards (119). The only human being who is allowed to sit on a heavenly throne is King David: “his throne was prepared for him opposite the throne of his Creator (and all the kings of the house of David sit before him and all the kings of the house of Israel stand behind him” (126). Again, a statusrelated distinction is made between those who are sitting and those who are standing, with David and his descendants receiving particular honour and privileges over Israelite kings. The elevation of the Davidic line has a long tradition which is also evident in rabbinic sources. For example, Tosefta Horayot 2:2 distinguishes between “a nasi of Israel and a nasi of the house of David.” Palestinian and Babylonian rabbis were divided over the question whether the Palestinian patriarch or the Babylonian exilarch was the legitimate successor of King David. 21 What David is doing while sitting on the heavenly throne is singing God’s praises (Hekhalot Rabbati 126; see also 162, where song and music for the heavenly King on the throne of His glory are mentioned). This activity has nothing to do with the patriarch/exilarch but is rather based on the biblical and post-biblical image of David as a harpist and singer (cf. 2 Sam. 6:5; 22:1) with whom many psalms are associated (see, e.g., Ps. 3:1, 4:1, 5:1, 6:1, etc.). The notion that members of the Davidic dynasty were allowed to sit in heaven is reminiscent of a complex Babylonian talmudic tradition about Metatron’s sitting on high. 22 According to a tradition in b. Hagiga 15a, Aher (the “Other”, a name given to Elisha b. Abuya) allegedly “saw that permission was given to Metatron to sit and write down the merits of Israel.” He commented on this vision by stating: “[According to] a tradition on high there is {no standing and} 23 no sitting, no rivalry and no division and no combination. Perhaps, God forbid, there are two powers?” Metatron was then (wrongly) taken away and punished with lashes and Aher/Elisha excluded from “the merits of Israel.” According to GoshenGottstein, this Babylonian tradition is “the first attempt to link the story of Elisha ben Abuya with an understanding of the Pardes passage, which describes the heavenly ascent of the four Tora scholars.” 24 Aher/Elisha allegedly gave a false report about the angel Metatron which might lead to the assumption that there were two powers in heaven. 25 Therefore both 21. See M. Jacobs , Die Institution des jüdischen Patriarchen. Eine quellen- und traditionskritische Studie zur Geschichte der Juden in der Spätantike (Tübingen, 1995) 45. 22. I thank Philip Alexander for this reference. 23. The Munich manuscript has these additional words. 24. A. Goshen Gottstein, The Sinner and the Amnesiac. The Rabbinic Invention of Elisha Ben Abuya and Eleazar Ben Arach (Stanford, California, 2000) 90. 25. There is no equivalent to this tradition in the Yerushalmi (y. Hag. 2:1, 77ab), where different reasons for Elisha’s “heresy” are mentioned.
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Metatron and Aher/Elisha were punished. According to the composers of the tradition, however, Metatron had good reason to (temporarily) sit in heaven for the purpose of recording the merits of Israel, from which Aher as the “Other” was excluded. 26 The tradition would then indicate that even according to Babylonian rabbis, angels such as Metatron were allowed to sit in heaven to fulfill certain tasks, an idea that did not necessarily imply theological dualism. The suspicion of dualism is put into Aher’s mouth. Obviously, the task of writing could only be properly accomplished while sitting, an association which was common in late antiquity. 27 In Hekhalot Rabbati there seems to be a certain conceptual discrepancy between the image of the “throne of His glory”, imagined to be suspended in the air (to fly and be stable at the same time), supported by heavenly beings, and the merkava, that is, a chariot with wheels. The wheels of the merkava are repeatedly mentioned (e.g., 155, 160, 182, 188). In Hekhalot Rabbati the two different concepts – the chariot with wheels and the suspended throne – are combined without being entirely harmonized. Only once is the “wheel of the throne of His glory” mentioned in a passage that starts with the descent to the merkava (94). Is the wheeled (and therefore moving) merkava or the relatively stable throne chamber the destination of the heavenly journey? To some extent, the confusion of visual imagery is already present in Ez. 1, where winged creatures and wheels of a chariot are mentioned side by side (see Ez. 1:15-21), along with the “likeness of a throne” with “the appearance of a man upon it” (Ez. 1:26; see also Ez. 10:1). Logic would suggest that the wheeled chariot is the means of transport which brings the righteous to the seventh heaven, where the divine throne is located (cf. 232). Yet this logic is defied when the merkava is presented as the destination of the descent (e.g., 92, 94) and mentioned alongside the throne of His glory (see, e.g. 106, 172), while the distinct terminology is maintained.
II. Standing Up Before an Authority In classical rabbinic sources younger and lower-status scholars are presented as standing up in front of elders and eminent Tora scholars. Tosefta Megila 3:24 already adapts the biblical commandment, “You shall rise up before old age” (Lev. 19:32), to the rabbinic movement: the custom of standing up before an elder was a ritualized way of acknowledging his superiority. The fact that this issue is further discussed in great detail in 26. See A. Goshen Gottstein, The Sinner and the Amnesiac. The Rabbinic Invention of Elisha Ben Abuya and Eleazar Ben Arach (Stanford, California, 2000) 94-95. 27. See, for example, L. M aurice , The Teacher in Ancient Rome. The Magister and His World (Plymouth, 2013) 35.
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Yerushalmi Bikkurim 3:3, 65c-d indicates that this form of non-verbal communication was of great significance to Palestinian amoraim and the editors of the Talmud. 28 Standing up before an authority is also an important feature in Hekhalot Rabbati. Hekhalot Rabbati 93 is particularly significant in this regard. In a statement attributed to R. Yishmael, someone who sees the merkava should, during the time of his vision, stand up before three authorities only: the king, the high priest, and the sanhedrin if a patriarch is present. Someone who stands up in front of any other human being, including members of the sanhedrin, is said to be “guilty of death, … and he would lessen his days and cut short his years” (ibid.). The text obviously highlights the importance of the vision of the merkava, in a way that is reminiscent of the importance Tora study and prayer are given in rabbinic sources. For example, R. Yohanan is said to have refused to stand up before a Roman official while he was occupied with reading or recitation (y. Ber. 5:1, 9a). Prayer required concentration and should not be disturbed by social rituals. In the Hekhalot Rabbati text, ordinary rabbis, even if they are members of the sanhedrin, are not considered important enough to interrupt one’s visionary experience in order to honour them. Rising before the patriarch is already mentioned in a baraita: “When the patriarch [ ]נשׂיאenters, all the people stand up before him, and none of them has permission to sit down until he says to them: ‘Sit down’” (T. Sanh. 7:8; y. Bikk. 3:3, 65c). The patriarch is also mentioned elsewhere in Hekhalot Rabbati: the patriarch allegedly initiated festivities when he heard R. Yishmael’s report about God’s vengeance upon Rome (111); he was angry with R. Yishmael (239); “Those who turn many to righteousness”, probably identified with the visionaries of the merkava, are said to anoint patriarchs and appoint presidents of the sanhedrin (290). Although the tradents and compilers of these texts seem to have had a notion of the late antique Palestinian patriarch, whom they associate with a court and sanhedrin, the patriarch imagined in Hekhalot Rabbati is linked to – and to some extent subordinated to – the visionaries of the merkava such as Nehunya and his disciple R. Yishmael. He is clearly seen as a Tora scholar and judge and distinguished from the highest priestly and political authorities. 29 Interestingly, exilarchs are also mentioned, but only once. They appear in a very similar role as the patriarchs, being appointed by the righteous visionaries and functioning as judges (291). Those who stand behind these texts probably 28. For a discussion of this issue see C. H ezser , Rabbinic Body Language: The Representation of Nonverbal Communication in Palestinian Rabbinic Literature of Late Antiquity (Leiden, 2017) 75-83. 29. According to A. A. Orlov, The Henoch – Metatron Tradition (Tübingen, 2005) 200, in the early Enochic material the patriarch assumes the sacerdotal role of a priest.
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knew of the Palestinian patriarch and Babylonian exilarch from talmudic sources and utilize these figures for their own purposes in their visionary scheme. Besides the patriarch, who is merely seen as part (albeit the leader) of the sanhedrin, the king and high priest are allocated the highest authority. Both roles would have been known from biblical sources. Elsewhere kings and priests are criticized for having given in to idolatry for seven hundred years, together with (biblical) prophets (130): “And there shall be for them no saviour, no priest, neither teacher, and no prophet and no king and no leader and no prince until they turn and return to Me in prayer and in supplications for mercy” (134). Altogether, priests are rarely mentioned in Hekhalot Rabbati and do not seem to be allocated an exceptional role. The requirement to rise before him applies to the high priest only, who is mentioned only once in the entire composition (93). In a statement attributed to Metatron R. Yishmael’s glory is compared to that of Aaron the Priest (140). Yet R. Yishmael is presented as a scholarly visionary rather than a priest in the rest of the text. In Hekhalot Rabbati Metatron is not explicitly called a (heavenly) priest either. R. Yishmael’s and Metatron’s priestly association may be stronger in other Hekhalot texts such as the Enochic tradition. 30 Unlike rabbinic texts, Hekhalot Rabbati is not interested in status differences among rabbis that are expressed through the body language of rising before eminent scholars. Rising before rabbis is never mentioned, not even in connection with R. Nehunya b. Hakkana and R. Yishmael. This is because the focus is on the heavenly realm. The movement is toward the merkava and the throne of God. All other earthly and heavenly figures are presented in their relationship to the Godhead. While Tora scholarship is a precondition, it is not sufficient in and of itself. The visionary journey and its goal are what matters most. In the celestial chamber the successful visionary is allowed to stand next to the throne of glory (82). Similarly, the seraphim are said to be “standing before him and saying: Holy, holy, holy is the God of hosts” (140; cf. 160; 172; 178; 183; 185). The scenario is that of a huge heavenly choir which stands before the enthroned God and constantly sings his praises. 31
30. See the discussion in A. A. Orlov, From Apocalypticism to Merkabah Mysticism: Studies in the Slavonic Pseudepigrapha (Leiden, 2007) 211; A. A. Orlov, Heavenly Priesthood in the Apocalypse of Abraham (Cambridge, 2013) 163. 31. For the “fiery angle choruses” envisioned in Hekhalot Rabbati see also N. Janowitz , Magic in the Roman World: Pagans, Jews, and Christians (London/ New York, 2001) 81; N. Janowitz , Icons of Power: Ritual Practices in Late Antiquity (University Park, Pennsylvania, 2002) 76-77.
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III. Prostration and Genuflection The gestures of prostration and genuflection are particularly prevalent in Hekhalot Rabbati, much more than in rabbinic texts where they are usually limited to prayer contexts and even there relatively rare. Prostration is an extreme form of bowing, where the entire upper body is lowered to the ground; genuflection requires kneeling on the ground in addition to the lowering of the torso. Due to the body’s direct contact with the ground this is the most extreme form of self-humiliation in front of someone or something that is worshipped or at least held in high esteem. The gestures are rare in social interactions, except in front of royalty. They are more common in contexts of worship and liturgy. As Ehrlich has pointed out: “During the biblical period prostration constituted the preeminent, most ritualized physical gesture in the sacrificial and prayer services.” 32 Prostration is mentioned in the Bible “over a hundred times” and “came to denote divine worship in general.” 33 It continued in the Second Temple period and “played a central role in the Temple cult.” 3 4 In rabbinic discussions of liturgy, on the other hand, a more moderate form of bowing is mentioned in connection with the recitation of the Amida only. 35 This limited form of bowing is “pushing prostration and kneeling to the periphery of gestures signifying self-degradation and sorrow on fast days or appropriate to personal prayers in times of distress.” 36 The frequent appearance of prostration and genuflection in Hekhalot Rabbati can be considered a revival of the significance of these gestures in the Bible and in First and Second Temple times. 37 It also stands in line with Christian and Muslim forms of prayer where kneeling and prostration play important roles. 38 In Hekhalot Rabbati prostration appears as 32. U. Ehrlich, The Nonverbal Language of Prayer: A New Approach to Jewish Liturgy (Tübingen, 2004) 38. 33. U. Ehrlich, The Nonverbal Language of Prayer: A New Approach to Jewish Liturgy (Tübingen, 2004) 38. 34. U. Ehrlich, The Nonverbal Language of Prayer: A New Approach to Jewish Liturgy (Tübingen, 2004) 39. 35. U. Ehrlich, The Nonverbal Language of Prayer: A New Approach to Jewish Liturgy (Tübingen, 2004) 42. 36. U. Ehrlich, The Nonverbal Language of Prayer: A New Approach to Jewish Liturgy (Tübingen, 2004), 42. 37. For the related phenomenon of a revived interest in biblical customs in early Gaonic times, see A. K adari, “Narrative and Normative: Havdalah in Pirkei deRabbi Eliezer”, Jewish Studies Quarterly 21 (2014) 136-152. 38. On the early Christian kneeling posture during prayer, see E. Ferguson, “Prayer”, in E. Ferguson (ed.), Encyclopedia of Early Christianity, Vol. 1 (New York/London, 21999) 938; on the many New Testament references to prostration (proskynesis) see C. D. Erickson, Participating in Worship: History, Theory,
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part of the heavenly liturgy. Everyone who hears the singing of the heavenly chorus is supposed to prostrate himself (Hekhalot Rabbati 104). R. Yishmael allegedly “grew feeble and fell prostrate upon my face” (131), when he heard God speak of his punishment of Israel for seven hundred years after the destruction of the Temple. The gesture is meant to express his utter devastation: “I was terrified and there was no force in me, neither to speak, nor to answer” (ibid.) until Metatron asked him to “rise and stand and strengthen your loins” (ibid.). Yishmael’s fear is subsequently alleviated by reference to God’s promise to create “great enmity between Edom and Ishmael, that they make war one with another and destroy not utterly my people Israel” (ibid.). Kneeling and prostration are also mentioned together as proper gestures of self-abasement before God. Even the angels are expected to kneel and bow down in the face of the divine presence: “When the angel of the presence goes in to arrange and to set in order the throne of His glory… a thousand times does he kneel and fall down and prostrate himself before the ‘ophanim of majesty’” (170). In the continuation of the text, genuflection and prostration are also required before the two thousand cherubim and the three thousand holy beasts. In this text the angel of the presence appears as a servant in charge of preparing the throne and his carriers. 39 The required gestures indicate that he is considered inferior to the ophanim, cherubim, and holy beasts who carry the throne and participate in the singing of hymns (see above). There is a further increase in the number of necessary kneelings and prostrations in connection with the also mentioned “Shining Light” (eight thousand times) and the “[angel of] lightning” (twelve thousand times), which defies logic and suggests a play with images and numbers for the sake of raising the notion of awe in front of the divine. In another passage group after group of cherubim, seraphim, and holy beasts are said to “kneel and prostrate” themselves while saying “holy, holy, holy” in front of the merkava itself (188; cf. 273: “they kneel down and prostrate themselves in song as a man does”). In these texts the quantity of genuflections and prostrations is so much increased that these rituals are almost carried ad absurdum. These are Temple-related gestures which intensify in visions of the merkava and throne of His glory. At the same time, those who formulated the texts and Practice (Louisville, Kentucky, 1989) 166. According to Har-El, “The practice of prostration is an integral part of Muslim ritual prayer”, already mentioned in the Qur’an, see S. H ar-El , Where Islam and Judaism Join Together. A Perspective of Reconciliation (New York, 2014) 56. See, e.g., Sura 38:71-75, and M. A. Sells , Early Islamic Mysticism. Sufi, Qur’an, Miraj, Poetic and Theological Writings (Mahwah, New Jersey, 1996) 269, who thinks that the gesture mentioned there included “assuming a kneeling position and touching the head to the ground.” 39. On the representation of angels in Hekhalot Rabbati see R. M. M. Tuschling , Angels and Orthodoxy (Tübingen, 2007) 198-199.
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also associated the gestures with kings. This is because the “Lord God of Israel” is also identified as a “splendid King” who requires his subjects’ devotion to be expressed that way (99; cf. 273). Therefore, worldly kings and princes are “forced to prostrate themselves” before him (288), along with the angels and cherubim. To have even the highest worldly authorities and superhuman beings kneel and prostrate themselves before God elevates his status even more than requiring these gestures from humans only, as is the case in the biblical descriptions of the Temple service. In Hekhalot Rabbati, composed many centuries after the destruction of the Second Temple, imaginary devotion to God is carried to a much higher and intensified level than would have been possible in the context and under the constraints of an earthly abode of the holy. Rather than constituting a direct continuation of priestly, Temple-related service, Hekhalot Rabbati replaces this service by an imaginary magnification whose aggrandisement leaves rabbinic Tora study and synagogue liturgy in its shadow.
IV. Conclusions Due to its focus on ritual and visionary experiences, body movements and postures are particularly significant in Hekhalot Rabbati. The appearance of some of the same types of non-verbal communication that are also used in classical rabbinic sources reveals important differences between the two bodies of literature. My discussion focused on sitting, standing up, kneeling, and prostration, postures and gestures that are very prevalent in the mystical text. The main questions that were asked are: Who is said to have performed the respective movement in which context? How does Hekhalot Rabbati’s representation compare with rabbinic references? What does this presentation reveal about the social and theological concerns of the composers of the text? The most obvious conclusion is that in Hekhalot Rabbati postures and movements that are earth-bound in (biblical and) rabbinic texts are elevated to an imagined celestial sphere, to the throne or merkava as the goal of the visionary’s journey. While sitting in a rabbinic academic setting is mentioned in connection with R. Yishmael and his visionary teacher Nehunya Hakkana, and a division between an inner circle of scholars and a larger standing audience is envisioned, the description culminates with God’s sitting on a celestial throne. Highly embellished chairs never mentioned in rabbinic sources are associated with the visionary teacher, the one who is able to reach the sixth hekhal, and with heavenly beings, with the throne vision at the summit of the heavenly hierarchy. The increase in the preciousness of the chairs is accompanied by the practitioners’ increased visionary expertise and closeness to the divinity. Unlike rabbinic texts, Hekhalot Rabbati shows little interest in social distinctions amongst sages based on different levels of Tora knowledge.
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This becomes evident in connection with the gesture of standing up before higher level individuals that is associated with junior and senior scholars in rabbinic texts. In Hekhalot Rabbati, on the other hand, standing up before rabbis is never mentioned. Only the highest political, priestly, and religious authorities validate the visionary’s interruption of his experience. Yet the authorities mentioned – the king, high priest, and patriarch as leader of the sanhedrin – are already known from biblical and rabbinic sources. The vision of the merkava or throne of God is deemed so significant that anyone who dares to interrupt it to recognize worldly hierarchies is threatened with instant death. The gestures of prostration and genuflection, which are mentioned in the Bible and linked to Temple ritual and liturgy, are particularly prominent in Hekhalot Rabbati, in contrast to rabbinic sources where they are almost entirely absent. Rabbis discussed a moderate form of bowing in connection with the Amida only. In Hekhalot Rabbati, on the other hand, kneeling and prostration before heavenly beings and the divine throne are described in an intensified and exaggerated way, emphasizing the devotion practiced in the celestial sphere. The hierarchy of who performs these gestures before whom matches the hierarchy of standing up, ranging from visionary rabbis to heavenly beings in front of the divine throne. Genuflection and prostration are part of the celestial ritual and are accompanied by singing. Rather than constituting a direct link to the Temple and its priestly functionaries, however, it seems that some of the most prominent biblical and rabbinic role models, institutions, and practices are combined in a selective and innovative way to give precedence to the visionary experience of the divine as a supplement to and advancement over rabbinic Tora knowledge and observance.
L’ascension au ciel de R abbi Neh. ounya ben ha- Qana en H ekhalot R abbati 13-25 (§§ 198-259)
Questions rédactionnelles et pratiques rituelles Pierluigi Piovanelli Université d ’Ottawa, Ottawa École pratique des hautes études, Sciences religieuses, Paris Sciences et Lettres, Paris [email protected] Abstract A new look at the famous episode of Rabbi Neḥunya ben ha-Qana’s ascent to heaven in Hekhalot Rabbati 13-25 (§§ 198-259) helps to better highlight the narrative structure of this major work from late Antiquity (datable between the middle of the 5th and the end of the 6th century). In this text, older mystical traditions, of “priestly” and/or “synagogal” origins, have been recycled to legitimize the new authority figure of the Yored Merkava. Contrary to the prevailing view, there is no particular error in the junction between § 223 and § 224. The earliest textual state of Hekhalot Rabbati has been preserved by manuscript V (Vatican Library, Ebr. 228), of Byzantine origin, and its Italian allies, rather than Ashkenazic manuscripts or fragment GO (Bodleian Library, Heb. fol. 56) from the Cairo Genizah. Résumé Un nouvel examen du célèbre épisode de l’ascension au ciel de Rabbi Neḥounya ben ha-Qana en Hekhalot Rabbati 13-25 (§§ 198-259) permet de mieux faire ressortir la structure narrative de cet ouvrage majeur de l’Antiquité tardive (datable entre le milieu du v e et la fin du vi e siècle), dans lequel des traditions mystiques plus anciennes, d’origine « sacerdotale » et/ou « synagogale », ont été réutilisées afin de légitimer la figure d’autorité nouvelle du yored Merkava. Contrairement à l’opinion commune, il n’y a pas d’erreur particulière à la jonction entre le § 223 et le § 224, et l’état textuel le plus ancien des Hekhalot Rabbati a été préservé par le manuscrit V (bibliothèque Vaticane, Ebr. 228), d’origine byzantine, et ses alliés italiens, plutôt que par les manuscrits d’origine ashkénaze ou le fragment GO (bibliothèque Bodléienne, Heb. fol. 56) de la Gueniza du Caire. La « sacerdotalisation » dans les premiers écrits mystiques juifs et chrétiens. Actes du colloque international tenu à l’Université de Lausanne du 26 au 28 octobre 2015, sous la direction de David Hamidović, Simon C. Mimouni et Louis Painchaud, Turnhout : Brepols, 2021 (Judaïsme ancien et origines du christianisme, 22), p. 57-70 DOI 10.1484/M.JAOC-EB.5.122766 © F H G
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I. L’ascension au ciel de Rabbi Neḥounya ben ha-Qana La partie finale des Hekhalot Rabbati, le « Grand (traité des) palais » 1, consiste en un récit d’ascension au ciel, apparemment en esprit, effectuée par Rabbi Neḥounya ben ha-Qana, le maître de Rabbi Išmaʾel ben Eliša, dans l’enceinte même du Temple de Jérusalem et en présence de ses disciples, de ses collègues et de tous les membres des deux sanhédrins réunis (chapitres 13-25 = §§ 198-259) 2 .
1. Introduction narrative (§§ 198-203) Il s’agit d’un long récit rapporté par Rabbi Išmaʾel ben Eliša relatant l’initiative prise par son maître, Rabbi Neḥounya ben ha-Qana, à la suite d’une crise survenue lorsque « Rome, la maudite », était sur le point de persécuter les élites d’Israël 3, de révéler la vraie nature du yored Merkava (§ 198) : « À quoi ressemble la nature de ceux qui descendent vers la Merkava ? À un homme qui, ayant une échelle à l’intérieur de sa maison, est libre de monter et de descendre sans qu’aucune créature l’en empêche ». Si 1. Pour les références bibliographiques et les questions introductives d’usage, voir P. P iovanelli, « “S’il n’y a pas de patriarche, il ne doit pas se lever, même devant le sanhédrin.” L’apothéose du yored Merkava au v e siècle de notre ère », dans S. C. M imouni – L. Painchaud (éd.), La question de la « sacerdotalisation » dans le judaïsme synagogal, le christianisme et le rabbinisme, Turnhout, 2018, p. 143166, ainsi que P. P iovanelli, « ‘A Door into an Alien World’: Reading the Ascension of Isaiah as a Jewish Mystical Text », dans J. N. Bremmer – T. R. K armann – T. Nicklas (éd.), The Ascension of Isaiah, Louvain, 2015, p. 119-144 ; P. P iovanelli, « Pratiques rituelles ou exégèse scripturaire ? Origines et nature de la mystique de la Merkava », dans S. C. M imouni – M. Scopello (éd.), La mystique théorétique et théurgique dans l ’antiquité gréco-romaine. Judaïsmes et christianismes, Turnhout, 2016, p. 281-302 (réimprimé dans P. P iovanelli, Apocryphités. Études sur les textes et les traditions scripturaires du judaïsme et du christianisme anciens, Turnhout, 2016, p. 247-268), deux études consacrées aux antécédents, apocalyptiques et autres, de la littérature des Hekhalot. Signalons aussi la publication récente du recueil de G. Busi, Città di luce. La mistica ebraica dei palazzi celesti, Turin, 2019 (les Hekhalot Rabbati sont traduites aux p. 55-118), et de la version anglaise de l’introduction à ce beau volume (p. vii- clxvii) : G. Busi, Heavenly Palaces in Judaism: A Historical Travel Guide, Castiglione delle Stiviere (Mantoue), 2020. 2. Dans le résumé qui suit, nous donnerons la priorité aux leçons du manuscrit Cité du Vatican, Ebr. 228 (byzantin, fin du xiv e siècle – avant ca. 1470), fol. 69 v90 v (= V), voire, le cas échéant, aux variantes des manuscrits Florence, Laurenziana Plut. 44.13 (italien, début du xiv e siècle), fol. 95v-106v (= F) ; Leyde, Or. 4730 (Scaliger 13) (italien, xvi e ou xvii e siècle), fol. 55r-66r (= L) ; Munich, Cod. Hebr. 22 (italien, milieu du xvi e siècle), fol. 149r-160 v (= M22), tirées de l’édition synoptique de P. Schäfer – H. G. Mutius – M. Schluter (éd.), Synopse zur Hekhalot-Literatur, Tubingue, 1981, p. 86-117, et de la traduction critique de J. R. Davila, Hekhalot Literature in Translation: Major Texts of Merkavah Mysticism, Leyde, 2013, p. 97-144. 3. Voir l’« Histoire des dix martyrs », aux §§ 107-121.
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un tel individu « est exempt (des péchés) d’idolâtrie, de lubricité, d’effusion de sang, de calomnie, de parjure, de profanation du Nom, d’insolence et de rancune immotivée » (§ 199), à savoir, « des huit caractéristiques que ṬWṬRKYʾL YHWH et Souria, son serviteur, rejettent », il pourra se tenir, « en haut, devant le trône de Sa gloire trois fois par jour, chaque jour, depuis le jour de la création du monde jusqu’à présent » (§ 200). La difficulté à trouver quelqu’un d’aussi intègre et pur avait donc poussé Rabbi Neḥounya à convoquer « tous les hommes les plus importants de la ḥavura et tous les hommes les plus illustres de la yešiva » afin de leur communiquer tous les mystères de l’univers, ainsi que « la voie de l’échelle qui est en haut, un bout de laquelle est sur terre et l’autre bout est sur le pied droit du trône de Gloire » (§ 201). C’est à l’invitation de Rabbi Išmaʾel que tous les membres du grand et du petit sanhédrin se réunirent « au troisième portail qui se trouve dans la maison de YHWH », où se tenait Rabbi Neḥounya, « assis sur un banc de marbre (rituellement) pur (šayiš ṭahor 4) », que Rabbi Išmaʾel avait hérité de sa mère (§ 202). Parmi les Sages présents, Rabban Šimʿon ben Gamliel (Ier), dans sa qualité de naśi du sanhédrin, accompagné de Rabbi Eliezer (ben Hyrcanos) le Grand, Rabbi Elazar ben Dama (le neveu de Rabbi Išmaʾel), Rabbi Elazar ben Šammua, Yoḥanan ben Dahavai, Ḥanania ben Ḥakhinaï, Yonathan ben Ouzziel, Rabbi ʿAqiva et Rabbi Judah ben Bava, éclairés par la lumière d’une rangée de torches qui les séparent de Rabbi Neḥounya et Rabbi Išmaʾel (§ 203).
2. Les noms des anges des six premiers palais (§§ 204-212) Commencent, ensuite, avec l’adjuration de l’ange Souria, les instructions véritables : « Quand quelqu’un essaie de descendre vers la Merkava, il fait appel à Souria, le Prince de la Présence (Śar ha-Panim), et l’adjure cent douze fois au nom de ṬWṬRWSYʾY YHWH » (§ 204), en prenant soin de bien compter sur ses doigts (§ 205). En effet, « ṬWṬRWSYʾY YHWH, Dieu d’Israël, siège sur le trône dans sept palais, une chambre à l’intérieur d’une autre chambre 5, et à l’entrée de chaque palais se tiennent 4. Il s’agit de la même expression qu’en Hekhalot Zuṭarti § 408, à propos de « l’éclat des pierres de marbre pur » à l’entrée du sixième palais (une précision absente du passage parallèle au § 259 des Hekhalot Rabbati), et en b. Ḥagiga 14b, « Lorsque vous parviendrez à des pierres de marbre pur, ne vous exclamez pas : “De l’eau, de l’eau !” ». 5. Dans le récit le plus ancien d’une vision de la Merkava au ciel, au chapitre 14 du 1er Hénoch, il n’était question que d’une « maison » à l’intérieur d’une autre « maison » (à l’image du hekhal dans l’enceinte du Temple de Jérusalem), au seul et unique ciel où réside la Divinité. Le traité Hekhalot Rabbati semble avoir hérité d’une telle structure concentrique (à l’image, encore une fois, du Temple) de type « poupée russe », le premier palais contenant le deuxième, qui contient à son tour le troisième, et ainsi de suite, le nombre des palais étant passé de deux à sept sous l’in-
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huit gardiens du seuil, quatre à la droite du linteau et quatre à la gauche du linteau » (§ 206), pour un total de quarante-huit anges, dont Rabbi Neḥounya révèle les noms (§§ 207-212).
3. La description des gardiens du septième palais (§§ 213-216) Le narrateur insiste particulièrement sur la nature impitoyable et farouche des anges, pour le moment encore anonymes, qui gardent l’entrée du septième et dernier palais : ils sont « furieux, effrayants, puissants, sévères, redoutables et déconcertants, plus hauts que des montagnes, plus anguleux que des collines » (§ 213) ; « leurs chevaux, qu’ils montent et qui se tiennent sur des mangeoires de feu remplies de charbons de genévrier ardents », avalent goulument, « en une bouchée, environ quarante seʾah (le volume d’eau normalement requis pour remplir un miqveh) de charbons », car leur bouche est « trois fois plus large que les dimensions des écuries impériales 6 » (§ 214) ! « Des rivières de feu coulent à côté de leurs mangeoires et chaque cheval boit l’équivalent de tout le débit d’eau du ruisseau Kidron, qui collecte et évacue toutes les eaux de pluie de toute (la ville de) Jérusalem » (§ 215). Rabbi Neḥounya tient, toutefois, à rassurer son auditoire que les yordé Merkava ne sont pas effrayés par la vue d’un tel spectacle « qui n’a pas d’égal dans aucun palais royal » sur terre, car ils sont sous la protection bienveillante de ṬWṬRWSYʾY YHWH, Dieu d’Israël (§ 216), auquel est adressée une brève hymne encomiastique (§§ 217-218).
fluence de la géographie céleste à sept cieux que l’on retrouve dans les textes apocalyptiques tardifs (tels le 2e Hénoch, le 3e Baruch ou l’A scension d ’Isaïe), voir dans le Sefer ha-Razim. Une telle conceptualisation pourrait expliquer la terminologie, à première vue paradoxale, de la yerida la-Merkava, car, une fois arrivé au ciel (d’une façon que le narrateur compare à la montée d’une échelle, sans plus de précisions), le visionnaire n’est pas censé continuer son voyage à la verticale, mais plutôt descendre vers la cour centrale du palais impérial de la Divinité, dans un mouvement allant de l’extérieur vers l’intérieur. Au sujet de la cosmologie tout à fait particulière des textes hékhalotiques, voir P. Schäfer , « In Heaven as It Is in Hell: The Cosmology of Seder Rabbah di-Bereshit », dans R. Boustan – A. Y. R eed (éd.), Heavenly Realms and Earthly Realities in Late Antique Religions, Cambridge, 2004, p. 233-274, sp. 271-274. 6. En adoptant la lectio difficilior « des Césars » des manuscrits V, L, F, voire « de César » de B (Budapest, Kaufmann 238 [italien, xv e siècle], fol. 169-184), M22 , plutôt que celle facilior « de Césarée » des autres témoins. À noter que cette référence aux « écuries impériales » renvoie à un contexte administratif, une fois de plus, tardo-antique. Sur l’évolution de la figure du tribun/comte des écuries impériales, voir C. M éa, La cavalerie romaine des Sévères à Théodose, Thèse de doctorat, Université de Bordeaux-Montaigne, 2014, p. 150-151, 201 et 337.
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4. Les sceaux à montrer aux gardiens des cinq premiers palais (§§ 219-223) Dans cette section, Rabbi Išmaʾel donne des instructions détaillées sur les deux sceaux, vraisemblablement tatoués sur ses mains, que le yored Merkava est supposé montrer aux anges en faction à chacune des entrées des cinq premiers palais, le premier au gardien en chef, à droite, le second à son lieutenant, à gauche, par exemple, lors du franchissement du premier seuil, il faudra montrer le sceau avec le nom de ṬWṬRWSYʾY YHWH à l’ange RHBYʾL, et celui de Souria, le Prince de la Présence, à l’ange ṬWPHYʾL (§ 219) ; au passage du deuxième palier, le sceau de ʾDRYHRWN YHWH à l’ange ṬGRYʾL, et celui avec le nom de ʾWZHYYʾ, le Prince de la Présence, à l’ange MTPYʾL (§§ 219-220), et ainsi de suite, jusqu’à ce que le yored Merkava ait été introduit à l’intérieur du cinquième palais (§§ 222223).
5. Le rappel soudain de Rabbi Neḥounya (§§ 224-228) C’est à cet endroit que se produit une rupture significative, entre la fin du § 223 et sa continuation, au § 229, dans le tissu narratif de tous les témoins « occidentaux » des Hekhalot Rabbati, avec l’insertion (non partagée par le fragment GO de la Gueniza 7, qui a préservé la séquence §§ 221-223-229, à première vue plus originale) de l’épisode fort célèbre du rappel de Rabbi Neḥounya de son ascension au ciel afin qu’il puisse s’expliquer sur le comportement apparemment étrange des redoutables gardiens du sixième palais 8, car ces derniers avaient pour habitude d’attaquer 7. Oxford, Bodleian Library, Heb. fol. 56 (xiii e ou xiv e siècle), fol. 125r, publié par P. Schäfer , « Ein neues Hekhalot Rabbati-Fragment », dans P. Schäfer , Hekhalot-Studien, Tubingue, 1988, p. 96-103, et traduit par J. R. Davila, Hekhalot Literature in Translation: Major Texts of Merkavah Mysticism, Leyde, 2013, p. 397-398. Je laisse pour le moment de côté le témoignage des autres fragments, publiés par P. Schäfer , Geniza-Fragmente zur Hekhalot-Literatur, Tubingue, 1984, p. 33-52 et 68-85, et traduits par J. R. Davila, Hekhalot Literature in Translation: Major Texts of Merkavah Mysticism, Leyde, 2013, p. 386-390 et 394-397, qui ont préservé d’autres passages des §§ 198-259 des Hekhalot Rabbati, à savoir, G2 (§§ 198-201), G4 (§§ 246-250), G5 (§§ 236-240) et G6 (§§ 213-214). 8. Voir notamment, G. Scholem, Jewish Gnosticism, Merkabah Mysticism, and Talmudic Tradition, New York, 21965, p. 10-12 ; L. H. Schiffman, « The Recall of Rabbi Neḥuniah Ben Ha-Qanah from Ecstasy in the Hekhalot Rabbati », Association for Jewish Studies Review 1 (1976), p. 269-281 ; S. Lieberman, « The Knowledge of Halakha by the Author (or Authors) of the Heikhaloth » (1980), dans I. Gruenwald, Apocalyptic and Merkavah Mysticism, Leyde, 22014, p. 297-300 ; M. Schlüter , « Die Erzählung von der Rückholung des R. Neḥunya ben Haqana aus der Merkava-Schau in Ihrem redaktionellen Rahmen », Frankfurter Judaistische Beiträge 10 (1982), p. 65-109 ; M. D. Swartz , « Mystics without Minds? Body and Soul in Merkavah Mysticism », dans H. Eifring (éd.), Meditation in Judaism, Chris-
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« (certains) des (min) yordé Merkava, et non parmi (be-) les yordé Merkava sans autorité » (§ 224), d’où la perplexité des membres de la ḥavura et leur requête que Rabbi Neḥounya revienne de sa vision de la Merkava et qu’il leur donne des éclaircissements (§ 225). Pour ce faire, Rabbi Išmaʾel et Rabbi ʿAqiva font demander à une femme qui vient d’accomplir, après la fin de ses règles, sa première purification rituelle, d’effleurer du doigt une bandelette de laine parhavaʾ (avec laquelle on examinait, d’après b. Nidda 17a, le lit des femmes après la fin de leur cycle menstruel), qu’ils vont ensuite placer sur les genoux du visionnaire (§§ 226-227). De retour parmi ses collègues, Rabbi Neḥounya explique qu’il s’agissait, en réalité, des assistants indignes du yored Merkava : « Ce sont des individus que les yordé Merkava ont choisis et qu’ils font tenir debout à leurs côtés ou assis devant eux en leur disant : “Observez attentivement, écoutez et écrivez tout ce que nous disons et tout ce que nous entendons depuis le trône de Gloire.” Mais ces individus (dont il était question) n’étaient pas dignes de cette (tâche), et c’est pour cela que les gardiens de l’entrée du sixième palais les attaquaient » (§ 228).
6. Du sixième au septième palais (§§ 229-237) Le narrateur reprend ici les instructions au sujet des gardiens du sixième palais, placés sous la direction conjointe du prince Qaṣpiʾel et du prince Dumiʾel (appelé ainsi d’après le nom de « ṬʿWS WBR MNṢYḤ WPWKYG ŠʿT [ainsi le manuscrit V, c’est-à-dire, à quelques émendations près, ΘΕΟΣ ΟΥΡΑΝΩΝ ΠΥΡ ΓΗΣ ΣΙΓΗ 9…] YHWH, Dieu d’Israël »), auxquels il faut montrer non pas deux, mais trois sceaux (§§ 229-231). Qaṣpiʾel installe confortablement le yored Merkava dans « un chariot de lumière », tandis que Dumiʾel lui apporte en cadeau l’autorisation à franchir, sans plus d’encombres, les entrées des sept palais, à condition, bien entendu, de montrer les sceaux appropriés (§§ 231-232). C’est encore Dumiʾel qui gratifie le yored Merkava d’un « ʾDSṬʾN WBNPYKZṬ ṢMNŠʿRGH (d’après V, possiblement, ΑΡΙΣΤΗΝ ΗΜΕΡΑΝ ΑΡΙΣΤΗΝ ΕΥΧΗΝ ΦΗΝΟΝ ΣΗΜΕΙΟΝ ΕΙΡΗΝΗ) YHWH, Dieu d’Israël », et le fait asseoir à sa droite « sur un banc de pierre pure » (§ 233) afin de le questionner sur ses aptitudes, car celui qui désire descendre vers la Merkava doit impérativement soit « avoir lu la Tora, les Neviʾim et les Ketouvim, et étudier les mišnayot et le midraš, les halakhot et les aggadot, ainsi que l’interprétation des lois au sujet de ce qui interdit et ce qui est permis », soit « avoir observé chacun des commandements négatifs inscrits dans la tianity, and Islam: Cultural Histories, Londres-New York, 2013, p. 33-43 et 239240, sp. 38-40 et 240. 9. Nous adoptons, ici et dans ce qui suit, les reconstitutions ingénieusement proposées par Y. L evy, « Restes de phrases et de noms grecs dans le livre “Hekhalot Rabbati” », Tarbiz 12 (1941), p. 163-167 [hébreu].
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Tora, et respecter les lois, les coutumes et les enseignements communiqués (oralement) à Moïse depuis le Sinaï » (§ 234). Si tel est le cas, Dumiʾel, assisté par « le scribe » Gavriʾel, rédige un laissez-passer et le fixe au mât (?) du chariot du yored Merkava (§ 235). À la vue de ce parchemin, les gardiens du septième palais relâchent leurs arcs et rengainent leurs épées, le temps que leur soit montré « le grand sceau et la couronne effroyable : ṬʿDS WBR MNWGYH WKʿŠPṬŠ (toujours d’après V, dérivant, peutêtre, de l’invocation ΘΕΟΣ ΟΥΡΑΝΟΣ ΓΗ Ο ΔΕΣΠΟΤΗΣ) YHWH, Dieu d’Israël », qui va permettre au yored Merkava d’être accueilli triomphalement à la cour divine et de s’asseoir à côté des keruvim, des ofanim et des saintes ḥayyot (§ 236). Et Rabbi Išmaʾel de conclure, en reprenant la comparaison déjà utilisée par son maître, « Tous les membres de la ḥavura ressemblent à ce personnage, à un homme qui, ayant une échelle à l’intérieur de sa maison, est libre de monter et de descendre sans qu’aucune créature l’en empêche » (§ 237).
7. Les noms et le comportement des gardiens du septième palais (§§ 238-249) Intervient à cet endroit une autre interruption significative du cours du récit, provoquée, cette fois-ci, par une colère de Rabban Šimʿon ben Gamliel à l’encontre de Rabbi Išmaʾel, car le président du sanhédrin est scandalisé à l’idée que Yonathan ben Ouzziel (quelqu’un d’aussi irréprochable que lui) puisse arriver au seuil du septième palais dépourvu, justement, du sceau approprié, au risque de se faire immédiatement anéantir par les gardiens en faction (§ 238). En réalité, comme Rabbi Neḥounya l’explique à son disciple, ce que le patriarche désire à tout prix est que lui soient révélés les noms de ces anges redoutables qui « sont appelés par le nom du Roi de l’univers » (i. e., YHWH) ; pour ce faire, Rabbi Neḥounya exige que tous les membres de la ḥavura et de la yešiva s’inclinent et se prosternent le visage contre terre, l’un après l’autre, pendant que les scribes transcrivent ses paroles (§§ 239-240). La liste des noms des huit anges préposés à la « descente », dressée en ordre d’importance croissante, culmine avec la mention du prince ʿAnafiʾel YHWH, « le nom duquel est cité trois fois par jour devant le trône de Gloire, depuis le jour où le monde a été créé […], parce que l’anneau du sceau du ciel et de la terre a été remis dans sa main » (§ 241), toutes les créatures angéliques, sans exception, s’inclinant et se prosternant devant lui, avec la permission de « ʾṬNR WSRB ZHG Yʾ PWMYL ŠBT ŠMYH KRṢʿ (ainsi V, une phrase d’origine et de signification obscures) YHWH, Dieu d’Israël » (§ 242). Les noms de ces huit anges sont, ensuite, répétés, en ordre légèrement différent et avec des précisions nouvelles (notamment, la mention du second nom de chacun d’entre eux, par exemple, dans le cas de ʿAnafiʾel, « ṬWPRYʾL YHWH »), à l’occasion, cette fois-ci, de la « remontée » du yored Merkava (§ 243), ce
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qui permet au narrateur d’expliquer que ʿAnafiʾel est ainsi appelé « à cause de la branche (ʿanaf ) de couronnes qui est placée sur sa tête et qui s’étend, en les recouvrant, sur toutes les chambres du palais du firmament d’Aravot, à l’instar du Yoṣer be-Rešit […], au sujet duquel est écrit : “Sa majesté couvre les cieux” (Habacuc 3,3) 10 » (§ 244). Derrière les portes du septième palais se tiennent les saintes ḥayyot, avec leurs deux cent cinquantesix visages et cinq cent douze yeux, sans compter les keruvim et les ofanim, les yeux desquels « ressemblent à des torches de lumière et à des flammes de charbons de genévrier ardents » (§ 245-247), de quoi mettre mal à l’aise et faire évanouir le yored Merkava parvenu jusque-là, si le prince ʿAnafiʾel et « tous les soixante-trois (autres) gardiens des entrées des sept palais 11 » ne lui apportaient leur soutien en le rassurant : « N’aie crainte, ô fils de la race bien-aimée, entre et vois le Roi dans sa beauté ! Tu n’es ni détruit ni brulé » (§ 248), avant d’entonner une hymne à la gloire du « Rois juste » et « fidèle » (§ 249).
8. La participation à la liturgie divine devant le trône de Gloire (§§ 250-257) Une fois parvenu devant le trône de Gloire (§ 250), le yored Merkava est invité à réciter le « chant du trône », ce « chant que le trône de Gloire adresse chaque jour […] à ZHRRYʾL YHWH, Dieu d’Israël » (§ 251, appelé « ṬWṬRWSYʾY YHWH » au § 257), le texte duquel est ici retranscrit dans son intégralité (§§ 252-257).
9. Retour sur les difficultés d’accéder au sixième palais (§§ 258-259) En guise de post-scriptum, les instructions de Rabbi Neḥounya s’achèvent sur une dernière mise en garde (apparemment une version abrégée de Hekhalot Zuṭarti §§ 407-408) sur l’impossibilité, pour ceux qui ne sont pas aptes, de descendre vers la Merkava (§ 258), tout particulièrement au moment critique du franchissement du seuil du sixième palais, lorsque quelqu’un pourrait croire qu’« un million de vagues d’eau » s’abattent sur lui, « même s’il n’y en a pas une seule goutte », et s’exclamer : « Quelle 10. La fonction démiurgique de ʿAnafiʾel a été soulignée par J. Dan, « ʿAnafiʾel, Meṭaṭron et le Yoṣer be-Rešit », Tarbiz 52 (1983), p. 447-457 [hébreu]. Toutefois, dans ce passage ʿAnafiʾel n’est pas identifié au Yoṣer be-Rešit, mais seulement comparé (ke-) au « Créateur de la Genèse », tandis qu’un peu plus loin, dans l’hymne au § 253, c’est à ZHRRYʾL YHWH, Dieu d’Israël, qu’est appliquée la citation de Habacuc 3,3. 11. C’est-à-dire, huit par chacun des six premiers palais (8 × 6 = 48), auxquels il faut ajouter la double équipe de seize anges en charge de l’entrée du septième palais, pour un total de soixante-quatre gardiens (48 + 16 = 64), duquel il faut retirer ʿAnafiʾel (64 - 1 = 63), même si le compte n’est pas tout à fait exact, car ʿAnafiʾel fait en réalité partie des deux équipes à la fois.
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est la nature de ces eaux ? », ce qui trahirait son ignorance et ses origines indignes : une bat qol l’identifierait comme un descendant de ceux qui ont adoré le veau d’or, et les anges ne le laisseraient pas repartir avant de lui avoir jeté « un million de barres de fer » (§ 259) 12 .
II. Questions ecdotiques et rédactionnelles La première impression qui se dégage de cette lecture, pour ainsi dire, en diagonale des chapitres 13-25 des Hekhalot Rabbati, pourrait être celle d’une certaine maladresse éditoriale dans la manipulation de quelques-uns des segments narratifs (les fameuses « microformes », chères à Peter Schäfer) qui en constituent l’ensemble, comme par exemple, pour ne citer que les cas les plus voyants, l’interruption du récit au sujet des gardiens du cinquième palais, à la fin du § 223, et de ceux du sixième palais, au § 229, provoquée par l’insertion de l’épisode du rappel de Rabbi Neḥounya (§§ 224228), ou les deux descriptions consécutives des gardiens du septième palais placés sous les ordres du prince ʿAnafiʾel (§§ 241-242 et 243-244). En ce qui concerne la fin abrupte du § 223 (« tout de suite, ils s’emparent de toi et t’emmènent, trois princes se tenant devant toi et trois princes derrière toi, et peut-être [ve-ʾulay]… »), Joseph Dan avait proposé d’y voir la marque d’une erreur conjonctive partagée par tous les manuscrits publiés dans la Synopse (auxquels il faut ajouter aussi leurs confrères F, J 13 et L), qui en ferait les descendants d’un seul et unique archétype commun 14 . C’était en 1987, l’année juste avant la publication du fragment GO de la Gueniza, qui a préservé la conclusion apparemment originale du § 223 (« tout de suite, ils s’emparent de toi, l’un à ta droite et l’autre à ta gauche, ils t’emmènent et t’accompagnent »), à laquelle fait immédiatement suite le début du § 229 (« en te faisant entrer et en prévenant le prince Dumiʾel, qui est le chef des gardiens de l’entrée du sixième palais, et [le prince] Qaṣ[piʾel], qui se tient avec lui, à la gauche du linteau »), ce qui semble confirmer, à la fois, la présence de l’erreur partagée par tous les 12. Les Hekhalot Rabbati s’achèvent ensuite sur une série d’hymnes de la Merkava (§§ 268-276) et un court passage au sujet des noms de Meṭaṭron (§ 277). 13. Jérusalem 381 (Scholem 4) (séfarade, xvi e ou xvii e siècle), fol. 1r-23r, publié par S. A. Wertheimer – A. J. Wertheimer (éd.), Batei Midrashot: Twenty-Five Midrashim Published for the First Time from Manuscripts Discovered in the Genizoth of Jerusalem and Egypt vol. I, Jérusalem, 21951-1954, p. 63-136. 14. Voir J. Dan, « L’entrée du sixième palais », dans J. Dan (éd.), Proceedings of the First International Conference on the History of Jewish Mysticism: Early Jewish Mysticism, Jérusalem, 1987, p. 197-220, sp. 204-205 [hébreu], dont la version anglaise, sous le titre de « The Dangers of the Mystical Ascension in Ancient Jewish Mystical Texts », est parue dans J. Dan, Jewish Mysticism, Volume 1: Late Antiquity, Northvale/New Jersey-Jérusalem, 1998, p. 261-230, sp. 287-288, ainsi que le compte rendu de P. Schäfer , Geniza-Fragmente zur Hekhalot-Literatur, Tubingue, 1984, dans Tarbiz 56 (1986-1987), p. 433-437, sp. 436 [hébreu].
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manuscrits « occidentaux » à la fin du § 223 et la nature secondaire de l’épisode du rappel de Rabbi Neḥounya (§§ 224-228). Une telle découverte pourrait avoir des conséquences significatives au niveau de la critique textuelle et de l’histoire rédactionnelle des Hekhalot Rabbati, à savoir, d’un côté la bipartition de leur tradition manuscrite (GO versus tous les autres témoins publiés à date), de l’autre un changement radical dans la nature de l’expérience ici narrativisée, car il ne s’agirait plus, à l’origine, de la retranscription d’une ascension extatique au ciel, mais des minutes d’une série d’instructions délivrées à la manière d’un cours magistral 15. En réalité, de telles conclusions sont, à mon avis, à nuancer. Tout d’abord, les variantes que le fragment GO présente par rapport aux autres témoins des Hekhalot Rabbati, tout spécialement en ce qui concerne les noms des gardiens du cinquième palais (ŠBWRYʾL et YRṢYṢYʾL dans GO, THYʾL et ʿRZYʾL dans V et, avec d’autres variantes, les autres manuscrits) et les noms inscrits sur les sceaux à leur montrer (ṢWRṬQ YYY et DHWBYRWN YYY versus ṬWRṬBY YWY et ZHPNWRYʾY Śar haPanim), sont telles qu’il devient extrêmement difficile de considérer GO comme « ein neues Hekhalot Rabbati-Fragment » tout court. Ne serait-ce pas plutôt le représentant isolé d’une source éventuelle des Hekhalot Rabbati, ou d’un texte inconnu proche des Hekhalot Rabbati, voire même d’un abrégé des Hekhalot Rabbati ? Que dire, ensuite, de la fin prétendument tronquée du § 223 ? À bien regarder de plus près, la leçon « et peut-être » n’a posé de problème qu’à ces scribes (y compris le copiste de V) qui ont choisi de commencer, à sa suite, un nouveau paragraphe, tandis que ceux qui ont lu les §§ 223-224 d’un seul tenant comme « et peut-être parce que (ve-ʾulay mipné še-) les gardiens de l’entrée du sixième palais avaient pour habitude d’attaquer (certains) des yordé Merkava, (…) ils prirent des dispositions à leur sujet (au sujet de ces gardiens trop agressifs) : ils les frappèrent, les brûlèrent et en mirent d’autres à leur place », ces scribes n’ont ressenti aucune difficulté majeure. Comment expliquer, enfin, le fait qu’un épisode apparemment secondaire comme le rappel de Rabbi Neḥounya ait préservé l’écho de pratiques communautaires archaïques telles que la présence de « secrétaires » et d’un public de « sympathisants » qui inte-
15. Dans ce sens, voir par exemple, J. R. Davila, « Prolegomena to a Critical Edition of the Hekhalot Rabbati », Journal of Jewish Studies 45 (1994), p. 208-226, sp. 220-221 ; J. R. Davila, « Ritual in the Hekhalot Literature », dans A. D. DeConick – G. Shaw – J. D. Turner (éd.), Practicing Gnosis: Ritual, Magic, Theurgy, and Liturgy in Nag Hammadi, Manichaean and Other Ancient Literature. Essays in Honor of Birger A. Pearson, Leyde, 2013, p. 449-466, sp. 456 et 465 (« une création peut-être de l’imagination des Ḥassidé Aškenaz » !) ; A. Kuyt, The « Descent » to the Chariot: Towards a Description of the Terminology, Place, Function and Nature of the Yeridah in Hekhalot Literature, Tubingue, 1995, p. 85-96 (au sujet des §§ 219-231).
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ragissent avec le mystique en transe, attestées au début du ii e siècle par l’Ascension d’Isaïe, mais non mentionnées ailleurs ? Il n’y a donc pas d’erreur particulière à la jonction des §§ 223 et 224, bien au contraire, la digression du rappel de Rabbi Neḥounya est une cheville ouvrière cruciale de cette section des Hekhalot Rabbati, qui permet de faire rebondir le récit en introduisant des détails nouveaux et du plus haut intérêt pour les praticiens de la mystique de la Merkava. Au fait, tout le récit a été habilement construit comme un crescendo d’instructions pratiques et liturgiques (la révélation des noms des anges des six premiers palais [§§ 204-212] ; la description des gardiens du septième palais [§§ 213216] ; la révélation des sceaux à montrer aux gardiens des cinq premiers palais [§§ 219-223] ; la description du passage du sixième au septième palais [§§ 229-237] ; la révélation des noms et du comportement des gardiens du septième palais [§§ 241-249] ; les modalités de la participation à la liturgie divine [§§ 250-257]) rythmées par une série d’épisodes narratifs (la convocation de la séance nocturne au Temple de Jérusalem [§§ 198203] ; le rappel de Rabbi Neḥounya [§§ 224-228] ; la colère de Rabban Šimʿon ben Gamliel [§§ 238-240]), qui tiennent, d’une certaine façon, le lecteur en haleine. Nous pourrions, certes, imaginer que les parties narratives ont été ajoutées après coup afin d’unifier des sections, à l’origine, indépendantes, portant sur les pratiques des yordé Merkava. Yaron Zini a, en effet, récemment proposé de distinguer, à l’intérieur des Hekhalot Rabbati, à l’aide de critères à la fois linguistiques et littéraires, des parties plus anciennes (la majorité des hymnes liturgiques [§§ 94-106, 152-196, 269-277] et les instructions pour l’ascension au ciel [§§ 204-223, 229-236, 241-259]), dont la langue serait de type amoraïque ou post-amoraïque palestinien, et qu’il faudrait, par conséquent, dater aux iv e-v e siècles, et des parties plus récentes (tous les passages mettant en scène Rabbi Išmaʾel et Rabbi Neḥounya, à savoir, les hymnes de la gedulla [§§ 81-86, 91-93], l’« Histoire des dix martyrs » [§§ 107-121] et tous les éléments qui forment le cadre narratif du récit actuel de l’ascension au ciel [§§ 198-203, 224-228, 237-240]), dont la langue correspondrait à l’hébreu gaonique palestinien des vi e-vii e siècles. « Il s’ensuit que la plus grande partie de la macroforme Hekhalot Rabbati a été créée en Palestine, de façon approximative, entre l’époque byzantine et le début de la période musulmane » 16, une stratigraphie textuelle et 16. Y. Zini, Le lexique et la phraséologie des Hekhalot Rabbati, Thèse de doctorat, Université hébraïque de Jérusalem, 2012 [hébreu], p. 13 du résumé en anglais (nous traduisons, soulignement dans l’original). Signalons que Zini prend, ici, délibérément le contrepied de R. S. Boustan, From Martyr to Mystic: Rabbinic Martyrology and the Making of Merkavah Mysticism, Tubingue, 2005, et R. S. Boustan, « Immolating Emperors: Spectacles of Imperial Suffering and the Making of a Jewish Minority Culture in Late Antiquity », Biblical Interpretation 17 (2009), p. 207-238, sp. 231-237, pour qui l’édition actuelle des Hekhalot Rabbati, avec
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rédactionnelle qui est tout à fait plausible et qui rend parfaitement compte de la préservation de traditions plus anciennes dans un texte dont l’édition « définitive » (telle qu’attestée dans le manuscrit V, le seul en provenance de l’aire culturelle byzantine, et ses alliés F, L et M22 , d’origine italienne, porteurs d’un texte vraisemblablement antérieur à la recension médiévale des Ḥassidé Aškenaz 17) ne devait être réalisée qu’après l’abolition officielle, en 429, de la fonction patriarcale 18, fort probablement dans la période qui va de la seconde moitié du v e au milieu du vi e siècle, en tout cas, avant les bouleversements provoqués par la prise de Jérusalem par les Perses, en 614. Il n’empêche que, si nous avions la chance de pouvoir comparer la version finale à ses sources originales (ce qui pourrait être, en théorie, le cas des §§ 221-223+229-230 des Hekhalot Rabbati vis-à-vis des quinze lignes de texte copiées dans GO), nous serions probablement surpris par le haut degré de réélaboration éditoriale de la première par rapport aux secondes. Ce qui nous amène à notre dernier point.
III. Pratiques rituelles et rapports avec le mouvement rabbinique Les questions étroitement liées de la nature exacte des pratiques décrites dans la littérature hékhalotique, dans les Hekhalot Rabbati et ailleurs, du milieu social des yordé Merkava et de leurs rapports avec les grands mouvements historiques du judaïsme, depuis l’époque du Second Temple jusqu’à l’Antiquité tardive et au-delà, sont encore et toujours vivement débattues dans la recherche actuelle. En ce qui concerne les pratiques rituelles, le seul et unique centre d’intérêt des §§ 198-259 des Hekhalot Rabbati, pour ne pas dire de l’ouvrage dans son ensemble, est constitué par l’expérience de l’ascension au ciel et du retour du visionnaire sur terre ou, plus exactement, de sa descente vers la Merkava et de sa remontée, sain et sauf, des profondeurs des palais de la Divinité au ciel. Les composantes de ce rituel sont aussi réduites au minimum : le cadre narratif nous apprend que l’environnement dans lequel l’expérience se déroule, doit être d’une pureté absolue (son cadre archétypique étant l’un des portails du Temple !), et que la présence de scribes et de spectateurs est, sous certaines conditions, admise, la mise en forme de l’« Histoire des dix martyrs » (§§ 107-113+117-121) et de l’« Ascension de Rabbi Neḥounya » (§§ 198-259), aurait été réalisée dans la Babylonie du viii e ou du ix e siècle. 17. Une appréciation similaire pour les mêmes manuscrits a été récemment exprimée par P. Schäfer , « The Hekhalot Genizah », dans R. S. Boustan – M. Himmelfarb – P. S chäfer (éd.), Hekhalot Literature in Context: Between Byzantium and Babylonia, Tubingue, 2013, p. 179-211, sp. 186-188. 18. Pour ce terminus post quem, voir P. P iovanelli, « “S’il n’y a pas de patriarche, il ne doit pas se lever, même devant le sanhédrin.” L’apothéose du yored Merkava au v e siècle de notre ère », dans S. C. M imouni – L. Painchaud (éd.), La question de la « sacerdotalisation » dans le judaïsme synagogal, le christianisme et le rabbinisme, Turnhout, 2018, p. 143-166.
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voire même requise ; quant aux instructions, elles recommandent de prononcer des noms divins et angéliques en comptant sur les doigts, de réciter des hymnes et, surtout, de montrer les sceaux appropriés aux chefs des gardiens de chaque palais, sans faire mention d’aucune discipline ascétique particulière. James Davila est récemment revenu, au terme d’un survol des indicateurs disséminés dans les textes des Hekhalot, sur la question de la nature exacte, relevant de l’expérience vécue ou simplement imaginée, des pratiques rituelles décrites dans cette littérature. À son avis, « le spectre possible de ces expériences est très large et devrait être envisagé comme un continuum : au niveau du pôle le plus faible, elles pourraient comporter l’exercice de l’imagination active afin de visualiser des thèmes et des images absorbés par la méditation sur les Écritures, tandis qu’au niveau du pôle le plus fort, elles pourraient inclure des états de transe et des états de conscience profondément altérés » 19, des conclusions tout à fait sensées, qui s’appliquent aussi bien aux Hekhalot Rabbati, en général, qu’aux §§ 198-259, en particulier. Mais quelle pourrait être la place de ce type de pratiques rituelles dans le continuum, justement, du judaïsme syro-palestinien de l’Antiquité tardive, entre le pôle, en simplifiant, du judaïsme synagogal et celui du judaïsme rabbinique 20 ? Telle est notre dernière question. À la lecture du récit de l’ascension au ciel de Rabbi Neḥounya (du moins, dans son état textuel actuel), il est difficile d’échapper à l’impression que le narrateur des Hekhalot Rabbati a fait de son mieux pour présenter comme étant parfaitement rabbiniques des traditions et des pratiques qui, fort probablement, à l’origine, ne l’étaient pas tout à fait 21, à savoir, 19. J. R. Davila, « Ritual in the Hekhalot Literature », dans A. D. DeConick – G. Shaw – J. D. Turner (éd.), Practicing Gnosis: Ritual, Magic, Theurgy, and Liturgy in Nag Hammadi, Manichaean and Other Ancient Literature. Essays in Honor of Birger A. Pearson, Leyde, 2013, p. 449-466, sp. 465. 20. Sur la notion de « continuum » entre des formes de judaïsme, à première vue, différentes, proposée à l’origine par J. Neusner , « Jewish Use of Pagan Symbols after 70 c .e . », The Journal of Religion 43 (1963), p. 285-294, afin de montrer la compatibilité et la complémentarité entre l’approche mystique hellénistique d’Erwin R. Goodenough (1893-1965) et l’approche mystique rabbinique de Gershom Scholem (1897-1982), voir les remarques de J. Costa, « Qu’est-ce que le “judaïsme synagogal” ? », Judaïsme ancien – Ancient Judaism 3 (2015), p. 63-218, sp. 199-202. Au sujet du judaïsme synagogal, d’inspiration davantage sacerdotale et mystique, voir la mise au point de S. C. M imouni, « Le “judaïsme sacerdotal et synagogal” en Palestine et en Diaspora entre le ii e et le vi e siècle : propositions pour un nouveau concept », Comptes rendus des séances de l ’Académie des Inscriptions et Belles-Lettres 159 (2015), p. 113-147. 21. Sur la nature et l’étendue de ce phénomène, voir maintenant R. Boustan, « Rabbinization and the Making of Early Jewish Mysticism », Jewish Quarterly Review 101 (2011), p. 482-501, et J. Costa, « Réflexions sur le judaïsme non-rabbinique, la rabbinisation et le judaïsme synagogal », Judaïsme ancien – Ancient Judaism 7 (2019), p. 187-241, sp. 215-236.
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non seulement les traces résiduelles de la croyance en l’existence de « deux puissances dans le ciel » 22 , mais tout spécialement l’idée même que l’on puisse établir un contact direct avec la Divinité aussi simplement qu’en grimpant à une échelle tendue entre la terre et le ciel. Le yored Merkava doit, d’un côté, faire preuve non seulement d’une pureté rituelle sans faille (quasiment sacerdotale !), mais aussi de qualités morales et de connaissances théologiques tout à fait exceptionnelles et, comme le remarquait Gershom Scholem, parfaitement conformes aux standards de la halakha rabbinique 23. Il est appelé, de l’autre, à participer à la liturgie angélique et, comme Rabbi Išmaʾel le proclame avec fierté dans les hymnes de la gedulla (§§ 81-86+91-93), à prendre connaissance de tous les jugements prononcés devant la cour céleste (unio iuridica atque liturgica !), ce qui en fait, ici-bas, un personnage tout à fait remarquable 24 , l’autorité duquel repose moins sur son érudition que sur une dose considérable de charisme personnel. Nous pourrions peut-être comparer cette tentative de légitimer une figure d’autorité nouvelle en réutilisant des traditions mystiques plus anciennes, d’origine « sacerdotale » et/ou « synagogale », à un phénomène de nature possiblement similaire, à savoir, le recyclage, en milieu monastique, des traditions apocryphes et mystiques des premiers siècles, d’origine « judéo-chrétienne » et/ou « gnostique » 25, afin de faire reconnaître, entre autres, le nouveau rôle charismatique que les holy men & women étaient idéalement appelés à jouer dans la société de l’Antiquité tardive.
22. Voir ci-dessus, n. 10. Rappelons que J. M agness , « Heaven on Earth : Helios and the Zodiac Cycle in Ancient Palestinian Synagogues », Dumbarton Oaks Papers 59 (2005), p. 1-52, a proposé d’interpréter l’apparition, dans les mosaïques de six synagogues palestiniennes tardo-antiques (datables entre la fin du iv e et la première moitié du vi e siècle), des représentations du Soleil sur son char entouré des signes du zodiaque comme le résultat iconographique de l’influence qu’auraient commencé à exercer, sur le culte synagogal, les spéculations et les pratiques de la mystique de la Merkava de type hékhalotique. 23. G. Scholem, Jewish Gnosticism, Merkabah Mysticism, and Talmudic Tradition, New York, 21965, p. 12, renvoyant, en note, aux compétences requises au § 234. 24. Sans lui conférer, pour autant, des prérogatives messianiques, de telles perspectives étant manifestement absentes des Hekhalot Rabbati. 25. Voir, en général, P. P iovanelli, « Le recyclage des textes apocryphes à l’heure de la petite “mondialisation” de l’Antiquité tardive (ca. 325-451). Quelques perspectives littéraires et historiques », dans R. Gounelle – A. Frey (éd.), Poussières de christianisme et de judaïsme antiques. Études réunies en l ’honneur de Jean-Daniel Kaestli et Éric Junod, Lausanne, 2007, p. 277-295, (dont la version intégrale figure dans P. P iovanelli, Apocryphités. Études sur les textes et les traditions scripturaires du judaïsme et du christianisme anciens, Turnhout, 2016, p. 63-85).
L es O tiyyot de - R abbi A kiva version A , la littérature des H ekhalot et la
« sacerdotalisation » Apolline Thromas Université de Lausanne Abstract
The corpus of the Otiyyot de-Rabbi Akiva is a precious testimony to the Jewish mystical literature of the first millennium. However, it remains relatively unknown. Although having much in common with rabbinical literature, version A of the Otiyyot de-Rabbi Akiva (OdRA.A) is often transmitted with Hekhalot literature, “magical” writings or kabbalistic texts. The objectives of the present paper are twofold: to understand the links between OdRA.A and Hekhalot literature; and to discern this version’s priestly preoccupations that may lead to a better understanding of its redactional milieus. Therefore, I first offer a study of the specific motifs pertaining to the Hekhalot literature as they are found in the OdRA.A, and in particular its relationship to the Merkava. Then, potential clues for the promotion of priestly ideology are sought through the occurrences of priests, prayers and temple. The use of typical motifs found in the Hekhalot literature and in the OdRA.A requires us to consider that they are the fruit of a literary revival rather than a desire to convey the specific concerns of the Hekhalot literature. It therefore seems difficult to affirm that they share the same redactional milieus with the Hekhalot literature. Moreover, while the importance of prayer and heavenly liturgy is emphasized in the OdRA.A, we cannot discern the explicitpromotion of a priestly group. Résumé Le corpus des Otiyyot de-Rabbi Akiva, riche témoin de la littérature juive mystique du premier millénaire, est encore méconnu. Bien que partageant beaucoup de points communs avec la littérature rabbinique, la version A des Otiyyot de-Rabbi akiva (OdRA.A) est majoritairement transmise avec des écrits de la littérature des Hekhalot, des écrits « magiques » ou des textes kabbalistiques. Le présent article a deux objectifs : comprendre les liens qu’entretiennent les OdRA.A et la littérature des Hekhalot ; et tenter de déceler dans les OdRA.A des préoccupations sacerdotales pouvant renseigner sur ses milieux de production. Dans un premier temps, les motifs propres à la littérature des Hekhalot tels qu’ils se retrouvent dans les OdRA.A sont étudiés, notamment le traitement de la Merkava. Dans un second temps, il est question des potentiels indices d’une promotion de l’idéologie sacerdotale grâce à l’étude des occurrences relatives aux prêtres, à la prière et au temple. La « sacerdotalisation » dans les premiers écrits mystiques juifs et chrétiens. Actes du colloque international tenu à l’Université de Lausanne du 26 au 28 octobre 2015, sous la direction de David Hamidović, Simon C. Mimouni et Louis Painchaud, Turnhout : Brepols, 2021 (Judaïsme ancien et origines du christianisme, 22), p. 71-94 DOI 10.1484/M.JAOC-EB.5.122767 © F H G
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S’il est vraisemblable que les OdRA.A reprennent des motifs typiques de la littérature des Hekhalot, il semble pertinent de considérer qu’ils sont le fruit d’une reprise littéraire plutôt que d’une volonté de véhiculer les préoccupations propres à cette littérature. Il apparaît donc difficile d’affirmer qu’ils partagent les mêmes milieux rédacteurs. De plus, bien que les OdRA.A insistent sur l’importance de la prière et de la liturgie céleste, il n’est pas possible d’y discerner la promotion explicite d’un groupe sacerdotal.
Les Otiyyot de-Rabbi Akiva 1 – parfois nommés Alphabet Midrash deRabbi Akiva – se présentent sous la forme d’un corpus de trois textes distingués par leur dimension : une version longue (A), une médiane (B) et une courte (C) 2 . Ces textes, tels qu’ils nous sont connus aujourd’hui, partagent deux caractéristiques majeures : l’attribution à R. Akiva et leur intérêt pour les lettres de l’alphabet hébraïque 3, qu’elles soient l’objet d’interprétations ou outils de nouvelles considérations de type éthique, anthropologique ou mystique. La version A a d’emblée été classée dans la catégorie de la littérature mystique 4 , alors que la version B apparaît comme plus haggadique. La littérature secondaire concernant ce corpus est extrêmement rare. Lorsque ce corpus est parfois mentionné dans la littérature scientifique, il sert généralement à étayer certaines hypothèses concernant des motifs particuliers d’autres écrits. À ce jour, seules deux chercheuses ont consacré des travaux entièrement dédiés à ce corpus : S. Dönitz, pour son master sous la direction de P. Schäfer, et E. Ketterer pour sa thèse de doctorat à l’Université hébraïque de Jérusalem. Le travail de la première n’a donné lieu qu’à un article de synthèse 5 ; la thèse de la seconde n’a pas fait l’objet de publication à ce jour, et seul un exemplaire 6 en hébreu
1. Ce corpus de texte fait l’objet de mon travail de doctorat à l’Université de Lausanne, sous la direction du professeur D. Hamidović. 2. La question de savoir si la version C participe ou non initialement de ce corpus est encore en suspens. Il apparaît néanmoins qu’elle n’est compilée qu’assez tardivement avec les versions A et B. Cette version très courte propose une explication sur les zayyin qui ornent les lettres de l’alphabet hébraïque et ne présente pas d’intérêt pour le sujet qui nous occupe ici. 3. אותיות, Otiyyot, « lettres de l’alphabet ». 4. H. Grätz , « Die mystische Literatur in der gaonäischen Epoche », Monatsschrift für Geschichte und Wissenschaft des Judentums 2 (1859), p. 67-78 ; L. Zunz , Die ottesdienstlichen Vorträge der Juden, historisch entwickelt : ein Beytrag zur Alterthumskunde und biblischen Kritik zur Literatur – und Religionsgeschichte, Frankfurt am Main, 21892, p. 165-179. 5. S. Dönitz , « Das Alphabet des Rabbi Aqiva und sein literarisches Umfeld », dans K. H errmann – M. Schlüter – G. Veltri (éd.), Jewish Studies Between the Disciplines – Judaistik zwischen den Disziplinen. Papers in Honor of Peter Schäfer on the Occasion of his 60th Birthday, Leyde-Boston, 2003, p. 149-179. 6. E. K etterer , Alphabet of Rabbi Aqiba (Version A-B) : The Nature of this Midrash, its Trend, its Ideas and its Relations with different Streams in Judaism and
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moderne est disponible à la consultation à la bibliothèque de l’Université de Jérusalem. Les auteurs qui évoquent la littérature mystique juive du premier millénaire, tendent à se tourner vers la littérature des Hekhalot. Cette dernière est considérée comme le premier exemple d’une collection (quasi-)systématique de traditions mystiques et magiques juives. P. Schäfer, responsable de l’édition synoptique de la littérature des Hekhalot faisant encore autorité, rejette d’emblée l’appartenance des Otiyyot à cette littérature et l’écarte de son édition 7, tout en admettant que le corpus des Hekhalot ne doit pas être considéré comme définitivement clos 8. Il convient donc d’être prudent lorsqu’on tente de circonscrire les critères d’appartenance à cette littérature, les Otiyyot partageant de nombreux motifs avec la littérature des Hekhalot. Comment les Otiyyot de-Rabbi Akiva version A se positionnent-ils par rapport à la littérature des Hekhalot ? S’il est possible d’y trouver des indices sur les milieux producteurs, témoignent-ils de préoccupations sacerdotales ? Afin de répondre à cette double problématique, il convient tout d’abord de présenter rapidement le corpus des Otiyyot, l’histoire de sa transmission matérielle et d’expliciter la pertinence scientifique de la version A pour la présente étude. Dans un second temps et afin de tenter de comprendre comment ce texte se positionne vis-à-vis de le la littérature des Hekhalot, il est nécessaire d’observer la présence de motifs typiques de cette littérature dans ladite version, notamment du motif de la Merkava, un des sujets favoris des milieux responsables de la littérature des Hekhalot. Enfin, il convient d’observer les indices présents dans les Otiyyot pouvant suggérer un milieu de production proche de celui des milieux sacerdotaux : le(s) temple(s), les prêtres et la liturgie.
Christianity, Thèse de Doctorat [en hébreu], Université Hébraïque de Jérusalem, 2005. 7. P. Schäfer – H. G. von Mutius – M. Schlüter (éd.), Synopse zur HekhalotLiteratur, Tubingue, 1981, p. ix . 8. L’édition de la synopse des Hekhalot est incontestablement un outil majeur pour les chercheurs qui travaillent sur ces sources. Néanmoins, cet ouvrage peut être perçu comme induisant un biais. En effet, de par sa forme matérielle « rigide », il peut suggérer – en dépit des mises en garde de P. Schäfer lui-même – que les Hekhalot constituent un corpus clos, une littérature unifiée, fruit d’une tradition continue de pratiques mystiques. Sur l’histoire des critiques concernant la synopse de Schäfer, voir R. S. Boustan, « The Study of Heikhalot Literature: Between Mystical Experience and Textual Artifact », Currents in Biblical Research 6 (2007), p. 147-150. Sur les mises en garde de P. Schäfer , voir The Hidden and Manifest God: Some Major Themes in Early Jewish Mysticism, Albany/New York, 1992, p. 152.
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I. Les Otiyyot de-Rabbi Akiva, versions A 9 et B 10 La littérature juive du premier millénaire se caractérise par sa fluidité. Les frontières entre les activités des auteurs, rédacteurs, compilateurs, éditeurs ou copistes sont extrêmement ténues. Dans ces circonstances, il semble quelque peu illusoire de tenter de circonscrire un Urtext d’un écrit de cette époque. Ce point est illustré par la forme même que prend l’édition de la synopse de P. Schäfer, aucun manuscrit ne prédominant sur un autre. Cette littérature juive ne se fixe qu’avec l’imprimerie. C’est le cas particulièrement pour la littérature rabbinique dite « classique » 11. Il semble dès lors intéressant lorsqu’on travaille sur un corpus comme les Otiyyot, de prendre en considération aussi bien les imprimés que les manuscrits, ces derniers ne témoignant pas d’une lecture faisant obligatoirement autorité.
1. Histoire de la transmission textuelle Comme beaucoup de petits midrashim, les Otiyyot ont fait l’objet de recensions par A. Jellinek 12 , S. Wertheimer 13 et J. Eisenstein 14 . Ces derniers n’ayant pas utilisé les mêmes témoins textuels, leur étude est déjà intéressante. Une quantité importante de manuscrits proposant une version des Otiyyot est disponible, une grande partie contenant également les macroformes des Hekhalot dont P. Schäfer s’est servi pour l’édition de sa synopse 15. Certains témoins n’offrent qu’une seule recension des Otiyyot, mais bien souvent, les versions A et B sont copiées ensemble. Le plus 9. Ci-après : OdRA.A. 10. Ci-après : OdRA.B. 11. À ce sujet, je me permets de renvoyer à mon article qui montre en quoi les éditions digitales se font le reflet de l’éclatement de cette littérature, telle qu’elle devait se présenter avant l’imprimerie : A. Thromas , « Digital Resources of the Rabbinic Literature: Radical Change with a Click of the Mouse », dans C. Clivaz – D. H amidović – P. Dilley (éd.), Ancient Worlds in Digital Culture, Leyde-Boston, 2016, p. 232-247. 12. A. Jellinek , « Alfabet-Midrasch des R. Akiba. Erste Rencension. Hebraïscher Text », dans Bet ha-Midrasch. Dritter Theil vol. III, Leipzig, 1855, p. 12-49 ; A. Jellinek , « Alfabet-Midrasch des R. Akiba : Zweite Recension. Hebräischer Text », dans Bet ha-Midrasch. Dritter Theil vol. III, Leipzig, 1855, p. 50-64. J’attire l’attention sur le fait qu’A. Jellinek utilise une dénomination différente de la mienne. En effet, sa version A correspond à celle que j’appelle B et vice versa. 13. S. A. W ertheimer (éd.), בתי מדרשות / Batei Midrashot vol. II, Jerusalem, 2 1954. 14. J. D. Eisenstein, Ozar Midrashim: A Library of Two Hundred Minor Midrashim vol. I : ל-א, New York, 1915. 15. Par exemple : ms. Munich Cod. Heb. 22, xv e siècle ashkénaze ; ms. Oxford Heb. fol. 62 vers 1627, ashkénaze ; ms. Vatican ebr. 228, entre 1400 et 1470, byzantin, etc.
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ancien manuscrit complet conservé date du xiii e s 16. et comporte déjà les versions A et B des Otiyyot 17. D’autres manuscrits sont également intéressants, notamment celui utilisé par S. Wertheimer pour établir sa recension : le ms. Moussaief 130, de la fin du xv e s., originaire d’Ouzbékistan, qui comprend les deux versions (A et B) des Otiyyot 18. Ces textes (tant la version A que la version B) sont bien souvent transmis avec des écrits des Hekhalot, des textes magiques ou encore avec des écrits de la Kabbale 19. Les documents retrouvés dans la genizah du Caire semblent avoir également plusieurs fragments des Otiyyot 20. Le nombre relativement conséquent de manuscrits à notre disposition, permet d’observer la grande popularité des Otiyyot. La multitude d’imprimés très rapidement diffusés, tant en Occident qu’en Orient, confirme cette notoriété. Les Otiyyot font partie des premiers « petits » midrashim imprimés sur les presses de Constantinople, d’où proviennent les editiones principes des « grands » midrashim 21, au début du xvi e s ; ainsi que plus tard, sur les presses vénitiennes. Les impressions de Constantinople 16. Ms. Parma 3122, cat. de Rossi 1240. 17. Voir également ms byzantin Parma 2785, Cat. De Rossi 327, daté de 1289 mais ne contenant que OdRA.B. 18. Ms. Moussaief 130. C’est le colophon de ce manuscrit qui nous indique sa provenance et sa datation. OdRA.A fol. 1a-44a ; OdRA.B fol. 123a-126a. 19. Voir par exemple le ms. Comites Latente 145, d’origine ottomane et daté du xv e siècle (Genève) ; ou encore le ms. OX Opp 742, xiii e-xiv e siècle (Oxford). 20. T-S C2.3 (Cambridge) ; T-S K1.36 (Cambridge) ; T-S C2.160 (Cambridge) ; EVR II A 471(St. Pétersbourg) ; Ox.heb. fol. 56 (Oxford), etc. Le dépouillement par mes soins des fragments de la genizah du Caire concernant les Otiyyots est toujours en cours. La difficulté d’identification des fragments rend la tâche difficile. Dans l’état actuel de mes investigations, il semble néanmoins que les fragments de la version B prédominent et que les leçons disponibles ne présentent pas de variantes majeures par rapport aux manuscrits et imprimés postérieurs. Pour des travaux sur la genizah du Caire, voir par exemple S. C. R eif, « The Cairo Genizah », dans J. Barton (éd.), The Biblical World vol. I, Londres, 2002, p. 287-304 ; S. C. R eif, « A Fresh Set of Genizah Texts », SBL Forum 4 (2006), www.sbl-site.org/publications/article.aspx?ArticleId=582> (12.02.2018) ; G. Bohak , « Observations on the Transmission of Hekhalot Literature », dans R. S. Boustan – M. Himmelfarb – P. Schäfer (éd.), Hekhalot Literature in Context: Between Byzantium and Babylonia, Tubingue, 2013, p. 213-229 ; P. Schäfer , « The Hekhalot Genizah », dans R. S. Boustan – M. Himmelfarb – P. Schäfer (éd.), Hekhalot Literature in Context: Between Byzantium and Babylonia, Tubingue, 2013, p. 179-211. 21. Bereshit Rabbah (1512) ; Bamidbar Rabbah (1512) ; Vayikra Rabbah (1512) ; Devarim Rabbah (1512) ; Shemot Rabbah (1512) ; Tanḥuma (1520-1522) ; Mekhilta de-Rabbi Ishmael (1515) ; Sifra (1523) ; Pirke de Rabbi Eliezer (1514) ; Alphabet de Ben Sira (1519), etc. Pour l’histoire de l’impression des écrits de la littérature rabbinique, voir les travaux de M. J. H eller , Printing the Talmud: A History of the Earliest Printed Editions of the Talmud, Brooklyn/New York, 1992 ; M. J. H eller , « Earliest Printings of the Talmud », dans M. S. Lieberman – G. M. Goldstein (éd.), Printing the Talmud: from Bomberg to Schottenstein, New York, 2005, p. 61-79.
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(1516), Venise (1546) et Cracovie (1579) ont servi à A. Jellinek pour établir ses recensions 22 . Ces imprimés connaissent une très large diffusion. En témoigne le nombre des exemplaires encore conservés aujourd’hui 23.
2. OdRA.B Plus courts que la version A, les OdRA.B proposent des interprétations éthiques et eschatologiques sur les lettres de l’alphabet, principalement basées sur leur forme, en accord avec b. Shab 104a. Ce texte a donc été longtemps classé dans le genre « didactique », suivant logiquement l’interprétation que l’on se faisait de b. Shab 104a, comme étant la proposition d’un modèle mnémotechnique d’apprentissage de l’alphabet, destiné aux enfants 24 . Comme le mentionne S. Dönitz 25, cette théorie – concernant aussi bien b. Shab 104b que les OdRA.B – a été abandonnée depuis les travaux d’I. G. Marcus sur les rituels d’apprentissage destinés aux enfants au Moyen-Âge 26.
22. J. D. Eisenstein quant à lui utilise deux éditions relativement semblables à celles utilisées par A. Jellinek : Cracovie, 1599 et Amsterdam 1728. 23. La Bibliothèque nationale d’Israël propose plus d’une cinquantaine d’imprimés à la consultation, d’origines diverses (ashkénaze, byzantine ou séfarade). Il est en outre possible d’en trouver dans des bibliothèques privées, notamment Loubavitch. Il semble que ce texte connaisse actuellement un « retour en grâce », la Librairie du Temple de Paris ayant sous-entendu qu’une traduction française était en cours d’édition (ou déjà éditée). Je n’ai pu à ce jour confirmer ni infirmer cette information. 24. F. Dornseiff, Das Alphabet in Mystik und Magie, Leipzig-Berlin, 1925, p. 17. 25. S. Dönitz , « Das Alphabet des Rabbi Aqiva und sein literarisches Umfeld », dans K. H errmann – M. Schlüter – G. Veltri (éd.), Jewish Studies Between the Disciplines – Judaistik zwischen den Disziplinen. Papers in Honor of Peter Schäfer on the Occasion of his 60th Birthday, Leyde-Boston, 2003. 26. I. G. M arcus , Rituals of Childhood: Jewish Acculturation in Medieval Europe, New Haven/Connecticut, 1996, p. 36. I. Marcus réfute cette théorie, notamment sur le lien qui a été fait avec la fête de Shavouot par A. Jellinek – D. J. H alperin, The Faces of the Chariot: Early Jewish Responses to Ezekiel ’s Vision, Tubingue, 1988. I. G. Marcus signale notamment que la littérature rabbinique ne fait aucune mention de rituels d’apprentissages propres à Shavouot, cette connexion ne devenant compréhensible qu’à partir du Moyen-Âge (I. G. M arcus , Rituals of Childhood: Jewish Acculturation in Medieval Europe, New Haven/Connecticut, 1996, p. 42). S. Dönitz rappelle que les premières attestations que nous possédons de textes comportant des exercices sur la récitation d’alphabets dans différentes combinaisons sont latines (Quintilien et Jérôme). Voir F. Dornseiff, Das Alphabet in Mystik und Magie, Leipzig-Berlin, 1925, p. 17 ; S. Dönitz , « Das Alphabet des Rabbi Aqiva und sein literarisches Umfeld », dans K. H errmann – M. Schlüter – G. Veltri (éd.), Jewish Studies Between the Disciplines – Judaistik zwischen den Disziplinen. Papers in Honor of Peter Schäfer on the Occasion of his 60th Birthday, Leyde-Boston, 2003, p. 151-152.
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Cette version se compose de trois grands blocs textuels relativement indépendants. La première partie propose un concours entre les lettres de l’alphabet en vue d’être choisies par la divinité pour créer le monde. La seconde partie se concentre sur la forme des lettres. Enfin, la troisième partie propose trois types de combinaisons de lettres, suivant les procédés classiques de l’Atbash, l’Albam et l’Atbah. Le fait que ces trois blocs textuels se présentent de manière indépendante suggère qu’ils ont probablement été compilés à un stade postérieur à leur composition respective. Tous ont cependant en commun l’interprétation des lettres de l’alphabet hébraïque et la primauté de la Tora. Nous ne trouvons pas vraiment ici de réelle influence de la littérature des Hekhalot, à l’exception peut-être de la lettre Yod dont l’interprétation se retrouve dans Masekhet Hekhalot 27. La spéculation sur les formes et la fonction des lettres de l’alphabet hébraïque reste tout à fait conforme avec ce que l’on peut retrouver dans la littérature rabbinique.
3. OdRA.A La version A s’avère la plus pertinente pour l’étude des motifs mystiques et sacerdotaux. Ce texte présente une unité textuelle plus grande que la version B, ou tout du moins une plus grande cohérence. Plutôt que la graphie des lettres, c’est leur signification qui est ici interprétée, à l’aide de procédés divers tels que la notarique, la gématrie et la Temura 28. Les interprétations sont plus ou moins longues et une même lettre peut faire l’objet de plusieurs interprétations. Elles sont de type éthique, eschatologique, anthropologique, cosmogonique, etc. ; elles concernent la revivification des morts, le banquet céleste, la rétribution finale, etc. Ces développements sont systématiquement légitimés à l’aide d’abondantes citations bibliques comme cela est courant dans la littérature rabbinique et en particulier dans les midrashim. S’il est encore complexe de comprendre la formation de ce texte, son milieu producteur ou son origine géographique, il est possible de postuler une constitution sur un temps relativement long, avec des strates de compilations, si ce n’est de réécritures successives, comme c’est le cas pour l’essentiel de la littérature juive du premier millénaire. 27. Voir l’édition de K. H errmann, Massekhet Hekhalot: Traktat von den himmlischen Palästen. Edition, Übersetzung, und Kommentar, Tubingue, 1994 ; et l’interprétation qu’en fait S. Dönitz , « Das Alphabet des Rabbi Aqiva und sein literarisches Umfeld », dans K. H errmann – M. Schlüter – G. Veltri (éd.), Jewish Studies Between the Disciplines – Judaistik zwischen den Disziplinen. Papers in Honor of Peter Schäfer on the Occasion of his 60th Birthday, Leyde-Boston, 2003, p. 16-165. 28. Procédé qui n’est pas propre à la Kabbale puisqu’on le retrouve dans la Massora parva.
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II. La relation des OdRA.A avec la littérature des Hekhalot Les OdRA.A ont été classés dans la catégorie de la littérature mystique dès les travaux de H. Grätz, L. Zunz et G. Scholem 29. Certains se sont efforcés de les dater, à commencer par H. Grätz qui propose de voir dans la première version des OdRA.A une des sources majeures de la littérature des Hekhalot, en étant probablement l’écrit le plus ancien 30. H. Grätz date l’apparition de la littérature de la Merkava aux époques géoniques tardives, soit au ix e s. de notre ère. Cette théorie a été depuis rendue caduque, notamment par les travaux de G. Scholem 31. Il est bien plus probable que la composition de ce texte ait été contemporaine de la littérature des Hekhalot, soit entre le iii e et le ix e s 32 .. D. Sawyer qui a travaillé sur le Midrash Aleph-Beth propose de situer la naissance des Otiyyot en Palestine entre le v e et le vi e s 33. S. Dönitz quant à elle, propose le viii e s 3 4 . Comme c’est le cas pour la majorité de ce type d’écrits, il est très déli29. H. Grätz , « Die mystische Literatur in der gaonäischen Epoche », Monatsschrift für Geschichte und Wissenschaft des Judentums 2 (1859) ; L. Zunz , Die gottesdienstlichen Vorträge der Juden, historisch entwickelt: ein Beytrag zur Alterthumskunde und biblischen Kritik zur Literatur – und Religionsgeschichte, Frankfurt am Main, 1892, p. 165-179. 30. H. Grätz , « Die mystische Literatur in der gaonäischen Epoche », Monatsschrift für Geschichte und Wissenschaft des Judentums 2 (1859) ; H. Grätz, « Die mystische Literatur in der gaonäischen Epoche », Monatsschrift für Geschichte und Wissenschaft des Judentums 3 (1859), p. 103-118 ; H. Grätz , « Die mystische Literatur in der gaonäischen Epoche », Monatsschrift für Geschichte und Wissenschaft des Judentums 4 (1859), p. 140-153. L. Zunz proposait quant à lui le xi e siècle : L. Zunz , Die gottesdienstlichen Vorträge der Juden, historisch entwickel : ein Beitrag zur Altertumskunde und biblischen Kritik zur Literatur – und Religionsgeschichte, Francfortsur-le-Main, 1892, p. 178. Suivi par N. Sed La mystique cosmologique juive, ParisBerlin-New York, 1981, p. 144ss. 31. Voir notamment G. Scholem, Major Trends in Jewish Mysticism, Jerusalem, 1941. 32. Ici est proposé le spectre le plus large de datation. Il est communément admis que la littérature des Hekhalot prend graduellement forme entre 300 et 900 de notre ère. Elle n’émerge probablement comme classe distincte de textes que vers le vii e siècle. À ce sujet voir R. S. Boustan, « The Study of Heikhalot Literature: Between Mystical Experience and Textual Artifact », Currents in Biblical Research 6 (2007), p. 131 ; R. S. Boustan, « The Emergence of Pseudonymous Attribution in Heikhalot Literature : Empirical Evidence from the Jewish “Magical” Corpora », Jewish Studies Quaterly 14 (2007), p. 18-38. 33. D. Sawyer fonde son hypothèse sur l’étude de la langue de rédaction qui comporterait selon elle, les principales caractéristiques de l’hébreu mishnique, voir D. F. Sawyer , Midrash Aleph Beth, Atlanta/Géorgie, 1993. Cette méthodologie est à considérer prudemment, ne serait-ce que de par les processus de copie, compilation, réécriture successifs dont toute la littérature juive du premier millénaire fait l’objet. 34. S. Dönitz , « Das Alphabet des Rabbi Aqiva und sein literarisches Umfeld », dans K. H errmann – M. Schlüter – G. Veltri (éd.), Jewish Studies Between the
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cat de formuler une date précise de composition. La première attestation de l’existence des Otiyyot remonte à leur mention au début du x e s. dans un écrit karaïte, relevée par P. S. Alexander 35 dans un article en 1977 : le karaïte Jacob al-Qirqisani qui cite les Otiyyot dans son Kitab al-anwar wal maraqib, I 4.2 36. Si cette indication ne nous permet pas de connaître l’état du texte à cette époque, nous savons en revanche qu’un recueil attribué à R. Akiva concernant des spéculations sur l’alphabet, circulait déjà au x e s. Cette polémique karaïte est intéressante d’un autre point de vue. Qirqisani cite un passage concernant l’élévation d’Hénoch. Ce passage se réfère à une partie textuelle plus longue, consistant en une énumération des septante noms de dieu et de Métatron ainsi qu’en un bref récit de l’élévation d’Hénoch, que l’on trouve à la fin de la lettre Aleph des OdRA.A 37, notamment dans le ms. Moussaief 130. Fait notable, ce passage se retrouve également à la fin de plusieurs manuscrits de 3 Hénoch (48BCD, §§7180) 38. La question de savoir si ce sont les OdRA.A qui empruntent un passage de 3 Hénoch ou l’inverse est encore débattue. Bien que P. Schäfer ne considère pas les Otiyyot comme appartenant à la littérature des Hekhalot, c’est bien une partie des OdRA.A qu’il présente lorsqu’il édite les §§71-80 de 3 Hénoch, n’hésitant pas à extraire directement ces passages de manuscrits éditant explicitement les Otiyyot. Pour P. Schäfer, le fait que les OdRA.A empruntent à un substrat énochique ne fait aucun doute 39. P. S. Alexander quant à lui, formule l’hypothèse contraire 4 0, suivi par C. Mopsik 41. Si cette citation de Qirqisani ne nous permet pas vraiment de statuer, nous pouvons déjà affirmer qu’au début du x e siècle, les Disciplines – Judaistik zwischen den Disziplinen. Papers in Honor of Peter Schäfer on the Occasion of his 60th Birthday, Leyde-Boston, 2003. 35. P. S. A lexander , « The Historical Setting of the Hebrew Book of Enoch », Journal of Jewish Studies 28 (1977), p. 156-180. 36. L. Nemoy, Karaite Anthology: Excerpts from the Early Literature, New Haven/Connecticut, 1952, p. 31. 37. S. A. Wertheimer (éd.), Batei Midrashot vol. II, 1954, p. 351-352. 38. Voir les différentes listes de manuscrits dans : P. Schäfer – H. G. von Mutius – M. Schlüter (éd.), Synopse zur Hekhalot-Literatur, Tubingue, 1981 ; P. S. A lexander , « 3 (Hebrew Apocalypse of) Enoch (Fifth to Sixth Century A.D.) », dans J. H. Charlesworth (éd.), The Old Testament Pseudepigrapha. Vol. I: Apocalyptic Literature and Testaments, Garden City/New York, 1983, p. 223315 ; H. Odeberg (éd.), 3 Enoch or the Hebrew book of Enoch, New York, 21973 ; C. Mopsik – I. Moshé , Le livre hébreu d ’Hénoch ou Livre des Palais, Lagrasse, 1989. 39. Dans ce cas, comment expliquer que les §§ 71-73 conservent la structure en acrostiche présente dans les OdRA.A ? 40. P. S. A lexander , « 3 (Hebrew Apocalypse of) Enoch (Fifth to Sixth Century a .d.) », dans J. H. Charlesworth (éd.), The Old Testament Pseudepigrapha. Vol. I: Apocalyptic Literature and Testaments, Garden City/New York, 1983. 41. C. Mopsik – I. Moshe , Le livre hébreu d ’Hénoch ou Livre des Palais, Lagrasse, 1989. Voir également M. D. Swartz , Scholastic Magic: Ritual and Revelation in Early Jewish Mysticism, Princeton/New Jersey, 1996, p. 178-179, sn. 19-21.
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OdRA.A comportaient déjà le passage concernant l’ascension d’Hénoch 42 . Pour Eléazar de Worms (xii e-xiii e s.), les §§ 71-80 de 3 Hénoch font partie intégrante des OdRA.A 43. D’autres parallèles formels entre certaines macroformes des Hekhalot et les OdRA.A peuvent se retrouver, notamment en ce qui concerne Massekhet Hekhalot 4 4 . A. Jellinek propose de voir dans ce texte une source des Otiyyot 45, tendance qu’il faudrait sinon inverser, tout du moins nuancer 4 6. En effet, certains motifs typiques de la littérature des Hekhalot sont présents dans les OdRA.A : la souveraineté de dieu dans les cieux, dépeint comme un roi siégeant dans un environnement où le feu prédomine ; la présence d’anges qui participent à la liturgie céleste ; la Merkava ; HénochMétatron ; un intérêt pour la cosmologie et la cosmogonie, etc. Il serait néanmoins hâtif d’affirmer qu’un seul partage de motifs suffise à faire entrer les OdRA.A dans la catégorie de la littérature des Hekhalot 47. Un point de convergence essentiel avec cette littérature est l’attribution de ce texte à une de ses autorités les plus éminentes : R. Akiva. Dans la littérature des Hekhalot, il est le yored-merkava par excellence et de nombreuses macroformes le prennent comme protagoniste central ou rédacteur 48. 42. P. S. A lexander , « The Historical Setting of the Hebrew Book of Enoch », Journal of Jewish Studies 28 (1977), p. 158. 43. P. Schäfer , Übersetzung der Hekhalot-Literatur vol. I, Tubingue, 1987, p. xxxi. 44. Notamment pour les lettres Aleph, He et Yod, mais aussi OdRA.B, voir S. Dönitz , « Das Alphabet des Rabbi Aqiva und sein literarisches Umfeld », dans K. H errmann – M. Schlüter – G. Veltri (éd.), Jewish Studies Between the Disciplines – Judaistik zwischen den Disziplinen. Papers in Honor of Peter Schäfer on the Occasion of his 60th Birthday, Leyde-Boston, 2003, p. 158-159. 45. A. Jellinek , Bet ha-Midrasch vol. IV, Leipzig, 1855, p. xxxxiii. 46. Ce lien avec Massekhet Hekhalot et celui avec 3 Hénoch poussent K. Herrmann à imaginer une étroite dépendance dans la composition de ces trois écrits qui appartiendraient aux compositions les plus récentes de la littérature des Hekhalot : K. H errmann, Massekhet Hekhalot: Traktat von den himmlischen Palästen. Edition, Übersetzung, und Kommentar, Tubingue, 1994, p. 217ss. 47. La question des critères d’inclusion à cette littérature ne fait pas à ce jour consensus. Voir par exemple E. R. Wolfson, Through a Speculum that Shines: Vision and Imagination in Medieval Jewish Mysticism, Princeton/New Jersey, 1994, p. 74-124 ; R. S. Boustan, « The Study of Heikhalot Literature : Between Mystical Experience and Textual Artifact », Currents in Biblical Research 6 (2007), p. 137143. 48. Les figures les plus employées dans la littérature des Hekhalot sont R. Ishmael, R. Akiva et R. Neḥunya ben ha-Qanah. Au sujet de l’autorité de ces figures et de leur attribution pseudépigraphique, voir R. S. Boustan, « The Emergence of Pseudonymous Attribution in Heikhalot Literature: Empirical Evidence from the Jewish “Magical” Corpora », Jewish Studies Quaterly 14 (2007) p. 18-38 ; M. D. Swartz , Scholastic Magic: Ritual and Revelation in Early Jewish Mysticism, Princeton/New Jersey, 1996, p. 173-229 ; P. Schäfer , The Hidden and Manifest God: Some Major Themes in Early Jewish Mysticism, Albany/New York, 1992,
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Il est celui qui, déjà dans la Tosefta, pénètre le Pardes 49 et le seul qui en sort indemne (t. Ḥag14b, cf. Hekhalot Zutarti § 344). Grâce à cette expérience, il va être le récipiendaire dans la littérature des Hekhalot, du nom de dieu et le seul qui aura pu directement le contempler (Hekhalot Zutarti §§ 337.342.421). Mais la figure de R. Akiva ne se distingue pas seulement dans la littérature des Hekhalot. La légende qui le concerne se construit tout au long de la littérature juive du premier millénaire et particulièrement dans la littérature rabbinique. Il y est présenté comme l’enseignant et l’érudit par excellence. C’est sous son autorité que se place, dans le Bavli, l’entièreté de la littérature rabbinique (b. Sanhedrin 86a) : Des passages anonymes de la Mishna (transmettent la tradition selon) R. Meir, des passages anonymes de la Tosefta (transmis selon) R. Nehemiah, des passages anonymes du Sifra sont de R. Yehudah, des passages anonymes du Sifré (transmis selon) R. Shimon. Et tous en accord avec la conception de R. Akiva.
C’est également R. Akiva qui, dans les Avot de Rabbi Nathan arrange et organise les traditions, à l’image du laboureur qui trie et regroupe la farine, le grain, l’orge (AdRN.A 18,34a ; y. Šekalim 48c ; t. Zabim 1,5). Mais surtout, il est celui qui est capable d’expliquer et d’interpréter chaque lettre de la Tora écrite, comme en témoigne ce passage où Moïse monte aux cieux et y rencontre R. Akiva (b. Menaḥot 29b) : Au moment où Moïse monta dans les hauteurs [des cieux], il trouva le Saint, béni soit-il. Il était assis et joignait des couronnes aux lettres. [Moïse] lui dit : « Maître du monde, qui te retient [de donner la Tora comme elle est] ? ». Il lui répondit : « Un homme vivra à la fin de nombreuses générations et Akiva ben Yoseph est son nom. Il expliquera chaque sens et chaque point des lois ».
Dans les OdRA.A, R. Akiva n’est mentionné qu’à deux reprises. Si l’on place ce texte dans le contexte de la littérature des Hekhalot on s’attendrait à trouver le récit de son ascension et de ce qu’il découvre dans les cieux. Ce n’est cependant jamais le cas. R. Akiva brille par son absence dans ce corpus qui lui est pourtant attribué. La première occurrence de son nom est à la première ligne des deux versions des Otiyyot et sert à placer l’ensemble du corpus sous son autorité 50 : « אמר רבי עקיבאR. Akiva a dit » p. 157-161 ; M. S. Cohen, The Shiʻur Qomah: Liturgy and Theurgy in Pre-Kabbalistic Jewish Mysticism, Lanham/Maryland, 1983, p. 82-87. 49. Pour une réflexion sur la signification du Pardes dans la littérature rabbinique, voir M. D. Swartz , « Jewish Visionary Tradition in Rabbinic Literature », dans C. E. Fonrobert – M. S. Jaffee (éd.), The Cambridge Companion to the Talmud and Rabbinic Literature, Cambridge-New York, 2007, p. 198-221, sp. 201-203. 50. Notons que c’est l’unique mention de R. Akiva dans les OdRA.B.
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La seconde et dernière occurrence dans les OdRA.A se trouve à la lettre Ṣade, faisant clairement allusion au passage du Bavli susmentionné : À ce moment-là, Moïse voit sa constellation, celle de R. Akiva à travers le rideau ()פרגוד, qui est le lieu où il s’assied et commente les lettres de la Tora.
Au regard de ces occurrences, il ne semble pas trop audacieux de formuler l’hypothèse que R. Akiva n’est pas ici le héros mystique que nous retrouvons dans la littérature des Hekhalot. Dans cette dernière les moyens et les agents – humains – qui sont l’objet d’ascension céleste, sont des sujets centraux. Dans les OdRA.A, R. Akiva semble être le héros de la littérature rabbinique, qui commente la Tora et le sens de chacune de ses lettres 51. Les Otiyyot ayant pour structure fondamentale une interprétation des lettres de l’alphabet hébraïque, cela fait totalement sens. Peut-être faudrait-il considérer que l’attribution de ce corpus à R. Akiva a pu s’opérer dans un stade ultérieur, postérieur à la composition ou à la compilation 52 .
1. Le motif de la Merkava dans les OdRA.A Le motif de la Merkava est central dans la littérature des Hekhalot. La Merkava désigne le char-trône hérité de la vision d’Éz 1, qui constitue un pont entre le monde céleste et sa manifestation terrestre. C’est donc un motif éminemment mystique que l’on retrouve de manière quasi-systématique dans la littérature des Hehalot. Ses occurrences dans les OdRA.A se révèlent de prime abord relativement décevantes. En effet, le char divin n’apparaît qu’à peu de reprises, aux lettres Aleph, Waw et Mem. La Merkava n’est jamais un motif de contemplation et n’est jamais personnalisée. Elle joue assez classiquement le rôle de char divin, servant à véhiculer le trône de gloire. OdRA.A, lettre Aleph : Et il a fait descendre Hénoch, fils de Yared, car son nom est Métatron, et les quatre ḥayyot (qui sont) sous les roues 53 du char des chars54 , son trône ; 51. Certains chercheurs ont tenté de démontrer que l’activité interprétative peut être considérée comme performative et aboutir sinon à une vision, du moins à une expérience de type mystique. Voir par exemple E. R. Wolfson, Through a Speculum that Shines: Vision and Imagination in Medieval Jewish Mysticism, Princeton/ New Jersey, 1994, p. 74-124 ; contra P. Schäfer , The Origins of Jewish Mysticism, Prince_ton/New Jersey, 2009, p. 210-213. 52. Voir R. S. Boustan qui propose de voir l’attribution pseudonymique dans la littérature des Hekalot comme un phénomène relativement tardif, « The Emergence of Pseudonymous Attribution in Heikhalot Literature: Empirical Evidence from the Jewish “Magical” Corpora », Jewish Studies Quaterly 14 (2007), p. 18-38. 53. Ici les roues, les galgalim ne sont pas personnifiées et ne constituent pas une catégorie d’anges, à la différence de certains passages des Hekhalot (voir par
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il a placé son trône d’un côté et il a fait monter Qoré et son assemblée du Shéol et du grand abysse. Et ont été amenés devant lui tous les habitants du monde, et il les a fait tenir debout sur leurs pieds. Il a instruit son propre jugement devant les créatures en leur disant : « vous tous, avez-vous vu un autre dieu en dehors de moi dans les cieux au-dessus ou dans la terre en-dessous, ou bien dans les quatre coins du monde ? Témoignez auprès de moi et dites la vérité, selon ce qui a été dit : “Vous (êtes) mes témoins, oracle de Yhwh, et moi (je suis) dieu” 55 ». Métatron et les ḥayyot ha-qodeš 56 , et Qoré et son assemblée, et tous les habitants du monde, tous, simultanément, répondent d’une seule voix, d’une seule bouche, d’une seule parole, et disent devant lui : « De toute éternité nous n’avons pas vu de dieu comme toi, dans les cieux au-dessus, et de toute éternité nous n’avons pas vu d’autre autorité comme toi, dans la terre en-dessous ! Il n’y a pas de roi comme toi, il n’y a pas de roc excepté toi, et il n’y a pas de dieu à l’exception de toi, tu es le premier et tu es le dernier, et il n’y a pas de dieu en dehors de toi, et il n’y a jamais eu d’(autre) dieu, selon ce qui a été dit : “Il n’y a personne comme toi parmi les dieux, Adonaï, et il n’y a rien comme tes actions” 57 ».
C’est là une des rares apparitions de Hénoch dans les OdRA.A (en dehors de la section à la fin de la lettre Aleph, peut-être originaire de 3 Hénoch §§ 71-80). Métatron, Qoré, les ḥayyot et les humains sont placés sur le même plan. Ici la descente d’Hénoch/Métatron siégeant dans les cieux avec les ḥayyot et la Merkava n’a pour objectif que de promouvoir la reconnaissance du dieu unique au moment du jugement. Dans la tradition rabbinique, R. Akiva insiste sur le monothéisme et place dieu comme unique créateur et maître de l’univers 58. Autre occurrence de la Merkava, à la lettre Waw : Ce sont les (7) 59 sceaux du Saint, béni soit-il, avec lesquels sont scellés tous les noms ineffables qui sont sur le trône de gloire, selon ce qui ce qui a été
exemple Ma’asseh Merkava § 590). Dans OdRA.B, où la Merkava n’est mentionnée qu’à deux reprises, les galgalim et le trône sont personnifiés et parlent (OdRA.B, première partie). 54. מרכבות, « les merkavot », comme les merkavot qui sont dans les sept cieux de Ma’asseh Merkava § 554 ? Cf. OdRA.A, lettre Waw. 55. Is 43,12. 56. Dans les Otiyyot, les ḥayyot ha-qodeš ne sont jamais décrits en détail, voir à l’inverse Hekhalot Zutarti § 353. 57. Ps 86,8. 58. Voir par exemple Bereshit Rabba I,12. 59. Certains témoins textuels proposent de lire un זau début de cette phrase (ms. Cracovie) d’autres non (ms. Moussaief 130).
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dit : « C’est mon nom pour l’éternité et c’est mon souvenir de génération en génération 60 ».
« C’est mon nom pour l’éternité », cela indique les noms ineffables ;
« et c’est mon souvenir de génération en génération », cela indique les sceaux du nom.
Car chaque nom qui est comme la Merkava a en lui un sceau 61 et un surnom, et le Saint, béni soit-il, siège sur un trône de feu et tout autour de lui comme des colonnes de feu (sont) les noms ineffables. Chacun (est) dans les bastions du feu, et chacun (est) au milieu de l’apparence du feu.
Dans les Hekhalot Zutarti (§ 337), c’est à R. Akiva que le nom a été dévoilé lorsqu’il a pu contempler « l’œuvre de la Merkava », charge à lui par la suite de l’enseigner à ses disciples – aux initiés – qui seront à même d’utiliser la puissance théurgique liée à ce nom 62 . En effet, l’utilisation du ou des nom(s) de dieu est un motif récurrent dans la littérature des Hekhalot, notamment en lien avec des pratiques indéniablement magiques 63. Dans les OdRA.A, les noms de dieu 6 4 sont décrits comme étant « comme la Merkava » et tourbillonnants comme des flammes autour de dieu qui siège sur son trône de gloire, sur sa Merkava (notons que nous nous trouvons toujours dans le champ lexical du feu). Comment interpréter ce « comme la Merkava » ? Il est possible d’imaginer que nous nous trouvons dans une volonté de reproduction de la formulation assez typique des visions d’Éz 1, avec le vocabulaire utilisé pour évoquer une apparition surnaturelle qu’il est de fait difficile de décrire (« l’apparence » ; « comme » ; « la ressemblance », etc.). Nous pourrions aussi imaginer que ce « comme la Merkava » puisse induire une analogie avec la fonction même du char divin, c’est-à-dire créer un lien avec le monde céleste 65. En ce sens nous nous trouverions typiquement dans la suggestion des pratiques magiques susmentionnées. Le but de l’invocation des noms de dieu (et des anges) dans la littérature des Hekhalot est la maîtrise pleine de la Tora garantissant une place dans le monde qui vient 66. Ici, contrairement à ce que l’on retrouve dans la littérature des Hekhalot, l’invocation des noms n’est pas 60. Ex 3,15. 61. Un « nom » selon ms. Moussaief 130. 62. Voir par également Ma’asse Merkava. 63. Voir par exemple Merkava Rabba §§ 659-663. 64. Qui ne sont jamais énoncés, en dehors du passage à la fin de la lettre Aleph correspondant à 3H §§ 71-80. 65. Monde céleste qui est par nature incompréhensible par l’intellect humain. Voir à ce sujet P. S. A lexander , « The Dualism of Heaven and Earth in Early Jewish Literature and its Implications », dans A. L ange – E. M. M eyers – B. H. R eynolds (éd.), Light against Darkness: Dualism in Ancient Mediterranean Religion and the Contemporary World, Gottingue, 2011, p. 169-185. 66. Cf. Merkava Rabba.
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codifiée. Son enseignement n’est pas même suggéré. Elle est même totalement prohibée : OdRA.A, lettre Waw : Et avec eux [les noms] sont les nombreuses armées, celles des princes du feu, disposant de la puissance des troupes du feu, et quand un homme les utilisera, chaque firmament se remplira de feu et ils descendront pour brûler le monde avec le feu. Dès qu’ils toucheront la terre, ils verront que les extrémités des cieux sont jointes aux extrémités de la terre et les extrémités de la terre sont jointes aux extrémités des cieux, et elles sont scellées du sceau : «ʾehěyeh ʾăšer ʾehěyeh je serai ce que je serai », aussitôt leur courroux s’apaise […] Car si jamais le Saint, béni soit-il, ne ferme pas avec son sceau les quatre coins du monde, alors un homme les utilisera, immédiatement, le monde sera rempli de feu. Si seulement le Saint, béni soit-il, ferme de son sceau, alors le feu n’aura pas de pouvoir sur le monde, selon ce qui a été dit : « “N’est-ce pas ma parole comme le feu ?” Oracle de Yhwh 67 ».
Le nom, sceau ultime de dieu, préserve l’intégrité terrestre. S’il est invoqué, la terre entière sera consumée. Il est possible d’imaginer que nous nous trouvons ici en présence d’une critique explicite des idées véhiculées dans la littérature des Hekhalot ou encore directement de pratiques magiques d’invocations 68. Néanmoins, les noms de dieu, s’ils ne sont pas cités 69, sont omniprésents dans les OdRA.A. Ce n’est pas à R. Akiva qu’ils sont révélés, mais à Moïse, lors de la révélation au Sinaï (OdRA.A, lettre Waw) : Et le Nom (est) celui qui a été révélé à Moïse dans le buisson par amour, par miséricorde, par humilité, par équité, […] À Moïse ont été révélés tous les noms : autant les noms ineffables, que les noms gravés sur la couronne de majesté qui est sur sa tête et ainsi que les noms gravés sur le trône de gloire, et les noms gravés sur le sceau qui est à sa main ; autant ceux (les noms) qui se tiennent comme des colonnes de feu tout autour du char des chars, que les noms qui sont tout autour de la Šĕkînâ comme les aigles de la Merkava ; autant les noms par lesquels sont fermés les cieux et la terre, la mer et la terre sèche, les montagnes et les 67. Jr 23,29. 68. P. Schäfer mentionne un fragment de la genizah où un certain ‘Anafi’el menace de punir celui qui tente de l’invoquer. Il semblerait qu’il s’agisse de l’une des premières (seules ?) attestations critiquant ouvertement les pratiques des mystiques. Fragment T.S.K 21. 95. C, f°2b, l. 45ss. P. Schäfer , Le Dieu caché et révélé : introduction à la mystique juive ancienne, Paris, 1993, p. 70 ; P. Schäfer , GenizaFragmente zur Hekhalot-Literatur, Tubingue, 1984, p. 105. 69. Sauf à la fin de la lettre Aleph = 3 Hénoch §§ 71-80.
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vallées, les monstres marins des profondeurs et les ordres de la création, les ordres des logements (célestes), la demeure élevée et la ʿĂrāvôt et le trône de gloire, les trésors de la vie et les dépôts (trésors) des bénédictions, les dépôts de la rosée et de la pluie, les dépôts des éclairs, les dépôts des nuages, les dépôts des esprits et les dépôts des souffles des vivants et des morts, selon ce qui a été dit : « Il a fait connaître ses voies à Moïse 70 ».
Nous trouvons ici l’aboutissement de ce qui a été mentionné plus haut : la sauvegarde de l’ordre terrestre physique (la nature) et céleste est garantie par la préservation de l’utilisation des noms de dieu. Seul Moïse est digne d’en être le récipiendaire. Notons que nous retrouvons ici un motif typique de la littérature des Hekhalot, selon P. Schäfer : « La magie de la littérature des Hekhalot repose sur la conviction essentielle selon laquelle la réalité tout entière est constituée par les Noms de Dieu et des anges. […] La connaissance du Nom divin et son utilisation dans des invocations magiques est la clef de la compréhension du monde » 71. Non seulement les OdRA.A comprennent ce motif, mais ils le détournent afin de condamner les invocations des noms divins, qui, si elles sont pratiquées, seront la cause de la destruction du monde par le feu. La seule personne capable d’assumer la responsabilité d’une telle connaissance n’est plus le yored-merkava, mais Moïse, le champion de la Tora 72 . La dernière mention de la Merkava se trouve à la lettre Mem. De prime abord, on s’attendrait à ce que le milieu responsable des OdRA.A se saisisse de l’occasion pour proposer une interprétation de la lettre Mem en lien avec la Merkava, ce qui n’est pas le cas. La présente mention de la Merkava ne semble être qu’un prétexte à la glorification relativement classique dans la littérature des Hekhalot de la souveraineté de Dieu, recourant notamment au champ lexical de la royauté comportant la lettre Mem en initiale. OdRA.A, lettre Mem : Pour quelle raison le « mem » se lit-il avec deux « mem » à la fois ? Parce que les deux se tiennent dans les secrets du trône de gloire et tous sont gravés dans les bastions de flamme sur le trône de gloire, et ils sont entrelacés sur la tête des couronnes de lumière. 70. Ps 103,7. 71. P. Schäfer , Le Dieu caché et révélé : introduction à la mystique juive ancienne, Paris, 1993, p. 171. 72. La fin de la lettre Aleph qui comporte le passage que l’on retrouve en 3 Hénoch fait de Métatron le possesseur des secrets et des noms de dieu. Il les reçoit de Moïse à travers une chaîne de traditions que l’on peut retrouver aussi bien dans la littérature rabbinique que celle des Hekhalot (b. Shab. 89a, Pesiqta Rabbati 20, AdRN.A et B, Merkava Rabba § 675 ; Shi’ur Qoma § 734, etc.). Voir à ce sujet M. D. Swartz , Scholastic Magic: Ritual and Revelation in Early Jewish Mysticism, Princeton/New Jersey, 1996, p. 173-186.
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Dès que s’approche le moment de la Sainteté, le Saint, béni soit-il, ne descend pas du haut de sa hauteur 73 et réside dans la Merkava, les deux (mem) s’approchent l’un de l’autre et disent : « Quand le Saint, béni soitil, descendra du haut des hauteurs des hauteurs ? Il résidera dans la Merkava et nous verrons sa ressemblance et nous dirons un cantique devant lui, selon ce qui a été dit : “Quand viendrai-je et serai-je vu en présence de Dieu 74 ?” ». Et qu’est-ce que (signifie) « quand viendrai-je » ? Cela signifie que l’esprit saint a dit cette parole seulement au moment où les lettres qui sont dans la Merkava disent, avant que la Šĕkhînâ ne vienne et ne descende sur le trône de la Merkava : « Quand le Saint, béni soit-il, viendra et s’assiéra sur le trône de gloire, nous recevrons sa face avec joie et avec des cantiques ». Et dès que le Saint, béni soit-il, vient et descend sur la Merkava, tous les princes de la Merkava et tous les Ḥayyot qui sont sur la Merkava et toutes les lettres qui sont dans la Merkava descendront avec des cantiques pour l’accueillir. Aussi le mem et le mem qui sont dans la Merkava accueilleront la face de la Šĕkînâ à ce moment-là, avec des cantiques de pouvoir et de majesté, ils ouvriront leur bouche et diront un cantique. Et quel est le cantique qu’ils diront ? Le mem ouvrant dira : « Ton règne (( )מלוכהest) le règne de tous les mondes 75 » ; et le mem fermant dira : « Et ta domination ( )ממשלהde génération en génération ». Que fait le Saint, béni soit-il, à ce moment-là ? Il se saisit de toutes les lettres qui sont dans la Merkava, les étreint et les embrasse et les ceint de deux couronnes chacune : une couronne qui est de majesté et une couronne qui est de la gloire ; et aussi le mem ouvrant et le mem fermant, le Saint béni soit-il, s’en empare par ses mains, les étreint, les embrasse et les ceint de deux couronnes. [Pour le mem ouvrant] : une (couronne), celle du règne ()מלוכה, et une (couronne), celle de la gloire ; pour le mem fermant : une (couronne), celle de la domination ()ממשלה, et une (couronne), celle de la magnificence.
Un fait relativement intéressant mérite d’être relevé ici, concernant la Merkava et la Šĕkhînâ. Les lettres qui sont dans la Merkava parlent, personnification relativement peu surprenante. Elles jouent un rôle central dans les Otiyyot 76, et dans ce passage en particulier puisqu’elles sont nécessaires 73. Cf. OdRA.A, lettre Aleph, « les cieux supérieurs ». 74. Ps 42,3. 75. Ps 145,13. 76. Leur joute verbale se situant à la première place lors de la création du monde occupe la première partie des OdRA.B.
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à louer de la royauté de dieu. La Šĕkhînâ est abondamment mentionnée dans 3 Hénoch. Elle séjourne dans le septième Hekhal, c’est-à-dire le plus retiré des palais. Si les OdRA.A ne fournissent pas de mention explicite d’une succession de palais, il n’en demeure pas moins que la Šĕkhînâ, c’està-dire la manifestation de la présence de dieu, doit descendre avant de se poser sur le trône, qui se trouve lui-même sur la Merkava. Il est possible ici d’entrevoir une allusion aux différents palais qui constituent une des bases d’identification de la littérature des Hekhalot. Une conclusion sur l’utilisation du motif de la Merkava dans les OdRA.A, doit se fonder sur ce que cette utilisation ne dit pas plutôt que sur ce qu’elle dit. Puisque ce motif mystique est utilisé, on s’attendrait à trouver au moins un récit de sa contemplation, ou éventuellement un développement sur son apparence. Il n’en est rien. Son apparition est décrite en des termes assez classiques, alliant les motifs du dieu-roi se manifestant sur son trône, et son univers composé de feu. Alors que les OdRA.A proposent plusieurs passages où sont décrits avec un luxe de détails la doxologie angélique et les réjouissances accordées aux justes dans le monde qui vient, les apparitions de la Merkava semblent témoigner d’un manque d’imagination certain. Peut-être faut-il considérer que nous nous trouvons dans un contexte littéraire où ce motif devient un classique, servant d’introduction – ici la louange de la souveraineté de dieu ou encore la prohibition des invocations de ses noms – et non plus un but de contemplation en soi, que le yored-merkava cherche à atteindre. Il en serait de même pour l’attribution pseudonymique à R. Akiva. Les milieux responsables des OdRA.A seraient alors familiers de la littérature des Hekhalot.
III. Les motifs sacerdotaux 1. Temple céleste et temple terrestre Reprenons le passage susmentionné, où Moïse observe R. Akiva à travers le Pargod, à la lettre Ṣade. On peut lire plus avant : Et Moïse vit à travers le rideau ( )פרגודles différentes équipes de scribes, les équipes du Sanhédrin dans la salle des pierres carrées ()לשכת הגזית. Ils commentaient le livre de la Tora, les Neviim et les Ketoubim […].
La mention du Pargod est ici un peu problématique. Le sens exact et l’origine de ce mot demeurent encore incertains. Il est possible d’y voir une traduction du terme פרכתutilisé dans les Targumim pour désigner le voile qui sépare le Saint des Saints du reste du sanctuaire (Ex 27,31). Dans la littérature rabbinique, le Pargod sert à désigner le rideau qui préserve la partie des cieux réservée à la divinité. Dans ce passage, l’allusion au passage du Bavli où Moïse est enlevé dans les cieux (b. Menaḥot 29b) est manifeste. Ce serait donc le rideau des cieux qui est désigné ici, celui qui
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masque le lieu où se trouve R. Akiva, occupé à interpréter la Tora. Néanmoins, ce passage mentionne également la « salle des pierres carrées », la לשכת הגזית. Cette salle désigne le lieu de réunion du Sanhédrin dans le temple, durant la période du Second Temple. Elle perdit de fait, son activité lorsque les Romains réduisirent les prérogatives du Sanhédrin. Mais ce lieu conserve sa fonction dans le Bavli. Il y apparaît comme l’endroit par excellence où le Sanhédrin tranche lors des litiges, notamment criminels (b. Sanh 88b). Ici, l’association du Pargod et de la לשכת הגזיתpourrait suggérer la représentation d’un temple céleste 77, dont le voile formerait une frontière physique. Mais il ne s’agit que de la suggestion implicite plutôt que de l’explicite affirmation de la présence d’un temple céleste. Les cieux, lieu par excellence où devrait s’exercer la liturgie des anges, sont présentés de manière relativement nébuleuse dans les OdRA.A. À ce temple céleste suggéré, semble répondre un temple terrestre, dont la nature et la fonction sont également assez vagues. Nous lisons à la lettre Samekh : Samekh c’est la maison du sanctuaire, où se trouve la Šekhînâ en son milieu et elle (la maison du sanctuaire) a à ses côtés ( )סמוך: le roi, le Grand-Prêtre, les lévites et Israël, correspondant à leurs quatre coins (du monde).
Ici la mention du Grand-Prêtre et des lévites fait explicitement le lien avec le temple terrestre. Dans le passage précédent est décrit le tabernacle au désert, réalisé par Moïse et Israël et ceint des campements des tribus d’Israël (Ruben, Dan, Juda et Éphraïm). Ce temple terrestre est le lieu de la Šekhînâ, donc en principe le lieu de la présence de la divinité. À la lettre Aleph apparaît une autre allusion à un temple terrestre. Dieu justifie la création des hommes par la nécessité de le prier quotidiennement, sur terre : Le Saint, béni soit-il, a dit : « j’ouvrirai la langue à tous les fils de la chair et du sang afin qu’ils prient devant moi quotidiennement et me reconnaissent souverain des quatre coins du monde. Car si jamais (il n’y avait personne) pour prononcer un cantique ou une mélodie devant moi quotidiennement, (alors) je n’aurais pas créé mon monde. » Et d’où (vient) que le Saint, béni soit-il, n’a pas créé son monde sinon à cause d’un cantique ou d’une mélodie ? Selon ce qui a été dit : « Majesté et splendeur devant lui, pouvoir et magnificence (sont) dans son sanctuaire 78 », majesté et splendeur (sont) pour lui dans les cieux ; pouvoir et magnificence pour son sanctuaire sur la terre.
77. Voir Merkava Rabba § 678 où la même salle est mentionnée probablement en allusion au temple également. 78. Ps 96,6.
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Tel que ce passage se termine, il pourrait se comprendre comme étant l’affirmation de la présence d’un sanctuaire terrestre. Néanmoins, il semble que la mention du « sanctuaire sur la terre » soit présente pour créer un parallèle narratif avec la citation du Ps 96,6. En effet, les OdRA.A ne font aucune mention d’une quelconque description d’un temple terrestre physique, où des rituels sont pratiqués. Les seules mentions de l’autel et de l’holocauste les désignent de façon immatérielle accentuant encore la nécessité de la prière : OdRA.A, lettre Ḥet : Et comme si cela n’était pas assez, l’Écriture le [le brisé de cœur] considère comme si l’autel avait été construit dans son cœur, où l’on offre des holocaustes et des sacrifices sur lui, devant le Saint, béni soit-il, selon ce qui a été dit : « Les sacrifices de dieu (sont) un esprit brisé, un cœur brisé et contrit ».
Il est possible de déceler ici un rappel de la destruction du temple. Les rites ne pouvant plus s’y dérouler, c’est dorénavant dans le « cœur » de chacun qu’ils doivent être performés. Le lieu de résidence de la divinité se trouve décrit dans la littérature des Hekhalot sous la forme d’un palais. En effet, cette littérature se caractérise, dans beaucoup de macroformes, par la glorification de la divinité souveraine, roi par excellence. Cependant, à la grande différence des Hekhalot, il n’est pas fait mention dans les OdRA.A des sept palais (ni d’une succession de cieux) 79. Ce texte n’évoque que deux palais : un terrestre et un céleste. Comme l’illustre par exemple le début de la lettre Bet, utilisant le procédé courant dans cette version consistant à mélanger les lettres du mot qu’elle souhaite expliciter : « ת''כנתי י''צרתי ב''ניתיJ’ai prédisposé, j’ai façonné, j’ai construit » : deux palais ()פלטרין, un pour le haut et l’autre pour le bas.
Ce n’est pas le terme de hekhal qui est usité ici, mais un substantif relativement déconcertant : פלטרין. Ce terme qui désigne la résidence royale par excellence est principalement utilisé dans les midrashim. Il ne désigne jamais à ma connaissance la demeure divine et encore moins le temple 80. Il semble que nous nous trouvions encore une fois en présence de la glorification du dieu-roi et de sa souveraineté totale, tant céleste que terrestre.
79. Le terme de hekhal n’apparait qu’une seule fois dans les OdRA.A, lors du banquet des justes dans les cieux, mais cette occurrence est peu explicite et difficile à interpréter. 80. Voir par exemple Pirke de-Rabbi Eliezer III, Sifre Deutéronome § 353, Esther Rabba 1,2 ; Qohelet Rabba 6,8 ; Bereshit Rabba 71, etc.
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2. Les anges, les prêtres et la liturgie Si l’on recherche la trace d’une idéologie sacerdotale, il convient d’examiner les occurrences du personnel censé s’y rattacher. Dans la littérature mystique en général et des Hekhalot en particulier, ce sont principalement les anges qui pratiquent une forme de liturgie, à consonnance céleste. Dans les OdRA.A, il est fait mention des « anges du service » ()מלאכי השרת, sans qu’ils soient explicitement définis. Ils sont qualifiés de « guerriers » (lettre Aleph), résident dans les cieux, mais sont explicitement considérés comme inférieurs à Abraham, Isaac et Jacob (lettre Waw). Ils ont été créés par la divinité uniquement dans le but de la servir : aller chercher les justes au moment de la revivification des morts (lettre Ṭêṭ), servir la nourriture aux justes lors du banquet final et y jouer de la musique (lettre Kaf ), etc. Ils ne semblent pas participer de façon particulière lors de la liturgie céleste, ne révèlent pas les secrets divins ni ne sont nommés « prêtres » 81. Le substantif cohen/cohanim n’apparait qu’à quatre reprises 82 dans ce texte. OdRA.A, lettre Zayin : « Tes prêtres », indique les justes des peuples du monde, ceux qui (servent) de prêtres pour le Saint, béni soit-il, dans ce monde-là, comme d’Antonin, fils de Sévère 83 et ses compagnons.
Ce passage intervient dans un récit concernant la géhenne et l’éventualité d’une ultime chance de salut. Michel et Gabriel, les deux seuls anges qui jouent un rôle vraiment important dans les OdRA.A 84 , sont chargés de sortir les impies d’Israël et les justes des peuples du monde qui sont au milieu de la géhenne. Ces derniers ne doivent leur salut qu’à leur récitation du Qaddish. Ils sont alors élevés par les deux anges susnommés, sortis de la géhenne et guéris des blessures liées à leur séjour. Alors ils peuvent réciter l’action de grâce et participer à l’exaltation de dieu dans les cieux, avec les justes d’Israël. Celui qui est donc désigné comme prêtre dans ce texte est explicitement l’étranger, pourtant condamné, mais qui a fait preuve de rédemption et a reconnu dieu en récitant le Qaddish. Avec l’es-
81. Comme c’est le cas par exemple dans les Cantiques de l ’holocauste du Sabbat. Voir la contribution de M. R. Jost dans ce volume. 82. Les deux autres occurrences sont des mentions de péricopes bibliques. 83. אנטונינוס בן אסוירוס, fréquemment cité par Juda Ha-Nassi, (cf. par exemple : b. Ab. Zar. 10a-b). La question de savoir qui est désigné par ce nom est encore irrésolue. 84. Contrairement à la majorité des textes de la littérature des Hekhalot, il n’est jamais fait mention dans les OdRA.A de l’usage de techniques magico-rituelles employées dans le but de gagner l’assistance d’un intermédiaire angélique. Michel et Gabriel sont sous l’autorité unique de la divinité.
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chatologie qui est propre aux OdRA.A, les anges ne sont jamais qualifiés de prêtres, Israël ne devient pas un peuple de prêtres, ce sont les justes des nations étrangères qui seront qualifiés ainsi, étant placés sur le même plan que les impies d’Israël repentis. Il semble donc plutôt ici que nous soyons en présence de la réutilisation d’une catégorie de pensée plutôt que dans une désignation explicite du prêtre en tant que ministre et de ses prérogatives. Le prêtre devient le méritant par excellence, statut que tous peuvent atteindre à condition de respecter scrupuleusement les ordonnances divines. Ces dernières consistent principalement en l’observance de la Tora et en la récitation de prières non en l’accomplissement de rituels particuliers.
IV. Conclusion Tentons maintenant de tirer quelques conclusions de l’observation des motifs de la Merkava, des temples et des prêtres dans les OdRA.A, dans le but de comprendre les liens que ce corpus entretient avec la littérature des Hekhalot, tant en ce qui concerne le contenu que le(s) milieu(x) de production. L’apparition du char-divin est décrite en des termes assez classiques, assemblant des motifs que l’on retrouve dans la littérature des Hekhalot : la souveraineté de dieu, la toute-puissance de son règne, sa présence sur son trône de gloire lui-même posé sur la Merkava elle-même soutenue par les ḥayyot, le champ lexical du feu, etc. Comme mentionné précédemment, on s’attendrait à une description un peu plus détaillée de cette Merkava ainsi que la mention de sa contemplation comme but à atteindre. Ce n’est jamais le cas puisque nous n’avons pas à proprement parler de récit d’ascension d’un quelconque yored-merkava. Il n’est pas fait mention explicite d’une succession de cieux ni de palais célestes. Les temples, qu’ils soient terrestre ou céleste sont plus suggérés qu’évoqués. Les seuls mouvements verticaux que l’on retrouve dans les OdRA.A concernent la divinité, les anges et les hommes « revivifiés », ils servent uniquement à définir les conditions de participation au monde qui vient et à la liturgie céleste. Une des premières conditions est la connaissance et la maîtrise de la Tora, s’acquérant uniquement par l’apprentissage et la lecture et non plus par les pratiques d’invocation des noms de dieu telles qu’elles sont longuement développées dans la littérature des Hekhalot. Ces invocations sont explicitement prohibées dans les OdRA.A, l’utilisation des noms de dieu risquant de causer la destruction du monde par le feu. De même, R. Akiva n’est pas le personnage principal de cet écrit. Il lui sert seulement d’autorité. Cette attribution semble être tardive. C’est
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Moïse qui est mis en avant dans les OdRA.A. C’est lui qui a reçu la connaissance du nom de dieu en même temps que le don de la Tora au Sinaï. Il est le garant du maintien de son étude, celui qui la protège de l’oubli. Ce motif n’est pas étranger à la littérature des Hekhalot puisqu’il est un des thèmes centraux des Hekhalot Zutarti (§§ 334.336). Bien qu’il soit possible de retrouver tout au long de ce texte de nombreux motifs qui jalonnent la littérature des Hekhalot, son intérêt principal réside dans l’œuvre de la Tora et non plus dans celle de la Merkava. Les OdRA.A sont avant tout préoccupés par des considérations de type eschatologique. Bien que la liturgie céleste y soit conséquemment développée, une observation minutieuse des membres y participant ne permet pas vraiment de discerner une véritable trace de la promotion d’un groupe en particulier, qu’il soit national, sacerdotal ou angélique. La participation au monde qui vient est formulée de façon universelle : à condition de reconnaître le dieu d’Israël comme dieu unique, de réciter le Qaddish et de reconnaître la Tora, chacun peut participer : les justes d’Israël au même titre que les étrangers impies condamnés à la géhenne qui sont les seuls à être qualifiés de prêtres. La prière, action volontaire et spontanée est centrale. Elle n’est ni un moyen d’invocation ni un moyen d’ascension. La question de savoir si l’emploi de motifs propres à la mystique des Hekhalot et adaptés selon la perspective des Otiyyot est le fruit d’un travail de réécriture ; ou bien s’il est originalement utilisé comme trame narrative servant à véhiculer des idées plus « conformes », demeure donc primordiale. Sommes-nous en présence d’un phénomène de « re-rabbinisation » d’un texte mystique ou pouvons-nous imaginer un milieu producteur proche de celui de la littérature rabbinique utilisant le genre littéraire des Hekhalot pour véhiculer ses idées ? Cette dernière hypothèse semble assez séduisante dans le cas des OdRA.A et ne serait pas exceptionnelle. Elle semble déjà être à l’œuvre, selon Swartz, dans le Sar-Tora : The authors of the Sar-Tora texts appropriated rabbinic values in remarkable ways. They maintained the scholastic virtues of Tora study, reverence for the teacher’s authority, and emphasis on protocol. But unlike those rabbis whose magical power was said to derive from their mastery of Tora, the practitioners of the Sar-Tora sought to derive mastery of Tora through their magic 85.
Dans l’état actuel de nos connaissances, il est malheureusement impossible de trancher sans circonscrire et comprendre les milieux de productions de la littérature juive du premier millénaire qui se caractérise par son extrême 85. M. D. Swartz , Scholastic Magic: Ritual and Revelation in Early Jewish Mysticism, Princeton/New Jersey, 1996, p. 229.
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fluidité. Il est encore difficile de comprendre les liens que la littérature mystique en général – des Hekhalot en particulier 86 – entretient avec la littérature rabbinique ou encore avec les Piyyutim.
86. La question des milieux de production et des destinataires de la littérature des Hekhalot est fortement débattue, certains chercheurs prônant une origine commune avec les milieux responsables de la littérature rabbinique, d’autres le contraire. Voir de manière non exhaustive : G. Scholem, Jewish Gnosticism, Merkabah Mysticism, and Talmudic Tradition, New York, 21965 ; M. Himmelfarb , Ascent to Heaven in Jewish and Christian Apocalypses, New York, 1993 ; I. Gruenwald, Apocalyptic and Merkavah Mysticism: Second Revised Edition, Leyde, 2014 ; P. Schäfer , The Hidden and Manifest God: Some Major Themes in Early Jewish Mysticism, Albany/ New York, 1992 ; M. D. Swartz , Mystical Prayer in Ancient Judaism: An Analysis of Maʿaseh Merkavah, Tubingue, 1992 ; M. D. Swartz , Scholastic Magic: Ritual and Revelation in Early Jewish Mysticism, Princeton/New Jersey, 1996 ; D. J. H alperin, The Faces of the Chariot: Early Jewish Responses to Ezekiel ’s Vision, Tubingue, 1988 ; R. S. Boustan – M. Himmelfarb – P. Schäfer (éd.), Hekhalot Literature in Context: Between Byzantium and Babylonia, Tubingue, 2013.
L iturgical Community, P riesthood, Qedusha 1 and Synagogue From Qumran to the Hekhalot Texts through Rabbinic Literature 2 José Costa Sorbonne-nouvelle University, Paris 3 [email protected] Résumé Deux thèmes principaux sont abordés dans cet article : la prière de la qedusha et la notion de « communauté liturgique ». Après avoir proposé une approche théorique de ce qu’il faut entendre par « communauté liturgique », nous avons relu quatre corpus juifs fondamentaux à la lumière de cette approche : les premiers siddurim, les textes de Qumrân, la littérature rabbinique et celle des Hekhalot. Notre examen a révélé que la communauté liturgique apparaissait sous des formes très diverses, y compris au sein d’un même corpus. Il a également montré que le concept de communauté liturgique n’est pas aussi central qu’on le pense dans les Hekhalot et qu’il permet de mieux comprendre un certain nombre de textes rabbiniques. Quant à la qedusha, elle est probablement une création du judaïsme sacerdotal et synagogal, postérieure à 70, même si elle s’enracine dans une conception plus ancienne, celle d’une liturgie partagée avec les anges, déjà attestée à Qumrân. La qedusha palestinienne de la ‘amida semble être une forme rabbinisée de cette prière. Elle a été finalement remplacée par la version babylonienne, qui reflète mieux l’idéologie de la qedusha originelle et de ses promoteurs. Abstract My paper focuses on two main topics: the qedusha prayer and the notion of “liturgical community”. It is divided into two parts. First, I clarify what should be understood by “liturgical community” and set a theoretical framework. Secondly, according to this framework, I address the Jewish corpora related to the qedusha and the notion of liturgical community: the first siddurim, Qumran texts, rabbinic literature and the Hekhalot materials. The overview of these corpora has revealed 1. A simplified transcription of qedushsha. 2. I would like to thank my daughter Florence Costa, my friend Kent Hudson and my student Marlène Celermajer for their careful reading of my paper. I am also grateful to Rachel Elior and Günter Stemberger for their insightful remarks. La « sacerdotalisation » dans les premiers écrits mystiques juifs et chrétiens. Actes du colloque international tenu à l’Université de Lausanne du 26 au 28 octobre 2015 sous la direction de David Hamidović, Simon C. Mimouni et Louis Painchaud, Turnhout : Brepols, 2021 (Judaïsme ancien et origines du christianisme, 22), p. 95-131 DOI 10.1484/M.JAOC-EB.5.122768 © F H G
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a plurality of conceptions of the liturgical community, which may even be found in one and the same corpus. In contrast to what is usually thought, the concept of liturgical community is relevant to understand a number of rabbinic texts and its importance in the Hekhalot writings should be played down, in particular when it is applied to the mystic. As to the qedusha, I argue that this prayer is a Post-70 priestly and synagogal creation, yet rooted in a more ancient liturgical view, namely the shared liturgy with the angels, which is already attested at Qumran. The Palestinian qedusha of the ‘amida seems to be a rabbinized version of the prayer. It has been finally replaced by the Babylonian version, which better reflects the ideology of the original qedusha and its promoters.
As the title makes it clear, my paper focuses on two main topics: the qedusha prayer and the notion of “liturgical community”. The qedusha is a well-known Jewish prayer, essentially based on two verses: Isaiah 6:3 and Ezekiel 3:12. In Isa. 6:3, the angels sanctify God with the words: “Holy, holy, holy” (qadosh, qadosh, qadosh). This repetition of the term qadosh gives its name to the qedusha. The issue of the qedusha is a fascinating one. I have already written three articles in French about it. The first article compares the rabbinic and Christian interpretations of Isa. 6:3. 3 The third article centers on the rabbinic corpus and deals with the 31 aggadic commentaries of Isa. 6:3. 4 The second article has a broader perspective and explores a new hypothesis, namely that of “synagogal Judaism”. 5 In a book published in 2012, Simon Claude Mimouni suggested a new model on Palestinian Judaism after 70, defining three kinds of Judaisms: rabbinic, Christian and synagogal. My article traces the origins of “synagogal Judaism” as a concept, insisting notably on the important role that Goodenough and his followers played and intends to clear up its relation to other recent historiographical models. It tries to refute counter-arguments that are likely to be raised against this hypothesis, using essentially rabbinic literature, but also archaeology and epigraphy. I show how the synagogal hypothesis offers a better understanding of a number of issues tackled by rabbinic literature. I finally open up with new avenues that deserve more exploration of some points of the hypothesis, which is still under construction: the sources of synagogal Judaism and its two components, Aramaic and Hellenist, the role of priests, the period that goes before 70 with the Diaspora, mysticism and messianism. 3. A. Bastit-K alinowska – J. Costa, “L’interprétation d’Isaïe 6, 3 et son usage liturgique dans le judaïsme et le christianisme anciens”, Revue d ’histoire ecclésiastique 105 (2010) 573-627. 4. J. Costa, “Is 6, 3 et la qedusha dans le corpus rabbinique ancien: une approche phénoménologique”, Journal for the Study of Judaism 47 (2016) 532-590. 5. J. Costa, “Qu’est-ce que le ‘judaïsme synagogal’?” Judaïsme ancien/Ancient Judaism 3 (2015) 64-218.
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The synagogal hypothesis may be of greater relevance for my investigation on the qedusha and contributes to shed light on the difficult question of its provenance. 6 As pointed out by E. Fleischer, the institution of this prayer “was neither initiated nor promoted by the Sages” and was accepted by the rabbis under the pressure of the worshippers. 7 The qedusha is probably the most important liturgical production of synagogal Judaism. Hovewer, the precise connection between this Judaism and Jewish mystical circles remains to be clarified. The link between the qedusha and the notion of liturgical community is obvious. Indeed, the version of the qedusha, which is inserted in the ‘amida prayer, calls on the worshippers to praise God in the same way that the angels do in Isa. 6:3 and Ezek. 3:12. 8 Thus, it is an example of liturgical community, in which the angels and Israel praise God with the same words. G. Stemberger published a short but very suggestive study on the notion of liturgical community between heaven and earth in ancient Judaism. He shows that this notion plays an important role, in one way or another, in Qumran, within the Hekhalot literature and in synagogues. He also emphasizes that it has a much more problematic status in rabbinic literature. 9 Although my research clearly follows Stemberger’s study, it departs from it on some points, as we shall see. My paper is divided into two parts. First, I will try to clarify more precisely what is generally understood by “liturgical community” and will set a theoretical framework. Secondly, according to this framework, I will briefly address each of the Jewish corpora related to the qedusha and the notion of liturgical community, which were already the focus of Stemberger’s study: the first siddurim, Qumran texts, rabbinic literature and the Hekhalot materials. My main purpose is not to deal with the Hekhalot literature and the sacerdotalization, which is the topic of the present book. However, my paper could have implications for some aspects of this topic. Its title suggests that the liturgical community is connected with the priesthood and 6. J. Costa, “Qu’est-ce que le ‘judaïsme synagogal’?”, Judaïsme ancien/Ancient Judaism 3 (2015) 125-140. 7. E. Fleischer , “Qedushat ha-‘amida (u-she’ar ha-qedushot): hebbeṭim hisṭoriyyim, liṭurgiyyim we-ide’ologiyyim”, Tarbiz 67 (1998) 301-350 and English summary. 8. Ashkenazi version: Seder ‘Abodat Yisra’el (ed. S. Baer) (Roedelheim, 1868) 89, “We will sanctify (neqaddesh) your name in the world…”; Sephardi version: Ḥereb Pifiyyot, “L’arme de la parole” (Gagny, undated) 104-105: “We will sanctify you (naqdishakh) and exalt you…”. 9. G. Stemberger , “‘Himmlische’ und ‘irdische’ Liturgie in der rabbinischen Zeit”, in Judaica Minora I: Biblische Traditionen im rabbinischen Judentum (Tübingen, 2010) 331-340.
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the qedusha with the synagogue. Even if the notion of liturgical community is already attested in the Bible, it became more important and took new forms in Qumran literature. Now, the Qumran texts which bear witness to a liturgical community between angels and men, have a strong priestly orientation, especially in their description of the celestial Temple, where the angels serve as priests. 10 As to the qedusha, it is the highest point of the actual synagogue prayer. However, scholars differ with regard to the time when the qedusha acquired its central position in the synagogue service. 11 Is there a historical link between the priestly liturgical community of Qumran texts and the qedusha prayer, whose setting is the ancient synagogue? According to P. Alexander, such a link is conceivable. He says: The priestly origins of Jewish mysticism should also lead us to reevaluate the echoes of this mysticism in the synagogue service. We noted earlier strong allusions to the doctrine of the celestial temple and the angelic liturgies in some of the synagogue prayers, most strikingly in the Qedushah de-Yoṣer and the Qedushah de-‘Amidah. These allusions were clearly intended to create the impression of the union of the earthly and heavenly congregations in worshipping God. Philipp Bloch argued long ago that these elements entered the synagogue liturgy from Heikhalot circles in the Gaonic era. […] However, if our analysis is correct, then the possibility that they came into the synagogue liturgy much earlier, direct from priestly circles, becomes an attractive option. 12
This analysis has much in common with R. Elior’s conclusions. She argued that the qedusha could only be understood against the background of priestly worldview, that human liturgy follows the celestial and angelic pattern. The synagogue, whose central prayer is the qedusha, is not a rab10. See R. E lior , The Three Temples. On the Emergence of Jewish Mysticism (Portland, 2004) and P. A lexander , Companion to the Qumran Scrolls. The Mystical Texts. Songs of the Sabbath Sacrifice and Related Manuscripts (London-New York, 2006). 11. According to Y. Heinemann, the qedusha is a very ancient prayer, already common at the end of the tannaitic period (Y. Heinemann, Ha-tefilla bi-tequfat ha-tanna’im we-ha-amora’im. Ṭibah u-defuseah, [Jerusalem, 1966], 145-147). Basing his argument on the evidence of the piyyuṭim, E. Fleischer says that the qedusha has achieved its present form and function around the middle of the fifth century (E. Fleischer , “Qedushat ha-‘amida [u-she’ar ha-qedushot]: hebbeṭim hisṭoriyyim, liṭurgiyyim we-ide’ologiyyim”, Tarbiz 67 [1998], 304-305). For A. Altmann, the songs of the qedusha, included in the Hekhalot literature, show that the qedusha of the ‘amida did not exist before the sixth or even the seventh century (A. A ltmann, “Shire qedusha be-sifrut ha-hekhalot ha-qeduma”, in Panim shel yahadut. Massot nibḥarot [Tel Aviv, 1983], 47-48, 51). 12. P. A lexander , Companion to the Qumran Scrolls. The Mystical Texts. Songs of the Sabbath Sacrifice and Related Manuscripts (London-New York, 2006) 137138.
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binic institution, but a priestly one. Consequently, the qedusha could not have emerged from the rabbinic milieu. Obviously, it originated in priestly circles. 13 As pointed out above, I proposed in a recent article to look at synagogal Judaism as the original milieu of the qedusha. In his last publications, S. C. Mimouni stresses more and more the priestly component of synagogal Judaism and speaks of a priestly-synagogal Judaism (“judaïsme sacerdotal et synagogal”). 14 Taking into account the insightful remarks of both P. Alexander and R. Elior and the terminological shift of S. C. Mimouni, it becomes almost unavoidable to ask the following question: is the qedusha a production of priestly-synagogal Judaism? 15 13. R. E lior , “From Earthly Temple to Heavenly Shrines. Prayer and Sacred Song in the Hekhalot Literature and its Relation to Temple Tradition”, Jewish Studies Quarterly 4 (1997) 217-267, esp. 230-246. However, it should be noted that neither the qedusha nor the synagogue plays an important role in her book The Three Temples (R. E lior , The Three Temples. On the Emergence of Jewish Mysticism [Portland, 2004], 13, 32-33). Relying on Elior’s views, J. Magness proposed to relate the synagogal art to the Hekhalot literature: J. Magness , “Heaven on Earth: Helios and the Zodiac Cycle in Ancient Palestinian Synagogues”, Dumbarton Oaks Papers 59 (2005) 1-52. Nevertheless, Magness does not discuss the issue of the qedusha. 14. S. C. M imouni, “Le ‘judaïsme sacerdotal et synagogal’ en Palestine et en Diaspora entre le ii e et le vi e siècle : propositions pour un nouveau concept”, in Comptes rendus de l ’académie des inscriptions et belles-lettres (Paris, 2015) 113-147 and S. C. M imouni, Jacques le juste, frère de Jésus de Nazareth (Paris, 2015) 23, 41, 60, 71, 90, 109, 165-166, 176, 193, 198, 201-202, 208, 214, 224, 229, 248, 257-258, 272, 278, 287-289, 295, 299-300, 340-341, 422, 432, 437, 536, 543-564. 15. The following editions and translations have been used in the article: P. A lexander , Companion to the Qumran Scrolls. The Mystical Texts. Songs of the Sabbath Sacrifice and Related Manuscripts (London-New York, 2006) (Alexander); I. Davidson – S. A ssaf – B. I. Joel , Siddur Rab Sa‘adya Ga’on (Jerusalem, 1963) (SSG); J. R. Davila, Hekhalot Literature in Translation. Major Texts of Merkavah Mysticism (Leiden, 2013) (Davila); D. A. Fiensy, Prayers Alleged to Be Jewish: an Examination of the Constitutiones Apostolorum (Chico, 1985) (AC); E. Fleischer , “Qedushat ha-‘amida (u-she’ar ha-qedushot): hebbeṭim hisṭoriyyim, liṭurgiyyim we-ide’ologiyyim”, Tarbiz 67 (1998) 301-350 (Fleischer); G. Friedlander , Pirkê de Rabbi Eliezer: the Chapters of Rabbi Eliezer the Great according to the Text of the Manuscript Belonging to Abraham Epstein of Vienna (London, 1916) (Friedlander); F. García Martínez – E. J. C. Tigchelaar , The Dead Sea Scrolls. Study Edition, t. II (Leiden, 1998) (GMT); D. Goldschmidt, Seder Rab ‘Amram Ga’on (Jerusalem, 2004) (SAG); H. Odeberg, 3 Enoch or the Hebrew Book of Enoch by R. Ishmael ben Elisha the High Priest (Cambridge, 1928) (Odeberg); M. Smith, Hekhalot Rabbati. The Greater Treatise Concerning the Palaces of Heaven (http://www. digital-brilliance.com/contributed/Karr/HekRab/indExod.php) (Smith); Soncino Babylonian Talmud Translation (http://www.halakhah.com/pdf/kodoshim/Chullin.pdf) (Soncino); Soncino Midrash Rabba Translation: Midrash Rabbah Exodus, translated by S. M. L ehrman (London, 1961) (1939) (Soncino). In certain cases, the translation used was slightly modified. Where none are mentioned, the translations are mine.
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I. The Notion of Liturgical Community The notion of liturgical community should be first considered from a linguistic point of view. Which Hebrew terms are used to express this notion? How does the text articulate earthly and celestial liturgy? Are the two liturgies merely juxtaposed or compared or even related to each other by a more sophisticated link? Is the liturgical community directly or indirectly attested in the text? In the first case, the liturgical community is explicitly mentioned. However, in the second, its presence is only suggested by the function of the text or some elements within it. A liturgical text which only describes the angelic liturgy is a good example of indirect attestation. It is indeed likely that the one who recites a text depicting the angelic liturgy sees himself as participating in this liturgy, even if it is not explicitly stated in the text. When analyzing the notion of liturgical community, four questions should be raised: 1. Who are the members of the community? 2. What is the relationship between these members? 3. Where and when is the liturgy performed? 4. What is the liturgical content of the community? From now on, I will make some remarks regarding each of these questions.
1. Members In the texts which will be addressed in my paper, the members are mainly the angels and Israel. Some texts show however a broader cosmic perspective. All the angels and all Israel are not necessarily concerned. Several texts seem to focus on more restricted groups, especially on individuals, which may or may not represent their community.
2. Relationship between Members Are the members of the community equal or unequal? The imitation of the angelic liturgy by men implies that angels are viewed as superior. At the same time, the existence of a liturgical community could attenuate and even erase the difference between both groups. Contrary to what is usually thought, a liturgical community is also possible, when Israel is declared superior to the angels. One group may stimulate the liturgical activity of the other, by exhorting it (exhortation) or giving it the permission to praise God (authorization).
3. Setting: Where and When If the liturgical community is achieved in the same place, either angels descend on earth, or men ascend to heaven. How does the text understand the nature of the descent or the ascent? Do the angels actually descend or are they always present on earth, the worshipper becoming aware of
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their presence at the time of the liturgy? 16 The ascent to heaven may concern the man as a whole or his spiritual part only. As P. Alexander has argued, it is also possible to conceive the relationship between angels and men from a psychological aspect: the liturgy performance allows a different state of mind, which opens the way to another dimension. 17 Regarding their temporal aspect, the two liturgies could be simultaneous or successive. Their proximity in time is central to the definition of the liturgical community. How do the questions of the place and the time of the liturgical community relate to mysticism and eschatology? When the contact with the celestial world occurs within human life, it should be called “mystical”. When it occurs after death or after resurrection, it should be called “eschatological”. It is not always easy to determine whether a liturgical community is mystical or eschatological. 18 Perhaps every kind of liturgical community is by definition mystical. It may also be thought that only the strongest forms of liturgical community are really mystical. 19
4. Content In the Jewish texts which will be commented in this paper, the liturgical content consists in prayers and songs. Do angels and men recite the same prayers or different ones? In the first case, what is the content of the common prayer? Do men recite the same prayer that angels do or is it the opposite? Unlike what is usually thought, a liturgical community is also possible, when the prayers of both groups are different. A liturgical community could be more or less intense. Intensity is in particular reflected by the words used in the text: for example, all the terms which derive from the root alef-ḥet-dalet refer to unity and suggest
16. P. A lexander , Companion to the Qumran Scrolls. The Mystical Texts. Songs of the Sabbath Sacrifice and Related Manuscripts (London-New York, 2006) 118119. 17. On both points, see P. A lexander , Companion to the Qumran Scrolls. The Mystical Texts. Songs of the Sabbath Sacrifice and Related Manuscripts (LondonNew York, 2006) 116-119. 18. According to E. G. Chazon, the Qumranic texts dealing with the liturgical community should not always be called mystical: E. G. Chazon, “The Qedushah Liturgy and its History in Light of the Dead Sea Scrolls”, in J. Tabory (ed.), Miqumran ‘ad qahir. Meḥqarim be-toledot ha-tefilla (Jerusalem, 1999) 12-13. 19. See P. A lexander , Companion to the Qumran Scrolls. The Mystical Texts. Songs of the Sabbath Sacrifice and Related Manuscripts (London-New York, 2006) 104: “From a history of religions perspective there is no problem in designating all three of these forms of yiḥud as ‘mystical’ […], but they are arguably mystical in very different degrees. The most intensely mystical is surely the third. In this the mystic has been absorbed into the transcendent reality…”.
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a strong version of the liturgical community. 20 A text in which the two liturgies are merely juxtaposed attests a less intense community than a text in which these liturgies are explicitly articulated. The same goes for an indirect attestation of the liturgical community when compared to a direct attestation. The four criteria mentioned above (members, relationship between the members, setting, content) are also relevant to the intensity issue. When the liturgical community is formed of two groups, which are both equal and recite the same prayer at the same time, it could be described as strong. When both groups are unequal and recite different prayers at different periods, it could be described as weak. Between these two extreme cases, the four criteria allow the conception of several intermediary situations.
II. The Liturgical Corpus Fleischer, 337 (reconstruction)
SAG, 32
SAG, 78
SSG, 38-39
SAG, 13
SSG, 36-37
Ordinary ‘amida
Sabbath and festival ‘amida (musaf )
Ordinary ‘amida
Yoṣer
Yoṣer
(Alexander, 111)
(Alexander, 111)
They will give you a crown, the crowds from above with the gatherings from below, all together (yaḥad kullam),
They will give you a crown, the crowds from above with the gatherings from below, etc.
We will sanctify you and exalt you
Blessed are you, our rock, our king and our liberator, creator of the saints, praised be your name for ever, our king, shaper of the servants.
Blessed are you, o Lord, our God, creator of the saints, praised be your name, our king, shaper of the servants.
[…] as it is written by the hand of your prophet: “Holy, holy, holy, the Lord of hosts, his glory fills the whole
they will say thrice Holy unto you, as it is said by the hand of your prophet: “Holy, holy, holy, the Lord of hosts,
“Holy, holy, holy, his glory fills the world” (cf. Isa. 6:3).
and say thrice Holy unto you, as it is written by the hand of your prophet: “ Holy, holy, holy, the Lord of hosts, his
Because your servants stand all in the heights of the world and caused to be heard with awe in unison
Because your servants stand all in the heights of the world and caused their voice to be heard facing
Sabbath and festival ‘amida (shaḥarit)
20. See also the difference between the prepositions “with” and “in”, the use of the latter suggesting a stronger form of liturgical community than that of the former, particularly in the Qumran corpus: P. A lexander , Companion to the Qumran Scrolls. The Mystical Texts. Songs of the Sabbath Sacrifice and Related Manuscripts (London-New York, 2006) 90.
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earth” (Isa. 6:3).
his glory fills the whole earth” (Isa. 6:3).
Then, with a sound of noise great, powerful and strong, they caused to be heard with pride (their praise).
And the holy ḥayyot and the wheels, facing them, praise and say: “Blessed be the glory of the Lord from its place” (Ezek. 3:12).
glory fills the whole earth” (Isa. 6:3).
(yaḥad ba-qol) the words of the living God and eternal king.
them with the words of the living God and eternal king.
And his servants ask where is the place of his glory.
Then, with a great, powerful, strong and awful noise, they caused their voice to be heard.
All are beloved, all are pure, all are heroes, all do in fear the will of their creator.
All are beloved, all are pure.
Facing them, they say barukh: “Blessed be the glory of the Lord from its place” (Ezek. 3: 12).
Facing them (and 21) they say: “Blessed be the glory of the Lord from its place” (Ezek. 3:12).
Facing them, they praise and say: “Blessed be the glory of the Lord from its place” (Ezek. 3:12).
All open their mouths in holiness and in purity and they praise, glorify, sanctify the name of the great, mighty and awful king, holy is he.
And your people unifies daily your name twice:
From your place, our king, you will appear and you will reign over us, because we are waiting for you.
From his place, he looks with mercy at his people, who unifies his name, evening and morning, each day, constantly:
From your place, our king, you will appear and you will reign over us, because we are waiting for you.
They take upon themselves the yoke of the kingdom of heaven one from another and they give permission one to another to sanctify their shaper.
All take upon themselves the yoke of the kingdom of heaven one from another, they receive (the permission)
“Listen Israel, the Lord, our God, the Lord is one” (Deut. 6:4).
When will you reign? You will reign in Zion, soon, in our days, during our life.
“Listen Israel, the Lord, our God, the Lord is one” (Deut. 6:4).
When will you reign? You will reign in Zion, soon, in our days.
In serenity, with clear speech and with holy melody, all like one (person) speak with fear and say with
And say: “Holy, holy, holy, the Lord of hosts, his glory fills the whole earth” (Isa. 6:3).
21. This term is probably out of place here.
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awe: “Holy, holy, holy, the Lord of hosts, his glory fills the whole earth” (Isa. 6:3). And you, you will cause (your voice) to be heard by us a second time in front of the eyes of every living being: “in order to be for you a God, I am the Lord your God” (Num. 15:41).
You will dwell, you will become great, you will be sanctified within Zion, your city, to generation and generation and to eternity and forever.
Our God is one, he is our father, he is our king and he saves us.
You will dwell, you will become great, you will be sanctified within Jerusalem, your city, in front of our eyes, to generation and generation and to eternity and forever.
And the wheels and the holy ḥayyot raise themselves with pride.
And the holy ḥayyot with the wheels, with a great, powerful and strong noise,
And us, with a strong voice, we answer: “The Lord shall reign forever, your God, o Zion, to generation and generation. Hallelujah” (Ps. 146:10).
And our eyes will see your kingship, as the word that is said in the songs of your strength, by the mouth of David, the anointed of your justice: “The Lord shall reign forever, your God, o Zion, to generation and generation. Hallelujah” (Ps. 146:10).
He will liberate us and he will cause (his voice) to be heard by us with mercy a second time in front of the eyes of every living being: “in order to be for you a God” (Num. 15:41).
And our eyes will see the kingship of your strength, as it is said by the hand of David, the anointed of your justice: “The Lord shall reign forever, your God, o Zion, to generation and generation. Hallelujah” (Ps. 146:10).
Facing them, they praise and say: “Blessed be the glory of the Lord from its place” (Ezek. 3:12).
Facing them, they praise and say: “Blessed be the glory of the Lord from its place” (Ezek. 3:12).
There are two main types of qedusha: the qedusha of the yoṣer and the qedusha of the ‘amida. The Babylonian versions of both qedushot are found in the prayer-books of ‘Amram and Sa‘adya Ga’on (ninth-tenth centuries ce). The Palestinian version of the qedusha of the ‘amida is indirectly known from the corpus of the liturgical poems called piyyuṭim: its text was reconstructed by E. Fleischer. The qedusha of the yoṣer only describes the angelic liturgy: it is a good example of an indirectly attested liturgical community. This community
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appears however explicitly in the ordinary qedusha of the ‘amida as transmitted in the Seder Rab ‘Amram Ga’on. 22 The relevant passage includes the introduction of the prayer and the section which cites Isa. 6:3: They will give you a crown, the crowds from above with the gatherings from below, all together (yaḥad kullam), they will say thrice Holy unto you, as it is said by the hand of your prophet: “Holy, holy, holy, the Lord of hosts, his glory fills the whole earth” (Isa. 6:3).
The liturgical community is clearly expressed by the terms: “all together” (yaḥad kullam). It seems to involve all the angels and all the men, but in the second case, it is obvious that Israel only is implied. In speaking of “above” and “below”, the text suggests that both groups are not in the same place when the common liturgy is performed. This liturgy consists in crowning God, namely in recognizing his kingship by reciting Isa. 6:3. The moment of the recitation is not specified, but the phrase “all together” probably alludes to a simultaneous recitation. Even if the worshipper recites Ezek. 3:12 too, the text refers to this verse only as regards the angels. The third part of the text, which has an obvious messianic orientation, does not mention the liturgical community anymore. The Siddur Rab Sa‘adya Ga’on also contains the text of the ordinary qedusha of the ‘amida. It differs from the version of the Seder Rab ‘Amram Ga’on on one single point: its introduction, which speaks only of Israel: We will sanctify you and exalt you and say thrice Holy unto you, as it is written by the hand of your prophet: “Holy, holy, holy, the Lord of hosts, his glory fills the whole earth” (Isa. 6:3).
The text goes on with the recitation of Ezek. 3:12 by the angels. Therefore, it gives the impression that Isa. 6:3 is recited by Israel and Ezek. 3:12 by the angels. Actually, it is a false impression, because Isa. 6:3 refers to the angelic liturgy, but the text seems to consider the verse as referring directly to Israel’s prayer. Finally, the evocation of the angelic liturgy is more detailed in the qedusha of the yoṣer than in the qedushot of the ‘amida that we have just commented on. There is no qedusha of the ordinary ‘amida in Palestine, but only a qedusha for sabbath and festival, recited on the morning service. E. Fleischer did not succeed in reconstructing its introduction, which some scholars identify with that of the Rab Sa‘adya’s qedusha. 23 The text, as reconstructed by E. Fleischer, begins with a description of the angelic liturgy 22. In the other parts of my paper, when I talk about the Babylonian qedusha of the ‘amida, I mean the ordinary qedusha of the ‘amida of the Seder Rab ‘Amram Ga’on. 23. On this identification, see N. D. Korobkin, “Kedushah, Shema, and the Difference between Israel and the Angels”, Ḥakirah, the Flatbush Journal of Jewish Law and Thought 16 (2013) 25-26.
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whose content is Isa. 6:3 and Ezek. 3:12. It goes on describing Israel’s liturgy which consists in the shema‘, as it is shown by the presence of the first and the last verses of this prayer. The two liturgies have thus a different content and the Palestinian qedusha would be paradoxical: instead of referring to its own recitation, it evokes the recitation of another prayer, the shema‘. The third part of the text, centered on the shema‘, has a messianic orientation. Nevertheless, this orientation is less marked than in the Babylonian versions. In the Palestinian version of the ‘amida, the liturgical community takes thus the form of a juxtaposition of the two liturgies. If the textual juxtaposition is also a temporal juxtaposition, the angelic liturgy would be anterior to the one of Israel. However, the text remains ambiguous and many options are possible: anteriority of Israel’s prayer, simultaneity of both prayers or two prayers separated by time. The Babylonian version of the qedusha of the ‘amida for sabbath and festival, recited at the musaf service, seems to combine the introduction of the qedusha of the ordinary ‘amida from the Seder Rab ‘Amram (mention of the crown) with the Palestinian version of the qedusha for sabbath and festival (mention of the couple qedusha/shema‘). AC, 7, 35, 1-7 (66-71, 198-199) (reconstruction)
Fleischer, 337
Great are you, O Lord and great is your strength, and of your understanding there is no measure, creator, savior.
For all things may glory be to you, master almighty.
Blessed are you, our rock, our king and our liberator, creator of the saints, praised be your name for ever, our king, shaper of the servants.
And the holy serafim together with the six winged kerubim
The innumerable hosts of angels, archangels, thrones, dominions, rulers, authorities, powers (and) eternal armies, worship you.
Because your servants stand all in the heights of the world and caused to be heard with awe in unison (yaḥad ba-qol) the words of the living God and eternal king.
Say to you and cry out with never-ceasing voices: “Holy, holy, holy, the Lord of hosts, heaven and earth are full of your glory” (cf. Isa. 6:3)
[…] as it is written by the hand of your prophet: “Holy, holy, holy, the Lord of hosts, his glory fills the whole earth” (Isa. 6:3).
All are beloved, all are pure, all are heroes, all do in fear the will of their creator.
AC, 8, 12, 27 (109)
Sabbath and festival ‘amida (shaḥarit)
SAG, 13 Yoṣer (Alexander, 111)
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All open their mouths in holiness and in purity and they praise, glorify, sanctify the name of the great, mighty and awful king, holy is he.
And the other multitudes of angels cry out and say: “Blessed be the glory of the Lord from its place” (Ezek. 3:12).
And the holy ḥayyot and the wheels, facing them, praise and say: “Blessed be the glory of the Lord from its place” (Ezek. 3:12).
They take upon themselves the yoke of the kingdom of heaven one from another and they give permission one to another to sanctify their shaper.
But Israel your earthly assembly from the nations, competing night and day with the powers in heaven sings
And your people unifies daily your name twice:
Let the kerubim and the six-winged serafim – covering their feet with two, their heads with two, and flying with two – also speaking together with the thousand thousands of archangels and myriad myriads angels with cries unceasing and loud
In serenity, with clear speech and with holy melody, all like one (person) speak with fear and say with awe:
“The chariot of God is ten thousand fold, thousands of flourishing ones. The Lord is among them on Sinai in the holy place” (Ps. 68:18).
“Listen Israel, the Lord, our God, the Lord is one” (Deut. 6:4).
And all the people together say:
Wherefore everyman ought to send up the hymn to you from their breasts for all things, since on account of you he has power over all things;
And you, you will cause (your voice) to be heard by us a second time in front of the eyes of every living being: “in order to be for you a God, I am the Lord your God” (Num. 15:41).
“Holy, holy, holy, the Lord of hosts, heaven and earth are full of his glory” (cf. Isa. 6:3).
“Holy, holy, holy, the Lord of hosts, his glory fills the whole earth” (Isa. 6:3).
For your eternal power both cools the flame, muzzles the lions, pacifies sea monsters, raises up those who
And us, with a strong voice, we answer: “The Lord shall reign forever, your God, o Zion, to generation and
And the wheels and the holy ḥayyot raise themselves with pride.
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are sick, turns back powers and lays low the army of enemies and the people numbered with those who behave arrogantly.
generation. Hallelujah” (Ps. 146:10).
Blessed (are you) forever. Amen.
Facing them, they praise and say: “Blessed be the glory of the Lord from its place” (Ezek. 3:12).
The most ancient versions of the qedusha are probably incorporated within a late fourth century Christian work: the Apostolic Constitutions (Constitutiones Apostolorum, AC). Christian prayers included in AC, 7, 33-38, are based upon six of the seven benedictions of the sabbath ‘amida. The prayer of AC, 7, 35, which is the third of the collection and combines Isa. 6:3 and Ezek. 3:12, clearly contains a version of the Jewish qedusha. Its text, reconstructed by D. Fiensy, distinguishes the prayer of the angels from the prayer of Israel and juxtaposes them, just like the Palestinian version of the qedusha. AC, 7 and the Palestinian qedusha however differ on the liturgical content attributed to Israel: Ps. 68:18 in the former and the shema‘ in the latter. The Jewish origin of AC, 8, 12 remains doubtful. The text shares nonetheless some striking similarities with the qedusha of the yoṣer, particularly as they share a same general framework: both prayers begin with a formula of introduction, then describe the angels and their praise which consists in Isa. 6:3, and conclude with a benediction of God (a simple benediction in AC, 8 and Ezek. 3:12 in the qedusha of the yoṣer). It is interesting to note that in AC, 8, 12, Isa. 6:3 is also uttered by the human worshippers, like in the Babylonian version of the qedusha of the ‘amida. As to evidence for priestly features of the qedusha, the verses embedded in the prayer should be first considered. The vision of Isa. 6 occurs in the Temple, and Ezekiel, who hears the angels saying “Blessed be…” (Ezek. 3:12), is a priest. The reference to Jerusalem or Sion in the qedusha of the ‘amida is also relevant: “You will dwell, you will become great, you will be sanctified within Zion, your city”. 24 The passage as a whole is however more characterized by royal and messianic concerns than priestly ones.
24. Concerning a possible link between the qedusha of the yoṣer and the Temple, see R. E lior , “From Earthly Temple to Heavenly Shrines. Prayer and Sacred Song in the Hekhalot Literature and its Relation to Temple Tradition”, Jewish Studies Quarterly 4 (1997) 234, n. 36.
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The Temple is not directly discussed and priesthood, whether celestial or terrestrial, is absent.
III. The Other Corpora 1. Qumran Text 1: Hodayot, 1QHa XI 22-23 (Alexander, 101) You have cast for man an eternal destiny (goral) with the spirits of knowledge, so that he might praise your name in the community of jubilation (be-yaḥad rinna). Text 2: Hodayot, 1QHa XIX 13-14 (Alexander, 101) So that he can take his stand in station before your face with the everlasting host and [your holy] spirits, to renew him with everything that exists, and with those who know, in the community of jubilation (be-yaḥad rinna). Text 3: War Rule, 1QM XII 1-2 (Alexander, 102) For there is a multitude of holy ones in heaven, and hosts of angels in your holy dwelling, to [praise] your [truth]. And the chosen ones of the holy nation you have set for yourself among t[hem]. Text 4: Blessings, 4Q286 7 I 2-7 (GMT, 646-647) [ and al]l their chosen ones [ ] and all their companions with hymns of [ ] and blessings of truth in the epochs of (qiṣṣe) [ ] your [ ] and your kingdom is elevated in the midst of [ the coun]cil of the pure Elim with all those who know eternal things, to pr[aise and to ble]ss your glorious name for all [et]er[nal ages]. Amen. Amen. Text 5: Songs of the Sabbath Sacrifice, 4Q400 1 I 1-3 (GMT, 806-809) [Of the Instructor. Song for the sacrifice] of the first [sabba]th, the fourth of the first month. Praise [the God of ] you, Elohim of all the most holy ones; and in the divinity [of his kingdom, rejoice. Because he has established] the most holy ones among the eternal holy ones, so that for him they can be priests. Text 6: Songs of the Sabbath Sacrifice, 4Q400 2 1 et 6-7 (GMT, 808-811) To praise your glory wondrously with the Elim of knowledge, and the praises of your kingship with the m[ost] holy ones […] How will it be regarded (nitḥashsheb)[amongst] them? And how our priesthood in their
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residences? […] [What] is the offering (teruma) of our tongue of dust (compared) with (be) the knowledge of the El[im]? Text 7: Self-Glorification Hymn, 4Q427 7 I + 9 13-18 (GMT, 896-897) Sing (zammeru), favoured ones, sing (shiru) to the king of [glory, rejoice in the assem]bly of God (ba-‘adat el), exult in the tent of salvation, praise in the [holy] residence (bi-me‘on qodesh), [e]xalt together with the eternal host (yaḥad bi-ṣeba ‘olam), ascribe greatness to our God and glory to our King; [san]ctify his name with stalwart lips and powerful tongue, raise your voices in unison (le-bad) [in a]ll periods (be-khol qiṣṣim), cause the sound of the shout to be heard, 25 rejoice with everlasting happiness, and unceasingly bow down in the united assembly (be-yaḥad qahal). Text 8: Daily Prayers, 4Q503 4 8, 7-9 3-4, 10 1-2, 37-38 21 (GMT, 998999, 1004-1005) We with the holy one[s ] […] [ and we], the sons of your covenant, bless [your name], with all the companies of [the light with al]l the tongues of knowledge. Bless […] [And when] the sun [ascends] to illuminate the earth, [they shall bless ][ ] with the companies of light. […] praising with us. Text 9: Words of the Luminaries, 4Q504 1-2 VII recto 4-9 (GMT, 10161017) Hymns (hodot) for the sabbath day. Give thanks [ ] his holy name for ever in the h[eavens?] all the angels of the holy vault and [all the waters above?] the heavens, the earth and all its depths 26 [ ] the great [abyss], the abode of the deaths (abaddon), the waters and all that there [is in them ], all its creatures, always, for centuries [eternal. Amen. Amen] In the Qumran corpus, a somewhat paradoxical situation could be observed. Indeed, the Qumran texts related to our issue give a great importance to the liturgical community, but seem to ignore the two fundamental verses of the qedusha: Isa. 6:3 and Ezek. 3:12. The more explicit texts related to the liturgical community are found in the Hodayot, the War Rule, the Songs of the Sabbath Sacrifice and in more fragmentary collections, like 4QBlessings, 4QSelf-Glorification
25. Corrected text. 26. E. G. Chazon’s translation, see E. G. Chazon, “Human and Angelic Prayer in Light of the Dead Sea Scrolls”, in E. G. Chazon (ed.), Liturgical Perspectives: Prayer and Poetry in Light of the Dead Sea Scrolls (Leiden-Boston, 2003) 38. GM: “all its schemers.”
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Hymn, 4QDaily Prayers and 4QWords of the Luminaries. 27 These texts are well known and have received much scholarly attention, particularly from P. Alexander, E. G. Chazon, R. Elior and M. Weinfeld. Our selection reveals that they are fewer than generally thought. The phrases referring to the liturgical community are the following: be-yaḥad rinna (“in the community of jubilation”, texts 1 and 2), be-yaḥad qahal and ba-‘adat el (“in the united assembly”, “in the assembly of God”, text 7), le-bad (“in unison”, text 7). Sometimes, it is mainly indicated by a preposition (“together with” [yaḥad be-], text 7; “with”, texts 1, 2, 6, 8; “among”, texts 3, 6) or the word kol (“all”, text 9). Even when the liturgical community is not expressly mentioned, the use of identical terms for both angels and men or their praise alludes indirectly to this community. 28 The members of the liturgical community are the angels and men. The angels are referred to by many names. The liturgical community involves the angels in general and sometimes, more particularly, categories of superior angels, as can be found in text 5 (“Elohim of all the most holy ones”). The men involved are obviously the members of the Qumran community, considered mostly as a whole. It is possible, however, that some parts of the Songs of the Sabbath Sacrifice were recited by priests and others by laymen. 29 Some passages of the Hodayot (maybe the case of texts 1 and 2) and 4QSelf-Glorification Hymn (text 7 speaks of “favoured ones”; other texts, not included in our selection, refer to a “boasting ‘I’”) show a more individual perspective. 30 Only text 9 exemplifies another approach, in which the liturgical community extends to all the elements of the world. 31 Regarding the relationship between the two groups, men are supposed to be the ones who join the angelic liturgy. 32 This fact shows how men are inferior to angels, which is explicitly underlined in text 6, in which the praise of the Qumran community, called “the offering of our tongue 27. All these texts, sectarian or not, were used by the Qumran community and thus they reflect, either directly or indirectly, their liturgical conceptions. 28. See E. G. Chazon, “Human and Angelic Prayer in Light of the Dead Sea Scrolls”, in E. G. Chazon (ed.), Liturgical Perspectives: Prayer and Poetry in Light of the Dead Sea Scrolls (Leiden-Boston, 2003) 40-41; P. A lexander , Companion to the Qumran Scrolls. The Mystical Texts. Songs of the Sabbath Sacrifice and Related Manuscripts (London-New York, 2006) 109. 29. See P. A lexander , Companion to the Qumran Scrolls. The Mystical Texts. Songs of the Sabbath Sacrifice and Related Manuscripts (London-New York, 2006) 112. 30. See E. G. Chazon, “Human and Angelic Prayer in Light of the Dead Sea Scrolls”, in E. G. Chazon (ed.), Liturgical Perspectives: Prayer and Poetry in Light of the Dead Sea Scrolls (Leiden-Boston, 2003) 43-45; P. A lexander , Companion to the Qumran Scrolls. The Mystical Texts. Songs of the Sabbath Sacrifice and Related Manuscripts (London-New York, 2006) 109. 31. It is also the case of the luminaries in 4QDaily Prayers. 32. A single text suggests the opposite movement: “praising with us” (text 8).
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of dust”, is considered of little worth compared to that of the angels. It is however the men who appear twice as those stimulating the angels (text 5) or the rest of the universe (text 9) in order to praise God. As to the temporal setting, the use of the term yaḥad suggests the simultaneity of the praises, even if it remains uncertain. Two passages refer to “moments” (qiṣṣim, texts 4 et 7), probably the hours when the joint praise took place. In 4QDaily Prayers, angels and men praise God for the renewal of the light of the luminaries at the same moment, namely when the luminaries become visible: “[And when] the sun [ascends] to illuminate the earth, [they shall bless ][ ] with the companies of light” (text 8). In the Songs of the Sabbath Sacrifice, the Qumran community joins the angelic praise on the Sabbath day only, at the time of the musaf offering. In 4QBlessings, both praises are juxtaposed and the human blessings could be seen as an answer to the angelic ones. However, this interpretation remains hypothetic. 33 As to the spatial setting, it is not always easy to know if the liturgical community is achieved in separate places or in one single place. If the common praise occurs in a single place, it implies that the individual or the group ascend into heaven in order to join the angelic liturgy. But, such an ascension is never described in the texts. It is yet possible that the ascent occurs only spiritually during the recitation of the text or that the angels themselves are thought to be already present among the worshipping congregation. 3 4 The term “eternity” is recurrent in the texts. It is mainly applied to the angels but also to the liturgical community. These texts probably refer to eschatological retribution. More generally, even the texts dealing with a present world close to its end depend on a “partially realized eschatology”. 35 As to the content of the liturgical community, it is quite difficult to be affirmative when it relates to Qumran. Indeed, the content of the angelic praise is almost entirely absent from the Qumran texts. Therefore, it is not clear whether angelic and human praises are different or identical. Text 6, which depreciates the human praise, rather suggests that the superior 33. See P. A lexander , Companion to the Qumran Scrolls. The Mystical Texts. Songs of the Sabbath Sacrifice and Related Manuscripts (London-New York, 2006) 61. Text 4 suggests rather the opposite order: see E. G. Chazon, “Human and Angelic Prayer in Light of the Dead Sea Scrolls”, in E. G. Chazon (ed.), Liturgical Perspectives: Prayer and Poetry in Light of the Dead Sea Scrolls (Leiden-Boston, 2003) 40. 34. See P. A lexander , Companion to the Qumran Scrolls. The Mystical Texts. Songs of the Sabbath Sacrifice and Related Manuscripts (London-New York, 2006) 118-119. 35. See P. A lexander , Companion to the Qumran Scrolls. The Mystical Texts. Songs of the Sabbath Sacrifice and Related Manuscripts (London-New York, 2006) 108.
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praise of the angels is a different one. Nevertheless, it is not sure whether this conception is shared by all the texts. E. G. Chazon distinguishes three conceptions of the liturgical community at Qumran: 1. A community consisting in many voices and including the whole world (“many voices”), 2. A community of two voices, in which the Qumranic community prays like the angels without identifying oneself with them (“two choirs”), 3. A one voice community, formed by the union between angels and men (“one congregation”). It corresponds to the more intense form of liturgical community in the Qumranic world. 36 This typology remains partly speculative, due to the fragmentary character of the evidence. 37 The qedusha, as said above, is absent from the Qumran corpus, which cites neither Isa. 6:3 nor Ezek. 3:12. The absence of the verses has been interpreted in many ways. 38 The most convincing explanation emphasizes the fact that the men of Qumran felt inferior to the angels and consequently, it would have been “blasphemous to recite such holy songs with ‘tongues of flesh’”. 39 At Qumran, it seems impossible to praise God with the verses of the qedusha and even the fact of putting these verses in the mouth of the angels is not observed among the texts of the community. Speaking of qedusha at Qumran, as a number of authors have done, remains therefore highly problematic, even if allusions to Isa. 6:3 and Ezek. 3:12 or passages similar to the synagogal qedusha may be found in the Qumran corpus. 4 0 Finally, it is well known that the Qumranic texts related to the notion of liturgical community have a strong priestly orientation, which emphasizes the connection between the priests from above and the priests from below. This orientation is however poorly evidenced in our selection of texts.
36. See E. G. Chazon, “Human and Angelic Prayer in Light of the Dead Sea Scrolls”, in E. G. Chazon (ed.), Liturgical Perspectives: Prayer and Poetry in Light of the Dead Sea Scrolls (Leiden-Boston, 2003) 35-47. 37. Our selection of texts may be classified as follows: 1. many voices; text 9; two choirs: texts 4-6, 8; one congregation: texts 1-3, 7. 38. See P. A lexander , Companion to the Qumran Scrolls. The Mystical Texts. Songs of the Sabbath Sacrifice and Related Manuscripts (London-New York, 2006) 113-114. 39. See P. A lexander , Companion to the Qumran Scrolls. The Mystical Texts. Songs of the Sabbath Sacrifice and Related Manuscripts (London-New York, 2006) 114. 40. See M. Weinfeld, “‘Iqqebot shel qedushat yoṣer u-fesuqe de-zimra bi-megillot qumran u-be-sefer Ben Sira”, Tarbiz 45 (1975-1976) 15-26; E. G. Chazon, “The Qedushah Liturgy and its History in Light of the Dead Sea Scrolls”, in J. Tabory (ed.), Mi-qumran ‘ad qahir. Meḥqarim be-toledot ha-tefilla (Jerusalem, 1999) 7-17.
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2. The Rabbis Text 10: Talmud Babli, Ḥullin, 91b-92a, MS Vatican 122, second hand (Soncino) An objection was raised (from a barayta): Israel are dearer to the Holy One, blessed be he, than the ministering angels, for Israel sing praises to the Lord every moment and every hour, as they want, whereas the ministering angels sing praises but once a day. Others say: Once a sabbath. Others say: Once a month. Others say: Once a week. Others say: Once in a jubilee. Others say: Once in eternity (le-‘olam). 41 And whereas Israel mention the name of God after two words, as it is said: “Listen Israel, the Lord, etc.” (Deut. 6:4), the ministering angels only mention the name of God after three words, as it is written: “Holy, holy, holy, the Lord of hosts” (Isa. 6:3). Moreover, the ministering angels do not begin to sing praises in heaven until Israel have sung below on earth, for it is said: “When the morning stars sang together, then all the sons of God shouted for joy!” (Job 38:7). It must be this: One (division of angels) says: “Holy”; the other says: “Holy, holy”; and the third says: “Holy, holy, holy, the Lord of hosts” (Isa. 6:3). But is there not the praise of “Blessed be the glory of the Lord” (Ezek. 3:12)? “Blessed” is recited by the wheels. Or you may say: Since permission has once been granted it is granted. Text 11: Pirqe de-rabbi Eli‘ezer, 4, MS New York, Enelow 866 (yemeni) (Friedlander, 25-26) Two serafim stand before him, one on his right and one on his left, each one has six wings, with two they cover their face so as not to behold the presence of the shekhina, with two they cover their feet so that they should not be seen before the presence of the shekhina, so that the standing of the foot of the calf might be forgotten. With two do they fly, praising and reverencing, and they sanctify his holy name. One (ze) answers and another (ze) calls, one (ze) calls and another (ze) answers, and they begin to speak and say: “Holy, Holy, Holy, the Lord of hosts, his glory fills the whole earth” (Isa. 6:3). The ḥayyot stand at the side of his glory and they do not know the place of his glory […] they begin to speak 42 and say in every place where they (should) speak: “Blessed be the glory of the Lord from its place” (Ezek. 3:12). Israel, a nation unique (eḥad) on the earth, unify daily his great Name, saying: 43 “Listen Israel, the Lord, our God, the Lord is one” (Deut. 6:4). He answers his people Israel and says to them: I am the Lord your God who has delivered you from every trouble. 41. Vilna: “in the world” (ba-‘olam). 42. Or: “they respond”. 43. Varsaw edition: “responding and saying”.
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Text 12: Shemot Rabba, 15, 6, MS Jerusalem 24 5977 (Soncino, p. 167168) Therefore, it is said: “Terrible as an army with banners” (Ct. 6: 10), because God compared Israel to angels. For in reference to angels, it says: “Above him stood the serafim” (Isa. 6:2), while concerning Israel, it says: “You are standing this day” (Deut. 29:9). The angels proclaim daily: “Holy, holy, holy” (Isa. 6:3) and Israel say: “The God of Abraham, the God of Isaac, and the God of Jacob” 4 4 . Text 13: Shemot Rabba, 23, 7, MS Jerusalem 24 5977 (Soncino, p. 285) “Then sang Moses” (Exod. 15:1). 45 Hence it is written: “The singers go before, the minstrels follow after” (Ps. 68:26). Rabbi Yoḥanan said: When the angels desired to chant song before God on that night where Israel crossed the Sea, the Holy One, blessed be he, prevented them saying: My legions are in distress, and you wish to utter song before me? Hence it is written: “And one (ze) did not draw nigh to the other (ze) all that night” (Exod. 14:20), as it says: “And one (ze) called unto another (ze)” (Isa. 6:3). As soon as Israel emerged from the sea, the angels rushed in to be the first to utter song before God, but God said: Let my children be the first to do so; hence it is written: “Then let Moses sing” (Exod. 15:1). 4 6 It does not say: “sang” (shar) but “then let he sing (yashir)”, (let) Moses and the children of Israel be the first (to sing). This is why David says: “The singers go before, the minstrels follow after” (Ps. 68:26), namely the Israelites who sang near the Sea, as it says: “Then let Moses sing” (Exod. 15:1). “The ministers follow after” (Ps. 68:26): these are the angels. Why was this so? God said: I am not in any way abasing you by saying that my children should precede you, but being mortals, they had better be the first, before any of them die; but you, being immortal, can utter song whenever you wish. Text 14: Shir ha-shirim Zuṭa, 1, 1, MS Parme 541 “The song of songs which is Solomon’s” (Ct. 1:1). […] Whence can you say that the ministering angels sang two songs, one at the binding of Isaac and the other at the Sea? In the case of Isaac, they sang before the king of kings of kings and said: “O Lord, our Lord, how majestic is thy name in all the earth” (Ps. 8:1). Why do they say: “Holy, Holy, Holy, the Lord of hosts, his glory fills the whole earth” (Isa. 6:3)? Indeed, the Holy one, blessed be he, said: If I have no glory on the earth, my name is not on 44. The first benediction of the ordinary ‘amida. 45. Ordinary translation of the verse. 46. Translation of the verse according to the Midrash.
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the earth (and) my name is not in the heights. Behold Israel says: “Listen Israel, the Lord, our God, the Lord is one” (Deut. 6:4). Then they give permission to the angels (to sing). They 47 receive it 48 from them 49 and say: “Blessed be the name of the glory of his kinship for ever”. 50 Hence we have a song at the binding of Isaac. A different picture of our issue is given by the rabbinic literature. At Qumran there is a liturgical community but no qedusha. Among the rabbis, it seems that the opposite is true: qedusha and no liturgical community. Nevertheless, the evidence of rabbinic literature is more complex than usually thought. The synagogal qedusha is discussed in a small number of halakhic passages and only in a laconic and imprecise way. 51 The 31 aggadic texts interpreting Isa. 6:3 are mainly interested in the angelic qedusha. 52 Almost all texts relate the recitation of Isa. 6:3 to the ministering angels or to angels without further specification. 53 Three texts only articulate Isa. 6:3 and Ezek. 3:12. Wa-yiqra Rabba, 2, 8 attributes both verses to the ministering angels. Talmud Babli, Ḥullin, 91b-92a (text 10) is uncertain as to the identity of the group which recites Ezek. 3:12 (the wheels or, as for Isa. 6:3, the ministering angels with a special permission). In Pirqe derabbi Eli‘ezer, 4 (text 11), Isa. 6:3 is told by the serafim (as in the Bible) and Ezek. 3:12 by the ḥayyot. Only 4 of the 31 texts refer to the synagogal qedusha. They belong to Midrashim, whose redaction occurred in the eighth or ninth century. 54 47. The angels. 48. The permission. 49. Israel. 50. On this formula, see notes 63 and 64. 51. See Tosefta, Berakhot 1, 9; Talmud Yerushalmi, Berakhot, 5, 3; Talmud Babli, Berakhot, 21b; Soṭa 49a. See also A. Bastit-K alinowska – J. Costa, “L’interprétation d’Isaïe 6, 3 et son usage liturgique dans le judaïsme et le christianisme anciens”, Revue d ’histoire ecclésiastique 105 (2010) 576-578. 52. See A. Bastit-K alinowska – J. Costa, “L’interprétation d’Isaïe 6, 3 et son usage liturgique dans le judaïsme et le christianisme anciens”, Revue d ’histoire ecclésiastique 105 (2010) 584-591; J. Costa, “Is 6, 3 et la qedusha dans le corpus rabbinique ancien : une approche phénoménologique”, Journal for the Study of Judaism 47 (2016) 532-590. 53. See J. Costa, “Is 6, 3 et la qedusha dans le corpus rabbinique ancien : une approche phénoménologique”, Journal for the Study of Judaism 47 (2016) 574-575. 54. An ignorant Jew recites with a loud voice Isa. 6:3 (Eliyyahu Rabba, 13). Israel is called “the third”, because he recites the Trisagion (Debarim Rabba, 2, 33). The dead who have recited the qedusha in this world continue to live in the hereafter by means of the angelic qedusha (Midrash Tanḥuma, ed. Buber, Mabo, 63b-64a). By the merit of answering to the qedusha, a woman insures successful pregnancy (id.). See also Be-reshit Rabba (early fifth century ce) 21, 1: the term “holy” in Dan. 8:13 refers to God because “all proclaim before him: Holy.” By “all,”
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The absence of references to the synagogal qedusha in the latest Midrashim (those redacted after the ninth century) is especially striking. At first sight, the rabbis do not explicitly stress the notion of liturgical community as it is in the case of Qumran. However, it appears clearly in rabbinic literature, where it takes the form of the so-called “two songs motif ”. The two songs in question are those of the angels and of Israel. 9 from the 31 aggadic texts commenting Isa. 6:3 reflect this motif. 55 When the identity of the songs is clearly indicated (which is not always the case), the song of the angels is nearly always identified with Isa. 6:3 (sometimes in couple with Ezek. 3:12). As to the song of Israel, it is identified with the shema‘ but also with other songs or prayers. Anyway, both songs are always considered different from one another. No text claims, as the Babylonian version of the qedusha of the ‘amida, that Isa. 6:3 is a song shared by the angels and Israel. This idea is ignored by the Palestinian sources as well as the Babylonian Talmud. The small number of texts which deal explicitly with the synagogal qedusha never refer to the motif of the two songs. The articulation of the two songs takes various forms: juxtaposition, comparison, succession and authorization. The juxtaposition is the simplest one: it consists in the presence of both songs in the same text, without indication of details on the nature of their relationship. 56 The term « succession » means that one song occurs before the other, in the text as well as the temporal reality. 57 When the temporal succession is not merely a fact, but appears as a necessity, we can speak of “authorization”. In this case, one song should be recited before the other: in fact, the recitation of the former is the condition, making then possible the recitation of the later. 58
the text probably means both angels and Israel. See finally The Second Targum to Esther (Targum sheni le-ester 5, 1) which states: “If Israel disappear from the world, who shall say before you daily thrice: Holy, holy, holy?”. 55. Sifre Debarim, § 306; Midrash Tanna’im, ed. Hoffmann, 71; Wa-yiqra Rabba, 2, 8; Talmud Babli, Ḥullin, 91b-92a; Pirqe de-rabbi Eli‘ezer, 4; Debarim Rabba, ed. Lieberman, 69; Shir ha-shirim Zuṭa, 1, 1; Shemot Rabba, 15, 7; Shemot Rabba, 23, 7. 56. See text 11: “and they (= the serafim) begin to speak and say: ‘Holy, Holy, Holy…’ […] The ḥayyot begin to speak and say […]: ‘Blessed be the glory of the Lord…’ […] Israel […] unify daily his great Name, saying: ‘Listen Israel…’ […].” 57. See text 13: “As soon as the Israelites emerged from the sea, the angels rushed in to be the first to utter song before God, but God said: Let my children be the first to do so…”. 58. See text 10: “The ministering angels do not begin to sing praises in heaven until Israel have sung below on earth”. Text 14 expresses even more clearly the notion of authorization: “Then they (= Israel) give permission to the angels (to sing). They receive it from them and say: ‘Blessed be the name of the glory of his kinship for ever’”.
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The comparison of the two songs emphasizes either their differences or their similarities. 59 The relationship between the two songs is connected (implicitly or explicitly) to a more general issue, namely the relationship between the angels and Israel. Text 10 from the Talmud Babli is a good example of such a connection. According to a barayta, Israel mentions the name of God after two words, while the angels only mention it after three words. Moreover, Israel sings praises to God more frequently than the angels. The same barayta states that “the ministering angels do not begin to sing praises in heaven until Israel have sung below on earth”. All these facts, which relate to the relationship between the songs of the angels and Israel, prove the superiority of Israel over the angels: “Israel are dearer to the Holy One, blessed be He, than the ministering angels”. Only one text among the nine, where the motif of the two songs is found, argues the opposite conception of the superiority of the angels and two other texts may refer to the equality between both groups. 60 In a recent article, N. D. Korobkin asserted correctly that the Palestinian version of the qedusha of the ‘amida could be better understood from the background of the aggadic commentaries of Isa. 6:3. Indeed, the couple formed by the qedusha and the shema‘ occurs in both corpora. 61 On other aspects, the comparison is less convincing. The Palestinian version of the qedusha does not say that Israel’s song is performed before the song of the angels or that the recitation of the former is the necessary condition for the recitation of the latter. Moreover, it does not declare the superiority of Israel over the angels. On both issues, it remains neutral. One single passage (text 11), drawn from the Pirqe de-rabbi Eli‘ezer and considered by some scholars as a commentary of the Palestinian version of the qedusha, shows a similar neutrality. As stressed above, the successive character of the two songs and the superiority of Israel over the angels are both entirely compatible with the notion of liturgical community.
59. See text 10: “And whereas Israel mention the name of God after two words […] the ministering angels only mention the name of God after three words…” (comparison emphasizing the difference between the two songs) and text 12: “Because God compared Israel to angels […] The angels proclaim daily: ‘Holy, holy, holy’ (Isa. 6:3) and Israel say: ‘The God of Abraham, the God of Isaac, and the God of Jacob’” (comparison emphasizing the similar condition of Israel and the angels, who sing both a song to God, even if the songs are different from each other). 60. Superiority of the angels: Sifre Debarim, § 306. Equality between angels and Israel: Pirqe de-rabbi Eli‘ezer, 4; Shemot Rabba, 15, 7. 61. N. D. Korobkin, “Kedushah, Shema, and the Difference between Israel and the Angels”, Ḥakirah, the Flatbush Journal of Jewish Law and Thought 16 (2013) 19-46.
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Some rabbinic texts however seem to be willing to separate completely both songs, in particular at a temporal level, as it is the case in text 10 when it states that “Israel sing praises to the Lord every moment and every hour, as they want, whereas the ministering angels sing praises but once a day. […] Others say: Once in a jubilee. Others say: Once in eternity.” It is a border case, almost falling outside the scope of the notion of liturgical community. I say “almost” and not “completely,” because both songs are still integrated within the same discourse. The priestly content of the liturgical community and the qedusha is very limited in rabbinic literature, which is not surprising, considering the ambivalent attitude of the rabbis towards priests and priesthood. One single text, connecting Isa. 6:3 with the two songs’ motif, refers to the priestly benediction and sets the priests at the top of a hierarchy, whose lower levels are occupied by Israel and the angels. 62 In certain Midrashim, the phrase “Blessed be the name of the glory of his kingship for ever” appears as an addition or a substitute to Ezek. 3:12 in the angelic song. Those Midrashim claim that it was introduced in Jewish liturgy according to the pattern of the angelic liturgy. 63 It is to be noticed that, according to rabbinic sources, the phrase “Blessed…” was used in the Temple, in particular after the recitation of the priestly benediction. 6 4
3. The Hekhalot Literature Text 15: § 101 65 (Davila, 62) For no creature is able to approach within a hundred eighty-five thousand myriad parasangs of that place because of the tendrils of fire that drip and go forth from the mouths of the kerubim and from the mouths of the ofannim and from the mouth of the ḥayyot who open their mouths, saying Holy in the hour that Israel say before him: “Holy,” 66 according to the word that is said: “Holy, holy, holy” (Isa. 6:3). Text 16: § 126 (Smith, 13) When David went up to the great school which is in the firmament, there was set for him a throne of fire which was forty parasangs in height and double in length and double in breadth. And when David came and sat 62. Midrash Tanna’im, ed. Hoffmann, 71. 63. See Debarim Rabba, ed. Lieberman, 68; Midrash Tanḥuma, Qedoshim, 6 (cf. the different versions of Be-reshit Rabba, 65, 21). 64. See Y. Heinemann, Ha-tefilla bi-tequfat ha-tanna’im we-ha-amora’im. Ṭibah u-defuseah (Jerusalem, 1966) 79. 65. Paragraph numbers refer to P. Schäfer , Synopse zur Hekhalot Literatur (Tübingen, 1981). 66. Variant: “in the hour that Israel stand before him.”
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down upon his throne which was prepared for him opposite to the throne of his creator and all the kings of the house of David sat before him, and all the kings of the house of Israel stood behind him, at once David arose and uttered songs and praises (such as) ear has not heard from (the creation of) the world. And when David began and said: “The Lord shall reign forever; your God, o Zion, to generation and generation. Hallelujah!” (Ps. 146:10). Metatron and all his servants began and said: “Holy, holy, holy, the Lord of hosts, his glory fills the whole earth” (Isa. 6:3), and the ḥayyot praise God saying: “Blessed be the glory of the Lord from its place” (Ezek. 3:12), and the firmaments say: “The Lord shall reign forever” (Ps. 146:10), and all the earth say: “The Lord has been king” (Ps. 93 or 97:1), “the Lord is king” (Ps. 10:16), “the Lord shall be king, forever and ever” (Exod. 15:18), and all the kings of the house of David say: “The Lord shall be king over all the earth, in that day shall the Lord be one and his name one” (Za. 14:9). Text 17: § 161 (Davila, 83-84) Rivers of happiness, rivers of exultation, rivers of rejoicing, rivers of chanting, rivers of love, rivers of friendship are poured out and go fourth from before the throne of glory and gain might and go into the gates of the roads of the ‘Arabot firmament. More than the sound (qol) of the playing of the lyres of his ḥayyot, more than the sound of the chanting of the timbrels of his ofannim, more than the sound of the melodies of the cymbals of his kerubim, the sound gains might and goes forth with a great earthquake at the qedusha in the hour that Israel say before him: “Holy, holy, holy” (Isa. 6:3). Text 18: § 163 (Davila, 85) Blessed to heaven and to earth be the descenders to the chariot, if you say and tell my sons what I do at the morning prayer and at the prayer of the afternoon and evening on every single day and every single hour that Israel say before me: “Holy.” Teach them, say to them: Lift up your eyes to the firmament corresponding to your house of prayer in the hour that you say before me: “Holy.” There is nothing as fine to me in my whole world that I created as that hour when your eyes are lifted up to my eyes and my eyes look into your eyes in the hour that you say before me: “Holy.” For the voice that goes forth from your mouth in that hour drips and ascends before me as a southing odor. Text 19: § 164 (Davila, 86) And testify to them. What testimony? You see me, what I do to the visage of the face (qelaster panaw) of Jacob your father which is engraved for
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me upon the throne of my glory. For in the hour that you say before me: “Holy,” I kneel on it and embrace it and kiss it and hug it and my hands are on its arms three times, corresponding to the three times that you say before me: “Holy,” according to the word that is said: “Holy, holy, holy” (Isa. 6:3). Text 20: § 179 (Smith, 23) And why does he 67 stand above the windows of the firmament? Because the ministering angels have not permission (reshut) to sing a song (in heaven) above until Israel first open their mouths in song (on earth) below, as it is said: “Praise you the Lord our God” (Ps. 99:5). And all the ministering angels and all angels of each heaven, when they hear the voice of songs and praises which Israel say (on earth) below, do commence (in heaven) above with “Holy, holy, holy” (Isa. 6:3). 68 Text 21: § 550-551 (Davila, 259-260) Rabbi ‘Aqiba said: When the name of the Lord prayed this prayer 69, I saw forty-six 70 thousand myriad angels of glory who stood to praise the throne of glory. 71 And I saw the knot of the phylacteries of the bands of the Lord, God of Israel, and I gave praise concerning everything. 72 It is incumbent upon me to praise the Lord of all […] And as for me, I will declare holy your great and mighty and fearsome name, “Holy, holy, holy, the Lord of hosts” (Isa. 6:3)… Text 22: § 558 (Davila, 267) In the fifth palace, I brought holiness before the king of kings of kings, blessed be he. In the sixth palace, I recited the qedusha before him who said and he formed the world and he commanded that all beings be created, so that the attending angels would not destroy. Text 23: § 564 (Davila, 273) And when you pray another prayer, invoke three letters that the wheels of the chariot invoke, who recite a song before the throne of glory…
67. The angel Shema‘i’el. 68. Variant: “when they hear the voice of songs and praises which Israel say (on earth) below, as it is said: ‘And one called unto another and said: Holy, holy, holy…’ (Isa. 6:3)”. 69. Variant: “when I prayed this prayer”. 70. Reading of P. Schäfer (see Davila). Variant: “six hundred and forty”. 71. Variant: “who stood facing the throne of glory”. 72. Variant: “I gave praise upon all my limbs”.
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Text 24: 3 Enoch, 1 (Odeberg, 3, 5) Rabbi Yishma‘el said: […] And he enlightened my eyes and my heart by words of psalm, song, praise, exaltation, thanksgiving, extolment, glorification, hymn and eulogy. And as I opened my mouth, uttering a song before the Holy One, blessed be he, the holy ḥayyot beneath and above the throne of glory answered and said: “Holy” (Isa. 6:3) and “Blessed be the glory of the Lord from its place” (Ezek. 3:12). Our selection of texts is drawn from the principal Hekhalot macroforms: texts 15 to 20 come from the Hekhalot Rabbati, texts 21 to 23 from the Ma‘ase Merkaba and text 24 from 3 Enoch. It is often said that the notion of liturgical community and the qedusha occurred frequently in the Hekhalot literature, even taking a prominent place within it. However, I shall propose a reassessment of this common view. Indeed, the Hekhalot texts reveal a great diversity of qedushot in regard to their form, content and setting. For instance, each of the so-called “Qedusha hymns” culminates with a citation of Isa. 6:3. 73 These hymns share some similarities with the synagogal qedusha and are closer to the qedusha of the yoṣer than to the qedusha of the ‘amida. 74 The qedusha is also included in long chains of names, which may combine nomina barbara, names of God and names of angels. Such lists are used to praise God. 75 Obviously, the angelic qedusha is more important and is described in much more details in the Hekhalot writings than in rabbinic literature. Its presence is particularly strong within 3 Enoch and Hekhalot Rabbati, as noted by P. Schäfer. 76 The Hekhalot texts provide a great amount of information regarding the identity of the angels who recite the qedusha and the recitation in itself, namely its time, place and modalities. They also deal with the feelings of the reciters and the consequences of their song upon themselves and the rest of the world. The qedusha (Isa. 6:3 and,
73. P. Schäfer , The Hidden and Manifest God. Some Major Themes in Early Jewish Mysticism (Albany, New York, 1992) 24 and n. 52; The Origins of Jewish Mysticism (Tübingen, 2009) 254-256; A. A ltmann, “Shire qedusha be-sifrut hahekhalot ha-qeduma”, in Panim shel yahadut. Massot nibḥarot (Tel Aviv, 1983) 44-67. 74. A. A ltmann, “Shire qedusha be-sifrut ha-hekhalot ha-qeduma”, in Panim shel yahadut. Massot nibḥarot (Tel Aviv, 1983) 47-48, 50-51. 75. See, for example, § 314, 351, 364, 491, 504, 549, 571. The qedusha is also connected to the divine names in § 57 and 71, but in a different way. 76. P. Schäfer , The Hidden and Manifest God. Some Major Themes in Early Jewish Mysticism (Albany, New-York, 1992) 24, 131, 141-142.
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in some texts, Ezek. 3:12 too) is connected with a huge variety of angels. 77 The place of its recitation is located within one of the circles which surround the ḥayyot or divided between several celestial palaces. 78 The qedusha is uttered when the divine crowns return under the throne of glory. 79 It is performed with joy and trembling. 80 One group says: “Holy,” another: “Holy, holy”… 81 The angels are transformed into sparks and torches. Their word creates mountains of flames and the flames move between the palaces. 82 The power of angelic voices shakes the foundations of the world. 83 The angels who successfully recite the qedusha are rewarded with a crown and those who make a mistake are destroyed. 84 After saying the qedusha, the angels bow down and fall upon their faces. 85 In contrast, little evidence for the synagogal qedusha is found in the Hekhalot literature. It only appears in four passages of the Hekhalot Rabbati: texts 15, 17, 18 and 19, which refer to the hour that Israel says: “Holy” or “Holy, holy, holy.” One should note however that a variant form of text 15 does not put the qedusha in the mouth of Israel, stating only: “to the hour that Israel stand before him.” Unlike what has been argued by Schäfer, it is not obvious that text 20 refers to the synagogal qedusha.. 86 The angels say: “Holy, holy, holy,” while Israel recite “songs and praises,” probably different from the qedusha. A number of texts do not deal with Israel as a whole but only with the mystic, who enters into the celestial palaces and recites on this occasion the qedusha. Rabbi ‘Aqiba, for example, utters the qedusha in the sixth palace (text 22). He also recites it within another prayer, the ‘alay le-shabbeaḥ “it is incumbent upon me to praise,” an adaptation of the synagogal prayer, the ‘alenu le-shabbeaḥ (text 21). It is not clear however that the prayer recited by Rabbi Yishma‘el in text 24 is the qedusha and the ambiguity 77. The texts refer to the following categories of angels: ḥayyot (§ 2, 273), ministering angels or servants (§ 43, 97, 306, 596), Shekhina’s camp or camps or angels of the Shekhina (§ 53, 57, 71), groups or rows of angels (§ 188, 192), kerubim, wheels and ḥayyot (§ 101), princes of the army (§ 52), Metatron, stars and ḥayyot (§ 126), chariots of fire (§ 555), angels without specification (§ 58). The texts citing both Isa. 6:3 and Ezek. 3:12 are § 2, 51, 52, 126, 146 and 351. The same category of angels recites the two verses in § 2 (ḥayyot) and 52 (princes of the army). In § 126, Metatron and the stars say Isa. 6:3 while the ḥayyot utter Ezek. 3:12. 78. § 51, 442. 79. § 71. 80. § 306. 81. § 192. 82. § 53, 95, 555. 83. § 56, 97. 84. § 58. 85. § 25, 57, 188. 86. P. Schäfer , The Hidden and Manifest God. Some Major Themes in Early Jewish Mysticism (Albany, New York, 1992) 47-48.
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of this text is similar to that of text 20 already discussed. The angels sing Isa. 6:3 and Ezek. 3:12, whereas Rabbi Yishma‘el utters “a song”: nothing compels us to identify this song with the qedusha. Text 16 is a very particular case. It belongs to the so-called Apocalypse of David and includes the three basic verses of all the versions of the synagogal qedusha: Isa. 6:3, Ezek. 3:12 and Ps. 146:10, which are either uttered by the angels or the firmaments. The human praise consists in other verses, recited in heaven (by David and the kings belonging to his house) and on earth. Only one verse, Ps. 146:10, is shared by the angels and David. As to the notion of liturgical community, it is not so attested in the Hekhalot literature as it is usually thought, at least in a direct manner, for the macroforms are essentially concerned with the angelic liturgy. Schäfer is well aware of this fact and while dealing with the macroform 3 Enoch, he notes: “the description of the angels and their heavenly praise for the most part is an end in itself, man is not present therein.” 87 The idea of a shared liturgy between the angels and Israel does not take a great place in the Hekhalot texts. In Schäfer’s book The Hidden and Manifest God, the only macroform whose discussion includes a section entitled Israel is one of the Hekhalot Rabbati. 88 According to R. Elior, three modes of prayer may be found within the Hekhalot corpus: mystical prayer which enables the ascension of the mystic, shared prayer between angels and men “which together recite the qedusha” and heavenly prayer, which consists in the angelic liturgy alone. 89 As pointed out by Elior herself, these modes of prayer are not entirely separate: heavenly prayer appears in mystical prayer and the qedusha occurs in both heavenly and shared prayers. As to shared prayer, Elior is aware that it is rarely attested within the Hekhalot literature: “references to shared prayer are infrequent.” 90 It may be added that this statement is true, regardless of the identity of the shared prayer (Elior focuses on the qedusha but there are other prayers shared between angels and men). Indeed, the liturgical community between Israel and the angels is clearly stated in text 15, an extract from the Hekhalot Rabbati. Israel and the angels say the same praise (“Holy”) simultaneously (one says: “Holy,” “in the hour” that the other says: “Holy”). The fact that the angels join 87. P. Schäfer , The Hidden and Manifest God. Some Major Themes in Early Jewish Mysticism (Albany, New York, 1992) 132. 88. P. Schäfer , The Hidden and Manifest God. Some Major Themes in Early Jewish Mysticism (Albany, New York, 1992) 45-49. 89. R. E lior , “From Earthly Temple to Heavenly Shrines. Prayer and Sacred Song in the Hekhalot Literature and its Relation to Temple Tradition”, Jewish Studies Quarterly 4 (1997) 231-236. 90. R. E lior , “From Earthly Temple to Heavenly Shrines. Prayer and Sacred Song in the Hekhalot Literature and its Relation to Temple Tradition”, Jewish Studies Quarterly 4 (1997) 235.
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Israel’s prayer and not the opposite suggests the superiority of the latter over the former. This passage is very close to the Babylonian version of the qedusha of the ‘amida, even if it stresses in a more explicit way the simultaneity of the songs and the superiority of Israel. However, it is a particular text, not representative of the rest of the Hekhalot corpus. Text 17 also alludes to the simultaneity of both qedushot, but less clearly than text 15. Texts 18 and 19, which come immediately after text 17 in Schäfer’s Synopse, leave out the angelic praise and focus on the trio of God, the mystic (the yored merkaba) and Israel. Text 20 belongs to another type of liturgical community, discussed above within the framework of rabbinic literature. According to this type, Israel’s song is different from that of the angels and the recitation of the former allows the recitation of the latter. Text 16 offers an example of a broader liturgical community, including heaven, earth, angels and a number of men residing in heaven. Each group is related to a specific song, consisting in one or several verses and the songs are performed one after another. Let us conclude our discussion with the difficult problem of the mystic joining the angelic liturgy. Schäfer gives a great importance to this form of liturgical community in the conclusion of his book The Hidden and Manifest God: The yored merkavah participates in this heavenly liturgy in both a passive and active manner […] the heavenly liturgy draws its legitimacy solely from the fact that man takes part in it […] The Hekhalot literature does not propagate the unio mystica, the unification of the individual with God, but, if the expression is allowed, the unio liturgica, the liturgical communion of the yored merkavah, as emissary of Israel, with God. 91
An overview of the book shows clearly that this statement is based on a small number of texts. Even texts 18 and 19 of our selection, the most relevant to support Schäfer’s claim, do not exactly testify such a kind of liturgical community, as was pointed out by M. Idel in a brief article. 92 Sometimes, for example in texts 21, 22 and 23, the mystic utters the qedusha or another song like the angels, but it does not necessarily mean that he participates in the heavenly liturgy, especially if the text refers to the mystic alone and not to the angels. It is often said that in text 21 Rabbi ‘Aqiba joins the angelic liturgy when he recites the ‘alay le-shabbeah. Nevertheless, there is no reference to the angelic liturgy in this pas-
91. P. Schäfer , The Hidden and Manifest God. Some Major Themes in Early Jewish Mysticism (Albany, New York, 1992) 164-165. 92. M. Idel , “‘Al ha-qedusha we-ha-ṣefiyya ba-merkaba”, in J. Tabory (ed.), Mi-qumran ‘ad qahir. Meḥqarim be-toledot ha-tefilla (Jerusalem, 1999) 7-15.
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sage. The very term ‘alay (“upon me”, “it is incumbent upon me”) suggests that we are dealing with an individual prayer. If in a number of macroforms, the prayers of the mystic have a theurgic function, as means in the ascent, it is far less obvious that the purpose of the mystic consists in taking part in the angelic liturgy. 93 More probably, his role would rather be to observe this liturgy, in order to be able to transmit what he has seen to other men. Text 24 is the only one from our selection which really illustrates the participation of the mystic in the celestial liturgy. It follows a pattern already seen within rabbinic literature: the song of the mystic precedes the recitation of Isa. 6:3 and Ezek. 3:12 both recited by the angels and it is probably different from that of the angels. According to several authors (R. Elior for example), the Hekhalot literature reflects mainly a priestly agenda. Our selection of texts does not support this view. P. Alexander notes rightly that the Hekhalot texts “are not as precise and detailed as Sabbath Songs in correlating the heavenly temple and its liturgy with the earthly cult.” 94 Let us now propose some words of conclusion. The overview of four corpora (the siddurim, Qumran, rabbinic and Hekhalot literature) has revealed a plurality of conceptions of the liturgical community. It is to be noticed that several of these conceptions can often be found in one and the same corpus. In contrast to what is usually thought, the concept of liturgical community is relevant to understand a number of rabbinic texts and its importance in the Hekhalot writings should be played down, in particular when it is applied to the mystic. The main purpose of my paper was to offer a more systematic approach to the notion of liturgical community, drawing on six categories: terminology, identity of the members, relationship between them, place and time, content and intensity. As to the first category, Qumran texts and the Babylonian version of the qedusha share three words which reflect a strong form of liturgical community: ‘ im (with), yaḥad (together, unity) and kol (all). It is interesting to note that neither the rabbis nor the authors of the Hekhalot literature make use of these terms when talking about the notion of liturgical community. Most of the time, Qumran and Hekhalot traditions describe the angelic liturgy without referring to the human praise. As these texts were recited by the worshippers and/or mystics, we can therefore speak of an indirect liturgical community. The same holds true for the qedusha of the yoṣer. Our selection of texts from Qumran and 93. P. Schäfer , The Hidden and Manifest God. Some Major Themes in Early Jewish Mysticism (Albany, New York, 1992) 86-87 (and note 63), 155-156, 163. 94. P. A lexander , Companion to the Qumran Scrolls. The Mystical Texts. Songs of the Sabbath Sacrifice and Related Manuscripts (London-New York, 2006) 127.
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Hekhalot literature focuses however on the small number of traditions attesting to a direct liturgical community. The Babylonian qedusha of the ‘amida and rabbinic texts commenting Isa. 6:3 are other instances of such a community. It is difficult to know whether the choice between the direct and indirect forms of liturgical community is only a formal detail or a highly significant fact. Within the four corpora addressed in my study, the members of the liturgical community are the angels and Israel. Even when the text speaks of “men”, it actually focuses on Jewish men. It is however obvious that Qumran’s Israel is more selective and sectarian than the rabbinic one. The definition of Israel within the Hekhalot literature remains to be clarified. It seems to be both elitist and inclusivist, the yored merkaba being conceived as the emissary of Israel in the supernal realms. As to the identity of the angels involved in the liturgical community, most versions of the synagogal qedusha remain very elusive, sometimes even avoiding the mention of the angels. 95 In our selection of liturgical texts, Isa. 6:3 never appears as the song of the serafim and the recitation of Ezek. 3:12 is performed by the ḥayyot and the wheels, both in the Palestinian qedusha of the ‘amida and the qedusha of the yoṣer. These two features (absence of the serafim, connection of the ḥayyot and the wheels with Ezek. 3:12) are also found in rabbinic and Hekhalot texts. Not all the texts focus on the couple Israel/angels. Some of them reveal two other perspectives: 1. a wider perspective taking the form of a cosmic praise; 2. an individual perspective, according to which a single human being, namely the mystic, joins the angelic corporation. Both perspectives are attested within Qumran and Hekhalot literature. It seems to me however that the participation of the yored merkaba to the heavenly liturgy is not as central in the Hekhalot texts as it has been currently suggested. The relationships between angels and men as well as between their respective songs is one of the most significant category when we try to shed some light on the notion of liturgical community. At first sight, the rabbinic anthropology is diametrically opposed to that of Qumran. The former emphasizes the superiority of Israel over the angels, while the latter argues the opposite. Anthropology and liturgy go hand in hand and anthropological superiority entails liturgical superiority. According to the rabbis, “Israel are dearer to the Holy One, blessed be he, than the ministering angels” and therefore “the ministering angels do not begin to sing praises in heaven until Israel have sung below on earth.” On the contrary, the Qumran worshipper says: “[What] is the offering of our tongue of dust (compared) with the knowledge of the El[im]?” (text 6). 95. E. Fleischer , “Qedushat ha-‘amida (u-she’ar ha-qedushot): hebbeṭim hisṭoriyyim, liṭurgiyyim we-ide’ologiyyim”, Tarbiz 67 (1998) 328-330.
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It should be noted however that the superiority of the angels within Qumran literature is not an absolute one. Otherwise, no form of liturgical community could have been possible. Accordingly, the angels seem to be a model of imitation and the aspiration of the Qumran worshipper is to come closer to them, even if he never reaches their level. Some texts go a step further and give us the fascinating picture of a single congregation which includes both angel and men. The angelification process is therefore possible. As it places the angelic praise (Isa. 6:3 and Ezek. 3:12) in human mouth, the synagogal qedusha is grounded on the same anthropological approach. At first glance, it is incompatible with rabbinic anthropology and its emphasis on the superiority of Israel. The paradox of a rabbinic qedusha remains to be explained. The anthropology of the Hekhalot corpus is less easy to grasp. Some texts emphasize the superiority of Israel and its song in the rabbinic manner, while other texts see the qedusha as a prayer shared by the angels and Israel and recited at the same moment. Yet even the latter stress the special love of God for Israel. Regarding space and time, the texts are frequently unclear, particularly within Qumran and liturgical corpora. Yet, it may be said that the songs of Israel and the angels are likely simultaneous in the Babylonian qedusha of the ‘amida and successive in the Palestinian one. By contrast, some rabbinic and Hekhalot texts are very clear on the issue. For the rabbis, the two praises are never simultaneous and when they are successive, Israel’s song is the first one. The Hekhalot texts know both simultaneity and succession of the songs. As to space indications, qedusha prayers and rabbinic texts draw a clear border between the domain of the angels and Israel: the former is in heaven and the latter on earth. The picture is more complicated within Qumran and Hekhalot literature. In the Hekhalot traditions, Israel recites the qedusha on earth but the mystic is able to ascend to heaven and take a direct part in celestial liturgy. Qumran texts are a puzzling case: on the one hand, they attest many forms of liturgical communion and union, on the other hand, they never speak of human ascent or angelic descent. In rabbinic traditions, the liturgical community is never performed within an eschatological setting. Some Qumran texts may refer to such a setting. The single obvious example of eschatological shared liturgy is found in the so-called Apocalypse of David (text 16). Regarding the liturgical content, it is logical to assume that when angels and men merge to form a single congregation, their song becomes one and the same. When they remain distinct, they may recite the same song, as in the previous case, or, more probably, two different songs. The former possibility is attested in the Babylonian qedusha of the ‘amida and the latter in rabbinic texts. As is well known, the rabbis frequently differ on a great number of issues. It is therefore all the more surprising that they all agree on the existence of two completely different songs. The Hekhalot
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traditions are not homogeneous: some of them talk about a shared qedusha, others distinguish between two different songs but less clearly than the rabbis do. Qumran texts show a striking feature: they never give the precise wording of the angelic songs. The most intense form of liturgical community consists in the gathering of angels and men within the same congregation. It is only found at Qumran. The Babylonian qedusha of the ‘amida and some Hekhalot texts also reflect a strong version of the liturgical community, for the same song, namely the qedusha, is uttered by two distinct communities (Israel and the angels) at the same time. The same could be said of the Qumran texts which emphasize the connection between the members of the liturgical community by using the preposition “with.” Rabbinic texts and the Palestinian qedusha of the ‘amida reveal the weakest form of liturgical community, whose main features are the existence of two different songs and the absence of a clear time framework. As already said, E. Chazon distinguishes three types of liturgical community at Qumran that she calls “many voices,” “two choirs” and “one congregation.” This typology is also relevant to the other corpora. Some examples of “many voices” and “one congregation” patterns may be found within the Hekhalot literature. It is obvious however that the mainstream pattern is the “two choirs” one, which appears in all the corpora. My own typology, based on the rabbinic evidence, includes four categories: juxtaposition, comparison, succession and authorization. The other corpora provide several texts which fall easily under one of these categories, as can be seen in the following table:
Juxtaposition
Comparison
Succession
Authorization
Liturgical corpus
Palestinian qedusha of the ‘amida (= succession?)
Qumran
Text 4
Text 6
Texts 5 and 9 (= exhortation)
The Hekhalot literature
Text 24
Text 20
As to the qedusha prayer, I emphasize the necessity of distinguishing the angelic from the synagogal qedusha. Both are totally absent from Qumran literature. The angelic qedusha may be found within rabbinic and Hekhalot literature, but it is much more central in the latter than in the former. The synagogal qedusha only appears a few times in these corpora, and, with the exception of the Hekhalot Rabbati, remains a marginal issue. The liturgical corpus provides four forms of the qedusha: 1. a qedusha which
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only mentions the angelic praise, as the qedusha of the yoṣer; 2. a qedusha which focuses on the praise of Israel, as the qedusha of the ‘amida in the Siddur Rab Sa‘adya Ga’on; 3. a qedusha emphasizing both praises, which could be identical to (3. a) or different from (3. b) each other. The Babylonian qedusha of the ‘amida is an example of the former and the Palestinian one an example of the latter. 96 The qedusha prayer is based on a strong conception of the liturgical community consisting in the recitation by the human worshipper of the two main components of the angelic praise, namely the verses of Isa. 6:3 and Ezek. 3:12. As already said, the content of the prayer does not always deal with the recitation of the verses by Israel. The qedusha of the yoṣer only describes the praise of the angels and does not refer to the worshipper’s practice. The content of the Babylonian qedusha of the ‘amida is more precise: it emphasizes that Israel and the angels recite together Isa. 6:3. The content of the Palestinian qedusha of the ‘amida also refers to Israel but it contradicts the practice of the worshipper, for it says that the angels recite Isa. 6:3 and Ezek. 3:12 while the song of Israel is different and consists in the shema‘ yisra’el. Thus, the Palestinian version of the qedusha is really paradoxical: on the one hand, the worshipper recites a prayer called qedusha, which includes the verses of the angelic praise and on the other hand, the very text of the prayer states that the song of Israel is not the qedusha! It is a synagogal qedusha which denies the existence of the synagogal qedusha or at least plays down its importance within the Jewish liturgy, the prayer of Israel being identified with the shema‘. It is clear that the content of the Palestinian qedusha of the ‘amida fits well with the rabbinic traditions according to which the song of Israel and the song of the angels are different from each other. Even the small number of rabbinic texts referring to the synagogal qedusha never emphasize the obvious fact that angelic and human songs are one and the same. As to the Babylonian qedusha of the ‘amida, its idea of a common recitation of the qedusha by the angels and Israel has no parallel in the Babylonian Talmud. It only occurs in some texts of the Hekhalot Rabbati. Therefore, the evidence suggests that the qedusha was originally a non-rabbinic prayer. Indeed, according to the rabbis, the angels and the men have their own specific song and could not share the same praise, as in the qedusha prayer. Accordingly, it is reasonable to regard the Palestinian version of the qedusha as a rabbinized and self-contradicting qedusha, promoting a weaker and less mystic kind of liturgical community. In Elior’s view, the qedusha is a prayer based on the priestly lore and it already played a central role in the Qumran liturgy. At first sight, serious objections could be raised against this approach. There is no evidence for the existence of the qedusha at Qumran or during the Second Tem96. Both forms of qedusha with two songs are also attested within the Christian Apostolic Constitutions.
LITURGICAL COMMUNITY, PRIESTHOOD, QEDUSHA, SYNAGOGUE
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ple period and its content does not directly refer to the Temple or the priesthood, whether celestial or terrestrial. However, Elior is right that the qedusha is grounded on the notion of a shared liturgy with the angels, which is already attested at Qumran. Therefore, we can assume that this prayer is a Post-70 priestly creation, yet rooted in a more ancient worldview. It is likely that the original qedusha included more explicit priestly features and a stronger presence of the angels, which were further played down during the rabbinization process, as in the case of the Hekhalot literature. 97 I think that the best account of the history of the qedusha is that of Ezra Fleischer, who stresses the following points: Unlike the usual mystical motif of the righteous (i.e. the mystic) joining the Heavenly Host in its service and worshipping God in unison (a motif frequently occurring in the Apocrypha, the Qumran literature, in early Christianity and later Jewish mysticism), the Qedusha equates Israel’s role in praising God on earth with that of the Angels’ in Heaven, allowing Israel to use the Angels’ words verbatim in their human worship. However, this point was apparently challenged by some of the authorities: the inclusion of the first and the last verses of Qeriat Shema (Dt. VI:1 and Num. XV:41) in the Palestinian variant of the Qedusha (a variant accepted also by the Babylonians for some occasions) was meant to stress that while the Angels praise God in song (Isa. VI:3 and Ezek. III:12), Israel praises God by reciting the Shema. In this variant, the mystical dimension of the Qedusha is strongly diminished. Taking into consideration the way in which the Qedusha of the Amida was dealt with by the old rabbinical authorities and the rather careless formulation of most Qedusha texts, the author concludes that the institution as such was neither initiated nor promoted by the Sages. It was rather reluctantly accepted into the prayer service under the pressure of the lower strata of the worshipers, frustrated by the somewhat realistic character of Jewish congregational prayer. 98
I think it is necessary to correct the first and the last statements of Fleischer, who erroneously dismisses the collective dimension of the mystical liturgy at Qumran and sees the rabbis as the leaders of the prayer service. Yet, I agree with the rest of his description, which suggests that the qedusha mainly stems from the synagogues and their worshippers and not from the rabbinic circles. The Palestinian qedusha of the ‘amida seems to be a rabbinized version of the prayer. It has been finally replaced by the Babylonian version, which better reflects the ideology of the original qedusha and its promoters. 97. See P. A lexander , Companion to the Qumran Scrolls. The Mystical Texts. Songs of the Sabbath Sacrifice and Related Manuscripts (London-New York, 2006) 127: “This playing down of the priestly aspects in the Heikhalot literature may reflect a rabbinizing redaction of the doctrine.” 98. E. Fleischer , “Qedushat ha-‘amida (u-she’ar ha-qedushot): hebbeṭim hisṭoriyyim, liṭurgiyyim we-ide’ologiyyim”, Tarbiz 67 (1998) 301-350, English summary.
L a Nouvelle J érusalem et le nouveau T emple dans la littérature apocalyptique du judaïsme antique Lorenzo DiTommaso Concordia University Montréal [email protected] Abstract The article highlights the spatial dimension of apocalyptic statements in Ancient Judaism. It takes as an example the motif of the New Jerusalem and places it within the mass of apocalyptic writings according to historical, sociological and anthropological approaches. This dimension encounters the phenomenon of sacerdotalization. Résumé L’article met en avant la dimension spatiale des énoncés apocalyptiques dans le judaïsme antique. Il prend pour exemple le motif de la Nouvelle Jérusalem en le resituant au sein de la masse des écrits apocalyptiques selon les approches historiques, sociologiques et anthropologiques. Cette dimension rencontre le phénomène de la sacerdotalisation.
Le règne d’Antiochos IV (175-164 avant notre ère) a façonné l’histoire des juifs et la direction prise par le judaïsme primitif. En l’espace de quelques années, le roi séleucide a marché sur Jérusalem, interféré dans le choix du grand prêtre, pillé le trésor du Temple et gravement profané son autel avec des sacrifices au dieu étranger Zeus, un acte qui est décrit dans les visions apocalyptiques du livre de Daniel comme « l’abomination du dévastateur » (Dn 12,11 ; cf. 9,27 et 11,31). Ces actions, intervenant dans le contexte d’une guerre culturelle plus large qui se déroule au sein même du judaïsme, ont indigné les pieux et traditionalistes de la société juive et ont entraîné la révolte des Maccabées (167-164 av. J.-C.). Antiochos IV a également précipité l’apparition des premiers écrits apocalyptiques, tels que ceux de Daniel. Cependant, en dépit de son lien originel avec Jérusalem et son Temple, la tradition apocalyptique juive conserve une attitude ambivalente. D’une part, nous ne pouvons sous-estimer la place centrale que représentaient La « sacerdotalisation » dans les premiers écrits mystiques juifs et chrétiens. Actes du colloque international tenu à l’Université de Lausanne du 26 au 28 octobre 2015, sous la direction de David Hamidović, Simon C. Mimouni et Louis Painchaud, Turnhout : Brepols, 2021 (Judaïsme ancien et origines du christianisme, 22), p. 133-144 DOI 10.1484/M.JAOC-EB.5.122769 © F H G
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Jérusalem et son Temple pour les juifs à la fin de l’époque hellénistique et au début de la période romaine (200 av. J.-C. à 100 après J.-C.). Jérusalem/Sion était la ville du roi David, et son Temple la merveille du roi Salomon, même si tous deux ont dû être reconstruits après l’Exil babylonien. Pour les juifs, la ville était au centre du monde : le Temple était le siège de Dieu sur terre et ses prêtres étaient les médiateurs de la fragile alliance entre Dieu et Israël. De plus, les fêtes de la ville et les sacrifices du Temple régulaient les rythmes de la vie quotidienne. Comme Lee I. Levine observe, le Temple « served first and foremost as a religious focal point for Jews in Judea and the Diaspora » 1. D’autre part, le concept de la centralité de Jérusalem ainsi que son Temple a été transformé dans la littérature apocalyptique, allant des préoccupations historiques à des considérations eschatologiques. Il est vrai que certains écrits apocalyptiques expriment des opinions concernant la ville historique et son Temple, des opinions allant de la révérence à la répulsion 2 . Mais la conception apocalyptique dominante ne concerne pas la Jérusalem ancienne mais la Nouvelle Jérusalem céleste à venir. Dans certains textes, le Temple est explicitement mentionné ; dans d’autres, sa présence est simplement supposée. Cette brève enquête a pour but d’examiner le concept de la Nouvelle Jérusalem et du nouveau Temple tel qu’il s’est développé dans les anciens écrits juifs apocalyptiques 3 afin d’examiner s’ils participent à une sacerdo1. L. I. L evine , « Temple, Jerusalem », dans J. J. Collins – D. C. H arlow (éd.), The Eerdmans Dictionary of Early Judaism, Grand Rapids, Michigan-Cambridge, 2010, p. 1289. 2. Le meilleur exemple de cette dernière attitude est le/s « groupe/s » apparenté(s) à Qumrân. Le mythe fondateur de ce groupe et une partie de sa littérature indiquent un conflit historique avec le sacerdoce de Jérusalem. Selon l’Apocalypse des Animaux (1 Hénoch 89,73-74), les sacrifices au Temple sont corrompus dès le début ; les auteurs de l’Apocalypse des Semaines et des visions apocalyptiques de Daniel ne mentionnent même pas la construction du deuxième Temple. Pourtant, le groupe de Qumrân pourrait envisager la restauration eschatologique de la ville et du Temple, ainsi que du sacerdoce (voir les Chants du Sacrifice du Sabbat). En outre, malgré quelques références évidentes, Daniel est intensément concerné par le Temple ; voir G. Goswell , « The Temple Theme in the Book of Daniel », Journal of the Evangelical Theological Society 55 (2012), p. 509-520. 3. La littérature sur la Nouvelle Jérusalem eschatologique dans la littérature juive et chrétienne est immense. Une grande partie de celle-ci est écrite sur des écrits prophétiques et apocalyptiques spécifiques, le plus important étant le livre d’Ézéchiel et l’Apocalypse de Jean. Des aperçus importants du style d’enquête sur le sujet comprennent : W. Müller , Die heilige Stadt. Roma quadrata, himmlisches Jerusalem und die Mythe vom Weltnabel, Stuttgart, 1961 ; R. G. H ammertonK elly, « The Temple and the Origins of Jewish Apocalyptic », Vetus Testamentum 20 (1970), p. 1-15 ; O. Böcher , « Die heilige Stadt im Völkerkrieg », Kirche in Zeit und Endzeit. Aufsätze zur Offenbarung des Johannes, Neukirchen-Vluyn, 1983, p. 113-132 ; G. Bissoli, Il tempio nella letteratura giudaica e neotestamenta-
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talisation. Le corpus de ces écrits s’étend entre les deux grandes périodes de la rébellion juive de la fin de la période du Second Temple, depuis la révolte des Maccabées jusqu’aux révoltes contre Rome.
Révoltes et apocalypses La première révolte fut celle des Maccabées contre les Séleucides. Son succès, qui a été couronné par la nouvelle dédicace du Temple, a conduit à la création d’un État juif indépendant qui a duré pendant un siècle, jusqu’à ce que le général romain Pompée assiège Jérusalem en 63 av. notre ère. Les premières vraies apocalypses sont apparues à la suite des événements associés à la révolte des Maccabées : on y trouve principalement le livre de Daniel et les textes hénochiques, tels que le Livre des Veilleurs (1 Hénoch 1-36), l’Apocalypse des Animaux (1 Hénoch 85-90) et l’Apocalypse des Semaines (1 Hén 93.1-10 + 91.11-17) 4 . Quant au livre des Jubilés, il a été écrit peu de temps après. Les écrits tels que le texte araméen Nouvelle Jérusalem, le Testament de Moïse et les premiers livres des Oracles Sibyllins sont sans doute de la même époque (bien que tous ne soient pas liés à la révolte des Maccabées). À la même période, on voit apparaître les premiers écrits du groupe (ou groupes) essénien(s). Cette communauté était apocaria. Studio sulla corrispondenza fra tempio celeste e tempio terrestre, Jérusalem, 1994 ; U. Sim, Das himmlische Jerusalem in Apk 21,2-22,5 im Kontext biblisch-jüdischer Tradition und antiken Städtebaus, Trèves, 1996 ; P. Söllner , Jerusalem, die hochgebaute Stadt. Eschatologisches und himmlisches Jerusalem im Frühjudentum und im frühen Christentum, Tubingue, 1998 ; L. DiTommaso, The Dead Sea New Jerusalem Text. Contents and Contexts, Tubingue, 2005 ; Y.-M. Congar , « Church, Kingdom, and the Eschatological Temple », Letter & Spirit 4 (2008), p. 289-317 ; L. DiTommaso, « Jerusalem, New », dans J. J. C ollins – D. C. H arlow (éd.), The Eerdmans Dictionary of Early Judaism, Grand Rapids/Michigan-Cambridge, 2010, p. 797799 ; E. W. Baker , The Eschatological Role of the Jerusalem Temple: An Examination of Jewish Writings Dating from 586 bce to 70 ce, Thèse de doctorat, Université d’Andrews/Michigan, 2014 ; et J. J. Collins , « Jerusalem and the Temple in Jewish Apocalyptic Literature of the Second Temple Period », Apocalypse, Prophecy, and Pseudepigraphy: On Jewish Apocalyptic Literature, Grand Rapids/Michigan-Cambridge, 2015, p. 159-177. 4. Les premiers textes hénochiques (le Livre Astronomique araméen et le Livre des Veilleurs) sont antérieurs au texte massorétique de Daniel. La question est de savoir quand ces trois livres ont atteint leurs formes apocalyptiques. À mon avis, cet événement ne s’est pas produit avant les crises qui ont provoqué la révolte des Maccabées. Gabriele Boccaccini, dans son livre Roots of Rabbinic Judiasm: An Intellectual History, from Ezekiel to Daniel, Grand Rapids, Michigan, 2002, , a plaidé pour l’existence d’un « judaïsme hénochique » distinctif, dont les écrits se concentrent sur les voyages célestes de la figure antédiluvienne d’Hénoch – une source d’autorité pré-mosaïque (ergo, extra-sacerdotale). Boccaccini identifie cette faction du judaïsme avec les esséniens, c’est-à-dire la communauté de Qumrân et leur opposition au sacerdoce de Jérusalem, mais cette opinion n’a pas été acceptée par la majorité des autorités.
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lyptique dans tous les aspects essentiels et a produit un ensemble d’œuvres apocalyptiques (la Règle de la communauté, la Règle de la guerre, les pesharim, etc.) La deuxième période majeure de la rébellion juive, qui marque la fin de l’ère du Deuxième Temple, a commencé par la grande révolte contre Rome en 66-73 après J.-C. Cette rébellion, en revanche, a été une catastrophe sans précédent. Elle a laissé le Temple et Jérusalem en ruines. Des interdictions et des sanctions impériales ultérieures furent imposées aux Juifs, suivies de la guerre de « Kitos » de 115-117 et, plus dévastatrice encore, la révolte de Bar Kokhba de 132-136, dont l’échec entraîna le dépeuplement total de la Judée et l’extinction d’apocalypses juives pour les cinq siècles à venir. La grande révolte et ses conséquences ont préparé le terrain aux révoltes suivantes pour la composition finale des apocalypses juives antiques, y compris l’Apocalypse d’Esdras (= Esdras 3-14), l’Apocalypse syriaque de Baruch (= 2 Baruch), et le Testament d’Abraham. En outre, l’Apocalypse de Jean a été écrite pendant la même période, pour des raisons superficiellement différentes mais selon une dynamique similaire. Les écrits apocalyptiques se sont développés durant la période du judaïsme ancien. C’était un événement unique : dans aucune autre culture, la littérature apocalyptique n’a émergé de manière organique 5. Ses racines sont profondément enfouies dans de nombreux champs et de nombreuses sources, comme la mantique babylonienne, l’ancien zoroastrisme, la philosophie néo-platonicienne et notamment la prophétie biblique tardive. Cependant, les premiers textes apocalyptiques, qui ont émergé au cours de la révolte maccabéenne, représentent un nouveau type littéraire. Pour les anciens juifs et chrétiens, les textes apocalyptiques offraient une nouvelle perception de l’homme, de Dieu ainsi que de leur relation, qui changea les anciennes notions de salut, de justice et de destin humain.
Les fondements de l’apocalyptique Qu’est donc cette nouvelle compréhension ? Qu’implique-t-elle ? Que peut-on définir comme « apocalyptique » ? Ces questions déconcertent les chercheurs depuis longtemps. La raison principale en est que l’apocalyptique se manifeste à plusieurs niveaux et peut être abordée sous plusieurs angles. Comme adjectif, « apocalyptique » peut être appliqué à la littérature, à l’art, ainsi qu’à d’autres médias. Il peut se référer à certains thèmes ou tropes. Il peut décrire un style rhétorique typique ou un vocabulaire caractéristique 6. Qu’en est-il de son Sitz im Leben ? L’apocalyptique semble 5. L. DiTommaso, The Architecture of Apocalypticism, à paraître chez Oxford University Press. 6. S. D. O’L eary, Arguing the Apocalypse: A Theory of Millennial Rhetoric, New York-Oxford, 1994 ; G. Carey, Ultimate Things: An Introduction to Jewish and
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se développer dans certains types de contextes sociaux et servir certains types de fonctions sociales 7. Qui sont ces groupes ou communautés apocalyptiques ? On peut pousser le questionnement plus loin : qu’est-ce qui rend la pensée apocalyptique distinctive ? Est-ce sa tonalité de révélation 8 ? Ou est-ce plutôt l’accent eschatologique, les motifs frappants ou le message de la fin du monde ? Plus profondément encore, il y a peut-être un concept « apocalyptique » qui renvoie à des notions-clés telles que la perspective de la résurrection des corps et le dernier jugement post-mortem des individus qui sont au-delà des limites de l’expérience humaine normale 9. À mon avis, toutes ces distinctions reposent finalement sur un même socle. Ce socle comporte une vision du monde apocalyptique distinctive, ou « apocalypticisme », qui affirme des spécificités sur la nature du temps, de l’espace et de l’existence humaine. La collection de ces affirmations (ou axiomes) définit la vision du monde et un tout apocalyptique, de la même manière que la littérature marxiste reflète l’idéologie marxiste et que les écrits fascistes ventilent les hypothèses fascistes 10.
La conception apocalyptique de l’espace La conception apocalyptique de l’espace suppose l’existence de deux réalités, la transcendante et la « banale ». Bien que ces réalités soient généralement appelées « ciel » et « terre » dans la littérature, ce sont des catégories ontologiques, non physiques, ni cosmologiques. Dans la mentalité apocalyptique, le ciel est la réalité transcendante ; le ciel est la réalité authentique et parfaite. Il est indivisible, éternel et la seule source d’informations vraies. La terre, en revanche, est la réalité « banale ». Elle est considérée comme le contraire du ciel à tous égards. La terre est une réalité imparfaite qui a été corrompue irrémédiablement par la présence du mal, qui se trouve dans un état permanent de guerre avec sa force opposée, le bien. Le conflit entre les forces du bien et du mal se manifeste dans le monde sous la forme de dualités : la vérité contre le mensonge, la justice Christian Apocalyptic Literature, St. Louis, Missouri, 2005 ; et G. Carey – L. G. Bloomquist (éd.), Vision and Persuasion: Rhetorical Dimensions of Apocalyptic Discourse, St. Louis, Missouri, 1999. 7. N. Cohn, The Pursuit of the Millennium, Oxford, 1970. 8. L. L. Grabbe , « Prophetic and Apocalyptic: Time for New Definitions – and New Thinking », dans L. L. Grabbe – R. D. H aak (éd.), Knowing the End from the Beginning: The Prophetic, the Apocalyptic and Their Relationships, Londres, 2003, p. 107-133. 9. J. J. Collins , « Apocalyptic Eschatology as the Transcendence of Death », Catholic Biblical Quarterly 36 (1974), p. 21-43. 10. L. DiTommaso, « Eschatology in the Early Jewish Pseudepigrapha and the Early Christian Apocrypha », dans H. M arlow et al. (éd.), Eschatology in Antiquity, New York, 2021, et L. DiTommaso, Architecture of Apocalypticism, à venir.
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contre la perversité, la lumière contre les ténèbres, l’esprit contre la chair, la vie contre la mort. Une partie de cette vision dualiste de l’existence terrestre est la lutte entre les élus (toujours le public visé par la littérature) et leurs adversaires. Le temps, dans l’apocalyptique, appartient à la réalité terrestre. Il est considéré comme linéaire, unidirectionnel et terminal. L’histoire a donc une fin, et inclut aussi bien le futur que le passé et le présent. Son objet est toujours la communauté des élus. Ils sont le centre du cosmos et le centre du plan divin. Les conceptions apocalyptiques de l’espace et du temps s’entrecroisent dans la conviction que Dieu amènera bientôt la guerre entre les forces du bien et du mal à sa fin prédéterminée. Le message de toute la littérature apocalyptique est que l’eschaton (littéralement : « les dernières choses ») est proche. La récompense pour les élus est le jugement post-mortem des individus, quand les justes et les méchants recevront leur récompense ou punition. La littérature apocalyptique est cependant toujours dirigée vers des individus de manière groupée, qu’il s’agisse de petites sectes et de communautés ou de grandes Églises et empires. L’apocalyptique fonctionne ainsi comme une épistémologie, une anthropologie, une historiographie, une sotériologie et une théorie de la justice, qui sont implicites dans les écrits. Avant tout, la littérature apocalyptique est un système d’information : elle prétend transmettre des données d’une autre réalité à la nôtre. Le caractère de ces données et leur transmission sont essentiels à la définition du terme « apocalyptique ». Dans les textes apocalyptiques classiques, les données sont des « mystères » : selon la logique du système, elles dérivent d’une réalité entièrement différente que les humains sont incapables de comprendre au cours de leur vie quotidienne. La même logique valide également le message, puisque l’apocalyptique suppose un système à deux réalités avec des revendications exclusives sur le transfert d’information. La fonction première de tout texte apocalyptique est donc de révéler la vraie nature des choses aux membres du groupe auquel il est destiné. Cette révélation a des conséquences dans le monde réel, car elle exige le renforcement ou la modification de la pensée et du comportement du groupe auquel elle est destinée – adhérer au bien et éviter le mal (même si ces termes ne sont toujours compris de la même manière) – à la lumière de la divulgation que la fin de la réalité actuelle se produira sous peu.
Le développement du motif de la Nouvelle Jérusalem comme une sacerdotalisation Comme nous l’avons déjà évoqué, l’apocalyptique s’est développée au début du judaïsme. Elle s’est tissée à partir de plusieurs sources plus anciennes, mais elle apparaît comme une nouveauté. Pour beaucoup de
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juifs de l’époque, ce vêtement offrait un meilleur ajustement à ses réalités. La prophétie biblique tardive a joué un rôle fondamental dans sa construction, en fournissant beaucoup d’idées et de thèmes qui deviendront par la suite des caractéristiques de la littérature apocalyptique 11. Si ces idées et ces thèmes essentiels ont acquis une valence apocalyptique, c’est parce qu’ils ont été placés dans le cadre intellectuel de la vision du monde apocalyptique décrite ci-dessus. En d’autres termes, les idées et les thèmes sont devenus supra-mondains et transhistoriques dans leur orientation ; ces changements étant ainsi articulés selon les axes de l’espace et du temps. L’histoire de l’émergence de l’apocalypse est, à certains égards, l’histoire de la transformation de ces idées et de ces thèmes sur ces deux axes. L’anticipation de la Nouvelle Jérusalem est l’un de ces thèmes. Sa transformation d’un trope prophétique à un trope apocalyptique est parallèle au développement embryonnaire de la vision du monde apocalyptique. La Nouvelle Jérusalem est la ville idéalisée ou idéale du futur. La ville n’étant normalement pas nommée, il existe des exceptions importantes comme Ez 48,35 et Ap 3,12 (cf. 21,2), ce dernier étant plus une appellation qu’un titre propre. Dans de nombreux cas, un nouveau Temple peut être supposé où seule une Nouvelle Jérusalem est explicitement prévue. Cependant, certains écrits, comme Ézéchiel ou la Nouvelle Jérusalem, décrivent à la fois la ville et le Temple, tandis que d’autres, tels que le Rouleau du Temple et l’Apocalypse des Semaines, se concentrent sur le Temple 12 . Dans l’Apocalypse des Animaux, la « maison » à venir était probablement destinée à fonctionner à la fois comme ville et comme temple. Dans la nouvelle cité de l’Apocalypse de Jean, le Temple est inutile, puisque sa fonction est assumée par Dieu et l’Agneau (21,22). Dans chaque cas, la Nouvelle Jérusalem est construite, reconstruite, apparaît, descend ou se manifeste autrement par l’intermédiaire de l’action divine. Le thème de la Nouvelle Jérusalem se fonde sur plusieurs motifs traditionnels. Un de ces derniers est la croyance en la centralité de Jérusalem comme étant la ville sainte de Dieu et la cité royale de David (1 R 8,44 ; 11. Paul Hanson situe les origines de l’apocalypse dans un conflit social entre la faction centrale et les éléments marginalisés de la communauté postexilique. Le premier groupe, que Hanson appelle le parti « hiératique », a produit Ezéchiel 40-48, Aggée et d’autres œuvres. Le parti « visionnaire » était responsable de la composition de Zacharie 9-14, de parties d’Isaïe et d’autres œuvres bibliques tardives qu’il comprend comme étant l’antécédent primaire de l’eschatologie apocalyptique. Voir P. D. H anson, The Dawn of Apocalyptic: The Historical and Sociological Roots of Jewish Apocalyptic Eschatology, Philadelphie, Pennsylvanie, 1979 et P. D. H anson, « Apocalypse, Genre », et « Apocalypticism », dans K. Crim (éd.), Interpreters Dictionary of the Bible, Supplementary Volume, Nashville, Tennessee, 1976, p. 27-34. 12. Après le deuxième des quatre jugements, le Temple est reconstruit pour toute la gloire et l’éternité (1 Hénoch 91,12-13).
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11,32 ; 14,21 ; 2 R 21,7, etc.), ainsi que le site éternel du Temple et du Trône, qui ne sera jamais conquis (Psaumes 46 et 48, etc.). Un autre motif concerne l’idée de la restauration et de renouveau présente dans la mythologie ancienne, en particulier l’espoir d’une nouvelle création (Is 65,17 ; 66,22 ; 1 Hénoch 91,14.16) et la reconstitution du paradis terrestre, qu’il soit renouvelé (1 Hénoch 45,3-5) ou utopique (Ps 102,25-27). Un troisième motif est enraciné dans les traditions omphaliques, qui englobent les notions de la ville idéale ou céleste comme l’axis mundi, la montagne cosmique, ou Jérusalem/Sion comme le nombril du monde (Ez 5,5 ; 38,12 ; 1 Hénoch 26,1 ; Jub 8,12.19). Les villes planifiées et l’urbanisme dans le Proche-Orient ancien et le monde classique ont eu une influence considérable sur les éléments architecturaux et les modèles de villes aux plans orthogonaux que nous trouvons dans de nombreuses descriptions de la Nouvelle Jérusalem. Ces descriptions, à leur tour, ont acquis leur signification théologique dans l’attente d’un revers imminent de fortune. Cette attente s’inspirait de plusieurs motifs importants pour le monde imaginaire de la Nouvelle Jérusalem : i) le futur rassemblement d’Israël (Is 27,12-13 ; 45,13 ; 49,19-20 ; Joël 3,2 ; So 3,19-20 ; Za 8,7-8 ; Tob 13,10-14 ; Ps Sal 11,2-6 ; 17,26), soit avec le retour des exilés (Si 36,13-16 ; Tob 14,5) ou l’affranchissement des dépossédés (Ez 47,13-48,29) ; ii) l’humiliation des nations qui ont opprimé et persécuté Israël (Is 2,2-3 ; Mi 4,1 ; Apostrophe à Sion en 11Q5 xxii 11-12 ; Ps Sal 17,30-31 ; TestDan 5,12-13, etc.) et leur soumission à la souveraineté de Dieu (Tob 13,11 ; OrSib 3,710-723), peut-être à la suite d’une grande guerre dans le futur (Ez 38-39 ; Joël 3,9-12) ; iii), la magnificence, la richesse et la force de la ville future et la sécurité de ses habitants.
Le portrait d’une ville forte, prospère et paisible est mis en valeur par l’accent mis sur : i) la splendeur éclatante des murs et des maisons de la ville (Is 60,2-3 ; Bar 5,1 ; OrSib 5,420-428 ; Esd 10,25.50.55), qui sont souvent construits en marbre et ornés de pierres précieuses et d’or fin (Is 49,18 ; 54,11-17 ; Tob 13,16-17, 2Q24 3,2, 4Q554 2 ii 15 ; Ap 21,11-21) ; ii) la présence de rivières, de ruisseaux ou d’une autre source abondante d’eau douce (Ez 47,1-12 ; Za 14,8 ; Nouvelle Jérusalem 4Q554 4,1-2 ; Ap 22,1), qui est un symbole de vie, de fécondité et un signe de la présence de Dieu ; iii) les structures défensives de la ville, telles que les murs immenses et les tours massives (voir ci-dessous) ;
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iv) les portes ouvertes (Ap 21,25), qui signifient la paix, et à travers lesquelles le commerce et l’échange passent librement ; v) les places animées, où les jeunes jouent et les anciens se rencontrent pour parler et se détendre sans problème (Za 8,4-5, etc.).
L’attente eschatologique de la Nouvelle Jérusalem apparaît sous de nombreuses formes différentes, qui, à leur tour, permettent de multiples classifications se chevauchant. Cependant, trois grandes catégories peuvent être observées dans la littérature. La première catégorie distingue les exemples du motif de la littérature prophétique, contextualisés par l’eschatologie prophétique, des exemples de la littérature apocalyptique, contextualisés par l’eschatologie apocalyptique. Cette distinction a été discutée ci-dessus, dans la mesure où la vision du monde apocalyptique (et son eschatologie) est catégoriquement différente de la vision du monde prophétique (et son eschatologie). John J. Collins, dans son article sur l’eschatologie du livre de Zacharie, présente une superbe illustration de cette distinction 13. La deuxième grande distinction se trouve entre l’attente d’une Jérusalem idéalisée (= la ville restaurée) et l’anticipation d’une Jérusalem idéale (= la ville utopique). Cette distinction se concentre sur la description de la ville et ses contextes. L’anticipation d’une Jérusalem restaurée envisage le futur renouvellement de la ville dans son état le plus pur (Is 33,17-24 ; 60,1-22 ; 62,112 ; 65,17-25 ; Jérémie 30-33 passim ; Tobit 13, etc.). Ces descriptions sont fondées sur une combinaison de désir romantique et de réalité historique. Elles dépeignent souvent la Jérusalem historique en détail, y compris les références aux fondements sociaux et économiques de la prospérité de la ville, tels que les champs irrigués, les récoltes abondantes, et un commerce stable par caravane et par bateau (Is 60,9-17 ; Am 9,14-15 ; So 3,20 ; Za 1,17 ; 2,8). Dans ce portrait heureux, la future ville rafraîchie n’est généralement pas plus grande que la Jérusalem actuelle. En fait, la Jérusalem renouvelée sera immédiatement reconnaissable à sa population (4 Baruch 5) de par ses repères familiers et son périmètre irrégulier (voir, en particulier, Jr 31,38-40), même si la ville doit être relevée de ses ruines ou complétée à nouveau (Is 44,24-28 ; 49,17 ; 52,9 ; 54,14 ; 61,4 ; Tob 13,16, 4Q462 1,14 ; Apostrophe à Sion). L’Apocalypse des Animaux rappelle un passé encore plus lointain, ressuscitant l’idée du camp du désert dans sa conception de la Nouvelle Jérusalem (1 Hénoch 90,28-36). La Jérusalem idéale, en revanche, représente une ville utopique qui, dans ses dimensions physiques, ses détails architecturaux et son cadre sociopoli13. J. J. Collins , « The Eschatology of Zechariah » dans L. L. Grabbe – R. D. H aak (éd.), Knowing the End from the Beginning: The Prophetic, the Apocalyptic and their Relationships, Journal for the Study of the Pseudepigrapha, Suppl. Series 46, Londres-New York, 2003, p. 74-84.
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tique statique, est séparée de la Jérusalem historique. La forme caractéristique de cette ville idéale est la monumentale Nouvelle Jérusalem, que l’on peut voir dans Ezéchiel 40-48 (en particulier 48,16.30-35), la Nouvelle Jérusalem (en particulier 4Q554+4Q554a par. 5Q15), « Reworked Pentateuch » (4Q365a), OrSib 5,420-433 et Ap 21,2-22,5 (dans le Rouleau du Temple, le sujet est le nouveau Temple monumental). Les caractéristiques principales de ce type monumental de la Jérusalem eschatologique sont son périmètre carré ou rectangulaire, ses caractéristiques régulières de conception et, surtout, sa taille énorme. L’exemple le plus excessif de la Nouvelle Jérusalem se trouve dans l’Apocalypse de Jean, avec une superficie de 12.000 stadia (21,16), soit environ neuf fois la taille de la France. Les mesures de la ville, de ses murs et de ses structures intramuros sont souvent décrites en détail (voir la Nouvelle Jérusalem), dont l’origine est la croyance que les plans de Jérusalem sont inscrits dans les paumes de Dieu (Is 49,16). La nouvelle cité de l’Apocalypse des Animaux, bien qu’idéalisée plutôt qu’idéale, est probablement monumentale, dans la mesure où elle est grande, large et pleine d’habitants (1 Hénoch 90,36). La troisième grande distinction que nous pouvons observer parmi les expressions littéraires de la Jérusalem eschatologique se perçoit entre la nouvelle ville terrestre et la nouvelle cité céleste. De nombreuses références à la Nouvelle Jérusalem décrivent une ville terrestre. Par exemple, Tobit 13 parle de la reconstruction de la ville (13,10.16) et inclut une malédiction sur ceux qui chercheraient à réduire ses murs, démolir ses tours, et mettre le feu à ses maisons (13,12). Plusieurs exemples du motif, cependant, sont indiscutablement célestes : 2 Hénoch (55,2), l’Apocalypse d’Elie (1,10), l’Épître aux Galates (4,26-27), l’Épître aux Hébreux (12,22 ; 13,14), et, le plus célèbre, l’Apocalypse de Jean (21,2-22,5), où la Nouvelle Jérusalem descend du ciel (21,2). Il est certainement probable que la Nouvelle Jérusalem de l’Apocalypse des Animaux soit originaire du ciel, étant donné que le Seigneur des brebis l’apporte sur terre (1 Hénoch 90,28). La Nouvelle Jérusalem de 4 Ezra 7,26 (voir 8,52 ; 10,27-59 ; 13,36), invisible puis perceptible, est probablement aussi une cité céleste, préexistante, qui doit se manifester sur terre à un temps donné. Dans 2 Baruch 4,1-6 la ville est définitivement céleste (et préexistante), mais d’autres passages (32,1-5 ; 68,5-7) décrivent une ville terrestre. L’énorme influence culturelle de la cité céleste et idéale de l’Apocalypse de Jean 21-22 peut obscurcir le fait que ces catégories ne se chevauchent pas automatiquement : les villes monumentales idéalisées d’Ezéchiel et la Nouvelle Jérusalem, par exemple, sont des structures terrestres, non célestes. De plus, la date tardive de l’Apocalypse de Jean et sa position finale dans le Nouveau Testament (et donc aussi dans les Bibles chrétiennes) peuvent donner l’impression que sa gigantesque cité céleste se trouve à la fin d’une trajectoire au développement unique, conforme aux modestes attentes
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prophétiques pour une Jérusalem terrestre renouvelée. Ceci est incorrect : des illustrations idéales et monumentales du thème apparaissent dans les premiers textes comme celui d’Ezéchiel, tandis que des exemples de villes restaurées et terrestres persistent dans des textes plus récents comme ceux de Tobit. Cela étant dit, les types idéaux et célestes de l’anticipation de la Nouvelle Jérusalem sont plus typiques dans les écrits tardifs, ce qui suggère que le motif a graduellement subi un développement historique. Le catalyseur était l’émergence de l’apocalyptique. La Nouvelle Jérusalem idéale des derniers écrits apocalyptiques représente l’expression du motif qui transcende les limites de l’historiquement possible, et la ville monumentale dans sa perfection architecturale reflète la nature fondamentalement statique de son cadre eschatologique. La Nouvelle Jérusalem, céleste et monumentale, représente donc la forme idéale du motif qui a été porté à son extrême logique. Avec l’addition de l’élément atemporel ultime de la préexistence, l’anticipation de la Nouvelle Jérusalem échappe aux restrictions du temps et de l’espace, et est comprise de manière allégorique ou métaphorique. Ainsi, Philon d’Alexandrie écrit à propos d’une cité invisible de Dieu, dont l’emplacement est l’âme (De Somniis 2,37-38), tandis que le quatrième oracle des Oracles Sibyllins parle du Temple immatériel de Dieu (4,6-11, cf. He 8,1-5 ; 9,11-12). Mais l’exemple prééminent de la Nouvelle Jérusalem céleste et préexistante qui transcende l’espace et le temps se trouve en 4 Ezra 14 , une apocalypse qui se déroule après la destruction de Jérusalem par les Babyloniens mais qui a été composée trente ans après la destruction de la ville par le Romains. Le point culminant du texte est la quatrième vision (9,27-10,59), où Esdras le voyant rencontre une femme inconsolable, qui pleure sur la mort de son fils le jour de son mariage. Jusqu’à ce point, Esdras s’est disputé avec l’ange Uriel concernant la justice de Dieu envers son peuple Israël, particulièrement après la destruction de Jérusalem et de son Temple. Il est important de comprendre que ces arguments représentent un débat plus large entre la vieille théologie deutéronomiste de l’histoire et la nouvelle théologie apocalyptique de l’histoire. Uriel a dit à plusieurs reprises qu’Esdras (un humain) ne peut comprendre les desseins de Dieu, comme si Dieu avait oublié son peuple et favorisé les Gentils (Rome) à la place. Durant tout ce dialogue, Esdras lutte amèrement contre les réponses de l’ange. Cependant, quand il rencontre les femmes qui pleurent, Esdras est furieux. Il dit à la femme que la douleur et le chagrin sont une partie inévitable de ce monde et que la perte de son fils n’est rien comparée à la perte qu’a connue Israël. Esdras exhorte la femme à avoir confiance en 14. L. DiTommaso, « Who is the ‘I’ of 4 Ezra ? », dans M. H enze – G. Boc(éd.), Fourth Ezra and Second Baruch: Reconstruction after the Fall, LeydeBoston, 2013, p. 119-133.
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Dieu et à croire que le plan divin pour le monde reste en opération, malgré les calamités du présent – un jour prochain, le dessein de Dieu sera révélé. Soudainement, la femme est transformée en une ville brillante ; c’est la nouvelle Jérusalem du monde à venir. Dans sa réponse à la femme qui pleure, Esdras a intériorisé l’argument d’Uriel. Sa « conversion » 15 à la compréhension apocalyptique de l’histoire et de la justice, catalysée par un mélange de raison et d’émotion à travers ses dialogues avec Uriel, est destinée aux lecteurs de l’apocalypse afin qu’ils l’expérimentent eux-mêmes pour arriver au même espace mental. La Nouvelle Jérusalem de 4 Ezra n’est pas de ce monde, mais du monde à venir, à tous égards. En résumé, à la fin de l’époque du Second Temple, le thème de la Nouvelle Jérusalem devient une caractéristique relativement commune de l’eschatologie apocalyptique, bien qu’elle ne soit pas nécessairement une spécificité. La forme idéale, céleste et parfois préexistante du motif a été léguée au judaïsme et au christianisme de l’antiquité tardive et des siècles médiévaux. Elle représente aussi une forme de sacerdotalisation à travers le processus littéraire et son développement qui vient d’être décrits.
15. M. E. Stone , « A Reconsideration of Apocalyptic Visions », Harvard Theological Review 96 (2003), p. 167-180.
Sacerdotalisation et liturgisation L’impact de la liturgie et de la communion avec les anges sur le sacerdoce dans la Liturgie angélique Michael R. Jost Université de Berne [email protected] Abstract The Songs of the Sabbath Sacrifice (4Q400-407; 11Q17 and Mas1k), also known as Angelic Liturgy, unveils the service of the angelic priests in the heavenly presence of God. This general observation shows the importance of the priestly task, but at the same time it leaves the earthly dimension. In this article I analyze the impact of the liturgy and communion with angels on the priesthood. This allows to clarify the significance of this composition for the community that transmitted this circle of 13 songs. First, I look at some general information on the manuscripts and the contents of these Songs. Secondly, I describe the priestly elements. This will result in an ambivalent conclusion. Priesthood is indispensable but at the same time it is not determining the community. It is the liturgy that is constitutive. Thus, in the third place, I show the importance and influence of this liturgy for the selfidentification and understanding of the liturgical reality of the yaḥad. Indeed, I present an interpretation of the Songs of the Sabbath Sacrifice in the context of the other Dead Sea Scrolls, although the possibility that this composition precedes the yaḥad is discussed. Résumé Les Cantiques de l ’holocauste du sabbat (4Q400-407 ; 11Q17 et Mas1k), connus également sous le nom de Liturgie angélique, dévoile le service des anges-prêtres près de Dieu. Elle montre alors l’importance de la fonction sacerdotale, mais en même temps, elle quitte la dimension terrestre. Nous analysons dans l’article présent l’impact de la liturgie et de la communion avec les anges sur le sacerdoce. Cela nous permet, tout d’abord, de clarifier la signification de ces Cantiques pour la communauté qui a transmis ces chants, et, ainsi, de situer ce cycle dans la littérature mystique. Nous verrons en premier lieu quelques informations générales sur les manuscrits et le contenu de ces Cantiques. En second lieu, nous décrirons les éléments sacerdotaux. Cela nous amènera à une conclusion ambivalente. Le sacerdoce est indispensable et en même temps, il n’est pas primordial. C’est la liturgie qui La « sacerdotalisation » dans les premiers écrits mystiques juifs et chrétiens. Actes du colloque international tenu à l’Université de Lausanne du 26 au 28 octobre 2015, sous la direction de David Hamidović, Simon C. Mimouni et Louis Painchaud, Turnhout : Brepols, 2021 (Judaïsme ancien et origines du christianisme, 22), p. 145-164 DOI 10.1484/M.JAOC-EB.5.122770 © F H G
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est déterminante. Ainsi, en troisième lieu, nous montrerons l’importance et l’influence de cette liturgie pour l’auto-identification et la compréhension de la réalité liturgique de la yaḥad. Nous présenterons en effet une interprétation des Cantiques de l’holocauste du sabbat dans le contexte des autres manuscrits de la mer Morte, même si la possibilité que les Cantiques précèdent la yaḥad est discutée.
Les Cantiques de l ’holocauste du sabbat, connus également sous le nom de Liturgie angélique, se révèlent être une source de réflexion particulièrement intéressante pour la thématique de la « sacerdotalisation » dans les premiers écrits mystiques juifs. Cette Liturgie, découverte dans les grottes de Qumrân, contient treize cantiques pour les treize premiers sabbats de l’année solaire, c’est-à-dire pour le premier trimestre. La Liturgie angélique dévoile le service des anges-prêtres près de Dieu. Elle montre alors l’importance de la fonction sacerdotale, mais en même temps, elle quitte la dimension terrestre. La Liturgie angélique englobe ainsi les thèmes de la sacerdotalisation et se présente comme sujet du discours mystique 1. Cependant, l’interprétation de ce cycle de cantiques et sa relation avec les écrits ultérieurs des Hekhalot divergent fortement d’un auteur à l’autre 2 . Il n’est pas envisagé dans cet article de vouloir tracer le développement historique de la mystique dans l’Antiquité. Au contraire, nous nous limitons à une analyse des Cantiques de l ’holocauste du sabbat. Plus précisément, nous analysons l’impact de la liturgie et de la communion avec les anges sur le sacerdoce. Cela nous permet, tout d’abord, de clarifier la signification de ces Cantiques pour la communauté qui a transmis ces chants, et, ensuite, de proposer quelques indices de leur relation avec la littérature mystique. Nous verrons en premier lieu quelques informations générales sur les manuscrits et le contenu de ces Cantiques. En second lieu, nous décrirons les éléments sacerdotaux. Cela nous amènera à une conclusion ambivalente. 1. Voir P. S. A lexander , « The Mystical Texts. Songs of the Sabbath Sacrifice and Related Manuscripts », Londres, 2006 ; M. Vârtejanu-Joubert, « La mystique à Qumrân : regards historiographiques et déconstruction de la notion », dans C. Batsch – M. Vârtejanu-Joubert (éd.), Manières de penser dans l ’Antiquité méditerranéenne et orientale. Mélanges offerts à Francis Schmidt par ses élèves, ses collègues et ses amis, Leyde, 2009, p. 23-36 ; D. H amidović , « La contribution des Cantiques de l ’holocauste du sabbat à l’étude de la pensée mystique juive au tournant de l’ère chrétienne », dans S. C. M imouni – M. Scopello (éd.), La mystique théorétique et théurgique dans l ’antiquité gréco-romaine. Judaïsmes et christianismes, Turnhout, 2016, p. 303-319. 2. Voir par exemple, R. Elior , The Three Temples. On the Emergence of Jewish Mysticism, Oxford, 2004, qui crée un lien direct entre la Liturgie angélique et les écrits mystiques des Hekhalot, contrairement à P. Schäfer , The Origins of Jewish Mysticism, Tubingue, 2009. Voir aussi M. Himmelfarb , « Merkavah Mysticism since Scholem : Rachel Elior’s The Three Temples », dans H. Himmelfarb (éd.), Between Temple and Torah, Tubingue, 2013, p. 307-325.
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Le sacerdoce est indispensable et en même temps, il n’est pas primordial. C’est la liturgie qui est déterminante. Ainsi, en troisième lieu, nous montrerons l’importance et l’influence de cette liturgie pour l’auto-identification et la compréhension de la réalité liturgique de la yaḥad. Nous présenterons en effet une interprétation des Cantiques de l ’holocauste du sabbat dans le contexte des autres manuscrits de la mer Morte, même si la possibilité que les Cantiques précèdent la yaḥad est discutée.
I. La Liturgie angélique (4Q400-407 ; 11Q17 et Mas1k) 1. Manuscrits et reconstitution Les fragments de dix manuscrits de la Liturgie angélique ont été retrouvés. Huit manuscrits proviennent de la grotte 4 (4Q400-407), et un manuscrit de la grotte 11 (11Q17). Une copie a été également découverte à Massada (Mas1k). Cela montre l’importance de cette Liturgie, mais aussi sa diffusion 3. Les différentes copies datent de différentes périodes. Le manuscrit le plus ancien est daté paléographiquement vers 75-50 avant notre ère (4Q400) ; la copie la plus récente est celle de Massada (env. 50 de notre ère) 4 . Ces manuscrits ont un format très différent. Certains sont très petits (4Q403) de sorte que « the minute script and narrow lines make it difficult to imagine as useful in the course of a liturgical performance. It
3. John Strugnell présentait en 1959 à Oxford les premiers fragments de la grotte 4 de ces Cantiques. Voir J. Strugnell , « Angelic Liturgy at Qumran. 4Q ̑ lat Haššabāt », dans G. W. A nderson – P. A. H. de Boer – G. R. Serek Šîrȏt ‘O Castellino et al., Congress Volume Oxford 1959, Leyde, 1960, p. 318-345. Une édition critique de toutes les copies de la grotte 4 a été développée par Carol Newsom en 1982 dans sa thèse de doctorat. En 1985 elle a publié une édition de tous les manuscrits trouvés à Qumrân et Massada. Voir C. A. Newsom, Songs of the Sabbath Sacrifice. A critical edition, Atlanta/Géorgie, 1985. En 1998 les Cantiques de l ’holocauste du sabbat ont été édités dans la série « Discoveries in the Judaean Desert ». Voir C. A. Newsom, Qumran Cave 4 VI: Poetical and Liturgical Texts, Part 1, Oxford, 1998, p. 173-401 et F. García M artínez – E. J. C. Tigchelaar – A. S. van der Woude , Qumran Cave 11 II: 11Q2-18, 11Q20-31, Oxford, 1998, p. 259-304, Pl. XXX-XXXIV, LIII. Une autre édition critique suivait 1999 dans la collection Princeton Theological Seminary Dead Sea Scrolls Project aussi de C. A. Newsom – J. H. Charlesworth, « Angelic Liturgy: Songs of the Sabbath Sacrifice (4Q400-4Q407, 11Q17, Mas1k) », dans J. H. Charlesworth (éd.), The Dead Sea Scrolls. Hebrew, Aramaic, and Greek Texts with English Translations vol. 4B, Tubingue-Louisville/Kentucky, 1999. L’influence de Newsom sur l’interprétation de ces Cantiques est donc importante. 4. Voir C. A. Newsom – J. H. Charlesworth, « Angelic Liturgy: Songs of the Sabbath Sacrifice (4Q400-4Q407, 11Q17, Mas1k) », dans J. H. Charlesworth (éd.), The Dead Sea Scrolls. Hebrew, Aramaic, and Greek Texts with English Translations vol. 4B, Tubingue-Louisville/Kentucky, 1999, p. 1-2.
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is more likely as a scholar’s personal copy for study » 5. D’autres rouleaux sont plus grands et plus étendus (4Q400 et 4Q405), probablement utiles au cours d’une lecture liturgique. Carol Newsom a reconstitué sur la base de ces dix manuscrits fragmentés ou très fragmentés un cycle de treize cantiques 6. Pour quelques cantiques, aucun fragment ne se laisse classer (p. ex. Cantique 3) ou seulement de façon incertaine avec très peu de texte (Cantiques 4, 9 ou 10). Néanmoins, quelques passages peuvent être reconstitués de façon presque complète (des Cantiques 6 ou 8) 7.
2. Contenu Malgré ces lacunes il est possible de retrouver le contenu de ce cycle de treize cantiques. Tous les chants commencent par une introduction identique 8. Mais le corpus des chants varie beaucoup au niveau du style 5. D. K. Falk , « Material Aspects of Prayer Manuscripts at Qumran », dans C. L eonhard – H. L öhr (éd.), Literature or Liturgy? Early Christian Hymns and Prayers in Their Literary and Liturgical Context in Antiquity, Tubingue, 2014, p. 33-87 (citation p. 69-70). 6. Dans cet article je me base sur la reconstitution de C. A. Newsom – J. H. Charlesworth, « Angelic Liturgy: Songs of the Sabbath Sacrifice (4Q400-4Q407, 11Q17, Mas1k) », dans J. H. Charlesworth (éd.), The Dead Sea Scrolls. Hebrew, Aramaic, and Greek Texts with English Translations vol. 4B, Tubingue-Louisville/ Kentucky, 1999. 7. Deux fragments ont été traduits en français dans les écrits intertestamentaires de la Bibliothèque de la Pléiade : La Bible. Écrits intertestamentaires, A. DupontSommer – M. Philonenko (éd.), Paris, 1987, p. 431-440. Une traduction plus complète a été présentée par André Caquot dans un article de la Revue d ’histoire et de philosophie religieuses, dans lequel il a noté que cette traduction paraîtrait dans le deuxième tome des « Écrits intertestamentaires II ». A. Caquot, « Les Cantiques Qoumrâniens de l’holocauste du sabbat. (Première traduction française accompagnée de brefs commentaires des ‘Cantiques de l’holocauste du sabbat’ édités en 1985 par Ms. Carol Newsom d’après les manuscrits de la grotte 4 de Qoumrân) », Revue d ’histoire et de philosophie religieuses 77 (1997), p. 1-29. Voir aussi G. Brixius , « La Liturgie Angélique. Des Chants pour le Sacrifice du Sabbat de Qumrân à la littérature mystique des Hekhalot », Thèse de doctorat sous la direction de M. Philonenko, Université de Strasbourg, 2001. Pourtant, cette thèse n’a jamais été publiée. 8. Celle-ci est formée de la dédicace « pour le maskil » ()למשכיל, puis de l’indication qu’il s’agit d’un chant pour le sacrifice du sabbat ()שיר עולת השבת, puis du numéro du sabbat avec la date (p. ex. )השבת הראישונה בארבעה לחודש הראישון. Les chants commencent tous par l’exclamation « hallélou » ()הללו, et l’objet direct de la louange, c’est-à-dire d’une épithète de Dieu (p. ex. « Louez le Dieu de toutes les hauteurs » אלוהי מרומים4Q403 1 i 30), et d’un vocatif (p. ex. « vous tous les dieux doués de connaissance » 4Q403 1 i 30). Voir C. A. Newsom – J. H. Charlesworth, « Angelic Liturgy: Songs of the Sabbath Sacrifice (4Q400-4Q407, 11Q17, Mas1k) », dans J. H. Charlesworth (éd.), The Dead Sea Scrolls. Hebrew, Aramaic, and Greek Texts with English Translations vol. 4B, Tubingue-Louisville/ Kentucky, 1999, p. 3.
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et du contenu. En ce qui concerne le contenu et la langue, trois sections sont perceptibles 9. Dans les cinq premiers cantiques, qui forment la première section, il s’agit de la fondation du culte céleste. Le premier cantique parle de l’installation des anges dans leur service sacerdotal céleste et de leur responsabilité. Dans le deuxième cantique, cette action des anges, à laquelle la communauté terrestre participe avec étonnement, est admirée. Pour les cantiques trois et quatre, peu, voire aucun, des fragments ne se laissent identifier. Le contenu reste alors inconnu. Le cinquième cantique est mieux conservé. Il parle de la bataille eschatologique et chante les œuvres glorieuses de Dieu, fondées dans la création, la providence et la prédestination. Dans la deuxième section des cantiques six, sept et huit, le texte est bien plus facile à reconstituer. Cette partie est écrite dans un style « grandiloquent » (A. Dupont-Sommer) et est formée autour du chiffre sept, illustrant ainsi la structure septuple du sacerdoce céleste 10. Au centre se trouve l’appel à la louange, ce qui amène à la description de la louange totale dans le saint de saints, à laquelle participent tous les esprits, chérubins et ophanim, et même la décoration et les « merkavoth ». Dans la dernière section des cantiques 9 à 13, sont progressivement décrits l’endroit et la caractéristique du culte. La description commence avec les portails du temple (Cantique 9), se poursuit jusqu’à la merkava (Cantique 11 et 12) et se conclut par le service du sacrifice des anges-prêtres dans le saint des saints (Cantique 13).
3. Conclusion La quantité des manuscrits retrouvés prouve une certaine diffusion et surtout l’importance de ces Cantiques pour la communauté de Qumrân, et au-delà (Massada). Le contenu des Cantiques est d’une grande diversité : Création, providence de Dieu, guerre, royaume de Dieu, louanges, bénédiction, Temple, merkava, sacrifice. Mais les différents thèmes sont liés par le fait qu’ils sont tous attachés au service sacerdotal des anges dans le lieu saint céleste, installé par Dieu pour la gloire de sa sainteté. C’est pourquoi le cycle ne décrit pas un thème, ni une action, mais la réalité du culte dans sa gloire céleste au temps du sacrifice du sabbat.
9. Voir C. A. Newsom, Songs of the Sabbath Sacrifice. A Critical Edition, Atlanta/Géorgie, 1985, p. 14-16. 10. D. H amidović , « La contribution des Cantiques de l ’holocauste du sabbat à l’étude de la pensée mystique juive au tournant de l’ère chrétienne », dans S. C. M imouni – M. Scopello (éd.), La mystique théorétique et théurgique dans l ’antiquité gréco-romaine. Judaïsmes et christianismes, Turnhout, 2016, p. 309-311 parle de « l’hébreu maniéré ».
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II. Les éléments sacerdotaux de la Liturgie angélique Dans ce deuxième chapitre nous distinguerons les éléments sacerdotaux de la réalité liturgique décrite. La conclusion montrera qu’il faudra, dans un troisième temps, analyser la relation entre prêtres et liturgie.
1. Thématique Les Cantiques de l ’holocauste du sabbat sont étroitement liés aux thèmes sacerdotaux, ce qui ne surprend pas, car ils parlent du culte céleste. Les anges y sont désignés comme prêtres. Au début du premier cantique, nous pouvons lire dans 4Q400 1 i 3-4 : [בקדושיעד קדושי קדושים ויהיו לו לכוהני [משרתי פנים בדביר כבודו
] 3 ] 4
[ ] parmi les saints de toujours, saints d’entre les saints, et ils sont devenus pour Lui des prêtres 4 [ ] ministres de la Face dans Son sanctuaire glorieux 11 3
De même, on lit dans 4Q400 1 i 19-20 12 : ות יסד לו כוהני קורב קדושי קדושים°[ [ל[ ] אלים כוהני מרומי רום
] 19 ] 20
[ ]°wt Il a établi pour Lui-même des prêtres du proche (accès), saints entre les saints 20 [ ]l[ ] dieux, prêtres des lieux les plus hauts 13 19
Par les termes « saints » et « dieux » sont évoqués les anges. Ils sont nommés d’ailleurs quatorze fois dans les manuscrits avec le terme « messager » ( )מלאך14. Mais la plupart du temps ils sont décrits à l’aide de formulations complexes, ce qui montre la haute estime de ces êtres, qui sont devenus pour Dieu des ministres de la Face dans son sanctuaire glorieux. Ils sont 11. Traduction A. Caquot, Les Cantiques Qoumrâniens de l’holocauste du sabbat. (Première traduction française accompagnée de brefs commentaires des « Cantiques de l’holocauste du sabbat » édités en 1985 par Ms. Carol Newsom d’après les manuscrits de la grotte 4 de Qoumrân) », Revue d ’histoire et de philosophie religieuses 77 (1997), p. 4. 12. Cf. 4Q400 1 i 10,17 ; 4Q403 1 ii 19 ; 4Q405 23 i 3. 13. Traduction A. Caquot, « Les Cantiques Qoumrâniens de l’holocauste du sabbat. (Première traduction française accompagnée de brefs commentaires des ‘Cantiques de l’holocauste du sabbat’ édités en 1985 par Ms. Carol Newsom d’après les manuscrits de la grotte 4 de Qoumrân) », Revue d ’histoire et de philosophie religieuses 77 (1997), p. 5. 14. Par exemple, 4Q403 1 ii 23 ; 4Q405 17,4-5 ; 19,7 ; 20-22 ii 9 ; 23 i 8 ; 49,3 ; 81,2 ; 4Q407 1,3 ; 11Q17 VI 7 ; IX 9 ; X 6 ; 37,1 (11Q17 se base sur la reconstitution de F. García M artínez – E. Tigchelaar – A. S. van der Woude , Qumran Cave 11 II : 11Q2-18, 11Q20-31, Oxford, 1998, p. 259-304).
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appelés קודש[ים ֯ ( קדושי קודש4Q400 1 ii 6) ou même אלוהי כול קדושי ( קדשים4Q400 1 i 2) 15. A côté de ces êtres célestes sont nommés quelquefois les Chérubins et Ophanim, à proximité immédiate du trône (p. ex. 11Q17 16-18,9-15). Mais, ils font plutôt partie d’un environnement vivant, comme « les seuils d’entrée et les portes de sortie font entendre la gloire du Roi en bénissant et célébrant » (5Q405 23 i 9). Cette personnification de réalités matérielles du temple se trouve dans plusieurs cantiques 16. Outre leur désignation en tant que prêtres, on peut aussi voir un aspect sacerdotal de leur fonction. Les anges célèbrent, exaltent et bénissent Dieu selon leur connaissance (4Q400 2,3). Cette fonction des princes-prêtres est décrite surtout dans le deuxième regroupement, comprenant les cantiques 6 à 8. Mais les anges ne se tournent pas exclusivement vers Dieu, mais aussi vers l’homme pour bénir tous ceux dont les chemins sont parfaits (4Q405 13,6). Cependant ils ne bénissent pas seulement ceux-ci, mais « ils feront l’expiation (qui rend) Sa grâce à tout pénitent » 17, comme il est écrit dans le premier cantique (4Q400 1 i 16). L’action des anges ne semble alors pas détachée de la terre et simplement fixée sur Dieu. Leur service est aussi significatif pour tous les gens qui se détournent du péché et qui veulent suivre le chemin de la connaissance. L’expiation décrit un acte typiquement sacerdotal, lié au sacrifice. Même si les tâches principales des anges sont la louange et la bénédiction, il ne faut pas ignorer que les treize cantiques sont écrits pour le sacrifice du sabbat. Ainsi le cycle parle à plusieurs reprises du sacrifice. Néanmoins, les dix passages dans les cantiques 2, 6, 8, 12 et 13 représentent un thème secondaire, intégré dans un contexte plus vaste (4Q400 2,7 / 4Q403 1 i 22 / 4Q405 3,6 / 4Q403 1 ii 26 / 4Q405 23 i 5-6 / 11Q17 21-22,3-5 / 4Q405 23 ii 12). Et il faut considérer que dans les cantiques 2, 6, 8 et dans un passage du cantique 13, il est question d’un sacrifice spirituel, intégré dans le contexte de la louange des anges. 15. Cf. 4Q400 1 ii 7 ; 4Q403 1 i 31-33. Il n’est pas toujours évident de trancher si les termes אליםet אלוהיםdésignent les anges ou bien Dieu, du fait du caractère fragmentaire des textes. Grâce à la même introduction, on peut néanmoins déduire qu’à l’impératif suit une épithète de Dieu, puis un vocatif qui s’applique aux anges (4Q403 1 i 30-31). Par conséquent ces termes s’appliquent aux êtres célestes qui sont invités à louer Dieu. 16. Voir R. S. Boustan, « Angels in the Architecture. Temple Art and the Poetics of Praise in the Songs of the Sabbath Sacrifice », dans R. S. Boustan – A. Yoshiko R eed (éd.), Heavenly Realms and Earthly Realities in Late Antique Religions, Cambridge, 2004, p. 195-212. 17. Traduction A. Caquot, « Les Cantiques Qoumrâniens de l’holocauste du sabbat. (Première traduction française accompagnée de brefs commentaires des ‘Cantiques de l’holocauste du sabbat’ édités en 1985 par Ms. Carol Newsom d’après les manuscrits de la grotte 4 de Qoumrân) », Revue d ’histoire et de philosophie religieuses 77 (1997), p. 5.
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Le terme עולהn’est utilisé que dans l’introduction. Dans le deuxième cantique, il est abordé « l’offrande de notre langue de poussière parmi la connaissance des di[eux] » (4Q400 2,7), ce qui est comparable à la connaissance des anges. Dans le sixième cantique est décrite la bénédiction du sixième des princes-prêtres qui « bless all those whose way is perfect with seven wondrous words, as a continual compassion » (Traduction Newsom). On suppose une formulation comparable dans le huitième cantique (4Q405 13,6), mais ce cantique parle auparavant des « offrandes de leurs langues » (̇( )ותרומת לשונ֯ י֯ ֯ה ם4Q403 1 ii 26). Cela montre que le sacrifice peut aussi être présenté spirituellement. Dans le douzième cantique il s’agit probablement du sacrifice total (4Q405 23 ii 5-6). Et dans le treizième cantique se trouvent différents termes pour le sacrifice : ריח נסכיהם/ ריח מנחותם/ לזבחי קדושים, mais il s’agit aussi du sacrifice de la langue de connaissance ( תרומות לשוני דעת4Q405 23 ii 12). Cela montre que le titre Cantiques de l ’holocauste du sabbat ne décrit pas le sacrifice hebdomadaire en tant que tel, mais le transforme en un contexte liturgique et cosmique. Ceci est également démontré par le fait que les sacrifices du sabbat sont comptés. Il ne s’agit pas du sacrifice individuel du sabbat d’un jour particulier (pour lequel la date aurait été suffisante), mais d’un cycle qui dévoile une réalité plus vaste 18. La signification du titre « chants de sacrifice du sabbat » ne donne donc pas de définition du contenu, mais indique plutôt l’occasion pour laquelle cette vue cosmique sera révélée. Un autre aspect sacerdotal est donné avec le temple, qui représente le lieu du service des prêtres. Bien que le terme היכלne soit mentionné qu’une seule fois et que par contre, le terme מעוןsoit évoqué huit fois 19, c’est sans doute dans le temple que la Liturgie angélique est décrite. Cependant, seul le véritable sanctuaire est en vue, sans les « parvis ». Comme déjà expliqué plus haut, la description se focalise vers le centre, c’est-à-dire le saint des saints. Dans le dixième cantique est décrite la parokhet (4Q405 15-16 ii 3-5), dans le onzième cantique le saint des saints (4Q405 19,2-8) et dans le douzième cantique le trône de la merkava (4Q405 20-22 ii 6-14). Dans le dernier cantique, le regard se tourne encore une fois vers les anges-prêtres, dont la robe, dans le contexte du sacrifice, est présentée en détail (4Q405 23 ii 1-13). A cause de cette concentration vers le saint des saints, il n’est pas étonnant, que le terme דבירsoit utilisé plus de 30 fois dans les manuscrits (4Q400-407 et 11Q17). Pourtant, mis 18. Voir C. A. Newsom, Songs of the Sabbath Sacrifice. A Critical Edition, Atlanta/Géorgie, 1985, p. 18-19. 19. B. A. Strawn, « art. » היכל, dans H.-J. Fabry – U. Dahmen (éd.), Theologisches Wörterbuch zu den Qumrantexten, I, Stuttgart, 2011, col. 779-781. Le terme ןועמdécrit la demeure de Dieu étendue au ciel, entourée des êtres célestes. F. M arx, « art. » מעון, dans H.-J. Fabry – U. Dahmen (éd.), Theologisches Wörterbuch zu den Qumrantexten, II, Stuttgart, 2013, col. 728-730.
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à part cela, ce terme n’est trouvé que deux fois de plus dans les manuscrits de la mer Morte, à condition d’accepter les reconstitutions proposées (4Q392 1,9 et 11Q19 9,13) – un fait encore à considérer dans le prochain paragraphe. Finalement dans le debîr réside Dieu, le Roi. Ce thème du royaume de Dieu est très important dans la Liturgie angélique. Ce sujet a été abordé dans un article de Jean Carmignac en 1986, et quelques années plus tard dans une analyse détaillée par Anna Maria Schwemer : 20. Les Cantiques parlent souvent des « trônes de sa gloire royale » (p. ex. 4Q405 23 i 3). Et les anges « disent la majesté de son règne » (4Q400 2,3) et « la magnificence de (sa) royauté » (4Q400 1 ii 3). C’est pourquoi ils sont appelés les « anges du roi » (( )מלאכי מלך4Q403 1 ii 23) et souvent les « princes » ( ; נשיאיםpar exemple, 4Q403 1 ii 20). L’intensité de ce vocabulaire royal est unique dans le judaïsme ancien 21. Elle rappelle néanmoins la théologie du temple de Jérusalem. Comme le temple à Jérusalem était le siège de Dieu, le roi (cf. les Psaumes 29 et 103 ou Isaïe 6), le temple céleste dans la Liturgie angélique est la demeure du roi. Comme les prêtres dans le temple terrestre servaient ce roi divin, les prêtres-anges servent dans le temple céleste le « roi des rois » (4Q403 1 i 34) ou le « roi de tout » (4Q403 1 i 28). Pour cette communauté de Qumrân, qui s’est séparée du temple terrestre, la description du culte céleste ne pouvait pas être simplement une description visionnaire ou une espérance eschatologique. La conclusion proposée par Schwemer mentionnant que les Cantiques de l ’holocauste du sabbat servent à la légitimation du sacerdoce qumrânien est alors concevable et confirme l’interprétation de Carol Newsom 22. Cette conclusion sera approfondie dans la suite de cet article. Les aspects thématiques montrent alors que le cycle est fortement influencé par le thème du sacerdoce : les titres des anges, la fonction des anges, l’endroit du temple et la désignation de Dieu comme roi. Tous ces éléments mettent en évidence le sacerdoce. C’est pourquoi il est aussi compréhensible que certains tirent la conclusion que ces Cantiques dérivent des cercles sacerdotaux 23. Pourtant ces cercles sacerdotaux restent flous24 . 20. Voir J. Carmignac , « Roi, Royauté et Royaume dans la Liturgie Angélique », Revue de Qumrân 46 (1986), p. 177-186, et A. M. Schwemer , « Gott als König und seine Königsherrschaft in den Sabbatliedern aus Qumran », dans M. H engel – A. M. Schwemer (éd.), Königsherrschaft Gottes und himmlischer Kult im Judentum, Urchristentum und in der hellenistischen Welt, Tubingue, 1991, p. 45-118. 21. Par contre l’usage ressemble à la littérature Hekhalot. 22. Voir A. M. Schwemer , « Gott als König und seine Königsherrschaft in den Sabbatliedern aus Qumran », dans M. H engel – A. M. Schwemer (éd.), Königsherrschaft Gottes und himmlischer Kult im Judentum, Urchristentum und in der hellenistischen Welt, Tubingue, 1991, p. 45-118. 23. « If the Songs of the Sabbath Sacrifice did not originate at Qumran, one should likely seek their origin among the priestly-scribal circles responsible for texts
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2. Linguistique Du point de vue linguistique, la situation semble être moins évidente. Noam Mizrahi a présenté une analyse exemplaire qui met l’accent sur une tradition sacerdotale 25. En s’appuyant sur les trois termes ממולח, ריח,דבי ר טוהר, il prouve que les treize cantiques n’utilisent pas typiquement le vocabulaire sacerdotal qui se veut différent des écrits bibliques sacerdotaux. Il montre que l’utilisation du terme דבירest exceptionnelle non seulement pour Qumrân, mais aussi pour les écrits bibliques sacerdotaux. De toute évidence, l’écrivain (ou les écrivains) des Cantiques se sont orientés librement vers différents écrits de la Bible, dont le Pentateuque, Ezéchiel, les Livres des Rois, des Chroniques, et les Psaumes. Mais Noam Mizrahi such as Jubilees or the Aramaic Testament of Levi (1Q21, 4Q213-4Q214, 4Q540541) ». Voir C. A. Newsom – J. H. Charlesworth, « Angelic Liturgy: Songs of the Sabbath Sacrifice (4Q400-4Q407, 11Q17, Mas1k) », dans J. H. Charlesworth (éd.), The Dead Sea Scrolls. Hebrew, Aramaic, and Greek Texts with English Translations vol. 4B, Tubingue-Louisville/Kentucky, 1999, p. 5. Ou J. Maier qui suppose que la base de la Liturgie angélique dérive d’une liturgie sacerdotale au temple ; J. M aier , « Zu Kult und Liturgie der Qumrangemeinde », Revue de Qumrân 14 (1989/90), p. 572. Pourtant la provenance reste une question de controverse. Tandis que C. A. Newsom supposait d’abord une paternité littéraire dans le contexte de Qumrân (C. A. Newsom, Songs of the Sabbath Sacrifice. A Critical Edition, Atlanta/Géorgie, 1985, p. 1-4), elle s’est prononcée plus tard pour une composition antérieure à Qumrân (C. A. Newsom, « ‘Sectually Explicit’ Literature from Qumran », in W. H. P ropp – B. H alpern – D. N. Freedman (éd.), The Hebrew Bible and Its Interpreters. Winona Lake/Indiana, 1990, p. 167-187). Cela a ensuite déterminé l’opinion majoritaire. Néanmoins, d’autres hésitent à prendre une décision, par exemple, J. L. A ngel , Otherworldly and Eschatological Priesthood in the Dead Sea Scrolls, Leyde, 2010, p. 85-87. Moi-même je plaide pour une provenance sectaire ; voir M. R. Jost, « The Liturgical Communion of the Yahad with the Angels: The Origin of the Songs of the Sabbath Sacrifice Reconsidered », Dead Sea Discoveries (accepted). 24. David Hamidović doute donc à juste titre du lien avec le livre des Jubilés : « On ne peut suivre, cependant, la datation des Cantiques de l ’holocauste du sabbat au iii e siècle avant notre ère, ‘if not earlier’ selon C. Newsom et J. H. Charlesworth, avec le livre des Jubilés et le Testament araméen de Lévi sous prétexte de caractéristiques communes : un milieu rédacteur sacerdotal, la comparaison des prêtres avec les anges. La comparaison des prêtres avec les anges est, certes, rare dans la littérature juive antérieure à l’ère chrétienne, mais on ne peut s’appuyer sur ce seul motif car les contextes de ces trois écrits sont bien différents et des nuances peuvent être apportées sur la relation pensée entre les prêtres et les anges. De plus, la reconnaissance d’un milieu sacerdotal rédacteur du livre des Jubilés demeure débattue. » (D. H amidović , « La contribution des Cantiques de l ’holocauste du sabbat à l’étude de la pensée mystique juive au tournant de l’ère chrétienne », dans S.-C. M imouni – M. Scopello (éd.), La mystique théorétique et théurgique dans l ’antiquité grécoromaine. Judaïsmes et christianismes, Turnhout, 2016, p. 315). 25. N. M izrahi, « The Songs of the Sabbath Sacrifice and Biblical Priestly Literature: A Linguistic Reconsideration », Harvard Theological Review 104 (2011), p. 33-57.
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ajoute avec raison que la catégorie de « priestly literature » (« écrits sacerdotaux ») est anachronique : « The author of the Songs had no special relation to the priestly literature because no such literature – as a distinct and recognizable body of texts – was ever available to him » 26. Donc, Mizrahi en arrive à la conclusion que ces observations linguistiques ne suffisent pas pour décider, si l’auteur ou les auteurs étaient des prêtres. Mais, au cas où ils appartiendraient au sacerdoce, il serait possible d’observer une telle modification profonde de la définition de cette conception appliquée à la période du Second Temple que la relation de ce groupe avec le cercle sacerdotal serait obscure 27.
3. Liturgique Une troisième possibilité de trouver des aspects sacerdotaux dans les Cantiques réside dans la perspective liturgique. Il est évident que ces Cantiques ne présentent pas seulement une œuvre littéraire, mais un texte liturgique. Plusieurs indices suggèrent cette conclusion 28. En effet, l’introduction par la date exacte fixée pour la lecture et la dédicace pour le maskil montrent un usage liturgique (cf. 4Q511). Toutefois, les Cantiques ne décrivent pas la situation d’un individu, mais la situation de la communauté à la première personne du pluriel (4Q400 2,6-8). Il en va de même pour le contenu qui ne parle pas d’une situation personnelle, mais au contraire d’une vue communautaire et cosmologique 29. Dans la recherche 26. N. M izrahi, « The Songs of the Sabbath Sacrifice and Biblical Priestly Literature: A Linguistic Reconsideration », Harvard Theological Review 104 (2011), p. 57. 27. « An alternative possibility is to maintain the argument that the Songs stems from a priestly provenance, but this would entail a profound and far-reaching change of the definition of this notion as applied to the Second Temple period. If the Songs is a priestly work, then it represents a cultural phenomenon and a social circle that are divorced from a special connection to the communities underlying biblical priestly literature. » N. M izrahi, « The Songs of the Sabbath Sacrifice and Biblical Priestly Literature: A Linguistic Reconsideration », Harvard Theological Review 104 (2011), p. 57. 28. Des critères indiquant un usage liturgique sont définis par E. Schuller , « Some Reflections on the Function and Use of Poetical Texts Among the Dead Sea Scrolls », dans E. G. Chazon – R. Clements – A. P innick (éd.), Liturgical Perspectives: Prayer and Poetry in Light of the Dead Sea Scrolls. Proceedings of the Fifth International Symposium of the Orion Center for the Study of the Dead Sea Scrolls and Associated Literature (19-23 January 2000), Leyde, 2003, p. 174 ; B. Nitzan, « The Dead Sea Scrolls and the Jewish Liturgy », dans J. R. Davila (éd.), The Dead Sea Scrolls as Background to Postbiblical Judaism and Early Christianity, Papers from an International Conference at St. Andrews in 2001, Leyde, 2003, p. 195-219 et D. K. Falk , Daily, Sabbath, and Festival Prayers in the Dead Sea Scrolls, Leyde, 1998, p. 16. 29. Voir E. Schuller , « Some Reflections on the Function and Use of Poetical Texts Among the Dead Sea Scrolls », dans E. G. Chazon – R. Clements – A. P in-
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sur la Liturgie angélique, les efforts portent justement sur une structure antiphonale. En raison de critiques textuelles du sixième cantique qui montrent une ambivalence entre l’utilisation du singulier et du pluriel, Noam Mizrahi a étudié à frais nouveaux la structure de ce cantique et est arrivé à la conclusion qu’il s’agit d’une liturgie antiphonale 30. Le sixième cantique est structuré de sept paroles parallèles. Il a souvent été allégué que chacune des sept paroles appartenait à un des sept princesanges. Dans ce cas-là, les formes au pluriel dans 4Q405 sont incompréhensibles. Une nouvelle lecture de שבעה בשבעהdonne la possibilité de séparer chaque parole liturgiquement. Ainsi, après les sept paroles merveilleuses déclamées par l’un des princes-anges, l’ensemble des sept anges lui donne réplique par sept paroles merveilleuses. Mizrahi trouve une confirmation de cette lecture dans les différentes épithètes utilisées dans les deux parties qui, de plus, montrent des variantes du point de vue syntactique. Tandis qu’une partie nomme une épithète divine, une épithète royale suit dans l’autre partie. Enfin, il ajoute des observations prosodiques : la deuxième partie forme respectivement des unités rythmiques courtes, contrairement à la première partie. La conséquence que tire Noam Mizrahi, est que ces paroles représentent une liturgie antiphonale, par la distinction entre la parole du prince-ange et la réponse de tous les sept princes-anges. La somme des observations individuelles justifie l’interprétation. Quoique nous n’ayons avec cela qu’un exemple dans le cycle, les cantiques sont à lire comme « a poetic composition of essential polyphony ». Mais, si nous cherchons des aspects sacerdotaux dans la Liturgie, il faut discerner deux niveaux. D’un côté le niveau du texte, donc ce que le texte dit sur la liturgie, et de l’autre côté le niveau performatif, c’est-à-dire la signification liturgique dans l’accomplissement des Cantiques. Comme déjà mentionné plus haut, les cantiques ont une formule d’introduction. Il est à remarquer que les cantiques sont dédicacés au maskil. Le maskil n’est pas un titre typiquement sacerdotal, mais plutôt un terme de la sagesse, aussi utilisé dans les Psaumes (Ps 32 ; 42 ; 44, etc.) et dans le texte apocalyptique de Dn 12,1-3. Dans les textes de la mer Morte il décrit une figure idéale, qui représente tous les membres de la communauté 31. Pour(éd.), Liturgical Perspectives: Prayer and Poetry in Light of the Dead Sea Scrolls. Proceedings of the Fifth International Symposium of the Orion Center for the Study of the Dead Sea Scrolls and Associated Literature (19-23 January 2000), Leyde, 2003, p. 174. 30. Voir N. M izrahi, « Earthly Liturgy and Celestial Music », dans J. Frey – M. R. Jost (éd.), Gottesdienst und Engel im antiken Judentum und frühen Christentum, Tubingue, 2017, p. 119-139. 31. Voir C. A. Newsom, The Self as Symbolic Space. Constructing Identity and Community at Qumran, Leyde, 2004; J. L. A ngel , « Maskil, Community, and Religious Experience in the Songs of the Sage (4Q510-511) », Dead Sea Discoveries 19 (2012), p. 1-27 ; J. H. Newman, « The Thanksgiving Hymns of 1QHa and the
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tant, le texte montre, avec la description du culte céleste des anges-prêtres sans doute, que les prêtres sont au centre. Ce sont eux qui sont appelés à louer, bénir et sacrifier. Le sacerdoce terrestre ne peut cependant pas imiter à l’identique le sacerdoce céleste, car il s’agit d’un sacerdoce septuple. Il y a sept princes suprêmes et sept princes-prêtres de second rang (huitième Cantique). Ainsi, le sacerdoce terrestre peut tendre vers le sacerdoce céleste, mais dans son accomplissement, les dimensions célestes surpassent les possibilités terrestres. Il est donc intéressant d’analyser, jusqu’à quel point le sacerdoce terrestre a lui-même participé à la Liturgie. Seul un passage nous donne pour cela des indices explicites. Ces lignes sont cependant d’une grande importance (4Q400 2,6-8) : ] [ [
מה נתחשב [ב]ם וכוהנתנו מה במעוניהם וק[ודשנו6 ̊[י]ה ֗ם [מה] תרומת לשון עפרנו בדעת אל̊[ים ֗ ק̊ודש7 8 ][ ל̊[ר]נתנו נרוממה לאלוהי דעת
Pour quoi nous comptons-nous [parmi] eux ? Et notre sacerdoce, qu’est-il dans leurs demeures ? Et [notre] sain[teté ] 7 leur sainte[té ? Qu’est] l’offrande de notre langue de poussière parmi la connaissance des di[eux] ? 8 [ ] notre ju[bi]lation. Exaltons le Dieu de la connaissance [ ] 6
Ces questions rhétoriques présentent une réflexion des membres de la communauté sur eux-mêmes. Elles montrent qu’ils se comprennent en présence du sacerdoce céleste et qu’ils y participent activement. La compréhension correcte de חשבest cruciale pour notre étude (4Q400 2,6). La composition du verbe au mode hitpaël avec la préposition ב, qui se propose dans la reconstitution, est à traduire par « se compter parmi » ou « se considérer parmi » 32. La préposition בn’exprime pas de comparaison du Construction of the Ideal Sage through Liturgical Performance », dans J. Baden – H. Najman – E. Tigchelaar (éd.), Sibyls, Scriptures, and Scrolls : John Collins at Seventy, Leyde, 2016, p. 940-957 ; T. Elgvin, « art. » משכיל, dans H.-J. Fabry – U. Dahmen (éd.), Theologisches Wörterbuch zu den Qumrantexten, II, Stuttgart, 2013, col. 802-806. Voir aussi M. R. Jost, « Yaḥad, Maskil, Priests and Angels – Their Relation in the Community Rule (1QS) », dans J. Jokiranta – M. Z ahn (éd.), Law, Literature, and Society in Legal Texts from Qumran. Papers from the Ninth Meeting of the International Organisation for Qumran Studies, Leuven 2016, Leyde, 2019, p. 207-229. 32. La traduction au sens réfléchi du verbe au mode hitpaël est à préférer du sens passif, notamment parce que les nifal et hofal sont aussi utilisés. Combiné avec le pronom interrogatif מהle verbe se réfère normalement à une question réfléchie (cf. Gn 42,1 ; 44,16 ; 1 Sam 29,4 ; 2 Rois 14,10 ; Jr 49,4 ; Ps 52,3). L’analyse de D. Dimant, « On Righteous and Sinners. 4Q181 Reconsidered », dans D. Dimant (éd.), History, Ideology and Bible Interpretation in the Dead Sea Scrolls. Collected Studies, Tubingue, 2014, p. 405-421, sp. 416, est intéressante. Elle définit en se référant au Hebrew and Aramaic Lexicon of the Old Testament le sens réfléchi (« to reckon oneself among »), mais traduit en effet au sens passif (« to be reck-
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sacerdoce terrestre avec le sacerdoce céleste 33, mais indique généralement une localisation spécifique 3 4. Dans 4Q400 2,6, c’est le positionnement du sacerdoce terrestre parmi les anges ou, concrètement, dans les demeures des êtres célestes 35. Le sacerdoce terrestre affirme donc sa présence dans le temple céleste, bien que les questions montrent qu’il se considère indigne de ce lieu saint. Néanmoins, ils s’appellent prêtres. Ils se désignent euxmêmes comme ceux qui offrent des offrandes avec leurs langues. En conséquence, après les questions, le texte continue avec « notre jubilation » (4Q400 2,8). À la suite de leur prise de conscience, de leur exaltation et de leur appartenance au culte céleste, ils ne se taisent pas mais se convient à la louange. De ce fait, nous pouvons conclure que ces questions rhétoriques ne rejettent pas l’idée de la participation au culte céleste en tant qu’impossibilité 36. En même temps les questions montrent qu’ils y participent en l’accompagnant et non en le dirigeant. Le service sacerdotal des anges fait « l’expiation (qui rend) sa grâce à tout pénitent » 37 (4Q400 1 i 16), comme mentionné auparavant. Toutefois, ce n’est pas simplement une substitution du sacerdoce terrestre, car les questions prouvent qu’ils s’y voient présents et qu’ils y participent avec l’offrande de leur « langue de poussière » 38.
oned with »). A. Caquot, « Les Cantiques Qoumrâniens de l’holocauste du sabbat. (Première traduction française accompagnée de brefs commentaires des ‘Cantiques de l’holocauste du sabbat’ édités en 1985 par Ms. Carol Newsom d’après les manuscrits de la grotte 4 de Qoumrân) », Revue d ’histoire et de philosophie religieuses 77 (1997), p. 7, propose aussi une traduction passive (« serions-nous comptés parmi »). 33. Pour une comparaison avec la préposition כvoir 1QSb IV 25. 1QSb III 25-26 décrit au contraire une localisation dans le lieu céleste avec la préposition ב. 34. Voir P. Joüon, Grammaire de l ’hébreu biblique, Rome, 1996, § 133c. « Il exprime premièrement le fait de se trouver (ou de se mouvoir) dans un lieu. » 35. Cette compréhension du mot peut également être vue ailleurs, par exemple dans Nb 23,9 ou 4Q504 6,9, qui traite de l’appartenance d’Israël aux peuples. Voir aussi 1QS III 1 et III 4 ; 4Q491 11 i 14 (4Q471b 1a-d,1) ; avec la préposition עם: 4Q181 1 ii 3 ; avec la conjugaison nifal ou hofal : 1QS V 11,18. 36. Contrairement à B. Nitzan, « Harmonic and Mystical Characteristics in Poetic and Liturgical Writings from Qumran », The Jewish Quarterly Review 85 (1994), p. 163-183, sp. 182-183. 37. Traduction A. Caquot, « Les Cantiques Qoumrâniens de l’holocauste du sabbat. (Première traduction française accompagnée de brefs commentaires des ‘Cantiques de l’holocauste du sabbat’ édités en 1985 par Ms. Carol Newsom d’après les manuscrits de la grotte 4 de Qoumrân) », Revue d ’histoire et de philosophie religieuses 77 (1997), p. 5. 38. Contrairement à P. Schäfer , The Origins of Jewish Mysticism, Tubingue, 2009, p. 146 : « As far as the sacrifice is concerned, the angels in heaven have replaced the humans on earth ; there is not much left in the songs of the communion of angels and humans. Hence the urgency and gravity with which the sectarians call upon the angels to perform their duty. »
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Une question se pose encore : à qui fait référence le pronom personnel « nous » ? Qui est concerné par « notre sacerdoce » ? Pour la yaḥad, il n’est pas convaincant de voir exclusivement les prêtres présents 39. En effet, à leur réunion participent tous les membres, prêtres ou non-prêtres, à la condition qu’au moins un prêtre soit présent (1QS VI 3-4 ; VIII 1). Ensemble ils formaient le temple métaphorique (1QS VIII 5-6). Ensemble ils étaient dans la présence des anges (1QS XI 7b-8) 4 0. C’est pourquoi chaque membre peut s’émerveiller de sa situation et confesser que son sacerdoce est dans les demeures des anges. Le rôle spécifique du sacerdoce terrestre dans la performance des Cantiques de l ’holocauste du sabbat reste cependant flou. Seul le maskil est explicitement introduit. La réponse est probablement liée à la structure antiphonale que nous trouvons dans les Cantiques 41. Du point de vue liturgique, la conclusion serait que le sacerdoce terrestre participe à la Liturgie angélique, mais pas de façon exclusive, ni en tant que guides principaux.
39. D’après la supposition d’A. M. Schwemer , « Gott als König und seine Königsherrschaft in den Sabbatliedern aus Qumran », dans M. H engel – A. M. Schwemer (éd.), Königsherrschaft Gottes und himmlischer Kult im Judentum, Urchristentum und in der hellenistischen Welt, Tubingue, 1991, p. 117 : « Die besondere Feier der Sabbatlieder war vielleicht (ursprünglich ?) nur der qumranischen Priesterschaft vorbehalten. Auf der strengen Scheidung zwischen Priestern, Leviten und Laien beruhte die ganze Gemeindeordnung. » 40. Voir M. R. Jost, « Yaḥad, Maskil, Priests and Angels – Their Relation in the Community Rule (1QS) », dans J. Jokiranta – M. Z ahn (éd.), Law, Literature, and Society in Legal Texts from Qumran. Papers from the Ninth Meeting of the International Organisation for Qumran Studies, Leuven 2016, Leyde, 2019, p. 216218. 41. La possibilité que la liturgie antiphonale soit aussi chantée de façon antiphonale, est à prendre en considération. Les Berakoth 4Q286-290 donnent un indice avec la formulation וענו ואמרו. Il est certain que les réponses étaient normalement très courtes, comme p. ex. amen, amen (cf. 4Q504 1 i 7 ; 2 vii 7 ; 3 ii 3 ; 4.15 ; voir aussi les Berakoth 4Q286-290). Nous trouvons néanmoins dans les Prières quotidiennes 4Q503 une structure également dialogique (voir D. K. Falk , Daily, Sabbath, and Festival Prayers in the Dead Sea Scrolls, Leyde, 1998, p. 53). Il faut aussi considérer la description des Thérapeutes de Philon, qui témoigne d’une telle pratique (cf. de Vita Contemplativa 83-85). Ce témoignage, indépendant de l’interprétation, montre que cette pratique n’était pas inconnue à cette époque dans le judaïsme hellénistique (voir A. Lieber , « Voice and Vision: Song as a Vehicle for Ecstatic Experience in Songs of the Sabbath Sacrifice », dans C. A. Evans (éd.), Of Scribes and Sages: Early Jewish Interpretation and Transmission of Scripture. Vol. ii : Later Versions and Traditions, Londres, 2004, p. 51-58). Quoique cette question attende encore une analyse détaillée, il nous semble évident de chercher le rôle spécifique des prêtres dans la liturgie au sein même de la structure antiphonale des Cantiques.
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4. Conclusion Le cycle des Cantiques de l ’holocauste du sabbat est évidemment lié à la tradition sacerdotale. Le contenu décrit ce qui caractérise l’essence du sacerdoce : à savoir louer Dieu en sa présence au Temple au temps du sacrifice. Mais en même temps, cette composition est unique. Elle nous présente ce contenu d’une façon extraordinaire. Noam Mizrahi a montré avec des arguments linguistiques que le vocabulaire n’est pas typique des écrits sacerdotaux, et qu’il se base largement sur des textes bibliques. Du point de vue liturgique pour terminer, nous avons démontré que le sacerdoce terrestre participe, mais ni de façon exclusive ni comme dirigeant du culte. C’est par la liturgie que le sacerdoce et la communauté entière participent à la réalité du culte dans sa gloire céleste. C’est donc la liturgie elle-même qui est déterminante.
III. La Liturgie angélique comme exemple pour la « liturgisation » de la yaḥad Sacerdoce et liturgie sont essentiellement liés. Mais, l’analyse nous a amené non seulement à nous demander quelle influence a le sacerdoce sur la liturgie mais aussi l’inverse, quelle influence a la performance liturgique sur le sacerdoce.
1. L’identité des prêtres et leur identité en tant que communauté est fondée et affirmée par la liturgie L’importance et l’influence des prières liturgiques communes pour l’auto-identification de la yaḥad se trouvent non seulement dans la Liturgie angélique, mais aussi dans les autres manuscrits de la mer Morte 42 . Il faut seulement prendre conscience de l’importance de la « fête du renouvellement de l’alliance », décrite dans la Règle de la communauté (1QS I 1-III 12). Le Recueil des bénédictions (1QSb) a également son importance. Il prouve que l’autorité des prêtres n’est pas simplement présupposée. Au contraire, ils sont aussi installés (ou confirmés) dans leur service par une 42. Voir J. J. Collins , « Prayer and the Meaning of Ritual in the Dead Sea Scrolls », dans J. Penner – K. Penner – C. Wassén (éd.), Prayer and Poetry in the Dead Sea Scrolls and Related Literature. Essays in Honor of Eileen Schuller on the Occasion of Her 65th Birthday, Leyde, 2012, p. 69-85 ; R. C. D. A rnold, « The Dead Sea Scrolls, Qumran, and Ritual Studies », dans A. L ange – E. Tov – M. Weigold (éd.), The Dead Sea Scrolls in Context. Integrating the Dead Sea Scrolls in the Study of Ancient Texts, Languages, and Cultures vol. II, Leyde, 2011, p. 547-562 ; D. Stökl Ben Ezra, « When the Bell Rings. The Qumran Rituals of Affliction in Context », dans A. L ange – E. Tov – M. Weigold (éd.), The Dead Sea Scrolls in Context. Integrating the Dead Sea Scrolls in the Study of Ancient Texts, Languages, and Cultures vol. II, Leyde, 2011, p. 533-546.
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bénédiction guidée par le maskil. Et il en est de même pour le grand prêtre. Le terme de maskil n’est pas en revanche à l’origine une désignation typique pour un prêtre. Le rôle et l’importance du maskil soulignent donc la « liturgisation », même si ce dernier était probablement un prêtre. Car le maskil n’est pas libre dans son service mais lié aux règles, enseignements et prières qui lui sont imposés (1QS III 13-IV 26 et IX 12-XI 22 ; 4Q511) 43. Dans la liturgie, la communauté prenait conscience de son rôle dans le cosmos, ce qu’on peut voir, par exemple, dans les Prières quotidiennes (4Q503) et dans les Paroles de lumières (4Q504-506), et faisait ainsi l’expérience de la communauté avec les anges. Les membres de la communauté affirmaient de ce fait leur identité comme peuple saint de Dieu et de même leur rôle propre au sein du peuple de Dieu. Bien que la yaḥad fût une communauté avec une grande productivité littéraire, l’essentiel se passait dans la performance du culte 4 4 . La Liturgie angélique est donc une preuve de plus qui montre comment le sacerdoce et la communauté gagnent leur identité par la liturgie. Mais tandis que le Recueil des bénédictions (1QSb) fonde et constitue le rôle de chaque groupe par la liturgie, la Liturgie angélique affirme leur identité par la description de la réalité liturgique.
2. L’extension de la participation au culte à toute la communauté La « liturgisation » est liée à une extension de la participation au culte à toute la communauté 45. Cette communauté de la yaḥad se voyait comme le temple de Dieu dans un sens métaphorique. Les prêtres avaient un rôle spécial 4 6. Pourtant, tout le monde faisait partie de ce temple métaphorique. Chaque participant était donc obligé d’être rituellement pur, ce qui est aussi expliqué avec la présence des anges (cf. 1QSa II 8-9 ; CD 43. Elaboré dans mon article, M. R. Jost, « Yaḥad, Maskil, Priests and Angels – Their Relation in the Community Rule (1QS) », dans J. Jokiranta – M. Z ahn (éd.), Law, Literature, and Society in Legal Texts from Qumran. Papers from the Ninth Meeting of the International Organisation for Qumran Studies, Leuven 2016, Leyde, 2019, p. 207-229. 44. Fabry a donc raison quand il tire la conclusion que « le culte est la caractéristique la plus haute importance de l’identité de la yaḥad » (« Gottesdienst als das herausragende Identitätsmerkmal des yaḥad »). Voir H.-J. Fabry, « Wie feierte der yaḥad Gottesdienst », dans J. Frey – M. R. Jost (éd.), Gottesdienst und Engel im antiken Judentum und frühen Christentum, Tubingue, 2017, p. 49-70. Voir aussi D. K. Falk , « Liturgical Progression and the Experience of Transformation in Prayers from Qumran », Dead Sea Discoveries 22 (2015), p. 267-284. 45. Voir aussi M. Himmelfarb , « ‘A Kingdom of Priests’. The Democratization of the Priesthood in the Literature of Second Temple Judaism », The Journal of Jewish Thought and Philosophy 6 (1997), p. 89-104. 46. Voir R. A. Kugler , « Priesthood at Qumran », dans P. W. Flint – J. C. Vander K am (éd.), The Dead Sea Scrolls after Fifty Years. A Comprehensive Assessment vol. II, Leyde, 1999, p. 93-116, sp. 109-112.
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A XV 17 ; 4Q174 1-2 et 21 i 4-5) 47. L’extension de cette participation à tous les membres impliquait alors une certaine adaptation entre prêtres et non-prêtres dans la liturgie. Tout le monde participait à la liturgie et recevait par la liturgie son identité. Ainsi, les prêtres devenaient eux aussi des membres participants et « réceptifs » de la communauté. Les prêtres recevaient bien évidemment une identité spéciale (1QSb), mais cela tout en étant inclus dans une communauté plus grande, qui était métaphoriquement le fondement du temple. Les prêtres ne se substituaient pas exclusivement à la communauté. Ainsi tous participaient à la Liturgie angélique et chacun prenait part au culte céleste tel qu’il est décrit dans les cantiques. Et parallèlement à cela, le sacerdoce était évidemment accentué par la description du service des prêtres-anges.
3. L’importance de la communauté La « liturgisation » montre la signification de la communion pour la yaḥad. Cette yaḥad (cette unité, comme le terme le dit littéralement) vivait une communion très intense incluant des prêtres et non-prêtres 48. Mais cette connaissance est aussi à considérer pour le culte. Ce n’était pas des actes spécifiques cultuels pour Dieu ou des expériences personnelles avec Dieu qui formaient le centre du culte, mais la communion même dans la présence de Dieu. Il est donc intéressant de noter que le texte ne cite jamais verbatim le contenu de la louange des anges. Seul le lieu céleste et le cadre liturgique sont décrits par la performance des chants. Ainsi, ces chants permettent une visualisation immédiate des royaumes célestes, mais non une imitation de la lounge des anges 49. Les Cantiques de l ’holocauste du sabbat ne sont alors pas à interpréter au regard du sacrifice du sabbat, ni au regard de l’acte de prière ou d’un autre acte liturgique, ni au regard d’une expérience individuelle, mais au regard de la réalité du culte, dans laquelle la communauté entière se comprenait – la communauté impliquant les êtres célestes. 47. A. Shemesh, « ‘The Holy Angels Are in Their Council’ : The Exclusion of Deformed Persons from Holy Places in Qumranic and Rabbinic Literature », Dead Sea Discoveries 4 (1997), p. 179-202, sp. 193-198, et C. Wassén, « What Do Angels Have against the Blind and the Deaf ? Rules of Exclusion in the Dead Sea Scrolls », dans W. O. McCready – A. R einhartz (éd.), Common Judaism. Explorations in Second-Temple Judaism, Minneapolis/Minnesota, 2008, p. 115-129. 48. J’ai examiné en détail la communion avec les anges dans M. R. Jost, Engelgemeinschaft im irdischen Gottesdienst. Studien zu Texten aus Qumran und dem Neuen Testament, Tubingue, 2019, p. 37-44 et 161-190. 49. Voir aussi D. C. A llison Jr ., « The Silence of Angels: Reflections on the Songs of the Sabbath Sacrifice », Revue de Qumrân 13 (1988), p. 189-197 et E. D. R eymond, « Poetry of the Heavenly Other: Angelic Praise in the Songs of the Sabbath Sacrifice », dans D. C. H arlow – K. M. Hogan – M. Goff – J. S. K aminsky (éd.), The « Other » in Second Temple Judaism. Essays in Honor of John J. Collins, Grand Rapids, 2011, p. 368-380.
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4. Des conséquences sur l’interprétation Après réflexion, nous ne voyons pas dans cette Liturgie angélique de structure d’une ascension de celui qui prie, parce qu’elle ne décrit pas une montée vers le temple céleste. Elle décrit une progression vers le centre du temple, tout en décrivant les actes des anges dans ce lieu. La Liturgie angélique présuppose ainsi la présence de la communauté dans la réalité céleste. Dès le début, les Cantique du sacrifice du sabbat se situent dans la présence de Dieu. Il n’est pas question d’une ascension ou d’une descente dangereuse, comme dans la littérature des Hekhalot 50. Il n’y pas de « via mystica » 51. Il y a simplement l’étonnement de la communauté de sa présence dans le culte céleste décrit en détails et en toute gloire, incluant la merkava. Il est donc impossible d’expliquer cette Liturgie angélique sans 50. Pour d’autres différences entre les textes de la mer Morte et le corpus des Hekhalot, voir M. Vârtejanu-Joubert, « La mystique à Qumrân : regards historiographiques et déconstruction de la notion », dans C. Batsch – M. Vârtejanu-Joubert (éd.), Manières de penser dans l ’A ntiquité méditerranéenne et orientale. Mélanges offerts à Francis Schmidt par ses élèves, ses collègues et ses amis, Leyde, 2009, p. 34, et D. H amidović , « La contribution des Cantiques de l ’holocauste du sabbat à l’étude de la pensée mystique juive au tournant de l’ère chrétienne », dans S.-C. M imouni – M. Scopello (éd.), La mystique théorétique et théurgique dans l ’antiquité grécoromaine. Judaïsmes et christianismes, Turnhout, 2016, p. 318. 51. P. S. Alexander propose trois critères pour la définition du mot « mystique » : une expérience religieuse, une présence transcendante, et une « via mystica ». Il écrit : « The via mystica demands perseverance and discipline ; it is long and hard, and there are many stages along the way. » Voir P. S. A lexander , « Qumran and the Genealogy of Western Mysticism », dans E. G. Chazon – B. H alpern-A maru – R. Clements (éd.), New Perspectives on Old Texts. Proceedings of the Tenth International Symposium of the Orion Center for the Study of the Dead Sea Scrolls and Associated Literature (9-11 January 2005), Leyde, 2010, p. 215-236, sp. 220. Mais ce point manque précisément dans la Liturgie angélique. Il prouve de ce fait l’ascension au temple céleste dans le livre « Mystical Texts » avec Hénoch, Lévi et le « Self-Glorification-Hymn », mais pas avec la Liturgie angélique. Voir P. S. A lexander , « The Mystical Texts. Songs of the Sabbath Sacrifice and Related Manuscripts », Londres, 2006, p. 74-92, voir aussi son commentaire dans P. S. A lexander , « Qumran and the Genealogy of Western Mysticism », dans E. G. Chazon – B. H alpern-A maru – R. Clements (éd.), New Perspectives on Old Texts. Proceedings of the Tenth International Symposium of the Orion Center for the Study of the Dead Sea Scrolls and Associated Literature (9-11 January 2005), Leyde, 2010, p. 226, note 23. De même C. A. Newsom, « Art. Mysticism », dans L. H. Schiffman – J. C. Vander K am (éd.), Encyclopedia of the Dead Sea Scrolls, Oxford, 2000, p. 591-594, nomme comme première caractéristique la « Visionary Ascents », mais sans qualifier les ShirShabb sous ce point. L’article de J. R. Davila, « Exploring the Mystical Background of the Scrolls », dans T. H. Lim – J. J Collins (éd.), The Oxford Handbook of the Dead Sea Scrolls, Oxford, 2010, p. 433-454, est également intéressant. Il explique dans un paragraphe intitulé « Ascent and Enthronement Mysticism », la difficulté de voir cette caractéristique dans la Liturgie angélique.
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Dieu 52 . Certes, elle n’envisage pas l’union avec Dieu lui-même, mais le lieu de sa présence immédiate. De plus, si les membres de la communauté se sont vus dans la présence des lieux célestes, il s’agit plus que d’une « communion cosmique » avec les anges. Ils ne chantaient pas seulement avec ou comme les anges, mais ils se voyaient réunis avec eux dans la présence de Dieu 53.
IV. Résumé Nous avons commencé cet exposé en décrivant les aspects sacerdotaux de la Liturgie angélique. Cela nous a amené à regarder plus précisément l’importance de la liturgie, c’est-à-dire de la performance des Cantiques de l ’holocauste du sabbat. Ces Cantiques confirment (dans le contexte des autres manuscrits de la mer Morte) ce que nous pouvons appeler la « liturgisation ». La communauté fonde essentiellement son identité et l’identité de chacun dans la communauté par la liturgie. Ce qui est aussi valable pour les prêtres. Ainsi, la « liturgisation » implique une certaine adaptation entre prêtres et non-prêtres dans la liturgie. Le rapport thématique important avec les prêtres-anges exige par contre la présence des prêtres dans la liturgie, ce qui est aussi visible par leurs places supérieures qu’ils occupent au sein de leurs réunions (1QS VI 8). C’est pourquoi il ne s’agit pas d’une démocratisation, 54 ni d’une laïcisation, 55 mais d’une liturgisation 56. 52. Voir P. S. A lexander , « Qumran and the Genealogy of Western Mysticism », dans E. G. Chazon – B. H alpern-A maru – R. Clements (éd.), New Perspectives on Old Texts. Proceedings of the Tenth International Symposium of the Orion Center for the Study of the Dead Sea Scrolls and Associated Literature (9-11 January 2005), Leyde, 2010, p. 222. 53. Les différents types de communion avec les anges (cosmique, liturgique et eschatologique) sont résumés dans M. R. Jost, Engelgemeinschaft im irdischen Gottesdienst. Studien zu Texten aus Qumran und dem Neuen Testament, Tubingue, 2019, p. 198-203. Contrairement à E. G. Chazon, « Human and Angelic Prayer in Light of the Dead Sea Scrolls », dans E. G. Chazon – R. Clements – A. P innick (éd.), Liturgical Perspectives: Prayer and Poetry in Light of the Dead Sea Scrolls. Proceedings of the Fifth International Symposium of the Orion Center for the Study of the Dead Sea Scrolls and Associated Literature (19-23 January 2000), Leyde, 2003, p. 35-47. Elle discerne trois types : « Many Voices : Harmonizing with the Universe », « Two Choirs : Praying like the Angels » et « One Congregation : Joining the Angels ». Elle classifie les Chants du sacrifice du sabbat dans la deuxième catégorie. 54. Voir M. Himmelfarb , « ‘A Kingdom of Priests’. The Democratization of the Priesthood in the Literature of Second Temple Judaism », The Journal of Jewish Thought and Philosophy 6 (1997), p. 89-104. 55. Voir G. J. Brooke , « From ‘Assembly of Supreme Holiness for Aaron’ to ‘Sanctuary of Adam’: the laicization of temple ideology in the Qumran scrolls and its wider implications », Journal for Semitics 8 (1996), p. 119-145. 56. Je tiens à remercier Lionel Gros et Anne Vanzo pour leur aide à la relecture de cet article.
L a Vision de Gabriel
et la mystique de la merkava David H amidović Université de Lausanne [email protected] Abstract Recently discovered, the text in ink on stone called Vision of Gabriel by the moderns retains two speculations on the meaning of the merkava. While it remains difficult to establish a continuity between this text, thought to have been written after the fall of the Temple of Jerusalem in 70 CE, and the writings of the so-called Hekhalot, the expressions of the merkava in Vision of Gabriel can be compared and explained in terms of the same motif in later texts, including those of the Hekhalot. The study of the merkava in Vision of Gabriel highlights the interest of the redactional milieu in supernatural accents, one of the characteristics of apocalyptic texts at the beginning of the Christian era. It seems to us that this is also a characteristic of “sacerdotalisation”, which promotes another form of knowledge of the divine, that of contact with the angels charged with announcing the final victory of salvation. Résumé Récemment découvert, le texte à l’encre sur pierre nommé Vision de Gabriel par les modernes conserve deux spéculations sur la signification de la merkava. S’il demeure difficile d’établir une continuité entre ce texte, qu’on pense écrit après la chute du Temple de Jérusalem en 70 de l’ère chrétienne, et les écrits dits des Hekhalot, les expressions de la merkava en Vision de Gabriel peuvent être comparées et expliquées à l’aune du même motif dans des textes plus tardifs, dont ceux des Hekhalot. L’étude de la merkava en Vision de Gabriel met en évidence l’intérêt du milieu rédacteur pour les accents surnaturels, une des caractéristiques des textes apocalyptiques au début de l’ère chrétienne. Il nous semble qu’il s’agit aussi d’une caractéristique de la sacerdotalisation qui promeut une autre forme de connaissance du divin, celle du contact avec les anges chargés d’annoncer la victoire finale du salut.
Porté à la connaissance de la communauté scientifique en 2007 1, le texte de la Vision de Gabriel était inconnu jusqu’alors. Il présente l’ori1. A. Yardeni – B. Elitzur , « A First-Century bce Prophetic Text Written on a Stone: First Publication », Cathedra 123 (2007), p. 155-166. La « sacerdotalisation » dans les premiers écrits mystiques juifs et chrétiens. Actes du colloque international tenu à l’Université de Lausanne du 26 au 28 octobre 2015, sous la direction de David Hamidović, Simon C. Mimouni et Louis Painchaud, Turnhout : Brepols, 2021 (Judaïsme ancien et origines du christianisme, 22), p. 165-182 DOI 10.1484/M.JAOC-EB.5.122771 © F H G
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DAVID HAMIDOVIĆ
ginalité d’être écrit à l’encre noire sur une stèle rectangulaire en calcaire poli, débité en un seul bloc taillé à cet effet. La stèle fut découverte dans la région orientale de la mer Morte selon les dires du collectionneur ; en ce sens, les analyses de résidus de terre conservés sur la pierre ont révélé une composition pétrographique proche de celle de la péninsule de la Lisan, littéralement cette « langue » de terre pénétrant dans la mer Morte à l’Est 2 . Toutefois l’usage de la stèle en ce lieu ne préjuge pas du lieu d’inscription, car la stèle a pu être transportée avant ou après avoir reçu l’inscription. Le texte disposé sur la stèle présente 87 lignes 3 réparties en deux colonnes séparées par une marge régulière, au point qu’Ada Yardeni, qui déchiffra la première le texte, observa une ressemblance avec les manuscrits de la mer Morte. Bien entendu, le support de copie infirme cette identification, mais la disposition du texte, l’écriture soignée, les lignes incisées, et l’erreur de copie aux lignes 57 à 59, où l’expression « car a dit YHWH Ṣeb’aôt/des armées, Dieu d’Israël » se lit deux fois de suite, invitent à considérer que le scribe avait devant lui un manuscrit modèle. Ainsi, le texte sur la stèle ne peut être considéré comme un autographe. À notre connaissance, aucune recension du texte n’était parvenue jusqu’à nous avant la découverte de la stèle au début des années 1990. Depuis la publication princeps, le texte a bénéficié d’une trentaine d’études sur son déchiffrement, sur des thèmes saillants et/ou sur l’intertextualité 4 . Le nom du texte varie aussi selon les chercheurs. En hébreu 2. Y. Goren, « Micromorphologic Examination of the ‘Gabriel Revelation’ Stone », Israel Exploration Journal 58 (2008), p. 220-229. 3. T. Elgvin, « Eschatology and Messianism in the Gabriel Inscription », Journal of the Jesus Movement in its Jewish Setting 1 (2014), p. 5, mentionne 88 lignes. 4. I. K nohl , « In Three Days, You Shall Live », Journal Haaretz du 19 avril 2007 ; I. K nohl , « Studies in the Gabriel Revelation », Tarbiz 76 (2007), p. 303328 ; A. Yardeni, « A New Dead Sea Scroll on Stone? Bible-like Prophecy Was Mounted in a Wall 2,000 Years Ago », Biblical Archaeology Review 34 (2008), p. 60-61 ; M. Bar-A sher , « On the Language of ‘The Vision of Gabriel’ », Römische Quartalschrift für christliche Alterumskunde und Kirchengeschichte 23 (2008), p. 491-524 ; Y. Goren, « Micromorphologic Examination of the ‘Gabriel Revelation’ Stone », Israel Exploration Journal 58 (2008), p. 220-229 ; I. K nohl , « ‘By Three Days Live’. Messiahs, Resurrection and Ascent to Heaven in Hazon Gabriel », Journal of Religion 88 (2008), p. 147-158 ; Y. Goren « The Messiah Son of Joseph: ‘Gabriel’s Revelation’ and the Birth of a New Messianic Model », Biblical Archaeology Review 34 (2008), p. 58-62 et 78 ; D. H amidović , « La Vision de Gabriel », Revue d ’Histoire et de Philosophie Religieuses 89 (2009), p. 147-168 ; M. Bar-A sher , « On the Language of ‘The Vision of Gabriel’ », dans M. BarA sher – D. Dimant (éd.), Meghillot: Studies in the Dead Sea Scrolls VII, HaïfaJérusalem, 2009, p. 193-226 ; E. Qimron – A. Yuditsky, « Notes on the Inscription ‘The Vision of Gabriel’ », Cathedra 133 (2009), p. 133-144 ; G. A. R endsburg , « Linguistic and Stylistic Notes to the Hazon Gabriel Inscription », Dead Sea Discoveries 16 (2009), p. 107-116 ; I. K nohl , Messiahs and Resurrection in ‘The Gabriel Revelation’, Londres-New York, 2009 ; R. H endel , « The Messiah Son of
LA VISION DE GABRIEL
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moderne, le texte est nommé Ḥazon Gabriel, la Révélation de Gabriel, aussi traduit comme cela dans la recherche anglo-saxonne, ou bien Vision de Gabriel et plus récemment la dénomination plus neutre d’Inscription de Gabriel 5. Une telle hésitation sur le titre s’explique par l’absence de titre conservé – si tant est qu’il en ait eu un –, par la difficulté d’établir le genre littéraire du document, c’est-à-dire du texte et sa fonction sur un tel support, à cause du texte fragmentaire aussi – un morceau de la stèle en haut à droite manque et l’encre est souvent effacée –, et par des discussions qui demeurent dans la Gattungsgeschichte sur la nature de la révélation et
Joseph: Simply ‘Sign’ », Biblical Archaeology Review 35 (2009), p. 8 ; D. Jeselsohn, « The Jeselsohn Stone: Discovery and Publication », dans M. H enze (éd.), Hazon Gabriel: New Readings of the Gabriel Revelation, Atlanta/Géorgie, 2011, p. 1-9 ; A. Yardeni – B. Elitzur , « A Hebrew Prophetic Text on Stone from the Early Herodian Period: A Preliminary Report », dans M. H enze (éd.), Hazon Gabriel: New Readings of the Gabriel Revelation, Atlanta/Géorgie, 2011, p. 11-29 ; E. Qimron – A. Yuditsky, « Notes on the So-Called Gabriel Vision Inscription », dans M. H enze (éd.), Hazon Gabriel: New Readings of the Gabriel Revelation, Atlanta/ Géorgie, 2011, p. 31-38 ; I. K nohl , « The Apocalyptic and Messianic Dimensions of the Gabriel Revelation in Their Historical Context », dans M. H enze (éd.), Hazon Gabriel: New Readings of the Gabriel Revelation, Atlanta/Géorgie, 2011, p. 39-59 ; G. A. R endsburg, « Hazon Gabriel: A Grammatical Sketch », dans M. H enze (éd.), Hazon Gabriel: New Readings of the Gabriel Revelation, Atlanta/ Géorgie, 2011, p. 61-91 ; A. Yarbro Collins , « Response to Israel Knohl, Messiahs and Resurrection in “The Gabriel Revelation” », dans M. H enze (éd.), Hazon Gabriel: New Readings of the Gabriel Revelation, Atlanta/Géorgie, 2011, p. 93-97 ; J. J. Collins , « Gabriel and David: Some Reflections on an Enigmatic Text », dans M. H enze (éd.), Hazon Gabriel: New Readings of the Gabriel Revelation, Atlanta/Géorgie, 2011, p. 99-112 ; M. H enze , « Some Observations on the Hazon Gabriel », dans M. H enze (éd.), Hazon Gabriel: New Readings of the Gabriel Revelation, Atlanta/Géorgie, 2011, p. 113-129 ; K. Coblentz Bautch, « Hosts, Holy Ones, and the Words of Gabriel: The Angelology of Hazon Gabriel in the Context of Second Temple and Late Antique Literature », dans M. H enze (éd.), Hazon Gabriel: New Readings of the Gabriel Revelation, Atlanta/Géorgie, 2011, p. 131152 ; D. K im, « The Use of Daniel in the Gabriel Revelation », dans M. H enze (éd.), Hazon Gabriel: New Readings of the Gabriel Revelation, Atlanta/Géorgie, 2011, p. 153-171 ; D. Capes , « ‘Jerusalem’ in the Gabriel Revelation and the Revelation of John », dans M. H enze (éd.), Hazon Gabriel: New Readings of the Gabriel Revelation, Atlanta/Géorgie, 2011, p. 173-186 ; D. H amidović , « An Eschatological Drama in Hazon Gabriel: Fantasy or Historical Basement? », Semitica 54 (2012), p. 233-250 ; T. Elgvin, « Notes on the Gabriel Inscription », Semitica 54 (2012), p. 221-232 ; T. Elgvin, « The Gabriel Inscription, b. Sukkah 52a, and Psalm 2 », Semitica 55 (2013), p. 137-142 ; T. Elgvin, « Gabriel, Vision of », dans Encyclopedia of the Bible and Its Reception 9, Berlin, 2014, p. 877-878 ; T. Elgvin, « Eschatology and Messianism in the Gabriel Inscription », Journal of the Jesus Movement in its Jewish Setting 1 (2014), p. 5-25. 5. T. Elgvin, « Eschatology and Messianism in the Gabriel Inscription », Journal of the Jesus Movement in its Jewish Setting 1 (2014), p. 5.
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ses modalités : les uns faisant de ces dernières des genres littéraires alors que d’autres ne reconnaissent que la révélation 6. Dans l’édition préliminaire parue en 2009 faite à partir des photographies que nous avait aimablement adressées Ada Yardeni, nous terminions l’article en s’interrogeant sur le genre littéraire et remarquions des « accents mystiques proches des Heikhalot collectant des traditions sur la merkavah ». À notre connaissance, aucun article ou autre publication n’est revenu en détail sur ces ressemblances. C’est pourquoi nous interrogeons celles-ci ainsi que le milieu intellectuel derrière la Vision de Gabriel. Pour ce faire, nous utilisons les nouvelles photographies haute définition mises en ligne sur le site Inscriptifact par l’équipe de Bruce Zuckerman.
1. Agrapha juifs apocalyptiques ? Bien que fragmentaire, le texte de la Vision de Gabriel accorde une place importante au thème du trône-char divin. Le motif débute explicitement à la ligne 26 ; il se poursuit peut-être jusqu’à la fin du texte, à la ligne 87, mais le texte présente de nombreuses lacunes. C’est pourquoi l’enquête sur la thématique du trône-char divin est difficile à mener dans le détail. Toutefois, plusieurs remarques peuvent être formulées. Les premières lignes sont perdues à cause de la cassure de la stèle ou parce que l’encre est très effacée. Néanmoins, les quelques mots et expressions déchiffrés donnent à lire un dialogue où un ou plusieurs locuteurs demandent une parole de YHWH à quelqu’un. Celui qui la reçoit est probablement l’ange Gabriel dont l’identité est préservée à partir de la ligne 77 ; peut-être était-elle déjà mentionnée dans la partie manquante au début ? Quoi qu’il en soit, le texte met donc en scène l’ange des révélations, Gabriel, sollicité comme un prophète pour délivrer un oracle divin. La double fonction d’envoyé divin et de prophète est fréquente dans la littérature juive au tournant de l’ère chrétienne 7. Dans la perspective des écrits apocalyptiques, l’ange endosse la fonction de médiateur entre YHWH et des locuteurs qui semblent nommés ou apparentés aux « fils d’Israël » (l. 7) voire à « la maison d’Israël » (l. 12). Dans ce cas de figure, la distinction entre la prophétie et l’apocalyptique ne tient plus, puisque l’ange porte la parole divine comme un prophète et il peut même la médiatiser en la commentant et en l’actualisant auprès des Israélites. Une telle caractéristique, même si le texte est lacuneux, oriente vers un écrit apocalyptique.
6. Voir les références et la discussion en D. H amidović , « La Vision de Gabriel », Revue d ’Histoire et de Philosophie Religieuses 89 (2009), p. 159-162. 7. Voir M. L euenberger , « Histoire théonome. Théologies prophétiques et apocalypses de l’histoire », dans J. -D. M acchi et al. (éd.), Les recueils prophétiques de la Bible. Origines, milieux, et contexte proche-oriental, Genève, 2012, p. 511-548.
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Toutefois, la parole divine est donnée de manière surprenante par rapport aux usages attestés dans les écrits apocalyptiques. En effet, la révélation ne prend pas place dans un long oracle mais dans une succession d’oracles courts sans, semble-t-il, interprétation intercalée. À cet égard, la référence à « mon serviteur David me demande : ‘Donne-moi des paroles [en ré]ponse, le signe que je te demande !’ » 8 aux lignes 16-17 suivie de l’introduction d’une nouvelle parole divine me semble une incise rapportant un dialogue antérieur entre Dieu et probablement un messie royal davidique 9 ; il n’est pas question ici d’une interprétation de l’ange. À chaque fois, la parole divine est introduite par une formule caractéristique des oracles prophétiques, « ainsi a dit YHWH » (kèn ’amar YHWH), déclinée en « ainsi a dit YHWH Ṣeb’aôt/des armées » à la ligne 11, « ainsi a dit YHWH, Dieu d’Israël » à la ligne 13, « a dit YHWH Ṣeb’aôt, Dieu d’Israël » aux lignes 17-18, et « a dit YHWH, Dieu Ṣeb’aôt, Dieu d’Israël » à la ligne 20. La structure littéraire ainsi dessinée avec ces formules crée l’effet d’une collection de paroles divines mises bout à bout avec un climax exprimé à la fin, car la dernière parole, « le mal sera brisé en présence de la justice (ṣedeq) » (l. 20-21), est introduite avec la formule la plus emphatique. Puis, l’ange-interprète revient en scène aux lignes 21 à 23 : « Demande-moi et je te raconterai ce qu’est ce germe (ṣemaḥ) mauvais. Tu ne tiens pas fermement ; l’ange, c’est ton appui, n’aie pas peur ! ». Cette dichotomie entre les paroles divines et leur interprétation par l’ange, tel un prophète, est complétée plus loin par une ou plusieurs visions, car l’ange dit qu’il voit ou qu’il a vu aux lignes 35, 38, 71, 72(?) et 82. La révélation divine a donc deux modalités combinées, les oracles et les visions, que l’ange Gabriel a pour fonction de transmettre et d’expliquer. Un tel modus operandi autour de la révélation divine est caractéristique d’un écrit apocalyptique au tournant de l’ère chrétienne. Toutefois, l’examen en détail de cette première partie conservée du texte, jusqu’au milieu de la ligne 23, livre quelques originalités par rapport à la littérature apocalyptique de cette époque. D’une part, la succession rapide des oracles divins fait penser à une collection d’extraits prophétiques mais à un détail près, c’est qu’on est bien en peine d’identifier le moindre passage prophétique conservé jusqu’alors dans le canon juif et hors de celuici. C’est pourquoi cette première partie fait penser à des agrapha, c’est-àdire des paroles non-écrites de YHWH. Le terme forgé pour désigner les paroles prétendues de Jésus de Nazareth par le savant allemand Johann 8. Pour les remarques sur le déchiffrement et les hypothèses émises, voir T. Elg « Eschatology and Messianism in the Gabriel Inscription », Journal of the Jesus Movement in its Jewish Setting 1 (2014), p. 9-10. 9. Voir J. J. Collins , « Gabriel and David: Some Reflections on an Enigmatic Text », dans M. H enze (éd.), Hazon Gabriel: New Readings of the Gabriel Revelation, Atlanta/Géorgie, 2011, p. 111. vin,
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Gottfried Körner dans son ouvrage De sermonibus Christi agraphois paru en 1776 nous semble approprié, car la répétition de la formule introductive, malgré ses variantes, vise à signifier des paroles courtes de YHWH qui font, bien entendu, autorité pour appuyer et légitimer le message délivré par l’ange au sujet du « germe mauvais ». L’usage du mot ṣemaḥ n’est pas neutre à cette époque puisqu’il est un des titres prophétiques mobilisés pour signifier la venue du messie royal 10. Le climax créé par la succession des paroles divines afin de signifier l’identité de ce mauvais ṣemaḥ résonne comme une figure d’antichrist, un faux messie ou au moins une figure eschatologique néfaste. Dans les écrits juifs contemporains, David comme figure messianique royale est souvent affublé de ce titre mais comme il est cité à la ligne 16 puis à la ligne 72 avec, à chaque fois, le titre de « serviteur », on comprend que le milieu rédacteur crée une opposition entre le messie royal et un antimessie royal.
2. Le « Dieu des merkavot » Dans ce cadre s’ouvre une deuxième partie du texte qui débute au milieu de la ligne 23. Une formule de bénédiction sert d’introduction : « bénie soit la gloire de YHWH Dieu provenant de son lieu (meqômô) ! ». Avec une variante sur le théonyme, la bénédiction rappelle celle d’Ez 3,12. Les interprétations de ce passage du livre d’Ezéchiel ont été nombreuses au point que des exégètes ont voulu corriger le verbe pour lire berum à la place de barukh pour traduire : « quand la gloire de YHWH se leva de ce lieu » 11. La présence de cette bénédiction aux lignes 23-24 de la Vision de Gabriel infirme une telle correction. Il n’en reste pas moins la signification de cette bénédiction, notamment l’identification du « lieu ». L’opinion commune est de reconnaître une désignation du Temple de Jérusalem. Mais d’une part, le contexte de la vision d’Ezéchiel oriente vers une époque perçue où le temple n’a pas encore été construit et vers une époque vécue, celle de la situation de juifs exilés en Babylonie où se pose cruellement la question de la présence de Dieu hors de son temple et de la terre promise. La confluence des deux représentations temporelles mène à la conclusion que la bénédiction a pour objet de signifier que la gloire divine peut se manifester en son temple et en dehors 12 . Le targum d’Ezéchiel du passage me semble aller en ce sens 10. Voir J. J. Collins , The Scepter and the Star: Messianism in Light of the Dead Sea Scrolls, New York, 22010, p. 57-63. 11. Voir F. Hitzig, Der Prophet Ezechiel, Leipzig, 1874 ; M. Greenberg, Ezekiel 1-20: A New Translation with Introduction and Commentary, Garden City/New York, 1983, p. 70 ; D. Block , The Book of Ezekiel: Chapters 1-24, Grand Rapids/ Michigan, 1997, p. 132, n. 1. 12. Voir M. Buber , « Zu Jecheskel 3:12 », Monatschrift für Geschichte und Wissenschaft des Judentums 78 (1934), p. 471-474 ; P. Schäfer , The Origins of Jewish
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en traduisant, certes dans un autre contexte : « du lieu de la maison de la shekhina ». C’est pourquoi la reprise de la bénédiction d’Ez 3,12 et la mention possible des « exilés » à la fin de la ligne 14 invitent à envisager que la gloire de Dieu peut se manifester en tout lieu. Un tel motif donne un cadre au scénario eschatologique qui suit et livre un renseignement sur le milieu intellectuel voire le milieu rédacteur de la Vision de Gabriel. Puis, l’ange annonce qu’il va « secouer les cieux 13 des cieux et la terre » (l. 24-25), désignation usuelle pour faire apparaître les acteurs de la fin des temps 14 , et « la gloire de YHWH, Dieu Ṣeb’aôt, Dieu d’Israël » (l. 25-26) apparaît. La formule reprend l’énoncé introductif le plus emphatique dans la collection des paroles divines placées dans la première partie. La combinaison de la double titulature « Dieu Ṣeb’aôt » et « Dieu d’Israël » est unique et elle ne me semble pas fortuite ou le fruit de l’héritage biblique. Elle semble insister respectivement sur la direction des armées célestes 15 et sur le concept d’élection. À la suite de tous ces éléments mis bout à bout, on peut se demander si le milieu juif – intellectuel et/ou social – à l’œuvre se perçoit en situation de dispersion, éloigné du Temple de Jérusalem, et qu’il affirme la présence possible de YHWH pour les juifs dans cette situation. Dans la lignée du livre d’Ezéchiel, la Vision de Gabriel promeut cette idée mais en donnant une place de premier plan aux anges. Immédiatement après l’apparition de la gloire divine, on s’attend à la communication d’une parole divine ou bien à une description de la gloire, mais il n’en est rien. Dieu écoute aux lignes 26 à 29 : Le Dieu des trônes-chars (’elah merkavot) écoute (shama‘) la voix de violence/désolation (i. e. les pleurs) de Jérusalem et les villes de Judée, il apporte consolation par égard pour les arm[é]es de [l’]ange Michel et pour tous ceux qui aiment le supplier et lui demander.
Comme la locution « Dieu des merkavot » succède immédiatement à l’apparition de la gloire divine, il fait peu de doute qu’elle en est un synonyme, mais à la différence des théonymes précédents, l’expression « Dieu des merkavot » ne trouve pas, à ma connaissance, d’autres attestations Mysticism, Tubingue, 2009, p. 49. 13. T. Elgvin, « Eschatology and Messianism in the Gabriel Inscription », Journal of the Jesus Movement in its Jewish Setting 1 (2014), p. 10 et 13, propose de lire « les pouvoirs ». 14. Voir Ag 2,6.21 ; 1 Hénoch 8,4-9,11 ; 40,9. 15. Selon C. Nihan, « Yhwh Ṣěbā’ôt et les puissances de la guerre », conférence prononcée au Collège de France (Paris), le 6 mai 2015, ce titre prend place dans la tradition prophétique juive postexilique pour signifier la royauté divine et ses accents guerriers. Il donne l’exemple de la recension longue du livre de Jérémie datée au iii e siècle avant l’ère chrétienne. Dans cette perspective, le développement des spéculations sur les anges dans les derniers siècles avant l’ère chrétienne a pu rencontrer cette conception du titre divin afin de signifier que Dieu peut se manifester dans l’histoire par l’envoi de ses anges.
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dans la littérature juive. Cependant, elle fait penser fortement aux paragraphes 37-38 selon le manuscrit 228 du Vatican contenant 3 Hénoch sur les merkavot de Dieu. À l’examen du manuscrit, on reconnaît l’ajout d’un sous-titre avant le paragraphe 37 : seder merkavot, « l’ordre des merkavot ». Puis, l’ange Métatron demande à R. Ishmaël : « combien de merkavot a le Saint, béni soit-il ? ». S’ensuit une longue liste de merkavot attachées à des éléments naturels et architecturaux relatifs au temple et au trône divin. À chaque fois, une citation de la Bible hébraïque vient justifier la nouvelle expression, merkavot de quelque chose, ainsi forgée. L’expression « Dieu des merkavot » dans la Vision de Gabriel pourrait faire allusion à cette liste. Un autre passage de 3 Hénoch, au paragraphe 55 selon le même manuscrit, donne une topographie céleste : « Quatre merkavot de la shekhina se tiennent dans les sept palais (hekhalot) et devant chacun d’entre eux se tiennent quatre paliers de la shekhina ». Le texte multiforme de 3 Hénoch n’en dit pas plus sur les merkavot, toutefois on comprend qu’il ne s’agit plus ici du trône-char, véhicule de la gloire divine, mais d’une extrapolation de ce motif pour signifier la présence divine dans les éléments de la nature et dans l’architecture et le mobilier célestes. Par ailleurs, un autre texte, Re’uyot Yeḥezqe’l 16, dénombre, quant à lui, sept merkavot : « Le Saint, béni soit-il, créa sept cieux et sept merkavot en leur sein ». Le Shi‘ur Qoma § 376, qui spécule sur la taille et la masse du corps divin, mentionne que « sa bouche est un feu dévorant » dans le manuscrit ashkénaze 8128 de New York 17, la comparant à « celui qui veut mal parler », avant de spécifier des mensurations : « 8 sont les dénominations, 300 les merkavot de sa dignité 18, 72 ses noms, 1200 ses dénominations, 66 ses lettres, 96 toutes ses relations, 24 les sanctifications de sa dignité, 42 l’éclat de sa réputation ». Le contexte indique qu’il s’agit de caractériser la bouche de Dieu, organe de la parole. La bouche ou plus précisément le feu dévorant de la bouche est décrit non en des termes physiques mais en lien, semble-t-il, avec les spéculations sur le nom divin et ses dérivés. Par exemple, les 72 noms de Dieu sont aussi connus en 3 Hénoch § 71 et dans la recension A des Avot de-Rabbi Nathan 19. Les 300 « merkavot de sa 16. S. A. Wertheimer – A. J. Wertheimer (éd.), Batei Midrashot: Twenty Five Midrashim Published for the First Time from Manuscripts Discovered in the Genizoth of Jerusalem and Egypt with Introductions and Annotations vol. II, Jérusalem, 1968, p. 130 ; éd. Gruenwald, p. 119. 17. P. Schäfer , Übersetzung der Hekhalot-Literatur III §§ 335-597, Tubingue, 1989, § 376. 18. Corriger יקרוau lieu de יקדוselon le manuscrit d’Oxford 1531 et ce nom noté plus loin. 19. S. A. Wertheimer – A. J. Wertheimer (éd.), Batei Midrashot: Twenty Five Midrashim Published for the First Time from Manuscripts Discovered in the Genizoth of Jerusalem and Egypt with Introductions and Annotations vol. II, Jérusalem, 1968, p. 350-351.
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dignité » semblent aussi compris comme une spéculation chiffrée du nom divin, ce qui illustre la perception des merkavot comme une manière de nommer la présence divine. Le même passage (« microforme » dirait Peter Schäfer 20, archétype dirait James Davila 21) est présent dans le manuscrit d’Oxford 1531 des Hekhalot Zutarti, § 490, avec aussi « 300 merkavot ». Le manuscrit ashkénaze 40 de Munich copié à la fin du xv e siècle présente une variante intéressante puisqu’il lit : « 300 myriades (merêr/bavot) de saints ». Bien entendu, on peut supposer une erreur de copie avec un kaph qui devient un resh ou un beth, mais on peut peut-être aussi y voir une assimilation de sens par proximité graphique, certes, mais aussi par proximité thématique dans la représentation divine des myriades d’anges et des merkavot qui désignent les éléments célestes constitués de la présence divine. En effet, dans le manuscrit d’Oxford 1531 de l’écrit Ma‘ase Merkava, l’assimilation entre les myriades et les merkavot est explicite aux paragraphes 554-555. Le mystique a la possibilité de voir ce qu’il y a dans les palais célestes : « Dans le premier palais se tiennent 4 000 myriades de merkavot provenant du feu et 40 000 myriades de flammes se mêlant entre elles. » La suite du paragraphe 554 reprend ce schéma littéraire jusqu’au septième palais avec des nombres exponentiels 22 . Il est fort probable que les nombres désignent les anges gravitant dans les hekhalot en les classant en deux catégories : ceux des merkavot de feu et ceux des flammes. Ces deux éléments dans les plus anciennes descriptions mystiques de Dieu en son palais céleste ont été progressivement interprétés comme des manifestations angéliques. Les merkavot dans ce contexte sont devenues des anges. Au paragraphe suivant, 555, ceux-ci deviennent les acteurs de la liturgie céleste de la Qedusha dans les sept palais. Par exemple, ils chantent le trisagion, « saint, saint, saint », dans le premier palais. On observe dans ce paragraphe et dans tous les manuscrits, que l’expression « myriades » est omise avec la mention des merkavot, mais cela ne semble pas significatif, car les « merkavot provenant du feu » font clairement office de célébrants de la liturgie céleste. Un passage de ce paragraphe résume la mutation du concept de merkava, car dans le quatrième palais, les « merkavot provenant du feu » continuent de chanter une louange à Dieu et il est dit : « Béni soit le Seigneur, vivant et établi pour toujours, et pour toujours et à jamais, puissant sur l’ensemble de la merkava ». Le concept de merkava ne signifie plus le trône-char divin mais l’ensemble des anges que Dieu dirige avec autorité. D’ailleurs, au paragraphe 585 du même manuscrit de Ma‘ase 20. P. Schäfer , The Hidden and Manifest God: Some Major Themes in Early Jewish Mysticism, Albany/New York, 1992, p. 6, n. 14. 21. J. Davila, « Prolegomena to a Critical Edition of Hekhalot Rabbati », Journal of Jewish Studies 45 (1994), p. 215. 22. Dans la description du deuxième palais, il manque la mention des « myriades » devant les merkavot, mais le manuscrit 22 de Munich possède le mot.
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Merkava, « l’ange de la présence » prie Dieu à la première personne ; il dit que Dieu règne sur les ḥayyot et « sur les merkavot de ta puissance », allusion à la liturgie du paragraphe 555. Ainsi, il existe dans la mystique de la merkava une ou plusieurs traditions extrapolant le nombre de trônes-chars possédés par Dieu. La pluralité des merkavot ne vise pas tant à signifier la richesse de Dieu qu’à s’assurer de la présence divine au sein des éléments célestes. L’expression « Dieu des merkavot » dans la Vision de Gabriel pourrait se comprendre en ce sens, c’est-à-dire que tous les éléments constitutifs des cieux et donc de la présence divine écoutent, à moins qu’il ne faille lire la locution comme l’affirmation du pouvoir divin sur les anges. Le contexte avec la formule emphatique « la gloire de YHWH, Dieu Ṣeb’aôt, Dieu d’Israël » citée juste avant « le Dieu des merkavot » m’oriente vers la seconde hypothèse. En effet, la place centrale donnée à l’ange de la révélation, Gabriel, le théonyme « Dieu Ṣeb’aôt », conservé dix fois, qu’on peut comprendre en contexte comme Dieu des armées, sous-entendues célestes, et le salut qui ne semble passer que par Dieu et non par les hommes selon les lignes 66-67, « nous avons confiance en toi, pas [en] la chair, pas en le sang », donnent aux anges un pouvoir majeur dans le combat eschatologique contre le mauvais messie royal. Le « Dieu des merkavot » serait le Dieu des anges. La tradition des merkavot dans le Ma‘ase Merkava semble la plus proche du sens supposé de la locution, mais on doit noter que l’expression n’est pas dans le Ma‘ase Merkava. Au mieux, on peut relever une tradition commune assimilant les merkavot aux anges et non seulement une manifestation de la présence divine, bien que les deux soient liées. La Vision de Gabriel résume par l’expression « Dieu des merkavot », ce qui nous semble, un développement logique du concept de merkava dans le judaïsme ancien. La synthèse opérée dans l’expression ainsi forgée témoigne aussi d’une réflexion approfondie sur le sens de la merkava dès le tournant de l’ère chrétienne. Une telle élaboration intellectuelle pouvait sembler tardive au sein des traditions de la mystique de la merkava, mais le texte de la Vision de Gabriel témoigne au contraire qu’un milieu intellectuel au tournant de l’ère chrétienne a déjà revisité le concept de merkava pour affirmer une pluralité de manifestations de la singularité de la présence divine et une assimilation de cette pluralité avec la multitude des anges. De même, l’expression « les cieux des cieux » ou « les plus hauts cieux » à la ligne 25, au lieu de la simple mention usuelle « les cieux » dans les signes de la venue de la fin des temps, signifie probablement que le milieu rédacteur a en tête les sept cieux, une des caractéristiques de la topographie céleste dans les traditions de la mystique de la merkava. Sans revenir en détail sur le scénario eschatologique 23, le « Dieu des merkavot » écoute les pleurs de Jérusalem et des villes de Judée, puis « il 23. Voir D. H amidović , « An Eschatological Drama in Hazon Gabriel: Fantasy or Historical Basement? », Semitica 54 (2012), p. 231-248.
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apporte consolation par égard pour les arm[é]es de [l’]ange Michel et pour tous ceux qui aiment le supplier et lui demander » (l. 27-29). Après avoir écouté, Dieu semble déléguer les anges, avec de nouveau le mot Ṣeb’aôt, sous la conduite de l’ange Michel. La prééminence de Michel sur les autres anges est souvent affirmée au tournant de l’ère chrétienne 24 . Ils ont pour mission de consoler les affligés qui ne sont pas cités en terme de groupe ou d’ethnie mais par des toponymes : Jérusalem et les villes de Judée. Outre la préoccupation marquée seulement pour Jérusalem et la Judée et s’il est toujours délicat de commenter un manque, on observe que ce ne sont pas les Judéens ou les juifs, les « fils d’Israël » ou « la maison d’Israël » comme aux lignes 7 et 12 respectivement, qui sont nommés. On pourrait en déduire que la conception ethnique des juifs ne se limite plus aux frontières de la Judée pour le milieu rédacteur du texte, c’est pourquoi l’usage de l’ethnique serait ambigu, d’où le choix possible de nommer les lieux plutôt que le groupe pour être plus précis sur les lieux de la scène eschatologique. Quoi qu’il en soit, la mention des « exilés » à la ligne 14, le réemploi d’Ez 3,12, l’expression « signe d’exil » (’ôt galut) 25 à deux reprises, aux lignes 37 et 38, ainsi que le lieu de découverte de la stèle orientent vers un milieu établi hors de Judée mais qui rapporte les lamentations au sein de Jérusalem et des villes de Judée en guerre contre les nations selon les lignes 13-14. Enfin, la consolation est promise par Dieu via les anges pour ceux qui le supplient et l’invoquent. Ce groupe ne correspond pas plus à un ethnique, puisqu’il s’agit de « ceux qui aiment ». L’expression n’est pas anodine puisqu’on la lit aussi à la ligne 69, « il y en a plusieurs qui aiment YHWH Ṣeb’aôt, Dieu d’Israël », et à la ligne 82, « voici ils te [de]mandent, voici ceux qui aiment le roi », c’est-à-dire Dieu en contexte. L’identité de ce groupe demeure difficile à préciser à cause des lacunes du texte, mais les citations l’associent clairement à ceux qui demandent des révélations divines auprès de l’ange Gabriel. Pour cette raison aussi, le déroulement exact du scénario est difficile à donner. Toutefois, les anges, ou peut-être seulement les anges principaux, semblent jouer un rôle dans la guerre eschatologique. À la ligne 57, il est dit : « garde fermé le sang des massacres/sacrifices de Jérusalem ». Si on opte pour l’expression « sang des sacrifices de Jérusalem », la ligne semble signifier la fin des sacrifices accomplis au Temple de Jérusalem, ce qui 24. Voir Dn 12,1 ; 1 Hénoch 24,6 ; Test Isaac 1,6 ; Mart Is 3,16-17 ; 3 Hénoch 17,3 ; Test Neph (H) 8-9 ; 3 Baruch 11-15 ; 1QM 17,7. 25. Voir d’autres propositions de vocalisation chez E. Qimron – A. Yuditsky, « Notes on the So-Called Gabriel Vision Inscription », dans M. H enze (éd.), Hazon Gabriel: New Readings of the Gabriel Revelation, Atlanta/Géorgie, 2011, p. 139 et 144 : « le premier exil », « le second exil », et chez T. Elgvin, « Eschatology and Messianism in the Gabriel Inscription », Journal of the Jesus Movement in its Jewish Setting 1 (2014), p. 11 : « la première révélation », « la seconde révélation ».
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pourrait signifier le caractère jugé inapproprié des rites sacrificiels perpétrés au temple ou bien la destruction même de l’édifice terrestre. Cependant, l’autre lecture, « sang des massacres de Jérusalem » demeure possible en particulier dans le contexte du combat eschatologique 26.
3. « Leur merkava » Quelques lignes plus loin, juste après la confiance proclamée en Dieu seulement et pas dans « la chair et le sang » (l. 66-67), c’est-à-dire les hommes, on lit à la ligne 67 : « C’est leur merkava, celle des grands […] ». Il est difficile de lier la proposition sur la confiance exclusive en Dieu et ce début de phrase ; il est aussi difficile de faire de la première une révélation et de la seconde une interprétation de la première, car le message ne semble pas connecté. En revanche, il est question à la ligne 65 précédant ces deux phrases des « trois saints ». Là aussi, le contexte de cette expression n’est pas assuré, mais il semble y avoir un jeu sur le chiffre trois dans la Vision de Gabriel. On mentionne tour à tour trois prophètes (l. 15.70.79), trois jours (l. 19.54.80.83), trois signes (l. 30-34) et trois bergers (l. 75.79) ; la référence aux « trois saints » est conservée une seule fois dans le texte. De la ligne 70 à la ligne 79, il est question de trois personnages envoyés par Dieu sur terre puis rappelés dans les cieux ; ils sont qualifiés de « prophètes » et de « bergers ». La ligne 79 en fait donc explicitement des synonymes. De nombreuses hypothèses d’identification des trois figures sont possibles selon la littérature biblique comme en Za 11,8 où il s’agit de trois dirigeants humains avec une mauvaise conduite ou en Ez 14,14.18.20 où ce sont Noé, Daniel et Job, et selon les écrits rabbiniques, les trois prophètes peuvent être tour à tour Moïse, Sophonie, Hulda, Michée, Elie, Amos, Qohelet, Isaïe, Ezéchiel, Daniel 27. Comme les lignes 75 et 76 assignent aux bergers le rôle de venir voir en Israël s’il se trouve « des saints et des pu[rs](?) » en son sein, on peut se demander s’il ne faut pas reconnaître derrière ces trois figures des anges. Par exemple, dans l’Apocalypse aux animaux en 1 Hénoch 89-90, les « bergers » sont des anges de colère. Bien qu’il existe un jeu de sens sur le terme « saint » depuis les derniers siècles avant l’ère chrétienne pour désigner tour à tour des hommes au comportement irréprochable – comme à la ligne 76 juste citée – et des anges, cette dernière identification est la plus fréquente 28. C’est pourquoi les « trois saints » de la ligne 65 nous semblent des figures 26. Voir D. H amidović , « An Eschatological Drama in Hazon Gabriel: Fantasy or Historical Basement? », Semitica 54 (2012), p. 239. 27. Voir les références en A. Yardeni – B. Elitzur , « A Hebrew Prophetic Text on Stone from the Early Herodian Period: A Preliminary Report », dans M. H enze (éd.), Hazon Gabriel: New Readings of the Gabriel Revelation, Atlanta/Géorgie, 2011, p. 18-19. 28. Voir J. J. Collins , Daniel, Minneapolis/Minnesota, 1993, p. 313-317.
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angéliques. L’expression est suivie du mot ha‘ ôlam qu’on peut traduire par les « trois saints du monde/d’éternité », ce qui renforce le trait angélique des saints. Dans cette perspective, il est possible que les trois saints, les trois prophètes et les trois bergers désignent un groupe de trois anges avec des mots synonymes. Comme Michel est cité plus avant, il est vraisemblable que les trois anges soient Gabriel, Raphaël et Sariel ou Uriel 29 comme en 1 Hénoch 87,2-3 par exemple. Le fait que Gabriel soit l’ange qui donne la révélation n’interdit pas son inclusion dans la parole révélée. Dans ce cadre, l’expression lacuneuse à la ligne 67, « c’est leur merkava, celle des grands […] », pourrait faire référence au trône-char de chacun des trois anges. S’il fallait restituer le mot manquant après la qualification « celle des grands », on pourrait opter pour les termes « saints », « prophètes » ou « bergers » en accord avec le contexte de la Vision de Gabriel. En ce sens, la déclaration de foi aux lignes 66-67, au-delà de la lacune de la fin de la ligne 65, « nous avons confiance en toi, pas [en] la chair, pas en le sang », serait prononcée par les trois anges, et la locution « leur merkava » qui suit, à la ligne 67, indiquerait soit le trône-char de chacun des trois anges, soit la présence divine de la merkava, mais on ne peut comprendre ici qu’il s’agisse des anges eux-mêmes, à la différence de l’expression « Dieu des merkavot » à la ligne 26, à cause du pronom « leur » se référant aux trois anges. Le passage des lignes 65 à 68 mentionne ainsi successivement les trois anges d’éternité, puis ils disent leur confiance en Dieu et non en les hommes, ensuite on 30 affirme que les anges ont chacun en eux la présence divine grâce à la mention de « leur merkava », et enfin la phrase qui suit, « il y en a plusieurs qui aiment YHWH Ṣeb’aôt, Dieu d’Israël », commente et nuance l’absence de confiance en les hommes en affirmant que certains aiment Dieu, c’est-à-dire qu’ils suivent ses préceptes. La tradition de la merkava employée dans ce passage demeure fidèle aux premières interprétations sur la merkava, c’est-à-dire celle d’un véhicule conçu à l’origine pour Dieu puis pour les anges pour signifier la présence divine dans l’action des anges. En ce sens, cette dernière mention de la merkava est plus proche de la conception en 3 Hénoch qui cherche à savoir combien de merkavot possède Dieu. Dans cette perspective, les quatre merkavot de 3 Hénoch § 55, citées plus avant, désignent peut-être à la fois leur emplacement aux quatre points cardinaux dans les cieux mais aussi, ils font peut-être allusion aux merkavot des quatre anges les plus importants. La ligne 67 de la Vision de Gabriel en serait une des premières attestations, bien qu’elle semble se référer davantage aux trois anges. Toutefois, on ne 29. Voir A. Caquot, « 1 Hénoch », dans A. Dupont-Sommer – M. Philo (éd.), La Bible. Ecrits intertestamentaires, Paris, 1987, p. 479. 30. Le locuteur est peut-être l’ange Gabriel mais le texte préservé ne permet pas d’être plus précis.
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peut exclure une allusion aussi à Michel cité plus avant, ce qui porterait le chiffre de merkavot à quatre conducteurs de l’engin céleste. Par ailleurs, dans la comparaison des chiffres avec la littérature des Hekhalot, on a déjà indiqué une préférence pour le chiffre trois dans la Vision de Gabriel. On observe que les multiples de trois fondent aussi les spéculations sur le nombre de merkavot dans le Shi‘ur Qoma, § 376, puisqu’il est question de « 300, les merkavot de sa dignité », et dans les Hekhalot Zutarti, § 490, avec aussi « 300 merkavot ». Le dernier passage considéré de la Vision de Gabriel sur les trois saints et leur merkava pourrait recueillir une tradition au fondement du nombre de 300 merkavot dans les écrits des Hekhalot. La fin de la Vision de Gabriel de la ligne 77 à 87 est aussi la partie conclusive. L’ange Gabriel se présente avec tous ses titres : « Je suis Gabriel, roi des anges, prince des princes, de ceux qui sont proches des cours (?) » (l. 80-81). Contrairement à la ligne 28, où Michel semble l’ange qui dirige les autres anges, Gabriel semble endosser ce rôle avec le titre « roi des anges » (melekh malkhin), à moins d’y voir une formule marquant la supériorité aussi de Gabriel sur les autres anges ou sur les anges qui lui sont attachés. La proximité divine est indiquée par l’expression « de ceux qui sont proches des cours » sous-entendues célestes, à l’instar de Lc 1,19 où Gabriel se présente comme celui « qui se tient en présence de Dieu ». Le deuxième titre, « prince des princes » (sar hasarin) se lit en Dn 8,25 mais la locution semble désigner Dieu ou Michel. Dans la Vision de Gabriel, c’est Gabriel qui hérite de cette dénomination. Dans les Hekhalot, le titre est donné à une figure angélique très proche de Dieu à l’instar de Métatron en 3 Hénoch, § 78, de l’ange jeune, c’est-à-dire explicitement Métatron encore selon le manuscrit 40 de Munich des Hekhalot Zutarti, et de l’ange Michel dans des piyyutim 31. On trouve une expression approchante, « le chef des princes » (r’osh hasarim) qualifiant Gabriel dans le Seder Rabba di-bereshit, § 847. Après avoir créé l’homme pour diriger les animaux, Dieu « établit ses armées (ṣeb’aôt) et commanda à chacune sa tâche particulière. Il suscita un ange pour être à la tête d’elles toutes, Gabriel comme le chef des princes ». Le titre de « prince des princes » accordé à l’ange Gabriel dans la Vision de Gabriel semble se conformer à l’usage plus tardif du titre pour les figures angéliques de premier plan. Le passage de la Vision de Gabriel atteste par là même l’occurrence la plus ancienne de 31. Les références sont citées par A. Yardeni – B. Elitzur , « A Hebrew Prophetic Text on Stone from the Early Herodian Period: A Preliminary Report », dans M. H enze (éd.), Hazon Gabriel: New Readings of the Gabriel Revelation, Atlanta/Géorgie, 2011, p. 20-21 ; N. K atsumata, « An Additional Seder ‘Avoda for Yom Kippur by Shelomo Suleiman Al-Sinjari », Frankfurter Judaistische Beiträge 29 (2002), p. 41, l. 231-232 ; E. Fleischer , The Yozer: Its Emergence and Development, Jérusalem, 1984, p. 732 [hébreu].
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ce titre en général. L’application de celui-ci à l’ange Gabriel est très proche du titre dans le Seder Rabba di-bereshit. On peut penser que cette variante s’explique par l’habitude dans les Hekhalot de réserver le titre de « prince des princes » à Métatron et dans les piyyutim à l’ange Michel. Pour éviter une confusion de la figure visée derrière ce titre, le milieu rédacteur du le Seder Rabba di-bereshit a probablement choisi une variante afin de l’appliquer à Gabriel et de signifier aussi son rôle de premier ordre. C’est pourquoi on pense que le Seder Rabba di-bereshit et la Vision de Gabriel empruntent à la même tradition mettant en avant l’ange Gabriel. Enfin, la ligne 83 présente un texte difficile à comprendre, presque elliptique : « au troisième jour, le petit/jeune que j’ai pris, moi Gabriel ». On pourrait songer dans ce contexte conclusif à un autre titre donné à Gabriel. L’adjectif substantivé qatan pourrait être un qualificatif nouveau reçu par Gabriel à l’issue des trois jours qu’a duré le combat eschatologique. Il serait à comprendre en parallèle avec l’usage plus tardif appliqué à Métatron en 3 Hénoch. Il signifierait que l’ange Gabriel entretient une proximité encore plus grande avec Dieu après la guerre eschatologique au point de devenir l’ange le plus important auprès de Dieu. Cette interprétation va dans le sens du contexte de la Vision de Gabriel. En effet, le titre de « roi des anges » fait écho à Dieu qualifié de « roi » à la fin de la ligne 82 mais le titre est bien appliqué à Gabriel afin, probablement, de signifier la proximité de l’ange avec Dieu. De même, le titre de « prince des princes » dit non seulement la primauté de Gabriel sur les autres anges mais aussi son lien hiérarchique privilégié à Dieu. Si cette lecture du contexte est correcte, il s’agirait de la plus ancienne attestation de l’usage de l’adjectif qatan en ce sens, un usage devenu plus tard particulièrement prégnant pour signifier la position unique de Métatron vis-à-vis de Dieu 32 . En conclusion de ce parcours, il nous faut revenir sur le bon usage de la comparaison entre la Vision de Gabriel et les écrits mystiques plus tardifs, dont les Hekhalot majoritairement, sinon on risque des conclusions excessives. J’ai essayé de faire miennes les remarques de Peter Schäfer 33 sur l’obligation de comprendre un motif, une idée, une expression à l’intérieur de son contexte d’énonciation avant de projeter ceux-ci dans un autre écrit nécessairement bâti dans un autre contexte et quelquefois à une autre époque dans un autre lieu par un autre milieu intellectuel. Je crois qu’il faut essayer d’éviter de décontextualiser les passages ou locutions étudiés pour procéder à la comparaison, pour montrer une continuité littéraire 32. Voir A. A. Orlov, The Enoch-Metatron Tradition, Texts and Studies in Ancient Judaism 107, Tubingue, 2005. 33. P. Schäfer , « The New Testament and Hekhalot Literature: The Journey into Heaven in Paul and in Merkavah Mysticism », Journal of Jewish Studies 35 (1984), p. 19-35.
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voire sociale, politico-religieuse ou culturelle. Je ne suis pas en train de dire que la comparaison n’a pas lieu d’être, elle doit même avoir lieu, mais il faut s’assurer que chaque texte comparé reste compris dans son contexte. J’ajouterai pour être précis, chaque manuscrit doit être étudié dans son contexte. Une telle précaution d’usage est évidente pour les historiens mais force est de constater au regard de l’histoire de la recherche sur les Hekhalot et leurs milieux rédacteurs, que les savants se sont trop souvent soustraits au contexte d’énonciation. C’est pourquoi on ne peut, me semble-t-il, conclure que la Vision de Gabriel est un écrit apocalyptique attestant la continuité de la mystique juive jusqu’aux Hekhalot ou des passages, microformes ou archétypes des Hekhalot. Plus prudemment, on peut observer des motifs en commun, mais, et il est important de le souligner, il n’y a aucune expression déchiffrée dans la Vision de Gabriel qui est commune aux passages des Hekhalot et écrits proches cités. Il n’en demeure pas moins que les deux attestations sur la merkava dans la Vision de Gabriel témoignent de deux spéculations sur la signification du trône-char. L’originalité de ces deux significations est d’être documentée plus tardivement dans d’autres écrits qui considèrent la merkava. Une première conclusion est de voir la Vision de Gabriel comme la plus ancienne attestation de ces compréhensions de la merkava. Comme il n’y a pas de verbatim, juste des analogies de sens, on ne peut parler de microformes plus anciennes qu’on croyait et qui circulèrent pendant plusieurs siècles, mais de traditions sur la merkava qui se forgent plus tôt qu’on ne le pensait jusqu’alors. Ada Yardeni a daté l’écriture de la stèle sur une base paléographique du tournant de l’ère chrétienne 3 4 , mais je pense avoir montré que la datation paléographique de ce type d’écriture est plus ample. Il faut aller jusqu’à la possibilité d’une copie sur la stèle à la fin du i er siècle de l’ère chrétienne 35. Du reste, les études linguistiques vont aussi en ce sens 36. Ainsi, les deux traditions sur la merkava dans la Vision de Gabriel dateraient d’une époque, le i er siècle de l’ère chrétienne, où les spéculations sur les anges, sur les chiffres – en témoigne le livre de l’Apocalypse dans le Nouveau Testament – et sur l’eschatologie en général foisonnent. Il ne nous semble pas impossible de situer la Vision de Gabriel
34. A. Yardeni – B. Elitzur , « A First-Century bce Prophetic Text Written on a Stone: First Publication », Cathedra 123 (2007), p. 164 ; A. Yardeni – B. Elitzur , « A Hebrew Prophetic Text on Stone from the Early Herodian Period: A Preliminary Report », dans M. H enze (éd.), Hazon Gabriel: New Readings of the Gabriel Revelation, Atlanta/Géorgie, 2011, p. 26. 35. D. H amidović , « An Eschatological Drama in Hazon Gabriel: Fantasy or Historical Basement? », Semitica 54 (2012), p. 244-245. 36. G. A. R endsburg, « Hazon Gabriel: A Grammatical Sketch », dans M. H enze (éd.), Hazon Gabriel: New Readings of the Gabriel Revelation, Atlanta/ Géorgie, 2011, p. 90.
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dans ce contexte plus tardif. En revanche, le contexte littéraire des Hekhalot me semble fort différent. À la suite de ces constats, j’ai émis l’hypothèse que le combat eschatologique, dont il est question dans la Vision de Gabriel, serait un des nombreux échos littéraires à la catastrophe de 70 de l’ère chrétienne et la destruction du temple 37. Après cette étude sur la merkava, il est possible d’aller plus avant dans le sens de ce contexte. L’absence des prêtres malgré différentes catégories envisagées, dont les pieux que nous n’avons pas cités jusqu’alors, l’absence du mot Tora et d’expressions associées, l’absence de termes pour dire le temple et son fonctionnement, sont peut-être dues aux lacunes du texte, mais on peut tout de même s’interroger sur leur absence totale. Le milieu rédacteur de la Vision de Gabriel privilégie les anges comme médiateurs entre YHWH et les hommes dans le scénario eschatologique. Il cite aussi les prophètes mais il s’agit davantage de caractériser les fonctions de révélation et d’interprétation attribuées aux anges. Certes, il existe raisonnablement quelques allusions à des paroles prophétiques conservées dans la Bible, mais elles ne sont jamais annoncées comme telles explicitement. De plus, la première partie conservée avec la succession de paroles divines est sans rapport avec les oracles prophétiques parvenus jusqu’à nous. C’est pourquoi la Vision de Gabriel ressemble à ces écrits apocalyptiques du i er siècle de l’ère chrétienne et après qui mélangent allégrement les genres littéraires, qui donnent un rôle accru aux anges et qui relèguent en arrière-plan les considérations sur la Tora, sur le canon juif et sur le temple en général. Toutefois, elle considère Jérusalem et les villes de Judée, et elle cite Israël avec les expressions « fils d’Israël », « maison d’Israël » et « Dieu d’Israël ». Le judaïsme qui transparaît de la Vision de Gabriel est un judaïsme aux accents surnaturels, où les considérations sur le monde céleste l’emportent sur les repères terrestres. On ne peut en déduire aussi facilement que le milieu intellectuel derrière ce texte rejette le temple et les prêtres, encore moins qu’il réfute la Tora, seulement parce que ces thèmes ne sont pas envisagés. Il nous semble que la mise en retrait de ces piliers de la vie juive est aussi une caractéristique de la sacerdotalisation, car elle promeut une autre forme de la connaissance du divin, celle du contact avec les anges chargés d’annoncer la victoire finale du salut : « le mal sera brisé en présence de la justice », lit-on à la ligne 21. Ainsi dessiné, l’arrière-plan de la Vision de Gabriel fait des anges un véritable concept qui n’a plus besoin d’une incarnation historique et donc d’une relégation en cas de problèmes politiques et religieux. La vie juive se passe sur terre mais elle tire ses enseignements des cieux dorénavant. La fusion des différentes figures nommées derrière la catégorie d’anges peut se comprendre en ce sens. La religion juive peut 37. D. H amidović , « An Eschatological Drama in Hazon Gabriel: Fantasy or Historical Basement? », Semitica 54 (2012), p. 245-247.
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continuer à exister, car le contact avec les anges maintient un accès à Dieu et sa parole quelle que soit la situation des juifs, en particulier si on envisage des juifs vivant à l’est de la mer Morte comme milieu rédacteur de la Vision de Gabriel. Sur la vie juive dans cette région, on sait peu : on connaît les fouilles de sauvetage de Khirbet Qazone et de quelques sites alentour où les juifs vivent avec les Nabatéens ; on a découvert les archives de Babatha datant du début du ii e siècle de l’ère chrétienne, qui montrent la présence de juifs à l’extrémité méridionale de la mer Morte mais, semble-t-il avec une faible judaïté à l’examen de la Ketubba de Babatha ; on peut lire çà et là des hypothèses de rédaction de tel ou tel écrit juif dans cette région comme le suggère G. W. E. Nickelsburg pour les Paraboles d’Hénoch 38, mais le judaïsme transjordanien nous échappe. La Vision de Gabriel est peut-être un des rares documents religieux parvenus jusqu’à nous qui provient de ce milieu. Si tel est le cas, il pourrait nous éclairer sur la situation perçue par les juifs de cette région et aussi il pourrait nous aider à mieux comprendre les contacts culturels entre d’un côté, la Palestine romaine et de l’autre côté, les communautés juives établies depuis plusieurs siècles en Mésopotamie 39.
38. Voir les arguments en G. W. E. Nickesburg – J. C. Vander K am, 1 Enoch 2: A Commentary on the Book of 1 Enoch. Chapters 37-82, Minneapolis/Minnesota, 2012, p. 66. 39. Voir à ce sujet pour les siècles qui suivent, l’article de C. H ezser , « Crossing Enemy Lines: Network Connections Between Palestinian and Babylonian Sages in Late Antiquity », Journal for the Study of Judaism in the Persian, Hellenistic, and Roman Periods 46 (2015), p. 224-250.
« L ivres d’ H ermès » : écrits de la « M aison de vie » ? L es
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Étude des liens possibles entre des Hermetica et le temple égyptien Anna Van
den
K erchove
Institut protestant de théologie – département d ’histoire, Paris [email protected] Abstract Research into possible links between the Hermetica and the Hekhalot is only in its infancy. We will therefore focus on the possible links between the Hermetica and Egyptian temples. The Hermetica composed during the first centuries of the Common Era, probably in Egypt, were placed under the authority of Hermes Trismegistus, who derives from the Greek Hermes and the Egyptian Thot. The authors, who are anonymous, forged specific links with Egyptian temples, thanks to the figures as Tat, Asclépius of Hammon and thanks to a presentation of the Hermetica as « books of Thot ». Thanks to these links, the authors may want to legitimize the way of Hermes, but perhaps also to seek to safeguard a tradition that might be considered as threatened. The question then arises of a historical relationship between the writing of the Hermetica and the Egyptian temples. However such a relationship is still hypothetic. Résumé La recherche sur les liens possibles entre les Hermetica et les Hekhalot n’en sont qu’à leurs tout débuts. Il s’agit donc ici de s’intéresser plutôt aux liens possibles entre les Hermetica et les temples égyptiens. Les Hermetica antiques, un corpus non clos composé au cours des premiers siècles de l’ère commune, probablement en Égypte, sont en effet placés sous l’égide d’Hermès Trismégiste, qui tient à la fois de l’Hermès grec et du Thot égyptien. Les auteurs, anonymes, ont cherché à tisser des liens précis avec les temples. Ils le font par l’intermédiaire des figures mises en scène – que ce soit Tat, Asclépios ou Hammon par exemple –, mais aussi en présentant les Hermetica comme des « livres de Thot ». Ces liens servent à légitimer la voie d’Hermès, mais peut-être aussi à chercher à sauvegarder une tradition dont certains penseurs pourraient considérer qu’elle est menacée. La question se pose alors d’un rapport historique entre la production des Hermetica et le milieu des temples égyptiens. Un tel rapport n’est pas impossible, mais reste pour le moment hypothétique. La « sacerdotalisation » dans les premiers écrits mystiques juifs et chrétiens. Actes du colloque international tenu à l’Université de Lausanne du 26 au 28 octobre 2015, sous la direction de David Hamidović, Simon C. Mimouni et Louis Painchaud, Turnhout : Brepols, 2021 (Judaïsme ancien et origines du christianisme, 22), p. 183-202 DOI 10.1484/M.JAOC-EB.5.122772 © F H G
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À l’heure actuelle, la recherche sur les rapports que l’historien pourrait établir entre la littérature des Hekhalot et les Hermetica en est seulement à ses débuts, avec quelques annotations éparses. Nous-mêmes avons trop peu avancé dans cette recherche pour pouvoir proposer des pages à ce sujet. C’est pourquoi nous avons plutôt choisi d’aborder une thématique centrée sur les Hermetica, avec une étude des liens possibles entre les écrits hermétiques et le temple égyptien. Nous espérons que ce thème pourra contribuer à la thématique « Hekhalot et sacerdotalisation ». Après une brève présentation de la littérature hermétique antique, nous aborderons la façon dont des auteurs hermétistes construisent un lien avec le temple égyptien puis, dans une partie plus brève en raison du manque de données, nous étudierons la possibilité d’une réalité historique à la construction hermétique de ce lien.
I. Les « Livres d’Hermès » antiques Les « livres / écrits d’Hermès » – selon la terminologie antique 1 – ou Hermetica – selon une terminologie moderne – constituent une vaste littérature dont la production s’étend sur tout le premier millénaire et la première moitié du deuxième millénaire de l’ère commune. Dans les pages qui suivent, nous présenterons uniquement les Hermetica antiques, ceux avec lesquels il pourrait être possible de tisser des liens (quels qu’ils soient) avec la littérature des Hekhalot.
1. Un corpus non clos La littérature hermétique est surtout connue grâce à l’Asclépius – qui est la version latine d’un écrit grec, le Discours parfait – et grâce à ce que les chercheurs du xx e siècle appellent le Corpus hermeticum, qui est transmis par des manuscrits des xiv e-xvi e siècles. Ce Corpus pourrait remonter au moins à l’érudit byzantin du xi e siècle, Michel Psellos, voire même plus tôt, mais probablement pas à l’époque de composition des plus anciens Hermetica, à savoir les premiers siècles de l’ère commune. À côté de cette collection et de l’Asclépius, il existe d’autres écrits que le chercheur peut qualifier d’« hermétiques » du fait de la présence conjointe de plusieurs des éléments suivants : – Les auteurs historiques attribuent ce qu’ils disent ou écrivent à Hermès Trismégiste ou à l’un de ses disciples caractéristiques (Tat, Asclépios et Ammon, voire Isis), ou font intervenir l’une ou l’autre
1. Nous trouvons cette terminologie en particulier chez Jamblique, dans sa Réponse d ’Abamon à la lettre à Anébon, I 1-2 [p. 4-5]. Cet écrit a été longtemps connu sous le titre De Mysteriis (ou Les Mystères de l ’Égypte), qui a été donné à l’ouvrage par Marsile Ficin quand il en a fait une paraphrase en 1489. Voir désormais Jamblique, Réponse à Porphyre (De Mysteriis), texte établi, traduit et annoté par H. D. Saffrey et A. Ph. Segonds †, avec la collaboration d’A. L ecerf, Paris, 2013.
LES « LIVRES D’HERMÈS »
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de ces figures. Leurs écrits sont placés ainsi sous le patronage d’Hermès Trismégiste. – Le corollaire est que les auteurs historiques sont anonymes, un anonymat volontaire, et qu’ils n’interviennent pas, ou très rarement, comme instance modalisante dans leurs écrits. Les différents auteurs historiques apparaissent ainsi comme étant les transcripteurs de l’enseignement d’Hermès à ses disciples. – La forme littéraire utilisée est majoritairement le dialogue, et les parties narratives sont très rares. Le destinataire est ainsi directement placé en présence des figures mises en scène, voire même est invité à s’identifier à l’une d’entre elles, en particulier le disciple : le destinataire assiste à et bénéficie de l’enseignement d’Hermès, il progresse au même titre que le disciple sur la voie d’Hermès, une voie de salut 2 . – Le contenu diverge d’un écrit à un autre, mais de manière générale il concerne toujours Dieu, le monde et les êtres, dans le but d’amener l’apprenant, véritable initié, à la connaissance de Dieu, qui est considérée comme le salut pour l’être humain. – Des expressions spécifiques à cette littérature sont employées, par exemple l’expression genikoi logoi, qui signifie « Leçons générales ». Pour être complet, il faudrait inclure des idées hermétiques, notamment celles qui concernent le fait que Dieu est plus grand que tout nom, ou la hiérarchie entre Dieu-monde-être humain ou encore les rapports entre monde et être humain 3. Néanmoins, ces idées ne sont pas en soi spécifiquement hermétiques ; il nous semble que la spécificité hermétique tient plus à l’association de plusieurs idées et à la manière de les exprimer avec des formules récurrentes. C’est une raison pour laquelle, d’ailleurs, il est difficile de reconnaître l’influence des idées hermétiques chez les penseurs antiques si aucun nom spécifique ni aucune expression caractéristique n’est employée. Quoi qu’il en soit, à partir des critères ci-dessus, une liste d’écrits hermétiques peut être établie, depuis l’Antiquité jusqu’à l’époque moderne, dans les mondes romain, musulman et chrétien 4 ; cette 2. A. Van den K erchove , La Voie d ’Hermès. Pratiques rituelles et traités hermétiques, Leyde, 2012, p. 45-78. 3. Voir A. Van den K erchove , « Dieu, monde et l’humain. Les hiérarchies dans les écrits hermétiques », dans C. Ombretta Tommasi, L. G. Soares Santoprete et H. Seng (éd.), Hierarchie und Ritual. Zur philosophischen Spiritualität in der Spätantike, Heidelberg, 2018, p. 89-110. 4. Compléter avec C. H. Bull , The Tradition of Hermes Trismegistus. The Egyptian Priestly Figure as a Teacher of Hellenized Wisdom, Leyde-Boston, 2018. Pour
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liste n’est pas close et il est possible d’y inclure de nouveaux textes au gré des découvertes ou de nouvelles identifications 5. Pour l’Antiquité, la liste rend compte d’une littérature multiforme, avec des tendances doctrinales et philosophiques différentes, entre lesquelles il est difficile d’établir des filiations et des liens de dépendance : – le Corpus hermeticum (ci-après CH) dont il a déjà été question, regroupant au moins dès le début du deuxième millénaire dix-sept écrits (numérotés de 1 à 18) composés durant les trois premiers siècles de l’ère commune 6 ; – l’Asclépius, version latine du Discours parfait composé en grec probablement au iii e siècle, avant Lactance qui mentionne et cite l’écrit grec dans ses Institutions divines écrites dans la première décennie du iv e siècle ; quelques extraits grecs et coptes sont également disponibles 7 ; – 39 fragments transmis par Jean Stobée dans son Anthologie datée des environs de 500, fragments dont la longueur varie entre quelques lignes et plus d’une vingtaine de pages pour le fragment 23 (ci-après SH 23) intitué Koré Kosmou 8 ; – des citations effectuées par des auteurs chrétiens, parmi lesquelles certaines sont également attestées par l’actuel Corpus hermeticum et par les fragments de Stobée 9 ; plus d’informations pour Hermès en monde arabe, voir K. Bladel , The Arabic Hermes. From Pagan Sage to Prophet of Science, Oxford, 2009 ; pour Hermès dans le monde occidental, voir P. Lucentini, Platonismo, ermetismo, eresia nel medioevo, Louvain-la-Neuve, 2007, F. Bonardel , La Voie hermétique : introduction à la philosophie d ’Hermès, Paris, 2011 et E. Garin, Hermétisme et renaissance, traduit par B. Schefer , Paris, 2016 [éd. orig. : Ermetismo del Rinascimento, Rome, 1988]. 5. Jamblique rapporte que selon Séleucos, il y aurait vingt mille livres hermétiques et trente-six mille cinq cent vingt-cinq selon Manéthon (Réponse d ’Abamon, VIII 1 [p. 261]). Certes, ces chiffres sont largement exagérés et ils n’ont rien d’historique. Cependant, il n’est pas impossible que les écrits dont leurs auteurs prétendent qu’ils appartiennent à la tradition hermétique soient plus nombreux que ceux qui sont parvenus jusqu’à nous. 6. Corpus Hermeticum, t. I-II, texte établi par A. D. Nock et traduit par A.-J. Festugière , Paris, 71991. 7. Corpus Hermeticum, t. II, texte établi par A. D. Nock et traduit par A.-J. Festugière , Paris, 71991. 8. Corpus Hermeticum, t. III-IV, texte établi par A. D. Nock et traduit par A.-J. Festugière , Paris, 71991. 9. Corpus Hermeticum, t. IV, texte établi par A. D. Nock et traduit par A.-J. Festugière , Paris, 71991. Voir aussi M. David L itwa , Hermetica II. The Excerpts of Stobaeus Papyrus Fragments, and Ancient Testimonies in an English Translation with Notes and Introductions, Cambridge, 2018.
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– les Définitions d’Hermès Trismégiste à Asclépius, conservées en arménien 10 ; – des fragments transmis par des papyri datés des ii e-iv e siècles, les plus connus étant les trois écrits transmis en copte dans le codex VI découvert près de Nag Hammadi en Haute-Égypte en 1945, en particulier le sixième écrit de ce codex, inconnu par ailleurs et intitulé, par les chercheurs, L’Ogdoade révèle l ’Ennéade (= NH VI, 6) 11 ; – des fragments astrologiques, botaniques, médicaux, etc. ; en particulier le Cyranide ou le Liber Hermetis (compendium, ca 500) 12 .
2. La production historique des « Livres d’Hermès » Le chercheur dispose de très peu d’informations historiques quant à la production des écrits hermétiques. Il a en particulier des difficultés à déterminer précisément la date de composition de la plupart d’entre eux. Les citations par les auteurs chrétiens et les découvertes papyrologiques permettent de proposer un terminus ante quem pour plusieurs écrits 13. Afin d’affiner ces datations, l’historien ne peut pas prendre en compte les auteurs historiques, puisqu’il ne connaît rien d’eux ; aucun nom n’a été transmis, ni par la tradition directe ni par la tradition indirecte. Le contenu peut fournir des informations supplémentaires, mais leur interprétation est loin d’être évidente. Des auteurs font certes allusion à des événements ; l’exemple caractéristique est la prophétie sur la fin des cultes, des temples égyptiens et de l’Égypte dans l’Asclépius, sections 24-25 ; Augustin et, à sa suite, quelques chercheurs ont considéré que cette « prophétie » faisait allusion à la victoire du culte chrétien 14 ; cependant, cette interprétation est hypothétique et n’exclut pas la réutilisation de prophéties cou10. J.-P. M ahé , Hermès en Haute-Égypte, tome II, Québec, 1982 et Hermès Trismégiste, tome V : Paralipomènes grec, copte, arménien. Codex VI de Nag Hammadi, Codex Clarkianus 11 Oxoniensis, Définitions hermétiques, Divers, textes édités et traduits par Jean-Pierre Mahé, Paris, 2019. 11. Le titre L’Ogdoade révèle l ’Ennéade est donné par les chercheurs au texte suite à ce que nous pouvons lire à la page 61 du codex, lignes 21-22. J.-P. M ahé , Hermès en Haute-Égypte, 2 tomes, Québec, 1978 (t. I) et 1982 (t. II) et Hermès Trismégiste, tome V : Paralipomènes grec, copte, arménien. Codex VI de Nag Hammadi, Codex Clarkianus 11 Oxoniensis, Définitions hermétiques, Divers, textes édités et traduits par Jean-Pierre Mahé, Paris, 2019. Pour une liste des témoignages papyrologiques, avec les références aux éditions, voir A. Van den K erchove , « Papyrological Hermetica », Studi e Materiali di Storia delle Religioni 83 (2017), p. 97-115. 12. Voir en particulier A.-J. Festugière , La Révélation d ’Hermès Trismégiste, Paris, 22014. 13. Voir A. Van den K erchove , « Papyrological Hermetica », Studi e Materiali di Storia delle Religioni 83 (2017), p. 106-107. 14. Augustin, Cité de Dieu, VIII 23.
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rantes en Égypte 15. Le recours à certaines idées est tout aussi difficile à interpréter. Un autre écrit est intéressant de ce point de vue, le premier écrit du Corpus hermeticum, intitulé Poimandrès dans la tradition manuscrite. Les chercheurs ont établi un lien entre cet écrit et le judaïsme 16 : la prière finale comprend des éléments provenant de la liturgie juive et en particulier du Shema Israël ; le récit cosmogonique et anthropogonique mis dans la bouche de Poimandrès comporte des motifs communs avec les premiers chapitres de la Genèse (et avec le Timée de Platon). Ces chercheurs, considérant que le judaïsme égyptien était sur le déclin après la révolte juive sous Hadrien, ont proposé de dater l’écrit hermétique de la fin du i er siècle ou du début du ii e siècle ; cependant, une réévaluation récente du judaïsme au ii e siècle et des rapprochements possibles avec des écrits conservés dans les codices de Nag Hammadi et avec les fragments de Numénius invitent à proposer une nouvelle datation située dans la seconde moitié du ii e siècle 17. De manière générale, la composition, en grec, des Hermetica antiques édités par Arthur D. Nock est ainsi située entre le i er siècle de l’ère commune (ce qui n’exclut pas que des idées ou des motifs remontent plus haut dans le temps) et la fin du iii e siècle ou le début du iv e siècle. Pour les écrits astrologiques, la production aurait pu commencer dès le i er siècle avant l’ère commune. De plus, la production se poursuit 15. Sur cette prophétie ou apocalypse de l’A sclépius, voir J. Schwartz , « Notes sur la ‘petite apocalypse’ de l’A sclépius », Revue d ’histoire et de philosophie religieuses 62 (1982), p. 165-169 ; A. Camplani, « Alcune note sul Testo del VI codice di Nag Hammadi: la predizione di Hermes ad Asclepius », Augustinianum 26 (1986), p. 349-368. 16. M. Philonenko, « Une utilisation du Shema dans le Poimandrès », Revue d ’histoire et de philosophie religieuses 59 (1979), p. 369-372 ; M. Philonenko, « Le Poimandrès et la liturgie juive », dans F. Dunand et P. L évêque (éd.), Les Syncrétismes dans les religions de l ’Antiquité, Colloque de Besançon, 22-23 octobre 1973, Leyde, 1975, p. 204-211 ; M. Philonenko, « Une allusion de l’A sclépius au livre d’Hénoch », dans J. Neusner (éd.), Christianity, Judaism and other Greco-Roman Cults. Studies for Morton Smith at Sixty, Part 2: Early Christianity, Leyde, 1975, p. 161-163 ; M. Philonenko, « La Koré Kosmou et les “Paraboles” d’Hénoch », dans S. Said (éd.), Hellénismos. Quelques jalons pour une histoire de l ’identité grecque. Actes du colloque de Strasbourg, 25-27 octobre 1989, Leyde, 1991, p. 119-124 ; B. A. Pearson, « Jewish Elements in Corpus Hermeticum I (Poimandres) », dans R. van den Broek – M. J. Vermaseren (éd.), Studies in Gnosticism and Hellenistic Religions presented to Gilles Quispel on the Occasion of his 65th Birthday, Leyde, 1981, p. 336-348 ; H. L. Jansen, « Die Frage nach Tendenz und Verfasserschaft im Poimandres », dans G. Windengren (éd.), Proceedings of the International Colloquium on Gnosticism, Stockholm, August 20-25. 1973, Stockholm-Leyde, 1977, p. 157163 ; J. Holzhausen, Der « Mythos vom Menschen » im hellenistischen Ägypten. Eine Studie zum « Poimandres » (CH I), zu Valentin und dem gnostischen Mythos, Bodenheim, 1994. 17. Voir A. Van den K erchove , « Les hermétistes et les conceptions traditionnelles des sacrifices », dans N. Belayche – J.-D. Dubois (éd.), L’Oiseau et le poisson. Cohabitations religieuses dans les mondes grec et romain, Paris, 2011, p. 61-80.
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après la fin de l’Antiquité jusqu’au milieu du deuxième millénaire, en particulier dans le monde musulman puis la chrétienté occidentale 18. Quant au lieu de production des écrits hermétiques antiques, vu les références à l’Égypte et l’emploi de certains traits culturels égyptiens, les chercheurs ont considéré, à la suite d’auteurs antiques comme Jamblique, que l’Égypte était le lieu de production. Néanmoins, dès qu’il s’agit d’être plus précis, il n’y a plus unanimité parmi les chercheurs. Alexandrie a été proposée, essentiellement en raison de la longue tradition « intellectuelle » et de sa population cosmopolite 19 ; mais d’autres cités importantes, comme Panopolis, Hermopolis, ou des régions, comme le Fayoum, peuvent être et ont été suggérées 20. Cependant, en l’état actuel de la documentation, il paraît difficile de trancher en faveur de l’une ou de l’autre. De plus, il est probable que les Hermetica ont été composés dans plusieurs cités en Égypte, voire même dans des cités situées en dehors de l’Égypte ; en tout cas, certains ont pu être réunis en collection dans des cités d’autres régions, comme Athènes, si le chercheur reconnaît fiable l’information donnée par Cyrille d’Alexandrie, ce que nous aurions tendance à faire 21. Concernant le milieu culturel ou les milieux culturels, la question a été essentiellement soulevée à propos du Poimandrès pour lequel nous venons de dire que des chercheurs avaient postulé un milieu de provenance proche du judaïsme, voire même que l’auteur était juif ou un juif converti à l’hermétisme 22 . Cependant, la question reste ouverte, puisque cet écrit présente 18. Voir plus haut n. 4. 19. J.-P. M ahé , « L’hermétisme alexandrin », Grand Atlas Universalis des religions, Paris, 1988, p. 344-345 ; voir aussi A. Faivre , Présence d ’Hermès Trismégiste, Paris, 1988, p. 15-16. 20. Pour Panopolis, on peut avancer le fait qu’une dédicace à Hermès Trismégiste y a été découverte (elle est due à un soldat romain et date de 238-244 de l’ère commune ; voir É. Bernand, Inscriptions grecques d ’Égypte et de Nubie : répertoire bibliographique des OGIS, Paris, 1982, p. 55 n.° 716 = OGIS II 716.1), ainsi que le fait que Zosime de Panopolis témoigne d’une connaissance du nom « Poimandrès » et du « baptême dans le cratère » de CH IV. Pour Hermopolis, on peut avancer une lettre de bienvenue (P. Vind. G 12563) écrite par la Boulè d’Hermopolis pour accueillir l’un de ses citoyens, Aurélios Ploution, de retour d’un séjour à Rome entre 253 et 268 (voir M. Drew-Bear , Hermopolis-La-Grande à l ’époque de Gallien. Recherches sur l ’histoire d ’une cité de l ’Égypte romaine à la lumière des archives de son conseil, Lille, 1988, no 18). Pour le Fayoum, voir H. A. M. Jackson, « A New Proposal for the Origin of the Hermetic God Poimandres », Zeitschrift für Papyrologie und Epigraphik 128 (1999), p. 95-106. 21. Voir Cyrille d’Alexandrie, Contre Julien, I 41, 548 B. 22. H. L. Jansen, « Die Frage nach Tendenz und Verfasserschaft im Poimandres », dans G. Windengren (éd.), Proceedings of the International Colloquium on Gnosticism, Stockholm, August 20-25. 1973, Stockholm-Leyde, 1977, p. 157-163 et J. Holzhausen, Der « Mythos vom Menschen » im hellenistischen Ägypten. Eine Studie zum « Poimandres » (CH I), zu Valentin und dem gnostischen Mythos, Bodenheim, 1994, p. 64.
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aussi des rapprochements possibles avec des fragments de Numénius et des écrits transmis par les codices découverts près de Nag Hammadi. De manière générale, il est possible d’affirmer que les auteurs ont suivi une partie de la paideia grecque, qu’ils ont notamment un certain niveau en rhétorique et en philosophie, sans être pour autant des « spécialistes » dans chacune de ces disciplines. Si nous prenons en compte les papyri, ces derniers informent surtout sur les milieux de réception d’écrits hermétiques : il s’agirait d’une élite polythéiste, de groupes « chrétiens » ou d’autres cercles qui restent indéterminés 23. Ainsi, la littérature hermétique apparaît comme un corpus qui n’est pas clos et qui est extrêmement diversifié quant aux auteurs, aux époques de composition et aux idées exprimées ; cependant, elle comporte quelques caractéristiques qui permettent d’affirmer l’appartenance à la tradition hermétique. Cette situation rend difficile l’exploitation historique des Hermetica, notamment quand il s’agit de les comparer à d’autres documents contemporains. Seule une recherche plus ample et interdisciplinaire permettrait d’affiner les données historiques relatives à la littéraire hermétique. Un domaine de recherche serait de prendre en considération le rapport que des auteurs tissent avec le temple égyptien. Dans les pages qui suivent, nous allons aborder cette thématique, en faisant essentiellement le point sur ce que les Hermetica nous apprennent.
II. Tisser des liens avec les temples égyptiens L’Égypte apparaît à l’arrière-plan de plusieurs des Hermetica antiques. Cela rend compte de la fascination qu’exerçaient ce pays et sa tradition religieuse dans le monde gréco-romain. Cependant, les auteurs des Hermetica ne paraissent pas avoir cédé uniquement à une mode, à un topos commun. Plusieurs éléments égyptiens repris dans les écrits participeraient à la construction d’un lien étroit avec le temple égyptien. Ce serait en particulier le cas du recours à des figures qui toutes ont un rapport avec des divinités égyptiennes.
1. Les figures mises en scène Plusieurs écrits transmis sous forme de fragments dans l’Anthologie de Jean Stobée mettent en scène Isis et Horus, où Isis enseigne son fils Horus et où elle-même se présente comme une disciple (indirecte) d’Hermès. En particulier l’auteur du fragment 23 reprendrait la tradition grecque qui fait d’Isis la fille ou la disciple d’Hermès, mais il l’adapterait ; Isis est une disciple de la seconde génération, puisqu’elle est l’élève de Kaméphis qui 23. A. Van den K erchove , « Papyrological Hermetica », Studi e Materiali di Storia delle Religioni 83 (2017), p. 110-114.
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lui-même a entendu l’enseignement d’Hermès (SH 23, 32). Le nom même de Kaméphis pourrait être relié à des épithètes divines égyptiennes qui deviennent des divinités en tant que telles dans des textes grecs, notamment Kneph-Kematef, le dieu « qui a accompli son temps », c’est-à-dire le « créateur initial » 24 . D’autres écrits mettent en scène Ammon, sous cette orthographe ou sous celle « Hammon » ; cette figure, qui est qualifiée de roi dans l’écrit CH XVI, n’est pas sans rappeler le dieu égyptien Amon, et la fonction royale qui est attribuée à Ammon/Hammon pourrait être l’héritière d’une conception évhémériste qui faisait du dieu Amon l’un des plus anciens rois de l’Égypte. Les deux disciples d’Hermès, Asclépios et Tat, sont également liés à des dieux égyptiens. Le premier porte certes le nom d’un dieu grec, mais l’Asclépius le situe dans la lignée d’Imhotep ; il s’agit ici d’une interpretatio graeca commune selon laquelle Asclépios est l’équivalent grec d’Imhotep, qui était grand prêtre d’Héliopolis, était considéré comme l’architecte à Saqqara de la pyramide à degrés de Djoser (pharaon de la iii e dynastie, vers 2735 – vers 2630) et qui fut perçu ultérieurement comme un « saint » 25. Quant à Tat, son nom est inconnu ; soit il s’agit « du dieu Thot mal orthographié » comme le propose Garth Fowden 26, soit le nom pourrait être lié au terme égyptien écrit en vieux-copte tat, lequel pourrait être la transcription de l’égyptien hiéroglyphique dd, le pilier osirien, symbole de la stabilité, de la permanence et de la fixité 27. Les différentes figures de disciples dont il a été question tissent un premier niveau de lien avec l’Égypte, toutes pouvant être reliées à la tradition égyptienne, soit directement soit par l’intermédiaire de l’interpretatio graeca. Ce premier niveau est complété ou renforcé par la manière dont sont présentées les deux figures qui fondent la voie d’Hermès : Poimandrès, l’être divin qui transmet la « Révélation primordiale », et Hermès Trismégiste, qui est le bénéficiaire de cette « Révélation primordiale » et 24. H. J. Thissen, « ΚΜΗΦ ein verkannter Gott », Zeitschrift für Papyrologie und Epigraphik 112 (1996), p. 153-160, sp. 156 ; S. Sauneron, Les Fêtes religieuses d ’Esna aux derniers siècles du paganisme, Le Caire, 1962, p. 319. Lire notamment les notes de M. Broze et C. Van Liefferinge à leur traduction de Jamblique (M. Broze – C. Van Liefferinge [éd.], Les Mystères d ’Égypte. Réponse d ’Abamon à la Lettre de Porphyre à Anébon, Bruxelles, 2009, p. 155 n. 78). 25. J. Quaegebeur , « Les ‘saints’ égyptiens préchrétiens », Orientalia Lovaniensia Periodica 8 (1977), p. 129-143. A. L ajtar , « Proskynema Inscriptions of a Corporation of Iron-Workers from Hermonthis in the Temple of Hatshepsout in Deir el-Bahari : New Evidence for Pagan Cults in Egypt in the 4th Cent. A. D. », The Journal of Juristic Papyrology 21 (1991), p. 53-70. 26. G. Fowden, Hermès l ’Égyptien. Une approche historique de l ’esprit du paganisme tardif, traduction : J.-M. M andosio, Paris, 2000 [éd. orig. : The Egyptian Hermes. A Historical Approach to the Late Pagan Mind, Cambridge, 1986], p. 60. 27. F. L. Griffith, « The Glosses in the Magical Papyrus of London and Leiden », Zeitschrift für ägyptische Sprache und Altertumskunde 46 (1909), p. 117-131.
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qui est chargé de la transmettre ensuite à ses propres disciples dans le cadre de « révélations ultérieures » 28. Le nom Poimandrès apparaît dans l’écrit éponyme (ou CH I) pour qualifier l’être divin qui se révèle au narrateur anonyme. Ce nom, qui ne proviendrait pas du nom du héros fondateur mythique de Tanagra, Poimandros, est exclusif aux écrits hermétiques 29. Plusieurs étymologies scientifiques ont été proposées depuis Isaac Casaubon au xvi e siècle et toutes établissent un lien avec l’Égypte et avec le dieu égyptien de la sagesse et de l’écriture Thot, dont Poimandrès apparaît comme le pendant hermétique 30. En effet, de même que Thot est parole et compréhension du dieu Ré, de même Poimandrès est la parole et l’intellect de la « Souveraineté absolue » 31 ; de plus, alors que, selon la mythologie égyptienne 32 , Thot est le secrétaire et le remplaçant de Ré auprès des êtres humains, en particulier des prêtres, Poimandrès est le remplaçant de la « Souveraineté » auprès des êtres humains dignes, afin de leur délivrer les connaissances nécessaires au salut, ce qu’il fait par l’intermédiaire du narrateur anonyme envoyé ensuite en mission auprès de ces êtres humains dignes 33. Hermès Trismégiste est lui aussi lié à Thot. Certes, ce lien est dû à l’interpretatio graeca de Thot en Hermès. Néanmoins, dans le cas d’Hermès Trismégiste, le procédé diffère de celui qui est habituellement utilisé dans le cadre de l’interpretatio graeca ou romana, notamment en raison du qua28. Voir A. Van den K erchove , « Le mode de révélation dans les Oracles chaldaiques et dans les traités hermétiques », dans H. Seng – M. Tardieu (éd.), Die Chaldaeischen Orakel: Kontext – Interpretation – Rezeption, Heidelberg, 2011, p. 145-162. 29. Voir A. Van den K erchove , « Poimandrès : figure d’autorité dans la tradition hermétique », Revue de l ’histoire des religions (2014), p. 24-46. 30. Voir J. Quaegebeur , « Thot-Hermès, le dieu le plus grand ? », Hommages à François Daumas vol. 2, Montpellier, 1986, p. 525-544 et P. K ingsley, « Poimandres: The Etymology of the Name and the Origins of the Hermetica », dans R. van den Broek – C. van H eertum (éd.), From Poimandres to Jacob Böhme : Gnosis, Hermetism and the Christian Tradition, Amsterdam, 2000, p. 41-76. 31. Cf. CH I, 2 : ἐγὼ μέ, φησίν, εἰμὶ ὁ Ποιμάνδρης, ὁ τῆς αὐθεντίας νοῦς. οἶδα ὃ βούλει, καὶ σύνειμί σοι πανταχοῦ, « “Je suis”, dit-il, “Poimandrès, l’Intellect de la Souveraineté ; je sais ce que tu veux et je suis avec toi partout.” » ; CH I, 30 : τοῦτο δὲ συνέβη μοι λαβόντι ἀπὸ τοῦ νοός μου, τουτέστι τοῦ Ποιμάνδρου, τοῦ τῆς αὐθεντίας λόγου, « Ceci m’arriva, l’ayant reçu de mon intellect, c’est-à-dire Poimandrès, la Parole de la Souveraineté. » 32. Lire ce que raconte le Mythe de la Vache du Ciel, plus particulièrement 237250, traduit dans C. L alouette , Textes sacrés et textes profanes de l ’ancienne Égypte, tome II : Mythes, contes et poésies, Paris, 1987, p. 46-52. 33. CH I, 26 : λοιπόν, τί μέλλεις ; οὐχ ὡς πάντα παραλαβὼν καθοδηγὸς γίνῃ τοῖς ἀξίοις, ὅπως τὸ γένος τῆς ἀνθρωπότητος διὰ σοῦ ὑπὸ θεοῦ σωθῇ ; « Maintenant, que tardes-tu ? Ayant tout hérité, ne vas-tu pas devenir un guide pour les (hommes) dignes, afin que le genre de l’humanité, par ton entremise, soit sauvé par Dieu ? »
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lificatif « trismégiste » qui constitue la spécificité de l’Hermès des Hermetica. « Trismégiste » signifie « trois fois très grand », et la plus ancienne attestation grecque se trouve sous la plume de l’astrologue Dorotheos de Sidon au i er siècle de l’ère commune 3 4 , mais elle est probablement antérieure. Cette épithète serait cependant d’origine égyptienne. Son « pendant égyptien exact » 35 est une épiclèse de Thot, ʿ3 ʿ3 ʿ3 wr, qui est attestée en particulier d’une part, sur un fragment de naos conservé à Moscou datant probablement de la fin du ii e siècle avant l’ère commune et provenant peut-être d’Hermopolis 36 et d’autre part, dans une inscription à Esna datant de Caracalla 37, c’est-à-dire de l’époque durant laquelle les Hermetica auraient été écrits. L’épiclèse égyptienne de Thot résulte de l’évolution du qualificatif de Thot comme « grand » en vue d’intensifier la grandeur et la primauté du dieu 38. « Trismégiste » relie l’Hermès des écrits où il est ainsi qualifié à l’Égypte, tout en en intensifiant, comme pour Thot, la grandeur. Cela fait de l’Hermès de ces textes un nouvel Hermès (dans le cadre d’une multiplication des Hermès, jusqu’à cinq selon Cicéron) 39, qui tient du Thot égyptien et de l’Hermès grec, tout en étant plus proche de Thot que de l’Hermès grec. En effet, certaines fonctions qui sont attribuées à Hermès Trismégiste dans des écrits hermétiques correspondent à celles de Thot. Ainsi, Thot est le « chroniqueur par excellence » 4 0, qui inscrit entre autres les noms des rois sur les feuilles de l’arbre Isched, qui est considéré comme arbre céleste et arbre de vie et qui pourrait être identifié au perséa 41. Hermès Trismégiste est aussi le « mémorialiste », comme cela est explicite dans le plus long fragment de Stobée, le fragment 23 (SH 23, sections 32 et 44).
34. Voir Dorotheus Sidonius, Dorothei Sidonii carmen astrologicum (D. P ingree [éd.], Leipzig, 1976, p. 427-434). 35. J. Quaegebeur , « Thot-Hermès, le dieu le plus grand ? », Hommages à François Daumas vol. 2, Montpellier, 1986, p. 529. 36. Ce document est cité par J. Quaegebeur , dans « Thot-Hermès, le dieu le plus grand ? », Hommages à François Daumas vol. 2, Montpellier, 1986, p. 542, n. 108. Voir aussi S. Hodjash – O. Berlev, The Egyptian Reliefs and Stelae in the Pushkin Museum of Fine Arts, Moscow, Leningrad, 1982, p. 199-200 et reproduction p. 197. 37. P. Derchain, « Noch einmal Hermes Trismegistos », Göttinger Miszellen 15 (1975), p. 7-10. 38. J. Quaegebeur , « Thot-Hermès, le dieu le plus grand ? », Hommages à François Daumas vol. 2, Montpellier, 1986, p. 535-536. 39. Cicéron, De natura deorum, III 56. 40. K. Nordh, Aspects of Ancient Egyptian Curses and Blessings. Conceptual Background and Transmission, Uppsala, 1996, p. 123. 41. N. P. Brix, Étude de la faune ophidienne de l ’Égypte ancienne, tome II : Les Monographies ophidiennes, Thèse de doctorat, Strasbourg, 2010 (version revue et complétée en 2006 ; première version : 2001), p. 423.
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De manière générale, les auteurs des Hermetica présentent Hermès Trismégiste comme la source de la révélation sur terre, celui qui fait le lien entre les êtres humains « dignes » et le Dieu qui est au-delà de tout, de manière analogue à Thot. En effet, en tant que secrétaire et représentant de Ré, Thot est le maillon entre Ré et les prêtres égyptiens, qualifiés d’initiés, bs, c’est-à-dire « (quelqu’un) qui ouvre les portes du ciel pour voir ce qui s’y trouve » 42 ; Thot est de plus le patron des prêtres scribes. Les Hermetica, qui sont placés sous le patronage d’Hermès Trismégiste, se situent, selon une hypothèse exposée ailleurs, dans la continuité de la parole 43 ; ils constituent un maillon important de la chaîne de transmission de la révélation salvatrice et remplacent Hermès quand celui-ci est absent ou permettent au maître hermétiste qui enseigne d’être un nouvel Hermès et de se placer sous le patronage du Trismégiste. Les figures de Poimandrès et d’Hermès Trismégiste, qui apparaissent comme des versions hermétiques, voire comme l’interpretatio hermetica du Thot égyptien, affinent le rapport entre cette littérature et l’Égypte. Plus généralement, le recours à des figures qui ont un lien avec des divinités (ou des « saints ») égyptiens (même si elles sont parfois revisitées par la tradition grecque) est un moyen d’accorder aux Hermetica l’autorité attribuée à l’Égypte et à sa sagesse dans l’Antiquité. Ce recours permet aussi de relier les Hermetica à l’univers du temple égyptien, auquel les divinités égyptiennes sont attachées, en particulier le dieu Thot. Il s’accompagne de l’identification des Hermetica aux « Livres de Thot », dont nous allons maintenant traiter.
2. Les Hermetica, des « livres de Thot » L’équivalence établie entre Poimandrès et Hermès Trismégiste d’une part, et Thot d’autre part, invite à envisager que les Hermetica, qui résultent de la révélation délivrée par Poimandrès, reçue et transmise par Hermès, soient un équivalent hermétique des « Livres de Thot ». La création ou l’invention du nom Poimandrès pourrait avoir eu pour finalité de mettre en place une telle équivalence. En effet, dans la tradition égyptienne, Thot est non seulement le secrétaire de Ré, mais il est aussi le patron des scribes (du temple) et des ouvrages qu’ils copient ou composent, les « Livres de Thot ». Ces écrits sont considérés comme les remplaçants de Ré après que celui-ci se fut définitivement éloigné du monde humain et
42. Inscription de l’« atelier des Orfèvres » de Dendara : J.-M. K ruchten, Les Annales des prêtres de Karnak (XXI-XXIIIemes dynasties) et autres textes contemporains relatifs à l ’initiation des prêtres d ’Amon, Louvain, 1989, p. 195. 43. A. Van den K erchove , La Voie d ’Hermès. Pratiques rituelles et traités hermétiques, Leyde, 2012, p. 65-78.
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que sa parole devint inaudible 4 4 . Grâce à Thot et aux « Livres de Thot », la parole de Ré est alors à nouveau audible par les humains. Les Égyptiens nomment parfois ces écrits les « b3w de Ré », une expression que les égyptologues français traduisent par « émanations de Ré ». Les « b3w de Ré » ou « Livres de Thot » sont écrits avec le système d’écriture qui est considéré comme sacré, à savoir les hiéroglyphes ou, pour reprendre la terminologie utilisée par les Égyptiens eux-mêmes, les mdw ntr (« paroles du dieu ») ou tjt (« statue [du dieu] ») ; ils traitent de sujets très variés : rituel, astrologie, mythe, médecine, etc. Ils sont produits et conservés dans les temples, plus spécifiquement dans la pièce que les documents égyptiens appellent « Maison de Vie ». Cette « Maison » fait partie intégrante de tout temple égyptien ; elle est un véritable microcosme, avec des activités d’érudition 45 (une bibliothèque 4 6) et de production (comme la composition et la copie) ; elle est aussi le lieu de pratiques rituelles 47. Son personnel, constitué de prêtres, représente l’élite des hommes éduqués en Égypte, dont le patron est Thot. Ces prêtres composent ou recopient des « Livres de Thot » ; ils s’en servent, notamment pour conduire le rituel, comme celui de l’animation des statues ou le rite de l’Ouverture de la bouche 48. Ces « Livres », produits du temple, contribuent ainsi à la bonne marche du temple, et plus largement, au maintien de la Maât, qui est la structure de la vie ordonnée et de la création. Par conséquent, prétendre qu’un écrit appartient à ce groupe scripturaire revient à vouloir accorder à cet écrit une autorité religieuse et rituelle importante. L’équivalence entre les Hermetica et les « Livres de Thot » est établie non seulement par les noms des figures qui sont présentées comme les patrons des Hermetica, mais aussi par la fonction et certaines caractéristiques de ces derniers. En effet, comme les « Livres de Thot », les « Livres d’Hermès » remplacent la parole divine en l’absence de la divinité (d’où le recours au style direct et au dialogue), sans gommer la nécessité des maîtres (qui agissent au nom d’Hermès, comme les scribes agissent au nom de Thot), et visent à permettre au bénéficiaire des écrits un accès 44. Voir Le Mythe de la Vache du Ciel, traduit dans C. L alouette , Textes sacrés et textes profanes de l ’ancienne Égypte, tome II : Mythes, contes et poésies, Paris, 1987, p. 46-52. 45. A. Volten, Demotische Traumdeutung (Pap. Carlsberg XIII and XIV verso), Copenhague, 1942, p. 37-38 ; K. Nordh, Aspects of Ancient Egyptian Curses and Blessings. Conceptual Background and Transmission, Uppsala, 1996, p. 108. 46. V. Wessetzky, « Die ägyptische Tempelbibliothek. Der Schlüssel der Lösung liegt doch in der Bibliothek des Osymandyas ? », Zeitschrift für ägyptische Sprache und Altertumskunde 100 (1973), p. 54-59 ; P. Derchain, « Le tombeau d’Osymandyas et la maison de la vie à Thèbes », Gottingue, 1965, p. 165-171. 47. En particulier, le récit de la Stèle de la famine : M. Lichtheim, Ancient Egyptian Literature, tome III, Berkeley/California, 1980, p. 94-103. 48. A. M. Roth, « Opening of the Mouth », dans D. B. R edford (éd.) The Oxford Encyclopedia of Ancient Egypt, tome II, Oxford, 2001, p. 605-609.
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à des connaissances secrètes, ou plutôt réservées à un nombre restreint de personnes, faisant du bénéficiaire un « initié ». Comme les « Livres de Thot », les Hermetica ont un aspect ritualiste, du fait des prières qui ponctuent certaines leçons, du caractère initiatique de l’enseignement et, enfin, en raison de la relation entre le maître, qui est un véritable guide spirituel, et le disciple, qui doit mener plusieurs exercices spirituels 49. De plus, l’enseignement hermétique repose sur un principe important, qui intervient également dans les rituels égyptiens, celui de l’imitation 50. L’enseignement ou la révélation délivrée par Hermès imite la « révélation primordiale » dont il a bénéficié ; Hermès lui-même doit être imité par ses disciples, qui eux-mêmes doivent être imités par le lecteur, lequel est invité à s’identifier au disciple sous la houlette d’un maître, un nouvel « Hermès ». Enfin, la variété même des thématiques abordées dans les Hermetica – une variété qui a parfois dérouté les chercheurs –, avec des écrits plus philosophiques, d’autres plus rituels, d’autres plus astrologiques, d’autres plus médicaux, d’autres enfin plus botaniques, etc., rappelle la variété des « Livres de Thot » et des ouvrages conservés et produits dans la « Maison de Vie ». Nous pouvons terminer en rappelant que le contenu de plusieurs des Hermetica témoigne d’une « inspiration égyptienne authentique », pour reprendre Philippe Derchain, et comporte des éléments que l’on attendrait d’un écrit égyptien 51. L’équivalence avec les « Livres de Thot » est aussi construite par la prétention d’auteurs hermétiques d’avoir recours aux hiéroglyphes ou mdw ntr, le système d’écriture réservé aux ouvrages sacrés en Égypte, parmi lesquels nous trouvons les « Livres de Thot ». Cette prétention apparaît cependant explicitement uniquement dans deux écrits, CH XVI et L’Ogdoade révèle l ’Ennéade. Dans le préambule de CH XVI, qui se présente comme une lettre d’Hermès à Asclépios, l’auteur historique met sous la plume d’Hermès une interdiction de traduire son enseignement de l’égyptien en grec. Il est certes question de « langue paternelle » ou de « noms égyptiens » et non d’hiéroglyphes, mais ce qui est dit de cette langue et de ces noms 49. A. Van den K erchove , La Voie d ’Hermès. Pratiques rituelles et traités hermétiques, Leyde, 2012, p. 128-141. 50. P. Derchain, « Rituels égyptiens », dans Y. Bonnefoy (dir.), Dictionnaire des mythologies et des religions des sociétés traditionnelles et du monde antique. K-Z, Paris, 1981, p. 328-333. 51. P. Derchain, « Sur l’authenticité de l’inspiration égyptienne dans le “Corpus Hermeticum” », Revue de l ’histoire des religions 161 (1962), p. 175-198 ; G. Fowden, Hermès l ’Égyptien. Une approche historique de l ’esprit du paganisme tardif, traduction : J.-M. M andosio, Paris, 2000 [éd. orig. : The Egyptian Hermes. A Historical Approach to the Late Pagan Mind, Cambridge, 1986], p. 34-44 et p. 150-153. Voir aussi J.-P. M ahé , Hermès en Haute-Égypte, tome II, Québec, 1982, p. 68. S. Delcomminette , « Vocabulaire stoïcien et pensée égyptienne dans le onzième traité du Corpus hermétique », Revue de philosophie ancienne 20 (2002), p. 11-36.
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correspond à la conception égyptienne de la langue et particulièrement du système d’écriture hiéroglyphique (ou du système hiératique) où les signes sont pleins d’efficace 52 . L’interdiction de traduire, qui est fondée sur le rapport entre le système d’écriture et la conservation de la puissance des choses signifiées, implique que l’auteur prétend que son écrit fut originellement composé en égyptien, établissant ainsi un lien avec le temple égyptien. Cependant, cette prétention et cette interdiction contredisent la réalité historique de la transmission des écrits en grec. Y aurait-il de la part des auteurs une volonté de tromper le destinataire ? On pourrait le penser. Pour notre part, la contradiction nous paraît trop flagrante pour pouvoir l’expliquer par la volonté de tromper. Ce qui paraît importer pour l’auteur, ce n’est pas tant la réalisation concrète d’un écrit en égyptien que la dimension symbolique de cette prétention. De plus, un jeu est possible sur le verbe grec hermeneuein qui signifie « traduire » ou « interpréter » et qui aurait, selon les Anciens, un lien étymologique avec Hermès : la bonne interprétation (plutôt que traduction ici) serait celle qui concerne le pouvoir des sons, qui permet de rester dans la lignée d’Hermès, dans sa chaîne, en grec herma 53. La prétention d’une composition en égyptien avec des mdw ntr est plus explicite dans L’Ogdoade révèle l ’Ennéade. Cet écrit se présente comme la transcription d’un dialogue entre Hermès Trismégiste et un disciple (Tat ?) au cours duquel Hermès conduit progressivement son disciple vers l’Ennéade, notamment au moyen de prières et grâce à la venue de Puissances divines. Le disciple peut alors lui-même adresser une hymne au Dieu situé au-delà de tout et déclarer qu’il voit en premier « des profondeurs sur lesquelles il est impossible de parler » (p. 57, 31-32), puis l’Ogdoade avec tous les êtres qui sont en elles, et enfin Dieu (p. 58, 6-14 et p. 59, 27-60.1), tout en se voyant aussi lui-même (p. 58, 8). Ces visions rendent compte que désormais le disciple se connaît, qu’il connaît le tout et Dieu 54 et que sa formation hermétique est achevée. Hermès conclut alors cet enseignement initiatique par des recommandations quant à la manière dont le disciple doit mettre par écrit la leçon théorique et pratique qui vient de se dérouler (p. 61, 18 – p. 63, 31). Les recommandations concernent les éléments suivants : les matériaux qu’il faut utiliser pour la mise par écrit, en fonction d’une symbolique qui reflète des données religieuses égyptiennes ; les mesures de protection qu’il faut mettre en œuvre pour protéger le texte 52. Pour plus de renseignements sur ce passage, voir A. Van den K erchove , La Voie d ’Hermès. Pratiques rituelles et traités hermétiques, Leyde, 2012, p. 117-127, avec la bibliographie afférente. 53. Voir M. Broze , « La réinterprétation du modèle hiéroglyphique chez les philosophes de langue grecque », dans L. Morra – C. Bazzanella (éd.), Philosophers and Hieroglyphs, Turin, 2003, p. 37-51, sp. 50-51. 54. NH VI, p. 59, 29 – p. 60, 1 et p. 60, 32 – p. 61, 1.
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épigraphique, avec huit gardiens à tête de grenouille ou de chat (ce qui n’est pas sans évoquer l’ogdoade hermopolitaine, les gardiens primordiaux) ; le moment où il faut ériger la stèle et une formule imprécatoire ; le système d’écriture dans lequel la leçon doit être gravée et le lieu d’affichage de l’écrit. Ces deux dernières indications nous intéressent ici plus particulièrement. Concernant le système d’écriture, l’auteur est très précis : il s’agit du système hiéroglyphique. La manière dont il mentionne ce système est remarquable, puisque l’auteur recourt à une expression – « les lettres gravées de l’écrit de la “Maison de Vie” 55 » – qui n’est pas calquée sur les expressions grecques « les lettres sacrées » ou « les signes de l’écriture sacrée » (comme nous pourrions nous y attendre dans un écrit probablement traduit du grec), mais qui est la transcription en copte d’une expression attestée en égyptien hiéroglyphique et en égyptien démotique, « les empreintes des scribes de la ‘Maison de Vie’ 56 ». Le syntagme copte est inconnu par ailleurs, excepté le terme copte ⲡⲣⲁⲉⲓϣ (« Maison de Vie ») ; celui-ci a été rapproché par Enzo Lucchesi 57 du ⲥⲫⲣⲁⲛϣ que nous lisons à deux reprises dans la version bohaïrique de Gn 41 58. Il est possible que l’expression copte utilisée dans l’écrit hermétique soit due au traducteur lui-même et que la version grecque comportait une expression plus courante, telle que ἱερὰ γράμματα ou τὰ ἐπίσημα τῆς ἱερᾶς γραμματικῆς ou d’autres similaires ; à moins que l’expression copte soit la traduction littérale d’une expression grecque non attestée par ailleurs. Dans ce dernier cas, l’auteur témoignerait d’une bonne connaissance des réalités égyptiennes ; dans le premier cas, ce serait le traducteur. Quelle que soit l’hypothèse retenue, un lien explicite avec le temple est créé (un lien qui pourrait être accentué par le traducteur, si l’expression copte est de son fait), et L’Ogdoade révèle l ’Ennéade est placée dans la lignée des « Livres de Thot ». Dans ce contexte, les indications quant aux matériaux et aux mesures de protection à prendre sont alors semblables à ce qui se déroulait au sein des « Maisons de Vie », et témoignent d’une division du travail entre initiés (Hermès et 55. L’expression est répétée trois fois, sous une orthographe différente (NH VI, p. 61, 20 et 30 et p. 62, 16 : ϩ ϩⲥϩⲉⲉⲓ ⲥⲁϩ ⲡⲣⲁⲉⲓϣ et ϩ ϩⲥϩⲁⲓ ⲥⲁϩ ⲡⲣⲁⲉⲓϣ). 56. A. Bernand, La Prose sur pierre dans l ’Égypte hellénistique et romaine, tome I, Paris, 1992, p. 26 et 32 : l’auteur donne la traduction suivante : « les caractères de l’écriture sacrée ». Sur le terme « tjt » pour désigner les hiéroglyphes : L. Motte , « Le hiéroglyphe, d’Esna à l’Évangile de Vérité », dans Deuxième journée d ’études coptes. Strasbourg 25 mai 1984, Louvain-Paris, 1986, p. 111-116, sp. 114. 57. E. Lucchesi, « À propos du mot copte “Sphransh” », Journal of Egyptian Archaeology 61 (1975), p. 254-256. 58. Gn 41.8 : ⲁϥⲟⲩⲱⲣⲡ ⲁϥⲙⲟⲩϯ ⲉⲛⲓⲥⲫⲣⲁⲛϣ ⲛⲧⲉ ⲭⲏⲙⲓ ⲛⲉⲙ ⲛⲓⲥⲁⲃⲉⲩ ⲧⲏⲣⲟⲩ, « il fit appeler tous les interprètes de l’Égypte et tous les sages » et 41.24 : ⲁⲓϫⲉ […] ⲟⲩⲛ ⲛⲛⲓⲥⲫⲣⲁⲛϣ, « j’ai […] donc dit aux interprètes ». Voir M. K. H. Peters , A Critical Edition of the Coptic (Bohairic) Pentateuch vol. I, Atlanta/Géorgie, 1985.
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son disciple ont bénéficié de la vision de Dieu) équivalente à la division du travail dans la « Maison de Vie », avec Hermès comme le prêtre ritualiste qui, grâce aux « Livres de Thot », dirige le travail d’un prêtre de rang inférieur, ici le disciple. Ce lien tissé avec le temple grâce aux indications sur la gravure de la leçon initiatique est parachevé par le lieu de dépose de la gravure : « Mon fils, ce livre, écris-le dans le temple de Diospolis dans des lettres gravées de l’écrit de la “Maison de Vie”, livre que tu appelleras L’Ogdoade révélant l ’Ennéade » (p. 61, 18-21) et plus loin « C’est pourquoi j’ordonne que soient gravées ces paroles sur la pierre et que tu la déposes à l’intérieur de mon paouôpe » (p. 62, 1-4). Il existe deux Diospolis en Égypte, Diospolis Parva (Hout, au sud de Chénoboskion) et Diospolis Magna (Thèbes), qui est très souvent appelée simplement Diospolis dans les sources grecques. Il pourrait s’agir ici de Diospolis Magna, même si l’identification avec Parva n’est pas à exclure 59. L’écrit est donc composé dans la « Maison de Vie » de ce temple de Diospolis (Magna ou Parva), avant d’être exposé dans un autre endroit du temple, désigné ici par le terme copte paoupe. L’interprétation du paoupe est difficile. Soit il signifie « mon sanctuaire » ou « mon espace ouvert », si le terme vient de ouope « être saint », soit il désigne le « centre d’archives », s’il a un lien avec le verbe ôp, « compter, enregistrer » 60. Quelle que soit la signification exacte de paoupe, il précise le lieu d’affichage au cœur même du temple. La prétention d’une localisation de compositions hermétiques au sein de l’enceinte de temples semble être également revendiquée par l’auteur du fragment 23 transmis par Stobée. Dans ce long fragment, qui se présente comme la transcription de l’enseignement d’Isis à Horus, Isis commence par exposer et justifier comment elle est devenue dépositrice du savoir provenant d’Hermès. Dans ce cadre, elle mentionne les dernières actions d’Hermès avant que ce dernier ne monte aux cieux (SH 23, section 7) et affirme : « lui vint lentement le discernement précis de déposer les symboles sacrés des éléments cosmiques à proximité des secrets d’Osiris et de remonter vers les cieux après avoir fait des vœux et dit de telles paroles. » Avec le syntagme « symboles sacrés des éléments cosmiques », Isis évoque les écrits d’Hermès 61 ; quant aux « secrets d’Osiris », Isis désignerait l’aba-
59. G. Fowden, Hermès l ’Égyptien. Une approche historique de l ’esprit du paganisme tardif, traduction : J.-M. M andosio, Paris, 2000 [éd. orig. : The Egyptian Hermes. A Historical Approach to the Late Pagan Mind, Cambridge, 1986], p. 250 et n. 59. 60. Hypothèse suggérée par Gérard Roquet lors de la soutenance de thèse, le 5 janvier 2006. 61. A. Van den K erchove , La Voie d ’Hermès. Pratiques rituelles et traités hermétiques, Leyde, 2012, p. 153-154.
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ton qui est présent dans tous les temples égyptiens et qui n’est accessible qu’à une minorité de prêtres 62 .
III. De la prétention d’être des « Livres de Thot » à la production historique des « Livres d’Hermès » Peu d’indications extérieures aux écrits hermétiques permettent d’argumenter en faveur d’une production historique des écrits hermétiques en lien avec les temples égyptiens. À la fin du iii e siècle ou au début du iv esiècle, Jamblique évoque seulement les stèles sacrées d’Hermès dans sa Réponse d’Abamon à la lettre de Porphyre à Anébon, I 2 (p. 5). L’usage du terme « stèle » n’est pas anodin ; il rappelle les stèles dont il est question au début du fragment 23 et dans l’écrit copte NH VI, 6. De plus, la stèle est très souvent associée au temple. Cependant, Jamblique était-il au courant de cette association ? Même si plus loin dans son écrit, en VIII 4 (p. 265), il parle des livres d’Hermès qui ont été traduits de l’égyptien, cela ne permet pas de considérer que Jamblique établit un lien historique avec le temple égyptien. Seul l’évêque d’Alexandrie, Cyrille, paraît attester d’un lien avec le temple. En effet, dans le premier livre de son Contre Julien, la réfutation du Contre les Galiléens de l’empereur Julien qu’il composa vers 440, il écrit (Contre Julien I, 41) : « Or donc, cet Hermès d’Égypte, tout prêtre initiateur qu’il fût, fixé à demeure dans les sanctuaires de l’idolâtrie, se trouve avoir rencontré les conceptions de Moïse, sinon avec une rectitude irréprochable en tout point, du moins partiellement ; et de fait il en a tiré profit 63. » Le « prêtre initiateur » dont il parle peut être un écho des prêtres bs égyptiens dont nous avons déjà parlé. L’évêque d’Alexandrie avait accès à des informations relativement précises sur les écrits hermétiques ; il est en effet l’un des rares citateurs à identifier ses références (« la première leçon de ses Leçons détaillées à Tat », dans Contre Julien I, 46 ou « dans la troisième leçon à Asclépios » en I, 48) et il est le seul à mentionner une mise en collection (« Celui qui a réuni à Athènes les quinze livres portant le titre d’Hermaïques fait mention de celui-ci [= Hermès] dans ses propres écrits », I, 41). Il pourrait donc attester d’une tradition (hermétique) où le lien d’Hermès au temple égyptien est plus marqué. Mais peut-on conclure à un lien historique ? Si nous mettons de côté la chronologie que les auteurs des Hermetica revendiquent et que les citateurs acceptent plus ou moins – une chronologie selon laquelle les Hermetica seraient très anciens, antérieurs aux philosophes grecs, mais postérieurs à Moïse au moins pour des chrétiens –, est-il possible de considérer que la prétention d’un lien avec le temple repose 62. A. Van den K erchove , La Voie d ’Hermès. Pratiques rituelles et traités hermétiques, Leyde, 2012, p. 159-160. 63. Cyrille , Contre Julien, éd. et trad. P. Burguière – P. Évieux, Paris, 1985.
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sur une réalité historique ? Les chercheurs datant la plupart des Hermetica anciens des trois premiers siècles de l’ère commune, les Hermetica ont-ils pu être composés alors dans des temples ? À la suite de Jamblique, quelques chercheurs modernes considèrent que certains écrits au moins ont pu être traduits depuis l’égyptien 6 4 (hiéroglyphique ou hiératique), en en faisant, sans le dire explicitement, mais cela est déduit de l’usage de l’écriture hiéroglyphique ou hiératique, une production du temple. Mais ces chercheurs sont rares et leur hypothèse n’est pas argumentée. La plupart des chercheurs n’a pas repris cette hypothèse. Cependant, à la suite de plusieurs savants, il nous semble qu’un certain nombre d’écrits hermétiques témoigne d’une bonne connaissance des réalités égyptiennes et du mode de fonctionnement de la pensée égyptienne. Ainsi, les indications d’Hermès quant à la gravure de la leçon (dans NH VI, 6) ou celles relatives à la fabrication des statues animées (dans l’Asclépius, sections 37-38) rendent compte d’une connaissance du travail qui était mené au sein des temples, et des rapprochements peuvent être établis avec les informations données par les inscriptions de « l’Atelier des Orfèvres » comme celui du temple de Dendara 65. De tels rapprochements ont conduit des chercheurs à émettre l’hypothèse qu’au moins certains écrits ont été composés par un prêtre égyptien 66. Nous serions encline à reprendre cette même hypothèse : des écrits hermétiques, notamment les plus anciens, qu’ils aient été composés ou non dans une « Maison de Vie », l’auraient été par une élite proche du temple. Cette composition relèverait d’une entreprise d’adaptation et de réinvention au cours de laquelle les écrits hermétiques constituent des « livres de Thot » revus et revisités par la culture grecque, comme Hermès Trismégiste est un Thot revu et revisité par la culture grecque. L’époque de composition est une époque où les temples égyptiens sont toujours debout et actifs et où ils sont également influencés par la culture grecque 67. Ensuite, d’autres écrits hermétiques ont pu être composés dans d’autres lieux que les temples égyptiens. 64. Ainsi L. Motte , « La vache multicolore et les trois pierres de la régénération », Études coptes. III. Troisième journée d ’études, Louvain-Paris, 1989, p. 130149. 65. Voir J.-M. K ruchten, Les Annales des prêtres de Karnak (XXI-XXIIIemes dynasties) et autres textes contemporains relatifs à l ’initiation des prêtres d ’Amon, Louvain, 1989 et P. Derchain, « L’Atelier des Orfèvres à Dendara et les origines de l’Alchimie », Chronique d ’Égypte 65 (1990), p. 219-242. 66. C’est le cas en particulier de Michèle Broze, lors de conversations en marge de colloques. 67. Voir M. Broze , « Le rire et les larmes du démiurge. La cosmogonie de Neith à Esna et ses parallèles en grec », Égypte, Afrique et Orient 29 (2003), p. 5-10 ; F. Feder , « Der Einfluss des Griechischen auf das Ägyptische in ptolemäischrömischer Zeit », dans T. Schneider (éd.), Das Ägyptische und die Sprachen Vorderasiens, Nordafrikas und der Ägäis. Akten des Basler Kolloquiums zum ägyptischnichtsemitischen Sprachkontakt. Basel 9.-11. Juli 2003, Münster, 2004, p. 509-521.
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IV. Conclusion Les auteurs des Hermetica tissent des liens avec la tradition égyptienne. Dans la plupart des cas, ces liens sont établis à travers la reprise d’idées et de thématiques égyptiennes et à travers la mise en scène de figures qui ont un rapport étroit avec des divinités égyptiennes. Toutefois, quelques auteurs peaufinent ces liens, notamment avec le temple égyptien, en donnant des informations sur l’écriture même de quelques Hermetica (en hiéroglyphes et gravés sur des stèles). Certes, la tradition égyptienne et le rapport aux temples qui affleurent dans des Hermetica sont revisités par la tradition grecque et par ce qu’en font les auteurs hermétiques. Ces liens servent à légitimer la voie de sagesse, celle d’Hermès Trismégiste, en lui accordant une grande antiquité et également tout le prestige qu’a la sagesse égyptienne auprès de plusieurs Anciens. Cependant, ces liens auraient une autre finalité également : comme Jamblique, des auteurs hermétiques auraient pour but la sauvegarde d’une tradition à une époque où certains pouvaient considérer qu’elle était menacée, comme en témoigne l’auteur de l’Asclépius dans la section relative à la fin des cultes en Égypte. Des auteurs hermétiques semblent revendiquer une posture d’héritiers légitimes par rapport à la tradition égyptienne, une posture qui paraît avoir été reconnue par d’autres penseurs antiques, comme Jamblique lui-même. Qu’en est-il alors d’un lien historique entre les Hermetica et des temples égyptiens ? Un tel lien est possible, mais reste hypothétique en l’état actuel des recherches. Cela mériterait une recherche plus approfondie.
Lire également R. K. R itner , « Implicit Models of Cross-Cultural Interaction : a Question of Noses, Soap and Prejudices », dans J. H. Johnson (éd.), Life in a Multi-cultural Society. Egypt from Cambyses to Constantine and Beyond, Chicago, 1992, p. 283-290.
E ffectless P rophecy, H atred between Shepherds and E lders, and Sacrifice to B eliar – T he Great Despair of T he A scension of I saiah Markus Vinzent King’s College London [email protected] Résumé Le lien entre les écrits du Nouveau Testament et les débuts de l’histoire de la littérature des hekhalot a été remis en question principalement sur la base de la datation des écrits chrétiens canoniques au premier siècle. Cet article tente de lire L’A scension d ’Isaïe dans le contexte de la formation de l’identité juive et chrétienne qui prend place vers la fin et après la deuxième guerre juive, vers le milieu du deuxième siècle. Avec Marcion de Sinope comme une figure clé qui a rejeté non seulement la Torah mais aussi les prophètes juifs d’autrefois pour promouvoir le seul prophète, le Christ, l’A scension partage des problèmes avec Marcion et développe un profil différent d’une vision chrétienne sur les prophètes juifs, comme Isaïe, considérés comme les principaux porteurs de l’autorité révélatrice. Si, cependant, on devait dater les écrits canoniques à la même époque, alors le réseau de négociations sur ce que sont les juifs et les nouveaux chrétiens devrait également être pris en compte. Abstract The link between NT writings and the early history of Hekhalot literature has been questioned primarily on the basis of the dating of the canonical Christian writings to the first century. This article attempts to read The Ascension of Isaiah against the background of Jewish and Christian identity formation that took place towards the end and after the second Jewish war around the mid second century. With Marcion of Sinope as a key figure who rejected not only the Torah but also the Jewish Prophets of old to promote the sole Prophet, Christ, the Ascension shares issues with Marcion, but also develops a distinctively different profile of a Christian vision with Jewish Prophets like Isaiah being the main carriers of revelatory authority. If, however, one were to date the canonical writings into the same time, then the web of negotiations of what Jews and the novel Christians are would need to be taken into account, too. La « sacerdotalisation » dans les premiers écrits mystiques juifs et chrétiens. Actes du colloque international tenu à l’Université de Lausanne du 26 au 28 octobre 2015, sous la direction de David Hamidović, Simon C. Mimouni et Louis Painchaud, Turnhout : Brepols, 2021 (Judaïsme ancien et origines du christianisme, 22), p. 203-216 DOI 10.1484/M.JAOC-EB.5.122773 © F H G
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In his rather recent monograph The Origins of Jewish Mysticism of the year 2009, Peter Schäfer reckons with The Ascension of Isaiah not only as belonging to the Hekhalot literature, but together with Revelation from the New Testament even as being one of the earliest representatives of this “literary complex”. 1 Quite to some astonishment, especially chapters 6-11, which according to Schäfer are “no doubt […] of Christian origin and […] believed to belong to the early second century ce” 2 with their visionary experience are described “surprisingly similar” to what one reads in Hekhalot literature, especially when compared with Hekhalot Rabbati. 3 Yet, amongst the many open questions that the Ascension “shares” with “so many apocryphal writings”, its unknown author, date and original language, the most controversial remains the cultural or “religious milieu in which it originated: was it Jewish or Christian”? 4 This question leads to the next one, namely whether or not and if so to what extent Christians and Jews share the Hekhalot tradition? Despite his views on the Ascension, in an earlier article Schäfer had expressed his scepticism to relate the Hekhalot tradition to the beginnings of Christianity, particularly to Paul, and therefore rejected links suggested earlier by Wilhelm Bousset and Gershom Sholem
1. P. Schäfer , The Origins of Jewish Mysticism (Princeton, New Jersey, 2009); in this he has predecessors, for example, R. G. H all , “The Ascension of Isaiah: Community Situation, Date, and Place in Early Christianity”, Journal of Biblical Literature 109 (1990) 300-306; M. Himmelfarb , Ascent to Heaven in Jewish and Christian Apocalypses (New York/Oxford, 1993) 55; M. Himmelfarb , Tours of Hell: An Apocalyptic Form in Jewish and Christian Literature (Philadelphia, 1983) 136-137, 156 n. 56; on the literary character of a “complex” that can be compared with the New Testament or Rabbinic literature, see P. Schäfer , “The New Testament and Hekhalot Literature: The Journey into Heaven in Paul and in Merkavah Myscticism”, in P. Schäfer (ed.), Hekhalot-Studien (Tübingen, 1988) 234-249, esp. 248249. 2. P. Schäfer , The Origins of Jewish Mysticism (Princeton, New Jersey, 2009) 93. 3. See P. Schäfer , The Origins of Jewish Mysticism (Princeton, New Jersey, 2009) 95; see also I. Gruenwald, Apocalyptic and Merkavah Mysticism (Leiden/ Cologne, 1980) 57-58; M. Himmelfarb , Ascent to Heaven in Jewish and Christian Apocalypses (New York/Oxford, 1993) 57 points out that the section of the “vision of Christ’s descent and ascent”, where the parallels to Hekhalot Rabbati appear, differs “significantly from the picture” of other sections of the Ascension, even within ch. 6-11. 4. A. Hilhorst, “Rev. of P. Bettiolo, A. G. Kossova, C. L eonardi, E. Norelli, and L. Perrone (ed.), Ascensio Isaiae, CSCO SA 7.8 (Turnhout,1995)”, Vigiliae Christianae 54 (2000) 111-114; on the notion of “cultural milieu” see I. Gruenwald, From Apocalypticism to Gnosticism (Frankfurt am Main, 1988) 1-11 (here and otherwise a little explored concept).
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to place the beginnings of Merkavah mysticism as early as nascent Christianity and to admit a relation between the two traditions. 5 Surely, the text of the Ascension as we have it today presented in a thorough and critical editio maior shows a Christian version of the text, 6 though with a particular docetic Christology. 7 Yet, the editors of the editio agreeing on most other issues, could not jointly settle the question of the origin of this text. While Paolo Bettiolo, Giambelluca Kossova, Claudio Leonardi and Lorenzo Perrone all held the view that the text was a Jewish document which was reworked by a Christian redactor, its editor and commentator Enrico Norelli made an adamant defence for his “minority position” “accepting the composite character of the work”, but maintaining it “to be Christian in origin and written in Greek by a group of early Christian prophets”. 8 In what follows, I will try to show that the editor’s disagreement on whether or not the text is of Jewish or Christian origin is based on a deep anachronism which has knock-on effects for our understanding of the beginnings of the Hekhalot and the Merkavah tradition.
I. The Ascension of Isaiah and Marcion of Sinope in the Post Bar Kokhba cultural and religious milieu Whenever the Ascension is to be dated within the second century, its author or authors display that “Christians could” not only “quite well 5. See W. Bousset, “Die Himmelreise der Seele”, Archiv für Religionswissenschaft 4 (1901) 136-169, 229-273; Gershom Scholem, Jewish Gnosticism, Merkabah Mysticism, and Talmudic Tradition (New York, 21965); P. Schäfer , “The New Testament and Hekhalot Literature: The Journey into Heaven in Paul and in Merkavah Myscticism”, in P. Schäfer , Hekhalot-Studien (Tübingen, 1988) 234-249. 6. Ascensio Isaiae: Textus, Paolo Bettiolo (ed.) et al. (Turnhout, 1995), together with the substantial commentary by Enrico Norelli, Ascensio Isaiae: Commentarius (Turnhout, 1995). 7. See D. D. H annah, “The Ascension of Isaiah and Docetic Christology”, Vigiliae Christianae 53 (1999) 165-196; see my earlier articles on this work, M. Vinzent, “Give and Take amongst Second Century Authors: The Ascension of Isaiah, the Epistle of the Apostles and Marcion of Sinope”, Studia Patristica 50 (2010) 105-129; see also M. Vinzent, “The Ascension of Isaiah as a response to Marcion of Sinope”, in J. N. Bremmer , T. R. K armann, T. Nicklas (ed.), The Ascension of Isaiah, Studies on early Christian Apocrypha 11 (Leuven, 2016) 75-117. 8. A. Hilhorst, “Rev. of P. Bettiolo, A. G. Kossova, C. Leonardi, E. Norelli, and L. Perrone (eds), Ascensio Isaiae, CSCO SA 7.8 (Turnhout, 1995)”, Vigiliae Christianae 54 (2000) 111-114, esp. 113; indeed, parallels between the Ascension and, for example, Rev. and other apocalyptic and prophetic literature have been noted by R. Bauckham, “The Worship of Jesus in Apocalyptic Christianity”, New Testament Studies 27 (1980/1981) 322-341, esp. 323.
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use Old Testament subject matter(s)”, as Norelli believes, but we have to remember that in the later second century the majority of Christians did not have any other sacred Scriptures than that of the Jews, and if I am not mistaken, prior to the 140th ce not only were there no other Scriptures regarded by Christ followers as sacred, but there were no members of the Jewish community who would have designated themselves as “Christians” in antithesis to Judaism and, hence, embark on claiming their own holy Scriptures. Such outspoken antithetical position towards the use of the Jewish Scriptures was ventured for the first time by Marcion of Sinope in the 140th in Rome, and only since he had come up with his New Testament in antithesis to what he called “Old Testament”, with his Gospel and his collection of 10 Pauline Letters, introduced by his Antitheses, was the antithesis created between “Ioudaismus” and “Christianismus”. 9 While Marcion had denied the appropriateness of Jewish Scriptures for his Christian community and replaced it with a genuine Christian New Testament, most of his Roman colleagues followed him by embracing his New Testament, but only by adapting this New Testament and linking it back to the Jewish heritage. The Valentinian Ptolemaius, for example, accepted the principle value of the Torah and admitted some of its commandments by commenting on the preface of the Gospel of John, while Ignatius and Justin portray scepticism towards the Gospels, although being equally critical of the Torah, and accepted only those Prophets who they thought could be read as speaking of Christ. If for Marcion not even “Abel, nor Enoch, nor Noah and all other just people participate in salvation”, 10 because being “just” was for him not the same as being loving, Irenaeus develops a history of salvation where Israelites and non-Israelites are included, although in a history that leads exclusively towards the Christ of the Christians. Marcion, for whom Christ was the great prophet, set the antithesis between him on the one side, and Moses and the Prophets on the other side. Neither Moses nor the Prophets, he claimed did know anything about the Christ of the transcendant God, but only conveyed knowledge about the Jewish Messiah of the creator god, hence none of the Prophets right through to John the Baptist had any foreknowledge of Christ whatsoever. Instead the Saviour came unexpectedly. 11 In contrast, Justin insisted that Christ’s earthly life was predicted and typologically pre-figured in the Jewish Scriptures and especially in the Prophets. It was the 9. See M. Vinzent, Marcion and the Dating of the Synoptic Gospels (Leuven, 2014). That the middle recension of the Ignatian Letters where the term ‘Christianity’ appears cannot be dated earlier, see M. Vinzent, Writing the History of Early Christianity (Cambridge, 2019), 266-370; see now also M. K linghardt, The Oldest Gospel and the Formation of the Canonical Gospels I-II (Leuven, 2021), 363-405. 10. Iren., Adv. haer. I 27,3: “Abel autem et Enoch et Noe et reliquos iustos […] non participasse salutem”; a potential correction of this is AscI IX 9. 11. See Tert., Adv. Marc. I 8,1; 9,1; V 16,3.
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Logos himself who had spoken about himself through the Prophets as a kind of enfleshment. Looking, therefore, at literature from this debate, an early divide between Jewish and Christian notions will fail. 12 Surely, Paul, especially in 1 Corinthians, had already stressed the novelty of life in Christ. 13 But he was one of the very few Jews during the Second Temple period who had quoted the prophetic saying of Jer. 31:22.31-33 about the “new covenant”. 14 And Paul was the only one who repeatedly pointed to these verses and developed a strong sense for any kind of novelty that had arrived with Christ. 15 And yet, none of his immediate followers, nor any other Christian during the next decades seems to have picked up this idea of novelty from him. 16 They all were contend with the long-standing assumption that “no one after having drunk old wine desires new, for one says ‘the old is better’” (Luke 5:39). In this they sided with Philo, Josephus, but also with 12. See D. Boyarin, “The Gospel of the Memra: Jewish Binitarianism and the Prologue to John”, Harvard Theological Review 94 (2001) 243-284 (and many ore of his studies later). 13. 6:4: “just as Christ was raised from the dead through the glory of the Father, so we too may live a new life”; 6:6: “We know that our old man was crucified with him so that the body of sin would no longer dominate us, so that we would no longer be enslaved to sin”. 14. 31:22 “How long will you vacillate, you who were once like an unfaithful daughter? For I, the Lord, promise to bring about something new on the earth, something as unique as a woman protecting a man!”; 31:31 “‘Indeed, a time is coming’, says the Lord, ‘when I will make a new covenant with the people of Israel and Judah. 31:32 It will not be like the old covenant that I made with their ancestors when I delivered them from Egypt. For they violated that covenant, even though I was like a faithful husband to them’, says the Lord. 31:33 ‘But I will make a new covenant with the whole nation of Israel after I plant them back in the land’ says the Lord. ‘I will put my law within them and write it on their hearts and minds. I will be their God and they will be my people’”. 15. 2 Cor. 5:17: “If anyone is in Christ, he is a new creation”, “what is old has passed away, look, what is new has come”; Rom. 11:32: “For God has consigned all people to disobedience so that he may show mercy to them all”; Gal. 3:31: “Do we then nullify the law through faith? Absolutely not! Instead we uphold the law; compare Jer. 31:31: ‘I will put my law within them and write it on their hearts and minds”; 1 Cor. 12:13: “For in one Spirit we were all baptized into one body. Whether Jews or Greeks or slaves or free, we were all made to drink of the one Spirit”; Gal. 5:5: “And hope does not disappoint, because the love of God has been poured out in our hearts through the Holy Spirit who was given to us”; compare Jer. 31:31: “I will put my law within them and write it on their hearts and minds”. See W. K inzig, Novitas Christiana: Die Idee des Fortschritts in der Alten Kirche bis Eusebius (Göttingen, 1994). 16. What we read in Col. 3:9-10; Eph. 2:11-16; and 4:22-24 (and the same with Hebr. 8-10) “sounds similar [to that of Paul], but the mindset is different”, so W. K inzig, Novitas Christiana: Die Idee des Fortschritts in der Alten Kirche bis Eusebius (Göttingen, 1994) 106 (own trans.) and comes closer to the moralizing “newness” that one finds in the Dead Sea Scrolls, CD VIII and 1Q34bis.
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non-Jewish Greek and Latin writing authors like Plato, the early annalists, Cicero, and also the Phenician Philo of Byblos. 17 As far as we can tell, for the first time Paul’s obsession with novelty re-appears with the collector and editor of his letters, the mentioned Marcion of Sinope. More radically, Marcion based his thinking on the idea of “newness”, the basis for his antithesis between old and new. Yet, as we will see with the Ascension, the debate about the prophetic heritage and the definition of what the Beloved’s community is or should be must have been in full swing. Within such a context, the text provides us with one voice that tries to position itself, as the opening states, in a threefold way: I 1 And it came to pass in the twenty-sixth year of the reign of Hezekiah king of Judah that he called Manasseh his son. Now he was his only one. I 2. And he called him into the presence of Isaiah the son of Amoz the prophet, and into the presence of Josab the son of Isaiah, in order to deliver unto him the words of righteousness which the king himself had seen: I 3. And of the eternal judgements and torments of Gehenna, and of the prince of this world, and of his angels, and his authorities and his powers. I 4. And the words of the faith of the Beloved which he himself had seen in the fifteenth year of his reign during his illness.
According to this opening, Manasseh, the only son of the king, is called to hear and then deliver to the king three things: (1) “the words of righteousness”, (2) “the eternal judgements and torments of Gehenna” and of the prince of this world, his angels, authorities and powers, and (3) “the words of the faith of the Beloved”. The three-fold structure of this message is not overly cryptic, as the last part (“the words of the faith of the Beloved”) clearly relates to the salvific message of “His Beloved, the Christ” (AscI VIII 17). That the king had seen this message “in the fifteenth year of his reign” links it to the opening of the Ascensio and contrasts with the opening of Marcion’s Gospel (Mcn 3:16: “In the fifteenth year of Emperor Tiberius, when Pontius Pilate was governor of Judea, 4:31 [Jesus] came down from above and appeared in Capernaum, a city of Galilee, at the sea in the territory of Zebulon and Naphthali, and he taught them on the Sabbath day” 18). The “words of righteousness” seem to hint at the Torah, while the “eternal judgements and torments of Gehenna” point to prophetic warnings, a court scene, and a radical view of this world that is kept under the dominion of the “prince of this world” which is similar 17. On all of these see P. P ilhofer , Presbyteron Kreitton (Tübingen, 1990). 18. The translation here and later follows M. K linghardt, The Oldest Gospel and the Formation of the Canonical Gospels I-II (Leuven, 2021), II 1284-1322 (with slight deviations where I think the reconstruction of Marcion’s Greek text should read differently from the reconstruction here).
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to the view of Barnabas, Marcion’s Gospel and some other early Christian texts. 19 If this were the right reading of this opening section, the Ascension gives us its own interpretation of “the words of the faith of the Beloved” – a re-reading potentially of the Gospel of Marcion, but, as we will see below, already in the light of other Gospel authors who had already picked up Marcion’s Gospel and, as Marcion himself complained, had added passages like Jesus’ birth to it. 20 Contrary to Marcion’s criticism of Jewish propheticism which to him only lasted until John the Baptist, in the Ascension we are, indeed, faced with a revelation that takes its authority from precisely the Jewish prophetic tradition, namely from one of the major prophets, Isaiah. Isaiah, of course, is the prophet (together with Jeremiah and Malachi) who was used as foreteller of the messianic birth stories of Christ in the Gospels of Luke and Matthew, 21 those passages in which Marcion saw a major distortion of his own Gospel. And Isa. 40:3 (in a combined quote with Mal. 3:1) is the first literal quote from a Prophet in both Luke and Mark (Luke 1:76; Mark 1:2-3), and also resonates with Matthew (11:10; Luke 7:27; Matt. 3:3 par. Luke 3:4; John 1:23 and 3:28). 22 In the Ascension, the profile of Isaiah is even enhanced. Hezekiah listened to the voice of the Holy Spirit and “the vision which the holy Isaiah saw was not from this world but from the world which is hidden from the flesh” (AscI VI 15). Surpassing Paul’s vision of 2 Corinthians, where Paul reached the third heaven, 23 a key passage for Marcion that assured him the authority of Paul, Isaiah ascends to the seventh heaven (AscI), and the author does not forget to highlight the incomparable insight that Isaiah gained: “I indeed say unto thee, Isaiah: No man about to return into a body of that world has ascended or seen what thou seest or perceived what thou hast perceived and what thou wilt see” (AscI VIII 11). It is hard to believe that this text would not resonate Paul’s claim to have had in this body an experience and vision in an attempt to outshine it. 19. See, for example, the Passio Sanctorum Mariani et Iacobi and the explanations by J. N. Bremmer , “Contextualizing Heaven in Third-Century North Africa”, in R. S. Boustan – A. Yoshiko R eed (ed.), Heavenly Realms and Earthly Realities in Late Antique Religions (Cambridge, 2004), 159-173. 20. See Tert., Adv. Marc. IV 4; see M. Vinzent, Marcion and the Dating of the Synoptic Gospels (Leuven, 2014) 94-95. 21. See Isa. 49:1 ff. and Luke 1:15; Isa. 40:3 ff. and Luke 1:17; Isa. 12:5-6 and Luke 1:28; Isa. 7:14 and Luke 1:31-35 with Matt. 1:18-23; Isa. 9:6 (et al.) and Luke 1:32-33; Isa. 32:15 with Isa. 4:3 and Luke 1:35; Isa. 40:10 with 51:5.9 and Luke 1:51; Isa. 57:15 with 61:1-11 and Luke 1:50-53; Isa. 41:8-9 and Luke 1:54-55; Isa. 29:19ff and Luke 1:72-76. 22. See H. Schürmann, Das Lukasevangelium (Freiburg, 21982) 90. 23. 12:5 “whether in the body or apart from the body I do not know, God knows”.
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Isaiah explicitly states that he saw “the holy Abel and all the righteous” in the seventh heaven, and also that he “saw Enoch and all who were with him, stript of the garments of the flesh, and (clothed) … in their garments of the upper world, and they were like angels, standing there in great glory”. Yet, the text does not simply contradict Marcion’s opinion, but perhaps acknowledges his criticism and adds cautiously that Enoch and those with him “sat neither on their thrones, nor were their crowns of glory on them” (AscI IX 8-10). As quoted before, the Ascension opens with a historical reference which reminds of both, the opening of Marcion’s Gospel and its parallel in Luke 3:1. Manasseh was the longest reigning king of Judah, and the report about him in the Second Book of Kings referred to by the Ascension is no praise. According to 2 Kings 21:2-18 24 Manasseh had paganized Israel, “rebuilt high places”, “set up altars for Baal and made an Asherah pole”, “bowed down to all the stars in the sky and worshiped them”, and yet, he also “built altars in the Lord’s temple, about which the Lord had said, ‘Jerusalem will be my home’”. However, “in the two courtyards of the Lord’s temple he built altars for all the stars in the sky”. Moreover, the list of sacrileges carries on (fireworship, divination, omen reading, appointing of magicians, putting an idol of Asherah into the temple). As a result, God through his prophets blamed the king and announced disasters ‘on Jerusalem and Judah’, namely the destruction of the capital: “I will wipe Jerusalem clean, just as one wipes a plate on both sides. I will abandon this last remaining tribe among my people and hand them over to their enemies; they will be plundered and robbed by all their enemies”. The prophetism also speaks about Manasseh’s killing of “many innocent people”, of staining “Jerusalem with their blood from end to end”. Who read this story in the aftermath of the Jewish war in the years 66-70 ce , and even more after the devastation of Jerusalem in the second Jewish war, the Bar Kokhba revolt of the years 132-135 ce , would not have linked this prophecy to these events? The introduction of the Ascension, indeed, refers to the scenario depicted in 2 Kings, 25 and not to the smoothened version of 2 Chronicles where Manasseh at the end of his life humbled himself and converted to the God of Israel. According to 2 Kings which the Ascension recounts and broadens, Isaiah had been called by God “to deliver the words of righteousness” in the last year of Hezekiah’s reign, when Manasseh was designated and probably began to co-reign with his father. The hint at this scenario sets the tone of the Ascension: In conflating then and now, the text is a prophetic, highly critical, if not dismissive divine message against the State 24. See also a revised version in 2 Chronicles 33:1-20. 25. See the explicit reference to 2 Kings in AscI 2:6: “And the rest of the acts, behold they are written in the book of the Kings of Judah and Israel”.
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of the Jews after the Bar Kokhba revolt. The temple had been turned into a site of pagan worship, Jerusalem was transformed into Aelia Capitolina after 130 ce , and, as a result of the war, the Jews were banned from living there or even entering the city (except for one festival a year), and not only divination and omen reading were practiced there, but Emperor Hadrian had built into or on the razed Holy Place a temple with a statue of Jupiter Capitolinus. 26 As evidence we can adduce Hadrian’s minting of coins in this colony: COL AEL KAP (Colonia Aelia Kapitolina) which carried on after the emperor’s death in the year 138 ce to the times of Hostilian in 251 ce .
JUDAEA, Aelia Capitolina Hadrian 117-138 ad. Æ 27 mm Obv: Laur. bust of emp. r. IMP[eratori] CAES[ari] TRAI[ano] HADRIANVS – “For Imperator Caesar Trajanus Hadrianus”; Rev: Façade of distyle temple of Jupiter Capitolinus (Zeus seated in center, flanked by Minerva and Juno COL(onia) AEL(ia) KAP(itolina) – “The Colony of Aelia Capitolina” 27
The ban on any Jew living in this city outlasted the minting and remained in force until the fourth c. ce . In 2 Kings 21:8 the contemporaries were also able to read God’s reason for such harsh punishment. God’s promise not to make “Israel again leave the land” which he “gave to their ancestors” was conditional on the provision “that they carefully obey all” that God “commanded them, the whole law” which “Moses ordered them to obey”. The Ascension is not directed against the Jewish Scriptures, although it is critical of the Jews. With reference to the prophet Isaiah and through him to 2 Kings, the author uses these Scriptures for his own – Christian – purpose. He even brings forward a new excuse for Manasseh’s wrongdoings. It is not, as in 2Chronicles the remorse of the king and his return to the God of Israel, but a lengthy explanation follows that Manasseh became subservient to “Beliar”, “the angel of lawlessness, who is the ruler of this world” (AscI II 4), and resided in Manasseh (AscI I 9). Even more, the plot develops into a cosmic drama between Beliar and Isaiah because 26. See P.-L. Couchoud, “Is Marcion’s Gospel One of the Synoptics”, Hibbert Journal 34 (1936) 265-277, esp. 277. 27. Y. M eshorer , The Coinage of Aelia Capitolina (Jerusalem, 1989), Aelia 1.
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of the prophet’s vision – the vision of the Beloved which starts off the Christological part of the Ascension. 28 Irrespective to what extent the author or redactor of our present version(s) used an older text or earlier traditions – we know he referred to and used 2 Kings, Isaiah and perhaps Ezekiel 29 –, the work as we read it forms an apocalyptic text with the Christian message as the content of the prophet’s vision. Contrary to Marcion’s antithetic view, however, such Christian vision is not set in antithesis to the Jewish law or propheticism, but it was used to establish a form of after-war community in the trenches of its older Jewish tradition. Thus, the work in its present form is a contribution to the specific identity formation of writers and readers that will later be seen as “Christians”, to whom propheticism and the use of the Jewish Scriptures are important. Similar to Justin, the Ascension insists that the Saviour had been announced by himself through the prophets: The one who is “going forth from the seventh heaven had been made known” through Isaiah but also other prophets mentioned in the Ascension (Miha, Ananias, Joel, Habakkuk, Jasub 30) because of their vision. The author does not entirely disagree with Marcion’s criticism of prophets, as he also mentions false-prophets, but he asserts, those were Samaritans like Belchira who “dwelt in the region of Bethlehem, and was an adherent of Manasseh” and “prophesied falsely in Jerusalem, and many belonging to Jerusalem were confederate with him” (AscI III 1). Belchira – perhaps a heresiological hat for Marcion – is said to even play prophets against prophets. Belchira points at Isaiah as if he were critical of Moses claiming: “I see more than Moses, the prophet”, because when Moses said: “No man can see God and live” (Ex. 33:20), Isaiah answered: “I have seen God and behold I live” (Isa. 6:5) (AscI III 8 f.). Isaiah reminds of Paul’s claim, and Belchira like Marcion highlights an inner antithesis between the Law and the Prophets, contradictions as known from Marcion’s Antitheses. Isaiah also spoke against Jerusalem and called it “Gomorrah” (Isa. 6:10). The reason why Belchira was “in great wrath against Isaiah” is identical with Marcion’s rejection of the prophets, namely Isaiah’s foreknowledge and vision of the arrival of the Saviour. Isaiah had “made known” through his vision the “going forth of the Beloved from the seventh heaven”, his descent and transformation into the likeness of man’ (AscI III 13).
28. On some parallels to texts from Nag Hammadi see A. K. H elmbold, “Gnostic Elements in the ‘Ascension of Isaiah’”, New Testament Studies 18 (1971) 222226. 29. On this see I. Gruenwald, Apocalyptic and Merkavah Mysticism (Leiden/ Cologne, 1980) 58. 30. See AscI II 9.
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II. The Beloved’s Coming and Going From our Marcionite/anti-Marcionite reading of the Ascension, its visions become more transparent. The angelological Christology conforms to that of Marcion and his pupils. The same subject, the Beloved, precedes the incarnation and becomes present in the likeness of man, suffers persecution and death, but raises again. We are not dealing with two subjects (Christ and Jesus) as in Cerinthus. In addition, the Ascension describes the process as a transformation. We know from Marcion that he accepted the cosmology of heavenly spheres, because he read in 2 Cor. 12 that Paul was lifted into the third heaven, and from his pupil Apelles that he specifically elaborated on the sphereal nature of Christ’s angelic body. 31 When Tertullian in the discussion with Marcion points to Paul’s “examples” of the resurrection, 32 he infers that Marcion had to some extent elaborated on the descent and that Apelles only thoroughly substantiated his Master’s teaching about the poverty of the created flesh and the poor work of the creator god. 33 In addition, Marcion also seems to have not solely suggested an angelic, but also a glorious sun-like, lunar, astral and sideric nature of the Lord’s body, a teaching that resonates in the Ascension. Apelles seems to have added to Marcion’s concept of Christ’s angelic body the Stoic notion of fleshliness, of course, angelic and astral, the gradual assumption of flesh during the descent, albeit in a very specific way. Both, therefore, seem to have understood – similar to the Ascension – the process of the descent as transformation. The Ascension displays criticism of Israel (the Israelites are the torturers of the Beloved), although it does not draw Marcion’s conclusion in setting the Jewish past as antithesis to a Christian present. Rather like Justin, it adopts both Jewish traditions and scriptures and creates a theological basis for their integration, at the core of which is the teaching of the Twelve. And, again, it is this combination that reflects both an influence of and a distancing from Marcion. With Marcion Christians have started discussing which of the writings should carry authority and should be read in the community, Jewish Scriptures, Paul’s letters, the Gospel, other texts? Marcion insisted on Paul alone, and on his gospel text that differed from, as Marcion believed, plagiarisms of his own text, known as Luke and the three 31. See K. Greschat, Apelles und Hermogenes: Zwei theologische Lehrer des zweiten Jahrhunderts (Leiden, 1999) 103-107. 32. Tert., Adv. Marc. V 9: 1 Cor. 15:41; “the grain of wheat”, “to every seed there is its own particular body, as there is one kind of flesh of men, and another of beasts and birds, and bodies celestial and terrestrial, and one glory of the sun and another of the moon and another of the stars”. 33. See Tert., De carne Christi 8; K. Greschat, Apelles und Hermogenes: Zwei theologische Lehrer des zweiten Jahrhunderts (Leiden, 1999) 103-107.
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other Gospels to which were given names of Apostles and Apostolic men. The Ascension includes Moses and the prophets, and makes Isaiah even the protagonist of the cosmic drama. The authorities, however, on whom the Beloved entrusts the teaching of the Resurrection of the Beloved to all the nations and every tongue, are the Twelve Apostles or the Twelve Disciples 3 4 who are qualified as in Acts 1:21-22 as those “who were with Him”, the Beloved (III 14.18; IV 3). 35 This qualification, of course, excludes Paul, Marcion’s sole authority. In the second part of the first vision, the Ascension speaks about the dispute over the Teachings of the Twelve Apostles, their faith, love and purity – precisely the kind of accusations uttered by Marcion and rejected by Tertullian. There is no need to see Marcion as the only target of the Ascension, as Isaiah writes about “many” who “love office, though devoid of wisdom” (III 23), “many lawless elders, and shepherds dealing wrongly by their own sheep” (III 24), “many” who “will change the honour of the garments of the saints for the garments of the covetous”. In contrast, the text advocates prophetism and complaints that “there will not be in those days many prophets, nor those who speak trustworthy words, save one here and there in diverse places” (III 27). Moreover, the text sees “great hatred in the shepherds and elders towards each other” because of “great jealousy” (III 29-30). Hence, we are set in the context of competing authorities, fighting for positions and offices, within which the Ascension admits that only few prophets carry weight, pointing to Isaiah who as very few others speak “after the impulse of their own hearts” (III 31). In the seventh heaven, having seen Abel and Enoch without crowns and thrones of glory, Isaiah continues that they will gain these only after the descent and ascent of the Beloved, Christ, “in the last days”, “545 days after the resurrection” (AscI IX 14-18). 36 He then recounts Christ’s descent through the heavens, the final stage being his arrival “in his lot” (AscI XI 3), a section which I will skip here, but on which I have elaborated already in the past, where I have shown that our text places itself into the debate about Christ’s birthstories, so harshly criticised by Marcion who’s Gospel
34. An expression found in Petrine texts, see E. Norelli, Ascensio Isaiae: Commentarius (Turnhout, 1995) 193. 35. See the excursus in Enrico Norelli, Ascensio Isaiae: Commentarius (Turnhout, 1995) 192-195. 36. The tradition that Christ stayed on earth for about 18 months can also be found in other texts which show relations to Marcion, see the Valentinians and Ophites in Iren., Adv. haer. I 3,2; I 30,14, see also the Apocryphon of James (I 1). The Ophites use the same Lukan resurrection appearance passage as Marcion (Luke 24:36 ff.), see A. K. H elmbold, “Gnostic Elements in the ‘Ascension of Isaiah’”, New Testament Studies 18 (1971/1972) 222-227, esp. 223.
THE ASCENSION OF ISAIAH
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had no birthstory of Christ. 37 As shown in this previous study, Marcion’s Gospel and the canonical Gospels of the New Testament provide the basis for the Ascension. The Ascension first picks up the idea found in John that the Saviour comes into his own, “his lot” or “portion”, not into an alien world, as Marcion saw it. The Ascension refers to Luke’s Bethlehem and makes the historical link. However, the prophetic author sides rather with Matthew on the special nature of the Saviour, endorsing the encratitic element he takes the proximity to Marcion even further than Matthew by missing out the birth of Jesus. As in Marcion, the coming into the world happens unexpectedly (Mary is astonished), as in the blink of an eye, without birth pains and with a womb “found as formerly”, although the Ascension admits that Mary had conceived, yet insists on her virginity. Interestingly, the Ascension even reflects the conflict about the nature of the Saviour’s appearance to this world and the discussion about the birth story. In this, the Ascension holds that Mary has not given birth to a child and had no labour pains. Like Marcion, the Ascension endorses the unexpectedness of the arrival and the blindness of the people, although restricting the not-knowing to the time “whence He was” coming.
III. Outlook What can we take from this history of literal references in a web of entangled discourses for our study of the Hekhalot tradition? First, pace Peter Schäfer’s attempt to disentangle traditions we need to re-think the very beginnings of the Hekhalot tradition, as it seems that it had its place precisely in the renegotiation about what was and who had a genuinely divine revelatory experience from which to derive tradition and authority. Second, it seems that this debate took place in the post-Bar Kokhba period between various Jewish traditions as soon as the central reference of the Jerusalem temple and the holy city of Jerusalem was lost for Jews. Third, the debate itself subsequently led to cementing of joint heritages, differences and separations. Prophetic teachers, but also the prophetic tradition played an important role with visions and ecstatic experiences being a core element for authority constructions and authority rejections. Fourth, particularly for those Jewish groups who showed affinity to messianism which included visionary experiences, the place of prophets and propheticism became crucial and those of elders and shepherds questionable. Was the messiah to be understood as a new prophet who super37. See M. Vinzent, “Give and Take amongst Second Century Authors: The Ascension of Isaiah, the Epistle of the Apostles and Marcion of Sinope”, Studia Patristica 50 (2010) 105-129.
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seded and abolished all older and even contemporary and future propheticism, as Marcion saw it, or was there room for the true prophets of old, perhaps even for new prophets as the Montanists and also as Tertullian believed? Fifth, as the Hekhalot tradition is present particularly in the core Christian sections of the Ascension which shows so many Marcionite and anti-Marcionite features, it seems to have its place precisely in this space of renegotiation and redefinition of Judaism in the Post Bar-Kokhba times. Even if the beginnings of the Hekhalot tradition might not go back as early as Gershom Sholem thought it would, once one sees the major New Testament texts being received, redacted and broadened (Paul’s Letters with its redactional stages, with added Pseudo-Paulines and quasi-Paulines) and even written (the Gospels) during the middle of the second century, rather than in the first, the suggested links between the New Testament and the Hekhalot traditions seem no longer to be “arbitrary and selective” as Schäfer believed they were, but reveal to have been part of an ongoing shared history of various Jewish traditions. What Marcion as the first in history deploys as self-definition, “Christianity”, was fully part of this web of Jewish traditions, even if Marcion set Christianity in antithesis to Judaism. The Ascension (just like Justin and the canonical Gospels) shows that Marcion’s stories were received and had an enormous impact, but that the common Jewish heritage was stronger and longer lasting. Hence, the Ascension as well as the early Hekhalot traditions are markers of a shared Jewish web of traditions and any attempt to disentangle “Jewish” or “Christian” redactional phases are anachronisms.
Sacerdotalisation and E arly Jewish Mystical E lements in the Greek T estament of L evi Jessica
van ‘t
Westeinde
University of Durham 1 [email protected]
Résumé La destruction du Second Temple en 70 de l’ère chrétienne et l’échec de la révolte de Bar Kokhba en 135 de l’ère chrétienne ont accéléré la recherche d’un nouvel accès à Dieu en l’absence du Temple et l’interdiction d’entrée à Jérusalem. Bien que la plupart des débats savants sur le Testament de Lévi aient porté sur la question de savoir si le texte était juif ou chrétien, j’essaie de le comprendre comme un texte juif avec un lectorat hypothétique constitué de groupes après la révolte de Bar Kokhba, mais avant que la distinction entre les identités juive et chétienne n’aient véritablement pris place. Dans une comparaison textuelle entre le Testament de Lévi et une sélection de premiers textes mystiques juifs qui ont plus tard trouvé leur voie dans Hekhalot Rabbati, je montre les caractéristiques juives par excellence du T.Lévi. En particulier, la critique du T.Lévi sur le sacerdoce, ses idées apocalyptiques et spirituelles doit être considérée comme juive plutôt que des interpolations chrétiennes, un point de vue prôné par la recherche antérieure. Ces textes traitent de questions primordiales qui correspondraient très bien au contexte après la révolte de Bar Kokhba. Abstract The Destruction of the Second Temple in 70 ce and the Defeat of the Bar Kokhba Revolt in 135 ce prompted the search for new ways to access God in absence of the Temple and a barred access to Jerusalem. Although most scholarly debates on the Testament of Levi concerned the question whether the text was Jewish or Christian, I attempt to understand it as a Jewish text with a hypothetical readership in groups after the Bar Kokhba Revolt, but before the distinction between Jewish and Chris1. The research for this contribution was supported by an Aarhus Universitet Forskningsfond Visiting Fellowship and a Faculty of Arts and Humanities PGR Research Support Award from Durham University (Spring 2016). My special thanks go to Anders Klostergaard Petersen and Markus Vinzent for offering me a chance to pursue this research project, and to David Hamidovic for the chance to publish it in this volume. La « sacerdotalisation » dans les premiers écrits mystiques juifs et chrétiens. Actes du colloque international tenu à l’Université de Lausanne du 26 au 28 octobre 2015, sous la direction de David Hamidović, Simon C. Mimouni et Louis Painchaud, Turnhout : Brepols, 2021 (Judaïsme ancien et origines du christianisme, 22), p. 217-246 DOI 10.1484/M.JAOC-EB.5.122774 © F H G
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tian identities really took hold. In a textual comparison between the Testament of Levi and a selection of early Jewish mystical texts that later found their way into Hekhalot Rabbati, I demonstrate T.Levi’s quintessential Jewish features. In particular, T.Levi’s criticism of the priesthood, its apocalyptic and spiritual ideas I propose are to be considered Jewish, rather than that they should be understood as Christian interpolations, a view advocated by earlier scholarship. These texts deal with the existential questions that would very well fit a post-Revolt context.
Dixon Slingerland in his introduction to his monograph which critically examines modern scholarship of the Testaments of the Twelve Patriarchs somewhat dauntingly states that “with wide disagreement surrounding the community of its origin, only the bravest among scholars would dare use it as a primary source for the way of life and teachings of some ancient Jewish or Christian community”. 2 Acknowledging the thin blue line between bravery and foolishness, this remark could set the stage for what is to follow. The Greek Testament of Levi (T.Levi) might not be the most obvious of choices for a textual analysis in the framework of research on early Jewish mysticism, Hekhalot literature, and sacerdotalisation. However, in this contribution I hope to show that T.Levi could well be considered within this Jewish mystical context. It remains to be seen if there is sufficient ground to draw up a correlation with Hekhalot literature or at least fragments from this vastly diverse corpus, particularly when accounting for the difficulties of dating the compositions. That notwithstanding, it could be argued that both literary corpuses search for new ways to access God in absence of the Temple. 3 A first glance at the text of the Greek T.Levi, as it has been transmitted in the Testaments of the Twelve Patriarchs (T12P), 4 will show how the narrator reflects themes that concern sacerdotalisation – heavenly temple, performance of sacrifices, the priesthood with an elaborate description of its tasks, a debate on the new priesthood, heavenly sacrifices that have become bloodless offerings, etc. –, and how they use typology that could 2. D. Slingerland, The Testaments of the Twelve Patriarchs: A Critical History of Research (Missoula, Montana, 1977) 1. Slingerland continues to state that this statement is to be lamented, for it is the most interesting question to be addressed, since “the real value of the Testaments is its use as a primary source for the way of life of some ancient community(ies)”, 2. 3. Here I follow the lines of the colloquium’s core argumentation, which proposes that the authors or redactors of the Hekhalot literature “chercheraient un nouvel accès à Dieu en l’absence du temple. Cette démarche serait alors un développement original des apocalypses juives et chrétiennes”. 4. For its manuscript tradition, see R. H. Charles , The Greek versions of the Testaments of the Twelve Patriarchs. Ed. From 9 MSS. Together with the variants of the Armenian and Slavonic versions and some Hebrew fragments (Oxford, 1908), and a critical text edition by M. de Jonge – H. W. Hollander , The Testaments of the Twelve Patriarchs: A Critical Edition of the Greek Text (Leiden, 1978).
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refer to the destruction of the second Temple and the defeat of the Bar Kokhba revolt. Furthermore, the text (and as such its author, redactor(s), and audience(s)) combines messianic typology that allows at once to speak of a “coming of the messiah” and to speak of a “coming again”: 5 this would argue against later Christian redaction or interpolation, as they would not be able to reconcile having both. Neither is there any self-identification of the author nor his audience as Christian, and therefore we must propose a dating not too long after the second Roman-Jewish war since it was not long after the 140s that Christians began to self-identify as “Christian”, and moreover, as “Christian” as opposed to being “Jewish”. In order to emphasise T.Levi’s priestly character and Jewish identity, I propose to offer a parallel reading of textual fragments taken from Hekhalot literature. That is to say, from texts that have found their way, in the later manuscript tradition, into what has become known as Hekhalot Rabbati. It is foremost the apocalyptic accounts that seem to offer pathways for textual comparison. In what follows, I will first present the major obstacles that (could) surface when considering such parallels. Current scholarship on T.Levi and Hekhalot Rabbati in particular points to the problematic nature of the textual fragments. Once these obstacles have been tackled, or at least awareness for them has been raised and the limitations of the research acknowledged, I shall introduce a possible analysis of the selected passages. Although the conclusions will unavoidably be speculative and highly tedious, I hope that they will provoke further research. I shall conclude that sacerdotalisation in T.Levi is a central concern and that T.Levi clearly presents elements that characterise early Jewish mysticism. 6 The parallels with apocalyptic, (later) mystical, and Hekhalot literature, particularly with regard to themes of sacerdotalisation and the (inherent) criticism of rabbinic Judaism allow for T.Levi to be situated firmly in a Jewish context. Within the field of Jewish history in Late Antiquity, much attention has been drawn to the effects of the destruction of the second Temple 5. As D. Slingerland, The Testaments of the Twelve Patriarchs: A Critical History of Research (Missoula, Montana, 1977) 1, has also stipulated, this “doctrine of the two Messiahs […] is paralleled only in the Qumran literature”. 6. For the idea of sacerdotalisation as a theme in priestly literature after Bar Kokhba, I build on Simon Mimouni’s hypothesis that “Le judaïsme sacerdotal et synagogal est documenté par des sources qui précédemment ont été considérées soit comme chrétiennes (pour la littérature pseudépigraphe ou apocryphe), soit comme rabbiniques (pour la littérature targoumique, poétique ou mystique)”, see S. C. M imouni, “Le ‘Judaïsme sacerdotal et synagogal’ en Palestine et en Diaspora entre le ii e et le vi e siècle : propositions pour un nouveau concept”, Comptes rendus de l ’Académie des inscriptions & belles lettres (2015) 114-147. This hypothesis allows one to situate T.Levi within sacerdotal and synagogal Judaism, and it allows one to move away from the “Christian” vs “Jewish” dichotomy.
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in 70 ce. The rhetoric that seems to have been constructed and that prevails in literary productions stems from a much later date long after the historical events, and more interestingly so, it seems to have been developed particularly as a rhetorical tool by later Christian apologetic authors. The title of a recent edited volume by Daniel Schwartz and Zeev Weiss is telling: Was 70 ce a Watershed in Jewish History? 7 The short answer is: no. However, in the epilogue to the volume Ruth Clements bridges the question to the devastating defeat of the Bar Kokhba revolt (132-135 ce), about half a century later. 8 Although she too appears to speak dismissively of qualifying even the revolt as a “watershed”, I would argue that the defeat had a much greater and a more transformative impact on ancient Judaism. 9 The T12P and T.Levi in particular have been subject to considerable scholarly attention since the nineteenth century, and researchers have analysed the Testaments’ parallels to the Dead Sea Scrolls and similar Jewish and Christian literature. 10 It has thus been assessed in its relation to a 7. D. Schwartz – Z. Weiss (ed.), Was 70 ce a Watershed in Jewish History? On Jews and Judaism before and after the Destruction of the Second Temple (Leiden, 2012). See particularly the contributions of Noah H acham, “Sanctity and the Attitude towards the Temple in Hellenistic Judaism”, 155-179; Michael Tuval , “Doing without the Temple: Paradigms in Judaic Literature of the Diaspora”, 181-239; and Nadav Sharon, “Setting the Stage: The Effects of the Roman Conquest and the Loss of Sovereignty”, 413-445. 8. Ruth Clements observes how it was only after 135 ce that Christian authors began to consider the events of 70 ce as final and epoch-making, R. Clements , “70 ce . After 135 ce– The Making of a Watershed?”, in D. Schwartz – Z. Weiss (ed.), Was 70 ce a Watershed in Jewish History? On Jews and Judaism before and after the Destruction of the Second Temple (Leiden, 2012), 517-536. 9. Judaism understood here and throughout this paper as the religion of people who identified as Jewish and who granted significance to the Temple and to Jerusalem for their religious worship/practice. Following S. C. M imouni, “Le ‘Judaïsme sacerdotal et synagogal’ en Palestine et en Diaspora entre le ii e et le vi e siècle : propositions pour un nouveau concept”, Comptes rendus de l ’Académie des inscriptions & belles lettres (2015) 114-147, as well as M. Satlow, “Defining Judaism: Accounting for ‘Religions’ in the Study of Religion”, Journal of the American Academy of Religion 74 (2006) 837-860, Judaism is not to be understood as a “religion” in the “Christian” sense, or comparable to Christianity as it emerged in the fourth and fifth centuries ce . Rather, I apply a definition of Jewish and Judaism as a group that sees itself as Israel and considers its people to be in exile (Diaspora), whilst cherishing the hope for a return to the homeland, Israel. This group furthermore adheres to a certain worldview and way of life. As such, my definition is based on Jacob Neusner , The Way of the Torah: An Introduction to Judaism (Belmont, California, 1993) 14-15. However, it is particularly Satlow ’s framework in “Defining Judaism: Accounting for ‘Religions’ in the Study of Religion”, Journal of the American Academy of Religion 74 (2006) 854, which could be applied in order to determine T.Levi’s Judaism, built on three clusters of questions pertaining 1) identity, 2) a discourse transmitted by texts, and 3) practice. 10. For a comprehensive account of the history of research into T12P see D. Slingerland, The Testaments of the Twelve Patriarchs: A Critical History of
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wider context of other (Jewish) apocalyptic literature, and in its pseudepigraphical context. As far as the current author is aware, no attempts have been made to particularly analyse T.Levi in context of emerging Jewish mysticism, nor have any attempts been made to approach the text as a response to the atrocities that hit the Jewish people between 70-135 ce . Neither has the text ever been approached using a methodology of religious agency. 11 Dereck Daschke, adopting a psychoanalytical perspective, has shown how apocalyptic literature can be read as a response to the destruction of the Temple and Jerusalem. 12 Similarly, Joshua Johnson has tried to approach this literary genre from a perspective of trauma studies. 13 Although I do not intend to offer a psychoanalytical rendering, I will try to read the T.Levi as a Jewish response not only to the destruction of the Temple but also as a response to the defeat of the revolt. At least some of what has become known as Hekhalot Rabbati literature could be read and interpreted in a similar fashion. Maybe even more so than T.Levi, some of these fragments which made their way into the complex Hekhalot Rabbati manuscript tradition seem to struggle with the devastating results of the destruction of the Jerusalem Temple. Rachel Elior has already argued this for Hekhalot and Merkavah traditions, and has shown how this literature could be regarded as “a reaction to the destruction of the earthly Temple” and that “these constructs of the imagination arose as a spiritual response to the sense of loss, desolation, and deprivation caused by the horrors of reality”. 14 Elior speaks even of an apparent “refusal to accept the cruel reality” of loss of the Temple. 15 Even if we follow Peter Schäfer’s “late” Research (Missoula, Montana, 1977) and more recently a concise account has been published by R. Kugler , The Testaments of the Twelve Patriarchs (Sheffield, 2001). For a more general but incredibly comprehensive overview of research into pseudepigrapha, see L. DiTommaso, A Bibliography of Pseudepigrapha Research 1850-1999 (Sheffield, 2001). 11. Although the limitations of this contribution do not allow me to apply this methodology extensively, a detailed or thorough analysis using this methodology should be carried out in future research. 12. Daschke does not specifically single out the destruction of the Second Temple and the defeat of the Bar Kokhba Revolt, but takes a broader approach and considers apocalyptic literature composed both as reaction to the destruction of the First Temple and the Babylonian exile and the destruction of the Second Temple. See D. Daschke , City of Ruins. Mourning the Destruction of Jerusalem (Leiden, 2010). 13. J. Johnson, “Trauma and Zion: Narrative Healing”, in Lumen et Vita 2 (2012), e-journal via https://ejournals.bc.edu/ojs/index.php/lumenetvita/article/ view/1858 (last consultation: 17.04.2016). 14. R. Elior , “From Earthly Temple to Heavenly Shrine”, Jewish Studies Quarterly 4 (1997) 217-267, esp. 223. 15. R. Elior , “From Earthly Temple to Heavenly Shrine”, Jewish Studies Quarterly 4 (1997) 223.
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dating, 16 there is reason to believe that for centuries people felt prompted to contemplate how, with the loss of the Temple and of Jerusalem, they could seek new ways to access God; how they could (re-)establish the relation between Israel and its creator. It was an existential quest, which would require a rethinking and reshaping that would lead to a new understanding of Jewish identity. For the Greek T.Levi, this response seems narrated in a thorough revision or redefinition of priesthood. Apparently, the author saw the need for such redefinition, which makes sense in light of what has been outlined above. However, scholarship is divided when it comes to the dating and denomination of T.Levi, and neither is there an agreement as to the determination of its author, audience, and redactor(s). It is therefore necessary to introduce briefly the two main camps before I move on to add my own. First, I will introduce the standard view that T.Levi is a Jewish text with later Christian interpolations. Secondly, I shall discuss the opposing view, namely that it is a Christian text which makes use of older Jewish traditions. Instead of subscribing to either of these hypotheses, I will try to come up with a differentiated view that challenges both on the ground of their basic assumptions of an already clear distinction between Jewish and Christian identities. 17 In light of this I shall elaborate my methodology and this will then allow for a comparison of the texts of T.Levi and textual units that later have been incorporated in the Hekhalot Rabbati manuscripts. Notwithstanding Robert Kugler’s views on T.Levi as a Christian text, he has brought to light the document’s emphasis on the combination of priestly and princely characteristics, 18 and I will try to link 16. P. Schäfer , Hekhalot-Studien (Tübingen, 1988). G. Scholem, Jewish Gnosticism, Merkabah Mysticism, and Talmudic Tradition (New York, 1965), proposed an earlier dating, at least for some of the textual units incorporated in Hekhalot Rabbati, going back as early as the second century ce . Peter Schäfer and Rana’an Boustan claim that Hekhalot literature contains early material, particularly hymns and magical texts that [might] date back to 200-500 ce , but which only became a distinct class of texts in the seventh century, and perhaps even later, in the early Islamic period, see R. S. Boustan, “The Study of Heikhalot Literature: Between Mystical Experience and Textual Artifact”, Currents in Biblical Research 6 (2007) 130-160, p. 131. This does not, however, provide any evidence that would support such an early dating for the fragments dealt with in this text, yet neither does it provide strong evidence to the contrary (ergo: a late dating such as eighth-eleventh centuries) as I shall elaborate below. 17. Cf. J. van ‘t Westeinde , “Liberating Levi. A Cultural-Evolutionary Approach to Aramaic and Greek Leviy Beyond Denominational Essentialism”, in K. M acK endrick and J. Cahana-Blum, We and They. Decolonizing Greco-Roman and Biblical Antiquities (Aarhus, 2019) 75-96. 18. Kugler reads this as evidence to date the “Original Levi” (the pre-Christian testament) to the Hasmonean period, see R. Kugler , From Patriarch to Priest: The Levi-Priestly Tradition from Aramaic Levi to Testament of Levi (Atlanta, Georgia, 1996) 224.
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this up with sacerdotal and royal imagery in some fragments derived from the later Hekhalot Rabbati. This comparison will exhibit the quintessentially Jewish features of T.Levi, and that despite its criticism of priesthood the text could be considered a Jewish text, just as the hekhalot fragments and, subsequently, Hekhalot Rabbati. As such, I hope this study will contribute to our insights about the great diversity – its myriad forms, localities, ideas, etc. – of Judaism, or Judaisms, in Late Antiquity.
I. Obstacle 1: Greek T.Levi from T12P The Greek Testament of Levi is a text that stands transmitted as part of the Testaments of the Twelve Patriarchs, commonly considered to belong to the genre of pseudepigrapha. Its exact origins are contested, but there are some interesting parallels with Qumran literature. 19 As for T.Levi in particular, it unmistakably reveals its inspirational source as deriving from the Aramaic Levi Document (ALD). 20 The connection between the two literary bodies has been demonstrated most elaborately by Robert Kugler in his monographs From Patriarch to Priest, where he illustrates the development from ALD through Jubilees to T.Levi. Furthermore, he suggests that T.Levi – not unlike the textual ‘hekhalot’ units below – might have existed independently before its incorporation into T12P. 21 While the Aramaic text focuses on sacrifice and wisdom topics, taken over by the author of T.Levi, the author of our Greek T.Levi adds a section that displays a clear Torah-orientation (T.Levi 13). I will show that this, among other characteristics, could support the argument that T.Levi is Jewish, and that this could possibly indicate a post-Bar Kokhba dating. 19. D. Slingerland, The Testaments of the Twelve Patriarchs: A Critical History of Research (Missoula, Montana, 1977) 44ff, consider also J. K lawans , Purity, Sacrifice, and the Temple. Symbolism and Supersessionism in the Study of Ancient Judaism (Oxford, 2006) 145-174; R. Kugler , “Whose Scripture? Whose Community? Reflections on the Dead Sea Scrolls Then and Now, by Way of Aramaic Levi”, Dead Sea Discoveries 15 (2008) 5-23; J. Kugel , “Levi’s Elevation to the Priesthood in Second Temple Writings”, Harvard Theological Review 86 (1993) 1-64; as well as C. Werman, “Levi and Levites in the Second Temple Period”, Dead Sea Discoveries 4 (1997) 211-225. In this context it is also worth comparing M. Swartz , “The Dead Sea Scrolls and Later Jewish Magic and Mysticism”, Dead Sea Discoveries 8 (2001) 182-193, as it offers the potential to make the bridge or indicate parallels between T.Levi and Hekhalot Rabbati. Compare along similar lines, P. A lexander , The Mystical Texts: Songs of the Sabbath Sacrifice and Related Manuscripts (London, 2006) who dedicates a chapter to the relation between Hekhalot mysticism and Qumran. 20. J. Greenfield – M. Stone – E. E shel , The Aramaic Levi Document: edition, translation, commentary (Leiden, 2004). 21. R. Kugler , From Patriarch to Priest: The Levi-Priestly Tradition from Aramaic Levi to Testament of Levi (Atlanta, Georgia, 1996) 224.
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Up until today, research on T.Levi has been balancing between two approaches. 22 The first is the “standard” view that T.Levi is Jewish but reflects Christian interpolations. Scholars like Bousset 23 and Philonenko 24 propagate the view that T.Levi is originally a Jewish text picked up by a Christian author who has “Christianised” the text by inserting typical “Christian” typologies or “Christian” elements into the original document. The weight of this scholarly argument is noticeable in the various text editions and translations where we find brackets inserted in the text where some scholars or editors have agreed that in these cases we are dealing with Christian interpolations. The “opposition” to this “standard” view holds that T.Levi is throughand-through Christian. Marinus de Jonge 25 and Michael Stone, 26 who belong to this group of scholars, have argued, at least for Greek T.Levi as it has been included and transmitted in and through T12P, that text, author, and audience were Christian rather than Jewish. They argue that a Christian author has made use of a variety of older, Jewish material to put together the Testament. It was a Christian text composed by a Christian hand for a Christian audience, although the author seemingly was acquainted with, and had access to, Jewish literary resources. Unfortunately, both views reflect the problematic dichotomy of an already well-established rupture between an identifiably different “Judaism” versus “Christianity”. It is therefore time for a new approach. Already 22. For the section that follows, see also J. van ‘t Westeinde , “Liberating Levi. A Cultural-Evolutionary Approach to Aramaic and Greek Leviy Beyond Denominational Essentialism”, in K. M acK endrick and J. Cahana-Blum, We and They. Decolonizing Greco-Roman and Biblical Antiquities (Aarhus, 2019) 81-84. 23. W. Bousset, “Die Testamente der XII Patriarchen: I. Die Ausschneidung der christlichen Interpretationen”, Zeitschrif für die Neutestamentliche Wissenschaft und die Kunde der älteren Kirche 1 (1900), 141-175. See also his argument, partially picked up by Kugler about a century later, that one can dissect a Jewish ‚Grundschrift’, “Die Testamente der XII Patriarchen: II. Composition und Zeit der jüdischen Grundschrift”, Zeitschrift für die Neutestamentliche Wissenschaft und die Kunde der älteren Kirche 1 (1900) 187-209. 24. M. Philonenko, Les interpolations chrétiennes des Testaments des Douze Patriarches et les manuscrits de Qoumrân (Paris, 1960). 25. See for example M. de Jonge , “Christian Influence in the Testaments of the Twelve Patriarchs”, Novum Testamentum 4 (1960) 182-235. 26. M. Stone , “Ideal Figures and Social Context: Priest and Sage in the Early Second Temple Age”, in M. Stone (ed.), Selected Studies in Pseudepigrapha and Apocrypha (Leiden, 1991) 259-270, at 262: “T12P is basically a Christian composition incorporating earlier Jewish sources and writings. This view is confirmed nicely in the case of the Testament of Levi, for Aramaic fragments and parts of a Greek translation of what seems to have been one of its sources have survived. That source stemmed in our view from the third pre-Christian century at least”. I appreciate that T.Levi has heavily relied on or borrowed from ALD, but that still does not justify the claim of T.Levi as a Christian composition.
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in 1960, Braun has challenged both views, which in turn led to extensive criticism from De Jonge. 27 Braun stated that one could not legitimately speak of Testament of Levi either being Jewish and interpolated, or Christian whilst using a variety of older Jewish sources. 28 Rather, he demonstrated how one should speak of a Jewish Grundschrift that was redacted by Christians. 29 Still, even Braun’s approach holds on to a presupposed dichotomy, yet his approach is to be favoured over the two alternatives. Whilst I would not immediately reject Braun’s approach, it still seems to me to be based on a basic assumption of an already clear distinction between Jewish and Christian identities. This debate between an alleged “old” versus “new” framework seems somehow misleading as the supposed institutionalisation of identities is still missing at the time of composition. Instead, one should look at the text standing on its own as expressing a rather particular, perhaps even individual interpretation of the loss of the Temple of Jerusalem and the new ways of understanding the task and standing of priests. Taken as such one could derive some insights into the complex reality of a society where boundaries between various religious groups were blurred at the very least and where freedom for creative developments was given. Thus, with Braun, I regard T.Levi as Jewish, but I do not immediately conclude that one can distinguish Christian redaction. De Jonge has criticised Braun’s approach stating that textual criticism is not possible for the T12P because of its complicated MSS tradition; but De Jonge allows for literary criticism: this enables one to look at the content and see what the text tells us, as it stands transmitted, without the need to immediately speculate about later redactions. There seems to exist 27. See M. de Jonge’s criticism of Braun, in M. de Jonge , “Once More: Christian Influence in the Testaments of the Twelve Patriarchs”, Novum Testamentum 5 (1962) 311-319. 28. See F. M. Braun, “Les Testaments des XII Patriarches et le problème de leur origine”, Revue Biblique 67 (1960) 516-549. 29. In line with Braun, see also J. Becker , Die Testamente der zwölf Patriarchen (Gütersloh, 1980); J. Becker , Untersuchungen zur Entstehungsgeschichte der Testamente der zwölf Patriarchen (Leiden, 1970); A. Hultgârd, L’Eschatologie des Testaments des Douze Patriarches (2 vols) (Uppsala, 1977, 1981); H. C. K ee , “The Testaments of the Twelve Patriarchs”, in J. H. Charlesworth (ed.), Old Testament Pseudepigrapha, Vol. 1 (New York, 1983) 775-828; J. H. Ulrichsen, Die Grundschrift der Testamente der Zwölf Patriarchen: Eine Untersuchung zu Umfang, Inhalt, und Eigenart der ursprünglichen Schrift (Stockholm, 1991); who all argue that we are dealing with a Jewish Grundschrift which was expanded in a Greek version, based on a Semitic original, and finally underwent a Christian redaction, see J. J. Collins , Apocalyptic Imagination (New York, 1984) 134. See also R. Kugler , From Patriarch to Priest: The Levi-Priestly Tradition from Aramaic Levi to Testament of Levi (Atlanta, Georgia, 1996), who tries to reconstruct the pre-Christian Greek document based on Aramaic Levi, which he then dates to the Hasmonean period and the reign of John Hyrcanus II, a hypothetical document, which he calls “Original T.Levi”.
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a scholarly consensus that Christian elements cannot be removed by textual criticism, 30 but even this consensus reveals the scholarly desire to see a dichotomy, which simply might not have existed yet. 31 Although Dixon Slingerland seems to have come up with innovative insights emphasising that one cannot ask if T12P is Jewish or Christian, but rather that if the documents are Jewish, “did they originate in the pre-Hasmonean, Hasmonean, or post-Hasmonean period? Is it the product of Qumran, or of the Pharisees, or of the Jewish Diaspora?” he too holds on to the “Christian” aspect, not by asking if T12P is Christian, but by trying to distinguish if it was “compiled, redacted, or only interpolated by Christian hands”. 32 The debate seems to be misleading and still very much dominated by this nineteenth-century approach of forcing things into boxes: one cannot approach the texts from an institutionalised framework, rather one has to look at the texts in their own right, composed by individual agents with a particular agenda, embodied in their complex socio-historical context. This implies a socio-anthropological background of lived experience where to us modern readers seemingly opposing views are presented in a text, which scholars thus explain as “interpolations”, that could in fact make sense or represent views the author and audience could identify themselves with.
II. Obstacle 2: The Troublesome Redaction- and Reception History of Hekhalot Rabbati From one text with obscure origins and a complex Redaktionsgeschichte we move to the next, where the situation might be even worse. Before I could, even if only cross-referentially, indicate some possible correlations (parallels, similarities) between T.Levi and fragments from “microforms” or textual units within the Hekhalot Rabbati macroform, I should a priori raise awareness for the troublesome nature of the text, its composition, and its transmission- and reception history. This section of my contribution does not serve to concisely cover the processes of literary formation of Hekhalot literature. Likewise, it goes well beyond the scope of the current study to establish and include a text-critical version of the text-units 30. So J. J. Collins , Apocalyptic Imagination (New York, 1984) 134 n. 69. Yet, see my comment above: in (critical) text editions of T.Levi editors seem to be of the opinion that the (Christian) interpolations can be bracketed out. 31. T.Levi is considered here as an individual text: I am not trying to make the same claim for the macroform that is T12P. See also the argument presented by M. Vinzent, “Effectless prophecy, hatred between shepherds and elders, and sacrifice to Beliar – The great despair of the Ascension of Isaiah”, elsewhere in this volume. 32. D. Slingerland, The Testaments of the Twelve Patriarchs: A Critical History of Research (Missoula, Montana, 1977).
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taken from Hekhalot Rabbati, although I am aware of the need for this in order to interpret the fragments adequately. 33 This, however, belongs to the realm of further research that I hope to continue beyond the preliminary stages of research of which the current contribution is a result. The first obstacle is the dating, which in scholarly disagreement is placed roughly between the second and the ninth centuries ce . Gershom Scholem has advocated, at least for some parts of the Hekhalot literature and particularly the apocalypses, for a dating as early as the second or third century ce . Peter Schäfer, on the other hand, favours a later date, not before the fifth century. Simon Mimouni follows Ithamar Gruenwald suggesting an imprecise estimate anywhere between the second and seventh centuries ce . 3 4 Various textual units or microforms might have existed before their incorporation into Hekhalot Rabbati, and could possibly be understood as texts that were read in a context of the aftermath of the Bar Kokhba revolt. One does well do remember that this “aftermath” could transcend the immediate framework of the historical events by quite some time and the need for responses seems to have been longitudinal. This leads to the second obstacle, namely its compilation and manuscript tradition. Already Don Karr acknowledges that attempts to group these writings under one label reveals scholarly desires to order something more than matches historical reality. 35 We should remind ourselves here that T.Levi, too, is part of a “collective body”: T12P. In addition, Peter Schäfer has argued more recently that not only taking the Hekhalot literature as some “collective entity” is a “wrong approach”, even to regard Hekhalot Rabbati, which he prefers to call a “macroform” rather than a “work”, is an artificial construction of later scribes and editors making use of “highly disparate and often even fragmentary pieces (microforms)” into one collective text divided – equally artificially – in chapters and subunits. 36 Not unlike T.Levi, here we are also dealing with a difficult Redaktionsgeschichte. James R. Davila takes Schäfer’s conclusions even a step further. Pierluigi Piovanelli, following Davila, has convincingly argued that the Hekhalot fragments analysed below cannot be considered as having originally belonged to the Hekhalot
33. So Davila, as quoted in R. S. Boustan, “The Study of Heikhalot Literature: Between Mystical Experience and Textual Artifact”, Currents in Biblical Research 6 (2007), 149. 34. S. C. M imouni, “Le ‘Judaïsme sacerdotal et synagogal’ en Palestine et en Diaspora entre le ii e et le vi e siècle : propositions pour un nouveau concept”, Comptes rendus de l ’Académie des inscriptions & belles lettres (2015), 136. 35. D. K arr , “Notes on the Study of Merkabah Mysticism and Hekhalot Literature in English, with an appendix on Jewish Magic”, 1982-1985, updated 19952015, Jewish Studies 52 (2017) 35*-112*. 36. P. Schäfer , The Origins of Jewish Mysticism (Tübingen, 2009) 244.
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Rabbati corpus. Rather, they only first appear in the Hekhalot Rabbati manuscripts in the eleventh century. 37 The third obstacle is the theme: what binds these texts together? It cannot be stressed enough that the fragments quoted in the analysis are taken from texts that in all likelihood might have circulated as individual bodies of text before their incorporation into Hekhalot Rabbati. Gershom Scholem, followed by Simon Mimouni, 38 considered the heavenly journey, yeridah, as the central theme of Hekhalot literature. The purpose of the yeridah is to perceive the appearance of God on his heavenly throne and to receive knowledge of the future of Israel, including messianic redemption. This aspect invites a comparison to T.Levi. However, Peter Schäfer challenges Scholem’s view and argues the magical element to be more important: although it is connected with the heavenly journey, it culminates more in liturgy than in vision, and furthermore the magical means can be employed to acquire knowledge of Torah more easily. 39 Yet, adopting the argument of the colloquium, and taking it a step further so as to justify the below analysis, I would propose that both the Hekhalot literature and T.Levi share the common theme of a search for new ways to access God in the absence of the Temple. This could hint, for both bodies of texts, at their possible origins or at least their redaction in priestly or Levite circles. Another theme pertains the dilemma of the reason of the atrocities. Literary evidence shows how it is mostly later reactions that reveal more criticism towards Rome (e.g. Story of the Ten Martyrs, piyyutim), which only seem to emerge around the fourth century ce at the earliest. 4 0 Yet, 37. P. P iovanelli, “L’ascension au ciel de Rabbi Neḥounya ben ha-Qanah en Hekhalot Rabbati 13-25 (§§ 198-259). Questions rédactionnelles et pratiques rituelles” in this volume. 38. S. C. M imouni, “Le ‘Judaïsme sacerdotal et synagogal’ en Palestine et en Diaspora entre le ii e et le vi e siècle : propositions pour un nouveau concept”, Comptes rendus de l ’Académie des inscriptions & belles lettres (2015) 136: “La forme dominante de ce mysticisme implique une ascension mystique du temple céleste”. 39. P. Schäfer , “Gerschom Scholem Reconsidered: The Aim and Purpose of Early Jewish Mysticism”, in P. Schäfer (ed.), Hekhalot-Studien (Tübingen, 1988) 277-295, esp. 281. 40. See for example S. C. M imouni, “Le ‘Judaïsme sacerdotal et synagogal’ en Palestine et en Diaspora entre le ii e et le vi e siècle : propositions pour un nouveau concept”, Comptes rendus de l ’Académie des inscriptions & belles lettres (2015) 135, who indicates that particularly in poetic compositions in the fifth and sixth centuries one observes an increase of hostile sentiments towards the Roman Empire. Compare S. Schwartz , “Political, Social, and Economic Life in the Land of Israel 66-235”, in S. K atz (ed.), Cambridge History of Judaism, vol. 4 (Cambridge, 2006) 29, who suggests that “many Jews [of literate elites and sub-elites] responded [to the Destruction] by loosening their attachment to Judaism and heightening their participation in the Roman system”.
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even if these texts were not composed in direct or contemporary response to the atrocities of 70-135 ce , their rhetoric seems to indicate that such questions were still being posed, which would make particular sense in a priestly environment. Therefore, despite a possible late dating of these fragments, it would not necessarily exclude the possibility of a comparison with T.Levi because, so it would seem, the questions addressed have a trans-temporal character. Questions of identity, the need to re-establish relations with the divine, and the question who has the right to claim authority in groups (now that Temple has gone, Jerusalem is lost, one is faced with Diaspora, dispersion, and competing groups), would be, and remain, important for a very long time after the immediate historical events of the destruction of the Temple and the defeat of the Revolt. As a matter of fact, for some they still are important today in the continued absence of the Temple. Before moving on to the analysis, it is necessary to introduce briefly the selected textual fragments individually. It has been argued that the Apocalypses only found their way into one of the Hekhalot Rabbati manuscripts in order to make up for its lack of Messiah-oriented material. This is presumably why they are only found incorporated in MS New York, where three apocalyptic accounts have been added which resemble classical apocalypses rather than Merkavah mystical texts. 41 What is interesting about the Apocalypses however is that angels are not merely the counterparts of royal dignitaries and Temple priests; in fact, they are made to replace the earthly priesthood as an act of polemical attitude towards it. 42 This does not necessarily have to indicate rabbinic criticism of the priesthood. Apocalyptic literature could, despite Schäfer’s observations that its messianic typology is traditionally rabbinic, in fact be seen as the product of Levite or priestly circles and as such reveals an inner-priestly struggle for hegemony and authority. As a result, “the heavenly temple and throneroom together with the hosts of ministering angels became the (apocalyptic) antidote for the moral illnesses of the Jerusalemite priesthood. Furthermore, while the priests in Jerusalem were occupied with politics of the here and now, the apocalyptic visionaries showed their concern with the events of the future, or with redemption in eschatological times. This is the point at which mysticism and eschatology meet apocalypticism”. 43 The Ascent accounts on the other hand offer descriptions of heavenly ascent and were part and parcel of religious literature in Late Antiquity where they were used in a variety of forms and for a variety of purposes by
41. P. Schäfer , The Origins of Jewish Mysticism (Tübingen, 2009) 257. 42. I. Gruenwald, Apocalyptic and Merkavah Mysticism (Leiden, 1980) 130. 43. I. Gruenwald, From Apocalypticism to Gnosticism: Studies in Apocalypticism, Merkavah Mysticism and Gnosticism (Bern, 1988) 139.
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different people in different cultures. 4 4 The ascent of the Merkavah mystic through the hekhalot imitates or re-enacts “the high priest’s entering of the Temple, from the vestibule through the nave to the Holy of Holies”. 45 The Sar ha-Torah speculation is the secret technique of the study of the Law and its memorisation. 4 6 Lastly, the Story of the Ten Martyrs could be regarded, as Ra’anan Boustan has proposed, as a “unified cycle of rabbinic martyr stories [which] developed out of earlier rabbinic and pararabbinic traditions between the fifth and seventh centuries in Byzantine Palestine”. 47 A proposition of the earliest date of composition situated in the fifth century does not necessarily make this narrative incomparable to T.Levi nor does it render it unsuitable to assess in light of possible post-Bar Kokhba responses. The narrative is concerned with theodicy and explains the martyrdom as divine retribution for the original national sin committed in Genesis by means of the sale of Joseph. 48 According to Boustan, “the work […] integrates rabbinic, liturgical, and apocalyptic materials and forms in a highly distinctive fashion, [and] is in fact rather representative of the Jewish literary culture of Byzantine Palestine”. 49 Furthermore, the narrative projects the salvific effects of martyrdom forward into a mythic future whereby the link between this future redemption and the divinely mandated afflictions of the past is embodied in the symbol of blood. The blood of the martyrs stands as God’s pledge to shed the blood of Israel’s enemies in retribution for the blood of Israel that they have spilled. 50 Cen-
44. I. Gruenwald, Apocalyptic and Merkavah Mysticism (Leiden, 1980) 128. 45. P. Schäfer , The Origins of Jewish Mysticism (Tübingen, 2009) 270. 46. I. Gruenwald, Apocalyptic and Merkavah Mysticism (Leiden, 1980) 150. 47. R. S. Boustan, “The Contested Reception of The Story of the Ten Martyrs”, in R. S. Boustan et al. (ed.), Envisioning Judaism. Studies in Honor of Peter Schäfer on the Occasion of his Seventieth Birthday, Vol. i (Tübingen, 2013) 370. Boustan further points at the narrative’s apparent authoritative significance as it was used in early medieval Judaism in the liturgy on the Day of Atonement, see 371. 48. “The connection between the sale of Joseph and rabbinic martyrological traditions, which played such a generative role in the literary formation of The Story of the Ten Martyrs, does not appear anywhere in classical rabbinic literature from the third and fourth centuries. Nor is it attested in the early aggadic midrashim from fifth- and sixth-century Palestine”. R. S. Boustan, “The Contested Reception of The Story of the Ten Martyrs”, in R. S. Boustan et al. (ed.), Envisioning Judaism. Studies in Honor of Peter Schäfer on the Occasion of his Seventieth Birthday, Vol. i (Tübingen, 2013) 373-374. 49. R. S. Boustan, “The Contested Reception of The Story of the Ten Martyrs”, in R. S. Boustan et al. (ed.), Envisioning Judaism. Studies in Honor of Peter Schäfer on the Occasion of his Seventieth Birthday, Vol. i (Tübingen, 2013) 373. 50. R. S. Boustan, “The Contested Reception of The Story of the Ten Martyrs”, in R. S. Boustan et al. (ed.), Envisioning Judaism. Studies in Honor of Peter Schäfer on the Occasion of his Seventieth Birthday, Vol. i (Tübingen, 2013) 373.
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tral to the narrative’s logic is the heavenly trial scene. 51 In the narrative, “God swears to bring down eschatological ruin on Rome as retribution for its role (albeit divinely appointed!) carrying out the executions of the ten rabbinic martyrs; indeed, the redemption of Israel is here made conditional upon the Roman persecution and, conversely, the punishment of Rome upon the suffering of the martyrs”. 52 Although it follows from the above that it is difficult if not impossible to maintain a classification of the apocalypses, Sar ha-Torah, and Ten Martyrs as belonging to Hekhalot literature, and despite the problems with regard to the Redaktionsgeschichte, I believe it still legitimate to compare T.Levi with the above mentioned textual fragments. Accepting Piovanelli’s and Davila’s criticism, these segments should however not be categorised under Schäfer’s Hekhalot Rabbati macroform. 53 My proposed comparison will show the quintessentially Jewish features of T.Levi, yet it will also reveal its criticism towards the priesthood and its combina51. R. S. Boustan, “The Contested Reception of The Story of the Ten Martyrs”, in R. S. Boustan et al. (ed.), Envisioning Judaism. Studies in Honor of Peter Schäfer on the Occasion of his Seventieth Birthday, Vol. i (Tübingen, 2013) 385, see also R. S. Boustan, From Martyr to Mystic: Rabbinic Martyrology and the Making of Merkavah Mysticism (Tübingen, 2005) appendix B; see also Ten Martyrs, I-X.15.20-28 and 18.1-3 (Reeg, Geschichte, 30*-33* and 38*-39*). Boustan continues to illustrate the scene as follows: “the heavenly trial scene is narrated by the angel Metatron to Rabbi Ishmael, who has ascended to heaven to learn whether it is in fact God’s will that the rabbinic martyrs embrace their fate. In this original context, the Principle of Justice (middat ha-din) reminds God that he has failed to punish Israel for the sale of Joseph by his brothers. The allegation made by the Principle of Justice mirrors the accusation that had been lodged against the ten sages by the Roman emperor on earth. Both the emperor below and the Principle of Justice above cite the scriptural authority of Exodus 21:16 (He who kidnaps a man – whether he has sold him or is still holding him – shall be put to death) to support their claim that the kidnapping of Joseph constitutes a capital crime. Israel’s guardian angel, Michael, is cast in the role of defense attorney. Michael does not, however, mount a counter-argument to this verdict, but remains silent in the face of the prosecutor’s charges against the founding fathers of the Jewish people and their latter-day counterparts”. Boustan, in a footnote, points to a parallel trial scene in the medieval Hebrew apocalypse Pirqe Mashiach par. 1 (where Michael likewise fails to counter Sama’el’s accusations against the Jewish people and is castigated for his silence by God). 52. R. S. Boustan, “The Contested Reception of The Story of the Ten Martyrs”, in R. S. Boustan et al. (ed.), Envisioning Judaism. Studies in Honor of Peter Schäfer on the Occasion of his Seventieth Birthday, Vol. i (Tübingen, 2013) 388-389, see also R. S. Boustan, From Martyr to Mystic: Rabbinic Martyrology and the Making of Merkavah Mysticism (Tübingen, 2005) 187-197. 53. This leaves open the question why a medieval redactor added the texts to the Hekhalot Rabbati macroform, yet this offers scope for further research. According to Piovanelli, we cannot determine when these fragments were composed; therefore, they could well have been written as late as the eleventh century, when an editor added them subsequently to the Hekhalot Rabbati manuscript.
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tion with apocalyptic and spiritual ideas that would later become associated with typically Christian notions. Despite those later associations, these apocalyptic and more particularly spiritual ideas – that is visionary, heavenly ascent, contact with the divine – are what allow the comparison. This visionary element, as Rajak has argued, “made continuity possible” 54 after 70 ce; and this is exactly what is being offered in the texts of T.Levi, Hekhalot literature, and the individual textual units. It is this plausibility of individual existence of the fragments separate from the later “macroform” that has allowed me to make this selection and treat the fragments as stand-alone texts; that is, existing in their own right as apocalyptic and mystical literature, and because of their respective themes most suitable for a comparison with T.Levi.
III. Textual analysis As already indicated above, for the comparison of the narratives I shall limit myself to the Apocalypses – in particular the David apocalypse (122126) 55 –, the Ascent Accounts, segments from the Sar ha-Torah text, and the Story of the Ten Martyrs. 56 The main interest however will be to compare what happens to the priests in the respective bodies of texts. The obstacles as outlined above notwithstanding, these textual units reveal some interesting themes that might correlate, but the analysis shall mainly deal with the themes as they appear in T.Levi, with subsequent cross-references to the above mentioned texts as they have come to be included in Hekhalot Rabbati. The analysis focuses on three thematic threads that could be observed in the texts, namely 1) “reactions to the Destruction and the Defeat”, 2) forms of sacerdotalisation and “replacing” priests, and 3) the centrality of Torah and/or Temple. 54. T. R ajak , “Investment in/of the Jerusalem Priesthood in the Second Temple and Beyond”, in B. Dignas – R. Parker – G. G. Stroumsa (ed.), Priests and Prophets among Pagans, Jews, and Christians (Leuven, 2013) 29-51, esp. 49-50. 55. See Schäfer’s observations about the three apocalypses only appearing in MS New York, that they had been transmitted independently also, and that therefore they could be regarded as later editions by an editor who deemed HR as macroform too radical, see P. Schäfer , The Origins of Jewish Mysticism (Tübingen, 2009) 257-268. However, the apocalypses are omitted from Davila’s translation of Hekhalot Rabbati, see J. Davila, Hekhalot Literature in Translation (Leiden, 2013) 77. Whilst acknowledging their individual character and their presumably not-belonging to Hekhalot Rabbati, for coherence sake I have nevertheless used the translations as provided by Peter Schäfer, and as such the references correspond to the paragraph numbers from Schäfer’s edition. This goes for all references to the textual units used in comparison to T.Levi. 56. See G. R eeg (ed.), Die Geschichte von den Zehn Märtyrern (Tübingen, 1985), for a synoptic edition of the narrative with a German translation.
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1. Reactions to Destruction and Defeat First, we should look at how we can read the selected texts as reactions to the destruction of the Jerusalem Temple and the defeat of the Bar Kokhba Revolt. Bearing in mind that Hekhalot Rabbati appears to neglect the destruction of the Temple totally, one might expect not to find any reference to the destruction in the above-mentioned textual fragments either. However, there are some fragments in the microform of the Apocalypses that may be read as references to the destruction. In T.Levi I would argue there are very clear references too; both with respect to the destruction and the defeat. 57 The responses with regard to the question of who is to blame for this ill fate also differ, particularly if one considers the Story of the Ten Martyrs. 58 When we read the apocalyptic narratives in light of the elaborate idealised rites in the heavenly Temple scenes, which characterise the Hekhalot Rabbati literature, they could be interpreted as referring to the devastation that has happened. The impression one gets that they are swiftly being skipped over adds to what Rachel Elior has already indicated, namely the refusal to accept the harsh reality; furthermore, the emphasis on the heavenly rites shows that the solution lies in that realm. The situation in T.Levi seems a little different, where by means of repetition much more emphasis is put on what has happened to the Temple, to Jerusalem, and to the people of Israel. Moreover, it emphasises how the priests – or the Levites, since the narrator claims to be addressing his sons – are the ones who should be held responsible. Levi’s solution is messianic yet remains within the priesthood by means of a renewal thereof. A look at the texts will determine if one could detect any parallels: The holy shrine shall be a ruin; and the temple, a fire burning; […] – And the pure altar, polluted; and the table which was set before the Lord, taken as spoil by the enemy; – And Jerusalem shall be desolation; and the land of Israel trembling. [HR 123, first apocalypse]
The Temple was destroyed by fire in 70 ce; however, the mention of the pollution of the altar seems to indicate the Maccabean revolt instead. 57. Yet, critically, see R. Elior , “Early Forms of Jewish Mysticism”, in S. K atz (ed.), Cambridge History of Judaism, vol. 4 (Cambridge, 2006) 755, who points at criticism of the earthly Temple service and priestly conduct as reasons for the visions of a celestial Temple in for example Qumran or prophetic literature. Elior, 756, note 19, also refers to J. M aier , Vom Kultus zur Gnosis, (Salzburg, 1964) whom, she writes, has argued “that priestly traditions about heavenly counterparts of the terrestrial Temple are the source of apocalyptic literature dealing with the divine throne and chariot”. Similar, see J. K lawans , Purity, Sacrifice, and the Temple. Symbolism and Supersessionism in the Study of Ancient Judaism (Oxford, 2006) 145-174. 58. This textual unit is found in paragraphs (107-121) in Schäfer’s edition, but is absent in Davila’s Hekhalot in Translation.
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Yet, it would also make sense if the text were read in a post-Bar Kokhba context when the Temple site was replaced by a statue and altar to Jupiter: the site was “taken as spoil by the enemy”. The expulsion from Jerusalem left it in desolation, and it left “trembling” the land of Israel, that had been renamed and was now ruled by the Romans. And there shall be for them no saviour, no priest, neither teacher, and no prophet and no king and no leader and no prince until they turn and return to Me in prayer and in supplications for mercy. And yet, if they seek My Face, I shall be found of them, and I shall bring them back to their land. [HR 134; second apocalypse]
A possible interpretation of the claims that there be “no saviour” and “no messiah” is that Simon Bar Kokhba who was hailed as messiah, failed. Even for Christ-typologists this fragment could sound appealing since their saviour was slain. Now that the Temple had been lost, what role is there left for the priests? Who can claim the authority to teach: the priests or the rabbis? King and prince again could refer to the earlier days of the Maccabees and Hasmoneans, yet it could also indicate a wish on behalf of the author that the Jewish people win back their political sovereignty. Furthermore, the fragment could read as a reference to the expulsion and Diaspora state until “they seek My Face”. This latter indicates that the author still considers the covenant as valid: repentance is still possible and God will return to protect Israel. A possible parallel here is Josephus, “who regarded the second Destruction as the conceptual equivalent of the first, and followed Jeremiah and the Deuteronomic Historian in seeing it as a confirmation of the validity of the covenant, and not as marking the covenant’s abrogation”. 59 Said Rabbi Ishmael: I reckoned the reckoning: For Babylon seventy years and for Media fifty and two and for Greece and hundred and eighty and for Edom accordingly I found the years to the destruction of the second temple to complete seven hundred years. And I sought in books which Daniel had closed up and sealed, and I found written in them: ―Seven hundred years were determined and decreed upon Thy people and upon Thy holy city and at their fulfilment shall the transgressors cease and the sinners shall come to an end and the iniquity of a small people shall be atoned and He that is righteous forever shall bring the Messiah who has remained hidden and sealed [from the sight] of all the prophets and he shall anoint the Holy of Holies. (HR 136; second apocalypse)
Would it take another seven hundred years for the second temple to be rebuilt and for the Messiah to come? The reference to Daniel will return 59. S. Schwartz , “Political, Social, and Economic Life in the Land of Israel 66-235”, in S. K atz (ed.), Cambridge History of Judaism, vol. 4 (Cambridge, 2006) 31. See also S. Schwartz , Josephus and Judaean Politics (Leiden, 1990) 175-200.
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below, but it is important to contextualise this reference. Robert Goldberg postulated that “Jews […] facing the loss of their capital and its Temple, sought to apply [the teachings of the author of Daniel] to the events of their own time. If the destruction had been their own fault, then it was critically important to identify the sin for which they had been punished and to find ways of atoning for that offense […] Perhaps it was better to adopt the solution of the book of Daniel and abandon the quest for understanding”. 60 Similarly, Josephus presented the events as reiteration of the ancient prophetic message presenting the Romans as the new Babylonians sent by God. This seems also the Leitmotif in the Story of the Ten Martyrs. In this light, it may very well be that the Greek T.Levi originates in this same context, rather than that it is a text from the Second Temple period bce . Totrosi’ai the Lord God of Israel desireth and awaitethIn such measure as He awaited for the redemption and for the season of salvation Which is laid up for Israel for a day of vengeance After the destruction of the last temple- (HR 218)
This fragment hints at the idea of redemption and season of salvation, which will come “after the destruction of the last temple”, that is the second Temple, and is to be situated in the heavenly liturgy. Following Schäfer, the message that the Merkavah mystic will bring is salvation, what he communicates to his fellow Jews is redemption: the liturgical exchange between God and Israel is the locus for redemption. 61 Whereas in T.Levi Levi becomes such a witness, here it is the Merkavah mystic who “becomes the harbinger of redemption if not the new Messiah himself, who brings the new Gospel of redemption to the people of Israel”. 62 […] For you did not act rightly, since you opposed Me so that I became angry with you and I stood and I carried out the decreed annihilation (Isa. 10:23; 28:22; Dan. 9:27) against My city and against My House and against My sons. (HR 283)
Here we have a reference to the destruction of the Temple and possibly the defeat and subsequent expulsion from Jerusalem, with Jews being taken captive as prisoners of war and sold as slaves, if they did not fall in battle. “Annihilation” of the city may be understood as reference to 60. R. Goldberg, “The Destruction of the Jerusalem Temple: its meaning and its consequences”, in S. K atz (ed.), Cambridge History of Judaism, vol. 4 (Cambridge, 2006) 197. 61. P. Schäfer , The Origins of Jewish Mysticism (Tübingen, 2009) 274. 62. P. Schäfer , The Origins of Jewish Mysticism (Tübingen, 2009) 281.
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the expulsion from Jerusalem, which was subsequently “wiped clean”. In T.Levi we find similar references: And now I have learnt that for seventy weeks ye shall go astray, and profane the priesthood, and pollute the sacrifices […]. (TL 16:1-2) 63
The fragment presents a criticism of the priestly class polluting the sacrifices, not the Gentiles: the priests “profane the priesthood” and will “go astray” for “seventy weeks”, a reference to Dan. 9:24, although here it rather reads as if the author overturns the statement in Daniel: in Daniel, the seventy weeks “were decreed upon Thy people and upon Thy holy city” to finish the transgression. In T.Levi, it seems rather that the sin and transgression will take up seventy weeks, and it does not hint at a cessation or ultimatum. And behold I am clear from your ungodliness and transgression, which ye shall commit in the end of the ages against the Saviour of the world, Christ, acting godlessly, deceiving Israel, and stirring up against it great evils from the Lord. And ye shall deal lawlessly together with Israel, so He shall not bear with Jerusalem because of your wickedness; but the veil of the temple shall be rent […] and ye shall be scattered as captives among the Gentiles. (TL 10:2-4)
The author is clearly blaming some, probably Levite, priests here for not keeping Torah/the Law; it is because of their sins and faults that Jerusalem has fallen. There is a clear reference to the post-135 ce ban from Jerusalem and the capture of Jews who were sold as slaves after the defeat of the Revolt. The author also clears himself from any “ungodliness”: he does not share the responsibility his sons will inflict or have inflicted. The “saviour of the world, Christ” refers to the messianic character of the text and is not uncommon for strands of Judaism. 6 4 Therefore the temple […] shall be laid waste through your uncleanness, and ye shall be captives throughout all nations. (TL 15:1-2)
Again, the author blames some Jews whom he regards as descendants of Levi, Levites, thus those connected to priests, for impure behaviour; 63. The parallel can be found here: “[…] Seventy weeks are decreed upon Thy people and upon Thy holy city to finish the transgression and to make an end of sins […]”. [HR par 137, quote from Dan. 9:24]. 64. See I. Gruenwald, Messiah and Christos: Studies in the Jewish Origins of Christianity (Tübingen, 1992); see also M. Himmelfarb , “Heavenly Ascent and the Relationship of the Apocalypses and the ‘Hekhalot’ Literature”, Hebrew Union College Annual 59 (1988) 73-100. Furthermore, it should be mentioned that “Christ” or “christos” is Greek translation of the Hebrew “messiah”; it is only later manifested Christian claims that have made modern readers see this as a reference to Jesus Christ, but this is not specified in the text/mss so we not draw such conclusions too hastily.
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and one encounters a repetition of an allusion to the post-135 ce situation where the Jews were banned from Jerusalem and Judea. Now, whereas in T.Levi the blame for the misery is put to the transgressing priests, and later on in the text we can read the possibility of an outreach to the Gentiles, in the Story of the Ten Martyrs the blaming finger initially seems to be pointed in the direction of the Romans: And thus He wrote against the day of vengeance which is destined and laid up for the wicked city, Rome. [HR 110] As for the design which the wicked city Rome designed against the mighty of Israel to destroy them, Zoharariel the Lord God of Israel has agreed, but even the mediation of the heart which Rome mediated against his children is weighty to them as if they carried it out. [HR 121]
Yet, as Boustan has shown, this wickedness of Rome was divinely appointed. It would lead us too far to enter into the discussion of the theodicy problem in the martyrology, but two aspects are worth mentioning. First, the narrative connects the martyrdom of the Tannayim back to the sale of Joseph by his brothers. 65 Second, the narrative reveals a shift in thinking about, and conceptualising, the atrocities as the role and responsibility of Rome is openly contemplated. Yet, it takes away the pride of Rome’s victory and states that it was a mere pretending: they were meant to think that they carried it out, yet the real power was with the God of Israel. At the same time it shows a consistency, namely that reasons, explanations, responsibility is always sought within Israel (and its relationship with God), and never externally. The same goes for T.Levi, where as we will see Gentiles will be introduced, yet the prime concern is still the relationship of Israel with God, and the responsibility for historical events are to be situated and explained internally.
2. Replacing Priests and Forms of Sacerdotalisation Part of the responses to the destruction of the Temple and the defeat of the Revolt was that, particularly with the loss of the Temple and thus the centre of religious worship, the loss of Jerusalem, the holy city, and the concept of priesthood had to be rethought, revised, redefined. This invites us to look at how T.Levi and the other selected textual fragments approach these issues. Evidence for this can be found for in the Ascent accounts, where we observe a transposition of the priestly office and rites to the heavenly realm where there takes place a liturgy very much based – if not by and large identical – to the liturgy performed in the earthly
65. Note that here too there is a parallel with T.Levi as part of the Testaments of the Twelve Patriarchs: Joseph’s brothers.
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Temple. The angels perform these rites and the Merkavah mystic partakes; as such we could speak of a sacerdotalisation of the Merkavah mystic. When R. Nehunia ben HaQana saw that wicked Rome was holding a council against the eminent ones of Israel in order to destroy them, he stood and revealed a secret counsel of eternity; the character that resembles the one who is fit to gaze on the King and the throne […] everyone who is innocent and void of idolatry, lewdness, bloodshed, slander, a vain oath, profanation of the Name, an insolent demeanour, and an unfounded grudge. And he keeps every positive and negative commandment. [HR 198-199]
For this segment, we could speak of a democratisation of access to the divine: whereas before, when the Temple was still standing, this was reserved for priests only, now it is, in theory, open to anyone who meets the requirements or qualifications. 66 However, in the same text we read that it was a “secret counsel” that was being called, which would rather recall associations of secrecy, exclusivity, certainly not a “democratisation”. As for T.Levi we could look at the second vision of Levi where he is officiated as priest, as well as the explanation of the three offices of priesthood and ultimately the failure of the priesthood and the announcement of a new priest. Thou shalt stand near the Lord, and shalt be His minister, and shalt declare His mysteries to men, and shall proclaim concerning Him that shall redeem Israel (TL 2.10)
This passage narrates the divine appointment of Levi, who shall “stand near the Lord”: stand, not “gaze on the king and the throne” but rather this invokes a sentiment of amicable vicinity and perhaps even of looking in the same direction. Yet then, in chapter eight, we are presented with an account of Levi’s second vision, which could be interpreted as a process of sacerdotalisation with the anointment, purification, etc.: And I saw seven men in white raiment saying unto me: Arise, put on the robe of the priesthood, and the crown of righteousness, and the breastplate of understanding, and the garment of truth, and the plate of faith, and the turban of the head, and the ephod of prophecy. […] From henceforth become a priest of the Lord, thou and thy seed for ever. And the first anointed me with holy oil, and gave to me the staff of judgment. The second washed me with pure water, and fed me with bread and wine (even) the most holy things, and clad me with a holy and glorious robe. The third clothed me with a linen vestment like an ephod. The fourth put round me 66. Compare M. Swartz , “The Dead Sea Scrolls and Later Jewish Magic and Mysticism”, Dead Sea Discoveries 8 (2001) 189, who presents a suggestion along similar lines.
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a girdle like unto purple. The fifth gave me a branch of rich olive. The sixth placed a crown on my head. The seventh placed on my head a diadem of priesthood, and filled my hands with incense, that I might serve as a priest to the Lord God. (TL 8:1-11)
The above passage from T.Levi narrates the ideals of priesthood, which, and this is important, remains Levite, and even more so “thou and thy seed” implies that the priesthood remains hereditary. As we can see, Levi portrays a vivid image of the priestly garment and the rites of purification. 67 The latter are being represented as stages in the Ascent accounts also. Furthermore, there is the mentioning of a “crown” which could be an indication of the royal status of the priest, and as such hint at a possible re-introduction of the “priest-king” or princes as they had been known from the Hasmonean period. 68 However, with regard to redefinition more importantly is the revelation of three offices of the Levite priesthood: the first is the “great”, the second is “in the priesthood” (maybe kohenim), and the third is a “new name”: And the third shall be called by a new name, because a king shall arise in Judah, and shall establish a new priesthood, after the fashion of the Gentiles [to all the Gentiles]. And His presence is beloved, as a prophet of the Most High, of the seed of Abraham our father. (TL 8:14-15)
It seems to refer to a pagan priest, yet it is part of the three offices of the Levites, so it is Jewish. We seem to have an integration of pagan priest67. According to Tessa Rajak, this fragment underlines the “clearly Jewish” character of T.Levi, in spite of later Christian overlay; indeed, at times it closely follows the so-called Aramaic Levi Document of which we have fragments from Qumran (4Q213-4; 4Q537; 4Q541), and also from the Cairo Genizah. Furthermore, she points at parallels in Ezekiel’s vision of ideal priests and the reconstructed ideal Temple, as well as the Merkavah (Ezek 1-10; 40-48), see T. R ajak , “Investment in/ of the Jerusalem Priesthood in the Second Temple and Beyond”, in B. Dignas – R. Parker – G. G. Stroumsa (ed.), Priests and Prophets among Pagans, Jews, and Christians (Leuven, 2013) 41-43. 68. R. Kugler, comparing T.Levi and Aramaic Levi, suggests that “one of its principal concerns was to legitimate the joint possession of military and sacerdotal power. Hence it is possible to imagine that it was composed during the period of Hasmonean rule as a defense of their simultaneous occupation of the offices of prince and priest”, see R. Kugler , From Patriarch to Priest: The Levi-Priestly Tradition from Aramaic Levi to Testament of Levi (Atlanta, Georgia, 1996) 224. Yet, it might be read just as well as a desire of its restoration in a time where the priestly class seeks to redefine and repurpose its identity and existence, or, even more broadly, a desire to regain political sovereignty. For an analysis of this loss of political sovereignty, see N. Sharon, “Roman Conquest and the Loss of Sovereignty”, in D. Schwartz – Z. Weiss (ed.), Was 70 ce a Watershed in Jewish History? On Jews and Judaism before and after the Destruction of the Second Temple (Leiden, 2012) 415-445.
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hood into the Jewish Levite tradition. This new priesthood shall be established by a “king [who] shall arise in Judah”. Instead of the possibility that this could refer to the installation or restoration of the Hasmonean Kingdom, readers could also consider it as a reference to the Messiah who creates a Gentile priesthood for the Gentiles. Regardless, these Gentile priests are still a form of Levites. The passage recalls a link with Paul (“Gentile to the Gentiles”), but not as Paul has understood himself: he does not call himself a priest, except for Romans 15 where priestly typology is used for Paul. This chapter however is not present in Marcion’s version of Paul and seems to have been added to Romans around the same time as my proposed date of redaction for T.Levi, that is: post-Marcion. Again, this indicates that the text could possibly be understood as a post-135 redefinition-attempt that seeks to demonstrate these parallels. Chapter 17 narrates the decline of the (Levite) priesthood, and chapter 18 illustrates the announcement of the new priest, since the priesthood has failed. It will therefore now be concentrated in one new priest: chapter 18 reads as a messianic vision – and fits within the Jewish literary genre. 69 With the arrival of the new priest Levi becomes a mediator and revelatory (see chapter 19), he, and with him all, become witnesses; so here we have a “democratisation” of the Levite priesthood and it is no longer based on priestly family genealogy. We could compare this to the role of the Merkavah mystic who becomes mediator between the people (Israel, on earth) and the divine realm of the seventh heaven (God and the angels, princes), particularly through participation in the heavenly liturgy. Yet, anyone who “lives according to the Law and keeps the commandments, both positive and negative”, and any man “who has a ladder in his house” to ascend and descend from, could become a Merkavah mystic and therefore a mediator. 70 So here too, we observe some form of “democratisation”, and, if I may, sacerdotalisation of a potential multitude. 69. As L. H. Feldman, Jew and Gentile in the Ancient World. Attitudes and Interactions from Alexander to Justinian (Princeton, New Jersey, 1993) 294 states, these ideas of conversion of the Gentiles as divinely appointed, and concern for universal enlightenment hint at the concern to spread the teachings of Torah to all non-Jews. A parallel can be found in T.Joseph 4:4-5, and the idea of universality in T.Levi could be seen as part of a wider “tradition” of early Jewish proselytism. See also M. Goodman, “Jews proselytising in the first century”, in M. Goodman (ed.), Judaism in the Roman World (Leiden, 2006) 91-116. As such, it renders hardly tenable to consider this a Christian addition. Yet, its continued incorporation indicates that it could have been read, or could (still) have made sense in the context of this post-Marcion debate, too. 70. As Peter Schäfer , The Origins of Jewish Mysticism (Tübingen, 2009) 257, has pointed out, “the Hekahlot literature remains conspicuously silent about the Messiah: the mystic has rendered him superfluous”.
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And after their punishment shall have come from the Lord, the priesthood shall fail. Then shall the Lord raise up a new priest. And to him all the words of the Lord shall be revealed; and he shall execute a righteous judgement upon the earth for a multitude of days. And his star shall arise in heaven as of a king. Lighting up the light of knowledge as the sun the day, and he shall be magnified in the world […] The heavens shall be opened, And from the temple of glory shall come upon him sanctification, with the Father’s voice as from Abraham to Isaac. And the glory of the Most High shall be uttered over him, and the spirit of understanding and sanctification shall rest upon him (TL 18:1-3; 6-7)
Chapter 18 follows the narration of the decline of the (Levite) priesthood illustrated in chapter 17 and conveys the announcement of a new priest, since the priesthood has failed. It will therefore now be concentrated in one new priest, but importantly one who will “lighten the knowledge”, which means the Law will not be abolished but made (even) brighter. It reads as a messianic vision not uncommon in Jewish literature. With this arrival of the new priest Levi becomes a mediator and revelator (see chapter 19): he becomes a witness, and with him, all become witnesses, but this time not for priestly family genealogy.
3. Centrality of Torah and/or Temple? An important element in the debate to determine whether a text is Jewish or Christian is the role granted to Torah. Unmistakably Christian texts will have Torah, the so-called ‘old Law’, replaced by the “new Law”. This is not the case in T.Levi. It is therefore interesting to see if we could determine how the Sar ha-Torah text corresponds with T.Levi. Thereupon did Rabbi Nehunya ben Hakkana, my master, take me from my father’s house and bring me into the chamber of the Temple in which the Sanhedrin met and cause me to swear by a great seal and by a great oath which appertained to Zebhoriel the Lord God of Israel who is Metatron the Lord God of Israel, God of the heavens and God of the earth, God of Gods, God of the sea and God of the land. And he revealed the secret of the Law, which was in his possession. And at once my heart was {as} enlightened as the gates of the East and mine eyes beheld the depths and the ways of the Law and thenceforth I forgot nothing. All things which mine ears heard from the mouth of my master and from the mouth of scripture and from the ways of the Law which I had truly practiced, thenceforth I forgot none of them. (HR 279)
Although it has been argued that the Sar ha-Torah account seems rabbinical and reads as a contradiction to the focus on priestly rites in the heavenly realm in other microforms, it is important to state that in the prelude to the Sar ha-Torah section there is an encounter between
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R. Nehunya ben Hakkana with R. Ishmael which takes place in the Temple, and where the secret of the Law is revealed to R. Ishmael: a combination of Torah and Temple. A little further in the section we can read how Israel receives full understanding of Torah: You no longer learn with labour and not with toil, but rather by means of the name of this seal and by the invocation of the crown. (HR 289) Why are you falling down and are thrown on your faces? Stand and sit before My throne in the same way you sit in the academy. And take hold of the crown and receive the seal and learn the order of this Prince of Torah: how you do it, how you inquire about it, how you make use of it, how they raise up the paths of your heart, how your hearts have a vision of Torah. (HR 298)
As for T.Levi, chapter 13 reflects the central importance of Torah, as we can read from the following fragments: And now my children, I command you: Fear the Lord your God with your whole heart, And walk in simplicity according to all His law. And do ye also teach your children letters, that they may have understanding all their life, reading unceasingly the law of God. For every one that knew the law of the Lord shall be honoured. (TL 13:1-3) Get wisdom in the fear of God with diligence; for though there be a leading into captivity, and cities and lands be destroyed, and gold and silver and every possession perish, the wisdom of the wise nought can take away. (TL 13:7) Whosoever teaches noble things and does them, shall be enthroned with kings, as was also Joseph my brother. (TL 13:9)
Although the priesthood may be renewed and revised, the Law clearly is not: it retains its importance, prominence, centrality, and moreover there is not a choice between Torah and the new priest; this is not the choice between darkness and light, rather: to choose light is (still) to choose Torah. This is also how the author concludes the text in chapter 19: the choice is between the Law of the Lord and the works of Beliar, and this is the choice between light (the Law) and darkness (Beliar). 71 Both in T.Levi 71. However, Marinus de Jonge points at a possible parallel, particularly because of the author’s switch to the first person plural, with Justin’s Dialogue with Trypho (116:3). In this text, Justin “calls the Christian community ‘the true high priestly race of God’ […] The Christians responsible for the present T.Levi saw themselves as the true servants of the true high priest announced by Levi in chapter 18”, see “The Testament of Levi and ‘Aramaic Levi’”, in M. de Jonge , Jewish eschatology, early Christian Christology and the Testaments of the twelve Patriarchs: Collected Essays of Marinus de Jonge (Leiden 1991) 262. However, there is no indication that the author when speaking of the Law means anything else than Torah: he still
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and in Sar ha-Torah the Torah is metaphorically presented as “light” and those who study Torah and receive its knowledge are “enlightened”. More importantly so, even in the darkest of times and under the greatest of threats (destruction, deportation, captivity) the Torah will survive and its wisdom cannot be taken away. Here one can detect a parallel with 2 Baruch, a Jewish apocalypse that originates in the immediate postDestruction period, and which insists that although the Temple is gone, the Jews still have Torah. 72 At first sight, this could be interpreted as a rabbinic argument, which holds that contrary to the priests who are tied to the Temple, their study of Torah could take place anywhere and does not suffer from geographic restrictions. However, a centrality of Torah does not necessarily automatically hint at a rabbinic context or rabbinic authorship, rather, the author could turn to Torah, because Torah defines the priesthood, its task and its place in society, and demanded for it to be obeyed. As such, Torah centrality could be interpreted as employed in order to support priestly authority, as opposed to a rejection or redundancy of the priesthood and the priestly class. Another indication of a possibly priestly rather than rabbinic context is T.Levi 14, which seems to concern a debate on Torah, purity, and oral teachings. Levi addresses his group as “lights of Israel” (purer than all the Gentiles), yet he warns that they could be darkened by transgression and “bring a curse upon our race”. Levi seems to condemn oral teachings that go against Torah, taught by rivalling groups which could be rabbinic, who “destroy by teaching commandments contrary to the ordinances of God”. The author firmly regards himself as well as his antagonists Jewish.
4. Yet: Centrality of the Temple Remains In the Ascent accounts, the location where the ascent-descent experiences take place is in front of the Temple, at the Temple gate, clearly making a connection between the earthly Temple – despite it being lost –, Jerusalem, or the people of Israel, and the heavenly Temple; which is also modelled after the earthly Temple. Likewise, the repeated references to the destruction of the Jerusalem Temple, the vision of the heavenly refers to the law as the way of light, the right choice. Therefore, it cannot be read as Christian substitution theology. 72. S. Schwartz , “Political, Social, and Economic Life in the Land of Israel 66-235”, in S. K atz (ed.), Cambridge History of Judaism, vol. 4 (Cambridge, 2006) 32. T.Levi, with its emphasis on the importance of the study of Torah, could be situated in the same context, or it could show agreement or parallels with “Josephus, or the authors of the apocalypses, [who responded] with a renewed embrace of the Torah… both Josephus and the author of 2 Baruch explicitly polemicized against Jews who had rejected the Torah, implying that this was a common response among literate Jewish survivors of the revolt”.
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Temple, and the continuation of the priesthood in T.Levi also indicate the importance and centrality granted by the circle of author and audience of the Testament. The main difference here is that Levi’s visions and ascent do not take place in or near the Jerusalem Temple, but rather on a remote site.
IV. Conclusion In sum, what does our textual comparison tell us about the diversity of sentiments, thoughts, and perception(s) of Jewish identity in the aftermath of the Roman-Jewish wars? There is at least one definite conclusion to be drawn and that is that the devastating events did pose existential questions to various (but not all) Jewish circles. The responses varied: although T.Levi and Hekhalot Rabbati offer a transformation of the priesthood and re-situate the Temple into a supernal realm, the author of T.Levi explicitly blames the Jerusalem priesthood or priestly class for the disastrous events. Contrastingly, the textual “units” or fragments that have been transmitted through Hekhalot Rabbati do not attempt to put the blame directly to the priests: in the Story of the Ten Martyrs it is “wicked Rome”, as well as an idea of original collective sin that prevails. Similarly, the Apocalypses reveal that it is for the sins of Israel that the Temple was destroyed, that Jerusalem was defiled, and that the people were expulsed from the city. However, there is not the harsh and singled-out critique of the priesthood as we can find it in T.Levi. Rather, Hekhalot Rabbati transposes the priesthood to the heavenly or supernal sphere without explicitly stating that it was due to the sinful or impure priestly class that this transposition was needed in the first place. A second concluding thought is that we noticed how the questions raised are related to circles situated in the Diaspora: Diaspora because there was only Diaspora Judaism left. 73 However, in both cases, these Diasporic people must have belonged to circles that had (previously) granted centrality and authority to the Jerusalem Temple when it was still standing, or they might have felt a special connection to it. This has led authors to focus on the importance and centrality of the heavenly Temple. Although it should be noted that contemplations on the heavenly Temple rather than the Jerusalem Temple did already occur before 70 ce , most evidently so in Qumran, I have demonstrated there are indications in T.Levi that could prove that we are dealing with a post-Destruction text, or at least that it 73. Here, I understand a Judaism without access to Jerusalem as essentially diasporic. This was the situation post-135 ce , until the Hadrianic ban was lifted at an unknown point, presumably sometime in the fourth century ce , likely under Emperor Julian (361-363).
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was read in such context. The consensus remains that Hekhalot Rabbati is to be dated much later. The simultaneously particularly strong criticism of T.Levi against the rabbis could indicate an already stronger established or emerging rabbinic Judaism that claims authority and threatens priestly authority, the latter who are (still) faced with the need to re-establish their authority and seek (continued) justification for their existence now that they are void of the Temple. This could not only reflect the redaction of this Greek T.Levi as post-Bar Kokhba, it again allows it to be identified as Jewish. Finally, let me return to the theme of sacerodalisation in relation to messianic and royal typologies. The author of the T.Levi seems to regard the new priesthood as a combination of both a messianic and royal figure, yet strongly placed in the Levite tradition. The authors or editors of the textual segments of the later Hekhalot Rabbati which I have discussed seem to envisage the Merkavah mystic as a replacement for the Messiah, as he can travel – ascend and descend – between heaven and earth: from earth, through the Hekhalot, to the Merkavah, and back. In that way I might propose that the mystic also has a mediating function, and he participates in liturgy (incl. sacrifices) in heaven and on earth and as such we can speak of sacerdotalisation. Thus, replacing the priesthood in Hekhalot Rabbati is a rather literal re-placing: it is transposed to the heavenly realm. As for T.Levi, it is critical of the Jerusalem priesthood or its priestly class, which is understandable in light of the aftermath of the Destruction and the Defeat. However, it does not abolish or replace the priesthood but transforms it whilst it continues to emphasise its Levite character, the centrality and importance of Torah and of the – now heavenly – Temple. Therefore, it is interesting to consider that in T.Levi we observe a combination of what is conventionally presented as a dichotomy, namely priests versus rabbis: priests and (study of) Torah. In the Sar ha-Torah fragments I demonstrated a similar emphasis on the importance of Torah 74 and Temple – despite the earthly Temple having been destroyed the text even pretends as if it is still standing. Yet, the centrality of priests as we encounter in T.Levi has been replaced by the centrality of the Merkavah mystic, whose role is sacerdotalised: the mystic seems to have taken on the task of the priest in ensuring contact between Israel and the divine realm, the Holy of Holies, the seventh heaven where God sits on his throne or rides his chariot. Both texts show clear parallels as well as differences, but they seem to constitute attempts to provide answers to questions that relate to Jewish identity that reflect a dispersed Judaism of fragmented groups wherein questions were asked about authority, religious practice, liturgy, 74. Yet Philip Alexander has argued in this same colloquium that it seems to contradict any sacerdotalisation, but is rather a rabbinic desacerdotalisation.
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the relation with or toward Gentiles, and ultimately the relation between God and his people Israel. 75
75. It is evident that more research would be required to delve into the “hekhalot” fragments discussed. . It deserves to be investigated if these excerpts appear in other post-Bar Kokhba Jewish literature that deals with this topic in order to get a grasp of their nature, however speculative this task may be.
Prêtres et « toit unique » (EvJud 45,6-7). M aisons célestes, sacrifice et sacerdoce dans l’ É vangile de Judas Louis Painchaud Université Laval, Québec [email protected] À Françoise Morard, en témoignage d ’amitié, et parce que l ’Apocalypse d’Adam pourrait bien receler la clé de l ’Évangile de Judas Abstract The Gospel of Judas describes two heavenly houses, the first is seen in a dream by Jesus’ disciples, the second by Judas. These visions have been placed in connection with the literature of the heavenly palaces and the description of the second house, which would have had “a roof of lightning”, has been compared with the roof of lightning of the palace described in 1 Enoch 14:1.17. However, this comparison is based on an error in the translation of the Coptic ⲟⲩⲟ ̣ ⲧⲉ, ̣ which was first rendered as “greenery” and then as “lightning”, but should be translated as “unique”. The hypothesis proposed here suggests that this “unique” roof is an allusion to the roof of the ark in Gen 8:13, and thus refers to the original myth of the Sethians, in which the descendants of Seth, the protosethians, escape the flood by taking refuge in the ark. True charge against the sacerdotalization at work within Christianity of its time, the EvJud opposes the second house, the ark of the Sethians, where sacrificial worship is absent, to the first house, where a sacrificial cult is dedicated to Saklas. Résumé L’Évangile de Judas décrit deux maisons célestes, la première est vue en rêve par les disciples de Jésus, la deuxième par Judas. On a voulu situer ces visions en lien avec la littérature des palais célestes et on a rapproché la description de la deuxième maison, qui aurait eu « un toit de feu », avec le toit de feu ou d’éclairs du palais décrit en 1 Hénoch 14,1.17. Ce rapprochement est toutefois basé sur une erreur de traduction du copte ⲟⲩⲟ ̣ ⲧⲉ ̣ qu’on a d’abord rendu par « verdure », ensuite par « feu », mais qu’il faut traduire par « unique ». L’hypothèse proposée ici suggère que ce toit « unique » est une allusion au toit de l’arche en Gn 8,13, et par là, renvoie au mythe d’origine des séthiens, dans lequel les descendants de Seth, les protoséthiens, échappent au déluge en trouvant refuge dans l’arche. Véritable charge La « sacerdotalisation » dans les premiers écrits mystiques juifs et chrétiens. Actes du colloque international tenu à l’Université de Lausanne du 26 au 28 octobre 2015, sous la direction de David Hamidović, Simon C. Mimouni et Louis Painchaud, Turnhout : Brepols, 2021 (Judaïsme ancien et origines du christianisme, 22), p. 247-264 DOI 10.1484/M.JAOC-EB.5.122775 © F H G
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contre la sacerdotalisation à l’œuvre au sein du christianisme de son temps, l’EvJud oppose à la première maison, où un culte sacrificiel est dédié à Saklas, la deuxième maison, l’arche des séthiens, où tout culte sacrificiel est absent.
L’Évangile de Judas comporte deux passages directement en lien avec la thématique de ce colloque. Il s’agit de deux descriptions de maisons célestes dont les disciples, puis Judas, ont la vision. Dans la première de ces visions, ils voient dans une maison, offrant des sacrifices, douze hommes qu’ils identifient « aux prêtres » (ⲛ̄ⲟⲩⲏⲏⲃ 38,5). Voici le récit de cette vision (EvJud 38,1-11) 1 : Et ils [dirent : « Nous avons] vu une grande maison dans laquelle se trouvaient un grand autel et douze hommes – nous le disons, c’étaient les prêtres –, et un nom. Il y avait une grande foule assidue devant {cet autel} cet autel-là, jusqu’à ce que les prêtres aient [fini de présenter les] offrandes. Et nous, nous étions assidus aussi. »
Nous y reviendrons. Jésus, que ses disciples interrogent au sujet de cette vision, leur révèle que ces prêtres, ce sont eux-mêmes et leurs successeurs, qui présentent ces offrandes à leur dieu et entraînent leurs fidèles assidus dans l’erreur (39,7-40,1). Quant à la deuxième vision, elle décrit aussi une maison, mais se distingue en tout de la première, notamment par l’absence de toute référence sacerdotale ou sacrificielle et par la mention d’un toit (ⲥⲧⲉⲅⲏ ̣ 45,6). Puisque c’est sans doute celle qui a le plus retenu l’attention, je cite ici de ce passage la traduction anglaise accompagnant l’édition critique publiée en 2007 (EvJud 44,23-45,12) 2 :
1. ⲛ̄ⲧⲟⲟⲩ ⲇⲉ ̣ ⲡ ̣[ⲉϫⲁ]ⲩ ̣ [ϫⲉ ⲁⲛ]ⲛ ̣ⲁ ̣[ⲩ] ⲉⲩⲛⲟϭ ⲛⲏ [̣ ⲓ̈ ] ⲉ ̣[ⲣⲉⲟⲩⲛ]ⲟ ̣ϭ ̣ ⲛⲑⲩ[ⲥⲓ] ⲁⲥⲧⲏ ̣ⲣⲓ[ⲟⲛ ̣ ⲛ̄ϩⲏⲧϥ̄ ⲁⲩ]ⲱ ̣ ⲙ ̣ⲛⲧ̣[ⲥ]ⲛⲟⲟⲩⲥ ̣ ⲛ̄ⲣⲱⲙⲉ ⲉⲛϫⲱ ̣ ⲙ̄ⲙⲟ ̣[ⲥ] ϫⲉ ⲛ̄ⲟⲩⲏⲏⲃ ⲛⲉ : ̣ ⲁⲩⲱ ⲟⲩⲣⲁⲛ ̣ ⲟⲩⲛ ⲟⲩⲙⲏⲏϣⲉ ⲇⲉ ⲡⲣⲟⲥⲕⲁⲣⲧⲉⲣ ̣ ⲉ̣ ̣ⲓ ̣{ⲉⲡⲑⲩⲥⲓⲁⲥⲧⲏⲣⲓ} ⲉⲡⲉⲑⲩ ̣[ⲥⲓ] ⲁⲥⲧⲏ ̣[ⲣⲓ]ⲟⲛ ⲉⲧⲙ ̣ ̄ⲙⲁⲩ ϣ [ⲁⲛⲧⲟⲩϫⲱⲕ ⲉⲃ]ⲟ ̣ⲗ ⲛϭⲓ ⲛ̄ⲟⲩⲏⲏⲃ [ⲛ̄ⲥⲉϫⲓ ⲉϩⲟⲩⲛ ⲛ̄] ̣ ⲛϣⲙ ̣ ̄ϣⲉ ⲁⲛⲟⲛ [ⲟⲛ ⲛⲉ]ⲛⲡⲣⲟ[ⲥⲕⲁ]ⲣⲧⲉⲣⲓ ̣ ⲡ ̣ⲉ (EvJud 38,1-11). Le texte copte est cité d’après l’editio princeps de R. K asser – M. M eyer – G. Wurst – F. Gaudard (éd.), The Gospel of Judas: Together with the Letter of Peter to Philip, James, and a Book of Allogenes from Codex Tchacos, Washington, District of Columbia, 2007, p. 195. À moins d’une autre mention, les traductions citées sont miennes. 2. ⲡⲉϫⲁϥ ⲛⲁϥ ⲛ̄ϭⲓ ⲓ̈ ⲟⲩⲇⲁⲥ ϫⲉ ⲁⲓ̈ ⲛⲁⲩ ⲉⲣⲟⲓ̈ ϩⲙ̄ⲫⲟⲣⲟⲙ ̣ⲁ ̣ ⲉⲣⲉⲡⲙⲛⲧⲥⲛⲟⲟⲩⲥ ⲙⲙⲁⲑⲏⲧⲏⲥ ϩⲓ ⲱⲛⲉ ⲉⲣⲟⲉ ̣ⲓ ̣ ⲥⲉⲡⲏⲧ [ⲛⲥⲱⲓ̈ ⲙ̄ⲡϣⲁ] : ⲁⲩ̣ ⲱ ̣ ̣ ⲁⲉ ̣[ⲓ]ⲉⲓ ⲟⲛ ⲉⲡⲙⲁ ⲉ[ ]ⲛ̄ ̣ⲥⲱⲕ̄ ⲁⲉⲓⲛⲁⲩ ⲉ ̣[ⲟⲩⲏⲉⲓ ]ⲥ ̣ ⲁⲩⲱ ⲡⲉϥϣ . ⲓ ⲛⲁⲃⲁⲗ ⲛⲁϣ̣ [ϣⲓⲧϥ̄] ⲁⲛ ⲛⲉⲣⲉϩⲛ̄ⲛⲟϭ ⲇⲉ ⲛ̄ⲣⲱⲙⲉ ⲕ ̣[ⲱ]ⲧⲉ ⲉⲣⲟϥ ⲡⲉ ⲁⲩⲱ ⲛⲉⲟⲩⲥⲧⲉⲅⲏ ̣ †ⲛ ̣ⲟⲩⲟ ̣ ⲧⲉ ̣ † ⲡⲉ ⲛ̄ϭⲓ ⲡⲏⲉⲓ ⲉⲧⲙ̄ⲙ[ⲁⲩ] ⲁⲩⲱ ϩⲛ̄ⲧⲙⲏⲧⲉ ⲙ̄ⲡⲏⲓ̈ ⲉⲣ[ⲉⲟⲩ] ⲙ ̣ⲏ[ⲏϣⲉ ] . [ ]ⲕ [ ]ϣⲉ [ ]ⲉ ̣ ϫⲉ ⲡⲥⲁϩ ϣⲟⲡⲧ̄’ ϩⲱ ⲉϩⲟ[ⲩⲛ ⲙ]ⲛ ⲛ ̣ⲓⲣⲱⲙⲉ (EvJud 44,23-45,12 R. K asser – M. M eyer – G. Wurst – F. Gaudard (éd.), The Gospel of Judas: Together with the Letter of Peter to Philip, James, and a Book of Allogenes from Codex Tchacos, Washington, District of Columbia, 2007, p. 207-209.
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Judas said to him, « In the vision I saw the twelve disciples stoning me and persecuting [me severely]. And I also came to the place where [---] after you. I saw [a house---], and my eyes could not [comprehend] its size. And great people were surrounding it, and that house a roof of †greenery†, and in the middle of the house was [a crowd---], [---] (saying), ‘Master, take me in along with these people.’ »
Publiée dès 2006, la traduction française de Pierre Cherix disponible sur la toile ne diffère pas sensiblement de cette traduction 3 : Judas lui dit : « Je me suis vu dans la vision, les douze disciples me jettent des pierres, ils (p. 45) me persécutent [beaucoup], et je suis revenu au lieu où […] derrière toi. J’ai vu une [maison spacieuse] et sa dimension, mes yeux n’ont pu la mesurer. Et de grands hommes l’entouraient et cette maison-là avait un toit de verdure. Et, au milieu de la maison, une foule […] [disant] : “Maître, reçois-moi, moi aussi, à l’intérieur avec ces hommes” ».
Ce toit eut tôt fait d’attirer l’attention. Dès 2006, Madeleine Scopello signala que le toit de la maison céleste rapprochait l’Évangile de Judas du Livre des veilleurs 4 . Deux ans plus tard, indépendamment de la contribution de Madeleine Scopello, Lance Jenott, alors candidat au doctorat à Princeton University sous la direction d’Elaine Pagels, proposa de lire au lieu de ⲟⲩⲟ ̣ ⲧⲉ, ̣ ⲟⲩⲉ ̣ ⲧⲉ, ̣ selon lui une variante phonétique non attestée d’un mot rare, ⲟⲩⲏⲧⲉ (Crum 495a), qu’il interpréta comme signifiant « éclair », ce qui lui permit de resserrer le rapprochement de ce passage avec 1 Hénoch, où le temple céleste a un toit fait d’éclairs 5. Cette description de la maison céleste vue par Judas aurait donc eu un parallèle direct dans la littérature hénochique. Ces deux descriptions de maisons célestes ont donc un double intérêt dans le cadre de ce colloque puisque la première est le témoin d’une repré3. Pierre Cherix a eu le mérite de publier une des premières traductions françaises de l’Évangile de Judas dès 2006, peu après celle de Rodolphe Kasser. Il l’a révisée en 2012 pour y intégrer les fragments rendus disponibles par Gregor Wurst en 2011, de sorte qu’elle est à l’heure actuelle la traduction française la plus à jour disponible sur la toile, P. Cherix, http://www.coptica.ch/Cherix-EvJudas.pdf (dernière consultation : 12.05.2020). Il existe sur la toile une autre traduction française par Nathalie Bosson, datée de 2007, N. Bosson, http://langoo.free.fr/ala/images/ docs/Traduction_EvJudas.pdf. 4. 1 Hénoch XIV, 15-18 ; voir M. Scopello, « Traditions angélologiques et mystique juive dans l’Évangile de Judas », dans M. Scopello (éd.), The Gospel of Judas in Context. Proceedings of the First International Conference on the Gospel of Judas. Paris, Sorbonne, October 27th-28th, 2006, Leyde, 2008, p. 131-132. 5. L. Jenott, « Gospel of Judas 45, 6-7 and Enoch’s Heavenly Temple », dans A. DeConick (éd.), The Codex Judas Papers. Proceedings of the International Congress on the Tchacos Codex Held at Rice University. Houston Texas, March 13-16, 2008, Leyde, 2009, p. 471-477. Il reprend cette interprétation dans L. Jenott, The Gospel of Judas, Tubingue, 2011, p. 207.
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sentation sacerdotale des disciples de Jésus et de leurs successeurs, et que la seconde pourrait, selon Madeleine Scopello et Lance Jenott, rapprocher l’Évangile de Judas de la littérature hénochique. Toutefois, les deux passages soulèvent des problèmes d’édition et de traduction qu’il faut examiner et tenter de résoudre avant d’en proposer une interprétation. Mais avant de discuter ces deux passages, il ne sera pas inutile de rappeler brièvement les circonstances de la publication du codex Tchacos et d’esquisser les grandes lignes du contenu de l’Évangile de Judas.
I. Le codex Tchacos et l’Évangile de Judas L’Évangile de Judas est contenu dans le codex Tchacos, qui aurait été trouvé dans une tombe dans la région d’Al Minya, en moyenne Égypte, vers la fin des années 1970 6. L’analyse codicologique menée par Gregor Wurst montre qu’il s’agit en réalité d’un demi-codex, dont seule la première moitié nous est actuellement connue 7. Examiné à Genève par Stephen Emmel le 15 mai 1983 8, ce n’est qu’au début des années 2000 qu’il a été acquis par Frieda Nussberger Tchacos, qui en a fait don à la fondation Maecenas de Bâle, laquelle a ensuite conclu une entente avec la National Geographic Society de Washington pour sa publication 9. L’Évangile de Judas, a donc été publié sous les auspices de cette société au printemps de 2006 10. Deux éditions critiques de l’ensemble de ce qui est conservé du codex suivirent un an plus tard en 2007 11. De nouveaux fragments ne 6. H. K rosney, The Lost Gospel: The Quest for the Gospel of Judas Iscariot, Washington, District of Columbia, 2006, p. 9-27 ; R. K asser – M. M eyer – G. Wurst – F. Gaudard (éd.), The Gospel of Judas, Critical Edition: Together with the Letter of Peter to Philip, James, and a Book of Allogenes from Codex Tchacos, Washington, District of Columbia, 2007, p. 2-3. 7. R. K asser – M. M eyer – G. Wurst – F. Gaudard (éd.), The Gospel of Judas, Critical Edition: Together with the Letter of Peter to Philip, James, and a Book of Allogenes from Codex Tchacos, Washington, District of Columbia, 2007, p. 27-33. 8. J. M. Robinson, The Secrets of Judas. The Story of the Misunderstood Disciple and his Lost Gospel, New York, 2006, p. 27-38. 9. H. K rosney, The Lost Gospel: The Quest for the Gospel of Judas Iscariot, Washington, District of Columbia, 2006, p. 205-229. 10. A. Cockburn, « The Judas Gospel. An Ancient Text Lost for 1,700 Years Says Christ’s Betrayer Was his Best Friend », National Geographic Magazine (May 2006), p. 78-95 ; R. K asser – M. M eyer – G. Wurst, L’Évangile de Judas, Paris, 2006 ; R. K asser – M. M eyer – G. Wurst – F. Gaudard (éd.), The Gospel of Judas, Critical Edition: Together with the Letter of Peter to Philip, James, and a Book of Allogenes from Codex Tchacos, Washington, District of Columbia, 2007. 11. R. K asser – M. M eyer – G. Wurst – F. Gaudard (éd.), The Gospel of Judas, Critical Edition: Together with the Letter of Peter to Philip, James, and a Book of Allogenes from Codex Tchacos, Washington, District of Columbia, 2007 ; J. Brankaer – H. G. Bethge (éd.), Codex Tchacos. Texte und Analysen, Berlin, 2007.
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furent toutefois publiés qu’en 2012 12 . Aujourd’hui, le codex Tchacos est conservé à la Fondation Bodmer, à Cologny, et les fragments publiés en 2011 sont en Égypte. Comportant 66 pages plus ou moins fragmentaires, le codex contient des copies de la Lettre de Pierre à Philippe et de la Première Apocalypse de Jacques, intitulée seulement Jacques, dont des parallèles nous sont connus respectivement par les codices VIII et V de Nag Hammadi 13, de l’Évangile de Judas, suivi d’un texte dont le titre est presque complètement perdu, pour lequel on a proposé la restauration Le L[ivre d’Allogène], différent de l’Allogène du codex XI de Nag Hammadi 14 , et des fragments du traité hermétique XIV sur la régénération identifiés par Jean-Pierre Mahé 15.
II. L’Évangile de Judas 16 Superficiellement, l’Évangile de Judas se présente comme un dialogue entre Jésus et ses disciples, parmi lesquels seul Judas est identifié, les autres 12. H. K rosney – M. M eyer – G. Wurst, « Preliminary Report on New Fragments of Codex Tchacos », Early Christianity 1 (2010), p. 282-294 ; G. Wurst, « Weitere neue Fragmente aus Codex Tchacos zum “Buch des Allogenes” und zu Corpus Hermeticum XIII », dans E. E. Popkes – G. Wurst (éd.), Judasevangelium und Codex Tchacos. Studien zur religionsgeschichtlichen Verortung einer gnostischen Schriftsammlung, Tubingue, 2012, p. 1-12. 13. J.-É. M énard, La Lettre de Pierre à Philippe, Québec-Louvain, 1977 ; A. Veilleux, La Première Apocalypse de Jacques (NH V, 3) : La Seconde Apocalypse de Jacques (NH V, 4), Québec, 1986. 14. W.-P. Funk – P.-H. Poirier – M. Scopello, L’Allogène, Québec-Louvain, 2004 ; voir M. Scopello, « Secrets et révélation dans le codex Tchacos, » dans C. H. Bull – L. I. Lied – J. D. Turner (éd.), Mystery and Secrecy in the Nag Hammadi Collection and Other Ancient Literature : Ideas and Practices. Studies for Einar Thomassen at Sixty, Leyde, 2012, p. 145-159 ; M. Scopello, « The Temptation of Allogenes (Codex Tchacos, Tractate IV) », dans K. Corrigan – T. R asimus (éd.), Gnosticism, Platonism and the Late Ancient World : Essays in Honour of John D. Turner, Leyde, 2013, p. 117-138 ; L. Painchaud, « Le quatrième écrit du codex Tchacos, les livres d’Allogène et la tradition littéraire séthienne », dans K. Corrigan − T. R asimus (éd.), Gnosticism, Platonism and the Late Ancient World : Essays in Honour of John D. Turner, Leyde, 2013, p. 89-104. 15. R. K asser – M. M eyer – G. Wurst – F. Gaudard (éd.), The Gospel of Judas, Critical Edition: Together with the Letter of Peter to Philip, James, and a Book of Allogenes from Codex Tchacos, Washington, District of Columbia, 2007, p. 29-30. 16. Il existe en français quatre traductions sérieuses de l’Évangile de Judas : R. Kasser en a publié deux, la première en 2006 (L’Évangile de Judas, Paris), et la deuxième en 2007, dans R. K asser – M. M eyer – G. Wurst – F. Gaudard (éd.), The Gospel of Judas, Critical Edition: Together with the Letter of Peter to Philip, James, and a Book of Allogenes from Codex Tchacos, Washington, District of Columbia, 2007, p. 237-252 ; P. Cherix, L’Évangile de Judas, 2006 révisée en 2012 pour y intégrer les nouveaux fragments dits « de l’Ohio » ; P. Cherix, http://www.coptica.ch/ Cherix-EvJudas.pdf ; et celle de N. Bosson publiée sur la toile en avril 2007, N. Bosson, http://langoo.free.fr/ala/images/docs/Traduction_EvJudas. Outre celles qui
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formant un groupe indistinct, toujours désigné comme « les disciples » 17. Ce dialogue est précédé d’un préambule narratif le situant dans les jours qui précèdent la passion et le rattachant aux faits et gestes de Jésus. Il est suivi d’un épilogue empruntant aux récits canoniques de la passion. Le dialogue manque parfois de cohésion de surface et les répliques en sont fort inégalement réparties tout au long du texte. Il comporte en particulier, un long enseignement théogonique et anthropogonique qui tranche sur le reste de l’écrit et que certains ont cru pour cette raison interpolé 18. Du point de vue du genre littéraire, on peut ranger l’Évangile de Judas dans la catégorie des dialogues gnostiques de révélation 19. Relatant des visions de l’au-delà expliquées par un être céleste, Jésus, et annonçant le déroulement d’événements à venir, la mort sacrificielle de l’homme qui porte Jésus, l’erreur de ses disciples et de leurs successeurs, et dévoilant
ont déjà été mentionnées, il existe plusieurs autres traductions anglaises : J. D. Turner , « The Place of the Gospel of Judas in the Sethian Tradition », dans M. S co pello (éd.), The Gospel of Judas in Context. Proceedings of the First International Conference on the Gospel of Judas. Paris, Sorbonne, October 27th-28th, 2006, Leyde, 2008, p. 229-237 ; S. Gathercole , The Gospel of Judas : Rewriting Early Christianity, Oxford, 2007 ; G. Schenke Robinson, « The Relationship of the Gospel of Judas to the New Testament and to Sethianism », Journal of Coptic Studies 10 (2008), p. 63-98 ; M. M eyer , The Gospel of Judas. Second Edition, Washington, District of Columbia, 2008 ; E. Pagels – K. K ing, Reading Judas. The Gospel of Judas and the Shaping of Christianity, New York, 2007 ; A. DeConick , The Thirteenth Apostle: What the Gospel of Judas Really Says, Londres, 2007 ; L. Jenott, The Gospel of Judas, Tubingue, 2011 ; en néerlandais : J. van Oort, Het Evangelie van Judas, Kampen, 2006 ; J. van der Vliet, Het Evangelie van Judas, Utrecht, 2006 ; en espagnol : F. García Bazán, El Evangelio de Judas, Madrid, 2006 ; F. García Bazán, Judas. Evangelio y Biografía, Buenos Aires, 2007 ; J. Montserrat Torrents , El Evangelio de Judas, Madrid, 2006 ; D. M. Santos − P. Ubierna, El Evangelio de Judas y otros textos gnosticos. Tradiciones culturales en el monacato primitivo egipcio del siglo IV, Buenos Aires, 2010 ; F. Bermejo Rubio, El Evangelio de Judas. Texto bilingüe y comentario, Salamanque, 2012 ; en italien : D. Devoti, Vangelo di Giuda, Rome, 2012 ; en allemand : J. Brankaer – H. G. Bethge (éd.), Codex Tchacos. Texte und Analysen, Berlin, 2007. 17. G. Schenke Robinson, « The Gospel of Judas : Its Protagonists, its Composition, and its Community », dans A. DeConick (éd.), The Codex Judas Papers. Proceedings of the International Congress on the Tchacos Codex Held at Rice University. Houston Texas, March 13-16, 2008, Leyde, 2009, p. 75-94. 18. G. Schenke Robinson, « The Relationship of the Gospel of Judas to the New Testament and to Sethianism », Journal of Coptic Studies 10 (2008), p. 63-98. 19. Voir K. Rudolph, « Der gnostische “Dialog” als literarisches Genus », dans P. Nagel (éd.), Probleme der koptischen Literatur (Wissenschaftliche Beiträge der Martin-Luther-Universität Halle-Wittenberg, 1968/1 [K2]), Halle, 1968, p. 85-107 (= K. Rudolph, « Der gnostische “Dialog” als literarisches Genus », dans K. Rudolph (éd.), Gnosis und spätantike Religionsgeschichte : Gesammelte Aufsätze, Leyde, p. 103-122, et P. Perkins , The Gnostic Dialogue : The Early Church and the Crisis of Gnosticism, New York-Ramsey, New Jersey, 1980.
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les mystères du début et de la fin des temps, l’Évangile de Judas peut aussi être considéré comme une apocalypse 20. Sous la surface dialogique, le corps de l’Évangile de Judas est structuré comme un diptyque dont les deux volets se font écho 21. Le premier volet est lui-même formé pour l’essentiel des deux récits de vision de maisons célestes et de leur interprétation par Jésus. Ce sont ces récits, dont j’ai cité des passages plus haut, qui retiendront notre attention. Le deuxième volet de ce diptyque est principalement occupé d’un long enseignement de Jésus, lui aussi subdivisé en deux parties. Il permet de comprendre les deux visions relatées dans le premier volet. La première de ces parties expose d’abord l’existence d’un éon illimité, demeure du Grand Esprit invisible, de luminaires, etc. La deuxième partie décrit l’organisation des cieux du chaos sur lesquels règnent Nébro, au visage de feu et souillé de sang, aussi appelé Yaldabaôth, et un autre ange appelé Saklas. Si en surface, le récit du dialogue paraît parfois manquer de cohésion, la structure profonde du texte en assure la cohérence et l’équilibre 22 . En effet, les deux volets sont de longueur à peu près égale, le deuxième procurant les clés pour comprendre le premier : le culte sacrificiel offert par les douze hommes vus en rêve par les disciples est en fait un culte rendu à Nebrô-Yaldabaôth-Saklas, le dieu créateur des Écritures judéennes, qui règne sur les cieux du chaos ; et la maison réservée à la génération sainte vue par les disciples est liée à l’éon illimité du Grand Esprit invisible. Précisons enfin que l’arrière-plan doctrinal de l’Évangile de Judas le rapproche de la doctrine séthienne dont on y retrouve plusieurs expressions caractéristiques 23.
20. L. Painchaud, « L’Apocalypse de Judas », Society of Biblical Literature International Meeting, Vienne, 2014, non publié. 21. L. Painchaud, « The Dispositio of the Gospel of Judas », Zeitschrift für antikes Christentum / Journal of Ancient Christianity 17 (2013), p. 268-290 (= L. Painchaud, « La dispositio de l’Évangile de Judas », dans D. Brakke – S. J. Davis – S. E mmel (éd.), From Gnostics to Monastics. Studies in Coptic and Early Christianity in Honor of Bentley Layton, Louvain, 2017, p. 77-100. 22. À propos de l’importante distinction en pragmatique textuelle entre cohésion et cohérence, voir A. Jaubert – M. Biraud, Cohésion et cohérence. Études de linguistique textuelle, Lyon, 2005. 23. J. D. Turner , « The Gospel of Judas and the Sethian Tradition », dans M. Scopello (éd.), The Gospel of Judas in Context. Proceedings of the First International Conference on the Gospel of Judas. Paris, Sorbonne, October 27th-28th, 2006, Leyde, 2008, p. 187-238 ; G. Schenke Robinson, « The Gospel of Judas in Light of the New Testament and Early Christianity », Zeitschrift für antikes Christentum Christentum / Journal of Ancient Christianity 13 (2009), p. 98-107 ; M. M eyer , « When the Sethians Were Young », dans A. DeConick (éd.), The Codex of Judas Papers. Proceedings of the International Congress on the Tchacos Codex Held at Rice University. Houston Texas, March 13-16, 2008, Leyde, 2009, p. 57-74.
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Comme cela a été vu très tôt par certains, dont John D. Turner, Anna van den Kerchove et moi-même, cet apocryphe chrétien est le témoin du refus de l’idéologie sacrificielle qui tend à s’imposer au ii e siècle au sein du christianisme en formation 24 . Plus fondamentalement encore, c’est ce que je propose ici, l’Évangile de Judas est le témoin du refus par certains chrétiens de la sacerdotalisation des ministères qui s’amorce au ii e siècle, perçue comme une utilisation fallacieuse du nom de Jésus perpétuant le culte sacrificiel du temple de Jérusalem, le culte de Yaldabaôth inauguré à la suite du déluge. C’est le sens de la première vision. Quant à ces chrétiens, ils s’identifient eux-mêmes comme la « génération sans roi » et se perçoivent de la descendance de Seth, celle-là même dont on lit dans l’Apocalypse d’Adam du codex V de Nag Hammadi que ses membres « furent introduits dans un autre éon » 25 et, dans le Livre des secrets de Jean, qu’ils « se mirent à l’abri au moyen d’un nuage de lumière » 26 lors du déluge, échappant ainsi à la domination de Yaldabaôth. Venons-en maintenant aux récits de ces deux visions de maisons célestes qui contiennent l’essentiel de ce message.
24. « As the Gospel of Judas stands, it constitutes a vicious polemic against sacrificial theology of the so-called apostolic churches at the turn of the third century… », J. D. Turner , « The Gospel of Judas in the Sethian Tradition », dans M. Scopello (éd.), The Gospel of Judas in Context. Proceedings of the First International Conference on the Gospel of Judas. Paris, Sorbonne, October 27th-28th, 2006, Leyde, 2008, p. 228 ; L. Painchaud, « Polemical Aspects of the Gospel of Judas », dans M. Scopello (éd.), The Gospel of Judas in Context. Proceedings of the First International Conference on the Gospel of Judas. Paris, Sorbonne, October 27th-28th, 2006, Leyde, 2008, p. 171-186 ; aussi A. van den K erchove , « La maison, l’autel et les sacrifices : quelques remarques sur la polémique dans l’Évangile de Judas », dans M. Scopello (éd.), The Gospel of Judas in Context. Proceedings of the First International Conference on the Gospel of Judas. Paris, Sorbonne, October 27th-28th, 2006, Leyde, 2008, p. 311-330. 25. ⲁⲩϫⲓⲧⲟⲩ ⲉϩⲟⲩⲛ ⲉⲕⲉⲉⲱⲛ NH V 74,13, voir F. Morard, L’Apocalypse d ’Adam (NH V, 5), Québec-Louvain, 1985, p. 38-39 et le commentaire ad loc. L’étude des nombreux contacts entre l’Apocalypse d ’Adam du codex V de Nag Hammadi et l’Évangile de Judas reste à faire. Elle pourrait mener au constat d’une étroite parenté à la fois doctrinale et littéraire entre ces deux textes. 26. Voir le Livre des secrets de Jean BG 73,11-12 ; NH II 29,11-12 et NH IV 45,8-9 ainsi que M. Waldstein – F. Wisse , The Apocryphon of John. Synopsis of Nag Hammadi Codices II,1 ; III,1 ; and IV,1 with BG 8502,2, Leyde-New York-Cologne, 1995, p. 164-165 et B. Barc – W.-P. Funk , Le Livre des secrets de Jean. Recension brève (NH III,1 et BG 8502,2), Québec-Louvain, 2012, p. 164-165. On notera que dans la version du codex III (ⲁⲩⲥⲕⲉⲡⲁⲍⲉ ⲙ̄ⲙⲟⲟⲩ ϩⲓⲧⲛⲟⲩⲕⲏⲡⲉ ⲛ̄ⲟⲩⲟⲉⲓⲛ NH III 38,4-5), on trouve le mot copte ⲕⲏⲡⲉ, qui a été interprété comme une forme du mot ϭⲏⲡⲉ dans le passage parallèle en BG 73,12 « nuage » (ϭⲏⲡⲉ Crum 825b) à la lumière de la présence du mot ⲕⲗⲟⲟⲩⲗⲉ (Crum104a) dans le passage parallèle de la recension longue contenue dans les codices II et IV. Toutefois, le mot copte ⲕⲏⲡⲉ est bien l’équivalent du mot grec στέγη (Crum 114a).
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1. La maison vue par les disciples La première de ces visions, donc, est relatée par les disciples : en rêve, ils ont vu une grande maison où il y avait un nom et un autel sacrificiel, et où douze hommes présentaient des offrandes. Les disciples précisent à propos de ces hommes « ce sont les prêtres ». Je cite à nouveau le texte et son contexte plus large (EvJud 37,20-38,11) : Un autre jour, Jésus alla vers eux et ils lui dirent : « Maître, nous t’avons vu en rêve car nous avons eu de grands rêves [la] nuit passé[e]. » [Il dit] : « Pourquoi avez[-vous … … … ] et vous êtes-vous cachés ? » 38 Et ils [dirent : « Nous avons] vu une grande maison dans laquelle se trouvaient un grand autel et douze hommes – nous le disons, c’étaient les prêtres –, et un nom. Il y avait une grande foule assidue devant cet autel-là jusqu’à ce que les prêtres aient [fini de présenter les] offrandes. Et nous, nous étions assidus aussi. »
La phrase qui nous intéresse plus particulièrement concerne les prêtres. Traduite littéralement, elle signifie « nous le disons, c’étaient les prêtres » 27. Dans le contexte d’un récit de vision, on attendrait plutôt quelque chose comme « on aurait dit que c’étaient des prêtres » signifiant alors que ces douze hommes semblaient appartenir à la catégorie sacerdotale. Adoptée par plusieurs 28, cette traduction ne rend toutefois pas exactement le texte copte. En effet le texte copte (ⲉⲛϫⲱ ̣ ⲙ̄ⲙⲟ ̣[ⲥ] ϫⲉ ⲛ̄ⲟⲩⲏⲏⲃ ⲛⲉ 38,4-5) a un article défini, « les prêtres », et le verbe « dire », au présent II, met l’accent sur ce qui suit, il faut donc plutôt traduire : « nous le disons, c’étaient les prêtres ». La nuance est importante, car l’utilisation de l’article défini indique que la phrase ne signifie pas simplement que ces hommes appartiennent à la catégorie sacerdotale, que ce sont des prêtres, mais affirme avec insistance qu’ils sont les prêtres. Il faut donc que ce passage renvoie, non pas à la catégorie sacerdotale en général, mais à une réalité précise, intérieure ou extérieure au texte, mais connue de ses destinataires implicites, des prêtres particuliers. Or c’est la première fois que des prêtres sont mentionnés dans le texte. Il faut donc que ces prêtres fassent référence à une réalité extérieure au texte. Dans le contexte général de l’écrit, la description de ce lieu comme une grande maison contenant 27. « they are the priests we would say » (Meyer 2006, 2007, 2008) ; « ce sont les prêtres, dirions-nous » (Kasser 2006) ; « nous disons que ce sont les prêtres » (Cherix 2012 [2006]) ; « nous dirions que ce sont les prêtres » (Bosson 2007) ; « son los sacerdotes diríamos » (García Bazan 2006) ; « diríamos que eran los sacerdotes » (Bermejo Rubio 2012). 28. « wir sagen, dass es Priester waren » (Bethge Brankaer 2007) ; « decimos que eran sacerdotes » (Santos Ubierna 2009) ; « whom we say are priests » (Jenott 2011) ; « noi pensiamo che fossero sacerdoti » (Devoti 2012).
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un autel sacrificiel et un nom veut vraisemblablement évoquer le temple de Jérusalem par allusion à des passages qui en font la demeure du Nom, comme le récit de la dédicace du temple de Salomon (III R 8,18-30 LXX) une maison pour le nom du Seigneur Dieu d’Israël (v. 16.18.19.20.29.49). Quant à l’assiduité des disciples et de leurs fidèles à ce temple, elle pointe aussi en direction du temple de Jérusalem, mais à travers cette fois une allusion à la description de la première communauté des disciples de Jésus décrite au chapitre 2 des Actes des apôtres comme étant assidue au temple (Ac 2,42-47) 29. Ces prêtres sont au nombre de douze, ce qui ne renvoie à aucun nombre de prêtres connu, mais cette précision veut sans doute faire allusion à la fois aux Douze des évangiles canoniques et aux douze tribus d’Israël, suggérant que ce culte sacrificiel offert par les disciples et leurs successeurs n’est rien d’autre que la perpétuation du culte du dieu d’Israël, leur dieu, qui n’est pas le père de Jésus comme en témoigne le passage suivant EvJud 34,3-22) : Les disciples lui dirent : « Maître, pourquoi ris-tu de [notre] prière d’action de grâce ? Qu’avons-nous fait ? C’est [cela] qu’il fallait ! » Il répondit et leur dit : « Je ne ris pas de vous ! Et ce [n’]est pas volontairement que vous faites cela, mais de ce fait, c’est votre dieu qui [recevra] louange. » Ils dirent : « Maître, toi . . [ . . ] . es le fils de notre dieu ? » Jésus leur dit : « En quoi me connaissez-[vous] ? Amen, [je] vous le dis, aucune génération ne me connaîtra parmi les hommes qui sont parmi vous. » Lorsque les disciples entendirent cela, [ils] commencèrent à être irrités et à [manifester] de la colère et à le blasphémer dans leur cœur.
Le caractère péjoratif de cette sacerdotalisation des disciples de Jésus et de leurs successeurs est exprimé par la conduite inique de ces prêtres. À Jésus qui leur demande comment étaient ces prêtres, les disciples répondent (EvJud 38,13-39,5) : 29. Assidue : ⲣⲡⲣⲟⲥⲕⲁⲣⲧⲉⲣⲉⲓ (aussi 38,11 ; 40,5), cf. προσκαρτερέω Ac 1,14 ; 2,42.46. L’Évangile de Judas comporte plusieurs allusions au début des Actes des apôtres, notamment au remplacement de Judas. Sur les allusions néotestamentaires dans l’Évangile de Judas, voir J. M. Robinson, « The Sources of the Gospel of Judas », dans M. Scopello (éd.), The Gospel of Judas in Context. Proceedings of the First International Conference on the Gospel of Judas. Paris, Sorbonne, October 27th-28th, Leyde, 2006, p. 59-68 ; pour le préambule et l’épilogue, voir A. van den K erchove , « The Gospel of Judas versus New Testament Gospels : The Writing of a New Gospel », dans J.-M. Roessli – T. Nicklas (éd.), Christian Αpocrypha : Receptions of the New Testament in Ancient Christian Apocrypha, Gottingue, 2014, p 105124 ; voir aussi Ac 6,7 qui signale l’adhésion d’une multitude de prêtres à la foi.
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« [Cer]tains [jeûnaient] deux semaines (ϩⲟⲉⲓ]ⲛ ̣ⲉ ⲙⲉⲛ ⲉⲩ[ⲛⲏⲥⲧⲉⲩⲉ ⲛ̄ϩⲉ] ⲃ ̣ⲇⲟⲙⲁⲥ ⲥⲛ̄ⲧⲉ) 30 ; d’autres sacrifiaient leurs propres enfants, d’autres, leurs épouses, en bénissant, et en étant humbles les uns envers les autres ; d’autres couchaient avec les hommes ; d’autres étaient des meurtriers ; d’autres commettaient une multitude de péchés et d’iniquités. Et les hommes qui se tenaient devant l’autel, c’est ton nom qu’ils invoquaient. 39 Et alors qu’ils sont dans toutes les œuvres de leur déficience, se consument les offran[des sacrificielles de ces prêtres]-là. » Et ayant dit cela, ils se turent, troublés.
La question qu’il convient de poser concerne le sens de cette sacerdotalisation péjorative des disciples et de leurs successeurs : s’agit-il d’une simple réaction contre le développement d’une idéologie sacrificielle et sacerdotale qui serait vue comme un emprunt au paganisme, une réaction s’appuyant sur un refus plus général du sacrifice 31 ? Si cet aspect n’est sans doute pas totalement absent de l’Évangile de Judas, je crois qu’il faut être plus précis. Compte tenu des allusions vraisemblables au temple de Jérusalem, mais aussi, on le verra plus loin, au déluge vu dans la perspective séthienne, que comporte cet écrit, on comprendra cette sacerdotalisation péjorative des disciples et de leurs successeurs comme un refus non seulement d’une certaine idéologie sacrificielle, mais plus encore comme le refus de concevoir le christianisme en formation comme le prolongement du culte judéen inauguré, dans la perspective séthienne, à la suite du déluge. Si l’on admet que l’Évangile de Judas que mentionne Irénée de Lyon dans l’Adversus haereses 32 est bien le texte dont nous avons maintenant une version copte, la date de rédaction de ce texte, autour de 180 EC, nous procurerait un terminus ante quem pour la composition en grec de l’Évangile de Judas, ce qui en ferait le plus ancien témoin d’une sacerdotalisation des ministères chrétiens, après la Doctrine des douze apôtres ou Didachè (13,1) 33 et l’Épître de Clément aux Corinthiens (40,1) 3 4 , mais un témoin hostile. 30. R. K asser – M. M eyer – G. Wurst – F. Gaudard (éd.), The Gospel of Judas Critical Edition : Together with the Letter of Peter to Philip, James, and a Book of Allogenes from Codex Tchacos, Washington, District of Columbia, 2007, p. 195 ; la restauration figure dans l’apparat critique. Lire peut-être « deux fois la semaine » ; voir Luc 18,12. 31. Voir G. G. Stroumsa, La fin du sacrifice : les mutations religieuses de l ’Antiquité tardive, Paris, 2005. 32. Irénée de Lyon, Contre les hérésies I, 31, 1 (A. Rousseau – L. Doutreleau [éd.], Irénée de Lyon : Contre les hérésies. Livre I : Édition critique, texte et traduction, Paris, 1979, p. 386-387). 33. W. Rordorf – A. Tuilier , La doctrine des douze Apôtres (Didachè), Paris, 1978, p. 190-191. 34. A. Jaubert, Clément de Rome : Épître aux Corinthiens, Paris, 1971, p. 166167 : Clément compare l’ordre ecclésiastique à la hiérarchie lévitique ; sur la continuation du culte du temple après la chute de Jérusalem en 70, voir la note 2 d’Annie Jaubert p. 167.
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2. La maison vue par Judas Cette vision mettant en scène une sacerdotalisation des disciples de Jésus et de leurs successeurs dans un temple où se trouvent un autel sacrificiel et un nom ne prend tout son sens que quand on la compare à la vision d’une autre maison, vue en rêve par Judas. En voici à nouveau la description qu’en donne Judas à Jésus dans la traduction de P. Cherix (44,2-45,12) : Judas lui dit : « Je me suis vu dans la vision, les douze disciples me jettent des pierres, ils (45) me persécutent [beaucoup], et je suis revenu au lieu où […] derrière toi. J’ai vu une [maison spacieuse] et sa dimension, mes yeux n’ont pu la mesurer. Et de grands hommes l’entouraient et cette maison-là avait un toit de verdure. Et, au milieu de la maison, une foule […] [(Judas) disant] : « Maître, reçois-moi, moi aussi, à l’intérieur avec ces hommes ».
Pour ce qui est des caractéristiques de cette maison, si la première était grande (ⲛⲟϭ 38,2), celle-ci, par contraste, ne peut être mesurée (ⲡⲉϥϣ ̣ⲓ ̣ ⲛⲁⲃⲁⲗ ⲛⲁϣ ̣[ϣⲓⲧϥ ̄] ⲁⲛ 45,4) ; ici nul autel sacrificiel, nul nom, nul prêtre. Ce n’est plus le temple de Jérusalem. Le seul élément qui en est mentionné est son toit. Quant à ses occupants, il s’agit d’une foule. Enfin, elle est entourée par de « grands hommes » (45,5 ϩⲛ̄ⲛⲟϭ ⲛ̄ⲣⲱⲙⲉ) 35. Si le nombre douze réapparaît dans ce récit de vision, c’est pour l’appliquer encore aux disciples qui poursuivent Judas, et non à cette maison céleste ou à ses occupants. Le toit (ⲥⲧⲉⲅⲏ > στέγη) est qualifié, ⲟⲩⲥⲧⲉⲅⲏ ⲛⲟⲩⲟ ̣ ⲧⲉ. ̣ Le mot copte ⲟⲩⲟⲧⲉ a été compris par les premiers éditeurs et traducteurs comme une forme de ⲟⲩ(ⲟ)ⲧⲉ (Crum 493b), un mot signifiant « herbe », et a été traduit en conséquence 36. Toutefois, dès 2006, Jacques van der Vliet a interprété cette forme comme le féminin de l’adjectif ⲟⲩⲱⲧ 37, « unique »
35. « De grands hommes l’entouraient » (ϩⲛ̄ⲛⲟϭ ⲇⲉ ⲛ̄ⲣⲱⲙⲉ ⲕ ̣[ⲱ]ⲧⲉ ⲉⲣⲟϥ) : pour l’expression « grands hommes » (ⲛⲟϭ ⲛ̄ⲣⲱⲙⲉ) dans les textes séthiens, voir F. Morard, L’Apocalypse d ’Adam (NH V, 5), Québec-Louvain, 1985 pour (ⲛⲓⲛⲟϭ ⲛ̄ⲣⲱⲙⲉ NH V 66,10 ; 74,6 ; 75,2) ; de même, dans le Livre sacré du Grand Esprit invisible « les grands hommes du Grand Seth » (ⲛ̄ⲛⲟϭ ⲛ̄ⲣⲱⲙⲉ ⲙ̄ⲡⲛⲟϭ ⲥⲏⲑ (NH III 62,18-19 // IV 74,3-4 ⲛⲓⲣⲱ[ⲙⲉ ⲉⲧ]ⲛⲉⲁⲩ ⲛ̄ⲧⲉ ⲡⲓⲛⲟϭ ⲥⲏⲑ), et aussi NH IV 73,21-22 « les grands qui les entourent » ⲛⲓⲛⲟϭ ⲉⲧⲕⲱⲧⲉ [ⲉⲣ]ⲟⲟⲩ où cependant ⲛⲓⲛⲟϭ est peut-être une corruption de ⲛ̄ϭⲟⲙ, cf. NH III 62,10 ⲛ̄ϭⲟⲙ ⲉⲧⲕⲱⲧⲉ ⲉⲣⲟⲟⲩ) ; voir pour le texte copte A. Böhlig – F. Wisse , Nag Hammadi Codices III,2 and IV,2 : The Gospel of the Egyptians, Leyde, 1975). 36. « a roof of greenery » (Meyer 2006 ; 2007) ; « un toit de [feuillage] » (Kasser 2006, qui note, p. 44, « passage très obscur, particulièrement incertain ») ; « un toit de verdure » (Cherix 2012 [2006]) ; « ein grünes dach » (Brankaer, Bethge 2007) ; (Garcia Bazan 2006). 37. J. van der Vliet, Het Evangelie van Judas, Utrecht, 2006.
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(Crum 494a). C’est l’interprétation qu’a ensuite adoptée Marvin Meyer en 2008, suivi par plusieurs autres 38. Dans un article portant sur les liens entre la mystique juive et l’Évangile de Judas, Madeleine Scopello 39 signale, à propos de ce toit, que dans la littérature mystique juive, le toit est souvent une partie importante des palais célestes et rapproche ce passage de 1 Hénoch (14,1.17) 4 0, où ce toit est toutefois mentionné avec d’autres éléments architecturaux, fondations et murs. En mars 2008, Lance Jenott, qui ne connaissait vraisemblablement pas l’article de Madeleine Scopello publié la même année et qui rejette la traduction proposée par van der Vliet en 2006, fait le même rapprochement que Scopello avec 1 Hénoch, rapprochement qu’il reprend dans sa thèse publiée en 2011 41. Il va toutefois plus loin jusqu’à proposer de lire, au lieu de ⲟⲩⲟⲧⲉ, ̣ ⲟⲩⲉⲧⲉ, ̣ qui serait selon lui une variante phonétique non attestée de ⲟⲩⲏⲧⲉ (Crum 495a), qu’il interprète comme désignant l’éclair, et il traduit « roofed with lightning » 42 , rapprochant, lui aussi, ce passage du Livre des veilleurs qui décrit le toit du temple céleste formé d’éclairs en 1 Hénoch 14, une tradition qui sera reprise en 3 Hénoch 33,3 43. Cette lecture doit être rejetée, car elle n’est pas supportée par le manuscrit, dont l’examen autoptique révèle que la lecture d’un epsilon est matériellement impossible et que la lettre pointée ne peut être qu’un omicron 4 4 . S’il faut bien admettre que cette description de maisons célestes 38. Στέγη peut aussi désigner un abri, une habitation, une chambre « a single room » (van der Vliet 2006 ; Meyer 2008) ; « cuarto unico » (Santos, Ubierna 135) ; « única habitación » (Bermejo Rubio 2012) « unica stanza » (Devoti). 39. M. Scopello, « Traditions angélologiques et mystique juive dans l’Évangile de Judas », dans M. Scopello (éd.), The Gospel of Judas in Context. Proceedings of the First International Conference on the Gospel of Judas. Paris, Sorbonne, October 27th-28th, 2006, Leyde, 2008, p. 132. 40. « La base en était de feu, la superstructure, d’éclairs et d’étoiles filantes, le toit de feu flamboyant » ; traduction A. Caquot, « Hénoch », dans A. DupontSommer – M. Philonenko (éd.), La Bible. Écrits intertestamentaires, Paris, 1987, p. 488. 41. L. Jenott, « Gospel of Judas 45, 6-7 and Enoch’s Heavenly Temple », dans A. D. DeConick (éd.), The Codex Judas Papers. Proceedings of the International Congress on the Tchacos Codex Held at Rice University. Houston Texas, March 13-16, 2008, Leyde, 2010, p. 471-477 ; L. Jenott, The Gospel of Judas, Tubingue, 2011, p. 207. 42. L. Jenott, The Gospel of Judas, Tubingue, 2011, p. 161. 43. L. Jenott, « Gospel of Judas 45, 6-7 and Enoch’s Heavenly Temple », dans A. D. DeConick (éd.), The Codex Judas Papers. Proceedings of the International Congress on the Tchacos Codex Held at Rice University. Houston Texas, March 13-16, 2008, Leyde, 2010, p. 473. 44. Il ne sera pas utile de discuter ici les autres aspects problématiques de l’hypothèse proposée par Lance Jenott. Quant à la lecture de la lettre, la principale difficulté réside dans le fait que cet omicron ne semble pas fermé du côté droit, ce qui
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dans l’Évangile de Judas se situe dans une riche et longue tradition de descriptions célestes à laquelle appartiennent aussi 1 et 3 Hénoch, il faut néanmoins définitivement écarter cette « intertextualité hénochique », du moins pour ce passage, sur la base d’un « toit d’éclairs ». Il faut donc bel et bien lire ⲛⲟⲩⲟ ̣ ⲧⲉ, ̣ une forme féminine de l’adjectif ⲟⲩⲱⲧ (Crum 494a), dont on compte deux attestations dans le codex V de Nag Hammadi. Dans Eugnoste d’abord ϩⲛ̄ⲟⲩⲅⲛⲱⲥⲓⲥ ⲛ̄ⲛⲟⲩⲟⲧⲉ ⲉⲥⲧⲃⲃⲏⲟⲩⲧ « dans une connaissance une et pure » (NH V 17,14-15, le texte du codex III diffère) 45, puis dans la Deuxième Apocalypse de Jacques ⲛⲉⲩϫⲱ ⲙ̄ⲙⲙⲟⲥ ⲧⲏⲣⲟⲩ ϩⲛ̄ⲟⲩⲥⲙⲏ ⲟⲩⲟⲧⲉ « tous disaient d’une seule voix » (NH V 61,112-113) 4 6. Cette forme féminine de ⲟⲩⲱⲧ que ne connaît pas Crum est donc bien attestée 47. Seul élément matériel mentionné dans la description de cette maison céleste, il n’en demeure pas moins que ce toit « unique » doit avoir une fonction importante qui demande à être expliquée. Pour en saisir toute la portée, il faut d’abord revenir au texte copte avant correction : ⲁⲩⲱ ⲛⲉⲟⲩⲥⲧⲉⲅⲏ ̣ ⲛ ̣ⲟⲩⲟ ̣ ⲧⲉ ̣ ⲡⲉ ⲛ̄ϭⲓ ⲡⲏⲉⲓ ⲉⲧⲙ̄ ̣[ⲙⲁⲩ]
Cette phrase nominale suivie d’un sujet postposé introduit par la particule ⲛ̄ϭⲓ fait de celle-ci un usage irrégulier dont ce n’est toutefois pas le seul exemple 48. Sa traduction ne pose pas de problème : « …et c’était un toit le fait ressembler à un sigma. Toutefois, le manuscrit conserve des traces d’encre qui révèlent bel et bien un omicron. Je remercie Florence Darbre et Naomi Wenger, de la Fondation Bodmer, grâce à qui j’ai pu collationner les passages discutés ici et utiliser des photos numériques de meilleure qualité que celles qui sont disponibles sur le site de la National Geographic Society. 45. A. Pasquier , Eugnoste. Lettre sur le dieu transcendant (NH III,3 et V,1), Québec-Louvain, 2000, p. 94-95. 46. A. Veilleux, La Première Apocalypse de Jacques (NH V,3). La Seconde Apocalypse de Jacques (NH V,4), Québec, 1986, p. 152-153. 47. Je remercie Wolf-Peter Funk qui m’a signalé ces références. 48. La correction est justifiée dans l’editio princeps (p. 209, note ad 6-7) par le fait que le sujet d’une phrase nominale ne peut pas être introduit par la particule ⲛ̄ϭⲓ. Toutefois, les emplois irréguliers de cette particule ne sont pas rares. Crum (252a-b) signale des emplois de ⲛ̄ϭⲓ en bohaïrique et en sahidique pour la lexicalisation d’un pronom suffixe qui n’a pas de fonction de sujet dans la phrase, mais celle de complément. À Nag Hammadi, on trouve cet usage irrégulier dans l’Évangile de la vérité en NH I 38,12-15 ⲉⲩϣⲟⲟⲡ ϩⲁϩⲧⲏϥ ⲛ̄ϭⲓ ⲡⲓⲱⲧ « étant auprès de lui, le Père », de même, dans l’Évangile de Marc sahidique PPalau Rib.182 ⲟⲩⲛⲧϥ̄ ⲉⲝⲟⲩⲥⲓⲁ ⲙ̄ⲙⲁⲩ ⲛϭⲓ ⲡϣⲏⲣⲉ ⲙ̄ⲡⲣⲱⲙⲉ « à lui est l’autorité, le Fils de l’homme ». Voir H. Quecke , Das Markusevangelium Saïdisch. Text der Handschrift PPalau Rib. Inv.-Nr. 182 mit den Varianten der Handschrift M569, Barcelone, 1972, p. 71-72. Dans le Deuxième Traité du Grand Seth, on trouve quelques cas d’usage irrégulier de ⲛ̄ϭⲓ, en NH VII 58,17-18 ⲉⲁⲩⲡⲱⲧ ⲛ̄ⲥⲁⲃⲟⲗ ⲙ̄ⲙⲟϥ ⲛ̄ϭⲓⲡⲓⲕⲣⲱⲙ « ayant échappé au feu », cas semblable aux précédents ; en NH VII 62,36-38 ⲛ̄ϭⲓ remplace ϫⲉ : ⲉⲁⲩϯⲣⲁⲛ ⲉⲣⲟⲟⲩ […] ⲛ̄ϭⲓ ⲛ̄ⲉⲓⲟⲧⲉ ⲡⲁⲣⲁⲡϣⲱⲗ ̄ϩ ; autre cas obscur en NH VII 61,14-17. D’autre part, on rencontre un usage que l’on pourrait caracté-
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unique, cette maison… ». La formule n’en est pas moins étonnante. C’est sans doute cette bizarrerie, associée à l’emploi irrégulier de la particule ⲛ̄ϭⲓ, qui a amené les premiers éditeurs à corriger la phrase de la manière suivante : ⲁⲩⲱ ⲛⲉⲟⲩⲥⲧⲉⲅⲏ ̣ ⲛ ̣ⲟⲩⲟ ̣ ⲧⲉ ̣ ⲡⲉ ⲛ̄ϭⲓ ⲡⲏⲉⲓ ⲉⲧⲙ̄[ⲙⲁⲩ]
qu’on a traduite : « …et elle un toit unique, cette maison… ». Cette correction est d’importance : elle remplace un prédicat d’identité « était un toit unique » par un prédicat d’existence « avait un toit unique », qu’on attendrait lorsqu’il est question du toit d’une maison. Et c’est bien ce que l’on trouve dans la description de la maison céleste du Livre des veilleurs : elle a des fondations, des murs et un toit. Quant à notre toit, aucune fondation, aucun mur ne le soutient. Véritable aporie du texte, il flotte dans le récit onirique de Judas tel une énigme livrée au lecteur. La solution à cette énigme, comme souvent en de tels cas, est à chercher dans les Écritures 49. L’hypothèse que je propose ici, c’est que ce toit unique (ⲥⲧⲉⲅⲏ ⲛⲟⲩⲟⲧⲉ) renvoie à la seule occurrence du mot στέγη dans la Torah, en Gn 8,13 LXX 50, dans le récit du déluge, qu’il faut lire à la lumière de la protohistoire séthienne. En effet, dans la protohistoire séthienne, le déluge marque précisément à la fois le commencement du culte judéen auquel s’oppose l’Évangile de Judas, et l’introduction dans un autre éon des descendants de Seth, les
riser comme « appositionnel » de la particule ⲛ̄ϭⲓ, encore en NH VII 49,21-24 ⲛ̄oⲩϣⲁϫⲉ […] ⲛ̄ϭⲓⲡⲓϣⲁϫⲉ ⲉⲧϣⲟⲟⲡ ⲛ̄ϩⲏⲧϥ̄ ; NHVII 54,12-13 ̄ϩ ⲛ ̄ⲧⲉⲩⲉⲛⲛⲟⲓⲁ ⲉⲧϣⲟⲩⲉⲓⲧ ⲛ̄ϭⲓⲡⲉⲩⲥⲱⲃⲉ ; de même, en bohaïrique, après le sujet de la phrase nominale : ⲛ.ⲑⲟϥ ⲟⲛ ⲡⲉ ⲡⲓⲙⲉⲑⲣⲉ ⲛ.ⲧⲉⲧⲁⲓⲁⲣⲉⲧⲏ ⲛ.ϫⲉⲡⲉⲛϭ ⲥ̄ϧ ̄ⲉⲛⲡϫⲓⲛⲑⲣⲉϥⲑⲁⲙⲓⲟ ⲙ.ⲡⲓⲣⲱⲙⲓ ⲙ.ⲙⲁⲩⲁⲧϥ ⲁⲛ « C’est lui aussi le témoin de cette vertu, notre Seigneur, non seulement dans son activité de créer l’homme… » (Vat. Copt. 66, fol. 289r : voir G. L afontaine , « La version copte bohaïrique du discours ‘Sur l’amour des pauvres’ de Grégoire de Nazianze », Le Muséon 93 (1980), p. 199-236. C’est ce type d’usage que l’on aurait ici. Je remercie Wolf-Peter Funk pour la discussion de cette question et les références qu’il m’a fournies. 49. Voir L. Painchaud, « The Use of Scripture in Gnostic Literature », Journal of Early Christian Studies 4 (1996), p. 129-147 ; et pour ce qui concerne les allusions scripturaires dans l’Évangile de Judas, voir L. Painchaud, « ‘Elle s’écroulera bientôt la colonne de feu’ (EvJud 42,18-19). Observations préliminaires sur l’utilisation des Écritures juives dans l’Évangile de Judas », dans R. Gounelle – B. Mounier (éd.), La littérature apocryphe chrétienne et les Écritures juives, Prahins, 2015, p. 145-161 ; S. Cazelais – L. Painchaud, « ‘What is the Advantage ?’ (Gos.Jud. 46.16) : Text, Context, Intertext », dans A. DeConick (éd.), The Codex Judas Papers. Proceedings of the International Congress on the Tchacos Codex held at Rice University. Houston Texas, March 13-16, 2008, Leyde, 2009, p. 437-452. 50. Καὶ ἀπεκάλυψεν Νωε τὴν στέγην τῆς κιβωτοῦ (Gn 8,13 Rahlfs). Le mot στέγη apparaît aussi en Gn 19,8, mais seulement dans le ms. Alexandrinus.
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protoséthiens 51. Hans-Martin Schenke découpe l’histoire mythique des séthiens en quatre âges, dont le premier se termine avec le déluge d’eau, et le deuxième avec le déluge de feu qui frappa Sodome, chaque événement étant le cadre d’une intervention salvifique pour les séthiens 52 . L’Apocalypse d’Adam du codex V de Nag Hammadi, un texte séthien selon la classification proposée par Schenke, dans le récit qu’il fait du déluge (71,4-25), fait intervenir des « hommes issus d’une autre gloire » ou d’une « autre génération ». Puis, après une lacune, ces hommes-là sont introduits dans une terre qui leur convient et une « demeure sainte » leur est bâtie (72,3-6) ; ces hommes, qui sont issus de la grande gnose éternelle (73,18-20), sont les descendants de Seth ou protoséthiens. Ils sont la cause du déluge 53 et sont enlevés vers une demeure céleste alors que le Démiurge donne la terre en partage à Noé et à ses fils, ce qui marque le commencement du culte judéen 54 . Les détours exégétiques par lesquels le στέγη de Genèse 8 LXX (et peut-être de Gn 19) serait devenu l’unique refuge des protoséthiens ne nous sont pas connus. À la lumière du mythe séthien toutefois, il paraît peu vraisemblable que l’occurrence du mot στέγη (ⲥⲧⲉⲅⲏ) à la fois dans la description de la maison vue par Judas, refuge de la génération sainte, et dans le récit du déluge d’eau en Gn 8, soit l’effet d’une simple coïncidence. Je fais donc l’hypothèse que l’identification de la maison vue en rêve par 51. Dans l’Apocryphon de Jean (BG 71,3-72,12 et NH III 36,15-37,14), le déluge marque le début de la domination de l’Esprit contrefait sur l’humanité ; voir le commentaire de Bernard Barc, dans B. Barc – W.-P. Funk , Le livre des secrets de Jean : recension brève (NH III, 1 et BG 2), Québec-Louvain-Paris, 2012, p. 317327 ; voir aussi B. Barc , l’Hypostase des archontes (NH II 92,4-18), dans B. Barc – M. Roberge , L’Hypostase des archontes. Traité gnostique sur l ’origine de l ’homme, du monde et des archontes (NH II,4) suivi de Noréa (NH IX,2), Québec-Louvain, 1978, p. 110-113. 52. H.-M. Schenke , « Das sethianische System nach Nag-Hammadi-Handschriften », dans P. Nagel (éd.), Studia Coptica, Berlin, 1974, p. 163-175 ; aussi J. D. Turner , « Time and History in Sethian Gnosticism », dans H.-G. Bethge – S. E mmel – K. L. K ing – I. Schletterer , For the Children, Perfect Instruction. Studies in Honor of Hans-Martin Schenke on the Occasion of the « Berliner Arbeitskreis für koptisch-gnostische Schriften » Thirtieth Year, Leyde, 2002, p. 203-214, sp. 209. 53. Dans le Livre sacré du Grand Esprit invisible (NH III 61,1-15// IV 72,1026) le déluge et les autres cataclysmes surviennent à cause de la grande race incorruptible (ϯⲛⲟϭ ⲛⲅⲉⲛⲉⲁ ⲛⲁⲫⲑⲁⲣⲧⲟⲥ NH III 61,12-13). 54. F. Morard, « Apocalypse d’Adam », dans J.-P. M ahé – P.-H. Poirier (éd.), Écrits gnostiques. La bibliothèque de Nag Hammadi, Paris, 2007, p. 777-805 ; L’Apocalypse d ’Adam (NH V, 5), Québec, 1985, commentaire p. 83-92 ; voir aussi A. F. J. K lijn, « An Analysis of the Use of the Story of the Flood in the Apocalypse of Adam », dans R. van den Broeck – M. J. Vermaseren (éd.), Studies in Gnosticism and Hellenistic Religions Presented to Gilles Quispel on the Occasion of his 65th Birthday, Leyde, 1981, p. 218-226 ; voir aussi le Livre sacré du Grand Esprit invisible NH III 60,12-14 et NH IV 74,17-75,4.
PRÊTRES ET « TOIT UNIQUE »
263
Judas à un toit unique voudrait signifier que cette maison à laquelle il n’aura pas accès est l’unique στέγη des Écritures, devenu le refuge des descendants de Seth. Je propose donc de ce passage la traduction suivante (44,24-45,12) : Judas lui dit : « Je me suis vu dans une vision : les douze disciples me jetant des pierres 45[me] poursuivaient […] . et je retournai vers le Lieu s[aint] à ta [recherche] et je vis [une maison ] . et sa dimension, mes yeux ne purent [la mesurer]. De grands hommes l’entouraient et elle était un toit unique, cette maison-là. Et dans le milieu de la maison il y avait une fou[le ]..[ ].[ ] . . [ » ] » . « Maître, accepte-moi à l’intérieur, moi aussi avec ces hommes. »
Cette interprétation de ce « toit unique » éloigne l’Évangile de Judas du Livre d’Hénoch et de la mystique juive. Elle a toutefois le mérite de le situer dans le contexte de la protohistoire « séthienne » 55.
III. Conclusion En résumé et pour conclure, comme l’a bien vu Madeleine Scopello, l’Évangile de Judas utilise deux descriptions de maisons célestes qui le placent, avec 1 Hénoch, l’Apocalypse de Jean, et bien d’autres textes judéens ou judéens chrétiens, sur une trajectoire qui mène vers la littérature des palais. La première de ces visions, celle d’un temple où les disciples, identifiés aux prêtres du culte judéen, officient un culte sacrificiel, met en scène une sacerdotalisation péjorative des ministres chrétiens en tant que prêtres du culte judéen entendu comme celui de l’Archonte Saklas, inauguré après le déluge. Cette représentation péjorative des disciples de Jésus et de leurs successeurs comme les prêtres ne prend sa source ni dans une critique du sacerdoce païen, ni même dans une critique de la conception d’un sacerdoce chrétien lié à la présidence du sacrifice eucharistique, mais plutôt dans une conception du sacerdoce chrétien comme le prolongement du sacerdoce judéen qui en serait le modèle scripturaire. L’Évangile de Judas est sans doute le seul témoin qui nous soit parvenu d’une sacerdotalisation péjorative des disciples de Jésus et de leurs successeurs comme expression du refus d’une perpétuation du culte judéen par ceux qui se réclament de Jésus. Il est difficile de déterminer si cette sacerdotalisation des disciples de Jésus et de leurs successeurs est une réaction secondaire à une « sacerdotalisation lévitique » déjà en cours, dont une thèse récente montre qu’elle s’est produite à la fin du ii e et au début du iii e 55. En outre, le jeu intertextuel induit par cette allusion à Gn 8 et à l’arche dans le contexte de la vision d’une maison céleste oriente en direction de l’interprétation de l’arche comme le modèle du Temple ; voir B. Barc , Siméon le juste, l ’auteur oublié de la Bible hébraïque, Turnhout, 2015, p. 195.
264
LOUIS PAINCHAUD
siècle, au moment où commence à se développer une conception de l’Église chrétienne comme une polis distincte et à apparaître une culture matérielle chrétienne spécifique, des espaces sacrés voués au culte qui requéraient la garde de prêtres 56. Martha Himmelfarb a déjà montré comment le Livre des veilleurs a décrit une maison céleste et les troupes angéliques comme un temple et des prêtres pour opérer un contraste avec le temple terrestre et ainsi formuler une critique implicite de celui-ci 57. C’est exactement dans ce mouvement qu’il faut situer l’Évangile de Judas, qui oppose deux maisons célestes pour formuler une critique implicite de l’idéologie sacrificielle et de la sacerdotalisation des ministères qu’il perçoit comme une judaïsation et une trahison de l’enseignement de Jésus. Les visions que décrit l’Évangile de Judas s’inscrivent donc dans une tradition de description de maisons ou temples célestes à laquelle appartient aussi 1 Hénoch, mais pour critiquer l’émergence d’un sacerdoce chrétien perçu comme la continuation du sacerdoce judéen voué au culte sacrificiel de Saklas.
56. B. A. Stewart, Priests of My People. Levitical Paradigms for Early Christian Ministers, New York, 2015. 57. M. Himmelfarb , Ascent to Heaven in Jewish and Christian Apocalypses, Oxford-New York, 1993.
I NDEX DES SOURCES A u teu r s
cl a s siqu e s /
Platon Phèdre 274-275 15 Timée 188
B i bl e
h é br a ïqu e /
Genèse 3,24 29 5 28 5,2 28 5,21-24 13 ; 21 ; 28 5,24 29-31 ; 37 5,25 38 8 262-263 8,13 (LXX) 247 ; 261 19 262 19,8 (LXX) 261 41 198 41,8 198 42,1 157 44,16 157 44,24-45,12 (LXX) 263 Exode 3,15 84 12,2 36 14,20 115 15,1 115 15,18 120 17-22 17 ; 20 25 29 25,8-9 20 25,9 17 25,17-22 17 25,40 17 27,31 88 29-30 20 33,20 212 34,27 15 37,7-9 20 40 17 Lévitique 8-9 20 16 20 19,32 50 23 20 ; 25
L i tt é r at u r e
cl a s siqu e
Cicéron De natura deorum III,56
193
A nci e n Te s ta me n t 23-25 20 25 20 Nombres 15,41 104 ; 107 ; 131 23,9 158 28-29 25 Deutéronome 6,1 131 6,4 103 ; 107 ; 114 ; 116 17,11 15 29,9 115 1 Samuel 29,4 157 2 Samuel 6,5 49 22,1 49 1 Rois 6,23-28 20 6,24-32 29 8,6-7 20 8,18-30 (LXX) 256 8,16 (LXX) 256 8,18 (LXX) 256 8,19 (LXX) 256 8,20 (LXX) 256 8,29 (LXX) 256 8,44 139 11,32 140 14,21 140 2 Rois 14,10 157 21,2-18 210 21,7 140 21,8 211 Isaïe 2,2-3 140 4,3 209 6 153
266 6,2 6,3 6,5 6,10 7,14 9,6 10,23 12,5-6 27,12-13 28,22 29,19ff 32,15 33,17-24 40,3 40,10 41,8-9 43,12 44,24-28 45,13 49,1 49,16 49,17 49,18 49,19-20 51,5 51,9 52,9 54,11-17 54,14 57,15 60,2-3 60,1-22 60,9-17 61,1-11 61,4 62,1-12 65,17 65,17-25 66,22 Jérémie 23,29 30,2 31-33 31,22 31,31 31,32 31,33 31,38-40 36,2 36,17
INDEX DES SOURCES
115 96-97 ; 102-108 ; 110 ; 113-124 ; 126-128 ; 130 212 212 209 209 215 209 140 235 209 209 141 209 209 209 83 141 140 209 142 141 140 140 209 209 141 140 141 209 140 141 141 209 141 141 140 141 140 85 48 207 207 207 207 207 141 48 48
36,28 49,4 Ézéchiel 1 1,10 1,15-21 1,26 3,12 5,5 10 10,1 14,14 14,18 14,20 38-39 38,12 40-48 44,15 47,1-12 47,13-48,29 48,16 48,30-35 48,35 Joël 3,2 3,9-12 Amos 9,14-15 Michée 4,1 Sophonie 3,19-20 3,20 Habacuc 3,3 Zacharie 1,17 2,8 8,4-5 8,7-8 9-14 11,8 14,14 14,8 14,9 Malachie 3,1
48 157 20 ; 46 ; 50 17 ; 239 50 50 96-97 ; 103-108 ; 110 ; 113-114 ; 116-117 ; 119120 ; 122-124 ; 126-128 ; 130 ; 170-171 ; 175 140 20 50 176 176 176 140 140 142 ; 239 24 140 140 142 142 139 140 140 141 140 140 141 64 141 141 141 140 139 176 176 140 120 209
INDEX DES SOURCES
Psaumes 3,1 49 4,1 49 5,1 49 6,1 49 8,1 115 10,16 120 29 153 32 156 42 87 ; 156 42,3 87 44 156 46 140 48 140 52,3 157 68,18 107-108 68,26 115 86,8 83 93 120 97,1 120 99,5 121 96,6 89-90 102,25-27 140 103 153 103,7 86 145,13 87 146,10 104 ; 108 ; 120 ; 124 Job 38,7 114
Te x te s
de
1Q21 154 1Q28 (1QS) I 1-III 12 160 1Q28 III 1 158 1Q28 III 4 158 1Q28 III 13-IV 26 161 1Q28 V 11,18 158 1Q28 VI 3-4 159 1Q28 VI 8 164 1Q28 VIII 1 159 1Q28 VIII 5-6 159 1Q28 XI 7b-8 159 1Q28a (1QSa) II 8-9 161 1Q28b (1QSb) 160-162 1Q28b III 25-26 158 1Q28b IV 25 158 1Q28b IX 12-XI 22 161 1Q33 (1QM) XII 1-2 109 1Q33 XVII 7 175
267
Cantique des Cantiques 1,1 115 6,10 115 13 149 Daniel 7,25 36 8,13 116 8,25 178 9,24 236 9,27 133 ; 235 11,31 133 12,1 133 ; 175 12,1-3 156 12,11 133 Esdras 10,25 140 10,50 140 10,55 140 Néhémie 12,10-11 24 12,26 24 1 Chroniques 5,34-41 24 24 25 24,6 24 28,18 20 ; 29 28,18-19 17 2 Chroniques 3,11-13 20 33,1-20 210
Qumr â n
et a ppa r e n t é s
1Q34bis 207 109 1QHa XI 22-23 109 1QHa XIX 13-14 2Q24 3,2 140 4Q174 1-2 162 4Q174 21 i 4-5 162 4Q181 1 ii 3 158 4Q209 29 4Q213-4Q214 154 ; 239 4Q286-290 159 4Q286 7 i 2-7 109 4Q365a 142 4Q387 3,7-8 35 4Q392 1,9 153 4Q400-407 145 ; 147-148 ; 152 ; 154 4Q400 1 i 1-3 109 4Q400 1 i 2 151
268
INDEX DES SOURCES
4Q400 1 i 3-4 150 4Q400 1 i 10,17 150 4Q400 1 i 16 151 ; 158 4Q400 1 i 19-20 150 4Q400 1 ii 3 153 4Q400 1 ii 6 151 4Q400 1 ii 7 151 4Q400 2,1 et 6-7 109 4Q400 2,3 151 ; 153 4Q400 2,6 157-158 4Q400 2,6-8 155 ; 157 4Q400 2,8 158 4Q400 2,7 151-152 4Q400 6,7 109 4Q403 1 i 22 151 4Q403 1 i 28 153 4Q403 1 i 30 148 4Q403 1 i 30-31 151 4Q403 1 i 31-33 151 4Q403 1 i 34 153 4Q403 1 ii 19 150 4Q403 1 ii 20 153 4Q403 1 ii 23 150 4Q403 1 ii 26 151 4Q405 148 4Q405 3,6 151 4Q405 13,6 151-152 4Q405 15-16 ii 3-5 152 4Q405 17,4-5 150 4Q405 19,2-8 152 4Q405 19,7 150 4Q405 20-22 ii 6-14 152 4Q405 20-22 ii 9 150 4Q405 23 i 3 150 ; 153 4Q405 23 i 5-6 151 4Q405 23 i 8 150 4Q405 23 ii 1-13 152 4Q405 23 ii 5-6 152 4Q405 23 ii 12 151 4Q405 49,3 150 4Q405 81,2 150 4Q407 1,3 150
É cr i ts
4Q427 7 i + 9 13-18 110 4Q462 1,14 141 4Q471b 1a-d,1 158 4Q491 11 i 14 158 4Q503 159 ; 161 4Q503 4,8 110 4Q503 7-9,3-4 110 4Q503 10,1-2 110 4Q503 37-38,21 110 4Q504-506 161 4Q504 1 i 7 159 4Q504 1-2 vii 4-9 110 4Q504 2 vii 7 159 4Q504 3 ii 3 159 4Q504 4,15 159 4Q504 6,9 158 4Q511 155 ; 161 4Q537 239 4Q540-541 154 4Q541 239 4Q554 142 4Q554 2 ii 15 140 4Q554 4,1-2 140 4Q554a 142 5Q13 21-22 ; 28 ; 30 32 ; 37 5Q15 142 5Q405 23 i 9 151 11Q5 22,11-12 140 11Q17 145 ; 147-148 ; 150 ; 152 ; 154 11Q17 VI 7 150 11Q17 IX 9 150 11Q17 X 6 150 11Q17 16-18,9-15 151 11Q17 21-22,3-5 151 11Q17 37,1 150 11Q19 9,13 153 CD A XV 17 161 CD VIII 207 Massada 1k 145 ; 147-148 j u déo - h e l l é n i s t iqu e s
Josèphe, Flavius Antiquités juives 11.347 24 Baruch 5,1 140 1 Maccabées 10,18-21 35
11,57 35 14,38-39 35 Philon d’Alexandrie De Somniis 2,37-38 143 De Vita Contemplativa 83-85 ; 159
269
INDEX DES SOURCES
N ou v e au Te s ta me n t Évangile de Matthieu 1,18-23 3,3 11,10 Évangile de Marc 1,2-3 Évangile de Luc 1,15 1,17 1,19 1,28 1,31-35 1,32-33 1,35 1,50-53 1,51 1,54-55 1,72-76 1,76 3,1 3,4 5,39 7,27 18,12 24,36 Évangile de Jean 1,23 3,28 Actes des apôtres 1,14 1,21-22 2,42 2,46 2,42-47 6,7
Épître aux Romains 11,32 207 15 240 1ère Épître aux Corinthiens 6,4 207 6,6 207 12,13 207 15,41 203 2e Épître aux Corinthiens 5,17 207 12 213 12,5 209 Épître aux Galates 3,31 207 4,26-27 142 5,5 207 Épître aux Éphésiens 2,11-16 207 4,22-24 207 Épître aux Colossiens 3,9-10 207 Épître aux Hébreux 8,1-5 143 8-10 207 9,11-12 143 12,22 142 13,14 142 Apocalypse de Jean 3,12 139 21,2 139 21,2-22,5 142 21,11-21 140 21,16 142 21-22 142 21-25 141
209 209 209 209 209 209 179 209 209 209 209 209 209 209 209 209 210 209 207 209 257 214 209 209 256 214 256 256 256 256
É cr i ts Apocalypse d’Adam 71,4-25 72,3-6 73,18-20 Apocalypse de David 16 Apocalypse d’Elie 1,10 Apocalypse d’Esdras 7,26 8,52
262 262 262 124 ; 128 142 142 142
a pocry ph e s
9,27-10,59 10,27-59 13,36 Apocryphe de Jean I1 Apocryphe de Jérémi Ascension d’Isaïe I1 I2 I3 I4
143 142 142 214 35 208 208 208 208
270
INDEX DES SOURCES
I9 211 II 4 211 II 6 210 II 9 212 III 1 212 III 8f 212 III 13 212 III 14 214 III 14.18 214 III 18 214 III 23 214 III 24 214 III 27 214 III 29-30 214 III 31 214 IV 3 214 VI 15 209 VIII 11 209 VIII 17 208 IX 8-10 210 IX 9 206 IX 14-18 214 XI 3 214 2 Baruch 4,1-6 142 32,1-5 142 68,5-7 142 3 Baruch 11-15 175 4 Baruch 5 141 Constitutions apostoliques 1-7 106 7 106 ; 108 8 108 12 108 33-38 108 35 108 Doctrine des douze apôtres ou Didachè 13,1 257 1 Hénoch 1-36 30 ; 135 8,4-9,11 171 14 259 14,1 247 14,8-25 17 ; 19 ; 21 14,15-18 249 14,17 247 15,1 17 17,3 175 24,6 175 26,1 140
40,9 171 45,3-5 140 71 29-30 71,5-13 21 72-82 17 ; 21 ; 29-30 ; 37 81-83 30 81,5 30 81,1-3 17 85-90 135 87,2-3 177 89-90 176 89,73-74 134 90,28-36 141 90,28 142 90,36 142 91,11-17 135 91,12-13 139 91,14 140 91,16 140 93,1-10 135 2 Hénoch 1,2 33 ; 37 55,2 142 Oracles sibyllins 3,710-723 140 4,6-11 143 5,420-428 140 Jubilés 4 37 4,17-18 19 ; 21 4,18-19 30 4,17-19 29 4,22-23 29 4,23 17 ; 33 4,23-24 30 4,25 30 5-6 29 8,12 140 8,19 140 Martyre d’Isaïe 3,16-17 175 Psaumes de Salomon 11,2-6 140 17,26 140 17,30-31 140 Siracide / Livre de Ben Sira 36,13-16 140 44,16 29 49,20 29 51,29 24
271
INDEX DES SOURCES
Testament d’Abraham Recension B11 30 Testament de Daniel 5,12-13 140 Testament d’Isaac 1,6 175 Testament de Moïse 135 Testament de Nephtali (hébreu) 8-9 175 Testaments de Douze patriarches 218 ; 223-224 ; 220 ; 225-227 Testament de Lévi 1 233 2,10 238 8,1-11 239 8,14-15 239 10,2-4 236 13 223 13,1-3 242 13,7 242 13,9 242 14 243 15,1-2 236 16,1-2 236 18,1-3 241 18,6-7 241 Tobit 13,10 142 13,10-14 140 13,11 140 13,12 142 13,16 141 13,16-17 140 14,5 140 Vision de Gabriel 7 168 ; 175 12 168 ; 175 11 169 13 169 13-14 175 14 171 ; 175 15 176
É cr i ts Avot de Rabbi Nathan 18,34a 81 Mishna Avot 3,2 44 Berakhot 7a 38
16 16-17 17-18 19 20 20-21 21 21-23 23 23-24 24-25 25-26 25 26 26-29 27-29 28 30-34 35 37 38 54 57 57-59 65 65-68 66-67 67 69 70 70-79 71 72 75 76 77 77-87 79 80 80-81 82 83 87
170 169 169 176 169 169 181 169 169-170 170 171 171 174 168 ; 177 171 175 178 176 169 175 169 ; 175 176 175 166 176-177 177 174 ; 176-177 176-177 175 176 176 169 169-170 176 176 168 178 176 176 178 169 ; 175 ; 179 176 ; 179 168
r a bbi n iqu e s
Ḥagiga 1,1 2,1 Rosh ha-Shana 1,1 2,8-9
38 20 37 40
272
INDEX DES SOURCES
Tosefta Berakhot 1,9 116 Ḥagiga 2,1-2 20 2,1-7 27 2,2 33 14b 81 Horayot 2,2 49 Meggila 3,24 50 Sanhedrin 7,8 51 Zabim 1,5 81 Talmud de Jérusalem Berakhot 4,1 46 5,1, 9a 51 5,3 116 7c-d 46 Ḥagiga 2,1 33 ; 49 77a-d 27 ; 49 Bikkurim 3,3, 65c 51 Shekalim 48c 81 Talmud de Babylone Avoda Zara 10a-b 91 18a 44 Berakhot 21b 116 Ḥagiga 11,2 20 11b-16a 27 14a 38 14b 59 14b-15a 33 ; 38 15a 30 ; 49 15b 34 Ḥullin 91b-92a 114 ; 116-117 Menaḥot 29b 81 ; 88 Nidda 17a 62 Sanhedrin 10a 40 10 37 ; 40
86a 81 88b 89 Shabbat 89a 86 104a 76 104b 76 Bereshit Rabba 1,12 83 5,2 28 21,1 116 25 38 65,21 119 71 90 75 Bamidbar Rabbah Vayikra Rabbah 2 116-117 8 116-117 Shemot Rabbah 7 115 15 115 16 115 15,6 115 15,7 117-118 23,7 115 ; 117 Debarim Rabba 2,33 116 Esther Rabba I,2 90 Shir ha Shirim Zuta 1,1 115 ; 117 Qohelet Rabba 6,8 90 Elyahu Rabba 13 116 Midrash Tanḥuma (ed. Buber) Mabo 63b-64a 116 Midrash Tanna’im (ed. Hoffmann) Qedoshim 6 119 Melkhita de Rabbi Ishmael 75 Otiyyot de-Rabbi Akiva Version A Aleph 79-80 ; 82-87 ; 89 ; 91 Waw 82-83 ; 85 ; 91 Zayin 91 Ḥet 90 Mem 82 ; 86 Ṣade 82 ; 88 Tet 91 Kaf 91 He 80
273
INDEX DES SOURCES
Yod Samekh Pesiqta Rabbati 20 Seder Rabba Bereshit 847 Sefarim Hitzonim Sifre Deutéronome 306
353 90 Pirqè de Rabbi Eliezer 3 90 4 114 ; 116-118 Seder Rab ‘Amram Ga’on 105 Siddur Rab Sa‘adya Ga’on 105 ; 130
80 89 86
178 40 117
Ta rgu ms Targum d’Ézéchiel Targum Jonathan Genèse 5,24
170
Targum Onkelos Genèse 5,24
30-31
Pèr es Augustin d’Hippone Cité de Dieu, VIII 23 187 Cyrille d’Alexandrie Contre Julien I 41 189 ; 200 I 46 200 I 48 200 Clément de Rome Épître aux Corinthiens 40,1 257 Irénée de Lyon Contre les hérésies I 3,2 214 I 27,3 206
É cr i ts
de l’É gl i se
I 30,14 214 I 31,1 257 Justin Martyr Dialogue avec Tryphon 116,3 242 Tertullien Contre Marcion I 8,1 206 I 9,1 206 IV 4 204 V9 213 V 16,3 206 Traité de la chair 8 213
a s si m i l é s au x
Sefer Hekhalot/ 3 Hénoch 1 122 2 123 12,5 38 17,3 175 25 123 33,3 259 37-38 172 43 123 51 123 52 123 53 123 55 172 56 123 57 122-123 58 123 71 122-123 ; 172
37
H ek h a lot
71-73 79 71-80 79 ; 83 ; 85 78 178 Hekhalot Rabbati (ed. Schäfer) 81-86 67 ; 70 91-93 67 ; 70 94-106 67 95 123 97 123 101 119 ; 123 107-113 68 107-121 58 110 237 117-121 68 121 234 ; 237 123 233 126 119 ; 123
274
INDEX DES SOURCES
134 134 229-230 68 136 234 229-231 62 137 236 229-236 67 146 123 229-237 62 ; 67 152-196 67 231-232 62 161 120 233 62 163 120 234 63 164 120 235 63 179 121 236 63 188 123 236-240 61 192 123 237 63 198 58 237-240 67 198-199 238 238 63 198-201 61 238-240 67 198-203 58 ; 67 238-249 63 198-259 58 ; 61 ; 68-69 239-240 63 199 59 240 36 ; 62 200 58 241 63 201 59 241-242 65 202 59 241-259 67 203 59 242 63 204 59 243 63 204-212 59 243-244 65 204-223 67 244 64 205 59 245-247 64 206 60 246-250 61 207-212 60 248 64 213 60 249 64 213-214 61 250 64 213-216 60 ; 67 250-257 64 ; 67 214 60 251 64 215 60 252-257 64 216 60 253 64 217-218 60 257 64 218 235 258-259 64 219 61 258 64 219-220 61 259 59 ; 65 219-223 61 ; 67 268-276 65 219-231 66 269-277 67 221-223 61 ; 68 273 123 222-223 61 277 65 223 65-67 279 241 223-224 66 283 235 223-229 61 289 242 224 62 ; 67 298 242 224-228 61 ; 65-67 306 123 225 62 Hekhalot Rabbati (éd. Smith) 226-227 62 13 119 228 36 23 121 229 61 ; 65 82 48 ; 52
INDEX DES SOURCES
92 48 ; 50 93 51-52 94 50 97 48 98 48 99 55 101 48 104 54 105 40 106 48 ; 50 111 51 112 48 119 48 120 44-45 121 45 126 48-49 130 52 131 104 134 52 140 52 155 50 160 50 ; 52 162 49 170 104 172 50 ; 52 178 52 182 50 183 52 185 52 187 48 188 50 ; 54 201 46 201-203 45 ; 47 202 45 ; 47 203 46 225 46 228 47 232 47 ; 50 233 47 234 47 239 47 240 47 273 54-55 288 55 289 242 290 51 291 51
298 242 Hekhalot Zutarti (éd. Schäfer) 334 93 336 93 337 81 ; 84 341 28 342 81 344 81 351 122-123 353 83 364 122 384-390 39 389 28 405 28 407-408 64 408 59 421 81 442 123 490 173 ; 178 491 122 Ma’aseh Merkava (éd. Schäfer) 550-551 121 554 83 555 (Oxford 1531) 123 554-555 (Oxford 1531) 173 558 121 564 121 571 121 585 (Oxford 1531) 173 590 173 596 123 Merkava Rabba (éd. Schäfer) 659-663 84 672 34 675 86 678 89 Shi‘ur Qoma 376 172 734 86 Fragments du vieux-Caire EVR II A 471 75 T.-S. C 2b l. 45ss. 85 T.-S. C 2.3 75 T.-S. C 2.160 75 T.-S. K 1.36 75 T.-S. K 21.95 85
C or a n 38,71-75
54
275
276
INDEX DES SOURCES
N ag H a mm a di I,1 : Évangile de la vérité 38,12-15 260 II,1 : Livre des secrets de Jean (v. longue) ou Apocryphon de Jean 29,11-12 254 II,4 : Hypostase des archontes 92,4-18 262 III,1 : Livre des secrets de Jean (v. brève) ou Apocryphon de Jean 36,15-37,14 262 38,4-5 254 III,2 : Livre sacré du grand esprit invisible (ou Évangile des Égyptiens) 61,1-15 262 62,10 258 62,18-19 258 III,3 : Eugnoste le Bienheureux 260 IV,1 : Livre des secrets de Jean ou Apocryphon de Jean 45,8-9 254 IV,2 : Livre sacré du grand esprit invisible (ou Évangile des Égyptiens) 72,10-26 262 73,21-22 258 74,3-4 258
V,1 : Eugnoste le Bienheureux 17,14-15 260 V, 3 : Première Apocalypse de Jacques 251 V, 4 : Deuxième Apocalypse de Jacques 61,112-113 260 V,5 : Apocalypse d’Adam 66,10 258 71,4-25 262 72,3-6 262 73,18-20 262 74,6 258 74,13 254 75,2 258 VI,6 : L’Ogdoade et l’Ennéade 187 VII,2 : Deuxième Traité du Grand Seth 49,21-24 261 54,12-13 261 58,17-18 260 61,14-17 260 62,36-38 260 VIII 2 : Lettre de Pierre à Philippe 251 XI, 3 : Allogène 251
B e rol i n e nsi s G nos t icus Livre des secrets de Jean 73,11-12 254 73,12 254
C ode x Tch acos 39,7-40,1 248 44,2-45,12 248 44,23-45,12 248 44,24-45,12 263 45,4 258 45,5 258 45,6 248
Évangile de Judas 34,3-22 256 37,20-38,11 255 38,1-11 248 38,2 258 38,4-5 255 38,5 248 38,13-39,5 256
É cr i ts Corpus Hermeticum I 192 I,2 192
h e r m ét iqu e s
I,26 192 I,30 192 IV 189
INDEX DES SOURCES
XVI 191 Stobai Hermetica 23 186 ; 193 23,32 191 23,7 199 32 193
Au t r e s Jamblique Réponse d’Abamon I 1-2 I2 VIII 1 Julien l’Apostat Contre les Galiléens
184 200 186 200
34 193 Asclepius 24-25 187 37-38 201 Cyranide
te x te s
Marcion de Sinope Évangile de Marcion 3,16 208 4,31 208 Kitab al-anwar wal-maraqib I 4.2 79
277
Judaïsme ancien et origines du christianisme 1. Régis Burnet, Les douze apôtres. Histoire de la réception des figures apostoliques dans le christianisme ancien (2014) 2. Thierry Murcia, Jésus dans le Talmud et la littérature rabbinique ancienne (2014) 3. Christian Julien Robin (éd.), Le judaïsme de l ’Arabie antique. Actes du Colloque de Jérusalem (février 2006) (2015) 4. Bernard Barc, Siméon le Juste: l ’auteur oublié de la Bible hébraïque (2015) 5. Claire Clivaz, Simon Mimouni & Bernard Pouderon (éds), Les judaïsmes dans tous leurs états aux Ier-IIIe siècles (les Judéens des synagogues, les chrétiens et les rabbins). Actes du colloque de Lausanne, 12-14 décembre 2012 (2015) 6. Simon Claude Mimouni & Madeleine Scopello (éds), La mystique théorétique et théurgique dans l ’Antiquité gréco-romaine (2016) 7. Pierluigi Piovanelli, Apocryphités. Études sur les textes et les traditions scripturaires du judaïsme et du christianisme anciens (2016) 8. Marie-Anne Vannier (éd.), Judaïsme et christianisme chez les Pères (2015) 9. Simon Claude Mimouni & Louis Painchaud (éds), La question de la « sacerdotalisation » dans le judaïsme synagogal, le christianisme et le rabbinisme (2018) 10. Adriana Destro & Mauro Pesce (éds), Texts, Practices, and Groups. Multidisciplinary approaches to the history of Jesus’ followers in the first two centuries. First Annual Meeting of Bertinoro (2-5 October 2014) (2017) 11. Eric Crégheur, Julio Cesar Dias Chaves & Steve Johnston (éds), Christianisme des origines. Mélanges en l ’honneur du Professeur Paul-Hubert Poirier (2018) 12. Alessandro Capone (éd.), Cristiani, ebrei e pagani: il dibattito sulla Sacra Scrittura tra III e VI secolo – Christians, Jews and Heathens: the debate on the Holy Scripture between the third and the sixth century (2017) 13. Francisco del Río Sánchez (éd.), Jewish Christianity and the Origins of Islam. Papers presented at the Colloquium held in Washington DC, October 29-31, 2015 (8th ASMEA Conference) (2018) 14. Simon Claude Mimouni, Origines du christianisme. Recherche et enseignement à la Section des sciences religieuses de l ’École Pratique des Hautes Études, 19912017 (2018) 15. Steve Johnston, Du créateur biblique au démiurge gnostique. Trajectoire et réception du motif du blasphème de l ’Archonte (2021) 16. Adriana Destro & Mauro Pesce (éds), From Jesus to Christian Origins. Second Annual Meeting of Bertinoro (1-4 October, 2015) (2019) 17. Marie-Anne Vannier (éd.), Judaïsme et christianisme au Moyen Âge (2019) 18. Pierre de Salis, Autorité et mémoire. Pragmatique et réception de l ’autorité épistolaire de Paul de Tarse du Ier au IIe siècle (2019) 19. Frédéric Chapot (éd.), Les récits de la destruction de Jérusalem (70 ap. J.-C.): contextes, représentations et enjeux, entre Antiquité et Moyen Âge (2020) 20. Simon Claude Mimouni, Les baptistes du Codex manichéen de Cologne sont-ils des elkasaïtes? (2020)
21. Damien Labadie, L’invention du protomartyr Étienne. Sainteté, pouvoir et controverse dans l ’Antiquité (Ier-VIe s.) (2021) 22. David Hamidović, Simon C. Mimouni & Louis Painchaud (éds), La « sacerdotalisation » dans les premiers écrits mystiques juifs et chrétiens. Actes du colloque international tenu à l ’Université de Lausanne du 26 au 28 octobre 2015 (2021)