268 101 6MB
French Pages 350 [331] Year 2017
Mathieu Fabrice Evrard BONDOBO
Sous la direction de
Mathieu Fabrice Evrard BONDOBO
Pape François en Centrafrique
Voyage apostolique du Pape François en Centrafrique
Eglises d’Afrique
Préface de Dieudonné Cardinal Nzapalainga
VOYAGE APOSTOLIQUE DU PAPE FRANÇOIS EN CENTRAFRIQUE
Églises d’Afrique Collection dirigée par Denis Pryen Depuis plus de deux millénaires, le phénomène chrétien s’est inscrit profondément dans la réalité socio-culturelle, économique et politique de l’Occident, au point d’en être le fil d’Ariane pour qui veut comprendre réellement les fondements de la civilisation judéo-chrétienne. Grâce aux mouvements d’explorations scientifiques, suivis d’expansions coloniales et missionnaires, le christianisme, porté par plusieurs générations d’hommes et de femmes, s’est répandu, entre autres contrées et à différentes époques, en Afrique. D’où la naissance de plusieurs communautés ecclésiales qui ont beaucoup contribué, grâce à leurs œuvres socio-éducatives et hospitalières, à l’avènement de plusieurs cadres, hommes et femmes de valeur. Quel est aujourd’hui, dans les domaines économiques, politiques et culturels, le rôle de l’Église en Afrique ? Face aux défis de la mondialisation, en quoi les Églises d’Afrique participeraient-elles d’une dynamique qui leur serait propre ? Autant de questions et de problématiques que la collection « Églises d’Afrique » entend étudier.
Dernières parutions Jean KOUADIO, Foi et libération dans les œuvres théologiques de Jean-Marc Ela, Perspective christologique, 2017. V. Francis C. DJEGUEDE, L’Être inachevé Réflexions sur l’éducation dans les séminaires catholiques béninois, 2017 Jean Lesort LOUCK TALOM, Préserver la Terre, Guide méthodologique et pratique chrétien, 2017. Damien ETSHINDO EPANDJOLA, Églises de réveil et salut chrétien au Congo-Kinshasa. Quels défis pour l’église catholique ?, 2016. Richard DANE LOKANDO, Le Saint-Siège et l’État indépendant du Congo. L’organisation des missions catholiques, 2016. François RAKOTOMALALA, Le rôle de l’Eglise à Madagascar dans la promotion du bien commun, 2016. Bertrand Magloire NDONGMO, Église catholique et processus démocratique au Cameroun. Une analyse de la participation politique dans les archidiocèses de Douala et de Yaoundé, 2016. Paul Venance NTAMBWE KASONGO, Normes canoniques sur les moyens d’éviter les litiges, Contexte culturel du Congo-Kinshasa, 2016. Honorine NGONO, La place et le rôle de la femme dans l’Église, 2016. Dieudonné ZOGNONG, Christianisme et liberté, Les paradoxes du pentecôtisme en Afrique noire, 2016.
Sous la direction de
Mathieu Fabrice Evrard BONDOBO
VOYAGE APOSTOLIQUE DU PAPE FRANÇOIS EN CENTRAFRIQUE
Préface de Dieudonné Cardinal NZAPALAINGA
© L’Harmattan, 2017 5-7, rue de l’École-Polytechnique, 75005 Paris http://www.editions-harmattan.fr ISBN : 978-2-343-11232-9 EAN : 9782343112329
PREFACE Il est un pays situé au cœur de l’Afrique : de son ancien nom Oubangui-Chari. Ce pays a été pendant longtemps l’objet des disputes et discussions entre Allemands, Belges, Britanniques et Français. Après de multiples traités, ce fut finalement la France qui obtint ce territoire qui devint par voie de conséquence colonie française le 29 décembre 1903. En la date du 15 janvier 1910, l’Oubangui Chari est associé au Congo, Gabon et Tchad pour former l’Afrique Equatoriale Française (AEF). Depuis le 1er Décembre 1958 ce pays s’appelle désormais Centrafrique ou République Centrafricaine. Sous l’impulsion de Barthélémy BOGANDA, père fondateur, la République Centrafricaine obtint son indépendance le 13 Août 1960. Elle a une superficie de 623.000km2 et partage ses frontières limitrophes respectivement au Nord par le Tchad ; au Sud par la République Démocratique du Congo ; au Sud-Ouest par le Congo ; à l’Ouest par le Cameroun ; à l’Est par le Soudan et le Sud Soudan. C’est un pays enclavé, car il n’a pas d’ouverture sur la mer. Cependant, c’est un pays vaste avec des faveurs naturelles à travers la richesse de son sol, sa faune (éléphants, girafes, babouins, singes, buffles, antilopes, gazelles, pythons, lions panthères, guépards, hippopotames, gorilles, l’élevage de bovins, ovins, caprins, volailles etc.) ; sa flore (steppe, savane, foret etc.) et de son sous-sol (diamant, or, uranium, fer, cuivre, calcaire etc.). C’est donc à l’alternance de la saison pluvieuse et de la saison sèche (2 saisons) que la vie de sa population s’organise. Au dernier recensement de l’an 2003, la population est estimée à 4,5 millions d’habitants. Et si l’indépendance a consacré son autonomie, la RCA1 n’a pas attendu longtemps pour engager sa vie politique. Cette expérience, hélas, n’a pas été joyeuse pour le peuple. Des turpitudes l’ont animée et marquée pour donner lieu à un patrimoine historique indescriptible :
1
C’est l’abréviation de la République Centrafricaine.
7
nous nous souvenons de la nuit de Saint Sylvestre, des push avec l’opération BARACUDA2 etc. Ce qui est vrai, la première élection va-t-on dire historique eut lieu en 1993. Alors que l’on a cru à une ère nouvelle, des séries de mutineries vont saboter ce régime avec des méfaits conséquents. L’atmosphère politique n’aura pas beaucoup évolué pour faire vivre un coup d’état manqué du 28 mai 2001 et le fameux qualifié de sursaut patriotique du 15 mars 2003. Aberration ou non ? La fin de l’année 2012 se présente comme un oiseau de mauvais augure par le déclenchement continu et répété des attaques et révoltes armés. C’est la coalition «seleka» (mot sango signifiant alliance) qui voit jour. Progressivement, cette coalition va anéantir le pays en occupant villes et villages ; finalement marcher sur la Capitale le 24 mars 2013. Le cortège de dégâts que cette coalition a imposé à la République chaque fois qu’elle investissait une ville ou village atteint son comble à la prise de la capitale Bangui. Du tissu humain aux infrastructures de l’Etat ou des privés, c’est la désolation incarnée. Plus que cela, le politique consomme un glissement en parlant d’un conflit de religion et/ou inter communautaire. Vrai ou faux ? La religion a été instrumentalisée et les avis à propos sont mitigés. Le laborieux effort consenti par les leaders des confessions religieuses annule tout doute et met sur table un heureux héritage du vivre ensemble de ce peuple, chacun dans le choix de sa religion. Cette description pratiquement affreuse rejoint délicatement les mots du prophète Isaïe au sujet du serviteur souffrant : « il n’avait ni aspect, ni prestance(…) homme de douleurs, familier de la souffrance, tel celui devant qui l’on cache son visage… » (Is53, 2-3). Pays de meurtres, de violence, de barbarie et de destruction, voilà celui que le Pape François choisit de visiter lors de la première rencontre de son pontificat avec l’Afrique. Décision surprenante et contre toute attente ; le dévolu est jeté sur la RCA comme sur Bethléem d’où naitra le sauveur du genre humain. Le peuple centrafricain avec les pères évêques se sont dès lors sentis concernés 2
Nom donné à une opération militaire française qui a contribué à la chute de l’Empereur BOKASSA.
8
et engagés à préparer ce moment de grâce. N’est-ce pas le lieu de dire à la remorque de Saint Paul que là où le péché a abondé, la grâce a surabondé ? Voilà qui peut être la leçon de foi à retenir de la déclaration du successeur de Pierre en terre centrafricaine : « aujourd’hui, Bangui devient la capitale spirituelle du monde ». Ces mots ont précédé à l’ouverture solennelle de la Porte Sainte du jubilé extraordinaire de la Miséricorde par anticipation le 29 novembre 2015. Une Porte Sainte en dehors de Rome, c’est la première fois que l’Eglise fait cette expérience ; quelle grâce ! Le jubilé commence avec l’ouverture de la porte sainte ; elle indique le signe manifeste de l’élément de foi célébré et signifie ce qu’il porte. De l’aéroport au palais de la renaissance puis les différentes visites et rencontres à la mosquée, à la pédiatrie, sur un site des déplacés et les deux célébrations eucharistiques présidées, le pape François a laissé en Centrafrique un trésor inouï à la fois en actes et enseignements. Laisserions-nous cet événement passé sans nous en instruire ? Quels impacts le passage du Pontife romain peut avoir sur la vie de chaque fille et fils de la Centrafrique ? Que disent les Centrafricains du passage du Pape François trente ans (30 ans) après celui de Saint Jean Paul II ? Sont là quelques interrogations parmi tant d’autres qui ont conduit au projet de ce livre. Il se veut un recueil de la visite du pape François en Centrafrique. Dans ce livre, l’abbé Mathieu Fabrice Evrard Bondobo commence par la Prière que toute l’Eglise Catholique en Centrafrique faisait pour la venue du Saint Père ; il présente les catéchèses préparatoires et les discours prononcés par Saint Jean Paul II, lors de son voyage en Centrafrique le 14 Août 1985. Ces discours seront précédés par de brefs commentaires3. Le premier à nous rendre visite était Jean Paul, il est devenu par la suite Saint, il est alors juste de faire écho de son passage en Centrafrique. Au sujet de la visite du Pape François, l’abbé
3
Nous avons fait le choix de commenter les discours et homélies pour faciliter la bonne compréhension aux lecteurs.
9
Mathieu Fabrice Evrard fait référence aux catéchèses de préparation4 à la visite du Pape François. Il met en évidence les discours et homélies du Pape François, précédés de commentaires, afin d’aider chaque lecteur à la bonne compréhension du texte lu. Dans ce livre, vous trouverez aussi les discours des autorités religieuses, civiles et aussi des laïcs adressés au Pape François. La première Porte Sainte du jubilé extraordinaire de la miséricorde est à la Cathédrale Notre Dame de l’Immaculée Conception de Bangui ; c’est pourquoi vous trouverez aussi une présentation de cette Eglise mère de l’archidiocèse. En annexe de ce livre, il y a le discours officiel du Saint Père lors de la veillée avec les jeunes (nous disons officiel, car le Pape a prononcé un discours spontané sans support durant la veillé) ; les rapports des activités de l’Eglise catholique et de la communauté musulmane. Enfin, les témoignages des Centrafricains sur ce qu’ils ont vécu lors de cette visite. En cette année du jubilé extraordinaire de la miséricorde, la République centrafricaine a touché du doigt l’expression de la tendresse divine, par la visite du Pape François. Que chaque lecteur (trice), à travers ce livre, sente et reçoive la bonté divine ! Son Eminence Dieudonné Cardinal NZAPALAINGA Archevêque de Bangui
4
La Conférence Episcopale Centrafricaine (CECA), durant sa session restreinte avait constitué une équipe qui avait pour charge d’animer des catéchèses, afin de préparer les fidèles spirituellement, à la visite papale.
10
PRIÈRE POUR LA VISITE DU FRANÇOIS EN CENTRAFRIQUE5
PAPE
Seigneur notre Dieu, nous te rendons grâce, Pour le Pape François qui viendra en Centrafrique. Guide ses pas sur les chemins du monde et de notre pays. Inspire toutes ses paroles et ses actions. Pour qu’il annonce à toutes les nations ton amour et ta miséricorde. Dieu de Miséricorde, dans toutes nos souffrances, tu as eu pitié de nous ; Et tu envoies le Pape François pour nous manifester ton amour. Aide-nous à suivre le chemin des vrais chrétiens qu’il nous enseigne. Libère nos cœurs de l’orgueil et de la méchanceté, Pour que nous suivions ensemble le chemin de la paix. Dieu de Paix, toi qui protège tes serviteurs, Fais que la visite du Pape François dans notre pays, Donne une nouvelle vigueur aux Évêques, et aux Autorités de notre pays ;
5 5
Dans toutes les paroisses et les chapelles des maisons religieuses, on faisait cette prière au terme de la messe, pour confier au Seigneur le voyage du Pape à Bangui. 11
Donne une nouvelle sagesse aux enfants, aux jeunes, aux hommes et aux femmes. Pour que nous œuvrions ensemble pour l’épanouissement de notre Église et de notre pays.
Sainte Marie, toi qui es une bonne Mère de Famille ; Prie pour les pères et les mères qui sont les chefs de familles ; Pour qu’ils donnent une bonne éducation à leurs enfants. Nos familles deviendront alors des familles de paix ; Et nous pourrons accueillir le pape François dans la joie et la paix.
Nous te le demandons, Par Jésus Christ notre Seigneur !
Amen
12
PREMIERE PARTIE : LA VISITE APOSTOLIQUE DU SAINT PERE JEAN PAUL II A BANGUI (14 août 1985)
La visite d’un Pape est toujours un évènement d’une grande portée ecclésiologique. Le Pape est le successeur de l’apôtre Pierre, celui que Jésus a choisi pour paitre ses brebis. A travers son envoyé, c’est Jésus lui-même qui rend visite à son peuple et lui manifeste son amour. L’Eglise de Centrafrique avait vécu avec grande ferveur et émotion cette visite apostolique du 14 août 1985 ; cependant, elle n’a pas su mettre à profit et exploiter profondément les messages du Saint Père. A titre d’illustration, il est facile de dire que Jean Paul II a été le premier Pape à venir en Centrafrique. Mais à la question de savoir quel a été le message livré par le Saint Père ? Il est difficile de donner une réponse. Et pourtant, la providence de Dieu a élevé Jean Paul II au rang des saints dans l’Eglise. Ne pas faire trésor de son message aux Centrafricains, serait une perte énorme pour notre Eglise et notre pays. Cela est donc une première motivation qui nous a conduits à commencer ce livre par le voyage apostolique de Saint Jean Paul II. Ensuite, il y a une continuité dans les thèmes abordés par les Saints Pères Jean Paul II et François, lors de leur visite en Centrafrique ; malgré les années qui séparent les deux voyages (30 ans) : tous deux sont venus en pèlerins, signe d’une proximité spirituelle ; il y a aussi le thème des rapports entre le Saint Siège et la Centrafrique, surtout la contribution du Saint Siège pour la paix en Centrafrique et la liberté religieuse. A cela s’ajoutent les thèmes d’un catéchuménat exigeant et d’une vie chrétienne authentique, la justice, le dialogue, les jeunes, la famille, la bonne gestion des ressources naturelles et le bien commun. Ce sont là quelques thèmes, évidemment non exhaustifs qui apparaissent lors de ces deux voyages apostoliques.
15
1. Catéchèses de préparation à la visite du Pape Saint Jean Paul II en Centrafrique6
1.1 QUELQUES
REFLEXIONS POUR PREPARER AVEC LES
CHRETIENS LA VISITE DU PAPE JEAN PAUL II
7
Que représente le Pape dans l’Eglise ? 1.1.1
La visite du Pape, une occasion pour réfléchir sur ce qu’est l’Eglise.
1. Connaitre l’Eglise à partir de la première Communauté chrétienne (Ac. 2, 42-47) a. Les premiers chrétiens vivaient en communion avec le Christ : - A travers l’écoute de la Parole - En pratiquant la charité, la mise en commun et le partage des biens - Par la prière - Par la participation à la célébration eucharistique b. Les premiers chrétiens vivaient en communion entre eux La communion entre les premiers chrétiens ne se limitait pas aux assemblées de prières mais va au-delà de celles-ci pour atteindre la vie quotidienne : une vie de charité, de la mise en commun et du partage des biens. Ceci est un exemple pour nous à imiter.
6
Ces catéchèses ont été faites en langue Sango; nous avons choisi aussi de les traduire en français.
7
Traduction française de la catéchèse en Sango.
17
c. Les premiers chrétiens étaient des témoins du Christ Ils ne se sont pas retirés du monde mais ils étaient des témoins du Christ auprès des hommes et des femmes en acte et en parole. C’est pourquoi nous les chrétiens nous ne devons pas nous recroqueviller, mais nous devons porter la Bonne Nouvelle au-delà de la sphère de notre communauté ; nous devons ainsi travailler à l’édification de notre pays et du monde. 2. Que nous dit le Concile Vatican II ? a. Assemblée de tous les chrétiens L’Eglise est l’assemblée de tous les baptisés et chaque baptisé est prêtre, prophète et roi. C’est pourquoi chacun de nous est invité à participer à l’édification de l’Eglise et de la société. b. Eglise, un mystère L’Eglise est un mystère à cause de sa nature humano-divine. Nous devons la respecter pour ce qu’elle est (sacrée, sainte) et respecter aussi nos frères comme fils de Dieu. Nous devons, avec humilité et pureté du cœur, nous mettre au service de l’Eglise en annonçant la Bonne Nouvelle. Le concile conclue en disant que l’Eglise est l’assemblée de tous ceux qui ont entendu et répondu à l’appel de Dieu et qui sont devenus par ce fait le corps du Christ, le temple de l’Esprit Saint. Le terme Eglise vient du grec ecclesia et signifie l’assemblée de ceux qui ont entendu et répondu à l’appel de Dieu. I. La visite du Pape, une occasion pour réfléchir sur le rôle des responsables de l’Eglise 1. Partons du rôle du chef dans notre société Dans notre société, le chef a pour rôle de : - Veiller sur tout le monde. Il est le gardien des autres. - Symbole de l’unité, il est un rassembleur. - Le chef est un guide - Le chef est le représentant du groupe. Dans la plupart des cas, le chef est élu par la communauté. Il est un béni des ancêtres et de Dieu. 2. Que nous dit l’Ancien Testament ? Les responsables d’Israël (les rois, les prêtres…) ont failli à leur responsabilité, Dieu décide de veiller personnellement sur son peuple 18
par le biais du descendant de David et à travers l’Esprit Saint (Ez. 34, 1-24). 3. Christ est le véritable chef de l’Eglise Le Christ est le véritable chef, la tête de l’Eglise : il s’est livré pour elle. Il lui a fait don de son Esprit. a. L’amour du Christ pour son Eglise. Jésus s’est distingué au cours de l’histoire par son humilité. Son autorité découle de son amour et de son attachement à la vérité. Il a gouverné son peuple avec amour jusqu’au don de sa vie sur la croix : « Avant de passer de ce monde à son Père, ayant aimé les siens qui étaient dans le monde, il les aima jusqu’au bout » (Jn. 13, 1). « Moi, je suis le bon pasteur ; le bon pasteur dépose sa vie pour ses brebis » (Jn. 10, 11). Par son sacrifice, le Christ a abattu le mur qui séparait les peuples. Il en a fait l’unique Peuple de Dieu dans sa mort et résurrection : « Jésus allait mourir pour la nation et non pas seulement pour la nation mais encore afin de rassembler dans l’unité les enfants de Dieu dispersés » (Jn. 11, 51-52). Le Christ a gouverné et a veillé sur son peuple avec la force de Dieu qui est l’amour. Il s’est fait le serviteur de ses disciples. Il nous invite ainsi à imiter son exemple : « Vous savez que ceux qu’on regarde comme chefs des nations dominent sur elles en maîtres et que les grands font sentir leur pouvoir. Il ne doit pas en être ainsi parmi vous : au contraire, celui qui voudra devenir grand parmi vous, sera votre serviteur, et celui qui voudra être premier parmi vous, sera l’esclave de tous. Aussi bien, le Fils de l’homme n’est pas venu pour être servi mais pour servir et donner sa vie en rançon pour une multitude. » (Mc. 10, 42-45) b. Le Christ est le chef de l’Eglise par le don de son Esprit. Le Christ a accompli sa mission sous la mouvance et par la force de l’Esprit Saint. Il est l’Oint de Dieu. Conçu de l’Esprit Saint, il est né de la Vierge Marie. L’Esprit Saint est descendu sur Lui le jour de son baptême ; au début de son ministère, l’Esprit était avec Lui. C’est par la force de l’Esprit qu’il s’en va annoncer la Bonne Nouvelle avec amour aux pauvres, à ceux qui souffrent et aux pécheurs en leur exprimant sa compassion. (cf. Lc. 4, 16-21). 19
Le Christ a fait don de son Esprit à ses disciples pour leur permettre de le connaitre, de connaitre la grandeur de son amour et de l’aimer par conséquent : « Comme le Père m’a aimé, moi aussi je vous ai aimés. Demeurez dans mon amour…Vous êtes mes amis…Je ne vous appelle plus serviteurs… » (Jn. 15, 9-15). Le salut du disciple réside dans sa réponse d’amour au Christ. Le disciple est appelé à demeurer toujours dans cet amour et sous l’autorité de son Maître. Le Christ a donné son Esprit à ses disciples pour que ceux-ci, à leur tour, deviennent responsables des autres. Les chrétiens ont reçu le Saint Esprit pour être témoins du Christ. Le Concile Vatican II rappelle aux chrétiens leur responsabilité de prêtres, de prophètes et de rois. Ainsi, le Christ s’associe des hommes pour être responsables les uns des autres. Le Christ est le véritable chef de l’Eglise. Nous aussi, étant responsables les uns des autres, apprenons à nous aimer et à nous sacrifier pour eux. 4. La diversité des ministères dans l’Eglise : le ministère des évêques et des prêtres est de rassembler tous les chrétiens dans le nom du Christ. a. Les ministères sont divers dans l’Eglise. Chaque chrétien, selon son charisme, est appelé à assumer sa responsabilité vis-à-vis de l’autre en lui indiquant toujours le bon chemin à suivre. « Il y a, certes, diversités de dons spirituels, mais c’est le même Esprit ; diversité de ministères, mais c’est le même Seigneur ; diversité d’opérations, mais c’est le même Dieu qui opère tout en tous. A chacun la manifestation de l’Esprit est donnée en vue du bien commun » (1 Cor. 12, 4-7). b. Sont responsables de l’Eglise ceux qui reçoivent leur fonction de la communauté, l’exercent pour la communauté et au nom de celleci de manière visible. Par exemple, tout chrétien est appelé à annoncer la Parole de Dieu ; mais le catéchiste est celui à qui le curé a donné mandat d’enseigner au nom de la communauté. c. Etant successeur des apôtres, l’Evêque est le responsable de l’Eglise au nom du Christ et au nom de l’Eglise universelle. Le Christ est le chef suprême de l’Eglise. Il s’est choisi des apôtres. Après l’Ascension, ceux-ci ont pris la relève. Leur ministère consiste à rassembler les chrétiens au nom du Christ. Ils doivent veiller à ce 20
que la communauté chrétienne demeure toujours sous l’autorité du Christ et de l’Eglise universelle. Cette Eglise qui vient du Christ est apostolique et catholique (universelle). Les prêtres sont les collaborateurs des évêques dans leur fonction d’enseigner, de sanctifier et de gouverner. Les prêtres sont appelés à accompagner les fidèles et à reconnaitre en eux les œuvres de Dieu dont ils sont capables par la puissance de l’Esprit qu’ils ont reçu lors de leur baptême. Les prêtres ne doivent pas se dérober de leur fonction principale : ils sont les porte-paroles des chrétiens, du Christ, de l’Eglise universelle dans la collaboration à l’Evêque. Le prêtre doit aussi réprimander et accompagner les égarés. II. Le rôle du Pape dans l’Eglise. 1. Successeur de Pierre, le Pape est l’Evêque de Rome. Pierre était le responsable de l’Eglise de Rome où il était mort martyr. Refusant d’être crucifié comme son Maître, il a été crucifié la tête en bas. Il a été enterré au Vatican. Ensuite, la Basilique Saint Pierre va être construite sur sa tombe. Les Papes sont les successeurs de Pierre, premier Evêque de Rome. Et le Pape Jean Paul II est le 265ème Pape après Pierre. 2. De même que Pierre avait la primauté parmi les autres apôtres, le Pape, l’Evêque de Rome a la primauté parmi tous les évêques du monde. Le Christ s’était choisi douze apôtres. A Pierre, il a accordé la primauté pour qu’il en soit le symbole de l’amour et de l’unité. a. Pierre parlait au nom des autres « Tu es le Christ, le Fils de Dieu vivant » Et Jésus lui répond : « Heureux es-tu Simon, fils de Jonas ; car cette révélation t’est venue, non de la chair et du sang, mais de mon Père qui est dans les cieux. Eh bien ! Moi je te dis : tu es pierre et sur cette pierre je bâtirai mon Eglise et les Portes de l’Hadès ne tiendront pas contre elle. Je te donnerai les clefs du Royaume des cieux : quoi que tu lies sur la terre, ce sera tenu dans les cieux pour lié , et quoi que tu délies sur la terre, ce sera tenu dans les cieux pour délié » (Mt. 16, 16-19). 21
Le Christ a donné à Pierre le pouvoir de mener l’Eglise sur la voie du salut (Mt. 18, 18). Le Christ a également donné ce pouvoir aux autres apôtres. Pour les Orthodoxes, tous les évêques ont reçu le même pouvoir que Pierre. Pour les Protestants, certes, Pierre avait la primauté parmi les apôtres. Mais ceci reste un privilège propre à Pierre. Pour les Catholiques, les Papes sont des successeurs de Pierre. Que nous dit le Nouveau Testament sur ce sujet ? -Pierre a la primauté parmi tous les autres apôtres sur le plan universel. Ce pouvoir lui a été confié par le Christ (cf. Mt. 16, 16-19) -Le Christ lui-même a dit à Pierre : « Toi donc, affermis tes frères» (Lc. 22, 32). -Pierre avait renié le Christ lors de sa Passion. Contrit pour avoir renié le Christ, il confesse sa foi et son amour au Christ de nouveau et le Christ a fait de lui le pasteur de toutes ses brebis (Jn. 21, 15-19). b. Le pouvoir et la primauté de Pierre découlent de sa profession de foi et son amour pour le Christ. C’est pourquoi il est appelé, avec l’amour même du Christ, à paitre le troupeau et à être gardien de l’Eglise universelle. c. Le rôle de Pierre ne finit pas avec Pierre. Pierre avait veillé avec amour sur l’Eglise universelle au nom du Christ. Il faudrait bien que quelqu’un parmi les évêques prennent la relève. Dans la Tradition, les chrétiens ont reconnu le Pape comme le responsable de l’Eglise universelle. Chaque diocèse a, à sa tête, un évêque. Il est bon, à la suite de Pierre, qu’il y ait un responsable de l’Eglise universelle pour garder les fidèles dans la fidélité au Christ. 3. Un travail de longue haleine : la légitimité du Pape comme responsable de l’Eglise universelle -A une époque, l’Eglise a dû batailler contre le césaro-papisme. Petit à petit, l’Eglise a conquis sa liberté. Elle a pu avoir la cité du Vatican. 22
-Aujourd’hui le Pape s’associe plusieurs collaborateurs dans l’exercice de sa fonction. -C’est le Pape qui nomme les évêques de tous les pays parmi les candidats qui lui ont été proposés. -Le Pape enseigne à travers ses multiples messages et écrits. -Ses visites lui permettent d’être en contact et en communion avec les églises particulières afin d’affermir la foi des fidèles, les garder dans la foi et l’unité au Christ. -Les conférences épiscopales et les associations de conférences épiscopales ont pour mission d’aider l’Eglise à grandir dans l’unité. -Un Concile est le regroupement de tous les évêques du monde autour du Pape pour discuter des sujets de l’Eglise. -Le Synode regroupe les envoyés des évêques du monde autour du Pape. -Le Nonce est l’ambassadeur du Pape auprès du chef de l’Etat d’un pays. Il est le délégué-apostolique auprès de l’Eglise de ce pays. En absence du nonce, nous pouvons avoir un prononcé tel est le cas actuel de Bangui : à Bangui nous avons un pro-nonce qui est prononce à Bangui et au Congo. Nous avons également le même déléguéapostolique qui travaille en RCA, au Congo et au Tchad. 4. Quelle est l’importance de la visite papale ? a. La visite du Pape Jean Paul II nous manifeste l’amour du Christ. Il est venu nous visiter au nom du Christ comme autrefois, Pierre visitait Samarie, Lydda, Joppé, Césarée, Rome. il suit les traces du Christ qui a marché partout en Palestine en parcourant villes et villages. b. La visite du Pape nous fait voir que notre Eglise nous vient de loin. Elle a une histoire. Elle a traversé des frontières pour nous arriver. c. La visite du Pape nous fait savoir que nous formons une grande famille, la famille de Dieu. N’oublions pas nos frères ni l’acte de charité qu’ils ne cessent d’accomplir de diverses manières à notre égard et à l’égard de l’Eglise universelle. d. La visite du Pape nous fait voir la grandeur de la responsabilité que l’Eglise a à accomplir en ce monde en vue du bien-être des hommes et de leur salut. e. Le Pape ne viendra pas se substituer à nous dans notre responsabilité du chrétien. 23
Nous ne devons pas nous dérober de notre responsabilité du chrétien dans notre Eglise et dans notre société. Représentant du Christ, il nous visite au nom de l’Eglise universelle pour nous connaitre, nous manifester sa solidarité et affermir notre foi.
24
25
26
27
28
29
30
31
2. La cérémonie de bienvenu du Pape Saint Jean-Paul II 2.1 PISTES DE COMPREHENSION DU DISCOURS
Piste n. 1 : Contexte du voyage
Ce voyage s’inscrit dans le cadre d’une vaste tournée africaine qui a conduit le Pape Saint Jean Paul II au Togo, en Côte d’Ivoire, au Cameroun, en Centrafrique, au Zaïre 8 (actuelle République Démocratique du Congo), au Kenya9 et au Maroc. En novembre 1982, les Évêques de Centrafrique étaient en visite ad limina apostolorum 10à Rome. Pour le Pape Saint Jean Paul II, c’était une manière de leur rendre cette visite. Le Pape était invité par le président de la République, son excellence feu André Kolingba : « Je vous remercie vivement, monsieur le président de la République centrafricaine, d’avoir désiré ce passage du Pape dans votre pays, d’avoir facilité cette visite pastorale en prenant les dispositions pour permettre son fructueux déroulement malgré sa brièveté »11
8
Le Saint Père se rendait au Zaïre pour la première béatification d’une sœur Zaïroise, la bienheureuse Anwarite.
9
Le voyage au Kenya était pour le 43eme congrès eucharistique international.
10
Tous les 5 (cinq) ans, l’Évêque diocésain se rend à Rome pour présenter au Pape un rapport sur son diocèse. Il vénère les tombeaux des Apôtres Pierre et Paul et visite les dicastères de la curie romaine. 11
Cf. Discours de bienvenue du Pape Saint Jean Paul II.
33
Piste n. 2 : La foi comme semence, la foi comme levain
L’Eglise en Centrafrique est une réalité jeune, fruit de l’œuvre évangélisatrice des missionnaires religieux et laïcs, venus de loin pour porter l’Evangile. Le Saint Père Jean-Paul II, en remerciant ceux qui ont évangélisé cette région, utilise l’image de la semence qui a été jetée sur le terrain centrafricain. La foi est un don qui est offert par Dieu, à travers des personnes qui ont accueilli la proposition d’évangéliser ce pays. Nous lui rendons grâce, car le message de l’Evangile a été bien reçu par peuple centrafricain et aujourd’hui les centrafricains sont appelées à cultiver cette semence pour le faire accroitre. En outre, le Saint Père invite à réfléchir sur la foi comme un don dont « personne n’est propriétaire » : la foi ne doit pas être reçue pour nous-mêmes, mais pour être multipliée et partagée. Les centrafricaines donc sont appelés à multiplier le don de la foi, à le recevoir et à agir comme « le levain dans la pâte », à offrir leur vies pour devenir des témoins de ce don qu’ils ont reçu. Le levain de la foi est constitué par l’œuvre des religieux et laïcs qui consacrent leur vie pour la création d’une société fraternelle. Le Pape Saint Jean Paul II, en effet fait éloge des premiers missionnaires, il cite les noms de quelques pionniers « Monseigneur Augouard, Monseigneur Grandin». Le plus souvent nous les oublions. On peut se demander, qui de nous célèbre ou demande des messes en suffrage pour eux ? La Cathédrale de Bangui, par exemple, a été construite par Monseigneur Grandin qui pendant son intronisation, a ordonné son 1er prêtre, en l’occurrence l’abbé Barthelemy BONGANDA. Par ailleurs, Monseigneur Grandin était de la ville de Séez, au Sud-Est de la France. La statue de la Sainte Vierge qui se trouve sur le mur de la façade de la Cathédrale de Bangui, est le don de cette ville. Sur le socle de la statue, il est écrit N.D. de Séez. Nous nous demandons pourquoi ne pas ajouter les noms de ces pionniers de l’histoire de l’évangélisation en Centrafrique dans le calendrier liturgique, afin de prier pour eux ? 34
Piste n.3 : le sens religieux est un don de Dieu qui rapproche tout le monde
La réalité de la Centrafrique est composée de différentes religions et croyances. Cette richesse spirituelle est appréciée par le Saint Père. Il reconnait dans le sens religieux de tous, un élément basilaire pour la création de communautés orientées au bien commun. Tous les centrafricaines, chacun dans ses propres communautés d'appartenance, peut contribuer à la création d’une nation plus juste, à la stabilisation « d’un climat de confiance et de fraternité », pour poursuivre le développement du pays en respectant aussi la dignité des plus démunis.
2.1 DISCOURS INTEGRAL DU PAPE JEAN-PAUL II A LA CÉRÉMONIE DE BIENVENUE Aéroport International Centrafricaine) Mercredi, 14 août 1985
de
Bangui-M'Poko
(République
Je suis très heureux de pouvoir vous visiter, cher peuple de la République Centrafricaine, pour vous saluer, pour recevoir le témoignage de l’Eglise qui vit chez vous et l’encourager moi-même dans sa mission. Je regrette de ne pas pouvoir demeurer plus longtemps parmi vous étant donné la surcharge du programme déjà prévu. Comme vous le savez, je vais clôturer le 43èmeCongrès eucharistique international à Nairobi, et aussi célébrer à Kinshasa la première béatification d’une Sœur zaïroise. J’ai beaucoup désiré saisir cette occasion pour rendre visite à votre nation et à quelques autres pays d’Afrique. Je veux vous assurer que le successeur de Pierre demeure proche de votre pays, enclavé au cœur de l’Afrique et peutêtre quelque peu isolé. J’avais déjà eu la joie de recevoir vos évêques à Rome, en novembre 1982. Aujourd’hui, je leur rends leur visite, à eux et à tout leur peuple chrétien. 35
Et je vous remercie vivement, Monsieur le Président de la République Centrafricaine, d’avoir vous-même désiré ce passage du Pape dans votre pays, d’avoir facilité cette visite pastorale en prenant les dispositions pour permettre son fructueux déroulement malgré sa brièveté. Dans la plupart des pays africains de cette région, l’évangélisation a commencé il y a tout juste un siècle. Pour vous, c’était il y a 90 ans. Je pense à la véritable épopée des pionniers : Monseigneur Augouard, puis Monseigneur Grandin, et tous les missionnaires spiritains, capucins, comboniens, prêtres “fidei donum”, frères et religieuses, laïcs, qui n’ont pas hésité à se frayer un chemin jusqu’à vous pour partager avec vous la foi chrétienne qu’ils avaient eux-mêmes reçue. Personne n’est propriétaire de ce don inouï de Dieu. Depuis que Jésus a envoyé ses Apôtres enseigner et baptiser toutes les nations, qui hésiterait à proposer en son nom cette Bonne Nouvelle qui nous assure de l’amour de Dieu, nous délivre de la peur et du péché, et nous pousse à bâtir une civilisation fraternelle? Les prêtres et religieux étrangers qui continuent à vous consacrer leurs forces et le dévouement de leur cœur par amour pour vous, sont encore nombreux et bien nécessaires. En votre nom à tous et au nom de l’Eglise universelle, je les remercie. Ils ont eu la joie de voir que votre terre accueillait volontiers la semence de l’Evangile. Un nombre important de Centrafricains ont accepté le baptême ou s’y préparent. Quelques-uns sont devenus prêtres, religieux ou religieuses. L’un d’entre eux a reçu la plénitude du sacerdoce, Monseigneur Joachim N’Dayen, pour exercer le ministère épiscopal dans cette capitale et présider la Conférence de ses frères les évêques. Oui, je trouve ici une Eglise vivante, méritante. Et je la visite aujourd’hui pour rendre grâce avec elle, pour la confirmer dans la foi et l’encourager dans son engagement apostolique, afin que sa présence soit au milieu du peuple comme le levain dans la pâte. Nous allons nous unir dans cette prière tout à l’heure, au cours de l’Eucharistie. Mais au delà de la famille des catholiques qui partagent pleinement ma foi, je sais que beaucoup d’autres personnes sont venues ici pour me saluer à l’arrivée dans le pays, vont assister à notre rassemblement de prière, ou s’intéressent de quelque façon à ma visite 36
pastorale. Certains se reconnaissent avec nous disciples du Christ Sauveur. D’autres sont fils de l’Islam. D’autres encore sont attachés aux religions traditionnelles de ce pays. Un certain sens religieux nous rapproche, ainsi que la recherche du véritable bien de l’homme, qui est aussi un don de Dieu. J’apprécie vivement la présence des Autorités nationales et locales, des membres du Corps Diplomatique ; je suis sensible à la venue de nombreuses personnes et familles de ce cher peuple. A tous, j’exprime mes remerciements, mon estime et mes souhaits cordiaux de bonheur et de paix. Dans la capitale de ce pays, en présence des responsables du bien commun, je forme des vœux pour toute la nation centrafricaine. Sur les chemins de sa destinée, elle a connu bien des épreuves qui, espérons-le, appartiennent désormais au passé. Et vous êtes tous très conscients des difficultés qui demeurent pour affermir la paix en maintenant les libertés essentielles, pour consolider un climat de confiance et de fraternité dans le respect des droits de chacun et dans la coopération active et loyale au bien général, pour assurer le développement économique, tout en instaurant des conditions de vie équitable pour tous et en venant en aide aux plus démunis. Mais je suis persuadé que ce peuple a en lui-même les ressources morales nécessaires pour relever ces défis dans la dignité. Mon séjour parmi vous veut être, sur ce plan aussi, un motif de réconfort et d’espérance. Que le Seigneur nous vienne en aide !
37
2.2 HOMELIE DU PAPE SAINT JEAN PAULII, LORS DE LA MESSE CELEBREE A L’AVENUE DES MARTYRS
2.2.3
PISTES DE COMPREHENSION DE L’HOMELIE
Piste n. 1 : « C’est la foi qui est première » Dans l’histoire récente la Centrafrique a été touchée par l’annonce de l’Evangile. Aujourd’hui il est temps de mettre en pratique cette Bonne Nouvelle. Le Saint Père a défini le don de la foi comme un « trésor », un signe précieux de l’amour de Dieu pour ce peuple. Maintenant il invite aussi le peuple centrafricain à partager cette richesse spirituelle à travers des actions concrètes. Les chrétiens ont reçu ce don et donc peuvent témoigner à travers leurs vies, l’amour de Dieu pour les hommes. Le Saint Père souligne aussi que les ouvres des hommes sont, ellesmêmes, une grâce de Dieu. Elles sont la démonstration de notre foi en Christ, elles sont aussi un signe précieux de l’œuvre de Dieu sur nous. Mais les ouvres se nourrissent de deux choses : la Parole et la prière. Le Pape Saint Jean-Paul II nous enseigne que l’écoute de la Parole nous aide être comme les sarments attachés à la vigne, il nous donne la possibilité de porter beaucoup de fruits. L’attitude du chrétien vers la prière est aussi importante. Le Saint Père utilise des mots spécifiques pour le définir : - la reconnaissance du fils qui remercie (reconnaitre ce qui nous a été donné) - l’audace du fils qui demande (distinguer ce dont nous avons besoin pour réaliser la volonté de Dieu) - la disponibilité du fils qui dit « Seigneur, que veux-tu que je fasse ?» (offrir notre vie à reconnaitre les dons qui nous sont donnés, demander ce dont nous avons besoin, accepter les propositions pour 38
les actions à faire). ceci nous rendra utiles dans les mains de Dieu, pour rendre concrète notre foi à travers nos actions. Piste n. 2 : Les laïcs au centre de la vie spirituelle du pays La charité fraternelle et la justice sont des actions quotidiennes, particulièrement des chrétiennes. Le Pape Saint Jean-Paul II rappelle que le Concile Vatican II a souligné le rôle des laïcs dans la société. Ils sont appelés à travailler pour la sanctification du monde dans les différents contextes de vie où ils se trouvent à agir. Il les définit comme « membres actifs du Corps du Christ » ; chacun simplement part du même corps et est activement impliqué dans sa réalisation. La vie familiale et sociale est le lieu où leurs actions peuvent être mises au service de l’œuvre de Dieu à travers des gestes concrets comme le respect de l’autre, la justice sociale, l’aide à mieux vivre une vie plus digne. Pour cette raison le Saint Père invite les chrétiens à augmenter les propres compétences professionnelles et s’engager dans les charges publiques, afin de travailler pour le bien commun.
Piste n. 3 : Le soutien réciproque entre les communautés locales La Centrafrique est un pays qui a reçu beaucoup de dons naturels, à travers l’environnement (le terrain fertile, l’eau, les ressources). Mais la vraie richesse de ce pays réside dans ses réseaux sociaux. Le Saint Père encourage les Centrafricains, et surtout les chrétiens, à s’aider réciproquement, à découvrir les besoins essentiels des communautés dont ils font partie. Les fruits de la foi se révèlent dans l'entrelacement des rôles des personnes différentes qui vivent en communauté. Les laïcs et les prêtres peuvent participer ensemble à la création d’un monde plus juste et humain. Les laïcs contribuent avec leur engagement au développement de la vie publique ; chacun par son travail et compétences dans la vie politique, sociale et familiale. Les religieuses et les religieux offriront l’exemple d’une vie consacrée 39
comme témoignage et signe de la stabilité de l’Eglise centrafricaine qui est aujourd’hui enracinée dans la culture locale. Les prêtres et les Evêques qui viennent de communautés locales ont un rôle particulier car ils soutiennent la vie spirituelle entre leur culture et ils administrent les sacrements, signes de l’œuvre de Dieu. Pour cette raison, il est particulièrement important le développement en Centrafrique de la formation des religieux et des ministres de Dieu. Les laïcs ont besoin de ministres appartenant à la culture locale ; l’animation des paroisses est un devoir commun entre laïcs bien formés et prêtres qui offrent une nourriture sacramentelle toujours vivante.
Piste n. 4 : Les adultes et les jeunes L’éducation est aussi une dimension fondamentale pour le développement du pays. Les jeunes sont appelés aussi à devenir actifs dans la création de leur même devenir : le Saint Père les invite à n’attendre pas que la vie leur offre des occasions. Dans ce discours consacré à la création d’une culture cohérente avec les enseignements chrétiens, le Pape Saint Jean-Paul II souhaite la création d’une perspective commune entre laïcs (dans les familles et dans la société civile) et religieux (dans les paroisses) pour offrir aux jeunes un futur cohérent avec leurs aspirations et leurs études. Ça sera possible si et seulement si les adultes fasse des choix courageux dans la société.
40
2.3 HOMÉLIE INTEGRALE DU PAPE SAINT JEAN-PAULII Avenue des Martyrs - Bangui (République Centrafricaine Mercredi, 14 août 1985
1.“Ce qui fait la gloire de mon Père, c’est que vous donniez beaucoup de fruits : ainsi vous serez pour moi des disciples” (Io. 15, 8). Chers Frères et Sœurs de Centrafrique, cette parole de Jésus à ses Apôtres, au soir de la première Eucharistie, dans le Cénacle de Jérusalem, elle est aussi pour vous, aujourd’hui. Vous êtes devenus ses disciples. Vous-mêmes, vos parents ou vos grands-parents, vous avez écouté la Parole de Dieu, portée ici au cours de ce dernier siècle, par d’autres disciples auxquels elle avait été transmise de génération en génération depuis Jésus, depuis ses Apôtres Pierre et Paul. Vous avez cru. Vous avez voulu le baptême au prix d’un catéchuménat exigeant. Et aussitôt, comme laïcs baptisés et confirmés, vous avez enseigné à d’autres le chemin de la foi. Et beaucoup avec vous ont fait cette expérience chrétienne : la Parole de Dieu est bonne, elle a changé le cœur des hommes. Un peuple de Dieu s’est constitué sans tarder sur les bords de l’Oubangui ; votre Archevêque, Monseigneur N’Dayen, vient d’en présenter les fruits au successeur de Pierre. Je le remercie de ses paroles de bienvenue, et je vous remercie tous de votre accueil. L’essentiel du message chrétien auquel vous adhérez est cette Bonne Nouvelle : Dieu est Père. Il a créé l’homme à son image. Il ne l’a pas abandonné à son péché. Il a tant aimé le monde qu’il a donné son Fils unique, pour que tout homme qui croit en lui soit sauvé, obtienne la Vie éternelle. Avec Jésus, mort et ressuscité pour vous, vous êtes devenus enfants adoptifs de Dieu. Dieu vous a donné part à son Esprit Saint qui demeure en vous. Vous êtes heureux de suivre le Christ, Lui qui est le Chemin, la Vérité, la Vie. Avec lui vous priez Dieu en toute confiance. Avec lui vous pouvez mener une vie imprégnée de paix et d’amour. Avec lui vous portez vos épreuves, même l’épreuve de la mort. Car Dieu est fidèle, et il vous appelle à partager sa Vie en ce monde et dans l’autre. Voilà l’essentiel de la foi que vous avez en commun avec tous les chrétiens du monde, avec 41
l’Eglise dont le Seigneur m’a établi Pasteur universel, en lien avec vos évêques. Pour cette foi reçue, ne cessez pas de vous réjouir, de rendre grâce à Dieu. C’est une graine qui peut porter beaucoup de fruits. C’est une Présence qui peut épanouir toute votre vie. Et vous ne sauriez garder pour vous ce trésor. Je souhaite que se poursuive, par vous, l’annonce de l’Evangile à travers ce pays, où beaucoup n’ont pas encore eu l’occasion de le connaître vraiment et d’y donner librement leur foi. 2. Mais vous, ne vous contentez jamais de dire : “Je suis baptisé”, “j’ai la foi”. Vous avez entendu l’avertissement de l’Apôtre Jacques aux premiers chrétiens : “Mes Frères, si quelqu’un prétend avoir la foi, alors qu’il n’agit pas, à quoi cela sert-il ?” (Iac. 2, 14). Chacun devrait plutôt dire : “C’est par mes actes que je te montrerai ma foi” (Ibid. 2, 18). Et ces actes consistent à accomplir la loi du Christ, qui est charité, amour. Certes, c’est la foi qui est première. C’est Dieu qui est à la source, car il nous a aimés le premier. S’il nous donne sa Vie, ce n’est pas à cause de nos mérites : c’est un don gratuit, une grâce. Et si nous arrivons à accomplir sa loi par des actes méritoires, c’est que luimême continue à nous inspirer et à nous aider. Mais il est normal que nous correspondions à sa volonté, quitte à lui offrir en sacrifice ce qui nous est le plus cher, comme Abraham. Il est logique, il est nécessaire, que nous répondions à son amour de toutes nos forces, de tout notre cœur. Ainsi ces actes rendent la foi parfaite, ils la prouvent. Sans eux, notre foi serait comme un corps qui est mort, qui ne respire plus. Or le commandement du Christ, c’est que nous nous aimions les uns les autres comme il nous a aimés (Cfr. Io. 15, 12). Comment pourrions-nous prier Dieu comme notre Père si nous ne regardions pas notre prochain comme un frère, si nous ne faisions rien pour lui lorsqu’il souffre de la faim, de la soif, du manque de vêtements ou de toit, lorsqu’il est malade, prisonnier, étranger (Cfr. Matth. 25, 35-36) ; et j’ajouterai, lorsqu’il est sans travail ou sans l’espoir d’un avenir vraiment humain en ce monde ? L’amour du prochain n’est jamais un mot abstrait ; il tend à se traduire dans un geste concret d’attention, de respect, d’estime, de justice, de partage, d’encouragement à vivre, à mieux vivre. 42
3. Mettre en œuvre l’Evangile dans toute la vie quotidienne, dans les mentalités, dans les institutions, voilà ce à quoi vous êtes appelés, chrétiens de Centrafrique. C’est la vocation du peuple chrétien tout entier. En effet , le baptême et la confirmation font des laïcs des membres actifs du Corps du Christ , soit dans l’Eglise où ils peuvent assurer les services de leur communauté chrétienne - autour du prêtre qui a un rôle spécifique - , soit dans le monde où ils coopèrent avec d’autres aux différentes taches profanes , sans se conformer à l’esprit du monde mais dans l’esprit des béatitudes : heureux ceux qui ont l’esprit de pauvreté : heureux les artisans de paix : heureux ceux qui ont faim et soif de la justice ; heureux les miséricordieux : heureux les cœurs purs ! Le Concile Vatican II a clairement exprimé ce rôle des laïcs dans la société : “Il vivent au milieu du siècle, c’est-à-dire engagés dans tous les divers devoirs et travaux du monde, dans les conditions ordinaires de la vie familiale et sociale dont leur existence est comme tissée. A cette place, ils sont appelés par Dieu pour travailler comme du dedans à la sanctification du monde, à la façon d’un ferment, en exerçant leurs propres charges sous la conduite de l’esprit évangélique” (Lumen Gentium, 31). Il me semble que l’Eglise en Centrafrique a bien compris cette responsabilité des laïcs, depuis une cinquantaine d’années, comme en ont témoigné les travaux des Assises de l’Eglise catholique, en janvier 1982. La multiplication de vos petites communautés dans les villages ruraux ou dans les quartiers urbains, avec leurs responsables ou conseillers, et les différents mouvements chrétiens aident à traduire l’esprit de l’Evangile dans les réalités de la vie quotidienne. 4. Votre milieu de vie attend l’action et le dévouement des chrétiens pour faire face solidairement à ses besoins humains. Votre pays, chers amis, n’est pas dépourvu de richesses, qu’il s’agisse du sol ou du sous-sol. Dieu vous a donné la terre et l’eau ; il vous confie cette terre fertile pour quelle produise suffisamment pour tous, et pour que les enfants de ce pays ne meurent jamais de faim ni ne souffrent de malnutrition. Sans nier la nécessité d’une solidarité nationale et internationale, il vous revient de mettre vous-mêmes en valeur toutes vos richesses, par un travail courageux, honnête, organisé, modernisé avec toutes les ressources de votre imagination et de l’entraide entre voisins. 43
Je sais que, sous l’impulsion des mouvements chrétiens, vous manifestez beaucoup de dévouement dans l’animation rurale ou urbaine. Vous prenez de nombreuses initiatives concrètes, par exemple pour assurer l’aménagement des puits et des sources, des routes, de meilleurs rendements agricoles, l’organisation de coopératives, l’alphabétisation, les écoles, la formation d’artisans, la formation ménagère et la couture, la promotion féminine dans son ensemble, les dispensaires, l’éducation sanitaire, la lutte contre l’alcoolisme, l’amélioration de l’habitat, la défense solidaire de vos droits … Oui, il est bon que chacun découvre, avec l’aide de ses frères, ses droits et ses devoirs, ses possibilités, et se sente encouragé à apporter sa collaboration, toujours dans le but de grandir en responsabilité comme Dieu le veut, et de servir la communauté dans ses besoins essentiels. C’est une oeuvre de charité fraternelle et de justice qui convient aux chrétiens. 5. Une telle action, absolument nécessaire à la base, doit s’articuler avec celles qui se déploient dans tout le pays et dans les divers domaines pour rechercher le bien commun de tous, c’est-à-dire la promotion de toutes les catégories sociales de la nation et des conditions nécessaires au développement, à la solidarité et à la paix. Les chrétiens doivent être au premier rang de ceux qui éduquent à ce sens du bien commun, par-delà les intérêts particuliers, et qui y coopèrent eux-mêmes. Ils auront à cœur d’acquérir une vraie compétence, d’accomplir consciencieusement le travail de leur profession, et, s’ils ont part à des charges publiques, de s’en acquitter pour servir tous leurs compatriotes, surtout les plus démunis, sans accepter le favoritisme, l’intolérance entre groupes ethniques, la corruption. Il faudrait qu’on puisse les reconnaître dans ces paroles du psaume : “L’homme de bien compatit et partage, / il mène honnêtement ses affaires . . . / sa justice ne cesse d’agir” («Psalmus Responsorialis» : Ps. 112 (111), 5. 9). Le Concile Vatican II a insisté sur la participation des chrétiens à la vie économico-sociale et à la vie politique pour contribuer à les “humaniser” selon le plan de Dieu. Pour cela, “rien n’est plus important que de développer le sens intérieur de la justice, de la bonté, le dévouement au bien commun, et de renforcer les convictions 44
fondamentales sur la nature véritable de la communauté politique, comme sur la fin, le bon exercice et les limites de l’autorité publique” (Gaudium et Spes, 73 § 5 ; cfr. etiam n. 143). Il faut tout faire pour régler les différends par le dialogue et selon la justice, afin que règne la véritable paix et que la dignité de chaque personne soit respectée. J’encourage donc tous ceux qui s’emploient en ce pays à former les consciences dans ce sens-là et à réaliser déjà un monde plus équitable, plus fraternel ; je pense à l’action éducative et à la réflexion de plusieurs mouvements chrétiens comme la JAC, la JEC, le scoutisme, le guidisme, les GEN, l’action catholique de l’enfance. Il y va du témoignage de l’Eglise, il y va d’un meilleur avenir pour le pays. 6. La jeunesse mérite notre sollicitude spéciale. Les jeunes accèdent à plus d’instruction, et c’est un bien pour épanouir leur esprit et pour servir le pays avec plus de capacités. Mais la déception les gagne de plus en plus, car ils ne voient pas les fruits dont ils ont rêvé faute d’emplois adaptés, faute peut-être aussi d’une formation qui corresponde à la situation. Les solutions sont certainement complexes, et il ne s’agit pas d’accuser seulement les autres, comme si les résultats devaient arriver tout préparés d’en haut ou d’ailleurs. Mais personne ne peut se résigner à cette déception des jeunes : elle risque d’entraîner certains à la colère, à la révolte, à des actes de brigandage ou au repli égoïste sur soi, ou encore à la fuite dans l’alcool et la drogue, au fatalisme désabusé. Vous, chers adultes, parents, professeurs, responsables du bien commun de la nation, n’acceptez pas un tel risque. Faites un effort d’imagination pour préparer l’avenir des jeunes. Cherchez ce qui est possible, prenez des initiatives courageuses, renouvelez les structures inadéquates, entraînez la nation tout entière à ce partage et faites tout pour soutenir la conscience des jeunes dans la droiture. Mais vous, chers jeunes, réagissez vous-mêmes avec dignité, avec courage, avec solidarité, surs qu’il y a une espérance pour qui cherche selon l’esprit de l’Evangile. Votre belle devise centrafricaine est : “Unité, dignité, travail”; je la traduis: devenez des hommes libres debout; la liberté n’est pas un cadeau, elle se mérite. Rejetez la division et la haine. Préparez une vie meilleure par votre travail et votre dévouement aux autres. 45
Pour l’éducation religieuse et intégrale des jeunes, l’Eglise entend apporter le plus possible sa collaboration - soit dans les écoles de l’Etat, soit dans les écoles dont elle peut avoir la responsabilité directe - pour aider les jeunes eux-mêmes et pour soutenir leurs éducateurs dans leur magnifique vocation, entre autres dans le cadre des “Equipes enseignantes”. 7. La cellule de base de la société reste la famille. Les tout premiers missionnaires avaient tenu à préparer des garçons et des filles à fonder des foyers chrétiens, je pense à Pierre Kwesse et à Marie Peke qui ont formé une famille admirable dès leur conversion, moins de cinq ans après la première annonce de l’Evangile dans ce pays. La liberté des futurs époux, la stabilité de leur union, leur influence décisive auprès de leurs enfants sont trop souvent menacés, soit par certains aspects négatifs de coutumes qu’il suffirait de renouveler, soit par certaines séductions modernes. Je félicite les membres de l’Association des foyers chrétiens qui cherchent à entraîner leurs amis dans une conception chrétienne de la famille, selon les principes que j’ai moi-même exposés dans l’exhortation “Familiaris Consortio” après un synode des évêques du monde entier. Ces exigences, librement acceptées, assumées dans le sacrement du mariage et vécues sans cesse avec le Christ dans la prière, assurent aux époux chrétiens la profondeur de l’amour conjugal, sa fidélité, sa fécondité, l’éducation à la foi, comme dans une Eglise en miniature. Chers amis, que Dieu vous aide à promouvoir de tels foyers ! Ne négligez pas le sacrement du mariage que le Christ a institué pour sanctifier l’alliance et toute la vie des époux, et leur permettre de s’approcher sans cesse des autres sources de la grâce ! Oui, que partout la conscience chrétienne bien formée fasse briller la lumière de l’Evangile, répande l’amour, suscite l’espérance ! 8. “Je vous ai établis pour que vous alliez et que vous donniez du fruit” (Io. 15, 16), déclarait Jésus. Cela vaut pour tous les disciples du Christ. Jésus le disait d’abord aux Apôtres. A eux il confiait un rôle spécial, pour annoncer l’Evangile dans toute sa force, pour veiller à la fidélité des disciples, pour leur donner en son nom le Pain de Vie qui est son Corps, et le pardon des péchés, pour les faire vivre dans l’unité fraternelle au-delà de tous les particularismes, pour relier les nouvelles communautés éparses à l’Eglise entière rassemblée en un seul Corps. 46
C’est aujourd’hui le rôle irremplaçable de vos évêques et de leurs coopérateurs immédiats, les prêtres et les diacres. Peuple de Dieu sur cette terre de Centrafrique, es-tu assez conscient de la place inestimable du prêtre au milieu de ton Eglise ? Longtemps, les vocations arrivées à maturité ont été peu nombreuses. Un progrès se dessine : je m’en réjouis. Il serait impensable que des foyers bien chrétiens, des communautés ferventes, ne mettent pas tout en œuvre pour éveiller de telles vocations, les encourager, et ensuite pour soutenir ces ministres du Christ qui engagent toute leur vie à son service dans l’Eglise. Les laïcs eux-mêmes ne rempliront tout leur rôle que si des prêtres soutiennent leur vie chrétienne, et il serait normal que des prêtres centrafricains et des évêques centrafricains plus nombreux assument de plus en plus cette responsabilité ecclésiale. Et je pense ici à toutes les personnes consacrées, religieux, religieuses, membres d’Instituts séculiers : le témoignage du don total de leur personne au Christ et aux autres, dans la chasteté, l’obéissance, la pauvreté, est un signe par excellence de l’Evangile, un signe aussi de maturité de l’Eglise. Combien de laïcs engagés, de catéchistes, n’ont-ils pas trouvé le chemin du Christ et sont devenus des évangélisateurs grâce à leur médiation ! Je suis sûr que vous attendez le moment où des religieuses centrafricaines prendront le relais des méritantes religieuses expatriées. Il faut préparer activement cette étape et accepter la formation nécessaire à la vie religieuse. Je n’oublie pas ceux et celles qui, au sein de cette Eglise, mènent une vie religieuse contemplative : ils bâtissent eux aussi la Cité de Dieu par la prière et le sacrifice. 9. Chers Frères et Sœurs, Jésus a encore une parole à vous confier, une belle et grave parole : “Je suis la vigne, et vous, les sarments. Celui qui demeure en moi et en qui je demeure, celui-là porte beaucoup de fruits, car en dehors de moi vous ne pouvez rien faire” (Io. 15, 5). Tous les fruits dont nous avons parlé, dans votre vie personnelle, familiale, sociale et nationale, ne seront possibles, et ils ne demeureront les fruits de l’amour, que si vous restez fermement attachés au Christ comme le sarment au cep de vigne, comme la branche au tronc de l’arbre. La sève qui produira en vous le 47
dynamisme de l’amour est l’Amour qui demeure dans le Cœur du Christ, son amour du Père et son amour de l’homme. Sans cet amour, nos efforts ne seront qu’activisme humain “comme une cymbale retentissante” (Cfr. 1 Cor. 13, 1). Chers Frères et Sœurs, persévérez dans le Christ, en prenant tous les moyens de resserrer vos liens avec lui. Demeurez dans le Christ par la foi, une foi vive, une foi qui se nourrit des paroles du Christ “que mes paroles demeurent en vous” -, méditées personnellement ou en groupe, en en demandant l’interprétation authentique à l’Eglise, bref, une foi qui cherche à mieux comprendre le salut et la volonté de Dieu. L’homélie de la messe, les catéchèses, les réunions de révision de vie, les retraites, les groupes bibliques sont des temps forts de ce ressourcement et de cette entraide spirituelle. Demeurez dans le Christ par la prière : la prière maintient avec Dieu des liens d’amour, elle exprime la reconnaissance du fils qui remercie, l’audace du fils qui demande, la disponibilité du fils qui dit: “Seigneur, que veux-tu que je fasse?”. Demeurez dans le Christ en accueillant ses sacrements, qui sont les signes efficaces de sa présence. Préparez-vous à les recevoir. Demandez au Seigneur de vous purifier et de vous nourrir de sa vie par l’Eucharistie, notamment dans l’assemblée dominicale. Demandez-lui de transfigurer votre amour humain par le sacrement du mariage. Vos paroisses sont des lieux privilégiés, indispensables, pour vous aider à demeurer dans le Christ. Je le disais à vos évêques en visite “ad Limina”: “Que les paroisses offrent à tous une nourriture doctrinale substantielle, une liturgie qui entraîne à la prière, un accueil chaleureux, et que, d’une façon complémentaire, les petites communautés favorisent un témoignage qui imprègne la vie quotidienne!” (Ioannis Pauli PP. II, Allocutio ad Episcopos Africae Centralis occasione oblata eorum visitationis “ad limina Apostolorum”, 4, 19 nov. 1982: Insegnamenti di Giovanni Paolo II, V/3 [1982] 1330). 10. Nous allons maintenant poursuivre notre prière eucharistique, en union avec les chrétiens de tous pays rassemblés au Congrès eucharistique de Nairobi et que je vais rejoindre. Nous rassemblons 48
tous les beaux efforts de votre Eglise pour les unir à l’offrande du Christ. Nous présentons au Seigneur nos intentions, nos besoins. Jésus nous dit comment prier : “Si vous demeurez en moi et que mes paroles demeurent en vous, demandez tout ce que vous voudrez et vous l’obtiendrez . . . Tout ce que vous demanderez au Père, en mon nom, il vous l’accordera” (Io. 17, 7. 16). Peut-être n’osons-nous pas assez demander ? Nous allons prier pour tout le peuple de la République Centrafricaine, pour la paix, pour l’unité, pour le développement, pour le progrès à tous égards. Nous prierons pour l’Eglise en ce pays et aussi pour l’Eglise universelle. Et vous prierez pour mon ministère. La prière universelle va développer ces intentions. Seigneur, que l’Eglise se rassemble dans l’Esprit Saint pour être le ferment et l’âme du monde (Prière d’ouverture) : - Seigneur, aide l’Eglise à révéler aux pauvres les richesses de l’Evangile (Prière après la communion). - Qu’elle soit un lieu de vérité et de liberté, de justice et de paix. Donne-nous l’Esprit d’amour, l’Esprit de ton Fils (Prière eucharistique). Oui, que tous, dans l’Eglise et dans la société, nous soyons animés de l’Esprit d’amour qui se traduit dans le service. Le Christ nous dit : “Vous serez mes amis, si vous faites ce que je vous commande . . . Ce n’est pas vous qui m’avez choisi, c’est moi qui vous ai choisis et établis afin que . . . vous donniez du fruit et que votre fruit demeure” (Ibid. 15, 14-16). Et souvenez-vous : “Le Fils de l’homme n’est pas venu pour être servi, mais pour servir et donner sa vie en rançon pour la multitude” (Matth. 20, 28). Moi-même, Jean-Paul II, j’ai été choisi d’entre mes frères pour assurer le service des serviteurs de Dieu, le service de l’unité, de la fidélité, de la marche cohérente de l’Eglise. A la suite de Jésus, je voudrais être au milieu de vous comme celui qui sert (Cfr. Luc. 22, 27). Je prie Dieu d’augmenter en chacun des chrétiens ici présents la foi qui vous fait entrer dans les vues de Dieu, l’amour qui vous met au service des autres, et l’espérance. Oui, l’espérance, pour qu’à aucun 49
moment, sous aucun prétexte, vous ne cédiez au découragement, mais que vous soyez comme ces hommes et ces femmes qui ont entendu l’appel de Jésus : “ Lève-toi et marche” (Matth. 9, 5). Que notre marche se fasse toujours avec Marie, la Servante du Seigneur. O Marie, que nous nous préparons à célébrer demain, O Marie, élevée au ciel, dans la gloire de ton Fils, toi notre Mère, tu as cru, tu as aimé, tu as espéré mieux que toutes les créatures. Tu es comblée par Dieu. Que ton exemple et ton intercession aident le peuple centrafricain à participer au Royaume de Dieu, ici-bas et pour l’éternité ! Amen.
50
2.4 DISCOURS DU PAPE SAINT JEAN PAUL II CEREMONIE DE DEPART 2.4.1
A LA
PISTES DE COMPREHENSION DU DISCOURS
Piste n. 1 : Brièveté du séjour Malgré la brièveté du séjour 12 , le Saint Père en garde un bon souvenir. Y revenir plus longuement ? Il ne sait pas : « Je ne sais pas si la Providence me permettra d’y revenir plus longuement » 13 . En effet, il n’est jamais revenu. Toutefois, il y a une proximité spirituelle qui lie Saint Jean Paul II, à notre pays : « De Rome, je penserai souvent dans la prière à cette terre africaine et à la moisson chrétienne qu’elle continue à préparer »14. On espère que maintenant depuis le ciel, il continue de prier pour nous, surtout en ce moment précis où nous avons besoin de sa prière et bénédiction, pour nous même et surtout pour le voyage de son successeur en Centrafrique.
Piste n. 2 : Apport du Saint siège A travers cette visite, le Saint Père nous manifestait l’estime, le respect et l’engagement du Saint siège. Cet aspect est source de consolation, car savoir qu’il y a une personne ou une institution qui t’estime, qui te respecte et qui t’encourage, est source de fierté et d’honneur.
12
Saint Jean Paul II n’a pas passé une seule nuit à Bangui.
13
Cf. Discours de Saint Jean Paul II, lors de la cérémonie de départ.
14
Idem.
51
Piste n.3 : Rôle des chrétiens et les défis à relever
Le Pape formule le vœu que ceux qui pratiquent les suivantes vertus puissent rencontrer toujours de la part des compatriotes la compréhension, la confiance et l’encouragement : -
Combattre les maux qui peuvent contrecarrer la justice et la paix ;
-
Etre solidaire afin d’agir dans le sens du respect de l’autre, de l’honnêteté, de l’entraide et du bien commun ;
Toutes ces vertus vont de pair avec la foi. Beaucoup des défis restent à relever : totale réconciliation et paix, liberté et loyale coopération, développement des ressources, promotion humaine intégrale, formation agricole.
52
2.5 DISCOURS INTEGRAL DU PAPE SAINT JEAN-PAUL II A LA CEREMONIE DE DÉPART Aéroport International Centrafricaine) Mercredi, 14 août 1985
de
Bangui-M'Poko
(République
1. J’ai bien conscience d’avoir à peine entamé la visite pastorale de votre cher pays. Je ne sais si la Providence me permettra d’y revenir plus longuement. Mais le moment que j’ai passé à Bangui a été très dense, et je garderai notamment en mémoire la célébration eucharistique où s’est exprimée avec ferveur la prière de nombreux Centrafricains. J’ai reçu avec joie le témoignage de la vitalité de cette Eglise, et j’ai pu donner mes encouragements à tous ses ouvriers apostoliques. De Rome, je penserai souvent dans la prière à cette terre africaine et à la moisson chrétienne qu’elle continue à préparer. Je remercie vivement tous ceux qui ont permis le bon déroulement de cette visite. Je suis heureux de redire ici ma gratitude à Son Excellence Monsieur le Président de la République, pour la bienveillance avec laquelle il m’a accueilli et accompagné au cours de cette journée. Ma reconnaissance va également à tous ceux qui ont aimablement apporté leur concours comme responsables, coordinateurs ou agents de l’organisation, de la sécurité, du service d’ordre, et aussi comme personnel bénévole au service de l’Eglise. 2. A votre pays, Monsieur le Président, je renouvelle mes vœux cordiaux. Par cette visite, je voulais lui manifester l’estime, le respect et l’encouragement du Saint-Siège. Avec vous, avec tous ceux qui sont soucieux du bien commun de la nation et du bonheur de tous leurs compatriotes, nous désirons que la République Centrafricaine vive dans un esprit de totale réconciliation et dans la paix, à l’intérieur comme à l’extérieur, qu’elle mobilise toutes ses forces pour se consacrer, dans un climat de liberté et de loyale coopération, au développement de ses ressources, à la promotion humaine intégrale de tous ses citoyens. Nous souhaitons que progressivement elle résolve heureusement ses problèmes, qui sont parfois de véritables défis ; nous avons évoqué celui de la formation agricole, celui de la jeunesse. Nous souhaitons que la République Centrafricaine bénéficie de la 53
bienveillance et de la solidarité des autres pays, en particulier des pays africains. Et nous n’oublions pas la contribution qu’elle-même peut apporter à certains problèmes lancinants en Afrique; je pense aux réfugiés en détresse, qui ont besoin de trouver, chez leurs voisins, un accueil généreux dans un esprit de paix et de neutralité, et une certaine intégration, en attendant qu’ils puissent, comme c’est souhaitable, regagner leur pays et reconstituer leur famille. Je sais qu’un bon nombre ont trouvé ici l’hospitalité souhaitée. 3. Les catholiques forment une partie importante de la population. Ils sont décidés à combattre les maux qui pourraient paralyser l’essor du pays, contrecarrer la justice et la paix. Ils tendent la main à leurs frères, chrétiens ou non, pour agir dans le sens du respect de l’autre, de l’honnêteté, de l’entraide, du bien commun. Ils savent, malgré leurs limites dont ils sont bien conscients, que ces vertus vont de pair avec leur foi : nous avons médité ce matin sur cet esprit de service et d’amour, qui nous vient du Christ et qui est à l’oeuvre partout, dans l’Eglise universelle au nom de laquelle je suis venu témoigner. Puisent-ils, sur ce point, rencontrer toujours de la part de leurs compatriotes la compréhension, la confiance et l’encouragement ! Et puisent-ils continuer à former entre eux des communautés vivantes qui manifestent leur joie de l’Amour de Dieu qui est répandu dans leur cœur ! A tous les diocésains de Bambari, de Bangassou, de Berberati, de Bassangoa, de Bouar, que je n’ai pas pu visiter comme ceux de Bangui et qui n’ont pas pu venir nous rejoindre pour diverses raisons, je dis mon salut affectueux. Je bénis les évêques mes Frères, les prêtres, les diacres, les religieux et religieuses, les laïcs, tous ceux qui travaillent pour l’Evangile. Ma pensée affectueuse rejoint spécialement ceux qui souffrent de maladies, d’infirmités, d’épreuves ; eux aussi participent, par leur patience et leur amour, à l’enfantement de l’Eglise. Je me sens proche d’eux. Ils sont proches de Marie, la Vierge au pied de la Croix, la Vierge dans la gloire du ciel. Que le Seigneur donne à tous son réconfort et sa paix ! En son nom je vous bénis de tout cœur. Et je vous remercie de votre accueil. 54
DEUXIEME PARTIE :
LES CATECHESES DE PREPARATION A LA VISITE DU PAPE FRANÇOIS
55
3 L'EGLISE PRIMITIVE
3.1 FONDATION ET STRUCTURE DE L'EGLISE PRIMITIVE Abbé Mathieu Fabrice Evrard BONDOBO15
Pour connaitre en profondeur, une réalité que nous aimons, c’est une exigence de chercher à connaitre son origine et son développement dans l’histoire. Il en va de même pour l’Eglise , pour mieux la comprendre et contempler son mystère, il convient d’étudier son histoire. Ainsi, en étudiant son histoire, sa diffusion, sa permanence dans l’histoire, on s’aperçoit aussi de sa réalité divine. Le centre de l’histoire, c’est Christ. L’Eglise est fondée par Lui et en perpétue la présence active et vive dans l’histoire humaine.
15
Vicaire général et Curé de la Cathédrale Notre Dame de l'Immaculée Conception de Bangui.
57
3.1.1
Fondation
a) L’environnement du christianisme naissant • L’environnement politique Avant la naissance de Jésus, l’empire romain a vu le jour. Sous Ottaviano, qui a reçu du sénat le nom d’Auguste, et sous ses successeurs immédiats, l’empire romain se répandait de plus en plus. Depuis la prise de Jérusalem par Pompeo Magno (l’an 63 avant Christ), il n’y a plus eu un Etat juif indépendant. Durant ce moment d’occupation, un réconfort pour le peuple, était l’idée et l’attente messianique : on attendait un messie libérateur. A l’époque de Jésus, la Palestine appartenait à l’empire romain. De l’an 26 à 36 après Jésus, Ponce Pilate fut procureur de Judée et de la Samarie. Le centre de l’empire, la capitale et le cœur de tout l’empire était Rome, Caput mundi, une vraie puissance et qui exerçait aussi une grande influence sur l’Eglise • L’environnement religieux D’un côté, il y avait le paganisme, où dominaient le polythéisme, l’idolâtrie et la superstition. De l’autre côté, nous trouvions le monde hébraïque, où dominaient le monothéisme, c’est-à-dire, la foi dans l’unique et vrai Dieu. Toutefois, dans la religion juive, au temps de Jésus, il existait différents courants religieux. Il y avait les Sadducéens, les Pharisiens et les Esséniens. Les Sadducéens disent qu’il n’y a pas de résurrection des morts. Les Pharisiens s’appliquaient à bien connaitre la loi et la tradition pour en promouvoir la stricte application. Les Esséniens étaient des juifs vivant en communauté installés dans le désert de Judée, à Qumran, et dont on a retrouvé les manuscrits (dits «de la mer Morte») en 1947. Les Esséniens avaient un mode de vie en communauté, ils observaient la chasteté ; ils étaient des communautés d'ascètes, c’est-à-dire, vie rude et austère, volontairement pauvres, pratiquant l'immersion quotidienne et l'abstinence des plaisirs du monde.
58
b) Jésus de Nazareth, fondateur de l’Eglise D’après les paroles de Paul, Christ fit son entrée dans le monde : «quand est venu l’accomplissement du temps » (Gal.4, 4). C’est dire que, le temps des attentes est terminé ; la venue du Christ porte à terme, une longue attente de préparation au salut messianique. Toute la vie et l’œuvre de Jésus est la base et le fondement de l’Eglise : il a prêché son évangile et a promis d’être avec ses disciples jusqu’à la fin des temps ; tout ce qu’il est, tout ce qu’il a fait et dit est essentiel pour son Eglise qu’il a institué dans l’histoire. Tout ce que nous savons de Jésus, appartient substantiellement aussi à l’histoire de l’Eglise. Nos sources de connaissance de la vie et de l’enseignement de Jésus, sont : le Nouveau testament et la Tradition. Dans l’œuvre de Jésus, nous voyons essentiellement la fondation de l’Eglise. Il mettait l’accent sur l’aspect communautaire (la prière de Notre Père…Pardonne nous nos offenses…). Il veut réunir le « peuple de Dieu ». Il veut que nous soyons tous des frères, que nous formions une famille qui, communautairement loue Dieu. Jésus fonde son Eglise, comme une Eglise expressément missionnaire. Il veut faire de ses disciples des pêcheurs d’hommes ; il les envoie jusqu’aux extrémités de la terre. Jésus a fondé son Eglise comme société visible et communauté historique : a) à travers la déclaration solennelle en Mt 16, 18 : « Et moi, je te dis que tues Pierre, et sur cette pierre je bâtirai mon Eglise, et que les portes du séjour des morts ne prévaudront point contre elle » ; b) l’institution des sacrements ; c) constituant les apôtres, prêtres de la nouvelle alliance (Lc. 22, 19) ; d) envoyant les apôtres, maitres du peuple. La dimension visible de l’Eglise, ne cache pas sa dimension invisible, c'est-à-dire, une réalité de foi. L’Eglise sur terre est en pèlerinage, vers la Jérusalem céleste. La vie terrestre de Jésus finit extérieurement par un échec, la croix, qui, paradoxalement, devient le point central de la rédemption. 3.1.1.1
La communauté primitive de Jérusalem
Jésus est condamné et crucifié à Jérusalem. A Jérusalem, il était apparu aux 11 apôtres (Lc. 24, 49-52 ; Ac.1, 4-12). Ils étaient restés là 59
à Jérusalem : « tous, unanimes, étaient assidus à la prière, avec quelques femmes dont Marie la mère de Jésus, et avec les frères de Jésus » (Ac. 1, 15). A Jérusalem, il leur ordonna de rester, jusqu’à la Pentecôte : «mais vous allez recevoir une puissance, celle du Saint Esprit qui viendra sur vous ; vous serez alors mes témoins à Jérusalem, dans toute la Judée et la Samarie, et jusqu’aux extrémités de la terre » (Ac.1,8). Ils étaient environ cent vingt (120) personnes (Ac. 1, 15), que le jour de la Pentecôte, ils ont reçu le Saint Esprit, et se manifestent au monde. Cela fut le début de la communauté primitive de Jérusalem ; ses membres étaient des juifs. A travers la prédication de Pierre, le jour de la Pentecôte, trois mille (3000) se convertissent ; et quelques temps plus tard, autres cinq cent mille (5000) personnes se convertissent (Ac. 2, 41; Ac. 4, 4). Les informations sur l’origine et sur la vie interne de cette première communauté et sur la successive propagation du christianisme, sont fournies par le livre des Actes des Apôtres. Le fait le plus important est que, ceux qui sont convertis au message de Jésus Christ, formaient une seule communauté avec les Apôtres : « Ils étaient assidus à l’enseignement des apôtres et à la communion fraternelle, à la fraction du pain et aux prières » (Ac. 2, 42ss.). Cette communauté primitive, était aussi constituée hiérarchiquement, c'est-à-dire, sous la direction des Apôtres que le Seigneur avait choisi, constitué et envoyé. Parmi les apôtres, Pierre avait un rôle particulier ; il suffit de se référer au dialogue entre Jésus ressuscité et Pierre : « Simon, fils de Jean, m’aimes-tu plus que ceuxci? », il répondit : « Oui, Seigneur, tu sais que je t’aime », et Jésus lui dit alors : « Pais mes agneaux ». D’autres épisodes sont par exemple, la profession de foi christologique de Pierre, dans la région de Césarée de Philippe, où Jésus interrogea ses disciples : « Au dire des hommes, qui est le Fils de l’homme ? ». Pierre prit la parole et répondit : « Tu es le Christ, le Fils du Dieu vivant ». Reprenant la parole, Jésus lui déclara : « Tu es Pierre, et sur cette pierre je bâtirai mon Eglise, et la puissance de la mort n’aura pas de force contre elle. Je te donnerai les clefs du Royaume des cieux; tout ce que tu lieras sur la terre sera lié aux cieux, et tout ce que tu délieras sur la terre, sera délié aux cieux ». Dans 60
l’évangile de Jean, discours sur le pain de vie (Jn 6), beaucoup des disciples de Jésus, l’ont abandonné. Jésus se tourne vers les 12 apôtres et leur demande : «voulez-vous, vous en aller, vous aussi ? ». Simon Pierre, au nom de tous lui réponde : « Seigneur, à qui irions-nous ? Tu as les paroles de vie éternelle. Et nous, nous, nous avons cru et nous avons connu que tu es le Saint de Dieu ». Dans l’évangile de Luc 22, 32 il y a un avertissement de Jésus à Pierre et tout le soutien spirituel de Jésus à l’apôtre : « Simon, Simon, Satan vous a réclamés pour vous secouer dans un crible comme on fait pour le blé. Mais moi, j’ai prié pour toi, afin que ta foi ne disparaisse pas. Et toi, quand tu seras revenu, affermis tes frères».
Pistes pour une préparation spirituelle
a) Ma relation personnelle avec Jésus Jésus est au cœur de la vie de l’Eglise. L’Eglise annonce Jésus Christ. Mais ce même Jésus, a été trahi, a souffert, est mort. Est-ce que, je fais partie de ceux qui continuent de trahir Jésus ? Comment ? (ici, il serait mieux de prendre appui sur les derniers événements dans notre pays et citer des exemples où nous avons agi comme des païens, en reniant le Christ, à travers notre contre témoignage. Relecture personnelle de notre vie). Proposition de la lecture d’un extrait de l’encyclique, Deus caritas est (Dieu est amour), du Pape émérite Benoît XVI : «A l’origine du fait d’être chrétien il n’y a pas une décision éthique ou une grande idée, mais la rencontre avec un événement, avec une Personne, qui donne à la vie un nouvel horizon et par là son orientation décisive »16. Proposition de lire et méditer Matthieu 9, 9-13 (Vocation de Matthieu). Ce passage est très important dans la vie du Saint père François, d’où sa parole de vie : Miserando atque eligendo, c'est-àdire, Jésus le regarde avec pitié, compassion, misère et il l’appelle.
16
Benoît XVI, Deus caritas est, Librairie Editrice Vaticane, Cité du Vatican, 2006, p. 3.
61
b) Une église missionnaire Jésus veut faire de ses disciples des pécheurs d’hommes. Il les envoie jusqu’aux extrémités de la terre. Le Pape François, parle et insiste beaucoup sur une Eglise qui doit sortir, aller aux périphéries. Tous nous sommes missionnaires. Comment je vis la dimension missionnaire dans l’église ? Est-ce que, je procède par exclusion dans mes activités missionnaires ; c'està-dire, préférer aller uniquement vers les personnes que je connais ou que j’aime ? Proposition de la lecture de l’exhortation apostolique, Evangelii gaudium (la joie de l’Evangile), du Pape François : « Dans la Parole de Dieu apparaît constamment ce dynamisme de « la sortie » que Dieu veut provoquer chez les croyants. Abraham accepta l’appel à partir vers une terre nouvelle (cf. Gn 12,1-3). Moïse écouta l’appel de Dieu : « Va, je t’envoie » (Ex 3,10) et fit sortir le peuple vers la terre promise (cf. Ex 3, 17). À Jérémie il dit : « Vers tous ceux à qui je t’enverrai, tu iras » (Jr 1, 7). Aujourd’hui, dans cet « allez » de Jésus, sont présents les scénarios et les défis toujours nouveaux de la mission évangélisatrice de l’Église, et nous sommes tous appelés à cette nouvelle « sortie » missionnaire. Tout chrétien et toute communauté discernera quel est le chemin que le Seigneur demande, mais nous sommes tous invités à accepter cet appel : sortir de son propre confort et avoir le courage de rejoindre toutes les périphéries qui ont besoin de la lumière de l’Évangile »17. Proposition de la lecture de Luc 8, 4-15 (parabole du semeur)
c) Eucharistie et Confession Proposition de lire, Sacramentum Caritatis : « … l'amour de l'Eucharistie conduit aussi à apprécier toujours plus le sacrement de la Réconciliation. À cause du lien entre ces sacrements, une authentique catéchèse à l'égard du sens de l'Eucharistie ne peut être séparée de la proposition d'un chemin pénitentiel (cf. 1 Co 11, 27-29). Nous 17
François, Evangelii gaudium, Librairie Editrice Vaticane, Cité du Vatican, n 20, 2013.
62
constatons assurément que, à notre époque, les fidèles se trouvent immergés dans une culture qui tend à effacer le sens du péché, favorisant un comportement superficiel qui porte à oublier la nécessité d'être dans la grâce de Dieu pour s'approcher dignement de la communion sacramentelle. En réalité, perdre la conscience du péché entraîne toujours aussi une certaine superficialité dans la compréhension de l'amour de Dieu lui-même. Il est très utile de rappeler aux fidèles ces éléments qui, dans le rite de la Messe, explicitent la conscience de leur péché et, simultanément, de la miséricorde de Dieu. En outre, la relation entre Eucharistie et Réconciliation nous rappelle que le péché n'est jamais une réalité exclusivement individuelle ; il comporte toujours également une blessure au sein de la communion ecclésiale, dans laquelle nous sommes insérés par le Baptême. C'est pourquoi la Réconciliation, comme le disaient les Pères de l'Église, est laboriosus quidam baptismus, soulignant de cette façon que l'issue du chemin de conversion est aussi le rétablissement de la pleine communion ecclésiale, qui se manifeste par le fait de s'approcher à nouveau de l'Eucharistie »18. Proposition de lire et méditer 1 Co 11, 27-29 (Paul affirme que celui qui mange le corps et boit le sang du Christ, de manière indigne, mange et boit sa propre condamnation).
d) Ma relation avec la Parole : les premiers chrétiens étaient assidus à l’enseignement des apôtres Dans Lc 22, 32 Jésus à Pierre : « Simon, Simon, Satan vous a réclamés pour vous secouer dans un crible comme on fait pour le blé. Mais moi, j’ai prié pour toi, afin que ta foi ne disparaisse pas. Et toi, quand tu seras revenu, affermis tes frères ». Le rôle du Pape est de nous affermir dans la foi, à travers l’annonce de l’évangile. Proposition de lire Verbum Domini, n 26 : « La Parole de Dieu révèle inévitablement aussi la possibilité dramatique, de la part de la liberté de l’homme, de se soustraire à ce dialogue d’alliance avec Dieu 18
Benoît XVI, Sacramentum caritatis, Librairie Editrice Vaticane, Cité du Vatican, n 20, 2007.
63
pour lequel nous avons été créés. La Parole divine révèle aussi le péché qui habite le cœur de l’homme. Nous trouvons très souvent, aussi bien dans l’Ancien que dans le Nouveau Testament, la description du péché comme non-écoute de la Parole, comme rupture de l’Alliance et donc comme fermeture à l’égard de Dieu qui appelle à la communion avec Lui. En effet, l’Écriture Sainte nous montre comment le péché de l’homme est essentiellement désobéissance et ‘non-écoute’. C’est vraiment l’obéissance radicale de Jésus jusqu’à la mort de la Croix (Ph 2, 8) qui démasquera totalement ce péché. Dans son obéissance s’accomplit la Nouvelle Alliance entre Dieu et l’homme et nous est donnée la possibilité de la réconciliation. Jésus, en effet, a été envoyé par le Père comme victime d’expiation pour nos péchés et pour ceux du monde entier (cf 1 Jn 2, 2 ; 4, 10 ; Hb 7, 27). Ainsi, la possibilité miséricordieuse de la rédemption nous est offerte et le début d’une vie nouvelle dans le Christ. Pour cela, il est important que les fidèles soient formés à reconnaître la racine du péché dans la non-écoute de la Parole du Seigneur et à accueillir en Jésus, le Verbe de Dieu, le pardon qui nous ouvre au salut »19. Il est question du péché comme non écoute de la Parole de Dieu. Disposition à préparer le cœur pour écouter le Pape qui vient nous annoncer cette Parole. Proposition de lire Evangelii gaudium nn 34-39 (Au cœur de l’évangile). Le Pape insiste sur la façon de communiquer le message évangélique, de se concentrer sur l’essentiel et surtout de ne pas mutiler l’intégralité du message de l’Evangile. e) Dimension communautaire Il est question de la solidarité, de l’existence des biens du salut et des intérêts communs ; par voie de conséquence, nous formons une communion de frères. En d’autres termes, nous avons le même credo, les mêmes sacrements et enfin la communion hiérarchique. Comment je vis la solidarité dans l’Eglise ?
19
Benoit XVI, Verbum domini, LibrairieEditrice Vaticane, Cité du Vatican, n 26, 2010
64
3.2 PENTECÔTE Abbé Serge IKAGA DOURAZA20
3.2.1
Étymologie
Le mot Pentecôte, vient du grec : pentêcostè hêméra c'est-àdire Cinquante Jours. C'est d'abord une fête juive qui doit ce nom (pris au II ès av. J C,) au fait qu'elle se célébrait au 50e jour après la Pâque. On disait plus usuellement hè pentêcostè. Aujourd'hui, Pentecôte désigne la fête chrétienne qui commémore la descente du St Esprit sur les Apôtres, cinquante jours après la Résurrection du Christ, c'est-à-dire après la Pâques chrétienne. 3.2.2
Historique
Historiquement, il s'agissait d'une fête juive appelée chavouot en hébreu, qui se célébrait pendant sept semaines après la fête de pesha (Pâque). La fin de ces festivités coïncidait à une autre fête juive appelée appelé la fête des semaines. C'était une fête des moissons pendant laquelle on offrait les prémices des récoltes (Ex 23, 16 ; Ex 34, 22 ; Lv23, 15). Progressivement cette fête agricole était devenue la commémoration annuelle du l'Alliance et du don de la loi au Sinaï. C'est ainsi qu'on peut découvrir beaucoup de liens entre les éléments décrits dans les Actes des Apôtres et ceux décrits dans Ex 19, 16 qui relate la manifestation de Dieu à son Peuple au pied du Sinaï. Prenant la signification de la célébration de l'Alliance sinaïtique, la Pentecôte était devenue une des fêtes de pèlerinage à Jérusalem, pèlerinage très pratiqué par les juifs de la diaspora (héllenisés).
20
Directeur du moyen séminaire Saint Paul à Bangui
65
Pour les chrétiens, la Pentecôte est la commémoration de la descente de l'Esprit Saint sur les Apôtres, cinquante jours après Pâques. Il faudra noter qu'au cénacle, il n'y avait pas que les 12 Apôtres : la présence de Marie et des autres femmes du groupe est aussi signalée. 3.2.3
Description
Le texte biblique qui décrit cette manifestation est celui que nous trouvons en Ac2, 1- 13, suivi du discours explicatif de Pierre en Ac2, 14-36. Mais les quatre premiers versets suffisent pour comprendre les faits décrits :
« Le jour de la Pentecôte, ils étaient tous ensemble dans le même lieu. Tout à coup il vint du ciel un bruit comme celui d'un vent impétueux, et il remplit toute la maison où ils étaient assis. Des langues, semblables à des langues de feu, leur apparurent, séparées les unes des autres, et se posèrent sur chacun d'eux. Et ils furent tous remplis du Saint Esprit, et se mirent à parler en d'autres langues, selon que l'Esprit leur donnait de s'exprimer. » Actes 2:1-4
Cette description est bien une théophanie, c'est-à-dire une manifestation visible de Dieu, ici, dans des phénomènes cosmiques. L'Esprit saint descend sur les Apôtres dans des signes visibles et éclatants. Beaucoup d'éléments dans ce texte (bruit, langue de feu, etc.) nous rapprochent de l'évènement du Sinaï (Ex19,16) où Israël, concluant une Alliance avec Dieu, devint un peuple constitué, régi par les lois divines. C'est sa naissance comme nation, peuple de Dieu. C'est ainsi qu'on pourra voir dans la Pentecôte, l'inauguration de la naissance de l'Eglise, nouveau peuple saint de Dieu. Dans l'Ancien Testament, le feu surtout eschatologique est symbole de la purification. Avec Jésus, le feu est présent non sous forme de la vengeance mais plutôt sous celle du baptême (Lc 3,16 ; 12,49). Ici à la Pentecôte, le feu est celui de l'Esprit qui se fait entendre de toutes les nations. 66
Parler en langue est un charisme que Dieu accorde aux croyants (Mc 16,17). C'est une prière extatique de louange adressée à Dieu et qui nécessite une interprétation. Effectivement, l'interprétation viendra dans le discours explicatif de Pierre. 3.2.4
Théologie
Le don de l'Esprit est étroitement lié au mystère pascal. En effet, c'est le Christ ressuscité qui avait promis cet Esprit, voulu comme paraclet, défenseur pour renforcer les Apôtres dans leur mission. Aux apôtres incapables de supporter le scandale de la passion de leur Maître, l’Esprit va offrir une nouvelle énergie, une nouvelle clef de lecture pour les introduire dans la vérité. «Quand il viendra, lui, l'Esprit de vérité, il vous conduira dans la vérité tout entière…» (Jn 16, 13). La Pentecôte inaugure la naissance de l'Eglise, une Eglise forte, capable de témoigner sa foi au-delà des frontières. En effet, ce qui se passe à la Pentecôte est le contraire de l'évènement jadis du Tour de Babel. Des hommes qui ne pouvaient plus se comprendre à cause de la diversité de leurs langues, entendent les Apôtres annoncer les merveilles de Dieu dans leurs propres langues. En effet, les Apôtres parlaient dans leur langue habituelle mais les étrangers les entendaient dans leurs langues étrangères. Sous l'action de l'Esprit Saint, il n'y a plus d'un côté des juifs, de l'autre des étrangers. L'Esprit crée l'unité et personne n'est exclu de la proclamation des merveilles de Dieu. La Pentecôte est la manifestation concrète de l'Universalité de l'Eglise. Ainsi, dans nos pratiques chrétiennes, dans nos prières extatiques, le parler en langue doit nécessaire avoir un contenu compréhensible et constructive. Il doit transmettre un message de Dieu, message d'unité et d'espérance qui aide les hommes à croitre dans leur foi. A la Pentecôte, les Disciples du Christ, sortis de leur peur deviennent plus que jamais témoins de la présence du Christ dans le monde avec une conviction de foi inébranlable. C'est ce sens du don de l'Esprit que nous retrouvons dans le sacrement de la Confirmation dont l'effet est l'effusion plénière de l'Esprit Saint. «De ce fait, la confirmation apporte croissance et approfondissement de la grâce baptismale, nous dit le Catéchisme de l'Eglise Catholique.» (CEC 1303). Elle nous enracine plus profondément dans la filiation divine 67
(Rm 8, 15), nous unit plus ferment au Christ, elle «nous accorde une force spéciale de l'Esprit Saint pour répandre et défendre la foi par la parole et par l'action en vrais témoins du Christ, pour confesser vaillamment le nom du Christ et pour ne jamais éprouver de la honte à l'égard de la Croix» (CEC 1303). Vivre de l'Esprit, c'est sortir de notre peur, aller au-delà de nos limites, de nos barrières humaines, c'est aller dans les périphéries comme nous le dit le Saint Père, pour annoncer avec force ce que nous croyons et confessons. Nous concluons nos propos par ces quelques lignes de la Séquence que propose la liturgie de la Parole du dimanche de Pentecôte : «Viens, Esprit Saint, en nos cœurs et envoie du haut du ciel un rayon de ta lumière…lave ce qui est souillé, baigne ce qui est aride, guéris ce qui est blessé, assouplis ce qui est raide, réchauffe ce qui est froid, rends droit ce qui est faussé…».
Pistes pour une préparation spirituelle
- Sommes toujours disposés à accueillir le don de l'Esprit, chaque jour et à chaque instant de notre vie ? - Nous baptisés (et confirmés) que faisons-nous pour faire développer en nous les dons reçus de l'Esprit-Saint ? - Sommes-nous toujours prêts à briser les barrières de division et d'incompréhension dans nos milieux respectifs ? - L'Esprit-Saint de vérité nous pousse à aller vers les autres pour annoncer les merveilles de Dieu, sommes-nous toujours prêts à faire ce passage avec beaucoup de courage et d'enthousiasme ?
68
3.3 LE RÔLE DE PIERRE DANS L’EGLISE PRIMITIVE Sœur Lucie MBOMBI21
Nous commençons d’abord par la présentation de Pierre. Puis nous parlerons de sa place dans l’Eglise primitive et, nous terminerons en le montrant comme le roc sur lequel le christ a fondé son Eglise. 3.3.1
Qui est Pierre ?
Le nom de Pierre était Simon, fils de Jonas. Galiléen comme Jésus, il habitait Capharnaüm, au bord du lac de Tibériade, et vivait de la pêche comme son frère André ; Tous deux deviennent les premiers apôtres de Jésus lorsque celui-ci leur demanda de laisser leurs filets pour devenir « pêcheurs d’hommes » (Mt 4, 19). Apôtre signifie envoyé, chargé de mission. Dans l’église primitive, il est chargé de l’évangélisation. Jésus a institué les Douze. Ce chiffre correspond au nombre des tribus d’Israël et symbolise le peuple de la nouvelle alliance Les actes des Apôtres et certains passages de Paul montrent le rôle capital que joue Pierre dans les commencements du christianisme, malgré la modestie de ses origines (pêcheur) et de sa culture ; ce qu’ils en disent s’accordent avec la mission confiée par le Christ à Simon, qu’Il a surnommé Pierre. « Tu es Pierre et sur cette Pierre je bâtirai mon Eglise, et les portes de l’enfer ne prévaudront pas contre elle ; je te donnerai les clefs du royaume des Cieux ; quoi que tu lies sur la terre, ce sera tenu pour lier ; quoi que tu délies sur la terre, ce sera tenu pourdélié » (Mt 16, 18-19). Tous dans la jeune Eglise, même Paul lui reconnaissent prééminence et Autorité. Tout en assurant la responsabilité générale, il semble que Pierre s’est tourné plus spécialement vers l’évangélisation du monde juif et les non juifs croyant en Dieu (« prosélyte » : païen converti au judaïsme et agrégé au peuple juif selon un rite comportant
21
Religieuse de la communauté des Sœurs Marie Missionnaire
69
la circoncision, un bain de purification et un sacrifice au temple) de Palestine et de Syrie, tandis que Paul prenait en charge l’évangélisation du monde païen, les « gentils », notamment en Grèce. Mais les limites de leur mission ne furent jamais absolues ; aussi bien, la jeune Eglise de Rome semble-t-elle avoir bénéficié de l’accueil de l’un et de l’autre dans leurs dernières années. Pierre est arrêté deux fois à Jérusalem par les autorités juives. Il est mis à mort à Rome vers 64 sous la persécution de l’empereur Néron et enterré à l’emplacement de l’actuelle basilique de saint Pierre. 3.3.2
Pierre, pécheur pardonné et berger des brebis
Jésus partit pour la Galilée proclamer la Bonne Nouvelle, passant le long de la mer de Galilée, vit Simon et son frère André en train de jeter les filets dans la mer, Il leur dit : « venez à masuite. Je vous ferai devenir pêcheur d’hommes ». Aussitôt laissant leur filet ils le suivirent (Cf. Mc 1, 14-18). Le rôle que Jésus confie à Pierre est celle de nourrir le peuple de Dieu avec la Parole de Dieu. C’est ainsi que nous bénéficions de la catéchèse du Pape, de ses encycliques ainsi que des exhortations apostoliques pour affermir la foi des fidèles du Christ. Nous voyons Jésus monté dans une barque qui appartenait à Simon et lui demanda de s’écarter un peu du rivage pour jeter le filet pour la pêche. Mais Pierre le répondit : Maitre nous avons peiné toute la nuit sans rien prendre ; mais sur ta parole, je vais jeter le filet. Et l’ayant fait, ils capturèrent beaucoup de poissons. A cette vue, Simon-Pierre dit à Jésus : « Eloigne-toi de moi, Seigneur, car je suis un homme pécheur » (Lc5, 3-8). Pierre reconnait ses limites, sa condition d’homme pécheur et se fie à Jésus qui est son maitre. En voyant Jésus marcher sur la mer, Pierre dit ce qui suit : «Seigneur si c’est bien toi, ordonne moi de venir vers toi sur les eaux ». Jésus lui dit : « Viens ! » Il descendit et marcha de la barque et marcha sur les eaux pour aller vers Jésus. Il a eu peur voyant la force du vent et, comme il commençait à enfoncer, il cria : «Seigneur sauvemoi ». Jésus étendit la main aussitôt et le saisit et lui dit : « Homme de peu de foi, pourquoi as-tu douté » (Cf. Mt 14, 23-31). Pierre est celui qui tâtonne aussi dans la foi devant Jésus vient à son secours pour le sauver du danger. A un moment Jésus commença à montrer à ses disciples qu’il lui fallait partir pour Jérusalem, souffrir beaucoup, être 70
tué, et le troisième jour ressusciter. Pierre, le prenant à part, et se met à lui faire de vifs reproches : « Dieu t’en garde, seigneur ! Cela ne t’arrivera pas ». Jésus lui dit : « Passe derrière-moi Satan ! Tu es pour moi une occasion de chute » (Cf. Mt 16, 21-23). Un jour Jésus se manifesta à ses disciples sur le bord de la mer de Tibériade. Il dit à Simon-Pierre : « Simon, fils de Jean, m’aimes-tu ? sois le berger de mes brebis. Dieu ne choisit pas les siens à cause de leur beauté physique ou morale. Il appelle qui Il veut. Il demande de marcher à sa suite et de se laisser conduire par son Esprit. 3.3.3
La place de Pierre dans l'église primitive
«le Christ a donné d'abord à Pierre, pris seul, ce qu'il a donné ensuite à tous les Douze, Pierre compris. Tous les Apôtres sont fondement (Ep2, 20 ; Ap21:14) Pierre est Roc premier (Matt16, 18) Tous les Apôtres sont pasteurs (Ac 20, 28 ;1P5, 2) Pierre est Pasteur Universel (Jn21,15-17) Tous les Apôtres ont les clés, le pouvoir de lier et délier (Matt18, 18 ; Jn20, 23) Pierre a reçu singulièrement (Matt16, 19). Tous les Apôtres sont témoins du Christ ressuscité (Actes1:8…) En premier lieu Pierre (1Co15:; Luc24,34). Jésus a prié pour tous (Jn17:9 et 20). Il a prié pour Pierre en vue d'une action au bénéfice des autres (Luc22,32). Pierre nous apparaît ainsi comme incarnant deux valeurs. Il est l'un des Douze avec les autres, il est et il a ce que sont et ont les autres. Mais il reçoit personnellement ces dons d'une façon qui le distingue ou le singularise : il sera roc, pas seulement fondement, il aura une charge pastorale universelle, il confirmera la foi, et ne sera pas seulement croyant et témoin. Les Évangiles et les Actes nous le montrent de plus prenant la parole pour tous, répondant pour tous, et également prenant des initiatives qui engagent l'Église. Ces deux 71
aspects, valeurs ou dimension se retrouveront chez « le successeur de Pierre » qui est le Pape. C'est une certaine structure de l'Apostolicité de l'Église. Elle s'est dégagée et précisée non seulement dans l'histoire, mais par l'histoire. (…) » 3.3.4
Pierre, le roc sur lequel le Christ a fondé l'Eglise
Nous voulons aujourd'hui revenir encore une fois sur cette grande et importante figure de l'Eglise. L'évangéliste Jean, racontant la première rencontre de Jésus avec Simon, frère d'André, souligne un fait singulier : Jésus, « posa son regard sur lui et dit : « Tu es Simon, fils de Jean ; tu t'appelleras Képha » (ce qui veut dire : pierre) » (Jn 1, 42). Jésus n'avait pas l'habitude de changer le nom de ses disciples : à l'exception de la dénomination de « fils du tonnerre », adressée dans une circonstance précise aux fils de Zébédée (cf. Mc 3, 17) et qui ne fut plus utilisée par la suite, Il n'a jamais attribué un nouveau nom à l'un de ses disciples. Il l'a fait en revanche avec Simon, l'appelant Kepha, un nom qui fut ensuite traduit en grec Petros, en latin Petrus, et il fut traduit précisément parce qu'il ne s'agissait pas seulement d'un nom ; c'était un « mandat », que Petrus recevait de cette façon du Seigneur. Le nouveau nom Petrus reviendra plusieurs fois dans les Evangiles et finira par supplanter le nom originel Simon. Cette information acquiert une importance particulière si l'on tient compte du fait que, dans l'Ancien Testament, le changement du nom préfigurait en général une mission qui est confiée (cf. Gn 17, 5 ; 32, 28sq. etc.). De fait, la volonté du Christ d'attribuer à Pierre une importance particulière au sein du Collège apostolique résulte de nombreux indices : à Capharnaüm, le Maître va loger dans la maison de Pierre (Mc 1, 29) ; lorsque la foule se presse autour de lui sur les rives du lac de Génésareth, entre les deux barques qui y sont amarrées, Jésus choisit celle de Simon (Lc 5, 3) ; lorsque, dans des circonstances particulières, Jésus ne se fait accompagner que par trois disciples, Pierre est toujours rappelé comme le premier du groupe : c'est le cas lors de la résurrection de la fille de Jaïre (cf. Mc 5, 37 ; Lc 8, 51), de la Transfiguration (cf. Mc 9, 2 ; Mt 17, 1 ; Lc 9, 28) et enfin, au cours de l'agonie dans le Jardin du Gethsémani (cf. Mc 14, 33 ; Mt 26, 37). Et encore : c'est à Pierre que s'adressent les percepteurs de la taxe du 72
Temple, et le Maître paie pour lui-même et pour Pierre uniquement (cf. Mt 17, 24-27) ; c'est à Pierre qu'Il lave les pieds en premier lors de la Dernière Cène (cf. Jn 13, 6) et c'est seulement pour lui qu'il prie afin que sa foi ne disparaisse pas et qu'il puisse ensuite confirmer en celle-ci les autres disciples (cf. Lc 22, 30-31). Du reste, Pierre lui-même est conscient de sa position particulière : c'est lui qui souvent, également au nom des autres, parle en demandant l'explication d'une parabole difficile (Mt 15, 15), ou le sens exact d'un précepte (Mt 18, 21), ou bien encore la promesse formelle d'une récompense (Mt 19, 27). C'est lui en particulier qui résout certaines situations embarrassantes en intervenant au nom de tous. Ainsi, lorsque Jésus, attristé en raison de l'incompréhension de la foule après le discours sur le « pain de vie » , demande : « Voulez-vous partir vous aussi ? », la réponse de Pierre est ferme : « Seigneur, vers qui pourrions-nous aller ? Tu as les paroles de la vie éternelle » (cf. Jn 6, 67-69). C'est également de manière décidée qu'il prononce la profession de foi, encore au nom des Douze, dans les environs de Césarée de Philippe. A Jésus qui demande : « Et vous, que dites-vous ? Pour vous, qui suis-je?», Pierre répond : « Tu es le Messie, le Fils du Dieu vivant ! » (Mt 16, 15-16). En réponse, Jésus prononce alors la déclaration solennelle qui définit, une fois pour toutes, le rôle de Pierre dans l'Eglise : « Et moi, je te le déclare : Tu es Pierre, et sur cette pierre je bâtirai mon Eglise... Je te donnerai les clefs du Royaume des cieux : tout ce que tu auras lié sur la terre sera lié dans les cieux, et tout ce que tu auras délié sur la terre sera délié dans les cieux » (Mt 16, 18-19). Les trois métaphores auxquelles Jésus a recours sont en elles-mêmes très claires: Pierre sera le fondement rocheux sur lequel reposera l'édifice de l'Eglise; il aura les clefs du Royaume des cieux pour ouvrir ou fermer à qui lui semblera juste ; enfin, il pourra lier ou délier, au sens où il pourra établir ou interdire ce qu'il considérera nécessaire pour la vie de l'Eglise, qui est et qui demeure au Christ. Elle est toujours l'Eglise du Christ, et non de Pierre. C'est ainsi qu'est décrit par des images d'une évidence plastique ce que la réflexion successive appellera le « primat de juridiction » . Cette position de prééminence que Jésus a voulu conférer à Pierre se retrouve également après la résurrection : Jésus charge les femmes d'en porter l'annonce à Pierre, de manière distincte par rapport aux autres Apôtres (cf. Mc 16, 7) ; c'est à lui et à Jean que s'adresse Marie73
Madeleine pour informer que la pierre a été déplacée devant l'entrée du sépulcre (cf. Jn 20, 2) et Jean lui cédera le pas lorsque tous les deux arriveront devant la tombe vide (cf. Jn 20, 4-6) ; ce sera ensuite Pierre, parmi les Apôtres, le premier témoin d'une apparition du Ressuscité (cf. Lc 24, 34 ; 1 Co 15, 5). Son rôle, clairement souligné (cf. Jn 20, 310), marque la continuité entre la prééminence qu'il a eue dans le groupe apostolique et la prééminence qu'il continuera à avoir au sein de la communauté née avec les événements pascals, comme l'atteste le livre des Actes (cf. 1, 15-26 ; 2, 14-40 ; 3, 12-26 ; 4, 8-12 ; 5, 1-11.29 ; 8, 14-17 ; 10 ; etc.). Son comportement est considéré à ce point décisif qu'il est au centre de remarques et également de critiques (cf. Ac 11, 1-18 ; Ga 2, 11-14). Au Concile dit de Jérusalem, Pierre exerce une fonction directive (cf. Ac 15 et Ga 2, 1-10), et c'est précisément parce qu'il est un témoin de la foi authentique que Paul lui-même reconnaîtra en lui une certaine qualité de « premier » (cf. 1 Co 15, 5 ; Ga 1, 18 ; 2, 7+ ; etc.). Ensuite, le fait que plusieurs des textes clefs se référant à Pierre puissent être reconduits au contexte de la Dernière Cène, où le Christ confère à Pierre le ministère de confirmer ses frères (cf. Lc 22, 31+.), montre comment l'Eglise qui naît du mémorial pascal célébré dans l'Eucharistie trouve dans le ministère confié à Pierre l'un de ses éléments constitutifs. Ce cadre du Primat de Pierre situé lors de la Dernière Cène, au moment de l'institution de l'Eucharistie, Pâque du Seigneur, indique également le sens ultime de ce Primat : Pierre, en tout temps, doit être le gardien de la communion avec le Christ ; il doit guider à la communion avec le Christ ; il doit prendre garde à ce que la chaîne ne se brise pas et que puisse ainsi perdurer la communion universelle. Ce n'est qu'ensemble que nous pouvons être avec le Christ, qui est le Seigneur de tous. La responsabilité de Pierre est de garantir ainsi la communion avec le Christ à travers la charité du Christ, en conduisant à la réalisation de cette charité dans la vie de chaque jour. Prions afin que le Primat de Pierre, confié aux pauvres personnes humaines, puisse toujours être exercé dans ce sens originel voulu par le Seigneur et puisse ainsi être toujours davantage reconnu dans sa véritable signification par nos frères qui ne sont pas encore en pleine communion avec nous. La place de Pierre est en fait prééminente dans la Bible, avec les clés du royaume que Jésus lui a données, il a ouvert le royaume des 74
cieux aux juifs (Ac 2), aux samaritains (Ac 8) et aux païens (Ac 10 Corneille). Maintenant que la porte est ouverte à tous, on peut les inviter à entrer dans le royaume par la foi en Jésus. Nous aussi sommes appelés à lier et à délier Mt.18:18. Nous constatons que dans certains cas, Pierre résout certaines situations embarrassantes au nom de tous, il exerce une fonction directive au Concile de Jérusalem (Ac 15 et Ga 2, 1-10) ; le Christ lui confère le ministère de confirmer ses frères dans la foi (Cf. Lc 22, 31+) et il est le gardien de l’unité, de la communion… C’est le même rôle que joue le successeur de Pierre dans l’Eglise aujourd’hui. Ainsi le pasteur universelle a la triple mission d’enseigner la foi authentique, de garantir les conditions du culte rendu à Dieu et de servir l’unité de l’Église.
Pistes pour une préparation spirituelle - Par rapport à mon engagement baptismal quel est le rôle que je joue dans l’Eglise ? - Mc1, 14-18 : Appel de Pierre et son frère André. Suis-je disponible pour répondre à l’appel de Dieu ? (vocation matrimoniale, sacerdotale et religieuse) - Lc5, 3-8 : La pêche miraculeuse. A qui j’obéi ? A Dieu ? ou aux hommes ? - Mt 14, 23-31 : Marche sur les eaux. Quand je me trouve en difficulté, je fais recours à qui ? A Dieu ? Au féticheur ? A une pratique traditionnelle incompatible au message évangélique ? - Mt 16, 21-23 : Obstacle à la réalisation de la volonté de Dieu. Suis-je occasion de chute de mon prochain ? un frein à sa croissance spirituelle ? - Quelle est la mission que le Christ m’a confiée et me confie aujourd’hui ? - Quelle démarche suis-je appelé à entreprendre pour grandir dans la foi ? 75
- Vivre le commandement nouveau : Amour de Dieu et du prochain sans Qu’est ce qui me pousse de fois à renier ma foi, à apostasier. -
Que signifie vivre l’unité dans la diversité ?
76
3.4 ÉGLISE PRIMITIVE : SON EXPANSION DE JERUSALEM A ROME Père Joseph SAMEDI SJ22
3.4.1
L’Église de Jérusalem ou l’Église apostolique
Ils nombreux au départ les hommes et les femmes qui suivaient Jésus durant de sa mission publique. Il y a d’abord les douze apôtres que Jésus a choisis pour être avec lui et pour être ensuite envoyés en mission. On parle aussi des disciples dont certaines femmes qui l’accompagnaient, enfin, la ou les foules qui venaient écouter sa parole et « se faisaient guérir par lui ». Dans l’Église apostolique on retrouve donc les douze apôtres. Aux douze, s’y ajoute Marie, la mère de Jésus ; Jacques, « le frère du Seigneur». A côté des douze, de Marie et Jacques, il y a les 7 hommes choisis pour le service du bienêtre matériel et spirituel de la communauté ; on signale dans cette église apostolique, la présence des anciens ou presbytres. Ils sont une centaine se réclamant de Jésus Christ. Quand l’apôtre Paul mettra en place les églises, les anciens seront les responsables des églises locales, ils fonctionneront comme gardiens de la tradition apostolique et gérants les biens de la communauté, avec voix actives dans les délibérations. Dans l’église de Jérusalem, les disciples de Jésus Christ formeront une communauté de « frères » que Luc désigne sous l’appellation d’ecclesia. Luc, l’auteur du livre des Actes des apôtres précisent quelques règles de cette ecclesia dont le « partage des biens, l’union des cœurs, etc. » Le quotidien des disciples de Jésus est rythmé par « l’enseignement des apôtres,le culte (prière et fraction du pain),les œuvres de miséricorde, etc.». L’entrée dans la communauté se fait par le baptême, qui est une plongée dans la mort du Christ en vue de participer à sa résurrection. La veille du jour du soleil, le dimanche, jour de la résurrection du Christ, les disciples de Jésus se retrouvent pour chanter des hymnes au Christ, appelé Kyrios (Seigneur), nom réservé à Dieu seul dans la Bible grec de l’Ancien Testament. 22
Prêtre de la Compagnie de Jésus à Bangui.
77
Signalons qu’avant la rédaction des évangiles, il n’existait d’autre Écriture que la bible juive, les fêtes restent celles d’Israël, les lieux de prière restent le temple. Les premiers chrétiens qui sont juifs pour la plupart continuaient de donner leur foi au Messie Jésus, continuaient de prendre part à la vie religieuse de son peuple, exactement comme Jésus mais ils sont attentifs à la charité et aux dispositions du cœur avec la conversion permanente à la Parole de Dieu. Les premiers disciples de Jésus se donnent des conseils de vivre la charité et d’élargir leur fraternité avec tous surtout les exclus de la communauté juive comme les samaritains. Ainsi en restant fidèles aux pratiques religieuses du peuple juif, les premiers chrétiens ont la conscience de former une communauté nouvelle, ecclesia, assemblée de Dieu. Les chrétiens sont rassemblés au nom de Jésus Christ, « ils sont assidus à l’enseignement des apôtres, l’union fraternelle, la prière et la fraction du pain ». Ce sont là, les caractéristiques de l’Église des premiers temps. La vie de la communauté était quelque chose de beau et d’idéal : «la multitude des croyants formait un seul cœur et une seule âme, ils mettaient tout en commun, ils vendaient leurs propriétés et leurs biens et partageaient le prix entre tous selon les besoins de chacun (Ac 2,44) ». 3.4.2
Persécutions et expansion de l’église
L’Eglise apostolique était composée en majorité des hébreux, les juifs du terroir et quelques juifs de la diaspora, appelés hellénistes. Les hébreux parlaient araméen tandis que les hellénistes, le grec. A cause des mésententes et d’autres difficultés, les relations entre les deux groupes vont se détériorer. C’est le cas des veuves des hellénistes se trouvant délaissés de la gestion commune des biens. La communauté, sous la direction, des apôtres, discerne et décide de l’institution des 7 hommes, plein de bons sens, pour le service de la communauté et l’enseignement. A Jérusalem, le succès de l’apostolat des disciples de Jésus qui accueille en son sien de nouveaux croyants, ne plaisait pas aux autorités religieuses juives. La communauté va connaitre des persécutions. Des accusations fusent de partout. Un membre influent de cette communauté de Jérusalem, un juif originaire de la diaspora, Etienne, connu pour ses propos durs envers les autorités religieuses du Temple, est lapidé et mis à mort. La répression s’abat sur la communauté de Jérusalem. Conséquences : la communauté se dispersera. On retrouve les disciples de Jésus Christ un peu partout, dans la Judée, la Samarie, la Phénicie et à 78
Antioche. Cette dispersion des premiers disciples de Jésus signe une étape essentielle dans la vie de l’Église. A partir d’une persécution sévissant à Jérusalem, les disciples de Jésus sont amenés à semer le message de salut en dehors de la ville de Jérusalem. Ainsi grâce à Philippe, par exemple, la Samarie accueille la Bonne nouvelle (Ac 8, 1-25). Cette même Bonne nouvelle atteint, un africain, pèlerin à Jérusalem, en quête du vrai Dieu, l’eunuque adorateur (Ac 8,26-40). Disséminés en Judée et en Samarie, les disciples de Jésus accomplissent de façon imprévisible l’ordre du ressuscité : « vous serez mes témoins, dans toute la Judée et la Samarie » (Ac1, 8). La Bonne nouvelle prend le chemin de la diaspora. L’Esprit Saint sera celui qui conduit la mission à travers les évènements. Seul l’Esprit Saint connait la manière dont la Parole de touche les cœurs. Lui seul sait comment dire les grâces de Dieu à travers les rencontres humaines. Il sait que la mort est souvent au bout du témoignage. 3.4.3
L’église d’Antioche
Après Rome, Alexandrie, Antioche est la 3e grande ville de l’empire de l’époque. La ville d’Antioche est peuplée en majorité de grecs ou païens. Les disciples de Jésus, partis de Jérusalem au moment de la persécution y apportent la Bonne Nouvelle. La prédication des disciples de Jésus à des populations païenne connait un succès retentissant. Le succès de l’annonce de la Bonne nouvelle du Seigneur Jésus fait désirer du renfort. Barnabé part à Tarse à la recherche de Saul. Antioche devient une communauté dynamique et missionnaire. C’est dans cette communauté, affirme Luc, que le terme « chrétien » fut employé la première fois pour désigner les partisans du Christ. Jusqu’à présent, ceux qui adhéraient au Seigneur Jésus recevaient ces diverses appellations : frères, c’est-à-dire qu’ils sont tous juifs au départ, croyants ceci rappelle leur commune adhésion au Messie mort et ressuscité, ou saints, c’est-à-dire ils ont été plongés dans l’Esprit de sainteté de Dieu ou disciples, c’est-à-dire qu’ils ont pour maitre le rabbi Jésus ou nazaréen, il est l’appellation habituelle des chrétiens dans le judaïsme. A Antioche, les disciples de Jésus reçoivent un nom étrange que les juifs eux-mêmes n’avaient pas imaginé. Selon toute probabilité, ce nom leur vient de l’extérieur et manifeste que leur groupe et perçu de manière particulière par ceux du dehors.
79
Dans l’église d’Antioche, on trouve des prophètes et des docteurs. Leur tâche, c’est de discerner, d’enseigner et d’interpréter la parole de Dieu. Paul nommera ces hommes « surveillants du troupeau » (episkopoi Ac 20,28) qui deviendront nos évêques. Dynamique et prospère, la responsabilité de cette église d’Antioche est confiée à un homme de bon sens, le chypriote Barnabé. C’est la communauté chrétienne d’Antioche qui envoie Paul en mission pour fonder les communautés chrétiennes à travers l’Asie Mineure. 3.4.4 Saint Paul et la mise en place des premières communautés Premier voyage missionnaire de Paul. C’est grâce au récit de Luc dans les Actes des Apôtres que nous avons les nouvelles de la mise en place par Paul des différentes églises. C’est l'Église d'Antioche qui envoie Saul 23 (qui deviendra Paul) en mission à deux reprises. Un premier voyage le mena avec ses compagnons Barnabé et Jean-Marc à Chypre, en Pamphylie, en Pisidie où ils créèrent quatre communautés. Leur mission durera presque 2 années, sur une distance d'environ 2400 km. Paul visite les villes suivantes Pergé, Antioche de Pisidie, Iconium, Lystres, Derbé, puis il retourne à Antioche. C’est l’itinéraire du premier voyage missionnaire de Paul. Le deuxième voyage missionnaire 24 , Paul repasse par les mêmes villes. Poussé par une vision à Troas, Paul passe en Europe et tente d’évangéliser une colonie romaine à Philippes. Il y connut d’incontestables succès. Les chrétiens de Philippes lui furent en effet d’une fidélité à toute épreuve et le soutiennent financièrement de manière importante. Mais, selon, son habitude, il s’adressait d’abord aux juifs puis aux païens, les premiers, hostiles à sa prédication triomphale, lui firent quitter ces villes. Fort de ses succès, Paul revient à Jérusalem et Antioche, et gère l’incident des judéo-chrétiens avec les pagano-chrétiens lors du « concile de Jérusalem ». Ce deuxième voyage dure 3 années et sur une distance globale de quelque 5600 km. Quelques points forts du deuxième 23
Le premier voyage missionnaire de Paul se situe vers l'an 46-48.
24
Le deuxième voyage missionnaire de Paul se situe entre les années 50-52.
80
voyage. Accompagné de Silas, Paul est rejoint par Timothée25 à Lystres (Ac 16:3). A Troas, Paul reçoit la vision d'aller évangéliser le continent européen (Ac 16:9). A Philippes, Lydie se convertit. Paul et Silas sont mis en prison et délivrés miraculeusement par un tremblement de terre (Ac 16:24). A Corinthe, Paul est encouragé à persévérer par une vision et il y fonde une église florissante (Ac 18:17). C’est après le concile de Jérusalem et les décisions prises que Paul décide de faire un troisième voyage. Ce voyage fait de lui un véritable chef d’Église à part. Paul26 visite la Galatie, la Phrygie, Éphèse, la grande ville d’Asie Mineure, la Macédoine, Corinthe, revient à Philippes pour regagner par mer Troas et Jérusalem. Le troisième est l’occasion pour Paul de consolider ses fondations. Pour mener à bien sa mission de fonder les églises, Paul s’est appuyé sur des collaborateurs comme Tite et Timothée. Paul demeure apôtre, pasteur et fondateur de nombreuses églises. Il apparait évident qu’il ne faisait pas tout seul, il s’appuyait sur des personnes de confiance qui partageaient des peines et de ses responsabilités. Le quatrième voyage est appelé, voyage de captivité 27 . A force d’évangéliser les païens, Paul s’est attiré des haines de tous côtés. A son arrivée à Jérusalem, les juifs radicaux fomentent une émeute dans la ville. Paul est arrêté pour "désordre public" et "hérésie". Il est emprisonné à Césarée pendant 2 ans. Citoyen romain, Paul réclame son droit d'être jugé par le tribunal de l'empereur à Rome. Il est persuadé que les tribunaux romains lui donneraient raison. Il sera accompagné sous escorte romaine vers Rome, la capitale de l'Empire Romain où il vivra environ deux années en attendant son jugement. Arrivé dans la capitale, Paul en profitera pour continuer ses enseignements jusqu’au jour où un non-lieu fut rendu en sa faveur. Sa mort et son martyr par décapitation ne sont pas explicitement décrits dans les livres bibliques, Luc ayant fini son récit trop tôt. On estime que sa mort a eu lieu vers l'an 64/67 sous le règne de l’empereur Néron. 2525
Selon l'Histoire ecclésiastique d'Eusèbe, écrite postérieurement, Timothée fut le premier Evêque d'Ephèse (cf. 3, 4).
26
Le troisième voyage missionnaire de Paul, on peut le placer entre 54-58.
27
L’année : entre 59-60.
81
3.4.5
La présence chrétienne à Rome
Avant l’arrivée de Paul à Rome, il y avait déjà une présence chrétienne dans la capitale de l’empire. Suétone, dans la Vie de Claude, XXV, signale que sous l’empereur Claude (41-54), les juifs de Rome s’agitaient sous l’impulsion d’un certain Chrestos. Ces juifs sont des pèlerins de retour de Jérusalem après leur conversion au christianisme. Globalement, dans ce premier siècle, on dénombre, une cinquantaine de communautés en Palestine, à Antioche, Damas, en Macédoine et Grèce, Corinthe, une petite communauté mais importante à Rome. 3.4.6
Pistes pour une préparation spirituelle
1. La catholicité ou l’universalité de l’Église Comment je la comprends ? Où en suis-je dans l’accueil de mes frères et sœurs qui viennent d’ailleurs partageant la même foi avec moi, la foi catholique ? Catholique veut dire aussi pas de divisions, d’exclusion, de sectarisme, de racisme, tribalisme. 2. La persécution se trouvait d’ores et déjà au début de l’expansion l’Église. Aujourd’hui, de par le monde, Irak, Syrie, les chrétiens sont persécutés à cause de leur foi. Comment je manifeste ma solidarité, ma proximité spirituelle avec les chrétiens qui souffrent dans le monde ?
82
3.5 LA MISSION DE L’EGLISE FAMILLE DE DIEU Sœur Lucie MBOMBI 3.5.1
I. Fondement théologique de la mission
3.5.1.1
L’Eglise a reçu le mandant
Rappelons que Vatican II a situé la mission comme constitutive de l’Église, dans Ad Gentes «De sa nature, l’Eglise, durant son pèlerinage sur terre, est missionnaire, puisqu’elle-même tire son origine de la mission du Fils et de la mission du Saint-Esprit, selon le dessein de Dieu le Père ». (AG, 2). La mission n’est pas pour l’Église une activité parmi d’autres. La mission constitue l’Église dans sa double relation à Celui qui l’envoie et à tous les hommes à qui l’Évangile est destiné. Rappelons encore, cette belle définition de la mission donnée par le concile Vatican II et reprise par Jean-Paul II dans son encyclique sur la mission (Redemptoris Missio 31) : « L’Église, envoyée par le Christ pour manifester et communiquer la charité de Dieu à tous les hommes et à toutes les nations, comprend qu’elle a à faire une œuvre missionnaire énorme. (…) L’Église, afin de pouvoir présenter à tous le mystère du salut et la vie apportée par Dieu, doit s’insérer dans tous ces groupes humains du même mouvement dont le Christ luimême, par son incarnation, s’est lié aux conditions sociales et culturelles déterminées des hommes avec lesquels il a vécu. » (AG, 10) Dans la prière sacerdotale, le Christ a prié pour l’unité de ceux qui ont cru en lu (Cf Jn17, 21). Ainsi nous sommes appelées à être ouverts au dialogue œcuménique qui répond à la prière de Jésus (cf. EG 244) ainsi qu’au dialogue interreligieux avec les croyants des religions non chrétiennes en vue de nous connaitre, de nous accepter mutuellement dans nos diversités afin de pouvoir assumer ensemble le devoir de servir la justice et la paix (cf. EG 250). Jean-Paul II repère trois situations missionnaires dans le monde d’aujourd’hui et ne parle plus en termes de territoires mais il évoque 83
«les peuples, des groupes humains, des contextes socio-culturels dans lesquels le Christ et son Évangile ne sont pas connus… » (RM 33). Nous passons d’une conception géographique de la mission à la prise en compte d’autres champs de la mission, « les nouveaux aréopages » car d’autres dimensions de la vie des hommes et du monde contemporain ont à connaître l’Évangile. Le Pape François nous invite dans ce sens à avoir « le courage d’aller vers les périphéries qui ont besoins de rejoindre la lumière de l’Evangile »i (EG 20). Et dans Dignitatis Humanae, sur la liberté religieuse, Jean-Paul II précise la posture, de la mission chrétienne : « L’Église propose, elle n’impose rien : elle respecte les personnes et les cultures » (RM 39). Elle est envoyée pour apporter la Bonne Nouvelle au monde (cf. Lc 4, 18-19), la consolation (cf. Is 41, 9-14 ; Bar 5, 5-9) de Dieu à ceux qui ont perdu l’espérance et, témoigner de la miséricorde de Dieu (cf. 15, 11-32 ; Rm 12, 1-2) aux hommes et aux femmes de notre temps. L’Eglise rencontre aussi des difficultés à travers ses agents pastoraux dans son engagement à la transmission du message évangélique. Elle se rappellera que le disciple n’est pas plus grand que son maitre. Elle est appelée à tenir dans la foi en sachant que la résurrection du Christ produit partout des germes de ce monde nouveau ; et même s’il venait à être taillés, ils poussent de nouveau, car la résurrection du Seigneur a déjà pénétré la trame cachée de cette histoire, (…) Ne restons pas en marge de ce chemin de l’espérance vivante (Cf. EG 277-278). « La mission du Christ Rédempteur, confiée à l’Eglise, est encore bien loin de son achèvement. Au terme du deuxième millénaire après sa venue, un regard d’ensemble porté sur l’humanité montre que cette mission en est encore à ses débuts et que nous devons nous engager de toutes nos forces à son service. C’est l’Esprit qui pousse à annoncer les grandes œuvres de Dieu: «Annoncer l’Evangile, en effet, n’est pas pour moi un titre de gloire; c’est une nécessité qui m’incombe. Oui, malheur à moi si je n’annonçais pas l’Evangile!» (1 Co 9, 16). » (RM 1).
84
3.5.1.2
Chacun(e) est responsable de la Mission
« Allez donc ! De toutes les nations faites des disciples, baptisez-les au nom du Père, et du Fils, et du Saint-Esprit » (Mt 28, 19). Depuis les origines de l’Église, depuis l’événement fondateur de la Pentecôte, l’enjeu de l’annonce de l’Évangile du Christ, de la mission, c’est bien que « chacun entende proclamer dans sa propre langue les merveilles de Dieu ». De grandes congrégations missionnaires masculines ou féminines ont inscrit, souvent dès leur fondation, cette dimension missionnaire dans leur vie (franciscains, dominicains dès le XIII et davantage encore au XVI , jésuites avec François Xavier, 1 compagnon d’Ignace de Loyola). Puis les congrégations missionnaires se sont multipliées au XIXe siècle et ont porté les efforts d’inculturation de la foi chrétienne dans de nouvelles cultures (c’est le cas de la Congrégation des filles de Marie Missionnaires). Rappelé par Vatican II, les évêques sont les premiers responsables de la mission et tous les évêques sont solidaires de la mission universelle de l’Église, au-delà des limites de leur diocèse: « Successeurs légitimes des apôtres et membres du collège apostolique, les Évêques doivent se savoir toujours unis entre eux et se montrer soucieux de toutes les Églises. (…) Qu’ils aient en particulier ce souci des régions du monde où la parole de Dieu n’a pas encore été annoncée. (…) Ils auront soin d’envoyer, dans la mesure du possible, certains de leurs prêtres dans ces missions ou ces diocèses pour y exercer le ministère sacré de façon durable ou transitoire » (Christus Dominus, 6). L’envoi en mission de prêtres fidei donum, permet à une Église locale de vivre cette communion effective entre Églises. Le prêtre diocésain participe à la sollicitude des évêques pour toutes les Églises. Par leur baptême, l’appel à l’engagement concret par l’Église, et la sensibilisation au développement, conduisent chaque année des milliers de jeunes adultes à vivre selon cette même dynamique d’envoi, de service d’une autre Église et d’échanges réciproques et 85
cela sur tous les continents. Ceci sur des durées plus ou moins courtes, projets humanitaires, propositions de volontariats. C’est ensemble que nous sommes conduits à vivre la mission, ici ou là-bas, co-responsables : ministres ordonnés (évêque, prêtre, diacre), laïcs, religieux ou religieuses, chacun à sa place, déployant la diversité des ministères et des charismes, pour aller à la rencontre de Celui qui nous précède dans le monde d’aujourd’hui et afin que le monde croie. Nous sommes appelés à être sel de la terre et la lumière du monde (cf.). Il est aussi de notre devoir de savoir lire et interpréter les signes de temps à la lumière de la Parole de Dieu afin de relever les défis de notre temps en relation avec nos charismes respectifs et pour éviter d’annoncer un christianisme désincarner. Pour faire ce travail, le missionnaire doit être une personne qui s’informe, qui se cultive à tous les niveaux. Elle est une personne de prière, celui ou celle qui se nourrit de la Parole de Dieu et de l’Eucharistie et se laisse conduire par l’Esprit de Dieu.
86
3.5.2 I. La spiritualité missionnaire dans Redemptoris Missio (RM 8) L’activité missionnaire exige une spiritualité spécifique qui concerne en particulier ceux que Dieu a appelés à être missionnaires. Selon Pape François, les missionnaires sont invités à devenir des évangélisateurs avec esprit c'est-à-dire ceux qui prient et travaillent : « Du point de vue de l’evangélisation, il n y a pas besoin de propositions mystiques sans un fort engagement social et missionnaire, ni de discours et d’usage sociaux et pastoraux, sans une spiritualité qui transforme le cœur » (EG 262) 3.5.2.1
Se laisser conduire par l’Esprit (cf. RM8, 87)
Cette spiritualité s’exprime avant tout par le fait de vivre en pleine docilité à l’Esprit, docilité qui engage à se laisser former intérieurement par lui afin de devenir toujours plus conforme au Christ. On ne peut témoigner du Christ sans refléter son image, qui est rendue vivante en nous par la grâce et par l’action de l’Esprit. La docilité à l’Esprit engage par ailleurs à accueillir ses dons de courage et de discernement, qui sont des traits essentiels de la spiritualité missionnaire. Le cas des Apôtres est exemplaire, eux qui durant la vie publique du Maître, malgré leur amour pour lui et la générosité de leur réponse à son appel, se montrent incapables de comprendre ses paroles et réticents à le suivre sur la voie de la souffrance et de l’humiliation. L’Esprit les transformera en témoins courageux du Christ et en annonciateurs éclairés de sa Parole. C’est l’Esprit qui les conduira sur les chemins ardus et nouveaux de la mission. Aujourd’hui comme hier, la mission reste difficile et complexe ; aujourd’hui comme hier, elle requiert le courage et la lumière de l’Esprit. Nous vivons souvent le drame de la première communauté chrétienne, qui voyait des foules incrédules et hostiles « se rassembler de concert contre le Seigneur et contre son Oint » (Ac 4,26). Comme hier, il faut prier pour que Dieu nous donne l’audace de proclamer l’Evangile ; il faut scruter les voies mystérieuses de 87
l’Esprit, et se laisser conduire par lui à toute la vérité (cf. Jn 16,13). 3.5.2.2
Vivre le mystère du Christ « envoyé » (RM 8, 88)
La communion intime avec le Christ est un élément essentiel de la spiritualité missionnaire : on ne peut comprendre ni vivre la mission qu’en se référant au Christ comme à celui qui a été envoyé pour évangéliser. Paul en décrit les comportements : « Ayez entre vous les mêmes sentiments qui sont dans le Christ Jésus : Lui, de condition divine, ne retint pas jalousement le rang qui l’égalait à Dieu. Mais il s’anéantit lui-même, prenant la condition d’esclave, et devenant semblable aux hommes. S’étant comporté comme un homme, il s’humilia plus encore, obéissant jusqu’à la mort, et à la mort sur une croix » (Ph 2,5-8). Ici se trouve décrit le mystère de l’Incarnation et de la Rédemption comme dépouillement total de soi qui amène le Christ à vivre pleinement la condition humaine et à adhérer jusqu’au bout au dessein du Père. Il s’agit d’un anéantissement qui est toutefois empreint d’amour et qui exprime l’amour. La mission parcourt ce même chemin et a son aboutissement au pied de la Croix. Il est demandé au missionnaire de « renoncer à lui-même et à tout ce qu’il a possédé jusque-là, et de se faire tout à tous », dans la pauvreté qui le rend libre pour l’Evangile, dans le détachement des personnes et des biens de son milieu pour se faire le frère de ceux à qui il est envoyé et leur apporter le Christ sauveur. C’est à cela que tend la spiritualité du missionnaire : « Je me suis fait faible avec les faibles... Je me suis fait tout à tous, afin d’en sauver à tout prix quelques-uns. Et tout cela, je le fais à cause de l’Evangile... » (1 Co 9, 22-23). Précisément parce qu’il est « envoyé », le missionnaire expérimente la présence réconfortante du Christ qui l’accompagne à tout instant de sa vie : « N’aie pas peur... car je suis avec toi » (Ac 18,9-10), et il l’attend au cœur de tout homme et de tout peuple.
88
3.5.2.3 Aimer l’Eglise et les hommes comme Jésus les a aimés (RM 8, 89) La spiritualité missionnaire est caractérisée également par la charité apostolique, celle du Christ venu « afin de rassembler dans l’unité les enfants de Dieu dispersés » (Jn 11,52), du Bon Pasteur qui connaît ses brebis, qui les cherche et qui offre sa vie pour elles (Jn 10). Celui qui a l’esprit missionnaire éprouve le même amour que le Christ pour les âmes et aime l’Eglise comme le Christ. Le missionnaire est poussé par le « zèle pour les âmes », qui s’inspire de la charité même du Christ, faite d’attention, de tendresse, de compassion, d’accueil, de disponibilité, d’intérêt pour les problèmes d’autrui. L’amour de Jésus pénètre en profondeur : lui qui « connaissait ce qu’il y avait dans l’homme » (Jn 2,25), aimait tous les hommes en leur offrant la rédemption et souffrait quand on refusait le salut. Le missionnaire est l’homme de la charité : pour pouvoir annoncer à chacun de ses frères qu’il est aimé de Dieu et qu’il peut lui-même aimer, il doit faire preuve de charité envers tous, dépensant sa vie pour son prochain. Le missionnaire est le (a) « frère/soeur universel(le) », il/elle porte en lui/elle l’esprit de l’Eglise, son ouverture et son intérêt envers tous les peuples et tous les hommes, spécialement les plus petits et les plus pauvres. Comme tel, il/elle dépasse les frontières et les divisions de race, de caste ou d’idéologie: elle est signe de l’amour de Dieu dans le monde, c’està-dire de l’amour sans aucune exclusion ni préférence. Enfin, comme le Christ, il doit aimer l’Eglise : « Le Christ a aimé l’Eglise : il s’est livré pour elle» (Ep 5,25). Cet amour, qui va jusqu’au don de la vie, est pour lui un point de repère. Seul un profond amour pour l’Eglise peut soutenir le zèle du missionnaire ; son obsession quotidienne est - comme le dit saint Paul - « le souci de toutes les Eglises» (2 Co 11, 28). Pour tout missionnaire, « la fidélité au Christ est inséparable de la fidélité à son Eglise »173.
89
3.5.2.4
Le véritable missionnaire, c’est le saint (RM 8, 90-91)
L’appel à la mission découle par nature de l’appel à la sainteté. Tout missionnaire n’est authentiquement missionnaire que s’il s’engage sur la voie de la sainteté : « La sainteté est un fondement essentiel et une condition absolument irremplaçable pour l’accomplissement de la mission de salut de l’Eglise ». La vocation universelle à la sainteté est étroitement liée à la vocation universelle à la mission : tout fidèle est appelé à la sainteté et à la mission. Ainsi, le Concile souhaitait ardemment, « en annonçant à toutes les créatures la bonne nouvelle de l’Evangile, répandre sur tous les hommes la clarté du Christ qui resplendit sur le visage de l’Eglise ». La spiritualité missionnaire de l’Eglise est un chemin vers la sainteté. L’élan renouvelé vers la mission ad gentes demande de saints missionnaires. Il ne suffit pas de renouveler les méthodes pastorales, ni de mieux organiser et de mieux coordonner les forces de l’Eglise, ni d’explorer avec plus d’acuité les fondements bibliques et théologiques de la foi : il faut susciter un nouvel « élan de sainteté » chez les missionnaires et dans toute la communauté chrétienne, en particulier chez ceux qui sont les plus proches collaborateurs des missionnaires. Rappelons-nous, chers Frères et Sœurs, l’élan missionnaire des premières communautés chrétiennes. Malgré la pauvreté des moyens de transport et de communication d’alors, l’annonce de l’Evangile a atteint en peu de temps les limites du monde. Et il s’agissait de la religion d’un Homme mort en croix, « scandale pour les Juifs et folie pour les païens » (1 Co 1, 23) ! A la base de ce dynamisme missionnaire, il y avait la sainteté des premiers chrétiens et des premières communautés. Que les missionnaires, réfléchissent sur le devoir de la sainteté que le don de la vocation leur demande, en se renouvelant de jour en jour par une transformation spirituelle et en mettant à jour continuellement leur formation doctrinale et pastorale. Le 90
missionnaire doit être « une contemplative en action ». La réponse aux problèmes, elle la trouve à la lumière de la parole divine et dans la prière personnelle et communautaire. La missionnaire, s’elle n’est pas une contemplative, ne peut annoncer le Christ d’une manière crédible ; elle est témoin de l’expérience de Dieu et doit pouvoir dire comme les Apôtres : « Ce que nous avons contemplé..., le Verbe de vie..., nous vous l’annonçons » (1 Jn 1,1-3). Le missionnaire est l’homme des Béatitudes. Avant de les envoyer évangéliser, Jésus instruit les Douze en leur montrant les voies de la mission : pauvreté, douceur, acceptation des souffrances et des persécutions, désir de justice et de paix, charité, c’est-à-dire précisément les Béatitudes, réalisées dans la vie apostolique (cf. Mt 5,1-12). En vivant les Béatitudes, le missionnaire expérimente et montre concrètement que le Règne de Dieu est déjà venu et qu’elle l’a déjà accueilli. La caractéristique de toute vie missionnaire authentique est la joie intérieure qui vient de la foi. Dans un monde angoissé et oppressé par tant de problèmes, qui est porté au pessimisme, celui qui annonce la Bonne Nouvelle doit être un homme qui a trouvé dans le Christ la véritable espérance et, qui cherche à combattre tout ce qui l’éloigne de la volonté de Dieu 3.5.3
L’Eglise, communion ou famille Dieu
A proprement parler, ces deux notions de communion et de famille de Dieu ne s’opposent ni ne se contredisent. Au contraire, elles s’incluent et s’impliquent mutuellement. Pourtant, elles ne sont pas si identiques. L’ecclésiologie de communion, est un des modèles prédominants dans la théologie de l’Eglise, pour saisir la pertinence de la conception d’Eglise-famille de Dieu promue par l’Episcopat africain (sub-saharien) et qui est une émanation de la communion ecclésiale. Mis à part le fait qu’elle a été stimulatrice du renouveau de l’ecclésiologie au concile Vatican II, la communion semble fournir une configuration ecclésiale favorable non seulement pour la communio ecclesiarum mais aussi pour la communio oecumenica. Elle met, en plus, en jeu un potentiel théologique pouvant articuler plusieurs notions ecclésiologiques. Aujourd’hui, on ne peut pas faire de l’œcuménisme ouvert sans invoquer, entre autres, la communion 91
des Eglises. Nous allons explorer d’abord les fondements théologiques de notre thème ensuite traiter de la contribution du Pape François lors de sa catéchèse en rapport à l’année de la famille. 3.5.3.1
Fondements théologiques
Les fondements bibliques et théologiques de cette Église-Famille s’appuient sur l’exemple apostolique. Particulièrement sur l’expérience rapportée par le Livre des Actes des Apôtres (Ac. 2, 4247). Il s’agit d’une expérience fraternelle qui est communion et qui se caractérise par l’assiduité à l’enseignement des Apôtres, à l’écoute de la Parole de Dieu, à la fraction du pain eucharistique et au partage des biens qu’ils mettaient en commun. Cette expérience est localisée à Jérusalem (Ac 2, 5) et fait penser à un groupe ou à une assemblée dont les membres sont d’origines diverses mais qui sont rassemblés au nom de Jésus-Christ par l’action de l’Esprit-Saint (Ac 2, 1-13). En entendant l’apôtre Pierre (Ac 2, 14-41) leur annoncer le message de conversion, ils se sont fait baptiser au nom du Seigneur crucifié et ressuscité. Cette adhésion à la foi en la résurrection du Seigneur leur donne de vivre et d’approfondir une expérience inédite qui est à la fois spirituelle, communion, partage et fraternité. Ainsi donc, après la prédication suivie du baptême reçu, un modèle d’Église se forme, une assemblée ou un groupe de croyants sous l’action de l’Esprit s’engagent à vivre un certain nombre d’actes et de pratiques essentiels à leur vie de foi. C’est cette pratique d’actes essentiels à la vie de foi chrétienne que l’on entendait réaliser dans son esprit en faisant le choix de l’Église comme Famille qui manifeste la fidélité à la tradition apostolique avec une mentalité africaine. Théologiquement, le choix se fonde sur la Sainte Trinité affirment les évêques. Le Père, le Fils et l’Esprit manifestent entre eux une communauté et une Famille divine. L’Église est Une et comprend plusieurs membres qui forment la famille de Dieu comme l’affirme Vatican. Si le Père dans sa sagesse crée l’univers et une humanité solidaire dans une relation de l’homme à la femme (Gn. 1,1-27), il décide également après la chute d’Adam de faire intervenir le Christ rédempteur « image du Dieu invisible, premier-né de toute la Création » et « d’élever les hommes à la communion de sa vie divine » (Col. 1, 15). L’Esprit-Saint, une fois achevée l’œuvre que le Père a confiée au 92
Fils, est envoyé pour « sanctifier l’Église en permanence et procurer ainsi aux croyants, par le Christ l’accès au Père » (Ep. 2, 18). L’Église dans sa réalisation historique a donc une empreinte de communion. Initiative du Père, elle est réalisée par le Fils et actualisée dans l’Esprit. Grâce au Fils de Dieu fait homme se sont établis de nouveaux liens entre Dieu et l’homme. Ces liens entre Dieu et l’homme et entre les hommes viennent de l’adoption filiale et sont les fruits de l’Esprit-Saint (Gal 4, 6-7). C’est ce fondement théologique qui permet de dire que la Sainte Trinité est le modèle sublime et le fondement de l’Église-Famille. Et c’est pourquoi, pour sauver son identité et sa mission, l’Eglise doit avoir pour norme la Parole de Dieu qui la fait vivre et qu’elle annonce, comme l’expérience des premiers chrétiens le révèle. Le but visé est de promouvoir la croissance de l’Église qui est Une. Cette intelligence doit s’approfondir dans une conception anthropologique africaine qui comprend l’homme et la femme comme fondamentalement des êtres de communion, de solidarité et de relation familiale chargés du ministère de communiquer la vie qu’ils ont reçue et qu’ils doivent protéger. L’évangélisation ne relève-t-elle pas aussi de la logique de l’amour et de la vie à transmettre ? Pour ce projet pastoral commun qu’ils veulent mettre en place, les évêques savent que leurs Églises sont conscientes qu’elles doivent se laisser continuellement régir par la Parole de Dieu pour former la famille de tous, ayant pour mission d’accueillir tous les hommes sans distinction d’origine, de village ou d’ethnie. Le choix de la métaphore situe l’Église dans un contexte familial qui peut aider à faire comprendre l’Église et sa mission. Devenir davantage famille en Église tel est le défi et l’objectif pris dans l’option de l’Église-Famille. 3.5.4
Apport du Pape François
Dans sa catéchèse, en l’occurrence avec l’année de la famille, le Pape François aborde dans le même sens pour souligner le lien entre la famille et la communauté chrétienne en se référant au Concile Vatican II. Pour ce, il dit que la famille est une église spirituelle, elle est une petite église (Cf. LG 9). Il poursuit en disant que la communauté chrétienne est la maison des ceux qui croient en Jésus, source de fraternité entre tous les hommes. L’Eglise chemine au 93
milieu des peuples, dans l’histoire des hommes et des femmes, des pères et des mères, des fils et des filles : C’est cette histoire qui compte pour le Seigneur. Le Pape continue en disant que dans les évangiles, l’assemblée à la forme d’une famille et d’une famille accueillante, non pas d’une secte exclusive, fermée : nous y trouvons pierre et Jean, celui qui a faim, celui qui a soif, l’étranger et celui qui est persécuté, la pécheresse et le publicain, les pharisiens et les foules. Jésus ne cesse d’accueillir et de parler avec tous, même avec celui qui n’espère plus rencontrer Dieu dans sa vie. Les disciples sont choisis pour prendre soin de cette assemblée, de cette famille des hôtes de Dieu. Le Pape François dit que la famille et la paroisse sont les deux lieux ou se réalise cette communion d’amour qui trouve sa source ultime à Dieu.
Pistes pour une préparation spirituelle -
Qu’elle est ma place dans l’Eglise ?
-
Je suis envoyé par qui ? Pour aller où ? Pour faire quoi?
-
Que faire pour ma conversion personnelle ?
- Comment je m’engage dans le dialogue œcuménique et le dialogue interreligieux ? - Suis-je artisan d’unité ? de communion ? de paix, de justice et de la réconciliation ? A lire : Mt 28, 19 ; Lc 4, 18-19 ; Rm 12, 1-2 ; Ac 4, 42-47, Jn 17, 21; EG 20 ; LG 9 ; RM 8, 87-90
94
4 MINISTERES L'EGLISE
ET
AUTORITE
DANS
Abbé Mathieu Fabrice Evrard BONDOBO
4.1 CONSTITUTION HIERARCHIQUE OU LA SUPRÊME AUTORITE DE L'EGLISE Préambule Selon l’évangile de Jn 20, 19-23, le Seigneur en apparaissant aux disciples, leur déclara : « Recevez l’Esprit Saint ; ceux à qui vous remettez les péchés, ils leur seront remis. Ceux à qui vous les retiendrez, ils leur seront retenus ». Jésus dote ses disciples d’un pouvoir, à exercer dans le cadre de leur ministère. La constitution dogmatique du Concile Vatican II, Lumen Gentium n 9-17 parle de l’Eglise comme peuple de Dieu ; tandis que le n 8 affirme que le Christ a voulu son Eglise, comme un organisme visible, une Eglise constituée et organisée ; une communauté, une société constituée d’organes hiérarchiques. L’expression peuple de Dieu, fait référence à une descendance commune ; celle de communauté signifie la solidarité qui dérive des liens ontologiques et des biens communs. Le peuple de Dieu est communauté, parce qu’il existe la solidarité et les biens communs (credo-sacrements-communion hiérarchique) ; l’expression société veut mettre en exergue la formation d’un peuple de Dieu, comme un corps unitaire, organiquement structuré. C’est dire que dans l’Eglise, du point de vue ontologique, il y a une organisation : « (…) les ministres qui sont revêtus d’un pouvoir sacré servent leurs frères (…). Jésus-Christ, Pasteur éternel, a édifié la sainte Eglise en envoyant les Apôtres (…) et a voulu que leurs successeurs, c’est-à-dire les évêques, fussent dans son Eglise pasteurs jusqu’à la fin des siècles (…). Les évêques, successeurs des Apôtres, lesquels, avec le successeur de Pierre, Vicaire du Christ et chef visible 95
de toute l’Eglise, gouvernent la maison du Dieu vivant » (Lumen Gentium, n 18). Le Pontife Romain et le collège des Évêques. St Pierre et les Apôtres constituaient un seul collège ; de la même manière, le Pape, successeur de Pierre et les Évêques, successeurs des Apôtres, forment un seul collège. Double sujet de la suprême autorité : le Pape et le collège des Évêques ; mais le collège n’agira jamais sans le Pape. Toutefois, le Pape et le collège des Évêques, sont deux sujets distincts, car le Souverain Pontife est à la tête du collège.
4.1.1 Le Pontife Romain Il est le successeur de Pierre et exerce sur toute l’Eglise le pouvoir ordinaire, suprême, plénier, immédiat et universel. Pouvoir ordinaire, c'est-à-dire lié à son office ; le pouvoir suprême, c'est-à-dire, il n’est soumis à aucune autorité dans l’Eglise, personne ne peut le juger et contre ses sentences et ses décrets, il n’y a pas de recours ; le pouvoir plénier, c'est-à-dire, s’étend à tout ce qui concerne la foi, les mœurs ou coutume, les sacrements, la discipline et le gouvernement de l’Eglise ; le pouvoir immédiat, c'est-à-dire, sans médiation ou permission, sur les personnes et les institutions (Eglises, pasteurs, fidèles) ; le pouvoir universel, à l’Église tout entière, sans limite du territoire. Ce pouvoir comporte des limites : il est utilisé dans le domaine de la communion ecclésiastique et non en dehors ; exclue l’usage arbitraire.
4.1.2
Le collège des Évêques
Par l’ordination épiscopale et la communion hiérarchique avec la tête (Pape) et les membres, L’Évêque devient membre du collège épiscopal. Ce collège est la succession du collège des Apôtres. L’appartenance au collège, exige 2 conditions : 1) Ordination épiscopale ; 2) Communion hiérarchique avec le Pape, communion avec les autres membres du collège. 96
Le collège épiscopal est d’institution divine, c'est-à-dire, par disposition du Seigneur (Can. 330) a) Pouvoir du collège épiscopal En union avec le Pape et jamais sans lui, le collège épiscopal est sujet du pouvoir suprême et plénier sur l’Eglise tout entière (Can.336). b) L’exercice du pouvoir Double exercice de ce pouvoir : • D’abord de manière solennelle dans le Concile Œcuménique • Ensuite, par action unie des Évêques dispersés dans le monde, quand cette action est demandée et reçue par le Pape, de sorte qu’elle devienne véritablement un acte collégial
4.1.3
Pistes pour une préparation spirituelle
Les fidèles qui jouissent d’un pouvoir dans l’Eglise, l’exercent pour le bien du peuple de Dieu. Comment j’exerce le pouvoir au sein de mon mouvement, fraternité, paroisse, diocèse ? Jésus en appelant ses disciples, après la demande de la mère des fils de Zébédée, affirme : « vous le savez, les chefs des nations les tiennent sur leur pouvoir et les grands sous leur domination. Il ne doit pas en être ainsi parmi vous » (Mt20, 25-26). Est-ce que dans ma vie, pour des intérêts ou au nom de mes ambitions, je maltraite ou fais souffrir mes frères ?
97
4.2 LE MAGISTERE DANS L'EGLISE CATHOLIQUE Soeur Lucie MBOMBI Notre réflexion se base sur trois points. Dans un premier temps nous parlerons du Magistère. Ensuite, nous présenterons les différents degrés du magistère et, nous exposerons les moyens par lesquels le magistère s’exprime.
4.2.1
Qu'est-ce que le magistère ?
La constitution dogmatique Dei Verbum du 18novembre1965, issue du concile Vatican II, explique que la doctrine chrétienne est, pour les catholiques, issue d'une seule source : la Révélation. Cette vérité sur Dieu et sur le salut qu'il accorde aux hommes est connue grâce à trois moyens : La Tradition (christianisme), les Saintes Écritures, et le Magistère vivant dont l'autorité s'exerce au nom du Christ, c'est-à-dire par les évêques en communion avec l'évêque de Rome. Pour les catholiques, cette autorité du collège épiscopal uni à son chef le pape est un héritage du Christ et des apôtres, selon leur interprétation des Évangiles. Ecoutons cette parole du Christ dans l'Évangile de Luc, 10:16 : « Celui qui vous écoute, m'écoute ; et celui qui vous rejette, me rejette ; et celui qui me rejette, rejette celui qui m'a envoyé. » L'Église considère qu'elle est assistée dans sa tâche d'enseignement par le Saint-Esprit, à l'œuvre particulièrement dans les conciles et les déclarations ex cathedra du pape, qui tous deux sont réputés infaillibles. Le Magistère s'exprime également dans des occasions moins solennelles, dans les actes pontificaux (encycliques, motu proprio, etc.), ou des préfets des congrégations de la Curie romaine, en particulier le préfet de la Congrégation pour la doctrine de la foi. Le Magistère est alors qualifié de « simplement authentique » : il requiert l'adhésion des fidèles sur le sujet traité. « La charge d'interpréter authentiquement la parole de Dieu écrite ou transmise a été confiée au seul Magistère vivant de l'Église, dont l'autorité s'exerce au nom de Jésus-Christ. Ce Magistère n'est pas au98
dessus de la parole de Dieu ; il la sert, n'enseignant que ce qui a été transmis, puisque, en vertu de l'ordre divin et de l'assistance du SaintEsprit, il écoute pieusement la parole, la garde religieusement, l'explique fidèlement, et puise dans cet unique dépôt de la foi tout ce qu'il nous propose à croire comme étant divinement révélé ». (DV 10)
Il s’agit là d’un service original du pape et des évêques qui consiste à « interpréter de façon authentique la Parole de Dieu, écrite ou transmise » « avec l’autorité reçue du Christ, au nom et par le pouvoir du Christ » (DV 10 ; LG 23 et 25, Cf. CIC 750 § 2). La première chose est de bien distinguer ce qu'est le magistère et ce qu'il n'est pas. Comme son nom l'indique, c'est un pouvoir d'enseignement doctrinal. « Allez et enseignez à toutes les nations » (Cf. Mt 28,19+) : telle est la tâche confiée par le Christ aux Apôtres. Et c'est en son nom que l'Église reconnaît aujourd'hui ce même pouvoir aux évêques et au pape, ainsi qu'aux personnes que ceux-ci délèguent en ce sens : prêtres, théologiens, catéchistes… Il s'agit d'une fonction instituée au nom de l'Église. Ce magistère consiste d'abord à expliquer la Parole de Dieu, dans une perspective missionnaire. Ensuite, à protéger la foi et son contenu contre les déviances, les mauvaises interprétations. Il s'agit là d'un rôle doctrinal. Pourquoi cet enseignement est-il nécessaire ? Pourquoi ne pas s'en tenir aux Évangiles ? C'est que ces mêmes Évangiles nous sont parvenus par la médiation de l'Église, ils ne sont pas « tombés du ciel ». Au sein de cette Église qui cherche à comprendre la Parole de Dieu, c'est la raison d'être du magistère des évêques et du Pape : maintenir l'Église dans la pureté de la foi transmise par les Apôtres.
4.2.2
Degrés du magistère
4.2.2.1
Magistère extraordinaire
On appelle « magistère extraordinaire » l'ensemble des actes pontificaux et conciliaires dont l'objet est la définition solennelle d'une doctrine sur la foi ou les mœurs. On trouve sa définition dans Lumen Gentium au n 25, dans le catéchisme de l'Église catholique au §891 et 99
dans le canon 749 : « Can. 749 - § 1. Le Pontife Suprême, en vertu de sa charge, jouit de l'infaillibilité dans le magistère lorsque, comme Pasteur et Docteur suprême de tous les fidèles auquel il appartient de confirmer ses frères dans la foi, il proclame par un acte décisif une doctrine à tenir sur la foi ou les mœurs. § 2. Le Collège des Évêques jouit lui aussi de l'infaillibilité dans le magistère lorsque les Évêques assemblés en Concile Œcuménique exercent le magistère comme docteurs et juges de la foi et des mœurs, et déclarent pour l'Église tout entière qu'il faut tenir de manière définitive une doctrine qui concerne la foi ou les mœurs; ou bien encore lorsque les Évêques, dispersés à travers le monde, gardant le lien de la communion entre eux et avec le successeur de Pierre, enseignant authentiquement en union avec ce même Pontife Romain ce qui concerne la foi ou les mœurs, s'accordent sur un point de doctrine à tenir de manière définitive. » Cet enseignement demande une adhésion de la foi de la part des fidèles : ne peut donc se réclamer catholique celui qui refuse des points définis par le magistère extraordinaire. Un exemple de cet acte posé par un pape est la proclamation du dogme de l'Assomption de la Vierge Marie par l'encyclique Munificentissimus Deus en 1950. Le concile Vatican I a quant à lui définit le dogme de l'infaillibilité pontificale en 1870.
4.2.2.2
Magistère ordinaire universel
Le « Magistère ordinaire et universel des évêques » est un enseignement universel (valable partout et de tout temps : semper et ubique, en communion avec le pape. Il suppose la commune adhésion de foi des fidèles. Il est considéré comme divinement révélé et donc irréformable. Il est défini par Lumen Gentium au n 25 et par le catéchisme de l'Église catholique au §891. Le fidèle doit à cet enseignement « l'adhésion de la foi ».
100
Il peut arriver que le besoin se fasse sentir de solenniser cet enseignement : soit pour lutter contre des erreurs sur ce sujet, soit pour rendre grâce à Dieu. Le pape ou un concile peut alors user de son magistère extraordinaire : C'est ce qui s'est passé en 1950 avec Munificentissimus Deus.
4.2.2.3
Magistère authentique
C'est l'enseignement habituel du pape et des évêques dans leurs exhortations, leurs catéchismes, leur lettres diverses, ou leurs sermons ou explications. L'autorité de ce magistère est très variable, selon ce que le pape ou l’évêque manifeste de sa pensée et de sa volonté et que l’on peut déduire en particulier du caractère des documents, ou de l’insistance à proposer une certaine doctrine, ou de la manière même de s’exprimer. « L’assistance divine est encore donnée aux successeurs des apôtres, enseignant en communion avec le successeur de Pierre, et, d’une manière particulière, à l’évêque de Rome, Pasteur de toute l’Église, lorsque, sans arriver à une définition infaillible et sans se prononcer d’une “manière définitive”, ils proposent dans l’exercice du Magistère ordinaire un enseignement qui conduit à une meilleure intelligence de la Révélation en matière de foi et de mœurs. À cet enseignement ordinaire les fidèles doivent “donner l’assentiment religieux de leur esprit” (LG 25) qui, s’il se distingue de l’assentiment de la foi, le prolonge cependant ». (CEC 892) Le fidèle doit à cet enseignement un « assentiment religieux de leur esprit » : la parole de l'évêque doit être tenue pour juste et vraie, jusqu'à plus ample informé.
4.2.3
Comment s'exprime le magistère dans l'Eglise ?
Concile Le concile œcuménique est une expression majeure du magistère de l’Eglise. Il s’exprime dans des textes promulgués par les évêques. Les Constitutions sont les documents les plus importants. Elles peuvent être dogmatiques ou pastorales. Viennent ensuite les déclarations et les décrets. Le concile œcuménique permet de 101
manifester plus clairement l’unité de l’Eglise et de prendre conscience d’avantage du pluralisme des évêques et de leurs églises locales. Encyclique L’encyclique est une lettre solennelle adressée par le pape à tous les évêques, et parfois également à l'ensemble des fidèles. Elle est destinée à exposer à ses destinataires la position officielle de l'Église catholique sur un thème précis. Elle est désignée par ses premiers mots en latin. Constitution apostolique C’est un document solennel du pape, semblable à une loi dans le domaine civil. Le qualificatif apostolique signifie qu'elle est issue du siège apostolique. Le Catéchisme de l’Eglise Catholique a été promulgué par une Constitution apostolique. Exhortation apostolique C’est un texte qui exhorte des évêques, les consacrées, les personnes de bonne volonté, les confirme, les incite à s'engager dans telle ou telle activité. Les Synodes des évêques sont suivis d’une exhortation apostolique de la part du pape.
Lettre apostolique Document solennel par lequel le pape s’adresse soit à un responsable de l’Eglise, soit à une catégorie de fidèles, sous forme de lettre ouverte.
Motu proprio Motu proprio signifie « de son propre mouvement». C’est une lettre émise par le pape de sa propre initiative. C’est par un motu proprio par exemple que le pape Benoit XVI avait annoncé l’Année de la foi en 2011.
102
Bulle Du latin bulla, le sceau, qui la scelle. Document juridique important marquant la convocation d’un concile, une canonisation, une nomination épiscopale etc.
4.2.4
Pistes pour une préparation spirituelle
Ma foi en Jésus-Christ se base sur quoi ? Sur la révélation ? Sur les miracles ? Les prophéties ? Selon Dei Verbum, personne n’est au-dessus de la Parole de Dieu. Qu’elle est la place que je réserve à la Parole de Dieu dans ma vie ? Est-ce que je trouve un temps pour la méditation de cette Parole ? Qu’elle est l’importance de la prière en famille pour moi ? Cette Parole de Dieu me guide dans mes jugements ? Dans mes décisions ? Ainsi que dans mes actes ? Suis-je obéissant au magistère universel ainsi que local ? Est-ce que j’adhère à leurs déclarations ainsi qu’à leurs décisions ? Est-ce que j’ai l’habitude de lire les documents conciliaires ? Les encycliques, les exhortations apostoliques ? Les lettres pastorales des évêques ? Pour m’imprégner des enseignements du magistère ?
103
4.3 INFAIBILITÉ PAPALE Abbé Serge IKAGA DOURAZA
4.3.1
Définition du terme
L'infaillibilité pontificale est un dogme selon lequel le pape ne peut se tromper lorsqu'il prononce une décision de l'Eglise en s'exprimant "Ex-cathedra" en matière de foi et de la morale selon la doctrine catholique romaine. L'expression Ex-cathedra est synonyme d'une autre expression latine "ex-officio" qui signifie littéralement " depuis la chaire". Il s'agit d'un enseignement, d'une doctrine que le pape proclame, assis sur sa chaire (la chaire de Pierre) entourés des cardinaux, évêques et tous les ministres. Ce qu'il proclame doit être tenu pour vrai, comme une vérité à croire. La "chaire" dont on parle ici, est symbole de la position du pape comme enseignant officiel de la Doctrine catholique. Il s'agit bien sûr d'un siège ou mieux d'un trône, symbole de l'enseignement et de l'autorité de gouvernement.
4.3.2
Les fondements du dogme de l'infaillibilité
-L'infaillibilité pontificale trouve bien son fondement dans les Ecritures surtout dans les évangiles où différents versets affirment la primauté de Pierre sachant que le pape est le successeur de Pierre dans sa fonction de pasteur de l'Eglise du Christ. Mt 16, 18 «Et moi, je te dis que tu es Pierre, et que sur cette pierre, je bâtirai mon Eglise et que les portes de l'enfer ne prévaudront point contre elle». Jn 21, 15-17 où par trois fois Jésus dit à Pierre "pais mes brebis" lui donnant par le fait même autorité sur ces brebis. Lc10, 16 : dans le discours d'envoie en mission des soixante-douze disciples, Jésus leur donne autorité sur le mal et leur dit « Qui vous écoute m'écoute, qui vous rejette me rejette, et qui me rejette rejette Celui qui m'a envoyé». 104
Lc 22. 31-32 « Mais j'ai prié pour toi, afin que ta foi ne défaille point ; et toi, quand tu seras converti, affermis tes frères ». - Son fondement est aussi patristique. En effet, dans les premiers siècles, l'évêque Tertullien reconnais la primauté papale qu'il exprime en parlant de Rome, son siège, comme le lieu d'où nous recevons l'autorité. - Au point de vue historique, la nécessité de déclarer l'infaillibilité papale se voyait déjà au bas Moyen-âge (XIV -XVès) surtout en cette période de 1400 où on assistait à une rivalité entre trois pape : -Un antipape Jean XXIII résidant chez le roi à Rome -Le pape de Rome Grégoire XII en fuite à Rimini - et l'antipape Benoit XIII résidant à Avignon : c'est ce qu'on a appelé le schisme de l'occident (1378-1417). C'est juste pendant cette période, au Concile de Constance (1414-1418) qu'on affirma la supériorité des décisions d'un Concile sur celles d'un pape. Mais sachons que c'est le pape qui convoque un concile. Ce n'est que plus tard le 18 juillet 1870 que le Concile du Vatican I va définir le dogme de l'infaillibilité pontificale. Cette infaillibilité est strictement et précisément délimitée au cas où le pape se prononce Excathedra. Cette définition stipule que les cardinaux reconnaissent comme vraies et irrévocables les interprétations du dogme prononcé par le Souverain pontife. Voici en exemple un extrait du texte prononcé par le pape Pie IX et promulguée dans la Constitution dogmatique sur l'Eglise Pastor Aeternus du Concile Vatican I: […] nous enseignons et proclamons comme un dogme révélé de Dieu :Le pontife romain, lorsqu'il parle ex cathedra, c’est-àdire lorsque, remplissant sa charge de pasteur et de docteur de tous les chrétiens, il définit, en vertu de sa suprême autorité apostolique, qu'une doctrine, en matière de foi ou de morale, doit être admise par toute l'Église, jouit par l'assistance divine à lui promise en la personne de saint Pierre, de cette infaillibilité dont le divin Rédempteur a voulu que fût pourvue l'Église, lorsqu'elle définit 105
la doctrine sur la foi ou la morale. Par conséquent, ces définitions du Pontife romain sont irréformables de par elles-mêmes et non en vertu du consentement de l'Église. Si quelqu'un, ce qu'à Dieu ne plaise, avait la présomption de contredire notre définition qu'il soit anathème. En exemple d'un dogme prononcé ex cathedra, nous retenons le dogme de l'immaculée conception, prononcé par le pape Pie IX , le 8 décembre 1854 dans la Constitution Apostolique «Ineffabilis Deus» :
«Nous déclarons, nous prononçons et définissons que la doctrine qui enseigne que la Bienheureuse Vierge Marie, dans le premier instant de sa Conception a été, par une grâce et un privilège spécial du Dieu Tout-Puissant, en vue des mérites de Jésus-Christ, Sauveur du genre humain, préservée et exempte de toute tache du péché originel, est révélée de Dieu, et par conséquent qu'elle doit être crue fermement et constamment par tous les fidèles.»
4.3.3
Infaillibilité et Primauté
Une certaine confusion est à éviter entre l'infaillibilité pontificale qui concerne la vérité des actes du Pontife dans le domaine de foi et de morale et la Primauté de l'évêque de Rome qui concerne l'autorité juridique (c'est-à-dire ce qui est juste de faire) du pape dans toute l'Eglise. Ici, il est question du pouvoir des clé et du choix de Pierre comme Responsable de l'Eglise, pouvoir qu'assume le Pape. Exemple, quand le pape écrit une encyclique, il le fait dans sa fonction d'autorité juridique de l'Eglise, chargé d'exhorter et d'enseigner le peuple de Dieu tandis qu'une déclaration dogmatique est une vérité de foi dans laquelle le pape ne peut se tromper.
106
4.3.4
Autres infaillibilités
Le développement et extension de l'infaillibilité s'est fait plus au Concile Vatican II surtout dans la Constitution Lumen Gentium.28 Le pape n'est pas seul à disposer de l'infaillibilité. Il faudra déjà reconnaitre le caractère infaillible de la Sainte Tradition car la communauté chrétienne ne peut unanimement se tromper sur les choses de la religion (cf LG 12). L'infaillibilité commune des évêques est également soulignée quand ils enseignent de manière unanime et authentique des points de foi ou de mœurs, ils proclament infaillible la doctrine du Christ (LG 25).
4.3.5 Pistes pour une préparation spirituelle -Comment accueillir l'Evangile de la Vérité suprême qui est le Christ ? -Le pape vient affermir la foi des chrétiens. Comment disposonsnous notre cœur à accueillir les vérités de foi que le Christ nous donne par son message -Le pape Benoit XVI dans l'exhortation Verbum Domini insiste sur la Parole de Dieu qui doit être vécue dans le quotidien : combien de temps donnons-nous à la méditation et au partage de la Parole de Dieu?
28
Cf. Jean-Yves Lacoste (dir), Dictionnaire critique de théologie, PUF, Paris 1998, 687.
107
4.4 LES MINISTERES DANS L’EGLISE Père Joseph SAMEDI, SJ
Introduction Pour mener à bien sa mission, Jésus avait besoin des collaborateurs. Il a choisi les douze apôtres. « La moisson, dit-il, est abondante mais les ouvriers sont peu nombreux ». Jésus s’est appuyé sur des personnes de confiance qui partageaient sa mission, sa joie, ses peines et ses responsabilités. Dans l’Église apostolique, les apôtres sont les responsables d’Église. A côté de ceux-ci, on signale la présence des 7 diacres choisis pour s’occuper du soin des pauvres et du bien-être spirituel de la communauté. Pour mener à bien sa mission de fonder les Églises, Paul s’est appuyé sur des collaborateurs comme Tite et Timothée. Il ne pouvait pas faire tout seul, il s’appuyait sur des personnes de confiance. Ainsi dans l’Église, les ministères ou les responsabilités sont partagés, et on reçoit les ministères dans l’Église, on ne se les donne pas soi-même. Le ministère est un service confié à un membre de l’Église.
4.4.1
Les ministères et leurs fonctions dans l’Église
primitive L’Église est un corps dont nous sommes les membres. La tête du corps, c’est le Christ. Comme membre d’un corps, chacun reçoit selon son charisme, une responsabilité, un service à rendre en vue de l’édification et de la croissance de l’Église. Nous lisons ceci dans l’épitre aux Éphésiens : «Et les dons qu’il a faits, ce sont les apôtres, des prophètes, des évangélistes, des pasteurs et catéchètes, afin de mettre les saints en état d’accomplir le ministère pour bâtir le corps du Christ » (Eph.4, 11). Dans cette épitre, nous énumérons cinq ministères. • Le ministère d'apôtre. L’apôtre est un fondateur d'églises. Il est chargé de l’annonce de l’Évangile, il exerce les dons spirituels, paît le troupeau. Il réunit donc à lui seul les autres ministères. • Le ministère de prophète. Le prophète a reçu la charge spéciale de transmettre la parole ou pensée de Dieu. Il est celui qui parle au nom de 108
Dieu et la responsabilité consiste aussi à exercer le discernement au sein de la communauté. • Le ministère d’évangéliste. L'évangéliste a pour mission l'annonce de la Bonne Nouvelle du salut. Son charisme spécifique le rend particulièrement apte à amener les gens à la conversion. • Le ministère de pasteur. Le pasteur est le berger qui prend soin des brebis, et enseigne la parole de Dieu. • Le ministère de docteur. Le docteur, on peut l’associer au pasteur. Il a le ministère d'enseignement de la parole de Dieu. Celle-ci est un puissant moyen d'édification de l'église. • Le ministère du catéchète. Le catéchète a la mission d’éduquer et d’instruire les enfants à la connaissance de Dieu et de la foi chrétienne.
4.4.2
Les ministères et leurs fonctions dans l’Église de
notre temps Le droit canon de 1983 de l’Église catholique définit les ministères dans l’Église en ces termes (canon 207 §1): « Par institution divine, il y a dans l’église, parmi les fidèles, les ministres sacrés qui en droit aussi appelés clercs, et les autres sont aussi appelés laïcs ». Par la réception du baptême et de la confirmation, tous les catholiques participent au sacerdoce commun des fidèles qui les fait « prêtres, prophètes et rois ». En outre, le sacrement de l’ordre donne à certains de ses membres un sacerdoce ministériel. Il y a donc le sacerdoce commun, baptismal, partagé par tous les fidèles et le sacerdoce ministériel propre à certains, qui ont été choisis et mis à part pour ce ministère dans l’Église. Les deux sacerdoces à savoir baptismal et ministériel sont différents et complémentaires.
4.4.3
Les ministères ordonnés
Les ministres ordonnés sont les évêques, les prêtres et les diacres. Ils sont choisis, appelés et ordonnés en vue d’une mission précise. Ils sont appelés clercs (membre du clergé), n’ont plus laïcs.
109
4.4.3.1
La figure de l’évêque
Qu’est-ce qu’un évêque ? Un évêque est un ecclésiastique qui dirige un diocèse, qui est une circonscription ou «une portion d’un peuple du peuple de Dieu». L’évêque a l’autorité apostolique sur une Église particulière. Il assume à ce titre la succession des apôtres qui les ont établis à la tête d’une communauté chrétienne d’un territoire défini. Considéré comme successeurs des apôtres, il est, à ce titre, docteur de la foi, chargé de l’enseigner et de la transmettre avec fidélité. L’évêque est avant tout celui qui préside l’assemblée des fidèles, plus précisément l’eucharistie, mais il peut déléguer un prêtre. Dans son église locale, il est le principe de l’unité visible des fidèles. Il est chargé de veiller sur son église locale, d’assurer la liturgie, l’enseignement de la foi. Il peut convoquer un synode diocésain pour l’aider à discerner les orientations pastorales pour son diocèse. Il est assisté dans sa tâche par des diacres, des prêtres et des laïcs, dument mandatés. Les sacrements que seuls les évêques peuvent administrer sont : la confirmation (déléguée aux prêtres diocésains), le sacrement de l’ordre : ordination diaconale et presbytérale et consécration épiscopale. Dans l’Église catholique, les évêques sont nommés par le Pape. La consécration d’un évêque est conférée par au moins trois évêques, en communion avec l’évêque de Rome. Si ce n’est pas le cas, l’ordination est considérée comme illicite et les consacrant comme le consacré encourent l’excommunication.
4.4.3.2
Rôle et mission du prêtre
Le terme prêtre vient du grec presbyteros signifiant « anciens »29 dans le sens des anciens notables ou chefs d’une communauté comme dans le 29
L'ancien, bibliquement, est un pasteur de l'église locale. Paul envoie chercher les anciens d'Éphèse pour leur dire entre autre : "Prenez donc garde à vous-mêmes, et à tout le troupeau sur lequel le Saint-Esprit vous a établis évêques, pour paître l'Église du Seigneur…" (Actes 20.28). Pierre adresse une exhortation aux anciens, se
110
judaïsme. De ce terme vient le mot presbytre qui a donné prêtre. Dans les débuts de l’Église cette fonction est assignée à des hommes reconnus par le peuple pour leur sagesse et la clarté de leur discernement. Le prêtre, dans l’Église catholique est celui qui a reçu le sacrement de l’Ordre, il n’est pas à comparer avec les lévites et les personnages désignés comme prêtre dans l’Ancien Testament. A l’image du Christ, le prêtre est un pasteur, il « paît » le peuple de Dieu. En effet, lorsque le prêtre agit dans la charge qui lui est confiée, et notamment en conférant des sacrements tels que l’eucharistie ou le sacrement de réconciliation, c’est le Christ luimême qui agit, en tant que tête de son corps qu’est l’Église. A travers ses diverses activités, le prêtre est un homme de Dieu, chargé d’être la présence du Christ au milieu de son peuple, à son service pour le mener à la sainteté. Le prêtre est le ministre du baptême, l’eucharistie, sacrement de réconciliation, sacrement des malades. Il agit in Persona Christi Capitis (dans la personne du Christ Tête). Il représente donc Jésus Christ qui est le Souverain Prêtre exerçant le vrai sacerdoce. Le prêtre responsable d’une paroisse est appelé curé, ailleurs recteur et dans certains cas modérateur, alors que les prêtres qui l’assistent sont nommés vicaires. Le presbytère est le logement de fonction réservé aux prêtres d’une paroisse. Le prêtre fait l’objet d’une vocation particulière que les croyants identifient à un appel.
4.4.3.3
Le Diacre
Le mot diacre vient du grec diaconia qui veut dire service/serviteur30. Jésus Christ est le serviteur par excellence. Il est venu dans le monde, «non pas pour être servi mais pour servir en faisant don de sa vie ». Le service des diacres remonte aux premiers temps de l’Église. Les apôtres choisissent « sept hommes remplis de l’Esprit Saint » pour le partage des tâches et pour une plus grande attention aux besoins de la
désignant lui-même comme ancien : "Paissez le troupeau de Dieu qui est sous votre garde…" (1 Pi. 5.1-2). 30
John N. Collins, Diakonia, Oxford University Press, 1990, p. 3.
111
communauté, en particulier « le service des tables » qui est à la fois celui de la table eucharistique et celui du partage (Ac 6). Ces sept hommes sont les précurseurs d’un ministère nouveau. Il est à noter que dans le texte grec des Actes, le mot diacre n’est pas employé. Seul est usité celui de diaconat, « service ». Le ministère des diacres a toujours été tenu en grande estime par l’Église, et l’institution du diaconat est très féconde dans l’Église d’Occident jusqu’au Ve siècle. Elle subit ensuite un lent déclin, pour finir par n’être plus qu’une étape intermédiaire avant l’ordination sacerdotale. Le triple ministère du diacre a)Ministère de la parole Le ministère de la parole est le premier volet du ministère diaconal. Durant l’ordination, l’évêque, après avoir invoqué l’Esprit Saint sur les ordinands, il poursuit sa prière "pour que, fortifiés par ta grâce des sept dons, ils accomplissent leur ministère avec fidélité". (Prière de consécration). Une fois revêtus de l’étole et de la dalmatique, les ordinands reçoivent l’un après l’autre le Saint Évangile des mains de l’évêque qui dit : "Reçois l’Évangile du Christ dont tu as été fait messager ; convertis en foi vivante ce que tu lis, apprends aux autres ce qui s’est fait chez toi foi vivante et accomplis ce que tu as appris aux autres" (Rite des Ordres). Les diacres reçoivent dans l’ordination diaconale, en tant que ministres du Christ serviteur, la tâche de prêcher l’Évangile et de l’annoncer à l’assemblée. Le diacre doit en outre convertir l’Évangile en foi vivante, l’apprendre aux autres et l’accomplir au jour le jour. b) Le Ministère de la liturgie Le diacre exerce dans l’Église son ministère/service) qu’il résume de façon sacramentelle dans la liturgie. Ses actions et son agir liturgique en font partie intégrante. Rappelons au passage que l’Église et la liturgie ne sont pas deux choses séparées : l’Église, soit-elle particulière ou universelle, est présente dans la liturgie qui en constitue le sacrement. L’Église n’existe pas sans la liturgie, tout comme la liturgie n’existe pas sans l’Église. C’est grâce à la liturgie que l’Église Universelle existe et qu’elle est consciente de son existence. Nous sommes catholiques, c’està-dire membres vivants de l’Église universelle, justement parce que nous célébrons et participons pleinement à la réalité de l’Église. Le diacre est responsable devant l’Église, présente dans l’assemblée de la messe, d’un 112
bon service. Sur l’autel, il doit se faire le porte-parole des prières et des besoins des fidèles. Il proclamera ainsi l’Évangile au peuple et dira les prières propres à son office. c) Servir sans présider Pendant les cérémonies, le diacre assiste le prêtre et reste toujours à côté de lui ; sur l’autel il sert le missel et le calice. Le diacre qui assiste le célébrant, doit connaître le "quand", le "comment" e le "pourquoi" de tout ce que le célébrant dit ou fait à chaque moment de la célébration. Que le diacre "soit le bras droit du célébrant" avec dignité, humilité et efficacité. S’il ne remplit pas sa tâche avec intelligence, on dirait qu’il "gêne" et entrave le bon déroulement des cérémonies. d) La Charité Outre le ministère de la parole et celui de la liturgie, le "ministère de la charité" lui revient aussi. C’est justement ce ministère qui explique l’élection par les apôtres des "premiers diacres", dont Saint Etienne. La situation décrite dans les Actes 6 montre la façon dont le diacre est appelé à ce ministère : l’administration de la charité ; la sollicitude pour les nécessiteux faisant toujours partie intégrante de l’office diaconal tant que les diacres existèrent en Occident. Saint Laurent, archidiacre de Rome, est le martyr de la charité et c’est aussi le patron des diacres engagés notamment dans cet office d’amour pour le plus pauvres qui représentent le trésor le plus grand de l’Église. L’Église accordera toujours une place préférentielle aux pauvres et aux nécessiteux. La diaconie de la charité est une responsabilité de l’Église tout entière. Le fait que dans la personne du diacre ce service soit lié d’un lien sacramentel à la proclamation de la parole et à la célébration de la liturgie, montre que la charité, à laquelle tous les chrétiens sont appelés, trouve son origine en Jésus Christ, dans le mystère de son incarnation, mort et résurrection. Enfin, le diacre est un bâtisseur de justice et de paix, puisque par son office de charité il devient responsable de la promotion de la quête du Royaume de Dieu et de sa justice. Le diacre a été ordonné et consacré pour être un sacrement, un signe visible et efficace du ministère et du service du Christ dans l’Église. Le diacre doit toujours se souvenir qu’il est le signe visible du Christ serviteur dans ce monde.
113
4.4.3.4
Le diaconat permanent
Un diacre permanent est un chrétien ayant reçu par l’imposition des mains de l’évêque, l’ordination sacramentelle du diaconat. C’est une très ancienne forme d’engagement au service de l’Église, coopérant dès l’origine au ministère apostolique de l’évêque. Le diaconat permanent a été restauré par le Concile Vatican II en tant que ministère permanent31de l’Église. Pour la croissance de l’Église, des laïcs et des religieux sont appelés à accomplir la fonction d’enseignement et de sanctification. Les Pères conciliaires sont persuadés que l’Église avait besoin de ce ministère en tant que niveau intermédiaire entre le laïcat et le sacerdoce, en tant que bras qui manquait aux évêques. Aujourd'hui, il y a des diacres en vue du sacerdoce et des diacres en vue du service permanent32, appelés « diacre permanent ». Les diacres permanents sont la plupart, mariés et exercent une profession. Le diacre permanent peut être également célibataire mais ne peut se marier après l’ordination. Un diacre permanent devenu veuf ne peut non plus se marier.
4.4.3.5
Les ministères institués
Le lectorat et l’acolytat sont appelés aujourd’hui ministères institués. Autrefois ils faisaient autrefois partie des ordres mineurs (portier, exorciste, lecteur, acolyte et sous-diacre). Le 15 août 1972, Paul VI via le motu proprio Ministeria quaedam du 15 août 1972, n’en conserve que les deux à savoir l’acolytat et le lectorat et en les séparant du sacrement de l’ordre. Le lectorat correspond au service de la Parole de Dieu. Le lecteur est institué pour lire la Parole de Dieu dans l’assemblée liturgique et la transmettre (depuis la catéchèse jusqu’à l’initiation aux sacrements). Le lecteur doit avant tout s’en nourrir en la lisant assidument car « seul celui qui se met avant tout à l’écoute de la Parole de Dieu peut l’annoncer, 31
Lumen Gentium, n 29.« Le diaconat pourra, dans l'avenir, être rétabli en tant que degré propre et permanent de la hiérarchie 32
Le statut des diacres permanents est régi par les textes de Vatican II, et par le Motu Proprio de Paul VI Sacrum Diaconatus Ordinemdu 18 juin 1967, ainsi que par le Directoire du 22 février 1998 de la Congrégation pour le clergé.
114
parce que l’on doit enseigner non sa propre sagesse mais la Sagesse de Dieu33 ». Le premier sens du mot « acolyte » est « accompagnateur, compagnon ». Il accompagne donc le célébrant. Il lui revient de s’occuper du service de l’autel, d’aider le prêtre dans les fonctions liturgiques et principalement dans la célébration de la messe. L’acolytat est institué pour le service de l’Eucharistie, des prières personnelles et communautaires. -Les ministres ordinaires de l’eucharistie sont les évêques et les prêtres. -Les ministres extraordinaires de l’eucharistie sont des laïcs choisis selon certains critères et qui donnent la communion aux fidèles et aux malades. -Dans le cas du sacrement de mariage, ce sont les mariés sont les ministres de leur sacrement, le prêtre assiste seulement même si c’est lui qui c’est qui assure la présidence de cette célébration eucharistique. -Dans l’Église, enfin, les baptisés consacrés et laïcs participent à la tâche de l’Église en participant à la catéchèse, à la liturgie, etc.
4.4.4
Pistes pour une préparation spirituelle
Dans l’Église, il y a de la place pour tous les baptisés, comme membre d’un corps, corps du Christ, qu’est l’Église, qu’est-ce que je fais comme apostolat, mon engagement au sein de ma paroisse ? Je fais partie de quel mouvement ou fraternité ? Suis-je seulement le chrétien du dimanche ou des grandes fêtes de l’Église comme Noël, Pâques ou Pentecôte ?
33
Benoît XVI, annonçant le synode des évêques de 2008.
115
5. LES PAPES Abbé Serge IKAGA DOURAZA
5.1 LA VACANCE DU SIÈGE APOSTOLIQUE La vacance du Siège apostolique concerne la période comprise entre la mort du Souverain Pontife Romain et la prise de possession du nouveau pape élu. Nous parlerons distinctivement de ces deux grands moments à savoir : d'abord la mort et les obsèques du pape et en fin le début du ministère pétrinien du nouveau pontife.
5.1.1
Première Partie : La mort et les obsèques du pape
La mort du Pontife Romain assume la valeur, comme celle de chaque chrétien, de la mort du Christ. Le Christ, premier martyr, rassemble tous les chrétiens dans l'unité d'un seul peuple. Il faudra bien y reconnaitre la mort du Fils de Dieu, obéissant au Père pour rassembler les fils dispersés de Dieu (Jn 11,51-52). Ainsi la mort de Jésus (une personne pour tous : Jn 11, 50) se comprend dans le sens de fécondité universelle : mort pour…Dans le naturel comme dans le martyr, la mort du Pontife Romain est un témoignage de vie et d'union au Christ dans la relation avec le Père. Ce témoignage nous guide à pénétrer dans la vérité de la Croix qui révèle le mystère salvifique. C'est dans ce sens qu'il faut comprendre, par exemple, la présence des milliers des fidèles en prière qui était sur la place St-Pierre le 2 avril 2005 pour accompagner le saint pape Jean-Paul II dans son agonie. Toute la législation concernant les obsèques du pape est contenue dans un document appelé Ordo Exsequiarum Romani Pontificis (OERP). Ce document a été renouvelé et approuvé par le pape Jean-Paul II le 05 février 1995.
Les moments significatifs sont : - La certification et la reconnaissance de la mort - L'exposition du corps dans la case pontificale 117
- La translation dans la Basilique vaticane - La mise en bielle ou déposition dans le cercueil - La messe des obsèques -La translation au sépulcre -L'inhumation. On peut résumer ces moments en trois stations: - 1ere station : ce qui se passe dans la case pontificale - 2eme station: ce qui se célèbre dans la Basilique Vaticane -3eme station : le transfert de la dépouille au lieu de la sépulture et l'inhumation. Il appartient au collège des Cardinaux d'établir les moments, les lieux et les différentes célébrations. En fait, jusqu'à l'élection du successeur du pape défunt, le gouvernement de l'Église pour les affaires courantes, la préparation des funérailles et le conclave appartiennent à ce collège des cardinaux qui se réunissent tous les jours.
5.1.1.1
1ère Station dans la case pontificale
-Mis à part le martyr, il est de coutume que le Souverain Pontife meurt chez lui, dans sa chambre du Vatican, dans son lit. En effet, il se peut que la mort advienne à l'hôpital ou dans un lieu donné. Dans ce cas, il appartiendra au Collège des cardinaux, selon les dispositions de la Constitution apostolique de procéder au transfert de la dépouille au Vatican.
-Dès que le pape meurt, généralement c'est un moment de sentiment profond de douleur que récent la famille pontificale. Il appartient au Cardinale Camerlingue de certifier la mort à la présence du substitut de la secrétairerie d'Etat, du maitre des célébrations liturgiques, des prélats et du notaire de la Chambre Apostolique, des 118
familles et du médecin chargé des services sanitaires de la Cité vaticane. Celui-ci rédige le certificat de décès. Ces présences représentent moins un acte juridique qu'un moment de prière de l'Eglise qui affirme par le fait, notre appartenance dans les mains de Dieu, que nous soyons vivants ou morts. A lui, est recommandé le pontife qui vient de laisser le monde, ils le confient à la Sainte Vierge Marie que le Pontife a toujours invoqué en priant pour cette "heure ", l'heure de sa mort.
Tandis que le Doyen du collège des cardinaux annonce la mort du Saint Père aux autres cardinaux ainsi qu'au Corps diplomatique, aux chefs d'Etat et au monde entier, le Cardinal Vicaire de Rome est chargé lui, de l'annoncer à l'Église et au peuple de Rome. Le maître des célébrations liturgiques veille à l'habillement du corps du défunt et de son transfert dans une salle appropriée où il sera exposé pour les premiers hommages. A côté du corps, on pose le cierge pascal allumé ainsi que de l'eau bénite. L'accès dans la salle à l'heure établie par le Maître des célébrations est ouvert par une célébration que préside le Cardinal Camerlingue. On notera la prononciation de l'antienne «je suis la résurrection et la vie qui croit en moi, même s'il meurt, il vivra…». L'objectif de cette visite au corps du pape défunt est de rendre grâce au Seigneur pour les grâces reçues à travers sa vie. C'est pour implorer sa miséricorde pour les péchés commis par le pontife et demander au Seigneur de le faire parvenir à la lumière éternelle car le Seigneur a dit «je suis la lumière du monde. Qui me suit ne marchera pas dans les ténèbres mais aura la lumière de la vie.» (Jn 8,12). La foi est la lumière dans les moments de trouble et de difficulté nous dit le Ps 26 :«Le Seigneur est ma lumière et mon salut, de qui aurai-je crainte ? ». Le baptême est aussi rappelé par l'aspersion du corps de l'eau bénite, signe de sa renaissance à une vie nouvelle. Le temps imparti pour cette visite est entrecoupé d'une série de prières : liturgie des heures, célébration de la Parole de Dieu, le Rosaire, récitation des psaumes…. Cette longue veillée priante dans la case pontificale pour objectif aussi de donner sens à ce lieu où le pape a travaillé pour 119
l'Église, où il a accueilli des personnes, où il a vécu la fidélité à l'Évangile et à son ministère. Maintenant il mérite d'être accueilli le Père bon, dans sa demeure éternelle.
5.1.1.2
2ème Station : dans la basilique Saint-Pierre
-Translation du corps dans la basilique vaticane se fait en procession. Celle-ci est ouverte par la salutation du Cardinal Camerlingue qui invite à l'espérance en Christ ressuscité et indique la signification de ce transfert. La Basilique vaticane est le symbole de l'universalité de l'Eglise. Là, le Saint Père a exercé son ministère d'évêque de Rome et d pasteur de l'Église universelle. Symboliquement le pape défunt y recevra l'hommage de reconnaissance de la part de toute l'Église pour tout le bien reçu de lui. La procession est accompagnée des chants de psaumes et des cantiques évangéliques (Magnificat, benedictus, nunc dimitis). A l'entrée de la Basilique, on entonne la litanie des saints dans laquelle on fait mention des saints et des martyrs de l'Église de Rome (Saint Laurent, sainte Agnès, sainte Sabine….). Une fois dans la Basilique, le corps est déposé devant l'autel des confessions, tourné vers le peuple. Il est béni et encensé pendant qu'on invoque les saints d'accueillir le défunt et de le présenter au trône saint. C'est ce qui est lu dans Jn 17, 24 « Père, ceux que tu m'as donnés, je veux que là où je suis, eux aussi soient avec moi, afin qu'ils contemplent ma gloire que tu m'as donnée parce que tu m'as aimé avant la fondation du monde.»La prière des fidèles pour le pape, l'Église, la paix, la communauté présente conclue cette célébration. Si on célèbre une messe, celle-ci se fera juste après le chant d'invocation des saints du ciel. De là jusqu'au jour des funérailles, est organisé les hommages des fidèles qu'on entrecoupe des prières communautaires selon les modes prévues. Particulièrement on organisera les Laudes et les Vêpres ainsi que l'eucharistie aux heures établies. La messe des obsèques est le moment central. Elle est célébrée le jour établi par la congrégation des cardinaux entre le 4ème et le 6ème jour après la mort dans la basilique vaticane ou sur la place 120
Saint-Pierre selon les conditions climatiques. Mais pour question du nombre des participants, la messe se tiendra mieux dehors que dans la Basique. Avant la translation sur la place Saint-Pierre, le Corps du pontife est déposé dans un cercueil confectionné en bois de ciprès devant les quelques cardinaux et la famille du défunt. C'est le moment où le Corps est soustrait à la vue des fidèles. La prière et les psaumes prononcés par le Cardinal Camerlingue appellent à une profonde aspiration de l'être humain à contempler la face de Dieu. «Mon âme à soif du Dieu vivant quand irai-je et verrai-je la face de Dieu ?» (Ps 40, 3). Pendant que le visage du défunt est couvert d'un voile blanc, la prière accompagnant le geste exprime la vive espérance que le Souverain défunt puisse contempler le visage du Père céleste. Pendant que le cercueil est marqué des signes, on se réfère au Ps 41 pour exprimer le renouvellement du désir de Dieu comme terme ultime de toute aspiration humaine : « Comme un Cerf altéré cherche l'eau vive, ainsi mon âme te cherche…». Puis le cercueil est porté sur le lieu de la messe (la place StPierre) et déposé à même le sol, orné du livre des Evangiles et honoré de la flamme du Cierge pascal. La Messe est célébrée par le Doyen des Cardinaux et concélébrée par les cardinaux ainsi que des patriarches des Eglises orientaux. Le texte de l'évangile est celui de Jn 21, 15-19 qui rappelle le ministère confié à Pierre « Simon, fils de Jean, m'aimes-tu ?.... » C'est cet amour qui transforme qui transforme progressivement le pauvre corps mortel à l'image du Corps glorieux du Christ (Ph 3, 20-4,1). Le Ps 23 « Le Seigneur est mon berger» rappelle à l'Assemblée la fonction pastorale exercée par le pape au nom du Pasteur Suprême, le Christ. La messe finit par un acte très nouveau dans le rite, c'est l'acte d'origine païenne d'au revoir adressé par la communauté au frère défunt. C'est une salutation qui se fait dans la foi au Christ, vainqueur de la mort et qui porte l'espérance des futures retrouvailles dans la demeure de Dieu. Ainsi cette salutation est celle de l'Eglise de Rome à son Évêque (à son Cardinal Vicaire) ; des Eglises orientales d'un même patriarcat ; de l'Eglise universelle à son Pasteur à travers la prière du Doyen des Cardinaux. Pendant que le Corps est aspergé 121
d'eau bénite et encensé, le chant exécuté exprime un renouvellement de foi en Dieu Sauveur et à la Résurrection des morts. Le rite se conclut par l'acte de confier le Pasteur défunt au Père céleste, en le remerciant pour les dons qu'il lui a accordé et en le suppliant de consolider l'Eglise : « Père très clément, nous confions à ta miséricorde notre Pape N. que tu as constitué successeur de Pierre et pasteur de l'Eglise, annonciateur intrépide de ta Parole et fidèle dispensateur des mystères divins. Accueille-le, nous t'en supplions, dans le sanctuaire du ciel pour qu'il jouisse de la gloire éternelle avec tous tes élus.»34 En ce moment, le cercueil est transféré au lieu de l'enterrement.
5.1.1.3
3ème Station : au lieu de la sépulture
Les mêmes personnes qui avaient fait sortir le corps le porte vers les grottes de la Basilique vaticane pour la sépulture. Avec le chant du cantique de la Vierge Marie (le Magnificat), le cortège funèbre passe par la porte dite de Ste Marthe. La prière, les psaumes pour la translation et le rite de la sépulture, dirigés par le Cardinal Camerlingue, rappellent encore le sens de la vie humaine comme passage de la terre à la liberté joyeuse de la demeure de Dieu. Le cercueil de Ciprès est déposé dans un autre en zinc marqué de sceau et de toutes les indications de la Chambre apostolique. Tous les deux cercueils seront encore déposés dans un troisième cercueil en bois portant l'armoirie du pape défunt. Le Salve Régina accompagne la déposition du corps dans la terre. Le Notaire du Chapitre de la Basilique vaticane rédige l'acte de l'enterrement et le lit devant tout les présents.
34
Cf. Piero MARINI, Sede apostolica vacante, Eventi e celebrazioni, aprile 2005, LEV, Città del Vaticano 2007, 77.
122
Du jour de l'enterrement, commencent ce qu'on appelle les «novendiali». Ce sont des célébrations de l'eucharistie pour le pontife romain, organisées pendant 9 jours selon certains groupes et catégories de personnes. -les 1er, 5e, 9e jours confiés au membre de la Chapelle papale -le 2e jour aux fidèles de la cité vaticane -le 3e à l'Eglise de Rome -le 4e aux chapitres des Basiliques patriarcales de Rome -le 6e aux membres de la Curie romaine -le 7e aux Eglises orientales -le 8e aux membres des Instituts de vie consacrée. Dans l'ensemble, ces célébrations concernent toute l'Eglise et ceux qui, ayant collaboré plus directement avec le pape dans son ministère, étaient particulièrement liés à lui et à son service pastoral. Nous notons que dès la mort du pape, le gouvernement de l'Église est confié au collège des cardinaux pour les affaires courantes, pour les urgences et pour la préparation de l'élection. Leurs réunions sont appelées Congrégations qui sont "générales" (tous les cardinaux) ou "particulières" (le Camerlingue plus trois assistants remplacés tous les trois jours).
5.1.2 Deuxième Partie : Élection et prise du Siège d'un nouveau pape Loin d'entrer dans l'histoire de choix des papes et des conclaves à travers les siècles, nous nous limiterons seulement à l'essentiel de ce qui est prévu dans les jours suivant l'enterrement du pape défunt à savoir : -les électeurs, -l’entrée en conclave, -l'élection du pape, -l'acceptation 123
-l'annonce solennelle. -Nous ajouterons les célébrations marquant les débuts du pontificat du nouveau pape à savoir la réception des insignes et la prise du siège apostolique.
5.1.2.1
Les électeurs
Toutes les dispositions concernant l'élection du Pontife Romain sont inscrites dans la Constitution Apostolique Universi Dominici Gregis du pape Jean-Paul II, promulgué le 22 février 1996. La deuxième partie de ce document traite de l'élection du pontife Romain : De electione Romani Pontificis 35 Dans cette partie, une précision est donné au numero 33 pour dire que les électeurs concernés sont les cardinaux de l'Eglise catholique romaine moins de 80 ans avant et pendant la vacance du siège. Le nombre maximum est de 120 (de ceux qui ont le droit de vote). D'après le c.340 et 347 parag.2 du Code de Droit Canonique, le Concile œcuménique et le synode des évêques cessent immédiatement dès la vacance du siège. Ceux qui ont droit de vote sont des cardinaux créés et publiés d'après un Consistoire, et qui non pas encore perdu ce droit. La période d'attente des absents avant l'entrée en conclave est de 15 jours. Dans certains cas, le collège des cardinaux peut prolonger ce temps jusqu'à 20 jours.
5.1.2.2
L'entrée en conclave
Par le terme Conclave, en matière canonique, nous attendons soit le lieu renfermé où les cardinaux se réunissent pour élire le Pontife, soit l'assemblée même des cardinaux qui s'y sont enfermés suivant la procédure pour l'élection. On pense généralement à tous les lieux concernés par la procédure de l'élection, qui doivent être fermés, avec les clés (cum clave) à toutes les personnes étrangères aux votes. L'entrée en conclave commence dans la basilique Saint-Pierre au Vatican (ou dans d'autre endroit) par la célébration solennelle de la messe votive pro eligendo papa (pour l'élection du pape). Dans l'après-midi, tous les cardinaux, avec quelques personnes indiquées, se 35
AAS 88 (1996) 321-343.
124
rassemblent dans la chapelle St-Paul d'où en procession et invoquant l'Esprit-Saint par le veni Creator Spiritus, ils se dirigent vers la chapelle Sixtine préparée pour les scrutins. Un grand contrôle est prévu pour empêcher le glissement de tous les moyens de communication. Une fois dans cette chapelle, les cardinaux électeurs passent à la prestation des serments après quoi tous ceux qui ont accompagné la procession et qui ne sont pas concernés doivent quitter la salle sous l'invitation du maître des célébrations papales par le terme extra omnes. Il ne restera que ce dernier et un autre ecclésiastique choisi pour prêcher une méditation aux cardinaux ayant but de leur rappeler la grandeur de leur devoir, celui d'agir pour le bien de l'Eglise. Après tout, les deux personnes sortent puis le cardinal doyen ou un autre choisi donne l'envoi des votes.
5.1.2.3
L’élection du pape
Le système de vote par acclamation a été aboli. Il s'agit d'un suffrage secret qui requiert les 2/3 des voix comme majorité au cas où le nombre des cardinaux est divisible par trois (ex. 120 : 3 = 40. Il faudra alors 80 voix). Au cas où le nombre n'est pas divisible par trois, la majorité sera des 2/3 + 1. L'élection peut se faire en plusieurs jours avec 3 à 4 scrutins par jours. Après le IVe jour, ils marquent une pause, et là, une exhortation leur est donnée par le premier cardinal de l'ordre des Diacre. Une autre suspension advient après le VIIè jour, avec l'exhortation du premier cardinal de l'ordre des prêtres. Une troisième suspension après le IXè jour avec l'exhortation du cardinal de l'ordre des évêques. S'il n'ya toujours pas d'élu, une quatre suspension viendra après le XIè jour pour qu'on redéfinisse les modalités des scrutins. A la fin de chaque journée, il y a cette traditionnelle pratique de faire produire la fumée noire pour indiquer au peuple de Dieu en attente et en prière sur la place St-Pierre que le pape n'a pas encore été élu. En effet, l'élection du Pontife Romain n'est pas un acte isolé, réservé aux seuls cardinaux électeurs mais une action de toute l'Eglise. Ainsi, spirituellement, toute l'Eglise unie à la Mère de Jésus doit persévérer dans la prière unanime à l'instar de la première communauté chrétienne, afin que le Seigneur illumine les électeurs dans leurs choix. 125
5.1.2.4
L'acceptation
L'acte juridique fondamental qui complète l'élection faite selon les normes de la Constitution Apostolique est l'acceptation par du choix par l'élu, selon les cann. 177 par.1 et 178 du Code de Droit canonique. Dès que l'élection est faite, il peut avoir deux situation: soit l'élu est parmi les électeurs, soit il est hors du conclave. Dans le premier cas, au nom des cardinaux le cardinal doyen demande si l'Élu accepte son élection comme Souverain Pontife. Il accepte. La deuxième question est de savoir comment il veut s'appeler et il donne le nom choisi. Au cas où il n'a pas été ordonné évêque, le Cardinal Doyen le fait immédiatement. Dans le second cas, celui de l'élu hors du conclave, il existe des normes spéciales pour le faire venir dans la chapelle Sixtine sans attirer l'attention de tout le monde et on procède au rite d'acceptation. Une fois que l'élu ait accepté son choix et ordonné évêque, tous les autres cardinaux électeurs viennent lui faire obédience. Tous ensembles, il bénisse le Seigneur en chantant le Te Deum. Successivement, le proto-diacre adresse l'annonce au peuple avec le fameux habemus papam et donne son nom. Le nouveau souverain Pontife apparaitra peu après à la fenêtre papale pour donner sa première bénédiction Urbi et Orbi. C'est la fin du conclave.
5.1.2.5
Le début du ministère pétrinien
Le Nouveau pontife romain commence son ministère par la grande messe qu'il célèbre devant la Basique St-Pierre pendant laquelle il reçoit les insignes pontificaux. La procession commence dans la Basilique après que le Nouveau pape soit descendu avec les patriarches des Eglises orientales sur la tombe de saint Pierre pour une prière silencieuse. La messe se déroule devant le grand public avec les textes de lectures appropriés comme 1P5, 1-5.10-11, Jn 21, 15-19 dans lequel l'Apôtre Pierre est appelé à suive le Christ en gardant ses brebis. Après la proclamation de l'Evangile, le Saint Père, assis sur son siège reçoit le pallium des mains du Cardinal protodiacre. Le Cardinal premier de l'ordre des prêtres fait une oraison à la fin de laquelle, le Doyen du collège des Cardinaux remet au nouveau pape l'anneau dit du pêcheur. 126
Cette grande célébration va continuer par la procession prévu de la Basilique St-Pierre à la Basilique St-Paul hors les murs où le pape va prier aussi sur la tombe de saint Paul. La seconde procession se fera un autre jour à la Basilique St-Jean de Latran où il sera intronisé sur sa Cathèdre comme Évêque de Rome. La messe de l'intronisation finit par la réception d'obédience de 12 personnes represant les chrétiens de l'Eglise de Rome. Suite à la messe, une procession est faite de la Basilique St-Jean jusqu'à la Basilique SteMarie Majeur. Là, l'entrée est faite avec l'humne Ave Maris Stella. La référence de Luc 1, 28 est utilisée comme salutation à l'Assemblée. La prière prend fin avec l'oraison du Saint Père à la Sainte Vierge Marie, Mère de Dieu. Le chant du Sub tuum praesidium accompagne l'encensement de l'icône de la Vierge avant la bénédiction finale.
127
5.2 L’ETAT DU VATICAN : LE PAPE COMME CHEF D’ETAT Abbé Mathieu Fabrice Evrard BONDOBO Préambule36 Sur la tombe de Pierre, il n’y a pas qu’une basilique ; mais aussi une organisation religieuse, culturelle, politique. Aujourd’hui, il y a plus d’1 milliards de catholiques dans le monde et tous ont le regard tourné vers Rome. Quelle est l’origine de l’Etat du Vatican ? Du IVème siècle jusqu’en 1870, l’Eglise était dépositaire de deux pouvoirs ; représentés parfois par les deux épées ou les deux clés : à savoir le pouvoir spirituel et le pouvoir temporel. Pouvoir temporel, parce que lié aux choses terrestres. Ce pouvoir s’exerçait sur une bonne partie d’Europe au sens large et sur certains territoires d’Italie, au sens étroit. Comme tout pouvoir temporel, celui de l’Eglise aussi, à certain moment de l’histoire, a pris fin. C’était le 20 septembre 1870 que les soldats italiens, sont entrés dans la ville de Rome, à travers la Porta Pia, l’une des portes d’entrée de la ville. Le Règne d’Italie transfère sa capitale à Rome. Pour régler les rapports avec le Pape et le Vatican, le Règne d’Italie promulgue la loi des garanties, approuvée en 1871 et qui prévoit un régime d’extraterritorialité pour les édifices du Vatican, le Latran, le palais de la chancellerie et la résidence pontificale de castel Gondolfo. Il est aussi reconnu l’inviolabilité de la personne du Pape et le droit d’avoir son propre service de gardes armées. Le Pape de l’époque, Pie IX refuse cette disposition normative et se considère prisonnier des Italiens. Il réitère le fameux non expedit, c’est à dire, cela ne convient pas, qui interdit aux catholiques, de prendre part à la vie politique du pays ; car toute participation
36
Les idées essentielles de ce préambule se trouvent dans le livre par Aldo Maria VALLI, Piccolo mondo vaticano, Bari, Editori Laterza, 2012.
128
donnerait à l’Etat italien une légitimation, qui n’existe pas pour l’Eglise. Cette situation, appelée la question romaine, reste bloquée jusqu’au pacte du Latran le 11 février 1929. Cet accord est appelé ainsi, parce que signé au palais de Saint Jean de Latran, entre le secrétaire d’Etat du Vatican, son éminence cardinal Pietro Gasparri et le premier ministre italien, Benito Mussolini. Dans cet accord, il est dit : « L’Italie reconnait au Saint Siège la pleine propriété et le pouvoir exclusif de juridiction souverain sur le Vatican, comme cela est actuellement constitué, avec toutes les pertinences et les dotations, créant ainsi la Cité du Vatican… ». De cette manière, a vu le jour le petit Etat indépendant, reconnu par l’Eglise et l’Etat italien : de son nom Etat de la Cité du Vatican, en latin Status Civitatis Vaticanae (SCV). Reconnu comme Etat souverain de droit public international, il est universellement reconnu. Comme l’indique l’introduction du traité en question, le but de ces accords était d’assurer au Saint-Siège, en sa qualité d’institution supérieure de l’Église catholique, « l’indépendance absolue et visible et [de] lui garantir une souveraineté indiscutable, même dans le domaine international ». Les pactes du Latran sont constitués de 3 documents : le traité, qui reconnait la souveraineté au Saint Siège sur l’Etat du Vatican ; la convention financière qui prévoit l’exemption des taxes sur les marchandises importées ; le concordat qui définit les rapports civils et religieux, entre l’Eglise et l’état italien.
5.2.1
Position géographique37
La Cité du Vatican se trouve dans l’Italie (d’où l’appellation un Etat dans un Etat), et se situe à proximité de la rive droite du Tibre, sur une petite colline (colline Vaticane). L’empereur romain Caligula (37-41 ap. JC) y fit réaliser un cirque privé. C’est là, ainsi que dans les jardins adjacents qu’eut lieu le martyre de bien des chrétiens de Rome à l’époque de Néron (54-68). 37
Cf. Site du Vatican, www.vatican.va
129
St Pierre fut enterré au nord de ce cirque, dans une nécropole qui longeait une route secondaire ; sur le lieu de sa sépulture, l’empereur Constantin fit édifier entre 324 et 326 une basilique grandiose qui fut substituée par la basilique actuelle au cours des XVIe et XVIIe siècles. Le territoire de l’Etat couvre une superficie de 0,44 km2 (44 hectares) ; il est entouré en partie de murs et s’étend, sur la place Saint-Pierre, jusqu’à la bande de travertin qui relie au sol les extrémités externes des deux ailes de la colonnade, marquant ainsi la limite de l’Etat au niveau de la place à laquelle on accède habituellement librement. Bien que faisant partie du territoire de la Cité du Vatican, cette place est soumise légalement au contrôle des forces de police de la République italienne. En d’autres termes, les frontières sont constituées par les murs, les deux ailes de la colonnade place Saint Pierre et la ligne blanche qui unit les colonnades. On accède à l’intérieur de l’Etat par cinq entrées dont le contrôle est confié à la Garde Suisse Pontificale et au corps de la Gendarmerie de l’Etat de la Cité du Vatican. Du fait des dimensions réduites de la Cité du Vatican, de nombreux organismes et bureaux du Saint-Siège sont situés dans des édifices de la ville de Rome (principalement Piazza Pio XII, Via della Conciliazione, Piazza S. Callisto, Piazza della Cancelleria, Piazza di Spagna). Ces bâtiments, conformément au Traité du Latran, jouissent d’une immunité reconnue par le droit international. Les lieux où se trouvent ces édifices sont appelées communément « Zones extraterritoriales ».
5.2.2
Le Pape chef d’Etat
Le Souverain Pontife réside dans l’Etat de la Cité du Vatican, où se trouvent également quelques-uns des organismes dont nous venons de parler. La constitution de cet Etat est une garantie pour l’indépendance du Saint-Siège et de l’Eglise par rapport à tout autre pouvoir constitué dans le monde. En un certain sens, il est signe du caractère surnaturel 130
de l’Eglise même, du fait que les structures de l’Etat du Vatican sont réduites au minimum indispensable pour son bon fonctionnement. L’Église catholique réalise sa mission évangélique à la fois par le biais de ses différentes Églises, distinctes et locales, et de son gouvernement central, formé du Souverain Pontife et des organismes qui l’aident dans l’exercice de ses responsabilités envers l’Église universelle (Saint-Siège). Ce gouvernement se présente sous la forme d’une monarchie absolue. Comme chef de l’État, le Souverain Pontife a la plénitude des pouvoirs législatif, exécutif et judiciaire. Pendant la vacance de siège, ces pouvoirs sont déférés au collège des cardinaux. Le pouvoir législatif est exercé non seulement par le Souverain Pontife, mais en son nom, par une commission composée d’un cardinal président et d’autres cardinaux, nommés pour cinq ans. Le pouvoir exécutif est confié au président de la commission qui, dans ce rôle, prend le nom de Président du Gouvernement et est aidé par le Secrétaire Général et le Vice-Secrétaire Général. C’est de lui que dépendent les directions et les offices centraux qui forment le Gouvernement, soit l’ensemble des organismes par lequel passe ce pouvoir. Le pouvoir judiciaire est exercé, au nom du Souverain Pontife, par les institutions constituées selon l’organisation judiciaire de l’État.
5.2.3
Les symboles38
Le drapeau de l’Etat de la Cité du Vatican est constitué de jaune blanc. Sur le blanc figurent les clés de Saint Pierre surmontées de la tiare pontificale. Les clés sont un symbole tiré de l’Evangile de Matthieu où Jésus dit à Pierre : « Je te donnerai les clés du Royaume des cieux ». La tiare est la couronne que les Papes portaient jusqu’en 1963, quand le Pape Paul VI en interdit l’usage. Cela s’appelle ainsi, parce qu’elle était la superposition de trois couronnes, symboles des trois pouvoirs des Papes : père des rois-recteur du monde-vicaire du Christ. 38
Cf. Aldo Maria VALLI, Piccolo mondo vaticano…
131
Le Pape Paul VI, pendant la messe de la réouverture du Concile Vatican II (après la mort de Saint Jean 23), par un geste inattendu, enleva la tiare et la posa sur l’autel, montrant ainsi, qu’il n’est plus temps, pour l’Eglise catholique de vanter 3 pouvoirs. Dès lors, les Papes utilisent la mitre. Il émet ses propres timbres. Le Vatican édite un journal quotidien, L’Osservatore Romano, fondé en 1861. Depuis 1931, il dispose d’une radio émettrice, Radio Vatican, qui transmet ses émissions en différentes langues, dans le monde entier et dispose aussi d’une chaine de télévision, Centre de Télévision du Vatican (CTV)
5.2.4
La population39
Actuellement, le Vatican compte presque 800 habitants, dont 450 environ jouissent de la nationalité vaticane, tandis que les autres, même s’ils y habitent temporairement ou en permanence, n’ont pas la nationalité vaticane. L’obtention et la perte de la citoyenneté, les autorisations à résider dans le territoire de l’Etat et les formalités pour y accéder sont régies par des dispositions spécifiques appliquées en conformité avec le Traité du Latran.
5.2.5
La sécurité
La sécurité du pape et de l’État revient d’une part au corps des Gardes Suisses, fondé en 1506, et dont les membres portent un uniforme qui aurait été dessiné par Michel-Ange, dit-on. La sécurité est assurée aussi par le corps de la Gendarmerie qui s’occupe de tous les services de police et de sécurité de l’État.
5.2.6
Hymne
L’Etat de la Cité du Vatican, en tant qu’organisme souverain de droit public universellement reconnu, a non seulement son propre drapeau mais également son hymne national officiel. Depuis 1949, il s’agit de la Marche Pontificale composée par le célèbre musicien
39
Cf. Site du Vatican, www.vatican.va
132
français et fervent catholique Charles Gounod (1818-1893), connu depuis longtemps pour ses compositions musicales et en particulier pour l’opéra de « Faust » et la splendide et très douce mélodie de l’« Ave Maria ». C’est en effet par décision de Pie XII que le 16 Octobre 1949 cette Marche de Gounod a remplacé l’ancienne Marche Triomphale de Hallmayer.
5.2.7
Protection internationale du territoire
L’ensemble du territoire de l’Etat de la Cité du Vatican est placé sous la protection de la convention de La Haye du 14 mai 1954 ; elle concerne la protection des biens culturels en cas de conflit armé. Ensuite, en 1984, la Cité du Vatican a été inscrite dans la liste du patrimoine mondial culturel et naturel (cf. la Convention de l’UNESCO du 16 novembre 1972). L’Etat est donc également reconnu de façon internationale, comme un patrimoine moral, artistique et culturel, digne d’être respecté et protégé comme trésor appartenant à l’humanité. C’est pourquoi, n’importe quel attentat à l’intégrité du Vatican, constitue un appauvrissement non seulement du Saint Siège, mais de chaque habitant de la planète.
5.2.8
Les ressources de l’Etat du Vatican
Chaque Etat a besoin d’argent pour son fonctionnement. D’où viennent les ressources de l’Etat du Vatican ? Les principales sources sont 3: a) L’Obole de Saint Pierre Il s’agit d’une aide économique que les fidèles offrent au Saint Père, comme signe d’adhésion à sa sollicitude pour les multiples nécessités de l’Eglise universelle et de l’œuvre de charité en faveur des nécessiteux. Il s’agit au fait, des contributions que les fidèles du monde entier, envoient au Pape pour les besoins de l’église. Ces quêtes sont organisées habituellement le 29 juin : « signe de communion avec le Pape et d’attention aux besoins des frères » (Benoit XVI, 25 février 2006).
133
b) Le musée du Vatican Chaque année, environ 4 millions de personnes, visitent le musée. La visite du musée débouche sur la chapelle Sixtine. c) IOR (Institut des Œuvres Religieuses) C’est une banque de l’Etat du Vatican. Son rôle est d’investir et faire fructifier le patrimoine du Saint Siège.
134
5.3 LE PAPE CHEF DE L’EGLISE CATHOLIQUE Sœur Lucie MBOMBI
Le pape est l’évêque de Rome et, de ce fait, le successeur de l’apôtre Pierre. Les Évangiles montrent que saint Pierre jouissait d’une primauté au sein du groupe apostolique constitué par le Christ (Cf. Mt 16, 18 ; Lc 22, 32 ; Jn 21, 15-17). Le pape hérite de cette primauté. Elle fait de lui le chef du Collège des évêques et donc le chef suprême de l’Église catholique. Pour ce thème, nous traiterons de l’origine et finalité de la primauté du pape dans un premier temps. Nous parlerons ensuite de l’évolution du concept de la primauté pontificale. Nous terminerons en présentant l’exercice de la primauté et ses modalités.
5.3.1
Les évêques, successeurs des apôtres du Christ
Les Évangiles rapportent que Jésus Christ a associé un petit groupe de proches disciples à sa mission de prédication. Il leur a donné le nom d’ »apôtre », mot grec qui signifie « envoyé ». Après sa résurrection, Jésus Christ s’est manifesté au groupe des apôtres. Il leur a communiqué le Saint-Esprit et leur a confié la mission d’être, ensemble, les témoins de sa résurrection et de son enseignement. Les apôtres ont donc été constitués par le Christ fondements de son Église : l’Église catholique est apostolique et les évêques sont les successeurs des apôtres.
5.3.2
Le Pape, évêque de Rome et successeur de l’apôtre
saint Pierre Depuis les origines de l’Église, l’évêque de Rome est considéré comme étant le successeur de l’apôtre Pierre, en vertu du fait que Rome est le lieu du martyr du chef des apôtres. Le pape est l’évêque de Rome. Il reçoit la charge qui était celle de l’apôtre Pierre dès l’acceptation de son élection au siège de Rome par les cardinaux. De même que les apôtres formaient un groupe au sein duquel une 135
prééminence revenait à Pierre, de même les évêques forment un Collège au sein duquel le pape exerce une primauté. Le pape est le premier des évêques.
5.3.3
Le pasteur de l’Église universelle
La triple mission de l’évêque est d’enseigner la foi authentique, de garantir les conditions du culte rendu à Dieu et de servir l’unité de l’Église. La sollicitude de l’évêque s’exprime à l’endroit de son diocèse. Mais le corps épiscopal est collectivement chargé de la conduite de l’Église universelle. Cette responsabilité collective s’exprime dans le cadre des conciles. Au pape, premier des évêques, revient le soin de confirmer les travaux d’un concile. En dehors des périodes conciliaires elles restent exceptionnelles, Vatican II, réuni de 1962 à 1965, était le 21e concile de l’histoire de l’Église catholique la responsabilité ultime de la conduite de l’Église est concentrée sur la personne du pape. Le pape doit donc exprimer sa sollicitude d’évêque à l’endroit de son diocèse de Rome et de l’Église toute entière. Le cardinal vicaire () assiste le pape dans sa charge d’évêque de Rome, et la Curie romaine collabore avec le pape dans sa charge de pasteur de l’Église universelle.
Autorité/service Autorité : rendre l’autre autonome, faire grandir l’autre “ Les chefs des nations les commandent en maîtres et [...] les grands exercent le pouvoir sur elles. Cela ne se passe pas ainsi parmi vous ; mais quiconque veut devenir grand parmi vous doit être votre serviteur. ” (Mat 20:25, 26). Les despotes du monde “ commandent en maîtres ” : ils imposent leur volonté et exigent que l’on fasse les choses de telle ou telle façon sous peine de sanctions. Jésus Christ, pour sa part, a enseigné très clairement qu’il faut servir les autres et ne pas les contraindre (Mat 20:27, 28). Lui-même s’est toujours montré bon et attentionné envers ses disciples. Si vous l’imitez, vos compagnons n’auront guère de difficulté à coopérer avec vous (Hé 13:7, 17). Ils n’hésiteront pas non plus à faire davantage que ce qui leur est demandé s’ils en ont la 136
possibilité, car ils agiront de bon cœur et non sous la pression. (Mat 5:41). “ Faites paître le troupeau de Dieu qui vous est confié, non [...] en personnes qui commandent en maîtres ceux qui sont l’héritage de Dieu, mais en devenant des exemples pour le troupeau. ” (1 Pierre 5:2, 3). Les surveillants sont conscients d’avoir des comptes à rendre en ce qui concerne la santé spirituelle de tous dans la congrégation. Ils assument cette responsabilité avec sérieux, s’efforçant de prendre soin du troupeau de Dieu de bon gré, avec ardeur et avec amour. Comme l’apôtre Paul, ils ne ménagent pas leurs efforts pour bâtir et fortifier la foi de ceux dont ils ont la charge, et non pour dominer sur leur foi. — 2 Corinthiens 1:24.
Jésus a lavé les pieds de ses disciples. Le Seigneur s’implique et implique les siens, en se mettant à genoux devant les autres pour les laver. Mais tout de suite après il dit à ses disciples : « Heureux êtesvous, si vous le faites de même» (Jn 13, 17). La communauté évangélisatrice, par ses œuvres et ses gestes, se met dans la vie quotidienne des autres, elle raccourcit les distances, elle s’abaisse jusqu’à l’humiliation si c’est nécessaire, et assume la vie humaine, touchant la chair souffrante du Christ dans le peuple L’autorité de Jésus c’est celle qui fait grandir l’autre. Au n 24 de Evangelii Gaudium, le Pape François présente une série de comportements dans la communauté évangélisatrice que nous pouvons prendre comme lignes directrices de notre service évangélique auprès des frères et sœurs. A la suite du Christ, le pape est le serviteur des serviteurs de Dieu. Il a reçu la mission de paitre le troupeau du Christ à l’exemple du Christ lui-même qui est venu pour servir et non pour être servi.
5.3.4
Origine, finalité et nature de la primauté
«Le premier, Simon, appelé Pierre» (Mt 10, 2). C’est par cet accent significatif mis sur la primauté de Simon-Pierre que saint Matthieu 137
commence dans son Évangile la liste des douze Apôtres qui, également dans les deux autres Évangiles synoptiques et dans les Actes, débute par le nom de Simon (Mc 3,6). Cette énumération, dotée d’une grande force de témoignage, et d’autres passages évangéliques (Mt 14, 28) montrent avec clarté et simplicité que le canon néotestamentaire a reçu les paroles du Christ relatives à Pierre et à son rôle dans le groupe des Douze. Aussi, déjà dans les premières communautés chrétiennes, comme plus tard dans toute l’Église, l’image de Pierre est-elle restée comme celle de l’Apôtre qui, malgré sa faiblesse humaine, fut placé expressément par le Christ à la première place parmi les Douze et appelé à exercer dans l’Église une fonction propre et spécifique. Il est la pierre sur laquelle le Christ construira son Église (Cf. Mt 16, 18) ; il est celui dont la foi, quand il sera revenu, ne faillira pas, et qui affermira ses frères (Cf. Lc 22, 32); il est enfin le Pasteur qui guidera toute la communauté des disciples du Seigneur (Jn 21, 15-17). Dans la figure, la mission et le ministère de Pierre, dans sa présence et sa mort à Rome - attestées par la plus ancienne tradition littéraire et archéologique -, l’Église contemple une réalité profonde qui est en rapport essentiel avec son mystère même de communion et de salut : «Ubi Petrus, ibi ergo Ecclesia». Dès le commencement et avec une clarté toujours plus grande, l’Église a compris que, tout comme la succession des Apôtres existe par le ministère des évêques, ainsi le ministère de l’unité confié à Pierre appartient à la structure pérenne de l’Église du Christ et que cette succession est fixée au siège de son martyre. Se basant sur le témoignage du Nouveau Testament, l’Église catholique enseigne, comme doctrine de foi, que l’évêque de Rome est successeur de Pierre dans son service primatial dans l’Église universelle ; cette succession expliquera la prééminence de l’Église de Rome, enrichie aussi par la prédication et le martyre de saint Paul. Dans le dessein divin sur la primauté en tant que «charge confiée personnellement par le Seigneur à Pierre, le premier des Apôtres, et destinée à être transmise à ses successeurs» (LG 20), se manifeste déjà la finalité du charisme pétrinien, c’est-à-dire «l’unité de foi et de communion» de tous les croyants. Le Pontife romain est, en effet, en 138
tant que successeur de Pierre, «le principe perpétuel et visible et le fondement de l’unité qui lie entre eux soit les évêques, soit la multitude des fidèles» (LG 23) ; aussi a-t-il une grâce ministérielle spécifique pour servir cette unité de foi et de communion qui est nécessaire pour l’accomplissement de la mission salvifique de l’Église (Jn 17, 21-23). La Constitution Pastor aeternus du Concile Vatican I a indiqué dans son Prologue la finalité de la primauté, consacrant ensuite le corps du texte à exposer le contenu ou cadre de son pouvoir propre. Pour sa part, le Concile Vatican II, réaffirmant et complétant les enseignements de Vatican I (LG 21), a traité principalement le thème de la finalité, accordant une attention particulière au mystère de l’Église comme Corpus Ecclesiarum (LG 23). Cette considération a permis de mettre en relief avec une plus grande clarté que la fonction primatiale de l’évêque de Rome et la fonction des autres évêques ne se trouvent pas en contradiction mais dans une harmonie originaire et essentielle. Aussi, «quand l’Église catholique affirme que la fonction de l’évêque de Rome répond à la volonté du Christ, elle ne sépare pas cette fonction de la mission confiée à l’ensemble des évêques, eux aussi "vicaires et légats du Christ" (Lumen gentium, 27). L’évêque de Rome appartient à leur collège et ils sont ses frères dans le ministère». Réciproquement, on doit aussi affirmer que la collégialité épiscopale n’est pas en opposition avec l’exercice personnel de la primauté et ne doit pas le relativiser. Tous les évêques sont sujets de la sollicitudo omnium Ecclesiarum (2 Co 11, 28) en tant que membres du Collège épiscopal qui succède au Collège des Apôtres, dont a aussi fait partie la figure extraordinaire de saint Paul. Cette dimension universelle de leur «episkopè» (vigilance) est inséparable de la dimension particulière relative aux fonctions qui leur sont confiées. Dans le cas de l’évêque de Rome - Vicaire du Christ à la manière propre de Pierre en tant que chef du Collège des évêques (LG 22) -, la sollicitudo omnium Ecclesiarum acquiert une force particulière parce qu’elle s’accompagne du pouvoir plénier et suprême dans l’Église (LG 22) : un pouvoir vraiment épiscopal, non seulement suprême, plénier et 139
universel, mais aussi immédiat, sur tous, pasteurs comme autres fidèles. Aussi le ministère du successeur de Pierre n’est-il pas un service qui affecte toute Église particulière de l’extérieur, mais il est inscrit au cœur de chaque Église particulière, en laquelle «est vraiment présente et agit l’Église du Christ» (CD 11) et, à cause de cela, elle porte en elle l’ouverture au ministère de l’unité. Cette intériorité du ministère de l’évêque de Rome à toute Église particulière est aussi l’expression de l’intériorité réciproque entre Église universelle et Église particulière. L’épiscopat et la primauté, liés réciproquement et inséparables, sont d’institution divine. Historiquement, par institution de l’Église, sont apparues des formes d’organisation ecclésiastique par lesquelles s’exerce également un commencement de primauté. En particulier, l’Église catholique est bien consciente de la fonction des Sièges apostoliques dans l’Église ancienne, spécialement des Sièges considérés comme liés à Pierre - Antioche et Alexandrie - en tant que points de référence de la Tradition apostolique, autour desquels s’est développé le système patriarcal ; ce système appartient à la conduite de la Providence ordinaire de Dieu sur l’Église et porte en lui-même, depuis le début, un lien avec la tradition pétrinienne (LG 23).
5.3.5
Évolution du concept de la primauté pontificale
5.3.5.1
Les
origines
du
christianisme :
une
lente
centralisation Dès le Ier siècle, les écrits d'Ignace d'Antioche insistent sur la loyauté que les communautés chrétiennes doivent avoir envers leurs épiscopes. Les paroles de Jésus à Pierre sont interprétées par Tertullien (vers 200) et Cyprien (vers 250) comme instituant Pierre à l’origine du ministère épiscopal et garantissant l’unité de l’épiscopat : c'est donc une collégialité épiscopale soumise à l'autorité d'un chef qui est alors peu à peu envisagée dans certaines communautés chrétiennes. À la fin du III siècle, il paraît admis en Orient comme en Occident qu’il est nécessaire de prendre l’avis autorisé de l’évêque de Rome dans les questions de foi.
140
5.3.5.2
Primauté d'honneur et primauté de juridiction
Après l'échec du concile de Bâle, réuni pour mettre fin au Grand Schisme d'Occident, et qui a cherché à démontrer que le sujet du pouvoir était le corps des fidèles agissant à travers ses représentants au concile, c'est au concile de Florence, en 1439, qu'est définie officiellement la primauté pontificale par les évêques latins et les patriarches orthodoxes : primauté d'honneur, primauté en matière de foi et de mœurs, mais aussi primauté de juridiction : « que le saintsiège apostolique et le pontife romain a la primauté sur tout l'univers, qu'il est le successeur de saint Pierre, prince des apôtres, et le vrai vicaire de Jésus-Christ, qu'il est le chef de l'Église entière, le père et le docteur de tous les chrétiens, et que Notre-Seigneur lui a remis dans la personne de saint Pierre le plein pouvoir de paître, de régir et de gouverner l'Église universelle, comme le prouvent les actes des conciles œcuméniques et les sacrés canons. Enfin le concile assigne au patriarche de Constantinople le second rang après le pontife romain ; le troisième au patriarche d'Alexandrie ; le quatrième à celui d'Antioche, et le cinquième à celui de Jérusalem, en conservant à chacun ses droits et ses privilèges. » Réformes protestantes et gallicanisme Lorsque Luther et Calvin, reprenant et amplifiant certaines revendications de Jan Hus, provoquent les schismes protestants au XVIe siècle, ils refusent l'existence d'une hiérarchie ecclésiale instituée par Dieu : pour eux le clergé est une émanation du peuple chrétien. Ils refusent donc toute autorité au pape. Le gallicanisme, suivant les avis du concile de Bâle, et prenant une forme légale avec la Pragmatique Sanction de Bourges en 1438, accepte la primauté d'honneur pontificale, ainsi que son arbitrage sur les questions théologiques, mais refuse la juridiction pontificale. C'est le roi qui détient ce pouvoir. Dans un premier temps, l'anglicanisme ne refuse que la juridiction pontificale. Puis très vite, sous l'influence de la Réforme, il refuse aussi la primauté en matière de foi et de mœurs.
141
5.3.5.3
L’exercice de la primauté et ses modalités
L’exercice du ministère pétrinien doit être compris - pour «qu’il ne perde rien de son authenticité et de sa transparence» à partir de l’Évangile, c’est-à-dire de son insertion essentielle dans le mystère salvifique du Christ et la construction de l’Église. La primauté diffère, dans son essence comme dans son exercice propre, des fonctions de gouvernement en vigueur dans les sociétés humaines ; elle n’est pas une fonction de coordination ou de présidence, pas plus qu’elle ne se réduit à une primauté d’honneur, elle ne peut pas non plus être conçue comme une monarchie de type politique. Le Pontife Romain est soumis - comme tous les fidèles - à la Parole de Dieu, à la foi catholique, et il est le garant de l’obéissance de l’Église ; et, en ce sens, il est servus servorum. Il ne décide pas selon son bon plaisir, mais il exprime la volonté du Seigneur qui parle à l’homme dans l’Écriture vécue et interprétée par la Tradition. En d’autres termes, «l’episkopè» du Primat a des limites qui viennent de la loi divine et de la constitution divine inviolable de l’Église, telle qu’elle est contenue dans la Révélation. Le successeur de Pierre est le Roc qui, contre l’arbitraire et le conformisme, garantit une fidélité rigoureuse à la Parole de Dieu ; s’ensuit aussi le caractère «martyrologique» (de témoignage) de sa primauté. Les caractéristiques de l’exercice de la primauté doivent être comprises surtout à partir de deux prémisses fondamentales : l’unité de l’épiscopat et le caractère épiscopal de la primauté ellemême. L’épiscopat étant une réalité «une et indivisible», la primauté du Pape comporte la faculté de servir effectivement l’unité de tous les évêques et de tous les fidèles, et «s’exerce à divers niveaux qui concernent la vigilance sur la transmission de la Parole, sur la célébration sacramentelle et liturgique, sur la mission, sur la discipline et la vie chrétienne». À ces différents niveaux, de par la volonté du Christ, tous dans l’Église - les évêques et les autres fidèles - doivent obéissance au successeur de Pierre, qui est aussi le garant de la légitime diversité des rites, des disciplines et des structures ecclésiastiques, entre l’Orient et l’Occident.
142
La primauté de l’évêque de Rome, étant donné son caractère épiscopal, s’explique en premier lieu par la transmission de la Parole de Dieu ; elle inclut donc une responsabilité spécifique et particulière dans la mission d’évangélisation (LG 23), puisque la communion ecclésiale est une réalité essentiellement destinée à se répandre : «Évangéliser est la grâce et la vocation propre de l’Église, son identité la plus profonde» (EN 14 ; Cf. C 781). La tâche épiscopale qui est celle du Pontife Romain à l’égard de la transmission de la Parole de Dieu s’étend aussi à l’intérieur de toute l’Église. Comme telle, elle est une fonction magistérielle suprême et universelle ; c’est une fonction qui implique un charisme : une assistance spéciale de l’Esprit Saint au successeur de Pierre, qui implique aussi, en certains cas, la prérogative de l’infaillibilité (LG 25 ; C 749§ 1). Comme «toutes les Églises sont en communion plénière et visible, parce que tous les pasteurs sont en communion avec Pierre, et ainsi dans l’unité du Christ», de la même manière les évêques sont les témoins de la vérité divine et catholique quand ils enseignent en communion avec le Pontife Romain (LG 25). En même temps que la fonction magistérielle de la primauté, la mission du successeur de Pierre sur toute l’Église comporte la faculté de poser les actes de gouvernement ecclésiastique nécessaires ou convenables pour promouvoir et défendre l’unité de foi et de communion. On peut inclure parmi ceux-ci, par exemple : donner le mandat pour l’ordination de nouveaux évêques, exiger d’eux la profession de foi catholique, les aider tous à demeurer dans la foi professée. Il est évident qu’il existe de nombreuses autres manières possibles, plus ou moins contingentes, d’exercer ce service de l’unité : promulguer des lois pour toute l’Église, établir des structures pastorales au service de diverses Églises particulières, donner force contraignante aux décisions de Conciles particuliers, approuver des Instituts religieux supra-diocésains, etc. En ce qui concerne le caractère suprême du pouvoir de primauté, il n’existe aucune instance à laquelle le Pontife Romain doive répondre juridiquement de l’exercice du don reçu : «Prima sedes a nemine iudicatur» (C 1404). Cependant, cela ne signifie pas que le Pape ait un pouvoir absolu. Écouter la voix des Églises est, en effet, un signe 143
distinctif du ministère d’unité, une conséquence aussi de l’unité du Corps épiscopal et du sensus fidelium de tout le Peuple de Dieu ; et ce lien apparaît substantiellement doté d’une force et d’une sécurité plus grande que des instances juridiques - hypothèse par ailleurs improbable, parce que privée de fondement - devant lesquelles le Pontife Romain devrait répondre. La responsabilité ultime et inéluctable du Pape trouve sa meilleure garantie, d’une part, dans son insertion dans la Tradition et la communion fraternelle et, d’autre part, dans la confiance en l’assistance de l’Esprit Saint qui gouverne l’Église. L’unité de l’Église, au service de laquelle le ministère du successeur de Pierre se met d’une manière singulière, atteint sa plus haute expression dans le Sacrifice eucharistique, qui est le centre et la racine de la communion ecclésiale ; une communion qui se fonde aussi nécessairement sur l’unité de l’épiscopat. Aussi, «toute célébration de l’Eucharistie est faite en union non seulement avec l’évêque propre mais aussi avec le Pape, avec l’Ordre épiscopal, avec tout le clergé et avec le Peuple tout entier. Toute célébration valide de l’Eucharistie exprime cette communion universelle avec Pierre et avec l’Église tout entière, ou bien la réclame objectivement» (CEC 1369), comme dans le cas des Églises qui ne sont pas en pleine communion avec le Siège apostolique. «L’Église en pèlerinage porte dans ses sacrements et ses institutions, qui relèvent de ce temps, la figure du siècle qui passe» (LG 48). Pour cette raison également, la nature immuable de la primauté du successeur de Pierre s’est exprimée historiquement selon des modalités d’exercice adaptées aux circonstances d’une Église en pèlerinage en ce monde changeant. Le contenu concret de son exercice caractérise le ministère pétrinien dans la mesure où il exprime fidèlement l’application aux circonstances de lieu et de temps des exigences de la finalité ultime qui lui est propre (l’unité de l’Église). L’extension plus ou moins grande de ce contenu concret dépendra à chaque époque historique de la necessitas Ecclesiae. L’Esprit Saint aide l’Église à connaître cette necessitas et le Pontife Romain, écoutant la voix de l’Esprit dans 144
les Églises, cherche la réponse et la donne quand et comme il le juge opportun. Par conséquent, ce n’est pas en cherchant le minimum d’attributions exercées au cours de l’histoire que l’on peut déterminer le noyau de la doctrine de la foi concernant les compétences de la primauté. Aussi, le fait qu’une tâche déterminée ait été exercée par le Primat à une certaine époque ne signifie pas en soi que cette tâche doive nécessairement être toujours réservée au Pontife Romain. Et, vice-versa, le seul fait qu’une fonction déterminée n’ait pas été exercée précédemment par le Pape n’autorise pas à conclure que cette fonction ne peut en aucune manière être exercée à l’avenir comme relevant de la compétence du Primat. En tout cas, il est fondamental d’affirmer que le discernement quant à l’accord entre la nature du ministère pétrinien et les modalités éventuelles de son exercice est un discernement qui doit être accompli in Ecclesia, c’est-à-dire sous l’assistance de l’Esprit Saint et dans un dialogue fraternel du Pontife Romain avec les autres évêques, selon les exigences concrètes de l’Église. Mais, en même temps, il est clair que seul le Pape (ou le Pape avec le Concile œcuménique) a, en tant que successeur de Pierre, l’autorité et la compétence pour dire l’ultime parole sur les modalités d’exercice de son ministère pastoral dans l’Église universelle. En rappelant les points essentiels de la doctrine catholique sur la primauté du successeur de Pierre, la Congrégation pour la Doctrine de la Foi est certaine que la réaffirmation autorisée de ces acquis doctrinaux apporte une clarté plus grande sur le chemin à parcourir. Ce rappel est utile, en effet, également pour éviter les rechutes toujours possibles dans les prises de position partiales et unilatérales déjà repoussées par l’Église dans le passé (fébronianisme, gallicanisme, ultramontanisme, conciliarisme, etc.). Et surtout, en voyant le ministère du serviteur des serviteurs de Dieu comme un grand don de la miséricorde divine à l’Église, nous trouverons tous avec la grâce de l’Esprit Saint - l’élan pour vivre et garder fidèlement l’union effective et plénière avec le Pontife Romain dans la marche quotidienne de l’Église selon la manière voulue par le Christ (LG 15). 145
La pleine communion voulue par le Seigneur entre ceux qui se reconnaissent comme ses disciples requiert la reconnaissance commune d’un ministère ecclésial universel «dans lequel tous les évêques se reconnaissent unis dans le Christ et où tous les fidèles trouvent la confirmation de leur foi». L’Église catholique professe que ce ministère est le ministère primatial du Pontife Romain, successeur de Pierre, et soutient avec humilité et fermeté «que la communion des Églises particulières avec l’Église de Rome, et de leurs évêques avec l’évêque de Rome, est une exigence essentielle - dans le dessein de Dieu - de la communion plénière et visible». Dans l’histoire de la papauté, les erreurs humaines et les manquements, même graves, n’ont pas manqué : Pierre lui-même a reconnu qu’il était pécheur» (Cf. Lc 5, 8). Pierre, homme faible, fut choisi comme Roc, précisément pour qu’il fût évident que la victoire n’appartient qu’au Christ et n’est pas la conséquence des forces humaines. Le Seigneur a voulu porter son propre trésor dans des vases fragiles (Cf. 2 Co 4-7), tout au long des temps : ainsi, la fragilité humaine est devenue un signe de la vérité des promesses divines. Quand et comment parviendra-t-on au but tant désiré de l’unité de tous les chrétiens ? «Comment y parvenir? Par l’espérance en l’Esprit qui sait éloigner de nous les spectres du passé et les souvenirs douloureux de la séparation ; il sait nous accorder lucidité, force et courage pour entreprendre les démarches nécessaires, en sorte que notre engagement soit toujours plus authentique». Nous sommes tous invités à nous confier à l’Esprit Saint et à nous confier au Christ, en nous en remettant à Pierre.
5.3.6
Pistes pour une préparation spirituelle
Si vous êtes dépositaire d’une forme d’autorité, efforcez-vous de l’exercer en imitant Jésus Christ. Gardez présente à l’esprit l’image touchante utilisée par David pour décrire la façon dont Dieu exerce son autorité sur son peuple : “ Dieu est mon Berger. Je ne manquerai de rien. Dans des prés où l’herbe abonde, il me fait coucher ; il me conduit près de lieux de repos qui sont bien arrosés. Il ranime mon âme. Il me conduit sur les pistes de la justice à cause de son nom. ” Pareillement, Jésus a dit de lui-même : “ Je suis le bon Berger, et je connais mes brebis et mes brebis me connaissent, comme le Père me 146
connaît et que je connais le Père ; et je livre mon âme pour les brebis. ” Pourrions-nous avoir de meilleurs modèles pour ce qui est d’exercer l’autorité avec amour ? (Psaume 23:1-3 ; Jean 10:14, 15). Jésus Christ exerce son autorité avec sagesse, justice et amour. Comment exercez-vous l’autorité ? Je crois en qui ? En quoi ? En qui j’ai mis ma confiance ? Mon espoir ? Dans ce moment difficile que traverse notre pays ou les personnes vivent dans le désespoir, dans les inquiétudes, suis-je celui ou celle qui aide les autres à tenir ferme dans leur foi ? Quelle est la place que je réserve à l’Eucharistie dans ma vie ? Est-ce que je sais faire la différence entre la participation à l’eucharistie et aux autres mouvements, fraternités et groupes de prières ? Suis-je promoteur d’unité et de communion ?
147
5.4 NOMBRE DE PAPES DE PIERRE A FRANÇOIS : LES PAPES D’ORIGINE AFRICAINE P. JOSEPH SAMEDI, SJ
Introduction À l'origine, le terme pape (en grec πάπας / papas) est une appellation d’affection respectueuse, celle que l’enfant donne à son père « papa ». La première attestation documentée de ce mot pour désigner un chef religieux de premier plan remonte à 306, quand la population chrétienne d'Alexandrie le décerna comme titre à son évêque Pierre, qui avait organisé la résistance extérieure à la persécution de Dioclétien. À partir du 1er concile œcuménique de Nicée, où siégèrent des évêques au nombre traditionnel de 318, l'appellation de « pape » a été affectueusement donnée à tout évêque en tant que chef de l'Église locale qu'il présidait. Ce n'est que progressivement, surtout à partir du VI e siècle, que ce nom a servi à désigner le seul pontife romain, et ce à l'échelle de l'Église universelle . Le premier évêque de Rome auquel est attribué le titre de « pape », au début du IVe siècle est Marcellin (296-304). Ce n'est donc qu'à partir du VIe siècle qu'il désigne plus spécifiquement l'évêque de Rome. En 998, au cours d’un concile tenu à Pavie, Grégoire V demande à l'archevêque Arnolfe II de Milan de renoncer à se faire appeler ainsi, puis Grégoire VII (1073-1085) édicte un document Dictatus papae réservant l'usage du terme au pontife romain. Aujourd’hui encore, les Grecs appellent papas les simples prêtres de l’Église orthodoxe, mais dans le sens classique de « Père », équivalent au titre que l'on donne aux prêtres dans l'Église latine. Le titre de Pape n'apparaît en effet qu'au cours du IIIe siècle et n'est pas attesté pour l'évêque de Rome avant le début du IVe siècle
148
De Pierre à François, nous avons au total 266 Papes.
5.4.1
Nationalités des papes :
Sur 266 papes : italiens 208 dont 122 romains ; français 16 ; grecs 15, allemands 8, syriens 6, africains 3 ; 1 anglais (Adrien IV), hollandais 1 (Adrien VI); polonais 1, argentin 1. Jean II (533-535) fut le premier pape à changer de nom. Avant, il portait le nom d’un dieu païen, Mercure.
5.4.2
Les papes d’origine africaine
Selon la tradition, il y en eut trois, tous berbères :
5.4.2.1
14e Pape Saint Victor 1er (189-199)
D’origine africaine. Son père aurait porté le nom de Félix. Le pontificat de Victor coïncida avec une période tranquille. Son action put donc s’orienter vers la solution de certains problèmes importants. Pour faire face au gnosticisme et à d’autres formes d’hérésie, en particulier l’adoptianisme, doctrine qui tendait à faire de Jésus un simple homme que Dieu a adopté pour Fils et la doctrine modaliste qui voulait supprimer toute distinction entre Père et Fils, il convoqua un concile en 198. Victor réaffirma aussi les décisions de Soter et d’Éleuthère pour la date de la célébration de la fête de Pâques : en Asie Mineure on célébrait à la date juive traditionnelle (le 14è jour de lune du mois de mars), à Rome le dimanche suivant. NB. Lors de la controverse pascale il s’agissait de savoir si la fête de Pâques devait être nécessairement célébrée un dimanche. Les « quartodécimans » (de quartodecimus, quatorzième) suivaient l’usage juif et célébraient Pâques le 14 nisan, c’est-à-dire lors de la pleine lune suivant le commencement du printemps, quel que soit le jour de semaine. Il s’agissait là de l’usage le plus ancien, judéo-chrétien. S’y opposait l’usage « dominical » (de dominica : dimanche) créé dans l’espace païen, et qui célébrait toujours Pâques le dimanche suivant. Jusqu’à la fin du IIè siècle les deux usages étaient parallèles et ont les tolérait respectivement. C’est ainsi qu’Irénée de Lyon40 rapporte que 40
D’après EUSEBE, Histoire ecclésiastique, V, 24.
149
Polycarpe de Smyrne serait venu à Rome vers 160 chez l’évêque de Rome, Anicet, et aurait parlé avec lui de la date de Pâques. Polycarpe se serait référé à saint Jean et à d’autres apôtres pour justifier l’usage Quartodeciman, et Anicet se serait référé à la coutume des « presbytres avant lui », qu’il se tenait tenu à le suivre. La pratique quartodécimans était observée surtout par les églises d’Asie Mineure. A la fin du siècle vers 195, le conflit éclata probablement parce que les quartodecimans étaient venus à Rome et avaient essayé d’y introduire leur date de Pâques à l’encontre de l’usage romain. Pape Victor décide en faveur de l’usage dominical. La tradition romaine avait une autorité particulière parce qu’elle était légitimée par les deux apôtres Pierre et Paul. En réaction, Polycarpe, évêque d’Éphèse, répondit que la province d’Asie pouvait aussi se référer elle aussi à deux apôtres, à savoir Philippe, enterré à Hiérapolis, et Jean, le disciple préféré, enterré à Éphèse. Sur ce, Victor excommunia l’ensemble de l’Église d’Asie Mineure. 32e pape Saint Miltiade (311-313) Africain. Il fut arrêté, torturé mais il eut la joie de connaitre la fin des persécutions assurée par deux grands édits impériaux, celui de Galère en 311, qui rendait aux chrétiens la liberté de pratiquer leur religion, et celui Licinius et Constantin en 313. Il commença à réorganiser l’Église qui s’ouvrait à la paix. La liberté de religion était finalement garantie par la loi. 49è pape. Saint Gélase (492-496) Africain, il avait été secrétaire de Félix. Il essaya de parvenir à une conciliation entre l’Église d’Orient et l’Église d’Occident, comme l’avait déjà fait son prédécesseur. Il ne parvint pas à ses fins en raison également de l’opposition de l’empereur Anastase 1er (430-518). L’épitre que Gélase envoyé à ce dernier pour expliquer sa pensée à propos des deux pouvoirs temporel et spirituel, restera célèbre. Des deux pouvoirs, le spirituel est le plus élevé et même l’empereur doit s’y soumettre. A ce dernier revient exclusivement l’exercice du pouvoir temporel. Et pour ce qui concerne les affaires temporelles, les ministres de Dieu doivent aussi se soumettre aux lois impériales. Il fut appelé, par sa générosité, le « Père des pauvres ». 150
Cependant, Victor Ier et Miltiade vécurent durant l'Antiquité à une époque où le terme de « pape » n'était pas encore donné aux évêques de Rome ; tous furent canonisés. La principale raison de l'absence de papes africains postérieurs à ceux-ci est la conquête vandale au Ve siècle puis musulmane au VIIe siècle, de l'Afrique du Nord. De plus, l'Afrique subsaharienne n'a guère été christianisée avant le XIXe siècle, et les Missions catholiques au XIXe et au XXe siècles eurent besoin de plusieurs décennies pour former un clergé local qui prit progressivement le relais des élites européennes avant et après la décolonisation — exception faite pour la Nubie chrétienne, qui a disparu au XIVe siècle, effacée par la conquête et la pénétration de l'islam, l'Éthiopie et l'Érythrée.
151
5.5 BIOGRAPHIE DU PAPE FRANÇOIS Père Joseph SAMEDI, SJ
Jorge Mario Bergoglio est né le 17 décembre 1936 dans le quartier portuaire de Flores à Buenos Aires en Argentine41. Son père Mario José Bergoglio, est un immigré italien venu du Piémont; sa mère, Régina Maria Sivori, née en Argentine, est aussi fille d'immigrés italiens. Jorge Mario est baptisé le 25 décembre 1936, jour de Noël, par le père Enrique Pozzoli. Mario José Bergoglio exerce la profession de cheminot, et Régina Maria Sivori est femme au foyer. Ses parents se marient le 12 décembre 1935 et ont cinq enfants : trois garçons (Alberto, Oscar et Jorge Mario) et deux filles (Marta Regina et Maria Elena). Jorge Mario a étudié notamment au collège salésien Wilfrid Barón de Ramos Mejía avant d'entrer dans l'école industrielle où il obtient un diplôme de technicien chimiste. Pendant ses études à Buenos Aires, pour subvenir à ses besoins financiers, il faisait des ménages dans une usine locale et en travaillait en tant que videur dans un club de Córdoba (Argentine). A 21 ans, il décide de devenir prêtre. Jorge Mario entre au séminaire diocésain de Villa Devoto dirigé par les jésuites. Le 11 mars 1958, il est accueilli au noviciat de la Compagnie de Jésus. Il continue sa formation spirituelle au Chili et revient en 1963 à Buenos Aires pour la philosophie. De 1964 à 1966 il est régent dans un collège jésuite comme professeur de littérature et de psychologie. De 1966 à 1969 il étudie la théologie à San Miguel de Buenos Aires. Il est ordonné prêtre le 13 décembre 1969 par Mgr Ramón José Castellano, archevêque de Córdoba. Après l’ordination il complète deux années d’études de philosophie et de la théologie dans la même de San Miguel. De 1971 à 1972 il fait son Troisième An à Alcalá de Henares en Espagne. Après « l’école du cœur », il est nommé maître des novices. Père Jorge Mario fait sa profession solennelle le 22 avril 1973. Le 31 juillet 1973, âgé d'à peine trente-six ans, il est nommé provincial des jésuites d'Argentine pendant six ans.
41
Annuaire de la Compagnie de Jésus, 2014, p.8
152
Une fois achevé son provincialat, Jorge Mario est envoyé en Allemagne pour le doctorat. En 1986 il obtient le doctorat en philosophie et en théologie. Sa thèse en philosophie porte sur Romano Guardini. De retour en Argentine il est affecté dans une paroisse rurale comme vicaire. Contre toute attente Jean-Paul II le nomme évêque auxiliaire de Buenos Aires le 20 mai 1992, puis coadjuteur du même archidiocèse le 3 juin 1997. Le 28 février 1998, à la mort du cardinal Antonio Quarracino, il devient archevêque de l'archidiocèse de Buenos Aires. Il n’est pas l’ostentation ni la publicité. Il vivait seul dans un modeste appartement de la curie épiscopale, à côté de la cathédrale. Son activité pastorale ne gênait pas ses autres de gouvernement. Au contraire elle les rendait plus compréhensibles et crédibles. Il ne se contentait pas d’enseigner et de prêcher sur la prière. Il la vivait. Outre les lettres et les écrits de Saint Ignace de Loyola qu’il connaissait parfaitement comme Maître des novices et comme supérieur, il lisait et méditait saint Jean de la Croix, Sainte Thérèse de Jésus et le journal de saint Jean Favre. Enraciné dans la spiritualité ignatienne, Bergoglio est un homme de discernement. Le Père Alvaro Restrepo, jésuite argentin, confiait un jour une affaire délicate au futur pape. Le père fut dans l’admiration devant la réponse du cardinal Bergoglio : « si ce que tu veux faire vient de Dieu, l’Esprit te le fera sentir intérieurement et fera que tes projets parviennent à bonne fin. Mais si ce que tu cherches ne vient pas de Dieu, ton plan n’aboutira pas42 ». Le 21 février 2001 il est créé cardinal cardinal-prêtre au titre cardinalice de San Roberto Bellarmino lors d’un consistoire. Le pape Benoît XVI ayant annoncé le 11 février 2013 sa renonciation, un conclave est convoqué à partir du 12 mars 2013 pour élire un nouveau pape. Après un peu plus de vingt-quatre heures de délibérations et cinq scrutins, Jorge Mario Bergoglio est élu pape, le 13 mars 2013 à 19 h36. L’amour pour la personne de Jésus et de la dévotion à la Vierge Marie reviennent sans cesse dans ces exposés, ses écrits et ses homélies. Saint Joseph a pour Jorge Mario Bergoglio une place spéciale. Ce n’est pas un simple hasard qu’il ait assumé son pontificat de manière officielle un 19 mars. Le nom de François par lequel nous le connaissons désormais évoque pour nous l’esprit évangélique de sa proximité envers les pauvres,
42
Ibidem, p.9
153
son identification avec le peuple des petits et son engagement pour le renouvellement de l’Église.
154
6. L’EGLISE CATHOLIQUE CENTRAFRIQUE
EN
Abbé Célestin DOYARI43
6.1 ABREGEE DE L’HISTOIRE L’EVANGELISATION DE LA CENTRAFRIQUE
DE
L’Oubangui-Chari, qui a changé de nom le 1er décembre 1958 pour devenir la République Centrafricaine, est devenue indépendante le 13 août 1960. Elle couvre une superficie de 623 000 km² et partage ses frontières communes avec le Tchad au Nord, le Soudan à l’Est, la République Démocratique du Congo au Sud-est, le Congo au Sudouest, le Cameroun à l’Ouest. Cet espace a été fixé de manière arbitraire dans le contexte des partages coloniaux et le découpage suit de près l’hydrographie de la région. Il est strictement conventionnel et ne tient aucunement compte des réalités ethniques ni des nécessités économiques. Les débuts de son évangélisation, dans le contexte colonial, remontent à la nomination de Mgr Philippe-Prosper Augouard44, de la Congrégation du Saint-Esprit, comme Vicaire Apostolique de l’Oubangui, le 23 novembre 1890. Dans une correspondance du 04 novembre 1891, il écrit: «Saint-Paul des Rapides sera fondé près de l’endroit où ont été tués Crampel et Poumeyrac». En fait, Mgr Augouard envisage fonder deux Missions dans la partie Nord de son Vicariat: la première à Bangui et la seconde plus au Nord. Ces terres nouvelles pour l’évangélisation seront au centre de ses préoccupations jusqu’à la fondation des Missions.
43
Abbé Célestin DOYARI est curé de la Cathédrale de Bouar.
44
Mgr Philippe-Prosper Augouard (1852-1921) est nommé par le Pape Léon XIII, le 14 octobre 1890, Evêque de Sinita et Vicaire Apostolique de l’Oubangui-Chari ou du Congo-français Supérieur (1890-1909), puis Vicaire Apostolique du Haut-Congo Français (1909-1921).
155
Nous allons structurer notre travail en trois périodes, à savoir: les débuts de l’évangélisation (1893-1938), l’expansion de la Mission (1938-1960), la nouvelle expansion et réorganisation (1960-2015).
6.1.1
Débuts de l’évangélisation (1893-1938)
L’année 1893 correspond à la date où Mgr Augouard foula pour la première fois le sol oubanguien. L’année 1938 rappelle des évènements grandioses vécus par l’Eglise locale de l’Oubangui-Chari: l’investiture de Mgr M. Grandin, Evêque de Furnos Major et Vicaire Apostolique de l’Oubangui-Chari, l’inauguration de sa cathédrale Notre-Dame de l’Immaculée Conception de Bangui et l’ordination presbytérale du premier Prêtre oubanguien, Barthélémy Boganda. La cérémonie a lieu le 27 mars 1938. Pour commémorer ce souvenir, un calvaire monumental a été élevé, près du presbytère, dans la cour de la cathédrale.
6.1.1.1
– Saint-Paul des Rapides à Bangui
Au début de l’année 1893, Mgr Augouard décide un voyage d’exploration dans la partie Nord de son Vicariat. Accompagné du P. Jules Rémy 45 , ils arrivent à Bangui, le 13 juin 1893, en vue de chercher un endroit favorable à la fondation d’un premier Poste de Mission en Haut-Oubangui. Toute l’année 1893 est dédiée à la préparation pour la fondation de la future Mission Saint-Paul des Rapides. Le 12 janvier 1894, l’équipe, composée de Mgr Augouard, le P. Jules Rémy, supérieur de la nouvelle Mission, le Fr Germain Le Gall quittent Brazzaville et arrivent à Bangui le 13 février à 11 heures et demie. Ils sont reçus par l’Administrateur Vittu de Kerraoul qui met une maison provisoire à leur disposition. Le lendemain, ils commencent aussitôt les travaux de construction. La maison provisoire terminée, le 16 avril 1894, ils procèdent le même jour au transport de tout le matériel dans la nouvelle fondation. Le lendemain,
45
P. Jules Remy (1863-1942), Français, originaire de Chaource (diocèse de Troyes), d’abord prêtre séculier, ensuite spiritain, affecté au Congo.Il servira les Missions de Linzolo, Brazzaville, Bangui comme fondateur de la Mission Saint-Paul des Rapides, Loango et Brazzaville où il sera pendant 25 ans Vicaire Général de Mgr Augouard. Il meurt à Langonnet (Morbihan) en 1942, à l’âge de 79 ans.
156
17 avril 1894, ils célèbrent la première eucharistie sur les lieux. Selon le P. Ghislain de Banville46, cette date est à retenir comme celle de la fondation de la première Mission Catholique de Centrafrique: SaintPaul des Rapides. Ce site sera désormais un centre de rayonnement missionnaire en Oubangui-Chari et au Sud du Tchad. Progressivement naîtront les Missions suivantes: Sainte-Famille de Djoukou en 1895, Notre-Dame de Borossé en 1910, Saint-Joseph de Bambari en 1912, Sainte-Anne de Berbérati en 1924, Sainte-Jeanne d’Arc de M’baïki en 1925, Notre-Dame de l’Immaculée Conception Bangui en 1925, Notre-Dame de l’Immaculée Conception de Batangafo en 1928, Saint-Pierre Claver de Bangassou en 1929, SaintMichel de Bozoum en 1929, Sainte-Thérèse-de-l’Enfant-Jésus de Doba en 1934, Saint-François-Xavier d’Ippy en 1938, Saint-Michel de Boda en 1938, etc.
6.1.1.2
Création du Vicariat Apostolique de Bangui
La Préfecture Apostolique de l’Oubangui-Chari est créée le 08 mai 1909, par division du Vicariat Apostolique du Congo-français Supérieur et confiée au R.P. P. Cotel qui en est le premier Préfet Apostolique. Pour des raisons de santé, il démissionne le 24 novembre 1913. Le R.P. J.-R. Calloc’h est nommé Préfet Apostolique de l’Oubangui-Chari47 le 01 janvier 1914 pour lui succéder. Une fois de plus pour des raisons sanitaires, celui-ci démissionne le 27 octobre 1927. Sur les trois candidats en liste pour sa succession, le R.P. M. Grandin, du Vicariat Apostolique du Nigéria Septentrional, est nommé Préfet Apostolique de l’Oubangui-Chari 48 , le 02 mai 1928. Avec le zèle et l’ardeur au travail du nouveau Préfet, la mission de l’Oubangui-Chari connaît un progrès remarquable. Mgr Basile Octave
46
Gh. De Banville, Les débuts de l’Eglise catholique en RCA, Section n 1.
47
A.A.S., Vol. 6 (1914) 30.
48
ID., Vol. 20 (1928) 266.
157
Tanghe49, lors d’un voyage à Bangui en octobre 1936, est resté très frappé par les œuvres réalisées et le progrès de la Mission dans cette Préfecture Apostolique. Dès son retour, il prend l’initiative d’écrire50, au Cardinal Préfet de la Congrégation de la Propagande, pour solliciter l’élévation de cette Préfecture, déjà ancienne, au rang de Vicariat Apostolique. Il ajoute à ces raisons, deux autres motivations importantes: la consécration solennelle de la pro-cathédrale NotreDame de Bangui, prévue pour fin décembre 1937 et l’ordination presbytérale du premier Prêtre indigène Barthélémy Boganda, en fin de cycle au Grand Séminaire de Yaoundé au Cameroun. La Préfecture est érigée en Vicariat Apostolique 51 de l’Oubangui-Chari le 02 décembre 1937 et le R.P. M. Grandin, en devenant le premier Vicaire Apostolique, est en même temps nommé Evêque de Forno Maggiore52. Ce dernier change de dénomination le 28 mai 1940 pour devenir le Vicariat Apostolique de Bangui53.
6.1.1.3
Stratégie et méthode missionnaire
Les Missionnaires de l’Oubangui-Chari se sont confrontés dès le départ à de sérieuses difficultés dans l’œuvre évangélisatrice, dues à plusieurs facteurs mais notamment à l’hostilité de la population locale.
49
Mgr Basile octave Tanghe, Ofmc, est Vicaire Aposolique de Libengue (Oubangui-belge).
50
A.P.F., S.C., N.S., Vol. 1229 (1936), Rub. 41/4, f. 660.
51
Le Vicariat Apostolique est une forme de juridiction provisoire même s’il peut durer longtemps. Il est établi en espérant que la région puisse générer un nombre suffisant de Catholiques pour permettre l’érection d’un diocèse à part entière. Le Vicariat Apostolique est dirigé par un Vicaire Apostolique qui peut être un Evêque ou un Prêtre nommé temporairement à la fonction d’Administrateur Apostolique. Bien qu’il soit reconnu comme une Eglise locale (cf. C. 371,1), la juridiction du Vicaire Apostolique est un exercice vicarial de la juridiction du Pape, c’est-à-dire, le territoire vient directement sous l’autorité du Pape en tant qu’Evêque universel, et il l’exerce à travers le Vicaire. Ceci est différent de la juridiction d’un Evêque diocésain, dont la juridiction dérive directement de son office. 52
A.P.F., S.C., N.S., Vol. 1229 (1937), Rub. 41/4, f. 736.
53
A.A.S., Vol. 32 (1940) 504-506.
158
Ainsi, ils vont orienter leur apostolat vers l’achat ou le rachat, selon le terme des missionnaires, des enfants des deux sexes qui intègrent l’internat de la Mission. L’objectif est de les instruire et les christianiser de sorte que, à l’âge adulte, ils deviennent les piliers de l’évangélisation. Ils sont aidés, pour cette œuvre par les Organisations humanitaires telle que la Société antiesclavagiste, née en France en 1888. Ils vont créer des villages de liberté qui accueillent les jeunes ressortissants de l’internat, les esclaves rachetés, les réfugiés, c’est-àdire, des personnes menacées soit de l’épreuve du poison soit des orphelins fuyant les corvées et les impôts et qui s’y rendaient pour trouver protection et échapper aux mauvais traitements. Parfois, ces jeunes accompagnent les Pères dans les tournées pastorales. Mais tous ceux qui sont reçus dans ces villages n’y restent pas toujours. Hormis les cas de décès, certains, quittent d’eux-mêmes, après un bref séjour, d’autres sont expulsés par suite de mauvais comportements ou encore, par nostalgie, certains ont préféré regagner leur famille afin de vaquer librement à leurs activités. D’autres, enfin, après avoir appris un métier ont choisi d’aller l’exercer ailleurs. Le village Saint-Henri a été fondé en 1900 par le Père Moreau supérieur de la Mission Sainte-Famille. Situé à proximité de la Mission, il a été dédié à Saint-Henri, par reconnaissance envers Mr Henri Wallon, jadis président de la Société anti-esclavagiste de France qui a financé ce projet. Le village de liberté Sainte-Blandine est né en 1901, de l’initiative du Père Gourdy, supérieur de la Mission SaintPaul. Il est composé de deux rangées de cases, à 200 mètres de la Mission. Sur la place du village étaient plantés des manguiers qui fournissaient aux habitants leurs fruits et leur ombre. Le manque de statistique normal ne permet pas de donner le nombre exact des ménages qui vivaient dans ces villages de liberté.
6.1.1.4 Rôle l’évangélisation
fondamental
des
catéchistes
dans
Les catéchistes ont joué un rôle très important dans l’évangélisation de l’Oubangui-Chari. Ils sont comme les seconds des Missionnaires dans l’apostolat. On compte beaucoup sur eux pour compenser le manque de personnels dans ces vastes territoires de Mission. Mais la
159
place donnée à leur formation reste très insuffisante. On distingue deux types de catéchistes. Il y a le volontaire, c’est-à-dire le lettré54 qui est capable de transmettre le message évangélique et les rudimentaires de la foi chrétienne à ses compatriotes. Il le fait temporairement suivant ses temps libres. Puis, le catéchiste titulaire qui, ayant fréquenté l’école de la Mission, suivi une formation de catéchiste et, ayant appris un métier, s’installe dans son village et se met au service de l’Eglise en plein temps.
6.1.1.5
Les tournées
Les tournées ont occupé une place importante dans les débuts de l’évangélisation en Centrafrique. On entend par tournées, la visite périodique des villages environnants constituant la zone de juridiction de la Mission. Se servant des enfants de l’internat comme guides et interprètes et des Loangos comme gardes de corps, les missionnaires vont souvent en visite pastorale qui prend parfois quelques jours, car il faut parcourir de longues distances à pieds. Ces tournées sont des occasions de prise de contact avec le chef du village et sa population, de visiter les malades et, en distribuant des cadeaux et quelques produits pharmaceutiques, ils deviennent amis du village. Ils peuvent ainsi racheter des enfants pour les ramener à la Mission. Ils font à l’occasion la propagande pour attirer les gens vers la Mission. Ce climat de confiance n’est pas réservé à tous les missionnaires. Le cas du Père Allaire est le plus révélateur. Il arrive dans les villages, escorté par les Loangos armés. Or, le port d’arme n’est rien d’autre qu’une déclaration de guerre. Ainsi, malgré sa vocation d’annoncer l’Evangile aux Ngbaka et aux Ndrys, il est mal reçu. Il lui est arrivé quelquefois de se sauver grâce à la rapidité de ses jambes.
6.1.1.6
Première ordination presbytérale
Après sa formation au grand séminaire Saint-Laurent de Mvolye à Yaoundé au Cameroun où il reçoit successivement la Tonsure le 05 octobre 1934, les Ordres mineurs à Pâques 1935 et 1936, le sous-
54
Ce terme désigne un indigène ayant une certaine pratique de la langue française parlée ou écrite.
160
diaconat le 25 mars 1937 et le diaconat le 10 août 1937, le séminariste Barthélémy Boganda revient à Bangui. Son Evêque lui confie la direction du nouveau Petit Séminaire Saint-Marcel de Bangui. Le 27 mars 1938, jour de l’intronisation de Mgr Grandin qui vient d’être ordonné Evêque et devient Vicaire Apostolique de l’Oubangui-Chari, il est ordonné premier Prêtre du clergé indigène en la Cathédrale Notre-Dame de Bangui. La messe est présidée par Mgr Grandin. Parmi les concélébrants il y a Mgr Basile Tanghe55, les PP. Huck et Dufour qui assurent le ministère du diacre et sous-diacre, le P. Hemme qui prononce le sermon du jour en français, le Fr. Marc qui fait le cérémoniaire et de nombreux Prêtres. Dans l’assemblée, il y a environ 150 européens et 3000 fidèles. La cérémonie prend fin à 10h30. Le lendemain, lundi 28 mars, le nouveau Prêtre célèbre sa première messe à Saint-Paul des Rapides en présence de Mgr Grandin, son Evêque, de Mgr Tanghe et d’une foule nombreuse. Il est assisté par le P. Hemme. Le P. Morandeau fait l’homélie en Sango. Le nouveau Prêtre est affecté à Saint-Paul des Rapides. En plus des activités pastorales à Saint-Paul, il continue d’assurer la direction du Petit Séminaire Saint-Marcel et il est chargé d’évangéliser le secteur Zongo, une localité située en face de Bangui sur la rive belge. Le second prêtre, Abbé Albert Lingo, sera ordonné le 1er janvier 1951.
6.1.2
Expansion de la Mission (1938-1960)
Les évènements correspondant à l’année 1938 viennent d’être évoqués ci-haut. Cependant, le 1er décembre 1958, l’Oubangui-Chari change de nom et devient la République Centrafricaine. Elle accède à l’indépendance le 13 août 1960. L’arrivée de nouveaux missionnaires vont permettre l’accroissement de l’aire géographique de la Mission.
6.1.2.1
Arrivée de nouveaux ordres missionnaires
Devant l’immensité du travail due au nombre toujours croissant des chrétiens et les Missions naissantes, le Vicaire Apostolique fait appel aux Capucins de la Province de Toulouse de venir à leur rescousse. Ceux-ci sont expulsés de l’Ethiopie suite à l’occupation italienne de
55
Mgr Basile Tanghe, Ofmc, est Vicaire Apostolique de Molegbe au Congo-belge.
161
l’Erythrée et de l’Ethiopie. Une douzaine de Capucins de Toulouse quittent Marseille le 26 avril 1938 à bord du Banfora à destination de l’Oubangui-Chari où, trois Missions récentes fondées par les Spiritains les attendent. Ils débarquent à Yaoundé et sont accueillis par Mgr Grandin. La seconde équipe part de Marseille, sur le Banfora, le 12 novembre 1938. Mgr Grandin les accueille à Yaoundé et les conduits personnellement à Berbérati où il les installe officiellement le 08 décembre 1938, en la fête de l’Immaculée Conception de la Vierge Marie. Le territoire de Mission qui leur est confié fait frontière avec le Cameroun et le Congo-Brazzaville, soit une superficie d’environ 250 000 km². Ces missionnaires ont à charge de poursuivre et de développer le travail amorcé par les Spiritains. Le 28 mai 1940, Berbérati devient Préfecture Apostolique56 et confiée aux Capucins de Toulouse. Au lendemain de la Seconde Guerre Mondiale, les Capucins de Toulouse se retrouvent à leur tour dans la même situation que celle des Spiritains 10 ans plus tôt. Le progrès réalisé dans l’évangélisation était tel qu’ils ne peuvent plus suffire aux multiples tâches. Le moment est venu de solliciter du renfort. Un premier groupe de Capucins de Toulouse est envoyé en 1946 puis un autre en 1948. Un an après, en 1950, les Provinces de Savoie et de Lyon mettent la main à la charrue en envoyant à leur tour de nouveaux Frères. Entre temps, en 1949, sont arrivés les premiers Capucins de la province de Gênes. Ils viennent en renfort pour collaborer avec les Capucins de Toulouse dans l’évangélisation de l’Oubangui-Chari. D’autres les rejoignent par la suite. Finalement, le 02 août 1952, le Conseil de la Préfecture Apostolique de Berbérati décide de partager ce vaste territoire de Mission. Les Capucins de Toulouse prennent en charge la Mission du Sud du Tchad avec pour centre Moundou57, ceux
56
Berbérati devient Préfecture Apostolique par la Constitution Quod Evangelii du 28 mai 1940, du Pape Pie XII. [Cf. A.A.S., Vol. 32 (1940) 536-538]. 57
Moundou est érigée en Préfecture Apostolique le 22 février 1953 puis en Evêché le 19 février 1959. Mgr Samuel Louis Gaumain en devient le premier Evêque.Il fait partie du groupe des Missionnaires de 1948. Il exercera son ministère à Moundou et dans de nombreux villages de la périphérie. Il est ordonné Evêque le 28 avril 1960
162
de la Province de Gênes, le secteur Ouest qui regroupe les Préfectures administratives de Bouar et de Bozoum, soit une superficie d’environ 45 000 km² et ceux de Savoie et de Lyon s’occupent du secteur de Berbérati. Par la suite, un décret du 08 septembre 1954 confie le secteur de Bossangoa à la Province capucine de Lyon.
6.1.2.2
Création de l’Archidiocèse de Bangui
Le Vicariat Apostolique de Bangui58, créé le 28 mai 1940, est érigé en Archidiocèse le 14 septembre 1955. Mgr Joseph Cucherousset, C.S.sp., en devient le premier Archevêque.
6.1.2.3
Création du diocèse de Berbérati
La Préfecture Apostolique de Berbérati59 est créée le 28 mai 1940 par détachement des Vicariats Apostoliques de Foumban au Cameroun et de l’Oubangui-Chari. En 1941, un télégramme du Cardinal Maglione, expédié par Mgr Valerio Valeri, Nonce Apostolique à Vichy, annonce à Mgr Grandin la nomination du R.P. Pierre Alcantara de Habas, Préfet Apostolique 60 de Berbérati. L’Evêque de Bangui informe immédiatement l’intéressé qui se rend à Bangui pour recevoir sa nomination officielle avec les insignes qui l’accompagnent et prononcer le serment prescrit. Berbérati est érigée en Vicariat Apostolique le 13 mars 1952 puis en Evêché le 14 septembre 1955. Mgr B. Baud en devient le premier Vicaire Apostolique61 puis l’Evêque titulaire.
devant la cathédrale de Moundou par Mgr Thomas Mongo, Evêque de Douala. Après 15 ans de ministère épiscopal, il démissionne en 1975. 58
A.A.S., Vol. 32 (1940) 504-506.
59
ID., Vol. 32 (1940) 536-538.
60
ID., Vol. 33 (1941) 335.
61
A.A.S., Vol. 46 (1954) 303.423.
163
6.1.2.4
Erection de la Préfecture Apostolique de Bangassou
Bangassou est érigée en Préfecture Apostolique, le 14 juin 1954 et confiée à la Province hollandaise de la Congrégation du Saint-Esprit. Le 04 février 1955, le R.P. Martinus Bodewes 62 est nommé Préfet Apostolique 63 de la nouvelle Préfecture. Le nouveau territoire ecclésiastique est constitué par toute la partie orientale du Vicariat de Bangui et comprend 04 Missions : Bangassou, Alindao, Zémio et Ouango et embrasse les territoires de Mbomou, Haut-Mbomou et Basse-Kotto. Le 07 octobre 1956, l’abbé Joseph AkandjiNgoui, originaire d’Alindao, est ordonné Prêtre. Au cours de l’année 1957, les Frères de la Congrégation de Saint-Gabriel de la Province du Canada vont ouvrir une Ecole normale pour la formation des futurs enseignants. Elle fut transférée peu après à Alindao. Le gouvernement s’est engagé à assurer les 80% des dépenses du personnel enseignant64.
6.1.2.5
Erection de la Préfecture Apostolique de Bossangoa
La Mission de Bossangoa a commencé tout doucement en 1929 avec la visite du P. Bonvalet qui vient de s’installer à Bozoum. Il y installe un poste de catéchisme dont Philippe Boboule, un infirmier en devient le premier catéchiste. Quelques années plus tard, en 1931, le
62
Martinus Bodewes est né le 03 juillet 1914 à Panmerden, au diocèse d’Utrecht, dans la province de Gueldre (Hollande), d’une famille profondément chrétienne. Il fait sa profession dans la Congrégation du Saint-Esprit le 23 août 1935. Ordonné Prêtre le 21 juillet 1940, il est empêché par la guerre de partir en Mission. Il remplit divers ministère dans la Maison spiritaine de Gemert; puis, en 1946, il rejoint le Vicariat de Brazzaville. Après un stage à la Mission de Ouesso, il devient directeur de la Station de Fort-Rousset dans le Vicariat de ce nom. C’est de là qu’il sera nommé Préfet Apostolique de Bangassou, confiée aux Spiritains de la Province de Hollande. 63
A.A.S., Vol. 47 (1955) 617. M. BRIAULT, «Un nouveau prélat: Mgr Martinus Bodewes», in Annales des Pères du Saint-Esprit, 65 (1955) 72.
64
C. TOSO, Centrafrique, un siècle d’évangélisation, 245.
164
P. Bonvalet construit la première chapelle en paille sur l’emplacement actuelle de la cathédrale. En 1934, ont lieu les six premiers baptêmes donnés par le P. Bernard qui vient d’être affecté à Bozoum. Deux ans plus tard, Mgr Marcel Grandin célèbre les trois premières confirmations. Progressivement, la Mission se développe et devient un centre de rayonnement missionnaire très important en donnant naissance à plusieurs Missions telles que Kouki, Paoua, Markounda, Bouca, Batangafo, etc. Dès 1940, la Mission de Bossangoa est rattachée à la Préfecture Apostolique de Berbérati dont la charge revient à Mgr Sintas. En 1954 sont arrivés les Frères Mineurs Capucins de Lyon puis les Religieuses Franciscaines de la Propagation de la Foi de Lyon. Comme le territoire de sa circonscription est devenu immense, Mgr Basile Baud, Evêque de Berbérati, demande au Saint-Siège, le 08 septembre 1857, d’ériger en juridiction indépendante la partie Nord-est, en la confiant aux Capucins de Lyon. Elle comprend: Bossangoa, Bouca, Batangafo et Paoua. Le 1er mars 1959, Bossangoa est détachée de Berbérati et érigée en Préfecture Apostolique 65 dont le R.P. Léon Toussaint Chambon est nommé, le 14 décembre 1959, le premier Préfet Apostolique. Il sera ordonné Evêque le 1er mai 1964. Entre temps, dès l’arrivée des Pères Capucins qui vont s’installer à Bozoum, l’un d’entre eux, le P. Chrysostome est chargé du secteur Bossangoa. Il entame aussitôt la construction de l’église en dur qui sera inauguré en 1942 et baptisé Saint-Antoine de Padoue.
6.1.3
Nouvelle expansion et réorganisation (1960-2015)
Malgré le contexte très difficile, les missionnaires, par leur labeur au travail et le sacrifice de leur vie, feront naître des communautés chrétiennes dans plusieurs endroits de la Centrafrique. L’effort se poursuit après les indépendances par la création de plusieurs paroisses, l’érection de nouveaux diocèses et une forte implication de l’Eglise dans le domaine social comme l’éducation, la santé, etc. Quelques évènements importants méritent également d’être rappelés.
65
A.A.S., Vol. 51 (1959) 678-680.
165
6.1.3.1
Nouveaux diocèses avec la liste de ses Evêques
jusqu’à 2015 - Diocèse de Bossangoa créé le 16 janvier 1964 Mgr Léon Toussaint Jean Clément CHAMBON, 16.01.1964 – 22.04.1978 Mgr Sergio Adolfo GOVI, 22.04.1978 – 10.06.1995 Mgr Paulin POMODIMO, 10.06.1995 – 26.06.2003 Mgr François-Xavier YOMBANDJE, 03.04.2004 – 16.05.2009 Siège vacant, 16.05.2009 – 14.05.2012 Mgr Nestor-Désiré NONGO-AZIAGBIA, 14.05.2012 –
- Diocèse de Bangassou, créé le 10 février 1964 Mgr Antoine-Marie MAANICUS, 10.02.1964 – 21.12.2000 Mgr Juan-José AGUIRRE MUNOZ, 21.12.2000 –
- Diocèse de Bambari, créé le 02 janvier 1970 Mgr Joachim N’DAYEN, 1970 – 1978 Mgr Michel-Marie Joseph MAÎTRE, 19.06.1981 - 29.02.1996 Mgr Jean-Claude REMBANGA, 29.02.1996 – 06.11.2004 Mgr Edouard MATHOS, 06.11.2004 –
- Diocèse de Bouar, créé le 07 février 1978 Mgr Armando Umberto GIANNI, 27.02.1978 –
- Diocèse de M’baïki, créé le 10 juin 1995 Mgr Guerrino PERRIN, 10.06.1995
166
- Diocèse de Kaga-Bandoro, créé le 28 juin 1997 Mgr François-Xavier YOMBANDJE, 28.06.1997 – 03.04.2004 Mgr Albert VANBUEL, 16.07.2005 – 27.09.2015 Mgr Tadeusz KUSY, 27.09.2015 –
- Diocèse d’Alindao, créé le 18 décembre 2004 Mgr Peter MARZINKOWSKI, 18.12.2004 – 19.03.2014 Mgr Cyr-Nestor YAPAUPA, 19.03.2014 –
6.1.4
Quelques évènements importants
• La visite de sa Sainteté le Pape saint Jean Paul II, le mercredi 14 août 1985. Dans son homélie de la circonstance, nous retenons cette interpellation: «Votre pays chers amis, n’est pas dépourvu de richesses, qu’il s’agisse du sol ou du sous-sol. Dieu vous a donné la terre et l’eau : il vous confie cette terre fertile pour qu’elle produise suffisamment pour tous, et pour que les enfants de ce pays ne meurent jamais de faim ni ne souffrent de malnutrition»66. • Les festivités du Centenaire de l’Evangélisation de la République Centrafricaine (1894-1994). L’ouverture a eu lieu le 09 janvier, en la fête du Baptême du Seigneur, devant la Cathédrale, en présence d’une foule imposante. Les 7 Evêques du pays, entourés d’une cinquantaine de prêtres, ont baptisé près de 300 adultes et petits enfants. Le thème retenu pour le Centenaire est : «Vivre notre foi de baptisé». Tout au long de cette année 1994, des conférences, des soirées de réflexions sur des thèmes précis tels que le mariage, la foi chrétienne, la Bible, etc. ont été organisées par les divers mouvements et fraternités des paroisses. Tout ceci en vue de soutenir l’effort à poursuivre pour l’annonce de l’Evangile.
66
IOANNES PAULUS, PP. II, «Banguiae, ad Christifideles congregatos habitat», A.A.S., 78 (1986) 64. Allocution du Pape Jean Paul II aux Centrafricains lors de sa visite apostolique en 1985.
167
• Les travaux de la 8ème Assemblée de l’ACERAC 67 sur le thème: «pour une bonne gestion des biens dans nos Eglises d’Afrique Centrale». Le thème choisi vise la nécessité de la bonne gestion des biens dans nos Eglises particulières et l’urgence d’une autonomie financière. Elle s’est tenue à Bangui, du 29 juin au 05 juillet 2008. A l’heure actuelle, l’Eglise locale de Centrafrique comprend neuf diocèses : - Archidiocèse de Bangui dont l’Archevêque est Mgr Dieudonné Nzapalainga, C.s.sp., originaire du Mbomou dans le diocèse de Bangassou. Il est ordonné Evêque le 22 juillet 2012. - Diocèse de Berbérati dont l’Ordinaire est Mgr Denis Koffi Agbenyadzi, SMA, originaire du Ghana. Il est ordonné Evêque le 22 juillet 2012. - Diocèse de Bangassou avec Mgr Juan José Aguirre Munoz, M.C.C.J., originaire de Cordoba en Espagne. Il est ordonné Evêque le 10 mai 1998. - Diocèse de Bossangoa avec Mgr Nestor Nongo-Aziagba, SMA, originaire du Mbomou, ordonné Evêque le 22 juillet 2012. - Diocèse de Bouar avec Mgr Armando Umberto Gianni, Ofmcap, originaire de Gragnola, diocèse de Massa-CarraraPontremoli (Italie). Il est ordonné Evêque le 19 novembre 1978. - Diocèse de Bambari avec Mgr Edouard Mathos, originaire de Bossangoa et ordonné Evêque le 10 janvier 1988. - Diocèse de M’baïki avec Mgr GuerrinoPerin, M.C.C.J., de Pianiga, diocèse de Padoue (Italie), ordonné Evêque le 29 octobre 1995. - Diocèse d’Alindao avec Mgr Cyr-Nestor Yapaupa, originaire du Mbomou, ordonné Evêque le 22 juillet 2012. - Diocèse de Kaga-Bandoro avec Mgr Albert Vanbuel, S.D.B., originaire de Zolder, diocèse de Hasselt (Belgique), ordonné Evêque
67
ACERAC ou Assemblée des Conférences Episcopales des Régions de l’Afrique Centrale comprend les Conférences Episcopales du Cameroun, Congo, Gabon, Guinée Equatoriale, Tchad et République Centrafricaine. Elle est née de la volonté des Evêques de ces sous-régions de s’unir pour mieux agir en Eglise et pour l’Eglise.
168
le 28 septembre 2005. Il vient d’être remplacé par Mgr Tadeusz Kusy, Ofm, le 27 septembre 2015.
169
TROISIEME PARTIE : DISCOURS ET HOMELIES DU PAPE FRANÇOIS LORS DE SON VOYAGE EN CENTRAFRIQUE (29-30 novembre 2015)
7.
RENCONTRE AVEC LES AUTORITES ET LE CORPS DIPLOMATIQUE 7.1 PISTES
DE COMPREHENSION DU DISCOURS DU PAPE FRANÇOIS LORS DE SA RENCONTRE AVEC LES AUTORITES ET LE CORPS DIPLOMATIQUE AU PALAIS DE LA RENAISSANCE
7.1.1
Piste n. 1 : Le Saint Père et sa mission en
Centrafrique Le premier discours du Pape François s’ouvre avec la définition de sa visite en Centrafrique. En saluant les autorités, le Saint Père affirme ouvertement qu’il vient comme « Pèlerin de la paix ». Cela est très significatif car pour le Pape, ce voyage est une étape spirituelle. Le temps du pèlerinage est un temps d’abandon du quotidien pour se concentrer sur un parcours sacré. Celle du Pape n’est pas une visite politique, mais un parcours spirituel. Un pèlerin c’est celui qui assume la fatigue du voyage en vue de gagner le salut éternel. Le Pape François se définit aussi comme « Apôtre de l’Espérance ». Il vient en Centrafrique comme messager, pour porter la bonne nouvelle qui parle d’espoir et de salut comme d’une perspective possible même en temps de guerre.
7.1.2
Piste n. 2 : Les gouvernants comme guides du peuple en marche Dans ce discours le Pape François utilise une métaphore puissante pour expliquer le rôle des autorités centrafricaines : ils doivent orienter le chemin de leur peuple comme une boussole. Le chemin de l’histoire se développe par étapes et il n’a pas de fin. Il est défini comme un « programme jamais achevé » car il doit toujours suivre les aspirations du peuple.
173
7.1.3
Piste n. 3 : « Unité, Dignité, Travail » : la devise de la Centrafrique Le Pape François propose une réflexion sur les trois mots qui composent la devise de la Centrafrique. Le discours propose une vision positive du Pays et de son potentiel de développement. Il nous rappelle qu’il faut faire attention aux tentations qui constituent une menace à leur réalisation. - « Unité » : la tentation que nous devons fuir est la peur de l’autre, car la peur conduit à la division entre les hommes ; « Dignité » : il faut éviter de tomber dans la tentation de se préoccuper de nos privilèges au détriment de la dignité d’autres ; - « travail » : c’est une bonne chose de travailler pour le bien être des familles ou pour développer le pays. Mais on ne peut pas accepter la tentation de l’exploitation des ressources du pays pour une fin purement commerciale. Le travail est une œuvre solidaire. Sortir de une vision égoïste (les tentations), pour regarder les autres dans une perspective solidaire ; c’est la proposition du Saint Père comme l’essentiel de la politique qui doit guider le peuple. Le chemin solidaire conduit le peuple centrafricain plus loin vers le développement auquel il a droit. La « recherche » de la paix et réconciliation : c’est un objectif qui est défini comme « un programme jamais achevé ». On construit la paix jour après jour.
174
7.2 DISCOURS INTEGRAL DU PAPE FRANÇOIS LORS DE LA RENCONTRE AVEC LES AUTORITES ET LE CORPS DIPLOMATIQUE AU PALAIS DE LA RENAISSANCE Madame le Chef de l’État de la Transition, Distinguées autorités, Membres du Corps diplomatique, Représentants des Organisations internationales, Chers frères Evêques, Mesdames et Messieurs, Heureux de me retrouver ici avec vous, je voudrais d’abord manifester ma vive appréciation pour le chaleureux accueil qui m’a été réservé et remercier Madame le Chef de l’État de la Transition pour son aimable adresse de bienvenue. Je suis touché, Madame, pour ce que vous venez de dire. Merci beaucoup pour ce témoignage si humain et si chrétien. De ce lieu, qui d’une certaine manière est la maison de tous les Centrafricains, il m’est agréable d’exprimer, à travers vous et à travers les autres Autorités du pays ici présentes, ma sympathie et ma proximité spirituelle à tous vos concitoyens. Je voudrais également saluer les membres du Corps diplomatique, ainsi que les représentants des Organisations internationales dont l’œuvre rappelle l’idéal de solidarité et de coopération qui doit être cultivé entre les peuples et les nations. Alors que la République Centrafricaine s’achemine progressivement, malgré les difficultés, vers la normalisation de sa vie socio-politique, je foule pour la première fois cette terre, après mon prédécesseur saint Jean-Paul II. C’est en pèlerin de la paix que je viens, et c’est en apôtre de l’espérance que je me présente. Voilà pourquoi j’ai plaisir à saluer l’effort accompli par les diverses Autorités nationales et internationales, en commençant par Madame le Chef de l’État de la Transition, pour conduire le pays à ce stade. Mon souhait le plus ardent est que les différentes consultations nationales 175
qui vont se tenir dans quelques semaines permettent au pays d’entamer sereinement une nouvelle étape de son histoire. Pour éclairer l’horizon, la devise de la République Centrafricaine traduisant l’espérance des pionniers et le rêve des pères fondateurs, est là : « Unité – Dignité – Travail ». Aujourd’hui plus encore qu’hier, cette trilogie exprime les aspirations de chaque Centrafricain et, par conséquent, constitue une boussole sûre pour les Autorités, chargées de conduire les destinées du pays. Unité, dignité, travail ! Trois mots lourds de sens, dont chacun représente autant un chantier qu’un programme jamais achevé, une tâche à remettre sans cesse sur le métier. D’abord, l’unité. Elle est, on le sait, une valeur cardinale pour l’harmonie des peuples. Elle est à vivre et à construire à partir de la merveilleuse diversité du monde ambiant, en évitant la tentation de la peur de l’autre, de ce qui ne nous est pas familier, de ce qui n’appartient pas à notre ethnie, à nos options politiques ou à notre confession religieuse. L’unité exige, tout au contraire, de créer et de promouvoir une synthèse des richesses que chacun porte en lui. L’unité dans la diversité, c’est un défi constant, qui appelle à la créativité, à la générosité, à l’abnégation et au respect d’autrui. Ensuite, la dignité. C’est justement cette valeur morale synonyme d’honnêteté, de loyauté, de grâce et d’honneur, qui caractérise les hommes et les femmes conscients de leurs droits comme de leurs devoirs et qui les conduit au respect mutuel. Chaque personne a une dignité. Je me suis laissé dire avec intérêt que la Centrafrique est le pays du ‘‘Zo kwe zo’’, le pays où chaque personne est une personne. Tout doit donc être fait pour sauvegarder le statut et la dignité de la personne humaine. Et celui qui a les moyens d’une vie décente, au lieu d’être préoccupé par les privilèges, doit chercher à aider les plus pauvres à accéder eux aussi à des conditions respectueuses de la dignité humaine, notamment à travers le développement de leur potentiel humain, culturel, économique et social. Par conséquent, l’accès à l’éducation et aux soins, la lutte contre la malnutrition et le combat pour garantir à tous un logement décent doivent figurer au premier plan d’un développement soucieux de la dignité humaine. En définitive, la dignité de l’être humain, c’est de travailler à la dignité de ses semblables. 176
Enfin, le travail. C’est par le travail que vous pouvez améliorer la vie de vos familles. Saint Paul a dit : « Les enfants n’ont pas à amasser pour leurs parents, mais les parents pour leurs enfants » (2 Co 12, 14). L’effort des parents exprime leur amour pour les petits. Et vous encore, les Centrafricains, vous pouvez améliorer cette merveilleuse terre, en exploitant judicieusement ses nombreuses ressources. Votre pays se trouve dans une région considérée comme l’un des deux poumons de l’humanité, à cause de sa richesse exceptionnelle en biodiversité. À ce sujet, me référant à l’Encyclique Laudato si’, je voudrais particulièrement attirer l’attention de chacun, citoyens, responsables du pays, partenaires internationaux et sociétés multinationales, sur la grave responsabilité qui est la leur dans l’exploitation des ressources environnementales, dans les choix et les projets de développement, qui d’une manière ou d’une autre affectent la planète entière. Le travail de construction d’une société prospère doit être une œuvre solidaire. Cette vérité, la sagesse de votre peuple l’a comprise depuis longtemps et l’a traduite par ce proverbe : « Les fourmis sont petites, mais en étant nombreuses, elles ramènent leur butin dans leur nid ». Il est sans doute superflu de souligner l’importance capitale que revêtent le comportement et la gestion des Autorités publiques. Celles-ci doivent être les premières à incarner avec cohérence dans leur vie les valeurs de l’unité, de la dignité et du travail, en étant des modèles pour leurs compatriotes. L’histoire de l’évangélisation de cette terre et l’histoire sociopolitique de ce pays attestent l’engagement de l’Église dans le sens de ces valeurs de l’unité, de la dignité et du travail. En faisant mémoire des pionniers de l’évangélisation en République Centrafricaine, je salue mes frères Evêques qui en ont présentement la charge. Avec eux, je renouvelle la disponibilité de cette Eglise particulière à contribuer toujours plus à la promotion du bien commun, notamment à travers la recherche de la paix et de la réconciliation. La recherche de la paix et de la réconciliation. Je ne doute donc pas que les Autorités centrafricaines actuelles et futures se préoccuperont sans relâche de garantir à l’Église des conditions favorables à l’accomplissement de sa mission spirituelle. Elle pourra ainsi contribuer toujours davantage à ‘‘promouvoir tout homme et tout l’homme’’ (Populorum progressio, n. 14), pour reprendre l’heureuse formule de mon prédécesseur, le 177
bienheureux Paul VI, qui, il y a bientôt 50 ans, fut le premier Pape des temps modernes à venir en Afrique pour l’encourager et la confirmer dans le bien à l’orée d’une aube nouvelle. Pour ma part, je voudrais à présent saluer l’effort accompli par la communauté internationale, ici représentée par le Corps Diplomatique et les membres de différentes Missions d’Organisations internationales. Je l’encourage vivement à aller toujours plus loin sur le chemin de la solidarité, souhaitant que son engagement, uni à l’action des Autorités centrafricaines, aide le pays à progresser notamment dans la réconciliation, le désarmement, le maintien de la paix, l’assistance sanitaire et la culture d’une saine gestion à tous les niveaux. Pour finir, j’aimerais redire ma joie de visiter ce merveilleux pays, situé au cœur de l’Afrique, abritant un peuple profondément religieux, doté d’un si riche patrimoine naturel et culturel. J’y vois un pays comblé des bienfaits de Dieu ! Puisse le peuple centrafricain, ainsi que ses dirigeants et tous ses partenaires, apprécier à leur juste valeur ces bienfaits, en travaillant sans cesse pour l’unité, la dignité humaine et la paix fondée sur la justice ! Que Dieu vous bénisse tous ! Merci !
178
8.
DISCOURS DU PAPE FRANÇOIS AU CAMP DES DEPLACES A LA PAROISSE SAINT SAVEUR68
8.1 PISTES
DE COMPREHENSION DU DISCOURS DU PAPE FRANÇOIS AU CAMP DES DEPLACES A LA PAROISSE SAINT SAUVEUR
8.1.1
Piste1 : les ingrédients de la paix
Le Pape François se laisse inspirér par les mots que les enfants ont écrit sur des papiers pour nous offrir une réflexion sur la paix. Amour, amitié, tolérance, pardon sont les ingrédients d’un processus qui porte la paix : on pardonne, on tolère, on devient amis, on aime les autres. C’est la voie à parcourir pour arriver paix. Les Centrafricains ont beaucoup d’éléments de différence entre eux : l’ethnie, la culture, la religion, la classe sociale. Mais ils ont démontré qu’ils savent vivre comme frères et ils désirent tous la paix.
8.2 DISCOURS INTEGRAL
DU PAPE FRANÇOIS AU DES DEPLACES A LA PAROISSE SAINT SAUVEUR
CAMP
Je vous salue tous qui êtes ici. Je vous dis que j’ai lu ce que les enfants avait écrit “paix”, “pardon”, “unité” et tant de choses… “amour”. Nous devons travailler et prier et tout faire pour la paix. Mais la paix, sans amour, sans amitié, sans tolérance, sans pardon, ce n’est pas possible. Chacun d’entre nous doit faire quelque chose. Je 68
Ce discours était spontané, le Pape parlait sans support écrit.
179
vous souhaite, à vous et à tous les centrafricains, la paix, une grande paix entre vous. Que vous puissiez vivre en paix quelque soit l’ethnie, la culture, la religion, le rang social. Mais tous en paix ! Tous ! Parce que nous sommes tous frères. Je voudrais que nous le disions tous ensemble : « Nous sommes tous frères ». Les gens répètent « Nous sommes tous frères » Encore une fois ! [« Nous sommes tous frères »] Et pour cela, parce que nous sommes tous frères, nous voulons la paix. Et je vous donnerai la bénédiction du Seigneur. Que le Seigneur vous bénisse, le Père, le Fils et le Saint-Esprit. Et priez pour moi ! Priez pour moi, vous l’avez entendu ? [« Oui ! »]
180
9.
DISCOURS PRONONCE PAR LE PAPE FRANÇOIS A LA FATEB69
9.1 PISTES DE COMPREHENSION DU DISCOURS PRONONCE PAR LE PAPE FRANÇOIS A LA FATEB 9.1.1 Piste n. 1 : Nous sommes tous frères. Dans ce discours le Saint Père nous invite à reconnaitre que nous sommes tous frères. Il y a des éléments de fraternité qui unissent les hommes. La première expérience qui rend tous les hommes des frères, c’est la souffrance. Toutes les personnes de la Centrafrique souffrent pour les conséquences de la violence, des épreuves, de la guerre. Tous les Centrafricains souffrent, chacun pour sa condition : les enfants, les personnes âgées, les pauvres. Tous ceux qui souffrent font partie du même corps, l’Eglise. La souffrance nous rend tous égaux devant notre Dieu, il n’y a pas de différence quand les gens souffrent (« œcuménisme du sang »). Pour cette raison les chrétiens ne peuvent pas être divisés. Ainsi, en vertu du baptême, tous les chrétiens sont appelés à reconnaitre leur fraternité. Un autre élément commun entre les frères est la mission que nous sommes appelés à servir. Nous pouvons agir comme des messagers, pour diffuser la bonne nouvelle et la joie à tous les membres de nos communautés. En vertu du Baptême nous partageons tous « un
69
Il s’agit de la rencontre avec les communautés évangéliques à la Faculté de Théologie Biblique (FATEB).
181
chemin » (un processus continu) « fraternel » (qui reconnait des liens), basé sur le « service » (nous sommes les outils), dans une attitude de « réconciliation et miséricorde » (nous devons offrir le pardon).
9.1.2
Piste n. 2 : la violence est une action du diable.
Tout au long de ce discours la violence n’est jamais attribuée aux hommes mais toujours au diable. La souffrance est une conséquence de l’action du diable, qui déclenche l’injustice et la violence. La guerre et la violence, dans les mots du Saint Père, sont toujours vues comme les effets du Mal et jamais vu comme actions de personnes spécifiques. Les personnes tombent sous le pouvoir du Mal, mais le temps de miséricorde divine vient pour les libérer et leur offrir une occasion de pardon et de salut.
182
9.2 DISCOURS INTEGRAL DU PAPE FRANÇOIS LORS DE LA RENCONTRE AVEC LES COMMUNAUTÉS ÉVANGÉLIQUES A LA FATEB Chers frères et sœurs, Je suis heureux d’avoir l’occasion de vous rencontrer dans cette Faculté de Théologie évangélique. Je remercie le Doyen de la Faculté et le Président de l’Alliance des Évangéliques en Centrafrique, pour leurs aimables paroles de bienvenue. Je salue chacun d’entre vous, et aussi à travers vous tous les membres de vos communautés, dans un profond sentiment d’amour fraternel. Nous sommes tous ici au service du même Seigneur ressuscité, qui nous rassemble aujourd’hui ; et, par le commun Baptême que nous avons reçu, nous sommes envoyés pour annoncer la joie de l’Évangile aux hommes et aux femmes de ce cher pays de Centrafrique. Depuis trop longtemps, votre peuple est marqué par les épreuves et la violence qui causent tant de souffrances. Cela rend l’annonce évangélique d’autant plus nécessaire et urgente. Car c’est la chair du Christ lui-même qui souffre, qui souffre, en ses membres préférés : les pauvres de son peuple, les malades, les personnes âgées et les abandonnés, les enfants qui n’ont plus de parents ou qui sont livrés à eux-mêmes, sans guide et sans éducation. Ce sont aussi tous ceux que la violence et la haine ont blessés dans leur âme ou dans leur corps ; ceux que la guerre a démunis de tout, de leur travail, de leur maison, de leurs êtres chers. Dieu ne fait pas de différences parmi ceux qui souffrent. J’ai souvent appelé cela l’œcuménisme du sang. Toutes nos communautés souffrent indistinctement de l’injustice et de la haine aveugle que le démon déchaîne ; et je voudrais à cette occasion faire part de ma proximité et de ma sollicitude envers le Pasteur Nicolas dont la maison a été récemment saccagée et incendiée, ainsi que le siège de sa communauté. Dans ce contexte difficile, le Seigneur nous envoie sans cesse manifester à tous sa tendresse, sa compassion et sa miséricorde. Cette souffrance commune et cette mission commune sont une occasion providentielle de nous faire avancer ensemble sur le chemin 183
de l’unité ; elles en sont même un moyen spirituel indispensable. Comment le Père refuserait-il la grâce de l’unité, même encore imparfaite, à ses enfants qui souffrent ensemble, et qui, en de multiples occasions, se dévouent ensemble au service de leurs frères ? Chers frères, la division des chrétiens est un scandale, car elle est d’abord contraire à la volonté du Seigneur. Elle est aussi un scandale devant tant de haine et de violence qui déchirent l’humanité, devant tant de contradictions qui se dressent face à l’Évangile du Christ. Aussi, saluant l’esprit de respect mutuel et de collaboration qui existe entre les chrétiens de votre pays, je vous encourage à poursuivre sur cette voie dans un service commun de la charité. C’est un témoigne rendu au Christ, qui construit l’unité. Puissiez-vous, de plus en plus et avec audace, ajouter à la persévérance et à la charité, le service de la prière et de la réflexion commune, dans la recherche d’une meilleure connaissance réciproque, d’une plus grande confiance et d’une plus grande amitié, en vue de la pleine communion dont nous gardons la ferme espérance. Je vous assure que ma prière vous accompagne sur ce chemin fraternel de service, de réconciliation et de miséricorde, un chemin long mais rempli de joie et d’espérance. Je demande au Seigneur Jésus de vous bénir tous, qu’il bénisse vos communautés, qu’il bénisse aussi notre Église. Et je vous demande de prier pour moi. Merci beaucoup.
184
10.
DISCOURS PRONONCE PAR LE PAPE FRANÇOIS AVANT L’OUVERTURE DE LA PORTE SANTE70
10.1
PISTES
10.1.1
Piste n. 1 : Bangui capitale spirituelle du monde
DE COMPREHENSION DU DISCOURS DU PAPE FRANÇOIS AVANT L’OUVERTURE DE LA PORTE SAINTE
Comment comprendre cette déclaration solennelle du Pape ? D’abord, parce que l’Année Sainte de la Miséricorde commence par anticipation à Bangui. C’est une première fois dans l’histoire de l’Eglise que le Pape ouvre une Porte Sainte avant Rome. Ensuite, cette ville comme certains pays du monde, connait la guerre, la haine, la violence, l’incompréhension. Par la prière et la miséricorde de Dieu, les habitants de cette capitale et par extension, toute la République Centrafricaine devient le lieu où se réalisent la réconciliation, le pardon et l’amour. C’est le thème de l’aujourd’hui de Dieu dans notre vie : Dieu est à l’œuvre hic et nunc, c'est-à-dire, ici et maintenant.
70
Ce discours était spontané, le Saint Père parlait sans support écrit. J’y reviendrai dans mon témoignage dans ce livre, car le Saint Père m’a préparé à ce moment.
185
10.2
DISCOURS INTEGRAL 71 L’OUVERTURE DE LA PORTE SAINTE
PRONONCE
AVANT
Aujourd’hui Bangui devient la capitale spirituelle du monde. L’Année Sainte de la Miséricorde commence en avance sur cette terre. Une terre qui souffre depuis plusieurs années de la guerre et de la haine, de l’incompréhension, du manque de paix. Mais sur cette terre souffrante, il y a aussi tous les pays qui passent par la croix de la guerre. Bangui devient la capitale spirituelle de la prière par la miséricorde du Père. Tous, demandons la paix, la miséricorde, la réconciliation, le pardon, l’amour. Pour Bangui, pour toute la République de Centrafrique, pour le monde entier, pour les pays qui souffrent de la guerre, demandons la paix ! Et tous ensemble, demandons l’amour et la paix. Tous ensembles ! Doyé Siriri ! [tous répètent : Doyé Siriri !] Et maintenant, avec cette prière nous commençons l’Année Sainte : ici, dans cette capitale spirituelle du monde, aujourd’hui !
71
Le discours était sans support écrit, c’est à dire, le Pape parlait avec son cœur.
186
10.3
10.3.1
HOMELIE DU PAPE LORS DE LA MESSE AVEC LES RELIGIEUX, RELIGIEUSES, PRETRES, CATECHISTES, A LA CATHEDRALE DE BANGUI PISTES DE COMPREHENSION DE L’HOMELIE
10.3.1.1 Piste n.1 : Dieu réalise à travers nous ses œuvres Toutes les personnes font l’expérience du Mal et du péché. Le cheminement spirituel commence à partir de la prise de conscience que nous avons tous été pardonnées, et en vertu de cette expérience nous sommes appelés à pardonner à notre tour. Les hommes, notamment les religieux et les religieuses, sont les outils du Bien, c’est-à-dire, qu’ils rendent possible que la joie soit annoncée, que le Bien soit réalisé à travers eux. Le Bien est œuvre du Seigneur. Les deux Apôtres, Pierre et Jean au temple, n’ont pas les moyens d’aider le paralytique, mais ils laissent que la force de Dieu, capable de guérir, arrive à travers eux. C’est vrai aussi quand le Pape parle de lui-même : il ne dit pas « je suis venu chez vous » mais « le Seigneur a guidé mes pas ». Le Pape aussi est un outil entre les mains du Seigneur ; sa venue en Centrafrique n’est pas une action personnelle mais la volonté de Dieu.
10.3.1.2 Piste n. 2 : la justice de Dieu est Amour. Le Salut est offert à tous, à ceux qui sont opprimés par la violence et à ceux qui sont opprimés par leurs péchés. La justice divine ne suit pas les règles de la justice humaine. Dieu ouvre la possibilité de salut aux opprimées et aux oppresseurs, parce que sa justice est Amour pour tous. La justice de Dieu suit la logique de l’Amour. Et l’Amour vaincra ; c’est une certitude pour les chrétiens. Le Salut en ce monde 187
se réalise à partir de ces personnes qui s’ouvrent au Christ, parce que c’est Lui qui, à travers ces personnes, rende possible l’Amour.
10.3.1.3 Piste n. 3 : Nous ne passons pas sur l’autre rive tout seul.
Le Saint Père nous invite à changer de vie avec l’aide du Seigneur. Jésus accompagne toujours l’homme, il ne le laisse jamais seul : « Il ne nous envoie pas tout seul à l’autre rive, mais Il nous invite à traverser avec Lui », et il nous demande d’aider les autres de la même manière. Pour les religieux et les religieuses, c’est une mission particulière : ils doivent encourager les fidèles à traverser la rive, avec la conviction certaine qu’Il est sur le bateau avec nous. On traverse avec Lui et avec nos frères, indépendamment de leur race, de leur religion. Le Saint Père nous invite à aider nos ennemis à traverser avec nous.
10.3.1.4 Piste n. 4 : Juda sera délivré. Le Seigneur ne cesse jamais de nous envoyer annoncer sa miséricorde à ceux qui sont opprimées, mais aussi à ceux qui sont encore écrasées par leurs péchés. En particulier les religieux et les religieuses ont été appelés par le Pape de trois manières différentes : - « Artisans du pardon » : ceux qui font du pardon une action concrète ; - « Spécialistes de la réconciliation » : ils savent agir de manière professionnelle, pour faciliter le dialogue entre les parties ; - «Experts de la miséricorde » : les mots utilisés par le Pape font ici référence au fait qui ils ont fait expérience de la miséricorde, et, ayant été pardonnés eux-mêmes, ils savent l’administrer. 188
Même pour ceux qui en ce moment utilisent encore les armes, le Pape exprime un cri d’espoir : il ne parle pas de condamnation, mais il les invite à passer sur l'autre rive en s’habillant à nouveau avec des armes de la paix. Le Saint Père nous rappelle que « Juda sera délivré » parce que la justice de Dieu, qui est amour, vaincra tout. Ceux qui nous ont fait du mal vont aussi jouir de la miséricorde de Dieu. Elle est juste parce qu’elle est pour tous.
189
11. HOMELIE DU PAPE FRANÇOIS LORS DE LA MESSE AVEC LES PRÊTRES, RELIGIEUX, RELIGIEUSES, CATÉCHISTES ET JEUNES A LA CATHEDRALE NOTRE DAME DE L’IMMACULEE CONCEPTION DE BANGUI.
En ce premier dimanche de l’Avent, temps liturgique de l’attente du Sauveur et symbole de l’espérance chrétienne, Dieu a conduit mes pas, jusqu’à vous, sur cette terre, alors que l’Église universelle s’apprête à inaugurer l’Année Jubilaire de la Miséricorde, que nous aujourd’hui, ici, avons commencée. Et je suis particulièrement heureux que ma visite pastorale coïncide avec l’ouverture dans votre pays de cette Année Jubilaire. Depuis cette cathédrale, par le cœur et la pensée, je voudrais rejoindre avec affection tous les prêtres, les personnes consacrées, les agents pastoraux de ce pays, spirituellement unis à nous en ce moment. A travers vous, j’aimerais saluer aussi tous les Centrafricains, les malades, les personnes âgées, les blessés de la vie. Certains d’entre eux sont peut-être désespérés et n’ont même plus la force d’agir, attendant simplement une aumône, l’aumône du pain, l’aumône de la justice, l’aumône d’un geste d’attention et de bonté. Et tous, nous attendons la grâce, l’aumône de la paix. Mais comme les apôtres Pierre et Jean montant au temple, qui n’avaient ni or ni argent à donner au paralytique dans le besoin, je viens leur offrir la force et la puissance de Dieu qui guérissent l’homme, le remettent debout et le rendent capable de commencer une nouvelle vie, en passant sur l’autre rive (cf. Lc 8, 22). Jésus ne nous envoie pas tous seuls sur l’autre rive, mais il nous invite plutôt à effectuer la traversée avec lui, en répondant, chacun, à une vocation spécifique. Il nous faut donc être conscients que ce passage sur l’autre rive ne peut se faire qu’avec lui, en nous libérant des conceptions de la famille et du sang qui divisent, pour construire 191
une Eglise-Famille de Dieu, ouverte à tous, soucieuse de ceux qui sont le plus dans le besoin. Cela suppose la proximité avec nos frères et sœurs, cela implique un esprit de communion. Ce n’est pas d’abord une question de moyens financiers ; il suffit juste de partager la vie du peuple de Dieu, en rendant compte de l’espérance qui est en nous (cf. 1P 3, 15), en étant témoins de l’infinie miséricorde de Dieu qui, comme le souligne le psaume de ce dimanche, « est bon [et] montre aux pécheurs le chemin » (Ps 24, 8). Jésus nous enseigne que le Père céleste « fait lever son soleil sur les méchants et sur les bons » (Mt 5, 45). Après avoir fait nous-mêmes l’expérience du pardon, nous devons pardonner. Voici notre vocation fondamentale : « Vous donc, vous serez parfaits comme votre Père céleste est parfait » (Mt 5, 48) ! L’une des exigences fondamentales de cette vocation à la perfection, c’est l’amour des ennemis, qui prémunit contre la tentation de la vengeance et contre la spirale des représailles sans fin. Jésus a tenu à insister sur cet aspect particulier du témoignage chrétien (Mt 5, 4647). Les agents d’évangélisation doivent donc être d’abord et avant tout des artisans du pardon, des spécialistes de la réconciliation, des experts de la miséricorde. C’est ainsi que nous pouvons aider nos frères et sœurs à passer sur l’autre rive, en leur révélant le secret de notre force, de notre espérance, de notre joie qui ont leur source en Dieu, parce qu’elles sont fondées sur la certitude qu’il est dans la barque avec nous. Comme il l’a fait avec les apôtres lors de la multiplication des pains, c’est donc à nous que le Seigneur confie ses dons afin que nous allions les distribuer partout, en proclamant sa parole qui assure : « Voici venir des jours où j’accomplirai la promesse de bonheur que j’ai adressée à la maison d’Israël et à la maison de Juda » (Jr 33, 14). Dans les textes liturgiques de ce dimanche, nous pouvons découvrir certaines caractéristiques de ce salut de Dieu annoncé, qui se présentent comme autant de points de repères pour nous guider dans notre mission. D’abord, le bonheur promis par Dieu est annoncé en termes de justice. L’Avent, c’est le temps pour préparer nos cœurs afin de pouvoir accueillir le Sauveur, c’est-à-dire le seul Juste et le seul Juge capable de réserver à chacun le sort qu’il mérite. Ici comme ailleurs, tant d’hommes et de femmes ont soif de respect, de justice, d’équité, sans trouver à l’horizon des signes positifs. À ceux-là, il vient faire don de sa justice (cf. Jr 33, 15). Il vient féconder nos 192
histoires personnelles et collectives, nos espoirs déçus et nos souhaits stériles. Et il nous envoie annoncer surtout à ceux qui sont opprimés par les forts de ce monde comme à ceux qui ploient sous le poids de leurs propres péchés : « Juda sera délivré, Jérusalem habitera en sécurité, et voici le nom qu’on lui donnera : ‘‘Le Seigneur-est-notreJustice’’ » (Jr 33, 16). Oui, Dieu est Justice ! Voilà pourquoi, nous, chrétiens, nous sommes appelés à être dans le monde les artisans d’une paix fondée sur la justice. Le salut de Dieu attendu a également le goût de l’amour. En effet, en nous préparant pour célébrer le mystère de Noël, nous nous réapproprions le cheminement du peuple de Dieu pour accueillir le Fils venu nous révéler que Dieu n’est pas seulement Justice mais qu’il est aussi et par-dessus tout Amour (cf. 1Jn 4, 8). Partout, même et surtout là où règnent la violence, la haine, l’injustice et la persécution, les chrétiens sont appelés à témoigner de ce Dieu qui est Amour. En encourageant les prêtres, les personnes consacrées et les laïcs qui, dans ce pays, vivent parfois jusqu’à l’héroïsme les vertus chrétiennes, je reconnais que la distance qui nous sépare de l’idéal si exigeant du témoignage chrétien, est parfois grande. Voilà pourquoi je fais miennes sous forme de prière ces paroles de saint Paul : « Frères, que le Seigneur vous donne, entre vous, et à l’égard de tous les hommes, un amour de plus en plus intense et débordant » (1Th 3, 12). A cet égard, le témoignage des païens sur les chrétiens de l’Eglise primitive doit rester présent à notre horizon comme un phare : « Voyez comme ils s’aiment, ils s’aiment vraiment » (Tertullien, Apologétique, 39, 7). Enfin, le salut de Dieu annoncé revêt le caractère d’une puissance invincible qui l’emportera sur tout. En effet, après avoir annoncé à ses disciples les signes terribles qui précéderont sa venue, Jésus conclut : « Quand ces événements commenceront, redressez-vous et relevez la tête, car votre rédemption approche » (Lc 21, 18). Et si saint Paul parle d’un ‘‘amour de plus en plus intense et débordant’’, c’est que le témoignage chrétien doit refléter cette force irrésistible dont il est question dans l’Évangile. C’est donc aussi au sein de bouleversements inouïs que Jésus veut montrer sa grande puissance, son inégalable gloire (cf. Lc 21, 27) et la puissance de l’amour qui ne recule devant rien, ni devant les cieux ébranlés, ni devant la terre en feu, ni devant la mer en furie. Dieu est plus puissant et plus fort que tout. Cette conviction donne au croyant sérénité, courage et la force de persévérer 193
dans le bien face aux pires adversités. Même lorsque les forces du mal se déchaînent, les chrétiens doivent répondre présents, la tête relevée, prêts à recevoir des coups dans cette bataille où Dieu aura le dernier mot. Et ce mot sera d’amour et de paix ! A tous ceux qui utilisent injustement les armes de ce monde, je lance un appel : déposez ces instruments de mort ; armez-vous plutôt de la justice, de l’amour et de la miséricorde, vrais gages de paix. Disciples du Christ, prêtres, religieux, religieuses ou laïcs engagés en ce pays au nom si suggestif, situé au cœur de l’Afrique et qui est appelé à découvrir le Seigneur comme le véritable Centre de tout ce qui est bon, votre vocation est d’incarner le cœur de Dieu parmi vos concitoyens. Daigne le Seigneur nous établir tous « fermement dans une sainteté sans reproche devant Dieu notre Père, pour le jour où notre Seigneur viendra avec tous les saints » (1Th 3, 13). Réconciliation, pardon, amour et paix ! Amen.
194
12.
DISCOURS LORS DE LA VEILLEE DE PRIERE
AVEC LES JEUNES72
12.1.1
PISTES DE COMPREHENSION DU DISCOURS
12.1.1.1 Piste n. 1 : Résister comme un bananier En répondant aux jeunes qui ont présenté leurs difficultés pour leurs conditions actuelles, le Saint Père explique l’importance de la capacité de résistance pour les jeunes, parce qu’ils représentent le futur du pays et le potentiel pour la nouvelle vie du peuple. Le Pape s’appuie sur l’image puissante du bananier proposée par le jeune garçon qui lui a souhaité la bienvenue : le bananier reste sur son lieu, donne la vie et résiste, pour se régénérer encore et encore.
12.1.1.2 Piste n. 2 : La méthode de résistance pour vaincre. Pape François présente aussi aux jeunes une méthode pour pratiquer la résistance qui passe par trois éléments : 1) La prière : c’est la force que nous fait participer à la puissance de Dieu. 2) Le travail pour la paix : il ne suffit pas d’attendre la paix, il est nécessaire de faire des actions concrètes pour sa réalisation, pour faciliter la réconciliation. 3) Le pardon : il n’est pas possible de travailler pour la paix si on ne pardonne pas ceux qui nous ont fait du mal. Le Pape incite les jeunes à répéter l’expression : « Pas de haine, beaucoup de pardon ».
72
Ce discours du Pape était spontané, c’est-à-dire, il parlait sans support écrit.
195
Ces trois éléments rendent les personnes plus fortes parce que ceux qui prient, travaillent pour la paix et pardonnent sont vainqueurs en amour. Pour être vainqueurs on doit aimer. Avec l’amour on vaincra toujours et on réalisera la paix.
12.2 DISCOURS INTEGRAL LORS DU LANCEMENT DE LA VEILLÉE DE PRIÈRE AVEC LES JEUNES Chers jeunes, Je vous salue avec toute mon affection. Votre ami, qui a parlé au nom de tous, a dit que votre symbole est le bananier, parce que le bananier est un symbole de vie : il grandit toujours, il se reproduit toujours, il donne toujours des fruits de grande énergie alimentaire. Le bananier est aussi résistant. Je pense que cela dit clairement la route qui vous est proposée en ce moment difficile de guerre, de haine, de divisions : la route de la résistance. Votre ami disait que certains d’entre vous veulent s’en aller. Fuir les défis de la vie n’est jamais une solution ! Il est nécessaire de résister, avoir le courage de la résistance, de la lutte pour le bien ! Celui qui fuit n’a pas le courage de donner la vie. Le bananier donne la vie et continue à se reproduire et à donner de plus en plus la vie, parce qu’il résiste, parce qu’il reste, parce qu’il est là. Certains d’entre vous me poseront la question : « Mais, Père, que pouvons-nous faire ? Comment fait-on pour résister ?» Avant tout, la prière. La prière est puissante ! La prière vainc le mal ! La prière vous rapproche de Dieu qui est le Tout-puissant. Je vous pose une question : est-ce que vous priez ? Je n’entends pas… [les jeunes : Oui !] Ne l’oubliez pas ! Deuxièmement : travailler pour la paix. Et la paix n’est pas un document qu’on signe et qui reste là. La paix se fait tous les jours ! La paix est un travail artisanal, elle se fait avec les mains, elle se fait avec sa vie. Mais quelqu’un peut me dire : « Dites-moi, Père, comment puis-je faire, moi, l’artisan de la paix ? » Premièrement : ne jamais 196
haïr. Et si on te fait du mal, cherche à pardonner. Pas de haine ! Beaucoup de pardon ! Disons-le ensemble : « Pas de haine, beaucoup de pardon » [tous répètent en Sango]. Et si tu n’as pas de haine dans ton cœur, si tu pardonnes, tu seras vainqueur. Parce que tu seras vainqueur de la bataille la plus difficile de la vie, vainqueur en amour. Et à travers l’amour vient la paix. Voulez-vous être vaincus ou vainqueurs dans la vie ? Qu’est-ce que vous voulez ? [ les jeunes crient : Nous voulons être ceux qui sont vainqueurs !] Et l’on est vainqueur seulement sur la route de l’amour. La route de l’amour. Et peut-on aimer l’ennemi ? Oui. Peut-on pardonner à celui qui t’a fait du mal ? Oui. Ainsi, avec l’amour et avec le pardon, vous serez vainqueurs. Avec l’amour vous serez vainqueurs dans la vie et vous donnerez toujours la vie. L’amour ne fera jamais de vous des vaincus. Maintenant je vous souhaite le meilleur, pour vous. Pensez au bananier. Pensez à la résistance devant les difficultés. Fuir, s’en aller loin, n’est pas une solution. Vous devez être courageux. Vous avez compris ce que signifie être courageux ? Courageux en pardon, courageux en amour, courageux pour faire la paix. D’accord ? [les jeunes répondent « Oui » en Sango] Nous le disons ensemble ? « Courageux en amour, en pardon et pour faire la paix » [les jeunes répètent en Sango]. Chers jeunes Centrafricains, je suis très content de vous rencontrer. Aujourd’hui nous avons ouvert cette Porte. Cela signifie la Porte de la Miséricorde de Dieu. Faites confiance à Dieu. Parce qu’il est miséricorde, il est amour, il est capable de nous donner la paix. C’est pourquoi je vous ai dit au début de prier : il est nécessaire de prier pour résister, pour aimer, pour ne pas haïr, pour être des artisans de paix. Merci beaucoup de votre présence. Maintenant je vais aller à l’intérieur pour entendre les confessions de certains d’entre vous… Etes-vous, dans le cœur, disposés à résister ? Oui ou non ? [Les jeunes : Oui !] Etes-vous, dans votre cœur, disposés à lutter pour la paix ? [Oui !] Etes-vous, dans votre cœur, disposés à la réconciliation ? [Oui !] Etes-vous, dans votre cœur, disposés à aimer cette belle patrie ? [Oui] Et je reviens au départ : Etes-vous, dans votre cœur, 197
disposés à prier ? [Oui !] Je vous demande aussi de prier pour moi, pour que je puisse être un bon Évêque, pour que je puisse être un bon Pape. Me promettez-vous de prier pour moi ? [Oui !] Et maintenant je vais vous donner la Bénédiction, à vous et à vos familles. Une Bénédiction en demandant au Seigneur de vous donner l’amour et la paix. Bonne soirée, et priez pour moi !
198
13. DISCOURS DU PAPE FRANÇOIS LORS DE SA RENCONTRE AVEC LA COMMUNAUTE MUSULMANE
13.1 PISTES
DE COMPREHENSION DU DISCOURS DU
FRANÇOIS
LORS
DE
SA
RENCONTRE
AVEC
PAPE LA
COMMUNAUTE MUSULMANE
13.1.1
Piste n. 1 : Frères en paix.
La visite à la communauté musulmane est une étape inéliminable du tour du Saint Père, car les musulmans sont considérés par Pape François comme frères. Nous tous qui croyons en Dieu, nous sommes membres d’une même famille. On peut distinguer les frères par leur comportement : ils s’aident l’un l’autre, ils se défendent réciproquement sens distinction d’ethnie, de religion, position politique. Se reconnaitre comme frères par la croyance en Dieu, est une garantie de paix ; car la religion ne justifie pas la haine, la violence, la vengeance. Le peuple Centrafricaine peut devenir vivant de fraternité entre chrétiens et musulmans par les nombreux cas d’accueil et défense réciproque en ce moment de crises. Tous ceux qui croient en Dieu sont personnes de paix.
13.1.2
Piste n. 2 : faire de la Centrafrique « une maison
accueillante »
Quand les frères se comportent comme tels, la Centrafrique deviendra « une maison accueillante » pour toutes personnes ; et le développement du pays deviendra possible. Pour atteindre ce but tous ceux qui croient en Dieu, sans distinction de religion, sont appelés à accepter l’invitation du Saint Père : prier le Dieu pour la paix, et travailler activement pour la réconciliation. 199
13.2
DISCOURS INTEGRAL DU PAPE FRANÇOIS LORS
DE SA RENCONTRE AVEC LA COMMUNAUTE MUSULMANE
Chers frères, C’est une grande joie pour moi de vous rencontrer et de vous exprimer ma gratitude pour votre accueil chaleureux. Je remercie particulièrement l’Imam Tidiani Moussa Naibi, pour ses aimables paroles de bienvenue. Ma visite pastorale en République Centrafricaine ne serait pas complète si elle ne comprenait pas aussi cette rencontre avec la communauté musulmane. Chrétiens et musulmans nous sommes frères. Nous devons donc nous considérer comme tels, nous comporter comme tels. Nous savons bien que les derniers événements et les violences qui ont secoué votre pays n’étaient pas fondés sur des motifs proprement religieux. Celui qui dit croire en Dieu doit être aussi un homme, une femme, de paix. Chrétiens, musulmans et membres des religions traditionnelles ont vécu pacifiquement ensemble pendant de nombreuses années. Nous devons donc demeurer unis pour que cesse toute action qui, de part et d’autre, défigure le Visage de Dieu et a finalement pour but de défendre par tous les moyens des intérêts particuliers, au détriment du bien commun. Ensemble, disons non à la haine, non à la vengeance, non à la violence, en particulier à celle qui est perpétrée au nom d’une religion ou de Dieu. Dieu est paix, Dieu salam. En ces temps dramatiques, les responsables religieux chrétiens et musulmans ont voulu se hisser à la hauteur des défis du moment. Ils ont joué un rôle important pour rétablir l’harmonie et la fraternité entre tous. Je voudrais les assurer de ma gratitude et de mon estime. Et nous pouvons aussi nous rappeler les nombreux gestes de solidarité que chrétiens et musulmans ont eu à l’égard de leurs compatriotes d’une autre confession religieuse, en les accueillant et en les défendant au cours de cette dernière crise, dans votre pays, mais aussi en d’autres parties du monde. On ne peut que souhaiter que les prochaines consultations 200
nationales donnent au pays des Responsables qui sachent unir les Centrafricains, et deviennent ainsi des symboles de l’unité de la nation plutôt que les représentants d’une faction. Je vous encourage vivement à faire de votre pays une maison accueillante pour tous ses enfants, sans distinction d’ethnie, d’appartenance politique ou de confession religieuse. La République Centrafricaine, située au cœur de l’Afrique, grâce au concours de tous ses enfants, pourra alors donner une impulsion en ce sens à tout le continent. Elle pourra l’influencer positivement et aider à éteindre les foyers de tension qui y sont présents et qui empêchent les Africains de bénéficier de ce développement qu’ils méritent et auquel ils ont droit. Chers amis, chers frères, je vous invite à prier et à travailler pour la réconciliation, la fraternité et la solidarité entre tous, sans oublier les personnes qui ont le plus souffert de ces événements. Que Dieu vous bénisse et vous protège ! Salam alaykoum !
201
14. HOMELIE DU PAPE FRANÇOIS LORS DE LA MESSE AU STADE 20.000 (VINGT MILLE) PLACES DE BANGUI 14.1
14.1.1
PISTES DE COMPREHENSION DE L’HOMELIE DU PAPE LORS DE LA MESSE AU STAGE 20.000 PLACES DE BANGUI Piste n. 1 : « l’autre rive » au ciel et sur la terre
L’homélie du Pape François au stade s’ouvre avec un message de joie : le Seigneur nous offre une vie nouvelle, et nous invite à passer « à l’autre rive ». Dans le message du Saint Père « l’autre rive » a deux dimensions fondamentales : la dimension du salut éternel et la dimension de la vie terrestre. L’autre rive est pour les chrétiens un but spirituel de vie après la mort, un espoir de salut et de vie éternelle qui ne se réalise pas dans ce monde mais au ciel. Ce but spirituel de vie éternelle se réalise sur la terre cependant en accueillant la proposition d’Evangile avec enthousiasme et dynamisme, c’est-à-dire en persévérant dans la foi et en mettant en pratique l’amour. Ce sont les deux actions qui sont demandées à l’homme.
14.1.2
Piste n. 2 : Devenir juste
Le Pape nous donne une indication pour rejoindre l’autre rive : persévérer dans la foi. Si nous persévérons nos vies seront transformées par l’œuvre de Dieu. Celui qui croit du fond du cœur devient juste. Être juste est une œuvre de la grâce divine sur nous ; 203
nous sommes appelés à ouvrir nos cœurs pour la recevoir. Cette grâce nous rendra capable de gestes de solidarité, d’accueil, de générosité réciproque. Nous ne sommes pas capables tout seul d’accomplir les gestes de justice. Mais si nous avons la foi, si nous laissons que Jésus nous prend par la main et nous conduit à l’autre rive, nous serons aptes à des actions courageuses. L’ouverture de la L’Année Jubilaire de la Miséricorde à Bangui marque le début d’un chemin nouveau, une étape fondamentale pour le chrétiens Centrafricains qui sont maintenant appelés à traverser courageusement l’eau profonde pour construire une société juste, un pays accueillant. Il est temps de demander pardon pour les fois que nous n’avons pas su obéir à la volonté de Dieu, pour les fois que nous n’avons pas eu assez la foi et d’avancer sur le chemin vers l’autre rive.
14.1.3
Piste n.3 : « Artisans du renouveau ».
Chacun dans son propre rôle, peut devenir protagoniste du processus de renouveau du Pays qui est basé sur l’annonciation et le témoignage de l’enthousiasme de suivre Christ. Le Saint Père nous invite à réfléchir sur la définition de chrétiens comme des « artisans du renouveau humain et spirituel » : être « artisan » veut dire qu’on doit activement travailler pour rendre nouvelle notre réalité quotidienne. L’Année de la Miséricorde est un moment particulière pour réaliser ce renouveau. Le Saint Père nous propose une piste pour parvenir à ce renouveau. Nous devons nous demander : quelles parties de la Bonne Nouvelle avons-nous déjà accepté ? Quelles parties devons-nous mettre en pratique ? Ainsi, pourrons-nous comprendre ce que le Seigneur nous demande pour le suivre. Nous devons nous demander : « qu’est-ce que nous dit la Parole qui nous est annoncée ? Comment nous répondons ? Comment nous pouvons l’appliquer dans la vie quotidienne pour le témoigner ? ». 204
Les « artisans du renouveau » sont appelés à devenir messagers de la joie et de l’espoir, et de porter ce message avec enthousiasme.
14.2
HOMELIE INTEGRAL DU PAPE FRANÇOIS LORS MESSE AU STADE 20.000 (VINGT MILLE) PLACES DE
DE LA BANGUI
Nous pouvons être étonnés, entendant la première lecture, de l’enthousiasme et du dynamisme missionnaires qui habitent l’Apôtre Paul. « Comme il est beau de voir courir les messagers de la Bonne Nouvelle » (Rm 10, 15) ! C’est pour nous un appel à rendre grâce pour le don de la foi que nous avons reçu de ces messagers qui nous l’ont transmis. C’est aussi un appel à nous émerveiller devant l’œuvre missionnaire qui a porté pour la première fois - il n’y a pas si longtemps - la joie de l’Évangile sur cette terre bien aimée de Centrafrique. Il est bon, surtout lorsque les temps sont difficiles, lorsque les épreuves et les souffrances ne manquent pas, lorsque l’avenir est incertain et que l’on se sent fatigué, craignant de ne plus y arriver, il est bon de se réunir autour du Seigneur, ainsi que nous le faisons aujourd’hui, pour se réjouir de sa présence, de la vie nouvelle et du salut qu’il nous propose, comme une autre rive vers laquelle nous devons tendre. Cette autre rive c’est, bien sûr, la vie éternelle, le ciel où nous sommes attendus. Ce regard porté vers le monde à venir a toujours soutenu le courage des chrétiens, des plus pauvres, des plus petits, dans leur pèlerinage terrestre. Cette vie éternelle n’est pas une illusion, elle n’est pas une fuite du monde ; elle est une puissante réalité qui nous appelle et qui nous engage à la persévérance dans la foi et dans l’amour. Mais l’autre rive, plus immédiate, que nous cherchons à rejoindre, ce salut procuré par la foi et dont parle Saint Paul, est une réalité qui transforme déjà notre vie présente et le monde dans lequel nous vivons : « Celui qui croit du fond du cœur devient juste » (Rm 10,10). Il accueille la vie même du Christ qui le rend capable d’aimer Dieu et 205
d’aimer ses frères d’une façon nouvelle, au point de faire naître un monde renouvelé par l’amour. Rendons grâce au Seigneur pour sa présence et pour la force qu’il nous donne dans le quotidien de nos vies lorsque nous sommes confrontés à la souffrance physique ou morale, à une peine, à un deuil ; pour les actes de solidarité et de générosité dont il nous rend capables ; pour la joie et l’amour qu’il fait briller dans nos familles, dans nos communautés, malgré, parfois, le dénuement, la violence qui nous entoure ou la crainte du lendemain ; pour l’audace qu’il met en nos âmes de vouloir créer des liens d’amitié, de dialoguer avec celui qui ne nous ressemble pas, de pardonner à celui qui nous a fait du mal, de nous engager dans la construction d’une société plus juste et plus fraternelle où personne n’est abandonné. En tout cela, le Christ ressuscité nous prend par la main, et nous entraîne à sa suite. Et je veux rendre grâce avec vous au Seigneur de miséricorde pour tout ce qu’il vous a donné d’accomplir de beau, de généreux, de courageux, dans vos familles et dans vos communautés, lors des évènements que connaît votre pays depuis plusieurs années. Pourtant, il est vrai aussi que nous ne sommes pas encore parvenus au terme, nous sommes comme au milieu du fleuve, et il nous faut décider courageusement, dans un engagement missionnaire renouvelé, de passer sur l’autre rive. Tout baptisé doit sans cesse rompre avec ce qu’il y a encore en lui de l’homme ancien, de l’homme pécheur, toujours prêt à se réveiller à la suggestion du démon – et combien il est agissant en notre monde et en ces temps de conflits, de haine et de guerre –, pour l’entrainer à l’égoïsme, au repli sur soi et à la méfiance, à la violence et à l’instinct de destruction, à la vengeance, à l’abandon et à l’exploitation des plus faibles… Nous savons aussi combien nos communautés chrétiennes, appelées à la sainteté, ont encore de chemin à parcourir. Certainement nous avons tous à demander pardon au Seigneur pour trop de résistances et de lenteur à rendre témoignage de l’Évangile. Que l’Année Jubilaire de la Miséricorde, qui vient de commencer dans votre pays, en soit l’occasion. Et vous, chers Centrafricains, vous devez surtout regarder vers l’avenir, et, forts du chemin déjà parcouru, décider résolument de franchir une nouvelle étape dans l’histoire chrétienne de votre pays, vous élancer vers de nouveaux horizons, 206
avancer plus au large, en eau profonde. L’Apôtre André, avec son frère Pierre, n’ont pas hésité un seul instant à tout laisser sur place à l’appel de Jésus, pour le suivre : « Aussitôt, laissant leurs filets, ils le suivirent » (Mt 4, 22). Nous sommes émerveillés, là encore, par tant d’enthousiasme chez les Apôtres, tellement le Christ les attire à lui, tellement ils perçoivent qu’ils peuvent tout entreprendre et tout oser avec lui. Alors, chacun dans son cœur peut se poser la question si importante de son lien personnel avec Jésus, examiner ce qu’il a déjà accepté – ou encore refusé – pour répondre à son appel afin de le suivre de plus près. Le cri des messagers retentit plus que jamais à nos oreilles, alors même que les temps sont difficiles ; ce cri qui « retentit par toute la terre, et […] jusqu’au bout du monde » (Rm 10,18). Et il retentit ici, aujourd’hui, en cette terre de Centrafrique ; il retentit dans nos cœurs, dans nos familles, dans nos paroisses, partout où nous vivons, et il nous invite à la persévérance dans l’enthousiasme de la mission, une mission qui a besoin de nouveaux messagers, encore plus nombreux, encore plus donnés, encore plus joyeux, encore plus saints. Et nous sommes tous appelés à être, chacun, ce messager que notre frère, quelle que soit son ethnie, sa religion, sa culture, attend, souvent sans le savoir. Comment, en effet, ce frère croira-t-il au Christ, se demande saint Paul, si la Parole n’est pas entendue ni proclamée ? Nous aussi, à l’exemple de l’Apôtre, nous devons être remplis d’espérance et d’enthousiasme pour l’avenir. L’autre rive est à portée de main, et Jésus traverse le fleuve avec nous. Il est ressuscité des morts ; dès lors les épreuves et les souffrances que nous vivons sont toujours des occasions qui ouvrent à un avenir nouveau si nous acceptons de nous attacher à sa personne. Chrétiens de Centrafrique, chacun de vous est appelé à être, par la persévérance de sa foi et par son engagement missionnaire, artisan du renouveau humain et spirituel de votre pays. Je souligne, artisan du renouveau humain et spirituel. Que la Vierge Marie, qui après avoir partagé les souffrances de la passion partage maintenant la joie parfaite avec son Fils, vous protège et vous encourage sur ce chemin d’espérance. Amen. 207
QUATRIEME PARTIE : LES DISCOURS DES AUTORITES RELIGIEUSES ET CIVILES ADRESSES AU SAINT PERE
16
LES DISCOURS RELIGIEUSES
DES
AUTORITES
14.3 DISCOURS DE SON EXCELLENCE MONSEIGNEUR DIEUDONNE NZAPALAINGA ARCHEVEQUE DE BANGUI, AU PAPE LORS DE LA MESSE AVEC LES PRETRES, RELIGIEUX, RELIGIEUSES, CATECHISTES ET LES JEUNES A LA CATHEDRALE NOTRE DAME DE L’IMMACULEE CONCEPTION DE BANGUI.
Refrain chanté : Qu’ils sont beaux sur le sol centrafricain les pieds du Pape François, messager de Dieu, qui annonce la Bonne Nouvelle de la Miséricorde de Dieu et de la Réconciliation.
Très-Saint-Père, Nzoni gango na Be-Africa – Benvenuto nella Reppublica Centrafricana – Bienvenue en République Centrafricaine. 211
Nous nous réjouissons de la visite pastorale que vous effectuez en ce moment en Centrafrique. Elle est une très bonne nouvelle, non seulement pour nous, fidèles catholiques, mais aussi pour tout le peuple centrafricain. Dès le début de votre pontificat, vous vous êtes fait l’écho de nos souffrances et de notre Espérance par votre prière et votre sollicitude pastorale. Au-delà de l’insécurité qui sévit encore dans notre pays, vous êtes venu chez nous. Vous avez posé un geste fort historique en ouvrant par anticipation la première Porte Sainte du Jubilé extraordinaire de la Miséricorde à la Cathédrale Notre Dame de l’Immaculée Conception de Bangui. Nous vous remercions infiniment pour ce privilège que nous considérons comme une invitation à un renouveau spirituel pour devenir des témoins authentiques de la Miséricorde. La crise militaro-politique montre combien le chemin de la vie en Centrafrique est perturbé, et le frère ou la sœur maltraité. Dans notre message du 10 janvier 2015, nous, Évêques de Centrafrique avons signalé trois plaies qui nous font souffrir : la haine, le non-respect de la vie humaine et le syncrétisme. Dans cette lettre pastorale, nous avons écrit : « L’agir de certains croyants ne correspond plus à leur foi. Au nom d’une prétendue quête de puissance et d’invulnérabilité, on n’hésite plus à allier des pratiques ancestrales non évangéliques au culte du Dieu d’amour…. Ce syncrétisme obscurcit la vraie foi. Il nous éloigne du vrai Dieu de Jésus-Christ et du chemin de la vie »73. Il se pose indubitablement la question de la cohérence de notre foi par le fossé qui ne cesse de se créer entre la foi professée et le vécu de cette même foi. D’ailleurs, face à l’ampleur des exactions subies et aux perspectives incertaines de sortie de crise, beaucoup doutent de l’existence de Dieu et trouvent difficile de témoigner leur attachement au Christ sans faillir à la tentation de se faire justice. En dépit de nos limites, de nos fragilités, de nos faiblesses et de nos égarements : « nous sommes édifiés par le témoignage véridique rendu par beaucoup de fidèles. Par la constance dans la fidélité à 73
Conférence Episcopale Centrafricaine, « Choisis donc la vie » (Dt 30,19), Bangui 2015, 6.
212
l’appel du Christ, certains ont mis en danger leur vie pour accueillir et protéger leurs frères et sœurs sans considération de religion. Nous avons fait une plus grande expérience de solidarité en dépit de la précarité qui affecte toutes les familles. Les uns n’ont pas hésité à ouvrir leurs portes à ceux qui fuyaient les exactions. Nos églises et nos institutions sont devenues des sanctuaires de refuge pour de nombreuses personnes qui se sentaient en insécurité. Cet accueil n’était pas limité aux chrétiens, mais étendu à toute personne en danger de mort. Dans un élan d’acceptation de l’autre et de renforcement des relations interreligieuses, nous avons su développer une franche collaboration avec les autres leaders religieux »74. Dans la modicité de nos moyens et dans l’indigence qui nous affecte, et grâce aussi à la générosité et aux sacrifices de nombreux bienfaiteurs, nous avons su déployer avec détermination et dans la fidélité à notre foi, les œuvres de Miséricorde corporelles, en donnant à manger aux affamés, en abreuvant les assoiffés, en vêtissant ceux qui sont nus, en accueillant les étrangers, en assistant les malades et en ensevelissant les morts. Les efforts déployés sont certes importants, mais beaucoup reste encore à faire. Au regard de la crise et dans le contexte des œuvres de la Miséricorde spirituelles, nous devons intensifier le suivi et la formation de nos fidèles, notamment par une pastorale orientée vers les jeunes et les familles qui sont les premières victimes des violences et qui sont déstabilisées ou détruites. Le bon témoignage évangélique que nous relevons est signe d’Espérance au cœur des tempêtes qui nous ballotent dans tous les sens. En ouvrant la première Porte de l’Année de la Miséricorde chez nous, vous nous avez fait un don immense. C’est la Porte de l’Espérance et du pardon, la Porte de la Réconciliation et de nouvelle vie. Certes, le Dieu de Jésus Christ-Christ respecte la liberté humaine (cf. Ap 3,20). Il ne s’impose à personne. Par conséquent il ne forcera jamais la porte de nos cœurs. Aussi en enfants de Dieu, devons-nous saisir cette occasion unique pour reconnaître nos multiples péchés « en pensée, en paroles, par action et par omission ». 74
Conseil permanent, Visite pastorale en République Centrafricaine, CECA, 24 octobre 2014.
213
En reconnaissant en toute humilité nos égarements et nos erreurs, ayons le courage de nous engager résolument à la rencontre du Dieu miséricordieux dans le sacrement de la Réconciliation. Très Saint-Père, au début de la veillée pénitentielle, vous administrerez en personne le sacrement de la Miséricorde à des pénitents. Ainsi, vous nous exhortez à porter la Miséricorde de Dieu à tous. Nous restons confiants au Christ qui nous fait passer « sur l’autre rive » en dépit de toutes nos épreuves (Lc 8,22). Par vous, le Christ passe en Centrafrique « en faisant le bien et en guérissant tous ceux qui sont tombés sous le pouvoir du diable » (Ac 10,38). C’est pourquoi nous voyons dans votre visite pastorale un grand signe de réconfort pour ceux qui faiblissent et un inlassable encouragement à laisser le chemin de mort et à aller sur l’autre rive, en choisissant la vie. Ainsi, nous irons jusqu’au bout de notre témoignage évangélique pour que la paix règne dans nos cœurs par la Miséricorde et la Réconciliation. Très Saint-Père, la communauté paroissiale de la Cathédrale de Bangui, en souvenir de cette célébration eucharistique, vous offre une crosse en Ébène, du bois solide de notre pays. Par ce cadeau symbolique, nous vous accueillons comme Pasteur qui vient nous affermir dans la foi et nous conduire sur l’autre rive. Merci, Très Saint-Père, pour l’indéfectible soutien que vous ne cessez de nous accorder. Alors que nous nous confions à votre bénédiction, nous vous assurons de nos prières par l’intercession de Marie, notre Mère.
Donné à Bangui, le 29 novembre 2015
Mgr Dieudonné NZAPALAINGA Archevêque de Bangui Président de la CECA 214
14.4 DISCOURS DE MONSEINGEUR DIEUDONNE NZAPALAINGA ARCHEVEQUE DE BANGUI, AU PAPE LORS DE LA MESSE AU STADE 20.000 PLACES DE BANGUI
Refrain chanté : Qu’ils sont beaux sur le sol centrafricain les pieds du Pape François, messager de Dieu, qui annonce la Bonne Nouvelle de la Miséricorde de Dieu et de la Réconciliation.
Très Saint-Père, À la fin de la célébration eucharistique et avant de recevoir votre bénédiction apostolique, je prends la parole au nom du peuple centrafricain et de l’Association des Conférences Épiscopales de la Région de l’Afrique Centrale pour vous exprimer toutes nos gratitudes. Nous pouvons nous réjouir et laisser déborder notre allégresse. Car le Seigneur a fait pour nous des merveilles, Saint est son Nom (cf. Lc 1,49). Les jours que vous avez passés avec nous sont inoubliables. Ils sont indubitablement inscrits dans notre cœur ainsi que dans l’histoire de 215
notre pays. Votre visite apostolique marque certainement le début d’une nouvelle ère pour tout le peuple centrafricain. En dépit de la crise militaro-politique avec ses corollaires de tueries, de destruction et de vandalisme, votre sollicitude pastorale est pour nous un signe d’Espérance. Nous vous sommes à jamais reconnaissants pour cette proximité. Aussi vrai que le Seigneur penche son regard vers nous, l’avenir de notre pays dépend non seulement du Dieu riche en Miséricorde, mais aussi des choix courageux que nous faisons. Comme le rappelle le livre du Deutéronome (Dt 30,19), la vie est à notre portée. Il suffit de la saisir. Choisir donc la vie, c’est poser des actes audacieux pour la protection de la vie et la promotion du vivre-ensemble dans un environnement respectueux de la dignité humaine. En effet le destin de notre pays est entre nos mains. Il est plus qu’urgent que nous nous posons les vraies questions quant à notre avenir. Saurons-nous assumer avec grandeur et responsabilité notre destin commun ? Tel est le grand défi que le peuple centrafricain est appelé à relever dans la prière et la docilité à l’Esprit Saint. Des initiatives de sortie de crise ne manquent pas. Le dernier Forum national de Bangui (tenu du 4 au 11 mai 2015) en est une et s’inscrit dans cette logique. Il nous a fait rêver d’un avenir meilleur par la perspicacité de ses recommandations, le pacte républicain, la signature des accords de cessation d’hostilités par les groupes armés, la mise en place d’un comité de suivi. Toutefois, force est de constater que ces mécanismes de sortie et de résolution de crise n’ont pas été rigoureusement suivis. Il nous manque, hélas, la force, le courage et surtout la volonté du respect des paroles données et des engagements pris. Pourtant ces mécanismes devaient accompagner le retour progressif à la constitutionalité et à l’État de droit. Jusqu’à quand allons-nous continuer à faire parler les armes et couler le sang de nos frères et sœurs ? Jusqu’à quand l’impunité va-t-elle prévaloir et les crimes servir de gage d’ascension et de promotion sociale ? Le relèvement économique de notre pays ne se fera ni dans la violence ni dans la destruction. Il convient impérativement de privilégier la paix comme vous le rappeliez lors de l’Angelus du dimanche 4 janvier 2015 : « Il n’y a pas d’avenir sans propositions et projets de paix ! Il n’y a 216
pas d’avenir sans paix » ! La paix se construit. Aussi chaque Centrafricaine et Centrafricain doivent s’inscrire dans cette dynamique et se faire artisans de paix sans suivre les désirs égoïstes de ceux qui tirent indûment profit de la crise, notamment les groupes armés et tous ceux et celles qui les soutiennent. En nous interpelant par ce geste fort et historique d’ouvrir la première porte sainte du Jubilé de la Miséricorde en Centrafrique, nous fondons l’espoir que les valeurs de Miséricorde, de justice, de vérité et de paix nous mèneront sur le chemin de la Réconciliation, du pardon et de la reconstruction de notre pays dans l’harmonie, la dignité et le respect de toute personne. Avec un profond sentiment de gratitude pour votre sollicitude pastorale, nous vous renouvelons notre attachement au service de l’Église et de la proclamation de la Bonne Nouvelle. Devant vous, j’invite tous les centrafricains sans distinction d’ethnie et de religion, à s’engager à construire ensemble une Centrafrique fraternelle et prospère. Dans la perspective d’un renouveau fondé sur la pleine cohésion sociale, nous entretenons le rêve d’une nation prospère, libre et démocratique, unie et fraternelle. Dans cet esprit nous implorons votre bénédiction apostolique pour cette terre, notre terre centrafricaine qui vous est présentée. Que cette bénédiction se répande sur nos familles, nos communautés chrétiennes, nos diocèses, nos agents pastoraux, nos hommes politiques, nos jeunes, nos enfants, tous ceux qui souffrent, nos bienfaiteurs, tous les pèlerins… Très Saint-Père, l’État centrafricain vous offre deux tableaux réalisés avec nos richesses naturelles, à savoir le bois et les papillons. Que la Vierge Marie, Reine de la Paix, intercède pour notre pays. Et que Dieu bénisse à jamais la République centrafricaine et lui donne sa Paix ! Donné à Bangui, le 30 novembre 2015 Mgr Dieudonné NZAPALAINGA Archevêque de Bangui Président de la CECA 217
14.5 DISCOURS DU DOYEN DE LA FATEB LORS DE LA VISITE DU PAPE
218
14.6 DISCOURS DU PASTEUR NICOLAS GUEREKOYAME LORS DE LA VISITE DU PAPE A LA FATEB
219
220
14.7 DISCOURS DE BIENVENUE DE L’IMAM TIDIANI MOUSSA NAIBI, DE LA MOSQUEE CENTRALE DE BANGUI
«Sire, Au nom de la Communauté musulmane de Centrafrique et en mon nom propre, je vous souhaite très respectueusement à vous-même et à toute la délégation qui vous accompagne, la bienvenue à la Moquée Centrale de Bangui. Votre visite est un symbole que nous comprenons parfaitement. Mais je voudrais tout de suite vous rassurer. Non, les relations entre les frères et sœurs chrétiens et nous-mêmes sont tellement profondes, qu’aucune ne manœuvre tendant à les saper, ne pourraient aboutir. Les fauteurs de trouble pourraient retarder la réalisation de tel ou tel projet d'intérêt commun ou compromettre pour un temps telle ou telle activité, mais jamais in sha Allah, ils ne pourraient détruire les liens de fraternité qui unissent si solidement nos communautés. Oui, je vous le confirme, Sire, les Chrétiens et les Musulmans de ce pays sont condamnés à vivre ensemble et à s'aimer. Mais pour vivre ensemble et nous aimer, nous avons besoin de la solidarité du monde entier. Et c'est vrai que nous n'en avons pas manqué. Car c'est au titre de cette solidarité que nous avons reçu la mission des pays de la Communauté économique et monétaire de l'Afrique Centrale (CEMAC), celle de la Communauté économique des Etats de l'Afrique Centrale (CEEAC) celle de l'Union Africaine (UA), celle de la France, de l'Union Européenne et des Nations Unies. Nous n'ignorons pas et nous n'oublierons jamais que des dizaines de jeunes soldats de ces différents pays ont perdu leurs vies pour apporter la paix à notre peuple. A tous nous disons merci du fond du cœur. C'est également au nom de cette solidarité que nous avons accueilli ici même le Secrétaire général des Nations Unies et celui de l'Organisation de la Coopération islamique (OCI). Depuis, la solidarité de ces organisations ne nous ont pas fait défaut. A l'un et à l'autre nous disons un merci spécial. 221
Sire, La solidarité du monde à l'égard du peuple centrafricain se manifeste aujourd'hui à travers votre visite dans notre pays et votre présence à la Mosquée Centrale de Bangui. Nous tenons à vous en remercier très particulièrement. Par ses actions de solidarité et par votre visite, le monde extérieur nous montre qu'il nous observe et qu'il se préoccupe toujours de notre situation. En retour nous voudrions que vous rassuriez le monde. Non, le peuple centrafricain n'est pas un peuple voué aux conflits et aux violences. Non, la situation actuelle de notre pays n'est pas appelée à s'éterniser. C'est simplement un moment de notre histoire. Un moment douloureux certes, un moment regrettable même, mais un moment seulement. Et bientôt, très bientôt in sha Allah, nous recouvrerions notre paix et notre sécurité d'antan. Nous trouverons même une paix et une sécurité plus grandes et plus justes encore. L'espoir nous est en effet permis grâce aux multiples actions visant à ramener la paix, à encourager le partage du pouvoir, à organiser des élections libres et démocratiques, à créer les conditions pour une bonne gestion de l'État, que mènent avec courage et assiduité le Gouvernement de la Transition. Puisse Dieu l'Unique, l'Omnipotent, l'Omniscient emmener la paix en notre pays. Une paix égale, juste et fertile. Je vous remercie pour votre attention.»
222
15.
DISCOURS DE L’AUTORITE CIVILE
15.1 DISCOURS DE SON EXCELLENCE MADAME CATHERINE SAMBA PANZA, PRESIDENTE DE TRANSITION DE LA REPUBLIQUE CENTRAFRICAINE Très Saint-Père, Leurs éminences les cardinaux, évêques et dignitaires religieux de toutes les obédiences, Distingués membres du clergé catholique, des églises protestantes, des mosquées et de différents cultes, Distinguées personnalités du monde entier qui ont bien voulu se joindre à nous en cette occasion exceptionnelle, Mes chers compatriotes unis en ce jour mémorable dans notre diversité, Au regard des incertitudes qui ont, un temps, entouré la visite du pape en terre centrafricaine, sa présence effective parmi nous aujourd’hui est vécue comme une bénédiction du ciel. Cette présence effective du pape François à Bangui est également perçue comme une victoire. Une victoire de la foi sur la peur, sur l’incrédulité et une victoire de la compassion et de la solidarité de l’église universelle. Nous nous en réjouissons tous et gloire soit rendue à Dieu pour cela. 223
C’est pourquoi, ces 29 et 30 novembre 2015 sont des jours à marquer d’une pierre blanche dans l’histoire de notre pays. Car en ces jours historiques, nous sommes le cœur de l’Afrique, la fierté d’une région. Remplie de joie et d’allégresse, je souhaite très solennellement la bienvenue au pape François, ainsi qu’a toute sa délégation. « Nzoni gango na sesse ti be Afrika, Tobwa Francois ». Le peuple centrafricain se joint également à moi pour vous dire du fond du cœur « Singuila mingui » ainsi qu’à toutes les personnes qui ont effectué le déplacement à Bangui pour cet important événement. Très Saint-Père, Le contexte politique du moment, les menaces sécuritaires réelles ou amplifiées qui ont émaillé les préparatifs de votre visite, la résurgence ces derniers jours des mouvements extrémistes et du terrorisme avec une violence omniprésente, auraient pu vous décourager à prendre le risque de faire le déplacement de Bangui. Il n’en est rien. La leçon de courage et de détermination est ici exemplaire et devrait nous enseigner. Vous avez toujours manifesté votre solidarité aux victimes de la crise centrafricaine, en encourageant les hommes et les femmes de Centrafrique, toutes obédiences religieuses confondues, à rester mobilisés pour reconstruire la cohésion nationale. Aujourd’hui, Vous leur confirmez une fois de plus et aux yeux du monde entier que Vous êtes à leurs côtés dans la fraternité et l’amitié universelles entre les hommes. Vous avez surtout démontré une fois de plus que vous êtes le pape des pauvres, des meurtris et de tous ceux qui sont dans la détresse. Vous avez en effet choisi de visiter un pays détruit dans ses fondements par plusieurs décennies de crises à répétition, un pays qui vit des drames au quotidien. Vous avez décidé de venir témoigner votre compassion et votre solidarité à un peuple tenaillé par la haine et l’esprit de vengeance, déchiré par des conflits interminables mais qui, malgré tout, n’a pas totalement perdu sa foi et est toujours debout par la force de l’espoir.
224
Au nom de cette foi, je veux commencer par implorer, à travers vous, la miséricorde de Dieu tout puissant au seuil de cette visite que tous les Centrafricains sans distinction attendaient dans la ferveur et l’espérance. Votre présence nous apporte la lumière de la visitation divine qui vient illuminer et transfigurer nos cœurs dans la repentance.
Très Saint-Père, La République centrafricaine, notre pays, a été fondée par un homme d’Église, Barthélémy Boganda dont la vision, en tant que serviteur de Dieu et homme d’État était de placer l’homme et la femme créés à l’image de Dieu au cœur du développement du pays sans distinction ethnique, religieuse ou sociale. Cette vision de «Zo kwe zo» prône l’unité nationale, l’humanisme et le respect de l’être humain. Mais les filles et les fils du pays n’ont pas su gérer l’héritage spirituel, moral, politique et social de notre Père fondateur. Il s’est ensuivi une histoire tumultueuse caractérisée par des crises à répétition. Notre pays, n’a ainsi pas été épargné de vents dévastateurs qui ont semé la désunion et la méfiance jusqu’à la violence entre ceux qui appartiennent à un même socle, à une même nation. Des Centrafricains ont infligé des souffrances inqualifiables à d’autres Centrafricains. C’est pour cela qu’il revient aux filles et aux fils de ce pays de reconnaître leurs fautes et demander pardon, un pardon sincère que votre bénédiction transformera en un nouveau levain pour la reconstruction du pays. Au nom de toute la classe dirigeante de ce pays mais aussi au nom de tous ceux qui ont contribué de quelque manière que ce soit à sa descente aux enfers, je confesse tout le mal qui a été fait ici au cours de l’histoire et demande pardon du fond de mon cœur.
225
Très Saint-Père, Nous avons absolument besoin de ce pardon à l’occasion de votre visite simplement parce que les dernières évolutions de la crise dans notre pays sont apparues comme des abominations commises au nom de la religion par des gens qui se disent des croyants. Or, comment être croyants et détruire des lieux de culte, tuer son prochain, violer, détruire des biens d’autrui et procéder à des violences de toutes sortes ? Nous avons absolument besoin de ce pardon parce que nos cœurs sont endurcis par les forces du Mal. L’amour sincère du prochain nous a quittés et nous sommes désormais ancrés dans l’intolérance, la perte des valeurs et le désordre qui en résulte. Nous avons besoin de ce pardon pour reprendre le chemin d’une nouvelle spiritualité plus vivante, accueillante et concrète parce que fondée sur l’amour vrai qui contribue à la réalisation et à l’affirmation de notre humanité. Nous sommes en effet conscients que la plus grande chose que votre séjour parmi nous peut nous apporter, c’est la prière, l’intercession pour que les démons de la division, de la haine et de l’autodestruction soient exorcisés et chassés définitivement de nos terres, pour que notre pays retrouve le chemin d’une nouvelle spiritualité solidement ancrée dans la tolérance, l’amour du prochain, le respect de la dignité humaine et des Autorités établies. Très Saint-Père, En tant que messager de la paix, vous avez choisi de venir consoler un peuple meurtri afin de le restaurer et de le réconcilier avec la grâce que Dieu lui a faite par son sol, son sous-sol, ses eaux, sa faune, ses forêts et sa diversité culturelle. Votre présence parmi nous doit nous réconcilier avec la paix. Que le souffle de paix que vous apportez demeure en République centrafricaine et établisse l’étendard de la gloire de Dieu sur notre pays.
226
Vos messages sont attendus pour nous libérer de la peur de l’autre, pour nous aider à cesser nos conflits, à changer nos cœurs et à nous établir sur la voie de la sérénité, de la sagesse, de la fraternité et de la paix. Il est incontestable que le message de paix que vous nous apportez ne manquera pas d’infléchir et de tourner nos cœurs vers Dieu qui est la source véritable de la paix profonde à laquelle nous aspirons. Après toutes les souffrances que notre peuple a vécues et continue de vivre, vous lui apportez certes le réconfort, la chaleur et la force de votre foi, votre commisération mais davantage : vous lui apportez l’espérance et la lumière d’une renaissance certaine. Aujourd’hui, le peuple Centrafricain vit dans l’espérance du retour durable de la sécurité sur toute l’étendue de son territoire, de l’organisation des élections libres, transparentes et démocratiques et au final, d’un retour à l’ordre constitutionnel avec des dirigeants élus qui présideront à sa destinée avec la préoccupation d’assurer son bienêtre au quotidien. Et c’est dans l’allégresse et la piété que nous Centrafricains de toutes les confessions religieuses confondues attendons que Votre main puissante bénisse ce pays afin qu’il devienne enfin cette terre de Zo Kwé Zo dont avait rêvé Barthélémy Boganda, père fondateur de la République centrafricaine. Une Centrafrique sans rancœurs, sans haines, sans divisions, sans discrimination de religions et d’ethnies, une Centrafrique sans armes et dans laquelle tous les citoyens pourraient « se donner la main », pour relever et reconstruire leur pays. Puisse cette visite marquer la naissance d’une nouvelle ère de coopération renforcée entre le Saint-Siège et la République centrafricaine pour nous aider à atteindre l’épanouissement dans toutes ses dimensions matérielle et spirituelle. Avant de clore mon propos, je me dois de remercier toutes les bonnes volontés qui ont contribué à faire de cette visite non seulement 227
une réalité, mais surtout un réel succès. Je voudrais remercier le nonce apostolique, l’archevêque de Bangui, le président de la conférence épiscopale de Centrafrique et toute la communauté catholique de Centrafrique, qui n’a ménagé aucun effort pour la concrétisation de cette visite. Le comité d’organisation ecclésiale et le comité gouvernemental ont ainsi travaillé en synergie au sein de la coordination nationale pour optimiser l’organisation de l’événement. À tous, je dis merci, mille fois merci, pour leurs précieuses contributions. Ces remerciements vont aussi à l’endroit des forces internationales notamment la Minusca et la Sangaris pour les efforts supplémentaires accomplis pour la circonstance. Leur présence sur le terrain aux côtés des forces intérieures est un élément essentiel de la réussite de cette visite. Très Saint-Père, Je terminerai mon propos en vous souhaitant ainsi qu’à toute la délégation qui Vous accompagne un très bon et agréable séjour en terre centrafricaine, terre de désolation aujourd’hui mais terre d’opportunités et d’avenir. Gloire à Dieu pour la présence de son messager parmi nous. Que la terre centrafricaine tressaille de joie car Dieu a jeté un regard favorable sur elle pour la sauver. Dieu a exaucé nos prières et nous a envoyé le messager de la paix. Nous sommes sauvés ! Je vous remercie
228
16.
DISCOURS ADRESSES AU SAINT PERE PAR DES FIDELES
16.1 DISCOURS DE BIENVENUE D’EVANS DEMBA, AU NOM DES JEUNES, AU LANCEMENT DE LA VEILLEE DE PRIERE Très Saint Père Au début de cette veillée pénitentielle, nous les jeunes, nous vous souhaitons la bienvenue parmi nous. Nous avons choisi le symbole du bananier pour représenter la jeunesse centrafricaine dans sa diversité. En effet, le bananier est une plante de pays chauds et humides. Il est cultivé uniquement pour ses fruits qui ont une grande valeur alimentaire. Il a besoin d’avoir de bonnes racines et d’être bien entretenu. Il meurt après maturité des fruits et reproduction de rejets ou drageons qui assurent le remplacent. Dans toutes les crises dans notre pays, nous avons toujours payé toujours de lourds tributs. N’ayant pas de « bonnes racines », nous nous laissons facilement emporter par le vent de la violence, de la vengeance, du pillage, de la destruction… Aujourd’hui, les défis auxquels nous sommes confrontés sont nombreux : la réconciliation, la formation adéquate, le chômage, la précarité. Beaucoup d’entre nous sont tentés de quitter notre pays pour aller chercher un avenir meilleur ailleurs. 229
Votre visite nous réconforte et nous fait comprendre que tout n’est pas encore perdu. Dites-nous Très Saint-Père ce que vous attendez des jeunes de Centrafrique. Que devons-nous faire pour que la paix et la prospérité règnent dans notre pays ? Très Saint-Père, nous implorons votre bénédiction apostolique sur nous pour nous aider à passer sur la rive de la Miséricorde et de la Réconciliation.
16.2 DISCOURS DE BIENVENUE D’UNE DEPLACEE, LORS DE LA VISITE DU PAPE FRANÇOIS SUR LE SITE DES DEPLACES DE LA PAROISSE SAINT SAUVEUR Très Saint-Père, Au nom des déplacés internes en général et des déplacés de la paroisse saint Sauveur et du Centre saint Jean XXIII en particulier, je vous souhaite la bienvenue parmi nous. Nous sommes heureux et très honorés par votre visite. En dépit de vos multiples engagements, vous vous êtes rendu disponible pour venir partager notre joie et notre peine, notre angoisse et notre Espérance. Que votre visite en Centrafrique apporte la réconciliation, la paix durable et le bonheur sur toute l’étendue du territoire. Merci infiniment ! Singila mingi.
230
CINQUIEME PARTIE : DECOUVRIR LA CATHEDRALE DE BANGUI -PREMIERE PORTE SAINTE DU JUBILE DE LA MISERICORDE PAR LE PAPE FRANÇOIS
17.
Introduction
La Cathédrale Notre Dame de l’Immaculée Conception est l’Eglise mère de l’archidiocèse de Bangui. Elle est aussi inscrite dans le patrimoine national de la République centrafricaine. Durant le jubilé extraordinaire de la miséricorde, le Seigneur nous a fait grâce : le Pape François est venu lui-même ouvrir la première porte sainte en cette cathédrale, avant celle de la basilique Saint Pierre, à Rome. Un geste absolument nouveau du point vue historique. C’est pourquoi, nous retenons intéressant de présenter cette Eglise à nos lecteurs.
17.1
HISTORIQUE
Comme tous les autres pays de l’Afrique centrale, l’OubanguiChari, l’actuelle République Centrafricaine (R.C.A), fut découvert au sortir de la Conférence de Berlin (1884-1885) suite aux explorations du fleuve Congo et de ses embouchures par Savorgnan de Brazza. Bangui comme premier poste français fut alors fondé en 1883 par Michel DOLISIE. L’Oubangui-Chari devint colonie française le 29 juin 1903 et faisait partie de la grande Afrique Equatoriale Française (A. E. F) regroupant le Congo-Brazzaville, l’Oubangui-Chari et le Tchad. Ce sera après plus d’une soixantaine d’années d’occupation française que la République Centrafricaine fut proclamée le 1er Décembre 1958 et acquit son indépendance le 13 Août 1960.
Le christianisme en Centrafrique peut-on l’affirmer, est le pendant spirituel de l’installation des colonisateurs français en cette partie de 233
l’Afrique. C’est juste un an après la création du poste de Bangui situé à l’extrême sud du pays, que les Pères du Saint Esprit se sont installés à Bangui. Aussi l’Eglise de Brazzaville, celle de Fort Lamy, et de Bangui ont longtemps obéi au découpage administratif de L’Afrique Équatoriale Française (A. E. F) constituant ainsi le Vicariat du HautCongo.
L’Eglise de Bangui qui peut à juste titre être appelée l’Eglise-mère de toute la R.C.A devint Archevêché le 14 Septembre 1955. Au fait, de la Préfecture apostolique de l’Oubangui-Chari le 08 mai 1909 par division du Vicariat du Haut-Congo français, l’Eglise de Bangui devint Vicariat Apostolique en 1937 avant d’être divisé puis renommé Vicariat de Bangui le 28 mai 1940. C’est ce Vicariat qui avait initialement la charge d’administrer l’Eglise catholique sur toute l’étendue du territoire centrafricain. C’est lui qui donnera naissance peu à peu à tous les diocèses de Berberati, Bangassou, Bambari, Mbaïki, Bouar, Bossangoa, Kaga-Bandoro et Alindao. D’où Bangui demeure depuis toujours le siège métropolitain de l’Eglise de Jésus qui est en Centrafrique.
17.1.1
Que savoir de la Cathédrale ?
Vous faisant grâce des préalables historiques pourtant nécessaires, retenons que nous devons ce joyau spirituel à la prévoyance pastorale de Mgr Jean René Calloc’h, qui en 1924, demanda et obtint du Gouverneur, Mr Augagneur par arrêté du 09 avril 1925 une concession gratuite de 4 hectares au centre de Bangui. La première installation précaire que le Père Marcel Gérard put y établir en 1925, sera le prélude de la Mission, aujourd’hui très importante, de NotreDame. Elle se trouvait à environ un kilomètre de la ville européenne, près du village des noirs, exactement entre l’hôpital européen et celui d’indigène. A la mission primitive, en 1927, fut ajoutée une chapelle provisoire mais qui se révéla bien vite insuffisante. La même année, après la visite du Père Soul, la nouvelle installation fut érigée de simple dépendance de Saint Paul en résidence indépendante sous le vocable de Notre-Dame dédiée à l’Immaculée Conception. Il y a un temps pour construire et entreprendre ; il y a un temps pour la ruine et 234
la destruction, c’est ainsi que dans l’après-midi du 16 novembre 1931 un petit cyclone renversa complètement la chapelle de l’école saint Louis ; le tabernacle n’a pas souffert et la statue de la Vierge Marie qui dominait est restée intacte mais y avait plus que des décombres…
Cathédrale Notre Dame de l’Immaculée Conception de Bangui
Vue du crucifix et du presbytère 235
En effet, c’est précisément le 22 octobre 1934 que Mgr Marcel Grandin débuta les travaux du hangar destiné à abriter les matériaux de construction de la Cathédrale de Bangui. L’extraction des pierres pour la fondation a lieu le 16 Janvier 1934. Le 13 janvier 1935, l’implantation de la fondation de l’église. Le 10 Février 1935 avait eu lieu la bénédiction de l’emplacement de la construction par Mgr Marcel Grandin lui-même. Trois jours après on traça les fondations. Le Vendredi 1er Avril 1937, le Frère Jean-Marie acheva tous les travaux de la construction de la Cathédrale.
Ces travaux de construction de la Cathédrale de Bangui ont mobilisé indigènes, missionnaires et colons. Retenons à cet effet que les briques qui ont servi à la construction de ladite Cathédrale avaient été cuites à la Mission Saint Paul des Rapides et transportées par pirogues via le fleuve Oubangui, jusqu’au débarcadère derrière l’ancienne maison DAVUM (actuellement DAMECA). De là un camion les transportait jusqu’au chantier. Quand ce camion était en panne, les chrétiens et les catéchumènes les transportaient sur leurs têtes.
Nombreux sont les néophytes qui ont contribué tant par la main d’œuvre bénévole qu’en fournissant des matériaux de construction comme le sable, les pierres. Notons que cette Cathédrale sera restaurée de 1961-1962 sous la direction du Père Yves GAUTIER alors curé: diminution des piliers, ouverture de la verrière de l’abside, ouvertures des claustras, plafonnage. Aussi faut-il le rappeler, ces aménagements qui ont été financés par le président BOKASSA à l’occasion de la messe de son couronnement le 4 Décembre 1977. Les cinq lustres actuels en cristal de BACCARAT ont été offerts en 1976 par Jean Bedel BOKASSA, Empereur à l’époque. A cette occasion, tout l’extérieur a été ravalé et l’esplanade goudronnée. Bien d’autres travaux ont été réalisés tels les carreaux à l’autel, la peinture à l’occasion de l’ACERAC (Association des Conférences Episcopales des Régions d’Afrique Centrale) en 2008. Cependant, certaines parties de l’église n’ont jamais été achevées : c’est l’exemple de l’une des deux tours, du baptistère. En outre, sous 236
l’effet du temps, d’un manque d’entretien régulier et approfondi, la vétusté des bâtiments s’est aggravée et la nécessité de restaurer la maison de Dieu qui se dégrade se fait de plus en plus urgent. C’est ainsi que le 28 mars 2015, lors d’une réunion du conseil paroissial, une visite guidée de tous les édifices de la paroisse (église, presbytère, salles paroissiales et centre Saint Louis), conduite par le curé, avait été effectuée. Le but de cette visite guidée était de se rendre compte de l’état effectif des édifices. Le constat fait par les conseillers paroissiaux, nous a poussés à la décision immédiate de réhabiliter la cathédrale. L’autre motivation pour démarrage des travaux de réhabilitation était l’annonce du voyage du Pape François le 29-30 novembre 2016.
17.2
LES
GRANDS EVENEMENTS MARQUANT LA VIE HISTORIQUE DE LA CATHEDRALE :
• Le 27 mars 1938 : Mgr Grandin inaugure sa Cathédrale et y ordonne le 1er prêtre originaire du pays, l’Abbé Barthélémy BOGANDA. Ce prélat quitte très vite ce monde pour le père le 4 août 1947 vers 17h30, suite à un accident de circulation sur la route inférieure de la corniche vers Oubangui hôtel ;
• Le 25 juillet 1948 : Mgr Joseph Cucherousset est sacré à la Cathédrale Notre Dame de l’Immaculée Conception le premier Evêque par Son Eminence Le Cardinal TISSERANT (Sacré Pallium) ;
Le 5 janvier 1969 : Ordination du premier épiscope centrafricain Mgr Joachim NDAYEN lors d’une célébration eucharistique présidée par Mgr Louis Poggi, Pro-Nonce Apostolique en RCA sur le parvis de la Cathédrale Notre Dame de l’Immaculée Conception de Bangui à 17h00 en présence de 17 Evêques, plus de 100 prêtres, le Président de la République avec le gouvernement entier •
237
et environ 10 000 personnes. Précisons-le, Mgr Joachim NDAYEN a remplacé S.E. Mgr Joseph CUCHEROUSSET alors Archevêque mais dont la santé était menacé et qui s’est résolu de démissionner
Vue de la grotte de la Cathédrale
• Le pape Jean Paul II de vénérée mémoire, lors de son unique visite en terre centrafricaine l’a honorée de sa présence le 14 août 1985 : Le souverain Pontife y a passé quelques moments de prière intense auprès du tabernacle de la Cathédrale.
Le 4 janvier 1994, elle abrite la célébration du centenaire de l’évangélisation de l’Eglise en Centrafrique. •
En 1996, il eut au sein de cette Cathédrale l’ordination épiscopale des Evêques suivants : Mgr Paulin POMODIMO 2ème Evêque de Bossangoa, qui deviendra en 2004 Archevêque de Bangui jusqu’en Mai 2009, Mgr Périn GUERINO, premier Evêque du diocèse de MBAÏKI dans le sud de la République Centrafricaine et un Evêque coadjuteur à Bambari, Mgr Jean Claude REMBANGA. •
238
• Le 26 octobre 1997, c’est la célébration de l’ordination épiscopale de Mgr François Xavier YOMBANDJE, 1er Evêque du diocèse de Kaga-Bandoro.
Du dimanche 29 juin au dimanche 6 juillet 2008, elle a accueilli et célébré avec fierté la 8ème Assemblée Plénière de l’ACERAC, sur le thème : « La bonne gestion dans l’Eglise ». •
Et le dimanche 22 juillet 2012, elle sert de cadre aux quatre ordinations épiscopales de : Monseigneur l’Archevêque Dieudonné NZAPALAINGA, Mgr Nestor NONGO – AZIAGBIA (3ème Evêque de Bossangoa), Mgr Denis Koffi (2ème Evêque de Berberati) et Mgr Nestor Cyr YAPAUPA, Evêque coadjuteur (Alindao) •
• Le 15 Aout 2014, ordination épiscopale de Monseigneur Thaddée KUSY, Evêque de Kaga-Bandoro
Le 29-30 novembre 2015 voyage apostolique de sa Sainteté le Pape François en Centrafrique •
• Le 29 novembre 2015 ouverture de la Porte Sainte du jubilé extraordinaire de la miséricorde et célébration de la messe, par le Pape François
239
17.3
LA CATHEDRALE EN CHIFFRES
Les structures en général de la Cathédrale n’ont pas jusque-là beaucoup changé. On peut y relever quelques ajustements pour besoin pastoral. C’est alors que dans certains locaux aujourd’hui on peut avoir :
•
1 Cyber café ;
•
1 Infirmerie animée par la Fraternité Saint Vincent de Paul ;
1 Librairie où sont en vente les objets de piété et quelques articles religieux; • •
35 773 est le nombre de baptêmes jusqu’en juillet 2016;
• 3 216 c’est le total Du mariage célébré en la Cathédrale jusqu’en juillet 2016. • 36 Mouvements, Fraternités et Groupes animent la vie de la Cathédrale et en constituent le champ pastoral; •
2500 places assises, voilà qui est sa capacité d’accueil;
240
L’autel de la Cathédrale
L’autel de la Cathédrale
241
La cathèdre de l’archevêque
242
Confessionnaux réalisés lors de la venue du Pape François.
Les cinq Communautés Ecclésiales de Base (CEB) de la Cathédrale sont : 1.
Saint Pierre (Saïdou/Enam)
2.
Saint André (Saïdou/marché)
3.
Saint Jacques (Sica) 243
4.
Saint Jean (Sica-Assana)
5.
Saint Michel Archange de 200-36 Villas
Elles sont animées par un slogan s’exprimant en ces termes: « CEB ou Kundu, Espoir de la Cathédrale ».
17.4
LES CURES DE LA CATHEDRALE
1.
Père Marcel Gérard : 1er Curé (1925-1936)
2.
Père Auguste Fayet : 1937
3.
Père Adrien Leperdriel 1938
4.
Père Joseph Cucherousset (1945-1946)
5.
Père Charles Grüner (1946-1948)
6.
Père Louis Godard (1948-1958)
7.
Père Yves Gautier (1958-1966)
8.
Père Théodore Dobozendi
9.
Père Léon Rallu
10. Abbé Benoît Basile Siango 11. Père André Robert 12. Père Philippe Reynaërt (1974-1983) 13. Père Yves Gautier (1983-1995) 14. Abbé Richard Filakota (1995-1996) 15. Abbé Jean Louis Yérima-Banga (1996-1999) 16. Abbé Placide Dono (1999-2001) 17. Abbé Pascal Tongamba (2001-2004) 244
18. Abbé Richard Filakota (2004-2006) 19. Abbé Yves Mana (2006-2008) 20. Abbé Pascal Tongamba (2008-2009) 21. Abbé Francis Synclair Siki (2009 - 2014) 22. Abbé Mathieu Fabrice Evrard Bondobo (actuel curé 2014-…)
245
ANNEXE
DISCOURS PRÉPARÉ DU SAINT PERE AUX JEUNES75
Chers jeunes, chers amis, bonsoir ! (Discours préparé) J’ai la grande joie de vous retrouver ce soir, alors que nous commençons une nouvelle année liturgique avec le temps de l’Avent. N’est-ce pas pour chacun de nous l’occasion d’un nouveau départ, l’occasion de « passer sur l’autre rive » (cf. Lc 8, 22) ! Merci Evans pour les paroles que tu viens de m’adresser au nom de vous tous. Au cours de notre rencontre, je pourrai donner le sacrement de la Réconciliation à quelques-uns d’entre vous. Aussi, je voudrais vous inviter à réfléchir sur la grandeur de ce sacrement dans lequel Dieu vient à notre rencontre d’une façon personnelle. Chaque fois que nous le lui demandons, il vient avec nous pour nous faire passer sur l’autre rive, sur cette rive de notre vie où Dieu nous pardonne, déverse en nous son amour qui guérit, apaise et relève ! Le Jubilé de la Miséricorde, que je viens d’avoir la joie d’ouvrir particulièrement pour vous, chers amis Centrafricains et Africains, nous rappelle justement que Dieu nous attend, les bras ouverts, comme nous le rappelle la belle image du Père accueillant le fils prodigue.
75
Il convient de dire que durant le voyage apostolique, il y avait des discours officiels déjà ecrits. Ce discours-ci était celui préparé officiellement, mais le Pape a tenu un autre discours de manière spontanée. Lui-même avait demandé à Monseigneur l’Archevêque de publier le discours officiel, car pendant la veillée, il a prononcé un discours qui lui venait de son cœur.
249
En effet, le pardon reçu nous console et il nous permet de repartir le cœur confiant et en paix, capables de vivre davantage en harmonie avec nous-mêmes, avec Dieu et avec les autres. Ce pardon reçu nous permet aussi de pardonner à notre tour. Nous en avons toujours besoin, et particulièrement dans des situations de conflits, de violences comme celles que vous connaissez encore trop souvent. Je redis ma proximité à tous ceux parmi vous qui sont touchés par le deuil, la séparation, les blessures infligées par la haine et la guerre. Dans ce contexte, pardonner à celui qui nous a fait du mal est humainement bien difficile. Mais Dieu nous offre force et courage pour devenir ces artisans de réconciliation et de paix, dont votre pays a tant besoin. Le chrétien, disciple du Christ, marche sur les pas de son maître, qui sur la croix a demandé à son Père de pardonner à ceux qui le crucifiaient (cf. Lc 23, 34). Comme cette attitude est éloignée des sentiments qui habitent trop souvent notre cœur… Méditer cette attitude et cette parole de Jésus : « Père, pardonne-leur », peut nous aider à convertir notre regard et notre cœur. Pour beaucoup, c’est un scandale que Dieu soit venu se faire l’un de nous. C’est un scandale qu’il soit mort sur une croix. Oui, c’est un scandale : le scandale de la croix. La croix continue à faire scandale. Mais c’est l’unique chemin sûr : celui de la Croix, celui de Jésus venu partager notre vie pour nous sauver du péché (cf. Rencontre avec les jeunes Argentins 25 juillet 2013 Rio de Janeiro). Chers amis, cette croix nous parle de la proximité de Dieu : il est avec nous, il est avec chacun de vous dans vos joies comme dans vos épreuves. Chers jeunes, le bien le plus précieux que nous pouvons avoir dans la vie est notre relation avec Dieu. En êtes-vous convaincus ? Êtes-vous conscients de la valeur inestimable que vous avez aux yeux de Dieu ? Savez-vous que vous êtes aimés et accueillis par Lui, inconditionnellement, comme vous êtes ? (cf. Message pour la 30ème Journée Mondiale de la Jeunesse 2015 – 2 ) En consacrant du temps à la prière, à la lecture de l’Écriture, particulièrement de l’Évangile, vous le connaîtrez mieux et vous vous connaîtrez aussi vous-mêmes. En effet, les conseils de Jésus peuvent éclairer aussi aujourd’hui vos sentiments et vos choix. Vous êtes enthousiastes et généreux, en quête d’un grand idéal, chercheurs de vérité et de beauté. Je vous encourage 250
à garder l’esprit vigilant et critique face à toute compromission contraire au message de l’Évangile. Merci pour votre dynamisme créatif dont l’Église a besoin ! Cultivez-le ! Soyez des témoins de la joie que donne la rencontre avec Jésus. Qu’elle vous transforme, qu’elle rende votre foi plus forte, plus solide pour surmonter les peurs, afin d’entrer toujours plus dans le projet d’amour de Dieu sur vous ! Dieu veut le bonheur de tous ses enfants. Ceux qui se laissent regarder par lui sont libérés du péché, de la tristesse, du vide intérieur, de l’isolement (cf. Exhort. apost. Evangelii gaudium, n. 1). Et, en retour, regarder l’autre comme un frère, accepter qu’il soit différent et découvrir qu’il est un don pour moi. C’est ainsi que la paix se construit chaque jour. Cela demande de prendre le chemin du service et de l’humilité, d’être attentif aux besoins de l’autre. Pour entrer dans cette logique, il faut avoir un cœur qui sait s’abaisser et partager sa vie avec ceux qui sont le plus dans le besoin. Là est la vraie charité. Et ainsi grandit la solidarité en commençant par de petites choses, et les germes de division disparaissent. Ainsi le dialogue entre les croyants porte du fruit, la fraternité se vit jour après jour, et elle élargit le cœur en ouvrant un avenir. De cette manière, vous pouvez faire beaucoup de bien pour votre pays et je vous y encourage. Chers jeunes, le Seigneur est vivant, et il marche à vos côtés. Quand les difficultés semblent s’accumuler, quand la douleur, la tristesse dominent autour de vous, il ne vous abandonne pas. Il nous a laissé le mémorial de son amour : l’Eucharistie et les sacrements pour avancer sur le chemin en y trouvant la force d’aller de l’avant chaque jour. Et cela doit être la source de votre espérance et de votre courage pour passer sur l’autre rive (cf. Lc 8, 22), avec Jésus, en ouvrant des chemins nouveaux pour vous et votre génération, pour vos familles, pour votre pays. Je prie pour que vous ayez cette espérance. Soyez ancrés en elle et vous la donnerez aux autres, à notre monde abimé par les guerres, les conflits, le mal, le péché. N’oubliez pas, le Seigneur est avec vous. Il a confiance en vous. Il souhaite que vous soyez ses disciples-missionnaires, soutenus par la prière de la Vierge Marie et par celle de toute l’Église dans les moments difficiles et les épreuves. Chers jeunes de Centrafrique, allez, je vous envoie !
251
CONFERENCE DE PRESSE AU RETOUR76
COP 21 Alors que s'est ouverte à Paris la COP 21, la conférence mondiale sur le climat, le Pape François a exprimé son inquiétude. «Je n'en suis pas sûr (du résultat de la COP 21), mais ce que je peux dire, c'est que c'est maintenant ou jamais», a déclaré le Souverain pontife. Depuis la conférence de Kyoto en 1997, «peu a été accompli» et «chaque année, les problèmes sont plus graves», alors qu'il peut sembler, «pour employer une parole forte, que nous soyons au bord du suicide», a insisté le pontife argentin. Cependant, «la quasi-totalité de ceux qui sont à Paris veulent faire quelque chose. J'ai confiance qu'ils le feront, ils ont de la bonne volonté et je prie pour cela», a-t-il dit. Des propos en continuité avec ceux tenus dans son encyclique Laudato Si', parue en juin dernier. Au fil de nombreuses interventions cette année, il a réclamé à plusieurs reprises que la COP 21 aboutisse à un accord contraignant dans lequel les pays les plus riches aideront
76
Dans l'avion de retour de sa tournée en Afrique, le Pape François a accordé, comme c'est la tradition, une heure de dialogue avec les journalistes. Il est revenu sur les grands sujets d'actualité du moment : la COP 21, les fondamentalismes religieux, les affaires de corruption, ou encore sur ses voyages apostoliques.
253
financièrement et techniquement les plus pauvres à accomplir cette révolution écologique. Le Saint-Siège a été représenté à l'ouverture de la COP 21 par le cardinal Pietro Parolin, Secrétaire d'État du SaintSiège, qui avait quitté la délégation pontificale en Afrique pour rejoindre Paris.
PAUVRETÉ Le Pape François s'est dit bouleversé par la pauvreté de nombreuses personnes rencontrées en Afrique, et il a une nouvelle fois dénoncé les ravages de l'idolâtrie de l'argent. «Hier je suis allé à l’hôpital pédiatrique, l’unique de Bangui et du pays. En thérapie intensive, ils n’ont pas d’oxygène, il y a tellement d’enfants en malnutrition. Le docteur m’a dit : la plupart d’entre eux va mourir, parce qu’ils ont la malaria et sont mal nourris.» «L’idôlatrie, c’est quand un homme ou une femme perd sa carte d’identité, c’est-à-dire le fait d’être enfant de Dieu, et préfère se chercher un Dieu à sa mesure, s'est-il attristé. Si l’humanité ne change pas, la misère, les tragédies, les guerres, les enfants qui meurent de faim, l’injustice, tout cela continuera.»
AFRIQUE Le Pape a reconnu qu’il serait difficile pour lui de revenir en Afrique. «Moi, je suis vieux, les voyages sont pesants !», a-t-il lancé. Mais il garde de grands souvenirs de son premier voyage sur le continent africain. «Cette foule, cette joie, cette capacité de faire la fête, même avec le ventre vide. Chaque pays a son identité : le Kenya est un peu plus moderne et développé. L’Ouganda a l’identité de ses martyrs ; le peuple ougandais, que ce soit les catholiques ou les anglicans, venère ses martyrs. La République centrafricaine a une volonté de paix, de réconciliation, (…) Aujourd’hui je suis allé à la mosquée, j’ai prié à la mosquée, l’imam est monté sur la papamobile pour faire un petit tour parmi les réfugiés.» «Maintenant, ils vont faire les élections, ils ont choisi une présidente de transition : il n’y a aucune haine», a insisté le Saint254
Père. Il a toutefois évoqué rapidement l'action des milices anti-balaka, en évoquant «un petit groupe très violent, chrétien, je crois, ou qui se dit chrétien.» Le Pape a aussi évoqué plus globalement la pauvreté de l'Afrique, «exploitée par les grandes puissances», et a refusé toute argumentation sur la liceité ou non du port du préservatif pour lutter contre le Sida : «Je n’aime pas descendre dans des réflexions casuistiques quand les gens meurent de faim ou du manque d’eau», a lancé le Pape François.
VATILEAKS Interpellé sur le procès au Vatican de cinq personnes, dont deux journalistes, poursuivis pour les fuites de documents confidentiels dans l'affaire dite "Vatileaks 2", François a réfuté toute idée d'atteinte à la liberté de la presse. « La dénonciation des injustices et de la corruption est un beau travail. La presse professionnelle doit tout dire, mais sans tomber dans les trois péchés les plus communs : la désinformation, c’est-à-dire dire seulement la moitié de la vérité, la calomnie, quand la presse non professionnelle salit les personnes, et la diffamation, qui revient à dire des choses qui abiment la réputation d’une personne. Ce sont les trois défauts qui portent atteinte au professionnalisme de la presse. Un vrai journaliste, s’il se trompe, doit s’excuser.» Il a aussi précisé qu’il aurait voulu que le procès puisse se tenir avant le Jubilé, mais qu’il fallait laisser le temps aux prévenus de préparer leur défense. Concernant la corruption au Vatican, François a rappelé que «le cardinal Ratzinger avait parlé de la "saleté de l’Église"», notamment lors du Vendredi Saint 2005, une semaine avant la mort de Jean-Paul II. «Nous l’avons élu pour cette liberté de dire les choses», a-t-il affirmé, faisant allusion au conclave de 2005. «Je remercie Dieu qu’il n’y ait plus Lucrèce Borgia. Mais nous devons continuer, avec les cardinaux et les commissions, cette œuvre de nettoyage.» 255
FONDAMENTALISMES Interrogé sur les attentats récents qui ont marqué l'actualité, notamment à Paris, le Pape a réfuté toute idée d'un lien consubstantiel entre l'islam et la violence. «Nous sommes tous enfants de Dieu, nous avons le même Père. Il y a des fondamentalistes dans toutes les religions. Nous les catholiques, nous en avons quelques-uns, beaucoup, qui croient avoir la vérité absolue et agissent en salissant les autres avec la calomnie, la diffamation, et font du mal. Je le dis parce que c’est mon Église (…). Le fondamentalisme qui finit en tragédie est une chose mauvaise, mais advient dans toutes les religions ». Il a par ailleurs précisé que l’histoire du christianisme n’était pas exempte de violence. «Le sac de Rome (par les troupes de Charles Quint en 1527, ndlr) , ce n’est pas les musulmans qui l’ont fait.», a-t-il lancé.
MEXIQUE François a par ailleurs confirmé que son prochain voyage serait pour le Mexique, à une date encore non fixée définitivement. Il ira visiter le sanctuaire de Guadalupe, à Mexico, mais il compte aussi se rendre dans trois ou quatre villes qu’aucun Pape n’a jamais visitées. Il ira probablement au Chiapas, à Morelia, et à Ciudad Juarez, sur la frontière avec les États-Unis. Par ailleurs, il a annoncé qu’il était invité à revenir à Aparecida au Brésil en 2017, ville déjà visitée en marge des JMJ de 2013, et que d’autres pays latino-américains pourraient être visités, mais que rien de plus précis n’est programmé pour le moment.
256
AUDIENCE DE MERCREDI, 2 DECEMBRE 201577 Chers frères et sœurs, bonjour ! Ces derniers jours, j’ai effectué mon premier voyage apostolique en Afrique. L’Afrique est belle ! Je rends grâce au Seigneur pour ce grand cadeau qu’il m’a fait, qui m’a permis de visiter trois pays : d’abord le Kenya, puis l’Ouganda et enfin la République centrafricaine. Je redis ma reconnaissance aux autorités civiles et aux évêques de ces nations pour m’avoir accueilli et je remercie tous ceux qui, de bien des manières, ont collaboré. Merci de tout cœur ! Le Kenya est un pays qui représente bien le défi mondial de notre époque : protéger la création en réformant le modèle de développement pour qu’il soit équitable, inclusif et durable. Tout cela se vérifie à Nairobi, la plus grande ville d’Afrique orientale, où cohabitent richesse et misère : mais ceci est un scandale ! Pas seulement en Afrique : ici aussi, partout ! La cohabitation de la richesse et de la misère est un scandale, c’est une honte pour l’humanité. À Nairobi se trouve justement le Bureau des Nations unies pour l’environnement, que j’ai visité. Au Kenya, j’ai rencontré les autorités et les diplomates, ainsi que les habitants d’un quartier populaire : j’ai rencontré les responsables des différentes confessions chrétiennes et des autres religions, les prêtres et les consacrés, et j’ai rencontré les jeunes, beaucoup de jeunes ! À chacune de ces occasions, j’ai encouragé à garder précieusement la grande richesse de ce pays : richesse naturelle et spirituelle, constituée des ressources de la terre, des nouvelles générations et des valeurs qui font la sagesse du peuple. Dans ce contexte si dramatiquement actuel, j’ai eu la joie d’apporter la parole d’espérance de Jésus : « Soyez fermes dans la foi, n’ayez pas peur ! » C’était la devise de ma visite. Une parole qui est 77
Le Pape selon une longue tradition, sur la place Saint Pierre ou dans la salle Nervis, appelée aussi Paul VI, reçoit les fidèles, en audience le mercredi. Il commente un passage de l’Ecriture, salue les fidèles et pèlerins réunis, bénis leurs objets de piété...
257
vécue tous les jours par tant de personnes humbles et simples, avec une noble dignité ; une parole à laquelle ont rendu témoignage, de façon tragique et héroïque, les jeunes de l’université de Garissa, tués le 2 avril dernier parce qu’ils étaient chrétiens. Leur sang est une semence de paix et de fraternité pour le Kenya, pour l’Afrique et pour le monde entier. Ensuite, en Ouganda, ma visite s’est passée sous le signe des martyrs de ce pays, 50 ans après leur canonisation historique par le bienheureux pape Paul VI. C’est pourquoi la devise était : « Vous serez mes témoins » (Ac 1,8). Une devise qui suppose les paroles qui précèdent immédiatement : « Vous recevrez la force de l’Esprit-Saint », parce que c’est l’Esprit qui anime le cœur et les mains des disciples missionnaires. Et toute la visite en Ouganda s’est déroulée dans la ferveur du témoignage animé par l’Esprit-Saint. Un témoignage dans le sens explicite comme le service des catéchistes, que j’ai remerciés et encouragés pour leur engagement, qui implique souvent aussi leurs familles. Un témoignage comme celui de la charité, que j’ai touché du doigt dans la Maison de Nalukolongo, mais dans lequel sont engagées de nombreuses communautés et associations au service des plus pauvres, des personnes handicapées, des malades. Un témoignage comme celui des jeunes qui, malgré les difficultés, conservent le don de l’espérance et cherchent à vivre selon l’Évangile et non selon le monde, en allant à contre-courant. Des témoins comme les prêtres, les consacrés hommes et femmes, qui renouvellent jour après jour leur « oui » total au Christ et se dévouent joyeusement au service du saint peuple de Dieu. Et il y a un autre groupe de témoins, mais j’en parlerai après. Tout ce témoignage multiforme, animé par le même Esprit-Saint, est le levain pour la société tout entière, comme le montre l’œuvre efficace réalisée en Ouganda dans la lutte contre le sida et dans l’accueil des réfugiés. La troisième étape du voyage a été la République centrafricaine, au cœur géographique du continent : c’est précisément le cœur de l’Afrique. Cette visite était en réalité la première dans mon intention, parce que ce pays cherche à sortir d’une période très difficile de conflits violents et de grandes souffrances pour la population. C’est pour cela que j’ai voulu ouvrir justement là-bas, à Bangui, avec une semaine d’avance, la première Porte sainte du Jubilé de la miséricorde, en signe de foi et d’espérance pour ce peuple, et 258
symboliquement pour toutes les populations africaines qui ont le plus besoin de délivrance et de réconfort. L’invitation de Jésus à ses disciples : « Passons sur l’autre rive ! » (Lc 8,22), était la devise pour la Centrafrique. « Passer sur l’autre rive », au sens civil, signifie laisser la guerre, les divisions et la misère derrière soi et choisir la paix, la réconciliation, le développement. Mais cela suppose un « passage » qui advient dans les consciences, dans les comportements, et dans les intentions des personnes. Et à ce niveau, l’apport des communautés religieuses est décisif. C’est pourquoi, j’ai rencontré les communautés évangéliques et la communauté musulmane, partageant avec elles la prière et l’engagement pour la paix. Avec les prêtres et les consacrés, mais aussi avec les jeunes, nous avons partagé la joie d’entendre que le Seigneur ressuscité est avec nous dans la barque, et que c’est lui qui la guide vers l’autre rive. Et enfin, au cours de la dernière messe, au stade de Bangui, en la fête de l’apôtre André, nous avons renouvelé notre engagement à suivre Jésus, notre espérance, notre paix, Visage de la Divine Miséricorde. Cette dernière messe a été merveilleuse : elle était pleine de jeunes, un stade de jeunes ! Mais plus de la moitié de la population de la République centrafricaine est composée de mineurs, ils ont moins de 18 ans : une promesse pour aller de l’avant ! Je voudrais dire un mot sur les missionnaires. Des hommes et des femmes qui ont laissé leur patrie, tout… Ils sont partis là-bas, jeunes, menant une vie faite de beaucoup, beaucoup de travail, dormant parfois sur la terre. À un moment, j’ai trouvé à Bangui une sœur, elle était italienne. On voyait qu’elle était âgée : « Quel âge avez-vous ? Lui ai-je demandé. — 81. — Ah mais ! Ce n’est pas beaucoup, deux ans de plus que moi ! » Cette sœur était là depuis l’âge de 23-24 ans : toute la vie ! Et comme elle, il y en a beaucoup. Elle était avec une petite fille. Et la petite fille, en italien, l’appelait « Grand-mère ». Et la sœur m’a dit : « Mais moi, je ne suis pas vraiment d’ici, mais du pays voisin, du Congo ; mais je suis venue en canoë, avec cette petite fille. » Ils sont comme ça, les missionnaires : courageux ! « Et que faitesvous, ma sœur ? — Mais, je suis infirmière et ensuite j’ai un peu étudié ici et je suis devenue obstétricienne et j’ai fait naître 3 280 bébés. » Voilà ce qu’elle m’a dit. Toute une vie pour la vie, pour la vie des autres. Et comme cette sœur, il y en a beaucoup : beaucoup de 259
sœurs, beaucoup de prêtres, beaucoup de religieux qui brûlent leur vie pour annoncer Jésus-Christ. C’est beau de voir cela. C’est beau. Je voudrais dire un mot aux jeunes. Mais ils sont peu nombreux, parce que la natalité est un luxe, semble-t-il, en Europe : natalité zéro, natalité 1 %. Mais je m’adresse aux jeunes : réfléchissez à ce que vous faites de votre vie. Pensez à cette sœur et à tant d’autres comme elle, qui ont donné leur vie et beaucoup sont mortes là-bas. La mission, ce n’est pas faire du prosélytisme : cette sœur me disait que les femmes musulmanes allaient chez elles parce qu’elles savent que les sœurs sont de bonnes infirmières qui les soignent bien et qui ne font pas le catéchisme pour les convertir ! Elles donnent un témoignage ; et puis pour ceux qui le veulent, elles font le catéchisme. Mais le témoignage : c’est la grande mission héroïque de l’Église. Annoncer Jésus-Christ par sa vie ! Je m’adresse aux jeunes : pense à ce que tu veux faire de ta vie. C’est le moment de réfléchir et de demander au Seigneur qu’il te fasse entendre sa volonté. Mais n’excluez pas, s’il vous plaît, cette possibilité de devenir missionnaires, pour apporter l’amour, l’humanité, la foi dans d’autres pays. Non pas pour faire du prosélytisme, non ! Cela, ce sont ceux qui cherchent autre chose qui le font. La foi se prêche d’abord par le témoignage et ensuite par la parole. Lentement. Louons ensemble le Seigneur pour ce pèlerinage en terre d’Afrique, et laissons-nous guider par ses paroles clés : « Soyez fermes dans la foi, n’ayez pas peur » ; « Vous serez mes témoins » ; « Passons sur l’autre rive ! ».
260
RAPPORTS SUR LA VISITE DU PAPE FRANÇOIS DE L’EGLISE CATHOLIQUE ET DE LA COMMUNAUTE MUSULMANE78
RAPPORTS DE L’EGLISE CATHOLIQUE
I – COMITÉ DE COORDINATION
1. 2. 3. 4. 5.
Président de la CECA Nonciature SG de la CECA Chancelier de Bangui 2 délégués de chaque diocèse
II – COMMISSIONS
1. 2. 3. 4. 5. 6. 7. 8.
Commission pour le protocole, l’accueil et l’hébergement Commission pour la liturgie Commission pour les affaires économiques (finances) Commission pour la sécurité Commission pour la restauration Commission pour la Logistique et matériel Commission pour les médias Commission pour la santé
78
L’objectif de cette partie est de montrer comment chaque communauté a travaillé pour organiser le voyage du Pape. Certaines medias parlent à tort, souvent de la guerre des religions en Centrafrique, chrétiens contre musulmans. Cependant, voire ces différentes communautés travailler avec zèle et parfois par des rencontres communes, c’est vraiment un témoignage à donner et rendre public.
261
III - TERMES DE RÉFÉRENCE
1.
Comité de coordination
Définir et présenter la visite pastorale du Saint Père dans toute sa portée : o Temps o Délégués nationaux et internationaux o Budget o Célébrations Conceptualiser et valider les termes de références de chaque commission Mise en place et suivi des commissions Relations nationales et internationales Evaluation 2.
Commission pour le protocole, l’accueil et l’hébergement
Établir son code éthique Application de l’agenda établi (avant – pendant et après l’évènement) Accueil des délégués nationaux et internationaux Définir et règlementer les parkings Disposition protocolaire pendant les temps forts de la visite ; Identifier les lieux d’accueil : o Communautés religieuses o Institutions religieuses o Familles o Hôtels Travail en symbiose avec les commissions pour la sécurité, la restauration… 3.
Commission pour la liturgie
Établir son code éthique 262
Conception d’une liturgie inculturée valorisant notre Église particulière Coordination des activités liturgiques (chorale, lecteurs, enfants de chœur, danseuses, vêtements liturgiques) ; Conception des carnets (célébration, et chants) Sonorisation à la hauteur de l’évènement. 4.
Commission pour les affaires économiques (finances)
a) Mission La Commission des Affaires Economiques (Finances) a pour missions de: établir le budget de l’organisation à partir des budgets du Comité de Coordination et des différentes commissions ; ouvrir un compte destiné à recevoir les ressources destinées à l’organisation de la visite du Saint Père ; lancer les appels à contribution ; collecter les ressources ; financer les activités éligibles arrêtées par le Comité de Coordination dresser un rapport moral et financier à la fin de l’évènement.
b) Ressources du comité de coordination
Les ressources du Comité de Coordination proviennent :
i.
Des appels à contributions lancés :
aux diocèses aux paroisses aux mouvements, fraternités et groupes 263
aux congrégations religieuses aux personnes morales aux bienfaiteurs.
ii. Du Gouvernement
La contribution exceptionnelle du Gouvernement Le Saint Père est Chef d’Etat. Sa visite revêt le double caractère de pastorale et politique. Le Comité de Coordination pourrait intégrer une contribution exceptionnelle du Gouvernement.
1.
Des activités génératrices de revenus
Confection de pagnes, tee-shirts, casquettes, porte-clés etc.
2.
Des Dons, legs et autres libéralités
Le Président du Comité de Coordination est l’Ordonnateur Principal des dépenses. Il peut se faire suppléer par un Ordonnateur dûment mandaté.
Les dépenses à exécuter, pour être éligibles, doivent être prévues dans le budget des différentes Commissions ou du Comité de Coordination et avoir revêtues de l’accord du Président du Comité de Coordination ou de son suppléant.
La validation de toute dépense est conditionnée par la présentation de trois (3) factures pro forma.
264
Les chèques émis par la Commission des Affaires Economiques et destinés aux prélèvements sur le compte du Comité de Coordination seront revêtus de la double signature du Président du Comité de Coordination ou de la personne dûment mandatée par lui et de la Présidente de la Commission Finances.
Les chèques relatifs aux dépenses arrêtées sont remis aux présidents des commissions sur décharge à la présidente de la Commission des Affaires Economiques, à charge pour ceux-ci de justifier lesdites dépenses exécutées et d’en dresser rapport à soumettre au Comité de Coordination.
Les montants en espèces versés aux présidents des Commissions obéissent à la même règle. (Situation exceptionnelle)
Les Commissions et le Comité de Coordination disposent d’un délai de trente (30) jours à partir de la fin de la visite papale pour présenter leurs justificatifs à la Commission des Affaires Economiques.
c) Fin de mission
La mission de la Commission prend fin après la présentation du rapport moral et financier de l’organisation. 5.
Commission pour la sécurité
Établir son code éthique Application de l’agenda établi (avant – pendant et après l’évènement) Identification des agents d’accueil : 265
La Commission pour les Médias aura comme piliers normatifs du travail intrépides : la vérité, la rigueur, l’exactitude, l’intégrité, l’équité, l’imputabilité… dans le respect de la vie privée et la protection des sources de ses informations. Bref, la Commission pour les Médias est invitée à un autocontrôle strict de l’information à donner au public Dans la totale liberté, la Commission a le droit de chercher et de publier honnêtement l’information. Elle mettra à la disposition du public les faits dont elle connaît l’origine, sans aucune falsification ou désinformation ; et utilisera dans la mesure du possible, les moyens nécessaires et équitables pour obtenir des informations exactes : les photographies et les documents sonores – écrits ou visuels. Elle ne ménagera aucun effort de rectifier toute information publiée et révélée inexacte et nuisible. Elle veillera sur les sources des informations publiées afin d’éviter le danger du plagiat, la calomnie, la médisance, les accusations sans preuves, le mensonge, la déformation des faits…. qui sont considérés comme des fautes professionnelles les plus graves.
1.
La mission de la Commission pour les Médias.
La Commission pour les Médias a comme mission principale : a) Sensibiliser : Elle doit sensibiliser les populations centrafricaines sur l’événement de la Visite Apostolique et Pastorale du Saint Père, le Pape François en terre centrafricaine ; Elle doit prendre et établir des contacts avec les organes de presses tant au niveau national et international ; Elaborer des spots publicitaires liées à l’événement ; Elaborer des contenus des annonces, des magazines, des articles de presses ; Faire des appels à contribution ; Organiser les micros balades b) Couvrir l’événement : 266
Assurer la coordination des organes de presses locaux et internationaux ; Etudier les dossiers d’accréditations en étroite collaboration avec l’Agence Centrafrique Presse « ACAP » et le Ministère de la Communication ; Organiser et convoquer les conférences de presses pour donner les informations fiables et viables à l’opinion nationale et internationale ; Retransmettre l’événement en live pour permettre une bonne écoute ; c) Protéger et archiver : Collecte des données : photos, articles, documents sonores et écrits Organiser un album photos ; d) Réseaux sociaux Créer un site web pour communiquer : face book, tweeter, blog 6.
Commission pour la santé
Établie son code éthique Gestion des urgences liées à la santé avant – pendant et après l’évènement.
267
RAPPORTS SUR LA VISITE DU PAPE FRANÇOIS PAR LA COMUNAUTE MUSULMANE DE LA MOSQUEE CENTRALE DE BANGUI. (Km5 dans le troisième arrondissement de Bangui).
Dans le cadre des préparatifs de la visite du PAPE François au PK5 dans le troisième arrondissement de Bangui et, sur l’initiative de l’Imam principal de la Mosquée Centrale de Bangui, un Comité Technique pour l’organisation dudit déplacement a été mis en place. Ce dernier, placé sur la supervision des responsables de la Coordination des Organisations Musulmanes de Centrafrique (COMUC) est composé de 20 personnes. Aussitôt désignés, les responsables du comité ont mis en place trois sous-commissions à savoir, la sous-commission accueil-protocole ; la sous-commission sécurité et la sous-commission accueil et sensibilisation. I – DES ACTIVITES Neuf (9) séances ont été tenues dont cinq (5) réunions ordinaires et quatre (4) séances consacrées à la plénière. Les séances en plénière ont connu la participation des Imams, celle des responsables du comité technique ainsi que les membres des différentes commissions. 1-1 Des Réunions Ordinaires Les réunions ordinaires qui ont été tenues par le comité technique d’organisation ont pour objectif de : - réfléchir sur la préparation, l’organisation et le déroulement de la cérémonie officielle de la visite du Pape François. - l’élaboration du chronogramme du déroulement des activités ; - l’élaboration des règles protocolaires à observer ; - l’élaboration du code de conduite à l’usage des membres des différentes commissions. - l’élaboration d’une lettre ouverte à l’intention du Pape François ; Les membres qui composent ces différentes commissions sont issus de toutes les entités en majeur partie affiliées à la Coordinations des 268
Organisations Musulmanes de Centrafrique (COMUC) qui est une plate-forme des organisations de la société civile musulmane en raison de deux (2) représentants choisis par entité. Les entités identifiées et retenues sont les suivantes : - Association des Cadres Musulmans de Centrafrique (ACCM) ; - Organisation de la Jeunesse Musulmane de Centrafrique (ORJEMUSCA) ; - Association des Commerçants de PK5(ACK) ; - Bureau de la Femme Musulmane de Centrafrique (BFMCA) ; - Association des Déplacés du PK5 ; - Les Autos – défenses du PK5 ; - Les Forces Armées Centrafricaines (FACA) habitant le troisième arrondissement composé essentiellement des musulmans ; - Les Politico – Militaires. 1-2 Des Séances plénières.
Quatre (4) séances de réunions en plénière ont eu lieu pour permettre de valider les différents projets de budgets élaborés et proposés par chaque commission. Des comptes rendus sont régulièrement faits à l’Imam de la mosquée centrale ainsi qu’aux autres Imams impliqués dans le processus. Le but de l’exercice était de les informer de l’état d’avancement des travaux et, éventuellement d’apporter des corrections et des contributions sur certains aspects des activités réalisées.
II. Des activités avec les partenaires impliqués dans l’organisation de la visite papale. Plusieurs réunions techniques ont été tenues avec les responsables de la sécurité auprès du Vatican, de la Minusca, ainsi que des groupes d’Auto – défense du PK5. Elles ont concerné principalement les aspects protocolaire et sécuritaire de l’arrivée du saint–père à la mosquée centrale de Bangui. 269
Sur le plan protocolaire et organisationnel, elles ont impliqué les présidents de la commission protocole, Monsieur Vincent SAKANGA ; celui de la commission sécurité, Aurélien ZINGAS tous membres de l’Archevêché. A l’issue de ces rencontres, une balle de pagne portant l’effigie du Pape François a été remise au Pasteur KOSSINGOU Gaston pour la communauté chrétienne du PK5 par l’Archevêque de Bangui Dieudonné NZAPLAINGA. Sur le plan sécuritaire, les différentes séances ont permis d’impliquer pleinement les groupes d’auto-défenses du PK5 dans le schéma conçu pour la sécurisation du Pape François. Pour ce faire, le service protocolaire de l’Etat fut également sollicité pour une meilleure organisation de la cérémonie. Une Conférence de Presse conjointe a été animée par l’Imam principal de la Mosquée Centrale, Ahmadou Tidjani MOUSSA NAIBI, à ses côtés, on notait la présence de Saliou NDIAYE l’imam adjoint de la mosquée de Lakouanga ; du docteur Aboubakar MOUKADAS-NOURE, enseignant chercheur à l’université de Bangui, de ALI OUSMAN, coordonnateur de la COMUC et Dieudonné NZAPLAINGA, archevêque de Bangui. La conférence a consisté à expliquer et situer l’opinion nationale et internationale sur l’état d’avancement du préparatif de la visite du PAPE François au PK5. La facilitation a été faite par Joachin MAGOMBASSA, Directeur en matière de Communication au Ministère de la Réconciliation, du Dialogue Politique et de la Promotion de la Culture Civique.
270
18. DU DEROULEMENT DE LA CEREMONIE Mise en place terminée le lundi 30 novembre 2015 à 5 heures 30 minutes avec la mise en place des dispositifs sécuritaires à l’intérieur et l’extérieur de la mosquée Centrale ; puis à l’intérieur et aux alentours de l’école KOUDOUKOU. Arrivée du Pape François à la mosquée centrale de Bangui à 08 heures 15 minutes, accompagnée d’une forte délégation du Vatican et de l’Archevêché conduite par Dieudonné NZAPALAINGA, Archevêque de Bangui. Il est accueilli par une fillette qui lui a prononcé les mots de bienvenue des communautés musulmane et chrétienne du PK5. La cérémonie a été rehaussée par la présence de deux (2) membres du gouvernement, leur excellence ABDALLAH KADR, ministre des finances et du budget et Monsieur MAHAMAT ATEIB, ministre délégué en charge de promotion de l’élevage. La lecture du programme de la cérémonie a été faite par le docteur Aboubakar MOUKADAS-NOURE, président du comité technique d’organisation. Dans sa présentation, il a souhaité la bienvenue au Pape François ainsi que sa délégation au nom de la communauté musulmane du PK5. Puis, il a invité Monsieur HAMISSOU KABARA, imam principal de la Mosquée ATTIQ à prononcer une invocation pour la prière d’ouverture. Ensuite, Ahmadou Tidjani MOUSSA NAIBI, imam de la Mosquée Centrale est invité à prendre la parole pour prononcer son allocution de bienvenue au Pape François, au nom de la communauté musulmane de PK5 pour avoir accepté de venir rendre visite à toute la population de ladite localité. Dans son discours, l’imam Ahmadou Tidjani MOUSSA NAIBI a remercié très chaleureusement la communauté internationale en l’occurrence, la Minusca, la Sangaris et l’Eufor pour leur engagement et détermination à rétablir la sécurité et la paix en Centrafrique. Il a par ailleurs, reconnu les efforts déployés par le gouvernement pour garantir la paix et la coexistence pacifique entre les Centrafricains. Pour lui, malgré les efforts de la communauté internationale, la crise continue à perdurer jusqu'à ce jour. Enfin, il a réitéré que la cohésion sociale existe toujours au PK5 entre 271
musulmans et chrétiens puisque, les deux communautés sont condamnées à vivre ensemble. Le Pape François dans son allocution a invité les musulmans et chrétiens à accepter le pardon, l’amour, la paix et la réconciliation. Il a insisté sur le terme « Salam » qui signifie paix en Islam. Il a salué les efforts des musulmans à œuvrer pour la paix et la cohésion sociale. Par la suite, il a réitéré que l’Eglise Catholique va renforcer son engagement pour encourager les différentes communautés confessionnelles à promouvoir un dialogue interreligieux en vue de favoriser une cohabitation pacifique. Selon lui, les Centrafricains doivent se mobiliser autour des prochaines élections qu’il souhaite libres et démocratiques. Enfin, le Pape François a clôturé sa visite par un détour avec l’Imam de la mosquée centrale dans le char papal en faisant le tour de l’école KOUDOUKOU où l’attendaient les ressortissants du Congo Démocratique ainsi que la communauté chrétienne résidente dans le km5. COMMISSION ACCUEIL ET PROTOCOLE
I - Des activités. Suite à une réunion tenue le lundi 23 Septembre 2015 à 11 heures à la Mosquée Centrale de Bangui ayant permis la mise en place d’un Bureau composé de cinq (5) membres et des différentes sous commissions à savoir : - Service Logistique ; - Service Assainissement ; - Service Accueil. Une réunion extraordinaire s’en est suivie pour définir les attributions des trois (3) services techniques et mettre immédiatement à leurs dispositions les moyens financiers pour la réalisation de leurs activités.
272
II – Des difficultés rencontrées. Difficultés d’ordre pratique liées à : - L’incompréhension relative à la prise en charge des personnes employées ; - L’effectif pléthorique des membres de ladite commission ; - Un manque de coordination réelle entre le protocole d’Etat, l’Archevêché et la Commission Accueil et Protocole ; - La prise en charge énorme des imprévus inhérents à nos activités ; - L’encaissement des menaces physiques et verbales ; - Perte des matériels enregistrés (02 Chaises, 01 Divan, 05 Pelles, 04 Râteaux, 03 Sceaux et 100 Piquets + Cordes. Recommandations. 1- Compte tenu des énormes dépenses effectuées, la commission Accueil et Protocole souhaite à ce qu’une somme soit ajoutée au reliquat de 18050FCFA pour la motivation des membres. 2- A cela s’ajoute, les décisions assorties d’une réunion quelconque doivent être tenues et gardées en toute confidentialité.
COMMISSION MOBILISATION
SENSIBILISATION
ET
I – Activités réalisées. Après avoir recensé tous les quartiers environnant du PK5, les membres désignés ont démarré les séances de sensibilisation à pieds dès lundi 23 au mercredi 25 novembre 2015. Les travaux se sont poursuivis par motos du jeudi 26 au vendredi 27 novembre 2015. Quant à la journée du samedi 28 novembre 2015, l’équipe a utilisé une Pic – up équipé de moyen de sonorisation pour finaliser ses activités. Tout est déroulé dans de très bonnes conditions. II – Difficultés rencontrées. - La commission a débuté ses travaux avec un effectif de 15 membres jusqu'à la date du vendredi 27 novembre 2015 où le Comité Technique d’Organisation lui a remis une nouvelle liste composée de 273
20 membres plus un superviseur. Ce qui a fait que les noms de certains membres n’apparaissent pas et cela a suscité des mécontentements au sein du groupe. Aussitôt, le président a saisi le Comité Technique d’Organisation qui a pu trouver une solution en leur délivrant des badges pour pallier à ce problème. - Compte tenu de la panne survenue au niveau du groupe électrogène dans la journée du 28 novembre 2015, après la réparation la sensibilisation a commencé un peu tard de 11heures à 18 heures. Recommandations. La commission sensibilisation et mobilisation recommande : 1 - Rencontre périodique de tous les membres des différentes commissions pour assurer le suivi/évaluation des activités réalisées sur le terrain. 2 – la réalisation avec médiatisation des activités réalisées avec tous les membres des différentes commissions. 3 -le partage d’un repas fraternel entre les membres des différentes commissions pour consolider les relations établies durant les préparatifs de cet évènement qui a des enjeux à la foi historique, politique et religieux.
274
COMMISSION SECURITE I –Activités. Dans l’enclave du PK5, le comité d’Auto – défense du km5 qui a pour mission d’assurer la défense et la sécurité de ses quartiers. La commission a retenu deux (2) éléments d’Auto – défense par base pour les associer avec quatre (4) jeunes déplacés de la Mosquée Centrale, ce qui donne un effectif de 124 personnes. L’objectif consiste à sécuriser la zone placée sous leur contrôle dans le but de rapporter tous renseignements utiles et débusquer toute personne mal intentionnée qui permettrait de perturber la tranquillité des paisibles citoyens pendant la visite du Pape. Dès 4 heures 30 minutes du matin à l’intérieur et à l’extérieur de la Mosquée Centrale, 124 éléments d’Auto – défense ont été mobilisés pour appuyer les contingents de la MINUSCA dans les dispositifs sécuritaires afin d’assurer la protection du Pape François. Dix (10) éléments du contingent Burundais ont été mobilisés pour être positionnés au côté Est de la Mosquée Centrale, sur l’Avenue Bea – Rex et 10 autres éléments composés des Gabonais et Congolais, derrière et à l’intérieur de l’Ecole Koudoukou. Enfin, 60 éléments de l’auto-défense ont été déployés à l’extrémité de l’Avenue Boganda – Monument Koudoukou, appuyés par les éléments de sécurité du Vatican qui ont permis d’accompagner la délégation Papale à la Mosquée Centrale et en direction du Stade 20 000 places. II – Difficultés rencontrées. Les plaintes enregistrées au sein de l’équipe se situent au niveau de la prise en charge alimentaire des éléments de sécurité : - Les éléments de sécurité se plaignent d’être mal nourris en terme d’alimentation ; - Le montant de la ration alimentaire alloué à chaque élément est insignifiant.
275
19.
TEMOIGNAGES79
19.1
TEMOIGNAGE DONNE PAR S.E. MADAME CATHERINE SAMBA-PANZA, PRESIDENTE DE LA REPUBLIQUE CENTRAFRICAINE, CHEF DE L’ETAT DE TRANSITION, LORS DE LA FETE DU PAPE A LA NONCIATURE APOSTOLIQUE DE BANGUI, LE 12 MARS 2016. Excellence, Monsieur le Nonce Apostolique, Monseigneur Dieudonné Nzapalainga, Archevêque de Bangui, Distinguées Personnalités, Mesdames et Messieurs,
J’avoue que ce soir, je suis bluffée (rires). Quand je reçois le Nonce Apostolique officiellement, il dit un ou deux mots, sans plus ! Et là, je découvre qu’il a le verbe ! Et qu’il peut parler longuement ! (rires) En tout cas, je voudrais sincèrement vous remercier, Excellence, de m’avoir associée à cette célébration du 3ème anniversaire de l’élection du Pape. J’avais deux possibilités : soit venir à la Messe, y prendre part et continuer avec le cocktail ou venir simplement au cocktail. En tant que chrétienne, j’estimais qu’il me fallait d’abord venir rendre grâce à Dieu avec vous tous et puis
79
Un évènement tel que le voyage du Pape marque, laisses des traces. Les témoignages sont nombreux, nous en avons choisi quelques-uns que nous vous proposons.
277
continuer avec le cocktail. J’ai eu cette opportunité cet après-midi et rendons gloire à Dieu pour cela. (Applaudissement).
Le Nonce Apostolique en m’envoyant l’invitation m’a dit de faire un témoignage sur la Venue du Pape en Centrafrique et les bienfaits de cette Visite. Après avoir écouté Monseigneur Nzapalainga longtemps, après avoir écouté le Nonce Apostolique, je n’ai plus grand’ chose à dire. J’ai juste un ou deux témoignages à faire, déjà parce que vous êtes debout, et que vous devez être fatigués, ensuite parce que l’essentiel a été dit et qu’il faut éviter des répétitions inutiles.
Ce que je peux apporter comme témoignage c’est que quand le Nonce Apostolique est venu m’annoncer le souhait du Pape de rendre visite à la République Centrafricaine, il s’est tout de suite installé comme une complicité entre la Nonciature, l’Archevêché et les Autorités de la Transition. J’ai commencé par dire au Nonce « je ne sais pas trop écrire ce genre de lettre, pouvez-vous m’aider à rédiger cette lettre d’invitation pour le Pape ? » Il l’a rédigée, il me l’a ramenée, je n’ai fait que poser ma signature au bas de la lettre d’invitation.
Ensuite il est revenu quelque temps après, préoccupé, « Madame la Présidente, le Pape veut bien venir mais la Transition va durer combien de temps ? Est-ce que vous serez encore là quand le Pape viendra ? Le Pape ne souhaite pas être là au moment des campagnes électorales. Rassurez-moi sur les dates des élections». Je lui ai dit : « revenez dans quelques temps, nous allons finaliser le chronogramme électoral et je pourrai vous confirmer dans quel période le Pape pourrait venir». C’est ce qu’il a fait. Quand il est revenu après nous être concertés avec l’ANE, le cadre de concertation, le comité stratégique de préparation des élections… je lui ai donné une date, il était dubitatif… « Vous êtes sûre de pouvoir organiser les élections à cette date-là ? » Je dis : « Je suis sûre, Monseigneur, que nous allons 278
organiser les élections à cette date-là, parce que je veux que ces élections soient organisées avant la fin de l’année».
Alors on a commencé à préparer ensemble, de manière coordonnée avec la Nonciature, l’Archevêché et les Autorités de la Transition, l’arrivée du Pape, mais quand on écoutait les médias internationaux c’est à peine si on n’avait pas de doutes sur notre capacité à accueillir le Pape. Un soir, je regardais une émission [très], très prisée sur TV5 Monde – actualités africaines, le sujet était la Visite du Pape en Centrafrique et deux autres sujets. Arrivé sur la Centrafrique, il y avait juste une phrase : « A moins d’un miracle, le Pape ne viendra jamais en Centrafrique ». Je me suis sentie interpellée, j’ai réagi en disant qu’il n’est pas possible que de telles positions soient prises ! Alors, j’ai commencé à répondre à toutes les interviews qui m’étaient sollicitées sur ma vision de la Venue du Pape, et à chaque fois, j’ai affirmé ma foi et ma détermination et ma volonté à ce que le Pape vienne, parce que j’y croyais ! (applaudissement). Je croyais que le Pape en arrivant à Bangui allait apporter quelque chose, que ce moment allait être un moment unificateur pour les centrafricains. J’ai été confortée dans cette détermination – et il faut que je lui rende hommage - par le Président Obiang Nguéma Mbasogo. Après les évènements du 26 septembre plus aucun Chef d’Etat ne croyait en la Transition, ni en moi, mais le Président Obiang m’appelait régulièrement, et un jour son Ambassadeur était venu dans mon bureau en me disant : « le Président veut vous parler ». Il m’a passé une communication avec le Président Obiang qui m’a dit : « Madame la Présidente, la Guinée Equatoriale était la dernière catégorie des pays du monde, on nous prenait vraiment pour des moins que rien, c’est quand le Pape est venu dans notre pays que nous avons décollé. Madame la Présidente, faites tout pour que le Pape vienne dans votre pays ! Vous allez en tirer tous les bénéfices ! (applaudissements) J’ai cru en cela, et j’ai dit : « Monsieur le Président, je vais me battre pour que le Pape vienne et que nous décollions réellement comme la Guinée Equatoriale. L’Ambassadeur doit être quelque part et je pense qu’il peut témoigner de cet échange que j’ai eu avec le Président Obiang Nguéma.
279
Alors les préparatifs ont commencé, il m’a été présenté un budget d’un milliard : il fallait des coiffures, il fallait des tenues, il fallait ceci, il fallait cela… Avec le Nonce et l’Archevêque on a dit : « Le Pape vient pour les pauvres, cet argent-là, si on peut l’utiliser pour les pauvres, ce serait bien, nous sommes un pays pauvre, nous ne pouvons pas nous permettre des frais démesurés, inconsidérés ». Avec mes collaborateurs, notamment mes collaboratrices parce que les femmes elles sont cadrées dans leurs dépenses. Avec la Présidente du Comité « Pape », qui est la Ministre d’Etat, Madame Koyara et son assistante la Ministre Conseillère Izamo, on a coupé, on a coupé, on a coupé… on a dit pourquoi c’est pour la Visite du Pape que les Protocoles doivent aller se coiffer ? Pourquoi pour la Visite du Pape, il faut amener les tenues au pressing ? On fera avec ce qu’on a, sans plus ! Et on est arrivé à arrêter un budget de 300 millions [CFA]. Et je vais vous surprendre, à la fin de la Visite du Pape, le Comité « Visite du Pape » m’a ramené 50 millions ; ces femmes ont tellement bien géré qu’elles ont pu économiser 50 millions (applaudissement). On a dépensé pour tout ce que vous avez vu, 250 millions, or évidemment les programmes de réhabilitation des avenues etc., et tout cela… mais avant cela, j’avais quand même des petits doutes, alors j’ai pris ma Médaille Miraculeuse, j’ai commencé à la porter, et j’ai dit à Catherine Labouré : « Tu es mon homonyme, prie pour moi ! Prie avec la Sainte Vierge pour moi ! » Et tous les jours j’avais ma Médaille Miraculeuse, et je priais mes intentions « la Venue du Pape, la Venue du Pape, la Venue du Pape » (applaudissement). Je priais la Vierge Marie en lui disant : « Tu es ma Mère, tu es une femme comme moi ; tu ne vas pas me faire honte ! Il faut que le Pape vienne ! Il faut qu’on démontre que quand il y a une mère à la tête d’un pays, tout est possible, et quand on a la foi, tout est possible ». Et j’ai prié des neuvaines, des neuvaines, des neuvaines avec l’intention de la Visite du Pape, et je rends grâce à Dieu d’avoir écouté mes intentions et d’avoir répondu à mes invocations et à mes prières. Alléluia ! (applaudissement).
Dieu a manifesté pour la Visite du Pape beaucoup de miracles. A chaque fois que Mgr Nzapalainga m’appelait à 22 heures ou à 23 heures, je savais qu’il y avait un problème ! Dès que je voyais « Nzapalainga » je disais : « Monseigneur, qu’est-ce qu’il y a 280
encore ! » Il me dit : « Présidente, on a besoin de temps, on a besoin de telle chose, on a besoin de telle chose » et le lendemain je disais au gouvernement : « ce qu’on peut faire, qu’on [le] fasse, qu’on fasse des rallonges qu’il fallait… » et puis, dans l’organisation on a dit [que] il fallait des écrans géants, parce tout le monde ne peut pas être au Stade 20.000 places, tellement il y a un engouement pour être présent à la Messe, qu’il fallait apprêter le deuxième stade et surtout à la Cathédrale au moment de la prière, il fallait des écrans géants pour l’extérieur. Le Nonce Apostolique et l’Archevêque m’ont dit : « On va prendre moitié-moitié, l’Eglisecatholique est prête à prendre et si le gouvernement peut compléter ». Ok. Les écrans géants devaient monter dans l’avion, on m’appelle, on me dit : « Ils sont tellement longs qu’ils [ne] peuvent pas monter dans l’avion ». J’ai dit : « Mon Dieu ! Ça c’est le diable qui est en train de nous faire des siennes ». J’ai dit : « Qu’est-ce qu’il faut faire ? » On me dit : « Ah, il faut louer, il faut mettre ces écrans géants dans un cargo Air France » - « Et ça couterait combien ? » « Il faut 38 millions pour la location et 12 millions - quelque chose comme ça – pour le transport, il faut environ 50 millions. Et ces 50 millions doivent être positionnés sur le compte de la Nonciature d’ici deux jours ». Je dis : « Mon Dieu, je vais trouver ça où ? » Le lendemain, l’Ambassadeur de la Guinée Equatoriale arrive et il me dit : « Il y a le Président Obiang qui envoie un messager avec sa petite contribution pour l’arrivée du Pape ». Je reçois l’envoyé spécial, et je le vois dans une mallette toute déchirée me donner 50 millions (applaudissement). Toutes mes collaboratrices se sont mises à pleurer. Dieu venait de nous donner les 50 millions dont on avait besoin ! Et j’ai dit à Madame Izamo : « Dès le lendemain tu vas déposer ça sur le compte du Nonce Apostolique, comme ça on va transférer ça en Italie pour que les écrans géants viennent ! » Voilà comment on a pu avoir des écrans géants, grâce à un miracle que Dieu nous a fait avec la somme exacte de ce dont on avait besoin. Et ça j’ai dit que je le témoignerai à chaque fois, parce qu’il faut témoigner, cela c’est très important, et rendre gloire à Dieu pour cela… Mais avant d’arriver à ça, un samedi matin Mgr Nzapalainga m’appelle et il dit : « Il faut que je vous voie » je dis : « Ah bon ? » « Oui, le Général chargé de la Sécurité du Pape veut vous voir ». Je dis « Beh, c’est samedi », il dit : « Oui, on vient à la maison ». « Le 281
Nonce sera là ? » « Oui. Il faudrait que vos Ministres de la Défense, de la Sécurité, tout ça soit là ». J’ai dit : « Bon, ça sent le roussi ». Alors je les ai tous appelés et on était là, alors le Général me dit : « Madame la Présidente, jusqu’au dernier moment, on peut changer le format de l’arrivée du Pape, il est possible que le Pape ne vienne pas ». Je regarde le Nonce, je regarde l’Archevêque et je dis : « Mon Dieu : qu’est-ce qu’on va faire ? » Alors, je regarde ce Général et je lui dis « le Pape va venir ! J’y crois, nous sommes tous des chrétiens, nous y croyons, nous avons la foi ! Le Pape va venir ». Il me regarde en me disant : « Ca, ce qu’elle dit là vraiment, elle ne sait pas qu’il y a des problèmes de sécurité etc… » Je dis : « Le Pape va venir » et Monseigneur m’a soutenue, et le Nonce Apostolique a soutenu. On est sorti de ma résidence en se disant : « Le Pape va venir le dimanche et on ne va rien changer dans le programme ! » Et le Pape est venu…
Mais avant que le Pape ne vienne, le samedi, puisque je devais le recevoir au Palais, je regarde les préparatifs du Palais : il n’y avait rien. Pas une tente, pas de chaises, rien, j’ai dit : « Mon Dieu : comment je vais recevoir le Pape dans ces conditions ? » J’ai décidé d’aller au Stade [par trois fois elle fait le bruit d’un marteau qui tape], ils sont en train seulement de taper des bois, les choses comme ça, j’ai dit : « Mon Dieu : comment on va recevoir le Pape dans ces conditions ? ». J’ai dit : « Bon, on fait avec ce qu’on a, là maintenant, c’est trop tard ». Et quand je vais à l’aéroport, je vois l’organisation : le défilé des militaires ; j’ai vu la petite estrade qu’on a organisée etc., et tout…J’ai vu toutes ces filles, alignées qui étaient en train de dire [et elle chante en Sango, le refrain que les petites filles chantaient : « Pape gana Bangui yo i yô/Pape lango na Bangui yo i yô/ Le Pape vient à Bangui, le Pape dort à Bangui»], et la suite vous la connaissez. J’étais impressionnée. Et sur la route, j’ai vu tous ces scouts, la main dans la main, et ces foules que je n’ai jamais vues !... là, en train de vouloir accueillir le Pape. Je dis « bon, les foules dans la rue… » Quand je suis arrivée au Stade : ah ! J’étais bluffée, c’était beau ! Tout ce jaune ! Tous ces… vraiment, incroyable ! J’ai dit : « Ils vous ont fait ça à quel moment ? » Ils ont dit : « Toute la nuit ils ont travaillé », et voilà c’est bien fait, organisé. Mais quand les catholiques commencent à organiser quelque chose, bravo ! (applaudissement et rires)…Et on était tous là, assis, pleins de bonheur, de joie, en 282
attendant le Pape. J’étais à côté de Monsieur Oynanga, de l’Ambassadeur de France, et on entend « ouah ! » On s’est dit : « Ca y est, le Pape est là ! » Tout le monde est debout et on voit un petit chéchia, et c’est Monseigneur [sic] Kobine, l’Imam Kobine et son équipe qui sont en train d’arriver ! Là aussi, on était bluffé : l’accueil qui a été réservé à nos frères musulmans, ce jour-là, c’était incroyable ! (applaudissement). Vraiment, on a compris que quelque chose s’est passé ! Quand j’ai vu toute cette foule dans la tribune en symbiose, et vraiment en train de participer pleinement à cette Messe, je me suis dit, il s’est passé quelque chose ! Avant d’aller dans ma voiture pour accompagner le Pape, je n’ai pas pu m’empêcher de faire quelques pas de danse, tellement j’étais heureuse de ce résultat.
Quand on est arrivé à l’aéroport et que le Pape partait, le Général qui était tellement préoccupé par les problèmes de sécurité - et le Directeur Général du Protocole d’Etat est là – il m’a attrapée : « Thank you very much, Thank you very much, Thank you very much ! » Et toute la Sécurité du Pape a tenu à faire une photo avec moi parce que ça a été un souvenir poignant pour eux également. « Le Pape a été au Kenya, le Pape a été je ne sais pas où, mais ce n’était pas pareil ! En Centrafrique, c’était exceptionnel ! » (Applaudissement). Et ça, c’est quelque chose que nous avons vécu, que nous avons partagé, non seulement à Bangui, à l’intérieur du pays, au niveau de la diaspora…Partout dans le monde ; j’avais des appels de partout ! Des gens qui ne suivaient jamais KTO, qui suivent KTO pour suivre comment le Pape est arrivé à Bangui. Et ça, c’est un acquis qui a permis l’accalmie, qui a permis les élections et qui a permis ce que nous vivons en ce moment. Et j’ai tenu en plus du témoignage de l’Archevêque et du Nonce Apostolique à apporter ce témoignage. Dans tous mes discours officiels, je souligne la Venue du Pape comme un évènement unificateur qui nous a permis des avancées notables. Je vous remercie. Alors, bonne fête du Pape à tous !
283
19.2
TEMOIGNAGE DE SON EXCELLENCE MONSEIGNEUR FRANCO COPPOLA NONCE APOSTOLIQUE EN CENTRAFRIQUE LORS DE LA VISITE DU PAPE FRANÇOIS
C’est avec plaisir que je réponds à l’invitation qui m’a été faite de donner mon propre témoignage sur la Visite Pastorale du Pape François à Bangui et sur les conséquences de cette Visite dans la capitale et dans l’ensemble de la RCA. Rappelons que cette visite eut lieu trois ans après les débuts d’une crise très grave qui a conduit à la chute des institutions de l’Etat et qui a dissout les forces armées et la police, tandis que tout le pays restait à la merci de différentes bandes armées qui le pillaient et le saccageaient, tout en s’érigeant en bouclier de défense des populations d’une certaine confession religieuse, afin de se donner une certaine « respectabilité » et pour recruter plus facilement de la main d’œuvre. Ce n’est qu’au mois d’avril 2015 qu’on en est arrivé au plein déploiement des casques bleus des Nations Unies (environ 12.000 hommes, de différents pays), ce qui a tout de même stoppé la poussée offensive des deux principales milices qui s’affrontaient, et a été le début d’un long chemin: on espérait en effet que quelque chose puisse enfin permettre de reprendre le dialogue afin de trouver une issue de sortie pacifique à ce conflit. Pendant ce temps, les milices vivaient parce qu’ils dévalisaient les populations, les privant des fruits de leur propre travail et les réduisant presque à la faim. Dans la capitale, les musulmans s’étaient tous regroupés dans un seul quartier, le fameux « km 5 », et ils survivaient alors qu’ils étaient littéralement assiégés par la milice qui prétendait défendre les chrétiens et les animistes. Quelle folie de la part de cette même milice de vouloir affamer la population musulmane, et cela devant l’impuissance des forces internationales qui, cependant, avaient leur quartier général à moins de 2 kilomètres. On peut facilement imaginer la rancœur, la colère, la haine, les jugements superficiels que ces violences ont provoqués dans le cœur de tant de victimes et de leurs proches : il n’y a personne en Centrafrique qui n’ait été touché par cette guerre. 284
En 2015, la République Centrafricaine, n’avait plus ni armée, ni police, l’Etat n’avait pas non plus de quoi rémunérer ses fonctionnaires (les pays voisins, à tour de rôle, assuraient chaque mois le nécessaire), tout le monde était armé, et l’est encore (une grenade coûte moins de 0,20 €), la population se trouvait à la merci des petits délinquants ou des groupes armés, et le pays était devenu le dernier ou l’avant-dernier dans toutes les classifications mondiales…
Un tel pays ne pouvait qu’attirer le regard du pape qui, déjà au mois de juillet 2014, m’avait demandé si je pensais qu’une visite de sa part pourrait être utile. Et puis, l’épidémie d’Ebola (dans les pays limitrophes) nous avait dissuadés d’envisager de grands rassemblements ou des déplacements, et du coup la Visite fut programmée du 29 au 30 novembre 2015. Tandis que les mois d’été s’étaient déroulés sans épisodes particulièrement sanglants, il arriva que le 26 septembre, puis le 29 octobre (c'est-à-dire à peine un mois avant la Visite du pape) la capitale connut à nouveau de graves désordres, avec des dizaines de morts, des centaines de maisons pillées et brûlées, des milliers de personnes qui durent quitter, encore une fois, leur domicile pour trouver refuge dans des camps de déplacés… Et par surcroît, les deux milices, celle qui prétendait défendre les musulmans et celle qui prétendait défendre les autres (chrétiens et animistes), semblaient avoir la ville en main, sans que les forces internationales aient aucune possibilité réelle de les contrôler : animées de rage et de haine envers « l’ennemi », elles terrifiaient la population. Dans ces conditions, on pouvait tout à fait comprendre que la visite prochaine du pape suscitait de plus en plus des préoccupations : les journaux en parlaient et les centrafricains avaient l’impression que l’on voulait leur enlever ce rêve et ce grand espoir qu’ils caressaient. Le dernier des pays du monde, où aucun Chef d’Etat n’était venu depuis des années puisque la sécurité était impossible à garantir, ce pays-là avait attiré l’attention du pape : non seulement il voulait s’y rendre, mais il voulait aussi y passer la nuit et y ouvrir, par anticipation, la Porte Sainte de la Miséricorde… En dehors de Rome ! C’était du jamais vu ! Le samedi 28 novembre, aux actualités de 17h sur TV5 - chaîne de grande écoute dans le pays – on a entendu à la fin du journal, un reportage sur la visite du pape en Ouganda : « Demain, selon le programme, il est prévu que le Pape 285
François se rende à Bangui, en Centrafrique, mais on sait qu’il n’y ira pas »… Malgré ces préoccupations (plus ou moins sincères) quant à la sécurité du pape, l’Archevêque de la capitale et la Présidente de la transition continuaient leur travail, avec les dizaines de membres des deux comités de préparation de la Visite, celui de l’Eglise et celui de l’Etat, qui œuvraient en étroite collaboration, tandis que le pape, lui, relativisait les choses en déclarant qu’effectivement une chose lui faisait peur en Centrafrique : les moustiques ! Plus tard, à la Nonciature, il aurait confié aux évêques que, dès le départ, c’était comme une impulsion intérieure qui l’avait poussé à se rendre en RCA, et qu’il avait décidé de la suivre jusqu’au bout. Et c’est ainsi que le 29 novembre, quand, depuis la tour de contrôle de l’aéroport, on annonça à la radio nationale que l’avion du pape avait quitté l’Ouganda et était entré dans la zone aérienne centrafricaine pour se diriger vers Bangui, on a vu la population de la capitale descendre dans la rue et se poster sur le parcours des 10 km de M’Poko au Palais de la Renaissance. Au sortir de l’aéroport, les responsables de la sécurité ont alors fait monter le pape dans une voiture fermée, mais au bout de quelques centaines de mètres, ils ont fait arrêter le cortège papal au milieu d’une foule enthousiaste qui le pressait des deux côtés de la route. Le pape est alors sorti pour gagner la papamobile… Avec beaucoup de respect, la foule est restée sur les bas côtés de la route, mais ils avaient placé des pagnes sur le goudron où la voiture du pape devait passer… On les voyait danser de part et d’autre de la route, ivres de joie… Eux qu’on avait toujours eu l’habitude de voir le sourire aux lèvres mais qui depuis trois ans avaient basculé dans les larmes, les cris, les hurlements de panique, ils pouvaient enfin célébrer leur Dieu et laisser exploser leur joie de vivre, tout simplement. La Présidente de la République avait su se faire l’interprète de son peuple en saluant ainsi le pape : « Que la terre centrafricaine tressaille de joie, parce que Dieu a tourné son regard vers elle pour la sauver. Dieu a exaucé nos prières et il nous a envoyé le Messager de la Paix. Nous sommes sauvés ! » C’est de cette manière que les gens simples de Bangui, qu’ils soient catholiques, protestants, ou musulmans, sans distinction, ont accueilli le pape: oui, le pape était vraiment l’homme de Dieu, et à travers lui, c’était Dieu lui-même qui était venu les visiter, les bénir, les libérer des chaînes de 286
la haine, du ressentiment, du soupçon…C’était Dieu lui-même qui était venu à proclamer Bangui « capitale spirituelle du monde » , cette ville où l’on déconseillait fortement d’aller, et qu’il fallait éviter à tout prix, cette ville qui avait même connu dans les premiers mois de 2014 des épisodes de cannibalisme ! Alors que le Pape François traversait les rues de la ville qui étaient jonchées de pagnes, je ne pouvais m’empêcher de penser aux foules qui avaient accueilli le Seigneur Jésus le dimanche des rameaux… En entendant le pape appeler Bangui « capitale spirituelle du monde » et en le voyant ouvrir ici la toute première Porte Sainte de la Miséricorde, la pensée m’est venue que vraiment les derniers sont les premiers aux yeux de Dieu, et que le bon larron fut le premier à entrer au Paradis avec Jésus… Et cette foi, la foi du pape et la foi des centrafricains, a opéré ce miracle…
Comment aurait-on pu imaginer, 24 heures avant l’arrivée du pape, que des fidèles d’une paroisse de Bangui, en traversant le fameux km 5, allaient voir venir à leur rencontre un groupe de musulmans pour les féliciter parce que le pape allait venir, et le soir, sur le chemin de retour, dans le même quartier, qu’ils allaient les voir revenir avec des cruches d’eau pour leur offrir un rafraichissement ? Et le lendemain, quelle fête incroyable chez les musulmans, lorsque le pape est allé les voir et a visité leur mosquée… Et quel geste dépassant l’imagination quand le pape a fait monter l’imam avec lui dans sa papamobile pour qu’ils aillent ensemble saluer la population musulmane qui l’attendait sur un terrain en face de la mosquée et qui avait laissé tomber le traditionnel style sobre, gesticulant et criant pour saluer le pape… Et que dire de ces dizaines de mobylettes sur lesquelles étaient montés des musulmans pour accompagner le pape, alors qu’il quittait la mosquée et qu’il prenait le chemin qui le conduirait au Stade pour la messe ! Pour la première fois depuis des années, on voyait des musulmans quitter leur quartier en suivant le pape, et alors qu’ils traversaient les rues du quartier « chrétien » on a aperçu que les foules, à droite et à gauche, venues pour saluer le pape, faisaient une grande fête pour eux aussi… Inimaginable aussi, cette ovation qui accueillit l’imam à son arrivée dans ce Stade de 20.000 places, où il venait lui-aussi pour assister à la messe du pape… 287
Les centrafricains ont accueilli et ils se sont approprié du message central du pape – parce que la vérité de ce message est inscrite au plus profond de leurs cœurs – Ce message, c’est que nous sommes frères et que nous devons nous traiter comme des frères… Ils se sont découverts frères, ils se sont retrouvés entre frères et depuis ce jour, ils n’ont laissé personne leur « voler » de nouveau cette vérité…
Deux semaines plus tard, les milices des deux camps ont essayé de reprendre en main la situation et d’imposer encore la loi de la terreur… Les centrafricains devaient aller aux urnes, le dimanche 13 décembre, pour un référendum au sujet de la nouvelle constitution ; depuis le matin, on entendait partout des tirs pour faire comprendre que personne ne devait aller voter, mais cette fois-ci, les gens ne sont pas restés chez eux : par petits groupes, ils se sont réunis devant le quartier général des casques bleus pour demander que les bureaux de vote soient protégés, et pour la première fois, on voyait placardés sur les murs les noms des terroristes, dans le but qu’ils soient arrêtés. Et ainsi, le lendemain, on a pu voter normalement… A partir de ce moment-là, les terroristes se sont tus ; beaucoup de miliciens ont abandonné la capitale et ont regagné leurs villages, tandis que d’autres miliciens attendent le plan du gouvernement pour le désarmement général et la réinsertion des ex-combattants.
Ensuite, le 28 décembre et le 14 février ont eu lieu les deux tours des élections présidentielles : alors que l’on craignait désordres, tripatouillages et intimidations, on a vécu en réalité deux journées semblables à toutes les autres depuis le 30 novembre… Les centrafricains sont allés voter dans l’ordre et dans le calme; il n y a eu ni menaces ni pressions, et on a élu un candidat auquel personne des analystes des capitales étrangères n’avait pensé… En outre, les autres candidats ont immédiatement accepté les résultats du vote, tout en déclarant qu’ils étaient prêts à collaborer avec le candidat élu. A présent, le km 5 reprend petit à petit sa fonction traditionnelle de marché principal de la capitale : un lieu extrêmement fréquenté, on 288
peut y aller, ça entre, ça sort… Ce quartier est devenu, de nouveau, partie intégrante de la ville… Et le Président élu, le Prof. Faustin Archange Touadéra, a commencé son mandat avec un nouveau style, inhabituel pour ce pays…Pour commencer, il veut continuer d’enseigner comme professeur de Faculté, et puis, il a décliné plusieurs invitations de différents Chefs d’Etat, car il a souhaité que sa première visite officielle soit chez le Pape François pour le remercier de ce qu’il a fait pour la République Centrafricaine. Et le Président a pu ainsi réaliser ce souhait le 18 avril dernier, et être reçu par le Saint-Père. « Vous savez quoi, Monsieur le Président ? Les centrafricains m’ont volé le cœur ! » a confié le pape au professeur Touadéra.
Bien évidemment, tout n’est pas résolu : au contraire, tout est à faire… Les problèmes, les causes du conflit, les injustices, tout est là, mais avec l’aide de la Communauté Internationale, maintenant, les centrafricains peuvent reconstruire leur pays car ils se sont retrouvés entre frères. L’Eglise en Centrafrique est appelée à continuer l’œuvre du pape : à rendre présent le regard bienfaisant et miséricordieux du Père qui nous découvre que nous sommes aimés de lui et frères entre nous… Permettez-moi de vous dire que je suis confiant : la Providence nous a donné un vrai pasteur selon le cœur de Dieu en la personne de Monseigneur Dieudonné Nzapalainga, Archevêque de la capitale. J’ai passé auprès de lui plus de six mois pour préparer la Visite du Pape François ; c’est vraiment un homme de Dieu: dans les moments les plus difficiles et les plus ardus du conflit, il s’est fait toujours un devoir d’aller à la rencontre des victimes de tous bords, il leur a apporté le réconfort de la foi et de la solidarité chrétienne, et ainsi il a su gagner le respect de tous ; en bon pasteur, même s’il aurait pu aller rapidement par le juste chemin, il a préféré marcher au pas plus lent, au pas de la brebis la plus faible, afin de n’en perdre aucune ; il s’est fait l’interprète de la prédilection de Dieu pour les plus pauvres, vers qui le Pape François attire inlassablement l’attention de toute l’Eglise. Enfin, il ne manque pas d’aller visiter ses fidèles, surtout ceux des campagnes et de la brousse. J’ai confiance qu’il saura rappeler à tous 289
ceux que le Pape a voulu rencontrer, les autorités politiques et la communauté internationale, ceux qui sont blessés à cause de la crise, les enfants, les jeunes, les personnes consacrées, les catéchistes et tous les centrafricains – quelle que soit l’appartenance religieuse –cette grande vérité qui nous vient d’avoir un Père en commun : nous sommes tous frères. C’est bien en cela que consiste la mission et la raison d’être de la Centrafrique, cœur de l’Afrique, et de Bangui, capitale spirituelle du monde.
Monseigneur Franco COPPOLA Nonce apostolique en Centrafrique Lors de la visite du Pape François
290
19.3 HOMELIE (TEMOIGNAGE) PRONONCEE PAR S.E. MGR DIEUDONNE NZAPALAINGA, ARCHEVEQUE DE BANGUI ET PRESIDENT DE LA CONFERENCE EPISCOPALE CENTRAFRICAINE, LORS DE LA MESSE POUR LE PAPE FRANÇOIS A LA NONCIATURE APOSTOLIQUE DE BANGUI, LE 12 MARS 2016, EN L’OCCASION DE LA « FETE DU PAPE ». Excellence, Monseigneur le Nonce, Représentant du Saint-Siège en République Centrafricaine et au Tchad, Excellence, Madame la Présidente, Chef de l’Etat de Transition, Chers confrères dans l’Episcopat, Excellence, Monsieur le Premier Ministre, Chef du Gouvernement de Transition, Excellences, Messieurs et Mesdames les Ministres, Excellences, Messieurs les Ambassadeurs et tous les Représentants du Corps Diplomatique en République Centrafricaine, Chers Pères, chères sœurs, chers frères, chers amis.
Aujourd’hui, nous sommes rassemblés au troisième anniversaire – bientôt - du Pontificat du Pape François. Le thème que j’ai intitulé [cette homélie], elle s’intitule de la manière suivante : « Soyez les bergers du troupeau de Dieu qui vous est confié ». J’ai préparé pour vous le rôle, la mission que le Seigneur a dédié à Pierre, comme Successeur ; comme celui qui est là pour rassembler les autres comme gardien. Je voudrais simplement, avec la permission, parce que c’est cela que le Nonce a demandé, partager avec vous le témoignage de ce que j’ai vécu avec [le dernier pour le moment], le Successeur de Pierre, c’est à dire, le Pape François.
291
J’ai intitulé la première partie comme « la Venue du Pape ici : les préparatifs comme épreuve de la foi », et la deuxième partie comme « la Venue du Pape comme moment de libération pour nous», et que pouvons-nous garder comme acquis de cette Venue du Saint-Père.
Les préparatifs de la Venue du Pape en République Centrafricaine, ne se sont pas déroulés comme certains pouvaient le croire. Il y a beaucoup de détails qui échappent aux uns et aux autres. D’abord, le 19 janvier, quand le Saint-Père annonçait dans l’avion qui le ramenait des Philippines qu’il viendrait en Centrafrique, moi-même j’étais déjà dans l’épreuve à Boy-Rabe, parce qu’une française était prise en otage, et je passais la nuit à Boy-Rabe sur deux chaises ! J’ai appris la bonne nouvelle étant sur ces chaises-là. J’aurais voulu apprendre autrement, pour fêter, être dans la joie, mais c’était dans ces conditions, que j’ai appris cette bonne nouvelle de la Venue du SaintPère chez nous.
Au début, on se mettait ensemble pour préparer la Venue du SaintPère, on se posait mille et une questions comment s’y prendre parce que nous n’avons pas les détails, on n’avait pas encore. Certes le Saint-Père, Jean Paul II est passé ici, mais nos archives sont restés muets, et on n’avait pas les détails pour bien organiser cela. On se posait la question s’il ne fallait pas inviter les amis venant du Cameroun ou d’ailleurs qui ont l’expérience pour nous aider. Finalement, nous avons pensé que nous-mêmes, on était capable aussi d’organiser.
Du côté de l’Eglise et du côté du Gouvernement, très vite, nous nous sommes mis ensemble ; nous nous sommes mis ensemble pour organiser les réunions [pour] préparer la Venue du Saint-Père ici en République Centrafricaine, mais préparer la Visite du Saint-Père n’a pas été de manière linéaire. Nous avons constaté, aussi, que quand on préparait que nous avons nos idées et ce qu’on devait proposer était différent : je m’explique. Alors que nous avons préparé un devis d’un milliard et quelques [CFA] pour l’organisation de la Visite du Saint292
Père, lors de la première réunion nous nous sommes partagés ce devis, rapidement le Nonce nous a dit : « le Saint-Père demande, c’est un homme qui veut la pauvreté, un homme de la simplicité. C’est inouï ce que vous avez dit, il va falloir revoir vos copies. Un milliard et quelques, c’est trop ! C’est pas possible, ce ne serait pas en conformité avec ce que vit et ce qu’annonce le Saint-Père ». Ça a été un moment de discussion. Rapidement la Présidente aussi a pris le relais : « Nous sommes en temps de transition, nous n’avons pas beaucoup de moyens, il va falloir qu’on puisse revoir aussi ». Le mot qui revenait très souvent, c’est la sobriété. Il va falloir resserrer les liens, supprimer beaucoup de choses. Nous avons appris à travailler et surtout compter d’abord sur nos propres moyens ; moyens humains ; moyens financiers. Et je peux vous dire que ça a été une grande expérience, une belle expérience, que nous pouvons dire peut-être le charisme, le charisme du Saint-Père nous a aussi marqués. Et quand nous, on préparait il y avait aussi des confrères qui nous aidaient, je veux penser à Monseigneur Rino [Guerrino Perin] de M’Baïki, qui nous a envoyé une lettre pour dire : « Tout ce que vous avez prévu, c’est énorme, pas possible, on ne pourra pas [le] réaliser ». Nous [l’] avons pris en compte. Préparatifs de la Venue du Saint-Père : moment d’épreuve pour notre foi. Et très vite on avait vu qu’il y avait des évènements qui se passaient dans ce pays qui mettaient à rude épreuve notre foi. Je veux parler des évènements du 26 septembre, du 29 octobre où on avait l’impression que rien ne pouvait arriver, le Saint-Père ne pourra plus venir en République Centrafricaine. ça a été difficile, dur, douloureux… ceux qui n’avaient pas la foi avaient déjà déposé les armes, ils ne croyaient plus, ils annonçaient partout que le Saint-Père ne viendrait plus en République Centrafricaine. Et nous, on continuait à croire mordicus que le Saint-Père viendra en Centrafrique. Quand on se retrouvait, c’était le dernier espoir qui nous restait : si on laissait échapper cet espoir, on ne saurait pas à quel saint se vouer. Et nous sommes restés accrochés à cet espoir-là. Pendant les réunions que l’on faisait… c’est l’occasion de dire aussi merci à la Présidente. Elle même s’est impliquée, plusieurs fois au niveau de la Salle des Ministres pour des réunions, à la Cathédrale, dans son bureau pour s’engager. Merci aussi au Nonce qui à chaque réunion était là, s’il n’était pas absent. Ca veut dire que en nous mettant ensemble, en nous 293
organisant, nous avons pu aussi exprimer notre foi, je disais tout à l’heure la victoire de la foi sur le doute, c’est cela aussi. Mais avec les derniers évènements dont je vous parlais, tout semblait aller vers l’obscurité, nous avons cru et surtout quand nous avons reçu le Message du Saint-Père annonçant sa Venue chez nous en messager de la paix, apôtre de l’espérance, les gens pleuraient, les gens s’embrassaient, et nous avons dit : « tout est possible maintenant en République Centrafricaine, le Pape viendra en Centrafrique ». Alors que les gens dehors ne croyaient pas, nous on croyait. Les journalistes nous demandaient : « est-ce que vous pensez qu’il viendra ? » On disait : « oui ! Il viendra » Ca a été un acte de foi que l’on faisait. On n’avait pas des réponses « rationnelles » à prouver à qui que ce soit, mais on posait cet acte de foi, on disait : « Le Pape viendra chez nous ! » Et nous avons cru à cela. Le jour du 29, alors qu’on disait la veille encore : « Ce n’est pas sûr qu’il viendra encore en Centrafrique ! » Nous, on croyait toujours qu’il viendrait en Centrafrique. Finalement, c’est le peuple centrafricain qui a cru à la Venue du Saint-Père, qu’il viendrait ici, c’est là où je dis c’est la victoire de la foi.
Quand je vois l’engagement des uns des autres, la MINUSCA, c’est l’occasion de dire merci pour les Forces des Nations Unies qui nous ont beaucoup aidés ; les forces nationales, les policiers, les gendarmes et tout. Tous nous ont aidés, on s’est dit : « il y avait un miracle ». Ceux qui ne croient pas aux miracles, ouvrez les yeux ! Souvenez-vous de ce qui s’est passé ! Il y a eu un miracle ici en Centrafrique. Quelques jours avant, c’était pas possible… Nous qui avons eu l’opportunité de circuler dans les quartiers en allant au Km5, ailleurs, on voyait qu’il y avait des tensions, mais il s’est passé un événement, on ne saura pas tout à fait expliquer, et le Seigneur a travaillé les cœurs des uns et des autres et on était disposé à accueillir la Venue du Saint-Père. Tout le peuple était massé le long de la route pour accueillir… Vous savez, les premiers, quand on était à l’aéroport, à voir le Saint-Père, pour nous, c’était les pauvres ; ceux qui sont à l’aéroport là, qui dorment dehors là. C’est eux qui ont poussé un grand cri. Ils sont là, ils scrutent tous les avions qui arrivent ; ils savent quand arrive un avion, nous on le sait pas, mais eux, ils le savent. Et 294
ils ont vu, ils ont commencé à crier. Ils ont dit : « Ca y est, le Pape arrive ! » Eux ils ont vu avant nous, la Venue du Saint-Père…
Moment vraiment d’épreuve, mais la foi nous a permis de vaincre et de [nous] situer au-dessus de ces doutes, de ces hésitations, les incompréhensions… quand le Pape est venu chez nous. Le Pape est venu chez nous, comme il l’a dit, et c’est intéressant, parce que le Pape en venant chez nous, n’a pas commencé par se retrouver d’abord avec les évêques, il a commencé à aller chez la Présidente, à voir les hommes politiques, le corps diplomatique, ce n’est pas rien ! Ici, tous ces gens-là ont le pouvoir temporel, on le dit, et c’est eux qui sont chargés d’administrer ce pays ; diriger ce pays [et] Dieu leur donne, chacun à sa manière, d’être pasteur du troupeau, c’est pas seulement Saint Pierre, mais chacun est pasteur du troupeau, à sa manière, s’ils mènent selon le cœur de Dieu. Le Pape a commencé par rencontrer la Présidente, les responsables politiques, je crois que notre mémoire commune, l’unité était là. En voyant tous ceux qui, peut-être, hier étaient opposants, tous ceux qui doutaient et qui sont retrouvés à la Présidence, tous autour du Pape, à entendre le message que la Présidente a livré, le message aussi que le Pape nous a livré pour nous inviter à nous réapproprier « unitédignité-travail » la devise de notre pays. Ça a été un moment important pour ceux qui sont les dirigeants de ce pays et je crois que ça a été un grand tournant pour notre pays : voir le Saint-Père venir, être au milieu de ceux qui sont chargés de diriger ce pays, et il a ouvert les perspectives de l’avenir ; il a dit clairement, bientôt il y aura des élections ça veut dire que lui ne doutait pas qu’il ne devait pas y avoir les élections, là il a parlé en prophète, il y aura des élections. On ouvre là une autre page pour notre pays. Oui, il l’a dit, et nous l’avons vécu, nous maintenant on peut le dire, parce que quand il est venu chez nous et après son départ, ceux qui connaissaient Bangui, il y a plus photo : il y a un changement radical dans le cœur des centrafricains qui se rencontrent ou qui se croisent.
Quand le Pape est venu, il a posé les actes, les gestes aussi très symboliques. On dit souvent que c’est le Pape des pauvres, des 295
pauvres, des malheureux. Nous sommes allés à Saint-Sauveur. Ces jeunes, et surtout les petits enfants avec leurs messages de paix : « Nous voulons la paix ; nous voulons la réconciliation ; nous voulons le pardon ». Moi, ça m’avait beaucoup touché. [Le] Saint-Père a prononcé, en demandant à ce que nous puissions nous aimer : doyé na siriri, il nous a dit en notre langue. Il l’a dit encore ces mots-là à la Cathédrale, pour dire qu’il n’y avait pas d’autres alternatifs que les mots que les enfants ont exprimés par leur messages, devons-nous les approprier. Il est allé les embrasser ; il a pris le temps, car on dit « Dieu vient nous caresser, Dieu vient nous toucher, manifester sa tendresse, c’est cela, il passe par le Saint-Père. Le Saint-Père nous l’a révélé, il a pris le temps de saluer les enfants tout le long et au retour aussi ; des gestes forts pour montrer la tendresse de Dieu ; gestes de simplicité, et je peux vous dire, à la fin de la journée, le Nonce était là, la soutane du Pape était plus sale, parce qu’il a salué, il y avait beaucoup de monde qui voulait toucher le Pape ! Quelqu’un me disait que c’est la première fois de voir la soutane [du Pape] était très sale, comme ça. Il n’a pas hésité à laisser les gens le toucher, toucher seulement. Vous ne pouvez pas imaginer l’hystérie, les joies, l’émotion des uns et des autres, « j’ai touché, j’ai au moins vu le Pape de près! » Ca a été un moment important, temps de SaintSauveur, lieu de l’expression de la tendresse de Dieu, à travers le Saint-Père qui touche les enfants : « Laissez venir à moi ces petits enfants » (cf. Lc 18,16). Bien sûr, le Pape est venu, il devait rencontrer les responsables de l’Eglise. Nous, les évêques, il nous a reçus ici, pour nous encourager, pour nous consoler aussi, pour nous inviter à garder le cap sur le dialogue, garder le cap sur l’unité, garder le cap surtout, sur l’espoir qui est, qui point à l’horizon…et je pense que ça fut aussi un moment important.
Le Pape est venu, pas seulement pour les catholiques, contrairement à ce que les gens pensent ; il est venu pour tout le monde. Nous sommes allés à [la] FATEB. Les protestants étaient là, il a dit aux protestants : « Ici je suis chez mes frères, vous êtes mes frères ! » Nous croyons à la mort et à la résurrection du Christ. On est des frères ; on partage la foi en Jésus, mort et ressuscité. 296
Je partage avec vous une expérience qui a marqué le Révérend Pasteur Nicolas, alors qu’on avait tout prévu, que le Pape ne devait pas se déplacer, il devait rester sur place pour tenir son discours. Au moment où les Pasteurs ont fini de tenir leur discours, il s’est levé luimême pour aller prendre son papier et dire son discours. Les Pasteurs nous l’ont dit, ça les a touchés. Quelle simplicité nous révèle cet homme-là ! Lui qui est grand, nous pouvons penser le respecter par son autorité, il se lève, il se met au même niveau que nous. C’est des messages que cet homme nous a laissés, nous a légués, comme serviteur de Dieu aussi, ici en République Centrafricaine.
Quand nous sommes partis à la Cathédrale, avant la Cathédrale il y a eu cet hôpital pédiatrique, où nous avons tous ces enfants qui souffrent : conséquence quelque part aussi de notre guerre interne. Eh bien le Pape a pris le temps de les saluer, de les consoler, de les embrasser. Et je pense que ça aussi, c’est de moments, car quand on dit « visiter les malades » ce ne sont pas des théories. Le Pape l’a vécu chez nous, en allant toucher les malades, en allant voir tous ceux qui soignent, et pour moi, c’est des moments importants.
A la Cathédrale, notre Cathédrale est devenue « la Capitale Spirituelle du monde », le Pape a poussé la première [porte], nous avons eu ce que dans l’histoire on n’a jamais eu : une porte sainte qui s’ouvre en dehors de Rome ! Il n’y a que Bangui ; Bangui pays des paradoxes, on est capable de passer d’un extrême à l’autre. Il n’y a qu’à Bangui qu’on a vu ça, pour la première fois dans l’histoire, le Pape décide d’ouvrir la porte de la Miséricorde. Je crois qu’il avait aussi un message fort à nous dire : à ce moment où il y a les tensions partout concernant les religions et tout ; les religions ne sont pas là pour nous diviser, on ne va pas les utiliser pour d’autres fins, elles sont là pour nous rassembler. Il a ouvert la porte pour que nous puissions entrer et découvrir la véritable miséricorde ; le véritable amour qui est là-dedans ; véritable unité, véritable, on va dire, pardon que nous devons recevoir de Dieu lui-même. Le Pape est venu chez nous par ces célébrations – nous on était loin de l’imaginer, le monde entier – il a désenclavé notre pays, en attirant 297
l’attention du monde entier sur nous. C’est aussi sa contribution pour nous montrer qu’il nous aime. Et nous qui nous disons « fils spirituels » de ce pays, un grand héritage nous a été légué : capitale spirituelle, Bangui. Le Pape est venu chez nous : qu’allons-nous en faire de cette capitale-là ? Est-ce qu’elle restera spirituelle ou elle deviendra mondaine : ce sont des questions qu’on peut déjà se poser, mais le défi est lancé. Le Pape est venu, et le lendemain du lundi ça a été, on va dire, le sommet. Beaucoup ne croyait pas qu’on pouvait aller au Km5. Certains doutaient, que c’est pas sûr, le chemin le plus dangereux pour aller au Km5, périlleux, mais il a osé. Nous sommes allés en papamobile [eh], donc il n’y avait pas de véhicule blindé. La foi, quand on vous dit que la foi elle est importante, elle nous permet de déplacer les montagnes : nous l’avons vécue en étant à côté de cet homme-là. En traversant la rue, les gens qui étaient séparés tout à coup, se sont mis ensemble. Il y avait un objectif, c’est seulement le Pape qui passe, tout le monde saluait le Pape. On ne voyait plus que l’autre était un ennemi, ou un bourreau, tout le monde était là, brassé, spontanément : la magie du passage du Saint-Père.
Le fait que les gens se soient mis ensemble pour aller maintenant vers le Km5 et ce sont nos frères qui nous ont aussi étonnés. Alors qu’on a dit et redit mille et une choses sur ce quartier, ils ont démontré autre chose. Ce ne sont pas des djihadistes, ce ne sont pas seulement des extrémistes, il y a des gens qui sont des centrafricains et qui aiment ce pays et qui veulent bâtir ce pays, et nos frères ont réservé un accueil digne de ce nom au Souverain Pontife.
Je voulais dire ici un geste qui m’a beaucoup marqué et qui n’était pas prévu, parce que le Pape, il saute parfois le protocole. Il n’était pas prévu qu’il prenne les bras, la main de l’Imam pour aller là où ils prient pour parler aux hôtes, eh bien c’est ce qu’il a fait. Quand ils ont fini les discours, il a pris un banc, il s’est assis, il s’est déchaussé, il a appelé l’Imam, il a pris sa main, ils sont partis, tous les deux. On se demandait où est-ce qu’ils vont aller, mais il est allé là où prêche souvent l’Imam. Ils sont allés, ils sont restés en silence, nous, on les regardait, il a prié, et prié pour la paix en République Centrafricaine, m’a-t-il dit, oui. En revenant c’est lui-même qui a demandé à l’Imam 298
de monter dans la papamobile, cette image qui a fait le tour du monde : le Pape avec l’Imam dedans. Nous avons fait le tour pour saluer tous ceux qui ont pris de leur temps et qui sont venus pour montrer leurs aspirations à une nouvelle Centrafrique, à une paix, et que cet homme est un messager de paix ; cet homme vient ouvrir une nouvelle page, et je crois que cette étape a été décisive. Spontanément, sans se poser des questions, nous avons eu la première libération, parce que les frères sont venus du Km5 en moto, en escortant le Pape jusqu’au Stade, et ils couraient des risques de mort ! Ils n’ont même pas pensé à la mort, ils ont pensé à la vie ! L’homme de vie est là, il les accompagne vers une nouvelle vie, et ils sont venus jusqu’au Stade. Dieu merci ! Ce jour-là, rien ne s’est passé. Il y a eu quelque chose qui s’est passé pour vraiment nous unir, pour nous rassembler, et le message que le Pape a lancé à chacun d’entre nous ici pour tourner une nouvelle page, pour prendre un autre chemin… Je crois qu’en venant massivement au Stade, nous avons tous compris qu’il était temps que la Centrafrique sorte de cette situation. Et ceux qui connaissent Bangui avant et maintenant, je disais il y a plus photo, parce qu’on a basculé qualitativement. On peut aller au Km5 à pied. Si vous n’êtes pas allés, je vous invite à y aller ! Allez les mains vides, pas avec les armes, pas avec les couteaux, pas avec autre chose. On peut y aller à pied. Il y a eu quelque chose qui s’est passé, il y avait les barrières qui nous séparaient des autres, eh bien nous avons décidé de les faire tomber. Moi-même, j’ai décidé, suite au départ du Pape de marcher dans les rues pour demander de faire tomber les barrières, parce que le Pape est venu de Rome jusqu’ici, et moi qui suis à Bangui, il faut que j’aille aussi voir mes frères : qu’on sorte avec les chrétiens pour aller à la rencontre de nos frères, pour qu’on se retrouve, qu’on se dise « frères », et qu’on s’apprécie ; que l’amitié revienne ; que la fraternité revienne… J’ai vu des larmes des gens depuis des mois et des mois qui n’ont pas vu leurs membres de familles qui étaient là, et il est temps que ce miracle puisse se perpétuer ici en Centrafrique… Le Pape est venu. Je disais la victoire de la foi sur le doute, sur les inquiétudes… nous avons vu, il faut maintenant qu’on témoigne de ce que nous avons vu. Il ne faut pas rester au niveau théorique. Nous avons entendu le message, et nous avons vu par enchantement, par miracle, alors qu’on 299
doutait… Les gens ont des armes dans Bangui, il [ne] faut pas se [le] leurrer en disant qu’on a jeté les armes, ils ont de belles armes dans les maisons ! Mais le jour des élections, personne n’est sorti avec les armes pour aller tirer sur l’autre. Ça aussi, c’est un mystère, un miracle que j’ai vu ce jour-là : rester des heures et des heures pour attendre son tour, pour aller poser l’acte républicain. Moi, ça m’avait beaucoup touché, ça m’avait beaucoup marqué, et je me dis, le destin des centrafricains maintenant ils veulent le prendre en main. Je crois qu’il était temps que nous prenions notre destin en main, pour ne pas laisser les autres écrire l’histoire à notre place ! Et je pense que ça a été aussi un moment déterminant, que nous allions dans la dignité, comme on aime souvent à le dire (comme dans notre devise) voter, ou élire qui on veut; ça a été aussi un message fort, ça a étonné beaucoup de gens, mais nous, comme on commence à vivre avec des miracles, on ne peut plus douter, ça fait partie des miracles, ça veut dire que dorénavant il y a des évènements de la vie simple qu’on va voir avec le regard de la foi pour dire que c’est un miracle, parce que je ne vois plus comme les hommes ordinaires, je vois avec les lunettes spirituelles, parce que je suis dans une capitale spirituelle. Maintenant, je peux me permettre [de poser], de dire les paroles spirituelles autour des évènements, et c’est cela aussi, ce que nous pouvons garder. Le Pape est parti, nous voici restés en Centrafrique ; nous sommes les héritiers des messages qu’il est venu semer ici. Le monde entier regarde, nous avons pris un autre départ à travers ces élections, à travers les préparatifs, maintenant l’installation et plus tard aussi les deuxièmes élections pour les députés plus tard quand on aura confirmé le premier tour des législatives, cela veut dire que quelque chose est en cours, il ne faut plus retourner en arrière ; l’avenir est devant nous, on vient d’ouvrir un autre avenir : l’avenir de la fraternité, l’avenir de l’unité, l’avenir [vraiment] du dialogue. En langage ordinaire, on dit l’avenir de la cohésion, mais nous, nous disons l’avenir de la fraternité, et il est temps pour avoir ce sursaut qualitatif pour regarder ce que le Pape nous a légué comme héritage. Il aime souvent dire [que nous puissions], que nous prions pour lui, et je crois que c’est aujourd’hui, c’est le moment plus que jamais pour que nous puissions prier pour le Saint-Père, pour le geste unique qu’il a posé pour nous, aujourd’hui, pour qu’on puisse respirer l’air de la paix ; pour sa Venue dans notre pays ; pour tout ce que nous avons 300
récolté comme résultats ; pour tout ce que nous avons en nous comme espoir. Que le Seigneur puisse le protéger, le garder et le bénir, afin qu’il continue sa mission comme gardien de la foi ; qu’il continue sa mission comme celui qui est chargé de rassembler ses frères ; qu’il continue sa mission comme celui qui est chargé d’enseigner la Parole de Dieu, à temps et à contretemps, (cf. 2 Tim 4,2) et nous qui sommes maintenant les héritiers, que nous puissions faire fructifier tout ce que nous avons reçu comme grâce. Amen.
301
19.4
TEMOIGNAGE DE S. E. MGR. JUAN JOSE AGUIRRE, ÉVEQUE DE BANGASSOU Au début, c'était difficile à croire : comment un pape peut-il fouler le sol rouge de ce pays ensanglanté par le sang tout aussi rouge de tant de pauvres gens ? Et pourtant, cher Pape François, tu as daigné passer outre les recommandations de prudence et, sans gilet pare-balle, tu es monté dans un pic up, à découvert, pour que tout le monde puisse mieux te voir et surtout, tu t’es mis à nous parler de paix et de réconciliation. Tu nous as dit qu’on a tout à gagner avec la paix et tout à perdre avec la guerre. Ces choses-là sont très simples mais nous avions besoin de les écouter. C’est vrai que la violence ne conduit jamais à la paix mais plutôt à plus de violence et finit par emballer tout le monde, innocents et pécheurs, dans la spirale. A ton arrivée, entouré par une multitude enthousiasmée et 2.800 scouts qui assuraient l’ordre, tu as traversé le quartier Combattant où, il y a moins d’un mois, quatre représentants d’un groupe radical venus à Bangui pour les négociations de paix ont été lynchés et tués à coups de bâtons et de machettes. Tu as touché les enfants déplacés sans maisons, sans familles, sans écoles; les enfants victimes de la violence, blessés par des balles; les enfants qui ont vu leurs maisons disparaître dans la fumée. Ces enfants regardent dans l’horizon sans rien voir parce qu’on leur a volé leur innocence; ils ont été témoins de la pure méchanceté.
Tu as touché les enfants victimes de la peur, de la faim, musulmans et non musulmans, dans deux camps différents, sans distinction. Ce sont des enfants dont on a volé l’âme à Bangui. Merci de t’être mis à leur place et d’avoir dénoncé, sans état d’âme, que la plupart de ces enfants ont été utilisés comme chair à canon ou sexuellement abusés par des criminels.
302
Tu es entré sans peur dans la mosquée de Koudoukou. Cependant, la mosquée avait été repeinte et nettoyée pour toi, saint père François. Ils disaient que c’était pour eux un grand honneur que tu poses tes pieds nus sur leurs tapis et que tu leur parles de paix. Tu as voulu prier pendant cinq minutes au même endroit que prêche l’imam, sans rien dire, dans un silence de recueillement. Un pape à Bangui sans gilet pare-balles alors que deux jours avant les bruits de kalachnikov ne cessaient de tonner à un jet de pierre de la nonciature, sur l’avenue Boganda, au km 5 où même la respiration peut coûter la vie. . Merci parce que tu nous as insufflé la valeur et l’espérance ; parce que tu ne t’es pas tû ; parce que tu as fixé ton regard dans le regard des pauvres ; parce que tu as ouvert la porte sainte de la Miséricorde pour tracer le chemin prioritaire, différent des autres chrétiens ailleurs pour aller beaucoup plus vite vers ses Mains, pour faire l’expérience de son amour. Tu nous as demandé de partager cette expérience après avec des gestes de réconciliation. Tu nous as montré un chemin, comment sortir du trou, du labyrinthe où nous nous trouvons perdus…Quand, après la photo de famille à la Nonciature, tu as pris ma main pour monter les escaliers, j’ai senti la force, pas physique, mais surtout humaine et spirituelle. Nous avons pu rigoler avec toi pendant le repas avec les évêques quand nous t’enseignions deux mots en Sango : ndoye et siriri. Tu as su, trois heures après, les répéter aux jeunes pendant la veillée de prière : « laissez-vous envahir par l’amour et la paix » ! Après, cher pape François, tu es monté dans l’avion vers 12 :30. Nous sommes restés en regardant autour de nous, orphelins de toi, perdus comme nous réveillant d’un profond sommeil en écoutant le bruit du Airbus A330 de Alitalia qui t’avait amené chez nous et qui te ramenait de nouveau à Rome. En fait, pendant que tu étais là, les armes s’étaient tues par respect pour toi. Nous aurions voulu que tu restes pour toujours avec nous ! Mais, tu as beaucoup à faire à Rome et dans le monde.
303
Et merci à Dieu le Père qui a permis que personne ne gâche notre fête, qu’aucun malfrat n'empêche notre rencontre, qu’aucun arriéré ne fasse du mal à personne. Merci surtout pour nous avoir donné ce cadeau de deux jours de rêve pleins de paix.
304
19.5
TEMOIGNAGES DE DEUX 80 SUR LA VISITE DU SAINT PERE
PERSONNES AU KM5,
Amadou YORO : Le Pape François est un homme de Dieu. Il est venu pour réconcilier Chrétiens et musulmans. Il est venu réparer les dégâts que les hommes politiques centrafricains ont commis sur la population centrafricaine. Françoise YANGANA : Si le Pape François n’était pas venu nous voir nous autres chrétiennes dans l’enclave musulmane du km5, on allait être désespéré. Heureusement, DIEU l’a aidé à venir nous voir et nous unir avec nos frères musulmans.
80
Km5 est le quartier musulman de la capitale Bangui, considéré comme étant le plus dangereux. Certains chrétiens catholiques sont restés dans ce quartier durant la crise.
305
19.6 EVRARD BANGUI81
TEMOIGNAGE DE L’ABBE MATHIEU FABRICE BONDOBO, CURE DE LA CATHEDRALE DE
Il m’a été demandé de donner mon témoignage, ou dire ce que j’ai vécu lors du voyage apostolique du Pape François à Bangui (Centrafrique). J’ai traduit tous les discours (à l’exception de celui prononcé au Palais de la Renaissance) du Saint Père en Sango, notre langue nationale. Pourquoi en Sango? La réponse est simple : la traduction des discours dans d’autres langues, on peut les trouver assez facilement sur internet. En plus, en Centrafrique tous ne parlent pas ou ne comprennent pas le français (même si c’est la deuxième langue officielle). Le Pape arrive dans un moment très difficile. La situation économique, socio-politique est désastreuse. Depuis plus de 2 ans, il n’a y a pas un gouvernement démocratiquement élu après le coup d’état. Il y a différents groupes rebelles qui occupent certaines zones du pays. Dans la capitale Bangui, les différents groupes armés non conventionnels s’affrontent assez souvent ; et la capitale par voie de conséquence, reste paralysée à cause des affrontements. Tout ceci à cause des richesses. La Centrafrique est considérée comme l’un des pays les pauvres au monde, mais a comme richesses : diamants, pétrole, or, uranium, coton, café etc. Ce conflit essentiellement géopolitique ou bien géostratégique est parfois manipulé jusqu’à parler de la guerre des religions : chrétiens contre musulmans. Malgré tout, le Pape décide de venir à Bangui. Certains massmédias ont essayé de créer la peur, en vue d’annuler ce passage du Saint Père dans mon cher et beau pays la Centrafrique. Je vous dis ceci : le dimanche 29 novembre, avant 10h du matin, j’étais à l’aéroport avec les Évêques de Centrafrique pour la cérémonie de 81
L’abbé Mathieu Fabrice Evrard BONDOBO était l’interprète officiel du Pape François lors de sa visite en Centrafrique. Il a traduit simultanément tous ses discours et homélies en Sango (l’une des langues officielles, en Centrafrique).
306
bienvenue au Pape. A un moment donné, nous avons écouté un cri très fort, venant du site des déplacés de l’aéroport. On se demandait ce qui se passait. Quelques secondes après, nous avons vu l’avion du Saint Père qui était en train d’arriver. Nous avons finalement compris que les déplacés avaient vu au loin l’avion et ils étaient très contents en poussant ces cris de joie. J’ai encore la chair de poule en le disant. Quand l’avion papal est atterri, le Père en est sorti, un autre cri de joie est encore parti : le Pape est à Bangui. Cette présence du Pape était déjà une victoire du peuple centrafricain. Vous me poserez certainement la question de savoir comment ai-je fait pour servir d’interprète au Saint Père ? Qui m’a choisi ? C’était une mission difficile? A voir les vidéo du voyage, plusieurs fois le Pape te parlait dans les oreilles, qu’est-ce qu’il te disait ? Que ressentais-tu en étant très proche du Pape ? Quelles sont tes émotions en montant dans la papamobile82 ? Je faisais partie d’une équipe qui devait préparer des catéchèses, pour aider les fidèles à bien se préparer spirituellement à cet évènement. Les catéchèses passaient sur les ondes de la radio diocésaine, appelée Radio Notre Dame. Un jour, mon Archevêque m’a dit : « Mathieu, tu as été choisi pour traduire tous les discours du Saint Père en Sango ». Ma réponse était immédiate : «Merci Monseigneur de la confiance ». Selon le dispositif, comme traducteur, ma place était proche du Saint Père dans tous ses déplacements. J’étais au début un peu tendu, cependant, j’ai réussi à entrer pleinement dans la pensée du Pape. Il est venu pour donner un message à ce peuple, donc le peuple centrafricain doit bien comprendre ce message. Le Seigneur m’a beaucoup aidé. Une personne m’a même demandé d’invoquer mon ange gardien pour m’aider. Je traduisais directement de l’Italien en Sango ; à certains moments de la traduction l’assemblé réagissait par des applaudissements. Une manière de dire que le message était compris. Je dois avouer que déjà
82
La papamobile est le nom du véhicule que le Pape utilise.
307
être très proche du Saint Père, puis fidèle à sa pensée, c’était une mission énorme. A plusieurs reprises, le Saint Père me parlait dans les oreilles ; je dirais qu’il y a eu une « complicité » entre nous. Au fait, il me disait seulement d’être prêt à tout moment, pour la simple raison qu’il peut sentir le besoin de dire une chose qui lui vient du cœur, en dehors du discours préparé et il le fait. Par exemple, les discours sur le site des déplacés à la paroisse Saint Sauveur, avant l’ouverture de la Porte Sainte et au lancement de la veillée avec les jeunes, sont des discours que le Saint Père prononçait sans support écrit. Permettez que je revienne sur le discours avant l’ouverture de la Porte Sainte. On était à la paroisse Saint Sauveur, sur le site des déplacés. Avant de monter dans la papamobile, le Saint Père se penche vers moi pour me dire, qu’il est en train de sentir le besoin de faire un appel au monde, sur la paix avant l’ouverture de la Porte Sainte. Cependant, il est en train de beaucoup prier pour cela. Quand nous sommes montés dans le véhicule papal, il me dit dans l’oreille, de ne le dire à personne ce qu’il m’a partagé, avant que cela ne se réalise. Quand nous sommes arrivés à la cathédrale, on était dans le salon du presbytère. Quand le Pape était prêt pour la procession, il me fixa dans les yeux et me fit signe de m’approcher. C’est alors qu’il me dit qu’il va prononcer le discours, et nous avons cette belle phrase : « Aujourd’hui, Bangui devient la capitale spirituelle du monde ». Personnellement, je vois à travers ce voyage du Pape François, la visite de Dieu lui-même en Centrafrique. Comme le Seigneur avait dit à Moïse : j’ai vu la souffrance de mon peuple et je suis venu le sauver. Nous Centrafricains, dans notre souffrance, nous avons prié le Seigneur. Pour cela, le Seigneur nous a envoyé le Pape qui est venu en Centrafrique comme pèlerin de la paix. En ouvrant pour la première fois dans l’histoire la Porte Sainte à Bangui, c’est à dire, avant Rome, nous avons vu un geste fort de la présence de Dieu dans notre histoire. Dieu nous ouvre la porte, il nous indique le chemin de la paix ; ce chemin passe par la miséricorde. Nous avons compris ce message, car pendant la veillée avec les jeunes, nous prêtres, nous avons passé toute une bonne partie de la nuit à confesser les fidèles. Malgré l’engagement que j’avais, je me suis mis aussi à confesser pour une heure avant de me retirer. 308
La visite du Saint Père, à la mosquée centrale, zone musulmane considérée comme l’une des zones dangereuses de la capitale; croyez moi, j’avais des larmes aux yeux. J’étais tellement ému que je pleurais. Je m’attendais à un accueil timide, glacial. Bien au contraire, nos frères musulmans sautaient de joie, couraient derrière la papamobile, certains étaient à genoux comme pour demander la bénédiction. Le Pape a aussi demandé à l’Iman de la mosquée centrale Tidiani Moussa Naibi de monter dans la papamobile et de faire un petit tour ensemble pour saluer les musulmans qui étaient réunis sur le terrain de l’école Koudoukou83. Ce geste était très beau. Une autre chose qui m’a beaucoup touché est la simplicité et l’humilité extraordinaire du Pape François : il me disait toujours MERCI. Il me remerciait pour mon service. A l’aéroport, lors de la cérémonie du départ, il m’a donné sa bénédiction. Le Pape est un homme de Dieu ; il transmet une douceur, une paix que je ne sais comment dire. Merci Saint Père de penser à mon cher et beau pays ; sa capitale Bangui est devenue « la capitale spirituelle du monde ».
83
L’école Koudoukou se situe en face de la mosquée centrale.
309
19.7
TEMOIGNAGE D’EVANS DEMBA84
Un passage de l’Evangile nous apprend que lorsqu’on est convié à une fête, il faut prendre place derrière. De cette manière, celui qui t’a invité viendra te faire asseoir devant. Je suis chrétien à la Cathédrale de Bangui et surtout actif dans le groupe des lecteurs. Pour moi, la venue du Pape était un évènement qui allait mobiliser énormément du monde. Je n’aime guère me faire bousculer dans une foule ; alors pour moi, je resterai tranquillement à la maison pour le suivre à la télévision. Ainsi, le samedi 21 novembre 2015, soit neuf (9) jours avant la date prévue pour la visite du Pape, mon téléphone sonnait, j’ai décroché et l’on m’informe que le curé de la Cathédrale de Bangui voulait me voir. Une fois reçu dans son bureau, c’est là qu’il m’informe que j’ai été choisi pour représenter les jeunes de la R.C.A et lire le message des jeunes au Pape. Je ne relisais pas la chose à l’instant. Des questions du genre, pourquoi moi ? Qu’ai-je fait pour mériter cela ? Toutes ces questions commencèrent à se bousculer dans ma tête. C’est au courant de la semaine du 23-29 novembre que j’ai commencé à réaliser la chose qui m’arrivait. On me remit les textes du message à lire pour m’y préparer. Je pris la décision de m’améliorer. Aujourd’hui encore les bienfaits du Seigneur ne cessent de se manifester dans ma vie. Pour toutes les personnes qui liront mon témoignage, je leur dirai tout simplement que ma foi en Dieu m’a conduit à ce miracle. Tel l’aveugle qui criait dans la foule, tel l’invité qui a pris place derrière, on me conduisit auprès du Saint Père. Ne cessez jamais de croire en Dieu, car il est bon. Un psaume déclare : « Heureux l’homme qui marche selon les préceptes du Seigneur ». Croyez
fermement,
mais
surtout
84
croyez
véritablement.
Evans DEMBA s’est adressé au Pape au nom des jeunes, lors de la veillée de prière.
310
20.
POST-PREFACE
La visite du Pape François était une entrée dans l’Esperance pour le peuple centrafricain. Le Saint Père s’est montré courageux en visitant une nation meurtrie, déchirée. Sa visite nous a consolés, une présence qui a guéri les cœurs blessés. A travers le Pape François, c’est Dieu lui-même qui a visité son peuple et lui a redonné vie. Chaque fille et fils de Centrafrique garde un souvenir inoubliable de l’évènement, à telle enseigne que nous parlons du miracle opéré par le Pape François, grâce à une paix retrouvée durant et après sa visite. Dire que tout est fini, serait une erreur. Nous sommes encore loin du bout du tunnel. La paix retrouvée reste fragile. Les défis sont énormes ; l’heure est à la reconstruction de notre cher et beau pays. Chaque centrafricain est appelé à abandonner le « vieil homme » pour revêtir « l’homme nouveau ». La mission est difficile, mais elle n’est pas impossible. L’histoire de certains pays voisins africains peut nous motiver. Apres avoir touché le fond, ils ont eu le courage de tourner la page sombre de leur histoire et de se relever. Il faut encore avoir la ferme volonté de le faire. A travers ce livre, nous voudrions offrir l’un des moyens possibles pour aider à la sortie de cette crise et à une vie chrétienne authentique. Le courage, l’humilité, la simplicité, l’amour, la vérité, la proximité, le dialogue, bref ! Tout ce qui constitue la richesse de la visite du Pape François dont nous avons pris le soin de retracer, à travers ce livre est à prendre en considération pour un avenir meilleur.
311
Saint Jean II était venu et nous n’avions pas fait trésor de son enseignement. Nous formulons le vœu de ne pas faire de même pour les messages du Pape François. Que Dieu bénisse la République centrafricaine et l’Eglise catholique en Centrafrique!
Abbé Mathieu Fabrice Evrard BONDOBO Vicaire général de l’archidiocèse de Bangui et curé de la Cathédrale Notre Dame de l’Immaculée Conception de Bangui
312
DES PHOTOS SOUVENIRS DU VOYAGE APOSTOLIQUE DU PAPE FRANÇOIS EN CENTRAFRIQUE
315
316
317
318
319
320
321
322
323
324
325
326
327
328
329
330
331
332
333
334
Table des matières PRIÈRE POUR LA VISITE DU PAPE FRANÇOIS EN CENTRAFRIQUE ................. 11 1. Catéchèses de préparation à la visite du Pape Saint Jean Paul II en Centrafrique .................................................................................................. 17 1.1 Quelques reflexions pour preparer avec les chretiens la visite du pape Jean Paul II ....................................................................................... 17 1.1.1 La visite du Pape, une occasion pour réfléchir sur ce qu’est l’Eglise. 17 2.
La cérémonie de bienvenu du Pape Saint Jean-Paul II ......................... 33 2.1
Pistes de comprehension du discours ............................................ 33
Piste n. 1 : Contexte du voyage............................................................. 33 Piste n. 2 : La foi comme semence, la foi comme levain...................... 34 Piste n.3 : le sens religieux est un don de Dieu qui rapproche tout le monde ................................................................................................... 35 2.1 DISCOURS INTEGRAL DU PAPE JEAN-PAUL II A LA CÉRÉMONIE DE BIENVENUE ............................................................. 35 2.2 Homélie du Pape Saint Jean PaulII, lors de la messe célébrée à l’avenue des martyrs ................................................................................. 38 2.2.3
PISTES DE COMPREHENSION DE L’HOMELIE ........... 38
Piste n. 1 : « C’est la foi qui est première » .......................................... 38 Piste n. 2 : Les laïcs au centre de la vie spirituelle du pays .................. 39 Piste n. 3 : Le soutien réciproque entre les communautés locales ........ 39 Piste n. 4 : Les adultes et les jeunes ...................................................... 40 2.3
HOMÉLIE INTEGRALE ............................................................. 41
DU PAPE SAINT JEAN-PAULII ............................................................ 41 2.4 2.4.1
Discours du Pape Saint Jean Paul II à la Cérémonie de départ..... 51 Pistes de COMPREHENSION DU discours ............................ 51
Piste n. 1 : Brièveté du séjour ............................................................... 51 Piste n. 2 : Apport du Saint siège .......................................................... 51 335
Piste n.3 : Rôle des chrétiens et les défis à relever ............................... 52 2.5 DISCOURS INTEGRAL DU PAPE SAINT JEAN-PAUL II A LA CEREMONIE DE DÉPART .................................................................... 53 3
L'EGLISE PRIMITIVE ............................................................................... 57 3.1
FONDATION ET STRUCTURE DE L'EGLISE PRIMITIVE .... 57
3.1.1
Fondation .............................................................................. 58
Pistes pour une préparation spirituelle ................................................ 61 3.2
PENTECÔTE................................................................................ 65
3.2.1
Étymologie ............................................................................ 65
3.2.2
Historique.............................................................................. 65
3.2.3
Description ............................................................................ 66
3.2.4
Théologie .............................................................................. 67
Pistes pour une préparation spirituelle .................................................. 68 3.3
LE RÔLE DE PIERRE DANS L’EGLISE PRIMITIVE.............. 69
3.3.1
Qui est Pierre ? ...................................................................... 69
3.3.2
Pierre, pécheur pardonné et berger des brebis ...................... 70
3.3.3
La place de Pierre dans l'église primitive ............................. 71
3.3.4
Pierre, le roc sur lequel le Christ a fondé l'Eglise ................. 72
Pistes pour une préparation spirituelle .................................................. 75 3.4 ÉGLISE PRIMITIVE : SON EXPANSION DE JERUSALEM A ROME 77 3.4.1
L’Église de Jérusalem ou l’Église apostolique ..................... 77
3.4.2
Persécutions et expansion de l’église .................................... 78
3.4.3
L’église d’Antioche .............................................................. 79
3.4.4
Saint Paul et la mise en place des premières communautés . 80
3.4.5
La présence chrétienne à Rome ............................................ 82
3.4.6
Pistes pour une préparation spirituelle .................................. 82
3.5
LA MISSION DE L’EGLISE FAMILLE DE DIEU .................... 83 336
3.5.1
I. Fondement théologique de la mission ............................... 83
3.5.2 8)
I. La spiritualité missionnaire dans Redemptoris Missio (RM 87
3.5.3
L’Eglise, communion ou famille Dieu.................................. 91
3.5.4
Apport du Pape François....................................................... 93
Pistes pour une préparation spirituelle .................................................. 94 4
MINISTERES ET AUTORITE DANS L'EGLISE ............................................ 95 4.1 CONSTITUTION HIERARCHIQUE OU LA SUPRÊME AUTORITE DE L'EGLISE ...................................................................... 95 Préambule ............................................................................................. 95 4.1.1
Le Pontife Romain ................................................................ 96
4.1.2
Le collège des Évêques ......................................................... 96
4.1.3
Pistes pour une préparation spirituelle .................................. 97
4.2
LE MAGISTERE DANS L'EGLISE CATHOLIQUE ................. 98
4.2.1
Qu'est-ce que le magistère ? .................................................. 98
4.2.2
Degrés du magistère.............................................................. 99
4.2.3
Comment s'exprime le magistère dans l'Eglise ? ................101
4.2.4
Pistes pour une préparation spirituelle ................................103
4.3
INFAIBILITÉ PAPALE .............................................................104
4.3.1
Définition du terme .............................................................104
4.3.2
Les fondements du dogme de l'infaillibilité ........................104
4.3.3
Infaillibilité et Primauté ......................................................106
4.3.4
Autres infaillibilités ............................................................107
4.3.5
Pistes pour une préparation spirituelle ................................107
4.4
LES MINISTERES DANS L’EGLISE ......................................108
Introduction.........................................................................................108 4.4.1
Les ministères et leurs fonctions dans l’Église primitive ...108
4.4.2
Les ministères et leurs fonctions dans l’Église de notre temps 109 337
5.
4.4.3
Les ministères ordonnés......................................................109
4.4.4
Pistes pour une préparation spirituelle ................................115
LES PAPES ............................................................................................117 5.1
LA VACANCE DU SIÈGE APOSTOLIQUE ...........................117
5.1.1
Première Partie : La mort et les obsèques du pape .............117
5.1.2 pape
Deuxième Partie : Élection et prise du Siège d'un nouveau 123
5.2
L’ETAT DU VATICAN : LE PAPE COMME CHEF D’ETAT128
Préambule ...........................................................................................128 5.2.1
Position géographique.........................................................129
5.2.2
Le Pape chef d’Etat .............................................................130
5.2.3
Les symboles.......................................................................131
5.2.4
La population ......................................................................132
5.2.5
La sécurité ...........................................................................132
5.2.6
Hymne .................................................................................132
5.2.7
Protection internationale du territoire .................................133
5.2.8
Les ressources de l’Etat du Vatican ....................................133
5.3
LE PAPE CHEF DE L’EGLISE CATHOLIQUE ......................135
5.3.1
Les évêques, successeurs des apôtres du Christ ..................135
5.3.2 Pierre
Le Pape, évêque de Rome et successeur de l’apôtre saint 135
5.3.3
Le pasteur de l’Église universelle .......................................136
5.3.4
Origine, finalité et nature de la primauté ............................137
5.3.5
Évolution du concept de la primauté pontificale ................140
Réformes protestantes et gallicanisme ............................................141 5.3.6
Pistes pour une préparation spirituelle ...............................146
5.4 NOMBRE DE PAPES DE PIERRE A FRANÇOIS : LES PAPES D’ORIGINE AFRICAINE .....................................................................148 P. Joseph SAMEDI, SJ ............................................................................148 338
Introduction.........................................................................................148 5.4.1
Nationalités des papes : .......................................................149
5.4.2
Les papes d’origine africaine ..............................................149
5.5 6.
BIOGRAPHIE DU PAPE FRANÇOIS ......................................152
L’EGLISE CATHOLIQUE EN CENTRAFRIQUE .........................................155 6.1 ABREGEE DE L’HISTOIRE DE L’EVANGELISATION DE LA CENTRAFRIQUE ..................................................................................155
7.
6.1.1
Débuts de l’évangélisation (1893-1938) .............................156
6.1.2
Expansion de la Mission (1938-1960) ................................161
6.1.3
Nouvelle expansion et réorganisation (1960-2015) ............165
6.1.4
Quelques évènements importants .......................................167
RENCONTRE AVEC LES AUTORITES ET LE CORPS DIPLOMATIQUE .....173 7.1 Pistes de comprehension du discours du Pape François lors de sa rencontre avec les autorités et le corps diplomatique au palais de la renaissance ..............................................................................................173 7.1.1
Piste n. 1 : Le Saint Père et sa mission en Centrafrique......173
7.1.2 marche
Piste n. 2 : Les gouvernants comme guides du peuple en 173
7.1.3 Piste n. 3 : « Unité, Dignité, Travail » : la devise de la Centrafrique ........................................................................................174 7.2 DISCOURS INTEGRAL DU PAPE FRANÇOIS LORS DE LA RENCONTRE AVEC LES AUTORITES ET LE CORPS DIPLOMATIQUE AU PALAIS DE LA RENAISSANCE ...................175 8. DISCOURS DU PAPE FRANÇOIS AU CAMP DES DEPLACES A LA PAROISSE SAINT SAVEUR .............................................................................................179 8.1 Pistes de COMPREHENSION DU discours du pape françois au camp des deplaces a la paroisse saint sauveur ........................................179 8.1.1
Piste1 : les ingrédients de la paix ........................................179
8.2 Discours Integral du Pape François au Camp des déplacés à la paroisse Saint Sauveur ............................................................................179 9.
DISCOURS PRONONCÉ PAR LE PAPE FRANÇOIS À LA FATEB ..............181 339
9.1 Pistes de compréhension du discours prononcé par le Pape François à la FATEB ..............................................................................181 9.1.1
Piste n. 1 : Nous sommes tous frères. .................................181
9.1.2
Piste n. 2 : la violence est une action du diable...................182
9.2 DISCOURS INTEGRAL DU PAPE FRANÇOIS LORS DE LA RENCONTRE AVEC LES COMMUNAUTÉS ÉVANGÉLIQUES A LA FATEB ....................................................................................................183 10. DISCOURS PRONONCE PAR LE PAPE FRANÇOIS AVANT L’OUVERTURE DE LA PORTE SANTE ....................................................................................185 10.1 Pistes de COMPREHENSION DU discours du Pape François avant l’ouverture de la porte sainte .........................................................185 10.1.1 10.2
Piste n. 1 : Bangui capitale spirituelle du monde ................185
Discours integral prononcé avant l’ouverture de la Porte Sainte 186
10.3 Homélie du Pape lors de la messe avec les prêtres, religieux, religieuses, catéchistes, à la Cathédrale de Bangui .................................187 10.3.1
PISTES DE COMPREHENSION DE L’HOMELIE .........187
11. HOMELIE DU PAPE FRANÇOIS LORS DE LA MESSE AVEC LES PRÊTRES, RELIGIEUX, RELIGIEUSES, CATÉCHISTES ET JEUNES A LA CATHEDRALE NOTRE DAME DE L’IMMACULEE CONCEPTION DE BANGUI. ...............................................................191 12.
Discours lors de la veillée de prière avec les jeunes ...................195
12.1.1
PISTES DE COMPREHENSION DU DISCOURS ...........195
12.2 DISCOURS INTEGRAL LORS DU LANCEMENT DE LA VEILLÉE DE PRIÈRE AVEC LES JEUNES........................................196 13. Discours du Pape François lors de sa rencontre avec la communauté musulmane ........................................................................199 13.1 Pistes de compréhension du discours du Pape François lors de sa rencontre avec la communauté musulmane ............................................199 13.1.1
Piste n. 1 : Frères en paix. ...................................................199
13.1.2 Piste n. 2 : faire de la Centrafrique « une maison accueillante » ......................................................................................199 340
13.2 Discours Integral du Pape François lors de sa rencontre avec la communauté musulmane ........................................................................200 14. Homélie du Pape François lors de la messe au Stade 20.000 (vingt mille) places de Bangui...........................................................................203 14.1 Pistes de compréhension de l’homélie du Pape lors de la messe au stage 20.000 places de Bangui ................................................................203 14.1.1
Piste n. 1 : « l’autre rive » au ciel et sur la terre..................203
14.1.2
Piste n. 2 : Devenir juste .....................................................203
14.1.3
Piste n.3 : « Artisans du renouveau ». .................................204
14.2 Homélie integral du Pape François lors de la messe au Stade 20.000 (vingt mille) places de Bangui ....................................................205 16 LES DISCOURS DES AUTORITES RELIGIEUSES .........................................211 14.3 DISCOURS DE SON EXCELLENCE MONSEIGNEUR DIEUDONNE NZAPALAINGA ARCHEVEQUE DE BANGUI, AU PAPE LORS DE LA MESSE AVEC LES PRETRES, RELIGIEUX, RELIGIEUSES, CATECHISTES ET LES JEUNES A LA CATHEDRALE NOTRE DAME DE L’IMMACULEE CONCEPTION DE BANGUI. .........................................................................................211 14.4 DISCOURS DE MONSEINGEUR DIEUDONNE NZAPALAINGA ARCHEVEQUE DE BANGUI, AU PAPE LORS DE LA MESSE AU STADE 20.000 PLACES DE BANGUI ......................215 14.5 DISCOURS DU DOYEN DE LA FATEB LORS DE LA VISITE DU PAPE ................................................................................................218 14.6 DISCOURS DU PASTEUR NICOLAS GUEREKOYAME LORS DE LA VISITE DU PAPE A LA FATEB ..............................................219 14.7 DISCOURS DE BIENVENUE DE L’IMAM TIDIANI MOUSSA NAIBI, DE LA MOSQUEE CENTRALE DE BANGUI .......................221 15.
DISCOURS DE L’AUTORITE CIVILE ...................................................223
15.1 DISCOURS DE SON EXCELLENCE MADAME CATHERINE SAMBA PANZA, PRESIDENTE DE TRANSITION DE LA REPUBLIQUE CENTRAFRICAINE ....................................................223 16.
DISCOURS ADRESSES AU SAINT PERE PAR DES FIDELES .................229 341
16.1 DISCOURS DE BIENVENUE D’EVANS DEMBA, AU NOM DES JEUNES, AU LANCEMENT DE LA VEILLEE DE PRIERE .....229 16.2 DISCOURS DE BIENVENUE D’UNE DEPLACEE, LORS DE LA VISITE DU PAPE FRANÇOIS SUR LE SITE DES DEPLACES DE LA PAROISSE SAINT SAUVEUR .......................................................230 17.
Introduction ....................................................................................233
17.1
Historique....................................................................................233
17.1.1
Que savoir de la Cathédrale ? .............................................234
17.2 Les grands événements marquant la vie historique de la Cathédrale : .............................................................................................237 17.3
La Cathédrale en chiffres ............................................................240
17.4
Les Curés de la Cathédrale .........................................................244
DISCOURS PRÉPARÉ DU SAINT PERE AUX JEUNES ......................................249 CONFERENCE DE PRESSE AU RETOUR ........................................................253 COP 21....................................................................................................253 PAUVRETÉ ...........................................................................................254 AFRIQUE ...............................................................................................254 VATILEAKS ..........................................................................................255 FONDAMENTALISMES ......................................................................256 MEXIQUE ..............................................................................................256 AUDIENCE DE MERCREDI, 2 DECEMBRE 2015 ............................................257 RAPPORTS SUR LA VISITE DU PAPE FRANÇOIS DE L’EGLISE CATHOLIQUE ET DE LA COMMUNAUTE MUSULMANE .........................................................261 RAPPORTS DE L’EGLISE CATHOLIQUE .........................................261 RAPPORTS SUR LA VISITE DU PAPE FRANÇOIS PAR LA COMUNAUTE MUSULMANE DE LA MOSQUEE CENTRALE DE BANGUI. ................................................................................................268 19.
TEMOIGNAGES ................................................................................277
19.1 Témoignage donné par S.E. Madame Catherine SAMBA-PANZA, Présidente de la République Centrafricaine, Chef de l’Etat de Transition, 342
lors de la Fête du Pape à la Nonciature Apostolique de Bangui, le 12 mars 2016. 277 19.2 Témoignage de son excellence Monseigneur Franco COPPOLA Nonce apostolique en Centrafrique lors de la visite du Pape François ...284 19.3 Homélie (Témoignage) prononcée par S.E. Mgr Dieudonné NZAPALAINGA, Archevêque de Bangui et Président de la Conférence Episcopale Centrafricaine, lors de la Messe pour le Pape François à la Nonciature Apostolique de Bangui, le 12 mars 2016, en l’occasion de la « fête du Pape ». ......................................................................................291 19.4 Témoignage de S. E. Mgr. Juan José Aguirre, Évêque de Bangassou ...............................................................................................302 19.5 Père
Témoignages de deux personnes au km5, sur la visite du Saint 305
19.6 Témoignage de l’abbé Mathieu Fabrice Evrard Bondobo, Curé de la Cathédrale de Bangui ..........................................................................306 19.7 20.
Témoignage d’Evans DEMBA ...................................................310 POST-PREFACE ................................................................................311
DES PHOTOS SOUVENIRS DU VOYAGE APOSTOLIQUE DU PAPE FRANÇOIS EN CENTRAFRIQUE ...........................................................................................313
343
Religion aux éditions L’Harmattan
Dernières parutions
400 questions sur la Bible Quiz pour toute la famille - parents & enfants (nouvelle édition, revue)
Nkansa Mbienga Erick
Où le Christ s’entretient-il avec la Samaritaine ? Qui meurt foudroyé pour avoir indûment touché l’arche de Dieu ? Quel psaume est attribué à Moïse ? Qui était Schaaschgaz et quelle était sa fonction ? Quel disciple imposa les mains sur Paul afin qu’il recouvre la vue ? Quel âge avait Abraham à la naissance d’Isaac ? À travers ces questions, le souhait de l’auteur est de présenter Jésus-Christ ressuscité, qui a accordé à tous ceux qui l’ont reçu comme Seigneur et Sauveur la véritable paix intérieure et la vie éternelle. (12.50 euros, 98 p.) ISBN : 978-2-343-07523-5, ISBN EBOOK : 978-2-336-39784-9 Vous avez dit Concordat ? Sortir progressivement du régime dérogatoire des cultes
Seelig Michel
Les mots concordat, concordataire, reviennent dans le débat public. Mais qu’est-ce que le Concordat ? Pourquoi dit-on de certains territoires qu’ils sont concordataires ? Quelle est la réalité concordataire de l’Alsace et de la Moselle ? Pourrait-on étendre le Concordat à tout le territoire national ? Quel rapport entre le Concordat et le droit local d’Alsace et de Moselle ? Telles sont quelques-unes des questions auxquelles cet ouvrage souhaite apporter des réponses claires, aux références juridiques incontestables. (Coll. Débats Laïques, 20.00 euros, 226 p.) ISBN : 978-2-343-07749-9, ISBN EBOOK : 978-2-336-39747-4 Et si le christianisme n’était pas du tout une religion Le testament révolutionnaire de Dietrich Bonhoeffer enfin restitué – Essai
Delahaye Christian
Le Christ est venu libérer les hommes du carcan des religions : c’est la découverte révolutionnaire faite par le théologien luthérien allemand Dietrich Bonhoeffer, résistant à Hitler, exécuté en 1945. Voici pour la première fois réunis des textes issus de l’ensemble de son œuvre sur le christianisme en dehors des religions. Bonhoeffer adresse un message authentiquement chrétien, c’est-à-dire pacifiste et areligieux à un monde gravement menacé par les violences identitaires et fondamentalistes. (23.50 euros, 234 p.) ISBN : 978-2-343-07617-1, ISBN EBOOK : 978-2-336-39789-4 Schismes et religions Problèmes actuels
Hirsch Jean
L’auteur fait le constat d’un schisme important au sein de l’islam entre sunnites et chiites. Avec la montée en puissance de Daech qui poursuit un processus fondamentaliste sunnite visant à
éliminer tout ce qui peut entacher l’unicité divine et qui s’oppose ainsi aux chiites, les divergences semblent s’aggraver. Mais qu’en est-il des deux autres monothéismes ? Existe-t-il des fractures d’intensité telles qu’on en trouve dans l’islam ? (19.50 euros, 188 p.) ISBN : 978-2-343-07019-3, ISBN EBOOK : 978-2-336-39797-9 Prières de l’Ancien Testament Mille ans de dialogue avec Dieu
Lapierre Francis, Watremez Pierre
Francis Lapierre rend hommage à Pierre Watremez en proposant une relecture des prières disséminées dans l’Ancien Testament. Trois grandes périodes apparaissent : les prières de la conquête de la terre promise, les prières de l’exil et, enfin, les prières de sagesse de l’époque perse puis grecque. On découvre que le texte le plus achevé est celui du dernier Esaïe (ch. 56-66). Comment méditer et prier avec ces textes que Jésus connaissait par cœur ? (Coll. Religions et Spiritualité, 31.00 euros, 304 p.) ISBN : 978-2-343-07104-6, ISBN EBOOK : 978-2-336-39727-6 Théologie empirique
Romanidès Jean Présenté et commenté par Mgr Philarète
L’œuvre exigeante et démystifiante de Jean Romanidès, théologien grec (1927-2001), reste méconnue. Orthodoxe, il constate que l’effondrement de la métaphysique raffermit la théologie des déifiés, qui est une science expérimentale. Il montre que les Pères théologuent uniquement à partir de leur vie en Christ et rejettent la philosophie. Historien, il démonte le mécanisme qui, avant le «schisme», a coupé l’Occident de ses propres racines. Cet ouvrage ouvre la perspective d’une conversion du regard occidental sur sa propre histoire falsifiée. (Coll. Contrelittérature, 34.00 euros, 344 p.) ISBN : 978-2-336-30908-8, ISBN EBOOK : 978-2-336-39832-7 Histoire et théorie du symbole
Borella Jean
Ce livre est considéré comme le texte fondateur d’une nouvelle épistémologie. On y trouvera, en introduction à La crise du symbolisme religieux, une théorie du symbole qui entend renouer intelligiblement, par-delà les déconstructions contemporaines, avec les doctrines anciennes d’Orient et d’Occident. Point nodal du discours métaphysique, le signe symbolique est le lieu où nature et culture se convertissent l’une à l’autre, c’est-à-dire où, sans se confondre, être et sens sont réconciliés. (Coll. Théôria, 29.00 euros, 280 p.) ISBN : 978-2-343-07835-9, ISBN EBOOK : 978-2-336-39728-3 Lumières de la théologie mystique
Borella Jean
Entre la nécessaire abstraction de la scolastique, aujourd’hui assez injustement récusée, et le goût de notre temps pour une spiritualité fondée sur l’expérience concrète, ce livre tente d’ouvrir une autre perspective, celle de la théologie comme voie spirituelle, comme theognôsis, par la sanctification de l’intelligence. L’auteur pense en trouver la clé dans l’oeuvre énigmatique et fondatrice de «Denys L’Aréopagite», dont le hiéronyme renvoie au converti de saint Paul. Il en poursuit les traces chez ses lointains continuateurs, Maître Eckhart et les mystiques rhénans. (Coll. Théôria, 21.50 euros, 200 p.) ISBN : 978-2-343-07836-6, ISBN EBOOK : 978-2-336-39738-2 Le recours aux Écritures dans le récit matthéen des tentations de Jésus (Mt4, 1-11)
Pongo Lowanga François
L’Évangile de Matthieu renferme des racines juives et déploie son herméneutique à la lumière de l’intertextualité biblique. Jésus, le diable et le narrateur matthéen font chacun un type de
relecture des Écritures. L’approche littéraliste réalisée par le diable est à proscrire, au profit de la fécondité des applications contextuelles et existentielles faites par Jésus. (Coll. Religions et Spiritualité, série Universitaire, 39.00 euros, 412 p.) ISBN : 978-2-343-07549-5, ISBN EBOOK : 978-2-336-39851-8 Consacrés africains, pour quoi faire ? Redécouvrir la fonction sociale des voeux religieux
Bira Louis
En s’inspirant de la dimension fonctionnelle du charisme de la vie consacrée, l’auteur invite à redécouvrir la fonction sociale des trois vœux religieux d’obéissance, de pauvreté et de chasteté. L’auteur postule l’existence de pratiques concrètes, en lien avec les problèmes sociaux, que les consacrés sont invités à assumer dans leurs Églises et leurs pays. C’est à ce prix que leur vécu peut revêtir une dimension sociale et, par conséquent, redevenir crédible. (Coll. Églises d’Afrique, 20.50 euros, 198 p.) ISBN : 978-2-343-07211-1, ISBN EBOOK : 978-2-336-39801-3 Le religieux sur internet
Sous la direction de Fabienne Duteil-Ogata, Isabelle Jonveaux, Liliane Kuczynski et Sophie Nizard
La multiplication des sites et blogs religieux - toutes religions confondues - contribue à redéfinir les conceptions traditionnelles du temps et de l’espace, les rapports entre centre et périphéries et les relations de pouvoir, d’autorité et de genre. Les pratiques, les identités, la notion de communauté se recomposent sans cesse. Ce livre, le premier en français sur ce sujet, se propose d’évaluer et d’analyser ces transformations. (Coll. Religions en questions, 32.00 euros, 330 p.) ISBN : 978-2-343-07147-3, ISBN EBOOK : 978-2-336-39625-5 L’amour conjugal comme « totalité » et « espérance » Une lecture patristique à la lumière de saint Augustin
Khonde Godefroid-Léon
Bibliquement, l’univers est l’œuvre créatrice de Dieu. En cela, il ressort que Dieu a créé l’homme et la femme en amour propre, intelligence et liberté comme une « seule chair », c’est-à-dire, comme une communion et une totalité, de telle manière que c’est finalement Dieu qui s’est converti en un « nous personnel » de la créature humaine. C’est donc en considérant le principe humain de la communication et de la totalité qui se réfère au couple humain que ce livre redéfinit la nature humaine sous le regard de saint Augustin. (Coll. Afrique théologique & spirituelle, 21.50 euros, 208 p.) ISBN : 978-2-343-07806-9, ISBN EBOOK : 978-2-336-39688-0 Jean-Marc Ela ou l’honneur de faire de la théologie en Afrique Hommage au théologien africain de la libération
Kouadio Jean - Préface de Mgr Marcellin Yao Kouadio
En Afrique, Jean-Marc Ela est l’un de ceux qui ont assigné une mission de libération ou de salut intégral à la théologie. Cet éminent homme de culture a su mener la réflexion et la recherche théologiques d’une manière contextuelle et ce, à partir de la Bible, de la Tradition de l’Église et des réalités de la société africaine. Ce prophète de notre temps, à l’instar de son Divin Maître, n’a pas fait l’unanimité. Ses écrits, ses prises de position et son engagement aux côtés des pauvres lui ont valu l’exil et la mort en exil. (21.50 euros, 218 p.) ISBN : 978-2-343-07164-0, ISBN EBOOK : 978-2-336-39571-5 Le contentement, une grâce de Dieu Une exégèse de Philippiens 4.10-13
Koumbem Elie
Cette réflexion a un double objectif : 1) Établir un parallèle entre l’approche de Paul par rapport à l’œuvre de Dieu et celle des pionniers au Burkina. Pour l’implantation et la consolidation de
l’Église, Paul s’est donné sans réserve, allant même jusqu’à se considérer comme esclave du Christ. 2) Faire le postulat normatif. Que reste-t-il de leur sacrifice ? Il s’est élevé une génération qui n’a pas connu Joseph et qui veut diluer l’Évangile au profit de leurs propres intérêts. (Coll. Harmattan International Burkina Faso, 11.50 euros, 82 p.) ISBN : 978-2-343-07875-5, ISBN EBOOK : 978-2-336-39579-1 Spiritualité incarnée Réflexions sur la quête de la santé
Goa Ibo Jean-Maurice
Cet ouvrage se donne pour but de comprendre l’état d’une humanité déchue et les modalités de son salut en Dieu. La réflexion de l’auteur s’inscrit dans la pastorale de la santé qui est une mission de consolation et d’accompagnement. Elle ouvre pour ceux soumis aux « épreuves de la croix », une espérance nouvelle au cœur d’une communauté ecclésiale solidaire et d’un monde plus attentionné. Ce livre se veut une contribution pour l’avènement d’une église charitable et compatissante. (Coll. Croire et savoir en Afrique, 18.00 euros, 178 p.) ISBN : 978-2-343-05589-3, ISBN EBOOK : 978-2-336-39599-9 Monothéisme africain Chance d’un dialogue œcuménique et interreligieux
Matabaro Chubaka Pierre, Bunyakiri Crispin
L’Afrique est le berceau de l’humanité. Les premiers monothéismes ont habité l’Afrique et la Bible serait un condensé de ce que Moïse «l’Africain» a enseigné aux Hébreux de sorte que celle-ci pouvait être considérée comme un héritage africain. Le monothéisme africain part du principe que le Créateur est unique et que, par conséquent, la famille humaine est unie par lui. (Coll. Afrique théologique & spirituelle, 30.00 euros, 306 p.) ISBN : 978-2-343-07626-3, ISBN EBOOK : 978-2-336-39687-3 Vie consacrée et prophétisme en Afrique
Sombel Sarr Benjamin
S’appuyant sur une analyse du contexte de l’Afrique contemporaine, l’auteur souligne la dimension prophétique de la vie consacrée. Cette dernière appelle, intègre et s’articule à une nouvelle évangélisation. Relue à travers sa dimension prophétique, la vie consacrée doit considérer de nouveaux paradigmes et explorer des nouvelles méthodes pour une pastorale et une présence qui contribuent avec pertinence à la nouvelle évangélisation. (Coll. Croire et savoir en Afrique, 19.00 euros, 186 p.) ISBN : 978-2-343-05397-4, ISBN EBOOK : 978-2-336-39624-8 Le mystère de la trinité Comme style de vie et forme de pensée dans le christianisme africain
Bakindika Jean Bonane - Préface du professeur Peter Hünermann
Jusqu’ici, la christologie africaine n’est pas intégrée dans une théologie trinitaire systématique. C’est ce déficit que voudrait combler l’auteur. Comme point de départ de sa théologie trinitaire il met au centre la vie et la parole. Cet ouvrage montre comment la théologie trinitaire peut contribuer à redynamiser les sociétés africaines d’aujourd’hui au plan ecclésial, socioéconomique et politique. Un livre qui donne un souffle nouveau à la théologie africaine et dont ne pourront plus se passer les recherches ultérieures. (Coll. Églises d’Afrique, 49.00 euros, 510 p.) ISBN : 978-2-343-06648-6, ISBN EBOOK : 978-2-336-39598-2
L’HARMATTAN ITALIA Via Degli Artisti 15; 10124 Torino [email protected] L’HARMATTAN HONGRIE Könyvesbolt ; Kossuth L. u. 14-16 1053 Budapest L’HARMATTAN KINSHASA 185, avenue Nyangwe Commune de Lingwala Kinshasa, R.D. Congo (00243) 998697603 ou (00243) 999229662
L’HARMATTAN CONGO 67, av. E. P. Lumumba Bât. – Congo Pharmacie (Bib. Nat.) BP2874 Brazzaville [email protected]
L’HARMATTAN GUINÉE Almamya Rue KA 028, en face du restaurant Le Cèdre OKB agency BP 3470 Conakry (00224) 657 20 85 08 / 664 28 91 96 [email protected]
L’HARMATTAN MALI Rue 73, Porte 536, Niamakoro, Cité Unicef, Bamako Tél. 00 (223) 20205724 / +(223) 76378082 [email protected] [email protected]
L’HARMATTAN CAMEROUN TSINGA/FECAFOOT BP 11486 Yaoundé 699198028/675441949 [email protected] L’HARMATTAN CÔTE D’IVOIRE Résidence Karl / cité des arts Abidjan-Cocody 03 BP 1588 Abidjan 03 (00225) 05 77 87 31 [email protected] L’HARMATTAN BURKINA Penou Achille Some Ouagadougou (+226) 70 26 88 27
L’HARMATTAN ARMATTAN SÉNÉGAL SÉNÉGAL L’H 10 VDN en face Mermoz, après le pont de Fann « Villa Rose », rue de Diourbel X G, Point E BP 45034 Dakar Fann 45034 33BP825 98 58Dakar / 33 FANN 860 9858 (00221) 33 825 98 58 / 77 242 25 08 [email protected] / [email protected] www.harmattansenegal.com
Voyage apostolique du Pape François en Centrafrique « Aujourd’hui Bangui devient la capitale spirituelle du monde. L’Année Sainte de la Miséricorde commence en avance sur cette terre. Une terre qui souffre depuis plusieurs années de la guerre et de la haine, de l’incompréhension, du manque de paix. Mais sur cette terre souffrante, il y a aussi tous les pays qui passent par la croix de la guerre. Bangui devient la capitale spirituelle de la prière par la miséricorde du Père. Tous, demandons la paix, la miséricorde, la réconciliation, le pardon, l’amour. Pour Bangui, pour toute la République de Centrafrique, pour le monde entier, pour les pays qui souffrent de la guerre, demandons la paix ! Et tous ensemble, demandons l’amour et la paix. Tous ensemble ! Doyé Siriri ! [Tous répètent : Doyé Siriri !] Et maintenant, avec cette prière nous commençons l’Année Sainte : ici, dans cette capitale spirituelle du monde, aujourd’hui ! »
Mathieu Fabrice Evrard BONDOBO, né en 1980 à Bangui, est ordonné prêtre en 2009, dans l’archidiocèse de Bangui, en Centrafrique. Il a fréquenté le petit séminaire Saint Marcel de Sibut, le moyen séminaire Saint Paul de Bangui, le grand séminaire Saint Marc de Bangui-Bimbo. En 2006, il a été envoyé à l’université pontificale Santa Croce à Rome, en Italie, pour terminer la théologie institutionnelle et se spécialiser en Droit Canon. Il est titulaire d’un diplôme de maturité en philosophie, d’un baccalauréat en théologie et d’un doctorat en droit canon. Il est nommé curé de la Cathédrale de Notre Dame de l’Immaculée Conception de Bangui en 2014. En 2016, il est nommé Vicaire général de l’archidiocèse de Bangui. Il est également membre du conseil presbytéral et du collège des consulteurs dans l’archidiocèse de Bangui. Il est responsable des prêtres de l’archidiocèse de Bangui à l’etranger et aussi professeur du Droit Canon au grand séminaire Saint Marc de Bangui-Bimbo.
Illustration de couverture : collection personnelle d’un paroissien de Bangui.
ISBN : 978-2-343-11232-9
36 €