Traite Sur La Predication De La Croisade (Corpus Christianorum in Translation, 39) (French Edition) 9782503598109, 2503598102


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Traite Sur La Predication De La Croisade (Corpus Christianorum in Translation, 39) (French Edition)
 9782503598109, 2503598102

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TRAITÉ SUR LA PRÉDICATION DE LA CROISADE

CORPVS CHRISTIANORVM IN TRANSLATION

39

CORPVS CHRISTIANORVM Continuatio Mediaeualis 279 HVMBERTVS DE ROMANIS DE PREDICATIONE CRVCIS

cura et studio Valentin Portnykh

auxilium praestante Christine Vande Veire

TURNHOUT

FHG

HUMBERT DE ROMANS Traité sur la prédication de la croisade

Introduction, traduction et notes par Valentin Portnykh

H

F

© 2022, Brepols Publishers n. v., Turnhout, Belgium. All rights reserved. No part of this publication may be reproduced, stored in a retrieval system, or transmitted, in any form or by any means, electronic, mechanical, photocopying, recording, or otherwise without the prior permission of the publisher.

D/2022/0095/79 ISBN 978-2-503-59810-9 E-ISBN 978-2-503-59811-6 DOI 10.1484/M.CCT-EB.5.127241 ISSN 2034-6557 E-ISSN 2565-9421 Printed in the EU on acid-free paper.

TABLE DES MATIÈRES

Avant-propos7 Introduction9 Le traité de prédication de la croix : étapes et directions principales de son étude 9 La composition du traité 14 Contexte du placement du traité dans les manuscrits 25 Les autres travaux d’Humbert de Romans concernant la croisade26 Contexte historique de la composition du traité 30 Bibliographie39 Abréviations39 Sources primaires 39 Études44 Traité sur la prédication de la croisade

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Index223 Index scripturaire 223 Index des sources non-bibliques 228 Index des noms232

AVANT-PROPOS

La traduction française présentée dans ce livre est une traduction du texte latin du traité d’Humbert de Romans sur la prédication de la croisade (De predicatione crucis) reconstruit à partir de la tradition manuscrite. Le travail a été commencé pendant la préparation de ma thèse de doctorat. D’abord, la traduction a été faite d’après le texte d’un des manuscrits les plus anciens, et ensuite, a été retravaillée au fur et à mesure des révisions faites sur le texte latin en considérant l’ensemble de la tradition manuscrite à ce jour identifiée. Parmi les maîtres et les collègues qui m’ont aidé à préparer cette traduction commentée, je voudrais tout d’abord remercier Madame Nicole Bériou, professeur de l’Université Lyon 2 et directrice de l’IRHT en 2011-2014, qui a été ma directrice de recherche d’abord en Master 2 (2006-2007) et ensuite en doctorat (2008-2011). C’est elle qui la première a corrigé cette traduction pendant mes études doctorales. Après la soutenance, ce travail de traduction a été revu et amélioré avec l’aide de Monsieur Guy Lobrichon, professeur émérite de l’Université d’Avignon que je connais depuis longtemps. Sans l’aide immence de Mme Bériou et M. Lobrichon, la traduction n’aurait pas pu être menée à bien, car l’auteur de ces lignes n’est pas un natif de langue française. Enfin, avant la publication le travail a été revu encore une fois par Madame Christine Chevalier-Boyer, membre associé du CIHAM UMR 5648, que j’aimerais remercier chaleureusement pour son

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Avant-propos

travail scrupuleux. Pour les corrections finales un grand merci à mon grand ami Loïc Chollet (Neuchâtel, Suisse). Enfin, je tiens à remercier Monsieur Ivan Remorov, professeur de latin et prêtre orthodoxe qui m’a beaucoup aidé à traduire le traité d’Humbert en russe. Certaines de ses suggestions pour la traduction russe ont été très utiles pour la traduction française.

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INTRODUCTION

Le traité de prédication de la croix : étapes et directions principales de son étude Humbert de Romans (c. 1190/1200-1277), le maître général des dominicains (1254-1263) est né à Romans (Drôme) dans la dernière décennie du xiie siècle1. Il a fait ses études à l’Université de Paris, où il a obtenu la maîtrise ès arts, et a étudié ensuite la théologie et le droit canonique. Au milieu des années 1220, il est entré dans l’ordre dominicain. Son noviciat s’est déroulé à Paris ; puis il a été envoyé à Lyon. En 1237, il est devenu prieur du couvent dominicain de Lyon. Vers 1240, il a été choisi comme provincial de la province romaine de l’ordre. Selon certaines informations, il aurait même été proposé pour être pape2. En novembre 1244, il est devenu provincial de la province française de l’ordre et enfin, le 31 mai 1254, il a été élu grand maître, au chapitre général réuni à Budapest. Le 30 mai 1263, Humbert a démissionné et s’est retiré au couvent dominicain de Lyon. C’est durant cette période qu’il consacre l’ensemble de son temps aux activités littéraires3. Il demeura dès lors en retrait des responsabilités, refusant par exemple E. T. Brett, Humbert of Romans. His Life and Views of Thirteenth-Century Society, Toronto, 1984, p. 4. 2  Brett, Humbert of Romans, p. 9. 3  G.  Tyl-Labory, « Humbert de Romans », R.  Bossuat, L.  Pichard et G.  Raynaud de Lage (éd.), Dictionnaire des Lettres françaises. Le Moyen Âge, Paris, 1992, p. 699. 1 

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Introduction

de devenir patriarche de Jérusalem4. Humbert est mort le 14 juillet 12775. Parmi ses œuvres, il existe le traité de prédication de la croix (De predicatione crucis). Humbert l’a conçu comme un « manuel » des prédicateurs. En le lisant, les prédicateurs étaient censés pouvoir composer un sermon eux-mêmes. La première tentative de consacrer une étude au traité de la prédication de la croix d’Humbert de Romans a été faite en 1890 par Albert Lecoy de la Marche dans son article « La prédication de la croisade au treizième siècle »6. Sans être étudié ensuite de manière approfondie, il a cependant retenu l’attention des chercheurs du vingtième siècle, parfois dans le cadre d’études sur des sujets plus vastes. Le traité a été approximativement daté et ses sources en partie identifiées. Le contexte historique de sa composition a aussi été précisé. Mais c’est seulement en 1991 que Penny Cole a examiné la première la tradition manuscrite et utilisé les manuscrits dans sa recherche au lieu de recourir uniquement, comme les autres chercheurs avant elle, à l’incunable fabriqué à Nuremberg vers 1495. Pourtant, le texte intégral latin n’a été édité que très récemment, et n’a jamais été traduit. La première édition critique du texte latin est celle qui sert de base pour la présente traduction.

Datation du traité Le premier à suggérer une datation du traité à été A. Lecoy de la Marche. En se fondant sur l’analyse du contenu il a conclu que le traité avait été écrit vers 1266-1267 : Humbert évoque la prise de la forteresse de Safed, en 1266, mais n’évoque nulle part la prise d’Antioche que l’auteur de l’article date de mai 12677 (dans l’historiographie contemporaine il est convenu d’admettre que la for-

Brett, Humbert of Romans, p. 10. Pour la vie et les œuvres d’Humbert voir aussi : Humberti de Romanis Legendae Sancti Dominici, éd. S.  Tugwell, Rome, 2008 (Monumenta Ordinis Fratrum Praedicatorum Historica, 30). 6  A.  Lecoy de la Marche, « La prédication de la croisade au treizième siècle », Revue des questions historiques, 4 (1890), p. 5-28. 7  Lecoy de la Marche, « La prédication de la croisade », p. 11-12. 4  5 

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Introduction

teresse d’Antioche a été prise en mai 12688). Lecoy de la Marche note aussi que Louis IX dans le De predicatione crucis est appelé simplement rex Franciae. Ce qui signifie qu’au moment de composition du traité de prédication de la croix le roi était encore vivant. En effet, si l’on examine l’Opusculum tripartitum, autre travail d’Humbert préparé pour le concile de Lyon de 1274, paru quelques années plus tard, probablement vers 1272, et assurément après la mort de Louis IX (dans les chapitres 12 et 17 de la première partie il est question de cette mort), l’on y constate la présence des expressions foelicis memoriae rex Ludovicus et bonae memoriae rex Ludovicus9. Quelques décennies plus tard la datation du traité a été confirmée par les travaux de Fritz Heintke10 et Valmar Cramer11 qui indiquent pourtant qu’Antioche a été prise en mai 1268. Si on admet qu’Humbert aurait très probablement mentionné la prise d’Antioche, la date de rédaction ne peut être postérieure à 1268 : la forteresse ayant été prise en mai, quelques mois étaient nécessaires pour que la nouvelle parvienne jusqu’en Europe12. Faute d’autres renseignements pouvant aider à dater le traité, pour l’instant cette datation est la plus précise que l’on puisse retenir.

Identification des sources du traité Déjà Lecoy de la Marche était parvenu à identifier quelquesunes des nombreuses sources citées dans le traité. Il a établi une relation entre l’anecdote à propos du roi Arthur dans le chapitre 4, le poème « La vengeance de Raguidel » et la collection

Voir par exemple : C. Tyerman, God’s War. A new History of the Crusades, London, 2007, p. 810. 9  Humberti de Romanis Opusculum Tripartitum, E. Brown (éd.), Appendix ad Fasciculum Rerum Expetendarum et Fugiendarum, London, 1690, p. 197. 10  F. Heintke, Humbert von Romans, der fünfte Ordensmeister der Dominikaner, Berlin, 1933, p. 103-107. 11  V. Сramer, « Humbert von Romans’ Traktat ‘Über die Kreuzpredigt’ », Das Heilige Land, 79 (1935), p. 132-153. 80 (1936). P. 11-23, 43-60, 77-98. 12  Сramer, « Humbert von Romans’ Traktat ‘Über die Kreuzpredigt’ », p. 137. 8 

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Introduction

des anecdotes compilée par Étienne de Bourbon13. En outre, il a identifié d’autres sources en s’appuyant sur les titres donnés par Humbert. Or, l’Historia Antiochena, par exemple, n’est pas la Chanson d’Antioche14, mais la chronique de la première croisade écrite par Foucher de Chartres. La précision se trouve dans certains manuscrits, mais Lecoy de la Marche ne pouvait pas le savoir, car il utilisait seulement l’incunable de 1495 qui ne contient pas cette indication. Bien après lui Edward  T. Brett s’est trompé au sujet de la même source, disant que c’est la chronique de Gautier le Chancelier15. Le grand mérite de Valmar Cramer a été l’identification d’autres sources du traité. C’est lui qui a identifié l’anecdote à propos du roi Philippe II de France qui figure dans le chapitre 26 du traité, empruntée à L’estoire de Eracles empereur et la conqueste de la Terre d’outre mer16. C’est lui aussi qui a supposé que le récit à propos de Justine et Cyprien, évoqué dans le texte deux fois, à savoir dans les chapitres 4 et 34, a été pris chez Honoré d’Autun17. Au contraire de Lecoy de la Marche, il donne le nom exact de l’auteur de la source citée dans le chapitre 38 : il s’agit de Foucher de Chartres18. Cramer a vraisemblablement raison de supposer que la légende de saint Martin (chapitre 41) a été empruntée à Sulpice Sévère19. En outre, il a raison de dire que la vie de sainte Marie d’Oignies (chapitre 41) est celle composée par Jacques de Vitry20. Lecoy de la Marche, « La prédication de la croisade », p. 17 ; A. Lecoy de la Marche (éd.), Anecdotes historiques, légendes et apologues tirés du recueil inédit d’Étienne de Bourbon, dominicain du xiiie siècle, Paris, 1877, p. 86-87. 14  Lecoy de la Marche, « La prédication de la croisade » p. 16. 15  Brett, Humbert of Romans, p. 173. 16  Сramer, « Humbert von Romans’ Traktat ‘Über die Kreuzpredigt’ », Das Heilige Land, 80 (1936), p. 57. 17  Сramer, « Humbert von Romans’ Traktat ‘Über die Kreuzpredigt’ », Das Heilige Land, 80 (1936), p. 80. 18  Сramer, « Humbert von Romans’ Traktat ‘Über die Kreuzpredigt’ », Das Heilige Land, 80 (1936), p. 81. 19  Сramer, « Humbert von Romans’ Traktat ‘Über die Kreuzpredigt’ », Das Heilige Land, 80 (1936), p. 83. 20  Сramer, « Humbert von Romans’ Traktat ‘Über die Kreuzpredigt’ », Das Heilige Land, 80 (1936), p. 84. 13 

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Introduction

En 1988 est paru l’article de David Trotter21 contenant une étude plus détaillée du fragment du chapitre 4, où est raconté un exemplum à propos du roi Arthur, qui avait déjà fait l’objet de l’intérêt de Lecoy de la Marche. En se référant à ce dernier, il parle de nouveau de la ressemblance entre cette histoire, le fragment du poème « La vengeance Raguidel » et une des anecdotes de la collection d’Étienne de Bourbon. De plus il démontre qu’il existe une certaine ressemblance entre le fragment et « La première continuation du Perceval ». L’article de James Brundage, en revanche, est plutôt concentré sur les sources indirectes du traité : le texte du traité montre les connaissances assez étendues d’Humbert dans le domaine du droit canonique, ce qui lui a permis de fonder la légitimité de la croisade sur la théorie de la guerre juste22. Pourtant il restait encore bien des sources à identifier. Dans notre édition il a été possible d’en reconnaître la plupart, quelquesunes résistent encore.

Tradition manuscrite Comme nous l’avons déjà signalé, la tradition manuscrite a seulement été abordée auparavant par Penny Cole, qui ne s’est pas contentée seulement du texte de l’incunable de Nuremberg (vers 1495). En 1991 elle a publié la première recherche générale sur l’histoire de la prédication de la croisade pendant les deux cents ans des expéditions en Terre sainte23. Entre autres, elle a examiné le traité de la prédication de la croix et en a récapitulé les idées en se fondant sur le plus ancien manuscrit, qui est celui du Vatican (Val. Lat. 3847)24. Ensuite, elle a également publié un article 21  D. Trotter, « La mythologie arthurienne et la prédication de la croisade », L. Harf-Lancner et D. Boutet (éd.), Pour une mythologie du Moyen Âge, Paris, 1988, p. 155-177. 22  J. A. Brundage, « Humbert of Romans and the Legitimacy of Crusader Conquests », B. Z. Kedar (éd.), The Horns of Hattin, Jerusalem, 1992, p. 302-313. 23  P. J. Cole, The Preaching of the Crusades to the Holy Land, 1095-1270, Cambridge (Massachusets), 1991, p. 202-217. 24  Cole, The Preaching of the Crusades to the Holy Land, p. 202.

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portant sur la comparaison des manuscrits qui contiennent le traité, et distingué parmi les textes une « version courte » (Wien, Nat. Bibl. 4239, f. 169r-187r)25. Cependant il a été découvert récemment dans l’édition critique que celle-ci rentre dans la tradition manuscrite de la version normale (« longue » selon elle), tandis qu’il existe une vraie version courte conservée dans cinq manuscrits qui constituent une tradition particulière du texte26. La reconstruction complète de la tradition manuscrite du traité a été résolue seulement à l’occasion de notre édition du texte latin.

La composition du traité Le contenu des chapitres du traité Le texte originel du traité compte 45 chapitres dе format et dе contenu très différents27. Le premier chapitre constitue une note explicative sur le principe de la composition du traité. Le deuxième chapitre expose les idées fondamentales d’Humbert sur la croisade, qui guideront la suite de ses propos. Son titre même le reflète très bien : « Thema communе ad totum opus ». L’ayant lu, le prédicateur devait comprendre l’essentiel de la question : ces idées peuvent être utilisées dans n’importe quel sermon concernant la croisade. En règle générale, celles-ci sont traditionnelles, et se trouvent dans diverses sources concernant les croisades pendant les deux cents ans des expéditions en Terre sainte. C’est dans ce chapitre qu’il est dit que la croisade est une guerre juste P. J. Cole, « Humbert of Romans and the Crusade », M. Bull, N. Housley (éd.), The Experience of Crusading. i. Western Approaches, Cambridge, 2003, p. 157-174. 26  V. Portnykh, « An Unknown Short Version of the Treatise De predicatione sancte crucis by Humbert of Romans », Studi Medievali, 2 (2015), p. 721-739 ; V. Portnykh, « The Short Version of Humbert of Romans’ Treatise on the Preaching of the Cross : Edition of the Latin Text », Crusades, 15 (2016), p. 55-116. 27  Il faut noter que dans les manuscrits de l’une des familles les chapitres sont au nombre de 46, même si en même temps ils ne contiennent pas le dernier chapitre, parce que deux chapitres sont encore divisés en deux. 25 

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contre les Sarrasins, menée par l’armée de Dieu qui profite du soutien de Dieu et des anges, et dont les participants bénéficient de l’indulgence plénière. Le troisième chapitre contient le récit sur les trois types possibles de l’aide à la Terre sainte : la participation en personne, l’aide matérielle et les prières. Les chapitres 4-9 expliquent les questions autour du signe de la croix comme signe distinctif des croisés. Le chapitre 10 est dédié à l’histoire des origines des croisades. Les chapitres 11-17 sont dédiés à la description des facteurs qui doivent motiver la prise de la croix. Les chapitres 18-25, en revanche, expliquent les empêchements à la prise de la croix avec des commentaires sur ce qui attend ceux qui ne vont pas les surmonter, et sur les avantages pour l’âme que n’obtiennent pas ceux qui se laissent détourner de l’engagement. Le chapitre 26 décrit les neuf « consolations » pour le futur croisé. Il faut noter que la liste des consolations fait écho à la liste des motivations à la prise de la croix (chapitres 11-17, voir le tableau ci-dessous). Le chapitre 27 est une liste des citations bibliques (themata) indispensables à la confection d’un sermon. Selon la nouvelle manière de prêcher qui s’est généralisée au temps d’Humbert, le sermon est construit en prenant appui sur une citation de l’Écriture qui devient son thème (thema), et dont une liste substantielle est donnée au chapitre 27. Le choix de cette citation dans l’un des livres canoniques de la Bible, de préférence à toute autre source était impératif : même les ouvrages des Pères de l’Église n’étaient pas recommandés à cet effet28. À de rares exceptions près, ce chapitre ne contient pas de commentaires personnels d’Humbert au sujet de leur utilisation : il est supposé que le prédicateur doive le comprendre sans être aidé. Le chapitre 28 donne une liste des qualités attendues du prédicateur et explique le comportement qu’il doit avoir. Th.-M. Charland, Artes praedicandi : contribution à l’histoire de la rhétorique au Moyen Âge, Paris, Ottawa, 1936 (Publications de l’Institut d’études médiévales d’Ottawa, VII), p. 114. 28 

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Introduction

Le chapitre 29 donne une liste des connaissances nécessaires au prédicateur. Les chapitres 30-41 contiennent des extraits des sources non-bibliques utiles pour la prédication de la croix. L’attention principale est concentrée sur la démonstration de la force de la croix et sur l’expérience des guerriers dans les combats antérieurs contre les Sarrasins. Humbert prévoyait donc que les sermons dont il guidait la composition soient farcis d’extraits d’œuvres non-bibliques, en majorité historiques. Le chapitre 42 est une liste de ce qui est nécessaire aux participants à la croisade pour aller en expédition. Le chapitre 43 donne la liste de ce qui assure la victoire des croisés. Le chapitre 44 insiste sur le fait que les croisés doivent compter, en allant à la bataille contre les Sarrasins, non sur leur force physique, mais sur Dieu. Enfin, le chapitre 45 est une annexe contenant le sermon du pape Urbain II à Clermont selon la version de Baudri de Bourgueil. D’emblée, le traité semble composé avec une certaine spontanéité. Mais en étudiant les choses attentivement, il est possible de discerner une certaine logique dans la composition.

Comment faut-il utiliser ce traité ? Le principe le plus important pour l’utilisateur du traité est qu’il doit composer le sermon lui-même, au lieu d’attendre que le traité lui fournisse un sermon prêt à être prononcé devant le peuple. Humbert ne s’en cache pas : dans le premier chapitre il appelle son traité une « matière brute » qui nécessite un travail ultérieur. À ceux qui en sont capables, le traité d’Humbert fournit du moins le nécessaire. Imaginons un prédicateur qui doit préparer un sermon. La citation biblique introductive du sermon (son thema) devra être ensuite expliquée dans l’ensemble du discours. Humbert donne une liste de ces themata, nous l’avons vu, dans le chapitre 27, mais n’explique guère comment utiliser telle ou telle citation.

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Ensuite il donne des exposés sur les sujets que le prédicateur veut aborder. Apparemment, tous les autres chapitres y servent, à part les chapitres 28 et 29 qui sont destinés purement aux prédicateurs eux-mêmes. Les extraits de sources non-bibliques servent apparemment à « farcir » le sermon, sauf que, de nouveau, Humbert ne les classe pas selon les sujets auxquels ils pourraient se rapporter : le prédicateur doit savoir les utiliser lui-même. Les seules parties du traité qui ont l’air d’être complétement prêtes à l’emploi sont les invitationes. Celles-ci, placées habituellement à la fin des chapitres 2 à 26, et parfois aussi au milieu, semblent composées comme des « appels finaux » qui concluent le sermon. Humbert en effet ne donne pas d’indication claire à propos de la localisation de l’invitation lors du prêche. Il est seulement mentionné dans le premier chapitre qu’invitatio est une invitation à la prise de la croix qui doit être suivie par un chant, ce qui suggère sa place à la fin du sermon. De plus, les invitations commencent d’habitude avec une formule ecce charissimi : si l’on regarde les textes des sermons du même auteur29, on verra que la même formule est placée au début de la partie de la conclusio qui se trouve à la fin. Enfin, dans un des sermons d’Humbert présents dans l’édition de Christoph Maier la conclusio est poursuivie par un chant, tout comme dans notre traité30. Si l’on regarde la structure grammaticale des invitations, l’on voit qu’elles sont souvent composées en utilisant largement le subjonctif dans sa fonction d’impératif : de ce fait, elles peuvent parfaitement remplir le rôle des « appels finaux » concluant un sermon au moment où l’auditeur est déjà inspiré, ayant entendu le sermon même. À la fin du sermon, après le discours argumenté sur la croisade, arrive un moment où le prédicateur sollicite plus les émotions que le raisonnement des auditeurs pour les faire aller jusqu’au bout de leur engagement à prendre la croix. Pour cette époque Jonathan Riley-Smith a trouvé un exemple de récit d’une prédication, où figure un fragment qui est proche des invitations par son style. Cependant, celle-ci n’est pas placée à la fin du C.  T. Maier, Crusade Propaganda and Ideology : Model Sermons for the Preaching of the Cross, Cambridge, 2000, p. 220, 226. 30  Maier, Crusade Propaganda and Ideology, p. 220. 29 

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Introduction

sermon. Il s’agit d’un fragment de la chronique de Gunther de Pairis qui raconte un sermon de l’abbé Martin de Pairis à Bâle (1200)31. Les chants recommandés pour accompagner l’invitation sont Veni Sanctus Spiritus, Veni Creator Spiritus, Vexilla Regis, ou Salve crux sancta. Ces chants semblent n’avoir rien à voir avec la prière qui se situait traditionnellement entre l’énoncé du thema au début du sermon et le développement de celui-ci32. Il est plus probable que le chant soit simplement un moyen de renforcer l’efficacité de la parole de propagande du prédicateur en mettant en scène l’assentiment collectif qui en résultait. Ainsi, le sermon composé selon « la consigne » représentait l’union de la raison et des sentiments : d’abord les auditeurs écoutaient des exposés sur le sujet, et ensuite l’invitation et le chant sollicitaient les émotions pour convaincre le peuple d’aller à la croisade.

Le principe d’utilisation du traité dans le contexte des idées de l’époque sur la prédication La réponse à la question de savoir quelle idée se cache au fondement de la structure du traité, lequel exige un travail considérable de la part du prédicateur qui l’utilisera, se trouve dans la perception de l’activité du prédicateur au Moyen Âge.  Il n’y avait pas d’opinion arrêtée sur la question de savoir jusqu’à quel point la prédication était une action humaine, et jusqu’à quel point elle était une intervention divine. 31  J. Riley-Smith, « Christian violence and the crusades », A. S. Abulafia (éd.), Religious Violence between Christians and Jews : Medieval Roots, Modern Perspectives, Basingstoke, 2002, p. 15. La source est publiée dans l’édition suivante : Gunter von Pairis, Hystoria Constantinopolitana – ed. P.  Orth (Spolia Berolinensia, 5), Hildesheim, Zurich, 1994, p. 113. Le texte en latin : « Nunc itaque validi bellatores, succurrite Christo, date nomina vestra militie christiane, felicibus castris aggregari satagite ! Vobis hodie causam Christi committo, vobis ipsum, ut ita loquar, in manus trado, ut eum in hereditatem suam, de qua crudeliter eiectus est, restituere studeatis. Ac ne vos illud terreat, quod hoc tempore gentilis rabies super nostros adeo vehementer invaluit, rerum precedentium vos cupio reminisci ». Voir aussi : C. T. Maier, « Ritual, what Else ? Papal Letters, Sermons and the Making of Crusaders », Journal of Medieval History, 44 (2018), p. 333-346. 32  Charland, Artes praedicandi, p. 125 et sq.

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Introduction

C’est au xiiie siècle que les sermons étaient de plus en plus fréquemment associés à la citation du Psautier 44:2 « Ma langue est le calame d’un scribe rapide » (Lingua mea calamus scribae velociter scribentis), d’autant plus que cela se faisait dans les textes composés par les prédicateurs mêmes33. Tandis que les commentateurs de la Bible à partir des premiers siècles du christianisme interprétaient ce passage de deux façons (certains voyaient dans le propos du psalmiste celui de Dieu, et les autres celui d’un prophète)34, au xiiie siècle est apparue une nouvelle explication : le calame devient la langue du prédicateur, et le scribe devient le Saint Esprit35. Assez fréquemment se rencontre l’idée que le prédicateur est un instrument, avec lequel le Saint Esprit écrit les ordres de Dieu dans les cœurs humains, tandis que les auditeurs sont à leur tour comparés au parchemin. Le calame est devenu un symbole de l’interaction de deux niveaux, humain et divin, sans frontière précise entre eux36. Il n’y avait pas non plus de consensus pour préciser à quel point le succès du sermon dépend de la grâce divine (gratia sermonis) ou de la compétence du prédicateur. Plusieurs sources parlent de la possibilité d’une efficacité venue de Dieu dans l’acte de la prédication. Par exemple, dans le Commentarius Сantabrigensis il est dit à propos de saint Bernard qu’il « a reçu du Saint-Esprit cette grâce vraiment merveilleuse pour parler et instruire les autres plutôt que par subtilité de l’esprit » (illam mirabilem gratiam loquendi et alios instruendi spiritu Dei assecutus est, potius quam subtilitate ingenii)37. En plus de cet exemple Franco  Morenzoni cite un récit qui raconte comment Bernard a prêché en Allemagne sans connaître l’allemand, mais a réussi néanmoins à provoquer les larmes de ses auditeurs. En même temps presque jusqu’à la fin du xiiie siècle les auteurs des artes praedicandi ne raisonnent prati33  C. Casagrande, « Le calame du Saint-Esprit. Grâce et rhétorique dans la prédication au xiii siècle », R. M. Dessi, M. Lauwers (éd.), La parole du prédicateur v-xv siècle, Nice, 1997 (Collection d’études médiévales de Nice 1), p. 241. 34  Casagrande, « Le calame du Saint-Esprit », p. 237. 35  Casagrande, « Le calame du Saint-Esprit », p. 241. 36  Casagrande, « Le calame du Saint-Esprit », p. 247. 37  F.  Morenzoni, « Parole du prédicateur et inspiration divine d’après les artes praedicandi », R.  M. Dessi, M.  Lauwers  (éd.), La parole du prédicateur v-xv siècle, Nice, 1997 (Collection d’études médiévales de Nice 1), p. 271.

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quement pas sur le sujet de la proportion du divin et de l’humain dans la prédication38. Pourtant, le facteur humain avait toujours un certain rôle : sinon quel sens auraient eu les nombreux artes praedicandi, si l’homme ne pouvait pas influencer la qualité du sermon ? En plus, tous les prédicateurs n’avaient pas le don des cieux : à partir de la fin du xiiie siècle, l’idée que les prédicateurs du temps présent peuvent bénéficier de la grâce divine seulement dans des cas exceptionnels et ne sont pas capables d’obtenir le succès de leurs grands prédécesseurs devient plus courante39. Humbert de Romans dans son traité De eruditione praedicatorum écrit que le prédicateur représente la bouche du Seigneur : « Le prédicateur est la bouche du Seigneur, et il convient que celui qui donne à sa voix la vertu, confère la vertu de la parole à celui qui prêche en son nom » (Predicator enim os est Domini ; et ideo decet ut qui dat voci suae vocem virtutis (cf. Ps. 67:34), praedicanti propter nomen suum virtutem conferat in loquendo)40. La prédication, d’origine divine, a été transmise aux hommes par l’intermédiaire du Saint Esprit41. Le don de prédication est un don divin et s’appelle gratia praedicandi. Un bon prédicateur est quelqu’un qui dispose de ce don, et par conséquent, d’un statut spécifique : « Les bons prédicateurs ne sont pas de ce monde, comme le Christ ne fut pas de ce monde, mais ils sont d’en haut comme le Christ » (Boni praedicatores non sunt de hoc mundo, sicut et Christus non fuit de hoc mundo ; sed desursum sunt, sicut et Christus)42. De plus, si compétent qu’un homme soit, il n’est pas capable de devenir un prédicateur excellent par lui-même : seule la grâce divine est capable de le rendre tel43. Morenzoni, « Parole du prédicateur et inspiration divine », p. 279. Morenzoni, « Parole du prédicateur et inspiration divine », p. 289. 40  Morenzoni, « Parole du prédicateur et inspiration divine », p. 281 ; Humberti de Romanis Opera de vita regulari, éd. J. J. Berthier, Rome, 1888, p. 385. 41  Humberti de Romanis Opera de vita regulari, p. 375 : « … aliae scientiae ab humano ingenio sunt inventae, quamvis non sine Dei adiutorio ; haec autem est a Deo immediate divinitus infusа » ; C. Carozzi, « Humbert de Romans et la prédication », Cahiers de Fanjeaux, 36 (2001), p. 251. 42  Humberti de Romanis Opera de vita regulari, p. 465 ; Carozzi, « Humbert de Romans », p. 255. 43  Humberti de Romanis Opera de vita regulari, p. 393 : « Aliae enim artes acquiruntur per assuefactionem ex frequenti agere […] Gratia vero praedicandi ex dono Dei speciali habetur ». 38 

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Humbert dit qu’il est préférable que ceux qui par grâce sont doués pour la prédication s’exercent surtout dans cet art (libentius debent exercitari circa praedicationem illi qui in hoc habent gratiam)44. D’abord, cela veut dire qu’il y en a aussi d’autres. Humbert dit que si un sermon est mal fait, cela peut résulter du manque de grâce divine (ex carentia gratiae divinae)45. Le plus grand maître de prédication est le Saint Esprit, dont les trésors sont accessibles seulement à un petit nombre de prédicateurs (cuius copiam pauci habent)46. Dans ce cas, il est possible de supposer que seulement ceux qui sont doués doivent prêcher, mais ce n’est pas le cas. Selon Humbert chaque prélat doit prêcher47, même s’il est évident qu’ils ne sont pas tous doués de grâce divine du simple fait qu’ils sont des prélats. Ensuite, cela veut dire que même ceux qui sont doués doivent s’exercer dans la prédication. La grâce de prédication n’exonère pas le prédicateur de ses propres efforts. Humbert constate que, bien que la grâce divine soit un privilège spécial, le prêcheur est quand même censé faire des efforts lui-même en faisant l’apprentissage de son métier48. Dans son ensemble, le traité d’Humbert en vue de la formation des prédicateurs contient plusieurs recommandations liées aux activités des prédicateurs. Si tout était déterminé par la grâce divine seule, elles n’auraient pas de sens. Ainsi Humbert, conformément aux points de vue de ses contemporains, en partageant l’idée de la présence du divin dans la prédication, croit aussi que l’élément humain est important dans cette activité, ce qui permet au traité de la prédication de la croix de présenter une structure impliquant que le travail personnel dévolu au prédicateur reste important. Humberti de Romanis Opera de vita regulari, p. 431. Humberti de Romanis Opera de vita regulari, p. 439. 46  Humberti de Romanis Opera de vita regulari, p.  393 ; Morenzoni, « Parole du prédicateur », p. 282. 47  Humberti de Romanis Opera de vita regulari, p. 416 : « reprehensibile est in prelato cum non predicat. Hoc ipso enim quod est praelatus, ad hoc tenetur ». 48  Humberti de Romanis Opera de vita regulari, p. 394 : « Circa primum notandum est, quod licet praedicationis gratia specialiter habeatur ex dono Dei, tamen sapiens praedicator debet facere quod in se est, diligenter studendo circa praedicationem faciendam, ut laudabiliter fiat » ; Morenzoni, « Parole du prédicateur », p. 282. 44  45 

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Autres observations sur la structure du traité 1) Le manuel d’Humbert est pratique pour trouver rapidement une réponse. Dans le traité, il se trouve que certains éléments des réflexions se croisent, ce qu’il est possible de constater dans ce tableau : Motivations à la prise de la croix (chapitres 11-17) Zelus honoris Domini (le zèle pour l’honneur du Seigneur) Zelus Christiane legis (le zèle pour la loi chrétienne) Fraterna karitas (la charité fraternelle)

Neuf consolations du Facteurs de la croisé (chapitre 26) victoire des croisés (chapitre 43) Gaudium conscientie Status bone conscientie (la joie de la conscience) (l’état de bonne conscience) Securitas de salute Cause iustitia (l’assurance du salut) (le caractère juste de la cause) Bona societas Immensitas retributionis (la bonne société) (l’immensité de la récompense) Devotio ad terram Ducatus angelicus Confidentia de divino sanctam (le commandement des auxilio (la dévotion envers la anges) (la confiance dans l’aide Terre sainte) divine) Conditio belli Orationes ecclesie Vilitas hostium (la condition de la guerre) (les prières de l’Église) (la bassesse des ennemis) Exempla precedentium Sanctorum subsidia Effusio sanguinis sociorum (les exemples des (le soutien des saints) (l’effusion du sang des précédents) compagnons) Gratie ecclesie Memoria mirabilium Acquisitio nominis (les grâces de l’Église) antiquorum (l’acquisition du nom) (le souvenir des anciennes merveilles)   Conditio terre   (la condition de la terre)   Confidentia de Dei   adiutorio (la confiance en l’aide de Dieu)

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Nous voyons bien que dans les trois listes il y a beaucoup d’arguments qui se croisent. Malgré ceci ces arguments sont à chaque fois commentés de nouveau par Humbert. On voit dans la première et dans la deuxième colonne la question du statut de la Terre sainte et l’expérience des guerres précédentes avec les Sarrasins. Dans les trois colonnes, même si c’est formulé différemment, il est question de la récompense pour les participants à la croisade. Dans la deuxième et dans la troisième colonne il est question du soutien divin, dans la première et la troisième est mentionnée l’aide aux frères chrétiens. À quoi cela sert-il ? Avec ce tableau il est possible de voir une particularité assez remarquable de la structure du traité : telle ou telle observation peut se répéter de chapitre en chapitre avec un commentaire différent selon les sujets abordés. Le traité de prédication de la croix a dû servir comme une sorte d’ouvrage de référence, et si un prêcheur s’intéressait à un tel ou tel sujet, en ouvrant la partie correspondante du traité il avait la possibilité d’obtenir tout de suite une information exhaustive concentrée dans un seul ­endroit, au lieu de feuilleter les pages et rassembler l’information par ­morceaux. S’il voulait parler aux fidèles des moti­vations à la prise de la croix, il avait une liste prête à dis­position, s’il voulait parler des consolations, il avait une autre liste, et s’il voulait ­justifier ­l’affirmation qu’il est inévitable que les croisés parviennent à vaincre leurs ennemis, il y avait une troisième liste. 2) Le traité n’est pas focalisé sur les Sarrasins comme ennemis En effet, Humbert n’accorde pas beaucoup d’attention à la description des Sarrasins eux-mêmes. Dans la première invitation, Humbert donne une brève synthèse des conquêtes musulmanes, en concluant que les frères chrétiens en Orient ont besoin d’une aide urgente. Dans les chapitres 4 et 8, il fait une sorte de « classement » des ennemis, où les Sarrasins sont sans doute à la première place, car ils se présentent contre les chrétiens les armes à la main et n’ont aucune chance d’être convertis au christianisme. Ensuite, dans le chapitre 11, est mentionnée l’importance de la Terre sainte, et, en rapport avec ce sujet, sa profanation par les Sarrasins. Dans le chapitre 12, Humbert compare les lois données par Moïse, Jé-

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sus et Mahomet, pour arriver à la conclusion que les préceptes des deux premiers sont bons, et ceux du troisième très mauvais. Dans le chapitre 15, il dit que Dieu a gardé les Sarrasins en vie expressément pour donner aux fidèles la possibilité de prouver leur foi par un haut-fait. Le chapitre 16 présente un bref récit des exploits des prédécesseurs dans les guerres contre les Sarrasins. Mais, dans les autres chapitres les évocations des Sarrasins sont certes assez fréquentes, mais ponctuelles. Il faut noter que le traité ne raconte ni la vie de Mahomet ni la naissance de l’islam et n’éclaire pas du tout l’essentiel de la religion musulmane. Ceci est très important, car les informations qui circulaient sur les Sarrasins à l’époque de la composition du traité pouvaient semer le trouble : certains auteurs contemporains qui ont écrit de manière précise sur les Sarrasins soulignent que la religion chrétienne et celle des Sarrasins ont beaucoup de points communs sur le plan de la doctrine, ce qui entre autres ouvre la porte à une espérance de conversion des Sarrasins. Par exemple, le dominicain Guillaume de Tripoli, dans sa Notitia de Machometo (1271), affirme que le Coran est une compilation des différents livres sacrés (compilatio facta de diversis, que sumpta sunt de aliis libris divinis), ce qui est évident pour un connaisseur des Écritures (sicut patet scienti sacram scripturam)49. À  la fin de son traité, il suggère qu’il faut au moyen des discussions (contra igitur istos errores nostri theologi et doctores… debent insurgere) amener les Sarrasins vers la foi juste et le salut (animas miseras de laqueo dyaboli eripere et… trahere ad portum salutis)50. Dans le traité anonyme De statu Saracenorum (1273), il est dit que, bien que la foi des Sarrasins « soit entourée de mensonges » (licet multis sint involuta mendaciis), il est clair que ces derniers sont « proches de la foi chrétienne et de la voie du salut » (quod ipsi sint fidei christiane vicini et ad viam salutis propinqui)51. De plus, Raymond Lulle, dans son Libre del Gentil e dels tres Savis rédigé entre 1271 et 1276, décrit les trois sages – un chrétien, un juif et un musulman – qui s’entretiennent 49  Wilhelm von Tripolis, Notitia de Machometo. De statu Sarracenorum – ed. P. Engels, Würzburg, 1992, p. 216. 50  Wilhelm von Tripolis, Notitia de Machometo, p. 260. 51  Wilhelm von Tripolis, Notitia de Machometo, p. 360.

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sur un ton très tolérant, en déclarant leur volonté de parvenir à l’établissement d’une doctrine commune52. Même si Humbert de Romans avait décrit la doctrine des Sarrasins sans parler de perspectives de conversion, et en disant même qu’il n’y en a pas, et bien qu’à l’époque la croisade et la conversion n’étaient pas considérées forcément comme des activités contradictoires, le prédicateur ou celui qui l’écoutait aurait pu s’interroger sur l’opportunité d’une intervention militaire immédiate, vu les ressemblances entre les deux religions. Il fallait donner des slogans sans ambigüité pour éviter d’engendrer chez les prédicateurs et les fidèles des doutes sur la nécessité de prendre les armes contre les Sarrasins. Il valait donc mieux donner une image des Sarrasins sommaire et clairement négative.

Contexte du placement du traité dans les manuscrits De ce fait, il est possible que le traité ait été largement utilisé comme un outil de propagande de la guerre sainte dans les expéditions plus tardives : en effet, sans être trop focalisé sur les Sarrasins comme ennemis, le traité pouvait théoriquement être utilisé sur n’importe quel front de la guerre sainte. Bien que dans la plus grande partie des recueils manuscrits les documents voisinant avec le traité n’aient aucun intérêt de ce point de vue, dans certains l’opuscule d’Humbert de Romans est placé à côté de documents concernant les guerres contre les Turcs ottomans et les Hussites. Sachant que presque tous les manuscrits sont du xve siècle et proviennent des terres du Saint-Empire romain germanique, ce fait mérite attention. De plus, dans le manuscrit de Melk, Stiftsbibliothek 1799 figure un document de la période des guerres contre les Turcs ottomans contenant de nombreuses traces de l’usage direct ou indirect du traité d’Humbert de Romans. L’analyse précise de ce cas particulier a été publiée sous la forme d’un article qui lui est consacré53. 52  Raymond Lull, Le Livre du Gentil et des trois sages, trad. A. Llinarès, Paris, 1993, p. 274. 53  V. Portnykh, « Le traité d’Humbert de Romans (OP) ‘De la prédication de la sainte croix’. Une hypothèse sur son utilisation dans les guerres saintes du xv siècle », Revue d’histoire ecclésiastique, 3-4 (2014), p. 588-624.

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Les autres travaux d’Humbert de Romans concernant la croisade À part le traité de prédication de la croix, Humbert aborde le sujet des croisades dans son Opusculum tripartitum et dans sa collection de sermons selon les états de vie et les circonstances. Les deux œuvres sont postérieures au traité de prédication, car il y est cité54. Opusculum tripartitum. Le travail principal d’Humbert de Romans concernant la croisade, en dehors du traité étudié ici, est l’Opusculum tripartitum, ou bien « Opuscule en trois parties ». Il est convenu de considérer que ce travail a été rédigé comme une sorte de synthèse pour le pape Grégoire X sur les problèmes qu’il fallait discuter pendant le concile de Lyon en 1274. Le document lui-même a été produit plus probablement en 1272 : le concile avait déjà été proclamé, mais n’avait pas encore eu lieu (il est mentionné dans le texte comme un événement futur)55. Il est adressé personnellement à Grégoire X (livre 1, chapitre 1) et concerne exactement les mêmes questions que celles qui ont été examinées pendant le concile : la croisade, l’unité de l’Église et la réforme de l’Église. Comme l’écrit Simon Tugwell qui a examiné la question dans son édition de la « Légende de Saint Dominique » écrite aussi par Humbert de Romans, nous ne disposons d’aucun manuscrit de l’Opusculum tripartitum dans son intégralité, mais seulement du texte imprimé56. On dispose, en revanche, des manuscrits du texte abrégé et modifié. Selon Tugwell, il s’agit des notes du pape Grégoire à l’occasion de la lecture du travail d’Humbert57. Ce document est remarquable par son développement concernant les Sarrasins (le premier des trois livres), question déjà examiné dans le livre de E. T. Brett et plus précisément dans l’article de Giuseppe Rizzardi58. En effet, dans l’Opusculum tripartitum Humbert Maier, Crusade Propaganda and Ideology, p. 228 ; Humberti de Romanis Opusculum Tripartitum, p. 189, 190. 55  Humberti de Romanis Legendae Sancti Dominici, p. 421-422. 56  Humberti de Romanis Legendae Sancti Dominici, p. 407. 57  Humberti de Romanis Legendae Sancti Dominici, p. 420. 58  Brett, Humbert of Romans, p. 176-194 ; G. Rizzardi, « La controversia cristiano-islamica nel Medioevo. Le ragioni teologico-etiche della guerra antisara54 

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de Romans donne une liste des ennemis de la chrétienté, beaucoup plus développée que celle qu’on trouve dans le traité de la prédication de la croix. Si dans ce dernier figurent seulement les juifs, les païens et les hérétiques, dans l’Opusculum figurent également les philosophes (ils entraient dans les discussions avec les chrétiens), les empereurs infidèles qui persécutaient les chrétiens, et les barbares (les Vandales, les Goths, les Huns et les Tartares) (livre 1, chapitre 4). Humbert fait une analogie : au total il y a sept ennemis, de la même manière que dans le Deutéronome y avait sept peuples s’opposant aux juifs (Deut. 7:1-2) et que la bête apocalyptique était à sept têtes (Apoc. 17:3). Pourtant, la conclusion ne change pas, les Sarrasins sont les pires ennemis : « Les autres étaient, et, malheureusement, sont jusqu’à maintenant, les Sarrasins, dont le séducteur Mahomet a donné la loi spécialement pour détruire le christianisme »59. Dans leur loi « il n’y a rien de ce qui serait au-delà de la raison dans leurs croyances »60. De plus, aucun ennemi n’a jamais persécuté les chrétiens si longtemps, sans cesse et sur des territoires si nombreux (en Europe, en Asie et en Afrique) : à différence du traité cette idée est formulée ici de façon très claire (livre 1, chapitre 6)61. Nouvelle par rapport au traité est la partie de l’Opus tripartitum concernant les arguments supposés des critiques probables des croisades, où le lecteur est informé aussi des contre-arguments (livre 1, chapitres 11-17). Cette partie nous permet d’imaginer quelle était la critique des croisades de la part des clercs contemporains d’Humbert. Par sa forme, une telle structure du texte rappelle le principe des disputes universitaires de l’époque, quand on proposait des arguments pour et contre telle ou telle affirmation62. cena in Umberto di Romans », Humanitas Brescia 39 (1984), p. 897-913. 59  Humberti de Romanis Opusculum Tripartitum, p. 187 : « Alii fuerunt et sunt adhuc proh dolor pessimi Saraceni, quibus seductor eorum Mahumetus dedit legem specialiter ad destruendam Christianitatem ». 60  Humberti de Romanis Opusculum Tripartitum, p. 188 : « … quod in credendis non continet aliquid supra rationem ». 61  Voir aussi : V. Portnykh, « Hat Humbert von Romans wirklich seine Ansichten zu Kreuzzug und Mission geändert ? », Deutsches Archiv für Erforschung des Mittelalters, 2 (2015), p. 611-619. 62  Voir plus précisément : O. Weijers, Queritur utrum. Recherches sur la « disputatio » dans les universités médiévales, Turnhout, 2009.

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Ici il faut rappeler qu’Humbert s’est formé à l’Université de Paris, où il a obtenu sa maîtrise ès arts, puis étudié la théologie et le droit canonique ; ainsi une telle structure ne peut résulter du hasard. Il est aussi important d’accorder attention à la deuxième partie de l’Opusculum tripartitum. L’auteur y parle du problème de la réunification de l’Église, qui était aussi un des sujets du concile. Entre autres, Humbert expose l’idée qui lie la croisade et l’union avec les Grecs schismatiques : « Et si tous ces schismatiques étaient ensemble avec les autres personnes de la vraie foi, l’Église aurait un pouvoir très fort contre les Sarrasins, les barbares et tous ceux qui sont hors de l’Église »63 (livre 2, chapitre 13). Ainsi, il propose de réunir l’Église, entre autres, pour aller ensemble contre les Sarrasins. La collection des sermons. En outre, Humbert parle de la croisade et de la prédication de la croisade dans certains sermons de son recueil des sermons ad status composés pour des auditoires divers, selon les états de vie et les circonstances. L’édition critique de ces sermons a été faite par Christoph Maier64. Des recueils comme celui-ci étaient répandus à l’époque et devaient fournir des « modèles », dont les prédicateurs pouvaient se servir. Les réflexions d’Humbert, cependant, ne sont pas aussi développées que celles des autres auteurs dont Maier édite aussi les sermons, et contiennent seulement une information brève, aussi que des indications sur la manière dont le sujet peut être développé par le prédicateur65, conformément au principe général du traité de prédication de la croix. On ne peut pas savoir dans quelle mesure Humbert aurait assumé de tels sermons, et même s’il a prêché la croisade lui-même66. Pourtant, Maier suppose que vu qu’il était à la tête de la province du Nord de la France dans les années quarante et cinquante du xiiie siècle, il était responsable de la propagande de la première croisade de Louis IX67. À partir des années Humberti de Romanis Opusculum Tripartitum, p. 217 : « Si enim omnes isti schismatici essent unum cum aliis catholicis, essent magnae vires Ecclesiae contra Saracenos et Barbaros et omnes qui essent extra Ecclesiam ». 64  Maier, Crusade Propaganda and Ideology. 65  Maier, Crusade Propaganda and Ideology, p. 33. 66  Maier, Crusade Propaganda and Ideology, p. 12. 67  Maier, Crusade Propaganda and Ideology, p. 12. 63 

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trente du xiiie siècle les papes utilisaient les ordres mendiants dans la propagande des croisades sur les « fronts » différents68. La série des sermons ad status qui contient les sermons édités par Maier fait partie du traité qui s’intitule De Eruditione Praedicatorum, rédigé entre 1266 et 127769. Probablement, il a été écrit un peu plus tard que le traité de prédication de la croix, car il y a des références à ce traité dans le texte du sermon 4 (voir plus loin). En tout cas, les deux traités sont plus ou moins de la même période, celle où Humbert s’est retiré au couvent dominicain de Lyon. Les sermons sont conservés dans au moins 19 manuscrits, pour la plupart du xve siècle. Par leur contenu les manuscrits diffèrent de manière insignifiante70. Grosso modo, les idées des sermons répètent certaines idées du traité de prédication de la croix, et parfois il s’agit même de parallèles directs. En plus, un des sermons contient une référence au traité. Dans le quatrième sermon d’Humbert dans l’édition de Maier sont énumérées six motivations à la prise de la croix qui sont conformes à la liste donnée dans le chapitre 11 du traité (seule la septième, qui est gratiae ecclesiae, est omise), et le lecteur est renvoyé au traité. Le texte complet du sermon est le suivant : Il faut noter que pour prendre la croix contre les Sarrasins il y a six motifs qui doivent donner l’impulsion : le premier est le zèle de l’honneur divin ; le deuxième est le zèle pour la loi chrétienne ; le troisième est la charité fraternelle ; le quatrième est la dévotion envers la Terre sainte ; le cinquième est les exemples des prédécesseurs ; le sixième est la condition de la guerre. Matière à propos de ce qui est mentionné plus haut. Thema : Saint, saint, saint Dieu le Seigneur des armées. Voir dans l’Opuscule de la prédication de la croix contre les Sarrasins71. 68  C. T. Maier, Preaching the Crusades. Mendicant Friars and the Cross in the Thirteenth Century, Cambridge, 1994, p. 60. 69  Maier, Crusade Propaganda and Ideology, p. 12. 70  Maier, Crusade Propaganda and Ideology, p. 78. 71  Maier, Crusade Propaganda and Ideology, p.  228 : « Notandum quod ad sumendum crucem contra Saracenos sunt sex que debent movere. Primum est zelus honoris diuini. Secundum est zelus Christiane legis. Tertium est fraterna caritas. Quartum est devotio ad Terram Sanctam. Quintum est exempla præcedentium. Sextum conditio belli. Materia de praedictis. Thema, Ysa.  6. Sanctus, Sanctus,

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Contexte historique de la composition du traité Contexte politique de la composition du traité La période de composition du traité de prédication était assez rude pour l’entreprise de croisade. Après la défaite de la première croisade de Louis IX en 1248-1250 les Mamelouks ont accédé au pouvoir en Égypte. En 1260 ils ont vaincu les Mongols, et ont décidé ensuite d’en finir avec les royaumes francs en Orient. Sous le commandement du sultan Baybars (1260-1277) les Égyptiens ont conquis en 1265 les villes de Césarée et d’Arsouf, en 1268 Jaffa et Antioche, et en 1291 Acre, ce qui a marqué la fin de la présence franque dans la région. Parallèlement, la situation est devenue catastrophique dans l’Asie Mineure : en 1261 l’Empire latin fondé par les croisés sur le territoire byzantin après la quatrième croisade est tombé aux mains de l’empereur Michel VIII Paléologue, le chef de l’Empire de Nicée, une des parties de l’Empire byzantin qui était restée sous le pouvoir des Grecs. Des États latins en Grèce ont survécu jusqu’à la venue des Turcs au xve siècle, mais le contrôle sur la ville de Constantinople a été perdu définitivement. Le contexte immédiat de la composition du traité est celui des préparatifs de la huitième croisade par Louis IX, qui a pris la croix le 24 mars 1267 suite à l’appel à la croisade du pape Clément IV en 1266. L’expédition même a pourtant eu lieu bien après la composition du traité, en 1270. La difficulté de la situation politique ne pouvait pas ne pas influencer le caractère du traité. Déjà dans la première invitation Humbert en parle en détail, en rappelant qu’autrefois l’armée chrétienne a reconquis une partie importante de la Terre sainte, mais qu’à présent presque tout a été perdu. Au moment de la composition du traité les Sarrasins ont pris la forteresse de Safed, ce qui signifiait que le danger était bien réel. En même temps les chrétiens en Orient n’espéraient obtenir de l’aide de nulle part sauf de l’Occident, alors qu’ils étaient entourés d’ennemis de tous les côSanctus Dominus Deus exercituum. Require in opusculo de predicatione crucis contra Saracenos ».

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tés, ce dont il est aussi question dans la même invitation. L’urgence de l’intervention est aussi mentionnée dans le chapitre 13 et dans l’invitation 22. Il faut noter que l’opinion d’Humbert de Romans sur ce dernier point était conforme à la position de la papauté à cette époque. L’étude des registres pontificaux de l’époque de Clément IV (1265-1268) et Grégoire X (1271-1276) montre un nombre de lettres concernant la croisade en Terre sainte beaucoup plus important que sous le pontificat d’Alexandre IV (1254-1261) et Urbain IV (1261-1264)72. Certainement, les papes précédents favorisaient, en règle générale, le passage d’outremer, mais en analysant les décisions des conciles œcuméniques il est quand même possible de voir une certaine dynamique. La période de composition du traité est chronologiquement proche du concile de Lyon II (1274), où le moment clé fut l’organisation de la prochaine croisade. Parmi les constitutions, celle qui s’appelle Zelus fidei consacrée à la croisade occupe la première place. Il y est dit que la décision d’organiser le concile a été prise pour discuter l’expédition d’outremer, ce qui n’apparaissait pas dans les constitutions des conciles précédents73. Pour aider la Terre sainte il fallait désormais donner une dixième de ses revenus ecclésiastiques pendant six ans, et la règle s’étendait à tout le clergé de tous niveaux, y compris le pape lui-même et les cardinaux74. Ces taxations étaient plus importantes que celles de Lyon I (1245) et Latran IV (1215) : il est vrai qu’à l’époque le pape et les cardinaux payaient déjà un dixième, mais les autres clercs devaient payer seulement un vingtième, les deux pendant seulement trois ans75. Pour que le maximum de navires soit à la disposition des croisés et non des Sarrasins, sous la menace d’anathème il a été interdit d’envoyer les navires vers les terres sarrasines pendant six ans, pour avoir plus 72  Voir : E.  Jordan (éd.), Les registres de Clément  IV : 1265-1268. Recueil des bulles de ce pape, Paris, 1893-1904 ; J. Guiraud, E. Cadier (éd.), Les Registres de Grégoire  X (1272-1276) et de Jean  XXI (1276-1277). Recueil des Bulles de ces papes publiées ou analysées, Paris, 1960. 73  G. Alberigo (éd.), Les conciles œcuméniques. Les décrets. Tome II-1. Nicée I à Latran V, Paris, Cerf, 1994, p. 644 : « Et quia praefatae Terrae liberatio tangere debet omnes, qui fidem catholicam profitentur, concilium mandavimus evocari… ». 74  Alberigo (éd.), Les conciles œcuméniques, p. 646. 75  Alberigo (éd.), Les conciles œcuméniques, p. 572, 628.

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de navires à disposition et priver les Sarrasins de toute aide76. En 1215 et 1245 cette interdiction a été faite pour quatre ans77. L’Occident avait besoin de concentrer ses forces pour organiser une croisade, et en vue de cela une trêve pour six ans a été proclamée : « et que dans le monde entier entre les chrétiens soit maintenue la paix, de sorte que ceux qui sont en discorde, qu’ils soient conduits avec l’aide des prélats vers une concorde complète ou la paix ou une trêve ferme pour six ans qui doit être fermement observée »78. Ceux qui n’observent pas cet ordre, seront punis par l’excommunication : « et ceux qui négligent de vivre en paix, seront sévèrement contraints par l’excommunication et l’interdit imposé sur les terres »79. Ces prescriptions de la trêve existaient auparavant, mais en 1215 et 1245 elle était prescrite seulement pour quatre ans80. Par le fait qu’Humbert donne une liste des empêchements à la prise de la croix et tient à expliquer pourquoi ils ne sont pas à prendre en considération, réflexions qu’on ne trouve pas dans les ouvrages des années précédentes, il est possible de supposer que son traité est un témoignage de la baisse d’enthousiasme de la population pour la croisade. Apparemment, le poème de Rutebeuf « La desputizons dou croisie et dou descroisie » en est un autre témoignage81. Les arguments que le croisé et son opposant y échangent correspondent partiellement aux arguments contre la croisade mentionnés par Humbert. Comme Rutebeuf, il dit que les gens ne vont pas à la croisade parce qu’ils sont très attachés aux biens et aux personnes qu’ils ont à la maison ; les deux aussi insistent sur l’idée que la croisade est une occasion exceptionnelle d’obtenir le salut pour un petit prix ; enfin, tous deux disent que Alberigo (éd.), Les conciles œcuméniques, p. 650. Alberigo (éd.), Les conciles œcuméniques, p. 574, 630. 78  Alberigo (éd.), Les conciles œcuméniques, p. 650 : « … ut in toto orbe inter christianos pax generaliter observetur ita, quod per ecclesiarum praelatos discordantes ducantur ad plenam concordiam sive pacem, aut ad firmam treugam per vi annos inviolabiliter observandam ». 79  Alberigo (éd.), Les conciles œcuméniques, p. 650 : « et qui acquiescere forte contempserint, per excommunicationis sententiam in personas et interdictum in terras arctissime compellantur ». 80  Alberigo (éd.), Les conciles œcuméniques, p. 574, 630. 81  Rutebeuf, Œuvres complètes, éd. M. Zink, Paris, 2001, p. 895-917. 76 

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la mort peut venir n’importe quand, et qu’il faut se purifier l’âme pour y être prêt à n’importe quel moment, sans exception. Cependant l’argument important de l’anti-croisé de Rutebeuf disant qu’il est possible d’être une bonne personne et de se sauver en restant sur place sans aller en Palestine ne figure pas chez Humbert. Outre la politique des papes dans le domaine des croisades, il faut aussi faire attention à un autre détail du contexte politique : quelles positions en Orient occupait l’ordre dominicain, et à quel point l’urgence de l’intervention mentionnée parfois par Humbert pouvait résulter de la crainte pour le devenir des couvents dominicains en Terre sainte ? Pratiquement tout de suite après la fondation de l’ordre il a été proposé d’organiser une province en Terre sainte : ce projet a été proposé au deuxième chapitre général à Bologne en 1221 présidé par saint Dominique en personne82. Ensuite une telle province a été fondée : en 1228 l’ordre comptait 12 provinces, parmi lesquelles il y avait la province de Terre sainte83. Pourtant, cette province, comme celles de Pologne, de Scandinavie et de Grèce était considérée comme petite et n’avait pas le même statut que les autres. Au moment de la rédaction du traité l’ordre possédait des maisons en Terre sainte, aussi bien qu’à Chypre84. Du fait que les dominicains avaient des installations au Proche Orient, même si ce n’étaient pas les plus importantes de leur ordre, il est possible de supposer que l’ordre avait son propre intérêt à défendre les terres d’outremer pour y conserver une présence, et cela peut contribuer à expliquer l’urgence de la question de l’expédition dans le traité de la prédication de la croisade.

L’auteur du traité : pourquoi le grand maître des dominicains ? Au xiiie siècle, quand la papauté a commencé à faire plus d’efforts pour organiser les croisades, il fallait entre autres organiser un bon système de prédication de la croisade. Comme écrit 82  W. A. Hinnebusch, The History of the Dominican Order. Vol. 1. Origins and Growth to 1500, New-York, 1965, p. 93. 83  Hinnebusch, The History of the Dominican Order, p. 173. 84  F. Balme, « La province dominicaine de Terre-Sainte de janvier 1277 a Octobre 1280 », Revue de l’Orient Latin, 1 (1893), p. 526-536.

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Christoph Maier, il y avait trois options en fonction des ressources existantes85. La première option était de faire appel au clergé local. Pourtant, il était trop lié aux pouvoirs locaux et n’avait pas toujours suffisamment de compétence pour bien prêcher. La deuxième option était d’établir des prédicateurs choisis et chargés spécialement de prêcher dans une région donnée, comme certains grands prédicateurs de l’époque, tels que saint Bernard, Foulques de Neuilly, ou Olivier de Cologne. Pourtant le désavantage était que l’objectif géographique dans ce cas était très restreint. Il fallait une solution pour les territoires plus vastes. La troisième option était de puiser dans les ordres monastiques qui existaient depuis longtemps, par exemple les cisterciens, qui étaient soumis directement au pape, à la différence du clergé local et dont les institutions assuraient un vaste réseau de relations. Mais le désavantage était qu’ils s’orientaient plutôt vers la vie ascétique et la contemplation. La solution a été trouvée pendant le pontificat de Grégoire IX. À partir des années trente les ordres mendiants, les franciscains comme les dominicains, ont été impliqués dans l’affaire de la propagande de la croix. Les deux ordres représentaient une organisation religieuse d’un nouveau type : à la différence de leurs prédécesseurs qui cherchaient une vie isolée du monde, ils se trouvaient toujours au milieu des gens pour prêcher la parole de Dieu. Maier écrit : « Les franciscains et les dominicains étaient les membres des premiers ordres religieux, dont le but principal était de prêcher, et ils s’exerçaient périodiquement dans leur métier. Les ordres mendiants étaient aussi organisés selon le principe d’une stricte hiérarchie avec des provinces partout en Europe, qui étaient présidées par le grand maître ou le ministre général et étaient gérées par le chapitre général annuel. Une stricte obéissance liait des régions différentes dans le cadre de la structure hiérarchique. En comparaison avec les cisterciens, la mobilité dans les ordres mendiants était assez considérable, parce que le principe de stabilitas loci des ordres de l’ancien type ne faisait pas partie de leur règlement »86. Maier, Preaching the crusades, p. 3-4. Maier, Preaching the crusades, p. 4-5. La traduction de l’anglais est faite par moi-même. 85 

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Outre la prédication, les ordres mendiants étaient activement utilisés pour rassembler des moyens financiers pour les croisades. Aucun de deux ordres n’a été créé comme un ordre de prédicateurs de la croisade, mais rien ne l’interdisait. Si on considère les fondateurs, on voit que saint Dominique prenait part à la lutte contre les hérétiques albigeois, tandis que saint François essayait de convertir au christianisme le sultan al-Kamil pendant la cinquième croisade. Ainsi, le fait que le traité ait été écrit par un dominicain n’est pas un hasard : ce sont les ordres mendiants qui prenaient activement part à la prédication, et entre autres, la prédication de la croisade.

Le manuel de prédication : était-il habituel à l’époque ? Les transformations dans l’Église qui ont eu lieu au xiiie siècle étaient une sorte de continuation du mouvement de réformes qu’on appelle d’habitude « réforme grégorienne ». Ces réformes, qui avaient pour objectif le renforcement du pouvoir et de l’influence politique du pape et la lutte pour la discipline dans l’Église, ont été commencées au milieu du xie siècle. Une conséquence logique de tous ces changements était la deuxième étape qui entre autres consistait en mesures concernant l’organisation de la prédication. Comme l’écrit André Vauchez, c’est seulement dans le dernier tiers du xiie siècle, après que la papauté a fait des progrès dans le premier volet de la réforme, qu’elle a pu commencer à traiter le second – passer des problèmes in capite aux problèmes in membris et s’occuper du clergé ordinaire et des fidèles87. Jacques Le Goff et Jean-Claude Schmitt appellent ces transformations « une parole nouvelle »88. L’essentiel est que l’Église a commencé à s’efforcer d’expliquer la doctrine chrétienne de façon plus simple pour les fidèles ordinaires. À cet effet, il valait mieux 87  A. Vauchez, « Présentation », Faire croire : modalités de la diffusion et de la réception des messages religieux du xiie au xve siècle, Rome, 1981, p. 10. 88  J. Le Goff, J.-C. Schmitt, « Au xiii siècle. Une parole nouvelle », Histoire vécue du peuple chrétien, sous la direction de J. Delumeau, 1, Toulouse, 1979, p. 261-262.

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organiser la prédication. Ce mouvement s’est d’abord répandu au sein des écoles parisiennes qui allaient donner naissance à l’Université, et ainsi ce n’est pas un hasard si beaucoup de prédicateurs fameux, dont Humbert de Romans, ont été formés là89. En outre, il s’agissait de l’amélioration de la compétence des clercs qui devaient prêcher. C’est dans le contexte de ces changements qu’a été composée toute une série d’artes praedicandi, ou « d’arts de prêcher », dans lesquels on trouve des conseils assez précis sur la manière de composer le sermon pour qu’il soit correctement compris par les fidèles. Comme l’écrit Jean Longère, l’apparition des artes praedicandi est liée à « l’indifférence religieuse de nombreux fidèles, l’ignorance ou la négligence des pasteurs, leur manque de préparation théologique ou pratique »90. Certaines instructions pour les prédicateurs se trouvaient déjà chez Augustin et Grégoire le Grand, mais ces ouvrages n’ont pas été écrits spécialement en vue d’instruire les prédicateurs91. Au xiiie siècle, par contre, il y a eu beaucoup d’ouvrages spécialement écrits à cet effet92. Franco Morenzoni estime que l’apparition des artes praedicandi et leur diffusion exactement à cette période était une conséquence de cette nouvelle politique de l’Église, dirigée d’une part vers une plus grande accessibilité à la doctrine chrétienne, et d’autre part vers l’amélioration du niveau d’éducation du clergé local93. Parmi les traités parus au xiiie siècle on peut aussi ranger le traité d’Humbert de Romans De eruditione praedicatorum, écrit entre 1266 et 1277, dans lequel il donne beaucoup de conseils pratiques en vue de composer un bon sermon. Le traité qui fait l’objet de notre traduction n’appartient pas aux artes praedicandi : à la différence de ces textes qui expliquent d’un point de vue technique comment prêcher sur n’importe quel Maier, Crusade Propaganda and Ideology, p. 4-5, 8-12. J. Longère, La prédication médiévale, Paris, 1983, p. 207. 91  F. Morenzoni, « La littérature des artes praedicandi de la fin du xii au début du xv siècle », S. Ebbesen, P. Schmitter (éd.), Geschichte der Sprachtheorie. 3. Sprachtheorien in Spätantike und Mittelalter, Tübingen, 1995, p. 340. 92  Morenzoni, « La littérature des artes praedicandi ». 93  Morenzoni, « La littérature des artes praedicandi », p. 345. 89 

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sujet, il aborde la composition des sermons au plan de leur contenu uniquement, sur le sujet précis des croisades, et seulement un peu sur le plan technique. Pourtant il est possible d’affirmer que le traité a été écrit dans le cadre du même courant qui parcourait la chrétienté occidentale : dans tous les cas envisagés, il s’agissait d’apprendre aux clercs à prêcher.

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TRAITÉ SUR LA PRÉDICATION DE LA CROISADE

1. 2. 3. 4. 5. 6. 7. 8. 9. 10. 11. 12. 13. 14. 15. 16. 17. 18. 19. 20. 21. 22. 23. 24. 25. 26. 27. 28. 29.

Instruction à propos du présent opuscule Thème commun à tout l’ouvrage De trois aides qu’il faut faire pour la Terre sainte Pourquoi la croix est imposée à ceux qui vont au secours de la Terre Sainte Pourquoi la croix est portée sur les épaules Pourquoi la croix est portée sur l’épaule droite Pourquoi prend-on la croix publiquement Pourquoi la croix est imposée par la main de l’Église Pourquoi personne n’est forcé De la première invention de la prise de la croix Du zèle de l’honneur divin qui doit conduire à la prise de la croix Du zèle de la loi chrétienne pour la même chose De la charité fraternelle pour la même chose De la dévotion envers la Terre sainte pour la même chose De la condition de la guerre pour la même chose Des exemples des précédents pour la même chose Des grâces de l’Église pour la même chose Contre le lien du péché qui retient de prendre la croix Contre une peur excessive de la peine corporelle qui a le même effet Contre un trop grand amour de sa patrie qui a le même effet Contre les médisances des hommes qui ont le même effet Contre les mauvais exemples des autres qui ont le même effet Contre l’affection exagérée envers les siens qui a le même effet Contre l’impuissance fictive qui a le même effet Contre le manque de foi qui a le même effet De neuf choses qui font la consolation des pèlerins de cette sorte Des thèmes empruntés à toute la Bible pour la prédication de la croix Des neuf choses qui sont nécessaires aux prédicateurs de la croix De six sortes de savoir qui sont nécessaires au prédicateur de la croix

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Traité sur la prédication de la croisade

30. À partir de divers récits de l’Histoire Ecclésiastique utiles pour la prédication de la croix 31. À partir de l’Histoire tripartite pour le même propos 32. À partir de l’Histoire des Anglais pour le même propos 33. À partir de l’Histoire des Francs pour le même propos 34. À partir du Miroir de l’Église d’Augustin pour le même propos 35. À partir du Dialogue de Grégoire pour le même propos 36. À partir de la Geste de Charles en Espagne pour le même propos 37. À partir du livre du pape Calixte pour le même propos 38. À partir de l’Histoire Antiochienne pour le même propos 39. À partir de l’Histoire Transmarine pour le même propos 40. À partir des Vies des Pères pour le même propos 41. À partir de diverses légendes des saints pour le même propos 42. Sur ce qui est nécessaire pour les bons pèlerins de cette sorte 43. Sur ce qui est efficace pour bien combattre les Sarrasins 44. Sur ce que doivent faire les fidèles qui vont à la rencontre des ennemis 45. Le sermon du pape Urbain pendant la première prise de la croix

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CHAPITRE 1 INSTRUCTION À PROPOS DU PRÉSENT OPUSCULE

Tout ce qui est écrit ci-dessous à propos de la prédication de la croix contre les Sarrasins, peut servir à ceci : les prédicateurs de la croix qui ne sont pas encore accoutumés à ce genre de prédication, trouveront ici matière à s’y exercer. Ceux qui sont davantage pourvus, en profiteront pour faire des ajouts en plus et en mieux. Et ceux qui sont dotés par la grâce d’une excellence en prédication, à partir de cette matière brute qui leur est préparée, comme des artisans prudents, produiront un ouvrage plus beau et mieux fait. Et tout ceci pour la gloire du Sauveur et le service de la foi chrétienne. Il faut noter que dans n’importe quel paragraphe où, vers la fin se trouve un petit signe de paragraphe et aussi le mot « invitation » dans la marge, l’invitation à la croix peut se faire avec le chant du Veni creator, ou Veni Sancte Spiritus, ou Vexilla, ou Salve, ou d’autres du même type, ou se poursuivre sans le chant, de manière plus étendue, sur le sujet décrit en-dessous de ce paragraphe ; ou bien l’invitation peut être faite après deux ou plusieurs paragraphes, selon la prudence du prédicateur. Il faut savoir que, là où l’on introduit beaucoup sur une seule matière, ce n’est pas pour qu’on allonge le sermon, mais pour que celui qui le voudra prenne dans les uns et les autres sermons ce qui lui semble convenir à son succès. Là où les choses sont traitées moins complètement, on laisse au bon vouloir du prédicateur la

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Chapitre 1

possibilité de développer davantage selon le sentiment et la grâce qui lui sont données. Il faut aussi savoir que les invitations sont données avec des numéros : de la sorte, si quelque chose de ce qui est dit au début est nécessaire à leur compréhension dans les chapitres suivants, il sera possible de s’y référer grâce aux numéros assignés et inversement. De même, dans cet ouvrage, il y a des titres numérotés, afin d’en connaître le contenu et pour trouver plus facilement ce qu’on cherche à l’aide des numéros.

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CHAPITRE 2 THÈME COMMUN À TOUT L’OUVRAGE

Saint, saint, saint est le Seigneur Dieu des armées ! Isaïe 6 (Is  6:3). Le saint prophète Isaïe, lors du bienheureux ravissement, où il a vu le roi de gloire assis sur son trône et assisté de ses anges, parmi bien d’autres visions glorieuses, entendit même les saints anges clamer des louanges en son honneur en disant : Saint, saint, saint, etc. ! Ces paroles signifient que le roi de gloire lui-même n’a pas qu’une seule armée, mais plusieurs, parce qu’on dit « armées » au pluriel et non « armée » au singulier. Cela signifie également que son armée n’a rien d’inique. Comment dirait-on « saint » et trois fois « saint », si cette armée portait en soi l’iniquité ? Cela signifie également que son armée est exaltée au dessus de toutes les autres armées par une prérogative spéciale, parce qu’elle s’appelle non pas l’armée d’un homme ou d’un ange quelconque, mais du Dieu vivant lui-même, parce qu’on dit « le Seigneur Dieu ». Premièrement, il faut noter que ce roi glorieux a une armée composée de créatures purement spirituelles : c’est l’armée des saints anges qui combattent pour lui depuis l’origine du monde contre les esprits mauvais, et se battront jusqu’à ce que ces derniers soient complétement vaincus ; elle a pour chef l’archange Michel.

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Apocalypse 12. Et il y eut un grand combat dans le ciel. Michel et ses anges combattirent contre le dragon. Et le dragon et ses anges combattirent, mais ils ne furent pas les plus forts, et leur place ne fut plus trouvée dans le ciel (Ap 12:7-8), ce qui signifie le ciel de l’Églisea. Dans Jude 1, on trouve un exemple de cela, où Michel parle avec le Diable au sujet du corps de Moïse (Jude 1:9). Et si tu veux en savoir le sens, regarde les gloses. De même, il a une autre armée prête en temps voulu à combattre ses ennemis, les hommes impies qui devront être finalement condamnés, c’est-à-dire, la totalité de la machine du mondeb jusqu’aux créatures qui manquent de raison. Si quand le cruel et odieux roi Hérode fut agité, toute Jérusalem qui était soumis à lui fut agité avec lui, comme il est dit dans Matthieu 2 (cf.  Mt 2:3), il convient d’autant plus qu’au jour du Jugement, lorsque le très pieux et aimable roi de gloire montrera sa grande colère contre les impies, toute la machine du monde, en se conformant à lui, s’enflamme contre eux. C’est pourquoi il est dit dans Sagesse 5 : Tout l’univers de la terre combattra avec lui contre les insensés (Sg 5:21). De même, il a une autre armée, celle des hommes qui consistent en deux natures, non pas n’importe lesquels, mais des fidèles qui se battent pour lui contre les infidèles, et qui s’appellent justement l’armée de Dieu. D’où 1 Rois 17. Qui est donc ce Philistin incirconcis, pour blâmer l’armée du Dieu vivant (1 S 17:26) ? L’exemple de cette guerre, nous l’avons chez les juifs, qui depuis qu’ils sont montés de l’Égypte, aussi longtemps qu’ils ont été le peuple de Dieu, ont presque toujours été en guerre avec les infidèles, les attaquant ou étant attaqués par eux, comme le voit celui qui lit scrupuleusement les histoires sacrées.

Cf. Glossa ordinaria. Apoc. 12, 8 (vol. 4, p. 564 interlin.) ; Hugues de SaintCher, Postillae in universa Biblia. Apoc. 12, 8 (vol. 7, f. 402r). b  La « machine du monde » désignait à l’époque l’ensemble de l’univers (M.  Popplow, « Setting the World Machine in Motion : The Meaning of Machina Mundi in the Middle Ages and the Early Modern Period », Mechanics and Cosmology in the Medieval and Early Modern Period, ed. M. Bucciantini et al., Firenze, 2007, p. 63-64). a 

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Thème commun à tout l’ouvrage

Invitation 1 Voilà, mes très chers, ce qu’on tire des histoires diverses : il y a déjà plus de six cents ans que ce ribauda impur de Mahomet a commencé avec son peuple la guerre contre la chrétienté, et il l’a emporté si fort, et nos péchés étaient si nombreux, qu’il a chassé pratiquement de partout notre Seigneur Jésus Christ, de qui nous nous appelons « chrétiens », et qui était adoré et honoré dans les terres d’Orient qu’on appelle l’Asie Majeure, c’est-à-dire le tiers de la terre habitée et quasiment la moitié du mondeb. Il a profané tous ses lieux saints, et a tué ses serviteurs innombrables. Ensuite, son peuple a occupé toute l’Afrique, qui est aussi un tiers de la terre où l’on comptait quatre cent quarante-quatre diocèses selon les chroniquesc, au point qu’aucun évêque, dit-on, n’y subsiste sauf un au Marocd, qui est à la tête des chrétiens peu nombreux qui paient un impôt. Ensuite, ayant traversé la Méditerranée vers l’Espagne, qui est en Europe où nous vivons, le tiers de la zone habitée, il a infligé aux chrétiens qui y habitent des maux inestimables en occupant jusqu’à la frontière du royaume de France. Et bien que ce peuple ait été repoussé par Charles et par les Francs de France et des environs, il détient encore une grande partie de l’Espagnee. Sur ce juron voir : N. Gonthier, « Sanglant Coupaul ! » « Orde Ribaude ! » Les injures au Moyen Âge, Rennes, 2007, p. 148. b  Selon les représentations de l’époque, le monde était divisé en trois parties, i. e. Europe, Afrique et Asie, parmi lesquelles l’Asie formait à peu près la moitié de toute la terre. Voir par exemple : J. K. Wright, The Geographical Lore of the Time of the Crusades : A Study in the History of Medieval Science and Tradition in Western Europe, New-York, 1925, p. 258. c  La chronique de Sigebert de Gembloux évoque ce chiffre dans la note sur l’an 483 (Chronica Sigeberti Gemblacensis a. 381-1111, MGH SS, 6, p. 312). d  Il est possible que le Maroc soit mentionné ici du fait que les relations entre la papauté et les pouvoirs marocains étaient bienveillantes. En 1233 un épiscopat chrétien a été fondé à Fès (Wright, The Geographical Lore of the Time of the Crusades, p. 302). e  Il faut se demander s’il s’agit de la bataille de Poitiers (732) où Charles Martel a vaincu les Arabes ou bien d’une des expéditions de Charlemagne décrite dans la chronique du pseudo-Turpin, dont des fragments sont cités par Humbert de Romans plus loin : en effet, une campagne défensive contre les Arabes venus en France y est décrite (A. Moisan, Le livre de Saint Jacques ou Codex Calixtinus de Compostelle, Genève, 1992, p. 168). a 

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Enfin, l’armée chrétienne a traversé la mer vers la Terre sainte, dont la désolation doit beaucoup nous toucher ; elle en a récupéré une grande partie, mais une suite de malheurs a fait que nous l’avons désormais presque entièrement perdue, et il ne nous en reste qu’un territoire très petit. De ce petit reste, nous avons récemment perdu un château qu’on appelait Safed, où l’on dit que près de deux mille chrétiens, demeurés constants dans la foi, ont été tués par la cruauté des Sarrasins. Ce château était situé dans les terres, assez loin de la mer : il constituait la principale défense d’autres petites places qui nous restaient seulement en bord de mer. De là-bas maintenant les Sarrasins peuvent venir jusqu’à la ville d’Acre : les chrétiens n’ont plus aucune défense entre les ennemis et cette ville. Nos frères chrétiens, dans une position tellement critique, constatent qu’ils ne peuvent plus longtemps tenir ce petit nombre de lieux qui leur restent le long de la mer sans un soutien rapide. Ils voient qu’une aide ne peut venir de nulle part, sauf de nous qui sommes du côté de la mer à l’Ouest, parce que à droite, au Sud, il y a des Égyptiens, à gauche, au Nord, les Grecs et bien d’autres schismatiques, et à l’Orient les Tartaresa : ils font recours à notre seigneur le pape, aux princes et aux autres chrétiens schismatiques, en signalant, le cœur plein d’amertume, le danger qu’encourt la chrétienté dans leurs terres et demandant un soutien rapide. C’est pourquoi, de la part du pape, de nombreux prédicateurs de la croix se dirigent maintenant dans toutes les parties du monde, pour que dans une telle nécessité les chrétiens s’arment virilement pour le soutien de la foi chrétienne. Par autorité pontificale, nous vous exhortons et vous prions, au nom de celui qui est mort pour nous dans la guerre de la croix. Considérez comment, selon ce qui est dit plus haut, les saints anges se battent sans cesse pour leur Dieu contre ses ennemis, comment aussi toute créature insensible est prête à le faire, comment même les juifs, quand ils étaient le peuple de Dieu, l’ont fait presque continûment contre les ennemis Ceci est probablement lié à l’orientation des mappaemundi de l’époque où l’Asie était en haut (pour des exemples, voir : Wright, The Geographical Lore of the Time of the Crusades, p. 67, 69, 123). a 

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Thème commun à tout l’ouvrage

de Dieu, c’est-à-dire les infidèles. Préparez-vous à venir au secours de la foi chrétienne, armez-vous de l’arme de Dieu, c’est-à-dire, de la croix que nous vous offrons, et, toutes affaires cessantes, venez avec dévotion, et en toute hâte ! Chant : Veni creator spiritus, etc. Deuxièmement, il faut noter qu’il y a des guerres injustes. Juges 11. En me déclarant une guerre injuste (Jg 11:27). Il existe trois raisons principales qui rendent la guerre injuste. La première, c’est quand les innocents sont agressés, comme cela se fait hélas dans les guerres de notre temps. Nos chevaliers et nos sergents ne sont pas comme saint Maurice et toute sa légion, qui ont préféré être décapités plutôt qu’obéir à leur seigneur l’empereur dans la persécution des chrétiens innocentsa. Mais ceux-là, parfois même sans obéir à leur seigneur, tuent de pauvres paysans innocents, envahissent les hôpitaux et même les léproseries, violent les églises, et sans toucher les plus grands seigneurs, ils exercent leur cruauté sur les innocents. Ce n’est pas comme cela dans cette armée du Seigneur. Le peuple Sarrasin, contre lequel elle se dirige, est entièrement coupable vis-à-vis de toute la chrétienté, comme cela apparaît dans l’invitation ci-dessus et dans le Psaume, dans lequel l’Église se plaint d’eux à Dieu, en disant : Dieu, les nations sont venues (Ps 78:1)b. Deuxième raison, quand on fait la guerre pour une moins bonne cause, comme font beaucoup maintenant, qui, par orgueil, par avarice ou par vaine gloire se battent contre les autres. Dans cette armée, il n’en va pas ainsi : on se bat pour la justice suprême qui est la justice de la foi. Si en effet la guerre qui se fait pour la défense des biens ou des êtres est juste de l’avis de tous, Cf. Evcher de Lyon, Passio Acaunensium martyrum (p. 32-39). Le Psaume 78 est devenu répandu surtout après la défaite de Hattin et la perte de Jérusalem en 1187. Voir par exemple : A. Linder, « ‘Deus venerunt gentes’. Psalm 78(79) in the Liturgical Commemoration of the Destruction of Latin Jerusalem », Medieval Studies in Honour of A.  Saltman, ed. A.  Bat-Sheva et  al., Ramat-Gan, 1995, p. 145-171 ; M. C. Gaposchkin, Invisible Weapons. Liturgy and the Making of Crusade Ideology, Ithaca and London, 2017, p. 195-208. a 

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combien plus juste est celle-ci qui se fait pour la défense de la foi, dans laquelle est le salut des âmes. Il est bien dit dans 1 Timothée 6 : Combats le bon combat de la foi, c’est-à-dire le combat de la foi, qui n’est pas mauvais, mais bon, et n’aie pas peur de rencontrer la mort de l’enfer, mais aie plutôt l’espoir certain de la vie éternelle qui en résulte. D’où la suite : Saisis la vie éternelle (1 Tm 6:12). Troisième raison, quand on fait la guerre hors de toute autorité. Il n’est pas permis à n’importe qui de mener une guerre par sa volonté, comme le font beaucoup pour la condamnation de leurs âmes. Pourtant, cette guerre a l’autorité, selon le droit non seulement humain, mais aussi divin, non seulement de l’Église, mais de Dieu même, qui parle à travers Moïse, en disant. Exode 17. Il y aura guerre du Seigneur contre Amalek, de génération en génération (Ex 17:16). Et Deutéronome, 7. Lorsque le Seigneur, t’aura fait entrer dans le pays dont tu vas prendre possession. Et après : Tu passeras les peuples au fil de l’épée jusqu’à l’intervention, tu ne traiteras point d’alliance avec eux, et tu ne leur feras point grâce (Dt 7:1-2). Et ces peuples dont il est question, ce sont les infidèles. Il est clair que Dieu le Seigneur des armées (Is 6:3) est justement appelé trois fois « saint », parce que son armée de fidèles n’agit pas contre les innocents, mais contre ceux qui nuisent le plus, non par une cause irrationnelle, mais très rationnelle, non sans autorité, mais avec une autorité suprême. C’est pourquoi sa guerre est vraiment juste. D’où dans Apocalypse 19, il est dit qu’il juge et combat avec justice (Ap 19:11). Il faut noter que la guerre injuste est un chemin qui conduit dans l’enfer. D’où à propos de ceux qui mènent une telle guerre, il est dit dans Ezéchiel 22  [sic] : Ils sont descendus dans l’enfer avec leurs armes (Ez 32:27). Cette guerre vraiment juste que l’on la fait pour le fils de Dieu, et à l’exhortation de la parole divine, conduit au ciel. D’où Apocalypse 6. Je vis sous l’autel les âmes de ceux qui avaient été immolés à cause de la parole de Dieu (Ap 6:9). On expose ici la signification des deux citations.

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Thème commun à tout l’ouvrage

Invitation 2 Alors, vous voyez, très chers, où conduisent les guerres du monde qui sont très souvent injustes ; vous voyez aussi et où conduit la guerre du Christ qui est très juste. Beaucoup sont attirés dans les guerres du monde par amitié pour le siècle, et vous, laissez-vous attirer dans celle-ci par amitié pour le Christ. Les autres sont attirés dans ces guerres-là par la gloire de la vaine renommée, et vous, laissez-vous attirer dans celle-ci par la vraie gloire de la patrie céleste. Les autres sont attirés dans celles-là par la nécessité corporelle de la vie présente, parce qu’ils n’ont rien d’autre pour vivre, et vous, laissez-vous attirer dans celle-ci par la nécessité de vos propres âmes. Par les autres guerres, le Diable entraîne beaucoup d’hommes en enfer, et par celle-ci le Seigneur cherche à vous entraîner dans les cieux. De la part de Dieu Tout-Puissant, Père, Fils et Saint Esprit, à tous ceux qui vont se joindre à cette armée, si avec un cœur dignement contrit et en se confessant ils meurent au combat, je promets le royaume céleste, que le Seigneur nous a acquis par la croix. Et je vous investis de sa part par la croix, que je vous tends dans le présent. Alors, venez, et que personne ne refuse de recevoir une investiture aussi glorieuse, et une telle promesse du royaume glorieux du ciel. Chant Troisièmement, il faut noter que cette armée, qui n’est pas celle de l’homme mortel, mais celle du Dieu vivant, jouit de trois prérogatives. La première découle de la bénédiction divine. Cette armée n’est pas maudite ou excommuniée comme d’autres, mais bénie. D’où Nombres 22 à propos de l’armée du Seigneur contre l’infidèle Balak et ses gens. Le Seigneur a dit à Balaam : Tu ne maudiras point ce peuple, car il est béni (Nb 22:12). Après avoir raconté cette histoire, dis ensuite comment Balaam n’a pas pu être conduit ni par l’argent, ni par les prières, ni par la peur du roi à maudire cette armée du Seigneur, mais plutôt, parce que l’esprit de Dieu parlait en lui, il l’a bénie trois fois en disant à la fin de Nombres 24. Béni

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Chapitre 2

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soit quiconque te bénira, et maudit soit quiconque te maudira (Nb 24:9) ! Si c’est vrai pour l’armée qui était contre Balak, cela vaut bien plus pour l’armée des chrétiens contre les Sarrasins, parce que de chaque côté, c’est-à-dire des chrétiens et des Sarrasins, se rejoignent plusieurs raisons, comme c’est clair pour l’observateur attentif. La deuxième découle de la société des anges. Il est dit dans 4 Rois 6 qu’au temps où l’armée du roi de Syrie avait assiégé la ville de Dothan à cause du prophète Élisée qui s’y trouvait, son serviteur en se levant le matin voyant l’armée s’était réclamé en disant à Élisée : Ah ! mon seigneur, comment ferons-nous ? Et Élisée répondit : Ne crains point, car ceux qui sont avec nous sont en plus grand nombre que ceux qui sont avec eux. Élisée pria, et dit : Seigneur, ouvre les yeux de ce serviteur, pour qu’il voie. Et le Seigneur ouvrit les yeux du serviteur, qui vit la montagne pleine de chevaux et de chars et d’hommes autour d’Élisée (2 R 6:15-17), ce qui signifie l’armée des angesa. En conséquence, Élisée a été libéré et les autres ont été capturés. De même, dans Josué 5, on lit : Comme Josué était près de Jéricho, il leva les yeux, et regarda. Voici, un homme se tenait debout devant lui, son épée nue dans la main (Jos 5:13), c’est-à-dire un ange qui a pris l’aspect d’un homme. Il alla vers lui, et lui dit : Es-tu des nôtres ou de nos ennemis ? Il répondit : Non, mais je suis le chef de l’armée du Seigneur (Jos 5:13-14). Et comme dit le Maître dans ses Histoires, il lui a indiqué comment prendre Jérichob. On peut conclure de ces deux histoires que les anges s’associaient à ces anciennes armées des fidèles contre les infidèles et prenaient part aux batailles comme des compagnons, comme des chefs, comme des adjoints, et comme des guides. Et si c’est vrai de ceux-ci à cette époque-là, il faut le croire plus encore de l’armée chrétienne qui se bat pour le Christ crucifié et le suit dans la bataille. C’est pourquoi il est dit justement dans Apocalypse 19 à propos du fils de Dieu. Et il était revêtu d’un vêtement teint de sang et les armées qui sont a  Cf.  Hugues de Saint-Cher, Postillae in universa Biblia. IV  Reg. 6,  17 (vol. 1, f. 290v). b  Cf. Pierre le Mangeur, Historia Scholastica. Ios. 5 (col. 1263) : “et docuit eum angelus de modo capiendi ciuitatem”.

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Thème commun à tout l’ouvrage

dans le ciel le suivaient (Ap 19:13-14), c’est-à-dire dans la bataille qui est la sienne. La troisième découle de la rémunération excellente qui est la récompense céleste. D’où le pape Léon [IV], XXIII, question VIIIa : « En laissant toute crainte et toute peur, apprenez à combattre virilement contre les ennemis de la sainte foi. Le Tout-Puissant sait que si quelqu’un des nôtres meurt, il meurt au nom de la vérité de la foi, du salut de la patrie et de la défense des chrétiens, donc une récompense céleste de Dieu va suivre ».

Invitation 3 Maintenant, mes très chers, il apparaît d’après ce qui vient d’être dit que ceux qui se joignent à cette sainte armée du Seigneur, seront bénis par le Seigneur, ils auront les anges pour compagnons, et à la fin recevront la récompense éternelle. Beaucoup s’exposent plus volontiers au combat, quand ils sont bénis par le pape ou quelqu’un d’autre à sa place. La bénédiction divine doit d’autant plus encourager à cela ! Beaucoup sont amenés par la société de nombreux grands à se joindre à leur armée. À  plus forte raison cette société des anges célestes doit maintenant les émouvoir ! Certains participent volontiers aux combats des joutes et des tournois, et agissent virilement pour gagner avec la renommée un chapeau de fleurs ou un fauconb, ou autre chose de cette sorte qu’on donne à la fin au meilleur combattant. La récompense éternelle donnée à la fin à celui qui combat légitimement doit d’autant plus émouvoir maintenant ! Alors, celui qui veut avoir la bénédiction divine, qui aime la société des anges, qui aspire à la couronne éternelle, qu’il vienne et prenne cette croix, par laquelle il obtiendra tout cela grâce à la générosité du Seigneur. Chant Gratien, Decretum II, causa 23, q. 8, c. 9 (col. 955). Le faucon est évoqué comme un prix possible : D.  Crouch, Tournament, London, New-York, 2005, p. 107. a 

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CHAPITRE 3 DE TROIS AIDES QU’IL FAUT FAIRE POUR LA TERRE SAINTE

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Ensuite, il faut noter qu’après que le prédicateur a fait ce qu’il peut et bien pour la prise de la croix chez les habitants d’un lieu, lorsqu’il n’espère plus pouvoir obtenir davantage, il doit engager les auditeurs à faire en sorte que ceux qui ne partent pas en personne, aident au moins à l’affaire en envoyant une part de leurs biens. Pour cela il peut procéder par le moyen d’un simple sermon, ou bien s’il l’estime convenable, ayant fait son sermon, il peut engager ceux qui proposent d’envoyer quelque chose, à venir lui parler après le sermon et à confirmer leur projet. Ici, il faut que les gens simples se méfient des obligations ou des promesses irréfléchies, à cause du danger de transgression. Dans le dernier sermon vers la fin, les auditeurs doivent être invités à faire en sorte que ceux qui ne donnent pas de subside ni en personne, ni par leurs biens, au moins subventionnent la Terre sainte par les mots de leurs prières. Il y a des prières qui doivent être imposées pour cette affaire sur demande. C’est ainsi qu’on peut procéder pour ce qui vient d’être dit. Voilà, mes très chers, cette affaire concerne toute la chrétienté et ainsi aucun chrétien ne doit se soustraire à apporter son aide selon ses moyens. Il y a trois sortes d’aide. Le premier est corporel, à savoir, ceux qui partent en personne. Le deuxième est matériel, à savoir ceux qui envoient une part de leurs biens. Le troisième est verbal, à savoir ceux qui aident par les paroles de la prière. Le troisième est

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De trois aides qu’il faut faire pour la Terre sainte

bon, mais le deuxième est mieux, et le premier est le meilleur. Il y a trois choses qui doivent stimuler pour le premier, trois autres pour le deuxième, et trois autres pour le troisième. À propos du premier il faut noter que nous tenons notre corps de notre Seigneur comme un fief, car il l’a façonné et il nous l’a donné. Ainsi, comme un chevalier doit exposer son fief pour le seigneur dont il le tient au temps de la nécessitéa, nous devons le faire envers le Seigneur avec notre corps. Motivé par cette raison, le troisième de sept frères, étant demandé de tendre la langue, la présenta aussitôt, tendit courageusement ses mains et dit avec confiance : J’ai reçu ces membres du ciel, mais je les méprise maintenant à cause des lois de Dieu (2 M 7:10-12). De même, le Seigneur a donné son corps de valeur inestimable à la mort pour nous. À plus forte raison, nous devons exposer notre vil corps au labeur et même à la mort pour lui ! Celui qui reçoit un très grand service, doit d’autant plus exposer le moindre. Bernardb : « Il revendique justement ma vie, celui qui pour la mienne a donné la sienne ». De même, le Seigneur rend à tous ceux qui exposent leur corps pour lui quelque chose d’incomparablement meilleur. Et à cause de cette espérance, il faut exposer ce vil corps pour le Christ avec audace, à l’exemple des saints dont on lit dans Hébreux 11 : [d’autres furent livrés aux tourments], et n’acceptèrent point de délivrance, afin d’obtenir une meilleure résurrection (He 11:35). Comme un chevalier n’a pas peur d’exposer un mauvais roncin pour son seigneur, de qui il espère recevoir un destrier, nous devons donc exposer notre corps pour le service du Christ au labeur et à la mort, en raison du fief, de la récompense et d’une meilleure restitution. Deuxièmement, il faut noter qu’on est conduit parfois à donner aux quêteurs d’aumônes par l’ampleur de l’indulgence, mais celle-là est beaucoup plus importante, parfois par la dignité du lieu pour lequel on prêche, mais celle-ci est meilleure. Celle-là en effet est particulière pour tel ou tel puissant ou pour une église, mais celle-ci est universelle pour toute la chrétienté, parce que cette affaire la concerne tout entière. Parfois c’est la piété, comme La ponctuation du texte latin est à corriger (p. 16, l. 28/29) : a quo tenet illud [virgule] in tempore necessitatis. b  Cf. Bernard, Epistolae. 143 (vol. 7, p. 343, 12-13). a 

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Chapitre 3

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lorsqu’une quête est faite pour des malades, des lépreux ou des ardents, mais celle-ci est plus importante, parce que l’autre est charnelle et celle-ci est spirituelle, parce que grâce à ces aumônes on vient au secours de la foi. Quand elle périt, périssent de nombreuses âmes, et quand elle est stable, elles sont sauvées. Note que dans Esdras 1 on parle du soutien que les juifs qui restaient à Babylone ont apporté aux juifs qui montaient à Jérusalem pour la récupérer. Tous ceux qui demeuraient aux environs ont aidé cette armée en apportant les vases d’argent et d’or, les biens, le matériel et les bêtes de somme (Esd 1:6). Si les juifs qui restaient ont tellement et avec tant de zèle aidé les juifs qui sont partis pour récupérer Jérusalem, avant que Dieu ait fait tant de miracles dans cette région pour notre salut, alors quelle aide, nous les chrétiens, devons-nous procurer aux chrétiens qui sont en route pour libérer cette Terre sainte, après tellement de miracles faits là-bas pour nous par Dieu ? Et le plus important est qu’avec l’aide apportée par les aumônes de ce genre, ils obtiennent de telles indulgences, et que celles-ci profitent non à un seul lieu, mais à toute la chrétienté, et que celles-ci ont des raisons vraiment valides pour réveiller la piété. Troisièmement, il faut noter que les prières faites pour l’armée des fidèles valent beaucoup pour le triomphe sur les infidèles. D’où Judith, qui a triomphé sur Holopherne et son armée, en allant contre eux a vivement demandé aux siens de prier, en disant : Et jusqu’à ce que je vous apporte des nouvelles, qu’on ne fasse autre chose que de prier pour moi notre Seigneur (Jdt 8:33). De même, lorsque Moïse tenait les mains élevées, c’est-à-dire dans la prière, Israël était victorieux sur le peuple infidèle des Amalécites (Ex 17:11). Exode 17. De même, pendant que l’Église priait, Pierre a été libéré de la main d’Hérode infidèle et de toute attente des juifs infidèles. Actes 12 (Ac 12:11). C’est pourquoi on peut espérer à juste titre que les prières servent beaucoup contre les infidèles. C’est pourquoi on ordonne parfois qu’à l’heure même du sacrifice suprême, on fasse une prière spéciale avec le psaume Dieu les nations sont venues (Ps 78:1), etc., où il est dit : Qu’elle vienne sous ton regard, Seigneur, la vengeance pour le sang de tes serviteurs (Ps 78:10-11), etc., en faveur de l’armée chrétienne dirigée contre les Sarrasins par l’Église militante qui se conforme en cela

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De trois aides qu’il faut faire pour la Terre sainte

à l’Église triomphantea, dans laquelle les âmes de ceux qui avaient été immolés à cause de la parole de Dieu par les infidèles disent : Jusqu’à quand, Seigneur saint et véritable, tarderas-tu à tirer la vengeance de notre sang et la vengeance sur les habitants de la terre (Ap 6:9-10) ? Et celui qui ne peut pas faire autre chose, doit dire au moins des prières spéciales à cette occasion, non seulement pour le bénéfice mentionné plus haut, mais pour qu’il soit partie prenante au mérite et aux indulgences. Je l’avoue, c’est cette confiance en cela qui m’a poussé à écrire cet ouvrage qui peut avoir quelque valeur pour les prédicateurs de la croix, parce que selon le Concile de Latran ceux qui apportent leur aide à l’affaire, participeront aux indulgences selon le niveau de leur contributionb. Pour disposer d’une matière plus abondante pour la prédication de la croix dont nous avons parlé, il faut d’abord la raison de prendre la croix pour ceux qui veulent aller au secours de la Terre sainte. Deuxièmement, la première invention de la prise de la croix. Troisièmement, les motifs pour prendre la croix. Quatrièmement, les remèdes contre les obstacles. Cinquièmement, les consolations pour les pèlerins. Sixièmement, les citations diverses des Saintes Écritures qu’on peut mettre au début des prédications de ce genre. Septièmement, ce qui est nécessaire au prédicateur de la croix afin d’accomplir cet office de manière louable. Huitièmement, ce qui est nécessaire pour les croisésc eux-mêmes afin d’accomplir leur vœu dignement. Sur la raison de prendre la croix pour ceux qui vont au secours de la Terre sainte, il faut noter d’abord pourquoi le signe de la croix est imposé ; deuxièmement, pourquoi sur l’épaule ; troisièmement, pourquoi sur l’épaule droite ; quatrièmement, pourquoi cela se fait en public ; cinquièmement, pourquoi par la main ecclésiastique ; sixièmement, pourquoi personne n’est forcé à le faire, mais est seulement invité volontairement. a  Traditionnellement l’Église militante désigne l’Église terrestre, tandis que l’Église triomphante désigne l’Église céleste. Voir par exemple : C. Thouzellier, « Ecclesia militans », Études d’histoire du droit canonique dédiées à G.  Le Bras, tome 2, Paris, 1965, p. 1407-1421. b  Cf. Alberigo (éd.), Les conciles œcuméniques, p. 574-576. c  Dans ce traité le terme « crucesignatus » est employé. Sur son histoire voir : M. Markowski, « Crucesignatus : its Origins and Early Usage », Journal of Medieval History, 10 (1984), p. 157-165.

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CHAPITRE 4 POURQUOI LA CROIX EST IMPOSÉEÀ CEUX QUI VONT AU SECOURS DE LA TERRE SAINTE ?

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Premièrement, il faut noter que comme il y a un pèlerinage des saints pour lequel on est mû par la dévotion envers eux, il y a aussi un pèlerinage du Crucifié qui conduit à prier au lieu où il a posé ses pieds (Ps 131:7) et à baiser les traces de ses pieds, à voir les lieux très saints de sa naissance, de sa vie quotidienne, de sa passion, de son ensevelissement et de son ascension. Le fait qu’un tel pèlerinage aura lieu dans la chrétienté, a été prophétisé par Isaïe. Isaïe 51. Ainsi les rachetés du Seigneur, c’est-à-dire les chrétiens, retourneront, c’est-à-dire des péchés au Seigneur et iront à Sion en se réjouissant, et une joie éternelle couronnera leur tête, c’est-à-dire dans leurs intentions, parce qu’ils le feront pour cela et ils ne seront pas trompés. D’où suit : ils obtiendront l’allégresse et la joie, et la douleur et les gémissements s’enfuiront (Is 51:11). Voici l’heureux pèlerinage auquel s’engagent les croisés, et ainsi leur est imposé le signe de la croix pour montrer qu’ils ne sont pas les pèlerins d’un saint, d’un apôtre, d’un martyr, d’un confesseur ou d’une vierge, mais, ce qui est plus considérable, du Crucifié lui-même. Les plus grands ennemis que la croix du Christ a jamais eus, ce sont les Sarrasins. En effet, les juifs qui ont ordonné la crucifixion, bien qu’ils n’aient pas voulu croire au Crucifié, ne dirigent pourtant pas leurs armes contre les adorateurs de la croix. Les païens

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romains qui ont exécuté la crucifixion, s’en sont ensuite tellement acquittés qu’ils ont adoré la croix et ont beaucoup aidé à soumettre le monde au Crucifié. Mais les Sarrasins sont vraiment les pires, bien qu’ils soient en grande partie d’accord avec nous à propos de la louange du Christ, ne comprenant pas le mystère de la croix et en le foulant aux pieds comme de très vils porcs, ils tiennent pour sottise et attentatoire à la majesté divine de croire que le fils de Dieu a été crucifié, comme il est mentionné dans 1 Corinthiens 1. Nous prêchons le Christ crucifié ce qui est une folie pour les païens (1 Co 1:23). Exécrant la croix, ils n’ont pas cessé pendant 660 ans et plus, ayant négligé les juifs et les idolâtres, de tuer les adorateurs de la croix en les persécutant non seulement en Asie et en Afrique, mais aussi en Europe jusque dans les Gaules comme on voit dans l’histoire de Charlesa, еn crucifiant de nouveau, à savoir, en imposant de multiples tourments, le fils de Dieu (He 6:6) dans ses membres, et en méprisant le Crucifié lui-même, comme on le dit dans Hébreux 6. Il est vrai que la croix très glorieuse du Seigneur, qui est une folie pour ceux qui périssent, pour ceux qui sont sauvés, c’est-à-dire pour nous, les chrétiens, est une puissance de Dieu (1 Co 1:18), comme il est dit dans 1 Corinthiens 1. C’est pour cela que dit Rabanb : la croix est l’espérance des chrétiens. Il est bien que les chrétiens qui vont rencontrer les Sarrasins, ne mettant l’espoir de la victoire ni dans leur nombre, ni dans la puissance, ni dans la qualité de leurs armes, mais dans la croix, par laquelle le Seigneur a triomphé noblement, prennent et élèvent la croix contre les Sarrasins, comme l’empereur Constantin qui, allant se battre contre les infidèles, a fait mettre ce signe sur sa bannière et sur les armes de ses soldats par espoir de la victoire, dont lui avaient parlé les anges qui lui étaient apparus en vision montrant ce signe : « Avec cela tu vaincras », comme on le sait à Il peut s’agir d’une allusion à la victoire de Charles Martel, mais la présence répétée des références à la chronique du pseudo-Turpin dans le texte fait penser qu’il s’agit plutôt de cette source, où entre autres il est question des actions de Charlemagne contre les Arabes venus en France (Moisan, Le livre de Saint Jacques ou Codex Calixtinus de Compostelle, p. 168). b  Cf. Rupert de Deutz, Liber de diuinis officiis 1 (p. 21, 544). a 

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partir de l’Histoire tripartite et l’Histoire ecclésiastiquea. Ensuite, de nombreux événements qui se sont déjà produits confortent cette espérance de la victoire contre les Sarrasins par la force de la croix et, parmi ces événements, il y a ce que rapporte l’Histoire Transmarineb à propos de la prise de Jérusalem. Il y est écrit que, quand Godefroi de Bouillon et les siens eurent assiégé déjà pendant longtemps la ville de Jérusalem, un vendredi, le cœur enflammé, ayant invoqué l’aide de Dieu et de la croix, ils escaladèrent les murs, prirent la ville et tuèrent d’innombrables Sarrasins. Il faut noter que tant que l’homme mène une vie de péché, il est comme un temple d’idoles plein d’images diaboliques variées, c’està-dire, les péchés. Quand ayant laissé les péchés, il veut servir Dieu dans la pénitence, il devient le temple de Dieu. Selon ceci : Le temple de Dieu est saint, et c’est ce que vous êtes (1 Co 3:17). 1 Corinthiens 2 [sic]. Quand le temple des idoles est transformé en temple de Dieu, on y place les croix à l’exemple de ce qu’on dit dans la vie de saint Barthélemy : quand il a consacré un temple où on se livrait à l’idolâtriec, est apparu un ange qui avec son doigt a imprimé le signe de la croix sur les quatre murs du templed. Parce que ceux qui veulent partir aider la Terre sainte, le cœur contrit et ayant déposé leurs péchés, viennent au service de Jésus Christ, on leur impose à juste titre le signe de la croix comme à un temple consacré à nouveau au Seigneur.

Invitation 4 Voilà, mes très chers, vous voyez que la prise de la croix est un pèlerinage du Crucifié et la croix est donnée comme son signe. De même c’est le rassemblement d’une armée contre les plus grands ennemis de la croix et la croix est portée en espoir de la victoire. Cf. Cassiodore, Historia ecclesiastica tripartita 1, 4, 7 (p. 17, 44) ; Eusèbe de Césarée, Historiae ecclesiasticae 9, 8, 15 (p. 827, 33 - p. 829, 2). b  Cf. Jacques de Vitry, Historia orientalis 20 (p. 170, 13-20). c  La ponctuation du texte latin est à corriger (p. 22, l. 64) : in quo fuerat [pas de virgule] ydolatria [virgule] consecraret. d  Cf.  Jacques de Voragine, Legenda aurea 119 (p.  833) ; Vincent de Beauvais, Speculum historiale 9, 85 (p. 353). a 

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De même, c’est une convocation à se consacrer au service de Jésus Christ et on appose habituellement des croix pendant les dédicaces. Donc celui qui veut être un pèlerin du Crucifié, celui qui veut se dresser pour le Crucifié contre les ennemis de la croix, celui qui veut, en abandonnant le Diable, se dédier au service de Jésus Christ, qu’il se lève, vienne et accepte cette croix. Chant

Sur le même sujet d’une autre manière Parmi tout ce qui doit enflammer davantage le cœur humain pour l’amour de Dieu, il y a la crucifixion de la passion qu’il a subie pour nous. Bernarda : « Surtout, c’est le calice de la passion, que tu as voulu boire pour moi, ô bon Jésus, qui t’a rendu aimable envers moi ». C’est le calice qui enivre de l’amour saint. Pierre, enivré par celui-ci, est retourné à Rome pour être crucifié. André, enivré ainsi, a couru à la croix préparée pour lui. Paul, enivré ainsi, a été continûment sur la croix pour le Christ. À propos de cela, Galates 2. J’ai été crucifié avec le Christ (Ga 2:19). D’où il est clair que la croix du Christ, par l’amour qu’elle provoque, a mené les saints à supporter la mortification de la croix pour le Christ. Et c’est bien ce qui mène nos pèlerins à s’exposer à la mort pour le Christ, et c’est pourquoi ils acceptent à juste titre et portent la croix comme s’ils disaient : « La glorieuse croix de notre Seigneur Jésus Christ m’a poussé à supporter ce labeur ». Aussi, comme on dit, on peut trouver dans la Geste d’Arthurb que c’était l’usage dans sa cour de ne pas manger avant que soient apportées les informations. Et voilà qu’un jour, quand la cour se trouvait au bord de la mer et s’inquiétait des rumeurs, un bateau qui naviguait sans voile ni timonier a accosté au rivage. Les cheCf. Bernard, Sermones super Cantica canticorum. 20, 2 (p. 115, 3-5). Étienne de Bourbon, Tractatus de diuersis materiis predicabilibus II, 5, 2 (p. 132, 283-294) ; David Trotter, La mythologie arthurienne et la prédication de la croisade. Pour une mythologie du Moyen Âge, Études rassemblées par L.  HarfLancner et D. Boutet, Paris, 1988, p. 155-177. a 

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valiers accoururent, ils y trouvèrent un chevalier qui était couché blessé, percé par une lance et inondé de sang. En le regardant, ils ont vu sa bourse qu’ils ont ouverte et ils y ont trouvé une lettre où le défunt portait plainte et réclamait justice à la cour. Il y nommait quelques personnes, qui l’avaient traité ainsi alors qu’il était innocent. Après la lecture de cette lettre en public devant toute la cour, tous étaient pleins de courage pour prendre les armes afin de venger ce chevalier innocent ainsi maltraité. Qu’est-ce que doit faire toute la foule de la chrétienté pour se venger des ennemis du Seigneur, crucifié tandis qu’il était innocent, blessé dans le bateau de la croix, percé de la lance, inondé de sang et qui crie ceci à la terre entière ? Job 16. O terre, ne couvre point mon sang. Et que mes cris ne trouvent pas l’endroit pour se cacher (Jb 16:19) ! Le cri, je dis, du sang qui parle plus fort pour la vengeance que le sang d’Abel, comme on le dit dans Hébreux 12a. Ceux qui veulent venger les injures faites au Crucifié, acceptent à juste titre la croix, parce que la crucifixion doit armer pour cela la piété des hommes. De même, comme on place des croix sur les routes pour montrer le vrai chemin, Dieu a ordonné que, par les tortures de la passion, on gagne le royaume céleste en le suivant. Ainsi dit Matthieu 8 [sic]. Si quelqu’un veut venir après moi, à savoir dans le paradis, qu’il se charge de la croix et qu’il me suive (Mt 16:24), à savoir à travers la voie de la passion et des tribulations vers le paradis. Ceux qui n’ont pas peur de s’exposer aux tribulations et aux tourments de ce chemin pour aller par là vers le ciel, prennent la croix, parce que c’est le chemin tout droit qui conduit au ciel.

Invitation 5 25

Il est alors clair, mes très chers, que la croix est donnée à nos pèlerins comme un signe que la crucifixion du Christ qui a mené les saints à supporter la mort pour lui, les mène à s’exposer à ces labeurs pour le Christ. Cf. Hugues de Saint-Cher, Postillae in universa Biblia. Iob 16, 19 (vol. 1, f. 418v). Cf. Hébreux 12:24. a 

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De même, comme un signe que c’est le Crucifié qui les mène en criant avec la voix du sang pour venger les outrages proférés contre lui. De même, comme un signe qu’ils sont sur la voie du paradis. Y a-t-il, je vous en conjure, quelqu’un parmi vous, qui serait motivé pour supporter ce labeur pour l’amour du Crucifié, qui voudrait venger autant que possible les injures faites à lui, qui voudrait aller directement au paradis ? Qu’il vienne, qui qu’il soit, et qu’il prenne la croix ! Chant

Sur le même sujet d’une autre manière. Comme le peuple juif a reçu la marque de la circoncision qui le distinguait des autres nations, de même les serviteurs du Christ ont un signe qui les distingue des serviteurs du Diable, c’est la croix. Le peuple du Diable est maintenant dans la joie et le désir, tandis que les vrais serviteurs sont maintenant dans la douleur. D’où Galates 5. Ceux qui sont au Christ ont crucifié leur chair (Ga 5:24). Pour cela, à ceux qui se préparent bien pour le service spécial et aimable de Jésus Christ, au soutien de la Terre sainte, est imposé le signe de la croix pour montrer qu’ils sont de sa famille particulière, qu’ils sont marqués de son sceau et qu’ils se distinguent des autres qui continuent à servir le Diable. De même, le signe de la croix a une vertu spéciale contre les tentations diaboliques des vices. D’où Augustina raconte que quand un grand personnage s’était épris de la vierge Justine, et qu’elle ne voulait point l’épouser, Cyprien, l’enchanteur chez qui cet homme avait cherché de l’aide, en invoquant différents démons, les a envoyés vers elle successivement en leur donnant l’apparence de personnes différentes pour la pousser à dire oui à cet homme. Mais quand elle sentait qu’elle était en train d’être émue par leurs paroles, elle faisait le signe de la croix et les démons s’évanouisCf.  Étienne de Bourbon, Tractatus de diuersis materiis predicabilibus II, 5, 7 (p. 155-156, 936-960) ; Honoré d’Autun, Speculum ecclesiae De exalt. s. crucis (col. 1004BD). a 

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saient en fumée. Origènea dit que la méditation de la croix avec zèle a cette immense vertu que si on la garde fidèlement dans le cœur pour en faire mémoire, toute l’armée du Diable s’enfuit. Si elle vaut tellement quand elle n’est que dans le cœur, elle doit valoir bien davantage si elle n’est pas seulement dans le cœur, mais qu’elle est fixée aussi dans le corps avec une dévotion convenable. L’Église fiche la croix dans ces bons pèlerins pour qu’ils soient protégés par la vertu de la croix de toute tentation du Diable qui les pousse à leurs anciens péchés. De même, le Diable vient d’habitude à l’heure de la mort pour torturer les âmes, mais l’Église promet à ces pèlerins que s’ils meurent sur ce chemin, ils ne connaitront ni la peine mortelle de l’enfer, ni même celle du purgatoire. Le signe de la croix leur est justement imposé, parce que c’est celle-ci qui détient de ce pouvoir. Ezéchiel 10 [sic]. Ne tuez pas ceux sur lesquels vous verrez le Thau (Ez 9:6).

Invitation 6

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Il est clair que ces bienheureux pèlerins sont marqués du signe de la croix, en signe qu’ils sont vraiment le peuple de Jésus Christ, en protection contre les tentations des vices d’aujourd’hui, et en défense contre les coups à venir des mauvais esprits. Qui voudrait montrer qu’il est de la famille du Christ, qui voudrait se munir contre les tentations présentes et qui voudrait éviter les peines futures, qu’il vienne et prenne le signe de la croix. Chant

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Cf. Rufin d’Aquilée, Origenes in Romanos 6, 1 (p. 457, 38-45).

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CHAPITRE 5 POURQUOI LA CROIX EST PORTÉE SUR LES ÉPAULES ?

Deuxièmement, il faut remarquer que parfois on porte quelque chose sur les épaules en guise de compensation, comme lorsque deux compagnons sont en route, et l’un porte un jour le manteau ou bien quelque autre bagage de l’autre, et le jour suivant, l’autre porte la charge du premier de la même manière. Il faut faire ainsi avec la croix. Le Seigneur portait notre croix sur les épaules, à savoir, la dette de nos péchés, sur sa route. Jean 19. Portant sa croix, il arriva au lieu du Calvaire (Jn 19:17). Il est donc juste que nous portions la croix pour lui sur nos épaules, et non seulement en l’ayant dans le cœur par la foi ou dans nos paroles par la confession, mais dans notre corps pour supporter les peines à l’exemple de Paul qui dit aux Galates, dernier chapitre : Je porte dans mon corps les stigmates de la passion de notre Seigneur Jésus Christ (Ga 6:17). Parfois on porte quelque chose sur les épaules à cause de son poids, comme un pauvre marchand porte son fardeau sur les épaules avec un bâton. Ainsi le Seigneur porta le poids de nos péchés sur les épaules avec le bâton de la croix. 1 Pierre 2. Lui qui a porté lui-même nos péchés en son corps sur le bois (1 P 2:24). Alors, les pèlerins fidèles portent la croix sur leurs épaules avec dignité, comme s’ils disaient : « Comme le Christ a porté le poids de mes péchés avec le bois de la croix sur les épaules pour moi, moi aussi, j’ai pris le poids de cette croix pour lui », selon ce qu’il a dit dans

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Chapitre 5

Matthieu 11. Prenez mon joug sur vous (Mt 11:29). Qui en effet pourrait nier que la prise de la croix soit un joug pesant ? Parfois on porte quelque chose sur les épaules pour l’honneur, comme autrefois on portait l’Arche du Seigneur sur les épaules ou comme pendant les processions chrétiennes les corps des saints sont portés sur les épaules des fidèles. Et on dit aussi que le roi de France, aidé de ses frères, a porté sur ses propres épaules les saintes reliques de la couronne et de la croix du Seigneur dans sa chapellea. Ainsi les fidèles croisés qui veulent honorer selon leurs forces la croix du Seigneur, dont le prix a payé leur rédemption, et glorifier Dieu dans leur corps conformément à la précepte de l’apôtre (cf. Ga 6:17), portent son signe sur les épaules pour l’honneur du Christ, à l’exemple de saint Luc dont on dit qu’il a constamment porté la mortification de la croix dans son corps pour l’honneur de Dieub. Il y a donc trois raisons de porter ce signe sur les épaules : pour la compensation, pour montrer le poids et pour l’honneur du Christ.

Invitation 7

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Mes très chers, voilà que viendra le temps et viendra bientôt où le fils de Dieu viendra pour le Jugement, et avec les autres signes de sa passion apparaîtra le signe de sa croix, comme il est dit dans l’Évangile. Tout œil le verra (Ap 1:7) et entendra le reproche de la passion qu’il fera en disant à sa créature, c’est-à-dire l’homme : « Qu’est-ce j’ai pu te faire de plus ? ». Heureux celui qui pourra alors se glorifier et dire : « Seigneur, tu as porté la croix pour moi de Jérusalem jusqu’au lieu du Calvaire qui était proche et j’ai porté la croix pour toi depuis ma terre très lointaine par mer et par terre entre tant de dangers. Toi, Seigneur, tu as porté le poids de mes péchés avec le bois de la croix et moi, pour toi, j’ai pris la charge du vœu de la croix, une charge, oui, considérable même si elle ne l’est a  b 

Voir p. ex. J. Le Goff, Saint Louis, Paris, 1996, p. 165-172. Cf. Corpus orationum 3180 (vol. 160D).

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Pourquoi la croix est portée sur les épaules ?

pas autant que la tienne, accompagnée cependant de beaucoup de dépenses, de labeurs et de dangers qu’il fallait traverser. Toi, Seigneur, tu as supporté la confusion pour moi en portant ta croix, et j’ai glorifié et honoré pour toi ta croix bénie autant que je peux en la portant sur mes épaules devant les juifs, devant les Sarrasins et devant tous les païens ». Heureux celui qui prépare ainsi ses paroles pour le Jugement. Qui veut se préparer ainsi, qu’il vienne et qu’il prenne cette croix bénie. Chant

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CHAPITRE 6 POURQUOI LA CROIX EST PORTÉE SUR L’ÉPAULE DROITE ?

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Troisièmement, il faut noter que certains, tout en s’approchant de la croix et en la portant, restent encore dans leurs péchés, faisant mal leur pénitence. Ils sont comme le mauvais larron qui a été crucifié avec le Seigneur, mais ne s’est pas repenti de ses péchés, et ainsi, bien que mourant sur la croix, il est allé en enfer. Il en est d’autres qui, en prenant la croix, laissent les péchés et font la pénitence avec dignité, ceux-ci sont comme le bon larron qui, crucifié avec le Christ et s’étant repenti, accéda le même jour au paradis avec le Christ. Tels doivent être les bons croisés, et ainsi on leur met la croix du côté droit, ce qui signifie le bien dans les Écritures sacrées, et non à gauche, ce qui signifie le mal, pour montrer par cela qu’ils doivent porter la croix dans l’état de la bonne pénitence, non mauvaise. Certains qui ont fait le vœu de la croix, l’accomplissent mollement, parfois ils font la pénitence, ils se préparent parfois tard, parfois mal et parfois quand ils ont pris le chemin le font avec tristesse, parfois soupirent après un retour au plus vite, parfois se comportent dans la bataille de manière vile. Les bons croisés ne doivent pas faire ainsi, mais ils doivent poursuivre virilement ce qu’ils ont bien commencé, et être forts dans la guerre du Seigneur en se battant s’il le faut jusqu’à la mort pour la justice, à l’exemple des fils de Mattathias, à qui, quand ils allaient combattre contre les Gentils, leur père a dit. 1 Maccabées 2. Vous donc, mes fils, pre-

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Pourquoi la croix est portée sur l’épaule droite ?

nez courage et agissez virilement pour la loi (1 M 2:64). En signe qu’ils doivent courageusement accomplir le vœu de la croix, le signe de leur croix est imposé à droite, qui est par nature la partie plus forte, et non à gauche, qui est par nature plus faible. Ainsi, dans le siècle à venir, Dieu tient deux parties, à savoir, la droite, qui est celle des bons, et la gauche, celle des mauvais. Matthieu 25. Et il mettra les brebis à sa droite, et les boucs à sa gauche (Mt 25:33). En outre, c’est le Christ qui est venu à la droite de Dieu, par le mérite de sa croix. Luc 22. En vertu de quoi, c’est-à-dire par le mérite de la passion, le Fils de l’homme sera assis à la droite de la puissance de Dieu (Lc 22:69). Sans aucun doute, les bons croisés viendront aussi dans la même partie bienheureuse. À propos de cela il est dit dans Matthieu 8 [sic]. Si quelqu’un veut venir après moi, c’est-à-dire dans l’endroit où je vais, qu’il se charge de la croix et qu’il me suive (Mt 16:24 / Mc 8:34). Ainsi, la croix leur est justement imposée à droite pour signifier qu’elle dirige vers la droite de Dieu le Père.

Invitation 8 Voilà, mes très chers, il est clair que le signe de la croix est imposé sur la partie droite, comme a fait aussi Constantin, qui, en se dirigeant pour la bataille, portait ce signe fabriqué en or dans le bras droit, selon l’Histoire ecclésiastiquea, parce que les croisés doivent être dans le bon état de pénitence qui est désigné par la droite, et parce qu’ils doivent poursuivre fortement ce qu’ils ont commencé, ce qui est marqué par la force de la droite, et en signe que cette croix conduit vers la droite de Dieu le Père. Celui qui voudrait refuser le côté gauche avec ses maux dans le futur et venir du côté droit bienheureux, qu’il vienne à la croix en faisant dignement acte de contrition pour ses péchés et qu’il réalise virilement le vœu de la croix, et vienne ainsi vers la droite de Dieu le Père où il demeurera sans fin avec son fils Jésus Christ et la société des saints anges. Chant a 

Cf. Eusèbe de Césarée, Historiae ecclesiasticae 9, 8, 15 (p. 829).

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CHAPITRE 7 POURQUOI PREND-ON LA CROIX PUBLIQUEMENT ?

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Quatrièmement, il faut noter que certains, bien qu’ils offensent beaucoup et publiquement et entre-temps font pénitence, pourtant ne montrent jamais manifestement les fruits de la pénitence. Cela ne semble pas suffisant. S’il n’a pas suffi à Paul, après qu’il ait été publiquement incarcéré, d’être libéré secrètement, comme on le trouve dans Actes 16 (Ac 16:37), comment celui qui a offensé Dieu publiquement peut-il dignement le satisfaire, s’il ne montre jamais les signes d’une pénitence manifeste ? C’est pourquoi il est dit, à l’inverse, dans Ecclésiastique 20. Qu’il est bon à celui qui s’est corrigé de témoigner la repentance ! (Si 20:4). De même, comme celui qui commet des péchés publiquement, est digne d’autant de morts qu’il a donné de mauvais exemples de vie aux autres, comme le dit Grégoirea, de même il est juste que celui qui fait du bien publiquement, s’il le fait avec bonne intention, en acquiert plus de mérite pour lui-même, parce qu’il pousse les autres à bien agir. C’est pourquoi on dit à propos [de la tribu] de Juda qu’elle a acquis la dignité royale, car tandis que les autres tremblaient, en présence de tout le monde, elle est entrée la première dans la mer Rouge, poussant les autres à traverser après elleb. Cf. Grégoire le Grand, Regula Pastoralis 3, 4 (p. 276). Détail absent de la Bible, mais présent dans les commentaires. Cf. Vincent de Beauvais, Speculum historiale 2, 7 (p. 49) ; Hugues de Saint-Cher, Posa 

b 

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Pourquoi prend-on la croix publiquement ?

De même, le Christ avait quelques disciples secrets, comme Joseph, mentionné dans Jean 19 (cf. Jn 19:38), et quelques disciples manifestes. Heureux sont-ils ! Pourtant, quiconque aura honte de lui, le Christ aura honte de lui, quand il viendra dans sa majesté, et dans celle du Père et des saints anges (Lc 9:26), comme il est dit dans Luc 9. Qui l’aura confessé au milieu de cette génération adultère et pécheresse, il le reconnaîtra, lorsqu’il viendra dans la gloire de son Père, avec ses anges (Mc 8:38), comme il est dit dans Marc 8.

Invitation 9 Il est clair, mes très chers, que le bien qui est fait publiquement est très efficace pour une plus juste satisfaction des péchés, pour plus de mérites dans le présent et pour plus d’honneur dans le futur. Celui qui désire tout cela, qu’il vienne et qu’il prenne publiquement le signe de la croix, motivé par l’amour et l’exemple de celui qui a porté la croix devant toute Jérusalem publiquement et a été suspendu sur la croix publiquement devant tout le monde. Chant

tillae in universa Biblia. Ex. 14, 22 (vol. 1, f. 83v) ; Pierre le Mangeur, Historia Scholastica. Ex. 31 (col. 1158).

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CHAPITRE 8 POURQUOI LA CROIX EST IMPOSÉE PAR LA MAIN DE L’ÉGLISE ?

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Cinquièmement, il faut noter que l’Église a deux glaives, à savoir le spirituel et le matériel. Luc 22. Seigneur, voici deux épées (Lc 22:38). Le premier, elle l’utilise toujours, le second – pas toujours. C’est pourquoi, quand Pierre, pris de trouble, l’a utilisé, le Seigneur lui a dit, Jean 18 : Remets ton épée dans le fourreau (Jn 18:11). Pourtant, bien qu’il soit rarement ou jamais utilisée par les personnes ecclésiastiques, elle autorise les autres à l’utiliser. Luc 22. Que celui qui maintenant n’a pas d’épée, vende sa tunique et achète une épée (Lc 22:36). Pourtant, bien que l’autorité ecclésiastique admette l’emploi du glaive au sens matériel, il n’est pas normal de le faire en dehors de cas vraiment raisonnables. À propos de cela, il faut noter qu’elle le fait parfois à cause de la sévérité du rébellion, quand certains continuent de se rebeller après les exhortations et les condamnations de l’Église dans des grandes et dangereuses affaires, de sorte que, si la crainte de Dieu ne les détourne pas du mal, la peine temporelle les arrête au moins, selon ce qu’il est dit dans Deutéronome 17 de cet homme qui, par orgueil, n’écoutera pas le sacrificateur : il faut qu’il meure (Dt 17:12). Parfois elle le fait à cause de l’infection par l’erreur, comme contre les hérétiques qui, comme un membre pourri infectent le corps de l’Église par leurs erreurs, et doivent être coupés par le fer. De plus, les Sarrasins sont bien pires que les rebelles, parce que les rebelles écoutent au moins ce que l’Église prescrit, bien

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Pourquoi la croix est imposée par la main de l’Église ?

qu’ils ne le fassent pas, mais les Sarrasins décapitent tous ceux qui veulent les éloigner de leur erreur. Ils sont pires que les hérétiques, parce que les hérétiques infectent seulement l’âme, tandis que ceux-ci infectent autant qu’ils peuvent les âmes et tuent les corps des chrétiens. En plus, les juifs sont tolérés par l’Église pour trois raisons. La première est que selon les Écritures, il existe un espoir de les convertira. La suivante est qu’ils aident notre foi, parce que selon les commentaires des fidèles, nous voyons en eux l’accomplissement des Écrituresb. La troisième est qu’ils ne dirigent pas les armes contre nous et ne peuvent pas le faire. Pourtant, aucun texte ne parle de la conversion des Sarrasins, leur vie ne nous aide aucunement non plus, mais ils scandalisent les faibles. Parmi les peuples infidèles, ils sont ceux qui s’acharnent le plus à nous attaquer sans cesse avec leurs armes, d’où il ressort qu’aucune des raisons pour lesquelles les juifs sont tolérés, ne vaut pour eux. En outre, on parle dans Matthieu 22 d’un roi qui fit les noces de son fils et envoya ses serviteurs pour appeler les invités aux noces. Parmi les invités, certains n’ont pas voulu venir, et ce sont les juifs qui restent seulement par l’obstination de leur volonté. Les autres ont négligé l’invitation, et ce sont les idolâtres, qui restent négligents, parce qu’ils ne font rien de ce qu'ils sont capables de faire. Les Voir p.  ex. : B.  Blumenkranz, Juifs et chrétiens dans le monde occidental. 430-1096. Paris, 1960, p. 152-153. b  D’une part il peut bien s’agir de l’idée d’Augustin disant que les juifs ne doivent pas être tués, parce qu’ils sont des témoins des événements de l’Ancien Testament, et, entre autres, des prophéties de la venue du Christ (M. R. Cohen, Under Crescent and Cross. The Jews in the Middle Ages. Princeton, 1994, p. 20-21 ; L. B. Glick, Abraham’s Heirs. Jews and Christians in Medieval Europe, Syracuse, 1999, p. 24 ; A. S. Abulafia, Christians and Jews in the Twelfth-Century Renaissance, London, New-York, 1995, p. 65-66). D’autre part, il n’est pas exclu que derrière ceci il y a aussi l’idée que les juifs sont dispersés comme punition pour la crucifixion du Christ et qu’ils servent à en témoigner. Humbert en parle dans son Opusculum tripartitum : « Item si de mundo deleti essent, non ita visibiliter appareret, quod de eorum reprobatione dicunt scripture, sicut apparet modo » (Humbert de Romans, Opusculum tripartitum, 1-15, p. 195). D’ailleurs, formulée plus clairement la même idée peut être trouvée dans la lettre 363 de Saint Bernard relative à la deuxième croisade (Bernard von Clairvaux, Sämtliche Werke lateinisch/deutsch, vol. III, Innsbruck, 1990, p. 316) : « Propter hoc [Dominicam passionem] et in omnes dispersi sunt regiones, ut dum iustas tanti facinoris poenas luunt ubique, testes sint nostrae redemptionis ». a 

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Chapitre 8

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autres ont tué ses serviteurs, et ce sont les Sarrasins, qui attaquent violemment les serviteurs de Dieu. Il est dit ensuite dans le texte que le roi, en colère non pas contre ceux qui n’ont pas voulu, non pas contre les négligents, mais contre ces homicides, a envoyé ses armées, les a anéantis et a brûlé leurs villes avec le feu (cf. Mt 22:2-7). On tient ainsi une autorité en faveur de l’envoi d’une armée contre eux. Il est alors clair qu’il est plus juste d’envoyer l’armée contre eux que contre des rebelles à l’Église ou des hérétiques. Il est aussi clair que vis-à-vis d’eux, il n’y a pas de raison de les tolérer comme les juifs. Il est aussi clair que l’autorité de l’Évangile va dans le même sens et ce sont les raisons de l’Église pour accorder le droit d’envoyer l’armée contre eux. L’Église donne non seulement cette autorité, mais aussi l’indulgence de tous les péchés. De la sorte, comme les martyrs, par la vertu du sang versé pour le Christ, ont été complètement blanchis, ainsi par la force de cette abondante indulgence, les bons pèlerins, non seulement mourants, mais aussi vivants, reçoivent sur la terre comme au ciel la rémission complète de tous péchés – petits et grands, cachés et manifestes, charnels et spirituels, de jour et de nuit, connus et inconnus – par l’autorité accordée de Dieu à Pierre pour que ce qu’il délierait sur terre, soit délié dans le ciel (Mt 16:19).

Invitation 10 Et voilà, mes très chers, pourquoi il est bien que la croix bénie se prenne de la main de l’Église, parce que l’Église très sainte, dont l’autorité est plus grande que celle d’un empereur ou d’un roi quelconque, fournit l’autorité pour cette guerre et a des raisons très efficaces pour la donner, et, pour que l’affaire soit plus efficace, elle confère l’indulgence de tous les péchés. Qui veut éviter dans le futur les tortures de l’enfer ou du purgatoire, et qui veut revenir de la saleté des péchés à la propreté du baptême, et s’envoler avec les saints martyrs sans obstacles vers la patrie bienheureuse, qu’il vienne et qu’il prenne cette croix très bienheureuse. Chant

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CHAPITRE 9 POURQUOI PERSONNE N’EST FORCÉ ?

Sixièmement, il faut noter que les seigneurs du monde forcent les leurs à les suivre. Mahomet lui aussi a forcé les hommes à le suivre par le glaive. Le Christ ne fait pas ainsi. Il n’a forcé personne à le suivre par la croix, il a accueilli seulement les volontaires. Luc 9. Si quelqu’un veut venir avec moi, qu’il renonce à lui-même, qu’il se charge de sa croix, et qu’il me suive (Lc 9:23). De même, dans le Deutéronome 20, il est dit : Qu’en est-il de l’homme qui a peur et manque de courage ? Qu’il s’en aille et retourne dans sa maison, c’est-à-dire, de l’armée, de peur qu’il n’ébranle le cœur de ses frères, comme il est lui-même saisi de crainte (Dt 20:8). Il s’ensuit que seuls les hommes vaillants sont bons dans la bataille. Comment quelqu’un pourrait-il être vaillant dans ce qu’il fait à contrecœur ? Il est donc clair qu’il n’est pas utile d’envoyer les réfractaires à la bataille. C’est pourquoi on dit, au contraire, dans le Livre des Juges 5. Vous qui parmi les enfants d’Israël avez exposé spontanément vos vies au péril, bénissez le Seigneur (Jg 5:2) ! De même, comme dit l’autorité, « les services forcés ne plaisent pas à Dieua », et pour qu’ils eussent acceptés, ils doivent être volontaires. C’est pourquoi David a dit à son fils Salomon, 1 Paralipomènes 28 : Sers-le avec un cœur parfait et une pleine volonté (1 Ch 28:9). a 

E.g. Pierre le Chantre, Verbum abbreuiatum B 2, 15 (p. 660, 23-25).

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Chapitre 9

Il est donc clair que personne n’est forcé à prendre la croix, et selon l’exemple du Seigneur qui n’a forcé personne, et en raison de l’utilité de la guerre, parce que ceux-là ne sont pas utiles dans la bataille, et parce que la récompense est plus considérable quand le service est gracieux.

Invitation 11

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Voilà, mes très chers, la merveilleuse bienveillance de notre Seigneur. Tandis que nous sommes obligés de le servir de toute manière, il ne nous force pas dans une telle nécessité, mais cherche seulement notre plus grande utilité dans ce service, pour que nous soyons mieux récompensés, et il recherche seulement les volontaires. Etonnante bêtise de ceux qui refuseront leur service à un Seigneur si courtois ! Vous, très chers, ne soyez pas bêtes à l’égard du Seigneur pour ne pas le provoquer violemment, comme Nabal fit bêtement avec David en le provoquant violemment. 1 Rois 25 (cf.  1 S 25). Mais pour l’amour de celui qui s’est volontairement offert pour nous sur l’autel de la croix, venez vers la croix, l’âme prompte et volontaire. Chant

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CHAPITRE 10 DE LA PREMIÈRE INVENTION DE LA PRISE DE LA CROIX

À propos de la première invention de la prise de la croix, il faut noter que, comme on sait par l’Histoire Transmarinea et certaines autres histoires, un ermite nommé Pierre, originaire de France, mû par sa dévotion envers les lieux saints, visita ces lieux. Comme il passait la nuit dans la ville sainte, en prière dans le temple, le Seigneur lui apparut en se plaignant que ses fils chrétiens permettaient que cette terre lui fût enlevée pour longtemps de son héritage. Depuis le temps de Mahomet se sont écoulés plus de trois cents ans pendant lesquels ces lieux étaient livrés aux mains des infidèles et que le petit nombre des chrétiens qui y restaient, vivait dans l’esclavage et menait une vie dure et misérable. Ainsi, le Seigneur qui lui est apparu, lui imposa d’aller chez le pape Urbain, qui régnait alors, et de lui dire cela. Après l’avoir fait, ledit Pierre, en voyageant à travers plusieurs pays, sollicita beaucoup de grands et petits gens en faveur du soutien à la Terre sainte. Le pape, venant en France en personne, célébra un concile à Clermont en Auvergne en l’année 1095. Plein du zèle du christianisme, entre autres bonnes choses qu’il proposa, il exposa la désolation de la Terre sainte en exaltant tout le monde à venir à son secours, et en ordonnant que ceux qui voudraient venir au secours, prennent le signe de la croix. a 

Cf. Jacques de Vitry, Historia orientalis. 16 (p. 160-162).

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Chapitre 10

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En ce temps, il y eut une telle dévotion pour la prise de la croix et tellement de gens de toute la nation qui s’appelle chrétienne de ce côté de la mer, de l’un et de l’autre sexes, de tous les âges et de tous les statuts, ont pris la croix, comme le dit Foucher de Chartresa, qui était personnellement dans l’armée et qui a écrit ce qu’il a vu de ses propres yeux : les uns couraient prendre la croix, et se faisaient des croix d’or, les autres en soie ou d’autres couleurs convenables qu’ils portaient sur eux-mêmes. Et quand l’armée fut rassemblée en Grèce, on estimait qu’il y avait 600 000 guerriers, excepté les femmes, les enfants, les moines, les clercs et les autres inaptes pour la bataille. Pourtant, si tous ceux qui quittèrent leur maison y étaient parvenus, il y aurait eu presque six millions de guerriers. Par eux ont été pris Antioche, Jérusalem, et Acre et tous les autres lieux de la Terre sainte ont été repris, bien qu’après nous en perdîmes une grande partie à cause de nos péchés et de plusieurs revers. Pour savoir pourquoi le pape Urbain a ordonné que l’armée des chrétiens prenne la croix contre les Sarrasins, il faut noter que la mémoire de la passion du Seigneur pousse à se battre avec cœur et persévérance pour la foi. D’où on lit dans l’Histoire tripartiteb que Constantin a fait porter devant son armée le signe de la croix et surtout devant les armées en action, afin que la mémoire de la passion du Seigneur anime les guerriers. 1 Maccabées 6. Ils montraient aux éléphants du sang de raisin et des mûres, afin de les exciter au combat (1 M 6:34). De même, elle arme contre les pouvoirs adverses, et c’est pourquoi le même Constantin fit mettre sur ses armes aussi que sur les armes de ses soldats le signe de la croix, ce qu’on trouve dans la même Histoirec. 1 Pierre 4. Ainsi donc, Christ ayant souffert dans la chair, vous aussi armez-vous de la même pensée (1 P 4:1). De même, elle donne confiance en la victoire. C’est pourquoi au même Constantin, soucieux de la bataille qui s’approchait, après avoir vu dans le ciel le signe de la croix, il fut dit par les anges a  Cf. Foucher de Chartres, Historia Hierosolymitana 1, 4 (p. 140) ; 1, 10 (p. 181-184). b  Cf. Cassiodore, Historia ecclesiastica tripartita. 1, 5, 4 (p. 18, 27-34). c  Cf. Cassiodore, Historia ecclesiastica tripartita. 1, 9, 11 (p. 27, 80-82).

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De la première invention de la prise de la croix

pendant son sommeil : « Avec ceci tu vaincras », comme il est raconté dans l’Histoire ecclésiastiquea, parce que dans chaque combat sont nécessaires l’ardeur, les armes et la confiance dans la réussite – tout ce que favorise la mémoire de la passion. À juste titre, ledit pape a donc ordonné que l’armée soit marquée de la croix, pour que par cela la passion du Seigneur soit rappelée à la mémoire qui favorise tout cela.

Invitation 12 Voilà, mes très chers, vous voyez que le pape a été ému par la parole d’un seul homme et par lui a été motivée toute l’Église, et, comme vous avez entendu, il y a eu un immense mouvement de prise de la croix dans toute notre chrétienté. Maintenant, le pape envoie un cardinal, ainsi que de nombreux envoyés, et ensuite de nombreuses lettres avec des indulgences et des privilèges d’utilité inestimable. N’endurcissez pas vos cœurs, mes très chers, mais émus et animés par le sang du Christ et des saints qui a été versé dans la Terre sainte, acceptez les armes de Dieu, c’est-à-dire la croix bénie, et, confortés non par vos forces, mais par la puissance de celui dont la main n’est pas raccourcie, сroyez que par la vertu de la croix le Seigneur Jésus vous donnera la victoire sur ses ennemis. À lui l’honneur et le pouvoir pour les siècles des siècles. Chant

a 

Cf. Eusèbe de Césarée, Historiae ecclesiasticae 9, 8, 15 (p. 827, 33 - p. 829, 2).

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CHAPITRE 11 DU ZÈLE DE L’HONNEUR DIVINQUI DOIT CONDUIRE À LA PRISE DE LA CROIX

À propos des motifs de la prise de la croix, il faut noter qu’il y en a sept qui doivent inciter à cela spirituellement. Le premier est le zèle pour l’honneur du Seigneur. Le deuxième est le zèle pour la loi chrétienne. Le troisième est la charité fraternelle. Le quatrième est la dévotion envers la Terre sainte. Le cinquième est la condition de la guerre. Le sixième est l’exemple des prédécesseurs. Le septième sont les grâces de l’Église. Premièrement, il faut noter qu’on voit que le Seigneur universel, parmi toutes les terres sous sa domination, semble avoir particulièrement aimé la Terre sainte, ce dont il existe trois signes. Le premier est que c’est sur cette terre qu’il a vécu la plupart du temps, comme un roi dans le manoir qu’il apprécie le plus. C’est ici et presque nulle part ailleurs, lorsqu’il habita en ce monde, qu’il a vécu près de trente-trois ans. Le deuxième est qu’il a agi avec beaucoup d’assiduité pour garder cette terre en bonne condition, comme les grands prennent beaucoup de soins pour améliorer les lieux qu’ils apprécient le plus. C’est pourquoi il y a d’abord envoyé des prophètes, ensuite il est venu en personne, puis, revenant vers son père, il a laissé là-bas les apôtres et disciples à cette fin.

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Du zèle de l’honneur divin

Le troisième est qu’il a spécialement élu ce lieu pour y tenir les réunions de sa cour, comme un roi réserve pour cela ses lieux préférés. Ici en effet il tint souvent des assemblées avec ses apôtres et disciples, ici il a ressuscité de l’enfer et de là est monté au ciel et, comme on croit, il y avait avec lui une grande multitude de ceux qui avaient été libérés de l’enfer et d’anges descendus du ciel ; c’est ici, dans la vallée de Josaphat, qu’à la fin du monde aura lieu le jour de la grande assemblée (cf. Jl 3:2,12) déterminé par le prophète Joël 3. Or, par la suite, les Sarrasins l’ont chassé de sa terre si bien aimée. On lit dans l’Histoire ecclésiastiquea qu’avant leur venue il y a eu des évêques chrétiens à Jérusalem pendant presque six cents ans. Et là-bas aussi bien que dans les alentours le Christ était honoré et adoré. Pourtant, ce que ni les juifs ni même les Gentils n’avaient fait, les pires Sarrasins l’ont fait en chassant le Christ pour qu’il n’y soit pas honoré selon l’habitude. Il y déjà plus que six cents ans. C'est comme Absalom qui avait chassé son père David de Jérusalem, ville bien aimée (cf. 2 S 15). 2 Rois 15. Eux aussi pourtant sont les fils du Christ par la création. De même, ils ne l’ont pas seulement chassé, mais ils y ont aussi effacé son nom et sa mémoire. Là, où il a été annoncé par les prophètes, glorifié par le chant des anges, et prêché par le chœur des apôtres, personne ne prêche [sa doctrine], ses louanges ne résonnent plus, et personne n’ose exalter son nom en public. Ils n’ont pas seulement effacé son nom, mais ils y ont aussi exalté le nom de son pire adversaire, l’abominable Mahomet. Selon leur loi, dans les endroits occupés par eux, ils font acclamer et glorifier le nom de Mahomet plusieurs fois par jour en public. Quel outrage ! Quelle honte devant Dieu, qui a été ainsi expulsé de sa terre bien aimée, dont le nom a été effacé, et une idole diaboliqueb de son adversaire dans cette terre très sainte érigé. Je n’ai pas pu identifier cette source. Il s’agit d’une opinion répandue surtout dans la chanson de geste et aussi dans des chroniques des croisades disant que les musulmans ont des idoles, et que parmi ceux-ci il y a une idole de Mahomet. Voir : S. C. Akbari, Idols in the East. European Representations of Islam and the Orient, 1100-1450, Ithaca and London, 2009, a 

b 

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Chapitre 11

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Quelle gêne et quelle confusion pour les chrétiens si leurs cœurs ne sont pas touchés quand on a fait un tel outrage à Dieu, depuis si longtemps et encore aujourd’hui. Le Seigneur peut certainement se venger de tout en un instant, mais pour leur donner l’occasion d’une glorieuse récompense il veut éprouver ses fidèles, et connaître ceux qui sont touchés par l’ignominie faite à lui. Et il dit : Qui se lèvera pour moi, c’est-à-dire, pour mon honneur, contre les méchants, c’est-à-dire, pour venger l’outrage fait à moi par eux (Ps 93:16) ? Observez avec attention, mes chers, quel zèle avaient les anciens pour venger les outrages faits à Dieu ! Dans Exode 22 [sic], on lit : Quand le peuple d’Israël a érigé en guise de Dieu un veau de métal fondu, seulement en quelques jours, Moïse, enflammé du zèle de la vengeance, se dressa à la porte du camp et dit : « Que celui qui est pour le Seigneur se joigne à moi ! » (Ex 32:26). Et les lévites, réunis autour de lui, ont tué environ 20 milliers de coupables de ce crime, et ils n’épargnèrent ni le frère, ni l’ami, ni le prochea. On lit aussi dans 3 Rois 18 qu’Élie a fait tuer quatre cent cinquante prophètes de Baal à côté du torrent de Kison, parce qu’il avait le zèle du nom divin. D’où l’on lit au chapitre 19 : J’ai déployé mon zèle pour le Seigneur, le Dieu des armées (1 R 19:10). De même, on lit dans 4 Rois 10 que Jéhu, roi d’Israël, a fait rassembler tous les prophètes, serviteurs, officiers et prêtres de Baal dans son temple et, en prenant soin qu’aucun des serviteurs de Dieu ne soit avec eux, il les a fait tuer. Ils ont aussi mis en pièces la statue de Baal et, en détruisant son temple, en ont fait un cloaque. Il a fait tout cela par zèle de l’honneur divin. C’est pourquoi avant de le faire, il a dit à Jonadab qui était auprès lui dans son char : Viens, et tu verras mon zèle pour le Seigneur (2 R 10:16). Le même chapitre.

p. 203-235 ; J. Tolan, Mahomet l’Européen. Histoire des représentations du Prophète en Occident, Paris, 2018, p. 35-68. a  Cf. Exode 32:26-28 (tria milia). Certains manuscrits de la Bible donnent le chiffre de vingt trois mille, ce qui évoque aussi Pierre le Mangeur dans son Historia Scolastica. Cf. Pierre le Mangeur, Historia Scholastica. Ex. 32, 28 (col. 1190). Voir aussi la Glossa Ordinaria et les Postillae de Hugues de Saint Cher.

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Du zèle de l’honneur divin

Invitation 13 Voilà, mes très chers, quel zèle avaient les anciens pour venger les outrages faits à Dieu. L’outrage de l’érection de l’idole de Mahomet contre lui, qui dure depuis plus de six cents ans, est plus grave que l’outrage de l’érection de l’idole du veau qui dura seulement quelques jours. De même, ce faux prophète a séduit et ne cesse de séduire beaucoup plus de monde que n’ont fait à l’époque les prophètes de Baal. De même, il est clair que ceux qui le servent sont beaucoup plus opposés au Christ que les ministres de Baal. De même, mes chers, prenez en considération que les serviteurs fidèles de David, en menant la bataille contre le fils-traître Absalom, ont glorieusement triomphé de lui et ont ramené le roi à Jérusalem en grand honneur. 2 Rois 18. S’il y a des hommes dont le cœur est touché par l’outrage fait à Jésus Christ, s’il en y a qui veulent aider à ramener leur roi Jésus Christ dans sa terre bien aimée, s’il y en a qui veulent se battre contre ceux qui sont méchants envers lui, qu’ils se lèvent et qu’ils prennent le signe de la croix en espérant et croyant que, une fois les ennemis vaincus par sa vertu, une fois vengé l’outrage fait au Roi de gloire, alors le fils de Dieu Jésus Christ sera encore honoré dans cette terre bénie et sainte qui était autrefois spécialement aimée par lui. Chant

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CHAPITRE 12 DU ZÈLE DE LA LOI CHRÉTIENNE POUR LA MÊME CHOSE

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Deuxièmement, il faut noter que depuis l’origine du monde et jusqu’à présent, ont été données trois lois de vie. La première a été la loi juive donnée par Moïse. La deuxième a été la loi chrétienne donnée par le Christ. La troisième a été la loi sarrasine rédigée par Mahomet dans un livre qui s’appelle le Coran. La première était bonne pour son temps, c’est-à-dire, jusqu’à la venue de la deuxième. Comme l’ombre de la nuit s’en va quand le jour vient, de même cette loi, qui était une ombre, a cédé à la venue de la lumière qui est le Christ selon ce que dit l’apôtre, Hébreux 9. Les lois valent jusqu’à l’époque de la correction (He 9:10). La troisième n’a jamais été bonne et ne le sera jamais. La deuxième fut toujours bonne et le sera toujours. Sans elle, la loi juive n’aurait pas eu de valeur à l’époque où elle valait quelque chose, parce que personne n’a été sauvé à l’époque sans avoir cru en Christ au moins d’une manière obscurea. La loi chrétienne est donc au-dessus de toutes, parce qu’elle est bonne, ce que la loi sarrasine n’est pas, et parce qu’elle est bonne de manière immuable, ce que la loi juive Apparemment, il s’agit ici de l’idée que les bons, les prophètes et les patriarches de l’Ancien Testament ont été sauvés par le Christ descendu aux enfers, bien qu’ils n’aient pas pu croire en lui, puisqu’ils sont nés avant. Il a été considéré qu’ils avaient quand même une sorte de foi implicite. Voir : R. V. Turner, « Descendit Ad Inferos : Medieval Views on Christ’s Descent into Hell and the Salvation of the Ancient Just », Journal of the History of Ideas, 27 (1966), p. 173-194. a 

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Du zèle de la loi chrétienne

n’est pas, et parce que sans elle rien dans les autres lois n’avait de valeur quand elles valaient quelque chose. La loi sarrasine est la plus vile. Les autres sont transmises par des hommes, l’un saint et l’autre très saint, à savoir par Moïse et par le Christ. Or cette loi est transmise par le très vil ribaud Mahomet. Il est glorifié dans sa loi pour le fait qu’il a un pouvoir sexuel supérieur à celui de 40 hommes. De même, quand il est tombé amoureux de la femme d’un autre alors qu’il avait interdit l’adultère dans sa loi, il a inventé qu’en tant que prophète le plus grand, il a reçu de Dieu le privilège que si une quelconque femme mariée veut faire l’amour avec lui, il pouvait le faire pour rien, sans péché. Et il l’a publié, en disant que cela lui a été révélé, pour pouvoir ainsi attirer vers son plaisir celle-ci ou d’autres femmes plus facilement. Et bien que l’on puisse lire beaucoup d’autres choses abominables de sa vie, ces deux faits devraient déjà suffire à chaque cœur humain pour que lui de son vivant et son image après sa mort soient lapidés d’excréments. De même, les autres lois ne contiennent rien de malhonnête, et surtout la loi chrétienne contient la plus grande honnêteté. En revanche, la loi de ce ribaud, bien qu’elle contienne certaines choses honnêtes qui sont extraites des lois de Moïse et du Christ pour ainsi être mieux crue, contient beaucoup de choses malhonnêtes. Elle permet en effet à l’homme d’avoir plusieurs femmes et plusieurs concubines, autant qu’il veut et peut entretenir, ainsi que d’autres choses qui sont détestées par la raison humaine dans leur ensemble. De même, il faut savoir que la loi de Moïse en son temps et la loi du Christ, venaient de Dieu, et que Dieu a confirmé les deux par de nombreux miracles. Et ce fils du Diable n’a pas pu en faire pour confirmer sa loi. De plus, quand on lui a demandé pourquoi il ne faisait pas de miracles comme Moïse et le Christ, il a répondu que les miracles ont toujours fait l’objet de tromperies, en trompant ainsi les gens simples par sa réponse. Il est donc clair que cette loi est de nature vile, tant à cause de la bassesse de la personne qui la transmet que de la malhonnêteté de ce qui est transmis dans la loi, à cause aussi du manque de la manifestation divine que Dieu accorde dans la transmission de ses lois. Il faut savoir aussi que les Sarrasins veulent détruire la loi chrétienne, si digne, en raison de

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Chapitre 12

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leur loi, si vile. Leur Mahomet leur a en effet dit que comme le Christ qui était plus grand que Moïse a été envoyé pour corriger la loi de celui-ci, il est lui-même plus grand que le Christ et a été envoyé pour corriger ou commenter la loi du Christ. C’est pourquoi en son temps, quand il a accédé au pouvoir dans le royaume de Perse, il a forcé de très nombreux chrétiens à abandonner la loi chrétienne pour la sienne, et ceux qui ont refusé, il les a tués, et les siens jusqu’à nos jours font de même avec les nôtres autant qu’ils peuvent, suivant son exemple et sa doctrine. Et si les bons chrétiens n’avaient pas défendu la loi chrétienne et continué à la défendre, les Sarrasins l’auraient abolie complètement. Ainsi, mes très chers, que votre zèle soit enflammé à la défense de notre loi très sainte contre ces vils Sarrasins. Il y a trois raisons pour enflammer le cœur de tout chrétien. La première est l’exemple du zèle extraordinaire des autres pour leur loi. En effet, les Sarrasins ont un tel zèle pour leur loi que partout dans les terres qui sont sous leur pouvoir, ils décapitent sans miséricorde chaque homme qui prêche contre celle-ci. Même les juifs, quand Antiochos a voulu détruire leur loi, se sont enflammés de zèle au point que pour la défense de leur loi ils ont commis des dommages, des exils, des morts, de graves et nombreuses souffrances, et des combats incroyables menés jusqu’au versement du sang, comme c’est décrit dans le Livre des Maccabées, pratiquement partout. Et s’ils l’ont fait pour leurs lois telles qu’elles sont, que devrions-nous faire pour notre loi très sainte ! Heureux est celui dont pourrait chanter toute l’Église : « Voilà un saint qui s’est battu pour la loi de son Dieu jusqu’à sa mort »a. La deuxième est l’utilité de cette loi. Cette loi est en effet la seule loi, par laquelle ils ont été sauvés, sont sauvés et seront sauvés, tous ceux qui viendront pour le salut. Et si elle était détruite, personne ne serait sauvé. Actes 4. Il n’y a de salut en aucun autre (Ac 4:12), c’est-à-dire, que dans le Christ, et cela veut dire dans la foi du Christ. Son utilité est le salut du monde entier. Celui qui a du zèle pour la défense de cette loi a du zèle pour le salut du monde entier. Qu’il sera heureux, celui qui, au jour du Jugement, quand a 

Corpus Antiphonalium Officii 7010 (IV, p. 253).

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Du zèle de la loi chrétienne

les apôtres et les prêcheurs vont dire : « Seigneur, j’ai fait beaucoup d’effort pour sauver tel ou tel peuple », pourra dire : « Seigneur, moi aussi, j’ai travaillé pour le salut du monde entier en défendant ta foi, par laquelle le monde est sauvé. Et de même que toi tu es allé sur la croix pour le salut du monde, moi, j’ai pris la croix pour aller au secours du salut du monde ». Le troisième est le fruit de ce zèle qui consiste en trois parties. La première est l’acquisition du royaume céleste. 1 Maccabées 2. Elie, en brûlant de zèle de Dieu, a été enlevé dans le ciel (1 M 2:58). La deuxième est l’acquisition d’une glorieuse renommée. Le même : Maintenant donc, ô mes fils, soyez des zélateurs de la loi, et donnez vos vies pour le testament de vos pères. Et après : Et vous recevrez une grande gloire et un nom éternel (1 M 2:50-51), c’est-à-dire, un nom glorieux comme les preux chevaliers qui combattent bien. Le troisième est le mérite du bon exemple. 2 Maccabées 6. Et je laisserai aux jeunes gens un exemple de fermeté, si je souffre avec enthousiasme et constance une mort honorable pour nos lois très vénérables et très saintes (2 M 6:28). À partir de cela, on voit combien nous devons avoir du zèle pour la loi chrétienne, parce que ceux qui suivent d’autres lois les soutiennent ainsi, parce que de cette loi dépend le salut du monde entier et parce que le zélateur en tire un grand fruit.

Invitation 14 On lit, mes très chers, dans 1 Macchabées 2, que Mattathias fut transporté de zèle pour la loi, comme l’avait été Phinée. Alors, il cria à haute voix dans la ville : « Quiconque est zélé pour la loi, établissant son testament, qu’il me suive ». Et il s’enfuit avec ses fils, en abandonnant tout ce qu’ils avaient dans la ville (1 M 2:26-28). Et plusieurs les ont suivis dans le désert. Et s’il y en a maintenant qui ont le même zèle pour la loi chrétienne, qu’ils viennent, ceux-là, et qu’ils prennent le signe de la croix pour la défense de la foi du Crucifié. Chant

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CHAPITRE 13 DE LA CHARITÉ FRATERNELLE POUR LA MÊME CHOSE

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Troisièmement, il faut noter que la charité fraternelle exige d’aimer les frères de tout cœur. 1 Jean 4. Et nous avons de Dieu le commandement que celui qui aime Dieu aime aussi son frère (1 Jn 4:21). Paul a donné un bel exemple de cela lorsqu’il dit en Romains 9 : Je voudrais moi-même être anathème de Christ pour mes frères (Rm 9:3). De plus, la même charité fraternelle, c’est non seulement aimer de tout cœur, mais aussi en cas de nécessité venir au secours avec ses propres biens. 1 Jean 3. Si quelqu’un possède les biens de ce monde, et que, voyant son frère dans le besoin, il lui ferme ses entrailles, comment l’amour de Dieu demeure-t-il en lui (1 Jn 3:17) ? Voici un exemple des temps de l’Église primitive : Actes 11. Les disciples résolurent d’envoyer, chacun selon ce qu’il possédait, un secours aux frères qui habitaient la Judée (Ac 11:29). De même, la charité fraternelle est tout cela, mais parfois c’est aussi, si l’affaire l’exige, se battre pour les frères. Judas a dit à son armée. 1 Maccabées 5. Combattez aujourd’hui pour vos frères (1 M 5:32). Citons l’exemple de saint Abraham, qui, ayant entendu que son frère Lot a été capturé, a envoyé 318 de ses compatriotes : il a commencé la guerre avec les ennemis et a libéré son frère et tous ses biens (cf. Gn 14:12-16). Genèse 14. Note aussi dans 1 Maccabées 5 que quand les peuples qui étaient à Galaad ont commencé une guerre avec les Israélites qui habitaient sur leur territoire

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De la charité fraternelle

en tuant environ mille hommes, en emmenant en captivité bon nombre d’entre eux avec leurs enfants et en prenant leurs biens, [les juifs] ont envoyé des lettres à Judas et à ses frères en Judée pour obtenir leur aide. Et pendant qu’on lisait ces lettres, arrivèrent d’autres messagers, les vêtements déchirés, qui étaient envoyés par les juifs qui étaient en Galilée, contre qui se rassemblaient les gens de Ptolémaïs, de Tyr et de Sidon : ils demandaient également de l’aide. Les ayant entendus, on a réuni une grande assemblée pour trouver quoi faire pour les frères qui étaient dans la tribulation et attaqués par leurs ennemis. À l’issue de la réunion Simon, le frère de Judas, fut envoyé en Galilée avec trois milles hommes ainsi que Judas et son frère Jonathas en Galaad avec huit mille hommes. Les uns et les autres ont remporté la victoire en libérant leurs frères aussi bien que leurs terres, comme on raconte dans l’histoire. Et voilà, mes très chers, que le petit nombre de nos frères d’Outre-mer est encerclé par les Sarrasins qui leur portent des coups ici et là. Leur tribulation n’est pas petite : elle est grande, parce que leurs terres, qui sont aussi les nôtres, sont en grand danger ; elle est plus grande parce qu’elle atteint les corps et elle est maximale parce c’est aussi la foi de Jésus Christ qu’on craint beaucoup de voir périr. Nos frères ont envoyé assez fréquemment, et ne cessent d’envoyer et de multiplier messagers et lettres vers nous, qui sommes de ce côté de la mer en Occident, parce qu’ils ne peuvent pas avoir une aide venant d’ailleurs, parce que de l’Est, du Sud et du Nord viennent leurs ennemis, comme on en a déjà parlé plus hauta. Par la grâce divine, la chrétienté n’a pas d’autres attaques urgentes ailleurs. Dites-moi, je vous prie, ce que les chrétiens pourront dire, le jour du Jugement, à notre Seigneur Jésus Christ, qui leur a prescrit par son apôtre, 1 Jean 3, de donner les vies pour les frères (1 Jn 3:16), si dans une telle nécessité ils ne secourent pas leurs frères à l’appel de tant de messagers et en un seul lieu, tandis que les juifs ont porté secours tellement vite et avec une telle force à leurs frères qui ont été confrontés à de moindres tribulations, en une seule fois et vers différentes destinations ? En a 

Voir la première invitation.

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Chapitre 13

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plus, on lit dans les Nombres 32 que quand les fils de Ruben et les fils de Gad ont demandé à Moïse la possession de la terre autour du Jourdain alors que la terre promise n’était pas encore acquise, Moïse a dit en les accusant : Vos frères iront-ils à la guerre, et vous, resterez-vous ici ? (Nb 32:6) Ils ont répondu : Nous construirons ici des parcs pour nos brebis et des étables pour nos bestiaux, et des villes bien garnies pour nos petits enfants. Et nous nous équiperons pour marcher devant les enfants d’Israël prêts à combattre, jusqu’à ce que nous les ayons introduits dans le lieu qui leur est destiné (Nb 32:1617). Et ils ont fait ainsi. De même, la justice chez les Gentils exige que pendant le siège d’une ville les citadins se battent ensemble, et quand les uns se reposent, les autres se battent et ainsi de suite pour tous. De même, chez les chevaliers ne sont pas considérés comme fidèles ceux qui, lorsque le premier corps d’armée se trouve en danger, ne lui portent pas secours, ce qui est étonnant et même déplorable. Les juifs, qui s’étaient installés de ce côté du Jourdain, n’ont pas voulu se reposer, quand les autres se battaient au-delà du Jourdain, mais ils les précédèrent toujours dans la bataille jusqu’à ce qu’ils eurent pris possession de la terre promise. Et nous, les chrétiens de ce côté de la mer, nous reposons en calme et nous prenons du bon temps sur nos terres, tandis que nos frères sont chassés de la très sainte terre promise ? Les Gentils dans la ville assiégée se battent successivement et partagent les difficultés de la guerre. Et nous, les chrétiens, quand la Cité de Dieu, à savoir la chrétienté, dont nous sommes les citadins, est assiégée par les Sarrasins infidèles, nous laissons tout le poids de la guerre sur le petit nombre de nos frères d’outremer ? Les chevaliers ne peuvent se disculper d’une trahison, s’ils ne portent pas secours, quand le premier corps d’armée est en danger. Et nous voulons nous appeler fidèles sans secourir nos frères d’outremer, en première ligne contre les Sarrasins, quand ils sont dans un tel danger ! Ce n’est pas comme cela, mes très chers, ce n’est pas comme cela qu’il faut faire, mais la chrétienté fraternelle exige qu’on les aide rapidement et activement !

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De la charité fraternelle

Invitation 15 Ensuite, la vision, décrite dans 2 Maccabées 11 doit nous conforter grandement à agir ainsi. Voici ce qu’on y dit : quand Judas Maccabée et ceux qui étaient avec lui ont entendu que les Gentils ont pénétré en Judée pour conquérir Jérusalem et ses environs, lui-même et le peuple ont prié en larmes le Seigneur d’envoyer un bon ange pour le salut d’Israël. En prenant lui-même [Judas] le premier les armes, il a exhorté les autres à s’exposer comme lui au péril et à porter secours à leurs frères. Et comme ils s’avançaient ensemble avec enthousiasme, au sortir de Jérusalem un cavalier apparut, qui marchait devant eux, portant un vêtement blanc et des armes d’or et brandissant une lance. Alors ils bénirent tous ensemble le Seigneur, et ils s’encouragèrent, prêts à attaquer non seulement les hommes, et les bêtes les plus farouches, mais aussi les murailles de fer. Ils marchaient ainsi, sous la protection du ciel et, comme des lions se jetèrent impétueusement sur leurs ennemis, ils en tuèrent quatorzea mille fantassins et seize cents cavaliers en mettant tous les autres en fuite (2 M 11:6-12). Et vous, prenez l’armure de la croix, terrible aux ennemis, en vous dépêchant d’aider nos frères chrétiens, et soyez sûrs que celui qui a donné un triomphe si glorieux aux Maccabées allant au secours de leurs frères, ne vous fera pas défaut. Lui, Notre Seigneur, Jésus Christ, qui a crée la fraternité chrétienne et veut qu’elle soit toujours fermement liée à la charité. Chant

a 

Dans la Bible il s’agit de onze mille fantassins.

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CHAPITRE 14 DE LA DÉVOTION ENVERS LA TERRE SAINTEPOUR LA MÊME CHOSE

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Quatrièmement, il faut noter que parmi toutes les terres chrétiennes, c’est la terre d’outre-mer qui mérite la plus grande dévotion. Là-bas a été créé le premier père de tous, c’est-à-dire, Adama. De même, là-bas sont nés, ont vécu et sont morts tous les patriarches, à savoir, Abraham, Isaac, Jacob et ses fils, Moïse, Aaron et bien d’autres qui ont cru en Christ qui leur a été révélé, aussi bien que les saints rois, comme David, Ézéchias, Josias et les autres dont le Christ est issu, et aussi bien que tous les prophètes qui ont prophétisé le Christ et sa venue. De même, de cette terre étaient tous les apôtres et les disciples du Christ et toute l’Église primitive. Puisque les fidèles peuvent s’attacher à un lieu à cause d’un seul saint, quelle dévotion devons nous avoir envers cette terre sainte, à cause d’un si grand nombre de tels saints ? En plus, il n’existe pas de miracles aussi certains que ceux qui sont décrits dans les Écritures saintes qui viennent de l’esprit de vérité. Or, tous les miracles que les Écritures saintes contiennent et qui sont immenses et innombrables, ont eu lieu sur cette terre. a  Plusieurs descriptions contemporaines mentionnent ce fait. Pour des exemples voir les textes mentionnés par D. Pringle, Pilgrimage to Jerusalem and the Holy Land, 1187-1291, Farnham, Burlington, 2012, p. 114, 171, 179, 198, 223, 232, 306, 342, 380. Parfois il est aussi dit qu’il est enterré en Terre sainte.

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De la dévotion envers la Terre sainte

De même, tout ce que contiennent les Écritures saintes sur l’histoire après la création du monde, a été accompli sur cette terre. De même, là ont été établis et transmis tous les sacrements grâce auxquels les âmes sont sanctifiées. De même, là a été transmise toute la doctrine du salut, que contiennent l’ancienne et la nouvelle loi. De même, toutes les visions célestes, soit de Dieu, soit des anges qui sont apparues dans le monde selon les Écritures divines, ont été données au même endroit. De même, les glorieux et merveilleux triomphes des fidèles sur les infidèles qui sont pratiquement innombrables dans les Écritures divines, ont été effectués ici. O dureté, o irréligion du cœur chrétien qui ne veut pas voir cette terre sainte qui a donné tant de miracles certains, d’actions si magnifiques, de sacrements particulièrement saints, une doctrine aussi salutaire, tant de visions si bienheureuses et des triomphes si célèbres et qui encore aujourd’hui en fait connaître des lieux de chacun d’entre eux. Telle n’était pas Paula : bien qu’elle soit une femme, la plus noble des Romains, cependant, au dire de Jérômea, elle y est allée, et en voyageant dans ces lieux saints, a exprimé sa dévotion. De plus, le fils de Dieu, sur le point de venir en ce monde, a choisi sa mère non pas en Europe ou en Afrique, mais en Judée, et de la chair très pure de celle-ci a été payé le prix de la rédemption de toutes les âmes. Si de notre côté de la mer on fait dévotion à telle ou telle église de la sainte Vierge, parce qu’on dit qu’il s’y trouve un petit morceau de son vêtement ou d’autre chose, quelle dévotion faut-il avoir pour la terre où elle est née et a été nourrie, où l’archange Gabriel lui est apparu pour annoncer la naissance du Sauveur, cette terre où la Vierge l’a conçu, fait naître et nourri, où les anges ont été vus et entendus chanter les louanges de son fils nouveau-né, d’où elle a porté et où elle a ramené son fils, où l’on peut voir les lieux de son séjour et le lieu de sa sépulture, et où l’on a édifié en son honneur des églises très pieuses qui sont des oua 

Cf. Jérôme, Epistulae 108, 6-14 (vol. 55, p. 310-325).

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Chapitre 14

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vrages merveilleux ? Si dans le lieu où elle a enfanté, les bergers ont été envoyés par l’ange, si les mages de l’Orient sont venus jusque là menés par un signe céleste, y a-t-il plus pieux pèlerinage pour ceux qui ont de la dévotion à la Vierge glorieuse que de visiter de tels lieux en révérence envers elle ? De plus, le fils de Dieu, pendant qu’il était dans le monde, avant la résurrection et après, n’a séjourné que sur cette terre. Là-bas il est né, là-bas il a été nourri, là-bas il a été baptisé, là-bas il a jeûné, là-bas il a combattu le Diable, là-bas il a prêché, là-bas il a fait des miracles, là-bas il a souffert, là-bas il a été enseveli, là-bas il a ressuscité, là-bas, en ressuscitant, il est apparu à ses disciples quand il est monté au ciel, et on peut même observer là-bas tous ces lieux. On dit qu’un Sarrasin n’a pas bonne réputation, s’il n’a pas visité la sépulture de ce ribaud Mahometa. Et qui est ce chrétien qui n’a pas assez de dévotion pour visiter les lieux si bienheureux, où Dieu son Sauveur a posé les pieds ? Heureux sont ceux qui pourront dire un jour : « Nous l’avons adoré au lieu où il a posé ses pieds (Ps 131:7) ». On dit que lorsqu’un pieux chevalier eut visité tous les lieux où a été le Seigneur, en venant vers le lieu de l’Ascension, il l’a adoré et il a dit : « Seigneur, j’ai suivi tes traces sur la terre. Ah, si je pouvais te suivre dans le ciel ! ». Sur ces mots, il a rendu le dernier soupir et, comme on peut le croire pieusement, s’est envolé dans le ciel vers luib. Il est clair, à partir de ce qu’on a dit plus haut, qu’il faut avoir une grande dévotion pour cette terre, en raison des pères saints qui y vécurent, en raison des œuvres excellentes qui y ont été réalisé, et en raison de la glorieuse Vierge et de son fils béni, qui l’ont rendu très sainte parce qu’ils y ont habité. Et note que c’est une dévotion qui a conduit non seulement des hommes, mais aussi des femmes très nobles à visiter ces lieux, comme il est clair à propos d’Hélène, la mère de Constantin : l’Histoire ecclésiastiquec et plus Il s’agit probablement de la légende à propos du cercueil flottant de Mahomet à la Mecque en réalité tenu par les pierres magnétiques, mais présenté aux croyants comme un miracle (Akbari, Idols in the East, p. 231-235). b  Cf.  Étienne de Bourbon, Tractatus de diuersis materiis predicabilibus II, 5, 12 (p. 187, 1820-1827). c  Cf. Rufin d’Aquilée, Historiae ecclesiasticae 10, 7-8 (p. 969-970). a 

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De la dévotion envers la Terre sainte

précisément sa légende disent qu’elle est venue ici en très grande dévotion, avec son grand cortège, elle a montré une merveilleuse dévotion envers les lieux saints. Dans l’Histoire tripartitea, on dit la même chose à propos d’Eudoxie, la femme de l’empereur Théodose. De même, [la dévotion] attire tant de grands hommes là-bas non seulement pour visiter, mais aussi pour y mourir, comme Jérôme, qui, en déposant sa dignité de cardinalb, s’y est déplacé pour finir sa vie, que de femmes, comme Paula, une romaine très noble, qui, en abandonnant Rome et ses richesses, s’y est déplacée et y a fini sa vie parmi les vierges qu’elle instruisait pour le Seigneur. De même, elle a attiré des pères anciens non seulement pour y mourir, mais aussi pour y transférer leurs corps, comme Jacob, qui a fait jurer à son fils Joseph, qu’il y transporterait son corps. Genèse 47 (cf.  Gn 47:29-31). Et Joseph, en mourant, a prescrit d’y transférer ses os. Genèse, dernier chapitre (cf.  Gn 50:24-25). Comme disent les commentateursc, ils ont fait cela à cause de la dévotion qu’ils avaient envers cette terre en raison du Christ qui devait y naître dans le futur. Si les faits à venir provoquent un tel mouvement, les faits du passé doivent d’autant plus émouvoir !

Invitation 16 Voilà, mes très chers, c’est une merveilleuse dévotion qui a fait transférer là-bas les corps des anciens pères, qui a conduit les saints et les saintes de notre temps à s’y rendre pour y mourir, qui a mené les impératrices à visiter ces lieux. Comme il est irréligieux, celui qui ne désire pas visiter ces lieux au moins une seule fois dans sa Il s’agit d’Eudoxie, la femme de Théodose II, dont le pèlerinage à Jérusalem est décrit dans l’Histoire Tripartite de Cassiodore. Cf. Cassiodore, Historia ecclesiastica tripartita. 12, 15, 2 (p. 683, 3-6). b  Le titre de cardinal pouvait être attribué à Jérôme. c  Cf. Glossa ordinaria. Gen. 50, 25 (vol. 1, p. 111 margin.) ; Hugues de SaintCher, Postillae in universa Biblia. Gen. 50, 24 (vol. 1, f. 74v). a 

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Chapitre 14

vie ! Celui qui ne désire jamais y aller, il ne peut plus rien attendre. Voilà la plus belle des communautés ! Voilà la plus plénière des indulgences, qui n’est nulle part donnée aux autres pèlerins ! Les autres pèlerins prennent la besace et le bâton. Ceux qui veulent faire ce pèlerinage, le plus dévot de tous, qu’ils viennent et qu’ils acceptent la croix. Chant

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CHAPITRE 15 DE LA CONDITION DE LA GUERRE POUR LA MÊME CHOSE

Cinquièmement, il faut noter qu’on peut se demander comment Dieu a permis à Mahomet, le fils de perdition, de durer avec les siens pendant si longtemps dans le monde. À cela il faut répondre, qu’on peut se demander plus encore comment Dieu, dès l’origine du monde, a permis au Diable d’infecter l’homme. Alors, il faut dire ceci : comme dès l’origine du monde les mauvaises herbes croissent avec les bonnes, les animaux venimeux avec les animaux sans venin et les démons sont mélangés avec les hommes bons, de même, dès l’origine de l’Église, Dieu a permis qu’il y ait toujours en ce monde des gens qui attaquent son Église, parmi lesquels il y a eu soit des princes, soit des hérétiques, qui parfois eurent un grand pouvoir dans la persécution des fidèles, et maintenant ce sont les Sarrasins. Mais tout se passe pour l’utilité des fidèles, parce que comme dit saint Augustina : « Dieu ne permettait pas que le mal se fasse sous son gouvernement, à moins qu’ensuite cela ne provoque quelque chose de bon ». Et comme le Seigneur n’a pas voulu détruire tous les peuples et qu’il a préservé ceux contre qui se battaient les fils d’Israël, et cela pour le bien, comme on lit dans Juges 3b, de la même manière le Seigneur a perCf. Augustin, Enchiridion ad Laurentium de fide et spe et caritate 3, 11 (p. 53, 29-34). b  Cf. Juges 3:1-2. a 

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Chapitre 15

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mis et permet encore aux Sarrasins de vivre pendant si longtemps sur cette terre pour l’utilité des chrétiens. Il y a une triple utilité à cela. Premièrement, c’est la manifestation des fidèles du Christ. En effet, comme apparaît la fidélité d’un chevalier pour son roi, quand celui-ci se bat virilement pour lui contre ses ennemis, il en va de même ici, d’où Exode 22 [sic]. Moïse, en se préparant à se battre pour le Seigneur, a dit : « Que celui qui est pour le Seigneur se joigne à moi ! (Ex 32:26) ». Il est dit aussi dans 1 Corinthiens 11 : Il faut, c’est-à-dire il est utile, qu’il y ait aussi des hérésies parmi vous, afin que ceux qui sont approuvés soient reconnus (1 Co 11:19). Et pour la même raison, c’est ici qu’est l’utilité. Deuxièmement, c’est un bon exercice. Le Seigneur ne veut pas que les siens soient sans occupation, mais qu’ils s’exercent dans quelque chose de bon. Voilà pourquoi l’on dit que par ordre de Dieu, à chacun est donné un mauvais ange pour l’exercice. Comme les rois qui soutiennent les tournois dans leurs royaumes pour l’exercice de leurs chevaliers, Dieu a permis à ces adversaires les Sarrasins d’exister dans ce monde pour que les fidèles, en s’exerçant à la guerre contre eux, accumulent des mérites, et accomplissent le précepte de Dieu de les combattre. Juges, 2. Je ne détruirai pas les nations que Josué laissa afin d’expérimenter par là si les enfants d’Israël garderont ce que le Seigneur leur a confié (Jg 2:21-22). Troisièmement, c’est la facilité du salut. D’innombrables chrétiens qui n’avaient jamais fait de longues et dures pénitences, se sont sauvés et se sauvent chaque jour facilement et rapidement en prenant la croix. D’où l’on peut à juste titre dire aujourd’hui ce mot de l’apôtre : Voici maintenant, non pas les années, ni un long temps, mais le jour du salut (2 Co 6:2), parce que les gens se sauvent maintenant en quelques jours. Et note une bonne condition dans cette guerre. Dans d’autres guerres, un homme peut perdre ou avoir du profit, mais ici les chrétiens ne peuvent qu’en tirer profit. S’ils vainquent les Sarrasins, ils ont du profit. S’ils sont vaincus, ils en ont davantage. En effet, s’ils perdent cette vie brève, ils gagnent la vie éternelle. S’ils perdent ce corps corruptible, on leur en rend un meilleur qui ne

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De la condition de la guerre

peut être estimé. S’ils ne retournent pas dans leurs terres, quelle importance, puisqu’ils vont au paradis ? Et c’est bien autre chose pour les Sarrasins qui perdent le corps et les âmes, et descendent dans l’enfer.

Invitation 17 Voilà, mes très chers, une guerre d’heureuse condition pour nous et très mauvaise pour les ennemis. Qui voudrait se manifester comme un fidèle chevalier du Christ, qui voudrait cumuler pour soi-même les mérites, qui voudrait facilement et rapidement parvenir jusqu’au royaume céleste ? Qu’il vienne et qu’il prenne le signe de la croix ! Chant

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CHAPITRE 16 DES EXEMPLES DES PRÉCÉDENTS POUR LA MÊME CHOSE

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Sixièmement, il faut noter que parmi les nombreux motifs qui animent les hommes à se battre activement, les meilleurs sont les exemples des prédécesseurs : c’est pour cela que, dans les palais des nobles, où de nombreux nobles se réunissent, on peint sur les murs les hauts faits des anciens guerriers et on les raconte aussi en chansons et en romans aux auditeurs, pour les encourager à faire de même. De la même manière et pour la même cause, dans l’Église, les gestes des chevaliers du Christ sont dépeints et mis en écrit et sont racontés par les prêcheurs pour encourager les fidèles. C’est ce qu’il est dit dans 1 Maccabées 6, où l’on dit : Ils montraient aux éléphants du sang de raisin et des mûres, afin de les exciter au combat (1 M 6:34), parce que la sainte Église ramène à la mémoire des fidèles le sang du Christ et de ses martyrs pour les encourager. De même, c’est ce que Mattathias, qui voulait encourager ses fils au combat viril pour la loi sainte, leur a dit en mourant : Maintenant donc, ô mes fils, soyez des zélateurs de la loi, et donnez vos vies pour le testament de vos pères. Puis, il a ajouté : Et souvenez-vous des œuvres de vos pères, qu’ils ont accomplies dans leurs générations (1 M 2:50-51), pour que vous soyez encouragés par leur exemple. 1 Maccabées 2. De même Paul, après avoir énuméré tant d’épreuves que les saints ont supportées pour la foi, a ajouté pour encourager les fidèles : Hébreux 12. Nous donc aussi, puisque nous sommes environnés d’une si grande nuée de témoins, nous courons avec patience

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Des exemples des précédents

vers la bataille qui nous est ouverte, posant nos regards sur Jésus, qui crée et accomplit la foi, qui, en vue de la joie qui lui était réservée, a souffert la croix (He 12:1-2). Note qu’il y a trois choses qui rendent l’exemple plus efficace. Premièrement, c’est l’importance de la personne qui donne l’exemple. C’est pourquoi il est dit dans 1 Pierre 2 : Christ a souffert pour nous, nous laissant un exemple (1 P 2:21). Il dit presque « qui est tel et tellement important ». Et c’est pourquoi un tel exemple doit nous émouvoir beaucoup. Deuxièmement, c’est la force du fait, d’où l’on tire l’exemple. C’est pourquoi dans 2 Maccabées 6 Éléazar a dit : Et je laisserai aux jeunes gens un exemple de fermeté, si je souffre avec enthousiasme et constance une mort honorable pour nos lois très vénérables et très saintes (2 M 6:28). Troisièmement, c’est la multitude des exemples. C’est pourquoi il est dit dans Jacques 5 : Pour sortir du mal, prenez, mes frères, pour modèles de longanimité, de souffrance et de patience, les prophètes qui ont parlé au nom du Seigneur (Jc 5:10). Et ensuite : Vous avez entendu parler de la patience de Job, et vous avez vu la fin que le Seigneur lui accorda (Jc 5:11). Il dit presque : « Et si un exemple ne vous motive pas, il faut qu’au moins une telle quantité d’exemples le fasse ». D’ailleurs, nos illustres prédécesseurs nous ont laissé beaucoup d’exemples forts et nombreux pour aller au combat contre les Sarrasins. En effet, vers l’an huit cent un, Charlemagne est entré en Espagne ; il y est revenu une deuxième et une troisième fois avec des combattants qui étaient d’illustres guerriers et une immense armée, il en a expulsé les Sarrasins qui l’avaient occupée et s’étaient avancés jusqu’à Saintes et Agen ; il l’a ensuite restituée aux chrétiens après avoir tué d’innombrables Sarrasins et après que plusieurs des nôtres ont reçu la couronne du martyre, ce que rapporte plus amplement la lettre de l’archevêque Turpin, qu’il a écrite sur cette geste qu’il a vue de ses propres yeux, en marchant quatre ans avec lui [Charlemagne] en Espagnea. En effet, pendant le règne de Charlemagne les Sarrasins ne menaçaient pas le territoire du royaume franc, mais la chronique de pseudo-Turpin parle de l’expédia 

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Chapitre 16

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De même, vers l’année 1095 à la suite du mouvement lancé par Pierre l’Ermite, de la prédication du pape Urbain II pendant le Concile de Clermont et de celle des autres prélats suivant son mandat, Godefroi de Bouillon et d’autres personnes nobles, ainsi que des clercs et une foule innombrable ont pris la croix. Après avoir traversé la Grèce et supporté des labeurs innombrables, des morts et des angoisses, ils ont pris Antioche et Jérusalem ; séjournant sur ces terres, ils ont pris ensuite d’autres lieux, et à partir de cette époque-là la Terre sainte, arrachée des mains des Sarrasins, est passée aux mains des chrétiens, et ils l’ont acquise en un merveilleux triomphe, ce que raconte plus précisément l’Histoire Antiochienne, sur laquelle ont écrit Foucher de Chartres et un archevêque de Tyra. De même, vers l’an 1188, sous la présidence de Clément  III, alors que Saladin avait récupéré pratiquement toutes les terres acquises, par l’entremise du même pape, l’empereur Fréderic, le roi de France Philippe et le roi d’Angleterre Richard et beaucoup d’autres ont pris la croix. Ils ont récupéré Acre et beaucoup d’autres lieux, et depuis lors jusqu’à présent les conflits entre nous et les Sarrasins n’ont pas cessé, parfois les nôtres l’emportent, parfois ce sont eux. Et des hommes innombrables, grands et petits, ont continué de faire la traversée pour ce combat de la foi et ont versé leur sang pour le Seigneur.

Invitation 18 Voilà, mes très chers, des exemples nombreux, grands et valeureux pour le combat contre les Sarrasins ! Qu’il est vil, d’un cœur méprisable, celui qui ne s’enflamme pas pour cela. Alors, armez-vous et soyez des fils puissants par l’imitation des prédécesseurs. Il est bien meilleur pour nous de mourir dans la bataille tion d’Agolant qui a réussi à parvenir jusqu’aux villes d’Agen et Saintes. L’année 801 a vu l’expédition de Charlemagne pour la conquête de Barcelone. a  La chronique de Foucher de Chartres sur la première croisade et la chronique de Guillaume de Tyr.

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Des exemples des précédents

que de voir le malheur de notre peuple, c’est-à-dire les chrétiens qui sont outremer, et la profanation des lieux saints. Ceux dont le cœur est touché par cela, qu’ils viennent et qu’ils prennent le signe de la croix pour l’amour de celui qui est mort pour nous sur la croix ! Chant

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CHAPITRE 17 DES GRÂCES DE L’ÉGLISEPOUR LA MÊME CHOSE

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Septièmement, il faut noter que comme les rois dans le temps de nécessité dépensent les trésors qu’ils gardent en d’autres temps enfermés, l’Église dépense maintenant en abondance les trésors de grâces qu’elle garde autrement enfermés, en accordant des grâces multiples et importantes en faveur de la Terre sainte. Il existe sept grâces de cette sorte. La première est l’indulgence complète de tous les péchés : par ce moyen, les hommes se libèrent non seulement des peines de l’enfer, mais aussi des peines du purgatoirea. La deuxième est la relaxe des peines. Parce que les pénitences dans le présent se font en raison de la peine temporelle à laquelle le pécheur reste contraint après l’effacement de la fauteb, il est certain qu’après la relaxe de la dette de la peine, tout ce qu’il fallait acquitter en raison de cette dette est supprimé de la même manière que sont supprimés les gages dus à cause de la dette. Et ainsi les hommes, par le moyen d’une telle indulgence, sont libérés de Le plein pardon des péchés est un privilège standard et le plus connu des croisés. b  Il était en usage à cette époque-là que la faute et la peine soient distinguées : si la faute était remise après la confession, elle était suivie d’une peine pénitentielle. Voir par exemple : R. Eckert, « Peine judiciaire, pénitence et salut entre droit canonique et théologie (xii-début du xiii siècle) », Revue de l’histoire et des religions, 4 (2011), p. 493. a 

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Des grâces de l’Église

toutes les pénitences, de celles qui auront été rompues et de toutes les autres, bien que les hommes ne devraient jamais être dispensés de pénitence, à cause du doute de l’incertitude. La troisième est la commutation de tous les vœux en celui-ci, excepté le vœu de chasteté et les vœux de religion. La quatrième est l’absolution de nombreuses excommunications, pour lesquelles les gens prennent la peine d’aller jusqu’à Romea. La cinquième est la protection et la défense des biens. Aujourd’hui l’Église comme une poule rassemble les croisés sous ses ailes (Mt 23:37) et, par le moyen des prélats et des exécuteurs attitrés, les protège eux-mêmes et leurs biens comme pour des personnes ecclésiastiquesb. La sixième est la relaxe de nombreuses impositions. L’Église veut en effet que ces gens soient affranchis de la taille et des exactionsc. De même, qu’ils ne puissent pas être cités en justice hors des diocèsesd. De même, que leurs serments prêtés pour les usures et d’autres choses soient levése. La septième concerne spécialement les clercs à propos de certaines gestions et de l’obligation concernant les bénéfices, etc.f a  En effet, dès le début du pontificat de Grégoire IX ce privilège a été accordé aux croisés (J. Brundage, Medieval Canon Law and the Crusader, Madison, Milwaukee, London, 1969, p. 155). b  Ce privilège existait vraiment à cette époque-là, étant apparu probablement déjà aux temps de la première croisade et s’étant affirmé ensuite. Voir : Brundage, Medieval Canon Law and the Crusader, p. 161-162 (protection des croisés en personne), 165-166 (protection de leur propriété). Voir aussi : D. Park, Papal Protection and the Crusader. Flanders, Champagne, and the Kingdom of France, 1095-1222, Woodbridge / Rochester, NY, 2018. c  Pour la durée de la croisade, le croisé est exonéré des taxes et exactions. Ce phénomène commence à se développer déjà au xiie siècle en s’affirmant au xiiie (Brundage, Medieval Canon Law and the Crusader, p. 183-184). d  Privilège introduit au xiiie siècle pour ne pas empêcher le départ du croisé (Brundage, Medieval Canon Law and the Crusader, p. 174-175). e  À partir de la bulle Quantum predecessores (1145), les croisés ont été dispensés des intérêts pour les prêts pour la durée de leur expédition (Brundage, Medieval Canon Law and the Crusader, p. 180-183). f  Au xiiie siècle la papauté a autorisé les clercs à hypothéquer les revenus de leurs bénéfices aux laïcs en vue de subvenir à leur participation à la croisade, ce qui était normalement interdit. En plus, il a été autorisé de continuer à percevoir le revenu du

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Chapitre 17

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Et voici maintenant que s’ouvrent les écluses des cieux (Gn 7:11) de l’Église, comme on le dit dans Genèse 7, et un déluge de grâces s’est répandu sur la terre. Voici maintenant qu’une femme forte craignant Dieu (cf. Pr 31:10), à savoir la sainte Église, a ouvert sa main à l’indigent, et a étendu ses bras vers le pauvre (Pr 31:20), à savoir vers le pécheur pauvre, à celui qui a très peu et à celui qui est sans moyens, à savoir, qui est privé d’un grand nombre de biens, et elle lui fait un grand don. C’est maintenant le jubilé non pas des juifs, dont parle Lévitique 25, mais des chrétiens, qui est beaucoup mieux. Dans le premier sont levées les dettes d’argent, et dans celui-ci sont levées les dettes des péchés. Dans le premier on revient aux possessions terrestres et dans celui-ci on revient aux possessions célestes. Dans le premier les serviteurs des hommes vont vers la liberté du siècle et dans celui-ci les serviteurs du Diable vont vers la liberté de la gloire des fils de Dieu. Et note que sur les terres où il pleut rarement, les hommes ne laissent pas s’en aller la pluie, quand elle vient, sans remplir leurs citernes. De même, quand on fait de grands dons, aucun pauvre n’hésite à accourir. De même, quand le temps est propice à quelque chose, il ne faut pas omettre même une parcelle d’un jour si bon. Comme ils seraient fous, ceux qui, habitant une terre desséchée, ne recueilleraient pas cette pluie de grâces ! Comme ils seraient fous, ces pauvres d’esprit qui ne courraient pas pour ce don tant qu’il dure encore ! Comme ils sont fous, ceux qui laissent passer ce jubilé, l’année de bonté sans en saisir le fruit !

Invitation 19 Voilà, mes très chers, les grâces si nombreuses, grandes et désirables qui vous sont offertes. Vous voyez, comme dit l’apôtre aux Hébreux : Que nul ne se prive de la grâce de Dieu (He 12:15). Et bénéfice même si l’on n’y résidait pas étant en croisade. Enfin, il est devenu possible pour un clerc d’utiliser 1/20 des revenus de son église pour ses propres frais de participation à la croisade (Brundage, Medieval Canon Law and the Crusader, p. 177-179).

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Des grâces de l’Église

ailleurs. Nous vous exhortons à ne pas recevoir la grâce de Dieu en vain (2 Co 6:1). 2 Corinthiens 6. Ce fleuve sera rapidement séché : Des fleuves, dit-il, se répandirent dans le désert (Ps 104:41). Il est fou, celui qui a besoin de l’eau du fleuve et n’y va pas. Encore plus fou est celui qui refuse ce qui lui est offert. Mais le plus fou est celui qui attend jusqu’à ce que tout soit asséché. Comme ils sont fous, ceux qui, ayant besoin de ces grâces, ne courent pas vers elles, ne reçoivent pas ce qui leur est offert et ne pensent pas à la sécheresse à venir ! Ceci n’est pas comme cela, mes très chers, ce n’est pas comme cela qu’il faut agir ! Comme le cerf soupire après les sources des eaux (Ps 41:2), vos âmes doivent avoir soif de ces eaux. Vous qui avez soif, venez aux eaux (Is 55:1), selon les paroles du prophète, et prenez la croix avec laquelle toutes ces grâces vous sont conférées. Chant

À propos de la même chose d’une autre manière Il faut noter que comme les eaux des puits, qui cachées longtemps au fond du puits, peuvent parfois monter jusqu’à se déverser sur la terre, de la même manière les grâces sortent maintenant en abondance des puits de l’Église. À propos de cela, Ecclésiastique 50. L’eau coula dans les réservoirs, qui furent extraordinairement remplis comme la mer (Si 50:3). Il y a trois sortes de grâces. Quelques-unes sont temporelles. Celles-ci, l’Église les verse sur les croisés, quand elle les prend eux-mêmes et leurs biens sous sa protection, qu’elle veille à ce qu’ils ne soient pas attaqués dans des procès hors de leur diocèse, et en forçant les usuriers à ne pas leur créer des désagréments. Et d’autres choses similaires. Et elle fait bien. Il est juste que ceux qui s’exposent eux-mêmes et leurs biens temporels dans le siècle pour Dieu, soient renforcés par des grâces temporelles. D’autres sont spirituelles. L’Église les verse en cas de commutation des vœux, dans la levée des excommunications et d’autres choses similaires, et elle fait bien. Il est juste que ceux qui dédient leur esprit au service du Créateur, obtiennent les grâces nécessaires pour l’esprit.

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D’autres sont salutaires, qui sont relatives au salut du corps et de l’âme, exposés à cette époque au service du Créateur. Et cellesci sont de grandes indulgences qui sont données maintenant. Et note que l’homme fils de perdition encourt quatre maux par le péché. À cause de son péché, il est contraint à de grandes peines, il est exclu du royaume des cieux, il est livré au pouvoir du Diable, il est séparé de la communauté des bons. Contre ces quatre maux, ces indulgences confèrent quatre biens qui valent pour le salut. En effet, elles libèrent de toutes les peines. De même, ceux qui meurent, elles les font entrer aussitôt dans le paradis. De même, elles libèrent du pouvoir des démons. Parce qu’ils ne trouvent dans le croisé rien qui leur appartienne, ni de la faute, ni de la peine, ils n’ont pas de pouvoir sur eux à l’heure de la mort et n’osent pas toucher ceux qui portent le Thau (cf. Ez 9:6). De même, elles rattachent non seulement aux bons, mais aux saints. Qu’est-ce qu’être saint sinon être complètement purgé de toutes les fautes et les peines ? Comme ils sont et seront misérables et malheureux, ceux qui, à l’heure de la mort, trouveront l’enfer ouvert et le ciel fermé, avec les démons qui surviennent et les capturent, et aucun saint présent ! En revanche, comme ils seront heureux, ceux qui à l’heure de la mort trouveront l’enfer fermé pour eux et le ciel ouvert, les démons qui s’enfuient et les saints présents ! Ces quatre bénéfices de la si grande indulgence qui est donnée avec la croix, sont justement désignés par les quatre bras de la croix. Regarde, ô chrétien, cette croix, et réfléchis ! Dans le bras inférieur est promise à toi l’exonération de toute peine souterraine après la mort. Dans le bras supérieur est promise à toi l’entrée aussitôt dans le paradis. Dans le bras gauche – l’exonération du pouvoir de tout adversaire. Dans le bras droit – la communauté et l’assimilation aux saints. Voilà, mes très chers, les grâces temporelles, les grâces spirituelles, les grâces salutaires, que l’Église dispense maintenant. Ce sont les fleuves de la grâce qui découlent de la pierre, c’est-à-dire du Christ, cloué sur la croix. Et il est dit qu’il la fit couler comme des fleuves (Ps 77:16), c’est-à-dire de la pierre frappée. Les Égyptiens, quand le Nil croît, s’approvisionnent d’eau qu’ils mettent dans les citernes pour toute l’année. Mes très chers, cette inondation va

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Des grâces de l’Église

être bientôt finie. Malheur à ceux qui maintenant ne s’approvisionnent pas contre la sécheresse de l’enfer dans le futur. Voilà, mes très chers, c’est maintenant le jour du marché, quand le royaume céleste est à bon prix, et, est-il dit, ils ont eu pour rien sa terre désirable (Ps 105:24), ce qui s’accomplit maintenant. Malheur à ceux qui négligent de venir pour ce jour du marché ! Viendra le temps, et il viendra vite, où l’on ne trouvera pas un tel prix, et peut-être bien qu’avec un autre prix ils ne trouveront pas ce royaume, comme Ésaü n’a pas pu recouvrer son héritage, bien qu’il l’ait recherché avec des larmes. Voilà, mes très chers, le vrai Joseph a ouvert maintenant ses greniers dans l’Égypte de ce monde pour le soutien des âmes dans le temps de l’infécondité. Malheur à ceux qui ne viennent pas et ne s’approvisionnent pas ! Si toutes les provinces venaient à ce grenier ouvert, comme il est dit dans Genèse 41 (cf.  Gn 41:56-57) pour les nécessités du corps, il est d’autant plus important d’y venir pour l’utilité des âmes.

Invitation 20 Soyez attentifs, mes très chers ! Quiconque est entré en religion, quelle que soit la sévérité de celle-ci, et qui y a vécu, quelle qu’en soit la sainteté et le temps qu’il y a passé, une telle indulgence ne lui est pas promise. Les saints qui ont souffert les moqueries et les fouets, les chaînes et les prisons (He 11:36), et pire encore, n’ont pas reçu la promesse d’une telle indulgence. De même, Charles, qui pendant si longtemps et tant de fois s’est battu avec ses guerriers dans une armée innombrable en Espagne contre les Sarrasins : on ne lit nulle part qu’il a reçu des indulgences pour cela. S’ils ont fait tant et si bien pour le Christ sans aucune indulgence, de telles indulgences doivent d’autant plus nous pousser à cela. Alors, celui qui veut bénéficier de tant de telles indulgences pendant qu’elles durent encore, qu’il vienne et qu’il prenne le signe de la croix ! Chant

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CHAPITRE 18 CONTRE LE LIEN DU PÉCHÉ QUI RETIENT DE PRENDRE LA CROIX

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À propos des empêchements à la prise de la croix et des remèdes contre ceux-ci, il faut noter qu’il y en a huit qui écartent de la prise de la croix. Le premier est le lien du péché. Le deuxième est une trop grande peur du châtiment corporel. Le troisième est l’amour trop grand de la patrie. Le quatrième, ce sont les mauvaises paroles des hommes. Le cinquième, ce sont les mauvais exemples des autres. Le sixième est une affection trop grande envers les siens. Le septième est une fausse incapacité. Le huitième est l’insuffisance de la foi. Premièrement, il faut noter que certains, sachant qu’ils n’obtiendraient pas d’indulgence et que le pèlerinage de la croix ne leur serait pas salutaire à moins de renoncer à leurs péchés mortels, sont tellement pris dans les pièges d’un ou de plusieurs péchés auxquels ils ne veulent pas du tout renoncer, et à cause de cela ils s’écartent d’un si grand bien. Ils sont comme ces malheureux juifs, qui ont préféré rester à Babylone, à savoir dans la confusiona du péché, que monter avec les autres juifs à Jérusalem et dans la Terre promise pour la récupérer et la restaurer, comme il est dit dans Esdras (cf. Esd 1). Ils sont vraiment comme ceux qui à cause de leurs femmes – ce qui dénote le vice de la luxure, ou de leurs maisons Cf.  Gen. 11:9 ; cf.  Bède le Vénérable, In Ezram et Neemiam libri III 1 (p. 253, 477) ; 2 (p. 301, 548). a 

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Contre le lien du péché qui retient de prendre la croix

– ce qui dénote le vice de l’avarice, ou de leurs vignobles – ce qui dénote le vice de la gourmandise, n’ont pas participé à la guerre autrefois, et ne sont pas allés avec les autres dans l’armée de Dieu dans la Terre promise contre les infidèles, comme il est dit dans le Deutéronome 20 (cf. Dt 20:5-7). Ils sont comme des chiens qui ne sont pas d’origine noble : les uns sont dits de boucherie, qui suivent les intestins, d’autres dits de chambre, qui sont assis sur les biens pour les garder, d’autres dits de village, qui, comme des griffons, ne font qu’aboyer dans les alentours. Tandis que les chiens nobles, en entendant le cor de leur seigneur partant à la chasse, courent et s’élancent à la suite du maître pour chasser les bêtes féroces, ceuxci restent soit à côté des intestins, soit sur des sacs, soit pour aboyer dans les alentours. Ainsi font ceux qui pour l’amour des choses charnelles ou de l’argent, ou à cause de la rivalité qu’ils ont avec des voisins, refusent de suivre le Seigneur contre les bêtes féroces sarrasines. Ce n’est pas comme cela, mes très chers, qu’il faut agir. Et ce n’est pas comme cela qu’a fait Ittaï de Gath à son seigneur David. Quand David, sortant avec son armée, lui a dit de revenir et de se reposer, il lui a répondu, en disant : Vive le Seigneur, et vive le roi mon maître, car en quelque lieu que tu sois, monseigneur le roi, ton serviteur y sera, soit à la mort, soit à la vie (2 S 15:21). Et il faut noter que certains un jour veulent avoir le pardon des péchés, comme, par exemple, quand ils promettent de se corriger non de bonne volonté, mais par la peur de la mort ou d’un autre danger, ou quand ils sont forcés par l’Église : les péchés ne les laissent pas, mais les livrent dans les mains des démons, comme on dit à propos d’une singe femellea qui veut jeter son petit, qu’elle aime beaucoup et qu’elle tient dans ses bras et qui est pour elle un grand plaisir, vers les chasseurs qui le poursuivent, parce qu’ils la serrent de très près, mais le petit, s’agrippant à son cou, la tire en arrière dans les mains des chasseurs, et la fait tomber dans leurs mains. C’est la même chose avec ceux-ci. Lamentations 1. Elles m’ont saisi, appliquées sur mon cou, c’est-à-dire, mes iniquités ; ma Cf.  Étienne de Bourbon, Tractatus de diuersis materiis predicabilibus I,  6,  10 (p.  235-236, 1173-1180) ; Jacques de Vitry, Sermones uulgares. 14,  18 (p. 264, 331-336) ; Jacques de Vitry, Historia orientalis. 92 (p. 410, 447-449). a 

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Chapitre 18

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force a été affaiblie, c’est-à-dire pour résister aux ennemis, le Seigneur m’a livrée à la main auquel je ne pourrai résister (Lm 1:14), c’est-à-dire au Diable pour l’éternité. Il y en a d’autres qui, parfois renoncent de bonne volonté aux péchés et les péchés les laissent, mais ils n’y renoncent pas totalement. Le Diable en effet a deux mains, avec lesquelles il tient l’homme par le péché, à savoir, par la faute et par la peine. Même si le Diable les abandonne quant à la faute, il ne les abandonne pas du tout quant à la peine, puisque ceux-là lui restent encore soumis. Cela a été signifié dans Jean 11 par Lazare, qui, bien qu’il soit ressuscité, restait pourtant lié de bandelettes (Jn 11:43-44). Il y en a d’autres qui renoncent aux péchés et leurs péchés sont complètement pardonnés. C’est le cas de ceux dont la faute est pardonnée par la force divine et toute la peine due est levée par la force des clésa après la contrition et la confession. Et ils sont heureux.

Invitation 21 Voilà, mes très chers, il est clair que l’homme ne peut jamais se faire pardonner les péchés aussi virilement dans un autre cas que celui-ci. Que chacun y prenne garde : que nul amour de Babylone, nulle imitation des juifs, nulle vulgarité de chien ne le retienne dans le péché et le soustraie à la prise de la croix, mais qu’il vienne vers elle, une fois abandonnés tous les péchés, en suivant le Seigneur vers la croix, pour que par le don et la grâce de celui qui a porté lui-même nos péchés en son corps sur le bois (1 P 2:24), il obtienne la pleine indulgence des péchés. Chant

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Il s’agit ici de la « clavis ecclesie », ce qui signifie le pouvoir ecclésiastique.

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CHAPITRE 19 CONTRE UNE PEUR EXCESSIVE DE LA PEINE CORPORELLEQUI A LE MÊME EFFET

Deuxièmement, il faut noter que certains, considérant les peines et les souffrances de ce pèlerinage, du fait des dangers de la mer, des difficultés du navire, de la chaleur et des maladies de la terre, des morts dans les batailles, etc., et craignant pour leur corps dont ils ont pitié, se détournent de la croix. Leurs corps sont comme ces palefrois, qu’on n’expose jamais au risque des armes ou d’autres dangers, comme les autres chevaux, mais qu’on engraisse seulement dans les écuries, que les serviteurs bouchonnent chaque jour et qu’on conduit dans les rues pour le plaisir, etc. Ils sont comme des bœufs d’embouche qui ne sont pas mis sous le joug ou à un autre travail, qui sont seulement engraissés, mais hélas pour être tués. On dit qu’une fois, quand l’armée chrétienne était au-delà de la mer, les Sarrasins arrivèrent, et on appela aux armes : tandis que les uns couraient aux armes, et allaient virilement à la rencontre des ennemis, un Français, qui avait commencé de se faire une sauce, ne quitta ni mortier, ni pilon, mais continua de faire sa sauce avec beaucoup d’attention. Ainsi ces hommes charnels, amateurs du corps, qui, quelle que soit le labeur auquel les autres s’exposent pour le Seigneur, ne pensent jamais qu’au soin de la chair. Ce n’est pas, mes très chers, ce qu’a fait Éléazar qui, en mémoire de sa mort, a laissé un exemple de courage et de force à

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Chapitre 19

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tout le peuple. Il a dit : 2 Maccabées 6 Seigneur, toi, qui as la sainte science, tu sais clairement qu’ayant pu me délivrer de la mort, je supporte dans mon corps de rudes douleurs. Mais dans mon âme je les souffre avec joie pour ta peur (2 M 6:30). Ce n’est pas non plus ce qu’ont fait ces bienheureux, dont parle Apocalypse 12. Ils n’ont pas aimé leur âme jusqu’à la mort (Ap 12:11). Ce n’est pas non plus ce qu’a fait le Christ, qui pour nous a donné son corps à ceux qui le frappaient, et ses joues à ceux qui lui arrachaient la barbe (Is 50:6). Et heureux sont ceux qui d’après leur exemple exposent pour Dieu leur corps aux peines et aux labeurs afin qu’ils soient comptés au nombre de ceux dont l’Église chante : « Ils ont livré leur corps pour Dieu aux supplices et ont mérité d’avoir les couronnes perpétuelles »a. Mais à propos des autres, au contraire, ce n’est pas en chantant, mais en se lamentant qu’il sera possible de dire un jour : « Ils ont soustrait leurs corps aux supplices transitoires à soutenir pour Dieu, et ainsi sont allés au supplice éternel (Mt 25:46) ». Et note qu’il faut exposer la présente vie corporelle pour Dieu aux peines et aux labeurs, même jusqu’à la mort, pour des raisons multiples. La première raison, c’est l’évasion des peines majeures. Celui qui fuit ces peines tombe sur de plus lourdes. Job 6. Celui qui craint la gelée, ce qui est peu, sera accablé par la neige (Jb 6:16), ce qui est beaucoup, comme il arrive au cheval ombrageux qui, en fuyant quelque chose de petit, tombe entre-temps dans la fosse, ce qui est plus grave. La deuxième, c’est pour acquérir la vie meilleure. Jean 11 [sic]. Celui qui hait son âme, c’est-à-dire sa vie, dans ce monde, c’est-àdire se comporte à la manière de celui qui hait sa vie et l’expose aux peines et aux labeurs, il la conserve pour la vie éternelle (Jn 12:25), ce qui est beaucoup mieux. La troisième, c’est pour la protection de l’âme qui se trouve à l’intérieur. Job 2. L’homme donnera peau, c’est-à-dire extérieure, pour peau (Jb 2:4), c’est-à-dire intérieureb, comme on expose la peau de la chaussure à la place de la peau des pieds. Corpus Antiphonalium Officii 7772 (IV, p. 434). Cf. Hugues de Saint-Cher, Postillae in universa Biblia. Iob 2, 4 (vol. 1, f. 400r). a 

b 

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Contre une peur excessive de la peine corporelle

La quatrième, c’est à cause de l’obligation féodale. Chacun tient sa vie corporelle comme un fief du Seigneur, de qui il la possède, et ainsi il est tenu de l’exposer pour le Seigneur, comme a fait l’un de sept frères, qui, regardant ses membres qu’il devait exposer aux tourments, a dit : J’ai reçu ces membres du ciel, mais je les méprise maintenant à cause des lois de Dieu (2 M 7:11). 2 Maccabées 7. La cinquième, c’est pour l’espoir de la couronne glorieuse. Selon l’apôtre, on ne sera pas couronné, si l’on n’a pas combattu suivant les règles (2 Tm 2:5). Comment se bat légitimement celui qui ne se bat jamais ? Comment se bat celui qui n’expose pas son corps au combat ? Comme dans les combats du monde les hommes s’exposent par espoir de la victoire et de la récompense, de même fautil agir ici. Bernarda : « Très imprudemment je m’attribue soit la victoire sans bataille, soit la couronne sans victoire ». La sixième, c’est la réciprocité, en donnant au Christ, qui a donné sa vie et s’est livré aux tourments pour nous. Bernardb. « Il revendique justement ma vie, celui qui pour la mienne a donné la sienne ».

Invitation 22 Voilà, mes très chers, vous voyez combien sont solides les raisons pour lesquelles chacun doit s’exposer dans son corps pour Dieu par les peines, les labeurs et même la mort. Maintenant, c’est très nécessaire pour la foi chrétienne et pour cela, maintenant, les gens doivent le faire plus qu’en d’autres temps. Que personne, alors, n’épargne son corps, mais, en repoussant la peur de toutes les incommodités corporelles, qu’il vienne à la croix, prêt à mourir sur la croix et avec la croix s’il est nécessaire pour le Christ ! Heureux et plus qu’heureux est celui qui au jour du Jugement pourra répondre et dire au Seigneur reprochant aux pécheurs la passion qu’il a supportée pour eux : « Seigneur, un jour tu as été pour moi sur la croix, et moi, j’ai été pour toi sur la croix et j’ai a  b 

Cf. Bernard, Sermones super Cantica canticorum 13, 5 (p. 72). Cf. Bernard, Epistolae 143 (vol. 7, p. 343, 12-13).

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supporté de nombreux tourments pendant bien des jours pour toi. Tu avais les pieds cloués sur la croix pour moi, et moi, pour toi, sur le navire parmi de nombreux pèlerins j’étais tellement à l’étroit que je ne pouvais pas allonger les pieds. Toi, sur la croix tu as bu une fois du vin corrompu pour moi, et moi, sur le navire, je me suis servi d’eau saumâtre et grouillant de vers pour toi pendant plusieurs jours. Tu as supporté la puanteur des cadavres sur le lieu du Calvaire pendant un moment, et moi, la puanteur de la sentine pour toi pendant bien des jours. Tu t’es battu une seule fois contre mes ennemis sur la croix, et moi, avec ta croix je me suis exposé en me battant fréquemment contre tes ennemis ». Qui veut délivrer ses paroles ainsi au Jugement, qu’il vienne et qu’il prenne le signe de la croix ! Chant

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CHAPITRE 20 CONTRE UN TROP GRAND AMOUR DE SA PATRIEQUI A LE MÊME EFFET

Troisièmement, il faut noter que certains sont si liés par l’amour de la patrie, de leurs parents et de la maison paternelle à cause des biens qu’ils y possèdent, qu’ils renoncent à ce saint pèlerinage par lequel ils s’éloignent de tout ceci. Ils sont comme les poules domestiques qui ne s’éloignent jamais de la maison afin de pouvoir y rentrer et s’y coucher à la nuit. Mais il leur arrive qu’après avoir voleté et vécu longtemps autour de la maison, fait beaucoup de poussins, on les met à la broche. Ces gens sont comme des vaches de Flandre, qu’on attache à un pieu à côté de la maison avec une corde en sorte qu’elles ne puissent pas aller plus loin, mais pâturent seulement là-bas toute la journée. Ainsi et le Diable a lié ces gens de la même manière afin qu’ils se restaurent et ne leur a pas permis d’aller plus loin. De même, il y a des gages par lesquels le Diable en tient bon nombre, jusqu’à ce qu’ils aient payé toute la dette de la peine éternelle. De même, ces gens sont comme des poissons de rivière, qui ne veulent jamais sortir des eaux douces : sitôt qu’ils sentent la mer, ils reculent et demeurent en eaux douces jusqu’à ce qu’ils soient capturés et tués. Et eux aussi, horrifiés par la mer, ils restent dans la douceur du sol natal, jusqu’à ce qu’ils soient capturés par le Diable pêcheur et conduits à la mort éternelle.

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De même, ils sont comme assiégés par le Diable sur leur propre terre, comme autrefois les juifs ont été assiégés à Jérusalem de sorte qu’ils ne pouvaient pas bouger. En effet, ils étaient liés à ce lieu. Lamentations 3. Il m’a entouré d’un mur, pour que je ne sorte pas ; Il m’a donné de pesantes chaînes (Lm 3:7). De même, le Diable agit avec ceux-ci comme le Pharaon avec les Israélites, auxquels il permettait de sortir un peu, mais pas jusqu’à la Terre promise. D’où Exode 8. Pharaon dit : Je vous laisserai aller, pour offrir au Seigneur, votre Dieu, des sacrifices dans le désert. Seulement, n’allez pas au-delà (Ex 8:28). Ainsi le Diable a bien permis que ceux-ci fassent un pèlerinage dans une terre voisine, mais il ne leur a pas permis d’aller jusqu’à la Terre promise. Ils ne sont pas comme Abraham : quand le Seigneur lui a dit Genèse 12. Va-t’en de ton pays, de ta patrie, et de la maison de ton père (Gn 12 :1), il a tout de suite obéi au Seigneur et s’en est allé dans un lieu qu’il ne connaissait pas avec un petit nombre de gens, sans intention d’en revenir, сomme il est dit dans Hébreux 11 (cf. He 11:8, 15-16). Or ces gens-là, alors que c’est pour le Seigneur et accompagnés d’une si grande et si glorieuse communauté, ils refusent d’aller dans un lieu bien connu dont ils doivent revenir rapidement avec l’aide du Seigneur. De même, ils ne peuvent se comparer à ces juifs, les fils de Ruben et les fils de Gad : tandis que leurs femmes, les enfants et les animaux étaient restés dans leurs possessions, ceux-ci ont traversé le Jourdain pour aller dans la Terre promise, en se battant virilement devant leurs frères jusqu’à ce qu’ils aient trouvé la Terre promise, comme c’est écrit dans Nombres 32 (cf. Nb 32:25-29). De même, les apôtres, après avoir laissé leurs pères, leurs parents et tout ce qu’ils avaient, sont partis et se sont exposés à d’innombrables labeurs et souffrances pour étendre la foi du Christ. Et ceux-là veulent plutôt que la foi du Christ périsse là où elle a pris naissance, que sortir de leur terre. De même, de très nombreux marchands partent de leur pays, traversent les montagnes, les collines, les mers et des dangers innombrables pour un profit temporel qui ne dure pas. Et ceux-là ne veulent pas quitter leurs maisons pour le salut éternel de leur âme.

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Contre un trop grand amour de sa patrie

De même, le Seigneur a quitté sa maison céleste pour nous, et a livré son âme bien-aimée aux dangers, comme il est dit dans Jérémie 12 (cf. Jr 12:7). Et ceux-là ne veulent pas sortir de leurs cabanes ou exposer leur vie à un effort quelconque. Mais comme il vient vite, le temps où il faudra bon gré mal gré les quitter et aussi la patrie, les siens et ses biens, et faire un pèlerinage dont même les saints ont peur ! Bernard : « Ô mon âme, quelle sera cette peur, quand, en laissant tout ce dont la présence t’est si agréable, toute seule tu sortiras pour une région inconnuea ? ». Ne serait-il pas mieux de quitter tout cela pour le Christ, un bref moment avec un grand mérite, plutôt que le laisser par nécessité à cause de la mort, dans l’éternité sans aucun bénéfice ? C’est pourquoi saint Bernardb a dit : « Est-ce que tu y renonces plutôt pour l’amour du Christ ou pour la mort ? ».

Invitation 23 Considérez, mes très chers, considérez comme elle est misérable, la patrie de ce monde, tout ce qu’il y a dedans, et comme elle va durer peu ! Considérez comme elle est heureuse cette patrie éternelle et riche de tous les biens, et laissez sur-le-champ notre patrie et toutes ses consolations, hâtez-vous pour le pèlerinage de la croix afin de parvenir à l’autre bienheureuse patrie ! Chant

a  b 

Cf. Bernard, Sermones de diuersis 28, 6 (p. 208). Cf. Bernard, Epistolae 103, 2 (vol. 7, p. 260).

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CHAPITRE 21 CONTRE LES MÉDISANCES DES HOMMESQUI ONT LE MÊME EFFET

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Quatrièmement, il faut noter que, parfois certains membres de la famille, quand ils pressentent que l’un d’eux envisage de prendre la croix, s’efforcent tout de suite de l’en empêcher en déconseillant le saint dessein. Et celui qu’ils ne tenteraient pas de soustraire à d’autres labeurs supportés pour ce monde ou pour le profit du siècle, ils s’efforcent de le soustraire au voyage salutaire au péril de son âme. Ils sont comme les fourchettes du Diable, avec lesquelles les démons arrachent les hommes au salut. Même s’ils sont vus comme des amis de l’homme, ils sont son pire ennemi. Michée 7. L’homme a pour ennemis les gens de sa maison (Mi 7:6). C’est pourquoi il ne faut pas leur demander conseil. Bernard : « Il demande un conseil aux amis, lui qui n’a pas entendu que ‘l’homme a pour ennemis les gens de sa maison’ »a. Au contraire, il ne faut pas les croire, s’il leur arrive de dissuader, alors qu’ils n’ont pas été consultés. Michée 7. Ne faites pas confiance à un ami (Mi 7:5). D’autres se moquent de tous ceux qui prennent la croix. Ils sont comme ces enfants qui se moquaient d’Élisée lorsqu’il montait de Jéricho à Béthel, en disant : Monte, chauve ! monte, chauve ! Mais à la suite de sa malédiction, deux ours sont sortis de la forêt et en ont déchiré quarante-deux (2 R 2:23-24). 4 Rois 2. Heureux sont ceux qui subissent ainsi la dérision, parce qu’ils ressemblent aux a 

Cf. Geoffroy d’Auxerre, De colloquio Simonis et Iesu 27 (p. 174, 36-38).

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Contre les médisances des hommes

apôtres. Parce qu’ils étaient pleins du Saint Esprit, les juifs se moquaient d’eux et disaient qu’ils étaient ivres. Actes 2. Mais d’autres se moquaient d’eux, et disaient : Ils sont pleins de vin nouveau (Ac 2:13). De même, ceux-ci subissent aussi la dérision à cause du voyage conçu par le Saint Esprit. De leur côté, ils doivent d’autant plus être confortés dans leur bon propos par ces moqueries, qu’ils en accumuleront de plus grands mérites. Quand ils font le bien et subissent le mal de la part de ceux qui donnent le mal pour le bien, ils pourront dire comme le prophète David au Seigneur : À cause de toi j’ai souffert l’opprobre, et la confusion a couvert mon visage (Ps 68:8), etc. De même, le zèle de ta maison, à savoir l’Églisea, m’a dévoré (Ps 68:10). D’autres calomnient l’affaire de la Terre sainte. À quoi sert – disent-ils – de faire de telles dépenses, que tant de gens meurent, de quitter tant de choses utiles pour s’occuper de cette affaire qui ne sera jamais menée jusqu’au bout, puisque que les Sarrasins sont si nombreux et dans leurs terres,  etc. Ils sont comme ces explorateurs, qui, en revenant de la Terre promise, ont brisé les cœurs du peuple par leurs critiques. Nombres 13. Et ils décrièrent, est-il dit, devant les enfants d’Israël le pays qu’ils avaient exploré. Le pays que nous avons parcouru dévore ses habitants ; tous ceux que nous y avons vus sont des hommes d’une haute taille. Et nous y avons vu les monstres, enfants d’Enoch, de la race des géants : comparés à eux, nous paraissions comme des sauterelles (Nb 13:33-34). Mais il faut considérer combien ces calomniateurs ont été gravement punis par le Seigneur. Tous ceux, est-il dit dans Nombres 14, qui, à leur retour, avaient fait murmurer tout le peuple en dénigrant le pays moururent frappés devant le Seigneur (Nb 14:3637). Non seulement eux-mêmes, mais aussi tous ceux qui murmurèrent des critiques. De même : Vos cadavres, dit-il, tomberont dans ce désert. Vous tous, qui avez murmuré, qui avez atteint l’âge de vingt ans (Nb 14:29). C’est pourquoi il ne faut pas écouter de tels détracteurs, mais nous devons plutôt être confortés par les paroles de Josué et Caleb, qui, en s’opposant aux détracteurs ont dit. Cf. Hugues de Saint-Cher, Postillae in universa Biblia. Ps. 68, 10 (vol. 2, f. 173r). a 

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Chapitre 21

Nombres 14. Ne craignez point les gens de ce pays, parce que nous pouvons les dévorer comme une bouchée de pain. Ils sont destitués de tout secours ; le Seigneur est avec nous, ne craignez point (Nb 14:9).

Invitation 24

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Voilà, mes très chers, vous voyez que certains s’efforcent par leurs mauvais conseils de dissuader les autres de prendre la croix. Ainsi saint Pierre, qui aimait le Seigneur charnellement, a voulu le retenir quand ce dernier lui a révélé sa passion : il l’a saisi et a commencé à lui faire des reproches, en disant : Que cela ne soit pas, Seigneur ! Cela ne t’arrivera pas (Mt 16:22). Mais le Seigneur l’a repoussé et lui a dit : Arrière, Satan ! tu es pour moi un scandale, car tu n’as pas de goût pour les choses de Dieu, mais pour celles des hommes (Mt 16:23). Matthieu 16. D’autres le font par la dérision. Mais le Seigneur a subi les moqueries, non de la part de quelques-uns ou d’étrangers, mais de tout son peuple. Je suis devenu, dit-il, la risée de tout mon peuple (Lm 3:14), c’est-à-dire, sur la croix. Lamentations 3. Mais il n’a pas renoncé pour cela à aller jusqu’à la croix pour autant. D’autres le font par la calomnie. Mais qui pourrait énumérer les calomnies, que le Christ a entendues et dont il a su qu’elles surviendraient à son égard pendant l’œuvre salutaire qu’il réalisait sur la terre ? Au lieu de m’aimer, dit-il, c’est-à-dire pour les choses, pour laquelles ils devaient m’aimer, ils me déchiraient (Ps 108:4), parce que je m’attachais au bien (Ps 37:21). Mais il n’a pas refusé la croix pour autant. Comme le Christ donc, qui n’a pas refusé d’aller à la croix, malgré le conseil de Pierre, son très grand ami, les moqueries du peuple ou quelque calomnie, vous aussi de même, vous ne devez pas refuser de venir vers la croix sous prétexte de ces médisances. Alors, venez donc ! Chant

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CHAPITRE 22 CONTRE LES MAUVAIS EXEMPLES DES AUTRESQUI ONT LE MÊME EFFET

Cinquièmement, il faut noter que certains, quand ils regardent ceux qui ne prennent pas la croix, se détournent de la prise de la croix à cause du mauvais exemple donné par ceux-ci, plutôt que d’y être engagés par le bon exemple du grand nombre qui a existé et existe encore : ils acceptent plus volontiers le mauvais exemple que le bon. Voilà qui est merveilleux : ils acceptent plus volontiers une bonne monnaie qu’une mauvaise, un bon repas qu’un mauvais, un bon vêtement qu’un mauvais, et ainsi de bien de choses, mais ils acceptent plus volontiers un mauvais exemple qu’un bon. Contre quoi il est dit : 3 Jean 1. Bien-aimé, n’imite pas le mal, mais le bien (3 Jn 1:11). De même, chaque scribe accepte plus volontiers un bon exemplaire qu’un moins bon pour le copier sur une peau morte. Et ceuxci acceptent plus volontiers un mauvais modèle, qu’un bon pour le transférer dans leur vie. Contre cela il est dit dans Hébreux 8. Aie soin de faire tout d’après le modèle qui t’a été montré sur la montagne (He 8:5). Il dit « sur la montagne », non « dans la vallée ». La vallée, ce sont des hommes au cœur méprisable, qui ne se dressent jamais vers ce qui est haut. Et la montagne signifie ceux qui se dressent pour agir en preux, comme le font les croisés. C’est leur exemple qui est à imiter et pas l’exemple de ceux qui fuient le labeur de la croix.

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De même, dans les activités temporelles, les hommes ne recherchent pas ceux qui agissent lentement : par exemple, ceux qui veulent tirer profit de leur travail n’ont que faire des somnolents ; le marchand qui veut prospérer n’a que faire de ceux qui restent à la maison ; l’artisan qui veut prospérer n’a que faire de oisifs pour les imiter. Donc, comme l’activité de l’âme est infiniment meilleure que l’activité temporelle, – à propos de cela Matthieu 16, Et que servirait-il à un homme de gagner le monde entier, s’il perdait son âme (Mt 16:26) ? –, quelle folie pour l’homme de vouloir suivre les exemples de ceux qui agissent pour leur salut avec négligence. De même, dans Deutéronome 18, il est dit. Tu n’apprendras point à imiter les abominations de ces nations-là (Dt 18:9), i. e. les choses abominables envers Dieu, que font ces nations. En plus, la tiédeur est abominable à Dieu. À propos de cela : Ainsi, parce que tu es tiède, je te vomirai de ma bouche (Ap 3:16). Apocalypse 3. Comment donc faudrait-il imiter ceux qui ne sont mus vers la croix par aucune empathie, mais restent toujours dans leur tiédeur ? De même, quand un roi rassemble une armée, moins il y a de gens à le suivre et plus il y en a à rester chez eux, plus il est en colère contre ceux qui restent, et plus il accepte le service de ceux qui le suivent. L’exemple dans Nombres 32 et Deutéronome 1 où Josué et Caleb furent prompts à suivre le Seigneur dans la Terre promise, tandis que les autres ont protesté. C’est pourquoi, quand ceux-ci ont été tués par le Seigneur dans le désert, ceux-là, quand ils sont entrés, ont été vivement glorifiés par le Seigneur. Pourquoi, alors, faut-il imiter ceux qui restent et pas ceux qui s’engagent ? De même, Josué 3. Josué a fait proclamer pour tout le monde pendant le passage du Jourdain en disant. Quand vous verrez l’arche du Seigneur, et les prêtres de la race de Lévi qui la porteront, levez-vous aussi, marchez après ceux qui précèdent (Jos 3:3). Il n’a pas dit « ceux qui restent », mais « ceux qui précèdent ». Pour la même raison, quand l’Église fait le passage de la mer, il faut imiter ceux qui traversent et non ceux qui restent. De même, quand le Seigneur a dit à Pierre – Jean, dernier chapitre – Suis-moi, c’est-à-dire dans la Passion, Pierre, en voyant Jean, a dit : Seigneur, que lui arrivera-t-il ? Jésus a répondu. Que

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Contre les mauvais exemples des autres

t’importe ? À savoir, à propos de Jean. Même s’il ne me suivait pas, toi, suis-moi (Jn 21:19-22). La volonté du Seigneur n’est pas que nous regardions ceux qui ne suivent pas, mais que nous suivions en les abandonnant. Enfin, si le Seigneur avait regardé vers ses disciples qui étaient avec lui, il ne serait pas allé à la croix, mais il aurait fui avec eux. Pourtant, il n’a pas fait ainsi, mais il est allé à la croix, tandis que ceux-ci l’ont fuie.

Invitation 25 C’est clair, mes très chers, d’après ce qui a déjà été dit : quelle sottise et quelle bassesse de cœur il y a à considérer les exemples de ceux qui restent et de les imiter. Ne soyez donc pas comme des chevaliers poltrons, qui restent avec les poltrons à la maison, mais comme des preux et des courageux, en imitant les actions des forts. Et venez à la croix en suivant l’exemple de celui qui a souffert pour nous, nous laissant un exemple afin que vous suiviez ses traces (1 P 2:21). Chant

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CHAPITRE 23 CONTRE L’AFFECTION EXAGÉRÉE ENVERS LES SIENSQUI A LE MÊME EFFET

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Sixièmement, il faut noter que certains sont mus par une affection si tendre envers les leurs, que non seulement ils manifestent le soin selon la loi divine aux gens de leurs familles, mais encore ils ne veulent pas les attrister par leur absence et croient qu’il leur sera intolérable d’être privés de leur présence : ils sont ainsi détournés de la croix. Comment, disent-ils, pourrais-je laisser ma mère, ma femme, mes fils, etc. ? Une affection de cette sorte est charnelle, elle a conduit le premier homme à commettre le péché par lequel le monde entier a été bouleversé. Augustin : « Adam ne voulait pas attrister [Ève] dont il pensait qu’elle dépérirait sans sa consolation, et qu’éloignée de lui, elle périrait complètement. Il n’a pas été vaincu par la concupiscence de la chair, qu’il n’avait pas encore éprouvée, mais par une bienveillance amicale, qui fait souvent offenser Dieu pour ne pas offenser un ami »a. De même, c’est ce qui rend l’homme indigne de Dieu. Matthieu 10. Celui qui aime son père ou sa mère plus que moi n’est pas digne de moi, et celui qui aime son fils ou sa fille plus que moi n’est pas digne de moi (Mt 10:37). Comment n’aime-t-il pas les siens plus que Dieu, celui qui délaisse pour eux l’affaire de Dieu ? a 

Cf. Augustin, De Genesi ad litteram 11, 42 (p. 378).

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Contre l’affection exagérée envers les siens

La même chose rend indigne non seulement de Dieu, mais aussi d’être son disciple. Luc 14. Si quelqu’un vient à moi, et s’il ne hait pas son père, sa mère, sa femme, ses enfants, ses frères, et ses sœurs, il ne peut être mon disciple (Lc 14:26). La même chose empêche la venue du Saint Esprit. Jean 16. Si je ne m’en vais pas, le consolateur ne viendra pas vers vous (Jn 16:7). Cela a été dit à cause de l’amour charnel qu’avaient les disciples envers le Christ. Mais si une telle affection envers le Christ empêchait la venue du Saint Esprit, bien pire est l’effet d’un amour excessif des amis charnels ! La même chose fait être sans le Christ. Luc 2. Ils le cherchaient parmi leurs parents et leurs connaissances sans le trouver, mais ils l’ont trouvé à Jérusalem, d’où suit : Ils retournèrent à Jérusalem et ils le trouvèrent (Lc 2:44-46). Bernarda : « Ô bon Jésus, si ta mère ne t’a pas trouvé parmi tes parents et connaissances, comment te trouverais-je parmi les miens ? ». Celui qui veut trouver le Christ, qu’il ne laisse pas la Terre sainte à cause de ses parents ! Et note que, parce que tant d’affection envers les siens fait tant de mal, le Christ venant dans le monde a pris grand soin de l’éteindre. D’où il est dit dans Matthieu 10. Je suis venu mettre la division entre l’homme et son père, entre la fille et sa mère, entre la belle-fille et sa belle-mère (Mt 10:35). Ainsi, de même que la nature, quand on a engendré un nouveau fils, rompt le cordon ombilical avec lequel l’enfant est lié à sa mère, de même le Christ, en faisant naître de nouveaux fils de la grâce, rompt cette affection qui lie les gens à la chair des leurs. Cela explique qu’en parlant à sa mère ou à propos de sa mère et de ses frères, il exprimait en mots prudents non pas la tendresse de l’affection, mais la sévérité. D’où Jean 2. Femme, qu’y a-t-il entre moi et toi (Jn 2:4) ? et Mathieu 12. Qui est ma mère, et qui sont mes frères (Mt 12:48) ? Cela pour donner un exemple contre la tendresse des affections de cette sorte. Cela explique aussi pourquoi il a dit à celui qui voulait le suivre une fois qu’il aurait enseveli son père. Matthieu 8. Laisse les morts ensevelir leurs morts (Mt 8:22). Grégoire : « Chacun doit s’éloigner de ses parents et ses proches, s’il veut se joindre plus véritablement à celui qui est le paa 

Cf. Bernard, Epistolae 107, 13 (vol. 7, p. 276, 7-8).

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rent de tousa ». C’est pour éteindre cette affection que [le Christ] fait de grandes promesses à celui qui renonce à ses parents à cause de lui. Matthieu 19. Et quiconque aura quitté, à cause de mon nom, sa maison, ses frères ou ses sœurs ou son père ou sa mère ou ses enfants ou sa femme, recevra le centuple et possédera la vie éternelle (Mt 19:29). Cela explique aussi qu’au temps de la passion, il a confié aussi sa mère à Jean, et il n’a pas renoncé à la croix, ni à cause de sa douleur, ni à cause de son amour, comme il est clair dans Jean 19 (cf. Jn 19:26-27), afin d’enseigner que, même s’il faut prendre soin des gens de la famille, ce n’est pas au point de refuser la croix à cause d’eux, pourvu qu’ils soient suffisamment pourvus. Regarde à quel point cette doctrine du Christ agit chez les saints. En effet, les apôtres du Christ eux-mêmes ont quitté pour cela non seulement des parents riches, mais aussi des parents pauvres. Exemple de Jacques et Jean. Matthieu 4. De là étant allé plus loin, dit-il, il vit deux autres frères, Jacques, fils de Zébédée, et Jean, son frère, avec Zébédée, leur père, et qui réparaient leurs filets (Mt 4:21-22). Dans cette réparation, selon Chrysostomeb, est signifiée la pauvreté. Et pourtant, laissant leurs filets et leur père si pauvre, ils le suivirent (Mt 4:22). De même, les martyrs, absorbés par l’amour du Christ, n’ont pas refusé le martyre au prétexte de leurs parents. Bel exemple ici de Marc et Marcellin, dont on lit dans la légende de saint Sébastienc que, lorsqu’ils reçurent la sentence de mort et que tous leurs biens devaient être confisqués, leurs amis obtinrent par leurs prières un sursis de trente jours pour les amener à céder ; amis, mère et père, épouse accompagnée des enfants, tous s’y employèrent tour à tour, recourant aux gestes et aux paroles capables de les amollir très efficacement, et cependant ils n’ont pas pu les dissuader du martyre. Ceux-là accomplissaient en eux-mêmes ce que l’apôtre dit, 2 Corinthiens 5. Nous ne connaissons plus personne selon la chair (2 Co 5:16). Et Deutéronome 33. Ils ont dit à son père et à sa mère : « Je ne Grégoire le Grand, Moralia in Iob 7, 30, 41 (p. 366, 74-76). Cf. Jean Chrysostome, Homiliae in Matthaeum 14, 2 (col. 219). Il dit que les frères étaient si pauvres qu’ils ne pouvaient pas avoir des filets neufs et étaient contraints de raccommoder leurs vieux filets pour s’en servir comme ils pourraient. c  Cf. Vincent de Beauvais, Speculum historiale 12, 10 (p. 459). a 

b 

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Contre l’affection exagérée envers les siens

sais qui vous êtes » et à ses frères « Je ne les connais pas », ils n’ont point connu leurs propres enfants (Dt 33:9). De même, qui pourrait énumérer combien de saints confesseurs, combien de saintes vierges, combien de saints religieux sont sortis de leur pays, de leur patrie, et de la maison de leur père (Gn 12:1), en oubliant leur peuple et la maison de leur père (Ps 44:11) pour l’amour du Christ et ont renoncé à cette affection. Et c’est bien. Si à cause de leurs femmes les gens quittent père et mère, il faut d’autant plus quitter les amis pour la cause du Christ !

Invitation 26 Voilà, mes très chers, voyez combien de maux résultent de cette affection charnelle ! De même, voyez quel soin le Christ a mis pour éteindre cette affection dans le monde ! De même, quel effet ont laissé ses soins chez les saints. Suivant leur exemple, que cette affection s’éteigne en nous, et que ni cette affection, ni les larmes des amis ne vous détournent de la croix ! Mais voyez ce qu’a fait Paul, quand ses amis voulaient par leurs larmes le détourner du chemin de Césarée à Jérusalem, à cause du danger des liens qu’Agabus lui prophétisait. Que faites-vous – dit-il –, en pleurant et en me brisant le cœur ? Je suis prêt, non seulement à être lié, mais encore à mourir à Jérusalem pour le nom du Seigneur Jésus (Ac 21:13). Actes 21. Ecoutez ce qu’aurait dit saint Jérômea à ce propos : « Même si – dit-il – ton petit neveu s’attache à ton cou, même si ta mère, avec ses cheveux épars et ses habits déchirés, te montre les seins qui t’avaient nourri, même si ton père se couche sur le seuil de la porte, passe par-dessus ton père, et, les yeux secs, cours à la bannière de la croix. Dans cette affaire, être cruel, ce n’est qu’une sorte de miséricorde ». Chant

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Jérôme, Epistulae 14, 2 (vol. 54, p. 46, 17 - p. 47, 4).

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CHAPITRE 24 CONTRE L’IMPUISSANCE FICTIVE QUI A LE MÊME EFFET

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Septièmement, il faut noter, que certains refusent la prise de la croix sous prétexte d’impotence. Il y a trois sortes d’impotence : celle qui vient de l’impuissance physique ; celle qui vient de l’impossibilité de faire les dépenses ; celle qui vient de l’embarras dans les affaires. Les premiers disent : « J’irais volontiers, mais je n’ai pas la force de supporter un tel effort ». Ils sont comme Mephibosheth qui s’excusait devant David de ne pas l’avoir suivi à cause de sa claudication. O roi mon seigneur, dit-il, mon serviteur m’a trompé. En effet, moi, j’avais dit : « Je vais faire seller mon âne, je le monterai et j’irai avec le roi », car ton serviteur est boiteux (2 S 19:26). 2 Rois 19. Bien que parfois une excuse de telle sorte soit vraie, souvent elle est fausse. Beaucoup de ceux qui l’invoquent, pour ce qui relève du monde se trouvent forts, et pour ce qui est de Dieu se font faibles : ils sont comme les ânes, qui sont forts de l’arrière et faibles de l’avant. Mais les hommes saints, qui ne font pas attention à l’arrière et se projettent vers l’avant, détournent leur espoir du monde et le reportent sur Dieu : ils transforment cette force pour les affaires séculières en force pour les affaires spirituelles. Esaïe 36 [sic]. Mais ceux qui se confient au Seigneur, renouvelleront leur force (Is 40:31), en celle dont parle le Psaume. C’est en toi que je conserverai ma force (Ps 58:10). Les deuxièmes disent : « J’irais volontiers, mais je n’ai rien qui me le permette ». Et bien que parfois ce soit vrai, pourtant, beaucoup de ceux qui le disent ne trouvent rien à dépenser pour

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Contre l’impuissance fictive

ce qui concerne Dieu, tandis qu’ils dépensent beaucoup pour ce qui concerne les plaisirs charnels. Ils sont comme le fils prodigue qui a tout gaspillé dans la luxure, et comme Ésaü qui a gaspillé son droit d’aînesse dans la gourmandise ou la vanité du monde (cf. Gn 25:29-34). Et ce sont ceux dont parle Osée 2. L’argent et l’or ont fait le Baal (Os 2:8), ce qui selon Papias signifie la vanité ou le service du Diable dans l’exécution de différentes malicesa. Et ils sont comme ceux à qui Ben-Hadad, le roi de Syrie, à savoir le Diable, qui est le roi de la terre d’en haut qui s’appelle la Syrieb, a dit : « Ton argent et ton or sont à moi (1 R 20:3) ». Et le frère du Diable, c’est-à-dire Achab, qui est considéré comme le frère, à savoir de son pèrec dont on dit « Vous avez pour père le Diable (Jn 8:44) », a répondu : Roi, mon seigneur, comme tu le dis, je suis à toi avec tout ce que j’ai (1 R 20:4), c’est-à-dire tout est à toi aussi. 3 Rois 20. Et note que la chair, le monde et les démons sont de très vils ennemis de Dieu et du Seigneur qui ne peuvent restituer rien de bon. Quelle disgrâce, alors, peut être de la part de Dieu dont nous tenons tout, contre l’homme qui dépense à leur service tout ce qu’il tient de Dieu, et ne dépense jamais rien à son service. C’est pourquoi le Seigneur se plaint d’après Ezéchiel 16. Tu as pris de mes vêtements, tu t’es fait des hauts lieux. Voilà la vanité du monde. Et tu t’es prostituée. Voilà le plaisir de la chair. Et de l’or et de l’argent, que je t’avais donné, et tu as fait des simulacres d’hommes (Ez 16:16-17). Voilà une œuvre diabolique, à savoir l’idolâtrie. Et un peu après : Malheur, malheur а toi ! dit Dieu le Seigneur (Ez 16:23). Ce n’est pas ce qu’ont fait David et son peuple, qui, en offrant l’or, l’argent et des biens innombrables dans l’édifice qui est la maison du Seigneur, disent. 1 Chroniques 29. Tout est à toi, et nous t’offrons ce que recevons de ta main (1 Ch 29:14). D’après leur exemple, au lieu de folles dépenses, il faut dépenser au service du Seigneur les biens reçus de lui. Cf.  Papias le Vocabuliste, Elementarium doctrine rudimentum “B” (f. 19va). b  Cf. Jérôme, Liber interpretationis hebraicorum nominum. Gen. S (p. 72 = Lagarde p. 11, 12) ; Iud. S (p. 101 = Lagarde p. 33, 17) ; Act. S (p. 149 = Lagarde p. 71, 17) ; Gal. S (p. 155 = Lagarde p. 76, 22). c  Cf. Jérôme, Liber interpretationis hebraicorum nominum. III Reg. A (p. 110 = Lagarde p. 41, 3). a 

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Chapitre 24

Les troisièmes disent : « J’irais volontiers, mais j’ai telle ou telle affaire que je ne peux pas laisser avant de l’avoir finie ». Ceux-ci sont comme ceux dont parle Luc 14. Invités à un dîner, ils se sont excusés pour des affaires différentes, à savoir, pour une maison de campagne, pour des bœufs, pour une épouse, mais malheur à eux, parce qu’aucun d’entre eux n’a goûté ce dîner glorieux, comme il est dit ici (cf. Lc 14:16-24). Et il leur faut en avoir peur. De telles affaires séculières sont un filet qui à la fin trompe, ce que dit Job 18. Car il met son pied sur un filet, il marche dans les mailles. Il est saisi au piège par le talon (Jb 18:8-9). C’est pourquoi les hommes saints préfèrent les affaires de Dieu et de leurs âmes aux affaires du siècle et prennent garde aux engagements de cette sorte. 2 Timothée 2. Personne, en s’engageant dans l’armée de Dieu ne s’embarrasse nullement des affaires du monde (2 Tm 2:4). Et si par hasard ils tombent dans pareils liens, comme une bête sauvage dans le filet, ils les rompent autant qu’ils peuvent. À  propos de cela : Brisons leurs liens (Ps 2:3).

Invitation 27

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Soyez attentifs, mes très chers, que dans de grands dangers, par exemple quand les ennemis arrivent, personne ne feigne d’être impuissant, personne ne néglige d’acheter de ses pauvres moyens les armes qu’il peut acheter, et personne n’hésite à s’abstenir de petites affaires en faveur d’une affaire si importante. Sachant qu’une telle nécessité urge, puisque que les ennemis de la foi arrivent, que le faible dise : « Je suis fort ! » (Jl 3:10), comme il est dit dans Joël 3. Celui qui n’a point d’épée, qu’il vende sa tunique, même s’il n’a rien d’autre, et qu’il achète une épée (Lc 22:36), comme il est dit dans Luc 22. Et en quittant même des affaires nécessaires, comme il est dit dans Joël 3, transformez vos socs de charrue en épées, et vos hoyaux en lances (Jl 3:10), qu’il vienne à la croix pour secourir la foi, où réside son salut et le salut de tous ceux qu’il faut sauver. Chant

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CHAPITRE 25 CONTRE LE MANQUE DE FOIQUI A LE MÊME EFFET

Huitièmement, il faut noter que la foi catholique tient que pour un péché mortel l’homme encourt la peine éternelle. Matthieu 25. Et ceux-ci iront au supplice éternel (Mt 25:46). Mais quand il fait pénitence, même si la faute est pardonnée, toute la peine n’est pas enlevée, sauf si la contrition est si grande que cela fait une punition suffisante. Mais dans ce cas on agit avec lui avec une telle miséricorde que la peine éternelle est commuée en transitoire, et si on ne subit pas la pénitence dans le siècle, il faudra la subir dans le purgatoire, et elle ne sera pas légère, mais très dure, comme il est dit dans 1 Corinthiens 3. Il sera pourtant sauvé, mais comme au travers du feu (1 Co 3:15). Si on confère à quelqu’un une pleine indulgence, il est pleinement libéré par elle de toute peine transitoire, à laquelle il restait obligé après la contrition mentionnée plus haut, d’après ce qui a été dit à Pierre. Tout ce que tu délieras sur la terre sera délié dans les cieux (Mt 16:19). Matthieu 16. Voilà la foi que tous les maîtres enseignent de maintenir, en le prouvant par la raison, par la Bible et par les dits des saints. C’est la foi que tient toute l’Église, et avec laquelle jamais aucun saint n’a été en désaccord depuis l’origine du monde. C’est la foi, à laquelle certains résistent sur quelques points et d’illustres catholiques les ont convaincus qu’ils étaient hérétiques et ont jugé qu’ils devaient être évités par tous les fidèles. Mais il y a des gens, proches de l’hérésie, qui vacillent sur cette foi et ne font pas œuvre de foi vraie et vive,

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Chapitre 25

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mais plutôt des œuvres d’infidèles : qui ne croient pas aux peines futures de l’enfer ou du purgatoire, ne font pas pénitence pour leurs péchés et ne courent pas à la recherche de remèdes contre les peines futures. Esaïe 21. L’incrédule agit avec infidélité (Is 21:2). Ils sont comme la première femme : questionnée par le Diable, elle a vacillé à propos de la menace de mort faite par le Seigneur, en disant : « de peur que nous ne mourions (Gn 3:3) ». Et la peine annoncée est venue et la femme a condamné avec elle le monde entier. Ils sont comme les incrédules au temps de Noé : quand Noé eut foi en la menace qui lui était adressée et s’est construit une arche pour le salut (He 11:7), comme il est dit dans Hébreux 11, ces incrédules, comme il est dit dans 1 Pierre 3 (1 P 3:20), mangeaient, buvaient, se mariaient jusqu’à ce que le déluge vint et les fit tous périr (Lc 17:27), comme il est dit dans Luc 18 [sic]. Ils sont comme les gens de Sodome de la famille de Lot : quand, sur ordre des anges, Lot leur a annoncé la perdition de la ville et leur a conseillé d’en sortir, à leurs yeux, il parut plaisanter (Gn 19:14), comme il est dit dans le Genèse 19. Incrédules à ses paroles (Ps Hebr 104:28), ils mangeaient, buvaient, achetaient, vendaient, plantaient, bâtissaient (Lc 17:28). Mais le jour où Lot sortit de Sodome, parce qu’il avait foi dans la menace annoncée, le Seigneur fit tomber du ciel une pluie de feu et de soufre, qui les fit tous périr (Lc 17:29), comme il est dit en Luc 18 [sic]. Malheur, malheur à ces imitateurs : comme dit le proverbe commun à propos du fou, ils ne croient pas tant qu’ils n’aient pas reçu. Ils sont pires que les Ninivites, dont le Seigneur avait décidé de détruire la ville, mais ceuxci, sur la prédication d’un seul homme, ont cru dans le Seigneur, se sont hâtés vers le remède de la pénitence et ont évité la peine dont ils étaient menacés, comme il est dit dans Jonas 3. Mais ceux-là ne croient même presque pas à l’univers de l’Église tout entière sur les peines à venir, ils ne recourent pas au remède de la pénitence et des indulgences, et, au jour du Jugement, ils recevront ainsi des peines plus graves que les Ninivites infidèles. Luc 6 [sic]. Les hommes de Ninive se lèveront, au jour du Jugement, avec cette génération et la condamneront, parce que, eux, ils s’étaient repentis à la prédication de Jonas (Lc 11:32).

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Contre le manque de foi

En outre, il faut noter le peuple juif, spécialement remarqué par son incrédulité, d’après ce qui est dit dans Jérémie 5. Le cœur de ce peuple est devenu incrédule (Jr 5:23), encourt trois maux par suite de son incrédulité. Le premier fut l’exclusion de la Terre promise qui lui a été promise. Hébreux 3. Ils ne purent entrer dans son repos à cause de leur incrédulité (He 3:18-19). Le deuxième fut la provocation de Dieu à fouetter la colère. Ecclésiastique 16. La colère s’embrassait contre la nation incrédule (Si 16:7). Le troisième fut leur destruction finale, parce qu’ils ne croyaient pas aux saints prophètes qui les menaçaient de la part de Dieu. Un jour ils ont été jetés au-delà des montagnes Caspiennesa, un jour à Babylone, un jour ils ont été détruits sur leur terre, et maintenant, ce qui est bien clair, ils sont dispersés et jetés de par le monde entier. Baruch 1. Nous avons été incrédules envers le Seigneur notre Dieu. Aussi des maux nombreux se sont-ils attachés à nous, avec les malédictions que le Seigneur avait exprimées à Moïse (Ba 1:19-20). Les chrétiens incrédules doivent avoir peur qu’il leur arrive dans la réalité ce qui est arrivé à ceux-là dans l’image, c’est-àdire, qu’ils n’accèdent pas à la vie éternelle, qu’ils ne rencontrent la grande colère de Dieu, et qu’ils ne soient finalement détruits, condamnés dans le corps et dans l’âme. Jean 3. Celui qui ne croit pas au Fils ne verra point la vie éternelle. Voici le premier. Mais la colère de Dieu sur lui (Jn 3:36). Voici le deuxième. Et le fait que ce n’est pas pour le moment, mais finalement, c’est pourquoi il dit « demeure »b. Voici le troisième. Aux bons et fidèles croisés est promis le contraire, à savoir, la vie éternelle, une large miséricorde ll s’agit de la transmigration forcée des juifs en Hyrcanie par Artaxerxès III (358/359-338 a.c.) après sa guerre en Égypte. L’information se trouve chez Paul Orose (lib. 3, cap. 7, par. 6 : « Tunc etiam Ochus, qui et Artaxerxes, post transactum in Aegypto maximum diuturnumque bellum plurimos Iudaeorum in transmigrationem egit atque in Hyrcania ad Caspium mare habitare praecepit ») (Paul Orose, Historiarum adversum paganos libri septem, p. 151-152) et la traduction du Chronicon d’Eusèbe faite par saint Jérôme (voir : Paul Orose, Seven Books of History against the Pagans, trad. Fear, Liverpool, 2010, p. 119-120). b  Cf. Hugues de Saint-Cher, Postillae in universa Biblia. Ioh. 3, 36 (vol. 6, f. 302v). a 

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Chapitre 25

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de Dieu, la libération de toutes les peines futures. Parce que tant de maux découlent de l’incrédulité de cette sorte, il est dit justement dans Ecclésiastique 1. Ne sois pas incrédule à la crainte de Dieu (Si 1:36), ce qui veut dire aux choses qui peuvent conduire à la crainte de Dieua. Ceux qui ont peur du fait de cette crainte, sont conduits au remède contre les peines futures. Ecclésiastique  2. Ceux qui craignent le Seigneur respecteront ses commandements, et ils garderont patience, c’est-à-dire dans l’adversitéb, jusqu’à sa visite, en disant : « Si nous ne faisons pénitence, c’est dans les mains de Dieu que nous tomberons, et non dans les mains des hommes ». Car autant est élevée la majesté de sa colère, autant est grande sa miséricorde envers l’homme (Si 2:21-23). Autrement dit, nous devons bien faire notre pénitence du fait de cette crainte, parce que de même qu’est grande sa colère envers les impénitents, de même est grande sa miséricorde envers les pénitents. Pour cette raison, les hommes saints, croyant fermement en ce qui est dit des peines futures, pour les éviter, choisissent d’être punis plutôt dans ce monde. D’où Habacuc 3. Que la putréfaction pénètre dans mes os et qu’elle me consume au dedans de moi pour que je me repose au jour de la tribulation (Ha 3:16). Et Job 10. Laisse-moi donc pleurer un instant ma douleur avant que je m’en aille dans cette région ténébreuse et couverte de l’obscurité de la mort (Jb 10:20-21). C’est-à-dire plutôt ceci que cela. Et Augustinc : « Brûle ici, Seigneur, coupe ici ».

Invitation 28 Voilà, mes très chers, vous voyez à quel point les hommes saints non seulement ont cru, mais ont eu aussi crainte des peines futures et, les craignant, ils ont recouru aux remèdes contre elles dans le présent. Alors, une fois oublié la sottise des incrédules, Cf. Hugues de Saint-Cher, Postillae in universa Biblia. Eccli. 1, 36 (vol. 3, f. 174r). b  Cf. Hugues de Saint-Cher, Postillae in universa Biblia. Eccli 2, 21 (vol. 3, f. 175r). c  Citation non trouvée dans les ouvrages d’Augustin, mais attribuée à Augustin par Humbert. a 

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Contre le manque de foi

imitez leur sagesse, parce que comme il est dit dans Ecclésiastique 33. L’homme de sens croira à la loi de Dieu (Si 33:3). Entendez encore la même chose, qui est dite dans le même livre, 2. Vous qui craignez le Seigneur, croyez en lui, et votre récompense ne sera pas perdue (Si 2:8). Et ce qu’a dit Josaphat au peuple. 2 Chroniques 20. Confiez-vous en le Seigneur, votre Dieu, et vous serez assurés ; croyez à ses prophètes, et tout vous réussira (2 Ch 20:20). Dans la foi et dans l’espérance que, grâce à la croix vous aurez une pleine indulgence des péchés, que vous échapperez à toutes les peines du siècle futur, et que vous parviendrez jusqu’à la joie éternelle, venez vers la croix ! Chant

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CHAPITRE 26 DE NEUF CHOSES QUI FONT LA CONSOLATION DES PÈLERINSDE CETTE SORTE

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À propos de la consolation des pèlerins, il faut noter que pour alléger le dégoût de l’effort et de la fatigue, les pèlerins ont d’habitude besoin de certaines consolations. Il y a plusieurs sources, d’où peuvent se réaliser des consolations diverses pour ces pèlerins. La première est la joie de la conscience. Nombreux sont ceux qui ne se sont jamais pleinement confessés, qui n’ont jamais fait de vraie pénitence, n’ont jamais été absous de plusieurs excommunications ou de vices quelconques, n’ont jamais réparé les dommages faits aux autres, n’ont jamais entretenu une bonne concorde avec leurs voisins. Pour ces gens-là, il se peut que la joie soit venue d’une occasion de l’extérieur, tandis que la conscience les ronge toujours à l’intérieur. Pourtant, les bons pèlerins croisés se libèrent de tout ceci, et parviennent ainsi à la joie de la conscience. Rares sont ceux qui l’ont éprouvée auparavant et elle est si grande que l’Apôtre l’appelle une « quasi-gloire ». Notre gloire, dit-il, c’est ce témoignage de notre conscience (2 Co 1:12). O, comme les pèlerins ont matière non seulement à se réjouir, mais aussi à chanter et dire ces paroles du psalmiste. Tes préceptes étaient le sujet de mes cantiques, à savoir ils me donnaient matière à chanter, dans le lieu de mon pèlerinage (Ps 118:54). La deuxième source est l’assurance du salut. Il en est beaucoup qui, en vivant dans les péchés, sont assurés de leur damnation, si la

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mort vient à l’improviste. D’autres ont un statut douteux, même s’ils font d’autres pèlerinages ou bien d’autres bonnes choses. Mais il y en a d’autres qui sont complètement sûrs du salut à condition de faire pénitence, et tels sont les bons croisés. S’il leur arrive de mourir en chemin, ils s’envolent tout de suite au ciel. D’où ce qu’on lit dans les miracles de la sainte Viergea : tandis que des croisés traversaient la mer, une tempête se leva, leur navire se cassa et certains, qui trouvèrent leur salut dans un canot, virent autant de colombes blanches qui montaient dans le ciel que de croisés noyés dans la mer. O, quelle consolation pour ce pèlerin qui, en toutes sortes de dangers, de mer, de guerre, de maladie, de mort soudaine, est sûr de son salut ! Proverbes 15. L’esprit tranquille est comme un festin continuel (Pr 15:15). La troisième est une bonne société. Comme la solitude est pour un pèlerin une occasion de tristesse, de même, une bonne société : quand les uns sont en avant et les autres suivent, les uns sont à droite et les autres à gauche, les uns chantent et les autres racontent les rumeurs, les uns jouent tandis que d’autres aident ou confortent les autres, etc., cette société est d’habitude une grande consolation. Peut-il y avoir une meilleure société que celle des pèlerins croisés, dans laquelle il y a tant de grands, tant de nobles, tant de clercs, tant de bons hommes, une telle multitude de peuple ? Une société, dis-je, dans laquelle les riches aident les pauvres, les forts aident les faibles, les grands ne font pas des difficultés aux petits, mais où tout le monde s’aide mutuellement tour à tour ? C’est une société où il n’y a pas de jalousie, pas de discorde et pas d’injustice réciproque, mais où tout le monde est unanimement au service de Jésus Christ. Ah ! – dit-on – qu’il est bon et agréable pour des frères d’habiter ensemble ! (Ps 132:1) Mais c’est tellement plus agréable quand tant de frères sont ensemble dans le Christ, vont ensemble, traversent ensemble, montent ensemble les tentes, attaquent ensemble les ennemis du Christ, sont ensemble prêts à accomplir la volonté du Seigneur.

Cf. Vincent de Beauvais, Speculum historiale 7, 88 (p. 253) et Césaire de Heisterbach, Dialogus Miraculorum 3, 39 (p. 166-168). a 

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La quatrième est le commandement des anges. Il y a en effet des anges qui sont députés auprès de chacuna, selon ceci : Il a commandé pour toi à ses anges (Ps 90:11). D’autres dirigent les armées divines, selon ce que dit un ange dans Josué 5. Je suis le chef de l’armée du Seigneur (Jos 5:14). On peut croire pieusement que l’armée chrétienne, qui se dirige vers la Terre sainte contre les infidèles, a pour chef un ange important, comme ce fut le cas de l’armée des juifs lorsqu’elle arrivait dans la même terre pour en chasser les Gentils, d’après ce qui est dit dans Exode 32. Va donc, conduis le peuple où je t’ai dit. Voici, mon ange marchera devant toi (Ex 32:34). Quand la présence d’un grand chef mortel suffit à la consolation de toute l’armée, quelle doit être la consolation de l’armée des pèlerins, qui ont un tel chef céleste ? C’est pourquoi il est dit ceci dans 2 Maccabées 11 : lorsque les Gentils, à leur entrée en Judée, assiégèrent une forteresse, qui était distante de cinq stades de Jérusalem et que Judas avec ses hommes et le peuple voulurent aller à leur secours, ils prièrent le Seigneur d’envoyer un bon ange pour le salut d’Israël et un cavalier apparut qui marchait devant eux, portant un vêtement blanc et des armes d’or et brandissant une lance. Celui-ci peut être considéré comme un ange. Alors ils bénirent tous ensemble le Seigneur, et ils s’animèrent de courage, prêts à attaquer non seulement les hommes et les bêtes les plus farouches, mais aussi les murailles de fer (2 M 11:5-9). Voilà d’où leur vint une telle consolation. La cinquième, ce sont les prières de l’Église. Presque toute l’Église prie pour ces pèlerins, comme elle priait aussi pour Pierre, quand il était dans la prison. On dit que quand le roi Philippe traversa la mer pour aller au secours de la Terre sainte, une grande tempête s’est levée la nuit, et le roi Philippe avait souvent demandé aux marins « quelle heure de la nuit est-il ? », on avait fini par lui répondre que c’était plus que le milieu de la nuit ; il consola tout le monde en disant : « N’ayez plus peur, parce qu’en France, les religieux et d’autres bons hommes se sont levés et prient pour nous »b. Еt ils ont été lia  Il s’agit apparemment de l’idée de l’existence des anges gardiens individuels (p.  ex. D.  Keck, Angels and Angelology in the Middle Ages, New-York, Oxford, 1998, p. 161-165). b  Cf. L’estoire de Eracles empereur 26, 6 (p. 181).

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bérés. Ce n’est pas un miracle, si, grâce à une telle confiance dans les prières de l’Église, il a été consolé, parce qu’elles sont très efficaces. Matthieu 18. Je vous le dis, si deux d’entre vous s’accordent sur la terre pour demander quelque chose, elle leur sera accordée par mon Père qui est dans les cieux (Mt 18:19). Quand c’est toute l’Église qui demande, combien plus il faut avoir confiance que s’accomplira ce qu’elle demande, et combien plus cela doit consoler ceux pour qui l’on prie ! La sixième est le soutien des saints. Dans 2 Maccabées 15, il est dit qu’Onias, qui était un très grand prêtre et un homme bon, exercé dès son enfance dans les vertus, est apparu à Judas qui allait à la bataille contre Nicanor infidèle, en tendant les mains et en priant pour le peuple des juifs. De même Jérémie, un homme respectable par l’âge et par la gloire, l’ami de ses frères et du peuple d’Israël pour lequel il priait beaucoup, étendit la main droite et donna à Judas un glaive d’or, en disant : « Prends ce glaive comme un saint présent de Dieu, avec lequel tu renverseras les ennemis de mon peuple » (2 M 15:1216). Si les saints de l’Ancien Testament prenaient tant de soin de ce peuple d’autrefois qui allait se battre contre les infidèles, comment peut-on ne pas croire davantage que les apôtres et les autres saints qui ont engendré le peuple chrétien dans le Christ (cf. 1 Co 4:15), aident l’armée chrétienne qui va contre les infidèles ? On lit dans l’Histoire Antiochiennea qu’après la prise d’Antioche, saint Luc est apparu à un Syrien à Tripoli et lui dit qu’il venait d’Antioche, où le Seigneur avait rassemblé l’armée du ciel, les apôtres et les martyrs pour qu’ils se battent avec les nôtres contre les Turcs. Et peu après les nôtres ont remporté une victoire merveilleuse et inespérée sur les Turcs. D’où il est dit dans le Psautier. J’ai élevé mes yeux vers les montagnes, à savoir vers les saintsb, d’où me viendra le secours (Ps 120:1). O, quelle joie et quelle allégresse peuvent avoir ceux qui ont confiance en une telle aide ! C’est pourquoi il est dit dans 2 Maccabées 15 : Un songe digne de foi étant rapporté (2 M 15:11), à savoir sur l’aide d’Onias et Jérémie, tout le monde s’est réjoui. a  Cf.  Étienne de Bourbon, Tractatus de diuersis materiis predicabilibus III, 6, 10 (p. 252, 1117-1133) ; voir aussi Raymond d’Aguilers, Historia Francorum qui ceperunt Hierusalem 18 (p. 117-118). b  Cf. Glossa ordinaria. Ps. 120, 1 (vol. 2, p. 623 margin. et interlin.) ; Hugues de Saint-Cher, Postillae in universa Biblia. Ps. 120, 1 (vol. 2, f. 323r).

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La septième, c’est le souvenir des anciennes merveilles qu’il [Dieu] a fait aux pèlerins de cette sorte. Qui en effet pourrait rapporter combien de miracles il a fait et lesquels, combien de glorieuses victoires il a données et lesquelles, combien de visions célestes et lesquelles il a montré pour ce peuple venant d’Égypte suivant son mandat pour nettoyer la Terre sainte des Gentils et l’acquérir à son service ? Qui veut savoir comment il a fait des miracles similaires pendant le premier pèlerinage des croisés, quand toute la Terre sainte a été acquise, et comment il a fait de même quand le roi des Francs Philippe et le roi des Anglais Richard ont récupéré Acre, occupée par Saladin auparavant, et ont acquis quelques autres lieux, qu’il lise l’Histoire Antiochienne et l’Histoire Transmarine. O, quelle consolation peut en naître pour nos pèlerins ! La main du Seigneur est-elle raccourcie au point qu’elle ne puisse pas faire de même ? C’est ce que Moïse disait au peuple de mémoriser. Deutéronome 7. Rappelle-toi de ce que le Seigneur, ton Dieu, a fait à Pharaon, le roi d’Égypte, et à toute l’Égypte, les grandes blessures que tes yeux ont vues, les signes et les prodiges, la main forte et le bras étendu, quand le Seigneur, ton Dieu, t’a fait sortir : ainsi fera le Seigneur, ton Dieu, à tous les peuples que tu redoutes (Dt 7:18-19). C’est ce que Judas Maccabée rappelait pour la consolation du peuple. 2 Maccabées 15, où il est dit. Maccabée espérait toujours avec une entière confiance que le secours du ciel lui serait envoyé. Et il exhortait les siens à ne pas craindre, mais à se souvenir des aides qu’ils avaient reçues du ciel, et à espérer que le Tout-Puissant leur procurerait la victoire (2 M 15:7-8). Le huitième est la condition de la terre vers laquelle se dirigent ces pèlerins. Cette terre sainte est appelée terre désirable dans le Psaume (cf. Ps 105:24). Qui ne désire pas voir cette terre, d’où nous tirons notre origine en Adam ; la terre d’où découle notre régénération baptismale ; la terre, dis-je, d’où vient notre salut, que le Seigneur y a accompli ? Je me suis réjoui, est-il dit, de ce qui m’a été dit : Nous irons dans la maison du Seigneur (Ps 121:1). Pourquoi, sinon parce que c’est une maison désirée ? Pour la même raison, les pèlerins doivent se réjouir, en examinant à quel point il doit être désirable pour chaque chrétien de voir cette terre où conduit ce pèlerinage.

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La neuvième est la confiance en l’aide de Dieu. On ne dit pas que le Seigneur est avec ceux qu’il ne veut pas aider. Deutéronome 2 [sic]. N’entreprenez point de descendre et de combattre, parce que je ne suis pas avec vous, et que vous succomberez devant vos ennemis (Dt 1:42). En revanche, il est dit qu’il est avec quelqu’un, quand il l’aide. Jérémie 30. Et tu n’auras personne à redouter, car je suis avec toi (Jr 30:10-11), c’est-à-dire pour t’aider. On peut pieusement croire que le Seigneur qui était avec son armée d’autrefois montant vers la Terre promise, selon ce mot de l’Exode 33. Je ferai ce que tu me demandes (Ex 33:17), c’est-à-dire, « je vais aller moi-même devant vous, moi qui ai promis d’être avec mes fidèles jusqu’à la fin du monde (Mt 28:20) » – Matthieu, dernier chapitre –, doit être avec cette armée des pèlerins pour les aider. Si pourtant pour un pèlerin, c’est une consolation d’avoir quelqu’un avec lui, sur l’aide duquel il peut compter avec confiance en toute nécessité, ce doit être une consolation d’autant plus grande d’avoir indéfiniment avec lui l’aide de Dieu ! C’est pourquoi il est dit dans Aggée 2 au peuple qui montait à Jérusalem. Fortifie-toi, peuple entier du pays, dit le Seigneur des armées, et travaillez, car je suis avec vous (Ag 2:5).

Invitation 29 O, bienheureux pèlerins, qui ont la joie de la conscience, qui sont sûrs que le salut se réalisera en toute circonstance, qui agissent dans une si bonne société, qui sont sous le commandement des anges, qui sont gratifiés des prières de l’Église, qui sont protégés par le secours des saints, qui sont dans ce pèlerinage que Dieu a illustré autrefois de tant de miracles, qui se dirigent vers la terre que tous les fidèles désirent voir et qui peuvent avoir confiance dans le fait d’avoir Dieu avec eux ! Qui veut prendre part à de si bienheureuses consolations, qu’il vienne et qu’il reçoive le signe de la croix, et qu’il se joigne à ces pèlerins ! Chant

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Va-t’en de ton pays, de ta parenté et de la maison de ton père, et viens dans le pays que je te montrerai (Gn 12:1). Genèse 12. Jacob fit venir sa maisonnée et parla ainsi : « Ôtez les dieux étrangers qui sont au milieu de vous, purifiez-vous, et changez de vêtements. Levez-vous, et montons à Béthel pour dresser un autel au Seigneur » (Gn 35:2-3). Genèse 35. Amalek vint combattre Israël à Raphadim. Alors Moïse dit à Josué : « Choisis des hommes, sors, et combats les Amalécites » (Ex 17:8-9). Exode 17. Note ce qui précède et qui suit. Que celui qui est pour le Seigneur se joigne à moi ! (Ex 32:26), à savoir, pour assumer la vengeance sur les idolâtres. Exode 32. La nuée s’éleva de dessus le tabernacle de l’alliance. Et les enfants d’Israël partirent selon l’ordre fixé (Nb 10:11-12). Nombres 10. Alors Moïse dit à Helyab, fils de Raguël Madian, son parent : « Nous allons au lieu que le Seigneur doit nous donner ; viens avec nous, afin que nous te fassions du bien, car le Seigneur a promis de faire du bien à Israël » (Nb 10:29). Nombres 10. Caleb fit taire le peuple, qui murmurait contre Moïse. Il dit : « Montons, emparons-nous du pays, parce que nous pourrons l’obtenir ! » (Nb 13:31). Nombres 13.

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Des thèmes empruntés à toute la Bible

Ne soyez point rebelles contre le Seigneur, et ne craignez point les gens de ce pays, parce que nous pouvons les dévorer comme une bouchée de pain. Ils sont destitués de tout secours ; le Seigneur est avec nous, ne craignez point (Nb 14:9). Nombres 14. En ce temps-là, Moïse a donné des ordres à Josué en disant : « Tes yeux ont vu tout ce que le Seigneur, notre Dieu, a fait à ces deux rois : ainsi fera le Seigneur à tous les royaumes contre lesquels tu vas marcher. Ne les crains point ; car le Seigneur, notre Dieu, combattra pour nous » (Dt 3:21-22). Deutéronome 3. Si tu entends dire dans l’une des villes que t’a données pour demeure le Seigneur, ton Dieu : « Des enfants de Bélial sont sortis de la bonne voie, et ont perverti les habitants de ta ville, en leur disant ‘Allons, et servons d’autres dieux, qui vous sont inconnus !’ », informez-vous avec soin et examinez attentivement la vérité de la chose, et si vous trouvez que ce qu’on vous avait dit est vrai, et que cette abomination a été commise effectivement chez toi, alors tu frapperas du tranchant de l’épée les habitants de cette ville, et tu la détruiras avec tout ce qui s’y trouve, même les animaux (Dt 13:12-15). Deutéronome 13. Fortifiez-vous et ayez courage ! Ne craignez point et ne soyez point effrayés à leur vue, car le Seigneur, ton Dieu, est ton chef, il ne te délaissera point, il ne t’abandonnera point (Dt 31:6). Deutéronome 31. Josué monta de Guilgal, lui et toute l’armée de ses combattants qui étaient très vaillants. Le Seigneur dit à Josué : « Ne les crains pas, je les ai livrés entre vos mains, et nul d’entre eux ne pourra te résister » (Jos 10:7-8). Josué 10. Jusqu’à quand demeurerez-vous paresseux, sans entrer vous mettre en possession de la terre que le Seigneur, le Dieu de vos pères, vous a donnée ? (Jos 18:3) Josué 18. Vous qui vous êtes exposés volontairement au péril, bénissez le Seigneur ! (Jg 5:9) Juges 5. Les étoiles, demeurant dans leur rang et dans leur course, ont combattu contre Sisara (Jg 5:20). Juges 5. Tandis que Samuel offrait son holocauste, il arriva que les Philistins commencèrent le combat contre Israël, et le Seigneur fit éclater ce jour-là son tonnerre avec un bruit épouvantable sur les Philistins,

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et il les frappa de terreur. Ainsi ils furent défaits par les fils d’Israël (1 S 7:10). 1 Rois 8 [sic]. Aussitôt que Saül eut entendu ces paroles, l’Esprit du Seigneur se saisit de lui, et il entra dans une très grande colère. Il prit ses deux bœufs, les coupa en morceaux, et les envoya par des messagers dans toutes les terres d’Israël, en disant : « C’est ainsi qu’on traitera les bœufs de quiconque ne sortira et ne suivra pas Saül et Samuel ». Alors le peuple fut frappé de la crainte du Seigneur, et ils sortirent tous en armes comme un seul homme (1 S 11:6-7), à savoir, contre ceux qui avaient attaqué leur peuple. 1 Rois 11. Note ce qui précède et ce qui suit. Voici ce que dit le Seigneur des armées : « Je me suis souvenu de tout ce que Amalek a fait à Israël, et de la manière dont il s’est opposé à lui dans son chemin lorsqu’il sortait d’Égypte. Maintenant va, frappe Amalek, et détruisez tout ce qui est à lui » (1 S 15:2-3). 1 Rois 15. On vint dire à David : « Voici, les Philistins ont attaqué Keïla, et ils pillent les aires ». David consulta le Seigneur, en disant : « Iraije, et battrai-je ces Philistins ? ». Et le Seigneur lui répondit : « Va, et bats les Philistins, et tu délivreras Keïla » (1 S 23:1-2), à savoir, l’Église. 1 Rois 23. Et David consulta le Seigneur, en disant : « Est-ce que je poursuivrai et capturerai ces brigands ? ». Le Seigneur lui répondit : « Poursuis-les, sans nul doute tu les captureras, et tu délivreras leur butin » (1 S 30:8). 1 Rois 30. Note ce qui est précède. Sois un homme fort, et combattons pour notre peuple et pour la cité de notre Dieu ; et le Seigneur fera comme il lui plaira (2 S 10:12). 2 Rois 10. David, ayant assemblé tout Israël, il passa le Jourdain et vint à Hélam. Les Syriens se rangèrent en bataille contre David, et engagèrent le combat contre lui, mais ils s’enfuirent en présence d’Israël (2 S 10:17-18). 2 Rois 10. Urie dit à David : « L’arche de Dieu, Israël et Juda demeurent sous des tentes ; et Joab, mon seigneur, et les serviteurs de mon seigneur couchent à terre ; et moi cependant j’irais en ma maison manger et boire, et dormir avec ma femme ? Je jure par ta vie et par ton salut que je ne le ferai jamais » (2 S 11:11). 2 Rois 11.

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Des thèmes empruntés à toute la Bible

Je poursuivrai mes ennemis, et je les détruirai ; je ne reviendrai pas avant de les avoir anéantis (2 S 22:38). 2 Rois 22. Lorsque les serviteurs des chefs des provinces et le reste de l’armée qui les suivait furent sortis de la ville, chacun frappa l’homme qui venait contre lui, et les Syriens prirent la fuite. Le roi d’Israël les poursuivit (1 R 20:19-20). 3 Rois 20. Alors le prophète s’approcha du roi d’Israël, et lui dit : « Va, fortifie-toi, et vois rapidement ce que tu as à faire ; car, l’an prochain, le roi de Syrie montera contre toi » (1 R 20:22). 3 Rois 20. Au temps de Saül, ils combattirent contre les Agaréniens, et les ayant tués, ils habitèrent dans leurs tentes (1 Ch 5:10). 1 Chroniques 5. Les fils de Ruben, de Gad, et d’une moitié de la tribu de Manassé furent des hommes belliqueux, qui portaient le bouclier et l’épée, qui tenaient l’arc, et qui étaient très expérimentés à la guerre. Quand ils marchaient en bataille, ils étaient au nombre de quarante-quatre mille sept cent soixante. Ils livrèrent bataille contre les Agaréniens ; mais les Ituréens, avec ceux de Naphis et de Nodab, leur ont fourni du secours. Et Dieu leur livra entre les mains ces Agaréniens, avec tous les gens de leur parti, parce qu’ils eurent soin d’invoquer le Seigneur dans le combat ; ainsi il les exauça, parce qu’ils avaient cru en lui. Ils s’emparèrent de tout ce que possédaient ces peuples (1 Ch 5:18-21). 1 Chroniques 5. Ils oignirent David pour roi sur Israël, selon la parole du Seigneur, prononcée par Samuel. David marcha avec tout Israël sur Jérusalem, nommée Jébus. Là étaient les Jébuséens, habitants du pays. Les habitants de Jebus dirent à David : « Tu n’entreras point ici ». Mais David s’empara de la forteresse de Sion qui est la cité de David. David avait dit : « Quiconque battra le premier les Jébuséens sera chef et prince » (1 Ch 11:3-6). 1 Chroniques 11. Zérach l’Éthiopien, sortit contre Juda avec une armée d’un million d’hommes et trois cents chars, et il s’avança jusqu’à Maréscha. Asa marcha au-devant de lui, et ils se rangèrent en bataille dans la vallée de Sephara, près de Maréscha. Asa invoqua le Seigneur, son Dieu, et dit : « Seigneur, tu n’as pas une distance pour venir en aide au faible comme au fort : viens à notre aide, Seigneur, notre Dieu ! car c’est sur ton nom que nous nous appuyons, et nous sommes venus contre cette multitude. Seigneur, tu es notre Dieu : que ce ne soit pas l’homme

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qui l’emporte sur toi ! ». Le Seigneur frappa les Éthiopiens devant Asa et devant Juda, et les Éthiopiens prirent la fuite. Asa et le peuple qui était avec lui les poursuivirent (2 Ch 14:9-13). 2 Chroniques 14. Asa, après avoir entendu ce discours et cette prédiction d’Azarias, le fils du prophète Obetha, se sentit fortifié, et il enleva les idoles de toute la terre de Juda et de Benjamin, et des villes du mont Éphraïm qu’il avait prises, et il dédia l’autel du Seigneur, qui était devant le portique de la maison du Seigneur (2 Ch 15:8). 2 Chroniques 15. Ézéchias donna des chefs militaires à l’armée, et les réunit auprès de lui sur la place de la porte de la ville. S’adressant à leur cœur, il dit : « Fortifiez-vous et ayez du courage ! Ne craignez point et ne soyez point effrayés devant le roi d’Assyrie et devant toute la multitude qui est avec lui ; car avec nous il y a plus qu’avec lui. Avec lui est un bras de chair, et avec nous le Seigneur, notre Dieu, qui nous aide et qui combat pour nous ». Le peuple eut confiance dans les paroles d’Ézéchias, roi de Juda (2 Ch 32:6-8). 2 Chroniques 32. Qui d’entre vous est du peuple du Seigneur ? Que son Dieu soit avec lui, et qu’il monte à Jérusalem en Juda et bâtisse la maison du Seigneur, le Dieu d’Israël ! C’est le Dieu qui est à Jérusalem. Dans tout lieu où séjournent des restes du peuple du Seigneur, il faut que les gens du lieu leur donnent de l’argent, de l’or, et du bétail (Esd 1:3-4). 1 Esdras 1. Voici ce que dit Cyrus, roi de Perse : « C’est moi qu’a désigné comme roi du monde le Seigneur d’Israël, le Seigneur Très-Haut, et il m’a signifié de lui construire une maison à Jérusalem, en Juda. Si l’un est de votre nation, que son Seigneur monte avec lui à Jérusalem. Que tous ceux qui habitent en ces lieux apportent leur aide en or et en argent », etc. (3 Esd 2:3-6). 3 Esdras 2. Les nations viendront à toi des pays lointains, et, t’apportant des présents, elles adoreront en toi le Seigneur, et considéreront ta terre comme un sanctuaire, invoqueront le grand nom au milieu de toi. Ceux qui te mépriseront seront maudits (Tb 13:14-16). Tobie 13. Souvenez-vous de Moïse, serviteur de Dieu, qui vainquit Amalek, qui se confiait en sa force, en son armée, en ses boucliers, en La ponctuation du texte latin est à corriger (p. 106, l. 123/124) : Azarie [virgule] filii [pas de virgule] Obeth prophete. a 

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ses chars et en ses chevaux, en le combattant non avec le fer, mais avec des prières saintes. Ainsi seront renversés tous les ennemis d’Israël, si vous persévérez dans cette œuvre que vous avez commencée (Jdt 4:13-14). Judith 4. Note ce qui précède et ce qui suit. La pierre de l’obscurité et l’ombre de la mort, le torrent les sépare du peuple pèlerin (Jb 28:3-4). Job 28. Je brisais la mâchoire de l’injuste, et j’arrachais de ses dents la proie (Jb 29:17). Job 19 [sic]. Mes maux se dressent aussitôt à ma droite ; ils ont renversé mes pieds et ils m’ont accablé ; comme les flots leur lit, ils ont effacé mes sentiers, ils m’ont dressé des pièges et ont eu sur moi l’avantage, et il n’y a eu personne pour me secourir (Jb 30:12-13). Job 30. Les rois de la terre se sont levés, et les princes se sont assemblés contre le Seigneur et contre son Christ : « Brisons leurs liens, et jetons loin de nous leur joug » (Ps 2:2-3). Psaume. Et tu m’élèveras au-dessus de ceux qui se dressent contre moi. Tu m’arracheras des mains de l’homme inique. C’est pourquoi je te louerai, Seigneur, parmi les nations, et je chanterai un cantique à la gloire de ton nom (Ps 17:49-50). Psaume. Tu es mon roi et mon Dieu, tu es celui qui ordonne le salut de Jacob. Par toi nous renverserons nos ennemis, et en ton nom nous mépriserons ceux qui se lèvent contre nous (Ps 43:5-6). Psaume. Note ce qui précède. Seigneur, souviens-toi de ta famille, que tu as possédée dès le commencement. Tu as racheté le sceptre de ton héritage, le mont Sion, où tu as habité. Lève tes mains afin d’abattre pour jamais leur orgueil. Que de forfaits l’ennemi a commis dans le sanctuaire (Ps 73:2-3) ! Psaume. La mer fut ton chemin, les grandes eaux furent les sentiers (Ps 76:20). Psaume. Et il enleva son peuple comme des brebis, et il les conduisit comme un troupeau dans le désert, et il les mena pleins d’espérance et ils ne craignaient pas, et la mer engloutit leurs ennemis. Et il les amena sur la montagne de sa sainteté, sur la montagne que sa droite avait acquise. Et il chassa les nations devant eux, et il leur distribua par le sort la terre, après l’avoir partagée avec le cordeau (Ps 77:52-54). Psaume.

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Dieu, les nations sont venues dans ton héritage ; elles ont souillé ton saint temple (Ps 78:1), etc. Psaume. Car voici, ô Seigneur, que tes ennemis font un grand bruit, et ceux qui te haïssent ont levé la tête. Ils ont formé un dessein plein de malice contre ton peuple, et ils ont conspiré contre tes saints. Ils ont dit : « Venez et exterminons-les du milieu des nations » (Ps 82:3-5). Psaume. Traite leurs princes comme Oreb, et Zeb, et Zébée, et Salama ; tous leurs princes qui avaient dit : « Emparons-nous du sanctuaire de Dieu comme de notre héritage ». Mon Dieu, rends-les semblables à une roue, et à la paille emportée par le vent. Comme le feu qui brûle la forêt, et comme la flamme qui consume les montagnes, ainsi tu les poursuivras par ta tempête, et tu les épouvanteras dans ta colère (Ps 82:12-16). Psaume. Qui se lèvera pour moi contre les méchants ? ou qui se tiendra auprès de moi contre ceux qui commettent l’iniquité ? (Ps 93:16) Psaume. Note ce qui précède. Seigneur, donne-nous du secours contre la tribulation, car la protection de l’homme est vaine. Avec Dieu nous ferons des actes de courage, et lui-même réduira à néant nos ennemis (Ps 107:13-14). Psaume. Seigneur, n’ai-je pas haï ceux qui tu haïssais ? Et n’ai-je pas dépéri à cause de tes ennemis ? Je les haïssais d’une haine parfaite (Ps 138:2122). Psaume. La sagesse a bâti sa maison, elle a taillé ses sept colonnes. Elle a immolé ses victimes, mêlé son vin, et dressé sa table. Elle a envoyé ses servantes, pour qu’elles appellent à la tour et aux murs de la ville (Pr 9:1-3), à savoir, de l’Église qu’il faut défendre. Proverbes 9. Le frère qui est aidé par son frère est comme une ville forte (Pr 18:19). Proverbes 18. Un temps pour la guerre, et un temps pour la paix (Qo 3:8). Ecclésiaste 3. Je t’ai comparée, ô mon amie, à savoir l’Église, à mes coursiers attelés aux chars du Pharaon (Ct 1:8). Cantique 1. Prenez-nous les petits renards qui ravagent les vignes, car notre vigne est en fleur (Ct 2:15). Cantique 2. Voici le lit de Salomon, soixante vaillants hommes l’entourent, des plus vaillants d’Israël. Tous sont armés de l’épée, sont exercés au combat (Ct 3:7-8). Cantique 3.

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Ton cou est comme la tour de David, qui est bâtie avec des créneaux, mille boucliers y sont suspendus, toute l’armure des forts (Ct 4:4). Cantique 4. Quelle est celle-ci qui s’avance comme l’aurore à son lever, belle comme la lune, éclatante comme le soleil, terrible comme une armée du camp rangée en bataille (Ct 6:9), à savoir l’Église ? Cantique 6. Que verras-tu dans la Sulamite, sinon les chœurs d’un camp (Ct 7:1) ? Cantique 7. Mets-moi comme un sceau, à savoir par la prise de la croix, sur ton cœur, comme un sceau sur ton bras, car l’amour est fort comme la mort, la jalousie inflexible comme l’enfer (Ct 8:6). Cantique, dernier chapitre. Son zèle se munira d’une armure, et il armera les créatures pour se venger de ses ennemis (Sg 5:18). Sagesse 5. La sagesse a délivré le peuple juste et la semence irréprochable des nations qui l’opprimaient. Elle est entrée dans l’âme du serviteur de Dieu, et s’est élevée avec des signes et des prodiges contre les rois redoutables. Elle a rendu aux justes la récompense de leurs travaux, les a conduits sur une voie admirable, et leur a tenu lieu d’ombre pendant le jour, et de lumière des étoiles pendant la nuit. Elle les a conduits à travers la mer Rouge, et les a fait passer au milieu des eaux profondes (Sg 10:15-18). Sagesse 10. Сes anciens habitants de ta terre sainte, que tu avais en horreur parce qu’ils faisaient des œuvres détestables à toi, tu as voulu les écarter du milieu de ton alliance par les mains de nos ancêtres, afin que ceux-ci reçoivent le digne pèlerinage des enfants de Dieu, car cette terre est pour toi la plus chère de toutes (Sg 12:3-7). Sagesse 12. Les hommes confient leur vie à un morceau de bois, et, traversant la mer, ils arrivent libres sur un vaisseau (Sg 14:5). Sagesse 14. Dieu a renversé les trônes des princes superbes, et il a fait asseoir les humbles à leur place. Dieu a desséché les racines des nations superbes, et il a planté celles de ces nations qui étaient humbles. Le Seigneur a renversé les terres des nations, et il les a ruinées jusqu’aux fondements (Si 10:17-19). Ecclésiastique 10. Seigneur, lève ta main sur les peuples étrangers, afin qu’ils voient ta puissance. De même que, sous leurs yeux, tu as manifesté ta sainteté parmi nous, de même, sous nos yeux, manifeste ta grandeur parmi

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eux (Si 36:3-4). Ecclésiastique 36. Note ce qui est précède et qui suit. Jésus [Josué], fils de Navé, fut vaillant à la guerre ; il succéda à Moïse dans le rôle de prophète ; il fut grand par le nom qu’il portait, et très grand pour sauver les élus de Dieu, pour combattre les ennemis qui s’élevaient pour conquérir l’héritage d’Israël (Si 46:1-2). Ecclésiastique 46. Les peuples s’y rendront en foule, et diront : « Venez, et montons à la montagne du Seigneur, à la maison du Dieu de Jacob » (Is 2:3). Isaïe 2. Assemblez-vous, peuples, et vous serez vaincus ; écoutez, vous tous, pays éloignés ; réunissez vos forces, et vous serez vaincus ; prenez vos armes, et vous serez vaincus ; formez des desseins, et ils seront dissipés ; donnez des ordres, et ils ne s’exécuteront pas, car Dieu est avec nous (Is 8:9-10). Isaïe 8. Le Seigneur élèvera une bannière pour les nations, il rassemblera les exilés d’Israël, et il recueillera les dispersés de Juda, des quatre extrémités de la terre. La jalousie d’Éphraïm disparaîtra, et ses ennemis en Juda seront anéantis (Is 11:12-13). Isaïe 11. Sur une montagne couverte de nuages, à savoir, Mahomet avec les siens, dressez un étendard, élevez la voix, agitez la main, et que les princes entrent dans ses portes. J’ai donné des ordres à ceux que j’ai consacrés pour cette œuvre. J’ai appelé mes guerriers dans ma colère, ceux qui se réjouissent de ma gloire (Is 13:2-3). Isaïe 13. Fais venir mes fils des pays lointains, et mes filles de l’extrémité de la terre et chacun qui évoque mon nom dans ma gloire (Is 43:6-7). Isaïe 43. Franchissez, franchissez, franchissez les portes, aplanissez la voie au peuple, préparez le chemin, ôtez les pierres, levez l’étendard pour les peuples (Is 62:10). Isaïe 62. Répands, ô Seigneur, ton indignation sur les nations qui ne te connaissent pas, et sur les provinces qui n’ont point invoqué ton nom, car elles ont dévoré Jacob, elles l’ont consumé entièrement, et ont détruit toute sa gloire (Jr 10:25). Jérémie 10. Car le jour vient où les gardes crieront sur la montagne de Samarie et sur la montagne d’Éphraïm : « Levez-vous, montons à Sion, vers le Seigneur, notre Dieu » ! (Jr 31:6) Jérémie 31.

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J’ai appris du Seigneur une nouvelle, je suis envoyé comme messager chez les nations : « Assemblez-vous, et marchez contre elle ! Levons-nous pour la guerre » ! (Jr 49:14). Jérémie 49. Préparez-vous contre Babylone de tous côtés, vous tous qui avez envie de tendre l’arc ; combattez-la, n’épargnez pas les flèches, car elle a péché contre le Seigneur (Jr 50:14). Jérémie 50. Levez l’étendard dans le pays, sonnez de la trompette dans les montagnes, consacrez les nations contre [Babylone] (Jr  51:27). Jérémie 51. Et note que par Babylone est désignée la multitude des infidèles. De la terre lointaine, pensez au Seigneur, et que Jérusalem soit présente à vos cœurs ! (Jr 51:50). Jérémie 51. Je m’adresse à vous tous qui passez ici ! Regardez et voyez s’il est une douleur pareille à la mienne (Lm 1:12). Lamentations 1. Vois, Seigneur, ce qui nous est arrivé ! Regarde et considère notre honte ! Notre héritage a passé à des étrangers (Lm 5:1-2). Lamentations dernier chapitre. Lève-toi, Jérusalem, et tiens-toi sur la hauteur ; regarde vers l’Orient, et vois tes enfants rassemblés, depuis le soleil levant jusqu’au couchant, par la parole du saint, pleins de joie, parce que Dieu s’est souvenu d’eux (Ba 5:5). Baruch 5. Ne tuez pas ceux sur lesquels vous verrez le Thau (Ez 9:6). Ezéchiel 10 [sic]. Ainsi parle le Seigneur Dieu : « Je vous rassemblerai du milieu des peuples, je vous réunirai depuis les pays où vous êtes dispersés, et je vous donnerai la terre d’Israël » (Ez 11:17). Ezéchiel 11. Consacrez la guerre ! Réveillez les forts ! Qu’ils montent, tous les hommes de guerre ! De vos hoyaux forgez des épées, et de vos serpes des lances ! Que le faible dise : « Je suis fort ! ». Hâtez-vous et venez, vous toutes, nations d’alentour, et rassemblez-vous ! Là le Seigneur fera périr tes forts (Jl 3:9-11). Joël, dernière chapitre. Nous avons appris une nouvelle de la part du Seigneur, et un messager a été envoyé parmi les nations : « Levez-vous, marchons contre Édom pour lui faire la guerre » (Ab 1:1). Abdias 1. J’entourerai ma maison de ceux qui combattent pour moi, les allants et les venants, et l’oppresseur ne passera plus sur eux (Za 9:8). Zacharie 9.

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Et Mattathias dit : « Malheur à moi ! Pourquoi suis-je né pour voir l’affliction de mon peuple et l’affliction de la ville sainte ? » (1 M 2:7), etc. 1 Maccabées 2. Et voici que tout ce que nous avions de saint, de beau et d’éclatant a été désolé, et les nations l’ont profané. Pourquoi donc vivons-nous encore ? (1 M 2:12-13). Ibid. Maintenant donc, ô mes fils, soyez des zélateurs de la loi, et donnez vos vies pour le testament de vos pères ; souvenez-vous des œuvres de vos pères, qu’ils ont accomplies dans leurs générations, et vous recevrez une grande gloire et un nom éternel (1 M 2:50-51). Ibid. Alors Judas fils de Mattathias, surnommé Maccabée, se leva à sa place ; et tous ses frères l’aidaient, avec tous ceux qui s’étaient joints à son père ; et ils combattaient avec joie les combats d’Israël (1 M 3:1-2). Ibid., trois. Et ils se dirent les uns aux autres : « Relevons l’humiliation de notre peuple, et combattons pour notre peuple et pour nos choses saintes » (1 M 3:43). Ibid. Ceignez-vous et tenez-vous prêts pour demain matin, afin de combattre contre ces nations qui se sont assemblées pour nous perdre, nous et nos choses saintes, car il est meilleur pour nous de mourir au combat, que de voir les maux de notre peuple et des lieux saints. Cependant que ce qui est voulu dans le ciel s’accomplisse (1 M 3:5860). Ibid. Et Judas a dit aux hommes qui étaient avec lui : « Ne craignez point leur multitude, et ne redoutez pas leur choc. Souvenez-vous comment nos pères furent sauvés dans la mer Rouge, lorsque le Pharaon les poursuivait avec une armée nombreuse. Crions maintenant vers le ciel, et notre Seigneur aura pitié de nous. Il se souviendra de l’alliance faite avec nos pères, et il brisera aujourd’hui cette armée devant nos yeux » (1 M 4:8-10). Ibid., quatre. Une grande assemblée se réunit, afin de délibérer sur ce qu’ils feraient pour leurs frères, qui étaient dans une grande tribulation et qui étaient attaqués par les Gentils (1 M 5:16). Ibid. 5. Judas a dit a son armée : « Combattez aujourd’hui pour nos frères » (1 M 5:32). Ibid. 5. Judas leur a donné cet ordre : « Ne laissez aucun homme en arrière ; mais que tous viennent au combat ». Puis il passa le premier,

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Des thèmes empruntés à toute la Bible

et tout le peuple après lui. Et toutes les nations furent battues en leur présence (1 M 5:42-43). Ibid. 5. Alors Judas rassembla tous les Israélites qui étaient dans le pays de Galaad, depuis le plus petit jusqu’au plus grand, avec leurs femmes, et leurs enfants, et une très grande armée, pour les emmener dans le pays de Juda (1 M 5:45). Ibid. 5. Les ennemis des juifs ont voulu écraser leurs choses saintes, ruiner leur pays, et étendre les mains sur le saint des saints. Alors Simon a résisté ; il a combattu pour son peuple, il a distribué beaucoup d’argent, il a armé les hommes vaillants de sa nation, et leur a donné une solde ; il a fortifié les villes de Judée (1 M 14:31-33). Ibid. 14. Et Simon appela ses deux fils aînés, Judas et Jean, et leur dit : « Moi, et mes frères, et la maison de mon père, nous avons combattu contre les ennemis d’Israël, depuis notre adolescence jusqu’à ce jour, et nos mains ont quelquefois réussi à délivrer Israël. Et maintenant je suis vieux ; mais prenez ma place et celle de mes frères, et allez combattre pour notre nation ; et que le secours du ciel soit avec vous » (1 M 16:2-3). Ibid. 16. Cependant Judas Maccabée et ceux qui étaient avec lui entraient joyeusement dans les villages, et rassemblant leurs parents et leurs amis, et prenant avec eux ceux qui étaient demeurés fermes dans le judaïsme, il a attiré six mille hommes. Et ils invoquaient le Seigneur, afin qu’il regardât son peuple que tout le monde foulait aux pieds, qu’il eût compassion de son temple profané par les impies ; qu’il eût pitié aussi de la destruction de la ville, qui allait être bientôt rasée, et qu’il écoutât la voix du sang qui criait vers lui ; qu’il se souvînt aussi des meurtres si injustes des enfants innocents, et des blasphèmes proférés contre son nom, et qu’il conçut de l’indignation contre ces excès. Or Maccabée, ayant assemblé une multitude, devenait formidable aux ennemis, car la colère de Dieu se changea en miséricorde (2 M 8:1-5). 2 Maccabées 8. Lorsque Maccabée et ceux qui étaient avec lui apprirent que les forteresses étaient attaquées, ils priaient le Seigneur avec pleurs et avec larmes, et tout le peuple en même temps qu’eux, d’envoyer un bon ange pour le salut d’Israël. Et Maccabée, prenant lui-même le premier les armes, a exhorté les autres à s’exposer comme lui au péril et à porter secours à leurs frères (2 M 11:6-7). Ibid. 11.

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Lorsque Judas eut appris qu’on avait commis cette cruauté contre les gens de sa nation, il donna des ordres à ceux qui étaient avec lui, et après avoir invoqué Dieu, le juste juge, il marcha contre les meurtriers de ses frères (2 M 12:5-6). Ibid. 12. Etant donc excités par ces excellentes paroles de Judas, qui étaient capables de relever l’enthousiasme et d’animer le courage des jeunes gens, ils résolurent de se défendre et de combattre vigoureusement, afin que la valeur décidât des affaires, parce que la ville sainte et le temple étaient en péril (2 M 15:17). Ibid. 15.

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Moi qui appartiens à un seigneur, j’ai des soldats sous mes ordres ; et je dis à l’un : « Va ! », et il va ; à l’autre : « Viens ! », et il vient ; et à mon serviteur : « Fais cela ! », et il le fait (Mt 8:9). Ils doivent le faire d’autant plus, les chevaliers et les serviteurs du Christ ! Matthieu 8. Jésus monta dans la barque, et ses disciples le suivirent (Mt 8:23). Ibid. Jésus, étant monté dans une barque, traversa la mer, et alla dans sa ville (Mt 9:1). Ibid. 9. Ne croyez pas que je suis venu apporter la paix sur la terre ; je ne suis pas venu apporter la paix sur la terre, mais l’épée, car je suis venu mettre la division entre l’homme et son père (Mt 10:34-35), etc. Ibid. 10. Celui qui ne prend pas sa croix et ne me suit pas, n’est pas digne de moi (Mt 10:38). Ibid. Jésus a ordonné aux disciples de monter dans la barque et de passer avant lui de l’autre côté (Mt 14:22). Matthieu 14. Si quelqu’un veut venir après moi, qu’il renonce à lui-même, qu’il se charge de sa croix, et qu’il me suive. Car celui qui voudra sauver sa vie la perdra, mais celui qui la perdra à cause de moi la trouvera (Mt 16:24-25). Ibid. 16. Les disciples montant donc dans une barque, partirent а l’écart dans un lieu désert. Beaucoup de gens les virent s’en aller et les reconnurent, et de toutes les villes on accourut (Mc 6:32-33). Marc 6. Et il obligea ses disciples à monter dans la barque pour passer avant lui de l’autre côté, vers Bethsaïde (Mc 6:45). Ibid. Et quiconque ne porte pas sa croix, et ne me suit pas, ne peut être mon disciple (Lc 14:27). Luc 14.

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Maintenant celui qui n’a point d’épée, qu’il vende sa tunique et achète une épée (Lc 22:36). Luc 22. Jésus s’en alla de l’autre côté de la mer de Galilée. Une grande foule le suivait, parce qu’elle voyait les miracles qu’il opérait sur les malades (Jn 6:1-2). Jean 6. Portant sa croix, il arriva au lieu du Calvaire (Jn 19:17). Jean 19. De même donc que vous avez fait servir vos membres à l’impureté et à l’iniquité, pour arriver à l’iniquité, ainsi faites maintenant servir vos membres à la justice pour votre sanctification (Rm 6:19). Rom 6. Car la parole de la croix est une folie pour ceux qui périssent ; mais pour nous qui sommes sauvés, elle est une puissance de Dieu (1 Co 1:18). 1 Corinthiens 1. Nous sommes les coopérateurs de Dieu (1 Co 3:9) – 1 Corinthiens 3 – c’est-à-dire contre les Sarrasins. Voici maintenant le temps favorable, voici maintenant le jour du salut (2 Co 6:2). 2 Corinthiens 6. Ceux qui sont au Christ ont crucifié leur chair avec ses vices et ses convoitises (Ga 5:24). Galates 5. Je ne me glorifie pas, si ce n’est dans la croix de notre Seigneur Jésus-Christ (Ga 6:14). Galates, dernière chapitre. Je porte dans mon corps les stigmates de notre Seigneur Jésus Christ (Ga 6:17). Ibid. Fortifiez-vous dans le Seigneur, et par sa force toute-puissante, revêtez-vous des armes de Dieu, afin de pouvoir tenir ferme contre les ruses du Diable (Ep 6:10-11), faites par Mahomet. Ephésiens 6. Prenez les armes de Dieu, afin de pouvoir résister au jour néfaste, et en toute chose demeurer parfait (Ep 6:13). Ibid. Je vous parle encore maintenant en larmes des ennemis de la croix du Christ. Leur fin sera la mort (Ph 3:18). Philippiens 3. Combats le bon combat de la foi, saisis la vie éternelle (1 Tm 6:12). 1 Timothée 6. Travaille comme un bon soldat du Christ (2 Tm 2:3). 2 Timothée 2. J’ai combattu le bon combat, j’ai achevé la course, j’ai gardé la foi (2 Tm 4:7). Ibid. 4.

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Les saints par la foi ont vaincu les royaumes, ont exercé la justice, et ont obtenu l’accomplissement des promesses (He 11:33). Hébreux 11. Nous courons avec patience vers la bataille qui nous est ouverte, posant nos regards sur Jésus, qui crée et accomplit la foi, qui, en vue de la joie qui lui était réservée, a souffert la croix, méprisé la confusion, et s’est assis à la droite du trône de Dieu (He 12:1-2). Hébreux 12. Partons donc pour aller à lui, hors du camp, en portant son opprobre (He 13:13). Hébreux 13. Que faites-vous, en pleurant et en me brisant le cœur ? Je suis prêt, non seulement à être lié, mais encore à mourir à Jérusalem pour le nom du Seigneur Jésus (Ac 21:13). C’est la parole de Paul qui s’est exposé à la mort dans cette terre pour le Seigneur. Actes 21. Vous avez vu la fin du Seigneur (Jc 5:11), à savoir, comment il est mort sur la croix. Jacques 5. Christ a souffert pour nous, en nous laissant un exemple, afin que vous suiviez ses traces (1 P 2:21). 1 Pierre 2. Ainsi donc, Christ ayant souffert dans la chair, vous aussi armez-vous de la même pensée (1 P 4:1). 1 Pierre 4. Il y aura des maîtres de mensonges, qui introduiront des sectes de perdition (2 P 2:1), dont l’un fut Mahomet. 2 Pierre 2. Comme vous avez appris que l’Antéchrist vient, il y a maintenant beaucoup d’antéchrists (1 Jn 2:18), à savoir les Sarrasins. 1 Jean 2. Bien aimés, comme je désirais vivement vous écrire au sujet de votre salut commun, je me suis senti obligé de le faire afin de vous exhorter à combattre pour la foi qui a été transmise une fois pour toutes par les saints (Jude 1:3). Jude 1. Prends en considération ce qui suit. Sois fidèle jusqu’à la mort, et je te donnerai la couronne de vie (Ap 2:10). Apocalypse 2. Fidèle jusqu’à la mort est celui qui s’expose à la mort pour la foi. Nos frères ont vaincu le dragon à cause du sang de l’agneau et à cause de la parole de leur témoignage, et ils n’ont pas aimé leurs âmes jusqu’à la mort. C’est pourquoi réjouissez-vous, cieux, et vous qui habitez dans les cieux (Ap 12:11-12). Apocalypse 12. Il avait un nom écrit, que personne ne connaît, si ce n’est lui-même ; et il était revêtu d’un vêtement teint de sang. Et son nom était la Parole de Dieu, et les armées qui sont dans le ciel le suivaient sur des chevaux blancs, revêtues d’un lin fin, blanc, pur (Ap 19:12-14). Apocalypse 19.

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CHAPITRE 28 DES NEUF CHOSES QUI SONT NÉCESSAIRES AUX PRÉDICATEURS DE LA CROIX

En ce qui concerne le nécessaire pour exercer de façon louable l’office de la prédication de la croix, il faut noter que le nécessaire pour cela, c’est la sainteté de la vie. Parce qu’il incombe aux prédicateurs de cette sorte de traiter assidûment les sujets de la passion, de la croix du Seigneur, et d’autres choses sacrées, la sainteté est requise d’eux comme du prêtre, parce qu’il traite constamment du sacré. C’est pourquoi dans le Psaume, au contraire, Dieu a dit au pécheur : Pourquoi racontes-tu ma justice et pourquoi as-tu toujours mon testament à la bouche ? (Ps 49:16), qui sont la justice et les paroles sacrées du Testament. De même, les signes de la pénitence. Il est en effet inconvenant que celui qui pendant toute la journée invite les autres à la croix et à la mort, n’affiche aucun signe de la croix qu’il porte en lui. C’est pourquoi Paul qui prêchait la foi de Jésus crucifié (1 Co 2:2), a dit : Portant toujours et partout en notre corps la mort de Jésus, afin que la vie de Jésus soit aussi manifestée dans nos corps (2 Co 4:10). 2 Corinthiens 4. De même, la prise de la croix. S’ils en ont le pouvoir, il faut qu’ils fassent ce qu’ils disent devoir être fait, pour qu’ils ne soient pas comme les scribes et les Pharisiens, qui lient les fardeaux pesants sur les épaules des hommes (Mt 23:2,4) qu’ils ne veulent pas

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même toucher du doigt eux-mêmes. C’est pourquoi saint André a dit : « Si j’étais épouvanté de la croix, je n’en prêcherais point la gloire »a. De même, le discernement dans les actions. Comme ils s’occupent en même temps de tant de choses importantes, comme des taxesb, des absolutions, des dispenses, etc., s’ils manquent de discernement, ils contractent la souillure des péchés. C’est pourquoi il est dit dans Lévitique 11. Tout animal qui a de la corne au pied, mais dont la corne n’est point fendue, à savoir par le discernement, et qui ne rumine point par la délibération méditative, sera impur (Lv 11:26). De même, une scrupuleuse sollicitude. Pour que leur office soit plus fructueux, ils doivent non seulement prêcher la croix, mais par des conversations familières, tantôt par eux-mêmes, tantôt par d’autres et de toutes les manières auxquelles on peut penser, ils doivent être soucieux de promouvoir l’affaire, suivant l’exemple de Paul, qui dit à propos du soin qu’il a pris du salut des Éphésiens. Actes 20 disent : Je n’ai cessé nuit et jour durant trois ans d’exhorter avec larmes chacun de vous (Ac 20:31). De même, le conseil d’hommes prudents. Parce que dans cette affaire, dans les actions, dans les jugements, dans les conseils et dans bien autres choses, surviennent souvent les doutes, il est très dangereux de les aborder sans le conseil des prudents, et c’est pourquoi il est dit dans Tobie 4. Demande toujours conseil à un homme sage (Tb 4:19). De même, le soutien des prières. Comme il faut implorer le secours divin même dans les plus petites affaires, selon la sentence de Platon, il faut le faire d’autant plus dans les grandes. Ainsi donc, puisque l’affaire de la croix est de grande importance parce qu’elle concerne la foi et le salut des âmes, le prédicateur doit souvent Passio beati Andreae apostoli 4 (p. 9) ; voir aussi Bernard, Sermones per annum. Vigil. s. Andreae 4 (vol. 5, p. 426, 9-10) ; Jacques de Voragine, Legenda aurea 2 (p. 30). b  Au xiii siècle les prédicateurs étaient chargés de prélever les taxes et les donations pour l’affaire de la croisade, ainsi que l’argent pour le rachat des voeux. Voir par exemple : C. T. Maier, Preaching the Crusades. Mendicant Friars and the Cross in the thirteenth century, Cambridge, 1994, p. 123-134. a 

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DES NEUF CHOSES NÉCESSAIRES AUX PRÉDICATEURS DE LA CROIX

s’adresser au Seigneur et aussi exhorter les autres à prier, car, selon une autoritéa, « il est impossible que les prières de plusieurs ne soient pas entendues ». De même, un zèle modéré. Certains s’activent tellement pour promouvoir l’affaire qu’à l’instar des quêteurs d’aumônes ils déversent des paroles fausses ou douteuses, ou se livrent à des fourberies, ce qui est très repréhensible. Job 13. Est-ce que Dieu a besoin de notre mensonge pour que vous disiez pour lui des faussetés ? (Jb 13:7) Finalement, ce qui leur est nécessaire, c’est le savoir sur ce qui concerne l’affaire. Comme à ceux qui annoncent les œuvres de Dieu est nécessaire de connaître tout cela – à ce sujet, le Psaume : Ils ont annoncé les œuvres de Dieu, et ils ont compris ses actes (Ps 63:10)  –, de même, il est nécessaire aussi aux prédicateurs de la croix contre les Sarrasins de connaître ce qui concerne l’affaire et dont il faut souvent parler, pour qu’ils ne soient comme ceux dont Paul a parlé. Thimothée 1. Ils ne comprennent ni ce qu’ils disent, ni ce qu’ils affirment (1 Tm 1:7).

Cf. Glossa ordinaria. Rom. 15, 30 (vol. 4, p. 305 margin.) ; Pseudo-Augustin, Sermones ad fratres in eremo commorantes 44 (col. 1319). a 

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CHAPITRE 29 DE SIX SORTES DE SAVOIR QUI SONT NÉCESSAIRES AU PRÉDICATEUR DE LA CROIX

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Il faut faire attention que ces personnes doivent nécessairement avoir la connaissance historique de ce que contient la Bible à propos de la Terre promise qui s’appelle maintenant la Terre sainte, parce qu’ils sont souvent obligés de parler de ces terres. De même, la connaissance imagée de la carte du monde, pour que, grâce à celle-ci, ils sachent, quand ils parlent de ces terres, où elles se trouvent, et ce qu’il y a au Sud, au Nord, à l’Est, à l’Ouest, ce qu’il y a au loin et ce qui est proche, et ainsi de suite. De même, la connaissance de l’origine et de la vie de Mahomet, parce qu’il faut parler souvent contre lui et sa loi. Sur cela l’on peut se renseigner dans le Coran et dans le petit livre de Pierre Alphonse contre les juifsa aussi bien que dans beaucoup autres ouvrages. De même, la connaissance de l’avancée de Mahomet et des siens contre nous et l’avancée des nôtres contre eux jusqu’à nos jours, sur quoi l’on peut se renseigner dans la lettre de l’évêque Turpin sur la geste de Charles en Espagne, dans l’Histoire Antiochienne, dans l’Histoire Transmarine et dans de nombreuses chroniques.

a 

Pierre Alphonse, Dialogi.

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DE SIX SORTES DE SAVOIR NÉCESSAIRES AU PRÉDICATEUR DE LA CROIX

De même, la connaissance de ce qui leur est confié avec l’office de la prédication, afin qu’ils comprennent bien et sainement la force des indulgences et les privilèges des croisés, et quel pouvoir ils ont en matière d’absolutions, de dispenses, etc., pour qu’ils ne fassent par erreur ce qu’il n’est pas permis de faire. De même, la connaissance de la narration : ce qu’il est parfois utile de raconter dans les sermons ou les collations familières pour l’édification, surtout quand c’est vraisemblable et que cela fait autorité. On a ajouté ci-dessous certaines d’entre elles.

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CHAPITRE 30 À PARTIR DE DIVERS RÉCITS DE L’HISTOIRE ECCLÉSIASTIQUE UTILES POUR LA PRÉDICATION DE LA CROIX

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Quand Constantin préparait la guerre contre Maxencea, tyran de la ville de Rome, il était déjà défenseur de la foi chrétienne et vénérait le vrai Dieu, mais n’avait pas encore reçu le signe de la passion du Seigneur, qui est chez nous le rite solennel de l’initiation ; et comme il réfléchissait abondamment sur la nécessité de la guerre imminente tout en faisant route et levait souvent les yeux au ciel et priait pour obtenir l’aide divine, il vit dans son sommeil, vers l’orient, le signe de la croix qui brillait dans le ciel comme l’éclat du feu et, effrayé, il vit les anges à côté de lui qui disaient « Constantin, par ceci tu vaincras ». Alors, joyeux, traçant le signe de la croix sur son front, il fait transformer de même les étendards militaires et adapte l’insigne impérial, le labarum, en lui donnant la forme de la croix dominicaleb ; il s’avance ainsi contre les armées des impies et l’on dit que dans sa main droite, il portait une enseigne de la croix fabriqué en or. Lorsqu’avec l’aide a  Maxence, un usurpateur qui a pris le pouvoir à Rome de 306 à 312, chassé ensuite par Constantin. b  Il est vrai que l’invention de cet étendard en forme de croix est liée à la bataille du pont Milvius. L’étymologie du terme reste incertaine. Voir : R. Egger, Das Labarum. Die Kaiserstandarte der Spätantike, Wien, 1960.

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RÉCITS DE L'HISTOIRE ECCLÉSIASTIQUE UTILES POUR LA PRÉDICATION

de la force divine, il devint certain de la victoire, jour et nuit il priait Dieu, qu’il sentait déjà comme son ami, de ne pas souiller par l’effusion du sang romain sa main droite qu’il avait fortifiée avec le signe salutaire. Et quand il installa son camp non loin du pont Milviusa, Maxence vint soudain à sa rencontre et en montant sur le pont de bateaux qu’il avait fait préparer, il se noya dans l’eau profonde : il épargna ainsi les carnages à venir de la guerre, contre la tête d’un seul criminel. Constantin est entré dans la ville de Rome pour son triomphe, et tous les Romains, libérés de la férocité du joug tyrannique, l’ont accepté avec joie comme garant du salut. Tout de suite il ordonne de peindre l’enseigne de la croix du Seigneur partout où le Sénat lui a érigé des images en l’honneur de la victoire, et d’écrire au-dessous que par ce signe singulier, qui est le signe d’une vraie force, il a arraché le peuple Romain à un joug tyrannique, et a restauré la liberté et la noblesse d’autrefoisb. Dans le même ouvragec, Constantin, d’une confiance totale en Dieu pour toutes choses, se fortifiait par ce signe céleste qui lui avait été montré et, grâce à lui il échappa à toutes les embuscades. Dans le même, livre 10d. Après avoir découvert trois croix sur le lieu du Calvaire, comme on se demanda quelle était la vraie croix, il arriva que, dans cette même cité, une femme de haut rang de ce pays fut atteinte d’une grave maladie ; elle était déjà demi-morte. Portant les croix, un certain Macaire, l’évêque de ce lieu, vint chez elle avec la reine Hélène ; agenouillé et priant pour que Dieu montre quelle est la croix du Seigneur, il approcha la première de la femme et rien ne se produisit. Il approcha la deuxième et rien ne se passa non plus. Et quand il approcha la troisième, tout à coup la femme se leva les yeux ouverts et, recouvrant l’usage de ses forces beaucoup plus vive qu’avant, quand elle était en bonne santé, elle commença à courir à travers toute la maison et à exalter la puissance de Dieu. C’est ainsi que la reine, dont le voeu s’est 28 octobre 312. Eusèbe de Césarée, Historiae ecclesiasticae 9,  8,  15 - 9,  9,  11 (p.  827, 26 p. 833, 9). c  Eusèbe de Césarée, Historiae ecclesiasticae 10, 8, 6 (p. 893, 19 - p. 895, 2). d  Rufin d’Aquilée, Historiae ecclesiasticae 10, 7-8 (p. 970, 1-25). a 

b 

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Chapitre 30

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réalisé, fit construire, avec le faste royal, une église extraordinaire dans le lieu où elle avait trouvé la croix. Et les clous, avec lesquels le corps du Seigneur a été fixé, elle les apporta à son fils qui en a fait les mors qu’il utiliserait à la guerre. On dit qu’il en utilisa les autres pour équiper un casque bon pour la bataille. Elle apporta à son fils une partie du bois salutaire et en laissa l’autre partie dans des coffres d’argent au même endroit. Dans le même ouvragea. Comme avec l’autorisation de l’empereur Julienb, les juifs s’étaient rassemblés en grande multitude depuis diverses provinces, et avaient préparé tout le nécessaire pour la reconstruction du Templec, voilà que, la dernière nuit avant le début des travaux, il y a un immense tremblement de terre. Les rochers des fondations sont projetés çà et là, et tous les édifices du lieu sont démolis. Les portiques, où restaient beaucoup de juifs qui se préparaient au travail, sont tombés par terre et ont écrasé tous les juifs qui étaient là. Il y avait un local au fond des parties basses du Temple, où on rangeait des outils et tout ce qui est nécessaire pour le travail. On dit que quand vint le jour, il en sortit une boule de feu qui, parcourant le centre de la place, brûla les juifs qui se trouvaient là, des deux côtés. La boule revint très souvent pendant toute la journée et réprimait la témérité du peuple par ses flammes vengeresses. Et pour qu’on ne crût pas que ces choses étaient arrivées par hasard, au cours de la nuit suivante le signe de la croix apparut sur les vêtements de tous de manière si visible que même si quelqu’un à cause de son infidélité avait voulu l’effacer, il n’aurait absolument pas pu le faire disparaître. Ainsi terrifiés, les juifs et les païens ont abandonné inutilement ce lieu et leurs œuvres.

Cf. Rufin d’Aquilée, Historiae ecclesiasticae 10, 38 (p. 997, 16-20) ; Rufin d’Aquilée, Historiae ecclesiasticae 10, 39-40 (p. 998, 3-23). b  Empereur Julien II l’Apostat (361-363). c  À propos de l’autorisation de l’empereur Julien l’Apostat de reconstruire le Temple, voir par exemple : C. Aziza, « Julien et le judaïsme », R. Braun, J. Richer (éd.), L’empereur Julien. De l’histoire à la légende (331-1715), Paris, 1978, p. 141-158 ; P. Renucci, Les idées politiques et le gouvernement de l’empereur Julien, Bruxelles, 2000, p. 367-375 ; S. Bradbury, « Julian and the Jews », S. Rebenich, H.-U. Wiemer (éd.), A Companion to Julian the Apostate, Leiden, Boston, 2020, p. 267-292. a 

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RÉCITS DE L'HISTOIRE ECCLÉSIASTIQUE UTILES POUR LA PRÉDICATION

Dans le mêmea, livre 9. À Alexandrie, quand on a peint le signe de la croix du Seigneur sur les portiques, sur les entrées, sur les fenêtres et sur les murs, là, où auparavant se trouvaient les bustes de Sérapisb, quelques païens qui s’étaient convertis, se souvinrent d’une chose très importante qui leur avait été confiée par les anciens : ils dirent que ce signe figurait parmi les lettres sacerdotales, qu’il est interprété comme « la vie à venir », et qu’il leur avait été transmis par les anciens et que ceux qui le vénéraient vivraient aussi longtemps qu’ils verraient ce signe venir dans lequel serait la vie. D’où il est arrivé que ceux qui adoraient les idoles se sont davantage convertis. Dans le mêmec. Quand Théodosed eut formé la ligne de bataille contre les barbares et qu’il vit ses troupes faire retraite, debout sur le rocher, d’où il pouvait voir et être vu par les deux armées, il jeta ses armes et invoqua le secours du ciel. Prosterné devant la face de Dieu, il dit : « Dieu Tout-Puissant, tu sais que j’ai entrepris ce juste combat de vengeance au nom du Christ, ton fils. Si j’ai tort, punis-moi, mais s’il est vrai que je suis venu ici confiant en toi et pour une cause digne d’approbation, étends ta droite sur les tiens, pour qu’on ne dise parmi les nations ‘Où est leur Dieu ?’ (Ps 78:10) ». Après cela, les chefs se sont animés et par-dessus des milliers de morts, sont parvenus jusqu’au tyran. On sait qu’un vent si violent s’est levé après ladite prière qu’il renvoyait les traits contre ceux qui les avaient lancés. Le courage des adversaires étant brisé, Eugène a été conduit aux pieds de Théodose, les mains liées dans son dos, et ce fut ici la fin de sa vie et celle de la bataille.

Rufin d’Aquilée, Historiae ecclesiasticae 11, 29 (p. 1034, 27 - p. 1035, 14). Un dieu dont le culte était répandu en Égypte à l’époque hellénistique. c  Rufin d’Aquilée, Historiae ecclesiasticae 11, 33 (p. 1038, 8 - p. 1039, 11). d  Il s’agit de l’empereur romain Théodose  I (379-392) et de son adversaire Eugène, qui possédait du pouvoir à Rome en 392-394, et fut vaincu ensuite par le premier. a 

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CHAPITRE 31 À PARTIR DE L’HISTOIRE TRIPARTITEPOUR LE MÊME PROPOS

Quand Maxence, le tyran de Rome, se livrait impudemment à l’adultère [avec les femmes] et tuait leurs maris, Constantin voulut l’attaquer et libérer les Romains, il se demandait quel dieu invoquer dans la bataille, sachant que les dieux que Dioclétien vénérait n’aident en rien. Plongé dans ses tourments, il vit pendant son sommeil le signe de la croix brillant dans le ciel et, tandis qu’il s’en étonnait, des anges se présentèrent et lui dirent : « O Constantin, par cela sois vainqueur ! ». On dit que le Christ lui-même lui apparut, lui montra le signe de la croix et lui ordonna de faire une figure semblable afin qu’elle lui vienne en aide dans la bataille. Eusèbe de Pamphile rapporte avoir entendu le récit donné sous serment par l’empereur lui-même : vers midi, quand le soleil a commencé à décliner, il a vu, lui-même et les soldats qui étaient avec lui, le signe de la croix fait de lumière et une inscription entrelacée lui disait : « Par cela sois vainqueur ! ». Et tandis qu’il se demandait ce que c’était, la nuit est survenue, et pendant son sommeil, le Christ lui est apparu avec ce signe qu’il avait vu, et il lui a ordonné qu’il en fasse une représentation semblable, qui apporterait de l’aide dans les bataillesa. Le jour venu, il a convoqué les prêtres et cherchait à savoir ce qu’il faudrait croire au sujet du Christ. Les prêtres ont apporté les a 

Cassiodore, Historia ecclesiastica tripartita. 1, 4, 6-9 (p. 16-17, 34-57).

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À partir de l’Histoire tripartite

livres des prophètes pour lui montrer ce qui a été prédit à propos du Christa. Il a admiré les prophéties annonciatrices du Christ et a ordonné à des hommes de l’art de transformer le signe de la croix en étendard, fait d’or et de pierres précieuses qu’on appelle « labarum », qui précédait l’empereur et était adoré par les guerriers. Voilà pourquoi, à mon avis, Constantin a modifié l’ornement très noble de l’empire en signe de la croix, pour qu’en le voyant souvent, les hommes se déshabituent des mœurs précédentes et pensent que seul est Dieu celui que l’empereur honore et qui lui vient en aide contre ses ennemis. Ce signe était toujours porté devant tous, et surtout devant les troupes qui peinent le plus dans la bataille. Il a constitué aussi des porte-enseignes fidèles pour qu’ils le portent tour à tour et ainsi purifieraient toutes les armées. On dit aussi que pendant une attaque ennemie, un homme qui le portait le donna à un autre ; se retirant de la bataille, transpercé d’une lance il mourut subitement, tandis que l’autre qui portait l’enseigne sortit sain et sauf, bien qu’assailli de nombreux coups de lances. On dit qu’aucun autre porte-enseigne n’a subi ni la mort au combat ni le désastre de la captivitéb. Dans le mêmec. Constantin, pour habituer les guerriers à honorer Dieu comme il faisait, signait leurs armes avec le signe de la croix. Dans le mêmed, il a interdit par une loi le supplice de la croix, qui était anciennement en usage chez les Romains, et a ordonné de toujours inscrire et figurer ce signe sur les pièces de monnaie et les images, comme en témoignent ses portraits décorés de cette figure. De même, livre IIe. La Sibylle a dit à propos de ce bois. « O saint bois sur lequel Dieu a été étenduf ». Dans le mêmeg. La mère de Constantin a apporté une partie de la croix du salut au palais royal. En la recevant, Constantin croyait que serait sauvée la ville dans laquelle cette parcelle serait conserCf. Cassiodore, Historia ecclesiastica tripartita. 1, 5, 1 (p. 17, 1-5). Cassiodore, Historia ecclesiastica tripartita. 1, 5, 3-7 (p. 18-19, 22-47). c  Cassiodore, Historia ecclesiastica tripartita. 1, 9, 11 (p. 27, 80-82). d  Cassiodore, Historia ecclesiastica tripartita. 1, 9, 13 (p. 27, 101-105). e  Cassiodore, Historia ecclesiastica tripartita. 2, 18, 9 (p. 114, 42-44). f  Oraculorum Sibyllinorum uersio latina 6, 26 (p. 153). g  Cf. Cassiodore, Historia ecclesiastica tripartita. 2, 18, 12 (p. 115, 63-66). a 

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vée. On dit qu’il l’a placée avec dévotion dans sa statue sur une colonne au forum de Constantin. Dans le mêmea. À un païen qui s’était fait chrétien, mais ne voulait pas adorer la croix, la force divine apparut et lui montra le signe de la croix, qui était posé sur l’autel de l’église de saint Michel de ce lieu ; elle lui fit clairement entendre que depuis que le Christ a été crucifié, tout ce qui a été fait pour l’utilité du genre humain par la force de la croix qu’il faut adorer, ne l’a été ni par les anges, ni par les hommes. De même, livre 5b. Quand l’empereur Constancec, devenu arien, persécutait les catholiques et était venu à Antioche, on dit qu’alors que la vendange avait été déjà effectuée, les vignes produisirent de nouveau et qu’en plus une pluie tomba du ciel, dont les gouttes ont formé le sceau de la croix sur les vêtements de l’empereur et ceux des étrangers. Par la suite, certains ont dit que le signe des grappes apparues hors saison signifiait la perdition de l’empereur, et qu’à l’instar de cette grappe, son empire durerait peu de temps. À propos de la croix, ils disaient qu’elle présageait le futur, parce qu’elle est le dogme céleste des chrétiens et qu’il faut que tout le monde soit marqué du signe de la croix. La suite des temps a ensuite montré que les deux suppositions étaient vraies, parce que, peu après, l’empereur mourut d’apoplexie. Le même, livre 6d. Quand Juliene, aspirant à l’empire, a consulté des devins qui donnaient des réponses, il trouva un homme qui avouait dire ce que celui-là voulait entendre. Comme l’homme l’emmena dans un lieu caché où il y avait des idoles et invoqua les démons, ceux-ci apparurent conformément au rite, Julien effrayé fit le signe de la croix sur son front et ils disparurent tout de suite. Et quand le mage a blâmé Julien pour son geste et que celui-ci a exprimé sa crainte en disant qu’il a été frappé de stupeur par la force de la croix, le mage a répondu : « Tu ne soupçonneras pas, homme de bien, que les démons ont eu peur, mais ils se sont plutôt Cf. Cassiodore, Historia ecclesiastica tripartita. 2, 19, 5-6 (p. 118, 37-45). Cassiodore, Historia ecclesiastica tripartita. 5, 50, 4-6 (p. 301, 13-31). c  Constance II, empereur (353-361). d  Cassiodore, Historia ecclesiastica tripartita. 6, 1, 16-19 (p. 308, 62-77). e  L’empereur Julien II l’Apostat (361-363). a 

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À partir de l’Histoire tripartite

enfuis, dégoûtés par ce signe ». Et en abusant ainsi ce malheureux, il a rempli Julien de haine envers le signe des chrétiens. De même, même livrea. On dit qu’une fois devenu empereur, Julien offrait un sacrifice ; on lui montra dans les entrailles de la bête sacrifiée le sceau de la croix entouré d’une couronne. En le voyant, les serviteurs ont été terrifiés, pensant que la religion de la croix est éternelle, parce que la couronne qui entourait la croix est un signe de victoire et que le tracé du cercle ne se termine jamais au point de son origine. Dans le mêmeb. Dans la ville d’Héliopolis un diacre du nom de Cyrille, sur ordre de Constance, enflammé du zèle divin, a piétiné et brûlé plusieurs idoles qui étaient adorées là-bas. Certains qui se souvenaient de cette action et dont il ne faut pas évoquer les noms, sur ordre de Julien, l’ont éventré et ont mangé une partie de son foie. Mais tous ceux qu’ont participé à ce crime ont été privés de leurs dents, sont devenus muets, ont aussi perdu la vue, et, par leurs souffrances, ont prêché à tous la force de la piété. Dans le mêmec. À Césarée de Philippe il y avait une statue remarquable représentant le Christ, qui avait été installée par une femme guérie du flux de sang. Julien la déposa et installa à sa place sa propre statue : un feu violent descendit du ciel, la coupa à peu près au niveau de la poitrine, et la partie avec la tête et le cou tomba et se planta dans la terre, l’autre partie est restée jusqu’à présent en gardant la trace de la foudre. Dans le mêmed. Julien, dressant les juifs contre les chrétiens, les convoqua et leur demanda pourquoi ils ne font toujours pas de sacrifices. Quand ils lui ont répondu qu’ils ne pouvaient sacrifier que dans un lieu précis, aussitôt il a ordonné de reconstruire le temple. Accourant de partout, les juifs offraient prestement de l’argent, et l’on dit que, pour nettoyer le terrain ils avaient des pioches, des seaux et des paniers d’argent. Quand, au jour dit, ils ont commencé à creuser, la terre de la fosse remontait spontanément pendant la nuit. Quand ils ont rassemblé plusieurs milliers de boisseaux de Cassiodore, Historia ecclesiastica tripartita. 6, 2, 2 (p. 313, 8-14). Cassiodore, Historia ecclesiastica tripartita. 6, 15, 4-5 (p. 328, 11-22). c  Cassiodore, Historia ecclesiastica tripartita. 6, 41, 1-2 (p. 363, 3-10). d  Cassiodore, Historia ecclesiastica tripartita. 6, 43, 1-8 (p. 365-366, 1-36). a 

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plâtre et de chaux, soudain des vents forts, des tempêtes et des ouragans dispersèrent tout ce qu’ils avaient rassemblé. Il y eut un très grand tremblement de terre et ceux qui n’étaient pas encore initiés au mystère divin ont été écrasés. Le feu, sortant des fondations qu’on creusait, en a brûlé beaucoup et a désagrégé les membres des autres. Dans la nuit, plusieurs dormaient dans un portique à côté; le portique est soudain tombé et les a écrasés dans leur sommeil. Un autre jour, le signe de la croix est apparu brillant dans le ciel. Les vêtements des juifs furent couverts d’empreintes de la croix, marqués pourtant de couleur noire. Alors, les rebelles, considérant cela et craignant d’autres châtiments, sont retournés chez eux, en se confiant à Dieu qui a été, comme il est prouvé, pendu au bois de la croix par leurs ancêtres. Dans le même, livre 9a. Quand on a mis à sac le temple de Sérapisb, on a trouvé des lettres gravées sur la pierre qui étaient en forme de croix. Les chrétiens disaient que c’était le signe de la passion salutaire du Christ, et les païens affirmaient que ce signe était un signe commun au Christ et à Sérapis. Les interprètes disaient que le signe de la croix démontrait la vie à venir. Pour cette raison les chrétiens ont été portés au plus haut degré [d’honneur]. Comme par d’autres lettres, qu’on dit sacrées chez eux, on jugeait que le service du temple de Sérapis devait prendre fin quand la marque de la croix apparaîtrait qui proclamerait la vie à venir, un très grand nombre de personnes se sont dépêchées vers la religion chrétienne et, confessant leurs péchés, ont été baptisées. Dans le même, livre 12c. Quand les barbares ont voulu envahir les frontières romaines, l’empereur Théodose, selon son habitude, s’est confié entièrement à Dieu et, concentré dans la prière, a obtenu rapidement ce qu’il demandait. Leur chef a péri d’un coup de foudre et, par la suite, la peste a tué la plupart d’entre eux et le feu descendant du ciel a brûlé nombre de ceux qui restaient. Cela a provoqué une immense peur chez les barbares, parce qu’ils ont ainsi considéré les Romains comme aidés par Dieu puissant. Cassiodore, Historia ecclesiastica tripartita. 9, 29, 1-3 (p. 539, 1-15). Ancienne divinité originaire de l’Égypte hellénistique. c  Cassiodore, Historia ecclesiastica tripartita. 12, 12, 1-4 (p. 680-681, 1-13).

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CHAPITRE 32 À PARTIR DE L’HISTOIRE DES ANGLAIS POUR LE MÊME PROPOSa

Quand un roi des Anglaisb devenu chrétien alla à la bataille contre un autre roi, qui, en apostasiant de la foi était devenu idolâtre, il érigea l’enseigne de la croix et, fléchissant les genoux, demanda à Dieu d’aider d’un secours céleste ceux qui l’honorent. On dit qu’on a fait rapidement la croix et préparé une fosse ; alors, animé de la foi, il a saisi la croix, l’a plantée dans la fosse et l’a tenue droite avec ses deux mains jusqu’à ce qu’elle soit fixée avec la terre apportée par les guerriers. Cela fait, il a proclamé à haute voix à toute l’armée : « Fléchissons tous les genoux et prions Dieu Tout-Puissant, que dans sa pitié il nous défende de l’ennemi superbe. Car il sait que nous menons des guerres justes pour le salut de notre peuple ». Tout le monde a fait comme il a ordonné et, marchant contre l’ennemi, ils ont remporté la victoire. Sur le lieu de cette prière se sont accomplis d’innombrables miracles ; jusqu’à ce jour, les gens coupent des morceaux de ce bois, les mettent dans l’eau, et les gens et les animaux malades, après l’avoir bue, recouvrent bientôt leur santé.

Bède le Vénérable, Historia ecclesiastica gentis Anglorum 3, 2, 1 (vol. 490, p. 18, 1 - p. 21, 21). b  Oswald de Northumbrie (634-642). a 

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CHAPITRE 33 À PARTIR DE L’HISTOIRE DES FRANCS POUR LE MÊME PROPOSa

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Comme Sophie, la femme de l’empereur Justinb devenu insensé, eut dirigé l’empire et qu’à Justin succéda Tibère, élu par le peuple, celui-ci se montrait généreux en aumônes et actions de piété. Sophie le réprimandait à ce sujet, en disant qu’il réduisait la république à la pauvreté et qu’il dispersait avec prodigalité ce qu’elle avait rassemblé pendant de nombreuses années. Il répondait : « Notre fisc ne sera pas appauvri, pourvu que les pauvres reçoivent des aumônes ». Et en raison de cette foi, Dieu lui donnait de plus en plus. Un jour qu’il se promenait dans le palais il vit une dalle de marbre, sur laquelle était sculptée la croix du Seigneur, et il dit : « Seigneur, nous fortifions notre front et notre poitrine du signe de ta croix et voilà que nous foulons la croix sous nos pieds ». Et il ordonna de l’emporter sur-le-champ. Ceci fait, on trouva en dessous une autre dalle portant le même signe. Il ordonna de l’enlever aussi. Ceci fait, on en a trouvé une troisième similaire et il ordonna que celle-ci soit enlevée aussi. Sous celle-ci, l’on a trouvé un trésor de plus de cent mille pièces d’or. C’est un argument pour dire qu’un grand trésor est caché sous la croix. Cf. Grégoire de Tours, Historia Francorum 5, 19 (p. 225, 6 - p. 226, 6). Dans ce passage il s’agit des empereurs byzantins Justin  II (565-578) et Tibère II (578-582). a 

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CHAPITRE 34 À PARTIR DU MIROIR DE L’ÉGLISE D’AUGUSTIN POUR LE MÊME PROPOSa

Cyprien était païen et malfaisant. Un jeune homme vint chez lui, en lui promettant beaucoup s’il faisait que Justine, une jeune fille chrétienne, lui donne son consentement. Sur cette promesse, Cyprien appela un démon et lui prescrit de faire ce que le jeune demandait. Revêtant les traits de sa nourrice, il se dirigea vers la jeune fille, en l’incitant à ce qu’on a dit. Or, quand la fille se sentit tentée, elle fit le signe de la croix, et le Diable confus se retira ; il revint chez Cyprien et lui dit qu’il ne pouvait pas la convaincre. Alors Cyprien convoqua un autre démon plus fort ; celui-ci, prenant les traits de la sœur, vint chez la jeune fille, se trouva de même confus et revint en disant la même chose. Alors Cyprien pour la troisième fois appela le maître des démons ; celui-ci prenant les traits de la mère, vint chez elle, se trouva également confus et, à son retour, dit à Cyprien qu’il ne pouvait rien faire à cause du signe de la croix avec lequel elle s’était fortifiée. Cyprien dit alors : « Est-elle vraiment si grande, la force du signe de la croix du Christ ? ». Et le Diable : « Elle l’est assurément ». Et Cyprien : « Par conséquent, le Christ est beaucoup plus puissant. Je me rends à lui et je renonce à toi ! ». Et le Diable : « Je t’emporterai vivant dans l’enfer ». Pris Cf.  Étienne de Bourbon, Tractatus de diuersis materiis predicabilibus II, 5, 7 (p. 155-156, 936-960) ; Honoré d’Autun, Speculum ecclesiae De exalt. s. crucis (col. 1004BD) ; voir aussi chap. IV. a 

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Chapitre 34

de peur, Cyprien se fortifia avec le signe de la croix, le Diable disparut et Cyprien vint chez la jeune fille, se fit baptiser et devint chrétien.

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CHAPITRE 35 À PARTIR DU DIALOGUE DE GRÉGOIRE POUR LE MÊME PROPOSa

Un juif venait vers la ville de Fondi, le soir tombait et il n’avait pas où dormir ; il entra dans le temple d’Apollon qui se situait à côté pour y rester pendant la nuit. Craignant l’impiété du lieu, bien qu’il n’ait pas la foi de la croix, il se fortifia du signe de celleci. Comme la peur le gardait éveillé au milieu de la nuit, tout-àcoup arriva une foule d’esprits mauvais et celui qui était à leur tête s’installa au milieu. À sa demande, chacun lui rapportait quel mal il avait fait contre les bons, et le juif entendait tout et voici que le chef des esprits ordonna d’aller voir qui avait eu l’audace de coucher dans le temple. Quand les esprits mauvais se dirigèrent vers lui, ils virent qu’il était marqué du mystère de la croix et, étonnés, ils dirent : « Hélas, hélas ! Ce vase est vide, mais il est scellé ». À  cette nouvelle, toute la troupe des esprits méchants disparut. Celui qui avait vu cela l’a raconté ensuite et est devenu chrétien.

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Cf. Grégoire le Grand, Dialogi 3, 7 (vol. 260, p. 280-285, 20-60).

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CHAPITRE 36 À PARTIR DE LA GESTE DE CHARLES EN ESPAGNEPOUR LE MÊME PROPOS

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J’ai vu de mes propres yeux les actions merveilleuses sur les Sarrasins, en marchant pendant 14 années avec Charles et son armée, et c’est pourquoi je n’hésite pas à écrire avec certitudea. Après que Charles, fortifié de l’aide divine, ait soumis divers royaumes à l’Empire Romain et les ait arrachés des mains des Sarrasins, fatigué par de nombreuses et difficiles entreprises, il se proposa de s’accorder du repos. Un homme au très beau visage lui apparut en vision pendant la nuit et lui dit : « Qu’est-ce que tu fais, mon fils ? ». Et lui : « Qui est-tu, seigneur ? ». Il a dit : « Je suis l’apôtre Jacques, le frère de Jean l’Evangéliste ; mon corps repose inconnu en Galice qui est encore aujourd’hui opprimée par les Sarrasins d’une manière honteuse. Et je me demande pourquoi tu n’as pas libéré ma terre des mains des Sarrasins, toi qui as acquis tant de terres ! Je te fais savoir que Dieu t’a élu pour libérer ma terre des mains des Sarrasins et pour visiter ma basilique, et après toi tous les peuples viendront en pèlerinage dans ce lieu jusqu’à la fin des temps. Maintenant donc, va au plus vite, parce que je serai ton soutien en toutes choses ». Il lui apparut trois fois ainsi et c’est pourquoi Charles rassembla son armée et entra en Espagneb. a  b 

Cf. Pseudo-Turpin, Historia Karoli Magni et Rotholandi Prol. (p. 87). Cf. Pseudo-Turpin, Historia Karoli Magni et Rotholandi 1 (p. 88-93).

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À partir de la Geste de Charles en Espagne

La première ville que Charles a assiégée était Pampelune qui était bien fortifiée de murs inexpugnables. Il en fit le siège pendant trois mois, mais il n’était pas capable de la prendre. On adressa des prières à Dieu et à saint Jacques, les murs s’écroulèrent jusqu’aux fondations et Charles garda saufs les Sarrasins qui voulurent être baptisés, mais passa les autres par le glaive. Terrifiés par ces miracles, les Sarrasins lui rendaient partout les villes, lui payaient tribut. Et tout le pays s’est retrouvé sous le tribut. Après avoir visité le sarcophage de saint Jacques, il vint à Petroniuma, et jeta une lance dans la mer, en remerciant Dieu et saint Jacques qui l’avaient conduit jusque làb. Et quand il eut pris des villes et des domaines presque innombrables, qui par la guerre ou gratuitement se sont livrés à lui, il restait une ville dite Lucernac très bien fortifiée. Bien qu’il l’ait assiégée pendant quatre mois sans pouvoir la prendre, en faisant la prière à Dieu et saint Jacques, les murs s’effondrèrent et elle est restée déserte jusqu’à nos jours. Un tourbillon d’eau noire a surgi dans son milieud. Un guerrier de l’armée qui souffrait ses derniers moments prescrivit à un parent de vendre après sa mort son cheval et de distribuer l’argent en aumônes. Après avoir reçu les derniers sacrements, il mourut et ledit parent vendit le cheval et dépensa l’argent en nourriture et en boissons. Après trente jours, le mort lui apparut en vision dans la nuit en disant : « Parce que je t’ai confié mes biens pour les donner en aumônes, sache que mes péchés sont remis et je serai au paradis, mais toi, parce que tu as retenu mes aumônes, sache que demain tu iras en enfer ! ». Et ainsi il disparut. Comme au petit matin, absolument terrifié, l’homme racontait sa vision et que toute l’armée en parlait, tout à coup, éclata au-dessus de lui a  Plus probablement, l’actuel El Padrón (ancienne Iria Flavia), env. 20 km de Compostelle. Voir : Pseudo-Turpin, Historia Karoli Magni et Rotholandi, p. 266. b  Cf. Pseudo-Turpin, Historia Karoli Magni et Rotholandi 2-3 (p. 92-95). c  Il s’agit d’une ville légendaire mentionnée dans la chronique de pseudo-Turpin. À ce sujet voir : J. M. Anguita Jaen « El Pseudo-Turpín y la leyenda de Lucerna de los Alpes al Lago de Sanabria », Iacobus : revista de estudios jacobeos y medievales, 15-16 (2003), p. 75-98. d  Cf. Pseudo-Turpin, Historia Karoli Magni et Rotholandi 3 (p. 94-100).

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comme le rugissement de lions, de loups et de veaux dans l’air et aussitôt il fut arraché du milieu des gens qui l’entouraient. On le chercha pendant quatre jours sans le trouver nulle part. L’armée marchait depuis 12 jours dans le désert quand on retrouva le corps inanimé et fracassé sur le sommet d’une montagne qui se trouvait à quatre journées de marche et une ascension de trois lieuesa. Alors que Charles allait se battre contre Agolant le lendemain, quelques-uns de ses guerriers, le soir précédent, préparaient les armes pour la bataille, ils fichèrent leurs lances en terre dans les prés devant le camp. Au petit matin, ils les trouvèrent décorées d’écorce et de feuilles. Ils sont tous morts dans la bataille du lendemain, et ont atteint la gloire du martyre. En mémoire dudit miracle, on a coupé les lances au niveau de la terre, et les racines qui sont restées ont produit ensuite de grands arbustesb. Entre Agolant et Charles, un pacte fut passé selon lequel, après la bataille entre les siens et les nôtres, on tiendrait pour meilleure la foi des vainqueurs ; on opposa successivement 20 contre 20, 40 contre 40 et une centaine contre une centaine et les nôtres eurent toujours la victoirec. On fit une trêve et, voyant cela, Agolant vint chez Charles pour recevoir le baptême avec ceux des siens qui le voulaient. Comme pendant le repas de Charles, Agolant avait vu la variété des évêques, des moines et des autres qui se trouvaient à sa cour, il l’interrogea et Charles lui dit à propos de chacun qui ils étaient ; il le questionna aussi sur treize pauvres qui, en vêtements de misère, mangeaient honteusement par terre. Charles lui répondit : « Ce sont les gens de Dieu et les messagers de notre Seigneur Jésus Christ, qu’on a l’habitude de nourrir chaque jour ». Agolant dit alors : « Ceux qui t’entourent et sont à toi, ils sont heureux et ils mangent, boivent et s’habillent de manière heureuse. Mais ceux que tu appelles le peuple de ton Dieu et ses messagers, pourquoi meurent-ils de faim, sont-ils mal vêtus, mis à l’écart de toi et traités d’une manière honteuse ? Il sert mal son Seigneur, celui qui accueille ses messagers d’une manière si honteuse. Tu montres en Cf. Pseudo-Turpin, Historia Karoli Magni et Rotholandi 7 (p. 104-108). Cf. Pseudo-Turpin, Historia Karoli Magni et Rotholandi 8 (p. 108-113). c  Cf. Pseudo-Turpin, Historia Karoli Magni et Rotholandi 12 (p. 128-135).

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À partir de la Geste de Charles en Espagne

cela que ta loi est fausse ». Et avec un sauf-conduit, il se retira chez les siens et, refusant le baptême, il déclara la guerre à Charles pour le lendemaina. De même, quand Charles alla se battre contre un grand prince sarrasin nommé Furre, il demanda au Seigneur de lui montrer qui de ses guerriers allait mourir dans la bataille. Le lendemain, quand ses guerriers prirent les armes, un signe rouge de la croix apparut sur les épaules de ceux qui allaient mourir. Voyant cela, Charles les a enfermés dans son oratoire, et il y en avait presque 150. Mais à la fin de la bataille et après que le prince sarrasin eut été tué, on les trouva morts aussi dans l’oratoire. Ils n’ont pas fait défaut au martyre, bien que le martyre leur ait fait défautb. Lors d’une bataille, les Sarrasins ont ordonné qu’à côté de chaque cavalier, l’un des leurs porte un masque terrifiant et un tambourin qui sonne de manière terrible et, venant ainsi, ils ont terrifié nos chevaux qui se sont enfuis malgré nos cavaliers ; le lendemain, Charles ordonna que tous les nôtres couvrent les yeux de leurs chevaux et leur bouchent soigneusement les oreilles. Et venant ainsi contre les Sarrasins, ils eurent la victoirec. Certains princes Sarrasins, afin de séduire les nôtres, leur envoyèrent, entre autres donations, du vin très doux et un millier de très jolies femmes sarrasines, et certains des nôtres s’adonnèrent à l’ébriété et à la luxure avec ces femmes sarrasines aussi bien qu’avec d’autres qu’ils avaient amenées de France. Peu après, les Sarrasins remportèrent la victoire sur les nôtres, grâce à la trahison de Ganelon, à Roncevaux, où sont morts les combattants, et Roland et les nôtres furent confus par une ultime confusion, bien que les combattants et d’autres preux ne se fussent pas exposés à ces plaisirsd. C’était l’usage dans l’armée de Charles que tous les combattants, avant d’entrer dans la bataille, se fortifient par l’eucharistie et la confession reçue des mains des évêques et des moines qui sont présents. La prière de Roland avant sa mort : « Seigneur Jésus, pour ta foi j’ai quitté ma patrie et je suis venu dans ces contrées Cf. Pseudo-Turpin, Historia Karoli Magni et Rotholandi 13 (p. 136-139). Cf. Pseudo-Turpin, Historia Karoli Magni et Rotholandi 16 (p. 144-147). c  Cf. Pseudo-Turpin, Historia Karoli Magni et Rotholandi 18 (p. 162-169). d  Cf. Pseudo-Turpin, Historia Karoli Magni et Rotholandi 21 (p. 178-185). a 

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barbares pour exalter ta foi ; muni de ton soutien, j’ai vaincu les armées de nombreux perfides et j’ai souffert d’innombrables soufflets, chutes, blessures, opprobres, moqueries, fatigues, chaleurs, froid, faim, soif et angoisses. C’est à toi que je confie maintenant mon âme. De plus, je confesse qu’il est juste de dire que je suis un pécheur, mais toi, qui as eu pitié de tes ennemis et de la femme trouvée en adultère, toi qui as pardonné Madeleine et Pierre qui pleurait, qui as ouvert la porte du paradis au larron qui s’est confessé, ne refuse pas de pardonner mes péchés et juge mon âme digne d’être ranimée dans le repos éternel ». Et, les mains tenant la peau et la chair sur la poitrine, il a dit : « Je confesse et je crois que dans cette chair je te verrai, Dieu (Jb 19:26) mon sauveur ». Puis tenant par trois fois sa chair, il mit par trois fois les mains sur ses yeux et dit : « Et ces yeux vont voir (Jb 19:27) ». Ouvrant de nouveau ses yeux, il a commencé à regarder vers le ciel et à faire le signe de la croix sur tous ses membres et sa poitrine, et a commencé à dire : « Maintenant je tiens tout ce qui est terrestre pour peu de prix, parce que je vois, et c’est le Christ qui le donne, сe que l’œil n’a pas vu, et ce qui n’est pas monté au cœur de l’homme (1 Co 2:9) ». Ayant étendu les mains, il a prononcé une prière pour les autres morts dans la bataille, disant : « Que ton sein miséricordieux s’étende sur tes fidèles, qui aujourd’hui sont morts dans la bataille et qui sont venus des terres lointaines contre ces nations barbares pour exalter ton nom saint et pour déclarer ta foi ! Maintenant ils gisent, tués par les mains des Sarrasins. Envoie les archanges, pour qu’ils conduisent leurs âmes vers le royaume céleste et qu’ils puissent régner avec les martyrs dans les siècles des siècles, toi qui vis et règnes avec Dieu le Père et le Saint Esprit dans les siècles des siècles ! »a. Quand l’âme du bienheureux Roland quitta son corps, et que moi, Turpin, je célébrais la messe des défunts en présence de Charles dans la vallée de Charlesb, transporté en extase j’ai entenCf. Pseudo-Turpin, Historia Karoli Magni et Rotholandi 23 (p. 194-201). Le même nom est utilisé dans le Guide du Pèlerin qui se trouve aussi dans le Codex Calixtinus (Pseudo-Turpin, Historia Karoli Magni et Rotholandi, p. 317). Cette vallée correspond à Valcarlos, un peu plus au nord que Roncevaux (Die Chronik von Karl dem Grossen und Roland. Die lateinische Pseudo-Turpin in a 

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À partir de la Geste de Charles en Espagne

du des chœurs qui chantaient dans les cieux. Et tandis qu’ils montaient au ciel, voici que derrière eux venaient des guerriers horribles comme chargés de butin. Et j’ai dit : « Qu’est-ce que vous portez ? ». Et eux : « Nous portons [l’émir] Marsile vers l’enfer. Et [l’archange] Michel emporte notre sonneur de cor [Roland] avec les autres dans les cieux ». Après la messe, quand j’ai raconté cela au roi, voici que Baudoina est arrivé sur le cheval de Roland et a raconté ce qui s’est passé et qu’il avait laissé Roland agonisant sur la montagne. Tout le monde a crié « Revenons en arrière, en arrière ! ». Charles a trouvé d’abord Roland gisant mort, sur le dos, les bras sur la poitrine en forme de croix. Il s’est précipité sur lui, pleurant, gémissant, poussant des soupirs innombrables et s’est exclamé : « O mon bras droit ! O toi, l’honneur des Gaulois, l’épée de la justice, la lance inflexible, très savant dans la guerre, le plus fort des forts, le destructeur des Sarrasins, le défenseur des chrétiens, le mur des clercs, le bâton des orphelins, la nourriture des veuves, le secours des pauvres, le renfort des églises, la langue ignorante du mensonge, le chef de l’armée des fidèles, pourquoi je t’ai emmené dans ces terres ? Pourquoi est-ce que je ne meurs pas avec toi ? Hélas, que dois-je faire ? Va avec les anges, exulte avec les martyrs, réjouis-toi avec tous les saints ! »b. Après avoir célébré les funérailles solennellement et avec dévotion, de bon matin ils sont allés en armes au lieu de la bataille de Roncevaux et ont trouvé leurs amis, morts ou mortellement blessés et Olivier couché sur le dos, dans la forme de la croix. Tandis que le roi courait à la poursuite des Sarrasins, le soleil s’est immobilisé et le jour a été prolongé jusqu’à presque trois jours. On a trouvé les Sarrasins et on en a tué quatre mille et le roi est revenu en faisant trainer Ganelon, le traître, par quatre chevaux très forts tirant aux quatre points cardinauxc. Et un grand nombre a pris soin des corps de ceux qui leur étaient chers, les embaumant avec des parfums et les portant vers den Handschriften aus Aachen und Andernach, éd. H.-W. Klein, München, 1986, p. 165). a  Le jeune demi-frère de Roland. b  Cf. Pseudo-Turpin, Historia Karoli Magni et Rotholandi 25 (p. 202-205). c  Cf. Pseudo-Turpin, Historia Karoli Magni et Rotholandi 26 (p. 206-209).

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Chapitre 36

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différents cimetièresa. Le roi a fait enterrer le bienheureux Roland à Blaye, dans l’église de saint Romain, qu’il avait construite auparavant et dotée de chanoines réguliers et il a glorifié cette église de sa munificence royaleb. Ainsi il est revenu en répandant prières à saint Denis pour les autres qui sont morts en Espagne dans la guerre contre les Sarrasins. La nuit suivante, saint Denis lui est apparu et lui a dit que pour ceux qui étaient morts dans la guerre avec les Sarrasins selon l’exemple de son courage, il a obtenu le pardon de tous les péchésc. Moi, Turpin, je suis venu avec le roi jusqu’à Vienne et tandis qu’il s’avançait en France, je suis resté là pour cause de maladie. Un jour, alors que je priais devant l’autel et je prononçais le psaume « Deus in adjutorium (Ps 69), etc. », je suis tombé en extase. Voici la troupe innombrable d’horribles guerriers dont j’ai parlé ! J’ai vu quelqu’un, comme un Éthiopien, qui marchait le dernier et plus lentement que les autres et je lui ai dit : « Où allez-vous ? ». Et il a dit : « Nous allons à Aix-la-Chapelle pour la mort de Charles, afin d’emporter son esprit aux enfers ». Et moi : « Je t’en conjure au nom de notre Seigneur Jésus Christ, revenez pour moi après votre voyage ». Ils sont restés un peu, mais quand le psaume que j’ai dit fut fini, ils sont repartis dans le même ordre, et j’ai dit au dernier, à qui j’avais parlé auparavant : « Qu’avez-vous fait ? ». Et lui : « Le Galicien sans têted a mis tant de telles pierres et de pièces de bois sur la balance que le bien a prévalu sur le mal, et ainsi il nous l’a pris ». Sur ces mots, il a disparu. Plus tard, quand un messager est venu chez moi pour me faire part de la mort de Charles, j’ai découvert que le roi est mort le jour même de cette visione.

Cf. Pseudo-Turpin, Historia Karoli Magni et Rotholandi 27 (p. 210-211). Cf. Pseudo-Turpin, Historia Karoli Magni et Rotholandi 29 (p. 212-213). c  Cf. Pseudo-Turpin, Historia Karoli Magni et Rotholandi 30 (p. 218-219). d  Saint Jacques le Majeur. Il est convenu de croire qu’il a été décapité. Voir par exemple : Iacopo da Varazze, Legenda Aurea con le miniature dal codice Ambrosiano C 240 inf., éd. G. P. Maggioni, Firenze, 2007, p. 730. Certaines églises en dehors de Saint-Jacques-de-Compostelle disaient posséder la relique de la tête de saint Jacques (D. Péricard-Méa, Compostelle et cultes de saint Jacques au Moyen Âge, Paris, 2000, p. 99, 113-114). e  Cf. Pseudo-Turpin, Historia Karoli Magni et Rotholandi 32 (p. 228-231). a 

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CHAPITRE 37 À PARTIR DU LIVRE DU PAPE CALIXTE POUR LE MÊME PROPOSa

Quand après la mort de Charles en Espagne est apparu un grand Sarrasin qui s’appelait Altumaior, qu’il est venu dans la basilique de saint Jacques et, dévastant tout, qu’il a ainsi profané la basilique en faisant loger les chevaux en leur faisant faire leurs excréments devant l’autel, voilà que les uns sont morts d’un flux d’intestins et les autres erraient de par la basilique et la ville, perdant la vue, et Altumaior lui-même est devenu aveugle. Mais suivant le conseil d’un prêtre de cette église, il a commencé à invoquer le Dieu des chrétiens et saint Jacques, en promettant que s’il lui rendait la vue, il restituerait tout et renierait Mahomet. Il a tout restitué au double, la santé lui a été restituée et, en se retirant de cette terre, il prêchait que le Dieu des chrétiens est grand et que saint Jacques est grand.

Un récit à partir du texte qui se trouve dans le Codex Calixtinus avec la chronique de pseudo-Turpin. Le personnage historique qui a servi pour cette histoire était probablement Almanzor le Conquérant qui agissait en Espagne et concrètement à Saint-Jacques-de-Compostelle à la fin du xe siècle. Les sources rapportent qu’il a effectué beaucoup de dévastations à Compostelle, y compris la cathédrale. Pour la source et le commentaire voir : cf. Pseudo-Turpin, Historia Karoli Magni et Rotholandi appendix B (p. 245-249, 338). a 

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CHAPITRE 38 À PARTIR DE L’HISTOIRE ANTIOCHIENNEPOUR LE MÊME PROPOS

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Paroles du pape Urbain II pour inviter les gens à la croix pendant le Concile de Clermont : O, quelle honte si un peuple si dégénéré, serviteur des démons, a vaincu ainsi le peuple de Dieu Tout-Puissant, doté de la foi et brillant du nom du Christ ! De quels reproches vous accablera le Seigneur lui-même, si vous n’aidez pas ceux qui sont considérés comme chrétiens autant que nous ! Pour cela, il faut que ceux qui se battaient de manière abusive contre les fidèles, aillent maintenant se battre contre les infidèles. Qu’ils deviennent maintenant chevaliers, ceux qui étaient autrefois les ravisseurs ! Qu’ils se battent maintenant contre les barbares, ceux qui se battaient autrefois contre les frères ! Que ceux qui étaient mercenaires pour une poignée de sous reçoivent une récompense éternelle. Que ceux qui se fatiguent au détriment du corps et de l’âme, travaillent pour un double honneura ! Quand nous sommes arrivés à Brindisi et que nos gens sont montés à bord des navires, un navire s’est brisé près du rivage, ce qui a causé la mort d’environ 800 personnesb, hommes aussi bien que femmes. Or, quand nous avons rassemblé les corps autant a  b 

Foucher de Chartres, Historia Hierosolymitana 1, 3, 6-7 (p. 135-137). 400 dans le texte de la chronique.

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À partir de l’Histoire Antiochienne

qu’on pouvait, nous avons trouvé, gravés dans la chair de certains d’entre eux, sur leurs épaules, des marques très visibles à l’instar de la croix. Il convenait que les défunts dans le service de Dieu gardent le signe victorieux comme un témoignage de la foia. Quand nous sommes arrivés dans la ville de Nicée, on considérait qu’il y avait 700 000 hommesb en état de combattre sauf les clercs et les autres inaptes à la bataille. On estime que si tous ceux qui sont partis étaient restés, il y aurait environ six millions de personnesc. Quand nous marchions de Nicée vers Antioche, les Turcs nous ont encerclés comme des brebis dans une bergerie en nous frappant, de tous côtés, d’une pluie de flèches au-delà de l’imaginable, à cause des péchés commis par les nôtres qui se sont souillés les uns par la luxure, les autres par l’avarice ou par l’orgueil. Et les nôtres ont reconnu leurs péchés et ont invoqué la miséricorde de Dieu : les évêques et les prêtres, vêtus de blanc, étaient là, priaient humblement le Seigneur, chantaient en pleurant, et la multitude accourait à eux pour la confession. Et voilà que le Seigneur bienveillant a donné aux nôtres une telle audace et aux adversaires une telle crainte que les uns ont aussitôt mis en fuite les autres. Ceux-ci n’ont pas cessé de courir pendant le deuxième et le troisième jour, et nous, nous nous sommes enrichis de leurs biens. Désormais tout le monde nous craignait et la rumeur s’en est répandue de l’Occident à l’Orientd. Quand nous nous sommes approchés de la ville d’Héracléee, nous avons vu un signe brillant à l’instar d’un glaive avec la pointe dirigée vers l’Orientf. Quand, pendant le siège d’Antioche, la famine croissait si rapidement que beaucoup pensaient à fuir ce siège, bien qu’ils aient juré [de se battre], on tint conseil et l’on chassa toutes les femmes Foucher de Chartres, Historia Hierosolymitana 1, 8, 2-3 (p. 169-170). 600 000 selon la chronique et aussi dans le chapitre 10 du présent traité. c  Foucher de Chartres, Historia Hierosolymitana 1, 10, 4-5 (p. 183-184). d  Cf.  Foucher de Chartres, Historia Hierosolymitana 1,  11,  8 - 1,  12,  5 (p. 195-198). e  Aujourd’hui Ereğli en Turquie. f  Foucher de Chartres, Historia Hierosolymitana 1, 14, 1 (p. 203-205). a 

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Chapitre 38

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de l’arméea, par peur que le Seigneur ne soit irrité à cause du péché de luxure qu’ils commettaient avec elles. Elles ont trouvé leur logement dans des châteaux à proximitéb. Et nous avons vu le ciel merveilleusement rouge et senti aussi un terrifiant tremblement de terre, et certains des nôtres ont vu dans le ciel un signe qui était en forme de croix, qui se dirigeait tout droit vers l’Orientc. Pendant le siège d’Antioche qui a duré du mois d’octobre [1097] jusqu’en juin suivant, les nôtres étaient si opiniâtres que, faute de vivres, ils mangeaient des chardons et toutes sortes d’autres herbes des champs, les chevaux, les mules et les chameaux, tandis que les plus pauvres mangeaient les chiens et la peau des bêtes et les grains trouvés dans le fumierd. Quand il plut au Seigneur de mettre un terme au labeur de son peuple, il est apparu à un Turc à l’intérieur de la ville et lui a dit : « Réveille-toi et rends la ville aux Francs ! ». Etonné, il a passé la vision sous silence. Il lui est apparu encore une fois et dit la même chose en ajoutant : « Je suis le Christ qui ordonne ». Au réveil l’homme alla chez le prince d’Antioche, son seigneur, et raconta la vision. Et celui-ci lui a dit : « Est-ce que tu dois croire aux visions comme un imbécile ? ». De retour chez lui le Seigneur lui est apparu à nouveau, disant : « Pourquoi n’as-tu pas accompli ce que je t’ai ordonné ? Tu ne dois pas hésiter ! Car moi qui ordonne, je suis le Seigneur pour tous ! ». Sans plus d’hésitation il négocia avec les nôtres comment il pourrait leur livrer la ville. Une vingtaine des nôtres ont été introduits de nuit dans la ville par le moyen de cordes, ils ont ouvert la porte aux autres et les nôtres sont entrés, ont pris la ville en tuant beaucoup de gens et les autres ont pris la fuite. L’émir d’Antioche a été décapité par un paysan arménien qui a apporté la tête aux Francs.

La ponctuation du texte latin est à corriger (p. 146, l. 44) : licet iurassent [VIRGULE] inito consilio [pas de virgule] eiecerunt omnes mulieres. b  Foucher de Chartres, Historia Hierosolymitana 1, 15, 11-14 (p. 222-223). c  Foucher de Chartres, Historia Hierosolymitana 1, 15, 16 (p. 224). d  Cf.  Foucher de Chartres, Historia Hierosolymitana 1,  16,  8 (p.  229) ; cf. Foucher de Chartres, Historia Hierosolymitana 1, 16, 2 (p. 225-226). a 

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À partir de l’Histoire Antiochienne

Quand les nôtres sont entrés et ont pris Antioche, ils se sont tous exclamés : « Dieu le veut ! Dieu le veut ! », et c’était le type d’exclamation que nous utilisions quand nous voulions accomplir efficacement quelque opération de cette affairea. Après la prise d’Antioche, un homme a trouvé une lance dans l’église de saint Pierre, en creusant la terre. Celui qui l’a trouvée disait que c’était la lance dont on avait percé le côté du Seigneur et que saint André lui était apparu trois fois, lui disant de creuser à tel endroit sous le pavé pour y trouver la lance du Seigneur en question. Peut-être a-t-elle été cachée d’une manière trompeuse. De là est née une grande exultation et dévotion dans le peupleb. Après la prise d’Antioche, comme plusieurs des nôtres avaient été souillés des péchés des femmes, voilà que le roi des Persesc, en venant au secours des Turcs avec ses hommes, a assiégé les nôtres si durement que beaucoup pensaient à fuir, mais on dit que Dieu qui n’oublie pas les siens est apparu à plusieurs et les a réconfortés. Il est apparu à un clerc en fuite et lui a dit : « Où te diriges-tu, frère ? ». Et lui : « Je fuis comme celui qui n’a pas la bonne fortune ». Et le Seigneur lui dit : « Ne fuis pas, mais reviens sur tes pas et dis aux autres que je serai avec eux dans la bataille. Bien qu’ils aient presque péri à cause de leurs péchés, je suis néanmoins apaisé par les prières de ma mère et je les pardonnerai. Qu’ils fassent pénitence, et ils seront sauvés. C’est moi ton Seigneur qui te parle ». Sitôt revenu, il a raconté ce qu’il a vud. De même, comme plusieurs voulaient descendre de nuit avec des cordes et fuir, à l’un de ceux qui descendaient est apparu son frère mort qui lui a dit : « Où fuis-tu, mon frère ? Reste ! N’aie pas peur, car le Seigneur sera avec vous dans la bataille ! Et vos compagnons qui sont morts en chemin se battront avec vous contre les Turcs ». Etonné par les paroles du défunt, il est resté et a raconté ce qu’il a vue. Et il est arrivé ceci peu après. Tandis que nos hommes avec leurs chevaux mouraient de faim, on a fait trois jours Foucher de Chartres, Historia Hierosolymitana 1, 17, 1-8 (p. 230-235). Cf. Foucher de Chartres, Historia Hierosolymitana 1, 18, 1-3 (p. 235-238). c  Kerbogha, l’atabey de Mossoul. d  Cf. Foucher de Chartres, Historia Hierosolymitana 1, 20, 1 (p. 245-246). e  Foucher de Chartres, Historia Hierosolymitana 1, 20, 2 (p. 246-247). a 

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de jeûne en priant avec dévotion, puis les nôtres, en petit nombre, sont sortis contre la foule innombrable des Turcs, accompagnés des prêtres en vêtements blancs qui priaient, pleuraient et récitaient des psaumes pour le peuple. Et ils ont remporté sur eux une victoire incroyable ; ils ont mis les Turcs en fuite et ils se sont enrichis d’un butin inestimablea. Lors d’un engagement [bataille de Ramla, 1105], alors que le patriarche de Jérusalem [Evremar de Thérouanne] portait la croixb et que les nôtres criaient unanimement « Christ est victorieux ! Christ règne ! Christ gouverne ! », nos guerriers ont remporté une victoire incroyable et inattendue, car ils étaient peu nombreux contre un grand nombre, à savoir 500 chevaliersc et deux mille piétons de notre côté contre 15 mille Sarrasinsd.

a  Cf.  Foucher de Chartres, Historia Hierosolymitana 1,  20,  3 (p.  247) ; 1, 22, 3 (p. 252-253) ; 1, 23, 2-3 (p. 255-256). b  Sous-entendue la relique de la croix du Seigneur. c  Malgré le fait qu’à l’époque le terme miles n’indiquait pas encore clairement l’appartenance à une catégorie sociale, mais désignait souvent un guerrier monté, ici il s’agit du chevalier proprement dit : « Milites nostri erant D, exceptis illis, qui militari nomine non censebantur, tamen equitantes ». d  Cf.  Foucher de Chartres, Historia Hierosolymitana 2,  32,  2-3.5 (p. 495-497).

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CHAPITRE 39 À PARTIR DE L’HISTOIRE TRANSMARINE POUR LE MÊME PROPOS

Quand Pierre l’Ermite, du diocèse d’Amiens, par dévotion visita les lieux saints, il découvrit que Syméon, alors patriarche de Jérusalem, et les chrétiens qui étaient sous son autorité  vivaient dans une affliction misérable et menaient une vie amère sous les Sarrasins. Pris de compassion profonde envers eux, il commença à se demander comment il pourrait leur venir en aide. Occupé à ces réflexions, tandis qu’il veillait une nuit dans l’église, vaquait à ses prières, et s’était endormi sur le pavement, le Seigneur Jésus lui apparut, lui ordonnant une mission auprès du pape et des princes de l’Occident. Et lui, conforté par la révélation divine et enflammé par la charité, partit avec des lettres du patriarche susdit et autres fidèles qui habitaient dans le même lieu ; il vint chez le pape qui le reçut avec bienveillance et s’est porté chez les princes. Il les a tellement émus, eux et un peuple innombrable, qu’ils ont traversé des labeurs et des batailles sans nombre et, avec l’aide de Dieu, ils ont arraché la Terre sainte des mains des Sarrasinsa. Quand les nôtres étaient assiégés à Antioche, la famine à cause des péchés commis est devenue telle qu’il était nécessaire soit de mourir de faim, soit de se battre ; et ils sont sortis peu nombreux a 

Cf. Jacques de Vitry, Historia orientalis 16 (p. 160, 8 - p. 162, 35).

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contre la multitude innombrable, confiants non dans leurs forces, mais dans la force de Dieu dont ils portaient la lance devant eux. Or la rosée tombant du ciel a si bien restauré leur courage et fortifié soudain les chevaux qui déjà s’affaiblissaient beaucoup, qu’avec un grand courage ils se sont précipités sur les ennemis, ont remporté une victoire inestimable et se sont enrichis de butina. Auparavant il n’y avait pas de vigne de baume dans d’autres parties du monde qu’à Jéricho, mais elle a été exportée par les Égyptiens dans la plaine de la ville qu’on appelle Babyloneb, où elle est cultivée par les chrétiens qui y habitent sous le pouvoir des Sarrasins. Or les Égyptiens disent, et cela a été vérifié par les expérimentations, que si elle est cultivée par les Sarrasins, elle ne donne pas de fruit. Dans la plaine dont je parle, il y a six sources et dans l’une d’elles, à ce qu’on dit, la sainte Vierge a fait baigner le Christ encore enfant. Et il est certain et prouvé que la liqueur de baume, que les médecins appellent « baume », ne peut pousser en aucun autre lieu, si l’on transfère la vigne ou le plantc.

Cf. Jacques de Vitry, Historia orientalis 19 (p. 168, 10-29). Le Caire (pour cette désignation voir p. ex. K. Allen Smith, The Bible and Crusade Narrative in the Twelfth Century, Woodbridge, 2020, p. 173-174). c  Cf. Jacques de Vitry, Historia orientalis 86 (p. 346, 52-62). a 

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CHAPITRE 40 À PARTIR DES VIES DES PÈRES POUR LE MÊME PROPOS

Quand les gens traversaient les solitudes pour se rendre chez saint Antoine qui habitait dans le désert, ils étaient terrifiés par diverses horreurs et illusions des démons et il leur disait : « Signez-vous et soyez en sûreté. Signez vos maisons et habitez en sûreté. Les démons en effet prennent des aspects différents, mais sitôt fait le signe de la croix, ils sont réduits à rien, parce qu’ils ont peur de ce trophée du salut »a. Sainte Sinclétique a dit : « Si tu as commencé quelque chose de bien, ne reviens pas en arrière à cause de la perversité de la tentation de l’ennemi. En effet, ceux qui commencent à naviguer avec un vent favorable et rencontrent un vent contraire, ne jettent pas tout de suite les charges et ne quittent pas le navire, mais s’accoutument peu à peu ou résistent à la tempête, hissent les voiles et trouvent le bon cap. Nous aussi, quand nous rencontrons un esprit contraire, dressons la croix en guise de voile, et sans le péril du siècle présent accomplissons notre navigation »b.

a  Étienne de Bourbon, Tractatus de diuersis materiis predicabilibus II, 5, 7 (p. 157, 1002-1006) ; cf. Athanase d’Alexandrie, Vita Antonii – interpretatio Euagrii 13 (p. 19, 1-12), 35 (p. 40, 1-5). b  Étienne de Bourbon, Tractatus de diuersis materiis predicabilibus II, 5, 7 (p. 161, 1129-1136) ; cf. Vitae patrum V, 7, 18 (col. 896D).

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CHAPITRE 41 À PARTIR DE DIVERSES LÉGENDES DES SAINTSPOUR LE MÊME PROPOS

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De la Légende de sainte Hélènea. Sainte Hélène était fervente par sa foi, incomparable par la dévotion de l’esprit, divinement inspirée et encouragée par les visites des anges ; selon la volonté de son fils qui lui accorda une grande aide militaire et lui fournit l’abondance des trésors, elle est venue à Jérusalem pour visiter et reconstruire les lieux saints et repérer les signes de la passion du Seigneur. Quand, en touchant la croix du Seigneur, un mort non seulement s’est levé, mais aussi est apparu à tous sain et robuste, dans la bouche de tous a retenti l’action de grâces et le chant de louange, tous ont adoré le bois de la croix vivifiante et la multitude des Gentils et du peuple juif s’est convertie. Alors on entendit les lamentations des démons qui volaient dans les airs et vociféraient : « Malheur, malheur à nous, misérables, qui sommes privés d’un pouvoir durable et sommes chassés de nos demeures ! Voilà que la croix du Christ pénètre tout, brille dans le ciel, rayonne dans l’air, dépouille l’enfer, étincelle de vertus. Ce que nous avions acquis à l’aide de notre Judas, nous l’avons perdu à cause d’un autre Judas dressé contre nous ». Quand après avoir trouvé la croix, la reine Hélène avec les autres priait le Seigneur qu’il daigne montrer les clous avec lesa 

Pour l’instant, la légende n’est pas identifiée.

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À partir de diverses légendes des saints

quels avaient été percés les paumes et les pieds du Seigneur, soudain une lumière céleste a jailli comme un éclair étincelant, la clarté de Dieu a éclairé le lieu du Calvaire et a montré à tous les clous rutilants plus que l’or et les pierres précieuses. La reine les a adorés agenouillée, les a reçus et en les couvrant d’abondants baisers a glorifié le Sauveur. Sainte Hélène a fait insérer un des clous du Seigneur, incisé d’or, dans le mors du roi son fils, confiante que sa présence dirigerait son chemin et ses actions, dompterait ses actes illicites et qu’en craignant la justice du Seigneur, il clouerait d’une manière salutaire sa chair par la crainte (cf. Ps 118:120). D’un autre clou, elle a fait renforcer le heaume de Constantin, pour qu’il soit protégé des armes étrangères et pour que Dieu lui donne la paix. Et dans le diadème royal très précieux, elle fit insérer avec une sainte habileté l’insigne de la croix contenant un petit morceau de la vraie croix et le troisième clou : ainsi, puisqu’était coupable de lèse-majesté quiconque refusait de fléchir la tête et d’adorer le roi couronné de son diadème, désormais le juif et le Gentil seraient contraints d’adorer à contrecœur les insignes de la passion du Seigneur pour ne pas être punis. Extrait de la Légende de saint André. André a répondu : « Je suis le serviteur de la croix et je dois souhaiter le trophée de la croix plus qu’en avoir peur »a. Quand les bourreaux l’ont conduit vers la croix, le peuple est accouru en criant et disant : « C’est un homme juste et l’ami de Dieu ! Qu’est-ce qu’il a fait pour être conduit à la croix ? ». André demandait au peuple de ne pas empêcher sa passion. Il allait joyeux et exultant, sans dévier de sa doctrine. Quand il est arrivé au lieu où avait été préparée la croix, la voyant de loin, il s’est exclamé à haute voix et dit : « Salut, ô croix qui as été consacrée dans le corps du Christ et ornée de ses membres comme de perles. Avant que ne monte sur toi le Seigneur, tu inspirais une crainte terrestre et maintenant, ayant obtenu l’amour céleste, tu seras reçue comme un désir ! Les croyants savent combien de joie est en toi et combien de dons tu as préparés. C’est donc avec assurance a 

Passio beati Andreae apostoli 9 (p. 22, 5-7).

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Chapitre 41

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et dans la joie que je viens vers toi pour que toi aussi tu m’acceptes avec allégresse, moi, le disciple de celui qui a été pendu sur toi, parce que je t’ai toujours aimé et j’ai toujours désiré t’embrasser. O bonne croix, qui a reçu des mains du Seigneur la beauté et l’ornement, désirée pendant longtemps, chèrement aimée, et sans cesse cherchée, toi qui es préparée à mon esprit désireux, choisis-moi au milieu des hommes et rends-moi à mon maître le Christ, afin qu’il me reçoive par toi, lui qui par toi m’a racheté ! »a. De même, quand les bourreaux ont voulu le détacher de la croix, quiconque tendait les bras pour le délier était paralysé. Alors, saint André a dit à haute voix : « Seigneur Jésus Christ ! Bon maître (Mt 19:16 / Mc 10:17 / Lc 18:18) ! Ordonne que je ne sois pas déposé de cette croix avant que tu n’aies reçu mon esprit ». Et voilà ce que tout le monde a vu, une grande splendeur venant du ciel a brillé autour de lui, telle que les yeux humains ne pouvaient pas le regarder. Cette splendeur a disparu après environ une demi-heure et il a rendu son esprit, s’acheminant vers le Christ dans la lumièreb. Extrait de la Légende de saint Pierre. Comme le bienheureux Pierre, à la prière des fidèles en larmes, fuyait le danger de mort et arrivait à la porte de la villec, il vit le Christ venir au-devant de lui, et lui dit avec adoration : « Seigneur, où vas-tu ? ». Et le Seigneur : « Je viens à Rome pour être crucifié encore une fois ». Pierre a compris qu’il s’agissait de sa passion ; il est revenu et a raconté cela aux frères, leur déclarant que [le Christ] serait crucifié encore une fois en luid. De même, Pierre a dit à Agrippa [le préfet] : « Il n’y pas de gloire pour moi sauf la croix de notre Seigneur Jésus Christ, dont je suis serviteur ». Et Agrippa : « Donc, tu veux être crucifié comme a été crucifié ton Seigneur ? ». Et Pierre : « Je ne suis pas digne de me faire le témoin du Christ dans le monde sur une croix dressée, mais par le supplice de la croix je choisis de suivre les traces de sa passion »e. Passio beati Andreae apostoli 10 (p. 24, 2 - p. 26, 1). Passio beati Andreae apostoli 14 (p. 32, 2 - p. 34, 4). c  Porte à la sortie de Rome. d  Cf. Martyrium beati Petri apostoli. 6 (p. 7, 21 - p. 8, 8). e  Martyrium beati Petri apostoli. 8 (p. 10, 4-9). a 

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À partir de diverses légendes des saints

De même, quand ils ont voulu crucifier Pierre, il a demandé d’être crucifié avec les pieds en haut, pour ne pas être crucifié d’une manière aussi honorable que le Seigneur. Cela fait, depuis sa croix, il a commencé à consoler le peuple, disant : « Mes fils très chers, ce mystère de la croix est profond et le lien de la charité indivisible. En effet, par la croix Dieu a attiré tout à lui et par elle a été détruit le pouvoir de la mort. Seigneur, tu m’as montré ce signe de la croix, ouvre alors les yeux de ces fidèles aussi pour qu’ils voient la consolation de la vie éternelle ». Cela dit, ils ont vu autour de lui la multitude des anges apportant les fleurs de roses et de lis, au chant inestimable de ceux qui louent la puissance de Dieu. À cette vue, Pierre a rendu grâces à Jésus Christ et a dit : « Seigneur, j’ai choisi de t’imiter par la passion, mais je n’ai pas usurpé la crucifixion debout, parce que nous sommes nés d’Adam et toi seul de Dieu. Dieu, tu es toujours dressé et toujours élevé, tu es le plus haut par dessus tout, mais nous, nous sommes les fils du premier homme dont l’origine plonge dans la terre. Gloire à toi dans les siècles ! »a. Extrait de la Légende de l’Exaltation de la sainte croixb. Quand Héracliusc, paré des ornements impériaux, monté sur son cheval royal et portant le bois de la croix qu’il avait pris au roi de Perse, en grande procession parmi ceux qui le précédaient et le suivaient, a voulu entrer à Jérusalem par la porte par laquelle le Seigneur était entré en venant à sa passion, tout à coup, les parois se sont rapprochées et ont fermé la porte. Tous ont vu alors un ange sur la porte qui tenait l’insigne de la croix dans les mains, brillant comme la foudre couleur de flamme, et celui-ci leur a dit : « Lorsque le roi des cieux est entré pour accomplir les sacrements de la passion, il ne s’est montré comme celui qui porte un diadème brillant, il n’a pas requis la monture d’un cheval puissant, mais, assis sur le dos d’un humble ânon, il a laissé à ceux qui l’honorent un exemple d’humilité ». Sur ces mots, il a disparu. Quant à l’empereur, une fois déposés les insignes de l’empire, déchaussé et ceint seulement d’une Cf. Martyrium beati Petri apostoli. 12-13 (p. 14, 4 - p. 16, 9). Cf. Vincent de Beauvais, Speculum historiale 23, 12 (p. 903). c  Héraclius Ier, empereur de Byzance (610-641). a 

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Chapitre 41

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simple ceinture de laine, en larmes a saisi la croix et s’est dépêché vers la porte, qui, bientôt ouverte, a libéré l’entrée aux arrivants. Extrait de la Légende de saint Martina. Quand après son baptême, le bienheureux Martin a renoncé au service militaire, l’empereur Julien irrité lui a dit qu’il ne voulait pas se battre par peur de la bataille du lendemain. Et lui : « Si c’est à la faiblesse, non à la foi qu’on attribue ma démarche, demain je me placerai, sans armes, au-devant des rangs et au nom de notre Seigneur Jésus Christ, avec le signe de la croix pour me protéger, sans bouclier, sans heaume, je pénètrerai sans crainte dans les lignes ennemies ». Or, selon un ordre divin, le lendemain des messagers de la paix ont été envoyés pour se rendre, eux et tout ce qu’ils possédaient. Dans la Passion de Longinb on lit qu’il a brisé une idole et de là sont sortis beaucoup d’esprits immondes qui sont entrés dans les Gentils. Quand il les a conjurés de dire pourquoi ils habitaient dans les idoles, ils ont dit : « Nous habitons là où il n’y a ni le Christ, ni son signe ». Dans la Légende de saint Philippec on lit que capturé et emmené dans le temple de Mars pour adorer une idole, comme il priait Dieu dans son cœur, un dragon est sorti de dessous le socle de la statue, et par son souffle beaucoup sont morts et plusieurs sont tombés malades. Alors, Philippe a dit qu’ils fassent un autel au lieu de la statue et qu’ils adorent la croix posée au-dessus et en prennent soin. Cela fait, les malades ont été guéris et les morts ont été ressuscités. Dans la légende de saint Bernardd on lit qu’un jour où il était malade, il a eu une vision selon laquelle il était présenté devant le tribunal du Christ pour être jugé. Et comme le Diable l’accusait de beaucoup de choses, il répondit : « Je confesse que je ne suis Cf. Sulpice Sévère, Vita Martini 4, 4-7 (p. 260). Cf.  Jacques de Voragine, Legenda aurea 47 (p.  307) et Vincent de Beauvais, Speculum historiale 7, 47 (p. 238). c  Cf.  Jacques de Voragine, Legenda aurea 62 (p.  443) et Vincent de Beauvais, Speculum historiale 9, 88 (p. 354). d  Étienne de Bourbon, Tractatus de diuersis materiis predicabilibus II, 5, 12 (p. 187-188, 1839-1847) ; cf. Guillaume de Saint-Tierry, Vita prima sancti Bernardi A. I, 57 (p. 73, 1439-1455). a 

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À partir de diverses légendes des saints

pas digne d’obtenir le royaume des cieux par mes propres mérites, mais mon Seigneur l’a obtenu à un double droit, par héritage de son Père et par le mérite de sa passion. Il s’est contenté de l’un pour soi-même et me le donne au titre de l’autre. Et par ce don, je n’ai pas honte de revendiquer ce mérite pour moi-même ». Sur quoi le Diable confus est resté muet, et le saint est revenu à lui. Dans la légende de sainte Marie Madeleinea on lit qu’un riche marseillais et sa femme, à qui la bienheureuse Madeleine avait prêché la foi du Christ, ont voulu aller au-delà de la mer pour éprouver si ce que Marie Madeleine leur avait dit était vrai ; quand ils s’en allèrent, elle leur imposa le signe de la croix sur les épaules pour que l’ennemi rusé [le Diable] n’empêche pas leur voyage par quelque tentation, leur expliquant qu’ils sauraient tout pleinement par la bouche de l’apôtre Pierre. Signés ainsi, ils ont traversé jusqu’à parvenir au port et peu de jours après Pierre les a rencontrés ; voyant le signe de la croix gravé sur leurs épaules, il s’est réjoui en devinant que dans les terres d’où ils venaient, la parole de Dieu avait été prêchée. Après avoir demandé la raison de leur voyage, il révéla qu’il était Pierre, il les emmena à Jérusalem en leur montrant les lieux de la passion et de l’ensevelissement du Seigneur et les a pleinement enseignés sur tout. Dans la Légende de dame Marie d’Oigniesb on lit que le Seigneur lui est apparu en se plaignant d’avoir été expulsé de la terre des Albigeois. Et elle voyait des croix descendre du ciel contre ces gens – c’était trois ans avant le début de la prédication de la croix contre eux. Ensuite, une fois que la croix avait été prêchée contre eux, elle a vu, dans un lieu qui s’appelle le mont de la Joie, les âmes des croisés qui étaient portés par les anges dans le ciel sans aucun purgatoire.

Cf.  Étienne de Bourbon, Tractatus de diuersis materiis predicabilibus II, 5, 10 (p. 176-177, 1531-1559) ; Vincent de Beauvais, Speculum historiale 9, 9597 (p. 356-357). b  Étienne de Bourbon, Tractatus de diuersis materiis predicabilibus II, 5, 11 (p.  184, 1755-1762) ; cf.  Jacques de Vitry, Vita Marie  de Oignies (p.  133-134, 969-982). a 

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CHAPITRE 42 SUR CE QUI EST NÉCESSAIRE POUR LES BONS PÈLERINSDE CETTE SORTE

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À propos de ce qui est nécessaire aux croisés pour faire dignement pèlerinage, il faut noter qu’une pleine confession des péchés leur est nécessaire, parce que l’indulgence ne leur est pas donnée sauf pour les péchés dont ils se sont confessés de bouche. Ainsi, si jamais ils ont été négligents à cet égard, ils doivent maintenant choisir un homme convenable exercé à l’écoute des confessions et dont la prudence suppléera aux insuffisances de beaucoup dans la science de la confession. Psalmiste : Seigneur, je te confesserai de tout mon cœur dans le conseil des justes (Ps 110:1), c’est-à-dire, selon le conseil des justes. De même est nécessaire la vraie contrition du cœur, parce que l’indulgence n’est donnée qu’aux repentants, parce que pleurer ou éprouver une douleur sensible à cause des délits n’est pas donné à n’importe qui. Ceci au moins est requis de chacun comme un signe de la contrition nécessaire, qu’ils aient le ferme propos de se détourner des péchés et de servir désormais le Seigneur. Selon cela, le Psaume. J’ai juré et résolu de garder les jugements de ta justice (Ps 118:106). De même, est requis le bon conseil dans les doutes à propos de son propre salut. Beaucoup laissent leurs âmes longtemps dans le doute à propos de restitutions, de serments, de mariages et d’autres sujets, ou bien, s’ils ont parfois besoin d’un conseil, ils le demandent à des gens qui ne savent pas le donner. Les croisés surtout

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Sur ce qui est nécessaire pour les bons pèlerins

doivent prendre des précautions afin d’éviter, s’ils restent dans un tel doute pendant un tel pèlerinage par lequel leur est promise la vie éternelle, de descendre par hasard en enfer. Ainsi, s’il faut toujours demander conseil à un homme sage (Tb 4:19), comme le dit Tobie 4, cela concerne d’autant plus le cas des doutes à propos du salut là où l’on fait tant de choses importantes pour le salut. Si l’on fait appel aux gens les plus sages pour des conseils dans les affaires du siècle, il le faut plus encore pour les affaires de l’âme. De même, la restitution du bien d’autrui. De même qu’aucun remède n’aide à soigner une plaie tant que le fer se trouve encore dedans, quoi qu’on fasse pour le salut ne sert de rien aussi longtemps qu’on garde le bien d’autrui. Augustina : « Le péché n’est pas remis si l’on ne restitue ce qu’on a soustrait ». De même, la réconciliation avec les adversaires si par hasard il y en a. Si quelqu’un, voulant déposer un don sur l’autel, doit d’abord se réconcilier avec son frère qui a quelque chose contre (Mt 5:23-24) lui pour que son don soit accepté, selon ce qui est dit dans Matthieu 5, celui qui s’offre lui-même à Dieu dans un tel pèlerinage doit le faire d’autant plus ! De même, l’ordonnance du testament. Ces gens s’exposent à la mort, ils doivent donc ordonner leur testament comme s’ils allaient mourir, selon la parole de Mattathias qui a dit à ceux qui voulaient s’exposer à la mort avec lui à cause de la loi, 1 Maccabées 2 : Quiconque est zélé pour la loi, établissant son testament, qu’il me suive (1 M 2:27). De même, l’administration de la maison et de tout ce qu’on possède, pour qu’à cette occasion l’esprit ne soit pas détourné ensuite de ce qui est commencé. D’où Nombres 32. Ruben et Gaad disent à Moïse : Nous construirons ici des parcs pour nos brebis et des étables pour nos bestiaux et des villes bien garnies pour nos petits enfants. Et nous, c’est-à-dire après cela, nous nous équiperons pour marcher devant les enfants d’Israël, jusqu’à ce que nous les ayons introduits dans le lieu qui leur est destiné (Nb 32:16-17). Et c’est pourquoi il est dit dans Deutéronome 3 : Passez en armes devant vos frères (Dt 3:18). a 

Augustin, Epistulae 153, 6 (vol. 44, p. 419, 5-7).

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Chapitre 42

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De même, la constance dans ce qui est commencé. Il en est beaucoup qui, après avoir pris la croix, changent facilement leur décision, soit en différant le départ, soit en s’efforçant de racheter leur vœu, soit en désespérant du fruit de cette voie après le début du chemin quand surviennent les difficultés, soit en se dépêchant de rentrer sous prétexte d’autres raisons insignifiantes ; contre quoi on dit dans Ecclésiastique 5. Sois ferme dans la voie du Seigneur (Si 5:12). De même, le réconfort des compagnons. Beaucoup murmurent facilement, détournent facilement de l’affaire, sont rapidement fatigués, perdent vite courage, comme les fils d’Israël qui montaient vers la Terre promise à travers le désert. Il faut donc les réconforter comme Josué et Caleb réconfortèrent les fils d’Israël – Nombres 14 (cf. Nb 14:6) – ce qui a été très agréable au Seigneur. Oh, comme saint Thomas a bien réconforté ses compagnons les apôtres : quand le Seigneur montait à Jérusalem où la mort l’attendait, il leur a dit – Jean 11 – Allons afin de mourir avec lui (Jn 11:16). De même, le secours des frères. C’est la coutume que, dans les terres étrangères, les gens s’entraident beaucoup plus pour leurs nécessités. Et il faut le faire encore plus dans l’armée chrétienne, parce que cela contribue beaucoup à la force de l’armée, d’où Proverbes 18. Le frère qui est aidé par son frère est comme une ville forte (Pr 18:19). De même, l’abstinence de tout péché. Non seulement à cause des péchés de la multitude, mais aussi du petit nombre et parfois même d’un seul homme, toute l’armée se trouve bouleversée, comme il est clair dans Josué 7 à la suite du péché d’Achor (Jos 7:24-26). C’est pourquoi l’on dit dans Deutéronome 23. Lorsque tu entreras dans le combat contre tes ennemis, garde-toi de tout mal (Dt 23:9). En voulant observer cela scrupuleusement dans son armée, le très vaillant homme Judas exhortait le peuple à se garder du péché, car ils voyaient sous leurs yeux ce qui était arrivé à cause des péchés de ceux qui avaient été tués (2 M 12:42). 2 Maccabées 13 [sic]. De même, la pénitence rapide à la suite d’un péché, si jamais il découle de la fragilité humaine. Il ne faut pas dans cette armée différer la confession, comme le font beaucoup dans d’autres états de vie, mais il faut aussitôt faire la confession et la satisfaction

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Sur ce qui est nécessaire pour les bons pèlerins

pour que le Seigneur ne soit pas en colère contre toute l’armée. Deutéronome 23. S’il y a chez vous un homme qui ne soit pas pur par suite d’un accident nocturne, qu’il sorte du camp et n’y revienne point jusqu’à ce qu’au soir il se soit lavé dans l’eau ; et, après le coucher du soleil, il reviendra dans le camp (Dt 23:10-11). Si les juifs se souciaient tellement de vite laver l’impureté corporelle dans leur armée, les chrétiens doivent d’autant plus se soucier de l’impureté spirituelle dans la leur. De même, le zèle à punir les maux qui se font dans l’armée. Et tout Israël lapida Achor et tout ce qui avait été à lui fut consumé par le feu (Jos 7:25), c’est-à-dire à cause du péché qu’il avait commis dans l’armée de Dieu. Et que doivent donc faire les chrétiens qui doivent davantage poursuivre le péché ? De même, le souci des affaires saintes. On doit souvent faire des sermons dans l’armée chrétienne. À ce sujet, il est dit dans 1 Maccabées 5. Judas encourageait le peuple tout le long du chemin, jusqu’à ce qu’ils fussent arrivés au pays de Juda (1 M 5:53). Les prières doivent y être insistantes, selon 2 Maccabées 13. Judas commanda au peuple d’invoquer jour et nuit le Seigneur, afin qu’il les assistât alors, comme il avait toujours fait (2 M 13:10). Ils doivent  s’exercer aux œuvres de l’humiliation, selon ce qui est dit dans le même chapitre. Quand tous implorèrent la miséricorde du Seigneur par leurs larmes et par leurs jeûnes et se tinrent prosternés durant trois jours, Judas les exhorta à se tenir prêts (2 M 13:12), c’est-à-dire pour la bataille. Et de même, 2 Maccabées 10. Comme Timothée approchait, Maccabée et ceux qui étaient avec lui priaient le Seigneur, la tête couverte de terre et les reins ceints de cilices, prosternés au pied de l’autel, de leur être propice et d’être l’ennemi de leurs ennemis (2 M 10:25-26). De bons pèlerins dans l’armée doivent d’autant plus être soucieux de cela et des autres biens qu’ils se trouvent dans la plus grande nécessité et sont dégagés plus souvent d’affaires séculières que dans leur propre pays. Dernière nécessité, la décision vigoureuse de combattre quand la bataille est imminente. 2 Maccabées 13. Judas exhortait les siens à combattre vaillamment (2 M 13:14).

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CHAPITRE 43 SUR CE QUI EST EFFICACE POUR BIEN COMBATTRE LES SARRASINS

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À ce sujet, il faut noter qu’il y a de nombreuses raisons efficaces pour que quelqu’un combatte virilement. La première est l’état de bonne conscience. La mauvaise conscience, qui conjecture toujours des issues cruelles, craint que si l’on meurt dans une bataille, l’homme connaisse un sort mauvais après la mort. Et donc, parce qu’elle a peur de la mort, elle agit plus timidement dans la bataille. La bonne conscience espère au contraire un sort heureux après la mort, et c’est pourquoi, craignant moins la mort, elle se bat plus virilement. Et c’est pourquoi il est dit dans 1 Maccabées 3. Judas combattait avec joie les combats d’Israël (1 M 3:2), parce que celui qui est bien confessé, ce qui est le sens du nom de Judas, combat avec plus d’audace. La deuxième est le caractère juste de la cause, comme on dit à propos d’un pugiliste : celui qui défend une meilleure cause combat mieux. Et c’est pourquoi il est dit dans Ecclésiastique 4. Combats jusqu’à la mort pour la justice (Si 4:33). La troisième est l’immensité de la récompense, à cause de quoi on dit dans 1 Corinthiens 9. Ils le font pour obtenir une couronne corruptible ; mais nous le faisons pour une couronne incorruptible (1 Co 9:25), c’est-à-dire, c’est pourquoi nous devons nous battre mieux. La quatrième est la confiance dans l’aide divine, et c’est pourquoi il est dit dans Deutéronome 20. Vous vous battrez au-

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Sur ce qui est efficace pour bien combattre les Sarrasins

jourd’hui contre vos ennemis. Que votre cœur ne se trouble point ; soyez sans crainte, ne soyez pas terrifiés, ne les redoutez pas, car le Seigneur votre Dieu est au milieu de vous, et il combattra pour vous contre vos ennemis, afin de vous délivrer du péril (Dt 20:3-4). La cinquième est la bassesse des ennemis. C’est pourquoi David a dit dans 1 Rois 17. Qui est donc cet incirconcis, pour blâmer l’armée du Dieu vivant (1 S 17:26) ? Et ensuite : Maintenant j’irai, et je ferai cesser l’opprobre du peuple (1 S 17:36). La sixième est l’effusion du sang des compagnons, et c’est pourquoi on dit dans 1 Maccabées 6. Ils leur montraient du sang de raisin et de mûres, afin de les exciter au combat (1 M 6:34). La septième est l’acquisition du nom. C’est pourquoi on dit dans 1 Maccabées 2. Donnez vos vies pour le testament de vos pères et vous recevrez une grande gloire et un nom éternel (1 M 2:50-51). En outre, les bons croisés ont une bonne conscience grâce à la confession et à la bonne volonté. De même, ils se battent pour la justice suprême, c’est-à-dire celle de la foi. De même, ils attendent une récompense similaire à celle des martyrs. De même, sans nul doute ils ont Dieu avec eux, pour qui ils s’exposent à la mort. De même, ils doivent se battre contre les Sarrasins les plus vils. De même, ils voient devant eux le sang innocent des chrétiens, que les Sarrasins ont versé. De même, ils peuvent espérer la bonne réputation des preux, non seulement sur la terre, mais aussi dans le ciel où l’on dira : « Ceux-ci sont ceux qui sont venus de la grande tribulation et ont lavé leurs robes dans le sang de l’agneau (Ap 7:14) ». Si, alors, les hommes se battent virilement pour l’une de ces raisons, les croisés qui ont toutes ces raisons d’agir doivent d’autant mieux combattre avec courage contre les Sarrasins.

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CHAPITRE 44 SUR CE QUE DOIVENT FAIRE LES FIDÈLES QUI VONT À LA RENCONTRE DES ENNEMIS

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Il faut noter que les fidèles qui vont à la rencontre des infidèles ne doivent pas se fier à leurs forces, parce que le Psalmiste dit : Ce n’est pas leur bras qui les a sauvés, mais c’est ta droite, dit-il, et ton bras (Ps 43:4). De même, ni à la multitude, parce que, selon 1 Maccabées 3. La victoire, à la guerre, n’est pas dans la grandeur des armées, mais c’est du ciel que vient la force (1 M 3:19). De même, ni à leurs armes. D’où le Psalmiste. Ce n’est pas dans mon arc que je me confierai, et ce n’est pas mon glaive qui me sauvera (Ps 43:7), mais ils doivent placer leur espoir en Dieu, d’après ce mot du Psalmiste : Par toi nous renverserons nos ennemis, et en ton nom nous mépriserons ceux qui se lèvent contre nous (Ps 43:6). C’est pourquoi ils doivent s’armer de la foi, parce que les saints ont vaincu les royaumes par la foi, échappèrent au tranchant de l’épée, devinrent forts dans la guerre, renversèrent les campements étrangers (He 11:33-34). Hébreux 11. Ils doivent aussi aller en prières à la rencontre [des ennemis]. 2 Maccabées 10. Ceux qui étaient avec Maccabée, en invoquant par leurs prières le Seigneur de venir à leur secours, attaquèrent avec vigueur les forteresses des Iduméens ; et, après de vigoureux efforts, ils s’emparèrent de ces places, mirent à mort ceux qu’ils rencontrèrent, et

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SUR CE QUE DOIVENT FAIRE LES FIDÈLES À LA RENCONTRE DES ENNEMIS

tous ensemble n’égorgèrent pas moins de trente-cinq mille hommes (2 M 10:16-17). De même, ils doivent placer leur espoir dans l’aide céleste. 2 Maccabées 15. Maccabée espérait toujours avec une entière confiance que Dieu lui enverrait du secours. Et il exhortait les siens à ne pas craindre l’approche des nations, mais à se souvenir des aides qu’ils avaient reçues du ciel, et à espérer, maintenant encore, que le Tout-Puissant leur procurerait la victoire (2 M 15:7-8). Et note une belle aide, dont il est question dans 2 Maccabées 10, lors de la lutte entre Timothée et Judas. Au plus fort du combat, cinq hommes apparurent du ciel aux ennemis, sur des chevaux ornés de freins d’or, servant de guides aux juifs. Deux d’entre eux, ayant Maccabée au milieu d’eux, le couvraient de leurs armes et le conservaient sain et sauf ; et ils lançaient des traits et la foudre contre les ennemis, qui tombaient frappés d’aveuglement et mis en désordre. Il y en eut vingt mille cinq cents tués et six cents cavaliers (2 M 10:29-31). Qui pourrait raconter les autres aides innombrables qu’il a apportées à ses fidèles qui se battent pour lui, le roi des rois et le Seigneur des Seigneurs (Ap 19:16), dont le règne et la gloire resteront sans fin, et la louange et la magnificence dans l’éternité ! Amen.

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CHAPITRE 45 LE SERMON DU PAPE URBAIN PENDANT LA PREMIÈRE PRISE DE LA CROIX

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Sermon du pape Urbain au concile de Clermont pour secourir la Terre sainte, quand a commencé pour la première fois la prise de la croix, selon ce que raconte Baudri, l’archevêque de Dola, dans l’histoire qu’il a écrite sur la prise d’Antioche et de Jérusalem. Nous avons entendu, frères bien aimés, et vous avez entendu ce que nous ne pouvons pas raconter sans profonds sanglots, par combien de calamités, combien d’incommodités, combien de terribles douleurs à Jérusalem, à Antioche, et dans d’autres villes des pays de l’Orient, nos chrétiens, nos frères et les membres du Christ, sont battus, opprimés et outragés. Nos frères germains, nos camarades, nos frères nés du même sein, car vous êtes les fils du même Christ et de la même Église qu’eux, dans leurs maisons qui sont leur héritage sont asservis par d’autres seigneurs, ou bien ils en sont chassés, ou mendient chez nous, ou, ce qui est plus grave, sont mis en vente, sont bannis et sont battus dans leurs patrimoines mêmes. Le sang chrétien, racheté par le sang du Christ, est versé, et la chair chrétienne qui est consanguine à la chair du Christ est livrée aux folies infâmes et aux esclavages terribles. Dans les villes, partout le deuil, les misères et les gémissements. Je le dis avec des soupirs : dans les églises a 

Baudri de Bourgueil, Historia Ierosolymitana 1 (p. 6-10).

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Le sermon du pape Urbain pendant la première prise de la croix

où autrefois on célébrait les sacrifices divins, hélas, voilà que sont les écuries pour leurs animaux ! De mauvais hommes ont occupé les villes saintes ! Les Turcs bâtards et immondes dominent nos frères ! Le premier évêque d’Antioche était saint Pierre. Voilà que dans cette église les Gentils ont installé leurs superstitions, et la religion chrétienne, qu’ils auraient dû vénérer le plus, ils l’ont éliminée honteusement de l’édifice sacré consacré à Dieu. Les biens dédiés aux saints et les patrimoines des nobles qui étaient prévus pour les aides aux pauvres sont soumis à la tyrannie païenne et réduits à des usages privés, les seigneurs cruels en abusent. Le sacerdoce de Dieu est foulé aux pieds. Le sanctuaire de Dieu, quelle impiété, est partout profané. Si des chrétiens se cachent encore là-bas, ils sont recherchés pour subir des tourments inouïs. Quant à la sainte cité de Jérusalem, mes frères, jusqu’à maintenant nous évitions presque d’en parler, parce que nous avions grand peur et rougissions de le faire, parce que cette cité même, comme vous savez tous, où le Christ a souffert pour nous, à cause des péchés que nous avons commis, est ensevelie sous l’ordure des païens et, je le dis pour notre honte, est soustraite au service de Dieu. Cette situation est le plus grand reproche adressé aux chrétiens, que nous avons mérité ainsi, et leur grande honte. À qui sert l’église de sainte Marie, où elle a été ensevelie corporellement, dans la vallée de Josaphat ? Mais pourquoi avons-nous négligé le Temple de Salomon, ou plutôt du Seigneur lui-même, dans lequel les nations barbares vénèrent leurs simulacres qui y sont installés contre la loi humaine et divine ? À propos du sépulcre du Seigneur, nous refusons même de nous en souvenir, parce que, pour certains d’entre vous, vous avez vu de vos propres yeux, à quelle grande abomination il est livré. Là-bas les Turcs dérobent violemment les offrandes que vous y avez apportées maintes fois en aumône, et sans nul doute ils se livrent làbas à de multiples et innombrables railleries envers notre religion. Et pourtant dans cet endroit – je parle de faits bien connus – a reposé Dieu, là il est mort pour nous, là il a été enseveli. Comme il est précieux, le Sépulcre du Seigneur, ce lieu désirable, ce lieu incomparable ! Parce que là, jamais jusqu’à ce jour Dieu n’a manqué de faire le miracle annuel, quand dans les jours de la Passion, alors que toutes les lumières dans le Sépulcre et dans l’église sont

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éteintes, par l’éclat divin les lampes éteintes sont rallumées. Quel cœur de pierre, mes frères, ne serait adouci par un tel miracle ? Croyez-moi, cet homme-là est une bête et un nigaud sans esprit, dont le coeur une vertu divine aussi manifeste ne peut exciter à la foi. Et pourtant les Gentils le voient en même temps que les chrétiens, mais ils ne s’amendent pas. Ils sont effrayés, mais ne se convertissent pas à la foi, ce qui n’est pas étonnant, puisqu’ils sont dominés par leur aveuglement. De quelles douleurs ils vous ont opprimés, vous qui êtes présents ici, vous qui êtes revenus, vous le savez mieux que quiconque, vous qui avez sacrifié à Dieu dans le même endroit et vos biens et votre sang. Voilà pourquoi, mes très chers, nous vous avons dit cela, pour que vous soyez vous-mêmes les témoins de notre sermon. Il y a tant de misères de nos frères et de dévastations des églises de Dieu que nous pourrions raconter les unes après les autres, mais nos larmes affluent, affluent les gémissements, les soupirs et les sanglots. Pleurons, frères, allons, pleurons, et avec le Psalmiste lamentons-nous du fond du cœur ! Nous, les misérables, nous les malheureux, dans le jour de qui s’est accomplie cette prophétie : Dieu, les nations sont venues dans ton héritage, elles ont souillé ton saint temple, elles ont réduit Jérusalem à être comme une cabane qui sert à garder les fruits, elles ont exposé les cadavres de tes serviteurs en pâture aux oiseaux du ciel, les chairs de tes saints aux bêtes de la terre. Elles ont répandu leur sang comme l’eau autour de Jérusalem et il n’y avait personne pour les ensevelir. Malheur à nous, frères ! Nous qui sommes un sujet d’opprobre pour nos voisins, la risée et la moquerie de ceux qui nous environnent (Ps 78:1-4), souffrons et compatissons pour nos frères, au moins avec des larmes ! Nous qui sommes désormais le rebut du peuple et les pires de tous, pleurons la monstrueuse dévastation de la terre très sainte ! Comme elle mérite d’être appelée sainte, la terre dans laquelle il n’y a pas l’espace d’un pas qui n’ait été orné et sanctifié par le corps ou par l’ombre du Sauveur, ou par la présence glorieuse de la sainte Mère de Dieu, ou n’a pas accueilli des apôtres, et pas un espace qui ne soit imprégné du sang versé par les martyrs ! Comme elles sont bienheureuses, ô protomartyr Étienne, les pierres qui t’ont couronné ! Comme ils sont féconds, ô Jean Baptiste, les flots du Jourdain qui t’ont servi pour baptiser le Sauveur ! Les fils d’Israël, qui sont

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Le sermon du pape Urbain pendant la première prise de la croix

sortis d’Égypte et ont traversé la mer Rouge, vous ont précédé, se sont appropriés cette terre avec leurs armes sous le commandement de Josué, en ont chassé les Jébuséens et les autres étrangers et ont peuplé la Jérusalem terrestre, image de la Jérusalem céleste. Que disons-nous, frères ? Ecoutez et réfléchissez ! Vous qui êtes ceints du baudrier de la chevalerie, dans votre grand orgueil vous déchirez vos frères, vous coupez en morceaux les uns les autres. Ce n’est pas cela, l’ombre du Christ, ce n’est pas mettre en pièces la bergerie du Rédempteur. La sainte Église s’est réservé une milice pour le soutien des siens que vous pourtant transformez en « malice », pour avouer la vérité, dont nous devons être les hérauts. Vraiment vous n’êtes pas sur le chemin qui vous conduirait au salut et à la vie. Vous les oppresseurs des orphelins, vous les brigands des veuves, vous les homicides, vous les sacrilèges, vous les promoteurs d’un droit qui nous est étranger ! Pour l’effusion du sang chrétien, vous attendez les salaires des mercenaires et, comme les vautours flairent les cadavres, vous, de loin vous pressentez et recherchez les guerres. Certainement, cette voie est la pire, parce qu’elle est complètement éloignée de Dieu. Pourtant, si vous voulez prendre soin de vos âmes, soit refusez au plus vite le baudrier d’une telle chevalerie, soit avancez avec audace comme les chevaliers du Christ et accourez en hâte à la défense de l’Église Orientale ! C’est de cette Église-là que sont issues les joies de tout votre salut, c’est elle qui a distillé dans votre bouche les seins du lait divin, c’est elle qui vous a donné à boire les dogmes très saints des Évangiles. Ceci, mes frères, nous le disons, pour que vous reteniez la main homicide de commettre le meurtre du frère, pour qu’en faveur des membres de la famille de votre foi, vous vous opposiez aux nations étrangères et que, sous Jésus Christ, notre chef, vous de l’armée chrétienne, l’armée invincible, vous combattiez pour notre Jérusalem mieux que les anciens descendants de Jacob, et que vous attaquiez et vainquiez les Turcs qui sont dans cette terre et qui sont plus impies que les Jébuséens. Qu’il vous soit beau de mourir pour le Christ dans cette cité où le Christ est mort pour vous ! D’ailleurs, s’il vous arrive de mourir en étant encore ici, vous pouvez être certains que ce sera une mort en chemin, à condition que le Christ vous ait compté dans sa mi-

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Chapitre 45

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lice. Dieu paie le même salaire pour la première et pour la onzième heure (cf. Mt 20:1-16). Il est terrible, mes frères, il est terrible que vous tendiez une main rapace vers les chrétiens. C’est un moindre mal de pointer le glaive contre les Sarrasins, mais c’est un bien exceptionnel de donner sa vie pour ses frères, parce que c’est aussi la charité (cf. Jn 15:13). Ne vous souciez pas du voyage du lendemain, sachez que rien ne manque à ceux qui craignent Dieu (cf. Ps 33:10) et à ceux qui l’aiment dans la vérité. Les provisions des ennemis seront vôtres, parce que vous les dépouillerez de leurs trésors, vous rentrerez victorieux chez vous ou bien, empourprés de votre sang, vous gagnerez un trophée éternel. Vous devez servir un tel empereur, à qui le pouvoir ne manque pas et qui n’hésite pas à payer ceux qui le servent. La voie est courte, le labeur est très mince, mais il vous assure une couronne qui ne flétrira pas. Parlons désormais avec l’autorité prophétique : « Ceins-toi, ô homme, qui que tu sois, de ton glaive sur la hanche, ô très puissant (Ps 44:4). Ceignez-vous, dis-je, et soyez des hommes puissants, car il est meilleur pour nous de mourir au combat, que de voir les maux de notre peuple et des lieux saints (1 M 3:58-59). Que les caresses séduisantes des femmes et de vos affaires ne vous charment pas au point de ne pas y aller, et que les labeurs à accomplir ne vous terrifient pas au point que vous restiez ! ». Et [le pape] s’est tourné vers les évêques : « Vous, dit-il, frères et coévêques, vous coprêtres et cohéritiers du Christ, dans toutes les églises qui vous sont confiées, annoncez-le et prêchez la voie vers Jérusalem à haute voix virilement ! À ceux qui ont confessé l’ignorance de leurs péchés, prenant votre assurance dans le Christ, accordez un pardon rapide. Pour vous qui allez partir, nous serons ceux qui prient pour vous et vous, soyez pour nous ceux qui combattent pour le peuple de Dieu ! Notre rôle est de prier, le vôtre de combattre les Amalécites. Nous allons étendre avec Moïse nos mains infatigables vers le ciel en priant, et vous, les combattants intrépides, sortez le glaive et dirigez-le contre Amalek ! (cf. Ex 17:11-12) ». Au nom de celui qui vit et règne, Dieu pour les siècles des siècles. Amen. Finit l’opuscule de la prédication de la croix.

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INDEX SCRIPTURAIRE

Genèse 3:3144 7:11116 12:1 128, 139, 154 19:14144 35:2-3154 Exode 17:8-9154 17:1166 17:1660 32:26 92, 108, 154 32:34150 33:17153 8:28128 Lévitique 11:26170 Nombres 10:11-12154 10:29154 13:31154 13:33-34131 14:9 132, 155 14:29131 14:36-37131 22:1261 24:962 32:6100 32:16-17 100, 211 Deutéronome 1:42153 3:18211 3:21-22155 7:1-260

7:18-19152 13:12-15155 17:1282 18:9134 20:3-4215 20:885 23:9212 23:10-11213 31:6155 33:9139 Josué 3:3134 5:1362 5:13-1462 5:14150 7:24-26212 7:25213 10:7-8155 18:3155 Juges 2:21-22108 5:285 5:9155 5:20155 11:2759 1er livre de Samuel 7:10156 11:6-7156 15:2-3156 17:26 56, 215 17:36215 23:1-2156 30:8156

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Index scripturaire

2e livre de Samuel 10:12156 10:17-18156 11:11156 15:21121 19:26140 22:38157 1er livre des Rois 19:1092 20:3141 20:4141 20:19-20157 20:22157 2e livre des Rois 2:23-24130 6:15-1762 10:1692 1er livre des Chroniques 5:10157 5:18-21157 11:3-6157 28:985 29:14141 2e livre des Chroniques 14:9-13158 15:8158 20:20147 32:6-8158 Esdras 1:3-4158 1:666 Tobie 4:19 170, 211 13:14-16158 Judith 4:13-14159 8:3366 Job 2:4124 6:16124 10:20-21146 13:7171 16:1972 18:8-9142 19:26192 28:3-4159 29:17159

30:12-13159 Psaumes 2:2-3159 2:3142 17:49-50159 37:21132 41:2117 43:4216 43:5-6159 43:6216 43:7216 44:4222 44:11139 49:16169 58:10140 63:10171 68:8131 68:10131 69194 73:2-3159 76:20159 77:16118 77:52-54159 78:1 59, 66, 160 78:1-4220 78:10177 78:10-1166 82:3-5160 82:12-16160 90:11150 93:16 92, 160 104:28144 104:41117 105:24119 107:13-14160 108:4132 110:1210 118:54148 118:106210 120:1151 121:1152 131:7 68, 104 132:1149 138:21-22160 Proverbes 9:1-3160 15:15149

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Index scripturaire

18:19 160, 212 31:20116 Qohèleth (Ecclésiaste) 3:8160 Cantique des Cantiques 1:8160 2:15160 3:7-8160 4:4161 6:9161 7:1161 8:6161 Sagesse 5:18161 5:2156 10:15-18161 12:3-7161 14:5161 Ben Sira (Ecclésiastique) 1:36146 2:8147 2:21-23146 4:33214 5:12212 10:17-19161 16:7145 20:480 33:3147 36:3-4162 46:1-2162 50:3117 Isaïe 2:3162 6:3 55, 60 8:9-10162 11:12-13162 13:2-3162 21:2144 40:31140 43:6-7162 50:6124 51:1168 55:1117 62:10162 Lamentations 1:12163 1:14122

3:7128 3:14132 5:1-2163 Jérémie 5:23145 10:25162 30:10-11153 31:6162 49:14163 50:14163 51:27163 51:50163 Baruc 1:19-20145 5:5163 Ézékiel 9:6 74, 163 11:17163 16:16-17141 16:23141 32:2760 Osée;29 2:8141 Joël 3:9-11163 3:10142 Abdias 1:1163 Michée;33 7:5130 7:6130 Habacuc 3:16146 Aggée 2:5153 Zacharie 9:8163 1er livre des Martyrs d’Israël (Maccabées) 2:7164 2:12-13164 2:26-2897 2:27211 2:50-51 97, 110, 164, 215 2:5897 2:6479 3:1-2164

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Index scripturaire

3:2214 3:19216 3:43164 3:58-59222 3:58-60164 4:8-10164 5:16164 5:32 98, 164 5:42-43165 5:45165 5:53213 6:34 88, 110, 215 14:31-33165 16:2-3165 2e livre des Martyrs d’Israël (Maccabées) 6:28 97, 111 6:30124 7:10-1265 7:11125 8:1-5165 10:16-17217 10:25-26213 10:29-31217 11:5-9150 11:6-7165 11:6-12101 12:5-6166 12:42212 13:10213 13:12213 13:14213 15:7-8 152, 217 15:11151 15:12-16151 15:17166 Évangile selon Matthieu 4:21-22138 4:22138 5:23-24211 8:9166 8:22137 8:23166 9:1166 10:34-35166 10:35137 10:37136 10:38166

11:2976 12:48137 14:22166 16:19 84, 143 16:22132 16:23132 16:24 72, 79 16:24-25166 16:26134 18:19151 19:16206 19:29138 23:2,4169 23:37115 25:3379 25:46 124, 143 28:20153 Évangile selon Marc 6:32-33166 6:45166 8:3479 8:3881 10:17206 Évangile selon Luc 2:44-46137 9:2385 9:2681 11:32144 14:26137 14:27166 17:27144 17:28144 17:29144 18:18206 22:36 82, 142, 167 22:3882 22:6979 Évangile selon Jean 2:4137 3:36145 6:1-2167 8:44141 11:16212 11:43-44122 12:25124 16:7137 18:1182 19:17 75, 167

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Index scripturaire

21:19-22135 Actes des Apôtres 2:13131 4:1296 11:2998 12:1166 16:3780 20:31170 21:13 139, 168 Lettre aux Romains 6:19167 9:398 1re lettre aux Corinthiens 1:18 69, 167 1:2369 2:2169 2:9192 3:9167 3:15143 3:1770 9:25214 11:19108 2e lettre aux Corinthiens 1:12148 4:10169 5:16138 6:1117 6:2 108, 167 Lettre aux Galates 2:1971 5:24 73, 167 6:14167 6:17 75, 167 Lettre aux Éphésiens 6:10-11167 6:13167 Lettre aux Philipiens 3:18167 1re lettre à Thimothée 1:7171 6:12 60, 167 2e lettre à Thimothée 2:3167 2:4142 2:5125 4:7167 Lettre aux Hébreux 3:18-19145

6:669 8:5133 9:1094 11:7144 11:33168 11:33-34216 11:3565 11:36119 12:1-2 111, 168 12:15116 13:13168 Lettre de saint Jacques 5:10111 5:11 111, 168 1re lettre de saint Pierre 2:21 111, 135, 168 2:24 75, 122 3:20144 4:1 88, 168 2e lettre de saint Pierre 2:1168 1re lettre de saint Jean 2:18168 3:1699 3:1798 4:2198 3e lettre de saint Jean 1:11133 Lettre de saint Jude 1:3168 1:956 Apocalypse 1:776 2:10168 3:16134 6:960 6:9-1067 7:14215 12:7-856 12:11124 12:11-12168 19:1160 19:12-14168 19:13-1463 19:16217 3 Esdras 2:3-6158

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INDEX DES SOURCES NON-BIBLIQUES

Athanase d’Alexandrie Vita Antonii – interpretatio Euagrii 35203 Augustin De Genesi ad litteram 11, 42136 Enchiridion ad Laurentium de fide et spe et caritate 3, 11107 Epistulae 153, 6211 Baudri de Bourgueil Historia Hierosolymitana 1218 Bède le Vénérable Historia ecclesiastica gentis Anglorum 3, 2, 1183 In Ezram et Neemiam libri III 1120 2120 Bernard Epistolae 103129 107, 13137 143 65, 125 Sermones de diuersis 28, 6129 Sermones per annum Vigil. s. Andreae 4 170

Sermones super Cantica canticorum 13125 20, 271 Cassiodore Historia ecclesiastica tripartita 1, 4, 6-9178 1, 4, 770 1, 5, 1179 1, 5, 3-7179 1, 5, 488 1, 9, 11179 1, 9, 1188 1, 9, 13179 2, 18, 9179 2, 18, 12179 2, 19, 5-6180 5, 50, 4-6180 6, 1, 16-19180 6, 2, 2181 6, 15, 4-5181 6, 41, 1-2181 6, 43, 1-8181 9, 29, 1-3182 12, 12, 1-4182 12, 15, 2105 Césaire de Heisterbach Dialogus Miraculorum 3, 39149 Chronica Sigeberti Gemblacensis a. 381-1111 57

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Index des sources non-bibliques

Corpus Antiphonalium Officii 701096 7772124 Corpus orationum 318076 Étienne de Bourbon Tractatus de diuersis materiis predicabilibus I, 6, 10121 II, 5, 271 II, 5, 7 73, 185, 203 II, 5, 10209 II, 5, 11209 II, 5, 12208 II, 5, 12104 III, 6, 10151 Eusèbe de Césarée Historiae ecclesiasticae 9, 8, 1570 9, 8, 15 - 9, 9, 11 174 9, 8, 15 79, 89 10, 8, 6175 Evcher de Lyon Passio Acaunensium martyrum59 Foucher de Chartres Historia Hierosolymitana 1, 3, 6-7196 1, 488 1, 8, 2-3197 1, 10 88 1, 10, 4-5197 1, 11, 8-1, 12, 5197 1, 14, 1197 1, 15, 11-14198 1, 15, 16198 1, 16, 2198 1, 16, 8198 1, 17, 1-8199 1, 18, 1-3199 1, 20, 1199 1, 20, 2199 1, 20, 3200 1, 22, 3200 1, 23, 2-3200 2, 32, 2-3200 2, 32, 5200

Geoffroy d’Auxerre De colloquio Simonis et Iesu 27130 Glossa ordinaria Apoc. 12, 8 56 Gen. 50, 25 105 Ps. 120, 1 151 Rom. 15, 30 171 Gratien Decretum II causa 23, q. 8, c. 9 63 Grégoire de Tours Historia Francorum 5, 19184 Grégoire le Grand Dialogi 3, 7187 Moralia in Iob 7, 30, 41138 Regula Pastoralis 3, 480 Guillaume de Saint-Tierry Vita prima sancti Bernardi A I, 57208 Honoré d’Autun Speculum ecclesiae De exalt. s. crucis 73, 185 Hugues de Saint-Cher Postillae in universa Biblia Apoc. 12, 8 56 Eccli. 1, 36 146 Eccli 2, 21 146 Ex. 14, 22 81 Gen. 50, 24 105 Iob 2, 4 124 Iob 16, 19 72 Ioh. 3, 36 145 IV Reg. 6, 17 62 Ps. 68, 10 131 Ps. 120, 1 151 Jacques de Vitry Historia orientalis 16201 1687 19202 2070

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Index des sources non-bibliques

86202 92121 Sermones uulgares 14, 18121 Vita Marie de Oignies209 Jacques de Voragine Legenda aurea 2170 47208 62208 11970 Jean Chrysostome Homiliae in Matthaeum 14, 2138 Jérôme Epistulae 14, 2139 108, 6-14103 Liber interpretationis hebraicorum nominum Act. S141 Gal. S141 Gen. S141 III Reg. A141 Iud. S141 L’estoire de Eracles empereur 26, 6150 Martyrium beati Petri apostoli 6206 8206 12-13207 Oraculorum Sibyllinorum uersio latina 6, 26179 Papias le Vocabuliste Elementarium doctrine rudimentum141 Passio beati Andreae apostoli 4170 9205 10206 14206 Pierre Alphonse Dialogi172 Pierre le Chantre Verbum abbreuiatum B 2, 15 85

Pierre le Mangeur Historia Scholastica Ex. 21 81 Ex. 32, 28 92 Ios. 5 62 Pseudo-Augustin Sermones ad fratres in eremo commorantes 44171 Pseudo-Turpin Historia Karoli Magni et Rotholandi189 1188 2-3189 3189 7190 8190 12190 13191 16191 18191 21191 23192 25193 26193 27194 29194 30194 32194 appendix B 195 Prol.188 Raymond d’Aguilers Historia Francorum qui ceperunt Hierusalem 17151 Rufin d’Aquilée Historiae ecclesiasticae 10, 7-8175 10, 7-8104 10, 38176 10, 39-40176 11, 29176 11, 33177 Origenes in Romanos 6, 173

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Index des sources non-bibliques

Rupert de Deutz Liber de diuinis officiis 169 Sulpice Sévère Vita Martini 4, 4-7208 Vincent de Beauvais Speculum historiale 2, 780

4, 8570 7, 47208 7, 88149 9, 88208 9, 95-97209 12, 10138 23, 12207 Vitae patrum V, 7, 18203

231

INDEX DES NOMS

Aaron 102 Abel 72 Abraham  98, 102, 128 Absalom  91, 93 Achab, roi  141 Achor  212, 213 Acre  30, 58, 88, 112, 152 Adam  102, 136, 152, 207 Agabus, prophète  139 Agen 111-112 Agolant  112, 190 Aix-la-Chapelle 194 Alexandre IV, pape  31 Alexandrie 177 Almanzor le Conquérant  195 Amalek  60, 154, 156, 158, 222 Amiens 201 André, apôtre  71, 170, 199, 205-206 Antioche  10-12, 30, 88, 112, 151, 180, 197-199, 201, 218-219 Antiochos IV Épiphane  96 Antoine, saint  203 Apollon, dieu  187 Arsouf 30 Artaxerxès III 145 Arthur, roi  11, 13, 71 Asa 157-158 Assyrie 158 Augustin, saint  36, 73, 83, 107, 136, 146, 185, 211 Auvergne 87 Azarias, fils du prophète Obeth  158

Baal  92, 93, 141 Babylone  63, 120, 122, 145, 163, 202 Balaam 61 Balak 61-62 Bâle 18 Barthélemy, saint  70 Baudoin, jeune demi-frère de Roland 193 Baudri de Bourgueil  16, 218 Baybars 30 Bélial 155 Ben-Hadad, roi de Syrie  141 Benjamin, tribu  158 Bernard, saint  19, 34, 65, 71, 83, 125, 129, 130, 137, 208 Bethsaïde 166 Béthel  130, 154 Blaye 194 Bologne 33 Brindisi 196 Budapest 9 Le Caire  202 Caleb  131, 134, 154, 212 Calvaire  75, 76, 126, 167, 175, 205 montagnes Caspiennes  145 Césarée (maritime)  30 Césarée de Philippe  181 Charlemagne / Charles  57, 59, 69, 111112, 119, 172, 188-195 Charles Martel  57 Chypre 33

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Index des noms

Clément III, pape  112 Clément IV, pape  30-31 Clermont, concile de  16, 87, 112, 196, 218 Constance II, empereur  180-181 Constantin, empereur  69, 79, 88, 104, 174-175, 178-180, 205 Constantinople 30 Cyprien, mage  12, 73, 185 Cyrille, diacre  181 Cyrus 158

Galaad  98-99, 165 Galice 188 Galilée  99, 167 Ganelon  191, 193 Gautier le Chancelier  12 Godefroi de Bouillon  70, 112 Grégoire X, pape  26, 31 Grégoire le Grand  36, 80, 137, 187 Guilgal 155 Guillaume de Tripoli  24 Gunther de Pairis  18

David  85-86, 91, 93, 102, 121, 131, 140, 141, 156, 157, 161, 215 Denis, saint  194 Dioclétien, empereur  178 Dothan 62

Hélam 156 Héliopolis 181 Hélène, la mère de Constantin  104, 175, 204-205 Helyab, fils de Raguël  154 Héraclée 197 Héraclius, empereur  207 Hérode  56, 66 Holopherne 66 Honoré d’Autun  12 Hyrcanie 145

Égypte  30, 56, 119, 145, 152, 156, 177, 182, 221 Éléazar  111, 123 Élie, prophète  92, 97 Élisée, prophète  62, 130 Enoch 131 Éphraïm, tribu  162 Éphraïm, mont  158, 162 Ésaü  119, 141 Étienne protomartyr  220 Étienne de Bourbon  12-13 Eudoxie, la femme de l’empereur Théodose II  105 Eugène, adversaire de l’empereur Théodose I  177 Eusèbe de Pamphile  178 Evremar de Thérouanne  200 Ézéchias, roi  102, 158 Fès 57 Fondi, ville  187 Foucher de Chartres  12, 88, 112 Foulques de Neuilly  34 François, saint  35 Fréderic I, empereur  112 Furre 191 Gabriel, archange  103 Gad, tribu  100, 128, 157

Isaac 102 Isaïe, prophète  55, 68 Ittaï de Gath  121 Jacob  102, 105, 154, 159, 162, 221 Jacques le Majeur, apôtre  188, 189, 194, 195 Jacques de Vitry  12 Jaffa 30 Jean, apôtre  134-135, 138, 188 Jean Baptiste  220 Jébus 157 Jéhu, roi  92 Jérémie 151 Jéricho  62, 130, 202 Jérôme, saint  103, 105, 139 Jérusalem  10, 56, 59, 66, 70, 76, 81, 88, 91, 93, 101, 112, 120, 128, 137, 139, 150, 153, 157-158, 163, 168, 200, 201, 204, 207, 209, 212, 218-222 Joab 156 Job 111 Jonadab 92

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Index des noms

Jonas 144 Jonathas, frère de Judas Maccabée  99 Josaphat, roi  147 Josaphat, la vallée de  91, 219 Joseph, patriarche  105, 119 Joseph, disciple secret du Christ  81 Josias, roi  102 Josué  62, 108, 131, 134, 154-155, 162, 212, 221 Jourdain  100, 128, 134, 156, 220 Juda, royaume de  156-158, 162, 165, 213 Juda, tribu de  80 Judas Maccabée  98-99, 101, 150-152, 164-166, 212-214, 217 Judée  98, 99, 101, 103, 150, 165 Judith 66 Julien II l’Apostat, empereur  176, 180-181, 208 Justin II, empereur  184 Justine, vierge  12, 73, 185 al-Kamil, sultan  35 Keïla 156 Kison, torrent  92 Lazare 122 Léon IV, pape  63 Longin, saint  208 Lot  98, 144 Louis IX, roi  11, 28, 30 Luc, apôtre  76, 151 Lucerna 189 Lyon  9, 11, 26, 29, 31 Macaire, évêque  175 Mahomet  24, 27, 57, 85, 87, 91, 93-96, 104, 107, 162, 167, 168, 172, 195 Manassé, tribu  157 Marc et Marcellin, saints  138 Maréscha 157 Marie Madeleine  192, 209 Marie d’Oignies, sainte  12, 209 Maroc 57 Mars, dieu  208 Marsile, l’émir  193 Martin, abbé de Pairis  18 Martin, saint  12, 208

Mattathias  78, 97, 110, 164, 211 Maxence, tyran de Rome  174-175, 178 Maurice, saint  59 La Mecque  104 Melk 25 Mer Rouge  80, 161, 164, 221 Mephibosheth 140 Michel, archange  55-56, 193 Michel VIII Paléologue  30 Milvius, pont, bataille de  174-175 Moïse  23, 56, 60, 66, 92, 94-96, 100, 102, 108, 145, 152, 154, 155, 158, 162, 211, 222 Nabal 86 Naphis 157 Nicanor 151 Nicée  30, 197 Ninive 144 Nodab 157 Noé 144 Nuremberg 10 Olivier (chronique de pseudo-Turpin) 193 Olivier de Cologne  34 Onias 151 Oreb 160 Origène 73 Oswald de Northumbrie  183 El Padrón  189 Pampelune 189 Papias le Vocabuliste  141 Paris 9 Paul, apôtre  75, 80, 98, 110, 139, 168-171 Paula, une romaine très noble  103, 105 Perse  96, 158, 199, 207 Petronium 189 Philippe, saint  208 Philippe II Auguste  12, 112, 150, 152 Phinée 97 Pierre, apôtre  66, 71, 82, 84, 132, 134, 143, 150, 192, 199, 206-207, 209, 219 Pierre Alphonse  172 Pierre l’Ermite  87, 112, 191

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Index des noms

Platon 170 Poitiers 57 Ptolémaïs 99 Raban Maur  69 Ramla 200 Raphadim 154 Raymond Lulle  24 Richard Cœur de Lion  112, 152 Roland 191-194 Romain, saint, l’église de  194 Rome  71, 105, 174, 175, 178, 206 Roncevaux 191-193 Ruben, tribu  100, 128, 157, 211 Rutebeuf, poète  32 Safed  10, 30, 58 Saint-Jacques-de-Compostelle 189, 194, 195 Saintes, ville  111-112 Saladin  112, 152 Salama 160 Salomon  85, 160 Samarie 162 Samuel  155, 156, 157 Saül  156, 157 Sébastien, saint  138 Sephara, la vallée de  157 Sérapis  177, 182 Sibylle 179 Sidon 99 Sigebert de Gembloux  57

Simon, le frère de Judas Maccabée  99, 165 Sinclétique, sainte  203 Sion, mont  68, 159, 162 Sion, forteresse de  157 Sisara 155 Sulamite 161 Sulpice Sévère  12 Sophie, femme de l’empereur Justin II 184 Syméon, patriarche de Jérusalem  201 Syrie  62, 141, 151, 157 Théodose I, empereur  105, 177, 182 Thomas, saint  212 Tibère II, empereur  184 Timothée (adversaire des Maccabées)  213, 217 Tripoli 151 Turpin  111, 172, 192, 194 Tyr  99, 112 Urbain II, pape  16, 87-88, 112, 196, 218 Urbain IV, pape  31 Urie 156 Valence 10 Vatican 13 Vienne (France)  194 Zeb 160 Zébée 160 Zérach l’Éthiopien  157

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