203 74 45MB
French Pages 236 Year 1965
PARLER DU
ARABE
CAIRE
MAISON
DES
SCIENCES
RECHERCHES
DE
L'HOMME
MÉDITERRANÉENNES PUBLIÉES
EN
COLLABORATION
LE CONSEIL MÉDITERRANÉEN SCIENCES
SOCIALES
*
AVEC
DE RECHERCHES EN
LE CENTRE D'ÉTUDES
DES
SOCIÉTÉS MÉDITERRANÉENNES, AIX-EN-PROVENCE » L'ÉCOLE PRATIQUE DES HAUTES ÉTUDES, VI* SECTION, PARIS
S
LA FONDATION N A T I O N A L E DES SCIENCES
POLITIQUES, PARIS
«
T H E INSTITUTE OF
SOCIAL
ANTHROPOLOGY, OXFORD « ST. A N T O N Y ' S COLLEGE, OXFORD
XC LE
CENTRE
DES
SCIENCES
SOCIALES
D'ATHÈNES, ATHÈNES * L'INSTITUT TURC D'HISTOIRE ÉCONOMIQUE DE L'UNIVERSITÉ D'ISTANBUL »
THE
RESEARCH CENTER IN ECONOMIC DEVELOPMENT A N D CULTURAL CHANGE, THE UNIVERSITY OF CHICAGO.
TEXTES
ET
ÉTUDES
LINGUISTIQUES
III
PARIS
MOUTON
& CO
MCMLXIV
LA
HAYE
NADA
TOMICHE
LE PARLER ARABE DU
PARIS
CAIRE
MOUTON
& CO
MCMLXIV
LA
HAYE
1964, Mouton & Co, La Haye, and Maison des Sciences de l'Homme, Paris Printed in France
Au seuil de cet ouvrage, je voudrais exprimer M. David Cohen, pour les conseils, suggestions m'a constamment prodigués au cours des années parler arabe du Caire, ainsi qu'à M. G. S. Colin les épreuves et dont les minutieuses remarques précieuses.
ma profonde gratitude à et encouragements qu'il consacrées à l'étude du qui a bien voulu relire et corrections m'ont été N. T.
TABLE DES MATIÈRES
SYSTÈME DE TRANSCRIPTION
10
PREMIÈRE PARTIE ANALYSE
PHONOLOGIQUE
DU PARLER A R A B E DU
CAIRE
Chapitre i. — Le consonantisme
13
Chapitre n . — Les voyelles Chapitre m . — Analyses statistiques :
45
Consonnes et voyelles du parier La syllabe
63 78
Longueur des mots Accentuation Chapitre IV. — Traits démarcatifs dans le dialecte arabe du Caire
87 90 95
DEUXIÈME PARTIE FORMES ET
FONCTIONS
MORPHOLOGIE ET
SYNTAXE
Chapitre i. — Le verbe
101
Chapitre n. — Le nom
143
Chapitre m . — S y n t a x e
167
1. Les genres
168
2. Les nombres
170
3. Les accords
178
4. Comparatifs et superlatifs
181
5. État d'annexion
183
6. La phrase nominale
185
7. La phrase verbale
185
8. La phrase « pluri-verbale »
187
9. L'optatif
188
Chapitre iv. — Pronoms, mots-outils, noms de nombre BIBLIOGRAPHIE
191 233
SYSTÈME DE
I.
NON EMPHATIQUES
' (suscrit, ex. 'akal) b d d f g g (prononcer dj) z (prononcer j) g (prononcer r grasseyé) h (comme dans anglais who) h (clas. r) h (comme ch dans Woch allemand) k
TRANSCRIPTION
CONSONNES
NON EMPHATIQUES
EMPHATIQUES
l m n r] (c'est n postpalatalisé devant g ou k)
b d d
y
? $
l
m n n
q
H H h
II.
r
r
s s t t w y z ' (suscrit, ex. 'abd)
s S
t i w
y $ s
VOYELLES LONGUES
EMPHATIQUES
e (comme é français) s (= e muet français; également suscrit ex. fi)
9 (également suscrit)
u (comme ou français)
0 V
III.
EMPHATIQUES
EMPHATIQUES
a ë
& Ç
i ô û
l ô Û
' , ce signe se place sur une syllabe pour indiquer la place de l'accent.
PREMIÈRE
PARTIE
ANALYSE PHONOLOGIQUE DU PARLER ARABE DU CAIRE *
* Le système phonologique du parler arabe du Caire comporte vingt-six phonèmes consonantiques et huit phonèmes vocaliques, soit 3,25 fois plus de consonnes que de voyelles. Toutefois, sur les 10 010 phonèmes d'un texte enregistré sur magnétophone (ce texte transcrit et traduit est déposé à la VI' section de l'École des Hautes Études) on compte 6052 consonnes et 3 958 voyelles — soit 1,53 fois plus de consonnes que de voyelles. Dans ce compte, les voyelles longues sont comptées pour 1 — et il y en a 561. A les dédoubler on arrive au total de 4 519 voyelles, soit 1,34 fois plus de consonnes que de voyelles (v. infra, le chapitre sur « l'analyse statistique »). Ces proportions reflètent bien l'état de conservation du vocalisme dans le parler du Caire.
CHAPITRE
I
L E CONSONANTISME Deux consonnes du classique ont disparu, c'est l'occlusive postvélaire pressée q (elle est réalisée par la laryngale '), et la prépalatale spirante sonore § réalisée par g postpalatale occlusive Le j* a perdu sa prononciation classique ainsi que les interdentales ¿> et Par contre, un plus grand nombre d'emphatiques est noté, ce qui permet de dresser le tableau de la page suivante dans lequel les variantes combinatoires (facultatives) emphatiques figurent entre crochets. Les modes de franchissement. Il y a dans le parier arabe du Caire, comme dans celui d'el-Hâmma, une seule corrélation de mode de franchissement du second degré - oo rH
i i es •"•m
i j J ce es
S s
co
i—1
•«li m r-H
77®
es vo
S 2
m
IM M
m
PHONOLOGIE
15
Sur le plan emphatique, on a les emphatiques « par nature » M, dentales (alvéolaires) : f—d s — z. Elles peuvent être également les variantes emphatisées par position des alvéolaires du plan normal. On a aussi les autres variantes emphatisées par position : f-b, h-(S, W-s, H II faut noter que, dans la série prépalatale, le correspondant sonore z de la spirante sourde S n'existe pas en tant que phonème dans les dialectes citadins de Basse-Égypte. Il existe en Haute-Égypte où il représente le ^ du classique et où il est réalisé comme une prépalatale spirante sonore mouillée et légèrement affriquée, prononcée plus légèrement que dj et plus proche — comme le notait bien Vollers qui en fixait mal le domaine puisqu'il l'étendait au Caire — du di de l'anglais soldier . Les classes de localisation. Le parler du Caire — comme tous les parlers de Basse-Égypte — possède huit classes de localisation : labiales, labio-dentales, dentales-alvéolaires, prépalatales, postpalatales, vélaires, pharyngales, laryngales . Il existe aussi une corrélation de vélarisation emphatique qui touche non seulement les consonnes mais aussi les voyelles. Outre leur point d'articulation principal, ces consonnes se vélarisent, vélarisant également les voyelles voisines. OBSERVATIONS SUR LE TABLEAU DES CONSONNES
1. L'opposition sourdes / sonores qui traverse le système à partir des alvéolaires jusqu'aux pharyngales (les liquides étant naturellement mises à part) se retrouve même dans les labiales (où b sonore n'a pas de phonème correspondant sourd mais où la labio-dentale spirante f sourde, qui n'a pas de phonème correspondant v, joue le rôle de sourde correspondante). L'opposition sourde-sonore est neutralisée en groupe, ou à la liaison (D C'est-à-dire les emphatiques qui résistent aux contextes désemphatisants. En fait, il s'agit généralement des emphatiques étymologiques. (2) Basse-Égypte : gamal « chameau » / Haute-Égypte : dyamal. Vollers, The Modem Egyptian dialect of Arabie, trad. angl. F. C. Burkitt, Cambridge, 1895, p. 8. N. Tomiche, « Les parlers arabes d'Égypte. Matériaux pour une étude de géographie dialectale », dans Études. . . Lévi-Provençal (t. II, p. 770 et suiv.). Voir sur la question de l'antériorité de g ou de j, H. Birkeland, Growth and structure of the Egyptian Arabie dialect, Oslo, 1952, p. 53 et 54, et A. Martinet, « La palatalisation ' spontanée ' de g en arabe », dans Bulletin de la Société de Linguistique de Paris, LIV (1959), fasc. 1, p. 98-100. (3) L'arabe ancien possédait toutes ces classes de localisation avec, en outre, la postvélaire q.
LE PARLER ARABE DU CAIRE
16
devant sourde ou devant sonore. C'est le phonème qui précède qui s'assimile ou s'accommode au phonème suivant, sauf si ce dernier est h, phonème «faible» qui s'assimile au précédent ou s'en rapproche. Exemples
: 'edfa
>
'etfa
« p a i e » ; walad
pâHçr >
walat
pâHçf
« un
enfant pur»; 'às^aj > 'âzgâf «plus petit » M ; 'el-fàfàs da ou 'ef-fàfàz da « ce cheval »; moi gàli>mog gâli «pas cher»; kalbak da > kalbag da « t o n c h i e n q u e v o i c i . . . » ; pàbàb frâsàl o u pà\>àg î>âsâl « il a c u i s i n é d e s o i g n o n s » ; balai}
gâli
ou
bala' gâli « des dattes chères ». Notons que l'assourdissement ou la sonorisation déborde le cadre des mots pour agir sur le phonème immédiatement antérieur du mot précédent. 2. Emphase et emphatisation. — La série des oppositions non-emphatiques/ emphatiques est extrêmement productive. Le parier du Caire se caractérise par une forte emphase. Non seulement la plupart des sons emphatiques dans la langue littéraire sont également emphatiques dans le dialecte, mais encore de nombreux mots d'emprunts (bçtrçl), certains termes expressifs et grossiers, des termes de l'anatomie intime, ou des mots affectifs (báfrá, Tjiârnâ), sont entièrement emphatisés. Un phonème emphatique a la propriété d'emphatiser toujours la syllabe et souvent le mot entier Les voyelles sont alors arrondies et vélarisées et les consonnes subissent une contagion d'emphase qui, non seulement arrondit la cavité formée par la langue et le palais, mais encore déplace le point de contact de la langue légèrement vers l'arrière pour les alvéolaires, les prépalatales et les postpalatales. C'est pourquoi le tableau présente une variante emphatisée (placée entre crochets) de toutes les consonnes nonemphatiques du système. L'emphatisation du mot s'étend aussi bien aux phonèmes qui précèdent le phonème emphatique qu'à ceux qui le suivent. pâblb « médecin » (class. tabïb-) ; l>ásá¡ « oignon » (class. basai-) ; fâbâp « il a attaché » (class. rabapa).
Dans le tableau, la disposition des phonèmes emphatiques en séries sourdes
(D Du point de vue diachronique, certaines accommodations sont définitivement réalisées et reforment la racine, même dans les cas où le phonème assimilé n'est pas en contact avec le phonème assimilant. Ex. : ïogâyyâr « petit » (class. jgr) qui n'a pas la valeur de diminutif que semblerait lui conférer sa forme ; nosf « moitié » (class. nu?/-); 'ezdz « verre » (class. zugâg-); borto'àn «oranges» (provenant de «Portugal»); lâtyâi «autre» (class. a,l-'âhar-> Làhâr puis, par assimilation, làhâr)- Métathèses : yen al . . . «maudit soit . . . » (class. yal'an. . .), gôz «paire, époux» (class. zawg-). !2 ' On ne saurait assez insister sur le fait qu'un phonème emphatique (ou emphatisé) emphatise nécessairement toute sa syllabe. Il suffit qu'un phonème dans un mot soit marqué comme emphatique pour que tous les phonèmes de la syllabe où il est placé le soient aussi, même s'ils ne sont pas marqués comme emphatiques.
PHONOLOGIE
17
et sonores oppose le système quadrangulaire du parler au système triangu laire du classique. Contextes modificateurs. Certains phonèmes peuvent toutefois réduire le champ d'extension de cette emphase en désemphatisant les consonnes et voyelles emphatisées qui sont à leur contact direct, à condition de les inclure dans une syllabe nouvelle et non emphatisée. C'est le cas de la voyelle ï et souvent de la semivoyelle y : ex. sârn «il a jeûné», sumi «jeûne» (impératif féminin) et sâyem « celui qui jeûne » (avec désemphatisation du m sous l'influence de i et de y) ; gâfH « une blessure » et yegj-àH « il blesse » (avec non-emphatisation de g). De même, en fin de mot, le pronom suffixe de la 2 e personne masculin ou féminin a souvent ce même effet : dârâ\> «il a frappé», dafàbak «il t'a frappé»; wâsl «union», wâslak «l'union avec toi (masc.) », wâslek «l'union avec toi (fém.) ». En général, les affixes ont tendance à arrêter l'emphatisation du mot et ne s'emphatisent pas, semblant protéger ainsi leur caractère morphématique. Le phénomène est d'autant plus sensible que le morphème n'est pas en contact direct avec le phonème emphatique de nature, mais seulement avec les phonèmes emphatisés. SUFFIXES : dàj-àb-ni « il m'a frappé » ; dàràl>-na «il nous a frappés»; dâfâb-ak « il t'a frappé ». PRÉFIXES : 'el-àjd INFIXES :
« la terre ».
«il a élevé», mais 'ertafa «il s'est élevé» avec désemphatisation du mot entier.
jàfa
Notons enfin que, contrairement à l'assourdissement ou à la sonorisation, l'emphase ne déborde jamais d'un mot sur un autre mot. Ces caractéristiques diverses font de l'emphase un signe démarcatif précis, que l'on retrouvera plus bas dans le chapitre des signes démarcatifs I. — LES LABIALES b et î>, m et tji, w et w LES BILABIALES OCCLUSIVES SONORES b ET b
La première non emphatique et la seconde emphatique sont le plus souvent des variantes par position. La bilabiale sonore continue le classique .
(D Voir « Traits démarcatifs. . . », p. 97-98. 2
LE PARLER
18
ARABE
DU
CAIRE
Elle est nettement occlusive. Elle représente aussi p et parfois v dans les mots d'emprunts : brimo « le premier » (it. primo), fjâfdçn « pardon », esbresso « express », bàbw « bateau » (it. vapore), rçliâbekkia « brocante » (it. roba vecchia). 1. Le problème se pose ici comme liques articulés du été indiquées plus
de l'emphatisation et de la désemphatisation par position il se pose pour tous les phonèmes consonantiques et vocadialecte. Les conditions générales de l'emphatisation ayant haut, nous n'y reviendrons pas :
fyàfrâl) « je suis en train de boire » et bi-yesrâb de boire ».
« il est en train
Mais il arrive, en de très rares cas, que l'emphase semble pertinente d'après les oppositions : rât>H « mon Dieu » et rabbi « éduque » (prononciation féminine) ; bass « assez » et bâ?? (< autobus » ; on peut toutefois se demander si dans cet exemple le b est emphatique de nature ou s'il est simplement emphatisé par le voisinage de s. Dans d'autres mots, l'emphase semble pertinente encore qu'aucune construction exactement identique mais non emphatique ne soit en opposition minimale avec elle. Mais le contexte neutre (ne comportant aucune emphase) où apparaît la labiale emphatique lui fait jouer le rôle de véritable emphatique : ya-b&y « quelle catastrophe ! », l. t représente souvent aussi l'interdentale classique t : «deux» (class.
'etnën
itnayn);
talàta
«trois» (class.
talât-).
t et t réalisent souvent les alvéolaires occlusives sonores d et d quand celles-ci sont placées devant une sourde : «entre» (pour
'ethol
'edhol);
'epfârr3
«il a été contraint» (pour
9
'edfârr ).
(1
> Comme dans de nombreux dialectes, le class. nusf « moitié» est représenté par noss. ' 2 i Pour la désemphatisation en contextes désemphatisants, voir plus haut p. 17. (3) Voir J. Cantineau, « Phonologie de l'arabe classique », dans Études, p. 171, qui indique qu'en arabe les consonnes dites dentales sont nettement alvéolaires. Gairdner soutient par contre, Egyptian Colloquial Arabie, p. 2, qu'il s'agit bien de dentales, non d'alvéolaires, ce qui me parait inexact. (4 > J. Cantineau, «Phonologie de l'arabe classique», dans Études, p. 183. Sur l'évolution qui a fait aboutir le système ancien à cette organisation, voir H. Birkeland, Growth and structure, p. 54-55. 15 > Voir plus bas, p. 68.
PHONOLOGIE 1° Emphatique
21 de nature.
•— Emphatisation.
—
Désemphatisation
L'emphatique t s'oppose de manière pertinente à t; comme en classique elle est originelle : tin «figues» et fin «boue»; 'atemm «je termine» et 'âfâm «il a mordu ». Mais il arrive fréquemment que, dans un contexte emphatique, f ne soit qu'une variante combinatoire de t. Sur 51 f relevés dans un texte, une bonne dizaine ne sont que des variantes combinatoires de t : pçggâr « commerçants » (sing. tâger, sans emphase) ; c âsof- « bâton » (le plus souvent 'âsâya avec un t muet qui réapparaît, non emphatisé, avec un suffixe c âsâytak); sôp «voix» (class. sawt-), où f se désemphatise à nouveau au contact du suffixe de 2 e pers. sing. : sôtak; sêp « réputation » (class. sît-), où le même phénomène se produit : sêtak. Le passage de t à f se produit également sous l'effet du r emphatique : }ofàl> « poussière » (class. turâb-) ; pàrpj « dattes » (class. tamr-) ;
for « taureau » (class. lawr-) et une réalisation turâb, tamr, tôr serait considérée comme fautive ou efféminée dans le dialecte. Notons que quand t est un affixe à fonction morphologique, il ne s'emphatise qu'à demi ou même pas du tout dans un entourage emphatisant. Il a même souvent tendance à désemphatiser les syllabes vélarisées par contexte : 2 e pers. de l'inacc. : 3 e pers. fém. de l'inacc. : l r e pers. de l'acc. :
te'fâf « tu sais » be-t'âssâf « elle raccourcit » dâyyà't3 «j'ai (tu as) perdu».
Alors que râfâ' est emphatisé en entier, 'ertafa « il s'est élevé », VIII e forme, est entièrement désemphatisé. 2° Assimilation
totale
ou
partielle
La dentale non emphatique t devient facilement voisée devant une sonore et peut même s'assimiler totalement à elle : la-ggîni (pour la-tgîni) « ne viens pas chez moi » (var. la-dgîni) ; 'eddâi>î>âf ( p o u r 'etdâbfyâf)
« a r r a n g e - t o i »; 'ezzalzel
(pour
'etzalzel)
« il tremble (le sol) » (var. 'edzalzel) ;
Elle peut s'assimiler même à une chuintante sourde : ma yeSSâffar$3 (var. yetsâptârÇ") « il ne fanfaronne pas », mais elle se maintient dans des cas comme 'et'assa « dîne », où le phonème qui suit t est une pharyngale, trop arrière pour permettre l'assimilation totale de t.
22
LE
Une assimilation partielle
PARLER
ARABE
DU
CAIRE
se produit souvent aussi, dans le cas d'un
second élément sonore et arrière, et c'est le passage de t à d. On a alors : « dîne » (var. élégante
'ed'assa
: 'et'assa)
; heyya
pour heyya tgannenet; ma
« elle
dgannenet
est devenue folle » (var. moins « élégante » : heyya
ggannenet),
ma dgâddâfyhâs « ne l'irrite pas » (pour
tgâddâphàs).
Le passage de t à d peut se produire également dans le cas de rencontre avec une alvéolaire sonore : ma dzàwwàjhâs « ne laisse pas les gens lui rendre visite » (var. ma
p o u r ma
zzàwwàrhâs)
tzàivwârhàs.
Ces assimilations sont particulièrement fréquentes pour t- qui, de par la morphologie du dialecte, est souvent préfixé ou infixé à des phonèmes radicaux très différents, ainsi qu'on a pu le noter dans tous les exemples précédents, en tant que pronom préfixe de la 2 e pers. verbale ou comme affixe dans les formes dérivées (thèmes verbaux). L E S ALVÉOLAIRES OCCLUSIVES SONORES d et
d
d correspond à d du classique et des mots d'emprunt et souvent à l'interdentale d du classique : dehel « il est entré » (class. dahala) ; dar' « bras » (class. dira'-) ; dàb « i l a f o n d u » (class. dâba); « oreille » (class. 1 ° Emphatique
par
dël « q u e u e » (class. dayl-);
wedn
'udn-).
nature.
—
Emphatisation.
—
Désemphatisation
L'emphatique d correspond, comme dans la plupart des dialectes sédentaires, à J= classique. dêf « invité » (class. dayf-) ; dâyyâf « il a perdu » (class. Elle correspond aussi à t classique ^
dayya'a).
:
dçfi, pl. dâwàfer « ongle » (class. zifr-, pl. 'azfàr-,
plur. de plur.
'azâfïr-) ; dâlrjiâ « obscurité » (class. zulmat-) ; dçl[ « ombre » (class. zill-)
;
dâlif
« d o s » (class.
zahr-).
d se trouve souvent aussi dans des mots qui, en classique comportent un d non emphatique : H»dâ$âr
« o n z e » (class. 'ihda
casar-);
dâr «maison» (class. dâr-),
terme assez relevé dans le dialecte qui préfère bët. Souvent d réalise la non-emphatique d emphatisée par contexte, ainsi que cela s'était produit, nous l'avons vu, pour certains (.
(1)
p
Voir les remarques d'ordre historique formulées par Birkeland, Growth
55, sur l'évolution du t classique vers 4
o u
? dans les parlers actuels.
and
structure,
PHONOLOGIE
23
sçd' « vérité » (class. sidq-) où la racine entière se désemphatise curieusement dans le verbe issu de la même racine : sadda' « il a cru ». C'est, semble-t-il, la seule racine qui offre une telle alternance, ce qui s'explique peut-être par le fait que sed? doit avoir une origine littéraire. sâdr
« p o i t r i n e » ( c l a s s . sadr-);
( c l a s s . difdcfat-,
pl.
dçfdà^à
( p l . dàfàdç'')
«grenouille»
dafâdi'-).
On a de rares cas de d non emphatique comme réalisation d'un d emphatique en classique : dehek
« i l a r i » (class.
dahika)
2° Assourdissement.
—
Amuissement
d s'assourdit souvent devant une consonne sourde et devient t ainsi qu'on l'a vu plus haut : 'ethol «entre» (pour 'edhol); 'etlj-ak « r i s » (pour 'edliak), d, en revanche, réalise souvent un t devant une sonore : medgâffi «couvert» (pour metgâpfi) En finale de mot, la sonore d peut s'assourdir et même tomber complètement, mais le cas n'est pas fréquent et. se produit surtout pour les substantifs dans certaines positions (exclamations, apostrophe, etc.) : ya walat !, v a r . ya wala y a walad)-,
e t ya walad
y a MJj-ammat,
o u yâ-wàd
v a r . y a Mhamma
« garçon » (pour e t ya
Mhammad
« hé ! Mhammad ». L E S ALVÉOLAIRES SPIRANTES PRESSÉES SOURDES : s NON EMPHATIQUE ET S EMPHATIQUE
Elles se présentent comme deux phonèmes pertinents : sallem « salue », yçsïH « il hurle » correspondant respectivement à et ^ du classique. Il arrive que, dans quelques rares mots, s soit la réalisation de s : sams « s o l e i l » ( v a r . sams) ; sagara
« a r b r e » ( v a r . fâgâ^â)
avec une
désemphatisation curieuse du mot entier. Il peut arriver également que s soit la réalisation de z : aseyya « un tort » (class. adiyyat- avec également la forme 'azeyya comme variante dans le dialecte); tsa"af variante de tza"af ( ou plutôt dza'af avec sonorisation de l'occlusive sourde) «applaudir» (class. zaqqafa). s représente parfois aussi un t interdental classique : masalan «par exemple» (class. matalan).
(1) nïs) « ne me contrains pas » où s, précédé d'une radicale sonore ne se sonorise pas mais l'assourdit, alors que dans une autre forme de la racine, gâzb9 'anno, par exemple, « malgré lui », s suivi d'une sonore (b) se sonorise. L E S ALVÉOLAIRES S P I R A N T E S S O N O R E S Z ET Z
z représente le classique ;, le z des emprunts et l'interdentale j du classique chez les sujets parlants cultivés 1° Emphatique
et
emphatisée
z représente k classique venu par la voie des emprunts turcs et z des emprunts Q>âzàf), z et z sont deux phonèmes pertinents. Proportionnellement toutefois, cette emphatique est la plus rare des emphatiques de nature utilisées dans le dialecte (18 z contre 53 d, 129 f et 195 r sur 10 010 phonèmes), car dans beaucoup de racines classiques où elle existe, elle est remplacée dans le dialecte, nous l'avons vu, par d : doHj- « midi » (class. zuhr-) ; dâfyç{ (var. de zâbçt) « officier » (class. zâbi(-); dç\l «ombre» (class. zill-); dçfj- «ongle» (class. zifr-); dàHf « dos » (class. zahr-), Emphatique
de nature
et emphatisée
etc. par
position.
Voici quelques exemples de la spirante sonore emphatique : «garde»; z\Ljâf «circonstances»; nàzçj- «surveillant»; « considérable »; yezHâf « il apparaît que »; Hàzz3 « le sort »; nâzâr « le regard ».
fçFIfâz • âzïm
Dans le dialecte, le z qui apparaît en contexte vélarisant subit par contact une emphatisation qui se fixe et s'étend à toutes les formes de la racine. Il n'a donc jamais l'occasion d'alterner avec z. zàHf «fleurs» (class. zahr-) s'oppose par ce z à dàHf « dos » (class. zahr-) et à dçHr «midi» (class. zuhr-); zàmrjiâr «il a joué de la trompette » (class. zamara) ; zà{ « il a visité », zpyârâ (class. ziyârat-) « la visite » (où le contexte dévélarisant iy ne désemphatise pas la spirante dont l'emphase est donc devenue stable). Dans tous ces exemples, z semble s'être emphatisé sous l'effet de x•
d) Voir plus bas mahùz (class. mahud-), p. 115, bas de page.
26
LE PARLER
2° Assimilation. —
ARABE
DU
CAIRE
Assourdissement
Placées après une sourde, z et z ont tendance à assimiler la sourde ou à la sonoriser : 'ezzawwag « il s'est marié », var. 'edzawwag (pour 'etzawwag) ; yçdzàHâr «il fait montre (de. . .) » (pour yetz&Hâf). Placées avant une sourde, si celle-ci est une occlusive, z et z s'assourdissent : Hâfâst3 «j'ai conservé» (pour Hàfàzt3). Si la sourde est une spirante, il y a soit assimilation totale, soit assourdissement : ma gammass3 « il n'a pas t r e m p é . . . » (pour ma gammazS') ; ma HâfâfP « il n'a pas retenu » (pour ma hâfàzp) ou, à l'intersection de mots — car l'assourdissement dépasse les limites du mot et ne représente pas une possibilité démarcative : Hâfâs
hàj-ùfo « i l a g a r d é son m o u t o n » (pour Hâfâz);
gammas
ketîr « il a beaucoup trempé son pain » (pour gammaz). En finale enfin, seule la spirante sonore non emphatique a tendance à s'assourdir : ' âraôs «Karaguz» (marionnette). L E S ALVÉOLAIRES L I Q U I D E S ORALES L ET /
Z représente J du classique et l des emprunts. Son point d'articulation est alvéolaire (ou plus exactement gingival). 1°
Emphatisation
À l'exception des oppositions walla « ou bien », ivâljâ « par Dieu » / est très généralement une simple variante combinatoire de l et n'apparaît que dans des racines où l'on relève au moins une radicale emphatique : fui «longueur»; 'çsul «principes»; >âsl3 «origine»; rjiàplàt «montée »; fàsl3 « section, saison »; râr[il3 « sable », etc. La liquide non emphatique l est statistiquement le phonème consonantique le plus important de la langue. II apparaît, on le verra, 803 fois sous la forme non emphatique l et 43 fois en contexte emphatisant sous la forme /, sur
( 1 ) Encore âl(dH est-il prononcé absolument sans emphase à Tanta, grande ville de Basse-Égypte. Même en Basse-Égypte, comme en classique, le nom de Dieu connaît un l non emphatique dans les constructions (lellâh « pour Dieu ») où le nom de Dieu est précédé d e la voyelle i ou plutôt de sa réalisation e.
PHONOLOGIE
27
10 010 phonèmes. Il est remarquable que l'article garde généralement son individualité en ne s'emphatisant pas en contexte dit « lunaire» emphatique : « le mouton ».
'el-hâj-fif
Même en contexte dit « solaire »
la consonne qui réalise le l de l'article
ne s'emphatise pas nécessairement : « l a p a t i e n c e ; 'es-sçi>h3
'es-sà^r9
tamarin»; 'ez-zçfûf
« l e m a t i n » ; 'et-tamf3
«les circonstances»; 'er-fâgel
«le
henna
«l'homme».
E n fait, ce n'est que quand il est encadré (précédé et suivi) par des emphatiques et à l'état construit que l'article se vélarise : Hàs'irt-çs-sëf
«la
natte de l'été » (pour parler des pelouses ou des champs verdissant en été). 2°
Assimilation
L'assimilation de l à d'autres phonèmes constitue en général un fait de morphonologie. Elle ne se produit jamais quand l est radical. Par contre : — le l de l'article s'assimile, comme dans la langue classique, à toutes les consonnes d'avant, mais aussi (et contrairement en cela à la langue classique) aux prépalatales, à l'exception de la semi-consonne y ('el-yemîn « la droite »), jusqu'à la post-palatale sonore g : eg-gabal « la montagne ». Des alternances sont possibles avec la labiale semi-vocalique w ('el-wârâ' «le papier », var. ' e w - w â r a ) ainsi qu'avec les autres labiales consonantiques : « pour la fille » (var. leb-betP>) ; 'el-ijiâyyâ
lel-bett3
« l'eau » (var.
'em-mâyyà).
Il n'y a par contre presque jamais assimilation avec la post-palatale k : 'el-kalb3 « le chien » (var. très rare dans un discours rapide : ' e k - k a l b 3 ) et jamais d'assimilation avec les vélaires h, g : «le vin»; 'el-gëf
'el-hàmi3
«le champ»,
ni avec les pharyngales h et ' : « l'âne » ; ' e l - o m x 3 « l'âge »,
'el-Iiçriiàr
ni, enfin, avec les laryngales h, 5 : 'el-hadaf « le b u t » ; 'el-'alb3 —
«le cœur».
le i du pronom suffixe indirect s'assimile fréquemment au n sub-
séquent : camalunna
'amalû
'ë ? « que nous ont-ils fait ? » (var. 'amalulna,
lanâ)
(var. fatahulna,
; fataliunna
(l-bâb)
class. fatal),û
class.
« ils n o u s ont ouvert (la p o r t e ) » lanâ).
d' Les grammairiens appellent « lunaires » les initiales devant lesquelles l'article aln'assimile pas sa consonne (al-qamar « la lune »). Par contre, la consonne de l'article s'assimile à l'initiale dite « solaire », d'après l'exemple aS-Sams « le soleil ».
28
LE PARLER
ARABE
DU CAIRE
(1)
De même enfin qu'en hassaniya et en maghrébin en général, un « passage particulier de It à tt se constate dans la forme 'ottelak (var. « élégante» : 'oltelak) «je t'ai dit». On constate également une métathèse l-n/n-l dans la forme euphémistique yen'al... « maudit s o i t . . . » (pour yel'an). Pour l variante conditionnée de n, voir plus bas. L'ALVÉOLAIRE LIQUIDE NASALE
n
Elle représente le j classique et le n des emprunts. Comme t, elle est plutôt alvéolaire qu'exactement dentale. 1°
Emphatisation
n est une variante combinatoire de n. Elle apparaît dans les contextes emphatisants : t>âfn3 « ventre ». Elle peut même être une variante libre de n : ne${àl? (prononcé ainsi surtout par les femmes) « nous buvons », var. nç$ràl> (prononciation masculine). Placée en finale de mot, la consonne emphatisée n se déseinphatise au contact du suffixe de 2 e personne -ak : frâfnak « ton ventre ». Le suffixe -na de la l r e personne du pluriel de l'accompli ne subit pas la contagion d'emphase : ja^â\na «nous avons attaché»; 'âfàdna «nous avons exposé». Par contre, n- préfixe est généralement emphatisé par contexte : nçdrâî> «nous frappons»; nçt}çl> «nous demandons». 2° Assimilation
partielle
et assimilation
totale
Devant g et devant la sourde correspondante k, n cesse de se prononcer avec point d'appui de la langue sur les alvéoles des dents : il devient postpalatal et se prononce avec l'arrière de la langue remonté vers le palais, sans aucun secours de la pointe de la langue, et cela même à la liaison d'une particule avec un verbe ou un substantif, ou à la liaison entre deux mots, à condition toutefois que n ne soit pas précédé d'une voyelle longue : 'eijgtlizi «anglais»; mei] gowwa «de dedans»; mirj gày «qui vient?» (mais min gày dans un discours de rythme plus lent, avec n nette-
(!) Voir D. Cohen, Mauritanie, p. 29, ms.
PHONOLOGIE
29
ment alvéolaire) ; tamarj
gamusa
g â f â « u n tel a c o u r u »
( m a i s f u l â n gârà);
'erj kân « si c'était »; tamai]
kàmel
« le prix d'une bufflesse » ; f u l a r j «araignée»;
'arjkabut
« prix complet ».
Le n de la préposition men «d'où» s'assimile à un l ou à un r qui le suivent : mel-l-etnën el-'etnën)
« des deux » (var. élégante : men-el-letnën, « d e l ' h o m m e » (var. é l é g a n t e : men
; mer-jàgel
IV. —
LES
pour
men
er-râgel)
PRÉPALATALES.
LES PRÉPALATALES SPIRANTES SOURDES I ET F
Elles ne sont que deux variantes combinatoires d'un même phonème. S représente le $ classique, le S et le j des emprunts. II s'emphatise en contexte vélarisant : $&tçf « brave »; tnâ$à[
« douze ».
Le S final de négation s'emphatise dans les mêmes conditions : ma b-ye^â^à[Sd
« il ne fanfaronne pas ».
En contexte neutre, on a : Sdyel
« portant »; ma f i S « il n'y a pas », weheS
« laid ».
LA PRÉPALATALE SPIRANTE SONORE G
Elle n'existe pas en tant que phonème dans le dialecte des citadins de Basse-Égypte < 2 ) . LES LIQUIDES r et
r
Le r est toujours fortement « roulé » et son point d'articulation se situe audessus des alvéoles. Il représente le j classique. 1 ° Emphatique
et
emphatisée
L'arabe du Caire possède deux liquides vibrantes : le r et l'emphatique correspondante /•. o. L'emphase, dans certains mots est incontestablement distinctive. Une opposition minimale est perçue dans la paire : gàil
« mon voisin » et gari
« la course ».
l1) Dans un texte de la Menufeyya enregistré sur magnétophone, il y a même un cas d'assimilation inverse : l devient n dans banna (pour balna « notre esprit »). Mais ce genre d'assimilation n'a pas pu être retrouvé dans d'autres textes du Caire, ni même de la Menufeyya. ( 2 ) Pour les mots d'emprunt du genre Saketta « jaquette », voir plus haut, p. 13, n. 1.
30
LE PARLER
ARABE
DU
CAIRE
Dans d'autres mots, placés dans des environnements semblables, on a r dans certaines formes et r dans d'autres : gâràs
« s o n n e t t e » / devras
«il a étudié»; f à r l i
9
« f ê t e » et
gàrh 9
« blessure » / farh 3 « poulet ». Notons que la voyelle a, qu'elle encadre, précède ou suive le phonème r, semble favoriser son emphase. Mais si parfois j persiste emphatique en con«ne blesse pas» (fém.), texte désemphatisant : sâwwàr «blesse», ma t^âwwà{ls il arrive souvent aussi qu'il se désemphatise : Sâràf
« honneur »
«je bois»
l>à${âl>
râgel
— tarif
—
« noble » ;
serebti
« u n h o m m e » — regâl
gà[ « un voisin »
«tu (fém.) as b u » ; « des h o m m e s » ;
— gerân « voisins ».
b. L'opposition /•//-, qui est donc très nette, est neutralisée en présence d'autres phonèmes emphatiques. La réalisation du phonème est dans ce cas normalement emphatique, même en contexte désemphatisant (i, eyya) : «charmant»;
zàrlf
dâinânHufçyya
«femme de Damanhour».
c. Il faut souligner que contrairement à ce qui se passe pour toutes les autres emphatiques du parler, que ce soit celles qui sont notées dans l'alphabet classique ou celles qui n'y sont pas notées, j est le seul phonème emphatique qui soit légèrement plus fréquent que son correspondant non emphatique (195 t pour 182 r sur 10 010 phonèmes).
LA
PRÉPALATALE
SEMI-VOCALIQUE y
Sur 206 occurrences, elle apparaît 23 fois dans l'exclamation yâ et 67 fois comme préfixe de la 3 e personne du masculin singulier de l'inaccompli. En finale de mot et surtout quand elle est suivie de i, elle a tendance à se déconsonantiser : saH (à côté de sa'y*) « e f f o r t » ; gari (à côté de gary i) rami (et non ramy*) « rejet »; bai « restant ».
«course»;
Elle peut être emphatisée par la proximité d'un â ou d'un â bref : yàllâ dâyyàtp
« a l l o n s » ; yâbây 3
«j'ai perdu»;
«seigneur!»; tâyyçb
y à râpp 9
«mon
Dieu!»;
«bien».
En tant que préfixe de l'inaccompli, elle ne s'emphatise souvent pas : «il fait devenir»; ma ydâyyas* «il ne perd pas»; ma yetrâbbdS «il ne s'éduque pas» (dans ce mot l'emphase est limitée à la 2 e syllabe de yetfâbbâs) ; ma yeffâftâfs 3 «il ne fanfaronne pas ». y 3s&l>bàH
PHONOLOGIE
31
V. — LES POSTPALATALES LA POSTPALATALE OCCLUSIVE SOURDE CLASSIQUE
k
Elle représente dans le parler le A classique et k des emprunts (makarôna «macaroni»). Le point d'occlusion ne se place jamais très loin en arrière. Il reste toujours circonscrit dans la zone centrale et postérieure du palais, variant sous l'influence de l'emphase consonantique : kâssàf «brise »; ketîr «beaucoup ». Le phonème k ne se vélarise que rarement pour devenir mufahham. Il offre dans les dialectes citadins de Basse-Égypte la particularité de s'emphatiser difficilement et d'avoir même, surtout quand c'est le suffixe possessif de 2 e personne qui agit, un effet désemphatisant sur les phonèmes non emphatiques d'origine, mais emphatisés par position : 'çsâdi nâzârak sàwàl/ak
«en face de moi» et fosâdak «en face de toi»; nâzâf «regard», «ton regard»; sà[>âhak «ton matin»; sâwâl>çJ «les doigts», «tes doigts»; sâHbak «ton ami». LA POSTPALATALE
OCCLUSIVE SONORE g
A la postpalatale occlusive sourde correspond, dans le parler, la sonore g. Elle représente toujours le classique j- ou les g d'emprunt : gâs gwanti
« pétrole » (angl. « gants » (it.
gas) ; gambari
« crevette » (it.
gambare)
guante).
Contrairement à ce qui se passe dans les parlers citadins d'Afrique du Nord, g ne représente jamais q (j) du classique. En ceci, il s'oppose non seulement à la situation notée au Hôrân - 1 ', à Palmyre ' 2 i et parfois même chez les sédentaires de Palestine ' 3 i , mais encore à la situation des parlers citadins de Haute-Egypte !-4'. Dans le dialecte du Caire, g est loin d'être un des phonèmes les plus rares. On a relevé 125 g et 13 g sur 10 010 phonèmes (alors qu'on n'a que 67 h19 h, 69 z - 18 z, 46 g - 9 g). Nous n'avons pas relevé de g « emphatique par nature» Voici quelques exemples de g : regâl
« hommes »;
gabàn
« poltron »; yerga
« il revient ».
H. Blanc, North Palestinian Arabie, p. 68. Cantineau, Hôrân, p. 127. (3) Voir D. Cohen, Mauritanie, p. 42, ms.
PHONOLOGIE
33
«occident» (mais garïb gçi «champ»; medgàtti
«étranger», sans emphase); «couvert» (pour metgâtfi);
ççtçst3 gâfoà
«tu as plongé»; «faute».
La post-vélaire q n'existe plus dans le dialecte où elle est réalisée par la laryngale occlusive sonore '
VII. — LES PHARYNGALES LA PHARYNGALE SPIRANTE SOURDE FR
Elle représente la pharyngale spirante sourde r- du classique et ne semble pas être emphatique de nature -2-1 : lahma « viande » ; ha-yegi « il va venir » ; wahda « une » ; sahhdt « mendiant »; dahhak « il a fait rire »; hâla « une situation ». Elle peut s'emphatiser (H) au contact de consonnes emphatiques : l>âH[3
«mer»;
Hâslfâ
«natte»;
Hàrf3
«chaud»;
IJçtt3
«pose», etc.
On trouve régulièrement la gémination hlj. comme assimilation de hh quand un mot à finale h, est suivi du suffixe de la 3 e pers. fém. ou pl. : rohha « son âme »; toffahhom « leurs pommes ». LA PHARYNGALE SPIRANTE SONORE
1
Pas plus que sa correspondante sourde, elle n'est « emphatique de nature » dans le dialecte du Caire 'âwez
ma'nâto
« il me (te) faut »;
'agûz
« vieux »;
'esta
mal
« il a employé »;
« sa signification ».
Dans un contexte emphatisant, comme pour li, ' peut s'emphatiser : «quatre» (mais 'arbe'în, sans emphase, «quarante»); ! â^â
II n'est pas certain non plus que le voisinage des voyelles o, u emphatise la pharyngale sonore : c
olûm
mahliï
«sciences» (et même plutôt
'alûm);
«tige de bois»;
« arraché ».
Dans ces exemples, le fait que le reste du mot n'est pas emphatisé indique qu'il n'y a pas d'emphase de ^ .
W Voir plus bas, p. 34 et suiv. - o. Les timbres fermés originels i et u, conservés dans le parler, servent surtout à réaliser les voyelles originellement longues abrégées par position. Chacune de ces voyelles a la faculté de s'emphatiser sous l'effet du contexte consonantique. Si on ajoute à ces dix réalisations la voyelle muette brève a qui permet de disjoindre les groupes consonantiques et son correspondant emphatisé a, on aurait un ensemble de douze voyelles brèves. En fait, phonologiquement, i et u brefs, n'étant que les réalisations de9 voyelles longues i et û abrégées par position, ne sont pas des phonèmes mais de simples variantes. De même, la voyelle de disjonction a n'est pas un phonème. Quand elle porte l'accent, elle est réalisée par l'un des trois timbres fondamentaux e, o, a, selon le contexte vocalique Par ailleurs, aux trois voyelles longues du classique s'ajoutent deux voyelles longues (ô et ê) qui réalisent les diphtongues de la langue littéraire. Ces cinq phonèmes et leurs correspondants emphatisés permettent de dresser donc une liste totale minima de vingt-deux réalisations vocaliques; elle explique l'impression de richesse et de variété que donne le vocalisme du parler du Caire. Ces timbres sont en général facilement identifiables, clairement réalisés. Timbre des voyelles brèves. On a donc, comme en classique, un système triangulaire à trois classes de localisation (antérieure - médiale - postérieure), avec une série de trois variantes non phonématiques (placées entre crochets), plus fermées que les voyelles fermées e et o et marquées par des pointillés : ANTÉRIEURE
MÉDIALE
POSTÉRIEURE
a
[li] M
Voir plus ba9, p. 50.
PHONOLOGIE
47
A. —
LES VOYELLES BRÈVES
Le dialecte arabe du Caire possède, comme l'arabe classique, trois timbres vocaliques qui forment un système triangulaire à trois classes de localisation : antérieure (e), mediale (a), postérieure (o) et à deux degrés d'aperture, le degré d'aperture maxima étant médial quant à la localisation : ANTÉRIEURE
MÉDIALE
Ouvert
POSTÉRIEURE
a
Fermé
e
o
Sous l'effet des consonnes environnantes, ces timbres fondamentaux sont susceptibles de plusieurs réalisations phonétiques qui n'ont pas de valeur distinctive. Ils sont, en particulier, susceptibles de se vélariser. Ce système fournit deux oppositions distinctives. a-e : Distingue verbale :
l'impératif
de l'accompli à la II e et à la III e forme
sallarn « il a salué », sallern « salue » (impératif) ; 'azzab « il a torturé », 'azzeb « torture » (impératif) ; safar «il a voyagé», sâfer «voyage» (impératif). Cette opposition est neutralisée devant les pharyngales : fâllâf «il a fait monter», walla'
«il a allumé»,
«fais monter»;
wallac
«allume»;
elle est également neutralisée près des emphatiques : Icâssâr «il a brisé», kâssàf
«brise»;
i>à({âl « il a cessé », l>á¡pá¡ « cesse ». Elle distingue aussi l'accompli de l'impératif à la I r e forme de certains verbes dits « sourds » : lamm? «il a ramassé», lemm3 «ramasse»; sadd? « il a bouché », sedd? « bouche » ; lahh? « il a insisté », lehh" « insiste » ; 'add3 « il a compté », ledd3 « compte ». Cette opposition distingue également des substantifs de sens varié : gadd? «sérieux» (class. gidd-),
gedd3
«aïeul» (class.
gadd-).
48
LE PARLER ARABE DU CAIRE a-o : Permet une série d'oppositions à valeur morphologique différenciant
la 3 e pers. sing. de l'accompli du sing. de l'impératif dans des verbes à 2 e et 3 e radicales semblables (verbes dits «sourds»), comportant en général une emphatisation du mot : mâss « il a sucé », rp,Q.ss « suce » ; Hâipo « il a mis », Hçtp> « mets » ; nâ{t? « il a sauté », nçt{9 « saute » ; 'àss3 « il a coupé », 'çss3 « coupe ». Cette opposition distingue — très rarement — un passif d'un actif : galabt3
«j'ai vaincu», golobt3
un verbe d'un masdar
«j'ai été vaincu» (infl. littéraire);
:
habb3 «il a aimé», hobb* « a m o u r » ; des noms : dàHr3
«dos»,
dollr3
«midi»;
fàmjAmr,
nom propre, 'orftf'
« âge » ; maria « une fois », rriçj-fâ « amère ». Remarques
:
1. Le -a de la désinence féminine (class. -at),
prononcé pur à l'état
absolu, est neutralisé en -e à l'état construit : bâ'âfâ « vache », baàret er-r&gel « la vache de l'homme » (var. plus fréquente : bà- âft-er-j-àgel) ; bà'ârétna, bà'âréthom « notre, leur vache ». 2. Dans la conjugaison, l'accompli de type fa'al
est de loin le plus
fréquent (plus de 4 fois le type /e'eZ). A l'inaccompli, le parler ne présente jamais de voyelle a dans sa première syllabe. II a toujours e- dans ses trois types : yef'al,
yef'el,
yef'ol
3. La forme de l'article n'est jamais 'al-, mais uniquement 'el- où la voyelle, avec coup de glotte, alterne souvent avec zéro. Il en va de même dans un certain nombre de mots-outils : we « e t » (class. wa);
'enta « t o i » (class.
anta).
a est la voyelle d'aperture maxima, de réalisation médio-antérieure. Elle est prononcée plus fermée que le a français, entre le a de salle et le e de sel, en contexte non emphatisant : 'awi
« beaucoup » (class. qawiy-) ; gada'
« jeune gars » (class.
gada'-) ; sanab « moustaches » (class. sanab-) ; sa'al « il a demandé »
l 1 ' Voir plus bas, « Morphologie du verbe », p. 104 et suiv.
PHONOLOGIE
49
( c l a s s . saala)
; rasam
lavé» (class. gasala);
« il a d e s s i n é » ( c l a s s . rasama)
; gasal
« il a
'and- «chez» (class. 1 ind-).
Il est bon de noter que l'existence d'une liquide, d'une nasale ou d'une post-palatale n'a aucune influence sur le timbre de la voyelle a : nazzal « il a fait descendre », kamân « encore ». Il en va de même des pharyngales et des laryngales : hammam
« b a i n » ; haka
f a i t » ; 'aywa
« i l a r a c o n t é » ; 'ala
« o u i » ; 'awâm
« v i t e » ; hawa
« s u r » ; 'amal
« a i r » ; hamrn
« il
a
« s o u c i ».
Enfin, les vélaires ne semblent pas avoir un effet vélarisant sur le a : hamsa « c i n q » ; harrag «il a fait sortir»; 'ahùh «son frère»; gasïl
«lessive»;
gammez
(le p a i n ) » ; bagl
«trempe
«mulet»'1'.
En contexte emphatisant, a se vélarise très facilement en â, proche de o, sans jamais se confondre avec cette voyelle : dâ^àb
« il a f r a p p é » ; bâsà]
m a r i a g e » ; ?â{âm
« o i g n o n » ; hâpâl>
« i l a t r a n c h é » ; 'âsfyàH
«il a perdu»; sâwâb'ak
« il a d e m a n d é
« i l est d e v e n u » ;
en
dâyyâ*
«tes doigts»;
sânâmak « ta bosse », où, sous l'effet du s, l'emphase atteint les â des deux premières syllabes. Elle n'atteint toutefois pas le troisième a qui, dans le suffixe -ak, maintient ainsi l'intégrité du suffixe et son pouvoir démarcatif. e-o : Le parler ne fournit pas d'opposition distinctive minimale entre ces deux phonèmes. e réalise souvent l'i bref de la langue ancienne, ou un ë du parler, abrégé par position : dâ[çl>
« qui f r a p p e » (class.
dârib-)
; betna
« notre maison »
(bët
«maison»),
e, phonème bref, antérieur, d'aperture moyenne, assez proche du é fermé français, s'emphatise moins facilement que a et o. Quand, dans le mot, il est assez éloigné du phonème emphatique de nature, il parvient parfois à arrêter la diffusion t 1 ' de l'emphase, surtout dans le parler des femmes : Sâpçf « b r a v e » ; gçpçsf «j'ai plongé», mais jàgel « homme » (encore qu'on puisse entendre fâgçl chez les hommes) ;
medgâffi « il est couvert », pour metgâ{{i (mais chez les hommes : mçdgâtçi).
I 1 ' Contrairement à ce qui se passe dans le parler arabe d'el-Hamma de Gabès (Canti neau, p. 85) et dans celui de la Palestine du Nord (H. Blanc, p. 31, 32). (2) Voir supra, p. 16-17. 4
LE PARLER
so
ARABE DU CAIRE
e, emphatisé, se rapproche du hi dur russe : tàpçliba « médecins » ; wçse\ « il est arrivé ». o réalise souvent l'a bref de la langue ancienne, ou un ô du parler, abrégé par position; également le o des emprunts : « il sort » (class. yahrugu) ; howwa « lui » (class. huwa) ; «vie» (class. 'umr-); 'on «cou»(class. 'unq-); ' a d o w w a k «ton ennemi » (class. 'adutvwuka) ; rohna « notre âme », à l'état absolu rôh (class. rùh-) ; tarjgo « tango ».
yehrog 'omr
Dans un contexte emphatisant, la voyelle brève postérieure d'aperture moyenne o s'emphatise facilement et devient plus fermée et plus arrière qu'en contexte neutre : sçl>H «matin» (/= somrn «poison» où o est plus avant); nosrâni « chrétien » ; 'çpfâ « chatte » (-/- 'ottelak « je t'ai dit », pour 'oltelak).
Le o des suffixes de 3 e personne, contrairement au -a du suffixe -ak, s'emphatise également, aidé en cela par sa position plus arrière que a : ! às}ç «son origine»; nçssç «sa moitié»; > ç f i à l l l o «réjouis-toi pour lui » (emphatisé sous l'influence de f). a : Est surtout une voyelle disjonctive qui permet de séparer un groupe de trois consonnes, formé généralement à la suite de suffixation, ou un groupe final de deux consonnes : dàfà^téna «tu nous as frappés» (sans suffixe, on a dârâfrp3), pour *dârâl>tna. Ce phonème est susceptible de porter l'accent, ce qui est le cas dans dâfâfyténa, ou de ne pas le porter dans ma dàf&btes «tu n'as pas frappé». Le timbre de cette voyelle, en contexte neutre, en fin de mot (bett9 « fille »), se rapproche de e muet français. Cette voyelle disjonctive a la propriété de subir une harmonie vocalique selon la teinte de la voyelle du suffixe : dâfâl>(? «j'ai frappé» et «tu as frappé»; dàj-àbtôhom. «je les ai (tu les as) frappés»; dàjàbtàha «je l'ai frappée (tu l'as frappée)»;
(1)
Il me semble préférable d'appeler cette voyelle ainsi plutôt que par la désignation traditionnelle de voyelle ultra-brève. Comme l'a très bien dit Cantineau pour les parlers du Hôràn «le nom de voyelles ultra-brèves n'est pas toujours exact, car ces voyelles peuvent avoir parfois la durée phonétique des voyelles brèves; mais elles se distinguent de ces dernières par les deux faits suivants : historiquement elles ont été ultra-brèves à un moment quelconque de leur développement; phonologiquement elles n'ont aucune existence réelle et sont tenues pour zéro par les sujets parlants, qui souvent n'ont pas conscience de les prononcer ». Ce dernier fait est contredit dans le parler du Caire, où, nous le verrons, la voyelle de disjonction est susceptible de porter l'accent de mot. Cf. Fischer, Die demonstrativen Bildungen, p. 103-104.
PHONOLOGIE
51
alors que l'on a, on l'a vu : dârâliténa « tu nous a frappés » (et non où le a devient plus ouvert et adopte le timbre de e
*dârabtâna)
Et de même dans les substantifs à syllabe finale doublement fermée quand s'y ajoute un suffixe, on a : bént3 «fille»; benténa «notre fille»; bentâha «sa fille»; bentâhom « leur fille ». Ce phonème se vélarise dans les mêmes conditions que e, c'est-à-dire, surtout quand il est au contact direct d'une emphatique de nature : ?â]-di> « terre ». Ses réalisations, en harmonie vocalique, s'emphatisent également : hâfpâHâ (fën) «(où) l'a-t-il placée?»; hàffçHçrji (fën) «(où) les a-t-il placés ? ». Mais on a, sans emphase : gàfâHténi «tu m'as blessé»; sânfôkom «notre Dieu».
«votre genre»; râfybéna
i-u : Le parler connaît également un i bref et un u bref qui sont toujours sentis comme les réalisations des voyelles longues i et û abrégées par position : katabli « il m'a écrit », katablu « il lui a écrit », et qui retrouvent leur longueur quand, par suite de modifications syllabiques ils portent l'accent sans se retrouver en syllabe fermée intérieure (2> : ma katablîs, ma katablus « il ne m'a — ne lui a — pas écrit ». Ces deux voyelles se vélarisent sous l'effet du contexte : tulhom « leur taille » (état absolu : tuf) ; tâHi'kom « votre déchiquetage » (état absolu : t f c f i f ) ; gâfi « mon voisin » (class. gârï). Neutralisation
de voyelles brèves.
En règle générale nous avons donc les correspondances suivantes : au a ancien correspond a, â; au i ancien correspondent e, ç; au u ancien correspondent o, o et parfois e, e ; i et u dans le dialecte sont des ï et û du parler, abrégés par position, a dans le parler est principalement une voyelle de disjonction. Il y a dans le courant du discours rapide de fréquentes neutralisations : e/a a/o et e/o e/i o/u i 1 ' Voir plus haut, p. 42, note 2. (2> Sur les problèmes de l'accentuation, voir chapitre « Accentuation », plus bas, p. 90 et suiv. I 3 ' Surtout dans les types de conjugaisons, voir «Morphologie», p. 102. 4.
LE PARLER
52 e -
à{tàla)
cet imale est maintenu en cas de suffixation : wahdeha
« toute seule » (Le Caire :
wahdâha).
Au Caire toutefois, un fort imale peut se produire uniquement, mais non nécessairement, par une sorte d'harmonie vocalique, en syllabe ouverte non accentuée, quand la voyelle de la syllabe suivante n'est pas un a : kebir «grand»; te il «lourd»; hedéyya «présent» (class. hadiyya-); etc. geztra « île » (class. gazira-), Mais on a aussi bien, surtout avec des vélaires et pharyngales : gastl yemin),
« lessive »;
hartm
« harem »;
yamtn
« droite » (à côté de
etc.
Toutefois, en règle générale, au Caire : 1. Il n'y a jamais d'imale dans une syllabe suivie d'une syllabe à voyelle a : «dattes»; rama «il a jeté»; «miel»; hala «il a créé»; « encore » ; gamâl « beauté ». balah
hawa
'asal
gamal
«air»; 'aywa «oui»; «chameau»; kamân
2. La finale a sentie comme la marque du féminin (qu'elle réalise les classiques -at, -a ou -â) subit nécessairement l'imale et devient -e dès que le mot est à l'état construit : frà'ârâ (class. baqarat-) se prononce à l'état construit : fyaâretna « notre vache », donya « monde » (class. dunya) devient donyetna « notre monde » sans que le -a final ait retrouvé sa valeur classique de longue; soda «noire» (class. sawdâ'-), sôdet el-bêt «la noiraude de la maison ». Quand la finale -a n'est pas sentie comme la marque du féminin, elle ne subit jamais d'imale à l'état construit : 'dsd « bâton » (class. 'asa) prend un Nous ne tiendrons pas compte des conjugaisons de verbes de type fe'el à i'acc. ou yef 'el, yef 'al, yef 'ol à l'inacc. A juste titre Cantineau, Hôrân, p. 179, pense que dans ces cas nâki « nous t'avons frappée ». U) Sur le rapprochement entre ce mot et la racine classique KWR « rouler en spirale, enrouler » et les suggestions de contamination ancienne, avancées par M. Cohen, voir A Iger, p. 266.
60
LE PARLER
ARABE
DU
CAIRE
Les dialectes de la Menufeyya et des campagnes de Basse-Égypte ont beaucoup plus souvent tendance à faire subir l'imale à cet a abrégé : ¡•âme « il a jeté », en lui rendant toutefois son timbre pur quand le â long reparaît en position accentuée : fâmâk « il t'a jeté». La voyelle -à finale, bien qu'abrégée, peut soit continuer à être sentie comme une longue, soit être sentie comme la marque du féminin (class. -at). Dans le premier cas, des faits aberrants peuvent avoir lieu : fàsâ « bâton » (class. 'asâ), n'est pas senti comme un féminin. A l'état construit, le -a final retrouve sa longueur parce qu'il se trouve placé en syllabe fermée par l'apparition d'un -t, indice du féminin, qui n'existe pas en classique : c
âsàt-el-fei
«le bâton du maître d'école»
û et ï sont encore mieux conservés. 2. û
garde
un timbre
'o'ûl
en toute position :
inaltéré
«esprits»;
«je dis»;
'a'ûl
negibhâlak
En Haute-Égypte par contre, il y a une conservation particulière des diphtongues classiques : -ay- classique, correspondant en Basse-Égypte à -ë-, est réalisé en Haute-Égypte par -ea- ; et -aw-, correspondant en Basse-Égypte à -ô-, par -oa- : H.-É. : bentean « deux filles », roah « âme ». Cet état de fait rappelle les phénomènes de fracture de certaines voyelles longues du maltais (v. Aquilina, The structure of Maltese) où, à l'ancien â accentué, correspond la diphtongue -ie- : bâb «porte» étant en maltais bieb (p. 55). La situation de la diphtongue en Haute-Égypte se rapproche encore plus de la situation notée en Mauritanie où, dans la réalisation des diphtongues, « la voyelle est susceptible de s'amalgamer en quelque sorte avec la semi-voyelle subséquente en assimilant partiellement son timbre à celui de cette semi-voyelle. Dans ce cas, la réalisation la plus fréquente est une voyelle longue suivie d'une sorte d'appendice labial ou palatal, léger mais le plus souvent nettement audible : &>, ôw. Cette réalisation est presque de règle dans les formes qui reviennent avec une grande fréquence dans le discours, outils grammaticaux, morphèmes fonctionnels et clichés de toutes sortes : mnê^n « lorsque », sôwr « vers », lfôwg « en haut », etc. (D. Cohen, Mauritanien, p. 77, ms.). C'est exactement la même situation que l'on retrouve en HauteÉgypte. Voir aussi N. Tomiche, « Les parlers arabes d'Égypte. Matériaux pour une étude de géographie dialectale», Études Lévi-Provençal, t. II, p. 773.
62
LE PARLER
ARABE
des verbes à 3 e rad. -a (rama «jeter») sont en classique ramaytu, et en dialecte cairote, après la chute des désinences personnelles :
DU
CAIRE
ramayt",
ramët «j'ai (tu as) jeté»; et de même bakët «j'ai (tu as) pleuré» (class. bakaytu, bakayta). Par contre, si la diphtongue est placée en syllabe initiale ou intérieure de mot, elle se maintient : 'aywa «oui»; c ayzâk «j'ai (fém.) besoin de toi»; wayya «avec»; mâyyâ « eau ». II en va de même si la diphtongue se scinde en deux syllabes : layâli «nuits »; fàjàyçd
« devoirs », etc.
CHAPITRE III
ANALYSE STATISTIQUE DES CONSONNES ET DES VOYELLES DU PARLER
Les calculs de fréquence présentés plus bas ont été établis sur des textes populaires variés : proverbes, mawwâl-s (chants populaires), récits populaires. Ils portent sur 10 010 phonèmes, échantillon assez étendu pour assurer la valeur des calculs. Les textes utilisés ont été enregistrés au magnétophone. Ils ont été lus par un informateur local, un ïayh capable de lire, écrire, compter, et connaissant le Coran. Enregistrés dans la province de la Menufeyya, les textes présentent quelques particularités locales (fréquence de Yimàla en particulier), aussitôt senties et soulignées par deux chercheurs coptes du Caire (2) qui ont travaillé ces textes avec moi pendant trois ans. Arabophones, parlant le dialecte arabe du Caire, ils m'ont permis de contrôler ma propre connaissance de ce parler qui est ma langue maternelle.
î1 ! Ils sont déposés, avec un grand nombre d'autres textes populaires de la Menufeyya, à l'École des Hautes Études (6 e section).