Bronzes Du Haut-archaisme a Delphes: Trepieds, Chaudrons Et Vaisselle De Bronze Fin Viiie-viie Siecle (Fouilles De Delphes) (French Edition) 9782869583252, 2869583257

A Delphes, les fouilles ont livre depuis plus d'un siecle un grand nombre d'offrandes de bronzes archaiques qu

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Table of contents :
par
Avant-propos
Chapitre 1
État des publications
De la Grande Fouille25 aux découvertes des fosses de l’Aire
La Grèce à l’école de l’Orient
L’« orientalisant » : un phénomène général dans le bassin méditerranéen ?
L’art et la civilisation grecs : des processus d’évolution interne
L’art grec au viie s.
L’interprétation sociale de l’« orientalisant »
L’« orientalisation », un phénomène étalé dans le temps et dans l’espace
Nouvelles interprétations du viie s.
La catégorie de la vaisselle
Organisation de l’étude
Chapitre 2
Catalogue
Commentaire
Support conique Catalogue
Commentaire
Catalogue
Commentaire
Catalogue
Commentaire
Catalogue
Commentaire
Catalogue
Commentaire
Chapitre 4
Catalogue
Commentaire
Catalogue
Commentaire
Catalogue
Commentaire
Catalogue
Commentaire
Chapitre 5
Catalogue
Commentaire
Chapitre 6
Orient
Provenances grecques
Occident
Chapitre 7
Les objets offerts mentionnés dans les textes
Provenances et chronologie des offrandes
Modalités d’acquisition et de consécration des offrandes.
Des dépôts d’offrandes
Les fosses de l’Aire
Le devenir des offrandes après la consécration85
Données chronologiques externes
Des offrandes spécifiques à Apollon et Athéna ?
Une fonction « politique » des offrandes ?
Types et valeur des offrandes
Chapitre 8
Les « offrandes étrangères » et les « étrangers » dans les sanctuaires grecs
Une sélection en Orient comme en Occident
exotica
Des objets grecs : le rôle du sanctuaire comme vitrine des cités.
Fréquenter et enrichir le sanctuaire
Du viiie au vie siècles : ruptures et continuités
La place de Delphes dans un contexte local, régional, égéen et méditerranéen
« Ouverture internationale » : les origines du panhellénisme à Delphes
Chapitre 9
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 9782869583252, 2869583257

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FOUILLES DE DELPHES V | MONUMENTS FIGURÉS 5

BRONZES DU HAUT-ARCHAÏSME À DELPHES Trépieds, chaudrons et vaisselle de bronze (fin viiie-viie siècle) Hélène Aurigny

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BRONZES DU HAUT-ARCHAÏSME À DELPHES TRÉPIEDS, CHAUDRONS ET VAISSELLE DE BRONZE (FIN VIIIe-VIIe SIÈCLE)

FOUILLES DE DELPHES TOME V MONUMENTS FIGURÉS 5

BRONZES DU HAUT-ARCHAÏSME À DELPHES TRÉPIEDS, CHAUDRONS ET VAISSELLE DE BRONZE (FIN VIIIe-VIIe SIÈCLE)

par Hélène Aurigny

ÉCOLE FRANÇAISE D’ATHÈNES 2019

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Directeur des publications : Responsable des publications :

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Alexandre Farnoux puis Véronique Chankowski Bertrand Grandsagne

Bronzes du haut-archaïsme à Delphes : trépieds, chaudrons et vaisselle de bronze (fin viiie-viie siècle) / par Hélène Aurigny Athènes : École française d'Athènes, 2019 ISBN 978-2-86958-325-2 (Fouilles de Delphes. Tome V. Monuments figurés ; 5) Fouilles archéologiques -- Grèce -- Delphes (ville ancienne) Bronzes -- Grèce -- Delphes (ville ancienne) Artisanat -- Grèce -- Delphes (ville ancienne) Ex-voto -- Grèce -- Delphes (ville ancienne) Antiquités-- Grèce -- Delphes (ville ancienne) Grèce -- 800-500 av. J.-C. (Époque archaïque) Bibliothèque de l’École française d’Athènes

Révision des textes et Suivi éditorial : EFA Prépresse : Lina Khanmé (Rome, Italie) Conception graphique de la couverture : EFA, Guillaume Fuchs Impression et reliure : n.v. Peeters s.a. (Herent, Belgique) © École française d’Athènes, 2019 – 6, rue Didotou, GR – 10680 Athènes, www.efa.gr

ISBN 978-2-86958-325-2 Reproduction et traduction, même partielles, interdites sans l’autorisation de l’éditeur pour tous pays, y compris les États-Unis.

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Avant-propos

Origines et objectifs de l’ouvrage

Cet ouvrage est tiré de ma thèse de doctorat « Delphes au viie siècle. Recherches sur les offrandes et la fréquentation du sanctuaire », dirigée par M. Roland Etienne et soutenue à l’université de Paris 1 en novembre 2009. Toutefois, ce volume des Fouilles de Delphes ne reprend pas l’ensemble du matériel étudié dans le cadre doctoral et se concentre sur la catégorie de la vaisselle. Le livre poursuit plusieurs objectifs : avant tout, celui de mettre à disposition de la communauté scientifique la vaisselle de bronze du haut-archaïsme, pour partie inédite ou anciennement et sporadiquement publiée. Chaque objet est donc décrit de façon détaillée, illustré par des photographies et des dessins, avant d’être replacé dans son contexte de création. L’ensemble permet de faire apparaître non seulement la variété des objets delphiques et des catégories attestées, mais aussi l’insertion du sanctuaire dans des réseaux de distribution à longue distance. Delphes se révèle ainsi comme un bon point de vue pour réfléchir aux circulations d’objets et d’hommes, aux questions de techniques artisanales et aux pratiques votives archaïques. Cette étude offre par ailleurs des éléments nouveaux pour nourrir une histoire de Delphes à l’époque archaïque à travers le matériel votif. Ce volume s’inscrit dans la continuité des Fouilles de Delphes V de Claude Rolley et prend la suite chronologique des Trépieds à cuve clouée. L’étude de la vaisselle à partir de l’époque archaïque par Mme Valeria Meirano, professeur à l’université de Turin, complètera la publication de la vaisselle de Delphes. La mise à disposition de cette documentation permet de replacer Delphes au niveau des grands sites, comme Olympie et Samos, qui ont évidemment livré des quantités bien supérieures de bronzes, mais par rapport auxquels Delphes présente des bronzes intéressants et divers. Ce volume peut être considéré comme une contribution à la réflexion commune sur Delphes et Olympie qui fait l’objet d’un programme de recherche franco-allemand et plus largement européen. Plus qu’un catalogue d’objets, l’ouvrage se veut une réflexion originale sur des pratiques artisanales et votives qui donnent la possibilité d’approcher au plus près la religion grecque dans sa dimension concrète.

Chapitre 1

Introduction et histoire de la recherche

Histoire de la recherche1 Si l’objectif de cet ouvrage est bien de s’inscrire dans la suite des ouvrages de Cl. Rolley dans la série des Fouilles de Delphes V, quelques précisions doivent être apportées sur la situation de ces objets dans les publications, afin de dresser avec le plus d’exactitude possible l’état du dossier.

État des publications Il existe trois types de publications relatives aux objets métalliques, vaisselle ou autres catégories, trouvés à Delphes : la collection des Fouilles de Delphes et les articles publiés dans le Bulletin de Correspondance Hellénique, les publications par type d’objets et les publications relatives à d’autres sites. Les objets delphiques sont traditionnellement publiés dans la série des Fouilles de Delphes, collection de l’École française d’Athènes, dont les fascicules du tome V sont consacrés aux petits objets et aux bronzes en particulier. De très nombreux objets trouvés lors de la Grande Fouille sont publiés dans le volume de Paul Perdrizet paru en 1908. Les statuettes, auxquelles il sera fait référence, ont été publiées en 1969 par Claude Rolley, dans le volume Les statuettes, qui traite des documents de l’époque géométrique à l’époque impériale. Les trépieds à cuve clouée prennent leur suite : les pièces relatives aux supports chypro-crétois qui s’y trouvent auront aussi leur place dans notre étude du matériel. Hors du tome V, des objets métalliques sont publiés notamment dans le volume de Robert Demangel consacré à la topographie du sanctuaire de Marmaria et paru en 1926 : bien que les photographies, d’une qualité souvent médiocre, présentent les objets de manière collective, c’est pour un grand nombre d’entre eux la seule publication. On peut ajouter aussi une petite brochure de Claude Rolley, publiée à l’École française d’Athènes en 1979, sous le titre Bronzes de Delphes. Un bilan de ces publications a été dressé en 1991 par Claude Rolley dans le Guide de Delphes, le musée2 ; on peut néanmoins constater que les publications sont anciennes, de nombreux objets n’ayant pas été repris depuis Paul Perdrizet. Il faut signaler l’importance des principaux articles de Pierre

1. « Solidaires les uns des autres, tous les “problèmes delphiques” se pénètrent, s’enchevêtrent, se ramifient aussi, et se prolongent, en des directions parfois divergentes : en sorte qu’il y aurait artifice (ou ignorance), et danger, à vouloir strictement délimiter le champ d’une enquête quelconque menée à Delphes. Dès que l’on aborde un

sujet, il faut prendre son parti des complications de l’étude – et des indispensables déblaiements préliminaires : le terrain a été encombré (non par les archéologues qualifiés) de vains obstacles », La CosteMesselière 1936, p. 3, n. 1. 2. Rolley 1991, p. 142.

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BRONZES DU HAUTARCHAÏSME À DELPHES

Amandry dans le BCH des années 1930 et 1940 pour les trouvailles des « fosses de l’Aire »3, et des articles collectifs donnant les résultats des analyses scientifiques de bronzes géométriques et orientaux4. On peut ajouter la mention d’un article important de Lucien Lerat sur les boucliers à protomes animales d’origine crétoise trouvés à Delphes5. Les publications par type d’objets comptent les articles fondamentaux de Pierre Amandry sur les protomes de taureaux et les attaches de chaudrons6, qui placent les objets de Delphes dans une catégorie plus vaste. C’est le principe qu’adoptent les Prähistorische Bronzefunde publiés à Munich, qui sont pour certains objets de Delphes la seule publication disponible7 ; les documents de Delphes sont donc souvent bien classés dans des séries, comme les fibules, l’armement (épées, lances, flèches, boucliers, etc.), les éléments de harnachement, ou encore la vaisselle8. Le plus souvent, ils bénéficient d’une mention, d’un dessin, mais jamais évidemment d’une étude approfondie. Claude Rolley a largement contribué à faire connaître les bronzes de Delphes en en publiant certains exemples dans des ouvrages généraux ou dans des articles, traitant le plus souvent de bronzes. Dans des livres consacrés aux bronzes grecs9, dans son volume traitant de la sculpture grecque archaïque10, dans ses chroniques recensant les publications de bronzes grecs et romains parues dans la Revue Archéologique11, Claude Rolley prit soin de montrer des documents delphiques inédits ou de proposer de nouvelles interprétations d’objets publiés par Paul Perdrizet12. Mais on pourrait mentionner beaucoup d’autres articles ou publications où il fait connaître le matériel de Delphes aux spécialistes, que ce soit pour le comparer à celui d’Olympie13, présenter des ratés de coulée et des traces de travail du métal à Delphes même14, tenter de tirer des conclusions historiques des analyses techniques que nous avons mentionnées, ou tirer de l’anonymat tel objet des réserves de Delphes15. Même les recherches relatives à la Bourgogne sont pour lui l’occasion de faire des comparaisons avec les objets delphiques16. Les objets de Delphes sont également mentionnés dans de nombreuses publications de sites orientaux, égéens, italiques, voire ibériques ; quelques ouvrages font particulièrement référence, comme, pour Olympie, les Olympische Forschungen de Hans-Volkmar Herrmann17, de Hanna Philipp18, de Werner Gauer19, ou pour Samos, les volumes Samos VIII et IX, dus respectivement à Ulf Jantzen20 et à Ulf Gehrig21. On ne saurait évoquer ici toutes les publications qui peuvent offrir des comparaisons au matériel de Delphes, mais les publications récentes du matériel des sanctuaires d’Ionie22, les articles d’Ingrid Strøm sur l’Héraion d’Argos23, ou de Rainer C. Felsch sur les bronzes de Kalapodi24 ont contribué à enrichir la réflexion sur l’assemblage votif de Delphes. Au-delà d’une revue bibliographique, la publication de la vaisselle du haut-archaïsme se donne comme objectif de replacer cette documentation dans son contexte historiographique, pour mieux comprendre ce qu’on a cherché à tirer des fragments de trépieds, de chaudrons et de vaisselle dans la recherche sur l’artisanat, les échanges en Méditerranée ou la vie religieuse. Cet ouvrage entend présenter l’histoire de la recherche à partir des objets delphiques. Naturellement, l’étude prendra en compte le matériel d’autres sites pour envisager ce qui relève en grande partie de l’histoire de la découverte et de la prise en compte des objets « étrangers » et de leurs imitations grecques dans

3. Voir Amandry 1939, Amandry 1944-1945 : ces articles constituent toujours la seule publication de cet ensemble majeur. 4. Voir Filipakis 1983, Magou 1986 et Magou 1991. 5. Lerat 1980. 6. Amandry 1956 ; Amandry 1958a ; Amandry 1958b. 7. On doit noter que la plupart des chercheurs, comme Klaus Kilian ou Imma Kilian-Dirlmeier notamment, connaissaient bien le matériel de Delphes grâce aux relations privilégiées qu’ils entretenaient avec Claude Rolley, toujours soucieux de faire connaître aux spécialistes le matériel de Delphes. Voir Kilian 1975a, Kilian-dirlmeier 1984. 8. Une douzaine de ces volumes font mention d’objets de Delphes, en particulier les publications des objets de parure, fibules, épingles, pendeloques, de Kl. et I. Kilian. 9. Le premier de 1967, dans Monumenta Graeca et Romana, le second de 1983, publié à Fribourg. 10. Publié en 1994 aux éditions Picard. 11. Elles ont été publiées de 1983 à 2006, et font la recension de plus de 180 ouvrages.

12. Par exemple, un fragment de bouclier italique : inv. 24819, Rolley 1995, p. 396. 13. Rolley 2003a, p. 273-279. 14. Rolley 2002a. 15. Par exemple une anse de situle, dans Cl. Rolley, « De Delphes à Magny-Lambert », Mélanges Lerat, Paris, 1984, p. 727-732 (Rolley 1984b). 16. Cl. Rolley, « Trouvailles méditerranéennes en Basse-Bourgogne », BCH, 1962, 86-2, p. 476-493. 17. VI et XI, Herrmann 1966 et Herrmann 1979. 18. XIII, Philipp 1981. 19. XX, Gauer 1991. 20. Jantzen 1972. 21. Gehrig 2004. 22. L’Artémision d’Éphèse, Klebinder-Gauss 2007 ; l’Athénaion de Milet, Held 2000. 23. Strøm 1998. 24. Felsch 2007.

INTRODUCTION ET HISTOIRE DE LA RECHERCHE

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les sanctuaires et pour évaluer l’intérêt qu’a pu susciter l’idée d’une présence étrangère dans les lieux sacrés des Grecs. On accordera une attention toute particulière aux différentes façons dont on aborde les relations entre les Grecs et les non-Grecs dans l’historiographie depuis la fin du xixe s., hors de Delphes également ; néanmoins, cette étude sera fondée d’abord sur les grands moments de la recherche à Delphes, qui correspondent en général aux découvertes majeures. On fera remarquer que l’intérêt pour les objets de Delphes est de moins en moins visible dans la seconde moitié du xxe siècle, peut-être faute de découvertes importantes par rapport à d’autres sites.

De la Grande Fouille25 aux découvertes des fosses de l’Aire La Grande Fouille La Grande Fouille de 1892, à partir du moment où les archéologues français eurent obtenu l’autorisation de fouiller Delphes pendant dix ans, constitue une entreprise exceptionnelle, qui livra dans tous les domaines des documents d’une extrême importance : pourtant, les catégories d’interprétation qui existent alors ne permettent pas une analyse très détaillée des objets de Delphes, et ces premiers contacts avec les objets delphiques suscitent parfois peu d’intérêt de la part des fouilleurs, qui s’attendaient à faire d’autres découvertes. Attentes et perspectives des fouilleurs De même que Théophile Homolle et son équipe ne s’attendaient pas à trouver à Delphes des fragments aussi importants de sculpture archaïque26, de même les bronzes géométriques et orientalisants sont, plus que tous les autres, inattendus dans ce sanctuaire ; la génération des premiers fouilleurs de Delphes a en réalité très peu de repères pour appréhender ces objets et les placer dans une catégorie27. À cette époque, les notions de « période géométrique » ou de « période orientalisante » n’existent pas et les viiie et viie siècles ne constituent pas à proprement parler des champs de recherche28. L’influence de l’Orient sur l’art grec est une idée apparue à l’époque de l’essor de l’archéologie orientale. En France, l’orientalisme jouit d’un grand prestige depuis le xviiie s.29 ; c’est avant tout une science philologique, renforcée peu à peu par les découvertes archéologiques. Les grandes fouilles menées à Olympie, Délos ou Delphes se font au moment des grandes missions d’exploration en Orient : les études mésopotamiennes se développent à partir de la seconde moitié du xixe s.30, Chypre est explorée à la même époque par le comte de Vogüé qui rapporte une collection d’objets chypriotes au Louvre, puis par le consul américain Louis Palma de Cesnola, qui fouille des milliers de tombes à Larnaca et à Idalion31.

25. On appelle la Grande Fouille la période de la fouille du sanctuaire, de 1892 à 1901, qui suivit la concession des fouilles de Delphes à l’École française d’Athènes par l’État grec. La Redécouverte, p. 73-202. 26. Croissant 2000, p. 334. 27. En effet, si l’on se réfère à L’histoire de l’Art dans l’Antiquité de G. Perrot et Ch. Chipiez, on constate que les périodes de l’art grec antique se subdivisent de la manière suivante : après la période mycénienne, un tome presque entier est consacré à « la Grèce de l’épopée », précisée ensuite en « la civilisation grecque depuis l’invasion dorienne jusqu’au milieu du viiie siècle » ; Perrot, Chipiez 1898, chapitre premier. Plus loin, les volumes étudient la Grèce archaïque, qui s’étend du milieu du viiie siècle, parfois même depuis l’année 776 précisément, jusqu’à la fin du vie siècle. Traitant de la Grèce de l’épopée, les auteurs prennent en compte des objets variés, les « productions industrielles », et examinent à la fois de la céramique, des objets de parure comme des fibules, des armes, épées et haches de fer, ou encore des trépieds à baguettes, portant un décor de volutes en haut de leurs tiges verticales.

Mais ce souci disparaît avec l’étude de la Grèce archaïque, où toute l’attention se porte sur l’architecture et la sculpture au détriment des petits objets. 28. C’est A. Conze qui le premier, en identifiant les styles dans la céramique, proposa un découpage chronologique en style géométrique, puis en style « orientalisierend » Conze 1870, p. 16-17. Jugeant fautifs les qualificatifs « égyptisant » ou « phénicisant » qui sont aussi employés pour cette classe de vases grecs, il insiste sur les sources assyriennes de l’art grec et sur le caractère précieux des œuvres d’art étrangères sur le sol grec à cette époque. Id., p. 19. Riva, Vella 2006, p. 4. Coulié 2013, p. 105-107. 29. Gran-Aymerich 1998, p. 64. Sur l’orientalisme aux xviiie et xixe s., voir p. 65 et suivantes. 30. On pense avant tout aux fouilles de Botta dans le palais assyrien de Sargon II à Khorsabad, qui envoie les grands taureaux androcéphales à Paris. 31. Gran-Aymerich 1998, p. 184.

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BRONZES DU HAUTARCHAÏSME À DELPHES

Les trouvailles à Delphes « Comme la plupart des entreprises humaines, Delphes a été fertile en joies et en déconvenues » : voilà comment G. Radet résumait en 1901 les impressions suscitées par les découvertes de la Grande Fouille32. Les fouilleurs cherchent avant tout les monuments ou consécrations mentionnés par Pausanias33, qui valent seuls la peine, penset-on, d’être découverts. Les fouilles et leur écho Dans le sanctuaire d’Apollon, de nombreux fragments de bronzes ou de petits objets sont mis au jour, mais ne retiennent pas toujours l’attention : « les trois terrasses qui s’étagent du haut en bas du sanctuaire furent comme autant de bassins de retenue où les objets antiques s’accumulèrent. De là sortirent, sans parler de milliers de vases et de menus bronzes, d’incomparables œuvres d’art que Pausanias avait tues et dont la découverte fut une source d’enthousiastes surprises »34. Au mois de juillet 1893, dans une zone en contrebas du portique des Athéniens, on découvrit des fragments de bronzes, dont une applique en forme de fleur de lotus35, le 26 juillet, ainsi qu’un objet pourvue d’« une tête de chouette, avec les ailes, paraissant avoir fait partie d’une anse de vase », dont la matière est reconnue comme de l’albâtre et le travail comme « asiatique », avec ses « incisions formant décoration géométrique ». Cet objet est la coquille de tridacne inv. 85136, qui n’est pas identifiée alors, et qui ne donne lieu à aucune description ni aucun dessin. En revanche, au printemps 1894, dans une partie rédigée par Paul Perdrizet, une applique en forme de sirène, trouvée devant le fronton Ouest du temple, est mise en valeur par un dessin (fig. 1)37, et par un commentaire qui évoque le lien avec l’Égypte de cet « ornement de grand vase, figure humaine à l’imitation de l’uraeus » ; malheureusement, la partie finale du commentaire entre parenthèses a été rayée – et est vraiment illisible – , preuve que l’on a dû reprendre une première opinion trop vite émise. Il nous semble pourtant important de souligner que Paul Perdrizet a pris soin de noter quels objets de terre cuite ou de céramique avaient été trouvés au même endroit, de même que l’« on s’est attaché à relever les différentes couches de terrain des fouilles, et les genres de poteries propres à chacune ». Mais plus généralement, les petits objets de bronze ne sont pas illustrés d’un dessin, sont peu décrits et pas toujours mentionnés. Les découvertes de Delphes ont un écho important, surtout les découvertes d’architecture, de sculpture et de textes inscrits38. Les petits objets, les petits bronzes ne retiennent pas vraiment l’attention, face aux œuvres monumentales qu’on peut montrer grâce à d’imposants moulages. En revanche, la Grande Fouille a fait connaître le fait suivant : des œuvres capitales pour l’histoire de l’art grec sont apparues, dont on ne soupçonnait pas même l’existence, car elles ne sont pas mentionnées dans les textes antiques, et un grand nombre de ces découvertes relèvent d’un état ancien du sanctuaire, lui-même inconnu des auteurs tardifs39. À propos de la sculpture, Théophile Homolle note que « la nouveauté est assez grande, en effet, pour que l’histoire de la sculpture archaïque, si récemment transformée par les découvertes d’Olympie et d’Athènes, soit, depuis les nôtres, à refaire »40. Cette situation renouvelle et ouvre donc largement les possibilités de la recherche scientifique à Delphes. Le même Homolle met en évidence le fait que les découvertes du sanctuaire d’Apollon permettent de tracer une histoire du sanctuaire de Delphes et de l’art des temps mycéniens à l’époque byzantine, et s’attache à présenter des documents des époques anciennes. Il s’intéresse entre autres à la place de l’Asie « dans l’industrie, comme aussi dans le culte delphique », et mentionne « quelques produits originaux de l’Orient, et des ouvrages inspirés des modèles orientaux »41, comme les têtes de griffons et les « oiseaux à tête humaine ». Homolle replace brièvement ces derniers dans leur contexte, en affirmant

32. Radet 1901 p. 313. 33. Id., p. 307, « on tâchait d’aborder le sanctuaire dans le même

ordre que Pausanias, on allait du connu à l’inconnu ». 34. Id., p. 313. 35. Journal de la Grande Fouille, p. 55 ; inv. 23951 (cat. 123). 36. Rolley 1979, p. 14, fig. 18. 37. Inv. 1248 (cat. 73), Journal, p. 109.

38. « Les Parisiennes parlent de l’Antinoüs, du Sphynx, de l’Apollon et des fouilles avec la même aisance que des dernières gravures des journaux de mode », Messager d’Athènes, 10/12 déc. 1894, cité dans La Redécouverte, p. 197. 39. Miliadis 1930, p. 30. 40. Homolle 1894, p. 442. 41. Id., p. 443.

INTRODUCTION ET HISTOIRE DE LA RECHERCHE

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que « le type est originaire de l’Assyrie ; mais [qu’] il s’était peu à peu hellénisé »42 ; cette façon – même modeste – de tenir compte des relations entre l’Orient et la Grèce reflète l’intérêt nouveau que suscite la découverte de tels objets43. Th. Homolle rappelle aussi combien ce type d’offrandes venues d’Orient trouve sa place à Delphes, en faisant allusion aux sources littéraires44 : « certes nous ne pouvions espérer et nous n’avons pas trouvé les offrandes magnifiques des souverains philhellènes de l’Égypte ou de la Lydie ; elles étaient trop précieuses pour échapper aux pillages »45 ; mais les offrandes de Midas et de Crésus sont bien présentes à l’esprit des premiers fouilleurs de Delphes. Ils cherchent d’emblée à replacer les objets dans le contexte historique delphique, et ce dès 1894, année particulièrement riche, deux années seulement après le début officiel de la Grande Fouille. Marmaria Le Journal de la Grande Fouille s’achève en 1901 et traite également des fouilles du sanctuaire d’Athéna à l’Est et en contrebas du sanctuaire d’Apollon, au lieu-dit « Marmaria » : il mentionne quelques objets comme une tête de griffon archaïque, « semblable à ceux qui furent trouvés à Delphes même et à Olympie »46, sans beaucoup d’autres commentaires. À partir de 1901, à Marmaria, la récolte d’objets est intéressante : malgré le peu de matériel qui subsiste des richesses du sanctuaire de naguère, Théophile Homolle signale un grand nombre d’armes (lances, flèches, haches, épées et boucliers), des statuettes, des objets de parure, des fragments de trépieds, de chaudrons décorés de figures, comme le griffon. Le morceau de bravoure est ici la phiale portant un décor représentant le siège d’une ville (n°178, fig. 494-499) ; Th. Homolle s’intéresse surtout à l’origine et au style d’une telle œuvre. Il compare cette coupe avec celles gravées sur des bas-reliefs de l’Assyrie et celles qui ont été trouvées à Nimrud, à Chypre, en Crète et jusqu’en Italie47. Enfin, il reconnaît dans son style « hybride et mixte » « la marque du génie phénicien »48, auquel il n’accorde toutefois que la faculté de créer « un style où tous les modèles avaient laissé leur marque, où tous les goûts trouvaient à se satisfaire »49, fort peu caractérisé finalement. N’a-t-on pas déjà affaire avec ce jugement à l’idée d’un « art orientalisant » diffusé dans le bassin méditerranéen et appartenant à un courant culturel général ? L’art phénicien ne semble pas autrement défini ici. Le rôle de Paul Perdrizet Parmi les pionniers des fouilles de Delphes, Paul Perdrizet, membre de l’école française justement à partir de 1893, se voit confier l’étude des « petits objets », titre de son volume des Fouilles de Delphes. C’est un personnage particulièrement important dans l’étude des objets, car il manifeste, à la différence de ses contemporains, un très grand souci du terrain. Cet « archéologue de terrain passionné par les époques anciennes »50 fait preuve de précision et de minutie dans la façon dont il remplit le Journal de la Grande Fouille51. Il est l’auteur du dessin de la sirène inv. 1248 mentionnée plus haut et de l’analyse des couches de terrain environnantes52. Il mêle déjà dans l’interprétation les données archéologiques, stratigraphiques et topographiques, afin de tirer des conclusions sur les pratiques des Grecs à l’intérieur du sanctuaire.

42. Id, p. 444. 43. Si Th. Homolle n’a pas d’intérêt particulier pour l’archéolo-

gie orientale, ou de liens privilégiés avec les orientalistes, il est d’une époque où l’on considère les civilisations de la Méditerranée comme interdépendantes : la meilleure preuve en est l’ouvrage de G. Perrot et de C. Chipiez, Histoire de l’Art dans l’Antiquité, paru en dix volumes de 1882 à 1914, qui montre les origines de l’art grec et les civilisations qui l’ont précédé ou entouré. 44. Voir en particulier Hérodote I, 14, 25, 50-51. Voir infra, p. 154-157. 45. Homolle 1894, p. 444. 46. Journal de la grande fouille, p. 547. 47. Homolle 1904, p. 11-12. 48. Id., p. 16. 49. Id., p. 13. 50. A. Jacquemin, La Redécouverte, p. 152.

51. Ce qu’il fait du 16 avril 1894, début de la campagne de cette année, au 9 juin, puis du 9 août au 6 septembre, du 2 au 24 octobre) ; en 1895, du 29 avril au 28 juin, et du 28 août au 13 octobre ; en 1896, du 23 au 29 mai. La Redécouverte, p. 151. 52. A. Jacquemin a caractérisé le souci « stratigraphique » et plus généralement archéologique de Paul Perdrizet, en relevant dans le Journal de la Grande Fouille les passages écrits de sa main, où il s’intéresse à la succession des couches, à la consistance de la terre ou à l’interprétation des objets au-delà des trouvailles, La Redécouverte, p. 154-157. Il note, à propos de la zone entre le grand autel et le mur est du téménos, une couche de « terre verdâtre, mélangée d’abondants débris d’os, [de] bois brûlé, [de] cendre », qu’il analyse ainsi : « il n’est pas douteux que cette couche n’ait été constituée lentement par les débris des sacrifices offerts aux viiie et viie siècles à l’autel qui devait s’élever devant le temple ancien », Journal de la Grande Fouille, p. 285.

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BRONZES DU HAUTARCHAÏSME À DELPHES

S’il manifeste son intérêt pour les objets de l’époque géométrique, en revanche la période « orientalisante » ne semble pas avoir encore d’existence particulière53 : on ne trouve jamais ce qualificatif qui est compris dans celui d’« archaïque », qui sert aussi bien pour une protome de griffon que pour une statuette d’« Apollon »54. Seule la céramique du viie et du vie siècle reçoit le qualificatif spécifique de protocorinthienne ou de corinthienne, suivant la terminologie contemporaine55. Pour André de Ridder56, se succèdent les « bronzes primitifs », puis des bronzes illustrant « une première invasion des motifs asiatiques », avant que, « au commencement du viie siècle, l’art grec [soit] constitué dans ses parties essentielles, un noyau primitif, certainement autochtone, et un élément adventif ou dérivé, emprunté de plus ou moins près à des motifs orientaux, mais transcrit en langue et en style grecs ». Il ne comprend pas du tout l’appellation d’« art géométrique » employée par Furtwängler à propos de statuettes humaines et animales d’Olympie, qui ne sont que « primitives » ou « schématiques » pour lui. Le tome des Fouilles de Delphes V qui paraît en 1908, consacré aux « petits bronzes, terres cuites, antiquités diverses », rappelle le volume des publications d’Olympie57 consacré aux bronzes, « l’admirable livre dont feu Adolphe Furtwängler58 a enrichi la publication des fouilles d’Olympie »59. Examinant les petits objets60 et les « Weihgeschenke der alten Zeit », le savant allemand distinguait deux groupes : les documents témoignant d’un « europäisch-griechische Stil », et ceux qu’on peut classer dans l’« orientalisch-griechische Stil »61. Ce groupe rassemble, par exemple, les chaudrons et attaches de chaudrons en forme de protomes de griffons, les attaches en forme de buste humain ailé (qu’il n’appelle pas encore « Assurattachen »), la vaisselle ou les armes relevant d’un style « gréco-oriental ». Bien que les objets ne soient alors clairement définis ni comme grecs ni comme orientaux, Adolf Furtwängler ne s’interdisait pas les comparaisons avec des documents orientaux62. La démarche mise en œuvre par Paul Perdrizet ressemble à celle de son prédécesseur par la recherche de comparaisons, en particulier par le renvoi, le cas échéant, à des parallèles connus ailleurs. Dans le chapitre sur les

53. On trouve la mention des périodes « très archaïque et archaïque » dans le tome des Fouilles de Delphes V, Perdrizet 1908, p. VII. 54. En dehors de la publication des bronzes d’Olympie par A. Furtwängler, Paul Perdrizet dispose de quelques publications de bronzes de référence : il y a des catalogues de bronzes pour le British Museum, les musées de Berlin, de Vienne, de Karlsruhe, et, en langue française, la Notice des bronzes antiques du Louvre de Longpérier, les Bronzes figurés de la Gaule romaine du musée de Saint-Germain-enLaye par S. Reinach, et surtout trois catalogues par A. de Ridder, Catalogue des bronzes trouvés sur l’Acropole d’Athènes, le Catalogue de la collection de Clercq, III, les bronzes, et le Catalogue des bronzes de la société archéologique d’Athènes. 55. Furtwängler 1885. Coulié 2013, p. 108. Dans le domaine de la céramique, Adolf Furtwängler invente dès 1883, faute de mieux, le terme de « protocorinthien ». 56. de Ridder 1896, p. X. 57. La fouille du sanctuaire d’Olympie est particulièrement intéressante dans notre perspective, car non seulement elle précède de peu celle de Delphes – on sait que l’obtention de la concession de cette fouille se fit sur fond de rivalité avec la recherche allemande : Gran Aymerich 1998, p. 178-184. Elle montre en particulier la dimension « militante » de l’archéologie à cette époque. On peut citer également un extrait de la biographie de Th. Homolle par E. Pottier : « Les fouilles d’Olympie, poursuivies par l’Allemagne de 1875 à 1881, avaient acquis une renommée par ailleurs très méritée, dont l’éclat faisait pâlir celle des fouilles de Délos. De plus, on ne pouvait oublier chez nous que le temple d’Olympie avait été découvert par des Français en 1829, sous le patronage de l’expédition de Morée, et il semblait équitable de donner à la France quelque compensation pour la perte de son ancien privilège » ; Pottier 1926, p. 4. 58. A. Furtwängler a lui-même visité l’Italie, la Grèce et l’Asie Mineure, mais pas le Proche-Orient ; il n’a pas particulièrement de

relations avec les orientalistes, qui ne sont pas très nombreux encore en Allemagne. Après les fouilles des Français (P.-E. Botta, puis V. Place et F. Fresnel) et des Anglais (H. Rawlinson et A.H. Layard) en Mésopotamie, on s’intéresse à la Syrie et à la Palestine dans les années 1870. C’est ensuite la Perse qui fait l’objet des recherches les plus importantes. Dans les années 1885, les Allemands aussi entreprirent des recherches dans la basse-Mésopotamie. Voir GranAymerich 1998, p. 186-196 et 253-260. 59. Perdrizet 1908, p. VII. Les résultats sont rapidement publiés dans neuf volumes de textes et de planches, Olympia : die Ergebnisse der von dem Deutschen Reich veranstalteten Ausgrabung, im Auftrage des Königlich preussischen Ministers der geistlichen, unterrichts- und medicinal-Angelegenheiten, Ernst Curtius und Friedrich Adler, Berlin, A. Asher & Co., 1890-97. 60. Furtwängler 1890, chapitre I. Sa formation lui a donné un intérêt certain pour la catégorie de la « Kleinkunst », qui, grâce à la multiplication des fouilles en Europe occidentale, en Grèce et au Proche-Orient, ne cesse de s’enrichir ; c’est donc naturellement que la nécessité de proposer un classement typologique et chronologique s’imposa à des savants comme A. Furtwängler ou A. Conze à la même époque. Voir Marchand 2003, p. 150-159. 61. Furtwängler 1890, p. 7 : l’auteur annonce le plan de l’ouvrage sans justifier son découpage (« Die Begründung dieser Scheidung und Benennung würde hier zu weit führen »). 62. Les sirènes d’Olympie inv. 3996 et 5445 sont comparées à des exemplaires de Préneste, du sanctuaire d’Apollon du Ptoion, de l’Acropole et enfin des objets trouvés près du lac de Van, en Arménie actuelle. Furtwängler 1890, p. 117. L’Arménie n’est pas une zone de recherches intenses, mais a livré quelques objets, conservés dans les collections russes surtout. H.A. de Longpérier, spécialiste de l’archéologie et de la numismatique de l’Orient, est attaché au Cabinet des médailles et chargé des Antiques au Louvre ; il avait notamment publié deux bustes humains ailés découverts près du lac de Van.

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bronzes, des objets qui sont aujourd’hui considérés comme orientaux sont alors attribués aux artisans grecs, même si les modèles qui les ont inspirés viennent d’Orient : à propos des « appliques en forme de figures ailées », Paul Perdrizet proteste « contre l’attribution de ces appliques, et par suite des ƯƩƦƢƷƩƵ qu’elles décoraient, à des ateliers orientaux, c’est-à-dire phéniciens »63. Les sirènes, ni les protomes de griffons ne sont orientales chez Paul Perdrizet, mais grecques ; il discute seulement du lieu de production le plus vraisemblable et préfère attribuer ces documents à l’Ionie64 plutôt qu’aux Argiens65. Cette tendance à interpréter ces productions comme grecques ne relève pas seulement de l’état des connaissances de l’époque, mais bien d’une conception générale de l’art grec, dans ses rapports avec les modèles orientaux. Les objets venus d’Orient ne sont que « débris sporadiques », « curiosités exotiques rapportées des pays lointains par des Grecs qui y avaient séjourné comme marchands et comme mercenaires »66. Il ne saurait être question d’art ou d’époque « orientalisant(e) », dans la mesure où « le merveilleux réveil de l’art grec du viiie au vie siècle » n’est pas explicable par des contacts avec l’Asie et l’Égypte. Il n’y a donc pas d’« influence » de l’art oriental sur l’art grec ni de recherche par les Grecs d’objets orientaux. Paul Perdrizet a montré une attention et un intérêt sans précédent pour les « petits objets », dont il réussit à souligner l’importance dans la compréhension globale du sanctuaire et de son fonctionnement.

Les travaux de Fr. Poulsen Malgré l’ensemble des découvertes de Delphes et les recherches de Perdrizet, l’histoire des débuts du sanctuaire n’existe pas comme un sujet de recherche constitué : « c’est au commencement du sixième siècle av. J.-C. que nous pouvons rapporter les premiers faits historiques qui intéressent Delphes », peut-on lire en 191467, dans un livre qui, certes, veut être un guide et un résumé des découvertes, mais qui n’en montre pas moins où se placent les centres d’intérêt des contemporains. Si Émile Bourguet cite et donne à voir deux protomes de griffon68, c’est pour illustrer la description qu’il fait des trépieds et des chaudrons, sans souci de chronologie. Origines orientales de la Grèce En revanche, dans le domaine des études sur la Grèce et l’Orient, il faut évoquer une personnalité capitale, celle de Frederik Poulsen, archéologue danois69, qui mena des recherches à Delphes70 et qui ouvrit de nouvelles voies à partir de ses découvertes. Poulsen a notamment cherché à montrer les origines orientales du culte et même de la mythologie d’Apollon71 qu’il considère comme un élément important pour comprendre la formation de la religion grecque. De même, il est aussi sensible aux origines orientales de l’art grec du haut-archaïsme. Il s’inscrit ainsi dans un mouvement d’analyse des rapports entre Grèce et Orient où, après la découverte de la civilisation mycénienne, il faut repenser l’origine de l’art et de la civilisation grecs. Il tire parti de l’échec des théories de W. Helbig sur l’assimilation des civilisations mycénienne et phénicienne72 ; débarrassé en quelque sorte de la question mycénienne, il peut étudier les rapports entre la civilisation grecque et l’Orient sous un jour nouveau73. D’une manière plus générale, l’essor de l’archéologie orientale en Allemagne depuis la fin du xixe s. a créé un terreau favorable à ce genre de réflexions74.

63. Perdrizet 1908, p. 80. 64. Id., p. 84. 65. Malgré la référence à Hérodote, IV, 152, qui qualifie d’argien

le type du trépied décoré de têtes de griffon. 66. Perdrizet 1908, p. V. 67. Bourguet 1914, p. 23. 68. Id., p. 161, fig. 51 et 52. 69. Il fut notamment directeur de la Glyptothèque de Copenhague de 1910 à 1946. 70. Dans les années 1905-1907, il vient à l’École française d’Athènes comme membre étranger, ce qui lui facilita l’accès aux objets de Delphes. 71. Dans le sillage de M.P. Nilsson, auteur en 1911 d’un article sur les origines orientales d’Apollon : Nilsson [1911] 1951, p. 36-61.

Poulsen 1924, p. 17 : « aber den Orient darf kein Altertumforscher mehr als quantité négligeable behandeln ». 72. Helbig 1894 ; Gras, Rouillard, Teixidor 1989, p. 129. 73. Cet intérêt pour les origines orientales de la religion grecque lui vient sans doute de sa formation en Allemagne et des idées d’U. von Wilamowitz, dont il a été l’élève à Göttingen et qui défendait l’origine lycienne d’Apollon. Wilamowitz 1903, p. 575 et suivantes. Il affirme pourtant en 1884 que les civilisations décadentes des Sémites et des Egyptiens n’ont rien apporté d’autres aux Grecs que quelques techniques, objets décoratifs, fétiches et fausses divinités : Wilamowitz 1884, p. 215. 74. Marchand 2003, p. 188-227.

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Cette perspective lui permet de replacer les offrandes des rois d’Asie Mineure Gygès et Alyattes dans un contexte précis, où le sanctuaire d’Apollon est un lieu de consécration comme les sanctuaires orientaux. Bien plus, il souligne les liens étroits avec les sanctuaires apolliniens d’Asie Mineure, comme Didymes et Claros, en particulier pour la dimension oraculaire ; il formerait avec eux une sorte de communauté culturelle75. Ainsi, la dimension religieuse joue un grand rôle dans la compréhension du phénomène d’« orientalisation » des arts, dont de nombreux objets de Delphes sont les témoins. Les rapports entre Grèce et Orient à travers les objets Fr. Poulsen a également développé un champ de recherche plus large : en 1912, il publie Der Orient und die frühgriechische Kunst, ouvrage qui expose pour la première fois une réflexion sur les rapports complexes entre l’Orient et la Grèce à partir de l’analyse des objets76. Dans cette étude, s’impose l’idée de l’importance de l’Orient pour l’art grec, en l’occurrence parce que des objets orientaux arrivent sous les yeux des Grecs, dans les sanctuaires. Il met en avant le rôle fondamental des Phéniciens dans la diffusion des objets et des motifs orientaux dans l’ensemble du bassin méditerranéen et, de ce fait, de la circulation et de l’échange possible des motifs d’origine orientale77. Sans être l’inventeur de la catégorie de l’art « orientalisant »78, il impose l’emploi du terme et lui donne pour la première fois un contenu épistémologique : « die frühgriechische Kunst ist orientalisierend, deshalb müssen ihre Motive im Orient, teilweise in Ägypten gesucht werden »79. Sans mentionner ici d’objet delphique, il s’attache à souligner les éléments orientaux dans l’art grec géométrique80, mais aussi à chercher les origines d’un motif adopté par l’art grec, comme la « perruque à étages »81, ou l’importance des créations égyptiennes pour l’art crétois82. Ces analyses sont pour la première fois, et très tôt, rassemblées pour faire comprendre les particularités de l’art grec du viie siècle ; elles sont sans doute aussi à l’origine d’une certaine confusion qui règne dans l’emploi du terme « orientalisant »83, qui désigne productions orientales et grecques. Fr. Poulsen fait vraiment figure de précurseur dans la mesure où ce n’est pas avant les années 1930 que les études sur la Grèce et l’Orient et sur l’origine des objets orientaux retrouvés en Grèce, se formalisent et construisent un domaine de recherche plus solide et plus académique.

Les années 1920 et 1930 À partir des années 1920, on s’intéresse davantage aux périodes hautes et à l’esthétique des objets géométriques. À Delphes, après 1903 où l’on s’imagine que les fouilles sont terminées, il y a très peu d’activité jusqu’à la première guerre mondiale qui marque un temps d’arrêt. La génération des années 1920 reprend fouilles et études en se concentrant sur les hautes époques du sanctuaire, à ses origines religieuses dans le cas de Robert Demangel à Marmaria. À Olympie également, les années 1920 voient se mener des fouilles de niveaux de plus en plus anciens 75. Poulsen 1924, p. 40 ; Etienne, Prost 2008. 76. Le seul exemple delphique présent dans ce livre n’en est pas

moins un objet important et singulier, dont Poulsen souligne encore les particularités : il s’agit de la coquille de tridacne gravée inv. 851, Poulsen 1912, p. 69-70. Il en analyse le décor comme phénicien, non sans liens avec les objets chypriotes. Toutefois, le caractère égyptisant du décor lui fait penser que cet objet a pu être gravé en Égypte même, puisque l’on sait par Hérodote (II, 112), que des Phéniciens de Tyr s’étaient installés à Memphis. Fr. Poulsen ira plus loin en 1920 dans son livre sur Delphes, Delphi, en affirmant que cet objet n’est pas un coquillage, mais un morceau d’albâtre indubitablement égyptien, gravé en forme de coquillage, et dont le lieu de production tout à fait approprié est Memphis ; Poulsen 1920, p. 64. Notons au passage combien les objets de Delphes revêtent un caractère exceptionnel au cœur d’une série bien attestée par ailleurs : c’est déjà l’annonce de ce qui caractérisera les œuvres sculptées de Delphes, « une nouveauté spectaculaire […] tout en s’inscrivant dans une tradition tout à fait identifiable », Croissant 2000, p. 344.

77. Ce phénomène, fondamental pour qui veut comprendre les cultures matérielles orientales, aux contours encore mal définis, est constitutif des œuvres d’art orientales : malgré les progrès effectués par les recherches récentes, il reste difficile de trancher définitivement dans l’attribution de certains objets clairement orientaux à des régions précises et les degrés d’orientalisation ou d’interprétation de modèles orientaux peuvent être variés. 78. Conze 1870, passim ; voir aussi Coulié 2005, p. 263, n. 44. 79. Poulsen 1912, p. V. 80. Id., chapitre neuf, p. 108-116. 81. Id., chapitre onze, p. 137-160. 82. Id., chapitre douze, p. 161-168. 83. M. Gras, P. Rouillard et X. Teixidor le rappellent : alors que le terme « orientalisant » est apparu dès 1870, « le concept d’“orientalisant” apparaît pour la première fois dans l’ouvrage du Danois F. Poulsen qui publie en 1912 un livre sur le rôle de l’Orient dans l’art grec archaïque », p. 128.

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qui livrent une importante documentation, surtout pour le matériel de bronze84. Il en va de même des fouilles à l’Héraion de Samos, où, depuis 1925, sont explorées des couches du sanctuaire du haut archaïsme et de la protohistoire du sanctuaire, sous la direction d’Ernst Buschor85. Les nouvelles fouilles et le souci de développer des outils et des cadres pour classer le matériel conduisent à la formalisation progressive de la notion d’« art orientalisant » et de « période orientalisante », entre l’art géométrique et l’art archaïque86. Les années 1920 et 1930 sont aussi l’époque des classements et des études du matériel par catégories, que permet l’accumulation de la documentation. Le rôle de la mise en série est essentiel pour aborder de façon concrète les questions d’imitation de modèles orientaux et de recréations grecques. En 1931, Ipsen87 et Emil Kunze88 dressent une liste des sirènes de chaudron recensant tous les exemplaires connus, en distinguant du même coup les exemplaires orientaux et les Grecs. Le rapprochement des documents oblige à poser plus clairement la question de la présence de ces objets orientaux en Grèce et de leur imitation. Les travaux d’Emil Kunze En 1931, Emil Kunze publie Kretische Bronzereliefs qui, par l’étude des objets crétois, formule en réalité une série de questions sur les rapports entre la Grèce et l’Orient, sur le rôle des Phéniciens et de Chypre dans l’évolution de l’art crétois et grec en général. Ces travaux sont importants car ils mettent en évidence les liens qui unissent Delphes et la Crète. Il apparaît qu’un certain nombre de fragments de boucliers de Delphes peuvent être rapprochés du travail des boucliers trouvés dans la grotte de l’Ida et attribués à la Crète ; bien avant la découverte des boucliers à protome animale publiés par Lucien Lerat89, Emil Kunze signale des fragments de tôle de bronze bordés d’une tresse gravée, qui semblent appartenir à ce type de bouclier90 ; Delphes est un des rares sites du continent où on trouve ce type de documents, avec d’autres fragments de tôle comportant des animaux gravés publiés dans Paul Perdrizet91. La coupe inv. 4463, qu’il compare avec certaines coupes assyriennes de Nimrud, est l’objet d’une attention particulière de sa part92. Les apports de l’étude de Kunze résident, outre les relations entre le Proche-Orient et la Grèce tout entière qu’il aborde, dans son esquisse d’une chronologie absolue des objets. Il montre que les sanctuaires du continent comme Olympie ou Delphes ont conservé quelques reliefs de bronze appartenant à la seconde moitié du viiie siècle, époque de l’apparition des motifs orientaux dans l’art grec pourtant encore géométrique93. Il souligne que la chronologie peut sembler haute, mais que, en dehors même des boucliers crétois, certains motifs de la céramique attique montrent que ces contacts existent dès le viiie siècle. Faisant une sorte de présentation résumée des objets trouvés sur le continent et correspondant à l’époque des reliefs de bronze crétois, il mentionne « les plus anciennes protomes de griffons, martelées » et enfin les « AssurAttaschen »94 : c’est la raison pour laquelle il propose en annexe une liste et une analyse des « attaches de chaudrons en forme de protome humaine ailée »95, découvertes aussi bien en Orient qu’en Grèce ou en Italie. Il indique que ces attaches ont beaucoup de points communs avec les bronzes crétois96. C’est une des premières tentatives pour

84. Mallwitz 1972, p. 294 : les travaux de W. Dörpfeld et H. Schleif s’intéressent aux époques hautes d’Olympie. Voir aussi Kyrieleis 2001, p. 53. 85. Demargne 1974, p. 183 ; Kyrieleis 1981, p. 57. 86. Cette période, en gros le viie s., est parfois interprétée comme une période de découverte totale de l’Orient par les Grecs et de « combat » contre une trop grande influence de l’art oriental. C’est ainsi que E. Pfuhl voit dans le viie s. « die kritischen Zeit der griechischen Kultur », menacée par l’influence de l’Orient. Il compare l’art dit des « Dédalides », qui serait la première expression grecque dans la plastique, aux batailles de Marathon et de Salamine contre l’ennemi oriental. Les éléments orientaux sont donc interprétés comme un mal nécessaire, comme un passage obligé menant l’art grec à son accomplissement classique. Pfuhl 1923, p. 96-97. 87. Ipsen chez Lehmann-Haupt 1931 (non vidi), voir Muscarella 1992, p. 17.

88. Kunze 1931, Anhang II. 89. Inv. 7177 et inv. 7227 : voir Lerat 1980, passim. 90. Perdrizet 1908, n°524, p. 104, fig 360 a,b,c. les fragments

ont été d’abord identifiés par Lippold 1909 ; Kunze 1931, p. 62. 91. Kunze 1931, p. 79-80 ; Perdrizet 1908, p. 105-106, n° 531533, pl. XVII, 1-3 (inv. 1845a, 1931 et 1932). Emil Kunze suppose qu’il doit s’agir du même objet, dans la mesure où les fragments ont été trouvés au même endroit le même jour ; le fait que les animaux n’aient pas tous les pattes tournées vers le centre du bouclier n’est pas rédhibitoire. 92. Infra, cat. 178. 93. Kunze 1931, p. 247 et suivantes. 94. Id., p. 253. 95. Id., p. 267. 96. Id., p. 237.

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présenter ce type de matériel dans une étude d’ensemble, en distinguant exemplaires grecs et orientaux, avec une réflexion sur l’origine et la diffusion de ces objets en Grèce : il en ressort que ce sont les appliques de chaudron qui sont le plus sous « l’influence » de l’Orient97. Emil Kunze rappelle aussi qu’il est difficile de déterminer précisément le lieu de provenance des sirènes et qu’on peut hésiter entre la région du lac de Van d’où sont originaires bon nombre d’exemplaires, et la Syrie du Nord. La question des origines, les différents styles de sirènes, la différenciation claire entre les exemplaires orientaux et les exemplaires grecs : autant d’éléments qui expliquent que cette contribution fondamentale ait été la base de toutes les réflexions sur ce matériel jusqu’aux publications du matériel d’Olympie par Hans-Volkmar Herrmann.

Les découvertes des fosses de l’Aire Avec l’arrivée de la « génération » de 193698, les fouilles reprennent à Delphes, mais les objectifs ont changé ; on s’intéresse davantage aux origines du sanctuaire, au lointain passé du culte d’Apollon. Lucien Lerat est chargé d’étudier les niveaux mycéniens et géométriques du sanctuaire, dont on cherchait jusque-là surtout l’état classique. Ensuite ce furent les fouilles de Pierre Amandry sous la « voie sacrée »99 qui contribuèrent à nourrir les réflexions sur le sanctuaire de Delphes du viiie au vie siècle (fig. 516). En face du portique des Athéniens, « à hauteur du Bouleuterion, entre la base des Béotiens et l’exèdre située vis-à-vis »100, deux fosses sont découvertes au mois de mai101. Pierre Amandry reconnaît d’emblée le caractère original de cette découverte : il s’agit de fosses, correspondant à un dépôt d’offrandes mélangées102 et le statut de ce matériel est celui d’offrandes enfouies après un incendie103. Le contenu des fosses est varié104, et les objets ou les fragments sont très nombreux : ils sont décrits en particulier dans le BCH de 1939 et celui de 1944-1945105. Dès la découverte des premiers objets, l’importance de ce dépôt d’offrandes apparaît clairement ; ce sont les restes des statues chryséléphantines qui constituent la partie la plus impressionnante de l’ensemble106. Premières interprétations À Delphes, la coulée de boue et de rochers de 1935 avait certes relancé les fouilles dans la partie orientale du sanctuaire d’Apollon, recouverte à certains endroits de plusieurs mètres de terre107 ; mais la reprise des fouilles à Olympie depuis 1936108 n’est pas sans incidence sur le choix de fouiller systématiquement les niveaux antérieurs à 97. Id., p. 273. 98. La redécouverte, p. 229 : si le terme est impropre, il a le mérite

de désigner en une formule concise ceux qui travaillèrent à Delphes après 1934, début d’un nouveau cycle de fouilles. 99. Amandry 1991, p. 192 : « nom qui fut donné par les archéologues au chemin pavé conduisant de l’entrée du sanctuaire au temple d’Apollon, mais qui n’apparaît dans aucun texte antique ». 100. Amandry 1944-1945, p. 36. 101. Les circonstances de la découverte sont détaillées dans les p. 86-90 du BCH de 1939. 102. Id., p. 89 : « cette énumération montre le désordre où étaient les objets, manifestement jetés pêle-mêle dans la fosse, et le mélange d’œuvres d’époques et de matières diverses, or, ivoire, terre cuite, bronze ». 103. Amandry 1991, p. 191. 104. Id., chapitre VI. 105. Une centaine de fragments de fer, fers de lance ou simples tiges, furent découverts dans les fosses, ainsi qu’une trentaine de tessons de céramique géométrique portant un décor. Les objets de bronze ont également été trouvés en bon nombre : des armes, hachettes, casques, pointes de lances ou fragments de boucliers ; des fragments de chaudrons ou de lébès, avec des attaches en forme d’oiseau à tête humaine ou des anses décorées de fleurs de lotus, des fragments de bassins dont il ne reste que les anses. En bronze encore, un objet plus énigmatique en forme de « diabolo », parfois considéré comme un thymiatérion (Amandry 1991, p. 197, fig. 5) et portant des lettres gravées non déchiffrées, illustre le caractère exceptionnel des décou-

vertes. Les métaux précieux ont également été utilisés pour ces objets : l’argent pour les plaques du grand taureau, montées sur une âme de bois, mais aussi pour des fragments de vaisselle ; l’or, pour les trois statues chryséléphantines de taille naturelle ou d’autres plus petites, qui faisaient aussi partie des offrandes du sanctuaire au vie siècle. L’ivoire, autre matériau rare et précieux, est donc présent avec l’or pour des statues de grande taille, mais aussi pour des documents de petite taille, décor de meuble ou d’instrument, comme le personnage masculin flanqué d’un lion, ou les reliefs composés de petits personnages. Enfin, des appliques en pâte de verre, visages, mains ou pieds, furent découvertes dans cet ensemble, et ajoutent encore à la variété des matériaux et des styles, avec leur caractère fortement égyptisant. 106. Ce type de statue, connu par de nombreux textes et d’importants fragments archéologiques, n’avait jamais été retrouvé sous une forme aussi complète dans un sanctuaire, pour des raisons évidentes touchant à la fragilité de l’objet et à la convoitise qu’il pouvait susciter. Lapatin 2001, passim, et p. 193-197 pour les sources littéraires. 107. La redécouverte, p. 231. 108. L’organisation du transfert de la flamme olympique à Berlin pour les Jeux Olympiques de 1936 a marqué la reprise d’une importante activité de fouille, notamment dans le stade, qui se poursuit jusqu’en 1943. L’intérêt du régime nazi pour l’archéologie ne se limita pas au territoire national, mais se développa aussi en Grèce, en vue notamment de démontrer une communauté raciale de l’Allemagne et de la Grèce. Sur l’archéologie en Grèce pendant l’occupation, voir ƑƊƒƘƝƖ 31, 1994 ; sur Olympie en 1936, p. 115.

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l’installation du sanctuaire109. Tandis que le régime nazi formule des théories « nordicistes » qui mettent en valeur les « qualités supérieures des races germaniques »110, et cherche à étudier la formation de l’esprit aryen dans la « grécité » et « son impact continu et fertile dans la germanité »111, l’analyse des contacts entre la Grèce avec l’Orient à travers la documentation archéologique est un enjeu qui devient idéologique. Pour Pierre Amandry, les contacts avec l’Asie, la vallée de l’Euphrate et la Syrie ont été déterminants pour les Grecs dans « l’apprentissage du travail de l’or et de l’ivoire, oublié après l’époque mycénienne »112. Or, il souligne que les Grecs d’Ionie ont atteint une grande maîtrise artistique grâce à leurs contacts avec l’Orient, alors que « la Grèce continentale balbutie encore à la suite des Dédalides »113. Toute la question de l’interprétation des rapports entre la Grèce et l’Orient est ici posée.

La Grèce à l’école de l’Orient De l’après-guerre aux années 1970, les découvertes se poursuivent et font naître des théories expliquant l’évolution de l’art grec aux viiie et viie s. : l’« art orientalisant » en est un des principaux produits, caractérisant d’abord un changement artistique, puis un phénomène culturel. Les découvertes des fosses de l’Aire inspirent à Pierre Amandry plusieurs articles sur les rapports entre la Grèce et l’Orient. Or, en 1938, est découvert à Altin Tepe, dans un site de l’Arménie actuelle, près du lac de Van, un chaudron de bronze décoré de têtes de taureau fixées sur des appliques à trois branches114 ; ces têtes sont stylistiquement apparentées à celles provenant de Toprak Kale, conservées au British Museum115. Ces documents sont le point de départ de la première contribution majeure de Pierre Amandry, qui paraît en 1956, dans un recueil d’études en hommage à Hetty Goldmann116 : il y dresse un bilan des provenances des protomes de taureau décorant des chaudrons, retrouvées à la fois en Orient et en Grèce (sept exemplaires de Delphes sont cités117). En 1958, deux articles importants paraissent, d’abord « Objets orientaux en Grèce et en Italie aux viiie et viie siècles avant J.-C. »118, puis, « Grèce et Orient » qui traite à la fois des attaches à figure humaine et des protomes animales119. Pierre Amandry s’inscrit dans un courant de pensée qui recherche dans l’art oriental les « modèles » qui ont inspiré les Grecs et les créations qui ont sans aucun doute contribué à modifier en profondeur l’art grec ; d’autres grands noms de l’archéologie incarnent ces idées, en particulier Ekrem Akurgal ou dans une moindre mesure Pierre Demargne.

Objets orientaux et objets grecs Faire la part entre les objets orientaux et les objets grecs passe par une analyse iconographique, stylistique et technique des protomes de taureaux, les sirènes et les protomes de griffons. Bien que Pierre Amandry cherche à établir des critères objectifs de classement – décoration gravée des protomes de taureaux120, présence ou non d’une bélière sur les appliques de taureaux et de sirènes121, ou procédés techniques comme le remplissage au bitume des griffons

109. Dont furent chargés Lucien Lerat, Pierre Amandry et Jean Bousquet. 110. Marchand 2003, p. 341-354 ; Schnapp 2003, p. 102 ; voir aussi Chapoutot 2012, en particulier la première partie, « l’annexion de l’Antiquité ». 111. Marchand 2003, p. 349, citant un memorandum de D. Weinreich à l’Université de Tübingen. la pureté hellénique est affirmée car sa permanence passe par le sang. 112. Amandry 1939, p. 119. 113. Ibid. 114. Barnett, Gökçe 1953, p. 121-123. 115. Barnett 1950, p. 1-43, surtout pl. XVI. 116. « Chaudrons à protomes en Orient et en Grèce », Amandry 1956. 117. Inv. 9467 (n° 16) ; 2351 (n° 81) ; 1784 (n° 84) ; 4139 (n° 85) ; 19892 (n° 82) ; 2808 (n° 90) ; 1869 (n° 110). 118. Amandry 1958a, p. 73-109.

119. Amandry 1958b. 120. Cette distinction se fonde tout d’abord sur l’observation de la

décoration gravée que portent les protomes orientales, plaque rectangulaire sur le haut de la tête avec décor de mèches ondulées, lignes incisées sur le museau, autour du mufle. Au contraire, les taureaux grecs ont un décor et un style en général « très fruste et impossible à définir », Amandry 1956, p. 245. Mais un document important, le lébès de Cumes conservé à Copenhague, oblige à nuancer cette distinction, car il paraît sûrement oriental par son style, bien que les protomes présentent des bélières (ce qui semblait bien un trait des documents grecs) ; en outre, son style est différent des protomes d’Altin Tepe et de Toprak Kale, si bien que, souligne notre auteur, il faut tenir compte des « influences orientales » (Id., p. 244) de variétés distinctes sur la Grèce. 121. Si la présence d’une bélière semble dans un premier temps caractéristique des objets grecs (c’est l’opinion dans Amandry 1956, p. 246), le chaudron de Copenhague exclut une systématisation trop

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orientaux122 –, il ne parvient pas à établir un système irréfutable, et certains documents s’avèrent bien difficiles à classer, comme le lébès de Cumes, conservé à Copenhague, qui entre mal dans les catégories définies (fig. 2). Le partage entre oriental et orientalisant reste ardu et Pierre Amandry doit constater que la variété des cultures matérielles du Proche-Orient rend périlleuses les tentatives de dégager clairement les modèles orientaux des objets grecs. Les hypothèses proposées sont loin de faire l’unanimité123, parce que, notamment, les parallèles manquent cruellement sur le sol oriental. À la recherche des « modèles » orientaux Dans cette situation paradoxale, tout se passe comme si on avait en Grèce des objets orientaux qui restent inconnus en Orient. La recherche se divise alors entre les archéologues allemands dans leur majorité, en particulier les fouilleurs d’Olympie, qui défendent l’idée d’une fabrication grecque pour toutes les protomes de griffons et aussi de taureaux, qui étaient ajoutées aux chaudrons orientaux en Grèce même, parfois avant d’être réexpédiées en Étrurie124, et les chercheurs français qui distinguent traditionnellement les exemplaires orientaux et orientalisants125 ; ces divergences au départ stylistiques ont bien évidemment des conséquences historiques sur l’histoire de l’art grec et le processus d’« orientalisation » qu’il connaît. Styles et ateliers Publiant les chaudrons orientalisants d’Olympie, Hans-Volkmar Herrmann développe notamment la réflexion sur les styles, en mettant tous les objets en série avant de les répartir en ateliers126. Cet effort a pour objectif premier de replacer les documents d’Olympie au sein d’une évolution générale des différents types ; le matériel de Delphes est commenté à cette occasion en référence à la collection d’Olympie. Le classement de Hans-Volkmar Herrmann, fondé sur une analyse stylistique des objets, et non sur des critères formels ou techniques uniquement, est soustendu par une conception évolutionniste de l’art grec127. Dans cette perspective, la question de la localisation des ateliers est resserrée dans un cadre étroit : si le développement de l’ensemble est uniforme, comment imaginer la coexistence d’ateliers ayant leurs propres traditions, qui pourraient maintenir la présence de traits « anciens » pendant une longue période ? Ce présupposé conduit l’auteur à faire entrer dans un développement régulier l’ensemble des œuvres qu’il a répertoriées, de manière pas toujours très convaincante.

Le chaudron, objet « oriental » et « orientalisant » Dans les décennies 1950-1970, ce sont les chaudrons de bronze et leurs différentes attaches qui sont, en Grèce, au centre des réflexions des chercheurs sur la période « orientalisante ». Prenant la suite des trépieds géométriques

grande, car les taureaux sont orientaux, mais sur des appliques à bélière. En outre, il apparaît que les artisans devaient tenir compte des exigences utilitaires dans la conception de leurs chaudrons, et placer, à côté de protomes animales en bronze martelé trop fragiles pour servir de poignée, des appliques à bélière ; donc les protomes et les anses à bélière pouvaient coexister sur un même chaudron, comme le prouva en 1956 la découverte d’un chaudron à Olympie, décoré de deux sirènes et de protomes de griffons. Mais Jantzen 1967, p. 91, considère comme grecques les appliques de sirènes sans bélière, alors que les documents orientaux auraient un caractère plus fonctionnel. 122. « Les protomes martelées, avant d’être fixées à la cuve, étaient remplies d’une pâte assez liquide pour pénétrer jusqu’au bout des oreilles et à la pointe du bec » Amandry 1958a, p. 85 ; or, l’analyse d’assez nombreux échantillons de ces remplissages a mis au jour la présence de bitume et de matières minérales, caractéristiques des matériaux présents en Orient. Un fragment du remplissage de la protome inv. 7734 a été analysé, et « il est très probable que la matière est un mélange de bitume et de terre calcaire » Amandry 1958a, p. 87,

note 3. La conséquence en est que les protomes martelées comportant ce remplissage ont été, d’après lui, faites en Orient. 123. Cl. Rolley a résumé les opinions des chercheurs sur cette question « beaucoup plus embrouillée, du lieu de fabrication des protomes de griffon martelées, grecques comme les protomes fondues selon Jantzen, Herrmann, et Benson, et orientales selon Amandry, Akurgal et les orientalistes », Rolley 1973, p. 508. 124. Hypothèse défendue par Hans-Volkmar Herrmann (Herrmann 1966, Herrmann 1979), H. Kyrieleis en particulier. 125. En particulier Pierre Amandry, ainsi qu’Ekrem Akurgal, et Cl. Rolley. 126. C’est aussi Hans-Volkmar Herrmann qui fit en 1964 la première tentative pour classer stylistiquement les bronzes géométriques, c’est-à-dire par ateliers, malgré les critiques que son classement a pu susciter : voir Rolley 1994, p. 97. 127. « The possibilities of an artisan’s conservativeness, or whim, or that a progressive detail actually may have developped even earlier than assumed, does not come into consideration », Muscarella 1981, p. 49.

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à cuve clouée, ce sont toujours les offrandes les plus coûteuses et les plus prestigieuses. L’histoire des découvertes a contribué à la concentration de la recherche sur ce type de documents : en 1956-57 furent découverts dans les grands tumuli de Gordion des chaudrons décorés de sirènes128 ; il est certain qu’une telle trouvaille a aussi orienté les débats vers la question de la localisation des ateliers orientaux qui ont produit ces chaudrons. Toutefois, la documentation grecque provient exclusivement des sanctuaires, ce qui lui confère une fonction spécifique. Oscar W. Muscarella présente un raisonnement caractéristique : après avoir rappelé les relations à plusieurs niveaux que les Grecs développent avec le Proche-Orient, et mentionné la présence de nombreux objets orientaux sur le sol grec, il écrit : « one of the most prevalent classes of the oriental material that reached Greece in the 8th century BC was the large bronze cauldron fitted with winged siren and winged bull-head attachments »129 Le chaudron de bronze devient le paradigme de la réflexion sur les relations entre le Proche-Orient et les sanctuaires grecs. Le problème de l’origine orientale À la suite des publications de Hans-Volkmar Herrmann, de nombreux archéologues présentent des documents et des arguments pour répondre à la question de l’origine et du lieu de fabrication des chaudrons et de leurs protomes130. Faute de publication spécifique depuis le volume de Paul Perdrizet, les objets de Delphes sont souvent laissés un peu en dehors des discussions sur l’origine des chaudrons. Les débats sont pourtant loin d’être clos à propos des deux principales catégories d’appliques décorant les chaudrons à cuve mobile, c’est-à-dire les sirènes et les protomes de griffons ; notons que l’intérêt se concentre sur le lieu de fabrication ou d’invention des objets orientaux, plutôt que sur la localisation des ateliers grecs. Cela semble un peu paradoxal, dans la mesure où ce problème concerne à la limite les orientalistes, et qu’on aurait pu traiter davantage les questions du processus de production à l’intérieur du monde grec131. Ainsi, pour les sirènes, les savants se partagent entre les partisans de l’origine du motif en Syrie du Nord132, avec des traits néo-hittites que l’on retrouve à Sakçegözü133, et les tenants d’une origine urartéenne134, à cause des découvertes faites dans la région du lac de Van, à Toprak Kale ou à Altin Tepe. Il apparaît que les cultures matérielles du Proche-Orient ne sont pas assez bien connues et définies pour offrir des points de comparaison sûrs ; les débats semblent donc un peu vains135. Certes, l’accord se fait sur une protome d’un style tout particulier, conservée au musée de Copenhague et censée provenir du sanctuaire de Delphes136 (cat. 67) ; elle serait représentative de la production assyrienne. Mais son lien avec Delphes est de plus en plus remis en cause137. Pour les griffons, le problème est celui « du lieu de fabrication des protomes de griffons martelées, grecques comme les protomes fondues selon Ulf Jantzen, Hans-Volkmar Herrmann et Jack Leonard Benson […], orientales selon Pierre Amandry, Ekrem Akurgal et les orientalistes, qui hésitent seulement sur la région précise – Urartu ou Syrie du Nord néo- hittite – qui a créé ces objets. »138 Cette fois, les objets de Delphes apportent des éléments

128. Les fouilles à Gordion sont menées depuis le début des années 1950 ; les niveaux achéménides, puis phrygiens, sont atteints, et le contenu des grands tumuli découverts est peu à peu publié : les fouilles de 1956 mettent au jour dans le tumulus P un grand chaudron de bronze qui contient des éléments de décor en bois sculpté. Des fragments interprétés comme les restes d’un trône, dans lequel R.S. Young propose de voir l’image du trône offert par Midas à Delphes : Young 1957, p. 330. En 1957, la fouille du grand tumulus livre de nombreux objets de métal, en particulier trois chaudrons à sirènes et à protomes de taureau, ou des phiales à omphalos dont nous reparlerons ; à propos des têtes de taureau, R.S. Young souligne leur différence stylistique avec les têtes analysées par Pierre Amandry comme urartéennes, et suppose un atelier de fabrication localisé à Gordion même. Toutefois, il reconnaît que les sirènes ont un air urartéen, et qu’elles pourraient avoir été importées de la région du lac de Van : Young 1958, p. 151-152. 129. Muscarella 1992, p. 16. Mais il ne tient pas compte des protomes de griffon ici considérées comme toutes grecques. 130. Selon Kyrieleis 1966, p. 1, la publication de Herrmann est centrée sur cette question : « der Haupteil des Buches ist der Herkunftsfrage

gewidmet ». Muscarella 1992, p. 35, à propos de l’origine des protomes de griffons, parle de « major and vertiginous problem ». 131. « Mais il reste irritant d’hésiter à ce point sur le lieu de fabrication d’objets dédiés dans les sanctuaires grecs (…), et inquiétant que les réponses proposées soient aussi compliquées », Rolley 1984a, p. 279. 132. Principalement Herrmann, Muscarella. 133. Akurgal 1961a, p. 67. 134. Kyrieleis 1966, Akurgal 1969, p. 197-198, Amandry. 135. Cl. Rolley a montré dans son compte rendu des volumes de Herrmann que l’ouvrage de Van Loon, Urartian Art, 1966, apportait une issue au débat entre origine hittite et origine urartéenne : en effet, les sirènes pourraient fort bien avoir été fabriquées dans une zone géographique du Taurus qui a été un temps sous domination du royaume de l’Urartu. Les deux attributions ne seraient donc plus aussi exclusives l’une de l’autre. Rolley 1984a, p. 279. 136. Entre Herrmann, Kyrieleis, Rolley, Akurgal, et Muscarella. 137. Muscarella 1992, p. 18. 138. Rolley 1973, p. 508.

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décisifs dans l’argumentation, grâce aux analyses que Pierre Amandry fit de certaines protomes, en particulier de la protome inv. 7734139. Cette protome martelée a en effet conservé la matière de remplissage qui gardait à la fine tôle de bronze sa forme initiale ; l’analyse de cette substance laisse penser qu’on a employé des matériaux inhabituels ou inconnus en Grèce à cette époque, et que la protome a été fabriquée en Orient140. Pour autant, même si cette pièce delphique apporte un élément essentiel au débat, il reste « impossible de tracer parmi les protomes de griffon une séparation, typologique ou stylistique, entre celles qui seraient orientales et celles qui seraient grecques, alors qu’on le fait assez facilement pour les sirènes »141. Malgré ce constat salutaire, la réflexion se borne souvent à l’alternative « oriental ou grec ? » qui conduit à une impasse142. Art oriental et art orientalisant Ekrem Akurgal, dans son livre intitulé Orient et Occident et sous-titré « la naissance de l’art grec » considère d’abord « toute la création artistique du Proche-Orient dans son ensemble »143, puis entreprend de voir ce que la Grèce doit à l’Orient avant de conclure que « les Hellènes ont subi une forte influence orientale, et l’art grec doit sa naissance à l’Orient »144. Chaque catégorie d’objets trouvés ou produits en Grèce est soigneusement analysée, afin d’en dégager les éléments d’origine orientale, motifs iconographiques, représentations humaines ou animales, vêtements, architecture, ou même le sourire archaïque145. Pour Akurgal, cette orientation scientifique a des fondements idéologiques : en affirmant l’origine orientale de la plupart des documents grecs importants du haut archaïsme, il construit une hiérarchie entre l’Orient et la Grèce146. Ekrem Akurgal est un orientaliste, qui traite des arts de l’Orient. Mais il s’est efforcé de faire porter ses recherches sur l’art grec, et notamment sur les sites de la côte147 : c’est une façon de rééquilibrer l’« influence » de l’art oriental sur l’art grec, en montrant le développement de celui-ci. Il reste que l’analyse se fonde sur une comparaison systématique entre l’art grec et ses modèles orientaux. Pierre Demargne utilisait la même formule, « la naissance de l’art grec », pour intituler son volume remontant bien avant l’art grec dit « orientalisant ». Il y interroge la notion d’« art orientalisant »148 et réévalue pour chaque domaine artistique ce qu’il doit, mais surtout ce qu’il ne doit pas à l’Orient : l’architecture dorique et ionique sont des créations grecques, la sculpture « dédalique », en « partant du modèle oriental »149, s’en est bien vite éloignée, et la céramique figurée qui semble recouverte de motifs orientaux, n’existe pas en Orient même. Même lorsqu’il s’agit par exemple de la Crète chère à Pierre Demargne150, l’Orient ne semble pas la seule origine et la source de l’art grec, bien qu’un rôle d’impulsion lui soit reconnu. L’auteur montre que les artisans crétois ont su utiliser les éléments orientaux des objets qu’ils recevaient, comme c’est le cas pour les bronzes de l’Ida151. Mais ce sont déjà des documents orientalisants, qui choisissent certains modèles dans un répertoire connu, en rejetant les éléments égyptiens152. Le choix varie aussi en fonction des différentes cités153. La perspective de Demargne est de dégager les caractéristiques de l’art grec, en relation avec ses origines extérieures, mais en s’attachant davantage à comprendre comment il a transformé des données de départ dans sa dynamique propre, qu’à constater des reprises à des modèles orientaux.

139. N° 33. 140. Amandry 1944-45, Amandry 1958b, p. 12. 141. Rolley 1973, p. 508. 142. Par exemple Kyrieleis 1977. 143. Akurgal 1969, p. 6. 144. Id., p. 229. 145. Syrien à l’origine. 146. Le volume évite curieusement le cas de l’art phrygien, qui est

mentionné par endroit sans être développé dans un chapitre propre : c’est évidemment un des cas où des emprunts réciproques empêchent de conclure à l’antériorité de l’art grec ou phrygien sur l’autre. 147. Présentés en particulier dans Akurgal 1970. 148. « La notion d’art orientalisant est simple et même trop simple dans son principe », car « on imagine parfois, sous ce mot, une trans-

formation totale de l’art grec s’alignant sur les arts orientaux. La réalité doit être davantage nuancée », Demargne 1974, p. 211. Il n’y a en revanche plus de référence à un art « orientalisierend » dans le tome I de la Geschichte der griechischen Kunst de F. Matz, mais uniquement aux formes « früharchaisch ». 149. Id., p. 212. Sur la notion de « dédalisme », Aurigny 2012a. 150. La Crète dédalique, 1947. 151. « Derrière l’imposante série crétoise des boucliers et des tympana de l’Ida, entre tous orientalisants, on devine l’importation dans les ateliers de Cnossos de bronzes assyriens ou syriens », Demargne 1974, p. 221. 152. Id., p. 238. 153. « car chacune [des cités] a sa façon de réagir aux influences de l’Orient et de construire un art neuf », Id., p. 184.

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L’« orientalisant » : un phénomène général dans le bassin méditerranéen ? Les travaux sur les relations entre la Grèce et l’Orient conduisent à des réflexions sur les circulations dans le bassin méditerranéen qui prennent en compte également la péninsule italique, la péninsule ibérique et certaines régions de l’Europe occidentale. Cette tendance à concevoir un phénomène culturel global s’accompagne d’un rôle important donné aux Phéniciens.

Diversification des provenances : un Orient multiple, l’Ouest du bassin méditerranéen De plus en plus, on cherche à comprendre les relations « non pas entre Orient et Occident, comme on dit trop souvent, mais entre, au moins, le Proche-Orient et quatre zones distinctes : Chypre ; la Crète ; l’Égée et la péninsule grecque ; l’Italie »154. De même, l’Orient apparaît multiple, l’Urartu aux confins du Caucase, la Phrygie, et les régions du Levant, Syrie du Nord ou côte phénicienne. La côte de l’Asie Mineure a évidemment une place particulière, car elle est directement au contact des royaumes phrygien et lydien. Les termes du problème évoluent aussi dans la mesure où l’on veut comprendre les relations entre Grecs et Orientaux plus qu’entre deux entités trop vagues, la Grèce et l’Orient155. John Boardman fait paraître, dès 1964, puis en 1980, The Greeks Overseas. Their Early Colonies and Trade156. Partant des relations entre les Grecs et les Orientaux, il traite plus généralement des relations avec les étrangers, les « Barbares », c’est-à-dire aussi les Égyptiens, les Occidentaux d’Italie ou de Sicile, et aussi les peuples du Nord et des Balkans, à partir de l’analyse de la présence des Grecs sur place. Il dégage d’une part « les différentes composantes des influences orientales sur la Grèce »157 et montre d’autre part les relations spécifiques des différents Grecs à l’Orient158. Il a le souci de montrer que les Grecs adoptèrent certains objets ou motifs iconographiques orientaux, tout en s’inspirant des techniques orientales ou en les modifiant selon leurs propres besoins159. Les recherches sur les relations des Grecs avec leurs voisins de la Méditerranée occidentale ne soulèvent pas les mêmes questions160. S’intéressant à un fragment de casque à crête villanovien de Delphes, Kl. Kilian161 pose « pour la première fois le problème de la signification historique de telles découvertes »162. Reprenant ces données, F.W. von Hase s’intéresse dans plusieurs publications aux « présences étrusques et italiques dans les sanctuaires grecs »163, pour reprendre le titre d’une synthèse qui servait de référence jusqu’aux recherches récentes d’A. Naso164.

154. Rolley 1984a, p. 275. 155. Le Proche-Orient cesse d’être un ensemble flou qui « influen-

cerait » de manière générale les créations grecques. Dès la fin des années 1950, ce changement est sensible, avec des ouvrages qui cherchent à prendre un point de vue plus global sur les relations Grèce/Orient. Les titres sont révélateurs : The Greeks and their Eastern Neighbours, de T.J. Dunbabin, publié d’abord en 1957, traite des rapports entre les Grecs et les Orientaux (et non plus seulement entre deux abstractions, Grèce et Orient). L’Orient a ici un visage précis, et les « influences » orientales ressemblent davantage à des choix tout à fait délibérés de la part des Grecs. 156. Nous nous réfèrerons à la traduction en français de 1995, due à Michel Bats, éditée par le Centre Jean Bérard de Naples. 157. Boardman 1995, p. 70. 158. Il attribue par exemple un rôle prépondérant aux Eubéens et aux Corinthiens dans les contacts avec l’Orient, en raison de la céramique retrouvée à Al-Mina. Sur l’importance d’Al-Mina, Boardman 1995. Contra Perreault 1993, pour qui Al-Mina n’était pas un comptoir commercial grec, mais essentiellement un site levantin. Hall 2007, p. 96-97 : les premières céramiques eubéennes sont attestées à Al-Mina vers 770-750. Vacek 2017, p. 48-49, confirme la domination des importations eubéennes au viiie s. 159. On voit à travers ce livre avec quelle prudence il faut employer le terme d’« influence », que J. Boardman utilise abondamment, sans désigner aucune sorte de domination que les Orientaux imposeraient

aux Grecs. « Il est intéressant de noter qu’au début les ateliers orientalisants adoptèrent de préférence la technique du martelage avec des détails en repoussé alors que les ornements importés d’Orient étaient habituellement fondus avec les détails incisés », Boardman 1995, p. 85. 160. Von Hase 1997, p. 294, pour l’histoire de la recherche. Dès la fin du xixe siècle, des objets italiques sont reconnus à Dodone ou à Olympie ; A. Furtwängler par exemple avait fait déjà un certain nombre d’identifications (Furtwängler 1890) ; mais c’est plus tard que ce type d’objets est étudié spécifiquement. Emil Kunze, en 1951, se pose la question de la présence d’objets étrusques en Grèce à partir de quelques objets d’Olympie (Kunze 1951). Il en profite pour présenter une réflexion générale, « en tenant compte des témoignages historiques attestant la faveur dont jouissaient auprès des Grecs les produits de la métallurgie étrusque » Von Hase 1997, p. 294. 161. Kilian 1977, p. 429-442. 162. Von Hase 1997, p. 294, et Kilian 1977, p. 429 et suivantes. Un article important du même auteur publié en 1975 invite aussi à se pencher sur les relations entre la zone de l’Égée et ses voisins occidentaux ; il prend en compte également les rapports de la Grèce avec la Macédoine et les Balkans. De nombreux objets de Delphes sont mentionnés, et très souvent aussi replacés sur des cartes de diffusion établies par catégories d’objet : Kilian 1975b, p. 9-141. 163. Von Hase 1997, p. 293-323. 164. Notamment Naso 2006a, Naso 2006b, Naso 2012.

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Depuis lors, on distingue plusieurs catégories d’objets, armes, objets de parure, vaisselle et objets de prestige qui induisent des problématiques différentes, liées à Delphes à la colonisation ou à l’oracle165.

Les objets de Delphes, reflet d’un phénomène culturel commun au bassin méditerranéen ? Les travaux sur les formes et les techniques communes à des objets retrouvés de l’Est à l’Ouest du bassin méditerranéen nourrissent la conception d’un espace méditerranéen unitaire. L’idée d’un « phénomène orientalisant » à l’œuvre dans le bassin méditerranéen s’inscrit dans une tradition historique solide166 et prend des formes spécifiques au haut-archaïsme. Le rôle des Phéniciens L’essor de l’archéologie phénicienne dans les années cinquante et soixante, de Chypre à l’Andalousie167, accroît le nombre de sites phéniciens connus et relance les études sur l’« expansion phénicienne », qu’elle soit commerciale, religieuse ou artistique168. Le rôle dévolu aux Phéniciens dans les poèmes d’Homère169, la publication des ivoires du palais de Samarie170, des ivoires de Nimrud171, les découvertes d’objets en métal précieux dans les sanctuaires grecs, qui font écho aux descriptions homériques172, sont autant d’éléments qui attestent la richesse et la diffusion des œuvres d’art phéniciennes dans le bassin méditerranéen. Le « phénomène orientalisant » fait d’ailleurs l’objet d’un chapitre de l’Univers phénicien de M. Gras, P. Rouillard et J. Teixidor en 1989173. L’ensemble des productions orientalisantes – chaudrons à protomes, vaisselle précieuse, ivoires et scarabées, tridacnes et œufs d’autruches – est présenté comme un ensemble unitaire, dans lequel les spécialistes cherchent certes à reconnaître des ateliers, mais dont on ne sait pas bien en définitive en quoi il est redevable aux Phéniciens174. L’apparition de nouveaux motifs dans le répertoire décoratif en Grèce et en Étrurie nourrit l’idée d’une koinè des arts orientalisants. Selon I. Bouzek, les modèles orientaux, issus des arts de la Syrie, de l’Assyrie, de la Phénicie, de l’Urartu et de l’Égypte, ont aidé à la création d’un style nouveau, ou plutôt d’une nouvelle famille de styles175, où l’art grec, en raison de sa haute qualité, joue un rôle fondamental dans la diffusion des formes. Delphes semble représentatif de ce phénomène, où les emprunts des Grecs se sont limités à quelque régions précises avec lesquelles ils étaient en contact, comme le rappelait Cl. Rolley176 ; les objets delphiques attestent pourtant de nombreuses provenances177. L’importance des circulations, des objets comme des hommes, artisans, marchands, ou de divers statuts, est mise en lumière par Claude Rolley, qui souligne à plusieurs reprises que si l’on comparait l’ensemble des publications

165. Sur les objets italiques de Delphes, voir Aurigny 2016b. 166. Etienne 2010, p. 3-26 pour le bilan historiographique ;

Charalambidou, Morgan 2017, introduction p. 1-8. 167. Gras, Rouillard, Teixidor 1989, p. 21. 168. Sur ces différents aspects, voir par exemple Lipinski 1987 (éd.). 169. Malgré l’importance des éléments littéraires et poétiques dans la représentation de la réalité, on a gardé l’image des marchands, des marins expérimentés et des artisans hors pair. C’est le cas notamment de Dunbabin, qui réfute l’idée qu’Homère renverrait à l’âge du bronze, et qui considère qu’il décrit le viiie siècle : Dunbabin 1957, p. 35. 170. Crowfoot 1957. 171. Barnett 1957. 172. Dunbabin 1957, p. 36. 173. L’étude de ce « phénomène » sert à montrer que les productions matérielles phéniciennes, font partie de l’« unité et [de la] diversité de l’objet orientalisant ». Siècles marqués par l’expansion phénicienne, « les viiie et viie s. av. J.-C. sont les témoins d’un phénomène puissant qui anime la vie méditerranéenne : celle-ci se met à l’école de l’Orient ». Gras, Rouillard, Teixidor 1989, p. 128. 174. Ont-ils créé ces objets ou sont-ils surtout responsables de leur transport ? Cette présentation globale entretient la confusion entre « phénicien » et « oriental » dans la désignation des importations par-

venues en Grèce et en Italie, comme si la globalité du phénomène permettait de faire l’économie des questions précises de provenances et de circuits. Le phénomène orientalisant est donc compris comme une phénomène culturel global : « on n’oubliera pas que l’orientalisant est un courant culturel qui suppose entre l’Orient méditerranéen (…) et l’Occident des échanges de produits bruts et travaillés, de « cartons », de modèles, de techniques, d’hommes – artistes et artisans en particulier », Ibid. 175. Bouzek 1997, p. 241. 176. La synthèse qu’il a donnée dans son premier volume de la sculpture grecque met l’accent sur les quatre aspects fondamentaux des contacts des Grecs avec l’Orient : ce sont les ports et les comptoirs, donc la présence des Grecs en Orient, les relations avec la Syrie du Nord et l’Urartu, les relations avec la Phénicie et Chypre, et enfin les rapports avec l’Anatolie intérieure, c’est-à-dire la Phrygie et la Lydie. Rolley 1994, p. 116 à 118. 177. Rappelons, à la suite de Cl. Rolley, qu’il y a « ici comme ailleurs, parmi les bronzes de Delphes, pourtant peu nombreux, des objets non représentés à Olympie », Rolley 1984a, p. 284 : malgré des conditions de conservation beaucoup plus mauvaises sur le site de Delphes qu’à Olympie ou à Samos, des objets de certaines catégories sont connus uniquement à Delphes, et nous aurons l’occasion de voir toute leur diversité.

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d’objets orientaux en Grèce et en Italie, « cette comparaison […] déboucherait probablement sur l’établissement de cartes de navigation très diversifiées, et peut-être assez précises »178. Il conclut à l’existence de deux routes bien distinctes qu’auraient suivies les objets orientaux pour parvenir en Grèce et en Étrurie, et qu’on pourrait représenter sur « une carte maritime », : « c’est de la région d’Al-Mina que part la route des chaudrons et des supports, fabriqués quelque part dans l’arrière-pays […] En tout cas, c’est une tout autre route qui menait de la Phénicie, ou de Chypre, vers Rhodes, avant de se diviser en une branche samienne et une branche italienne… »179. Une « révolution orientalisante » ? En 1984, W. Burkert publie Die Orientalisierende Epoche in der griechischen Religion und Literatur180. L’« orientalisant » y est conçu comme un phénomène général marquant une époque, en gros le viie s., en forte rupture avec le viiie s. géométrique, dans le domaine des arts figurés comme dans l’ensemble de la culture grecque. W. Burkert se fonde notamment sur les objets orientaux trouvés en Grèce : travail de l’ivoire, œufs d’autruche, tridacnes, puis bijoux et amulettes, et enfin le matériel de bronze, constituent des indices remarquables de ce phénomène. Il mentionne les bols en argent et en bronze181, puis les chaudrons à appliques et leurs supports, ainsi que le tympanon et les boucliers de la grotte de l’Ida et le frontail du roi Hazael à Érétrie. Ce phénomène a bénéficié notamment de l’apprentissage que les artisans grecs ont reçu des artisans orientaux présents sur le sol grec182. J. Boardman a détaillé différents cas de figure attestant ces contacts directs avec des artisans orientaux en Crète183. Les indices archéologiques de ces contacts servent à élaborer un modèle de relations directes entre Grecs et Orientaux, ces derniers étant de préférence les acteurs des déplacements, modèle ensuite utilisé pour expliquer les modes de transmission des données culturelles, alphabet, littérature, religion. Les échanges entre Est et Ouest à cette époque sont donc encore plus importants que la koinè égéenne de l’âge du bronze : W. Burkert parle d’importations « massives » de biens et des circulations d’hommes, mercenaires grecs d’un côté et artisans, devins et guérisseurs orientaux de l’autre. Cette révolution culturelle de l’époque orientalisante est enfin interprétée comme à l’origine du « miracle de la Grèce », qui permit à cette dernière de jouer un rôle de leader dans la civilisation méditerranéenne. La Grèce n’existe dans la réflexion de W. Burkert que comme une entité unique et homogène, qui réagit à un Orient qui n’est pas moins unique, quelles qu’en soient les manifestations particulières dans le bassin méditerranéen. Analyses métallographiques Au-delà des analyses stylistiques qui débouchent parfois sur une impasse dans l’évaluation des relations avec l’Orient, certains ont mis en œuvre des analyses scientifiques des objets, relatives à la composition du métal184, non seulement pour déterminer si les changements observés dans les bronzes grecs viennent de l’adoption de techniques orientales185, mais aussi, plus largement, pour répondre à un questionnement sur l’histoire des techniques et sur l’histoire de l’artisanat grec. L’origine de l’étain186, la composition des alliages187, permettent d’interroger les rapports entre la Grèce et l’Orient. Ces résultats conduisent à une autre conclusion : l’adoption par les Grecs de techniques orientales suppose des contacts étroits et un apprentissage des techniques qui passe par la fréquentation directe. 178. Rolley 1984a, p. 275. 179. À l’issue du compte rendu qu’il fait des publications de Hans-

Volkmar Herrmann, Rolley 1984a, p. 286. 180. On se réfèrera toutefois à la traduction de 1992 en anglais. 181. Dont un exemple de Delphes, cat. 178. 182. On connaît le cas des Phéniciens à Kommos : Shaw 2000. 183. Vers 800 av. J-C., une famille d’orfèvres occupe une tombe à tholos minoenne à Knossos, des bronziers utilisant des motifs iconographiques assyriens ont produit le tympanon et les boucliers de bronze de la grotte de l’Ida, et des tombes de type syrien ont été trouvées près d’Afrati, Boardman 1995, p. 72-76. 184. Trois articles du BCH présentent des analyses de matériel des époques géométrique et orientalisante des sites de Delphes et d’Olympie, à l’initiative de Cl. Rolley, qui put faire des prélèvements sur un

bon nombre de documents de Delphes : Filippakis 1983 ; Magou 1986, Magou 1991. 185. « Notre ambition n’est pas de proposer des attributions à partir des examens de laboratoire, ce qui, ici comme ailleurs, serait au mieux une utopie, et constituerait le plus souvent une erreur de principe », Magou 1991, p. 565. 186. « Tous les objets orientaux ou orientalisants sont de vrais bronzes, avec une teneur en étain qui n’est jamais inférieure à 6%, et rarement à 7% », Magou 1991, p. 566. « Les bronziers orientaux employaient de forts pourcentages d’étain, alors que, jusqu’au milieu du viiie s., les pourcentages, en Grèce, sont trop faibles pour correspondre à une introduction volontaire […]. Après cette date, les artisans grecs qui imitaient les objets ou les motifs orientaux ont mis de l’étain dans leur bronze […] », Filippakis 1983, p. 127. 187. Filippakis 1983, p. 114.

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La présence d’artisans étrangers en Grèce acquiert encore une nouvelle réalité188, de même que l’idée abstraite du « transfert technologique » est rendue plus concrète. Mais, si certaines distinctions formelles correspondent à des différences de composition et d’ateliers189, en revanche certaines parties d’objets présentent entre elles des différences importantes d’alliage, par exemple « les alliages de ces protomes [martelées] et des sirènes fixées sur les mêmes chaudrons »190. Il n’y a donc pas de techniques orientales opposées à des techniques grecques mais la mise en œuvre de choix précis, selon le type d’appliques produites. Offrandes orientales en Grèce Un dernier aspect de ce phénomène culturel général réside aussi dans le développement des études sur une présence bien particulière d’Orientaux et d’étrangers en Grèce, celle de la fréquentation des sanctuaires par des non-Grecs. Certains indices – type d’objet, inscription dédicatoire, sources littéraires – suggèrent que des Orientaux ont fait parvenir des offrandes dans les sanctuaires grecs, au moins dans certains contextes : le sanctuaire d’Héra à Samos semble propice à l’offrande par les Orientaux eux-mêmes d’objets à Héra, si bien qu’on en a déduit un rapprochement entre une divinité orientale et la divinité grecque à qui ont été dédiés ces anathèmata191. La présence d’orientalia ou plus exactement d’exotica192 en Grèce a été considérée comme le possible marqueur de contacts et d’interactions entre les religions grecque et orientale. Les offrandes reçues par Aphrodite à l’Acrocorinthe193 ou par Athéna à Lindos194 requièrent cependant une analyse et une conclusion prudente sur d’éventuels rapprochements religieux ; la fréquentation des sanctuaires par des étrangers n’en est pas moins une réalité bien circonscrite qui a été l’objet de réflexions récentes195.

La recherche récente sur le viie siècle L’art et la civilisation grecs : des processus d’évolution interne Dans un article au titre explicite, « Influence extérieure ou évolution interne ? L’innovation cultuelle en Grèce géométrique et archaïque », Fr. de Polignac a interrogé les transformations cultuelles en Grèce aux viiieviie siècles196. Sans refuser les nombreux rapprochements possibles entre religions orientale et grecque, il situe le problème précisément du point de vue de la réception des emprunts par les Grecs, afin de comprendre les raisons de l’adoption d’éléments orientaux et notamment les changements de sens qui affectent les éléments empruntés197. D’une manière générale, la particularité première des objets orientaux à partir de la fin du viiie s. réside dans le fait qu’ils sont déposés dans les sanctuaires, qui reçoivent à ce moment de grandes concentrations d’offrandes198. Or, Polignac rappelle que ce phénomène se développe bien après la reprise des échanges et des contacts réguliers avec le Levant ; les innovations religieuses et cultuelles en Grèce ne sont donc pas liées de façon directe avec l’Orient. Enfin, il développe une réflexion sur la croissance des sanctuaires extra-urbains, véritable singularité grecque, qui recevaient 188. Id., p. 132 : Cl. Rolley rappelle les analyses de Boardman. 189. Magou 1991, p. 567 : le cas des sirènes montre que si on

distingue très bien les orientales des grecques par le style et par la composition de l’alliage, en revanche on n’apprend rien sur le lieu de production des sirènes grecques. 190. Id., p. 576. 191. Kyrieleis 1979. L’auteur tente de rapprocher Gula, une déesse babylonienne guérisseuse, de l’Héra samienne de manière très peu convaincante. Voir aussi Ebbinghaus 2006. 192. Duplouy 2006, p. 153. 193. Bonnet, Pirenne-Delforge 1999 p. 270 : « L’importance des échanges entre la Corinthe du haut archaïsme et le Proche-Orient pourrait constituer un facteur décisif d’indice d’une interaction possible dont les modalités concrètes nous échappent ». 194. Bonnet 1996, p. 96 : « Dès le viiie siècle av. J.-C., le sanctuaire reçoit des ivoires, bronzes, amulettes et autres objets orien-

taux qui pourraient n’être le témoin que d’échanges entre Grecs et Phéniciens, mais la présence de communautés phéniciennes contemporaines à Ialysos suggère toutefois d’envisager l’hypothèse d’une dévotion adressée à une déesse en qui l’on pouvait reconnaître une Astarté phénicienne ». 195. Stranieri 2006. 196. Polignac 1992. 197. « Il y a adoption d’un élément exogène dans la mesure où celuici, pouvant être adapté à un usage nouveau, offre la réponse adéquate à un besoin qui se fait jour à un moment particulier en un lieu précis », Id., p. 116. L’auteur fonde sa démonstration sur l’adoption de masques grotesques à Sparte, mais considère que l’on peut trouver dans les différents cas d’objets orientaux présents en Grèce des raisons précises à ces choix. 198. Id., p. 120.

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des offrandes étrangères, orientales en particulier. En refusant d’assimiler l’origine de l’offrande et l’origine du dédicant, il souligne que les offrandes étrangères sont le fait de Grecs, même si la présence de ces offrandes indique une ouverture du sanctuaire sur l’extérieur, ouverture qui doit être précisée en fonction du contexte199.

L’art grec au viie s. Alors que les changements dans le répertoire artistique à partir de 700 av. J.-C. étaient traditionnellement attribués à l’influence des contacts avec le Proche-Orient syro-phénicien, le concept général d’« art orientalisant » a été mis en question et critiqué pour son caractère inopérant dans la compréhension de l’art grec du viie s. 200 : c’est même une « appellation mal contrôlée » selon Fr. Villard201. À partir du matériel archéologique, Fr. Croissant a démontré le caractère encombrant, voire illusoire du concept de « phénomène orientalisant » appliqué au viie s., dont les productions ne permettent pas de lui donner un « contenu réel »202. En outre, il réévalue le rôle des commanditaires et des artisans « créateurs » dans le choix des motifs et de formes issus de l’Orient. Rejetant donc le caractère global de l’orientalisation, Fr. Croissant souligne la diversité des inspirations orientales dans l’art grec des viiie et viie s. 203, L’adoption des formes orientales n’est pas une conséquence de la « découverte des arts de l’Orient par les Grecs »204, mais de l’apparition de besoins répondant à des projets artistiques précis. Il faut donc étudier dans des contextes régionaux précis l’apparition d’éléments nouveaux pour en comprendre les raisons et échapper aux schémas généraux qui se fondent finalement sur les productions les mieux connues, comme Corinthe, où la rupture avec la tradition géométrique vers 720 av. J.-C. serait le modèle à appliquer ailleurs. J. Whitley avait également souligné les particularismes locaux dans la « réponse » à l’Orient205, contre l’idée d’un monde grec monolithique réagissant d’une façon unique à un phénomène. « Dernier avatar du mirage oriental »206, le « phénomène orientalisant » est une notion construite historiquement à l’origine sur les découvertes des ivoires et des coupes en métal du palais de Nimrud, contenant donc dès le départ la difficulté à faire la part entre le lieu de découverte des objets, leur style et leur lieu de fabrication207.

L’interprétation sociale de l’« orientalisant » L’émulation, qui existe entre les aristocrates ou les membres des élites208, a depuis les années 1990 été considérée comme un acteur essentiel du développement de la pratique de l’offrande dans les sanctuaires aux viiie et viie siècles209. C’est en analysant en particulier le rôle de Corinthe dans le sanctuaire de Delphes que C. Morgan peut avancer l’hypothèse suivante pour la fin du viiie s. : l’élite corinthienne210 serait à l’origine d’un type d’offrandes exceptionnel à Delphes, c’est-à-dire les offrandes d’objets chypro-crétois qui apparaissent à partir de 725 av J.-C. Des parallèles ont été établis entre la pratique de l’offrande au sein de l’aristocratie de l’épopée homérique et dans les sanctuaires qui ne permet pourtant pas cette réciprocité du don211. S. Langdon a émis l’hypothèse que les dédicants recevaient en échange de leur don aux dieux une reconnaissance sociale : un statut, une légitimité, la preuve de l’appartenance à une classe et de la possession foncière212. Ces recherches ont permis de dégager les liens 199. Id., p. 122. Des offrandes orientales à Samos ou à Delphes n’indiquent pas le même type d’ouverture sur « d’autres horizons ». 200. Dès 1981, Fr. Villard montre que l’art orientalisant n’est pas une réalité immuable et objective, malgré son ancrage dans les recherches sur la céramique du viie s. Il constate que le « phénomène orientalisant », pourtant si bien connu en Étrurie, « n’a guère marqué la vision artistique des Grecs d’Occident », Villard 1983, p. 133. 201. Titre d’une communication faite au séminaire de Paris I le 20 novembre 2003. Il met en valeur, dans un article sur un groupe de céramiques polychromes, la « saine réaction des meilleurs peintres de vases contre la submersion de l’esprit “orientalisant” » qui n’est donc pas un passage obligé de la céramique grecque. 202. Croissant 2010, p. 313. 203. La céramique géométrique attique en est un bon exemple (Borell 1978) comme, encore à Athènes, les statuettes féminines nues trouvées dans une tombe du Dipylon.

204. Rolley 1994, p. 134. 205. Whitley 2001, p. 115. 206. Croissant 2010, p. 344. 207. Gunter 2009. Sur les apports du livre d’A.C. Gunter, voir

Aurigny 2012c. 208. Pour reprendre le titre de la thèse et de l’ouvrage d’A. Duplouy (2006), qui a montré que le terme d’« élites » était plus approprié, dans la mesure où il renvoie à une conception moins figée de la société grecque. 209. Alors que les objets témoignant de la richesse d’une famille étaient auparavant plutôt destinés aux tombes. Voir notamment Morgan 1990. 210. « Corinthian elite », p. 144. 211. Langdon 1987, p. 110. 212. « The cycle of exchange was thus complete » Id., p. 113.

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étroits qui existent entre un objet oriental ou « étranger » et son possesseur, ainsi que les interactions qui jouent sans cesse entre les deux213. Toutefois, cette analyse n’est pas valable pour les créations « orientalisantes », qui apparaissent clairement comme des créations grecques aux yeux des donateurs. En outre, le caractère exceptionnel des offrandes orientales ne les distingue pas par nature du reste des offrandes et ne crée pas une pratique votive particulière. Le rôle de la société dans la création artistique est clairement établi et c’est bien logiquement que l’art grec du e vii siècle a été l’objet d’une « histoire sociale », l’art orientalisant étant qualifié de « citoyen »214. Néanmoins, cet « art orientalisant », s’il sert en Crète à cimenter la communauté et non à aiguiser l’émulation entre ses membres, se trouve ailleurs au service d’une élite sociale qui s’emploie à se distinguer et à diversifier les statuts dans la cité215. Cet éclairage venu des pratiques sociales ouvre des pistes de réflexion nouvelles pour comprendre les objets, même si les choix formels et artistiques semblent davantage redevables aux commanditaires qu’aux créateurs216.

L’« orientalisation », un phénomène étalé dans le temps et dans l’espace Sarah Morris a considérablement renouvelé la réflexion en 1992 en étudiant les rapports entre la Grèce et l’Orient à l’âge du bronze et à l’âge du fer217, en reconsidérant la périodisation traditionnelle et en réévaluant le concept d’« orientalisation » et son pouvoir diachronique dans l’antiquité218. Dans cette mise en perspective de l’histoire grecque, la fascination de l’Orient détermine, pour reprendre l’expression de S. Morris, « une dimension plus qu’une phase de l’art grec »219. Depuis une vingtaine d’années, nombreuses sont les tentatives de redéfinir les processus rassemblés sous le terme d’« orientalisation ». Dans les actes d’un colloque justement intitulé « debating Orientalization », les éditeurs C. Riva et N.C. Vella rappellent que la chronologie traditionnelle devait être revue pour intégrer le bronze récent et l’âge du fer220. C’est la définition même de ce phénomène qui s’en trouve modifiée, car il n’est plus possible de parler de « révolution » ou d’une quelconque rupture si l’on considère les évolutions sur une aussi longue échelle. De même, la zone géographique concernée est redéfinie : on ne s’intéresse plus seulement à l’Orient, aux mondes grec et étrusque, mais les effets de l’orientalisation se font sentir ailleurs. Les cours aristocratiques de l’Europe centrale attestent le rôle du commerce et des modes de vie des Levantins, des Grecs et des Étrusques221. Dans cette perspective qui met l’accent sur la multiplication des contacts, sur l’« interaction » à longue distance et à grande échelle, on aboutit à se demander si l’Orient existe bien222 : l’Orient ou le Proche-Orient est une invention de l’Europe moderne, dont les origines peuvent être trouvées dès la Renaissance et qui s’est construite au fur et à mesure des découvertes archéologiques et de l’histoire du goût européen223.

Nouvelles interprétations du viie s. Le viiie s. a bénéficié d’un renouveau des études et des perspectives de recherche : non seulement les données se sont accumulées224 , mais de nouvelles interprétations des phénomènes propres au viie s., devenu un objet d’étude à part entière, ont été récemment proposées.

213. « Entre la valeur de l’objet et le prestige de son possesseur se tisse ainsi un ensemble de relations réciproques », Duplouy 2006, p. 181. 214. Th. Brisart insiste sur le fait que l’artiste grec est inséré dans une communauté et dans des cadres sociaux qui occupent une place importante dans sa création artistique Brisart 2011, en particulier p. 13-17. L’objectif ambitieux de « comprendre le statut social de l’art orientalisant » passe par la contextualisation des documents pour mettre en évidence la place qu’ils occupaient dans la société grecque ; il s’agit de replacer l’art grec proto-archaïque dans son contexte culturel : Brisart 2011, p. 81-82 ; Morris 1997, p. 10 (dans S. Langdon). 215. Brisart 2011, p. 324-327. 216. Aurigny 2013.

217. Morris 1992, p. 101-149. 218. Morris 2005, p. 69. 219. Morris 1992, p. 130. 220. Riva, Vella 2006, p. 2. 221. Kristiansen, cité dans Riva, Vella 2006 p. 2 (mais non

publié). 222. Purcell 2005, p. 25. 223. Wengrow 2005, p. 31-47 ; Gunter 2009. 224. Même si on constate des différences entre les domaines cultuels en pleine expansion, domestiques et funéraires où les données sont plus éparses : cela est vrai notamment pour Athènes et Érétrie : Osborne 1989, Prost 2010, p. 228-232.

INTRODUCTION ET HISTOIRE DE LA RECHERCHE

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Le problème de la périodisation225 Le choix de la terminologie pour désigner cette période est confronté à la question de la périodisation : l’expression « période proto-archaïque »226, supposée plus neutre pour désigner le viie s., suggère une progression continue vers le développement des arts de l’archaïsme qui limite de fait la richesse de la période. Elle a au moins le mérite de ne pas introduire de discontinuité avec le vie s. En effet, on ne saurait oublier le caractère totalement arbitraire de notre découpage en siècle qui induit plus ou moins implicitement une rupture avec le viiie et le vie s. 227. R. Osborne avait choisi la périodisation en siècle en s’attachant à montrer quelques phénomènes propres au viie s. 228 De nouvelles synthèses permettent de montrer la complexité et la richesse de la période, à un niveau méditerranéen, contre une vision trop moderniste des échanges et des circulations dans la Méditerranée du haut-archaïsme229, ou pour le renouvellement des connaissances et les possibilités d’interprétation de ce moment230.

Vers une « méditerranéisation » ? L’historiographie récente montre une volonté de sortir des modèles anciens et de changer de paradigme pour comprendre les évolutions qui ont lieu à l’époque archaïque : le choix de l’échelle de la Méditerranée est révélateur de ces modifications. L’étude des communautés grecques et de leur expansion fait l’objet d’analyses qui révèlent des processus de « méditerranéisme »231 ou de « méditerranéisation »232. Cette « méditerranéisation », sensible surtout à partir de 800 av. J.-C. 233, est mise en relation avec la colonisation et le développement de l’« interconnectedness »234 à l’échelle du monde grec. Ce qui semble vraiment émerger dans les deux premiers siècles de l’expansion grecque, c’est plutôt une identité grecque commune qui, même si elle ne se nomme pas clairement, se crée à travers les identités régionales (l’exemple de la Sicile est tout particulièrement développé) et le rôle des sanctuaires235. Dans cette perspective, Delphes se voit attribuer un rôle primordial236 : le sanctuaire permet le développement d’un sentiment panhellénique, dont Delphes est le nombril, mais qui se construit à partir des « colonies » sans que se mette en place un schéma hiérarchique entre le centre et les périphéries. Enfin, le concept de « méditerranéisation » a été repris pour caractériser l’intégration de communautés indigènes jusqu’alors plutôt isolées dans un horizon d’échanges méditerranéens237. Le viie s. dépasse donc le cadre du « Greek Wide Web »238 et c’est peut-être ce qui lui confère sa spécificité. Avant de considérer la place de Delphes au viie s. à l’échelle de la Méditerranée, il nous faut partir des objets euxmêmes pour savoir ce que le corpus de la vaisselle métallique peut nous apprendre sur le sanctuaire.

225. Voir Etienne 2017. 226. Brisart 2011 notamment. 227. Croissant 2010, p. 312. 228. Osborne 1989, Osborne 1996. 229. Etienne 2010. Voir les comptes rendus de Cl. Mossé (Mossé

2012) et Julien Zurbach (Zurbach 2012). Le volume consacre finalement la « désorientalisation » de la période : le monde grec fait preuve d’un grand dynamisme que les contacts et les emprunts à l’Orient ne suffisent naturellement pas à expliquer. Etienne 2010, p. 372. 230. Charalambidou, Morgan 2017. 231. Cette première notion a été développée par Horden et Purcell dans l’ouvrage The Corrupting Sea pour décrire les relations qui se créent dans l’espace méditerranéen, défini comme une zone où la « connectivity » relie entre elles des micro-régions. Horden, Purcell 2000 ; Etienne 2006. 232. Cette seconde notion, relative au processus d’intégration dynamique dans l’espace méditerranéen, a été développée par Ian Morris pour la substituer au concept de Horden et Purcell ; il considère qu’il ne va pas assez loin dans la prise en compte des conséquences

de la « connectivité » et de la mobilité. I. Morris admet aussi que ces concepts, qui prennent la Méditerranée dans son ensemble comme unité d’analyse, sont une réponse à la globalisation développée surtout dans les années 1990 et 2000 ; mais il veut croire que le modèle théorique de la « connectivité » révèle de nouvelles dimensions de l’antiquité et lui donne de nouvelles significations, notamment Morris 2005, p. 51. 233. Comme I. Morris le suggère, ce processus a pour corollaire le développement des échanges et liens entre les différentes parties du monde grec en expansion. 234. Malkin 2003, p. 61. 235. Sur le rôle des sanctuaires, notamment Olympe et Samos, comme lieu d’exposition d’objets venus d’Orient, voir Niemeier 2016. 236. Malkin 2003, p. 61-64. 237. La notion est utilisée par D. Garcia et J.-Chr. Sourisseau à propos de la Gaule méridionale qui connaît une première « méditerranéisation » un demi-siècle avant la fondation de Marseille : Garcia, Sourisseau 2010, p. 240-241. 238. Malkin 2003.

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BRONZES DU HAUTARCHAÏSME À DELPHES

L’étude des objets delphiques par catégories Il faut rappeler l’intérêt d’étudier les objets par catégorie, comme le montrent les publications d’Olympie ou de Samos239 . En dehors de l’histoire de la recherche ou de la pertinence qu’il y a à étudier ensemble objets grecs et non grecs, c’est la manière la plus simple et la plus aisée de regrouper les objets, qu’il est très souvent difficile de classer autrement, par provenance géographique par exemple. À l’intérieur d’une série, l’accord n’est pas toujours fait ni sur ce qui revient aux artisans grecs ou aux artisans étrangers, ni sur le lieu exact de fabrication d’objets reconnus comme étrangers ou comme grecs. Il est donc indispensable à la fois de prendre en compte les ensembles dans le sanctuaire de Delphes et de replacer les objets de Delphes dans des séries constituées à l’échelle de la Grèce ou du bassin méditerranéen.

La catégorie de la vaisselle L’étude des objets par catégorie permet de réfléchir à la fonction d’une catégorie dans un sanctuaire et à la pratique votive de façon générale. La vaisselle s’impose comme un ensemble majeur au sein du matériel de bronze du hautarchaïsme, puisque la moitié de la documentation en fait partie, contre environ un quart d’armes et un autre quart formé par la parure, les éléments de harnachement et les objets divers. Les différentes études de la vaisselle votive d’Olympie ont montré la continuité dans la consécration de chaudrons d’abord à cuve clouée240, puis avec un support mobile et appliques à l’époque orientalisante241 , avant une nouvelle période florissante à l’époque archaïque242 qui a créé des formes qui seront ensuite à peu près conservées. Plus que l’usage votif ou cultuel, ce sont les conséquences économiques et sociales de la présence de ces bronzes dans un sanctuaire panhellénique qui intéressent W. Gauer : la structuration d’ateliers au sein des cités qui restent les plus gros commanditaires d’objets, se combine à l’existence d’un marché temporaire et d’ateliers éphémères dans les sanctuaires panhelléniques, pour les fêtes et les concours. Les échanges avec les régions périphériques du monde grec, répertoires de modèles pour les artisans et peu à peu demandeuses de vaisselle métallique grecque, constituent aussi une dimension essentielle de l’analyse de cette documentation. C’est plus récemment que la vaisselle a été analysée comme partie prenante de la définition du contexte cultuel des sanctuaires. Ces objets ou ces assemblages d’objets construisent une relation spécifique entre les donateurs et la ou les divinités, permettent de rendre concrets les rites qui étaient pratiqués et de préciser le rôle que cette documentation matérielle pouvait jouer dans l’accomplissement des rituels243 : c’est la perspective développée par V. Meirano pour la vaisselle delphique à partir de l’époque archaïque244. L’examen des objets permet de faire apparaître notamment des dommages volontaires commis sur les objets, mieux connus pour les armes245, les objets de parure246, mais aussi la vaisselle. D’autres pratiques votives peuvent être déduites de l’examen attentif des découvertes, comme l’offrande d’objets partiels247 ; d’une manière générale, la présence de vaisselle dans le sanctuaire correspond à un éventail de pratiques qui doivent être examinées au cas par cas.

Le chaudron Emblématique des époques hautes du sanctuaire, le chaudron de bronze est un ustensile qui apparaît d’abord sous la forme du trépied à cuve clouée, « Dreifusskessel », à l’époque géométrique248. Il est loin d’être une spécificité delphique : en effet, les chaudrons géométriques ont été découverts à Olympie, à l’Heraion d’Argos, à Athènes, à

239. Pour Samos : Jantzen 1972, Gehrig 2004 ; pour Olympie : Herrmann 1966 et 1979 ; Gauer 1991. 240. OF III et OF X. 241. OF VI et OF XI. 242. OF XX, Gauer 1991, p. 168-176. 243. Meirano 2016 ; Patera 2012 ; Greco, Ferrara 2008.

244. Meirano 2017. 245. Baitinger 2013, Aurigny 2016b. 246. Meirano 2016, p. 79-80 et fig. 1-2. 247. Meirano 2014, p. 34. 248. Rolley 1977, Rolley 1992a, Rolley 2007a notamment. Sur

les représentations du chaudron, voir Sakowski 1997, Sakowski 1998.

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Délos, ou encore en Crète entre autres lieux sacrés249. Il n’y a donc pas lieu de rapprocher, à date haute, le trépied à cuve clouée de l’instrument associé à la Pythie dans ses consultations250. L’objet est considéré comme caractéristique des plus anciennes offrandes des sanctuaires panhelléniques de l’époque géométrique. Son étude est d’ordinaire mise en relation avec les significations que l’objet revêt dans la poésie homérique251. Si l’on ne comprend pas exactement pourquoi cet ustensile de cuisine, élaboré à l’époque mycénienne, connaît un énorme succès, on peut souligner que le trépied reste l’objet le plus précieux qu’on sache fabriquer et qu’on puisse dédier252. La présence de figurines anthropomorphiques figurant des guerriers armés d’une lance (le plus souvent) a été analysée comme la volonté de de rappeler la gloire (kléos) des dédicants à titre individuel253. On a fait remarquer que c’était plutôt une offrande que l’on trouvait dans des sanctuaires majeurs des cités, des sanctuaires extra-urbains au centre d’une région ou des sanctuaires extra-urbains panhelléniques254 ; le chaudron sur trois pieds aurait donc indiqué que ces sanctuaires jouaient le rôle de points de rencontre de l’élite aux époques proto-géométrique et géométrique : ils révèleraient une dimension historico-politique spécifique, étroitement liée au processus de construction de l’État255. Pour la chronologie des trépieds à cuve clouée, de nouvelles données sont disponibles256, sans que le sens en soit fondamentalement changé.

Diffusion à l’époque orientalisante La signification du chaudron change-t-elle lorsqu’il adopte la forme orientale dite « à cuve mobile » ? Il faut bien reconnaître que ce chaudron s’inscrit dans une pratique votive continue, si bien que les publications de matériel ont peu abordé cette question257. On a postulé que le chaudron décoré d’appliques orientalisantes et son trépied à baguettes auraient endossé une signification plus spécifique encore que ses prédécesseurs, en faisant référence à des pratiques orientales, la toilette et le banquet258. Mais l’eau du bain est depuis la poésie homérique étroitement liée à la toilette du héros et n’est pas proprement orientale, tandis que l’ustensile offert dans le sanctuaire évoque non tant le banquet que le sacrifice offert à la divinité et le statut social du dédicant. Ainsi, il est difficile de déduire une signification particulière de cette référence à l’Orient. L’iconographie du griffon et du chaudron orientalisant a fait l’objet de tentative d’analyse, en l’absence d’indications textuelles259 et devant le petit nombre de représentations aidant à l’interprétation de ce type d’offrande260. Dans le monde grec, les chaudrons orientalisants, présents exclusivement dans les sanctuaires, ont été considérés comme des offrandes particulières, à côté des trépieds à cuve clouée, correspondant à une intention spécifique, groupe de dédicants ou dédicants non grecs261. La distribution, la chronologie et l’évolution de cette documentation sont donc autant d’aspects importants pour interpréter la signification de l’offrande.

Autres formes En dehors des chaudrons décorés d’appliques figurées ou d’attaches d’anse de différentes formes, la vaisselle métallique du haut-archaïsme se caractérise par l’apparition de formes nouvelles, en particulier la phiale à omphalos, quelle que soit sa forme précise. Ce type de vase a des antécédents dans le répertoire des productions métalliques orientales, Anatolie, Chypre, Syrie-Palestine et Assyrie avant le Ier millénaire262 ; il ne semble pas que le répertoire 249. Kiderlen 2010, fig. 1 p. 95 : l’auteur recense 26 sanctuaires dans lesquels les chaudrons de bronze ont été offerts de façon assez concentrée, alors que la majorité des sanctuaires géométriques n’en ont pas livré. En revanche, la chronologie des sanctuaires révisée par Kiderlen, qui remonte la datation des premiers trépieds de Delphes de deux siècles, ne repose pas sur des éléments suffisants pour emporter la conviction. Voir aussi Kiderlen, Themelis 2010, Kiderlen et alii 2016. 250. Amandry 1986. 251. Papalexandrou 2005, p. 9-63. 252. Rolley 1983a, p. 53. 253. Papalexandrou 2008, p. 254 ; Papalexandrou 2005, p. 99-148. 254. Kiderlen 2010. 255. Kiderlen 2010, 96-98.

256. Christakopoulou–Somakou 2009, tombe T 378 de la nécropole protogéométrique de Stamna en Etolie ; Stavropoulou– Gatsi, Jung, Mehofer 2012, tombe de Kouvaras en Etoloacarnanie. 257. Voir récemment Papalexandrou 2016, p. 263-265 : il souligne au contraire la rupture entre les chaudrons géométriques et les chaudrons orientalisants. 258. Brisart 2011, 160-162. 259. À l’exception notable d’Hérodote, IV, 152, qui fait le récit des aventures de Colaios et de la consécration d’un chaudron à griffons à Héra comme dîme de ses gains commerciaux. Papalexandrou 2016, p. 265. 260. Voir la liste dressée dans Papalexandrou 2015, 174-175. 261. Papalexandrou 2013. 262. Hasserodt 2009, p. 23-92.

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des formes puisse être mis en relation avec une fonction spécifique des vases. Enfin, il faut bien constater qu’il n’est pas toujours facile de savoir à quelles formes de vases appartenaient les appliques retrouvées isolées, même si le chaudron et la coupe sont les types principaux, l’aryballe ou d’autres formes restant plus anecdotiques. Elles seront étudiées au fur et à mesure du catalogue.

Organisation de l’étude L’étude des objets (chapitres 2 à 5) suivra trois étapes principales : tout d’abord les objets et fragments sont présentés sous forme de catalogue avec toutes les précisions matérielles nécessaires, complétées par des photographies d’ensemble ou de détail et une illustration graphique si nécessaire. Il est indispensable, à Delphes peut-être plus encore qu’ailleurs, de souligner combien chaque objet est unique, comme c’est souvent le cas à l’époque orientalisante : « s’il y a des séries d’objets, il n’y a pas d’objets de série : chaque élément se rattache stylistiquement à un groupe mais constitue néanmoins une œuvre d’art originale voire unique »263. Ensuite, la réflexion progressera par le biais des comparaisons avec le matériel d’autres sanctuaires ou d’autres sites en général : si les parallèles sont bien connus avec les objets d’Olympie ou de Samos, d’autres sont plus inattendus. Enfin, il sera possible de replacer les documents de Delphes dans un développement plus général de chaque catégorie, qui donnera un aperçu géographique et historique de la diffusion des objets. La seconde partie (chapitres 6 à 8) se propose de réunir les éléments permettant de préciser le contexte technique, chronologique et géographique de créations des objets et de tirer des conclusions sur la provenance des objets. Ensuite, les pratiques votives visibles à partir de ce type de documentation seront évoquées, à travers l’examen conjoint des sources littéraires et archéologiques. Enfin, le corpus choisi permettra d’apprécier la fréquentation du sanctuaire pendant le haut-archaïsme et ses relations extérieures à une époque antérieure à l’avènement de Delphes comme sanctuaire panhellénique majeur.

263. Gras, Rouillard, Teixidor 1989, p. 135.

Chapitre 2

Supports et trépieds à baguettes1 (nos 1-14 ; 15-30)

Supports chypro-crétois Catalogue 1. Fragment de support crétois. Bronze. 21,6 cm. Inv. 3252 (couronne)+9471 (pied ajouré). Fig. 3-5. Rolley 1975a, p. 155-160, fig. 5 ; Rolley 1977, p. 115-117, n° 504 ; Rolley 1991, p. 161, fig. 24 ; ƕƆƕƆƗƆƇƇƆƗ 2001, n° 52 p. 253 ; p. 390, fig. 156-158 ; Aurigny 2010, p. 235, 237, fig. 38 ; Aurigny 2012b, fig. 11. Fragment de support ajouré à quatre faces, recollé de deux morceaux. La couronne supérieure est faite d’un ruban non décoré, qui s’évase vers le haut, les deux bords se repliant vers l’extérieur. Il en part, en bas, quatre tiges obliques et, alternant avec ces tiges, quatre plaquettes verticales, plus épaisses au bord. Une de ces tiges et une des plaquettes voisines se prolongent par la moitié d’un des quatre panneaux verticaux qui constituaient le bas de l’objet. Il en subsiste la tige verticale angulaire, irrégulière, sur quoi s’articulent, du côté conservé, deux tiges horizontales plus fines entre lesquelles s’insère un quadrupède, daim ou faon, la tête tournée vers l’extérieur ; son corps est concave au revers. À ce niveau, le panneau est fermé par une tige oblique qui forme en haut une volute, qui faisait partie d’un couronnement de tige verticale, du type de ce que présente le n° inv. 6928 (n° 3), exactement sous la plaquette verticale ; cela permet de restituer par symétrie la moitié gauche du panneau. L’amorce du panneau perpendiculaire à celui-ci est conservée sur la tige angulaire. Celle-ci porte, en haut, outre la grosse tige oblique, ornée de quatre stries annulaires, qui rejoint la couronne, le départ d’une tige plus petite. En bas, deux amorces perpendiculaires sont plutôt une sorte de pied que le départ de tiges. Il est classé par G. ƕƥƳƥƶƥƦƦƥƵ dans l’atelier 2 des supports crétois à quatre faces2, qui comprend en particulier le grand support de la grotte de l’Ida3 (fig. 7), mais aussi un fragment de Kaniale Tekke, un d’Amnisos4 et tous les fragments de Delphes rassemblés sous le n° 51. Cet exemplaire se démarque par sa petite taille, alors que les exemples de cet atelier ont plutôt de grandes dimensions.

1. « La salle de jeux ou fumoir, avec son pavage illustré, ses trépieds, ses figures de dieux et d’animaux qui vous regardaient, les sphinx allongés aux bras des sièges, et surtout l’immense table en marbre ou en mosaïque émaillée, couverte de signes symboliques plus ou moins imités de l’art étrusque et égyptien, cette salle de jeux

me fit l’effet d’une véritable chambre magique », Proust, Sodome et Gomorrhe. 2. ƕƆƕƆƗƆƇƇƆƗ 2001, p. 192-193. 3. Id., n° 48. Sakellarakis 2013, t. II, p. 85-88, t. III pl. 59-60. 4. Id., n° 50.

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2. Fragment de support crétois. Bronze. 7cm. Inv. 13769. Fig. 6. ƕƆƕƆƗƆƇƇƆƗ 2001, n° 52Ʀ.

Fragment de tige angulaire de support ajouré. Le fragment est très partiel et peut difficilement être comparé à d’autres ; ƕƥƳƥƶƠƦƦƥƵ l’a rapproché du n° précédent. Cependant, le fragment n° 15 du support de la grotte de l’Ida, où se rejoignent tiges verticales et horizontales, présente des similitudes fig. 7b. 3. Fragment de support crétois. Trouvé le 11 juillet 1941 à l’Ouest du trésor des Athéniens, « à l’intérieur de la fondation IX »5. Inv. 6928. Bronze. 18 cm. Fig. 8-10. Amandry 1944-45, p. 56-61, pl. 4,1, fig. 17 ; Demargne 1947, p. 243 ; Rolley 1977, p. 115, n° 503, pl. 52 ; Rolley 1979, p. 17, n° et fig. 21 ; Cross 1974, n° 82, p. 266, fig. 20 ; Catling 1984, p. 85 ; Matthäus 1988, p. 290 ; ƕƆƕƆƗƆƇƇƆƗ 2001, n° 57a, p. 255, fig. 165-167, p. 392-3, Aurigny 2012b, fig. 12. Fragment de décor ajouré, organisé en registres. Des rubans horizontaux formés de quatre filets séparent trois registres, eux-mêmes structurés par des rubans verticaux, ornés de trois filets, certains se terminant par deux volutes ; les filets sont en creux sur l’envers. L’existence du registre supérieur est attestée par l’arrachement de pattes animales ; le registre médian présente un taureau au corps mince, étiré, concave à l’arrière. De sa croupe part un bandeau vertical à trois filets, de ses épaules un deuxième ruban se terminant par une double volute. Sa tête est pourvue d’une longue corne qui touche la double volute sommitale du troisième ruban vertical. Au registre inférieur, un bouquetin au corps également mince, porte les deux mêmes rubans verticaux que le taureau sur le corps. Une patte avant levée vers l’avant, les trois autres sont brisées. Devant sa tête portant une corne recourbée, une double volute semblable au registre supérieur. Selon ƕƥƳƥƶƠƦƦƥƵ, les animaux de ce support n’ont pas été faits à l’aide de matrices, mais la cire a été modelée6. Trouvé avec des fragments de céramique corinthienne, le fragment est daté vers 700 av. J.-C. Le support à quatre faces de Famagouste, conservé à Nicosie, présente des registres à décor animalier qui donnent une bonne idée de ce que pouvait être le support de Delphes (fig. 11) 7. Le support acheté à Larnaca, aujourd’hui à Berlin8, montre le même type de volutes séparant le panneau. Toutefois, bien qu’on ne trouve pas de parallèles convaincants en Crète, c’est à un atelier crétois qu’on doit l’attribuer avec le plus de vraisemblance, par comparaison avec les autres fragments delphiques provenant de Crète. 4. Oiseau, fragment de support crétois. Trouvé le 9 octobre 1895, près des Thermes de l’Est. Inv. 3148. 9,2 cm. Fig. 12-13. Perdrizet 1908, p. 131, n° 706, fig. 489 ; Rolley 1977, p. 117, n° 505, pl. 53 ; ƕƆƕƆƗƆƇƇƆƗ 2001, n° 57Ƨ p. 256, fig. 168 p. 393. Fragment plat, qui conserve l’angle supérieur droit d’un panneau encadré, comme le n° 6928, de rubans dont la face extérieure est divisée en quatre filets, et la silhouette, apparemment très usée, d’un animal à long cou, sans doute un oiseau, très sommaire mais dans la même position que sur le support ajouré de Larnaca, aux angles des panneaux rectangulaires. Au revers, le ruban vertical forme une gouttière très évasée ; le départ du ruban horizontal du panneau perpendiculaire à celui-ci est visible. Le support de Larnaca à Berlin9, le support de la collection de duc de Buccleuch à Londres10, tout comme un fragment de support à Jérusalem11, présentent le même type d’oiseau, dressé à l’angle supérieur des panneaux. Il appartient selon ƕƥƳƥƶƠƦƦƥƵ au même ensemble que le fragment inv. 6928 (n° 3) et inv. 10129 (n° 5) ; l’ensemble 57 est attribué par comparaison avec le reste du matériel delphique à un atelier crétois. 5. Fragment de support crétois. Inv. 10129. Bronze. 9,7 cm (épaisseur : 0,4 cm). Fig. 14-15. Rolley 1977, p. 117, n° 506, pl. 53 ; ƕƆƕƆƗƆƇƇƆƗ 2001, n° 57Ʀ p. 256, fig. 169-170 p. 393. Fragment plat. En haut, un ruban orné de cinq filets s’élargit vers le haut ; le filet du bas, plus gros, amorce une courbe, peut-être une volute ; en haut, le ruban ne semble pas conservé sur toute sa largeur. Le reste, où tout le découpage du haut est originel, est constitué d’une zone entièrement plate, en S couché, présentant sur la face antérieure un léger ressaut en-dessous duquel on voit les restes de traits obliques parallèles, gravés, et d’autre part, d’une partie bombée, concave au revers, qui est l’arrière-train d’un animal voisin du bouquetin du n° 6928 (n° 3), ce qui confirme que ce fragment vient d’un support ajouré du même type. 5. Trouvé avec des fragments de céramique protocorinthienne. 6. ƕƆƕƆƗƆƇƇƆƗ 2001, p. 202. 7. Matthäus 1985, n° 707. 8. ƕƆƕƆƗƆƇƇƆƗ 2001, n° 27 p. 242 (références bibliographiques).

9. Id., n° 27 p. 242 (références bibliographiques). 10. Id., n° 28 p. 242-243 (références bibliographiques). 11. Id., n° 29 p. 244 (références bibliographiques).

SUPPORTS ET TRÉPIEDS À BAGUETTES

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Ce fragment fait partie, selon ƕƥƳƥƶƠƦƦƥƵ, du même support que inv. 6928 et 3148 ; il présente les mêmes caractéristiques dans le traitement que le taureau et le capridé de inv. 6928, et doit être attribué à un atelier crétois. 6. Avant-train de cheval. Trouvé le 28 juin 1895, à l’angle sud-est du téménos d’Apollon. Inv. 2695. Bronze, 11,4 cm. Fig. 16-18. Perdrizet 1908, p. 125, n° 678, fig. 467 ; ƕƆƕƆƗƆƇƇƆƗ 2001, 51Ƨ, p. 252, fig. 150 p. 387. Avant-train de cheval, aussi plat que inv. 4460. H. cons. 11,3 cm. Ce cheval était attelé : les rênes, figurés du côté principal, sont fait d’un gros filet, dédoublé sur le cou ; le bourrelet qui figure la crinière n’est indiqué qu’au-dessus. La tête est moins détaillée que sur le n° inv. 4460 (n° 7) ; les oreilles sont couchées vers l’avant. Une seconde épaisseur de métal, coulée en même temps, est visible au revers, en haut (fig. 17) : c’est le départ d’un élément supplémentaire (lié au montage de l’ustensile ?), brisé en haut. Pas plus que le précédent, ce cheval, dont le revers n’est pas lisse, n’est une applique. Ses dimensions et son aspect de détail, qui rappellent les chevaux, moins détaillés, du support de l’Ida (fig. 7c), rendent très vraisemblable qu’il provienne d’un objet du même type, de même origine et de même date. Comme le fragment inv. 3252, cet exemplaire a été replacé dans l’atelier crétois responsable également du cheval d’Amnisos, et du cheval inv. 4460 de Delphes (atelier 2)12. 7. Avant-train de cheval. Trouvé en 1903 à Marmaria. Inv. 4460. Bronze, 10 cm. Fig. 19-20. Perdrizet 1908, p. 50, n° 138, fig. 158 ; Rolley 1989, p. 345, fig. 1 ; ƕƆƕƆƗƆƇƇƆƗ 2001, n° 51ƥ p. 252, fig. 149 p. 387. Avant-train de cheval tournant la tête en arrière ; l’ensemble est très plat. Le haut de la bouche est brisé. Du côté qui devait être vu, les seules indications sont le fin bourrelet finement strié qui marque la crinière, et se termine par un toupet sur le front, l’oreille, l’œil, qui est une saillie ronde, et la bouche, dont le haut est brisé. Cette face est lisse ; au revers, où la seule indication est le décrochement au départ de la jambe gauche, le bronze n’a pas été poli après coulée. Si on compare ce fragment aux chevaux du grand support de l’Ida13, il est évident que nous avons ici le reste d’un objet très voisin, plus soigné encore. Le cheval était plus grand que ceux de l’Ida (fig.7c), mais la structure de ces supports est si variée qu’on ne peut en déduire les dimensions de l’objet, qui pouvait ne comporter qu’une zone décorée. Rien n’empêcherait que la grosse tige angulaire n° 9 provienne du même support que ce cheval. C’est en tout cas un ajout à la liste de ces supports dressée en 197714. Deux autres animaux pourraient provenir aussi de supports de ce type, portant le nombre de ces objets à Delphes à huit ou dix. ƕƥƳƥƶƠƦƦƥƵ le classe, comme le précédent, dans l’atelier responsable du support de l’Ida, qui produit des objets de grande taille. 8. Fragment de plaquette et double volute. Inv. 10130. Bronze. 9 cm. Fig. 21-22. Rolley 1977, p. 117, n° 507, pl. 53 ; ƕƆƕƆƗƆƇƇƆƗ 2001, n° 51ƨ p. 253, fig. 151 p. 388. Fragment d’un support de même structure que le n° 3252, mais plus grand. On reconnaît le bas d’une plaquette verticale, et les volutes couronnant la tige centrale d’un panneau vertical. Le revers est travaillé comme au n° 3252 : volutes visibles, bord inférieur de la plaquette irrégulièrement épaissi. Cet objet a des parallèles précis : un fragment du grand support de l’Ida a la même volute, avec des tiges partant en diagonale vers le bas (fig. 7a). À Delphes, le support inv. 6928 aussi a une volute placée en couronnement des tiges obliques qui ferment le panneau décoré d’un animal (fig. 9). Il se place donc dans la production du même atelier que le support de l’Ida, comme le fragment inv. 4460, inv. 2695 ou inv. 10132. 9. Fragment de tige angulaire. Trouvé à Marmaria. Inv. 10132. Bronze, 15 cm (diam. 1,55-1,6 cm). Fig. 23-24. Rolley 1977, p. 117, n° 509, pl. 53 ; ƕƆƕƆƗƆƇƇƆƗ 2001, n° 51Ʃ p. 253, fig. 155 p. 388. Fragment de tige verticale angulaire d’un support du type du n° 3252. Arrachements, dans les deux plans perpendiculaires : à mi-hauteur, deux tiges horizontales, qui séparaient deux registres, au-dessus de deux tiges obliques plus fines. Au-dessous, d’un côté seulement, départ d’un élément plat, qui porte à l’extérieur deux filets courbes, rappelant le décor des rubans d’encadrement des nos 3 et 4 (6928 et 3148). Ce fragment est très proche de inv. 23962 (n° 10) ; il appartient au groupe rassemblé par ƕƥƳƥƶƥƦƦƥƵ sous le n° 51, donc au second atelier crétois distingué par cet auteur.

12. Id., tableau 4. 13. Rolley 1977, p. 121-122, fig. 44 et 45.

14. Id., nos 503 à 510.

BRONZES DU HAUTARCHAÏSME À DELPHES

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10. Fragment de tige. Inv. 23962. Bronze, 13,5 cm. Fig. 25. Inédit. Fragment de support ajouré : tige de section ronde portant le départ d’une tige plate, qui forme un angle aigu avec la tige principale. La comparaison avec le n° précédent suggère que ce document était une tige de support crétois. 11. Fragment de couronne et de ruban. Inv. 10131. Bronze, 14,5 x 10 cm (épaisseur : 0,275 cm). Fig. 26-28. Rolley 1977, p. 117, n° 508, pl. 53 ; ƕƆƕƆƗƆƇƇƆƗ 2001, n° 58 p. 256, fig. 174 p. 394. Fragment provenant sans doute d’une couronne proche de celle du n° 3252. Le fragment est un peu aplati, mais la courbure reste nette d’un côté. On voit le ruban, son bord inférieur, le départ d’un ruban vertical lisse, et deux arrachements plus petits à gauche. Le rapprochement avec inv. 3252 pour la structure (n° 1, fig. 3) place ce fragment dans la sphère de production crétoise, sinon en Crète même. 12. Quadrupède. Inv. 23965. Bronze, 6,2 cm. Fig. 29-30. Rolley 1999, p. 123 ; ƕƆƕƆƗƆƇƇƆƗ 2001, n° 53 p. 254, fig. 161 p. 391. Quadrupède, plutôt dressé sur ses pattes arrière que marchant. L. cons. : 6,2 cm. Sont brisés la queue entièrement, les pattes à mi-longueur, le museau à mi-longueur. Malgré l’allure originale de l’animal, l’oreille dressée, le toupet de poils sur le front suggèrent qu’il s’agit d’un cheval dressé, qui devait faire partie d’un groupe de deux chevaux affrontés. Des filets aigus décorent l’animal : deux sur la cuisse, un groupe formant la crinière ; la zone de l’œil est également délimitée par un filet aigu ; l’œil lui-même est une petite saillie ronde. L’objet, ou son modèle de cire, a été coulé dans un moule ouvert ; les bords n’ont pas été limés ou polis après coulée, ce qui se voit bien sur le dos. La comparaison la plus convaincante est celle que l’on peut faire avec un support de Symi Viannou (fig. 31)15 : ƕƥƳƥƶƥƦƦƥƵ reconstitue d’ailleurs à partir de ces deux fragments une production particulière, qu’il réunit dans son troisième atelier crétois. On peut toutefois aussi penser au support de Nicosie, trouvé dans des fouilles clandestines à Chypre en 1972, sauvé et publié par V. Karageorghis16 ; mais c’est évidemment la datation du fragment de Symi Viannou qui s’impose. 13. Fragment de couronne. Trouvé en 1996 dans les travaux du musée. Inv. 25082. Bronze, 7,2 cm ; couronne 2,6 cm. Fig. 32-34. Rolley 1999, p. 123 ; ƕƆƕƆƗƆƇƇƆƗ 2001, n° 67 p. 258, p. 166, fig. 174a p. 394 ; Rolley 2002b, p. 276-277. Aurigny 2016d, p. 231, fig. 6. Fragment de trépied à baguettes de type chypro-crétois. Sont conservés une partie de la couronne supérieure et le départ d’un arceau, de section circulaire. L. cons. : 7,2 cm ; larg. de la couronne : 2,6 cm. La couronne, très irrégulière au revers, a une courbure qui paraît originelle : il s’agit alors d’un trépied, et non d’un support à quatre faces. La couronne porte, à l’extérieur seulement, trois filets encadrant deux zones cordées dans le même sens. Ce fragment est peut-être le seul à provenir d’un support chypriote. Il est vrai que l’on trouve ce type de décor fait de filets et de zones cordées en majorité sur les supports de Chypre, par exemple le trépied de Tirynthe17, ou celui de Beth Shan18. Dans ce cas, sa datation doit être plutôt le xiie siècle av. J.-C., ce qui a des conséquences importantes sur l’histoire de Delphes. 14. Haut de candélabre (?) inv. 10134. Bronze, 10 cm. Fig. 35-36. Rolley 1977, p. 117, n° 511, pl. 53 ; Aurigny 2016d, p. 231, fig. 7. L’objet se compose d’un manchon cylindrique vertical, avec un anneau saillant à mi-hauteur. Au centre, une tige de bronze de section carrée est fixée par un clou transversal. Il part de là deux rubans divergents, sur trois que comptait l’objet ; ils sont renforcés à l’arrière par un ruban plat perpendiculaire. Les rubans sont liés, en partie supérieure, par des volutes opposées, travaillées « à jour ».

15. ƕƆƕƆƗƆƇƇƆƗ 2001, n° 54 p. 254. 16. Karageorghis 1979, p. 203-208, pl. XXV-XXVII. Voir aussi

BCH 1979, p. 675, fig. 5.

17. ƕƆƕƆƗƆƇƇƆƗ 2001, n° 8. 18. Id., n° 12.

SUPPORTS ET TRÉPIEDS À BAGUETTES

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L’interprétation de l’objet n’est pas aisée : on pense tout d’abord à un haut de candélabre, dont on a un autre exemple, plus tardif, au Ptoion19. Mais notre fragment n’entre pas facilement dans les séries attestées de candélabres : la série de candélabres chypriotes, bien connue à Samos20 , comprend des objets différents. Certes, ils ont une forme qui va en s’évasant, mais les trois tiges dressées se recourbent en haut, et ne sont pas liées entre elles par des volutes. En outre, elles sont le plus souvent placées sur une série de deux ou trois éléments végétaux aux feuilles tombantes, ce qui est très loin de l’exemple delphique. Un exemplaire à Lindos21 , formé de trois pétales supportant un anneau hexagonal, rappelle, par sa structure, l’objet de Delphes. On songe à la catégorie des supports d’offrandes, qui, comme les supports à quatre faces ou les trépieds, est une production que l’on rencontre aussi à Chypre, en Anatolie et au Proche-Orient22 . Mais ces exemples sont de l’âge du bronze, il faudrait donc admettre que cet objet appartient également à cette époque.

Commentaire Alors que cette catégorie de supports n’est apparemment pas liée aux chaudrons orientaux, l’étude des trépieds à baguettes permet de rappeler que cette série avait des points communs avec celle des supports à quatre faces, qu’ils soient munis ou non de roulettes. Les objets de Delphes confirment ces liens et touchent à un des problèmes les plus importants de cette époque, celui de la transmission des modèles et des techniques entre le second et le ier millénaire23. H. Matthäus a parfaitement résumé la situation, en soulignant le caractère surprenant non seulement de la distribution géographique des supports ajourés (trépieds à baguettes ou supports ajourés, carte 1, fig. 3724), mais aussi de leur distribution chronologique : les découvertes faites à Chypre datent principalement de l’âge du bronze récent, tandis que le groupe d’objets découverts en Égée, surtout en Crète, est daté vers 700 av. J.-C.25. Mais ces données ont été interprétées de manières très différentes : pour H.W. Catling, l’ensemble forme une unité, fabriquée à Chypre à la fin de l’âge du bronze, et pour une part exportée et conservée précieusement à travers les siècles26. H. Matthäus, au contraire, a insisté sur les différences typologiques entre le groupe chypriote et le groupe grec. Ce dernier se caractérise par une couronne fondue en forme de ruban, avec un large bord supérieur, ou encore un pied en forme de ruban, avec une base séparée en forme de disque, éléments inconnus sur les exemples chypriotes27. La technique est donc différente, et empêche de confondre les deux séries. Il n’en reste pas moins que ce cas de figure est très intéressant : les modèles chypriotes ont été copiés durant toute cette période, bien après que les ateliers de cette île eurent cessé leur production. L’ouvrage de ƈƕƥƳƥƶƥƦƦƥƵ « envisage enfin l’ensemble du matériel, qui est important pour les problèmes de transmission de types et de savoir-faire, d’une part de Chypre à la Crète, d’autre part de l’Âge du bronze à l’Âge du fer »28. A Delphes même, on hésite pour le classement d’un fragment, inv. 25082 (n° 13) : s’il appartenait à l’âge du bronze, ce serait alors une « donnée nouvelle aux réflexions sur les débuts de Delphes »29. Si en effet on avait importé à Delphes un support fait à Chypre au xiie siècle av. J.-C., cela ne signifierait pas nécessairement que c’était déjà un lieu de culte important, fréquenté par des visiteurs lointains, mais peut-être que c’était une antiquité que l’on conservait depuis cette époque30. On trouve également à Samos un fragment de ce type qui provient de l’Héraion31 : la conservation d’objets anciens n’est donc pas sans exemple. Dans la série grecque qui nous occupe, les objets delphiques ont une place très importante : peu de supports ajourés de ce type ont été trouvés en dehors de la Crète, qui apparaît comme le centre de fabrication de tous les exemplaires grecs. À Delphes, les 13 fragments de supports, sans compter le candélabre, permettent de compter environ 10 objets. Hors de Delphes, seuls Antidôn et Rhodes ont livré chacun un fragment de support ajouré32 ; l’exemplaire de Rhodes est considéré comme issu d’un atelier crétois également.

19. Ducat 1971, p. 455, n° 322, pl. 156 : daté de la fin de l’archaïsme. 20. Jantzen 1972, p. 43 et pl. 41-42 21. Blinkenberg 1931, p. 210, n° 673, et pl. 27. 22. Matthäus 1985, p. 321-324, n° 713-714, pl. 109, 137, 139 ;

ƕƆƕƆƗƆƇƇƆƗ 2001, fig. 112. 23. Voir en particulier Rolley 1977, p. 115-146 ; Catling 1984 ; Matthäus 1988. 24. ƕƆƕƆƗƆƇƇƆƗ 2001, p. 334. 25. Matthäus 1988, p. 285.

26. Catling 1964 ; Catling 1984. 27. Matthäus 1988, p. 287. 28. Rolley 2002b, p. 275. 29. Rolley 2002b, p. 277. 30. Sur les relations entre Delphes et Chypre, Aurigny 2016d. 31. Vue au musée de Samos à l’été 2009. 32. ƕƆƕƆƗƆƇƇƆƗ 2001, n° 32 et 55, p. 245, 256-257, avec réfé-

rences. Le fragment d’Antidôn provient d’un contexte de trésor et non d’un contexte sacré.

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BRONZES DU HAUTARCHAÏSME À DELPHES

Les rapports entre Delphes et la Crète sont, dans le cas des supports ajourés, particulièrement nourris33, parce qu’on a retrouvé des fragments venant de plusieurs ateliers crétois. Rappelons succinctement leurs caractéristiques, en partant de l’étude d’ensemble de ƕƥƳƥƶƠƦƦƥƵ, qui a distingué des ateliers malgré l’uniformité de la production crétoise. Il différencie quatre ateliers : le premier ne réunit presque que des trépieds ajourés trouvés en Crète (au nombre de 7), à Fortetsa, Symè, Vrokastro, Knossos, Amnisos, Palaikastro et Théra, et reste difficile à dater, tant les données de fouilles sont incomplètes. Tous ces supports ont une couronne supérieure en ruban, avec la lèvre supérieure légèrement débordante ; les pieds sont en ruban plat, renforcés par des baguettes obliques fines dont l’extrémité forme une volute. Ensuite, les supports à quatre faces se répartissent en trois ateliers. L’atelier n° 2 (5 exemplaires) est très important, car il réunit quatre, voire cinq des supports crétois sur onze connus. Il comprend des documents de grande taille, construits sur le même schéma, avec des baguettes horizontales et en diagonale, entre lesquelles se placent les motifs figuratifs34. Le style de l’atelier se révèle aussi dans le traitement des figures comme les chevaux, dont nous avons à Delphes deux bons exemples, inv. 4460 et inv. 2695 (n° 7, fig. 19-20 et n° 6, 16-17), très plats, avec une sorte de fragilité dans le modelé. C’est pour des raisons stylistiques que l’auteur a placé le petit support de Delphes inv. 3252 (n° 1, fig. 3) dans ce groupe, car il présente la même organisation du décor que dans les supports de grande taille, en particulier le support de l’Ida. On note toutefois des différences techniques, entre le support de l’Ida, dont les formes sont modelées à la main, et le support de Delphes, dont les figures sont issues de matrices. La différence pourrait être chronologique, l’utilisation de matrices étant plus tardive, mais ƈ. ƕƥƳƥƶƠƦƦƥƵ ne donne pas de datation pour ce groupe. G. Sakellarakis le date de la fin du viiie ou du début du viie siècle35. Le troisième atelier n’est attesté que par deux fragments, dont le rapprochement ne suscite pourtant aucun doute, vu qu’ils doivent être issus de la même matrice : il s’agit du fragment delphique inv. 23695 et d’un morceau important d’un panneau constituant l’une des faces d’un support de Symi Viannou. On retrouve les mêmes détails anatomiques, la même face postérieure plate ; comme le support mieux conservé de Symi vient d’une matrice d’un seul tenant, on peut supposer que le fragment de Delphes se trouvait au sein d’un ensemble identique. Mais l’existence d’une matrice commune qui a donné deux fragments est un élément très mince pour reconstituer un atelier tout entier. Alors que le fragment de Rhodes représente seul le quatrième atelier, les trois fragments de Delphes regroupés sous le n° 57 (n° 3, 4 et 5) sont étudiés à part. ƈ. ƕƥƳƥƶƠƦƦƥƵ juge leur traitement un peu rude, avec un dessin trop simple, comparable à ce que l’on trouve sur les supports chypriotes de Jérusalem et d’Ammochostos36. Mais il l’attribue à la Crète, parce que tous les fragments delphiques en proviennent ; on pourrait toutefois faire remarquer que le fragment n° 67 (n° 13, inv. 25082) est un candidat potentiel à l’attribution à Chypre. On ne comprend pas très bien ce qui empêche ƈ. ƕƥƳƥƶƠƦƦƥƵ de reconstituer pour le n° 57 un atelier, quand deux objets suffisent pour l’atelier 3 ; d’une manière générale, la notion d’atelier utilisée par l’auteur est assez floue et il n’en donne d’ailleurs aucune définition, à part un classement selon la structure et la taille des supports. Et comme il rappelle à plusieurs reprises combien le matériel crétois est homogène, et combien il est difficile de différencier des ateliers37, les groupes proposés paraissent un peu arbitraires, car ils réunissent finalement très peu d’objets chacun, et ne se distinguent que par quelques détails. En outre, les ateliers ne sont pas attribués à un lieu de production précis, à une cité dont on pourrait connaître par ailleurs les autres fabrications ; ainsi la classification reste abstraite, et semble finalement, même si elle n’est pas dénuée d’ingéniosité, assez formelle. Si le manque de sources complémentaires ne permet pas de se faire une idée précise de la nature et de l’organisation des ateliers qui produisent ces objets, le classement formel de ƕƥƳƥƶƠƦƦƥƵ ne rend pas compte de la possibilité de traditions artistiques particulières liées à une demande et à un contexte socio-politique précis38. Les objets crétois sont relativement nombreux à Delphes : y a-t-il des raisons particulières à ce constat, en dehors du fait que les artisans crétois produisaient des objets en métal nombreux et de qualité ? Il faut regarder les autres 33. Sur les offrandes crétoises à Delphes aux viiie et viie siècles, voir Rolley 1977, p. 145-146, Aurigny 2017a et infra p. 151. 34. ƕƆƕƆƗƆƇƇƆƗ 2001, p. 192. 35. Sakellarakis 2013, t. II, p. 87.

36. N° 29 et 30 de ƕƆƕƆƗƆƇƇƆƗ 2001. 37. En particulier p. 190. 38. Viviers 1995, p. 211.

SUPPORTS ET TRÉPIEDS À BAGUETTES

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productions pour trouver des comparaisons. Un rapprochement s’impose évidemment avec la série des boucliers crétois : « les supports ajourés et les boucliers forment deux ensembles qu’il faut associer pour trois raisons : ces objets sont strictement contemporains ; les deux groupes ne se comprennent que par comparaison avec les productions orientales et notamment chypriotes ; les deux groupes ne sont connus qu’en Crète, où on les trouve associés dans la grotte de l’Ida, et à Delphes »39. J.-M. Luce suggère qu’ils avaient dû être déposés ensemble, dans un même lot, peut-être dans le temple ou dans un trésor. Les offrandes crétoises ont beau être très importantes à Delphes, elles ne suffisent pas à conclure immédiatement à une fréquentation du sanctuaire par les Crétois ; le rôle de ceux-ci dans la production d’objets de métal et dans la redistribution des objets orientaux doit être discuté.

Supports de chaudron Si l’offrande la plus prestigieuse depuis l’époque géométrique, le chaudron, se perpétue, en revanche il change de forme : devenus mobiles, les chaudrons archaïques, « ornés d’appliques ou d’attaches, étaient le plus souvent posés sur des trépieds « à baguettes »40, ou sur des supports coniques en tôle décorée au repoussé. Delphes conserve des fragments de ces deux types : bien qu’on ait retrouvé dans le sanctuaire de Delphes moins de bronzes qu’à Olympie ou à Samos, le sanctuaire fournit la preuve de la variété des offrandes qui y furent déposées.

Support conique Catalogue 15. Fragment de support conique. Inv. 19899, bronze, 9 cm x 0,8 cm. Fig. 38-39. Filippakis 1983, p. 123, fig. 6 ; Magou 1991, p. 563, n. 6 (ech. 25) ; Gehrig 2004, p. 157 n. 677, p. 261 n. 799. Fragment de tôle décorée au repoussé. Le repoussé est assez fort, avec un décor de points et de petits traits. Le fragment est divisé en trois zones de décor par des côtes en léger relief : à droite, une zone lisse, au centre, une zone qui va en s’évasant vers le bas est ponctuée de petits cratères ; à gauche, six côtes délimitent sept bandes décorées de points. Il s’agit d’une partie de l’aile et de l’arrière de la tête d’un sphinx. La composition de l’alliage du fragment de Delphes41 le rapproche des protomes de griffon martelées, avec une forte teneur en étain (9%), pas de plomb et peu d’impuretés, en particulier de fer ; c’est un élément intéressant dans la discussion sur l’origine des protomes martelées. Ce fragment se superpose exactement à une partie de l’aile et l’arrière de la tête d’un des sphinx du support conique de la tombe Barberini, à Préneste42. Le détail du travail est le même (fig. 40). Nous avons donc l’unique reste, à Delphes, d’un support de ce type, représenté à Olympie par six exemplaires43, deux à Praeneste, l’un dans la tombe Barberini, l’autre dans la tombe Bernardini44. La ressemblance typologique et stylistique des sphinx de la tombe Barberini avec les reliefs de Sakzegözü45, quelques rapprochements qui renvoient aussi aux reliefs de pierre néo-hittites sont assez étroits pour que l’unanimité se soit faite pour voir dans ces supports des importations de Syrie du Nord, vers la fin du viiie siècle46.

Commentaire La diffusion des grands supports coniques est très restreinte47 : on connaît ceux d’Olympie et de Delphes, les deux principaux sanctuaires « panhelléniques » et, depuis plus longtemps encore, les deux supports des tombes

39. Luce 2008, p. 449. 40. Rolley 1977, p. 26. 41. Filippakis 1983, p. 132 (échantillon 25), reprise et discutée

Magou 1991, surtout p. 566. 42. Excellente photographie : Akurgal 1961a, p. 58, fig. 36. 43. Herrmann 1966, U1 à U6, p. 162-164. 44. Canciani, von Hase 1979, p. 46-47, n° 42, et pl. 27-29. 45. Akurgal 1961a, p. 59.

46. C‘est, en particulier, la seule catégorie sur laquelle E. Akurgal et H.-V. Herrmann sont du même avis. 47. La dernière publication des bronzes orientaux de Samos montre qu’aucun de ces grands supports coniques n’est connu à Samos. Rien à l’Acropole non plus. H.-V. Herrmann explique que soit très peu d’ateliers orientaux en ont fabriqué, soit le trépied à baguettes a évincé le support conique peu stable ; Herrmann 1966 p. 161.

BRONZES DU HAUTARCHAÏSME À DELPHES

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Bernardini et Barberini. Ces objets impressionnants, pouvant aller jusqu’à 1,20 m de haut48, sont des produits de l’artisanat du métal développé en Syrie du Nord à l’époque néo-hittite. Aucun exemple n’a été découvert dans la région d’origine49 et cette attribution, bien que très vraisemblable, repose sur la comparaison avec des modèles connus sur un autre support, la pierre en l’occurrence. Comme nous le verrons, il s’agit du même type de raisonnement que pour les protomes de griffons, dont on n’a pas retrouvé d’exemple en Orient, mais dont le modèle est le griffon oriental de l’art nord-syrien. H.-V. Herrmann développe un point de vue intéressant, en soulignant que ce travail particulier du métal, mis en œuvre dans les supports, se retrouve dans d’autres produits de la toreutique de l’art néohittite : il cite en particulier les coupes de bronze de Préneste, du Céramique, un fragment de tôle de bronze orné d’un lion au repoussé, et un plat avec un adorant barbu50. En outre, H.-V. Herrmann souligne les parallèles avec les appliques en forme de « sirènes », travaillées « Hand in Hand »51 avec les supports. Il y a donc un groupe d’objets attribuables aux mêmes ateliers orientaux, dont plusieurs exemples sont parvenus en Grèce. Des liens avec la Crète ont aussi été suggérés : si H.-V. Herrmann avait cité à titre de comparaison le « tympanon » de la grotte de l’Ida, U. Gehrig voit dans les supports d’Olympie et dans le « tympanon » l’intervention de la même main, et il attribue également le fragment de Delphes à ces ateliers de bronziers de Crète. Il date la fabrication des supports coniques des années 680 avant J.-C., par comparaison avec les sirènes et le grand « tympanon » de la grotte de l’Ida52. Si l’on prend le cas des supports coniques, on remarque qu’ils ont marqué, peut-être plus que les autres objets, l’esprit des Grecs, qui en ont représenté la forme sur le décor de vases : « denn alle griechischen Darstellungen von Protomenkesseln zeigen diesen Untersatztyp »53 ; on note que les représentations de chaudrons orientalisants ne sont pas très nombreuses54. C’est toutefois une forme connue dans le répertoire céramique du géométrique récent55 ; indice de leur popularité, des exemplaires en terre cuite existent au Céramique à Athènes56, mais aussi dans le Latium, dans la nécropole de la Rustica57, ce qui n’est pas étonnant, vu les découvertes des tombes Bernardini et Barberini. Ces importations syriennes en Étrurie sont si proches des objets syriens retrouvés en Grèce que l’on a proposé non seulement de les dater de la même époque, vers 700 av. J.-C., mais de les attribuer à un seul et même atelier58. Cette forme est devenue symbolique du nouveau chaudron originaire d’Orient, et, malgré son succès dans l’iconographie, il ne semble pas que les ateliers grecs l’aient imité : en effet à la fin du viiie siècle, lors du bref succès de ce type de support, les ateliers de bronziers grecs n’étaient sans doute pas en mesure de réaliser de telles œuvres. Ce fragment de 9 cm de long montre l’importance de la Syrie du Nord dans la transmission et la distribution des objets orientaux dans le monde grec.

Trépieds à baguettes Catalogue Un exemplaire complet 16. Trépied à baguettes. Trouvé avant 1908. Inv. 9467, bronze (sabots) et fer (support). 72 cm (sans les tenons) ; diamètre du cercle sup. : 53 cm ; diam. max. des tiges : 1,5 cm. Fig. 41-44. Perdrizet 1908, n° 248, fig. 222, p. 68 ; Benton 1934, p. 125, n° 10 ; Riis 1939, p. 10, B1 ; Amandry 1956, p. 255 et n. 56 ; Rolley 1962, p. 483 et n. 3, et 1971, p. 296-301, fig. 4 et 5 ; Cross 1974, n° 103, p. 286, fig. 31 ; Rolley 1979, 48. 0,86 m pour le support de la tombe Barberini ; 0,91 m pour le support de la tombe Bernardini ; le support d’Olympie U2 devait aller jusqu’à 1,20 m ; Herrmann 1966, p. 166-167. 49. Amandry 1969, p. 801 : « rien de pareil n’a été découvert, jusqu’à présent, au Proche-Orient ». 50. Herrmann 1966, p. 177. 51. Herrmann 1966, p. 182 ; « mais H. pousse trop loin la systématisation en établissant un parallèle rigoureux, stylistique et chronologique, entre les groupes A, B, C des appliques et les groupes A, B, C des supports », Amandry 1969, p. 801. 52. Gehrig 2004, p. 178.

53. Herrmann 1966, p. 183. 54. Voir aussi Papalexandrou 2015, p. 174. 55. Coulié 2013, p. 91, fig. 63. 56. En particulier les chaudrons à protomes ou à fleur de lotus

inv. 150 et 147, Kübler 1970, pl. 44-45. L’ensemble cuve et support a été utilisé dans la céramique grecque comme en témoigne la forme du dinos. Voir aussi Coulié 2013, p. 207, fig. 201 et p. 211, fig. 205 et 206. 57. Colonna dans Civilta 1976, p. 153 et suivantes. 58. Strøm 1971, p. 131, 203

SUPPORTS ET TRÉPIEDS À BAGUETTES

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n° 11 ; Herrmann 1979, p. 205 et n. 3 ; Rolley 1991, p. 145-147, fig. 4 ; Macnamara 2001, p. 300 ; Bieg 2002, p. 148, ST8, fig. 8a-b. Trépied à baguettes, fortement restauré et complété. Tiges de fer, sabots et manchons de bronze. Étaient conservés le cercle supérieur complet, une des tiges verticales et l’amorce d’une autre, deux arceaux, les trois sabots. La restauration a masqué le détail des raccords des tiges, décrits ici d’après l’état antérieur à la restauration (fig. 42). Les arceaux étaient aplatis en haut, un clou vertical traversant l’arceau et le cercle supérieur. Les tiges verticales étaient également aplaties. D’après le restaurateur, A. Mavragannis, cette extrémité aplatie traversait un trou ménagé dans le cercle, l’extrémité étant martelée pour rivetage. Ce montage des tiges et des arceaux est aussi exceptionnel que l’absence des tiges inférieures. Les pieds de bronze sont des sabots bifides, avec deux ergots, c’est-à-dire des sabots de bovidés, où pénètrent trois tiges de fer (fig. 43). Leur couleur dorée vient probablement de l’alliage. La faible épaisseur du bronze indique qu’il a été réalisé par surcoulée, c’est-à-dire en modelant les pieds en cire par-dessus les extrémités des tiges. Sous chaque sabot, un tenon en forte saillie (1 cm) maintenait le pied dans une base. Ce montage explique que l’on n’ait pas les tiges secondaires et le cercle inférieur qui d’ordinaire empêchent l’ustensile de s’écraser ; on ne le retrouve que sur quelques trépieds chypriotes, beaucoup plus anciens59. Si la forme des sabots rappelle ceux du trépied de Kourion60, en revanche le trépied qui supporte le chaudron retrouvé dans la tombe 79 de Salamine61 présente lui aussi trois pieds d’où partent trois tiges, non reliés entre eux par des tiges horizontales. L’absence de tiges horizontales rappelle encore les fragments de trépieds à baguettes retrouvés dans le palais NordOuest de Nimrud, étudiés par Barnett, et datés du viiie s.62 ; toutefois ce dernier type ne présente pas les tiges verticales partant du pied et reliées directement au cercle supérieur. Le sanctuaire d’Olympie a également livré un pied à sabot bifide pourvu de deux ergots à l’arrière63 ; conservant encore le départ de trois tiges de fer, il se présente aussi comme une masse aplatie au-dessus du sabot. H.-V. Herrmann le classe parmi les documents orientaux. Trois pieds à sabot de la « salle des bronzes » de Nimrud64 présentent les deux mêmes ergots à l’arrière, ainsi que le pied du trépied Barberini à Préneste65. Il semble que ces objets soient redevables à un atelier syrien et puissent être datés au viiie s. 66 Pieds 17. Pied à sabot. Inv. 23959. Bronze et fer, 12,5 cm, diam. ext. des tiges : env. 2 cm. Fig. 45-48. Perdrizet 1908, n° 250, p. 69, fig. 224 ; Cross 1974, p. 288, n° 105 ; Bieg 2002, p. 148, ST9. Pied à sabot. Sabot non fendu, surmonté de deux bourrelets. Le pied est aplati au-dessus, et se prolonge en une mince gaine de bronze (ép. 1,5 à 2 mm) autour de trois grosses tiges de fer. En bas, sur le côté gauche du pied, la paroi de bronze a disparu, montrant que l’ensemble a été fait par surcoulée du bronze sur une masse de fer qui se prolongeait par les trois tiges. Le dessous du sabot, concave, est plus épais (5 mm au moins). On n’a aucune trace de tiges secondaires ; mais il reste possible qu’elles se soient articulées sur les tiges verticales un peu au-dessus du pied. Ce pied est proche du pied trouvé à Olympie, et conservé sous le numéro d’inventaire B. 5243 (S 30)67 ; comme pour l’exemplaire de Delphes, trois tiges verticales en partaient, et H.-V. Herrmann suggère la possibilité d’une tige horizontale à l’arrière68. L’examen de ce pied, dont le bronze est très endommagé à l’arrière, ne permet pas de conclure ; un simple ressaut du métal n’est pas une preuve suffisante. Le montage du trépied auquel appartenait le pied de Delphes doit suivre le principe du trépied de Kourion, par exemple. Il est vrai que dans une autre zone géographique, le trépied d’Auxerre a ses pieds terminés en sabots, avec cinq tiges sortant du haut des pieds, qui étaient reliés entre eux par une couronne en bas69. 18. Pied à sabot bifide. Trouvé sur les terrasses de l’Est du sanctuaire d’Athéna Pronaia en 1921. Inv. 5339. Bronze, 16,5 cm ; 1,7 kg. Fig. 49-51. Demangel 1926, p. 81 et fig. 88. Pied à sabot bifide, pointu. Le paturon est nettement marqué ; à l’arrière du boulet, deux ergots écartés. En haut du canon, de chaque côté, saillie verticale d’un tendon. Ce souci des détails anatomiques contraste avec l’aspect de la surface, irrégulière. Le dessus recevait trois tiges de bronze ; celle du milieu, tordue (diam. 1,1 à 1,2 cm) est conservée sur env. 3,5 cm. Deux autres tiges de bronze (diam. 1,01 à 1,2 cm) s’engagent dans des gaines placées à l’arrière : comme pour le précédent, 59. Amandry 1956, p. 252, n. 40. 60. Matthäus 1985, n° 719, p. 337-338. 61. Matthäus 1985, n° 718, p. 336. 62. Barnett 1967, p. 6. 63. Herrmann 1979, p. 181, S 30, pl. 79, 4-5. 64. Curtis 2013, p. 3-6.

65. Canciani, von Hase 1979, pl. 33, fig. 5 ; Bardelli 2015, p. 158. 66. Curtis 2013, p. 65-67. 67. Herrmann 1979, p. 181, S 30, pl. 79, 4-5. 68. Id., p. 195. 69. Orgogozo-Lintz 2007, p. 160, et p. 165 n° 143.

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ce pied a été coulé sur les tiges. Le résultat est un objet particulièrement lourd et massif. Le montage des tiges inférieures est rare : leur départ suggère qu’elles formaient un triangle, sans le cercle central fréquent. C’est le montage d’un trépied d’Altin Tepe, tandis que le sabot n’est pas sans évoquer celui du trépied de Kourion. 19. Pied de lion. Trouvé le 29 juin 1894, à l’entrée du sanctuaire d’Apollon. Inv. 1717. Bronze et fer, 13,5 cm x 11,5 cm x 6,5 cm (3 kg). Fig. 52-56. Perdrizet 1908, n° 249, fig. 223, p. 68-69 ; Riis 1939, p. 11, n° B 7. Masson, Rolley 1971, p. 295-304 ; Amandry, Spyropoulos 1974, p. 240-241, fig. 55 ; Cross 1974, n° 96, p. 278, fig. 26. Rolley 1979, 16, fig. 19 ; Filippakis 1983, p. 132, échantillon 26 ; Magou 1991, 563, n° 26 (analyse de l’alliage) ; Rolley 1991, 152-153, n° 14, fig. 14 ; Partida 1992, p. 135-136, fig. 3 ; Bieg 2002, p. 148, ST10, fig. 7a-b ; Aurigny 2010, p. 235, fig. 36 ; Aurigny 2016d, p. 223, fig. 1. Pied de lion, d’un trépied à baguettes. Sur une semelle épaisse, les doigts sont gras et mous, l’articulation à peine marquée ; les griffes, triangulaires, ne sont détachées qu’à leur naissance. À l’arrière, une protubérance hémisphérique est entourée par un repli de peau qui forme, avec deux bourrelets supplémentaires, un décor qui s’élargit de haut en bas. Vu de profil, le pied est fortement incliné. En haut de la face avant, qui est presque plane, deux groupes de sillons horizontaux encadrent une inscription, qui est apparue lors de la restauration de l’objet. La masse de fer qui subsiste au sommet est le reste de cinq grosses tiges (diam. de chacune : 2,7 cm) ; le départ des trois de l’avant et d’une des deux autres est conservé. Le bronze, peu épais en avant (0,7 à 0,8 mm), s’est fendu, faisant disparaître un des signes de l’inscription : il a été surcoulé. L’alliage contient 10,48% d’étain, pourcentage fréquent au Proche Orient, et 5,50% de plomb ; cela doit avoir pour but d’augmenter la coulabilité, ce qui est important pour une surcoulée mince (voir le n° inv. 23959). Le dessous comporte des dépressions irrégulières. Il est probable que la semelle servait à encastrer les pieds du trépied dans des cavités ménagées dans une base de pierre70. L’inscription71 (fig. 55) a été faite dans la cire, avant coulée, c’est-à-dire par le fabricant, et non à Delphes même par le dédicant. En alphabet chypriote syllabique, elle se lit de droite à gauche e-re-ma-i-[yo], suivi d’une barre d’interponction, soit ˚Ɗƴuƥƭʦ, génitif d’˚ƊƴuƥƭƲƵ. O. Masson, en publiant l’inscription72, suivi par G. Pugliese Caratelli et J. Pouilloux, y voit le nom du dédicant, ce qui suppose une formule peu courante pour un objet qui a certainement été fait pour être dédié, au contraire d’objets où le nom du propriétaire, normalement au génitif73, devient celui du dédicant quand ce propriétaire l’offre à une divinité. Il paraît probable que la barre d’interponction s’explique parce qu’il y avait un mot sur chaque pied ; pourtant, la restitution proposée par Cl. Rolley, « à Apollon, untel, fils d’Hermaios »74, qui suppose qu’Hermaios était le père du dédicant, ne peut être considérée que comme une proposition75. Ce pied, qui porte l’une des plus anciennes inscriptions en syllabaire chypriote découvertes hors de Chypre, puisqu’il s’agit d’un objet du viie siècle, provient d’un trépied exceptionnellement grand ; il est au moins probable que le fils d’Hermaios a apporté en même temps le chaudron à appliques qu’un tel trépied soutient normalement. Parmi les documents chypriotes, on peut comparer le modelé de la patte aux pieds de lion du trépied de Kourion partagé entre Berlin et New York76. On pense aussi à un gros pied d’Olympie77 : il conserve des restes de trois tiges de fer. Mais il porte deux moulures sur sa face antérieure, ainsi qu’un ressaut à l’arrière, qui en font un objet typologiquement différent. Enfin, le pied de lion provenant de Samos St 4278 présente aussi une forme plutôt carrée et une semelle, mais appartient à un objet plus petit et plus récent. Tiges, manchons et éléments décoratifs 20. Manchon de bronze. Inv. 23970. Bronze et fer, 13 cm. Fig. 57-59. Masson-Rolley 1971, p. 296, fig. 6 ; Filippakis 1983, 121 et 132, fig. 8 (n° 27) ; Bieg 2002, p. 148, ST6. Manchon de bronze, reliant le cercle supérieur et une tige verticale, en fer. L. cons. : 13 cm ; L. du manchon : 5,4 cm ; diam. ext. aux extrémités : 2,7 cm. La tige verticale se termine en ruban plat (env. 2,5 x 0,5 cm). Le bronze, très mince (2 mm au max.), a été coulé sur les tiges de fer. Le bronze a conservé une couleur dorée. Sa composition est intéressante : 7,31% d’étain, et 17,22% de plomb, teneur très forte, justifiée probablement par le souci d’assurer une grande facilité à la coulée, nécessaire pour une surcoulée aussi mince. 70. Amandry, Spyropoulou 1974, p. 240-241, fig. 55. 71. Sur l’inscription, outre les titres ci-dessus, Pugliese Caratelli

1971, p. 590 ; Rolley 1973, p. 524, n. 101 ; Pouilloux 1976, p. 158-159 et 165 ; Masson 1983, fig. 154 et p. 422, n° 369a ; Egetmeyer 2010, vol. II, p. 841, n° 2. 72. Masson, Rolley 1971. 73. Amandry 1971, p. 592. 74. Rolley 1991, p. 153.

75. De plus, Apollon n’est pas connu dans les inscriptions chypriotes avant le ive siècle. 76. Karageorghis 2000, n° 280, p. 173 : il s’agit des pieds de lion dont Liepmann a rejeté l’attribution au trépied de Kourion fait de pieds à sabot et de manchons à têtes de taureau. 77. Ol. IV, n° 812, pl. 48 ; Herrmann 1979, inv. BR 8062, S 35 p. 181, fig. 6 ; et aussi S 36, inv. Br 13525, p. 181, pl. 80 (1,2). 78. Gehrig 2004, p. 297, St 42 (inv. 458), pl. 119.

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Si on ne trouve pas de parallèle très précis à Samos ou Olympie, on peut rapprocher le fragment S 24 d’Olympie79, qui a la même forme en T et la même fonction, bien qu’il porte un décor de doubles lignes inconnu sur l’objet de Delphes. Mais sa coulée épaisse et régulière suggère qu’il a été fait à part, et non surcoulé sur la tige de fer. La forme en T est également visible dans le manchon S 25 d’Olympie qui, bien que fragmentaire, enserre encore un morceau de la tige de fer80. 21. Manchon de bronze. Sans inv. Bronze et fer, 19,5 cm. (dessiné en 1963 par Cl. Rolley, non revu depuis). Masson, Rolley 1971, p. 296-298. Manchon de bronze, reliant le cercle supérieur et un arceau, en fer. L. cons. : 19,5 cm ; L. du manchon : 10,5 cm ; diam. à l’extrémité du manchon : 2,5 cm ; des gaines enveloppant les tiges obliques : 2 cm. Le bronze, mince, a éclaté. On connaît ce type de manchon utilisé pour lier le cercle supérieur et les arceaux à Olympie, par exemple la pièce S2681. 22. Manchon avec tête de taureau. Trouvé par J. Bousquet en 1941, dans le sanctuaire d’Athéna, sous le temple du ive siècle, avec d’autres bronzes archaïques. Inv. 8400. Bronze et fer. 6,6 cm (tête 4,6 cm). Fig. 60-63. Amandry 1958a, p. 79 et pl. VI, c-d ; Bieg 2002, p. 148, ST5, fig. 10b. Manchon de haut d’arceau, avec tête de taureau. L’arrachement des tiges, dont il ne reste rien, a fait éclater le bronze. Sous le cou, un trou cylindrique (prof. : 2 cm ; diam. 1 cm au bord, 0,8 au fond) se dirige vers le front, qu’il rejoint presque ; il semble prévu pour recevoir une tige, qui serait très oblique si on place la tête dans la position habituelle par rapport au cercle, et s’ajouterait aux tiges de l’arceau, qui sont certaines. Cela pourrait s’expliquer par un montage plus complexe que le schéma ordinaire, par exemple celui que restitue U. Liepmann82 pour le trépied de Kourion, où il y a des têtes de taureau à deux niveaux ; mais il n’y a pas d’exemple de rencontre d’un arceau et d’une tige verticale sur le même manchon. La tête est plate sur le dessus et sur les côtés. Elle s’élargit au museau, où la bouche est marquée par un trait, les naseaux par deux trous ronds. Les oreilles sont bien détachées, les cornes très courbées vers l’avant. Les yeux allongés sont creusés pour recevoir une incrustation, de même qu’une cavité sur le front, celle-ci un peu allongée pour la rosette qui est le motif habituel à cet endroit. Les taureaux du trépied de Kourion reçoivent des tiges à deux niveaux différents. P. Amandry l’a comparé pour la fonction aux protomes de ce trépied83, bien qu’on ne puisse envisager une couronne double pour ce fragment. Ce fragment a aussi été rapproché d’une tête d’Olympie84 et d’une tête de Samos85 qui décoraient elles aussi des trépieds à baguettes, sur l’arceau supérieur pour la première, et sur une tige verticale pour la seconde. 23. Manchon à tête de taureau. Découvert en 1945, au sud du gymnase, à 100 m du terrain de M. Nikolopoulou. Inv. 7195. Bronze et fer, 6,5 cm. Fig. 64-66. Inédit. Manchon de bronze à tête de taureau, sur tiges de fer. L. cons. : 6,5 cm ; du côté le mieux conservé, diam. ext. du manchon : env. 1,4 cm, de la tige de fer : env. 0,8 cm. H. de la tête : 4,3 cm. Le manchon, terminé à chaque extrémité par un gros filet, paraît complet, mais il est très dissymétrique. Il comporte, audessous, un trou rond (diam. : 0,9 cm) qui est celui d’une tige verticale. Mais l’ensemble a un aspect de surface très irrégulier. D’un côté, le fer a fait éclater le bronze, ce qui est normal. Sur la joue droite, le cou et le front, il y a eu apparemment deux coulées successives, la seconde presque aussi mal venue que la première. Le décor masque mal les raccords, sur la joue et sur le front, où une dépression était prévue au départ pour une incrustation, comme sur le n° inv. 8400. Le modelé est simple. La bouche et les naseaux sont grossièrement gravés. La zone des yeux fait saillie ; la paupière supérieure de l’œil droit forme un bourrelet ; la gauche est indiquée par deux traits gravés. Les oreilles, très usées, étaient placées très en arrière. Les cornes, brisées, sont reliées par un gros bourrelet couvert de stries dessinant des losanges. Sur le cou, à l’arrière, des stries horizontales ondulées sont divisées par une raie axiale. Trois languettes sur les joues. Un tube de bronze cassé qui portait probablement une tête de taureau a été retrouvée dans le sanctuaire de Claros86. À Olympie, parmi les appliques à têtes de taureaux, on a un exemplaire bien différent, mais décoré de palmettes gravées87.

79. B 3036, Herrmann 1979, p. 180, pl. 75,3. 80. Herrmann 1979, pl. 76. 81. Herrmann 1979, S 26, p. 180, pl. 75,4. 82. Liepmann 1968, p. 51, fig. 31. 83. Amandry 1958b, p. 79. 84. Herrmann 1966, p. 115, A28, pl. 46, 3-4 : les restes de man-

chon à l’arrière de la tête empêchent que cette tête ait décoré un chaudron, comme Herrmann le propose. Voir Bieg 2002, p. 32. 85. Inv. B455, Kyrieleis 1977, p. 81, pl. 36, 34. 86. Verger 2003, p. 175. 87. Herrmann 1966, A 34, pl. 51.

BRONZES DU HAUTARCHAÏSME À DELPHES

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24. Tête de taureau. Inv. 19891. Bronze, 5,3 cm. Fig. 67-69. Inédit. Tête de taureau, probablement d’un pied de trépied à baguettes. H. de la tête : 5,3 cm. Au-dessus d’un décrochement, le cou, à l’arrière, est coupé plat, autour de l’arrachement d’une grosse tige (diam. : env. 1,2 cm). Le plus probable est qu’il s’agit du décor d’un très grand trépied, comme celui de Chypre, de Kourion, dont les éléments sont conservés à Berlin et New-York. Le modelé (yeux, museau) est vigoureux. Décor gravé : stries formant damier sur le bourrelet qui va d’une corne à l’autre, doubles stries transversales sur le cou et pour délimiter le museau, stries pour marquer l’œil, et sur les joues. La forme de la tête rappelle celles des taureaux du trépied de Kourion. Mais le décor de stries sur le haut du front ne s’y retrouve pas ; on le trouve sur des taureaux urartéens88 bien différents de notre exemplaire ; mais un bon parallèle, dans la collection Stathatos89, peut être proposé) : si les yeux, allongés, creux, et incrustés, sont différents de ceux de l’exemplaire delphique, on retrouve la même forme des cornes jointes par une protubérance continue, striée. Or, ce « bandeau étroit d’une corne à l’autre, quand il est seul, n’est pas oriental »90. La date proposée, au second quart du viie siècle, au moment de la fin des importations orientales, est très vraisemblable. 25. Manchon à tête de bélier. Trouvé en dessous de la Lesché des Cnidiens en 1935. Inv. 6040. Bronze, 6,5 cm. Fig. 70-71. Lerat 1938, p. 223-225 ; Masson, Rolley 1971, p. 298, fig. 7 ; Cross 1974, n° 104, p. 287, fig. 32 ; Bieg 2002, p. 148, ST 12, fig. 15 ; Baitinger, Völling 2007, p. 113, n. 596 ; Felsch 2007, n° 106. Manchon de bronze à tête de bélier, sur tiges de fer. L. cons. du manchon : 6,5 cm ; L. de la tête : 4,8 cm. Le manchon, fendu en dessous, est complet d’un côté, avec un bourrelet, brisé de l’autre. Il recevait deux tiges horizontales (diam. : env. 1,4 cm). Le dessous est très mal conservé : on distingue en avant deux trous correspondant à deux clous, en arrière deux fentes étroites. Ce sont les traces de la fixation d’un arceau de fer, dont le contact explique que cette zone est noirâtre et oxydée, alors que la surface est bien conservée ailleurs. La tête elle-même est une fonte creuse mince ; le trou, au-dessus, est probablement accidentel. Le modelé de la tête, peut-être usée en surface, est simple. Les oreilles, petites, sont plaquées sur des cornes étroites, dont le bout se détache. Les arêtes des cornes se prolongent sur le front en une saillie courbe. Bouche et naseaux indiqués par gravure. Les yeux sont entourés par un fin bourrelet ; ils ont conservé une matière de remplissage blanchâtre, et à droite l’iris. La tête de bélier n’est pas un motif habituel sur les trépieds91. Une tête de bélier très schématique a été retrouvée à Kalapodi92 : elle orne le haut d’une tige de trépied à baguettes et elle est associée à une tête féminine à polos qu’elle surmonte. L’ensemble, jugé de fabrication locale, est daté très haut dans le viie siècle. Les têtes de bélier qu’on connaît à Olympie sont des appliques de chaudron93 ; il faut regarder à Samos pour trouver un objet équivalent, un manchon en T avec des tiges de fer et tête de bélier94. Un trépied apparu sur le marché de l’art, à Lugano, en 1992, présentait aussi des têtes de bélier sur la couronne supérieure, alternant avec des manchons formant crochet ; il est daté de la première moitié du vie s., et est attribué à la Grande-Grèce95. 26. Manchon de bronze. Inv. 23953. Bronze, 9 cm. Fig. 72-73. Filippakis 1983, p. 123 et 132, fig. 7 (n° 28) ; Bieg 2002, p. 148, ST7, fig. 16 ; Aurigny 2010, p. 242, fig. 52. Manchon de bronze sur tiges de fer, avec le haut d’une tête humaine et au-dessus un ruban formant crochet, l’ensemble coulé d’une seule pièce. L. du manchon : 9 cm ; largeur du crochet : 6 cm ; h. cons. de la tête : 5,5 cm. Le fragment comprend un manchon, fendu mais conservé sur toute sa longueur, qui entoure une tige de fer (diam. de la tige : 2,5 cm ; diam. ext. original du manchon : 3 cm). L’alliage est un vrai bronze : 10,32% d’étain, 0,15% seulement de plomb ; le plomb n’y est donc qu’une impureté, ce qui distingue nettement ce manchon du n° 20 (inv. 23970) ci-dessus ; cette différence s’explique par l’origine différente des deux manchons : celui-ci étant évidemment grec d’après la tête, l’autre ayant toutes chances d’être oriental, ou peut-être par la différence de date.

88. Par exemple Amandry 1956, pl. XXIV. 89. Stathatos I, p. 7, fig. 5 ; Rolley 1963a, p. 93-95, n° 29, pl. XIII. 90. Rolley 1963a, p. 95 ; Rolley 1962, p. 488 : « la présence

d’un bandeau horizontal d’une corne à l’autre, à l’exclusion de tout autre ornement sur le front, orné de chevrons ici, lisse ailleurs, ou couvert de stries verticales, et souvent en légère saillie, caractérise les têtes de fabrication grecque ou étrusque ». 91. Mais c’est un motif qui est loin d’être inconnu à l’époque orientalisante : on en connaît sur le support du périrrhanterion de

l’Isthme (Sturgeon 1987, p. 45 et suivantes) ; M.C. Sturgeon rappelle que le bélier est connu dans de nombreux contextes au ProcheOrient, en Phrygie, en Assyrie, puis apparaît dans la plastique grecque. 92. Felsch 2007, n° 106, p. 256, pl. 7 et 18. 93. Mais il y a une ressemblance avec la tête B 5668, de fabrication péloponnésienne, sans doute du début du vie siècle : Gauer 1991, Le 67, pl. 1. 94. Gehrig 2004, St 24, p. 294, pl. 116. 95. Bieg 2002, p. 148-149, ST 14, fig. 24.

SUPPORTS ET TRÉPIEDS À BAGUETTES

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Au-dessus, le manchon se prolonge par un large ruban, se recourbant en crochet vers l’extérieur du cercle ; il porte à l’extérieur six groupes de deux filets, non disposés symétriquement ; l’intérieur est lisse, non poli. En-dessous, est conservé le haut d’une tête coulée en creux, d’épaisseur très irrégulière. Subsistent le haut du crâne lisse, un bandeau sur le front, les oreilles, non détaillées. L’ensemble donne l’impression d’une tête de la Grèce de l’Est, qui pourrait être de la première moitié du vie siècle. La fonction de ce fragment et du suivant ne fait pas de doute, comme le confirment deux ou trois trépieds, l’un à Nîmes, le second vu autrefois à Brindisi, et provenant de Capoue. Il s’agit dans les deux cas de trépieds à couronne supérieure double, comportant des protomes de chevaux ; ce sont des productions de Grande Grèce : les protomes de chevaux rappellent trois autres trépieds occidentaux, deux exemplaires complets à peu près identiques de Métaponte et Trebenishte, et un fragment de Dodone, à cercle double : les deux derniers font partie des nombreux ustensiles de bronze de Grande Grèce parvenus en Grèce du Nord-Ouest ou en Illyrie. Il s’agit donc du décor du raccord entre le cercle supérieur et les arceaux ou les tiges verticales ; l’état des deux fragments de Delphes empêche évidemment de choisir. Les crochets trouvent des parallèles à Samos96, mais sans association avec cette tête. Pour l’Occident, on a des exemples de crochets sur le trépied de Nîmes97, ou sur celui de Capoue98. G. Bieg le rapproche aussi des éléments de bronze d’un trépied conservé à Copenhague, acheté sur le marché de l’art à Rome, et provenant peut-être de Campanie99. Le trépied de GrandeGrèce du Metropolitan Museum of Art à New-York porte ce genre de crochets, sans la tête, sur la couronne inférieure100. Le style de la tête, pour autant qu’on puisse en juger malgré l’état fragmentaire, rappelle des œuvres de la Grèce de l’Est, où les personnages féminins portent voiles ou bandeaux arrangés d’une façon similaire ; les côtés du voile vont s’évasant autour du crâne, comme si la tête portait un diadème. Cela peut être comparé aux têtes de Grèce de l’Est, comme la tête voilée Berlin 1631, ou le fragment de colonne de Didymes décoré d’une tête féminine. G. Bieg estime que cet objet date encore, « stylistiquement », du viie s. 27. Ruban formant crochet. Trouvé en août 1895, dans les fossés à l’Ouest du temple. Inv. 3092 ; 23952. Bronze, 6 cm. Fig. 74-75. Inédit. Ruban formant crochet, du même type que le précédent, avec à peu près un tiers du pourtour du manchon. Largeur du crochet : 6,6 cm ; la tige devait être sensiblement plus grosse que celle du n° précédent. Piqûres de fonte sur la face externe. Le crochet porte six groupes de deux filets, d’un travail plus régulier que ceux du n° précédent (23953). La courbure du manchon indique un cercle beaucoup plus grand. Il est à peu près certain que nous avons les restes de deux trépieds. Il s’agit du décor du raccord entre le cercle supérieur et les arceaux ou les tiges verticales ; l’état des deux fragments de Delphes empêche évidemment de choisir. La fonction de ce fragment rappelle celle du numéro précédent. 28. Fragment d’arceau. Inv. 23960. Bronze, 10,8 cm. Fig. 76-78. Aurigny 2011, p. 157, p. 166, fig. 8 ; Aurigny 2016b, fig. 23, p. 169. Fragment d’arceau. Dim. max. : 10,8 cm ; diam. de la tige : env. 1,8 cm ; ép. de la barrette horizontale : 0,6 à 0,8 cm. Le fragment comprend un morceau de la tige de l’arceau et un motif figuré en bas-relief fixé à l’intérieur, comme sur le trépied de Métaponte101. Ce motif est fait d’une barrette qui se termine en un élargissement circulaire, où on attendrait une volute gravée, et l’arrière-train d’un lion : patte arrière, avec indication des griffes, cuisse et queue. L’ensemble est très négligé : l’aspect actuel n’est pas dû à l’usure ni au nettoyage. Ce morceau, particulièrement lourd, pose un problème technique. Aux deux cassures de la tige courbe, on distingue très nettement une couche de bronze, d’environ 2,5 mm, autour du centre, qui est également en alliage cuivreux, à reflets jaunes quand on le gratte : la coulée a été faite en deux fois. Cela s’explique probablement si on regarde, au revers, le montage du lion : il s’agit d’un motif plat, qui a été fixé à l’avant de l’arceau. On est donc conduit à supposer que c’est sur une première tige de bronze que le lion de cire a été fixé. Car la cassure inférieure de l’arceau, à droite, n’est pas une brisure accidentelle : c’est une surface plane, au centre de laquelle on voit bien une sorte de tige ou de clou. Dans ce trépied, qui était de dimensions exceptionnelles, le haut de l’arceau a été fait à part, et ce clou en assurait la jonction avec le reste. On a probablement, après fixation du lion sur la tige, trempé l’ensemble dans de la cire liquide, pour assurer la cohésion du motif décoratif et de la cire. Le fragment rappelle le décor des trépieds de Métaponte.

96. Gehrig 2004, ST 28 à 32, pl. 116. 97. Bieg 2002, p. 46, fig. 30 b, et p. 151, ST 29. 98. Id., p. 46, fig. 30 a, et p. 150, ST27 (Brindisi). 99. Id., p. 39, fig. 23, et p. 148, ST 13.

100. Stibbe 2000, p. 127-142. 101. Charlottenburg, trépied de Métaponte F 768 ; Gehrig et alii

1968, p. 95, pl. 15.

BRONZES DU HAUTARCHAÏSME À DELPHES

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On peut citer aussi en comparaison des documents étrusques, comme un support de chaudron de la collection Loeb, à Munich, provenant de San Valentino ; le traitement du lion est comparable, la croupe posée aux angles, avec la queue revenant sur le côté102. 29. Protome de griffon. Trouvé le 15 août 1895 dans le quartier de Pylaea. Bronze, 18 cm. Fig. 79-80. Perdrizet 1908, 86, n° 386, pl. 10,5 ; Herrmann 1979, p. 129 et n. 28 ; Gehrig 2004, p. 286, n. 915. Protome de griffon. Dim. max. 18 cm ; poids actuel 1,772 kg. Proportions plus trapues que d’ordinaire. Sur le cou, une boucle gravée de chaque côté, se terminant par un enroulement simple ; stries doubles de place en place sur la boucle ; « écailles » faites avec un poinçon à peu près demi-circulaire. Gros bourrelet d’une oreille à l’autre ; les oreilles sont larges et courtes. Le bouton est court, en boule aplatie ; trois « verrues » sur le front. Les yeux étaient incrustés, ils sont encadrés de deux bourrelets minces en bas, un gros bourrelet entre filets au-dessus. Bec bien ouvert, court, avec la langue bien distincte. Le noyau est conservé dans la tête ; à l’intérieur, trace d’un raccord du modèle entre le cou et la tête. Epaisseur du bronze en bas, à 2 cm du bord : 7 mm. Le montage est indiqué par trois encoches circulaires, deux sur les côtés (larg. au bord : 2,6 cm à droite, 2,8 à gauche) et une en bas (larg. : 3,3 cm). Elles correspondent à la fixation sur une tige horizontale et une tige verticale, de très gros diamètre (les encoches correspondent au quart ou au tiers du cercle), la solidité de l’assemblage étant assurée par un gros clou horizontal, qui a laissé un trou en avant, à la base du cou (diam. du trou : 5 mm, du clou : 3 mm). Aucune trace de fer. Il s’agit d’un très gros trépied à baguettes ; celui d’où provient le pied de lion inv. 1717, avec des tiges de 2,5 cm de diamètre, n’était guère plus petit. Cette protome a un parallèle précis à Olympie103, de mêmes dimensions ; le diamètre des tiges y est estimé à 3,2-3,4 cm. Ce griffon a en commun les dimensions, la forme du bouton ou des oreilles, et surtout celle du cou, qui se recourbe vers l’arrière, formant presque un angle à 90°. Mais il n’y a pas de clou horizontal sur cette protome, bien qu’elle conserve aussi des traces de rivets et quatre encoches circulaires qui assuraient sa fixation sur de grosses tiges ; la protome se situait à un croisement de deux tiges, dans un montage plus complexe que celui d’un trépied ordinaire. La comparaison très précise avec Olympie incite à voir dans l’exemplaire de Delphes un décor de trépied à baguettes. Pourtant, on peut hésiter pour la protome de Delphes entre plusieurs fonctions. Elle décorait très vraisemblablement un trépied à baguettes, mais on a pensé aussi au décor du timon d’un char, comme on en voit une représentation sur l’amphore « mélienne » d’Apollon104. D’autres représentations de protomes de griffon sur un timon de char sont connues, par exemple à Larissa sur l’Hermos105. Enfin, une protome de griffon conservée au Metropolitan museum à New-York, dont le cou qui se recourbe vers l’arrière se termine par une cavité rectangulaire, devait orner un meuble106 ; c’est une autre fonction possible de la pièce de Delphes. 30. Protome de serpent. Inv. 24963. Remise le 7 mars 1958 par un ouvrier. Bronze, 6,5 cm. Fig. 81. Aurigny 2016b, p. 169, fig. 24. Protome de serpent. Le dessus de la tête est plat ; il est probable que quelque chose y était soudé. Le cou est creux ; en haut, trace du contact avec une grosse tige horizontale ou oblique. Le dessous du cou porte les ondulations horizontales. Des parallèles assez précis à Olympie107 ou à Samos108 assurent que c’est un fragment de trépied à baguettes. Ce serpent a la même forme que les serpents ornant le lébès en argent doré trouvé dans la tombe Bernardini à Préneste109.

Commentaire Les objets de Delphes qui entrent dans la catégorie du trépied à baguettes forment un groupe disparate, mais assez nombreux. Il faut donc tenter de les replacer dans une évolution générale du trépied à baguettes pour comprendre de combien de types de trépieds ils témoignent à l’intérieur de la même catégorie.

102. Höckmann 1982, reliefs de bronze n° 13 et 15 p. 49-51, pl. 1819, et support de chaudron de la collection Loeb, p. 121, pl. 64-65, attribués à un atelier de l’Étrurie centrale sans plus de précision possible. 103. Herrmann 1979, n°S 62, pl. 86, 6-7. 104. Musée national d’Athènes, n° 911. Coulié 2013, p. 250-252, fig. 251c notamment.

105. Kjellberg 1942, fig. 8 p. 35. 106. Alexander 1941, p. 202-203, fig. 1. 107. Herrmann 1979, n° 63, 66, 67, pl. 86. 108. Gehrig 2004, St 74 et St 75. 109. Canciani, von Hase 1979, n° 16 p. 36, pl. 12-13.

SUPPORTS ET TRÉPIEDS À BAGUETTES

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Si la fonction de support de chaudron peut être remplie par différents objets – support conique, support en pierre110 – le trépied à baguettes est, à Delphes comme ailleurs, le plus répandu. Les premiers exemples semblent bien de fabrication orientale111, avant que des productions grecques et étrusques se développent et se poursuivent jusqu’au ve siècle ; il faut les prendre en compte toutes les deux pour comprendre l’ensemble du phénomène. Les trépieds à baguettes ont fait l’objet de quelques études d’ensemble112 et d’études particulières113 ; Le catalogue dressé par G. Bieg à l’occasion de l’étude du chaudron de Hochdorf est particulièrement utile, car il en propose une synthèse récente ; pourtant il ne prend en compte que très peu de fragments d’Olympie, alors que H.-V. Herrmann en a publié plus d’une centaine, et très peu de Samos, qui en compte également plus de 80. Il est indispensable de remonter à l’âge du bronze récent pour trouver les origines du trépied à baguettes114. Dès cette époque au Proche-Orient, la soudure est utilisée pour créer les tables à offrandes, formées d’un cercle et de trois pieds, comme les trépieds à baguettes115 ; il est lié, par les éléments du décor comme par la structure de l’objet, au type du support à quatre faces116, avec ou sans roues, étudié précédemment. Un rapide aperçu sur les différentes catégories de la famille des trépieds permettra de clarifier un peu la succession des différents objets117. Les plus anciens trépieds de bronze proviennent de Chypre, et sont datés des xiie et xie siècles ; ils appartiennent à une série de 17 supports en bronze118. Ils se caractérisent par le fait qu’ils sont entièrement en bronze, faits de parties – cercle supérieur, baguettes se terminant par des volutes, ou encore cercle intérieur reliant les pieds – assemblées entre elles. En outre, « les pieds de ces supports sont de section carrée jusqu’à leur extrémité, sauf sur trois exemplaires de la série, où ils se terminent en forme de sabot »119. En dehors de Chypre, ces documents sont connus, au Proche-Orient120, en Turquie121, en Crète122 et en Grèce123 ; la datation de l’ensemble de ce matériel va du xiiie, pour le document du Cap Chelidonya, jusqu’à la fin du viiie siècle pour les exemplaires grecs. Nous avons donc affaire à une série qui se développe sans solution de continuité124. Cette série se distingue des trépieds fondus (« cast tripods »), c’est-à-dire des trépieds de format miniature avec des pieds fondus, de section triangulaire : on en compte neuf à Chypre125, puis un en Jordanie, deux à Ras ShamraUgarit, et enfin un seul exemplaire en Grèce, à Olympie126. C’est vraisemblablement une production très limitée, peut-être la production d’un seul atelier, voire d’un seul artisan. La question que les chercheurs ont souvent posée est celle du lien entre la série chypriote de l’âge du bronze, et celle de l’âge du fer : comment s’est faite la transmission ? Il semble que les ateliers chypriotes aient une activité très limitée à partir de la fin du xie et au xe siècle, et le type ne se transmet pour cette période que par quelques exemplaires en terre cuite et en bronze127. On date quelques spécimens crétois de la fin de l’âge du bronze, mais il est difficile de savoir si ce sont des importations ou des productions locales128.

110. Herrmann 1979, p. 171. 111. On songe par exemple aux trépieds de Kourion ou d’Altin Tepe. 112. Savignoni 1897 ; Riis 1939 ; Cross 1974 ; Bieg 2002. 113. Joffroy 1960 pour le trépied de Sainte-Colombe ; Matthäus

1985 pour Chypre. 114. Voire même à l’âge du bronze moyen, quand, en Anatolie, les artisans inventèrent la technique de la soudure de différents éléments de bronze : Catling 1984, p. 73 ; Raubitschek 1998, p. 89. Voir la synthèse d’Ellen Macnamara dans Lo Schiavo, Romualdi 2009, p. 85-102. 115. Raubitschek 1998, p. 89. 116. Rolley 1977, p. 125-126 : « Ces trépieds sont faits, comme les supports, de tiges couronnées de volutes, qui supportent une couronne circulaire. Celle-ci présente les mêmes variantes, et les mêmes types de décor, que sur les supports à quatre faces […]. Il est indiscutable que les deux séries sont l’œuvre des mêmes fabricants ». 117. Voir aussi Bardelli 2015, p. 152 pour la clarification de la terminologie de ces objets (« rod tripods », « tripod stands » et « cast tripods »). 118. Matthäus 1985, p. 301-304, n° 677-693 (pour les deux derniers, le lieu de découverte n’est pas connu).

119. Amandry 1956, p. 252. 120. À Beth Shan, aujourd’hui au musée de Jérusalem : Riis 1939,

n° 2 ; Benson 1960, n° 14 p. 12 ; Catling 1964 n° 13 ; Matthäus 1985, a) p. 304. 121. Du Cap Chelidonya, au musée de Bodrum, Catling 1964 n° 2 et 12 ; Matthäus 1985, b, p. 304. 122. Matthäus 1998, p. 129-132. 123. 11 exemplaires sont recensés dans Matthäus 1985, p. 305306. 124. Rolley 1977, p. 129 : « la continuité de la fabrication est confirmée par les copies de terre cuite, qui montrent en même temps que les uns et les autres sont sinon fabriqués, au moins connus, du début à la fin, depuis Chypre jusqu’à la Grèce ». 125. Matthäus 1985, p. 310-311, n° 694-702, pl. 99-100. 126. Id., p. 311-312, a) à d). 127. Catling 1964, p. 214 ; Raubitschek 1998, p. 91. 128. À Fortetsa et Vrokastro ; un exemplaire de Cnossos est plus vraisemblablement une production locale : Matthäus 1985, p. 305 ; Raubitschek 1998, p. 91.

BRONZES DU HAUTARCHAÏSME À DELPHES

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Orientaux Chypre Nimrud130 Altin Tepe131 Trépieds urartéens132 Olympie Samos Delphes Athènes (Acr.) Isthmia Kalapodi Dodone Trikkala Crète, grotte de l’Ida Crète134 Asie Mineure Italie du sud Syracuse Vetulonia Vulci Préneste, Tombe Bernardini Préneste, Tombe Barnerini Civita castellana Populonia (Cop.) Étrurie Trestina Lugano Trebenishte135 Francfort Copenhague Nîmes (Pompéi) Châtillon (La Garenne) Total

Grecs (dont Grande-Grèce)

Étrusques

129

3 trépieds 16 fragments 1 complet 2 complets 4133 8

104 85 7 3 Amazones, 2 fragments 8 (18 fragments) 3 fragments 1 fragment 8 fragments 8 1 4 1 (Kamarina) 1 8 1 1 1 1 5 1

34

1 1 trépied et 4 fragments 1 1 1 1 249

17

Total 3 16 1 2 108 85 15 5 8 trépieds 3 2 trépieds 1 8 8 1 4 1 1 8 1 1 1 1 5 1 1 5 1 1 1 1 300

Tableau 1. — Éléments de trépieds à baguettes de l’âge du fer.

Au début du Ier millénaire, le matériel crétois permet de saisir la manière dont les ateliers de Crète ont développé la fabrication des trépieds à baguettes d’inspiration chypriote : un fragment de la grotte de l’Ida136 et un fragment de Vrokastro indiquent que la production commence à partir de l’époque protogéométrique, tandis que d’autres fragments de l’Ida, des tombes de Cnossos, de Palaikastro et d’Amnisos attestent la continuité de ces trépieds jusqu’au milieu du viiie s.137. On peut aborder la série des trépieds à baguettes en fer avec des éléments de fixation en bronze, datant de l’âge du fer. Trois exemples seulement sont rassemblés par H. Matthäus pour Chypre ; mais deux d’entre eux ont une 129. De Salamine, Kourion (entre New-York et Berlin), et un exemplaire miniature d’Idalion : Matthäus 1985, n° 718-720. 130. Un trépied du palais de Nimrud a été restauré, mais les fragments permettent de compter en tout 16 trépieds : Bieg 2002, p. 23. 131. Barnett, Gökçe 1953, Özgüç 1969, p. 70-71. 132. Bieg 2002, p. 26. 133. Herrmann 1979, S27-29, et S 30 (4 pieds à sabot).

134. Vrokastro (1), Palaikastro (1), Cnossos (3), Amnisos (1), Fortetsa (1), Symi (1) : Matthäus 1998, p. 129-131. 135. Filov 1927, p. 91-93, n° 133-138. 136. Matthäus 1998, p. 131, fig. 1 ; Sakellarakis 2013, vol. III, pl. 59,1. 137. Matthäus 1998, p. 130-131 ; Sakellarakis 2013, vol. III, pl. 59, 2-8.

SUPPORTS ET TRÉPIEDS À BAGUETTES

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importance considérable pour notre connaissance du type, vu leur état de conservation et les études qui en ont été faites. Il s’agit du trépied, avec le chaudron, trouvé en 1966 par V. Karageorghis dans le dromos de la tombe 79 de Salamine de Chypre, et du trépied de Kourion, dont les éléments (pieds à sabot, manchons à tête de taureau) sont partagés entre les musées de Berlin et de New-York. Ces deux exemples illustrent la part prise par Chypre dans la création de ce type de support ; mais il n’est pas sûr que l’origine des trépieds à baguettes ne soit pas à rechercher aussi sur la côte du Levant, voire plus à l’Est en Mésopotamie138. En effet, la découverte de 16 trépieds et de 12 chaudrons dans la salle royale du palais de Nimrud, dont certains portent des inscriptions, a fait penser à Barnett que c’était un butin de guerre pris sur les Levantins, tandis que J.E. Curtis suggère qu’il s’agit de productions d’un atelier syrien139. Enfin, la technique d’assemblage des trépieds à baguettes en fer et en bronze est illustrée par trois exemples complets de trépieds avec chaudron provenant de l’Urartu : seul le trépied de la tombe d’Altin Tepe possède un contexte de découverte, dans la seconde moitié du viiie s., les deux autres, à Karlsruhe et à Munich, sont très proches (celui de Munich portant aussi des protomes de taureau). La question de l’origine orientale reste ouverte dans l’état actuel des recherches140. La technique d’assemblage de baguettes en fer avec des éléments en bronze est à l’origine du groupe des trépieds à baguettes grecs. Les trépieds à baguettes n’en sont pas moins une spécificité du haut archaïsme dans le bassin méditerranéen : le trépied à baguettes appartient aux produits de luxe orientaux qui s’exportèrent vers l’Ouest, en Grèce et en Étrurie141. Pour H. Matthäus, les trépieds retrouvés dans les sanctuaires et les tombes de l’âge du fer se distinguent de leurs prédécesseurs chypriotes par leur forme circulaire. Delphes s’inscrit dans cette série par les documents qui illustrent, autant qu’on a les moyens d’en juger, deux productions, l’une orientale et l’autre grecque142. Mais l’état des objets trouvés en Grèce rend généralement difficile de reconnaître la part des importations chypriotes ou orientales et la part des productions locales. La technique d’assemblage semble spécifiquement orientale au départ143, mais les études sur ce matériel permettent difficilement de comprendre où et comment se fait la transmission du type et des techniques. Il y a en outre sans doute plusieurs ateliers grecs qui fabriquent des trépieds à baguettes144, vu le succès de cet objet. Le matériel de Delphes permet de formuler quelques hypothèses. Parmi les 15 exemplaires qui peuvent être classés dans cette catégorie, 8 peuvent être attribués avec vraisemblance à des trépieds orientaux, et les 7 autres à des trépieds grecs, de Grèce propre ou de Grande-Grèce. S’il y a beaucoup moins de fragments de trépieds à baguettes qu’à Olympie ou à Samos, en revanche les exemplaires orientaux sont plus nombreux à Delphes, même en nombre, pas seulement en pourcentage. Dans le premier groupe, il n’est pas possible de regrouper les objets : il faut donc supposer qu’il y avait au moins 8 trépieds différents. Du point de vue typologique, il est intéressant de noter qu’on trouve à Delphes davantage de pieds à sabot que de pieds de lion, qui sont pourtant plus fréquents145 ; or, les pieds à sabot apparaissent sur les trépieds orientaux et chypriotes, c’est-à-dire sur le trépied d’Altin Tepe146 et sur celui de Kourion147. Pour autant, les pieds de lion font aussi partie du répertoire chypriote, comme l’indique sans aucun doute possible le pied inv. 1717 (n° 19). Les pieds à sabot, interprétés comme des pieds de taureau148, sont également majoritaires dans les fragments retrouvés dans la chambre de bronzes du palais de Nimrud149, et datés de l’âge du fer. Il semble donc que tous les pieds de trépied que nous avons à Delphes attestent l’existence de supports de fabrication orientale150. La difficulté à effectuer le classement des trépieds de Delphes n’est en réalité que le reflet de la diversité des types orientaux.

138. Il faut tenir compte des fragments de Nimrud (Barnett 1967, p. 2, pl. I,3), ainsi que du trépied d’Altin Tepe. 139. Curtis 1995, p. 144. 140. Matthäus 1985, p. 339 ; Bieg 2002, p. 22. Mais les chercheurs rejettent dans l’ensemble l’idée de Catling, selon laquelle le trépied serait une invention des artisans mycéniens qui l’aurait diffusée jusqu’à Chypre. 141. Ibid. 142. Voir la tentative de Schweitzer 1969 de distinguer entre « östliche Gruppe » et « griechische Gruppe » ; mais il ne tient compte que des trépieds en bronze, en abaissant les dates, et non des trépieds à baguettes en fer et bronze. 143. Il semble que jusqu’au vie siècle, les artisans Grecs soient confrontés à la difficulté de la technique de la soudure ; il reste plus facile de couler les objets d’un seul tenant que de les assembler. C’est

ainsi que le support fait par Glaucos de Chios pour Alyattes constitue un véritable exploit, car l’artisan maîtrise la technique de la soudure d’éléments en fer (Hérodote I, 25) ; Bol 1985, p. 66. 144. Raubitschek 1998, p. 92. 145. À Olympie, il y a 5 pieds à sabot et 10 pieds de lion ; à Samos, on compte 20 pieds de lion, et pas de sabot. Voir Bieg 2002, p. 33. 146. Akurgal 1959, et Akurgal 1961a, pl. 30-32. 147. En outre, H.-V. Herrmann souligne à plusieurs reprises la fabrication orientale des pieds à sabot : Herrmann 1979, p. 195. 148. Les sabots du trépied d’Auxerre sont interprétés comme des sabots de capridés : voir Rolley 1962, p. 483. 149. Barnett 1967. 150. On connaît d’autres pieds de lion à Delphes, qui appartiennent à des ustensiles comme des bassins bas (podanuptères).

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L’examen des manchons et des éléments décoratifs ne suggère pas non plus une provenance claire ou unique ; toutefois la plupart des éléments, grecs ou orientaux, peuvent conduire à quelques conclusions. Dans le cas des manchons aussi, on éprouve pour chaque objet des difficultés à l’attribuer à une production orientale ou grecque : le manchon inv. 23970 (n° 20), en forme de T, n’a pas vraiment de parallèle, et l’exemplaire le plus approchant se trouve à Olympie, mais n’est pas caractérisé par H.-V. Herrmann comme un élément spécialement grec ou oriental. Si l’exemplaire inv. 7195 (n° 23), dont l’état de conservation est médiocre, semble de toute façon d’une facture peu soignée et ne trouve pas de vrai parallèle, en revanche la protome inv. 8400 (n° 22) renvoie aux protomes du trépied de Kourion, et a au moins un parallèle à Olympie, avec une tête qui décorait aussi une tige horizontale. Le modelé de la tête est assez schématique, et les yeux laissés creux pour recevoir une incrustation datent ces deux œuvres avant la fin du viie s.151. Enfin, la tête de taureau inv. 19891 (n° 24), pose un problème de fonction et d’origine : elle ne porte aucune trace la désignant comme provenant d’un manchon, mais elle était liée à une tige. Si sa forme, encore une fois, la rapproche des têtes orientales comme celles du trépied de Kourion, en revanche le décor de la tête renvoie à d’autres exemples, de fabrication grecque ou étrusque152. La tête de taureau de la collection Stathatos153 est pour cette raison aussi de fabrication grecque. On se reportera pour davantage de précision au classement des têtes de taureaux de chaudron154. Autre objet qui pose des problèmes de technique : la protome de griffon inv. 2885 (n° 29). Le parallèle avec l’exemplaire d’Olympie155 est très important, car H.-V. Herrmann démontre qu’il ne saurait s’agir d’une protome de chaudron, mais que ce griffon, grâce aux indices techniques et à la série stylistique à laquelle il appartient156, peut être identifié comme un décor de trépied. Toutefois le rapprochement avec le décor des chaudrons est déterminant, car ce type s’avère étroitement lié au type II des griffons faits selon une technique mixte, c’est-à-dire avec la tête fondue et le cou martelé. Or ce groupe est daté au milieu du viie s.157 et attribué aux ateliers argiens158 par H.-V. Herrmann ; mais pour U. Gehrig, il est proche du groupe monumental I (c’est-à-dire la technique mixte), et se trouve du même coup rapproché des productions samiennes, qui ne sont pas rares à Delphes, comme nous le verrons à propos des protomes décorant les chaudrons. Mais il y a une autre possibilité, qui a été proposée à partir de plusieurs documents : les protomes de griffon pouvaient être employées comme décor de l’avant d’un timon de char, au moins en Grèce de l’Est, comme sur les frises de sima de Larissa sur l’Hermos159. Nous connaissons d’autres protomes qui pourraient avoir joué ce rôle : l’une d’elles est au Fogg Museum160, une autre au Metropolitan à New York161. Enfin cette possibilité est attestée par la représentation du char d’Apollon sur l’amphore de Mélos, ainsi que par la protome de Brolio à Florence162. Delphes a livré encore d’autres éléments de trépied, comme un intéressant manchon à tête de bélier (inv. 6040, n° 25) ; le motif est rare dans cet emploi163, mais on en connaît un exemple à Samos, sur un manchon en forme de T et qui s’assemblait à des tiges de fer : c’est un équivalent technique et iconographique du document de Delphes, bien que différent par le style, puisqu’il montre une représentation très schématique. Or le bélier de Delphes est peut-être plus proche d’un trépied à baguettes apparu sur le marché de l’art à Lugano, sur lequel des têtes de bélier décorent les manchons de bronze qui relient la couronne supérieure aux tiges descendant vers les pieds164. Son attribution à la Grande-Grèce l’éloigne de la sphère samienne, alors qu’un groupe d’objets venus de Samos se dessine

151. Bieg 2002, p. 32. 152. Rolley 1962, p. 488. 153. Rolley 1963a, n° 29, p. 93-95, pl. XIII. 154. Infra, p. 97-103. 155. Herrmann 1979, n° S 62 (inv. B 4890), p. 186, et 129, 199,

200, 202, 206. 156. Les nos S 57-61 de Herrmann 1979. 157. Herrmann 1979, p. 206. 158. L’argumentation d’Herrmann tient aussi compte du fait que ce type de protomes n’a pas été retrouvé en dehors d’Olympie, et donc qu’il est vraisemblable qu’il relève d’une production péloponnésienne ;

l’exemple de Delphes montre que sa diffusion est plus étendue, ou qu’on peut proposer un autre atelier. 159. Kjellberg 1942, fig. 7, 8, 12, 13 et pl. 2 à 6, 8, 10 ; Akerström, 1951, pl. 1, 3, 5 et pl. couleur I et III. 160. Hanfmann 1957, p. 243. 161. Alexander 1941 p. 202 ; et Jantzen 1955, p. 80. 162. Jantzen 1955, p. 80. Contra Romualdi 1981, p. 21. 163. On connaît à Delphes des têtes de bélier comme ornement d’épingles, comme attache de récipient, peut-être comme décor de passe-guides de char. 164. Bieg 2002, p. 148-149, ST 14, fig. 24.

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assez clairement à Delphes165. On citera simplement à titre de comparaison la tête de bélier très schématique de Kalapodi, sur le haut d’une tige de bronze décorée d’une tête féminine166 ; ce document montre l’existence au début du viie s. de tentatives de création de trépieds en bronze grecs éloignés des modèles orientaux. Un rapprochement intéressant avec la tête de l’Apollon de Mantiklos a fait juger ce document béotien167. Dans le groupe des objets samiens qui furent dédiés à Delphes168, on doit citer notamment les « crochets » larges (n° 26 et 27), qui sont un trait distinctif des trépieds à baguettes samiens169 ; on n’en trouve aucun exemple à Olympie. Ils peuvent se situer en haut, sur la couronne supérieure, ou plus rarement en bas, comme sur le trépied conservé aujourd’hui à New-York170. L’exemplaire de Delphes, décoré d’une tête coulée qui semble provenir de Grèce de l’Est, suggère que ce sont des créations samiennes qui ont ensuite été reprises en Grande-Grèce. Le groupe tout à fait important d’objets samiens offerts à Delphes creuse encore l’écart avec Olympie ; il faudra voir toutes les conséquences de ces rapports avec l’Ionie171. Si les crochets se rattachent vraisemblablement à une production samienne, en revanche deux fragments témoignent de liens avec la Grande-Grèce ou la péninsule italique. Le fragment d’arceau décoré d’un arrière-train de lion renvoie aux petits serpents enroulés, dont le corps forme une spirale, et la tête se projette vers l’avant, que l’on trouve sur le trépied de Métaponte, à Berlin172, et qu’on connaît aussi à Olympie173. Ce trépied présente de grandes similitudes avec le trépied retrouvé dans la tombe XIII de Trebenishte174 ; or, ces documents sont attribués aux ateliers laconiens, de Tarente ou de Métaponte, et datés du début du 2e quart du vie siècle175. La tête de serpent pose un problème de classement, car c’est un motif que l’on rencontre ailleurs que dans le décor des trépieds à baguettes, bien évidemment. La protome inv. 24963 (n° 30) a toutefois des parallèles précis à Olympie et à Samos. Il faut donc imaginer ce type de tête de serpent comme décor soudé sur les baguettes internes d’un trépied ; sur le trépied de Métaponte, on en trouve, nous l’avons dit, comme décor entre les arceaux, avec la protome dressée vers l’extérieur. Ce même trépied de Métaponte montre des têtes de serpent terminant les tiges qui, partant des pieds de lion, se rejoignent pour former le cercle inférieur qui renforce l’ensemble. Dans les deux cas, aucun élément dans le montage ne se trouve placé au-dessus de la tête serpentine. U. Gehrig attribue la tête St 74 à un atelier « égéen », dont il se demande s’il faut le situer sur la côte ionienne ou en Crète176 ; H.-V. Herrmann rappelait aussi, pour les figures décorant la couronne des trépieds, les hésitations des chercheurs entre Samos et la Crète. Delphes a donc reçu des trépieds à baguettes de fabrication orientale et grecque, et de différents ateliers à l’intérieur de chaque tradition. On voit que pour bon nombre d’objets, il est bien difficile de dissocier les objets orientaux, grecs et étrusques ; il y a une véritable continuité dans la production, avec des emprunts, des mélanges. Delphes en tout cas reçoit une grande variété de trépieds, même si le petit nombre de fragments est trompeur, et rend plus difficile de replacer correctement les morceaux177. Très peu de fragments peuvent aller ensemble ; il faut donc compter pas moins de 15 trépieds à baguettes dans le sanctuaire. Delphes est un bon témoin des grandes capacités techniques développées très tôt par les Grecs, imitant les trépieds à baguettes alliant tiges de fer et éléments de bronze venus d’Orient. Mais au vu de la variété du matériel, à Delphes et en dehors de ce sanctuaire, il est bien difficile d’attribuer aux différentes cités leur production respective. On peut toutefois résumer ainsi la situation à Delphes : le sanctuaire a livré des trépieds de technique composite, que l’on trouve aussi à Olympie, à Samos, à Chypre et sans doute en Grande-Grèce. Ces fragments sont datés assez haut, au viie et au début du vie s., par rapport aux trépieds de cette catégorie, et à plus forte raison à ceux des

165. Infra, p. 150-151. 166. Felsch 2007, n° 106, p. 256, pl. 7 et 18. 167. Bieg 2002, p. 42. 168. Rolley 2005a, p. 346. 169. Gehrig 2004, p. 285. 170. Stibbe 2000, p. 127-142. 171. Infra, p. 150-151. Mais il faut résister au « samocentrisme »

d’U. Gehrig, qui veut rattacher à Samos tant les griffons que les fragments de trépieds à baguettes de Delphes ; il attribue par exemple le pied de lion inv. 1717, manifestement chypriote, à Samos : Gehrig 2004, p. 287.

172. À Charlottenburg, trépied de Métaponte F 768 ; Gehrig et alii 1968, p. 95, pl. 15. 173. Herrmann 1979, S 69-74. 174. Stibbe 2000, p. 78-88. 175. Rolley 1982, p. 52, 69 ; Stibbe 2000, p. 83-85. 176. Gehrig 2004, p. 108. 177. On est loin en effet du nombre de fragments retrouvés à Olympie (108, en tenant compte des éléments en fer publiés dans Olympische Forschungen 32, Baitinger,Völling 2007), ou à Samos (85 fragments) ; mais, on peut le rappeler encore, le taux de conservation du bronze à Delphes est beaucoup plus faible que sur ces deux autres sites.

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autres « classes ». À peine peut-on faire allusion, avec les objets de Delphes, aux trépieds du groupe MétaponteTrebenishte178 ; aucun objet en tout cas ne s’y rattache clairement. Il n’y a pas non plus de trépied à couronne double, ni de trépieds à protomes de canards. L’éventail des types découverts à Delphes est donc finalement assez restreint, bien que les formes particulières puissent varier ; toutefois on ne saurait en déduire un nombre limité de lieux de provenance. Le trépied à baguettes est un objet originaire d’Orient, dont on connaît des versions orientales, chypriotes, grecques et étrusques pendant trois siècles. Il montre le développement technique de l’artisanat grec qui a fabriqué des trépieds à baguettes, qui prenaient naturellement la suite des trépieds géométriques à cuve clouée179. Les nombreuses variantes et la diffusion très large de cette catégorie (carte 2, fig. 82) témoignent aussi de la liberté de création par rapport aux modèles orientaux. Bien qu’il soit difficile de distinguer des productions régionales ou locales, quelques particularités sont visibles. Chypre semble avoir inventé la forme du trépied à baguettes à deux couronnes qu’elle conserve aux viiie et au viie s. D’autre part, les trépieds du groupe Métaponte-Trebenishte sont étroitement liés à l’artisanat des colonies laconiennes de Grande-Grèce, et donc à la tradition artisanale de Sparte. Cette catégorie se caractérise aussi par sa répartition : on note que la Crète, notamment, n’a pas développé de production au-delà du géométrique récent et qu’on n’y a pas retrouvé de trépieds alliant le fer et le bronze180. Il y a donc bien, pour cette catégorie comme pour d’autres, une spécialisation des ateliers qui développent leur propre version de ce support, qui ne rencontre pas partout le même succès.

178. Je renvoie pour ces « classes » à la présentation synthétique proposée par H. Bieg : Bieg 2002, p. 21-67. 179. Sauf dans le cas des trépieds crétois qui s’inspirent, dès le protogéométrique, des modèles chypriotes.

180. Trépieds à baguettes crétois : Grotte de l’Ida, Matthäus 2011, p. 112, fig. 5 ; Sakellarakis 2013, vol. II, p. 85-86, vol. III, pl. 59.

Chapitre 3 Appliques en forme de protomes : griffons, sirènes, taureaux (nos 30-90)

Les chaudrons à cuve mobile et leur décor sont considérés comme les objets les plus caractéristiques de l’« époque orientalisante ». Le classement oblige à distinguer les appliques qui décoraient un chaudron de celles qui décoraient un autre récipient ; il va de soi qu’on ne saurait être catégorique dans certains cas, mais il a fallu choisir, et le reste des appliques sera présenté ensuite. Les chaudrons de Delphes n’ont pas été étudiés depuis le volume 3 des Fouilles de Delphes V consacré aux trépieds à cuve clouée ; peu de nouveautés peuvent être apportées au bilan qui était alors dressé. Rappelons que la principale difficulté vient de ce qu’on ne sait pas distinguer une cuve à laquelle étaient cloués des pieds d’une cuve mobile décorée d’appliques, sans les traces de rivets. Même le profil n’est pas déterminant. Or, dans la dizaine de chaudrons présentés, aucun ne présente la forme et les traces de rivets caractéristiques de la cuve mobile à appliques. Seul un fragment de cuve porte le départ d’une protome de griffon martelée : nous l’étudierons donc avec les griffons.

Protomes de griffon Catalogue Griffons martelés 31. Fragment de chaudron. Trouvé en 1903 à Marmaria. Inv. 19898. Bronze, 47,5 cm. Fig. 83-84. Perdrizet 1908, p. 85, n° 384, fig. 289 ; Herrmann 1966, p. 143, n. 4 ; Filippakis 1983, p. 131, n° 14 et 15 et fig. 17 et 18, p. 128 ; Magou 1991, p. 563 (analyse de l’alliage). Fragment de cuve à rebord épaissi1, avec manchon de fixation d’une protome martelée. Dim. max. : 47,5 cm ; diam. du manchon : env. 9,5 cm à l’attache, env. 7,6 cm au départ du manchon ; larg. du rebord de la cuve : 9,5 mm ; ép. à la cassure, là où elle n’est pas oxydée : env. 1 mm. Le manchon est fixé par trois rivets, conservés, disposés irrégulièrement ; diam. des têtes de rivet, à l’intérieur : 1,3 cm. À gauche, sont conservés deux des trois trous de fixation d’une autre applique, qui ne peut être qu’une sirène orientale, les sirènes grecques étant fixées par deux rivets seulement.

1. « Le rebord “épaissi” est celui de tous les chaudrons à cuve clouée, et d’une proportion importante des chaudrons mobiles », Rolley 1977, p. 26.

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On rencontre le même type de manchon de fixation de protomes sur le chaudron retrouvé à Olympie en 1956, inv. 4224 : ce sont dans ce cas des protomes de lions, qui ont la même fonction que les protomes de griffons, associées à des griffons et à des appliques en forme de sirènes. 32. Protome de griffon. Trouvée dans les fouilles Lerat de 1934-1935, au Nord-Est du sanctuaire d’Apollon. Inv. 30933. Bronze, 41 cm. Fig. 85-89. Lerat 1938, p. 224-225, et pl. 4 ; Jantzen 1955, n° 12 ; Herrmann 1979, p. 57, 147 et 162, n° 8 ; Rolley 1979, p. 13, fig. 14 (manque l’oreille) ; Filippakis 1983, p. 131, n° 71 et 72 ; Magou 1991, p. 563 (analyse alliage) ; Gehrig 2004, p. 11 n. 46, p. 24, n. 99, p. 89 n. 342, p. 112 n. 474, p. 323 n° 6 ; Rolley 2005a, p. 55-65 ; Aurigny 2010, p. 238, fig. 39 ; Aurigny 2017a, p. 39, fig. 1. Protome de griffon martelée. Tôle très oxydée, avec quelques lacunes, complétées à la cire. L’oreille droite, seule conservée à la découverte, a disparu, avant d’être retrouvée, et remise en place en 2000 (fig. 89). Dim. max. : 41 cm ; h. du manchon (partie visible, bourrelet compris) : 6,5 cm an arrière, 16,5 en avant ; dim. ext. du cercle de fixation : 25 x 20,5 cm ; largeur du replat : 1,9 à 2,3 cm. Elle est composée de deux parties emboîtées. En bas, un manchon, qui était lisse, porte en haut un bourrelet qui bloque la protome proprement dite. Sur le replat du bas, on voit l’emplacement de deux des rivets qui le fixaient à la cuve ; il a pu y en avoir un ou deux autres dans la partie disparue, en haut. Les écailles qui couvrent le cou sont des bossettes soulignées par un demi-cercle poinçonné. Il porte trois mèches faites au repoussé et striées, l’une dans l’axe à l’arrière, de chaque côté une plus petite, avec un enroulement terminal unique. La tête est du type qui allie une mâchoire inférieure de lion à la mandibule d’un bec d’aigle. Dans la gueule, la langue en saillie est encadrée de rangs de carrés au repoussé ; sur le dessus, six ondulations horizontales entre deux rangs de stries entre filets, qui font le tour de l’intérieur du bec. La gueule-bec est entourée d’un filet au repoussé, strié. L’état du métal empêche d’être certain que l’intérieur a été fait d’une feuille de métal travaillée à part et sertie. Les deux yeux semblent être les extrémités d’un boudin horizontal ; l’œil droit, seul bien conservé, a une dépression centrale. Le bouton sommital habituel est peu développé, moins saillant que les yeux. L’oreille avait une face externe plane (h. 3,7 cm). Lors de la restauration, l’intérieur a été couvert de cire, ce qui a fait disparaître d’éventuels restes du remplissage2. Cette protome est proche des protomes G5 et G6 d’Olympie, datées vers 7003, presque au début de la production ; mais si ces protomes présentent deux mèches latérales, elles ont aussi les yeux exorbités, reliés par un petit bourrelet continu ; leurs oreilles ont également une face externe plane, même si elles n’ont pas de forme conique. L’intérieur de la protome G5 est plâtré, mais il ne semble pas que l’intérieur de la gueule était serti. Enfin, le décor de surface est très semblable à inv. 30933, avec des bossettes soulignées d’un poinçon en forme de demi-cercle, assez grand. Un autre document fournit un bon parallèle pour l’oreille, le fragment de griffon G1, daté de la fin du viiie siècle : en effet l’oreille du griffon de Delphes est conique, sans présenter de face antérieure plane. 33. Protome de griffon. Trouvée le 25 avril 1944, sous le dallage de la fontaine, à l’angle Sud-Ouest du mur polygonal. Inv. 7734. Bronze, 29,5 cm. Fig. 90-94. Amandry 1944-45, p. 67-74 ; Jantzen 1955, n° 7 et pl. 2,3 ; Amandry 1958b, p. 8, pl. V, 1 ; Herrmann 1979, p. 66, 147 et 163, n° 44 ; Filippakis 1983, p. 132, n° 71 et 72 ; Magou 1991, p. 563, n° 71 et 72 ; Rolley 1991, p. 155-156, n° et fig. 18 ; Gehrig 2004, p. 112 n. 476, p. 324 n° 69 ; Rolley 2005a, p. 58. Protome de griffon martelée. Le métal, très oxydé, est inégalement conservé ; c’est le remplissage, complet, qui conserve la forme de l’objet. H. max. : 29,5 cm. On distingue la limite du manchon, lisse au moins en bas, avec le bourrelet supérieur ; le replat de fixation à la cuve est replié. Le cou portait les trois mèches habituelles ; le bas de celle de droite, avec un enroulement simple, est conservé. Elles se rejoignent au sommet, entourant le bouton sommital. On devine par endroits des écailles. Moins nettement que pour la précédente, la gueule est faite d’une mâchoire de lion, arrondie au bout, et d’une mandibule d’oiseau de proie. La langue fait saillie de la même façon ; elle porte sur le dessus des points en creux, assez espacés. Le bord de la gueule donne l’impression que l’intérieur était fait à part et serti. Les yeux très proéminents sont entourés de bourrelets superposés, comme pour la protome précédente. Au sommet, deux « verrues » en avant du bouton sommital. Le remplissage est fait d’un mélange de bitume et de terre calcaire.

2. Une oreille, retrouvée dans les années 1960, remise à l’Éphorie, puis égarée, a été retrouvée et restaurée par Aristophanis Konstantatos en 2000. C’est certainement celle de ce griffon (vérification faite séparément par A.K. et Cl. Rolley. : il y a à la base contact avec le contour sur plus de 1 cm) ; mais elle n’a pas la forme qu’indique la photo

dans Lerat 1938 : mauvais montage en 1938 ?) : c’est un large cône à pointe arrondie (h. 4,9 cm ; ép. du métal 1 à 1,5 mm). Elle a été remise en place par A.K. Preuve supplémentaire : il y avait avec un petit morceau de l’entourage (3 bourrelets) de l’œil gauche. 3. Herrmann 1979, pl. 4-5.

APPLIQUES EN FORME DE PROTOMES

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La protome G6 d’Olympie, datée vers 700, présente la même façon de faire les yeux très proéminents, de forme presque cylindrique, séparés par des petites verrues, même si les yeux de inv. 7734 ne sont pas si cylindriques ; l’oreille est similaire, un peu arrondie en haut, avec un plan antérieur marqué. L’examen de G 15 montre que la taille de cette protome est proche de celle de Delphes, même s’il lui manque le manchon. Les yeux exorbités, faits de plusieurs bourrelets superposés, légèrement allongés, les deux petites verrues, ressemblent beaucoup à 7734 ; le décor d’écailles en U est aussi très similaire. G 16, très proche de G 15, est donc également un bon parallèle à inv. 7734. Il faudrait aussi mentionner G 35, pour la forme du bouton, des protubérances à l’avant, et les mêmes yeux proéminents, quoiqu’avec un traitement différent de la pupille. G36, proche en apparence, montre plus de différences dans les détails. 34. Protome de griffon. Inv. 24948. Bronze, terre, 25 cm. Fig. 95-97. Perdrizet 1908, p. 85, n° 383, fig. 288 ; Jantzen 1955, n° 31 ; Herrmann 1979, p. 163, n° 71 ; Gehrig 2004, p. 112 n. 476, 117, n. 518, p. 324 n° 71 ; Rolley 2005a, p. 58. Remplissage d’une protome de griffon martelée. « Ce bronze était très mince, et tellement oxydé qu’il est tombé en morceaux entre les mains des ouvriers », selon P. Perdrizet4. H. cons. : 23 cm. On voit nettement deux tresses terminées en spirales de chaque côté, le raccord du manchon et à l’arrière le dessin en U des écailles. Le remplissage est une matière terreuse noirâtre, compacte, mais pleine de grains et de fissures, et englobant des débris clairs friables. Ce fragment appartient au même groupe que le n° précédent. 35. Fragment de protome de griffon. Inv. 24955. Bronze, 9 cm. Fig. 98-100. Filippakis 1983, p. 131, n° 17 (et non 16) ; Magou 1991, p. 563 (analyse de l’alliage) ; Gehrig 2004, p. 112 n. 480, 117 n. 517, p. 324, n° 725. Fragment de la tête d’une protome de griffon martelée. Dim. max. : 9 cm. Sont conservés le dessus du bec, l’œil gauche, le bouton sommital, entouré d’un cercle en relief, l’oreille gauche. La forme de l’œil est très particulière : proéminent, il ressemble à une sphère creusée au centre. Le bouton est formé d’un petit cylindre bas, tandis que l’oreille est un cône à peine plus aplati sur sa face principale. Si le traitement du bouton suggère un rapprochement avec G1 d’Olympie, en revanche l’œil n’est pas creux et l’oreille a une forme conique sur la protome d’Olympie. Elle a donc plutôt des éléments communs avec les protomes G5 et G6 déjà mentionnées. 36. Protome de griffon. Trouvée en 1938, entre le trésor des Athéniens et le péribole Ouest. Inv. 6406. Bronze, 14 cm. Fig. 101-104. Amandry 1938, p. 310-312 et pl. 34,4 ; Jantzen 1955, p. 13, n° 6, p. 32-33, et pl. 2,2 ; Herrmann 1979, p. 55 et n. 4, p. 162, n° 5 ; Filippakis 1983, p. 123, fig. 5 ; p. 126, fig. 15 ; Magou 1991, p. 563 (n° 16, et non 17) analyse alliage et structure métallographique ; Gehrig 2004, p. 13 n. 56, p. 112 n. 475, p. 323, n° 23. Protome de griffon martelée. Le métal est replié en bas ; manque le dessus de la tête : le fragment conservé sur la photo de 1938, qui donnait le départ du bouton sommital, a disparu (fig. 104). Le cou porte des écailles en U, peu serrées, mais pas de boucles. Petites stries obliques sur le pourtour du bec, qui est peu saillant ; il est impossible de décider si la moitié inférieure est une mâchoire de lion. Sur la langue, en léger relief, un rang de stries entre deux rangs de points. Placée par U. Jantzen dans le premier groupe des protomes martelées, cette protome est aussi citée comme parallèle aux griffons G3 et G4 d’Olympie6 : G3 a la même forme des yeux un peu exorbités et allongés, le bec décoré de stries, la langue décorée de points et de motifs en arête de poisson ; la tôle martelée est toutefois assez épaisse (de 1à 3 mm). Elle ne présente pas de traces de remplissage ; elle porte le même type de traces de poinçon en forme de U que inv. 6406. G4, qui est une protome de griffon fragmentaire, dont il reste l’œil et bouton, a aussi des ressemblances avec inv. 6406 ; son œil est proéminent, de forme allongée, en amande, cerné par des paupières décorées de stries. Mais sa petite taille fait penser aussi aux exemplaires d’Olympie G26 ou G27. À Samos également, on peut trouver un point de comparaison dans le n °4 7, du « groupe Barberini », daté vers 690-670 ; en outre, U. Gehrig fait un parallèle avec un griffon sur une applique à trois branches de Delphes, inv. 2669, qui proviendrait du même atelier.

4. Perdrizet 1908, p. 85. 5. U. Gehrig la mentionne pour la rapprocher du groupe de

l’ « atelier Barberini », vers 690-670.

6. Herrmann 1979, pl. 2. 7. Gehrig 2004, pl. 3.

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37. Remplissage d’une protome de griffon. Trouvé en 1972, dans les sondages à l’Est du sanctuaire d’Apollon. Terre, 7,7 cm. Fig. 105. Rougemont 1973, p. 510-511, sans fig. (non reconnu). Une partie du remplissage du haut de la tête d’une protome de griffon martelée. L. cons. 7,7 cm. On reconnaît la mandibule supérieure du bec, le très gros œil gauche, les deux « verrues » au départ du bec. Le fragment ajoute donc un exemplaire du type le plus détaillé. Le fragment est tellement ruiné qu’on ne saurait proposer des comparaisons. Griffons fondus 38. Protome de griffon. Inv. 1213. Trouvée le 16 avril 1894, en contrebas de l’Hellénico, dans une couche noire et dure, sur le sol vierge. Bronze, 13,5 cm. Fig. 106-107. Perdrizet 1908, p. 86, n° 379 bis et fig. 290 ; Jantzen 1955, p. 18, n° 63 ; Herrmann 1979, p. 108 n. 28, p. 164 n° 175 ; Gehrig 2004, p. 38 n. 147, 55 n. 233, p. 326, n° 157. Protome de griffon. Manquent l’oreille gauche et le bouton ; il reste le bourrelet qui marquait le départ ; l’anneau de fixation n’est conservé qu’en arrière. H. max. 13,5 cm. Le cou est élancé. A la base, un bourrelet porte des groupes de trois stries transversales. Deux longues boucles à enroulement terminal sont en relief, ornées aussi de groupes de trois stries. Le bourrelet habituel va d’une oreille à l’autre ; le bourrelet qui le termine de chaque côté a la forme d’une virgule couchée. Oreilles de section triangulaire, arrondies au bout. Le bec n’est pas très ouvert, avec la mandibule inférieure courte, large à la base, et une langue étroite, bien détachée. Stries transversales sur le contour du bec. Les yeux sont coulés avec la tête, l’angle arrière plus aigu que l’avant, le contour supérieur très arqué. Ils sont entourés de deux bourrelets, l’extérieur, plus large, strié. Sauf le bec et les oreilles, la surface est entièrement décorée avec deux poinçons : un poinçon circulaire (diam. 2 mm) sur la tête et le bourrelet sous le cou, un autre, en U, un peu plus grand, sur le cou. La protome a conservé son noyau, généralement brunâtre, qui s’arrête, en bas à environ 2 mm au-dessus de l’anneau de fixation. Juste à ce niveau, un petit trou circulaire, à l’arrière, peut-être la trace d’un distanciateur, tige qui soutenait le noyau dans le moule ; ce peut être aussi l’explication de deux trous un peu plus gros, sur le côté gauche. À cause de cette trace de distanciateur, on peut rapprocher cette protome de inv. 2620, n° 41. Elle est proche de la protome G 71 d’Olympie (conservée à Athènes), et se situe dans le groupe moyen. Le détail du filet saillant à la base du bouton se retrouve sur des protomes du premier groupe des protomes fondues8. Mais la protome de Delphes a un parallèle précis dans une protome de Phères9, avec laquelle elle partage le rendu des paupières et le traitement de la boucle en relief. À Samos aussi, le griffon inv. B 70910 présente la même forme des yeux et la même boucle en relief que l’exemplaire delphique ; il est daté vers 670-650. 39. Protome de griffon. Trouvée le 23 mai 1896, hors du téménos d’Apollon, près de la poterne du grand autel. Inv. 3737. Bronze, 13 cm. Fig. 108-109. Perdrizet 1908, p. 86, n° 380 bis, et pl. 10,3 ; Jantzen 1955, p. 18, n° 62 ; Herrmann 1979, p. 104, 164 n° 144 ; Rolley 1991, p. 155-156, n° et fig. 19 ; Partida 2003, p. 427, n° 710 ; Gehrig 2004, p. 37, n. 144, p. 325 n° 153 ; Aurigny 2010, fig. 40, p. 238. Protome de griffon, brisée en bas. Coulée épaisse (ép. à la cassure : 6 mm). Le gonflement du noyau, conservé, a fait éclater le métal en arrière ; le noyau blanchâtre, que Perdrizet dit « extrêmement dur », est actuellement friable en bas. Deux boucles à enroulement terminal, la spirale finale indistincte. Aux extrémités du bourrelet qui va d’une oreille à l’autre, un petit bourrelet transversal au départ des oreilles, plus allongées que celles du n° précédent. Le bec a la même forme, la langue moins détachée. Les yeux, coulés avec la tête, plus grands que ceux du n° précédent, sont entourés d’un bourrelet lisse. Le bouton supérieur, de profil biconique, semble entièrement conservé. Décor fait avec un poinçon en arc de cercle ; les écailles s’arrêtent en bas, nettement plus haut que la cassure. Cette protome est proche de inv. 2889 et 1225, nos 40 et 44. U. Jantzen a classé cette protome dans le troisième groupe des protomes fondues, tandis que U. Gehrig l’attribue à l’atelier « Rundkopf », parmi les plus anciennes protomes fondues11, vers 670-650. À Olympie, on peut la rapprocher de G 67-68.

8. Jantzen 1958, pl. 32,2 et 3. 9. Jantzen 1955, n° 61.

10. Gehrig 2004, p. 37, n° 46, pl. 20 ; Jantzen 1955, p. 18, n° 66. 11. Gehrig 2004, par exemple n° 43 p. 37, pl. 18.

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40. Protome de griffon. Trouvée le 15 août 1895 dans les tranchées de Pylaea12. Inv. 2889. Bronze, 10,5 cm. Fig. 110-112. Perdrizet 1908, p. 86, n° 381 bis ; Jantzen 1955, p. 27, n° 181 ; Jantzen 1958, p. 47 ; Herrmann 1979, p. 167, n° 402 ; Gehrig 2004, p. 79 n. 315, p. 332 n° 474. Partie supérieure d’une protome de griffon, qui devait être très proche du n° précédent. Manquent le bouton et le haut des oreilles ; h. cons. 10,5 cm. Pas de bourrelet au départ des oreilles. Le décor d’écailles fait au poinçon se prolonge sur le bec. Bien que la présentation actuelle la penche excessivement vers l’avant, le cou de la protome forme une courbe très ronde. Cette protome rappelle inv. 3737, mais la courbure du cou est plus accentuée, et les mèches ne sont plus rendues en relief. Elle a aussi des parallèles à Samos, où elle est proche des n° 213-21713, c’est-à-dire le septième groupe des protomes fondues de Jantzen, repris par Gehrig, et daté vers 630-620. À Olympie, Herrmann la place dans le groupe tardif IV. 41. Protome de griffon. Trouvée le 22 juin 1895, sous la maison d’école. Inv. 2620. Bronze, 18 cm. Fig. 113-115. Perdrizet 1908, p. 86, n° 382 bis, pl. 10,4 ; Jantzen 1955, p. 20, n° 82 ; Herrmann 1979, p. 113, n. 39, p. 164, n° 188 ; Filippakis 1983, p. 132, n° 18 ; Magou 1991, p. 562 (analyse de l’alliage) ; Gehrig 2004, p. 60 n. 251, p. 328 n° 264 ; Aurigny 2016a, fig. 9, p. 36. Protome de griffon. Manquent les oreilles et le bouton ; plusieurs manques dans le cou ont été bouchés à la restauration ; le mauvais état de l’épiderme semble dû à un nettoyage énergique. Mais l’objet avait été réparé dans l’antiquité : on a remplacé le bouton (mal venu à la coulée ?) en insérant une pièce nouvelle dans un trou ; en haut du cou, à gauche, une pièce ronde peut boucher le trou laissé par un distanciateur. Au-dessus de l’anneau de fixation (trois rivets, un seul conservé), un bourrelet porte des groupes de cinq stries. Le cou est décoré de chaque côté de deux boucles gravées à enroulement terminal : les deux paires naissent l’une au-dessous de l’autre, à l’arrière ; elles portent des groupes de cinq stries. Le bec est assez ouvert, avec les commissures arrondies ; la langue est bien détachée. Les yeux étaient rapportés et sont marqués par un gros bourrelet au-dessus. Une « verrue » centrale devant le trou qui marque l’emplacement du bouton ; il en partait de chaque côté (l’épiderme est usé à cet endroit) une boucle gravée qui suit le dessus de l’œil et se termine en spirale devant le départ de l’oreille ; sur ces boucles, traces de stries transversales. Le gros bourrelet qui va d’une oreille à l’autre disparaît sous le cou. Le décor au poinçon a laissé de petites dépressions juxtaposées. Cette protome peut être rapprochée de inv. 1213 pour le distanciateur, n° 38. Elle est par ailleurs classée par Herrmann dans le groupe tardif I, avec G 76 : bien qu’elle ait perdu son bouton, elle présente en effet le même décor gravé de mèche se terminant par une volute au-dessus des yeux ; de plus, le fragment d’Olympie 76a présente le même bourrelet à la base du cou, et le dessin gravé de l’extrémité des volutes enroulées sur le cou est tout à fait semblable. À Samos, Jantzen la place dans le quatrième groupe des protomes fondues ; Gehrig va plus loin dans la précision, en affirmant que c’est le même ciseleur samien qui a fait la protome d’Olympie G 76, G 76 a, et celle-ci, et qu’il reste des traits de l’atelier monumental II, daté des années 660-640. Elle est donc proche des nos 78-8014 à Samos. Une parenté avec les ateliers crétois n’est pas à négliger. 42. Protome de griffon. Trouvée le 16 mai 1924, sur la terrasse à soutènement polygonal à l’Ouest du sanctuaire, en contrebas du portique de l’Ouest (« pseudo-Herméion »)15. Inv. 5606. Bronze 13 cm. Fig. 116-118. BCH 1924, p. 477 (sans fig.) ; Gehrig 2004, p. 112 n. 478, p. 327 n° 248. Protome de griffon. Dim. max. 13 cm. Surface rongée : plusieurs manques ; il ne reste rien du décor. Le bouton supérieur était pointu avant nettoyage, ainsi que la mandibule inférieure. Proportions générales trapues. Il reste un des trois rivets de fixation, sur un anneau large (1,3 cm) ; un voile de bronze ferme à demi l’orifice. Gros bourrelet sous le cou ; on devine un petit bourrelet transversal à la jonction avec les oreilles. Bec large, assez court ; langue étroite. Les yeux sont coulés avec la tête ; un bourrelet au-dessus. Cette protome se situe dans le premier groupe des protomes fondues de Jantzen, plutôt parmi les exemplaires les plus récents du groupe16. On peut donc restituer un décor d’écailles gravées, mais sans les boucles qui apparaissent plus tard ; en outre, les imperfections techniques sont caractéristiques d’un document qui représente une des premières applications de la fonte en creux en Grèce17. U. Gehrig la place dans le cercle de la protome miniature n° 71, de l’« atelier monumental II », daté des années 660-640.

12. Nom du faubourg de Delphes où se réunissait l’Amphictionie ; il se trouve à l’ouest du sanctuaire, jusqu’à l’emplacement du cimetière et de l’église du prophète Elie. 13. Gehrig 2004, p. 79, pl. 80-81. 14. Gehrig 2004, pl. 30

15. Dans la chronique de 1923 (p. 518) et 1924 (p. 476), cette terrasse est appelée « Herméion », nom auquel P. de La Coste-Messelière a ensuite renoncé. 16. Jantzen 1955, n° 45, pl. 15. 17. Id., p. 57-60.

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43. Protome de griffon. Trouvée le 10 mai 1894, à 2 m du trésor des Sicyoniens (côté Est), à la hauteur des fondations. Inv. 1549. Bronze, 23 cm. Fig. 119-120. Perdrizet 1908, 86, n° 383 bis, pl. 10,1 ; Jantzen 1955, 21, n° 95 ; Herrmann 1979, p. 114, 165 n° 210 ; Gehrig 2004, 64 n. 268, p. 328 n° 299. Protome de griffon. Oreilles brisées ; le bouton, manquant, a laissé un trou rond ; manque l’extrémité de la langue ; deux déchirures, en bas du cou et sous le bourrelet. H. cons. 23 cm. Cou très sinueux, se rétrécissant fortement du bas au premier angle. Le bourrelet supérieur s’aplatit sous le cou ; petit bourrelet transversal au départ des oreilles. La mandibule inférieure du bec est courte et pointue, la langue relevée ; le haut forme un grand crochet ; le bec est entouré d’un filet mince. Au-dessus des yeux, qui étaient incrustés, grand plan vertical, avec un gros filet ; vu de face, il forme un angle droit avec le dessus de la tête, qui est plat. Décor d’écailles au poinçon, en arc de cercle, sauf sur le bec. Le traitement de cette protome la rapproche de inv. 1225 (n° 44), ainsi que de inv. 4289 (n° 45). Placée par Jantzen dans le cinquième groupe des protomes fondues, cette protome fait partie des exemplaires de taille moyenne ; chez Gehrig, elle trouve une place dans les productions du « groupe 6 », datées vers 640-630, et est très proche des nos 96-97. Elle est classée par Herrmann dans le groupe tardif II, avec G 80, G 81 et G82 : une comparaison précise avec G 81 fait apparaître en effet de grandes similitudes, en particulier dans la protubérance qui relie les deux yeux, le petit ressaut à la base des oreilles, ou le décor d’écailles au poinçon en tout petits arcs de cercle, couvrant la surface sauf le bec. 44. Protome de griffon. Trouvée le 17 avril 1894, dans le dépôt de l’opisthodome. Inv. 1225. Bronze, 19 cm. Fig. 121-122. Homolle 1894, p. 441 ; Perdrizet 1908, p. 86, n° 384 bis, pl. 10,7 ; Jantzen 1955, p. 21, n° 96 ; Herrmann 1979, p. 115, p. 165 n° 243 ; Rolley 1979, p. 13, fig. 15 ; Gehrig 2004, p. 58 n. 245, p. 328 n° 256. Protome de griffon. Manquent la pointe des oreilles et un éclat du cou. H. cons. : 19 cm. Le cou est assez large à la base et se rétrécit rapidement. Le tour des oreilles porte de fines stries transversales. Les oreilles sont minces et longues, au-dessus de deux bourrelets. Les yeux sont creux. Le bouton sommital est très haut, de profil complexe. La langue est probablement déformée. La zone verticale au-dessus des yeux est moins développée que sur le n° précédent. Décor d’écailles au poinçon en V aux branches légèrement courbes, sauf sur le bec. Le traitement de cette protome la rapproche de 1549 (n° 43), ainsi que de 4289 (n° 45). Placée dans le groupe tardif II par Herrmann, elle est comparée à Olympie à G 84 : de très nombreux rapprochements peuvent être faits, comme la forme du cou, la forme des écailles en V, décorant les mêmes parties. Ce parallèle permet de confirmer que la langue était légèrement déformée, mais qu’elle se recourbait fortement comme sur l’exemplaire d’Olympie. À Samos, elle appartient au groupe de « l’atelier monumental II » de Gehrig, daté vers 660-640. 45. Protome de griffon. Trouvée le 30 avril 1901 à Marmaria. Inv. 4289. Bronze, 19,5 cm. Fig. 123-124. Homolle 1904, p. 5 ; Perdrizet 1908, p. 86, n° 385 bis, fig. 290 bis ; Jantzen 1955, p. 22, n° 107 ; Herrmann 1979, p. 165 n° 244 ; Partida 2003, p. 428, n° 711 ; Gehrig 2004, p. 61 n. 255, p. 328 n° 278. Protome de griffon. Oreilles et bouton brisés presque au départ. H. cons. : 19,5 cm. Proche des deux précédentes, mais de taille légèrement supérieure. Dans l’état actuel, la tête est pleine, sauf un conduit horizontal d’un œil à l’autre. La zone bombée au-dessus des yeux est assez développée, plate sur le dessus. Les yeux, cernés par un trait incisé, étaient incrustés ; le bec aussi est brodé d’un trait ; la langue est dressée, formant un jeu de courbes habituel avec le cou sinueux, qui se rétrécit légèrement de la base au bourrelet du bas des oreilles. Le décor d’écailles s’étend sur toute la surface, à l’exception du bec. Cette protome présente des ressemblances avec 1225 (n° 44) et 1549 (n° 43). Gehrig la rapproche de protomes de Samos n° 86 et 87 18, qui sont des exemplaires de l’atelier « Schmuckring », vers 660-640. 46. Protome de griffon, trouvée le 19 mai 1896, à l’Ouest du théâtre. Inv. 3708. Bronze, 9,3 cm. Fig. 125-126. Perdrizet 1908, p. 86, n° 386 bis ; Filippakis 1983, p. 131, échantillon 19 ; Magou 1991, p. 563, échantillon 19. Moitié inférieure d’une protome de griffon, proche des précédentes. Dim. max. cons. : 9,3 cm ; diam. ext. de l’anneau de fixation (plus large en bas qu’en haut) : 6,6 cm. La surface est mal conservée ; quelques traces de poinçon. Le cou, assez large à la base, avec un anneau de fixation plus large en bas qu’en haut, et trois rivets inégalement espacés, se rétrécit fortement après s’être recourbé vers le haut. Cette protome est proche de 4289, 1225, 1549. La forme de la protome la rattache à un des groupes tardifs de Jantzen, du cinquième au septième groupe.

18. Gehrig 2004, p. 61 et pl. 33.

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Technique mixte 47. Protome de griffon. Inv. 8396. Bronze, 21,5 cm. Fig. 127-128. Perdrizet 1908, p. 87, n° 390, pl. XI, 1 et 1bis ; Jantzen 1955, p. 65, n° 75, pl. 26,4 ; Herrmann 1979, p. 118, 122123, 167 n° 417 ; Rolley 1991, p. 155-156, n° et fig. 20 ; Partida 2003, p. 428, n° 712 ; Gehrig 2004, p. 48 n. 195, 55 n. 234, 141 n. 576, p. 327 n° 218 ; Aurigny 2010, fig. 41, p. 238. Tête de griffon coulée, fixée à l’origine par des rivets (probablement 8, partiellement conservés) sur un cou martelé. H. : 21,5 cm ; de la pointe du bec à l’arrière : 16 cm. Creuse, y compris les oreilles et le bouton ; une réparation antique entre les oreilles. Le bourrelet qui passe sous le cou est directement prolongé, sans séparation, par les oreilles, creuses du côté externe. Bec court, aux mandibules pointues ; le contour est souligné par un trait gravé et de petites stries obliques. Le palais et le bas, de chaque côté de la langue, portent des traits transversaux espacés ; la langue est très détachée, la pointe fortement relevée. Les yeux creux, courts et ouverts, sont soulignés au-dessus par trois bourrelets marqués. Gros bouton sommital, fait d’un pédoncule et d’une boule aplatie, surmontée d’un grain, non centré. Trois « verrues » entre les yeux, celle du centre nettement plus grosse. Les encadrant, naissent deux sillons qui se prolongent en filet double, dessinant une boucle qui se termine en spirale au-dessus de la commissure du bec. Décor d’écailles en U sur le bourrelet et en arrière du bouton. On connaît des parallèles précis à ce document, qui appartient au groupe monumental, qui allie une tête fondue à un cou martelé. Dans le classement de Gehrig, on compte plus d’une trentaine de griffons de ce groupe. On peut citer en particulier une tête de Samos, de l’atelier monumental I19 (mais qui n’a pas le même décor de volute autour de l’œil) ; cette tête, légèrement plus petite, a conservé son cou martelé, l’ensemble mesurant 55 cm de haut. La protome de Delphes devait donc mesurer entre 60 et 65 cm de haut, pour un chaudron de 4 à 5 m de haut. D’autres têtes peuvent être citées : une tête de l’Acropole20 et des têtes d’Olympie21. Mais les têtes relevant de la technique mixte n’ont pas toutes été attribuées au même atelier : Jantzen distingue deux productions, l’une samienne et l’autre péloponnésienne. Dans l’ouvrage récent de Gehrig, ces protomes sont attribuées à Samos, alors qu’Herrmann les donnait à Argos. 48. Protome de griffon. Trouvée le 17 mai 1996, dans les remblais au Nord-Est de la nouvelle réserve épigraphique, lors des travaux du nouveau musée. Inv. 23846. Bronze, 15,5 cm. Fig. 129-130. Rolley 1999, p. 467. Tête de griffon, du même type que la précédente. H. cons. : 15,5 cm ; d’avant en arrière : 11,6 cm. Il manque la pointe du bouton sommital et celle de la langue, et les oreilles ; le contour, en arrière, est conservé en bas, avec un des rivets de fixation sur le cou. Le bouton est plein, les oreilles l’étaient aussi. Le bourrelet qui passe sous le cou se rétrécit en haut ; un gros bourrelet transversal le séparait des oreilles. Les bourrelets au-dessus des yeux sont moins accentués que sur la tête précédente, la langue moins en relief. Le décor gravé est plus simple, sans les boucles latérales à enroulement ; mais une double ligne en U inversé, en arrière du bouton, semble être un souvenir de ce motif ; aucune indication à l’intérieur du bec. Sauf le bec, le reste est couvert de petites écailles serrées. Cette tête illustre la même technique que la précédente. Elle peut être rapprochée aussi des protomes d’Olympie G 93 et suivantes22, et de celles de Samos n° 57-59 en particulier23. La comparaison avec les exemples de Samos permet de reconstituer une protome d’environ 50 cm de haut, pour un chaudron de 3 à 4 m de haut. Autres griffons 49. Protome de griffon. Trouvée en 1989, au lieu-dit « Stathmos ». Inv. 16516. Bronze, 7,2 cm. Fig. 131-133. ƏƔƐƝƒƎƆ 1995, ƶ. 215, Chronique BCH 1996, p. 1199.

Protome de griffon. Sur un cou très court, de forme légèrement évasée, traversé par un rivet juste sous la mandibule, la tête du griffon présente des caractéristiques très particulières. La gueule est très ouverte, le bec projeté en avant, formant avec la partie inférieure un angle droit. Les oreilles sont courtes, dans le prolongement du bourrelet autour de la mâchoire, qui n’est plus qu’un pli. Le bouton est formé d’un petit cylindre et d’une galette aplatie. Les yeux à peine modelés sont faits d’une petite excroissance du bronze, percée de chaque côté d’un trou. L’ensemble dénote un traitement assez schématique, souligné par le décor graphique du contour du bec. Le cou et le rivet font douter que cette protome ait pu orner un chaudron. Le montage est rare. Les caractéristiques de cette protome la placent à part : était-elle même un décor de chaudron ?

19. Jantzen 1955, n° 72 ; Gehrig 2004, n° 58. 20. Jantzen 1955, n° 73 ; MN 6635. 21. Herrmann 1979, G 93 et suivantes, mais G 104, G 105 et

G 106 appartiennent à la production d’un autre atelier, corinthien pour Herrmann et Gehrig. 22. Herrmann 1979, G 93-98. 23. Gehrig 2004, n° 57-59, pl. 24.

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50. Protome de griffon. Trouvée en 1989, au Nord du musée, par les élèves du collège. Inv. 16915. Bronze, 6,5 cm. Fig. 134-136. ƏƔƐƝƒƎƆ 1995, ƶ. 215, Chronique BCH 1996, p. 1199.

Protome de griffon coulée. Elle est corrodée et sur la surface arrondie qui termine, le cou conserve deux clous par lesquels la protome était fixée au chaudron. Malgré sa petite taille, elle présente le bourrelet canonique au bas des oreilles, qui sont courtes. Sur la tête, le bouton, qui était une simple tige, est rejeté en arrière ; la zone des yeux forme une protubérance massive. On ne distingue pas la pointe de la langue dans le bec largement ouvert. Cette protome rappelle certains documents miniatures de Samos24, mais on ne saurait proposer de parallèles bien précis. 51. Oreille de griffon. Inv. 24949. Bronze, 10 cm. Fig. 137-139. Inédit. Oreille, d’une tête du groupe « monumental ». H. cons. : 10 cm ; le bas, correspondant au début de la tête, est creux (ép. min. à la cassure : 5 mm). L’inclinaison de l’amorce de la tête indique qu’il s’agit d’une oreille droite. Les oreilles de la tête inv. 8396 donnent un élément de comparaison. 52. Oreille de griffon. Inv. 24953. Bronze, 4,9 cm. Fig. 140-141. Inédit. Ces oreilles courtes, avec une arête à l’extérieur (trace d’un raccord de moule selon U. Gehrig) sont celles de protomes « monumentales », et pourraient révéler une production samienne. Elle est d’un type ancien (deuxième ou troisième groupe de Jantzen). 53a. Oreille de griffon. Trouvée le 25 mai 1893, au pied de l’angle Sud-Ouest de la terrasse de l’opisthodome du temple d’Apollon. Inv. 24946 (1925a). bronze, 9,2 cm. Fig. 142-144. Perdrizet 1908, n° 387 p 86, fig. 2. Oreille, d’une paire, de la même tête de griffon du groupe « monumental ». L’oreille 24946, qui est l’oreille droite, est un peu déformée. H. cons. : 9,2 cm, dont 7,8 et pour l’oreille elle-même. Cette oreille a conservé un petit fragment de la tête, qui est martelé (ép. : 0,6 à 0,8 mm) ; les deux oreilles paraissent y être soudées. 53b. Oreille de griffon. Trouvée le 25 mai 1893, au même endroit que la précédente. Inv. 24951 (1925b). bronze, 9 cm. Fig. 145-146. Perdrizet 1908, n° 387 p 86, fig. 2. Oreille, d’une paire, de la même tête de griffon du groupe « monumental ». L’oreille 24951, qui est l’oreille gauche, a gardé sa forme intacte. H. cons. 9, cm, dont 7,7 pour l’oreille elle-même. Ces deux oreilles, qui ont dû appartenir à la même tête, assez larges à la base, concaves sur leur face externe, allongées mais pas très pointues, ont la forme courante dans le troisième groupe de Jantzen. En fait, la minceur du petit fragment de la tête qui est conservé indique sans doute que c’était une tête du groupe monumental, le seul où la paroi soit aussi mince ; cela s’accorde aussi avec les dimensions des oreilles. 54. Oreille de griffon. Inv. 24945. Bronze, 7,1 cm. Fig. 147-148. Inédit. Oreille de griffon. La pointe est brisée, et le bas mal conservé ; h. cons. : 7,1 cm. La surface est corrodée. L’oreille est très étroite, haute, et très peu concave. Ce type d’oreille appartient aux griffons coulés peu anciens, datés de la seconde moitié du viie siècle25. 55. Oreille de griffon. Inv. 24950. Bronze, 7 cm. Fig. 149-151. Inédit. Oreille de griffon. La pointe est brisée. Elle est entièrement plate à l’intérieur. On trouve à Samos des oreilles tout aussi plates : elles appartiennent à des protomes récentes et sont datées de la seconde moitié du viie siècle. 56. Oreille de griffon. Inv. 24952. Bronze, 7 cm. Fig. 152-153. Inédit. Oreille de griffon. La pointe arrondie est intacte, mais il manque plusieurs mm en bas. La surface est très corrodée, mais on perçoit encore la forme légèrement concave de l’oreille. Ce type d’oreille appartient aux types récents de protomes de griffons coulées, de la seconde moitié du viie siècle. 24. Gehrig 2004, n° 295, p. 256 et pl. 91.

25. À partir du « groupe 6 » de Gehrig 2004, voir p. 174.

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57. Tête de griffon à bélière. Trouvée le 9 novembre 1893 à l’Ouest du trésor d’Athènes. Inv. 951. Bronze, 8 cm. Fig. 154-155. Perdrizet 1908, p. 85, n° 385, pl. 10,6 ; Gehrig 2004, p. 9 n. 35 ; p. 92, n. 364 ; p. 94 n. 385 ; p. 112 n. 479 ; p. 156 n. 665, p. 323 n° 47. Tête de griffon, à bélière. Manquent un éclat qui a emporté l’oreille gauche, deux autres dans la région de l’oreille droite, un en bas du cou. H. (la base étant à plat) : 8 cm ; diam. de l’ouverture de la bélière : 1 cm. L’objet est creux ; reste du noyau en haut. Il était fixé sur un chaudron par un anneau, où sont conservés deux trous de rivets. La structure générale est à peu près celle des protomes. Les oreilles courtes ne prolongent pas le bourrelet. En bas, la vue de profil suggèrerait une mâchoire, comme sur les protomes anciennes, mais, de face, cela ressemble à un bec. Les yeux, très saillants, coulés avec la tête, sont tournés vers l’avant, entourés de paupières en bourrelet, séparées par un trait du côté externe. Bouton sommital court, conique ; quatre verrues entre les yeux. C’est là un intermédiaire intéressant, qui paraît unique, entre plusieurs types. La structure de l’objet et le mode de fixation sont ceux des protomes de taureau. La construction de la tête renvoie aux premières protomes coulées, dont cette applique doit être contemporaine. Cette protome présente les caractéristiques du premier groupe des protomes fondues du classement de Jantzen26, en gardant certains traits des protomes martelées, surtout du second groupe. Si l’on considère les débuts de la création de l’image du griffon, la forme générale trapue de cette protome rappelle un exemplaire d’Olympie27 : les oreilles sont assez différentes, celles de G2 sont coniques et à pans coupés, le bouton est plus haut sur l’exemplaire de Delphes, mais la forme de la gueule, des yeux, la difficulté à identifier mâchoire ou bec, rapprochent ces documents. Le décor au poinçon en U est abondant sur la protome d’Olympie, la tôle y est assez légère.

Commentaire Parmi les appliques qui décorent les chaudrons à cuve mobile, les protomes de griffon sont les plus nombreuses, devant les sirènes et les têtes de taureau. Elles ont été étudiées en détail en particulier par Ulf Jantzen, Hans-Volkmar Herrmann, puis, plus récemment, par Ulf Gehrig ; mais ces études qui traitent du matériel de Samos et d’Olympie ne considèrent Delphes que de façon ponctuelle. Il est donc légitime de se demander ce que les protomes de Delphes peuvent apporter aux classements qui existent déjà, et aux problèmes particuliers que soulève la production de protomes de griffons28. La carte de répartition des griffons montre bien que les chaudrons portant ces protomes ont été retrouvés surtout dans le monde grec, et en particulier dans les sanctuaires d’Ionie et de Grèce continentale (tableau 2, p. 64 et carte 3, fig. 156) ; la Crète est exclue de cette répartition, comme c’était le cas pour les trépieds à baguettes les plus récents. Très loin derrière les quantités très importantes de griffons retrouvés à Samos et à Olympie, Delphes se classe en troisième position pour le nombre de griffons, et offre des griffons de chaque type, martelé, fondu ou mixte. En outre, les exemplaires de chacun de ces types sont dans la moyenne des productions trouvées ailleurs. Il y a à Delphes 7 protomes de griffons martelées, sur un total de 28 protomes de griffons, ce qui correspond à la proportion moyenne de griffons martelés (25%29). Sur 300 protomes samiennes, 14 sont martelées, ce qui fait un pourcentage beaucoup plus faible qu’à Delphes (seulement 5%) ; à Olympie, sur 111 protomes, 65 sont martelées (soit près de 60%)30.

Origine L’origine même des protomes reste très débattue. Le griffon est connu dans l’art syrien depuis le IVe millénaire ; il appartient au répertoire de l’art créto-mycénien, qui lui-même est adopté en Orient31. Le problème est celui du griffon du viiie siècle : est-il un pur emprunt à l’Orient, ou une création grecque ? Les chercheurs Allemands, qui ont

26. Jantzen 1955, n° 33 à 45. 27. Herrmann 1979, G2. 28. Voir aussi Aruz 2014 et Aruz, Seymour 2016 : mais l’expo-

sition du Metropolitan pas plus que les actes du colloque ne renouvellent la liste des protomes de griffon ou n’offrent de synthèse sur la question.

29. On compte en effet 120 protomes martelées pour un total de 569 protomes connues. 30. Ces données chiffrées ont été établies à partir de la publication la plus récente de l’ensemble des griffons, c’est-à-dire celle de Gehrig en 2004. 31. Leventopoulou 1997, p. 609.

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publié l’essentiel du matériel, sont partisans d’une origine totalement grecque des protomes de griffons. D’autres ont un avis différent, qui voient dans des documents orientaux la source des griffons tels qu’on les a retrouvés en Grèce. Les arguments sont de trois ordres : iconographiques, archéologiques et techniques, dans ce dernier cas pour certaines protomes martelées seulement. Du point de vue de l’iconographie, R.D. Barnett a le premier mis en évidence que les griffons qui apparaissent à l’époque orientalisante en Grèce sont très différents de ceux qu’avait créés l’art de la Crète et de Mycènes ; celui du viie siècle a des oreilles de cheval32, un bouton sur la tête, et une langue dressée dans sa gueule ouverte. Les trois parallèles que R.D. Barnett propose ne sont pas négligeables, bien que peu nombreux. Il fait référence d’abord à un griffon en relief d’Ankara (fig. 157)33, avant de montrer que c’est une figure que l’on rencontre ailleurs en Orient, dans des reliefs de Tell Halaf, en Syrie du Nord (fig. 158)34, ou dans un fragment de Nimrud, une tête de griffon en pierre blanche qui, avec sa crête, son bec crochu et des boucles le long du cou, fait un très bon modèle pour les griffons trouvés dans les sanctuaires grecs35. L’objectif poursuivi par Barnett dans son article est de montrer que les créations des zones occidentales de l’Orient, comme l’Anatolie ou la Syrie du Nord, sont influencées par l’art de l’Urartu36 ; nous ne retiendrons que les différents exemples montrant que le griffon était bien connu et illustré par des documents différents en Orient. Après Barnett, E. Akurgal a lui aussi apporté des éléments prouvant l’origine orientale des griffons, en remarquant leur tête très particulière, faite, pour les plus anciennes, d’une mâchoire inférieure de lion et d’une mandibule supérieure d’oiseau ; c’est le cas de la protome martelée la plus grande de Delphes, inv. 30933 (n° 32, fig. 85). « Or ce type ne se retrouve que sur un petit nombre de reliefs néo-hittites de Syrie du Nord, à Ankara et Sakçegözü, où des hommes- griffons ont aussi la longue boucle à spirale terminale et, dans un cas, le bouton sommital qui est une des caractéristiques des protomes »37 (fig. 159)38. Ces reliefs sont datés de la seconde moitié du viiie siècle, ce qui contribue encore à en faire des modèles vraisemblables pour les griffons martelés trouvés en Grèce. Les Grecs n’ont pas repris le griffon phénicien, qui lui-même vient de l’iconographie créto-mycénienne, mais ont choisi le type de l’art néo-hittite récent39 ; seule la crête que l’on voit sur certains hommes-griffons de Sakçegözu n’a pas été reprise par les griffons trouvés en Grèce40. Le rôle des modèles urartéens n’est toutefois pas à négliger, dans la mesure où les griffons et les hommes-griffons de Toprak Kale arborent des spirales doubles, comme on le verra aussi sur les protomes grecques41. Les arguments archéologiques sont moins favorables à l’idée d’une origine orientale des protomes de griffon. En effet, si le parallèle avec les reliefs néo-hittites, présentant toutes les caractéristiques du griffon martelé, a toute chance d’être pertinent, il n’en reste pas moins qu’aucun griffon en bronze martelé exactement comparable à ce qu’on a trouvé dans les sanctuaires grecs n’est connu en Orient42. Parmi les quelques griffons connus en Orient, on peut citer un petit griffon trouvé parmi les objets du trésor de Ziwiyé43, qui rassemblait des objets d’inspiration assyrienne et de type scythe, mais que l’on date du ixe au viie siècle. Ce petit griffon en or est en outre d’un style différent des protomes de griffons retrouvées en Grèce ; mais il « présente des détails qui sont communs à de nombreuses protomes de bronze : la forme du bec (où le léger ressaut qui en divise la partie supérieure accuse la ressemblance avec un bec de perroquet), le bourrelet hachuré qui borde la bouche, les deux excroissances entre les yeux, la collerette de trois rangs de plumes […],

32. Voir les commentaires sceptiques de Benson 1960, p. 61. 33. Barnett 1948, fig. 9, p. 11. 34. Oppenheim 1955, pl. 89-90. 35. Barnett 1948, pl. XI d. 36. On sait depuis 1966, avec l’ouvrage de Van Loon, Urartian

Art, qu’il y a un art de cour urartéen, et un art périphérique, jusqu’à la Syrie du Nord, qui rassemble des traditions artistiques plus larges. 37. Rolley 2005a, p. 63. 38. Akurgal 1961b, pl. 134 39. Akurgal 1992, p. 34-35. 40. La crinière du griffon de l’Artémision d’Éphèse étudié par Gudrun Klebinder-Gauss fait exception. Klebinder-Gauss 2005, p. 131-136.

41. Akurgal 1992, p. 35-36 ; voir aussi Wartke 1990, p. 43-44, n° 2, pl. II : statuette de griffon coiffé d’un polos provenant de Toprak Kale ; il porte deux mèches de chaque côté du cou. 42. Cette situation est rappelée succinctement en dernier lieu dans Klebinder-Gauss 2005, p. 133 et Klebinder-Gauss 2007, p. 151. En revanche des griffons coulés ont bien été retrouvés dans des régions orientales : O.W. Muscarella en donnait une liste dans un article faisant le bilan sur les attaches de chaudron grecques et orientales (Muscarella 1992, p. 36). Enfin, G. Klebinder-Gauss souligne les aspects néo-hittites du griffon de l’Artémision d’Éphèse. 43. Trouvé dans des fouilles clandestines en 1947 sur la colline de « Ziwiyé », dans la province du Kurdistan, au Sud-Est du lac d’Urmia, il fut immédiatement dispersé et de nombreuses pièces furent exportées. Au musée de Téhéran.

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l’oreille de mammifère »44. Le griffon de Ziwiyé n’est pas le seul connu en Orient : on a trouvé au début des années 1960 un grand chaudron dans le dromos de la tombe « royale » 79 de Salamine de Chypre, sur l’épaule duquel quatre « sirènes » barbues portent chacune deux protomes de griffons sur leurs ailes (fig. 160). Ces protomes, datées de la fin du viiie siècle, présentent un cou allongé et légèrement sinueux, séparé de la tête par un bourrelet réduit à une arête, au-dessus de laquelle le bec s’ouvre largement ; au sommet de la tête, se dresse un bouton couronné par un disque plat. Ces griffons sont différents des premiers griffons martelés, mais fournissent une attestation de l’existence du motif en Orient45. Ces griffons correspondent à un griffon de type syro-palestinien, « avec sa tête ronde, sa volute latérale, et son bec ouvert tourné vers le haut »46, mais avec des oreilles assez petites ; ce type est naturellement repris à Chypre. Ce griffon est différent du griffon créé dans la zone de la Syrie du Nord et du Sud anatolien : le griffon à volute latérale, à oreille et crinière de cheval, avec un bouton frontal prolongeant la boucle latérale, et le bec grand ouvert. C’est ce dernier type qui a été repris par les Grecs, tandis que l’autre est parvenu en Étrurie, même en Espagne47. Tous ces indices incitent fortement à conclure à l’existence du modèle du griffon en Orient48 ; mais le manque de documentation empêche de proposer un lieu de fabrication précis, tout au moins des doutes demeurent sur les ateliers qui faisaient les protomes et les fixaient sur les chaudrons. Seul un examen très attentif du matériel peut apporter quelques réponses, à la question de savoir ce qui est effectivement repris à l’Orient, un motif formel ou des objets complets ; étaient-ce les objets qui étaient importés d’Orient, par le biais de marchands ou de voyageurs, ou les hommes, c’est-à-dire les artisans orientaux, qui voyageaient ?49 Il faut aussi prendre en compte le fait que c’est en Grèce que la protome de griffon a véritablement connu son grand développement50 ; si les premiers griffons martelés sont orientaux, la plus grande partie de la production est grecque. Le succès de ce motif iconographique dans le monde grec est aussi visible sur d’autres objets ou dans d’autres techniques : il existe notamment des chaudrons de terre cuite à protomes de griffon51. L’exemplaire du Céramique montre d’ailleurs que le type est éloigné des créations de bronze, et que l’artisan a dû élaborer lui-même une image du griffon. D’autres exemples présentent des images du griffon bien proches des monstres immortalisés dans le métal52. Les tenants d’une origine totalement grecque de la protome de griffon ont toutefois soulevé un certain nombre de questions qui restent sans réponse chez les partisans des griffons « orientaux ». On s’interroge avant tout sur les raisons pour lesquelles, en tenant compte des hasards de l’archéologie, on n’a pas trouvé en Orient de griffons de bronze correspondant aux types trouvés en Grèce. Pourtant on a bien trouvé des « sirènes » orientales en Grèce comme en Orient, parfois sur des chaudrons qui portaient aussi des protomes de griffons martelées53 ; si l’on suppose que les protomes sont grecques, alors il faut imaginer que des ateliers grecs ont importé du Proche-Orient des chaudrons pourvus de sirènes, ou au moins les sirènes, pour ajouter les protomes de griffons, avant, dans le cas de Préneste et Vetulonia, de les renvoyer en Étrurie54. Cette hypothèse manque de preuves concrètes, car on ne voit pas quel(s) atelier(s) aurai(en)t pu intervenir dans ce processus55 ; mais c’est une tentative pour rendre compte de la distribution des protomes de griffon dans le bassin méditerranéen. Si les premiers griffons martelés étaient fabriqués par des artisans orientaux pour l’exportation, ils ont pu parvenir aussi bien chez les Grecs que chez les Étrusques, d’autant plus s’ils étaient produits sur place par des Orientaux. Le cas des griffons est enfin très intéressant pour réfléchir à l’opposition entre Grèce et Orient, qui n’est peut-être pas « aussi stricte qu’on la définit d’ordinaire »56 : l’examen du matériel ne permet pas de proposer une répartition 44. Amandry 1958a, p. 91. 45. Ce sont des griffons fondus. 46. Delplace 1980, p. 84. 47. Id., p. 111. 48. Mais les conclusions tirées de la documentation sont variées :

« the weight of the argument seems clearly on the side of those scholars who claim Greek origin for the cauldron griffin », Raubitschek 1998, p. 86. 49. Akurgal 1992, p. 40 : il laisse entendre que les chaudrons à protomes de griffons ont été faits d’abord en Grèce par des artisans orientaux ; ceci expliquerait alors la présence des griffons de technique orientale non en Orient, mais dans les sanctuaires grecs, où ils auraient répondu à une demande particulière de commanditaires soucieux de se faire remarquer. 50. Si l’invention de l’image peut être attribuée à l’Orient, le phénomène le plus intéressant est celui de la transposition d’un modèle

en deux dimensions en pierre à une protome de bronze en volume : Croissant 2010. 51. Un exemple a été trouvé au Céramique à Athènes (supra, p. 122), d’autres en Crète, à Gortyne ou Arkades. 52. Akurgal 1992, p. 47 : la cruche d’Égine ou un petit griffon en ivoire d’Éphèse sont très proches des protomes de chaudron. 53. Rolley 2005a, p. 62 : celui de la tombe Bernardini à Préneste, un de Vetulonia, un d’Olympie, et le fragment de Delphes inv. 19898 (n° 31). 54. Herrmann 1979, p. 142-143 ; Gehrig 2004, p. 160. Le problème est de savoir, à propos de l’exemple de la tombe Bernardini, si les protomes ont été ajoutées après coup, et combien de temps après ; la question se pose aussi pour le chaudron à protomes de serpent 61566 de la tombe Bernardini : Markoe 1985, p. 191-192. 55. Raubitschek 1998, p. 86. 56. Rolley 1984a, p. 286.

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entre Orient et Grèce. C’est d’une part un argument en faveur d’une attribution de l’ensemble aux artisans grecs, car les séries sont continues, et les protomes martelées et fondues se sont mutuellement influencées. D’autre part, l’hypothèse de la présence d’artisans orientaux en Grèce rend plus floues les limites entre production orientale et grecque, entre les choix des commanditaires et les réalisations des artisans. Que nous apprennent les griffons retrouvés dans la péninsule italique ? Les découvertes les plus spectaculaires ont été faites dans le Latium, dans les tombes Bernardini et Barberini de Praeneste57 ; si seule la tombe RegoliniGalassi a conservé des documents aussi précieux, des griffons en terre cuite ornent de nombreux vases déposés dans des tombes du Latium. Par ailleurs, la Toscane et l’Ombrie aussi ont livré des protomes de griffon de bronze, en métal fondu (tableaux 2 et 4). Les tombes Bernardini et Barberini, contemporaines, montrent des exemples exceptionnels de support conique au repoussé d’origine nord-syrienne ; c’est un indice de l’ouverture du Latium aux productions orientales. On trouve dans ces tombes un mélange entre des éléments importés et des objets issus d’ateliers italiques : la tombe Barberini en particulier a livré un grand bouclier, un trône et un brûle-parfum en tôle de bronze, des trépieds et des ivoires orientalisants, tandis que dans la tombe Bernardini ont été trouvés des coupes en métal précieux d’origine orientale et des récipients en or ou en bronze fabriqués localement. En ce qui concerne les protomes de griffon, associées à des sirènes dans la tombe Bernardini, et à des protomes de lions dans la tombe Barberini, elles sont faites par martelage et présentent un type ancien, où la gueule du monstre est faite d’une mandibule de lion. Les deux chaudrons de la tombe Regolini-Galassi sont ornés de protomes de lion fondues en creux58. Le matériel de ces grandes tombes orientalisantes donne une image de l’orientalisant en Étrurie où le matériel oriental est importé et immédiatement réinterprété, sans que l’intermédiaire grec soit nécessaire.

Protomes martelées Les protomes de griffon ont suscité une littérature abondante59 ; le matériel de Delphes est-il conforme aux schémas qui ont été proposés, ou apporte-t-il des nouveautés ? Cl. Rolley notait que l’examen des protomes de Delphes apportait peu de nouvelles remarques au classement fait par U. Jantzen60, mais il n’avait pas alors retrouvé tous les exemplaires, et d’autres se sont ajoutés depuis. Sites Tombe Barberini Tombe Bernardini Vetulonia Samos Olympie Delphes Lindos Milet Elmalı Acropole (Oxford) Délos Didymes Dodone Perachora Berlin (coll. Brommer) Collection Ortiz Louvre Total

Protomes 2 + 1 (Copenhague) 5 6 14 63 7 4 2 3 1 1 1 1 1 1 1 1 115

Chaudrons 1 1 1 14 63 7 1 ?61 2 162 1 1 1 1 1 1 1 1 99

Tableau 2. — Les protomes de griffons martelées63.

57. Tombe Bernardini : Canciani, von Hase 1979. 58. Pareti 1947. 59. Voir dernièrement Papalexandrou 2015. 60. Rolley 1963a, p. 107. 61. Blinkenberg 1931, p. 218, n° 707 (sans ill.) : l’auteur ne dit

pas que les têtes appartiennent à un même chaudron, mais les décrit toutes de la même façon.

62. Antalya Museum 1988, n° 29-30. 63. Les protomes de griffon sont toutes différentes qu’elles soient

martelées ou fondues : il est donc difficile de savoir à combien de chaudrons elles correspondent. Si certains chaudrons de Samos comptent jusqu’à six protomes, un chaudron retrouvé à Olympie portait trois protomes de griffon, trois protomes de lion et deux sirènes.

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Dans le groupe des protomes martelées à Delphes, on compte aujourd’hui 7 exemplaires. La technique du martelage consiste dans le fait de donner une forme à une feuille de bronze en la battant au marteau ; par cette opération, le métal se solidifie, mais devient aussi plus cassant, si bien qu’il faut parfois effectuer des « recuits » pour pouvoir continuer à travailler la forme ; les analyses scientifiques permettent de déceler cette structure particulière du métal. U. Jantzen avait conclu que les protomes martelées sont faites de plusieurs morceaux martelés séparément et assemblés ensuite64, mais que les jointures elles-mêmes étant martelées, c’est un procédé qu’on ne peut observer de l’extérieur. Il est vrai que les analyses faites sur différentes protomes martelées attestent l’absence de rivet65 ; mais il y a des cas, au moins à Samos et à Delphes, où la protome semble faite d’un seul morceau de métal, comme la petite protome inv. 6406 (n° 36). H.-V. Herrmann ne dit pas catégoriquement qu’il existe des protomes faites d’un seul morceau, il souligne plutôt qu’elles sont le plus souvent issues de l’assemblage de plusieurs pièces, comme les plus grandes protomes martelées66. On a justement à Delphes une protome d’assez grande taille, inv. 7734, dont la gueule semble avoir été faite à part et sertie ; mais il est impossible de le vérifier actuellement. En revanche, Samos a livré des protomes faites d’une seule pièce67, ce qui montre les expérimentations et les traditions différentes élaborées dès les types les plus anciens. Le sanctuaire de Delphes, comme Olympie, semble avoir reçu des protomes faites selon ces deux techniques. L’examen par Gehrig d’une protome martelée samienne inachevée lui permet de faire des hypothèses sur la technique employée. Après que la protome a été coulée dans sa forme générale, avec les oreilles, le bouton, et les boucles latérales, l’artisan a commencé le martelage, dont des traces sont visibles derrière les oreilles et sur le cou ; or, Gehrig conclut que cette technique était habituelle, en se fondant sur des exemples non samiens, c’est-à-dire une protome de Pérachora68, une d’Olympie69 et une de Delphes, inv. 24955 (n° 35). Cette dernière frappe en effet par son épaisseur, qui témoigne de cette étape de la réalisation, où le métal coulé est un peu épais, avant d’être aminci par martelage. Gehrig la mentionne pour la rapprocher du groupe de l’atelier Barberini, vers 690-67070. Enfin, nombre d’auteurs ont aussi souligné que les protomes de griffons martelées illustraient le développement technique avancé des artisans grecs, qui maîtrisent parfaitement la technique du martelage. Ils pratiquent ce qui a été qualifié de « repoussé haut »71. Cette technique n’a pas une large diffusion : on la trouve sur des objets de la sphère d’influence nord-syrienne et iranienne, sur des situles importées à Gordion, et aussi sur quelques armes crétoises. Mais dans le cas des griffons martelés, il semble que le motif et la technique aient été apportés ensemble, sans doute par des artisans itinérants orientaux ; la relation entre le style et la technique est d’autant plus certaine que rapidement, les Grecs préférèrent la coulée au martelage, et modifièrent l’aspect extérieur des griffons72. Ce sont, quoi qu’il en soit, des chefs d’œuvre du martelage, car à la maîtrise des formes complexes des oreilles, du bouton ou du bourrelet s’ajoute un décor gravé, qui constitue la seconde phase de création des protomes : les protomes recevaient un décor de poinçon ou de lignes gravées. Un décor de poinçon en U est visible sur la petite protome inv. 6406 (n° 36), des écailles en demi-cercle poinçonné décorent inv. 30933 (n° 32). Des écailles sont à peine discernables sur inv. 7734 (n° 33), mais révèlent un poinçon semi-circulaire, tandis que le document très fragmentaire inv. 24948 présente aussi des écailles en forme de U (fig. 95-97). Or, ce dernier exemple permet de poser la question du moment où le décor était appliqué sur les protomes : en effet, Ulf Gehrig soutient qu’il était posé avant le remplissage, mais la protome de Delphes porte pourtant un décor encore assez aigu pour qu’on imagine que le remplissage aussi avait reçu les coups du poinçon, donc qu’il était présent au moment du décor. À moins que l’on imagine que le remplissage liquide ait pu prendre la forme de la protome jusque dans ses moindres détails, ce qui est beaucoup moins vraisemblable.

64. Jantzen 1955, p. 29-30 : il compte sept fragments composant une protome, le manchon, le cou, le bourrelet, les deux oreilles, le bouton, l’avant de la tête. Il ajoute que faire une protome avec une seule tôle de bronze est techniquement impossible. 65. Bol 1985, p. 74 ; Gehrig 2004, p. 115-116, et pl. 107,1. 66. Herrmann 1979, p. 8. On a trouvé à Olympie des pièces détachées de protomes martelées, qui assurent qu’il y avait différentes pièces ; voir pl. 30 et p. 33 par exemple.

67. Gehrig 2004, p. 115-119. 68. Payne 1940, p. 126, pl . 38 69. Herrmann 1979, G 33. 70. Gehrig 2004, p. 324. 71. Voir en dernier lieu Rolley 2005a, p. 56. 72. Sur la technique du « high repoussé », voir Steinberg 1970,

p. 103-105.

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L’observation des techniques d’assemblage et de décor se trouve bien souvent limitée par la présence, à l’intérieur de la protome, d’une masse décrite la plupart du temps comme sombre ou noirâtre, et qui constitue le remplissage destiné à garantir à la protome sa forme. Cette pratique a depuis longtemps été distinguée de la technique du sphyrelaton grec, qui utilise une âme de bois comme structure intérieure73. Mais l’interprétation des analyses scientifiques de cette matière, faites dans quelques cas, est controversée, parce que ses conséquences historiques sont importantes. Claude Rolley dressait en 2005 la liste des protomes de griffons ou de lions74 dont le remplissage a été étudié75 ; il en comptait neuf exemplaires, avec inv. 30933, sujet de l’article. Trois protomes comportent du bitume dans leur mélange : il s’agit d’une protome d’Olympie76, de deux de Delphes, inv. 7734, et inv. 30933, dont un fragment du remplissage de l’oreille a pu être analysé. Depuis les analyses de Pierre Amandry, la présence de bitume est un argument en faveur d’une origine orientale des protomes, malgré le peu d’analyses disponibles. La thèse de la fabrication orientale de ces premières protomes est fort vraisemblable. Claude Rolley se place dans la continuité de Pierre Amandry en attribuant l’utilisation du bitume à des artisans orientaux ; il va jusqu’à souligner que c’est la technique de remplissage avec un mélange composé de terre, de bitume, qui peut être remplacé par de la cire, qui est orientale, plus que les matériaux eux-mêmes. Il est peu naturel de penser que des artisans grecs auraient utilisé un matériau et une technique étrangers à leurs pratiques, avant de les abandonner rapidement pour d’autres méthodes77. En effet, ce qui caractérise les protomes de griffon en général, et les griffons martelés en particulier, est l’évolution de leur forme, du monstre à gueule de lion que nous avons décrit à une créature assez différente : « parmi les protomes trouvées en Grèce se dessine une évolution assez nette et régulière, qui se manifeste, entre autres détails, par le développement progressif du bouton frontal, par l’allongement des oreilles, par la duplication des mèches de part et d’autre du cou »78. Le matériel de Samos et d’Olympie permet de suivre les étapes de ce développement : depuis l’étude d’Ulf Jantzen, une évolution générale s’est dessinée, revue et précisée par Hans-Volkmar Herrmann, avant que de nouvelles découvertes enrichissent encore la variété des types. Les premières protomes79 présentent peu de détails, et ont une forme peu élaborée, avec un cou très court, des oreilles qui se limitent à des protubérances coniques, un décor gravé très simple. Le sanctuaire de Samos a livré deux protomes80 qui n’ont pas de boucles partant du bouton et descendant dans le cou : elles semblent pour cette raison antérieures aux autres81. C’est le cas également de la protome inv. 6406 de Delphes (n° 36) ; l’absence de boucles, qui a été interprétée comme relevant d’un « stade antérieur à celui des reliefs d’Ankara et de Sakçegözü »82, montre qu’il y avait des variantes possibles dans la réalisation, sans que cela indique nécessairement une date antérieure. H.-V. Herrmann y voit une contemporaine des protomes G3 et G4, peut-être à une place charnière entre des deux protomes et les deux suivantes, G5 et G6, plus monumentales83. Les autres protomes de Delphes présentent des boucles ; sur un fragment incomplet comme inv. 24955 (n° 35), le cercle en relief entourant le bouton indique le départ des boucles habituelles. Parmi les protomes martelées les plus anciennes, mais d’une taille supérieure qui trahit l’évolution générale, se place le document complet inv. 30933 (n° 32), proche des griffons G5 et G6 d’Olympie. Ils ont en commun leur taille d’une quarantaine de centimètres (avec le manchon), les trois boucles84 (l’une à l’arrière, et deux latérales), les petites oreilles coniques, les yeux très saillants, presque autant que le bouton sommital ; l’ensemble est rehaussé d’un décor gravé soigné. Si ces protomes présentent deux mèches latérales, elles ont aussi les yeux exorbités, qui sont reliés par un petit bourrelet continu ; leurs oreilles ont une face externe plane, même si elles n’ont pas de forme conique. L’intérêt de cette protome complète est qu’elle nous montre également que les artisans n’ont pas encore donné à la protome martelée elle-même la forme sinueuse qu’elle acquiert ensuite ; ici c’est le manchon qui permet

73. Amandry 1958a, p. 85-86. 74. Les protomes martelées de lion ou de griffons présentent les

78. Amandry 1958a, p. 89. 79. Sans reprendre les différents groupes établis par U. Jantzen,

mêmes caractéristiques techniques ; on n’a pas retrouvé de protomes de lion à Delphes. 75. Rolley 2005a, p. 58-59. 76. Kunze 1938, p. 107, n° 1. 77. L’emploi du bitume est toutefois mal connu dans l’Antiquité et pourrait avoir été assez répandu. Forbes 1993, p. 29 : un gisement important était connu à Zakynthos, selon Hérodote IV, 195.

H.V. Herrmann ou U. Gehrig, nous retenons les critères qui permettent de rendre sensible l’évolution des formes. 80. Gehrig 2004, n° 1 et n° 2, pl. 2. 81. On n’en trouve pas de semblable à Olympie. 82. Amandry 1958a, p. 89. 83. Herrmann 1979, p. 55, n. 4. 84. On peut noter que G5 a des doubles boucles latérales.

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de créer ce léger mouvement. Certains y ont vu le signe d’un « emprunt direct à une autre forme d’art : les reliefs de pierre »85, ainsi qu’une phase d’élaboration artistique non encore aboutie. On voit donc bien dans qu’il faut attendre les premières protomes coulées, qui imitent les protomes martelées, pour voir apparaître cette forme sinueuse. Une étape est encore franchie avec la protome inv. 7734 (et 24948, très proche), datable des deuxième ou troisième décennies du viie siècle d’après la chronologie de Herrmann. Alors que U. Jantzen la classe dans le premier groupe des protomes martelées, U. Gehrig la rapproche des productions de l’atelier Bernardini, un peu plus récentes. H.-V. Herrmann rapproche cette protome de G 29 pour sa date, et des protomes G 15 et G16 pour l’atelier de production, en la considérant comme une pièce plus récente. La protome inv. 7734 (n° 33) de Delphes illustrerait le passage, en train de s’opérer dans la représentation, du caractère clairement démoniaque des premières figures à une expression bizarre, extravagante, que H.-V. Herrmann qualifie de « grotesque »86. Le cou est plus long et plus élancé, les verrues entre les yeux sont apparues, proéminentes, comme les yeux ; les formes sont dans l’ensemble plus anguleuses, mais aussi plus vivantes, d’une certaine manière. En outre, l’augmentation de la taille des protomes indique le sens de l’évolution vers des protomes martelées monumentales. Il n’y en a pas d’exemple à Delphes. Le relais est rapidement pris ensuite par les protomes de griffons coulées, et les protomes de techniques mixtes, qui offrent de meilleurs résultats du point de vue de la monumentalité. La production des protomes de griffons martelées cesse vers le milieu du viie siècle environ. Vu le nombre de protomes martelées à Olympie, bien supérieur à celui des protomes coulées, il est facile d’en attribuer le développement à des ateliers du Péloponnèse, vraisemblablement installés à Olympie même, destination obligée de ces offrandes monumentales. En l’absence d’autres éléments, une attribution aux ateliers argiens doit rester dans le domaine de la possibilité. À quoi pouvaient ressembler les chaudrons décorés de protomes de griffon à Delphes ? Grâce aux découvertes des tombes de Préneste, l’ensemble support-chaudron-protomes revêt une réalité concrète, alors que le matériel d’Olympie et de Samos, beaucoup plus fragmentaire, oblige à un effort de reconstitution87. Les supports coniques mesurent entre 70 et 120 cm, de même que les trépieds à baguettes ; il faut leur ajouter des chaudrons qui atteignent des hauteurs respectives de 40/50 à 100 cm de hauteur. Les plus grandes protomes, environ 70 cm à Olympie et 40 cm à Delphes, ajoutent encore environ les deux tiers de leur hauteur à l’ensemble. Les chaudrons à protomes martelées peuvent donc facilement mesurer entre 150 et 250 cm pour les plus monumentaux ; la mise en œuvre de la technique mixte augmente encore la taille des offrandes, véritablement monumentales.

Protomes fondues À Delphes, 21 fragments de protomes trouvés dans le sanctuaire proviennent de griffons obtenus par le procédé de la coulée ; on compte en fait 12 protomes plus ou moins fragmentaires, et 7 oreilles (dont deux formant paire) détachées de têtes de griffons : on compte donc 18 protomes fondues. Deux têtes fondues seront étudiées ensuite, puisqu’elles appartiennent à la catégorie des têtes mixtes88. Les synthèses sur les griffons proposent des classements assez différents les uns des autres, et en particulier pour les protomes fondues : il est indispensable d’exposer en quelques mots les méthodes employées et les résultats qu’elles ont apportés. U. Jantzen fonde son classement sur des éléments objectifs, c’est-à-dire l’apparition et l’évolution des différents traits des griffons (forme du bouton, yeux incrustés ou pas, etc.), avant de mettre les protomes dans un ordre chronologique, qui doit coïncider finalement avec la présentation typologique89. Comme il y a finalement assez peu de données stratigraphiques exploitables à Samos pour la chronologie des griffons, il est logique que l’auteur ait cherché à faire des groupes en rassemblant les protomes selon leurs points communs ou leurs différences. La perspective

85. Rolley 1984a, p. 284. 86. Herrmann 1979, p. 66. Il résume cela dans une belle formule

un peu après : « das Bedrohliche der älteren Greifenbeginnt sich ins Groteske zu verkehren », Herrmann 1984, p. 28. 87. Si H.-V. Herrmann aborde cette question (Herrmann 1979, p. 76), U. Gehrig ne la traite pas et évoque à peine la forme que pou-

vaient avoir les chaudrons, sans faire de propositions sur le nombre de protomes par chaudron ou le nombre total de chaudrons offerts à Samos. 88. Rolley 2005b, p. 344 : les comptages proposés sont un peu différents, mais les proportions restent les mêmes. 89. Jantzen 1955, p. 53-54.

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d’ensemble n’en reste pas moins déterminée par l’idée d’une évolution chronologique des différents groupes ; mais U. Jantzen utilise très prudemment les comparaisons avec la céramique ou les relations avec les attaches en forme de sirènes, tout en reconnaissant la difficulté à ancrer l’ensemble des groupes de griffons dans une chronologie absolue90. H.-V. Herrmann analyse plus généralement la forme, c’est-à-dire le style des protomes91, et n’aborde les questions de chronologie et de centres de production que dans une partie finale consacrée à la problématique des protomes de chaudron. Après avoir repris rapidement les grands traits de l’évolution des protomes de griffon, il rappelle, tout comme son prédécesseur, le manque cruel de données permettant de faire coïncider cette évolution avec la chronologie absolue, l’absence de datations issues des fouilles pour les griffons, à Olympie, Samos ou ailleurs. Mais la prudence laisse place peu à peu à une revue patiente de chaque élément exploitable, presque uniquement les représentations de la céramique92, que l’on peut mettre en relation étroite avec tel ou tel griffon. Les références, prises dans la céramique des Cyclades, dans une phiale de bronze de Pérachora, dans un chaudron en terre cuite à protomes de griffon du Céramique, dans une protome en ivoire de Sparte, puis dans des terres cuites de Gortyne en Crète, deviennent les jalons de l’évolution générale du type du griffon, sans qu’il soit jamais suggéré que les représentations de griffon, protome ou silhouette, puissent avoir des spécificités locales. La seule perspective est celle d’un classement stylistique et chronologique général, qui n’explore pas la notion d’atelier. H.-V. Herrmann va jusqu’à convoquer le « style dédalique », dont les nouvelles caractéristiques, tridimensionnalité et clarté de construction, se reflèteraient bien dans les têtes « classiques »93 des griffons G93-G10394. Il ne reste donc plus qu’à proposer, malgré les rappels de l’incertitude qui caractérise ce matériel, un tableau chronologique datant les œuvres à dix ans près95. Ce n’est qu’ensuite qu’il vaut la peine de se poser la question du lieu de production : à Olympie, ce sont les ateliers péloponnésiens qui viennent d’abord à l’esprit, outre le passage d’Hérodote qui parle de cratère argien pour la présence de griffons96, puis les ateliers samiens pour les protomes fondues, en raison du nombre de documents retrouvés sur place. Pourtant, outre ces généralités, c’est un constat essentiellement négatif qui ressort, car aucun lien n’est possible avec les sirènes, retrouvées détachées des chaudrons, comme les griffons ; c’est donc par pétition de principe que H.-V. Herrmann attribue les griffons de technique mixte, « véritables représentants du style dédalique moyen »97, à Argos. Cette argumentation qui apparaît extrêmement faible trahit avant tout l’incapacité à mettre en relation, du point de vue du style, les objets clairement orientalisant comme les griffons ou les sirènes, et les documents plastiques connus pour le viie s. que l’on tente, après les avoir appelés « dédaliques », de constituer en groupe homogène98. Ulf Gehrig enfin revient à un classement sur des critères concrets, comme l’avait fait Jantzen. Pour ordonner la documentation, il établit des groupes en fonction des détails matériels qui apparaissent et se maintiennent sur les griffons : il distingue ainsi deux grands groupes de protomes fondues, avec, dans la catégorie des protomes les plus anciennes, 64 exemplaires produits par huit ateliers, et dans les plus récentes, 211 documents répartis en neuf ateliers. L’étude est particulièrement importante en ce qu’elle met en évidence le dynamisme des ateliers samiens dans la création des protomes fondues ; l’examen de ratés de coulée apporte bien sûr des informations techniques, mais permet aussi de s’interroger sur le rapport entre la création d’une image et les moyens mis en œuvre pour y parvenir. Pour la chronologie, les limites sont les mêmes que celles rencontrées par H.-V. Herrmann : même lorsque des exemplaires ont été trouvés en stratigraphie99, il ne s’agit que d’un terminus ante quem, et il faut ensuite déterminer pendant combien de temps un chaudron était exposé ; U. Gehrig l’estime à une trentaine d’années.

90. Id., p. 84-86. 91. Herrmann 1979, p. 14 : „trotz dieser Schwierigkeiten schien

mir die Gliederung des Materials nach stilkritischen Gesichtpunkten der für die Bearbeitung einer solchen Denkmälergattung einzig angemessene Weg zu sein“. 92. À l’exception des tombes princières étrusques qui donnent un terminus ante quem. 93. L’auteur choisit ce terme parce que ces protomes sont censées être le sommet de l’évolution des protomes, qui coïncide justement avec le développement du « dédalisme ».

94. Herrmann 1979, p. 146-153. 95. Id., p. 154. 96. Hérodote IV, 152. 97. Herrmann 1979, p. 159. 98. Sur les inconvénients de la notion de « dédalique », voir

Aurigny 2012a. 99. C’est le cas à Samos pour une quinzaine de protomes : Gehrig 2004, p. 171-172, n. 775. Les dates sont celles du fouilleur H. Walter.

APPLIQUES EN FORME DE PROTOMES

Griffons de Delphes Inv. 30933 Inv. 7734 Inv. 24948 Inv. 24955 Inv. 6406 Inv. 1213 Inv. 3737 Inv. 2889 Inv.2620 Inv. 5606 Inv. 1549 Inv. 1225 Inv. 4289 Inv. 8396 Inv. 951

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Herrmann Attribution Datation Griffons martelés Vers 700 « frühe Gruppe » 690-670 690-670 « Mittlere Gruppe » 700-660 690-670 « Mittlere Gruppe » 700-660 abs abs 690-670 4e/4 du viiie s. « frühe Gruppe » 690-670 Griffons fondus Vers 640 « mittlere Gruppe » 670-650 680-670 « mittlere Gruppe » 670-650 1er quart du vie s. Späte Gruppe IV 630-620 Vers 620 Späte Gruppe I 660-640 abs abs 660-640 Vers 620 Späte Gruppe I 640-630 620/600 Späte Gruppe II 660-640 620/600 Späte Gruppe II 660-640 Vers 650 Technique mixte Vers 650 abs abs 700-660

Gehrig Attribution

Datation

Atelier Barberini Atelier Bernardini Rattaché au précédent Atelier Barberini Atelier Barberini Atelier « Rundkopf » Atelier « Rundkopf » Atelier 7 Proche du groupe « Schmuckring » monumental II Proche du « groupe 6 » monumental II Proche du groupe « Schmuckring » Monumental I Proche de l’atelier Bernardini

Tableau 3. — Les griffons de Delphes dans les classements de Herrmann et Gehrig.

Le faible nombre d’objets à Delphes ne permettant pas de mettre en œuvre un classement comparable à ceux de Samos et Olympie, il est toutefois indispensable de prendre en compte les critères principaux de classement mis en évidence par Herrmann et Gehrig. Les différences entre ces deux publications montrent que, s’il est illusoire de proposer un classement « objectif », en revanche on peut faire des regroupements tels qu’ils permettent de préciser les lieux de production des objets trouvés à Delphes. Or, le rôle des ateliers samiens dans la production de protomes fondues est fondamental ; les griffons de Samos sont presque tous samiens, et des griffons de fabrication samienne ont été trouvés dans la plupart des sites qui ont livré des chaudrons à protomes de griffon. Il semble donc plus utile de chercher à déterminer quelle image du griffon les Samiens ont créée, pour mettre en évidence son développement, ou éventuellement des tentatives d’autres ateliers – surtout du Péloponnèse – pour profiter du succès que ce motif remportait. C’est ainsi que l’on pourra placer les différents groupes les uns par rapport aux autres, et en tirer des conclusions sur la typologie ou la chronologie. Mais il reste à répondre à la question : si Samos a fabriqué la grande majorité des chaudrons à protomes coulées, qui les a offerts à Delphes ? Une première interrogation s’impose à qui veut tenter de classer les protomes : comment ont-elles été faites ? Bien que Delphes n’ait pas livré de ratés de coulée, quelques éclaircissements sur la technique aident à comprendre aussi les choix esthétiques. La technique de la fonte à la cire perdue était connue depuis longtemps en Orient100 ; mais elle n’est vraiment adoptée en Grèce qu’avec la fabrication massive des griffons, dus surtout aux ateliers samiens101. U. Gehrig a montré en dernier lieu que cette technique était mise en œuvre avec des moules en plusieurs parties ; les célèbres ratés de coulés qu’il examine minutieusement, et qui sont issus de différents ateliers, font apparaître que cette technique était généralisée, et non pas seulement employée dans ces exemplaires qui ne sont pas des expérimentations malheureuses de la technique de fonte en plusieurs parties102. Le matériel de Delphes n’offre pas de document appartenant aux premières protomes fondues, comme le groupe samien 15-18 de Gehrig, qui permet de proposer l’hypothèse suivante : « on a bien l’impression que les bronziers samiens, renonçant dès le départ à imiter le travail au repoussé, très virtuose, des protomes orientales, ont plusieurs fois, surtout au début, tenté d’utiliser des moules bivalves »103 ; les premières protomes fondues cherchent donc à imiter les protomes martelées. Ceux qui considèrent tous les griffons comme grecs suggèrent que le remplissage des protomes martelées était devenu trop lourd, vu la taille de certaines protomes, pour que le martelage présentât encore un avantage104. 100. Depuis le troisième millénaire au moins à Ninive, voir Bol 1985, p. 77. 101. Jantzen 1955, p. 54 ; Herrmann 1979, p. 9 ; Rolley 1983, p. 15 ; Gehrig 2004, p. 119. 102. Gehrig 2004, p. 127. Aurigny 2016a, p. 35.

103. Rolley 1983, p. 15. 104. Bol 1985, p. 75-76. On pourra cependant souligner que le

martelage de pièces de très grande taille se poursuit avec les protomes de technique mixte.

BRONZES DU HAUTARCHAÏSME À DELPHES

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À propos de la technique toutefois, le matériel de Delphes présente certains détails intéressants : sur les protomes inv. 1213 (n° 38, fig. 106-107) et 2620 (n° 41, fig. 113-115)105, on a retrouvé des traces ou des cavités circulaires qui peuvent témoigner de la présence d’un « distanciateur », c’est-à-dire de tiges plus ou moins épaisses qui servent à maintenir en place le noyau dans le moule. Elles sont placées avant le moule dans le cas de petits objets106, avant que l’ensemble soit enrobé dans un moule. Mais ces quelques observations ne permettent pas d’affirmer une stabilité dans la pratique mise en œuvre dans les griffons trouvés à Delphes. Ces deux exemples appartiennent de toute façon à la production samienne. Delphes n’a pas livré, à la différence de Samos et d’Olympie, de protomes de griffons copiant les protomes martelées ; et si l’on ne rencontre pas la variété des types connus dans ces sanctuaires, quelques groupes peuvent être distingués107. U. Gehrig doit avoir raison d’attribuer huit griffons à Samos sur les neuf qu’il recense108 ; ajoutés aux fragments de trépieds probablement originaires de Samos, ils forment un ensemble important, qui doit être pris en compte dans les réflexions sur la fréquentation de Delphes. Un premier groupe est formé par les deux protomes inv. 3737 et inv. 1213 (nos 39, fig. 108-109 et 38, fig. 106-107), qui se caractérisent par leur taille encore modeste, leur cou qui suit une courbe sinueuse peu marquée, et qui porte des boucles latérales en relief ; elles seront ensuite représentées gravées sur la surface. Le bec est peu ouvert, les yeux sont coulés avec la tête, et soulignés de bourrelets ; enfin les oreilles ne sont pas très hautes, un peu plus chez inv. 3737, bien que d’une forme allongée qui contraste évidemment avec les protomes martelées. Enfin, le profil biconique du bouton, conservé seulement sur inv. 3737, est aussi fréquent sur les griffons de ce type. Ils sont bien représentés à Samos, avec une quinzaine d’exemplaires109, datés des années 670-650. U. Gehrig souligne le développement au sein de ce groupe : les protomes ont d’abord les yeux pleins, puis des yeux concaves, et enfin creux110 ; les deux protomes delphiques doivent trouver une place plutôt au début de cette évolution, plus proches des nos 40 et 41 de Samos. Il est même possible à U. Gehrig d’attribuer les n° 40-46, 52 et 55 à une même main, à cause de la forme identique des écailles. La définition des « mains » et des « ateliers » reste malheureusement à ce niveau de détail qui n’offre jamais de réflexion sur le sens des regroupements. Les deux protomes delphiques présentent elles aussi des écailles circulaires, mais inv. 1213 porte également des traces de l’utilisation d’un poinçon en U ; elles ont donc vraisemblablement été faites par deux artisans différents, mais samiens, qui travaillaient à la manière du groupe rassemblé par Gehrig sous l’appellation « les têtes rondes ». Ce groupe est nombreux et le mieux représenté en dehors de Samos111 : en dehors des cinq exemplaires d’Olympie112, on en compte un trouvé à Phères, dans le sanctuaire de Zeus Thaulios (Athènes, NM 15417), très proche de Delphes inv. 1213 ; une autre, de provenance inconnue, proche des deux précédentes, est conservée au British Museum (inv. 1971.3-23.2)113 ; une protome aujourd’hui à Athènes vient de Tsotyli près de Kozani. Ensuite, l’Étrurie a aussi livré huit protomes que l’on peut attribuer à ce groupe, deux protomes conservées à Munich, et six de la collection Erbach114 ; enfin, trois protomes d’Éphèse peuvent être citées dans ce groupe, ainsi que quatre autres griffons connus en dehors de Samos115. Ce cas de figure intéressant suscite la réflexion : cette quarantaine de protomes nécessitait-elle un atelier de nombreux artisans ? Avaient-ils cherché à exporter leurs chaudrons en dehors de Samos ? Il est assez arbitraire de différencier des mains en fonction des formes différentes de poinçons utilisés, d’autant plus que cela n’apprend rien sur l’organisation concrète de l’atelier ni sur les donateurs. On peut néanmoins rapprocher de deux protomes delphiques qui font partie de cet ensemble un griffon de petite taille, dans un état de conservation assez médiocre, inv. 5606 (n° 42, fig. 116-118). Bien que U. Gehrig

105. Aurigny 2016a, p. 36, fig. 9. 106. Rolley 1983, p. 16 ; mise au point dans Gehrig 2004,

p. 131-132 : les griffons samiens semblent toujours avoir les tiges supportant le noyau au même endroit, c’est-à-dire, dans la partie supérieure, de l’arrière du bouton à l’intérieur de la gueule, et dans la partie inférieure, de l’arrière de la tête au milieu du cou. 107. Comme à Samos ou à Olympie, on ne trouve pas à Delphes deux protomes strictement identiques ; une étude technique de C. Mattusch (Mattusch 1990, p. 549-560) de trois protomes très semblables d’Olympie, New York et Athènes montre que les griffons étaient faits séparément, et non à partir d’un même moule, comme le pensait Haynes 1981 ou Kopcke 1968. Il semble impossible qu’il y ait une réutilisation des moules : la technique à la cire per-

due à l’époque suppose une destruction du moule à chaque fois (voir Rolley 1983). 108. Gehrig 2004, p. 112 ; il ne connaît pas la tête 23846 de type mixte, non plus que les têtes inv. 16915 et 16516 trouvées pourtant depuis 1989 dans les travaux du musée. 109. Gehrig 2004, n° 40-56, pl. 17-23. 110. Id., p. 99. 111. Rolley 2005b, p. 343. 112. Herrmann 1979, n° 67-71. 113. Citée dans Gehrig 2004, p. 38. 114. Id., p. 39. 115. Id., p. 40 : un au Liban, un à New York, deux autres apparus sur le marché de l’art (voir tableau 4 p. 76-77).

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l’interprète comme une protome miniature qui se classe dans l’atelier du « groupe monumental 2 », donc déjà vers le milieu du viie siècle, les proportions trapues, les oreilles courtes, un certain nombre d’imperfections techniques, semblent plutôt caractéristiques des protomes coulées les plus anciennes. Il doit être contemporain des deux griffons précédents, sinon même antérieur. Après ce premier ensemble de protomes, les regroupements se font moins facilement au sein du matériel delphique ; quelques rapprochements pourront toutefois ne pas paraître trop artificiels. Ainsi les protomes inv. 1225, 2620, 4289, 1549 et 3708 peuvent être examinées ensemble (n° 44, 41, 45, 43 et 46) ; elles étaient placées par U. Jantzen dans le groupe 4 (inv. 2620) et le groupe 5 (inv. 1225, 4289, 1549) des protomes coulées, et font l’objet chez U. Gehrig d’un classement plus complexe, mais pas nécessairement plus convaincant116 ; or, elles appartiennent à une même époque de création, même si elles présentent des détails différents. Les protomes possèdent une taille supérieure à celles du groupe précédent (supérieure à 20 cm pour une protome complète), et une silhouette globalement beaucoup plus sinueuse, un bec plus ouvert, des oreilles plus hautes – même si elles sont rarement conservées. Ensuite, on peut noter certaines particularités, comme le bourrelet décoré d’incisions, au-dessus de l’anneau de fixation de la protome 2620 (n° 41, fig. 113-115). C’est ce qui lui vaut son classement dans le groupe de l’atelier « Schmuckring » de Gehrig, où l’on trouve également des protomes décorées de ce petit bourrelet, avec des boucles gravées à la surface du cou (des doubles boucles aussi pour la plupart des exemplaires)117. Des protomes ornées d’un tel élément décoratif sont connues à Olympie aussi118 , mais plusieurs documents, comme le G 71, auquel H.-V. Herrmann voue une grande admiration, combinent le bourrelet et les boucles en relief sur le cou. La protome inv. 2620 a en outre une petite verrue entre les yeux, qui la rapproche de G72 -73 à Olympie. La chronologie de Gehrig permet de proposer une date au milieu du viie s., dans les années 660-640. Comme c’est le cas pour inv. 1225 (n° 44, fig. 121-122) et 1549 (n° 43, fig. 119-120), les yeux sont creux, ce qui constitue en fait une évolution dans la technique de la fonte des protomes, puisque les yeux sont alors rapportés dans un autre matériau après la coulée. Cette pratique se répand très largement, avant que les yeux soient de nouveau fondus avec la tête, en particulier dans le cas des protomes de Samos de la fin de la production. H.-V. Herrmann a suggéré que la technique de la coulée en bronze conduisait les artisans à produire des protomes aux contours aigus, aux formes assez élancées et aux arêtes vives. Le cas de la cruche d’Égine à tête de griffon, conservée au British Museum n’apporte pas vraiment d’élément de réflexion, dans la mesure où elle reproduit visiblement un modèle en métal. Elle n’est sans doute pas un projet de céramiste, mais elle montre que ces formes aigües sont aussi appréciées des artisans de la céramique119. Proche de la précédente, mais sans le bourrelet à la base du cou, la protome inv. 4289 se caractérise par un important renflement au bas des oreilles120. U. Gehrig la place dans la sphère de création des protomes du groupe « Schmuckring », juste avant les protomes fondues récentes, à la transition avec les protomes de l’atelier du « Groupe 6 » ; elle peut être datée vers 640 av J.-C., si l’on veut se fonder sur la chronologie proposée par U. Gehrig. D’après le classement de H.-V. Herrmann, cette protome trouve sa place plus loin dans l’évolution générale, dans le groupe II des protomes récentes, comparable surtout à la protome G85, conservée à New-York121. Si la forme s’est allongée, avec des volumes plus fluides et plus raffinés, c’est au détriment de la vie et de l’individualité du griffon. On arrive alors davantage à une production de série122, et il est vrai que même à Delphes on a des documents très proches comme inv. 1225, 1549 et 3708, dont inv. 4289 n’est pas très éloigné non plus. L’allure générale du griffon s’est en quelque sorte standardisée : au-dessus de l’anneau de fixation à trois rivets, quand il est conservé, se dresse le cou aux sinuosités prononcées, orné d’écailles faites au poinçon. L’élancement de la silhouette est assuré par les oreilles et le bouton, qui sont d’une grande importance dans l’économie de la forme, comme le montre le griffon inv. 1225. On remarque que les protomes en question ne portent pas de décor de boucles gravées sur le cou, ce qui n’est pas un indice chronologique, comme nous l’avons déjà évoqué ; c’est un trait de l’ensemble rassemblé par U.

116. Il place en effet les n° 5606 et 1225 dans le groupe de l’ « atelier monumental II », qui devrait regrouper des protomes faites selon la technique mixte, alors que les protomes de Delphes sont faites d’une seule pièce, et que inv. 5606 est de petite taille. 117. Gehrig 2004, n° 76-88, pl. 29-33. Mais les nos 86-88 n’ont pas de bourrelet.

118. Herrmann 1979, G 68-G73, pl. 40-44. 119. Contra Akurgal 1992, p. 47-48. 120. Comme Gehrig 2004, nos 86-87. 121. Herrmann 1979, G 85, p. 115, pl. 49,3-4. 122. Comme c’est le cas pour les griffons du « groupe 6 » de

Gehrig 2004.

BRONZES DU HAUTARCHAÏSME À DELPHES

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Gehrig dans l’atelier du « Groupe 6 »123 qui se développe dans le troisième quart du viie siècle. L’attribution de cet ensemble aux ateliers de Samos est donc très vraisemblable : elle confirme d’une part le rôle central des artisans installés à Samos dans la fabrication massive des protomes fondues, et les liens que Delphes tisse avec Samos, et sans doute d’autres cités d’Ionie, à partir du milieu du viie siècle environ. Olympie reçoit proportionnellement moins de protomes coulées, ce qui signifie des circuits d’approvisionnement et une fréquentation différents124. Avant d’en venir à des documents vraiment différents, il convient de placer, à la suite des protomes qui viennent d’être envisagées, le griffon inv. 2889 (n° 40, fig. 110-112), qui offre certes des ressemblances avec inv. 3737, mais qui représente sans doute un autre type de développement des protomes de griffon125. En effet le cou adopte une forme très courbe, en dehors du fait que la présentation actuelle dans le musée l’accentue encore ; bien qu’il ne reste plus que la partie supérieure de la protome, le décor d’écailles fait au poinçon est encore bien visible, comme l’absence de boucles latérales. Le départ des oreilles est marqué par le même renflement que ce que montraient les précédentes protomes ; les yeux ne sont plus creux, mais coulés avec la tête, une caractéristique de la fabrication des griffons classés dans le « groupe 7 » de Gehrig, et particulièrement nombreux126 ; il note en outre que le groupe nos 192-229 présente très peu de différences et doit provenir des mêmes modèles ; la protome de Delphes est proposée comme parallèle au sous-groupe 213-217, ainsi qu’une protome de Phanai de Chios, retrouvée dans le temple d’Apollon127. Enfin, une dernière protome peut être mentionnée à la suite de celles qui entrent dans des séries plus connues : il s’agit du griffon inv. 16915 (n° 50, fig. 134-136), dont le mauvais état de conservation et la surface corrodée rendent l’interprétation difficile. Mais sa petite taille fait penser aux griffons miniatures étudiés par U. Gehrig, en particulier le n° 295 : de la même taille que celui de Delphes, il fournit un bon parallèle non pas tant pour les ressemblances de détail (même si les oreilles sont assez courtes, et le bouton fait d’une simple tige aussi), mais donne un autre exemple de certaines exagérations, dans la forme de la gueule par exemple. Le spécialiste de Samos voit dans ce type de protomes des exemples de la fin de la production, où les documents ne sont même plus des caricatures, mais plutôt des objets un peu bâclés. Il est évident que ce type de protome ne requiert pas le même soin que les plus grands exemplaires coulés ; est-il pour autant sûr que ce constat se traduise, du point de vue chronologique, par une datation plus tardive, à la fin du viie siècle ? Il n’est pas absurde d’imaginer, à côté des protomes les plus achevées, la fabrication d’objets miniatures moins soignés, en fonte pleine, présentant moins de détails et de raffinements. C’est sans doute le cas de cette petite protome, pour laquelle on sera plus prudent, en la plaçant dans la seconde moitié du siècle. D’une manière générale, on ne trouve pas à Delphes les très nombreuses protomes de Samos créées à la fin du viie et au début du vie s. : dans les 250 dernières protomes de la liste établie par U. Gehrig, on trouve une seule protome de Delphes, le griffon inv. 2889. Ce constat est renforcé par les datations plutôt hautes proposées en dernier lieu par U. Gehrig. Faut-il y voir un déclin des relations entre Delphes et Samos ? Le reste de la documentation delphique du viie s. va contre cette interprétation ; la mode des griffons est peut-être passée à Delphes, où parvenaient d’autres objets ioniens de grand prix. Par ailleurs, des protomes de griffon fondues ont été retrouvées dans le Latium, dans les centres côtiers de l’Étrurie méridionale, à Rome, Gravisca128, Tarquinia129, et dans la vallée du Tibre, à Trestina130, à Brolio131. Ce dernier site rassemblait à la fois une protome grecque importée de Samos et deux protomes identiques d’un type inconnu dans les productions grecques, sans doute une création locale. Cela montre à la fois les circulations d’objets grecs dans l’intérieur de l’Étrurie et la créativité des artisans qui savent s’affranchir des modèles extérieurs132.

123. Gehrig 2004, p. 62. 124. Voir la synthèse infra p. 150-151 et p. 177-178. 125. À Olympie, Herrmann la place dans le groupe tardif IV. 126. Gehrig 2004, nos 182-267, 299, 300. 127. Kyrieleis 1986, p. 190-191, fig. 3. 128. Colivicchi 2004, p. 36, nr. 24 ; Fiorini 2005, p. 97, fig. 29

(specifying an early 3d c. BCE context of deposition upon discovery).

129. Hencken 1968, p. 393 f. ; à ce chaudron appartiennent deux protomes à Copenhague, voir Jantzen 1955, p. 24, n° 131-132 ; une autre protome de Tarquinia, à Berlin, atteste la présence d’un autre chaudron à griffons à Tarquinia : Hencken 1968, p. 409, fig. 407. 130. E. Macnamara dans Lo Schiavo, Romualdi 2009, p. 102106, voir aussi p. 169-171. 131. Voir tableau 4, p. 76-77. 132. Papalexandrou 2016.

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Technique mixte Les deux protomes qui suivent auraient pu être étudiées entre les protomes martelées et les protomes fondues, puisqu’elles empruntent aux deux techniques : des têtes de griffons coulées étaient en effet associées à des cous martelés. Mais l’état de conservation de ces protomes, dont les cous ont la plupart du temps disparu, empêche de sentir la monumentalité de ces objets. La tête inv. 8396 (n° 47, fig. 127-128) est un document très bien conservé, parfait exemple de ce groupe ; au même type appartient l’oreille 24949 (n° 51, fig. 137-139) : au bas de la tête se trouvent des trous qui permettaient de fixer un cou obtenu par martelage d’une tôle de bronze ; si on ne conserve pas à Delphes de fragments de ces cous martelés, en revanche on en connaît un exemplaire à Samos133, et au moins une dizaine à Olympie134. En ce qui concerne la tête, elle a des parallèles très précis à Samos135, à Olympie136 et aussi à l’Acropole d’Athènes137 ; elle appartient au premier « sous-groupe » des têtes monumentales, les « têtes rondes » chez U. Gehrig, qui sont bien représentées hors de Samos. La tête inv. 23846 (n° 48, fig. 129-130), bien que plus petite et moins bien conservée, doit être étudiée en même temps. Ces têtes ont en commun la forme du bouton, fait d’une tige cylindrique, d’une boule et d’un petit bouton au sommet ; trois petites verrues se dressent sur le front, les yeux sont entourés de paupières à trois bourrelets, le bec, largement ouvert, avec la langue recourbée, reçoit un décor de lignes à l’intérieur, et est entouré d’un mince filet lui aussi décoré de petites lignes gravées. La question est donc celle de l’attribution de ce groupe de têtes. Pour U. Gehrig, ces documents sont samiens138 ; or, H.-V. Herrmann, qui attribue au Péloponnèse davantage de documents, propose de voir dans les protomes de type mixte du type II (donc notre exemplaire delphique aussi), une production argienne139, pour des raisons stylistiques. Mais il a beau invoquer la fermeté et la clarté dans la construction plastique, ainsi que la forme équilibrée de l’ensemble, les comparaisons manquent pour étayer cette attribution. Déclarer ces protomes les « véritables représentants du style dédalique moyen vers 650 »140 ne constitue pas une argumentation bien convaincante. À vrai dire, celle-ci repose sur le caractère « dorien » de l’art « dédalique », censé être produit par excellence dans le Péloponnèse, et non en Ionie. Il est intéressant de constater que cela convient bien à la fréquentation du sanctuaire d’Olympie, qui doit en effet avoir reçu des œuvres péloponnésiennes au viie siècle, comme il en recevait auparavant ; cette attribution montre aussi qu’à l’intérieur de la documentation très « orientalisante », des particularités régionales persistent, même s’il est particulièrement difficile de comparer des griffons à d’autres documents plastiques ou céramiques. Cette question se trouvera posée également avec la série des bustes de sirènes141. Enfin, le récit d’Hérodote attribuant à Argos le chaudron à protomes de griffons, le « cratère argolique », n’apporte aucun argument en faveur de cette attribution. La taille monumentale des protomes de technique mixte, et des chaudrons et supports leur correspondant, est peutêtre un indice d’une production péloponnésienne, dans la mesure où c’était déjà la caractéristique d’un petit groupe de protomes martelées monumentales d’Olympie142. Quant à la reconstitution des chaudrons décorés de griffons faits dans cette technique mixte, on peut constater que les auteurs ont donné peu d’éléments : U. Gehrig ne se pose à aucun moment le problème de l’aspect concret de ces chaudrons-ci ni des autres, du reste. Il n’est pas inintéressant de chercher à savoir à combien de chaudrons les trois cents griffons de Samos pouvaient correspondre et où ils prenaient place dans le sanctuaire. Pour l’évaluation de la hauteur des protomes, les avis divergent ; il est vrai que les deux exemples de Delphes suffisent à comprendre que même à l’intérieur de ce groupe de protomes « monumentales », des différences de tailles existaient. U. Jantzen proposait des protomes d’environ 80 cm de haut143, tandis que A. Mallwitz ne leur donnait que 65 cm144 ; alors que H.-V. Herrmann s’abstient de donner des mesures précises145, C. Mattusch propose de reconstruire des chaudrons

133. Gehrig 2004, n° 58a, p. 202 et pl. 107. 134. Herrmann 1979, p. 46-47, pl. 61-62. 135. Gehrig 2004, n° 57-59, pl. 24. 136. Herrmann 1979, G 94-95, pl. 56-57. 137. Scholl 2006, p. 101 n° 93 et fig. 38 a et b ; Gehrig 2004,

p. 111 ; Herrmann 1979, p. 122, n. 14 ; de Ridder 1896 p. 151, n° 437, fig. 105. 138. Voir en particulier Gehrig 2004, p. 100, alors qu’il attribue les têtes du second sous-groupe aux ateliers corinthiens, en suivant Herrmann.

139. Herrmann 1979, p. 159. 140. Ibid. 141. Infra, p. 226 et suivantes. 142. Herrmann 1979, G48-G63. Un seul griffon martelé monu-

mental est connu à Samos : Gehrig 2004, n° 12 (44 cm). 143. Jantzen 1955, p. 65. 144. Mallwitz 1972, p. 49. 145. Herrmann 1979, p. 131.

BRONZES DU HAUTARCHAÏSME À DELPHES

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de 4,60 à 5,60 m de haut146. Se dressaient dans les sanctuaires des objets en bronze d’une taille trois fois supérieure à la taille humaine, sans que les sources anciennes n’en aient gardé la trace, en dehors du trépied de Kôlaios dont Hérodote nous dit qu’il reposait sur des statues de 7 coudées147 ; il est vraisemblable que déjà à l’époque d’Hérodote, et plus encore de Pausanias, ces offrandes véritablement monumentales avaient disparu. Il eût pourtant été très intéressant de savoir quels étaient les commanditaires de tels morceaux de bravoure : il est tentant de les attribuer à des ateliers du Péloponnèse148. La technique de martelage des premières protomes de griffon et des cous des protomes coulées suggère un lien avec la technique du sphyrelaton, qui permettait d’obtenir des statues en ronde-bosse de grande taille avant l’emploi de la fonte à la cire perdue. Le mélange de technique et l’ajout de matériau autre que le bronze rapprochent en effet les protomes de griffon et les statues en sphyrelaton. Cependant, les discussions se poursuivent sur la définition exacte du sphyrelaton et notamment sur la présence obligée d’une structure de bois à l’intérieur : si on l’admet149, alors les protomes de griffon ne sont pas des sphyrelata. En revanche, elles peuvent appartenir à cette catégorie d’œuvres martelées en l’absence de certitude sur la présence de bois dans les sphyrelata150. Cela nous renseigne-t-il davantage sur les ateliers qui se seraient spécialisés dans le sphyrelaton ? Un buste féminin de Samos présentant la technique du sphyrelaton est analysé par D. Haynes comme l’œuvre des artisans samiens, rompus à cette technique à cause des protomes de griffon151 ; mais les Samiens ont surtout produit des protomes fondues. La triade de statues en sphyrelaton offerte à Olympie et étudiée récemment152 est attribuée à des artisans crétois qui, à l’école des artisans orientaux, ont développé l’art du métal martelé. Pourtant, l’absence de protome de griffon en Crète rend presque très improbable une telle attribution.

Objets particuliers Restent, après ces documents assez bien connus dans la production samienne ou péloponnésienne, des protomes dont la forme trouve difficilement des parallèles ; le fait qu’on ignore s’ils appartenaient même au décor d’un chaudron leur donne une place à part. Il s’agit tout d’abord de la tête de griffon à bélière inv. 951 (no 57, fig. 154-155) : bien que cet objet ne montre pas le système de fixation habituel des protomes sur l’épaule du chaudron, il occupe une place importante dans l’étude des protomes de griffon et de leur évolution. En effet, cet objet doit être une des premières têtes de griffon coulées, avec ses oreilles petites, les yeux proéminents, la partie inférieure de la gueule qui fait hésiter entre une mâchoire et un bec ; la bélière est un indice qui suggère que cette tête de griffon imite en fait une tête de taureau à bélière153, au tout début de la production des griffons154. Autre document bien difficile à classer : la protome inv. 16516 (n° 49, fig. 131-133). Comme elle n’a pas d’anneau de fixation, et qu’elle porte un clou en travers du cou, on ne voit pas bien comment elle pouvait décorer l’épaule d’un chaudron ; elle n’en est pas moins une protome de griffon, qu’on peut essayer de classer dans l’ensemble. Mais force est de constater qu’elle ne ressemble pas aux documents connus à Delphes, ni dans les autres principaux sanctuaires grecs. Une tête de griffon, conservée au Museum of Fine Arts de Boston155, de taille supérieure, présente quelques points de comparaison : le bec est entouré d’un décor de plusieurs filets, et la zone des yeux présente un traitement très curieux, comme si un gros cylindre troué à ses deux extrémités avait été

146. Mattusch 1990, p. 558.

147. Le support de sept coudées correspond environ à 3,25 m, auxquels il faut ajouter un chaudron d’une hauteur de 1,60 m environ et des protomes de 0,80 m ; l’ensemble se dressait à plus de 5,50 m dans l’Héraion de Samos. Mattusch 1990, p. 558. 148. Herrmann 1979, p. 129 : il suggère un rapprochement avec des documents de la toreutique corinthienne découverts à Olympie. 149. Par exemple Bol 1985, p. 74. 150. Haynes 1992, p. 13.

151. Id., p. 15. 152. Borell, Rittig 1998 ; Guralnick 2004. 153. Par exemple cat n° 91. 154. Gehrig 2004, en fait un contemporain de la protome n° 16, après les protomes n° 1 et n° 2 de Samos, et proche des créations de l’atelier Bernardini. 155. N° inv. 01.7471 : elle a été acquise dans la vente « Forman Sale II » qui se tint à Sotheby’s les 5-7 juillet 1900 ; Benson 1960, p. 60.

APPLIQUES EN FORME DE PROTOMES

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posé au-dessus du bec, sous le bouton. Comme elle était complétée d’un cou martelé, J.L. Benson place cette tête dans le groupe monumental, plutôt à la fin ; mais cette information n’est pas d’une grande utilité pour la protome delphique, décidément à part. Avant d’en venir à la signification du griffon, il faut mentionner ici deux autres griffons dont on trouvera l’étude ailleurs : il s’agit du griffon inv. 2885, décor de trépied ou de char (n° 29, fig. 79-80), et de la protome de griffon inv. 2669 (n° 100, fig. 275-276) sur applique à trois branches.

La signification des chaudrons à griffons En l’absence de sources écrites contemporaines, il est difficile de savoir quelle était la signification exacte du griffon qui décorait les chaudrons aux viiie et viie siècles en Grèce156 ; on a récemment cherché à y voir une offrande convoyant un sens spécifique157. Sans reprendre l’histoire du griffon dans l’art grec en général, qui a déjà été faite158, il s’agit de se demander pourquoi le chaudron à protomes de griffon a eu autant de succès, de la fin du viiie au vie av. J.-C.159. Seul Hérodote mentionne ce type d’offrande160, en le décrivant comme le « cratère argolique » ; le cratère présente en fait de nombreuses ressemblances formelles avec le chaudron, ce qui explique l’emploi de ce terme par Hérodote161. Bien qu’un certain nombre de représentations du viie siècle montre le chaudron à protomes de griffon comme objet de prix de concours162, ou comme butin de guerre163, le chaudron à griffons n’est presque pas mentionné dans les sources littéraires164 ; il faut donc avoir recours aux images pour essayer de compléter notre connaissance de cet objet très important au viie siècle. On en a des représentations sur des trépieds à baguettes165, ou des supports coniques166, comme nous l’avons déjà évoqué ; à partir de 700 av. J.-C., une série de représentations de chaudrons à griffons prend place dans un environnement habité d’oiseaux, d’animaux comme des chevaux ou des fauves, et d’êtres monstrueux comme le centaure, le sphinx. Dans ce contexte, certains ont fait remarquer que les protomes sont senties comme des êtres vivants167. Peut-on dire pour autant que les griffons sont des êtres dotés d’un pouvoir et chargés d’un sens symbolique particuliers ?168 Avant son retour dans la Grèce du viie siècle, le griffon est connu en Orient et en Égypte, où il est lié au culte des morts, tandis qu’au Proche Orient, il a de multiples fonctions, de protecteur de l’arbre de vie, de gardien de porte ou de compagnon de divinité169. Cet être est issu de la réunion d’éléments divers, témoignant de son aspect sauvage, surnaturel ou de sa puissance. C’est sans doute ce qui est encore visible dans les représentations grecques que l’on peut qualifier d’« apotropaïques », mais sur un mode mineur. H.-V. Herrmann a raison quand il souligne que les griffons, pas plus que les sirènes, ne sont des êtres mythologiques, qui prennent part à des histoires ; ce sera fait plus tard, avec le mythe des Arimaspes, ou des associations avec certains dieux, comme Apollon170. Les Grecs se sont avant tout intéressés à l’aspect formel des griffons, à ce motif finalement presque purement iconographique. Dans cette phase d’élaboration de l’art grec, la recréation d’un schéma formel à partir d’un modèle emprunté ailleurs est sans doute l’aspect le plus important ; et le griffon fut une réussite, tandis que les Grecs abandonnaient rapidement la création de sirènes avant le milieu du viie siècle.

156. Benson 1960, p. 65. 157. Papalexandrou 2015 notamment. 158. Delplace 1980. 159. Bien entendu, la question se pose aussi pour les « sirènes »,

mais il est alors plus facile de comprendre que les premières « sirènes » étaient orientales, et que leurs adaptations grecques n’eurent pas grand succès, si bien que la production s’arrêta rapidement. Sur le succès des représentations de griffons en dehors des protomes, voir Dierichs 1985, p. 5-32. 160. Hérodote IV, 152. 161. Sakowski 1998, p. 62. 162. Id., p. 63, dans des scènes où il accompagne des athlètes. 163. Id., p. 65.

164. Leventopoulou 1997 : ceci rend bien difficile de définir un quelconque rôle symbolique. 165. Par exemple sur un aryballe protocorinthien conservé à Berlin (inv. V.I.3409). 166. Par exemple sur une tôle de bronze d’Olympie : Sakowski 1998, p. 68, fig. 8. 167. Sakowski 1998, p. 65-67. 168. Klebinder-Gauss 2007, p. 150 : l’auteur conclut à l’impossibilité d’expliquer précisément les raisons de l’offrande de griffons dans les sanctuaires, en l’occurrence Éphèse, notamment à cause de la polysémie de la figure du griffon. 169. Herrmann 1979, p. 5 ; Flagge 1975 ; Bisi 1965. 170. Herrmann 1979, p. 6.

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Régions

Sites

Protomes martelées

Orient (11)

Ziwiyé

1 (or)

1

Elmalı

3

3 1

1

Suse

1

1

Samos

14

Chios

6 300

2

2

2

7

9

Didymes

1

1

2

Claros

2

2

Éphèse

9

9

Kalymnos

1

1

4

Camiros

4 3

Délos

1

Kalaurie Athènes

1

Pérachora

1

Argos (Heraion)

3 1

1

1

8

9 1

1

1

65

46

111

1

1

Delphes

7

21

28

Dodone

1

3

4

Phères

1

1

Tsotyli (Kozani)

1

1

Olympie Sparte

Étrurie (31)

6 286

Milet

Lindos Grèce des îles et du continent (159)

Total

Liban Chypre Ionie et Dodécanèse (333)

Protomes fondues

Préneste, T. Barberini

3

3

Préneste, T. Bernardini

5

5

Vetulonia

6

6

171

Tarquini

7

7

Brolio

3

3

1

1

4

4

Perougia

2

2

Kymé

2

2

Métaponte

1

1

Bourgogne (4)

La Garenne

4

4

Espagne (1)

Andalousie

1

1

Gravisca Trestina Italie du sud (3)

172

173

171. Hencken 1968, p. 393 : 4 protomes pour 1 chaudron ; 2 autres protomes du même chaudron à Copenhague : Jantzen 1955, p. 24, n. 131-132 ; une autre de Tarquinia, à Berlin : Hencken 1968, p. 409, fig. 407.

172. Colivicchi 2004, p. 36, n° 24, fig. 24a et 24b. 173. Lo Schiavo, Romualdi 2009, p. 53-56, 85-102, n° 22-25,

fig. 12-14, pl. XVI.

APPLIQUES EN FORME DE PROTOMES

Régions

77

Sites 174

Musées et collections d’Europe (24)

Protomes martelées

1

1

Bâle

1

1

1

2

Budapest

1

1

Erlangen

1

1

Genève

2

2

Hambourg

1

1

Londres

7

7

Munich

2

2

1

2

Prague

2

2

Zurich

1

1

Ankara

2

2

Izmir

2

2

Shikaraki

1

1

Boston

5

5

Bowdoin college

1

1

Chicago

2

2

Cleveland

1

1

New-York

2

2

1

Paris (Louvre)

Musées des États-Unis (13)

Total

Angers Berlin

Musées d’Asie (5)

Protomes fondues

1

Philadelphie Marché de l’art (15) Total

117

1

1

15

15

480

597

Tableau 4. — Répartition régionale des protomes martelées et fondues175.

Sirènes176 Catalogue 58. Sirène. Inv. 23972. Bronze, 23,3 cm. Fig. 161-162. Perdrizet 1908, p. 81, n° 368, pl. XII, 2 et 2 bis ; Kunze 1931, p. 268, n° 25, pl. 56 b ; Pallottino 1955, pl. 48,2 ; Herrmann 1966, p. 57, n° 40, et p. 79 ; Rolley 1991, p. 153 n° 15, p. 154, fig. 15 ; Muscarella 1992, p. 19 ; Aurigny 2017a, p. 41, fig. 7-8. Sirène imberbe. Manque un angle de la queue ; surface rongée en plusieurs points. Visage fin en bas, presque triangulaire. Les yeux, aux paupières lourdes, assez usées, ne sont pas très ouverts ; la bouche est assez large. Les cheveux forment une lourde calotte épousant le profil du crâne, assez haut, droit derrière. Décor gravé, très effacé au sommet : d’une raie axiale partent des traits parallèles, verticaux sur les côtés, encadrant des rangs de stries obliques. Autour de la nuque, une masse plus épaisse porte quatre rangs de petits cercles faits au poinçon. Le vêtement porte un décor gravé complexe. Sur le devant, deux traits sont gravés à la base du cou, deux rangs de petits cercles (quatre sur les côtés) ; au bord, rang de triangles à côtés doubles, et décor de points, formant des cercles audessus des triangles et les remplissant au-dessous. Un trait vertical bordé de rangs de points semble indiquer la couture des

174. Documents dont le contexte de découverte est inconnu. 175. Le tableau a été fait grâce aux listes établies par U. Gehrig, en

ajoutant les protomes de Delphes qu’il ne connaissait pas et les protomes de griffon du chaudron de Salamine de Chypre.

176. Ce nom reste le plus commode pour désigner une applique ailée à buste humain en bronze qui servait de décor de chaudron ; voir infra, p. 86.

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manches sur les côtés ; elles sont rendues plastiquement à l’arrière, et bordées d’un trait. Le dos est couvert de points. Les bras portent deux traits au coude177, et un bracelet de deux traits. Sur les mains, au pouce détaché et très long, douze cases délimitent grossièrement les doigts et les phalanges. Entre les coudes, deux ouvertures à peu près rondes encadrent une bélière ; d’un coude à l’autre, s’étend un arc en relief orné de deux rangs de petits cercles. Le contour des ailes dessine dix saillies rondes à droite, neuf à gauche ; il devait en être de même pour la queue. Sur les ailes, des plumes sont gravées : trait double pour la tige, trait simple entre les plumes ; entre eux, traits obliques. Décor identique sur le bas de la queue ; audessus, zone intermédiaire couverte d’écailles faites de points ; en haut, quatre rangs de petits cercles. Le rivet de la queue est conservé ; un trou de rivet sur chaque aile. Par le modelé de la chevelure, la finesse du bas du visage, les yeux peu ouverts, cette sirène, malgré l’usure des yeux et du nez, ressemble à l’exemplaire de la collection Dutuit178, dont elle reprend le décor gravé, en le simplifiant. H.-V. Herrmann la place dans le groupe de « l’atelier C », avec vingt autres attaches179 ; à l’intérieur de cet ensemble, un sous-groupe est formé par la sirène de Delphes, la paire de sirènes d’Olympie A3 et A4, et la paire du Ptoion. Le profil du visage est assez nettement le même que celui de la sirène A12 d’Olympie180, avec des yeux cernés de lourdes paupières et un nez busqué. Comme on n’a pas retrouvé d’exemplaires de ce groupe en Orient, H.-V. Herrmann suggère que ces pièces étaient faites pour l’exportation. On doit aussi souligner la proximité avec les sirènes retrouvées à Toprak Kale (fig. 163)181. Le décor de triangle et de points se retrouve sur les sirènes du tumulus MM de Gordion (fig. 164)182, ou sur des éléments de parure, comme les pendeloques en disque en or de Camiros, conservées à Berlin183. 59. Sirène. Trouvée le 21 juin 1895, au Nord-Ouest du trésor des Athéniens, sur le sol vierge. Inv. 2623. Bronze, 17,8 cm. Fig. 165-167. Perdrizet 1908, p. 81, n° 366, pl. XII, 1 et 1 bis ; Kunze 1931, p. 268, n° 26 ; Herrmann 1966, p. 57, n° 41, p. 79 ; Muscarella 1992, p. 19. Sirène imberbe. Manquent la queue et une partie de l’aile gauche. Visage plus large en bas que le n° 58 (inv. 23972), les yeux, encore plus allongés, sont inégaux ; la bouche est abîmée. La chevelure est indiquée par un décor gravé : autour d’une raie axiale, lignes gravées encadrant des stries transversales. Le décor du buste rappelle celui du n° précédent : trois courbes en bas du cou ; petits cercles, jusqu’à une bordure de triangles faits de traits doubles ; à l’arrière, à droite, on voit encore un décor de petits cercles. À la main droite, le pouce est détaché, les autres doigts séparés par trois traits. Bélière entre deux ouvertures, encadrées par un arc en relief, sur lequel on ne voit pas de décor. Sur l’aile droite, neuf plumes, celles de l’intérieur coupées droit, les autres formant une saillie moins arrondie que sur le n° précédent. Traits simples pour la tige et la séparation des plumes, stries obliques. Rivet conservé à l’aile droite. Maladroit ou brutal dans son modelé184, ce qu’accuse surtout la vue de profil, cet exemplaire est beaucoup plus proche du précédent que des suivants, par le visage comme par le décor gravé : la convergence de ces deux critères permet l’attribution à deux « mains » voisines. Classée par Herrmann dans le groupe de « l’atelier C », elle se rattache à un sous-groupe formé par la paire trouvée dans les fosses de l’Aire, inv. 7725 et 7726, ainsi qu’au fragment d’aile de sirène surmonté d’un taureau de l’Héraion d’Argos (fig. 193)185. Comme la précédente, elle doit être rapprochée des sirènes de Toprak Kale (fig. 163)186. 60. Buste de sirène. Trouvée le 2 mai 1894, « entre les trésors de Cnide187 et de Sicyone, sur le sol vierge ». Inv. 1347. Bronze, 11,5 cm. Fig. 168-170. Perdrizet 1908, p. 81, n° 367, fig. 281, pl. XII, 4 ; Kunze 1931, p. 268, n° 23 et pl. 56 a ; Herrmann 1966, p. 57, n° 38 et p. 79 ; Filippakis 1983, p. 131-132, éch. 20 ; Magou 1991, p. 363, n° 20 ; Muscarella 1992, p. 19 ; Maass 1993, p. 136, fig. 58. Sirène à deux visages opposés. Ailes et queue manquent, sauf le départ d’un bras, avec deux traits au coude ; du côté tourné vers l’extérieur du chaudron, le visage et la bordure inférieure du buste sont rongés. H. cons. : 11 cm ; h. du buste intérieur : 8,8 cm ; larg. cons. : 11,5 cm. En dessous, l’objet est creux, encore partiellement rempli du plomb qui, en plus des rivets habituels au bout des ailes, soudait au chaudron cette applique particulièrement grande et lourde. Le visage conservé 177. On trouve des parallèles à ce détail, dans les sirènes d’Olympie A3, A8 et A12 par exemple : Herrmann 1966, pl. 9, 14 et 18. 178. Kunze 1931, p. 27, n° 50 ; Akurgal 1968, p. 40 („type B, groupe d‘Istanbul“), p. 43, pl. 6 à 9 ; Herrmann 1966, surtout p. 59, n° 62, p. 76 (attribution à l‘“atelier B“) et pl. 25, 3-4. 179. Sur le classement proposé par H.-V. Herrmann, voir le commentaire. 180. Datée de la première moitié du viie s. (musée). ; Herrmann 1966, p. 32, pl. 18. 181. Akurgal 1961a, pl. 18-19.

182. Young 1981, p. 105, fig. 69. 183. Gehrig, Niemeyer 1990, n° 91-2, fig. 79, p. 101. 184. Mais il n‘y a aucune raison de penser que la pièce „n‘ait pas

été tout à fait réussie à la coulée“ (Herrmann 1966, p. 80). 185. Conservée au Musée National d’Athènes : voir infra, p. 81, n° 69, fig. 190-192. 186. Akurgal 1961a, pl. 18-19. 187. Le « trésor de Cnide » désigne alors le bastion à l’Ouest du trésor de Sicyone, c’est-à-dire le trésor de Siphnos.

APPLIQUES EN FORME DE PROTOMES

79

est rond, comme bouffi, avec les yeux plus ouverts que sur les deux nos précédents, des paupières encore plus grosses, les sourcils marqués par un bourrelet ; la bouche est plus petite. Sur les côtés, les cheveux forment une nappe plate qui tombe sur les épaules, avec un décor irrégulier de fines lignes gravées verticales encadrant des stries. Sur le buste se développe un décor très chargé, non identique des deux côtés. Du côté de l’intérieur du chaudron, il s’organise en rangées horizontales, encadrées et séparées par des traits plus ou moins courbes ; de bas en haut : un rang de triangles remplis de points, un rang de chevrons, un rang de triangles remplis de points, un rang de chevrons, un double rang de points, qui est plutôt le collier habituel sur ces figures. À l’extérieur, les trois zones supérieures sont les mêmes ; en dessous, le décor, en rangs de stries obliques, suit la ligne des bras, sauf, apparemment, au centre. Sur les côtés, un rang vertical de triangles remplis de points, du côté intérieur, et une bande de métopes à l’extérieur, sont séparées par un rang de points entre deux traits. Cette sirène est particulièrement proche du n° A 13 d’Olympie, elle également à double tête : la similitude des visages est frappante. Le décor est plus simple sur l’exemplaire d’Olympie, mais se caractérise par les mêmes triangles remplis de points et la richesse de la bordure du vêtement, au bas du cou. La sirène A9 fournit encre un bon parallèle. Elle est aussi très proche d’une sirène de Vetulonia188. Comme pour les deux précédentes, le rapprochement avec des sirènes de Toprak Kale s’impose, pour le visage comme pour le décor gravé. 61. Buste de sirène. Trouvé en 1972, à l’Est du sanctuaire (fouilles Lerat). Inv. 8929. Bronze, 8 cm. Fig. 171-172. Filippakis 1983, p. 131-132, n° 76 ; Magou 1991, p. 563, n° 76. Brisée au départ des bras et de l’élément qui portait la bélière ; surface usée et oxydée. H. du buste : 6,5 cm. Le visage est triangulaire, à peine plus arrondi que celui du n° d’inv. 23972 (n° 58), et les traits sont voisins : on distingue encore l’œil droit en amande allongée, la bouche, petite, le menton étroit. Le décor gravé est presque entièrement effacé ; on devine quelques traits sur les côtés de la chevelure, et un rang de triangles doubles au bord du buste. Cette applique est proche du n°inv. 23972, mais avec des différences, dans les volumes du visage et la largeur du buste à la base qui empêchent probablement qu’elles aient formé une paire. Les sirènes A 10 et A 11 d’Olympie n’en sont pas éloignées ; elles appartiennent encore à la production de « l’atelier C »189. 62a. Sirène. Trouvée en 1939, dans une favissa de l’Aire. Inv. 7725. Bronze, 15 cm. Fig. 173-174. Amandry 1939, p. 115, n° 64 ; Amandry 1958, pl. 6,e ; Herrmann 1966, p. 58, n° 48-49, p. 79-80, p. 145-146. Elle forme une paire avec la suivante. Elle a conservé la bélière, brisée, très endommagée. Le visage est rongé, et le décor n’est pas conservé. Les trois rivets sont conservés. Le visage est très rond, la chevelure forme de gros bourrelets sur les épaules. On distingue encore quelques traits verticaux derrière une des chevelures, les triangles bordant le buste, et sur l’une des rangs de stries transversales sur la manche gauche. Le dessin des plumes ne respecte pas bien les indentations du contour. Bien que son état de conservation ne soit pas très bon, on peut remarquer une importante dissymétrie d’origine entre les deux ailes, la gauche étant bien plus longue que la droite. Cette particularité ne se retrouve pas sur la sirène suivante. 62b. Sirène. Trouvée en 1939 dans une favissa de l’Aire. Inv. 7726. Bronze, 16,8 cm. Fig. 175-176. Amandry 1939, p. 115, n° 64 ; Amandry 1958, pl. 6,e ; Herrmann 1966, p. 58, n° 48-49, p. 79-80, p. 145-146. Sirène de chaudron. Le visage est rongé, et le décor n’est pas conservé. Le visage est très rond, la chevelure forme de gros bourrelets sur les épaules. On ne distingue presque rien sur la surface de cette sirène, bien plus abîmée que la précédente. Le raccord du buste et de l’aile gauche à l’ensemble est très fragile. Les proportions ont l’air un peu différentes aussi : en dehors de l’usure du métal, qui a perdu une grande partie de son volume, le buste paraît moins large, beaucoup plus étroit de profil. Sans vouloir remettre en cause le rapprochement avec le n° précédent, on peut toutefois remarquer que ces sirènes ne devaient pas être totalement identiques. Elle forme une paire avec inv. 7725 ; et ce chaudron, avec la sirène inv. 2623 et l’aile de sirène portant un taureau de l’Héraion d’Argos (fig. 193), constitue un ensemble attribué par Herrmann à « l’atelier C ». La forme de l’applique et la structure du visage rappellent les sirènes de Toprak Kale190. 63. Sirène. Trouvée le 22 juin 1895 entre la base des Thessaliens, et le mur Est du téménos. Inv. 2646. Bronze, 12,3 cm. Fig. 177-178. Perdrizet 1908, p. 82, n° 371 ; Kunze 1931, p. 269, n° 35 ; Herrmann 1966, p. 58, n° 47 ; Muscarella 1992, p. 20.

188. Herrmann 1966, pl. 6, fig. 4 ; Camporeale 1969, p. 102 et pl. 37.

189. Herrmann 1966, p. 31, pl. 16-17. 190. Akurgal 1961a, p. 35 et suivantes.

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Ailes et queue de Sirène : les ailes sont brisées, la droite au trou de rivet, la gauche plus près du centre. Le contour des ailes et de la queue est découpé, sans rapport avec le décor gravé, qui est du type habituel : lignes verticales négligées encadrant des stries obliques alternées, généralement très effacées. Sur l’arc en relief, traces évanides de triangles gravés, avec peut-être des points. La main droite, seule conservée, a le pouce bien détaché ; un trait transversal au poignet, deux autres, encadrant un rang de points, à mi-longueur du bras. Il s’agit d’une applique plus petite que d’ordinaire (envergure restituée : env. 14 cm), mais du type oriental habituel : contrairement à ce qu’écrit Perdrizet, elle n’est pas, proportionnellement à sa taille, plus mince que les autres, et sa courbure générale est normale. Le contour, assez découpé, avec des festons triangulaires, assez aigus, rappelle la sirène de Delphes inv. 8397, la sirène d’Olympie A 10, ou encore celle du Ptoion 42A. Toutes ces sirènes sont issues de la même production, celle de « l’atelier C » selon Herrmann. La forme n’est pas sans rappeler les sirènes de Toprak Kale191. 64. Queue de sirène. Trouvée le 13 juin 1895, à l’Est du sanctuaire d’Apollon. Inv. 2569. Bronze, 10,3 cm. Fig. 179. Perdrizet 1908, p. 81, n° 365 ; Herrmann 1966, p. 58, n° 46. Queue de très grande sirène ? H. cons. : 10,3 cm ; larg. max. : 8 cm ; ép. max. à la cassure : 8 mm. Un trou de rivet. Décor de sept rangs de plumes, dont seul le contour est indiqué. Le revers n’est pas tout à fait lisse. La forme générale, le décor, le trou de rivet, invitent à voir dans ce fragment la queue d’une sirène de taille exceptionnelle (mais pas plus grande que n’était le n° inv. 23972). Le fragment, très légèrement courbe de droite à gauche, ne l’est pas du tout de haut en bas. Le décor de plumes non striées en plusieurs rangs est plutôt grec, mais la forme générale de la queue est alors tout autre. L’absence de feston et les dimensions imposantes limitent le nombre de comparaisons possibles : une sirène de Van192 peut être un parallèle. 65. Sirène. Trouvée le 24 mai 1924, sur la terrasse à soutènement polygonal à l’Ouest du sanctuaire, en contrebas du portique de l’Ouest, au milieu d’une couche de remblai caractérisée par des tessons corinthiens. Inv. 8397. Bronze, 22,5 cm. Fig. 180-183. BCH 1924, p. 477 ; Rolley 1967, n° 140 ; Amandry, 1969, p. 797 ; Rolley 1979, 14-15, fig. 16 ; Rolley 1990, p. 417, fig. 2 ; Muscarella 1992, p. 17, pl. Ib ; Partida 2003, p. 424, n° 694 ; Partida 2006, p. 803 ; Aurigny 2010, p. 235, 238, fig. 42 ; Aruz 2014, p. 277-278, 149a193 . Sirène imberbe casquée. Intacte, sauf un éclat à l’aile gauche. Envergure : 22,5 cm ; h. : 18 cm. Le visage est triangulaire, étroit du bas. Sous des arcades sourcilières striées, des paupières lourdes, également striées, encadrent des yeux allongés, audessus d’un nez aux côtés plats ; la bouche est en revanche d’un modelé adouci. La chevelure est formée de volumes simples et nets. Elle forme un bandeau plat sur le front ; le dessus est presque plat ; à l’arrière, décor en trois zones, qui assure qu’il s’agit bien de cheveux, et non d’un casque ; de bas en haut groupes de points, lignes verticales encadrant des stries obliques ; en bas, écailles en arrière, traits transversaux en avant. Sur le dessus de la tête, un crochet à quatre pans plats, décorés de rangs irréguliers de points, qui est le cimier d’un casque, se recourbe vers l’avant. A la base du cou, collier fait d’un rang de points, un rang de chevrons, une ligne continue, un rang de points. A la bordure du buste, un rang de triangles remplis de points et surmontés d’une rosette de points. Le vêtement forme deux manches indiquées plastiquement, couvertes de lignes longitudinales encadrant des rangs de points ou de stries transversales. Coudes soulignés par deux traits ; bracelets de trois traits ; pouces détachés, quadrillage pour les autres doigts (quatre doigts à droite, trois à gauche). Deux ouvertures encadrent une bélière ; l’arc en relief porte un rang de triangles remplis de points. Au-dessous, une zone d’écailles, plus large sur la queue, va d’un coude à l’autre. Les plumes sont rendues par des lignes encadrant des rangs simples ou doubles de stries obliques, ne correspondant pas aux indentations régulières du contour (huit sur chaque aile) et de la queue. L’excellente conservation de la surface souligne le contraste, habituel sur les sirènes orientales, entre un modelé soigné et un décor négligé, complexe mais fait très vite. L’intérêt essentiel de cet exemplaire est que c’est la première sirène imberbe qui soit casquée : outre quelques comparaisons supplémentaires avec d’autres séries, cela assure que, imberbes ou barbues, ces appliques sont masculines. Le casque194 recourbé vers l’avant se rencontre sur une sirène barbue du chaudron de Vetulonia, en Étrurie195, ainsi que sur la sirène A5 d’Olympie196. Sur celle-ci, le casque n’est pas formé de pans coupés, mais a la même forme générale, et présente la même façon de commencer la chevelure sous le casque sans marquer trop clairement la limite. À Chypre, les statuettes

191. Akurgal 1961a, p. 18-19. 192. Herrmann 1966, pl. 25. 193. Notice rédigée par A. Psalti. 194. Ce casque est porté par des soldats assyriens sur un bas-relief

de Tell Halaf en Syrie du Nord ; Muscarella 1962, p. 324. On

connaît aussi des exemplaires de ces casques assyriens : Dezsö 1998, ill. 26-27. 195. Akurgal 1961a, fig. 25-26 ; Herrmann 1966 pl. 5 ; Camporeale 1969, p. 102, pl. 36,2. 196. Herrmann 1966, p. 31 et pl. 11.

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qui ornent les clavettes d’essieu du char de la tombe 79 de Salamine portent des casques de ce genre197 ; cela est un indice en faveur de l’origine orientale de ce couvre-chef. Le visage et le décor du buste permettent de proposer un rapprochement avec les sirènes du lac de Van198. 66. Sirène. Inv. 8395. Bronze, 14 cm. Fig. 184-186. Perdrizet 1908, 81, n° 364, pl. XIII,1 et 1 bis ; Kunze 1931, 268, n° 24 ; Herrmann 1966, 57, n° 39, p. 82, n. 23. Partida 2003, 424, n° 696 ; Partida 2006, p. 803 ; Aruz 2014, p. 277-278, n° 149b199. Sirène imberbe complète. Envergure : 14 cm ; h. 12,7 cm. L’applique est massive, sans les ouvertures ni l’arc en relief habituels ; les ailes sont exceptionnellement courtes. Un trou de rivet sur chaque aile. À l’extérieur, le décor, bien conservé, se limite aux ailes et à la queue proprement dites : lignes verticales encadrant des bandes striées de traits obliques alternés ; en haut de la queue, bande transversale faite, entre deux groupes de deux traits, de groupes de stries formant des triangles. Un trait courbe délimite la zone centrale lisse, où la bélière est située plus bas que d’ordinaire. Les bras portent deux traits aux coudes et aux poignets ; des traits séparent les doigts200. Le visage est plus large que haut, avec un menton gras, une bouche petite sous un nez large du bout, des yeux assez ouverts sous des arcades sourcilières marquées. Les oreilles, grandes, sont modelées en avant de la chevelure, qui forme une calotte striée autour de la raie centrale ; en bas, un gros bourrelet arrondi, nettement séparé de la calotte, forme sur les épaules deux grosses masses rondes, ornée de petits cercles au poinçon, qui encadrent le visage. Cette sirène est totalement originale, par la structure générale de l’applique, le visage, et le décor, qui ne reprend pas les quelques motifs courants. Les attributions proposées l’ont toujours été avec réserves ; on l’a toujours jugée orientale. H.-V. Herrmann reconnaît en effet qu’il est difficile de préciser la place de la protome dans l’ensemble des sirènes. La forme du visage, le volume de la coiffure tombant sur les épaules rappellent une sirène conservée au British Museum (Londres 22. 494)201, et considérée comme provenant de Nimrud202. Est-ce suffisant pour reconstituer une production assyrienne ? La sirène conservée à Copenhague permet aussi de poser la question. 67. Sirène. Trouvée à Marmaria ? Inv. 13258 (Musée de Copenhague). Bronze, 15,5 cm. Fig. 187-189. Kunze 1931, p. 238, 268, n° 22, et Beil. 6 ; Frankfort 1954, p. 189, n. 127 ; Amandry 1958a, p. 81, n. 5 ; Herrmann 1966, p. 71 ; Amandry 1958b, 5, pl. IV, 1 et 2 ; Muscarella 1962, 318 et 327, pl. 104 b ; Kyrieleis 1966, p. 12-13 ; Braun-Holzinger 1984, p. 90 ; n° 297, pl. 59 ; Guralnick 1989, 157, fig. 13a-b ; Muscarella 1992, 19, n. 13, pl. IIb ; Curtis 1994, p. 14, fig. 25. Sirène barbue. Manque l’aile droite. Le buste donne l’impression d’être modelé indépendamment de l’applique, le personnage s’accrochant des deux mains au bord du chaudron. Yeux bien ouverts, entre deux paupières en bourrelet, sous des arcades sourcilières marquées ; nez étroit en haut, aux ailes bien dessinées. La bouche, qui semble entr’ouverte, disparaît, ainsi que le bas des joues, sous une barbe bouclée qui, en bas, est stylisée en mèches verticales coupées à mi-hauteur par une ligne horizontale. La chevelure forme au-dessus du front des mèches verticales modelées, à l’arrière des bourrelets horizontaux ; elle s’élargit sur les épaules en une demi-couronne de trois rangs de boucles rondes. Le bas des manches est marqué par trois filets ; les bras sont musclés, les mains soigneusement rendues. Bélière étroite ; en dessous, deux traits marquent le départ de la queue. Celle-ci porte en haut deux volutes opposées autour d’un motif en double pointe de flèche, en bas des languettes divergentes. Sur l’aile conservée, plumes en deux rangs, respectant les indentations du contour. Tout ce décor est modelé, la seule indication gravée étant les deux traits à la base de la queue. Un trou de rivet sur l’aile, un sur la queue. Document dont l’origine delphique a été contestée203, cette sirène tout à fait à part est cependant importante dans la discussion sur le lieu de provenance des sirènes en Orient : elle est considérée comme de type assyrien, c’est-à-dire qu’elle présente des caractéristiques qu’on retrouve sur des reliefs, comme ceux du palais de Ninive204. 68. Taureau sur aile de sirène. Inv. 8399. Bronze, 14 cm. Fig. 190-192. Perdrizet 1908, p. 56, n° 178, pl. XIV,3 ; Kunze 1950, p. 98-99 ; Filippakis 1983, 131-132, éch. 77 ; Magou 1991, p. 563, n° 77 ; Strøm 1998, p. 43-44, fig. 5. Taureau debout sur l’aile gauche d’une sirène. Contour de l’aile déformé ; la cassure, à droite, est totalement usée. L. du taureau : 14,8 cm ; h. à la croupe : 9,5 cm. L’ensemble a été coulé d’une seule pièce. L’aile comporte, à l’avant, un ressaut qui assurait la fixation au bord du chaudron ; un rivet est conservé à l’extrême gauche. On aperçoit à l’extrémité de l’aile 197. Karageorghis 1973, pl. CI-CIV. 198. Akurgal 1961a, p. 35 et suivantes. 199. Notice rédigée par A. Psalti. 200. Barnett 1986, p. 120, note 21, compte six doigts à la main

gauche de cette sirène.

201. Herrmann 1966, pl. 22. 202. Mais cette sirène est en fait sans provenance, bien que de style

mésopotamien : Curtis 1994, p. 14. 203. Muscarella 1992, p. 19. 204. Parrot 1961, fig. 75-76.

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les restes d’un décor : lignes parallèles au bord de l’aile encadrant des rangs de stries. Le corps du taureau est mince, mais le cou est puissant. Les pattes arrière sont comme surélevées sur une plaquette verticale. La queue est ramenée sur la croupe. La tête, massive, est bien séparée du cou, avec de gros yeux saillants entre des paupières en bourrelet ; une fente marque la bouche. Les cornes et les oreilles sont usées. On ne voit aucune trace de décor gravé. En avant, monte de la cassure de l’aile un bras gauche, dont la main saisit la patte antérieure droite du taureau. E. Kunze a reconnu la fonction de ce fragment, à partir d’un parallèle précis, brisé à peu près au même endroit, de l’Héraion d’Argos (fig. 193)205 ; cette dernière sirène a le bras normalement couché sur l’aile. On peut, dans les deux cas, restituer une sirène d’environ 30 cm d’envergure, ce qui suppose un chaudron colossal, sans doute de 80 à 100 cm de haut pour la cuve, mais pas plus que le pied de lion chypriote, ci-dessus n° 19. C’est Chypre aussi qui a fourni un autre exemple de sirènes portant un motif en ronde bosse sur les ailes, avec le grand ustensile complet de Salamine, où les sirènes ont des protomes de griffon (fig. 160). Mais le style et la technique sont entièrement différents : le chaudron de Salamine doit être une imitation locale d’un type non chypriote, ce qui ne renseigne donc pas sur l’origine des deux sirènes à taureaux. D’après l’analyse des décors, E. Kunze conclut que ces deux objets sont des produits de l’art du lac de Van, de l’art urartéen206. 69. Sirène. Trouvée en juin ou juillet 1893. Inv. 725. Bronze, 15,5 cm. Fig. 194-196. Perdrizet 1908, p. 81, n° 362, pl. XII, 2 et 2 bis ; Kunze 1931, p. 269, n° 27, Herrmann 1966, p. 44, 58, n° 42, p. 83 n° 24 ; Muscarella 1992, p. 19. Sirène imberbe. Manque un éclat à l’aile droite. Envergure : 15,5 cm ; h. : 9,8 cm. Elle ne comporte ni les ouvertures ni l’arc en relief des sirènes plus grandes; elle a les trois rivets habituels. La bélière est brodée de filets. Le découpage est très irrégulier, le modelé et le décor négligés. Tout l’arrière porte des points qui dessinent de grandes lignes courbes plus ou moins parallèles au contour. Les bras maigres se rattachent maladroitement aux manches, raides ; des traits séparent les doigts. Le visage, dont le bas est rongé, était rond, mais avec un menton probablement pointu. La ligne des yeux est oblique ; les yeux eux-mêmes sont allongés entre des paupières lourdes, plutôt gravées que modelées. La chevelure est, sur tout le crâne, striée de traits horizontaux. Le bourrelet fréquent sur la nuque est lourd, et détaché de la calotte crânienne par un angle brutal ; il est strié de traits verticaux. Cette sirène est rapprochée par Herrmann de A15 à Olympie, avec lesquelles elle est censée former un « Unterströmungsgruppe »207 ; c’est-à-dire qu’elles font partie de la production d’un atelier secondaire, un peu en marge des grandes créations de sirènes. H.-V. Herrmann les qualifie de « provinciales », d’Anatolie ou de Syrie208. Il suggère aussi qu’elles appartenaient, d’après leur petite taille, à de petits chaudrons ou à des bassins. O.W. Muscarella ne les considère pas comme orientales. 70. Sirène. Achetée en 1899 à un paysan de Castri. Inv. Br 2604 (musée du Louvre). Bronze, 10,8 cm. Fig. 197-199. Perdrizet 1908, p. 81, n° 363 ; Kunze 1931, p. 269, n° 32 ; de Ridder 1913, II, pl. 94 ; Herrmann 1966, p. 58, n° 44 ; Muscarella 1992, p. 19. Sirène imberbe. Complète, mais la surface est entièrement rongée : on ne voit plus rien du décor des ailes. Envergure : 10,8 cm. Cette sirène de petite taille se caractérise par le fait que la tête se rattache directement aux ailes sans buste. Le contour est sans festons ou indentations, comme le précédent. Sur le dos les deux bras sont visibles : les épaules et le haut des bras se confondent avec le renflement de l’arc en relief ; à gauche on distingue à peine quelques traits gravés pour les doigts. Au centre de l’arc en relief, on voit deux dépressions à la place des ouvertures habituelles ; il n’y avait pas de bélière. Les trois rivets sont en ligne, celui du centre à l’emplacement de la bélière. Le visage a une forme en V à la pointe arrondie. La chevelure porte en arrière des lignes verticales encadrant des stries transversales ; elle ne forme pas sur les épaules le bourrelet habituel aux sirènes orientales. Les grands yeux en amande, saillants, sont surmontés d’épais sourcils. La forme générale a un bon parallèle à Olympie dans A 14, qui possède en plus un appendice circulaire à la place de la queue. Le jugement de H.-V. Herrmann, qui en fait les productions d’un même atelier, ou d’une même main, est très sévère : derniers témoignages de la production de sirènes orientales, elles montrent qu’on n’a plus alors qu’une vague idée de ce que doit être une sirène209.

205. Kunze 1950, p. 96-99. 206. Voir aussi Akurgal 1959, p. 97. 207. Herrmann 1966, p. 81. 208. Mais Brookes 1982, p. 610 considère A 15 comme une œuvre

grecque avec des traits typiques de la sculpture grecque géométrique,

proche par exemple de la statuette de Delphes inv. 1785, Rolley 1969, n° 9, p. 29, pl. 3,9. 209. Herrmann 1966, p. 81.

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71. Sirène. Trouvée en 1893. Inv. 3810 (23971). Bronze, 6,5 cm. Fig. 200-202. Perdrizet 1908, p. 81, n° 361 ; Kunze 1931, p. 269, n° 33 ; Herrmann 1966, p. 58, n° 45 ; Filippakis 1983, p. 131132, n° 21 ; Magou 1991, p. 563, n° 21 ; Muscarella 1992, p. 19. Sirène imberbe, avec un fragment du chaudron. Surface rongée ; la moitié gauche du visage manque. L ; cons. du rebord : 6,5 cm ; envergure : 5,8 cm ; h. : 5,5 cm. Ni ouverture, ni arc en relief. La bélière est, proportionnellement, très grosse. Il n’y a apparemment que deux rivets, sur les ailes. Du visage rond sont lisibles le bas d’un œil, avec une paupière assez fine, la bouche courte, le nez, qui était gros et court. Sur le bourrelet que les cheveux forment sur les épaules, stries verticales. Aucune indication des manches ni des bras. On distingue sur les épaules et les ailes des bandes de stries obliques, sans les traits de séparation habituels ; sur la queue petites incisions irrégulières. La petite taille et l’état de conservation empêchent de proposer des parallèles convaincants. 72. Sirène. Trouvée le 1er juillet 1895, au Nord de la base des Thessaliens. Inv. 2704. Bronze, 9,1 cm. Fig. 203-204. Perdrizet 1908, p. 80, n° 360, pl. XII, 3 et 3bis ; Kunze 1931, p. 269, n° 28 ; Herrmann 1966, p. 55, n. 32, p. 58, n° 43, p. 82-84, et pl. 27 ; Muscarella 1992, p. 20. Sirène imberbe. Surface entièrement rongée. Envergure : 10,8 cm. Envergure : 8,8 cm ; de la queue au sommet de la tête : 9,1 cm ; ép. : 3,5 cm, c’est-à-dire autant que les exemplaires de grande taille. La courbure marquée montre que l’applique décorait un chaudron de petite taille. L’applique a une structure simplifiée, comme certaines sirènes orientales (nos 68-72), sans ouvertures ; il n’y a pas de bélière ; trois rivets alignés, sous les mains et au centre, à l’emplacement habituel de la bélière. Aucun décor gravé, mais il a pu disparaître entièrement. On voit des amorces de manches, des bras maigres. Vue de devant, c’est-à-dire de l’intérieur du récipient, la tête repose directement sur le bord, sans amorce de buste, ce qui est sans autre exemple. Le visage est massif et brutal ; on distingue encore les yeux très grands, la bouche longue et fine. La chevelure forme une masse uniforme, avec en bas un bourrelet horizontal, assez haut sur le cou ; elle porte en arrière des traits verticaux encadrant des rangs de stries ; elle disparaît en bas, sans limite marquée. Cette sirène, considérée comme orientale par H.-V. Herrmann210, pourrait être grecque. Elle a un parallèle dans une sirène de Lindos, à Rhodes, conservée à Istanbul (n° inv. 3543), pour ce qui est de la taille et de la construction d’ensemble211. Il paraît plus probable de l’attribuer à un artisan grec. 73. Sirène. Trouvée le 21 avril 1894, entre l’opisthodome et le mur Ouest. Inv. 1248. Bronze, 18,1 cm. Fig. 205-207. Perdrizet 1908, p. 81, n° 369, pl. XIII,3 et 3bis ; Kunze 1930, p. 157, n. 1 ; Kunze 1931, p. 269, n° 29 ; Benton 1934, p. 85, n. 9 ; Matz 1950, 152, et pl. 57 a ; Amandry 1958a, p. 81, n. 7 ; Rolley 1979, p. 14-15, fig. 17 ; Herrmann 1966, p. 102, pl. 34, 39.1 ; Filippakis 1983, p. 132, n° 23 ; Magou 1991, p. 563, n° 23 ; Rolley 1994, p. 130 ; Partida 2003, p. 424, n° 695 ; Aurigny 2010, p. 235, 238, fig. 43 ; Aurigny 2017a, p. 41-42, fig. 4 à 6. Sirène imberbe. Manquent la queue et un éclat à l’aile gauche. Envergure actuelle : 18,1 cm ; h. max. actuelle : 10 cm. Le visage triangulaire, au nez et au menton pointus, est organisé autour de trois dépressions, l’une autour de la bouche, qui est droite, assez longue, aux lèvres minces, les deux autres autour des yeux, qui sont en « relief dans le creux », avec la pupille creusée assez profondément. En vue de face, les pommettes saillantes et la pointe du nez divisent le visage en deux zones. Arcades sourcilières marquées ; pas de front. Oreilles petites, surtout la droite, avec détails gravés. La chevelure est en saillie au-dessus du front, avec un rang de petits cercles gravés sur l’épaisseur. Sur le dessus, de chaque côté de la raie axiale, stries obliques fines ; sur l’arrière, vertical, décor gravé en cinq bandes horizontales, celle du haut portant des cercles doubles reliés par des tangentes, les autres des chevrons. Cou bien dégagé. Le buste porte un collier complexe : au-dessus d’un fil, un rang de petits cercles ; cinq pendeloques, les trois centrales en forme d’œil. A la bordure du buste, sept triangles sommés d’un petit cercle, et limités par deux traits encadrant un rang de petits cercles. À l’arrière, modelé schématique des omoplates, limitées par un rang de petits cercles. Sur les ailes, dissymétriques (la droite est plus mince), au-dessous des bras, languettes entourées par deux traits encadrant un rang de petits cercles, chacune correspondant à une indentation du contour ; elles s’arrêtent, en haut, à deux traits encadrant un rang de petits cercles, qui suivent la ligne du bras. Au-dessus des bras, remplissage confus, utilisant un poinçon rond et un autre en quart de cercle. Sur les bras, au modelé prononcé, quatre traits doubles encadrant un rang de petits cercles, à mi-hauteur du bras, au coude, au poignet, au départ des quatre doigts (le pouce étant détaché). La bélière est encadrée de deux bourrelets. Sur l’arc, neuf triangles bordés de traits doubles encadrant un rang de petits cercles. Un rivet, conservé, sous chaque poignet. Traces de soudure au plomb sous le buste.

210. Il en fait une production de la Grèce de l’Est, qu’il considère curieusement comme orientale.

211. Akurgal 1959 en fait une œuvre du « Ringelstil », dans les productions de l’Urartu, p. 90, pl. XXIII.

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Considérée comme une des plus anciennes sirènes grecques212, dans la vingtaine connue, elle reste, par la brutalité de sa construction, difficile à classer. Malgré son aspect encore très géométrique, qui pousse H.-V. Herrmann à la dater du dernier quart du viiie siècle213, on a fait des propositions sur son lieu de production : Herrmann y voit une production argienne214, tandis qu’on a pensé aussi à Corinthe ou à Athènes215. 74. Sirène. Trouvée avant 1931, à Marmaria (?). Inv. 8398. Bronze, 19,5 cm. Fig. 208-211. Kunze 1931, p. 269, n° 31 ; Filippakis 1983, p. 131-132, éch. 78 ; Magou 1991, p. 363, n° 78 ; Rolley 1991, p. 153, n° 16, p. 154, fig. 16 ; Partida 2006, p. 803. Sirène imberbe. Manquent la queue et l’extrémité du nez. Envergure : 19,5 cm ; h. max. actuelle : 10,1 cm. Visage de forme générale ovale, la mâchoire inférieure large, le menton arrondi. Arcades sourcilières dissymétriques, nez court, large à la base. Grands yeux, avec une large pupille creuse. La bouche aux lèvres fortes semble entr’ouverte. Les oreilles, grandes et détaillées, sont en saillie en avant de la chevelure. Celle-ci forme au-dessus comme un béret plat, avec raie centrale et stries divergentes. À l’arrière, elle forme deux bourrelets et l’amorce d’un troisième, séparés par des sillons et couverts de traits obliques divergents. Collier de deux traits ; en bordure du buste, rang de neuf triangles remplis de points. À l’arrière, modelé marquant un creux axial ; bordure des manches indiquée plastiquement et marquée par un trait double. Les bras ont des coudes pointus ; on y voit un bracelet fait de deux traits. Le pouce est détaché ; les autres doigts sont séparés par des traits, avec de petites courbes délimitant deux phalanges et les ongles. Sur les ailes, sous les bras et à leur niveau, deux rangs de languettes limitées par un trait double, correspondant aux indentations du contour ; au-dessus des bras, quadrillage de losanges. La bélière est bordée de deux traits gravés. Sur l’arc, dix triangles remplis de points. À l’arrière du buste, signe gravé en forme d’alpha renversé. La sirène de Delphes est extrêmement proche d’une sirène de l’Acropole inv. 6519216, jusque dans les détails gravés qui sont identiques (fig. 212). Celle-ci est attribuée par H.-V. Herrmann à la production de Sicyone- Corinthe217. 75. Sirène. Trouvée le 29 juin 1894, dans le puits à l’entrée de la tombe mycénienne à dromos. Inv. 1666. Bronze, 18 cm. Fig. 213-215. Homolle 1894, p. 441 (photographie) ; Perdrizet 1908, p. 82, n° 370, pl. XIII, 4 et 4 bis ; Kunze 1930, p. 269, n° 30 et pl. 56 d ; Benton 1934, p. 126, n. 5 ; Amandry 1958a, p. 81, n. 7 ; Herrmann 1966, p. 100, 102, 104, 112 et pl. 35 ; Filippakis 1983, p. 131, n° 24 ; Magou 1991, p. 563, n° 24. Sirène imberbe. Manquent la queue et un éclat à chaque aile ; surface érodée en plusieurs endroits. Envergure : 18 cm ; h. du buste : 6,4 cm. Visage plein, menton rond. Les yeux, bombés, occupent toute la dépression orbitale, le gauche plus grand que le droit ; pupilles indiquées par un cercle au poinçon, décalé vers le bas à gauche. Les lèvres sont plates, comme le montre la vue de profil, mais très lourdes, cernées et séparées par un trait gravé. Les oreilles assez grandes sont modelées en avant de la chevelure. Celle-ci s’arrête horizontalement au-dessus d’un front très bas ; stries obliques sur l’épaisseur, formant chevrons avec un autre rang au-dessus. Sur le dessus, stries divergentes de part et d’autres d’une raie centrale. L’arrière, à peu près vertical, porte trois rangs de chevrons qui se continuent en avant sur l’arrondi qui encadre les joues et le haut du cou ; le bas est lisse. Cou très long. Sur l’avant du buste, le seul décor est, à la bordure, un rang de triangles simples, délimité par une ligne double qui se prolonge en arrière, sur les épaules, pour se terminer par deux palmettes larges à languettes courtes. Dos modelé comme le précédent. Le bas du buste, en arrière, porte, entre les deux ouvertures habituelles, quatre languettes à contour simple. Les ailes sont ornées sous les bras de languettes limitées par un trait simple, correspondant aux indentations du contour ; au-dessus, languettes horizontales, celle qui suit le bord de l’aile en trois étages. Bras ronds ; bracelets de deux traits au-dessus du coude ; deux traits courbes sur le dos de la main ; sur le côté gauche, on voit nettement quatre incisions détachant cinq doigts, auquel on ajoute le pouce218. Pas de bélière. L’arc porte un rang de cercles réunis par des tangentes. Sur l’amorce de la queue, début d’un décor de languettes. Un trou de rivet sous chaque poignet. Il n’y a pas de parallèle pour le traitement du visage, ni pour un détail comme les tiges à palmettes des épaules219. Herrmann la rapproche tout de même d’une sirène de l’Acropole, inv. 6518 (fig. 216)220, qu’il date vers 700 av. J.-C. ; il attribue ces sirènes à un atelier attique221.

212. Herrmann 1966, p. 102 ; Rolley 1994, p. 130. 213. Herrmann 1966, p. 102. 214. Id., p. 108, et pl. 39. 215. Scholl 2006, n° 104, p. 155, et bibliographie complémentaire. 216. Scholl 2006, n° 104, p. 155, fig. 42 a-d. 217. Herrmann 1966, p. 109. 218. Cette sirène n’est pas la seule à posséder six doigts : on a fait

un rapprochement avec des êtres de la mythologie assyrienne, aux

pouvoirs surnaturels, le Rephaim ; Barnett 1986, p. 118. Cet être correspond à une forme de divinisation des ancêtres, et se caractérise par une taille gigantesque. 219. On trouve également des motifs gravés sur le taureau décorant le manchon de bronze inv. 7195, n° 23 de ce catalogue. 220. Herrmann 1966, pl. 37 (Herrmann a confondu dans les illustrations MN 6518 et MN 6517). 221. Herrmann 1966, p. 112, pl. 41.

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76. Queue de sirène. Inv. 23976. Bronze, 6,5 cm. Fig. 217. Inédit. Queue de sirène. Le fragment est presque plat. Décor de quatre plumes, divisées à mi-hauteur par une double ligne courbe ; une ligne suit le contour. Un rivet au milieu de la queue. La cassure, en haut, est extrêmement régulière. Ce fragment, malgré l’aspect régulier de la cassure, est certainement la queue d’une sirène. On comparera, pour les proportions, le décor et le rivet, avec l’exemplaire de l’Acropole d’Athènes inv. 6517, mais qui a six plumes222. Il ne provient certainement pas des nos 72-73. Le décor rend peu probable qu’il s’agisse du même objet que l’aile inv. 23973, où les languettes qui figurent les plumes ont partout une ligne de contour double. On trouve un autre parallèle à l’Héraion d’Argos (les plumes, sur deux rangs, sont beaucoup plus détaillées), mais qui doit être oriental223. 77. Aile gauche de sirène. Inv. 23973. Bronze, 7,5 cm. Fig. 218. Inédit. Aile gauche de sirène. Surface usée. Dim. max. cons. : 7,5 cm. La structure est celle des sirènes grecques ; les ouvertures allant jusqu’à l’arc en relief, dont est conservé un petit fragment. Sous un trait double encadrant des stries obliques, deux rangs de plumes sont délimités par des traits doubles, les plumes du bas correspondant aux indentations du contour. Le long du bord supérieur de l’aile, stries verticales. Sur l’arc, motif fait de triangles au départ, très usé ensuite. Sur le bras, bordure de la manche ; le pouce est à peine détaché, les autres doigts non détaillés. Si la forme de l’aile, le contour des plumes et la position du bras rappellent des sirènes d’Olympie, comme A 20224 et A 22, en revanche le décor de double rang de plumes est sans parallèle. 78. Aile droite de sirène. Inv. 23974. Bronze, 7 cm. Fig. 219. Inédit. Aile droite de sirène ; la surface est très usée. Le contour n’est pas découpé, avec de simples encoches sur le dessus. Les plumes, en trois rangs au moins, sont cernées par des traits doubles et striées obliquement ; elles paraissent respecter les encoches du contour, avec une encoche supplémentaire. Bras court et nu. Bracelet de deux traits au poignet ; un autre bracelet, ou le bas d’une manche, à la cassure ; main grasse, pouce court. Un rivet sous la main. Le décor de l’aile, qui évoque les nos 72-74, et à un moindre degré le modelé du bras, font penser que ce fragment, de toute façon sans parallèle exact, est grec. 79. Fragment d’aile droite de sirène. Inv. 23975. Bronze, 10 cm. Fig. 220. Inédit. Fragment d’aile de sirène, dont il est difficile de savoir s’il vient de l’aile droite ou de l’aile gauche. Le contour est assez découpé, et les plumes visibles ne se superposent pas, comme sur les autres exemples. Elles sont faites d’un trait central et de stries encore assez nettes. On trouve aussi un décor gravé sous l’aile. Il n’est pas sûr que ce fragment provienne d’une sirène : l’absence de trace de bras, le trou à l’extrémité de la plume, le décor gravé présent sur les deux faces font de ce fragment un document difficile à classer. 80. Sirène à deux visages. Trouvée le 2 mai 1894, près de l’opisthodome du temple d’Apollon. Inv. 1348. Bronze, 7,8 cm. Fig. 221-223. Perdrizet 1908, 82, n° 372, fig. 282. Applique à deux visages opposés. Les extrémités latérales paraissent brisées à l’emplacement des trous de rivet ; l’élément vertical est complet. Du bas de l’applique au sommet de la tête : 7,8 cm. La tête, remplie de plomb, serait à peu près sphérique sans la saillie des deux mentons. Sur les côtés, séparant les deux visages, décor gravé fait d’une colonne de chevrons entre deux groupes de traits verticaux qui se prolongent sous le menton. Les yeux sont de gros trous profonds ; nez mince, bouche droite aux lèvres à peine marquées. Pas d’oreilles. La forme de l’applique, les deux têtes opposées poussent à ranger cet objet, comme l’a fait Perdrizet, à côté des sirènes. Peutêtre y verrait-on une sorte d’agrandissement de la tête de quelques statuettes géométriques tardives ou subgéométriques. Parmi les bronzes de Delphes, la grande statuette225, du milieu du viiie siècle ou peu après, de fabrication attique, a une tête qui n’est pas totalement différente de celle-ci, et à peine plus petite ; celles de statuettes de plus petite taille sont nettement sphériques. Aurions-nous ici une sorte d’essai isolé, dû à un bronzier grec travaillant dans le style géométrique récent, d’orner un chaudron ? En dehors donc de la grande statuette attique, une hypothèse suggère que les sirènes à deux visages ont eu leur origine à Chypre, avant d’influencer les ateliers grecs et étrusques226.

222. Scholl 2006, n° 103, p. 155, fig. 41 a-c ; Herrmann 1966, pl. 36 (confusion entre 6517 et 6518). 223. Strøm 1992, pl. VII. 224. Herrmann 1966, pl. 30 et 32. Au musée d’Olympie, A20 est considéré comme une production argienne.

225. Rolley 1969, p. 28, n° 8, pl. IV. 226. Demetriou 1989, p. 69.

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Commentaire L’étude des sirènes conduit à des problèmes un peu différents de ceux des protomes de griffons, et qui paraîtront peut-être moins difficiles. Pourtant toutes les questions n’ont pas de réponse, à commencer par celle du nom à donner à ces attaches. Il faudrait évidemment parler d’ « appliques à buste humain ailé » pour être exact, mais l’appellation sirène reste commode227. Elle est en tout cas moins trompeuse que le terme allemand « Assurattaschen », qui semble indiquer une origine qui n’est sans doute pas la bonne : employé à la suite d’A. Furtwängler228, il est finalement rapidement abandonné dans les publications de référence, celles d’E. Kunze229, puis de H.-V. Herrmann, qui préfèrent parler de « Flügelattaschen mit menschlischen Protomen »230. Les Anglo-saxons, puis les germanophones, parlent de « Siren » ou de « Sirene ». Si ce terme permet d’éviter une longue périphrase, il prête aussi à certaines confusions, qu’on peut rappeler brièvement. Le terme de « sirène » fait songer avant tout au célèbre passage de l’Odyssée231 ; mais cet épisode n’est pas représenté dans l’art grec avant le vie siècle, et les sirènes que l’on connaît jusque-là n’ont pas de relation avérée avec les sirènes homériques : « il existe bien des oiseaux androcéphales dans l’art grec pendant ce laps de temps et ceci dès la fin du viiie siècle, mais ils sont représentés en dehors de tout contexte mythologique et ne sont dotés d’aucun attribut »232. En outre, il ne s’agit pas seulement là des sirènes de bronze utilisées comme décor de chaudron, mais aussi de décor de vases, d’objets en ivoire, ou en métaux précieux ; on peut noter aussi le fait que la plupart de ces sirènes sont des êtres masculins233. La spécificité iconographique des sirènes de chaudron réside dans le motif ressemblant en gros à un cercle ailé, encadré de deux ailes et surmonté d’un buste humain. Ce schéma a des origines spécifiques qui le placent à part : c’est une iconographie employée depuis longtemps en Mésopotamie pour figurer une apparition divine, comme on le voit par exemple sur des scènes décorant les palais assyriens ou sur des stèles funéraires234. Depuis A. Furtwängler, l’image du dieu Assur dans un disque solaire ailé est considérée comme l’origine du motif de la sirène235. On a pu évoquer aussi l’iconographie de Ba, dieu égyptien à corps d’oiseau et à tête humaine, dans une position héraldique. H.-V. Herrmann a toutefois souligné à juste titre qu’il est difficile de trouver une origine unique et certaine à ce motif polysémique, ou de savoir pourquoi les Grecs l’ont adopté et copié236 . On peut en tout cas en conclure que la série ancienne de sirènes de chaudron semble véritablement éloignée de la tradition des femmes oiseaux qui viendra illustrer les vers d’Homère. Connue depuis le xixe siècle, cette catégorie d’objets a été étudiée en série à partir des années 1930, lorsque Ipsen237 et Kunze238 établirent les premières listes de sirènes. Ensuite, la découverte de chaudrons ornés de sirènes à Gordion dans une tombe datée239 a permis de faire progresser nettement les données ; le chaudron découvert à Olympie en 1956240, portant à la fois griffons et sirènes, a définitivement lié l’étude des deux catégories. Si les sirènes ont des liens évidents avec d’autres appliques de vase à visage humain241, elles peuvent aussi être comparées à la catégorie des coquilles de tridacnes gravées, qui s’ornent à la charnière d’une tête humaine : le motif du disque solaire ailé est, pour chaque catégorie, une source d’inspiration, car il était connu dans tout l’Orient242. La catégorie des sirènes n’a pas bénéficié d’une étude fondamentale très récente ; un article de O.W. Muscarella faisait le point en 1992 sur l’historiographie de cette catégorie. Il est vrai qu’en dehors d’Olympie et de Delphes, et de Gordion en Orient, les autres sites n’ont pas livré plus de quatre sirènes à la fois (comme à l’Acropole) ; ce n’est donc pas du côté des publications de site que les études peuvent être vraiment renouvelées. Avant d’aborder les éléments susceptibles de compléter ce tableau déjà ancien, il faut souligner que la réalité est plus complexe que ne le montre 227. Amandry 1956, p. 244, n. 14 : « j’emploie le terme de « sirène » pour désigner commodément les bustes humains adhérant à une plaque qui affecte la forme de deux ailes et d’une queue d’oiseau, sans préjuger, de ce fait, si les Grecs ont réellement assimilé ces figures aux sirènes. » 228. Furtwängler 1890. 229. Kunze 1931 et Kunze 1950. 230. Herrmann 1966, p. 27 par exemple. 231. Odyssée chant XII. 232. Voir en dernier lieu Walter 2003, p. 143 et suivantes ; Leclercq-Marx 2002. 233. Même si celles du Ptoion sont considérées comme féminines : Ducat 1971, p. 67.

234. Stèle funéraire de Sam’al, Akurgal 1961b, pl. 130. 235. Parrot 1961, fig. 16. 236. Herrmann 1966, p. 51, et fig. 14. 237. Voir Lehmann-Haupt 1931, Anmerkungen p. 21. 238. Kunze 1931, annexe II, p. 267 et suivantes. 239. Young 1981. Sur la question de la datation des tombes de

Gordion, voir infra p. 161-162. 240. Herrmann 1966, p. 11, pour les circonstances de la découverte. 241. Infra, p. 117. 242. Stucky 1974, p. 74-75.

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une apparente facilité dans le classement des documents, par attribution à la Grèce ou à l’Orient ; de plus, l’étude des sirènes, qui décorent les mêmes chaudrons que les protomes de griffons, apporte des éléments de réponse aux questions qui se sont posées pour les griffons. À la différence de ces derniers, les sirènes ont été retrouvées en Grèce, mais aussi en Orient (carte 4, fig. 224)243 : à Nimrud244, dans la région de l’Urartu (Alişar)245, autour du lac de Van (Toprak Kale), puis à Gordion246, à Chypre247. En Grèce, des sirènes ont été retrouvées à Olympie248, Delphes249, au Ptoion en Béotie250, à Argos251, à l’Isthme252, Athènes253, Délos254, Samos255, et Rhodes256. Quelques pièces n’ont pas de provenance : une paire de sirènes au musée de Munich257, une sirène de la collection Glencairn à Bryn Athyn en Pennsylvanie258. Enfin, le sol italien a aussi livré quelques sirènes qui jouent un rôle important dans la réflexion sur la diffusion des documents dans le bassin méditerranéen259. L’ensemble de ces découvertes permet de faire des propositions précises quant à la provenance et à la fabrication des sirènes trouvées dans les sanctuaires de Delphes (Apollon et Athéna ont reçu tous les deux des chaudrons décorés de sirènes). Le matériel delphique sera présenté selon les critères déterminés par une longue tradition de la recherche en ce domaine ; nous verrons s’il peut apporter quelques nouveautés.

Sirènes orientales Les sirènes orientales sont à Delphes au nombre de 15, sur un total de 24. Cela est conforme à la proportion de sirènes orientales, plus élevée en général que celle des documents grecs. Elles se reconnaissent d’abord à une technique et une forme particulières, qui permettent de les distinguer des sirènes grecques : elles présentent une masse assez compacte, peu découpée, où les ouvertures autour de la bélière sont de taille très réduite (nos 58, fig. 161-162 et 59, fig. 165-167), quand elles ne sont pas absentes (nos 69, fig. 194-196, et 70, fig. 197-199). En dehors de la physionomie des sirènes, leur extérieur se caractérise par l’aspect brut de la surface non travaillée après la coulée260 ; non que des motifs décoratifs soient absents, mais le travail très modéré après la fonte donne une impression de flou et d’imprécision qu’on ne trouvera pas avec les sirènes grecques. Un autre détail technique peut être noté : les exemplaires orientaux semblent toujours être fixés au chaudron par trois rivets, tandis que les grecs se contentent bien souvent de deux rivets, sur les ailes261. Enfin, c’est le traitement du visage et de la chevelure qui constitue une autre caractéristique : le visage très rond, souvent assez gras, est constitué par de grands yeux en amande encadrés de paupières épaisses, un nez busqué arrondi à son extrémité, une bouche petite. La chevelure encadre ces traits, tombant en une masse indifférenciée sur les épaules ; le cou large est totalement pris dans cette silhouette. Ces caractéristiques sont bien entendu générales, et n’empêchent pas les différences entre les sirènes, en particulier dans le décor incisé après la coulée. Mais si celui-ci peut connaître de grandes variations, la structure des attaches, la « conception plastique de l’archétype » et le « style des visages »262 s’avèrent des critères plus pertinents, bien que plus difficiles à manier, que les seuls critères techniques. Au-delà de ces caractéristiques générales, les sirènes orientales présentent entre elles des différences qui ont conduit depuis longtemps à les classer selon différents lieux de production en Orient ; sur ce point l’accord est loin d’être fait263. Trois opinions principales ont cours, qui permettront de mettre en perspective le matériel delphique :

243. Carte dressée dans Bieg 2002, p. 69, fig. 56. 244. Londres, BM22.494 ; Lehmann-Haupt, Armenien II, p. 866. 245. Alişar. Ces sirènes sont aujourd’hui conservées à Istanbul,

257. Herrmann 1984, p. 21, n. 22. 258. Romano, Pigott 1983, p. 124-129 (non vidi). 259. La tombe Bernardini à Préneste, Canciani, Von Hase 1979 ;

Berlin, Paris, Leningrad ; voir Herrmann 1966, p. 56-57, n° 2-9. 246. Young 1981, p. 104-110, pl. 51-57. 247. Karageorghis 1973, pl. H, 130. 248. Herrmann 1966, p. 27-141. 249. Perdrizet 1908, p. 80-82, pl. XII-XIII. 250. Ducat 1971, n° 42 A et 42 B, p. 65-69, pl. XIII-XV. 251. Waldstein 1905, p. 49, pl. 77 ; Strøm 1998, p. 42-43. 252. Raubitschek 1998, p. 87, n° 307, pl. 50. 253. De Ridder 1896 ; Scholl 2006. 254. Déonna 1938, p. 68, pl. 29. 255. Jantzen 1967, 2, p. 91-93 ; Gehrig 2004, p. 258, pl. 110-111. 256. Blinkenberg 1931, p. 705, pl. 29.

deux chaudrons de Vetulonia. 260. Bol 1985, p. 73. 261. Mais ce n’est pas un détail toujours valable : les sirènes grecques de Delphes ont presque toutes perdu leur queue. La sirène de l’Acropole inv. 6517 porte un rivet sur la queue, alors qu’elle est sans nul doute de fabrication grecque. Ainsi, nous avons classé la queue inv. 23976, percée d’un rivet en son centre, parmi les documents grecs. 262. Ducat 1971, p. 68. 263. Muscarella 1992, p. 21 ; Rolley 1984a, p. 278 : « les divergences sont fortes, en revanche, sur la localisation des ateliers, qui est un des problèmes les plus embrouillés de l’histoire du ProcheOrient de cette période ».

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les uns attribuent les sirènes à la Syrie du Nord, les autres à l’Urartu, en admettant chaque fois l’origine assyrienne de quelques exemplaires ; enfin d’autres croient à l’existence d’ateliers syriens et urartéens, avec toujours quelques documents assyriens. Il est donc nécessaire de reprendre l’examen des documents, tout en tenant compte des données objectives des lieux de découvertes264, et de la carte de répartition des sirènes : « on ne peut […] négliger les cartes de répartition, quand elles sont nettes, quitte à se demander quelle est la meilleure façon de les lire »265. Or, des chaudrons décorés de ces bustes humains ailés ont été trouvés, en Asie, de Gordion au lac de Van, c’est-àdire la Phrygie et la moitié seulement de l’Urartu (carte 4, fig. 224) ; des comparaisons précises sont donc possibles, pour répartir le matériel en grands groupes ; nous verrons ensuite les difficultés à localiser et à identifier les ateliers de fabrication. Un premier groupe de sirènes est constitué par les nos 23972, 2623, 1347 et 8397 (nos 58-60 et 65). Les caractéristiques de ces sirènes sont d’abord le visage, très rond, au menton assez gras, avec un nez large, les yeux encadrés de paupières épaisses, qui forment comme des bourrelets. Or, on retrouve des traits tout à fait similaires sur les visages des sirènes de Toprak Kale266 et de Gordion267 (fig. 163-164). En outre, l’ornementation rapproche ces documents268 : non que les motifs soient strictement identiques269, mais l’alternance de traits courbes, de rangs de petits cercles, de rangs de triangles sur le bord du buste, rehaussés par des petits cercles faits au poinçon, permet d’affirmer l’existence d’un groupe. Pour les sirènes inv. 1347 (n° 60, fig. 168-170) et 8397 (n° 65, fig. 180-183), les cercles sont remplacés par des points, mais la ressemblance dans les visages ôte toute hésitation pour les attribuer à ce groupe. Les sirènes n° 61 et n° 63 se rattachent au même groupe, même si les exemplaires sont d’une qualité ou dans un état de conservation moindres. La recherche du lieu de fabrication de ces sirènes s’avère une entreprise beaucoup plus hasardeuse ; si l’opinion la plus ancienne, selon laquelle ces documents sont à mettre au compte des artisans urartéens, a été maintes fois défendue, par E. Akurgal en particulier270, un certain nombre d’éléments montre des liens étroits avec la Syrie du Nord et les productions « néo-hittites »271. L’attribution à l’art de l’Urartu tient à deux types d’arguments ; le lieu de découverte, même si on a prétendu qu’il n’était pas discriminant272. Les sirènes de Gordion n’apportent aucune preuve dans l’attribution à l’Urartu, et les sirènes de Toprak Kale, conservées à Berlin, n’ont pas de contexte de découverte assuré ; on n’a donc aucune sirène découverte avec certitude dans la région de l’Urartu. Ainsi, c’est la comparaison avec d’autres documents de l’Urartu qui a permis à E. Akurgal de reconnaître dans les sirènes le « Ringelstil » illustré par d’autres documents de la fin du viiie siècle, comme une statuette de Toprak Kale appelée l’ « Eunuque »273 et conservée à Berlin, ou des éléments de trône en forme de taureau ou de lion274. Ce style décoratif sera remplacé au viie siècle par le « Buckelstil », plus développé et plus riche ; les sirènes appartiennent donc bien au groupe antérieur, et la production est caractéristique du viiie siècle. D’autres détails, comme le casque de la sirène inv. 8397 (n° 65), ont été interprétés comme caractéristiques des représentations urartéennes275. Pourtant, les rapprochements faits depuis longtemps avec la Syrie du Nord, ainsi que les réflexions sur l’unité de l’art urartéen, permettent peut-être d’apporter des nuances : l’art de l’Urartu est multiple, on peut en particulier distinguer un art de cour et un art populaire, avec différentes productions276. Les appliques de chaudron en forme de sirènes appartiennent bien au « style des petits cercles », qui n’est pas une phase chronologique, mais une branche de cet art de cour. Et comme Van Loon attribue les sirènes à la zone du Taurus, à l’Ouest de l’Euphrate, « cela 264. Il faut signaler que malgré le lieu de découverte, les sirènes de Gordion n’ont jamais été considérées comme phrygiennes ; on a plutôt envisagé que des artisans de la zone néo-hittite se sont déplacés à Gordion où ils ont fabriqué des objets et transmis leurs connaissances aux artisans phrygiens ; voir Young 1981, p. 110. L’hypothèse phrygienne a été suggérée par H.-V. Herrmann à propos de la sirène inv. 2704 et d’une sirène de Lindos : voir infra p. 91. 265. Rolley 1984a, p. 279. 266. Akurgal 1961a, fig. 18-20 ; Barnett 1954, pl. III. 267. Akurgal 1961a, fig. 17 et 21 ; Young 1981, pl. 53 et 57 en particulier. 268. Akurgal 1961a, p. 303, fig. 9 et 10 (dessins du décor gravé). 269. On peut constater que même lorsqu’elles forment une paire, les sirènes d’un même chaudron n’ont pas exactement le même traitement décoratif : Ducat 1971, p. 67.

270. Mais aussi par P. Amandry ou J. Boardman. 271. Muscarella 1992, p. 22 ; Wartke 1985 p. 87, n. 2 et 3. 272. Les trouvailles anciennes du lac de Van ne sont souvent que

des lieux de découvertes supposés, les objets n’ayant pas été trouvés dans des fouilles régulières. Herrmann 1966, p. 59, n. 36. Mais on trouve quelques données importantes dans Van Loon 1966 : un chaudron d’une tombe de Toprak Kale est associé au règne du roi Argisti Ier (786-764 av. J.-C.) ; une sirène d’une tombe d’Altin Tepe est datée du règne d’Argisti II (713-685). 273. Akurgal 1961a, fig. 6-7 ; Wartke 1990, p. 43, n° 1, pl. I, 1-4. 274. Akurgal 1961a, fig. 9-10 et 11-12. 275. Kyrieleis 1966, p. 3-5. 276. Van Loon 1966, p. 166-169.

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permet d’attribuer à un seul centre chacun des ustensiles exportés vers l’Occident, et c’est aussi rendre compte de l’impression étrange qu’on pouvait avoir jusqu’ici en comparant l’Ourartou des archéologues russes, celui du Caucase, et celui des Anglais et de Turcs, celui du lac de Van »277. Il est ainsi plus facile de comprendre les liens avec la Syrie du Nord, la zone de l’art néo-hittite d’Akurgal, et les comparaisons qu’il a lui-même faites avec des reliefs sculptés des villes néo-hittites, Carcemish ou Sakçegözü, en interprétant ces traits communs comme une influence de l’art néo-hittite sur l’art de l’Urartu278. Ces comparaisons rappellent bien entendu celles qui avaient été proposées pour l’origine des griffons : sur les mêmes reliefs de Sakçegözü ou Zinçirli, les hommes- oiseaux apparaissaient comme un modèle très vraisemblable à la figure du griffon. Il est naturellement très tentant d’attribuer à une seule région les différents ornements des mêmes chaudrons ; et cette région, la Syrie du Nord, la région d’Al-Mina, est aussi celle d’où partent les objets, ce qui offre une possibilité de comprendre le processus d’ensemble de l’exportation. L’existence de chaudrons décorés de sirènes dans des tombes découvertes en Italie permet également de s’interroger sur les trajets suivis par les objets dans le bassin méditerranéen, et sur les acteurs de ces exportations. Il est remarquable que les chaudrons à sirènes retrouvés en Étrurie portent des sirènes orientales, ainsi que des protomes de lion et de griffon279, et pas d’attaches caractéristiques des productions grecques, pour autant que nos connaissances permettent d’en juger. Grâce aux sirènes, on peut supposer que les importations en Étrurie se faisaient directement depuis l’Orient, en tout cas sans que les Grecs intervinssent sur les objets280, même s’ils pouvaient être des intermédiaires. D’après l’analyse d’O. Brendel, les protomes de lion très originales de la tombe Regolini-Galassi, sont des créations locales librement inspirées des modèles orientaux ou grecs281. Les sirènes du chaudron de la tombe Bernardini, comme celles de la tombe dei Lebeti à Vetulonia, sont proches, par leur décor gravé, des sirènes de Syrie du Nord. Mais tous les documents ne rentrent pas dans le premier groupe défini : certes, les sirènes inv. 7725 et 7726 (n° 62, fig. 173-176), malgré leur état de conservation, présentent des traits similaires à ce premier groupe, mais le matériel de Delphes permet de faire encore deux groupes à l’intérieur des sirènes orientales. Le premier est formé par la sirène inv. 8395 (n° 66, fig. 184-186) et la sirène conservée à Copenhague sous le numéro inv. 13258 (n° 67, fig. 187-189)282. La sirène inv. 8395 présente comme les documents du groupe précédent un décor de petits cercles, mais sur la chevelure, et non sur le vêtement ; en outre, la structure du visage et de la calotte de cheveux est différente : le visage est plus bouffi, la bouche petite et rapprochée du nez, les oreilles bien visibles devant la chevelure. Le rapprochement avec la sirène du British Museum283 vaut pour la structure d’ensemble, mais pas dans le détail, car les traits du visage sont sur cette dernière beaucoup plus précis et mieux conservés. Ces indices suffisent-ils à donner une existence concrète à une production assyrienne de sirènes, à laquelle on a pensé en voyant ces visages ? Si l’on cherche à préciser les parallèles, c’est dans les bas-reliefs du palais d’Assurbanipal à Ninive que l’on trouve des personnages présentant une physionomie comparable284 : les personnages masculins imberbes, serviteurs rapportant un lion ou assistant Assurbanipal dans une libation ont le même visage gras, le nez busqué, les yeux étirés en amande et la petite bouche de la sirène de Londres ; il est vrai que la sirène de Delphes rappelle moins clairement ces modèles. Autre document qui a été convoqué à l’appui de l’hypothèse de l’école assyrienne, la sirène de Copenhague : la forme et les détails de l’applique et du buste sont pourtant bien différents du précédent. Mais seules les volutes présentes sur la queue, formant comme une palmette inversée, forment un motif que l’on retrouve sur du mobilier assyrien285. Les autres comparaisons orientent vers la Syrie du Nord, et non la Mésopotamie. Si la chevelure, divisée sur le crâne par des lignes partant du front, resserrée sur la nuque et formant des boucles volumineuses sur les épaules, rappelle, elle aussi, les personnages des bas-reliefs de Ninive, la barbe, faite de petites boucles sur le menton

277. Rolley 1984a, p. 279. 278. Akurgal 1961a, p. 43. 279. Tombe Regolini-Galassi pour les protomes de lion, tombes

Barberini et Bernardini pour les protomes de lion, de griffon et les sirènes. 280. Contre l’avis de H.-V. Herrmann, qui suppose que les Grecs ajoutaient des griffons aux chaudrons à sirènes. 281. Brendel 1995, p. 47-48.

282. Qu’elle ait été trouvée à Delphes ou non, cette sirène présente un style très particulier qui montre la variété de la production au sein de cette catégorie. 283. Sans provenance exacte, la sirène du British Museum (inv. 22494) peut faire partie du lot d’objets rapportés de Babylone par Hormuzd Rassam entre 1879 et 1882 ; Curtis 1994, p. 14. 284. Parrot 1961, fig. 75-76. 285. Curtis 1994, p. 14.

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et de mèches rangées en deux ou trois rangs sur le buste, est tout à fait comparable à celle du roi Assurbanipal. Mais les reliefs néo-hittites aussi présentent des têtes masculines ornées du même type de chevelure286 ; mieux, la représentation du prince Kilamuwa287 le montre portant la barbe, mais sans moustache, détail qui le rapproche de notre sirène. Il faut souligner en outre que ces mêmes reliefs de Syrie du Nord offrent des éléments de comparaison très convaincants pour les détails de l’applique, avec ses rangées de plumes bien séparées et les volutes sur la queue. Nous avons vu que le motif des sirènes provient de représentations du disque solaire ailé288, qui ont les mêmes ailes et les mêmes volutes. Une nouvelle fois, la Syrie du Nord se révèle riche de modèles correspondant aux objets parvenus en Grèce ; la recherche de parallèles montre l’imbrication des cultures matérielles au Proche-Orient, et la difficulté à isoler dans le temps et dans l’espace des productions bien différenciées. Cependant, il vaut la peine de citer le rapprochement que proposait E. Kunze entre la sirène de Copenhague de style « assyrisant » et le groupe de bronzes crétois d’inspiration assyrienne comptant notamment le « tympanon » de l’Ida289. E. Kunze a montré que les éléments assyriens étaient très minoritaires face à l’inspiration syro-phénicienne, elle-même divisée en plusieurs tendances290. Il n’y a donc peut-être pas lieu d’opposer, du point de vue des objets parvenus en Grèce, un art assyrien et un art de la côte syrienne. Enfin, Delphes a livré un document original, mais pas tout à fait unique : une aile d’une grande sirène portant un taureau (n° 68, fig. 190-192). Typologiquement, c’est un fragment de sirène, même si nous aurons à reparler du taureau plus loin291. E. Kunze, qui le premier a rapproché cette pièce de son parallèle argien, a conclu à partir du décor de l’aile à une production proche des sirènes du lac de Van292. Selon E. Akurgal, le taureau de l’Heraion d’Argos, seul parallèle à l’objet de Delphes, appartient au « style à bandes striées »293 qui succède, dans les ateliers urartéens, au « style à petits cercles »294. Mais dans le sillage d’E. Kunze et H.-V. Herrmann, l’accord se fait sur une attribution à un atelier de la Syrie du Nord : le taureau, avec sa tête carrée, large, ses yeux ovales, présente les mêmes détails gravés que les sirènes de Syrie du Nord ; en outre, les deux taureaux de Delphes et de l’Héraion forment un groupe, du point de vue du style, avec des attaches à tête de griffons d’Olympie295, pour lesquels une provenance nord-syrienne a été suggérée296. Comme pour l’origine des sirènes, l’hypothèse de la Syrie du Nord est préférée pour sa vraisemblance, sans être démontrée. Quant au sens du motif du taureau debout sur une aile de sirène, il est bien difficile à interpréter : l’exemplaire de Delphes surtout, avec la sirène attrapant la patte du taureau, suggère une relation spéciale entre les deux êtres. Les sirènes du chaudron de Salamine de Chypre peuvent être évoquées ici, car elles portent aussi sur leurs ailes des éléments, mais qui sont des protomes de griffon297 ; c’est peut-être un indice que ce dispositif est un motif décoratif sans signification particulière. On aurait pu songer à voir une « potnia tauron »298, si une des rares représentations probables n’avait finalement été reconnue comme une déesse en char299 ; tracer un lien avec l’art créto-mycénien qui a produit des images de déesses sur le taureau300 serait assez artificiel.

Entre l’Orient et la Grèce Enfin, les sirènes de petites dimensions de Delphes peuvent être étudiées à part, non tant à cause de ce trait particulier qu’en raison de la difficulté à les classer. Les spécificités y sont moins affirmées, et les détails un peu gommés ; bien que ces documents ne remettent pas en cause l’ensemble du classement, ils obligent à éclaircir un certain nombre de points, et à préciser nos critères de classement. Quatre sirènes sont concernées ici : les sirènes inv. 725 (n° 69, fig. 194-196) et inv. 3810 (n° 71, fig. 200-202), et la sirène 2704 (n° 72, fig. 203-204), que nous 286. Nombreux exemples sur les bas-reliefs du palais de Zinçirli ; Akurgal 1961b, pl. 129-131. 287. Akurgal 1961b, pl. 129. 288. Akurgal 1961b, pl. 130. 289. Sakellarakis 2013, vol. III, pl. 20. 290. Kunze 1931, p. 239. 291. Kunze 1950 ; I. Strøm accepte la fonction reconnue par Kunze pour le fragment de l’Héraion, mais la rejette pour la pièce de Delphes, dans laquelle elle veut voir un fragment retaillé pour en faire un objet indépendant ; Strøm 1998, p. 43. 292. Kunze 1950, p. 97. Mais la mention du lac de Van ne suppose pas une attribution à l’Urartu : en effet Kunze constate plutôt

l’hétérogénéité stylistique des objets retrouvés près du lac de Van, et refuse de les attribuer à l’Urartu. 293. « Strichelstil ». 294. « Ringelstil » ; Akurgal 1959, p. 97. 295. Herrmann 1966, n° A 35-37, pl. 55-56 ; Herrmann 1984, p. 26. 296. Strøm 1988, p. 42. 297. Karageorghis 1973, pl. couleur H. 298. Hypothèse de Picard 1913, p. 175. 299. Lehmann-Hartleben 1939, p. 669. 300. Christou 1968, p. 163-164.

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avons classée avec les documents grecs ; enfin la sirène du Louvre Br 2604 (n° 70, fig. 197-199). Leur aspect chaque fois très particulier les a fait considérer comme des documents grecs ou orientaux selon les auteurs. La sirène inv. 725 est pour Herrmann une sirène orientale301 ; mais avant et après lui, d’autres y ont vu une œuvre grecque302 ; les rapprochements faits avec d’autres documents sont tout aussi sujets à caution303 : A. Brookes considère que ces documents illustrent un moment d’élaboration de l’art grec, où le style géométrique est influencé par les documents orientaux qui arrivent en Grèce, surtout les sirènes, première catégorie d’objets présentant un traitement de la figure humaine en trois dimensions304. Le caractère un peu étrange, disproportionné, qui avait fait classer ces sirènes dans une production provinciale par H.-V. Herrmann, est aussi interprété comme l’illustration d’une période de recherche et d’élaboration de l’art grec. Nous reviendrons ensuite sur le rapport établi par A. Brookes entre les visages des sirènes et le développement du style « dédalique » en sculpture ; notons ici que si les chercheurs se rejoignent sur le constat que les Grecs ont imité librement les documents orientaux, les étapes du processus de la copie sont loin d’être reconstituées de la même façon. La situation est un peu la même pour la sirène inv. 3810305, sans que cet objet ait suscité de commentaires étendus, vu son état de conservation : « Brookes a sans doute raison, mais il s’agit d’exemplaires médiocres, où la forme de l’attache proprement dite n’est pas canonique »306. Dans une même position intermédiaire se trouve une sirène qu’on peut logiquement présenter ici. La sirène inv. 2704 est proche de la sirène retrouvée à Lindos, et conservée à Istanbul307 ; le rapprochement est développé par H.-V. Herrmann, qui y voit un atelier « ostgriechisch »308 : il interprète la construction symétrique stricte, l’importance donnée au buste humain dans l’économie générale de la figure, comme des caractéristiques d’une production grecque. Le problème est qu’il classe ce document dans le groupe des sirènes orientales ; il justifie ensuite son choix par le fait que les limites entre art grec et art oriental sont floues, lorsque l’on s’intéresse aux documents produits en Ionie309. H.-V. Herrmann présente une « vue très péloponnésienne des choses »310 par ce classement des documents ioniens dans les productions orientales ; c’est donc assez naturellement qu’il change d’opinion pour ne plus y voir des documents grecs, mais bien orientaux, relevant peut-être de l’art phrygien311. Ils sont en tout cas rapprochés d’une sirène de Délos conservée à Istanbul, ressortissant plutôt de l’art de la Syrie du nord312. Un dernier document delphique laisse également assez perplexe : donnée au musée du Louvre en 1900 par P. Perdrizet, la sirène Br 2604 (n° 70, fig. 197-199) est-elle une création grecque ou orientale ? Ce ne sont pas ses dimensions, mais plutôt sa forme particulière qui en font une pièce à part : la forme de l’applique, en particulier l’absence d’indentation, place cet objet dans un groupe dont l’attribution à un centre est problématique. Un détail mérite l’attention : il n’y a pas de bélière au dos de l’applique. Or, en Orient, les appliques ne sont pas des éléments de décor du chaudron, mais ont un rôle fonctionnel ; en Grèce, où les chaudrons sont destinés à être offerts et exposés dans le sanctuaire, les sirènes peuvent se passer de bélière. L’applique du Louvre rejoint en cela deux appliques de Samos313, et une applique d’Olympie314. Une certaine structure leur est commune, comme l’absence de buste, la tête étant rattachée directement aux ailes, et l’absence de festons ou d’indentations. Mais il est bien difficile de trouver une attribution unique aux productions de ce groupe, car les auteurs, dans le doute, ont fait des propositions bien diverses. H.-V. Herrmann, à propos de l’exemple d’Olympie, tient le même raisonnement que pour Delphes inv. 2704 et la sirène de Lindos : un mélange d’éléments grecs et orientaux doit indiquer une zone périphérique de l’Orient, d’abord, la Grèce de l’Est, puis la Phrygie, qui lui paraît plus vraisemblable, même s’il n’apporte aucun argument315. Il s’est en fait rallié à l’opinion de H. Walter à propos des deux appliques de Samos, dans lesquelles celui-ci voit des documents anciens de la plastique phrygienne316. Mais l’attribution à un atelier ionien, 301. Herrmann 1966, p. 58. 302. Ipsen 1931, p. 493, Muscarella 1992, p. 20. 303. Voir supra p. 82. 304. Brookes 1982, p. 607, 614. 305. Considérée comme orientale par Filippakis 1983, et comme

grecque par Brandes, Muscarella 1992, p. 19. 306. Rolley 1984a, p. 278. 307. Herrmann 1966, pl. 27. 308. Id., p. 83. 309. Ce cas de figure se présente aussi pour d’autres œuvres delphiques : voir l’applique de meuble en ivoire inv. 9912 (Amandry 1991, 199-202, fig. 9-10).

310. Rolley 1984a, p. 278. 311. Herrmann 1984, p. 20. 312. Délos 18, Deonna 1938, p. 68, pl. 29 ; Herrmann 1966,

n° 55, p. 58 ; Herrmann 1984, p. 20. 313. BB 728 et B 1341, Jantzen 1967, passim ; Gehrig 2004, Ke1 et Ke 2, pl. 110-111. 314. B 6099, A15a, Herrmann 1966, p. 29 et 187 ; Herrmann 1984, p. 17-20, pl. 5, 1-3. 315. Herrmann 1984, p. 20. 316. Walter 1963, p. 294.

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et plus particulièrement samien, est rapidement apparue et a été soutenue de manière plus convaincante. Dès 1967 U. Jantzen a démontré que ces deux appliques s’inscrivaient dans le paysage stylistique samien, en reprenant une comparaison de H. Walter avec des visages plastiques de la céramique samienne, ou des appliques faites seulement d’une tête317. Ces comparaisons lui permettent de proposer une caractérisation du style samien qui apparaît dans ces œuvres : un profil très allongé, le menton étant quelque peu gommé, et le nez en forte saillie318. Mais déjà sont patents la douceur des contours des formes, les jeux de lignes presque parallèles, l’ensemble annonçant les traits de la plastique samienne du siècle suivant319. Cette analyse est ensuite reprise par U. Gehrig, qui souligne combien il est curieux de ne pas trouver de sirènes orientales à Samos, sanctuaire qui a reçu pourtant des objets orientaux, statuettes égyptiennes ou documents iraniens320. C’est aussi là une preuve de la distribution différente des objets entre les différents sanctuaires ; mais ce constat n’a pas conduit à une analyse plus développée.

Sirènes grecques On compte finalement très peu de sirènes grecques dans les sanctuaires : cinq proviennent d’Olympie, six de Delphes si l’on tient compte des sirènes de la Grèce de l’Est, trois de l’Acropole d’Athènes et deux de Samos321. Le modèle oriental n’a pas suscité l’engouement connu pour les griffons : peut-on expliquer ce succès moindre, à une époque qui semble pourtant accorder une place de plus en plus grande à la figure humaine ? D’autre part, le traitement du visage des sirènes permet-il de les attribuer à des centres de production ? Si l’on regarde les sirènes habituellement reconnues comme grecques, quelques remarques générales doivent être faites. E. Kunze a le premier, une fois encore, isolé neuf exemplaires dans sa liste en 1931322. Les sirènes grecques se distinguent immédiatement des sirènes orientales, d’abord en raison du traitement du visage. En bas du visage en forme de U ou de forme triangulaire, le menton est bien dégagé du cou, et l’ensemble est souligné par la coiffure, qui ne tombe pas sur les épaules, mais s’arrête au-dessus d’elles, plus ou moins haut. Les traits sont nets, et le regard gagne en intensité, car les yeux sont soulignés de paupières gravées, les pupilles parfois marquées d’un trou ; le nez, plus court, est tendu vers l’avant, au-dessus d’une bouche plus large que sur les exemplaires orientaux, mais faite d’un trait simple aux lèvres à peine marquées ; « les fabricants des sirènes grecques donnent aux visages une solidité de construction qui va parfois jusqu’à la rigidité »323. La conception d’ensemble de l’applique a également changé : le disque central est très ajouré, et les ailes et la queue s’y rattachent sans être liées entre elles. La légèreté de l’ensemble a augmenté en même temps que sa fragilité, comme le montrent le nombre de queues manquant et les fragments d’ailes cassées. Le buste humain est en outre modelé à l’arrière, même par une indication sommaire des omoplates, détail absent des modèles orientaux. Enfin, la technique est différente : les artisans grecs ont accordé une grande importance au travail de la pièce à froid, avec de nombreux détails gravés, et un travail de la surface qui donne un épiderme lisse et net324. La construction géométrique des pièces, aux arêtes vives et aux angles saillants, va donc de pair avec le traitement des surfaces. Le cas des sirènes est différent de celui des griffons dans la mesure où elles montrent un travail sur l’adaptation de la figure humaine proposée par les modèles orientaux pour en faire des représentations grecques. On est donc conduit à s’interroger sur les rapports de ces documents avec d’autres documents de la plastique grecque du viie siècle, en particulier tout ce qui ressortit aux productions subgéométriques et aux débuts de la plastique que l’on appelle, selon l’usage, « dédalique »325. Néanmoins, la catégorie des sirènes est souvent placée en dehors de ce développement : « ces objets, peu nombreux, marquent, au dernier quart du viiie siècle et au premier quart du

317. Jantzen 1967, p. 92. 318. Ibid. 319. Jantzen 1967, p. 93. 320. Gehrig 2004, p. 151, et aussi Mer Egée, Grèce des îles 1979,

p. 167, n° 111. 321. Ke 1 et Ke 2, auxquelles on peut joindre, dans la réflexion, les trois appliques en forme de tête humaine Ke3-Ke5 : Gehrig 2004, p. 258-259, pl. 110-111.

322. Kunze 1931, Anhang II. 323. Rolley 1994, p. 120. 324. Bol 1985, p. 73. 325. Sur cette notion, Aurigny 2012a.

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suivant, le passage du style géométrique finissant au début de l’archaïsme, sans participer pour autant, semble-t-il, à la naissance des schémas dédaliques »326. Mais les jugements sont divergents, et si Rolley renonce à faire entrer les sirènes grecques dans les schémas dédaliques, en revanche Herrmann considère que la nouveauté dans les visages et les coiffures de ces sirènes sont des signes annonciateurs de la plastique dédalique327. En dehors de ces traits généraux, les sirènes grecques de Delphes comptent des cas particuliers qui méritent que l’on s’y attarde, davantage pour leurs relations avec la plastique grecque qu’avec les modèles orientaux. Mais il règne une grande confusion dans l’attribution et la datation de ces documents (voir tableau 5, p. 96) : la plastique grecque du viie s. est-elle à ce point difficile à connaître ? À ce titre, la sirène inv. 1248 (n° 73, fig. 205-207) est exemplaire : reconnue depuis longtemps comme « la plus ancienne des sirènes grecques », elle « frappe par la vigueur, sinon la brutalité, de l’articulation du visage triangulaire autour de trois creux, pour les yeux et la bouche »328. Remarquons que le fragment d’aile droite inv. 23974 (n° 78, fig. 219) porte également deux traits au poignet, bien que le bord de l’applique ne soit pas festonné : une autre sirène très ressemblante à inv. 1248 avait donc été offerte à Delphes. Ce sont les questions de datation et de style qui montrent des divergences dans l’interprétation des appliques : alors que pour Cl. Rolley cette applique doit être contemporaine des exemplaires orientaux329, A. Brookes, par exemple, la date du premier quart du viie siècle, en raison des profils de visages que l’on trouve dans la céramique protocorinthienne moyenne I, vers 675330. Cette comparaison avec la céramique est développée par l’exemple d’un aryballe de Boston331 : « in both cases the facial profile shows an extreme crescent shape forme nose to chin with a small puckered mouth in the crescent »332. Ce rapprochement avec un document corinthien n’est pas sans remettre en cause l’attribution de cette sirène à une production argienne, que proposait Herrmann333. Selon Brookes, c’est plutôt le profil corinthien qui caractérise la sirène ; mais ce n’est pas l’attribution à un centre particulier qui intéresse Brookes. Son but est de montrer que les sirènes grecques sont les produits du mélange de styles grecs et d’influences orientales ; et pour montrer les traits « native Greek » dans ce document, il le compare aux œuvres de la sculpture « dédalique » rassemblées par Jenkins334, en particulier à une tête de terre cuite de Sparte335. C’est la première fois qu’un artisan grec fait en style grec, corinthien ou laconien, une figure humaine en trois dimensions comme dans les appliques orientales. Toutefois, une certaine proximité avec une sirène de l’Acropole (MN 6519, fig. 212) a aussi été mise en évidence336, et la créature delphique interprétée comme une imitation de la sirène attique337. Ces comparaisons et ces conclusions multiples font apparaître que les productions semblent à ce moment plus difficiles à différencier ; est-ce à dire que « les différences entre les styles locaux, sous l’influence des objets orientaux, s’estompent fortement à ce moment »338 ? L’étude des premiers visages humains de la plastique grecque fait apparaître un paradoxe : les chercheurs affirment que les artisans grecs ont chaque fois repris des éléments aux objets orientaux pour aboutir à des créations véritables, et supposent dans le même temps un effacement des styles locaux devant la mode orientale. Or, la production de céramique peinte ou de terres cuites montre que les traditions locales persistent, du viiie au vie siècles. Le fait que les sirènes – et c’est aussi le cas de certains griffons – ne semblent pas au premier coup d’œil caractéristiques d’une production particulière est un élément intéressant dans notre réflexion sur le « phénomène orientalisant ». Le cas des sirènes est symptomatique d’une réflexion qui sous-tend finalement l’examen de toutes les œuvres du viie siècle qu’on appelle « orientalisant » : quel est le sens à donner à ce qualificatif ? Sa polysémie, ou son caractère flou, font qu’on l’utilise pour désigner une forme générale, un motif, ou encore une technique, si bien qu’elle a autant de sens que d’emplois. Il s’agit donc, à chaque fois, de faire la part entre les éléments

326. Rolley 1984a, p. 280. 327. Herrmann 1966, p. 105 ;

mais les attributions de H.-V. Herrmann ont été le plus souvent rejetées. 328. Rolley 1994, p. 120. 329. Ibid. 330. Brookes 1982, p. 610. 331. Boston 95.12, Boardman 1998, fig. 174 ; Herrmann 1966, pl. 40. 332. Brookes 1982, p. 611.

333. Herrmann 1966, p. 108 et pl. 39. 334. Jenkins 1936. 335. Jenkins 1933, p. 69, pl. 7,5. 336. Brookes 1982, p. 611. 337. Weber 1974, p. 39 ; mais l’accord n’est pas fait sur le

style de cette sirène de l’Acropole : Herrmann 1966 l’attribue à Sicyone-Corinthe. 338. Rolley 1994, p. 120.

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ressortissant à une tradition grecque locale, et les éléments empruntés à des modèles orientaux, et de comprendre le processus particulier qui permet aux deux composantes de se développer pour renouveler elles-mêmes le style339. Mais l’existence du système chronologique mis au point par Jenkins conduit la plupart des auteurs à chercher une explication chronologique aux phénomènes constatés340. Dans le cas de la sirène 1248, les parallèles avec des documents de la tradition corinthienne, plastique ou peinte, sont les plus convaincants : le profil du Zeus de l’aryballe protocorinthien de Boston, la tête de terre cuite de Pérachora (conservée à Athènes)341, ainsi que la sirène de l’Acropole d’Athènes MN 6519, dont nous reparlerons, semblent caractéristiques des profils corinthiens. Il n’y a donc pas de rupture dans les schémas privilégiés, qui sont à peine adaptés à des types d’objets issus du répertoire oriental. C’est le cas de la tête inv. 1348 (n° 80, fig. 221-223), qu’il convient d’examiner ici, même si ce n’est pas une sirène. Le fragment paraît très isolé, du point de vue formel : était-ce une applique réduite à un simple visage ? On n’en connaît pas d’autre exemple. Du point de vue typologique et stylistique, quelques rapprochements sont possibles, qui placent ce document dans une situation intermédiaire, entre tradition grecque et « influences » extérieures. Si l’existence de deux visages est notamment à mettre en relation avec Chypre342, en revanche le rapprochement fait avec la statuette de Delphes inv. 3144 fait plutôt songer à une production attique343. Le cas de la sirène 8398 est aussi discuté ; pourtant elle a un parallèle très proche à l’Acropole, MN 6519 (fig. 212). Les visages sont dans les deux cas plus souples que sur l’exemplaire précédent, les joues sont plus développées, le front plus haut. La chevelure y est découpée de la même façon, avec une forme de « béret » plat sur le crâne et trois niveaux striés pour le reste des cheveux, aux angles encore bien vifs. Un autre indice matériel rapproche les deux documents : un signe gravé à l’arrière du buste, en forme de A renversé sur l’exemplaire de Delphes, et en forme de diabolo sur le document athénien. Au même groupe appartient la sirène d’Olympie A 22 (inv. B 28)344, qui présente aussi un signe, interprété comme un lambda, connu dans l’alphabet sicyonien comme dans l’alphabet corinthien. Mais le petit « diabolo » de la sirène d’Athènes n’a de sens que dans l’alphabet sicyonien, où c’est un epsilon. C’est la raison essentielle pour laquelle H.-V. Herrmann attribue à la production de SicyoneCorinthe ce groupe de sirènes 345. L’intérêt de l’attribution à Sicyone est qu’elle a été suggérée ailleurs, pour d’autres raisons : « les bronzes de Sicyone ont cette précision du travail, cette netteté souvent un peu sèche »346. Mais les bronzes de Sicyone connus sont du vie siècle : il reste donc à trouver des éléments de continuité pour cet intervalle d’un siècle. Cependant le rapprochement avec MN 6519 pose plus de problèmes qu’il n’en résout : « die Herkunft der groƦartigen Attasche NM 6519 ist oft diskutiert worden »347. Alors que Matz348 l’attribue à Argos, Alscher349 et Homann-Wedeking350 préfèrent en faire un produit de l’art attique, et Hampe une œuvre de Corinthe351 ; les données relatives aux traditions stylistiques locales au viie siècle font-elles défaut à ce point ? Ce n’est pas l’avis de Fr. Croissant, qui compare MN 6519 au profil d’un personnage d’une œnochoé de Pérachora, avec une tête de terre cuite MN 16491, en faisant ressortir que l’on peut superposer les trois profils, de structure identique, dont l’origine est corinthienne352. Si cette hypothèse est vraisemblable, c’est qu’il existe des schémas de représentation repris par les artisans corinthiens, quels que soient le matériau et les modèles extérieurs dont ils peuvent s’inspirer. La sirène inv. 1666 (n° 75, fig. 213-215) présente elle aussi un grand intérêt, ne serait-ce que pour le nombre important de commentaires qu’elle a suscités. Le fragment inv. 23973 (n° 77, fig. 218), à cause de son bord festonné et de la représentation de la main, est proche de inv. 1666. Son attribution à un atelier attique par

339. On peut citer l’analyse du style corinthien par Fr. Croissant, qui a montré que des visages dont la structure est empruntée à l’Orient ont cohabité avec des têtes de tradition géométrique locale, sans véritable fusion des deux éléments dans la création corinthienne : Croissant 1988, p. 107-112 notamment. 340. Sur l’équivalence récente entre « dédalisme » vers l’« orientalisant », voir Aurigny 2012a, p. 36. 341. Croissant 1988, fig. 8-9. 342. Demetriou 1989, p. 69. 343. Rolley 1969, n° 8, p. 28 et pl. IV.

344. Herrmann 1966, p. 92. 345. Id., p. 111 ; Jeffery 1990, p. 138. 346. Rolley 1963b, p. 65. 347. Weber 1974, p. 36. 348. Matz 1950, p. 152. 349. Alscher 1954, p. 54. 350. Homann-Wedeking 1950, p. 38-40. 351. Hampe 1936 p. 34. 352. Croissant 1988, p. 97.

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H.-V. Herrmann353, par comparaison avec Acropole inv. 6518 (fig. 216), ne rend pas compte de certains détails qui la singularisent : le visage très spécial, et les deux motifs végétaux gravés sur les omoplates. D’ailleurs l’attribution à Athènes n’a pas toujours convaincu : M. Weber accepte le rapprochement avec la sirène de l’Acropole MN 6518, en raison de la proximité avec les modèles orientaux ; elle voit dans MN 6518 la même stylisation des yeux, du nez et de la bouche que dans les figurines de support d’anses attiques354. Mais pour la sirène de Delphes, elle considère que le fait qu’elle ne transpose pas exactement les modèles orientaux dans des formes grecques, n’en fait pas pour autant une œuvre attique. C’est un exemplaire « étrange, sans aucun parallèle pour le traitement du visage »355. Pourtant le long cou, les lèvres épaisses, le nez court et fort, les yeux fins et en amande, sont bien ceux de la sirène de l’Acropole, MN 6518356 ; mais « Athens [6518] is clearly the superior work with Delphi 1666 having the appearance of being a poorly conceived copy of it »357. Le problème qui se pose ensuite est celui des rapports entre les visages des sirènes, qui sont finalement parmi les premiers visages humains de la sculpture grecque, et les visages attribués à la sculpture « dédalique » : pour A. Brookes, la sirène de Delphes inv. 1666 et la sirène MN 6518 s’intègrent bien dans la tendance de la sculpture « dédalique » à faire des visages plus courts et plus pleins, jusqu’au dédalique récent où leur largeur est égale à leur hauteur. Mais l’on ne manquera pas de s’étonner devant cette analyse : alors que dans cette sirène, un certain assouplissement du schéma géométrique semble à l’œuvre, ces courbes souples sont bien loin des schémas du « dédalisme », qui est censé aller d’un visage en forme de V fermé vers une forme en U aux angles plutôt carrés. Il paraît donc assez artificiel d’intégrer les visages des sirènes dans le développement du style « dédalique », et ce d’autant plus que la chronologie contredit ces rapprochements : la plupart des auteurs s’accordent pour dater les sirènes jusqu’à la fin du premier quart du viie siècle, et pas au-delà358. La démarche de Brookes, qui consiste à descendre leur datation jusqu’au milieu du siècle, pour les faire coïncider avec la plastique, n’est pas très convaincante. À propos de la sirène inv. 1666, on peut mentionner l’hypothèse de Barnett quant au rapprochement de certaines sirènes avec le Rephaim de la Bible359, à partir d’un détail jusque-là jamais remarqué : la présence de six doigts sur l’une des mains de quelques sirènes (5 à Olympie, et deux à Delphes, inv. 1666 et inv. 8395). Ce trait, souvent illustré dans l’art oriental et grec aux époques hautes, mais aussi dans l’Égypte hellénistique, doit être, dans l’hypothèse de Barnett, interprété comme un signe, positif si c’est la main gauche, et négatif si c’est la main droite, qui porte les six doigts. La « polydactylie » serait en tout cas la marque de pouvoirs spéciaux360. Au-delà de son caractère anecdotique, cette observation créée un lien supplémentaire entre la catégorie des sirènes et celle des tridacnes gravés, dont certains portent également cette marque. À partir d’un passage de la Bible et de la fête appelée marzeah en Syrie et en Palestine, il en conclut que les sirènes, placées au bord des chaudrons, sont censées être les Rephaim ou les ancêtres divinisés qui sont invités à la fête funéraire361. Cette hypothèse permettrait aussi d’infléchir le sens à donner à la représentation du griffon, ornant les mêmes chaudrons, vers un être fabuleux choisi pour sa dimension funéraire, elle aussi présente à travers l’idée du banquet funéraire que matérialise le chaudron362. Mais il va de soi que cette observation reste un peu isolée, et qu’on ne voit pas bien pourquoi une infime partie des sirènes aurait reçu cette distinction très particulière, qui n’a pas véritablement de sens précis dans les représentations grecques. Par ailleurs, comme les chaudrons décorés de sirènes ont été découverts uniquement dans des sanctuaires sur le sol grec, le symbolisme funéraire n’est pas l’interprétation la plus évidente. Malgré l’apparente facilité à classer les « sirènes », on se rend compte que les avis divergent sur les ateliers de productions, orientaux ou grecs ; les documents que nous avons placés dans une situation intermédiaire soulignent que dès que l’on sort des schémas bien connus, les références manquent, et les analyses reposent sur des logiques parfois bien extérieures au matériel étudié.

353. En raison de la stylisation de la chevelure, qu’on retrouve sur la céramique protoattique notamment, Herrmann 1966, p. 112. 354. Weber 1974, p. 37. 355. Rolley 1963b, p. 66. 356. De Ridder 1896 n° 765, Herrmann 1966 pl. 37 (Herrmann a confondu dans les illustrations MN 6518 et MN 6517) ; Scholl 2006, n° 103, pl. 41 a-c.

357. Brookes 1982, p. 614 (qui reprend la numérotation erronée de Herrmann). 358. Par exemple Rolley 1994, p. 120. 359. Samuel II, 21.18-22. 360. Barnett 1986, p. 116. 361. Id., p. 119. 362. Supra p. 30-31.

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Sirènes

Acropole MN 6517 Acr. MN 6518 Acr. MN 6519

Hampe 1936

Matz 1950

HomannWedeking 1950

Herrmann Weber 1974 Brookes 1982 Croissant 1966/ 1984 1988 Argos

Corinthe

Olympie A19 Olympie A20 Olympie A21 Olympie A22 Olympie A23 Delphes 1248 Delphes 1666 Delphes 8398 Delphes 2704

Delphes 3810 Delphes Louvre Br 2604

Argos

Athènes

Gehrig 2004

Corinthe

Athènes SicyoneCorinthe Argos Argos Argos

Athènes Athènes

SicyoneCorinthe SicyoneCorinthe Argos

Laconie

Athènes SicyoneCorinthe Grèce de l’Est/ Phrygie

Athènes ?

Laconie

Athènes Corinthe

Scholl 2006 Athènes Athènes Athènes

Corinthe

Corinthe Corinthe Corinthe, vers. 620 Corinthe Corinthe

Athènes

Vers 675, Corinthe Athènes

Corinthe

Grèce de l’Est/ Phrygie

Samos Ke1 Samos Ke2

Rhodes ou la Crète

Samos Samos

Tableau 5. — Sirènes grecques, attributions et datation.

Le classement stylistique des sirènes de chaudron reste à faire, en cherchant quels ateliers ont pu se spécialiser dans cette production. Le petit nombre de documents ne rend pas l’entreprise aisée, mais quelques propositions peuvent être faites. Tout d’abord, il est très tentant de considérer les curieuses sirènes samiennes comme des œuvres locales : le rapprochement avec les visages de terre cuite de Samos est convaincant. Il faudrait imaginer une brève tentative pour imiter les sirènes orientales, qui restent malheureusement inconnues à l’heure actuelle à Samos ; mais cet essai, à la différence des protomes de griffon, serait resté très limité, la clientèle samienne continuant d’offrir surtout des chaudrons à protomes de griffon. La série des sirènes de petite taille classées de façon un peu vague dans le groupe de la Grèce de l’Est reflète les créations de la côte d’Asie Mineure. La découverte à Lindos de l’exemplaire conservé à Istanbul peut suggérer une origine rhodienne, mais rien d’autre ne vient la confirmer. En revanche, la présence de documents ioniens à Delphes renforce cette présence de la Grèce de l’Est à Delphes dans l’ensemble de la documentation. Quant aux sirènes les plus anciennes, si l’on considère qu’elles apparaissent dès la fin du viiie s., elles s’inscrivent davantage qu’on ne l’a dit dans les schémas de la plastique « subgéométrique ». Certes, cette petite série est à part, mais nullement isolée. La sirène inv. 1248 présente le profil corinthien ancien avant l’intégration d’éléments orientaux, comme ce sera le cas ensuite pour le jeune homme de Samos363. L’imitation d’une applique orientale n’implique donc pas l’adaptation des traits orientaux dans la figure humaine, qui a lieu ultérieurement dans la plastique corinthienne : on est encore ici dans la tradition protocorinthienne la plus ancienne. Il en va de même

363. Croissant 1988, p. 105.

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pour la sirène inv. 8398, également bien ancrée dans la tradition corinthienne. Il faut alors, en bonne logique, attribuer la sirène de l’Acropole MN 6519 également à Corinthe. Il ne serait pas étonnant de constater la présence d’appliques de l’artisanat corinthien à Athènes, où le schéma du visage corinthien a été abondamment utilisé dans les productions locales. Rien d’étonnant non plus à trouver des sirènes corinthiennes à Delphes, sanctuaire particulièrement lié aux intérêts corinthiens364. Quels que soient les schémas dans lesquels on veut faire entrer les sirènes, elles fournissent un exemple intéressant de la façon dont les artisans grecs se sont inspirés de modèles orientaux en les transformant immédiatement, si l’on peut dater la sirène inv. 1248 de Delphes à la fin du viiie s. Il n’y a donc pas d’élaboration progressive de styles grecs à partir de modèles extérieurs, qui passerait par des étapes successives ; au contraire, l’artisanat grec utilise des schémas nouveaux pour continuer à faire de l’art grec365.

Taureaux Catalogue 81. Tête de taureau sur applique. Trouvée le 29 avril 1895 entre le temple d’Apollon et le mur Ouest du téménos. Inv. 2351. Bronze, 11,5 x 8,2 cm. Fig. 225-226. Perdrizet 1908, p. 77, n° 329, pl. XIV,2 ; Amandry 1956, p. 245, n° 8 ; Rolley 1962, p. 488, n. 5 ; Kyrieleis 1977, p. 87, et note 98, pl. 31, 4-5 ; Filippakis 1983, p. 132, n° 81 ; Herrmann 1984, p. 24, n. 42 ; Magou 1991, p. 563 ; Aurigny 2010, fig. 44, p. 235 ; Aruz 2014, p. 280, n° 153366 ; Aurigny 2016a, p. 30, fig. 4, Aurigny 2016c, p. 31, fig. 6. Applique à tête de taureau. Manquent l’extrémité de l’aile gauche de l’applique et de la corne droite. Modelé en surfaces simples : une arête dans l’axe du museau, entre des joues étroites ; extrémité plate, la bouche correspondant à l’extrémité du décrochement qui sépare les joues du cou. Yeux ronds très bombés, entourés d’un bourrelet ininterrompu. Sur le front, plaque lisse trapézoïdale, en léger relief. Les cornes sont petites, recourbées vers l’avant. Les oreilles sont bien détachées ; la gauche, qui manque, a laissé un trou rond : elle était rapportée. La bélière est un ruban de 1,5 cm de large, avec rebords plus épais; diam. ext. max. : 2,5 cm. Rivet conservé sur la queue, trou sur l’aile droite. P. Amandry a souligné la ressemblance entre cette tête et les protomes du lébès de Copenhague (fig. 227-228), provenant de Naples367. On note aussi des similitudes, pour l’avancée de la crinière sur le front, avec les lions couchés étudiés par Cl. Rolley, qui sont de fabrication orientale, sans doute anatolienne368. Ce type de taureau oriental avec une « crinière plate » se retrouve sur un document de l’Amycleion de Sparte369. À Samos, une protome, B 1266, présente le même type de structure (phrygienne pour Kyrieleis et Herrmann). H. Kyrieleis fait aussi une comparaison avec une protome de taureau de l’Héraion, AH 25 (MN 13973) ; il n’exclut pas finalement la possibilité que ces protomes soient des imitations grecques de modèles orientaux370. Enfin, c’est à Gordion, dans la tombe MM, que l’on trouve des protomes du chaudron proches de notre exemplaire, pour la forme de l’applique ou la schématisation du modelé371. 82. Fragment d’une applique à tête de taureau. Inv. 19892. Bronze, 7,3 cm. Fig. 229-230. Perdrizet 1908, p. 77, n° 331, sans fig. ; Amandry 1956, p. 245, n° 10 ; Filippakis 1983, p. 132, n° 80 ; Magou 1991, p. 563 (analyse de l’alliage), Aurigny 2016c, p. 31, fig. 7-8. Fragment d’une applique à tête de taureau ; restent la moitié droite de la tête, jusqu’au-dessus de l’œil, et la queue de l’attache. H. cons. : 7,3 cm. La tête était assez large, avec le museau court, mais d’un modelé plus souple que les deux précédentes. L’œil, allongé, est entouré de trois filets ; sous l’œil, stries obliques sur le premier et le troisième. Les naseaux sont marqués par deux traits obliques, en V ouvert. Un trou de rivet sur la queue de l’attache ; il reste du plomb à l’intérieur.

364. Infra, p. 148-149, 179. 365. Aurigny 2017a. 366. Notice rédigée par A. Psalti. 367. Amandry 1956, p. 242 ; voir Akurgal 1961a, p. 54-55,

fig. 33-34. Muscarella 1992, p. 29, rappelle qu’il a été acheté dans le port de Naples, mais qu’il n’y a aucune indication sur sa provenance exacte.

368. Rolley 1969, p. 139. 369. Herrmann 1967, p. 128, fig. 42. 370. Kyrieleis 1977, p. 87, pl. 31,4-5 ; Waldstein 1905,

pl. 75,25. 371. Young 1981, pl. 50, B-C. ; voir aussi tumulus W2, pl. 88.

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Ce fragment est sans doute celui qui doit le plus être comparé aux protomes du lébès de Copenhague (fig. 227-228), pour la forme du museau comme pour le décor gravé : le problème est l’attribution du chaudron de Copenhague. Une protome du tumulus W de Gordion conserve également un remplissage au plomb (tumulus W1)372 ; mais elle est fixée à une applique de forme triangulaire, et non à trois branches373. 83. Fragment d’applique à tête de taureau. Inv. 19894. Bronze, 7,3 cm. Fig. 231-232. Aurigny 2016c, p. 31, fig. 9. Fragment d’une applique à tête de taureau. Sont conservés l’aile droite, sans décor, avec un rivet, et le dessus de la tête avec la corne droite incomplète, fortement recourbée en avant, l’arrachement de l’oreille, et la bélière diam. ext. : 1,7 cm. Larg. max. cons. 7,3 cm ; larg. restituée : 12 cm. Coulée très épaisse, env. 6 mm. Il n’y a pas de parallèle satisfaisant à ce fragment très incomplet. 84. Applique à tête de taureau. Trouvée le 18 juillet 1894, hors du téménos d’Apollon, près de la porte de la voie sacrée. Inv. 1784. Bronze, 6,6 cm. Fig. 233-234. Perdrizet 1908, p. 76-77, n° 328, fig. 263 ; Amandry 1956, p. 245, n° 7 ; Kyrieleis 1977, p. 87, note 100 ; Herrmann 1984, p. 23, n. 37 ; Muscarella 1992, p. 34, pl. V a-b ; Partida 2006, p. 804. Applique en forme de tête de taureau, sans appendices latéraux. Nombreuses piqûres, surface érodée par endroits. H. de la tête sans la bélière : 5,2 cm ; avec la bélière : 6,6 cm. Forme générale massive : la tête ne se détache guère du cou, les naseaux et les yeux sont en relief très faible. Sur le front, saillie lisse semi-circulaire. Les cornes, petites, se recourbent vers l’avant. Un décor gravé abondant se développe autour des yeux ; deux lignes, au-dessus des yeux, se prolongent jusqu’aux naseaux dont elles soulignent le contour ; points conservés en arrière de l’œil droit. La bélière est un ruban lisse (diam. ext. : 1,5 cm). La bélière assure qu’il s’agit d’une applique, avec la même fonction que les autres ; le bourrelet du bas devait servir à sa fixation dans une plaque rivée sur le chaudron, mais on ne voit aucune trace du mode de fixation. La surface de contact est exactement plane. La coulée est épaisse : 3 à 6 mm au rebord. On note la même proximité que le n° précédent, pour l’avancée de la crinière sur le front, avec les lions couchés étudiés par Cl. Rolley, de fabrication orientale, sans doute anatolienne. Le profil, la plaquette frontale et la forme des yeux rappellent les têtes phrygiennes, mais le modelé et le décor gravé sont différents. Des parallèles peuvent être faits avec le chaudron de Copenhague. Un autre rapprochement, fait avec des documents de Zinçirli et d’Alep (protome en bronze aujourd’hui au Louvre), indiquent une provenance nord-syrienne374 : la massivité et la forme des cornes sont en effet des points communs. Comme pour inv. 4139 (n° 85), O.W. Muscarella conteste les rapprochements faits par H. Kyrieleis, mais ne fait pas d’autre suggestion. 85. Applique à tête de taureau. Trouvée le 13 août 1898, au gymnase. Inv. 4139. Bronze, 7,5 cm. Fig. 235-236. Perdrizet 1908, p. 77, n° 327, fig. 262 ; Amandry 1956, p. 245, n° 6 ; Kyrieleis 1977, p. 87, note 100 ; Filippakis 1983, p. 132, n° 79 ; Herrmann 1984, p. 23, n. 37 ; Magou 1991, p. 563 (analyse de l’alliage) ; Muscarella 1992, p. 34, pl. IV b-c ; Aurigny 2011, p. 153, 163, fig. 2. Applique à tête de taureau ; la plaque d’attache est brisée tout autour ; cornes, oreilles brisées au départ ; surface en mauvais état. Du museau au-dessus de la tête : 7,5 cm. Forme générale massive, comme pour la tête précédente : les naseaux se détachent à peine ; gros yeux ronds, entourés d’un gros bourrelet. Le départ des oreilles est en contact avec celui des cornes. Au-dessus du front, un arrachement étroit doit être celui d’une bélière. La plaque d’attache au chaudron devait être triangulaire, à en juger par l’emplacement du trou de rivet, partiellement conservé à la cassure, à notre droite. Cette tête a les mêmes gros yeux ronds que inv. 2351, mais pas la crinière délimitée par un demi-cercle, ni le museau un peu allongé. H. Kyrieleis notait la même proximité avec des attaches de Zincirli et d’Alep, et concluait à une importation nord-syrienne375. Comme pour inv. 1784 (n° 84), O.W. Muscarella conteste les rapprochements faits par Kyrieleis, mais ne fait pas d’autre suggestion.

372. La présence de plomb dans les attaches de chaudron est considérée comme caractéristique de la technique grecque : Matthäus 2001, p. 173, où il cite des attaches non figurées de la grotte de l’Ida en Crète. Mais c’est une technique également connue en Orient.

373. Young 1981, pl. 87 C. 374. Kyrieleis 1977, p. 74 et 87, fig. 29, 3 et 4-5. 375. Ibid.

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86. Fragment d’applique à tête de taureau. Inv. 19893. Bronze, 7,3 cm. Fig. 237-238. Inédit. Fragment d’une applique à tête de taureau. Subsistent la bélière, les cornes et les oreilles, un peu de la joue gauche. H. max. cons. 7,3 cm. La tête était large et plate ; avec de petites cornes courbées vers l’avant. Ce qu’on peut deviner de la structure de l’applique, la place des cornes et de la bélière, rappelle inv. 1784 ; les cornes petites et courbes rappellent plutôt les documents orientaux. 87. Fragment d’applique à tête de taureau. Trouvé avec d’autres bronzes réputés provenir de « l’ancien atelier ». Sans no d’inv. Bronze, 9,6 cm. Fig. 239-240. Fragment droit de tête de taureau à bélière. La bélière (diam. 2,7 ; largeur : 2), sur le haut de la tête, est conservée. Il reste un petit fragment de la calotte crânienne (ép. 0,7-0,9), ainsi que la corne droite, en forme de virgule, recourbée à son extrémité. L’oreille droite, collée à la corne et tournée sur le côté, est petite et arrondie. La disposition de la corne et de l’oreille rappelle la tête inv. 19893, même si cette tête est de plus grandes dimensions. 88. Fragment d’applique à tête de taureau. Inv. 19895. Bronze, 9 cm. Fig. 241-242. Inédit. Sommet d’une tête de taureau, d’une applique ; sont conservés les deux cornes, presque verticales à l’origine, et le départ d’une plaque centrale qui était en saillie sur le front. L’irrégularité du bronze, autour de la corne droite, correspond à une réparation du modèle de cire, avant la coulée. Vu l’état de conservation, il est difficile de trouver des parallèles ; alors que la plaquette centrale fait penser à des modèles orientaux (phrygiens), les cornes droites suggèrent plutôt une fabrication grecque. 89. Fragment d’applique à tête de taureau. Inv. 23977. Bronze, 6,3 cm. Fig. 243-244. Inédit. Aile droite d’attache à tête de taureau376. Elle est bombée, avec un léger repli, en haut, pour accrochage sur le bord du chaudron. Un gros trou de rivet à droite, qui servait à la fixer sur le récipient. Ce fragment d’applique n’a conservé aucune trace de tête de taureau, et pourrait être interprété comme une applique à tête de rapace ou d’un autre animal. Mais les parallèles précis que l’on peut faire avec des documents d’Olympie incitent à le classer dans la catégorie des taureaux : les appliques A 24 ou A 25 en sont en effet proches, et sont attribuées par Herrmann respectivement à la Syrie du nord et à la Phrygie377. A 25 a aussi un parallèle à l’Acropole378. Parmi les bronzes d’une tombe d’Alişar, on trouve une applique à tête de taureau avec des ailes semblables379. Mêmes les ailes des sirènes de Samos380, très stylisées, portent un décor de plumes : ce fragment vient donc très certainement d’une applique à tête de taureau. 90. Applique à tête de taureau. Trouvée le 22 juillet 1895 dans les tranchées de l’Est. Inv. 2808. Bronze, 13 cm. Fig. 245-247. Perdrizet 1908, n° 373 p. 82 ; pl. XIV,1 et XV,1 ; Amandry 1956, p. 249 n° 1 ; Herrmann 1966, p. 128 ; Muscarella 1968, p. 14, n. 20 ; Rolley 1973, p. 515 ; Kyrieleis 1977, p. 84-85 ; Filippakis 1983, p. 132, n° 82, et Magou 1991, p. 563 (analyse de l’alliage) ; Rolley 1991, p. 153 n° 17, p. 155, fig. 17 ; Maaß 1993, p. 137, fig. 59 ; Partida 2003, p. 422, n° 688. Applique à tête de taureau. Ne manque que la moitié de l’appendice, en haut, où passait un rivet ; la surface est inégalement conservée. H. ext. conservée de la surface de contact : 13 cm ; h. de la tête : 12,5 cm ; saillie max. par rapport à la surface de contact, sans les cornes : 9,5 cm ; de pointe de corne à pointe de corne : 16 cm ; poids : 1357 gr. Modelé souple, avec un gros bourrelet au-dessus du cou, trois bourrelets sur les joues ; plis du museau et bouche détaillés. Le front est plat entre les saillies des paupières supérieures, qui dessinent quatre bourrelets vigoureux, serrés, au-dessus du liseré qui fait le tour de l’œil. Les yeux étaient rapportés. Les cornes, pas très longues, se recourbent légèrement vers l’avant. Riche décor gravé. Sur le front rayonnent de petites flammèches serrées, chacune striée de traits parallèles ; le centre est perdu. Sur le cou, lignes parallèles encadrant des rangs de petites stries obliques. Sur les bourrelets des joues, traits ondulés, assez espacés. La section du cou est à peu près plate : il n’est donc pas certain que cette protome ait orné un chaudron, à moins de supposer un chaudron de grande taille. Il reste un rivet sur la pointe inférieure ; en haut, une patte, brisée, avec un trou de rivet.

376. Malgré la ressemblance formelle avec les appliques à décor de « sirène », l’absence de toute trace de bras ou de main sur cette partie droite de l’applique empêche de la classer dans la série des sirènes. 377. Herrmann 1966, pl. 42-43.

378. De Ridder 1896, n° 518, fig. 164. 379. Herrmann 1967, p. 109, fig. 27. 380. Gehrig 2004, Ke1 et Ke 2.

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On connaît de ce type un équivalent mal conservé, mais précis, à Délos381. À Olympie, le type A 31 de Herrmann est un autre exemple très proche382. Pour le décor gravé, en particulier les flammèches sur le front, on a des parallèles sur des lions en ivoire de Zinçirli383, ou sur ceux que l’on a trouvés à Thasos384, ou encore sur une protome de Samos (B 171), mais très différente pour le modelé385. Une tête du Louvre aussi entre dans cette série386. Pourtant les spécialistes s’accordent plutôt sur une fabrication grecque.

Commentaire Le classement des têtes de taureaux décorant des chaudrons doit tenir compte d’autres têtes de taureau de fonction ou de forme différentes : il a été question des têtes provenant de trépieds à baguettes (n° 22-24)387, du taureau debout sur l’aile de sirène (n° 68) et, en dehors d’une petite applique de récipient, nous verrons un taureau parmi les animaux sur plaquettes (n° 91)388, lui aussi décor de chaudron. Le traitement stylistique et les schémas de l’ensemble des taureaux doivent servir de référence. Cette catégorie compte moins d’exemplaires que les deux précédentes, mais le classement n’en est pas pour autant facilité : les mêmes doutes sur l’origine grecque ou orientale, les mêmes divergences sur les centres de production grecs et orientaux se font jour. Il y a toutefois quelques points de repère, comme les chaudrons découverts dans les tombes de Gordion, mais leur attribution ne fait pas l’unanimité. Si le classement de Herrmann, souvent critiqué, peut être laissé de côté389, il est possible de suivre l’avis de Kyrieleis, qui proposa d’autres regroupements, jugés valables390, en apportant les nuances qui s’imposent. Pour une vision rapide et claire des styles des têtes de taureaux, on se reportera à l’étude de Friedhelm Prayon de la plastique phrygienne : la page 121 (fig. 248) montre les différents types de protomes de taureau391. Une carte de répartition des trouvailles (carte 5, fig. 249)392 s’avère dans le cas des taureaux fort utile pour dégager quelques groupes ; mais les lieux de découverte sont, comme pour les sirènes, des informations à interpréter et non des renseignements sur les lieux de production. Le groupe qui se dégage le plus clairement, et par lequel on peut commencer le classement, n’est pas du tout représenté en Grèce. Il s’agit des têtes de taureau de l’Urartu, qui ont une forte unité : elles ont d’abord été trouvées sur des sites de l’Urartu, à Altintepe, Toprak Kale, Guschi, et aucune des têtes trouvées en fouille ne l’a été en dehors de l’Urartu, même s’il y a des exemplaires sans provenance393. L’unité est ensuite typologique et stylistique : la tête et l’applique sont fondues séparément, le front est orné d’une plaquette rectangulaire portant des mèches terminées par des bouclettes, et les protomes ne portent pas de bélière. L’intérêt de l’homogénéité géographique et stylistique de ce groupe est de fournir un point de départ pour la définition des autres groupes, même si cette définition est négative. Ainsi, on a reconnu depuis longtemps d’autres protomes de taureau orientales, très différentes des documents urartéens. Ces œuvres ont été trouvées en Orient, en Anatolie et en Syrie du Nord, et d’autres dans des sanctuaires grecs394. Les découvertes des tumuli de Gordion sont particulièrement importantes, mais ne sont pas de style homogène, ce qui pose des problèmes d’interprétation. Des trouvailles faites dans d’autres tumuli en Phrygie395 permettent toutefois de dessiner les contours du style phrygien : l’applique est relativement stylisée, adoptant la forme d’un T qui schématise la combinaison d’une paire d’ailes et d’une queue, rappelant ainsi les sirènes. Les taureaux phrygiens ont une tête large au niveau des cornes, avec une plaque triangulaire ou arrondie sur le front, et leur museau est allongé, l’extrémité étant nettement détachée de l’applique.

381. Rolley 1973, fig. 20 et 21 p. 514. 382. Herrmann 1966, A 31, p. 115, pl. 47-49. 383. Von Luschan 1943, V, pl. 64 et 65. 384. Salviat 1962, p. 95 et suivantes. 385. Herrmann 1966, pl. 52, 2 ; Kyrieleis 1977, pl. 35, 1-2. 386. Kyrieleis 1977, pl. 35, 3-4. 387. Supra, p. 43-44. 388. Infra, p. 105. 389. Rolley 1984a, p. 282. 390. Id., p. 282 ; Muscarella 1992, p. 30.

391. Prayon 1987, p. 121, fig. 20. 392. Bieg 2002, p. 69, fig. 57. 393. Rolley 1963b, p. 78 ; Herrmann 1966, p. 122 ; Young (de

Vries) 1981, p. 219-220 ; Muscarella 1992, p. 25-26. 394. Muscarella 1992, p. 26, donne l’ensemble du matériel et les provenances. 395. Dans le tumulus D de Bayindir-Elmalı en Lycie ; dans un tumulus de Niğde à Tabal (au sud de la rivière Halys) : Acar et Mazur 1989 (non vidi), dans Muscarella 1992.

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Or, tous les taureaux que les tombes royales de Gordion ont livrés ne répondent pas à ce schéma. Si l’on peut considérer comme phrygiennes les protomes du chaudron MM1 et celles des petits chaudrons MM 12 et MM 13396, provenant toutes de la même tombe, en revanche les protomes du chaudron du tumulus W relèvent d’un autre style397. Les différences sont réelles, comme la forme de l’applique, qui est une plaque triangulaire dans le cas des protomes du tumulus W2, et une applique à trois branches, assez schématique, dans le cas des taureaux de la tombe MM. Mais notre connaissance de l’art phrygien est-elle suffisante pour conclure que la coexistence de deux styles différents est impossible dans cette production ?398 Il est vrai que la présence à Gordion de tous ces exemplaires, et même ceux de la tombe W, les points communs comme la fonte en une seule pièce et la présence sur le front d’une zone triangulaire ou arrondie ont permis de supposer que tous ces taureaux relevaient de la production phrygienne399. Mais il faut tenir compte d’une autre hypothèse, antérieure même à l’attribution de certaines protomes à la Phrygie. H. Kyrieleis400 surtout, après H.-V. Herrmann, rattache les protomes de type oriental qui ne viennent pas de l’Urartu à la Syrie du Nord, par comparaison avec des documents de pierre ou de bronze de la région néo-hittite. Il y ajoute les protomes de Gordion (tumulus W), et suggère l’appartenance de Samos B 171 à ce groupe. Mais ce groupe est typologiquement et stylistiquement hétérogène. Il compte en effet des appliques de facture plus naturaliste, avec des ailes et une queue ornées de festons401, mais d’autres qui ont la forme d’une plaque triangulaire402, et d’autres encore qui semblent directement soudées sur le chaudron403. Les têtes des taureaux classées dans ce groupe sont massives, avec des formes rondes, bien différentes des plans séparés par des arêtes des taureaux phrygiens ; on y retrouve des cornes petites, recourbées, des oreilles tombantes, et une bélière à l’arrière de la tête. Le museau encore large n’affine pas l’ensemble de la tête. Un décor gravé souligne les yeux, la plaquette sur le front, et parfois le museau. En fonction de ces propositions de classement, où peut-on placer les œuvres trouvées sans contexte en Orient, ou dans les sanctuaires grecs ? Le chaudron conservé à Copenhague et prétendument trouvé à Cumes404 concentre sur lui ces questions d’attribution (fig. 2, 227 et 228) ; comme il sert de point de référence pour plusieurs documents de Delphes, il est nécessaire de faire le point sur son interprétation. Ce chaudron porte deux appliques à deux ailes et une queue, fondues avec la tête de taureau, elle-même surmontée d’une bélière dans laquelle se trouve encore un anneau. Les têtes de taureau sont massives, la tête très large en haut, portant des cornes petites et recourbées, des oreilles tombantes ; les yeux ronds sont entourés de deux lignes concentriques ; le front porte une plaque arrondie décorée de stries. H.-V. Herrmann405 et H. Kyrieleis406 ont soutenu que ce chaudron avait été fait en Syrie du Nord, sur la base de rapprochements avec des protomes en bronze d’Alep et de Zinçirli, un taureau en pierre de Carcemish407, et une protome en pierre de Zinçirli408. Il est important de noter qu’à ce groupe, H. Kyrieleis rattache les protomes de taureau du chaudron trouvé dans la tombe W de Gordion409 : la présence d’importations nordsyriennes à Gordion conforte les hypothèses émises à propos des chaudrons à décor de sirènes410. Ce panorama rapide suffit à montrer combien il est difficile de classer les documents de Delphes avec certitude ; on tentera de faire tout de même quelques regroupements. La tête inv. 2351 (n° 81, fig. 225-226), sur applique en

396. Young 1981, p. 102-103, fig. 68, pl. 50, et p. 112, pl. 59. 397. Young 1981, p. 199-201, fig. 117, pl. 87-88. 398. Kyrieleis 1977 ; Muscarella 1992, p. 30 et suivantes :

l’auteur obscurcit passablement le débat en revenant sur ses positions et en suggérant d’appeler toutes les protomes non urartéennes « de style proche-oriental » ; si la prudence est en effet nécessaire, il n’en faut pas moins essayer de caractériser les différentes traditions, quitte à constater, comme le fait très timidement l’auteur, qu’il y a plusieurs ateliers phrygiens ou nord-syriens. 399. Rolley 1984a, p. 282. 400. Kyrieleis 1977, p. 74-77 : il compare avec une tête de taureau de pierre de Carcemish, une attache du Louvre trouvée à Alep, et une protome de Zincirli. 401. Exemple : paire de Tell Rifa, Muscarella 1968, p. 11, fig. 11. 402. Chaudron de Gordion Tumulus W.

403. Comme l’applique de chaudron du Louvre, provenant d’Alep. 404. Amandry 1956, p. 242, n. 11. 405. Herrmann 1966, p. 122. 406. Kyrieleis 1977, p. 74-76. 407. Kyrieleis 1977, pl. 29, 1-2. 408. De Vries, Young 1981 trouve ces deux dernières comparai-

sons moins convaincantes. 409. Young 1981, p. 199-201 ; Prayon 1987, p. 127 : l’auteur souligne la différence de style entre ces têtes et les appliques à protome de rapace trouvées dans le même tumulus, avant de conclure que les têtes de taureaux doivent être des importations. 410. Les sirènes de Gordion pourraient donc avoir une origine nord-syrienne. Pour les protomes de taureau, O.W. Muscarella suggère que les documents nord-syriens du tumulus W, plus ancien que les autres, témoignent des importations qui ont inspiré les artisans phrygiens ; Muscarella 1992, p. 26.

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forme de T, avec une certaine schématisation du modelé, a été pour diverses raisons rapprochée de documents jugés phrygiens, en particulier les têtes de MM1 de Gordion ; ce qui permet de nuancer l’avis de Cl. Rolley, qui jugeait cette tête, « d’une facture plus nette, avec un traitement des plans et des volumes franc, presque sec, et des yeux ronds très saillants, entourés d’un bourrelet continu, sans séparation des paupières »411, un peu différente des œuvres phrygiennes. Le rapprochement s’impose ici avec les taureaux que la plupart des auteurs reconnaissent comme pleinement phrygiens, bien que la vue de profil ne ressemble à rien de ce que l’on connaît en Orient ou en Grèce. L’existence de ce type d’exemplaires qui n’entre pas parfaitement dans une série est précisément intéressante parce qu’elle oblige à déterminer clairement les critères412. Le fragment de protome inv. 19892 (n° 82, fig. 229-230) est aussi très proche des appliques du chaudron MM1, plus que de celles du chaudron de Copenhague, formées des ailes et d’une queue d’oiseau ; le décor gravé, où les lignes autour des yeux et dans la zone du museau sont formées de petits points, est un autre argument pour attribuer le fragment de Delphes à la Phrygie. La présence de plomb, utilisé dans l’artisanat grec et oriental, n’est pas un élément déterminant. Enfin, le fragment inv. 19894 (n° 83, fig. 231-232), qui conserve une « aile » de l’applique assez schématique, une corne recourbée implantée très près de l’arrachement de l’oreille, fait penser aux taureaux que nous avons classés dans ce groupe. Deux autres têtes de Delphes montrent un traitement différent, qui présentent des éléments communs avec les analyses que nous avons présentées des documents nord-syriens : l’applique inv. 1784 (n° 84, fig. 233-234) a certes souffert du passage du temps, mais elle présente encore certaines de ces caractéristiques, comme la massivité de la tête, le peu de relief des détails modelés, la plaquette semi-circulaire sur le front, ou le décor gravé. Vu les points communs constatés, cette applique correspond aux critères stylistiques dégagés par les auteurs, H. Kyrieleis en particulier, pour les documents néo-hittites. C’est ici que l’on pourrait proposer de classer le fragment inv. 19893 (n° 86, fig. 237-238), qui, avec ses cornes petites et recourbées, implantées très près des oreilles un peu inclinées, ressemble à inv. 1784. La tête de Delphes inv. 4139 (n° 85, fig. 235-236) partage avec les appliques de Gordion (tumulus W 1 et 2) la plaque triangulaire, la massivité des formes, le modelé peu détaillé, et les grands yeux ronds des taureaux du groupe en question. Elle a notamment le même profil caractéristique, où l’extrémité du museau n’est pas dégagée du cou. Si les spécialistes se sont accordés sur une fabrication nord-syrienne de ces documents, c’est aussi parce que cette opinion corrobore les propositions faites pour les griffons, et pour les sirènes surtout, d’une origine nord-syrienne. Enfin, une applique à tête de taureau très fragmentaire, sans n° d’inventaire (n° 87, fig. 239-240)413, doit sans doute trouver sa place ici, en raison de sa corne recourbée et courte, et de la forme de la bélière, qui rappelle aussi inv. 1784. En revanche, il n’est pas possible de proposer une attribution pour les fragments inv. 19895 (n° 88, fig. 241242) et 23977 (n° 89, fig. 243-244), vu leur état de conservation. Alors que l’on serait tenté de reconnaître dans inv. 19895 un document oriental, à cause de la plaquette dont le départ est visible au sommet de la tête, un peu en relief, comme sur inv. 2351, les cornes, toute droites, et non courbes comme sur les parallèles orientaux, font hésiter sur ce classement. Il peut s’agir d’un document grec copiant la plaquette des taureaux orientaux. L’aile d’applique 23977 a pu être ornée d’une tête de taureau : c’est l’interprétation la plus vraisemblable du fragment. Enfin, un document extrêmement réussi, la tête inv. 2808 (n° 90, fig. 245-247), prouve une fois encore que le sanctuaire de Delphes recevait des œuvres d’une grande qualité. Un doute persiste quant à sa fonction : protome si on suppose un chaudron de grande taille, il n’est pas impossible qu’elle ait décoré un meuble ou un char414. Son classement parmi les créations grecques ne va pas non plus de soi415. En effet on y a vu à plusieurs reprises une protome orientale, en particulier en raison de l’abondance du décor gravé, les lignes parallèles encadrant de petites stries obliques, ou les flammèches sur le front. Mais si le modelé est très différent des exemplaires orientaux, qui se caractérisent par une certaine stylisation – ici l’artisan a été sensible à la souplesse de la peau qu’il a cherché à rendre –, l’ensemble des comparaisons que l’on peut faire nous ramène vers les œuvres orientales. Une protome

411. Rolley 1963b p. 82. 412. Et non à proposer que cette applique appartienne à la caté-

gorie des « provinzielle griechische Nachahmungen orientalischer Vorbilder », Kyrieleis 1977, p. 87. 413. Car retrouvée en septembre 2008 dans la réserve des bronzes de Delphes, avec des objets supposés provenir de « l’ancien atelier ».

414. On connaît des protomes ornant des sièges : Amandry 1956, p. 249, n. 29. 415. L’analyse de la composition du métal montre que cette pièce entre bien dans le groupe 7, où on compte beaucoup d’œuvres orientales : Magou 1991, p. 563 et suivantes.

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d’Olympie présente le même type de traitement du modelé, avec la zone au milieu des cornes légèrement bombée ; or, elle entre dans une série rassemblée par H. Kyrieleis autour d’objets provenant de Chypre, et en particulier les têtes de taureau de Kourion, partagées entre New York et Berlin, qui décoraient un trépied à baguettes (fig. 250)416. Ces protomes ont été comparées par K. Vierneisel à une tête de taureau de terre cuite d’un kernos annulaire daté vers 600 av. J.-C., de fabrication samienne417. Dans son étude sur les vases plastiques rhodiens, J. Ducat place ce kernos dans une série de copies de vases rhodiens418. Doit-on en conclure que la protome de taureau est de facture rhodienne ? Il est vrai qu’un atelier de la Grèce de l’Est conviendrait bien à une œuvre qui s’inspire de modèles orientaux sans leur correspondre vraiment ; mais il faut bien avouer qu’il n’y a guère d’arguments plus convaincants. Peut-être toutefois une tête de Samos (B171)419, qui a un parallèle très proche au Louvre, peut apporter un indice supplémentaire en faveur d’une attribution à la Grèce de l’Est ou à l’Ionie. Le cas de ce taureau est-il isolé ? La carte de répartition (carte 5, fig. 249) des appliques de chaudrons à tête de taureau montre un nombre de trouvailles à peu près égal sur le sol oriental et sur le sol grec420 ; cela reflète donc l’existence de lieux de productions multiples en Orient comme en Grèce. Les spécialistes ont d’ailleurs des difficultés à faire la part entre les taureaux de fabrication orientale ou grecque trouvés dans les sanctuaires grecs421. Même si l’on a parfois vu dans certaines protomes de Delphes des productions grecques copiant des modèles orientaux, la plupart peuvent être interprétées comme des importations orientales, soit de la Syrie du Nord, ce qui renforce les hypothèses émises à propos des sirènes trouvées dans les sanctuaires grecs, soit de la Phrygie, pour laquelle les sources littéraires mentionnent les offrandes royales. À Delphes ont été trouvés des objets de parure ou de vaisselle caractéristiques aussi des productions phrygiennes : cette provenance est donc très vraisemblable. Enfin, les liens avec Chypre et la Grèce de l’Est sont également très bien illustrés par les documents delphiques422.

416. Kyrieleis 1977, p. 84 ; Amandry 1956, pl. 30-32. 417. Vierneisel 1961, p. 57. 418. Ducat 1963, p. 433, n. 1. 419. Kyrieleis 1977, pl. 35, 1-2. 420. Orient (52) : 14 en Urartu + 3 chaudrons ; 3 au musée

de Karlsruhe, 2 au Japon, 4 sur petit chaudron Japon ; 1 collection Mildenberg ; 1 Louvre ; 1 British Museum ; Proche Orient : Phrygie

13 ; Lycie 4 ; Nigde 4 ; Kamir Blur 1 ; Tell Rifa 2 ; Zinçirli 1 ; Alep 1 ; chaudron de Copenhague et nombreuses têtes isolées dans des collections. Grèce (48) : Olympie 14 ; Delphes 10 ; Athènes 1 ; Heraion Argos 2 ; Amyclées (Sparte) 1 ; Délos 1 ; Lindos 2 ; Samos 11 ; Chypre 5 (Idalion 1, Kourion 2 ; Salamine 2) ; Lindos 1. 421. Voir le bilan fait dans Muscarella 1992, p. 32-35. 422. Aurigny 2016d.

Chapitre 4

Appliques de vaisselle

Appliques animales de chaudron Catalogue La fonction de ce type d’animal sur plaquette, comme l’avait écrit Cl. Rolley à la suite de E. Kunze, est d’orner l’épaule de chaudrons ; l’applique est fixée perpendiculairement au rebord, et regarde à l’intérieur du récipient ; cette fonction est celle des appliques n° 91 à 97. La découverte à Olympie d’un chaudron portant la trace des trous pour les plaquettes, a confirmé ce qui était d’abord une supposition1. 91. Taureau. Trouvé le 15 mars 1902 à Pylaea, au Nord-Est du musée. Inv. 4434. Bronze, 10 cm. Fig. 251-252. Perdrizet 1908, p. 52, n°158, fig. 163 ; Kunze 1938, p. 117 ; Kunze 1950, p. 100 ; Kunze 1956a, p. 81 note 11, et p. 176 ; Herrmann 1966, 155, n° 11 ; Rolley 1969, 94, n° 154, pl. XXIV ; Partida 2006, p. 804. Taureau dressé sur ses pattes arrière. Il manque l’extrémité de la patte arrière droite, la moitié droite de la plaquette arrière, les deux pattes avant et la plaquette avant et l’extrémité des cornes. Sur la croupe, il ne reste que le départ de la queue. Les plaquettes étaient fixées par deux rivets au support. Le corps de l’animal adopte une forme cylindrique, avant un appendice au niveau de l’abdomen. Le cou est allongé et se termine par une tête de petite taille, aux yeux saillants, avec des oreilles bien détachées sous les cornes. Le taureau porte un riche décor gravé : les membres sont séparés du corps par un trait et portent un trait vertical, le corps a reçu trois traits sur le dessus, et les flancs sont décorées de quatre traits. Un trait courbe sépare le cou, couvert de points, du reste du corps ; on voit deux rangs de stries entre les cornes, des lignes encadrant les yeux qui sont déjà soulignés de deux traits. Le taureau présente un décor gravé similaire à celui des sirènes orientales, et des sirènes portant des taureaux sur leurs ailes (n° 68) ; toutefois, le modelé est très différent de ces dernières. À Olympie, les taureaux B 171, B4384, B 16992 constituent de bons parallèles ; le taureau d’Olympie B 1569 présente une structure identique, mais la forme de l’applique est un peu différente, avec une barre de bronze beaucoup plus large (presque 6 cm de large). On citera encore les ressemblances avec un taureau conservé à Providence3. 92. Avant-train de lion. Trouvé le 19 avril 1894, au dépôt de l’opisthodome. Inv. 1248. Bronze, 10 cm, fig. 253-254. Perdrizet 1908, 57, n° 183, fig. 179 ; Neugebauer 1931, p. 52, n° 136, n. 5 (pl. 14) ; Gabelmann 1964, p. 6, n° 4 Herrmann 1966, p. 155, n° 30 ; Rolley 1969, p. 95, n° 155, pl. XXIV.

1. Herrmann 1966, p. 11-17. 2. Id., pl. 62-63.

3. Inv. 36.190. Boardman 1995, p. 82, fig. 44. Mitten 1975, p. 31-33, n° 10, fig. A-d.

BRONZES DU HAUTARCHAÏSME À DELPHES

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Avant-train de lion. Ne sont conservées que la tête, le cou, le départ de la patte gauche et une partie du corps. Seul le corps était fondu en creux. Le lion est reconnaissable à sa crinière en saillie tout autour de la tête, qui sépare les oreilles du reste des traits. La gueule du lion rugissant est ouverte, laissant voir les canines conservées dans la partie supérieure. Les naseaux ne sont plus visibles que par les masses qu’ils forment. Malgré l’état de conservation médiocre de l’épiderme du bronze, le riche décor gravé est visible : sur le corps, des languettes décorées de stries et surmontées d’un trait ; sur les épaules, des flammèches ; sur la patte, des stries ; sur le cou, des cercles faits au poinçon ; sur la tête, des rangées de point et de traits. Proche d’un exemplaire trouvé à Delphes et perdu depuis (n° 93), ce document a la même structure qu’une tête de lion de l’Acropole (MN 6663)4, deux bronzes d’Olympie (n° 3972 et 4213)5, et un lion du Petit Palais6. Pour le style, on peut le rapprocher d’un cerf de la collection des musées de Berlin7. L’origine anatolienne, fondée sur une tête de Toprak Kale, proposée par H.-V. Herrmann n’a pas été remise en cause8 ; le décor de la tête est un peu le même sur le n° 99 (inv. 7803). H.-V. Herrmann a publié plus récemment un autre lion d’Olympie avec la gueule ouverte sur plaquettes9. 93. Lion. Trouvé en 1935, sous la Lesché des Cnidiens. Sans no d’inv. (perdu). Bronze, 12 cm. Fig. 255-257. Lerat 1938, p. 225 ; Rolley 1977, p. 12, n° 256, pl. XIV. D’après les photographies faites au moment de la découverte, il s’agit d’un ornement de chaudron d’origine orientale. L’extrémité des pattes antérieures et postérieures manquent. Le corps a une forme cylindrique ; à l’arrière, la queue n’est qu’un petit appendice dans le prolongement du corps. À l’avant, la gueule de l’animal est largement ouverte, mais on ne distingue pas de dents. Les naseaux sont à peine visibles. La crinière est en forte saillie sur la tête. Ce lion est tellement proche d’inv. 1248 qu’on peut supposer que ce sont les deux appliques du même chaudron. U. Jantzen a publié un fragment de Samos10 qui fournit un bon parallèle. Enfin, H. Gabelmann a montré l’existence d’un petit groupe de lions orientaux trouvés en Grèce11, deux à Olympie, un de l’Acropole d’Athènes conservé au musée National d’Athènes, un provenant de la collection Dutuit, conservé au Petit Palais ; E. Kunze les rapprochait pour le style du cerf de la collection des musées de Berlin12. Mais une autre comparaison s’avère bien intéressante pour déterminer l’origine de cette image de lion : H. Gabelmann propose un rapprochement avec une anse de vase décorée d’une tête de lion, découverte à Toprak Kale et conservée au British Museum13. Enfin, les trouvailles de Grévéna ont livré une anse zoomorphe de lébès14 dont le corps cylindrique fait penser au document delphique. 94. Fauve dévorant un homme. Trouvé le 4 mai 1894, en contrebas de la voie sacrée, entre les Épigones et le trésor de Sicyone. Inv. 1430. Bronze, 9,5 cm. Fig. 258-260. Perdrizet 1908, p. 56, n° 181, et fig. 178 ; Rolley 1969, p. 95, n° 156, pl. XXIV. Fauve dévorant un homme. Manquent l’extrémité des pattes arrière, la plaquette arrière et la queue ; les pattes avant sont tordues, il manque une partie de la plaquette transversale sur laquelle elles sont fixées. Cette plaquette est transversale est plus mince que celle de n° 94. Le corps est très resserré au niveau de la taille, alors que les cuisses et les épaules sont larges. La tête est séparée des épaules par un ressaut, mais il n’y a pas de cou. Elle est arrondie dans sa partie supérieure, avec des petites oreilles détachées et de petits yeux creusés. La gueule allongée vers l’avant, est ouverte et laisse voir de grandes dents de part et d’autre de l’objet que l’animal tient. Il s’agit d’une tête humaine : les cheveux sur le crâne sont séparés du reste du visage par un trait, les oreilles sont visibles, de même que les yeux en amande. S’il n’existe pas de parallèles orientaux exacts, quelques comparaisons peuvent être faites en Étrurie, avec des situles : parmi les appliques de bronze de Préneste, une anse de situle porte un lion dévorant un homme15. Une anse de cruche provenant peut-être de Pérouse, conservée à Munich, est faite d’un lion dressé sur le rebord du vase, une tête humaine dans la gueule16. C’est une représentation qui a des points communs avec des documents grecs, qui montrent des scènes de chasse, sur des fibules béotiennes, et surtout dans les représentations du géométrique attique. Pour la représentation du lion, on trouve un parallèle convaincant sur l’hydrie du peintre d’Analatos d’Athènes17.

4. De Ridder 1896, n° 476 (inv. 6663). 5. Furtwängler 1890, p. 150, n° 947 et sans n°, pl. 56 ;

Herrmann 1966, p. 155, n° 28 et 29. 6. De la collection Dutuit : Gabelmann 1964, p. 6 et suivantes, pl. 6-7. 7. Neugebauer 1931, pl. 14. 136. 8. Herrmann 1966, p. 155. 9. Olympie B 7370, Herrmann 1984, p. 32, pl. 9,2.

10. Jantzen 1972, p. 63 (BB 775), pl. 59. 11. Gabelmann 1964, p. 6-12. 12. Kunze 1950. 13. Barnett 1954, pl. II, 1 A et B ; Gabelmann 1964, p. 9. 14. BCH 92 (1968), p. 896-898, fig. 20. 15. Rolley 1969, p. 96, qui donne les principaux exemples. 16. Höckmann 1982, n° 52, p. 92-96, pl. 53. 17. Boardman 1998, p. 99, fig. 188.2.

APPLIQUES DE VAISSELLE

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95. Avant-train de quadrupède. Trouvé en 1938, à l’Ouest du trésor des Athéniens. Inv. 7802. Bronze, 4,9 cm. Fig. 261-262. Rolley 1969, p. 97, n°157, pl. XXIV. Quadrupède, dont il ne reste que l’avant. L’extrémité des deux pattes a disparu. Vu le rétrécissement du corps et la cassure, il n’est pas certain que l’animal ait jamais été complet : peut-être s’insérait-il dans un autre objet plus grand qu’il décorait (meuble, objet décoratif ?). La tête, à la gueule entrouverte, plate au-dessus, avec les oreilles couchées et les yeux marqués par deux petits trous, rappelle d’assez près celle du lion précédent ; le lieu de fabrication et la date doivent être voisins. C’est le parallèle que l’on peut faire avec l’objet précédent, pour le modelé et l’aspect du bronze, qui justifie la place de ce document dans ce groupe. Le motif du chien comme décor de récipient se trouve aussi sur un chaudron de la tombe Bernardini à Palestrina, où les chiens alternent avec des hommes debout autour du chaudron de bronze18. 96. Arrière-train de quadrupède. Donné au musée le 31 août 1912. Inv. 4766. Bronze, 4 cm. Fig. 263-265. Rolley 1969, p. 97, n°158, pl. XXIV. Arrière-train de quadrupède à queue très courte, les pattes réunies par une plaquette transversale. La queue très courte, qui semble d’origine, est différente de celles de la plupart des taureaux19, même si la position des pattes arrière peut y faire penser. 97. Sphinx debout. Trouvé avant 1908, à l’Est du grand autel. Inv. 2440. Bronze, 7 cm. Fig. 266-267. Perdrizet 1908, p. 57, n°184, pl. XI,5 ; Herrmann 1966, p. 155, n°35 ; Rolley 1969, p. 97, n°159, pl. XXIV. Sphinx debout. Manquent la patte avant droite, la plus grande partie de la patte arrière gauche, et le bas des deux autres pattes. Le corps du sphinx est cylindrique, comme n° 92, avec une petite queue dressée à l’arrière. À l’avant, les deux ailes semblent collées sur les épaules, dans le même plan que les pattes et le buste. La chevelure forme une masse assez haute audessus du visage, dont elle est séparée par un trait bien marqué ; sur les épaules, elle se termine par un bourrelet horizontal. Les traits du visage sont presque entièrement effacés ; aucun décor gravé n’est conservé sur l’ensemble de la statuette. Il existe à Ithaque un parallèle à ce sphinx, qui décorait un chaudron, car il est placé sur des plaquettes larges qui identifient sa fonction20. Mais il est de style assez différent, beaucoup plus trapu ; en outre, on y reconnaît une œuvre grecque, qui atteste seule que les bronziers grecs ont aussi imité ce type d’appliques de chaudron. Le musée National d’Athènes conserve aussi un sphinx fragmentaire provenant d’Olympie (Br 5275)21 : il n’en reste que l’avant, mais les antérieurs forment avec le corps un angle qui rappelle la structure de la pièce delphique. Enfin, un quadrupède ailé conservé à Héraklion22, peut-être un cheval, remplissait sans doute la même fonction de décor de chaudron. T.J. Dunbabin en souligne l’origine syrienne, avant d’expliquer l’importance de l’ « influence » syrienne dans la formation de l’art grec aux viiie et viie siècles. La chevelure du sphinx de Delphes rappelle d’assez près celle de certaines sirènes de chaudrons, de fabrication orientale, comme les nos inv. 2623 (n°59) et 1347 à Delphes (n°60). 98. Quadrupède debout. Trouvé le 29 août 1894, au-dessus de l’ex-voto de Gélon. Inv. 1866. Bronze, 13 cm. Fig. 268-269. Perdrizet 1908, 56, n°177, pl. 14,5 ; Rolley 1969, 98, n°161, pl. XXV. Quadrupède dressé sur ses pattes arrière. Manquent les deux pattes avant presque entièrement, l’extrémité des pattes arrière, la queue. Le corps cylindrique est long et mince, impression renforcée par l’arrondi du cou et les pattes arrière qui allongent encore la ligne. La tête relativement grosse par rapport au corps se termine par un museau plat qui est percé d’un trou profond, carré aux angles arrondis. Sur la tête, on voit des yeux en relief dans le creux, surmontés de bourrelets doubles. Le montage de cette pièce n’est pas assuré, au contraire des exemplaires précédents : décor d’ustensile ou de meuble, il peut aussi avoir servi d’anse verticale de vase, ou de décor de chaudron23. La fonction possible de décor de chaudron nous permet de placer ici ce document. Cl. Rolley, rappelant que les montages possibles étaient multiples, proposait un rapprochement avec un bassin d’Olympie24, où des animaux très étirés décorent les anses. U. Jantzen a publié un fragment d’animal, trouvé à l’Héraion de Samos qui partage avec celui de Delphes un certain nombre de traits, notamment la courbure du cou, ou la tête grosse par rapport à l’étirement du corps ; ce document, sans doute un lion, est placé par U. Jantzen dans l’orbe de l’art néo-hittite25. Les chaudrons ne sont pas les seuls récipients à avoir

18. Canciani, von Hase 1979, n° 44, p. 49, pl. 32,1 et 33-34. 19. Par exemple Herrmann 1966, pl. 62-63. 20. Robertson 1948, pl. 49, E5. 21. Furtwängler 1890, pl. 56, 949. 22. Sans inv., provenant d’Haghia Triada, Dunbabin 1957, p. 36

et pl. VIII, 3.

23. Voir les différentes possibilités énumérées par Cl. Rolley dans Rolley 1969, p. 98-99. 24. Daux 1966, p. 818, fig. 10. 25. Jantzen 1972, p. 63-64, pl. 59.

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reçu des anses prenant la forme d’animaux schématiques : la publication de la vaisselle d’Olympie par W. Gauer offre des exemples d’anse en forme de lion, qui témoignent d’importations d’objets orientaux et surtout de la mode de l’imitation de ces documents et de leur intégration au répertoire créatif grec26. 9927. Lion couché. Trouvé le 23 août 1895, en contrebas du monument des Épigones. Inv. 2924 (ou 7803). Bronze, 6,3 cm. Fig. 270-272. Perdrizet 1908, 56, n° 176, fig. 175 ; Rolley 1969, 99, n° 162, pl. XXV. Lion couché. Le félin est trapu, car l’arrière-train est presque atrophié. Les pattes arrière, très courtes, sont comme collées sur le haut de la croupe, très réduite. La queue se replie aussi dessus. L’avant-train de l’animal est plus développé : les épaules et le cou sont plus massifs. Les oreilles sont séparées du reste de la tête par la crinière, figurée comme une collerette qui entoure la tête en faisant saillie, sauf sous la mâchoire (comme le n° 92). La tête, légèrement tournée vers la droite de l’animal, est coupée droit au bout ; une légère dépression axiale sépare les deux yeux, qui sont grands et allongés. Le lion est rugissant : la gueule ouverte laisse voir deux canines supérieures et la langue tirée. L’animal porte un riche décor gravé : les pattes sont séparées du corps par des traits courbes ; les griffes sont indiquées par des traits parallèles. Le corps porte à la fois de petits cercles et des traits profonds verticaux ; sur l’échine, une série de petits chevrons que l’on retrouve dans la partie inférieure de l’abdomen. Sur les épaules et le cou, de grands traits courbes divisent des zones décorées de stries et de demi-cercles. Enfin, le front et les joues sont ornés de demi-cercles, des traits profonds marquent les naseaux, la moustache et les dents. L’objet, plat dessous et fait pour être vu de face, devait orner un meuble ou un objet décoratif. Ce lion a une crinière proche du n° 92 (inv. 1248) qui justifie son attribution à un artisan oriental, sans doute anatolien. Cette petite applique rappelle, par ses proportions, des représentations monumentales néo-hittites, comme les lions de Zinçirli28 : on retrouve en particulier la même gueule un peu disproportionnée par rapport au corps.

Commentaire Ce petit groupe d’appliques de chaudron appartient à une série peu nombreuse, mais assez facile à caractériser : « il s’agit de petites figurines de bronze […] aux pattes tendues, tenant à deux courtes plinthes qui étaient rivées, peut-être à des couvercles de chaudrons29, plus probablement à la paroi des chaudrons eux-mêmes »30. Or, cette fonction a été reconnue depuis longtemps par E. Kunze31, qui l’avait d’abord suggérée comme une possibilité ; elle fut confirmée de façon éclatante par la découverte d’un chaudron fragmentaire à Olympie, qui gardait des restes de ces plaquettes, ou les trous de rivets (fig. 273)32. Les animaux qui décorent les chaudrons sont surtout des taureaux, des lions, des cerfs ou des boucs ; ils sont la plupart du temps interprétés comme orientaux. La liste de ces objets a été dressée par H.-V. Herrmann en 1966, dans une annexe à son étude des chaudrons orientalisants33 où il reconnaît que ce sont aussi des éléments de décor de chaudrons orientaux34. C’est aussi la raison pour laquelle nous avons choisi d’étudier avec eux des animaux qui ont une fonction comparable et qui sont aussi issus du répertoire oriental (inv. 1866, n° 98, par exemple). Ces documents sont dans la même situation paradoxale que celles des protomes de griffons : alors que certaines, en raison de particularités iconographiques et techniques, sont très vraisemblablement orientales, aucun équivalent trouvé en Orient ne venait jusqu’à récemment confirmer cette hypothèse. Mais il est possible de comparer les documents de cette série avec les autres appliques décorant les chaudrons, comme les sirènes ou les griffons, pour lesquels nous avons déjà examiné un certain nombre d’hypothèses. On peut considérer

26. Gauer 1991, pl. 114-115. 27. Ce document est introuvable dans le musée de Delphes. 28. Akurgal 1969, p. 106, fig. 71. 29. Hypothèse émise par Furtwängler 1890, p. 150. 30. Amandry 1958b, p. 11. 31. Kunze 1938, p. 115-117 ; Kunze 1950, p. 99. 32. Herrmann 1966, p. 158, fig. 64,4. 33. Id., p. 153-158.

34. Herrmann en compte en tout trente-sept : vingt-trois à Olympie (dix taureaux, sept capridés, deux cerfs, deux lions, un sphinx), deux à l’Acropole d’Athènes (un taureau, un lion), deux à Samos (un capridé et un démon caprin ailé), un capridé à l’Amyklaion de Sparte, un capridé à l’Héraion d’Argos, un cheval ailé à Héraklion et un sphinx d’Ithaque ; un taureau de provenance inconnue à Londres, un taureau à Providence, un capridé de Camiros à Londres, un lion au Petit Palais de provenance inconnue. Herrmann 1966, p. 155, n’en compte que deux pour Delphes (inv. 4434 et inv. 1248).

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cette série comme une production destinée à la clientèle grecque, puisqu’il semble bien qu’une partie relativement importante des objets orientaux retrouvés dans les sanctuaires grecs n’a, pour ainsi dire, pas de parallèle en Orient. La carte de leur répartition est intéressante35 (carte 6, fig. 274) : on croyait ne trouver ces objets qu’en Grèce, malgré leur aspect clairement oriental ; or, ce n’est pas le cas. En remarquant que tous les exemplaires semblent être d’importation, J. Boardman donne un début d’explication : ces produits auraient-ils été conçus uniquement pour l’exportation vers la Grèce ? Aux lieux de découverte, déjà variés, cités par J. Boardman36, il faut ajouter Kalapodi37, ce qui donne un total de 43. Il faut encore y ajouter une découverte publiée récemment, bien que sans contexte : le musée d’Adana conserve un cerf en bronze très proche des exemplaires d’Olympie38. Il y a donc bien une provenance orientale pour l’un des éléments de cette liste. Le taureau de Delphes inv. 4434 (n° 91) a un intérêt particulier parce qu’on peut le comparer de façon précise à de nombreux exemplaires d’Olympie39 : même modelé du corps, élancé, même construction de la tête. En outre, le décor gravé, faits de lignes de points, de stries et traits, est aussi un point commun que ces taureaux sur plaquettes partagent avec les taureaux debout sur des ailes de sirène de l’Héraion d’Argos et de Delphes40. Or ce groupe de documents avait été attribué, par comparaison avec les sirènes, à la production de la Syrie du Nord néo-hittite41 ; les animaux sur plaquettes seraient donc une catégorie supplémentaire dans la production des appliques de chaudron en Syrie du Nord, ensuite importées et imitées par les Grecs. Qu’apporte l’examen des autres pièces pour l’attribution de cette production ? Le lion inv. 1248, ainsi que celui qui a été perdu, font partie eux aussi d’une petite série étudiée par Hanns Gabelmann, qui comprend deux exemplaires d’Olympie, un de l’Acropole d’Athènes, et le lion de la collection Dutuit. Ils ont en commun le dispositif des plaquettes, le corps tendu, la crinière de forme circulaire, les oreilles appliquées par-dessus, la gueule ouverte avec de puissantes canines. Bien que Gabelmann souligne les rapprochements possibles avec des documents du lac de Van et de Toprak Kale, et conclue à la provenance probable de cet ensemble de l’Urartu42, il rappelle que le type du lion urartéen, comme l’a montré E. Akurgal, dépend du lion araméen-hittite, ce qui permet de rassembler dans une même zone l’ensemble des modèles orientaux importés ou imités par les Grecs43. On constate pour cette catégorie que les spécialistes ont les mêmes opinions opposées que pour les autres appliques de chaudron, ce qui est logique ; l’Urartu, bien que moins cité que la Syrie du Nord néo-hittite, reste à l’esprit de certains lorsqu’il s’agit de la recherche des modèles. Le sphinx de Delphes inv. 2440 (n° 97) appartient aussi à ce bestiaire fantastique que l’on appréciait particulièrement sur le rebord des chaudrons. Si l’absence de décor gravé sur la créature le différencie fortement des autres éléments de la série, en revanche sa coiffure rappelle celle des sirènes orientales, « arrêtée droit sur le front et, à l’arrière, entourant le cou d’un bourrelet horizontal »44 : ce détail conduit Cl. Rolley à y voir une œuvre orientale. Les documents qui suivent, le fauve dévorant un homme (n° 94), les quadrupèdes et les taureaux (n° 95-99) sont rattachés aux précédents par la fonction ou par l’iconographie, mais ont été jugés la plupart du temps grecs, plutôt qu’orientaux ; pourtant il est encore question ici des modèles néo-hittites. Le groupe du fauve dévorant une forme humaine est d’ailleurs très isolé : on ne connaît pas d’antécédents orientaux, et même parmi les parallèles étrusques proposés par Cl. Rolley, un seul paraît vraiment convaincant pour le schéma d’un lion tenant une tête humaine dans la gueule. La silhouette du lion de Delphes suggère des comparaisons avec des documents grecs, de la céramique attique en particulier45. Ainsi ce groupe difficile à classer pourrait bien se révéler un témoignage important de la façon dont s’élabore l’art grec, à la fin de l’époque géométrique, qui emprunte des éléments au répertoire oriental ou occidental46 pour créer des images à la fois nouvelles et parfaitement intégrées à une tradition locale. Dans cette perspective, les points de ressemblance notés par Cl. Rolley avec un canthare attique du géométrique récent conservé

35. Les cartes établies dans Strøm 1992, fig. 5 et Bieg 2002, fig. 58 donnent les principaux sites et doivent être complétées par Kalapodi. 36. Boardman 1995, p. 82 : il ajoute notamment un exemplaire trouvé en Macédoine. 37. Felsch 2007, n° 105. 38. Tašyürek 1976, p. 105-106 (réf. dans Bieg 2002, p. 71). 39. Herrmann 1966, pl. 62-63.

40. Kunze 1950, p. 96 et suivantes. 41. Par E. Kunze et H.-V. Herrmann, voir supra p. 90 ; en revanche

E. Akurgal y voyait une production urartéenne. 42. Gabelmann 1964, p. 7-8. 43. Akurgal 1959, p. 86 ; Akurgal 1961a, p. 31. 44. Rolley 1969, p. 97. 45. Kunze 1931, p. 205 ; Rolley 1969, p. 96. 46. Brown 1960, pl. 42 a.

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à Copenhague47 montrent que, chez les céramistes comme chez les bronziers, le répertoire a évolué en utilisant des schémas extérieurs, pour ne pas dire étrangers, et en les adaptant aux schémas et aux goûts existants : le lion procheoriental est géométrisé et l’accent est mis sur les épaules et la mâchoire48. C’est aussi une des raisons pour lesquelles il est souvent bien difficile de trouver des parallèles exacts aux documents grecs, pour qui les modèles orientaux sont avant tout une réserve de motifs. C’est la difficulté et l’intérêt de comprendre l’élaboration de l’art « orientalisant ». On comprendra mieux ainsi les autres quadrupèdes, eux aussi dans une situation un peu intermédiaire, entre modèles orientaux et facture grecque ; bien que de qualité inégale, ils sont issus d’une production qui n’ignore pas les objets venus d’Orient, mais qui s’en est éloignée. Les documents néo-hittites restent la source d’inspiration principale des créations que nous étudions, mais les œuvres grecques ne les copient pas directement, comme on peut le voir avec le quadrupède inv. 1866 (n° 98) qui, si c’est bien un taureau, développe une dimension bien plus décorative que monstrueuse ou fantastique. Les deux autres quadrupèdes (inv. 7802 et 4766, n° 95-96), quelles que soient leur fonction exacte et leur place sur le récipient, s’inscrivent dans ce même type d’évolution : alors qu’on pourrait penser que l’art grec du viie siècle connaît une « orientalisation » généralisée, il utilise au contraire et adapte des schémas et des motifs extérieurs, en les intégrant dans une tradition. Enfin, un dernier objet se rattache à cet ensemble, davantage en raison de sa forme et de son décor que de sa fonction : les demi-cercles et les stries du lion couché inv. 7803 (n° 99) le rapprochent des productions orientales, en particulier des « sirènes » et des taureaux à décor de bandes striées dont la production est située soit en Urartu soit en Syrie du Nord49. La comparaison avec des lions de Zinçirli invite à préférer une origine nord-syrienne.

Cette applique, dont la fonction n’est pas très claire, permet en tout cas d’aborder des questions qui se poseront aussi avec les autres appliques figurées. Comme elles ne décoraient pas toutes des chaudrons, on les a étudiées séparément.

Attaches à décor humain ou animal Catalogue 100. Protome de griffon. Trouvée le 26 juin 1895 à l’emplacement de l’école. Inv. 2669. Bronze, 7,5 cm pour la protome, 10 pour l’applique. Fig. 275-276. Perdrizet 1908, p. 87, n°391, pl. X, 8 ; Kunze 1956b, col. 138, n. 10 ; Herrmann 1966, p. 134 ; Gehrig 2004, p. 112, n. 475. Protome de griffon, sur attache en T ; coulée d’une seule pièce, en fonte pleine ; le griffon regarde normalement vers l’extérieur. Manquent un côté de l’attache et les oreilles du griffon ; surface rongée. L’attache était fixée par quatre rivets : un de chaque côté, deux en bas. Le col est trapu, à courbure faible. Bourrelet massif. Bec large en vue de face ; la mandibule supérieure, de profil, a une forme particulière. Les yeux ne sont plus que des saillies indistinctes ; entre eux, deux petites boules remplacent les protubérances fréquentes. Bouton en forme de boule aplatie sur un court pédoncule. Cette applique, qui était fixée sur un chaudron de petites dimensions, est l’exemple le plus clair, à Delphes, de la contamination de types différents. L’attache est celle de quelques appliques à tête de taureau. Le cou massif et la tête massive renvoient à des protomes de griffon anciennes. Samos a livré au moins deux protomes de griffon de petites dimensions et de type ancien, qui sont comme celle-ci en fonte pleine. Deux types de comparaisons peuvent être faits, pour la forme de l’applique à trois branches et pour la protome de griffon. Pour l’applique, on songe aux appliques à têtes de taureaux, d’origine ou d’inspiration orientale. Le griffon trouve bien évidemment des parallèles dans les protomes qui décoraient les chaudrons, en particulier dans deux exemples de Samos50 : deux griffons de petite taille, en fonte pleine, dont l’un (B35) est daté des toutes premières années du viie s. U. Gehrig le rapproche du griffon martelé inv. 640651, et suggère que les deux viennent du même atelier ; on aurait donc à Delphes une illustration du moment où les ateliers utilisent différentes techniques pour créer des objets similaires.

47. Boardman 1998, fig. 65-2. 48. Boardman 1998, fig. 66, 74-75. 49. Supra, p. 81-82 et 90 : à propos du taureau debout sur une aile

de sirène (n° 68).

50. B 35 et B 1081 : Jantzen 1958, p. 30, n° 33 a et b, pl. 30, 2 et 3. Gehrig 2004, n° 16 (33a) p. 25 et 188, pl. 7, et n° 295 (33b) p. 256 et pl. 91. 51. Gehrig 2004, p. 112 : atelier « Barberini ».

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101. Protome animale sur attache en T. Trouvée le 23 mai 1896, à hauteur du grand autel d’Apollon, près du mur Est, hors du téménos. Inv. 3735. Bronze, 7,5 cm. Fig. 277-278. Perdrizet 1908, p. 83-84, n° 382, pl. 15,3 ; Benton 1934, p. 96 et pl. 23,4 ; Herrmann 1966, p. 137, n. 1 ; Aurigny 2016c, p. 32, fig. 11. Applique composée d’une plaque en T et d’une protome animale, tournée vers l’intérieur du récipient. Larg. de l’attache : 6 cm ; h. totale de l’objet : 7,5 cm. Deux trous de rivets. Montée sur un long cou, la tête animale a deux yeux saillants, deux cornes (ou oreilles ?), une sorte de bosse sur le front. Il ne s’agit évidemment pas d’un chameau, comme le pensait Perdrizet, mais d’un griffon dégénéré, qui aurait fermé le bec. Sans qu’il ait vraiment de document tout à fait comparable, on peut rapprocher cet objet du document suivant (inv. 3738), et d’une applique d’Olympie publiée par H.-V. Herrmann52, au moins pour la forme en T, non pour le cou très allongé de l’animal. Un autre petit griffon au cou plus court a été retrouvé à l’Héraion d’Argos53 : on a considéré ce document, de même que les exemplaires d’Olympie, comme phrygien, ou comme proche- oriental. Les exemples de Gordion sont en effet de bons parallèles, mais les rapaces ont la tête tournée vers l’extérieur du chaudron, et portent la bélière au-dessus de la tête54. 102. Oiseau de proie sur attache en T. trouvé le 23 mai 1896, à hauteur du grand autel d’Apollon, près du mur Est, hors du téménos. Inv. 3738. Bronze, 6,3 cm. Fig. 279-280. Perdrizet 1908, p. 83, n° 380, fig. 286 ; Herrmann 1966, p. 136, n. 10 ; Aurigny 2016c, p. 32, fig. 12. Applique faite d’une attache en T et d’une protome d’oiseau de proie, tournée vers l’intérieur. Larg. de l’attache : 6,3 cm ; h. totale de l’objet : 5,6 cm. La base du cou forme un ressaut qui s’appuyait sur le bord de la cuve. Comme pour l’exemplaire précédent, on trouve des parallèles à Olympie, avec les griffons de petite taille A 38-A 39 de Herrmann55. En Grèce encore, à Tégée, on a trouvé une attache de récipient décorée sans doute d’un oiseau de proie56. La forme générale de l’oiseau n’est pas sans rappeler les oiseaux décorant des chaudrons du tumulus W de Gordion57. 103. Protome de rapace sur applique. Trouvée le 26 juillet 1895, entre la face Est du téménos et la pierre des Labyades. Inv. 2825. Bronze, 6,4 cm. Fig. 281-282. Perdrizet 1908, p. 83, n° 379, fig. 285 ; Herrmann 1966, p. 136, note 10. Applique faite d’une plaque à angles arrondis, légèrement bombée, et d’une protome de rapace très sommaire. Larg. : 5,4 cm ; h. : 6,4 cm. Un décrochement en haut de la plaque s’appuyait sur le bord de la cuve. Vu la taille et la courbure de la plaque, cette applique devait orner un vase assez grand. Ce type d’applique suit le principe général des appliques d’Olympie que nous avons citées précédemment, mais cette large plaque arrondie et la tête très schématisée n’ont pas de parallèles. 104. Tête animale sur applique. Trouvée le 6 nov. 1895, sur la terrasse du grand mur polygonal. Inv. 3299. Bronze, 6,6 cm. Fig. 283-284. Perdrizet 1908, p. 83-84, n° 381, fig. 287. Applique composée d’un élément horizontal, fixé au chaudron par deux rivets et, au-dessus d’un léger décrochement qui s’appuyait sur le bord de la cuve, d’une tête qui pourrait être de canidé, tournée vers l’intérieur. Les mêmes documents que ceux cités pour les nos précédents sont les plus proches parallèles à cette applique, mais ici la tête ne paraît pas être celle d’un oiseau. Dans ce cas on peut la comparer à celle du canidé suivant. 105. Applique à tête de canidé. Trouvé en 1991, dans la fouille sous le char des Rhodiens. Sans inv. R91 C049.9. Bronze, 6,6 cm. Fig. 285-286. Luce 2008, n°266. p. 201, pl. 66, H. Applique faite d’une attache à une barrette horizontale et deux barrettes divergentes obliques, l’une de celle-ci brisée, et d’une protome de canidé. Un trou de rivet à l’extrémité de chaque barrette oblique. Larg. de la barrette horizontale : 6,1 cm ; dim. max., obliquement : 6,6 cm. La forme de l’attache est inhabituelle ; l’extrémité des barrettes obliques est creuse. À la base du cou, décrochement qui s’appuyait sur le bord de la cuve. 52. Herrmann 1966, A39, pl. 57. 53. Strøm 1998, p. 45, fig. 9. 54. Muscarella 1970, p. 114 ; Young 1981, p. 201, tumu-

lus W3-W4, fig. 118 et pl. 88B-C. Prayon 1987, p. 127-129 et 201, n° 90-93, pl. 20d.

55. Herrmann 1966. 56. Dugas 1921, p. 366 n° 70 et p. 372 fig. 33 : l’auteur croit

pourtant reconnaître une tête de chat. 57. Young 1981, p. 201, tumulus W3-W4, fig. 118 et pl. 88B-C.

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Le haut de la tête du canidé, avec le museau en avant, les yeux un peu saillants et les petites oreilles, rappelle une tête de griffon conservée à Olympie58, dans un montage très différent, sur une anse de plat dont les branches sont terminées par deux têtes de serpent. À Gordion également a été retrouvée une applique décorée d’un griffon, avec de grandes oreilles et un bouton sur la tête, la gueule ouverte59. Les têtes de canidé de Delphes font figure d’exception. 106. Applique en forme de tête casquée. Trouvée le 30 juin 1894, à l’Ouest de l’opisthodome. Inv. 1673 ; 23967. Bronze, 4,4 cm. Fig. 287-289. Perdrizet 1908, p. 76, n° 323. Applique en forme de tête casquée, tournée vers l’intérieur, surmontant une plaquette, avec un ressaut pour l’accrochage sur le bord du chaudron : le montage est celui du n° 103. Brisée en haut et en bas. H. cons. : 4,4 cm. On ne distingue plus, du visage, que l’emplacement des yeux. La tête porte un casque dont la pointe, brisée, se recourbait vers l’avant, et qui se termine sur la nuque par un bourrelet. Le casque rapproche cette tête des sirènes casquées davantage que des statuettes géométriques (qui ont un casque à pointe tournée vers l’avant60). Sur les statuettes, le casque est comme posé sur le dessus de la tête, la chevelure dépassant en arrière. Sur les sirènes comme ici, le casque enveloppe l’arrière du crâne, dissimulant la chevelure, à moins que le bourrelet du bas ne représente les cheveux qui dépassent. S’il s’agit donc de l’imitation de sirènes orientales, l’applique pourrait dater encore de la fin du viiie siècle. Cet objet un peu à part dans la typologie montre la liberté que pouvaient prendre les artisans grecs dans l’imitation de modèles orientaux, en combinant une tête rappelant les sirènes avec une applique de récipient sans aile. Le profil de la tête est proche de celui de la sirène casquée et barbue A5 d’Olympie61, même si les dimensions de la sirène sont beaucoup plus imposantes. Ce document peut être rapproché d’un groupe d’appliques de Delphes, où le traitement de la tête humaine hésite entre tradition sub-géométrique et imitation de structures venues d’Orient. 107. Tête et buste de femme. Trouvée le 29 mai 1895, entre la face Est du téménos et la pierre des Labyades. Inv. 2528. Bronze, 5 cm. Fig. 290-292. Perdrizet 1908, p. 29 n° 10, fig. 107 ; Rolley 1969, p. 116, n° 177, pl. 30. Tête féminine, avec le haut du torse. Le fragment, très étroit en bas, est censé représenter le haut de la poitrine : à la base du cou, un double sillon gravé marque le haut du vêtement. Mais l’ensemble est très plat, sauf la tête, volumineuse. Le visage est rond, bouffi, avec un lourd menton gras, des joues très pleines, le nez large et court, les yeux très ouverts, bombés sous des arcades sourcilières bien marquées ; ils sont délimités par un sillon gravé, et l’iris est marqué par un poinçon rond. Les oreilles très grandes sont seulement gravées. Le personnage porte un diadème, qui est un gros bourrelet. Sur le dessus de la tête, l’usure ne laisse subsister qu’une partie de la raie axiale. Au-dessous du diadème, les cheveux forment une lourde masse qui entoure les épaules, et qui n’est différenciée que par des ondulations gravées très serrées. La forme du fragment s’explique par sa fonction décorative. La section inférieure, large de 3,4 cm et profonde de 1,5 cm, porte dans son grand axe un sillon de section rectangulaire (largeur : 2 mm ; profondeur : 3 à 4 mm) : cette tête décorait sans doute un rebord de récipient. Le montage n’a pas de parallèle exact. L’impression d’allongement de la tête sur un long cou se retrouve dans une tête de l’Acropole d’Athènes, élément de thymiatérion62, datant du milieu du viie siècle av. J.-C63. Cette tête est considérée comme un précurseur dans la plastique attique64. 108. Applique en forme de buste humain. Trouvée dans l’hiver 1894-1895, sur le grand mur polygonal. Inv. 2343. Bronze, 5 cm. Fig. 293-295. Perdrizet 1908, p. 76, n° 322, fig. 259. Applique en forme de buste humain, tourné vers l’intérieur. H. : 5 cm ; larg. : 4,5 cm. Au-dessus du buste triangulaire, décoré d’écailles doubles, le cou, assez long, porte une tête dont le gros nez pointu prolonge le front. Menton pointu, bouche étroite, gros yeux saillants sous des arcades sourcilières marquées. Le profil de la chevelure est celui d’un béret plat, soigneusement gravé au-dessus : autour d’une raie axiale, lignes ondulées divergentes. Dans une bélière en ruban, proche

58. Gauer 1991, Te 7, pl. 68, 1. 59. Prayon 1987, p. 128, n°94, Pl. 20, e-f. 60. Supra, p. 80, n° 65. 61. B 4312, Herrmann 1966, p. 31, pl. 11. 62. MN 6494, de Ridder 1896, p. 330, n° 819 et fig. 323. 63. Scholl 2006, n° 120 p. 106-107 : il signale que l’élément

architectonique sur la tête féminine a des parallèles dans une tombe du Céramique du viie siècle av. J.-C. 64. Homann-Wedeking 1950, p. 72, fig. 33. E. HomannWedeking l’interprète comme un des premiers exemples, en petit format, du style « dédalique » dans la plastique attique qui ne vient qu’assez tard à ce style commun de l’époque.

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de ce que portent les sirènes, il reste un morceau de l’anneau de fer. Le buste, creux en dessous, était placé sur le bord d’un chaudron, la tête regardant vers l’intérieur du récipient. Un trou de clou en bas, pour fixation sur le chaudron. La structure brutale de la tête et son profil, qui indiquent une fabrication grecque, sont du viie siècle. Le décor d’écailles est celui des bustes de sirènes, mais il est fait ici de lignes doubles. Cet objet joue le même rôle que les sirènes ou les protomes de taureau sur le rebord du récipient, mais les traits sont proches d’exemples sub-géométriques, et non de documents orientaux : on trouve ce type de profil où le front fuyant prolonge la ligne du nez sur la tête de terre cuite de l’Amyclaion de Sparte par exemple65. 109. Attache de récipient. Trouvée en 1938, dans le dépôt derrière l’Asclépieion. Inv. 23966. Bronze, 7,4 cm. Fig. 296-299. Inédit. Fragment d’attache de récipient, formé d’une tige à section carrée qui s’amincit du côté de la tête humaine. Cette tête présente un menton arrondi, les côtés du visage s’évasant jusqu’au front, où l’on devine la limite de la chevelure. La chevelure est longue, et les mèches sont notées par des stries dans le métal. Les traits du visage ont disparu, presque complètement effacés. À l’arrière, un crochet est conservé. On peut interpréter ce fragment comme une applique de vase, qui portait deux têtes symétriques tournées vers l’intérieur, et un anneau mobile. Mais il n’est pas exclu, vu l’état fragmentaire, que ce soit un élément d’un trépied à baguettes. Il est très difficile de trouver une comparaison satisfaisante : au mieux connaît-on des têtes féminines comme élément d’anse verticale. W. Gauer en a publié plusieurs exemples à Olympie66, mais aucune sur une tige comparable à ce que nous avons à Delphes. Le fragment fait penser aussi à une anse découverte à Lindos, où deux bustes féminins s’élèvent de chaque côté d’une attache de vase67. 110. Applique à tête de taureau. Trouvée le 17 sept 1894, au pied du mur polygonal qui est sous la base des Thessaliens. Inv. 1869. Bronze, 6,7 cm. Fig. 300-301. Perdrizet 1908, p. 77, n° 332, fig. 264 ; Amandry 1956, p. 245, n° 11 ; Herrmann 1966, p. 117 ; Aurigny 2016c, p. 32, fig. 10. Applique à bélière. L. cons. : 6,7 cm ; L. restituée : 8 cm. Une bobine, comportant une échancrure étroite pour l’insertion du bord du récipient, était fixée par deux rivets ; à l’arrière, une bélière, où subsiste une partie de l’anneau de fer. Faisant corps avec elle, une tête de taureau, tournée vers l’intérieur, traitée en plans qui se rencontrent brutalement, possède un riche décor gravé, comportant en particulier un rang de petits cercles au-dessus du front, se prolongeant à l’arrière en une sorte de collier. L’origine phrygienne de ce document a été proposée sur la base de la comparaison avec une applique de chaudron de Gordion : on trouve le document déjà chez E. Akurgal68 . Mais l’applique de Gordion a trois branches, et la tête de taureau, certes au modelé schématique, porte un demi- cercle sur la tête. On connaît en revanche à Olympie un objet comparable à celui de Delphes (Br 11536)69 : il conserve l’ensemble de l’applique, en forme de bande épaisse d’une dizaine de cm de long, avec un rivet à chaque extrémité ; au centre, une tête de taureau, portant une bélière à l’arrière, présente le même modelé schématique. 111. Applique à tête de lion. Trouvée le 22 juin 1895, près du « bathron » des Thessaliens. Inv. 2583. Bronze, 4,4 cm. Fig. 302-303. Perdrizet 1908, p. 78, n°335. Applique à bélière. Tête de lion, tournée vers l’intérieur du récipient, qui était un bassin à lèvre épaissie, sur laquelle s’adapte l’échancrure ménagée sous la tête ; deux rivets en arrière, en bas. Larg. : 4,4 cm ; h. : 4,1 cm (bélière comprise). La bélière est un ruban. L’applique ne figurait que le haut de la tête, vigoureusement modelé : saillies du mufle, du nez, des yeux, qui rappellent certaines sirènes, y compris pour le trou central. Décor gravé : points ; poinçons pour les naseaux ; traits divergents sur le cou, derrière les oreilles. Larges oreilles rondes. Les dimensions montrent qu’il s’agit du n° 335 de Perdrizet, qui ne le reproduit pas. Le traitement des yeux, même le décor sur le départ du cou sont identiques à ce que l’on trouve sur certaines sirènes, par exemple inv. 1248 (n° 73), et incitent, autant que le modelé, à dater tôt, en tout cas au viie siècle, cette applique d’un type rare. Cette applique n’est pas tout à fait isolée à Delphes, car le n° suivant est un exemple un peu différent du même type, et I. Strøm la cite comme parallèle à un document de l’Héraion d’Argos70.

65. Rolley 1994, p. 111, fig. 97. 66. Gauer 1991, Var 3-5, pl. 116. 67. Blinkenberg 1931, p. 220, n° 734, pl. 30.

68. Akurgal 1961a, pl. couleur III. 69. Herrmann 1966, n° A 26, pl. 43. 70. AH 2204 (MN 14018), Strøm 1998, fig. 8.

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112. Applique à tête de lion. Trouvée 29 avril 1896, à l’Est de l’autel de Chios. Inv. 3513. Bronze 6 cm. Fig. 304-305. Perdrizet 1908, p. 77, n°334, fig. 266. Mufle léonin, mordant le rebord d’un bassin dont il regardait l’intérieur. On ne voit que la mâchoire supérieure de l’animal, le mufle en léger relief, tandis que les yeux en forme d’amande et les paupières sont indiqués par des incisions ; les yeux sont marqués par un point. Les oreilles, petites et rondes, sortent sur le haut de la tête ; à l’arrière part la bélière, formée d’un simple anneau. Applique proche de la précédente, dans la découpe comme dans le modelé. I. Strøm la cite comme parallèle à un document de l’Héraion d’Argos, qu’elle considère comme une imitation grecque lointaine d’objets phrygiens71. 113. Applique à tête de lion. Trouvée en 1898 au gymnase. Inv. 4128. Bronze, 7,8 cm (diamètre de l’attache : 1,5 cm). Fig. 306-308. Perdrizet 1908, p. 78, n° 336, fig. 267. Tête léonine sur une attache en forme de demi-cylindre décorée de trois filets à chaque extrémité. Cette applique est munie d’une bélière en forme de tube allongé, placée derrière la tête de l’animal. À chaque extrémité du cylindre est ménagé un trou dans lequel se trouve encore un clou. On a retrouvé à l’Héraion d’Argos une tête de lion sur une applique en forme de T, qui a en commun les oreilles petites, les yeux allongés percés d’un trou pour la pupille. I. Strøm souligne l’éloignement de cette pièce par rapport à des modèles orientaux précis72. 114. Applique à tête léonine. Trouvée le 12 mai 1895, près du musée, à fleur de terre. Inv. 2446. Bronze, 5,5 cm. Fig. 309-311. Perdrizet 1908, p. 78, n° 337, sans fig. Tête de lionne regardant à l’intérieur du lébès ; elle sort d’une attache horizontale en forme de demi-cylindre. L’attache était fixée par deux clous horizontaux ; deux trous, aux deux bouts de l’attache, devaient recevoir une poignée mobile. Cette applique reprend quelque peu la structure du n° précédent, mais on verra aussi des parallèles dans le groupe des appliques non figurées73. 115. Applique à tête de lion. Trouvée le 10 juillet 1894, dans le puits, à côté du grand tombeau mycénien. Inv. 1669. Bronze, 6,5 cm. Fig. 312-313. Perdrizet 1908, p. 82-83, n° 374 et fig. 283, 283a. Applique : tête de lionne rugissant. Entièrement creuse. Très usée, avec trois trous accidentels au-dessus ; le bord a disparu, avec les traces éventuelles de fixation. La forme générale est très arrondie, le modelé brutal dans le détail : un décrochement marque le bord de la crinière au-dessus du front ; le « nez » est une bande en relief ; deux crocs au-dessus, deux autres encadrant la langue ; oreilles usées. Les petits yeux ronds étaient peut-être incrustés. Quelques traces d’une figuration de la crinière, en flammèches gravées, au-dessus du cou. Est-ce vraiment une applique ? Il n’est pas impossible, d’après le travail de l’intérieur, que cette tête ait été enfilée sur l’extrémité d’une grosse tige de bois. Document isolé tant pour la fonction que pour le modelé. 116. Applique à tête de lionne. Trouvée le 7 mai 1895, au-dessus du musée. Inv. 2403. Bronze, 5 cm. Fig. 314-316. Perdrizet 1908, p. 83, n°375, fig. 283 bis. Applique : tête de lionne rugissant. D’avant en arrière : 4,5 cm ; larg. : 5 cm. Entièrement creuse. Surface rongée. La collerette de fixation a presque entièrement disparu ; restent les traces des quatre rivets. Grands yeux ouverts, apparemment trop grands pour des incrustations. La forme générale est arrondie ; les oreilles étaient pointues. On voit des restes des crocs. Décor de stries obliques alternées sur la crinière. De petits cercles au poinçon sur le mufle. Comme pour la précédente, on manque de documents de comparaison, car les appliques en forme de protomes animales bien connues à l’époque archaïque n’ont pas ce caractère brut dans le modelé.

71. Ibid. 72. Waldstein 1905, p. 293, n° 2204, pl. 123 ; Strøm 1998, AH

2204 (MN 14018), fig. 8.

73. Par exemple n° 160, p. 128.

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117. Applique en tête de lionne. Trouvée le 29 avril 1896, près de l’autel de Chios. Inv. 2750. Bronze, 5,5 cm. Fig. 317-318. Perdrizet 1908, p. 77, n° 333, fig. 265. Applique en tête de lionne. H. cons. : 5,5 cm ; larg. : 4,2 cm. Une échancrure, en dessous, montre qu’elle était fixée sur le bord d’un récipient ; trous de deux rivets en bas. Mais le fragment, certainement incomplet, s’intégrait à une applique de structure complexe. En arrière, amorce brisée d’une tige qui pourrait être le départ d’une grande bélière, dont l’autre extrémité serait ce qu’on aperçoit au-dessus. Cela pose le problème du profil du récipient, probablement un chaudron, sur lequel la tête était fixée, regardant vers l’extérieur. De chaque côté, au contact de l’angle de l’échancrure, une cavité ronde, peu profonde, marque la présence d’éléments supplémentaires. Comme pour les documents précédents, il n’y a pas de parallèle exact à cette tête de lion, à son modelé et à son montage complexe. On trouve certes des têtes de lion qui présentent des ressemblances dans le traitement du mufle ou de la crinière74 ; mais on est en général dans le cas d’un lion entier représenté comme décor de vase, sur l’épaule d’un chaudron par exemple, comme on en connaît d’autres exemples à Delphes75, pour lesquels une origine orientale n’est pas impossible. 118. Applique avec avant-train de sphinx. Trouvée 22 avril 1896, sous l’église Saint-Nicolas, en contrebas du théâtre. Inv. 3430. Bronze, 10,2 cm. Fig. 319-320. Perdrizet 1908, p. 76, n° 326, pl. XI, 3 ; Partida 2003, p. 424, n° 697. Applique à bélière. Manquent la moitié d’une patte et l’extrémité d’une aile. Larg. cons. : 10,2 cm. Avant-train d’un sphinx, surmonté d’une grosse bélière (ouverture : 1 x 1,3 cm). Elle était fixée sur un récipient de petit diamètre ; l’arrière est creux, ménageant sur tout le contour une bande de contact avec le récipient ; un rivet sur chaque aile. Modelé vigoureux du visage dissymétrique, au nez fin, à la bouche épaisse, aux yeux marqués d’un coup de poinçon rond. Le détail des cheveux, avec raie axiale, est gravé. Sur la poitrine, l’avant des ailes et le haut des pattes, poinçons semi-circulaires ; plumes indiquées sur l’extérieur des ailes. La structure de l’applique est unique : si les ailes et le visage rappellent les sirènes, le buste prolongé par les pattes animales est sans parallèle. Le plumage rendu par des poinçons semi-circulaires n’est pas sans ressemblances avec ce que l’on trouve sur les griffons fondus du milieu de la production. Le visage présente un ensemble construit sur des jeux de courbes : le menton très rond, les grands yeux à peine ovales, ainsi que les oreilles, petites et rejetées dans le plan du visage font penser à des visages argiens. En bronze, on songe au petit couros Gillet conservé au Musée du Louvre76. 119. Applique à protome de sanglier. Trouvée le 15 août 1895, en contrebas du stade. Inv. 2886. Bronze, 8 cm. Fig. 321-322. Perdrizet 1908, p. 77, n° 377, pl. XIV, 7. Applique : protome de sanglier. H. à l’arrière : 6,5 cm ; dim. max. : 8 cm. Entièrement creuse. Il manque une partie du contour à l’arrière : l’objet s’élargissait, sans doute pour être soudé. Trois sillons font le tour du cou en arrière. Un bourrelet strié, qui est le bord d’une sorte de crinière, se termine par deux pattes atrophiées. Les poils de l’échine forment une plaquette verticale striée. Gros yeux en relief, très obliques, entourés d’un double rang de points et d’un trait ; le globe, avec un trou central, est distingué de « cils » striés. Bouche fendue, deux trous pour les naseaux ; défenses courbes en relief. De petites stries irrégulières marquent les poils sur toute la tête. Il est bien difficile de trouver un équivalent à ce sanglier ; le décor gravé seul rappelle d’autres appliques, comme le lion couché inv. 7803 (n° 99), dont l’origine anatolienne est très vraisemblable. 120. Applique à tête de bélier. Trouvée le 24 mars 1896, au Sud-Ouest du temple d’Apollon. Inv. 3384. Bronze, 6,5 cm. Fig. 323-325. Perdrizet n° 376, p. 83 ; pl. XIV, 6. Applique : tête de bélier : Entièrement creuse. Collerette de fixation, sauf en haut, avec quatre trous de rivets. La tête est usée : on ne voit rien en avant ; les cornes sont cassées au bout ; grands yeux comme pour n° 116 (inv. 2403). Traces du décor : ondulations sur le côté gauche du cou, sillons transversaux sur les cornes. La tête de bélier est un motif plus habituel sur des chaudrons ou des récipients que sur les trépieds ; même si l’on se souvient de l’exemplaire de Delphes inv. 604077. Les têtes de bélier qu’on connaît à Olympie sont des appliques de chaudron : on peut citer en particulier l’applique B 5686, qui a quelques points communs, mais pas les trous de rivets, ni les yeux creux, bien que la protome soit aussi coulée en creux. W. Gauer la date du tout début du vie siècle78. 74. Par exemple Gauer 1991, Hy 18 ou Le 61, p. 259 et 188, pl. 11 : elles sont attribuées à une production corinthienne et datent du milieu du vie siècle. 75. Rolley 1969, n° 192-195, p. 138-139, pl. 38-39.

76. Rolley 1975b. 77. Supra, p. 44, n° 25. 78. Gauer 1991, p. 189, Le 67, pl. 1.

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Pour le style, on peut se référer aux protomes de bélier du chaudron de Leontinoi, conservé à Berlin : quatre têtes de bélier fondues en creux, fixées par des rivets, ornent l’épaule d’un chaudron, trouvé dans une tombe à Leontinoi en Sicile ; l’ensemble est daté du milieu du vie siècle79. On trouve également des têtes de bélier sur un vase provenant de Rhodes, conservé à Londres au British Museum80.

Commentaire Ce chapitre regroupe des documents qui ne sont pas étrangers aux appliques étudiées auparavant : ils sont difficiles à classer d’emblée avec les appliques de chaudrons, car ils ont dû orner d’autres récipients. Leur regroupement est commode, bien que ces objets soient différents les uns des autres, et tient tant à leur fonction qu’à leur structure, où le système de fixation est souvent sommaire, parfois totalement inexistant. Quoi qu’il en soit, leur étude permet de connaître l’artisanat grec du haut-archaïsme, et de réfléchir à ce que l’on peut appeler « oriental » ou « orientalisant », au degré d’adaptation de modèles étrangers et à la faculté de recréation de l’artisanat grec, même si l’on n’a pas affaire aux chaudrons monumentaux et prestigieux. C’est le cas en particulier de l’applique à protome de griffon inv. 2669 (n° 100), qui se rattache facilement aux protomes de griffon, mais qui fait penser à différentes appliques ; le mélange de types différents dans cette pièce est sans doute le signe d’une création grecque à partir de plusieurs modèles : applique de taureau à trois branches, protome de griffon coulée, mais qui rappelle des modèles de griffons martelés81. Un cas similaire s’est déjà présenté, celui de la protome de griffon à bélière inv. 951 (n° 57), qui occupe une place intermédiaire entre plusieurs types, protomes de griffons et de taureaux. Comme inv. 2669, elle semble appartenir aux premiers griffons coulés, mais en en produisant alors une image bien différente ; le cou très légèrement courbe de 2669 a plus à voir avec la longue série des protomes de griffons coulées dont la production va se développer à Samos en particulier. Il semble que, dans les années où les importations venues d’Orient cohabitent avec des créations grecques qui s’en inspirent, les artisans grecs n’aient pas hésité à fabriquer des types hybrides, en adaptant des modèles à leurs besoins. Le tableau n’est pas aussi clair pour les protomes animales sur attaches en T, dont on peine à dire si elles sont des importations orientales ou des imitations grecques. Pour celles qui entrent grosso modo dans la catégorie des rapaces, les documents phrygiens trouvés dans les tombes de Gordion offrent des parallèles intéressants, et montrent les liens des objets trouvés dans les sanctuaires grecs avec la culture matérielle phrygienne82. Mais des différences importantes existent : les oiseaux phrygiens regardent à l’extérieur du vase et servent de poignée et pas seulement d’éléments décoratifs. Ainsi les modèles doivent être cherchés au Proche-Orient : les représentations sur les reliefs assyriens et nord-syriens83 offrent des parallèles aux objets de Gordion, tandis que deux appliques de facture assyrienne, une applique d’origine assyrienne de l’Acropole d’Athènes84, ou un griffon du Zagros85 peuvent être cités en comparaison des objets de Delphes. Elles ont certes une bélière qui rappelle leur fonction utilitaire, mais les oiseaux regardent aussi vers l’intérieur du récipient. Pour ce qui est de la chronologie, les objets qui servent ici de point de comparaison, les petits chaudrons décorés d’attaches à protomes d’oiseau trouvés dans le tumulus W, étaient datés assez tôt par Young, vers le milieu du viiie siècle86 ; on peut donc en conclure des relations à date haute entre la Phrygie et Delphes, antérieures même à l’offrande faite par Midas. Cette chronologie se fonde toutefois sur des dates que l’on admettait traditionnellement87, à propos desquelles existe un débat, qui pourrait bouleverser toute la chronologie de la Phrygie et, du même

79. Gehrig et alii 1968, p. 111, pl. 10. 80. Walter-Karydi 1973, n° 1057. 81. E. Kunze caractérise cet objet comme résolument grec, par

85. Calmeyer 1969, p. 109, fig. 112. 86. Young 1981, p. 199. 87. Le règne du roi Midas, mentionné dans les sources assy-

opposition à Br 7400 d’Olympie (Herrmann 1966, A 35, p. 131, pl. 30-31) : Kunze 1956b, col. 138, n. 10. 82. Infra, p. 529. 83. Herrmann 1966, p. 69, fig. 18 : relief du palais de Khorsabad ; Woolley 1952, pl. 35 c. 84. NM 6714 : Herrmann 1966, p. 70, 136, pl. 58.

riennes, est placé par la tradition à l’extrême fin du viiie s. (CAH III2, p. 622 : d’après Eusèbe il aurait vécu et régné jusqu’en 696 av. J.-C.) : les raids Cimmériens ont mis à mal le royaume phrygien à la toute fin du viiie s. en effet. Dans la mesure où l’on peut croire Hérodote (I, 14), la première offrande daterait de la fin du viiie s. ou du tout début du viie s.

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coup, de nombreux documents grecs en relation avec la culture matérielle phrygienne88. Une autre question a été soulevée, issue de la comparaison entre ces appliques à protomes d’oiseau et des têtes de taureau du chaudron trouvé dans le même tumulus89 : comme ces dernières présentent un style très différent, avec un modelé plastique de la tête allié à un décor gravé abondant et de qualité, elles ont été considérées comme des pièces d’importation, les rapaces représentant le style local, malgré les liens avec des modèles assyriens mis en évidence par Fr. Prayon90. Le matériel des tumuli de Gordion constitue donc une source documentaire de première importance, mais l’analyse des objets montre qu’ils trouvent leur inspiration dans les différentes cultures matérielles que les Phrygiens ont pu connaître. Un groupe de quatre appliques utilisant le visage humain comme élément décoratif (n° 106-109) mérite un examen commun, malgré des différences évidentes entre les types, car il illustre un moment de l’artisanat grec où, après le goût pour les monstres et les êtres hybrides du début du viie siècle, le travail autour de la figure humaine reprend vigueur91. Le rôle des appliques en forme de sirènes venues d’Orient n’est pas à négliger dans ce processus92 ; l’applique inv. 1673 l’illustre parfaitement, par sa proximité avec une sirène casquée d’Olympie notamment ; le casque à pointe tournée vers l’intérieur a des origines assyriennes93. Elle prouve que même le schéma de la sirène peut être utilisé pour créer une applique plus simple, sans la paire d’ailes et la queue. Il est bien difficile de commenter ici le visage, alors qu’il est un peu mieux visible sur l’applique suivante (inv. 2528). Mais ce visage rond et bouffi, très plein, est un peu inattendu sur une applique construite plutôt en hauteur, avec les cheveux tombant sur le buste. Le visage n’a rien de la forme triangulaire que l’on connaît sur les visages du haut archaïsme, comme sur le support de thymiaterion de l’Acropole94. Ces têtes ont naturellement été classées parmi les premières œuvres « dédaliques »95 ; si l’on se réfère au système de classement mis en place par R.H.J. Jenkins dans les années 1930 pour mettre de l’ordre dans les visages de la plastique dédalique, la tête de Delphes ne devrait pas être datée avant la fin du viie siècle. Or, il est évident qu’un certain nombre de têtes ne suivent pas ce développement96 ; un document récemment publié vient illustrer ce constat. Il s’agit d’une tête féminine, ornement de baguettes de trépied retrouvé à Kalapodi, surmonté d’une tête de bélier au modelé très sommaire, qui est datée tôt dans le viie siècle ; l’objet est considéré comme un instrument lié au culte, de fabrication locale. Le visage est certes d’une exécution rapide, aux contours un peu flous ; mais le visage n’adopte pas vraiment ici à une forme triangulaire, dont les limites se perdent un peu dans la masse formée par la chevelure97. L’applique inv. 2343 (n° 108, fig. 293-295) soulève des problèmes un peu différents, car son visage s’inscrit plutôt dans la série des visages sub-géométriques : le nez, dans le prolongement du front, structure le visage, dans lequel les yeux sont gros, la bouche large. On retrouve cette construction, avec le nez en avant dans le prolongement du front, les grands yeux et la bouche formant une fente horizontale, dans une statuette du Ménélaion de Sparte, considérée comme « ein Werk des Übergangs von der geometrischen zur früharchaischen Stilstufe »98. Et l’on voit bien qu’un document placé à un moment de « transition » vers le « dédalique » ne présente pas le visage triangulaire qui devrait être si caractéristique des premiers documents de cette série. Si l’on trouve par ailleurs quelques points de comparaison avec les « sirènes », comme Delphes inv. 1248 (n°73), qui partage la forme du nez et un peu des yeux – mais ici percés de pupilles –, l’applique 2343 frappe par l’absence de volume à l’arrière de la tête.

88. Depuis 2001, le laboratoire de la Heidelberg Akademie der Wissenschaften a daté au C14 des éléments de la couche de destruction de Gordion entre 830 et 800, remontant de plus de cent ans la chronologie traditionnelle. Ces résultats ne sont pas pour autant acceptés par l’ensemble des chercheurs : voir Muscarella 2003, p. 225-252, ou Boardman 2005, p. 313. Le tumulus W devrait, si on se fonde sur les nouvelles datations, se situer dans le milieu du ixe siècle. Voir désormais Darbyshire, Rose 2011. 89. Young 1981, fig. 117 p. 200. 90. Prayon 1987, p. 127. 91. Les offrandes et les sanctuaires changent, car les rôles donnés aux pratiques cultuelles traditionnelles ont changé. Bien que les offrandes ne soient pas plus nombreuses qu’au viiie siècle (leur nombre diminue dans de nombreux cas), elles se modifient, pour laisser une plus grande place à la figure humaine. En effet, à Delphes, après le tournant du viiie siècle au viie siècle, qui faisait la part belle aux protomes animales, lions sur les boucliers, griffons et « sirènes » hybrides

sur les chaudrons, la seconde moitié du siècle voit la consécration dans le sanctuaire d’un plus grand nombre de représentations de la figure humaine ; Osborne 1996, p. 202-208. 92. « Nous sommes à l’époque des statuettes qui, au dernier quart du viiie siècle, cherchent à échapper aux schémas géométriques, en privilégiant le visage ; il est à peu près certain que les sirènes orientales ont joué un rôle dans ce processus », Rolley 1994, p. 120. 93. Voir par exemple l’étude de Dezsö 1998, et les ill. 26 et 27. 94. Scholl 2006, n° 120, p. 107, fig. 45 a-c. 95. « hochdädalisch », selon Scholl 2006, p. 107. 96. On peut citer en particulier la tête inv. 814 du musée d’Égine (Margreiter 1988, p. 68, n° 134 pl. 8), datée du premier tiers du viie s., avec sa « face large et massive, crâne plat, menton fort » (Croissant 1992, p. 82). 97. Felsch 2007, n° 106, p. 45, 256 et pl. 7 et 18. 98. Kaminski 2002 (in Bol), p. 78, fig. 146 a-c ; pourtant, l’auteur classe cette statuette parmi les premières œuvres « dédaliques ».

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Cette caractéristique l’éloigne donc de la production des sirènes, même si elle leur a emprunté la découpe du buste couvert d’écailles, ainsi que l’attache dans le dos. Les créations « orientalisantes » ont joué un rôle non négligeable dans le processus d’élaboration de la figure humaine dans l’artisanat du viie siècle. On n’en dira pas beaucoup plus de l’applique suivante, inv. 23966, dont l’état de conservation laisse seulement visibles le contour du visage, au menton légèrement arrondi, et la chevelure décorée de quelques stries pour les mèches ; elle illustre encore une fois le goût en plein développement dans le viie siècle pour la figure féminine frontale, avec un visage un peu perdu dans le cadre de la chevelure, lointain rappel de modèles orientaux fréquents surtout dans le type syro-phénicien de la « dame à la fenêtre ». Ces créations plutôt modestes, malgré les questions intéressantes qu’elles posent sur l’évolution de la figure humaine dans l’art grec, sont toutefois bien difficiles à replacer dans des séries stylistiques et chronologiques. Les appliques nos 110 à 120 se situent encore entre des schémas orientaux et la réinterprétation de ces éléments dans un langage résolument grec : loin de pouvoir être considérés comme des imitations d’objets connus en Orient, ces documents rappellent néanmoins certaines images dérivées de l’art oriental. Le taureau a les faveurs de l’artisanat grec au viie siècle99 : il décore des trépieds à baguettes, il sert d’applique de chaudron, sous forme de protome ou d’animal dressé sur des plaquettes ; on le retrouve naturellement comme décor de récipients de la même époque. La bobine surmontée d’une tête de taureau schématique inv. 1869 (n° 110) décorait un récipient, et servait d’élément de préhension, comme le prouve la bélière. Sa proximité avec un exemplaire d’Olympie permet d’utiliser le commentaire de H.-V. Herrmann à son sujet : mais on ne peut que constater ses hésitations pour l’attribution, entre un atelier « provinzial-griechisch »100 et un atelier qu’on pourrait situer en Phrygie. Il se réfère pour cela à un document de Gordion cité par E. Akurgal101, dont il dit en même temps qu’on peut le considérer comme un travail grec. On voit là toute l’ambiguïté des documents retrouvés à Gordion. Ces attaches proviennent du grand tumulus de Gordion, se caractérisent par leur forme en T, l’abstraction géométrique de la tête, et les yeux comme appliqués sur la tête102. Ce ne sont pas exactement les caractéristiques de l’applique de Delphes, en dehors d’un traitement géométrisé des volumes. Un autre exemple de cette géométrisation est visible dans deux attaches d’Alişar103 ; mais leur mauvais état de conservation ne permet pas de commentaire stylistique très poussé ; en outre, les taureaux avaient les yeux rapportés dans un autre matériau, ce qui creuse la différence avec l’objet plus simple de Delphes. Une tête de taureau allongée, sur applique à trois branches, conservée à Bruxelles, présente encore un niveau de schématisation assez avancé : les cornes sont petites et droites, la zone des yeux indiquée par un bourrelet, tandis que le museau forme au bout un plan net. O.W. Muscarella a raison de refuser une origine proche-orientale pour cette tête ; il la place, dans la discussion, avec des têtes grecques ou de l’Anatolie de l’Ouest104. Lorsque l’on s’éloigne des modèles orientaux néo-hittites, il est plus difficile de faire le départ entre les productions de la Grèce, ionienne ou même continentale, et celles de l’Anatolie de l’Ouest. Si l’on considère maintenant les nos 111-114, des appliques à tête de félin, on peut constater que si l’on change d’animal, les mêmes questions de la distance prise par rapport à des objets orientaux connus se posent. Les trois premières peuvent être comparées à un document de l’Héraion d’Argos (MN 14018) 105, qui présente notamment le même type de traitement des yeux que inv. 2583, avec de grands yeux allongés et percés d’un trou qui forme la pupille ; mais aucun modèle oriental précis ne peut être cité, qui aurait inspiré l’ensemble de ces documents. La schématisation, le traitement des yeux ou du décor rappellent pourtant les sirènes, voire les visages ornant les coquilles de tridacne106. Si l’on cherche du côté des origines de l’image du lion en Grèce, deux principaux modèles orientaux s’imposent : le lion néo-hittite et le lion assyrien107. Mais ni le museau carré et la langue pendante de l’un, ni le mufle allongé et la crinière fournie de l’autre ne peuvent nous aider à comprendre ce type de document très modeste.

99. Il décorait déjà des trépieds à cuve clouée à l’époque géomé-

trique. 100. Terme qu’il reprend à Bielefeld, p. 252 ; Herrmann 1966,

p. 125. 101. Akurgal 1961a, pl. couleur III. 102. Young 1981, p. 112, MM12, pl. 59. 103. Prayon 1987, p. 126, pl. 19d.

104. Muscarella 1992, p. 31 pl. IVa. 105. Strøm 1998, AH 2204 (MN 14018), fig. 8. 106. Stucky 1974, passim. 107. H. Payne avait, dès Necrocorinthia, fait la distinction entre

le lion protocorinthien emprunté à l’art hittite, et le lion corinthien inspiré du lion assyrien ; Payne 1931, p. 66. Voir aussi Gabelmann 1965, p. 17-65 ; Boardman 1995, p. 96.

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Symbole royal en Orient, le motif du lion a été largement adopté dans l’art grec, dans la plastique, la céramique ou les objets de bronze : « on a pu dire que le viie s. fut celui des lions »108. Les vases se sont ornés de figures de lion, simple masque sur applique comme les derniers exemples l’ont montré, ou véritable protome en relief, comme les nos 111-117. Pour ces exemples, le classement proposé par J. Boardman peut en revanche être utile109. Les trois appliques n° 114-116 (inv. 2446, 1669 et 2403), surtout 115 et 116, présentent un mufle plutôt carré, une tête dépourvue de crinière modelée en volume, qui correspondent au modèle néo-hittite du lion, en faveur surtout pendant la première moitié du viie s. dans la céramique corinthienne. Les lions néo-hittites sont bien connus dans les exemples de Zinçirli110, et des fragments de lions d’une facture proche ont été retrouvés à Thasos111. Il est intéressant de noter que ce modèle a été depuis longtemps mentionné pour des productions orientalisantes importantes, la céramique protocorinthienne, mais aussi les boucliers crétois112. La tête n° 117 (inv. 2750), dont la structure est un peu différente des précédentes, ressemble davantage au type assyrien, avec une crinière volumineuse, le mufle plus avancé vers l’avant113 ; l’oreille arrondie rappelle par ailleurs l’intégration d’éléments d’origine hittite dans les créations grecques114. Le type assyrien aurait été adopté plus largement dans la seconde moitié du viie s. selon J. Boardman. Il ne saurait pour autant être question de tirer de ce classement général une chronologie précise des objets de Delphes : si la succession des types est avérée pour la céramique corinthienne, on sait que le type du lion hittite se maintient plus longtemps ailleurs, comme en Crète, à Rhodes, à Chios115. On ne peut donc pas classer chronologiquement les lions grecs en fonction du modèle qu’ils reprennent. Le motif du lion assyrien persiste aussi pendant un long moment dans la céramique et la toreutique, sous la forme d’attaches, lions entiers ou protomes, comme le montrent des éléments de vaisselle retrouvés à Olympie116. C’est pourquoi la tête inv. 2750 s’intègre bien dans la production d’appliques d’hydries ou de chaudrons corinthiens, même si sa structure semble unique ; on doit être déjà au milieu du vie s. On voit combien, à travers ces documents, les formes orientales ont pu se diffuser dans les créations grecques. L’avant-train de sphinx n° 118 (inv. 3430) est encore une pièce vraiment unique, bien que faite d’éléments connus : c’est une combinaison d’un avant-train d’animal et d’une applique ailée à visage humain, comme les sirènes. Mais bien que ce mélange, ainsi que les traits du visage, indique une production grecque, les traits humains sont rendus bien autrement que sur les sirènes. L’organisation des éléments de la face n’est pas sans rappeler des documents argiens, comme le couros Gillet conservé au musée du Louvre117, ou des têtes de figurines en terre cuite trouvées à Argos118. Dans ce cas, ce serait l’indice d’une grande capacité d’invention des créateurs argiens dans le décor des chaudrons de bronze, en dehors des types majeurs de la sirène ou du griffon. Une applique en forme de sanglier, rattachée à ce groupe par sa fonction, pose un problème de classement en raison de la rareté du type : l’applique n° 119 pourrait être du haut archaïsme : le sanglier n’apparaît pas dans l’art grec avant le début du viie s. 119, mais particulièrement dans la céramique protocorinthienne, dans des scènes de chasse ; pourtant, quelques exemples existent aussi dans la toreutique du viie s. 120. La structure de la tête, avec les gros yeux saillants, mais surtout le décor fait de petites stries et de lignes de points suggère un rapprochement avec les sirènes de notre premier groupe, vraisemblablement produites en Syrie du Nord, ainsi qu’avec les protomes de taureau provenant de la même région121. Mais l’absence d’éléments de comparaison empêche d’être plus précis. Enfin, une applique en forme de tête de bélier entre dans ce groupe. La tête de bélier de Delphes appartenant à un trépied (n° 25) montrait peut-être une importation orientale à Delphes ; avec la tête n° 120 (inv. 3384), il s’agit d’une dérivation grecque du motif de la tête de bélier. La plupart des parallèles, à Olympie, ou le lébès de Leontinoi, indiquent une datation peut-être dans la première moitié du vie s., dans le prolongement des créations orientalisantes du siècle précédent122.

108. Salviat 1962, p. 109. 109. Boardman 1995, p. 96. 110. Akurgal 1969, p. 106-107, fig. 70-73. 111. Salviat 1962. 112. Akurgal 1949, p. 74 ; Brown 1960, p. 4. Voir aussi la mise

au point dans Borell-Rittig 1998, p. 126-132. 113. Gabelmann 1965, pl. 4 à 7 par exemple. 114. Id., p. 40.

115. Salviat 1962, p. 109. 116. Gauer 1991, pl. 9-11. 117. Br 4510 ; Rolley 1975b, passim. 118. Croissant 1992, pl. 32, fig. 56 et 58. 119. Borell, Rittig 1998, p. 141. 120. Furtwängler 1890, n° 980, pl. 58. 121. Supra, p. 236, 245. 122. Gauer 1991, p. 33, 150.

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Cette catégorie d’appliques de vase à décor animal laisse voir les multiples cas d’adoption et d’adaptation de schémas venus de loin, le plus souvent d’Orient ; mais elle n’est pas spécifique du viie s., et tout au long de l’époque archaïque, ou même un peu plus tard, les vases sont ornés de ce type d’attache.

Anses en arceau Catalogue 121. Chaudron de type chypriote. Trouvé en 1991, entre la base des Thessaliens et la Lesché des Cnidiens. Sans inv., n° de fouille R91 B084.2. Bronze, 36 cm. Fig. 326-327. Luce 2008, p. 205, n° 279, pl. 92 ; Aurigny 2016d, p. 223, n. 11. « Chaudron presque complet. Quatre gros rivets permettent de fixer chacune des anses à une vasque assez plate, aujourd’hui très déformée. Ces anses sont constituées d’une grosse applique en forme de huit couché, d’où s’élève la poignée dont seul le départ est conservé. Contrairement à ce que peut laisser penser la restauration, la lèvre est rentrante et non sortante. La tranche permettait de voir la technique employée : le bord de la cuve était replié deux fois sur lui-même et aplati au marteau. En dehors des anses, qui sont coulées, le tout est martelé. Le meilleur parallèle nous est donné par les trois objets découverts lors des fouilles allemandes à Olympie123. La forme en huit couché de l’applique de l’anse est une caractéristique des bassins et chaudrons chypriotes124. Sur la plupart des exemples, l’anse est surmontée d’une fleur de lotus, mais il existe des exceptions où elle dessine un arc simple »125. 122. Anse à fleur de lotus. Trouvée l’hiver 1894-1895. Inv. 2050. Bronze, 19 cm. Fig. 328-330. Perdrizet 1908, 73, n° 287, sans fig. ; Aurigny 2016d, p. 224, fig. 2. Anse formée d’un arceau et de deux feuilles ; il n’y a pas de bouton ; la fleur est creuse à l’intérieur. La forme de l’arceau est celle des numéros suivants, mais la fleur creuse fait penser aux fragments de grosses fleurs remplies de plomb, nos 123-125. Ce fragment appartient à la série d’anses à fleur de lotus massives, dont font partie les objets de la collection Cesnola – en particulier ceux du Metropolitan à New York126 – malheureusement sans provenance exacte à Chypre127. 123. Fleur de lotus. Trouvée le 26 juillet 1893, près du trésor d’Athènes. Inv. 23951. Bronze et plomb, 12,6 cm. Fig. 331-333. Perdrizet 1908, p. 73, n° 292, sans fig. ; Aurigny 2016d, p. 224, fig. 3. Fleur provenant d’une grande anse en arceau ; l’intérieur de la fleur est rempli d’une masse blanchâtre, composée en majorité de plomb, qui rend l’objet très lourd. Proche du n° précédent. 124. Fleur de lotus. Trouvée le 21 juin 1895, au Nord-Ouest du trésor des Athéniens. inv. 2626 ; 23822. Bronze et plomb, 10 cm. Fig. 334-336. Perdrizet 1908, 73, n° 291, sans fig. ; Aurigny 2011, p. 164, fig. 4. Fleur provenant d’une grande anse en arceau ; l’intérieur de la fleur est rempli d’une masse blanchâtre composée de plomb. L’extrémité des pétales est cassée. Proche du n° précédent. 125. Fleur de lotus. Inv. 23824. Bronze, 9,2 cm. Fig. 337-339. Inédit. Haut d’anse en arceau avec fleur de lotus ; les pétales ont disparu, ainsi que le remplissage en plomb ; petit tenon à l’intérieur. Proche du n° précédent.

123. Gauer 1991, n˚ P1 et 2, p. 70-71, cat. p. 236, pl. 55, 1, 2, 3, b, fig. 2, 22 ; 20, 1. 124. Les bols chypriotes présentent également le même type d‘anse, cf. Chavane 1982, p. 31-36, fig. 30-41.

125. Luce 2008, p. 205. 126. Karageorghis 2000, n° 271-272, p. 166-167. 127. Matthäus 2001, p. 159.

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126. fragment d’attache d’anse en arceau. Inv. 23975. Bronze, 8 cm. Fig. 340-342. Inédit. Fragment d’attache en forme de huit, à anse en arceau ; seule la partie gauche est conservée. Reste le départ de l’anse ; au revers, deux gros clous à tête ronde. Proche du n° précédent. 127. Fragment de pétale de fleur de lotus. Inv. 23821. Bronze, 7,1 x 4,2 cm. Fig. 343-345. Inédit. Fragment de pétale d’une fleur de lotus de grande taille, surmontant une anse en arceau. Proche du n° précédent. 128. Fragment de fleur de lotus. Trouvé le 9 mai 1896, à l’Ouest du théâtre. Inv. 3617. Bronze, 8,8 x 4,4 cm. Fig. 346-348. Perdrizet 1908, 73, n° 288, sans fig. Fragment de fleur de lotus : le pétale est de grande taille, avec une nervure bien marquée au milieu, et une courbure importante, la pointe du pétale se recourbant fortement vers l’extérieur. La grande taille de ce fragment invite à le rapprocher des nos précédents, qui appartiennent au même groupe que les objets de la collection Cesnola, sans provenance128. 129. Anse à fleur de lotus. Trouvée en août 1895 à l’Est de Cassotis. Inv. 2977. Bronze, 18 cm (largeur de l’anse : 13,5 cm). Fig. 349-351. Perdrizet 1908, p. 72, n° 283, fig. 240 et 240a ; Matthäus 2001, p. 184, n° A.46 ; Gehrig 2004, p. 266 n. 828. Le fragment se compose d’une attache allongée, en forme de huit, dont la partie inférieure gauche manque. À l’intérieur, 5 gros rivets encore en place, qui retiennent la tôle de la cuve. De l’attache part une anse en arceau, décorée au sommet d’une fleur de lotus, soulignée de deux petits filets immédiatement sous la fleur. Bien que le détail de deux filets soit sans parallèle, cette anse présente tous les éléments caractéristiques des coupes chypriotes, en particulier la fleur assez petite dans la composition d’ensemble129. Les rivets sont les mêmes que ceux du fragment inv. 23795 (n°126). 130. Anse en arceau à fleur de lotus. Inv. 23817. Bronze, 12,2 cm. Fig. 352-355. Inédit. Anse en arceau fragmentaire. Il manque toute la partie gauche. En haut, une fleur de lotus de petite taille, même si les pétales sont cassés. Proche du n° précédent. 131. Anse à fleur de lotus. Trouvée le 23 juin 1896, entre la grande entrée du sanctuaire et la grand route. Inv. 3910. Bronze, 7,7 cm. Fig. 356-357. Perdrizet 1908, p. 73, n° 284, sans fig. ; Matthäus 2001, p. 184, n° A 46. Le fragment se compose d’une attache allongée, percée de 3 rivets, avec petite lacune à droite. De l’attache part une anse en arceau, décorée au sommet d’une fleur de lotus, dont le pétale droit manque. La taille de l’anse et ses proportions en font un exemple caractéristique de la série, mais de petite taille : voir le n° précédent. 132. Anse à fleur de lotus. Inv. 23816. Bronze, 11,2 (hauteur) x 10,5 (largeur). Fig. 358-359. Inédit. Anse en arceau, décorée au sommet d’une fleur de lotus ; l’attache est perdue. 133. Anse à fleur de lotus. Trouvée le 19 avril 1895, entre la base des Thessaliens et la Lesché des Cnidiens. Inv. 2907. Bronze, 26 cm. Fig. 360-363. Perdrizet 1908, p. 73, n° 286, fig. 241 ; Matthäus 2001, p. 163 ; Partida 2003, p. 419, n° 680 ; Gehrig 2004, p. 266 n. 828 ; Partida 2006, p. 803. Anse formée d’un arceau de section circulaire et d’un bouton de lotus entre deux feuilles. Ici, un oiseau est posé sur le bouton, au sommet de l’anse.

128. Matthäus 2001, p. 159.

129. Matthäus 1985, p. 124 et suivantes.

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Alors que cette anse entre bien dans la catégorie des bassins décorés d’anses à fleur de lotus d’origine chypriote130, la présence de l’oiseau pourrait révéler une origine grecque131. 134. Anse à fleur de lotus. Trouvée en 1936-1937 dans les fouilles Lerat. Inv. 5874. 23793. Bronze, 11 cm. Fig. 364-366. Inédit. Anse formée d’un arceau et d’un bouton de lotus entre deux feuilles. Elle est fondue d’une seule coulée, et était attachée au vase soit par deux petites plaques situées à chaque extrémité de l’arceau, dont une seule est conservée, soit par une grande plaque d’attache. Comme le système de fixation au vase ne doit pas avoir été une grande plaque en forme de huit, cette anse n’est pas dans la tradition des exemples trouvés à Chypre132 ; il s’agit plutôt d’une des nombreuses variantes du type, sans doute une adaptation grecque. 135. Anse à décor de fleur de lotus. Trouvée entre le 5 et le 8 mai 1939, sous le dallage de la voie sacrée. Inv. 7729. Bronze, 9 cm. Fig. 367-369. Amandry 1944-45, p. 38, fig. 5 ; Matthäus 2001, p. 184, n° A 47 ; Partida 2003, p. 419, n° 681 ; Partida 2006, p. 803 ; Aurigny 2010, p. 237, fig. 37, pl. I. Anse de section circulaire, en arceau, décorée au sommet d’une fleur de lotus. Manque une des extrémités de l’attache. Cette anse s’insère dans la série des anses décorées d’une fleur de lotus ; on peut toutefois remarquer que la fleur est d’une taille supérieure à celles qui sont attribuées par H. Matthäus à Chypre133. Elle fait penser aux fleurs de lotus que l’on trouve dans le décor des trépieds à baguettes, par exemple à Samos134. 136. fragment d’anse à fleur de lotus. Trouvée en 1902 à Marmaria. Inv. 23820. Bronze, 7,7 x 6,8 cm. Fig. 370-372. Perdrizet 1908, 73, n° 289, sans fig. Fragment de fleur de lotus à très haut pédoncule, qui surmontait une anse en arceau semblable aux exemples précédents. Comme pour le n° 134, cette fleur assez large, tout en se rattachant à la série, fait penser aux fleurs utilisées dans le décor des trépieds à baguettes du vie siècle, dont plusieurs fragments sont connus à Samos135. 137. Anse à fleur de lotus. Inv. 23974. Bronze, 8,2 cm. Fig. 373-375. Inédit. Anse en arceau décorée d’une fleur de lotus ; il ne reste la plaque d’attache qu’en bas à droite de l’anse. Voir le n° précédent. 138. Anse en arceau à fleur de lotus. Inv. 23818. Bronze, 11,3 x 7,5 cm. Fig. 376-378. Inédit. Anse en arceau, avec décor de fleur de lotus ; manque l’extrémité du pétale gauche. 139. Fragment d’anse à fleur de lotus. Inv. 23819. Bronze, 10,5 cm. Fig. 379-382. Inédit. Fragment de fleur de lotus à très haut pédoncule. S’il s’agit toujours de la même série, le haut pédoncule est original : on songe à l’anse de lébès trouvée à Emporio à Chios, formée d’un arceau aplati, d’une longue tige d’où émerge, entre les deux pétales, une tête humaine136. 140. Fragment de fleur de lotus. Inv. 23941. Bronze, 5,7 cm. Fig. 383-384. Inédit. Fragment de fleur de lotus : pétale. Ce fragment appartient à la série des anses en arceau portant un décor de fleur de lotus ; sa forme le rapproche du n° 136.

130. C’est un type bien connu à Chypre à l’âge du bronze : Matthäus 1985, p. 124 et suivantes. 131. Matthäus 2001, p. 163. 132. Matthäus 1985, p. 124 et suivantes.

133. Matthäus 1985, n° 347-356. 134. Gehrig 2004, p. 266. 135. Gehrig 2004, p. 264-266, St 16-18. 136. Ploes 2003, n° 679, p. 419 ; Boardman 1995, fig. 52 p. 85.

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141. Anse en arceau décorée d’un oiseau. Trouvée le 28 sept. 1895, près des thermes de l’Est. Inv. 23814 ; 3145. Bronze, 7,6 cm. Fig. 385-386. Perdrizet 1908, p. 75, n°319, fig. 257. Anse en arceau, de section ronde, sauf les extrémités plates et percées d’un trou de rivet. Sur le haut de l’anse, un pédoncule se confond avec les pattes et le corps de l’oiseau. Celui-ci, de style schématique, est caractérisé par un bec en spatule, légèrement penché vers l’avant, et une queue elle aussi traitée en spatule. On peut faire avec cet objet des comparaisons de deux ordres : l’arceau le rattache d’une part aux anses décorées d’une fleur de lotus, connues par une vingtaine d’exemplaires à Delphes, et dont l’origine est chypriote. L’oiseau, d’autre part, est proche d’oiseaux de l’époque géométrique, sur des disques ou des sphères : à Delphes, ces oiseaux entrent dans le type 1 défini par Cl. Rolley137, et l’oiseau décorant l’anse est proche surtout du n° 131, considéré comme corinthien138.

Commentaire Les anses en arceau décorées de fleur de lotus peuvent appartenir à différents vases, en particulier des coupes139, ou encore des bassins140, plus grands, dans le cas des anses plus massives. La catégorie plus générale est celle des vases à anses horizontales dressées, à une anse ou deux anses ornées de fleurs de lotus, à deux anses non décorées141. C’est pourquoi on a rapproché de cette série le n° 141. La série des coupes avec anses en arceau décorées de fleur de lotus est assez bien connue ; elle est représentative de la diffusion des objets depuis l’Est du bassin méditerranéen vers la Grèce et même l’Italie. La popularité du type est aussi attestée par l’existence de copies en terre cuite d’anses en fleur de lotus142. Ces coupes sont plus exactement des « bols » assez profonds, dont la panse est presque hémisphérique. Un vase de ce type, conservé à Nicosie, a un diamètre de 15 cm pour une anse de 5,5 cm de large143, plus petite que l’anse inv. 3910 (n° 131) pour laquelle on peut restituer un vase de 17 à 20 cm de diamètre. Il faut alors restituer, pour les plus grandes anses, des vases de 40 à 45 cm de diamètre, c’est-à-dire des offrandes de prix dans le sanctuaire. Le cas des bassins est mal connu, car ils sont représentés par les objets de la collection Cesnola, au Metropolitan Museum à New-York ou au British Museum à Londres, sans autre provenance que Chypre. Même si la taille des anses et des fleurs est supérieure, les bassins conservés à New-York font 35 à 40 cm de diamètre, pas plus que les grandes coupes. À Chypre, où elle a été bien étudiée, cette série d’anses présente beaucoup de variantes, dans le nombre de fleurs ou dans le décor, si bien qu’il est difficile de déterminer des sous-ensembles pertinents ; les caractéristiques générales sont l’anse en arceau, décorée à son sommet de la fleur de lotus, et rattachée à une plaque en forme de huit, elle-même fixée par de gros rivets. La fleur de lotus présente un bouton bien détaché entre deux pétales, mais reste de petite taille ; les nos 129 et 131 (2977 et 3910) sont de ce point de vue très proches des exemples chypriotes. Les coupes proviennent le plus souvent de tombes, de la côte Sud, Amathonte et Kouklia144 ; elles sont datées entre le début de l’âge du fer (vers 1050 av. J.-C.) et la première moitié du viiie siècle. Par ailleurs la forme de l’anse semble bien être une invention chypriote, datée de la fin de l’âge du bronze, tandis que la fleur de lotus peut avoir des origines orientales145. La série des anses à décor de fleur de lotus146 est nombreuse147, et se rencontre dans plusieurs sites de la partie orientale du bassin de la Méditerranée. H. Matthäus dressait en 1998 la carte de répartition de ces anses (carte 7,

137. Rolley 1969, p. 87. 138. Id., p. 92. 139. Matthäus 1985, p. 124-127, n° 347-356. 140. Id., p. 195-196, n° 470-472. 141. Chavane 1982, p. 31, note 21. 142. Stampolidis, Karetsou 1998, p. 121 ; Matthäus 2001,

p. 162, avec bibliographie. 143. Chavane 1982, n° 15, p. 34. 144. Matthäus 1985, p. 126.

145. Que ce soit la côte levantine, comme pour Matthäus 1985, p. 126, l’Égypte, Matthäus 2001, p. 158, ou l’Assyrie : Boardman 1995, p. 85. 146. « Schalen mit Lotushenkel » en allemand. 147. H. Matthäus recense 66 lieux de découverte, avec parfois un lot d’objets (comme pour l’Italie). On peut donc compter une centaine de ces anses, à Chypre, au Proche-Orient, en Crète, en Grèce, en Sardaigne, en Italie, et dans la péninsule ibérique. Il compte aussi les anses en arceau sans fleur de lotus. Matthäus 2001, p.179-188.

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fig. 387) 148 : après Chypre qui a livré des coupes et des bassins, cette production florissante a été exportée ou imitée au Proche-Orient, de l’Anatolie (Gordion) à la côte levantine, en passant par la Syrie du Nord. On en a aussi retrouvé dans une zone bien plus lointaine, à Meroe et Nuri, dans le royaume de Kush (Soudan). Dans le monde grec, les exemplaires sont nombreux en Crète, surtout dans des tombes mais aussi dans des sanctuaires ; ailleurs, c’est dans les sanctuaires uniquement qu’on les avait offerts, Olympie, Delphes, Héraion d’Argos, Emporio de Chios et Ithaque. Enfin les découvertes en Sardaigne, en Italie et dans la péninsule ibérique attestent encore le succès de cette forme. La chronologie de ce type de coupes à anses à fleur de lotus montre qu’il n’a pas seulement été importé, mais aussi copié en de nombreux endroits, bien après que la production se fut arrêtée à Chypre même149. Le décalage est même assez étonnant, car Hartmut Matthäus a souligné que les anses en fleur de lotus étaient une production chypriote des « âges obscurs », prouvant la continuité des échanges entre le bassin méditerranéen oriental et sa partie centrale. Dans le cas des bassins ornés de grosses fleurs de lotus, une datation au chypre-archaïque a été proposée150. Or les exemplaires provenant des sols grec et italique sont datés de contexte des viiie et viie siècles ; il s’agit donc plus vraisemblablement d’adaptations de modèles chypriotes qui continuaient peut-être à circuler, ou de productions chypriotes plus anciennes, comme le cas s’est déjà présenté151. « On a suggéré que les productions locales seraient celles qui présentent des variantes comme celles que l’on a trouvées dans plusieurs sites de Grèce, et surtout en Étrurie : le bouton est de forme différente ou un motif animal est rajouté »152. Delphes présente d’ailleurs quelques objets qui sont indéniablement des variations grecques, sur le modèle importé de Chypre. Ainsi l’anse de grande taille, dont le sommet de la fleur porte un oiseau, est une composition que l’on ne rencontre pas à Chypre, ni ailleurs dans le bassin méditerranéen. On ne saurait pour autant déduire de cet exemple que l’ensemble des anses retrouvées à Delphes sont des fabrications grecques. En effet, le groupe des anses massives offre un parallèle aux objets de la collection Cesnola provenant de Chypre. Il faut toutefois noter que le remplissage au plomb de ces grosses fleurs semble unique à Delphes153. Il serait donc hasardeux d’aller au-delà d’un essai de classement général des objets delphiques : on peut avancer que les nos 129 à 132 doivent être chypriotes, en raison de leur proximité formelle avec les anses de coupes chypriotes. Les anses massives de bassin, les nos 121 (2050) à 128 (3617), ont des parallèles chypriotes sûrs dans la collection Cesnola. Pour le reste, les nos 133 à 141 montrent des variations dans la taille ou la forme de la tige, des pétales, que l’on ne rencontre pas sur les exemplaires trouvés à Chypre ; de même, les nos 136 (23820) et 140 (23941), par leur ressemblance avec la structure des fleurs de lotus des trépieds à baguettes, doivent être des œuvres grecques. En effet, le motif de la fleur de lotus est employé dans l’art grec au-delà des viiie et viie siècles, et pour orner d’autres documents que des anses horizontales dressées. On la connaît notamment comme décor de trépieds à baguettes, où elle orne l’intérieur des arceaux154 ; elle peut servir aussi de support à un personnage, comme on le voit sur certains trépieds étrusques155. Dans ce cas, les pétales sont plus développés, plus longs ou recourbés d’une manière très décorative. La fouille sous le char des Rhodiens a livré un bassin portant une applique en forme de huit qui présentait ce type d’anse : il se trouvait dans la Maison rouge. Comme celle-ci est datée de la fin du viie s. au début du vie s. av. J.-C., la datation du bassin pose le même problème que précédemment : il n’est pas contemporain des exemplaires chypriotes156. On peut aussi imaginer que le bassin ne portait pas de fleur de lotus, comme c’est le cas des appliques de bassin plus récentes. Il existe des chaudrons de bronze sans fleur du viie s. à Olympie157. La fin de ce même siècle paraît donc une date acceptable pour le bassin de Delphes, à condition de restituer des anses sans

148. Matthäus 2001, p.158, fig. 3 ; voir aussi Matthäus 2011, p. 124, fig. 32. 149. H. Matthäus considère le chypro-géométrique III (850-750) comme un terminus ante quem pour Chypre même (Matthäus 1985, p. 126), et qu’il n’est même pas sûr que le type ait continué jusqu’à la fin de cette période ; en tout cas il n’y en a pas à l’époque chyproarchaïque (Matthäus 2001, p. 159). 150. Matthäus 1985, p. 196 ; Matthäus 2011, p. 123. 151. Supra, n° 13.

152. Chavane 1982, p. 33, et n. 43. 153. Karageorghis 2000, p. 166-167 : l’auteur ne mentionne

pas un éventuel remplissage particulier des fleurs de lotus. 154. Par exemple à Samos, St 11, Gehrig 2004, pl. 114. 155. Sur les trépieds étrusques : voir Riis 1939, BM 539, fig. 9. 156. « En revanche, les bassins chypriotes qui portent une applique en forme de huit, mais sans fleur sur la poignée, sont attestés jusqu‘à l‘époque classique », Luce 2008, p. 205 ; Matthäus 1985, p. 126. 157. Gauer 1991, p. 70-71.

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fleur. C’est l’hypothèse la plus vraisemblable, mais on ne peut totalement écarter une autre possibilité : les habitants de la Maison Rouge auraient conservé un objet plus ancien ayant circulé longtemps avant de trouver sa dernière utilisation. Cette catégorie d’objets fournit un cas intéressant pour la diffusion des objets en Méditerranée, et montre l’importance de Chypre dans la création et la diffusion de modèles ; c’est un nouvel élément dans la réflexion sur les rapports entre Chypre et Delphes158 .

Attaches à décor non figuré et autres vases Catalogue Attaches d’anse en bobine159 142. Attache d’anse à tores et anse en anneau. Trouvée le 9 oct. 1896, près des thermes de l’Est. Inv. 3146, 23755160. Bronze, 10,7 cm. Fig. 388-390. Perdrizet 1908, p. 78, n° 340, fig. 270 ; Birmingham 1961, p. 190, n. 2 ; Young 1981, p. 230, n. 67 ; Aurigny 2016c, p. 32, fig. 14. Attache d’anse formée d’un corps horizontal semi-cylindrique, orné de trois doubles tores, aux extrémités et au milieu. On retrouve ce type d’attaches sur les récipients phrygiens, en particulier ceux de Gordion161. On en trouve dans d’autres sanctuaires grecs, comme Olympie162 par exemple. La grande diffusion des modèles phrygiens et les nombreuses imitations grecques rendent bien difficile la différenciation entre les deux et leur datation précise, au viie ou même au vie s. 143. Attache d’anse à tores et anse en anneau. inv. 23943163. Bronze, 7,1 cm. Fig. 391-394. Inédit. Attache d’anse formée d’un corps horizontal semi-cylindrique, orné de trois triples tores, aux extrémités et au milieu. Deux rivets servaient à fixer l’attache sur le récipient. L’anse presque circulaire a été conservée. Creux à l’intérieur. Sans être exactement identiques, des exemples du tumulus MM de Gordion sont proches164 . En Grèce, le sanctuaire d’Olympie a livré ce type d’attaches165, ainsi que Kalapodi166. 144. Attache d’anse à tores. Trouvée à Delphes entre 1892 et 1901. Inv. 23834167. Bronze, 5 cm. Fig. 395-398. Perdrizet 1908, p. 78, n° 340 bis. Attache d’anse en demi-bobine, avec trace d’un petit rivet. Les tores sont très en reliefs, avec une double rainure ; la très faible courbure du vase, et la lourdeur des anses pourraient indiquer un vase de grande taille. Du tumulus MM de Gordion, les attaches des coupes MM62 et MM68 sont des parallèles intéressants168, bien qu’avec des arêtes plus aiguës dans le profil. Une attache d’exaleiptron d’Olympie présente les mêmes doubles tores169 ; une attache de Pérachora est aussi proche pour la forme, bien que les arêtes soient bien moins vives170. 145. Attache d’anse à tores. Trouvée entre 1892 et 1901. inv. 23835171. Bronze, 4,5 cm. Fig. 399-402. Perdrizet 1908, n° 341, p. 78. Attache d’anse en demi-bobine, d’un bassin, décorée de tores triples. Le corps est légèrement resserré au milieu ; l’anse manque.

158. Infra, p. 147, 176-177. 159. Cette catégorie se dit « bowls with swiveling ring handles and

banded rim » en anglais, et « Spulenattasche » en allemand. 160. Pariente 1987 type I A1. Mémoire de troisième année de l’école française d’Athènes d’Anne Pariente, portant sur des fragments de vaisselle de bronze delphique, écrit en 1987 et resté inédit. Je me suis largement inspirée des descriptions et des comparaisons faites dans ce mémoire. 161. Akurgal 1961a, pl. couleur IIIa. L’auteur les date vers 700 av. J.-C. ; Young 1981, pl. 66-67, MM 61, 63, 64, 68. 162. Gauer 1991, Le 89, p. 192, pl. 21, 3b : du haut archaïsme, sans doute oriental.

163. Pariente 1987, type IA 3. 164. Young 1981, MM 58 ou MM 63, p. 126 et pl. 65-66. 165. Gauer 1991, p. 191, Le 82 et 83, pl. 20. 166. Felsch 2007, n° 2182, p. 378, pl. 61. 167. Pariente 1987, type IA 5. 168. Young 1981, MM 62 ou MM 68, p. 126-130 et pl. 65-66. 169. Gauer 1991, Br 5387, pl. 21,1. 170. Payne 1940, pl. 65, n° 7. 171. Pariente 1987, type IA 7.

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Si à Gordion, on peut penser à un rapprochement avec MM 67172, qui reste tout de même assez différent, il est plus difficile de trouver des parallèles dans d’autres sanctuaires grecs173, mais on peut citer un exemplaire de Sybaris174. 146. Attache en demi-bobine. Inv. 23836175. Bronze, 4,6 cm. Fig. 403-406. Attache dont le corps est fait d’une demi-bobine, qui reçoit trois triples tores, au milieu et aux extrémités du cylindre. Le corps de l’attache, creux, a conservé du plomb à l’intérieur. À Olympie, une comparaison peut être faite avec l’attache « Le 86 », datée du premier quart du vie siècle176. 147. Attache en demi-bobine. Inv. 23838177. Bronze, 5,25 cm. Fig. 407-410. Attache d’anse en demi bobine, de forme ramassée avec trois tores, qui sont des baguettes entre deux filets de profil aigu ; deux trous sont visibles sur les côtés, placés assez haut ; à l’avant, deux clous encore bien visibles à l’arrière. Proche de l’attache MM67 de Gordion178, cette attache a aussi un parallèle exact à Rhodes179, Lindos180, à Isthmia181 et à Olympie182. On connaît aussi en Étrurie des attaches proches de ce type183, ainsi qu’à Sybaris184. 148. Attache d’anse en demi-bobine. Trouvée entre 1892 et 1901. Inv. 23839185. Bronze, 6,5 cm. Fig. 411-414. Perdrizet 1908, p. 78, n° 340 ter. Attache d’anse en demi-bobine ; avec trois triples tores qui ont la même forme que pour le n° précédent. L’attache, cylindrique et creuse, est presque fermée sur elle-même ; elle conserve à l’intérieur du plomb et un des rivets qui servait à la fixer sur la vasque. Proche de l’attache précédente, cette pièce a un parallèle à Pérachora186 et à Olympie187. 149. Attache d’anse. Inv. 23840188. Bronze, 5,45 cm. Fig. 415-417. Inédit. Attache d’anse en bobine, à trois épaississements formant arête, séparés par des étranglements concaves. A. Pariente suggère que cet objet était inachevé, à cause d’un défaut de fonte, car on ne comprend pas le système de fixation à la vasque. La comparaison avec un exemplaire très proche d’Olympie189 permet de situer le fragment à la fin du viie s. À Pérachora, un exemplaire proche par la forme est néanmoins plus décoré au centre190. 150. Attache d’anse. Inv. 23841191. Bronze, 5,6 cm. Fig. 418-420. Attache d’anse en bobine, dont le corps, côtelé de quinze petits tores contigus, est bordé aux deux extrémités d’un tore en quart de cercle plus épais. Cette forme particulière se retrouve dans d’autres sanctuaires grecs, comme Olympie192, où les exemplaires sont datés de la fin du viiie ou de la première moitié du viie s., et Pérachora193. 151. Attache d’anse. Trouvée dans les fouilles Demangel. Inv. 23843+23844194. Bronze, 5,7 x 2,6 x 2,2 cm. Fig. 421-423. Demangel 1926, p. 77, fig. 86. Attache d’anse en bobine, d’un bassin, dont le corps est côtelé ; entier, en deux morceaux. Plusieurs parallèles existent à Olympie, datés du viie s. 195

172. Young 1981, p. 129, et pl. 67. 173. L’attache d’Olympie Le 85, Gauer 1991, p. 192, pl. 20, n’a

185. Pariente 1987, type IA 4. 186. Payne 1940, pl. 65 n° 4, p. 161 ; mais ces pièces sont d’un

pas la même forme resserrée au centre. 174. Papadopoulos 2003, p. 30-31, n° 36, fig. 37 c-d. 175. Pariente 1987, type IA 2. 176. Gauer 1991, Le 86, p. 192, pl. 20. 177. Pariente 1987, type IA 6. 178. Young 1981, p. 129, pl. 66. 179. Par exemple Stampolidis, Karetsou 1998, n° 298. 180. Blinkenberg 1931, n° 719, p. 220, pl. 30. 181. Raubitschek 1998, p. 19, n° 71, pl. 15. 182. Gauer 1991, Le 96 (B. 4254), p. 193, pl. 20 : cet exemplaire est sans doute oriental. 183. Haynes 1965, n° 39, p. 259, fig. p. 146. 184. Papadopoulos 2003, p. 31, n° 38, fig. 38 c-d.

diamètre inférieur et n’ont pas de trace de rivet. 187. Furtwängler 1890, n° 844 ; Gauer 1991, Le 86, pl. 20. 188. Pariente 1987, type IA 10. 189. Gauer 1991, Le 95, pl. 21,2. 190. Payne 1940, pl. 65 n° 5, p. 162. 191. Pariente 1987, type IA 12. 192. Gauer 1991, Le 102-104, p. 194, pl. 21 ; ils sont datés des viiie- viie s. 193. Payne 1940, pl. 65 n° 6, p. 162, mais plus long avec tore moins semblable. 194. Pariente 1987, type IA 13. 195. Gauer 1991, Le 105-110, pl. 21.

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152. Attache d’anse. Trouvée en 1971 dans les fouilles L. Lerat. Inv. 23842196. Bronze, 3,5 x 2,6 x 3,1 cm. Fig. 424-426. Attache d’anse en bobine, d’un bassin, corps côtelé ; très semblable au précédent, il n’en reste qu’une moitié. On connaît de telles attaches à la fois à Olympie197, à l’Héraion d’Argos où il s’agit de vases plus petits198. Il est intéressant de noter un autre parallèle à Crimisa199, mais de la fin du vie s. 153. Attache d’anse de phiale. Inv. 23770. Bronze, 10,8 cm. Fig. 427-428. Aurigny 2016c, p. 32, fig. 13. Extrémité de l’attache d’une anse de phiale. L’attache est formée d’une tige allongée, de section semi-circulaire, d’où partent deux barres perpendiculaires, elles aussi de section semi-circulaire. Ce type d’attache est phrygien, du haut archaïsme. Il est attesté sur le même type de phiales que les exemples précédents, avec des anses en anneau pivotant dans l’attache. Les comparaisons principales et nombreuses sont à faire avec le matériel de Gordion, en particulier avec les récipients du tumulus MM de Gordion200 , datés de la seconde moitié du viiie siècle. Un exemple intéressant de ces bassins plats à anses en anneaux porte une inscription gravée sous le bord201. Des sanctuaires grecs aussi ont livré ce type d’attaches : on en trouve à l’Héraion d’Argos202, à Éphèse203. 154. Anse lisse en arceau. Inv. 23775204. Bronze, 7 cm. Fig. 429. Inédit. Anse en arceau presque circulaire, de section ronde. Cette anse en arceau s’adapte au type d’attache n° 143 (inv. 3146) : nous avons là encore un exemple de ce que les tumuli de Gordion ont si abondamment livré205. Comme pour les précédents, des exemplaires ont été retrouvés dans d’autres sanctuaires grecs, en particulier l’Héraion d’Argos206, Olympie207 ; un exemplaire a aussi été retrouvé à Olynthe208. 155. Anse lisse en arceau. Inv. 23776209. Bronze, 7,9 cm. Fig. 430. Anse en demi-cercle, section ronde, incomplète. L’évasement creux des extrémités surprend ; il correspond peut-être à un autre système de fixation que le précédent. Malgré une certaine différence avec le type précédent, cette anse se rattache au même type d’origine phrygienne. Attaches en forme de barre Avec anse en oméga

156. Attache d’anse semi-circulaire. Inv. 23779210. Bronze, 9,1 cm. Fig. 431-433. Matthäus 2001, p. 197, C59 ; Aurigny 2012b, fig. 1. Applique longue, de section en gros semi-circulaire, qui suit la courbe du bord du vase, avec deux anneaux verticaux de section ronde, à égale distance l’un de l’autre et des extrémités. Ce type d’applique recevait une anse en oméga. Ce type d’attache à anse en oméga trouve des parallèles en Orient comme en Grèce. Connues au deuxième millénaire en Égypte et en Orient, les appliques à deux anneaux et à anses en oméga se développent surtout à partir du viiie s. av. J.-C. Seize bols du palais Nord-Ouest d’Assurnasirpal de Nimrud présentent la même forme d’attaches, un peu plus allongée211. Ils se rattachent à la production phénicienne. Ce type a été étudié par Barnett212 et Chavane213. Selon H. Matthäus, c’est un type de l’Est de la Méditerranée, bien connu à Chypre ; mais il a bien montré aussi sa diffusion jusqu’en Sicile et en Sardaigne214. 196. Pariente 1987, type IA 14. 197. Id., Le 105-110, p. , pl. 21, datées du viie s. 198. Waldstein 1905, p. 292, pl. CXXII, n°s 2181 et 2182 :

modèles réduits de A13 et A14. 199. Orsi 1932 , p. 116, fig. 76 : bobine de lébès aux parois légèrement concaves, ornée d’un tore médian plus épais que les autres ; assez lourd. 200. Young 1981, pl. 66-67, surtout MM 63 à MM 69 ; mais aussi pl. 95, A, tumulus J . 201. Young 1981, p. 130, fig. 84. Boardman 1995, fig. 98, p. 108. 202. Strøm 1992a, p. 52, pl. VI a-c. 203. Klebinder-Gauss 2007, n° 826, pl. 66.

204. Pariente 1987, type IC9. 205. Young 1981, pl. 65-67. 206. Waldstein 1905, n° 2111 et 2114, pl. CXXI. 207. Gauer 1991, Le 363-365, p. 218, pl. 25 : datées du viie s. 208. Robinson 1941, n° 779, p. 223, pl. LX. 209. Pariente 1987, type I C10. 210. Pariente 1987, type IIA6. 211. Conservées au British Museum : Barnett 1974, p. 22, sans

fig. 212. Barnett 1974. 213. Chavane 1982. 214. Matthäus 2001, p. 170-171, fig. 11-12.

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157. Attache d’anse. Trouvée entre 1892 et 1901. Inv. 3149. Bronze, 12,5 cm. Fig. 434-436. Perdrizet 1908, p. 79, n° 351, sans fig. ; Pariente 1987, IIA 3 ; Matthäus 2001, C 59, p. 197 ; Aurigny 2012b, fig. 2. Attache d’anse de section semi-circulaire, avec un double tore à chaque extrémité, et deux anneaux pour recevoir l’anse. 158. Attache d’anse. Inv. 23780215. Bronze, 10 cm. Fig. 437-439. Matthäus 2001, p. 197, C59 ; Aurigny 2012b, fig. 3. Attache d’anse de section semi-circulaire, avec deux anneaux pour recevoir l’anse. Un fragment de la vasque a été conservé. 159. Attache d’anse. Trouvée en 1903 à Marmaria. Inv. 23767216. Bronze, 10,5 cm. Fig. 440-442. Perdrizet 1908, p. 79, n° 350 ; Matthäus 2001, C 59, p. 197 ; Aurigny 2012b, fig. 4. Attache d’anse de section semi-circulaire, avec deux anneaux pour recevoir l’anse. Un fragment de la vasque a été conservé (diamètre restitué de la vasque 30 cm). 160. Attache d’anse ornée de tores et anse en oméga. Inv. 23803217. Bronze, 10,6 cm. Fig. 443-445. Aurigny 2012b, fig. 5. Attache d’anse de section semi-circulaire, ornée de deux groupes de deux tores aux extrémités, et de deux anneaux pour recevoir l’anse ; anse en oméga encore en place ; reste d’un remplissage de plomb à l’intérieur de l’attache. Un exemplaire très proche, pour la forme de l’attache, a été trouvé à Lindos218. Mais il semble que ce type soit bien présent aussi en Étrurie219. H. Matthäus donne une carte de répartition qui montre la très large diffusion du type en Méditerranée. 161. Attache d’anse. Trouvée le 28 sept. 1895, sous la Lesché des Cnidiens. Inv. 3095 ; 23758220. Bronze, 10,5 cm. Fig. 446-448. Perdrizet 1908, n° 349, p. 79, fig. 276 ; Cuadrado Diaz 1956, p. 74, fig. 20 ; Matthäus 2001, C 59, p. 197 ; Aurigny 2012b, fig. 6. Attache d’anse légèrement courbe, dont la section adopte la forme d’un D. elle est ornée de deux groupes de deux tores, outre les anneaux pour faire passer l’anse ; l’anse en oméga est encore en place. Comme pour les nos précédents, ce type d’attache et d’anse est répandu dans l’Est du bassin méditerranéen et jusqu’en Méditerranée occidentale. 162. Anse en oméga. Inv. 2443 ; 13763 ? Bronze, 5 cm. Fig. 449. Perdrizet 1908, p. 79, n°352, sans fig. ; Aurigny 2012b, fig. 8. Anse mobile en oméga fermé ; extrémités en S aplati, section ronde. 163. Anse en oméga. Inv. 2740. Bronze, 11,5 cm. Fig. 450-451. Perdrizet 1908, p. 79, n°353, sans fig. ; Aurigny 2012b, fig. 7. Anse mobile en oméga fermé ; extrémités en S aplati, section ronde. 164. Anse en oméga. « Vieux fonds du musée »221. Inv. 3024222. Bronze, 15,4 cm. Fig. 452-453. Perdrizet 1908, p. 79, n° 354, fig. 277 ; Matthäus 2001, p. 197, C59 ; Aurigny 2012b, fig. 9. Anse mobile en oméga fermé ; extrémités en S aplati, section ronde. Cette anse de grande taille suppose une attache de grande taille, au moins 25 cm de long, voire 30 cm. C’est la seule anse de cette taille retrouvée à Delphes, qui a des parallèles à Chypre notamment, mais qui doit avoir été créée dans les ateliers

215. Pariente 1987, IIA 4. 216. Pariente 1987, IIA 5. 217. Pariente 1987, II A 1. 218. Blinkenberg 1931, n°709, pl. 29. 219. Matthäus 2001, C69, p. 198 : attaches d’anse de Tarquinia,

sur un plat de bronze de Tarquinia aujourd’hui au Louvre, apparte-

nant au mobilier d’une tombe du viie s., et dont le décor gravé est d’origine orientale, rhodienne selon Villard 1956, p. 25-53. 220. Pariente 1987, type IIA 2. 221. C’est-à-dire avant la Grande fouille. 222. Pariente 1987, IIB1.

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phéniciens223. En Grèce, on ne trouve que des anses de petite taille dans les sanctuaires, même si les exemplaires de Lindos224 ou de l’Héraion d’Argos225 sont les plus ressemblants. Cette anse de grande taille fait penser également à une anse de situle égyptienne ; or, ce type d’objet est connu en Grèce et en Crète, comme c’est le cas d’un exemplaire trouvé dans la grotte de l’Ida226. Il ne remonte pas à une date avant le début du Ier millénaire, proto- ou subgéométrique. Attaches d’anse à côte à un seul anneau (« Leistenattasche ») 165. Attache d’anse. Inv. 23798227. Bronze, 25 cm. Fig. 454-456. Inédit. Attache d’anse de grande taille, avec un unique anneau. L’anse circulaire était fermée. C’est une attache d’anse d’un chaudron, avec une barre en demi-boudin aplati, un anneau circulaire au milieu, en ruban épais, avec, sur la face supérieure de l’anneau, trois V incisés. Seuls les bourrelets aux extrémités et sur le corps de l’attache forment un décor plastique. L’attache était rivetée au chaudron. Fonte pleine. Ce type est connu en Orient et en Grèce au géométrique récent. Des exemples chypriotes ne sont pas éloignés, sauf qu’ils présentent deux anneaux pour recevoir l’anse228. Dans les sanctuaires grecs, on peut citer des exemples d’Olympie229 et de l’Héraion d’Argos230. 166. Attache d’anse. Inv. 13774+13776. Bronze, 22,5 cm. Fig. 457-458. Inédit. Attache d’anse de grande taille, avec un unique anneau. L’anse circulaire était fermée. C’est une attache d’anse d’un chaudron, avec une barre en demi-boudin aplati, un anneau circulaire au milieu ; le décor se limite à deux groupes de filets sur le corps de l’attache. 167. Attache d’anse. Inv. 13773. Bronze, 21,5 cm. Fig. 459-461. Inédit. Attache d’anse de grande taille, avec un unique anneau. L’anse circulaire était fermée. C’est une attache d’anse d’un chaudron, avec une barre de section ronde, un anneau circulaire au milieu ; l’anneau est fait d’un double tore, les extrémités sont décorées de triple tore. Un fragment de la tôle du récipient est conservé : il est fixé par 4 rivets encore en place. Le métal déformé entoure l’attache. Proche des nos précédents, cette attache a une section ronde qui la rapproche d’une attache d’Olympie231. Attache d’anse de forme triangulaire à anneau simple 168. Attache d’anse rivetée. Trouvée en octobre 1972, dans la zone à l’Est du sanctuaire. Inv. 4775232. Bronze, 14 cm. Fig. 462-465. Inédit. Anse de forme triangulaire, légèrement bombée, avec un anneau à 3 tores massif au centre pour l’anse. On note que le reste de l’anse en fer est encore dans la bélière. Ce type d’anse forme une petite série de quatre exemplaires à Delphes (n° 168 à 171). Selon A. Pariente, elles dérivent de la catégorie des attaches à ailes, comme les sirènes, d’origine orientale et imitées en Grèce. On en connaît également à Olympie233, où certaines ont les grandes dimensions de celles de Delphes.

223. Matthäus 2001, p. 172. 224. Blinkenberg 1931, n°712-713, p. 219, pl. 29. 225. Waldstein 1905, p. 289, pl. CXXXI, n°2074-2077. 226. Matthäus 2011, p. 115, fig. 13. D’autres exemplaires

viennent de Toumba à Lefkandi : Popham, Lemos 1996, pl. 46, 17 ; 70, 17. 227. Pariente 1987, II C1. 228. Matthäus 1985, n° 359-367, pl. 22-25, datés sans grande précision possible de la période chypro- archaïque.

229. Gauer 1991, Le 73 et suivants, datés des viiie et viie s. 230. Waldstein 1905, n° 2788, p. 329, pl. CXXXV : pour

A. Pariente, c’est davantage une applique décorative qu’une attache. 231. Gauer 1991, p. 190, Le 72, pl. 19,3. 232. Pariente 1987, III A1. 233. Herrmann 1966, p. 137, pl. 60. Le n° B 1681 fait 25 cm de large.

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169. Attache d’anse rivetée. Trouvée le 16 août 1895, hors du téménos, en contrebas des Épigones. Inv. 2891 ; 23799234. Bronze, 15 cm. Fig. 466-469. Perdrizet 1908, p. 78, n° 339, fig. 269. Anse de forme triangulaire, avec anneau massif au centre pour l’anse. 170. Attache d’anse rivetée. Trouvée le 22 mai 1895, hors du mur est du téménos, à la hauteur du temple d’Apollon. Inv. 2503235. Bronze, 21 cm. Fig. 470-473. Perdrizet 1908, p. 78, n°338, fig. 268. Anse de forme triangulaire, avec anneau massif au centre pour l’anse ; brisée à droite ; restes d’un fragment de l’anse en fer. 171. Attache d’anse rivetée. Trouvée le 23 oct. 1895, à la Lesché. Inv. 3201 ; 23696236. Bronze, 25 cm. Fig. 474-477. Perdrizet 1908, p. 78, n° 338 bis, sans fig. Anse de forme triangulaire, avec anneau à deux tores légèrement modelés. Un rivet bien visible d’un côté, mais pas de l’autre : l’objet a-t-il été réellement utilisé ? Les traces d’incisions en forme de V sur le dessus semblent accidentelles. Anses diverses, d’origine italique 172. Plaque d’attache d’anse. Trouvée le 25 juin 1895, au Nord du trésor d’Athènes. Inv. 2657237. Bronze, 26 cm. Fig. 478-481. Perdrizet 1908, 74, n° 295, fig. 244 ; Müller-Karpe 1959, p. 28, n. 7 ; Zancani-Montuoro 1980, p. 23, pl. XIII a-b ; Albanese Procelli 1993, p. 188 ; Aurigny 2011, p. 166, fig. 7 ; Baitinger 2013, p. 246, fig. 130 ; Aurigny 2016b, p. 165, fig. 8. Plaque d’attache grossièrement rectangulaire, épousant la courbe de la vasque ; en son milieu, anse circulaire fixe, de section ronde, avec empattement à la partie inférieure, étayé par deux tiges obliques. Des parallèles existent en Grèce, à Olympie notamment où ils ne sont pas récemment publiés238. P. Zancani-Montuoro a publié un exemplaire trouvé à Francavilla Marittima239, proche d’exemplaires de l’âge du fer retrouvés en Sicile orientale240 ; mais l’auteur fait justement remarquer que cela ne dit rien de l’origine du type de l’anse. Où ont donc été produits les exemplaires de Delphes ? 173. Plaque d’attache d’anse. Trouvée en 1902 à Marmaria. Inv. 23812241. Bronze, 13 cm. Fig. 482-484. Perdrizet 1908, 74, n° 296, sans fig. ; Zancani-Montuoro 1980, p. 23, pl. XIII a-b ; Albanese Procelli 1993, p. 188 ; Aurigny 2010, p. 239, fig. 50 ; Baitinger 2013, p. 246, fig. 130 ; Aurigny 2016b, p. 165, fig. 9. Cette anse horizontale fixe, de section ronde, est flanquée de deux tiges obliques formant un triangle à sommet courbe avec la plaque d’attache plate, de forme trapézoïdale. Cet objet peut être rapproché du précédent ; P. Zancani-Montuoro le donne comme comparaison à l’anse découverte à Francavilla Marittima, cité au n° précédent. En outre, le musée de Syracuse conserve quelques exemplaires242 provenant de Sicile, qu’on peut situer typologiquement entre les deux objets de Delphes. À Delphes, un autre exemplaire, ni nettoyé ni inventorié a été trouvé dans les travaux du musée en 1996243. Il y en a plusieurs à Olympie, publiés par H. Baitinger244. 174. Anse horizontale245. Inv. 23619. Bronze, 15 cm. Fig. 485-486. Aurigny 2016b, p. 163, fig. 5. Cette anse horizontale fixe est constituée d’une tige de bronze de section ronde, aplatie en ruban à chaque extrémité pour fournir une surface de contact avec le vase ; les extrémités étaient rivetées à la vasque par deux rivets. Ce type d’anse appar234. Pariente 1987, IIIA2. 235. Pariente 1987, III A3. 236. Pariente 1987, III A4. 237. Pariente 1987, IV, 1. 238. Furtwängler 1890, pl. 36, 645. 239. Zancani-Montuoro 1980, p. 23 et pl. XIII. 240. Un exemple de Giarratana et trois de Adrano : voir les réfé-

rences dans Zancani-Montuoro 1980, p. 23, n. 10, pl. XII. Albanese Procelli 1993, p. 188 : Musée Syracuse : voir 10882 dépôt de

Giarratana (Ragusa) et 2 complètes du dépôt de Mendelito de Adrano (Catane). 241. Pariente 1987, IV, 2. 242. Albanese Procelli 1993, p. 188, n. 393 : inv. 16963. 243. D’après les indications lisibles sur les caisses posées dans l’apothèque 5 du musée de Delphes. 244. Baitinger 2013, p. 244-251, fig. 125-129. 245. Pariente 1987, V A1.

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tient à une situle italique ou nordique : des parallèles sont connus, par exemple à Este246, où une situle de forme tronconique présente une anse exactement identique ; elle est datée de la période Este II B-C, vers milieu du viiie s. Au sein du groupe des cistes à cordons247 étudié par B. Stjernquist, ces anses appartiennent à la première série, celle des vases à anses fixes248, comme la ciste de Magny-Lambert249. Selon l’analyse de M.V. Giuliani-Pomes250, ce sont des situles des régions nordiques, de la civilisation de Hallstatt des viiie-viie s. Il n’est pas exclu que ce type d’anse provienne aussi de situle de bronze biconique ou d’un chaudron de bronze en tôle martelée de forme plus ouverte. 175. Anse horizontale. Sans n° d’inv. Bronze, 7,5 cm. Fig. 487-488. Inédit251. Anse horizontale fixe : elle est constituée d’une tige de bronze de section ronde, aplatie en ruban à chaque extrémité pour fournir une surface de contact avec le vase ; les extrémités étaient rivetées à la vasque par deux rivets. 176. Anse horizontale. Sans inv. Bronze, 7 cm. Fig. 489-490. Inédit252. Anse horizontale fixe : elle est constituée d’une tige de bronze de section ronde, aplatie en ruban à chaque extrémité pour fournir une surface de contact avec le vase ; les extrémités perdues étaient rivetées à la vasque. 177. Attache d’anse. Inv. 23815. Bronze, 4,3 cm. Fig. 491-492. Inédit253. Attache d’anse de section ronde, en forme de boucle verticale, parallèle à la vasque. Dans d’autres sanctuaires grecs, une pièce semblable existe à Pérachora254. Les comparaisons principales orientent plutôt vers une origine italique, ou hallstattienne. Cette attache d’anse peut être comparée tout d’abord à une pièce de Tarquinia255, qui illustre les premiers contacts entre le monde tyrrhénien et le monde oriental. D’autres comparaisons ont été proposées, en particulier avec les anses de cistes à cordons, comme celles présentées par B. Stjernquist256, au sein de sa seconde série, où les attaches reçoivent des anses mobiles257. B. Bouloumié en a présenté également258. À Este, des comparaisons sont possibles259. On rencontre donc ce type aussi dans le monde hallstattien, et dans ce cas à Hallstatt même, dans la nécropole qui a livré de nombreuses situles.

Commentaire Attaches d’anse en bobine260 Les nombreuses comparaisons que l’on a pu faire avec le matériel de Gordion sont évidemment essentielles dans une réflexion sur l’origine des récipients dont il ne reste que les anses. Il est remarquable que le seul tumulus MM ait livré autant de variété d’attaches en forme de bobines ; on comprend dès lors d’où les différents modèles trouvés à Delphes tirent leur origine. Si E. Akurgal avait déjà publié une phiale portant ce type d’attaches261, la publication du matériel des tumuli de Gordion par R.S. Young en offre de multiples exemples, réunis pour la plupart dans le tumulus MM262. Ces

246. Chieco Bianchi 1985, n° 1 p. 302, pl. XV b et pl. 204. 247. « Ciste a cordoni » en italien et « Rippenzisten » en allemand :

grands récipients à vasque cylindrique avec relief en côtes horizontales. 248. Stjernquist 1967, p. 42-63, pl. I-X. 249. Bouloumié, 1976, p. 2. 250. Giuliani-Pomes 1954. 251. Pariente 1987, VA2. 252. Pariente 1987, VA3. 253. Pariente 1987, VB1. 254. Payne 1940, pl. 69 n° 10, p. 164. 255. Giuliani-Pomes 1954, p. 160-1. 256. Stjernquist 1967, p. 63-94.

257. La plupart des exemplaires sont datés du dernier tiers du viiie s. à la fin du vie s. Stjernquist 1967, p. 105. 258. Bouloumié 1977 : situle de Ede, en Hollande, elle aussi d’origine hallstattienne. 259. Chieco Bianchi 1985, p. 303, milieu viiie s. 260. Cette catégorie se dit « bowls with swiveling ring handles and banded rim » en anglais. Young 1981, p. 126, fig. 80 (dessin de l’ensemble des bobines). 261. Akurgal 1961a, pl. couleur IIIa. L’auteur les date vers 700 av. J.-C. 262. Young 1981, pl. 66-67, n°MM 61, 63, 64, 68. Le tumulus MM est daté aujourd’hui vers 740. Voir Darbyshire, Rose 2011.

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exemples sont datés par R.S. Young de la fin du viiie siècle263, mais la popularité du type en Phrygie et dans le bassin méditerranéen lui a assuré une grande longévité, jusque dans la première moitié du vie siècle264. R.S. Young dresse une liste rapide, mais éloquente pour la popularité du type, des exemples trouvés à Gordion et ailleurs en Phrygie, en métal, terre cuite et bois. Alors que J.M. Birmingham pensait que ces « bowls » en bronze étaient issus de prototypes en bois265, R.S. Young explique de manière assez convaincante que la forme des anses en anneau ne peut avoir été inventée que pour le bronze, puisqu’elle eût été trop fragile dans un autre matériau266. La forme était pourtant connue aussi en bois ou en terre cuite. Les attaches étudiées ici proviennent de coupes peu profondes, sur lesquelles elles sont maintenues par des rivets, deux la plupart du temps, visibles sur le corps de l’attache. Un trou à chaque extrémité de l’attache permettait de maintenir une anse circulaire. En outre, l’attache se prolongeait sur la panse du vase par des tiges de section semi-circulaires décorées de barres perpendiculaires (comme le n° 153, fig. 427-428). La publication de Gordion permet aussi de faire un bilan des documents provenant des sanctuaires grecs267. Si cette publication assure de l’origine phrygienne de ces « bols », il est certain que les ateliers grecs en ont également produit en grand nombre : on en trouve à Delphes, à Olympie, à l’Héraion d’Argos, à Pérachora, à l’Heraion de Samos, à Éphèse. J.M. Birmingham explique leur présence dans les sanctuaires grecs par un « natural interchange of goods between neighbours »268 ; mais plus que sur les modes d’échange, il apporte une réflexion sur le chemin suivi par les objets d’origine phrygienne, ainsi que des productions d’autres origines, comme la Syrie du Nord par exemple. Il inclut en effet les sirènes et les protomes de taureau dans son raisonnement sur les trajets des objets. Or il soutient l’hypothèse que la route continentale à travers l’Anatolie a été la plus empruntée à l’époque de la puissance phrygienne, de 732 à 680 av. J.-C.269, alors qu’auparavant, dans la première moitié du viiie s., c’est plutôt la route depuis l’Urartu, par la Syrie et Chypre qui est attestée270. En changeant de lieu, ces récipients n’ont-ils pas changé de destination ? Alors que la filiation du type est certaine, il est intéressant de constater que ces « bowls », en Phrygie, ont été déposés dans de riches tombes, avec un mobilier funéraire évoquant le banquet. En Grèce, ces vases deviennent des offrandes dans les sanctuaires, ils sont offerts aux dieux, ou bien ils sont utilisés dans le rituel. Il n’est pas toujours facile de savoir quelle était leur destination précise, même si ces récipients portent en eux une référence implicite à l’image du banquet oriental ; il est certain que les références à la richesse, au pouvoir et au loisir, transmises par les instruments du banquet en Orient, sont encore attachées aux objets et jouent un rôle dans le souci de l’aristocratie grecque de se distinguer dans la société271.

Attaches en forme de barre À deux anneaux avec anse en oméga Les chercheurs se sont intéressés à l’origine de ce type d’attaches. Grâce à l’étude synthétique de H. Matthäus272, on sait que les attaches en barre, à section en forme de D, existent en Méditerranée orientale depuis le second millénaire, notamment en Égypte273 . Les attaches pouvaient être formées de deux palmettes recevant l’anse en oméga, ou d’une barre unique aux extrémités décorées de palmettes. Puis cette forme, dans sa version plus simple sans palmette, se diffuse au Levant et à Chypre à la fin du second millénaire. On connaît à la fois la barre de petite taille, à Zinçirli par exemple, et des exemplaires beaucoup plus longs, avec un décor de tores et des anses en oméga elles

263. Mais qu’il faut remonter au moins vers 740. Comme on n’a pas trouvé d’exemplaires plus anciens dans d’autres régions d’Orient, on peut conclure à une invention phrygienne. Pour le problème de la chronologie des tumuli de Gordion et la datation au troisième quart du viiie s., voir infra, p. 161-162 (chapitre 7.2). 264. Young 1981, p. 232. 265. Birmingham 1961, p. 189. 266. Young 1981, p. 230. 267. Id., p. 229-230. 268. Birmingham 1961, p. 190. 269. Id., p. 195.

270. H. Matthäus a prouvé, grâce à l’étude de trois types d’anses différents, que la route maritime entre Chypre, la Crète, très probablement Malte, la Sicile et la Sardaigne était restée empruntée pendant les xie -ixe s. : Matthäus 2001, p. 176. 271. Dentzer 1982, p. 444 et suivantes. 272. Matthäus 2001, p. 170-174 : à partir d’un exemplaire trouvé dans le trésor de Monte Sa Idda en Sicile, il fait le bilan des attaches de ce type connues dans le bassin méditerranéen. 273. Id., forme connue au Nouvel Empire. Voir aussi Barnett 1974, p. 21-22.

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aussi plus travaillées. La plupart des exemples datent du viiie s. av. J.-C., au moment où ce type plus long est élaboré. Ur, Nimrud274 et Al-Mina en ont livré : ce type serait dû aux ateliers phéniciens275. C’est ce type qui se diffuse à Chypre, à côté de quelques exemplaires de petite taille et de nombreuses variantes ajoutant des éléments décoratifs. Chypre en a livré dix-sept, de la fin de l’âge du bronze au chypro-archaïque II (vie s.). En Grèce, ces attaches en forme de barre sont toutes de petites dimensions : à une dizaine en Crète s’ajoutent seulement six exemplaires du continent et des îles276 ; les anses en forme de barre sont plus nombreuses en Méditerranée occidentale, Italie, Sardaigne et péninsule ibérique qu’en Grèce. Bien que de nombreux exemplaires puissent être datés avant le viiie s. av. J.-C., c’est seulement à partir de ce moment qu’on peut dater les documents de la péninsule ibérique ; or, c’est grâce à la présence phénicienne que cette diffusion est possible. En revanche, il est intéressant de noter que contrairement au type précédent, aucun exemple ne semble avoir été trouvé en Phrygie ; il s’agit donc d’une production différente, qui suit des réseaux de diffusion propres. Toutefois, l’exemplaire de Samos B 1397 est analysé par U. Jantzen comme une production phrygienne277, et classé avec les autres fragments d’anses, en particulier ceux du type précédent. Mais ce fragment est un peu différent des attaches simples à deux anneaux que H. Matthäus a recensées : c’est une bande de métal plus longue, décorée de petits tores aux extrémités et au milieu, qui a quelque chose à voir avec la variante que nous présentons ensuite. Mais rien ne justifie vraiment l’identification de cet objet comme une production phrygienne. Delphes, comme la Crète, reçoit ce type d’anses aussi bien que le précédent qui, de la Phrygie, suivait une voie d’acheminement différente. Dans le cas de ces attaches, pour les deux variantes, il semble que leur diffusion en Orient au viiie s. soit due au développement de la toreutique phénicienne, comme on l’a vu pour Nimrud, et comme c’est aussi le cas pour Chypre. La carte de répartition (carte 8, fig. 493) reflète donc logiquement celle de l’expansion commerciale et coloniale phénicienne, bien différente, comme on l’a vu, des réseaux qui existent à partir de l’Anatolie. Si les anses sont liées à l’expansion phénicienne en Espagne, cette explication ne convient pas à Delphes qui n’a pas reçu massivement d’objets phéniciens. Il faut donc examiner plus en détail le contexte pour expliquer la présence de ces objets. Il n’est pas facile de savoir où ont été produits les exemplaires de Delphes, ni de quand ils datent exactement. Rappelant des modèles orientaux, ils présentent aussi des formes connues à Chypre et en Crète. Le rapprochement avec les anses de vases provenant de la Grotte de l’Ida est particulièrement intéressant et pourrait offrir encore un exemple des relations très étroites entre Delphes et la Crète. On y trouve deux types d’anses, en fonte pleine comme les exemplaires du Proche-Orient, qui sont sûrement des importations orientales, et en fonte creuse remplie de plomb. Ces exemplaires remplis de plomb, en cours de publication, offrent un parallèle très précis à l’exemplaire de Delphes n° 160 et doivent être de fabrication locale, vu la technique278. La documentation disponible à Delphes pour les viiie et viie s. indique le rôle important de Chypre et de la Crète dans l’arrivée d’objets orientaux et orientalisants à Delphes : il s’agit par exemple des supports ajourés à quatre faces, ou des boucliers crétois. Les circulations d’objets venus d’Orient sont donc multiples et ne sont sans doute pas issues de voies commerciales bien définies, mais sont plutôt soumises au choix et à la demande des dédicants grecs. Il faut enfin considérer les exemplaires trouvés dans la péninsule ibérique, car ils bénéficient d’une étude ancienne mais importante279 ; quelles que soient les circonstances des découvertes, les attaches partagent une caractéristique qui les distingue des productions du reste du bassin méditerranéen. L’attache, en forme de ruban métallique à section en forme de D, se termine à chaque extrémité par une main tendue aux doigts relativement allongés280 ; les attaches épousent presque la moitié de la circonférence du bassin, et la vasque est peu profonde. Dans ce cas, s’il paraît sûr que le type a été apporté en même temps que le commerce phénicien s’est étendu, une production locale s’est développée peut-être pour une fonction rituelle précise.

274. Au moins 14 coupes trouvées dans la chambre des bronzes du palais N-O d’Assurnasirpal. 275. Matthäus 2001, p. 172 ; Conservées au British Museum : Barnett 1974, groupe 3, p. 22. 276. Boardman 1965 : l’auteur montre, à propos de l’anse isolée d’Al-Mina, la transmission des anses en forme de barre avec anneaux aux dinoi grecs.

277. Jantzen 1972, B1397, p. 54-55, pl. 50. 278. Matthäus 2011, p. 123, fig. 34 ; le bronze fondu avec rem-

plissage de plomb rappelle la construction des appliques de chaudron archaïques. 279. Cuadrado Diaz 1956, p. 52-84. 280. Quelques exemplaires sont connus à Delphes.

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La grande anse en oméga n° 164 peut être considérée à part : en effet, elle correspond aux anses des situles de type égyptien. H. Matthäus a rappelé l’importance des objets égyptiens au premier millénaire, qui permettent de réévaluer leur influence sur le monde grec281. En outre, les situles égyptiennes forment une des catégories d’objets qui se diffusent d’un bout à l’autre de la Méditerranée et qui permettent d’apprécier la mise en place et l’évolution des grands réseaux transméditerranéens aux viiie et viie siècles282. Si un fragment de situle était identifié à Delphes, alors le sanctuaire confirmerait sa place dans ces grands réseaux à date haute ; il viendrait également ajouter un élément remarquable au groupe des objets égyptiens, fort rares à Delphes283. Attache d’anse à côte284 à un seul anneau Ce type poursuit la catégorie des attaches de forme allongée, dans ce cas plus massives285, et pourvues d’un seul anneau (nos 165-167) ; elles n’étaient donc pas associées à des anses en oméga qui requièrent deux anneaux. Cette variante compte peu d’exemplaires. W. Gauer souligne son importance dans le développement des attaches grecques du haut-archaïsme, au moins égale à celle des attaches ailées ou en forme de sirènes286. Il considère que c’est une forme de base sur laquelle se sont développés ensuite les éléments non figurés comme les cylindres et les bobines, ainsi que des éléments figurés, avec un décor de têtes de lions ou de taureaux. Mais les attaches de cette variante sont particulièrement longues, si bien qu’elles rappellent davantage les documents chypriotes, les coupes qui recevaient une attache s’étendant sur près de la moitié de la vasque287, datées du chypro-archaïque. Delphes a livré deux documents qui se distinguent encore dans la décoration : tandis que inv. 23798 n’est animé plastiquement que de bourrelets, l’attache inv. 13774 reçoit un décor de deux groupes de filets, comme on le voit sur les exemplaires d’Olympie ou de Chypre. D’après les datations proposées par H. Matthäus et W. Gauer, la seconde moitié du viie s. paraît la plus vraisemblable. En l’absence d’étude très exhaustive de ces documents, il est difficile d’en proposer une typologie plus approfondie. Attache d’anse de forme triangulaire à anneau simple Pour ce type comme pour le précédent, il faut souligner combien certaines formes ont plu, qu’elles aient été employées sans décor ou ornées d’éléments zoomorphes. C’est le cas des attaches triangulaires, dont plusieurs spécialistes rappellent qu’elles dérivent de la catégorie des attaches à ailes, en forme de sirènes ou portant des protomes de taureau288. Comme on n’en connaît d’autres exemplaires qu’à Olympie, il faut sans doute y voir une production grecque, de la fin du viiie s. ou du début du viie s. H.-V. Herrmann les mentionne sans presque les commenter, et W. Gauer ne les reprend pas ; très peu d’informations sont donc disponibles sur ce type.

Anses diverses, d’origine italique289 Cette partie regroupe des anses qui ne sont pas formellement identiques, mais qui partagent le fait d’avoir une origine italique. Nous évoquerons successivement les types du chaudron et de la situle qui sont représentés ici. Les nos 172-173 (inv. 2657 et 23812) sont deux variantes d’un type d’anse de chaudron très particulier, qui n’existe, dans l’état actuel de nos connaissances, qu’en Italie du Sud et en Sicile, et qui a reçu l’appellation de type d’anse « Adernò- Giarratana »290. Cette forme, qu’on connaît donc à Delphes et à Olympie, n’est pas caractéristique des formes du géométrique tardif, mais est apparentée à des formes plus anciennes291. Il est possible de différencier trois types parmi ces anses : le n° 172 illustre le type A, avec une décoration de lignes ondulées sur la face supérieure, tandis que l’attache n°173 appartient au type C, originaire d’Italie du sud 281. Matthäus 2011, p. 115, note 31. 282. Verger, Pernet 2013, p. 196 (carte). Il faut ajouter à la carte,

pour le monde grec, l’exemplaire de Crète et les fragments de Lefkandi. 283. On remarque la même rareté à Olympie. Voir le chapitre 8.1, p. 146. 284. « Leistenattaschen ». 285. Mais les exemplaires chypriotes classés par Matthäus 1985, n° 359-366, sont aussi de taille importante.

286. Gauer 1991, p. 34. 287. Matthäus 1985, n° 365-367, p. 129-130, pl. 24-25. 288. Herrmann 1966, p. 137, pl. 60 ; Pariente 1987. 289. Aurigny 2016b. 290. Müller-Karpe 1959, p. 29. 291. Ibid.

APPLIQUES DE VAISSELLE

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plutôt que sicilien, comme le A. En Sicile, ce type d’anse a été trouvé seulement dans des dépôts votifs292 ; leur présence dans les deux sanctuaires panhelléniques majeurs renforce leur interprétation votive. Toutefois, les exemples de Francavilla Marittima ont été trouvées dans la zone de la nécropole et sont vraisemblablement funéraires. Un autre exemplaire encore provient de Sardaigne, mais est privé de tout contexte293. En Sicile, ce type d’anse est associé à d’autres objets dans le groupe d’Adernò294, qui correspond au dernier groupe des champs d’urnes chez Müller-Karpe, à la fin du viiie et au début du viie s.295 : on trouve notamment une pointe de lance en forme de feuille, ou une fibule faite de quatre enroulements de bronze fixés sur une plaquette de bronze. Or, on a retrouvé à Delphes de tels objets296, ce qui est peut-être le signe de relations régulières entre le sanctuaire pythien et la Sicile. C’est également un argument en faveur de l’origine sicilienne de ces objets de Delphes. La diffusion relativement importante en Sicile et la variété morphologique des objets constituent des arguments en faveur d’un lieu de fabrication du type en Sicile297. Ce type de document apporte une preuve, pour un certain nombre de chercheurs, de la permanence des relations entre le monde grec d’une part et la Sicile et la péninsule italique d’autre part, pendant le viiie s., mais aussi pendant les deux siècles précédents298 et nourrit les réflexions sur la question des relations « précoloniales » de la Grèce avec l’Italie du sud et la Sicile299. D’autre part, quatre fragments d’attache ou d’anses sont des éléments de situle ou de chaudron dont l’origine semble également italique. Les trois premiers, n° 174-176, sont des fragments d’anses, fixées au corps de la situle par les deux rivets qui subsistent. Des parallèles sont connus à Este, dans la nécropole de Vénétie du sud ; une situle de la tombe n° 236 présente cette anse à l’extrémité allongée fixée par deux rivets, et qui porte deux pendeloques300. La même tombe a livré une petite attache d’anse en forme de boucle, assez semblable à notre n° 177 : il semblerait que parviennent à Delphes des documents associés aussi dans la péninsule italique. La tombe 236, appartenant à la période Este II, peut être datée de la seconde moitié du viiie s.301. La catégorie des cistes à cordons a été étudiée en détail par B. Stjernquist, qui distingue les cistes à poignées fixes et les cistes à anses mobiles. Dans la première catégorie, des cistes trouvées en Gaule permettent aussi d’illustrer les liens avec l’Italie à l’âge du fer : c’est le cas de la ciste de Magny-Lambert, en Côte d’Or, ou de Urtenen en Suisse. Les extrémités des poignées de ces cistes, rivetées à la panse, sont très semblables aux exemplaires de Delphes ; en outre, la ciste de Magny-Lambert, objet à part, daté du viie s., est ornée de pendeloques attachées aux anses, dont Delphes possède peut-être un équivalent302. Les anses fixées par deux rivets peuvent aussi venir de chaudrons ou d’urnes biconiques découvertes dans les tombes villanoviennes de l’Étrurie et du Latium au viiie s. av. J.-C. On en connaît en particulier dans les tombes de Véies. Le cas d’une tombe de Véies de la fin du viiie siècle est intéressant, car il montre l’apparition de nouvelles formes. La tombe 871 (v. 720), d’un riche guerrier, contenait un chaudron biconique portant des anses comparables à celles de Delphes et, entre autres, une situle en tôle de bronze en forme de tête de lion de fabrication assyrienne303. Le chaudron à anses horizontales est donc contemporain des importations orientales en Étrurie à la fin du viiie s.

292. Albanese Procelli 1993, p. 187. 293. Id., p. 188. 294. Appelé aussi « Finocchito-Adernò ». 295. Müller-Karpe 1959, p. 228 : un grand tableau synchro-

nique montre les correspondances chronologiques que l’auteur a essayé de faire entre la Grèce, l’Italie, la Sicile, et la zone transalpine. Toutefois un consensus s’est dégagé pour considérer que les dates de l’âge du fer proposées par Müller-Karpe étaient trop basses : Bartoloni, Delpino 2005. 296. Lances : inv. 3206, 3940 (nos 184-185) ; fibule inv. 6400 os (n 306). 297. Id., p. 189. 298. Müller-Karpe 1959, p. 29. On en a trouvé aussi dans le sanctuaire de Bitalemi de Gela, où l’objet est associé à des éléments du corinthien ancien, dans le dernier tiers du viie s. ; un autre fragment

provient du sanctuaire de Démeter sotto S. Biagio d’Agrigente ; voir Albanese Procelli 1993, p. 188, qui cite aussi un exemplaire provenant de Sardaigne, sans contexte. 299. Infra, p. 151-152. 300. Chieco Bianchi 1985, n° 1 p. 302, pl. XV b et pl. 204 ; Giuliani-Pomes 1954, p. 172, fig. 9 (mais elle date cette situle de la fin viie-début vie s.). Müller-Karpe 1959, pl. 98. 301. Müller-Karpe 1959, p. 97 et 228. 302. Inv. 24880, fragment de pendeloque de bouclier en bronze : Demangel 1926, 53, fig. 61 ; Kilian 1977, p. 438, n. 45 ; Kilian 1975b, p. 122, fig. 3 ; Rolley 1984b, passim ; Geiger 1994, n° 47, p. 74 et pl. 53 ; Rolley 1995, p. 394, fig. 2a ; Briquel 1998, p. 146, n. 12 ; Aurigny 2016b, p. 162, fig. 2. 303. Müller-Karpe 1974, p. 89 et suivantes, pl. 23, 2.

Chapitre 5

Phiales et vases

Catalogue 178. Phiale, dite « phiale du siège ». Trouvée le 19 mai 1903 à Marmaria, « au sud du temple d’Athéna Ergané ». Inv. 4463. Bronze, 17 cm. Fig. 494-499. Homolle 1904, p. 14 ; Perdrizet 1908, p. 23-25, pl. 18-20 ; et p. 90, n°413 ; Poulsen 1920, p. 65-66, fig. 12 (dessin de Fonseca, déroulé) ; Rolley 1979, p. 28-29, fig. 35 (photo et dessin de A. Platon) ; Markoe 1985, p. 205-206, 320323, G4 ; Rolley 1991, p. 156-157, n° et fig. 21 (dessin A. Platon) ; Ström 1992, p. 49, 60 ; Deszö 1993, n° 189 ; Deszö 1998, p. 33, 63, M.2.23 ; Padgett 2004, p. 126, n. 1 ; Partida 2006, p. 803 ; Fontan 2007, n° 175, p. 346, Hasserodt 2009 p. 375, n°20, pl. 9,2-3 ; Aurigny 2010, p. 240, fig. 54. Phiale à ombilic plat et à décor de languettes. Manquent quelques morceaux de métal, en particulier un fragment du char qui existait dans la publication de P. Perdrizet. La coupe est assez profonde, le décor fait au repoussé superficiel ou plus accentué, les contours sont cernés. Le détail de l’incision est très fin. La zone centrale de la coupe, un cercle divisé en trois zones, est entourée de languettes, puis d’une tresse. La scène figurée est placée sur la panse : on y voit le siège d’une ville, que défendent quatre archers. La ville a la forme d’un grand panier, l’aspect fortifié étant rendu par le jeu d’incisions quadrillées. Les assiégés ont aussi pour deux d’entre eux un décor de quadrillage sur leur pagne, les deux autres ayant un pagne décoré de lignes horizontales (le premier en partant de la droite) ou verticales (le troisième en partant de la droite). Tous archers, ils portent un carquois, leurs cheveux sont faits de stries verticales, ils ont le bras tendu. À droite, un assaillant porte une coiffure haute, proche d’une des couronnes pharaoniques1 (est-ce le « roi » ?), et monte à une échelle. Il porte un pagne, avec un ourlet en haut et en bas, couvert de lignes verticales ondulées ; le fourreau de son épée pend à sa ceinture. Suit un archer, portant un pagne quadrillé à ourlet, et un carquois haut orné de stries verticales. Ensuite vient le groupe du char tiré par un sphinx ailé qui a la même coiffure que le premier assaillant. Sur le char, on voit un archer tirant vers la gauche, vêtu d’un pagne à traits verticaux, armé d’un arc et d’un grand carquois ; à côté de lui, le cocher (très abîmé), vêtu d’un pagne à stries verticales, les deux bras tendus, tenant les rênes qui vont jusqu’au timon recourbé. Le sphinx aux ailes déployées, présentant deux rangs de plumes, porte un tablier2 entre les pattes. Il s’avance vers le soldat suivant, qui porte un long pagne à écailles, une ceinture à nœud, et un fourreau d’épée pendant à la ceinture ; son torse est recouvert d’un cercle orné de bossettes au repoussé (un bouclier ?). En sortent son bras gauche tenant l’arc et les flèches, ainsi que son bras droit, dans une manche courte et large, tenant une sorte de bâton au-dessus de sa tête. Puis vient un archer, le pied gauche avancé levé : il porte un pagne quadrillé, un carquois haut ; il est en train des tirer des flèches. Devant lui, un assaillant tombe d’une échelle appuyée sur le mur de la ville ; le bouclier représenté dans la partie supérieure suggère que l’attaquant l’a lâché dans sa chute. 1. Ce couvre-chef est porté aussi par des chasseurs ou des personnages sacrifiant, comme c’est le cas sur la phiale d’Olympie inv. 7941 (Markoe 1985, p. 204).

2. Détail que l’on trouve sur des ivoires syro-phéniciens : pectoral de Ziwiyé, Parrot 1961. p. 142 ; ivoires d’Arslan Tash.

BRONZES DU HAUTARCHAÏSME À DELPHES

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Bien que ce type de coupes phéniciennes à décor au repoussé soit connu de l’Assyrie à l’Étrurie, où elles sont plus nombreuses qu’en Grèce, cet exemplaire n’a que peu de parallèles très précis3. Pour la forme particulière, on peut citer une coupe en argent doré de la tombe Bernardini4, mais aussi une coupe de bronze du Princeton University Art Museum5, qui présente un décor proche de notre coupe. Enfin, une coupe d’Olympie constitue aussi un bon parallèle, surtout pour le décor6. La scène de prise de ville se retrouve sur une coupe d’Amathonte7, ainsi que sur des coupes du palais de Nimrud8, en particulier celle de la planche 68 de la publication de Layard en 1853. Esquissant un rapprochement entre les boucliers à protome et les coupes de bronze de Nimrud, E. Kunze compare le style de ces coupes assyriennes avec la coupe découverte à Delphes, qui porte comme principal décor une ville assiégée : avec un style de figures à grosse tête, elle est très proche d’une coupe de Nimrud un peu à part et d’une coupe d’Olympie9. Il utilise quelques éléments iconographiques précis de cette phiale : d’abord, il montre l’utilisation du bouclier rond à omphalos10. Ensuite, le couvre-chef du sphinx, interprété comme un casque, le rapproche de l’iconographie hittite, car les sphinx grecs portent rarement un casque11. La datation de l’objet n’est pas facile, mais il existe quelques éléments chronologiques pour situer ces coupes : les coupes en bronze sont antérieures aux coupes en argent, dont la production ne commence que vers 700 av. J.-C. En outre, celles dont le médaillon central est orné d’une rosace constituent le groupe le plus ancien12. Le parallèle avec le bol de Princeton suggère une date à la fin du viiie s. 179. Phiale à omphalos. Inv. 2651, trouvée le 21 juin 1895 à l’angle sud-est du téménos d’Apollon. H. 4 cm ; diam 16 cm ; omphalos H 0,6, diam 3,5. poids 69 g. Fig. 500-501. Perdrizet 1908, p. 90, n° 416, fig. 305, Hasserodt 2009, p. 426, n° 136, pl. 14,2-3 ; Aurigny 2016c, p. 33, fig. 15. La coupe est recouverte d’une corrosion verte et une bande de (corrosion) noire. Environ un tiers de la coupe est conservé en un seul morceau. Petits trous dans la paroi. Deux fragments de fond et trois fragments de panse appartiennent à la même coupe. Le bord est légèrement épaissi. La lèvre est un peu arrondie et revient un peu vers l’intérieur. La paroi est lisse. L’omphalos forme un angle par rapport à la panse et son arrondi est très plat. L’omphalos est entouré par trois filets concentriques qui ne sont modelés qu’à l’intérieur de la coupe (en tout 5 mm de haut et de large). Près du bord, il y a un trou de suspension. La coupe a des parallèles à Gordion, dans les tumulus P et MM13. 180. Phiale à omphalos. Inv. 5284. Bronze. H. 5,5 cm ; diam. 15 cm. Diam fond 5,5 cm. omphalos H 1,5, diam. 2,4. 163 g. Fig. 502-503. Demangel 1926, p. 47, fig. 56, Hasserodt 2009, p. 410, n° 56, pl. 12, 1-2 ; Aurigny 2016c, p. 33, fig. 16. La couleur de la coupe est vert foncé, le métal est en bon état. Il y a quelques petits trous dans la paroi ; il manque environ un quart de la coupe et un fragment du bord. De l’autre côté, trois petits trous circulaires sont conservés, qui devaient servir à placer l’anse. La coupe est profonde ; le bord est épaissi et la lèvre légèrement arrondie à l’intérieur. La paroi est un peu aplatie au fond. L’omphalos est en forme de cône pointu. Un parallèle exact vient de Gordion14, daté du début du viiie siècle. 181. Phiale à ombilic. Trouvée en 1903 à Marmaria. Inv. 27161. Bronze, 15 cm (diamètre restitué de 15,5 cm). Fig. 504-505. Perdrizet 1908, p. 90, n° 420, fig. 30715, Hasserodt 2009 p. ; Aurigny 2016c, p. 33, fig. 17. Fragment de phiale à ombilic assez plat, entouré d’un large filet strié ; autour, des poissons sont gravés. La phiale porte trois rangs d’excroissances rondes, qui ne vont pas jusqu’au bord ; le rang inférieur est constitué de formes allongées en pétales.

3. On ne peut que regretter que la présence de cet objet à l’exposition « La Méditerranée des Phéniciens », qui s’est tenue à Paris en novembre 2007-avril 2008, n’ait pas été l’occasion d’une étude et d’un commentaire particuliers d’un exemplaire pourtant assez différent des autres coupes présentées. 4. Canciani, von Hase 1979, n° 17, plus petite. 5. Stephen Gavel in Padgett 2004, n°9, p. 124-126 : le char tiré par un sphinx ailé, comme sur la coupe de Delphes et d’Olympie, est un indice d’une reprise plus récente des modèles connus à Nimrud, considérés comme des productions de Syrie du Nord. 6. Inv. 7941, conservée au MNA : Markoe 1985, p. 204-205. 7. B.M. 123053, Markoe 1985, Cy4, p.172 et pl. 249. 8. Une cinquantaine de ces coupes, conservées au British Museum, proviennent d’un trésor trouvé dans les magasins du palais de Nimrud :

cette cachette rassemblait des objets de styles différents, sans leur contexte d’origine qui ne facilite pas le classement à l’intérieur de ce groupe hétérogène. 9. Kunze 1931, p. 65. 10. Id., p. 60. 11. Id., p. 180. 12. Markoe 2007, p. 169. 13. Young 1981, p. 16, P25, pl. 10 ; p. 145, MM 139-145, pl. 72. Voir aussi Sideris 2016, p. 14. 14. Young 1981, tumulus W, p. 206, W17, fig. 124 et pl. 90E. 15. Partida 2006 : l’auteur renvoie à ce numéro de Perdrizet 1908 (n° 420) pour la coupe inv. 8404, qui est un autre objet.

PHIALES ET VASES

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Si les parallèles parfaitement exacts sont difficiles à trouver, certains exemplaires découverts à Gordion16 prouvent que ce type est phrygien, et qu’il était en usage au début du viie siècle. En revanche les poissons gravés, inconnus dans les objets de Gordion, pourraient être considérés comme une addition grecque. 182. Phiale en « lotus ». Trouvée dans les années 1920 à Marmaria. Inv. 8404. Bronze, 20 cm. Fig. 506-507. Demangel 1926, p. 94, fig. 102 ; Luschey 1939, p. 121, n° 5, Hasserodt 2009, p. 411, n° 63, pl. 12,4 ; 13,1) ; Aurigny 2016c, p. 34, fig. 18. Coupe en forme de fleur de lotus. Au centre, un omphalos en relief, fait dans la même feuille que le vase. Les pétales sont traités en relief et pas seulement incisés dans le métal. Les bords de la coupe sont presque droits. Forme particulière des phiales en feuilles, la phiale à feuille de lotus est une forme courante à l’époque archaïque en Grèce. Ces phiales ont été offertes en grand nombre dans les sanctuaires grecs, à partir de la fin du viie s. jusque au vie, voire au ve s.17 183. Phiale à godrons. Inv. 7638 ; 26869. Bronze, 15 cm. Fig. 508-510. Hansen 1960, fig. 47 p. 405 ; Sciacca 2005, p. 85, De 1, fig. 112 ; Hasserodt 2009, p. 371, n°1, pl. 4,3. Phiale de bronze, recomposée de plusieurs fragments, en tôle de bronze martelée. Le rebord est un peu épaissi ; le fond est plat, avec un grand omphalos semi-circulaire inscrit entre deux cordons ; on compte dix-neuf godrons sur la panse. F. Sciacca classe ce vase comme variante du type A2. Le grand omphalos est de tradition phrygienne, tandis que le nombre réduit de godrons est plutôt de tradition syrienne ; d’après les parallèles, il doit se situer dans la première moitié du viie s.18 184. Phiale à omphalos et godrons. Trouvée entre le mur ouest du téménos et le trésor d’Athènes, 8 mai 1895. Diam. 16 cm ; H. : 4,5 cm. Bronze. Fig. 511-512. Perdrizet 1908, p. 90, n° 418, fig. 306 ; Hasserodt 2009, p. 374, n° 16, pl. 6,1. Cette phiale à omphalos est décorée de seize godrons plastiques : 8 en forme de gouttes ont la pointe tournée vers le bord légèrement épaissi de la coupe ; 8 autres, à la base large, pointent vers le bas. Un petit cercle entoure l’omphalos légèrement proéminent. D’après Hasserodt, son origine pourrait se trouver en Asie mineure et les parallèles, notamment les coupes en argent des fosses de l’Aire19, indiquent une date aux viie-vie siècle. 185. Aryballe. Trouvé le 24 avril 1896, sous l’Église Saint-Nicolas (en contrebas du théâtre). Inv. 3433. Bronze, 5,7 cm. Fig. 513-514. Perdrizet 1908, p. 92, n° 436, fig. 314 ; Rolley 1991, p. 165, n° 31 ; Partida 2003, p. 453, n° 789. Aryballe piriforme : le pied est très mince, la panse rebondie, le col droit et la lèvre horizontale, débordante ; on remarque un décor de filets au milieu de la panse, ainsi que l’arrachement circulaire de l’anse qui était faite à part. Dans le domaine de la céramique, ce vase ressemble aux vases protocorinthiens du 3e quart du viie s. Les vases miniatures en bronze sont bien attestés dans les sanctuaires grecs.

Commentaire Coupe décorée Il n’y a à Delphes qu’un seul exemple de coupe caractéristique de la production phénicienne décorée au repoussé, mais c’est en même temps un exemple ancien et dans un bon état de conservation. Les coupes phéniciennes faisaient la réputation des artisans phéniciens et leur célébrité est attestée par la diffusion de ces objets dans les sanc-

16. Par exemple les « petaled bowls with decorated omphalos »,

Young 1981, p. 131, MM 70-73, pl. 68 : mais ces récipients ont un omphalos très saillant. Plus proche serait un « omphalos bowl » à décoration en relief, trouvé dans le tumulus W : p. 204, W 10, pl. 89.

17. J’ai choisi de présenter cette coupe dans ce chapitre parce qu’elle peut appartenir à la fin du viie s., mais je partage l’avis de Valeria Meirano qui en fait un objet plus récent. 18. Sciacca 2005, p. 289 et suivantes. 19. Amandry 1991, p. 208 (deux phiales d’argent).

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BRONZES DU HAUTARCHAÏSME À DELPHES

tuaires grecs (carte 9, fig. 515) et par les sources littéraires20. Les travaux de Glenn Markoe21 sur cette production spécifique de coupes nous permettent de situer précisément celle de Delphes : elle peut être datée de la fin du viiie s. par comparaison avec d’autres documents ; mais, dans la série des coupes en bronze, la présence d’une rosace centrale la place plutôt parmi les exemplaires anciens, dont certains exemples de Lefkandi remontent au xe s. av. J.-C.22. D’autres coupes du même type, de forme assez creuse, avec la rosace centrale et une frise décorée, sont conservées au Metropolitan Museum à New-York23 ou encore au musée de Téhéran24 : celle de New-York qui provient de la collection Cesnola, donc de Chypre, est daté entre 850 et 750 av. J.-C.25. Les découvertes des coupes dans les tombes et dans les contextes de la péninsule italique donnent des dates vers la fin du viiie ou le début du viie s.26 Selon la chronologie établie par G. Markoe, les coupes G3, G4 (Delphes) et G7 sont de la même période, un peu après G1, même si elles lui sont liées par le style, la technique et le format27. Le médaillon en rosette et le registre décoré unique appartiennent à la période II, et ce type est apparenté à un groupe de coupes de Nimrud28 ; en outre, on note à cette période l’introduction de traits égyptisants. Les coupes de Nimrud sont à mettre en relation avec le règne de Sargon II (722-705), qui constitue un terminus ante quem. Le décor de cette coupe est unique, bien que l’on ait cherché à faire toutes les comparaisons possibles avec des scènes connues ailleurs. Cette représentation narrative fait partie des scènes les plus élaborées du corpus des coupes décorées : on rencontre le plus souvent des défilés ou des processions sans véritable scène29. Vu l’importance de la production, il est possible de classer ces coupes selon des centres régionaux : tandis qu’un atelier d’artisans phéniciens installés à Chypre produit des coupes avec un goût marqué pour les motifs assyriens, un autre groupe bien individualisé est celui des coupes produites en Étrurie. Il est plus difficile de savoir où ont été produites les coupes retrouvées sur le sol grec. La carte de répartition produite par G. Markoe (carte 9, fig. 515) frappe d’emblée par le fait que ces coupes, sauf celle de Meggido, n’ont pas été retrouvées sur la côte levantine, dans les villes phéniciennes30 ; en revanche, l’ensemble des découvertes permet d’avoir une bonne idée de la circulation de ces coupes. L’île de Chypre joue un grand rôle, tant dans leur distribution que dans leur fabrication, comme on l’a vu ; puis Rhodes et la Crète sont les étapes suivantes, avant les îles de l’Égée31, Athènes, la Grèce centrale32 et le Péloponnèse d’un côté, et la péninsule italique de l’autre. On note que cette répartition est différente de celle des œnochoés en métal phéniciennes, que l’on ne trouve pas en Grèce33. L’absence de ces coupes dans les régions où les Phéniciens étaient établis, leur présence dans des sanctuaires grecs ou des tombes étrusques sont interprétées par G. Markoe comme le signe d’une fabrication réservée à des destinataires étrangers, avec une forte valeur de prestige34. Elles étaient utilisées comme cadeaux réservés à une élite, dans un but diplomatique au sens large, pour sceller des relations commerciales. Les coupes découvertes en Grèce illustrent un autre moment de la destinée de ces objets : comme la grande majorité a été retrouvée dans des contextes de sanctuaires35, on peut en conclure qu’elles ont été offertes par leurs propriétaires grecs aux divinités. G. Markoe prend l’exemple de la coupe de Delphes, retrouvée dans le sanctuaire d’Athéna, près de l’autel d’Athéna Ergané36, pour affirmer le lien de ces coupes avec le culte lui-même37. La présence de cette coupe dans le sanctuaire d’Athéna n’est sans doute pas exclusive d’une autre explication : un grand personnage, propriétaire d’une coupe issue de cette production prestigieuse, conscient de la valeur attachée à cet objet, a souhaité l’offrir à Athéna pour honorer la déesse, et montrer sa piété et ses relations aux yeux de tous.

20. Markoe 2007 rappelle les témoignages bibliques (Rois I, 7, 46-47), les documents assyriens, ainsi que les mentions dans l’Iliade et l’Odyssée de la vaisselle précieuse phénicienne (Iliade XXIII, v. 741 et suivants). 21. Markoe 1985, Markoe 1992, Markoe 2007. 22. Popham, Lemos 1996, pl. 134 (dessin), 145 (photo). 23. Inv. 74.51.5700. 24. Inv. 15198. 25. Karageorghis 2000, n° 306, p. 187-188. 26. Markoe 1992, p. 65. 27. Markoe 1985, p. 149-150. 28. Layard 1853, pl. 64, 65. 29. Markoe 2007, p. 168. 30. Markoe 1992, p. 65 ; Markoe 2007, p. 172.

31. On remarque aussi que la côte de l’Asie Mineure n’a pas livré de telles coupes. 32. Les coupes découvertes dans une riche tombe de Tragana, en Locride orientale, apportent des informations intéressantes : tout d’abord la fabrication des coupes est datée du ixe ou du début du viiie s., ce qui en fait des exemplaires assez anciens ; ensuite, ces objets parvenaient en Locride dès le milieu du viiie s., date de la tombe ; enfin, un nom inscrit en néohittite pourrait indiquer une provenance de Syrie du Nord : voir ƝƒƆƗƔƈƐƔƙ 1981, p. 1-57 ; Fontan 2007, p. 346, n° 177. 33. Grau-Zimmermann 1978, p. 161-218. 34. Markoe 2007, p. 172. 35. Markoe 1985, p. 81. 36. Perdrizet 1908, p. 23. 37. Markoe 1985, p. 81.

PHIALES ET VASES

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Les bronzes phéniciens forment donc un autre groupe important de bronzes orientaux parvenus dans les sanctuaires grecs, à côté des bronzes travaillés au repoussé d’origine syrienne, trouvés aussi en Grèce38. Mais à Delphes, les objets phéniciens sont assez peu nombreux. On dispose actuellement du travail de Fr. Sciacca sur les coupes à godrons et d’une synthèse récente sur les coupes métalliques du premier millénaire, par M. Hasserodt39. Parmi les huit coupes en bronze de Delphes qu’on peut dater du haut-archaïsme, on peut distinguer plusieurs catégories.

Phiales à omphalos et phiale en lotus La forme de la phiale à omphalos fait son apparition en Grèce aux alentours de 700 av. J.-C., mais est connue en Orient auparavant40. Si on peut supposer son origine assyrienne, la production phrygienne est à l’heure actuelle mieux connue41. On en a de très nombreux exemplaires dans les tumuli de Gordion, si bien qu’on peut tracer une évolution entre les phiales simples, à omphalos entouré de filets, du tumulus W et celles du tumulus MM, à pétales. Des exemplaires découverts à Ankara et Boğazköy confirment le rôle pris par les ateliers phrygiens dans la fabrication des phiales à omphalos. Les découvertes de Gordion ont notamment modifié les conclusions de H. Luschey qui croyait à l’origine grecque de la phiale à omphalos42. Mais aucun exemplaire de Delphes ne peut être comparé aux exemples de Gordion : la plupart sont bien postérieurs43. Les coupes nos 179 et 180 illustrent le type des phiales à omphalos simple entouré de filets. On sait, d’après les exemples des tombes de Gordion, que le nombre de filets peut varier de un à sept, et que les filets eux-mêmes peuvent avoir un profil arrondi ou triangulaire sans qu’on puisse établir de distinction chronologique44. La coupe n° 179 présente des filets arrondis et assez bas. Athanasios Sideris a récemment mis à jour la liste des sites, surtout des sanctuaires, où des coupes de ce genre ont été trouvées45. L’exemplaire de Delphes inv. 27161 (n° 181) est une adaptation grecque d’une coupe à omphalos, presque totalement plat ici, avec une grande liberté dans l’ajout de motifs décoratifs. C’est à Gordion que la phiale en lotus se développe surtout, comme un intermédiaire entre la phiale à omphalos et les coupes orientales en forme de fleur. En Phrygie ce sont sans conteste des vases à boire, de taille supérieure en général aux exemplaires grecs (entre 4 et 7 cm de haut pour un diamètre de 15 à 26 cm). Les nombreux exemplaires trouvés en Grèce sont donc fortement inspirés des créations phrygiennes ; mais il est pourtant difficile d’identifier clairement un grand nombre d’importations, car les objets découverts en Grèce présentent des différences formelles. De plus, il est certain que la fonction s’est transformée en changeant de continent, puisque les vases de banquet sont devenus des instruments de libation46. Les ateliers grecs peuvent se reconnaître à certains détails, comme la fabrication à part des omphaloi pour les coupes de Pérachora47 ou l’absence de décoration incisée sur la lèvre des coupes de Delphes (n° 182) et d’au moins une coupe d’Olympie. C’est sans doute cette fonction d’instrument lié au culte qui explique la présence des phiales à Delphes, à la fois chez Apollon et chez Athéna.

Phiale à godrons Un autre type de coupe, étudié par H. Luschey sou le nom de « Zungenphiale »48 et daté du ixe au viie s., se diffuse du Luristan à Chypre, en passant par l’Assyrie, dont la forme semble être originaire49. En effet, bien qu’elle ait des antécédents au second millénaire en Mésopotamie, en Anatolie et en Égypte, ce sont les usages cultuels assyriens qui 38. Id., p. 117. 39. Hasserodt 2009. 40. Origine égyptienne possible, mais plutôt assyrienne. 41. Young 1981, p. 236 : l’auteur note en particulier l’invention

phrygienne de l’omphalos creux qui permet une meilleure préhension de la coupe, à la place de l’élément central seulement décoratif des coupes assyriennes. 42. Ibid. ; Luschey 1939, p. 144. 43. Je remercie Valeria Meirano, qui étudie la vaisselle de Delphes à partir du vie s. av. J.-C., pour les informations qu’elle m’a communiquées à propos de ces coupes.

44. Sideris 2016, p. 14. 45. Ibid. : Ephèse, Samos, Assos, Lindos, Pérachora, Olympie, la

grotte d’Eileithyia à Inatos en Crète, la nécropole d’Eleuthernes, l’île de Rhénée (probablement Délos). 46. Strøm 1998, p. 50. 47. Payne 1940. 48. Luschey 1939, p. 76-95. 49. Sciacca 2005, p. 14, p. 245. L’auteur propose une carte de distribution de ce type de coupes dans tout le bassin méditerranéen (p. 516) ; malheureusement elle est difficile à exploiter à cause de sa taille très réduite et de l’absence totale de noms.

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ont permis de développer considérablement cette forme, ainsi que la domination assyrienne sur le Proche-Orient à partir du viiie s., qui peuvent expliquer la diffusion du type. Cette diffusion en Grèce est relativement réduite, par rapport au grand succès de cette forme auprès de l’aristocratie de l’Étrurie et de l’Italie centrale50. Pourtant, la Crète en a livré des exemplaires dans des contextes à la fois religieux (sanctuaire de Zeus à la grotte de l’Ida) et funéraire (nécropole d’Eleftherna). Il semble qu’il y ait parmi ces patères des importations aussi bien que des imitations locales51. Le cas de la nécropole d’Eleftherna est intéressant, car elle rassemble une patère d’origine iranienne, une autre très proche de celles qu’on a trouvées dans les tombes étrusques, et une troisième, au fond concave, ressemblant à d’autres exemples provenant de Grèce, de Cnossos, de Pérachora et également de Delphes (n° 183, inv. 7638). Ce type mélange des éléments d’influence syrienne, le fond concave, le nombre réduit de godrons, et d’autres, le grand omphalos globulaire, qui les apparentent à la tradition phrygienne52. Outre le constat que la production de bronze crétoise est particulièrement ouverte aux influences extérieures, ce fait permet de tisser un lien supplémentaire entre Delphes et la Crète53. Une autre coupe à omphalos et à godrons de Delphes (nos 184) présente une association entre le type précédent et des modèles d’Asie mineure qui suggèrent une origine en Grèce de l’Est. Les autres patères à godrons trouvées en Grèce proviennent de sanctuaires54 ; ce constat permet de conclure à la fonction cultuelle de ce type de vases en contexte grec, les vases étant offerts à la divinité mais sans doute aussi utilisés pour les libations.

Aryballe On ne mentionnera l’aryballe de bronze inv. 3433 (n° 185) que parce c’est un équivalent en bronze des aryballes du viie s. dont Corinthe s’était fait une spécialité. Les aryballes en bronze sont rares ; c’est l’adaptation de flacons orientaux à plus haut col55, mais qui n’ont pas cette taille miniature. Il existe un exemplaire de forme globulaire à Akragas, de fabrication laconienne56, mais les aryballes allongés, plus raffinés, sont spécifiques du protocorinthien moyen. D’autres vases miniatures appartiennent à la catégorie des pendeloques. Ces éléments de vaisselle, disparates et parfois très fragmentaires, constituent un ensemble qui vaut pourtant la peine d’être étudié, d’une part parce qu’il montre que Delphes reçoit des objets par des réseaux de circulation différents, de l’Anatolie et de la Phrygie surtout, et également du Levant et de Chypre. D’autre part, ces documents offrent un échantillonnage des facultés d’adaptation par l’artisanat grec des modèles orientaux. La division de la catégorie de la vaisselle entre les appliques figurées ou protomes d’une part, et les attaches non figurées d’autre part est commode, mais artificielle : les mêmes phénomènes se retrouvent pour tous ces documents. Il est vrai qu’il est parfois plus difficile de distinguer importations orientales et fabrications grecques pour les objets non figurés ; cela dit, l’ajout de détails inconnus en Phrygie ou en Orient révèle souvent l’atelier grec. Ces vases passent de la sphère du banquet en Orient, dans un contexte de palais ou dans un contexte funéraire, à une fonction votive dans les sanctuaires grecs. C’est un fait qui soulève quelques questions, à propos de l’adoption du banquet par les Grecs ou de l’utilisation exacte de ces vases : sont-ce de simples objets précieux offerts au dieu ou des instrument du culte ?57

50. Id., p. 287. 51. Qui peuvent avoir été faites par des artisans orientaux installés

sur place : Sciacca 2005, p. 288. 52. Id., p. 289, p. 296. 53. Sur les relations entre Delphes et la Crète, voir infra p. 151 (chapitre 6.2).

54. Héraion de Samos (5) ; sanctuaire de Zeus à Olympie (11) ; Héraion de Perachora (5) ; Héraion d’Argos (2) ; Phères, sanctuaire d’Enodia (1). 55. Boardman 1998, p. 85. 56. Ploes 2003, n° 790 p. 453. 57. Infra, p. 171.

Chapitre 6

Contextualisation

Bien que l’histoire des fouilles, l’état de conservation des objets ou les limites de nos connaissances ne nous autorisent pas à le faire avec l’exactitude souhaitée, ce chapitre vise à donner un contexte aux objets de bronze étudiés. Les éléments apportant des précisions sur le contexte chronologique de ces objets sont assez pauvres : les quelques observations que l’état lacunaire de la documentation a permis de rassembler seront présentées dans le chapitre 7.2. En effet, ces données sur les lieux de découverte peuvent faire apparaître des associations significatives pour comprendre les assemblages votifs et les origines communes de certaines offrandes. La « contextualisation » invite aussi à restituer le contexte de création des objets, et avant tout les techniques qui ont servi à les fabriquer. Or, la période étudiée est souvent appelée « orientalisante », en particulier à cause des emprunts techniques supposés à l’Orient. La documentation étudiée offre une occasion de faire le point sur ces évolutions techniques et plus largement sur le travail du bronze, qu’il ait pris place en dehors ou dans le sanctuaire. Enfin, on tentera de dresser un tableau synthétique des ateliers de fabrication des 185 objets étudiés, de l’Orient à l’Occident méditerranéen, en insistant sur les ateliers grecs du Péloponnèse, de l’Attique ou de l’Ionie, bien représentés à Delphes.

Place de ces documents dans l’histoire des techniques Ces fragments de vaisselle orientale et « orientalisante » témoignent de l’évolution des techniques du travail du bronze par rapport aux documents géométriques. Les spécialistes ont identifié en particulier des techniques qui semblent appartenir au répertoire oriental : la première est le martelage en haut-relief ou « repoussé haut »1 qui concerne plusieurs types d’objets. En dehors des griffons martelés dont nous avons parlé, on la retrouve sous une forme un peu différente dans la catégorie des supports de chaudrons de forme conique, production développée en Syrie du Nord. Comme c’est l’origine supposée des protomes de griffons, on peut estimer que c’est la fréquentation de cette zone par les Grecs qui a suscité leur intérêt pour les objets de ce type. Cette technique semble caractériser un groupe d’objets que l’on retrouve dans les œuvres produites par les ateliers de Tell Halaf, Zincirli et Sakçegözü,

1. Steinberg 1970, p. 103-105.

BRONZES DU HAUTARCHAÏSME À DELPHES

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c’est-à-dire ceux que nous appelons nord-syriens, et c’est justement un des traits qui atteste une certaine unité dans ces productions2. La distribution des productions de ces ateliers est aussi significative : Nimrud, le Mont Ida en Crète, l’Heraion de Samos, Olympie et Delphes, les tombes de Praeneste et Vulci en Étrurie et le sanctuaire de Satricum dans le Latium. On note les liens de ces objets avec la sphère d’influence assyrienne et urartéenne. Enfin, on retrouve cette technique à Gordion sur deux situles à tête animales3 de production peut-être phrygienne, mais s’inspirant fortement de modèle assyriens ou urartéens. L’examen des protomes de griffons martelées avait montré que le motif et la technique semblaient avoir été importés ensemble, peut-être par des artisans orientaux. La diffusion assez limitée de cette technique dans le monde grec suggère qu’elle a rapidement été abandonnée par des artisans qui ont modifié les formes et préféré d’autres techniques, comme la coulée du bronze4. Il en va de même pour le remplissage de ce martelage en haut relief avec du bitume : son utilisation est très limitée dans le type d’objet et dans le temps. S’il est toutefois permis de faire un rapprochement, il faut noter que le procédé du remplissage se rencontre également dans la série particulière des anses en fleur de lotus de type chypriote (n° 122-125), même si le matériau utilisé pour garnir les fleurs de lotus, une masse blanchâtre contenant du plomb, est différent ; le but de ce remplissage semble bien être là aussi de préserver la forme d’un objet que les artisans ont voulu assez spectaculaire. Si ces techniques de martelage-remplissage semblent venir avec des objets ou les artisans orientaux, des innovations sont à mettre au compte des artisans grecs à la recherche de nouvelles formes correspondant mieux au goût des commanditaires. Les fragments de vaisselle étudiés permettent également d’évoquer le perfectionnement de la technique de la coulée, voire de suivre les étapes de la coulée en moule bivalve. L’exemple des griffons qui a déjà été abordé5 reste le meilleur pour le comprendre. D’abord, les protomes de griffons martelés représentent une étape dans le passage de la technique du sphyrelaton à la fonte en creux6. Ce sont notamment les griffons samiens qui prouvent la généralisation de la fonte à la cire perdue dans les pratiques grecques7 : l’utilisation de moules bivalves non réutilisés, la présence d’un noyau intérieur et de distanciateurs sur deux exemples delphiques (nos 38 et 41)8 indiquent que l’on a affaire à la technique de la cire perdue sur positif9. On signalera ici que le perfectionnement de la coulée est visible à la même époque, au cours ou à la fin du e vii siècle, sur une série de cinq statuettes trouvées à Delphes et semblant provenir du même moule10. Les kouroi portent une chevelure à perruque à étages, présentent un buste étroit, des hanches arrondies sur lesquelles sont posés les bras. Cl. Rolley a fait la démonstration que leur identité stricte ne pouvait correspondre à l’usage habituel de la technique de la fonte à la cire perdue sur positif qui détruit à chaque fois le modèle et le moule ; il s’agit donc d’une reproduction mécanique vraisemblablement obtenue par l’usage des moules bivalves. C’est ce qui permet de comprendre la présence de la suture visible sur le n° 165 et qui explique d’ailleurs le profil très plat des statuettes. Les bronzes du viie siècle à Delphes témoignent donc des recherches qui sont menées à cette époque par les artisans bronziers, peut-être même sur place, dans le sanctuaire même, dans le cas des statuettes11. Il s’agit en tout cas de techniques qui se répandent au cours de l’époque archaïque, puisque des statuettes de plomb, notamment argiennes, sont fabriquées selon la même technique au début du vie siècle12.

2. CAH III2, p. 478. 3. Young 1981, p. 121-122, MM45 et MM46, pl. 62C-F, pl. 63. 4. Rolley 2005a, p. 56. 5. Chapitre 3, p. 65. 6. Kyrieleis 1990, p. 21. 7. Jantzen 1955, p. 54 ; Herrmann 1979, p. 9 ; Rolley 1983a,

p. 15 ; Gehrig 2004, p. 119.

8. Voir supra, p. 56, 57 et 70.. 9. Aurigny 2016a, p. 35-36. 10. Rolley 1969, p. 105-110, n°164-168, pl. XXVI.

11. Sur le travail du bronze à Delphes, voir Rolley 2002a. 12. I. Strøm suggère d’ailleurs que l’origine de ces figurines de bronze du viie siècle est argienne, et que cette technique a servi de modèle aux figurines de plomb de l’Aphrodision : Strøm 1998, p. 71.

CONTEXTUALISATION

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Fabrication et provenances des objets Supports ajourés Syrie du Nord Phrygie Chypre Orient (indéterminé) Grèce de l’Est Samos Argos Corinthe Athènes Crète Grande-Grèce Grèce Total

Trépieds et supports

Griffons

Sirènes

Taureaux

Autres animaux

Total

1

5

10

5 3

3 1 2

24 3 3 12

3 9

7 15 4 2 1 14 1 13 99

1 7

1 2

3

1

4 15 4 ( ?) 2 1

14

14

1 3 16

2 26

4 24

1 10

Tableau 6. — Origine des éléments de support, chaudrons et appliques de chaudrons.

Chypre Phrygie Asie mineure Italie Samos Athènes Argos Grèce Total

Appliques figurées

Appliques non figurées

Autres vases

Total

12 1

1

1 2 coupes 2 coupes

13 4 2 6 1 1 1 59 87

6 1 1 1 26 42

29 36

4 9

Tableau 7. — Origine des autres pièces de vaisselle (appliques et vases).

Orient La vaisselle du haut-archaïsme, de la fin du viiie siècle à la fin du viie siècle, se compose à Delphes d’objets non grecs de fabrication orientale de l’ordre de 30% et de fabrication occidentale d’à peine 3%13. Il y a donc une présence significative d’importations orientales, même si elle reste bien moindre que dans d’autres sanctuaires14. L’Orient dont proviennent les objets delphiques est limité géographiquement. Dans la mesure où la région de l’Urartu n’est plus considérée comme une des sources majeures des bronzes parvenus en Grèce, l’espace oriental concerné s’est quelque peu rétréci. Pourtant il est nécessaire de bien distinguer les provenances des différents objets orientaux, afin de mieux comprendre les choix dans le matériel parvenu en Grèce et les voies de circulation. Une mise en garde est nécessaire : si l’objet est oriental par sa technique, son iconographie ou son style, il peut avoir été fait en Grèce : « oriental » n’indique donc pas toujours une provenance. Les provenances ne sont finalement pas très nombreuses : la Syrie du Nord, la Phrygie et Chypre constituent la majorité des lieux de fabrication supposés des objets orientaux, avec une très faible proportion qui semblent venir de la côte levantine. 13. Les objets italiques sont bien mieux représentés dans la catégorie des armes, du harnachement ou de la parure : Aurigny 2016b.

14. Les objets de fabrication étrangère sont bien plus nombreux à Pérachora (78%) ou à Samos (84%), mais moins nombreux à Olympie (23%), d’après l’étude de Kilian-Dirlmeier 1985.

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BRONZES DU HAUTARCHAÏSME À DELPHES

Anatolie et Phrygie Les créations phrygiennes sont assez bien représentées dans la vaisselle15 : protomes de taureau, appliques animales, coupes forment un ensemble qui nous permet de rappeler que Delphes connaît le même phénomène d’importations d’objets phrygiens ou anatoliens que d’autres sanctuaires grecs. Les exportations les plus nombreuses sont naturellement dans les sanctuaires d’Asie Mineure les plus proches : les sanctuaires d’Athéna à Camiros16 et à Lindos17 à Rhodes, l’Athénaion de Smyrne18, l’Artémision d’Éphèse19, le sanctuaire d’Apollon20 à Milet. L’Héraion de Samos21 aussi a reçu des objets phrygiens, ainsi qu’Emporio de Chios22 et Paros23 pour les îles. Mais les importations phrygiennes sont parvenues aussi sur le continent, dans le Péloponnèse (Héraion de Pérachora24 et d’Argos25, sanctuaire d’Athéna à Tégée26 et de Zeus à Olympie27), en Grèce centrale (Delphes), et plus au Nord, en Épire (Dodone28) et en Thessalie (Phères29). Il faut rappeler que parmi les objets « phrygiens », il y a sans doute de nombreuses imitations grecques, et la difficulté à les différencier (comme pour les fibules) montre la communauté des créations entre la Grèce et la Phrygie. Les fragments sont particulièrement complexes à attribuer, et les analyses de métal des documents phrygiens ne permettent pas de trancher30. Ainsi, la proximité avec des créations ioniennes peuvent s’expliquer par des échanges, des circulations de modèles et d’objets qui suggèrent une communauté de création dépassant le clivage moderne entre grec et oriental.

Syrie du Nord La majorité des objets nord-syriens parvenus à Delphes appartiennent à la seule catégorie du chaudron de bronze et de son support, trépied à baguettes ou support conique. Les parallèles proposés montrent que des chaudrons ont été exportés de Syrie du Nord également vers d’autres sanctuaires grecs, comme Olympie par exemple. En ce qui concerne le Levant et la Phénicie à proprement parler, Delphes est particulièrement peu représentative des importations phéniciennes. Alors que le sanctuaire de Pérachora a livré de très nombreux objets phéniciens, Delphes ne compte que trois fragments de tridacnes, et deux scarabées qui peuvent provenir de Phénicie. Les très nombreux objets égyptisants en faïence, caractéristiques des productions phéniciennes sont presque absents du sanctuaire delphique. On peut certes alléguer les circonstances de la Grande Fouille, pendant laquelle les petits objets de faïence n’auraient pas été gardés ; en effet les fouilles récentes sous le char des Rhodiens ont permis de découvrir proportionnellement beaucoup plus d’objets de ce type31.

Égypte L’assemblage votif de Delphes se caractérise aussi par les catégories qui ne sont pas présentes. Les objets égyptiens et égyptisants sont très rares32, totalement absents dans le cas de la vaisselle. L’absence d’offrandes égyptiennes et égyptisantes dans les sources archéologiques est donc une caractéristique du sanctuaire de Delphes ; mais c’est aussi une caractéristique d’Olympie33.

15. Les importations phrygiennes à Delphes consistent aussi dans quelques objets de parure : Aurigny 2016c. 16. Jacopi 1933, p. 338, 357, pl. 84,5. 17. Blinkenberg 1931, pl. 8. 18. Muscarella 1967, pl. 16, 83-84. 19. Klebinder-Gauss 2007, p. 37-67. 20. Bumke 2002, p. 209-219. 21. Jantzen 1972, p. 48-54. 22. Boardman 1967, p. 210, pl. 138, n° 212-225. 23. Rubensohn 1962, p. 69, pl. 12. 24. Payne 1940, pl. 73. 25. Strøm 1998, p. 50-57. 26. Voyatzis 1990, p. 344. 27. Kilian-Dirlmeier 1985, p. 230-235.

28. Blinkenberg 1926, p. 224. 29. Kilian-Dirlmeier 1985, p. 216-225. 30. Steinberg 1970, p. 285-286 (dans Young 1981) : on trouve

les mêmes éléments traces dans les attaches du Circolo dei Lebetti de Vetulonia, à Delphes, Olympie, au Ptoion et dans les têtes de taureau de Gordion (MM1). De même, des fibules phrygiennes de forme différente partagent la même composition. 31. Un sceau égyptisant et un sceau du groupe du « Joueur de Lyre » : Luce 2008, n° 296-297, p. 209, pl. 95 H, I et J. 32. Si l’on peut incriminer les choix faits lors de la Grande Fouille qui n’a pas gardé les objets les plus insignifiants, P. Perdrizet avait toutefois publié trois scarabées, auxquels ne se sont ajoutés depuis que sept autres exemplaires. 33. Skon-Jedele 1994 ; Gunter 2009, p. 130.

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Chypre Moins nombreux que les objets phrygiens et nord-syriens, les éléments de vaisselle chypriote de Delphes méritent une attention d’autant plus grande que Chypre est bien représentée à Delphes par d’autres documents, notamment des armes34. Les catégories sont différentes des objets de Syrie du Nord, car parmi les trépieds, seul un fragment d’un trépied à baguettes consacré par un Chypriote, le fils d’Hermaios, a été retrouvé (n° 19). Un fragment de support ajouré a été attribué sans certitude absolue à Chypre, et il pourrait s’agir dans ce cas d’un document très antérieur à la plupart des supports ajourés crétois (n° 13) 35 ; un autre présente aussi des ressemblances avec des documents chypriotes (n° 14). Le groupe d’offrandes chypriotes le plus important est celui des coupes dont les anses sont décorées de fleurs de lotus : bien que le modèle ait sans aucun doute été imité en Grèce, une douzaine d’exemplaires doivent être de fabrication chypriote. De même que les boucliers chypriotes, ces récipients sont connus, en dehors de Chypre et du Proche-Orient, en Crète, puis dans quelques autres sites : à Emporio de Chios36, à l’Heraion d’Argos37, à Olympie38 et à Ithaque39.

Provenances grecques Quel que soit le succès des modèles exotiques parvenus aux yeux des Grecs, une part importante de la documentation examinée ici est de fabrication grecque, qu’elle s’inspire de modèles nouveaux ou qu’elle s’inscrive plus nettement dans la continuité des formes géométriques. De même que les lieux de fabrication des objets orientaux sont finalement assez limités en nombre et dans l’espace – surtout si l’on considère que beaucoup d’entre eux ont dû être faits en Grèce par des artisans orientaux – de même, les objets grecs ont des provenances bien précises, même si l’état actuel des connaissances sur les productions du viie s. ne permet pas toujours de les identifier. On peut en tout cas prendre la mesure de la dimension « internationale » du sanctuaire de Delphes. Le problème majeur est qu’un nombre très important d’objets n’est pas attribuable à un atelier particulier ou à un style, que l’objet ait été produit aux abords du sanctuaire ou apporté d’une cité plus lointaine. Il n’est donc pas question ici de raisonner sur des proportions par rapport à l’ensemble, mais de donner quelques tendances. D’autre part, plutôt qu’un découpage en grandes régions, la réflexion cherchera à différencier des productions caractéristiques de traditions artistiques, de cité ou de régions le cas échéant. Le corpus de la vaisselle du haut-archaïsme ne permet pas de rendre visibles les régions les plus proches du sanctuaire de Delphes, la Grèce centrale, notamment la Phocide, dont les productions sont pourtant présentes dans le sanctuaire40, ni la Grèce plus septentrionale, la Thessalie, à qui on peut aussi attribuer quelques offrandes41 ; encore moins les productions de la Macédoine ou des Balkans.

Attique La présence à Delphes d’objets de bronze d’origine attique est un trait ancien et remarquable, mis en évidence en particulier par Cl. Rolley : statuettes et fragments de trépieds à baguettes ont été identifiés comme attiques, d’un point de vue stylistique42 ou technique43. On en a déduit la volonté d’Athènes de prendre ses marques à Delphes à

34. Aurigny 2016d. Parmi les statuettes, une statuette de taureau en bronze au moins est de facture chypriote : Rolley 1969, p. 99, n° 163, pl. XXV, et peut-être aussi p. 97, n° 160, pl. XXIV. Mais Delphes n’a reçu aucune des statuettes de faïence ou de calcaire que Chypre a produites et exportées en si grand nombre, à Rhodes (Camiros et Lindos), Cnide (Aphrodision), Samos (Héraion). 35. Il existe un fragment très similaire à Samos. 36. Boardman 1967, p. 224, pl. 92, 389. 37. Waldstein 1905, n° 2235, pl. CXXVI. 38. Furtwängler 1890, pl. 55, 911. 39. Benton 1934, p. 72, fig. 22.

40. Des objets de parure (bracelets notamment, ou pendeloques, identifiés grâce à Felsch 2007) relèvent d’une production phocidienne. 41. Des objets de parure (pendeloques, anneaux, fibules), des statuettes de chevaux, voire des armes, peuvent être attribués à la Thessalie. 42. Rolley 1969, statuettes humaines n˚ 7 et 8, chevaux n° 50, 52, 53, 54, 55, 57 et 73, identifiées comme attiques dans Rolley 1977, p. 101 ; Rolley 1977, trépieds n˚ 481-502. 43. Cl. Rolley dans Magou 1986, p. 129-130, qui montre la cohérence du groupe des trépieds sur le plan de la composition chimique.

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une époque relativement ancienne. C’est une particularité du sanctuaire delphique dans le courant du viiie s., mais on retrouve aussi une présence attique très forte à Olympie. En revanche, la diminution du nombre d’offrandes attiques au viie s. est-elle aussi sensible qu’on l’a dit44 ? Un groupe de statuettes masculines datées vers 700 av. J.-C. et bien représentées à Athènes et à Delphes montre la créativité des artisans attiques dans la recherche de renouvellement du décor des trépieds à cuve clouée45. Le changement dans les offrandes au cours du viie s. rend les attributions plus difficiles et oblige à se demander si la présence d’Athènes ne faiblit pas quelque peu. Mais la diminution des offrandes et de leur qualité est un constat qui a été fait également pour l’Acropole d’Athènes : on ne saurait donc conclure à un désintérêt des Athéniens pour Delphes au viie siècle46. La répartition des offrandes dans les sanctuaires de l’Attique et la pratique votive athénienne à la même époque méritent d’être analysées en détail47. L’activité est sans doute bien plus intense dans les sanctuaires de la polis athénienne que dans le sanctuaire de Delphes. Si des statuettes peuvent être attribuées à Athènes, malgré quelques discussions sur ces attributions, il y a vraisemblablement des documents attiques aussi dans le domaine de la vaisselle. En particulier, les appliques de chaudrons ont intéressé les artisans attiques : certes, les protomes de griffon doivent se partager entre Samos et le Péloponnèse sans que l’on puisse dans l’état actuel de nos connaissances en attribuer à l’Attique. Mais quelques appliques en forme de sirène, dont on trouve des exemples sur l’Acropole d’Athènes48, peuvent provenir d’Attique. La sirène inv. 8398 (n° 74) et la sirène inv. 1666 (n° 75) ont été attribuées par certains à un atelier attique ; mais l’unanimité est loin d’être faite sur ces documents. Dans le domaine de la vaisselle, les appliques zoomorphes ou anthropomorphes provenant d’Attique sont difficiles à reconnaître. Seul le buste féminin inv. 2528 (n° 107) a de bonnes chances d’avoir été fait par un artisan attique. Le choix de la figure humaine, de plus en plus en vogue au viie s., n’est pas propre à l’Attique, mais son traitement relève de choix formels spécifiques. Toutefois il est vrai que peu de fragments peuvent être sûrement mis en relation avec Athènes. Dans le domaine de la céramique également, les productions attiques ne sont pas absentes de Delphes à l’époque archaïque49, mais elles sont plus nombreuses à partir du vie s. Depuis le viiie s., Delphes reçoit des offrandes du Péloponnèse : statuettes indépendantes ou trépieds à cuve clouée sont les principales catégories d’objets. Mais les spécialistes distinguent dès l’époque géométrique des styles bien différenciés : les productions de Corinthe, d’Argos et de Laconie forment trois ensembles que les découvertes faites dans d’autres sanctuaires, notamment Olympie, permettent de reconnaître. L’étude du matériel de Delphes et d’Olympie donne aussi à voir le rôle des sanctuaires dans l’élaboration par les grandes cités de traditions stylistiques propres50.

Corinthe Quelques figurines humaines, entre six et douze trépieds au décor « en marche d’escalier » et une douzaine de chevaux géométriques51 prouvent que les Corinthiens ont fréquenté le sanctuaire delphique, cela d’autant plus que la céramique corinthienne devient très majoritaire au milieu du viiie s. Que se passe-t-il au viie s. ? Comme dans le cas de l’Attique, les productions corinthiennes semblent moins immédiatement reconnaissables au cours du viie s., du moins dans le domaine des offrandes de bronze.

44. Par exemple Luce 2008, p. 441. 45. Pour Athènes : Scholl 2006, p. 90-92, n° 62-67 p. 148-

149. Pour Delphes : Rolley 1969, n°170, p. 111, pl. 27. Voir aussi Morgan 1990, p. 140. Cette production spécifique des ateliers attiques et sa présence à Delphes permet de conclure à la volonté des riches athéniens d’offrir à Delphes des objets « dernier cri » clairement reconnaissables comme venant d’Athènes. 46. Scholl 2006, p. 117. 47. La question du repli d’Athènes au viie s. a été posée par R. Osborne (Osborne 1989, p. 297 et suivantes) et les difficultés de cette période ont été résumées par Fr. de Polignac : « le viie s. fait figure de parent pauvre, injustement dédaigné d’un côté par les archéologues

victimes d’un “tropisme géométrique” et de l’autre par les historiens paralysés par l’absence de sources littéraires », Polignac 1995b, p. 77. Mais le développement des centres religieux, visibles grâce aux aménagements durables et non aux offrandes qui y sont trouvées, est un fait majeur dans l’ensemble du territoire de l’Attique : voir Prost 2010. 48. Supra, p. 94-95. 49. Pariente 1991, p. 227 et suivantes. 50. Sur le rôle de Delphes dans la fabrication de trépieds argiens ou de chevaux corinthiens, voir Rolley 2007a, p. 70. 51. Luce 2008, p. 412, qui rappelle l’ensemble du matériel qui a été attribué à Corinthe et les discussions.

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Il y a toutefois quelques objets précieux que l’on peut mettre en rapport avec Corinthe. Parmi les chaudrons de bronze à cuve mobile et décorés d’appliques, quelques exemplaires orientaux peuvent avoir été offerts par les Corinthiens eux-mêmes, mais certains exemplaires grecs doivent avoir été faits par les artisans corinthiens. C’est le cas notamment des deux sirènes inv. 1248 (n° 73) et inv. 8398 (n° 74), qui trouvent un environnement stylistique convaincant dans des documents corinthiens, céramique et terre cuite, datés du viie s.52. Ces deux sirènes ne se ressemblent pas : faut-il en déduire qu’elles décoraient deux chaudrons différents, ou bien peut-on supposer que deux sirènes différentes pouvaient se trouver sur un même chaudron ? L’état de conservation des documents à Delphes et à Olympie n’offre pas la possibilité de le savoir : les sirènes grecques y ont toutes été retrouvées séparées de leur chaudron. Dans le cas des sirènes orientales, le chaudron trouvé entier à Olympie portant protomes de lions et sirènes est décoré de deux sirènes barbues très proches53. C’est le cas aussi d’un des chaudrons trouvés dans le tumulus MM de Gordion54, tandis qu’un autre rassemble des appliques différentes, barbues et imberbes, avec un décor très varié des cheveux et des barbes55. Toutefois, dans le cas de ces deux sirènes, leurs dimensions et leur forme sont trop différentes pour les imaginer sur un même chaudron. En dehors de ces appliques, que connaît-on à Delphes comme documents corinthiens ? Plusieurs éléments de vaisselle de bronze peuvent avec vraisemblance avoir été fabriqués par des artisans corinthiens, mais les parallèles manquent pour l’affirmer en toute certitude. Seul l’aryballe piriforme inv. 3433 est tellement proche des aryballes protocorinthiens produits en céramique qu’on peut l’attribuer sans conteste à Corinthe. Parmi les armes, l’invention du casque illyrien et les plus anciens exemplaires du type ont été attribués à Corinthe56, mais il est évident que les différents types de casque se sont rapidement diffusés du Sud au Nord de la Grèce, fabriqués dans différents ateliers.

Argos Si les spécialistes distinguent entre les productions artisanales corinthiennes et argiennes à l’époque géométrique, pour les trépieds à cuve clouée, les figurines animales et les statuettes de guerriers57, il est plus difficile de repérer les productions argiennes du viie siècle. Une partie des chaudrons à cuve mobile et de la vaisselle votive du viie s. a-t-elle été fabriquée par des Argiens ? Nous avons vu que les protomes de griffon associant un cou martelé à une tête fondue, plus nombreuses dans le Péloponnèse qu’à Samos, pouvaient être une production argienne, notamment si l’on tient compte du témoignage d’Hérodote58. Vu le succès du chaudron à protomes de griffon dans les grands sanctuaires, il serait tout à fait normal que les artisans argiens aient cherché à en donner leur propre version pour rivaliser avec les créations samiennes59, comme il est normal que le sanctuaire de Delphes en ait reçu quelques exemplaires. Si cette attribution à Argos a des chances d’être vraie, on doit imaginer au moins un chaudron sur support qui aurait mesuré 3 à 4 m de haut, soit bien davantage que la plupart des autres chaudrons connus à Delphes. Mais d’autres appliques caractéristiques du chaudron mobile orientalisant peuvent également être portées au crédit des artisans argiens : dans le cas des sirènes, toutefois, seule la sirène inv. 1248 a été considérée comme argienne par H.-V. Herrmann60 sans que cette proposition ait convaincu. En revanche, un lien supplémentaire existe entre Delphes et Argos par la présence à l’Héraion et dans le sanctuaire d’Apollon d’un fragment de sirène orientale portant un taureau : il ne serait pas absurde d’y voir une l’offrande d’Argiens qui s’étaient procuré ou avaient fait faire ces curieuses sirènes. L’originalité des créations argiennes pourrait aussi apparaître dans des appliques figurées qui ne répondent pas aux schémas bien connus des griffons ou des sirènes. Une applique en forme d’avant-train de sphinx, qui combine ailes et visage humain à la manière des sirènes, présente un visage qui pourrait bien être argien (n° 118, fig. 319-320)61. C’est une variante des appliques de chaudrons illustrant le goût pour les adaptations et l’invention

52. Voir les analyses des p. 227 et suivantes. 53. Herrmann 1966, Br 4224, pl. 9 et 10. 54. Young 1981, MM2. 55. Id., MM3. 56. Felsch 2007, p. 214. Frielinghaus 2007, p. 149-150. 57. Rolley 1992, p. 45 ; Croissant 1992, p. 76.

58. Hérodote IV, 152. 59. Il y a aussi à Olympie beaucoup plus de griffons martelés que

fondus : ne peut-on y voir des créations des ateliers argiens ? 60. Herrmann 1966, p. 108 et pl. 39. 61. Supra, p. 115.

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de formes nouvelles de l’art grec, peut-être particulièrement de l’artisanat argien qui aurait inventé son propre type de protome de griffon. Dans le reste de la vaisselle de bronze, rien n’est caractérisé d’une manière assez précise pour l’attribuer à Argos, même si cela ne doit pas être exclu. Les offrandes argiennes étaient aussi visibles dans les armes62, certains objets de parure63 qui, offerts dans le courant du viie siècle, témoignent d’une fréquentation continue, bien que parfois modeste, des Argiens, avant les grandes offrandes officielles de la cité aux vie et ve siècles. Il est plus délicat d’identifier des offrandes d’autres communautés péloponnésiennes à Delphes. Seule une sirène de chaudron a été rapprochée par Herrmann des productions de Sicyone, qu’il place dans un groupe commun avec Corinthe. En effet, le signe en forme de diabolo sur la sirène inv. 8398 est sans doute un epsilon de l’alphabet sicyonien ; mais l’absence d’autres bronzes sicyoniens contemporains qui pourraient servir de comparaison rend cette proposition très abstraite. En outre, la proximité de Corinthe et de Sicyone classées par H.-V. Herrmann dans un même groupe ne correspond pas à une réalité du viie s., mais anticipe la situation du vie s. à l’époque de Clisthène de Sicyone. Le rapprochement de Sicyone et de Corinthe se fait alors dans un contexte particulier, celui du règne de Clisthène de Sicyone, qui veut exalter sa puissance et marquer le sanctuaire de Delphes de son empreinte essentiellement contre la cité d’Argos. Auparavant, il est bien difficile de savoir à quoi correspond la cité de Sicyone : c’est seulement avec Clisthène que commence vraiment l’histoire de la cité64. Il est néanmoins intéressant de constater que le sanctuaire de Delphes joue un grand rôle dans l’affirmation de l’existence même des cités, qui, tout au long du viie s., sont encore en pleine période de construction65 ; et un témoignage épigraphique de Delphes, en alphabet sicyonien66, pourrait bien être le premier graffito sicyonien et le témoin de la présence ancienne de Sicyone à Delphes, même si elle n’a un sens politique que plus tard.

Laconie Si l’absence de céramique laconienne à Delphes n’est pas un élément déterminant67, il est plus problématique de constater au cours du viie s. l’absence de matériel typiquement laconien, sans doute davantage liée à notre incapacité à le reconnaître qu’à l’arrêt de la fréquentation des Lacédémoniens68.

Ionie Si Olympie est ouvert sur le Péloponnèse, la Grèce occidentale et la Grande-Grèce, Delphes est en contact avec les zones orientales de l’Égée. Le matériel archéologique atteste ces contacts avec l’Ionie, bien qu’il faille tenir compte de la difficulté à différencier les productions ioniennes les unes des autres, et de la situation des cités d’Ionie, qui n’ont pas les mêmes prétentions que les cités du Péloponnèse sur Delphes. La première cité à mentionner est sans doute Samos dont les ateliers se sont spécialisés dans le chaudron orientalisant par excellence, le chaudron décoré de protomes de griffon ; les ateliers samiens sont ceux qui ont le plus développé la technique de coulée des protomes, comme en témoignent à la fois quelques ratés de coulée et le grand nombre de protomes. Si les protomes martelées sont plus nombreuses dans le Péloponnèse, ce qui doit s’expliquer par l’invention du type dans cette zone, en revanche Samos a contribué à transformer davantage le modèle oriental en une élégante créature grecque. Mais la production samienne est telle qu’elle s’exporte largement à Olympie ou à Delphes ; la quasi-totalité des griffons coulés de Delphes étant samiens, faut-il les attribuer à des dédicants samiens ? Le succès de ces chaudrons devait les faire rechercher par ceux qui voulaient consacrer dans le sanctuaire une offrande « à la mode ».

62. Une partie des nombreux casques corinthiens de Delphes, en particulier ceux du groupe dit de Myros, pourrait être de fabrication argienne : Frielinghaus 2007, p. 163-166. 63. Quelques épingles à tête multiples, notamment, semblent être des offrandes typiques du Péloponnèse, peut-être d’Argos. 64. Griffin 1982, p. 43. 65. Selon la tradition littéraire, la Pythie avait rendu un oracle à une ambassade sicyonienne venue à Delphes : Diodore VIII, 24.

66. Jeffery 1990, p. 138, n°2 : seconde moitié du viie s. ou début du vie siècle. Jacquemin, Mulliez, Rougemont 2012, p. 36, n° 2. 67. Très peu de céramique laconienne a été trouvée en dehors du territoire spartiate. 68. Un sceau en os, inv. 6398, décoré d’un aigle, a certes des parallèles en Laconie, mais les spécialistes préfèrent y voir une œuvre argienne ou corinthienne, Boardman 1963, p. 151.

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Mais d’autres objets ioniens illustrent les liens entre Delphes et Samos. C’est le cas de deux éléments de trépieds à baguettes (n°s 26 et 27), datables de la fin du viie ou même du vie s. Ces documents sont exceptionnels, sans être spectaculaires, et ils montrent la permanence d’une capacité d’invention formelle dans le détail d’un objet fabriqué depuis plus d’un siècle, le trépied à baguettes. Pourtant on n’a pas trouvé en Ionie de manchon décoré de ce type de visage. En dehors de la vaisselle, les objets ioniens sont connus dans d’autres catégories, comme la parure69 ou la céramique70. Ainsi les relations entre Delphes et la côte asiatique ne concernent pas seulement Samos, même si Samos est la meilleure candidate pour le lieu de redistribution des documents ioniens vers les régions occidentales.

Crète Si l’Hymne homérique à Apollon suggère des liens particuliers de Delphes avec la Crète, le matériel de bronze a depuis longtemps et encore récemment confirmé les sources littéraires71. Une vingtaine de fragments ont été identifiés comme de fabrication crétoise. Quelles que soient l’ouverture précoce de la Crète sur l’Orient et l’utilisation dans l’artisanat d’éléments orientaux, les trépieds à cuve clouée crétois retrouvés à Delphes72 s’inscrivent parfaitement dans la tradition du trépied géométrique et sont contemporains des supports ajourés de type chypro-crétois (n° 1-13), dont le lieu de fabrication est à coup sûr la Crète, même si un fragment peut être chypriote. Près des trois quarts des objets crétois de Delphes peuvent être datés avant 70073. L’arrivée d’objets crétois ne s’interrompt pas ensuite, mais au viie s., le casque, le petit couros74 ou une applique en terre cuite sont tous datés de la seconde moitié, et même assez tard dans le siècle. Par conséquent il faut conclure à l’existence d’un moment privilégié des échanges et tenter de l’expliquer en fonction de la situation en Crète ou à Delphes.

Occident Parmi les productions occidentales, certaines catégories sont totalement absentes, comme les trépieds à baguettes ou les chaudrons à appliques. La catégorie de la vaisselle est pourtant représentée par quelques anses particulières qui n’ont de parallèles qu’en Italie. Seules trois anses horizontales fragmentaires témoignent de la présence à Delphes de situles dont les parallèles les plus convaincants viennent d’Este ou de Hallstatt, ou de chaudrons martelés étrusques. Des situles comparables ont été trouvées dans des contextes de type Este II-III75. C’est une production qui de toute façon caractérise les Vénètes pendant plusieurs siècles ; mais cette permanence n’empêche pas l’intégration d’éléments originaires d’Europe centrale, orientalisants, étrusques, grecs. Les questions d’acculturation, de circulation de métal et d’objets en Étrurie et en Égée et le rôle de la demande des aristocraties ont été récemment posées76. Deux anses de forme légèrement différente (nos 172-173) trouvées à Delphes permettent d’aborder la question des rapports entre les productions de l’Italie du Sud et de la Sicile. Il s’agit d’objets massifs, d’anses de chaudron qui devaient avoir un diamètre d’environ 40 à 50 cm. Des exemplaires ont été trouvés en Calabre (à Francavilla Marittima), en Sicile (à Agrigente, à Gela), en Sardaigne et à Olympie77. Les études portant sur ces objets tendent à faire penser qu’on a affaire à une production de Sicile. La taille de ces récipients montre le caractère prestigieux

69. À Delphes, un fragment de ceinture en bronze, proche des exemplaires phrygiens, est plus vraisemblablement une production ionienne : Aurigny 2016c. Les ceintures ioniennes sont une production caractéristique de cette région, plus élaborées que les ceintures phrygiennes dont elles s’inspirent pourtant (Boardman 1995, p. 110-111) des exemplaires ont été recueillis à Chios, Samos, Éphèse, Didymes et Smyrne. 70. La céramique ionienne orientalisante a aussi livré quelques beaux exemplaires à Delphes qui témoignent du développement des relations avec la Grèce de l’Est. Voir GD, le musée, p. 227. 71. Rolley 1977, p. 145-146 ; Luce 2008, p. 448-449.

72. 3 à 5 anses, Rolley 1977, n° 458-461 (+462-463), et quelques pieds : Rolley 1977, n° 338-343bis +336, 337, 344 et 345. 73. C’est à la fin du viiie s. que l’on peut dater les boucliers en tôle de bronze décorée au repoussé (Rolley 1979, n°40, p. 32-33) ainsi que le couvre-ventre (Perdrizet 1908, n° 514). 74. Inv. 2527 : Rolley 1969, n° 172, p. 111. 75. Supra, p. 130, 131 et 135. 76. Schauer 1998, introduction p. 1-16. 77. Les exemplaires d’Olympie sont publiés par H. Baitinger : Baitinger 2013, p. 242-246, fig. 125-129 ; pour les autres, voir Albanese Procelli 1993, p. 63 et 147.

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de l’offrande ; il reste toujours possible que ce type de vaisselle en matériau précieux ait été utilisé pour le culte luimême78. En dehors de la vaisselle, les productions occidentales sont représentées par les catégories bien plus nombreuses des armes et de la parure qui indiquent peut-être une fréquentation directe de visiteurs italiques79. La mention de toutes les régions dont les objets reflètent les productions conduit à tirer une double conclusion un peu paradoxale. D’une part, la variété des provenances s’accorde bien avec l’ouverture du sanctuaire sur l’extérieur qui est le phénomène principal à partir de la fin du viiie et au viie s. ; d’autre part, les objets d’Orient ou d’Occident viennent de quelques zones, peu nombreuses, où l’on peut supposer que les Grecs se les procuraient : ce sont des points de contact finalement assez restreints entre Grecs et Étrangers. Enfin, les objets se rapportent essentiellement à quelques grandes catégories, armes, parure notamment, ou vaisselle de bronze, avec de grands chaudrons ou des récipients pouvant servir au culte, qui montre une continuité dans les pratiques votives depuis l’époque géométrique.

78. Aurigny 2016b.

79. Ibid.

Chapitre 7

Pratiques votives au haut-archaïsme à Delphes

À Delphes comme ailleurs, la notion d’« offrande » n’est peut-être pas aussi évidente qu’elle en a l’air : c’est le terme le plus simple pour désigner une pratique que les sources écrites ne nomment pas encore au viie s. L’offrande est une notion assez vague qui désigne à la fois l’acte de la consécration et l’objet offert à la divinité. C’est à la fois un don et la trace dans le sanctuaire de la célébration d’un événement d’ordre privé ou public. Témoignage de la piété du donateur, « l’offrande est la forme que prend le don des hommes aux dieux. Donner aux dieux est une façon de s’acquitter de ce qu’on leur doit, et de s’assurer de leur générosité à l’avenir »1. L’offrande installe donc un système d’échange, qui ne se cantonne pas à une relation personnelle entre le dédicant et le dieu, mais, par son caractère durable, l’objet offert prolonge le souvenir du geste et de l’occasion de la consécration2 aux yeux des autres dédicants et de l’ensemble des visiteurs du sanctuaire. Les fonctions de l’offrande sont donc multiples, surtout parce que l’offrande est « adressée » à plusieurs destinataires. Avant le recensement systématique des pratiques votives présenté récemment dans le Thescra3, il y avait fort peu d’ouvrages traitant uniquement des offrandes : on peut citer l’ouvrage de W.H.D. Rouse4, « synthèse embrassant le phénomène dans toute sa variété, des bénéficiaires aux circonstances, qu’elles soient exceptionnelles ou ordinaires, des objets offerts aux formules de dédicace et à la disposition des offrandes »5. Mais ce livre date du début du siècle dernier, et si aucune étude de synthèse ne l’a renouvelé, les recherches dans ce domaine ont repris à une date relativement récente : on doit citer notamment l’entreprise des Suédois dans les années 19806, puis des Italiens dans les mêmes années7. Pour Delphes, on peut citer le volume de la BEFAR d’Anne Jacquemin, qui traite des offrandes monumentales. Si l’auteur se restreint au sanctuaire de Delphes, en revanche elle insiste sur sa volonté de prendre en compte tant les vestiges matériels des documents offerts que les textes en faisant mention : « à la richesse des sources littéraires s’ajoutent l'importance des vestiges archéologiques et le nombre des inscriptions »8. Ce chapitre entend faire le point sur les pratiques votives visibles à travers l’étude de cette documentation. Les sources littéraires, notamment Hérodote et Pausanias, donnent des indications très précieuses sur les offrandes archaïques de Delphes ; leur examen permettra de discuter leur apport à l’étude de la documentation archéologique. Les pratiques votives seront envisagées aussi à partir des différents contextes votifs, en particulier les spectaculaires fosses de l’Aire qui invitent à s’interroger sur le devenir des offrandes après la consécration. Enfin, il faudra tenter de mettre en regard les objets avec les domaines d’intervention des divinités de Delphes, Apollon et Athéna, pour proposer d’éclairer les significations et les valeurs possibles des offrandes. 1. Bruit Zaidman 2001, p. 26. 2. Id., p. 45. 3. Thesaurus Cultus et Rituum Antiquorum. 4. Rouse 1902. 5. Jacquemin 1999, p. 1.

6. Linders, Nordquist 1987 ; Hägg, Marinatos, Nordquist 1988. 7. Anathema 1989. 8. Jacquemin 1999, p. 2.

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La vaisselle votive archaïque dans les sources littéraires Il n’existe pas de textes du viie s. mentionnant les offrandes contemporaines déposées à Delphes. Les textes littéraires relatifs aux offrandes sont plus tardifs, et évoquent surtout des offrandes du vie s. Mais s’ils ne sont pas très nombreux, ils sont assez bien connus, comme dans le cas des offrandes de Crésus mentionnées par Hérodote ou de ce que Plutarque et Pausanias ont pu voir à Delphes. Ces textes9 offrent des informations sur les objets eux-mêmes et sur la pratique de l’offrande et le geste du dédicant, bien qu’une grande part de reconstruction littéraire dans l’image qui est transmise des étrangers et de leurs offrandes à Delphes empêche d’utiliser ces textes comme des inventaires de ce que conserverait le sanctuaire. En outre, les offrandes de Delphes, qui étaient dès Homère un thème littéraire, ont reçu d’autant plus d’attention de la part des historiens que nombre d’entre elles ont été détruites par les Phocidiens pendant la troisième guerre sacrée10. Trois types d’information peuvent être tirés des sources : la nature des objets offerts, leur provenance géographique et la façon dont ils ont été acquis et offerts.

Les objets offerts mentionnés dans les textes Les textes mentionnent des offrandes architecturales, notamment des trésors, et des offrandes mobiles de prestige parmi lesquelles la vaisselle métallique n’occupe qu’une place numériquement faible, même si elle structure l’image du sanctuaire à date haute. Un fragment de Théopompe cité par Athénée11 mentionne « des chaudrons et des trépieds faits de bronze », que l’on voyait dans le sanctuaire dans les temps anciens. C’est aussi l’image que nous transmettent les Hymnes homériques : le sanctuaire est assez tôt réputé pour ces offrandes caractéristiques que sont les chaudrons et les trépieds de bronze. Un passage de l’Hymne homérique à Apollon cite « les trépieds de grand prix »12 ; plus intéressant encore, l’Hymne homérique à Hermès renvoie l’image d’un sanctuaire regorgeant de chaudrons et de trépieds13. Le dieu Hermès se propose de voler des quantités d’objets de valeur et cite, à côté des chaudrons et trépieds dont nous supposons qu’ils sont en bronze, les matériaux précieux qui sont l’objet de sa convoitise : ce sont l’or et le fer, et même des étoffes14. C’est donc avant tout sur des offrandes comme les chaudrons et les trépieds que repose la richesse du sanctuaire d’Apollon ; notons qu’il n’est pas question du sanctuaire d’Athéna pour cette catégorie d’objets. Si les sources citent à date haute trois statues, l’Apollon offert par Echékratidas de Larissa15, le lion d’or16 et la boulangère17 de Crésus, ce ne sont pas des statues qui constituent l’essentiel des offrandes à Delphes à l’époque archaïque. Une autre catégorie d’offrandes est bien représentée dans les textes : il s’agit de la vaisselle liée au culte, et en premier lieu les cratères. Dans ce domaine, il semble que ce sont particulièrement les rois Lydiens qui ont pourvu le sanctuaire en cratères. Gygès en offrit d’abord six18, qui pesaient trente talents ; la richesse des offrandes de Gygès à Delphes aurait même produit un mot, « gygades », employé par les Delphiens pour désigner ces offrandes d’or et d’argent. Ensuite, illustrant encore la générosité de la dynastie des Mermnades, Alyatte offrit un grand cratère d’argent avec support de cratère en fer19 ; si le cratère est une nouvelle preuve de richesse, en revanche le support de fer repré-

9. Voir index des textes. 10. Diodore de Sicile, XVI, 56, 6-7 ; Maaß 1992, p. 86. 11. Athénée VI, 231. 12. Hymne homérique à Apollon, 443. 13. Hymne homérique à Hermès, 178-179. 14. Quelque littéraire qu’il soit, ce témoignage sur la présence

d’étoffes précieuses dans le sanctuaire, convoitées par Hermès, apporte une donnée qui échappe souvent totalement à l’archéologie. Voir les réflexions de Felsch 2007 pour le sanctuaire de Kalapodi, à partir des découvertes de fibules et d’épingles, p. 141 par exemple.

15. Pausanias X, 16,8. Jacquemin 1999, n°333, p. 339. 16. Hérodote I, 50 ; Roux 1990. 17. Hérodote I, 51 ; Plutarque De Pyth. Or.16. On sait seulement

qu’elle faisait 3 coudées, ce qui équivaudrait à 1,35 m (Buxton 2002, p. 73). Mais différents chercheurs ont contesté l’identification avec la boulangère, et préfèrent voir l’effigie d’une déesse dans cette statue, en particulier Artémis ou la Grande déesse ; voir Buxton 2002, p. 75, ou Wormell 1963, p. 220-222. 18. Hérodote I, 14. 19. Hérodote I, 25.

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sente un chef d’œuvre technique, cité à ce titre dans différents textes20. Sont répétées les informations relatives à l’artiste, Glaucos de Chios, dont on souligne le grand art, avec lequel par exemple il a soudé les différents éléments du support, sans utiliser d’agrafes ou de clous. À propos de ce support, Hérodote est le premier à employer le terme « ȻƳƲƮƴƫƷƫƴƣƨƭƲư », petit support de cratère, qui ne donne pas d’informations sur sa forme ; c’est le cas de nombreuses mentions de cet objet21. Seul Pausanias nous en donne une image assez détaillée : il décrit d’abord la forme générale comme « celle d’une tour qui va s’amincissant à mesure qu’elle monte à partir de la base, plus large », puis les montants comme « des bandes de fer horizontales [formant] comme les marches d’une échelle », et des « lames verticales, […] recourbées à leur sommet [pour former] le siège du cratère » ; c’est à Athénée que l’on doit le plus d’informations sur le décor, avec « des figures ciselées en relief dessus, en même temps que d’autres petites créatures et plantes ». Cet objet extraordinaire ne manque pas de faire penser aux trépieds d’époque orientalisante, formés de baguettes de fer assemblées, d’arceaux de fer et de manchons de bronze, et décorés de figures végétales, animales ou parfois humaines ; il peut aussi rappeler les supports ajourés chypriotes des xiie et xie siècles et les exemplaires crétois du viiie siècle22. Cette série d’offrandes se poursuit avec celles de Crésus qui fait cadeau d’un cratère en or et d’un en argent23, directement liés au culte d’Apollon, puisqu’ils étaient placés à l’entrée du temple et que les Delphiens utilisaient encore le cratère d’argent au ve siècle lors de la fête des Théophanies. Crésus ajoute quatre jarres d’argent, et deux vases pour l’eau lustrale, l’un en or et l’autre en argent24, comme pour les cratères. Crésus, par ses dons, participe au rituel même de Delphes. Un autre objet mérite d’être mentionné, pour sa nature comme pour sa provenance : il s’agir de l’encensoir offert par le roi de Salamine de Chypre Evelthon25, dans la seconde moitié du vie siècle ; la provenance chypriote précisée ici est importante, même si la date est tardive en comparaison avec le matériel archéologique qui nous intéresse. Une nouvelle fois malheureusement, l’objet n’est pas décrit ; mais à Delphes, un nombre relativement important d’objets est de fabrication chypriote, ce qui rend très vraisemblable cette donnée rapportée par Hérodote. En outre, un objet toujours énigmatique trouvé avec les statues chryséléphantines des fosses de l’Aire est généralement interprété comme un thymiaterion et pourrait avoir un lien avec Chypre26. Outre la vaisselle précieuse, les sources mentionnent des offrandes d’objets de prestige : Midas, roi de Phrygie27, aurait consacré son trône dans le sanctuaire28 ; Hérodote seul mentionne cette offrande, mais on peut rapprocher ce passage du texte dans lequel Pausanias signale le trône du roi étrusque Arimnestos à Olympie, car, dans les deux cas, il s’agit de la première offrande d’un Barbare dans le sanctuaire grec29. Pour les offrandes d’armes, la seule mention que nous avons est le bouclier en or que Crésus offrit pour le sanctuaire d’Athéna Pronaia30. Enfin, les textes, et encore une fois plus particulièrement Hérodote, nous rappellent qu’on offrait aussi à Delphes des objets de parure : nous savons que Crésus offrit les colliers et les ceintures de sa femme31.

Provenances et chronologie des offrandes Les sources mentionnent des provenances spécifiques et peu variées. L’Anatolie intérieure et la côte anatolienne sont les mieux représentées, avec d’abord le trône offert par Midas, roi de Phrygie, puis avec les très nombreuses offrandes de la dynastie des Mermnades, de Gygès à Crésus. Hérodote rend abondamment compte des offrandes royales lydiennes et on peut souligner la constance avec laquelle les 20. En dehors d’Hérodote, Plutarque, De Def. Or., 47 ; Pausanias, X, 16, 1 ; Athénée V, 210 b-c . 21. Buxton 2002, p. 112. 22. Jacquemin 1999, p. 168, mais ces supports sont en bronze, et non en fer comme le support de Glaucos de Chios. 23. Hérodote I, 51. 24. Ibid. 25. Hérodote IV, 162. 26. Inv. 10658 : Amandry 1991, p. 197, fig. 5. 27. La chronologie du règne de Midas est particulièrement discutée : on y voit traditionnellement un roi de la fin du viiie s., cité par Sargon II.

28. Hérodote I, 14 ; sur la vraisemblance de cette offrande et les doutes qu’on peut avoir, voir Buxton 2002, p. 27, n. 21. 29. Pausanias V, 12,5. Le trône est donc selon les sources la plus ancienne offrande de souverains étrangers. 30. Hérodote I, 92 ; Pausanias X, 8, 7. 31. La mention des boucles de ceinture est intéressante, car des exemplaires ont bien été retrouvés à Delphes, mais ils sont identifiés comme des objets phrygiens, et non lydiens (inv. 4363 et inv. 24649, cat. 353-354).

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Mermnades font des offrandes à Delphes, sanctuaire vu comme un lieu capable d’asseoir ou de renforcer leur pouvoir et leur prestige. Les offrandes sont dans ce cas toujours politiques32, bien qu’Apollon et Athéna soient loin d’être des dieux totalement inconnus dans le panthéon lydien33. Il faut néanmoins clairement séparer dans ce cas l’origine des dédicants et l’origine des offrandes : en effet, pour deux de ces objets, Hérodote précise que l’artiste était ionien, Glaucos de Chios, qui fabriqua le support de fer du cratère d’Alyatte, et Théodoros de Samos, qui fit le cratère d’argent offert par Crésus. Ces offrandes, qui marquent pourtant le sanctuaire de la présence lydienne sont l’œuvre d’artistes ioniens, si bien qu’on ne peut pas, comme nous l’avons vu déjà à plusieurs reprises, déduire de la fabrication de l’objet l’origine du dédicant ; ce point est donc corroboré par l’étude des textes. Si le texte de Strabon nous dit que les dédicants vinrent au fur et à mesure de régions de plus en plus éloignées34 de Delphes, les seuls exemples qu’il donne sont les Mermnades et l’Italie du Sud et la Sicile. Or, peu d’autres provenances sont attestées : nous avons bien une mention rapide de Chypre, mais pour une époque plus tardive ; de même les liens de Delphes avec l’Égypte ne concernent que le vie siècle35. L’Italie est aussi une zone de laquelle viennent des offrandes visibles à Delphes : les trésors de Caere et de Spina36 en sont les meilleurs exemples. Mais ces offrandes appartiennent au plus tôt à la fin de l’époque archaïque et ne nous donnent donc qu’une indication indirectement intéressante. Un exemple peut être encore cité pour montrer jusqu’où le sanctuaire de Delphes exerce son influence : Hérodote rappelle que les Dolonces, peuple thrace, envoyèrent leurs princes à Delphes pour consulter l’oracle, dans une guerre contre les Apsinthiens37. Il ressort de cet examen que c’est surtout la Lydie qui est la région pourvoyeuse d’offrandes à Delphes, au viie et au vie siècles ; la richesse des rois Mermnades, en or et en argent, a donc surtout retenu l’attention d’une tradition où l’image d’un Orient fabuleux et luxueux est particulièrement forte. Des indications chronologiques peuvent-elles être tirées des sources écrites ? Le roi de Phrygie Midas avait offert le trône sur lequel il rendait la justice, qui était déposé à l’époque d’Hérodote dans le trésor des Corinthiens38. Le règne du roi Midas, mentionné dans les sources assyriennes, est placé par la tradition à l’extrême fin du viiie s.39 : Dans la mesure où l’on peut croire Hérodote, la première offrande daterait de la fin du viiie s ou du tout début du viie s. Ensuite ce fut le tour des Mermnades de faire des offrandes à Apollon : Gygès fut le premier de la dynastie et offrit notamment, parmi ses dons en or et en argent, des cratères en or, eux aussi dans le trésor des Corinthiens à l’époque d’Hérodote40. Les dates du règne de Gygès, bien qu’elles soient discutées, sont placées aux alentours de 685-64541 : les offrandes peuvent donc être datées du deuxième quart du siècle. Enfin, Alyatte offrit, à la suite d’une maladie, un cratère en argent sur un support de fer42 : or, son très long règne est daté d’environ 610 à 560 ; il prit Smyrne vers 60043. C’est donc à la transition entre le viie et le vie siècles qu’il faut placer son offrande à Apollon. Cette pratique ne cesse pas avec Alyatte, puisque Crésus, son successeur, est encore davantage cité dans les sources pour ses offrandes à Delphes44. Les textes mentionnent des offrandes à Delphes tout au long du viie siècle ; puis, sans vraie rupture, le vie s. voit encore affluer les nombreuses et somptueuses offrandes de Crésus. Il semble donc qu’il y ait une continuité qui se dessine entre les viie et vie s., alors que se produit à Delphes un événement majeur au début du vie s., ce qu’on a appelé la première « guerre sacrée » ; or, ce moment coïncide avec plusieurs changements, à la fois l’installation de

32. Kerschner 2006, p. 259-260. 33. Id., p. 264. 34. Strabon IX, 3, 7. 35. Pour la première moitié du siècle d’abord, Hérodote (II, 135)

et Plutarque (De Pyth. Or., 14) citent les broches de Rhodopis que la courtisane offrit comme dîme de sa richesse et qui étaient visibles à l’époque d’Hérodote, mais dont on n’évoque plus que l’emplacement chez Plutarque. Notons que les broches sont une offrande que l’on trouve dans les sanctuaires grecs depuis l’époque géométrique. Après le milieu du siècle, ce n’est pas un objet, mais mille talents d’alun que le roi Amasis offrit à Delphes pour la reconstruction du temple (Hérodote II, 180). 36. Briquel 1998, p. 143, 145 ; Jacquemin 1999, p. 73.

37. Hérodote VI, 34. 38. Hérodote I, 14. 39. CAH III2, p. 622 : d’après Eusèbe il aurait vécu et régné

jusqu’en 696 av. J.-C. Les raids Cimmériens ont mis à mal le royaume phrygien à la toute fin du VIIIe s en effet. Sur les bouleverseemnts de la chronologie phrygienne, voir infra p. 161-162. 40. Hérodote I, 14. 41. CAH III2, p. 645. Les dates d’Hérodote pour le règne de Gygès, de 716 à 678, sont rejetées par les historiens : CAH III3, p. 197. 42. Hérodote I, 25. 43. CAH III2, p. 647-8. 44. Sur la chronologie des Mermnades, voir Roosevelt 2009, p. 11-12 et 22-26.

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l’amphictionie45, les Pythia46, l’aménagement de la zone du temple47, avant une succession d’offrandes sculptées proprement monumentales48.

Modalités d’acquisition et de consécration des offrandes. Fort peu d’éléments sont fournis par les sources sur les motivations de ces rois orientaux ou de ces personnages importants qui ont fait des offrandes à Delphes. C’est d’ailleurs aussi le cas de celles que l’on a retrouvées dans les sanctuaires, trop rarement accompagnées d’une dédicace qui nous renseigne sur les circonstances de la consécration49. Il va de soi que faire une offrande est un signe d’hommage à la divinité, qu’on cherche ainsi à se concilier. Mais au-delà de ce sens très général, que sait-on ? Alyatte offre le cratère sur son support exceptionnel à l’issue d’une maladie50 : c’est donc en remerciement pour sa guérison qu’il fait cet hommage à Apollon. Dans le cas de Gygès, Hérodote ne mentionne pas non plus de consultation de l’oracle ; pourtant une source plus tardive, rapportée par Pline l’Ancien, fait référence à un oracle rendu à Gygès, qui cherchait à savoir qui était le plus heureux des hommes51. En dehors de la reconstruction tardive de cet épisode et de l’assimilation de Gygès à Crésus (qui posait la même question à Solon), il y a peut-être une trace de l’intérêt de Gygès pour l’oracle de Delphes. Crésus, quant à lui, ne remercie pas à la suite d’un bienfait, mais agit à la fois pour se concilier le dieu à travers sa piété et pour montrer sa richesse : ces aspects ne sont pas contradictoires d’ailleurs aux yeux des Grecs52. Crésus joint le sacrifice et l’offrande dans un même hommage au dieu53, dans le but plus précis de préparer la consultation de l’oracle54. Celui-ci, toutefois, n’était pas l’une des principales sources d’offrandes : même si Plutarque suggère qu’il aurait rempli le sanctuaire de présents grecs et barbares55, il y a très peu de monuments offerts à la suite d’un oracle à Delphes même56. Crésus semble préférer des offrandes propitiatoires à des offrandes de remerciements à Delphes ; toutefois il est certain que les remerciements prenaient place dans un cycle où le don attend sa contrepartie et où le fait d’offrir en remerciement est aussi une façon de se concilier pour l’avenir les faveurs du dieu57. Que nous apprennent donc les sources textuelles sur la consécration à Delphes aux hautes époques de l’histoire du sanctuaire ? Des Orientaux, ou des étrangers d’autres régions, y ont fait des offrandes ; ils ont offert des objets de facture « étrangère », mais aussi de facture grecque, c’est-à-dire ionienne dans le cas de Crésus. De toute évidence, leur pratique est celle de dédicants grecs, qui se concilient ou remercient l’oracle et qui, du même coup, marquent le sanctuaire de leur empreinte fastueuse, dans le cas des offrandes lydiennes tout au moins.

Les lieux de découverte des offrandes et leur histoire après consécration Deux types d’obstacles se dressent pour déterminer où les offrandes étaient exposées dans le sanctuaire : l’absence de données stratigraphiques précises pour une grande partie du matériel d’une part, et d’autre part le fait que les objets ont été retrouvés, dans de nombreux cas, dans des dépôts ou utilisés dans des fonctions secondaires58. C’est pourquoi il est indispensable de considérer aussi ce que l’histoire des offrandes après leur consécration peut nous apprendre.

45. Lefèvre 1998, p. 14 : « le véritable acte de naissance de l’Amphictionie pyléo-delphique passe pour avoir été la « première guerre sacrée » menée contre Krisa et son port Kirrha ». 46. Amandry 1990. 47. Même si le premier temple d’Apollon semble antérieur au tout début du vie s., c’est vraisemblablement au début du vie s. que l’on construit le premier péribole du sanctuaire d’Apollon, et que l’on fait aussi des aménagements dans le sanctuaire d’Athéna. 48. Par exemple les jumeaux argiens, le sphinx des Naxiens, le monoptère de Sicyone. 49. Parker 2004, p. 278. 50. Hérodote I, 25.

51. Pline, Histoire Naturelle VII, 47. 52. Parker 2004, p. 270. 53. Hérodote I, 51. 54. A Delphes comme à l’Amphiaraon, selon le texte d’Hérodote. 55. Plutarque, De Pyth. Or., 28 . 56. Jacquemin 1999, p. 87-88. 57. Parker 2004, p. 280. 58. C‘est ainsi que P. Amandry a découvert, dans ses fouilles à

l‘Ouest du sanctuaire, une canalisation faite exclusivement de cnémides en bronze emboîtées les unes dans les autres : Amandry 1938, p. 312-314.

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Des dépôts d’offrandes Chez Apollon La plupart des objets étudiés ici provenant des travaux de la Grande Fouille, la consultation du Journal59 dans lequel a été consignée au fur et à mesure la progression du travail s’avère utile : on sait que les renseignements portés par P. Perdrizet s’attachent à l’aspect concret du terrain, au contexte archéologique60. Quelques groupes de trouvailles apparaissent à travers la lecture du Journal de la Grande Fouille ou du volume des Fouilles de Delphes consacré aux petits objets. P. Perdrizet signale en effet les dépôts devant les façades Est et Ouest du temple d’Apollon, formés de deux couches : la couche inférieure comprend des statuettes et des tessons géométriques, tandis que la couche supérieure « renfermait, mêlée à des débris de trépieds et d’armes, une très grande quantité de tessons corinthiens et de balsamaires «protocorinthiens» »61. Il mentionne également deux autres dépôts de bronze dans le sanctuaire, à l’Est du trésor de Sicyone et dans « l’enceinte de Néoptolème »62 ; enfin, Marmaria aussi a livré des bronzes en grande quantité. Il conclut à propos de ces dépôts que « ce sont bien, comme à Olympie, des amas d’objets hors d’usage, d’offrandes détériorées, qui furent enterrées intentionnellement »63, conformément à la piété grecque. Il note pourtant que les favissae et les dépôts d’offrandes sont relativement peu nombreux à Delphes, mais cette situation est valable surtout pour les offrandes à partir du vie s. Les fouilles de L. Lerat en 1934-35 dans la zone Nord du sanctuaire prouvent que l’habitat y existait encore en partie au viie s. La zone de la Lesché des Cnidiens a donc reçu, en l’absence de construction, les offrandes ou ustensiles de culte hors d’usage, « déversés des autres régions dans celle-ci »64. L. Lerat relève les autres zones conservant des restes de ces dépôts : à l’Est du théâtre sur la terrasse située au niveau du diazôma ; derrière l’analemma qui protège le « Dionysion »65, sous le « Poteidanion »66, sous la Lesché, à l’Est et au Sud de ce monument ; enfin, sous la voie sacrée, devant l’autel de Chios. C’est le cas notamment de la belle protome de griffon inv. 30933 (n°32) ; or, elle a été trouvée avec le bouclier du type de Herzsprung inv. 7226. Jean-Marc Luce propose que leur association dans ce dépôt vienne de leur appartenance à un même lot, peut-être une exposition commune voire une offrande par la même personne ou par des gens de même origine, peut-être chypriote67. Les fouilles de 1949, à l’Est et au Sud-Est de la Lesché jusqu’au mur de péribole, ont permis de découvrir, le long du mur est du péribole, « des bronzes qui ont dû y être systématiquement ensevelis »68, trépieds, phiales, cnémides, et des fragments des boucliers crétois à protome animale. Dans son compte rendu des fouilles effectuées dans les années 1950 à l’Est du sanctuaire d’Apollon, L. Lerat signale encore un dépôt contenant de la céramique et des bronzes du viie s., ainsi que de la céramique archaïque, si bien qu’il y voit les traces du remaniement du sanctuaire après l’incendie de 548 av. J.-C.69. Toujours à l’Est du sanctuaire, au Nord du secteur fouillé par Lerat de 1950 à 1957, les travaux menés en 1972 par G. Rougemont et L Lerat ont permis de découvrir un remblai de l’époque hellénistique contenant des bronzes géométriques et archaïques, en particulier des fragments de trépieds. 70 Les fouilles sous l’offrande des Rhodiens ont mis au jour un autre type de dépôt de bronzes : le très riche mobilier en bronze de la Maison Rouge a été laissé sur le sol de la maison désertée par ses habitants, sans doute à cause d’un événement violent71. Les bronzes n’appartiennent donc pas seulement à la sphère sacrée, mais peuvent provenir aussi de l’habitat72. Toutefois, les bronzes découverts par Perdrizet et ses successeurs l’ont été dans des couches de remblai, et non en place, ce qui atteste leur situation d’offrandes au rebut. 59. Consultable en ligne : https ://ressources-en-ligne.efa.gr/ archives_carnets_Delphes/DELPHES_2-C_DPH_23/ 60. Voir les remarques d’A. Jacquemin : Jacquemin 1999, p. 152 et 154. 61. Perdrizet 1908, p. iv. 62. Zone située au Nord-Est du temple d’Apollon, derrière les trépieds des Deinoménides, au niveau de la terrasse des Attalides. 63. Perdrizet 1908, p. v. 64. Lerat 1938, p. 223. 65. À l’Est de la terrasse d’Attale. GD, le site, p. 195 ; Lerat 1961, p. 317-320.

66. Fondation GD 535, juste au Nord du temple d’Apollon, qu’on a voulu attribuer au culte de Poséidon : GD, le site, p. 206. 67. Luce 2008, p. 416. 68. Lerat 1950, p. 327-328. 69. Lerat 1961, p. 326-328. 70. Rougemont 1973, p. 511 et suivantes. 71. Luce 2008, p. 66. 72. Ce fait est toutefois plus vraisemblable à la fin du viie s.

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Dans le sanctuaire d’Athéna Le Journal de la Grande Fouille, qui s’arrête en 1901, est moins riche d’enseinements pour les découvertes du sanctuaire d’Athéna : la plupart des objets ont été trouvés en 1902 ou 1903. Les fouilles continuent ensuite, en particulier dans les années 1920 sous la conduite de R. Demangel. Dans le sanctuaire d’Athéna Pronaia à Marmaria, les fouilles entre le temple en tuf et le trésor dorique ont mis au jour des murs anciens et des objets sans doute votifs : lances en fer, perles et pendeloques d’ambre et d’os avec matière vitreuse, des fragments de céramique géométrique et protocorinthienne73. De la même zone, sans plus de précision, proviennent de nombreux petits bronzes archaïques, des objets de parure féminine, des fragments de vaisselle de bronze, des armes, boucliers et cuirasse74. À l’Est du temple, la fouille de la terrasse des autels, en 1922, « a permis de recueillir une grande quantité de petits bronzes archaïques, analogues à ceux qui furent découverts à l’Ouest du temple »75. Les fig. 60 et 61 de la publication de R. Demangel montrent bien la diversité des trouvailles, ainsi que le nombre dominant des objets de parure.

Les fosses de l’Aire Autre cas où les offrandes ont été enterrées pour être laissées au dieu après leur destruction, le dépôt d’objets dans des fosses situées sous la « voie sacrée », en plein cœur du sanctuaire, en contrebas du portique des Athéniens. Les deux fosses ont été découvertes par P. Amandry en 1939, remplies d’un mobilier archéologique très varié, dans ses formes et dans sa chronologie76. Les fosses se caractérisent par leur remplissage : une terre noire, contrastant avec la couche de terre rouge et caillouteuse, mêlée de cendre et de charbon. La plus grande des fosses fait 5,70 m de long sur 2 m de large au maximum, avec une profondeur de 0,80 m. Un peu plus à l’Est se trouvait la seconde fosse, 1,50 m x 0,80 m, remplie de la même terre et d’objets de même type. C’est parce que les limites de ces fosses ont pu être retrouvées - ce dispositif a été creusé dans le but d’enterrer les offrandes - que l’on peut parler de favissa ; ce cas n’est finalement pas très courant dans les sanctuaires. Le matériel qui y a été trouvé est très divers, et il semble qu’on l’ait aussi mélangé indifféremment dans les deux fosses : certes, les plaques d’argent du grand taureau n’ont été trouvées que dans la fosse la plus petite, mais les objets de bronze ou les têtes d’ivoire étaient répartis dans les deux fosses77. Comment interpréter cette disparité entre des offrandes jetées ensemble dans ces fosses ? Leur contenu se caractérisait par l’association d’offrandes très précieuses et d’autres sans grande valeur. Mais l’étude des documents fait ressortir deux lieux de provenance principaux, la Grèce de l’Est d’une part, et surtout l’Ionie, d’où viennent l’applique en ivoire de l’homme au lion (inv. 9912), deux des têtes de statues chryséléphantines78, le taureau d’argent en sphyrelaton, et certaines plaques en or, et Corinthe d’autre part, avec les reliefs miniatures en ivoire, la plus grande tête en ivoire notamment. On en a bien logiquement déduit que ces offrandes avaient été enfouies ensemble car provenant d’un ou peut-être de deux groupes communs79, offrandes d’une cité de la Grèce de l’Est et offrandes de Corinthe. La topographie du sanctuaire et la proximité du trésor de Corinthe ainsi que du trésor de Cnide renforcent cette hypothèse : des objets conservés dans ces trésors ont très bien pu être enfouis à la suite d’une destruction ou en raison d’une pratique régulière dans les sanctuaires grecs, visant à « faire de la place » parmi les offrandes. Les objets les plus récents étant datés de la fin du ve siècle av. J.-C., il est difficile de mettre en rapport cet enfouissement avec un événement historique connu ; il faut envisager alors un événement propre au sanctuaire, ou une procédure normale de nettoyage dans la vie des offrandes. Il est même possible que ces documents aient fait partie d’un seul ensemble, provenant du trésor de Corinthe, comme il est bien tentant de l’imaginer. Hérodote mentionne en

73. Demangel 1926, p. 47. 74. Id., fig. 55 et 56. 75. Id., p. 51. 76. Supra, p. 18-19. 77. Amandry 1939, p. 87-88.

78. Croissant 1988, p. 124-126. 79. Luce 2008, p. 452. Sur les rapports entre les lots d’objets

enfouis et le groupement originel des offrandes, voir Luce 2005, p. 4-5 et 13-15.

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effet les offrandes des rois Phrygiens et Lydiens qui étaient à son époque déposées dans le Trésor des Corinthiens : il contenait donc des offrandes orientales et ioniennes, en plus des objets de facture corinthienne qui devaient s’y trouver80. L’exemple des fosses de l’Aire présente donc un cas intéressant, qui permet de comprendre plusieurs types de pratiques : l’enfouissement rituel des offrandes usagées dans le sol même du sanctuaire, le creusement de fosses à proximité du lieu d’exposition, ainsi que le regroupement d’offrandes d’origines différentes. Le problème du statut de l’offrande après consécration81 connaît, à Delphes même, des solutions bien différentes. Malheureusement, la plupart des fosses et des dépôts datent au plus tôt du vie s. et ne renseignent pas sur les pratiques du viie s. lui-même. Dans le cas des fosses de l’Aire, il ne s’agit pas d’un dépôt intentionnel comme cela a pu être le cas à Délos par exemple. Dans la fouille de l’Artémision, on découvrit en effet « les éléments variés d’un dépôt intentionnel »82 : de nombreux ivoires mycéniens, des fragments d’or et de métal. La définition exacte d’une favissa mérite réflexion : est-elle faite après une destruction, comme à Delphes, ou joue-t-elle plutôt le rôle d’un dépôt comme à Délos83 ? L’étude des objets a montré en détail les différentes modalités pratiques de « la coutume d’enfouir pieusement les objets de culte hors d’usage [qui est, comme on sait, générale en Grèce, au moins aux temps archaïques] »84.

Le devenir des offrandes après la consécration85 L’emploi du terme de « dépôt » dans cette rapide revue des lieux de découvertes de groupes de bronzes à Delphes est assez flou pour correspondre à diverses situations. On sait d’abord, toujours grâce à Hérodote, que les offrandes pouvaient, après leur consécration dans ou aux abords du temple, être transportées dans un lieu « secondaire », où elles étaient toujours présentées aux visiteurs. Hérodote mentionne ce cas de figure à deux reprises pour les offrandes de Crésus, la statue de lion (I 50) et les cratères d’or et d’argent placés de part et d’autre de la porte du temple (I, 51), tous déplacés après l’incendie du temple en 548 av. J.-C. Si les cratères ont été placés dans le trésor des Clazoméniens86, le lion a rejoint d’autres offrandes orientales dans le trésor des Corinthiens : le trône de Midas, les cratères de Gygès, les jarres d’argent offertes par Crésus, l’encensoir d’Evelthon de Salamine de Chypre formaient ce très riche ensemble, suggérant les relations privilégiées des Corinthiens avec l’Orient. L’étape suivante dans la vie de ces offrandes était sans aucun doute l’enfouissement : « l’usage d’enterrer les ex-voto, soit pour faire place à d’autres, soit parce qu’ils avaient été endommagés, est bien attesté dans l’antiquité grecque »87. Un seul cas de réutilisation d’offrandes, une canalisation faite de cnémides de bronze, montre que, pourvu qu’on n’emportât pas les offrandes hors du sanctuaire, les possibilités d’enfouissement étaient multiples88. Une autre raison peut être invoquée : le salut des œuvres exigeait parfois qu’on les dissimulât, comme le pensaient les Delphiens à l’approche des Perses, selon Hérodote, qui consultèrent l’oracle pour savoir s’ils devaient enterrer les « trésors sacrés » offerts à Apollon pour les sauver de Xerxès (VIII, 35-36). Le dieu fit bien entendu savoir qu’il saurait défendre ce qui lui appartenait. L’enfouissement répondait donc le plus souvent aux besoins plus prosaïques évoqués par P. Amandry. À Delphes, il y a peu de cas d’enfouissement sur place connu, hormis les objets de bronze laissés sur le sol de la Maison Rouge89. On n’a pas non plus trouvé de fosse liée à une nouvelle fondation, si bien que le lieu de découverte des objets n’apporte pas d’information directe sur le lieu de consécration.

80. Les liens de Corinthe avec l’Ionie et la Lydie sont aussi attestés par les textes, qui mentionnent les relations de xenia entre Périandre et les Milésiens, mais aussi avec les Lydiens ; Périandre jouait en quelque sorte le rôle de représentant d’Alyatte à Delphes. Hérodote V, 92 ; Jeffery 1976, p. 149. 81. Luce 2005, p. 14. 82. Gallet de Santerre-Tréheux 1947-1948, p. 250. 83. L’avis des fouilleurs de Délos est le suivant : « nous sommes donc en présence d’une véritable favissa où l’on a réuni, lors de la

construction du temple E, les objets cultuels et les offrandes hors service d’un sanctuaire plus ancien », Id., p. 251. 84. Ibid. 85. Sur les dépôts de rebut, voir Patera 2012, p. 193-203. 86. Qu’on ne sait pas où placer : GD, le site, p. 159-160. 87. Amandry 1991, p. 191. 88. Amandry 1938, p. 312-314. 89. Luce 2008, p. 70.

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Si le cas des favissae est exceptionnel, c’est qu’il n’y a pas en général de véritables trous creusés pour les offrandes mises au rebut ; on utilise le plus souvent des zones creuses propres à recueillir les offrandes, sans plus d’aménagement, « un de ces dépôts qui servent à débarrasser les sanctuaires du trop-plein d’offrandes, […] une sorte de favissa horizontale, sans fosse creusée, ni aménagement particulier »90. Il n’est pas toujours facile de savoir si l’on a affaire à une favissa, en particulier lorsque les données de fouilles anciennes sont trop imprécises pour décider ; l’Acropole en fournit un bon exemple avec le Perserschutt91. Deux cas restent à envisager au sein des dépôts d’offrandes. Tout d’abord, les offrandes retrouvées lors de la Grande Fouille à proximité du temple doivent appartenir à des dépôts faits au fur et à mesure que l’accumulation des objets y obligeait. Ils n’ont pas été déplacés ensuite, malgré les travaux effectués dans la zone du temple tout au long de la vie du sanctuaire. Mais cet épandage d’offrandes n’était pas nécessairement la dernière étape du devenir des offrandes : les travaux courants dans les sanctuaires amenaient des déplacements des terres et du matériel qu’elles contenaient. Certains cas de transport de déblai ont été clairement identifiés92, tandis que les remblais contenant des offrandes sont connus à Corfou, Olympie ou Tégée93. Les informations éparses recueillies ici permettent difficilement de caractériser une pratique spécifique de l’offrande à Delphes ; le témoignage d’Hérodote sur le dépôt des objets orientaux dans les trésors de Clazomènes et surtout de Corinthe est peut-être plus intéressant, dans la mesure où il nous permet d’entrevoir un jeu de réseaux entre quelques puissantes cités et des visiteurs étrangers soucieux d’entretenir des signes visibles de leur intérêt pour Delphes.

Données chronologiques externes Si les contextes de découverte à Delphes offrent peu de données permettant une datation précise des objets, il en va de même sur les autres sites comme Olympie ou Samos où les objets ont été le plus souvent découverts dans des remblais tardifs. Les conditions de découverte des appliques de chaudron d’Olympie montrent encore qu’il est difficile d’en tirer des données chronologiques pour les objets : un chaudron peut avoir été trouvé loin des appliques qui l’ornait, quand on a la chance de pouvoir rapprocher les deux94. Et les nombreux bronzes entassés dans les puits du stade pour débarrasser le sanctuaire des offrandes des anciens temps ne permettent de dater que le moment de leur ensevelissement, aux ve ou ive siècle. Pour les protomes de griffon non plus, il n’existe pas de point fixe qui assure leur datation95. Ce sont surtout les comparaisons avec le matériel de Gordion et, dans une moindre mesure, avec celui des tombes étrusques, qui offrent un ancrage chronologique. À Samos, les données de fouilles présentent les mêmes lacunes, quand elles ne sont pas tout simplement perdues pour les fouilles anciennes96 ; pour les objets de bronze dont nous connaissons la strate archéologique d’origine, elle ne permet généralement que de dater le moment de l’enfouissement de l’objet97. Il faut noter toutefois quelques exceptions, comme le griffon inv. B 107798, qui provient d’une couche bien datée vers 620 av J.-C. 99 Mais le classement se fonde essentiellement sur des données stylistiques, et non chronologiques. La multiplicité des comparaisons que nous avons faites avec la vaisselle des tombes de Gordion oblige à évoquer le renouvellement de la datation de Gordion à l’âge du fer, qui a été l’objet de débats depuis 2001100 avant de donner

90. Luce 1992, p. 267. 91. Ce terme employé par Dörpfeld désigne les débris résultant

du saccage de l’Acropole par les Perses, mais comprend des fragments d’architecture, de sculpture et de céramique jetés pêle-mêle comme matériau de remblai, aussi bien que la fosse aménagée contre la muraille nord de l’Acropole pour accueillir quatorze statues, surtout des corès ; Holtzmann 2003, p. 47. 92. Ex de transport de déblai : BCH 1961, p. 329 : deux fragments de céramique géométrique, trouvés éloignés l’un de l’autre dans le sanctuaire et par des fouilleurs différents ont pu être raccordés.

93. Cités dans Luce 1992, p. 267, avec bibliographie supplémentaire. Pour Tégée, voir Luce 2005, p. 6. 94. Herrmann 1966, p. 25. Voir aussi p. 84, 129-130. 95. Herrmann 1979, p. 149. 96. Jantzen 1972, p. 87 97. Jantzen 1972, p. 88. 98. Jantzen 1955. 99. Gehrig 2004, p. 232, n°172, pl. 69, avec références. Voir d’autres protomes provenant de contextes datés : Gehrig 2004, p. 171-172. 100. Supra, p. 86, 132, 156.

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lieu à une nouvelle publication101 où deux dates principales sont réétudiées et modifiées : la date de la destruction de la citadelle de Gordion doit désormais être placée vers 800 av J.-C. (au lieu de 700) et le bois du tumulus MM vers 740 et non à la toute fin du siècle. Ces datations reposent sur des éléments scientifiques, notamment la datation radiocarbone et la dendrochronologie ; elles interdisent notamment deux reconstitutions historiques traditionnelles, qui voyaient d’une part dans la destruction de la citadelle l’action des Cimmériens102 et d’autre part dans la tombe MM le tombeau de Midas103. En ce qui concerne la culture matérielle et les bronzes, il faut tenir compte de la nouvelle datation des tumuli : vers 850 pour le W, 760 pour le P et 740 pour le MM. L’évolution des coupes en bronze pourrait être reconstituée de la manière suivante : les filets ornant les coupes sont d’abord bas et larges, sur les objets du tumulus W ; puis plus articulés et hauts au tumulus P, traits qui sont encore accentués avec les objets du tumulus MM104. De même, un élément d’attache de vase en bronze orné d’un griffon (Megaron 3) a longtemps été comparé à deux anses à tête d’oiseau de la fin du ixe siècle à Hasanlu et relève d’une même période, bien qu’illustrant des styles différents. Est-ce que certains objets trouvés à Delphes pourraient dater de la fin du ixe siècle ? Ce ne serait pas incompatible avec la date des premières offrandes en bronze et l’apparition du culte d’Apollon ; rien n’indique pourtant à quel moment ces objets sont parvenus à Delphes.

Offrandes et domaines d’intervention des divinités Des offrandes spécifiques à Apollon et Athéna ? Les deux sanctuaires de Delphes offrent l’occasion d’examiner s’il existe un lien particulier entre le choix de l’offrande et la divinité, en l’occurrence Apollon ou Athéna. C’est une question importante dans l’histoire des cultes que celle du rapport entre « les attributions ou les modes d’intervention d’une divinité dans la société » et le « choix des objets qui étaient déposés, en qualité soit d’instrument du culte (en usage ou consacrés), soit d’offrandes à proprement parler »105. Apollon et Athéna font partie des quatre divinités les plus concernées par le mouvement d’édification des grands sanctuaires à la fin de l’époque géométrique106. Mais il semble qu’il y a des offrandes communes à ces dieux plutôt que des spécificités propres à chacun d’eux. Si des études récentes ont montré quelques traits particuliers des cultes d’Héra107 ou de Déméter108, en revanche pour Apollon ou Athéna il est difficile de faire coïncider leurs domaines d’intervention et les offrandes qui leur sont faites, en raison du caractère très varié des premiers et de la polysémie inhérente aux objets offerts, sans compter « l’ignorance où nous nous trouvons souvent du contexte rituel de l’usage d’un objet dans un sanctuaire »109. Les remarques qui suivent visent donc essentiellement à évaluer si des spécificités existent dans les offrandes faites à chaque dieu, et non à démontrer l’existence d’un système votif particulier. Ce questionnement sur l’offrande et sa relation à la divinité peut aussi aider à mieux comprendre la dynamique qui s’instaure entre le donateur et la divinité par le biais de l’offrande110 : les offrandes interviennentelles pour remercier la divinité ou pour l’inciter à exaucer le souhait du dédicant ? Même s’il ne s’agit pas d’analyser l’ensemble de l’assemblage votif, on tentera par quelques comparaisons avec d’autres sanctuaires de faire apparaître des tendances, des préférences dans les choix des dédicants. Si tout était possible, tout n’était pas d’usage111 .

Apollon Il ne saurait être question de passer en revue l’ensemble des attributions possibles d’Apollon ; il s’agit de comprendre les interactions entre le dieu de Delphes à l’époque archaïque et les offrandes qui lui sont faites. Il faut 101. Darbyshire, Rose 2011. 102. Mais ils n’apparaissent dans les sources assyriennes qu’à la fin

du viiie siècle. Darbyshire, Rose 2011, chapitre 3. 103. Qui était encore en vie en 709. Voir note précédente. 104. Darbyshire, Rose 2011, p. 62-63, d’après De Vries 2007. Certains restent prudent sur cette évolution chronologique des formes : Sideris 2016, p. 14.

105. Polignac 1997, p. 113. 106. Polignac 1995a, p. 42. 107. La Genière 1997. 108. Demetra 2008. 109. Polignac 1997, p. 113. 110. Prêtre 2009. 111. Brize 1997, p. 123.

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partir des catégories d’objets offerts au dieu. Sur 185 objets étudiés, 93 ont comme lieu de découverte le téménos d’Apollon ou ses abords immédiats, 13 le sanctuaire d’Athéna. Une grande proportion est donc sans provenance. Objets Trépieds à baguettes Chaudrons Autres fragments de vaisselle Support chypriote Total

Nombre 3 65 21 4 93

Tableau 8. — Objets offerts dans le sanctuaire d’Apollon.

Les types d’objets découverts à Delphes ne sont pas particulièrement marqués par leur lien avec Apollon. Dans la catégorie de la vaisselle, les supports ajourés à quatre faces témoignent des relations privilégiées avec la Crète, et non avec Apollon, puisqu’ils ont aussi été trouvés dans la grotte de Zeus sur le Mont Ida112. Les quatre divinités mentionnées, Héra, Athéna, Apollon et Artémis reçoivent le trépied de bronze comme offrande, « objet le plus précieux des trésors et des butins, symbole de victoire, évocateur de l’agôn, de l’affrontement sous toutes ces formes »113, alors que dans les sources littéraires archaïques, seul Apollon parmi les dieux reçoit des trépieds comme offrande114. Les trépieds à baguettes et les chaudrons à cuve mobile décorés d’appliques ne sont pas non plus spectaculaires à Delphes : très fragmentaires, ils sont certes variés, mais pas franchement révélateurs d’un aspect de la personnalité divine d’Apollon. Offerts également au Zeus d’Olympie, à l’Héra de Samos ou à l’Athéna de l’Acropole d’Athènes, ces objets indiquent tout au plus la richesse du dédicant qui offre du bronze ou ses relations avec l’Orient quand l’objet est de fabrication syrienne par exemple. Toutefois l’offrande du trépied chez Apollon mérite un peu plus d’attention : lié à la mythologie d’Apollon115, il devient à partir de l’époque classique le prix des concours pythiques. Mais depuis le ixe s., le trépied à cuve clouée, puis à cuve mobile, est une offrande de prestige caractéristique des sanctuaires les plus importants, et n’a pas d’autre sens. La question de l’origine mycénienne a également été abordée116, et permet de souligner la difficulté à imaginer le siège de la Pythie comme « un objet qui servait à faire bouillir la soupe ou la viande »117. Le trépied n’est donc pas a priori une offrande destinée à Apollon. L’ensemble des vases retrouvés dans le téménos d’Apollon ne saurait non plus apporter des informations discriminantes sur la divinité, car à l’époque archaïque, « la vaisselle de métal est appréciée par tous les dieux »118. D’une manière générale, et même dans le cas de l’offrande d’armes qui, à Delphes, ne portent pas de dédicaces, les offrandes à Apollon sont peu caractérisées119. Ce constat n’est pas vraiment étonnant, dans la mesure où dans la Grèce archaïque, on peut offrir n’importe quoi à n’importe quel dieu120 : Kypsélos aurait promis d’offrir toutes les possessions des Corinthiens en cas de succès121. Il est donc un peu ardu de reconnaître les champs d’action spécifiques d’Apollon pythien seulement à partir des offrandes. Rien ne peut non plus être mis en relation directe avec l’oracle qui devait pourtant jouer un rôle moteur dans la fréquentation du sanctuaire ; il est plus juste de dire que l’état de nos connaissances et le manque de sources

112. ƕƆƕƆƗƆƇƇƆƗ 2001, p. 192. 113. Polignac 1995a, p. 43. 114. Sakowski 1997, p. 24. Par exemple Hymne à Apollon III,

443 ; Hymne à Hermès IV, 178-179, Pindare. Pyth. 11,4. 115. Après s’être emparé de l’oracle de Thémis, il consacra dans le sanctuaire un trépied ; c’est assise sur un trépied que la Pythie rendait ses oracles. Héraclès, venu interroger l’oracle, devant le refus de la Pythie de lui répondre, voulut piller le temple, emporter le trépied et établir un oracle à lui en un autre endroit, Pausanias X, 13, 7-8. Grimal [1951] 1999, p. 41. 116. Herrmann 1982 qui y est favorable ; Amandry 1986 juge cette hypothèse sans fondement. 117. Rolley 1983b, p. 113. 118. Rolley 1991, p. 141.

119. Seuls quelques rares exemples peuvent éventuellement être mis en relation avec la personnalité d’Apollon. On songe en particulier à l’applique de meuble en ivoire inv. 9912 représentant un homme flanqué d’un lion ; la tentation d’y reconnaître un Apollon maître des animaux est légitime ; mais elle est aussi liée au fait que l’objet a été offert dans le sanctuaire d’Apollon et qu’on cherche automatiquement un lien entre l’offrande et la divinité. En outre, si cet élément appartenait à un meuble ou un instrument décoré d’autres figures ou d’autres scènes, on ne l’a peut-être pas offert à cause d’un lien superficiel entre une partie de l’iconographie et la divinité. Voir Aurigny 2016c, p. 34, fig. 19 (avec références). 120. Laumonier 1956, p. 12 et suivantes. 121. Aristote, Économique, 1346a 32.

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complémentaires ne nous permettent pas de tirer de telles conclusions du matériel archéologique disponible. La présence d’offrandes venues de loin ou précieuses peut aussi bien être interprétée comme un geste propitiatoire pour la consultation de l’oracle que comme un geste de remerciement après cette consultation. Les indices manquent pour reconstituer un scénario acceptable, d’autant que différents cas de figure sont possibles. Quelques orientalia, quelques objets grecs rivalisant clairement avec les modèles orientaux, de la vaisselle et des armes : en apparence, le sanctuaire d’Apollon pythien de Delphes n’attire pas d’objets spécifiques.

Athéna 13 objets parmi ceux qui ont été présentés ont comme lieu de provenance assuré Marmaria, le sanctuaire d’Athéna Pronaia. Ils comprennent des éléments de trépied, des appliques de chaudron et de la vaisselle de bronze ; par ailleurs, parure et fragments de bouclier assurent de l’étendue des champs de compétence d’Athéna ; Cl. Rolley affirmait qu’« Athéna reçoit les mêmes offrandes qu’Apollon » à Delphes122. Objets Trépied à baguettes Chaudrons Vaisselle Total

Nombre 2 4 7 13

Tableau 9. — Objets offerts à Athéna.

Les exemples de vaisselle précieuse, même s’ils sont remarquables comme la coupe historiée en bronze, ne sont spécifiques ni d’une divinité ni d’une région ; ils font partie des offrandes traditionnelles, ou du matériel lié à la pratique du culte. Il est évidemment possible de penser que la représentation d’une scène de guerre, en l’occurrence l’attaque d’une ville, sur la coupe phénicienne, est en rapport avec les fonctions guerrières d’Athéna123 ; mais c’est en tout cas un élément de correspondance minimal entre l’objet et la divinité, qui constitue surtout un indice de l’origine grecque, plutôt qu’orientale, de la consécration. On peut certes retrouver dans le sanctuaire d’Athéna à Delphes deux fonctions fondamentales qui existent dans les plus anciens sanctuaires d’Athéna : patronne des travaux féminins d’une part, Athéna préside aussi aux occupations guerrières des hommes124. Mais il faut bien reconnaître que la dimension féminine n’est pas très marquée, et qu’une bonne proportion d’objets ne peut s’expliquer ainsi. La consécration de trépieds à cuve clouée d’abord, puis de trépieds à baguettes et de chaudrons à appliques, dans le cas qui nous intéresse, n’est pas spécifique des compétences et champs d’intervention d’Athéna. De telles offrandes apparaissent plutôt comme caractéristiques des sanctuaires oraculaires d’Apollon, des sanctuaires à vocation internationale comme Olympie, ou des sanctuaires où se déroulent des compétitions athlétiques125. Leur présence dans l’Athénaion de Delphes corrobore le constat d’une fréquentation similaire à celle du sanctuaire d’Apollon : élites, masculines ou féminines, offrant des objets orientaux ou exotiques pour montrer les possibilités d’acquisition et les relations liées à leur statut privilégié. On voit peut-être apparaître dès le haut-archaïsme une Athéna qui sera la déesse amphictionique associée à Apollon126 ; en tout cas, on ne saurait distinguer entre le sanctuaire international d’Apollon et un sanctuaire fréquenté plus localement.

122. Rolley 1991, p. 139. 123. Martinez 1995, p. 67. 124. Graf 1985, p. 45. Certains objets, loin de se rapporter aux

compétences d’une divinité féminine, rappellent qu’Athéna est avant tout une déesse de la guerre. Elle reçoit en particulier des armes : Crésus lui-même avait consacré un grand bouclier d’or dans le sanctuaire d’Athéna Pronaia (Hérodote I, 92). Le second caractère qui se

dégage de cet ensemble votif est constitué par la présence d’objets de parure qui, à l’exception de la fibule à arc revêtu d’origine italique, sont des ornements de vêtements d’inspiration phrygienne et ionienne : Aurigny 2016c, p. 29-30, fig. 1-5. 125. Simon 1986, p. 165. 126. Jacquemin 2005, p. 248.

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Une fonction « politique » des offrandes ? Puisque les ensembles votifs trouvés chez Apollon ou Athéna ne font pas apparaître de traits particuliers liés à leurs compétences divines, il faut chercher à caractériser le type d’offrandes afin de mieux connaître les dédicants. Quels critères peuvent être utilisés pour essayer de cerner la pratique votive à travers l’offrande ? Devant les nombreux et multiples systèmes votifs des lieux de culte grecs, on s’est interrogé notamment sur le caractère privé ou public de l’offrande, et sur le statut social révélé par la valeur de l’offrande. Les offrandes sont-elles une dédicace publique d’une cité, d’une communauté, ou un don personnel fait par un particulier à la divinité ? Les deux aspects ne sont pas toujours aisés à distinguer dans la vaisselle du haut-archaïsme. Mais c’est un classement qui apporte un éclairage intéressant pour le sanctuaire de Delphes, bien que sa pertinence puisse être discutée.

Offrandes publiques ou privées ? Classer les objets selon ce critère est problématique : en l’absence d’inscriptions pour le haut archaïsme, comment reconnaître les offrandes politiques, publiques et personnelles127 ? Dans le cas des chaudrons et des trépieds, il semble que cette catégorie est représentative des offrandes officielles, comme l’indiquent la plupart des sources littéraires : si le chaudron peut être un cadeau fait à des hôtes, il est offert dans les sanctuaires de nombreux dieux, et le trépied n’est lié à l’oracle d’Apollon à Delphes qu’à partir du milieu du vie siècle128. Comme c’est un objet de prix, pour son matériau avant tout mais aussi pour sa qualité technique129, il est logique qu’on le considère dans les sanctuaires comme une offrande importante et donc officielle. À Delphes, on songe aux trépieds de Hiéron et de Gélon, qui commémorent les victoires militaires des Deinoménides sur leurs ennemis. Mais comment interpréter les restes parfois très modestes de ces récipients de bronze ? I. Kilian-Dirlmeier suggère d’après l’examen du matériel de Philia qu’on ne saurait expliquer les deux ou trois trépieds de taille normale comme des offrandes officielles130. Elle rappelle qu’il ne faut pas être trop systématique et voir des offrandes officielles dans les objets précieux comme les boucliers, les trépieds, la grande statuaire de bronze ou de marbre, car la valeur de ces objets ne renseigne pas nécessairement sur le statut du dédicant131. L’ambiguïté est entretenue à Delphes par les sources littéraires mentionnant les offrandes des rois orientaux. Il ne fait pas de doute que l’offrande du roi Midas, le trône sur lequel il rendait la justice132, est un symbole de son pouvoir et vaut comme offrande officielle. Dans le cas d’Alyatte en revanche, le cratère en argent qu’il envoie est assurément un objet de grand prix, illustrant la richesse et le pouvoir du souverain133. Mais il a pour fonction première de remercier le dieu à l’issue de sa maladie et pourrait à ce titre être rangé parmi les offrandes personnelles, même de très grande valeur. Un fragment de trépied retrouvé dans le sanctuaire permet de poursuivre ces réflexions : le pied de trépied chypriote en forme de pied de lion a été fait à Chypre même, semble-t-il, commandé par le fils d’Hermaios, le dédicant. Est-ce l’offrande d’un visiteur chypriote, venant honorer Apollon à titre personnel, ou n’est-ce pas ici plutôt une offrande à caractère officiel, puisqu’on peut supposer que ce personnage appartient à l’entourage royal d’un des souverains de Chypre134 ? Malheureusement le lieu de découverte du pied de trépied, à l’entrée du téménos d’Apollon, n’apporte pas de renseignement sur son lieu d’exposition initial ou sur son appartenance à un lot d’offrandes. Dans ce cas comme dans le cas des offrandes faites par un individu membre d’une cité, « les offrandes d’une communauté sont à distinguer de celles des individus quoique ces derniers puissent souhaiter parfois être identifiés comme membres d’un groupe, principalement comme citoyens d’une cité et que leurs consécrations soient alors l’expression de cette appartenance »135. On mesure l’importance de cette affirmation pour le rôle politique joué par le sanctuaire dans la construction identitaire des cités ou des ethnè.

127. Question déjà posée par Rouse 1902, p. 351. 128. Amandry 1986, p. 177-178. 129. Homère, Iliade, XXIII.718 ; XVIII. 373. 130. Kilian-Dirlmeier 2002, p. 215. 131. Ibid.

132. Hérodote I, 14. 133. Hérodote I, 25. 134. Fourrier 2010, p. 165, n. 78. Aurigny 2016d, p. 223 et

228. 135. Jacquemin 1999, p. 184.

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Delphes, un sanctuaire politique ? Comme les objets ne peuvent pas être confrontés avec des données textuelles contemporaines, il peut être tentant de les interpréter en fonction des connaissances disponibles pour les phases ultérieures du sanctuaire. Or, Delphes apparaît comme le sanctuaire qui a reçu très souvent les consécrations des vainqueurs à la guerre : « les offrandes consécutives à des victoires militaires forment la catégorie la plus répandue des consécrations delphiques »136. On peut citer notamment la consécration athénienne faite sur la façade du temple alcméonide137, les consécrations liées aux guerres médiques138, le trépied de Gélon célébrant sa victoire sur les Carthaginois. Delphes reçoit le butin fait tant sur les Barbares que sur les états grecs ; ces offrandes sont attestées néanmoins surtout pour l’époque classique, se raréfient à l’époque hellénistique où le sanctuaire a perdu de son importance. Delphes est-il dès le viie s. un sanctuaire marqué par cet aspect « politique » ? 139 La seule catégorie de la vaisselle métallique permet difficilement de l’affirmer, et même l’offrande d’armes, que nous n’examinons pas ici, ne suffit pas à faire apparaître une spécificité delphique140. Quoi qu’il en soit, le cas des armes doit être traité à part, car ce sont des documents qui se distinguent en ce qu’ils ne sont pas l’objet d’un commerce. Quelle que soit leur origine, on ne peut pas les interpréter comme les autres offrandes.

Types et valeur des offrandes Pour parler des pratiques votives, il faut d’abord être sûr que l’on a affaire à des offrandes et, partant, différencier clairement les statuts possibles des objets retrouvés dans le sanctuaire. Or un certain nombre d’objets maintiennent l’ambiguïté dans la mesure où ils peuvent relever de deux statuts légèrement différents : soit il s’agit d’objets déposés dans le sanctuaire comme dons à la divinité et qui n’ont pas d’autre rôle, soit il s’agit de dépôts qui sont aussi utilisés dans la pratique cultuelle. Le problème de la différenciation se pose dans le cas de la vaisselle. Le cratère en argent offert par Crésus, nous dit Hérodote141, était utilisé par les Delphiens à la fête des Théophanies pour mélanger le vin. Si rien n’atteste que c’était la fonction initiale de ce grand vase (et peut-être du cratère en argent offert aussi par Crésus), la place qu’il occupe à l’entrée du temple le suggère toutefois, même si les vases sont déplacés après l’incendie du temple. En dehors de formes spécifiques de vaisselle cultuelle, comme le cratérisque ou le kernos, on ne peut pas distinguer instruments du culte et offrandes. Or, si cela est dû en partie à un manque de données ou de connaissances, ce constat tient aussi à la polysémie fondamentale de l’offrande, qui peut avoir un autre usage que la seule fonction d’offrande. Les phiales, par exemple, sont les instruments utilisés pour les libations, mais font aussi référence au banquet et au repas rituel, tout en étant des productions parfois luxueuses offertes au dieu. Il n’en reste pas moins que ce sont dans les deux cas des offrandes, même si on n’a aucun moyen de savoir d’après la forme quels sont l’usage et la fonction exacts des objets retrouvés. La découverte de plusieurs vases de bronze dans la « Maison Rouge » sous le char des Rhodiens est plus problématique, car elle suggère que rien non plus ne différencie les objets en métal des particuliers et ceux que l’on offrait aux dieux. Cet exemple jette le doute sur l’ensemble des documents issus de fouilles sans données stratigraphiques précises. Le cas de la Maison Rouge, dans un contexte de la fin du viie s., est-il une exception à Delphes ? Ce fait illustre une tendance à la redéfinition de la différence entre le votif et le domestique ; les objets en bronze font davantage partie, au vie s., du contexte domestique, et leur place diminue parmi les offrandes, qui ont changé, pour être le plus souvent des statues ou des trésors142.

136. Id., p. 84. 137. Ibid. 138. Après la bataille de Marathon, les Athéniens consacrèrent la

base de Marathon, le trésor et la base triangulaire ; pour la seconde guerre médique, les Grecs consacrèrent l’Apollon de Salamine et le trépied de Platées. 139. V. Brinkmann, comparant les couroi à Delphes et à Samos, voit dans le sanctuaire de Delphes le lieu par excellence des offrandes politiques, si bien que les œuvres offertes deviennent de véritables monu-

ments historiques, à la différence d’un sanctuaire comme l’Héraion de Samos, où les offrandes auraient un caractère privé : Brinkmann 2003, p. 89. Les contextes sont différents : si les offrandes ne sont pas du même type, elles n’en sont pas moins publiques dans les deux sanctuaires. 140. Sur les offrandes d’armes à Delphes, voir par exemple Baitinger 2011, p. 20-33. ; Frielinghaus 2007. Sur les armes italiques de Delphes, Aurigny 2016b. 141. Hérodote I, 51. 142. Luce 2008, p. 212-213.

PRATIQUES VOTIVES AU HAUTARCHAÏSME À DELPHES

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Pour répondre à la question du caractère privé ou public des offrandes, les notions de valeur et de prestige ont été évoquées. À partir de quels critères peut-on classer une offrande parmi les « objets de prestige » ? La situation est-elle différente selon les sanctuaires ? Comment évaluer les offrandes de Delphes ?

Valeur des offrandes La notion de « valeur » des objets a été particulièrement discutée par L. Gernet et les représentants de l’anthropologie historique : il a mis en évidence tout d’abord les objets dont la valeur était le plus souvent matière à des récits chez les Grecs anciens eux-mêmes. Ces objets précieux, coupes, bassins, trépieds, armes, sont d’abord des objets d’un prix élevé, faits dans un matériau onéreux, si bien qu’ils « sont de l’ordre des «signes prémonétaires», […] plusieurs de ces objets sont en relation immédiate avec les débuts de la monnaie »143. Mais à cette valeur s’en ajoutent plusieurs autres, issues du contexte dans lequel ces objets sont connus et utilisés. Ils sont en effet « la matière d’un commerce noble »144, c’est-à-dire qu’ils sont choisis pour être offerts soit aux hommes, comme présents d’hospitalité au vivant ou comme offrande au mort, soit aux dieux, dans les sanctuaires. Ces objets prennent donc une valeur supplémentaire en raison de leur utilisation sociale, qui les transforment en ce qu’on peut appeler des agalmata, offrandes destinées à réjouir le destinataire. C’est bien dans les pratiques d’acquisition et de circulation que se créée la « valeur mythique » mise en évidence par L. Gernet : un jeu d’échanges entre l’objet et le prestige de ses possesseurs accroît la valeur de l’objet145. Les catégories proposées par L. Gernet sont bien les mêmes que celles qui constituent le corpus étudié ici ; ce sont en effet des objets qui relèvent d’une « industrie que nous qualifierions de luxe »146. Ces documents recevaient en outre un prestige venu d’une part de leur circulation entre des mains illustres, d’autre part de leur consécration dans un sanctuaire sous le regard des nombreux visiteurs : « le transfert des biens de prestige de la nécropole au sanctuaire dénote une extension du cercle de la collectivité conviée à la démonstration sociale »147.

Offrandes de prestige C’est donc le cadre du sanctuaire qui permet de comprendre le prestige supplémentaire qui s’attache à l’objet. Par rapport au domaine funéraire où l’objet de prestige était enseveli avec son propriétaire, le sanctuaire garantit à l’objet une reconnaissance plus durable. Le sanctuaire permet de mettre en scène une fonction mémorielle double : d’une part l’objet présenté a sa propre histoire, « un pedigree évalué en fonction de la gloire de [ses] détenteurs successifs qui se [l’] étaient transmis par héritage, en cadeau ou comme prix de concours »148, d’autre part, il entame dans le sanctuaire une histoire rappelant le prestige des donateurs, parfois pendant plusieurs siècles149. L’exemple du trépied, développé par Fr. de Polignac, est très représentatif de ce phénomène : une fois offert, un tel objet devenait un véritable monument, support de mémoire150. On peut imaginer qu’un chaudron à cuve mobile portant des protomes de griffons comme la tête inv. 8396 (cat. 47), qui s’élevait à plusieurs mètres de haut, devait fonctionner comme un monument de ce type dans l’espace du sanctuaire. Malheureusement son lieu de découverte est inconnu, ce qui ne permet pas de reconstituer pour le viie s. une topographie des offrandes de prestige. À l’intérieur de ces pratiques dédicatoires, il convient de dégager le cas de l’offrande d’objets de fabrication non grecque, essentiellement orientale ou italique, dans le sanctuaire. Dans le cas d’objets ayant une valeur importante en soi, notamment par leur matériau ou leur technique, l’origine orientale ou « étrangère » apporte comme un surcroît de prestige, à celui qui s’est procuré les précieux objets lors d’un voyage, grâce à ses relations personnelles avec des Orientaux ou des intermédiaires, ou par sa richesse. Le texte homérique nous aide à mesurer le prix et la valeur

143. Gernet 1995 (1968), p. 124. 144. Id., p. 125. 145. Duplouy 2006, p. 181. 146. Gernet 1995 (1968), p. 127. 147. Duplouy 2006, p. 180.

148. Polignac 1998, p. 99. 149. Si l’on songe au cas des frontaux inscrits au nom d’Haza’el,

on peut aussi mentionner à Delphes le matériel des favissae de l’Aire, rassemblant des objets qui avaient été visibles pendant trois siècles. 150. Voir aussi Brisart 2011, p. 156-159.

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BRONZES DU HAUTARCHAÏSME À DELPHES

attachés aux créations faites et offertes par des Orientaux151 ; la comparaison avec le matériel oriental d’autres sanctuaires grecs apporte aussi l’image concrète du circuit suivi par les objets orientaux ensuite offerts à Delphes152. Il convient de retenir ici la « valeur ajoutée » de l’offrande orientale pour un dédicant grec, par rapport à la masse des objets offerts. La coupe de bronze chypro-phénicienne inv. 4463 décorée d’une scène de siège de ville est caractéristique de la vaisselle précieuse offerte fréquemment dans les sanctuaires, mais son origine en fait un objet différent, qui distingue également son propriétaire. Même si quelques exemples montrent qu’on faisait à Delphes des offrandes très prestigieuses au viie s., il faut tout de même reconnaître que les séries les plus belles et les plus impressionnantes que l’on trouve à Olympie153 ou à Samos154n’ont pas été retrouvées à Delphes. Même si nous ignorons pour la grande majorité des objets leur « pedigree », leurs conditions d’acquisition et les circonstances de l’offrande, les objets retrouvés ne sont pas, pour chaque catégorie, parmi les plus coûteux et les plus imposants. Seule la comparaison avec les autres sanctuaires permet d’interpréter ce fait en fonction de la fréquentation du sanctuaire.

151. Sur les orientalia chez Homère, Duplouy 2006, p. 170-174. L’Odyssée IV, vers 613-618, mentionne un cratère d’argent aux lèvres couvertes d’or que Ménélas tenait de son hôte le roi de Sidon. Sur l’image des Phéniciens, voir Odyssée XV, 415-470. 152. Infra, p. 175-178.

153. Supports coniques de chaudrons, protomes de griffons martelées, sirènes : Herrmann 1966 et 1979. 154. Les nombreuses protomes de griffon constituent sans aucun doute les offrandes les plus spectaculaires de Samos.

Chapitre 8

Les offrandes et l’histoire du sanctuaire de Delphes

La documentation choisie permet, à une époque où les inscriptions et les réalisations architecturales majeures manquent, de réfléchir aux relations extérieures du sanctuaire et de retracer certains aspects de l’histoire de Delphes avant son avènement comme sanctuaire panhellénique majeur.

L’origine des offrandes et l’origine des dédicants Les « offrandes étrangères » et les « étrangers » dans les sanctuaires grecs I. Kilian-Dirlmeier a prudemment procédé à l’étude de l’origine des objets « étrangers » dans quatre sanctuaires grecs, Phères, Pérachora, Olympie, Samos. Avec toutes les limites touchant à l’état des découvertes et des publications, elle prend en compte à chaque fois les objets qui ne sont pas produits dans les ateliers du sanctuaire ou dans la région alentour1. Il se pose donc un problème de définition géographique et de sens du terme « fremd » ; celui-ci est employé dans un sens uniquement géographique, alors que des visiteurs « étrangers » d’une cité proche, Chios ou Milet à Samos par exemple, ne sont pas comptés dans le matériel. À Phères, tout ce qui n’est pas thessalien est « fremd », mais peut-être qu’à l’intérieur des objets thessaliens, des différences pouvaient être montrées. En outre, il aurait été intéressant de compter les objets non étrangers, ne serait-ce que pour en connaître la proportion par rapport à l’ensemble. À Samos, par exemple, la fabrication des protomes de griffon en bronze constitue une part importante des offrandes grecques (300 objets), alors que sont analysées ensuite les provenances grecques « extérieures ». Par ailleurs, I. Kilian-Dirlmeier affirme ne pas prendre en compte les productions des ateliers du sanctuaire lui-même, alors qu’il est très vraisemblable que les artisans installés à proximité des sanctuaires, venus parfois de loin, fabriquaient des objets dans leur tradition stylistique, argienne ou laconienne par exemple à Olympie. L’auteur sous-entend donc que le style d’un objet indique le lieu de production, alors que la situation est loin d’être aussi simple ; sa prudence néanmoins l’empêche de tirer des conclusions trop définitives et l’étude de ces quatre sanctuaires selon la même méthode2, qui permet des comparaisons d’ensemble, ne l’empêche pas d’interpréter ensuite les résultats en fonction du contexte de chaque sanctuaire.

1. « das umliegenden Land », Kilian-Dirlmeier 1985, p. 215. 2. S’il est vrai que dans cet article, le résumé des origines des

offrandes sous forme de tableaux et de « camemberts » est très utile pour comparer rapidement les provenances, on s’interrogera en revanche sur

les cartes, qui sont présentées avec des flèches convergeant vers le sanctuaire, suggérant ainsi des déplacements directs d’objets et des flux dont la réalité reste à démontrer.

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Une sélection en Orient comme en Occident Nous avons identifié dans la vaisselle métallique, malgré les limites de l’exercice, des provenances orientales et occidentales. Il paraît utile de se demander quelle est la place de ces objets « étrangers » dans la culture matérielle et les usages grecs. En effet, de nouvelles formes ou de nouveaux motifs peuvent correspondre à des besoins nouveaux ou avoir été adaptés à des usages plus anciens. C’est aussi une façon d’évaluer l’importante sélection effectuée parmi des documents extérieurs à la culture matérielle grecque.

La fonction des exotica La fonction des objets orientaux retrouvés à Delphes indique-t-elle des changements dans les offrandes ou dans les pratiques cultuelles grecques ? L’évolution des pratiques religieuses et culturelles grecques à l’époque des contacts avec les peuples et civilisations d’Orient n’est pas nécessairement soumise à l’ « influence » des religions orientales3. Le cas de la vaisselle est révélateur à ce titre. Si l’on prend l’exemple des chaudrons à cuve mobile décorés d’appliques, la répartition géographique qui les caractérise dans l’état actuel des connaissances suggère que ce sont des artefacts fabriqués en grande majorité pour des commanditaires grecs. Cela vaut surtout pour les chaudrons décorés de protomes de griffon dont on n’a pas du tout d’équivalent en Orient. C’est pourquoi le scénario le plus vraisemblable est celui du déplacement d’artisans orientaux en Grèce pour répondre à la demande de commanditaires qui recherchaient un objet de valeur présentant un aspect nouveau et étrange. Les chaudrons à sirènes ou à taureaux sont connus, particulièrement à Gordion, où ils font partie du mobilier funéraire. Les chaudrons à appliques, dont la forme est indéniablement orientale à l’origine, ont néanmoins changé de fonction en devenant des offrandes votives dans les sanctuaires. Le développement du chaudron à protomes de griffon, qui conduit à la fabrication d’objets de plus en plus grands qui requièrent une virtuosité technique, indique également qu’ils s’éloignent de toute fonction utilitaire. Le chaudron sur trépied n’est pas un emprunt récent à l’Orient, puisqu’il est connu dès le ixe s. dans les sanctuaires grecs4, dans une version où les pieds sont cloués à la cuve. Si un ustensile de cuisine a été choisi au départ pour remplir la fonction d’offrandes, c’est que le trépied est l’objet le plus précieux que l’on sache fabriquer, avant l’invention de la grande statuaire5. Les chaudrons à cuve mobile s’inscrivent donc dans cette continuité, sans être une référence à l’instrument du banquet auquel les contacts avec l’Orient peuvent faire penser. Les rapports entre la cité et le banquet ont été étudiés par P. Schmitt Pantel qui a insisté sur la différence entre le chaudron et le cratère : le premier est le « signe du repas commun à base de viandes, du banquet sacrificiel privilège de l’aristocratie guerrière détentrice du pouvoir politique, militaire, religieux », alors que le cratère renvoie à la nouvelle pratique du symposium6. Les réflexions de Fr. de Polignac sur le sens symbolique du chaudron dans les sanctuaires ont fait apparaître la nécessité de prendre en compte chaque contexte précis7, car c’est un objet fortement polysémique et ce d’autant plus qu’il a été fait en Orient ou par des artisans orientaux. Il est difficile de savoir si la plupart des chaudrons à appliques étaient fabriqués dans un but d’abord votif ; cet ustensile a perdu sa fonction première d’instrument de cuisine, mais il n’est peut-être pas toujours destiné à être offert. C’est un bien de grande valeur qui peut jouer le rôle de cadeau « princier », en circulant au sein des élites orientales ou grecques : il peut donc avoir une longue existence avant d’être offert à un dieu. Il peut toutefois être fabriqué pour être offert8 : à Delphes, le trépied d’Hermaios a peut-être été fait spécialement pour Apollon. Quelles que soient les difficultés à estimer le nombre de chaudrons de type oriental qu’avait reçus le sanctuaire de Delphes9, la présence de telles offrandes ne témoigne pas de change-

3. Polignac 1992. 4. Sur la datation des premiers trépieds, voir la mise au point dans

7. Polignac 1996. 8. Kôlaios fait faire à son retour un grand trépied pour l’offrir à

Aurigny, Scott, à paraître. 5. Rolley 1983a, p. 53. 6. Schmitt Pantel 1992, p. 43 : le passage du chaudron au cratère dans le matériel funéraire de Cumes a lieu au début du vie s.

l’Héra de Samos, comme le rapporte Hérodote, IV, 152. 9. Quelques griffons martelés anciens, une dizaine de sirènes orientales et une dizaine de taureaux devaient se trouver sur quinze à vingt chaudrons.

LES OFFRANDES ET L’HISTOIRE DU SANCTUAIRE DE DELPHES

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ments profonds dans la pratique religieuse. Le chaudron « orientalisant » ne répond pas à un besoin radicalement nouveau ; il s’inscrit dans la recherche permanente par l’aristocratie des cités qui fréquente Delphes d’être remarquée par l’originalité et la splendeur des offrandes. Aurait-on par ailleurs l’exemple qu’une fonction particulière peut être remplie par des objets venus d’Orient ? Les Grecs ont, semble-t-il, adapté certains objets d’origine orientale à leurs besoins cultuels. C’est le cas des phiales à fond plat ou des bols à reliefs phéniciens, ce qui montre une spécialisation votive de ce type de vaisselle10, utilisée en Orient dans une sphère profane même s’il peut s’agir du banquet royal. Le cas de la phiale de type phénicien de Marmaria correspond bien à ce cas de figure : trouvée à proximité de l’autel, elle paraît avoir été plus qu’une offrande, un instrument du culte lui-même. Toutefois, puisqu’on doit tenir compte du contexte particulier de Delphes, il faut souligner que les fouilles menées par J.-M. Luce sous le char des Rhodiens ont apporté des éléments nouveaux. Dans la Maison Rouge, construite à la fin du viie s. et détruite vers 580 av. J.-C., deux phiales, un bol et un chaudron de bronze ont été retrouvés, dans un contexte incontestablement domestique : « comparé aux offrandes de la même époque, ce matériel est riche d’enseignements. Ce qu’il exprime, c’est la tendance nouvelle à redéfinir la différence entre le votif et le domestique. »11. Certes, il ne s’agit pas dans ce cas, un peu plus récent que les objets pris en compte jusqu’ici, de coupes orientales ; mais les séries d’objets de vaisselle ne montrent pas de rupture typologique entre les documents orientaux et les documents grecs. La fin du viie s. constitue sans doute un moment charnière dans les pratiques votives : à partir de cette époque, et surtout au début du vie s., les offrandes immobiles, petits trésors ou monuments sculptés, tendent à remplacer les chaudrons à appliques, les trépieds à cuve clouée ou les objets personnels en bronze. À l’inverse, les riches pièces de vaisselle entrent chez les particuliers soucieux de briller également dans une sphère privée. Bien que les formes changent, il est difficile de décrire précisément de nouvelles pratiques cultuelles qui seraient venues avec le matériel étranger. Les Grecs ont offert à Delphes de riches présents qui perpétuaient des pratiques élaborées dans le courant du viiie s. ; ils ont choisi dans les formes connues en Orient ce qui correspondait le mieux à leurs besoins. Si une « influence » de l’Orient est sensible, elle joue à un niveau très général : la mise en valeur d’un passé héroïque, les manifestations cultuelles plus matérialisées et publiques peuvent en partie s’expliquer à la suite de contacts avec les civilisations de l’Orient12. La prise en compte d’un passé très ancien au cours d’une nouvelle fondation est précisément ce que l’on trouve à Delphes, dans le sanctuaire d’Athéna à Marmaria, où des figurines de terre cuite mycéniennes ont été rassemblées et enterrées sur une pierre plate au sud des autels13, au moment de l’aménagement du sanctuaire à la fin du viiie s. On peut sans doute reconnaître un « modèle » oriental dans cet exemple de « dépôt de fondation », mais il s’agit avant tout d’un intérêt pour un passé perçu comme très ancien, qui permet de se rattacher à une origine, une tradition par « un contact matériel direct »14, ici au moment de l’aménagement du sanctuaire d’Athéna. Il n’en reste pas moins que les éléments nouveaux ont pu être accueillis après que les transformations internes de la société grecque l’eurent permis.

Quel Orient à Delphes ? Les objets « exotiques » parvenus à Delphes présentent un ensemble de modèles et de motifs qui ont été sélectionnés dans l’immense répertoire que fournissait l’art de la Syrie du Nord et du Levant, de Chypre ou de l’Anatolie. On s’est interrogé sur les vecteurs de transmission de ce répertoire15, ainsi que sur les modalités du transport des œuvres16 : il semble une fois encore que les Grecs aient clairement choisi les formes qui leur convenaient le mieux, et leur choix ne dépendait pas seulement des petits objets arrivant jusqu’à eux. Les documents de Delphes apportent aussi leur témoignage sur cette question. 10. Polignac 1996, p. 61 : « Ainsi, la spécialisation cultuelle de certains objets d’origine orientale, comme les phiales à fond plat ou les bols à reliefs phéniciens, suffirait à expliquer que ces productions aient abouti systématiquement dans les sanctuaires ». 11. Luce 2008, p. 244. 12. Polignac 1992, passim.

13. Lerat 1957, p. 708-710. Müller 1992, p. 481. 14. Polignac 1992, p. 119. 15. Gunter 1990, Gunter 2009. 16. Sur les modes d’acquisition ou de passage des objets de l’Orient

vers la Grèce, voir infra, p. 174-175.

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BRONZES DU HAUTARCHAÏSME À DELPHES

Les civilisations du Proche-Orient se caractérisent par l’importance de l’art de cour et les représentations du pouvoir, voire du souverain lui-même. Or cette dimension de l’art oriental n’est présente que rarement sur le sol grec17 : le cas du sanctuaire de Delphes confirme cette absence d’iconographie royale18. De toute façon, les symboles du pouvoir royal changent de sens en étant offerts à une divinité grecque et valent surtout comme un objet exotique, avant de faire référence peut-être au pouvoir politique du dédicant ou à la puissance de la divinité. Quels objets orientaux sont parvenus à Delphes ? Les appliques de chaudron, sirènes, taureaux ou sphinx, révèlent un goût pour les créatures fantastiques ou les monstres ; mais s’il est vrai que les griffons ont été créés pour la clientèle grecque, ce n’est donc pas l’Orient qui fournit les objets les plus étranges19. Les nombreuses appliques de récipient zoomorphes qui utilisent des motifs orientaux ne sont pas plus exotiques ou bigarrées que ce que l’on trouve dans les motifs de la céramique peinte à partir de la fin du viiie s. Les modèles étrangers choisis sont donc toujours des formes et des motifs transposables dans les usages grecs. La disponibilité et l’utilisation des modèles étrangers ne dépendaient pas des objets mobiles qui arrivaient effectivement sur les sites grecs, mais du choix des motifs correspondant à une intention bien précise de l’artisan : c’est pourquoi, entre l’importation d’une production orientale réutilisée dans un contexte grec et la création d’un objet puisant des motifs dans un répertoire oriental, la différence est ténue. Cela conduit à remettre en cause les paradigmes de l’art « grec » et « oriental », créations avant tout modernes qui opposent les deux domaines20. Les objets orientaux qui ne sont connus que dans les sanctuaires grecs participent davantage de l’art grec que de l’art oriental.

Des objets orientaux inconnus en Orient En dehors des chaudrons décorés de sirènes, dont des équivalents ont été découverts dans le tumulus MM à Gordion, la plupart des objets orientaux découverts dans les sanctuaires grecs ne trouvent pas d’équivalents en Orient. Le cas le plus patent est bien entendu celui des griffons : même si l’on admet qu’une partie des griffons martelés et l’ensemble des exemplaires fondus ont été faits dans des ateliers grecs, les protomes martelées les plus anciennes, remplies d’un mélange fait en partie de bitume qui « signe » l’intervention d’un oriental21, sont inconnues en Orient. À moins d’une découverte archéologique en Orient, une conclusion s’impose : ces protomes ont été faites uniquement pour la clientèle grecque, même si ce sont des artisans orientaux qui ont initié cette production. Le fait que la protome de griffon soit une transposition, dans un autre matériau et pour un autre usage, de modèles connus sur des hauts reliefs22, lui enlève en quelque sorte le statut d’objet oriental. Les séries continues des appliques de chaudron le prouvent assez : même les sirènes « orientales » sont connues surtout hors de l’Orient. Ce phénomène est d’ailleurs bien connu pour un certain nombre d’objets attribués à la Phénicie. Le cas des tridacnes, dont Delphes a conservé trois exemplaires, le montre : la plupart des coquilles gravées ont été trouvées hors de Phénicie, puisque c’est avant tout un produit destiné à l’exportation23. Dans le cas des chaudrons à appliques, il semble que, de plus, les commanditaires aient fait venir les artisans aussi bien que la marchandise. Une autre hypothèse propose que les artisans orientaux, dans un établissement comme Al-Mina par exemple, aient profité de la présence de commanditaires grecs pour développer une production spécialisée à leur intention24.

17. Contra Gunter 1990, p. 137 : l’auteur montre que la peinture de vase, qui représente des scènes de chasse ou des préparatifs militaires, s’est inspirée des reliefs sculptés des palais assyriens. 18. Seul l’objet inv. 2926 (Perdrizet 1908, n° 625, p. 119, fig. 427 ; Rolley 1969, p. 55, fig. 18) peut à la rigueur être interprété comme un sceptre ou un insigne de pouvoir, mais ne constituerait pas plus qu’une exception. L’Héraion de Samos en revanche a livré des têtes de bâton qui peuvent être considérées comme des sceptres : Jantzen 1972, p. 56-57, pl. 50-51 ; un autre exemplaire vient de Lindos, Blinkenberg 1931, n° 664, pl. 26. 19. À Delphes il y a finalement très peu d’objets exotiques et étranges : même la « pacotille » orientale constituée de scarabées, de

sceaux ou de statuettes en faïence, production égyptienne ou phénicienne, est relativement rare. Seules les coquilles de tridacnes, dans un matériau inconnu en Grèce et dans une technique elle aussi caractéristique de l’art phénicien, correspondent à l’image d’un art rare et précieux qui pouvait séduire et étonner les Grecs. 20. Gunter 2009, p. 50-80. 21. La présence de bitume est peut-être moins déterminante que la technique employée, dans la mesure où des gisements de bitume ont pu exister ailleurs qu’en Orient. 22. Croissant 2010. 23. Markoe 2007. 24. Treister 1995, p. 159-178.

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Des objets grecs : le rôle du sanctuaire comme vitrine des cités. Malgré la présence très majoritaire d’objets de fabrication grecque, il n’est pas facile de les attribuer à des ateliers précis. Des tendances sont néanmoins perceptibles, comme la présence de la Crète, le rôle important joué par les cités du Nord-Est du Péloponnèse dans la fabrication et la circulation des documents, et les relations multiples avec l’Ionie. Le problème reste de savoir de quoi la présence de matériel témoigne ; et l’utilisation de sources écrites ou de la situation postérieure du sanctuaire est indispensable pour en proposer une interprétation. Par ailleurs, si le viiie s. est celui de la « naissance » des cités25, elles sont loin d’être totalement constituées au viie s., et les situations sont aussi diverses, pourrait-on dire, que les cités elles-mêmes ; Delphes constitue un moteur et un lieu d’expression privilégié de ces cités, mais cela ne veut pas dire que le matériel archéologique peut « témoigner » explicitement de ces relations. Si l’idée générale est facile à admettre – le sanctuaire a dû avoir une influence sur la création artistique –, il est plutôt malaisé de le démontrer dans le détail. À Delphes, les fouilles n’ont pas livré de matériel permettant une réflexion sur d’éventuels ateliers du sanctuaire, à part quelques ratés de coulée26. Leur présence a beau être fort probable, elle ne peut être ni localisée ni évaluée. Il faut donc essayer de se représenter, à partir des objets conservés, la volonté des commanditaires et l’imagination créatrice des artisans. Le sanctuaire, au moment de sa montée en puissance, rassemblait en un lieu unique des productions variées et originales, qui constituaient une source très riche de formes et d’idées. La vaisselle en est un exemple caractéristique. C’est pourquoi il n’est pas anodin que Delphes ait conservé une des plus anciennes sirènes grecques qui adaptait directement les exemples orientaux, la sirène inv. 1248 (n° 73). La facilité à distinguer sirènes grecques et orientales, dans la plupart des cas, met en évidence le double processus qui consiste à imiter tout en modifiant la plupart des éléments formels que les appliques à sirènes orientales comportaient. Comme ces sirènes grecques, finalement fort peu nombreuses, ont été trouvées uniquement dans les sanctuaires à Olympie, Athènes et Delphes, il est fort vraisemblable qu’elles étaient faites sur place par des artisans qui proposaient ainsi des chaudrons à sirènes répondant alors au goût de la clientèle. Leur petit nombre indique aussi la brièveté de cet engouement. Le sanctuaire joue donc à la fois un rôle de diffusion des modèles et de lieu d’élaboration des nouveautés ; on doit y trouver à la fois des œuvres emblématiques de leurs dédicants, surtout si ce sont des cités ou des communautés, et des créations originales, quelle qu’ait été leur postérité. C’est peut-être à cause de cette double dimension qu’il est parfois difficile de reconnaître des productions locales dont on pense qu’elles devraient identifier clairement l’origine des fabricants et des dédicants. Or, les cas de figure sont souvent bien plus complexes. Et même une œuvre emblématique du style argien, comme Cléobis et Biton pour prendre un exemple un peu plus récent, est assez déconcertante, de par son matériau surtout, mais aussi parce qu’elle n’a aucun équivalent à Argos ni ailleurs. Si la signature du sculpteur n’avait pas assuré l’origine argienne de l’œuvre, gageons que celle-ci aurait été aussi un élément à démontrer, malgré le témoignage de la petite plastique argienne27. C’est un trait qui caractérise les offrandes de Delphes dès le haut-archaïsme : elles sont à la fois exceptionnelles et caractéristiques de traditions artistiques28. L’exemple des supports chypro-crétois présente ce double aspect : alors qu’on les reconnaît facilement comme crétois, on n’est pas sûr de pouvoir les attribuer à un atelier précis en l’absence de parallèle exact. Et c’est pourquoi ils ont en même temps ce caractère d’exception, qui s’ajoute à leur répartition si particulière29. Même si aucune preuve ne peut être fournie, il n’est pas impossible de penser que ces supports ont été créés pour être offerts précisément à Delphes, où les Crétois avaient leurs intérêts. La destination votive des documents en question n’étant pas douteuse, rien n’empêche de supposer que le sanctuaire de Delphes ait été à l’origine de leur création. Le sanctuaire de Delphes a donc suscité un certain nombre de créations, d’œuvres fondamentalement nouvelles. Ce processus à l’œuvre à Delphes apporte un éclairage sur la nature de l’art grec au viie s., valable sans doute pour toute la période archaïque. L’art grec est formé alors aussi bien par les offrandes d’objets acquis en Orient ou fabri-

25. Polignac 1995a. 26. Rolley 2002a. 27. Aurigny, Croissant, à paraître.

28. Croissant 2000, p. 347. 29. Supra, p. 37-39.

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qués par des Orientaux, puisque ces objets deviennent des dons à la divinité grecque et entrent dans le paysage visuel des Grecs, que par les offrandes d’objets grecs. L’art grec à Delphes se définit par la réunion de toutes ces caractéristiques, et non par l’existence d’œuvres orientales et d’imitations plus ou moins « orientalisantes ». Si la tradition historiographique nous invite à passer par la distinction entre « oriental » et « orientalisant » pour avoir une idée de la fréquentation du sanctuaire, cette manière de concevoir la production artistique du viie s. ne rend pas compte de nombreux documents. La fréquentation du sanctuaire n’est pas non plus éclairée par une telle approche : on l’a dit maintes fois, l’origine d’un objet ne trahit pas nécessairement l’origine de son donateur. On ne peut donc faire l’économie de la comparaison du matériel de Delphes avec les découvertes d’autres sanctuaires ou d’autres sites ayant livré un matériel archéologique analogue, pour comprendre la production et la circulation des objets. L’état très varié de la documentation rend évidemment cette entreprise très périlleuse ; même si elle ne peut pas apporter tous les résultats escomptés, cette méthode reste la seule à appliquer pour ne pas brosser un tableau abstrait ou caricatural de la fréquentation à Delphes. L’interprétation archéologique a donc des limites étroites et ne saurait proposer que des scenarii vraisemblables.

Relations extérieures et fréquentation du sanctuaire30 En ce qui concerne la catégorie de la vaisselle étudiée ici, la première remarque à faire est le nombre beaucoup plus faible d’objets conservés à Delphes par rapport aux deux sanctuaires d’Olympie et de Samos. Il est vrai que les conditions de conservation sont loin d’être aussi propices à Delphes qu’ailleurs31, et qu’il est difficile de faire des comparaisons à partir de chiffres bruts32. On a tenu compte de ces observations en analysant des documents sous la forme de pourcentages ; mais si l’on admet que seulement une petite partie des bronzes du viie s. a été conservée, il faut aussi se demander si des objets comparables à ceux de Samos ou d’Olympie ont été trouvés à Delphes. La série des protomes de griffon suffit à montrer que les exemplaires delphiques, moins nombreux, présentent la variété et la qualité des documents trouvés ailleurs. L’objectif, quoique difficile, consiste donc à esquisser une image de la fréquentation du sanctuaire, sans tenir pour acquis le « rayonnement » international de Delphes, ni considérer à partir de lacunes dans le matériel que c’est un sanctuaire de second ordre. On envisagera donc d’abord comment et par qui les objets, surtout les productions « exotiques » ont pu arriver jusqu’à Delphes, avant d’évoquer les sources qui permettent d’identifier les dédicants.

Fréquenter et enrichir le sanctuaire H. Kyrieleis a récemment rappelé les différents modes d’acquisition des objets étrangers par les Grecs33. Les objets importés retrouvés dans les sanctuaires grecs peuvent être le reflet des relations commerciales entre Grecs et Orientaux ou Occidentaux. On songe évidemment au voyage de Kôlaios de Samos en Égypte et à Tartessos, à ceux de Sostratos d’Égine34 et du Corinthien Démarate en Étrurie35 ; la présence d’objets étrangers en Grèce donne une illustration concrète aux textes. De la même façon, l’existence d’établissements grecs comme Al-Mina ou Naucratis permet un accès direct aux objets étrangers. Mais cela explique surtout la présence de produits d’importation dans les sanctuaires liés à des cités très commerçantes, comme Samos, à l’Héraion, ou Corinthe, avec les offrandes de l’Héraion

30. On trouvera un tableau synthétique des relations extérieures de Delphes au viie siècle, comprenant l’ensemble des offrandes métalliques, dans Aurigny 2011. 31. Les conditions géomorphologiques du sanctuaire expliquent la mauvaise conservation des bronzes, à cause du sol très calcaire et des ruissellements importants sur les pentes du Parnasse : Rolley 1984a, p. 284. 32. Rolley 1984a, p. 284 : « qu’il y ait, ici comme ailleurs, parmi les bronzes de Delphes, pourtant peu nombreux, des objets non repré-

sentés à Olympie, n’est pas sans importance non plus pour l’utilisation des statistiques. Il faut tenir compte des conditions de conservation du métal : Olympie et Samos sont […] les deux sites de Grèce les plus favorables ». 33. Kyrieleis 2006, p. 130-137. 34. Hérodote IV, 152. 35. Tite-Live I, 34.

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de Pérachora. Pour un sanctuaire comme Delphes, le lien n’est pas évident, même si on peut aussi admettre que les importations sont des offrandes des Corinthiens engagés dans le commerce à longue distance ; le fait de les offrir dans un sanctuaire qui n’est pas sur le territoire de la cité suppose une intention différente. Dans le cas où les objets orientaux étaient rapportés par des Grecs ayant servi comme mercenaires auprès des dynastes égyptiens ou Orientaux, il reste aussi à expliquer dans quel but ils les offraient ensuite dans tel ou tel sanctuaire : ni le sanctuaire d’Apollon, ni celui d’Athéna à Delphes n’ont de raisons particulières d’attirer ce type d’offrandes. Et en l’absence d’inscription, c’est un cas où l’on ne peut rien déduire du matériel. Mais ce ne sont pas nécessairement des Grecs qui ont effectué le transport. La diffusion des objets orientaux dans le bassin méditerranéen oriental et occidental doit beaucoup à l’activité des Phéniciens. À Delphes, une fois encore, cette explication n’est pas particulièrement satisfaisante. Non que les objets phéniciens ou susceptibles d’avoir été apportés par les Phéniciens n’existent pas, mais ils représentent une très petite proportion de l’ensemble. L’idée que les artisans orientaux étaient présents en Grèce pour répondre à des commandes spécifiquement grecques, développée surtout par J. Boardman36, est beaucoup plus intéressante et offre une hypothèse historique qui permet de mieux comprendre le matériel. Faudrait-il alors imaginer à Delphes une activité importante qui ferait se côtoyer Grecs et étrangers, artisans, visiteurs et constructeurs, comme une étude de W. Gauer l’a proposé pour Olympie37 ? Le tableau est sans doute un peu excessif car, si les sanctuaires étaient les points de rassemblement de biens fabriqués dans toute la Méditerranée, il s’en faut de beaucoup qu’on puisse en déduire la présence de visiteurs « cosmopolites ». En dehors des sanctuaires d’Asie Mineure comme l’Artémision d’Éphèse, qui accueillait les offrandes lydiennes, signe de l’intérêt des voisins pour ce sanctuaire, on voit mal, en l’absence de recoupements précis avec d’autres sources38, l’intérêt des visiteurs étrangers pour les sanctuaires grecs. La présence de visiteurs et de donateurs étrangers à Delphes est sans doute très limitée. Il faut donc s’interroger sur la façon dont les objets étrangers sont arrivés dans le monde grec, et en particulier dans les sanctuaires.

Du viiie au vie siècles : ruptures et continuités La fin du VIIIe s. et le début du VIIe s. En regroupant les remarques faites à propos de l’origine des offrandes, des acteurs des transports et de la situation dans d’autres sanctuaires grecs, des voies de circulation peuvent être reconstituées au fur et à mesure des époques. De nombreux objets orientaux arrivent à Delphes dans le dernier quart du viiie s. et disparaissent ensuite ; c’est le cas notamment des bronzes syriens.

Une route depuis la Syrie du Nord La fin du viiie s., jusqu’à la fin du premier quart du viie s., est la période qui voit arriver à Delphes le plus d’objets orientaux, quel que soit l’endroit exact où ils ont été faits. Le support conique de chaudron, les trépieds à baguettes, les sirènes orientales ou certaines appliques en forme de tête de taureau se rattachent à l’art de la Syrie du Nord. Cette région est essentielle en ce qu’elle devait être un point de débouché des objets de tout le Proche-Orient, du Caucase, de la zone iranienne ou de la Phénicie. Mais l’avancée de l’Empire assyrien et les conquêtes territoriales ne facilitent pas la connaissance des productions matérielles locales. Il faut tenir compte du fait que la compréhension de l’organisation géographique des productions artisanales au Proche-Orient repose sur les sources assyriennes, les annales royales et les inventaires des objets rapportés en butin des différentes campagnes militaires. Il y a parfois des difficultés à savoir de quels objets exactement parlent les textes, de même qu’il apparaît que certaines productions

36. Boardman 1970, p. 14-25 ; Boardman 1995, p. 72 et suivantes ; Burkert 1992, p. 21-25. 37. Gauer 2000, p. 119-122 notamment.

38. À Samos, la déesse Héra est assimilée par les dédicants étrangers à leur propre déesse, comme le montre le miroir égyptien dédiée par une fidèle de Mut : Ebbinghaus 2006, p. 196 et suivantes.

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luxueuses, en particulier les ivoires, étaient distribuées largement dans l’Empire assyrien39 ; on ne peut donc pas utiliser les sources assyriennes et les listes d’objets recensés comme unique témoignage de centres de production régionaux. Par quels intermédiaires ces objets sont-ils parvenus en Grèce ? Il est tentant de songer au rôle des Eubéens et des Corinthiens, quelles que soient les discussions sur leur présence à Al-Mina et sur la côte syrienne40. Les intérêts développés par Corinthe à Delphes depuis le milieu du viiie s. rendent cette hypothèse très vraisemblable : ainsi ils seraient à la fois les acteurs des importations sur le sol grec et les responsables des offrandes dans le sanctuaire de Delphes. Cette explication est soutenue aussi par la présence corinthienne en Occident et sa participation à la colonisation : dans ce cas aussi, on peut proposer que les plus anciens objets italiques ont été offerts par des Corinthiens au retour de leurs explorations en Occident41.

La circulation via Chypre L’importance de Chypre dans les échanges en Méditerranée orientale et occidentale de l’âge du bronze à l’archaïsme a été soulignée à de nombreuses reprises, notamment dans des colloques internationaux récents42. Les objets chypriotes à Delphes, relativement nombreux et appartenant à des catégories différentes de matériel, témoignent de contacts répétés avec Chypre43. Mais comment interpréter ces contacts ? Plusieurs possibilités s’offrent en effet à qui veut caractériser ces relations, qui participent du problème général des échanges en Méditerranée à l’âge du fer. Les sources littéraires et l’identification d’un trépied chypriote inscrit témoignent des contacts voulus par les souverains des royaumes chypriotes ou leur entourage proche. Il s’agit d’une fréquentation ponctuelle qui concerne des individus soucieux d’honorer l’Apollon de Delphes par une offrande de prix qui montre leur statut social ; cette attitude rejoint les pratiques décrites par A. Duplouy à propos des élites grecques, de « leur culture de l’agôn »44. C’est un phénomène comparable à ce qui se passe dans les cités grecques et les formes de reconnaissance sociales mises en œuvre par leurs « élites ». Il faut toutefois faire remarquer que les sources textuelles proche-orientales et le texte homérique indiquent clairement que les échanges de dons et les présents diplomatiques accompagnaient fréquemment les relations de type commercial ou politique45. Cela ne s’oppose donc pas à d’autres façons d’expliquer la présence de ces objets à Delphes, mais ce cas de figure n’induit pas une circulation importante d’objets chypriotes. Un certain nombre d’objets orientaux ou chypriotes sont parvenus en Grèce et ont été offerts à Delphes en suivant un autre mode d’acheminement. L’existence de relations commerciales entre Chypre et l’Ouest du bassin méditerranéen est connue pour des périodes plus hautes46 et la question des routes maritimes a été récemment remise en avant par une exposition et un colloque intitulés « ƕƯƲƩƵ » ou « Sea routes »47 : toutes les formes de connexions possibles, commerciales, artistiques, linguistiques, sont rassemblées pour présenter la Méditerranée comme un espace d’échanges importants à l’âge du bronze et à l’âge du fer. La recherche de telles voies de circulation est d’autant plus justifiée que, dans le cas de Chypre, les questions de l’expansion et du commerce phéniciens sont étroitement liées. La coupe de Marmaria inv. 4363 (n° 178), qui ne porte pas de dédicace, peut avoir été fabriquée en Phénicie ou à Chypre et appartient aux objets apportés sur le sol grec à l’occasion de l’expansion phénicienne. La présence phénicienne en Égée a été analysée par N. Stampolidis : les activités des Phéniciens sont mentionnées par Homère48 et la documentation archéologique permet de repérer les premiers sites ayant reçu des artefacts 39. Gunter 2009, p. 106-110. 40. Osborne 1996, p. 112-113 ; Infra, p. 23, n. 158. 41. Rolley 1983b, p. 110. 42. Colloque « Italy and Cyprus », Bonfante, Karageorghis

2001 ; colloque « Chypre et les grandes îles de la Méditerranée », Fourrier, Sourisseau 2016. 43. Aurigny 2016d. 44. Duplouy 2006, p. 271 et suivantes. 45. Matthäus 1998, p. 139. Iliade 23, 740-9 ; Odyssée 4, 615-9 ; 15, 112-122 ; 21, 11-14.

46. Bonfante, Karageorghis 2001, en particulier Matthäus ; Whitley 2010, pour la Crète : “There may be an economic dimension – both Knossos and Kommos had profited from the CyprusSardinia trade axis in the earlier part of the Iron Age, and this may have become less significant during the latter part of the seventh and sixth centuries BC.” 47. Ploes, Karageorghis, Stampolidis 2003. 48. Odyssée VI, 47.

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phéniciens49 jusqu’au viie s. av. J.-C., même si c’est surtout la Crète qui constitue l’objet de son enquête. Or, malgré la difficulté que nous éprouvons à distinguer les objets phéniciens des autres productions orientales, chypriotes surtout, mais aussi égyptiennes, syriennes ou levantines, il est certain que les Phéniciens ont apporté de nombreux artefacts en Égée et qu’ils se sont même installés sur place50. Le sanctuaire phénicien a été analysé comme un élément à part entière de l’emporion, du lieu où peuvent avoir eu lieu les échanges51. Mais les échanges depuis le Levant et Chypre obligent à considérer le rôle de la Crète.

Chypre et la Crète Le matériel de Delphes offre un cas privilégié pour évoquer les relations entre les deux grandes îles. Les objets parvenus en Phocide montrent que les Crétois font de nombreux emprunts aux créations chypriotes. Les contacts qui n’ont pas cessé depuis l’âge du bronze52 sont particulièrement visibles à l’âge du fer dans les productions céramiques et métalliques. D.W. Jones, dans une synthèse de ces relations entre le xie et le viie s. av. J.-C., a montré qu’une forte présence des objets chypriotes en Crète commence vers 850 av. J.-C. pour diminuer considérablement au début du viie s. et devenir très rare à la fin de ce siècle53. C’est donc plutôt à la fin du viiie s. qu’il convient de placer la plupart des documents chypro-crétois connus à Delphes. La situation en Crète au cours du viie s. semble de toute façon moins propice aux liens avec Chypre54. Si la Crète se situe sur la route des documents venant du Levant et de Chypre, elle a aussi reçu des objets anatoliens, comme des coupes phrygiennes, tout à fait comparables à celles qui ont été découvertes dans les tumuli de Gordion55. Il n’y a donc sans doute pas lieu d’opposer les voies de circulation entre elles : tout comme est attestée une route de l’Anatolie de l’intérieur vers la côte, de même ici les objets anatoliens ont suivi pour rejoindre la Crète une route vers le Sud, qui passe sans doute par Rhodes, qui joue aussi un rôle dans les circulations. Le matériel de la stipe votive de Ialysos, comportant de la statuaire chypriote et des fragments de supports ajourés crétois56, atteste ces relations et la variété du matériel à Rhodes. Chypre, la Crète et, dans une moindre mesure, Rhodes (dont les liens avec Delphes restent à établir), sont des lieux de passage des objets et des hommes pendant le haut-archaïsme, qui rendent difficile de dégager des voies de circulation bien déterminées, tant les possibilités sont grandes.

Du second quart à la fin du VIIe s. Après une période riche en objets orientaux, les importations se font plus rares et laissent la place à des objets issus d’ateliers grecs. Est-ce le signe d’une évolution du goût ou peut-on percevoir des changements dans les voies d’acheminement de la vaisselle votive à Delphes ? La présence des objets ioniens et anatoliens ou d’inspiration anatolienne s’accroît au cours du viie s., notamment à cause des productions samiennes. L’expression « vague ionienne » est sans doute un peu exagérée pour décrire un phénomène peu massif quantitativement, mais important par la qualité des objets qui parviennent à Delphes. Les griffons samiens, des trépieds à baguettes, la vaisselle inspirée du banquet phrygien sont des éléments bien visibles de cette nouvelle mode qui se poursuit au vie s., avec des œuvres exceptionnelles comme le taureau en argent, attribué à Chios par P. Amandry57, ou deux des statues chryséléphantines dont Fr. Croissant a montré qu’elles étaient de style samien58. Dans ce cas, les changements importants que connaît le sanctuaire avec l’installation de l’Amphictionie et la guerre contre Krisa ne constituent pas véritablement de rupture. Les souverains lydiens, si l’on en croit 49. Stampolidis 2003, p. 218-219. 50. Shaw 2000 : à Kommos, le temple B est peut-être à l’origine

un sanctuaire phénicien, mais il disparaît au viie s. ; Stampolidis 2003, sur la présence de Phéniciens à Eleutherna. 51. Gras, Rouillard, Teixidor 1989, p. 109. 52. Jones 2000, p. 142. 53. Id., p. 148 ; voir aussi Demetriou 1989, p. 83-87.

54. Whitley 2010. 55. Stampolidis-Karetsou 1998, p. 241, n° 292 (Eleutherna) et

293 (Inatos). 56. Martelli 1988, p. 104-115. 57. Amandry 1986, p. 228. 58. Croissant 1988, p. 124-126.

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Hérodote, font des offrandes magnifiques à Delphes tout au long des viie et des vie s. ; Alyattes offre un cratère et son support en faisant appel aux services d’un artisan chiote, Glaucos, dont la renommée dans le travail du fer était grande59. Delphes attire en quelque sorte les œuvres d’artistes réputés. De toute façon, le passage du sanctuaire sous le contrôle de l’Amphictionie montre qu’à la fin du viie s. il n’était plus possible que la cité s’occupât seule d’un lieu fréquenté par un grand nombre de visiteurs, et dont la renommée s’étendait à l’ensemble du monde grec et de ses voisins. Ce développement est en partie lié, on le sait, au rôle de Delphes dans la colonisation. Toutefois, le corpus de la vaisselle du haut-archaïsme ne permet guère de l’évoquer en détail ; on ne renoncera pas pour autant à dégager les grandes lignes de la fréquentation et du développement du sanctuaire de Delphes pendant le haut-archaïsme.

La place de Delphes dans un contexte local, régional, égéen et méditerranéen Les Grecs, victorieux des Étrusques ou voulant rendre visibles leurs relations avec les princes étrangers, ont fait autant d’offrandes à Olympie qu’à Delphes au cours du viiie s. C’est ensuite que Delphes se « spécialise » dans la colonisation, en exploitant l’opportunité que lui offre le phénomène. On peut constater qu’il y a deux tendances concomitantes à Delphes : une dimension internationale, sensible dès les premières offrandes à Apollon60, et une dimension régionale qui caractérise Delphes au début de la colonisation. C’est comme sanctuaire régional des cités fondatrices de colonies que Delphes peut être interprété d’abord : « pour la période la plus ancienne, il faut insister sur le fait que, surtout au viiie s., et pour les colonies d’Italie et de Sicile, il s’est principalement agi […], d’un mouvement local entre les poleis qui avaient un débouché direct ou indirect, sur le golfe de Corinthe. »61 Le problème est de définir ce que l’on entend par sanctuaire régional, surtout dans le cas de Delphes. Cette conception est paradoxale dans la mesure où il y a une tension entre l’affirmation des cités et le développement de leurs intérêts régionaux. De ce point de vue, Delphes n’a pas un développement et une histoire comparables à Kalapodi qui joue pleinement le rôle de sanctuaire des Phocidiens. Ce sanctuaire offre pourtant des points de comparaison avec Delphes, comme l’a montré R. Felsch62. Les offrandes métalliques de Kalapodi suggèrent, comme à Delphes, que le culte d’Apollon est apparu à la fin du ixe ou au début du viiie siècle av J.-C. ; des trépieds de bronze ont également été offerts à Kalapodi à l’époque géométrique, certes en bien moins grand nombre qu’à Delphes. Toutefois les objets importés de régions non grecques63 sont assez rares64 : « schießlich handelt es sich hier um ein Lokalheiligtum. Deshalb sind in Kalapodi Importe auch unvergleichlich seltener »65. Les découvertes archéologiques montrent qu’il y a davantage de bronzes de Grèce centrale à Kalapodi et un plus grand nombre de bronzes péloponnésiens à Delphes ; les bronzes de Grèce centrale à Delphes forment un ensemble équivalent à celui d’Olympie66. C’est cette dimension d’ouverture vers l’extérieur qui caractérise Delphes, et non son ancrage en Phocide. Pourtant cette dimension internationale est liée à la position favorable67 de Delphes dans le golfe de Corinthe. Que Delphes occupe une place centrale dans le monde grec peut être justifié à partir du vie siècle et du moment où les Pythia attirent visiteurs et participants de toutes parts68. Mais qu’en est-il pour l’époque précédente ? C. Morgan a donc réévalué l’idée que Delphes était à date haute le « centre », le « nombril » du monde grec, en étudiant les relations de Delphes avec d’autres sites de Phocide69, comme Médéon en particulier : « it is easy to consider the Delphic sanctuary in isolation, and to forget that not only did it develop within the context of a network of regional settlements »70. C. Morgan insiste plus spécifiquement sur l’importance de Médéon et de l’occupation le long des côtes 59. Hérodote I, 25. 60. Maaß 1992. 61. Lepore 2000, p. 39. 62. Felsch 1998, p. 219-236. 63. Donc en dehors de la céramique corinthienne ou attique, ou

des fragments de trépieds argiens. 64. Quelques bronzes balkano-macédoniens, un bouclier de Herzsprung fragmentaire, un fragment de chaudron oriental décoré d’une figure animale, une perle en ambre et un scarabée phénicien ou rhodien, Felsch 1998, p. 223, note 21. 65. Felsch 1998, p. 223.

66. Morgan 2003, p. 124. 67. Malgré sa situation à 500 m. d’altitude environ, qui ne favo-

risait pas a priori son développement, le sanctuaire de Delphes aurait attiré les offrandes de grand prix justement à cause de sa place excentrée : Polignac 1996, p. 63. 68. Amandry 1990. 69. Voir à la fois Morgan 1990 et Morgan 2003. 70. Morgan 1990, p. 106 ; voir aussi p. 115 : « during the last quarter of the eighth century, a major alteration in the pattern of settlement occurred on the plain of Itea, with the appearance of a number of new sites, and the end of Delphi’s long period of isolation ».

LES OFFRANDES ET L’HISTOIRE DU SANCTUAIRE DE DELPHES

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du golfe de Corinthe, parce qu’elle veut établir, à juste titre, un lien fort entre le sanctuaire de Delphes et les élites de Corinthe qui vont peu à peu s’intéresser à Delphes71. Elle cherche à montrer que le développement du sanctuaire de Delphes dans le cours du viiie siècle est le résultat des pratiques et des préférences de l’aristocratie corinthienne, qui choisit à dessein un lieu excentré, censé produire distinction et prestige aux yeux d’une élite interrégionale restreinte72. L’offrande d’objets produits dans des régions lointaines ou copiant des modèles étrangers serait également imputable aux Corinthiens, qui jugent les offrandes « exotiques » susceptibles de refléter leur haut statut social73. Tout en soulignant le grand intérêt de l’analyse de C. Morgan pour le viiie siècle, nous noterons qu’elle ne traite pas précisément du viie ; elle y fait quelques allusions74. De rares mentions indiquent le type de matériel qui distingue, dès la fin du viiie et au viie siècles, le sanctuaire de Delphes de ses voisins : « the range of mostly seventhcentury Orientalia (scarabs, Cypro-cretan and Cypro-Levantine bronze stands, for example) and Italian Imports also implies primary connections along the Corinthian gulf »75. Pour cette raison, elle rapproche Delphes du sanctuaire de Pérachora, dont les offrandes sont pourtant assez différentes. Ainsi, malgré l’état de la documentation issue des fouilles anciennes, les représentants de la « pacotille » orientalisante que l’on trouve abondamment à Pérachora sont bien rares à Delphes. L’étude précise du matériel permet de nuancer l’analyse de C. Morgan. Il faut donc tenir compte des différentes échelles qui permettent de juger du rôle de Delphes, même si le golfe de Corinthe n’est pas une région et n’a pas une identité propre. C. Morgan a tenté de montrer comment l’espace spécifique du golfe de Corinthe avait pu jouer un rôle très important dans la construction de liens entre diverses communautés et elle a souligné les limites de l’appartenance « ethnique ». Mais elle adopte un point de vue très « corinthocentré », en expliquant les trouvailles de céramique corinthienne en Phocide ou en Achaïe comme le reflet de l’activité ciblée des Corinthiens76. Delphes serait l’illustration extrême des effets des connexions maritimes « both on the development of a coastal zone and on its integration within the wider region of which it formed part. »77

« Ouverture internationale » : les origines du panhellénisme à Delphes On n’abordera pas directement ici la question du développement de l’oracle d’Apollon, sollicité d’après la tradition littéraire à propos du développement politique des cités et de la colonisation. En effet, le matériel étudié permet difficilement d’évoquer cet aspect du développement du sanctuaire78. Le développement du sanctuaire à partir de la fin du viiie s. et au viie s. est marqué par une large ouverture géographique, qui passe par la présence des cités commerçantes ou fondatrices de colonies ; cette caractéristique s’inscrit dans une continuité certaine avec le viiie s., où les offrandes montraient déjà l’intérêt de dédicants géographiquement éloignés pour le sanctuaire. Mais cela ne suffit pas à en faire un sanctuaire panhellénique : quand et comment cette seconde dimension apparaît-elle ? Le cas de Delphes permet d’interroger plus généralement la notion de « panhellénisme », et en même temps d’en saisir les manifestations concrètes à travers les offrandes.

Le « panhellénisme » de Delphes Le statut panhellénique de Delphes est incontestable à partir du vie s. et jusqu’à l’époque hellénistique. Mais certains auteurs suggèrent l’existence de ce statut pour les périodes antérieures, alors que c’est un point qu’il convient justement de démontrer. L’existence de l’oracle dès le viiie s. av. J.-C. ne suffit pas à en faire déjà un sanctuaire panhellénique, quand bien même « l’oracle seul donne à Delphes sa dimension panhellénique »79. Même s’il est d’usage courant d’employer l’expression « sanctuaires panhelléniques », elle n’existe pas dans l’Antiquité, où l’on parle de

71. « it is only during the eight century that one may infer any connection (however indirect), and for much of our period, the sole link between Delphi and Medeon was the action of a third party, Corinth, who incorporated them both within her exchange networks », Id., p. 107. 72. Polignac 1996, p. 63. 73. Morgan 1990, p. 142-144.

74. Id., p. 125 : “during the seventh century […] the Delphic sanctuary expanded and attracted wider participation”. 75. Morgan 2003, p. 124. 76. Morgan 2003, p. 216-217. 77. Id., p. 217. 78. Voir Aurigny, Scott à paraître. 79. Lefèvre 1998, p. 164.

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« sanctuaires communs »80 . Seul est attesté dans la langue grecque « ƕƥươƯƯƫưƩƵ », qui désigne chez Homère tous les Grecs réunis81. Encore faut-il tenir compte du fait que le sens de « commun », ƮƲƣưƲƵ, n’est pas le même à l’époque de Thucydide et pendant le haut archaïsme. C. Morgan et Chr. Sourvinou-Inwood ont cherché à préciser les origines et le fonctionnement du panhellénisme dont le système de valeurs ne leur semblait pas particulièrement ancien. La polis offre le cadre fondamental à l’intérieur duquel se développe la religion grecque ; dès l’origine, l’activité religieuse se déploie dans les sanctuaires de la cité mais aussi dans un réseau de sanctuaires d’autres cités et de sanctuaires panhelléniques. Il y a donc un double mouvement de fermeture sur une religion de la cité et d’ouverture à travers la participation au culte panhellénique, consultation d’oracle, pèlerinage ou offrandes82. Toutes ces activités sont attestées dès le viiie s., et émerge peu à peu le sentiment d’une religion grecque commune, notamment dans les textes d’Homère83 et d’Hésiode ; il n’en reste pas moins qu’on ne peut parler encore de sanctuaire panhellénique dans le cas de Delphes. C. Morgan a défini les éléments propices au développement des sanctuaires panhelléniques : il s’agit d’une situation géographique éloignée des grands centres, tout au moins en dehors des frontières des cités – États participant, sous le contrôle d’un État ou d’une institution plutôt faible, ce qui offre un lieu de rencontre et de compétition neutre84. Il est vrai que cette définition correspond parfaitement bien au sanctuaire de Delphes, qui l’a sans doute fortement inspiré. Mais elle a bien montré que si un terreau favorable existe dès la seconde moitié du viiie s., il faut attendre le début du vie s. pour que le statut panhellénique soit assuré85. Doit-on alors établir une différence entre la formalisation des institutions et la reconnaissance du caractère panhellénique du sanctuaire, antérieure et moins formelle ? I. Morris situait en effet l’avènement d’Olympie et de Delphes comme de « vrais » sanctuaires panhelléniques au viie siècle86. Mais cela ne va pas de soi. Si Delphes présente quelques traits généraux qui permettent de mieux comprendre son développement panhellénique, il ne faut pas partir de « sa fortune ultérieure »87 pour trouver naturel cet essor. Rien ne favorisait a priori une telle croissance, dont aucune explication simple ne permet de rendre compte totalement. Le sanctuaire se développe d’abord selon le schéma qui caractérise les sanctuaires de cités : les offrandes sont disposées à l’intérieur de l’espace profane, et l’espace sacré ne se distingue que tardivement de l’habitat. Même si cela reste un lieu éloigné, hors des frontières des puissances de l’époque, c’est d’abord un sanctuaire lié à une petite cité, et non pas un lieu de culte installé à la campagne. Le sanctuaire de Delphes se définit dès le début par le mélange entre ces deux dimensions : un développement local visible dans l’habitat qui reste très important et dynamique tout au long du viie s., et l’apparition d’activités spéciales liées à l’instauration de l’oracle, qui induisent non seulement une participation des individus, mais aussi des communautés, au culte et à la consultation de l’oracle. Mais l’oracle n’explique pas complètement la capacité de Delphes à rassembler. Si l’oracle est utilisé par certaines cités comme outil dans la pratique du gouvernement ou pour la fondation de colonies, en revanche rien de tel n’est attesté dans le fonctionnement politique des ethnè88. Pourtant, les ethnè sont fortement représentés à Delphes, comme la composition de l’Amphictionie suffit à le montrer89. Alors que le sanctuaire est un foyer d’activités pour les ethnè de Grèce centrale et de Thessalie, l’oracle instaure une relation plus étroite avec les cités90. Il n’y a donc pas d’explication simple au succès de la fréquentation de Delphes, mais ces traits originaux contribuent à la diversité de cette fréquentation. C. Morgan interprète l’institution de l’oracle comme le premier pas vers la domination d’une activité des États dans un sanctuaire qui sert jusque-là les intérêts personnels des membres des élites. Le matériel archéologique ne permet pas de percevoir une telle évolution.

80. Thucydide IV, 108, 1-3. Voir Jacquemin 1999, p. 10. 81. Iliade, II, 530. 82. Sourvinou-Inwood 1988, p. 267. 83. On admet la datation du texte homérique dans le cours du viiie s., bien que ce soit une question extrêmement discutée. Voir Duplouy 2006, p. 170 : « pour la plupart des chercheurs, l’époque de l’Iliade et de l’Odyssée correspond donc à la seconde moitié du viiie s., époque présumée de l’émergence de la cité grecque ». 84. Morgan 1995, p. 31.

85. « The victory of the Amphictyony marked a turning point in sanctuary affairs, the final separation of the sanctuary from its regional context and the assertion of inter-state vested interests essential to the development of formalized pan-Hellenic institutions », Id., p. 30. 86. Morris 1998, p. 55 : « Olympia and Delphi became truly panhellenic in the seventh century ». 87. Rolley 1983b, p. 110. 88. Morgan 1995, p. 28-29. 89. Lefèvre 1998. 90. Morgan 1990, p. 185.

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Un certain nombre de traits prépare l’avènement panhellénique du sanctuaire tout au long du viie s., mais le fait d’être un sanctuaire ouvert, possédant un oracle célèbre91 et jouissant d’une fréquentation importante, n’en fait pas pour autant un sanctuaire commun. F. Felten a d’ailleurs tenté de différencier le panhellénisme d’Olympie et celui de Delphes, plutôt pour des époques ultérieures. Il constate en effet une grande similitude dans les catégories d’offrandes anciennes, du viiie au vie s. ; ensuite, il considère que les offrandes faites à l’Apollon de Delphes témoignent d’une volonté de chaque donateur de célébrer ses héros ou ses victoires, tandis que s’exprimerait à Olympie un esprit unique et commun à tous les Grecs92. Même si ces affirmations sont quelque peu discutables, elles ont le mérite de rappeler que le succès de Delphes a puisé son origine dans les intérêts différents qui se sont rassemblés en un même endroit. Delphes est loin d’être un symbole de rassemblement : c’est avant tout un sanctuaire choisi par certaines élites, en particulier corinthiennes, mais aussi thessaliennes, pour exprimer leur haut rang social et donner à voir leur richesse et leur prestige en y faisant des offrandes de prix. Or, la conjonction de ce type d’intérêts avec la fréquentation et la renommée croissantes de l’oracle, ont conduit le sanctuaire à prendre une grande envergure, concrétisée dans son passage sous le contrôle de l’Amphictionie et la création de concours communs. Ces deux traits originaux marquent bien le panhellénisme de Delphes : son utilisation politique par des puissances émergentes et son administration par un groupe de voisins, reflet de son rôle avant tout régional. Le caractère panhellénique du sanctuaire de Delphes n’est donc pas encore avéré pendant le haut-archaïsme. Avant le début du vie s., il y a pourtant une multiplicité d’offrandes qui suggèrent la compétition entre les dédicants. La mentalité agonistique est certes un trait culturel grec, qui connaît toutefois des variations géographiques et individuelles93. Comment ce trait culturel se manifeste-t-il à Delphes ? La consécration d’objets de prestige dans le sanctuaire delphique n’est pas facile à interpréter dans le détail, en l’absence de dédicace ou de tout autre source écrite. Le statut du sanctuaire apporte-t-il des éléments de précision ? Considéré comme un sanctuaire « à vocation interrégionale »94, Delphes offre une scène favorable à une double expression identitaire : les objets dont le style est bien reconnaissable semblent afficher leur origine, et servent au donateur à la fois à rappeler cette origine et à se distinguer dans le groupe auquel il appartient. L’offrande est alors polysémique : elle proclame « l’appartenance du donateur à une élite sociale et politique “internationale” » aux yeux de la cité d’origine et de la communauté rassemblée autour du sanctuaire. Or, quelles que soient les différentes appartenances revendiquées, elles semblent se définir surtout en fonction des cités, à l’intérieur ou à l’extérieur de celles-ci : la cité permet en effet d’articuler d’une part les groupes constitués en son sein (famille, phratrie, etc.), et d’autre part les lieux de culte qui voient participer plusieurs cités, sanctuaire régionaux ou panhelléniques. On ne reviendra donc pas sur l’imbrication entre le développement de la cité et l’organisation des cultes.

Delphes dans un réseau de sanctuaires ? Si l’on se réfère à une géographie culturelle de la Grèce, Delphes appartient à la « Grèce de l’Ouest », telle que l’a définie I. Morris95. Pourtant, terrain propice à la rivalité par l’offrande, Delphes correspond mieux aux pratiques recensées dans la zone de la « Grèce centrale », qui comprend les contrées bordant le bassin égéen, l’Ionie, les Cyclades, l’Eubée, l’Attique, la Corinthie et l’Argolide. Certes, I. Morris avait souligné le fait que les grands sanctuaires comme Delphes et Olympie avaient plus à voir avec la « Grèce centrale ». Ce découpage n’est alors d’aucune utilité dans le cas de Delphes, en dehors du fait qu’il montre la difficulté à classer le sanctuaire. La présence d’objets très similaires, parfois parfaitement identiques, dans des sanctuaires différents, a créé un lien de fait. C’est le cas par exemple des frontaux de bronze de style nord-syrien regroupés autour de l’inscription au nom du roi Haza’el : le plus grand nombre vient de Samos, mais aussi de l’Athénaion de Milet, du temple d’Athéna à Lindos, et du temple d’Apollon Daphnéphoros à Érétrie, qui a livré la même inscription que l’un des exemplaires de Samos. Le cas des obeloi en fer, étudié par I. Strøm, dessine aussi un réseau entre quelques sanctuaires, certes

91. Le développement très important des oracles dans la Béotie voisine à l’époque archaïque montre la concurrence qui pouvait exister entre différents centres oraculaires : Etienne, Prost 2008, p. 82 notamment. 92. Felten 1982, p. 79 et suivantes.

93. Duplouy 2006, p. 278. 94. Polignac 2006, p. 12. 95. Morris 1998, p. 52 et suivantes.

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plus étendu que dans l’exemple précédent96. Mais les liens sont peut-être plus religieux que géographiques, car les divinités concernées sont toujours les mêmes : Héra, Athéna, Apollon et Artémis97. De tels liens existent-ils pour Delphes ? Quelques objets très particuliers le suggèrent : à Delphes comme à l’Héraion d’Argos a été retrouvé un taureau dressé sur une aile de sirène98 de fabrication sans doute nord-syrienne. Mais d’autres attaches nord-syriennes, de la vaisselle et de la parure phrygiennes constituent d’autres points communs entre le sanctuaire de l’Argolide et Delphes. Si ces ressemblances permettent de conclure à des similitudes dans la fréquentation, en revanche Delphes n’a pas livré de statuette égyptienne comme l’Héraion : le sanctuaire argien appartient également à d’autres réseaux qui ne concernent pas Delphes. Si Delphes partage avec Samos les protomes de griffon, certains éléments de trépieds et aussi les appliques en ivoire, en revanche on n’a pas à Delphes les nombreux bronzes égyptiens ou iraniens qui ont été offerts à l’Héra samienne. On a vu plus haut les points communs entre l’Artémision d’Éphèse et le sanctuaire d’Athéna à Marmaria99 ; on retrouve également des objets similaires à Chios, qui pourtant présente un ensemble votif très différent de celui de Samos. S’il existe bien des réseaux entre les sanctuaires des divinités mentionnés, il reste à les décrire précisément et à les interpréter en fonction de chaque contexte. Delphes a reçu, comme l’Héraion d’Argos, des bronzes nord-syriens, phrygiens ou d’imitation phrygienne, ce qui avait été interprété comme l’adoption de la tradition proche-orientale du banquet avec du vin, dans un groupe de sanctuaires d’Apollon, Artémis, Athéna et Héra100. I. Strøm y voit même des liens personnels entre les membres de la cour phrygienne et les prêtres de ces temples. Mais ce type de documents a aussi été retrouvé à Olympie ou dans la grotte de l’Ida en Crète101, qui partagent en outre avec Delphes les coupes phéniciennes. Or, ces deux sanctuaires de Zeus entrent mal dans le schéma proposé par I. Strøm. S’il est vraisemblable qu’il y a eu des circuits privilégiés de distribution et une fréquentation de groupes de sanctuaires par les mêmes élites, on doit se garder de constituer des ensembles figés. Ces circulations restent à préciser en fonction de chaque contexte particulier ; s’il existe un réseau de sanctuaires, c’est un domaine de recherche qui demande encore à être approfondi. Rien à Delphes ne permet de soutenir l’idée d’un ensemble de sanctuaires, indépendants économiquement, qui se procureraient ensemble des objets importés pour les besoins du culte102. Ces quelques exemples, qui montrent les liens et les différences de Delphes avec d’autres sanctuaires, conduisent à un tableau complexe des relations entre les sanctuaires grecs et de ceux-ci avec les différentes zones du bassin méditerranéen. La facilité d’accès, les relations commerciales ou politiques n’expliquent pas la distribution particulière des objets. Les circulations d’objets correspondent aussi à des relations non commerciales dont les multiples modalités, en l’absence de sources écrites, sont impossibles à connaître.

Conclusion La vaisselle métallique offerte à Delphes au viie siècle av. J.-C. apporte quelques éléments utiles pour retracer l’histoire du sanctuaire, même si elle est loin de constituer l’ensemble du matériel archéologique de cette époque, qui comporte notamment des armes et des objets de parure. Les différents récipients métalliques et les appliques qui les ornaient permettent d’abord d’attester l’arrivée d’objets de fabrication étrangère, orientale surtout et dans une moindre mesure occidentale, ce qui est un marqueur de la période, bien que l’assimilation des motifs extérieurs/étrangers et la continuité dans les pratiques votives invitent à relativiser la notion d’« orientalisant » pour qualifier en gros la période allant de la fin du viiie au début du vie siècle

96. Strøm 1992b, p. 50 97. Gunter 2009, p. 153. 98. Supra, n° 68. 99. Supra, p. 132, 146.

100. Strøm 1998, p. 55. 101. Les objets de métal ont été partiellement publiés par

H. Matthäus : Matthäus 2011. 102. Strøm 1992b, p. 52-56.

LES OFFRANDES ET L’HISTOIRE DU SANCTUAIRE DE DELPHES

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à Delphes103. Ces objets sont ensuite des indicateurs du développement du sanctuaire dont les aménagements architecturaux, en dehors du temple, sont presque inexistants jusqu’à la fin du viie siècle104. Cette documentation permet enfin de mettre à l’épreuve la notion de panhellénisme pour les périodes hautes, et particulièrement pour Delphes : plus qu’un lieu de rassemblement et de creuset d’une identité grecque commune (processus avéré au moment des guerres médiques), le sanctuaire de Delphes suscite l’intérêt des puissantes cités voisines du Péloponnèse, de l’Attique, mais aussi d’Ionie qui s’y retrouvent pour s’y confronter par le biais des offrandes.

103. Sur les limites de la notion d’« orientalisant », voir Croissant 2010 et Aurigny 2012a, p. 35-36.

104. Luce 2008, plan hors texte II ; Aurigny, Scott, à paraître,

fig. 3.

Chapitre 9

Conclusion

Les offrandes delphiques de vaisselle métallique apportent de nouveaux éléments pour qui veut comprendre les changements artistiques, culturels et politiques du viie siècle qui semblait, jusqu’à récemment, une période mal connue1. Force est de constater tout d’abord que le matériel delphique corrobore les critiques qui ont été formulées à propos du « phénomène orientalisant ». L’« orientalisation » des productions artisanales et artistiques y apparaît très limitée, car les formes radicalement nouvelles sont le plus souvent des inventions nées dans le monde égéen ou pour des commanditaires grecs : à Delphes, toutes les formes correspondent à des besoins et à des choix grecs. La continuité formelle dans le matériel rappelle également que les classements appliqués par les Modernes correspondent mal aux réalités antiques. Il ne faudrait pas tirer du cas particulier de Delphes des conclusions trop générales : il y a des objets orientaux radicalement extérieurs à la culture matérielle grecque dans des sanctuaires grecs, comme l’Héraion de Samos, mais ils sont en général bien intégrés au système votif grec. L’adjectif « orientalisant » mérite en effet d’être discuté. Il sous-entend l’adaptation d’un modèle oriental connu et place de fait l’objet dans une période chronologique précise et dans un rapport systématisé à l’art oriental. Or, l’étude des documents de Delphes et de la vaisselle en particulier a souvent montré l’éloignement pris par rapport à des schémas orientaux que l’on pouvait reconnaître, mais plus encore une capacité à créer sans référence évidente à un modèle. Cet affranchissement des modèles est visible dans le cas des appliques figurées (nos 100-120) : une foule de petites appliques animales à tête d’oiseau ou de fauve semblent issues d’une mode orientale sans que l’on puisse citer de modèles précis qui les auraient inspirées directement. Pour un Grec du haut-archaïsme, il est évident que le concept d’« objet orientalisant » n’avait pas de sens : on pouvait d’une part offrir un objet importé et exotique à la divinité, mais dans tous les autres cas, les objets étaient considérés comme grecs, issus de différents ateliers, même s’ils restent pour nous difficiles à identifier. Du même coup, la frontière entre objet oriental et objet orientalisant devient plus floue et perd, à vrai dire, de son importance : c’est au sein d’une catégorie d’objets et dans un contexte précis qu’il faut analyser les objets, en tenant compte des particularités géographiques et historiques des consécrations. Les catégories d’ « original », de « copie » et d’« adaptation » ne rendent pas compte de la subtilité des styles et des créations2. L’apparition d’une géographie culturelle très diversifiée est un des aspects les plus intéressants du processus qui se poursuit au cours du viie siècle. Le cas de Delphes en est à la fois un bon témoin et un acteur, puisque la consécration d’œuvres dans un sanctuaire important joue un rôle dans la définition des styles et l’élaboration des productions 1. Les études et colloques consacrés au viie siècle se sont multi-

pliés récemment : Etienne 2010 ; Brisart 2011 ; Charalambidou, Morgan 2017. 2. Gunter 2009, p. 105.

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locales. Et même si la diversification des formes et l’intégration d’éléments nouveaux, qui confèrent à l’art grec du viie s. sa créativité, rendent sa connaissance difficile, l’étude de ces documents a montré qu’en aucun cas la notion d’« art orientalisant » ne permettait ne rendre compte de façon précise du matériel archéologique : cette notion qui induit une rupture avec les périodes précédente et suivante ne correspond pas à la réalité des documents. L’origine des offrandes tout comme les formes artistiques ne changent pas radicalement entre le viiie et le vie s., même si on peut constater des évolutions et avant tout l’avènement d’un grand sanctuaire fréquenté par de nombreux Grecs. Les origines de la vaisselle votive offerte à Delphes sont assez variées pour qu’il soit difficile d’en déduire une fréquentation vraiment dominante. Les provenances géographiques permettent quelques hypothèses, mais les objets eux-mêmes ne renseignent que très peu sur l’appartenance sociale ou ethnique des dédicants. Sanctuaire dont l’ouverture « internationale » est avérée très tôt, Delphes attire des offrandes qui répondent à différentes stratégies votives, selon le statut social, l’origine géographique et le « message » que veut transmettre le donateur. On ne saurait déduire de la catégorie de la vaisselle métallique des conclusions trop générales, mais son étude apporte quelques résultats. Le cas de Delphes présente l’intérêt de mêler plusieurs échelles géographiques au niveau desquelles peut se développer la réflexion sur l’histoire des offrandes et des sanctuaires. On a en effet insisté sur une certaine montée en puissance de Delphes au sein de la Phocide et plus généralement de la Grèce centrale, puisque c’est le sanctuaire qui reçoit le plus d’objets étrangers et le plus d’offrandes de grande valeur, en particulier les chaudrons de bronze, à partir du viiie s. Mais la provenance des objets met naturellement en jeu bien plus que les relations de Delphes avec sa région, même élargie au golfe de Corinthe : quels types d’échanges existent dans le monde méditerranéen pour que des artefacts étrangers arrivent dans les sanctuaires grecs ? Sans exposer ici l’histoire des différents modèles d’explication des échanges dans le monde archaïque3, il faut toutefois essayer de préciser ce que les offrandes delphiques apportent à cette question. La composition du matériel votif envisagé ici suggère que des Grecs consacraient à Delphes des objets assez rares et originaux dont l’acquisition était sans doute réservée à une aristocratie : le trafic de « biens » semble donc entre les mains d’une élite, participant à un système d’échanges restreints ; les principaux acteurs en sont les Phéniciens et le centre se trouve au cœur de l’Empire assyrien au viie s. Même si on ne saurait déduire des quelques témoignages matériels de Delphes une histoire politique ou économique de la Méditerranée au viie s., tout porte à croire que c’est l’aristocratie de quelques cités voisines qui est surtout responsable des offrandes et du succès du sanctuaire dans les premiers temps ; cet engouement parvient ensuite à susciter des offrandes d’autres visiteurs grecs plus éloignés. Il n’en demeure pas moins qu’à l’intérieur de la zone égéenne, Delphes est un exemple du dynamisme des Grecs qui fusionnent des emprunts divers pour créer un modèle original de civilisation. Période de changements, de mise en place de modèles et d’institutions qui restent en vigueur au siècle suivant, le viie siècle est pour cette raison souvent analysé en fonction de schémas explicatifs valables pour d’autres périodes. Or, ce processus de création d’un modèle de civilisation est peut-être ce qui permet de replacer Delphes dans un contexte méditerranéen, au lieu d’en rester à une histoire régionale du sanctuaire : Delphes participe du succès de ce modèle. Toutefois, il n’est pas question de proposer à partir d’un cas de figure, la vaisselle du viie s. à Delphes, une explication globale des échanges culturels dans le monde méditerranéen au viie s. ; on peut néanmoins souligner quelques points. En effet, bien que la Grèce soit sans doute dans une position politique périphérique par rapport à la puissance assyrienne, l’affirmation de son identité culturelle ne relève pas d’une situation de passivité ou de subordination. Les contacts culturels qui existent par le biais de la circulation des produits, des hommes et des idées ne participent sans doute pas d’un commerce très intensif, comme l’a montré R. Étienne, revenant aux conceptions développées par M. Finley pour expliquer les échanges commerciaux dans le monde antique4. Ainsi, comme les importations orientales n’arrivent pas en Grèce de façon massive, et que des pratiques nouvelles inspirées de l’Orient ne sont adoptées que de façon ponctuelle et progressive, on ne saurait parler d’un phénomène d’acculturation. Les phénomènes de choix, de sélection, jusqu’à la résistance, que nous avons rencontrés dans le cas de Delphes, auraient plutôt tendance à faire apparaître le processus de création proprement grec : sans aller jusqu’à ériger en sys-

3. Étienne 2010, p. 3-21, notamment p. 16-21.

4. Étienne 2010 ; Finley 1975.

CONCLUSION

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tème l’« anti-acculturation »5 dont il a été question, il faut reconnaître qu’il y a là un trait culturel et identitaire qui caractérise bien le monde grec dans la Méditerranée archaïque. On préfèrera donc parler de « transferts » culturels, mais en insistant sur le fait que l’intégration dans la culture d’accueil d’éléments extérieurs est le fruit d’une intention manifeste et consciente de la part de celle-ci. Le terme d’« emprunt » a tendance à restreindre encore l’étendue possible des objets matériels ou immatériels transférés, mais rend compte de la volonté de maîtriser totalement le passage d’une culture à l’autre. Le contexte de réception des documents est de toute façon ce qui a été particulièrement étudié ici puisque c’est uniquement dans un contexte précis que les objets prennent sens les uns par rapport aux autres, quelle que soit leur culture d’origine.

5. Gontier 1995, p. 9.

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Liste des cartes et tableaux

Tableaux Tableau 1 – Tableau 2 – Tableau 3 – Tableau 4 – Tableau 5 – Tableau 6 – Tableau 7 – Tableau 8 – Tableau 9 –

éléments de trépieds à baguettes de l’âge du fer. Les protomes de griffons martelées. Les griffons de Delphes dans les classements de Herrmann et Gehrig. Répartition régionale des protomes martelées et fondues. Sirènes grecques, attributions et datation. Origine des éléments de support, chaudrons et appliques de chaudrons. Origine des autres pièces de vaisselle (appliques et vases). Objets offerts dans le sanctuaire d’Apollon. Objets offerts à Athéna.

Cartes Carte 1 – Carte 2 – Carte 3 – Carte 4 – Carte 5 – Carte 6 – Carte 7 – Carte 8 – Carte 9 –

Distribution des supports chypro-crétois (les exemplaires de Chypre et de la Crète ne sont pas détaillés1). D’après la carte de répartition, ƕƆƕƆƗƆƇƇƆƗ 2001, carte 3, p. 334. Distribution des trépieds à baguettes, d’après Bieg 2002. Distribution des protomes de griffon. Distribution des appliques en forme de sirène. Distribution des appliques à tête de taureau. Distribution des animaux sur plaquettes (appliques de chaudron). Distribution des anses en arceau à décor de fleur de lotus (sans Orient et Égypte), d’après Matthäus 2001, fig. 3. Distribution des attaches en forme de barre à deux anneaux avec anses en oméga. D’après Matthäus 2001, fig. 12, Matthäus 2011, fig. 35 ; Aurigny 2012b, fig. 10. Distribution des coupes métalliques phéniciennes (argent, bronze, or) : d’après Markoe 1992, p. 66, fig. 7.

Plans Plan du sanctuaire d’Apollon à Delphes : Bommelaer, Laroche 2015. Plan du sanctuaire d’Athéna à Delphes.

1. Voir ȆǹȆǹȈǹǺǺǹȈ 2001, cartes 1 et 2, p. 332-333.

Table des figures

Fig. 1 – Page 109 du Journal de la Grande Fouille, avec le dessin de la sirène de bronze inv. 1248 (n° 73). Fig. 2 – Lébès de Cumes inv. 4952 (Musée National de Copenhague, cliché Arnold Mikkelsen). Fig. 3 – Fragment de support crétois 3252 (couronne, nég. éfa 62158). Fig. 4 – Fragment de support crétois n° 1, inv. 3252+9471 (nég.efa 72626). Fig. 5 – Fragment de support crétois n° 1, inv. 9471 (nég. efa 74371). Fig. 6 a et b – Fragment de tige de support ajouré n° 2, inv. 13769, face et revers (N353-178 et N353-179, cliché Ph. Collet). Fig. 7 a – Fragment du grand support de la grotte de l’Ida, n° 1, avec représentation d’un bateau (Musée Archéologique d’Héraklion,ƙƕƔƙƖƈƊƎƔƕƔƐƎƘƎƗƑƔƙƏƆƎƆƍƐƌƘƎƗƑƔƙ˝ƘƆƕ). Fig 7 b – Le grand support de la grotte de l’Ida, fragment 15, Rolley 1977, fig. 55-56, p. 124. Fig. 7 c – Grand support de la grotte de l'Ida, fragment 4, (Musée Archéologique d’Héraklion,ƙƕƔƙƖƈƊƎƔƕƔƐƎƘƎƗƑƔƙƏƆƎ ƆƍƐƌƘƎƗƑƔƙ˝ƘƆƕ). Fig. 8 – Reconstitution d’un panneau de support ajouré n° 3, inv. 6928 (dessin 10690-01). Fig. 9 – Fragment de support ajouré n° 3, inv. 6928 (face) (nég. Éfa 74366). Fig. 10 – Fragment de support ajouré n° 3, inv. 6928 (face) (nég. Éfa. 74369). Fig. 11 – Support à quatre faces de Famagouste (Nicosie) : Matthäus 1985, n° 707. Fig. 12 – Fragment de support crétois n° 4, inv. 3148 (N476-003 cliché Ph. Collet). Fig. 13 – Fragment de support crétois n° 4, inv. 3148 (dessin H. Aurigny). Fig. 14 a et b – Fragment de support ajouré n° 5, inv. 10129 (N476-004, N476-005, clichés Ph. Collet). Fig. 15 – Fragment de support ajouré n° 5, inv. 10129 (dessin H. Aurigny). Fig. 16 – Avant-train de cheval n° 6, inv. 2695 (nég. Éfa 30953). Fig. 17 – Avant-train de cheval n° 6, inv. 2695 : revers (nég. Éfa 30949). Fig. 18 – Avant-train de cheval n° 6, inv. 2695 (dessin H. Aurigny). Fig. 19 – Avant-train de cheval n° 7, inv. 4460 (nég. Éfa 30947). Fig. 20 – Avant-train de cheval n° 7, inv. 4460 (nég. Éfa 30966). Fig. 21 – Volute d’un support ajouré n° 8, inv. 10130, face (cliché H. Aurigny). Fig. 22 – Volute d’un support ajouré n° 8, inv. 10130, revers (cliché H. Aurigny). Fig. 23 – Fragment de tige n° 9, inv. 10132 (nég. Éfa 69174). Fig. 24 – Fragment de tige n° 9, inv. 10132 (dessin H. Aurigny). Fig. 25 – Fragment de tige de support n° 10, inv. 23962 (N476-126, clichés Ph. Collet). Fig. 26 – Fragment de couronne et de ruban n° 11, inv. 10131, face (cliché H. Aurigny).

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BRONZES DU HAUTARCHAÏSME À DELPHES

Fig. 27 – Fragment de couronne et de ruban n° 11, inv. 10131, revers (cliché H. Aurigny). Fig. 28 – Fragment de couronne et de ruban n° 11, inv. 10131 (dessin H. Aurigny). Fig. 29 – Quadrupède n° 12, inv. 23965, face (N476-008, cliché Ph. Collet). Fig. 30 – Quadrupède n° 12, inv. 23965, revers (N476-009 cliché Ph. Collet). Fig. 31 – Support de Symi Viannou : Prakt 1975, pl. 259. Fig. 32 et 33 – Fragment de couronne et support n° 13, inv. 25082, face et revers (clichés H. Aurigny). Fig. 34 – Fragment de couronne et support n° 13, inv. 25082, face et revers (dessin H. Aurigny). Fig. 35 – Support à volutes n° 14, inv. 10134 (nég. Éfa 68329). Fig. 36 – Support à volutes n° 14, inv. 10134 (dessin H. Aurigny). Fig. 37 : Carte 1 – distribution des supports et trépieds, d’après ƕƆƕƆƗƆƇƇƆƗ 2001, carte 3, p. 334. Fig. 38 – Fragment de support conique n° 15, inv. 19899, face (clichés H. Aurigny). Fig. 39 – Fragment de support conique n° 15, inv. 19899, revers (clichés H. Aurigny). Fig. 40 – Support conique de la tombe Barberini de Préneste ; Akurgal 1961, p. 58-59, fig. 36. Fig. 41 – Trépied à baguettes n° 16, inv. 9467 (nég. Éfa 41526). Fig. 42 – Trépied à baguettes n° 16, inv. 9467, avant restauration : (nég. Éfa 31315). Fig. 43 – Pied à sabot n° 16, inv. 9467, arrière (nég. Éfa 38749). Fig. 44 – Pied à sabot n° 16, inv. 9467 (nég. Éfa 38750). Fig. 45-47 – Pied à sabot n° 17, inv. 23959, face, côté droit et revers (clichés H. Aurigny). Fig. 48 – Pied à sabot n° 17, inv. 23959 (dessin H. Aurigny). Fig. 49-51 – Pied à sabot n° 18, inv. 5339, face, côté gauche et arrière (N476-012, N476-014, N476-013 clichés Ph. Collet). Fig. 52-54 – Pied de lion n° 19, inv. 1717 face, revers, ¾ (nég. Éfa 38746, 38748, 41530). Fig. 55 – Pied de lion n° 19, inv. 1717 : l’inscription chypriote (détail nég. 38747). Fig. 56 – Pied de lion n° 19, inv. 1717 (dessin H. Aurigny). Fig. 57-58 – Manchon de bronze n° 20, inv. 23970, face et revers (clichés H. Aurigny). Fig. 59 – Manchon de bronze n° 20, inv. 23970 (dessin H. Aurigny). Fig. 60-63 – Manchon à tête de taureau n° 22, inv. 8400, face, dessous, dessus ¾ (nég. Éfa. 31944, 50756, R 2009_12) ; profil (nég. Éfa. 31947). Fig. 64-66 – Manchon à tête de taureau n° 23, inv. 7195 (nég. Éfa 32599, R2008_05, 32600). Fig. 67-69 – Tête de taureau n° 24, inv. 19891 (nég. Éfa 63308, 63309 et cliché H. Aurigny). Fig. 70-71 – Tête de bélier n° 25, inv. 6040 (nég. Éfa 31213, 31214). Fig. 72-73 – Manchon de bronze n° 26, inv. 23953 (nég. Éfa 69173 et 69195). Fig. 74-75 – Crochet de bronze n° 27, inv. 3092 (N476-016, N476-015, clichés Ph. Collet, dessin H. Aurigny). Fig. 76 – Fragment d’arceau de trépied n° 28, inv. 23960 (nég. Éfa. 62096). Fig. 77 – Fragment d’arceau de trépied n° 28, inv. 23960 (nég. Éfa. 62097). Fig. 78 – Fragment d’arceau de trépied n° 28, inv. 23960 (dessin H. Aurigny). Fig. 79-80 – Protome de griffon n° 29, inv. 2885 (nég. Éfa 31223, 31224). Fig. 81 – Protome de serpent n° 30, inv. 23963 (nég. éfA R2761,06). Fig. 82 : Carte 2 – Distribution des trépieds à baguettes, d’après BIEG 2002, p. 66, fig. 55B. Fig. 83 – Dragment de chaudron n° 31, inv. 19898, extérieur (nég. Éfa R 896-5). Fig. 84 – Dragment de chaudron n° 31, inv. 19898, détail (N 353-201, cliché Ph. Collet). Fig. 85-89 – Protome de griffon inv. 30933, n° 32 : face et profils (nég. Éfa N041-01, N041-02 et N041-06) ; détail du haut de la tête ; détail du profil (nég. Éfa N041-07, N041-04). Fig. 90-94 – Protome de griffon n° 33, inv. 7734, face et profils (nég.Éfa 33152, 33153 et 45085) ; vue de dessous, dessous de ¾ (nég. Éfa 11057a et 74377). Fig. 95-97 – Protome de griffon n° 34, inv. 24948 : profils et arrière (nég. Éfa 74378, 74379, 74381). Fig. 98-100 – Protome de griffon n° 35, inv. 24955, trois quarts, profil, vue de dessus (cliché H. Aurigny, et N 353-097 et N353096, clichés Ph. Collet). Fig. 101-104 – Protome de griffon n° 36, inv. 6406 (nég. Éfa 11024, 11025, cliché H. Aurigny, 11021).

TABLE DES FIGURES

Fig. 105 – Fragment de remplissage de griffon n° 37 (cliché H. Aurigny). Fig. 106-107 – Protome de griffon n° 38, inv. 1213 (nég. Éfa 31048, 31049). Fig. 108-109 – Protome de griffon n° 39, inv. 3737 (nég. Éfa 31294 et 31295). Fig. 110-112 – Protome de griffon n° 40, inv. 2889 (deux clichés H. Aurigny et nég. Éfa 30978). Fig. 113-115 – Protome de griffon n° 41, inv. 2620 (nég. Éfa 31023 et 31024, cliché H. Aurigny). Fig. 116-118 – Protome de griffon n° 42, inv. 5606 (nég. Éfa 10699, 30931, et cliché H. Aurigny). Fig. 119-120 – Protome de griffon n° 43, inv. 1549 (nég. Éfa 31025, 31026). Fig. 121-122 – Protome de griffon n° 44, inv. 1225 (nég. Éfa 31210 et cliché H. Aurigny). Fig. 123-124 – Protome de griffon n° 45, inv. 4289 (nég. Éfa 31002 et 31027). Fig. 125-126 – Protome de griffon n° 46, inv. 3708 (N353-089 et N353-090, Ph. Collet). Fig. 127-128 – Protome de griffon n° 47, inv. 8396 (nég. Éfa 31350 et 31351). Fig. 129-130 – Protome de griffon n° 48, inv. 23846 (clichés H. Aurigny). Fig. 131-133 – Protome de griffon n° 49, inv. 16516 (nég. Éfa N353-004, N353-005, n353-006, Ph. Collet). Fig. 134-136 – Protome de griffon n° 50, inv. 16915 (nég. Éfa N353-001, N353-002, n353-003, Ph. Collet). Fig. 137-139 – Oreille de griffon n° 51, inv. 24949 (N476-033 Ph. Collet, cliché H. Aurigny, N476-034 Ph. Collet). Fig. 140-141 – Oreille de griffon n° 52, inv. 24953 (N476-045, N476-046, Ph. Collet). Fig. 142-144 – Oreille de griffon n° 53a, inv. 24946 (N476-035 Ph. Collet, cliché H. Aurigny, N476-036 Ph. Collet). Fig. 145-146 – Oreille de griffon n° 53b, inv. 24951 (N476-037 Ph. Collet, N476-038 Ph. Collet). Fig. 147-148 – Oreille de griffon n° 54, inv. 24945 (N476-039 Ph. Collet, N476-040 Ph. Collet). Fig. 149-151 – Oreille de griffon n° 55, inv. 24950 (N476-043 Ph. Collet, cliché H. Aurigny, N476-044 Ph. Collet). Fig. 152-153 – Oreille de griffon n° 56, inv. 24952 (N476-041 Ph. Collet, N476-042 Ph. Collet). Fig. 154-155 – Protome de griffon à bélière n° 57, inv. 951 (nég. Éfa 31022 et 31041). Fig. 156 : Carte 3 – Distribution des protomes de griffon en Orient, Grèce, Italie. Fig. 157 – Relief au griffon d’Ankara, Barnett 1948, fig. 9 p. 11. Fig. 158 – Relief de Tell Halaf : griffon : Oppenheim 1955, pl. 89 a. Fig. 159 – Lion et relief de Sakçegözü, Akurgal 1961b, pl. 134. Fig. 160 – Trépied et chaudron de Salamine de Chypre, tombe 79: Karageorghis 1973, p. 98, fig. 18. Fig. 161-162 a et b – Sirène n° 58, inv. 23972 (nég. Éfa 31225, N476-017, N476-018 Ph. Collet). Fig. 163 – Sirène de Toprak Kale, Akurgal 1961a, fig. 18, p. 303. Fig. 164 – Décor de sirène du chaudron du tumulus MM de Gordion : Akurgal 1961a, fig. 10, p. 303. Fig. 165-167 – Sirène n° 59, inv. 2623 profil (nég. Éfa 31016), face (31020), dos (31017). Fig. 168-170 – Sirène n° 60, inv. 1347, profil (nég. Éfa 31216), face (31219), revers (31220). Fig. 171-172 – Sirène n° 61, inv. 8929 (nég. Éfa 68322 et R2527-06). Fig. 173-174 – Sirène n° 62 a, inv. 7725 (neg. Éfa 12574, 12575). Fig. 175-176 – Sirène n° 62 b, inv. 7726 (neg. Éfa 12574, 12575). Fig. 177-178– Sirène n° 63, inv. 2646 (clichés H. Aurigny). Fig. 179a et b – Queue de sirène n° 64, inv. 2569 (N476-019, N476-020 Ph. Collet). Fig. 180-183 – Sirène n° 65, inv. 8397 (nég. Éfa 31227, 64881, 31256 et 31264). Fig. 184-186 – Sirène n° 66, inv. 8395, face (31266), profil (R2009-11), dos (31222). Fig. 187-189 – Sirène de Copenhague n° 67, inv. 13258 : Herrmann 1966, pl. 23,1 et 3, Curtis 1994, fig. 25. Fig. 190-192 – Taureau sur aile de sirène n° 68, inv.8399 (nég. Éfa 31259, 31260 et 31217). Fig. 193 – Taureau sur aile de sirène de l’Héraion d’Argos : Strøm 1998, fig. 4, p. 42. Fig. 194-196 – Sirène n° 69, inv. 725, face (nég. Éfa R 2307-05), profil (31267), dos (31221). Fig. 197-199 – Sirène n° 70, Louvre inv. Br. 2604 (cliché H. Aurigny). Fig. 200-202 – Sirène n° 71, inv. 3810 (nég. Éfa 63328, 61111 et 61112). Fig. 203-204 – Sirène n° 72, inv. 2704 (cliché H. Aurigny et nég. Éfa 31015). Fig. 205-207 – Sirène n° 73, inv. 1248, face (nég. Éfa 31021), dos (31019), profil (31018).

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BRONZES DU HAUTARCHAÏSME À DELPHES

Fig. 208-211 – Sirène n° 74, inv. 8398, inv. 8398, face (neg. Efa 31268), dos (nég. Éfa 31273), profil (R2009-09), face (R2009-10). Fig. 212 – Sirène de l’Acropole, MN 6519, Scholl 2006, fig. 42 p. 104. Fig. 213-215 – Sirène n° 75, inv. 1666, dos (nég. Éfa 31226), profil (31262), face (31265). Fig. 216 – Sirène de l’Acropole MN 6518 : Scholl 2006, fig. 41 p. 103. Fig. 217 – Queue de sirène n° 76, inv. 23976 (nég. Éfa 69176). Fig. 218 – Aile gauche de sirène n° 77, inv. 23973 (R2526-04). Fig. 219 – Aile droite de sirène n° 78, inv. 23974 (N476-021 Ph. Collet). Fig. 220 – Fragment d’aile de sirène n° 79 (cliché H. Aurigny). Fig. 221-223 – Tête de sirène n° 80, inv. 1348 (nég. Éfa 31036, 31037 et 64880). Fig. 224 : Carte 4 – Distribution des appliques en forme de sirènes, d’après BIEG 2002, fig. 56 p. 69. Fig. 225-226 – Applique à tête de taureau n° 81, inv. 2351 (nég. Éfa 30968 et 30969). Fig. 227-228 – Protome du Lébès de Cumes inv. 4952 à Copenhague : Amandry 1956, pl. 28, 2-3. Fig. 229-230 – Fragment d’applique à tête de taureau n° 82, inv. 19892 (N476-026, N476-025 Ph. Collet). Fig. 231-232 – Fragment d’applique à tête de taureau n° 83, inv. 19894 (N476-029, N476-030 Ph. Collet) Fig. 233-234 – Applique en forme de tête de taureau n° 84, inv. 1784 (nég. Éfa 30932 et 31034). Fig. 235-236 – Applique en forme de tête de taureau n° 85, inv. 4139 (nég. Éfa 30930 et 31042). Fig. 237-238 – Fragment d’applique à tête de taureau n° 86, inv. 19893 (neg. Efa R0244_05 et R0244_06). Fig. 239-240 – Fragment d’applique à tête de taureau n° 87 (N353-176 et N353-177, clichés Ph. Collet). Fig. 241-242 – Fragment d’applique à tête de taureau n° 88, inv. 19895 (N476-027, N476-028 Ph. Collet). Fig. 243-244 – Fragment d’applique à tête de taureau n° 89, inv. 23977 (N476-031, N476-032 Ph. Collet). Fig. 245-247 – Protome de taureau n° 90, inv. 2808 (nég. Éfa 31254, 64876 et 31263). Fig. 248 – Protomes de taureau classées par style : d’après Prayon 1987, p. 121, fig. 20. Fig. 249 : Carte 5 – Distribution des chaudrons à protomes de taureau. Fig. 250 – Manchons à têtes de taureau du trépied de Kourion : Liepmann 1968, n°14-15 et 16-17, p. 45. Fig. 251-252 – Taureau sur plaquettes n° 91, inv. 4434 (cliché H. Aurigny et nég. éfa 31288). Fig. 253-254 – Avant-train de lion n° 92, inv. 1248 (nég. Éfa 36628-36629). Fig. 255-257 – Lion sur plaquettes, n° 93, sans inv., perdu (neg. éfa. 64897, 64897a et 64897b). Fig. 258-260 – Groupe sur plaquettes n° 94: fauve dévorant un homme inv. 1430 (nég. Éfa N353-124, N353-125 et N353-127, clichés Ph. Collet). Fig. 261-262 – Avant-train de quadrupède n° 95, inv. 7802 (N476-098, N476-099 cliché Ph. Collet). Fig. 263-265 – Arrière-train de quadrupède n° 96, inv. 4766 (nég. Éfa N353-116, N353-117 et N353-118, clichés Ph. Collet). Fig. 266-267 – Sphinx n° 97, inv. 2440 (cliché H. Aurigny et nég. Éfa 31253). Fig. 268-269 – Quadrupède n° 98, inv. 1866 (N353-029 et N353-030, clichés Ph. Collet). Fig. 270-272 – Lion couché n° 99, inv. 7803 (nég. Éfa 30899, 31039 et 31040). Fig. 273 – Chaudron fragmentaire avec restes d’animaux sur plaquettes, Herrmann 1966, pl. 64, 4. Fig. 274 : Carte 6 – Distribution des animaux sur plaquettes (appliques de chaudron). d’après BIEG 2002, fig. 58. Fig. 275-276 – Protome de griffon n° 100, inv. 2669 (nég. Éfa 31046 et 31047). Fig. 277-278 – Applique animale sur attache en T n° 101, inv. 3735 (nég. Éfa 69175 et 69198). Fig. 279-280 – Attache à tête d’oiseau de proie n° 102, inv. 3738 (nég. Éfa 69175 et 69198). Fig. 281-282 – Applique à tête de rapace n° 103, inv. 2825 (nég. Éfa 69175 et 69198). Fig. 283-284 – Applique à tête animale n° 104, inv. 3299 (nég. Éfa 69175 et 69198). Fig. 285-286 – Applique à tête de canidé n° 105, R91 C049.9 (clichés H. Aurigny). Fig. 287-289 – Applique à décor de tête casquée n° 106, inv. 1673 (nég. Éfa 31261, N353-119 et N353-120, clichés Ph. Collet). Fig. 290-292 – Buste féminin n° 107, inv. 2528 (nég. Éfa 32596, 32597 et 32598). Fig. 293-295 – Applique en forme de buste humain n° 108, inv. 2343 (nég. Éfa 62121, 62122 et 62123). Fig. 296-299 – Applique n° 109, inv. 23966 : face et profil (N353-064 et N353-065, clichés Ph. Collet) ; (N353-062 et N353063, clichés Ph. Collet). Fig. 300-301 – Applique à tête de taureau n° 110, inv. 1869 (nég. Éfa 64875 et cliché H. Aurigny).

TABLE DES FIGURES

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Fig. 302-303 – Applique à tête de lion n° 111, inv. 2583 (N353-037, N353-038 et N353-039, clichés Ph. Collet). Fig. 304-305 – Applique à tête de lion n° 112, inv. 3513 (clichés H. Aurigny). Fig. 306-308 – Applique à tête de lion n° 113, inv. 4128 (nég. Éfa 30997 et clichés H. Aurigny). Fig. 309-311 – Applique à tête léonine n° 114, inv. 2446 (N353-122, N353-121, N353-123, clichés Ph. Collet). Fig. 312-313 – Protome de lionne n° 115, inv. 1699 (nég. Éfa 36631 et 36632). Fig. 314-316 – Protome de lionne n° 116, inv. 2403 (nég. Éfa 36632, 36633 et cliché H. Aurigny). Fig. 317-318 – Protome léonine n° 117, inv. 2750 (nég. Éfa 36632 et 36633). Fig. 319-320 – Applique en forme d’avant-train de sphinx n° 118, inv. 3430 (nég. Éfa 31218 et clichés H. Aurigny). Fig. 321-322 – Applique en forme de protome de sanglier n° 119, inv. 2886 (nég. Éfa 31044 et 31045). Fig. 323-325 – Applique en forme de tête de bélier n° 120, inv. 3384 (N353-031, N353-032, N353-035, clichés Ph. Collet). Fig. 326-327 – Chaudron de type chypriote n° 121, R91 B084.2 : Luce 2008, p. 205, n° 279, pl. 92. Fig. 328-330 – Anse en arceau à fleur de lotus n° 122, inv. 2050 (N353-022 et N353-023, clichés Ph. Collet) ; anse n° 122, inv. 2050 (dessin H. Aurigny). Fig. 331-333 – Fleur d’une grande anse en arceau n° 123, inv. 23951 (clichés et dessins H. Aurigny). Fig. 334-336 – Fleur d’une grande anse en arceau n° 124, inv. 2626 (23822) (clichés et dessin H. Aurigny). Fig. 337-339 – Fragment de fleur d’une grande anse en arceau n° 125, inv. 23824 (N353-044 et N353-045, clichés Ph. Collet, dessin H. Aurigny). Fig. 340-342 – Fragment d’attache n° 126, inv. 23795 (clichés Ph. Collet N353-046 et N353-047 et dessin H. Aurigny). Fig. 343-345 – Fragment de pétale n° 127, inv. 23821 (N353-052 et N353-053, clichés Ph. Collet, dessin H. Aurigny). Fig. 346-348 – Pétale de fleur de lotus n° 128, inv. 3617 (N353-056 et N353-057, clichés Ph. Collet, dessin H. Aurigny). Fig. 349-351 – Attache et anse à fleur de lotus n° 129, inv. 2977 (N476-010, N476-011 clichés Ph. Collet, dessin H. Aurigny). Fig. 352-355 – Anse en arceau à fleur de lotus n° 130, inv. 23817 (N353-050 et N353-051, clichés Ph. Collet, dessin H. Aurigny). Fig. 356-357 – Anse à fleur de lotus n° 131, inv. 3910 (nég. Éfa 62168 et dessins H. Aurigny). Fig. 358-359 – Anse à fleur de lotus n° 132, inv. 23816 (nég. Éfa 62169 et dessin H. Aurigny). Fig. 360-363 – Anse en arceau à fleur de lotus décorée d’un oiseau n° 133, inv. 2907 (neg. Éfa 31293, N353-026 et N353-027, clichés Ph. Collet, dessin H. Aurigny). Fig. 364-366 – Anse à fleur de lotus n° 134, inv. 5874 (N353-011 et N353-012, clichés Ph. Collet, et dessin H. Aurigny). Fig. 367-369 – Anse à fleur de lotus n° 135, inv. 7729 (N353-014 et N353-015, clichés Ph. Collet ; dessin H. Aurigny). Fig. 370-372 – Fleur de lotus d’anse n° 136, inv. 23820 (clichés et dessin H. Aurigny). Fig. 373-375 – Anse à fleur de lotus n° 137, inv. 23794 (N353-048 et N353-049, clichés Ph. Collet ; dessin H. Aurigny). Fig. 376-378 – Anse à fleur de lotus n° 138, inv. 23818 (clichés et dessin H. Aurigny). Fig. 379-382 – Fleur de lotus n° 139, inv. 23819 (clichés et dessin H. Aurigny). Fig. 383-384 – Pétale de fleur de lotus n° 140, inv. 23941 (N353-054, cliché Ph. Collet ; dessin H. Aurigny). Fig. 385-386 – Attache en arceau à décor d’oiseau n° 141, inv. 23814 (neg. Éfa 32547 et dessin H. Aurigny). Fig. 387 : Carte 7 – Distribution des anses en arceau à décor de fleur de lotus (sans Orient et Égypte), d’après Matthäus 2001, fig. 3. Fig. 388-390 – Attache d’anse en bobine n° 142, inv. 3146 (N476-047, N476-048 clichés Ph. Collet, dessin H. Aurigny). Fig. 391-394 – Attache en bobine n° 143, inv. 23943 (N476-049, N476-050 clichés Ph. Collet, cliché et dessin H. Aurigny). Fig. 395-398 – Attache en bobine n° 144, inv. 23834 (N476-051, N476-052 clichés Ph. Collet, cliché et dessin H. Aurigny). Fig. 399-402 – Attache d’anse en bobine n° 145, inv. 23835 (N476-063, N476-064 clichés Ph. Collet, cliché et dessin H. Aurigny). Fig. 403-406 – Attache d’anse en bobine n° 146, inv. 23836 (clichés et dessin H. Aurigny). Fig. 407-410 – Attache en bobine n° 147, inv. 23838 (N476-055, N476-056 clichés Ph. Collet, cliché et dessin H. Aurigny). Fig. 411-414 – Attache en bobine n° 148, inv. 23839 (N476-053, N476-054 clichés Ph. Collet, cliché et dessin H. Aurigny). Fig. 415-417 – Attache n° 149, inv. 23840 (N476-061, N476-062 clichés Ph. Collet, dessin H. Aurigny). Fig. 418-420 – Attache n° 150, inv. 23841 (N476-057, N476-058 clichés Ph. Collet et dessin H. Aurigny). Fig. 421-423 – Attache d’anse n° 151, inv. 23843+ 23844 (N476-059, N476-060 clichés Ph. Collet, et dessin H. Aurigny). Fig. 424-426 – Attache d’anse n° 152, inv. 23842 (N476-069, N476-070 clichés Ph. Collet, et dessin H. Aurigny). Fig. 427-428 – Attache d’anse de coupe n° 153, inv. 23770 (cliché efa 62152 et dessin H. Aurigny).

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BRONZES DU HAUTARCHAÏSME À DELPHES

Fig. 429 – Anse lisse n° 154, inv. 23775 (cliché H. Aurigny). Fig. 430 – Anse lisse n° 155, inv. 23776 (cliché H. Aurigny). Fig. 431-433 – Applique à deux anneaux n° 156, inv. 23779 (N476-085, N476-086 clichés Ph. Collet et dessin H. Aurigny). Fig. 434-436 – Applique à deux anneaux n° 157, inv. 3149 (clichés et dessin H. Aurigny). Fig. 437-439 – Applique à deux anneaux et vasque n° 158, inv. 23780 (N476-090, N476-091 clichés Ph. Collet et dessin H. Aurigny). Fig. 440-442 – Applique à deux anneaux n° 159, inv. 23767 (N476-087 cliché Ph. Collet, cliché et dessin H. Aurigny). Fig. 443-445 – Applique à deux anneaux et anse en oméga n° 160, inv. 23803 (N476-088, N476-089 clichés Ph. Collet et dessin H. Aurigny). Fig. 446-448 – Applique à deux anneaux et anse en oméga n° 161, inv. 3095 (clichés et dessin H. Aurigny). Fig. 449 – Anse n° 162, inv. 13763 (cliché H. Aurigny). Fig. 450-451 – Anse en oméga n° 163, inv. 2740 (clichés et dessin H. Aurigny). Fig. 452-453 – Anse en oméga n° 164, inv. 3024 (cliché et dessin H. Aurigny). Fig. 454-456 – Attache d’anse à anneau unique n° 165, inv. 23798 (clichés et dessin H. Aurigny). Fig. 457-458 – Attache d’anse à anneau unique n° 166, inv. 13774+13776, recollés (clichés et dessin H. Aurigny). Fig. 459-461 – Attache d’anse à anneau unique n° 167, inv. 13773 (clichés et dessin H. Aurigny). Fig. 462-465 – Attache d’anse triangulaire n° 168, inv. 4775 (N476-093 cliché Ph. Collet, clichés et dessin H. Aurigny). Fig. 466-469 – Attache d’anse n° 169, inv. 23799 (N476-092 cliché Ph. Collet, clichés et dessin H. Aurigny). Fig. 470-473 – Attache d’anse triangulaire n° 170, inv. 2503 (clichés et dessin H. Aurigny). Fig. 474-477 – Attache d’anse n° 171, inv. 3201 (clichés et dessin H. Aurigny). Fig. 478-481 – Plaque d’attache d’anse n° 172, inv. 2657 (clichés et dessin H. Aurigny). Fig. 482-484 – Plaque d’attache n° 173, inv. 23812 (clichés et dessin H. Aurigny). Fig. 485-486 – Anse horizontale n° 174, inv. 23619 (clichés et dessin H. Aurigny). Fig. 487-488 – Anse horizontale n° 175, sans inv. (clichés et dessin H. Aurigny). Fig. 489-490 – Anse horizontale n° 176, sans inv. (clichés et dessin H. Aurigny). Fig. 491-492 – Attache d’anse n° 177, inv. 23815 (N353-106 et N353-107, clichés Ph. Collet). Fig. 493 : Carte 8 – Distribution des attaches en forme de barre à deux anneaux avec anses en oméga. D’après Matthäus 2001, fig. 12, Matthäus 2011, fig. 35 ; Aurigny 2012b, fig. 10. Fig. 494-499 – Coupe n° 178, inv. 4463, photographie générale (nég. Éfa 2234) et dessin (A. Platon) ; le char tiré par le sphinx (nég. Éfa 31235) ; deux soldats attaquant la ville (nég. Éfa 31236) ; la ville assiégée (nég. Éfa 31237) ; archers et assaillants (nég. Éfa 31238). Fig. 500-501 – Phiale à omphalos, Inv. 2651, n° 179 (N476-131, N476-132 clichés Ph. Collet). Fig. 502-503 – Phiale à omphalos. Inv. 5284, n° 180 (clichés H. Aurigny). Fig. 504-505 – Coupe n° 181, inv. 27161 (nég. Éfa 62117 et 62118). Fig. 506-507 – Coupe n° 182, inv. 8404 (nég. Éfa 62115 et 62116). Fig. 508-510 – Coupe n° 183, inv. 7638 (N476-134, N476-135 clichés Ph. Collet et dessin H. Aurigny). Fig. 511-512 – Coupe n° 184, sans inv (N476-129, N476-130, clichés Ph. Collet). Fig. 513-514 – Aryballe n° 185, inv. 3433 (clichés et dessin H. Aurigny). Fig. 515 : Carte 9 – Distribution des coupes métalliques au repoussé phéniciennes : d’après MARKOE 1992, p. 66, fig. 7. Fig. 516 – Plan du sanctuaire d’Apollon. Fig. 517 – Plan de Marmaria.

Table des matières

Trépieds, chaudrons et vaisselle de bronze du haut-archaïsme (fin viiie-viie siècle) Avant-propos .....................................................................................................................................................................................

7

CHAPITRE 1 — INTRODUCTION ET HISTOIRE DE LA RECHERCHE ....................................................................................

9

Histoire de la recherche ........................................................................................................................................................... État des publications .................................................................................................................................................... De la Grande Fouille aux découvertes des fosses de l’Aire ...................................................................................... La Grande Fouille ............................................................................................................................................ Les travaux de Fr. Poulsen .................................................................................................................. Les années 1920 et 1930 ................................................................................................................................ Les découvertes des fosses de l’Aire ...............................................................................................................

9 9 11 11 15 16 18

La Grèce à l’école de l’Orient ..................................................................................................................................... Objets orientaux et objets grecs ..................................................................................................................... Le chaudron, objet oriental et orientalisant .................................................................................................

19 19 20

L’orientalisant : un phénomène général dans le bassin méditerranéen ? ................................................................ Diversification des provenances : un Orient multiple, l’Ouest du bassin méditerranéen ....................... Les objets de Delphes, reflet d’un phénomène culturel méditerranéen ? ..................................................

23 23 24

La recherche récente sur le viie siècle ...................................................................................................................................... L’art et la civilisation grecs : des processus d’évolution interne ............................................................................... L’art grec au viie siècle ................................................................................................................................................. L’interprétation sociale de l’orientalisant ................................................................................................................... L’orientalisation, un phénomène étalé dans le temps et dans l’espace ................................................................... Nouvelles interprétations du viie siècle ...................................................................................................................... Le problème de la périodisation .................................................................................................................... Vers une « méditerranéisation » ? ...................................................................................................................

26 26 27 27 28 28 29 29

L’étude des objets delphiques par catégories .......................................................................................................................... La catégorie de la vaisselle ........................................................................................................................................... Le chaudron ..................................................................................................................................................... La diffusion à l’époque orientalisante ........................................................................................................... Autres formes ...................................................................................................................................................

30 30 30 31 31

Organisation de l’étude ...............................................................................................................................................

32

216

BRONZES DU HAUTARCHAÏSME À DELPHES

CHAPITRE 2 — SUPPORTS ET TRÉPIEDS À BAGUETTES NOS 114 ; 1530 .............................................................................

33

Supports chypro-crétois ........................................................................................................................................................... Catalogue ...................................................................................................................................................................... Commentaire ...............................................................................................................................................................

33 33 37

Supports de chaudron .............................................................................................................................................................. Support conique ........................................................................................................................................................... Catalogue ......................................................................................................................................................... Commentaire ...................................................................................................................................................

39 39 39 39

Trépieds à baguettes ..................................................................................................................................................... Catalogue ......................................................................................................................................................... Un exemplaire complet ...................................................................................................................... Pieds ..................................................................................................................................................... Tiges, manchons et éléments décoratifs ........................................................................................... Commentaire ...................................................................................................................................................

40 40 40 41 42 46

CHAPITRE 3 — APPLIQUES EN FORME DE PROTOMES : GRIFFONS, SIRÈNES, TAUREAUX NOS 3090 ........................

53

Protomes de griffon .................................................................................................................................................................. Catalogue ...................................................................................................................................................................... Griffons martelés ............................................................................................................................................. Griffons fondus ................................................................................................................................................ Technique mixte .............................................................................................................................................. Autres griffons ..................................................................................................................................................

53 53 53 56 59 59

Commentaire ............................................................................................................................................................... Origine ............................................................................................................................................................. Protomes martelées ......................................................................................................................................... Protomes fondues ............................................................................................................................................ Technique mixte .............................................................................................................................................. Objets particulier ............................................................................................................................................. La signification des chaudrons à griffons ......................................................................................................

61 61 64 67 73 74 75

Sirènes ..................................................................................................................................................................................... Catalogue ...................................................................................................................................................................... Commentaire ............................................................................................................................................................... Sirènes orientales ............................................................................................................................................. Entre l’Orient et la Grèce ............................................................................................................................... Sirènes grecques ...............................................................................................................................................

77 77 86 87 90 92

Taureaux .................................................................................................................................................................................... 97 Catalogue ...................................................................................................................................................................... 97 Commentaire ............................................................................................................................................................... 100 CHAPITRE 4 — APPLIQUES DE VAISSELLE .................................................................................................................................... 105

Appliques animales de chaudron ............................................................................................................................................ 105 Catalogue ...................................................................................................................................................................... 105 Commentaire ............................................................................................................................................................... 108 Attaches à décor humain ou animal ....................................................................................................................................... 110 Catalogue ...................................................................................................................................................................... 110 Commentaire ............................................................................................................................................................... 116 Anses en arceau ......................................................................................................................................................................... 120 Catalogue ...................................................................................................................................................................... 120 Commentaire ............................................................................................................................................................... 123 Attaches à décor non figuré et autres vases ............................................................................................................................ 125 Catalogue ...................................................................................................................................................................... 125

TABLE DES MATIÈRES

217

Attaches d’anse en bobine .............................................................................................................................. 125 Attaches en forme de barre ............................................................................................................................. 127 Anses diverses, d’origine italique ................................................................................................................... 130 Commentaire ............................................................................................................................................................... Attaches d’anses en bobine ............................................................................................................................. Attaches en forme de barre ............................................................................................................................. Anses diverses, d’origine italique ...................................................................................................................

131 131 132 134

CHAPITRE 5 — PHIALES ET VASES .................................................................................................................................................. 137

Catalogue ................................................................................................................................................................................... Commentaire ............................................................................................................................................................................ Coupe décorée .............................................................................................................................................................. Phiale à omphalos et phiale en lotus .......................................................................................................................... Phiale à godrons ........................................................................................................................................................... Aryballe .........................................................................................................................................................................

137 139 139 141 141 142

CHAPITRE 6 — CONTEXTUALISATION ......................................................................................................................................... 143

Place de ces documents dans l’histoire des techniques ......................................................................................................... Fabrication et provenance des objets ...................................................................................................................................... Orient (Anatolie et Phrygie/Syrie du Nord/Égypte/Chypre) ................................................................................. Provenances grecques (Attique, Corinthe, Argos, Laconie, Ionie, Crète) .............................................................. Occident .......................................................................................................................................................................

143 145 145 147 151

CHAPITRE 7 — PRATIQUES VOTIVES AU HAUTARCHAÏSME À DELPHES ........................................................................... 153

La vaisselle votive archaïque dans les sources littéraires ....................................................................................................... Les objets offerts mentionnés dans les textes ............................................................................................................ Provenance et chronologie des offrandes ................................................................................................................... Modalités d’acquisition et de consécration des offrandes ........................................................................................

154 154 155 157

Les lieux de découverte des offrandes et leur histoire après consécration ........................................................................... Des dépôts d’offrandes (chez Apollon/chez Athéna) ............................................................................................... Les fosses de l’Aire ........................................................................................................................................................ Le devenir des offrandes après la consécration ......................................................................................................... Données chronologiques externes ..............................................................................................................................

157 158 159 160 161

Offrandes et domaines d’intervention des divinités ............................................................................................................. Des offrandes spécifiques à Apollon et Athéna ? ...................................................................................................... Une fonction « politique » des offrandes ? ................................................................................................................ Offrandes publiques ou privées ? ................................................................................................................... Delphes, un sanctuaire politique ...................................................................................................................

162 162 165 165 166

Types et valeurs des offrandes ..................................................................................................................................... 166 Valeur des offrandes ........................................................................................................................................ 167 Offrandes de prestige ...................................................................................................................................... 167 CHAPITRE 8 — LES OFFRANDES ET L’HISTOIRE DU SANCTUAIRE ....................................................................................... 169

L’origine des offrandes et l’origine des dédicants .................................................................................................................. Les « offrandes étrangères » et les « étrangers » dans les sanctuaires grecs .............................................................. Une sélection en Orient comme en Occident .......................................................................................................... La fonction des exotica ................................................................................................................................... Quel Orient à Delphes ? ................................................................................................................................. Des objets orientaux inconnus en Orient .....................................................................................................

169 169 170 170 171 172

Des objets grecs : le rôle du sanctuaire comme vitrine des cités ............................................................................. 173

218

BRONZES DU HAUTARCHAÏSME À DELPHES

Relations extérieures et fréquentation du sanctuaire ............................................................................................................ Fréquenter et enrichir le sanctuaire ............................................................................................................................ Du viiie au vie siècles : ruptures et continuités ......................................................................................................... La fin du viiie s. et le début du viie s. ............................................................................................................ Du second quart à la fin du viie siècle ...........................................................................................................

174 174 175 175 177

La place de Delphes dans un contexte local, régional, égéen et méditerranéen .................................................... « Ouverture internationale » : les origines du panhellénisme à Delphes ............................................................... Le panhellénisme de Delphes ........................................................................................................................ Delphes dans un réseau de sanctuaires ? .......................................................................................................

178 179 179 181

Conclusion ................................................................................................................................................................................ 182 CHAPITRE 9 — CONCLUSION ......................................................................................................................................................... 185

Index des textes ................................................................................................................................................................................. Bibliographie ..................................................................................................................................................................................... Liste des cartes et tableaux ............................................................................................................................................................ Table des figures ................................................................................................................................................................................

189 191 207 209

ILLUSTRATIONS

1

2

Fig. 1 – Sirène de bronze inv. 1248 (n° 73), Journal de la Grande Fouille, p. 109. Fig. 2 – Lébès de Cumes inv. 4952 (Musée National de Copenhague, cliché Arnold Mikkelsen).

3

4

5

7a 6a

6b

7b 7c

Fig. 3 – Fragment de support crétois n° 1, inv. 3252 (couronne, nég. éfa 62158). Fig. 4 – Fragment de support crétois n° 1, inv. 3252+9471 (nég. efa 72626). Fig. 5 – Fragment de support crétois n° 1, inv. 9471 (nég. efa 74371). Fig. 6a et b – Fragment de tige de support ajouré n° 2, inv. 13769, face et revers (N353-178 et N353-179, cliché Ph. Collet). Fig. 7a – Fragment du grand support de la grotte de l’Ida avec représentation d’un bateau (Musée Archéologique d’Héraklion, ƙƕƔƙƖƈƊƎƔƕƔƐƎƘƎƗƑƔƙƏƆƎ ƆƍƐƌƘƎƗƑƔƙ˝ƘƆƕ . Fig 7b – Le grand support de la grotte de l’Ida, fragment 15, Rolley 1977, fig. 55-56, p. 124. Fig 7c – Le grand support de la grotte de l’Ida, fragment 4, (Musée Archéologique d’Héraklion, ƙƕƔƙƖƈƊƎƔƕƔƐƎƘƎƗƑƔƙƏƆƎƆƍƐƌƘƎƗƑƔƙ˝ƘƆƕ.).

10

9

8 11

Fig. 8 – Reconstitution d’un panneau de support ajouré n° 3, inv. 6928 (dessin 10690-01). Fig. 9 – Fragment de support ajouré n° 3, inv. 6928 (face) (nég. Éfa 74366). Fig. 10 – Fragment de support ajouré n° 3, inv. 6928 (revers) (nég. Éfa. 74369). Fig. 11 – Support à quatre faces de Famagouste (Nicosie) : Matthäus 1985, n° 707.

12

13

14a

15a

14b

15b

Fig. 12 – Fragment de support crétois n° 4, inv. 3148 (N476-003 cliché Ph. Collet). Fig. 13 – Fragment de support crétois n° 4, inv. 3148 (dessin H. Aurigny). Fig. 14a et b – Fragment de support ajouré n° 5, inv. 10129 (N476-004, N476-005, clichés Ph. Collet). Fig. 15 – Fragment de support ajouré n° 5, inv. 10129 (dessin H. Aurigny).

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Fig. 16 – Avant-train de cheval n° 6, inv. 2695 (nég. Éfa 30953). Fig. 17 – Avant-train de cheval n° 6, inv. 2695 : revers (nég. Éfa 30949). Fig. 18 – Avant-train de cheval n° 6, inv. 2695 (dessin H. Aurigny). Fig. 19 – Avant-train de cheval n° 7, inv. 4460 (nég. Éfa 30947). Fig. 20 – Avant-train de cheval n° 7, inv. 4460 : revers (nég. Éfa 30966).

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Fig. 21 – Volute d’un support ajouré n° 8, inv. 10130, face (cliché H. Aurigny). Fig. 22 – Volute d’un support ajouré n° 8, inv. 10130, revers (cliché H. Aurigny). Fig. 23 – Fragment de tige n° 9, inv. 10132 (nég. Éfa 69174). Fig. 24 – Fragment de tige n° 9, inv. 10132 (dessin H. Aurigny). Fig. 25 – Fragment de tige de support n° 10, inv. 23962 (N476-126, clichés Ph. Collet).

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Fig. 26 – Fragment de couronne et de ruban n° 11, inv. 10131, face (cliché H. Aurigny). Fig. 27 – Fragment de couronne et de ruban n° 11, inv. 10131, revers (cliché H. Aurigny). Fig. 28 – Fragment de couronne et de ruban n° 11, inv. 10131 (dessin H. Aurigny). Fig. 29 – Quadrupède n° 12, inv. 23965, face (N476-008, cliché Ph. Collet). Fig. 30 – Quadrupède n° 12, inv. 23965, revers (N476-009 cliché Ph. Collet). Fig. 31 – Support de Symi Viannou : Prakt 1975, pl. 259.

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Fig. 32 et 33 – Fragment de couronne et support n° 13, inv. 25082, face et revers (clichés H. Aurigny). Fig. 34 – Fragment de couronne et support n° 13, inv. 25082, face et revers (dessin H. Aurigny). Fig. 35 – Support à volutes n° 14, inv. 10134 (nég. Éfa 68329). Fig. 36 – Support à volutes n° 14, inv. 10134 (dessin H. Aurigny).

9. lalysos de Rhodes (1) 10. Cap Chelidonia (1) 11. Tel Nami (1) 12. Beth Shean (1) 13. Megiddo (1) 14. Tel Miqna (1) 15. Crète 16. Chypre

Fig. 37, Carte 1 – Distribution des supports et trépieds, d’après ƕƆƕƆƗƆƇƇƆƗ 2001, carte 3, p. 334.

500 km

supports tripodes supports à 4 faces supports tripodes ou à 4 faces

1. Sardaigne (9 supports) 2. Piediluco (1) 3. Delphes (6) 4. Antidôn (1) 5. Pnyx (1) 6. Tirynthe (1) 7. Thera (2) 8. Samos (1)

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Fig. 38 – Fragment de support conique n° 15, inv. 19899, face (clichés H. Aurigny). Fig. 39 – Fragment de support conique n° 15, inv. 19899, revers (clichés H. Aurigny). Fig. 40 – Support conique de la tombe Barberini de Préneste ; Akurgal 1961, p. 58-59, fig. 36.

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Fig. 41 – Trépied à baguettes n° 16, inv. 9467 (nég. Éfa 41526). Fig. 42 – Trépied à baguettes n° 16, inv. 9467, avant restauration : (nég. Éfa 31315). Fig. 43 – Pied à sabot n° 16, inv. 9467, arrière (nég. Éfa 38749). Fig. 44 – Pied à sabot n° 16, inv. 9467 (nég. Éfa 38750).

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Fig. 45-47 – Pied à sabot n° 17, inv. 23959, face, côté droit et revers (clichés H. Aurigny). Fig. 48 – Pied à sabot n° 17, inv. 23959 (dessin H. Aurigny).

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Fig. 49-51 – Pied à sabot n° 18, inv. 5339, face, côté gauche et arrière (N476-012, N476-014, N476-013 clichés Ph. Collet). Fig. 52-54 – Pied de lion n° 19, inv. 1717 face, revers, ¾ (nég. Éfa 38746, 38748, 41530). Fig. 55 – Pied de lion n° 19, inv. 1717 : l’inscription chypriote (détail nég. 38747). Fig. 56 – Pied de lion n° 19, inv. 1717 (dessin H. Aurigny).

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Fig. 57-58 – Manchon de bronze n° 20, inv. 23970, face et revers (clichés H. Aurigny). Fig. 59 – Manchon de bronze n° 20, inv. 23970 (dessin H. Aurigny). Fig. 60-63 – Manchon à tête de taureau n° 22, inv. 8400, face, dessous, dessus ¾ (nég. Éfa. 31944, 50756, R 2009_12) ; profil (nég. Éfa. 31947).

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Fig. 64-66 – Manchon à tête de taureau n° 23, inv. 7195 (nég. Éfa 32599, R2008_05, 32600). Fig. 67-69 – Tête de taureau n° 24, inv. 19891 (nég. Éfa 63308, 63309 et cliché H. Aurigny). Fig. 70-71 – Tête de bélier n° 25, inv. 6040 (nég. Éfa 31213, 31214).

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Fig. 72-73 – Manchon de bronze n° 26, inv. 23953 (nég. Éfa 69173 et 69195). Fig. 74-75 – Crochet de bronze n° 27, inv. 3092 (N476-016, N476-015, clichés Ph. Collet, dessin H. Aurigny).

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Fig. 76 – Fragment d’arceau de trépied n° 28, inv. 23960 (nég. Éfa. 62096). Fig. 77 – Fragment d’arceau de trépied n° 28, inv. 23960 (nég. Éfa. 62097). Fig. 78 – Fragment d’arceau de trépied n° 28, inv. 23960 (dessin H. Aurigny). Fig. 79-80 – Protome de griffon n° 29, inv. 2885 (nég. Éfa 31223, 31224). Fig. 81 – Protome de serpent n° 30, inv. 23963 (nég. Éfa R2761,06).

1. Cap d’Agde 2. La Garenne 3. Bad Dürkheim 4. Asperg 5. Spina 6. Moscano 7. S. Vincenzo 8. Orvieto 9. Monteleone 10. Vulci 11. Falerii

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12. Todi 13. Cerveteri 14. Préneste 15. Capoue 16. Pompéi 17. Métaponte 18. Camarina 19. Trebenishte 20. Vergina 21. Dodone 22. Palaiokastro

4

16 17

23. Delphes 24. Kalapodi 25. Athènes 26. Olympie 27. Sparte 28. Crète (Ida) 29. Chios 30. Samos 31. Rhodes 32. Kourion 33. Salamine

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Fig. 82, Carte 2 – Distribution des trépieds à baguettes, d’après BIEG 2002, p. 66, fig. 55B.

500 km

trépieds à baguettes grecs trépieds à baguettes étrusques

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Fig. 83 – Fragment de chaudron n° 31, inv. 19898, extérieur (nég. Éfa R 896-5). Fig. 84 – Fragment de chaudron n° 31, inv. 19898, détail (N 353-201, cliché Ph. Collet).

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Fig. 85-89 – Protome de griffon inv. 30933, n° 32 : face et profils (nég. Éfa N041-01, N041-02 et N041-06) ; détail du haut de la tête ; détail du profil (nég. Éfa N041-07, N041-04).

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Fig. 90-94 – Protome de griffon n° 33, inv. 7734, face et profils (nég.Éfa 33152, 33153 et 45085) ; vue de dessous, dessous de ¾ (nég. Éfa 11057a et 74377).

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Fig. 95-97 – Protome de griffon n° 34, inv. 24948 : profils et arrière (nég. Éfa 74378, 74379, 74381). Fig. 98-100 – Protome de griffon n° 35, inv. 24955, trois quarts, profil, vue de dessus (cliché H. Aurigny, et N 353-097 et N353- 096, clichés Ph. Collet).

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Fig. 101-104 – Protome de griffon n° 36, inv. 6406 (nég. Éfa 11024, 11025, cliché H. Aurigny, 11021). Fig. 105 – Fragment de remplissage de griffon n° 37 (cliché H. Aurigny).

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Fig. 106-107 – Protome de griffon n° 38, inv. 1213 (nég. Éfa 31048, 31049). Fig. 108-109 – Protome de griffon n° 39, inv. 3737 (nég. Éfa 31294 et 31295).

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Fig. 110-112 – Protome de griffon n° 40, inv. 2889 (deux clichés H. Aurigny et nég. Éfa 30978). Fig. 113-115 – Protome de griffon n° 41, inv. 2620 (nég. Éfa 31023 et 31024, cliché H. Aurigny).

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Fig. 116-118 – Protome de griffon n° 42, inv. 5606 (nég. Éfa 10699, 30931, et cliché H. Aurigny). Fig. 119-120 – Protome de griffon n° 43, inv. 1549 (nég. Éfa 31025, 31026).

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Fig. 121-122 – Protome de griffon n° 44, inv. 1225 (nég. Éfa 31210 et cliché H. Aurigny). Fig. 123-124 – Protome de griffon n° 45, inv. 4289 (nég. Éfa 31002 et 31027). Fig. 125-126 – Protome de griffon n° 46, inv. 3708 (N353-089 et N353-090, Ph. Collet).

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Fig. 127-128 – Protome de griffon n° 47, inv. 8396 (nég. Éfa 31350 et 31351). Fig. 129-130 – Protome de griffon n° 48, inv. 23846 (clichés H. Aurigny).

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Fig. 131-133 – Protome de griffon n° 49, inv. 16516 (nég. Éfa N353-004, N353-005, n353-006, Ph. Collet). Fig. 134-136 – Protome de griffon n° 50, inv. 16915 (nég. Éfa N353-001, N353-002, n353-003, Ph. Collet).

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Fig. 137-139 – Oreille de griffon n° 51, inv. 24949 (N476-033 Ph. Collet, cliché H. Aurigny, N476-034 Ph. Collet). Fig. 140-141 – Oreille de griffon n° 52, inv. 24953 (N476-045, N476-046, Ph. Collet). Fig. 142-144 – Oreille de griffon n° 53a, inv. 24946 (N476-035 Ph. Collet, cliché H. Aurigny, N476-036 Ph. Collet). Fig. 145-146 – Oreille de griffon n° 53b, inv. 24951 (N476-037 Ph. Collet, N476-038 Ph. Collet). Fig. 147-148 – Oreille de griffon n° 54, inv. 24945 (N476-039 Ph. Collet, N476-040 Ph. Collet). Fig. 149-151 – Oreille de griffon n° 55, inv. 24950 (N476-043 Ph. Collet, cliché H. Aurigny, N476-044 Ph. Collet).

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1. La Garenne 2. Andalousie 3. Brolio 4. Trestina 5. Vetulonia 6. Perugia 7. Gravisca 8. Tarquinia 9. Préneste 10. Kymé 11. Métaponte

12. Dodone 13. Tsotyli 14. Phères 15. Delphes 16. Athènes 17. Pérachora 18. Argos (Héraion) 19. Olympie 20. Sparte 21. Calaurie 22. Délos

23. Chios 24. Claros 25. Ephèse 26. Samos 27. Milet 28. Didymes 29. Kalymnos 30. Rhodes (Lindos, Camiros) 31. Bayindir-Elmali 32. Chypre

33. Liban 34. Ziwiyé 35. Suse

500 km

Fig. 152-153 – Oreille de griffon n° 56, inv. 24952 (N476-041 Ph. Collet, N476-042 Ph. Collet). Fig. 154-155 – Protome de griffon à bélière n° 57, inv. 951 (nég. Éfa 31022 et 31041). Fig. 156, Carte 3 – Distribution des protomes de griffon en Orient, Grèce, Italie.

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Fig. 157 – Relief au griffon d’Ankara, Barnett 1948, fig. 9 p. 11. Fig. 158 – Relief de Tell Halaf : griffon : Oppenheim 1955, pl. 89a. Fig. 159 – Lion et relief de Sakçegözü, Akurgal 1961b, pl. 134. Fig. 160 – Trépied et chaudron de Salamine de Chypre, tombe 79: Karageorghis 1973, p. 98, fig. 18.

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Fig. 161-162a et b – Sirène n° 58, inv. 23972 (nég. Éfa 31225, N476-017, N476-018 Ph. Collet). Fig. 163 – Sirène de Toprak Kale, Akurgal 1961a, fig. 18, p. 303. Fig. 164 – Décor de sirène du chaudron du tumulus MM de Gordion : Akurgal 1961a, fig. 10, p. 303.

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Fig. 165-167 – Sirène n° 59, inv. 2623 profil (nég. Éfa 31016), face (31020), dos (31017). Fig. 168-170 – Sirène n° 60, inv. 1347, profil (nég. Éfa 31216), face (31219), revers (31220).

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Fig. 171-172 – Sirène n° 61, inv. 8929 (nég. Éfa 68322 et R2527-06). Fig. 173-174 – Sirène n° 62a, inv. 7725 (neg. Éfa 12574, 12575). Fig. 175-176 – Sirène n° 62b, inv. 7726 (neg. Éfa 12574, 12575).

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Fig. 177-178– Sirène n° 63, inv. 2646 (clichés H. Aurigny). Fig. 179a et b – Queue de sirène n° 64, inv. 2569 (N476-019, N476-020 Ph. Collet). Fig. 180-183 – Sirène n° 65, inv. 8397 (nég. Éfa 31227, 64881, 31256 et 31264).

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Fig. 184-186 – Sirène n° 66, inv. 8395, face (31266), profil (R2009-11), dos (31222). Fig. 187-189 – Sirène inv. 13258, vue de face, profil (Musée national de Copenhague, cliché Lennart Larsen).

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Fig. 190-192 – Taureau sur aile de sirène n° 68, inv.8399 (nég. Éfa 31259, 31260 et 31217). Fig. 193 – Taureau sur aile de sirène de l’Héraion d’Argos inv. 16552 (Musée national d’Athènes, El. Galanopoulos).

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Fig. 194-196 – Sirène n° 69, inv. 725, face (nég. Éfa R 2307-05), profil (31267), dos (31221). Fig. 197-199 – Sirène n° 70, Louvre inv. Br. 2604 (clichés H. Aurigny).

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Fig. 200-202 – Sirène n° 71, inv. 3810 (nég. Éfa 63328, 61111 et 61112). Fig. 203-204 – Sirène n° 72, inv. 2704 (cliché H. Aurigny et nég. Éfa 31015).

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Fig. 205-207 – Sirène n° 73, inv. 1248, face (nég. Éfa 31021), dos (31019), profil (31018). Fig. 208-211 – Sirène n° 74, inv. 8398, face (neg. Efa 31268), dos (nég. Éfa 31273), profil (R2009-09), face (R2009-10). Fig. 212 – Sirène de l’Acropole MN 6519 (Musée National d’Athènes, G. Patrikianos).

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Fig. 213-215 – Sirène n° 75, inv. 1666, dos (nég. Éfa 31226), profil (31262), face (31265). Fig. 216 – Sirène de l’Acropole MN 6518 (Musée National d’Athènes, El. Galanopoulos).

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Fig. 217 – Queue de sirène n° 76, inv. 23976 (nég. Éfa 69176). Fig. 218 – Aile gauche de sirène n° 77, inv. 23973 (R2526-04). Fig. 219 – Aile droite de sirène n° 78, inv. 23974 (N476-021 Ph. Collet). Fig. 220 – Fragment d’aile de sirène n° 79 (cliché H. Aurigny). Fig. 221-223 – Tête de sirène n° 80, inv. 1348 (nég. Éfa 31036, 31037 et 64880).

223

10. Samos 11. Lindos 12. Salamine 13. Gordion 14. Toprak Kale 15. Alisar 16. Nimrud

2

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Fig. 224, Carte 4 – Distribution des appliques en forme de sirènes, d’après BIEG 2002, fig. 56 p. 69.

500 km

1. Vetulonia 2. Préneste 3. Delphes 4. Ptoion 5. Athènes 6. Isthmia 7. Argos 8. Olympia 9. Délos

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Fig. 225-226 – Applique à tête de taureau n° 81, inv. 2351 (nég. Éfa 30968 et 30969). Fig. 227-228 – Protome du Lébès de Cumes inv. 4952, à Copenhague : Amandry 1956, pl. 28, 2-3. Fig. 229-230 – Fragment d’applique à tête de taureau n° 82, inv. 19892 (N476-026, N476-025 Ph. Collet). Fig. 231-232 – Fragment d’applique à tête de taureau n° 83, inv. 19894 (N476-029, N476-030 Ph. Collet)

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239

240

Fig. 233-234 – Applique en forme de tête de taureau n° 84, inv. 1784 (nég. Éfa 30932 et 31034). Fig. 235-236 – Applique en forme de tête de taureau n° 85, inv. 4139 (nég. Éfa 30930 et 31042). Fig. 237-238 – Fragment d’applique à tête de taureau n° 86, inv. 19893 (neg. Efa R0244_05 et R0244_06). Fig. 239-240 – Fragment d’applique à tête de taureau n° 87 (N353-176 et N353-177, clichés Ph. Collet).

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Fig. 241-242 – Fragment d’applique à tête de taureau n° 88, inv. 19895 (N476-027, N476-028 Ph. Collet) Fig. 243-244 – Fragment d’applique à tête de taureau n° 89, inv. 23977 (N476-031, N476-032 Ph. Collet). Fig. 245-247 – Protome de taureau n° 90, inv. 2808 (nég. Éfa 31254, 64876 et 31263).

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250

Fig. 248 – Protomes de taureau classées par style : d’après Prayon 1987, p. 121, fig. 20. Fig. 250 – Manchons à têtes de taureau du trépied de Kourion : Liepmann 1968, n°14-15 et 16-17, p. 45.

10. Lindos 11. Bayindir-Elmali 12. Idalion 13. Salamine 14. Gordion 15. Nigde 16. Zinçirli 17. Tell Rifaat 18. Altin Tepe

19. Toprak Kale 20. Guschi 21. Lac d’Urmia 22. Alisar 23. Karmir Blur

Fig. 249, Carte 5 – Distribution des chaudrons à protomes de taureau.

500 km

1. Cumes 2. Delphes 3. Ptoion 4. Athènes, Acropole 5. Argos 6. Olympie 7. Amyclées 8. Délos 9. Samos

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Fig. 251-252 – Taureau sur plaquettes n° 91, inv. 4434 (cliché H. Aurigny et nég. éfa 31288). Fig. 253-254 – Avant-train de lion n° 92, inv. 1248 (nég. Éfa 36628-36629). Fig. 255-257 – Lion sur plaquettes, n° 93, sans inv., perdu (neg. éfa. 64897, 64897a et 64897b).

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Fig. 258-260 – Groupe sur plaquettes n° 94: fauve dévorant un homme inv. 1430 (nég. Éfa N353-124, N353-125 et N353-127, clichés Ph. Collet). Fig. 261-262 – Avant-train de quadrupède n° 95, inv. 7802 (N476-098, N476-099 cliché Ph. Collet). Fig. 263-265 – Arrière-train de quadrupède n° 96, inv. 4766 (nég. Éfa N353-116, N353-117 et N353-118, clichés Ph. Collet).

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Fig. 266-267 – Sphinx n° 97, inv. 2440 (cliché H. Aurigny et nég. Éfa 31253). Fig. 268-269 – Quadrupède n° 98, inv. 1866 (N353-029 et N353-030, clichés Ph. Collet). Fig. 270-272 – Lion couché n° 99, inv. 7803 (nég. Éfa 30899, 31039 et 31040). Fig. 273 – Chaudron fragmentaire avec restes d’animaux sur plaquettes, Herrmann 1966, pl. 64, 4.

6 8

4 5

1. Grevena 2. Ithaque 3. Delphes 4. Kalapodi 5. Athènes 6. Argos

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9

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7. Olympie 8. Amyclées 9. H. Triada 10. Samos 11. Kamiros 12. Adana

10

Fig. 274, Carte 6 – Distribution des animaux sur plaquettes (appliques de chaudron). d’après BIEG 2002, fig. 58.

500 km

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Fig. 275-276 – Protome de griffon n° 100, inv. 2669 (nég. Éfa 31046 et 31047). Fig. 277-278 – Applique animale sur attache en T n° 101, inv. 3735 (nég. Éfa 69175 et 69198). Fig. 279-280 – Attache à tête d’oiseau de proie n° 102, inv. 3738 (nég. Éfa 69175 et 69198). Fig. 281-282 – Applique à tête de rapace n° 103, inv. 2825 (nég. Éfa 69175 et 69198).

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Fig. 283-284 – Applique à tête animale n° 104, inv. 3299 (nég. Éfa 69175 et 69198). Fig. 285-286 – Applique à tête de canidé n° 105, R91 C049.9 (clichés H. Aurigny). Fig. 287-289 – Applique à décor de tête casquée n° 106, inv. 1673 (nég. Éfa 31261, N353-119 et N353-120, clichés Ph. Collet). Fig. 290-292 – Buste féminin n° 107, inv. 2528 (nég. Éfa 32596, 32597 et 32598).

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Fig. 293-295 – Applique en forme de buste humain n° 108, inv. 2343 (nég. Éfa 62121, 62122 et 62123). Fig. 296-299 – Applique n° 109, inv. 23966 : face et profil (N353-064 et N353-065, clichés Ph. Collet) ; (N353-062 et N353-063, clichés Ph. Collet). Fig. 300-301 – Applique à tête de taureau n° 110, inv. 1869 (nég. Éfa 64875 et cliché H. Aurigny).

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Fig. 302-303 – Applique à tête de lion n° 111, inv. 2583 (N353-037, N353-038 et N353-039, clichés Ph. Collet). Fig. 304-305 – Applique à tête de lion n° 112, inv. 3513 (clichés H. Aurigny). Fig. 306-308 – Applique à tête de lion n° 113, inv. 4128 (nég. Éfa 30997 et clichés H. Aurigny).

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Fig. 309-311 – Applique à tête léonine n° 114, inv. 2446 (N353-122, N353-121, N353-123, clichés Ph. Collet). Fig. 312-313 – Protome de lionne n° 115, inv. 1699 (nég. Éfa 36631 et 36632). Fig. 314-316 – Protome de lionne n° 116, inv. 2403 (nég. Éfa 36632, 36633 et cliché H. Aurigny). Fig. 317-318 – Protome léonine n° 117, inv. 2750 (nég. Éfa 36632 et 36633).

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Fig. 319-320 – Applique en forme d’avant-train de sphinx n° 118, inv. 3430 (nég. Éfa 31218 et cliché H. Aurigny). Fig. 321-322 – Applique en forme de protome de sanglier n° 119, inv. 2886 (nég. Éfa 31044 et 31045). Fig. 323-325 – Applique en forme de tête de bélier n° 120, inv. 3384 (N353-031, N353-032, N353-035, clichés Ph. Collet).

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Fig. 326-327 – Chaudron de type chypriote n° 121, R91 B084.2 : Luce 2008, p. 205, n° 279, pl. 92. Fig. 328-330 – Anse en arceau à fleur de lotus n° 122, inv. 2050 (N353-022 et N353-023, clichés Ph. Collet) ; anse n° 122, inv. 2050 (dessin H. Aurigny).

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Fig. 331-333 – Fleur d’une grande anse en arceau n° 123, inv. 23951 (clichés et dessins H. Aurigny). Fig. 334-336 – Fleur d’une grande anse en arceau n° 124, inv. 2626 (23822) (clichés et dessin H. Aurigny).

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Fig. 337-339 – Fragment de fleur d’une grande anse en arceau n° 125, inv. 23824 (N353-044 et N353-045, clichés Ph. Collet, dessin H. Aurigny). Fig. 340-342 – Fragment d’attache n° 126, inv. 23795 (clichés Ph. Collet N353-046 et N353-047 et dessin H. Aurigny).

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Fig. 343-345 – Fragment de pétale n° 127, inv. 23821 (N353-052 et N353-053, clichés Ph. Collet, dessin H. Aurigny). Fig. 346-348 – Pétale de fleur de lotus n° 128, inv. 3617 (N353-056 et N353-057, clichés Ph. Collet, dessin H. Aurigny). Fig. 349-351 – Attache et anse à fleur de lotus n° 129, inv. 2977 (N476-010, N476-011 clichés Ph. Collet, dessin H. Aurigny).

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Fig. 352-355 – Anse en arceau à fleur de lotus n° 130, inv. 23817 (N353-050 et N353-051, clichés Ph. Collet, dessin H. Aurigny). Fig. 356-357 – Anse à fleur de lotus n° 131, inv. 3910 (nég. Éfa 62168 et dessins H. Aurigny).

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Fig. 358-359 – Anse à fleur de lotus n° 132, inv. 23816 (nég. Éfa 62169 et dessin H. Aurigny). Fig. 360-363 – Anse en arceau à fleur de lotus décorée d’un oiseau n° 133, inv. 2907 (neg. Éfa 31293, N353-026 et N353027, clichés Ph. Collet, dessin H. Aurigny).

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Fig. 364-366 – Anse à fleur de lotus n° 134, inv. 5874 (N353-011 et N353-012, clichés Ph. Collet, et dessin H. Aurigny). Fig. 367-369 – Anse à fleur de lotus n° 135, inv. 7729 (N353-014 et N353-015, clichés Ph. Collet ; dessin H. Aurigny). Fig. 370-372 – Fleur de lotus d’anse n° 136, inv. 23820 (clichés et dessin H. Aurigny).

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Fig. 373-375 – Anse à fleur de lotus n° 137, inv. 23794 (N353-048 et N353-049, clichés Ph. Collet ; dessin H. Aurigny). Fig. 376-378 – Anse à fleur de lotus n° 138, inv. 23818 (clichés et dessin H. Aurigny). Fig. 379-382 – Fleur de lotus n° 139, inv. 23819 (clichés et dessin H. Aurigny).

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1. Castulo 2. Sardaigne 3. Bologne 4. Etrurie 5. Latium 6. Campanie 7. Ithaque 8. Delphes 9. Argos 10. Olympie 11. Chios

21

20 19

12. Amnisos, Cnossos 13. Rethymnon 14. Arkades 15. Eleutherna 16. Grotte de l’Ida 17. Kavousi 18. Praisos 19. Amathonte 20. Kourion 21. Palaipaphos 22. Gordion

500 km

Fig. 383-384 – Pétale de fleur de lotus n° 140, inv. 23941 (N353-054, cliché Ph. Collet ; dessin H. Aurigny). Fig. 385-386 – Attache en arceau à décor d’oiseau n° 141, inv. 23814 (neg. Éfa 32547 et dessin H. Aurigny). Fig. 387, Carte 7 – Distribution des anses en arceau à décor de fleur de lotus (sans Orient et Égypte), d’après Matthäus 2001, fig. 3.

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Fig. 388-390 – Attache d’anse en bobine n° 142, inv. 3146 (N476-047, N476-048 clichés Ph. Collet, dessin H. Aurigny). Fig. 391-394 – Attache en bobine n° 143, inv. 23943 (N476-049, N476-050 clichés Ph. Collet, cliché et dessin H. Aurigny). Fig. 395-398 – Attache en bobine n° 144, inv. 23834 (N476-051, N476-052 clichés Ph. Collet, cliché et dessin H. Aurigny).

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Fig. 399-402 – Attache d’anse en bobine n° 145, inv. 23835 (N476-063, N476-064 clichés Ph. Collet, cliché et dessin H. Aurigny). Fig. 403-406 – Attache d’anse en bobine n° 146, inv. 23836 (clichés et dessin H. Aurigny). Fig. 407-410 – Attache en bobine n° 147, inv. 23838 (N476-055, N476-056 clichés Ph. Collet, cliché et dessin H. Aurigny).

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Fig. 411-414 – Attache en bobine n° 148, inv. 23839 (N476-053, N476-054 clichés Ph. Collet, cliché et dessin H. Aurigny). Fig. 415-417 – Attache n° 149, inv. 23840 (N476-061, N476-062 clichés Ph. Collet, dessin H. Aurigny). Fig. 418-420 – Attache n° 150, inv. 23841 (N476-057, N476-058 clichés Ph. Collet et dessin H. Aurigny).

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Fig. 421-423 – Attache d’anse n° 151, inv. 23843+ 23844 (N476-059, N476-060 clichés Ph. Collet, et dessin H. Aurigny). Fig. 424-426 – Attache d’anse n° 152, inv. 23842 (N476-069, N476-070 clichés Ph. Collet, et dessin H. Aurigny). Fig. 427-428 – Attache d’anse de coupe n° 153, inv. 23770 (cliché efa 62152 et dessin H. Aurigny).

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Fig. 429 – Anse lisse n° 154, inv. 23775 (cliché H. Aurigny). Fig. 430 – Anse lisse n° 155, inv. 23776 (cliché H. Aurigny). Fig. 431-433 – Applique à deux anneaux n° 156, inv. 23779 (N476-085, N476-086 clichés Ph. Collet et dessin H. Aurigny). Fig. 434-436 – Applique à deux anneaux n° 157, inv. 3149 (clichés et dessin H. Aurigny).

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Fig. 437-439 – Applique à deux anneaux et vasque n° 158, inv. 23780 (N476-090, N476-091 clichés Ph. Collet et dessin H. Aurigny). Fig. 440-442 – Applique à deux anneaux n° 159, inv. 23767 (N476-087 cliché Ph. Collet, cliché et dessin H. Aurigny).

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Fig. 443-445 – Applique à deux anneaux et anse en oméga n° 160, inv. 23803 (N476-088, N476-089 clichés Ph. Collet et dessin H. Aurigny). Fig. 446-448 – Applique à deux anneaux et anse en oméga n° 161, inv. 3095 (clichés et dessin H. Aurigny).

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Fig. 449 – Anse n° 162, inv. 13763 (cliché H. Aurigny). Fig. 450-451 – Anse en oméga n° 163, inv. 2740 (clichés et dessin H. Aurigny). Fig. 452-453 – Anse en oméga n° 164, inv. 3024 (cliché et dessin H. Aurigny).

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Fig. 454-456 – Attache d’anse à anneau unique n° 165, inv. 23798 (clichés et dessin H. Aurigny).

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Fig. 457-458 – Attache d’anse à anneau unique n° 166, inv. 13774+13776, recollés (clichés et dessin H. Aurigny). Fig. 459-461 – Attache d’anse à anneau unique n° 167, inv. 13773 (clichés et dessin H. Aurigny).

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Fig. 462-465 – Attache d’anse triangulaire n° 168, inv. 4775 (N476-093 cliché Ph. Collet, clichés et dessin H. Aurigny). Fig. 466-469 – Attache d’anse n° 169, inv. 23799 (N476-092 cliché Ph. Collet, clichés et dessin H. Aurigny).

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Fig. 470-473 – Attache d’anse triangulaire n° 170, inv. 2503 (clichés et dessin H. Aurigny). Fig. 474-477 – Attache d’anse n° 171, inv. 3201 (clichés et dessin H. Aurigny).

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Fig. 478-481 – Plaque d’attache d’anse n° 172, inv. 2657 (clichés et dessin H. Aurigny).

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Fig. 482-484 – Plaque d’attache n° 173, inv. 23812 (clichés et dessin H. Aurigny).

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Fig. 485-486 – Anse horizontale n° 174, inv. 23619 (clichés et dessin H. Aurigny) Fig. 487-488 – Anse horizontale n° 175, sans inv. (clichés et dessin H. Aurigny) Fig. 489-490 – Anse horizontale n° 176, sans inv. (clichés et dessin H. Aurigny). Fig. 491-492 – Attache d’anse n° 177, inv. 23815 (N353-106 et N353-107, clichés Ph. Collet).

1. Sardaigne 2. Etrurie 3. Francavilla Marittima 4. Caldare 5. Delphes 6. Lefkandi 7. Argos 8. Samos 9. Lindos

10. Eleutherna 11. Cnossos 12. Amnisos 13. Grotte de l’Ida 14. Arkadès 15. Palaikastro 16. Kourion 17. Amathonte 18. Tamassos

4

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19. Idalion 20. Salamine 21. Enkomi 22. Zinçirli 23. Al Mina 24. Tel Dan 25. Gezer 26. Egypte

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Fig. 493, Carte 8 – Distribution des attaches en forme de barre à deux anneaux avec anses en oméga. D’après Matthäus 2001, fig. 12, Matthäus 2011, fig. 35 ; Aurigny 2012b, fig. 10.

500 km

attaches de l’âge du bronze attaches des Xe-VIIIe s., contexte funéraire attaches des Xe-VIIIe s., contexte votif ou palatial attaches de l’époque archaïque

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Fig. 494-499 – Coupe n° 178, inv. 4463, photographie générale (nég. Éfa 2234) et dessin (A. Platon) ; le char tiré par le sphinx (nég. Éfa 31235) ; deux soldats attaquant la ville (nég. Éfa 31236) ; la ville assiégée (nég. Éfa 31237) ; archers et assaillants (nég. Éfa 31238).

500

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Fig. 500-501 – Phiale à omphalos, Inv. 2651, n° 179 (N476-131, N476-132 clichés Ph. Collet). Fig. 502-503 – Phiale à omphalos. Inv. 5284, n° 180 (clichés H. Aurigny).

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Fig. 504-505 – Coupe n° 181, inv. 27161 (nég. Éfa 62117 et 62118). Fig. 506-507 – Coupe n° 182, inv. 8404 (nég. Éfa 62115 et 62116).

PBCE2: Fewer Than Three Bookmarks

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Fig. 508-510 – Coupe n° 183, inv. 7638 (N476-134, N476-135 clichés Ph. Collet et dessin H. Aurigny). Fig. 511-512 – Coupe n° 184, sans inv (N476-129, N476-130, clichés Ph. Collet).

513

514

1 2

3 4 23

5 6 8

7

9

11 10 12

14 13

1. Vetulonia 2. Cerveteri 3. Préneste 4. Pontecagnano 5. Francavilla Marittima 6. Delphes 7. Athènes 8. Pérachora 9. Olympie 10. Sparte 11. Rhénée 12. Camiros

15

13. Grotte de l’Ida 14. Fortetsa 15. Arkades 16. Amou 17. Palaipaphos 18. Kourion 19. Amathonte 20. Tamassos 21. Idalion 22. Salamine 23. Ankara 24. Meggido

500 km

Fig. 513-514 – Aryballe n° 185, inv. 3433 (clichés et dessin H. Aurigny). Fig. 515, Carte 9 – Distribution des coupes métalliques au repoussé phéniciennes : d’après MARKOE 1992, p. 66, fig. 7.

20 21 16 17

22 18

19

24

516

517

Fig. 516 – Plan du sanctuaire d’Apollon. Fig. 517 – Plan de Marmaria.

Cet ouvrage a été imprimé et relié en quatre cents exemplaires par l’imprimeur n.v. Peeters s.a. à Herent (Belgique)

ISBN : 978-2-86958-325-2 Décembre 2019 Imprimé en Belgique