Parlez-vous maths ?: Le langage mathématique dans tous ses états 9782759817016

Ce livre n’est pas un livre de mathématiques. Pourtant il « parle » mathématiques ! Écrit par deux professeurs de mathém

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French Pages 216 Year 2016

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Parlez-vous maths ?: Le langage mathématique dans tous ses états
 9782759817016

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Parlez-v mat ma Le langage

s t a t é s e s

mathématique dans tous

Y Agnès RIGN Z Pierre LÓPE

Imprimé en France ISBN : 978-2-7598-1194-6

Tous droits de traduction, d’adaptation et de reproduction par tous procédés, réservés pour tous pays. La loi du 11 mars 1957 n’autorisant, aux termes des alinéas 2 et 3 de l’article 41, d’une part, que les « copies ou reproductions strictement réservées à l’usage privé du copiste et non destinées à une utilisation collective », et d’autre part, que les analyses et les courtes citations dans un but d’exemple et d’illustration, « toute représentation intégrale, ou partielle, faite sans le consentement de l’auteur ou de ses ayants droit ou ayants cause est illicite » (alinéa 1er de l’article 40). Cette représentation ou reproduction, par quelque procédé que ce soit, constituerait donc une contrefaçon sanctionnée par les articles 425 et suivants du code pénal.

© EDP Sciences 2014

Les auteurs Agnès Rigny Ancienne élève de l’ENS (École Normale Supérieure) Saint-Cloud, agrégée de mathématiques, actuellement professeur en classe préparatoire B/L au lycée Saint-Sernin à Toulouse. Pendant plus de 25 ans, professeur dans les classes préparatoires commerciales et scientifiques au lycée Corneille à Rouen, puis au lycée Fermat à Toulouse. S’intéresse particulièrement aux blocages en mathématiques et développe une activité de soutien spécifique. (Voir www.mathssansstress.fr.)

Pierre López Agrégé de mathématiques, actuellement professeur en classe préparatoire ATS : adaptation technicien supérieur au lycée Louis Rascol à Albi. Ancien responsable du groupe « Sciences physiques et mathématiques au lycée » à l’IREM (Institut de recherche sur l’enseignement des mathématiques) de Toulouse. Ancien formateur associé à l’IUFM (Institut universitaire de formation des maîtres) de Toulouse. S’intéresse particulièrement aux problèmes liés au rapport des mathématiques avec les autres disciplines.

Anne Fioc, illustratrice http://annefioc.com

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Préface Traduire les mathématiques Anne SIETY Objets mathématiques, avez-vous donc une âme, Qui s’attache à notre âme et la force d’aimer ? Alphonse de Lamartine, « Milly ou la terre natale »

Espérance, exposant, inconnue, limite, famille, identité, base, loi, puissance, image, corps, couple, idéal, spectre, figure, norme… Inquiétante étrangeté de termes aussi familiers que mystérieux : autant d’entrées pour cet étonnant abécédaire. Avec Parlez-vous maths ?, Agnès Rigny et Pierre Lopez osent une démarche inédite et passionnante : ils nous ouvrent la porte de l’univers mystérieux des professeurs de mathématiques, leurs convictions, leur humour (un peu particulier il est vrai), mais aussi leur désir profond de transmettre une discipline souvent hermétique, et les continuels « quiproquo » où les entraîne le langage mathématique, si semblable au discours quotidien et si différent à la fois. Les mathématiques sont abstraites. Conçues par l’Homme pour s’assurer une prise sur le monde, elles sont extraites, au sens littéral, tirées hors des objets concrets. Lorsque la chasse a fait place à l’élevage, et la cueillette à l’agriculture, lorsque les échanges économiques se sont généralisés, il a bien fallu compter, mesurer, comparer : les chiffres sont apparus, successivement remplacés par les lettres, les fonctions, les vecteurs… chaque fois un cran plus loin dans l’immatériel, l’irreprésentable. Les objets mathématiques, ainsi lancés dans l’espace intersidéral, planeraient très loin, hors de notre portée, s’ils n’étaient reliés à nous par un dernier filet : leur nom. Un filet puissant, à la fois salvateur et illusoire. Ce filet nous offre une prise précieuse sur les notions mathématiques. Appartenir : « Un élément appartient à un ensemble, il est dans l’ensemble. » Nous voilà rassurés, la théorie des ensembles, immatérielle, insaisissable par excellence, offre une similitude avec notre vie quotidienne. Elle nous tend une perche. Appartenir, nous connaissons. On pourrait dire que ce terme nous appartient déjà. Parlez-vous maths ?

V

Préface

Mais « traduttore, traditore ». Traduire, du langage des mathématiques à celui de notre vie, « appartenir » par « appartenir », serait bien présomptueux. En effet, les auteurs poursuivent : « L’ensemble n’est défini « que » par les éléments qu’il contient. Ce qui n’est pas le cas dans la vie courante. « Ces boucles d’oreilles m’appartiennent, mais si je les perds, je reste quand même moi. » En mathématiques, dire qu’un élément appartient à un ensemble, c’est lui conférer une valeur constitutive, essentielle. Sans cet élément, l’ensemble n’est plus l’ensemble. Être ou avoir : la nuance est de taille. Depuis le Veau d’Or, nous avons appris à ne pas sacraliser les objets. Appartenir en mathématiques, ce n’est pas exactement comme appartenir pour nous. « Ça change rien… mais ça change tout ! » remarquait mon professeur de mathématiques de troisième. « Ces boucles d’oreilles m’appartiennent, mais si je les perds, je reste quand même moi (quoique…) » Tout est dans ce « quoique ». Les mathématiques viennent déranger avec bonheur nos automatismes de parole, secouer notre routine, ranimer les mots que nous laissions en sommeil. Au fond, mon identité est-elle si bien assise au point que je puisse perdre mes possessions sans qu’elle en soit ébranlée ? Les mathématiques nous invitent à repenser notre vie. Drôles, légers en apparence, Agnès Rigny et Pierre Lopez découvrent la profondeur de champ qui fait la singularité des mathématiques. Ces faux-amis, ces hiatus où s’entremêlent compréhension et obscurité, sens et non-sens, lumière et pénombre. Sources de confusions, d’angoisse, des fameux « blocages », mais aussi richesse à nulle autre pareille, force, âme véritable des mathématiques.

Anne Siety est psychologue clinicienne, psychopédagogue en mathématiques. Elle travaille auprès d’enfants et d’adultes rencontrant des blocages en mathématiques. Elle est l’auteur de Qui a peur des mathématiques ? (Le livre de Poche, 2013).

VI

Parlez-vous maths ?

Avant-propos Nous avons souvent l’impression, en cours de mathématiques, de parler « chinois ». Certains jours, même si nos élèves nous regardent, nous écoutent, nous voyons dans leurs yeux qu’ils ne nous comprennent pas. Dans leurs copies, nous lisons parfois des choses totalement dénuées de bon sens, voire des contradictions flagrantes d’une question à l’autre. Les élèves en ont souvent tout à fait conscience, mais « ils tentent ». Ils disent pour se justifier : « on ne sait jamais... ». Comme si cela pouvait être vrai malgré eux, à leur insu. Ou bien renoncent-ils simplement à donner un sens à leurs écrits mathématiques ? Ils se sentent dans la peau d’un étranger ne comprenant pas les mots du menu du restaurant et commandant un plat un peu au hasard. Notre première réaction, en début de carrière, a été l’incompréhension : « mais quel est donc le problème ? » Nous leur donnons les définitions, les théorèmes, il n’y a tout simplement qu’à les appliquer. Qu’est-ce qui les en empêche ? La réponse classique du manque de travail ou d’intérêt ne nous a pas satisfaits. De notre point de vue de professeurs, d’amateurs de mathématiques, il ne devrait pas y avoir de difficulté. Il y a une définition, des règles, des causes et des conséquences, il suffit de les utiliser. Quand les élèves nous disent ne pas comprendre, nous les renvoyons aux définitions et aux théorèmes. Mais cela ne se passe pas comme on l’espère dans leurs têtes, puisque finalement, c’est le rôle même de la définition qui n’a pas de sens pour eux. Depuis plusieurs années, l’enseignement des mathématiques est basé sur un apprentissage du vocabulaire mathématique en dehors de tout cadre structuré. Par exemple, la notion de limite est enseignée dès la classe de première, par une approche expérimentale à l’aide d’une calculatrice ou d’un ordinateur, mais sans la définition. Le langage mathématique est enseigné comme un langage naturel. Le sens des mots est censé émerger de l’expérience. Une fois que les élèves ont eu ce vécu au lycée, la rencontre ultérieure avec une formalisation des mathématiques est extrêmement difficile, voire conflictuelle. Comme les mots employés en mathématiques sont également des mots du langage naturel (le français pour ce qui nous occupe), les élèves cherchent à se construire une idée intuitive de la signification mathématique, en s’appuyant sur le sens du mot en français. Cela, au final, ne leur donne pas une compréhension correcte de la notion, puisqu’il y a souvent un décalage entre le sens mathématique et le sens en français. Parlez-vous maths ?

VII

Avant-propos

Ce sentiment d’incompréhension se mue parfois en souffrance, qui perdure à l’âge adulte. Combien d’adultes ont de mauvais souvenirs de leurs cours de mathématiques, ou frissonnent encore en entendant parler de mathématiques ? Cet ouvrage s’adresse à ceux qui ne sont plus élèves et qui se sont éloignés, souvent avec soulagement, des mathématiques. Nous souhaiterions les aider à comprendre ce qui s’est dit pendant leurs anciens cours, et apporter des réponses à des questions enfouies et non résolues, voire leur donner la curiosité de renouer avec cette matière. Nous aimerions également expliquer aux élèves actuels (fin du lycée, université et classes préparatoires) ce que veulent dire les professeurs quand ils « parlent maths ». Les enseignants pourront trouver ici des exemples de ce qu’entendent leurs élèves pendant les cours, ce qui est souvent différent de ce qu’ils ont cru dire et des pistes de réflexion leur permettant d’enrichir leurs cours. Les parents y trouveront des explications qui, d’une part, leur éviteront de transmettre à leurs enfants une éventuelle incompréhension (voire un dégoût) des mathématiques et qui, d’autre part, leur fourniront des outils pour les aider. Nous nous adressons enfin à tous ceux qui sont restés curieux des mathématiques, qui ont des regrets de n’avoir pas pu les apprécier, ou qui se demandent simplement de quoi parlent les mathématiques. Nous avons cherché les mots qui ont un sens différent en mathématiques et en français, les mots qui peuvent renvoyer à d’autres images que les images mathématiques. Nous proposons chaque fois une sorte de traduction : « quand un professeur dit..., il veut dire..., mais l’élève peut penser à... ». Sont rassemblés également dans ce « dictionnaire » des mots français qui ont des sens différents pour le professeur et pour l’élève, sans pour autant être mathématiques, par exemple « apprendre son cours » ou encore « un, deux, trois ». Mais attention, ce n’est pas un livre de mathématiques, ni un « dictionnaire » de mathématiques, car tous les mots « importants » en mathématiques n’y sont pas forcément développés. Nous proposons à ceux qui, après avoir lu ce livre, voudraient apporter leurs expériences, leurs anecdotes, leurs contributions (il y a sûrement des mots qui manquent !) de le faire sur notre blog : parlezvousmaths.blogspot.fr.

VIII

Parlez-vous maths ?

Nous remercions chaleureusement nos amis et parents pour leur relecture attentive, leurs conseils et leur soutien.

À part quelques mots en « -morphisme », les termes de mathématiques sont empruntés à la langue usuelle. Un ensemble, un espace reçoivent, par exemple, les qualifications de dense, compact, clairsemé, dénombrable, mince, maigre, rare, ouvert, fermé, borné, fibré, feuilleté. Le pittoresque voulu de chacun de ces mots favorise l’intuition et seconde l’imagination. René Étiemble, Au secours, Athéna ! Le jargon des sciences, Éditions Hermann, 1996.

Introduction Les mathématiques enseignées dans les établissements scolaires et universitaires en France utilisent le français (pour l’instant…). Aussi quand un élève ou un étudiant entre dans une salle de cours, il arrive avec toutes les images que les mots ont construites en lui au travers de ses expériences de vie. Le professeur de mathématiques, conscient ou non de cette situation, prend bien soin de définir chaque mot qu’il emploie. Il définit ce qu’il appelle un « vecteur », une « fonction continue », etc. Il insiste le plus souvent sur le caractère univoque du langage mathématique et invite ses élèves ou étudiants à revenir aux définitions données. Cependant, les images créées par les mots utilisés dans l’esprit de l’étudiant peuvent perturber sa compréhension. Comment un étudiant reçoit-il le vocabulaire employé ? Quelles résonances affectives cela produit-il en lui ? Certains y trouvent une forme de poésie et sont entraînés dans un univers merveilleux (par exemple, une partie qui est à la fois ouverte et fermée). Mais pour d’autres (la majorité ?), les mots mathématiques et français se mêlent, se nouent et sont à l’origine de blocages. Par exemple, comment comprendre que la courbe représentative d’une fonction peut être une ligne brisée, ou comment un maximum peut-il aussi être un minimum ? Avoir à sa disposition les définitions adéquates ne suffit pas toujours, car il est difficile d’utiliser la définition mathématique pour ce qu’elle est. Beaucoup d’idées reçues interfèrent et empêchent de progresser, ou de généraliser. Si on considère la notion de matrices semblables, est-il « complètement idiot » de dire que les matrices A 

–1 –1 2 1 2 –1 –2 –1 3

et T 

2 0 0 0 1 1 0 0 1

ne sont pas

semblables parce qu’elles ne se ressemblent pas ? Pourtant ces matrices sont bien « mathématiquement » semblables.

Parlez-vous maths ?

1

Introduction

Le professeur de mathématiques doit faire l’effort d’expliquer son vocabulaire. Pourquoi dit-on que les matrices A et T sont semblables ? Pourquoi a-t-on choisi ce mot pour traduire cette notion ? Il est souvent difficile d’être parfaitement explicite. L’étymologie et l’histoire peuvent aider1. C’est le parti pris par M. Bertrand Hauchecorne dans son excellent livre Les Mots & les Maths (éditions Ellipses, 2003). Dans l’avantpropos, il écrit : « Quelle relation y a-t-il entre une base canonique et une femme d’âge canonique, entre une combinaison linéaire et les combinaisons de nos grands-mères, entre une série entière et une série télévisée ? Plus sérieusement, d’où viennent les mots que nous utilisons en mathématiques ? » Mais l’étymologie ne fournit pas toujours une explication suffisante, et puis nous avons décidé de ne pas être systématiquement sérieux… L’étymologie renvoie souvent à un contexte culturel éloigné de nos étudiants, donc peu signifiant. On peut légitimement douter de leur connaissance du droit canon. En revanche, ils comprennent très bien la phrase « il (elle) est canon » ! Nous nous proposons, à partir de situations que nous avons vécues en classe, de mettre en lumière certaines incompréhensions portant sur le vocabulaire mathématique, et par là d’essayer de redonner le goût de faire (ou de lire) des mathématiques. La forme « dictionnaire » qui a été choisie ici permet plusieurs niveaux de lecture. Certains articles sont traités de manière légère ou humoristique. Nous n’avons pas voulu faire un livre de mathématiques2. Toutefois, on trouvera en annexe les définitions « sérieuses » de certains mots signalés par une astérisque dans le texte.

1. Les sites de l’Académie française et du Centre national de ressources textuelles et lexicales nous ont beaucoup servi. À ce propos, nous avons essayé de suivre certaines des recommandations de la réforme de l’orthographe de 1990. 2. Encore moins un livre de didactique. De nombreux problèmes soulevés dans ce livre peuvent être abordés sous cet angle. Nous ne minimisons pas l’importance de cette approche qui, pour un professionnel de l’enseignement, peut s’avérer profitable. Cependant, cela nous aurait éloignés de notre objectif.

2

Parlez-vous maths ?

Sommaire A Absolu* . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .  Abstrait, abstraction . . . . . . . . . .  Absurde . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .  Adhérence* . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .  Aire. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .  Ambiguïté . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .  Analogie . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .  Analyse. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .  Anneau*. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .  Antécédent*. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .  Appartenir . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .  Application* . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .  Apprendre son cours . . . . . . . . . .  Argument d’une démonstration . . . . . . . . . . Argument d’un nombre complexe* . . . . . .  Arrangement . . . . . . . . . . . . . . . . . . .  Astuce . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .  Asymptote . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 

5 6 7 8 9 10 11 12 14 14 14 15 16  17 18 18 19 20

B Base* . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .  Beauté . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .  Borné* . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .  Boule* . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .  Branche . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 

23 24 25 25 26

C Calcul . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .  Calculer . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .  Canonique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .  Cardinal . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .  Carré . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .  Cercle . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .  Chiffre . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .  Chtoucas de Drinfeld . . . . . . . . .  Combinaison . . . . . . . . . . . . . . . . . .  Combinaison linéaire* . . . . . . . .  Compas . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .  Compact* . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .  Complémentaire . . . . . . . . . . . . . . .  Complexe* . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .  Composition . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 

Comprendre . . . . . . . . . . . . . . . . . . .  Condition nécessaire et suffisante . . . . . . .  Cône* . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .  Conjugué. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .  Contexte . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .  Continu* . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .  Contraposée . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .  Contre-exemple. . . . . . . . . . . . . . . .  Convergence* . . . . . . . . . . . . . . . . . .  Corps* . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .  Couper . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .  Couple. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Courbe . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .  C. Q. F. D. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .  Croissante (ou décroissante)* . . . . . . . . . . . . . . Cylindre*. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 

39 40 40 42 43 43 44 44 45 45 45 46 46

28 31 32 33 34

48

34 34 35 35 36 36 37 37

Parlez-vous maths ?

71

F Facteur . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .  Famille . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .  Faute (étourderie) . . . . . . . . . . . .  Fermé* . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .  Figure . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .  Fonction* . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .  Formule . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 

73 74 74 75 75 75 76

G Groupe* . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .  77

49 50 50 51 53 54 55 55 56 57 58

H Habitude . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .  Hasard . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Hélice . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Hérédité . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .  Humour . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .  Hyperplan* . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .  Hypothèse . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 

79  80  80 81 82 82 83

59 60 61 62

E Égalité . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Élégance . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Ensemble . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .  Équation . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .  Équivalence (relation, classe) . . . . . . . . . . . . . Équivalence (versus égalité) . . Erreur . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .  Espace . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .  Espérance. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 

70

 47

27 31

69 70

41

D Décomposition . . . . . . . . . . . . . . . . .  Définition . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .  Delta . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .  Démonstration . . . . . . . . . . . . . . . . .  Dénominateur. . . . . . . . . . . . . . . . . .  Dériver* . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .  Dessin . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .  Déterminant . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .  Développement . . . . . . . . . . . . . . . .  Dimension* . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .  Direction . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .  Discret . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .  Discriminant . . . . . . . . . . . . . . . . . .  Discussion . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .  Distinct . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 

Évènement . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .  Exemple . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .  Existence . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .  Exposant . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 

 63  63 64 65  65  67 67 68 69

I Idéal* . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .  Identité . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .  Image* . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .  Implication . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .  Inconnue . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .  Indécidable . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .  Indépendance* . . . . . . . . . . . . . . . .  Inférieur (supérieur) . . . . . . . . . .  Inférieur (ou supérieur) ou égal . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Infini . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .  Infinitésimal . . . . . . . . . . . . . . . . . . .  Information . . . . . . . . . . . . . . . . . . .  Injection* . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 

85 85 86 87 88 89 90 91  91 91 93 93 95

3

Sommaire

Intégral (calcul) . . . . . . . . . . . . . .  Intégrer . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .  Intervalle (ouvert et fermé). . .  Intuition . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .  Inverse*. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .  Irrationnel* . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .  Irréductible* . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 

95 95 96 96 97 99 99

J j . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 101

L Lemme. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 103 Liberté* . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 103 Limite*. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 105 Linéaire* . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 106 Littérature . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 106 Logique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 107 Loi . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 108

M Main . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 109 Majorer (minorer) . . . . . . . . . . . . 109 Mathématiques. . . . . . . . . . . . . . . . 110 Matrice . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 111 Mécanique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 112 Méditation. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 112 Membre. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 112 Mémoire . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 113 Modèle . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 114 Modélisation . . . . . . . . . . . . . . . . . . 115 Monotone . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 116 Mutatis mutandis . . . . . . . . . . . . . . 116

N Naïveté . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 117 Naturel* . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 117 Négatif . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 118 Normal . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 118 Norme* . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 119 Notation . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 120 Numérateur . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 120

O Objet . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 121 Opération . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 122

4

Ordre . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 123 Orientation . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 123 Ou . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 124 Ouvert* . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 125

P Pair . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 127 Paire . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 127 Paramètre . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 128 Parenthèses . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 129 Partie . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 129 Partie entière . . . . . . . . . . . . . . . . . . 130 Partition . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 131 Pente . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 131 Période* . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 132 Point . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 132 Pôle . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 133 Positif . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 133 Postuler . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 134 Pourcentage . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 134 Primitive . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 135 Produit. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 135 Projection* . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 136 Proportionnel (directement ou inversement) . . . . . . . . . . . . . . 138 Proposition . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 139 Propre* . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 139 Propriété . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 140 Puissances . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 140

Q Quadrature du cercle . . . . . . . . 141 Quel que soit . . . . . . . . . . . . . . . . . . 141 Question . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 141

R Racine carrée . . . . . . . . . . . . . . . . . 143 Racine d’un polynôme . . . . . . . 144 Raison. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 145 Rang* . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 145 Rationnel* . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 146 Réciproque . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 146 Récurrence* . . . . . . . . . . . . . . . . . . 147 Réduction . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 148 Réel* . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 148 Réfléchir . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 149 Relatif * . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 149 Relation* . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 150 Remettre la casserole dans le buffet . . . 151 Résidu. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 151 Résoudre. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 152 Rigueur . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 152

S Semblable* . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 155 Série . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 156 Signe . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 156 Simplification . . . . . . . . . . . . . . . . . 158 Soit . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 159 Sommet . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .  159 Sous . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 160 Spectre . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 160 Sphère . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 161 Strict . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 161 Structure. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 161 Ssi . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 162 Suite et série. . . . . . . . . . . . . . . . . . . 162 Supplémentaire . . . . . . . . . . . . . . . 164 Sur . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 164 Système . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 165

T Tangente*. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 167 Temps . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 169 Termes . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .  170 Théorème . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 170 Topologie* . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 171 Toujours . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 172 Tribu* . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 172 Trivial . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 173

U Un (deux, trois…) . . . . . . . . . . . . 175 Unicité . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 176 Union (ou réunion) . . . . . . . . . . . 177 Utilité . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 177

V Valeur approchée . . . . . . . . . . . . . 179 Variable* . . . . . . . . . . . . . . . . . . .  179 Variable aléatoire . . . . . . . . . . . . . . 182 Vecteur* . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 182 Vérité . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 183 Vide* . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 184 Voisinage* . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 186

Z Zéro . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 187

Parlez-vous maths ?

A

Absolu* . . . . . . . . . . . . . . . . C’est beau l ’absolu ! En plus, en maths, on a des « valeurs absolues » ! À partir d’exemples comme la valeur absolue de 3 est égale à 3, et la valeur absolue de –7 est 7, on retient souvent de la notion de valeur absolue que « c’est le nombre sans le signe ». Cela entraîne des difficultés à comprendre que quand on désigne un nombre par une lettre, a par exemple, si ce nombre est négatif sa valeur absolue est –a ! Le mot « absolu » en français connote la totalité, la perfection, l’idéal (en bien ou en mal). On retrouve cette idée en physique avec la notion de « zéro absolu », qui est la température au-dessous de laquelle on ne peut pas descendre, inaccessible (l’idéal étant forcément inaccessible...). On trouve d’ailleurs là l’origine de la terminologie mathématique de « valeur absolue ». La définition de la valeur absolue d’un nombre est sa distance à 0. C’est donc un nombre positif. En effet, quand le vocabulaire s’est fixé vers la fin du xviiie siècle, les nombres négatifs étaient considérés comme « moins parfaits » que les nombres positifs, leur existence était mal cernée. Même D’Alembert dans l’Encyclopédie souligne que la notion de nombre négatif n’est pas claire pour les mathématiciens de son époque. Il écrit à la fin de son article : « –3 pris abstraitement ne présente à l’esprit aucune idée ».

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Abstrait, abstraction

L’introduction des nombres négatifs est un vrai problème pédagogique, et pour la grande majorité des élèves, le nombre négatif est associé au signe moins. Cette idée fortement ancrée est un handicap quand on passe à l’écriture des nombres avec des lettres. (Voir Signe, Notation). En mathématiques, le mot « absolu », ou l’adverbe « absolument », fait référence soit à la valeur absolue, comme dans « une série absolument convergente » ou « une intégrale absolument convergente », soit plutôt à la notion de perfection comme dans « le maximum absolu d’une fonction* » (on dit aussi maximum global). Au passage, noter que le maximum absolu d’une fonction peut être un nombre négatif... Le mot « absolument » en français est employé pour renforcer une idée, exprimer une certitude, mais pas en mathématiques : il ne faut pas confondre « la série est absolument convergente » avec « absolument, la série est convergente ». (De temps en temps, les professeurs de mathématiques parlent français...)

Abstrait, abstraction . . . . . . . En français, l’abstraction est une opération de la pensée. On isole une caractéristique pour la considérer séparément, ou bien on trouve un point commun à différents objets pour en faire un type nouveau (l’idée abstraite de « chien » s’opposant aux différents chiens rencontrés). Ce terme est lié à celui d’intelligence, mais il peut également devenir péjoratif, comme désignant ce qui est trop éloigné de la réalité. On retrouve cette dualité dans la relation aux mathématiques. Il est communément admis qu’il faut être intelligent pour faire des mathématiques, mais que tout de même les mathématiques sont assez éloignées de la réalité ! « Abstrait » s’oppose également à « concret ». Les mathématiques sont abstraites, contrairement à « la vraie vie » qui est concrète. Concret, pour un élève, cela veut souvent dire familier. Si on écrit (a + b)2, est-ce plus abstrait que (π + 2)2 ? Les nombres sont-ils plus concrets que les lettres ? Quels nombres ? Les nombres entiers sont-ils plus concrets que les nombres réels* ? Les nombres réels sont-ils plus concrets que les nombres complexes* (appelés au début imaginaires, c’est tout dire) ? Le paradoxe réside dans le fait que les mathématiques ne semblent pas se soucier de la vie, mais qu’elles permettent pourtant tous les jours de résoudre des problèmes concrets (concevoir un téléphone portable par exemple).

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Absurde

Bien entendu, les mathématiques apprennent l’abstraction. On cherche toujours à s’éloigner des cas particuliers, à écrire des formules générales, qui s’appliquent à plusieurs cas, on cherche à dégager des lois, à trouver des ressemblances entre des objets de natures différentes. (Voir Analogie, Structure.)

Absurde . . . . . . . . . . . . . . .

Coluche : « Quelle est la différence entre un pigeon ? […] Il a les deux pattes pareilles, surtout la droite. »

Mais c’est absurde ! Si les maths c’est ça, moi j’arrête. Eh bien non, précisément. Les mathématiques, ce n’est pas ça. Au contraire, elles sont parvenues à se servir de l’absurde pour démontrer des choses bien sérieuses. Qu’est-ce que l’absurdité ? Ce qui est contraire à la raison, au bon sens. Tout d’abord, le bon sens et la raison, est-ce la même chose ? En mathématiques, une absurdité est une proposition qui serait à la fois vraie et fausse. Or la théorie mathématique ne comporte pas d’« absurdités », autrement dit de contradictions. Il est impossible qu’un nombre soit à la fois pair et impair par exemple. De là découle le principe de la démonstration par l’absurde. Pour démontrer qu’une propriété est vraie, on suppose qu’elle est fausse, ou pour être plus positif, on suppose que l’énoncé contraire est vrai. Puis, on regarde tout ce que l’on peut en déduire, et si on arrive à en déduire que nécessairement une certaine propriété est vraie, alors qu’il est connu par ailleurs qu’elle est fausse, on se retrouve face à une contradiction (par exemple si on aboutit à « 0 = 1 »).

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Adhérence

Malheur ! D’où vient ce désordre ? Nécessairement de la propriété supposée fausse, enfin de la propriété contraire supposée vraie, enfin bref, du machin supposé au début ! Sus à l’ennemi ! On l’éjecte donc de la belle harmonie mathématique ! Elle est fausse ! Autrement dit, elle est fausse, parce que si elle était vraie, ce serait le chaos, plus de certitude ! C’est le principe de la démonstration par l’absurde. Vous avez mal à la tête ? Mais non, c’est simple ! Prenons l’exemple de la « démonstration » célèbre de 3 = 0 3. On part de l’équation x2 + x + 1 = 0. Elle est équivalente à x + 1 = –x2. Comme 0 n’est pas solution de l’équation, elle est équivalente à x2 + x = –x3. Mais comme x2 + x + 1 = 0, on aboutit à l’équation x3 = 1 qui n’a qu’une solution, 1. Donc en reportant dans l’équation de départ, on a bien 12 + 1 + 1 = 3 = 0. On n’a, bien sûr, pas démontré que 3 = 0 ! Mais alors qu’a-t-on fait ? On a démontré par l’absurde que l’équation x2 + x + 1 = 0 n’a pas de solution réelle. En effet, quand on dit que « l’équation x3 = 1 […] n’a qu’une solution 1 », on se place dans l’ensemble des nombres réels et quand on « manipule » x2 + x + 1 = 0, on sous-entend que cette égalité est vraie pour un nombre réel. Donc le fait d’arriver à l’égalité 3 = 0, qui est fausse, montre par l’absurde que l’équation x2 + x + 1 = 0 n’a pas de solution réelle. Elle a, en revanche, deux solutions complexes non réelles, celles de l’équation x3 = 1, qui sont –1 + i 3 et –1 –i 3 . 2 2 2 2

Adhérence* . . . . . . . . . . . Voici un bon exemple de l’usage que font les mathématiques du français. Essayons de reconstituer l’enchaînement des idées. Au départ, il y a un ensemble désigné par la lettre E et un sous-ensemble désigné par la lettre A. On dit qu’un élément x de E est adhérent à A si sa « distance » à A est nulle (plus précisément si pour tout nombre positif , il existe un élément a de A tel que la distance entre x et a soit inférieure à ). Là, on comprend le mot « adhérent ». On visualise une sorte de sac A, et x vient « se coller » à A. Oui, mais attention ! Telle qu’elle est énoncée, la définition permet de dire que les éléments de A sont adhérents à A.

3. Marcel Gotlib en a fait une planche de bande dessinée savoureuse sous la forme d’un dialogue entre Mme Poussin et Mme Lampion.

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Aire

Surprenant, mais admettons. En effet, s’il appartient à A, x « colle » d’autant mieux à A ! Qu'est ce que l’adhérence alors ? A priori, on attend une caractéristique d’une relation entre deux objets (l’Académie française donne : « l’adhérence d’un coquillage au rocher »), ou quelque chose qui vient en plus (toujours l’Académie : « Des adhérences postopératoires »). Eh bien, cela ne sera pas le cas en mathématiques ! L’adhérence d’un ensemble est l’ensemble de tous les points qui sont adhérents à cet ensemble (donc l’adhérence contient en particulier l’ensemble de départ). Pour le matheux, cette définition est d’une simplicité biblique. Pourtant, il nous faut reconnaître que cela a de quoi déstabiliser. Allons, nous sommes de bonne composition ! Nous admettons cette forme de « création littéraire » : l’adhérence d’un ensemble n’est pas une propriété de cet ensemble, mais un ensemble qui contient tous les points adhérents à cet ensemble. On croit être tranquille. Que nenni ! Quand on étudie les suites, on rencontre l’expression « valeur d’adhérence d’une suite ». On se dit : « C’est bon, je vois ce que c’est ! En particulier, toutes les valeurs de la suite sont des valeurs d’adhérence. » Eh bien, en général, non !

Alors, si c’est ça, pour moi c’est RIDEAU !

Aire . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Ce terme désigne un nombre, et pas une surface. On parle de l’aire d’une surface. Dans le langage courant, « aire » et « surface » ont des usages interchangeables. Il faut donc faire attention. En mathématiques, l’aire est une sorte de mesure de la taille de la surface. Mais, une aire en mathématique peut être « algébrique », c’est-à-dire qu’elle peut avoir une valeur négative. En effet, pour une fonction* continue par morceaux sur l’intervalle [a; b], l’intégrale

b a

ƒ(t) dt donne l’aire algébrique de la partie du plan comprise entre

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Ambiguïté

la courbe d’équation y = ƒ(x), l’axe des abscisses et les droites d’équations respectives x = a et x = b. Dans le cas où la fonction est négative, l’aire algébrique est négative. Plus généralement, si la fonction prend des valeurs positives et négatives et si l’aire algébrique est négative, cela signifie que la surface « sous » l’axe des abscisses est plus importante que celle « au-dessus ».

Ambiguïté . . . . . . . . . . . . . Qu’est-ce qu’être ambigu ? C’est pouvoir être interprété de plusieurs façons, ce que les mathématiciens ont en horreur, car ils s’attachent toujours à ce que tout soit clairement défini. Mais l’ambiguïté est inhérente à la condition humaine, elle existe donc, malheureusement pour les élèves, aussi en mathématiques. Le professeur n’en a pas toujours conscience, car le contexte lui permet de lever l’ambiguïté. Et pour un professeur, le contexte va de soi, ce qui n’est pas le cas pour les élèves, d’où de nombreuses incompréhensions. Exemple : les symboles I3 peuvent être lus comme le nombre « treize » ou comme un « B » mal fait, suivant le contexte : I3 000 vs. I3onbons. Autre exemple : |A| peut désigner la valeur absolue d’un nombre ou le déterminant d’une matrice, selon la nature de l’objet représenté par la lettre A. Dans le premier cas, le nombre est obligatoirement positif, dans le second pas du tout… et on pourra avoir l’égalité |A| = –1 ! Comment interpréter a(x + y) ? Est-ce « a fois x + y » ou bien la fonction a appliquée à x + y ? Les conventions de notation font plutôt pencher en faveur de la première interprétation : « a(x + y) = ax + ay ».

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Analogie

Qu’en est-il alors de « ln(x + y) » ? Bien sûr, pour un mathématicien, il n’y a pas de doute, ln désigne la fonction « logarithme ». Mais un élève débutant avec cette fonction et à qui on a répété maintes fois « a(x + y) = ax + ay » sera fier d’écrire « ln(x + y) = ln x + ln y  », ce qui fera hurler son professeur. D’où l’incompréhension mutuelle : « les élèves ne comprennent rien », « les profs ne sont jamais contents ». Théoriquement, il n’y a pas d’ambiguïté dans le langage mathématique. On ne devrait pas noter deux choses différentes de la même façon. On trouve pourtant de nombreuses situations où la même notation désigne des objets distincts. Par exemple, les différents « 0 » sont notés de façon identique (voir Zéro). Un autre exemple d’une écriture similaire pour deux choses différentes, qui ne peut se        2(x).          

(x) 



 2(x)= a2x2.    

      a (x) 



 2(x) = a2   2(x)  ((x)). 2      Il s’agit de la même notation, mais pour un professeur il n’y a pas d’ambiguïté, car le contexte est différent. En revanche, ça ne doit pas être aussi simple pour les élèves, car c’est une erreur fréquemment rencontrée.

(Voir Notation, Rigueur.)

Analogie . . . . . . . . . . . . . . . Développer le sens de l’analogie est une qualité essentielle en mathématiques ; et inversement, faire des mathématiques permet de développer cette qualité. Repérer des analogies est créateur, cela permet d’inventer des solutions, d’avoir des idées. Une autre façon de le dire est de « créer des liens » ou « faire des ponts » entre des domaines qui n’ont pas forcément de relations entre eux à première vue. L’analogie permet aussi d’abréger une démonstration. Si c’est analogue, nul besoin de recommencer. Il faut être un peu « paresseux » quand on fait des mathématiques. Il y a plusieurs types d’analogie. Le premier type correspond à celui utilisé dans une démonstration quand il y a plusieurs cas (par exemple x positif et x négatif) et, dans chacun d’eux, on exploite les mêmes arguments. On dira que le second cas est analogue au premier.

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Analyse

Un deuxième type d’analogie est visuel et permet de soulager la mémoire. Dans ce cas, il s’agit plutôt d’une ressemblance. Par exemple, pour les dérivées successives d’une fonction ƒ, la notation ƒ (n) qui ressemble à la notation ƒ n, présente l’avantage que certaines propriétés de calculs sont analogues à celles des puissances d’un nombre. n

En effet, la formule de Leibniz (u.v) ( n) = n

du binôme (z1 + z 2)n = k=0

n k

k=0

(

n k

( )u

( n-k)

.v ( k) est analogue à celle de la formule

) z1n-k .z k2 .

Analogue ne veut pas dire identique ! Un troisième type d’analogie est lié à la notion de structure. Par exemple, la notion d’espace vectoriel est intéressante car elle montre que (dans certaines circonstances) travailler sur les vecteurs* « usuels » (ceux du physicien, les « flèches ») ou sur des fonctions revient au même. Cela permet d’avoir une « intuition géométrique » de problème sur les fonctions. On s’intéresse à la notion « abstraite » de vecteur, en oubliant leurs caractéristiques (un bipoint, un triplet, ou une fonction par exemple). (Voir Structure, Abstraction.)

Analyse . . . . . . . . . . . . . . . . On peut penser à « analyses de sang ». Pour peu qu’un étudiant n’aime pas les piqûres, cela peut provoquer une réaction de rejet quand on lui dit « on va commencer l’analyse ». En réalité, en français, une analyse est synonyme d’« observation en détail », c’est une décomposition d’un tout en parties pour mieux le comprendre. Un étudiant a déjà rencontré en cours de français l’analyse de texte. Ce mot a plusieurs sens en mathématiques. En premier, l’analyse est la branche des mathématiques qui concerne l’étude des suites et des fonctions, des problèmes de convergence*, du calcul intégral, etc. (Les autres branches sont l’algèbre, la géométrie, les probabilités, l’arithmétique, pour les plus connues.)

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Analyse

Dans une conférence donnée le 7 avril 2010 à la Bibliothèque nationale de France, Cédric Villani a dit : « un analyste, c’est quelqu’un qui veut tout contrôler » (23e minute de la vidéo)4.        

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exemple, on pourra parler de la résolution analytique dans ⺓ de l’équation z42 -2i3    // * 0    

1 *    3   #  )4  %   & // 0     ρe iθ !

D’autre part, l’analyse est une démarche de raisonnement, la démarche « analyse-synthèse » ou « analyse-vérification ». On met en œuvre ce type d’approche quand on cherche à résoudre une équation (de n’importe quel type ; l’inconnue peut être un nombre, une fonction, un vecteur, etc.) ou bien à prouver l’existence d’un objet. 5    

 $4$/3           

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ensuite une condition nécessaire   (      "     " * 

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        (   "   4   " :   (    /  "  ! "   

;    (    condition précédemment trouvée est  (voir       ! On peut parfois être amené à faire plusieurs fois ce raisonnement, si la condition trouvée au   "       5 /  "  $   /   //  

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(      )   " "     #(  %: "  

  

 '  ( //   ?     /  

     

de science divinatoire que seuls des génies peuvent pratiquer.

Il est à noter que l’usage du mot « synthèse » dans ce cas est un peu différent de l’usage en français « faire la synthèse d’un texte, d’une réunion, etc. ». Mais demeure l’idée que la synthèse est « l’opération de l’esprit », inverse de l’analyse.

4. Un peu avant pendant la conférence, Cédric Villani avait dit que quand on fait de l’analyse, on fait « du raffiné, du précis ».

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Anneau

Anneau* . . . . . . . . . . . . . . . Un anneau n’a rien de rond ! C’est un corps*, auquel il manque une propriété. Un corps inachevé... (Voir Corps.)

Antécédent* . . . . . . . . . . . Comme dans le langage courant, antécédent signifie ce qui vient avant, mais dans le cadre des fonctions et des applications, quand on écrit y = ƒ(x), x est un antécédent de y alors que x apparaît après y ! En réalité, pour un « matheux », il n’y a pas de difficulté, car dans l’écriture y = ƒ(x), il voit un processus chronologique qui fait partir de x, auquel on applique une fonction ƒ pour obtenir y. Et donc dans ce schéma, le x est bien avant (au sens temporel). Attention : ne pas dire x est l’antécédent de y, mais un antécédent de y, car y peut avoir plusieurs antécédents. (Voir Fonction, Application, Image*.)

Appartenir . . . . . . . . . . . . . Se dit d’un élément. Un ensemble est constitué d’éléments. Un élément appartient à un ensemble, il est dans l’ensemble. L’ensemble n’est défini que par les éléments qu’il contient. Ce qui n’est pas le cas dans la vie courante. Or si un ensemble perd un élément, il n’est plus lui-même. Ces boucles d’oreilles m’appartiennent, mais si je les perds, je reste quand même moi-même (quoique...). Grande question : le centre d’un cercle appartient-il à ce cercle ? Non, il appartient au disque (qui est lui-même une « boule* »). (Voir Ensemble.)

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Application

Application* . . . . . . . . . . . En premier lieu, une application en mathématiques, c’est une fonction*, définie sur tout l’ensemble de départ. En d’autres termes, tout élément de l’ensemble de départ a une et une seule image. Au lycée, on confond souvent les deux notions de fonction et d’application. Considérons une application ƒ de E dans F. Pour y un élément de F, on appelle un antécédent de y, un élément x de E tel que ƒ(x) = y. Il peut y avoir plusieurs antécédents, ou aucun, ou un seul. Si tout élément de F a au moins un antécédent, l’application est dite surjective. Si tout élément de F a au plus un antécédent, l’application est dite injective. Si elle est à la fois injective et surjective, on la dit bijective. Autrement dit, une application bijective est une correspondance exacte (on dit parfois : « biunivoque ») entre les éléments de E et les éléments de F. Par exemple, prenons pour E l’ensemble des élèves d’une classe et pour F l’ensemble des chaises de la salle de classe ; ƒ est l’application qui à chaque élève associe une chaise. Dans les cas idéaux, elle est injective, c’est-à-dire que chaque élève est assis seul sur sa chaise (s’il reste des chaises, elle n’est pas surjective). Si cela se passe mal, il manque des chaises : deux élèves doivent s’asseoir sur la même chaise, l’application n’est pas injective (mais dans ce cas elle est surjective). S’il y a le même nombre d’élèves et de chaises, l’application est bijective. Un paradoxe : l’application qui associe à chaque nombre entier 0, 1, 2, 3 ,4... son double 0, 2, 4, 6, 8... est une bijection de l’ensemble des entiers dans l’ensemble des entiers pairs. On peut donc dire qu’il y a « le même nombre » d’entiers que d’entiers pairs ; pourtant, il y a deux fois moins de nombres pairs (un sur deux seulement) ! C’est ce paradoxe qui a conduit à la définition des ensembles infinis : un ensemble est dit infini s’il existe une bijection de lui-même dans l’une de ses parties (strictes). Mais ce mot apparaît également dans un autre contexte. « Application d’un théorème, d’un résultat. » Chic se dit l’élève, on va enfin voir « à quoi ça sert les maths ». Il est en général déçu, car il s’agit souvent d’un autre théorème, qui lui paraît aussi abstrait que le premier.

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Apprendre son cours

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Il y a quand même aussi des applications des mathématiques dans la vie réelle... mais ça n’intéresse pas forcément le professeur. Ou bien c’est beaucoup trop compliqué... Il y a des mathématiques dans les téléphones portables, les avions et les ordinateurs... Il y a aussi des applications des mathématiques à la finance… Est-ce toutefois la meilleure idée que l’on ait eue ?! Quand on utilise un théorème dans un raisonnement, on dit aussi que l’on applique ce théorème. Un théorème énonce une propriété générale, pour toute une catégorie d’objets, identifiés par des lettres dans le théorème. L’appliquer, c’est remplacer les lettres par les lettres ou les objets dont on dispose, après avoir vérifié que ces objets appartiennent à la bonne catégorie. Par exemple pour calculer (2x – 3y)2, on utilise le théorème : pour tous a, b réels, (a + b)2 = a2 + 2ab + b2. Ici, 2x va jouer le rôle de a, –3y celui de b ; après avoir remarqué que ce sont des réels, on écrit (2x – 3y)2 = (4x2 – 12xy + 9y2). +  

   /3 

           entier k supérieur à 2, 1 A (k) - (B - 1) A 1 . Ici, il s’agit de trouver quelle fonction on k (B - 1) va utiliser, sur quel intervalle.

Appliquer le cours, utiliser le cours, c’est là que les difficultés commencent. Pour finir, dans le langage courant, application veut dire également consacrer soin et attention à une chose : il faut de l’application pour appliquer un théorème ! (Voir Fonction, Image, Antécédent.)

Apprendre son cours . . . . . . Il s’agit d’un grand sujet de malentendu entre élèves et professeurs. Un élève a toujours l’impression de connaître son cours. En cas de difficultés, il peut éventuellement dire « j’ai appris mon cours, mais je ne sais pas l’appliquer ». Le professeur dans ce cas pensera « si l’élève ne sait pas appliquer

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Argument d’une démonstration

son cours, c’est qu’il ne l’a pas appris ». Apprendre son cours pour un élève, c’est souvent apprendre par cœur. Il le faut aussi, mais pour un professeur, cela veut plutôt dire comprendre. De quoi parle-t-on ? Qu’est-ce qu’un nombre complexe, une fonction, une suite... ? Apprendre son cours, c’est se poser des questions. Apprendre son cours, c’est aussi (pour un professeur) apprendre « pour toujours », pas seulement pour le devoir surveillé de la semaine prochaine (voir Méditation). Apprendre une démonstration, par exemple, ce n’est pas l’apprendre par cœur. Apprendre une démonstration c’est apprendre le plan, le point de départ, ce à quoi on veut aboutir, quelle idée-force est en jeu, quel autre théorème on utilise, etc. Apprendre une formule, c’est non seulement la connaître, mais aussi la reconnaître. C’est pour cela que donner un formulaire aux bacheliers, ou bien avoir les formules dans une calculatrice, n’est pas tellement utile, parce que si on ne connaît pas les formules, on ne va pas y penser, donc on n’aura pas l’idée de les chercher dans la calculatrice ou dans le formulaire.

Argument d’une démonstration

Contrairement peut-être à l’usage courant, le mot « argument » en mathématiques ne désignera pas un exemple ou une phrase destinée à emporter l’adhésion de l’interlocuteur, mais une étape d’une démonstration. Quand un professeur de mathématiques écrit « argumentez » ou « il manque un argument » en marge d’une copie, cela veut dire que la démonstration est incomplète. Parlez-vous maths ?

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Argument d’un nombre complexe

Une démonstration peut être considérée comme une suite d’arguments. Mais bien sûr, il est impossible d’écrire tous les arguments, ce serait beaucoup trop long. Il y en a donc certains que l’on n’écrit pas. Toute la difficulté pour un élève consiste à savoir lesquels. Cela dépend entre autres du niveau d’enseignement. Il est souvent difficile de faire le tri. Parfois, trop détailler une démonstration va faire croire à l’interlocuteur ou au lecteur que l’on ne maîtrise pas la notion. A contrario, s’il manque l’argument jugé essentiel, la démonstration ne sera pas considérée comme valide. Dans la perspective d’une évaluation, il vaut mieux néanmoins trop détailler que pas assez. (Voir Démonstration.)

Argument d’un nombre complexe*

..........

Tu vois, je te l ’avais bien dit : les nombres complexes, ce n’est pas naturel. Ils en sont à chercher des arguments pour les nombres complexes ! Mais tu n’y es pas ! L’argument d ’un nombre complexe, c’est un angle qui caractérise l ’inclinaison du vecteur représentant ce nombre dans le plan par rapport à l ’axe des abscisses. Oui, d ’accord, je vois à peu près. Mais pourquoi appelle-t-on ça l ’argument ? Euh… C’est-à-dire qu’il n’y a pas vraiment d ’argument pour appeler cet angle argument !

Arrangement . . . . . . . . . . Ah, je savais bien qu’en maths pourrait toujours trouver un arrangement ! Un arrangement en français, c’est le résultat d’une mise en ordre (l’arrangement des meubles dans le salon) et cela désigne aussi le fait de se mettre d’accord.

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Astuce

En mathématiques, on retrouvera plutôt le premier sens. Ce terme est utilisé en dénombrement (le dénombrement est l’art de compter, de dénombrer des choses...). Par exemple, quand le sélectionneur de l’équipe de France de rugby constitue son équipe, il choisit 15 joueurs parmi le groupe des joueurs pressentis – admettons qu’il y en ait 30 – et leur attribue des numéros (suivant leur rôle dans l’équipe). C’est un arrangement de 15 joueurs parmi 30. Combien y a-t-il d’équipes possibles (sans tenir compte des compétences de chaque joueur) ? Il y en a 3 042 648 073 975 910 400 000 (essayez de lire ce nombre !). Surprenant non ? Pour obtenir un arrangement mathématique, il faut choisir p éléments dans un n! = n(n – 1)(n – 2)… ensemble de n éléments et les numéroter. Il y a (n – p)! (n – p + 1) arrangements. (Voir Combinaison.)

Astuce . . . . . . . . . . . . . . . . . . Je n’aime pas les mathématiques ! Il y a toujours une astuce ! Si tu ne la vois pas, tu ne peux rien faire. Comment veux-tu apprendre à faire des maths ? L’astuce en français est liée à l’idée d’habileté, voire de ruse. « Il a trouvé une astuce pour payer moins d’impôts. » En mathématiques, la plupart du temps, une astuce cache une méthode. Exemple, pour montrer que x2+ 2x est toujours (voir ce mot) supérieur ou égal à -1, on peut présenter une démonstration de la manière suivante. « On utilise l’astuce que 1 – 1 = 0 et alors on peut écrire x2 + 2x = x2 + 2x + 1 – 1 = (x + 1)2 – 1 et donc comme (x + 1)2 est toujours positif ou nul, on a bien que x2+2x est toujours supérieur ou égal à –1. » En fait, il n’y a aucune astuce, il y a une méthode, celle qui consiste à écrire un polynôme du second degré sous forme canonique (voir ce mot). Le professeur est parfois dans l’obligation de présenter certaines démarches sous forme d’astuce, car le programme ne contient plus l’enseignement de la méthode.

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Asymptote

+ "       "      C

n’est plus au programme de certaines classes préparatoires. Néanmoins, on est souvent x2 

 &     (         (x) = 1 + x2 1 , ce L’astuce consiste à écrire au numérateur x2 = x2 + 1 - 1  &    1 -

1 + x2 qui s’intègre très bien. F4 

      / G F            

Certains cas relèvent du génie humain. Un mathématicien a trouvé une démarche et, depuis, « les autres ne font que copier ». Souvent, les élèves nous demandent pourquoi nous avons cette idée dans la résolution d’un exercice, nous sommes obligés de leur avouer que ce n’est pas nous qui l’avons inventée, mais que comme nous faisons des mathématiques depuis plus de 30 ans, il y a certaines choses que nous savons. Ce que nous nous attachons à dire aux élèves, c’est de ne pas se bloquer parce qu’on leur montre une solution qu’ils n’auraient pas trouvée tout seuls. Les mathématiques sont aussi culturelles, il faut se servir de ce que les Hommes ont inventé avant nous.

Asymptote. . . . . . . . . . . . . D’abord, explique-moi pourquoi il n’y a qu’un « s », parce que moi, j’ai appris qu’en français, si on veut avoir le son « ss », il faut deux « s » entre deux voyelles ! Volontiers ! C’est l ’étymologie. Quoi ? Je sens que tu vas m’embrouiller… Mais non. C’est simple. « A » est privatif, « sumptôtos » signifie rencontre. En somme, asymptote signifie « qui ne se rencontre pas », « qui ne coïncide pas ». Tout ça, c’est du chinois ! Non, c’est du grec… Du grec ou du chinois, moi ça ne m’éclaire pas beaucoup !

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Asymptote

y

x

On rencontre souvent cette notion de manière informelle la première fois, à 1 l’occasion de l’étude de la fonction « inverse* » : x → , pour laquelle on dit x que l’axe des abscisses est asymptote à la courbe :

On retient l’image d’une droite de laquelle la courbe se rapproche sans jamais la toucher. Même si ce mot est peu utilisé en dehors du contexte mathématique ou scientifique, on en trouve l’usage chez Victor Hugo : « La science est l’asymptote de la vérité. Elle approche sans cesse et ne touche jamais » (William Shakespeare, « L’Art et la science ») ou encore « la paix universelle est une hyperbole dont le genre humain suit l’asymptote. Suivre cette radieuse asymptote, voilà la loi de l’humanité » (Le Rhin, lettres à un ami)5 . Ici, on retrouve l’idée « d’idéal jamais atteint ». Or il s’avère qu’en mathématiques, la généralisation de la situation de la fonction « inverse » a débouché sur la définition suivante : « Une courbe représentative d’une fonction ƒ admet la droite d’équation y = ax + b comme asymptote à l’infini si ƒ(x) – ax – b tend vers 0 quand x tend vers l’infini. » Le premier contact avec la notion d’asymptote va faire obstacle à l’application de cette définition. Avec celle-ci, on peut dire qu’une droite est asymptote à elle-même ! De plus, si on considère la courbe représentative de la fonction qui à x associe sin(10x) x+ , elle oscille autour de son asymptote qui est la droite d’équation x y = x, et elle la rencontre périodiquement.

5. Cité par le Centre national de ressources textuelles et lexicographiques à l’article « asymptote ».

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Asymptote

x

Malgré ces exemples, des élèves restent bloqués sur leur première impression et donc, pour démontrer qu’une droite est asymptote à une courbe, vont commencer par prouver qu’elles ne se rencontrent jamais, ce qui ne sert à rien. Et ce d’autant plus que la définition n’est pas toujours clairement énoncée6. >      /  " H   &J    "    #(%   

  



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Dans la notion d’asymptote, il y a une idée d’indiscernabilité. On le retrouve dans l’usage des diagrammes de Bode, en électronique, où l’on confond carrément la courbe avec ses asymptotes. (Voir Limite.)

6. Dans un cours disponible sur le site Internet de l’ISTP (Institut supérieur des techniques de la performance), on trouve la définition suivante à propos du mot « asymptote » : « Il s’agit de droites ou de courbes dont la courbe d’une fonction se rapproche indéfiniment, sans les croiser, lorsque x tend vers un réel ou vers l’infini. »

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B

Base* . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Débutons par les bases de numération. En mathématiques, tout commence par savoir compter jusqu’à dix ! C’est la base ! Est-ce pour cela que l’on dit que nous comptons en base dix ? Pas si simple. La notion de base de numération est un peu plus subtile. D’abord, on remarquera que l’on dit « onze », « douze »… et pas « dix un », « dix deux »…, comme en chinois par exemple. Malgré tout, l’écriture 11, 12… respecte bien l’idée de tout faire découler de dix, et de ses puissances avec 100, 1 000… En effet, quand on écrit 11, on veut dire 10 plus 1 ; 273, lui, veut dire 2 fois 100 plus 7 fois 10 plus 3. Quand on a compris le principe, on peut se poser la question de changer de base. C’est le cas de la base deux utile en informatique (sans parler des bases « historiques » soixante et douze, cette dernière étant encore utile pour compter les œufs…). En base deux, il n’y a que deux symboles, 0 et 1. Rappelons qu’en base dix, on n’a pas de symbole spécifique pour dix. Ici, c’est pareil pour deux, il s’écrit comme dix en base dix, à savoir 10. En base deux, 10 c’est « une fois deux plus zéro fois un », donc deux !

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Beauté

Sur le même principe, 101 c’est « une fois deux au carré plus zéro fois deux plus un », soit cinq. Etc. On remarquera que dans un système de numération, la base est « invisible ». En base dix on ne voit pas dix, comme en base deux on ne voit pas deux ! Ici, la base s’apparente plutôt aux fondations d’une maison, qui sont enterrées. On trouve un autre usage du mot base dans « base d’un espace vectoriel ». Par exemple, si on considère un espace vectoriel E de dimension* (voir ce mot) trois,





avec comme base i, j,k , alors tout vecteur v de E peut s’écrire de manière unique comme combinaison linéaire* (voir ce mot) des trois vecteurs de la base : v = x.i + y. j + z.k. Ici, la base est visible. Les vecteurs de la base jouent le rôle de briques.

Beauté. . . . . . . . . . . . . . . . . . Il n’est pas incongru de parler de beauté en mathématiques. D’aucuns disent que la plus belle formule mathématique est eiπ = –1 . Pourquoi ? Ce qui plaît, c’est la présence de –1, π, i et e, avec tout le « poids » historique que ces objets mathématiques portent. Une autre jolie formule, celle de Stirling : n!  2πn.nn.e–n On parle de démonstration « belle » quand celle-ci est particulièrement courte ou met en jeu des notions qui ne sont pas « directement » reliées à ce que l’on veut démontrer. La beauté mathématique est liée ici à une idée de simplicité, d’élégance. On peut dire aussi qu’une théorie est « belle » quand elle unifie des parties apparemment éloignées des mathématiques (exemple : la notion d’espace vectoriel qui permet de « comprendre » la structure de l’ensemble des solutions d’une équation différentielle linéaire, la démonstration de ce résultat étant elle-même une « belle » démonstration). Mais, comme dans la vie courante, c’est une notion sujette à caution. Est-ce que x2 – 3x + 2 est plus beau que (x – 1)(x – 2) ? En tout cas, ces deux expressions sont plus belles que 2x2 + 3x + 1 – 5x + 1 – x2 – x + 1 (elles sont toutes les trois égales). Dorénavant, avec les ordinateurs, on peut représenter des objets mathématiques, qui se révèlent d’une grande beauté visuelle, comme les courbes fractales par

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Boule*

exemple. On pourra consulter le magnifique ouvrage Le beau livre des maths chez Dunod ou le site « Images des mathématiques » (http://images.math.cnrs.fr/).

Borné* . . . . . . . . . . . . . . . . . .

Allons, une fonction bornée n’est pas une fonction intellectuellement limitée ! D’autant moins que l’usage que l’on fait en mathématiques de ce mot est en réalité étrange. En effet, si l’on dit dans la « vraie vie » qu’un terrain est borné, cela veut dire que l’on a délimité son pourtour par des bornes, celles-ci étant aux « limites » du terrain. Or en mathématiques, on peut dire que la fonction sinus est bornée par 2013 et –4. On est loin du langage courant. En effet, les valeurs extrêmes prises par la fonction sinus sont –1 et 1. On ne parlera pas de la borne supérieure qui est le plus petit des majorants, ou de la borne inférieure qui est… ? Devinez7.

Boule* . . . . . . . . . . . . . . . . . .

Pour paraphraser le peintre René Magritte, on peut dire que ceci n’est pas une boule : C’est au mieux la représentation d’une boule. 7. Réponse : « Plus grand des minorants ». Gagné !

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Branche

Quand on demande la définition d’une boule, on obtient souvent un énoncé basé sur l’idée de « rond », d’objet à « courbure régulière ». Ceci n’est pas non plus la définition d’une boule. En mathématiques, une boule est définie comme l’ensemble des points qui sont à une distance inférieure à un certain rayon d’un point fixe, appelé centre. C’est à partir du moment où l’on dispose de cette définition que l’on peut faire quelque chose avec les boules. Mais il y a bien d’autres distances que celle utilisée dans la vie quotidienne (appelée « distance euclidienne »). D’où des boules de formes très variées. Voici deux exemples de boules avec deux distances classiques en mathématiques :

De plus, cette notion de boule peut être appliquée au plan (en dimension 2). Donc une boule peut être un carré ou un losange. Elle peut être aussi un disque et même... une sphère dans l’espace ! Et nous n’abordons pas la question de la quatrième dimension... (Voir Distance, Norme*.)

Branche . . . . . . . . . . . . . . . . Toujours infinie... parfois parabolique.

Dans le contexte des courbes représentatives des fonctions, quand la courbe « va à l’infini », on parle de branche infinie, comme les branches d’un arbre qui monteraient vers le ciel.

C’est beau, ça ! Mis à part que les courbes peuvent avoir des branches, mais pas de tronc !

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C

Calcul . . . . . . . . . . . . . . . . . .

Pour le citoyen lambda, mathématiques = calcul. Il s’agit déjà d’une première confusion. Peut-être faudrait-il faire des cours de calcul distincts des cours de mathématiques. Bien sûr, savoir calculer (en général, on entend par là les quatre opérations, mais aussi calculer avec des fractions, développer, réduire, factoriser) est indispensable pour faire des mathématiques. De même que pour rédiger une dissertation de français ou d’histoire, il vaut mieux maîtriser l’orthographe et la grammaire. Mais savoir calculer ne sert pas qu’en mathématiques ; pour rester dans le champ scolaire, cela sert aussi en physique, en biologie, en chimie,

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Calculer

en économie. C’est également important pour gérer correctement l’argent du ménage, quand on vend des légumes sur le marché, ou encore quand on fait les soldes, etc. Inversement, être bon en calcul ne veut pas dire que l’on va être bon en mathématiques. Parce que les mathématiques, c’est essentiellement autre chose. C’est plutôt l’art du raisonnement. Les calculateurs prodiges ne sont pas spécialement bons en mathématiques, ni même particulièrement intelligents. Il s’agit plutôt d’un don (ou bien d’une grande capacité de mémoire ?). Et puis un calcul mathématique ne porte pas forcément sur des nombres, mais sur des fonctions, des matrices, des vecteurs, etc.

Calculer . . . . . . . . . . . . . . . . dt , qu’est-ce que c’est ? Ce mot n’a pas forcément le même sens t pour un élève et un professeur. Le professeur trouvera très satisfaisant la réponse ln(2), mais pas l’élève. Calculer

2

1

Comment le calcule-t-on ? Quoi ? ln(2) ? Peu importe. Si vous voulez, vous avez une valeur approchée avec votre calculatrice ! Oui, mais alors pourquoi m’avoir dit de calculer croyais que « par définition »,

2 1

dt t

2 1

dt t

? Je

et ln(2), c’était pareil !

Penchons-nous sur le vécu des étudiants. Ils ont commencé leurs études mathématiques en effectuant des « calculs » à l’école primaire du type 2 + 3 = 5. On remarquera qu’on leur demande de calculer 2 + 3 et qu’ils ont appris à répondre 5, alors que l’on peut très bien dire que 5 = 2 + 3 (ce que l’on ne manquera pas de faire plus tard, par exemple avec 0 que l’on pourra écrire 1 – 1 ou …). Donc, très vite, calculer devient synonyme de « transformer une écriture pour avoir un nombre sous forme chiffrée ». D’où une première difficulté avec 2. La question rituelle : à quoi est-ce égal ?

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Calculer

À 2 ! Mais, on ne peut pas le calculer ? Si… En fait non ! Il faut savoir ! On sait calculer une valeur approchée avec la précision que l ’on veut. L’algorithme de calcul n’est plus au programme (moi-même, je ne suis pas sûr de savoir encore le faire !). Quand je tape sur ma calculatrice « racine de 2 puis égal », elle m’affiche quelque chose ! Oui, mais c’est précisément une valeur approchée ! Donc 2, ça n’existe pas ! Si ça existe. Prends la diagonale d ’un carré de côté de longueur 1 ; avec le théorème de Pythagore, tu peux montrer qu’elle mesure 2 ! … ?! De là à ce que l’élève remette en cause le théorème de Pythagore… On peut avoir cette même difficulté avec ln(2). L’élève voudrait pouvoir le « calculer ». Autre exemple : Que vaut 2,31,7. Tout le monde sait calculer 2,34 : 2,34 = 2,3 × 2,3 × 2,3 × 2,3. 1,7

Et donc pour 2,3 ? Comment vous faites ? Là, ce n’est pas pareil ! On utilise une autre formule : 2,3  = e . 1,7

1,7 × ln(2,3)

Quoi ?! Vous plaisantez ? Alors si je vous suis, 2,3  = e  ? 4

4 × ln(2,3)

Oui ! Parlez-vous maths ?

29

Calculer

Donc en gros, ce que je savais calculer, à savoir 2,3 = 2,3 × 2,3 × 2,3 × 2,3, maintenant, après avoir fait des études, je peux dire que 2,3 = e , ce que je ne sais plus calculer ! Sincèrement, vous m’inquiétez… 4

4

4 × ln(2,3)

En réalité, faire des mathématiques, c’est accepter « ça » ! Un autre phénomène curieux pour un professeur – tantôt amusant, tantôt énervant, c’est selon – est l’élève qui se lance dans un calcul sans savoir pourquoi. Il ne comprend pas vraiment l’énoncé, la question. Si une fonction est proposée, il peut calculer sa dérivée ; ou bien si la fonction est un trinôme du second degré, chercher ses racines, alors que cela n’est d’aucune utilité pour la question posée. Parfois, le calcul est long et l’élève perd du temps (dans un devoir en temps limité par exemple). Mais calculer le rassure dans ce cas. Néanmoins, à un moment ou à un autre, il faut mettre les « mains dans le cambouis ». Si on ne trouve pas uniquement en calculant, on ne peut pas non plus résoudre un problème sans calculer. Dans son livre Théorème vivant, Cédric Villani écrit page 92 en retranscrivant un courriel adressé à Clément Mouhot : « […] j’ai enfin trouvé comment faire […]. Ceci résulte d’un calcul parfaitement diabolique […]. Il a l’air totalement miraculeux mais il tombe pile comme il faut […]. Il va falloir refaire tous les calculs […] ça s’annonce assez atroce... ». Bien sûr, un étudiant n’est pas un chercheur. Il est dans un processus d’apprentissage qui a pour but de lui faire acquérir des savoirs déjà existants. Donc une analyse préalable du problème posé doit lui permettre d’éviter les calculs inutiles. Il faut même qu’il ait une certaine réticence à effectuer des calculs, précisément pour initier cette phase de réflexion. On peut être bon en mathématiques parce que l’on n’aime pas calculer ! Cependant, une réticence excessive et un manque de technique peuvent dans certains cas bloquer. Combien de fois a-t-on vu des étudiants ne rien faire devant un problème parce qu’ils ne voulaient pas se lancer dans un calcul. Tous les calculs ne sont pas « miraculeux », mais certains sont la clef de la solution. Toute la difficulté consistera à mener, sans se tromper, les calculs nécessaires...

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Cardinal

Canonique . . . . . . . . . . . . . Ne pas confondre les formes canoniques avec des formes « canons ».

Canonique ne qualifie pas uniquement l’âge de la bonne du curé, mais vient néanmoins de la même origine. Est canonique en mathématique ce qui est dans les canons, dans le droit de « l’Église » mathématique. En mathématiques, quelque chose de canonique est quelque chose que l’on n’a pas besoin de préciser, car « tout le monde » sait ce dont il s’agit. Sauf, évidemment, l’élève la première fois qu’il rencontre cette expression en cours... On parle de la décomposition canonique d’un trinôme du second degré par exemple : 2 4ac b 2 b , ou de la forme canonique d’un polynôme, ax 2  bx  c  a x   4a 2 2a





de la base canonique de ^n, de ^n [X]. En effet un polynôme a plusieurs formes, mais il y en a une que l’on considère comme canonique. ^n a plusieurs bases (une infinité en fait), toutefois il y en a une particulière que l’on appelle canonique. Cela évite de la redéfinir à chaque fois et permet simplement d’alléger l’écriture d’un texte. Finalement, savoir ce qu’est un objet canonique, cela signe son appartenance à une communauté. Il y a ceux qui savent ce qu’est la base canonique de ^n et les autres...

Cardinal . . . . . . . . . . . . . . . . Le cardinal d’un ensemble est son nombre d’éléments. Cela n’a rien à voir avec la religion catholique, les points cardinaux ou avec les vertus ! Même si étymologiquement, il existe un lien… lointain. De plus, il vaut mieux ne pas le connaître, car le cardinal d’un ensemble n’est pas forcément le plus important à savoir sur cet ensemble !

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Carré

Carré . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Tu as vu ce mec comme il est carré ! Dans le langage courant, une chose que l’on qualifie de carrée a toutes les chances de ne pas l’être au sens mathématique. Au mieux, elle sera rectangulaire, quand elle ne sera pas tout simplement de forme quadrangulaire. On peut d’ailleurs s’interroger sur ce fait de langage. Quelles conséquences « psychologiques » découlent de l’emploi d’un qualificatif (ici « carré ») pour des objets dont les propriétés sont des conséquences ? Dire de quelque chose qui est quadrangulaire que « c’est carré » (comme quand on parle de « voiles carrées »), c’est en fait confondre cause et conséquence. Si on a un carré, c’est aussi un rectangle, un quadrilatère… En revanche, un quadrilatère n’est pas forcément carré !

Vous avez raison. Parler de voiles carrées, c’est carrément scandaleux ! Oui mais attendez, ce n’est pas vous qui parlez parfois du carré d ’un nombre ? Vous m’expliquez le rapport ! En effet, on parle du carré d’un nombre. Cela ne veut pas dire que dans un nombre, il y aurait un carré caché. Une sorte de mystère à découvrir !

Pour une fois que les maths pouvaient être palpitantes ! Le carré de 3 est le nombre 9 car 9 = 3 × 3.

Ah, parce que comme ça, vous croyez être clair ! En fait, l’expression « carré de 3 » peut être comprise comme « aire du carré de côté 3 », et là on trouve bien 9. Les pythagoriciens appelaient les nombres comme 4, 9, 16… des nombres carrés car ils étaient associés à la figure du carré 8. Avec la notation exponentielle, on écrit 9 = 32. À partir de là, comme souvent en mathématiques, on va faire des « glissements » de notation et de vocabulaire pour des objets différents. 8. Ils étudiaient aussi les nombres « triangulaires », « pentagonaux »...

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Cercle

On va par exemple parler de ^2 pour désigner l’ensemble des couples (x ; y) de nombres réels. Cela vient du fait que l’on peut parler du produit (voir ce terme) cartésien d’ensembles, et alors ^2 = ^ × ^. On remarquera que si le nombre d’éléments, appelé cardinal (voir ce terme), d’un ensemble E est fini, on a la (jolie) formule : Card(E2) = (Card(E))2, où les carrés n’ont pas le même sens ! (Un exemple d’ambiguïté, voir ce mot.)

Ce n’est pas beau, ça ? Si vous ne trouvez pas ça beau, qu’est-ce que vous pourrez trouver beau dans la vie ?! Bouclons la boucle. Si on considère [0  ; 1]2 (au sens ensembliste), on a l’ensemble des coordonnées des points du plan formant un carré.

Cercle . . . . . . . . . . . . . . . . . . Plus personne ne sait tracer un cercle à main levée.

Il ne faut pas confondre cercle (le bord) et disque (la surface), qui est aussi une boule (voir ce mot).

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Chiffre

Chiffre . . . . . . . . . . . . . . . . . . « Les chiffres du commerce extérieur sont mauvais ». Un mathématicien dirait : « Les nombres du commerce extérieur sont inférieurs à ce que l’on espérait. » Le chiffre est au nombre ce que la lettre est au mot. Il y en a dix, pas un de plus…

Chtoucas de Drinfeld . . . . . . On ne sait pas ce que c’est, mais c’est rassurant de savoir que des mathématiciens s’en préoccupent, notamment quand c’est Laurent Lafforgue9.

Combinaison . . . . . . . . . Ce terme est également (voir Arrangement) un terme de dénombrement, dont le sens mathématique est très différent de l’usage français. Cela se rapprocherait du sens de « combinaison » dans « la combinaison du coffre-fort », mais justement ici, la notion d’ordre n’importe pas. 1, 2, 3, 4 ou 4, 3, 2, 1 ou 2, 3, 1, 4... C’est la même combinaison de quatre chiffres pris parmi 0, 1, 2, 3, 4, 5, 6, 7, 8, 9. Un résultat au loto est une combinaison, bien que la Française des jeux parle de « tirage » ! Une combinaison mathématique est une partie, un sous-ensemble d’un ensemble fini. (Ici, il s’agit de combinaison sans répétition, comme dans l’article « Arrangement ».) Quand on prépare sa valise et que l’on prend trois paires de chaussettes parmi toutes ses paires de chaussettes, on fait une combinaison. Ou, pour reprendre l’exemple des équipes de rugby, si le sélectionneur choisit d’abord le groupe de 15 joueurs parmi les 30, il a 155117520 possibilités. Le groupe c’est la combinaison. À un groupe de 15 joueurs correspondent 1307674368000 équipes (ou arrangements possibles). 9. Laurent Lafforgue, professeur à l'Institut des hautes études scientifiques (IHES) à Bures-surYvette, a reçu la médaille Fields en 2002. On peut citer cette phrase de Laurent Lafforgue parlant d’un « naïf » qui visiterait un laboratoire de recherche en mathématiques : « le visiteur conclurait que les lieux mathématiques sont meublés principalement de personnes occupées à parler et écouter en groupes grands ou petits ou bien à lire, écrire ou réfléchir seules ».

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Compas

Les nombres correspondants à la quantité de combinaisons de p éléments parmi n sont les coefficients du binôme, notés C np ou np , qui traînent un peu partout en mathématiques, et notamment dans la célèbre formule du binôme de Newton !



Attention  : une combinaison de coffre-fort est un arrangement, pas une combinaison !

Combinaison

linéaire

*. . .

Encore une fois, il faut entendre cette expression globalement. Ce n’est pas une combinaison (encore moins une combinaison de ski ou de moto !) qui aurait la propriété d’être linéaire. Quand un mathématicien fait une « combinaison linéaire », il fait tout autre chose. Il lui faut d’abord un espace vectoriel. Il lui faut ensuite un certain nombre de vecteurs. Il les multiplie chacun par un nombre puis additionne tous ces éléments. Prenons un exemple. Considérons l’espace vectoriel des vecteurs de la physique (les « flèches »). 2v1 3v2  v3 est une combinaison linéaire des vecteurs v1, v2 et v3 avec respectivement les nombres 2, –3 et 1. On remarquera que lorsque l’on a fait une combinaison linéaire de trois vecteurs (par exemple), on a, à la fin, UN vecteur ; alors qu’avec une combinaison de paires de chaussettes, à la fin on a trois paires de chaussettes. En fait, quand on fait une combinaison linéaire, on fait bien une combinaison au sens de « L’eau est formée par la combinaison de l’oxygène et de l’hydrogène » (Dictionnaire de l’académie, 9e édition).

Compas . . . . . . . . . . . . . . . . Pourquoi devrait-on mieux apprécier les distances si on l’a dans l’œil ?

Au cours d’un repas entre amis (ou mieux, avec son (ou sa) petit(e) ami(e) au restaurant), essayez de placer la phrase : « Toute construction faisable avec une règle et un compas est faisable avec seulement un compas »… Même si on est bien incapable de tracer trois points alignés avec seulement un compas !

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Compact

Compact* . . . . . . . . . . . . . . Comme « ouvert* », « fermé* », « voisinage* », « adhérent », ce mot est utilisé en topologie*, branche des mathématiques qui n’est pas du tout enseignée au lycée, et un peu au début des études supérieures. Notre premier contact avec la topologie a eu lieu en classes préparatoires à une époque où on en faisait beaucoup. Nous avons trouvé cela tout de suite très poétique, les mots (comme « compact », mais aussi « ouvert », « fermé »…) ayant un sens précis en français et différent en mathématiques. Cela nous a fait rêver. « Compact » en français est un adjectif, en mathématiques c’est aussi un substantif. On retrouve cette notion de « resserré », « dense » et « épais » (dense est également un mot du vocabulaire topologique). Un segment est un compact de ^. Un disque est également un compact du plan. Un disque compact est un compact... (Voir Topologie.) En français, « compact » signifie aussi « petit », petit parce que resserré. On a introduit le terme de disque compact par opposition aux disques vinyles, parce qu’ils sont beaucoup plus petits. Mathématiquement, ce sont tous les deux des compacts.

Complémentaire . . . . . La complémentarité est une belle idée. Compléter un objet, c’est le rendre plus grand, plus beau, plus fort. Mis ensemble, deux objets complémentaires en forment un complet. Ce mot se retrouve dans la théorie des ensembles. Deux ensembles sont complémentaires (en référence explicite ou implicite à l’ensemble dans lequel on travaille) si leur réunion donne l’ensemble en totalité et s’ils n’ont pas d’éléments en commun. On dit alors qu’ils forment une partition (voir ce mot). En français, les notions de complémentaire et de supplémentaire (voir ce mot) sont voisines. Par exemple, un supplément d’un magazine est un magazine qui le complète. Mais un supplément vient en plus, s’ajoute à quelque chose qui est déjà complet. D’où une confusion fréquente et malencontreuse dans l’esprit des élèves entre « sous-espaces vectoriels supplémentaires* » et « complémentaire d’un sous-espace vectoriel ». Un sous-espace et un supplémentaire de ce sous-espace (ici, rien à voir avec « un truc en plus ») permettent de reconstituer tout l’espace, de même qu’un sous-espace vectoriel et son complémentaire, mais de deux façons très différentes !

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Composition

Par exemple, dans le plan, si on considère une droite (vectorielle), une autre droite (vectorielle) est un sous-espace vectoriel supplémentaire, alors que le complémentaire                                             

        F    

)  4&          MPQ  

         RSPQ

Complexe* . . . . . . . . . . . . J ’ai des complexes de ne pas comprendre les nombres complexes, pourtant ce n’est pas complexe ! En français, il y a d’une part « les complexes » : en avoir ou pas – en général, à l’âge des élèves et des étudiants, on en a plusieurs et ce n’est pas très agréable –, et d’autre part, « complexe » qui signifie composé de plusieurs éléments et, par extension, difficile, compliqué. Donc ce mot n’est pas très engageant ! Cela explique peut-être pourquoi les élèves n’aiment pas les nombres complexes. Pourtant, en mathématiques, les complexes ne sont vraiment pas compliqués. Un nombre complexe est un nombre qui est « composé » de deux réels et d’un être mathématique noté i qui a la propriété d’avoir son carré égal à –1 : i2 = –1. Certes, c’est étrange, mais pas compliqué ! Les nombres complexes ont été inventés pour résoudre les équations de degré 3. Mais, en prime, il se trouve que toutes les équations de tout degré se résolvent dans ` (même si pour trouver les solutions, c’est moins évident ; on sait en tout cas qu’elles existent et combien il y en a). Et, cerise sur le gâteau, on peut faire de la géométrie avec les nombres complexes.

Composition . . . . . . . . . . En mathématiques, ce mot n’a pas le même sens que dans « la composition du menu » ou « la composition d’un tableau ». On l’utilise dans l’expression « composition des fonctions ou des applications » ou bien quand on parle de « loi de composition » interne ou externe.

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Composition

En français, la composition concerne la production ou la constitution d’un objet (de quoi est composé le menu, la composition d’un livre), alors qu’en mathématiques, le résultat de la composition de deux objets est un objet du même type. C’est une notion que l’on utilise dès le primaire, mais sans lui donner son nom (la notion de composition de fonctions vient d’ailleurs de disparaître du programme de terminale). En effet, quand on dit « 2 + 3 = 5 », on utilise l’addition, qui est une loi de composition interne (voir Loi). L’idée est de prendre deux éléments d’un ensemble et d’en fabriquer un troisième (deux et trois étant à entendre au sens mathématique, il peut s’agir du même... par exemple 2 + 2 = 4, ou même 0 + 0 = 0). La composition de deux fonctions est aussi une manière de fabriquer une troisième fonction à partir de deux. On la note avec le symbole « o » (on dit « rond »), « f o g ». Si ƒ et g sont deux fonctions, ƒ o g est une troisième fonction. Pour calculer ƒ o g (x), on calcule g(x), puis on applique ƒ à g(x), ce qui donne ƒ o g (x) = ƒ(g(x)). Attention, il n’est pas toujours possible de définir la fonction ƒ o g. Inversement, analyser une fonction donnée comme étant une fonction composée n’est pas forcément facile, en particulier pour un élève. Ainsi la fonction définie par x → sin2 x s’écrit ƒ o g, où g est la fonction sin et ƒ la fonction carrée. Il y a une contradiction apparente avec la lecture de sin2, où le carré vient après. Il y a moins de problème avec sin, car le symbole  vient avant. La difficulté est d’autant plus grande quand on représente les fonctions par un  )  / f g F G E gof +       "            *   3 & 

  K  " "        &    )) >   ( 

noter que g o f est différent de f o g qui n’est même pas forcément défini.

On peut dire que, dans le cas où ƒ et g sont des fonctions d’un ensemble E dans lui-même, la composition des fonctions est une loi de composition interne sur l’ensemble des fonctions de E dans E. Dans ce cas, les deux sens du mot se confondent. De plus, « s’il n’y a pas d’ambiguïté », on ne note pas le symbole « o ». Ainsi ƒ2 peut désigner suivant les cas ƒ o ƒ ou ƒ × ƒ (voir Ambiguïté). On peut s’y retrouver en fonction du contexte dans lequel on travaille, mais les élèves ont souvent des difficultés à le faire.

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Comprendre

Comprendre . . . . . . . . . . Deux phrases célèbres : « Vous avez compris ? » (c’est le professeur qui parle) et « Je n’ai rien compris ! » (c’est l’élève qui parle, en général...). Qu’attend le professeur quand il pose cette question ? Outre la réponse « oui » qui le rassure, le professeur attend que les élèves sachent (re)faire un exercice en rapport avec la notion qu’il a enseignée. Dans ce cas, « avoir compris » c’est « savoir (re)faire ». Que veut dire l’élève ? Souvent, il exprime un doute profond, d’ordre métaphysique. Par exemple, après l’énoncé de la définition « pour a réel non nul, on pose a0 = 1 », un élève peut dire qu’il n’a « rien compris », parce qu’il ne voit pas pourquoi (ou pour quoi) on pose cette égalité. Pour l’élève, « avoir compris », c’est « savoir pourquoi (ou pour quoi) on fait », à quoi cela sert. On peut réduire ce hiatus en demandant à l’élève d’abandonner ses « prétentions philosophiques » ou bien de patienter, le pourquoi viendra plus tard (peut-être). C’est ce que l’on fait en général. On peut même penser que c’est ce que font spontanément les « bons » élèves. Mais cela ne peut être pleinement satisfaisant pour l’élève. Ce reproche est fréquemment fait aux professeurs de mathématiques. À notre décharge, il n’est pas facile d’expliquer rapidement et simplement à quoi servent les notions mathématiques étudiées. Le concret se révèle souvent trop compliqué et nécessite des notions mathématiques non élémentaires. On doit donc trouver un compromis… Il faut aussi accepter que la compréhension ne soit pas immédiate et qu’elle se fasse de manière inconsciente. On n’a pas toujours un éclair de génie du type : « Ah, bon sang, mais c’est bien sûr ! » Accepter de manipuler une définition ou un théorème sans en comprendre tous les tenants et aboutissants permet la compréhension profonde, plus tard. C’est pour cela qu’il faut prendre les définitions et les théorèmes « au pied de la lettre », en vérifiant bien les hypothèses avant de les utiliser. On peut faire le parallèle avec les films ou les romans policiers. En général, le lecteur ne comprend qu’à la fin du livre. Pourtant, de nombreux éléments sont disséminés au cours du livre, mais c’est seulement à la fin que le lecteur trouve leur pleine signification. Les élèves qui veulent tout comprendre de manière séquentielle sont souvent bloqués. Un souvenir personnel sur la compréhension : nous avons utilisé, quand nous étions élèves en terminale, la définition de la limite « quel que soit  > 0, il existe ƣ> 0 tel que... » comme un mantra, une formule magique, que nous cherchions à Parlez-vous maths ?

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Condition nécessaire et suffisante

appliquer (et, en général, on y parvenait). La compréhension est survenue plus tard, comme un éclair foudroyant, ce qui nous a procuré une très grande joie. Les « angoisses » de la compréhension ont préoccupé les plus grands. Cantor, après avoir mis au point sa théorie « révolutionnaire » des nombres transfinis, aurait dit : « Je le vois, mais ne le crois pas » (d’après Jacques Hadamard dans Essai sur la psychologie de l’invention dans le domaine mathématique, 1959).

Condition nécessaire et suffisante

..........

Autrement dit « il faut et il suffit ». Cette notion est centrale, mais souvent mal comprise. Pourtant les mots sont utilisés ici dans leur sens courant, en français. Il faut, c’est nécessaire : par exemple, il faut boire pour vivre. Si on ne boit pas, assez rapidement, on déclare forfait. Mais cela ne suffit pas : il faut aussi manger et dormir. Il faut qu’un nombre entier soit pair pour être un multiple de 4, mais cela ne suffit pas. Il suffit qu’un nombre soit multiple de 8 pour être un multiple de 4, mais cela n’est pas nécessaire (on peut être un multiple de 4 même si on n’est pas un multiple de 8, par exemple 12). Évidemment, dans le langage courant, on introduit aussi « la pensée magique » : « il suffit que j’oublie mon parapluie pour qu’il se mette à pleuvoir ! » Bien sûr, cela n’a rien à voir… Pour un mathématicien, la pensée magique n’est pas un raisonnement valide !

Cône* . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Comment ne pas penser à une glace ! Mais attention, le cornet de glace est au cône ce que le triangle équilatéral est au triangle : un cas particulier ! Un cône, en général, est une surface infinie engendrée par une droite dépendant d’un paramètre et passant par un point fixe appelé « sommet ».

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Conjugué

L’idée de « droite dépendant d’un paramètre » peut être visualisée en considérant que la droite coupe une courbe donnée, appelée « directrice ». Cette courbe peut être plane, on parle alors de « base » dans la mesure où le cône peut être « posé » sur un plan (attention, il peut ne pas être stable !). Une droite passant par le sommet d’un cône et sa directrice est appelée « génératrice ».

Pour en revenir aux glaces, un cornet de glace est un morceau d’un cône cylindrique de révolution. Cylindrique parce qu’il a une base circulaire. Et de révolution parce que ses génératrices peuvent être vues comme tournant autour de l’axe du cône correspondant à la droite passant par le sommet et le centre du cercle de base. (Voir Cylindre*.)

Conjugué . . . . . . . . . . . . . . Ah non, on ne va pas conjuguer ! J ’ai toujours eu du mal à apprendre mes conjugaisons ! Mais non, rassure-toi, en mathématiques la conjugaison est facile. En algèbre, on parle d’expressions conjuguées quand, par exemple, on a x – 2x + 3 et x + 2x + 3. L’une est conjuguée de l’autre et « réciproquement ».

Oui, ça je veux bien l ’admettre ! Mais à quoi ça sert ?! Bonne question ! Parlez-vous maths ?

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Contexte 5 sans « radical » au dénominateur. x – 2x + 3 Étant donné « l’identité remarquable » (a – b)(a + b) = a2 – b2, en multipliant « haut et bas » par l’expression conjuguée du dénominateur, on peut écrire Prenons un exemple : on veut écrire

5 5(x + 2x + 3) 5(x + 2x + 3) = . = 2 x – 2x + 3 x2 – (2x + 3)2 x – 2x – 3 Bingo !

Oui, compris, mais à quoi ça sert de vouloir écrire un nombre sans radical au dénominateur ? Ça, c’est une autre histoire ! Trop facile ! Vous dites toujours ça, les matheux ! Non, non, je t’assure, c’est vraiment une autre histoire. D’autant que je serai amené à t’expliquer que dans certains cas, c’est au numérateur que l ’on ne voudra pas de radical ! Donc si tu as compris ce que l ’on vient de faire, c’est le plus important. Une chose après l ’autre ! Pour les nombres complexes, on a aussi cette notion de nombres conjugués. Si on prend z = a + ib, son conjugué est a – ib, que l’on note en général z. Allez, un petit calcul qu’il faut avoir effectué au moins une fois dans sa vie et que l’on ne refait jamais plus : z.z = (a + ib)(a – ib) = a2 – (ib)2 = a2 – i2 b2 = a2 + b2 puisque i2 = –1. a + ib (a + ib)(c – id) À partir de là, on peut faire comme plus haut avec i :  ; on = c + id c 2 + d2 n’a plus de i au dénominateur !

Contexte . . . . . . . . . . . . . . . Le contexte est primordial quand on résout un problème de mathématiques (mais c’est le cas également dans de nombreuses situations). Même si on essaye de le limiter, il y a du sous-entendu dans un texte de problème. Notamment pour comprendre les notations. Par exemple, ƒ 2 n’aura pas le même sens si on se penche sur un problème d’algèbre linéaire ou un problème d’analyse (voir Ambiguïté).

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Contraposée

Il faut aussi tenir compte de l’enchaînement des questions. Quand on bloque sur une question, on doit penser à ce que l’on a fait avant, dans quel contexte on travaille. De même, avant de se lancer dans un problème, il est judicieux de lire l’énoncé, pour savoir quel est le contexte, quelle partie du cours va être utilisée, et de se remémorer les théorèmes importants, le type de questions que l’on se pose (par exemple, avec une matrice, on cherche souvent à calculer ses puissances successives, et donc pour cela à la diagonaliser).

Continu* . . . . . . . . . . . . . . . Continuer en français, cela veut dire « ne pas s’arrêter », « ne pas présenter d’interruption ». C’est le même sens en mathématiques que dans l’expression « ligne continue ». Une fonction continue à valeurs réelles a une représentation graphique « en ligne continue », c’est-à-dire dont on peut tracer le graphe sans lever le crayon. Mais la définition de la continuité concerne aussi des fonctions que l’on ne peut pas dessiner. Le mot « continu » s’oppose également à « discret » (voir Discret). Attention, dans les sciences physiques, on parle de « courant continu » pour un courant « constant ». Certes, s’il est constant il est bien continu mathématiquement parlant, mais dans ce sens le courant alternatif est aussi continu !

Contraposée . . . . . . . . . . À ne pas confondre avec la réciproque. Si on a une proposition de la forme « A implique B », alors sa contraposée est « non-B implique non-A ». Il s’avère qu’une implication et sa contraposée ont la même valeur de vérité (ou bien elles sont vraies toutes les deux, ou bien elles sont fausses toutes les deux). « Il est midi donc j’ai faim » est équivalent à « je n’ai pas faim donc il n’est pas midi ». De là découle une méthode de démonstration d’une implication : on démontre sa contraposée.

Pourquoi faire simple quand on peut faire compliqué !

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Contre-exemple

Contre-exemple . . . . . . C’est un exemple qui est « contre ». On veut savoir si la proposition « tous les élèves de la classe mesurent moins d’un mètre quatre-vingts » est vraie ou fausse. Pour prouver qu’elle est vraie, il faut prendre les élèves un par un, les mesurer et constater que pour chacun, sa taille est inférieure à un mètre quatre-vingts. Pour prouver qu’elle est fausse, il suffit de trouver UN élève qui mesure plus d’un mètre quatre-vingts : c’est le contre-exemple. (Remarquons que la négation logique de la proposition est « il existe au moins un élève qui mesure plus d’un mètre quatrevingts » et non pas « tous les élèves mesurent plus d’un mètre quatre-vingts ».) On utilise un contre-exemple pour prouver qu’une proposition commençant par « pour tout... » est fausse. En effet, il suffit de trouver un cas où ça ne marche pas pour que la proposition soit fausse. On appelle ce cas un contre-exemple.

Convergence* . . . . . . . . On retrouve dans la terminologie mathématique l’idée de mouvement et l’idée d’objectif à atteindre, que l’on a par exemple en français dans les phrases « la convergence des feux de l’artillerie  » ou dans «  nous essayons d’avoir une convergence de points de vue ». Mais si, en français, ce sont plusieurs choses qui convergent vers un même point, un même accord, en mathématiques, il s’agit d’un seul objet, en général une suite ou une fonction (même si le terme converger s’emploie pour des intégrales, des séries, etc., in fine il s’agit d’une suite ou d’une fonction). Une suite ou une fonction peuvent être vues comme modélisant un processus en mouvement. Par exemple, la suite des températures les plus chaudes de chaque année (les années se suivent, d’où l’idée de mouvement), ou bien une fonction qui modélise un phénomène dépendant du temps (continu). La notion de convergence est liée à celle de limite. Une suite de réels convergente est une suite qui a une limite finie (voir ce mot). « Tendre » peut toujours s’employer à la place de « converger », en français 1 également. On dira que la suite tend vers 0. Mais ils ne sont pas synonymes ; n en effet, « converger » ne s’emploie pas toujours à la place de « tendre ». Une suite qui tend vers l’infini est divergente, on ne dit pas qu’« elle converge vers l’infini ».

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Couple

Corps* . . . . . . . . . . . . . . . . . . Un corps peut être fini ou infini, algébriquement clos, commutatif ou non, premier… Qui a dit que les mathématiques ne faisaient pas rêver ? Les corps que rencontrent en premier les élèves en mathématiques sont le corps des nombres rationnels, des nombres réels et le corps des nombres complexes. Parler de « corps » en mathématiques à un public composé d’adolescents pour lesquels la question de leur corps est une préoccupation importante peut paraître provocante, d’autant plus que la définition donnée n’a rien de très « sexy »… (Voir Anneau.)

Couper . . . . . . . . . . . . . . . . . « Couper » en français est le plus souvent employé sous sa forme transitive. « Je coupe une pomme. » Après cette action, on a plusieurs morceaux. « Je me suis coupé le doigt » peut signifier deux choses. Rarement que le doigt est séparé de la main ; plus souvent (et tant mieux !) que l’on a la peau d’un doigt écorchée. Dans l’expression « elle me coupe la parole », il y a de l’agressivité. Au sens figuré ou au sens propre, « couper » évoque plutôt une action violente, en tout cas peu agréable. En mathématiques, nulle agressivité ! Ce mot est en général employé dans le sens de « se croiser », d’« avoir une intersection non vide* ». « Deux droites se coupent. » Quand une droite coupe un plan, elle ne constitue pas deux demi-plans, elle ne fait que traverser le plan. Pour évoquer le cas d’une droite qui partage un plan, on utilisera le terme de « frontière ».

Couple Pour faire un couple, il faut être deux (au sens mathématique, donc ça peut être deux fois le même), mais l’ordre compte. Pour faire une paire, il faut être deux Parlez-vous maths ?

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Courbe

(distincts), mais l’ordre ne compte pas. (1,1), (1,2) et (2,1) sont trois couples différents. {1,2} est une paire, {1,2} = {2,1}.

Des mariés forment-ils un couple ou une paire ?

Courbe . . . . . . . . . . . . . . . . . Une courbe n’est pas forcément courbe, par exemple une droite est une courbe ! Avis aux professeurs, ne pas s’enthousiasmer à la fin d’un exercice en disant : « Nous avons de belles courbes au tableau ! » lorsque c’est une étudiante qui vient de faire les tracés.

C. Q. F. D. . . . . . . . . . . . . . On ne sait pas trop ce que cela veut dire, mais cela fait bien à la fin d’une démonstration.

En réalité, c’est l’acronyme de «  ce qu’il fallait démontrer  », qui a remplacé « Q. E. D. », acronyme de « Quod Erat Demonstrandum », le latin étant moins à l’honneur à notre époque. De même, on trouve parfois dans une démonstration l’abréviation « i.e. » pour « id est », soit « c’est-à-dire », également abrégé en « c.-à-d. ».

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Croissante

Croissante (ou décroissante)* On parle d’une fonction (ou d’une suite) croissante lorsque, quand on l’applique à deux nombres a et b, avec a ≤ b, on obtient ƒ(a) ≤ ƒ(b). Il y a un risque de conflit avec le langage courant. En effet, on peut dire qu’une grandeur croît (par exemple les salaires après une augmentation), lorsqu’après avoir appliqué une « fonction » à cette grandeur, on a a ≤ ƒ(a). Autre risque de conflit : une fonction constante est croissante. Comment en est-on arrivé là ? Pourquoi n’a-t-on pas pris comme définition : « si on l’applique à deux nombres a et b, avec a < b, alors ƒ(a) < ƒ(b) » ? En fait, une fonction croissante est une fonction qui « conserve l’ordre ». En effet, si on peut dire que a ≤ b implique ƒ(a) ≤ ƒ(b), on peut très bien dire aussi que a ≥ b implique ƒ(a) ≥ ƒ(b). Or en mathématiques, une « relation d’ordre » (voir ce mot) doit être réflexive, donc permettre l’égalité, d’où les « ≤ » plutôt que des «  $

     " G F       3   

de ce livre.

Discriminant . . . . . . . . . . Ne pas confondre avec « déterminant » (voir ce mot).

En français c’est un adjectif, mais en mathématiques c’est un nom commun. Il s’agit du fameux Δ = b2 – 4ac associé à l’équation du second degré ax2 + bx + c = 0. Il permet de déterminer les racines de l’équation, leur nombre. Il permet d’introduire une discrimination parmi les équations. On peut définir ce mot dans un contexte plus large. En particulier, on peut définir le discriminant d’un polynôme de degré quelconque. Pour le calculer on utilise alors un... déterminant ! 

H      "  #  *%     

*      J

Donc si je vous comprends bien, ce n’est pas si grave que ça si je dis « déterminant d ’une équation du second degré » ou « discriminant d ’une matrice » ? 60

Parlez-vous maths ?

Discussion

Discussion . . . . . . . . . . . . Ça tombe bien, moi qui aime parler ! Mais si on doit discuter, le mieux c’est d ’aller discuter au café… Non, non, on va rester « en mathématiques ». Discuter, c’est envisager tous les cas qui peuvent se présenter dans un problème. N’est-ce pas ce que l’on devrait faire dans une « vraie » discussion sérieuse ? F    #@  "  ( - 1)( - 2)x = m2 – 1, m étant un   3 % (m2 – 1) . C" & 3 (      ) 5    x = ( - 1)( - 2) ;       (   PJ X    1 ou si m = 2  $

 *3 "'

   >  $

       1, m = 2  | 1   | 2.

Une erreur fréquemment commise consiste à ne pas faire porter la discussion sur des cas pertinents. Dans l’exemple précédent, cela ne sert à rien d’envisager le cas m = 0.

Une autre erreur, plus ennuyeuse, est de faire porter la discussion sur les solutions. Dans l’exemple précédent, on ne doit pas discuter le cas x = 0 # x = 0 alors m2 = 1%!

En effet, le problème est la recherche de x. On ne discute pas sur ce que l’on cherche, puisque la valeur cherchée ne dépend pas de notre bon vouloir.

Une discussion mathématique ressemble à : 1er cas..., 2e cas..., etc. En général, les cas s’excluent mutuellement, mais ce n’est pas une nécessité. En revanche, pour que le problème soit entièrement résolu, les différents cas doivent recouvrir toutes les possibilités. +    )  *3    3           

la discussion.    ( )     (  1er       2e        ~ ~e        6k + 1, 6B - 1. 5              &         ~  

(

les trois cas on couvre bien toutes les possibilités.

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Distinct

Distinct . . . . . . . . . . . . . . . . « Soient x1, x2, …, xn des nombres réels. » Cela veut dire que l’on considère n nombres réels, mais qu’ils ne sont pas forcément distincts (c’est une famille ou une liste). Si on précise « deux à deux distincts », cela signifie que lorsque l’on en prend deux d’entre eux, ils sont différents, et pas seulement que x1 ≠ x2 et x2 ≠ x3 et … et xn – 1 ≠ xn. Pourquoi ne pas simplement dire « n réels distincts » ? En effet, cela suffirait, mais cette habitude de langage est une précision pour éviter toute ambiguïté. De même, on dira « un et un seul élément » ou « exactement un ». (Voir Un, deux, trois.)

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E Égalité

Doit être parfaite ! C’est un principe de notre république.

Grande question : peut-on écrire 1 = 2 ? Oui, on peut l’écrire (la preuve, nous l’avons écrit…) mais c’est faux ! De toute manière, une égalité est soit vraie, soit fausse. Si elle peut être vraie ou fausse, c’est une équation (voir ce mot).

Élégance L’élégance est liée à la simplicité, la sobriété, l’économie de moyens. Il en va de même en mathématiques. En effet, l’élégance et la beauté sont deux notions importantes pour les mathématiciens dans leur art, même si cela peut sembler obscur pour les autres. On parlera de « démonstration élégante » pour une démonstration courte, ou évitant des calculs fastidieux. En général, plus la démonstration est élégante, Parlez-vous maths ?

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Ensemble

plus elle nécessite des mathématiques compliquées, mais pas systématiquement. Une démonstration peut aussi être élégante parce qu’elle utilise astucieusement des notions simples.

En tout cas, ces trois notions – beauté, élégance, simplicité – sont liées dans l’esprit du mathématicien. Il faut beaucoup de pratique pour en saisir toutes les nuances et il subsiste toujours une part de subjectivité, propre à chaque individu. (Voir Beauté.)

Ensemble . . . . . . . . . . . . . La notion d’ensemble est à la fois fondatrice de la théorie mathématique et très mal définie ; on se contente souvent d’une définition tautologique du genre « un ensemble est une collection d’objets ». À notre niveau, nous sommes obligés de nous contenter d’une idée intuitive, ainsi que des outils pour manipuler les ensembles, notamment la notion d’appartenance. Un ensemble est défini par les éléments qui le constituent, qui lui appartiennent. À noter qu’il existe un ensemble vide qui ne contient pas d’éléments, que certains ensembles peuvent être constitués d’ensembles, mais qu’il n’existe pas d’ensemble de tous les ensembles (voir Partie, Appartenir). Le mot « ensemble » est ici assez proche du sens français : être ensemble, c’est appartenir à un même ensemble. Il est à noter que l’on peut à la fois appartenir à un même ensemble et à des ensembles disjoints ; par exemple, dans une manifestation (ensemble) des personnes de bords politiques différents peuvent se côtoyer.

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Équivalence

Équation . . . . . . . . . . . . . . . C’est une égalité qui peut être vraie ou fausse, selon le cas. Résoudre une équation, c’est répondre à la question : « Dans quel cas l’égalité est-elle vraie ? » Remarquons que, si l’on montre qu’elle n’est jamais vraie, on a quand même résolu l’équation. Savoir qu’un problème n’a pas de solution, c’est savoir quelque chose ! Citons à titre d’exemple le fameux théorème de Fermat. Nous parlons ici du dernier, celui qui a été démontré en 1994 par le mathématicien Andrew Wiles. La propriété s’énonce ainsi. « Pour tout entier n supérieur ou égal à 3, il n’existe pas de triplet d’entiers non nuls (x, y, z) tels que xn + yn = zn. » Cette proposition a été énoncée par Pierre de Fermat en 1621, qui a affirmé, dans la marge d’un livre, en avoir une démonstration, mais pas assez de place pour l’écrire. Pendant 350 ans, les mathématiciens ont cherché en vain une démonstration. Cette proposition n’a été démontrée qu’en 1994. L’équation xn + yn = zn n’a donc pas de solution si n ≥ 3. L’équation est bien résolue, et le jour où elle l’a été, cela a déclenché un véritable tsunami dans le monde des mathématiciens ! Au passage (voir Indécidable, Théorème), cette proposition n’a pas changé de valeur de vérité. Elle a toujours été vraie, mais elle n’est devenue un théorème qu’en 1994, une fois que l’on en a trouvé une démonstration.

Équivalence (relation, classe) Les notions de relation d’équivalence et de classe d’équivalence ont disparu des programmes de mathématiques du lycée et ne sont introduites qu’en première année d’études post-bac, et ce de manière assez succincte. Dommage, car c’est un outil formidable pour construire de nouveaux objets mathématiques. Relation et classe sont deux mots courants en français ; on trouve des exemples de relations et de classes d’équivalence dans la vie quotidienne, à commencer par le collège ou le lycée. Prenons la définition des vecteurs donnée en classe de seconde. Pour ne pas parler de classe et de relation d’équivalence, on parle de translation, de Parlez-vous maths ?

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Équivalence

parallélogramme, et hop, on se retrouve avec une translation de vecteur AB , ce qui sert de définition du vecteur, puis on donne l’égalité de deux vecteurs en passant par le parallélogramme. Ce qui fait que l’on demande aux élèves de trouver que deux vecteurs sont égaux alors qu’on les représente à deux endroits différents du plan. Chapeau s’ils y parviennent ! Ce qui n’est pas dit en cours, c’est qu’il existe une relation d’équivalence entre les couples de points et qu’un vecteur est une classe d’équivalence, c’est-à-dire l’ensemble de tous les couples en relation les uns avec les autres. Pourtant, les élèves manipulent quotidiennement ces notions, puisqu’un lycée peut être considéré comme l’ensemble des classes d’équivalence par la relation d’équivalence « être dans la même classe ». L’ensemble des classes d’équivalence est appelé l’ensemble quotient. Bien sûr, cette façon de parler est peut-être un peu brutale... mais que font les professeurs sinon tourner autour du pot ? Par exemple dans une ville, on peut définir deux relations entre individus : – la première, un individu A est en relation avec un individu B si A habite dans la même rue que B, – la seconde, A est en relation avec B si A est plus jeune que B. On voit dans le premier cas qu’un individu est en relation avec lui-même, que si A est en relation avec B alors B est en relation avec A et que si A est en relation avec B et B en relation avec C, alors A est en relation avec C. C’est un exemple de relation d’équivalence. Dans le second cas, non. Sociologiquement, une rue est donc l’ensemble de tous les individus en relation les uns avec les autres. Cela s’appelle une classe d’équivalence. Un vecteur est en fait une classe d’équivalence pour une relation d’équivalence sur l’ensemble des bipoints. C’est un ensemble de bipoints. Quand on trace un vecteur, en réalité, on ne dessine pas un vecteur, mais un élément de cette classe. Deux bipoints tracés à des endroits différents sont des représentants du même vecteur, mais ne sont pas le vecteur lui-même. Là où c’est très fort, c’est que lorsque l’on manipule des vecteurs, on oublie leur procédé de fabrication. On définit des nouveaux objets, que l’on peut additionner, etc. On a fait un acte de création.

C’est beau !!! C’est la même démarche pour les nombres rationnels et pour quantité d’objets mathématiques.

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Erreur

Équivalence (versus égalité) Dans le langage courant, « équivalent » est employé pour « cela revient au même », « c’est la même chose », d’où la confusion que l’on trouve souvent entre « équivalent » et « égal ». Il n’est pas rare de voir dans des calculs enchaînés des équivalences à la place d’égalités. Il ne faut pas écrire : (2a – 3b)2 ⇔ 4a2 – 12ab + 9b2, mais (2a – 3b)2 = 4a2 – 12ab + 9b2. Cette pratique « malheureuse » amène certains à écrire : 12x2 – 3y3 = 4x2 – y3, qui est bien sûr faux (en général…). Cela s’explique parce que 12x2 – 3y3 = 0 ⇔ 4x2 – y3 = 0 est vraie… On parle aussi de suites équivalentes, de fonctions équivalentes et, encore une fois, les 3(    ( 

(   ")  C    "  ( 

n + 1 = n alors qu’ils veulent écrire n + 1  n . Ils sont induits en erreur aussi par une certaine pratique des physiciens qui écrivent ex = 1 1         #( %  

fait une approximation à l’ordre 1.

Erreur . . . . . . . . . . . . . . . . . . On ne devrait pas gommer ni effacer ses erreurs car on apprend beaucoup grâce à elles. Qu’est-ce qui énerve le professeur ? Que l’élève n’écrive rien de peur de faire une erreur et qu’il gomme ses essais quand on lui donne la solution. La phobie de l’élève : écrire quelque chose de faux sur son cahier. Il existe une solution pour réconcilier les deux : le cahier de brouillon ! Pourquoi les élèves ne l’adoptent-ils pas ? Problème ouvert ! Tout le monde commet des erreurs. Même Andrew Wiles qui, après sept ans d’efforts intenses, a réussi à démontrer le théorème de Fermat (voir Équation). À la première relecture de sa démonstration par un tiers (démonstration qui fait plusieurs centaines de pages), une erreur a été trouvée ! Il a mis plus d’un an pour surmonter l’obstacle. (À ce propos, nous recommandons le livre de Simon Singh, Le dernier théorème de Fermat, format poche. On trouve aussi sur Youtube une vidéo réalisée par S. Singh sur ce sujet, passionnante : www.youtube.com/ watch?v=7FnXgprKgSE.) Parlez-vous maths ?

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Espace

La peur de faire des erreurs inhibe l’élève. Pourquoi ? Il y a d’une part les erreurs d’étourderie ou les erreurs de calcul. C’est ennuyeux, mais cela ne remet pas en cause l’intelligence, même si c’est très décourageant. Il y a d’autre part les erreurs de raisonnement et là, c’est sans doute ravageur pour l’estime de soi. Toujours est-il qu’une chose importante pour se sentir plus à l’aise avec les mathématiques est de ne plus avoir peur de faire des erreurs, en se donnant par exemple des moyens pour se vérifier. Utiliser un brouillon est aussi une façon de mettre sur le papier des idées en vrac, sans crainte (c’est un lieu privé, hors d’atteinte du jugement du professeur), et de commencer à réfléchir. Il est très rare de pouvoir faire des mathématiques de tête, sans écrire. La notion d’erreur est également rattachée à la notion de faute. Et le terme « faute » porte un jugement moral, sans doute lourd à porter pour un élève. Il n’y a pas de faute morale en mathématiques. L’erreur signifie quelque chose. C’est souvent l’application rationnelle d’une connaissance fausse donc, sans analyser ses erreurs, il sera difficile de progresser, de se corriger.

Espace. . . . . . . . . . . . . . . . . Le terme « espace » en français désigne une étendue continue et illimitée (l’espace intersidéral) ou bien un intervalle contenu entre deux bornes, une étendue limitée. Il est maintenant employé « à toutes les sauces » (au grand dam de l’Académie...) : espace monétaire, espace social... C’est un mot qui renvoie à la géographie, donc à la géométrie pour un mathématicien. « Espace » est parfois synonyme d’ensemble en mathématiques, mais c’est plutôt un ensemble muni d’outils. Soit d’une structure (avec des opérations : on parlera d’espace vectoriel), soit d’une distance (pour étudier des limites : on parlera d’espace métrique) ou d’une tribu* et d’une probabilité (espace probabilisé)... En mathématiques, on ne parlera pas de « l’espace des entiers naturels », mais de l’ensemble des entiers naturels ; on parlera d’espace quand il s’agit d’un ensemble décrivant plus ou moins le monde géométrique dans lequel nous sommes. Les espaces les plus fréquemment rencontrés dans les deux premières années post-bac sont les espaces vectoriels et les espaces probabilisés.

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Évènement

Espérance . . . . . . . . . . . . . Ah, enfin un peu d ’espoir ! Je n’ai pas dit espoir, mais espérance ! ??? En français, le mot « espérance » a souvent un sens positif. « L’Homme espère ce qu’il désire et croit que son souhait va se réaliser ». Cependant, il n’y a pas équivalence entre espérance et bonheur. On peut même noter que dans certaines sagesses non religieuses, l’abandon de l’espérance est la condition du bonheur. En mathématiques, on rencontre ce terme en probabilités. L’espérance représente plus ou moins ce que l’on peut espérer obtenir quand on effectue une expérience aléatoire (par exemple, ce que l’on peut espérer comme gain quand on joue au loto), mais il n’y a pas de connotation heureuse. L’espérance de gain au loto est négative par exemple ; autrement dit, en jouant au loto, on peut plutôt « espérer » perdre de l’argent...

Évènement . . . . . . . . . . . 11

Ce terme s’emploie en probabilités. Un évènement mathématique n’est pas, contrairement à un évènement médiatique, quelque chose de remarquable, qui sort de l’ordinaire. Tout d’abord, il faut considérer l’univers des possibles, relativement à un contexte. Par exemple, on lance un dé. L’univers des possibles est l’ensemble des numéros obtenus. Un évènement est une partie de cet ensemble (y compris la partie vide ou l’ensemble lui-même). Un évènement de notre vie pourrait être « nous lançons un dé » (notre vie n’est pas toujours très intéressante), mais ce n’est pas un évènement mathématique. L’évènement mathématique dans ce cas-là est le résultat obtenu. Un évènement est donc une partie d’un ensemble, souvent noté Ω, qui est interprété comme l’ensemble des choses qui se produisent. On définit une

11. On essaie de suivre les recommandations de la réforme de l’orthographe de 1990.

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Exemple

probabilité sur l’ensemble des évènements. À chaque évènement, on associe un nombre entre 0 et 1, avec des propriétés pour que ça « marche bien ». Ce qui est paradoxal en probabilités, c’est qu’un évènement de probabilité nulle peut se produire. Par exemple, si on lance une fléchette sur une cible et que l’on se donne un point précis de cette cible A, l’évènement « la fléchette arrive sur le point A » est un évènement de probabilité nulle. Pourtant, quand on lance une fléchette, elle arrive bien sur un point de la cible... Donc a fortiori, la probabilité de gagner au loto n’étant pas nulle, l’un d’entre nous (on ne dira pas lequel !) continue de jouer (à l’heure où nous écrivons ces lignes, il/elle a plutôt perdu de l’argent…).

Exemple . . . . . . . . . . . . . . . Un exemple ne peut pas servir de démonstration (voir Argument). Sauf s’il est contre (voir Contre-exemple)… En revanche, dans un exercice, traiter un exemple (ou traiter un cas particulier) avant de traiter le cas général permet de s’approprier l’énoncé, de trouver des idées et déjà de faire quelque chose, ce qui est une première satisfaction. De plus, ce n’est pas une « sous-activité » dans la mesure où l’histoire des mathématiques regorge de cas où les mathématiciens ont d’abord étudié des cas particuliers avant de pouvoir généraliser.

Existence . . . . . . . . . . . . . . « Pourquoi y a-t-il quelque chose plutôt que rien ? » demandait Gottfried Wilhelm Leibniz en 1714 dans Principes de la nature et de la grâce fondés en raison (7e alinéa). Et poursuivait : « […] supposé que des choses doivent exister, il faut qu’on puisse rendre raison pourquoi elles doivent exister ». Les questions d’existence sont difficiles pour tout le monde, et pour les étudiants en particulier ! De fait, l’existence va souvent de soi, comme sa propre vie. Aussi le mathématicien apparaît comme quelqu’un qui se pose des questions que personne ne se pose avec ses questions d’existence.

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Exposant

De plus, l’enseignement favorise cette impression. Prenons l’exemple des nombres réels. Ils sont introduits très tôt, comme allant de soi en tant qu’abscisses des points d’une droite graduée. Cependant, plus tard (disons après la licence), on va s’interroger sur leur existence et « rendre raison » à partir de l’existence des nombres entiers que l’on va… postuler ! Il est parfois possible de démontrer qu’un objet existe, sans pour autant le connaître explicitement, ni même avoir une méthode permettant de l’approcher. C’est souvent le cas quand on fait un raisonnement par l’absurde : on démontre qu’un objet existe car s’il n’existait pas, cela aboutirait à une contradiction dans la théorie mathématique. Cela reste néanmoins assez frustrant pour un novice. Que signifie « connaître » pour un mathématicien ? Si le problème commence par « soit un nombre réel a », a est « connu » pour le mathématicien. Il est aussi concret que 2 ou π par exemple. Si la solution d’une équation dans ce problème est a2 + 1, le mathématicien est satisfait. L’élève, lui, s’étonne parfois : « Mais c’est quoi a ? » Pour un mathématicien, l’existence est en fait souvent un postulat : on postule que l’ensemble des nombres entiers existe (ou à peu près). En d’autres termes, on n’est pas capable de savoir si « 1 » existe ; on affirme qu’il existe. L’écriture sert souvent à camoufler cette question de fond. Par exemple, quand on écrit i (en mathématiques), on a bien un nombre qui vérifie que i2 = –1. Méditons sur la phrase de Bertrand Russel (« Recent Work on the Principles of Mathematics », The International Monthly, vol. IV, n° 1, p. 84, Burlington, juillet 1901) : « les mathématiques sont la seule science où on ne sait pas de quoi on parle, ni si ce qu’on dit est vrai ».

Exposant . . . . . . . . . . . . . . Les maths, ce n’est pas la foire. Un exposant n’expose rien du tout. C’est l’élève qui peut s’exposer à commettre des erreurs s’il ne sait pas ce que sont les exposants et comment on les manipule. Quand on écrit 73, l’exposant c’est 3. En gros, cela veut dire que 3 « montre » qu’il faut multiplier 7 par lui-même trois fois : 73 = 7 × 7 × 7.

Oui, mais pourquoi on met le 3 en petit en haut à droite de 7 ? Parce que ! Parlez-vous maths ?

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Exposant

Il y a des fois où les exposants s’ajoutent ou se soustraient, d’autres fois où ils se multiplient ou se divisent !

On n’y comprend rien !! (Voir Comprendre.) Il faut reconnaître qu’en plus, on peut utiliser les exposants pour deux catégories différentes d’objets : les nombres et les fonctions. Et cela ne veut pas dire la même chose ! Si a est un nombre, a3 = a × a × a. Si ƒ est une fonction, ƒ3 = ƒ o ƒ o ƒ. On a même une contradiction : sin2(t) ne veut pas dire la même chose que ƒ2(t) si on prend ƒ = sin !

Non mais, je rêve ! Allez y comprendre quelque chose… Si on écrit sin2(t), on veut dire sin(t) × sin(t). Tandis que si on écrit ƒ2(t) pour ƒ = sin, on veut dire sin o sin(t) = sin(sin(t)).

Et ce n’est pas pareil ? NON !!! (Voir Calcul, Indice.)

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F

Facteur . . . . . . . . . . . . . . . .

Le facteur sonne toujours deux fois... Qu’est-ce que c’est que cette histoire de facteur ? Vous ne connaissez pas le film ? Oh, ça va avec vos vieux films ! Je suppose qu’il est en noir et blanc en plus… En tout cas, je ne vois toujours pas ce que vient faire un facteur en mathématiques ! Parlez-vous maths ?

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Famille

En fait, un facteur à la poste c’est comme un facteur en mathématiques ! Chacun dans leur domaine, ils « font » quelque chose. Le facteur à la poste fait son travail. Le facteur en mathématiques fait aussi son travail qui consiste à influencer le résultat d’un produit : si je remplace le facteur 2 dans 2 × 3, je n’ai pas le même résultat.

Famille . . . . . . . . . . . . . . . . . « Familles, je vous hais ! » écrivait André Gide dans Les nourritures terrestres. Pourquoi tant de haine ? Allez, on se calme, revenons aux maths... On rencontre souvent des familles en mathématiques, particulièrement en algèbre linéaire (ce qui concerne les vecteurs...), où l’on parle de famille libre, famille liée, famille génératrice. Dans une famille mathématique, il n’y a pas d’éléments qui font la vaisselle et d’autres pas, il n’y a pas d’éléments qui font la vidange de la voiture et d’autres pas. Tous jouent le même rôle… excepté qu’il y a un ordre. On retrouve cette notion dans les mots « combinaison », « n-liste » ou « n-uplet ». On pourrait donc se passer de ce mot de « famille ». Ce terme, qui a une très forte connotation affective, est sans doute à l’origine de nombreuses difficultés des élèves. Une chose particulièrement surprenante : dans une famille d’éléments, il peut y avoir le même élément répété plusieurs fois, ce qui n’est pas le cas dans un ensemble (ni dans une « vraie famille »).

Faute (étourderie) . . . . . . . . . . . Quand elle est de calcul, pour l’étudiant, c’est de l’étourderie. Quand il a dit ça, il a tout dit ! C’est le meilleur moyen pour lui de ne pas affronter ses difficultés. L’étourderie, ce n’est pas grave. La prochaine fois, en faisant attention, il ne commettra pas l’erreur. Eh bien non  ! Cela ne se passe pas comme ça. On peut faire l’expérience suivante : vous prenez un calcul dans lequel vous avez commis une « faute d’étourderie » et vous le refaites entièrement sur une feuille blanche. Vous allez constater qu’effectivement, vous ne vous trompez pas à l’endroit où vous vous êtes déjà trompé, mais vous vous trompez quand même ailleurs ! Comme si

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Fonction*

c’était le calcul dans son ensemble qui présentait pour vous un problème, comme si votre cerveau n’était pas assez entraîné pour ce genre de tâche. C’est une expérience que nous avons réalisée plusieurs fois en classe, mais nous n’avons pas de référence scientifique sur le sujet. Quand on fait une « faute d’étourderie », il ne faut donc pas la traiter par-dessus la jambe. (Voir Erreur.)

Fermé* . . . . . . . . . . . . . . . . . Fermé est un terme utilisé en topologie. La définition est simple : un ensemble est fermé si son complémentaire est ouvert (voir ce mot). Et réciproquement. Mais un ensemble peut n’être ni ouvert, ni fermé. Encore plus fort, une partie peut être à la fois ouverte et fermée !

Ça quand même, ça laisse rêveur...

Figure . . . . . . . . . . . . . . . . . . On dit souvent : « La géométrie est l’art de raisonner juste sur une figure fausse. » Oui, peut-être, mais il est plus facile de raisonner juste sur une figure juste ! (Voir Dessin.)

Fonction* . . . . . . . . . . . . . . La fonction est un objet essentiel en mathématiques. L’étude des fonctions occupe la plupart des mathématiciens. On en trouve partout. Bien sûr, en analyse, quand on étudie des fonctions (sens de variations, limites par exemple), la plupart des phénomènes de la vie courante (la « vraie vie »…) se modélisent à l’aide de fonctions.

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Formule

Le sens français du mot « fonction » le plus proche se trouve par exemple dans la phrase « je m’habille en fonction du temps qu’il fait » ou « le taux d’intérêt de l’emprunt est fonction de la durée de l’emprunt ». Cependant, une fonction en mathématiques est d’apparence assez éloignée d’une fonction dans la vie de tous les jours (même si historiquement, les sens étaient proches). En mathématiques, cela donne « y = ƒ(x) » qui se dit « y égale ƒ de x », c’està-dire « y est fonction de x » (la fonction c’est ƒ). Une difficulté survient alors avec les fonctions « constantes ». Mathématiquement, il est légitime de dire que si on attribue la même somme d’argent de poche à chacun de ses enfants, l’argent de poche est fonction des enfants ! Autre exemple : « les allocations familiales vont devenir fonction des revenus ». Mais les allocations familiales ont toujours été fonction des revenus, même si elles étaient identiques pour tous ! C’est un exemple de fonction constante... Cela se double d’un différend de vocabulaire entre les mathématiques et les sciences physiques, où les fonctions constantes sont souvent qualifiées de « continues ». Par exemple, un courant continu est un courant constant, par opposition à un courant sinusoïdal, qui est tout autant continu (voir ce mot) d’un point de vue mathématique. Ce qu’il faut comprendre ici c’est aussi le sens de x (voir Variable). C’est une notion qui est souvent mal comprise et comme elle est centrale, toutes les constructions qui gravitent autour deviennent confuses dans l’esprit des élèves. Chacun doit s’approprier cette notion, en avoir une représentation mentale, il faut donc passer du temps à rêvasser, à méditer dessus. Cela permet aussi d’apprendre la rigueur. En effet, une fonction ƒ n’étant pas la même chose que ƒ(x) ou que sa représentation graphique, il est nécessaire de bien faire la différence.

Formule . . . . . . . . . . . . . . . . Une formule mathématique n’est pas une formule magique (quoique…). Souvent, on ne retient des mathématiques que des formules. Par exemple, une fonction n’est pas forcément définie par une formule, de même pour une suite. C’est une idée fausse qu’ont souvent les élèves. À leur décharge, la plupart des fonctions ou des suites étudiées au lycée sont définies par une formule. Les autres fonctions sont plus difficiles à étudier et exigent plus de capacité d’abstraction.

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G

Groupe* . . . . . . . . . . . . . . . On doit toujours savoir travailler en groupe.

Un groupe, dans le langage usuel, est un ensemble de choses, ayant une caractéristique commune (un groupe d’enfants par exemple) ou un intérêt commun. Quand il s’agit d’un groupe de personnes, il n’y a pas vraiment de hiérarchie ou de structure (contrairement à un parti politique par exemple). Les éléments constitutifs du groupe sont plus ou moins sur le même plan. Un groupe mathématique, est un ensemble d’éléments muni d’une loi interne, qui possède un certain nombre de propriétés. Un exemple de groupe très simple est l’ensemble des entiers relatifs* avec l’addition. Ce groupe est manipulé dès l’école primaire (même si l’on n’emploie pas cette terminologie). On peut considérer que les éléments jouent un peu tous le même rôle ; cela étant, il y en a un qui est particulier (l’élément neutre), et chaque élément est associé plus spécifiquement à un autre (son inverse, qui peut être égal à luimême). Dans un groupe, ce qui est intéressant, ce sont les relations entre les éléments, pas la nature de ces éléments.

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Groupe*

C’est une création mathématique assez récente (apparue en 1850 à partir des travaux d’Évariste Galois). Il y a des groupes partout en mathématiques et, plus curieux, il y a des groupes partout aussi dans la nature. Par exemple en cristallographie, on caractérise chaque forme de cristal par le groupe des transformations qui le laissent invariant (des symétries, des rotations, etc.). L’étude mathématique de tels groupes permet entre autres de déterminer le nombre de cristaux possibles, de les classer. Un autre exemple que tout le monde connaît est celui du Rubik’s Cube. L’ensemble des configurations du Rubik’s Cube constitue un groupe fini. On peut résoudre le problème du cube à l’aide de la théorie des groupes.

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H

Habitude . . . . . . . . . . . . . . Il faut aller contre ses habitudes.

Monsieur, je n’ai pas l ’habitude de faire comme ça ! Heureusement ! Sinon à quoi je sers ? Pour pouvoir progresser en mathématiques, il faut savoir rompre avec ses habitudes. Certaines techniques apprises au lycée deviennent inefficaces plus tard. Par exemple, pour résoudre un système de deux équations à deux inconnues, on peut procéder par substitution, mais cette technique ne se généralise pas. Ou encore, on apprend qu’« un carré est toujours positif » ; puis plus tard, on rencontre i2 = –1. Or, il est difficile pour un élève, qui a acquis, souvent au prix de gros efforts, une technique de calcul ou une notion mathématique, de se délester de ses habitudes. C’est une attitude que l’on retrouve dans la « vraie vie » : c’est souvent très difficile de faire changer les habitudes des citoyens, même si c’est pour aller vers une utilisation plus rationnelle de l’espace urbain par exemple, ou pour acquérir d’autres réflexes environnementaux (quitter la voiture pour les transports en commun, etc.). Les hommes politiques le savent bien.

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Hasard

Il y a quand même un côté positif aux habitudes : ce sont les méthodes... « Les méthodes sont les habitudes de l’esprit et les économies de la mémoire » (Antoine Rivarol).

Hasard

Dans un sujet d’exercice de probabilité, « au hasard » signifie toujours qu’il y a équiprobabilité. Par exemple, si on lance un dé « au hasard », on a une chance sur six d’obtenir 1. Mais si le dé est truqué, ce n’est plus le cas. Pourtant, on lance toujours « au hasard ». Dans ce dernier cas, on parlera plutôt « d’expérience aléatoire ».

Hélice Moi, je vous le dis, on va revenir aux avions à hélices…

Hélice mathématique

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Spirale (hyperbolique)

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Hérédité

L’hélice en mathématiques ressemble assez peu à une hélice d’avion. L’image la plus ressemblante est celle d’un ressort ou d’un escalier en colimaçon. Un colimaçon (ou spirale) en mathématiques ne ressemble pas à un escalier « en hélice », sauf vu de haut. Cela tombe bien, il est de bon ton de regarder les mathématiques de haut.

Hérédité . . . . . . . . . . . . . . . Voilà un mot qui a du sens en français ! L’hérédité est la transmission de caractères génétiques d’une génération à l’autre. C’est un mot qui est clairement associé à la génération, aux parents et aux enfants. Ce mot s’utilise en mathématiques, depuis peu (début 1980), dans la démonstration par récurrence*. On considère une propriété mathématique qui dépend de l’entier n, que l’on note P(n). Par exemple, on peut dire : « la propriété P(n) : 1 + 2 + 3 + … + n = n (n + 1) ». 2 Cette propriété est dite héréditaire quand, si on suppose qu’elle est vérifiée pour un entier n, on peut montrer alors qu’elle est vérifiée pour son successeur n + 1. Prouver l’hérédité d’une propriété consiste à démontrer l’implication  : P(n) ⇒ P(n + 1). Ici, en considérant que 1 représente la première génération, 2 la deuxième, etc., n la nème génération, la propriété est héréditaire si elle se transmet de génération en génération. Si la propriété est vraie au départ et si elle est héréditaire, elle est vraie tout le temps, c’est-à-dire pour toutes les générations. C’est le principe de la récurrence. La difficulté réside aussi dans le fait que l’on a à démontrer une implication et que pour démontrer cette implication, on commence par dire que « P(n) est vraie » pour un entier n quelconque. Or, la conclusion de la récurrence sera que « P(n) est vraie », quel que soit l’entier n. Toute la différence est dans le « quel que soit » qui intervient dans la conclusion. W         (3    /  &  #€$/3        +(n)% >    #  €$/3    +(n)% 8 !

Parlez-vous maths ?

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Humour

Peut-être que les difficultés rencontrées avec le raisonnement par récurrence proviennent dans certains cas de la difficulté à se situer dans le processus générationnel. Cette terminologie introduite tardivement n’a pas forcément facilité la compréhension. (Voir Récurrence.)

Humour . . . . . . . . . . . . . . . . Les mathématiciens ont un humour particulier, qu’ils sont les seuls à comprendre. Les blagues des professeurs tombent souvent à plat (ou bien les élèves rient par politesse... : Une blague que nous aimons bien : Un pilote est contraint d’atterrir dans le désert. Il marche quelque temps puis rencontre un homme assis dans le sable. Tout heureux, il lui demande : « Où sommes-nous ?». Alors l’homme réfléchit longuement, griffonne des signes incompréhensibles dans le sable. Puis finalement, il répond « nous sommes dans le désert ». - Vous, vous êtes mathématicien. - En effet, comment le savez-vous ? - Vous avez réfléchi longuement avant de répondre, votre réponse est parfaitement exacte, mais… elle ne me sert absolument à rien. Attention, il n’y a que les matheux qui ont le droit de la raconter… (Voir le livre de Bruno Winckler, Blagues mathématiques et autres curiosités, éditions Ellipses, assez complet sur le sujet.) (Voir Utilité.)

Hyperplan* . . . . . . . . . . . . Dans l’espace « usuel », il y a trois « degrés de liberté » (ou de dimension 3). Un plan est un objet mathématique qui, lui, n’a que deux degrés de liberté. Un de moins.

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Parlez-vous maths ?

Hypothèse

Si on prend un espace de dimension 4, d’un sous-espace (voir ce terme) de dimension 3, c’est-à-dire avec une dimension de moins, on dit que c’est un hyperplan. Et on généralise à des espaces de dimension quelconque.

Donc en dimension 2, un hyperplan est une droite. Ce n’est pas un super plan, votre hyperplan !

Hypothèse . . . . . . . . . . . . Quand on fait une démonstration, ou un exercice, il y a un certain nombre d’hypothèses : par exemple, on considère une fonction continue ou une famille libre. On ne se préoccupe pas de savoir si les hypothèses sont vraies ou fausses, on les pose forcément vraies. Il ne s’agit pas, comme dans une enquête, de faire une hypothèse (supposition) et de vérifier ensuite si elle est vraie. On part du principe qu’elle est vraie, et on regarde tout ce que l’on peut en déduire. En cas de blocage dans un exercice, il faut revenir aux hypothèses, voir si elles ont toutes été utilisées par exemple. En général, si on arrive à faire l’exercice sans utiliser toutes les hypothèses, il y a un problème ! (Sous réserve que l’énoncé soit bien pensé.) Bien sûr, il ne faut pas croire que l’on peut répondre à n’importe quelle question avec n’importe quelles hypothèses : connaissant la taille et la vitesse d’un bateau, il est difficile d’en déduire l’âge du capitaine12 ! Mais, qui peut bien se poser ce genre de question ?! Plus sérieusement, la réduction du nombre des hypothèses pour parvenir à une même conclusion est un vrai problème qui a été moteur dans l’histoire des mathématiques. La donnée d’hypothèses surabondantes peut être un problème pédagogique. Si on prend l’exemple du théorème des valeurs intermédiaires, il est souvent énoncé avec une hypothèse  ( *  "        "     (     4   /3 3   !       3( C 4  ( ) "

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12. Voir Stella Baruk, L’âge du capitaine, Points.

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I

Idéal* . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Idéal en français signifie d’abord « qui est une idée, qui n’a d’existence que pour la pensée ». On peut dire que c’est le cas des mathématiques... Cela signifie également « qui réunit toutes les perfections que l’esprit peut concevoir ». C’est aussi le cas des mathématiques... Mais un idéal en mathématiques a une signification précise. Par exemple, l’ensemble des nombres entiers relatifs pairs est un idéal de _. Cela ne veut pas dire que les nombres pairs sont « idéaux » (même si pour notre part, nous les préférons aux nombres impairs).

Identité . . . . . . . . . . . . . . . . Toujours remarquable.

En français, l’identité désigne le fait pour deux choses d’être similaires, mais cela désigne aussi ce qui est propre à chacun (« mon identité », « l’identité féminine »). À quelles conditions deux choses non identiques peuvent être considérées comme égales ? Vaste débat… de société. Parlez-vous maths ?

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Image*

En mathématiques, ce n’est pas un point sur lequel on débat... On peut remarquer que l’addition n’est pas la même chose que la multiplication, mais pourtant 2 + 2 est égal à 2 × 2. On rencontre d’abord les identités remarquables (on ne parle jamais des « non remarquables »…), ce que l’on pourrait appeler égalités remarquables, par exemple (a + b)2 = a2 + 2ab + b2. Puis se présente l’application «  identité  », dans des contextes très variés. L’application « identité » est une application qui associe à un élément luimême. Si on utilise la métaphore de « mouvement » associée à une application, l’application identité fait du surplace. Elle est extrêmement utile, comme le 1 peut l’être dans la multiplication ou le 0 dans l’addition.

Image* . . . . . . . . . . . . . . . . . Voici encore un terme très utilisé en français, surtout à notre époque caractérisée par « une société de l’image ». Chacun fait attention à son image, on est abreuvé d’images, on est sage comme une image, il y a le droit à l’image, l’image projetée sur l’écran, etc. Le mot « image » en mathématiques proviendrait plutôt de ce dernier sens. Il est apparu au xxe siècle. On l’utilise à partir du lycée quand on étudie les fonctions et les applications. Une application ou une fonction, notons-la ƒ, va d’un ensemble E dans un autre F (« autre » au sens mathématique, cela peut être le même ensemble !) et qui, à un élément de l’ensemble de départ, appelons-le x, associe un unique élément de l’ensemble d’arrivée, que l’on note dans ce cas ƒ(x). On dit que ƒ(x) est l’image de x (voir Antécédent). Quand on s’intéresse à tous les éléments de F de la forme « ƒ(x) », où x prend toutes les valeurs possibles dans E, on a un sous-ensemble de F, que l’on note ƒ(E) en général et que l’on appelle « l’image de ƒ ». L’image de ƒ est l’ensemble de tous les éléments qui sont des images. Cet ensemble est particulièrement intéressant quand ƒ est une application linéaire. Donc ce mot, qui est très concret, visuel en français, est assez abstrait en mathématiques. Où est l’image ? Quand on représente le graphe d’une fonction, on peut « voir » l’image de la fonction. Mais dire que « 4 est l’image de 2 » par la fonction « carrée » n’est certainement pas très visuel.

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Implication

Implication . . . . . . . . . . . . En français, « implication » se retrouve dans des expressions du genre « il est impliqué dans ce délit », « il s’implique sérieusement dans son travail ». Dans l’usage courant, « l’implication » caractérise le fait d’attribuer à quelqu’un un rôle dans une affaire, l’engagement dans une tâche. Il y a aussi le sens logique, celui qui est utilisé en mathématiques. L’implication, qui est à la base du raisonnement mathématique, caractérise le lien entre cause et effet. Par exemple, « il pleut, donc je prends mon parapluie ». L’objectif du raisonnement mathématique est de faire la chasse aux « propositions » vraies. Pour affirmer qu’une proposition est vraie, il y a deux solutions. Ou bien c’est un axiome ou une hypothèse, c’est-à-dire décrétée vraie, ou bien on la déduit par implication. Par exemple : « il pleut » (c’est vrai) ; « il pleut donc je prends mon parapluie » est vraie ; conclusion : « je prends mon parapluie » est vraie. Dans cette série de trois propositions vraies, la deuxième est une implication, car sa structure est « A donc B » (variantes : si A alors B, A implique B). Le schéma de raisonnement (modus ponens) est donc : A ; A donc B ; B. En recommençant ce raisonnement, parfois plusieurs fois, on démontre donc qu’une propriété est vraie. Quand est-ce qu’une implication est vraie ? C’est là que ça se complique, tout du moins que ce n’est plus tout à fait conforme à l’intuition. « A implique B » est vraie dans trois cas : A est fausse et B est vraie, A est fausse et B est fausse, A et B sont toutes les deux vraies. C’est là qu’il y a un décalage par rapport à l’usage courant : si A est fausse, A implique B est toujours vraie ! Si on dit « nous avons 25 ans donc la Terre est plate », on énonce quelque chose de vrai puisque ça fait longtemps que nous n’avons plus 25 ans ! Pour autant, savoir que nous n’avons pas 25 ans ne permet pas de conclure que la Terre n’est pas plate. Si dans l’usage courant, une implication marque la nécessité, ce n’est pas le cas en mathématiques. Bon là, ça devient de la logique (discipline à part entière) ; dans la pratique, on ne décortique pas le raisonnement comme ça.

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Inconnue

Si on nous demande de démontrer que « A implique B », on commence par supposer que A est vraie. En effet, comme si « A est fausse », « A implique B » est toujours vraie, il n’y a pas besoin de travailler. Le seul cas à considérer est « A est vraie ».13 W     

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Inconnue . . . . . . . . . . . . . . On ne discute pas avec les inconnues !

L’inconnue c’est x. L’inconnue est du genre féminin. C’est parce que les femmes sont terriblement mystérieuses… L’inconnue est l’objet mathématique que l’on cherche, qui doit être solution des belles équations posées ou des belles conditions formulées. Comme par définition, au départ, l’inconnue on ne la connaît pas, pour la cerner un peu, on commence par lui donner un nom. D’ailleurs, donner un nom aux choses est l’une des activités principales quand on fait des mathématiques. Dans une équation, il y a aussi des paramètres qui sont également désignés par des lettres. Oui, mais eux, on les connaît (au sens mathématique…).

13. Michel Onfray, dans l’une de ses conférences de l’université populaire de Caen (en l’occurrence l’avant-dernière du cycle 2012–2103 retransmise par France Culture le 29 août 2013), a dit que Raoul Vaneigem pense que « c’est parce qu’on se déteste que l’on déteste les autres », opinion qu’il ne partage pas car « j’en connais qui s’aiment beaucoup et qui sont doués pour la détestation des autres » (18’ 30’’), ce qui est une erreur de logique.

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Indécidable

Par exemple, dans l’équation ax + b = 0, si on décide que l’inconnue c’est x, a b et b sont des paramètres. On cherche x. Ici, cela donne x = – (sauf si a = 0). a w J F4               

   0   " $

    K  4  G ƒ    44 

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ça dépend de b. Si b est différent de 0  "$

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     #   

ou a = b = 0% +   7            6

Revenons à l’équation. Parce que l’on n’est pas obligé d’appeler l’inconnue x. C’est juste un usage répandu. Si l’inconnue est b, l’équation ax + b = 0 a toujours une solution : b = –ax. Moralité, dans un problème, il est important de commencer par repérer : les paramètres, les inconnues. Quand on discute (comme dans l’exemple précédent, si…, alors…), c’est toujours sur les paramètres, jamais sur les inconnues. Les inconnues, on les cherche. (Voir Discussion, Paramètre.)

Indécidable . . . . . . . . . . . C’est une bizarrerie des mathématiques. Le sens est clair en français. On ne peut pas décider. En mathématiques, le mot a le même sens ; en effet, si une proposition est indécidable, on ne peut pas décider si elle est vraie ou fausse. Plus précisément, il n’existe pas de démonstration qui prouve que cette proposition est vraie ou fausse. Ce n’est pas que l’on n’a pas encore trouvé la démonstration, non, c’est qu’elle n’existe pas. (Alors, comment savoir si la démonstration n’existe pas ou si on ne l’a pas encore trouvée ?) Pour une proposition indécidable, paradoxalement, on peut décider arbitrairement qu’elle est vraie ou qu’elle est fausse, cela n’amènera pas de contradiction. En revanche, les mathématiques que l’on fera à partir de là seront différentes. W    * 3*  #"/$/3  %     * 

" "$

  "*       #)  %  b    #%  ^ C

hypothèse a été émise au début du XXe 3   „) C     /  &

(  (  )     "   …  „ †  RM~S   +  C/  RM~

qui ont démontré que l’on ne pouvait ni prouver, ni réfuter cette proposition. En fait, il faut la considérer comme un axiome ou considérer que la proposition contraire est un axiome.

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Indépendance

Un exemple peut-être plus simple à comprendre est celui du cinquième postulat d’Euclide, stipulant qu’il n’existe qu’une seule droite parallèle à une droite donnée et passant par un point donné (ce n’est pas exactement le postulat d’Euclide, mais il lui est équivalent). Pendant longtemps, les mathématiciens se sont demandés s’il était possible de déduire cette proposition des quatre autres postulats, auquel cas ce ne serait pas un postulat, mais un théorème. Au xixe siècle, il a été prouvé que non. Le cinquième postulat d’Euclide est indécidable dans la théorie mathématique s’appuyant sur les quatre premiers postulats. Si on rajoute ce cinquième postulat, on trouve la géométrie euclidienne, qui est en gros une bonne approximation du monde dans lequel nous vivons. Mais si on remplace ce cinquième postulat par un autre, on trouve d’autres géométries qui décrivent aussi le monde réel (par exemple en tenant compte du fait que l’on vit sur une sphère et que les parallèles se coupent au pôle). Il coexiste donc plusieurs théories mathématiques, qui sont toutes cohérentes. Il est à noter que, quelle que soit la théorie mathématique (suffisamment compliquée quand même), il existera toujours des propositions indécidables (c’est le théorème d’incomplétude de Gödel). On peut remarquer que, pour une proposition indécidable, il est paradoxalement possible de décider si elle est vraie ou fausse ; on trouve là le seul cas où l’individu a le choix en mathématiques.

En attendant, quand vous ne parvenez pas à faire une démonstration, il est néanmoins peu judicieux d’écrire dans votre copie « cette proposition est peut-être en fait indécidable... » (Voir Théorème, Démonstration.)

Indépendance* . . . . . . . En français, l’indépendance est considérée comme une condition nécessaire de la liberté*. On veut l’indépendance pour se sentir libre. Quand un pays retrouve son indépendance, il retrouve sa liberté (« Vive le Québec libre ! », cette phrase célèbre du général Charles de Gaulle a fait couler beaucoup d’encre...). Néanmoins, il existe beaucoup de pays indépendants dans lesquels on ne jouit pas d’une grande liberté. Quand on est indépendant de ses parents, on est libre de mener sa vie (croit-on…). En algèbre linéaire, l’indépendance et la liberté sont synonymes. Une famille libre est une famille de vecteurs indépendants, c’est-à-dire qu’aucun vecteur de

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Infini

cette famille ne s’écrit comme combinaison linéaire des autres, qu’aucun vecteur ne « dépend » des autres. Dans une famille de personnes, n’est-ce pas plutôt le contraire, chacun dépend des autres à sa manière ? (Voir Famille, Liberté.) En probabilités, deux évènements sont indépendants si le fait que l’un se produise ne modifie pas la chance que l’autre se produise. Cette notion d’indépendance est souvent mal comprise dans la vie réelle. Par exemple, à chaque fois que l’on lance un dé (non truqué), chaque numéro a une chance sur six de sortir. Si on a lancé 100 fois de suite le dé et que l’on n’a obtenu aucun 6, la probabilité d’obtenir un 6 au 101e lancer est toujours de 1/6. (En revanche, la probabilité 100 5 de lancer 100 fois de suite un dé sans obtenir de 6 est de , c’est-à-dire de 6 l’ordre de 0,000 000 01.)

Inférieur (supérieur) . . . . . . . . Il n’y a pas de notion morale en mathématiques, ni de jugement de valeur ; quand on dit que 1 est inférieur à 2, il n’est pas « moins bien ».

Inférieur (ou supérieur) ou égal Il n’y a aucun problème à dire que « 1 est inférieur ou égal à 2 », même si la phrase « 1 est inférieur (strictement) à 2 » est aussi vraie (voir Vérité). Les élèves ont tendance à confondre les deux symboles «   "     

littérature (voir Littérature!     7 Ž     "  

éclairage mathématique. 1 1 1 1 1 š2 W    3*  1 + + + +

1 6 1 2 1 6  . 4 9 16 25 n 6 En revanche parfois, en effet, une somme d’un nombre infini de nombres 1 1 1 1 1  4H   1 + + + + 1 6 1 1 6 

1 ‡  2 3 4 5 n

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Supplémentaire

Supplémentaire . . . . . . Le plus dur, c’est de se rappeler qu’il faut deux « p » ! Oh, ce n’est pas difficile. Il faut deux « p » à supplémentaire car pour complémentaire, il ne peut y en avoir qu’un ! Pourquoi vous me parlez de complémentaire ? Ah, vous ne savez pas ? Eh bien, parce qu’il y a des angles complémentaires et des angles supplémentaires ! Pour les premiers, la somme fait un angle droit et pour les seconds, un angle plat. Quand les angles sont supplémentaires, cela fait deux angles droits, comme les deux « p » ! Mouais… On utilise également le terme « supplémentaire » en algèbre linéaire, pour qualifier deux sous-espaces vectoriels. On pourra aussi dire « F est un supplémentaire de G ». Les mots « complémentaire » et « supplémentaire » ayant des sens voisins en français, les notions de complémentaire et de supplémentaire se confondent dans l’esprit des élèves, avec souvent des conséquences fâcheuses. (Voir Complémentaire.)

Sur . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Comment ça, en mathématiques il y a des choses les unes sur les autres ? Est-ce bien moral ? Quand on considère une fonction, par exemple cosinus, on dit que cosinus est définie « sur ^ », et non « sur [–1;1] ». C’est une erreur fréquente, sûrement due au fait que [–1;1] est l’ensemble des images de cette fonction. Cependant, on a tendance à dire « une bijection de I sur J » !

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Système

Système . . . . . . . . . . . . . . . « Système » est un mot que l’on trouve dans différents contextes, aussi bien en français qu’en mathématiques. En français, on parle de système philosophique, de système politique, de système économique, de système éducatif, de système solaire, de système nerveux, de système sanguin, etc. Le principe commun est qu’il s’agit d’un ensemble d’éléments ou de règles qui interagissent en suivant certaines lois. En musique, un système de portées est un ensemble de portées qui doivent se lire ensemble (main droite et main gauche au piano par exemple). On retrouve cette notion en mathématiques dans « un système d’équations linéaires » ou un « système différentiel », qui sont dans les deux cas des ensembles d’équations dont on cherche les solutions vérifiant toutes ces équations simultanément. On parle aussi parfois de système de vecteurs pour famille de vecteurs, ou de système d’axes (pour définir les coordonnées), ou encore de système de numération (ce sont les règles pour noter les nombres, pour les ajouter, les multiplier, etc.). On a par exemple le système de numération en base 10 ou en base 2. Néanmoins, les systèmes rencontrés le plus souvent par les élèves et les étudiants sont les systèmes d’équations.

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T

Tangente* . . . . . . . . . . . . .

Naïvement, la tangente est une droite qui « frôle » une courbe sans la couper… Erreur !

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Tangente*

Si on prend l’exemple de la fonction sinus en 0, la tangente est une droite qui coupe nettement la courbe…

Dans le cadre scolaire, on rencontre le mot « tangente » pour la première fois au moment de l’étude du cercle. Dans ce cas, la tangente en un point à un cercle (définie comme perpendiculaire au rayon) est une droite qui « frôle » le cercle sans le couper. Néanmoins, on ne généralise pas la notion de tangente à partir de cette idée géométrique. On part de la notion de nombre dérivé d’une fonction en un point (voir Point). Et par définition, on appelle tangente à la représentation graphique de la fonction au point d’abscisse x la droite qui passe par ce point et dont le coefficient directeur est le nombre dérivé. Sauf qu’en général, au lycée, on ne montre pas que, d’une part, cette définition n’est pas en contradiction avec le cas de la tangente à un cercle, et que, d’autre part, cette définition « modélise » bien l’idée naïve suggérée par la situation d’un cercle et de l’une de ses tangentes. Et pour cause, puisque comme on l’a vu avec la fonction sinus en 0, la définition prise n’assure pas du tout ce caractère de droite qui « frôle » une courbe sans la couper. En fait, c’est une autre idée qui est en jeu : l’indiscernabilité. C’est ce que l’on peut expérimenter avec une calculatrice graphique ou un ordinateur. On demande le tracé conjoint d’une représentation graphique de fonction avec la tangente en un point. En « zoomant », il arrivera un moment où on n’arrivera pas à discerner les deux lignes sur l’écran. On peut voir les choses de manière plus « manuelle ». Supposons que l’on ait une mine d’épaisseur de 0,5 mm et un papier carré de 20 cm de côté. On montre que l’on peut choisir une unité graphique telle que les tracés de la représentation graphique d’une fonction et de sa tangente en un point soient indiscernables.

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Parlez-vous maths ?

Temps

C’est bien sûr la même chose entre un cercle et l’une de ses tangentes. Le cercle est bouclé !

Ouais ! Tu dis ça pour faire un mot ! Mais tu ne m’as toujours pas défini dans le cas général la tangente comme la perpendiculaire à un rayon ! Bonne remarque. Mais c’est une autre histoire… Vous dites toujours ça, vous profs de maths !

Temps . . . . . . . . . . . . . . . . . En devoir surveillé, on manque toujours de temps. Le temps permet d’illustrer la notion de variable (voir ce mot). Inconvénient : il est difficile de remonter le temps ! Et si nous parlions du « temps pédagogique » ? D’abord en parodiant Anatole France25 : « La vie est trop courte et le programme est trop long. » En classe, on n’a jamais le temps de tout comprendre. Il faut bien prendre au pied de la lettre cette phrase. Mais si on doit réfléchir a priori sur la longueur des programmes, on ne pourra jamais construire un enseignement qui permette à tous de tout comprendre. L’enjeu est donc de développer des capacités (ou des compétences, comme on veut…) pour acquérir le maximum de savoirs. On peut dire qu’« apprendre, c’est accepter d’avancer de nuit par temps de brouillard dans un tunnel avec des lunettes de soleil ». Il ne s’agit pas d’être dans une situation confortable ! La citation suivante est également pertinente : « Un mathématicien est un aveugle dans une pièce sombre cherchant un chat noir qui n’y est pas » (Charles Darwin).

25. Propos d’Anatole France cités par Marcel Le Goff : « La vie est trop courte et Proust est trop long. »

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Termes

Termes Ne pas écrire « thermes », cela ne fait pas très sérieux…

Théorème . . . . . . . . . . . . . Les théorèmes, voilà une chose capitale en mathématiques ! Ce mot n’existe que dans le domaine mathématique, il n’a pas d’autre sens en français. On peut dire que les mathématiques s’occupent de théorèmes. Faire des mathématiques, c’est démontrer des théorèmes. Mais ce n’est pas toujours comme cela que les choses se présentent aux étudiants. À partir du lycée, et surtout après le bac, un cours de mathématiques se passe en général de la manière suivante : définitions, théorèmes, exercices. On définit des objets, on énonce des théorèmes à leur sujet, théorèmes que l’on démontre ou non en cours, qui en tout cas peuvent être démontrés (c’est même la définition : un théorème est une proposition qui a été démontrée) et ont été effectivement démontrés par d’autres. Ensuite, on fait des exercices. Cependant, souvent, un exercice consiste à démontrer un théorème... même si on ne l’énonce pas clairement à la fin. (Parfois c’est un cas trop particulier, qu’il n’est pas nécessaire d’élever au rang de théorème.) Il faut bien distinguer « théorème » de « proposition » (voir ce mot). Un théorème est une proposition, mais une proposition n’est pas forcément un théorème.

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Topologie*

W /3    (     # ;

 [% +             [a,b]     ( *

sur ]a,b[, alors il existe c dans l’intervalle ]a,b[ tel que f’(c) = (b) - (a) C"  /3

* -



  ! 5   "  /3  "         (  W /3 "     J >        #"(c) = (b) - (a) % * -

X      (     &    ( 

   /3

(  *       !

Terminons sur une jolie histoire. Au départ, en grec, theorema signifiait à la fois fête, méditation et objet d’étude ! Exactement ce qui caractérise les mathématiques !

Topologie* . . . . . . . . . . . . La topologie est un domaine récent (milieu du xixe siècle) des mathématiques. Ce mot n’a pas de sens en français, même s’il évoque le terme de topographie. La topologie est l’étude du lieu, ici du lieu en un sens mathématique à préciser. Sans topologie, on ne peut pas parler de limite, donc de continuité, voire de dérivabilité, etc. Il y a ce que l’on appelle la topologie générale, la plus abstraite, que l’on n’enseigne plus en dehors d’études approfondies en mathématiques. Quand on a un espace muni d’une topologie, on dit que l’on a un espace topologique, on peut parler alors d’« ouvert », de « fermé », de « voisinage », d’« intérieur », d’« adhérence », de « limite », d’« espace séparé », d’« espace compact », d’« espace connexe »… Les espaces munis d’une distance (et donc les espaces vectoriels munis d’une norme, les espaces vectoriels munis d’un produit scalaire) sont des exemples d’espaces topologiques, donc d’espaces dans lesquels les mots ci-dessus ont un sens. Il y a une topologie « naturelle » sur l’ensemble des nombres réels (celle liée à la valeur absolue), c’est pourquoi on étudie le plus souvent toutes ces notions dans le cadre des nombres réels, sans pour autant avoir parlé au préalable de topologie générale. Il y a un usage du mot « topologie » dans d’autres sciences. Par exemple en chimie, la « topologie chimique » s’intéresse à la géométrie des molécules, ce qui en fait leur complexité, sans se soucier des aspects quantitatifs. On peut rapprocher ces préoccupations de la théorie des graphes (ou des nœuds) et de l’idée

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Toujours

de déformation continue26. C’est précisément la notion de continuité qui assure le lien avec le sens mathématique du mot topologie. Un exemple classique consiste à dire qu’une tasse et un beignet sont topologiquement équivalents dans la mesure où l’on peut déformer l’un pour obtenir l’autre de manière « continue », c’est-à-dire, concrètement, « sans cassure ».

Toujours . . . . . . . . . . . . . . . Dans le langage courant, « toujours » fait souvent référence au temps (voir ce mot). Mais on l’utilise également dans des expressions comme « avec du foie gras, toujours un blanc sucré » (ce qui peut être discuté...). En mathématiques, on emploie ce mot pour une propriété qui est vraie pour tous les éléments d’un ensemble. Par exemple, « x2 + y2 est toujours supérieur ou égal à 0 » signifie que « quels que soient les réels x et y, x2 + y2est supérieur ou égal à 0 ».

Tribu* . . . . . . . . . . . . . . . . . . Encore un mot très évocateur, qui fait voyager dans le temps et dans l’espace. Agglomération de familles vivant dans la même région ou division de la population (les tribus des Indiens d’Amérique), ou plus proche de nous, l’ensemble des membres de sa famille (élargie) ou l’ensemble de ses copains. Les lycéens et les jeunes étudiants s’imaginent souvent comme faisant partie d’une tribu. (Est-ce que l’ensemble des amis sur Facebook est une tribu ?) En mathématiques, on retrouve cette idée d’agglomération, de grand nombre d’objets ayant un point commun. On utilise ce terme en particulier dans la théorie des probabilités. En effet, on parle de la probabilité d’un évènement (voir ce mot). Mais qu’est-ce qu’un évènement ? Il faut avoir des règles. L’ensemble des évènements obéissant à certains axiomes s’appelle une tribu. Encore une fois, on peut passer pas mal de temps à faire des probabilités sans en parler, parce qu’il existe une tribu « naturelle »,

26. En chimie, une condition de non-« planarité » est rajoutée pour rentrer dans le domaine de la topologie chimique.

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Trivial

l’ensemble des parties de Ω (Ω étant l’ensemble des expériences aléatoires). Au début, on se place souvent dans ce cadre-là.

Trivial . . . . . . . . . . . . . . . . . . Sert au professeur quand il n’a pas envie de refaire une démonstration peu « gratifiante » qu’il a effectuée plus de vingt fois au cours de sa carrière. Sert à l’élève quand il ne sait pas faire une démonstration d’un résultat qui lui paraît évident. À éviter !

« Bon, cela je ne le démontre pas, c’est trivial », dit le professeur dédaigneusement à l’élève qui n’ose rien dire, ne comprend rien et de plus se sent insignifiant, car ce qu’il comprend c’est qu’il devrait comprendre. Dans le domaine des mathématiques, « trivial » ne veut pas dire grossier, indécent, mais évident. Avec une légère nuance de mépris, de flemme ou de manque de temps (on ne peut pas non plus tout expliquer). Pour les étudiants, il faut trouver le juste milieu du trivial, pour d’une part ne pas perdre de temps et d’autre part ne pas perdre de points ! Cela désigne aussi les cas « particuliers », extrêmes. Par exemple, E et la partie vide sont des parties (sous-ensembles) triviales de E. Autre exemple : une combinaison linéaire triviale est une combinaison linéaire dont tous les coefficients sont nuls. Un cas trivial est un cas particulièrement simple (« le cas où n = 0 est trivial »). Mais c’est essentiellement une notion relative, car elle dépend du niveau d’instruction mathématique. Une histoire : le professeur fait une démonstration et dit à un moment donné : « ce passage est trivial ». Puis, manifestement pris d’un doute, s’arrête, se met à réfléchir, une minute ou deux, s’assied à son bureau, écrit furieusement pendant un quart d’heure et se relève, triomphant : « Oui, c’est bien trivial ! »

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U

Un (deux, trois…) . . . . . . . . . . . . . Tout le monde sait ce que veut dire « un », « deux », « trois »… En réalité, ça n’est pas si sûr ! En effet, quand un mathématicien dit « soit a et b deux nombres », il envisage la possibilité « a = b ». Parfois, il en va de même dans le langage courant. Par exemple, « je choisis deux élèves dans la classe, le plus grand et le plus âgé » ; c’est peut-être le même. Quand on dit « un » en mathématiques, c’est « un au moins ». Exemple : la proposition « l’équation x3 – 3x + 1 = 0 a une solution dans ^ » est vraie (vu le théorème des valeurs intermédiaires) alors que cette équation a (exactement) trois solutions réelles. « Un » est employé ici en tant qu’article « indéfini » ; « le » est l’article « défini ». On dira que « 1 est la solution réelle de l’équation x3 – 1 = 0 » parce que 1 est la seule solution réelle de cette équation. Donc si on me dit de montrer que telle équation admet une solution, je ne dois pas chercher à montrer qu’elle n’en admet pas deux !

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Unicité

Si on veut exactement un objet, on dit « un et un seul ». On peut dire aussi « un, exactement » et, plus généralement, « deux, exactement » (ou « deux distincts »), « trois, exactement »... De même, dans l’énoncé d’un théorème comme celui des accroissements finis, quand on dit, dans certaines conditions, qu’il existe un nombre c appartenant à un certain intervalle tel que ƒ(a) – ƒ(b) = ƒ′(c) × (a – b), on ne sous-entend pas que c est unique ! Il faut prendre les énoncés au pied de la lettre (voir Information). ;     /3  #    " )3*%   #X";*4 „ %   "  $›  ` non constant admet le même nombre de racines   )6   (   7     !

(       4  +   +  j3 - j2 - j 1 1  "

 +  (j - 1)2 × (j 1 1), admet    R           #  *%  –1 > #% ) 

#  %  #  % )  #%J

(Voir Distinct.)

Unicité . . . . . . . . . . . . . . . . . Il y a deux grands types de problèmes en mathématiques, des problèmes d’existence et des problèmes d’unicité. Une équation a-t-elle une solution ? C’est un problème d’existence. Cette solution est-elle unique ? C’est un problème d’unicité. Quand on dit « l’équation admet une solution », cela veut dire « au moins une » (problème d’existence). Si on veut préciser qu’elle n’en a qu’une seule, on dira « l’équation admet une et une seule solution » ou bien « l’équation admet une unique solution ». Les démarches pour prouver l’existence et pour prouver l’unicité sont de natures très différentes. En général, on s’occupe de chaque problème séparément. Les problèmes d’unicité sont souvent plus simples. On peut même parfois commencer par démontrer que s’il existe une solution, elle est unique, pour s’apercevoir plus tard qu’il n’y a pas de solution... Pour démontrer l’unicité, on peut utiliser un raisonnement par l’absurde : on suppose qu’il y a deux solutions distinctes et on essaye d’en déduire une contradiction.

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Utilité

Mais on peut faire un autre type de raisonnement, qui ressemble au raisonnement par l’absurde : on commence par considérer deux solutions. (Quand on dit deux dans ce contexte, les deux solutions peuvent être la même...) Et on démontre qu’elles sont égales.

Union (ou réunion) . . . . . . . . . . Un moment de poésie : « Dans l’union de deux personnes les yeux ne se fondent pas... »

Dans le langage courant, on utilise le mot « union » pour désigner une association de deux personnes ou plus, des sociétés, des groupes… afin de fonder une nouvelle entité (un mariage, une nouvelle société, une nouvelle ville, etc.). En mathématiques, on emploie ce terme comme on emploie les termes de « plus », « fois », etc. C’est un terme opératoire, on le trouve entre deux ensembles : « A union B ». Le résultat de cette opération est un nouvel ensemble. On utilisera le terme de réunion pour désigner le résultat. « L’ensemble des entiers naturels est la réunion de l’ensemble des nombres pairs et de l’ensemble des nombres impairs. » On trouve également « l’ensemble des nombres impairs union l’ensemble des nombres pairs est égal à l’ensemble des entiers naturels ». Contrairement à un mariage, on peut faire la réunion d’un ensemble avec lui-même et d’un ensemble avec l’ensemble vide : le résultat est l’ensemble lui-même dans les deux cas. La réunion mathématique n’a rien à voir avec une réunion de travail !

Utilité . . . . . . . . . . . . . . . . . . Tout le monde sait que les mathématiques ne servent à rien ! Naguère, un ministre de l’Éducation nationale s’interrogeait sur la place de l’enseignement des mathématiques au lycée et un autre trouvait que les mathématiques étaient « en train de se dévaluer, de façon quasi inéluctable », puisque nous disposions de calculatrices et d’ordinateurs !

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Utilité

Dans l’ouvrage Mathématiques en liberté, Cédric Villani raconte que les journalistes lui posent toujours la question « à quoi servent les mathématiques ? », avec, bien sûr, l’idée sous-jacente qu’elles ne servent à rien ! Dans ces conditions, est-ce que quelques lignes dans cet ouvrage suffiront à prouver l’utilité des mathématiques ? Gageons que si vous êtes en train de lire ce dictionnaire, c’est que vous en avez déjà une petite idée... Cependant, remarquons la position « inverse » qui consiste à faire des mathématiques l’alpha et l’oméga de toute activité humaine. L’histoire récente de ce début de xxie siècle montre les dégâts que peut causer une économie qui ne se pense qu’à travers des modèles mathématiques27. Un mot sur « l’incroyable efficacité des mathématiques », comme titrait en janvier 1999 le magazine La Recherche28. Sans rentrer dans un débat philosophique, nous dirons simplement que les théories mathématiques servent parce que si ça n’était pas le cas, on développerait de nouvelles théories. +    )       (

XIXe 3

    (

la nécessité du cinquième postulat d’Euclide, mais ce n’est que plus tard, au début du XXe siècle, avec la découverte de la relativité, qu’elles ont pris toute leur importance. Sinon, on n’en parlerait plus.

27. Voir le film Comment j’ai détesté les maths, d’Olivier Peyon. 28. Dans la presse grand public, on trouve régulièrement des articles portant sur la même problématique.

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V

Valeur approchée . . . . . . . . . . Ne pas dire « la » valeur approchée d’un nombre, mais « une » valeur approchée. De plus, sans précision, on peut dire n’importe quoi : 1 est une valeur approchée de 2014 à… 2013 près ! Une question « existentielle » : 3,141 6 est-il une valeur approchée de π à 10–4, ou π est-il une valeur approchée de 3,141 6 à 10–4 ?

Variable* Tout d’abord, dans le Dictionnaire de l’Académie française, « variable » est un adjectif. Il n’y a que dans l’expression « le baromètre est au variable » qu’on lui reconnaît le statut de nom… masculin ! En mathématiques, il faut donc accepter d’utiliser ce mot comme un nom féminin.

Oh là, moi, ça me va ! Souvent femme varie…

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Variable*

Premier problème, que veut dire ce mot en français ? Variable, c’est ce qui varie, qui change, sous-entendu souvent, avec le temps. Quand on quitte le domaine du calcul numérique pour faire des mathématiques plus sophistiquées, on rencontre des lettres, à partir de ce moment, les choses se compliquent et deviennent, pour certains, inaccessibles. On passe du calcul numérique « (1 + 2)2 = 9 » au théorème « pour tout a et tout b réels, (a + b)2 = a2 + 2ab + b2 ». Parmi toutes ces lettres, certaines sont appelées paramètres, inconnues, ou encore variables. Une variable en mathématiques, c’est quelque chose qui peut prendre plusieurs valeurs. Ce terme s’oppose à constante. Considérons la fonction ƒ définie par, pour tout x réel, ƒ(x) = 2x + 1. Ici, x est la variable, elle peut « prendre » toutes les valeurs possibles réelles. Par exemple, si x = 2, ƒ(2) c’est 5. Si x = 0, ƒ(0) c’est 1. Cependant, dans la fonction g définie par, pour tout x réel, ƒ(x) = ax + 1, x est la variable, mais a est une constante. On a donc trois lettres, a, g, x qui interviennent dans ce dernier exemple. On parlera de variable pour x et de paramètre pour a. En effet, si on remplace x par une autre lettre, on n’a pas changé la fonction, on est toujours avec la même fonction g. En revanche, si on remplace a par une autre lettre, on obtient une autre fonction.

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Variable*

   3      €  (  ^ dans l’ensemble des fonctions

      €(a)    

   & x associe ax + 1, a devient la (  *    €

Dans ces derniers exemples, f, g, H sont plutôt considérés comme des « noms » que comme des variables ou des paramètres. Dans l’équation x2 – 3x + 2 = 0, x est une variable. Mais seules les valeurs x = 2 et x = 1 vérifieront l’équation. Dans ce cas, on emploie plutôt le terme « inconnue », surtout si le problème est « résoudre l’équation ». Quand on rencontre une lettre dans un énoncé mathématique, ce n’est pas forcément une variable. C’est l’une des plus grandes difficultés pédagogiques. Il faut bien distinguer quand on peut remplacer une lettre par une autre (on parle parfois de variable muette) et quand ce n’est pas possible (c’est le nom d’un objet fixé dans l’énoncé). Tout ce qui est introduit dans un énoncé par « soit » (« soit a un réel…, soit ƒ une fonction…, soit n un entier naturel…, etc. ») est un nom, qui désigne un objet du problème. On ne peut pas choisir un autre nom. Quand on vous présente quelqu’un « tiens, voilà M. Machin », il est assez désagréable pour lui d’être appelé M. Truc ; de plus, il risque de ne pas se sentir concerné. Dans une somme : S n 

n

k 2, n est la variable de la suite (S n). Si on fixe n, on k 1

peut remplacer, dans l’écriture de S n, k par une autre lettre i, j,…, sauf par n. Une variable, quand elle ne prend que des valeurs entières, est appelée plutôt un indice. Dans l’intégrale :

b 2 a

t dt , a et b sont des paramètres, t est une variable muette,

on peut la remplacer par une autre lettre (sauf si cette lettre est déjà utilisée comme nom, par exemple a ou b). Dans un énoncé, il faut repérer les objets du problème, définis par un nom, voir si ces objets peuvent prendre plusieurs valeurs (si ce sont des paramètres), ce qui amène souvent à faire une discussion (voir Objet, Discussion). Ces objets (par exemple une fonction, une suite) peuvent être définis à l’aide de variables muettes ; on a davantage plus de latitude pour choisir le nom de ces variables, même s’il y a des usages courants. On oppose parfois la notion de variable muette à celle de variable libre, en logique, en informatique. Une variable qui n’est pas muette est libre.

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Variable aléatoire

(Voir Paramètre, Notation, Inconnue.)

Variable aléatoire . . . . . . . . . . Une variable aléatoire, pourrait-on croire, est une variable qui prend ses valeurs « au hasard ». Eh bien pas vraiment, même si on rencontre ce terme en probabilités, et qu’à l’origine il y a quelque chose qui varie aléatoirement. En fait, une variable aléatoire est une fonction. En général, quand on a une fonction ƒ, on s’intéresse à ses images, ƒ(x), pour une certaine variable x. Une variable aléatoire, c’est une fonction, notée souvent X (encore un risque de confusion...) dont les valeurs dépendent d’une expérience aléatoire donnée ; en d’autres termes, la variable de la fonction « variable aléatoire », c’est l’expérience. Par exemple, dans le cas où l’expérience aléatoire (notée ω) consiste à lancer un dé, on notera le nombre obtenu X(ω). Quand on manipule des variables aléatoires, les variables « disparaissent ». En effet, dans l’exemple précédent, on écrira l’évènement A = {ω Ω, X(ω) pair} simplement A = {X pair}. C’est vraiment déroutant par rapport à tout ce que l’on apprend en analyse ! Il faut dire que le langage des probabilités est à part dans le langage des mathématiques. (Voir Évènement.)

Vecteur* . . . . . . . . . . . . . . . On peut rencontrer cette phrase dans la presse : « Les moustiques vecteurs du paludisme sont les anophèles. » Autre exemple : « L’hydrogène et les piles à combustible sont de bons vecteurs d’énergie renouvelable. » Il y a donc un usage courant de ce mot, dans le sens « agent conduisant, transmettant, transportant quelque chose ». Les mathématiciens ont d’abord retenu de son étymologie l’idée de déplacement en ligne droite sur une certaine distance et dans un certain sens. Ce sont les bons vieux vecteurs de la géométrie élémentaire : le « vecteur AB », noté AB, se caractérise par sa direction (voir ce mot) qui correspond à celle de la droite (AB), son sens qui est celui de A vers B et sa longueur (ou sa « norme ») qui est la distance entre A et B.

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Vérité

On peut, grâce à ces vecteurs, formaliser un certain nombre de phénomènes physiques : les forces, la vitesse… Avec parfois une subtilité en plus : on aura des vecteurs libres et des vecteurs liés. Mais le plus important n’est pas là. L’intérêt des vecteurs réside dans le fait que l’on sait effectuer deux opérations (une interne, l’autre externe (voir Loi)) qui ont les mêmes propriétés que l’addition et la multiplication des nombres (en gros…). Aussi, on parle d’addition et de multiplication ! Et cela débouche sur une redoutable efficacité calculatoire. Mais il y a encore plus ! On s’est rendu compte que d’autres « espaces » que celui de la géométrie élémentaire permettaient ce même genre de calculs. Par exemple, des ensembles de fonctions peuvent être traités comme l’ensemble des vecteurs de la géométrie élémentaire. Outre l’efficacité calculatoire qui est transférée, on a ainsi la possibilité de « voir » des phénomènes « invisibles ». Travailler sur des fonctions revient à faire de la géométrie élémentaire. C’est analogue (voir ce mot) avec les polynômes, les matrices…

Vérité. . . . . . . . . . . . . . . . . . . Faire des mathématiques, c’est rechercher des vérités. On part du principe qu’une proposition mathématique ne peut pas être à la fois vraie et fausse, ou dépendre des points de vue. C’est un monde très rassurant sur ce plan. Bien sûr, il existe des propositions indécidables (voir ce mot), mais on ne les rencontre pas tous les jours ! Parfois, on a l’impression néanmoins qu’une chose vraie un temps devient fausse. Par exemple, « un carré est toujours positif ». On nous répète cette phrase dès que l’on apprend la multiplication, et puis soudain hop, on rencontre les nombres complexes et on découvre que i2 = –1. Alors là tout s’écroule ? Non en fait, c’est une question de contexte. Le carré d’un nombre est toujours positif lorsque ce nombre est réel. Dans le cas de i2 = –1, il ne s’agit plus d’un nombre réel. Donc, soyons rassurés, il n’y a qu’une vérité. Cela dit, qu’est-ce que la vérité pour un mathématicien ? Il n’y a pas de vérité absolue. Une vérité est relative à un système (un ensemble d’axiomes). Dans la géométrie euclidienne par exemple, il est vrai que par un point donné, on ne peut mener qu’une parallèle Parlez-vous maths ?

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Vide*

à une droite donnée, et ce sera toujours vrai. Mais ce n’est pas le cas dans une géométrie non euclidienne. Dans un système logique, il y a au départ des axiomes, qui sont décrétés comme vrais, un point c’est tout, tout à fait arbitrairement (ou presque). À partir de là, on en déduit les théorèmes, c’est-à-dire les propositions vraies. Plusieurs mondes parallèles peuvent exister. Une proposition vraie dans un système, peut ne pas l’être dans un autre. Est-ce si différent « dans la vraie vie » ? Si on considère que « l’Homme est au service de l’économie » ou que « L’économie est au service de l’Homme » (deux propositions contradictoires), on déduit des « théorèmes » tout à fait différents, et contradictoires. Par exemple, dans un cas on licenciera pour augmenter les profits, dans l’autre on diminuera les profits pour sauvegarder les emplois. Ce sont deux systèmes logiques incompatibles. Mais avec tout ça, il faut bien vivre ensemble... Un autre aspect de la question de la vérité est le suivant. Parfois, les mathématiques sont tellement compliquées que peu de personnes sont capables de comprendre certains pans de la théorie. Le commun des mortels mathématiciens est obligé de faire confiance aux experts. Par exemple, prenons le théorème de Fermat démontré par Andrew Wiles en 1994. Dans un premier temps, on peut estimer que le nombre de mathématiciens qui ont lu la démonstration intégralement est de l’ordre de la centaine. Pendant quelques mois, la démonstration était acceptée, puis un lecteur s’est aperçu d’un manque, la démonstration est devenue insatisfaisante, et a finalement été complétée par Wiles (il aura mis un an avec l’aide d’un autre mathématicien, Richard Taylor !). On peut constater sur cet exemple que ce qui a été admis vrai un temps ne l’a plus été, puis l’a été à nouveau, pour l’être encore… jusqu’à présent. En fait, tout cela repose sur un consensus. Pour autant, la proposition, elle, n’a pas changé. C’est notre connaissance sur elle qui a changé. (Voir Absurde, Indécidable, Théorème.)

Vide* . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Le vide caractérise souvent l’absence : journée vide, esprit vide, vide de l’existence, ventre vide… Comment définir un verre vide ? Par la négative : il ne contient pas de liquide.

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Vide*

Vide, dans le langage courant, c’est le « rien ». La difficulté a été de penser que le vide lui-même était quelque chose. En mathématiques, on pose de manière axiomatique29 l’existence d’un ensemble vide, noté ∅. C’est un ensemble qui ne contient pas d’élément. Il n’y a qu’un seul ensemble vide. L’ensemble vide, ce n’est pas rien. Il n’y a rien dedans, mais ce n’est pas rien. Savoir qu’un ensemble est vide, c’est savoir quelque chose… qui peut être signifiant. Par exemple, considérons l’ensemble des femmes ayant obtenu la médaille Fields (l’équivalent du prix Nobel pour les mathématiques). On obtient l’ensemble vide. En effet, aucune femme ne l’a obtenue (au jour où nous écrivons ces lignes, au printemps 2014)30. Eh bien, cela ne veut pas « rien dire »... De plus, ce que peut en penser le lecteur en dira également long sur lui ! Comme on peut dire que l’ensemble vide ne prend pas beaucoup de place (!), on le trouve partout : l’ensemble vide est contenu dans tous les ensembles. C’est une partie (ou sous-ensemble) de chaque ensemble (voir Partie). Amusons-nous avec l’ensemble vide. L’ensemble des parties de l’ensemble vide, noté P(∅) contient donc un élément, l’ensemble vide : on a donc P(∅) = {∅}. Ce nouvel ensemble contient donc un et un seul élément. Si on prend maintenant l’ensemble des parties de cet ensemble, on a : P(P(∅)) = {∅,{∅}}, il contient deux éléments. Comme quoi à partir de rien, on peut fabriquer « un » et « deux » et par récurrence (voir ce mot)… on peut construire tous les entiers31, qui eux mêmes permettent de construire les autres ensembles de nombres,… !

Toute votre théorie mathématique reposerait-elle sur du vide ?

29. En toute rigueur, dans la théorie des ensembles dite ZFC (Zermelo-Fraenkel avec axiome du choix), l’existence de l’ensemble vide n’est pas un axiome, mais on peut sans inconvénient le prendre comme axiome. 30. Ça y est ! Marayam Mirzakhani (iranienne) vient d’obtenir la médaille Fields en août 2014. 31. Raymond Devos ne disait-il pas : « Une fois rien... c'est rien ! Deux fois rien... ce n'est pas beaucoup ! Mais trois fois rien !... Pour trois fois rien, on peut déjà acheter quelque chose... et pour pas cher ! » R. Devos, Sens dessus dessous, Paris, Stock, 1976.

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Voisinage*

Voisinage* . . . . . . . . . . . . . Voilà encore un mot issu de la topologie. « Voisinage », en français, implique une certaine proximité ; ce n’est pas le cas en mathématiques. On parle de voisinage d’un point, c’est une notion mathématiquement précise. En revanche, dire que « deux points sont voisins » (ou « les points sont proches ») n’est pas une notion formalisée ; on peut quand même l’utiliser, mais plutôt comme métaphore. Pour parler de voisinage d’un point, il faut être dans un espace topologique (voir Topologie). Si on se place dans le cas des nombres réels, un voisinage d’un réel a, c’est une partie de ^ qui contient un intervalle ouvert, qui lui-même contient a. Par exemple, ]–1 ,1[ est un voisinage de 0, de 0,5, de –0,999 et de tous les réels strictement compris entre –1 et 1. [-1 ,1] aussi, toutefois ce n’est pas un voisinage de 1 ni de –1. ^ lui-même est un voisinage de 0 (et de chaque réel). Peut-on alors dire d’un réel qui est dans un voisinage de 0 qu’il est voisin de 0 ? À l’heure d’Internet, il est facile de comprendre qu’un voisinage peut être très « grand ».

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Z

Zéro . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .

0 ce n’est pas « rien » et 0 ce n’est pas rien ! Pour commencer, pour les élèves, 0 est une note qui n’est pas du tout comme les autres ! Dans le langage courant, 0 signifie rien, nul, sans valeur, vide. Il apporte trouble et confusion quand on commence les mathématiques. Une petite anecdote : un jour, un élève, sachant parfaitement résoudre l’équation « 2x = 1 », et plus généralement « ax = b », a bloqué devant l’équation « ax = 0 » car, pour lui, il n’y avait pas de solution puisqu’il trouvait 0.

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Zéro

Dans l’Encyclopédie, à l’article « nombre négatif », D’Alembert assimile le rien et le nombre 0 : « Dire que la quantité négative est au-dessous du rien, c’est avancer une chose qui ne se peut pas concevoir. » Il est amusant de remarquer que dans son livre Théorème vivant (page 126), Cédric Villani, quand il parle des nombres entiers, les fait commencer à 1 ! En fait, il faut considérer 0 comme les autres nombres... Enfin, pas vraiment non plus ! Tout d’abord, il faut savoir qu’on l’a découvert (ou inventé) et utilisé longtemps après les autres. Même s’il est difficile de lui donner une date de naissance, on peut considérer que l’usage du zéro ne s’est généralisé qu’au Moyen Âge32. Bien plus tard, avec la théorie des ensembles, on a introduit dans le langage mathématique  $*     #( % "* ( ! ∅, ce qui a permis de construire l’ensemble des nombres entiers en assimilant 0 à ∅, puis 1 à {∅} (l’ensemble qui contient un seul élément qui est ∅ !   2 à {∅,{∅}} (l’ensemble qui contient deux éléments ∅ et {∅} !  C     *  &     #0%  #%   "

vrai, mais là on est dans la cuisine des mathématiques, et si ce n’est pas sans noblesse (   * !  `/   *            

cas dans l’enseignement actuel du secondaire et du début du supérieur.

Donc il nous faut convaincre l’élève que 0 peut être une solution d’une équation, tout à fait intéressante, aussi intéressante qu’une autre ! Une équation, qui a pour ensemble de solutions {0}, a un ensemble de solutions non vide (donc « {0} ce n’est pas vide »)... On retrouve cette problématique dans une autre erreur très fréquente en algèbre. Les élèves écrivent que l’intersection de deux sous-espaces vectoriels est ∅ à la place de {0} (l’espace contenant seulement le « vecteur nul »). Les élèves pensent que l’espace vectoriel contenant le seul vecteur nul est vide (il faut dire que cet espace vectoriel est de dimension 0 !). Les professeurs doivent lutter contre cette idée, issue du langage courant, que 0 c’est « rien ». Étymologiquement, « rien » ce n’est pas rien, car en fait « rien » vient de « res » qui signifie « chose »33.

32. On peut expliquer l’absence d’année 0 dans notre calendrier par le fait que ce nombre n’était pas usité au moment de l’élaboration de celui-ci. 33. Dans sa grammaire Le bon Usage, Maurice Grevisse écrit : « Rien […] employé jusque dans le xvie siècle comme nom féminin, a pu servir ensuite de nominal, au sens de « quelque chose ». Il a donc par lui-même un sens positif ».

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Parlez-vous maths ?

Zéro

En ce qui concerne la « physique » (en regroupant sous ce terme toutes les sciences expérimentales), ce qui est nul, ça n’existe pas. Une quantité « presque nulle », on la néglige, ce n’est rien. Mais, presque nul, qu’est-ce que cela peut bien vouloir dire ? En mathématiques, il y a plusieurs « zéros ». Il y a le 0 des nombres réels, la fonction nulle (pour tout x, ƒ(x) = 0), le vecteur nul, le polynôme nul, etc. À chaque fois, dans l’ensemble considéré (l’ensemble des fonctions, l’ensemble des vecteurs, l’ensemble des polynômes, etc.), ces éléments jouent le même rôle : quand on l’ajoute, il ne change rien ! On en arrive à les noter en général tous de la même façon, « 0 » (avec, bien sûr, parfois des variantes comme pour le vecteur nul, 0). Il faut donc toujours être vigilant en mathématiques et se poser la question : « De quoi parle-t-on ? » D’autant plus que (pour ajouter à la confusion ?), on a un autre sens du mot « zéro » dans l’expression « zéro d’une fonction ». Un « zéro d’une fonction » est un nombre tel que l’image de la fonction pour ce nombre est nulle (formellement, a est un zéro ƒ de lorsque ƒ(a) = 0). Donc le zéro d’une fonction n’est pas forcément égal à 0. L’ensemble des zéros d’une fonction peut donc contenir 0, ou non, ou bien contenir zéro élément, c’est-à-dire être vide (voir Racine)…

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Lexique Nous donnons ici les définitions mathématiques de quelques-uns des mots utilisés dans notre dictionnaire. Ces définitions sont là, d’une part, pour remettre en mémoire certaines des notions abordées pour ceux qui ont des souvenirs plutôt lointains, et d’autre part, pour montrer à quoi peuvent ressembler les mathématiques écrites formellement (attention, les amateurs de N. Bourbaki seront déçus...). Nous aimerions que certaines de ces définitions paraissent poétiques au lecteur. Parfois, nous ne nous sommes pas contentés d’un langage formel, mais nous avons utilisé un langage imagé et nous avons essayé d’illustrer ces définitions. Encore une fois, il ne s’agit pas d’un cours, il y a beaucoup de choses implicites. De plus, nous n’avons pas cherché à donner les formulations les plus générales.

Absolue (valeur)

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Soit x un nombre réel. La valeur absolue de x, notée |x|, est égale à x si x ≥ 0, et égale à – x si x ≤ 0. On peut condenser cet énoncé en disant que |x| = max{x, –x}.

Adhérence . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . On considère E un espace vectoriel normé (en particulier ^). On considère A une partie de E et a E. On dit que a est adhérent à A si et seulement si ∀ > 0, ∃x  A tel que ||x – a|| < ε (ou |x – a| < ε dans le cas où E = ^.) C’est-à-dire que la boule de centre a et de rayon ε a une intersection non vide avec l’ensemble A. L’adhérence de A est l’ensemble de tous les points adhérents à A.

Anneau

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(Voir Corps.)

Antécédent

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(Voir Application.)

Application

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Une application de E dans F est une fonction de E dans F dont l’ensemble de définition est égal à E. En d’autres termes, tout élément de l’ensemble de départ a une et une seule image.

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Lexique

Pour y un élément de F, on appelle un antécédent de y un élément x de E tel que ƒ(x) = y. Il peut y avoir plusieurs antécédents, ou aucun, ou un seul. Si tout élément de F a au moins un antécédent, l’application est dite surjective. Si tout élément de F a au plus un antécédent, l’application est dite injective. Si elle est à la fois injective et surjective, on la dit bijective. (Voir Fonction.)

Argument d’un nombre complexe

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(Voir Complexe.)

Base

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On considère un espace vectoriel E, et B une famille de vecteurs de E. On dit que B est une base de E si et seulement si c’est une famille libre et génératrice. Si B est de cardinal fini n, alors toutes les bases ont le même cardinal. On appelle ce nombre la dimension de E. L’espace vectoriel ne contenant qu’un seul élément, {0E} (l’espace vectoriel réduit au vecteur nul), n’admet pas de base. Par convention, on dit qu’il est de dimension 0. Quand on dispose d’une base, on peut écrire chaque vecteur comme combinaison linéaire unique des vecteurs de la base. On appelle les scalaires de la combinaison linéaire les coordonnées du vecteur. L’intérêt est que l’on peut assimiler un vecteur à ses coordonnées et ramener des problèmes de « géométrie » à des calculs sur des coordonnées. (Voir Dimension, Combinaison linéaire.)

Borné

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• Soit A une partie bornée de ^. On dit que A est bornée si et seulement si ∃ M > 0, ∀x  A,|x| ≤ M. • Soit (un) une suite de nombres réels. On dit que (un) est une suite bornée si et seulement si ∃ M > 0, ∀n b,|un | ≤ M. • Soit ƒ une fonction définie sur I, un intervalle de ^, à valeurs réelles. On dit que ƒ est bornée sur I si et seulement si ∃ M > 0, ∀x I, |ƒ(x)|≤ M. On remarque que dans les deux derniers cas, on a en fait une partie bornée : A = {un, n  b} dans le cas de la suite et A = ƒ(I) = {ƒ(x), x I } dans le cas de la fonction. On peut définir ces notions pour des suites de nombres complexes, pour des fonctions à valeurs complexes et, plus généralement, pour tout espace sur lequel on a une distance, et on peut formuler alors la notion en disant qu’il existe une boule contenant tous les éléments de l’ensemble borné.

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Lexique

Boule

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Pour parler de boules, il faut être dans un espace muni d’une distance. Par exemple un espace vectoriel normé. Une boule est définie par son centre A et son rayon r (r étant un réel strictement positif.) C’est l’ensemble de tous les éléments de l’espace qui sont à une distance inférieure à r de A. On retrouve la définition du disque, bien connue (le cercle est le « bord de la boule »). Ce qui donne dans un espace vectoriel normé E (on note ||u|| la norme d’un vecteur) : soit a E et r > 0. La boule de centre a et de rayon r est B(a, r) = {u E, ||u – a|| ≤ r}.

Combinaison linéaire

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On considère E un espace vectoriel et (u1, ..., un) une famille de vecteurs de E. Une combinaison linéaire des vecteurs u1, ..., un est un vecteur qui s’écrit λ1u1 + ... + λnun, où λ1, ... λn sont des scalaires.

Compact

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• Si on considère un espace vectoriel normé de dimension finie, E, on peut dire qu’un compact de E, C, est une partie de E qui est fermée et bornée. • Pour des espaces plus « exotiques » (en l’occurrence, des espaces munis simplement d’une topologie), on dit qu’un compact est une partie A dont, de toute famille d’ouverts dont la réunion contient A (on parle de « recouvrement par des ouverts »), on peut extraire un sous-recouvrement fini.

Complexe

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L’ensemble des nombres complexes ` est un ensemble qui contient les nombres réels. On peut multiplier et ajouter les nombres complexes. L’ensemble des nombres complexes ` est un ensemble plus grand que l’ensemble des nombres

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Lexique

réels ^ dans lequel on peut aussi additionner et multiplier. Il y a un nombre complexe particulier, noté i, qui vérifie : i 2 = –1. Un nombre complexe est composé de deux réels et du nombre i. On peut donc dire que ` = {x + iy|x, y ^}. On assimile souvent l’ensemble des nombres complexes au plan « usuel », l’ensemble des points de coordonnées (x, y) dans un repère cartésien (O, u , v). Le module d’un nombre complexe z = x + iy est égal à la distance OM où M est le point de coordonnées (x, y). Une mesure de l’angle entre le vecteur u et le vecteur

OM s’appelle un argument de z, lorsque z n’est pas nul.

Cône

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Un cône est une surface de l’espace constituée de la réunion de droites passant par un point fixe. Ces droites sont appelées les génératrices du cône, au sens où elles engendrent la surface. Le point de concours des droites est appelé sommet du cône. Avec cette définition, deux droites sécantes forment un cône. En général, un cône est défini à l’aide d’une courbe ne passant pas par le sommet du cône ; les génératrices du cône sont alors les droites passant par le sommet du cône et un point de cette courbe (appelée directrice). Dans le cas du cône illustré par un cornet de glace (dans ce cas on parle de cône de révolution), une directrice est le bord du cornet où on pose la glace...

Continue

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L’idée retenue en général pour une fonction continue est que si on dessine son graphe, on n’a pas besoin de lever le crayon. Mais cette idée se révèle vite inopérante. Une fonction définie sur un ensemble de réels sur ^, I, est continue sur I si elle est continue en chaque réel de I (la continuité est en fait une propriété locale). Et ƒ est continue en a, un réel de I, si et seulement si la limite quand x tend vers a de ƒ(x) existe et vaut ƒ(a). Ce qui donne « en maths » : ∀a I, ∀e > 0, ∃ d > 0, ∀x I, |x – a| ≤ d ⇒ |ƒ(x) – ƒ(a) | ≤ e. Il est clair que le passage de l’idée intuitive à cette définition ne peut pas se faire en cinq minutes ! On peut étendre la notion de continuité à d’autres types de fonctions que les fonctions définies sur une partie de ^ et dont l’ensemble d’arrivée est ^.

Convergence

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On parle de convergence dès que l’on parle de limite. Converger signifie « avoir une limite » au sens naïf, c’est-à-dire avoir une limite finie. Parlez-vous maths ?

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Lexique

On rencontre ensuite plusieurs cas. Dans celui qui nous intéresse, on peut avoir la convergence des suites, des fonctions, des séries, des intégrales. Par exemple on dira qu’une suite de réels (un) converge vers un réel l (ou que la limite de (un) est l) si et seulement si: ∀ ε > 0, ∃ n0 b, ∀ n b, n ≥ n0 ⇒ |un – l |≤ ε. Étudier la convergence d’une suite (ou la nature d’une suite), c’est déterminer si elle est convergente ou non, et dans le cas où elle l’est, déterminer sa limite si possible.

Corps

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On considère un ensemble K, muni de deux lois de composition internes, notées respectivement + et x. (K, +, x) est un corps si et seulement si : • (K, +) est un groupe commutatif. On note 0K le neutre pour l’addition. • La multiplication × est associative, distributive par rapport à l’addition et possède un élément neutre, noté 1K. • Tous les éléments de K sauf 0K ont un inverse pour ×. C’est-à-dire, ∀ x K, x ≠ K, ∃ y  K, x × y = y × x = 1K. Si seules les deux premières propriétés sont vérifiées, on dit que (K, +, ×) est un anneau. C’est le cas de (_, +, ×). Si × est commutative, (K, +, ×) est un corps commutatif. (a, +, ×), (^, +, ×) et (`, +, ×) sont des corps commutatifs.

Croissante (ou décroissante)

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• Considérons une fonction de I, une partie de ^ dans ^. Elle est croissante si et seulement si ∀ x, y I, x ≤ y ⇒ ƒ(x) ≤ ƒ(y). Elle est décroissante si et seulement si ∀ x, y I, x ≤ y ⇒ ƒ(x) ≥ ƒ(y). Une fonction peut n’être ni croissante ni décroissante. « Décroissant » n’est pas le contraire de « croissant » en mathématiques. Une fonction peut également être à la fois croissante et décroissante : dans ce cas, elle est constante. Quand on parle des « variations d’une fonction », on s’intéresse aux intervalles sur lesquels elle est croissante ou décroissante (le fameux « tableau de variation »...). • Considérons une suite de réels un. Elle est croissante si et seulement si ∀ n b, un ≤ un+1. Elle est décroissante si et seulement si ∀ n b, un ≥ un+1. Comme pour les fonctions, une suite peut n’être ni croissante, ni décroissante.

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Parlez-vous maths ?

Lexique

Cylindre

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Un cylindre est une surface de l’espace constituée de la réunion de droites toutes parallèles entre elles. Comme dans le cas du cône, ces droites sont appelées les génératrices du cylindre. Le cylindre et le cône sont des surfaces réglées, au sens où elles sont engendrées par des lignes que l’on peut tracer avec une règle. Avec cette définition, un livre représente un cylindre. En général, un cylindre est défini à l’aide d’une courbe et une direction de droite ; les génératrices du cylindre sont alors les droites parallèles à la direction donnée et passant par un point de la courbe (appelée directrice). Dans le cas du cylindre illustré par une boîte de conserve (dans ce cas on parle de cylindre de révolution), une directrice est le bord de la boîte de conserve que l’on découpe pour l’ouvrir.

Dériver

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Dériver une fonction, c’est calculer sa dérivée. C’est-à-dire : on considère une fonction ƒ définie sur un intervalle I de ^ et un nombre a I. On dit que ƒ est dérivable en a si et seulement si ƒ(x) – ƒ(a) a une limite réelle (donc x–a finie) quand x tend vers a. Cette limite se note alors ƒ′(a). Si pour chaque réel a de I, ƒ′(a) existe, alors on définit une nouvelle fonction, notée ƒ′, en associant à tout réel a de I le nombre ƒ′(a). ƒ′ s’appelle la fonction dérivée de ƒ.

Dimension

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La dimension d’un espace vectoriel représente le nombre de paramètres qu’il faut connaître pour caractériser l’objet. Par exemple dans un plan, deux coordonnées suffisent pour placer un point ; dans l’espace « usuel » (celui dans lequel nous croyons vivre), trois coordonnées suffisent pour situer un point. On peut se représenter un espace de dimension 4 en ajoutant le temps. Plus précisément, considérons E un K-espace vectoriel. Si E possède une famille génératrice finie, on dit qu’il est de dimension finie. Sinon, on dit qu’il est de dimension infinie. Dans le cas où E est de dimension finie : Si E ne contient qu’un vecteur, le vecteur nul, on dit qu’il est de dimension 0. Sinon, on démontre alors qu’il existe une base (en l’extrayant d’une famille génératrice) et que cette base contient un nombre fini de vecteurs, puis que toutes les bases ont le même cardinal (c’est-à-dire contiennent le même nombre de vecteurs). Ce nombre s’appelle la dimension de E. Parlez-vous maths ?

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Lexique

Par exemple, si on s’intéresse à l’ensemble des matrices réelles (tableaux de réels) de 3 lignes et 4 colonnes, il faut 12 réels pour définir une matrice. L’espace des matrices est de dimension 12.

Fermé

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Dans un espace topologique, un fermé (ou une partie fermée) est le complémentaire d’un ouvert. (Voir Ouvert.) Dans un espace vectoriel normé, on peut dire qu’une partie A est fermée si et seulement si toutes les suites d’éléments de A qui sont convergentes ont leur limite dans A. Un segment est un fermé de ^, en effet on le démontre avec le théorème de passage à la limite dans une inégalité (que l’on aborde en terminale) : soit une suite (un) de réels, convergente, de limite l ; on suppose que ∀n, a ≤ un ≤ b ; alors a ≤ l ≤ b. Ça tombe bien quand même qu’un intervalle fermé soit un fermé (d’ailleurs un intervalle ouvert est également un ouvert) !

Fonction

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Soit deux ensembles E et F. On appelle fonction de E dans F tout moyen d’associer à un élément quelconque x de E au plus un élément de F. Lorsqu’il existe, celui-ci est appelé image de x. E est appelé ensemble de départ de la fonction. F est appelé ensemble d’arrivée. On désigne souvent une fonction par une lettre ƒ, H, ... L’image de x est alors notée ƒ(x), H(x), (x)... La méthode la plus théorique pour assurer « mathématiquement » cette association est de considérer un sous-ensemble G du produit cartésien E × F. Le sous-ensemble G est appelé graphe de la fonction, ce qui n’est pas complètement « idiot » dans la mesure où si on considère une fonction de ^ dans ^ le graphe correspond à l’ensemble des coordonnées des points de la représentation graphique de la fonction. Ce qui donne : soit E, F deux ensembles. Une fonction de E dans F est un triplet (E, F, G) où G ⊂ E × F et vérifie : ∀ (a, b), (c, d) G, a = c ⇒ b = d. Si (a, b) G, on note b = ƒ(a) et on dit que b est l’image de a. L’ensemble des éléments de E tels qu’il existe une image est appelé ensemble de définition de la fonction. Si cet ensemble de définition est E tout entier, on dit que la fonction est une application. On peut donc dire que ƒ = (E, F, G) est une application si et seulement si : ∀ x E,

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∃! y F,

(x, y) G.

Parlez-vous maths ?

Lexique

Groupe

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Considérons un ensemble G muni d’une loi de composition interne notée ∗. Si cette loi est associative : ∀x, y, z G, (x ∗ y) ∗ z = x ∗ (y ∗ z) ; s’il y a un élément neutre e : ∀x G, e ∗ x = x ∗ e = x ; et si tout élément possède un symétrique (ou inverse) : ∀x G, ∃ x′ G, x ∗ x′ = x′ ∗ x = e ; alors on dit que (G, ∗) est un groupe. Si la loi ∗ est en plus commutative (∀x, y G, x ∗ y = y ∗ x), on dit que (G,∗) est un groupe commutatif. Typiquement (_, +), (^, +), (^∗, ×) sont des groupes, mais (b, +) non (en effet, à part 0, un nombre entier naturel n’a pas de symétrique). L’ensemble des vecteurs de l’espace usuel (plus généralement tout espace vectoriel) est un groupe pour l’addition des vecteurs.

Hyperplan

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Un hyperplan est un sous-espace vectoriel de dimension n – 1 dans un espace vectoriel de dimension n. Avec cette définition, dans l’espace « usuel » de dimension 3, un hyperplan est un plan, et dans le plan « usuel » un hyperplan est une droite.

Idéal

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On considère (A, +, ×) un anneau. (Voir Corps). Soit I une partie de cet anneau. On dit que I est un idéal de l’anneau A si et seulement si : • (I, +) est un groupe. • ∀ a A, ∀ x I, a × x I ; on parle alors d’idéal à droite ; si ∀ a A, ∀ x I, x × a I ; on parle alors d’idéal à gauche. Si la multiplication est commutative, l’idéal à droite est aussi un idéal à gauche et inversement. On parle d’idéal, sans précision. (On remarquera que cela n’a rien à voir avec la vie politique.) Par exemple, l’ensemble des nombres pairs est un idéal de _.

Image

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(Voir Fonction.)

Indépendance

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On considère un K-espace vectoriel E et une famille de p vecteurs de E, (u1, …, up).

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197

Lexique

On dit que la famille est libre, ou que les vecteurs sont indépendants (sous-entendu les uns des autres), si et seulement si : p

∀ λ1, …, λp K,

λk uk = OE ⇒ λ1 = λ2 = … = λp = 0. k1

Ce qui correspond au fait qu’aucun vecteur de la famille ne s’exprime comme combinaison linéaire des autres.

Injection

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Une injection est une application injective. (Voir Application.)

Inverse (bijection)

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Considérons une application bijective ƒ de E dans F. Chaque élément de F a un unique antécédent dans E. L’inverse de ƒ, notée ƒ–1 est l’application de F dans E qui à chaque élément de F associe son antécédent par ƒ, c’est-à-dire ƒ–1(α) = β équivaut à ƒ() = . On a donc, pour tout x de E, ƒ–1 (ƒ(x)) = x et pour tout élément y de F, ƒ(ƒ–1 (y)) = y.

Irrationnel

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(Voir Rationnel.)

Irréductible

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C’est l’équivalent des nombres premiers pour les polynômes. Un polynôme P de degré k, non nul, est dit irréductible, si on ne peut pas lui trouver de diviseur de degré supérieur à 1 et strictement inférieur à k. Un polynôme de degré 1 est irréductible. X 2 – 3X + 2 = (X – 1)(X – 2), il n’est donc pas irréductible.

Liberté

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(Voir Indépendance.)

Limite

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Donnons quelques exemples de définition mathématique de limite. • On dit qu’une suite de réels (un) tend vers le réel l si et seulement si: ∀ > 0, ∃p b, n ≥ p ⇒ |un – l|≤ . • On dit qu’une fonction ƒ définie sur un intervalle I tend vers un réel l quand x tend vers un réel a si et seulement si : ∀> 0, ∃ > 0,∀ x I,|x – a|≤ ⇒ |f(x) – l|≤ 

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Parlez-vous maths ?

Lexique

Cette liste est loin d’être exhaustive : il y a les fonctions qui tendent vers +∞, –∞, etc. Plus généralement, dans des espaces topologiques quelconques, cela donne : soit ƒ une application de E dans F, a E et l F. On dit que ƒ(x) tend vers l quand x tend vers a si et seulement si: ∀ Ω V(l ), ∃ O V(a), x O⇒ ƒ(x) Ω où V(a) est l’ensemble de tous les voisinages de a (voir ce mot). Bon, il faut un peu « mouiller la chemise » pour comprendre toutes ces notions, mais à la fin, on a une jolie définition, qui s’applique dans tous les cas ! Elle n’est pas belle la vie ?

Linéaire (application)

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Une application ƒ de E vers F, deux ⺛ espaces vectoriels, est dite linéaire si et seulement si : ∀ u, v E, ∀ ,  ⺛, ƒ( u + v) =  ƒ(u) + ƒ(v)

Naturel

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Parce qu’il faut bien rigoler un peu, énonçons les axiomes de Peano. Ceux-ci reviennent à postuler l’existence d’un ensemble, appelé l’ensemble des nombres entiers naturels, et la propriété qui permet le raisonnement par récurrence. Axiomes de Peano. L’ensemble des entiers naturels b est un ensemble non vide contenant un élément noté 0 et muni d’une fonction de b dans b tel que : • la fonction est injective, • 0 n’a pas d’antécédent par la fonction , • pour tout sous-ensemble A de b, si 0 A, et si pour tout n b, n A entraîne

(n) A, alors A = b. On note n + 1, le successeur de n. C’est sur le troisième axiome que repose le principe de récurrence.

Norme

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Une norme sur un ^ ou ` espace vectoriel E est une application N de E dans ^, vérifiant les propriétés suivantes : • ∀ u E, N(u) ≥ 0 ; • ∀ u E, N(u) = 0 ⇔ u = 0E ; • ∀ u E, ∀  ⺛, N ( u) = ||N(u) ; • ∀ u, v E, N(u + v) ≤ N(u) + N(v).

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Lexique

Ouvert

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(Voir Topologie.) Dans le cas d’un espace vectoriel normé E, un ouvert est un sous-ensemble O tel que pour chaque élément a de O, on peut trouver un réel r > 0 vérifiant que la boule de centre a de rayon r est incluse entièrement dans O . Dans ^, un intervalle ouvert ]a, b[ est un ouvert.

Période

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Soit ƒ une fonction définie sur I une partie de ^ et T un réel strictement positif. On suppose que T vérifie a priori : ∀ x I, x + T I. On dit que ƒ est périodique de période T si et seulement si ∀ x I, ƒ(x + T) = ƒ(x). Si T est une période nT avec n b* est aussi une période. Il y a une infinité de périodes. On ne peut pas parler de « la » période d’une fonction. Les exemples types sont les fonctions sinus et cosinus qui sont de période 2π.

Projection

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Une projection p est une application linéaire de E dans E, E étant un espace vectoriel, définie de la manière suivante. On considère deux sous-espaces vectoriels supplémentaires, F et G. (Voir définition.) Alors, tout vecteur u de E s’écrit de manière unique sous la forme u = uF + uG avec uF F et uG G. La projection sur F de direction G (ou parallèlement à G) est l’application qui à u associe uF . En notant p cette projection, on a : p(u) = uF.

Propre (valeur)

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• Une valeur propre d’une matrice carrée A est un scalaire  tel qu’il existe une colonne X non nulle vérifiant AX = X . • Considérons une application linéaire ƒ d’un espace vectoriel E dans lui-même (on parle d’endomorphisme). Une valeur propre de ƒ est un scalaire  tel qu’il existe un vecteur non nul de E, u, vérifiant ƒ(u) =  u.

Rang

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Le rang d’une famille de vecteurs est la dimension de l’espace vectoriel engendré par ces vecteurs (c’est-à-dire, le plus petit espace contenant ces vecteurs). Pour définir le rang d’une application linéaire ƒ de E dans F, on considère le sous-espace vectoriel de F formé de tous les vecteurs de F ayant un antécédent par ƒ, que l’on appelle image de ƒ ; le rang de ƒ est alors la dimension de son image.

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Parlez-vous maths ?

Lexique

On définit aussi le rang d’une matrice comme le rang de la famille des vecteurs colonnes.

Rationnel

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On sépare l’ensemble des nombres réels en deux sous-ensembles disjoints : l’ensemble des nombres rationnels (a) et les autres, dits irrationnels. Un nombre rationnel est un nombre qui s’écrit comme fraction de deux entiers relatifs : 2 , – 671, etc. 3 17 On peut remarquer qu’un même nombre rationnel a plusieurs écritures : 2 1 5 = = … 4 2 10 Il y a une histoire de relation d’équivalence là-dessous.

Récurrence

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(Voir Naturel.) Explicitons le lien qu’il y a entre le troisième axiome de Peano et le raisonnement bien connu (?) dit par récurrence. On veut démontrer qu’une certaine phrase (on parle de proposition) dépendant d’un entier n est vraie pour tous les entiers n. On notera cette phrase P(n). On considère l’ensemble A des entiers n tels que la proposition P(n) soit vraie. Montrer que « 0 A », correspond à ce que l’on appelle « l’initialisation », c’est-à-dire à la démonstration que P(0) est vraie. Montrer que « si pour tout n b, n A entraîne (n) A », correspond à ce qu’on appelle « l’hérédité ». Pour cela on considère un entier n quelconque, on suppose que P(n) est vraie, ce qui correspond au fait que n A, puis on démontre que P(n + 1) est vraie, ce qui correspond à (n) A  ». Avec le troisième axiome de Peano, on peut alors dire que A = b, c’est-à-dire que P(n) est vraie pour tout entier n.

Réel

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La définition des nombres réels est rarement donnée, même dans des études scientifiques avancées. Toute la scolarité au lycée (et un peu plus...) repose sur une compréhension intuitive des nombres réels. On définit l’ensemble des nombres réels à partir de l’ensemble des nombres rationnels de la manière suivante: (c’est l’une des constructions possibles, construction par les coupures de Dedekind proposée en 1872) : une coupure est un couple (A, A) où A a et A est le complémentaire de A dans a tel que ∀ x A, ∀ y A, x ≤ y . L’ensemble des réels est l’ensemble de toutes les coupures ! Parions que vous n’aviez pas vu les choses comme ça... Parlez-vous maths ?

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Lexique

Relatif

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L’ensemble des entiers relatifs est l’ensemble des nombres entiers positifs 0,1,2, … et de leurs opposés –1, –2, … On le note _. (_, +) est un groupe.

Relation

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On considère E un ensemble. Une relation sur E est définie par un sous-ensemble de E × E, noté G. Pour x, y E, on dit que x est en relation avec y si et seulement si (x, y) G. Pour simplifier la relation R , on écrira « xRy » pour « x est en relation avec y ». Si pour tout x E , xRx, on dit que la relation est réflexive. Si pour tous x, y E, xRy implique yRx, on dit que la relation est symétrique. Si pour tous x, y, z E, xRy et yRz implique xRz, on dit que la relation est transitive. Enfin, si pour tous x, y E , xRy et yRx implique x = y, on dit que la relation est antisymétrique. • Une relation réflexive, symétrique et transitive est une relation d’équivalence. • Une relation réflexive, antisymétrique et transitive est une relation d’ordre. Si pour deux éléments quelconques x, y on a soit xRy, soit yRx, on dit que la relation d’ordre est totale, sinon elle est partielle.

Semblable

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Deux matrices carrées A et C sont dites semblables si et seulement si il existe une matrice carrée P inversible telle que C = P –1 AP . Deux matrices semblables sont en fait associées au même endomorphisme dans deux bases différentes.

Sous-espaces vectoriels supplémentaires

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On considère un espace vectoriel E, et deux sous-espaces vectoriels de E, que l’on note F et G. On dit que F et G sont supplémentaires lorsque tout vecteur u de E peut s’écrire de manière unique sous la forme u = uF + uG avec uF F et uG G.

Surjection

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Une surjection est une application surjective. (Voir Application.)

Tangente

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Considérons une fonction ƒ définie sur un intervalle I de ^, et dérivable en a I. La droite d’équation y = ƒ(a) + ƒ′(a)(x – a) est appelée la tangente à la courbe représentative de ƒ au point (a, ƒ(a)).

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Parlez-vous maths ?

Lexique

On remarquera que c’est une définition. Donc exit la « notion » de tangente reposant sur l’idée d’une droite frôlant une courbe et ne la touchant qu’en un point (de plus, parfois avec la condition de « la laisser d’un même côté »), voire de « perpendiculaire au rayon » (ce qui est le cas du cercle).

Topologie

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Un espace topologique est un couple (X,O) où X est un ensemble et O un ensemble de parties de X (appelées les ouverts) vérifiant les axiomes suivants : • X O et ∅ O ; • si O1,…,On  O alors ouvert) ;

n i1

Oi O (toute intersection finie d’ouverts est un

• si (Oi )i I est une famille d’éléments de O, alors quelconque d’ouverts est un ouvert).

i I

Oi  O (toute réunion

On dit que O définit une topologie sur X. Un même ensemble X peut être muni de différentes topologies.

Tribu

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Une tribu sur un ensemble X est un ensemble T de parties de X telles que : • X T ; • si A T, le complémentaire de A aussi ; • si (Ai)i I est une famille d’éléments de T, alors

i I

Ai T.

On notera la ressemblance avec la définition d’une topologie, mais le fait qu’il y ait stabilité par passage au complémentaire change tout ! Pour définir une probabilité sur X, il faut avoir une tribu, celle-ci devenant l’ensemble des évènements que l’on veut étudier. Une probabilité est alors une application de T dans [0, 1] vérifiant certains axiomes. UNE probabilité donne LES probabilités de tous les évènements.

Variable aléatoire réelle

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Une variable aléatoire X est une application définie de Ω dans ^, où Ω est un espace probabilisé, c’est-à-dire muni d’une tribu et d’une probabilité. Pour que X soit une variable aléatoire, il faut que pour tout intervalle I de ^, l’ensemble {w Ω, X(w) I} soit dans la tribu, c’est-à-dire corresponde à un évènement.

Parlez-vous maths ?

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Lexique

Vecteur

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Un vecteur est un élément d’un espace vectoriel. On notera qu’un espace vectoriel n’est donc pas défini en tant qu’ensemble contenant des vecteurs, mais c’est un vecteur qui est défini en tant qu’élément d’un espace vectoriel. Soit ⺛ un corps commutatif et E un ensemble E muni de deux lois : + et . telles que : + est une loi interne sur E et (E, +) est un groupe commutatif ; . est une loi externe, c’est-à-dire une application de ⺛ × E dans E, vérifiant : • ∀  ⺛, ∀ u, v E,  .(u + v) =  .u +  .v ; • ∀ , ⺛, ∀ u, v E, ( + ) .u =  .u + .u ; • ∀ , ⺛, ∀ u E, ( + ) .u =  .( .u) ; • ∀ u E, 1.u = u . On dit alors que (E, +,. ) est un ⺛-espace vectoriel (ou plus simplement que E est un espace vectoriel s’il n’y a pas d’ambiguïté sur les lois et le corps). Le dernier axiome, malgré sa formulation « triviale », est indispensable. Il ne découle pas des autres axiomes. Il existe des exemples simples pour lesquels tous les axiomes sont vérifiés sauf celui-ci !

Vide

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L’ensemble vide est l’ensemble qui ne contient aucun élément. On le note ∅. L’écriture formelle de cet ensemble donnée par N. Bourbaki est 



Référence : fascicule XVII, chapitre 2, Théorie des ensembles, note page 68.

Voisinage

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Dans un espace topologique, un voisinage d’un élément est un sous-ensemble contenant un ouvert contenant cet élément. (Voir Limite et Topologie.)

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Parlez-vous maths ?

Bibliographie Nous donnons ci-dessous une liste d’ouvrages et de références qui nous ont servi de manière plus ou moins directe pour rédiger ce dictionnaire. Nous n’avons pas essayé d’être exhaustifs. Si des lecteurs veulent signaler d’autres ouvrages et références, ils peuvent le faire via le site internet consacré à ce livre. Baruk Stella, L’âge du capitaine, Points Sciences, 1998, Bourbaki Nicolas, Éléments de mathématique, Hermann, 1965 (en particulier les notes historiques). Collectif, Leçons de mathématiques d’aujourd’hui, Cassini, 2000. Collectif, Mathématiques en liberté, La ville brûle, 2012. Commission Inter-I.R.E.M, Histoires de Problèmes - Histoire des Mathématiques, Ellipses, 1997. Devos Raymond, Sens dessus dessous, Stock, 1976. Diderot et d’Alembert, Encyclopédie. Etiemble René, Au secours, Athéna ! Le jargon des sciences, Éditions Hermann, 1996. Gauvrit Nicolas, Statistiques Méfiez-vous !, Ellipses, 2007. Grévisse Maurice et Goosse André, Le bon Usage, De Boeck, 2007. Hadamard Jacques, Essai sur la psychologie de l’invention dans le domaine mathématique, Blanchard, 1959 (ré-édition Jacques Gabay 2007). Hauchecorne Bertrand, Les Mots & les Maths, Éditions Ellipses, 2003. Johsua Samuel et Dupin Jean-Jacques, Introduction à la didactique des sciences et des mathématiques, PUF, 1999. Lebesgue Henri-Léon, « Sur l’intégration des fonctions discontinues », Annales scientifiques de l’E.N.S., 1910 (consultables sur internet), Pascal Blaise, Œuvres complètes, Bibliothèque de la Pléïade, Gallimard. Pickover Clifford A., Le beau livre des maths, Dunod, 2010. Roba Jean, Boule et Bill (Album n°18), Dupuis, 1980. Russel Bertrand, Recent work on the principles of mathematics, The international monthly, Burlingon, 1901. Schwartz Laurent, Analyse, Hermann, 1981. Parlez-vous maths ?

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Bibliographie

Siety Anne, Qui a peur des mathématiques ? Livre de poche, 2013 Singh Simon, Le dernier théorème de Fermat, Fayard/Pluriel, 1999 (voir aussi une vidéo sur www.youtube.com/watch?v=7FnXgprKgSE). Villani Cédric, Théorème vivant, Grasset, 2012. Winckler Bruno, Blagues mathématiques et autres curiosités, Ellipses, 2011. Film « Comment j’ai détesté les maths » de Olivier Peyon. Le site de l’Académie Française donnant accès au Dictionnaire de l’académie : http://www.academie-francaise.fr/le-dictionnaire/consultation-en-ligne Le site du Centre National de Ressources Textuelles et Lexicale : http://www.cnrtl.fr/portail/ Le site « image des mathématiques » : http://images.math.cnrs.fr/. Un site pour consulter en ligne des divers ouvrages : https://archive.org/ Le site de la Bibliothèque nationale de France permettant de voir des vidéos : http://www.bnf.fr/fr/la_bnf/a.videos.html Le site de Laurent Lafforgue : http://www.ihes.fr/~lafforgue/ Les 2 CDs « dimensions » et « chaos » qu’on peut retrouver aux adresses : www.dimensions-math.org et www.chaos-math.org