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French Pages 214 [217] Year 2016
Le sel
Professeur Tilman B. Drüeke Bernard Moinier
Alimentation
et Santé
Le sel
dans TOUS SES ÉTATS
VRAI/FAUX
sur un aliment trop critiqué
Le sel
Collection Alimentation et Santé dirigée par le Dr H. Robert La collection Alimentation et Santé fait le point des connaissances actuelles sur des aliments utilisés quotidiennement par les consommateurs. Destinée aux professionnels de la nutrition mais également à un public plus large soucieux de son alimentation, chaque ouvrage présente un aliment dans sa globalité, de son élaboration aux conséquences de sa consommation sur la santé. Sans parti pris et appuyée par des études médicales sérieuses, cette collection permet également de rétablir certaines contre-vérités ou idées reçues largement diffusées auprès du public.
Imprimé en France ISBN : 978-2-7598-1706-1
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© EDP Sciences 2016
Sommaire Le sel Introduction ............................................................................................................................. V 1re Partie : Des salins à la salière .............................................. 1 1. Aux origines du sel .................................................................................................................. 2 5 2. Regards sur le sel dans l’histoire ................................................................................ 7 3. Géographie : l’univers « sel » ....................................................................................... 12 4. Les techniques de production .................................................................................... 28 5. Production ......................................................................................................................................... 34 6. Les principaux débouchés du sel ............................................................................ 47 7. Regards sur le monde actuel ......................................................................................
2e Partie : Sel et santé ..................................................................................... 51 1. Composition chimique du sel (chlorure de sodium) ........................... 52 53 2. Rôles physiologiques du sel (chlorure de sodium) .............................. 85 3. Les perturbations de l’équilibre hydrosodé .................................................... 89 4. Sel, hypertension artérielle et risque cardio-vasculaire ................... 119 5. Le sel dans d’autres pathologies ? .......................................................................... 131 6. Prévention des carences en micronutriments ............................................ et de la carie dentaire ......................................................................................................... 131
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3e Partie : Le bon usage du sel alimentaire .... 153 1. Définition de la qualité alimentaire du sel ...................................................... 154 (Codex Alimentarius) ............................................................................................................ 154 2. Teneur en sodium/ sel des aliments ....................................................................... 159 3. Étiquetage nutritionnel ......................................................................................................... 169 171 4. Sels présents sur le marché ............................................................................................ 5. Autres sels supplémentés (sel nitrité) .................................................................... 182 6. Substituts du sel ............................................................................................................................ 184 7. Juste ce qu’il faut en cuisine ou à table ........................................................... 186
Conclusion générale ......................................................................................... 191
Contacts utiles ................................................................................................................... 193 Annexe Réglementation relative au sel ....................................................................................... 195
Bibliographie ........................................................................................................................ 201
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Introduction Le sel
est un sel parmi d’autres mais il est tellement familier qu’on l’appelle généralement le sel. Certes, il n’est pas unique mais il est indispensable. Il l’est à la fois pour la survie de l’homme et de nombreuses espèces et pour ses innombrables applications. Les Américains le qualifient de produit aux 14 000 usages. Pour y satisfaire, l’homme recourt à trois techniques de production : agricole (marais salants ou salins), minière (gisements de sel gemme) et ignigène (salines).
le chlorure de sodium
En raison de son utilité, les Anciens le tiennent pour divin (1, 2). Ils pressentent qu’il est nécessaire à la vie grâce à diverses observations portant sur les animaux. Il faut attendre le xxe siècle pour que, avec l’évolution de la médecine, son rôle important dans les régulations physiologiques et son incidence sur certaines maladies soient analysés de manière approfondie et commencent à être mieux connus. Désormais, l’accent est mis davantage sur ses effets potentiellement négatifs que sur son action positive dans les fonctions normales de l’organisme où il est déterminant. La recherche s’oriente plutôt vers son implication dans divers états pathologiques que son importance majeure dans le maintien d’un bon état de santé chez les sujets sains. Peu averti des questions médicales, le public ne retient qu’une approche partielle et simplificatrice du thème « sel et santé ». La perception largement négative du sel est stimulée par des campagnes régulièrement menées par un petit nombre de scientifiques. Il est communément admis que la consommation de sel contribue à la survenue d’une pression artérielle élevée. Le public l’exprime à sa manière : « le sel donne de la tension ». Tout au long de ce siècle, les chercheurs s’affrontent. Des études plus sophistiquées en matière d’épidémiologie et d’intervention permettent de multiplier les hypothèses. Cependant, les conclusions s’opposent tandis que certains s’obstinent à prendre la partie (sel et pression artérielle) pour le tout (sel et santé publique). À la fin du siècle, l’intervention de l’Organisation mondiale de la santé (OMS) et des autorités nationales compétentes rend le débat plus âpre. Des recommandations de restriction sodée généralisée sont émises sur des bases scientifiques incertaines. C’est pourquoi de nombreux experts s’insurgent contre une politisation incompatible avec la sérénité qui devrait faciliter l’application des mesures de prévention de masse. Leur agacement tient notamment au déni d’un effet global de l’ensemble des nutriments sur la santé ce qui, en matière de nutrition, est
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Le sel
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particulièrement grave. Pourquoi isoler le sodium des autres nutriments, notamment le calcium, le magnésium et le potassium d’autant que ce ne sont pas des nutriments que l’on ingère mais des aliments que l’on mange en combinant satiété et plaisir ? Par ailleurs, comme le sel a été choisi par l’OMS en tant que vecteur efficace pour les micronutriments dont l’ingestion est déficitaire comme l’iode et le fer – d’où risque d’arriération mentale et anémie – ou dont l’apport peut être bénéficiaire comme le fluor – hygiène bucco-dentaire –, les professions de santé relèvent une contradiction entre ce choix et la volonté de réduire les ingesta sodés, c’est-à-dire le sel alimentaire dont disposent les ménages et les industries alimentaires et qui est effectivement absorbé par l’organisme. Si une mesure doit être prise en faveur de la population générale, c’est la promotion du sel iodé dont l’utilisation doit être ouverte non seulement aux ménages mais encore aux entreprises de l’industrie agro-alimentaire. Cet ouvrage vise à rappeler des notions parfois oubliées, faire un sort aux contre-vérités et redonner confiance en une substance minérale dont l’organisme se suffit de peu mais dont il a absolument besoin. Il faut être conscient qu’une réduction généralisée des apports sodés risque de se révéler néfaste en termes de santé publique. On ne saurait confondre le cas de certains patients dont la sensibilité au sel est avérée et les standards de la population générale qui doivent être fondés sur une approche globale de la nutrition.
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Des salins à la salière
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1. Aux origines du sel Aux origines du sel, on découvre la mer, « la mer toujours recommencée ». Il faut entendre par là l’élément liquide qui entoure les terres et qu’on répertorie sous les termes d’océans et de mers, accompagnés d’un qualificatif. Par exemple, océan Atlantique, mer Méditerranée, mer Noire ou mer Rouge. Pour l’essentiel, le sel des océans provient de l’érosion des sols et de la dissolution des sédiments sous l’action de la pluie et des courants. En pratique, la salinité est mesurée indirectement par la conductivité électrique. La salinité des océans s’est accrue au fur à mesure de l’évaporation par phases successives au cours des ères géologiques. Elle interpellait les Anciens et pour certains, il importait de comprendre d’où venait le sel. C’est une des préoccupations d’Aristote (3). Pour d’autres, le plus simple était de recourir à la mythologie pour apporter une explication.
1.1. Mythologie L’importance du sel est patente dès les temps anciens et, partout dans le monde, les hommes en font un des ingrédients de leurs mythes fondateurs au même titre que l’eau et le soleil ; la vie en dépend et les prêtres (ou les poètes) leur associent des dieux porteurs de sens. Le mythe est un renseignement relatif à une connaissance diffuse. À Babylone, on oppose Apsou et Tiamat qui personnifient l’eau douce et l’eau salée. Au commencement du monde celles-ci sont mêlées dans un tout unique. À cette vision d’une masse d’eau première répond plus prosaïquement la notion de « soupe primitive » développée par le physicien John Haldane (1892-1964). L’hypothèse suivante a été émise. Les radiations en ultra-violets (UV) venant du Soleil (la source d’énergie principale) auraient brisé les molécules simples de l’atmosphère initiale et libéré des radicaux très réactifs qui rapidement se combinèrent pour former des molécules plus complexes et plus lourdes. Les éclairs (décharges électriques), ainsi que les volcans, ont fourni une source énergétique additionnelle. Avec la condensation des vapeurs d’eau et la formation, dans la haute atmosphère, de nuages qui retombent en pluie, toutes ces nouvelles molécules ont été précipitées à la surface de la planète, surtout dans les océans. Ces nouvelles molécules sont composées de carbone-hydrogène- oxygène-azote, donc des molécules organiques. C’est à ce bouillon que le sel aurait donné toute sa saveur…
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Des salins à la salière
Hésiode donne d’utiles indications au sujet de la naissance d’Aphrodite. On y apprend que le sel résulte de la cristallisation du sperme d’Ouranos que Cronos a émasculé. Du sexe flottant dans l’eau sourd une blanche écume (aphros) et en elle prend corps la belle déesse. Elle est dite Haligénée, née du sel, et personnifie le pouvoir générateur de cette substance. Ce mythe associe l’appétence que les animaux manifestent pour ses cristaux et les fonctions de copulation, de gestation, de parturition et de lactation. Le sel est associé au culte et aux rites qui s’y rapportent. À l’époque classique, Aphrodite est figurée tenant un petit sac de sel. Lors des aphrodisies très suivies à Corinthe, Athènes et autres lieux, les participants le portent. Actuellement, les légers cristaux de sel qui se forment à la surface d’un cristallisoir sont dénommés en Grèce « aphrina ». Il s’agit de la fleur de sel. Dans l’énumération des cadeaux que, pour leurs noces, Nérée offre à Pelée, le père d’Achille, et à Téthys, la déesse de la mer, le sel divin est mentionné par Ptolémée Hephaestion. L’offrande du sel est un signe d’ouverture à la réalité cosmique. Aussi, n’est-ce pas par hasard que la géologie trouve parfois son inspiration dans la mythologie.
1.2. Géologie (quelques rappels) La Téthys est une mer chaude qui borde un continent unique, la Pangée. Au fur et à mesure que l’on avance dans le temps, on assiste à une extension de la zone aride que caractérisent de nombreux dépôts de sel et de gypse. Ils sont dits « évaporites » puisque leurs dépôts résultent de l’évaporation de l’eau dans laquelle ils sont dissous. À la glaciation survenue à la fin du Carbonifère succède une transgression de l’eustatisme (variation du niveau de la mer). On appelle transgression une avancée des eaux marines par rapport aux terres. Les transgressions coïncident souvent avec un réchauffement climatique. Les lagunes très peu profondes deviennent des playas, étendues d’eau temporaires où se déposent des évaporites. Au Permien, les conditions sont extrêmes dans ces lagunes. Les gisements de sel d’une considérable puissance qui se trouvent dans le sous-sol (Amérique du Nord, Allemagne, Russie, Afrique du Sud) témoignent d’une évaporation intense. Les énormes dépôts salifères du Zechstein (260-230 millions d’années ou Ma) réagissent aux poussées tectoniques alpines en formant des dômes de sel ou diapirs repérables en Allemagne, en Espagne ou en Roumanie. Lorsqu’une couche de sel très puissante (épaisseur de 500 à 900 m) se trouve enfouie à plus de 2 000 m dans un bassin sédimentaire, le sel qui est extrêmement plastique, a tendance à remonter vers la surface en déformant les terrains subjacents.
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Le sel
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Le deuxième niveau du Trias correspond à une transgression de la mer du Nord qui se traduit par une vaste étendue d’eau salée d’une faible profondeur. Les contours de cette mer germanique diffèrent peu de ceux d’une mer antérieure formée au Permien. Le climat devient très sec et cette mer s’évapore. Se constituent alors les gîtes salifères du Keuper (230-220 Ma) exploités ultérieurement en Allemagne et en Lorraine. Il est à noter que, dans cette région, le sel ne donne nulle part naissance à un dôme de sel. À l’ère quaternaire, de très grands glaciers se développent à partir d’une calotte dite inlandsis qui s’étend au nord de l’Eurasie, et dans les chaînes de montagne (Pyrénées, Alpes, Apennins, Himalaya). Sous le poids des glaciers (lors des phases de glaciation continentales), les Alpes subissent un affaissement qui est vraisemblablement accentué par une dissolution des évaporites. Dès l’Antiquité, de nombreux savants et philosophes se sont intéressés au sel. Sa composition chimique n’a été établie qu’en 1807 par Sir Humphry Davy qui obtint de la soude caustique par électrolyse. Les principales caractéristiques du chlorure de sodium (4) sont rappelées au début de la seconde partie.
La salinité des eaux La salinité des océans est variable dans l’espace. Un litre d’eau de mer pèse en moyenne 1,028 kg en raison de la présence de sels dissous, du chlorure de sodium essentiellement. Il contient environ 35 g de sel, ce qui représente une salinité de 35. Elle atteint 39 en Méditerranée, 44 dans la mer Rouge, et jusqu’à 275 dans la mer Morte. L’eau de mer contient 96,5 % d’eau et 3,5 % de substances diverses (dont 3,0 % de chlorure de sodium, 0,3 % de sulfate, 0,1 % de magnésium, et divers autres sels à l’état de trace). En 1978, l’UNESCO a défini une unité de mesure de la concentration des sels dissous dans l’eau : la « practical salinity unit » (psu). Elle correspond à un ratio de conductivité par rapport à une référence. C’est donc une unité sans dimension. La salinité (S) d’un échantillon d’eau est donnée par le rapport K de la conductivité électrique de cet échantillon d’eau de mer à 15 °C et à la pression atmosphérique normale, avec la conductivité d’une solution de chlorure de potassium (KCl) dans laquelle la fraction en masse de KCl est 0,0324356, à la même température et même pression. Si ce rapport K est égal à 1, on dit que la salinité est de 35. L’unité de base, soit un psu, correspond à un gramme de sel par kilogramme d’eau.
La crise de salinité messinienne La salinité est aussi variable dans le temps. C’est pourquoi il convient d’évoquer un évènement géologique original correspondant à des épisodes de chasse et de remplissage successifs de la mer Méditerranée qui se sont
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produits à la fin du Miocène, il y a près de 6 Ma. Les phases d’assèchement sont d’origine tectonique, favorisées notamment par la fermeture progressive du détroit de Gibraltar. Le rééquilibrage eustatique avec l’Atlantique est perturbé et ralenti. Il en résulte une baisse de son niveau de plus de 1 000 mètres. Cet événement se produit probablement sur plusieurs millénaires. Des arrivées d’eau de mer provenant de l’océan Atlantique alimentent les bassins d’évaporation à plusieurs reprises. Il s’ensuit des dépôts massifs d’évaporites visibles sous la forme de diapirs (dômes de sel). La remise en eau se produit au début du Pliocène, c’est-à-dire il y a 5,3 Ma. En moins d’un siècle, les bassins de la Méditerranée se seraient remplis, entraînant une chute du niveau global des océans de l’ordre d’une quinzaine de mètres et une salinité importante aux points de dissolution des diapirs. Une relativement récente mobilisation du sel qui est extrêmement plastique, entraîne la formation de ceux-ci, susceptibles d’être attaqués par les eaux souterraines ou de surface au fur et à mesure de leur montée au jour (dissolution du sel et formation d’un cap rock). Il y a quelque 20 000 ans, le niveau de la mer était d’environ 100 m inférieur à ce qu’il est actuellement.
2. Regards sur le sel dans l’histoire L’histoire du sel se confond avec la géologie. En fait, le sel n’a pas d’histoire. Mais c’est une pierre blanche dans l’histoire de l’homme. Le sel est impliqué dans des pratiques cultuelles et des applications variées où il se révèle indispensable depuis des temps immémoriaux (5). Pline l’Ancien assure que « le sel est indispensable à la vie ». Ses applications pratiques sont, en effet, nombreuses. Dès la Préhistoire, les éleveurs (instruits par les animaux qui le recherchent dans la nature) veillent à en disposer autant que nécessaire car il contribue à la bonne santé des animaux et à la qualité des produits laitiers. La notoriété de la Via Salaria traduit l’importance qu’avaient les salins d’Ostie pour l’alimentation du bétail dans l’arrière-pays. Le sel entre dans le traitement des peaux et, chez les Égyptiens, la momification des corps. Il garantit la palatabilité des aliments (saveur et texture). Par delà les plaisirs de la table, il est à la base de maintes salaisons. En raison de son efficacité pour conserver viande et poisson, leur production connaît un remarquable essor au fur et à mesure que la population augmente
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autour de la Méditerranée. On recourt au sel pour rendre l’eau potable et les vins médiocres plus agréables à boire. La fabrication de produits de beauté ne va pas sans sel (stabilisation des corps gras). Le sel est largement répandu dans la composition des remèdes. Il est employé comme auxiliaire technologique dans le traitement des métaux non-ferreux. Deux hommes ne peuvent se dire amis qu’après avoir consommé bien des boisseaux de sel (6). La période qui va de la Révolution française à la Première Guerre mondiale (1914-1918) est fertile en changements qui modifient la physionomie de la profession salinière jusqu’alors tournée presqu’exclusivement vers des activités alimentaires (cuisine, salaisons, pêche, alimentation du bétail). Avec l’ouverture du secteur de la chimie minérale, le sel se révèle être une matière première stratégique pour la production de carbonate de soude qui a déjà plusieurs applications industrielles (savonneries, fabrication du verre, métallurgie). On recourt au procédé Leblanc d’abord, au procédé Solvay ensuite (réaction liée à la décomposition du bicarbonate d’ammoniaque et du chlorure de sodium). En 1903, la production mondiale atteint 1 776 000 tonnes, dont 276 000 en France. Désormais, le procédé Solvay l’emporte. Dans ce pays, 250 000 tonnes environ sont obtenues suivant ce procédé alors que le procédé Leblanc y est devenu marginal. Sachant qu’il faut utiliser de 1,6 à 2,1 tonnes de sel pour fabriquer une tonne de carbonate de soude, et compte tenu de l’importance croissante de ses applications, on mesure l’impact que de telles innovations ont sur l’économie du sel, notamment en Lorraine. Sa production y passe de 23 000 tonnes à 158 800 tonnes en moins d’un siècle. L’essor des chemins de fer contribue à un nouvel équilibre du marché qui se développe sur l’axe Rhin-Rhône au détriment des marais salants atlantiques. La perte de l’Alsace et d’une partie de la Lorraine à l’issue de la guerre de 1870 (traité de Francfort, 1871) pousse l’administration française à ouvrir « de nouvelles facilités aux concessionnaires des mines et à procurer à l’industrie les ressources dont elle a besoin ». Après extraction, le concessionnaire est libre de disposer du sel à sa guise. On assiste à la multiplication des salines dans les vallées de la Meurthe et du Sânon tandis que les salines de la région annexée entrent dans l’union douanière de l’empire allemand (Zollverein). La surcapacité s’accompagne de rivalités d’où la crise traversée à la fin du xixe siècle. Au xxe siècle, nombre d’entreprises disparaissent au gré des regroupements. Les économies d’échelle, l’évolution des principaux secteurs-clients et la politique européenne accélèrent le phénomène de concentration à partir des années 1980. La mondialisation déplace les perspectives de croissance vers d’autres continents que l’Europe. Un seul exemple : la Chine produit aujourd’hui près de 80 millions de tonnes de sel…
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3. Géographie : l’univers « sel » On trouve du sel presque partout dans le monde. La Terre en renferme des réserves considérables. Les réserves de sel dissous dans l’eau des océans, des mers, des lacs et des fleuves salés assurent un potentiel extraordinaire. Le volume de l’eau de mer est estimé à 1 370 millions de km3. À raison d’une concentration moyenne de 30 g/L, cela représente en masse 40 000 millions de millions de tonnes.
3.1. La mémoire du sel Le sel a investi le langage. Dans nombre de régions du monde, les halonymes, c’est-à-dire les toponymes liés aux activités salinières, témoignent d’une intégration culturelle des métiers du sel entreprise de longue date. Le simple examen d’une carte permet d’identifier les régions où les ressources en sel ont été exploitées et le sont parfois encore. La Seille est une rivière salée. Elle coule dans le Saulnois où Marsal garde le souvenir des anciennes salines. Sur un axe nord-sud, on rencontre Saulnot, Salins, Lonsle-Saulnier. Dans les Pyrénées, Salies-de-Béarn et Salies-du-Salat (au cœur du Comminges) renvoient le même écho de sal, salis, le sel en latin. Moriez viendrait de muria qui désigne la saumure. On peut faire le même exercice dans d’autres langues ayant la même racine : Salisbury en Angleterre ou Salzburg en Autriche. Dans les pays de langue allemande, la trace du sel est révélée par Hall qui vient du grec ἅλς. Hallstatt est un site éponyme d’une culture florissante grâce au sel au premier âge de fer. Dans les Balkans, Tuzla vient du mot turc « tuz » qui désigne le sel et que l’on retrouve dans Tuz Gölü, le grand lac salé d’Anatolie où le sel forme une croûte facile à exploiter. En russe, le sel se dit соль (sol) et divers sites sont associés à sa production. Par exemple, Solikamsk (littéralement sel de Kama). Melah est commun à l’hébreu et à l’arabe. Kef el melah renvoie à une montagne de sel près de Laghouat (Algérie). Hadjer el melah (Pierrede-Sel) constitue une halte au débouché du passage que s’est frayé l’oued Melah dans le djebel Sahari, piémont du massif des Ouled Naïl. Bien des langues du monde sont saupoudrées, sinon saturées de ce sel omniprésent et de mots qui, parfois, se déclinent longuement (salade, saucisse, saupiquet, saugrenu)… Un propos salé fait image et se révèle piquant
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au propre comme au figuré. Son auteur est un homme d’esprit que les Espagnols qualifient volontiers de « muy salado ».
3.2. Comportements La plupart des pays du monde disposent de ressources en sel. Les conditions d’exploitation varient en fonction de leur superficie, de leur climat, de leur expansion démographique, de leur développement économique et de leur positionnement sur le marché mondial. Quelques exemples permettent d’apprécier comment ils réagissent à la demande. Celle-ci évolue dans le temps, dynamisée par la révolution industrielle ou inchangée quand la tradition l’emporte sur le progrès… Sur la longue durée, on assiste à de singuliers bonds technologiques comme en témoigne l’évolution de la production de sel au Japon. L’ouverture du Japon sur le monde se traduit par l’introduction des équipements (triple effet) et des techniques (échange d’ions) permettant de produire en grand du sel ignigène (thermo-compression, évaporation sous vide) (10). Les producteurs développent simultanément des dispositifs de graduation (shijoka) permettant de faire appel à une main-d’œuvre moindre. En 1905, un monopole du sel est instauré. En 1971, la production est répartie entre sept sociétés qui ont recours à la membrane échangeuse d’ions pour concentrer la saumure et aux multiples effets pour l’évaporer sous vide. Le Japon fournit un bon exemple de son sens de l’innovation technologique et du réalisme commercial. En 2005, la consommation de sel atteint 9,4 Mt dont 85 % de sel importé par l’industrie chimique à partir des marais salants où elle a investi en Australie et au Mexique. L’évolution de l’homme est-elle concevable dans l’ignorance du sel ? D’aucuns prétendent que le sel est un poison auquel les peuples primitifs ne sont pas exposés. Ainsi, en irait-il des Yanomami qui vivent dans la forêt amazonienne entre le Brésil et le Venezuela (11). Ces hommes seraient représentatifs d’une « société première », d’une « vie naturelle », bref d’un milieu épargné par l’industrialisation. Ils ne seraient pas exposés aux accidents cardiovasculaires car leur alimentation est pauvre en sel. En effet, ils n’utilisent que celui qu’ils retirent des cendres de certains végétaux. Ils fabriquent un condiment à base de saumure qui témoigne d’une sensibilité minimale à la saveur salée. D’après l’étude Intersalt, leurs ingesta sodés sont inférieurs à 1 g/j pour un indice de masse corporelle de 21 et une pression artérielle de 10-6 cmHg. Toutefois, leur espérance de vie est brève (12). On ne peut donc pas vérifier quels sujets pourraient développer une augmentation de leur pression artérielle avec l’âge…
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Chez d’autres Aborigènes, du sel est produit à la manière des ancêtres (pratiques liées au sacré et au prestige). En Papouasie-Nouvelle-Guinée, divers groupes ethniques exploitent des sources salées à grand labeur dans la région des Hautes-Terres (Irian Jaya) (13). Les indigènes procèdent au trempage des végétaux dans une eau plus ou moins concentrée en sel, recueillie dans un bassin rudimentaire. Là où la salinité est médiocre, les fibres végétales sont brûlées. Avec leurs cendres, ils fabriquent des pains de dimensions modestes. La fréquentation de sources fortement salées donne lieu à l’implantation durable d’un groupe ou à l’organisation par les hommes d’expéditions répétées pour obtenir du sel et le conditionner sous forme de pains de plusieurs kilogrammes. Ces indications sommaires ne doivent pas faire oublier que ce processus d’obtention du sel est décliné de maintes manières, chaque groupe ayant ses méthodes et ses habitudes transmises par les Anciens. La consommation de sel chez ces montagnards est réduite (entre 3 et 4 g/j). Dans les régions plus accessibles, les autorités font la promotion du sel iodé sans que cette mesure entraîne une augmentation des ingesta sodés. En fait, ce sel traditionnel est assez peu consommé, et l’est plutôt comme un médicament. Outre sa valeur curative, il apparaît comme un bien associé à des rites de propitiation et de socialisation (14). L’étude ethno-archéologique de ces populations autonomes et bien adaptées à leur milieu permet de construire un modèle interprétatif ouvrant le champ des possibles au sujet de la quête du sel dans les sociétés néolithiques européennes.
3.3. Techniques et paysages du sel Les paysages du sel attirent le regard qu’il s’agisse des champs de sel du Japon, des aménagements salicoles du littoral atlantique (de la Normandie au Portugal), des « jardins à sel » de Papouasie, des salines continentales d’Espagne, des micro-salins de Gozo (Malte) ou des grands lacs salés (Turquie, États-Unis, Bolivie). Les salines de Maras, près de Cuzco (Pérou) s’opposent par leur aspect au salar d’Uyuni (Bolivie) comme les deux infinis. Ici, l’eau salée qui sourd à flanc de montagne est récupérée et canalisée vers une dentelle d’innombrables bassins où elle s’évapore tandis que le sel cristallise au soleil. La production varie de l’un à l’autre (capacité de 120 à 200 kg/ mois). Là, avec une superficie de 10 582 km2, le salar constitue une immense réserve de sel solaire. Elle est estimée à quelque 60 milliards de tonnes. La récolte de sel est de l’ordre de 25 000 tonnes/an. Plus extraordinaire encore est le lac Assal (Djibouti) (15) qui se trouve dans une vaste dépression à 157 m en dessous du niveau de la mer. C’est un immense dépôt de sel. On distingue une lagune d’une superficie de 54 km2
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où des sels sont en dissolution et une sorte de banquise de sel gemme qui l’entoure (61 km2). Son alimentation est pérenne, assurée par des sources qui jaillissent des failles et des infiltrations d’eau de mer le long des fissures qui sont dues aux mouvements de magma sous l’écorce terrestre (rift). Aliment nécessaire aux hommes et aux animaux, le sel d’Assal est depuis toujours convoité par les caravaniers qui alimentent les échanges entre la côte et l’arrière-pays éthiopien. Au xxe siècle, de multiples projets voient le jour en vue de l’exploitation industrielle des ressources de cette dépression. Les missions géologiques se succèdent à Djibouti. Le projet est longtemps caressé d’une centrale hydraulique, puis d’une unité géothermique. L’exploitation des ressources salines fait rêver les entrepreneurs. Certaines études privilégient l’évaporation des saumures saturées plutôt que l’extraction du sel (20 m d’épaisseur moyenne sur 60 km2). La tendance s’inverse en 1998 et les concessionnaires entreprennent bientôt d’exploiter le sel brut. Les exportations représentent 130 000 tonnes en 1999. D’aucuns regrettent cette option prise au détriment de l’exploitation touristique et de son environnement. La relation « techniques/paysages » mérite qu’on s’y attarde. Y incitent certains ouvrages comme la thèse de géographie de Sarah Réault-Mille sur les marais salants charentais (16). Elle vient à point pour relancer une réflexion engagée en son temps par Charles Esprit Le Terme. Celle-ci devrait permettre de trouver des réponses aux questions que pose la strate salicole (travail régulier du sol, maîtrise des eaux douces et salées, qualité du sel) dans les systèmes de production actuels. Comment le littoral charentais a-t-il été construit et quelle part l’aménagement des marais salants y a-t-il pris ? Les techniques de production du sel par évaporation solaire ont, nonobstant les variations climatiques, des constantes spécifiques et déterminantes en ce qui concerne les relations de l’homme avec le milieu. Comment des modes de production différents (saliculture, aquaculture, ostréiculture, agriculture) ont-ils interprété harmonieusement un même milieu ? La question déborde le cadre de la Charente Maritime. Le moment n’est-il pas venu de faire un sort à l’opposition factice entre « naturel » et « industriel ». Y a-t-il une seule activité humaine qui n’ait jamais porté atteinte à la nature ? On ne peut que donner quitus à la constatation faite par Hocquet (17) à propos des marais salants voisins : « Il faut peu de réflexion pour proclamer que le marais de Guérande est un marais naturel. Il n’est pas de paysage plus construit par l’homme ». Déjà artificiel lorsqu’il est aménagé, le marais salant l’est encore plus du fait de sa morphologie et de la gestion des eaux qui lui est associée. La poldérisation du littoral est synonyme d’acculturation géographique. Ce que le milieu naturel aurait été ne sera jamais qu’une approximation en regard du temps géologique. Les mesures prises en vue d’une valorisation
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productive répondent à des contraintes que le milieu impose autant que le marché. On ne récolte jamais du sel dans le même marais salant. Le risque est que les activités dont il est le cadre incitent à une « esthétisation » du paysage, autrement dit les fantasmes d’une société urbanisée qui a perdu le sens de la nature.
3.4. Dessalement de l’eau Dessaler l’eau de mer de manière à la rendre consommable est désormais pratiqué à l’échelle industrielle. Les deux procédés les plus couramment utilisés sont la distillation et l’osmose inverse. La distillation consiste à évaporer l’eau de mer, soit en utilisant la chaleur des rayons du Soleil, soit en la chauffant dans une chaudière. Seules les molécules d’eau s’échappent, laissant en dépôt les sels dissous et toutes les autres substances contenues dans l’eau de mer. Il suffit alors de condenser la vapeur d’eau ainsi produite pour obtenir de l’eau douce. L’osmose inverse nécessite, quant à elle, de traiter au préalable l’eau de mer en la filtrant et l’épurant afin de la débarrasser des éléments en suspension et des micro- organismes qu’elle contient. Le procédé consiste ensuite à exercer sur cette eau salée une pression suffisante pour la faire passer à travers une membrane semi-perméable. Seules les molécules d’eau traversent la membrane, et on obtient ainsi une eau douce potable. Des évaporateurs « multiple effet » permettent, comme dans les salines ignigènes, de limiter la dépense énergétique des systèmes précédents en utilisant la chaleur produite lors de la condensation de la vapeur d’eau pour évaporer l’eau de mer. Si le dessalement n’est pas envisagé à grande échelle en France, il progresse sensiblement dans d’autres pays. Selon l’Association internationale du dessalement (IDA), il y aurait actuellement près de 16 000 usines en activité dans le monde, attestant d’une croissance de plus de 5 % en 2010-2011. Les principaux pays y ayant recours sont les pays du Golfe, notamment l’Arabie Saoudite et les Émirats arabes unis (EAU), l’Espagne, les États-Unis et la Chine. L’eau ainsi obtenue est destinée à la consommation humaine et aux applications industrielles. Parmi les critiques formulées par leurs détracteurs figurent l’importance des coûts énergétiques et des rejets salins. Toutefois, ceux-ci peuvent être recyclés par la chimie minérale.
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4. Les techniques de production Bien qu’elles comportent des variantes dans l’espace et des aménagements dans le temps, les techniques de production de sel (chlorure de sodium) peuvent être ramenées à trois : une technique agricole (évaporation naturelle), une technique minière (extraction), une technique ignigène (évaporation artificielle). Afin d’éviter une approche par trop réductrice, on se réserve la possibilité d’évoquer quelques cas particuliers pour montrer l’ingéniosité des hommes qui les ont développées. Actuellement, près de 40 % de la production mondiale de sel est assurée par sa récolte dans les marais salants ou les lacs salés, 26 % par l’exploitation directe (mine sèche) de gisements de sel gemme et 34 % par l’extraction en dissolution.
4.1. Agricole – Marais salants ou salins (évaporation naturelle) Le sel qui est récolté dans les marais salants ou salins (salinae) provient non seulement de ceux qui sont aménagés sur des littoraux où les conditions climatiques et pédologiques sont favorables mais encore des lacs salés ou des plans d’eau salés construits en vue d’une exploitation naturelle des sources salées. Aussi, l’expression « sel solaire » semble-t-elle parfois plus exacte que « sel de mer ». D’ailleurs, le sel extrait des mers fossiles n’est-il pas aussi d’origine marine ? Même dans un salin sis au bord de la mer, du sel peut être obtenu à partir d’autres sources que l’eau de la mer. En effet, il peut être, en totalité ou partie, alimenté en saumures continentales. Un saumoduc les y conduit à partir de cavités (sel en dissolution). Des marais salants peuvent également être aménagés en bordure d’un lac salé ou d’un chott. Un chott est une étendue d’eau salée, aux rivages changeants, située dans les régions semi-arides (Afrique du Nord). Certains géologues préfèrent le terme de sebkha. Il est alimenté en eau de façon discontinue lors des rares pluies. Il s’y dépose des masses plus ou moins importantes de sels quand ces sites sont l’objet d’une évaporation intense après la chute des pluies et le lessivage des terrains circonvoisins (impluvium). Cette évaporation accumule des sels ou des saumures qui sont parfois exploitables encore que leur utilisation soit compliquée parce que ces sels coexistent dans des proportions variables et que les insolubles peuvent être importants en volume.
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Les salins méditerranéens La production de sel solaire par évaporation naturelle sous l’action du soleil et du vent comporte deux phases complémentaires : la concentration de l’eau en sel jusqu’à l’obtention d’une saumure saturée. Colas (24) considère que la saturation est effective à partir de 260 g/litre pour l’eau de mer. L’évaporation de l’eau affecte 90 % de son volume ; la cristallisation du sel à partir de cette saumure qui perd encore 7 % d’eau ; 3 % subsistent dans les eaux mères. Pour produire 1 kg de sel, l’évaporation de 37 kg d’eau de mer est nécessaire. Lorsque l’eau de mer s’évapore dans un salin, divers sels se déposent successivement en fonction de leur degré de saturation, le sel proportionnellement majeur étant le chlorure de sodium. Le sulfate de sodium (gypse) précipite avant cristallisation du chlorure de sodium. Celle-ci est interrompue pour éviter les effets des sels magnésiens : au-delà d’une teneur de 40 g/l, le sel serait amer et déliquescent. Description d’un salin Les deux phases évoquées précédemment se déroulent comme suit : la concentration dans les partènements, la cristallisation dans les tables salantes. Des bassins sont aménagés en marge de celles-ci pour constituer des réserves de saumure. On dispose ainsi de saumures permettant d’éviter une baisse de la concentration en cas de pluies, ou d’assurer un début de campagne plus serein en termes de qualité. Les partènements sont de grands bassins que l’eau de mer parcourt pour arriver aux cristallisoirs à l’état de saumures saturées. Ils sont généralement aménagés en tirant parti des étangs littoraux ou en regroupant d’anciens marais salants (Aigues-Mortes). Ils comportent des digues et sont équipés de martelières (vannes). L’eau est pompée à la mer mais généralement ses mouvements se font par gravité. Dans le plus vaste des salins de la Méditerranée (Salin-de-Giraud), les partènements représentent une superficie de quelque 10 000 ha. Les tables salantes ou cristallisoirs sont d’une superficie moindre, encore que, désormais, la surface unitaire dépasse 10 ha en relation avec les moyens mécaniques mis en œuvre pour la récolte. De forme rectangulaire, elles sont séparées par des cairels garnis de planches pour éviter le contact de l’eau avec la terre. Ces tables sont ceinturées de rigoles ; les unes y conduisent la saumure saturée, les autres en évacuent les eaux mères ou les eaux pluviales. Le fond des tables salantes est nivelé et compacté. En effet, le sel doit se
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déposer de manière uniforme pour faciliter sa récolte. Au printemps, avant la saunaison, c’est la tâche du saunier qui envoie d’abord de l’eau sur les cristallisoirs pour les laver. Ensuite, le sol est travaillé pour être aussi plat et lisse que possible. Lorsque le climat le permet, il est possible de récolter sur un contre-sel, c’est-à-dire une épaisse couche de sel sur laquelle le sel nouveau se dépose. On obtient ainsi un sel parfaitement blanc. Avant la mécanisation, la récolte comportait deux opérations complémentaires : le javelage et le levage. Pour effectuer la première, on commençait par évacuer l’eau recouvrant le gâteau de sel qui s’était formé progressivement sur le cristallisoir. On le laissait exposé au soleil pendant deux ou trois jours, puis on le décollait du fond de la table avec une pelle plate en bois terminée par un couteau qui devait se glisser sous les cristaux pris en masse. Le sel était alors amoncelé en petits tas coniques, les javelles. Dans les jours suivants, le sel était repris des javelles pour être stocké sur les graviers (aires de stockage) en grands tas appelés camelles. Beaucoup de soins et d’efforts étaient requis pendant les semaines que durait la récolte. Ces opérations devaient être achevées pour le 15 août à cause des orages. Ensuite les camelles restaient à découvert. Le sel était lavé par les pluies survenues avec l’automne et débarrassé ainsi des sels magnésiens subsistants. Il arrivait qu’elles fussent couvertes de joncs ou de tuiles. La campagne salicole demeure une période critique. La détermination de la date du lancement de la récolte exige de la réflexion. Engagée trop tôt, elle risquerait de limiter le nombre de jours efficaces, c’est-à-dire propices à un travail incessant assurant la rentabilité des moyens mis en œuvre. Trop tard, elle subirait des pertes importantes pouvant atteindre 10 %. La période la plus propice est désormais calculée par analyse statistique des conditions antérieures, enregistrées depuis de nombreuses années. Toutefois, l’incertitude subsiste car les prévisions météorologiques ne sont pas fiables au-delà de quelques jours. La récolte s’effectue toujours sur des surfaces asséchées, une fois évacuées les eaux mères. La mécanisation permet de réduire la durée de la campagne et de limiter les risques de perte. Les très nombreux ouvriers qui se pressaient sur les tables salantes à la fin du xixe siècle ne sont plus qu’un souvenir. Les récolteurs, qui ont été perfectionnés au fil des années, décollent exactement la couche de sel qui les porte, avec très peu d’insolubles (sable et argile). La généralisation des voies étroites, puis des locomotives Decauville, a permis de déplacer plus aisément le sel récolté qu’avec l’utilisation de brouettes. Les wagonnets ont fait place aux camions et aux remorques tirées par des tracteurs, chargés directement par les récolteurs qu’ils servent. Le transport du sel depuis ceux-ci jusqu’aux pistes implantées autour des tables salantes peut aussi être effectué par des lignes de convoyeurs à bande.
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En fonction de son utilisation ultérieure, en particulier s’il est destiné à l’alimentation, le sel brut est convoyé jusqu’à une station de lavage où une saumure saturée le débarrasse des insolubles qui lui donneraient une couleur grise. On sait que le sel est naturellement blanc. Les procédés de lavage du sel sont divers. Le nœud gordien est constitué par le vigoureux brassage des cristaux avec une saumure en évitant de les briser car ils sont très fragiles du fait de l’humidité.
Les marais salants de l’Atlantique L’océan Atlantique baigne de nombreux rivages. Pour montrer la variété des exploitations salicoles aménagées sur ceux-ci en Europe, on s’est limité à la France alors que les spécificités du Portugal auraient aussi mérité de retenir l’attention. À l’Ouest, rien de nouveau… Bien qu’ils présentent des différences morphologiques et lexicales selon les régions (Loire-Atlantique, Vendée, Charente-Maritime), on peut décrire les modalités de production dans ceux-ci de manière schématique. Pour la commodité des explications, on prend ceux de la presqu’île de Guérande comme modèle et on utilise les termes qui y sont familiers. Les marais salants occupent la partie orientale d’une zone plane dont l’altitude ne dépasse pas six mètres, située entre le coteau de Guérande au nord et la presqu’île du Croisic au sud. À l’ouest, cette zone est séparée de l’océan par la pointe de Pen Bron, à l’exception du chenal qui permet à l’eau d’y pénétrer à marée haute. Les marais salants sont répartis entre les communes de Batz-sur-Mer et de Guérande, et pour une faible part, de La Turballe. Les marais salants communiquent à l’ouest avec l’océan par les Traits du Croisic qui alimentent des étiers. L’eau de mer parvient par un étier à la vasière, qui constitue une réserve alimentée lors des grandes marées. De là, elle passe dans le cobier qui est le premier d’une série de bassins qui s’achève avec les œillets (cristallisoirs). Ce parcours lui permet de se concentrer. La saline proprement dite est constituée par les compartiments dits adernes, fares et œillets. L’eau salée passe de l’un à l’autre par une ouverture appelée cuy qu’il est possible d’obstruer avec une pierre plate. De petites digues les séparent, les ponts. Au centre de ceux qui délimitent les œillets est aménagée une plate-forme, la ladure. Le paludier y dépose le sel qu’il a retiré de l’œillet. Ce sel constitue un mulon. Dans la presqu’île de Guérande, la récolte du sel et l’entretien des digues et des bassins est le fait des paludiers (palus, -udis : marais). Plus au sud, ils se disent sauniers. Dans l’île de Ré, un marais salant est composé de trois séries de bassins : le vasais, les métières et le champ de marais. Dans celui-ci, l’eau de mer circule d’abord dans les vivres (chauffoir) pour gagner les nourrices,
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puis les aires saunantes. Ces bassins ont été méticuleusement aménagés dans l’argile afin que l’eau passe de l’un à l’autre par gravité. Récolté sur le fond de l’aire saunante, le gros sel est d’une couleur grise due aux particules argileuses qu’il contient. Pendant l’hiver, le marais ne requiert pas de soins particuliers. On commence à y travailler en mars (réparation de la vasière, nettoyage des cuys). On vide les salines de l’eau douce accumulée pendant l’hiver. On vérifie la planéité des différents bassins et, après le chaussage, on les remet en eau. Au début de juin, le sel commence à se former dans les œillets. On le recueille tous les jours si le temps est favorable. Debout sur la ladure, le paludier le tire avec son rouable ou las (simoussi à Ré). Il s’agit d’une planchette emmanchée perpendiculairement à une tige de bois (ou de plastique) d’environ six mètres. Vers la mi-septembre, on cesse d’en récolter. Il importe de le faire chaque jour pour éviter sa dissolution par la pluie. Égoutté, le sel est transporté dans une salorge où il est entreposé pour la vente. Le caractère archaïque de la récolte séduit la clientèle estivale qui l’assimile à « l’authentique ». En 1857, la production française de sel de mer était de 445 000 t dont 208 000 t sur la côte atlantique. Actuellement, cette production est marginale, comparée à celle de la côte méditerranéenne. Elle est réalisée dans la presqu’île de Guérande (12 kt), dans l’île de Ré (3 kt) et à Noirmoutier (2 kt).
Micro-salins continentaux Il s’agit là d’une spécialité espagnole. Si ces exploitations ont un profil variable, les techniques mises en œuvre sont pratiquement les mêmes partout. Toutefois, la situation géographique de la région entre l’Andalousie occidentale et orientale mérite un bref rappel. Caractérisé par la présence d’une vallée (Vega del río Genil) encaissée entre deux massifs montagneux, le sous-bétique au nord et le pénibétique au sud, son relief contribue à instaurer un microclimat marqué par des variations thermiques importantes entre l’hiver et l’été. Les lagunes salées en milieu pénibétique constituent un exemple significatif de l’aménagement de micro-salins loin de la mer (26). Ils sont approvisionnés en eau salée à partir de sources. Celle-ci se concentre avant que le sel ne se dépose dans les cristallisoirs. Le captage des eaux salées est crucial. Là où le relief le permet, on aménage une retenue et on installe des dispositifs hydrauliques jusqu’aux bassins qui jouent le même rôle que les parténements. Il arrive qu’il soit nécessaire de creuser une galerie pour atteindre le niveau d’eau salée. Si celle-ci est tirée d’un puits, elle est élevée grâce à des roues à augets (norias). Ces dispositifs sont familiers aux exploitants de champs irrigués. Après avoir assuré la venue d’eau salée par l’une ou l’autre de ces méthodes, on la conduit
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jusqu’aux bassins où elle se concentre, chacun disposant d’une réserve. Des canaux permettent de passer de l’un à l’autre jusqu’aux cristallisoirs. L’espace occupé par les cristallisoirs respecte un plan orthogonal. Ils sont donc rectangulaires ou carrés. Leur fond peut être garni de pierres ou dallé. L’hypothèse est plausible selon laquelle l’aménagement de ces micro- salins aurait connu un essor avec le développement de l’agriculture irriguée à l’époque andalouse (27). Néanmoins, de telles exploitations auraient pu fonctionner antérieurement. Les experts distinguent les « salines de campagne » (comme celles de la campine de Jaen) et les « salines de montagne ». Ces dernières exigent des aménagements tenant compte des courbes de niveau et leurs dimensions sont plus modestes. À titre de curiosité, on peut encore faire état des salines du cap Cod (Massachussetts) (28) où le sel était obtenu par évaporation naturelle dans des cuves en bois de trois mètres de large, d’une longueur variable et d’une profondeur de 20-30 cm. Ces cuves sont installées en retrait de la côte et alimentées en eau de mer par des pompes. Elle se concentre dans un premier compartiment, dépose les sels secondaires dans un second avant de cristalliser dans un troisième sous l’œil attentif du saunier. Il fait plusieurs récoltes entre mars et octobre. L’originalité de ces installations tient surtout aux toits pivotant, ou coulissant sur des rails. Ils en assurent la couverture en cas d’intempéries. Leur aménagement en cascade et l’utilisation de moulins pour faire circuler l’eau de mer contribuent aussi à leur originalité. La technique agricole est ainsi « industrialisée » puisqu’elle fait appel à des structures et des machines complexes. Essentiellement destinée au secteur de la pêche, la production atteint 22 kt en 1837. Introduite en 1778, elle est abandonnée peu après 1860, les besoins des pêcheries étant couverts par d’autres sources et à moindre coût.
4.2. Minière (extraction) La mine sèche Le sel gemme ou halite est souvent associé à d’autres évaporites, gypse ou anhydrite, ou des sels de potassium, sylvinite ou carnallite. Dans les gisements où il se présente en couches ou en dômes (diapir), il a l’aspect de cristaux centimétriques enchevêtrés. Quand il est pur, il est blanc, parfois translucide. L’une des plus importantes mines de sel (Borth, Allemagne) exploite à 700 m une couche de sel de 20 m de puissance où le sel est de cette qualité ( 98 %, classe B > 91 % – répondent à la recherche du meilleur pouvoir fondant en fonction de la nature des revêtements. Le traitement préventif s’applique sur la chaussée quelques heures avant un refroidissement annoncé par les services de la météorologie et susceptible d’entraîner neige ou verglas. Un traitement curatif est possible. Lorsque la neige adhère déjà à la chaussée ou que du verglas s’est formé, il faut procéder aux salages appropriés. L’enlèvement mécanique de la neige est indispensable avant le salage de la chaussée. Selon les circonstances, le sel est épandu sous forme : de sel grenu ; de saumure (solution saturée de sel dans l’eau) ; de bouillie (mélange de sel grenu et de saumure dans une proportion de 10 à 30 % de solution par rapport au mélange). La quantité annuelle de fondants routiers épandue en France a varié entre 200 et 2 000 kt au cours des vingt dernières années. L’hiver 20092010 s’est caractérisé par une demande estimée à 1,9 million de tonnes de sel, soit plus du double du tonnage en année moyenne. Ces statistiques négligent le sel alimentaire détourné de son utilisation pour prévenir la formation de verglas. Une analyse du service hivernal menée par le SETRA à l’échelle régionale, montre qu’il est possible d’épandre annuellement, dans des zones critiques, des quantités comprises entre 10 et 80 tonnes par kilomètre carré. L’impact des fondants routiers sur l’environnement est variable. Il existe des différences notables dans la composition et les concentrations en éléments dits insolubles. Ces dernières peuvent varier dans le temps suivant l’origine du produit et son fournisseur. Pour les autres types de fondants et pour le chlorure de sodium issu d’autres processus industriels que ceux décrits plus haut, la norme XP P98-181 définit leurs propriétés fonctionnelles et encadre leurs performances. Les effets constatés et supposés des fondants routiers sur l’environnement font l’objet d’une abondante littérature dans les pays où les conditions hivernales se caractérisent par de nombreux jours de gêne. Parfois vives lorsque l’hiver est doux, les critiques changent d’objet quand le trafic routier est paralysé faute de salage… En matière d’écologie, la note d’information du SETRA (36) vise à définir : des outils méthodologiques pour évaluer les conséquences de l’usage des fondants, et faire prendre conscience aux exploitants et aux usagers de la route des risques encourus par les milieux naturels ; des mesures techniques et opérationnelles qui permettraient de réduire l’impact des fondants routiers sur l’environnement,
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afin de proposer un cadre réglementaire susceptible d’assurer un nouvel équilibre entre les exigences de la société en matière de sécurité routière et la responsabilité de tous au regard du développement durable.
6.3. Industries diverses Adoucissement de l’eau Le consommateur se plaint souvent de l’eau calcaire. L’eau du réseau contient des ions calcium et magnésium qui forment des sels peu solubles. Ces sels contribuent à la « dureté » de l’eau. Ils entraînent l’entartrage des canalisations d’eau chaude, des appareillages d’eau potable et des systèmes de traitement d’eau. Les adoucisseurs offrent une solution qui combine adoucissement de l’eau et suppression du calcaire. La dureté de l’eau s’exprime par un indice ou titre hydrotimétrique (TH) exprimé en degré français (°f). 1 °f correspond à 10 mg de calcaire par litre d’eau. Plus le TH est élevé, plus l’eau est dure, voir le tableau suivant. TABLEAU 10. Dureté de l’eau. TH °f
De 0 à 6
De 6 à 15
De 15 à 25
> 25
Eau
Très douce
Douce
Assez dure
Dure
Pour connaître la dureté de l’eau du robinet à son domicile, il convient de se renseigner auprès de son distributeur d’eau ou de la mairie de sa commune de résidence. L’adoucissement de l’eau peut être nécessaire dans certaines industries comme l’industrie alimentaire et dans les appareils domestiques : adoucisseurs et lave-vaisselle. Le calcaire a la particularité de précipiter durant le chauffage dans les lave-vaisselle. Il forme alors un dépôt sur la résistance et laisse des traces après le séchage sur la vaisselle. De plus, une eau dure diminue l’efficacité du détergent. C’est pour toutes ces raisons que ces appareils ont un adoucisseur intégré. Il est conseillé d’alimenter régulièrement le bac à sel du lave-vaisselle avec du sel régénérant spécialement étudié et réalisé pour cet usage car cela conditionne le bon fonctionnement de l’appareil et la qualité de la régénération. Du sel est également nécessaire pour les installations d’adoucissement installée dans les foyers, les hôtels, les restaurants, les hôpitaux, les centres de nettoyage, les laveries, etc. Il se présente sous la forme de pastilles compactées, spécialement conçues pour cet usage.
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On procède ainsi à l’élimination du calcaire tout en maintenant une quantité résiduelle pour que l’eau ne devienne pas agressive. L’eau douce, caractéristique des reliefs granitiques, est non seulement pauvre en calcaire, mais également dépourvue de nombreux autres minéraux dissous, alors que l’eau adoucie – débarrassée de son calcaire – contient toujours les mêmes quantités de minéraux dissous. Le principe de l’adoucissement en cycle sodium est simple et efficace : des résines échangeuses d’ions sont chargées en sodium ; lors de la phase d’adoucissement, les ions calcium et magnésium, res ponsables de la dureté de l’eau, se fixent sur les résines en prenant la place des ions sodium qui se retrouvent dans l’eau adoucie ; lorsque les résines sont saturées en calcium et magnésium (et qu’elles n’ont plus de sodium), elles doivent être régénérées à l’aide de saumure produite par dissolution de sels spéciaux dits « de régénération » ; lors de la phase de régénération, les ions sodium reprennent la place des ions calcium et magnésium qui sont éliminés à l’égout avec les ions chlorures. Pour assurer une bonne qualité de régénération, le sel doit répondre à des critères de qualité chimique et physique, et être d’une grande pureté. Il doit être conforme à la norme NF EN 973 qui les définit. De plus, certains sels de régénération sont porteurs du label NF, garantie d’un niveau de qualité supérieur. La marque NF 406 relative aux appareils de traitement de l’eau et aux sels de régénération des résines échangeuses d’ions résulte d’une démarche volontaire de certification de produits et services dans l’intérêt des usagers. Le sel doit répondre à trois critères de pureté : physique : le sel ne doit pas contenir de matières insolubles qui pour raient colmater les systèmes d’aspiration de saumure et encrasser les résines ; chimique : le chlorure de sodium est la matière active. Le sel ne doit donc pas contenir d’autres composants ; microbiologique : le sel doit être exempt de tout germe pathogène. L’eau adoucie n’a pas une saveur salée. Après traitement, une eau dure à 30 °f contient 138 mg/L de sodium alors que la limite fixée par l’arrêté du 11 janvier 2007 relatif aux limites et références de qualité des eaux brutes et destinées à la consommation humaine stipule un seuil de 200 mg/L pour le sodium. L’électrochloruration qui fait appel à des sels spéciaux semble le procédé le plus sain pour traiter l’eau des piscines. Elle est régie par la norme EN 14805. Ce procédé est fondé sur la production naturelle par électrolyse
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d’hypochlorite de sodium, d’oxygène et d’ozone. Le chlore actif, après avoir détruit les bactéries et les micro-organismes de l’eau, se reconvertit naturellement en sel sous l’effet des UV. Il est préférable d’utiliser du sel compacté sous forme de pastilles qui se dissolvent progressivement et de façon homogène dans l’eau. La salinité de l’eau n’est que de quelques grammes par litre.
Traitement des cuirs et peaux La conservation des peaux livrées après équarrissage doit être assurée à l’abri des bactéries. Le salage consiste à soumettre la peau fraîche à l’action déshydratante du sel, et le saumurage à celle d’une solution saline saturée. On empile les peaux chair contre poil en recouvrant le côté chair d’une couche de sel. Le degré d’hydratation diminue d’environ 15 à 20 % et l’eau résiduelle d’imprégnation se sature en sel. Après 10 à 15 jours de séjour en pile de salage ou 25 à 30 heures d’immersion en bac de saumurage, les peaux brutes salées peuvent être conditionnées et stockées en magasins réfrigérés en attente d’expédition. Ce procédé permet d’éviter la putréfaction des éléments qui constitue, après tannage, le cuir. Le salage est effectué, soit manuellement, soit mécaniquement à l’aide de machines idoines ou de foulons. Le salage traditionnel au sol en utilisant du sel fin permet d’améliorer la conservation des peaux à condition de respecter les bonnes pratiques de préparation de celles-ci. Il permet de réduire les coûts, le rejet étant moindre. Le grenage et la composition chimique du sel doivent être bien adaptés à cette utilisation. S’il contient des éléments alcalino-terreux, il y a lieu de le traiter au carbonate de sodium pour éviter les incrustations dites piqûres ou taches de sel. Les principaux défauts de conservation des peaux ont une origine : soit chimique (réaction entre les substances en présence). En raison de celle-ci, des piqûres de sel sont visibles sur la chair ou sur la fleur ; soit micro-organique. Les peaux s’échauffent en raison de l’insuffisance de déshydratation ou d’un salage tardif ou d’un stockage dans un lieu mal réfrigéré ou mal ventilé. D’où l’apparition de taches.
Vernissage des grès Depuis l’Antiquité, le sel est utilisé pour le vernissage des grès. On appelle « volatilisation » le procédé qui revient à jeter du sel humide dans le four en fin de cuisson. L’eau et le sel se vaporisent, réagissant alors sur le silicate d’alumine constitutif de l’argile. Au terme de cette réaction, il se produit un silicate alumino-sodique grâce auquel se forme une légère glaçure à la surface des pots et autres objets de céramique.
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Métallurgie Le chlorure de sodium est associé à d’autres substances minérales pour obtenir des bains ayant une température de fusion très précise. Ces bains sont requis pour la cémentation et la trempe qui permettent de donner au métal des propriétés particulières. Il participe à la production d’aluminium de deuxième fusion par affinage à 800 °C quand il est mélangé avec des déchets de fonderie. Plus la proportion d’oxydes est importante, plus la quantité de sel nécessaire pour les recueillir augmente, et la rentabilité de l’aluminium recyclé diminue d’autant. Avec un fourneau rotatif à bain de sel conventionnel, toute réduction dans la quantité de sel se répercute sur l’efficacité du processus et amoindrit la production de métal réutilisable. Selon les procédés thermiques utilisés et les teneurs initiales en aluminium des déchets, la proportion de sels ajoutés dans la charge peut représenter de 1,2 à 1,5 fois la masse d’impuretés traitées (environ 1/3 de sels pour 2/3 de déchets contenant 60 % d’aluminium). Des recherches sont en cours afin de réduire la quantité de sel employée sans affecter la proportion de métal récupéré. L’électrodéposition ou galvanoplastie est un traitement électrolytique à anode soluble qui permet le dépôt d’une couche très fine d’un métal noble à la surface d’un autre métal. Plus les métaux (celui qui est déposé et la cathode) sont différents moins bonne est l’adhérence. Le sel joue le rôle d’électrolyte. Il convient de choisir un sel conducteur qui a le même anion que le sel métallique (ex : K+Cl– pour ZnCl2) pour augmenter la conductibilité, donc diminuer la résistivité de l’électrolyte. L’utilisation d’un sel d’une grande pureté est indispensable.
Explosifs Le chlorure de sodium entre dans la composition des explosifs de sécurité utilisés dans les mines poussiéreuses. Lors de la détonation, la projection de sel très fin inhibe l’auto-inflammation des poussières.
Sodium métal Le sodium métal est obtenu par électrolyse du chlorure de sodium fondu dans un four électrique. Le sel utilisé doit être exempt de sulfate de sodium et ne pas contenir d’eau, même incluse. L’électrolyse s’effectue dans une cellule (mise au point par Downs en 1921) qui comporte une cuve en acier revêtue intérieurement de briques réfractaires et calorifugée, quatre anodes en graphite, une cathode annulaire en acier entourant les anodes, quatre diaphragmes en toiles métalliques situés entre les électrodes pour empêcher la recombinaison entre le sodium et le chlore, enfin un collecteur qui est une sorte de cloche portant les diaphragmes, placé au dessus des anodes et recueillant séparément le sodium et le chlore.
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Une cellule contient 8 t de chlorures fondus et conduit à la production de 830 kg de sodium et 1 300 kg de chlore par jour pour une intensité de 45 000 A. La tension aux bornes des cellules est de l’ordre de 7 V. Une fraction de cette tension, correspond à la tension de décomposition du chlorure de sodium soit 3,45 V et est utilisée pour effectuer la réaction électrochimique. L’autre partie de cette tension est liée à la résistance du bain de sel fondu. Le sodium métal est un réducteur. En outre, les propriétés du sodium fondu (fluidité, capacité calorifique) et la faible section efficace du noyau vis-à-vis des neutrons en font un excellent liquide de refroidissement pour réacteur nucléaire.
Sel « pharmaceutique » Le sel « pharmaceutique » est une spécialité très utile dans l’industrie pharmaceutique et dans les hôpitaux. Il sert à la fabrication de solutions de dialyse et de perfusion mais également à la fabrication de nombreux médicaments, d’aliments diététiques ainsi que de produits cosmétiques, de soin et de bien-être. Le sel « pharmaceutique » doit être chimiquement très pur et d’une qualité conforme au Codex pharmaceutique ou à la Pharmacopée européenne.
6.4. Alimentation du bétail Le souci de mettre du sel à la disposition du bétail est perceptible dès la Préhistoire. En témoigne l’exploitation des sources salées et des affleurements de sel gemme dans diverses régions. Cette pratique se développe au fil des siècles. Elle a la force de l’évidence quand Pline l’Ancien note, dans son Histoire Naturelle, que « rien ne stimule mieux que le sel l’appétit de diverses espèces animales, leur lait est plus abondant et la qualité du fromage très supérieure » (37). L’utilisation du sel est assurément aussi ancienne que l’élevage lui-même puisque les animaux sont génétiquement programmés pour rechercher le chlorure de sodium dont ils ont besoin. Les minéraux garantissent, par leur présence en quantité suffisante dans la ration des animaux, la bonne santé de ceux-ci en prévenant les carences qui limitent leurs performances. L’ensemble des minéraux représente environ 4 % des éléments constitutifs de l’organisme. En outre, le sel est un excellent vecteur pour d’autres substances comme le cuivre (Cu), le fer (Fe), le sélénium (Se) et l’iode (I). L’entrée dans l’organisme s’effectue tout au long du tube digestif, depuis le rumen jusqu’au gros intestin. Le tube digestif est un lieu de transit
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privilégié dans le métabolisme minéral. L’absorption digestive des minéraux varie en fonction de facteurs propres à ceux-ci et aux animaux. Parmi les facteurs liés à l’animal, le plus important est l’âge (l’absorption digestive de certains minéraux décroît avec celui-ci). L’état de santé d’un animal affecte les conditions d’utilisation digestive d’un élément minéral. En cas de troubles digestifs sa disponibilité pour l’organisme peut diminuer. Comme chez l’homme, il en va de son équilibre hydrominéral. En effet, en regard des risques de carence minérale (perte d’appétit, croissance ralentie, fertilité réduite, lactation médiocre, morbidité accrue), il est important pour les éleveurs et les bergers de veiller soigneusement à des apports équilibrés (38). Le sel, composé de sodium (40 %) et de chlore (60 %), joue un rôle important dans l’alimentation animale. Le sodium et le chlore, ainsi que le potassium, sont déterminants dans le contrôle de la pression artérielle de l’organisme et le maintien de la pression osmotique entre les cellules et les liquides qui les entourent. Ils participent également à la régulation de l’équilibre acido- basique. Ces minéraux, chargés électriquement (électrolytes) sont présents dans tous les liquides corporels. Ils sont en permanence transportés à travers les membranes cellulaires, et régulent les échanges aqueux entre les milieux extra et intracellulaires. Ils entrent en jeu dans la transmission de l’influx nerveux et dans l’utilisation des éléments nutritifs. Le sodium et le chlore aident au passage des nutriments vers l’intérieur des cellules et des déchets du métabolisme vers l’extérieur. Le sodium doit être présent dans la lumière de l’intestin grêle pour l’absorption des sucres et des acides aminés. Une insuffisance en sodium diminue l’utilisation de l’énergie et des protéines et l’absorption des vitamines hydrosolubles. Le chlore, anion majeur du fluide extracellulaire, est aussi retrouvé dans les secrétions gastriques où l’acide chlorhydrique joue un rôle important dans la digestion protéique. Il est aussi retrouvé à d’assez larges concentrations dans la bile, le suc pancréatique, les sécrétions intestinales et il est essentiel pour l’activation de l’amylase, enzyme permettant la digestion de l’amidon et des dextrines. Actuellement, la biodisponibilité du sel chez les animaux varie en fonction de facteurs tenant à la présence de cette substance dans la nourriture, et aux caractéristiques des apports assurés par l’homme : présentations traditionnelles ou blocs à lécher obtenus par compression. Ils sont généralement accessibles « en libre service » dans les pâturages. Certains blocs sont enrichis en oligo-éléments de manière à permettre une couverture suffisante des besoins à la mesure des performances qu’on en attend, notamment en élevage extensif. Les apports en libre-service impliquent une correction raisonnée tenant compte de l’appétibilité de la formule choisie (plus la teneur en sel est élevée, moins la consommation est importante), de la qualité de la pâture, de la distribution de compléments énergétiques, et des propriétés de l’eau.
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6.5. Alimentation humaine Les ventes de sel alimentaire déclinent progressivement (baisse de 15 % sur les douze dernières années connues). Cette tendance est accompagnée par la diminution des ventes en petits conditionnements. Actuellement, le marché de l’alimentation humaine en France représente quelque 330 kt. Les importations y comptent pour près de 100 kt. Il faut savoir que près de 80 % de ce volume est utilisé par les industriels dans la fabrication des aliments élaborés. L’apport de sel dans différents produits alimentaires répond à des besoins organoleptiques (saveur), technologiques (maîtrise des processus) et bactériostatiques (inhibition de la prolifération microbienne). Une série d’histogrammes permet de suivre l’évolution des ventes sur douze ans. La contraction des ventes affecte à la fois les industries alimentaires et les ménages. Une autre série porte sur les sels en petits conditionnements. Voir troisième partie. On y distingue les ventes de sels ordinaires et celles qui ont trait aux sels enrichis en iode et en fluor. On assiste au fléchissement de la demande des ménages, particulièrement grave pour les sels supplémentés au sujet desquels l’information du consommateur laisse à désirer, bien que le Programme national nutrition santé (PNNS) recommande leur promotion. FIGURE 2. É volution des ventes de sel alimentaire et répartition entre utilisateurs (2001 = 100) (en %).
Source : producteurs de sel.
L’évolution des apports sodés se traduit par une baisse régulière, quoi que modérée, depuis les années 1950. Les progrès technologiques ont été particulièrement spectaculaires dans toutes les étapes de la chaîne agro-alimentaire
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jusqu’à la mise sur le marché des produits : production, conservation, commercialisation, distribution. Le développement du travail des femmes, l’inflation des familles monoparentales, la propension réduite des générations à cohabiter et les conséquences d’une urbanisation accentuée ont également contribué à bouleverser les habitudes et les comportements alimentaires. La répartition des différentes sources des apports en sel s’en est trouvée modifiée. Le sel vendu aux ménages ne représente désormais que 10 %. Entre 1950 et 2000, les ingesta sodés sont passés en France de 10,8 à 8,5 g/j. On peut observer une évolution semblable dans d’autres pays d’Europe. En Finlande, ils sont passés de 12, 6 à 10,0 g/j entre 1980 et 1998. On remarque une différence sensible dans les pratiques et les choix alimentaires entre les deux périodes : plus de produits industriels, plus de produits transformés, beaucoup moins de pain et de charcuteries. Le sel est affecté par la progressive désaffection des ménages pour la cuisine et la modification de leurs habitudes vis-à-vis des produits vecteurs comme ceux-ci. La consommation de pain a fortement baissé, passant de 600 g au début du xxe siècle à seulement 130 g par personne et par jour à présent. Toutefois, il est probablement utilisé davantage de sel avec la consommation d’aliments industriels ou lors de son ajout à discrétion. La consommation totale de sel ne semble pas avoir beaucoup varié dans le monde au cours des dernières décennies (39). Europe Les profils de consommation apparaissent rarement dans toute leur spécificité. Pour des raisons de confidentialité, on s’écarte rarement d’un modèle qui ne distingue que quatre rubriques : industrie chimique (sel en dissolution exclu) : 40 % ; viabilité hivernale (déneigement) : 30 % ; industries diverses (y compris adoucissement de l’eau et agriculture) : > 20 % ; alimentation humaine (sel de qualité alimentaire) :