Matériaux supraconducteurs: Structures et propriétés physico-chimiques 9782759822164

La supraconductivité est le thème, dans la Collection Grenoble Sciences, de plusieurs ouvrages qui présentent ses fondem

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French Pages 232 [226] Year 2017

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Matériaux supraconducteurs: Structures et propriétés physico-chimiques
 9782759822164

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Matériaux supraconducteurs Structures et propriétés physico-chimiques

Grenoble Sciences Les ouvrages labellisés dans la collection Grenoble Sciences correspondent à : ‡ des proMets clairePent dé¿nis sans contrainte de Pode ou de prograPPe ‡ des Tualités scienti¿Tues et pédagogiTues certi¿ées par le Pode de sélection cKaTue proMet est sélectionné avec l¶aide de réIérés anon\Pes 3uis a¿n d¶optiPiser l¶ouvrage les auteurs intéragissent ± en Po\enne pendant un an ± avec les PePbres d¶un coPité de lecture dont les noPs ¿gurent en début d¶ouvrage  ‡ une qualité de réalisation assurée par le centre technique d’UGA Éditions.

Directeur scientifique de Grenoble Sciences -ean %ornarel 3roIesseur éPérite à l’Université Grenoble Alpes

Contacts https://www.uga-editions.com/ [email protected]

Livres et sites web compagnons https://www.uga-editions.com/menu-principal/autour-de-nos-livres/ Le label Grenoble Sciences est attribué à des livres papier (en langue française et en langue anglaise mais également à des ouvrages utilisant d’autres supports. 'ans ce conte[te situons le concept de pap-ebook. Celui-ci se compose de deux éléments : ‡ un livre papier qui demeure l’obMet central ‡ un site web compagnon qui propose : : des éléments permettant de combler les lacunes du lecteur qui ne posséderait pas les prérequis nécessaires à une utilisation optimale de l’ouvrage : des exercices pour s’entravner : des compléments pour approfondir un thqme trouver des liens sur internet etc. Le livre du pap-ebook est autosuf¿sant et certains lecteurs n’utiliseront pas le site web compagnon. '’autres l’utiliseront et ce chacun à sa maniqre.

ISBN 978-2-7598-2136-5 ‹ ('3 Sciences 217

Matériaux supraconducteurs Structures et propriétés physico-chimiques Philippe Mangin Rémi Kahn

17 avenue du +oggar Parc d’Activité de Courtabœuf - BP 112 91944 Les Ulis Cedex A - France

Matériaux supraconducteurs Cet ouvrage est un des titres du secteur Sciences de la matière de la Collection Grenoble Sciences d’('P Sciences qui regroupe des proMets originaux et de qualité. Cette collection est dirigée par -ean Bornarel Professeur émérite à l’Université Grenoble Alpes.

Comité de lecture de l’ouvrage ‡ Julien Bobroff Professeur à l’Univ. Paris-Sud Lab. de ph\sique des solides ± 2rsa\ ‡ Claude Bourbonnais Professeur titulaire à l’Univ. de SherbrooNe dép. de ph\sique ± Canada ‡ Daniel Bourgault 'irecteur de recherche au CN5S Inst. Néel ± Grenoble ‡ Hervé Courtois Professeur à l’Université Grenoble Alpes Inst. Néel ± Grenoble ‡ Jean-Luc Duchateau Conseiller scienti¿que au C(A Inst. de 5echerche sur la Fusion par con¿nement magnétique ± Cadarache ‡ Pascal Febvre Professeur à l’Univ. de Savoie Inst. de 0icroélectronique Électromagnétisme et Photonique ± Le Bourget du Lac ‡ Claire Hérold 'irecteur de recherche au CN5S Inst. -. Lamour ± 9andoeuvre-lèsNancy ‡ Thierry Klein Professeur à l’Univ. Grenoble Alpes Inst. Néel ± Grenoble ‡ Jean-Pierre Michel Professeur émérite à l’École des 0ines de Nancy ‡ Alessandro Monfardini Chargé de recherche au CN5S Inst. Néel ± Grenoble ‡ Lucio Rossi Professeur à l’Univ. de 0ilan chef du proMet High Luminosity LHC au C(5N ± Suisse ‡ Pierre Rodière Chargé de recherche au CN5S Inst. Néel ± Grenoble ‡ André Sulpice 'irecteur de recherche au CN5S Inst. Néel ± Grenoble ‡ Jean-Louis Tholence 'irecteur de recherche émérite au CN5S Lab. National des Champs 0agnétiques Intenses ± Grenoble ‡ Pierre Vedrine Ingénieur au C(A Inst. de recherche sur les lois fondamentales de l’Univers ± Saclay ‡ Georges Waysand 'irecteur de recherche au CN5S Lab. souterrain à bas bruit ± 5ustrel. Cet ouvrage a été suivi par Laura Capolo Gwenn Cognard Anne-Laure Passavant pour la partie scienti¿que et la réalisation pratique (avec la participation de PatricN 'essenne et Anne-Claire Lecomte pour les ¿gures et photographies . L’illustration de couverture est l’œuvre d’Alice Giraud d’après : ¿g. 1.6 ± ¿g. 3.3a ± ¿g. 3.12 ± ¿g. 3.22a ± ¿g. 4.3a ± ¿g. 4.15 >‹ S. Leroux IPC0S Univ. de Strasbourg@ ± ¿g. 5.4a >modi¿ée d’après ;. Chen et P. 'ai 214@ - ¿g. 5.19 >modi¿ée d’après C. 'ong et al. 211@.

Ouvrages labellisés sur des thèmes proches (chez le même éditeur) Supraconductivité – Introduction (P. 0angin 5. .ahn ‡ Applications magnétoélectriques des supraconducteurs (P. 0angin 5. .ahn ‡ Applications des supraconducteurs en couches minces – SQUIDs, Détecteurs, Électroniques (P. 0angin 5. .ahn ‡ Physique des diélectriques ('. Gignoux -.-C. Peu]in ‡ Magnétisme – Fondements et Matériaux et applications (sous la direction d’(. du 7rémolet de Lacheisserie et d’autres titres sur le site internet : https://www.uga-editions.com/

Avant-Propos Le présent ouvrage fait partie d’un ensemble de quatre livres consacrés à la supraconductivité et édités dans la collection Grenoble Sciences avec le soutien des membres des communautés scienti¿ques concernées : Supraconductivité - Introduction propose des bases scienti¿ques solides pour un public asse] large. Le lecteur s’initie à la théorie de London aux équations de Pippard aux types de supraconductivité (I et II  aborde les paires de Cooper et les résultats de la théorie BCS et en¿n se familiarise avec les effets de cohérence quantique à la base des propriétés de la Monction -osephson et du fonctionnement des S4UI's éléments fondamentaux pour de nombreuses applications. Le niveau de l’ouvrage est globalement du master de physique mais nombre de parties sont abordables par les étudiants de ¿n de premier cycle. Matériaux - structures et propriétés physico-chimiques offre une revue des grandes classes de matériaux supraconducteurs aussi bien à destination des ingénieurs que pour les chercheurs enseignants et étudiants. 2n y trouve des métaux et alliages des oxydes dont les cuprates à haute température critique des composés organiques lamellaires des composés à base de fer élément longtemps considéré comme le tueur par excellence de la supraconductivité des fermions lourds souvent quali¿és d’exotique etc… Leurs performances sont sans cesse améliorées et leur diversité est particulièrement frappante tant du point de vue de leur structure et de leur chimie que des mécanismes physiques mis en jeux. Si pour éviter un aspect catalogue la présentation est aussi pragmatique que possible en suivant un ¿l directeur s’appuyant sur les propriétés structurales et physicochimiques il est procédé de temps à autre à un recentrage théorique qualitatif qui doit permettre une lecture transversale de ce foisonnement insoupçonné de matériaux supraconducteurs.

Applications magnétoélectriques des supraconducteurs présente les réalisations qui mettent en jeu des courants de très forte intensité que ce soit dans les aimants pour le transport du courant ou au sein d’autres dispositifs. Les premiers chapitres sont consacrés à l’ingénierie conduisant à la production industrielle de ¿ls d’alliages métalliques (Nb ± 7i Nb3Sn 0gB2 et de rubans supraconducteurs à haute température critique. Les chapitres suivants abordent les différentes applications dans lesquelles les supraconducteurs jouent un r{le décisif depuis les installations les plus spectaculaires avec le L+C I7(5 le train à sustentation magnétique japonais jusqu’aux I50 qui équipent les hôpitaux en passant par de nombreuses niches et de multiples projets futuristes susceptibles de voir le jour. 'ans chaque cas il est procédé à une présentation des enjeux scienti¿ques technologiques ou médicaux puis à l’apport de la technologie supraconductrice et de ses dispositifs originaux. Application des supraconducteurs en couches minces : SQUID, Détecteurs, Electronique présente les applications portées par des ¿lms minces au travers de différentes propriétés uniques des supraconducteurs et en particulier de l’effet Josephson. Ce sont les S4UI's qui permettent de mesurer des champs magnétiques extrrmement faibles. Si on les trouve en premier lieu intégrés dans de multiples magnétomètres de laboratoire ils sont aussi implantés dans des dispositifs très divers et souvent futuristes allant de la magnéto-encéphalographie à la localisation de gisements souterrains en passant par les mouvements ioniques en atmosphère terrestre. Ce sont des détecteurs ultrasensibles de particules de type bolomètre à effet tunnel ou à inductance cinétique (.I' qui équipent progressivement les télescopes terrestres et embarqués. C’est en¿n un projet d’électronique dynamique ultrarapide qui pourrait se développer en raison des économies d’énergie qu’elle permet d’envisager.

Remerciements

Nous tenons tout particulièrement à remercier Jean Bornarel qui nous a encouragé et nous a fait con¿ance. Le comité de lecture à la fois rigoureux et amical qu’il a su rassembler fut déterminant pour l’aboutissement de cet ouvrage. Lecteurs nous apprécions beaucoup la collection Grenoble Sciences pour la qualité et la pertinence de ses publications. Auteurs nous sommes très honorés d’rtre de cette aventure exceptionnelle. L’écriture d’ouvrages rassemblant des thèmes des applications et des réalisations aussi diverses n’aurait pas été possible sans le concours des nombreux spécialistes membres du comité de lecture et des nombreux chercheurs qui nous ont apporté leur expertise. Nous les remercions très chaleureusement. Le contenu de ces ouvrages a aussi béné¿cié des conseils avisés de nombre de nos collègues de l’Institut Jean Lamour de Nancy (IJL et du Laboratoire Léon Brillouin de Saclay (LLB . 0adame Laura Capolo a coordonné avec expertise rigueur et gentillesse la progression de ces ouvrages. 0esdames Sylvie Bordage Gwenn Cognard et Anne-Laure Passavant ont effectué un minutieux travail de graphisme et de mise en page si importants pour le lecteur. Qu’elles en soient remerciées.

2utre les membres du comité de lecture nos remerciements vont à Alexis Amadon Nicolas Bergeal Pierre Bertand Grégoire Coiffard François 'ebray Arnaud 'evred Jean-0arie (scanyé Philippe Fa]illeau 'aniel Fruchart Bertrand +ervieu Paul Loubeyre Pierre de 0arcillac François Pageot Cyril Poupon Pierre Pugnat Abderre]aN 5e]]oug  Jean-Claude 9illegier. Philippe 0angin et 5émi .ahn

Table des matières Chapitre 1 – Introduction aux matériaux supraconducteurs ...................................... 1 1.1 ± Émergence des grandes classes de matériaux supraconducteurs ................................... 1 1.2 ± Longueurs caractéristiques............................................................................................. 3 1.2.1 ± 'ensité d’électrons supraconducteurs ............................................................... 4 1.2.2 ± Longueur de cohérence ...................................................................................... 4 1.2.3 ± Longueurs de London et de pénétration ............................................................ 5 1.3 ± Comportement magnétique des supraconducteurs......................................................... 6 1.3.1 ± Quelques rappels de magnétisme ....................................................................... 6 1.3.2 ± Supraconducteurs de types I et II ....................................................................... 7 Supraconducteur de type I ................................................................................. 7 Supraconducteur de type II ................................................................................ 7 1.3.3 ± 9ortex d’AbriNosov ............................................................................................ 9 'escription d’un vortex ..................................................................................... 9 5éseaux de vortex ............................................................................................ 1 1.4 ± Supraconducteurs anisotropes ...................................................................................... 11 1.4.1 ± Longueurs de pénétration en milieu anisotrope axial ...................................... 11 1.4.2 ± Longueurs de cohérence en milieu anisotrope ................................................. 13 1.4.3 ± Paramètre d’anisotropie ................................................................................... 13 1.4.4 ± Champs magnétiques critiques ........................................................................ 13 1.4.5 ± 9ortex en milieu anisotrope ............................................................................. 13 9ortex en milieu anisotrope continu ................................................................ 13 9ortex en milieux lamellaires .......................................................................... 14 1.5 ± Champs magnétiques critiques des classes de supraconducteurs ................................ 14 1.6 ± Approche © physico-chimique ª ................................................................................... 15

Complément C1A – Théories microscopiques ...................................................................... 17 C1A.1 ± Paires de Cooper............................................................................................17 C1A.1.1 ± États quantiques individuels ........................................................... 17 C1A.1.2 ± États de paires ................................................................................. 17 C1A.1.3 ± La paire de Cooper ......................................................................... 17

X

Matériaux supraconducteurs - Structures et propriétés physico-chimiques C1A.2 – Énergie de liaison par délocalisation ............................................................. 18 + C1A.2.1 – Exemple d’un système à deux états : la molécule H2..................... 18 C1A.2.2 – Extension à un système à un nombre croissant d’états .................. 18 C1A.2.3 – Énergie de liaison par délocalisation d’une paire de Cooper ......... 19 C1A.3 – État supraconducteur fondamental ................................................................ 19 C1A.3.1 – État normal ..................................................................................... 19 C1A.3.2 – Potentiel d’interaction .................................................................... 19 C1A.3.3 – États impliqués dans le balayage des paires de Cooper .................20 C1A.3.4 – Énergie et phase.............................................................................. 22 C1A.4 – Quasiparticules .............................................................................................. 22 C1A.5 – Approximation BCS ...................................................................................... 23 C1A.5.1 – Hypothèses simpli¿catrices ............................................................ 23 C1A.5.2 – Expression du gap .......................................................................... 24 C1A.5.3 – Longueur de Cohérence BCS ......................................................... 25 C1A.5.4 – Comportement en température ....................................................... 26 C1A.5.5 – Traitement BCS en couplage fort ................................................... 27 C1A.6 – Phénomènes de transport ............................................................................... 28 C1A.7 – Supraconductivité multibande ....................................................................... 30 C1A.8 – Supraconductivité à potentiel structuré ......................................................... 32 C1A.8.1 – Modèle de supraconductivité des cuprates ..................................... 32 C1A.8.2 – Supraconductivité des composés à base de fer (pnictides)............. 35 C1A.9 – Supraconductivité non-conventionnelle ........................................................35 C1A.9.1 – 'é¿nition ........................................................................................ 35 C1A.9.2 – Supraconductivité singulet et supraconductivité triplet .................36

Complément C1B – Supraconductivité BCS à couplage fort – Traitement d’Eliashberg .............. 40 Chapitre 2– Métaux et alliages métalliques.............................................................. 43 2.1 – Métaux purs ................................................................................................................. 43 2.1.1 – Métaux supraconducteurs dans le tableau de Mendeleiev ............................... 44 2.1.2 – Structure cristalline .......................................................................................... 46 2.1.3 – Champ magnétique critique ............................................................................. 46 2.1.4 – Effet des impuretés (magnétiques et non-magnétiques) .................................. 47 2.1.5 – Mécanisme de la supraconductivité dans les métaux ...................................... 48 2.2 – Alliages et composés intermétalliques ......................................................................... 48 2.2.1 – Introduction ...................................................................................................... 48

Table des matières

XI

2.2.2 – Alliages métalliques ......................................................................................... 50 Caractères généraux ......................................................................................... 50 Alliage Nb–Ti .................................................................................................. 51 2.2.3 – Composés intermétalliques .............................................................................. 53 Composés de type NaCl (B1) ..........................................................................54 Phases de Laves ............................................................................................... 54 2.2.4 – Composés de type A15 .................................................................................... 55 Généralités ....................................................................................................... 55 Composé Nb3Sn ............................................................................................... 58 2.3 – Composé MgB2 ............................................................................................................ 59 2.3.1 – Structure ........................................................................................................... 59 2.3.2 – Une supraconductivité conventionnelle à deux bandes ................................... 62 2.3.3 – Anisotropie des champs critiques de MgB2 ..................................................... 63 2.3.4 – Effet du dopage ................................................................................................ 64 2.4 – Supraconductivité et pression ...................................................................................... 66 2.4.1 – Supraconductivité et changement de structure cristalline................................ 67 Effet de la pression sur les metalloïdes ............................................................ 67 Effet de la pression sur le fer ........................................................................... 69 2.4.2 – Modi¿cation des paramètres BCS ................................................................... 69 Effet de la pression sur les métaux pauvres et de transition ............................ 69 Effet de la pression sur le lithium et les alcalino-terreux ................................. 70 2.5 – Supraconductivité induite par les éléments légers – Composé H2S-H3S .................... 73 2.5.1 – L’hydrogène pur ...............................................................................................73 2.5.2 – Composés ......................................................................................................... 73 2.5.3 – Les calculs et prédictions ................................................................................. 74 2.5.4 – Succès expérimentaux......................................................................................74

Complément C2A – Phases de Chevrel ............................................................................... 77 C2A.1 – Structures ....................................................................................................... 77 C2A.2 – Origines de la supraconductivité ................................................................... 78 C2A.3 – Supraconductivité et magnétisme..................................................................82 C2A.4 – Famille des phases de Chevrel ......................................................................82

Chapitre 3 – Oxydes supraconducteurs – Cuprates et autres systèmes..................... 85 3.1 – Supraconductivité et plan CuO2...................................................................................86 3.1.1 – Structure cristalline des plans CuO2 ................................................................ 86 3.1.2 – Structure électronique des plans CuO2 ............................................................ 87

XII

Matériaux supraconducteurs - Structures et propriétés physico-chimiques 3.1.3 – Les plans CuO2 : de l’isolant de Mott au supraconducteur .............................88 Isolant de Mott .................................................................................................88 Plan CuO2 dopé en trous .................................................................................. 90

Plan CuO2 dopé en électrons ........................................................................... 91 3.1.4 – Esquisse du mécanisme de la supraconductivité ............................................. 92 3.1.5 – Spéci¿cité du cuivre.........................................................................................93 3.2 – Principe généraux de construction des composés cuprates.......................................... 94 3.2.1 – Plans atomiques : dé¿nitions et notations ........................................................ 94 3.2.2 – Les blocs supraconducteurs ............................................................................. 94 3.2.3 – Les blocs © dopants ª ........................................................................................ 95 3.2.4 – Structure des cuprates : dopage ....................................................................... 96 3.2.5 – Anisotropie dans les cuprates ........................................................................... 97 3.3 – Familles de cuprates supraconducteurs dopés en trous................................................ 97 3.3.1 – Supraconducteurs à blocs dopants © biplans décalés ª ..................................... 97 Le bloc biplan décalé ....................................................................................... 97 Composés de la famille LaBaCuO (0201) ....................................................... 98 3.3.2 – Analogie avec les pérovsNites ........................................................................ 100 3.3.3 – Blocs dopants à 3 plans décalés (TlBaCaCuO) ............................................. 101 3.3.4 – Blocs dopants à 4 plans décalés (TlBaCaCuO et BiSrCaCuO) ..................... 103 3.3.5 – Bloc dopant triplan à mercure aligné HgBaCaCuO....................................... 104 3.4 – 5eprésentation structurale et classi¿cation des cuprates ........................................... 107 3.4.1 – Schématisation des structures ........................................................................ 107 3.4.2 – Nomenclature ................................................................................................. 107 3.5 – Le composé .@ à P  1 atm Tc, max P >GPa@

Élément

Ti 0,40 3,35 56 Zr 0,61 11 30 Hf 0,128 8,6 62

9 Cr 5,38 16,5 120 Nb Mo 9,25 0,915 9,9 10 Ta W 4,47 0,0154 4,5 43

B 11 250 Al 1,175

Tc, max P >GPa@ Mn

Fe

2,1 21 Tc 5u 7,77 0,49

Co

Ni Cu

Zn Ga 0,85 1,083 7 1,4 5h Pd Ag Cd In 0,0003 0,517 3,41

5e Os Ir 1,4 0,66 0,112

C

N

F

Ne

0,6 100 S Cl

Ar

13 17,3 30 190 As Se Br

.r

Si

P

8,2 15,2 Ge

5,35 11,5 Sn(w) 3,72 5,3 11,3 Pt Au Hg Tl Pb 4,15 2,38 7,196

O

2,4 8 1,4 32 150 100 Sb Te I ;e 3,9 25 Bi

7,5 1,2 35 25 Po At

5n

8,5 9,1

Ac Ļ Lr La 4,88 13 15 Ac

Ce

Pr

Nd

Pm

Sm

Eu

Gd

Tb

'y

Ho

Er

Tm

.Ar@ 3d3 4s2) possède (3 + 2)  5 électrons de valence. >d‫ތ‬après S.9. 9onsovsNy et al., 1982 12 ‹ Springer@ 4

5

S.9. 9onsovsNy et al. (1982) Chapitre 5, dans Superconductivity of Transition Metals: Their Alloys and Compounds, Springer-9erlag, p. 231 – 258. Springer Series in Solid-State Sciences vol. 27. Par exemple, pour le vanadium dont la structure électronique est >Ar@ 3d3 4s2, le nombre d’électrons de valence à comptabiliser est de 5.

46

Matériaux supraconducteurs - Structures et propriétés physico-chimiques

2.1.2 – Structure cristalline La structure cristalline des métaux, caractéristique vers laquelle les chercheurs se sont tournés en premier lieu pour y trouver des critères d’apparition de la supraconductivité 6, ne semble pas rtre un paramètre pertinent. Bon nombre d’éléments supraconducteurs présentent certes des structures cristallographiques de haute symétrie, mais il s’avère impossible de trancher entre les différentes phases compactes et dire lesquelles favorisent la supraconductivité. Certains métaux supraconducteurs possèdent d’ailleurs des structures de symétrie basse (Hg est trigonal, In et Sn sont tétragonaux) et mrme plusieurs éléments, tels que l’étain et le germanium, sont supraconducteurs en phase amorphe compacte, en l’absence d’éléments de symétrie 7 autre que locale.

2.1.3 – Champ magnétique critique ¬ l’exception notable du niobium, du vanadium et du tantale qui sont de type II, les éléments simples supraconducteurs sont, dans leur très grande majorité, de type I. Ils sont très sensibles aux champs magnétiques puisque leur supraconductibilité disparaît à 0 . pour des champs magnétiques critiques Bc(0)  0 Hc(0) toujours inférieurs à 200 mT (tableau 2.2). Tableau 2.2 – Quelques grandeurs caractéristiques dans les métaux supraconducteurs les plus communs 3, 8

6

7 8

Tc [K]

Bc [mT]

[nm] (observé)

L [nm]

Sn

3,72

30,3

51

31

230

Al

1,175

9,9

50

10

1600

Pb

7,196

80,3

39

37

83

Nb

9,250

194,4

44

39

38

In

3,41

27,8

Hg

4,15

41,2

0

[nm]

'ans les années 1970, il était souvent postulé qu’une haute symétrie était nécessaire pour avoir une phase supraconductrice. 'ans un tout autre registre, les HTS, supraconducteurs à haute température critique, sont lamellaires et donc très anisotropes (chap. 3). B. StritzNer et H. Whl (1976) Z. Phys. B 24, 367. J.P. Burger (1974) Chapitres 1 et 2, dans La supraconductivité des métaux, des alliages et des lms minces, Masson Cie. On trouve dans la littérature une dispersion assez large des longueurs de pénétration et de cohérence qui sont dif¿ciles à mesurer

2 - Métaux et alliages métalliques

47

L’expérience montre une forte corrélation entre les champs magnétiques critiques Bc(0) à température nulle et les températures critiques Tc en champ nul (¿g. 2.2). Un ajustement conduit à la relation : log (Bc) § 1,2 log (Tc) + 0,92 (2.1a) qui trouve sa justi¿cation dans la combinaison des relations de la théorie BCS 9 : H c (0) 

G (e F ) m 0 D (0) et D (0)  1, 76 k B Tc

(2.1b)

et au fait que la densité d’état au niveau de Fermi G( F) – et plus encore sa racine carrée – varie peu d’un métal à l’autre. %F  >P7@ 9



ORJ %F ORJ 7F  

7D 3E

+J 6Q 7K 0R

 7L

5X 2V

5H

,Q

$

=Q *D &G





7F>.@

Figure 2.2 – Corrélation entre la température critique Tc et le champ critique Bc dans les métaux 10 'ans les métaux (de type I) la température critique Tc en champ nul et le champ magnétique critique à 0 . croissent simultanément. >d‫ތ‬après les données de C.P. Poole et H.A. Farach, 2000 11  5oberts, 1976  S.9. 9onsovsNi et al.,1982 12 et HandbooN of Chem. and Phys. (70ème éd.), 1989@

2.1.4 – Effet des impuretés (magnétiques et non-magnétiques) L’introduction d’impuretés non-magnétiques a, du moins si elle n’est pas excessive, peu d’inÀuence sur la température critique des supraconducteurs métalliques 13 alors que l’addition d’atomes porteurs de moments magnétiques fait chuter Tc très rapidement. Il suf¿t souvent d’une concentration de quelques  d’impuretés

9

10 11 12

13

P. Mangin et 5. .ahn (2013) Chapitre 8, dans Supraconductivité – Introduction, collection Grenoble Sciences, E'P Sciences, p. 199 – 234. 5assemblés par C.P. Poole et al. (1995) Superconductivity, Academic Press, table 3.1 p. 60. C.P. Poole et H.A. Farach (2000) J. of Superconductivity 13, 47. S.9. 9onsovsNy et al. (1982) Superconductivity of Transition Metals: Their Alloys and Compounds, Springer-9erlag. Springer Series in Solid-State Sciences vol. 27. P.W. Anderson (1959) J. Phys. Chem. Solids 11, 26.

48

Matériaux supraconducteurs - Structures et propriétés physico-chimiques

magnétiques pour faire disparaître totalement la supraconductivité. L’exemple du plomb 14 est donné dans le tableau 2.3. Tableau 2.3 – Concentration d’impuretés magnétiques conduisant à la disparition de la supraconductivité du plomb 14 Élément d’addition

Cr

Mn

Fe

Co

Gd

[% atomique]

1

0,26

1,2

6,3

2,8

Le désordre que génère l’introduction d’une quantité importante d’impuretés nonmagnétiques est, par contre, de nature à transformer les supraconducteurs de type I en supraconducteurs de type II. (chap. 1, section C1A.5.3)

2.1.5 – Mécanisme de la supraconductivité dans les métaux S’il y a consensus pour admettre que la supraconductivité des métaux simples est de type BCS, c’est-à-dire produite par l’interaction électrons-phonons, il est aussi admis que le modèle d’une surface de Fermi parfaitement sphérique et d’un couplage électron-phonon aussi simple que celui postulé par Bardeen, Cooper et Schrieffer 15 dans leur papier originel est peu réaliste. Les résultats expérimentaux sont le plus souvent analysés au travers des paramètres log, G phH, et ep (tableau 2.4) introduits par McMillan 16 dans le formalisme d’Eliashberg (complément C1B).

2.2 – Alliages et composés intermétalliques 2.2.1 – Introduction La recherche de nouveaux matériaux supraconducteurs par mélange de plusieurs éléments n’a jamais cessé avec, en premier lieu, celle concernant les alliages métalliques, à son apogée durant la période 1945 – 1975. L’objectif était de trouver des matériaux présentant à la fois une température critique Tc, un champ critique Hc2 et une densité de courant critique Jc élevés et cumulant simultanément des propriétés mécaniques favorables à la fabrication de ¿ls par des procédés industriels.

14

15 16

5assemblés par W. BucNel (1991) Chapitre 6, dans Superconductivity: Fundamentals and Applications, Wiley-9CH. J. Bardeen, L.N. Cooper and J.5. Schrieffer ( 1957) Phys. Rev. 108,1175 W.L. McMillan (1968) Phys. Rev. 167, 331.

2 - Métaux et alliages métalliques

49

Tableau 2.4 – Gaps, fréquences de Debye et températures critiques de quelques métaux et paramètres d’Eliashberg qui permettent de reproduire au mieux le comportement expérimental (0) : gap supraconducteur à 0 . 17  Tc mesurée : température critique expérimentale 18. Le rapport 2 (0) / kB Tc, qui caractérise la force du couplage, est calculé à partir de ces deux grandeurs. Les paramètres de couplage du formalisme d’Eliashberg (complément C1B) G phH, ep, et Tc calculée, sont issues du tableau de valeurs numériques rassemblées par 5.M. White et T.H. Geballe 19. Noter que s’il y a peu de dispersion sur les valeurs des températures critiques, il n’en est pas de mrme sur celles du gap et du rapport 2 (0) / kB Tc. 2 (0) [meV]

2

D (0) k B Tc

D

G

phH

[meV]

[meV]

ep

*

Tc [K]

Tc [K]

calculée mesurée

Pb

2,7

4,35

9,05

5,20

1,55

0,131

6,48

7,196

In

1,05

3,57

9,65

6,91

0,834

0,125

3,44

3,41

Sn(w)

1,4

4,37

17,2

9,50

0,72

0,111

3,77

3,72

Hg

1,7

4,75

6,19

3,3

1,60

0,11

4,51

4,15

Tl

0,79

3,85

6,80

4,98

0,78

0,127

2,10

2,38

Ta

1,4

3,63

22,2

12

0,69

0,111

4,26

4,47

Nb

3

3,76

31,7

12,84

0,98

0,11

9,6

9,25

¬ ce jour, la littérature fait état d’un très grand nombre d’alliages ou composés possédant une phase supraconductrice. Chaque élément de la table périodique rentre dans la composition d’au moins un alliage ou composé supraconducteurs et nombre d’entre eux sont faits d’éléments qui ne sont ni l’un ni l’autre supraconducteur à l’état pur, ce qui montre, s’il en est encore besoin, que la supraconductivité n’est pas une propriété de nature purement atomique. 'es listes d’alliages et composés supraconducteurs exhaustives sont données dans plusieurs articles de revue 11, 12, 20. Ne sont rapportées dans ce qui suit que quelques familles qui, en raison de leurs températures critiques élevées et/ou de leur utilisation actuelle ou potentielle dans des applications, apparaissent comme les plus importantes.

17 18 19

20

5assemblés par C.P. Poole et al. (1995) Superconductivity, Academic Press, p. 167. J. EcN, Superconductor Information for the Beginner, http://superconductors.org/. 5.M. White et T.H. Geballe (1979) Long Range Order in Solids, H. Ehrenreich et al. (dir.), Academic Press, p. 91. B.T. Matthias et al. (1963) Rev. Mod. Phys. 35, 1.

50

Matériaux supraconducteurs - Structures et propriétés physico-chimiques

¬ de très rares exceptions près 21, les alliages et composés supraconducteurs sont de type II avec, pour certains, un champ critique supérieur Hc2 particulièrement élevé. La variation du champ magnétique Bc2  μ0 Hc2 avec la température est montrée sur la ¿gure 2.3 pour quelques alliages et composés de référence. %F>7@ 

*G3E0R6

   

1E*H

1E6Q



1E±7L 













7 .

Figure 2.3 – Diagramme représentant le champ magnétique critique Bc2 en fonction de la température dans quelques alliages et composés de référence 22 (Bc2  μ0 Hc2) >exposé de W. Scandale, CE5N (5ome 2006)@

2.2.2 – Alliages métalliques Z Caractères généraux Les alliages – ce terme sera réservé aux solutions solides et aux mélanges sans ordre chimique prononcé – constituent une très vaste famille dans laquelle des métaux sont associés dans des proportions variables. Les matériaux les plus performants sont le plus souvent des alliages contenant des métaux de transition de début de série, zone riche en éléments simples supraconducteurs. L’expérience montre que dans les alliages d’éléments de début de série de transition, la température critique suit la corrélation à double bosse, déjà observée sur les corps purs (¿g. 2.4), entre Tc et le nombre moyen Nv d’électrons de valence 12 : elle est maximale lorsque Nv est proche de 4,75 ou de 6,75 et minimale autour de 5,75 (¿g. 2.4). Paradoxalement, ce comportement double bosse fait ¿ des structures cristallines puisque le passage, de l’intérieur de la zone Nv § (5 – 7) où la structure est cubique centrée, à l’extérieur où la structure devient hexagonale compacte, n’affecte pas la continuité de la variation de Tc avec le nombre Nv d’électrons de valence. 21 22

E. Svanidze et E. Morosan (2012) Phys. Rev. B 85, 174514. O. Fischer (1978) Appl. Phys. 16, 1.

2 - Métaux et alliages métalliques

51

T c [K] hexagonale compacte 16

cubique centrée

hexagonale compacte

14

Tc

12

Nb

10

V

8 6

Re

Ta

4 2 0

4

5

6

7

8

Zr Ti Hf

Nb V Ta

Mo W

Tc Re

Ru Os

Nv [e– at –1]

Figure 2.4 – Alliages supraconducteurs : corrélation entre Tc et le nombre d’électrons de valence La courbe en double bosse généralise la ¿gure 2.1  les températures critiques les plus élevées se manifestent lorsque la valence moyenne est proche de 5 ou 7. Les changements de structure n’ont aucune incidence visible sur ces courbes. Le passage d’une phase à une autre ne fait pas apparaître de discontinuité de Tc. Pour obtenir un alliage ayant un nombre non-entier d’électrons de valence, chacun des éléments à 5 (Nb, 9, Ta) et à 7 (Tc, 5e) électrons de valence est allié, en proportion variable, avec l’élément de la mrme ligne qui le précède ou qui le suit. >modi¿ée d‫ތ‬après S.9. 9onsovsNy et al., 1982 12@

Z Alliage Nb–Ti L’alliage Nb – Ti est de loin l’alliage métallique supraconducteur le plus utilisé. 2 Diagramme des phases Le niobium (température de fusion 2477 ƒC) est, à toute température, de structure cubique centrée (phase ȕ). Le titane (température de fusion 1668 ƒC), hexagonal compact (phase Į-Ti) à basse température prend, comme le niobium, la structure cubique centrée au-delà de 882 °C. En phase hexagonale, le titane ne peut dissoudre que quelques  at. de niobium si bien qu’à basse température il y a, dans un large domaine de composition, séparation entre une phase hexagonale très riche en titane (Į-Ti) et une solution Nb – Ti (phase ȕ) riche en niobium. Aux températures supérieures à celles dé¿nies par la ligne de solvus, le diagramme des phases 23 (¿g. 2.5) montre une zone étendue de solution solide cubique centrée. ¬ partir de ce domaine il est possible, par refroidissement contrôlé, de geler des alliages métastable dans lesquels la phase ȕ, qui est la phase supraconductrice, est très majoritaire, voire homogène et unique. 23

T.B. MassalsNi et al. (dir.) (1990) Binary Alloy Phase Diagrams, ASM International.

52

Matériaux supraconducteurs - Structures et propriétés physico-chimiques 

7>ƒ&@



 1E>PDVVH@



/LTXLGH

  

ȕ >DW@1E>DW@7L>1E7L $Ɣ

  Į

/LJQHGHVROYXV Į ȕ

%

 

 





 1E>DW@

Figure 2.5 – Diagramme des phases d’équilibre de Nb – Ti La phase supraconductrice est la phase ȕ cubique centrée. Le refroidissement à partir d’un point A donne un mélange Į + ȕ, ayant une concentration de phase ȕ bien supérieure à celle prévue par le diagramme des phases à l’équilibre. Par exemple, la Àèche B indique la composition de la phase ȕ, au sein d’un alliage de composition nominale Nb47Ti, lorsqu’après un refroidissement adapté, la concentration volumique de précipité de phase Į-Ti est de 20 – 25. >d’après L. Cooley et al., 2003 24 ‹ Taylor and Francis Group LLC BooNs@

Notations : 'ans la communauté de la physique ou de la chimie, la composition des alliages est usuellement exprimée en pourcentage atomique ( at.) alors que dans le milieu industriel, elle est donnée le plus souvent en pourcentage de masse des composants ( masse). Ainsi l’alliage de référence, connu industriellement sous le nom Nb47Ti, est un alliage à 53 en masse de Nb et 47 en masse de Ti, ce qui correspond à 38 at. de Nb et 62 at. de Ti 25. 2 Propriétés supraconductrices de la phase β homogène Les variations avec la composition, de la température critique Tc et du champ magnétique critique à 4,2 . >Bc2(4,2 .)@ de la phase ȕ obtenue homogène à basse

24

25

L. Cooley et al. (2003) Section B3.3.2, dans Handbook of superconducting materials – Volume I: Superconductivity, Materials and Processes, '.A. Cardwell et '.S. Ginley (dir.), C5C Press, IOP Publishing Ltd, p. 603 – 638. Pour un alliage d’éléments A – B de masses atomiques respectives MA et MB, où x est le pourcentage en atomique et y le pourcentage massique de A, on a : y xM x = y + (100 − y) (M /M ) y = x M + (100A− x) M A B A B Pour Nb – Ti : MNb  92,9 g mol–1 et MTi  47,88 g mol–1.

2 - Métaux et alliages métalliques

53

température par trempe rapide depuis 26 1300 °C, sont montrées 27 sur la ¿gure 2.6. La température critique, qui vaut 9,25 . dans le niobium pur, passe par un maximum de 9,8 . pour la composition Nb30Ti. Le champ magnétique critique à 4,2 . reste supérieur à 11 T lorsque la composition de la phase ȕ est comprise entre Nb40Ti et Nb52Ti avec un maximum de 11,6 T pour Nb44Ti. 









7F>.@

7L>DW@ %F>7@





7F

 

 

%F









1E7L



















7L>PDVVH@

Figure 2.6 –Température critique et champ critique Bc2 de la phase ȕ à 4,2 K Les mesures ont été effectuées sur des alliages dans lesquels la phase ȕ a été obtenue unique et homogène par trempe depuis 1300°C. >d’après Peter J. Lee et al., 1993 28 © Taylor and Francis Group LLC BooNs@

2 Propriétés mécaniques L’alliage Nb – Ti, qui possède de bonnes propriétés supraconductrices, présente par ailleurs des propriétés mécaniques extrrmement favorables pour la fabrication de ¿ls. La plupart des électro-aimants supraconducteurs opérant à moins de 10 T sont constitués de ¿ls, généralement multibrins, de cet alliage.

2.2.3 – Composés intermétalliques Les composés intermétalliques supraconducteurs dans lesquels chaque espèce atomique occupe un site bien précis de la maille élémentaire sont très nombreux et

26

27 28

H.J. Muller (1989) The Upper Critical Field of Niobium-Titanium, Thèse de doctorat, University of Wisconsin-Madison, États-Unis. C. Meingast et al. (1989) J. Appl. Phys. 66, 5962. P.J. Lee et al. (1994) Chapitre 5, dans Composite Superconductors, .. Osamura (dir.), Marcel 'eNNer Inc., p. 237 – 321.

54

Matériaux supraconducteurs - Structures et propriétés physico-chimiques

très variés 11. ¬ titre d’exemple des composés de structure NaCl et des phases de Laves, sont présentées dans ce paragraphe. Les composés de structure A15 et MgB2, d’importance majeure pour les applications, sont traités séparément.

Z Composés de type NaCl (B1) 'ans les composés de type NaCl, 2 éléments A et B sont disposés aux nœuds de deux sous-réseaux cubiques faces centrées qui s’interpénètrent (¿g. 2.7). Chaque type d’atome (A ou B) est au centre d’un octaèdre dont les sommets sont occupés par des atomes de l’autre type. Selon le cas, la concentration en lacunes dans l’un, l’autre, ou les deux sous-réseaux, améliore ou affaiblit leurs propriétés supraconductrices.

Figure 2.7 – Composé dé¿ni AB de structure NaCl Les atomes A et B forment deux sous-réseaux cubiques à faces centrées qui s’interpénètrent.

Les représentants les plus intéressants de cette famille, parce que dotés de températures critiques élevées, sont les carbures AC et les nitrures AN où A est un métal de transition tel que le niobium, le zirconium ou le titane. Quelques températures critiques sont indiquées dans le tableau 2.5. Tableau 2.5 – Températures critiques de quelques carbures et nitrures de métaux de transition de début de série (structure NaCl)20 Composé

NbC

NbN

ZrN

TiN

Tc [K]

11,1

16,6

10,7

5,6

Z Phases de Laves Les phases de Laves 29 (formule AB2) forment le groupe de composés intermétalliques le plus important avec plusieurs dizaines de composés supraconducteurs à basse température. On y trouve 3 structures : cubique C15 (¿g. 2.8), hexagonale C14 et hexagonale C36. 'ans chacune d’elles, les atomes A forment un réseau de type 29

F. Laves et H. Witte (1935) Metallwirt 14, 645.

2 - Métaux et alliages métalliques

55

diamant dans lequel s’insèrent des tétraèdres d’atomes B qui s’organisent de façon plus ou moins complexe 30.

$

%

Figure 2.8 – Maille élémentaire de la structure cubique AB2 (C15) La structure des atomes A (gris) est de type diamant où chaque atome A est au centre d’un tétraèdre (liaison tétragonale) formé par 4 autres atomes A (traits gras). Les atomes B (noirs) se groupent en tétraèdres qui se positionnent dans les sites interstitiels de la structure.

Bien que de températures critiques modestes, ces composés ont été très étudiés en raison de leurs propriétés mécaniques intéressantes et des champs critiques et/ou des courants critiques élevés qu’ils manifestent. Tableau 2.6 – Températures critiques de quelques 20 composés de structure a e e a e e Composé

Zr92

Hf92

LaOs2

SrIr2

Sc5h2

La5u2

ZrIr2

Tc [K]

8,8

5,7

8,9

7,6

6,2

4,4

4,1

2.2.4 – Composés de type A15 Z Généralités Cette importante famille a pour formule générale A3B, où A est l’un des éléments Ti, Zr, 9, Nb, Ta, Cr, Mo et B est un élément de ¿n de série de transition, un métal pauvre ou encore un métal noble (voir tableau 2.1). Elle compte en son sein les supraconducteurs métalliques de plus hautes températures critiques 11 (tableau 2.7), dont Nb3Ge découvert en 1974 qui, avec une température critique de 23,2 ., a détenu le record de Tc durant plus de 10 années.

30 F.C. FranN et J.S. .asper (1958) Acta Cryst. 11, 3. F.C. FranN et J.S. .asper (1959) Acta Cryst. 12, 7.

56

Matériaux supraconducteurs - Structures et propriétés physico-chimiques Tableau 2.7 – Températures critiques des composés A3B de structure A15 11

B

Ļ

A ĺ

Ti

Zr

V

Nb

Ta

Cr

Mo

Valence

4

4

5

5

5

6

6

Al

3

9,6

19,1

0,6

In

3

14,9

20,7

1

Ga

3

13,9

9,2

Tl

3

Si

4

17

19

Ge

4

6,2

23,2

8

Sn

4

3,8

17,9

8,4

Pb

4

8

17

As

5

Sb

5

2

0,7

Bi

5

Tc

7

15

Re

7

15

Ru

8

Os

8

5,7

1,1

Rh

9

0,7

2,6

10

0,3

Ir

9

1,7

3,2

6,6

0,8

Pd

10

Pt

10

2,9

10,9

0,4

Au

11

3,0

11,5

16

9

5,8

0,9 0,8

1,7 1,2

1,8

0,2 6,5

0,8 3,4

5

3,1

3,4

10,6

4,7

12,7

9,1

0,08 0,5 0,9

4,7

'ans la structure A15 (Pm3n), aussi appelée bronze de tungstène, les atomes B forment un réseau cubique centré et les atomes A sont disposés par paires sur chacune des 6 faces du cube (¿g. 2.9). Placés ainsi, les atomes A dessinent des chaînes le long desquelles ils sont séparés par des distances plus courtes que celles rencontrées dans les cristaux purs. Ainsi, dans le composé Nb3Sn, les atomes Nb sont séparés de seulement 0,264 nm alors que la distance entre premiers voisins est de 0,286 nm dans le niobium cubique centré. Ce caractère unidimensionnel des chaînes d’atomes A associé à la réduction de la distance A – A joue probablement un rôle déterminant pour les valeurs élevées de Tc, en augmentant à la fois la densité d’état au niveau de Fermi et la force du couplage électron-phonon.

2 - Métaux et alliages métalliques

57

FKDvQHG¶DWRPHV$

$ 1E % *H

Figure 2.9 – Structure A15 (A3B) Les atomes B (ici Ge) forment un réseau cubique centré. Les atomes A (ici Nb) occupent par paires les six faces du cube et forment des chaînes d’atomes très proches.

Comme dans les métaux de début de série de transition (¿g. 2.1) et leurs alliages (¿g. 2.4), on retrouve une évolution à deux bosses (¿g. 2.10) de la température critique Tc en fonction du nombre d’électrons de valence Nv (électrons s – d dans les métaux de transition et s – p pour les métaux des colonnes ;III et au-delà) 12, 31. 7F>.@

Ȗ>P-PRO.@ 

59 [



%F>7@

1E[6Q±[



[

1E[6Q±[





    



 



 

 



FXELTXH



FXELTXH

WpWUDJRQDO 





 







6Q>DW@









WpWUD JRQDO

6Q>DW@

E

D

Figure 2.11 – Variation de la température critique Tc et du champ critique supérieur Bc2 des composés stables Nb3 + x Sn1 – x Les lignes continues correspondent à des lois empiriques. Les valeurs expérimentales ont été mesurées par différents auteurs. >d‫ތ‬après A. GodeNe, 2006 32 © IOP Publishing@ Tableau 2.8 – Quelques caractéristiques supraconductrices du composé stœchiométrique Nb3Sn 41 Tc

a

Tm

a

[K]

[nm]

[K]

17,8

0,5293 40 – 45 1,0026

±0,1

±0,0001

±0,0001

Hc(0)

Hc1(0)

Hc2(0)

[K]

[T]

[T]

[T]

[nm]

[nm]

233,7

0,52

0,038

25

3,6

124

±2

±0,01

D

34

±0,5

2.3 – Composé MgB2 42, 43 2.3.1 – Structure Au début des années 2000, alors que la communauté scienti¿que se passionne pour les matériaux à haute température critique (HTS), J. Nagamatsu et al. 43 annoncent 41 42

43

9. Guritanu et al. (2004) Phys. Rev. B 70, 184526. C. Buzea et T. adapté avec permission d‫ތ‬après L. Lyard et al., 2002 © American Physical Society@

2.3.4 – Effet du dopage De nombreuses études ont porté sur les effets du dopage de MgB2, en particulier par l’aluminium 58 qui se substitue au magnésium en formant le composé (Mg1 – y Aly)B2, et par le carbone 59 qui se substitue au bore 60 pour former le composé Mg(B1 – x Cx)2.

57 58 59 60

L. Lyard et al. (2002) Phys. Rev. B 66, 180502. T. Klein et al. (2006) Phys. Rev. B 73, 224528. R. Wilke et al. (2004) Phys. Rev. Lett 92, 217003. Dans le composé (Mg1 – xAlx)B2, l’aluminium apporte x électrons par maille élémentaire et dans Mg(B1 – xCx)2 le carbone en apporte 2 x.

2 - Métaux et alliages métalliques

65

Les mesures comparées 61, 62 montrent que : ‡ le dopage par l’aluminium ou le carbone, exprimé en électrons ajoutés par maille élémentaire, entraîne une diminution de la température critique tout à fait comparable (¿g. 2.17)  ‡ jusqu’à 0,12 e– supplémentaire par maille, le dopage en carbone (x  0,06) produit un accroissement très important des champs critiques supérieurs B ab c2 (maximum § 35 T) et B cc2 , alors que le dopage en aluminium (y  0,12) se traduit par c une forte décroissance de B ab c2 et une stagnation de B c2 (¿g. 2.18a et b). Pour des dopages plus importants en carbone B ab c2 diminue rapidement et le paramètre ab c d’anisotropie c an  B c2 /B c2 décroît. 7F>.@ 



 GRSDJHFDUERQH0J %7@

%F>7@ 







   



GRSDJHFDUERQH0J %[&[  GRSDJHDOXPLQLXP 0J\$O\ % 

H±VXSSOpPHQWDLUH SDUPDLOOH D



 

GRSDJHFDUERQH0J %[&[  GRSDJHDOXPLQLXP 0J\$O\ % 

H±VXSSOpPHQWDLUH SDUPDLOOH E



Figure 2.18 – Champs magnétiques critiques (T  4,2 K) en fonction du nombre d’électrons ajoutés par maille élémentaire (a) Champ critique dans le plan (a,b)  (b) Champ critique parallèle à l’axe c. >adapté avec permission d‫ތ‬après M. Angts et al. 62, 2005 © American Physical Society@

2.4 – Supraconductivité et pression Les études consacrées à l’effet de la pression sur la supraconductivité se sont multipliées au cours de ces dernières décennies, portées par l’évolution des techniques expérimentales qui permettent aujourd’hui d’atteindre couramment la centaine de GPa 64. Son incidence est montrée dans le tableau 2.1 où il apparaît que 22 éléments ne sont supraconducteurs que sous pression et que, parmi les 30 éléments supraconducteurs à la pression atmosphérique, 12 voient leur température critique augmenter signi¿cativement par application d’une pression. La pression est susceptible de provoquer l’apparition de la supraconductivité et/ou de produire une évolution de la température critique, à travers deux effets principaux : ‡ un changement de structure cristalline  ‡ une variation des paramètres qui déterminent la force du couplage BCS : : augmentation de la rigidité du réseau cristallin et en conséquence des fréquences de vibration  : transfert d’électrons entre bandes qui a pour effet de modi¿er à la fois la densité électronique au niveau de Fermi et le couplage électron-phonon.

64

1 MPa (Méga pascal) § 10 atm  1 Gpa (Giga pascal) § 104 atm.

2 - Métaux et alliages métalliques

67

2.4.1 – Supraconductivité et changement de structure cristalline Z Effet de la pression sur les metalloïdes Les métalloïdes (pris au sens large : Si, Ge, O, S, Se) possèdent, en raison de leurs liaisons covalentes directionnelles, un nombre de voisins restreint qui rend peu compactes leurs structures cristallines : ce sont des isolants ou des semi-conducteurs. L’application d’une pression provoque des changements de phase vers des structures plus compactes, à caractère métallique, qui s’accompagnent souvent d’une apparition de la supraconductivité : ‡ le silicium présente, à pression atmosphérique, une structure cubique diamant (hybridation sp3) qui fait de lui un semi-conducteur. Sous 12 GPa, il subit une transition de phase vers une structure ȕ-Sn compacte, métallique et supraconductrice en dessous de 6,3 K. Sous une pression de 14 GPa, il devient hexagonal simple (sh-Sn) et sa température critique atteint 7,2 K. Avec l’augmentation de la pression, Tc poursuit sa croissance jusqu’à atteindre 8,2 K à 15,2 GPa. Elle décroît ensuite quasi-linéairement 65, comme cela est observé dans les métaux, (¿g. 2.19)  ‡ à pression atmosphérique, les atomes de soufre se groupent en anneaux S8 qui cristallisent selon diverses formes allotropiques. Sous une pression de 93 GPa, le soufre adopte une structure orthorhombique à base centrée (bco) métallique et devient supraconducteur. Sa température critique initialement égale 10,1 K croît contin€ment avec la pression. 9ers 170 GPa le soufre subit une seconde transition structurale (rhomboédrique ȕ-Po) avec une discontinuité de Tc qui devient supérieure à 17 K. Au-delà, et au moins jusqu’à 230 GPa, Tc décroît avec la pression 66 (¿g. 2.20)  ‡ dans l’oxygène, une transition vers l’état métallique et supraconducteur a été observée autour de 96 GPa, avec néanmoins une température critique qui reste inférieure à 0,6 K. Les auteurs 67 attribuent cette faible valeur de Tc, comparée à celles trouvées dans le silicium et le soufre, au fait que la structure devient certes plus compacte, mais reste moléculaire.

65 66 67

K.J. Chang et al. (1985) Phys. Rev. Lett. 54, 2375. E. Gregoryanz (2002) Phys. Rev. B 65, 064504. K. Shimizu et al. (1998) Nature 393, 767.

68

Matériaux supraconducteurs - Structures et propriétés physico-chimiques 7F>.@

VLOLFLXP







VK



ȕ6Q

VWUXFWXUHGLDPDQW









3>*3D@

Figure 2.19 – Supraconductivité du silicium sous pression À la pression atmosphérique, le silicium cristallise dans la structure cubique diamant et il est semi-conducteur. Sous 12 GPa, il devient métallique (beta-Sn) et supraconducteur. Lorsque la pression atteint 12 GPa, il adopte une structure hexagonale simple (Sh) au sein de laquelle il atteint la température critique maximale (8,2 K). On peut noter que chaque changement de phase est accompagné d‫ތ‬un saut de température critique  elle est maximale (8,2 K) à la pression de 16 GPa, puis décroît comme dans les métaux pauvres (¿g. 2.22a). (sh : simple hexagonal). >adaptée avec permission d‫ތ‬après K.J. Chang et al., 1985 65 © American Physical Society]

VRXIUH

7F>.@   

EFR

ȕ3R

  















3>*3D@

Figure 2.20 – Supraconductivité du soufre sous pression Constitué d’anneaux S8, le soufre n’est pas supraconducteur à la pression atmosphérique. Sous pression de 93 GPa il devient orthorhombique base centrée et supraconducteur. Il subit une seconde transition de phase vers 160 GPa qui porte sa température critique à 17 K. (bco : based-centered orthorhombic et ȕ-Po : rhombohedral). >adaptée avec permission d‫ތ‬après E. Gregoryanz et al., 2002 66 © American Physical Society]

2 - Métaux et alliages métalliques

69

Z Effet de la pression sur le fer Le fer, considéré comme ennemi de la supraconductivité parce que magnétique, devient supraconducteur lorsqu’une pression comprise entre 15 et 30 GPa lui est appliquée 68 (¿g. 2.21). En fait, l’apparition de la supraconductivité sous 15 GPa est due à une transition de phase, de cubique centrée magnétique vers une phase hexagonale compacte non-magnétique. L’incidence de la perte du magnétisme est con¿rmée par le fait que des quantités, mrme très faibles, de résidus de fer ferromagnétiques entravent l’apparition de la supraconductivité. 7F>.@

IHU







SKDVH VXSUDFRQGXFWULFH









3>*3D@

Figure 2.21 – Supraconductivité du fer sous pression Dans sa phase non-magnétique hexagonale compacte, le fer devient supraconducteur entre 15 et 30 GPa. >adapté avec permission d‫ތ‬après K. Shimizu et al., 2001 68 © Macmillan Publishers Ltd]

2.4.2 – Modification des paramètres BCS Z Effet de la pression sur les métaux pauvres et de transition Dans les métaux appartenant aux colonnes ;II à ;9 (Al, Cd, Sn, In, Pb, etc.), l’application d’une pression entraîne toujours une décroissance de la température critique 69 (¿g. 2.22a). Les raisons communément admises en sont une augmentation de la rigidité du réseau qui entraîne une croissance de la température de Debye et une diminution de la densité d’états au niveau de Fermi par élargissement de bande 70.

68 69 70

K. Shimizu et al. (2001) Nature 412, 316. T.F. Smith et C.W. Chu (1967) Phys. Rev. 159, 353. J.S. Schilling (2006) High Pressure Research 26, 145.

70

Matériaux supraconducteurs - Structures et propriétés physico-chimiques

Le niobium (¿g. 2.22b) présente, pour sa part, un comportement singulier : lorsqu’une pression est appliquée, on observe successivement une décroissance de la température critique, un brusque accroissement de Tc autour de 5 GPa, un plateau qui prend ¿n avec une chute très brusque de Tc vers 60 GPa et ¿nalement une décroissance continue qui amène Tc à 0 K. Les auteurs de cette étude 71 attribuent les sauts de Tc vers 5 et 60 GPa à de brusques modi¿cations de la topologie de la surface de Fermi. La décroissance de Tc au-delà de 80 GPa serait due à une décroissance de la densité d’états au niveau de Fermi. 7F>.@

7F9 7F9

$ &G =Q



6Q

3E

QLRELXP 3FURLVVDQWH 3GpFURLVVDQWH

,Q  



 

  











 















D







 9@ 9









E

 

3>*3D@

Figure 2.22 – Évolution de la température critique des métaux supraconducteurs avec la pression (a) La température critique des métaux pauvres décroît avec la pression et la réduction du volume qu’elle engendre. V0 est le volume spéci¿que à pression atmosphérique et V à la pression P. >adapté avec permission d‫ތ‬après T.F. Smith et C.W. Chu, 1967 69 © American Physical Society] (b) Dans le niobium on observe aussi cette décroissance de Tc avec la pression entre 0 et 5 GPa puis au-delà de 60 GPa  Les sauts de Tc à ces deux valeurs sont dues à des transitions topologiques de la surface de Fermi. >adapté avec permission d‫ތ‬après 9.9. Struzhkin et al., 1997 71 © American Physical Society]

Z Effet de la pression sur le lithium et les alcalino-terreux Éléments de la colonne I, et de structure cristalline cubique centrée, les métaux alcalins possèdent un électron de conduction unique situé sur une orbitale s très peu couplée aux électrons des couches internes ce qui entraîne une très forte 71

9.9. Struzhkin et al. (1997) Phys. Rev. Lett. 79, 4262.

2 - Métaux et alliages métalliques

71

compressibilité 70 des matériaux (¿g. 2.23). L’application d’une pression conduit à de multiples transitions de phase 72, des transferts électroniques de la bande s vers les bandes p ou d qui modi¿ent les densités d’états au niveau de Fermi, et un renforcement des couplages électrons-phonons. 99 

$X



/L . 5E 





1D &V +  3>*3D@

Figure 2.23 – Variation du volume spéci¿que des métaux alcalins avec la pression Les métaux alcalins voient leur volume spéci¿que V diminuer fortement avec la pression en raison d’une redistribution électronique s ĺ p et s ĺ d. Le comportement de l’or, métal de référence, est indiqué pour comparaison. >d‫ތ‬après J.S. Schilling, 2006 70 © Taylor and Francis Ltd, http://www.tandfonline.com, avec permission]

Le lithium en est une bonne illustration. À pression atmosphérique et température ambiante, cet élément est cubique centré. En dessous de 90 K, il adopte la structure 9R 73 qui le rend supraconducteur à 0,4 mK 74. Sous l’effet d’une pression de 8 GPa, il devient cubique faces centrées et sa température critique croît très rapidement pour atteindre 14 K à 30 GPa (¿g. 2.24). À plus haute pression, la dispersion des résultats obtenus par différents auteurs 75, 76, 77, 78 pourrait provenir de l’occurrence, ou non, de transitions de phase dépendant fortement des conditions 72 73

74 75 76 77 78

.@

OLWKLXP %D]KLURYHWDO 'HP\DGHWDO 6WUX]KNLQHWDO 6FKLPL]XHWDO























3>*3D@

Figure 2.24 – Température critique du lithium en fonction de la pression À pression atmosphérique, le lithium cfc est supraconducteur en dessous de 0,4 mK. Sous pression, sa température critique augmente jusqu’à 15 – 20 K. Au-delà, les résultats divergent selon les auteurs, probablement en raison de diverses transitions de phase. Au-dessus de 60 – 70 GPa, la supraconductivité disparaît. >adapté avec permission d‫ތ‬après T. Bazhirov et al., 2010 75 © American Physical Society] FDOFLXP

7F>.@ 2NDGDHWDO *3D@

Figure 2.25 – Température critique du calcium sous pression La succession des phases en fonction de la pression est indiquée au-dessus de l’axe des pressions. >d‫ތ‬après R. Szczesniak et A.P. Durajski, 2012 79 © Elsevier, avec permission] 79

R. SzczĊĞniak et A.P. Durajski (2012) Physica C 472, 15.

2 - Métaux et alliages métalliques

73

Les métaux alcalino-terreux (Ca, Sr, Ba) et les éléments de transition de tout début de série (Sc, 200 GPa), avec une température critique supérieure à 200 K c’est-à-dire plus élevée que celles des cuprates (chap. 3). L’histoire de cette découverte récente 83 a suivi un chemin singulier dont le premier acte a pour origine l’idée que des éléments légers, s’ils sont impliqués dans une structure dense et à caractère métallique, sont propices à la supraconductivité.

2.5.1 – L’hydrogène pur Le premier élément évoqué fut le plus léger d’entre eux : l’hydrogène 84. Mais encore fallait-il qu’il soit sous forme de solide métallique et non pas de solide moléculaire – cristal de molécules H2 – comme il l’est spontanément lorsque, à pression atmosphérique, sa température est abaissée en dessous de 20,28 K. La façon la plus naturelle d’obtenir un solide métallique est d’appliquer au solide moléculaire une pression suf¿samment élevée pour, en rapprochant les molécules H2, rendre équivalentes les interactions intermoléculaires et intramoléculaires. Lorsque ce seuil est franchi, les molécules doivent perdre leur identité et un solide atomique, à caractère métallique (éventuellement supraconducteur) devrait se manifester. Les tentatives expérimentales sont jusqu’à présent restées sans succès, peut-rtre faute d’application d’une pression suf¿sante pourtant déjà portée à 400 GPa.

2.5.2 – Composés Animé par les mrmes considérations les études se sont portées, au début des années 1970, sur les métaux avides d’hydrogène avec en particulier le palladium et 80 81 82 83 84

S. Okada et al. (1996) J. Phys. Soc. Jpn. 65, 1924. T. .@ 



+6+6 '6'6  



 3>*3D@

6D

D

6E

+

E

Figure 2.26 – Supraconductivité dans le composé H2S-H3S sous pression (a) 9ariation avec la pression de la température critique Tc du composé H2S-H3S  effet de la substitution H – D. >d‫ތ‬après A.P. Drozdov et al., 2015 83 © Macmillan Publishers Ltd, avec permission] (b) Structure cristallographique (symétrie Imଲ௘3m) du composé H3S. Cette structure est formée par deux sous-réseaux (Sa et Sb) de type ReO3 imbriqués. Chaque soufre est entouré par six hydrogènes et chaque hydrogène est commun à deux soufres. >adapté avec permission d‫ތ‬après D.A. Papaconstantopoulos et al., 2016 96 © American Physical Society] 93 94 95 96

A.F. Goncharov et al. (2016) Phys. Rev. B 93, 174105. L.P. Gor’kov et 9.Z. Kresin (2016) Sci. Rep. 6, 25608. W. Sano et al. (2016) Phys. Rev. B 93, 094525. D.A. Papaconstantopoulos et al. (2015) Phys. Rev. B 91, 184511.

76

Matériaux supraconducteurs - Structures et propriétés physico-chimiques

Parallèlement, d’autres recherches sont engagées sur l’effet de la pression sur des hydrides voisins où le silicium est remplacé par des éléments de propriétés physicochimiques voisines tels que le phosphore, le sélénium où le tellure. La synthèse sous haute pression de nouveaux hydrides de fer 97 offre une possibilité d’émergence de supraconducteurs originaux.

97

C.M. Pépin et al. (2014) Phys. Rev. Lett. 113, 265504.

2 - Métaux et alliages métalliques

77

Complément C2A Phases de Chevrel C2A.1 – Structures Les phases de Chevrel ont été découvertes en 1971 98 et leurs propriétés sont rassemblées dans plusieurs articles de revue 22, 99, 100. Ce sont des composés ternaires du type MyMo6;8 (1 < y < 4), où ; est un chalcogène (S, Se, Te) et M un métal, possédant en commun le molybdène Mo. Leurs structures peuvent incorporer des éléments M de différentes tailles, sur des plages de concentration étendues et avec des états d’oxydation variables, ce qui en fait un groupe vaste, dans lequel on trouve une grande diversité de propriétés physiques. La plupart des composés de ce groupe qui ont une phase supraconductrice sont rhomboédriques 101 (groupe de symétrie Rଲ௘3), avec un angle proche de 90 degrés ce qui permet de les considérer, en première approximation, comme des structures quasi-cubiques. Ils sont classés en deux sous-groupes de formules stœchiométriques MMo6;8 (y  1) lorsque l’atome M est gros (Pb, Sn, Terre Rare) et MyMo6;8 (1 < y < 4) lorsque l’atome M est petit (Cu). ‡ dans les composés du premier sous-groupe, les atomes M (le plomb dans la ¿gure 2.27a) forment un réseau cubique simple dont le centre est occupé par des groupements (clusters) Mo6;8 (¿g. 2.27a). Ces clusters sont eux-mrmes des cubes faces centrées, légèrement déformés (¿g. 2.27b), dont les sommets sont occupés par l’atome ; (le soufre dans la ¿gure 2.27b) et les centres des faces (ou des positions très proches) par les atomes de molybdène qui forment ainsi des octaèdres Mo6. En renversant l’ordre de la construction, on peut voir la structure comme celle d’un réseau cubique simple de clusters Mo6;8 dont les canaux, dans les directions , sont garnis d’atomes M  98 99

100

101

R. Chevrel et al. (1971) J. Solid State Chem. 3, 515. R. Chevrel (1981) Chapitre 10, dans Superconductor Materials Sciences: Metallurgy, Fabrication, and Applications, S. Foner et B. Schwartz (dir.), Plenum Press. NATO Advanced Study Institutes Series vol. 68, p. 685 – 723. D.P. Hampshire (2002), Section G2, dans Handbook of Superconducting Materials – Volume II: Characterization, Application and Cryogenics, D. Cardwell et G. Ginley (dir.), CRC Press, IOP Publishing Ltd, p. 1903–1932. La maille rhomboédrique est un parallélépipède dont toutes les arrtes ont la mrme longueur et dont les angles entre 3 arrtes adjacentes sont égaux.

78

Matériaux supraconducteurs - Structures et propriétés physico-chimiques

‡ dans les systèmes du second sous-groupe, les clusters Mo6S8 conservent une structure et une organisation similaire à celles du groupe précédent mais les atomes M, parce qu’ils sont de petites tailles, se répartissent différemment dans les canaux laissés entre les clusters Mo6S8. Dans ce sous-groupe, le désordre est généralement plus important et l’angle rhomboédrique peut atteindre 95°. Toutes ces structures possèdent en commun l’arrangement octaédrique des atomes de molybdène qui joue un rôle majeur dans l’apparition de la supraconductivité. La distance Mo-Mo, comprise entre 0,265 et 0,28 nm pour des molybdènes proches voisins au sein d’un mrme cluster et entre 0,31 et 0,36 nm pour des molybdènes de clusters voisins, est un paramètre important.

Į

3E

0R D

6

6

0R E

Figure 2.27 – Phases de Chevrel : Structure du composé PbMo6S8 (a) Le plomb (atome M) forme, en première approximation, un réseau cubique simple (en réalité, un réseau rhomboédrique d’angle proche de 90°). (b) Chaque maille renferme un cluster Mo6S8 fait lui-mrme d’un cube de soufre dont les centres des faces sont occupés par les atomes de molybdène qui dessinent un octaèdre. L’axe cubique des clusters de Mo6S8 forme un angle d’environ 27° avec l’axe des cubes M, de telle sorte qu’un atome de molybdène appartenant à un cluster se trouve placé en vis-à-vis d’un chalcogène du cluster voisin.

C2A.2 – Origines de la supraconductivité Comme on peut le voir dans le tableau 2.9, les composés Phases de Chevrel supraconducteurs présentent des températures critiques plutôt modestes mais possèdent tous une valeur particulièrement élevée de leur champ critique Hc2, bien supérieure à celles de l’alliage Nb – Ti, des composés A15 ou de MgB2 (voir ¿g. 2.12). Malheureusement, leur utilisation se heurte à la faiblesse de leur densité de

2 - Métaux et alliages métalliques

79

courant critique, qui ne dépasse pas 102 – 103 A cm–2, et à la dif¿culté métallurgique de les conditionner sous forme de ¿ls. Tableau 2.9 – Températures critique Tc de quelques composés de phase de Chevrel 102 Composé

SnMo6S8 103

PbMo6S8 103

LaMo6S8 22

PbMo6Se8 22

La Mo6Se8 22

Tc [K]

14,2

14,9

5,8

3,8

10,8

Hc2 [T]

42

86

54

3,8

44,5

Les mécanismes à la base de la supraconductivité ont été recherchés par des études systématiques de la variation de la température critique et du champ critique avec les paramètres physico-chimiques et la structure électronique. La nature des modes de vibration et le mécanisme de couplage électrons-phonons ont été étudiés en détail. Après avoir éliminé le rôle des vibrations localisées des atomes M (vibration d’Einstein) trop découplées de la structure électronique, et celui des modes de vibration internes dans les clusters de trop haute fréquence, il est admis que les vibrations pertinentes sont celles produites par les mouvements relatifs des clusters les uns par rapport aux autres. D’ailleurs, ces modes se ramollissent à basse température, ce qui favorise la supraconductivité. Cependant, le spectre de fréquence de ces modes dépendant peu du composé, il faut aller chercher ailleurs la variation de Tc avec la formule chimique en particulier en direction du nombre d’électrons dans la bande de valence du cluster Mo6;8. Les calculs 104 montrent que la stabilité de ce cluster est assurée par des liaisons covalentes entre orbitales électroniques de type d x 2 < y 2 centrées sur les atomes de molybdène. Ces électrons d du molybdène, auxquels s’ajoutent des électrons provenant de transferts venant des atomes M, se placent dans une bande liante, pouvant recevoir jusqu’à 24 électrons, séparée de la bande supérieure par un gap voisin de 1 e9. Il s’ensuit une variété de comportements, depuis le semi-conducteur lorsque la bande liante est pleine (24 électrons, soit 4 électrons par molybdène) jusqu’au métal lorsqu’elle n’est que partiellement remplie. La supraconductivité apparaît lorsque le remplissage de la bande est voisin de 22 électrons 22, 105 (soit 3,67 par atome de molybdène) et disparaît rapidement lorsqu’on s’écarte de cette valeur (¿g. 2.28).

102

103 104 105

Pour des raisons métallurgiques, les valeurs de Tc et Hc2 trouvées dans la littérature sont relativement dispersées. A.P. Petrovic et al. (2011) Phys. Rev. Lett. 106, 017003. L.F. Mattheiss et al. (1977) Phys. Rev. B 15, 1760. K. .@





 





1Y>HDW±@

Figure 2.28 – Phases de Chevrel : corrélation entre Tc et le remplissage de la bande La supraconductivité se manifeste dans un domaine étroit du remplissage de la bande d. La température critique est maximale lorsque le nombre d’électrons de valence (électrons d) par atome de molybdène est proche de 3,8 c’est-à-dire lorsqu’il y a 23 électrons par cluster Mo6 dans la bande. Les 4 séries de points reliés par un guide pour l’œil correspondent aux mesures réalisées sur 4 composés MyMo6S8 avec M  Cu, Ag, Sn, In. >d‫ތ‬après R. Chevrel, 1981 99 © Plenum Press, New DX@ 

&X0R6 6Q0R6 3E0R6 /D0R6 /X0R6



 













DX@

Figure 2.29 – Phases de Chevrel : corrélation entre le paramètre du couplage électron-phonon et la densité d’état au niveau de Fermi G( F) 99 © Plenum ep : paramètre de McMillan obtenu à partir de Tc. >d‫ތ‬après R. Chevrel, 1981 Press, New .@   

/D3E0R6 *G3E0R6 /X3E0R6 QP@

Figure 2.30 – Phases de Chevrel : corrélation entre la température critique et le volume de la maille rhomboédrique Une série de mesures dans des composés MxPb1 – xMo6S8 (M  La, Gd, Lu, d‫ތ‬après M. Sergent, 1978 106 © Elsevier, avec permission]

82

Matériaux supraconducteurs - Structures et propriétés physico-chimiques

Les articles de revues 22, présentent beaucoup d’autres effets comme ceux de la pression ou de la valence de l’atome M.

C2A.3 – Supraconductivité et magnétisme Les composés où M est une terre rare porteuse d’un moment magnétique ont fortement animé la communauté scienti¿que durant les années 1975 à 1985 car, contrairement à ce qui faisait consensus à l’époque sur l’incompatibilité entre supraconductivité et magnétisme, des cas d’existence d’une phase supraconductrice dans un composé à terre rare paramagnétique ont été observés. Mieux, les composés Dy1,2Mo6S8 et Tb1,2Mo6S8, de températures critiques voisines de 2 K, présentent des mises en ordre antiferromagnétique, respectivement à 0,4 et 1 K, sans disparition de la supraconductivité. En revanche, lorsque les moments portés par la terre rare s’ordonnent ferromagnétiquement, ce qui est le cas de HoMo6S8, la supraconductivité disparaît avec la mise en ordre magnétique. En¿n, si M est un métal de transition, paramagnétisme et ordre magnétique ne coexistent plus avec la supraconductivité. Ces différents comportements s’expliquent par la nature des électrons qui portent le magnétisme des atomes M 107. Lorsqu’il s’agit d’une terre rare, le magnétisme est le fait des électrons de la couche 4f qui, très enfouis dans le nuage électronique, sont peu couplés aux électrons d du molybdène impliqués dans les paires de Cooper. Sans ordre ferromagnétique qui génère un champ magnétique macroscopique, la supraconductivité reste peu perturbée. Lorsque M est un métal de transition, les moments magnétiques sont portés par ses électrons 3d qui eux sont en forte interaction avec les électrons d du molybdène, tuent la supraconductivité. Notons aussi que les phases de Chevrel constituent des matériaux à fort potentiel thermoélectrique grkce à leur faible gap, ajustable en changeant la nature et/ou la concentration des éléments M, et en raison de leur mauvaise conductivité thermique.

C2A.4 – Famille des phases de Chevrel Au-delà du groupe des alliages phases de Chevrel, il existe toute une famille de composés 108 dans lesquels des clusters d’ordre supérieur (formule Mo6n;6n + 2) s’organisent en chaînes soudées par des atomes de la série des alcalins (Rb, Cs) qui se 107 108

J.W. Lynn et al. (1981) Phys. Rev. B 27, 7. R. Brusetti et al. (1995) Phys. Rev. B 52, 4481.

2 - Métaux et alliages métalliques

83

placent dans les canaux que la structure fait émerger. Dans cette très vaste famille, nombre de membres sont supraconducteurs comme Cs2Mo12Se14 (Tc  4,6 K) ou Rb4Mo18Se20 (Tc  4,4 K) dont les structures sont montrées sur la ¿gure 2.31. PRO\EGqQH VpOpQLXP PpWDODOFDOLQ 

FOXVWHUG·RUGUH D





FOXVWHUG·RUGUH E

FOXVWHUG·RUGUH F

Figure 2.31 – Projection sur le plan (1 1ଲ௘2 0) des structures cristallines de quelques phases de Chevrel complexes (a) Mo6S8  (b) Cs2Mo12Se14  (c) Rb4Mo18Se20 (les longueurs sont en nm). >d‫ތ‬après P. Gougeon et al.,1988 109 © Elsevier, avec permission]

109

P. Gougeon et al. (1988) Mater. Res. Bull. 23, 453.

Chapitre 3 Oxydes supraconducteurs Cuprates et autres systèmes

La découverte en 1986, par J.G. Bednorz et K.A. Mller 1, d’une transition supraconductrice à 28 K dans le composé LaBaCuO a ouvert la voie aux supraconducteurs à haute température critique (High Temperature Superconductors – HTS). La température critique Tc la plus élevée, qui était alors de 23,2 K dans le composé Nb3Ge, est rapidement passée, avec la découverte de He] 2s2 2p6 et celle de Cu2+ est >Ar] 3d 9 où >He] et >Ar] symbolisent les cortèges électroniques des 2 gaz rares. Dans un environnement de symétrie quadratique, il y a levée de dégénérescence du niveau 3d du cuivre avec, comme il apparaît sur la ¿gure 3.2, détachement vers le haut 3 d’un niveau 3d x 2 < y 2 qui peut accueillir 2 électrons. Dans le solide, les niveaux atomiques s’élargissent et se transforment en bandes. Huit des neuf électrons 3d du cuivre remplissent les bandes d’énergies inférieures et le dernier viendrait, s’il n’y avait pas de corrélations électron-électron, occuper la bande 3d x 2 < y 2 qui serait alors à moitié remplie (¿g. 3.2). 8+% G[&X2@ E

Figure 3.8 – Deux notations équivalentes des plans CuO2 (a) [Cu – O2] : les atomes de cuivre occupent les sommets (position E) et les oxygènes, au nombre de 2 par maille, sont positionnés au milieu des cotés (position F). (b) [– Cu O2] : les atomes de cuivre sont situés au centre du carré (position C) et les oxygènes occupent le milieu des cotés (position F).

>&X2@

>&X2@ Q"P"

>;@

FXLYUH >&X2@

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>;@

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Q"P"

R[\JqQH ;

Q"P"

Figure 3.9 – Blocs supraconducteurs des cuprates Les blocs supraconducteurs sont constitués de plans CuO2 maintenus par des plans intercalaires d’atomes X (Y, Ca). L’atome X est situé à la verticale de la place non-occupée, au centre de la maille carrée CuO2.

3.2.3 – Les blocs « dopants » À l’instar des blocs supraconducteurs, les blocs dopants, qui se comportent en réservoir de charges, sont faits d’empilements de plans atomiques à maille quasi-carrée. Les blocs dopants sont spéci¿ques à chaque famille de cuprates et en constituent

96

Matériaux supraconducteurs - Structures et propriétés physico-chimiques

mrme la signature. Les blocs dopants des familles les plus importantes sont décrits en détails dans les sections 3.3 et 3.4. Précision – Dans ce qui suit et sauf mention particulière, la température critique attribuée à chaque composé est celle mesurée au dopage optimal. La dispersion des valeurs qui apparaît dans la littérature est généralement due aux dif¿cultés rencontrées pour maîtriser parfaitement la composition et le dopage des composés.

3.2.4 – Structure des cuprates : dopage De façon générique, les cuprates supraconducteurs sont construits en alternant, le long de l’axe c, des blocs supraconducteurs et des blocs dopants (¿g. 3.10). Les cuprates dopés en trous sont ceux pour lesquels des électrons sont transférés des blocs supraconducteurs du composé parent (isolant de Mott) vers les blocs dopants ; ils constituent la majorité des familles connues et des composés étudiés. Le transfert électronique inverse, de bloc dopant vers bloc supraconducteur, donne naissance aux cuprates dopés en électrons. Ils ne forment que quelques familles dont la principale est (RE2 – xCex)CuO4 où RE10 est une terre rare (La, Pr, Nd, Sm, Eu). Notons bien que les transferts d’électrons constitutifs du dopage se superposent au déplacement initial, vers le plan CuO2, de 2 électrons par atome de cuivre conduisant au composé parent Cu++(O– –)2 isolant de Mott. H
%2@

>&X2@

LQWHUIDFHV EORFGRSDQW&X2 E Figure 3.11 – Bloc biplan et son interface avec le bloc supraconducteur (a) Motif élémentaire des plans blocs dopants biplan décalé [O B –][B O –] où B est un élément trivalent (La) auquel peut rtre substitué un élément divalent (Ba). (b) Dispositions relatives des plans [CuO2] d’extrémité du bloc supraconducteur et des plans [O B –] ou [B O –] du bloc dopant.

Z Composés de la famille LaBaCuO (0201) 12 Les composés de la famille LaBaCuO avec en particulier La2 – xBaxCuO4 – y et La2 – xSrxCuO4 – y sont des exemples de supraconducteurs à blocs dopants biplans décalés, séparés par des blocs supraconducteurs uniplans. Dans ces composés, l’élément trivalent du bloc dopant est le lanthane et les éléments divalents dopants sont le baryum ou le strontium (¿g. 3.12 et tableau 3.3).

12

Pour la notation (0201) en nomenclature à 4 chiffres, se reporter à la section 3.4.2.

3 - Oxydes supraconducteurs – Cuprates et autres systèmes

99

Tableau 3.3 – Température critique Tc maximale des composés LaBaCuO et LSCO Composé

Acronyme

Nomenclature 12

Tc

La2 – xBaxCuO4 – y

LaBaCuO

LaBa-0201

§ 30 K

La2 – xSrxCuO4 – y

LSCO

LaSr-0201

§ 40 K

C’est à partir de résultats obtenus sur le composé au baryum que Bednorz et Mller 1 ont publié l’article intitulé Possible high Tc superconductivity in the Ba–La–Cu–O system qui a ouvert la voie au développement des cuprates supraconducteurs HTS. >&X2/D/D2/D22/D&X.@    









[

Figure 3.13 – Température critique dans La2 – xSrxCuO4 9ariation de Tc avec la concentration x en élément dopant (strontium). La valeur maximale de Tc est de 39 K pour un dopage optimal x § 0,16. [adapté avec permission d‫ތ‬après H. Takagi et al., 1989 13 © American Physical Society]

Appartiennent à la mrme famille, les composés de formule chimique RE2 – xBxCuO4 – y, où B reste un atome de baryum ou de strontium et où le lanthane est remplacé par une terre rare (RE) trivalente. La ¿gure 3.14 présente, pour les composés au strontium, la température Tc mesurée 2d au dopage optimal op § 0,16 avec chacune des terres rares. 7F>.@ 

/D 3U





1G 6P (X *G 



YROXPHPDLOOH>QP@

Figure 3.14 – Température critique des composés RE2 – xSrxCuO4 – y La température critique Tc varie avec la terre rare ; elle est d’autant plus élevée que le volume de la maille cristallographique est grand. [données issues de Raveau et al. 2d]

3.3.2 – Analogie avec les pérovskites Il s’avère que les composés de la famille de La2CuO4 possèdent des éléments de structure caractéristiques des pérovskites cubiques ABO3 qui elles aussi, sont construites par superposition de plans de carrés [A O –] et [– B O2]. Ainsi, comme l’atome de titane (Ti) dans les pérovskites cubiques BaTiO3, LaTiO3, SrTiO3, l’atome de cuivre des plans CuO2 (¿g. 3.15) est situé au centre d’un octaèdre formé par les 4 atomes d’oxygène qui l’encadrent dans le plan et les 2 atomes d’oxygène des plans supérieur

3 - Oxydes supraconducteurs – Cuprates et autres systèmes

101

et inférieur (en position apicale). En raison de cette analogie, et bien que l’octaèdre soit très déformé puisque la distance CuO dans le plan est de 0,190 nm alors que la distance entre le cuivre et un atome d’oxygène en position apicale est de 0,242 nm 14, les cuprates ont aussi été appelés pérovskites supraconductrices. >%D2@

WLWDQH R[\JqQH

>9L2@

EDU\XP >%D2@

D

E

Figure 3.15 – Structure pérovskite BaTiO3 (a) Le titane de la pérovskite cubique BaTiO3 occupe une position équivalente à celle du cuivre dans le composé LaBaCuO (centre d’un octaèdre d’oxygène). (b) L’octaèdre symbolise le groupe © Ti (au centre) + 6 O (sur les sommets) ª.

3.3.3 – Blocs dopants à 3 plans décalés (TlBaCaCuO) Les blocs dopants à trois plans décalés sont de type [O B’ –][B O –][O B’ –] (¿g. 3.16), où B est un élément trivalent et B’ un élément divalent. Le plan [B O –] se trouve en position décalée par rapport aux 2 plans [O B’ –].

>2%¶@ % >%2@

R[\JqQH %¶

>2%¶@ Figure 3.16 – Structure du bloc dopant à 3 plans décalés Le plan [B O –] (B est un élément trivalent) est encadré par 2 plans [O B’ –] (B’ est un élément divalent). C’est à partir de ce bloc que sont construits les composés de la famille TlBaCaCuO. 14

M. Reehuis et al. (2006) Phys. Rev. B 73, 144513.

102

Matériaux supraconducteurs - Structures et propriétés physico-chimiques

Les composés au thallium, de formule générale TlBa2Can – 1CunO2n + 3 (acronyme TBCCO, ¿g. 3.17), sont les plus connus de cette famille.

R[\JqQH

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WKDOOLXP FDOFLXP

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EORF WULSODQ GRSDQW

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7O%D&D&X2 F

Figure 3.17 – Structure des supraconducteurs de la famille (TlBaCaCuO) Ces composés sont constitués par une alternance de blocs dopants triplans décalés (¿g. 3.16) et de blocs supraconducteurs à n plans CuO2.

Dans ces composés, les blocs dopants contiennent le baryum comme élément divalent et le thallium comme élément trivalent. Ils alternent avec des blocs supraconducteurs dont le nombre de plans CuO2, séparés par des plans intercalaires de calcium, peut rtre n  1, 2, 3 ou 4. La température critique Tc la plus élevée 15 (133 K) a été trouvée pour n  3 (tableau 3.4).

15

Z.Z. Sheng et A.M. Hermann (1988) Nature 332, 138.

3 - Oxydes supraconducteurs – Cuprates et autres systèmes

103

Tableau 3.4 – Températures critiques des composés de la famille TBCCO au dopage optimal 2a n

Composé TBCCO

Nomenclature

Tc [K]

1

TlBa2CuO5

Tl-1201

50

2

TlBa2CaCu2O7

Tl-1212

82

3

TlBa2Ca2Cu3O9

Tl-1223

133

4

TlBa2Ca3Cu4O11

Tl-1234

127

3.3.4 – Blocs dopants à 4 plans décalés (TlBaCaCuO et BiSrCaCuO) Dans le prolongement des constructions précédentes, on trouve les familles TlBaCaCuO et BiSrCaCuO (acronymes TBCCO et BSCCO) dans lesquelles le bloc dopant contient 4 plans empilés selon la séquence [O B’ –][B O –][O B –][B’ O –] (¿g. 3.18) où, de nouveau, B est un atome trivalent et B’ un atome divalent. >2'¶@

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% R[\JqQH

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% "7ORX%L %¶ "%DRX6U

>'¶2@ Figure 3.18 – Structure du bloc dopant à 4 plans décalés Ils sont du type : [O B’ –][B O –][O B –][B’ O –] où B est un élément trivalent et B’ un élément divalent. Les couples Tl/Ba et Bi/Sr sont à la base des familles TlBaCaCuO et BiSrCaCuO.

La ¿gure 3.19 montre, dans les composés appartenant à la famille TlBaCaCuO, quelques séquences d’empilements de blocs dopants à 4 plans et de blocs supraconducteurs à n  1, 2 ou 3 plans CuO2 séparés par des plans intercalaires de calcium. Les composés de cette famille présentent des températures critiques particulièrement élevées (tableau 3.5).

104

Matériaux supraconducteurs - Structures et propriétés physico-chimiques Tableau 3.5 – Températures critiques des composés des familles BSCCO et TBCCO au dopage optimal 2a

n

Composé TBCCO

Tc [K]

Composés BSCCO

Tc [K]

1

Tl2Ba2CuO6

Tl-2201

90

Bi2Sr2CuO6

Bi-2201

34

2

Tl2Ba2CaCu2O8

Tl-2212

110

Bi2Sr2CaCu2O8

Bi-2212

96

3

Tl2Ba2Ca2Cu3O10

Tl-2223

128

Bi2Sr2Ca2Cu3O10

Bi-2223

110

4

Tl2Ba2Ca3Cu4O12

Tl-2234

119

Tl2Ba2Ca3Cu4O12

Bi-2234

110

&X 2 7O 2 %D 

%D 2 7O 2 &X



2

%D 2 7O 2



&X 2 7O 2 %D

2



2

      

7O%D&X2

EORFVXSUD Q" EORF GRSDQW EORFVXSUD Q" EORF GRSDQW

&D





2



&D





2

2



%D 2 7O 2 &X





&X 2 7O 2 %D

2

&D





2

2



&D



&X 2



2

%D 2

 



7O 2 &X

&D





&X 2 7O 2 %D

2



2

%D 2 7O 2 &X

2

 





&X

&X

7O 2 %D

&X



EORFVXSUD Q" EORF GRSDQW EORFVXSUD Q"

  



&X



&D









&X 2 7O 2 %D

2



2



EORF GRSDQW



7O%D&D&X2

%D 2 7O 2 &X

   

7O%D&D&X2 Figure 3.19 – Séquence d’empilement de blocs dopants et de blocs supraconducteurs de la famille TlBaCaCuO (TBCCO) La famille BiSrCaCuO est formée en remplaçant le thallium par le bismuth et le baryum par le strontium.

3.3.5 – Bloc dopant triplan à mercure aligné HgBaCaCuO De formule générale HgBa2Can – 1CunO2n + 2 (HBCCO), cette famille 16 contient un autre type de bloc dopant triplan, de séquence [Ba O –][Hg – –][Ba O –], où le plan 16

Le premier élément de cette série cuprate au mercure HgBa2CuO4 + į (Tc  94 K) a été découvert à Grenoble : S.N. Putilin et al. (1993) Nature 362, 226.

3 - Oxydes supraconducteurs – Cuprates et autres systèmes

105

médian contient uniquement des atomes de mercure divalents alignés à la verticale des atomes de baryum (¿g. 3.20a). Ici le bloc supraconducteur peut compter jusqu’à 6 plans CuO2. La température critique du composé n  3 atteint 135 K (tableau 3.6). Tableau 3.6 – Températures critiques des composés de la famille HBCCO au dopage optimal 2a n

Composé

Tc [K]

1

HgBa2CuO4

Hg-1201

97

2

HgBa2CaCu2O6

Hg-1212

128

3

HgBa2Ca2Cu3O8

Hg-1223

135

4

HgBa2Ca3Cu4O10

Hg-1234

127

5

HgBa2Ca4Cu5O12

Hg-1245

110

6

HgBa2Ca5Cu6O14

Hg-1256

107

%D

+J

&X

&D

2 >%D2@ >+J@

EORF GRSDQW

>%D2@ >%D2@ >&X2@ >+J@ F

>&D@ >&X2@

>'D2@ D

EORFVXSUD Q"

+J%D&D&X2 E

Figure 3.20 – Famille HgBaCaCuO (a) Bloc triplan aligné. Noter que Hg est situé le long de l’axe c, entre 2 atomes Ba. (b) HgBa2CaCu2O6 est construit par alternance de blocs triplans alignés et de blocs supraconducteurs à 2 plans CuO2

106

Matériaux supraconducteurs - Structures et propriétés physico-chimiques

Soumis à une pression hydrostatique croissante, l’évolution de la température critique de chacun des composés de cette famille est assez similaire17, 18, 19 (¿g. 3.21) : on observe tout d’abord une augmentation rapide de Tc puis une saturation suivie d’une diminution. C’est dans cette famille que, par application d’une pression, la plus haute température critique des cuprates a été obtenue : sous une pression de 31 GPa, la température critique de HgBa2Ca2Cu3O8 19 (Hg-1223) est de 164 K (¿g. 3.21) et elle atteint 20 166 K dans ce mrme composé dopé au Àuor et soumis à une pression P  23 GPa. 7F>.@ 

+J) +J +J +J +J





 







3>*3D@

Figure 3.21 – Effet de la pression sur la température critique des composés au mercure La température critique croît avec la pression, atteint un maximum puis décroît. Cette variation en forme de dôme est à rapprocher du comportement de Tc en fonction du taux de dopage (¿g. 3.5). [d’après M. Nuxez-Regueiro, communication personnelle]

Cette évolution serait le résultat de 2 effets 21 : ‡ à pression nulle, le dopage des blocs supraconducteurs est légèrement inférieur au dopage optimal op (¿g. 3.5) ; l’application de la pression, en diminuant les 17 18 19 20 21

M. Nuxez-Regueiro et al. (1993) Science 262, 97. C.W. Chu et al. (1993) Nature 365, 323. L. Gao et al. (1994) Phys. Rev. B 50, 4260. M. Monteverde et al. (2005) Europhys. Lett. 72, 458. R.J. Wijngaarden et al. (1999) Physica B 265, 128.

3 - Oxydes supraconducteurs – Cuprates et autres systèmes

107

distances interplans dans la direction c, facilite le transfert d’électrons des blocs supraconducteurs vers les blocs dopant ce qui augmente le dopage en trou. La comparaison des ¿gures 3.21 et 3.5 va dans le sens de cette interprétation : une augmentation de Tc lorsque le dopage se rapproche de l’optimal, un dôme autour de op suivi d’une décroissance lorsque, sous l’effet d’une trop forte pression, le transfert de trous conduit à un dopage supérieur à op ; ‡ sous pression, la contraction des paramètres du plan de base (a,b) serait de nature à faire croître la densité d’états 22 au niveau de Fermi et donc de stabiliser l’état supraconducteur.

3.4 – Représentation structurale et classification des cuprates Avant de poursuivre la description de systèmes plus particuliers, il est utile d’exposer les quelques principes de base utilisés pour représenter et nommer les cuprates supraconducteurs.

3.4.1 – Schématisation des structures Il est d’usage, en cristallographie, de faire apparaître le cuivre et son environnement oxygène par la ¿gure géométrique qu’ils dessinent. Pour cela, les atomes d’oxygène voisins d’un atome de cuivre sont reliés entre eux par des segments de droite et les faces qu’ils génèrent sont grisées. Souvent mrme, pour alléger la ¿gure, les atomes sont omis et seules les ¿gures géométriques ainsi obtenues sont représentées. Ainsi : ‡ chaque octaèdre de la ¿gure 3.22a symbolise l’ensemble formé par un atome de cuivre central et les 6 atomes d’oxygène qui forment sa cage octaédrique ; ‡ sur la ¿gure 3.22b, chaque tétraèdre représente l’ensemble formé par un atome de cuivre situé au centre du carré de base et les 5 atomes d’oxygène situés sur chacun des sommets ; chaque carré représente l’ensemble formé par un atome de cuivre central et les 4 atomes d’oxygène positionnés sur les sommets du carré.

3.4.2 – Nomenclature Dans un premier temps les nouveaux composés ont été désignés par des acronymes, ou des appellations de circonstance, LaBaCuO, YBaCuO, Y123, BSCCO, HBCCO ou TBCCO, qui sont encore très largement utilisées, en particulier dans la communauté qui se consacre aux développements technologiques.

22

C. Ambrosch-Draxl et al. (2004) Phys. Rev. Lett. 92, 187004.

108

Matériaux supraconducteurs - Structures et propriétés physico-chimiques

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7O%D&D&X2 E

Figure 3.22 – Représentation cristallographique des cuprates 12 Un octaèdre symbolise 1 atome Cu central et 6 atomes O aux sommets. Un tétraèdre représente 1 Cu au milieu de la base carrée et 5 O sur les sommets. Un carré symbolise 1 Cu au centre et 4 O sur les sommets. (a) Schéma de la structure du composé La2CuO4 23. La succession des plans est celle montrée sur la ¿gure 3.12. (b) Schéma de la structure du composé TlBa2Ca2Cu3O9 24. La succession des plans est celle montrée sur la ¿gure 3.17c.

En parallèle, une nomenclature fonctionnelle faisant ressortir les caractéristiques majeures des structures a été proposée. Elle fait apparaître le symbole de l’élément le plus évocateur du bloc dopant suivi de 4 nombres q, p, m, n qui se réfèrent, pour les 2 premiers au bloc dopant et pour les 2 derniers au bloc supraconducteur 25. ‡ Bloc dopant : Le premier chiffre q est le nombre de plans du bloc dopants qui ne sont pas en contact avec les plans CuO2 et que l’on quali¿e parfois d’isolants. Il vaut 0 lorsque le bloc dopant est diplan, comme par exemple [O La –][La O –] dans La2CuO4 (La-0201, ¿g. 3.12) ; 1 lorsque le bloc dopant est triplan comme [Ba O –][Hg – –][Ba O –] dans HgBa2CaCu2O6 (Hg-1212, ¿g. 3.20b) ; 2 lorsque le bloc dopant est quadriplan tel que [O Tl –][Sr O –][O Sr –][Tl O –] dans Tl2Sr2CuO6 (Tl-2201, ¿g. 3.19). 23 24 25

J.M. Longo et al. (1973) J. Solid State Chem. 6, 526. B. Morosin et al. (1991) Physica C 172, 413. J. Eck, Superconductor Terminology and the Naming Scheme, http://www.superconductors. org/terms.htm.

3 - Oxydes supraconducteurs – Cuprates et autres systèmes

109

Le second chiffre p, introduit pour rendre compte de situations éventuellement plus complexes, est le nombre de plans voisins d’un plan CuO2 supraconducteur. Dans la pratique, p est quasiment toujours égal à 2. ‡ Bloc supraconducteur : m est le nombre total de plan intercalaires entre les plans CuO2 d’un mrme bloc. n est le nombre total de plans CuO2 dans le bloc. Les blocs supraconducteurs commençant et ¿nissant toujours par des plans CuO2, on a généralement m  n – 1 ce qui, malgré une redondance apparente, laisse la possibilité de décrire des situations moins standard. Ainsi le composé Tl2Ba2Ca2Cu3O10, dont le bloc dopant est formé de 4 plans dont 2 au contact avec les plans CuO2 et le bloc supraconducteur contient 2 plans intercalaires Ca et 3 plans CuO2, a pour nomenclature Tl-2223 (¿g. 3.19). Restent quelques cas particuliers comme ceux des composés YBaCuO ou (Nd1 – xCex)2CuO4 – y dont les blocs dopants sont atypiques. Dans ces cas les 4 nombres sont suivis des caractères (C, T, T’, T , etc.) indicatifs de certaines spéci¿cités du composé.

3.5 – Le composé YBaCuO et sa famille Le composé YBa2Cu3O7 – y, dénommé Y-123 pour rappeler sa composition chimique, ou par l’acronyme YBaCuO, ou encore en suivant la nomenclature présentée au paragraphe précédent Y-1212C, reste à ce jour le plus répandu et le plus étudié des supraconducteurs HTS. Sa structure 26 (¿g. 3.23) est faite d’un empilement périodique de blocs supraconducteurs biplans (2 plans CuO2 et 1 plan d’yttrium intercalaire), et de blocs dopants triplans constitués de 2 plans [O Ba –] entre lesquels est inséré un plan [Cu – O]. Dans ce dernier plan, les atomes Cu et O forment des chaînes CuO suivant une seule des directions du plan de base ; les atomes de cuivre de ce plan, dénommés Cu , ne contribuent pas directement à la supraconductivité et ne doivent pas rtre assimilés aux atomes Cu des plans CuO2 (ce fut une grande source de confusion dans les premiers temps de la supraconductivité HTS). Pour rappeler la singularité de ce plan fait de chaînes, la lettre C (pour Chains) est ajoutée aux 4 nombres de la nomenclature et, pour des raisons historiques, la lettre qui précède ne se réfère pas à l’élément dopant (Ba) mais à l’yttrium 27, d’où la dénomination Y-1212C. 26 27

J.J. Capponi et al. (1987) Europhys. Lett. 3, 1301. J. Matricon et G. Waysand (1994) Chapitre 21, dans La guerre du froid : Une histoire de la supraconductivité, Éditions du Seuil, p. 331 – 356. L’yttrium a été au cœur de l’effervescence qui s’est développée autour des cuprates au moment de leur découverte.

110

Matériaux supraconducteurs - Structures et propriétés physico-chimiques

>2%D@ EORF >&X2@ WULSODQ GRSDQW

2 &X < %D

>2%D@ >&X2@ EORFVXSUD Q"

>&X2@

Figure 3.23 – Structure de YBaCuO YBaCuO est constitué d’un empilement alterné de blocs supraconducteurs n  2 (¿g. 3.9) et de blocs dopants triplans (¿g. 3.16). Le bloc dopant contient un plan fait de chaînes CuO qui dissymétrisent les directions du plan. L’atome cuivre de ce plan ne participe pas directement à la supraconductivité.

Les études cristallographiques ont montré que les plans CuO2 et BaO sont gaufrés et que les chaînes CuO du bloc dopant engendrent une distorsion orthorhombique qui brise la symétrie carrée du plan de base (¿g. 3.24). De ce fait, les monocristaux sont souvent maclés et poly-domaines. F>QP@

QP

SODQGHV\PpWULH  òòò       QP

P Q

%D < &X 2





Figure 3.24 – Détails de la structure du composé YBaCuO 28 28

C.P. Poole et al. (1995) Chapitre 7, dans Superconductivity, Academic Press, p. 171 – 193.

3 - Oxydes supraconducteurs – Cuprates et autres systèmes

111

La substitution de l’yttrium des plans intercalaires par une autre terre rare trivalente de taille atomique voisine vient peu modi¿er la température critique (tableau 3.7). Tableau 3.7 – Composés RE-1212C avec différentes terres rares 2a On observe que les températures critiques sont peu dépendantes de la terre rare. Terre rare

Composé

Nomenclature

Tc [K]

Y

Y-123

Y-1212C

92

Nd

Nd-123

Nd-1212C

96

Gd

Gd-123

Gd-1212C

94

Er

Er-123

Er-1212C

92

Yb

Yb-123

Yb-1212C

89

Dans cette famille on trouve aussi, avec le mrme bloc dopant, des composés à blocs supraconducteurs n > 2 où l’élément intercalaire n’est plus une terre rare mais le calcium 29. Nommés Cu-1223, Cu-1234 ou Cu-1245, leurs températures critiques sont situées entre 70 et 100 K selon les éléments d’insertion qui y sont ajoutés. Dans tous les composés, la concentration d’oxygène joue un rôle primordial pour le dopage. L’effet, sur la température critique, de l’application d’une pression sur des échantillons YBa2Cu4O8 sous-dopés 21 est montré sur la ¿gure 3.25, où la variation en forme de dôme est attribuée à un transfert d’électrons du blocs supraconducteurs vers le bloc dopant d€ au rapprochement des distances interplans dans la direction perpendiculaire à l’axe c. .@ 







29









3>*3D@

Figure 3.25 – Variation, avec la pression, de la température critique d’échantillons YBa2Cu4O8 sous-dopés La courbe en cloche traduit le transfert de trous du bloc dopant vers le bloc supraconducteur. [d‫ތ‬après R. Wijngaarden et al., 1999 21 © Elsevier Science B.9.]

H. Ihara (2001) Physica C 364 – 365, 289.

112

Matériaux supraconducteurs - Structures et propriétés physico-chimiques

3.6 – Cuprates dopés en électrons Le dopage en électrons30 peut être obtenu par substitution d’un élément quadrivalent à l’élément trivalent des plans [O B –] et [B O –] du bloc dopant biplan. C’est ce qui est réalisé dans les composés de formule Nd2 – xCexCuO4 – y, où le néodyme est la terre rare trivalente et le cérium l’élément quadrivalent. La formule chimique (RE1 – xCex)2CuO4 – y, peut laisser penser que la structure est identique à celle du composé (RE1 – xBax)2CuO4 – y où le baryum, élément de valence 2, est un donneur de trous (¿g. 3.12). En réalité la structure du bloc dopant31 de (RE1 – xCex)2CuO4 – y s’écarte sensiblement de celle décrite au paragraphe 3.3. En effet, alors que la substitution d’atomes de baryum ou de strontium aux atomes de terre rares trivalents n’entraîne, dans (RE1 – xBax)2CuO4 – y, qu’un léger glissement des atomes d’oxygène vers le centre du bloc qui peut se décrire par un simple gaufrage des plans [O RE –] et [RE O –], le dopage au cérium provoque un déplacement tel que les atomes d’oxygène se rejoignent dans le plan médian en position [– – O2] (¿g. 3.26). R[\JqQH >25(5(2.@



&V& VWUXFWXUH$ VWUXFWXUHFIF















9>QPSDU&@

Figure 4.20 – Cs3C60 formes allotropiques A15 et cfc Température critique en fonction du volume moyen par molécule C60 [adapté avec permission d‫ތ‬après A. Ganin et al., 2010 51 © Macmillan Publishers Ltd]

Z Composés A3C60 expansés Constatant l’augmentation de Tc avec le volume moyen occupé par une molécule C60, plusieurs groupes ont cherché à dilater le paramètre des composés A3C60 en y insérant des molécules neutres qui ne viendraient pas, à modi¿er la structure électronique. Des phases orthorhombiques de volume moyen par C60 de § 0,763 jusqu’à § 0,790 nm3 ont été obtenues avec les composés (NH3)(K3–nRbn)C60 (0 ” n ” 3) 53. Tous se sont avérés être antiferromagnétiques à basse température et présenter, selon leur composition, une température de Néel en forme de dôme avec maximum proche de 80 K au voisinage de (NH3)(KRb2)C60. À ce jour aucune transition supraconductrice n’a été observée.

4.2.4 – Supraconductivité t1g : composés (A, AT)C60 Après remplissage total de la bande t1u, les électrons cédés par l’insertion additionnelle d’atomes alcalino-terreux (AT  Ca, Sr, Ba), de valence 2, commencent à remplir la bande t1g provoquant l’apparition d’autres phases supraconductrices (supraconductivité t1g) pour les remplissages partiels de 2, 3 et 4 électrons dans cette bande. À la différence de ce que l’on rencontre en supraconductivité t1u, les structures cristallines sont variées (cubique simple, cubique centré ou orthorhombique centré, voir tableau 4.7). La température critique est toujours assez basse (< 10 K) et, contrairement à ce qui se produit dans les supraconducteurs t1u, à dopage constant Tc décroît 39 lorsque le paramètre cristallin augmente (¿g. 4.21). 53

T. Takenobu et al. (2000) Phys. Rev. Lett. 85, 381.

4 - Supraconducteurs organiques et composés du carbone

145

Tableau 4.7 – Caractéristiques de quelques fullerènes supraconducteurs t1g Les bandes hu et t1u sont pleines. La bande t1g (6 électrons au maximum) n’est que partiellement remplie. sc : cubique simple ; cc : cubique centré ; bco : orthorhombique centré. Composé

Électrons t1g

Tc [K]

Structure

Ca5C60

4

8,4

sc

Sr4C60

2

4

bco

Ba4C60

2

6,7

bco

K3Ba3C60

3

5,6

cc

Rb3Ba3C60

3

2,0

cc

K2Ba4C60

4

3,6

cc

7F>.@ .%D&







5E%D& &V%D&











D>QP@

Figure 4.21 – Supraconducteurs t1g – Corrélation entre paramètre de maille et température critique À la différence des supraconducteurs t1u (A3C60), Tc décroît lorsque le paramètre de maille augmente ; seuls les composés cc ont été pris en considération. [adapté d‫ތ‬après Y. Iwasa et T. Takenobu, 2003 39 © IOP Publishing]

4.2.5 – Mécanisme de la supraconductivité dans les fullerènes Z Supraconductivité t1u Les caractéristiques de l’état supraconducteur dans les fullerènes A3C60 (amplitude de la discontinuité de la chaleur spéci¿que à Tc, susceptibilité magnétique, rapport entre la température critique Tc et la valeur du gap) plaident a priori pour un comportement BCS conventionnel. Les écarts numériques aux valeurs théoriques sont attribués à un couplage électron-phonon fort (section 1.4.2).

146

Matériaux supraconducteurs - Structures et propriétés physico-chimiques

La substitution isotopique, sans effet sur l’atome alcalin tandis qu’elle modi¿e Tc lorsqu’il s’agit du carbone, ont conduit à rechercher parmi les vibrations du carbone celles conduisant à la supraconductivité. Il est maintenant généralement admis que les modes de vibration correspondants aux mouvements relatifs entre molécules C60 distinctes sont inopérants et que l’appariement en paires de Cooper résulte d’un couplage fort entre les modes intramoléculaires Hg de distorsion de la molécule C60 et les électrons de la bande t1u. L’élévation de Tc avec le paramètre de maille s’explique par le fait que la croissance de la distance interatomique provoque une diminution de la largeur de cette bande et corrélativement une augmentation de la densité d’états au niveau de Fermi que l’on sait être favorable à la supraconductivité 54.

Z Limites du modèle BCS-Eliashberg Si le modèle BCS-Eliashberg fournit une explication satisfaisante de l’évolution de la température critique des A3C60 du tableau 4.5, il trouve ses limites dans les comportements : ‡ des composés voisins A2C60 et A4C60 qui sont isolants et non-magnétiques alors que la bande t1u n’est ni totalement pleine, ni totalement vide ; ‡ de Cs3C60 qui est isolant et antiferromagnétique à la pression atmosphérique et ne devient supraconducteur que sous pression ; ‡ du composé expansé (NH3)(K3–nRbn)C60 qui est antiferromagnétique et isolant. Bien que tous ces comportements n’aient pas nécessairement la même origine, puisqu‫ތ‬un effet Jahn-Teller de déformation statique de C60 est généralement évoqué pour rendre compte du caractère isolant de Na2C60 et Na4C60 39, la proximité entre phases supraconductrices et phases magnétiques a conduit nombre d’auteurs à explorer les effets de corrélations électron-électron et de transition de Mott, qui feraient des fullerènes des supraconducteurs non-conventionnels 38.

Z Supraconductivité t1g Beaucoup moins explorée, l’interprétation de la supraconductivité t1g reste très ouverte. La différence avec la supraconductivité t1u serait due à un accroissement signi¿catif de la largeur de bande qui engendrerait une diminution de la densité d’états au niveau de Fermi et donc un abaissement de la température critique. Cela expliquerait aussi les moindres instabilités, comme celles qui restreignent la supraconductivité t1u au seul composé A3C60, toujours promptes à se développer dans des systèmes à bandes étroites. 54

9oir par exemple : P. Mangin et R. Kahn (2013) Chapitre 8, dans Supraconductivité – Introduction, collection Grenoble Sciences, EDP Sciences, p. 199 – 234.

4 - Supraconducteurs organiques et composés du carbone

147

4.3 – Composés d’intercalation du graphite La supraconductivité des composés de graphite intercalé, dans lesquels des plans de métaux alcalins viennent s’insérer entre des plans de carbone, a été découverte 32 en 1965 avec KC8 qui présente une température critique de seulement 0,55 K. Puis sont apparus les composés 55 LiC2 (Tc  1,9 K), NaC2 (Tc  5 K) et KC3 (Tc  3 K), synthétisés sous pression, et des composés ternaires où, entre 2 plans de graphite, sont insérés plusieurs plans de différentes espèces chimiques. Mais c’est seulement en 2005 qu’a été découverte la supraconductivité dans les composés YbC6 et CaC6 56, 57 (¿g. 4.22), avec des températures critiques Tc nettement plus élevées puisque respectivement de 6,5 et 11,5 K. CaC6 présenterait un gap à 0 K, anisotrope, de 1,35 me9 et 1,72 me9 respectivement dans le plan (a,b) et suivant l’axe c 58. La longueur de pénétration ab serait à 0 K d’environ 72 nm 59. SODQV&D LQVpUpV

SODQV FDUERQH

Figure 4.22 – Structure du composé d’intercalation CaC6 Les plans graphitiques hexagonaux se superposent, sans décalage latéral ; les atomes M s’y insèrent à la verticale des centres des hexagones en occupant dans chaque plan 1 site sur 3 (Į, ȕ ou Ȗ). [d‫ތ‬après N. Emery et al., 2005 56 © American Physical Society]

Les études structurales ont montré que dans ces deux composés les plans de graphite sont superposés et non-décalés d’un plan à l’autre mais que les positions de Ca et Yb 55

56 57 58 59

I.T. Belash et al. (1989) Synth. Met. 34, 455. I.T. Belash et al. (1990) Synth. Met. 36, 283. N. Emery et al. (2005) Phys. Rev. Lett. 95, 087003. T.E. Weller et al. (2005) Nat. Phys. 1, 39. R.S. Gonelli et al. (2008) Phys. Rev. Lett. 100, 207004. G. Lamura et al. (2006) Phys. Rev. Lett. 96, 107008.

148

Matériaux supraconducteurs - Structures et propriétés physico-chimiques

y sont différentes. En notant P un plan graphite et Į, ȕ, Ȗ les centres des hexagones appartenant à 3 colonnes voisines et susceptibles d’accueillir des atomes d’insertion (¿g. 4.23a), YbC6 adopte la séquence PĮPȕPĮPȕ… alors que celle de CaC6 est PĮPȕPȖPĮ… (¿g. 4.23b et c).

Į Ȗ Ȗ ȕ Į Į Ȗ ȕ ȕ Į Ȗ

Į Į Ȗ ȕ ȕ Į Ȗ Ȗ ȕ Į Į Ȗ

D

3Ȗ 3ȕ

3Į 3ȕ 3Į

Į ȕ

Ȗ



3Į ȕ Į



Į ȕ

Ȗ

ȕ Į

3ȕ E

F

Figure 4.23 – Structure des composés d’intercalation MC6 (M  Ca, Yb) (a) 9ue de dessus : répartition des sites Į, ȕ, Ȗ dans chaque plan des hexagones C6 ; (b et c) 9ue de coté en perspective : les plans graphitiques hexagonaux se superposent sans décalage latéral. Les atomes M s’y insèrent à la verticale du centre des hexagones. Dans chaque plan interstitiel 1 et 1 seul type de site (Į, ȕ ou Ȗ) est occupé. (b) YbC6 : les sites occupés sont alternativement Į et ȕ ce qui conduit à la séquence PĮPȕPĮPȕ… (c) CaC6 : les 3 sites sont alternativement occupés donnant la séquence PĮPȕPȖPĮ…

La découverte de ces composés a donné un regain d’intérêt à la supraconductivité des composés d’intercalation et à la détermination de sa nature. Les résultats vont

4 - Supraconducteurs organiques et composés du carbone

149

dans le sens d’une supraconductivité conventionnelle de type BCS 59, 60 médiée par les plans de graphite 61. Ajoutons en¿n que certains composés ternaires d’intercalation du graphite sont aussi supraconducteurs : par exemple KTl1,5C4 dont la température critique 62 est de 2,7 K.

4.4 – Graphène en couches très minces Récemment, il a été montré que des couches ne contenant qu’un petit nombre de plans graphène 63 (few layer graphene ou FLG) peuvent devenir supraconductrices avec des températures critiques très supérieures à celle du même composé massif. Un exemple est celui d’un échantillon de quatre couches de graphène dopé au potassium dans lequel une température critique Tc  4,5 K a été mesurée 64. Ces composés pourraient ouvrir une nouvelle voie de recherche sur la supraconductivité.

4.5 – Nanotubes supraconducteurs Il existe une très grande variété de tubes de carbone (nanotubes) formés par enroulement de feuillets de graphène 65, 66, 67, 68. Ils diffèrent par leur diamètre, par le type d’enroulement, par le nombre de feuillets de la paroi (mono ou multi), par la nature de leurs extrémités (ouvertes ou fermées), par la concentration de défauts, par leur répartition dans l’espace (isolée ou en faisceaux), par les nombreuses insertions d’atomes possibles. Cette grande variété de composés entraîne de multiples propriétés de conduction électronique. Pour ce qui est de la supraconductivité, il n’existe à l’heure actuelle que des résultats très partiels, mentionnant des Tc de 0,4 K pour des nanotubes mono-parois 69 et de 12 K pour des nanotubes multi-parois fermés à leurs extrémités 70. 60 61 62 63 64 65 66 67 68 69 70

A. Sanna et al. (2012) Phys. Rev. B 85, 184514. Z.H. Pan (2011) Phys. Rev. Lett. 106, 187002. R.A. Wachnik et al. (1982) Solid State Commun. 43, 5. K.S. Novoselov et al. (2004) Science 306, 666. M. Xue et al. (2012) J. Am. Chem. Soc. 134, 6536. J. Zhang et al. (2006) Phys. Rev. B 74, 155414. J.C. Charlier et al. (2007) Rev. Mod. Phys. 79, 677. P. Ayala et al. (2010) Rev. Mod. Phys. 82, 1844. N. Murata et al. (2008) Phys. Rev. Lett. 101, 027002. K. Kociak et al. (2001) Phys. Rev. Lett. 86, 2416. I. Takesue et al. (2006) Phys. Rev. Lett. 96, 057001.

150

Matériaux supraconducteurs - Structures et propriétés physico-chimiques

4.6 – Hydrocarbures aromatiques dopés Il a été découvert récemment 71 (2010) que certains hydrocarbures aromatiques présentent une phase supraconductrice à basse température lorsqu’ils sont dopés par insertion d’atomes. Il en est ainsi : ‡ du picène, molécule à 5 cycles aromatiques (C22H14, ¿g. 4.24a) qui cristallise dans une maille monoclinique (groupe de symétrie P2). Les molécules se disposent en arêtes de poissons en formant des blocs parallèles au plan (a,b) qui s’empilent suivant l’axe c avec un couplage réduit, conférant ainsi au système conférant au système un caractère quasi-2D 72. Dopés au potassium, ces cristaux deviennent supraconducteurs avec une température critique voisine de 18 K pour le composé K3-picène 71 ; K\GURJqQH FDUERQH

&+ SLFqQH D

F

 D

E

YXHILJXUH F

F E

D

F

Figure 4.24 – Hydrocarbure aromatique C22H14 (Picène) (a) Molécule à 5 cycles aromatiques ; (b) Les molécules disposées en arêtes de poison forment des blocs parallèles au plan (a,b) ; (c) Ces blocs s’empilent suivant l’axe c. [adapté avec permission d‫ތ‬après Y. Kubozuno et al., 2011 72 © The Royal Society of Chemistry] 71 72

R. Mitsuhashi et al. (2010) Nature 464, 7. Y. Kubozono et al. (2011) Phys. Chem. Chem. Phys. 13, 16476.

4 - Supraconducteurs organiques et composés du carbone

151

‡ de composés supraconducteurs de structure proche 73 dans lesquels le picène est remplacé par le phénanthrène74 (C14H10, 3 cycles aromatiques, Tc  5 K) ou le dibenzopentacène (C30H18, 7 cycles aromatiques, Tc  33,1 K). La croissance de la température critique avec le nombre de cycles (¿g. 4.25) pourrait provenir d’un renforcement du caractère bidimensionnel de la structure. 7F>.@

 ij



ij

ij

ij



ij

ij

ij

ij

ij

ij

ij

ij

 ij 





ij 

ij 





QRPEUHGHF\FOHV

Figure 4.25 – Température critique des hydrocarbures aromatiques quasi-linéaires dopés La température critique croît avec le nombre de cycles aromatiques. [d‫ތ‬après les données de M. Xue et al. 73, 2012]

‡ de la molécule coronène (C24H12), premier élément d’une nouvelle famille d’hydrocarbures aromatiques dopés présentant une phase supraconductrice, formée de 7 cycles benzéniques groupés de façon compacte (¿g. 4.26). Le dopage au potassium de tels cristaux, dont la structure en arêtes de poisson est proche de celle des picènes, a permis d’atteindre une température de transition de 15 K 74. +

+

+

+ ij ij

+

ij

+

ij

+

ij ij

+

ij +

+ +

73 74

+

M. Xue et al. (2012) Sci. Rep. 2, 389. X.F. Wang et al. (2011) Nat. Commun. 2, 507.

Figure 4.26 – Molécule de coronène

152

Matériaux supraconducteurs - Structures et propriétés physico-chimiques

Outre la recherche de nouveaux matériaux relevant de ces familles, les premières études concernant le mécanisme de la supraconductivité de ces matériaux moléculaires à cycles benzéniques sont en cours 75, 76.

4.7 – Diamant et silicium dopé au bore Les observations récentes de supraconductivité dans le silicium et le diamant fortement dopés au bore méritent une attention particulière. Le silicium et le diamant cristallisent tous deux dans la structure cubique diamant où, en raison de l’hybridation sp3, chaque atome est lié à 4 voisins par une liaison ı. À 0 K, les quatre électrons de la liaison remplissent totalement la bande de valence ; celle-ci est séparée de la bande de conduction par un gap de 1,1 e9 pour le silicium et 5,5 e9 pour le diamant, ce qui fait du premier élément un semi-conducteur et du second un isolant. L’énergie de Fermi est située au milieu du gap et, à température non-nulle, une fraction des électrons quitte la bande de valence pour venir occuper la bande de conduction, conférant au matériau une conductivité non-nulle mais très faible, en particulier pour le diamant dont le gap est grand. Une conductivité plus élevée peut être obtenue par dopage, par exemple en remplaçant une fraction des atomes tétravalents de carbone ou de silicium par des atomes de bore trivalents, ce qui diminue le nombre d’électrons engagés dans les liaisons. Après substitution de 1023 à 1025 at m–3 de carbone par du bore 77 (¿g. 4.27a), valeur très élevée par rapport aux dopages habituels de l’électronique, le diamant devient semi-conducteur avec une énergie d’activation de 0,35 e9 78 (différence d’énergie entre le niveau accepteur du bore 79 et le haut de la bande de valence du carbone). Pour des taux de substitution plus grands, le niveau accepteur se rapproche du haut de la bande de valence et, suivant de premières études 80, 81, le matériau devient simultanément métallique et supraconducteur au voisinage de 4,5#1026 at m–3 soit 0,25 de bore. L’apparition de la supraconductivité par substitution d’atome de bore sur les sites de carbone diamant a été con¿rmée par d’autres travaux qui toutefois ont 75 76 77 78 79

80 81

T. Kato et al. (2011) Phys. Rev. Lett. 107, 077001. B. Mahns et al. (2012) J. Chem. Phys. 136, 134503. La densité atomique du diamant est de 1,76#1029 at m–3. E.A. Ekimov et al. (2004) Nature 428, 542. Le niveau accepteur est le niveau électronique lié au bore sur lequel viennent, par excitation thermique, se placer des électrons de la bande de valence du carbone, créant ainsi des trous mobiles dans cette dernière. T. Klein et al. (2007) Phys. Rev. B 75, 165313. A. Kawano et al. (2010) Phys. Rev. B 82, 085318.

4 - Supraconducteurs organiques et composés du carbone

153

décelé l’existence d’une plage de concentration de bore sur laquelle les échantillons sont métalliques mais pas encore supraconducteurs 82. Un phénomène similaire a été montré dans le silicium dopé au bore 83, 84 (¿g. 4.27b), avec un décalage entre la transition isolant-métal et l’apparition de la supraconductivité puisque, si la première se produit pour un taux de substitution de 0,08, la supraconductivité n’apparaît que pour une concentration en bore de 2,2. Plus récemment il a été observé que le seuil d’apparition de la supraconductivité et la température de transition dépendaient de l’épaisseur de l’échantillon 85. Suivant cette étude, Tc(nB, d) varie selon une loi d’échelle : A (4.1) Tc (n B, d) = Tc0 c 1 − n d m B où nB est la concentration en bore (cm–3), d est l’épaisseur de la couche (cm), Tc0 § 750 mK et A § 8#10–15 cm–2. 7F>.@

7F>.@

GLDPDQW

WUDQVLWLRQ  LVRODQWPpWDO









 

  

VLOLFLXP



 





D





&%>DW@













E





&%>DW@

Figure 4.27 – Supraconductivité du diamant et du silicium dopés au bore (a) Température critique Tc du diamant (de structure cubique diamant) dopé au bore. À la concentration de CB  0,25 d’atomes substitués, le diamant devient métallique et supraconducteur à basse température. [adapté avec permission d‫ތ‬après T. Klein et al., 2007 79 © American Physical Society] (b) Température critique Tc d’un ¿lm de silicium en fonction du pourcentage d’atomes de bore substitué. [adapté avec permission d‫ތ‬après C. Marcenat et al., 2010 83 © American Physical Society]

82

83 84 85

J. Bousquet (2015) Propriétés optiques et électroniques du diamant fortement dopé au bore, Thèse de doctorat, Université Grenoble Alpes, Grenoble. E. Bustarret et al. (2006) Nature 444, 465. C. Marcenat et al. (2010) Phys. Rev. B 81, 020501(R). A. Grockowiak et al. (2012) Phys. Rev. B 88, 064508.

154

Matériaux supraconducteurs - Structures et propriétés physico-chimiques

Les différents auteurs présentent le mécanisme d’apparition de la supraconductivité comme étant de type BCS et répondant au formalisme d’Eliashberg (voir complément du chap. 1). Le couplage électron-phonon apparaîtrait entre les modes optiques et les électrons qui, en raison du dopage extrême, afÀeurent au niveau de Fermi. Des modes locaux de bore peuvent aussi jouer un rôle. Bien noter que dans chacun des cas, les atomes de bore se substituent aux atomes du réseau cristallin et ne sont pas des atomes qui se placeraient en position d’insertion.

Chapitre 5 Supraconducteurs à base de fer – Pnictides La découverte 1, en 2006, du composé supraconducteur FeP/LaO a produit une certaine effervescence dans la communauté scienti¿que puisque le fer, jusque-là considéré comme tueur de la supraconductivité, en est apparu comme l’élément central. Depuis cette date, de nombreux autres composés supraconducteurs voisins ont été élaborés. Les températures critiques Tc obtenues à ce jour atteignant 50 K, et les champs critiques Bc2 les plus élevés dépassant 100 teslas (¿gure 1.1), ces composés pourraient s’avérer très intéressants pour les applications. La recherche est toujours très active, tant du côté des chimistes qui veulent élaborer des composés à plus haute température critique, que du côté des physiciens qui s’attachent à mieux comprendre le mécanisme de la supraconductivité non-conventionnelle et multibande dans ces matériaux 2, 3.

5.1 – Le composant de base : le feuillet de FePn(FeCh) Dans toute cette classe de composés, la supraconductivité est portée par un feuillet bien identi¿é qui se compose d’un plan d’atomes de fer placés sur un réseau carré de côté a, coiffé par des atomes pnictogènes © Pn ª (tableau 2.1, colonne X9 ; Pn  As, P, Sb, Bi) ou chalcogènes © Ch ª (tableau 2.1, colonne X9I ; Ch  S, Se, Te), situés alternativement au-dessus et en dessous du centre de chacun des carrés de fer 4 (¿g. 5.1). Dans cette con¿guration, chaque atome Pn (Ch) est situé au sommet d’une pyramide dont la base carrée est formée de 4 atomes de fer, et chaque atome de fer apparaît au centre du tétraèdre formé par les 4 atomes Pn (Ch) (¿g. 5.1). Ces tétraèdres sont légèrement irréguliers avec des angles entre les liaisons FePn (FeCh) compris entre 108° et 112° (ils seraient de 109°47 dans un tétraèdre régulier).

1 2 3 4

Y. Kamihara (2006) J. Am. Chem. Soc. 128, 10012. G. R. Stewart (2011) Rev. Mod. Phys. 83, 1589. P. M. Aswathy et al. (2010) Supercond. Sci. Technol. 23, 073001. Les premiers matériaux découverts étaient à base de feuillets fer-pnictogène, ce qui a valu initialement le quali¿catif de pnictides à ces nouveaux supraconducteurs.

156

Matériaux supraconducteurs - Structures et propriétés physico-chimiques \ ]

\


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1G

6P

3U

*G 



)H$V/Q2  

18

19 20







Figure 5.8 – Variation de la température critique des composés FeAs/LnO0,6 en fonction du paramètre de maille Dans ce diagramme tracé au taux de dopage optimal, Ln représente une terre rare trivalente (ou un de ses alliages). Les valeurs les plus élevées, atteintes avec /D le samarium et le néodyme, dépassent 50 K. [adapté avec permission d‫ތ‬après G.R. Stewart, 2011 2 © American Physical DFU >QP@ Society]

Rappel : dans le feuillet FeAs (¿g. 5.1b) : - la maille magnétique carré (1 Fe par maille) a pour paramètre a ; - la maille cristalline (2 Fe par maille) a pour paramètre acr  a¥ଲ2. P.M. Shirage et al. (2008) Phys. Rev. B 78, 172503. H. Eisaki et al. (2008) J. Phys. Soc. Jpn. 77, 36.

5 - Supraconducteurs à base de fer – Pnictides

163

2 Effet de la pression Avec l’application d’une pression, la température critique du composé FeAs/La(O0,89F0,11) augmente, passe par un maximum voisin de 43 K vers 7 – 8 GPa puis, au-delà, décroît 21, 22 (¿g. 5.9). Le composé parent FeAs/LaO non-supraconducteur à la pression atmosphérique, le devient autour de 2 Gpa et atteint sa température critique la plus élevée autour de 10 GPa où elle dépasse 20 K. À la différence du système précédent 23, 24, les températures critiques des composés FeAs/SmO0,85 et FeAs/NdO0,6 décroissent contin€ment avec la pression sans passer par une étape de croissance initiale. Compte tenu du fait que les paramètres évoluent en sens inverse de la pression, ces comportements sont parfaitement cohérents avec la forme de courbe en cloche de la température critique montrée sur la ¿gure 5.8 : lorsque la pression augmente et donc que acr décroît, la température critique des composés au lanthane augmente puis diminue alors que celles des composés au néodyme ou au samarium, situés à pression nulle sur le dôme de la courbe, décroissent contin€ment avec la pression. 7F>.@ )H$V6P2HW)H$V1G2



)H$V/D 2±[)[ [ [ [











21 22 23 24









3>*3D@

Figure 5.9 – Variation de la température critique de quelques composés de la famille « 1111 » en fonction de la pression FeAs/La(O1 – xFx) : Le composé non-dopé (x  0) n’est pas supraconducteur à la pression atmosphérique, mais le devient sous une pression de 2 GPa. En pression croissante la température critique de tous ces composés passe par un maximum avant de décroître. FeAs/SmO0,85 et FeAs/NdO0,85 : Tc est maximum à pression nulle et décroît avec la pression. [d‫ތ‬après les données de H. Takahashi et al., 2008 21 et W. Yi, 2008 23]

H. Takahashi et al. (2008) J. Phys. Soc. Jpn. 77, 78. H. Okada et al. (2008) J. Phys. Soc. Jpn. 77, 113712. W. Yi (2008) Europ. Phys. Lett. 83, 57002. N. Takeshita et al. (2008) J. Phys. Soc. Jpn. 77, 131.

164

Matériaux supraconducteurs - Structures et propriétés physico-chimiques

S’il n’est pas immédiat de distinguer quantitativement l’effet du dopage qui déplace le niveau de Fermi, de celui du paramètre cristallin qui décale l’énergie de bande, et sans oublier de possibles reconstructions de la surface de Fermi 25, on peut imaginer, au vu de l’importance des effets, que la position relative du niveau de Fermi par rapport à certains détails de la structure de bande constitue un élément pertinent de cette sensibilité. En anticipant sur la modélisation s+ –, et sans même connaître le mécanisme de diffusion sous-jacent, il est compréhensible qu’avec une structure de bandes telle que celle de la ¿gure 5.26 et une position du niveau de Fermi en limite haute ou basse des différentes bandes, la surface de Fermi soit très sensible à un décalage relatif entre l’ensemble des bandes et le niveau de Fermi.

5.2.2 – Famille 2 : type (FeAs)2/AT (« 122 ») Z Structure Dans cette seconde famille de supraconducteurs à base de fer, les feuillets FeAs des composés parents sont séparés par des plans de métaux alcalino-terreux AT de valence 2, tels que le baryum (Ba), le strontium (Sr) ou le calcium (Ca). L’emboîtement de feuillets FeAs/LnO de la ¿gure 5.4 est remplacé par un empilement tête-bêche des feuillets FeAs (¿g. 5.10) qui laisse suf¿samment de place aux atomes AT pour s’intercaler et assurer la cohésion de la structure. Parce qu’à chaque atome AT correspondent 2 atomes Fe et 2 atomes As, cette famille est notée © 122 ª et les formules chimiques retenues 26, 27 sont FeAs/AT0,5, ou de façon équivalente (FeAs)2/AT. En libérant 2 électrons, chaque atome AT apporte un électron à chaque groupe FeAs ce qui conduit au composé ionique parent non-dopé (FeAs)2– –/Ba++. Comme dans les © 1111 ª, les composés non-dopés deviennent antiferromagnétiques 28, 29 au voisinage de 140 K avec la structure magnétique représentée sur la ¿gure 5.5. Le composé, quadratique à haute température, devient orthorhombique lors de la transition magnétique. Pour devenir supraconducteurs ces composés, comme ceux de type © 1111 ª, doivent être dopés.

25 26

27 28 29

E. Hassinger et al. (2012) Phys. Rev. B 84, 140502. L’indice 0,5 permet de se référer toujours à FeAs. Une autre possibilité est d’écrire la famille 1 sous la forme (FeAs)2/(LnO)2 et se référer à (FeAs)2– – ; ce que font beaucoup d’auteurs. K. Sasmal (2008) Phys. Rev. Lett. 101, 10700. Q. Huang et al. (2008) Phys. Rev. Lett. 101, 257003. S.D. Wilson et al. (2010) Phys. Rev. B 81, 014501.

5 - Supraconducteurs à base de fer – Pnictides

165

)H $V $7 DOFDOLQR WHUUHX[

D

E

Figure 5.10 – Pnictides de type « 122 » (a) Les feuillets FeAs sont alternés tête-bêche le long de l’axe c et sont séparés par des plans d’alcalino-terreux (AT) dont les atomes sont placés dans les larges espaces libres. [d‫ތ‬après X. Chen et P. Dai, 2014 7 © Oxford University Press, avec permission] (b) Cet arrangement est symbolisé par les frises FeAs alternées, les atomes AT formant des lignes dans les espaces vacants.

Z Dopage en électrons Le dopage en électrons est réalisé en substituant des atomes de cobalt ou de nickel à une fraction des atomes de fer du plan FeAs. Avec 1 électron excédentaire par atome de cobalt et 2 électrons excédentaires par atome de nickel, les taux de dopage des composés (FexCo1 – x As)2/AT et (FexNi1 – xAs)2/AT, sont respectivement  x et  2x. Le dopage en électrons conduit 30, 31 au diagramme de phases de la ¿gure 5.11, partie gauche. Comme dans les composés © 1111 ª, la température de Néel décroît avec le dopage 32, 33 mais, à la différence de ceux-ci, la supraconductivité apparaît sous la phase magnétique avant que cette dernière ne disparaisse. La question de la nature de la coexistence entre les deux phases reste ouverte.

Z Dopage en trous Une façon de doper le feuillet FeAs en trous est de substituer des atomes alcalins (K, Rb…) de valence 1 (à l’exclusion des plus petits Li et Na qui ne s’y prêtent pas) aux alcalino-terreux de valence 2. Cela réduit la quantité d’électrons transférés et produit

30 31 32 33

S. Nandi et al. (2010) Phys. Rev. Lett. 104, 057006. A. Sefat (2008) Phys. Rev. Lett. 101, 117004. D. Johrendt et al. (2009) Physica C 469, 332. G.F. Chen et al. (2009) Phys. Rev. Lett. 102, 227004.

166

Matériaux supraconducteurs - Structures et propriétés physico-chimiques

un dopage de formulation générale (FeAs)2/(AT1 – xAx) (  0,5 x). Le diagramme de phases (¿g. 5.11, partie droite) montre, qualitativement, les mêmes évolutions 34 qu’avec le dopage en électrons. Dans la phase supraconductrice la température critique passe par un maximum pour une valeur de x située autour de 0,4 à 0,6 c’està-dire, si on suppose que le transfert d’électron est total, pour un dopage optimal  0,2 – 0,3 signi¿cativement supérieur à ceux rencontrés dans la famille © 1111 ª. Les températures Tc maximales restent du même ordre de grandeur que celles des composés © 1111 ª. 7>.@ )H±[&R[ $V%D į[

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Figure 5.11 – Diagramme de phases de composés de la famille « 122 » Le composé non-dopé (x  0) est antiferromagnétique avec une température de Néel TN proche de 140 K. En dopage croissant, TN décroît et une phase supraconductrice apparaît. On note que dans ces deux systèmes, la supraconductivité apparaît avant la disparition de la phase antiferromagnétique. La nature de la coexistence entre les deux phases n’est pas connue. Des distorsions orthorhombiques se manifestent simultanément ou à des températures légèrement supérieures à celle de la transition magnétique. [adapté avec permission d‫ތ‬après P. Dai, 2015 35 © American Physical Society]

34 35

S. Avci et al. (2012) Phys. Rev. B, 85, 184507. P. Dai (2015) Rev. Mod. Phys. 87, 855.

5 - Supraconducteurs à base de fer – Pnictides

167

5.2.3 – Famille 3 : FeAs/ Li ; FeAs/ Na (« 111 ») Z Structure La troisième famille ne comprend, à ce jour, que 2 composés parents FeAs/Li et FeAs/Na de compositions équi-atomiques, ce qui leur vaut la dénomination © 111 ª. Dans ces composés les atomes de lithium, ou de sodium, s’intercalent sous forme de doubles plans 36, 37 entre les feuillets FeAs (¿g. 5.12a) qui se répliquent le long de l’axe c. En représentation symbolique l’ensemble forme la structure en chevrons 38 de la ¿gure 5.12b. En raison de la proximité des atomes d’arsenic et de lithium, les tétraèdres FeAs4 sont signi¿cativement aplatis dans la direction c. Les atomes de lithium et de sodium, de valence 1 et très électropositifs, libèrent chacun 1 électron qui se déplace vers le feuillet FeAs ce qui engendre la répartition des charges (Fe2+As3–)/Li+ ou (Fe2+As3–)/Na+. Comme dans les familles © 1111 ª et © 122 ª non-dopées, le feuillet FeAs porte 1 électron par formule chimique.

)H $V /L

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E

Figure 5.12 – Structure des pnictides FeAs/Li « 111 » (a) Les feuillets FeAs sont empilés suivant l’axe c. Ils sont séparés par un double plan de lithium. [d‫ތ‬après X. Chen et P. Dai, 2014 7 © Oxford University Press, avec permission] (b) En représentation symbolique les plans de lithium forment une frise qui s‫ތ‬emboîte avec la frise FeAs pour former les chevrons.

36 37 38

X.C. Wang et al. (2008) Solid State Comm. 148, 538. Z. Deng et al. (2009) Europhys. Lett. 87, 37004. J.H. Tapp et al. (2008) Phys. Rev. B 78, 060505 (R).

168

Matériaux supraconducteurs - Structures et propriétés physico-chimiques

Z Supraconductivité et dopage Contrairement aux éléments des familles © 1111 ª et © 122 ª, ces 2 composés sont supraconducteurs en l’absence de dopage, avec une température critique 39 de 16,6 K pour (Fe2+As3–)/Li+ et de 10 K pour (Fe2+As3–)/Na+. Cependant, au-delà de cette similitude apparente, les deux systèmes présentent des différences signi¿catives : ‡ FeAs/Li devient supraconducteur sans manifester d’ordre antiferromagnétique. Sa température critique décroît avec le taux de dopage ( ) en électrons 39, 40. Le dopage est réalisé en substituant au fer du cobalt qui apporte un électron excédentaire, ou du nickel qui en apporte 2 (¿g. 5.13a). ‡ dans FeAs/Na non-dopé, il y a coexistence d’un ordre antiferromagnétique (TN § 45 K) tel que celui de la ¿gure 5.5, et de la supraconductivité. Le dopage par substitution de cobalt [(Fe1 – xCox)As/Na] produit une décroissance de TN qui s’annule vers x  0,02 et une variation de la température critique en forme de dôme (¿g. 5.13b). Au dopage optimal ( op  x § 0,03), la température critique 41 est proche de 20 K. 7F>.@

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Figure 5.13 – Évolution de la température critique des membres de la famille « 111 » dopés en électrons par substitution partielle du fer par du cobalt ou du nickel (a) À dopage nul le composé FeAs/Li est supraconducteur (Tc § 16,6 K). Le dopage en électrons produit un abaissement de la température critique. (b) À dopage nul, le composé FeAs/Na est supraconducteur (Tc § 10 K) et antiferromagnétique (TN § 45 K). La température de Néel décroît avec le dopage et la température critique varie en forme de dôme avec un maximum autour de 20 K 41. [adapté avec permission d‫ތ‬après M. Pitcher et al., 2010 40 © American Chemical Society] 39 40 41

S. Aswartham et al. (2011) Phys. Rev. B 84, 054534. M. Pitcher et al. (2010) JACS 132, 10467. D.R. Parker et al. (2010) Phys. Rev. Lett. 104, 057007.

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5 - Supraconducteurs à base de fer – Pnictides

169

Z Effet de la pression Dans FeAs/Li 42 comme dans FeP/Li 43, l’application d’une pression entraîne une décroissance linéaire de la température critique (¿g. 5.14). 7F>.@    

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Figure 5.14 – Variation de la température critique de FeAs/Li et FeP/Li avec la pression [pour FeP/Li : données issues de K. Mydeen et al., 2010 43 – pour FeAs/Li : adapté avec permission d‫ތ‬après S.J. Zhang et al., 2009 42 © American Physical Society]

5.2.4 – Famille 4 : composés à blocs de type pérovskite À la différence des composés présentés jusqu’ici, où les feuillets FeAs n’étaient séparés que par quelques plans atomiques, les feuillets FeAs des composés de la famille 4 sont séparés par des blocs © épais ª de type pérovskite. Le premier composé 44, découvert en 2009, est (FeP)2/Sr4Sc2O6 (¿g. 5.15) qui devient supraconducteur à 17 K. Il a été suivi par d’autres composés 45, 46 tels que (FeAs)2/Ca4(Sc,Ti)3O8, (FeAs)2/Ca5(Sc,Ti)4O8, (FeAs)2/Ca6(Sc,Ti)5O8 et (FeAs)2/Ca4(Mg,Ti)3O8 dont les températures critiques Tc sont respectivement 33, 41, 42 et 47 K. Elles sont, selon les auteurs des publications, corrélées à la longueur des côtés a des carrés de fer qui valent, dans l’ordre des Tc croissantes, 0,3922 – 0,3902 – 0,3884 et 0,3877 nm.

42 43 44 45 46

S. J. Zhang et al. (2009) Phys. Rev. B 80, 014506. K. Mydeen et al. (2010) Phys. Rev. B 82, 014514. H. Ogino et al. (2009) Supercond. Sci. Technol. 22, 075008. H. Ogino et al. (2010) Appl. Phys. Express 3, 063103. H. Ogino (2011) Supercond. Sci. Technol. 24, 085020.

170

Matériaux supraconducteurs - Structures et propriétés physico-chimiques

)H 3 6U 6F 2

D

E

Figure 5.15 – Supraconducteurs à base de fer de type pnictides et à blocs pérovskite Dans les composés tels que (FeP)2/Sr4M2O6 (M  Sc, Cr, 9…) 44, 47, les feuillets supraconducteurs sont séparés par des blocs pérovskites. (b) est la représentation projetée de (a). [d‫ތ‬après X. Chen et P. Dai, 2014 7 © Oxford University Press, avec permission]

D’autres composés 47 tels que (FeAs)2/Sr492O6 (Tc  37,2 K) ont été synthétisés. Il ne dépend que du génie des chimistes pour voir émerger d’autres composés supraconducteurs à bloc pérovskite.

5.3 – Supraconducteurs à feuillets FeCh (Ch : chalcogène) 5.3.1 – Famille 5 : supraconducteurs fer – chalcogène (FeCh ou « 11 ») Le composé de référence FeSe, premier membre de cette famille © 11 ª, a été découvert 48 en 2008. Les composés de la famille ont pour formule générale FeCh ou plus généralement Fe(Ch1)1 – x (Ch2)x où les © Ch ª sont des chalcogènes (S, Se, Te). Ils sont appelés © 11 ª en raison de la composition équi-atomique en fer et en chalcogène. L’élément structurel de base (section 5.1) est un feuillet supraconducteur 47 48

X. Zhu (2009) Phys. Rev B 79, 220512. F.C. Hsu et al. (2008) Proc. Natl. Acad. Sci. U.S.A. 105, 14262.

5 - Supraconducteurs à base de fer – Pnictides

171

identique à celui des pnictides dans lesquels un chalcogène © Ch ª remplace le pnictogène © Pn ª (¿g. 5.16a).

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E

Figure 5.16 – Structure du feuillet FeSe « 11 » (a) Les feuillets FeSe s’empilent par emboîtement suivant l’axe c. Ils ne sont séparés par aucun plan intercalaire. [d‫ތ‬après X. Chen et P. Dai, 2014 7 © Oxford University Press, avec permission] (b) Schéma en chevrons représentant symboliquement cette structure.

Z FeSe Les feuillets FeSe s’emboîtent le long de l’axe c, sans couches ou blocs intermédiaires et forment, en représentation symbolique, les chevrons de la ¿gure 5.16b. Le sélénium étant très électronégatif et divalent, le fer est dans l’état Fe++. En réalité les composés contiennent généralement un léger excès fer 49. Ils ne présentent pas d’ordre antiferromagnétique statique, mais deviennent supraconducteurs à pression atmosphérique avec des valeurs de température critique décroissant rapidement avec l’excès de fer. Tc passe de § 8,5 K lorsque l’excès de fer est de 1 à une valeur proche de zéro, voire nulle, lorsqu’il atteint 3 50, ce qui explique une certaine dispersion dans les résultats de mesure. 49 50

T.M. McQueen et al. (2009) Phys. Rev. B 79, 014522. T.M. McQueen et al. (2009) Phys. Rev. Lett. 103, 057002.

172

Matériaux supraconducteurs - Structures et propriétés physico-chimiques

Le composé FeSe est très sensibles à la pression puisque, dans l’exemple des travaux qui ont conduit à la ¿gure 5.17, Tc peut atteindre un maximum de 37 K sous P  6 GPa 51 (¿g. 5.17). Un champ critique Bc2 de § 92 T a été mesuré sous 1,48 GPa 52. Notons que dans ce composé, on observe vers 90 K une distorsion orthorhombique telle que celle observée dans les © 1111 ª et © 122 ª à TN ou légèrement au-dessus 53. 7F>.@     















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Figure 5.17 – Variation de la température critique de FeSe avec la pression Dans cet exemple, Tc, voisin de 10 K à la pression atmosphérique, atteint 37 K sous une pression de 6 GPa. Chacun des symboles correspond à un cycle de mesure particulier. [adapté avec permission d‫ތ‬après S. Margadonna, 2009 51 © American Physical Society]

2 FeSe en couche ultramince En fait la singularité de FeSe ne s’arrête pas là, car il a été montré 53 que sous forme de couche monoatomique en épitaxie sur SrTiO3, la température critique Tc pouvait excéder 50 K, voire 100 K 54. Il est généralement admis que cette augmentation de Tc résulte de l’expansion du feuillet FeSe dans son plan de base et de ses conséquences sur la surface de Fermi très sensible à un déplacement du niveau de Fermi ou à toute déformation de la structure de bande.

Z FeTe À la différence de FeSe, le composé FeTe (lui aussi légèrement excédentaire en fer 55) est, à la pression atmosphérique, antiferromagnétique (TN  70 K) et non-supraconducteur. La structure magnétique de ce composé © 11 ª 55, 56 s’écarte de celle des composés 51 52 53 54 55

56

S. Margadonna (2009) Phys. Rev. B 80, 064506. Y Mizuguchi et al. (2008) Appl. Phys. Lett. 93, 152505. Q.Y. Wang et al. (2012) Chin. Phys. Lett. 29, 037402 ; références incluses. J.F. Ge et al. (2014) Nat. Mat. 14, 285. D. Fruchart et al. (1975) Mat. Res. Bull. 10, 169. Cette étude montre la présence de quelques pourcentages d’atomes de fer non-magnétique dans un plan intermédiaire situé entre les feuillets FeTe. D.J. Singh (2012) Sci. Tech. Adv. Mater. 13, 054304 et références citées dans cet article de revue.

5 - Supraconducteurs à base de fer – Pnictides

173

© 1111 ª, © 122 ª et © 111 ª. Les sites de fer du plan du feuillet se divisent en 2 sousréseaux, distingués sur la ¿gure 5.18 par des Àèches de styles différents. Dans chacun de ces sous-réseaux, les moments sont orientés dans la direction OX. Ils sont couplés ferromagnétiquement dans la direction OX et antiferromagnétiquement dans la direction OY. La composante du vecteur d’onde de la structure antiferromagnétique dans le plan de base est, en référence au réseau réciproque de la maille à un atome de fer (¿g. 5.24b), Q =  (ʌ /a, ʌ /a). La structure est antiferromagnétique dans la direction OZ. La substitution partielle de sélénium au tellure 57 entraîne une décroissance de la température de Néel ; le composé Fe(Te1 – xSex) devient supraconducteur dès x  0,05, avec coexistence de l’antiferromagnétisme jusqu’à x 0,2. Au-delà, et jusqu’à x  1 (FeSe), la température critique reste dans la fourchette 10 – 15 K (¿g. 5.19). \
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Figure 5.19 – Diagramme des phases du système FeTe1 – xSex En dessous de 70 K, FeTe est antiferromagnétique. En substituant du sélénium au tellure, la température de Néel décroît et une phase supraconductrice apparaît. On note un domaine de coexistence des 2 phases. [adapté avec permission d‫ތ‬après C. Dong et al., 2011 57 © American Physical Society]

5.3.2 – Famille 6 : (FeCh)2 /A (« 122* ») La dénomination © 122 ª de cette famille provient de la similitude de sa structure avec celle des composés © 122 ª décrite en section 5.2.2. Ici, le feuillet supraconducteur fer-pnictogène est remplacé par un feuillet fer-chalcogène, identique à celui décrit au paragraphe précédent, et l’élément A inséré entre les plans est un métal alcalin (et non-alcalinoterreux). Le premier composé de cette famille, (FeCh)2/K, a été découvert en 2010 59 ; sa température critique sous pression atmosphérique est de 31 K, c’est-à-dire bien supérieure à celle des éléments de la famille © 11 ª. Ultérieurement, le potassium a été remplacé par d’autres éléments monovalents comme le césium avec des températures critiques comparables 60. L’étude de ces composés est en progression ; une température critique de 46 K a été mesurée 61 dans (FeSe)2/Na.

5.3.3 – Et au-delà ... Comme il a déjà été signalé, la recherche sur les supraconducteurs à base de fer est très active et la classi¿cation actuelle a toutes les chances d’évoluer. Des travaux récents révèlent que, par l’insertion de molécules entre les plans FeSe, les températures

59 60 61

J. Guo et al. (2010) Phys. Rev. B 82, 180520. J.J. Ying et al. (2011) Phys. Rev. B 83, 212502. T.P. Ying et al. (2012) Sci. Rep. 2, 426.

5 - Supraconducteurs à base de fer – Pnictides

175

critiques des composés (Fe1 – zSe)2/Lix(C5H5N)y et (FeSe)2/Lix(NH2)y(NH3)1 – y peuvent atteindre respectivement 45 K 62 et 43 K 63.

5.4 – Champs critiques et paramètres de la supraconductivité 5.4.1 – Détermination expérimentale La détermination du champ critique des supraconducteurs à base de fer est réalisée, le plus souvent, par mesures de la résistivité sous champ 64 (¿g. 5.20 64, 65). 5>Ÿ@

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Figure 5.20 – Évolutions des résistances d’échantillons de différentes familles de supraconducteurs à base de « fer », lors de la transition supraconducteur/normal sous 7>.@ champ magnétique orienté dans la direction de l’axe c [d‫ތ‬après M. Putti et al., 2010 64 © IOP Publishing]

De façon générale et malgré des critères variant d’un auteur à l’autre, la température à partir de laquelle la résistivité décolle est associée à un début de mobilité des vortex donc d’irréversibilité, alors que celle pour laquelle la résistivité sature, est interprétée

62 63 64 65

A. Krzton-Maziopa et al. (2012) J. Phys. Condens. Matter 24, 382202. M. Burrard-Lucas (2012) Nat. Mater. 12, 15. M. Putti et al. (2010) Supercond. Sci. Tech. 23, 034003. Y. Jia et al. (2008) Appl. Phys. Lett. 93, 032503.

176

Matériaux supraconducteurs - Structures et propriétés physico-chimiques

comme la température de transition vers l’état normal. Sur la base des différentes mesures effectuées, il apparaît que 66 : ‡ les supraconducteurs à base de fer sont, comme tous les alliages et composés supraconducteurs, de type II ; ‡ les champs critiques Bc2 sont très élevés et ce, d’autant plus que la température critique Tc est haute. Ils croissent très rapidement lorsque on abaisse la température et leur extrapolation à 0 K conduit, pour les plus intenses © 1111 ª et selon les modèles, à des champs Bc2(0) de 100 T à 200 T ; ‡ bien que les structures soient nettement bidimensionnelles, les coef¿cients d’anic sotropie g an  B ab c2 /B c2 restent modestes (¿g. 5.21). Ils sont inférieurs à 2 dans la plupart des composés et ne dépassent 5 que dans ceux de la famille © 1111 ª ; %F>7@

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Figure 5.21 – Champs critiques Bc2 et paramètres d’anisotropie typiques de composés supraconducteurs à base de fer de différentes familles [(a), (b) et (d) : d’après I. Pallechi et al., 2012 67 © Elsevier, avec permission et (c) : adapté avec permission d‫ތ‬après J.L. Zang et al., 2011 68 © American Physical Society] 66 67 68

J. Jaroszynski et al. (2008) Phys. Rev. B 78, 174523. I. Pallecchi et al. (2012) Physica C 482, 68. J.L. Zhang et al. (2011) Phys. Rev. B 83, 174506.

5 - Supraconducteurs à base de fer – Pnictides

177

‡ à température donnée, la résistivité décolle de zéro pour un champ Birr qui peut être très inférieur à Bc2 (¿g. 5.22). Il s’ensuit un domaine de champ plus ou moins important suivant les systèmes, dans lequel les vortex sont très mobiles et probablement en phase liquide 69. %F>7@ %LUU>7@   

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Figure 5.22 – Champ critique Bc2 et champ d’irréversibilité Birr du composé « 1111 » FeAs/Nd(O0,82F0,18) [d‫ތ‬après Y. Jia et al., 2008 65 © AIP Publishing, avec permission]

5.4.2 – Paramètres de la supraconductivité Quelques paramètres typiques des différentes familles de supraconducteurs à base de fer sont rassemblés dans le tableau 5.2. Tableau 5.2 – Paramètres des supraconducteurs des différentes familles de supraconducteurs à base de fer 70 Famille

Tc [K]

« 1111 » FeAs/Ln(O,F)

47 – 55

5 – 10

§ 200

37 – 38

1,5 – 2

300

22 – 23

1,5 – 2

« 122 » dopé en trous (FeAs)2/(Ba,K) « 122 » dopé en électrons [(FexCo1–x)As]2/Ba

69 70 71

Longueur de pénétration 71 [nm] axe c plan (a,b)

Paramètre d’anisotropie

« 111 » LiAsFe

17

« 11 » Fe(Se,Te)

14,5

§ 1000

200 1,9 – 1,1

A. Gurevich (2011) Rep. Prog. Phys. 74, 124501. A. Rahman et A. Hossen (2015) ASRJETS 11, 104. R. Prozorov et 9. Kogan (2011) Rep. Prog. Phys. 74, 124505.

Longueur de cohérence [nm] axe c plan (a,b) 1,8 – 2,3

0,26

1,5

1

2,4

1,3

2–4 1,2

0,35

178

Matériaux supraconducteurs - Structures et propriétés physico-chimiques

On y trouve : des températures critiques élevées, des longueurs de pénétration importantes, des longueurs de cohérence faibles et, à l’exception des composés © 1111 ª, une anisotropie réduite. De façon consistante : ‡ le paramètre de Ginzburg-Landau  / , souvent supérieur à 100, indique que les supraconducteurs à base de fer sont de type II extrême ; f0 ‡ B c2 (T)  m 0 est en adéquation avec une longueur de cohérence 2p m 0 x 2 (T ) courte.

5.5 – Mécanisme de la supraconductivité 5.5.1 – Corrélation entre supraconductivité et structure Avant d’examiner les mécanismes de formation des paires de Cooper actuellement proposés dans les supraconducteurs à base de fer, mentionnons quelques paramètres physico-chimiques auxquels les caractéristiques de la supraconductivité, et en particulier la température critique, apparaissent corrélés : ‡ le dopage : c’est le paramètre majeur ; ‡ le paramètre cristallin : la température critique est maximale pour une valeur optimale du paramètre cristallin. La haute température critique des ¿lms FeSe ultraminces épitaxiés sur SrTiO3 est attribuée à une expansion de son paramètre dans le plan du feuillet ; ‡ l’écart à la régularité du tétraèdre formé par les atomes Pn qui entourent l’atome de fer : plusieurs auteurs 72 ont remarqué que la température critique est maximale lorsque le tétraèdre se rapproche de la perfection (¿g. 5.23) ; ‡ la distance entre les plans des pnictogènes et celui du fer 73 dans les feuillets supraconducteurs. Quali¿ée de hauteur des Pn, et corrélée à la forme des tétraèdres, elle constituerait un paramètre important agissant sur la température critique et sur la forme du gap, en particulier sur la présence ou non de nœuds (points de la surface de Fermi où le gap est nul). Ces paramètres physico-chimiques induisent des modi¿cations de la structure de bande, du niveau de Fermi et éventuellement du comportement magnétique qui, in ne, dictent les propriétés supraconductrices des divers composés.

72 73

C.H. Lee et al. (2008) J. Phys. Soc. Jpn. 77, 083704. K. Kuroki (2009) Phys. Rev. B 79, 224511.

5 - Supraconducteurs à base de fer – Pnictides

179

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Figure 5.23 – Variation de la température critique avec l’un des angles As –Fe –As est l’angle entre les liaisons joignant le fer et les 2 arsenics situés au-dessus ou en dessous des plans de fer. Il est différent de l’angle entre les liaisons qui joignent le fer à un arsenic du dessus et à un arsenic du dessous ; pour un tétraèdre régulier on aurait   109°47. [d‫ތ‬après C.H. Lee et al., 2008 72 © The Physical Society of Japan]

5.5.2 – Espace réciproque et zones de Brillouin La suite de ce chapitre étant dédiée à la description de la structure de la surface de Fermi et des interactions entre électrons situés sur celle-ci, il s’avère utile de dé¿nir le réseau réciproque dans lequel les vecteurs d’ondes sont dé¿nis, et de préciser la zone de Brillouin dans laquelle la surface de Fermi s’inscrit. Deux réseaux doivent être distingués : ‡ le réseau carré d’atomes de fer de vecteur de base (a,b) à un atome par maille ; ‡ le réseau cristallin, de vecteurs de base (acr, bcr), contenant 2 atomes de fer par maille. À ces deux réseaux de l’espace direct correspondent deux réseaux de l’espace réciproque, donc deux zones de Brillouin de côté a  2 ʌ /a pour la première et acr  2 ʌ /acr pour la seconde. La zone de Brillouin correspondant aux seuls atomes de fer (côté a ) est appelée zone de Brillouin étendue. Si la structure cristalline doit être décrite dans le réseau à 2 atomes de fer par maille, les propriétés électroniques relatives au fer sont souvent présentées dans le réseau à un atome de fer par maille et donc dans la zone de Brillouin étendue qui lui est associée (¿g. 5.24). Lors de la lecture d’un article, il est toujours nécessaire de s’assurer de la zone de Brillouin dans laquelle les surfaces de Fermi et les vecteurs d’onde des structures magnétiques sont représentés.

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Matériaux supraconducteurs - Structures et propriétés physico-chimiques \


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