Immunoanalyse: De la théorie aux critères de choix en biologie clinique 9782759809028

Cet ouvrage cherche à décrire de manière pédagogique l'utilisation des techniques par immunoanalyse. Il compte deux

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French Pages 261 [260] Year 2009

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Immunoanalyse: De la théorie aux critères de choix en biologie clinique
 9782759809028

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IMMUNOANALYSE De la théorie aux critères de choix en biologie clinique

Coordonnateur : Catherine Massart

Maquette intérieure et mise en page : idt Imprimé en France ISBN : 978-2-7598-0432-0 Tous droits de traduction, d’adaptation et de reproduction par tous procédés, réservés pour tous pays. La loi du 11 mars 1957 n’autorisant, aux termes des alinéas 2 et 3 de l’article 41, d’une part, que les « copies ou reproductions strictement réservées à l’usage privé du copiste et non destinées à une utilisation collective », et d’autre part, que les analyses et les courtes citations dans un but d’exemple et d’illustration, « toute représentation intégrale, ou partielle, faite sans le consentement de l’auteur ou de ses ayants droit ou ayants cause est illicite » (alinéa 1er de l’article 40). Cette représentation ou reproduction, par quelque procédé que ce soit, constituerait donc une contrefaçon sanctionnée par les articles 425 et suivants du code pénal.

© EDP Sciences 2009

LES AUTEURS

Catherine Massart, Biochimiste enseignant à la Faculté de Médecine de l’Université de Rennes 1, est responsable de l’Unité Fonctionnelle d’Hormonologie au CHU de Rennes. Pour coordonner cet ouvrage, elle a été mandatée par les membres d’un Groupe de Biologie Spécialisée présidé par Anne-Sophie Gauchez. Ces biologistes médecins, pharmaciens ou scientifiques issus de toute la France exercent dans des Services Hospitaliers ou Hospitalo-Universitaires de Biophysique, Médecine Nucléaire, Biochimie, Physiologie ainsi que dans des Centres de Recherche Contre Le Cancer ou au sein de grands laboratoires privés. Certains d’entre eux ont associé leur compétence multidisciplinaire pour la rédaction de cet ouvrage. Leur participation au groupe leur permet d’actualiser leur pratique, d’échanger leur savoir-faire et d’établir des normes de qualité pour de nouveaux dosages qu’ils mettent en place. Par ailleurs, ils utilisent tous en pratique quotidienne l’immunoanalyse mais certains effectuent également toutes les techniques qu’implique la réalisation d’analyse de biologie spécialisée (spectrométrie de masse, chromatographie, biologie moléculaire…). Leur spécialité les amène à travailler en étroite collaboration avec les cliniciens afin d’être en mesure de confronter les résultats biologiques avec les données cliniques. Au-delà de la qualité des services rendus, leur volonté est de pouvoir intervenir en tant qu’expert et référent en cas de discordance clinico-biologique, répondant ainsi aux exigences de la prochaine réforme de la biologie médicale. Par ailleurs, ces biologistes sont sollicités par les Autorités de Santé (HAS, AFSSAPS…) pour réaliser des études se finalisant par la rédaction de recommandations sur l’utilisation de certains paramètres ou sur leurs limites. La diversité de leur formation initiale et leur expérience multidisciplinaire en pratique biologique médicale permet une complémentarité scientifique en immunoanalyse, garantissant ainsi la cohérence finale de cet ouvrage. Enfin, l’édition de ce livre a été réalisée grâce à l’ACOMEN (groupe d’Action Concertée des services de Médecine Nucléaire du Sud de la France), association loi 1901 créée en 1974, dont le siège social et l’administration sont situés à Montpellier (http://www.acomen.fr). Son but est de promouvoir et de faciliter les échanges liés à l’exercice professionnel de la médecine nucléaire, d’assurer la formation des personnes et de gérer les études de développement et de recherche dans le domaine de la médecine nucléaire et des techniques associées. L’action de l’ACOMEN se fait à travers des activités scientifiques, une formation continue et des publications.

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Dany Alcaraz-Galvain : CHU de LYON Service fédéré de biochimie et biologie moléculaire Unité fonctionnelle endocrinologie, métabolisme, nutrition Centre hospitalier Lyon Sud [email protected] Laurence Bordenave : Université de BORDEAUX 2 Faculté de médecine, INSERM U577 Hôpital du Haut-Lévêque PESSAC Service de médecine nucléaire Laboratoire hormonologie et marqueurs tumoraux [email protected] Florence Boux de Casson : CHU d'ANGERS Département de biochimie et génétique Unité fonctionnelle d'hormonologie-métabolique [email protected] Anne Charrié : Université Claude Bernard de LYON I Faculté de médecine Lyon Sud, Charles Mérieux EA 37-38 CHU de LYON Service fédéré de biochimie et biologie moléculaire Unité fonctionnelle endocrinologie, métabolisme, nutrition Centre Hospitalier Lyon Sud [email protected] Karim Chikh : Université Claude Bernard de LYON I Faculté de pharmacie, INSERM U590 CHU de LYON Service fédéré de biochimie et biologie moléculaire Unité fonctionnelle endocrinologie, métabolisme, nutrition Centre Hospitalier Lyon Sud [email protected] Anne-Sophie Gauchez Pôle de Biologie, INSERM U877 CHU Grenoble Département de Biologie Intégrée 38043 Grenoble cedex [email protected]

Les auteurs

Michèle d’Herbomez : Université de LILLE 2 Faculté de médecine CHRU de LILLE Laboratoire de médecine nucléaire Centre de biologie-pathologie michele.d’[email protected] Isabelle Lacroix : Laboratoire Pasteur Cerba, CERGY PONTOISE [email protected] Pierre-Jean Lamy : Centre de Lutte Contre le Cancer Val d’Aurelle-Paul Lamarque, MONTPELLIER Laboratoire de biologie spécialisée Unité de transfert en cancérologie clinique [email protected] Catherine Massart : Université de RENNES 1 Faculté de médecine, INSERM 0203 Centre d’investigation clinique CHU de RENNES Unité fonctionnelle d’hormonologie Pôle molécules [email protected] Bruno Mathian : Université Claude Bernard de LYON I Faculté de pharmacie CHU de LYON Service fédéré de biochimie et biologie moléculaire Unité fonctionnelle endocrinologie, métabolisme, nutrition Centre hospitalier Lyon Sud [email protected] Frédéric Montels : Centre de lutte contre le cancer Val d’Aurelle-Paul Lamarque, MONTPELLIER Laboratoire de biologie spécialisée frederic.montels@ valdorel.fnclcc.fr Jean-Marc Riedinger : Centre de lutte contre le cancer Georges François Leclerc, DIJON Département de biologie et de pathologie des tumeurs Unité de biologie clinique [email protected]

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Rémy Sapin : Université Louis Pasteur de STRASBOURG Faculté de médecine, ULP/CNRS UMR 7191 CHRU de STRASBOURG Laboratoire d’explorations fonctionnelles par les isotopes [email protected] Corinne Sault : Laboratoire Biomnis, LYON [email protected] Jean-Claude Souberbielle : Hôpital Necker-Enfants Malades, PARIS Service d'explorations fonctionnelles [email protected] Chantal Valat : Université François Rabelais de TOURS Faculté de médecine, INSERM 618 CHU Bretonneau de TOURS Laboratoire de médecine nucléaire Pôle de biologie [email protected] Ont également participé à la rédaction Jean-Benoît Corcuff (Département de Médecine Nucléaire et Université de BORDEAUX), Guylène Charrière (Laboratoire Biomnis, LYON), Agnès Georges (Département de Médecine Nucléaire, BORDEAUX), Marie-Pierre Moineau (CHU de BREST) et François Roux (CHU La Timone, MARSEILLE).

LES RELECTEURS

Arnaud AGIN, Dany ALCARAZ-GALVAIN, Yves BARBIER, Laurence BORDENAVE, Florence BOUX DE CASSON, Anne CHARRIÉ, Karim CHIKH, Guylène CHARRIÈRE, Richard COHEN, Jean-Benoît CORCUFF, Henri DECHAUD, Christine DEMANGEAT, Michèle d’HERBOMEZ, Yvonne FULLA, Odile GALLE-DELMAS, Agnès GEORGES, Anouk GIREME, Daniel HUE, AnneSophie GAUCHEZ, Isabelle LACROIX, Pierre-Jean LAMY, Catherine MASSART, Bruno MATHIAN, Marie-Pierre MOINEAU, Marie-Liesse PICKETTY, Jean-Marc RIEDINGER, François ROUX, Rémy SAPIN, Corinne SAULT, Jean-Claude SOUBERBIELLE, Chantal VALAT.

AVANT-PROPOS Catherine MASSART

L’immunoanalyse connaît depuis quelques années un essor considérable dans des disciplines biologiques très variées. Quel que soit le domaine où il exerce, le biologiste va se retrouver confronté à la prochaine réforme de la biologie proposant notamment de renforcer le caractère médical de la discipline et les compétences des professionnels de santé, ainsi que d’optimiser les normes de qualité. Cet ouvrage souhaite aider le lecteur dans cette démarche pour lui apporter le complément scientifique nécessaire à un travail en symbiose avec la clinique et faire progresser une biologie de qualité tant sur le plan fondamental que sur le plan appliqué. Le chapitre 1 regroupe les principes immunologiques essentiels à la compréhension de la réaction antigène-anticorps impliquée dans toute technique par immunoanalyse. Le chapitre 2 permet de prendre connaissance des différents immunodosages avec marqueurs associant un antigène, un anticorps et un troisième élément, le traceur, constitué d’un antigène ou d’un anticorps, couplé à un marqueur qu’il soit radioactif, enzymatique, fluorescent ou luminescent. Cette partie pédagogique s’adresse tout particulièrement aux étudiants des IUT, des instituts de recherche et des facultés de sciences, qu’elles soient techniques, médicales, pharmaceutiques, dentaires ou vétérinaires, leur permettant d’appréhender tout immunodosage de son concept théorique à sa mise en œuvre en pratique. Les pièges méthodologiques multiples qui sous-tendent en permanence l’immunoanalyse sont détaillés dans le chapitre 3. Cette partie doit être considérée comme le cœur de l’ouvrage pour tout biologiste futur ou confirmé, susceptible de pratiquer ce type de techniques, afin de faire progresser une biologie cohérente et de qualité. En effet, le lecteur prendra connaissance dans ce chapitre de tous les pièges et subtilités propres à ces techniques et pourra ainsi apprendre à les repérer et savoir y remédier. Ce chapitre est également destiné aux cliniciens de médecine générale ou de spécialités pour les sensibiliser aux difficultés de ces méthodes et à la nécessité d’un dialogue étroit avec le biologiste en cas de discordance de certains résultats avec la clinique lors du diagnostic ou du suivi des patients traités. L’émergence d’une biologie compétente sur le plan de la qualité se voit renforcée par les hautes autorités de santé. La mise en place de contrôles de qualité évoqués dans le chapitre 4 reste à l’heure actuelle une exigence primordiale pour tout laboratoire de routine confronté de plus en plus à une réglementation et à des directives française et européenne exposées dans le chapitre 5. Enfin les critères de choix analytique de techniques en fonction du paramètre biologique sont proposés en fin d’ouvrage, dans le chapitre 6. Ce chapitre est destiné tout particulièrement aux biologistes soumis à la remise en cause régulière du choix des réactifs

AVANT-PROPOS

et des dosages face aux diverses offres qui leur sont proposées. Ils pourront ainsi choisir de façon raisonnée et adaptée leurs trousses et leur matériel d’immunoanalyse en fonction des forces et des faiblesses de chaque technologie, ainsi que des paramètres biologiques qu’ils souhaitent ou non doser par méthode automatisée. Ce livre permet de réactualiser et de compléter l’ancien ouvrage1, édité en 1988, qui n’est plus commercialisé. Il est le fruit d’une collaboration amicale avec les différents membres du Groupe de Biologie Spécialisé (GBS), constitué de biologistes issus de toute la France et chargés en tant que référents et experts de partager leur expérience et leur savoir-faire en immunoanalyse. Il convient d’y associer certains fournisseurs de réactifs qui ont participé à la relecture finale. Nous tenons tout particulièrement à remercier rédacteurs et relecteurs de nous avoir accordé le temps nécessaire à la réalisation optimale de l’ouvrage face à des exigences inhérentes notamment à la pluralité des auteurs.

1. Référence : Les Immunodosages. De la théorie à la pratique, ed. ACOMEN, 1988, ISBN 2-907794-00-0.

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SOMMAIRE

Abréviations ............................................................. 10 Chapitre 1 Bases immunologiques de la réaction antigène-anticorps ................................................. 15

Chapitre 2 Principes et techniques en immunoanalyse ........ 39

Chapitre 3 Problèmes et pièges en immunoanalyse .............. 115

Chapitre 4 Critères et contrôles de qualité ............................. 159

Chapitre 5 Réglementation ..................................................... 185

Chapitre 6 Critères de choix analytiques des principaux paramètres biologiques ......................................... 219

Glossaire .................................................................. 257

Abréviations

AAHT : anticorps anti-hormone thyroïdienne. ABTS : 2,2' azino di [3-éthyl-benzothiazolinyl-6-sulfonate d'ammonium]. Ac : anticorps. Ac anti-R-TSH : anticorps antirécepteur de la TSH. Ac anti-TPO : anticorps antithyroperoxydase. ACE : Antigène CarcinoEmbryonnaire. ACTH : Adréno Corticotrophic Hormone ou hormone adrénocorticotrope. ACMIA : Antibody Conjugated Magnetic ImmunoAssay. ADH : hormone antidiurétique ou vasopressine. AFAQ : association française d’assurance qualité. AFNOR : association française de normalisation. AFP : alpha foetoprotéine. AFSSAPS : agence française de sécurité sanitaire et produits de santé. Ag : antigène. AINS : anti-inflammatoires non stéroïdiens. AMP : assistance médicale à la procréation. AMPc : adénosine monophosphate cyclique. AMPPD : ester d’adamantyl-1, 2-dioxétane phénylphosphate. ANAES : agence nationale d’accréditation et evaluation en santé. ANS : 8 analino- 1 naphtalène sulfonate de sodium. ATA : American Thyroid Association. BGP1 : biliaire glycoprotéine P1. Bq : becquerel. BLIA : BioLuminescence ImmunoAssay. BVQI : Bureau Veritas Quality International. CA : carbohydrate antigen. CA 125 : carbohydrate antigen 125. CA 15-3 : carbohydrate antigen 15-3. CA 19-9 : carbohydrate antigen 19-9. CCD : Charge-Coupled Device. CEN : centre européen de normalisation. CENELEC : Comité Européen de Normalisation Électrotechnique. Ci : curie. CL : chimiluminescence. CLEIA : Chemiluminoenzymoimmunoassay.

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CLIA : Chemiluminescence Immunoassay. COFRAC : comité français d’accréditation. CPG-SM : Chromatographie en phase gazeuse-spectrométrie de masse. cpm : coup par minute. CTX : télopeptide C terminal. DHEA : déhydroepiandrostérone. DHEAS : sulfate de déhydroépiandrostérone. DMDIV : dispositif médicaux de diagnostic in vitro. dpm : désintégration par minute. EC : Enzyme Commission. ECCLS : comité européen des standards de laboratoires cliniques. ECL : electrochimiluminescence. ECLIA : ElectrochemiluminescenceImmunoassay. EDTA : acide ethylène diamine tétraacétique. E2 : œstradiol. ELISA : Enzyme Linked Immuno Sorbent Assay. ELFIA : Enzyme Linked Fluoroimmunoassay. EMIT : Enzyme Multiplied Immunoassay Technique. FDH : dysalbuminémie familiale hyperthyroxinémique. FETIA : Fluoro Energy Transfert Immunoassay. FIA : Fluroimmunoassay. FPIA : Fluorescence Polarization Immunoassay. FRET : Fluorescence Resonance Energy Transfer. FSH : Follicle Stimulating Hormone ou hormone folliculostimulante. GAD : glutamique acide décarboxylase. GBEA : guide de bonne exécution des analyses de biologie médicale. GH : Growth Hormone ou hormone de croissance. GICA : Gastro Intestinal Carbohydrate Antigen. Gn-RH : Gonadotrophin Releasing Hormone. HAMA : Human Anti-Mouse Antibody. HAS : haute autorité de santé. HBR : Heterophilic Blocking Reagent. HBT: Heterophilic Blocking Tube. HAT (milieu) : hypoxanthine, aminoptérine et thymidine (milieu contenant). hCG : Human Chorionic Gonadotrophine ou choriogonadotrophine humaine. HGPRT : hypoxanthine guanidine phosphoryle transférase. HOMA : Homeostasis Model Assessment. HPLC : chromatographie en phase liquide à haute performance. HRP : Horse-Raifort Peroxydase.

Abréviations

25OH-D : 25 hydroxy vitamine D. Hz : Herz. IBMA : Immunobioluminometric Assay. ICEMA : Immunochemiluminoenzymometric Assay. ICIA : Ion Capture Enzyme Immunoassay. ICMA : Immunochemiluminometric Assay. IFMA : Immunofluorometric Assay. ILMA : Immunoluminometric Assay. Ig : immunoglobuline. IGF : Insulin Growth Factor. IGF BP : Insulin Growth Factor Binding Protein. ipm : impulsion par minute. IRMA : Immunoradiometricassay. IRP : International Reference Preparation. IS : International Standard. ISO : organisation internationale de normalisation. JOCE : journal officiel du Conseil européen. JORF : journal officiel de la République française. Kat : katal. kDa : kilodalton. keV : kilo électron Volt. kUI : kilo international unit. L : litre. LABM : laboratoire d’analyse de biologie médicale. LDCR : limite de détection de cancer résiduel. LH : Luteinizing Hormone ou hormone lutéinisante. LIA : Luminescentimmunoassay. LNS : liaison non spécifique. LOCI™ : Luminescent Oxygen Channeling Immunoassay. LPH : Lipotropic Hormone ou hormone lipémiante. MEIA : Microparticule Enzyme Immunoassay. mol : mole. MSH : Mélano Stimulating Hormone ou hormone mélanostimulante. NABM : nomenclature des actes de biologie médicale. NABT : Non Specific Antibody Blocking Tube. NCA : Non Specific Cross Reactive Antigen. NFA : Normal Fecal Antigen. NIBSC : National Institute for Biological Standards and Control. NTX : Télopeptide N Terminal. NSE : Neurone Specific Enolase.

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OMS : organisation mondiale de la santé. OPD : o-phénylenediamine. PAL : phosphatase alcaline. PEG : polyéthylèneglycol. PhIA : Phosphoroimmunoassay. POMC : proopiomélanocortine. PSA : Prostate Specific Antigen. PSA libre : Prostate Specific Antigen libre. PTH : parathormone. PTH-rp : parathormone-related peptide. RC : réaction croisée. RFU : Relative Fluorescence Unit. RIA : Radioimmunoassay. RLU : Relative Luminescence Unit. RM : Reference Materials. RMP : Reference Measurement Procedures. R-TSH : récepteur de la TSH. SepFIA : Separation Fluoroimmunoassay. SFBC : société française de biologie clinique. SHBG : Sex Hormone Binding Globulin. SI : Standard International. SPA : Scintillation Proximity Assay. TBG : Thyroid Binding Globulin. TMB : 3, 3', 5, 5'-tétraméthyl-benzidine. TRFIA : Time-Resolved Fluoroimmunoassay. TRIFMA : Time-Resolved Immunofluorometric Assay. TRH : Thyrotrophin Releasing Hormone ou thyréolibérine. TSH : Thyrostimulating hormone ou hormone thyréostimulante ou thyréostimuline. T3 : Triiodothyronine. T3L : Triiodothyronine Libre. T4 : Thyroxine. T4L : Thyroxine Libre TPA : TripPropylAmine. TRFIA : Time-Resolved Fluoroimmunoassay. TRIFMA : Time-Resolved Immunofluorometric Assay. TPO : Thyroperoxydase. TUV : Technischer Überwachungs Verein. UI : unité internationale. WHO : World Health Organisation.

Chapitre 15

Bases immunologiques de la réaction antigène-anticorps Auteurs : Pierre-Jean Lamy, Frédéric Montels

1. Les antigènes 1.1. Rappel immunologique Les antigènes sont par définition des molécules naturelles ou synthétiques dont la reconnaissance spécifique par des anticorps ou par des cellules du système immunitaire provoque le déclenchement de la réponse immunitaire. Les antigènes sont le plus souvent des protéines, des glycoprotéines ou des polysaccharides. L’épitope est la région de l’antigène reconnue de façon spécifique par les récepteurs membranaires des lymphocytes B (BCR) et des lymphocytes T (TCR).

1.1.1 Antigènes protéiques Dans le cas d’un Ag protéique, l’épitope peut être : – une séquence peptidique continue : l’épitope est dit séquentiel ; – deux séquences peptidiques discontinues : l’épitope est dit conformationnel, lié à la structure de la protéine et donc sensible à la dénaturation. Les lymphocytes B, ayant comme récepteur une immunoglobuline (Ig) de membrane, reconnaissent les épitopes séquentiels mais aussi les épitopes conformationnels des antigènes protéiques à l’état natif. Par contre, les lymphocytes T ne reconnaissent pas les épitopes conformationnels des antigènes protéiques à l’état natif. Leur récepteur TCR ne reconnaît que des séquences peptidiques obtenues après protéolyse de l’Ag natif.

1.1.2 Antigènes polysaccharidiques Les antigènes polysaccharidiques sont constitués par des séquences répétitives de cinq à six sucres en moyenne. Le récepteur BCR des lymphocytes B reconnaît les épitopes des antigènes polysaccharidiques à l’état natif. Le caractère répétitif des séquences épitopiques permet une agrégation des récepteurs, dans une même région

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membranaire des lymphocytes B, provoquant ainsi leur activation directe, sans intervention coopératrice des lymphocytes T. Ces antigènes, non reconnus par les récepteurs TCR sont dits thymoindépendants. Ils provoquent une réponse immune faible, sans production de cellules B mémoires, sans réponse secondaire et sans commutation épitopique entre Ig de classe M (IgM) et de classe G (IgG).

1.1.3 Haptènes Les molécules de faible poids moléculaire sont antigéniques, c’est-à-dire capables de se lier à un anticorps, mais ne sont pas immunogènes, ce qui signifie qu’elles ne peuvent pas induire une réaction immunitaire aboutissant à la production d’anticorps. Ces molécules appelées haptènes (du grec haptein, lier) doivent nécessairement être couplées à des protéines ou des groupements glucidiques porteurs appelés « carriers » pour devenir immunogènes. Les carriers les plus utilisés sont l’hémocyanine, l’ovalbumine et l’albumine bovine. Des réactifs bi-fonctionnels, réagissant d’une part avec un groupement de l’haptène et d’autre part avec le carrier, assurent une jonction de type liaison covalente entre les deux.

1.2. Antigènes et immunodosages Dans le cadre des immunodosages, les antigènes correspondent aux molécules à doser, à condition que l’on dispose des anticorps spécifiques de ces antigènes. Ces molécules sont le plus souvent des macromolécules exprimant de nombreux épitopes différents. Ce qui est appelé « antigène » est donc en fait une mosaïque de déterminants antigéniques différents dont un ou deux seulement seront utilisés au cours de la réaction d’immunoanalyse. C’est pourquoi le terme d’analyte semble mieux indiqué, ou encore ligand lorsque le dosage fait appel à une méthode par liaison. D’un point de vue technique, la concentration en antigène est déterminée au moyen d’une courbe d’étalonnage en comparant les signaux (désintégration radioactive, absorbance, luminescence, etc.) obtenus pour l’échantillon à doser avec les signaux de solutions de référence ou solutions étalon, de concentrations connues. L’étude des antigènes doit donc être envisagée d’une part en tant qu’étalons dans une solution de référence, d’autre part en tant que molécules à doser (ou analytes), dans un échantillon biologique ou un échantillon de contrôle.

1.2.1 L’antigène en tant qu’étalon biologique 1.2.1.1 Les solutions étalon

Les solutions étalon utilisées au cours de chaque série de dosage permettent d’établir une courbe d’étalonnage et de déterminer ensuite la concentration de l’analyte dans les échantillons biologiques.

Bases immunologiques de la réaction antigène-anticorps

La validité d’un immunodosage repose donc sur deux critères d’identité : – une identité de comportement entre l’analyte présent dans l’échantillon à doser et celui présent dans la solution étalon. Les caractéristiques physico-chimiques du milieu réactionnel pouvant intervenir, il est souhaitable qu’il y ait une identité entre le milieu dans lequel est placé l’étalon et celui de l’échantillon biologique ; – une identité de structure entre molécule étalon et molécule à doser ce qui est d’autant plus difficile à obtenir que la molécule est complexe. Il est possible de vérifier l’identité de liaison par une épreuve de parallélisme : la courbe d’étalonnage est comparée à une courbe de dilution de l’échantillon dans les conditions propres de la réaction. Si les deux courbes ne sont pas parallèles (après transformation linéaire si nécessaire), l’identité n’est pas réalisée et l’étalon ne peut pas être utilisé dans les conditions données. Toutefois, si le parallélisme est essentiel pour la validité d’un dosage, il ne permet pas d’affirmer à lui seul l’identité de structure entre la molécule étalon et la molécule contenue dans l’échantillon. 1.2.1.2 Les étalons biologiques internationaux (1, 2)

Il est souhaitable que l’analyse d’une molécule par différents laboratoires conduise à des résultats comparables. Pour les substances biologiques dont la structure n’est pas complètement définie par des méthodes chimiques ou physiques, il est nécessaire de se référer à un étalon international. Dans le cas de molécules de faible masse molaire et de structure bien définie (comme les médicaments, les hormones thyroïdiennes ou stéroïdes), il est facile de se procurer des préparations antigéniques étalon sous forme purifiée, et identiques d’un lot à l’autre. Les valeurs de concentrations peuvent alors être exprimées sous forme de concentration massique (masse en gramme ou sous-multiple par litre) ou de concentration molaire (mole ou sous-multiple par litre). Dans le cas de molécules de masse molaire élevée et de structure complexe (comme les hormones glycoprotéiques ou les marqueurs tumoraux), les étalons sont obtenus par extraction à partir de liquides ou de tissus biologiques. L’identité de structure et donc l’identité antigénique est alors difficile à assurer, du fait de l’hétérogénéité métabolique (présence de nombreuses formes métaboliques) ou génétique (présence d’isoenzymes) de la substance considérée. Pour ces molécules complexes, la préparation des étalons est confiée par l’Organisation Mondiale de la Santé (OMS) à des organismes experts, comme le National Institute for Biological Standards and Control (NIBSC), qui fournit la majorité des standards utilisés pour les immunodosages. Ces étalons de référence sont régulièrement répertoriés et publiés par l’OMS (3). En dehors des caractéristiques d’identité, ces étalons doivent être disponibles en quantité suffisante pour répondre aux besoins des fabricants au moins dix ou quinze années. De plus, leur titre doit rester stable

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au cours de leur conservation et de leur distribution. Pour éviter une perte trop importante d’activité, ces solutions sont traitées (bactériostatiques, antiprotéases…), réparties en fractions aliquotes lyophilisées, scellées sous azote et conservées à très basse température. Ces précautions permettent pour la plupart des étalons de l’OMS une perte d’activité biologique inférieure à 1 % par an. Deux types de préparations peuvent être utilisées : – l’ « International Standard » (IS) qui est une préparation issue d’une étude collaborative à grande échelle entre des laboratoires utilisant des méthodes de dosage différentes ; – l’ « International Reference Preparation » (IRP), issue d’une étude à moins grande échelle et destinée spécifiquement aux immunodosages. L’ « Unité Internationale » (UI) est définie comme l’activité biologique contenue dans une masse définie d’IS ou d’IRP. Pour la fabrication de leurs trousses, les fabricants utilisent des étalons dits « secondaires », calibrés par rapport aux différents IS ou IRP, permettant d’exprimer les concentrations de l’analyte en UI/L. La calibration des solutions étalon d’une trousse étant réalisée, par rapport à l’étalon international, avec des réactifs bien établis et dans des conditions précisées dans le protocole, la valeur nominale attribuée à ces étalons dans ces conditions peut s’avérer incorrecte avec une méthodologie et des réactifs différents. Lorsqu’il n’existe pas de standard international disponible (comme c’est le cas actuellement pour la majorité des marqueurs tumoraux), l’absence de calibration par rapport à une telle préparation de référence augmente considérablement la variabilité entre les différentes techniques. Les concentrations d’analytes ne peuvent alors être exprimées qu’en « unités arbitraires ».

1.2.2 L’antigène en tant qu’analyte 1.2.2.1 Influence de la nature de l’échantillon

La molécule à doser peut se trouver sous différentes formes selon la nature du prélèvement et les conditions physicochimiques du milieu : pH, force ionique, concentration totale en protéines (albumine, …) et en protéine liant l’analyte en particulier, comme par exemple la Sex Hormone Binding Globulin (SHBG), l’Insulin Growth Facteur Binding Globulin (IGF BP), etc. Ces formes sont variables d’un milieu à un autre, modifiant la réaction entre la molécule et son anticorps. Par conséquent, un immunodosage mis au point pour une molécule et un milieu donné ne sera pas forcément directement applicable aux autres milieux. 1.2.2.2 Influence des conditions pré-analytiques

Le mode de prélèvement peut altérer la molécule à doser ou apporter des contaminants interférant avec la réaction. La présence d’anticoagulants et leur nature, la durée et la température de conservation du prélèvement, la

Bases immunologiques de la réaction antigène-anticorps

valeur du pH pour certains milieux, la nature du récipient (adsorption), la présence d’hémoglobine, etc. peuvent jouer un rôle. Certaines molécules présentes à des concentrations différentes dans les milieux extra et intracellulaires et pouvant diffuser à travers la paroi globulaire nécessitent une séparation rapide des érythrocytes et du plasma. D’autres demandent une séparation préalable à leur dosage. Si le dosage n’est pas réalisé rapidement, les conditions de conservation de l’échantillon peuvent modifier la structure de certaines molécules. C’est la raison pour laquelle doivent être déterminées ces conditions : température, addition de conservateurs ou d’agents chimiques protecteurs, pH, etc. 1.2.2.3 Hétérogénéité antigénique (4)

Les anticorps monoclonaux, largement utilisés aujourd’hui, étant spécifiques d’un épitope et non de la molécule entière, le dosage de molécules complexes et hétérogènes peut être pris en défaut : – si l’épitope reconnu n’est pas exprimé ou n’est pas accessible ; – si les épitopes présents ne sont pas reconnus par les anticorps utilisés du fait de l’existence de formes moléculaires variables ; – si les mêmes épitopes sont communs à des formes moléculaires d’activité biologique différente.

Exemples : • La prolactine : la forme moléculaire principale est monomérique mais circulent également des formes dimériques (« big prolactin ») et polymériques (« big big prolactin ») dont l’activité biologique reste à préciser. • LH (luteinizing hormone ou hormone lutéinisante) : cette hormone, de nature glycoprotéique, se trouve dans la circulation sous plusieurs formes plus ou moins glycosylées parmi lesquelles certaines ne sont pas reconnues par les anticorps de certains immunodosages (LH « invisibles »). • PSA (prostate specific antigen) : le PSA ou kallikréine hK3 se trouve dans la circulation sous forme libre et sous formes liées à des inhibiteurs circulants, essentiellement l’α2 et l’α−1 -anti-chymotrypsine. La α2-macroglobuline formant un manchon et masquant les épitopes du PSA total, les dosages dits de PSA total ne prennent pas en compte les formes de PSA liées à la α2-macroglobuline, bien qu’elles représentent environ la moitié du PSA sanguin. La fraction de PSA dite libre comprend des formes moléculaires différentes (fractions clivées, variants de glycosylation) et des fragments de dégradation d’antigénicité variable. • hCG (human chorionic gonadotropin ou choriogonadotrophine humaine) : l’hCG existe sous plusieurs formes circulantes (forme dimérique, sous-unités α et β libres, fragments de chaînes, variants de glycosylation) reconnues de manière variable en fonction des anticorps

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utilisés. Suivant le degré de reconnaissance des différentes formes de l’hCG, la concentration d’un même échantillon peut varier dans un rapport de 1 à 58. 1.2.2.4 Réactions antigéniques croisées

Lorsque l’échantillon contient des molécules antigéniquement proches de l’analyte à doser, des réactions croisées peuvent avoir lieu entre ces molécules et les anticorps de l’immunodosage. Exemple des interférences médicamenteuses : • Triiodothyronine (T3) totale et libre : interférence avec l’acide triiodothyroacétique ou Triac. • Cortisol direct : interférence avec la prednisolone et d’autres corticoïdes de synthèse. • Progestérone : interférence avec les métabolites de progestérone orale. • Œstradiol : interférence avec les métabolites du 17 bêta œstradiol oral. • Dosages de stéroïdes : les anticorps utilisés pour les dosages de cortisol direct peuvent présenter des réactions croisées avec les précurseurs (17 hydroxy-progestérone, 11 désoxycortisol), ce qui conduit à une surestimation des taux de cortisol en cas de déficits enzymatiques des surrénales s’accompagnant de taux élevés de ces précurseurs (déficit en 21 hydroxylase par exemple).

2. Les immunoglobulines 2.1. Introduction En 1890, Emil Adolf von Behring et Shibasaburo Kitasato mettent en évidence une antitoxine dans le sérum des patients qui avaient survécu à la diphtérie (5) : cette substance, capable de neutraliser la toxine qui a induit sa production et spécifique de celle-ci, est un anticorps. La molécule qui a induit la production de cet anticorps porte le nom d’antigène. Les anticorps sont aussi appelées immunoglobulines (Ig) de part leur nature protéique et leurs propriétés immunologiques. Elles sont synthétisées au cours de la réaction immunitaire par les lymphocytes B et sont exprimées à la surface de ces derniers ou secrétées dans le sang, les tissus ou les muqueuses. Elles sont divisées en cinq classes chez l’homme : Ig G, M, A, D, E.

2.2. Structure des immunoglobulines (6) 2.2.1 Structure générale des Ig : les IgG (fig. 1) Les IgG représentent la fraction majoritaire des Ig. Leur structure simple en Y observée au microscope électronique se compose : – de deux chaînes lourdes (chaînes H pour Heavy) constituant la région Fc, qui contient les domaines constants et détermine les fonctions communes à toutes les Ig ;

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– de deux chaînes légères (chaînes L pour Light) composant le fragment Fab porteur de la spécificité Ac capable de fixer l’Ag correspondant ; – des groupements glucidiques en nombres variables selon la classe.

2.2.2 Structure primaire des chaînes lourdes (chaînes H) La nature des chaînes lourdes détermine la classe et la sous-classe des Ig. Elles sont reliées entre elles par des ponts disulfures au niveau de la région charnière et par des liaisons non covalentes. Trois domaines constants (CH1, CH2, CH3) déterminent les propriétés effectrices de l’Ig et un domaine variable (VH) en regard du domaine variable des chaînes L participe à la spécificité de l’Ac pour l’Ag.

2.2.3 Structure primaire des chaînes légères (chaînes L) Les deux chaînes sont identiques quel que soit le type d’Ig. Chaque chaîne légère est liée à une chaîne lourde par un pont disulfure et des liaisons non covalentes. Hormis un segment constant (CL) qui spécifie le type kappa (κ) ou lambda (λ) des chaînes légères, la structure primaire de ces chaînes est variable d’une Ig à l’autre. Dans chaque chaîne se présentent des segments variables (VL) dans lesquels des zones hypervariables constituent les points de contact avec l’antigène. Ces chaînes sont porteuses de la spécificité anticorps.

VL CL

VH CH 1

CH2

CH3

Sites de liaison à l’antigène

Figure : 1 – Structure d’une immunoglobuline G.

2.2.4 Les IgA Les IgA forment la deuxième classe d'Ig après les IgG en terme de concentration sérique. Il existe deux sous-classes d'IgA : IgA1 et IgA2. Dans les sécrétions comme la salive, les secrétions bronchiques, le liquide

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Immunoanalyse

duodénal, les IgA peuvent exister sous une forme IgA sécrétoire ou exocrine (IgAS). La molécule d'IgA est constituée par deux chaînes légères, identiques α1 ou α2 et deux chaînes lourdes. La pièce J (pour Jonction) synthétisée par les plasmocytes permet de lier entre eux, par des ponts disulfure les fragments Fc constituant ainsi les IgA polymériques. L'IgA peut être dimérique ou trimérique formant une image en étoile. La pièce sécrétoire (S) synthétisée par les cellules épithéliales des muqueuses se lie aux fragments Fc et à la chaîne J des IgA dimériques pour former les IgA sécrétoires IgAS. Cette pièce S protège les IgA et les stabilise.

2.2.5 Les IgM Ainsi nommées parce qu’elles font partie des macroglobulines, leur structure se rapproche des IgA. Elles sont retrouvées majoritairement dans le sérum sous la forme de pentamères (cinq unités d’IgM identiques reliées entre elles par une pièce J). De même que les IgA, porteuses d’une pièce sécrétoire, elles forment les IgM que l’on retrouve dans les mêmes sécrétions. Première classe d’anticorps à être synthétisée lors d’une réaction immunitaire, leur spécificité vis-à-vis des antigènes est faible. Les IgM, comme les IgG, ont un rôle important dans l’opsonisation (processus par lequel certaines substances favorisent la phagocytose) des antigènes particulaires.

2.2.6 Les IgE et IgD Les IgE, dont la structure est proche de celle des IgG, se caractérisent par la capacité à se fixer par le fragment Fc sur les récepteurs des polynucléaires basophiles et des mastocytes, entraînant une réaction de dégranulation à l’origine de la réaction anaphylactique. Les IgD sont en concentration très faible dans le sérum. De par leur structure particulière (un seul pont disulfure entre les chaînes H), elles sont rapidement dégradées dans le sérum par les protéases. Elles sont majoritairement retrouvées fixées à la surface des lymphocytes.

2.3. Fonction anticorps des IgG 2.3.1 Hétérogénéité des anticorps Les Ig, bien qu’ayant une structure de base commune, présentent une diversité telle qu’elles assurent une spécificité de la réponse immunitaire vis-à-vis des antigènes existants. Celle-ci est en général absolue. Isotypie, allotypie et idiotypie forment les trois niveaux d’hétérogénéité des Ig.

2.3.2 Isotypie Les isotypes caractérisent les classes et sous-classes d’Ig et sont portés par les segments C. Les segments CH présentent respectivement les isotypes suivants : γ1, γ2, γ3 et γ4 pour les IgG ; α1 et α2 pour les IgA ; μ pour les IgM ; ε pour les IgE ; δ pour les IgD. Il existe six isotypes pour les chaînes légères λ sur les segments CL. Chaque individu porte l’ensemble des variabilités isotypiques.

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2.3.3 Allotypie Caractérisant les individus au sein d’une même espèce, les déterminants antigéniques de la spécificité allotypique sont portés par les domaines constants des chaînes H ou L. L’allotypie des chaînes lourdes se retrouve sur les chaînes γ des IgG (24 groupes) et sur les chaînes α2 des IgA2. L’allotypie des chaînes L est portée uniquement par les chaînes κ au niveau du domaine C. La grossesse, les transfusions, les traitements par des anticorps peuvent être à l’origine d’immunisations anti-allotypiques.

2.3.4 Idiotypie L’idiotypie caractérise la spécificité anticorps vis-à-vis d’un antigène donné. Les idiotypes sont des déterminants antigéniques portés par les domaines variables des Ig. Ces variations structurales affectent la zone de l’anticorps en contact avec l’antigène encore appelé paratope. Elles peuvent être à l’origine d’immunisations avec production d’anticorps antiidiotypes. Un anticorps anti-idiotype, de par sa complémentarité vis-à-vis du paratope peut empêcher la liaison antigène-anticorps.

2.4. Fonctions effectrices et propriétés biologiques des fragments Fc et Fab des Ig La molécule d’IgG peut être scindée par des enzymes en différents fragments : à l’aide de la papaïne en présence de cystéine, on obtient un fragment Fc (cristallisable en milieu aqueux) et deux fragments Fab (7) (fig. 2).

2.4.1 Propriétés biologiques du fragment Fc des Ig Le fragment Fc permet l’activation cellulaire et du complément par : – la fixation des Ig sur les cellules : macrophages, lymphocytes (IgG1, IgG3, IgM), cellules K, mastocytes (IgE, IgG4) ; – l’opsonisation (marquage d’un antigène particulaire – bactérie, cellule étrangère – avec une partie du complément facilitant la reconnaissance et l’élimination par phagocytose) pour les polynucléaires neutrophiles et les macrophages (IgG1, IgG3, IgA) ; – la fixation du complément par la voie directe pour IgG1, 2 et 3 et IgM. Le fragment Fc porte aussi le caractère sécrétoire des IgA et des IgM et participe à la régulation de la réponse immunitaire humorale (arrêt de la sécrétion des Ac au-delà d’une certaine quantité produite).

2.4.2 Propriétés du fragment Fab Par contact entre le paratope de l’anticorps et l’épitope de l’antigène, il se forme le complexe antigène-anticorps. Cette fixation de l’anticorps à l’antigène a pour fonction : – la neutralisation : c’est la capacité que possède un anticorps de neutraliser l’activité biologique d’un antigène comme l’activité enzymatique, la capacité à infecter une cellule ou la toxicité ;

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– l’agglutination : c’est la capacité d’un anticorps à former des agglutinats visibles avec les antigènes particulaires (ex. : agglutinats d’hématies) ; – la précipitation : c’est la capacité d’un anticorps à former un précipité avec les antigènes solubles.

Papaïne

2 fragments Fab

Fragment Fc

Figure : 2 – Fragments (Fc et Fab) d’une immunoglobuline G digérée par la papaïne.

2.5. Production des anticorps 2.5.1 Anticorps polyclonaux Les anticorps polyclonaux sont produits par immunisation avec un antigène donné d’un animal dans un système allotypique (l’antigène provient d’une espèce différente de l’animal immunisé). Ces anticorps sont ensuite obtenus par prélèvement de sérum ou de liquides d’ascites. Produits par les différents clones de plasmocytes issus de la réaction immunitaire, ils sont donc hétérogènes, dirigés contre différents épitopes de l’antigène considéré. Leur affinité pour l’antigène présente une haute variabilité. Les souris, rats, lapins, cobayes, chèvres, chevaux et moutons sont le plus fréquemment utilisés pour produire des anticorps polyclonaux. Les sérums animaux sont ensuite purifiés pour une utilisation au laboratoire. L’intérêt des anticorps polyclonaux réside dans leur capacité à reconnaître les différentes formes moléculaires des antigènes. 2.5.1.1 Réponse immunitaire humorale

La réaction immunitaire humorale fait intervenir les antigènes et les lymphocytes B. Les lymphocytes B peuvent reconnaître des antigènes natifs comme des protéines solubles, des protéines fixées à des cellules ou à des virus et des polysaccharides, a contrario des lymphocytes T qui reconnaissent des

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antigènes protéiques associés au complexe majeur d’histocompatibilité et présentés par des cellules immunocompétentes. L’épitope de l’antigène natif est reconnu par une immunoglobuline de membrane spécifique du lymphocyte B, appelée BCR. Cette fixation constitue un premier signal qui, renforcé par la production de cytokines ou de molécules d’adhérences par des lymphocytes T appelés « Helper », aboutit à la production par le lymphocyte B d’un isotype d’anticorps. Les lymphocytes B immatures ne produisent que des IgM ou des IgD de surface. Des cytokines permettent la commutation isotypique vers la production d’Ig M, G, A ou E par une recombinaison du gène codant pour le fragment Fc des chaînes lourdes. La spécificité anticorps des domaines variables est conservée. La cinétique de production des anticorps se décompose en quatre phases : après l’injection d’antigène, une phase de latence qui varie de vingt heures à plusieurs semaines, puis une phase de production exponentielle d’anticorps, une phase de plateau où la production d’anticorps égale le catabolisme et enfin une phase de décroissance lors de la suppression de la réponse immunitaire. Un immunsérum destiné à être utilisé comme réactif est caractérisé par son titre, son affinité et sa spécificité. Le titre est généralement défini par la dilution pour laquelle on observe 50 % de liaison de l’antigène marqué dans les conditions du dosage et en l’absence d’antigène stable. Il est exprimé par l’inverse du facteur de dilution. L’affinité est représentée par la mesure de la constante d’association antigène-anticorps (Ka) exprimée en litre/mole (L/mol) (cf. chap. 2). La spécificité d’un immunsérum pour un antigène est sa capacité à reconnaître cet antigène. In vivo, un antigène qui est le plus souvent une mosaïque d’épitopes peut entraîner l’activation de différents clones de lymphocytes B aboutissant à la production de nombreux anticorps différents. De même, un épitope peut être porté par deux antigènes et l’anticorps obtenu par l’immunisation avec un de ces antigènes reconnaîtra l’autre, ce qui est à l’origine des réactions croisées (cf. chap. 2). 2.5.1.2 Protocoles d’immunisation

La production d’anticorps à des concentrations élevées nécessite la répétition des injections de l’antigène à l’animal. Après la deuxième injection, le temps de latence est raccourci, la phase de plateau plus longue et la décroissance plus lente. Il s’en suit une élévation rapide du taux d’anticorps circulants, le pic étant au moins dix fois plus élevé que dans une réaction primaire (fig. 3). Les injections sont réalisées dans le temps selon des protocoles établis par espèce. Des substances adjuvantes, comme l’hydroxyde d’aluminium, l’adjuvant complet de Freund, le BCG, agissant comme activateurs non spécifiques de l’immunité permettent d’augmenter la réponse immunitaire humorale et la concentration sérique en anticorps. Lors de la réponse secondaire, se produit le phénomène de commutation isotypique.

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Immunoanalyse

Taux d’anticorps Réponse secondaire

Réponse primaire

Inoculation

Rappel

Temps

Figure : 3 – Taux d’anticorps au cours d’un protocole d’immunisation.

2.5.2 Anticorps monoclonaux 2.5.2.1 Principe

La production d’anticorps monoclonaux est basée sur la théorie de la sélection clonale où chaque lymphocyte exprime un type unique de récepteur spécifique d’antigène. La liaison de l’antigène à ce récepteur avec une affinité élevée entraîne l’activation du lymphocyte et la production d’une réaction immunitaire. En culture, des cellules effectrices issues d’un lymphocyte activé donné expriment des récepteurs de même activité. S’il s’agit de lymphocytes B, ils exprimeront le même BCR et activés en plasmocytes, ils produiront le même anticorps. Ainsi les anticorps monoclonaux sont des anticorps issus d’une lignée unique de plasmocytes engagés dans une réaction immunitaire vis-à-vis de l’antigène considéré. Ce phénomène se produit in vivo dans certains myélomes où la dégénérescence cancéreuse d’un clone plasmocytaire aboutit à la production massive d’une Ig monoclonale dans le sérum. La culture in vitro de lymphocytes B activés est difficile et la production d’anticorps rapidement limitée. En revanche, les cellules cancéreuses se cultivent indéfiniment. D’où l’idée de Köhler et Milstein de faire fusionner le lymphocyte B secrétant avec une cellule de plasmocytome (8). L’hybride obtenu porte les caractéristiques des deux cellules initiales, la spécificité de produire un anticorps et l’immortalité des cellules cancéreuses, permettant une culture cellulaire aisée avec une forte production monoclonale d’anticorps. 2.5.2.2 Techniques

• Obtention d’hybridomes (fig. 4) L’immunisation d’une souris est réalisée par injection intra-péritonéale d’une préparation d’antigène. Les lymphocytes à hybrider, majoritaires

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parmi les cellules de la rate, sont obtenus par dilacération de celle-ci. Ces cellules présentent une activité hypoxanthine guanine phosphoryle transférase normale (HGPRT+), enzyme de la voie exogène classique de synthèse des nucléotides. Les cellules myélomateuses choisies présentent une mutation au niveau de l’HGPRT (HGPRT–). Pour elles, seule persiste la voie de sauvetage de synthèse des nucléotides qui peut être bloquée par addition dans le milieu d’un inhibiteur, l'aminoptérine. Les cellules HGPRT– ne pourront donc survivre dans un milieu contenant de l’aminoptérine. La fusion s’effectue en présence de polyéthylène glycol (PEG) qui modifie les propriétés de la membrane cellulaire et facilite ainsi la fusion entre cellules. Après fusion, les trois types cellulaires, lymphocytes de rate, cellules myélomateuses et hybridomes issus de la fusion sont cultivés dans un milieu de culture contenant de l’hypoxanthine, de l’aminoptérine et de la thymidine (milieu HAT). Les lymphocytes et les cellules myélomateuses ne peuvent se maintenir durablement en culture, y compris dans ce milieu. Par conséquent, seuls les hybridomes ayant hérité des systèmes enzymatiques parentaux (HGPRT+) issus des lymphocytes et de l’immortalité myélomateuse peuvent se développer. La sélection sur milieu HAT permet d’obtenir, quinze jours après la fusion, une culture ne contenant que des cellules hybrides. • Criblage et clonage Les surnageants de culture sont ensuite prélevés et testés par immunofluorescence, immunohistochimie, par méthode ELISA (Enzyme Linked Immuno Sorbent Assay) ou par radioimmunologie (radioimmunoassay ou RIA) pour déterminer s’il y a production d’anticorps spécifiques. À partir de la culture la plus riche en anticorps, un clonage est réalisé en utilisant la technique des dilutions limites. Celle-ci consiste à effectuer une série de dilutions de manière à obtenir en théorie une cellule par cupule de culture. Après une période de croissance, les clones producteurs d’anticorps sont sélectionnés. L’opération de clonage est ensuite renouvelée afin d’obtenir des clones stables ne sécrétant que l’anticorps spécifique souhaité. • Production d’anticorps La production massive d’anticorps est alors réalisée par culture soit in vitro, soit in vivo en ascite. Dans cette dernière technique, des souris Balb/c subissent une injection intrapéritonéale de 2, 6, 10, 14 tétraméthylpentadécane (Pristan®). Cinq jours après, les cellules du clone sélectionné sont alors injectées dans le péritoine. Au bout de dix jours, les souris développent des tumeurs ascitiques contenant une concentration d’anticorps monoclonaux très supérieure (environ cent fois) à celle du surnageant de la culture d’origine. Les anticorps peuvent être ensuite purifiés par chromatographie d’affinité sur protéine A (protéine A-Sepharose®) ou par chromatographie d’échange d’ions sur DEAE-Trisacryl M®.

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Immunoanalyse

Lymphocytes

Cellules myélomateuses Fusion avec PEG

Milieu HAT

Clonage

Clones sélectionnés

Figure : 4 – Obtention d’anticorps monoclonaux. 2.5.2.3 Caractéristiques des anticorps monoclonaux

Les anticorps monoclonaux sont constitués d’une population moléculaire homogène ayant une mono-spécificité pour un épitope déterminé. Ils peuvent être produits de façon quasi illimitée, ce qui assure une bonne reproductibilité des immunodosages au cours du temps. Leur production a permis également le développement de toutes les techniques immunométriques à deux sites dites « sandwich » largement employées aujourd’hui. Cependant, l’obtention d’anticorps monoclonaux bien adaptés à un dosage particulier (affinité, spécificité) pose de nombreux problèmes techniques qui, le plus souvent, ne peuvent être résolus qu’en milieu industriel.

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Si le principe d’obtention des anticorps monoclonaux n’a pas varié, la production d’anticorps monoclonaux a bénéficié des évolutions scientifiques dans le domaine des biotechnologies et de la génétique : – Les incubateurs cellulaires permettent de se passer de la production in vivo en ascite qui est limitée dans le temps pour chaque animal. Néanmoins leur production reste coûteuse et la fabrication de plantes transgéniques productrices d'anticorps monoclonaux ou « plantibodies » est une solution possible pour obtenir des anticorps en grande quantité. – L’utilisation d’anticorps monoclonaux en thérapeutique humaine a posé le problème de leur origine murine. Une fois injectés aux patients, ces anticorps monoclonaux murins sont rapidement dégradés, entraînant une immunisation du patient et parfois des réactions d’hypersensibilité potentiellement létales. De plus ces anticorps se fixent difficilement sur les membranes des cellules effectrices du système immunitaire humain par leur extrémité constante. C’est une perte de propriété qui peut diminuer l’efficacité thérapeutique de ces anticorps notamment par absence d’induction de l’immunité cellulaire médiée par les anticorps (ADCC). Les biotechnologies ont permis d’ « humaniser » ces anticorps en greffant une partie constante humaine sur les régions variables murines porteuses de la spécificité anticorps ou en utilisant des souris transgéniques contenant une partie de gènes humains codant pour les anticorps. Ces anticorps chimériques « murin-humain » n’entraînent pas, en théorie, d’immunisation allotypique chez l’homme puisque les domaines constants sont d’origine humaine. Une transformation plus importante du capital génétique des souris permet d’aboutir à des anticorps totalement humains qui de fait sont encore mieux tolérés. Ces anticorps humanisés apportent une spécificité supplémentaire qui peut être mise à profit dans les immunodosages.

3. Réaction antigène-anticorps 3.1. Introduction Les complexes immuns sont issus de la combinaison d’un épitope avec un Ac dirigé contre cet épitope. Cette réaction physiologique dans l’organisme peut être mise à profit pour réaliser in vitro un immunodosage. Les bases théoriques de la réaction Ag-Ac permettent de comprendre les principes des immunodosages.

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Immunoanalyse

3.2. Bases physico-chimiques 3.2.1 Réactions primaires (5, 9) 3.2.1.1 La loi d’action de masse-Ka/Kd

La réaction entre un antigène et un anticorps peut être représentée de la manière suivante :

Ag : antigène libre ; Ac : anticorps libre ; Ag-Ac : complexe antigène anticorps ; k1 et k2 : constantes de vitesse respectivement d’association et de dissociation (10, 11).

Dans cette représentation, une molécule d’antigène réagit avec une molécule d’anticorps selon une réaction réversible. Un équilibre est obtenu lorsque la quantité de complexe Ag-Ac formé par unité de temps est égale à la quantité de ce même complexe dissocié par unité de temps. Ainsi à l’équilibre :

d’où :

Les valeurs entre crochets représentent les concentrations molaires des différents composés. Ka est la constante d’affinité (ou d’association) à l’équilibre, appelée aussi constante d’affinité intrinsèque. 1/Ka = Kd : la constante de dissociation à l’équilibre. Ka et Kd sont indépendantes des concentrations de l’antigène et de l’anticorps ; elles ne dépendent que des molécules en présence, du milieu dans lequel se fait la réaction et de la température. Ka s’exprime généralement en litre par mole (L/mol) et Kd en mole par litre (mol/L). 3.2.1.2 Les forces en jeu

La réaction Ag/Ac due à l’interaction entre l’épitope et le paratope fait intervenir des forces de liaisons faibles comme : – les forces électrostatiques entre charges électriques de signes opposés ;

Bases immunologiques de la réaction antigène-anticorps

– les liaisons hydrogènes résultant du partage d’hydrogènes entre des atomes électro-négatifs (oxygène, azote) ; – les forces de Van der Waals, forces intermoléculaires résultant de la polarisation des molécules dans un dipôle ; – les forces hydrophobes qui s’exercent entre les groupes hydrophobes pour exclure les molécules d’eau. Globalement, l’énergie de liaison entre un anticorps et un antigène varie entre 34 et 65 kJ/mol. Ceci élimine la liaison de covalence (entre 210 et 500 kJ/mol). Elle est du même ordre de grandeur que l’énergie d’agitation thermique à 37 ˚C (3,9 kJ/mol), ce qui explique la réversibilité de ces liaisons. La stabilité du complexe Ag-Ac n’est possible que par la mise en jeu simultanée d’un nombre suffisant d’interactions élémentaires. Ces forces augmentent avec la diminution de la distance entre l’Ag et l’Ac. Elles sont donc maximales lorsque la distance est faible du fait d’une bonne complémentarité entre l’Ag et l’Ac. Une complémentarité élevée peut être obtenue suite à des changements conformationnels de l’Ag et de l’Ac lors de leur liaison. La stabilité du complexe est fonction des conditions physico-chimiques comme la température, le pH et la force ionique du milieu qui influencent la thermodynamique de la réaction Ag-Ac et donc la constante d’affinité. Le plus souvent, au moins pour les molécules chargées, l’abaissement du pH diminue l’intensité de la liaison Ag-Ac. De même, l’augmentation de la force ionique entraîne une diminution de l’intensité de la liaison en modifiant les interactions du type ionique entre le paratope et l’épitope. La température aussi joue un rôle à la fois sur la constante d’affinité et sur la vitesse de la réaction Ag-Ac. Les aspects pratiques pour l’établissement des conditions optimales dans lesquelles doivent se dérouler les réactions pour un couple donné Ag-Ac sont décrits dans le Chapitre 2.

3.2.2 Réaction anticorps-macromolécules (liaisons polyvalentes) 3.2.2.1 Affinité - Avidité

Hormis les haptènes monovalents, les Ag présentent souvent plusieurs épitopes (Ag multivalents), répétés ou différents, dont le nombre est parfois inconnu. Par ailleurs, les Ac utilisés sont la plupart du temps des immunoglobulines de type G, qui possèdent deux sites identiques de liaison. Un Ac, même monoclonal, peut ainsi lier deux haptènes monovalents. Il peut alors se former une multitude de complexes, créant des réseaux linéaires ou cycliques. Des modèles mathématiques ont été élaborés pour calculer les concentrations respectives des différents complexes. Les résultats montrent qu’en fait, tous les complexes possibles ne sont pas également formés, et que seuls deux ou trois types prédominent selon les concentrations respectives de l’Ag et de l’Ac mises en présence. Il est donc très difficile en pratique de définir une constante d’affinité (12).

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Immunoanalyse

Toutes ces difficultés liées à la multiplicité des sites de réaction entre l’Ag et l’Ac conduisent à la notion d’avidité, ou mieux, d’affinité fonctionnelle entre l’antigène et l’anticorps. Elle ne correspond pas à la somme arithmétique de l’affinité de chaque site considéré isolément, mais à une valeur plus élevée, liée au fait que les multiples liaisons augmentent la stabilité des complexes. Ainsi l’intérêt des Ac polyclonaux réside dans leur grande avidité pour l’Ag en raison des multiples épitopes qu’ils sont capables de reconnaître (les Ac monoclonaux n’en reconnaissant que deux au maximum pour les IgG). L’avidité se détermine en pratique expérimentalement. 3.2.2.2 Précipités - Agglutinats

Les complexes Ac-haptènes monovalents sont solubles. Les complexes Acmacromolécules peuvent former un précipité dans certaines conditions physico-chimiques. Ces propriétés sont utilisées pour séparer les formes d’Ag et Ac libres et liées (cf. chap. 2). Quand l’Ag est particulaire (cellules, bactéries, particules de latex, etc.), les complexes forment des agglutinats.

3.3. Détermination de la spécificité de la réaction Ag-Ac 3.3.1 Détermination du Kd par la méthode de Scatchard (13) 3.3.1.1 Description de la méthode

Les relations suivantes supposent qu’une molécule d’Ag réagit avec une molécule d’Ac. Si la concentration en antigène libre [Ag] est appelée F et la concentration en complexe [Ag-Ac] est appelée B, l’équation suivante est obtenue : Ka =

B F [Ac]

[Ac] : concentration en Ac non liés est égale à la concentration totale des Ac mis dans la réaction [Ac]T diminuée de la concentration en anticorps liés sous la forme de complexe antigène-anticorps. Ainsi : [Ac]T = [Ac] + [Ag-Ac] [Ac] = [Ac]T – [Ag-Ac] [Ac] = [Ac]T – B Cette relation peut encore s’écrire : B = K a ([Ac]T – B) F Cette expression montre qu’il existe une relation linéaire entre le rapport B/F et la concentration en Ag-Ac. C’est la représentation de Scatchard (fig. 5).

Bases immunologiques de la réaction antigène-anticorps

B/F Ka[Ac]T

-Ka

[Ac]T

B

Figure : 5 – Représentation de Scatchard. Si les sites de liaison sont identiques, c’est-à-dire si la constante d’affinité intrinsèque est la même pour chaque site, et si la liaison de l’haptène à un site ne modifie pas la liaison du site voisin (absence de coopérativité), les équations précédentes restent valables. Il suffit de remplacer la valeur de [Ac]T par deux [Ac]T pour les IgG ou, d’une manière générale, par n [Ac]T pour des immunoglobulines possédant n sites (IgA, IgM). Nous obtenons ainsi : B = − K a B + nK a [Ac]T F 3.3.1.2 Exemple de détermination de la constante d’affinité par la méthode de Scatchard

Le système utilisé est le suivant : – anticorps : anticorps monoclonal anti-trypsine (IgG de souris) ; – antigène stable : trypsine humaine purifiée ; – traceur : trypsine humaine marquée à l’iode 125 ; – séparation des complexes Ag-Ac : anticorps anti-souris en présence de polyéthylène glycol (PEG) (cf. chap. 2). Une réaction de compétition est réalisée entre le traceur et l’antigène stable en présence de concentrations croissantes, connues, de ce dernier. Pour chaque concentration, après séparation des complexes, on mesure l’activité B* du complexe traceur-anticorps. Pour déterminer la constante d’affinité Ka de l’anticorps, la courbe expérimentale B/F = f (B) est tracée sachant que : B=

([Ag]T ( B* – LNS)) T

B et F représentent la fraction liée et la fraction libre de l’antigène stable, pour chaque concentration.

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Immunoanalyse

1. Calcul de B B=

([Ag]T ( B * ⋅ LNS)) T

avec

T : activité totale du traceur introduit dans la réaction ; LNS : liaison non spécifique (cf. chap. 2) ; [Ag]T = concentration molaire de l’antigène stable présent dans la réaction. [Ag]T est la somme de la concentration de l’antigène mis en jeu [Ag] et de celle de l’antigène apporté par le traceur [Ag]t. Cette dernière, exprimée en mole par litre, se calcule à partir de l’activité spécifique du traceur (AS) exprimée en becquerel par mole, de l’activité du traceur introduite dans le milieu réactionnel (T), exprimée en impulsions par seconde, du volume réactionnel (V), exprimé en litre, et du rendement du compteur (R) selon la formule : [Ag]t =

T R ⋅ AS ⋅ V

2. Calcul de B/F Il peut se faire de deux manières : – à partir des mesures radioactives : B* activité du complexe – LNS = F* T – (B* – LNS) – à partir de la relation : B B = F [Ag]t – B 3. Données expérimentales et résultats activité spécifique du traceur AS = 6 ⋅ 1015 Bq/mol ; rendement du compteur R = 0,80 ; activité totale T = 88 742 impulsions/min (ipm) ; liaison non spécifique LNS = 2 964 impulsions/min ; volume réactionnel V = 300 μL. [Ag]t =

88 742 / 60 = 1, 03 ⋅ 10−9 mol/L ≈ 1 nmol/L 0, 80 × 6 ⋅ 1015 × 300 ⋅ 10−6

Les résultats de la manipulation (B*) et ceux des calculs effectués sont rassemblés dans le tableau ci-dessous.

Bases immunologiques de la réaction antigène-anticorps

étalon nmol/L

Ag*

Ag T (a)

B*

B*-NSB/T B (c=a.b) (b)

B/F (d=c/(a-c))

0

1

1

38925

0,405

0,41

0,695

7,3

1

8,3

30590

0,311

2,58

0,451

18,3

1

19,3

20207

0,194

3,74

0,241

36,7

1

37,7

13762

0,122

4,59

0,139

195

1

196

5403

0,027

5,39

0,028

289

1

290,9

4638

0,019

5,49

0,019

T = 88742 NSB = 2964 B* – NSB/T = % de fixation

La figure 6 montre la représentation graphique et les valeurs de la constante d’affinité et de la concentration totale en sites anticorps.

Scatchard B/F = -0,13B + 0,76 R2 = 0,99 Ka= 0,13L/nmol n[Ac]T= 0,76/0,13= 5,8 nmol/L

B/F

0,8 0,7 0,6 0,5 0,4 0,3 0,2 0,1 0 0

1

2

3 B nmol/L

4

5

6

Figure : 6 – Exemple de détermination de la constante d’affinité par la méthode de Scatchard.

3.3.2 Calcul du pourcentage de réaction croisée La spécificité d’un Ac pour un Ag n’est pas absolue et une réaction Ag-Ac peut se produire avec des molécules de structures voisines. Il s’agit alors de réaction croisée définie comme étant la propriété d'un anticorps

35

36

Immunoanalyse

spécifique d'un antigène donné de reconnaître également un autre antigène (les deux antigènes partagent en fait des épitopes communs, il y a homologie entre les Ag). Le pourcentage de réactivité croisée peut se calculer comme le rapport de la concentration de l’Ag sur la concentration de la molécule soumise à la réaction croisée vis-à-vis d’une quantité d’Ac fixe et donnant la même quantité de complexe Ag-Ac. C’est encore le rapport (en pourcentage) des concentrations de l’Ag et de la molécule interférente produisant chacune un déplacement de 50 % du traceur lié à l’immunsérum. Exemple : dosage du cortisol par RIA Calcul de la réactivité croisée (%) = (concentration 50 % en cortisol) / (concentration 50 % en stéroïde) × 100 Avec concentration 50 % = concentration de l’analyte dans le calibrateur zéro entraînant 50 % de liaison. Réaction croisée du cortisol = 100 % Soit : [cortisol] 50 % = 60 nmol/L • Si réaction croisée de la corticostérone = 10 % alors [corticostérone] 50 % = 600 nmol/L • Si réaction croisée de la cortisone = 2 % alors [cortisone] 50 % = 3 000 nmol/L. • Si réaction croisée de la prednisone est < 0,1 % alors [prednisone] 50 % > 60 000 nmol/L.

Références 1.

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Chapitre 2

Principes et techniques en immunoanalyse Auteurs : Anne Charrié, Karim Chikh, Dany Alcaraz-Galvain

1. Principes généraux Parmi l’ensemble des méthodes de dosage mettant en jeu la réaction immunologique antigène-anticorps, seules seront décrites ici celles qui font appel à un marqueur. Dans le cadre des immunodosages, un marqueur est une entité (atome, molécule, ion…) liée chimiquement à une molécule d’antigène ou d’anticorps et délivrant un signal (direct ou indirect) quantitativement mesurable. La molécule sur laquelle est lié le marqueur peut être un antigène ou un anticorps et est dénommée traceur dans ce chapitre. La molécule dont la concentration est mesurée par l’immunodosage peut être un antigène ou un anticorps. Nous les dénommerons respectivement antigène « analyte » et anticorps « analyte ». Au cours de l’immunodosage, le traceur et la molécule dosée (antigène ou anticorps « analyte ») peuvent se retrouver sous deux formes : libre et liée. La forme liée, contrairement à la forme libre, correspond à la fraction engagée dans un complexe antigèneanticorps. Les méthodes d’immunoanalyse regroupent selon le marqueur (radioélément, enzyme, luminophore) les méthodes radioimmunologiques, enzymoimmunologiques et luminoimmunologiques. Elles permettent de doser des antigènes et des anticorps. De nombreuses variantes méthodologiques existent (1), dont certaines sont peu employées ; elles peuvent toutes être classées selon les proportions relatives d’anticorps et d’antigène présents dans la réaction. – Pour le dosage d’antigènes, les méthodes peuvent être classées en méthodes dites « en défaut d’anticorps » ou méthodes par compétition dans lesquelles, le plus souvent, le marqueur est porté par un antigène, et en méthodes dites « en excès d’anticorps » ou immunométriques à deux sites ou méthodes « sandwich ».

40

Immunoanalyse

– Pour le dosage des anticorps, les méthodes peuvent être classées en méthodes dites « en défaut d’antigène » (ou méthodes par compétition) et en méthodes en « excès d’antigène ». Les méthodes d’immunoanalyse peuvent aussi être classées en méthodes nécessitant la séparation du traceur lié et du traceur libre avant l’étape de détection (méthodes en phase hétérogène) et en méthodes ne nécessitant pas cette étape de séparation (méthodes en phase homogène). Les principes généraux des méthodes de dosage d’antigènes et d’anticorps sont exposés ci-après.

1.1. Dosage d’antigènes 1.1.1 Méthodes en défaut d’anticorps (2, 3, 4) 1.1.1.1 Méthodes en phase hétérogène

1.1.1.1.1 Méthodes avec antigène marqué Lorsque sont mis en présence : – un antigène (Ag) présent dans l’échantillon à analyser (antigène « analyte »), – ce même antigène préalablement « marqué » (Ag*) (traceur), – un anticorps (Ac) dirigé contre cet antigène. Si la concentration en anticorps est inférieure à la concentration totale en antigène marqué, une compétition vis-à-vis des sites anticorps a lieu, avec formation simultanée des complexes antigène « analyte »-anticorps (Ag-Ac) et antigène marqué-anticorps (Ag*-Ac), selon les deux réactions suivantes :

Ag + Ac

Ag-Ac

+ Ag* Ag* - Ac En maintenant fixe la concentration en anticorps et en antigène marqués, l’augmentation de la concentration en antigène « analyte » dans l’échantillon biologique analysé entraîne l’augmentation de la concentration en complexe antigène « analyte »-anticorps, au détriment de la formation du complexe antigène marqué-anticorps (fig. 1).

Principes et techniques en immunoanalyse

B* = 6 F* 6

(1)

B* = B = 4 F* F 8

(2)

B* B = 3 = F* F 9

(3)

Légende Ag marqué Ag analyte Sites anticorps

B* : concentration de l’antigène marqué lié à l’anticorps F* : concentration de l’antigène marqué libre B : concentration de l’antigène « analyte » lié à l’anticorps F : concentration de l’antigène « analyte » libre

Figure : 1 – Représentation schématique de la compétition entre l’antigène et l’antigène marqué vis-à-vis des sites anticorps : (1) en l’absence d’antigène à doser, (2) et (3) en présence de quantités croissantes d’antigène à doser. Dans le cadre des immunodosages en phase hétérogène, une méthode ne modifiant pas l’équilibre de la réaction doit être employée lors de l’étape de séparation des formes libres et liées (cf. § 2.3.). Le signal délivré par le marqueur permettra de déterminer facilement la concentration de l’antigène marqué libre (F*) et du complexe antigène marqué-anticorps (B*), pour chaque concentration en antigène « analyte ». Ces concentrations sont, à l’équilibre, dans le même rapport que les concentrations des fractions libre (F) et liée (B) de l’antigène analyte. Pour toutes les concentrations en antigène « analyte », la relation suivante peut être vérifiée : B/F = B*/F* (fig. 1). La concentration en antigène « analyte » de solutions inconnues peut être déterminée en établissant une courbe d’étalonnage à l’aide de solutions étalons de concentrations connues (fig. 2). Il existe différentes méthodes de calcul permettant de tracer la courbe d’étalonnage.

41

42

Immunoanalyse

signal

(fraction liée)

[Ag]

La valeur portée en ordonnée est l’intensité du signal (absorbance, nombre d’impulsions, etc.) correspondant à la concentration d’antigène marqué libre (F*) ou lié (B*) ou la valeur des rapports B*/F*, B*/B0*, etc. (B0* correspondant à la concentration du complexe Ag*-Ac en l’absence d’antigène analyte). La courbe est obtenue par lissage à partir des points expérimentaux de la gamme d’étalonnage.

Figure : 2 – Méthodes par compétition en phase hétérogène : représentation schématique d’une courbe d’étalonnage. Différentes variantes méthodologiques, basées sur ce principe, ont été proposées dans le but principal d’améliorer la précision et la limite de détection (cf. § 2.2.). 1.1.1.1.2 Méthodes avec anticorps marqué Dans ces méthodes, le traceur utilisé est un anticorps marqué. La figure 3 en présente le principe.

Lavages

Antigène lié Antigène à la phase présent dans solide l’échantillon

Ac marqué = traceur

Fraction liée du traceur

Fraction libre du traceur

Fraction liée du traceur

Figure : 3 – Méthodes par compétition avec anticorps marqué. L’antigène « analyte » (échantillon ou étalon) et l’antigène fixé sur phase solide entrent en compétition vis-à-vis de l’anticorps marqué. La quantité d’anticorps marqué liée à la phase solide est inversement proportionnelle à la quantité d’antigène « analyte ».

Principes et techniques en immunoanalyse

1.1.1.2 Méthodes en phase homogène

Dans le cadre des immunodosages en phase homogène, il n’existe pas d’étape de séparation. Celle-ci est inutile car la réaction antigène-anticorps entraîne une modulation du signal. Ainsi, le signal mesuré proviendra soit seulement de la fraction libre du traceur (principe des techniques EMIT ou Enzyme Multiplied ImmunoAssay) (fig. 4a), soit seulement de la fraction liée (fig. 4b).

Distance importante entre l’Ac marqué et l’antigène marqué : pas d’interaction entre les deux marqueurs, pas de modulation de signal

Distance faible entre l’Ac marqué et l’antigène marqué : interaction entre les deux marqueurs permettant une modulation de signal

(a)

Légende

(b)

Ag analyte Ag marqué par un fluorophore (F) ou un radioélément (R) Ac marqué par un fluorophore (F) ou un composé radioluminescent (RL)

Figure : 4 – Méthodes par compétition en phase homogène. Ces méthodes utilisent en très grande majorité des marqueurs fluorescents. Le principe de modulation du signal fluorescent est développé dans la partie consacrée aux marqueurs luminescents. Il n’existe qu’une seule technique avec marqueur radioactif en phase homogène : la technique SPA (Scintillation Proximity Assay) (cf. § 3.1.) (5). Le principe est le suivant : l’antigène radiomarqué en compétition avec l’antigène « analyte » se lie à l’anticorps fixé à des fluomicrosphères ou des billes de silicate d’ytrium. Cette liaison permet un transfert d’électrons de l’antigène marqué fixé au composé scintillant inclus dans les billes ou microsphères, qui est alors activé et émet une énergie lumineuse radiative. Seules les molécules d’antigène radiomarquées qui sont liées à l’anticorps sont à proximité suffisante des fluomicrosphères pour permettre le transfert d’électrons. Les électrons émis par l’antigène radiomarqué non fixé dissipent leur énergie dans le milieu et ne sont pas détectés.

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Immunoanalyse

1.1.1.3 Avantages et inconvénients des méthodes en défaut d’anticorps

L’avantage principal des méthodes par compétition est qu’elles peuvent s’appliquer à tous les antigènes, quelle que soit leur taille. C’est, en particulier, la seule méthode utilisable pour doser les haptènes ne possédant qu’un seul épitope. Elle nécessite cependant un certain nombre de conditions : l’utilisation d’un anticorps possédant une constante d’affinité élevée pour l’antigène et d’un traceur d’activité spécifique élevée permet d’obtenir une limite de détection faible ; la présence d’un nombre constant de sites anticorps dans le milieu réactionnel permet d’obtenir une bonne précision. Cette dernière condition est critique et liée au fait que la concentration d’anticorps est très en défaut par rapport aux concentrations du traceur et de l’antigène « analyte ». Un seul épitope étant nécessaire à l’antigène pour être reconnu par l’anticorps, des fragments ou des métabolites de l’antigène, porteurs de l’épitope, peuvent être reconnus comme la molécule mère. Ceci conduit alors à des résultats par excès. Ce manque de spécificité est évité dans les méthodes en excès d’anticorps (de type « sandwich »). Les méthodes de dosage d’antigènes en défaut d’anticorps avec anticorps marqué en concentration limitée par rapport à l’antigène permettent d’éviter d’éventuelles modifications de la configuration de l’antigène lors du marquage ; ces modifications pourraient réduire ou supprimer la reconnaissance de l’antigène par l’anticorps. Par contre, la présence d’anticorps anti-analyte peut interférer dans le dosage et induire des valeurs d’antigènes faussement élevées, même si ces méthodes à anticorps marqués sont moins sensibles que certaines méthodes par antigène marqué. Ce type d’interférences est développé dans le chapitre 3.

1.1.2 Méthodes en excès d’anticorps (1, 6, 7, 8, 9) 1.1.2.1 Méthodes en phase hétérogène

Ces méthodes, développées depuis une quarantaine d’années, ont pris une véritable extension depuis l’utilisation des anticorps monoclonaux, au point de remplacer en grande partie les méthodes par compétition dans le cadre des dosages de molécules de masse molaire élevée. Les méthodes en excès d’anticorps sont caractérisées par la présence d’un excès d’anticorps et par l’utilisation d’un deuxième anticorps marqué comme révélateur de la réaction entre l’antigène et le premier anticorps. Le principe de ces méthodes est présenté ci-après (fig. 5).

Principes et techniques en immunoanalyse

Séparation

Légende Ac de capture Ag Ac marqué Phase solide

Figure : 5 – Méthodes en excès d’anticorps (méthodes immunométriques à deux sites ou technique « sandwich ») en phase hétérogène. Dans le cadre de ces immunodosages en phase hétérogène, le premier anticorps (anticorps liant ou anticorps de capture) est fixé sur un support solide (tubes, billes, particules diverses) (cf. § 2.3.2.4.). La quantité fixée doit être telle que le nombre de sites de liaison disponibles soit supérieur au nombre de molécules d’antigènes présentes dans les solutions étalons ou de concentrations inconnues. L’antigène va ainsi se fixer sur les sites spécifiques. L’addition de l’anticorps marqué (ou anticorps de détection ou de révélation), soit simultanément (méthodes en un temps), soit après une première incubation et un lavage (méthodes en deux temps), est suivie de sa fixation sur l’antigène, préalablement fixé au premier anticorps. L’antigène se trouve ainsi littéralement pris en « sandwich » entre les deux anticorps, d’où le nom souvent attribué à ce type de méthode. Pour ces méthodes en phase hétérogène, un simple lavage permet de séparer les complexes anticorps-antigène-anticorps marqués des anticorps marqués libres en excès. De manière générale, pour que l’anticorps marqué puisse se lier à l’antigène déjà engagé dans une réaction avec le premier anticorps, il est nécessaire que les deux anticorps réagissent contre des épitopes différents (cependant, dans le cas particulier où la molécule antigène porte son épitope de manière répétitive, un même anticorps peut être utilisé comme anticorps de capture et comme anticorps marqué). Les anticorps de capture et les anticorps marqués utilisés sont des anticorps multivalents ou des anticorps spécifiques différents. C’est cette dernière solution qui est généralement choisie et qui explique l’intérêt des anticorps monoclonaux, spécifiques d’un seul épitope. La combinaison anticorps monoclonal liant-anticorps polyclonal marqué, de

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Immunoanalyse

même que l’association de plusieurs anticorps monoclonaux peut être également utilisée. Les courbes obtenues en portant en ordonnée l’intensité du signal correspondant aux complexes marqués [Ac-Ag-Ac*] et en abscisse la concentration en antigène sont des courbes croissantes (fig. 6), à l’inverse de celles obtenues avec les méthodes par compétition dans lesquelles sont mesurés les signaux émis par la fraction liée du traceur.

signal (fraction liée)

[Ag]

Figure : 6 – Méthodes en excès d’anticorps de type « sandwich » : représentation schématique d’une courbe d’étalonnage. 1.1.2.2 Méthodes en phase homogène

Pour les immunodosages en phase homogène, les deux anticorps participent tous les deux à la détection. Le principe de ces méthodes est présenté ci-après (fig. 7).

Principes et techniques en immunoanalyse

Distance faible entre les deux Ac marqués : interaction entre les deux marqueurs permettant une modulation du signal

Distance importante entre les deux Ac marqués : pas d’interaction entre les deux marqueurs, pas de modulation du signal

Légende Ag analyte 1er Ac marqué 2ème Ac marqué

Figure : 7 – Méthodes en excès d’anticorps en phase homogène. 1.1.2.3 Avantages et inconvénients des méthodes en excès d’anticorps

Les avantages de ces méthodes sont liés à la fois à l’utilisation des anticorps monoclonaux et au principe même de la méthode. L’utilisation de deux anticorps dirigés contre deux épitopes différents augmente la spécificité du dosage. Une molécule, pour être « confondue » avec l’antigène doit posséder ces deux mêmes épitopes. Cette spécificité accrue permet, en choisissant bien les épitopes reconnus, de distinguer parfaitement des macromolécules présentant une forte homologie, telles que les hormones hypophysaires thyréostimulante (TSH), LH, FSH et l’hCG. La limite de détection (cf. chap. 4), obtenue avec les méthodes en excès d’anticorps est plus basse que celle obtenue avec des méthodes par compétition. • Au moins trois raisons l’expliquent : – 1re raison : dans une méthode en excès d’anticorps, toute molécule d’antigène mise en présence de l’anticorps de capture est susceptible d’être captée par cet anticorps. Dans une méthode par compétition, sa probabilité d’entraîner le déplacement d’une molécule de traceur est faible (fig. 1).

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Immunoanalyse

La détection et la mesure d’un signal s’ajoutant à un nombre faible de signaux (bruit) sont plus faciles que la détection de la diminution d’un signal dans un ensemble élevé de signaux. Or, en immunométrie, en l’absence d’antigène, il n’y a aucun complexe [Ac-Ag-Ac*]. Les signaux dus à la présence de marqueur sont donc théoriquement inexistants. Un nombre restreint de molécules d’antigènes provoque la formation de complexes [Ac-Ag-Ac*], se traduisant par l’apparition de signaux qu’il est facile de détecter et de mesurer. À l’inverse, dans les méthodes par compétition, en l’absence d’antigène, un nombre élevé de signaux émis par les complexes [Ag-Ac*] est mesuré. L’addition d’un nombre faible de molécules d’antigène provoque une diminution faible du nombre des complexes [Ag-Ac*], donc des signaux émis, qu’il est alors difficile de distinguer. À titre d’exemple, la figure suivante (fig. 8) montre des valeurs obtenues pour la mesure de la TSH par une méthode par compétition et par une méthode immunoradiométrique. impulsions / min (ipm)

(1)

104

variation = 380 ipm / mUI / L

5.103

(2)

0

0,5

variation = 1885 ipm / mUI / L

1

mUI / L

Figure : 8 – Exemples de courbes d’étalonnage pour des valeurs , 1 mU/L) : faibles de TSH (, (1) pour la méthode par compétition, (2) pour la méthode radioimmunométrique. Cependant la sensibilité d’un dosage n’est pas liée qu’à la seule pente de la courbe d’étalonnage et l’erreur sur la mesure du signal. La variabilité totale est la somme de la variabilité de « la réaction antigène-anticorps », de la variabilité de l’émission du signal et de la variabilité de mesure de ce signal (cf. chap. 4) (10). – 2e raison : l’utilisation d’anticorps marqués permet d’obtenir des activités spécifiques plus élevées et donc d’introduire une quantité

Principes et techniques en immunoanalyse

plus importante de marqueur dans la réaction, augmentant ainsi la précision des mesures. – 3e raison : un dernier avantage des méthodes immunométriques est la possibilité de réaliser des gammes de concentrations mesurables plus étendues. Il suffit, au moins en théorie, d’augmenter la concentration des anticorps pour augmenter la quantité d’antigène susceptible d’être mesurée. • Cependant il existe plusieurs inconvénients : – La nécessité pour l’antigène de posséder deux épitopes conduit à l’impossibilité d’appliquer les méthodes immunométriques au dosage de molécules de très petite taille comme les haptènes. Les dosages des stéroïdes, des hormones thyroïdiennes, des médicaments sont donc impossibles avec ces méthodes (il faut une masse molaire de l’analyte au moins supérieure à 3 000 g/mol). – Un deuxième inconvénient important est l’existence d’un phénomène appelé « effet crochet » ou « effet cloche » qui peut apparaître pour les concentrations élevées en antigène (cf. chap. 3). – Des interférences restent possibles (cf. chap. 3) : molécules interférentes (au moins un épitope semblable à l’antigène), auto-anticorps, anticorps hétérophiles (11).

1.2. Dosages d’anticorps 1.2.1 Méthodes en défaut d’antigène 1.2.1.1 Méthodes en phase hétérogène

Lorsque sont mis en présence un anticorps présent dans l’échantillon à analyser (Ac « analyte » ou Aca), un anticorps dirigé contre le même épitope que l’anticorps « analyte » (Ac « compétiteur » ou Acc) et un antigène portant l’épitope reconnu par les anticorps précédemment décrits, si la concentration en antigène est inférieure aux concentrations en anticorps « analyte » et « compétiteur », une compétition a lieu entre les deux anticorps pour la fixation sur l’épitope contre lequel ils sont dirigés : Aca + Ag

Aca-Ag +

Acc Acc-Ag En maintenant fixe la concentration en anticorps « compétiteur » et en antigène, l’augmentation de la concentration en anticorps dans l’échantillon biologique analysé entraîne l’augmentation de la concentration en complexe antigène-anticorps « analyte », au détriment de la formation du complexe antigène-anticorps « compétiteur » (fig. 9).

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Immunoanalyse

(1)

B* = 6 F* 6

(2)

B* = B = 4 F* F 8

Légende Ac analyte Ac compétiteur Sites antigéniques

(3)

B* B = 3 = F* F 9

B* : concentration de l’anticorps « compétiteur » lié à l’antigène F* : concentration de l’anticorps « compétiteur » libre B : concentration de l’anticorps « analyte » lié à l’antigène F : concentration de l’anticorps « analyte » libre

Figure : 9 – Représentation schématique de la compétition entre l’anticorps « analyte » et l’anticorps « compétiteur » vis-à-vis des sites antigéniques : (1) en l’absence d’anticorps « analyte », (2) et (3) en présence de quantités croissantes d’anticorps « analyte ». Dans les méthodes de dosage d’anticorps en défaut d’antigène et en phase hétérogène, le traceur peut être soit l’anticorps compétiteur (l’antigène sera utilisé comme réactif de capture) (fig. 10), soit l’antigène (l’anticorps « compétiteur » sera utilisé comme réactif de capture) (fig. 11a et 11b). Le marquage de l’antigène peut être réalisé soit directement, soit indirectement par liaison à un anticorps marqué reconnaissant un épitope différent de celui reconnu par les anticorps « analyte » et « compétiteur ». L’avantage du marquage indirect réside dans l’absence de modification de l’immunoréactivité de l’antigène.

Principes et techniques en immunoanalyse

Séparation

Légende Ac compétiteur marqué = traceur Ac analyte Ag fixé sur phase solide

Figure : 10 – Méthode de dosage d’anticorps en défaut d’antigène et en phase hétérogène utilisant comme traceur l’anticorps compétiteur.

Séparation

(a) Séparation

(b)

Légende Ac « compétiteur » fixé sur phase solide Ac « analyte » Ag marqué = traceur (a) Ag lié à un Ac marqué = traceur (b)

Figure : 11 – Méthodes de dosage d’anticorps en défaut d’antigène et en phase hétérogène utilisant comme traceur l’antigène marqué directement (a) ou indirectement (b).

51

52

Immunoanalyse

1.2.1.2 Méthodes en phase homogène

Dans les méthodes en phase homogène, une modulation du signal par la réaction antigène-anticorps permet de détecter seulement les complexes anticorps « compétiteur » marqué-antigène-2e anticorps marqué. Les concentrations en anticorps analyte de solutions inconnues seront déterminées en établissant une courbe d’étalonnage à l’aide de solutions étalon, selon le même principe que pour le dosage d’antigènes. 1.2.1.3 Avantages et inconvénients des méthodes en défaut d’antigène

Les méthodes de dosage d’anticorps par compétition ont l’avantage de pouvoir être appliquées en phase homogène, contrairement aux méthodes en excès d’antigène. Les conditions à respecter sont similaires à celles du dosage des antigènes. L’inconvénient de ces méthodes est leur manque de spécificité quant à la classe de l’anticorps « analyte ». Effectivement, dans ces méthodes, seule la liaison de l’anticorps à l’antigène cible est testée. Ce manque de spécificité peut être problématique lorsque deux classes d’anticorps dirigés contre le même épitope sont retrouvées dans l’échantillon biologique. Dans l’allergie, il est fréquent de retrouver à la fois des IgE (analyte) et des IgG dirigés contre la même cible. En infectiologie, par exemple au cours des hépatites virales, il est intéressant de distinguer les IgM (infections aiguës) des IgG (infections chroniques).

1.2.2 Méthodes en excès d’antigène 1.2.2.1 Méthodes en phase hétérogène

Deux types de méthodes sont utilisés : • ELISA indirecte (Enzyme Linked Immuno Sorbent Assay) (cf. § 3.2.3.2.) L’antigène en excès est fixé sur la matrice solide et sera utilisé comme réactif de capture. Les anticorps « analyte » liés à l’antigène seront détectés par un anticorps marqué spécifique de la classe de l’anticorps « analyte » (exemple : anticorps anti-IgG humains) (fig.12).

Séparation

Légende Ac « analyte » Ac marqué dirigé contre la classe de l’anticorps analyte Ag fixé sur phase solide

Figure : 12 – Méthode de dosage d’anticorps en excès d’antigène par ELISA indirecte.

Principes et techniques en immunoanalyse

• Immunocapture Un anticorps dirigé contre la classe de l’anticorps « analyte » est utilisé comme réactif de capture. La détection de l’anticorps « analyte » capturé se fera soit directement par liaison à un antigène marqué, soit indirectement par liaison à un antigène non marqué, qui sera secondairement reconnu par un anticorps marqué (fig.13).

Séparation

Légende Ac analyte Ag marqué Ac dirigé contre la classe de l’anticorps analyte et fixé sur phase solide

Figure : 13 – Méthode de dosage d’anticorps en excès d’antigène par immunocapture. 1.2.2.2 Avantages et inconvénients des méthodes en excès d’antigène

L’avantage de ces méthodes est d’être spécifique de la classe de l’anticorps « analyte » (utilisation d’un anticorps spécifique de classe). Ceci est particulièrement important quand deux anticorps de classes différentes et dirigés contre le même épitope sont présents dans l’échantillon biologique. Le seul inconvénient de ces méthodes est qu’elles ne sont pas applicables en phase homogène.

2. Conditions expérimentales À chaque étape d’un immunodosage, les conditions de réalisation doivent être particulièrement étudiées et suivies, depuis la collection des échantillons jusqu’à la détection du signal permettant le calcul de la concentration de l’analyte à doser. Ce sous-chapitre a pour but de rappeler les points clés de la mise en œuvre de la réaction immunologique et de mettre en évidence les caractéristiques essentielles des réactifs (12, 13). Il permet également de montrer l’évolution du développement des immunodosages. Les dosages de « première génération » étaient des dosages par compétition utilisant des antigènes radiomarqués. La fabrication des anticorps monoclonaux et la découverte de nouveaux marqueurs ont permis de développer des dosages « sandwich », dits de « deuxième génération », utilisant éventuellement des marqueurs non radioactifs possédant des activités spécifiques élevées. Enfin, la « troisième génération » constituée par des

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microméthodes ultrasensibles utilise des supports de type biopuces (chips), microbilles permettant aussi la mesure simultanée de plusieurs analytes dans un faible volume. Ces méthodes sont disponibles pour certains paramètres (cytokines, auto-anticorps, marqueurs tumoraux, hormones...) (10).

2.1. L’échantillon biologique L’échantillon biologique peut être de différentes natures : sang, urine, salive, liquides divers (céphalorachidien, bronchoalvéolaire, d’ascite, de kystes, de ponction de ganglion…).

2.1.1 Type de prélèvement Différents types de tubes sont utilisés pour les prélèvements sanguins selon que le dosage est réalisé sur sérum, plasma ou sang total. Tous ces prélèvements doivent être réalisés dans des conditions optimales et le choix du tube de prélèvement doit être adapté au paramètre à doser. Le non-respect des conditions de prélèvement est une non-conformité qui peut modifier le résultat du dosage (cf. chap. 3). Certains dosages sont réalisés sur sang total (tacrolimus et ciclosporine, par exemple), d’autres analyses sont réalisées sur taches de sang déposées sur du papier buvard, dans le cadre du dépistage néonatal.

2.1.2 Formes circulantes de l’analyte La molécule à doser peut se trouver sous différentes formes au sein de l’échantillon : sous forme liée à des protéines vectrices ou à des immunoglobulines, ou sous forme libre conjuguée (sulfoconjuguée, glycuroconjuguée…) ou non. Quand une molécule est présente sous forme libre et sous forme liée, l’objectif est de doser soit la forme totale (libre + liée) soit la forme libre uniquement. Pour doser la forme totale d’une molécule, il existe plusieurs possibilités : • L’extraction par solvant organique peut être utilisée : elle permet de dénaturer les protéines, libérer la molécule liée qui se retrouve entièrement sous forme libre. Ce type de technique est encore réalisé pour le dosage de nombreux stéroïdes. • La libération de l’analyte lié peut être faite en utilisant des agents compétiteurs tels que : – l’ANS (8 analino-1 naphtalène sulfonate de sodium) qui interagit au niveau du site de liaison de la TBG (Thyroxine Binding Globulin) visà-vis des hormones thyroïdiennes T4 et T3 (dosages des hormones thyroïdiennes totales) ; – l’IGF II qui permet la dissociation de la liaison IGF-I–protéines de transport (dosage de l’IGF-I), etc.

Principes et techniques en immunoanalyse

• La dissociation des complexes antigène-anticorps par passage en milieu acide lorsque la molécule est liée à des immunoglobulines, par exemple dans le cas de l’insuline liée à des auto-anticorps (cf. chap. 3). Pour doser uniquement la forme libre, il existe plusieurs types de méthodes permettant de ne pas déplacer l’équilibre « analyte lié-analyte libre » : • La séparation chromatographique préalable : c’est le cas de méthodes utilisant une séparation des formes libres et liées par chromatographie sur colonne (de type Sephadex LH20) dans le cadre du dosage des formes libres des hormones thyroïdiennes (14). • Le choix d’un anticorps possédant une constante d’affinité adaptée, c’està-dire peu différente de celles des protéines vectrices. Dans le cas où la forme libre de la molécule à doser est composée de formes conjuguées et non conjuguées, une extraction de la forme non conjuguée est nécessaire pour s’affranchir des formes conjuguées. C’est le cas, par exemple de l’œstradiol pour lequel il existe des réactions croisées dues à des métabolites sulfatées ou glycuronidées qui peuvent être en concentrations très élevées. Un calcul de rendement d’extraction doit être alors effectué. Il existe quelques cas particuliers, par exemple celui de la testostérone biodisponible. Elle correspond à l’ensemble testostérone libre et testostérone liée à l’albumine. La testostérone est aussi liée à la SHBG. Pour pouvoir doser la testostérone biodisponible, il faut préalablement éliminer par précipitation la testostérone liée à la SHBG, à l’aide d’une solution saturée de sulfate d’ammonium. Toutes les étapes de séparation, extraction, dissociation doivent se faire dans le respect de la configuration de la molécule à doser afin que sa liaison avec l’anticorps soit maintenue.

2.1.3 « Fragilité » de la molécule à doser Les analytes présents dans l’échantillon biologique peuvent se dégrader plus ou moins rapidement en fonction de leur « fragilité » respective. La bêta 2 microglobuline urinaire est dénaturée en milieu acide (pH < 5) et nécessite un ajustement du pH urinaire dès réception du prélèvement. Certains analytes sont sensibles aux protéases contenues dans l’échantillon biologique et devront donc être prélevés sur des tubes spéciaux contenant une antiprotéase (aprotinine). C’est le cas, par exemple, de la PTH-rp (Parathormone-related peptide) ou de l’ACTH (cf. chap. 3).

2.1.4 Présence possible de molécules interférentes Un grand nombre de molécules peuvent entraîner des interférences dans les immunodosages (cf. chap. 3). Seules les principales sont mentionnées ici. Les molécules concernées sont : • Les autoanticorps anti-analytes Ces mêmes anticorps peuvent, par ailleurs, faire l’objet de dosages. C’est le cas, par exemple, des anticorps anti-hormones thyroïdiennes, anti-thyroglobuline.

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Mais il existe aussi des exemples d’interférence provoquée par la thyroglobuline dans le dosage des anticorps anti-thyroglobuline (15). • Les anticorps hétérophiles Afin d’éliminer ces anticorps hétérophiles, un traitement préalable des échantillons avant dosage est possible. Il consiste à incuber un volume d’échantillon dans des tubes particuliers contenant un réactif éliminant les anticorps hétérophiles. Il s’agit des tubes HBT pour le dosage des antigènes (Heterophilic Blocking Tube) et des tubes NABT (Non Specific Antibody Blocking Tube) pour celui des anticorps. Pour limiter l’impact des anticorps hétérophiles, les fabricants de trousses ajoutent des immunoglobulines anti-immunoglobulines hétérophiles dans un des réactifs du dosage. • l’héparine dans les échantillons plasmatiques (l’héparine est un polyanion qui peut exercer un effet salin et modifier la réaction antigène-anticorps) ; • la fibrine détectée ou non par les automates (la fibrine non détectée par l’automate puis aspirée peut boucher les systèmes de distribution et de lavage de l’appareil). Par ailleurs, la présence de microfibrine peut entraîner une interférence dans le dosage (erreur par excès dans le cas de certaines techniques de dosage de la troponine).

2.2. Réaction antigène-anticorps La réaction antigène-anticorps dépend : – de facteurs spécifiques liés à la nature de l’antigène et de l’anticorps et déterminant la constante d’association (ou d’affinité) à l’équilibre (cf. chap. 1) ; – de facteurs non spécifiques liés aux conditions d’incubation (durée, température, agitation), au milieu réactionnel (volume, concentration protéique, force ionique, pH) et à l’exposition à la lumière.

2.2.1 Facteurs spécifiques Les facteurs spécifiques sont liés à la nature de l’antigène et de l’anticorps qui peuvent être la molécule à doser, l’analyte ou un réactif du dosage (anticorps de capture, anticorps de révélation, antigène marqué…). 2.2.1.1 Analyte à doser : étalons, échantillons, contrôles

La méthode de dosage utilisée pour mesurer la concentration de l’analyte est influencée par sa masse molaire. Effectivement, les haptènes ne peuvent être dosés que par des méthodes par compétition. L’analyte est retrouvé dans l’échantillon biologique, dans les solutions étalons et dans les échantillons contrôles. Lorsque le biologiste a le choix entre plusieurs réactifs de dosages sériques, il devra privilégier celui pour lequel il y a : – existence de standards calibrés vis-à-vis de standards internationaux,

Principes et techniques en immunoanalyse

– identité de structure entre l’analyte à doser et celui contenu dans les étalons, – présence d’un sérum « déplété » pour l’étalon de concentration zéro pour avoir une matrice identique à l’échantillon biologique. 2.2.1.2 Réactifs du dosage

Ils sont de type antigène et/ou anticorps suivant l’analyte à doser. 2.2.1.2.1 Dosage en phase hétérogène

• Réactif de capture Le réactif de capture peut être fixé directement sur la phase solide ou indirectement à l’aide du système avidine-biotine. Dans le deuxième cas, le réactif de capture est couplé à la biotine et la surface solide est recouverte d’avidine. La liaison du réactif de capture à la phase solide est assurée par la liaison entre l’avidine et la biotine (constante d’association très élevée). Cette liaison indirecte permet à la réaction antigène-anticorps de s’effectuer en milieu liquide et donc de diminuer l’effet de l’encombrement stérique dû à la phase solide. • Réactif de détection (traceur) Les anticorps marqués peuvent être de différentes natures : immunoglobuline entière ou fragment d’immunoglobuline (F(ab)’). Les fragments F(ab)’ sont beaucoup utilisés avec le marqueur enzymatique. Ils permettent d’éviter les liaisons des anticorps avec le complément ou les facteurs rhumatoïdes qui peuvent augmenter les liaisons non spécifiques du traceur sur les phases solides. Dans les techniques de dosage d’antigènes en défaut d’anticorps, l’addition retardée du traceur, après une incubation préalable de l’anticorps et de l’antigène « analyte », abaisse la limite de détection, accroît la précision de la mesure pour les faibles concentrations et inversement diminue cette précision pour les plus hautes concentrations. La nature du marqueur et la qualité du marquage sont des facteurs influençant de manière importante la limite de détection. La stabilité des traceurs est également très importante pour la qualité du dosage 2.2.1.2.2 Dosage en phase homogène La réaction antigène-anticorps permet une modulation du signal (cf. § 1.1.1.2.). Les réactifs du dosage sont élaborés afin de permettre cette modulation du signal. Dans les enzymoimmunodosages en défaut d’anticorps (cf. § 3.2.3.), la liaison entre l’anticorps et l’antigène marqué doit inhiber au maximum la réaction enzymatique. Il faudra donc adapter le marquage pour que l’encombrement stérique provoqué par la réaction antigène-anticorps empêche la liaison entre l’enzyme et son substrat. Dans la technique SPA (Scintillation Proximity Assay), la liaison entre l’anticorps et l’antigène marqué doit amener le radioisotope suffisamment près de la particule radioluminescente pour entraîner l’émission de lumière. Cependant, les traceurs non liés ne doivent pas pouvoir déclencher de radiolumi-

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nescence. Dans les fluoroimmunodosages, deux marqueurs interagissent par transfert d’énergie non radiatif lorsqu’ils sont proches. Il faudra donc que la réaction antigène-anticorps permette de rapprocher suffisamment les deux fluorophores.

2.2.2 Facteurs non spécifiques : conditions physico-chimiques 2.2.2.1 Température et durée d’incubation

La constante d’affinité (ou d’association) à l’équilibre de la réaction dépend de la température. L’augmentation de la température permet d’atteindre l’équilibre plus rapidement et par conséquent de réduire la durée d’incubation. L’incubation lors des immunodosages est réalisée à des températures comprises entre 4 ˚C et 37 ˚C, la température la plus utilisée étant la température ambiante (18-25 ˚C). Certains automates d’immunoanalyse arrêtent les dosages lorsque la température s’écarte de l’intervalle prévu. Pour les dosages manuels, la température doit être absolument contrôlée. Le temps d’incubation devrait permettre l’obtention de l’équilibre entre l’analyte lié et l’analyte libre. C’est le cas de la plupart des dosages manuels mais rarement le cas des dosages automatisés (diminution du temps d’analyse). Pour des réactions haptènes-anticorps, la constante d’association est très élevée. Les durées d’incubation peuvent être courtes. Dans d’autres cas, des temps d’incubation beaucoup plus longs (18 à 24 heures) sont nécessaires. À cela, plusieurs raisons : – le temps de mise en équilibre varie selon la masse molaire des réactifs ; pour les analytes de nature protéique, de masse molaire élevée, les temps d’équilibre sont plus grands ; – les dilutions d’anticorps et d’antigène sont grandes ; – la sensibilité du dosage augmente avec le temps d’incubation. En pratique, la durée d’incubation est déterminée pour chaque système antigène-anticorps. Il est impératif de respecter ce temps. Plusieurs paramètres influencent la durée d’incubation en dehors de la température : – l’agitation du milieu pendant la réaction ; les caractéristiques de l’agitation données par le fabricant doivent être impérativement respectées (vitesse, mode orbital ou linéaire) ; – le type de phase solide utilisée ; par exemple, les microparticules, en augmentant la surface de contact entre les réactifs en présence, permettent d’augmenter la vitesse de réaction et donc de réduire la durée de l’incubation ; de plus, leur répartition homogène dans le milieu réactionnel diminue la distance entre les antigènes et les anticorps et par conséquent contribue à la réduction de la durée d’incubation. D’autre part, il existe une relation (t = L2/D) entre le temps de transport (t), la distance (L) et le coefficient de diffusion (D) des espèces moléculaires dans le milieu réactionnel. Dans le cas de dosages miniaturisés, les distances entre les molécules sont faibles et par conséquent, les temps de

Principes et techniques en immunoanalyse

réaction sont courts. C’est un des avantages de la miniaturisation des systèmes analytiques. 2.2.2.2 Volume d’incubation

Pour les techniques réalisées manuellement, la proportion relative de chacun des réactifs ne doit pas être modifiée, celle-ci ayant été choisie par le fabricant pour optimiser la réaction antigène-anticorps. Et notamment, lors de l’utilisation de supports solides revêtus (tubes, billes...), le milieu réactionnel doit recouvrir la zone de réactif préfixé à cette phase solide. Les techniques apparues sur le marché à la fin des années 1990 sont caractérisées par une miniaturisation des dosages permettant d’avoir une prise d’essai de quelques microlitres. Il en résulte aussi une diminution de la quantité de réactifs nécessaires. C’est un autre avantage de la miniaturisation des dosages. 2.2.2.3 Concentration protéique, force ionique, pH

La matrice de l’échantillon biologique correspond à l’ensemble de l’environnement de la molécule à doser. La concentration en protéine est un élément important définissant cette matrice. La concentration protéique du milieu réactionnel doit être proche du milieu biologique pour lequel le dosage est prévu. Ainsi, pour le dosage de liquides pauvres en protéines (urines, LCR par exemple), avec une méthode de dosage prévue pour des analytes sériques, il sera parfois nécessaire de réajuster la concentration en protéine de l’échantillon par une dilution dans un diluant particulier riche en protéine. Les solutions tampons nécessaires à la réaction antigène-anticorps (reconstitution des réactifs, dilutions des échantillons) ont une concentration protéique et saline, ainsi qu’un pH permettant une réaction antigène-anticorps optimale. Une attention toute particulière sera portée à la qualité de l’eau utilisée pour la reconstitution des réactifs et tampons. Les fortes concentrations salines inhibent la liaison Ag-Ac. De plus, les complexes antigène-anticorps se dissocient à des pH extrêmes, d’où la nécessité d’ajuster le pH de certains échantillons, en particulier les urines (dosage de peptide C urinaire). Pour le cas particulier des dosages à partir de taches de sang déposées sur papier buvard, le tampon utilisé doit permettre d’éluer l’antigène à partir du support. 2.2.2.4 Exposition à la lumière

L’exposition à la lumière peut entraîner l’altération : – d’un analyte photolabile (cas de la vitamine B12), – de l’un des réactifs intervenant dans la détection, en particulier pour les enzymoimmunodosages (par exemple, le peroxyde d’hydrogène substrat de la peroxydase de raifort), – des microbilles composées de fluorochromes photosensibles (par exemple, celles qui sont utilisées dans la technologie Luminex®). Lorsque l’exposition à la lumière a un impact sur le dosage, la réaction devra être réalisée à l’abri de la lumière.

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2.3. Séparation entre la forme libre et la forme liée du traceur (méthodes en phase hétérogène) Le choix des méthodes de séparation prend en compte différents facteurs tels que le volume réactionnel, la concentration protéique du milieu réactionnel, la vitesse de séparation, le coût et l’automatisation. Elles ne doivent pas modifier l’équilibre atteint, ce qui aurait pour conséquence une perte de sensibilité et de précision. De plus, la simplicité et la reproductibilité de la méthode de séparation sont des paramètres essentiels de la qualité d’une technique. Il existe un grand nombre de techniques qui peuvent être regroupées en deux catégories, selon que l’objectif est de mesurer le signal de la forme libre ou liée du traceur.

2.3.1 Mesure du signal émis par la forme libre du traceur Le charbon a été largement utilisé dans les techniques par compétition. C’est un adsorbant dont les particules possèdent des surfaces irrégulières qui lui confèrent cette propriété de fixer les molécules. Il peut être utilisé si l’antigène à doser est petit par rapport au complexe antigène-anticorps (petits peptides, stéroïdes). En utilisant du Dextran® de masse molaire appropriée, il est possible de recouvrir le charbon pour produire un réactif qui lie plus sélectivement les petites molécules. Ainsi un charbon recouvert agit comme un tamis moléculaire et n’absorbe plus que des molécules dont la taille est inférieure ou égale à celle des molécules de Dextran® qui lui sert de couverture. Toute molécule dont la taille est supérieure est exclue. Après centrifugation et élimination du surnageant, le charbon ou le charbon-dextran est récupéré et permet la mesure du signal émis par la forme libre du traceur.

2.3.2 Mesure du signal émis par la forme liée du traceur 2.3.2.1 Précipitation non spécifique

Puisqu’il existe une différence importante de taille moléculaire entre la fraction libre et la fraction liée de l’antigène, le complexe antigèneanticorps peut être séparé par précipitation chimique. Pour une concentration critique en agents précipitants, les complexes antigène-anticorps deviennent insolubles, alors que la fraction libre du traceur reste, après centrifugation, dans le surnageant. Les agents précipitants les plus utilisés sont le sulfate d’ammonium d’une part et le polyéthylèneglycol (PEG) de masse molaire 6 000 (PEG 6 000) ou 8 000 d’autre part. L’inconvénient majeur du PEG est la présence d’un « blanc réactif » élevé dû à un entraînement non spécifique du traceur libre dans le précipité. Son utilisation lors d’un dosage est simple. 2.3.2.2 Utilisation d’un deuxième anticorps

Il existe des méthodes dites à double anticorps qui consistent en une précipitation du complexe antigène-anticorps (forme liée du traceur) par une anti-immunoglobuline dans le cas d’un dosage d’antigène. Par exemple, si

Principes et techniques en immunoanalyse

le premier anticorps a été obtenu par immunisation d’un lapin, il est possible d’utiliser un deuxième anticorps, obtenu chez le mouton ou la chèvre, spécifique des immunoglobulines de lapin. La séparation de la fraction libre et de la fraction liée nécessite une centrifugation. L’aspiration de la fraction libre est souvent assez délicate. Lorsque le deuxième anticorps est lié par covalence à un gel de type Sépharose® réparti dans une colonne, il constitue un immunosorbant sur lequel se fixe le complexe antigène-anticorps. Cette technique est utilisée dans le cas particulier du dosage radioimmunologique des hormones thyroïdiennes libres, après séparation chromatographique préalable de la forme liée aux protéines de transport de la forme libre. Après réaction avec un anticorps, le milieu réactionnel est passé au travers d’une colonne de Sépharose® sur laquelle est fixé le deuxième anticorps. Les complexes hormones libres-anticorps sont retenus par la colonne, ce qui permet d’éliminer certaines interférences (cf. § 2.1.2.). 2.3.2.3 Utilisation de la protéine A

La protéine A (constituant de la paroi de Staphylococcus aureus) possède une affinité particulière pour le fragment Fc de toutes les immunoglobulines G humaines (IgG), sauf les IgG3, et forme des complexes insolubles qui permettent de les séparer des fractions libres après centrifugation. 2.3.2.4 Utilisation d’une phase solide

Un réactif de capture fixé sur la phase solide permet de retenir la fraction liée du traceur. La séparation des formes libres et liées du traceur est réalisée par élimination de la forme libre du traceur : aspiration de la phase liquide suivie de lavages de la phase solide à l’aide de tampons adaptés. Trois objectifs sont recherchés lors de l’utilisation des phases solides : – simplifier l’étape de séparation, – avoir une surface d’échange maximale avec le milieu réactionnel, ce qui permet d’augmenter la quantité de réactif de capture (microparticules, mousse), – et juxtaposer des réactifs de capture permettant le dosage simultané de plusieurs paramètres sur un même support (biochip) ou sur des supports différents (microbilles), de faibles dimensions (quelques microns). Le réactif de capture peut être fixé sur de nombreux supports solides (16, 17). • Dosage d’un paramètre : particules de dioxyde de chrome, microparticules de latex, microparticules para-magnétiques, microparticules magnétiques, particules magnétiques, mousse de cellulose, cônes et tubes, micropuits, puits de microplaque, billes… • Dosage de plusieurs paramètres simultanément : microbilles en polystyrène, biopuces en céramique (biochip).

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2.4. Conditions de réalisation 2.4.1 Dosage manuel Les techniques manuelles correspondent à une part de marché moins importante du fait de l’automatisation. Certaines d’entres elles sont considérées comme techniques de référence, d’autres sont difficilement automatisables et d’autres encore sont réalisées pour des paramètres peu prescrits. Elles sont toujours utilisées pour les techniques de recours (exemple de la trousse du dosage radioimmunologique des hormones thyroïdiennes libres (T4L, T3L) après séparation chromatographique), pour les techniques avec extraction, celles avec traceurs radioactifs tritiés et les méthodes en développement.

2.4.2 Dosage automatisé Il existe deux catégories d’automate : – les automates « ouverts » permettant d’utiliser tous types de réactifs sont rares ; – les automates « fermés » qui n’acceptent que les réactifs qui leur sont dédiés et avec lesquels les conditions expérimentales (volume et séquence d’addition des réactifs, durée et température d’incubation) sont figées. Les automates acceptent différents dispositifs contenant les échantillons : tubes de dimension variable, microplaques.

2.4.3 Fréquence d’étalonnage ou de calibration Pour les techniques manuelles, une courbe d’étalonnage est réalisée lors de chaque série. Pour les techniques automatisées, une calibration est nécessaire au minimum lors d’un changement de lot de réactifs et indispensable lorsque le contrôle de qualité est défectueux.

2.4.4 Choix du dosage en simple ou en double La décision revient au biologiste qui la prend après évaluation de la variabilité du dosage (cf. chap. 4) et de la robustesse de la technique.

2.5. Détection Cette ultime étape de la réaction antigène-anticorps fait l’objet de la troisième partie de ce chapitre.

3. Marqueurs et techniques de détection Les trois types de marqueurs actuellement les plus largement utilisés sont le marqueur radioactif, le marqueur enzymatique et le marqueur luminescent. Ces différents marqueurs doivent posséder un certain nombre de qualités générales :

Principes et techniques en immunoanalyse

– leur liaison chimique à une molécule d’antigène ou d’anticorps doit perturber le moins possible la formation du complexe antigèneanticorps ; – leur signal émis doit avoir une intensité élevée par unité de masse, propriété dont dépendent la précision des mesures et la limite de détection du marqueur ; – la spécificité de leur signal doit être la plus grande possible, ce qui garantit un faible bruit de fond et contribue donc à améliorer le seuil de détection ; – leur signal ne doit pas être modifié par le milieu environnant ; – si possible, la mesure de leur signal doit pouvoir être répétée ; – enfin, le marqueur doit pouvoir être détecté quantitativement sur une large gamme de concentrations. Le signal doit donc avoir une grande dynamique, cette propriété étant liée à la nature du signal et à l’appareil de mesure.

3.1. Marqueurs radioactifs 3.1.1 Le marqueur radioactif Pendant longtemps, le marqueur radioactif a été le seul marqueur utilisé dans la mise au point et la réalisation des immunodosages (« méthode radioactive »), historiquement seule technique reconnue à la nomenclature des actes de biologie médicale (NABM). Puis des méthodes non radioactives faisant tout d’abord appel à des marqueurs enzymatiques sont apparues. En fait, le véritable essor des méthodes enzymatique et luminescente date des années 1980 avec la commercialisation des premiers automates. Aujourd’hui, la part des marqueurs radioactifs a considérablement diminué pour des raisons de contraintes réglementaires et de rapidité dans le rendu des résultats. Cependant les méthodes utilisant des marqueurs radioactifs restent, le plus souvent, des méthodes de référence et celles utilisées en recherche et développement. 3.1.1.1 Isotopes stables et radioactifs

Chaque noyau atomique ( AZ X ) est caractérisé par son numéro atomique (Z) qui indique le nombre de protons et son nombre de masse (A) qui représente le nombre total de nucléons : protons (Z) + neutrons (N). Les atomes ayant le même nombre de protons (et donc le même nombre d’électrons) mais un nombre différent de neutrons sont des isotopes. La plupart des éléments naturels sont des mélanges de plusieurs isotopes ne différant que par le nombre de neutrons. Parmi ces isotopes, certains peuvent être instables et redevenir stables en émettant des particules ou un rayonnement électromagnétique : ils se désintègrent. Ce sont des isotopes radioactifs. La radioactivité est un phénomène nucléaire aléatoire, spontané. Il existe plusieurs types de transformations radioactives (ou désintégrations) : – les transformations isobariques β–, β+ et capture électronique ;

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– les transformations par partition (α, fission). Après chaque transformation radioactive, le noyau résiduel peut se trouver dans un état excité. Il revient à un état stable par émission de photons γ. Après une capture électronique, l’atome dans un état excité revient à son état de base en émettant des photons X. En immunoanalyse, seuls les émetteurs β– et γ sont utilisés comme marqueurs. Le spectre énergétique caractéristique de l’élément représente l’intensité du rayonnement (électromagnétique ou particulaire) en fonction de l’énergie du rayonnement. La détection du rayonnement émis par l’isotope radioactif ou marqueur constitue le signal (qui est un signal direct et spontané). 3.1.1.2 La décroissance radioactive

L’activité d’une source radioactive au temps t (At) est égale au nombre de désintégrations nucléaires (Nt) qui se produisent par unité de temps : At = dN/dt = –λNt En intégrant la relation précédente, on obtient que At = A0 ⋅ e–λt, ce qui signifie que l’activité d’une source radioactive décroît de façon exponentielle dans le temps. La constante radioactive (λ) représente la probabilité qu’a un noyau de se désintégrer pendant l’unité de temps ; elle est une caractéristique du radioélément considéré. Le temps au bout duquel une source radioactive a perdu la moitié de son activité est appelé période (T) ou demi-vie : A0/2 = A0 ⋅ e–λT d’où

λT = Ln2 soit T = Ln2/λ

Les périodes radioactives du tritium, de l’iode 125 et du cobalt 57 (isotopes utilisés en immunoanalyse) sont respectivement de 12,3 ans, 59,7 jours et 271 jours (La période du phosphore 32, isotope utilisé dans les techniques de biologie moléculaire est de 14,3 jours). L’unité d’activité dans le système international est le becquerel (Bq) qui correspond à une désintégration ou transformation radioactive par seconde (1 dps). Le curie (Ci), ancienne unité, qui correspond à 3,7⋅ 1010 Bq, représente l’activité d’une source de 1 gramme de radium. L’activité volumique indique l’activité d’une source par unité de volume ; elle s’exprime par exemple en kilobecquerel par millilitre (kBq ⋅ mL–1). L’activité spécifique d’une entité marquée représente l’activité par unité de masse ou par quantité de matière ; elle s’exprime par exemple en microcurie par microgramme (μCi/μg) ou en mégabecquerel par millimole (MBq ⋅ mmol–1).

3.1.2 Détection du marqueur radioactif Les deux principaux radioéléments marqueurs utilisés en radioimmunoanalyse sont l’iode 125 et le tritium.

Principes et techniques en immunoanalyse

3.1.2.1 Iode 125

3.1.2.1.1 Désintégration La période radioactive (59,7 jours), la nature et l’énergie des rayonnements émis (γ et X) lors de sa désintégration font de l’iode 125 le marqueur de choix en immunoanalyse : facilité de détection et contraintes de radioprotection minimisées (irradiation faible, stockage des déchets en décroissance). L’iode 125 se désintègre par capture électronique en tellure 125. Le retour du niveau excité du noyau de tellure au niveau fondamental se traduit par l’émission d’un rayonnement γ de 35,5 keV. Le réarrangement du cortège électronique après la capture d’un électron par le noyau se traduit par l’émission de rayons X (raies Kβ à 31,7 et 30,9 keV et raie Kα à 27,3 keV). L’iode 125 émet aussi des électrons de très faible énergie. La connaissance de ces émissions permet de comprendre que cet isotope est détectable par SPA. 3.1.2.1.2 Mode de détection Compte tenu des niveaux d’énergie des X et du γ émis, l’interaction de ces rayonnements électromagnétiques avec la matière se fait essentiellement par effet photoélectrique. Des détecteurs composés d’un scintillateur solide (cristal d’iodure de sodium : NaI) associé à un photomultiplicateur sont utilisés (fig.14). Il y a donc interaction rayonnement γ − matière au sein du cristal. Les atomes du cristal sont alors ionisés ou excités. Leur désexcitation entraîne une émission de photons de longueur d’onde voisine de 400 nm, qui correspond à une énergie permettant à ces photons de provoquer un effet photoélectrique sur la photocathode avec une bonne probabilité. Le nombre d’électrons expulsés de la photocathode est ensuite amplifié par le système de dynodes. La mesure des tubes contenant les échantillons à mesurer est généralement réalisée dans un compteur dit « multi-puits » : cinq à vingt tubes peuvent être ainsi mesurés simultanément dans des scintillateurs contigus mais indépendants ; la notion de « puits » est associée au fait que les cristaux scintillateurs sont creux. Ils permettent de recevoir les tubes échantillons pour mesure de la radioactivité et d’optimiser ainsi la géométrie de comptage. Enveloppe étanche à la lumière Scintillateur

Dynodes

Anodes

Signal

Fenêtre étanche à la lumière

C

Réflecteur de lumière

Guide de lumière

Photomultiplicateur Photocathode

Figure : 14 – Sonde de détection pour rayonnements g.

R

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Immunoanalyse

3.1.2.2 Tritium

3.1.2.2.1 Désintégration

C’est un émetteur β– dont la période radioactive est de 12,3 ans. L’énergie maximale des rayonnements β– émis est de 18,5 keV, ce qui interdit en pratique une détection directe de ce rayonnement (β « mou ») car les rayonnements sont absorbés par de très faibles épaisseurs de matériau. 3.1.2.2.2 Mode de détection

Pour être détecté, l’échantillon contenant le tritium doit être mélangé dans une fiole avec un réactif scintillant. Ce réactif scintillant est constitué d’un solvant, d’un scintillant primaire et d’un scintillant secondaire. Les rayonnements β– vont exciter les molécules de solvant qui transfèrent cette énergie au scintillant primaire, puis au scintillant secondaire. Ce dernier retrouve sa stabilité par émission radiative. Les photons émis (430 nm) sont détectés par une sonde constituée d’un photomultiplicateur placé au contact de la fiole. Le spectre énergétique du tritium est un spectre continu. 3.1.2.3 Autres marqueurs

D’autres marqueurs radioactifs, comme le cobalt 57 (marqueur « naturel » de la vitamine B12 ou cyanocobalamine) émetteur γ d’énergie E = 122 keV et le carbone 14, émetteur β– d’énergie E = 157 keV peuvent être utilisés. Il existe aussi des possibilités de double marquage de type « iode 125 cobalt 57 » ou « cobalt 57 - cobalt 58 » permettant au cours d’un même dosage d’évaluer deux analytes différents. 3.1.2.4 Modalités pratiques

3.1.2.4.1 Contrôle du matériel de mesure

• Réglage de la zone de mesure En premier lieu, il faut régler les détecteurs sur le « pic » photoélectrique du radioélément à mesurer. S’il s’agit d’un émetteur γ, le pic pourra être élargi jusqu’à englober les raies X, l’ensemble étant alors appelé spectre (exemple de l’iode 125 : 125I). S’il s’agit d’un émetteur β, le spectre étant continu, une fenêtre de mesure est déterminée en fonction du radioélément (tritium ou carbone 14). Pics et fenêtres seront régulièrement contrôlés à partir du rendement de comptage qui devra être le même pour tous les puits. • Mesure du bruit de fond Le taux de comptage d’un détecteur en l’absence de l’échantillon à compter est appelé bruit de fond et doit être déduit de chaque mesure. Ces impulsions parasites proviennent de l’électronique (mouvement propre), de la radioactivité ambiante et du rayonnement cosmique. Le bruit de fond est caractéristique d’une installation donnée ; il doit être contrôlé régulièrement afin de mettre en évidence une éventuelle contamination du compteur ou une défaillance de l’électronique associée.

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Cette mesure de bruit de fond est particulièrement importante avant les mesures relatives à des dosages pour lesquels une très grande sensibilité est requise (tels que ceux de la thyroglobuline, de la calcitonine ou de la β hCG libre…). • Détermination du rendement de comptage (ou efficacité de détection) Les résultats d’un comptage sont en général exprimés en impulsions par minute (ipm), souvent appelées « coups par minute » (cpm). On peut les convertir en dpm (désintégrations par minute) en connaissant le rendement de comptage de l’installation. Ce rendement (rapport du nombre d’impulsions et du nombre de désintégrations) tient compte de l’efficacité du détecteur et de la position de la source (géométrie). Il est voisin de 80 % pour l’iode 125 et de 60 % pour le tritium dans les conditions habituelles de comptage. La limite de détection est de 10–17 mol pour l’iode 125, soit 48 dpm (deux ou trois fois le mouvement propre d’un compteur). Le taux de comptage d’une mole d’iode 125 est 75 fois supérieur à celui d’une mole de tritium. • Détecteurs multipuits L’utilisation de plus en plus répandue de compteurs « multipuits » nécessite d’effectuer une « standardisation » régulière. Cette opération consiste à mesurer le bruit de fond et le rendement de comptage des différents puits de comptage. La calibration de tous les puits sur l’un d’entre eux pris comme référence est effectuée automatiquement selon les consignes du constructeur. 3.1.2.4.2 Statistique de comptage

La précision d’un comptage est fonction du nombre d’impulsions enregistrées. On admet généralement que l’incertitude sur la mesure de N impulsions est N ; cette incertitude est la conséquence de la nature aléatoire de la désintégration radioactive. Dans une même série, l’activité et donc le taux de comptage (nombre d’impulsions par unité de temps) variant d’un tube à l’autre, le temps de comptage de chaque échantillon devrait être fonction de ce taux afin d’obtenir une précision identique. En théorie, les mesures devraient être effectuées en précompte ; l’activité de chaque tube est alors mesurée jusqu’à l’obtention d’un nombre d’impulsions fixé au préalable (10 000 impulsions pour une incertitude de 1 % ; 400 impulsions pour une incertitude de 5 %). En pratique, les mesures sont effectuées en pré-temps, c’est-à-dire que chaque tube est « compté » pendant la même durée (une minute par exemple). Dans ces conditions, l’incertitude sur la mesure est variable d’un échantillon à l’autre et d’autant plus importante que l’activité est plus faible. Il est donc indispensable de connaître avec précision ce taux de comptage et de soustraire de chaque mesure le bruit de fond (cette opération peut être effectuée directement par le programme de traitement des données). Il faut ensuite intégrer l’incertitude sur le taux de comptage ou sur la concentration dans le contrôle de qualité (rejet de

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doublet, évaluation de la limite de détection…) lors de l’interprétation des résultats.

3.1.3 Caractéristiques du traceur radioactif Par définition, le traceur doit être aussi peu différent que possible de l’analyte pur, notamment pour un radioimmunodosage en défaut d’analyte (antigène ou anticorps). Les performances du dosage dépendent fortement de la qualité du traceur. 3.1.3.1 Immunoréactivité

La reconnaissance du traceur par l’anticorps spécifique doit être vérifiée. La courbe de déplacement obtenue par addition de concentrations croissantes en antigène non marqué par exemple est comparée à celle obtenue après addition de concentrations de l’antigène marqué. 3.1.3.2 Pureté

Le signal émis par un marqueur radioactif, qu’il soit libre ou lié à une molécule (traceur ou impuretés), est identique. De ce fait, la pureté du traceur (absence de molécules voisines ayant pu fixer le marqueur) conditionne la spécificité du dosage. Elle influe également : – sur la limite de détection (l’augmentation de la pureté diminue les liaisons non spécifiques), – sur l’exactitude des résultats (la fixation sur les anticorps de molécules non marquées ou dégradées par exemple diminue l’exactitude). 3.1.3.3 Activité spécifique

En théorie, l’augmentation de l’activité spécifique du traceur conditionne directement la limite de détection du dosage. En pratique, l’addition de plusieurs atomes d’iode par molécule d’antigène ou d’anticorps entraîne une augmentation des phénomènes de radiolyse et conduit souvent à une perte d’immunoréactivité. Un compromis, qui diffère selon chaque traceur, est donc à trouver. La présence d’un atome d’iode par molécule correspond à une activité spécifique de 8 ⋅ 1013 Bq/mmol. Dans une molécule donnée, les résidus tyrosyl (où se fixe l’iode) peuvent être très différemment accessibles au marquage ; par exemple, l’insuline qui compte 4 tyrosines en position 14 et 19 sur la chaîne A, 16 et 26 sur la chaîne B est préférentiellement marquée en A 14 par la méthode à la chloramine T. 3.1.3.4 Stabilité

Elle est très variable d’un traceur à l’autre (de l’ordre d’un mois pour 125IGH et de six mois pour 125I-AMPc). On peut augmenter la stabilité du traceur par addition de protéine, congélation ou lyophilisation et conservation sous atmosphère inerte (azote) ou en solvant organique.

3.1.4 Méthodes de dosage Les immunodosages avec marqueurs radioactifs peuvent être divisés en deux catégories (ils sont en très grande majorité en phase hétérogène) :

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– les méthodes en défaut d’analyte (anticorps ou antigène) avec marqueur radioactif, appelées classiquement RIA (RadioImmunoAssay) (cf. § 1.) ; – les méthodes en excès d’analyte (anticorps ou antigène) avec marqueur radioactif regroupant un ensemble de techniques, appelées classiquement IRMA (ImmunoRadioMetricAssay) (cf. § 1.). Il existe une seule méthode en phase homogène : la méthode SPA. Elle utilise les marqueurs 125I et 3H qui émettent des électrons de faible énergie (parcours d’environ 10 μm dans l’eau).

3.1.5 Avantages et inconvénients Le signal physique radioactif présente plusieurs avantages : c’est un signal direct (directement émis par le marqueur), « positif » (émission de rayonnements électromagnétiques ou de particules), spontané (ne faisant pas intervenir une source d’énergie externe) et très spécifique (les rayonnements parasites ou les contaminations sont exceptionnels). Son émission est indépendante du milieu, l’activité (amplitude du signal physique) étant seulement proportionnelle au nombre de molécules marquées. La détection de ce signal est une détection numérique (comptage d’impulsions), donc facilement corrigée du bruit de fond résiduel. Par rapport aux autres marqueurs, en particulier les enzymes, le marqueur radioactif présente l’avantage d’un faible encombrement stérique (surtout le tritium), modifiant peu le comportement immunologique du traceur par rapport à l’analyte dosé. Enfin le marqueur radioactif possède un signal non détruit lors de la mesure et peut donc se prêter à de nouvelles mesures. Il existe des inconvénients dans l’utilisation des molécules radiomarquées : d’une part le temps d’acquisition du signal doit être suffisamment long pour obtenir une précision et une limite de détection satisfaisante, d’autre part le phénomène de décroissance radioactive, et éventuellement la radiolyse, limitent la durée de conservation des molécules marquées. Parmi les différentes méthodes d’immunodosage, les techniques faisant appel à des traceurs radioactifs restent globalement très compétitives par leur sensibilité, leur spécificité et leur facilité de mise en œuvre ; certaines contraintes d’utilisation tiennent aux réglementations qui régissent l’emploi des radioéléments et en fixent les modalités d’utilisation (autorisations, radioprotection).

3.2. Marqueurs enzymatiques Les immunodosages utilisant une enzyme comme marqueur (enzymoimmunodosages) ont été utilisés à partir de 1971 comme alternative aux dosages utilisant des radioisotopes. Lors de la conférence de l’ERIAC (European RadioImmunoAssay Club) organisée à Bâle (Suisse) au début des années 1970, le concept d’utilisation des enzymes comme marqueurs avait été accueilli avec beaucoup de scepticisme. Cependant, les travaux des équipes de Peter Perlmann et de Anton Schuurs allaient rapidement démontrer l’intérêt des enzymoimmunodosages. Au cours d’un enzymoimmunodosage,

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après la réaction immunologique, une réaction enzymatique avec un substrat spécifique en excès donne naissance à une espèce chimique émettant un signal physique dont l’amplitude est proportionnelle à la quantité du marqueur enzymatique et à la durée d’incubation. En fonction de l’enzyme et du substrat employés, 102 à 106 molécules de substrat sont transformées par seconde, ce qui permet d’expliquer l’intérêt de ces marqueurs en termes de sensibilité. Les enzymes étant plus stables que les radioisotopes, les réactifs des enzymoimmunodosages pourront se conserver plus longtemps. Cependant, dans les enzymoimmunodosages, le signal généré sera beaucoup plus sensible aux interférences et aux variations des conditions du dosage. La robustesse sera donc moins grande que celle obtenue avec les radioimmunodosages pour lesquels l’émission de signal n’est pas influencée par le milieu réactionnel. La majorité des enzymoimmunodosages aboutit à la mesure d’une absorbance à une longueur d’onde donnée (signal d’absorption), ou d’une intensité de fluorescence, ou de chimiluminescence (signal d’émission). La partie suivante « marqueurs enzymatiques » traite plus particulièrement des méthodes de dosage basées sur une mesure d’absorbance, les méthodes de dosage basées sur une mesure d’une intensité de fluorescence ou de chimiluminescence étant décrites plus en détails dans la partie « marqueurs luminescents » (18).

3.2.1 Le marqueur enzymatique 3.2.1.1 Caractères généraux

Une enzyme est une protéine de masse molaire élevée, caractérisée par une capacité de reconnaissance spécifique d’une espèce moléculaire particulière appelée substrat, sur laquelle elle induit une réaction de transformation spécifique. Sa structure peut être entièrement protéique (exemple : le lysozyme). Elle est le plus souvent constituée d’une partie protéique, l’apoenzyme, et d’une partie non protéique, le cofacteur. Ce dernier est soit un ion métallique (Zn2+, Mg2+), soit une molécule organique de faible poids moléculaire et thermostable appelée coenzyme. Le coenzyme peut être un groupement prosthétique caractérisé par une liaison forte à l’apoenzyme (liaison covalente) (exemple : l’hémine de la peroxydase de raifort) ou un co-substrat faiblement lié à l’apoenzyme (exemple : le NAD+ de la glucose 6 phosphate déshydrogénase). Les enzymes sont classées par la commission des enzymes en six classes numérotées selon le type de la réaction catalysée à savoir : les oxydoréductases (classe 1), les transférases (classe 2), les hydrolases (classe 3), les lyases (classe 4), les isomérases (classe 5), les ligases (classe 6). Chaque classe est ensuite divisée en sousclasses et en sous-sous-classes qui portent des numéros correspondant à des fonctions particulières de l’enzyme. Dans une sous-sous-classe, chaque enzyme porte enfin un numéro qui lui est propre. Ainsi l’enzyme qui catalyse la réaction suivante a pour numéro : EC 1.1.1.49 .

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α-D-glucose-6-phosphate + NADP+  6-phospho-D-glucono-δ-lactone + NADPH, H+ La signification de EC 1.1.1.49 est : EC pour Enzyme Commission, le premier 1 est le numéro de la classe des oxydoréductases, le deuxième 1 est le numéro de la sous-classe des oxydoréductases agissant sur le groupement –CHOH des donneurs (substrats), le troisième 1 est le numéro de la soussous-classe des oxydoréductases avec NAD+ ou NADP+ comme accepteur d’électrons (coenzyme), 49 est le numéro propre de l’enzyme. Une dénomination usuelle plus simple et plus courte peut être utilisée pour les enzymes dès lors qu’elles sont clairement identifiées et classées. Pour ce faire, le suffixe « ase » qui indique la fonction catalytique de l’enzyme est ajouté au nom du substrat et éventuellement au terme décrivant la nature de la réaction. L’enzyme EC 1.1.1.49 décrite ci-dessus a ainsi pour nom usuel D-glucose-6-phosphate : NADP oxydoréductase ou glucose 6 phosphate déshydrogénase (G6PDH). Lors d’une réaction enzymatique, une molécule d’enzyme interagit de manière spécifique avec une molécule de substrat pour former un « complexe activé » enzyme-substrat. Cette liaison s’effectue au niveau du site actif de la molécule d’enzyme. Celui-ci comprend un site de reconnaissance et un site d’action catalytique au niveau duquel est induite la transformation de la molécule de substrat. À la fin de la réaction, les produits quittent l’enzyme qui se retrouve intacte, donc prête à réagir éventuellement avec une autre molécule de substrat. Une enzyme peut donc être considérée comme un catalyseur, car elle favorise la réalisation d’une réaction chimique lorsque celle-ci est possible sur le plan thermodynamique ; elle accélère la réaction chimique jusqu’à atteinte de l’équilibre régi par la thermodynamique, agit à faible concentration, et retrouve son état initial à la fin de la réaction. Le dosage d’une enzyme est dans la majorité des cas, basé sur la mesure de l’activité catalytique de l’enzyme (activité enzymatique) au cours d’une réaction convenablement choisie : l’enzyme est mise en présence du substrat, la vitesse de la réaction est évaluée soit par mesure de la vitesse de disparition du substrat, soit par mesure de la vitesse d’apparition d’un produit de la réaction, soit encore par mesure de la vitesse d’apparition ou de disparition des coenzymes réduits NADH, H+ ou NADPH, H+. Ces derniers coenzymes absorbent à 340 nm uniquement lorsqu’ils sont sous forme réduite. La mesure de l’activité catalytique d’une enzyme doit toujours être réalisée dans des conditions opératoires bien précises, car la vitesse de réaction enzymatique dépend de nombreux facteurs tels la nature du substrat, l’ordre de la réaction qui dépend lui même de la quantité de substrat, de la température, du pH et de la force ionique du milieu, ainsi que de la présence ou non d’activateurs et d’inhibiteurs enzymatiques. L’unité du Système International d’activité catalytique d’une enzyme est le katal (kat) : quantité d’enzyme qui catalyse la transformation d’une mole de substrat par seconde. Cette unité étant très importante par rapport aux

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activités réellement mesurées, le nanokatal est la sous-unité la plus employée. Les laboratoires d’analyses médicales ont souvent conservé les anciennes unités internationales (UI) qui sont mieux adaptées aux activités enzymatiques mesurées. Une « UI » est la quantité d’enzyme qui catalyse la transformation d’une micromole de substrat par minute (1 UI = 16,7 nkat). Les propriétés catalytiques des enzymes, associées à leurs propriétés remarquables de spécificité vis-à-vis d’un type de substrat d’une part, et vis-à-vis de la réaction chimique de transformation du substrat d’autre part, font de l’enzyme un réactif de choix en analyse biologique et en particulier dans les immunodosages. 3.2.1.2 Principe général d’obtention du signal

Dans les enzymoimmunodosages, le traceur est un antigène ou un anticorps marqué par une enzyme. Cette dernière permet de mesurer la quantité de traceur libre ou de traceur engagé dans des complexes immuns. La quantification est rendue possible par la mise en œuvre de la réaction enzymatique en présence du substrat approprié. Les marqueurs enzymatiques n’émettent pas un signal direct. Les modifications qualitatives et quantitatives des espèces moléculaires en présence au cours de la réaction enzymatique permettent l’obtention d’un signal quantitativement mesurable et proportionnel à l’activité catalytique de l’enzyme, donc à sa concentration. Les signaux les plus couramment utilisés pour mesurer l’activité catalytique de l’enzyme marqueur dans les enzymoimmunodosages sont le signal d’absorption lumineuse (absorbance) et le signal d’émission lumineuse (luminescence : intensité de fluorescence ou intensité de chimiluminescence). • Pour obtenir un signal d’absorption lumineuse par une réaction enzymatique, différentes possibilités sont offertes : – L'utilisation d’un substrat chromogène Un chromogène est une molécule dont la transformation chimique catalysée par l’enzyme (marqueur) entraîne une modification du spectre d’absorption lumineuse. Exemple : phosphatase alcaline ⎯⎯⎯⎯⎯⎯ ⎯⎯⎯ ⎯ ⎯⎯ → p-nitrophénol + Pi p-nitrophénylphosphate ← ⎯

Dans cette réaction enzymatique, l’enzyme transforme le substrat chromogène (p-nitrophénylphosphate) en p-nitrophénol, dont la longueur d’onde du maximum d’absorption lumineuse se situe à 405 nm, et en phosphate inorganique (Pi). – L’utilisation de deux substrats dont un chromogène Exemple : peroxydase de raifort ⎯⎯⎯⎯⎯⎯ ⎯⎯⎯⎯⎯⎯ → o-nitro-aniline + 2 H O H 2 O 2 + o-phénylènediamine ← 2

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Dans cette réaction enzymatique, la peroxydase de raifort catalyse l’oxydation de l’o-phénylènediamine (chromogène réduit) en o-nitro-aniline en transférant les électrons au peroxyde d’hydrogène qui est réduit en eau. La longueur d’onde du maximum d’absorption lumineuse de l’o-nitro-aniline se situe à 492 nm. – L’utilisation de NAD+ ou NADP+ (cosubstrats absorbant à 340 nm uniquement sous forme réduite) Exemple : glucose -6- phosphate + NADP + ⎯G6PDH ⎯⎯→ 6-phospho-D-glucono -δ - lactone + NADPH, H +

Au cours de cette réaction enzymatique, le cosubstrat NADP+ qui n’absorbe pas à 340 nm est réduit en NADPH, H+ qui présente un maximum d’absorption à 340 nm. • Pour obtenir un signal d’émission lumineuse par une réaction enzymatique, plusieurs possibilités sont également offertes : – L’utilisation d’un substrat fluorigène Un fluorigène est une molécule dont le produit de transformation est une molécule fluorescente. Exemple :

Au cours de cette réaction enzymatique, le substrat donne par hydrolyse la 4-méthyl-ombelliférone fluorescente dont la longueur d’onde du maximum d’excitation est 364 nm, celle du maximum d’émission 448 nm. – L’utilisation de deux substrats dont un luminogène Un luminogène est une molécule dont la transformation chimique produit une émission de lumière (réaction de chimiluminescence). Exemple : peroxydase de raifort ⎯⎯⎯⎯⎯⎯ ⎯⎯⎯⎯⎯⎯ → ion aminophtalate + 2 H O H 2 O 2 + o-phénylènediamine ← 2

Dans cette réaction, le luminogène (luminol) est oxydé en ion aminophtalate qui se trouve dans un état énergétique excité. Le retour spontané de cet ion à l’état fondamental s’accompagne d’une émission de lumière (longueur d’onde du maximum d’émission = 430 nm). Le peroxyde d’hydrogène sert d’accepteur d’électrons et de protons. 3.2.1.3 Enzymes et substrats utilisés

Dans le tableau ci-après (tableau 1), sont présentées les principales enzymes utilisées comme marqueurs, ainsi que les principaux chromogènes et les longueurs d’onde de mesure d’absorbance correspondantes.

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3.2.1.3.1 Enzymes

La phosphatase alcaline (PAL) (EC 3.1.3.1) et la peroxydase de raifort ou HorseRadish Peroxidase (HRP) (EC 1.11.1.7) sont de loin les enzymes les plus employées en immunoanalyse. Ces deux enzymes ont l’avantage d’être relativement stables (conservation supérieure à 6 mois à + 4˚C) et peu coûteuses. • La PAL catalyse l’hydrolyse (classe des hydrolases) de groupements phosphates à partir d’esters : RO-PO32– + H2O → R-OH + HO-PO32– Il s’agit donc d’une phosphomonoestérase non spécifique. Cette enzyme est une glycoprotéine dimérique de 140 kDa possédant une activité maximale à pH 9,5-10,5 et nécessitant des cofacteurs métalliques, le zinc et le magnésium. Elle sera inactivée par des concentrations importantes de phosphate inorganique, par un pH acide ou par l’EDTA (chélateur de cations divalents). • La HRP est une peroxydase et fait donc partie de la classe des oxydoréductases. La HRP catalyse la réduction du peroxyde d’hydrogène en eau selon la réaction : H2O2 + RH2 → 2H2O + R L’enzyme permet le transfert sur le peroxyde d’hydrogène de deux électrons et de deux protons provenant de RH2. La HRP utilise spécifiquement le peroxyde d’hydrogène comme accepteur de protons et d’électrons mais tolère de très nombreux substrats RH2 comme donneur de protons et électrons. La HRP est une hémoprotéine glycosylée de 44 kDa présentant une activité maximale entre pH 4 et pH 8. Sa petite taille permet de lier jusqu’à quatre molécules d’enzyme par anticorps, ce qui ne peut être réalisé avec la PAL. La HRP est moins onéreuse que la PAL mais présente l’inconvénient d’être incompatible avec les conservateurs comme l’azide de sodium et d’être sensible aux métaux retrouvés dans l’eau. 3.2.1.3.2 Substrats

La plupart des marqueurs enzymatiques peuvent être révélés photométriquement avec différents chromogènes. Par exemple, pour la HRP, l’OPD (o-phénylènediamine), l’ABTS (2,2’ azino di [3-éthyl-benzothiazolinyl-6sulfonate d’ammonium] et la TMB (3, 3’, 5, 5’-tétraméthyl-benzidine) peuvent être employés en association avec le peroxyde d’hydrogène. Le TMB est souvent préféré car ce substrat est associé avec les valeurs d’absorbance les plus élevées, un faible bruit de fond et, contrairement à l’OPD, il n’est pas mutagène. La HRP peut aussi être révélée par une méthode luminométrique en utilisant un luminogène (luminol). Le PNPP (paranitrophényl phosphate) (substrat chromogène) et le 4-MUP (4-méthyl-ombelliféryl-phosphate) (substrat fluorigène) sont employés avec la PAL. Pour la β-D-galactosidase, outre les substrats chromogènes tels l’ortho- et le para-nitrophényl-β-D-galactopyranoside, il existe un substrat fluorigène, le 4-méthyl-ombelliféryl-β-D-galactopyranoside.

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Le choix du substrat est guidé par la concentration en analyte et par le mode de mesure du signal (cinétique ou point final). Lorsque l’analyte est en très faible concentration, un substrat permettant d’obtenir un signal élevé est privilégié. Lorsque le dosage concerne un analyte dont la concentration peut être comprise dans un grand intervalle, le choix se porte sur un substrat permettant une réaction relativement lente, ce qui permet d’obtenir un large intervalle d’intensité de signal. Les mesures réalisées en cinétique impliquent plusieurs lectures du signal dans un temps très court et commençant immédiatement après l’ajout du substrat (par exemple : lecture toutes les 10 s pendant 2 à 5 min). Pour obtenir une bonne sensibilité avec ce mode de lecture, un substrat permettant une réaction rapide sera choisi. Les mesures réalisées en point final impliquent quant à elles l’ajout d’un réactif d’arrêt à un certain temps (souvent 15 ou 30 minutes) après le début de la réaction enzymatique. Cette opération permet de réduire le temps d’analyse en s’affranchissant du délai d’atteinte de l’équilibre réactionnel. Afin de minimiser l’impact des différences interéchantillons de temps de réaction enzymatique (pipetages du substrat et du réactif d’arrêt), un substrat entraînant une réaction plutôt lente est préféré. Tableau : 1 – Principales enzymes utilisées comme marqueurs

(EC = Enzyme Commission ; MM = Masse Molaire).

Enzymes

Substrats non chromogènes et substrats chromogènes

Produits formés absorbants ( lecture)

peroxydase de raifort (HRP) EC 1. 11. 1. 7 MM = 44 000

H2O2 + o-phénylènediamine (OPD) H2O2 + azino-di[éthylbenzothiazolinyl sulfonate] (ABTS) H2O2 + tétraméthylbenzidine (TMB)

o-nitroaniline (492 nm)

phosphatase alcaline EC 3.1.3.1 MM = 140 000

p-nitrophényl-phosphate (PNPP)

p-nitrophénol (405 nm)

β -D- galactosidase o-nitrophényl-β-D-galactopyranoside EC 3.2.1.23 (ONPG) MM = 540 000 glucose oxydase EC 1.1.3.4 MM = 186 000 glucose-6-phosphate déshydrogénase EC 1.1.1.49 MM = 128 000

oxydase (1) glucose ⎯glucose ⎯⎯⎯⎯ → H 2O2

(2)

H 2 O 2 + OPD ⎯⎯→ produit absorbant HRP

Glucose-6-phosphate + NADP+ ou NAD+

o-nitrophénol (405 nm)

o-nitroaniline (492 nm)

NADPH, H+ ou NADH, H+ (340 nm)

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Immunoanalyse

3.2.2 Détection Après la réaction immunologique, les complexes antigène-anticorps sont révélés par ajout du (ou des) substrat(s) au milieu réactionnel. L’activité enzymatique peut être mesurée en cinétique ou au point final. Dans le premier cas, plusieurs mesures effectuées dans un intervalle de temps court (de 2 à 5 minutes en général) suivant l’ajout d’un large excès de substrat permettent de mesurer la vitesse maximale de réaction enzymatique. La vitesse maximale est reliée à la concentration totale d’enzyme par la relation : vmax = kcat × [E] (avec kcat = constante catalytique). La vitesse maximale est donc directement proportionnelle à la concentration d’enzyme et donc à la concentration en analyte. Dans le second cas, la réaction enzymatique est arrêtée à un temps fixe (15-30 minutes après ajout du substrat) à l’aide d’un réactif d’arrêt afin de limiter dans le temps le développement de la réaction enzymatique. L’intensité du signal mesuré après arrêt de la réaction est proportionnelle à la concentration en analyte. En général, le réactif d’arrêt permet soit de modifier fortement le pH du milieu réactionnel, soit d’apporter des inhibiteurs enzymatiques (ex : phosphates inorganiques inhibant la PAL). Les méthodes de mesure du signal sont de deux types : les méthodes photométriques d’absorption et les méthodes luminométriques. 3.2.2.1 Spectrophotométrie d’absorption

Lors de la phase terminale d’un enzymoimmunodosage, la réaction enzymatique provoque la transformation d’un chromogène (le substrat lui-même ou une molécule associée au substrat) en un produit possédant une bande d’absorption dans une région bien déterminée du domaine visible ou ultraviolet. La quantité de produit formé est proportionnelle au nombre de molécules d’enzymes (c’est-à-dire de marqueurs) et donc proportionnelle au nombre de molécules d’analyte, et l’absorbance constitue le signal indirect utilisé pour établir les courbes d’étalonnage des dosages. L’absorbance d’une substance est déterminée expérimentalement par une mesure photométrique : un faisceau lumineux parallèle et monochromatique, d’intensité incidente I0 traverse la substance. Si l’intensité transmise est I, par définition, l’absorbance A de la substance est exprimée par la relation : A = log10 (Io/I). Dans le domaine UV-visible, chaque espèce moléculaire absorbante est caractérisée par un spectre d’absorption qui est un spectre de bandes : il s’agit de la courbe A = f (λ) présentant généralement un pic large (plusieurs dizaines de nanomètres). La longueur d’onde du maximum d’absorption est caractéristique de l’espèce moléculaire. Pour les dosages, c’est à cette longueur d’onde que sont effectuées les mesures d’absorbance afin d’obtenir la sensibilité maximum (pente de la droite d’étalonnage la plus grande). Pour les solutions, la loi de Beer-Lambert définit une relation de proportionnalité entre l’absorbance A et la concentration C de l’espèce absorbante, pour un trajet optique l déterminé :

Principes et techniques en immunoanalyse

A = ε l C (loi de Beer-Lambert) où ε est le coefficient d’absorptivité molaire de la substance à la longueur d’onde de mesure. L’application de cette loi est limitée aux solutions d’absorbance inférieure à 2,5, non diffusantes et non fluorescentes. Les appareils utilisés pour effectuer des mesures d’absorbance comportent principalement une ou deux sources lumineuses (lampe « tungstène-halogène » pour le visible, lampe au deutérium pour l’ultraviolet), un monochromateur ou une série de filtres, un compartiment échantillon et un photodétecteur. Lorsque la longueur d’onde est sélectionnée par un filtre optique, l’appareil est un photomètre d’absorption. Lorsque la longueur d’onde est réglable en continu grâce à un monochromateur à réseau optique, il s’agit d’un spectrophotomètre d’absorption. Les dosages manuels en microplaques impliquent l’utilisation d’un lecteur de microplaques, tandis que les automates réalisant des immunodosages sont équipés d’un photomètre ou d’un spectrophotomètre. La plupart des lecteurs de microplaques permettent une lecture à deux longueurs d’onde, ce qui permet d’éliminer le bruit de fond provenant par exemple d’imperfections des surfaces traversées par la lumière. Sur les automates, le contrôle optique des cuvettes réactionnelles peut être réalisé par mesure de l’absorbance d’une cuvette vide. Si les mesures d’absorbance paraissent séduisantes par leur simplicité et leur accessibilité, il faut néanmoins souligner un certain nombre d’inconvénients. En premier lieu, la dynamique du signal est restreinte, puisqu’en pratique, les valeurs maximales d’absorbance ne doivent pas dépasser 2,5, alors que celle des « blancs réactifs » peut atteindre 0,1. D’autre part, une absorbance est un signal engendré par un phénomène « négatif » (diminution d’intensité lumineuse), moins spécifique qu’un signal d’émission, comme par exemple une intensité de luminescence. Il en résulte une perte de précision due à d’éventuels phénomènes parasites, tels que des défauts d’homogénéité des solutions (présence de bulles, de particules en suspensions…) ou des irrégularités de la surface des cuves ou cupules de mesure. L’augmentation de l’imprécision des mesures a également pour conséquence une détérioration des limites de détection. 3.2.2.2 Luminométrie

La détection de la luminescence est traitée dans la partie « marqueurs luminescents » (cf. § 3.3.).

3.2.3 Méthodes de dosage Les méthodes de dosages présentées ici ne concernent que les techniques associées à une détection par spectrophotométrie d’absorption. Elles peuvent être distinguées d’abord en méthodes en phase homogène et méthodes en phase hétérogène, puis déclinées en méthodes par défaut d’anticorps et méthodes par excès d’anticorps.

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Immunoanalyse

3.2.3.1 Méthodes en phase homogène

Ce sont pour la plupart des méthodes en défaut d’anticorps et elles s’appliquent particulièrement bien aux haptènes. Un certain nombre de méthodes existent, seules les principales sont détaillées ici. • EMIT® (Enzyme Multiplied Immunoassay Technique) Il s’agit de la principale technique d’enzymoimmunodosage en phase homogène. Elle a été décrite pour la première fois en 1972 et dès l’année suivante, un test était commercialisé pour détecter en toxicologie certaines drogues urinaires (19). Elle est actuellement très largement utilisée pour le dosage des médicaments et la détection de drogues. Le principe de cette méthode en phase homogène et en défaut d’anticorps est schématisé ci-après (fig. 15).

Légende Ac Ag analyte Ag marqué par une enzyme (E) Substrat Produit Mesure de l’absorbance à 340 nm

Figure : 15 – Principe de la technique EMIT®. La liaison de l’antigène marqué à l’anticorps masque le site actif de l’enzyme qui ne peut alors agir sur le substrat. La quantité d’enzyme active correspondant au signal mesuré augmente avec la concentration de l’antigène analyte. Le cas inverse (augmentation de l’activité enzymatique après liaison de l’antigène marqué) est également possible. L’enzyme utilisée pour les dosages EMIT® actuels est la glucose-6phosphate déshydrogénase (G6PDH), issue de la bactérie Leuconostoc mesenteroides. Cette enzyme a été modifiée génétiquement de manière à augmenter la modulation de son activité par la liaison entre l’antigène marqué et l’anticorps. La G6PDH bactérienne transforme le NAD+ en NADH, H+ qui absorbe à 340 nm. La G6PDH endogène utilise le NADP+ en qualité de cosubstrat et n’interfère donc pas sur les mesures. La méthode EMIT® s’applique bien aux petites molécules car il faut que la liaison de

Principes et techniques en immunoanalyse

l’anticorps produise un encombrement stérique suffisant pour moduler l’activité enzymatique, ce qui n’est pas aisé avec des grosses molécules. • CEDIA® (Cloned Enzyme Donor ImmmunoAssay) Le développement de cette méthode repose sur les techniques de recombinaison génétique qui permettent la synthèse de deux types de fragments inactifs et complémentaires de la β-D-galactosidase de Escherichia Coli (20). Ces deux fragments sont nommés « enzyme donor » (fragment « donneur ») et « enzyme acceptor » (fragment « accepteur »). La restauration de l’activité enzymatique nécessite l’association des deux types de fragments. Le marqueur est le fragment enzyme donor. La liaison de l’anticorps à l’antigène marqué inhibe la réassociation des deux fragments et donc la restauration de l’activité enzymatique. Dans cette méthode en défaut d’anticorps, l’antigène analyte rentre en compétition avec l’antigène marqué pour la liaison sur les sites anticorps (fig. 16). Ainsi, plus la concentration de l’antigène analyte est importante, plus la fraction libre de l’antigène marqué est grande et donc plus l’activité enzymatique mesurée est élevée. La mesure spectrophotométrique de la cinétique d’hydrolyse d’un substrat chromogène permet d’obtenir l’activité enzymatique qui est directement proportionnelle à la concentration en antigène analyte. Cette technique est employée pour mesurer des analytes de faible masse molaire (hormones, drogues, vitamines, immunosuppresseurs) et des analytes de masse molaire plus élevée (ferritine). C’est le plus sensible des immunodosages en phase homogène utilisant un signal d’absorption lumineuse.

Légende Ac Ag analyte Ag marqué par le fragment « enzyme donor » (ED) Fragment « enzyme acceptor » (EA) Substrat Produit

Mesure de l’absorbance du produit

La liaison de l’antigène marqué à l’anticorps empêche la réassociation des fragments enzymatiques enzyme donor et enzyme acceptor, et donc la réactivation de l’enzyme. La quantité d’enzyme réactivée correspondant au signal mesuré augmente avec la concentration de l’antigène analyte.

Figure : 16 – Principe de la technique CEDIA®.

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Immunoanalyse

Il existe aussi différents systèmes de dosage par immunochromatographie, comme par exemple les tests AccuLevel®. Dans ce système, une bandelette de papier chromatographique, sur laquelle est fixé un anticorps de capture, est trempée dans l’échantillon (sang total) préalablement mélangé avec une solution tampon contenant l’antigène marqué à la HRP et les réactifs nécessaires à la réaction enzymatique. L’antigène analyte et l’antigène marqué entrent en compétition avec les sites anticorps immobilisés sur toute la hauteur de la bandelette. Plus la concentration en antigène analyte est importante et plus la hauteur de migration de l’antigène marqué est grande, la hauteur de migration étant dépendante de la liaison de l’antigène à un anticorps immobilisé. La concentration d’antigène analyte est proportionnelle à la hauteur de la coloration obtenue après la réaction enzymatique. 3.2.3.2 Méthodes en phase hétérogène

Parmi les méthodes en phase hétérogène les plus courantes, on trouve les méthodes ELISA (Enzyme Linked Immunosorbent Assay). Ces dernières regroupent des méthodes par compétition (ELISA compétition) et des méthodes immunométriques (ELISA sandwich) (fig. 17). Une méthode analogue permet d’effectuer le dosage des anticorps : l’antigène correspondant est fixé en excès sur le support solide, l’anticorps analyte se lie à l’antigène fixé dans une première étape, puis un deuxième anticorps (marqué et en excès) dirigé contre les immunoglobulines humaines est ajouté.

Légende Ac de capture fixé sur une phase solide Ag analyte Ac marqué par une enzyme (E) Substrat chromogène Produit

Lavages addition de substrat

Mesure de l’absorbance du produit

Figure : 17 – Principe de la méthode ELISA « sandwich ».

Principes et techniques en immunoanalyse

Une technique automatisée, appelée ACMIA (Antibody Conjugated Magnetic ImmunoAssay), est basée sur un principe différent (fig. 18). L’antigène analyte est mis en contact avec un excès d’anticorps marqué par la β-galactosidase, dans une cupule échantillon. Ensuite des particules de dioxyde de chrome sur lesquelles sont fixées des molécules d’antigène vont se lier à l’excès d’anticorps marqué. Une séparation magnétique permet de retenir les particules et l’excès d’anticorps marqué, tandis que le surnageant contenant les complexes anticorps marqué–antigène analyte est transféré dans une cuvette réactionnelle. Après ajout du substrat chromogène, le β-D-galactopyranoside rouge chlorophénol, l’absorbance du produit de la réaction enzymatique, le rouge chlorophénol, est mesurée à 577 nm. Elle est proportionnelle à la concentration d’analyte.

Légende Ac marqué avec une enzyme (E) Ag analyte Particule de dioxyde de chrome lié à l’antigène

Séparation magnétique

Substrat Produit Mesure de l’absorbance du produit

Figure : 18 – Principe de l’ACMIA.

3.2.4 Avantages et inconvénients Les enzymoimmunodosages, comparés aux radioimmunodosages, ont pour principal avantage d’être accessibles à l’ensemble des biologistes. En effet, aucun agrément particulier n’est nécessaire pour commander les réactifs, et les enzymoimmunodosages ne sont pas assujettis aux mêmes contraintes réglementaires et organisationnelles (locaux, déchets, radioprotection). De plus, contrairement aux trousses de radioimmunodosages, la durée de validité des trousses d’enzymoimmunodosages est relativement longue, en général une année. Cependant les immunodosages utilisant le marqueur enzymatique sont caractérisés par une plus forte variabilité dans la mesure des signaux que les radioimmunodosages. Dans les dosages radioimmunologiques, le

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Immunoanalyse

signal émis est direct, spontané et très spécifique (les rayonnements parasites et les contaminations sont exceptionnels), son émission est indépendante du milieu réactionnel. Les enzymoimmunodosages sont caractérisés par l’association de deux étapes, l’étape immunologique et l’étape enzymatique, cette dernière étant particulièrement sensible aux variations des conditions expérimentales : temps de réaction enzymatique, température, pH et parfois exposition à la lumière. Ce dernier facteur intervient par exemple lorsque la réaction enzymatique fait appel au peroxyde d’hydrogène, cette molécule se dissociant rapidement à la lumière visible. Certains facteurs sériques peuvent également interférer dans la réaction enzymatique : – le signal d’absorbance lumineuse est caractérisé par une faible spécificité (interférences des bulles, imperfections des surfaces des puits ou cupules…) et par une dynamique de signal réduite (limite de la loi de Beer-Lambert : absorbance de 2,5) ; – le signal fluorescent est peu spécifique (fluorescences parasites, phénomènes de diffusion), dépend du milieu réactionnel (influence sur le rendement quantique) mais offre une plus grande dynamique (jusqu’à cinq ordres de grandeur) ; pour ces deux précédents signaux, les fluctuations (intensité, longueur d’onde) de la source lumineuse représentent un facteur de variabilité supplémentaire ; – le signal luminescent est influencé par la composition du milieu réactionnel (influence sur le rendement quantique) mais il est plus spécifique que le signal fluorescent (absence de source de lumière parasite). La limite de détection des méthodes enzymatiques utilisant le signal d’absorption lumineuse peut être améliorée en utilisant des systèmes d’amplification qui consistent à enchaîner des réactions enzymatiques provoquant l’augmentation du nombre de molécules absorbantes. Le signal mesuré est ainsi considérablement amplifié. Cependant la limite de détection n’est pas abaissée dans les mêmes proportions, en raison de l’augmentation concomitante du bruit de fond. Un exemple de stratégie d’amplification est présenté sur la figure suivante (fig.19).

Principes et techniques en immunoanalyse

Légende Ac de capture fixé sur une phase solide

Mesure de l’absorbance du produit

Ag analyte Ag marqué par une enzyme (E)

(En excès)

Substrats Produits

Lavages Addition du substrat

Enzymes de recyclage (ER)

(En excès)

Figure : 19 – Principe d’un système d’amplification enzymatique. Dans ce système d’amplification enzymatique, après élimination par lavages de l’excès d’antigène marqué, l’enzyme « marqueur » transforme le substrat 1 (S1) en produit 1 (P1). P1 est ensuite transformé en un produit 1 modifié (P1’) par une première enzyme de recyclage (ER1) qui, au cours de la même réaction, transforme un substrat 2 (S2) chromogène (en excès) en produit 2 (P2) coloré, dont l’absorbance est mesurée. Le processus d’amplification est permis par le recyclage de P1’ en P1 par une deuxième enzyme de recyclage (ER2) qui, de manière similaire à ER1, transforme le substrat 3 (en excès) en produit 3. Le produit 1 formé va être de nouveau transformé par ER1, ce qui entraîne la formation de nouvelles molécules de produit 2. Ainsi une molécule de produit 1 initiale permet de générer un grand nombre de molécules de produit 2 grâce à un système de recyclage enzymatique conduisant à l’amplification du signal d’absorption lumineuse. Cette stratégie a été commercialisée : le marqueur enzymatique, la phosphatase alcaline, déphosphoryle le NADPH, H+ (substrat 1) en NADH, H+ (produit 1). Le NADH, H+ formé est le cofacteur (cosubstrat) de la diaphorase (enzyme de recyclage 1) qui transforme le substrat 2 en formazan (produit coloré). Le NAD+ obtenu par cette réaction est ensuite recyclé en NADH, H+ par la réaction catalysée par l’alcool déshydrogénase (enzyme de recyclage 2).

3.2.5 Techniques automatisées Le tableau suivant (tableau 2) présente les automates d’immunoanalyse utilisant des techniques d’enzymoimmunodosages basées sur la mesure d’un signal d’absorption lumineuse.

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Immunoanalyse

Tableau : 2 – Techniques associées avec une mesure d’un signal

d’absorption lumineuse. Phase solide Technique

Signal

Mode de séparation

Marqueur

Type de lecture

ACMIA

Particules de dioxyde de chrome

Aimantation

β-galactosidase (substrat chromogène : rouge de chlorophénol)

Abs

EMIT®

Phase homogène

Pas de séparation

G6PDH (Leuconostoc mesenteroides)

Abs

CEDIA®

Phase homogène

Pas de séparation

β-galactosidase (fragment donneur)

Abs

Nature

ACMIA : Antibody Conjugated Magnetic ImmunoAssay EMIT® : Enzyme Multiplied Immunoassay Technique CEDIA® : Cloned Enzyme Donor ImmunoAssay G6PDH : Glucose 6 Phosphate Deshydrogénase

Abs : Absorbance

3.3. Marqueurs luminescents Depuis environ trente ans, comme alternative à l’utilisation des marqueurs radioactifs, le couplage de luminophores à des anticorps ou à des antigènes a été appliqué avec succès à de nombreuses techniques d’immunodosage. Le terme de luminophore est utilisé pour désigner toute molécule ou tout groupement susceptible d’émettre de la lumière sous l’effet d’une excitation appropriée. Alors que le marqueur radioactif émet un signal direct spontané, le marqueur luminescent émet un signal provoqué par un apport d’énergie extérieure. Les immunodosages pour lesquels le signal physique détecté est un signal lumineux, peuvent être désignés soit par l’abréviation LIA (LuminoImmunoAssay) lorsqu’il s’agit de méthodes par compétition, soit par l’abréviation ILMA (ImmunoLuminoMetric Assay) lorsqu’il s’agit de méthodes immunométriques.

Principes et techniques en immunoanalyse

3.3.1 Généralités sur les phénomènes de luminescence moléculaire 3.3.1.1 Niveaux d’énergie moléculaire

L’énergie d’une molécule est en première approximation la somme de trois termes : l’énergie Er due aux mouvements de rotation de la molécule autour de son centre d’inertie, l’énergie Ev due aux vibrations des atomes de la molécule les uns par rapport aux autres, et enfin l’énergie électronique Ee qui dépend de la répartition des électrons au sein de la molécule. Er, Ev et Ee sont quantifiées ; leur variation est discontinue. Le quantum d’énergie séparant un niveau d’énergie d’un autre niveau immédiatement supérieur est de l’ordre de 10–22 J (soit environ 10–3 eV) pour Er, 10–21 à 10–20 J (soit environ 10–2 à 10–1 eV) pour Ev et 10–19 à 10–18 J (soit environ 1 à 10 eV) pour Ee, ce qui correspond à l’énergie des photons du domaine UV-visible. Les différents niveaux d’énergie d’une molécule sont représentés de manière schématique (fig. 20).

Énergie V2

État excité

J3 J2 J1 J0

V1 V0

E1

V2

État fondamental E0, E1 : V0, V1, V2 : J0, J1, J2, J3 :

J3 J2 J1 J0

V1 V0

E0

niveaux électroniques niveaux de vibration niveaux de rotation

Figure : 20 – Niveaux d’énergie d’une molécule. 3.3.1.2 Origine de la luminescence moléculaire

Une molécule qui absorbe suffisamment d’énergie pour passer sur un niveau d’énergie (électronique, vibrationnelle et rotationnelle) supérieur (niveau excité) revient spontanément à son niveau d’énergie fondamental. Ce retour peut se faire avec émission de photons du domaine optique : ceci constitue le phénomène de luminescence.

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Immunoanalyse

• Phénomène d’absorption : Le quantum d’énergie séparant deux niveaux électroniques étant de quelques électron-volts, une énergie au moins équivalente doit être apportée à la molécule pour qu’elle puisse passer dans un état électronique excité. L’énergie fournie à la molécule peut être de nature lumineuse (photons UV, visible), électrique, chimique, mécanique... • Mécanisme d’émission : Divers processus permettent le retour de l’état excité à l’état fondamental. Certains sont non radiatifs comme la relaxation vibrationnelle à l’intérieur d’un même état électronique, ainsi que la conversion interne entre les différents états électroniques. D’autres sont radiatifs et constituent la luminescence moléculaire. Les différents processus de désexcitation sont représentés sur le diagramme suivant (fig. 21).

Énergie RV

CI

S2 S1

S

A

T

F CI

T1

RV

P CI

V4 V3 V2 V1 V0

S0

A: F: P: S0 : S1, S2 : T1 : RV : CI : S>T:

Absorption Fluorescence Phosphorescence État singulet fondamental États singulets excités État triplet Relaxation vibrationnelle Conversion interne Conversion interne avec changement de multiplicité spectrale

Figure : 21 – Diagramme des niveaux d’énergie d’une molécule indiquant les différents mécanismes de désexcitation radiative et non radiative. 3.3.1.3 Différents types de luminescence utilisés en immunoanalyse

La distinction repose sur la nature de l’énergie d’excitation d’une part et sur le mode de désexcitation d’autre part (tableau 3).

Principes et techniques en immunoanalyse

Tableau : 3 – Principaux types de luminescence utilisés

en immunoanalyse. Énergie d’excitation

Type d’émission

lumineuse

photoluminescence S* → S fluorescence T* → S phosphorescence

chimique Cas général d’une réaction chimique Cas particulier de luminescence rencontrée chez des organismes vivants

chimiluminescence S* → S chimiluminescence S* → S bioluminescence

radioactivité

radioluminescence

électrique

électrochimiluminescence

thermique

thermochimiluminescence

• La photoluminescence, qui englobe la fluorescence et la phosphorescence, est un phénomène d’émission consécutif à une excitation lumineuse (photons UV, visible). La fluorescence est caractérisée par des transitions électroniques entre un état singulet excité et l’état singulet fondamental (S* → S). C’est un phénomène rapide, la durée de vie moyenne τ des états excités étant de l’ordre de 10–9 à 10–8 s. • La phosphorescence est caractérisée par des transitions entre un état triplet excité et l’état singulet fondamental (T* → S). C’est un phénomène lent, la durée de vie des états excités triplets étant beaucoup plus longue que celle des états singulets (τ > 10–6 s). La chimiluminescence est un phénomène radiatif consécutif à une réaction chimique produisant une molécule dans un état excité. Ce phénomène est caractérisé principalement par une transition radiative S* → S. La bioluminescence est un cas particulier de la chimiluminescence. Ce phénomène est retrouvé chez certains êtres vivants et nécessite l’intervention de réactions enzymatiques (exemple du système luciférine-luciférase retrouvé dans divers organismes). • La radioluminescence est un phénomène radiatif consécutif à l’interaction entre les rayonnements électromagnétiques γ et X (iode 125, cobalt 57) et un cristal d’iodure de sodium, ou entre une particule β– (tritium) et un liquide scintillant. La radioluminescence est à la base du mode de détection de la radioactivité (cf. § 3.1.2.2.2.). • L’électrochimiluminescence est un phénomène radiatif consécutif à l’application d’une différence de potentiel qui provoque l’émission lumineuse (λ = 620 nm) à partir d’un chélate de ruthénium (cf. § 3.3.3.4.2.).

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Immunoanalyse

• La thermochimiluminescence est un processus radiatif consécutif à l’excitation de molécules par une énergie thermique.

3.3.2 Marqueurs fluorescents 3.3.2.1 Propriétés d’émission

3.3.2.1.1 Spectres de fluorescence moléculaire

Les spectres d’émission moléculaire sont des spectres de bandes car les états électroniques excités et fondamentaux comportent différents niveaux vibrationnels rapprochés, plus ou moins peuplés. De ce fait, les transitions d’émission possibles entre deux états électroniques sont multiples et il en résulte un spectre de bande dont la largeur est généralement comprise entre 10 et 50 nm. D’autre part, en raison des phénomènes de perte d’énergie par désexcitation vibrationnelle ou conversion interne, préalables à l’émission de photons, les molécules émettent un rayonnement de fluorescence d’énergie inférieure à celle du rayonnement d’excitation, donc de plus grande longueur d’onde (fig. 22). Absorbance (1) ou intensité (2)

1

2

450

500

550

λ (nm)

λmax λmax (abs) (émis) 492 nm 520 nm

Figure : 22 – Spectres d’absorption (1) et d’émission (2) de la fluorescéine. 3.3.2.1.2 Intensité de fluorescence

Dans un milieu donné et à flux lumineux excitateur monochromatique constant, l’intensité de fluorescence d’un fluorophore à faible concentration est proportionnelle à la concentration molaire C du fluorophore, à son absorptivité molaire ε et à son rendement quantique de fluorescence ΦF (rapport du nombre de photons émis par fluorescence au nombre de photons incidents absorbés). Donc, en première approximation, dans un milieu dilué (cas de l’immunoanalyse), le nombre n de photons émis par unité de temps est donné par la relation : n = k ⋅ ε ⋅ ΦF ⋅ C

Principes et techniques en immunoanalyse

3.3.2.1.3 Déclin de fluorescence (fig. 23) Pour une population de molécules identiques, excitées simultanément par un flux lumineux excitateur monochromatique constant, le déclin de l’intensité d’émission lumineuse après l’arrêt de l’excitation suit une loi du type :

It = I0 . e –t/τ où I 0 est l’intensité de fluorescence à l’instant où cesse l’excitation, It est l’intensité de fluorescence à l’instant t après l’arrêt de l’excitation et τ la constante de temps de déclin de fluorescence ; cette constante est égale à la durée de vie moyenne d’un état excité (de l’ordre de la nanoseconde pour un état singulet). Intensité de fluorescence

I0

Temps (arrêt de l’excitation)

Figure : 23 – Courbe de déclin de fluorescence. 3.3.2.1.4 Polarisation de fluorescence La lumière naturelle est constituée d’ondes transversales vibrant perpendiculairement à la direction de propagation, les vibrations ayant une orientation quelconque autour de l’axe de propagation ; il n’existe donc pas de plan de vibration privilégié. Après traversée d’un polariseur, il ne subsiste qu’un seul plan de vibration : la lumière obtenue est dite polarisée rectilignement (fig. 24).

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90

Immunoanalyse

Lumière naturelle

Vibrations Polarisateur

Lumière polarisée

Propagation

Figure : 24 – Polarisation de la lumière. Lorsqu’une population de molécules fluorescentes est éclairée par un faisceau de lumière incidente polarisée et de longueur d’onde appropriée, seules les molécules convenablement orientées sont excitées. Si ces molécules excitées sont libres de tourner sur elles-mêmes rapidement et indépendamment les unes des autres (cas d’un fluorophore en solution dans un liquide), elles prennent de nouvelles orientations quelconques au cours de leur désexcitation : la lumière émise n’a alors aucun plan de vibration privilégié, elle n’est pas polarisée. Au contraire, lorsque les molécules excitées tournent lentement sur elles-mêmes, la lumière émise par fluorescence est partiellement polarisée : c’est le cas des édifices moléculaires de grande taille en solution aqueuse, comme par exemple les complexes anticorpsantigènes marqués (fig. 25). Milieu réactionnel

Excitation avec lumière polarisée

Milieu réactionnel

Émission

Traceur libre Rotation rapide Émission de lumière non polarisée : Ag marqué

Excitation avec lumière polarisée

Émission

Traceur lié Rotation lente Émission de lumière polarisée : Anticorps

Figure : 25 – Principe de la polarisation de fluorescence.

Principes et techniques en immunoanalyse

L’état de polarisation de la fluorescence peut être exprimé quantitativement par le taux de polarisation P : P=

I − I ⊥ I + I ⊥

où I|| représente l’intensité de fluorescence mesurée (grâce à un analyseur) dans un plan de vibration parallèle à la direction de vibration de la lumière excitatrice, et I⊥ représente l’intensité de fluorescence mesurée dans un plan de vibration perpendiculaire à la direction de vibration de la lumière excitatrice. Par exemple, dans le cas d’un fluoroimmunodosage sans séparation de phases, la valeur de P est d’autant plus élevée que la proportion d’antigène marqué (petite molécule) impliquée dans des complexes antigèneanticorps (grosse molécule) est plus grande. 3.3.2.1.5 Phénomènes parasites en fluorimétrie Au cours de la mesure de l’intensité de fluorescence d’une substance, le signal peut être perturbé par différents phénomènes parasites non spécifiques, inhérents à l’échantillon lui-même. Ce sont, d’une part les phénomènes de diffusion produisant un rayonnement indésirable détecté en même temps que le rayonnement de fluorescence, d’autre part les phénomènes de « quenching » provoquant une extinction partielle de l’intensité de la fluorescence.

• Les phénomènes de diffusion Ils sont de deux types : la diffusion RAYLEIGH et la diffusion RAMAN. Lorsqu’un échantillon est éclairé par un faisceau de lumière incidente monochromatique, une partie non négligeable de ce rayonnement est diffusée dans toutes les directions de l’espace, sans perte d’énergie pour les photons, donc sans modification de longueur d’onde. Ce phénomène, appelé diffusion RAYLEIGH, est d’autant plus important que le milieu est plus riche en macromolécules ou en particules en suspension (cas des milieux biologiques). D’autre part, par un autre mécanisme de diffusion, certains photons incidents perdent une partie de leur énergie qui est transférée aux molécules du milieu sous forme d’énergie vibrationnelle et rotationnelle. La lumière diffusée a alors une longueur d’onde supérieure à celle de la lumière incidente : c’est le phénomène de diffusion RAMAN. Ce phénomène parasite en fluorimétrie, dû principalement aux molécules de solvant, est caractérisé par une intensité plus faible que celle de la diffusion RAYLEIGH. Il est cependant plus gênant car la diffusion RAMAN se produit, comme l’émission du fluorophore, à une longueur d’onde supérieure à la longueur d’onde d’excitation (fig. 26).

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Immunoanalyse

Diffusion Rayleigh Intensité Émission de fluorescence

Diffusion Raman

λexc.

Longueur d’onde

Figure : 26 – Spectre d’émission et de diffusion d’un échantillon fluorescent excité par un rayonnement de longueur d’onde moyenne lexc. • Les phénomènes de quenching La désexcitation non radiative des molécules fluorescentes peut se faire par transfert d’énergie à des molécules environnantes. Celles-ci peuvent également absorber des photons de fluorescence. L’ensemble de ces phénomènes, appelé quenching, contribue à l’affaiblissement de l’intensité de fluorescence. Il est donc étroitement lié à la composition du milieu : par exemple, la présence d’oxygène en solution dans un milieu aqueux entraîne une extinction partielle de la fluorescence de nombreuses molécules. 3.3.2.2 Principaux fluorophores

Outre les qualités propres à tout marqueur (facilité de marquage, rendement de marquage élevé, stabilité, coût modéré, etc.), le marqueur fluorescent doit si possible délivrer un signal intense et spécifique. L’intensité du signal dépend principalement de la puissance de la source d’excitation et du rendement quantique du fluorophore. Les fluorophores conventionnels, comme la fluorescéine par exemple, délivrent un signal intense mais peu spécifique car plusieurs phénomènes parasites peuvent augmenter le bruit de fond optique dans la bande passante de détection. Ces phénomènes parasites comprennent les phénomènes de diffusion RAYLEIGH et RAMAN, et des phénomènes de fluorescence parasite telles que la fluorescence des cuves de mesure, la fluorescence de certains composés naturels du plasma (protéines, bilirubine, NADH, porphyrines...) ou des réactifs. Les diffusions parasites augmentent le bruit de fond optique quand le déplacement de STOKES (intervalle de longueur d’onde séparant les maxima des spectres d’émission et d’excitation) est faible. Quant aux fluorescences parasites, le plus souvent dans le bleu et le vert, elles contribuent

Principes et techniques en immunoanalyse

au bruit de fond optique lorsque le fluorophore émet dans le même domaine de longueur d’onde. À titre d’exemple, la figure suivante (fig. 27) représente le spectre d’émission d’un fluorophore délivrant un signal peu spécifique. Diffusion Rayleigh Intensité Fluorescence à détecter Fluorescences parasites

Diffusion Raman

400 λexc.

500

600

λ (nm)

Bande passante de détection

Figure : 27 – Exemple théorique de signal fluorescent peu spécifique. En immunoanalyse, l’obtention d’une bonne limite de détection nécessite un rapport signal sur bruit de fond élevé, c’est-à-dire l’utilisation de fluorophores délivrant des signaux intenses et détectables avec le maximum de spécificité. Cette spécificité de détection peut être améliorée par deux types de sélectivité, l’une en longueur d’onde, l’autre en temps. Lorsqu’un fluorophore a une longueur d’onde d’émission élevée (rouge), la contribution des phénomènes de fluorescence parasite est faible au niveau de la bande passante de détection. D’autre part, quand le déplacement de STOKES est important, les photons de diffusion ne sont pas détectés. Ces deux caractéristiques garantissent une bonne sélectivité en longueur d’onde (fig. 28). La figure 29 représente le principe de détection du signal fluorescent avec résolution temporelle tel qu’il est réalisé dans les immunodosages de type TRFIA (Time-Resolved FluoroImmunoAssay) ou TRIFMA (Time-Resolved ImmunoFluorometric Assay). La séquence d’événements constituant un cycle de mesure se compose d’une excitation par un flash lumineux d’une durée inférieure à la microseconde et, après un délai, d’un comptage dans une porte de temps (400 à 800 μs). Le délai séparant le flash lumineux de la porte de temps de détection permet de s’affranchir des fluorescences parasites dont la demi-vie est plus courte (inférieure à 50 ns) que celle des chélates de lanthanides. Le temps de comptage, qui est habituellement d’une seconde par échantillon, permet de répéter l’acquisition pendant un grand nombre de cycles et, ainsi, d’accumuler les photons émis pour obtenir un

93

94

Immunoanalyse

signal très intense. Par exemple, si l’excitation impulsionnelle est réalisée à une fréquence de 1 000 Hz, un flash lumineux est émis toutes les millisecondes. Le temps de comptage étant d’une seconde, la détection des photons de fluorescence est effectuée pendant 1 000 portes de temps (1/ms). Diffusion Rayleigh Intensité Fluorescence à détecter Fluorescences parasites

Diffusion Raman

400

500

λexc.

600

λ (nm)

Bande passante de détection

Figure : 28 – Exemple théorique de signal fluorescent très spécifique.

Intensité

Fluorescence du chélate de lanthanides

Fluorescences parasites

Excitation impulsionnelle

Détection

Excitation impulsionnelle

Détection

Temps

Figure : 29 – Principe de détection du signal fluorescent avec résolution temporelle (21).

Principes et techniques en immunoanalyse

Le tableau suivant indique les propriétés de quelques fluorophores (tableau 4). Les fluorophores conventionnels (fluorescéine, rhodamine B, ANS, ombelliférone) présentent les inconvénients de posséder un déplacement de Stokes faible (< 100 nm), une longueur d’onde d’émission inférieure à 600 nm et un temps de déclin de fluorescence court (< 20 ns). Les phycobiliprotéines sont plus intéressantes en raison de leur émission dans le rouge avec un rendement quantique élevé. Les chélates de lanthanides (europium, terbium, samarium) ont, en plus, une constante de temps de déclin de fluorescence élevée (10 à 1 000 μs) permettant une sélection du temps de mesure. Enfin l’érythrosine est un marqueur phosphorescent. Tableau : 4 – Propriétés de fluorophores utilisés en immunoanalyse.

bNTA)* ion lanthanide sous forme de chélate (b avec la bnaphtyltrifluoroacétone (21).

Fluorophore

Absorption lmax (nm)

Émission lmax (nm)

Rendement quantique

Demivie t (ns)

Isothiocyanate de fluorescéine

492

520

0,85

4,5

Isothiocyanate de rhodamine B

550

585

0,70

3,0

Acide anilinonaphtalène sulfonique (ANS)

385

471

0,80

16,0

4-méthylombelliférone

364

448

0,69



Phycobiliprotéines

550-620

580-660

0,50-0,98



Eu (βNTA)*

340

613



714 000

Sm3+ (βNTA)*

340

600, 643

...

65 000

Erythrosine

492

517

0,01

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3+

Dans les immunodosages, les fluorophores peuvent être employés de deux façons différentes (fig. 30). Ils peuvent dans un premier cas servir de marqueur, il s’agira de fluorescence directe. Dans un deuxième cas, le marqueur sera une enzyme qui agira sur un substrat fluorigène pour donner un produit fluorescent, il s’agira de fluorescence indirecte. En pratique, les méthodes utilisant la fluorescence indirecte sont basées sur l’utilisation du couple phosphatase alcaline / 4-méthyl-ombelliféryl-phosphate.

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96

Immunoanalyse

Légende Anticorps marqué par un fluorophore

(a) Anticorps marqué par une enzyme Substrat fluorigène Fluorophore produit par une réaction enzymatique

(b)

Figure : 30 – Principe des méthodes utilisant la fluorescence directe (a) et indirecte (b). Le tableau suivant présente les avantages et inconvénients des marqueurs fluorescents (tableau 5) : Tableau : 5 – Avantages et inconvénients du marqueur fluorescent (21). Avantages - Stabilité des produits marqués - Facilité de marquage - Signal intense et spécifique (chélates de lanthanides) - Grande dynamique du signal - Mise au point d’immunodosages sans séparation de phases possible - Mise au point possible du dosage simultané de plusieurs analytes

Inconvénients - Appareillage complexe (mesure avec résolution en temps) - Signal peu spécifique (fluorophores conventionnels) : mauvaises détectabilité et reproductibilité - Risque de contamination par l’Europium exogène

3.3.2.3 Détection des marqueurs fluorescents

Dans le cas des fluoroimmunodosages et des phosphoroimmunodosages, le marqueur émet un signal lumineux consécutivement à une excitation photonique UV ou visible, alors que dans le cas des immunodosages par chimiluminescence, l’émission du signal lumineux résulte d’une réaction chimique provoquée par l’addition d’un réactif approprié. La détection de la lumière est toujours assurée par un photomultiplicateur fonctionnant soit en mode analogique (fluorimètres classiques), soit en comptage de photons (fluorimètres à résolution temporelle et luminomètres modernes). La technique du comptage de photons permet l’obtention d’un signal numérique plus stable et moins parasité par le bruit de fond électronique ;

Principes et techniques en immunoanalyse

les taux de comptage sont traités comme dans le cas de la détection des radioéléments (cf. § 3.1.2.4.2.). 3.3.2.3.1 Instrumentation en fluorimétrie classique Le schéma général d’un fluorimètre est représenté ci-après (fig. 31).

Cuve Échantillon Source lumineuse

Monochromateur d’excitation

Monochromateur d’émission

Enregistreur PM Affichage du signal

Photomultiplicateur

Ampli

Figure : 31 – Schéma de principe d’un fluorimètre. 3.3.2.3.2 Instrumentation en fluorimétrie à résolution temporelle La fluorimétrie à résolution temporelle est une technique permettant de détecter très sélectivement les fluorophores à constante de déclin élevée (chélates de lanthanides) (21, 17) (fig. 29). Les sources lumineuses utilisées pour l’excitation sont des lampes au xénon ou des lasers pulsés qui émettent des flashs lumineux brefs et répétitifs (quelques dizaines à quelques centaines par seconde) entre lesquels sont effectuées les mesures d’intensité de fluorescence. La détection se fait par comptage de photons dans une porte de temps, après un certain retard par rapport à l’excitation impulsionnelle. La double sélectivité en longueur d’onde (filtres optiques) et en temps (porte de temps) permet d’obtenir une limite de détection du signal très basse (10–18 mol pour Eu3+). 3.3.2.3.3 Instrumentation pour les mesures de polarisation de fluorescence Dans cette technique fluorimétrique, la grandeur mesurée est le taux de polarisation P dont l’obtention nécessite la détermination de deux intensités de fluorescence dans deux plans de vibration perpendiculaires entre eux. Ces deux intensités sont généralement mesurées de façon séquentielle sur chaque échantillon, soit par rotation de 90 degrés du polariseur, soit par rotation de 90 degrés de l’analyseur (fig. 32). Ce type de mesure s’applique à des immunodosages par compétition, avec marquage d’antigène et sans séparation de phases. Le fluorophore habituellement utilisé est la fluorescéine, dont le rendement quantique est élevé.

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Immunoanalyse

Source Filtre Polarisateur

Échantillon

90° Analyseur Filtre Photomultiplicateur

Mesures de I|| et I⊥

P=

I − I ⊥ I +I ⊥ Figure : 32 – Schéma de principe d’une mesure de polarisation de fluorescence (21).

3.3.2.4 Méthodes de dosage avec marqueurs fluorescents

Le classement « méthodes en phase homogène » et « méthodes en phase hétérogène » pour les techniques de fluoroimmunodosages, est préféré à celui de « méthodes par compétition » (FIA) et « méthodes immunométriques » (IFMA). 3.3.2.4.1 Méthodes en phase homogène Ces méthodes sont basées sur la mesure de la modulation (exaltation ou atténuation) du signal fluorescent consécutive à la liaison antigèneanticorps. Du fait des difficultés rencontrées (présence de composés endogènes fluorescents, phénomène de quenching), les méthodes en phase homogène ont initialement été réservées au dosage des haptènes selon un schéma réactionnel compétitif qui ne permettait pas d’atteindre des limites de détection très basses.

• Immunodosages par polarisation de fluorescence (FPIA) Des automates reposant sur ce principe et utilisant des fluorophores conventionnels (fluorescéine) ont été développés dès 1980 par plusieurs

Principes et techniques en immunoanalyse

sociétés, notamment pour le dosage de médicaments ou d’hormones stéroïdiennes (exemple : le cortisol). Les analytes de haut poids moléculaires sont difficiles à doser par FPIA pour deux raisons. Premièrement, la liaison à un anticorps d’un antigène de masse molaire similaire ne produit qu’un faible changement dans la polarisation de fluorescence. Deuxièmement, les états excités de la plupart des marqueurs fluorescents ont un temps de demi-vie trop faible (10–9 à 10–7s) pour permettre la réorientation rotationnelle des complexes antigène-anticorps de masse molaire élevée. • Immunodosages par modulation de fluorescence Parmi ces méthodes, qui ont trouvé peu d’applications en routine, sont distingués les immunodosages par exaltation de fluorescence et les immunodosages par quenching de fluorescence. Dans les premiers, sont utilisés des composés (acide anilino-naphtalène sulfonique, N-pyrène maléimide) pour lesquels l’intensité de fluorescence est augmentée par la liaison antigène-anticorps. Dans les seconds, au contraire, la liaison à l’anticorps atténue la fluorescence de substances telles que la fluorescéine. Pour contourner les inconvénients des fluorophores conventionnels et profiter des avantages de la mesure avec résolution en temps, certains auteurs ont réussi à préparer de nouveaux chélates de lanthanides directement fluorescents en solution aqueuse et présentant des rendements quantiques élevés. Ces composés ont été utilisés dans le cadre d’immunodosages par quenching de fluorescence, le signal étant délivré uniquement par le réactif marqué libre en solution. • Fluoroimmunodosages par transfert d’énergie d’excitation (FETIA) Ces méthodes sont basées sur le transfert résonnant d’énergie de fluorescence (FRET). Le FRET (Fluorescence Resonance Energy Transfer) est un phénomène quantique non radiatif se produisant entre deux fluorophores situés très proches l’un de l’autre (distance : 1 à 10 nm) et dont le spectre d’émission de l’un (fluorophore donneur) recouvre le spectre d’excitation de l’autre (fluorophore accepteur). Lorsque le fluorophore donneur est excité par un photon, il peut transmettre son énergie au fluorophore accepteur qui alors se retrouve dans un état excité. Le fluorophore accepteur revient ensuite à son état fondamental en émettant de la lumière. L’importance du transfert d’énergie est inversement proportionnelle à la puissance 6 de la distance entre les deux fluorophores, et ce transfert est directement relié au chevauchement entre le spectre d’émission du fluorophore donneur et le spectre d’excitation du fluorophore accepteur. Ces méthodes mettent en jeu deux fluorophores : dans le cas d’une méthode par compétition, un fluorophore est lié à l’antigène et l’autre à l’anticorps (fig. 4a), dans le cas d’une méthode immunométrique, les deux fluorophores sont liés à deux anticorps différents (fig. 7). Lors de la réaction antigène-anticorps, les deux marqueurs se rapprochent l’un de l’autre à des distances d’environ 10 nm et le transfert d’énergie peut avoir lieu. Contrairement à la FPIA, la FETIA est applicable à la fois aux petites et aux grosses molécules. Les dosages sont réalisés par suivi de la cinétique

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100

Immunoanalyse

de fluorescence dans la phase initiale de la réaction antigène-anticorps, ce qui permet de réduire l’interférence de la fluorescence parasite de l’échantillon qui normalement est constante. Dans une des premières applications, les deux fluorophores utilisés étaient la fluorescéine comme donneur d’énergie et la rhodamine comme accepteur d’énergie. Dans ce système, c’était la diminution de l’intensité du rayonnement de fluorescence émis par le fluorophore donneur (quenching par le fluorophore accepteur) qui était suivie et non l’augmentation de l’intensité de fluorescence du fluorophore accepteur. En théorie, le suivi de l’augmentation de l’intensité de fluorescence du fluorophore accepteur devait permettre d’obtenir une plus grande sensibilité. Néanmoins, la difficulté d’obtenir un fluorophore accepteur non excitable par le rayonnement servant à exciter le fluorophore donneur ne permet pas d’utiliser cette méthodologie. Cette méthode fut améliorée par la mise au point des chélates de terres rares qui ont permis l’utilisation de la fluorimétrie à résolution temporelle. Ces marqueurs, à demi-vie élevée (de l’ordre de la milliseconde), sont utilisés comme fluorophores donneurs. Les accepteurs sont des fluorophores conventionnels qui absorbent fortement à la longueur d’onde d’émission du chélate. L’irradiation avec un flash lumineux très bref est suivie par une rapide diminution de la fluorescence des impuretés contenues dans l’échantillon (fluorescence parasite) et de la fluorescence émise par le fluorophore accepteur (demi-vie de l’état excité très courte). La mesure de la fluorescence avec un temps de retard par rapport à l’excitation du donneur permet de détecter uniquement la fluorescence de l’accepteur obtenue après transfert résonnant d’énergie. Ainsi la diminution du bruit de fond et la possibilité de mesurer l’augmentation de fluorescence de l’accepteur ont permis d’améliorer de manière importante la sensibilité de la méthode FETIA. Actuellement, un système d’immunodosage utilisant la méthode FETIA est commercialisé : il s’agit de la technique TRACE® (22, 23) utilisée sur un automate. Elle est basée sur l’utilisation d’un couple de fluorophores comportant un cryptate d’Europium (Eu3+) (fluorophore donneur) et une phycobiliprotéine (fluorophore accepteur). 3.3.2.4.2 Méthodes en phase hétérogène

Terminologie : • Fluorescence directe (marqueur = fluorophore) – Méthodes compétitives : FIA (FluoroImmunoAssay) ou TRFIA (Time-resolved FluoroImmunoAssay) si utilisation de fluorimétrie à résolution temporelle.

Principes et techniques en immunoanalyse

– Méthodes non compétitives : IFMA (ImmunoFluoroMetric Assay) ou TRIFMA (Time-resolved ImmunoFluoroMetric Assay) si utilisation de fluorimétrie à résolution temporelle. • Fluorescence indirecte (marqueur = enzyme) : ELFIA pour Enzyme Linked FluoroImmunoAssay Marqueurs utilisés et méthodes de dosage : • Marqueur fluorophore À l’heure actuelle, la principale application de la fluorescence directe en phase hétérogène, est la technologie LUMINEX®. Cette technologie récente basée sur le principe de la cytométrie en flux (17) allie l’utilisation de microsphères fluorescentes et une double lecture après excitation par deux lasers. Les microsphères ou billes sont en polystyrène et ont un diamètre de 5,6 μ. Deux fluorochromes sont incorporés à l’intérieur des billes lors de leur fabrication. Il existe environ une centaine de billes différentes caractérisées par le ratio des deux fluorochromes incorporés. Les billes servent de support à différentes molécules : antigènes (dosage d’un anticorps), anticorps (dosage d’un antigène) ou sondes nucléiques (identification d’allèles particuliers). Ainsi chaque bille, identifiée par le ratio des deux fluorochromes incorporés en elles, est liée à un antigène, à un anticorps ou à une sonde spécifique. Les billes sont en mélange au début de l’analyse et vont être mises en contact avec le fluide biologique où se trouvent les analytes. Ces derniers se fixent spécifiquement sur les billes possédant l’antigène ou l’anticorps les reconnaissant. Un anticorps marqué généralement à la phycoérythrine et dirigé contre l’antigène ou l’anticorps analyte, se fixe ensuite sur les différents complexes antigène-anticorps. L’excès d’anticorps marqué à la phycoérythrine est éliminé par lavages. Les billes sont entraînées ensuite dans la veine liquide et sont séparées. À la sortie de la veine liquide, les billes sont excitées par un jeu de deux lasers : un laser rouge à diode (633 nm) et un laser vert (532nm) (fig. 33). Le laser rouge excite les fluorochromes incorporés aux billes de polystyrène. Ceux-ci émettent un rayonnement de fluorescence à une longueur d’onde spécifique de chaque bille, ce qui permet l’identification de la bille concernée et donc de l’analyte éventuellement fixé dessus. Le laser vert excite la phycoérythrine et la fluorescence émise (575 nm) témoigne de la réaction antigène-anticorps en surface de la bille et détermine la positivité de la réaction en fonction d’un seuil de fluorescence propre à chaque bille.

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Immunoanalyse

Légende

Laser vert λ = 532 nm

Antigène analyte

Fluorescence (λ = 575 nm) = positivité de la réaction antigène-anticorps

Antigène lié aux billes Anticorps analyte

Laser rouge λ = 633 nm

Anticorps lié aux billes

Fluorescence dont la λ permet l’identification de la bille et donc de l’analyte cible

Phycoérythrine Bille fluorescente

(a)

(b)

Figure : 33 – Détection d’antigènes (a) ou d’anticorps (b) à l’aide de la technologie Luminex®. • Marqueur enzymatique Les méthodes en fluorescence indirecte sont très utilisées et sont basées sur l’utilisation de la PAL comme marqueur enzymatique et du 4-méthylombelliféryl-phosphate comme substrat fluorigène. L’action de la PAL sur ce substrat va produire de la 4-méthyl-ombelliférone. Mesure du signal : L’acquisition du signal fluorescent par le fluorimètre est réalisée au cours de plusieurs cycles de mesures dans le cas de la fluorimétrie à résolution temporelle. Pour les dosages ELFIA, la lecture peut se faire au point final ou en cinétique. Le résultat est exprimé en RFU (unités relatives de fluorescence) et est converti en unités de concentration par l’intermédiaire d’une courbe de calibration. 3.3.2.4.3 Techniques automatisées Les principales techniques utilisant la fluorescence directe ou indirecte sont indiquées ci-après (tableau 6) (16).

Principes et techniques en immunoanalyse

Tableau : 6 – Principales techniques utilisant la fluorescence

directe ou indirecte. Phase solide Technique Nature MEIA ICIA FPIA

Mode de séparation

Signal Marqueur

PAL (substrat Microparticules en latex Absorption sur fluorigène : 4-méthylmatrice en Composé fibre de verre ombelliféryl anionique phosphate) Phase homogène

Type de lecture

Cinétique de fluorescence

Pas de séparation

Fluorescéine

Polarisation de fluorescence

PAL (substrat fluorigène : 4-méthylombelliféryl phosphate)

Fluorescence

ELFIA

Cône

Lavage

LUMINEX®

Billes

Cytométrie

Phycoérythrine Fluorescence

TRACE®

Phase homogène

Pas de séparation

Cryptate d’europium et XL 665

ELFIA

Mousse cellulose

Lavage

Cinétique de fluorescence

β-galac. (substrat fluorigène : 4-méthylFluorescence ombelliféryl-βD-galactopyranoside)

ELFIA

PAL (substrat fluorigène : 4-méthylFibre de verre Élution radiale ombelliféryl phosphate)

Fluorescence

ELFIA

PAL (substrat fluorigène : 4-méthylombelliféryl phosphate)

Cinétique de fluorescence

Billes

Lavage

MEIA : Microparticule Enzyme ImmunoAssay ICIA : Ion Capture Enzyme ImmunoAssay FPIA : Fluorescence Polarization ImmunoAssay ELFIA : Enzyme Linked FluoroImmunoAssay

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Immunoanalyse

3.3.3 Marqueurs chimiluminescents 3.3.3.1 Propriétés d’émission

3.3.3.1.1 Spectres de chimiluminescence L’excitation des molécules étant due à un apport d’énergie chimique, la chimiluminescence d’une espèce moléculaire est caractérisée seulement par son spectre d’émission qui est un spectre de bande. 3.3.3.1.2 Aspects quantitatifs de l’émission En chimiluminescence et en bioluminescence, l’émission de lumière commence immédiatement après le début de la réaction chimique ; l’intensité d’émission croît rapidement, passe par un maximum pour ensuite diminuer et s’annuler généralement en quelques secondes ou dizaines de secondes (fig. 34). Ici, c’est la cinétique de la réaction chimique qui détermine la cinétique de l’émission lumineuse. Le nombre total de photons émis est proportionnel au nombre de molécules de luminophore, à condition que le réactif déclenchant la réaction chimique soit en excès. Des cinétiques rapides et des cinétiques plus lentes sont distinguées. Dans le premier cas, la cellule de mesure doit être située à proximité du détecteur lors du déclenchement de la réaction. Comme dans le cas de la fluorescence, l’émission lumineuse peut être perturbée par des phénomènes de quenching. Intensité

Fin de la réaction

Réactif

0

10

20

30

40

50

Temps (s)

Figure : 34 – Exemple de cinétique d’émission de chimiluminescence.

Principes et techniques en immunoanalyse

La chimiluminescence peut être provoquée par d’autres méthodes que le simple mélange de réactifs chimiques : – par exemple, dans le cas de la thermochimiluminescence, le chauffage de dérivés des dioxétanes permet leur excitation, le retour à l’état fondamental est consécutif à l’émission de lumière ; – dans le cas de l’électrochimiluminescence, c’est l’application d’une différence de potentiel qui provoque l’émission lumineuse (λ = 620 nm) à partir d’un chélate de ruthénium. La principale qualité des marqueurs chimiluminescents est la très grande spécificité de leur signal. En effet, contrairement aux fluorophores, leur émission, qui ne requiert pas de lumière excitatrice, n’est pas perturbée par la lumière parasite. Cependant ces marqueurs posent souvent un problème de reproductibilité dans la détection de leur émission en raison de la variation de l’intensité lumineuse au cours de la réaction chimique. 3.3.3.2 Principaux marqueurs chimiluminescents

Les composés chimiluminescents et les procédés de marquage susceptibles d’être utilisés en immunoanalyse doivent posséder plusieurs qualités : aptitude à former des liaisons covalentes avec la molécule à marquer, réactions chimiques suffisamment douces pour ne pas affecter la molécule à coupler tout en préservant l’immunoréactivité du produit marqué, rendement quantique de luminescence peu diminué. Comme pour les fluorophores, les molécules chimiluminescentes peuvent être utilisées directement comme marqueur de la réaction antigène-anticorps (chimiluminescence directe) ou comme substrats d’un marqueur enzymatique (chimiluminescence indirecte). Plusieurs familles de composés chimiluminescents sont distinguées : les phtalhydrazides, les esters d’acridinium et les dioxétanes. 3.3.3.2.1 Les phtalhydrazides (fig. 35)

Le luminol, l’isoluminol et les dérivés substitués de l’isoluminol sont les plus utilisés. Par des réactions d’oxydation en présence de peroxyde d’hydrogène et d’un catalyseur enzymatique (peroxydase), ces molécules sont transformées en espèces excitées qui se désexcitent ensuite avec émission de photons d’énérgie hν, selon la réaction : −

OH ⎯⎯⎯⎯ → ion aminophtalate + hν luminol + H 2 O 2 ⎯peroxydase,

(λmax = 430 nm) Ces molécules peuvent être utilisées en chimiluminescence directe et indirecte. En chimiluminescence directe, le marqueur est constitué par le substrat luminogène et la peroxydase est ajoutée en fin de dosage avec le peroxyde d’hydrogène. En chimiluminescence indirecte, le marqueur est la peroxydase et le substrat luminogène est ajouté secondairement avec le peroxyde d’hydrogène.

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Immunoanalyse

3.3.3.2.2 Les esters d’acridinium (fig. 35) Contrairement à la famille de molécules précédente, ils ne nécessitent pas obligatoirement la présence d’enzymes. L’addition de peroxyde d’hydrogène en milieu alcalin suffit à déclencher la réaction de chimiluminescence. −

ester d'acridinium + H 2 O 2 ⎯OH ⎯⎯ → N-méthylacridone + hν (λmax = 470 nm) Le composé formé (N-méthylacridone) dans un état singulet excité se désexcite en émettant de la lumière. 3.3.3.2.3 Les dioxétanes (fig. 35) Ce sont des composés spontanément chimiluminescents. Il est possible de les stabiliser en greffant un groupement phosphate ou galactose. L’émission lumineuse est, alors, obtenue grâce à l’action de l’enzyme correspondante (phosphatase alcaline ou β-galactosidase). Le substrat le plus répandu est un ester d’adamantyl-1, 2-dioxétane phénylphosphate (AMPPD). CH 3

O

N

NH

+

NH NH 2

O

C RO

O

Luminol Esters d’acridinium O

O

Adamantyl dioxétane

Figure : 35 – Exemples de molécules chimiluminescentes.

Principes et techniques en immunoanalyse

Le tableau ci-dessous présente les avantages et inconvénients des marqueurs chimiluminescents (tableau 7). Tableau : 7 – Avantages et inconvénients du marqueur

chimiluminescent. Avantages - stabilité du marqueur - signal intense - pas de lumière parasite (signal très spécifique) - acquisition rapide - grande dynamique

Inconvénients - appareillage spécialisé - signal fugace (imprécision de la mesure) - quenching possible

3.3.3.3 Détection des marqueurs chimiluminescents

Les automates d’immunoanalyse utilisant des marqueurs chimiluminescents sont équipés d’un luminomètre. Un luminomètre comporte principalement une chambre échantillon, un distributeur automatique de réactif et un détecteur. 3.3.3.4 Méthodes de dosage avec marqueur chimiluminescent

3.3.3.4.1 Méthodes en phase homogène Une seule méthode est actuellement utilisée en routine. Elle repose sur la technologie LOCI™ (Luminescent Oxygen Channeling Immunoassay) (24) qui utilise deux types de réactifs associés à des particules de latex d’environ 250 nm de diamètre et un anticorps de capture biotinylé. Le premier réactif (« sensibead ») contient des particules recouvertes de streptavidine (pouvant lier l’anticorps de capture biotinylé) et dans lesquelles sont dissoutes des molécules photosensibles de phtalocyanine capables d’exciter l’oxygène (état singulet) après irradiation à 680 nm. Le deuxième réactif (« chemibead ») contient un anticorps (dosage « sandwich ») ou un antigène (dosage par compétition) lié à des particules de latex dans lesquelles sont dissoutes des molécules d’oléfine. Ces molécules peuvent réagir avec l’oxygène singulet, ce qui va secondairement exciter un composé de la famille des dioxétanes et produire le signal lumineux. Cette technique ne nécessite pas de séparation des formes liées et libres puisque l’oxygène singulet a une durée de vie d’environ 4 μs dans l’eau et ne peut donc générer la réaction de chimiluminescence que si les deux particules de latex (chemibead et sensibead) sont très proches, comme c’est le cas dans les complexes antigène-anticorps (fig. 36).

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Immunoanalyse

Légende Sensibead : particules de latex contenant de la phtalocyanine Chemibead : particules de latex contenant de l’oléfine

a) Formes non liées

Anticorps Chimiluminescence Antigène analyte Oxygène à l’état excité (singulet) Oxygène à l’état fondamental b) Formes liées

Figure : 36 – Principe de la technologie LOCI®. 3.3.3.4.2 Méthodes en phase hétérogène

Terminologie : • Chimiluminescence directe (marqueur = luminophore) – Méthodes compétitives : CLIA (ChemiLuminescence ImmunoAssay). – Méthodes non compétitives : ICMA (ImmunoChemiLuminometric Assay). • Chimiluminescence indirecte (marqueur = enzyme) – Méthodes compétitives : CLEIA (ChemiLuminescent Enzyme ImmunoAssay). – Méthodes non compétitives : ICEMA (ImmunoChemiluminoEnzymoMetric Assay). Marqueurs et méthodes de dosages : • Marqueur luminophore – Esters d’acridinium : l’ajout de peroxyde d’hydrogène et le passage en milieu alcalin déclenchent la chimiluminescence. – Ruthénium : ce fluorophore est utilisé dans la technique ECLIA (ElectroChimiLuminescence ImmunoAssay).

Principes et techniques en immunoanalyse

Dans cette technique (fig. 37), lors d’une première étape, un anticorps de capture biotinylé et un anticorps marqué au Ruthénium tris (bipyridil) Ru(bpy)2+3 se lient à l’antigène analyte contenu dans l’échantillon (méthode immunométrique). Les complexes antigène-anticorps formés se fixent sur des microparticules magnétiques tapissées de streptavidine (liaison biotine-streptavidine). Lors d’une deuxième étape, après une incubation à 37 ˚C, le mélange réactionnel est transféré dans la cellule de mesure contenant une électrode de platine. Un aimant permet de fixer les microparticules magnétiques, donc les complexes antigènes-anticorps, sur l’électrode. L’excès d’anticorps marqué au Ruthénium tris (bipyridil) Ru(bpy)2+3 est éliminé par lavages. La réaction d’électrochimiluminescence est déclenchée par une différence de potentiel appliquée au niveau de l’électrode en présence d’un donneur d’électrons : le TPA (TriPropylAmine) disponible en excès. Cette différence de potentiel permet la double oxydation d’un ion ruthénium Ru2+ et d’une molécule de tripropylamine en, respectivement, un ion Ru3+ et un cation radicalaire tripropylamine . (TPA+ ). Le cation radicalaire tripropylamine perd sa charge positive en libérant un proton H+ dans le milieu, puis cède un électron à l’ion Ru3+ dans une réaction exergonique permettant d’obtenir l’ion Ru2+ dans un état excité. Le retour à l’état fondamental du Ru2+ est effectué par émission de photons à une longueur d’onde de 620 nm. Une amplification du signal est obtenue en effectuant plusieurs cycles d’oxydoréduction pour une même molécule de ruthénium (excès de TPA).

Légende Antigène analyte Anticorps Microparticules magnéttiques Chélate de ruthénium Électron Tripropylamine

Figure : 37 – Principe de l’électrochimiluminescence (ECLIA).

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Immunoanalyse

• Marqueur enzymatique – PAL : cette enzyme déphosphoryle un ester d’adamantyl-1, 2-dioxétane phénylphosphate (AMPPD) et produit de l’adamantyl dioxétane instable, qui se décompose spontanément en donnant une molécule à l’état excité qui émet de la lumière en se désexcitant. Le signal peut être amplifié en ajoutant de la fluorescéine au milieu réactionnel. – HRP : Cette enzyme va catalyser la transformation du luminol ou d’un de ses dérivés en aminophtalate en présence de peroxyde d’hydrogène. Une brève émission de lumière aura lieu au cours de cette réaction enzymatique. Le signal lumineux peut être amplifié par un agent de transfert d’électron comme un acétanilide substitué. Mesure du signal La mesure du signal est effectuée par un luminomètre dans la plupart des applications. Cependant, pour le format de dosage en biopuces, une caméra CCD est employée pour analyser le signal provenant de nombreux spots simultanément. Pour la plupart des automates, l’ensemble des photons émis au cours du processus de chimiluminescence est comptabilisé par le luminomètre grâce à un très grand nombre de mesures réalisées pendant un temps très court (exemple : 500 mesures en 5 secondes). Une mesure en cinétique peut aussi être effectuée dans le but d’éviter les artéfacts. Les résultats sont exprimés en RLU (Unité Relative de Lumière) et convertis en unités de concentration par le biais d’une courbe de calibration. 3.3.3.4.3 Techniques automatisées Les principales techniques utilisant la chimiluminescence directe ou indirecte sont indiquées ci-après (tableau 8) (16).

Principes et techniques en immunoanalyse

Tableau : 8 – Principales techniques d’immunoanalyse utilisant

la chimiluminescence directe ou indirecte.

Techniques

Phase solide Mode de Nature séparation

Signal Marqueur

Type de lecture

Carboxamide d’acridinium

CL

CLIA/ICMA

Microparticules paramagnétiques

Aimantation

CLEIA/ICEMA

Microparticules paramagnétiques

Aimantation

CLEIA/ICEMA

Microparticules magnétiques

Aimantation

CLIA/ICMA

Microparticules magnétiques

Aimantation

Ester d’acridinium

CL

CLEIA/ICEMA

Micropuits

Lavage

HRP (substrat luminogène : luminol + amplificateur)

CL

CLEIA/ICEMA

Biopuces en céramique

Lavage

HRP

CL (caméra CCD)

ECLIA

Microparticules magnétiques

Aimantation

Chélate de ruthénium

ECL

Microparticules magnétiques

Aimantation/ Lavage

Ester d’acridinium

Billes

Lavage avec centrifugation axiale

Phase homogène

Pas de séparation

PAL (substrat luminogène : dioxétane) Dérivé du Dioxétane (excité par une réaction chimique)

CLIA/ICMA

LOCI®

PAL (substrat luminogène : dioxétane) HRP (substrat luminogène : éthyluminol)

CLIA : ChemiLuminescent ImmunoAssay ICMA : ImmunoChemiluminoMetric Assay CLEIA : ChemiLuminescent Enzyme ImmunoAssay ICEMA : ImmunoChemiluminoEnzyMometric Assay LOCI : Luminescent Oxygen Channeling Immunoassay PAL : Phosphatase Alcaline HRP : Horse Radish Peroxydase CL : ChimiLuminescence ECL : ElectroChimiluminescence CCD : Charge-Coupled Device

CL

CL

CL

CL

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Immunoanalyse

Abréviations des principales techniques en immunoanalyse ACMIA

Antibody Conjugated Magnetic ImmunoAssay

BLIA

BioLuminescence ImmunoAssay

CLEIA

ChemiLuminoEnzymoImmunoAssay

CLIA

ChemiLuminescence ImmunoAssay

ECLIA

ElectroChimiLuminescence ImmunoAssay

ELFIA

Enzyme Linked FluoroImmunoAssay

FIA

FluoroImmunoAssay

FPIA

Fluorescence Polarization ImmunoAssay

IBMA

ImmunoBioluminoMetric Assay

ICEMA

ImmunoChemiluminoEnzymoMetric Assay

ICIA

Ion Capture Enzyme ImmunoAssay

ICMA

ImmunoChemiluminoMetric Assay

IFMA

ImmunoFluoroMetric Assay

ILMA

ImmunoLuminoMetric Assay

LIA

LuminoImmunoAssay

LOCI

Luminescent Oxygen Channeling Immunoassay

PhIA

PhosphoroImmunoAssay

MEIA

Microparticule Enzyme ImmunoAssay

sepFIA

separation FluoroImmunoAssay

TRFIA

Time-Resolved FluoroImmunoAssay

TRIFMA

Time-Resolved ImmunoFluoroMetric Assay

Principes et techniques en immunoanalyse

Références 1.

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Chapitre 3

Problèmes et pièges en immunoanalyse Auteurs : Chantal Valat, Rémy Sapin

La qualité et la fiabilité des résultats d’analyses biologiques dépendent non seulement des performances des techniques utilisées mais aussi des conditions de prélèvement et de transfert propres à chaque paramètre. Trop souvent négligée, la phase pré-analytique joue un rôle essentiel dans la qualité des résultats d’analyses biologiques ; la répartition des erreurs de laboratoire en témoigne : 62 % pour la phase pré-analytique, 15 % pour la phase analytique et 23 % pour la phase post-analytique. Cette étape est pourtant tout autant encadrée par le GBEA que le reste du processus analytique. La généralisation de l’informatique ayant nettement fait régresser les erreurs post-analytiques, nous avons choisi de ne traiter dans ce chapitre que les pièges pré-analytiques et analytiques.

1. Phase pré-analytique La phase pré-analytique d’un dosage comprend plusieurs étapes : – le recueil de l’échantillon, – la conservation et le transfert au laboratoire d’analyse, – la réception et le traitement de l’échantillon dans le laboratoire avant l’analyse. Nous passerons en revue les pièges potentiels de chacune de ces trois étapes.

1.1. Recueil de l’échantillon biologique Pour chaque paramètre à doser, le biologiste doit fournir aux préleveurs les informations nécessaires aux bonnes conditions de prélèvement et d’acheminement jusqu’au laboratoire ; en particulier, la nature du tube de prélèvement à utiliser, la température et le délai de conservation à respecter. Il est important aussi de sensibiliser les préleveurs aux facteurs et aux conditions physiologiques ou pathologiques du patient qui peuvent modifier le résultat.

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Immunoanalyse

1.1.1 Type de prélèvement L’échantillon biologique peut être de différentes natures : sang, urine, salive, liquides divers (céphalorachidien, bronchoalvéolaire, d’ascite, de kystes, de ponction ganglionnaire …). Les techniques d’immunodosage sont en général adaptées au sérum ou au plasma. Lorsqu’il s’agit d’un autre liquide, il est nécessaire de vérifier l’absence d’un effet matrice, soit en effectuant un test de surcharge, soit en vérifiant la linéarité de dilutions successives (cf. chapitre 4). Certaines techniques s’adaptent aux dosages urinaires et dans ce cas, le protocole le précise. Si la nature de l’échantillon n’est pas celle qui est recommandée par la technique de dosage, il est nécessaire de s’assurer de la validité des résultats obtenus (1). Les valeurs de référence sont souvent alors inconnues et la notion de concentration parfois mal définie. C’est le cas par exemple d’un liquide broncho-alvéolaire dont le volume est impossible à déterminer. 1.1.1.1 Prélèvement sanguin

Différents types de tubes sont utilisés pour les prélèvements sanguins selon que le dosage est réalisé sur sérum, plasma ou sang total. Les couleurs de bouchons de ces tubes sont celles recommandées par le Comité Européen des Standards de Laboratoires Cliniques (ECCLS). Tous ces prélèvements doivent être réalisés dans des conditions optimales et le choix du tube de prélèvement doit être adapté au paramètre à doser. Le biologiste doit fournir aux préleveurs les informations permettant un recueil d’échantillon adapté à la technique de dosage. À titre d’exemple, l’hormone adrénocorticotrope (ACTH) adhère au verre, d’où la nécessité de prélever sur des tubes en plastique ou en verre siliconé. En théorie, les fabricants de tubes de prélèvement devraient valider chaque lot de fabrication selon la méthode de dosage pratiquée, manuelle ou automatisée, ce qui n’est pas réalisé ; en conséquence, la traçabilité des lots de tubes et la réactovigilance s’imposent dans ce domaine. Suivant le fournisseur, les différences portent sur le matériau composant le tube (verre avec ou sans silicone, plastique), le volume de sang à prélever, la nature des additifs de coagulation et l’éventuel produit conservateur. • Sérum Le sérum est le plus souvent préféré au plasma ; il peut être obtenu par prélèvement dans un tube sec, avec ou sans gel, la présence de gel permettant d’accélérer le temps de coagulation nécessite une vigilance supplémentaire. En effet, une augmentation des résultats de certains marqueurs tumoraux après 24 heures de contact avec le gel a été décrite (2), d’où la nécessité dans ce cas d’un traitement rapide du tube primaire. L’utilisation du tube avec séparateur impose une température ambiante inférieure à 25 ˚C car, au-delà, le séparateur ainsi que les composants du sérum se dégradent. Par ailleurs, certains tubes avec gel ont fait l’objet en 2004 d’interférences observées sur des dosages hormonaux automatisés et de ce

Problèmes et pièges en immunoanalyse

fait ont été retirés du marché (AFSSAPS : DIV-RECO 04/02). En revanche, en l’absence de gel, l’étape de centrifugation nécessaire pour obtenir le sérum ne doit pas intervenir trop vite. Il est nécessaire d’attendre la rétraction du caillot (45 minutes environ). • Plasma – Anticoagulant L’EDTA (acide éthylène diamine tétraacétique) est l’anticoagulant le plus souvent utilisé. Il est nécessaire alors de s’assurer que les résultats sur plasma sont identiques à ceux du sérum. Il faut cependant être prudent en cas de dosages utilisant la phosphatase alcaline dans lesquels l’EDTA, du fait de la chélation des ions métalliques divalents, peut interférer. En revanche, pour certains dosages (rénine par exemple), le prélèvement doit impérativement être effectué sur EDTA. L’héparine est généralement déconseillée pour les immunodosages. Or une étude réalisée sur un automate d’immunoanalyse a montré pour les marqueurs tumoraux des résultats similaires pour le plasma hépariné et le sérum, alors qu’une légère diminution des valeurs était constatée avec le plasma EDTA, s’accentuant avec le plasma citraté (2). D’une façon générale, les prélèvements sur citrate sont à proscrire en raison notamment de la dilution liée au volume de l’anticoagulant. Il faut aussi noter des différences de résultats de parathormone (PTH), d’insuline et de calcitonine entre le plasma et le sérum, selon l’automate ou la technique utilisés (3, 4, 5). Ces différences doivent être prises en compte dans l’établissement des valeurs de références. Cependant la nature de l’anticoagulant n’est pas seule en cause. Les proportions d’anticoagulant et de sang peuvent aussi modifier les résultats. Une solution d’EDTA (1,2 à 2 g/L) ne doit pas représenter plus de 1 % du volume de sang recueilli. Les taux de PTH en particulier peuvent être artificiellement abaissés par un excès d’anticoagulant. Le volume d’anticoagulant étant adapté à la capacité de recueil du tube, il est alors impératif de prélever le volume de sang correspondant. – Antiprotéolytique Les peptides tels que l’ACTH, la PTH, l’ostéocalcine, l’hormone antidiurétique (ADH) ou vasopressine, le glucagon ou la ghréline sont fragiles et se dégradent rapidement (6). La stabilité de ces molécules dépend de la température et du délai de traitement du prélèvement ; il est donc conseillé de séparer à 4 ˚C et de congeler le plasma le plus rapidement possible afin d’éviter la dégradation de la molécule en peptides de plus petite taille pouvant interférer avec l’anticorps utilisé dans le dosage. L’importance d’une centrifugation rapide (dans les quatre heures) et à 4 ˚C de l’échantillon a été démontrée pour conserver l’intégrité de l’ACTH, dont les concentrations diminuent très rapidement quelle que soit la température de conservation du prélèvement (7). L’addition d’un agent anti-protéolytique (aprotinine ou Zymofren® ou Iniprol®) inhibant l’action de certaines protéases permet d’allonger le délai de traitement des prélèvements sanguins.

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Immunoanalyse

– Hémolyse En cas de difficulté de prélèvement, il est fréquent d’observer une hémolyse pouvant entraîner une surestimation des résultats, en particulier lorsque la concentration érythrocytaire est importante. C’est le cas des dosages sériques des folates et de la Neuron Specific Enolase (NSE). En ce qui concerne l’insuline, la libération d’une insulinase érythrocytaire dans le sérum peut modifier les résultats (8). Des résultats sous-estimés ou surestimés ont été rapportés selon la technique de dosage, immunométrique ou compétitive, et selon la température de conservation, 20 ˚C ou 4 ˚C. L’utilisation actuelle de techniques immunométriques (un anticorps reconnaissant la chaîne A, le second la chaîne B) entraîne une sous-estimation des résultats obtenus sur des prélèvements conservés à température ambiante. L’insulinase dégrade alors les molécules qui ne sont plus reconnues simultanément par les deux anticorps. Une conservation à 4 ˚C et/ou l’addition d’un inhibiteur de l’insulinase permettent d’en atténuer l’importance. De même, une hémolyse même très légère doit être évitée pour les peptides fragiles (ACTH, glucagon, gastrine, PTH, calcitonine) car elle entraîne le relargage d’enzymes protéolytiques qui peuvent les détruire. Sur le plan technique, il est important de noter que l’hémolyse, modifiant la couleur de l’échantillon, peut affecter les méthodes en phase homogène utilisant les marqueurs luminescents. • Sang total Certains dosages comme ceux des folates érythrocytaires, du tacrolimus et de la ciclosporine sont pratiqués sur sang total. Le sang total est également utilisé pour le dépistage néonatal des maladies congénitales. Dans ce cadre, les dosages sont effectués sur une goutte de sang total recueillie sur papier buvard. La tache de sang doit imprégner totalement la zone dédiée du buvard, de manière à ce que la perforation de la tache corresponde à un volume précis. Après le prélèvement, le buvard doit sécher à température ambiante car le chauffage du sang modifie l’efficacité de l’élution, étape préliminaire indispensable avant le dosage. 1.1.1.2 Prélèvement urinaire

En cas de dosage urinaire, il est indispensable de disposer d’une valeur fiable de la diurèse. Le dosage de la créatinine doit être réalisé en parallèle pour valider la qualité du recueil urinaire. Le volume d’urines émises mesuré, le résultat du dosage sera alors exprimé en fonction du temps de recueil, le plus souvent en quantité par 24 heures. Pour certains paramètres, l’addition de conservateurs dans le récipient contenant les urines est nécessaire. Pour le dosage du cortisol, en raison du nombre important de métabolites stéroïdiens contenus dans l’urine, une étape de purification peut être nécessaire. Seul le respect de ces différentes conditions permettra une quantification précise.

Problèmes et pièges en immunoanalyse

1.1.1.3 Prélèvement salivaire

Le dosage salivaire du cortisol permet une mesure indirecte du cortisol libre plasmatique. Ce mode de recueil donne la possibilité d’augmenter facilement le nombre de prélèvements. Il existe plusieurs systèmes de recueil salivaire. Ils sont malheureusement trop souvent mal utilisés et la quantité de salive est en conséquence insuffisante. Les taux de cortisol étant faibles, il faut disposer au minimum d’un millilitre de salive pour effectuer le dosage dans de bonnes conditions.

1.2. Conditions de prélèvement 1.2.1 Horaire Certaines hormones sont libérées dans le sang selon un mode rythmique chronologique en relation avec des processus physiologiques. En effet, la libération des neurohormones et des hormones hypophysaires s’effectue de façon pulsatile, probablement reliée au stress, pouvant varier d’un sujet à l’autre (9). Cette pulsatilité permet d’expliquer les variations parfois importantes des résultats, même si les prélèvements ont été effectués dans un intervalle de temps limité. Une modulation neuroendocrine hypothalamique pulsatile suscite le rythme circadien de sécrétion de l’ACTH et des hormones surrénaliennes « ACTH dépendantes ». Pour d’autres hormones hypophysaires, comme l’hormone thyréostimulante (TSH) ou la prolactine, le rythme cyclique est moins accentué. En effet, les concentrations de TSH augmentent en fin de soirée, passent par un maximum vers minuit, puis diminuent jusqu’à 8 h 00 et restent sensiblement constantes jusqu’au soir avec un nadir en fin d’après-midi (10). Pour la prolactine, l’élévation et la décroissance nocturnes sont retardées de 2 à 3 heures. En pratique il n’apparaît pas nécessaire de tenir compte de l’horaire, en évitant cependant la fin de nuit pour la prolactine. Un résultat légèrement élevé obtenu sur un prélèvement nocturne devra être systématiquement contrôlé par un prélèvement diurne. Pour doser la prolactine, il a été longtemps conseillé de poser un cathéter, puis de prélever le sang 10 à 15 minutes plus tard pour éviter une augmentation du résultat liée au stress. Cette augmentation inconstante dépend beaucoup de l’état d’anxiété du sujet prélevé (11, 12). Selon le consensus 2006 de la Société Française d’Endocrinologie, la possibilité d’élévation de la prolactine – très minime – incite à recommander un prélèvement effectué dans des conditions de repos, mais n’impose pas la pose d’un cathéter et ne justifie pas de réaliser systématiquement des prélèvements multiples. L’influence du stress reste en revanche reconnue pour les dosages d’ACTH, de cortisol et de l’hormone de croissance (GH). En l’absence de sécrétion en continu, certaines explorations (retard de croissance, déficit en ADH) nécessitent d’avoir recours à des épreuves dynamiques (stimulation de l’hormone de croissance, restriction hydrique) pour prouver le déficit.

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Immunoanalyse

1.2.2 Position Il est recommandé de doser l’aldostérone et la rénine en position couchée (3 heures de décubitus), puis après 1 heure de déambulation, stimulus physiologique de la sécrétion.

1.2.3 Saison La vitamine D est synthétisée à partir du 7-déhydro cholestérol sous l’effet de certains rayonnements UVB (longueur d’onde entre 290 et 315 nm) ; les taux de 25 hydroxy-vitamine D (25OH-D) sont plus élevés en été qu’en hiver. Les taux de testostérone fluctuent légèrement et sont au maximum en automne.

1.2.4 État nutritionnel L’interprétation des taux de certains paramètres est fonction du régime alimentaire. Il est donc important que ces informations soient précisées sur les demandes d’examen. • Régime sodé Les taux d’aldostérone et de rénine varient en fonction du régime sodé. Si l’apport sodé du patient est différent de l’apport normal (100 à 200 mEq de Na par 24 heures), il est important de le préciser pour que des valeurs de références adaptées (régime hypo ou hypersalé) soient associées au résultat. Par ailleurs, quel que soit le paramètre considéré, il est nécessaire d’effectuer les prélèvements dans les mêmes conditions d’horaires et d’état nutritionnel en cas de dosages répétés. • Lipides Une concentration anormalement élevée de lipides dans le sérum peut modifier le signal de quantification et en conséquence le résultat. Elle peut également poser un problème mécanique lors du pipetage. En cas de technique manuelle nécessitant une centrifugation, la faible densité des lipides modifie la qualité du précipité, rend difficile la séparation du surnageant et peut ainsi diminuer la fiabilité du résultat. De manière générale, pour tout prélèvement sanguin, il est conseillé d’être à jeun ou d’avoir pris un repas léger sans graisse. • Jeûne Le jeûne prolongé est à proscrire pour le dosage de la triiodothyronine car il entraîne une diminution sensible des résultats. En revanche, un jeûne strict est exigé pour les dosages de gastrine (10 heures de jeûne), d’insuline, de peptide C, de glucagon, de leptine, d’adiponectine et de ghréline.

1.2.5 Grossesse Depuis une vingtaine d’années, le diagnostic et le suivi des grossesses ont été considérablement améliorés par les dosages d’hormone choriogonadotrophique (hCG) utilisant des anticorps spécifiques de la sous-unité bêta ne croisant pas avec la sous-unité alpha commune à la TSH, à l’hormone

Problèmes et pièges en immunoanalyse

folliculostimulante (FSH) et à l’hormone lutéinisante (LH). Néanmoins les diverses formes d’hCG circulantes reconnues par les anticorps (dimérique, monomérique bêta libre, dimérique ou monomérique clivée et hyperglycosylée) varient selon la trousse utilisée. La prise en compte de la grossesse est nécessaire pour interpréter correctement le résultat des dosages d’hormones sexuelles mais aussi d'autres hormones. À titre d'exemple, l'activité thyréotrope de l'hCG peut entraîner une baisse significative de la TSH au premier trimestre et il est admis que la thyroxine (T4) libre et la T3 libre s'abaissent aux deuxième et troisième trimestres de grossesse.

1.2.6 Insuffisance rénale Chez les insuffisants rénaux et en particulier chez les hémodialysés, le dysfonctionnement rénal permet d’expliquer l’augmentation du taux sérique de certaines hormones ou de leurs fragments (PTH) et donc les surestimations parfois observées, selon la spécificité de l’anticorps utilisé (13).

1.2.7 Tabac Le tabagisme peut augmenter le taux de certains marqueurs tumoraux tels que l’antigène carcinoembryonnaire et la calcitonine, ou diminuer le taux d’autres marqueurs, comme l’hCG impliqué dans le dépistage de la trisomie 21, d’où l’utilité de le mentionner dans les renseignements cliniques.

1.2.8 Traitement médical Il est essentiel de connaître les traitements en cours au moment du prélèvement sanguin pour éviter toute erreur dans l’interprétation des résultats. Les médicaments peuvent interférer directement dans la technique de dosage ou modifier de manière indirecte les résultats : inhibition de la synthèse, augmentation de la clairance, altération du transport. À titre d’exemple, il est nécessaire de s’assurer de l’absence d’interférence des traitements aux corticoïdes pour tout dosage d’hormone corticosurrénalienne. Certains psychotropes, hypotenseurs, antiémétiques ou antiulcéreux sont susceptibles d’induire des hyperprolactinémies. Les inhibiteurs de la pompe à protons induisent des hypergastrinémies et donc des élévations de la calcitonine et de la chromogranine A. L’interprétation des résultats de rénine et d’aldostérone ne peut se faire qu’après arrêt du traitement anti-hypertenseur. Après l’accord du médecin prescripteur, un délai d’au moins 15 jours, 1 mois s’il s’agit d’anti-aldostérone, devra être respecté avant l’exploration. Seuls les traitements par la prazosine et les anti-hypertenseurs centraux, type alpha-méthyl-DOPA, peuvent être poursuivis. Les traitements à base de biotine peuvent interférer dans toutes les techniques qui utilisent le couple réactionnel avidine-biotine. Des exemples de médicaments modifiant les paramètres thyroïdiens sont reportés ci-dessous (tableau 1).

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Immunoanalyse

Tableau : 1 – Médicaments pouvant modifier les paramètres thyroïdiens.

Anti-inflammatoires non stéroïdiens

Thyroxine libre

TSH



Normale ou 



Glucocorticoïdes Amiodarone

Triiodothyronine libre





3 premiers mois

Amphétamines



Psychotropes Anticonvulsivants





Anti-oestrogènes





Médicaments iodés







L’héparine, en activant la lipoprotéine lipase de l’endothélium vasculaire, induit une libération d’acides gras libres qui peuvent déplacer la T4 fixée aux protéines vectrices. De ce fait, un traitement à l’héparine peut être à l’origine de taux de T4 libre faussement augmentés si le sérum est conservé plusieurs heures à température ambiante.

1.3. Conservation et transfert au laboratoire 1.3.1 Conditions 1.3.1.1 Température

La température de conservation des prélèvements, température ambiante, 4 ˚C ou -20 ˚C, doit être adaptée à la fragilité des molécules à doser. Elle conditionne le temps de conservation. Pour le dosage de rénine, les conditions de conservation diffèrent selon que l’on dose la rénine active ou que l’on effectue un dosage indirect de l’activité rénine. En effet, une température de 4 ˚C favorise la transformation du précurseur, la prorénine, en rénine active. De ce fait, le prélèvement doit être rapidement décanté et congelé, car la conservation prolongée à 4 ˚C entraîne une surestimation des résultats. À l’inverse, en cas de dosage indirect (mesure de l’activité rénine plasmatique), le prélèvement doit être maintenu à 4 ˚C de manière à bloquer l’activité enzymatique de la rénine. La transformation du substrat, l'angiotensinogène, en angiotensine sera déclenchée au moment du dosage. Il convient toutefois de ne pas prolonger cette conservation à 4 ˚C au-delà de quelques heures, pour ne pas augmenter la concentration de l’enzyme par activation du précurseur.

Problèmes et pièges en immunoanalyse

Le respect de ces consignes est particulièrement important lorsque le délai d’acheminement est long, comme ce peut être le cas dans certaines structures hospitalières ou lors de la transmission d’un échantillon à un laboratoire spécialisé. 1.3.1.2 Lumière

Pendant longtemps, il a été conseillé de transporter dans du papier aluminium les tubes de prélèvement destinés au dosage de la 25OH-D, de l’acide folique ou de la vitamine B12, ces molécules étant considérées comme photosensibles. Il a aussi été rapporté que la lumière et l’ensoleillement en favorisaient respectivement la synthèse ou la dégradation. Il est maintenant reconnu que ces phénomènes apparaissent uniquement in vivo pour la 25OH-D et l’acide folique et n’interviennent pas après le recueil de sang.

1.3.2 Délai de conservation Les petits peptides tels que l’ACTH, la calcitonine, la PTH, l’ostéocalcine et la gastrine doivent être dosés le plus rapidement possible. Le délai de conservation à respecter sera fonction de la demi-vie in vitro des molécules reconnues dans le dosage. L’addition d’un antiprotéolytique permet de prolonger ce délai. Une étude de conservation de sérums à 4 ˚C, 20 ˚C et 37 ˚C pour le dosage de onze paramètres sur un automate d’immunoanalyse a été effectuée (14). Les paramètres ont été dosés chez dix-neuf sujets dans neuf conditions différentes de conservation (durée et température). Chaque résultat a été comparé au résultat obtenu dès la décantation et exprimé sous la forme d’écart par rapport à cette valeur. Deux limites de contrôle (au risque de 1 %) fondées sur l’erreur expérimentale de l’analyse de variance ont été fixées. Les conditions de conservation sont mises en cause quand les résultats des dosages se situent en dehors de ces limites. Les résultats de cette étude montrent que, pour la majorité des paramètres, la qualité est garantie si, après décantation, les sérums sont conservés à 20 ˚C pendant 24 h ou à 4 ˚C pendant une semaine. En revanche, une conservation à 37 ˚C, même de courte durée, peut modifier les valeurs. Les résultats de la conservation des sérums à 37 ˚C, et, à titre d’exemple, la dispersion des valeurs de TSH selon les conditions de conservation sont reportés ci-après (tableau 2, fig. 1).

123

Immunoanalyse

Tableau : 2 – Conservation à 37 ˚C. 37 ˚C

2h

4h

24 h

TSH T3L T4L E2 Progestérone LH Prolactine Cortisol GH Vitamine B12 Folates Conditions modifiant les résultats

Étude des écarts individuels les limites correspondent au risque 1 % 0,2

lim sup

20° - 2h

0,1

écarts

124

20° - 4h 20° - 24h

-0,0

37° - 2h 37° - 4h

-0,1

37° - 24h

lim inf

4° - 24h

-0,2

4° - 48h

-0,3

4° - 72h

Figure : 1 – Exemple de la TSH. Il est important de noter que la température ambiante n’est pas toujours de 20 ˚C et qu’elle peut même atteindre, voire dépasser, 37 ˚C en été. Dans ces conditions, les prélèvements devront être adressés le plus rapidement possible au laboratoire.

Problèmes et pièges en immunoanalyse

1.4. Réception et traitement au laboratoire Le rôle du personnel recevant les prélèvements consiste à : – vérifier l’identification des tubes et son adéquation avec celle de la prescription qui les accompagne, – contrôler les bonnes conditions de recueil et d’acheminement des échantillons sanguins (absence de choc thermique, position verticale), – constater la formation complète du caillot pour tout tube sec avant la centrifugation (pour éviter la présence de fibrine), – s’assurer en cas de prélèvement sur anticoagulant du respect des proportions des volumes sang-anticoagulant. Par ailleurs, ce personnel doit montrer une vigilance extrême afin d’éviter l’erreur d’étiquetage du tube secondaire à la décantation. C’est la raison pour laquelle, il est recommandé, dans la mesure du possible, de travailler sur tubes primaires.

2. Phase analytique En raison de leurs grandes qualités analytiques, sensibilité et spécificité, et de leur bonne praticabilité, les immunodosages sont très largement répandus. Du fait de l’amélioration de leur reproductibilité, les cliniciens ont de plus en plus confiance dans leurs résultats. Leur banalisation ne doit cependant pas faire oublier qu’ils peuvent être pris en défaut dans certaines circonstances particulières. Parmi les problèmes et pièges analytiques, nous envisagerons successivement l’effet crochet, propre au dosage immunométrique par excès d’anticorps, puis l’effet matrice et les interférences auxquelles peuvent être sensibles tous les immunodosages. Enfin les problèmes particuliers liés à la standardisation seront présentés.

2.1. Effet crochet Le principe d’un dosage immunométrique à deux sites par excès d’anticorps (sandwich) (cf. chapitre 2) veut que la concentration des anticorps réactifs soit en excès par rapport à celle de l’antigène. Cette condition est vérifiée dans la majorité des circonstances physiologiques et pathologiques garantissant un résultat exact. Cependant il peut arriver que la concentration en antigène soit telle qu’elle dépasse celle des anticorps présents. Le dosage immunométrique peut alors être gravement pris en défaut (15, 16). En effet, lorsque la concentration en antigène s’élève au-delà de la concentration du dernier point de la gamme d’étalonnage, le signal mesuré croît jusqu’à un plateau obtenu à la saturation des anticorps de capture fixés à la phase solide, puis il décroît si la concentration en antigène continue d’augmenter. Cette décroissance s’explique par la saturation de l’anticorps marqué, qui se lie à des antigènes fixés aux anticorps de capture mais aussi à des antigènes qui n’ont pas pu réagir avec ces derniers en raison de leur saturation. Cette décroissance peut être telle que le signal mesuré

125

126

Immunoanalyse

revienne dans le domaine des signaux mesurés dans la gamme d’étalonnage. C’est alors que pour un échantillon de concentration très élevée un résultat faussement bas peut être obtenu (fig. 2). La décroissance de la courbe d’étalonnage s’explique par la diminution du nombre de « sandwichs » formés ; la concentration en anticorps marqués n’est pas suffisante pour qu’ils puissent réagir avec tous les antigènes, en particulier ceux fixés à l’anticorps de capture lié sur la phase solide. Les dosages concernés le plus fréquemment sont ceux pour lesquels la concentration en analyte peut varier sur plusieurs ordres de grandeur, les marqueurs tumoraux en particulier mais aussi les dosages d’anticorps.

Signal (fraction liée)

(a)

104

Zone de la courbe d’étalonnage 5.103

1

10

102

103

104

105

106

[Ag]

Figure : 2a – Effet crochet : représentation de l’effet crochet. Quand la concentration en antigène est supérieure à celle indiquée par la flèche, la concentration en anticorps marqué n’est pas en excès par rapport à l’antigène et la quantité de marqueur lié à la phase solide décroît.

Problèmes et pièges en immunoanalyse

Figure : 2 b– Effet crochet : schématisation du principe. Différents moyens ont été utilisés pour éviter l’effet crochet ou le repousser à des concentrations plus élevées : – La réalisation d’un dosage immunométrique en deux étapes avec un lavage après la première incubation mettant en présence l’analyte et l’anticorps de capture. En théorie, un dosage en deux étapes ne devrait pas présenter le piège de l’effet crochet. L’excès d’antigène étant éliminé lors du lavage intermédiaire, la courbe d’étalonnage devrait rester en plateau. En pratique, l’effet crochet est repoussé à des concentrations plus élevées mais subsiste parfois (17). Les différentes hypothèses avancées dans la littérature pour expliquer ce phénomène sont : (i) un lavage intermédiaire imparfait entre la première et la seconde étape, (ii) une hétérogénéité des anticorps de capture aboutissant à la libération d’une partie des antigènes liés à des sites de plus faible affinité lors du lavage ou de la seconde incubation, (iii) une concentration inadéquate d’anticorps marqué rajouté dans la seconde étape. D’autres hypothèses ont également été avancées telles que la fixation de l’anticorps marqué entraînant un changement de conformation de l’analyte et sa désorption de l’anticorps de capture, ou la présence d’agrégats de l’analyte à forte concentration se dissociant après dilution du sérum. Des phénomènes de coopérativité et d’interaction de l’analyte avec la phase solide pourraient également jouer un rôle. – La réduction de la prise d’essai Cette stratégie présente l’inconvénient d’augmenter la limite de détection, ce qui peut être un grave inconvénient dans le cas des dosages pour lesquels ce paramètre est critique.

127

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Immunoanalyse

– La réduction de l’étendue de la gamme d’étalonnage (dynamique de mesure) Cette stratégie a pour inconvénient de nécessiter un recours plus fréquent à la dilution de l’échantillon pour obtenir le résultat. – L’augmentation de la concentration en anticorps marqué Pour les dosages avec détection par des anticorps radiomarqués (technique IRMA), ceci impose la limitation de l’activité spécifique de l’anticorps marqué afin que l’activité manipulée ne soit trop importante. Si l’effet crochet ne peut être éliminé dans tous les cas, il convient donc de pouvoir le détecter. Deux moyens permettent de le faire : – Le dosage systématique de l’échantillon pur et d’une dilution Si le signal mesuré avec la dilution est plus élevé que celui de l’échantillon pur, l’effet crochet est présent. Des dilutions successives sont alors réalisées jusqu’à ce que le signal soit de nouveau dans l’intervalle de la gamme d’étalonnage. Cette méthode efficace présente l’inconvénient de multiplier par deux le nombre de tubes nécessaires au dosage. Une variante de cette méthode consiste à analyser la cohérence du résultat du dosage d’un pool de dix sérums avec le résultat de ce même pool dilué au 1/10 (18). Cette dernière approche permet de réduire le nombre de tubes à doser mais comme la précédente, elle impose un travail supplémentaire non négligeable. – L’étude de la cinétique de formation des « sandwichs » La mise en évidence d’une cinétique rapide dès le début de la réaction permet de suspecter une concentration d’analyte très élevée. Si cette méthode a été décrite avec un dosage IRMA, elle n’est actuellement appliquée en pratique qu’avec des dosages non isotopiques en phase homogène tels que les dosages utilisant le système TRACE®. Ces derniers dosages ne nécessitant ni séparation des fractions libre et liée, ni destruction du marqueur lors de la mesure du signal sont bien adaptés à des mesures répétées permettant une étude de la cinétique de réaction. Dès qu’une cinétique particulièrement rapide est détectée, l’automate déclenche automatiquement une dilution de l’échantillon (fig. 3). Cette méthode particulièrement élégante n’entraîne a priori une dilution que pour les échantillons pour lesquels elle est justifiée.

Problèmes et pièges en immunoanalyse

(a)

(b)

Figure : 3 – Détection de l’effet crochet par mesure des cinétiques de réaction d’un dosage utilisant le système TRACE®. (a) Les concentrations 16 μg/L et 400000 μg/L donnent le même signal de fluorescence en lecture en temps résolu. (b) La mesure de la vitesse initiale de réaction permet de les distinguer nettement et de déclencher une dilution automatique de l’échantillon de concentration élevée. Si la détection de l’effet crochet n’est pas systématique, afin d’éviter ce piège, le biologiste doit, avant de valider un résultat, tenir compte des résultats antérieurs du patient et exiger du prescripteur un minimum de renseignements cliniques pour être informé quand, par exemple, un adénome est très volumineux ou une tumeur est à un stade très avancé.

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130

Immunoanalyse

2.2. Effet matrice L’immunoanalyse fait appel à la réaction antigène-anticorps susceptible d’être influencée par de nombreux paramètres tels que le pH, la force ionique, la concentration en protéines du milieu (cf. chapitre 2). Ces paramètres varient selon le liquide biologique sur lequel le dosage est réalisé. L’effet des ces paramètres sur le résultat du dosage constitue ce que l’on appelle couramment « l’effet matrice ». Celui-ci est dû à une différence importante de composition chimique entre les étalons et les échantillons inconnus. Ainsi un dosage, le plus souvent mis au point pour le sérum (ou le plasma), devra être revalidé si on envisage de l’utiliser sur d’autres liquides biologiques : urine, liquide céphalo-rachidien, salive, liquide de ponction, surnageant de cultures cellulaires, dialysat ou ultrafiltrat. Des problèmes de spécificité différents de ceux qui peuvent se présenter dans le sérum devront également être pris en compte. Pour résoudre les problèmes liés à l’effet matrice deux approches sont possibles : – s’efforcer d’harmoniser directement la composition des solutions étalons et des échantillons inconnus ; par exemple pour un dosage urinaire direct avec des étalons sériques, on ajoutera à la prise d’essai d’urine un volume égal d’étalon zéro de la gamme d’étalonnage et aux solutions étalons un volume de sérum physiologique égal à celui de la prise d’essai d’urine ; – extraire l’analyte par un solvant organique ou une chromatographie, évaporer à sec l’extrait et reconstituer le résidu dans l’étalon zéro du dosage. Le problème de l’effet matrice se pose aussi parfois lors du choix d’un milieu de dilution. L’étalon zéro est souvent disponible en quantité trop limitée pour servir à cet effet. Un sérum privé de l’analyte naturellement ou par traitement au charbon peut être utilisé. Si un diluant autre, à base de tampon protéiné ou de sérums animaux est utilisé, l’absence d’effet matrice devra être recherchée par un test de dilution et/ou de récupération. Un effet matrice peut également être évoqué pour expliquer des différences entre les reproductibilités déterminées sur des sérums de contrôle ayant subi des traitements variés (congélation, lyophilisation, ajustement des concentrations en analyte, incorporation d’additifs…) et celles déterminées sur des sérums de patients ou des sérums de contrôle liquides plus natifs. De même, dans le contrôle de qualité des dosages de T4 libre à l’aide de sérums lyophilisés, un effet matrice est considéré comme responsable du biais important des résultats de la majorité des immunodosages par rapport à ceux de la dialyse à l’équilibre, considérée comme référence. Dans ce cas particulier, l’effet matrice serait dû à une baisse de la capacité de fixation des protéines de transport de la thyroxine, cette baisse étant provoquée par les nombreux traitements subis par les sérums lyophilisés.

Problèmes et pièges en immunoanalyse

Pour les dosages urinaires, des urines acidifiées (en vue du dosage des catécholamines par exemple) peuvent poser problème, surtout si un immunodosage sans extraction préalable est utilisé.

2.3. Interférences Si l’effet matrice est prévisible dans la mesure où le manipulateur a conscience de la composition très différente des étalons et des échantillons analysés, dans d’autres cas, le schéma réactionnel du dosage est perturbé par une substance qui n’est pas habituellement présente dans l’échantillon et dont la présence n’est pas connue de l’expérimentateur. On parle alors d’une interférence (19, 20). Une interférence est définie plus globalement comme l’effet d’une substance présente dans l’échantillon qui modifie le résultat exact du dosage. Elle est propre à un échantillon biologique donné et ne peut pas être identifiée par les procédures de contrôle de qualité habituelles. Les différentes causes d’interférence sont un défaut de spécificité de l’anticorps réactif, la présence de certains anticorps dans l’échantillon, la contamination de l’échantillon ou, pour certains dosages, l’influence des protéines de transport.

2.3.1 Spécificité – Réactions croisées Le réactif clé d’un immunodosage est très certainement l’anticorps. Les problèmes analytiques les plus fréquents liés directement à l’anticorps sont un défaut de spécificité à l’origine d’une réaction croisée et, plus rarement, un excès de spécificité. Une réaction croisée exprime un manque de spécificité (sélectivité) de l’anticorps du dosage (21). L’anticorps du dosage reconnaît une molécule, en général voisine de l’analyte à doser, mais aussi parfois une molécule plus différente mais comportant un épitope semblable à celui porté par l’analyte. 2.3.1.1 Dosage compétitif (défaut d’anticorps)

Ces dosages très utilisés pour les haptènes (hormones thyroïdiennes, stéroïdes, médicaments…) mettent en jeu un seul anticorps le plus souvent polyclonal. Ils sont de ce fait les plus concernés par ces défauts de spécificité entraînant généralement une surestimation du résultat (interférence positive). Des exemples sont donnés ci-après (tableau 3).

131

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Immunoanalyse

Tableau : 3 – Principaux problèmes de spécificité

des immunodosages actuels. Analyte

Molécules pouvant avoir une réactivité croisée avec l’analyte Dosage compétitif

Cortisol (plasma)

11 désoxycortisol, 21-désoxycortisol, prednisolone, méthylprednisolone, prednisone métabolisée en prednisolone

Cortisol (urine)

Corticoïdes, métabolites du cortisol conjugués ou non

T3

Acide triiodothyroacétique, diclofenac

Testostérone

Dihydrotestostérone, sulfate de DHEA

17 α-OH progestérone

Sulfate de 17 OH prégnenolone (période néonatale)

Aldostérone

Glucuronide de tetrahydroaldostérone (insuffisance rénale)

Œstradiol

Œstrone (traitement hormonal substitutif)

Progestérone

Dihydroprogestérone (traitement oral par progestérone micronisée)

Digoxine

Spironolactone

Médicaments

Drogues

Drogues

Médicaments Dosage immunométrique

PTH

Fragments, PTH 7-84

Insuline

Proinsulines, analogues pharmacologiques

ACTH

Formes clivées

Calcitonine

Procalcitonine

Ces réactions croisées sont le fait de précurseurs ou de métabolites de l’analyte, ou de médicaments. Elles peuvent être évaluées en déterminant le pourcentage de réaction croisée. En pratique, cette estimation est imparfaite, en particulier pour les médicaments pour lesquels de nombreux métabolites, parfois non identifiés, peuvent interférer. De ce point de vue aussi, il faut être particulièrement vigilant lorsque le dosage est mis en œuvre dans un milieu biologique différent de celui pour lequel il a été mis au point. Concernant les stéroïdes, une grande prudence s’impose quand les dosages sont pratiqués sur des sérums de patient(e)s se trouvant dans des conditions physiologiques particulières (grossesse ou période néonatale), ou pathologiques (bloc enzymatique). Dans ces diverses circonstances, l’équilibre entre les différents stéroïdes est fortement modifié

Problèmes et pièges en immunoanalyse

et des interférences peuvent être observées. Il peut en être de même lors d’une épreuve dynamique fonctionnelle (interférence du 11 désoxycortisol dans le dosage du cortisol lors d’un test à la métopirone). Lorsque les stéroïdes interférents sont des conjugués hydrosolubles, une extraction par un solvant organique peut suffire pour éliminer l’interférence, dans d’autres cas, une purification par chromatographie est nécessaire. Des interférences négatives ont été rapportées pour la digoxine dosée par une méthode compétitive séquentielle comportant une incubation du sérum et de l’anticorps fixé sur une phase solide, suivie d’un lavage avant ajout de l’antigène marqué. Ces interférences sont dues à des molécules présentant une réaction croisée avec la digoxine. Lors du lavage intermédiaire, ces molécules interférentes se dissocient de l’anticorps plus rapidement que l’analyte. De ce fait, la fixation de l’antigène marqué à l’anticorps est plus élevée que ce qu’elle aurait été en l’absence de réaction croisée. Cet exemple illustre bien la fragilité des immunodosages et la nécessité de bien analyser le schéma réactionnel d’un dosage pour appréhender correctement les interférences. 2.3.1.2 Dosage immunométrique (excès d’anticorps)

Du fait de la reconnaissance de deux épitopes de l’analyte et du recours fréquent à des anticorps monoclonaux, les dosages immunométriques sont plus spécifiques que les dosages compétitifs. Les interférences positives sont plus rares car elles nécessitent la reconnaissance de la molécule interférente par les deux anticorps du dosage. Dans certains cas, la molécule interférente ne réagit qu’avec un seul des deux anticorps du dosage, ce qui peut conduire à une interférence négative (abaissement du résultat). Les sites anticorps occupés par la molécule interférente ne sont plus disponibles pour l’analyte et le nombre de « sandwichs » formés peut diminuer (fig. 4). Cette interférence négative est elle aussi rare car les anticorps sont en large excès. Les exemples rapportés dans la littérature concernent l’interférence de fragments dans le dosage d’ACTH « intacte », d’insuline dans le dosage de proinsuline, de l’hCG dans le dosage d’hCG β au cours de la grossesse et d’un analogue de la GH dans le dosage de cette hormone (21). Cet analogue antagoniste, le pegvisomant, est présent dans le sérum de patients traités à une concentration environ 1000 fois supérieure à celle de la GH. Par conséquent, pour évaluer la spécificité d’un dosage immunométrique, il est indispensable de tester la réactivité croisée de la molécule interférente, en absence et en présence de l’analyte.

133

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Immunoanalyse

(a)

Molécule interférente

!

(b)

Molécule interférente

Figure : 4 – Dosage immunométrique à deux sites par excès d’anticorps : interférences liées à la présence d’une molécule présentant un épitope identique à l’un des épitopes de l’analyte. (a) Épitope réagissant avec l’anticorps fixé sur la phase solide. (b) Épitope réagissant avec l’anticorps marqué. Certains dosages, en particulier ceux qui utilisent un couple d’anticorps monoclonaux très sélectifs, peuvent présenter un excès de spécificité. Ce phénomène, qui n’est pas une réaction croisée, ni à proprement parler une interférence, a pu conduire dans le cas des hormones glycoprotéiques

Problèmes et pièges en immunoanalyse

hypophysaires à la non-reconnaissance de certaines isoformes pourtant physiologiques. Une meilleure sélection du couple d’anticorps permet d’éviter ce piège. Dans certaines circonstances, un dosage exact peut se révéler trop spécifique par rapport au but recherché. Par exemple, un dosage spécifique de l’insuline humaine, s’il est utilisé seul, est inadapté à l’exploration d’une hypoglycémie pour laquelle il est intéressant d’évaluer outre la concentration d’insuline elle-même, celles des proinsulines et des analogues pharmacologiques de l’insuline.

2.3.2 Interférences d’anticorps Parmi les anticorps susceptibles de fausser le résultat d’un dosage, nous envisagerons successivement ceux qui sont dirigés contre l’analyte et ceux qui réagissent avec un réactif du dosage, anticorps ou autre composant (tableau 4). Tableau : 4 – Principaux anticorps interférents dans les immunodosages. Anticorps dirigés contre l’analyte : autoanticorps Anticorps anti• thyroglobuline, • prolactine, • insuline, • troponine, • T3, T4, TSH, • GH, • PTH, • LH, FSH…

Anticorps dirigés contre un réactif du dosage • Anticorps dirigés contre un ou des anticorps réactifs : anticorps hétérophiles (anti-isotype, anti-idiotype), • anticorps anti-animal : anti-souris (HAMA), anti-lapin..., • anticorps hétérophiles naturels. • Anticorps dirigés contre d’autres cibles : anti-avidine ou streptavidine, anticonjugué, anti-fluorescéine, anti-ruthénium, anti-gélatine, anti-phase solide...

2.3.2.1 Anticorps anti-analyte

Des autoanticorps dirigés contre l’analyte peuvent être présents dans le sérum de certains sujets. Ils sont soit associés à une pathologie autoimmune (antithyroglobuline et pathologie thyroïdienne, anti-insuline et prédiabète, par exemple), soit induits par un traitement (anti-insuline, anti-GH, anti-érythropoïétine...) ou présents sans étiologie connue (anti-prolactine, anti-troponine, anti-PTH…). L’analyte est alors présent dans le sérum sous une forme libre et sous une forme liée parfois dénommée forme macro (macroprolactine par exemple). L’ensemble constitue la forme totale. Les autoanticorps peuvent être recherchés à l’aide de tests spécifiques (dosage des anticorps anti-thyroglobuline par exemple) ou plus généralement en incubant le sérum avec l’antigène marqué à l’iode 125, quand il est disponible, et en précipitant les immuncomplexes avec du PEG (antiT3, anti-T4, anti-insuline par exemple). L’interférence des anticorps antianalyte est fréquente pour les dosages de prolactine, thyroglobuline ou insuline, et plus exceptionnelle avec d’autres analytes.

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Immunoanalyse

2.3.2.1.1 Interférence dans un dosage immunométrique Le couple d’anticorps reconnaît l’analyte libre mais aussi, au moins pour partie, l’analyte lié. En effet, d’une part les épitopes reconnus par les anticorps réactifs peuvent être différents des épitopes occupés par les autoanticorps, et d’autre part la dilution introduite par le dosage peut provoquer une dissociation partielle des complexes antigène-autoanticorps initialement présents dans le sérum. De plus, si l’affinité des anticorps du dosage est supérieure à celle des autoanticorps, ils peuvent déplacer ces derniers de leurs sites de liaison et accéder aux épitopes de l’analyte. Le résultat du dosage est le plus souvent intermédiaire entre la concentration libre et la concentration totale (fig. 5).

Insulinémie (muI/L) 100 90 80 70 60 50 40 30 20 10 0 Insuline Libre

Dosage Direct

Insuline totale

Figure : 5 – Dosage d’insuline dans six sérums contenant des autoanticorps anti-insuline : dosage direct (sans prétraitement du sérum), dosage de l’insuline libre mesurée dans le surnageant de précipitation au PEG, dosage de l’insuline totale obtenue après dissociation des immuncomplexes (insuline-autoanticorps anti-insuline du sérum) par passage en milieu acide et après élimination des immunoglobulines par précipitation au PEG. La concentration mesurée par le dosage direct est intermédiaire entre les concentrations d’insuline libre et d’insuline totale. Si la finalité du dosage est de mesurer la concentration de la forme libre, comme c’est le cas pour le dosage d’une hormone dont seule la fraction libre est biologiquement active, l’interférence observée est qualifiée de positive. Ce type d’interférence est observé en particulier avec les dosages de prolactine et d’insuline (encadré 1).

Problèmes et pièges en immunoanalyse

Encadré : 1 – Insuline libre et prolactine monomérique. Pour l’insuline et la prolactine, la précipitation des complexes antigèneautoanticorps par le polyéthylène glycol à 25 % (mélange sérum / PEG volume à volume) est couramment pratiquée. Après centrifugation, la fraction libre de l’hormone est dosée dans le surnageant. Le résultat est multiplié par deux pour tenir compte du facteur de dilution. Pour valider cette technique, il faut s’assurer de l’absence d’effet matrice dû à l’ajout de PEG. Dans le cas de l’insuline, le résultat du dosage est connu sous le nom d’insuline libre et l’effet matrice est souvent négligeable. Pour la prolactine, le nom consacré par l’usage est prolactine monomérique (22). En effet, pour cette hormone, la précipitation au PEG, en plus des formes très lourdes (macroprolactine ou big big prolactine), élimine aussi des formes de masse molaire plus faible (dimères, big prolactine). L’effet matrice du PEG est négligeable avec une majorité de dosages mais pas avec tous. La précipitation au PEG entraîne toujours une précipitation de prolactine monomérique faible mais non négligeable. C’est pourquoi il est impératif de définir des normes de prolactine monomérique tenant compte de cette précipitation. Les déterminations de l’insuline libre et de la prolactine monomérique permettent de mesurer les concentrations hormonales biologiquement actives donc susceptibles d’être responsables des signes cliniques : hypoglycémie pour l’insuline, aménorrhée, galactorrhée, infertilité pour la prolactine.

Pour mesurer l’analyte libre uniquement, il faudrait que les anticorps du dosage aient la double propriété de ne pas reconnaître la fraction liée et de ne pas déplacer les autoanticorps de leurs sites de liaison sur l’antigène. De plus, le dosage ne devrait pas entraîner une dissociation même partielle des complexes antigène-autoanticorps. Ces conditions très exigeantes sont difficilement réalisables en pratique. À l’inverse, si la finalité du dosage est de mesurer la concentration totale, comme par exemple pour le dosage d’un marqueur dont on cherche à détecter la présence sous forme libre ou liée, l’interférence est qualifiée de négative (dosages de thyroglobuline et troponine). La stratégie retenue pour essayer de minimiser cette interférence a été soit de sélectionner des anticorps monoclonaux reconnaissant des épitopes non occupés par les autoanticorps (cas de la thyroglobuline et de la troponine), soit de favoriser la dissociation des complexes antigène-autoanticorps et d’utiliser des anticorps de très haute affinité capables de déplacer l’analyte lié aux autoanticorps (cas de la thyroglobuline). Pour la thyroglobuline, ces approches n’ont pas permis d’obtenir des dosages totalement insensibles aux autoanticorps. C’est la raison pour laquelle l’interférence des autoanticorps dans ce dosage doit être systématiquement recherchée (encadré 2).

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Immunoanalyse

Encadré : 2 – Autoanticorps anti-thyroglobuline et dosage

de thyroglobuline. La validation d’un résultat de thyroglobuline impose de s’assurer de l’absence d’interférence des autoanticorps responsable d’un abaissement du résultat du dosage par méthode immunométrique. Pour ce faire, une première stratégie consiste à déterminer le pourcentage de récupération d’une certaine quantité de thyroglobuline ajoutée au sérum (test de surcharge, récupération ou recouvrement). Une interférence devrait abaisser ce pourcentage en dessous de la limite inférieure généralement admise de 80 %. Cette approche théoriquement satisfaisante a été critiquée pour plusieurs raisons dont la principale est la non-identité entre la thyroglobuline endogène et la thyroglobuline ajoutée. En effet, il a été montré que le résultat de thyroglobuline pouvait être faussement abaissé même si le pourcentage de récupération était supérieur à 80 %. C’est pourquoi il est de plus en plus fréquemment admis qu’il faut mettre en doute un résultat dès lors que des anticorps anti-thyroglobuline ont été détectés. Ceci est particulièrement justifié quand le résultat de thyroglobuline est inférieur à la limite de détection. Dans le cas contraire, le résultat, même s’il est abaissé par rapport à la valeur exacte, signe la présence de thyroglobuline. Utilisé dans le cadre de la surveillance d’un patient thyroïdectomisé pour cancer de la thyroïde, un résultat indétectable peut, s’il est validé, être faussement rassurant. La limite de cette dernière approche (recherche des Ac antithyroglobuline) réside dans la concordance encore très imparfaite des résultats des différentes trousses de recherche des Ac anti-thyroglobuline (23).

2.3.2.1.2 Interférence dans un dosage compétitif Le traceur (antigène marqué) qui se lie normalement aux anticorps réactifs peut se lier également aux autoanticorps. La liaison du traceur aux anticorps du dosage se trouve ainsi diminuée, alors que la fixation globale du traceur aux anticorps réactifs et aux autoanticorps est accrue. Dans la majorité des cas, en particulier avec les dosages actuels dans lesquels l’anticorps réactif est fixé sur une phase solide, l’étape de séparation fraction libre/fraction liée retient uniquement la fraction liée aux anticorps réactifs et l’interférence est positive (résultat supérieur à celui attendu pour la fraction libre ou l’analyte total). Le signal mesuré est en effet inférieur à celui attendu en l’absence d’interférence et la concentration lue sur la courbe d’étalonnage décroissante est surestimée. Très rarement maintenant, l’étape de séparation retient l’ensemble du traceur lié aux anticorps réactifs et aux autoanticorps et l’interférence est négative. Les interférences d’autoanticorps les plus fréquentes, bien que rares, concernent les dosages des hormones thyroïdiennes et de leurs fractions libres (encadré 3).

Problèmes et pièges en immunoanalyse

Encadré : 3 – Autoanticorps et dosages de thyroxine (T4)

et triiodothyronine (T3) libre.

Deux approches ont été mises en œuvre pour éviter ou minimiser l’interférence des autoanticorps anti-T4 ou anti-T3 dans le dosage de la fraction libre des hormones thyroïdiennes. La première approche consiste à faire un dosage séquentiel en deux étapes : dans une première incubation, le sérum est mis en contact avec l’anticorps réactif fixé sur une phase solide, puis après un lavage méticuleux, l’antigène marqué est ajouté et se lie aux sites anticorps restés libres. Dans cette méthode, le traceur (antigène marqué) n’est pas en contact avec le sérum et ne réagit donc pas avec les autoanticorps. Certains de ces dosages sont en pratique considérés comme non influencés par les autoanticorps et permettent de doser la fraction libre sans interférence. La seconde approche est celle d’un dosage compétitif par anticorps marqué ou antigène immobilisé. Dans cette méthode, le ligand, hormone ou dérivé de l’hormone (T4 ou T3 pour un dosage de T4 et T3 ou T2, diiodothyronine, pour un dosage de T3), entrant en compétition avec l’analyte pour la fixation à l’anticorps réactif marqué est immobilisé sur une phase solide. Sa fixation à l’anticorps réactif est moins perturbée par la présence des autoanticorps que celle du ligand marqué d’un dosage compétitif classique (le ligand immobilisé aurait une affinité plus faible que celle d’un ligand marqué, ce qui expliquerait une moindre interférence des auto-anticorps). Cependant une interférence reste possible et plusieurs cas ont été rapportés. Pour un dosage de T4 libre, dont le ligand est à base de T3 et non de T4, une interférence peut être observée en l’absence d’autoanticorps anti-T4 mais en présence d’autoanticorps anti-T3. Les dosages de T3 dont le ligand est à base de T2 sont à l’abri d’une interférence d’autoanticorps anti-T3. 2.3.2.2 Anticorps anti-anticorps réactif – Anticorps hétérophiles

Certains sérums contiennent des anticorps humains anti-immunoglobulines animales. Ces anticorps sont capables de se lier aux anticorps impliqués dans les immunodosages. Ils peuvent être dirigés contre le fragment constant Fc des immunoglobulines (anticorps isotypiques, anti-isotype) mais aussi contre des régions plus variables des immunoglobulines, fragment Fab (anticorps idiotypiques, anti-idiotype) (fig. 6). Ils sont le plus souvent de classe IgG ou IgM. Lorsque ces anticorps sont de forte affinité et spécifiques des immunoglobulines d’une espèce animale donnée, on parle d’anticorps anti-animal. L'agent immunogène responsable de la présence de ces anticorps est en général connu. On retrouve ces anticorps par exemple chez des patients ayant bénéficié d’un vaccin à base de produits d’origine animale, ayant subi une immunothérapie ou une immunoscintigraphie utilisant des anticorps monoclonaux murins, ou chez des sujets, qui de par leur profession ou mode de vie sont en contact fréquent et rapproché avec des animaux. Quand l'immunogène est un anticorps monoclonal de souris utilisé dans un but diagnostique ou thérapeutique, il s'agit d'HAMA (Human Anti-Mouse Antibody).

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Immunoanalyse

Antigène

Anticorps humain anti-idiotype

Anticorps humain anti-isotype

Figure : 6 – Structure d’une molécule d’IgG animale (anticorps réactif du dosage) et spécificité des anticorps hétérophiles anti-isotype et anti-idiotype. Lorsque ces anticorps sont de faible affinité et réagissent avec des immunoglobulines de différentes espèces animales (anticorps polyspécifiques ou multispécifiques), on parle d’anticorps hétérophiles. Le plus souvent, l’agent immunogène n’est pas identifié et l’origine de ces anticorps est inconnue. Les facteurs rhumatoïdes réagissant avec des immunoglobulines animales peuvent être inclus dans les anticorps hétérophiles. Ces anticorps hétérophiles sont le plus souvent considérés comme des anticorps naturels. De tels anticorps ont été détectés dans le sérum de patients atteints de maladies auto-immunes, comme le syndrome de Sjögren et le lupus, mais ils sont aussi fréquemment rencontrés hors de ces contextes autoimmuns forts. La fréquence des anticorps hétérophiles dépend de la technique utilisée pour les mettre en évidence mais elle est certainement élevée et peut atteindre 40 %. Lorsque ces anticorps réagissent avec les immunoglobulines de souris, ils sont aussi dénommés HAMA. Enfin dans quelques cas, une interférence du même type que celle des anticorps hétérophiles a été décrite pour une paraprotéine (immunoglobuline monoclonale). En fait, sous l’appellation d’anticorps hétérophiles, on réunit fréquemment les anticorps hétérophiles précédemment définis et les anticorps anti-animal. Ceci est dû au fait que tous deux interagissent de la même façon avec les anticorps réactifs des dosages et induisent les mêmes interférences. C’est dans cette dernière acceptation que nous utiliserons les termes anticorps hétérophiles dans la suite de ce chapitre (24). Ces anticorps interférents sont propres à un sujet donné. Leur concentration peut rester stable dans le temps ou au contraire varier chez un même individu suite à une immunisation, une infection, une transfusion sanguine ou une transmission materno-fœtale. Fréquemment l’interférence ne se manifeste que pour un dosage d’un seul fabricant.

Problèmes et pièges en immunoanalyse

2.3.2.2.1 Interférence dans un dosage immunométrique Dans un dosage immunométrique, des anticorps hétérophiles peuvent interférer de deux façons. S’ils reconnaissent les deux anticorps du dosage, ils peuvent former un pont entre l’anticorps de capture et l’anticorps marqué, ce qui produit une interférence positive. Ce premier cas de figure est le plus fréquent. Par contre, s’ils ne reconnaissent qu’un des deux anticorps réactifs, en empêchant la formation des « sandwichs », ils peuvent donner une interférence négative (fig. 7). En raison de la concentration en anticorps réactifs relativement élevée dans les dosages immunométriques, ceux-ci sont particulièrement sensibles aux anticorps hétérophiles même de faible affinité.

(a)

(b)

Anticorps hétérophile

Figure : 7 – Interférences d’anticorps hétérophiles dans un dosage immunométrique. (a) Interférence positive : les anticorps hétérophiles réagissent avec les deux anticorps du dosage et miment le rôle de l’analyte. (b) Interférence négative : les anticorps hétérophiles ne réagissent qu’avec l’anticorps lié à la phase solide et bloquent la liaison de l’antigène donc la formation des sandwichs (le résultat est le même si les anticorps hétérophiles ne réagissent qu’avec l’anticorps marqué).

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Immunoanalyse

Les dosages d’anticorps par méthode immunométrique peuvent être sujets à des interférences positives du même type : des anticorps hétérophiles polyspécifiques peuvent en effet réagir à la fois avec l’antigène fixé sur la phase solide et avec l’anticorps de détection anti-immunoglobuline humaine utilisé dans ces dosages. 2.3.2.2.2 Interférence dans un dosage compétitif

L’interférence positive d’anticorps hétérophiles dans un dosage compétitif est également possible. Des anticorps hétérophiles peuvent en effet inhiber la fixation de l’antigène marqué à l’anticorps réactif. Cette inhibition due à un empêchement stérique se conçoit particulièrement bien quand il s’agit d’anticorps hétérophiles anti-idiotypes qui se fixent près du paratope de l’anticorps réactif (fig. 8). L’affinité de l’analyte et du traceur pour l’anticorps réactif est en général beaucoup plus forte que celle de la plupart des anticorps hétérophiles. De ce fait cette interférence est rare. Elle peut se produire cependant lorsque les anticorps hétérophiles sont présents en forte concentration (ce qui est le cas lorsque la prise d’essai est importante) et/ou lorsque la concentration en anticorps réactif est particulièrement faible (ce qui est le cas lorsqu’une faible limite de détection est recherchée).

(a)

Anticorps

Antigène

(b)

Antigène marqué

Anticorps hétérophile

Figure : 8 – Interférence des anticorps hétérophiles dans un dosage compétitif par défaut d’anticorps. (a) Réaction normale en l’absence d’anticorps hétérophile. (b) L’anticorps hétérophile bloque en partie l’accès de l’antigène et de l’antigène marqué à l’anticorps du dosage. La quantité de marqueur liée est diminuée et l’interférence est positive.

Problèmes et pièges en immunoanalyse

Une interférence négative a été décrite pour un dosage de cortisol, elle s’expliquerait par une liaison des anticorps hétérophiles au complexe anticorps réactif-cortisol marqué inhibant la liaison du cortisol non marqué. Cet exemple illustre la diversité des mécanismes qui peuvent être à l’origine d’une interférence dans un immunodosage. 2.3.2.2.3 Minimisation de l’interférence des anticorps hétérophiles Étant donnée la grande fréquence de ces anticorps, la question de l’élimination ou pour le moins de la minimisation de leur interférence est posée. Trois approches ont été proposées : – La dénaturation ou l’élimination des anticorps interférents Sauf exception, la dénaturation des anticorps interférents est en général incompatible avec une bonne préservation de l’analyte. Une élimination des immunoglobulines de l’échantillon préalablement au dosage apparaît actuellement comme la seule parade absolue contre ces interférences. Pour ce faire, une précipitation systématique des immunoglobulines au PEG a été proposée mais elle pose des problèmes pratiques (allongement de la durée d’analyse, automatisation) et surtout elle manque de fiabilité. En effet, la précipitation au PEG est sensible à la concentration en immunoglobulines et s’accompagne en général d’une coprécipitation partielle de l’analyte d’autant plus importante que sa masse molaire est élevée. – La modification des anticorps réactifs pour les rendre moins sensibles aux anticorps hétérophiles Le remplacement de l’anticorps réactif entier par le fragment Fab n’élimine en général pas l’interférence car les anticorps hétérophiles se lient fréquemment à ce fragment. Des anticorps chimériques ou humanisés sont parfois utilisés. Pour la même raison que précédemment, cette approche n’élimine pas l’interférence dans tous les cas. – L’introduction d’additifs dans le milieu réactionnel pour réduire l’interférence La parade la plus courante est l’ajout dans les réactifs du dosage de protéines animales (agents bloquants non spécifiques) : des sérums animaux (de souris mais aussi de bœuf, chèvre ou mouton), des IgG polyclonales (fréquemment des mélanges d’immunoglobulines de plusieurs espèces animales), des IgG polymérisées ou des fragments d’IgG. Des anticorps antiimmunoglobulines humaines (agents bloquants spécifiques) peuvent également être utilisés. Ces additifs, spécifiques ou non, réagissent avec les anticorps hétérophiles et peuvent les neutraliser. Certains de ces additifs commercialisés sont brevetés et leur composition détaillée reste inconnue. Cette dernière approche, ajout d’agents bloquants, a été adoptée par la majorité des fabricants de trousses de réactifs. L’efficacité de ces agents est réelle mais n’est pas toujours absolue et une interférence peut subsister dans quelques cas. Les interférences d’anticorps hétérophiles de classe IgM et/ou anti-idiotype semblent particulièrement difficiles à éliminer.

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Immunoanalyse

2.3.2.2.4 Fréquence de l’interférence des anticorps hétérophiles

S’il est admis que des anticorps hétérophiles sont présents dans 40 % des sérums, ils ne seraient responsables d’une interférence que dans 15 % des cas quand on utilise un dosage non protégé. Avec les dosages actuels incorporant des agents bloquants, les fréquences d’interférence rapportées dans différentes études sont les suivantes : 6 % sur 3 445 résultats de 74 analytes dosés dans 10 sérums contenant des HAMA et 0,5 % dans une étude prospective de dosages de TSH, LH et FSH réalisés sur 5 310 patients, avec une méthode probablement plus sensible que d’autres à ces interférences. En fait, le pourcentage de 0,05 %, basé en particulier sur une étude de cohérence des résultats de T4 libre et de TSH, est retenu par la majorité des auteurs et semble mieux correspondre à la réalité. L’interférence peut parfois ne pas être suffisamment marquée pour entraîner une discordance clinico-biologique permettant de la suspecter. Cependant, étant donné le nombre très élevé d’immunodosages réalisés, des résultats biologiques faussement normaux ou pathologiques sont observés dans un nombre non négligeable de cas. De plus, le développement de l’usage d’anticorps monoclonaux murins à des fins diagnostiques ou thérapeutiques pourrait à l’avenir augmenter la fréquence de ces interférences. 2.3.2.2.5 Mise en évidence des interférences d’anticorps hétérophiles

Avec parfois celles des autoanticorps anti-analyte, les interférences des anticorps hétérophiles sont parmi les plus sournoises car très souvent imprévisibles. Quand une discordance clinico-biologique est observée, il convient de rechercher une interférence de ce type. Dans le laboratoire où un résultat suspect d’interférence a été détecté, une épreuve de dilution peut être faite. Les dilutions peuvent être réalisées dans le diluant du fabricant. Celui-ci contient fréquemment des immunoglobulines animales qui peuvent neutraliser les anticorps hétérophiles. La non-linéarité du test de dilution n’est pas spécifique d’une interférence d’anticorps hétérophiles. Elle s’explique par d’autres circonstances comme pour certains marqueurs tumoraux, l’accessibilité des anticorps du dosage dans le sérum dilué à des épitopes masqués dans le sérum non dilué (CA 19-9 par exemple). À l’inverse, l’épreuve de dilution peut être normale alors que l’interférence est présente. Au total, ce test ne détecterait que 60 % des interférences d’anticorps hétérophiles (25). Le moyen simple, probablement le plus performant consiste à doser l’analyte avec une autre trousse de dosage utilisant d’autres anticorps réactifs. L’interférence est en effet souvent spécifique d’un anticorps ou couple d’anticorps réactifs et une discordance entre les résultats des deux dosages est observée. D’autres moyens peuvent être mis en œuvre : – élimination des anticorps du sérum par précipitation au PEG, à la protéine-A ou protéine-G, – surcharge du sérum avec des sérums ou des immunoglobulines animales,

Problèmes et pièges en immunoanalyse

– traitement du sérum par un réactif commercial : Heterophilic Blocking Reagent (HBR) ou Heterophilic Blocking Tube (HBT) pour neutraliser les anticorps hétérophiles, ou Non-Specific Antibody Blocking Tube (NABT) pour éliminer une interférence non spécifique d’anticorps dans un dosage d’anticorps. Les réactifs HBR et HBT contiennent des immunoglobulines de souris et peuvent donc ne pas être adaptés à des dosages dont les réactifs contiennent des anticorps anti-immunoglobuline de souris. Aucune de ces méthodes n’est infaillible : le PEG interfère dans certains dosages, la protéine-A et la protéine-G n’éliminent que les IgG (la protéine A n’élimine pas les IgG3) et l’addition d’immunoglobulines animales ou d’autres réactifs commerciaux n’est pas toujours efficace. Dans tous les cas, il est nécessaire de contrôler l’effet du traitement choisi sur des sérums sans interférence. Enfin la recherche de HAMA dans un sérum interférent à l’aide d’un immunodosage développé à cet effet, pour détecter ces anticorps dans le sérum de patients ayant bénéficié d’une immunothérapie à base d’anticorps monoclonaux de souris est souvent décevante. Ce n’est pas très surprenant dans la mesure où les anticorps hétérophiles recherchés sont fréquemment des anticorps naturels qui se lient le plus souvent au fragment Fab des immunoglobulines murines, dont la structure est beaucoup plus variable que celle des fragments Fc. En pratique, la mise en évidence d’une interférence d’anticorps hétérophiles et sa caractérisation font appel à une combinaison de plusieurs de ces techniques (tableau 5). Tableau : 5 – Une prolactine faussement élevée. Recherche d’une interférence d’anticorps hétérophiles dans le sérum d’une patiente présentant des règles irrégulières (imagerie hypophysaire normale). Traitement subi par le sérum et dosage Sérum non traité, dosage de prolactine Méthode A Méthode B Méthode C Méthode D

Sérum Patient Résultat

Sérum Contrôle Résultat

> 200 μg/L 21,6 μg/L 19,1 μg/L 18,4 μg/L

Précipitation au PEG 25 % et dosage du surnageant (méthode B)

Récupération 76 %

Dilutions dans le diluant du dosage A : 5 à 320 fois pour le sérum, 2 à 32 fois pour le contrôle

Récupération Récupération 117-191 % 83-97 %

Conclusions

Dosage A : faux positif Autres résultats compatibles avec le tableau clinique de la patiente Macroprolactine négative (récupération > 60 %) % de récupération croissant suggérant une interférence

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Immunoanalyse

Traitement subi par le sérum et dosage

Sérum Patient Résultat

Ajout de sérum de souris, bœuf ou lapin et dosage de prolactine (méthode A)

Pas de variation

Dosage ELISA d’HAMA (IgG de souris immobilisée et conjugué de souris)

63 μg/L

Sérum Contrôle Résultat

Ne bloque pas l’interférence < 40 μg/L

Addition de protéine-A Pas Sépharose et dosage de prode variation lactine (méthode A) Tubes HBT (Heterophilic Blocking Tubes) contenant un anticorps anti-IgM humaine et dosage de prolactine Méthode A Méthode B

17,4 μg/L 23,3 μg/L

Conclusions

Faiblement positif

L’anticorps interférent n’est pas une IgG

L’anticorps interférent est probablement Pas de un anticorps naturel variation des idiotypique IgM résultats

2.3.2.3 Anticorps dirigés contre d’autres cibles

Certains dosages mettent à profit la liaison avidine- ou streptavidinebiotine pour lier des anticorps réactifs ou des antigènes à la phase solide. La phase solide est recouverte d’avidine ou de streptavidine, et les anticorps ou antigènes sont biotinylés. Ces dosages sont susceptibles d’être mis en défaut lorsque des anticorps anti-avidine ou antistreptavidine sont présents dans l’échantillon analysé ou lorsque celuici contient de la biotine à une concentration particulièrement élevée. Ces anticorps ou la biotine en excès peuvent bloquer la fixation des anticorps réactifs ou des antigènes à la phase solide. Chez les patients traités par la biotine (> 5 mg/jour), il est recommandé d’effectuer le prélèvement sanguin huit heures après la dernière administration. De plus, en cas de discordance clinico-biologique, doivent être aussi envisagées les interférences d’anticorps dirigés contre les marqueurs des immunodosages, en particulier celles d’anticorps anti-conjugué pour un dosage immunoenzymatique, anti-fluorescéine pour un dosage immunofluorométrique et anti-ruthénium pour un dosage utilisant le ruthénium comme marqueur électrochimiluminescent. Enfin des interférences d’anticorps dirigés contre la phase solide ou l’ensemble formé par le ligand et son bras de liaison à la phase solide ont été rapportées. L’interférence de ces anticorps, globalement considérés comme des anticorps anti-phase solide, a été décrite en particulier dans des dosages par anticorps marqués de T4 libre et T3 libre.

Problèmes et pièges en immunoanalyse

2.3.3 Contamination Une surestimation du résultat peut être due à une contamination de l’échantillon par l’analyte lui-même ou une substance présentant une réactivité croisée avec l’analyte. Cette contamination peut se produire lors de la phase analytique. Dans un automate, si l’aiguille de prélèvement n’est pas changée ou lavée suffisamment entre les prélèvements de sérum, un échantillon de concentration très élevée peut contaminer un échantillon de concentration plus faible. Ce type de problème (carry-over des anglo-saxons) se produit avec des analytes dont les concentrations varient sur plusieurs ordres de grandeurs, comme l’hCG et les marqueurs tumoraux, mais aussi la TSH ou des anticorps. Des tests doivent être pratiqués pour s’assurer de l’absence de ce phénomène quand on introduit un automate au laboratoire. Dans d’autres cas, c’est l’expérimentateur lui-même qui contamine l’échantillon au moment du dosage ou juste avant. Trois exemples : prélèvement pour dosage de l’œstradiol contaminé par les techniciennes ou les préleveuses suivant un traitement hormonal substitutif par voie transdermique ou nasale, prélèvement pour dosage de testostérone contaminé par un technicien traité par testostérone sous forme de gel et enfin une salive destinée au dosage du cortisol contaminée lors du recueil par le patient utilisant une crème contenant de l’hydrocortisone. Des contaminations par d’autres substances que l’analyte peuvent exceptionnellement fausser le résultat du dosage, en particulier des substances capables de modifier le signal émis par le marqueur : inhibiteurs enzymatiques pour un dosage immunoenzymatique, fluorophores utilisés dans un examen ophtalmologique pour un dosage immunofluorométrique. En fait, il a été montré que, pour les dosages en phase hétérogène, si la mesure du signal est précédée par des lavages suffisamment performants, ces interférences peuvent être le plus souvent évitées.

2.3.4 Interférences des protéines de liaison Certains analytes comme les hormones thyroïdiennes et les stéroïdes (cortisol, estradiol, progestérone, testostérone…), mais aussi la GH, l’IGF-I et la vitamine D circulent dans le sérum sous formes libre et liée à des protéines de transport. L’ensemble constitue la forme totale. 2.3.4.1 Dosage des formes totales

Dans le cas du dosage de l’analyte total, il faut s’assurer que la dissociation de la fraction liée est complète. Dans le cas contraire, le résultat peut être sous-estimé. Les moyens les plus utilisés pour libérer l’analyte de ses protéines de transport sont l’extraction par un solvant ou une chromatographie et, de plus en plus fréquemment, car cela permet un dosage direct, l’ajout de compétiteurs qui ne sont pas reconnus par les anticorps du dosage mais déplacent l’analyte lié : soustraction de la mesure de l’activité non spécifique à la mesure obtenue pour les hormones thyroïdiennes, danazol pour le cortisol et la progestérone, mestérolone pour l’œstradiol,

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Immunoanalyse

ANS et norgestrel pour la testostérone, IGF-II pour l’IGF-I par exemple. Dans le cas d’un dosage compétitif, si le traceur (antigène marqué) se lie en partie aux protéines de transport, le résultat du dosage devient dépendant de la concentration en protéines de transport. À titre d’exemple la SHBG peut interférer dans certains dosages de testostérone. 2.3.4.2 Dosage des formes libres

Les dosages des formes libres, T4 libre et T3 libre principalement, mais aussi cortisol libre ou testostérone libre sont particulièrement délicats car ils nécessitent de perturber le moins possible l’équilibre préexistant dans le sérum (26, 27). Ils peuvent être réalisés indirectement après séparation préalable de la forme libre par dialyse ou ultrafiltration. Ces méthodes, utilisées en particulier pour le cortisol libre, sont qualifiées d’absolues car elles peuvent être étalonnées avec des calibrateurs définis par gravimétrie. Ces techniques exigeantes en temps et en matériel tiennent lieu de référence. Elles sont reconnues comme peu sensibles aux anomalies des protéines de transport, qu’elles soient quantitatives ou qualitatives comme la présence dans le sérum d’un autoanticorps ou, pour la T4 libre, d’une forme anormale d’albumine ayant une affinité accrue pour la T4 (dysalbuminémie familiale hyperthyroxinémique ou FDH). Les dosages les plus couramment pratiqués sont ceux de T4 libre et T3 libre. Ils sont réalisés en routine par des immunodosages compétitifs directs qualifiés de relatifs car calibrés par rapport à des sérums étalon dont la concentration en hormone libre a été déterminée par une méthode absolue (tableau 6).

Problèmes et pièges en immunoanalyse

Tableau : 6 – Caractéristiques des principales méthodes de dosage

des hormones thyroïdiennes libres. Méthode

Qualités

Défauts

Interférences

- Méthode absolue - Technique lourde peu applicable en routine - Dilution - Séparation longue (18 h)

-Pas d’interférence de FDH* (T4 libre) et AAHT** - Effet in vitro de l’héparine très marqué (T4 libre)

Ultrafiltration/RIA - Méthode absolue - Technique très délicate - Absence de dilution - Séparation rapide (1-2 h)

- Pas d’interférence de FDH (T4 libre) et AAHT - Effet in vitro de l’héparine moins marqué

Dialyse/RIA

Immunodosage en deux étapes

- Pas de contact direct entre le ligand et le sérum - Automatisable

- Méthode relative - Dilution - Séquestration - En méthode manuelle : reproductibilité médiocre, dérive - Dynamique de réponse parfois limitée

- Faible ou nulle de la FDH (T4 libre) - Pas d'interférence des AAHT

Immunodosage en une étape avec ligand marqué, traceur analogue radioactif

- Praticabilité - Reproductibilité - Dynamique de réponse suffisante

- Méthode relative - Dilution - Séquestration - Influence de la concentration en protéines de transport (albumine) ayant conduit à l’abandon de cette méthode

- Très marquée et systématique de la FDH (T4 libre) et des AAHT - Baisse paradoxale de T4 libre sous héparine

Immunodosage en une étape avec ligand macromoléculaire marqué

- Méthode relative - Praticabilité - Dilution (automatisable) - Reproductibilité - Séquestration - Dynamique de réponse suffisante

- Possible des AAHT - Pas d’interférence de la FDH (T4 libre) avec certaines trousses

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Immunoanalyse

Méthode

Qualités

Défauts

- Méthode relative - Praticabilité Immunodosage - Dilution en une étape avec (automatisable) anticorps marqué - Reproductibilité - Séquestration - Dynamique de réponse suffisante - Pas de réactivité du ligand avec les protéines de transport

Interférences - Faible de la FDH (T4 libre) - Possible des anti-T4 pour T4 libre homologue - Possible des anti-T3 pour T4 libre hétérologue et T3 libre homologue - Anticorps anti-phase solide

*FDH : dysalbuminémie familiale **AAHT : anticorps anti-hormone thyroïdienne

Pour ces dosages, deux écueils sont à éviter : – la séquestration en quantité trop importante de l’antigène par l’anticorps du dosage, entraînant un déplacement de l’équilibre libre-lié d’autant plus marqué que la capacité de fixation des protéines de transport du sérum est faible ; pour la T4 libre, idéalement, cette séquestration devrait être limitée à 1-2 % de la quantité totale d’antigène ; – la fixation d’une partie du traceur (dérivé ou analogue de l’antigène) sur les protéines de transport. Les immunodosages en deux étapes permettent en général de bien maîtriser ces deux difficultés. Par contre, les dosages en une étape sont souvent plus problématiques et certains ont fait l’objet de vives critiques, en particulier les dosages de T4 libre, T3 libre et testostérone libre par traceur analogue radioactif. Les dosages en une étape les plus utilisés actuellement pour T4 libre et T3 libre mettent en jeu un traceur macromoléculaire qui n’interagit pas avec les protéines de transport, ou des anticorps marqués et un ligand compétiteur de la T4 (ou T3) fixé sur une phase solide. Avec les dosages actuels, la dilution du sérum et la séquestration d’une certaine quantité d’hormone par les anticorps du dosage peuvent entraîner une baisse du résultat, surtout notable quand la capacité de fixation des protéines du sérum est basse (hypoalbuminémie). Ce biais est majoré par la présence d’albumine dans les réactifs du dosage. De l’albumine est en effet assez fréquemment ajoutée aux réactifs dans le but de tamponner l’effet d’inhibiteurs de fixation de la T4 à ses protéines de transport. Ces inhibiteurs peuvent être des médicaments (salicylates, furosémide, antiinflammatoires non stéroïdiens) ou des acides gras libres endogènes ou libérés durant la conservation du sérum (traitements à l’héparine). En conséquence, ce sont chez les patients hospitalisés avec des pathologies très sévères et des traitements médicamenteux nombreux que les résultats de T4 libre (et T3 libre) sont le plus méthode-dépendants (fig. 9).

Problèmes et pièges en immunoanalyse

6 5 4 3 2 0

6

Résultat normalisé

5 4 3 2 1 0 A

B

C

D

E

F

Figure : 9 – Résultats normalisés (divisés par la valeur moyenne de l’intervalle de référence de chaque méthode) de la T4 libre dosée dans vingt sérums de patients hospitalisés suite à une greffe de moelle osseuse par différentes méthodes : A dialyse à l’équilibre/RIA, B RIA compétitif en deux étapes, C RIA compétitif par anticorps marqué en une étape, D, E, F dans vingt sérums de patients hospitalisés suite à une greffe de moelle osseuse, trois immunodosages non isotopiques automatisés.

2.4. Standardisation En tenant compte de l’imprécision de chaque détermination, il est fréquent que plusieurs trousses d’immunodosages ne donnent pas le même résultat sur un même échantillon. On dit alors que ces dosages souffrent d’un défaut de standardisation (28). Ceci est particulièrement gênant pour l’interprétation des résultats d’études multicentriques et lorsque des valeurs seuils uniques sont utilisées pour décider ou non d’un traitement (exemple de l’hormone de croissance) ou d’une surveillance (marqueurs sériques maternels de trisomie 21), ou d’une façon plus générale sont proposées dans des recommandations nationales ou internationales. Les directives européennes (IVD 98/79/EC du 7 décembre 1998) recommandent que la comparaison des résultats de dosages soit améliorée dans le temps et dans l’espace. La traçabilité des valeurs assignées aux calibrateurs et aux matériels de contrôle doit être assurée grâce à des procédures de mesure de référence (Reference Measurement Procedures : RMP) et/ou des matériels de référence (Reference Materials : RM).

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Immunoanalyse

Les problèmes de standardisation se posent différemment pour les dosages des haptènes et des protéines.

2.4.1 Dosage des haptènes Dans ce cas, des étalons purs existent et une méthode de référence par chromatographie couplée à la spectrométrie de masse et associée à la dilution isotopique est de plus en plus fréquemment disponible. Les problèmes de standardisation qui subsistent sont alors étroitement liés à la spécificité des anticorps, l’interférence des protéines de transport ou à un effet matrice pour les dosages directs. Les fabricants de trousses de dosage doivent s’assurer de la bonne standardisation de leur méthode vis-à-vis d’une méthode de référence.

2.4.2 Dosage des protéines La standardisation des dosages de peptides ou protéines est plus difficile à appréhender car il n’existe pas de méthode de référence et l’hétérogénéité de l’analyte présent dans les liquides biologiques pose problème. La standardisation voudrait en effet que l’étalon et l’analyte soient identiques. Ce n’est le cas qu’avec des petits peptides comme l’Angiotensine I ou II, voire certains polypeptides comme l’insuline. Le plus souvent pour les protéines, l’échantillon biologique contient en plus de l’analyte lui-même, des précurseurs, des formes clivées, des fragments de dégradation ou des complexes. Les glycoprotéines (marqueurs tumoraux ou hormones) sont par nature hétérogènes. Il n’est pas possible de préparer un étalon contenant les mêmes proportions de chaque forme moléculaire que l’échantillon biologique à doser, lui-même variable dans sa composition. Dans cette optique, certains considèrent comme impossible la standardisation de ces dosages et le but à atteindre reste l’harmonisation des résultats permettant leur comparaison avec différentes trousses de dosage. Des efforts importants ont été déployés dans ce sens (tableau 7). Ils ont consisté le plus souvent à préparer un ou des matériels de référence reconnus par tous. Il s’agit soit d’une préparation extractive (préparation de référence CRM 457 pour la thyroglobuline), soit d’une protéine recombinante (standard international 98/574 pour la GH). Une fois cette étape franchie, il faut s’assurer du comportement identique du matériel préparé quel que soit le milieu de dilution de la gamme étalon (absence d’effet matrice). En effet, la commutabilité, définie par le comportement identique de la préparation de référence et de l’analyte contenu dans l’échantillon biologique peut être perturbée par un effet matrice ou par la présence de formes non natives de l’analyte dans la préparation de référence.

Problèmes et pièges en immunoanalyse

Tableau : 7 – Problèmes de standardisation et solutions proposées :

des exemples. Analyte

Origine des difficultés de standardisation

Matériel de référence proposé et recommandations

hCG

Hétérogénéité des formes circulantes

4e IS WHO 75/537

PSA

Hétérogénéité des formes circulantes et raccord métrologique variable sur le standard international

PSA total : WHO 96/670 PSA libre : WHO 96/668

Thyroglobuline

Nombreuses isoformes plus ou moins iodées

Étalon commun CRM 457

GH

GH 20 kDa, 22 kDa Protéines de liaison

GH recombinante 22 kDa 2e SI 98/574 Dilution des étalons dans du sérum humain

TSH

Insuline

Productions de nouveaux calibrateurs structuralement Modifications de glycosylation et immunologiquement proches de la TSH circulante

Effet matrice

Production d’un nouveau matériel de référence et mise au point d’une méthode de référence (travail programmé par l’American Diabetes Association)

Ces efforts, s’ils contribuent à diminuer la variabilité inter-trousses, ne sont pas suffisants pour la supprimer. En effet, les anticorps utilisés dans les différentes trousses n’ont pas la même spécificité et ne reconnaissent donc pas de la même façon toutes les formes moléculaires présentes. Pour la thyroglobuline par exemple, l’expression des résultats par rapport à un étalon commun (CRM 457) n’a pas supprimé la variabilité inter-trousses des résultats mais a permis de la réduire nettement. Pour l’hormone de croissance également, des progrès notables ont été enregistrés (encadré 4).

153

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Immunoanalyse

Encadré : 4 – Harmonisation des résultats des dosages

d’hormone de croissance. Les problèmes d’harmonisation se posent d’une façon particulièrement aiguë quand des valeurs seuils fixes sont utilisées par les cliniciens pour décider d’un traitement comme ce fut le cas pour le traitement des déficits en GH à partir de valeurs seuils à 20 mUI/L ou 10 μg/L. Le travail réalisé pour améliorer l’harmonisation des résultats des dosages sériques de l’hormone de croissance par un groupe de travail de la SFBC est à ce titre exemplaire. Les conclusions de cette étude reprises par l’AFSSAPS préconisent l’utilisation de GH recombinante 22 kDa (2e SI 98/574 avec le facteur de conversion officiel 3 UI = 1 mg) comme étalon, et d’un sérum humain sans GH comme milieu de dilution. La mise en évidence d’un effet matrice a conduit également à recommander le dosage sur sérum. L’utilisation de facteurs différents pour convertir les unités internationales en unités de masse peut nuire gravement à l’harmonisation des résultats exprimés en unité de masse. Des facteurs de conversion différents pour des trousses pourtant étalonnées par rapport à un même standard international peuvent s’expliquer par l’emploi d’étalons secondaires propres à chaque trousse. À défaut de l’utilisation d’un facteur de conversion unique, pour comparer les résultats de différentes trousses, l’emploi des unités internationales reste en général recommandé comme dans le cas du dosage de la prolactine.

L’AFSSAPS a également soulevé le problème de l’harmonisation des dosages de PSA total et de PSA libre. Les données recueillies par le Contrôle National de Qualité AFSSAPS de 1999 à 2007 montrent l’existence de dispersions inter-techniques non négligeables pour les dosages du PSA total et du PSA libre. Les résultats de l’étude de réévaluation en 2004 des trousses commercialisées en France ont confirmé une variabilité notablement améliorée pour le PSA total, malgré une calibration encore imparfaitement ciblée pour plus de la moitié des trousses, mais une discordance encore importante pour le PSA libre, donc une variabilité du rapport PSA libre/PSA total difficilement conciliable avec la notion de seuil diagnostique unique. Les problèmes proviennent d’un manque de raccord métrologique pour certains dosages et d’une différence de reconnaissance épitopique des réactifs anticorps spécifiques à chaque dosage. Globalement les dosages de PSA total sont aujourd’hui harmonisés, mais des efforts sont encore à faire pour le PSA libre ou le PSA complexé considéré comme le complément du PSA libre dans le dosage du PSA total.

Problèmes et pièges en immunoanalyse

3. Conséquences sur la prise en charge médicale Le résultat d’un immunodosage faussement anormal, qu’il soit abaissé ou élevé comme c’est le plus souvent le cas, suggère un état pathologique et peut avoir des conséquences regrettables. De même, un résultat faussement normal peut être préjudiciable à la bonne prise en charge d’une pathologie. Un faux négatif d’hCG en présence d’un choriocarcinome et un faux négatif de Tg en cas de récidive d’un cancer thyroïdien en sont deux exemples. Dans bon nombre de cas, le résultat faussement inquiétant n’entraîne que des dosages ou des investigations complémentaires permettant de rectifier le diagnostic. Néanmoins le stress engendré par un résultat erroné n’est pas négligeable et les investigations complémentaires ont un coût (IRM pour une fausse hyperprolactinémie due à la macroprolactine) et sont parfois invasives : aspiration à l’aiguille fine pour un faux positif de calcitonine, coronarographie pour un faux positif de troponine, traitement par l’iode 131 pour un faux positif de thyroglobuline par exemple (29). Dans d’autres cas, le résultat du dosage peut être à l’origine de la mise en route d’un traitement médicamenteux qui se révèle injustifié par la suite : traitements anti-prolactine ou anti-thyroïdien en cas de fausse augmentation de prolactine ou d’hormones thyroïdiennes, ou traitement par hormones thyroïdiennes d’une femme enceinte au deuxième ou troisième trimestre dont le bilan n’aurait pas été interprété avec des normes adéquates de T4 libre. Dans le cas d’un faux positif d’œstradiol, il est arrivé qu’une interférence soit à l’origine de l’arrêt non justifié d’un cycle de stimulation ovarienne. Des faux positifs d’hCG témoignant à tort d’une tumeur ou d’une grossesse ont eu des conséquences regrettables : mise en route d’une chimiothérapie ou exclusion d’un protocole médicamenteux ou d’une greffe rénale. Les élévations modérées de calcitonine peuvent également poser problème car elles peuvent induire des thyroïdectomies totales, pas complètement justifiées. Enfin un faux résultat peut être à l’origine d’un acte chirurgical non justifié. Les exemples les plus fréquents concernent des faux positifs d’hCG suggérant un choriocarcinome ou une maladie trophoblastique et des faux positifs de testostérone suggérant une tumeur. En conséquence, il est indispensable que les fabricants continuent à améliorer la qualité des réactifs et que les biologistes restent vigilants car du fait de la multiplication des immunodosages, un risque d’erreur subsiste. La poursuite d’une bonne communication entre biologistes et cliniciens est nécessaire pour limiter les conséquences d’un faux résultat (30). Les biologistes se doivent d’informer les cliniciens des limites des immunodosages et des risques actuellement inévitables de faux résultats. Ils doivent être en mesure de réaliser (ou de transmettre à un autre laboratoire susceptible de le faire) les investigations complémentaires permettant de mettre en évidence un

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Immunoanalyse

problème analytique ou de démasquer une interférence. Dans ce but, la coopération des laboratoires de recherche des fabricants est de plus en plus nécessaire en raison de la généralisation des automates fermés. De leur côté, les cliniciens se doivent d’informer le laboratoire quand le sérum du patient est potentiellement sujet à un problème analytique (tumeur cancéreuse à un stade très avancé ou adénome très volumineux pour l’effet crochet, patient traité à l’insuline pour les anticorps anti-insuline, contexte autoimmun très fort pour les anticorps hétérophiles…) et surtout d’alerter le biologiste quand le résultat rendu leur paraît inadapté au tableau clinique. Ce n’est que par un dialogue basé sur une confiance réciproque que des erreurs diagnostiques peuvent être évitées.

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Chapitre 4

Critères et contrôles de qualité Auteurs : Catherine Massart, Anne Charrie, Corinne Sault

1. Évaluation analytique d’un immunodosage 1.1. Erreur de mesure Chaque résultat de mesure est entaché d’une erreur qui s’exprime par la différence entre la valeur trouvée et la valeur « vraie » que l’on cherche à estimer. Cette erreur dite totale peut être décomposée en deux termes : l’erreur systématique et l’erreur aléatoire. La figure ci-dessous (fig. 1) représente l’erreur totale ainsi que ses deux composantes en supposant que la distribution des valeurs de concentration suit une loi normale.

e

ei

ei– e xv

x

xi

Figure : 1 – Densité de probabilité P(x) des valeurs x de concentration obtenues au cours d’un dosage. Composantes systématique et aléatoire de l’erreur totale. Xv valeur « vraie » de concentration Xi valeur obtenue lors de la ie mesure moyenne des valeurs expérimentales x ei erreur totale commise dans la ie mesure partie non aléatoire de l’erreur totale ou erreur systématique e ei – e erreur aléatoire (fortuite, accidentelle)

x

160

Immunoanalyse

1.1.1 Erreur systématique Elle correspond à l’écart toujours de même signe entre un résultat et la valeur « vraie » ou sa meilleure estimation. Suivant le cas, sa grandeur est proportionnelle à la concentration ou, au contraire, indépendante de celle-ci. On l’apprécie en répétant les mesures sur le même spécimen et en calculant la différence entre la moyenne de la distribution des valeurs expérimentales et la valeur « vraie ». Cet écart, exprimé en valeur absolue ou relative par rapport à la valeur « vraie », positif ou négatif, également appelé biais ou erreur de justesse, constitue une estimation de l’erreur systématique, qui est d’autant meilleure que la moyenne est obtenue à l’aide d’un plus grand nombre de valeurs expérimentales, puisqu’il est impératif d’éliminer les erreurs aléatoires. L’élimination totale des erreurs aléatoires nécessite théoriquement un nombre infini de répétitions qui permet d’obtenir une appréciation de la justesse de la méthode (voir paragraphe suivant). En pratique, on dispose d’un nombre limité de valeurs expérimentales ou même d’une seule. Dans ce cas, l’élimination des erreurs aléatoires est partielle et on parle alors de l’exactitude d’un résultat ou d’une méthode. Une grande difficulté pour évaluer l’erreur systématique réside dans la nécessité de connaître la valeur « vraie » d’un composé dans un échantillon biologique déterminé. Or, la plupart du temps, pour les substances concernées par les immunodosages, la valeur « vraie » reste inconnue, excepté pour les petites molécules, telles que les hormones stéroïdiennes, qui peuvent être dosées par chromatographie en phase gazeuse couplée à la spectrométrie de masse. Pour certains analytes, des standards internationaux sont disponibles au NIBSC (National Institute for Biological Standards and Control : www.nibsc.ac.uk ) et permettent d’évaluer la justesse de différentes techniques de dosage d’un même paramètre. En règle générale, l’erreur systématique dont la cause est le plus souvent identifiable, provient du fait qu’il s’agit de méthodes relatives dans lesquelles le comportement des solutions de calibration peut être différent de celui des spécimens à doser. Parmi les paramètres susceptibles d’entraîner une erreur systématique se trouvent principalement l’étalon, qui est en cause à la fois par sa nature, son titre et sa stabilité au cours de la conservation, et les anticorps, qui sont responsables de la spécificité d’un système de dosage donné et la méthode de calcul des résultats. Il faut ajouter un certain nombre d’effets, qualifiés de non spécifiques, reliés : – au pH ou à la présence de composés susceptibles de modifier la réaction Ag-Ac (anticoagulants, hémoglobine, etc.), – à la destruction de l’analyte au cours des étapes précédant le dosage (prélèvement, transport, centrifugation, décantation, etc.), – à la liaison de l’antigène marqué aux parois des tubes, à des protéines de transport naturelles ou à d’éventuels anticorps circulants consécutifs à une auto-immunisation ou à une thérapeutique comme, par exemple, chez les diabétiques traités à l’insuline.

Critères et contrôles de qualité

1.1.2 Erreur aléatoire Elle représente l’écart, de signe et de grandeur imprévisibles, entre un résultat et la valeur « vraie » ou sa meilleure estimation. L’erreur aléatoire présente plusieurs caractéristiques. Elle suit généralement une distribution normale de moyenne nulle car les erreurs sont nombreuses et du même ordre de grandeur. Elle est quantifiée par l’écart-type de cette distribution. Elle dépend étroitement de la concentration : en effet, dans le cas des immunodosages, l’écart type augmente avec celle-ci. De nombreux facteurs sont responsables de l’erreur aléatoire affectant les résultats d’un immunodosage. Certains ont un effet prépondérant sur l’erreur de mesure du signal : les opérations de distribution des volumes des spécimens à doser ou des différents réactifs, la méthode de séparation car la séparation des formes libre et liée peut être plus ou moins complète d’un tube à l’autre et les erreurs de mesure du signal proprement dites. On sait, pour un signal radioactif par exemple, que le phénomène de désintégration nucléaire est lui-même aléatoire. D’autres facteurs agissent principalement sur la pente de la courbe d’étalonnage, tels que, par exemple dans le cas des méthodes par défaut d’anticorps, la dilution de l’anticorps, la pureté ou la masse de l’antigène marqué et les conditions d’incubation.

1.2. Niveaux d’erreur dans un immunodosage Erreur systématique

Dans un laboratoire

Dans une série

D’une série à l’autre

Contrôle interne de qualité

aléatoire

Dans un groupe de laboratoires

Utilisant la même méthode

Utilisant des méthodes différentes

Évaluation externe de qualité

Figure : 2 – Niveaux d’erreur dans un immunodosage.

161

162

Immunoanalyse

On a représenté les différents niveaux d’erreur et le domaine d’application du contrôle de qualité intra- ou interlaboratoires (fig. 2). Les principales erreurs surviennent à différents niveaux qui sont, par ordre croissant d’importance : la série de dosages, le laboratoire effectuant plusieurs séries dans le temps, le groupe de laboratoires utilisant la même technique et enfin le groupe de laboratoires utilisant des techniques différentes. On comprend bien que les erreurs soient peu importantes au sein d’une série de dosages dans laquelle les conditions sont strictement contrôlées (réactifs, opérateur, temps d’incubation identiques). En revanche, au cours du temps, les réactifs évoluent, le manipulateur peut changer, ce qui augmente la dispersion des résultats rendus par un laboratoire. Lorsque le patient se déplace et que le clinicien se trouve face à des résultats provenant de laboratoires différents mais utilisant la même technique, ce sont alors l’expérience et l’équipement du laboratoire qui interviennent. Enfin, lorsque les résultats sont obtenus par des laboratoires qui ont adopté des techniques différentes, la variabilité est, en grande partie, liée aux caractéristiques des réactifs notamment de l’étalon et des anticorps. En résumé, il existe une hiérarchie des erreurs. À chaque niveau, se retrouvent à la fois des erreurs aléatoires et systématiques, qui en se combinant concourent à la variabilité, c’est-à-dire à l’erreur aléatoire du niveau supérieur.

2. Critères de qualité La définition des critères de qualité est depuis longtemps l’objet de nombreuses discussions et controverses. Pour éviter toute confusion, nous avons choisi d’utiliser la terminologie internationale adoptée en métrologie qui est également préconisée dans les référentiels d’accréditation (1).

2.1. Fidélité 2.1.1 Définition et expression Autrefois dénommée précision, la fidélité correspond à la variation des valeurs obtenues lors de mesures répétées effectuées dans des conditions expérimentales bien déterminées. Elle permet d’apprécier quantitativement la dispersion des valeurs fournies par un même dosage pratiqué plusieurs fois. Elle est exprimée habituellement par le coefficient de variation (CV) égal à l’écart type (s) divisé par la moyenne ( X ) du même dosage : Σ xi n est la valeur de chaque mesure et n le nombre de mesures. xi X =

s=

Σ ( x − xi )2 n −1

Critères et contrôles de qualité

s indique la dispersion des valeurs autour de la moyenne. CV(%) =

s × 100 x

Lorsque la mesure est répétée : • n fois dans la même série, il s’agit de répétabilité évaluée par un CV intra-série ; • dans n séries différentes, on parle de fidélité intermédiaire (autrefois reproductibilité intra-laboratoire) estimée par un CV inter-séries intralot (si le même lot de réactif est utilisé pour le dosage) ou inter-lots (si plusieurs lots sont concernés) ; • dans différents laboratoires, on parle de reproductibilité. La fidélité est conditionnée par l’erreur aléatoire due aux fluctuations du dosage (cf. notion d’erreur). Elle dépend de la concentration mesurée, d’où la nécessité de l’évaluer à différents niveaux (valeurs basse, moyenne et haute par exemple).

2.1.2 Mesure 2.1.2.1 Répétabilité

Un dosage est répété n fois dans la même série. L’écart-type est calculé selon la formule ci-dessus. L’estimation de la fidélité sera d’autant meilleure que le nombre de dosages (n) pratiqués est important et donc que le nombre de degrés de liberté (n – 1) est grand. Exemple : calcul de la répétabilité du dosage de la TSH pratiqué douze fois dans la même série. Dosage

1

TSH (mUI/L) 5,0

2

3

4

5

6

7

8

9

10

11

12

4,9

5,5

5,0

4,6

4,9

5,1

5,3

4,9

4,9

5,2

5,4

La moyenne x = 5,1 mUI/L et l’écart-type s = 0,25 mUI/L. Le CV intra-série = (0,25/5,1) × 100 = 4,9 %. 2.1.2.2 Fidélité intermédiaire (reproductibilité intra-laboratoire)

Un dosage de TSH est répété dans douze séries différentes J1

J2

J3

J4

J5

J6

J7

J8

J9

J10 J11 J12

TSH (mUI/L) 5,1

Séries

4,8

5,3

5,2

4,7

4,5

5,8

5,0

4,9

4,7

5,0

5,2

La moyenne x = 5,0 mUI/L et l’écart-type s = 0,34 mUI/L Le CV inter-séries = (0,34/5,0) × 100 = 6,8 %. La fidélité intermédiaire intra-lot sera obtenue avec des lots de réactifs identiques. Pour la fidélité intermédiaire inter-lots, il s’agira d’utiliser plusieurs lots différents à l’aide desquels seront déterminés les CV à différents niveaux de concentrations.

163

164

Immunoanalyse

2.1.3 Réalisation pratique Le guide COFRAC LAB GTA 04 (2) décrit l’évaluation de la fidélité. Les essais de répétabilité peuvent être effectués sur des pools de prélèvements (sérum, urine, LCR…) ou sur des échantillons du contrôle de qualité interne. Il est recommandé d’utiliser plusieurs niveaux de concentration (bas, moyen, élevé), en tenant compte des valeurs physiopathologiques. Ces échantillons sont dosés dans une même série en respectant des conditions techniques strictement identiques (opérateur, lot de réactif…). Le nombre de dosages est compris entre 10 et 30, selon les possibilités techniques, financières…, tout en sachant que l’évaluation de la répétabilité sera d’autant plus exacte que le nombre de passages est élevé (cf. § 2.1.2.1). Le calcul du CV est effectué selon la formule rappelée au paragraphe 2.1.1. La fidélité intermédiaire est, en pratique, déterminée par le passage du même échantillon dans différentes séries. Ces échantillons sont en général les contrôles de qualité interne, il peut également s’agir de pools aliquotés et congelés. Selon les techniques, un minimum de quinze à trente déterminations par échantillon est nécessaire.

2.1.4 Interprétation des résultats Pour chaque analyte, les performances attendues en termes de répétabilité et de fidélité intermédiaire doivent être fixées au préalable, en fonction de différents critères (technique utilisée, bibliographie…), et être validées au moment de la qualification technique, puis vérifiées tout au long de l’utilisation de la méthode de dosage.

2.2. Sensibilité- détectabilité Pour ces critères également, nous nous conformerons à la terminologie internationale. Ainsi la sensibilité d’une technique est définie comme « le quotient de la variation du signal mesuré sur la variation correspondante de concentration ». Il s’agit donc de la pente de la courbe d’étalonnage si celle-ci est linéaire ; sinon, la sensibilité varie avec la concentration, ce qui est le cas général des immunodosages. Il ne faut pas confondre limite de détection (« détectabilité ») et sensibilité ; cette dernière s’adresse à toutes les concentrations et permet, tout comme la fidélité (précision) dont elle est l’une des deux composantes avec l’erreur de mesure du signal, d’apprécier la capacité d’une technique à distinguer de manière significative des concentrations voisines. Pour sa part, la détectabilité ne concerne que les concentrations très faibles ou nulles. Actuellement, pour le dosage de la TSH, on recherche des techniques permettant de mesurer des très faibles concentrations et donc de faire un diagnostic précoce des hyperthyroïdies ; commercialement, ces techniques sont qualifiées d’« ultrasensibles », alors qu’en toute rigueur, elles devraient être dites « ultradétectables ».

Critères et contrôles de qualité

Dans ce paragraphe, nous insisterons sur la détectabilité en différenciant bien la limite de détection analytique de la limite de détection fonctionnelle d’un dosage.

2.2.1 Limite de détection analytique 2.2.1.1 Définition

Elle est définie comme la plus petite concentration donnant un signal significativement différent de celui obtenu avec un blanc réactif de concentration nulle en analyte (3, 4, 5). La limite de détection est généralement calculée en ajoutant (ou en retranchant) deux ou trois écarts-types au signal moyen fourni par le blanc réactif (solution de calibration de concentration nulle) et en déduisant la concentration correspondante sur la courbe de calibration. Le signal moyen, ainsi que l’écart type sont habituellement estimés à partir du dosage répété du blanc réactif dans la même série. 2.2.1.2 Réalisation pratique

L’estimation de la limite de détection peut, selon le guide COFRAC LAB GTA 04 (2), être estimée en effectuant trente mesures répétées du « blanc » (sérum dépourvu de la substance à doser, calibrateur zéro, diluant…) dans une même série. La limite de détection est calculée, à partir de la moyenne x et de l’écart-type s de ces trente mesures, selon la formule suivante : limite de détection = x + 3s 2.2.1.3 Limites

Pour certains automates, il est difficile d’avoir accès à la valeur brute du signal. Il faut dans ce cas prendre contact avec le fournisseur pour obtenir les données afin de valider la limite de détection. Par ailleurs, le mode de calcul ne prend en compte que la répétabilité du blanc réactif et la pente initiale de la courbe de calibration. De ce fait, la limite de détection analytique n’est pas représentative de la réalité dans laquelle les valeurs obtenues sont soumises à des sources de variation inter-séries (fluctuation des appareils de mesure, des volumes, températures d’incubation, calibrations, lots de réactifs, opérateurs…). De plus, étant déduite de répétitions pratiquées sur des solutions de calibration, elle est sujette aux effets de matrice liés aux sérums et aux diluants. C’est la raison pour laquelle on préfère utiliser depuis quelques années un critère plus opérationnel, celui de limite de détection fonctionnelle, qui prend en compte la plupart des variations énumérées ci-dessus et qui est exempte des critiques formulées à l’encontre de la limite de détection analytique.

165

Immunoanalyse

2.2.2 Limite de détection fonctionnelle 2.2.2.1 Définition

Il s’agit de la concentration au-dessus de laquelle le CV peut être considéré comme acceptable. Le seuil généralement fixé en immunoanalyse pour le CV est de 10 % à 20 % ; il est fonction du paramètre à doser (exemples : 10 % dans le cas de la troponine plasmatique, 20 % dans le cas de la TSH). 2.2.2.2 Mesure

Deux approches peuvent être utilisées pour l’apprécier : le profil de précision (fig. 3) ou la répétition de mesures pratiquées sur des échantillons dont les concentrations sont basses.

Profil de Précision 30 25 20

CV (%)

166

15 10 5 0 1

10

100

1000

Concentrations de T4 libre (pmol/L)

Figure : 3 – Exemple de profil de précision obtenu pour un dosage de T4 libre. Pour éviter les effets de matrice, il est recommandé d’utiliser des échantillons de patients et non pas les solutions de calibration. La définition de la limite de détection fonctionnelle, adoptée en 1996 (6, 7) lors de la mise en place des dosages de TSH de troisième génération, correspond à la concentration entraînant, pour ce paramètre, un CV interséries de 20 % établi sur une période compatible avec un suivi clinique, dans ce cas six à huit semaines, en utilisant au minimum deux lots de réactifs différents.

Critères et contrôles de qualité

2.2.2.3 Réalisation pratique

Plusieurs pools sériques de faibles concentrations sont préparés, aliquotés et congelés à –20 ˚C. Les dosages sont ensuite réalisés pendant six semaines au minimum et avec au moins deux lots différents de réactifs ; à l’issue de ces essais, les CV inter-séries sont calculés. La limite de détection fonctionnelle correspond à la concentration pour laquelle le CV inter-séries est de 20 %. 2.2.2.4 Interprétation des résultats

L’utilisation de la limite de détection fonctionnelle s’est avérée essentielle pour la qualification des trousses de TSH de troisième génération atteignant des valeurs inférieures ou égales à 0,02 mUI/L (8). Par ailleurs, cette notion est particulièrement importante pour les analytes nécessitant une détection précoce, notamment certains marqueurs tumoraux et, en particulier, la thyroglobuline.

2.3. Justesse, exactitude 2.3.1 Définitions Selon le vocabulaire international de métrologie (1,9), la justesse de mesure est « l’étroitesse de l’accord entre la moyenne d’un nombre infini de valeurs mesurées répétées et une valeur de référence », alors que l’exactitude est définie comme « l’étroitesse de l’accord entre une valeur mesurée et une valeur vraie de la grandeur à mesurer ». D’après ces définitions, on peut constater que la justesse n’est le reflet que de l’erreur systématique, puisque la moyenne d’un nombre infini de valeurs est exempte d’erreur aléatoire. En revanche, l’exactitude, dont la définition ne fait intervenir qu’une seule valeur mesurée est entachée non seulement d’erreur systématique mais aussi d’erreur aléatoire. L’inexactitude est quantifiée par l’erreur totale ei (fig.1), c’est-à-dire par l’écart entre la valeur mesurée et la valeur vraie d’un analyte, alors que l’erreur de justesse (ou biais) est quantifiée par la différence entre la moyenne et la valeur de référence e (fig.1), la difficulté étant de connaître la valeur vraie (cf. § 1.1.1.).

2.3.2 Mesure En l’absence de méthode de référence, on dispose de deux épreuves qui permettent de mettre en évidence une erreur de justesse : le test de dilution et le test de surcharge d’échantillons biologiques sur toute l’étendue de la gamme d’étalonnage. 2.3.2.1 Test de dilution

Le test de dilution (ou test de parallélisme) permet d’une part de vérifier l’identité d’immunoréactivité de l’analyte présent dans l’échantillon biologique et de la substance présente dans les solutions de calibration, et d’autre part de déceler la présence d’une erreur systématique constante en valeur absolue (10). Le choix du diluant est important. En général, les dilutions doivent être effectuées en respectant strictement les conditions préconisées par le fabricant (utilisation en général d’un diluant fourni avec les

167

Immunoanalyse

réactifs). En l’absence de spécification particulière, les dilutions sont effectuées dans le calibrateur de concentration nulle ou dans un sérum dont la concentration est proche de zéro. Il est conseillé d’effectuer des dilutions indépendantes et d’éviter si possible les dilutions en cascade générant des erreurs cumulées. L’interprétation de ce test peut être réalisée au moyen d’un graphe représentant la concentration mesurée (en ordonnée) en fonction de la concentration théorique en abscisse. La situation idéale correspond à une droite passant par l’origine (fig. 4a). Un défaut de linéarité avec sous-estimation dans la zone des fortes concentrations (fig. 4b) témoigne en général d’un phénomène appelé « effet crochet » apparaissant notamment dans les méthodes immunométriques en une étape (cf. chapitre 3).

(a) 100 Y=X

Concentrations

mesurées (pmoL/L)

80 60 40 20 0 0

20

40

60

80

100

Concentrations théoriques (pmol/L)

(b)

100

Concentrations

80

mesurées (pmoL/L)

168

Y = 0,91 X + 1,6

60 40 20 0 0

20

40

60

80

100

Concentrations théoriques (pmol/L)

Figure : 4 – Linéarité. (a) Cas idéal où la technique est linéaire (b) Cas d’un défaut haut où les valeurs hautes sont sous-estimées.

Critères et contrôles de qualité

Ce test de dilution présente certaines limites. Tout d’abord, il n’est naturellement pas utilisable pour l’étude des immunodosages d’hormones libres dans la mesure où la fraction libre est le résultat d’un équilibre avec les protéines de liaison. Ensuite il n’est pas sensible aux erreurs systématiques constantes en valeur relative qui peuvent être détectées par un test de surcharge. 2.3.2.2 Test de surcharge

Ce test peut être utile pour valider le dosage d’un analyte dans un milieu biologique qui n’est pas préconisé par le fabricant de la trousse comme, par exemple, le dosage de marqueurs tumoraux dans le liquide céphalorachidien (LCR), les liquides d’épanchement ou de kystes. Le test de surcharge (ou de récupération) est réalisé en ajoutant à l’échantillon biologique (sérum, liquide…) de concentration basse des quantités connues d’analyte. Ce test permet de repérer les erreurs relatives constantes qui se visualisent, dans la représentation concentration mesurée en fonction de la concentration ajoutée, par une droite dont la pente est égale à l’unité en l’absence d’erreur systématique ou en présence d’une erreur absolue constante (fig. 5a). En revanche, une erreur relative constante est objectivée, selon cette représentation, par une droite dont la pente est significativement différente de l’unité (fig. 5b). Habituellement on calcule également le pourcentage de récupération concentration mesurée × 100 concentration attenduee qui doit afficher une valeur voisine de 100 %. Néanmoins ce taux a l’inconvénient de tenir compte de la valeur initiale, qui présente une erreur se répercutant de façon non linéaire dans le calcul de chaque taux de récupération.

( )

R % =

(a) 100 Y = X + 10

Concentrations mesurées (pmoL/L)

80 60 40 20 0 0

20

40

60

80

Concentrations théoriques (pmol/L)

Figure : 5a – Exactitude : Cas d’une erreur absolue constante où la technique est linéaire mais inexacte.

100

169

Immunoanalyse

(b) 100 Y = 1,1 X + 10 80

Concentrations mesurées (pmoL/L)

170

60 40 20 0 20

0

40

60

80

100

Concentrations théoriques (pmol/L)

Figure : 5b – Exactitude (suite) : cas d’une erreur absolue constante associée à une erreur relative constante.

2.4. Spécificité 2.4.1 Définition La spécificité d’une technique est sa capacité à mesurer sélectivement un analyte (11). Cette propriété dépend donc étroitement de la qualité des anticorps monoclonaux ou polyclonaux utilisés (cf. chapitre 1).

2.4.2 Mesure La quantification des réactions croisées vis-à-vis de substances interférentes est une étape indispensable pour évaluer la spécificité d’un dosage (cf. chapitre 1).

3. Contrôles de qualité La mise en place et le suivi du contrôle de qualité doivent être faits par le biologiste en concertation avec le responsable qualité. Ce dernier, indépendamment de ses autres fonctions doit avoir « une responsabilité et une autorité définies pour assurer que le système de management relatif à la qualité est mis en œuvre et observé en tout temps » (12). Le laboratoire doit avoir une politique et une stratégie définies en termes de contrôle de qualité. Ce choix doit refléter l’état de l’art et la pertinence clinique. Il peut s’appuyer sur des recommandations de la Haute Autorité de Santé (HAS), de sociétés savantes ou de groupes de travail, du guide COFRAC LAB GTA 06, sur des publications scientifiques, etc. (13).

Critères et contrôles de qualité

Le Guide de Bonne Exécution des Analyses (GBEA) (14) distingue deux types de contrôles : le contrôle de qualité interne (CQI) et l’évaluation externe de la qualité (EEQ).

3.1. Contrôle de qualité interne (CQI) 3.1.1 Objectifs Le contrôle de qualité interne est un élément clef de la validation analytique des résultats biologiques. Il est indispensable pour permettre de déceler les anomalies et les erreurs de mesure, et pour y remédier immédiatement. Les limites d’acceptabilité doivent être judicieusement choisies pour assurer une bonne maîtrise de la fidélité intermédiaire et de la justesse de l’ensemble du système analytique (instrument, méthode, réactifs, matériaux d’étalonnage) (14, 15).

3.1.2 Réalisation pratique Le CQI doit être effectué dans les mêmes conditions que celles appliquées aux échantillons biologiques. Les procédures opératoires doivent préciser les spécifications du CQI et les critères de validation. 3.1.2.1 Matériaux de contrôle

Il faut, dans la mesure du possible, éviter les contrôles de la trousse utilisée ainsi que ceux commercialisés par le même fournisseur. Le GBEA spécifie que les échantillons de contrôle ne peuvent en aucun cas se substituer aux calibrateurs (ou étalons) et inversement. Il peut s’agir d’échantillons titrés ou non titrés, commerciaux ou de fabrication « maison » (pools) (13). Les matériaux de contrôle doivent répondre à certaines caractéristiques (16), notamment une stabilité supérieure à un an si possible, une homogénéité à l’intérieur du même lot et une matrice similaire à celle de l’échantillon patient (9). Les niveaux de concentration choisis doivent balayer le domaine de mesure, encadrer le seuil décisionnel et permettre de valider les résultats, tant dans les valeurs basses que dans les valeurs élevées. Pour la plupart des analytes, un minimum de deux niveaux de concentration est recommandé. Les contrôles doivent être passés dans chaque série ; ils sont positionnés de préférence en aléatoire ou bien en début et fin de série pour s’assurer de l’absence de dérive du système analytique (13). Il peut être aussi nécessaire d’augmenter la fréquence de passage préconisée par le fabricant lorsqu’il s’agit d’automates travaillant en continu. 3.1.2.2 Exploitation et interprétation des résultats

Le GBEA indique que « les procédures opératoires doivent préciser la fréquence de passage des échantillons de contrôle et les valeurs acceptables pour chaque constituant ». L’objectif est de maîtriser la variabilité naturelle du processus analytique (13), en utilisant des outils et les règles statistiques adaptés pour le suivi du CQI.

171

172

Immunoanalyse

Les techniques utilisent le calcul de la moyenne ( x ) et de l’écart type s (cf. 2.1.1.). Concernant la moyenne, avant l’utilisation en routine de tout contrôle, une période test préalable est nécessaire afin de bien cibler la valeur moyenne de ce contrôle ; les indicateurs à évaluer sont la fidélité et la justesse. Les valeurs trouvées pour un contrôle donné au cours du temps sont reportées sur des cartes de contrôles (représentation de LEVEY-JENNINGS (17) ou de SHEWHART (18)). On compare alors la position de cette valeur vis-àvis de la moyenne plus ou moins un, deux ou trois écarts-types (fig. 6). Ce suivi est rendu plus efficace et pertinent en utilisant des règles de contrôle qui permettent d’identifier et d’anticiper des variations aléatoires ou systématiques : ce sont les règles de Westgard (19). Ces dernières donnent des moyens objectifs de valider techniquement une série. Habituellement on représente ces règles de façon abrégée de la manière suivante : Xi où X représente le nombre de mesures prises en compte et i la limite utilisée. Par exemple, 12s indique une mesure (1) excédant deux écarts-types (2s). Exemple des règles de Westgard (19) – règle 12s : une valeur éloignée de plus de deux écarts-types de la moyenne ; – règle 13s : une valeur éloignée de plus de trois écarts-types de la moyenne ; – règle 22s : deux valeurs éloignées de plus de deux écarts-types du même côté de la moyenne : dans une même série si deux contrôles différents ou dans deux séries consécutives si un seul contrôle ; – règle R4s : la différence entre les valeurs de deux contrôles de la même série excède quatre écarts-types ; – règle 41s : quatre valeurs consécutives éloignées de plus d’un écarttype du même côté de la moyenne : dans deux séries consécutives si deux contrôles différents ou dans quatre séries consécutives si un seul contrôle utilisé ; – règle 10x : dix valeurs consécutives situées du même côté de la moyenne. Chacune des règles permet de détecter des erreurs aléatoires ou systématiques. Les erreurs aléatoires sont détectées le plus souvent par les règles 13s et R4s. Ces erreurs aléatoires sont relatives soit à l’opérateur (maintenance de l’appareil non faite par exemple), soit aux réactifs (changement de lot, conservation…) ou encore à l’appareillage (dérèglements du pipetage ou d’une autre étape réactionnelle…) (cf. § 1.1.2.). Les erreurs systématiques sont mises en évidence par les règles 22s, 41s ou 10x : il peut s’agir d’un problème de péremption de réactifs (préparation, stockage…) ou d’un problème d’étalonnage (cf. § 1.1.1.) (9). Les règles de Westgard peuvent être utilisées en association sous forme de « multi-règles », ce qui permet d’améliorer sensiblement les performances du contrôle (diminution des faux rejets et augmentation de détection des

-3 s

-2 s

-1 s

x

1s

2s

3s

-3 s

-2 s

-1 s

x

1s

2s

3s

Figure : 6 – Exemple de carte de contrôle traditionnelle de type Levey-Jennings : en abscisse, les dates et en ordonnée, la moyenne et les écarts-types (±1 s, ±2 s, ±3 s).

Critères et contrôles de qualité 173

174

Immunoanalyse

erreurs). Un bon contrôle doit avoir la probabilité de faux rejet la plus petite et la probabilité de détection de l’erreur la plus grande. Un exemple d’association est donné ci-après (fig. 7) (d’après (19)). NON ACCEPTATION

1 2s

OUI

OUI REJET

1 3s

NON

OUI REJET

2 2s

NON

OUI REJET

R 4s

NON

OUI REJET

4 1s

NON

NON ACCEPTATION

OUI 10 x

REJET

Figure : 7 – Logigramme décisionnel pour deux niveaux de contrôle.

Critères et contrôles de qualité

3.1.2.3 Objectifs analytiques établis à partir des variations biologiques du paramètre

L’interprétation statistique des résultats de contrôle interne de qualité peut être complétée et optimisée par la fixation d’objectifs analytiques aux performances des méthodes utilisées (13). Pour chaque paramètre, les limites acceptables sont définies, en termes de fidélité intermédiaire (reproductibilité intra-laboratoire) et d’erreur de justesse (biais), en prenant en compte les exigences cliniques, les consensus établis et les variations biologiques. À titre d’exemple en immunoanalyse, pour le marqueur cardiaque troponine, le coefficient de variation (CV) intralaboratoire ne doit pas dépasser 10 % au seuil décisionnel (9, 20). Des objectifs doivent être fixés pour intégrer la variation biologique intra et inter-individuelles. Plusieurs auteurs, à titre d’exemple Fraser (21), Ricos (22), Vassault (23), ont proposé des spécifications minimales, souhaitables et optimales de fidélité, d’erreur de justesse et d’erreur totale (tableau 1). tableau : 1 – Limites d’acceptabilité analytique (d’après Fraser (20)). Objectif analytique

Optimale

Fidélité I

Souhaitable

Minimale

I < 0,25 × CVi

I < 0,5 CVi

I < 0,75 CVi

Erreur de justesse B

2

B < 0,125 × (Cvi + CVg2)1/2

B < 0,25 × (Cvi2+CVg2)1/2

B < 0,375 × (CVi+CVg2)1/2

Erreur totale ET

ET < (1,65 × I) + B (p < 0,05)

ET < (1,65 × I) + B (p < 0,05)

ET < (1,65 × I) + B (p < 0,05)

I Fidélité, B Biais, ET erreur totale, CVi variation biologique intra-individuelle, CVg variation biologique inter-individuelles.

Une base de données de plus de 300 mesurandes est mise à jour régulièrement et est disponible sur le site web de Westgard (24). 3.1.2.4 Histogrammes de distribution

Parallèlement, il est possible de contrôler l’exactitude d’un dosage en représentant l’ensemble des valeurs obtenues dans une série sous la forme d’un histogramme, qui peut être comparé à l’historique de distribution (25). Ils doivent être superposables. Si ce n’est pas le cas, il existe une erreur systématique dans le dosage. L’utilisation de cette méthode est simple mais nécessite que le recrutement du laboratoire ne change pas et que les séries de dosage soient suffisamment importantes. 3.1.2.5 Traitement des résultats

En cas d’anomalies constatées, des mesures correctives doivent être prises (14). Une procédure écrite doit fixer les mesures curatives immédiates et les actions correctives afin que les événements indésirables ne se reproduisent pas.

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176

Immunoanalyse

3.1.3 Archivage Tous les documents relatifs au CQI sont archivés dans le laboratoire au moins pendant trois ans (14).

3.2. Évaluation externe de la qualité (EEQ) ou contrôle de qualité externe (CQE) 3.2.1 Principes et objectifs Le GBEA en donne la définition : « elle correspond au contrôle, par un organisme extérieur, de la qualité des résultats fournis par un laboratoire. Ce contrôle rétrospectif permet une confrontation inter-laboratoires en vue d’améliorer la qualité du travail de l’ensemble des participants ». On distingue deux types de contrôles : – Le contrôle de qualité national organisé par l’AFSSAPS (Agence Française de Sécurité Sanitaire des Produits de Santé), obligatoire pour tous les laboratoires réalisant des analyses de biologie médicale. La « participation doit être un reflet exact de la pratique du laboratoire. Une optimisation artificielle des résultats du contrôle est inutile pour le laboratoire et nuisible pour la collectivité » (14). L’étude critique des anomalies détectées peut induire la remise en cause de la méthode utilisée au laboratoire. Devant toute anomalie, il faut se mettre en rapport avec l’AFSSAPS et tracer les actions correctives engagées. – Les contrôles de qualité organisés par des sociétés scientifiques, des groupements de biologistes ou tout autre organisme présentant les garanties nécessaires. La liste des organisateurs de comparaisons interlaboratoires fait l’objet d’un document disponible (26). Il est recommandé par le GBEA que le laboratoire participe à des contrôles de qualité externes autres que le contrôle national obligatoire. Pour les laboratoires engagés dans une démarche d’accréditation, la norme 15 189 (27) rend obligatoire la participation à des EEQ. Le guide ISO CEI 43 (28) et la norme NF EN 14136 (29) définissent les objectifs des programmes d’évaluation externe de la qualité qui doivent permettre d’évaluer la performance des laboratoires, d’effectuer des comparaisons entre différents dispositifs médicaux de diagnostic in vitro, de montrer les avantages et les inconvénients de certaines techniques ou automates du marché, d’aborder les variations inter-techniques. Ces informations sont utiles non seulement aux biologistes mais aussi aux fournisseurs de dispositifs.

3.2.2 Réalisation pratique 3.2.2.1 Matériaux de contrôle

Les échantillons de contrôle sont préparés par l’organisme de contrôle ou un sous-traitant de celui-ci. Ils doivent présenter certaines caractéristiques identiques à celles citées paragraphe 3.1.2.1. (homogénéité, stabilité sur

Critères et contrôles de qualité

une période suffisamment longue par rapport à la durée de l’évaluation...). Les échantillons sont adressés en général sous forme lyophilisée. Les valeurs cible sont le plus couramment définies rétrospectivement, à partir des résultats de l’ensemble des participants, elles peuvent aussi être évaluées au préalable par un ou plusieurs laboratoires de référence. La ou les valeurs assignées ne sont pas révélées aux participants tant que tous les résultats n’ont pas été rassemblés dans le délai prévu. 3.2.2.2 Exploitation des résultats et évaluation des performances des techniques et des laboratoires

L’organisme organisateur reçoit l’ensemble des résultats des dosages réalisés par les différents laboratoires et réalise une exploitation des données par une méthode statistique appropriée à la campagne de comparaison. L’anonymat des laboratoires est respecté. Les participants reçoivent les résultats sous une forme leur permettant une interprétation aisée. Le procédé le plus simple est la représentation sous forme d’histogrammes. Ils sont accompagnés en général d’estimations qui caractérisent la distribution : moyenne, moyenne tronquée, médiane, écart-type, coefficient de variation. Le principal intérêt réside dans le fait qu’ils permettent : – à chaque participant de se situer parmi l’ensemble des laboratoires ou parmi ceux qui utilisent la même méthode que lui, – d’évaluer la variabilité totale, – d’apprécier la composante de l’erreur due à la méthode (écarts entre la moyenne des résultats de chaque méthode et la moyenne générale) et la variabilité dans un groupe de laboratoires utilisant la même méthode : la première dépend étroitement de l’état de standardisation du dosage et la seconde de la robustesse de la méthode, – de détecter visuellement la présence d’éventuelles valeurs aberrantes, – de comparer les grands groupes de techniques à condition que le nombre d’utilisateurs soit suffisant. Un autre procédé est le diagramme de Youden. Il s’agit de la représentation en deux dimensions des résultats trouvés par les laboratoires sur deux sérums de contrôle (fig. 8).

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Immunoanalyse

Concentration Contrôle (B) Q P xB

R

xA

Concentration Contrôle (A)

Figure : 8 – Diagramme de Youden (d’après (25)) En abscisse, les valeurs trouvées pour le contrôle bas (A) et en ordonnée, les valeurs trouvées pour le contrôle haut (B). La position idéale coïncide avec le point dont les coordonnées sont les concentrations « vraies XA et XB » des deux sérums (centre de la croix R sur le schéma). Les résultats entachés d’une erreur systématique se trouvent sur la droite joignant le centre de la croix à l’ordonnée à l’origine du schéma (exemple RP) ; cela signifie un problème d’exactitude (l’erreur peut être due à la méthode, à un problème de calibration...). Tout écart par rapport à cette droite (PQ) traduit la présence d’erreurs aléatoires (variabilité à l’intérieur de ce laboratoire). Par ailleurs, un diagramme de Youden peut être construit avec l’ensemble des résultats, toutes techniques confondues, et il n’est interprétable que dans la mesure où il existe une valeur cible. Il est aisé de repérer les résultats relatifs aux différentes trousses de dosage car ils sont représentés en général par des pictogrammes différents. La position de la zone centrale est influencée par la technique la plus représentée. Le Moël et al. (30) donne une interprétation détaillée du diagramme de Youden en fonction de la position des résultats des deux contrôles (fig. 9).

Critères et contrôles de qualité

Sérum à concentration élevée

LA (Limites acceptables) 3

3 1

2 1

3

1

9 4

0 -1

2

0

5

7

8

-1 6

-2 -3

-3

-2

-1

0

1

2

3

LA (Limites acceptables)

Sérum à concentration basse

Notation en fonction des zones : 0 = bons résultats ; 3, 6 = exactitude à contrôler ; 8 : linéarité à contrôler ; 2, 4, 5, 7 = reproductibilité à contrôler ; 1 et 9 = alarme.

Figure : 9 – Diagramme de Youden d’après G. de Moël et al. (30). Enfin la représentation du Z-score permet de suivre les résultats de différents contrôles au cours d’une période, en général sur une année : son intérêt est donc un suivi longitudinal (fig.10). La variable Z est calculée de la façon suivante : trouvée – x z = valeur ------------------------------------------s

x : moyenne des valeurs obtenues par l’ensemble des laboratoires ou par les laboratoires utilisant la même technique ; s : écart-type correspondant à la moyenne retenue. Le Z-score représente donc l’expression de l’erreur systématique du laboratoire par rapport à la moyenne.

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Immunoanalyse

A C E : Z Sco r e 3 2 1

B

0 -1

A

-2 -3

Figure : 10 – Exemple de représentation du Z-score pour le dosage de l’antigène carcino-embryonnaire (ACE) sur une année : les points correspondant au contrôle A sont en bleu, les points correspondant au contrôle B sont en rouge. Le but de toute EEQ est d’estimer la performance des laboratoires et la qualité des méthodes analytiques disponibles. La difficulté réside dans l’établissement des limites d’acceptabilité et le choix des critères utilisés (31). En général, ces critères sont l’état de l’art et la variation biologique. D’après Vassault et al. (23), « l’état de l’art représente les performances analytiques obtenues, à un moment donné, dans un certain nombre de laboratoire » et fixe comme objectif souhaitable un niveau de performance au moins égal à celui obtenu avec les 50 % des meilleurs résultats d’un grand nombre de laboratoires participants aux CQE. La variation biologique est un critère qui a été développé précédemment dans le paragraphe du CQI. Chacune des approches comporte des limites : les variations biologiques ne tiennent pas compte des niveaux de concentration, cependant c’est l’approche la plus adaptée à la clinique. L’état de l’art doit être en permanence réévalué par les EEQ. L’approche idéale reste un compromis entre ces deux critères (23).

3.2.3 Archivage Les résultats des analyses réalisées pour le contrôle de qualité externe sont conservés pendant cinq ans. Les comptes-rendus des mesures prises pour corriger les anomalies observées à la suite du résultat du contrôle de qualité national sont également conservés pendant cinq ans (14). L’utilisation des données disponibles grâce au CQI d’une part et à l’EEQ d’autre part, permet d’avoir une approche de l’incertitude de mesure (32). Le GUM (guide pour l’expression de l’incertitude de mesure) justifie les raisons de l’importance d’évaluer cette incertitude : « il faut obligatoirement donner

Critères et contrôles de qualité

une indication quantitative sur la qualité du résultat pour que ceux qui l’utiliseront puissent en estimer la fiabilité (33). Cette approche des incertitudes de mesure sur les résultats est aussi une exigence de la norme EN ISO 15189 (27) : « le laboratoire doit déterminer l’incertitude des résultats, dans le cas où cela est pertinent et possible. Toutes les composantes importantes de l’incertitude doivent être prises en compte. Les sources contribuant à l’incertitude peuvent inclure l’échantillonnage, la préparation des échantillons, la sélection des aliquotes d’échantillon, les calibrateurs, les matériaux de référence, l’équipement utilisé, les conditions expérimentales, l’état de l’échantillon et les changements de manipulateurs ». Une méthode d’estimation de l’incertitude de mesure utilise les résultats du CQI et de l’EEQ selon le calcul suivant : U (C) = 2 × u 2 (CQI ) + u 2 ( KEEQ )

u 2 (CQI ) représente la variance (carré de l’écart-type) de l’ensemble des résultats du CQI ; u 2 ( KEEQ ) représente la variance liée à la justesse estimée d’après les résultats de l’EEQ. Les résultats d’incertitude sont à rapprocher des spécifications de Ricos et al. et la réévaluation des incertitudes des résultats d’analyses est préconisée tous les ans (15, 32).

Références 1. 2. 3.

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Critères et contrôles de qualité

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Chapitre 5

Réglementation Auteurs : Florence Boux de Casson, Laurence Bordenave

1. Textes réglementaires, normes et systèmes de reconnaissance applicables à l’immunoanalyse 1.1. Référentiels, réglementations et normes Les exigences spécifiées ou référentiels qui sont à la base de la pratique de la biologie médicale et qui s’appliquent à l’immunoanalyse sont très nombreuses. Ces exigences peuvent être classées en différentes catégories. Parmi celles-ci, citons les réglementations (lois, directives, règlements, etc.) et les normes. Les réglementations se différencient des normes par leur nature, leur mise en pratique et leur conception. Contrairement aux normes, les réglementations fournissent des obligations et des recommandations. Elles sont élaborées par les pouvoirs publics et sont d’application obligatoire. Certaines s’adressent aux industriels (marquage CE), d’autres s’adressent spécifiquement aux Laboratoires d’Analyses de Biologie Médicale (LABM) publics ou privés (Guide de Bonne Exécution des Analyses de Biologie Médicale ou GBEA), d’autres encore concernent à la fois les fabricants et les utilisateurs (réactovigilance). Les normes, quant à elles, sont des documents qui fournissent des règles, des lignes directrices ou des caractéristiques pour des activités ou leurs résultats. Elles sont d’élaboration consensuelle, et d’application en général volontaire. Il existe d’après l’Association Française de Normalisation (AFNOR) quatre types de normes : des normes fondamentales qui concernent la terminologie ou la métrologie, des normes de méthodes d’essai, des normes de spécifications fixant les caractéristiques d’un produit et des normes d’organisation et de service décrivant les fonctions de l’entreprise et les activités de service. L’AFNOR établit des normes NF, qui constituent les documents techniques de référence pour la France. Le Comité Européen de Normalisation (CEN) gère les normes EN pour l’Europe. Ces normes sont automatiquement reprises en normes nationales dans chacun des pays de l’Union européenne. Ces normes permettent de traduire les exigences essentielles

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des directives européennes en des spécifications techniques. L’organisation internationale de normalisation (ISO) s’occupe des normes internationales qui peuvent également être transposées en normes NF (avec ou sans adaptation).

1.2. Les systèmes de reconnaissance 1.2.1 Reconnaissance de la conformité Lorsque des exigences sont spécifiées, les pouvoirs publics ou les autorités compétentes dans le cas des réglementations, ou des tierces parties indépendantes dans le cas des normes se donnent les moyens d’obtenir la preuve du respect des exigences. Différents systèmes de preuves de conformité existent. Dans le domaine de l’immunoanalyse, ces preuves de conformité peuvent être apportées par : – un agrément pour des analyses spécialisées réservées à certains biologistes (dépistage prénatal de la trisomie 21 par le dosage de marqueurs sériques maternels), – une vérification par les pouvoirs publics du respect des obligations et des règles de fonctionnement imposées par la réglementation (GBEA), – la certification du système qualité. La certification est une procédure par laquelle une tierce partie donne une assurance écrite qu’un système qualité est conforme aux exigences spécifiées. Des organismes spécialisés comme l’Association Française d’Assurance Qualité (AFAQ), le Bureau Veritas Quality International (BVQI) et le Technischer Überwachungs Verein (TUV) délivrent les certificats correspondants. Peu de LABM choisissent de faire certifier leur système d’assurance qualité. C’est une démarche essentiellement industrielle à ce jour. La reconnaissance de la conformité des dispositifs médicaux in vitro aux exigences essentielles définie dans la directive 98/79/CE, qui permet le marquage CE et la libre circulation des réactifs à l’intérieur de l’espace économique européen suit une procédure particulière qui sera développée plus loin.

1.2.2 Reconnaissance de la compétence L’accréditation est une attestation délivrée par une tierce partie, constituant la reconnaissance formelle de la compétence technique des personnels, de la conformité du système qualité par rapport à une norme et de la maîtrise des équipements, des méthodes et des conditions ambiantes. En France l’organisme d’accréditation est le COFRAC (Comité français d’accréditation). Un LABM public ou privé peut se faire accréditer pour toute ou partie de ses activités. Il s’agit d’une démarche volontaire. Deux normes peuvent s’appliquer :

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– La norme ISO/CEI 17025 complétée par les critères techniques du COFRAC Elle concerne les activités d’essai, d’analyse et d’étalonnage. Elle est structurée en deux parties : organisationnelle et technique. Elle privilégie la relation laboratoire/client. Elle a permis d’ouvrir le champ de l’accréditation à de nouveaux domaines : l’échantillonnage, la conception et le développement de la méthode, l’incertitude de mesure, les avis et interprétations sur les résultats d’analyses. – La norme NF EN ISO 15189 complétée par les critères techniques du COFRAC Cette norme spécifie les exigences de qualité et de compétence propres aux LABM. Elle est destinée à être utilisée par les laboratoires qui élaborent leurs systèmes de management de la qualité et évaluent leur propre compétence, ainsi que par les organismes d’accréditation engagés dans des activités de confirmation ou de reconnaissance de la compétence des LABM. Le terme « accréditation » est également utilisé dans l’ordonnance n˚ 96-346 du 24 avril 1996 portant réforme de l’hospitalisation publique et privée. Cette ordonnance crée l’Agence Nationale d’Accréditation et d’Évaluation en Santé (ANAES), établissement public administratif rattaché au ministère de la Santé. Elle stipule que tous les établissements de santé, publics ou privés, disposent de cinq ans (soit jusqu’en 2001) pour s’engager dans une procédure d’accréditation conduite par l’ANAES. L’objectif clairement défini est d’améliorer la qualité et la sécurité des soins dans les établissements de santé. Le terme « accréditation » est utilisé ici au sens anglo-saxon et il est plus proche d’une certification que d’une accréditation COFRAC. D’ailleurs le terme « accréditation » a été remplacé par celui de « certification » en 2004, lorsque le législateur créa la Haute Autorité de Santé (HAS) et lui conféra l’intégralité des missions de l’ANAES. La certification des établissements de santé est une évaluation externe et indépendante de l’établissement. Cette procédure s’appuie sur des référentiels qui sont propres à l’HAS.

2. GBEA et perspectives réglementaires 2.1. GBEA Les règles auxquelles doivent se conformer désormais les LABM sont définies par le Guide de Bonne Exécution des Analyses de biologie médicale (GBEA) publié au Journal Officiel en novembre 1994, abrogé et remplacé par l’arrêté du 26 novembre 1999, puis modifié par l’arrêté du 26 avril 2002. Le GBEA a été rédigé par un groupe de personnalités du monde de la biologie désignées par les pouvoirs publics. Certains professionnels (syndicats, sociétés savantes) ont été consultés pour avis. Le texte a été ensuite soumis et adopté par les autorités.

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La parution du GBEA s’inscrivait dans un contexte général faisant appliquer à tous les secteurs de l’économie (santé, formation, fonction publique) des principes, au départ développés dans les entreprises privées, d’évaluation et de standardisation des pratiques. La législation des LABM en France résultait alors d’une succession de textes réglementaires ayant évolué sur une période de vingt ans. Les biologistes français ont toujours été familiarisés avec les contrôles de qualité des examens effectués (contrôles de qualité externe et interne) qui permettent de déceler en continu les anomalies ou les erreurs pour y remédier avant de rendre les résultats. L’esprit du GBEA en France était de faire apparaître la notion de « qualité » de l’ensemble des phases pré-, per- et post-analytiques englobant toutes les étapes de l’analyse : du prélèvement au compte rendu en incluant le dialogue avec le clinicien. Le GBEA est opposable à l’ensemble des laboratoires réalisant des analyses de biologie médicale et a fait prendre conscience aux biologistes qu’ils étaient tous concernés par l’assurance qualité (biologistes des centres hospitaliers et biologistes des laboratoires privés). Le GBEA s’adresse à toutes les personnes participant à la réalisation des analyses de biologie médicale, quelles que soient leurs qualifications, mais ne s’applique pas aux actes d’anatomie et de cytologie pathologiques. Le GBEA regroupe un ensemble d’obligations, de règles de fonctionnement, de rappels à la législation en vigueur et introduit la notion d’assurance qualité. Selon le GBEA, la qualité dans le laboratoire est l’adéquation entre les moyens mis en œuvre et les attentes des patients et des médecins prescripteurs, alors que l’assurance qualité permet de maîtriser l’organisation des tâches conduisant à la qualité. Ainsi le GBEA est présenté par le législateur comme « un instrument au service de la qualité ». Par la référence à la définition normalisée de la qualité et par les explications qui viennent renforcer cette orientation, le GBEA positionne les LABM dans une optique client-fournisseur. Comme tout système d’assurance qualité, il repose sur les grands principes suivants : la prévision, l’exécution, le contrôle, la correction. Le but final est la maîtrise des différents événements susceptibles d’intervenir entre le prélèvement et la remise du résultat. Par ailleurs, le GBEA instaure des exigences nouvelles comme : – le partage et la définition des responsabilités de chacun au sein du laboratoire, – l’établissement et la maîtrise d’un système documentaire par la rédaction de procédures opératoires et de documents d’enregistrement, – la mise en œuvre d’actions correctives au sein du laboratoire, – la notion de traçabilité qui transparaît tout au long du texte, même si le mot lui-même n’est pas cité.

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Toutefois le texte ne propose aucune démarche ni aucune indication d’ordre pratique au biologiste pour l’aider ou le guider dans sa mise en application au laboratoire. Le chapitre d’introduction (chapitre I), après avoir défini l’objet du guide, s’attache à donner les définitions d’une quinzaine de termes : – ayant trait au personnel (différentes catégories, qualifications requises, responsabilités, formation initiale et continue) ; – ayant trait aux analyses de biologie médicale (prélèvement, échantillon, système analytique, validation analytique et biologique, compte rendu d’analyse, valeur de référence, transférabilité et confidentialité) ; – et concernant l’assurance de la qualité avec notamment les définitions des notions de maîtrise de la qualité, de la quantité, de l’évaluation externe de la qualité et du contrôle de qualité interne. Le deuxième chapitre porte sur ce que doivent être les règles de fonctionnement du laboratoire avec une mention particulière quant à la nécessité de disposer d’un système d’assurance de qualité fondé sur les principes : « de décrire ce que l’on fait, de faire ce que l’on écrit, de garder la trace des écrits ». Les règles de fonctionnement sont déclinées en plusieurs points : 1. Règles d’organisation – Les obligations de la direction et des responsables de laboratoire des établissements de santé et des directeurs de laboratoire dans l’organisation et l’exécution des analyses, concernant le personnel, les procédures, les installations, l’équipement, l’instrumentation, les produits fongibles et les réactifs, la sécurité des personnels au regard notamment d’Hygiène & Sécurité, de manipulation des produits toxiques, sont énoncées. – Les obligations du biologiste quant aux comptes rendus d’analyses et celles du personnel quant à l’obligation du respect des prescriptions du guide sont mentionnées. 2. Règles d’installation Tous les aspects d’aménagement, d’entretien des locaux (y compris les zones de stockage) et de sécurité sont abordés. 3. Règles concernant l’instrumentation Le biologiste doit s’assurer du respect des modalités d’installation, de fonctionnement et d’entretien préconisées dans la notice du fabricant des matériels et des automates présents dans le laboratoire. Le responsable du laboratoire doit s’assurer de la mise en œuvre des moyens métrologiques nécessaires à la vérification usuelle des appareils. La liste de matériel requise par tout LABM doit être complétée par des équipements spécifiques selon que le laboratoire est autorisé à pratiquer des examens relevant de la biochimie, de la microbiologie, de l’hématologie…

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4. Règles concernant matériels et réactifs Elles concernent leur utilisation et leur préparation (reconstitution, utilisation, stockage, élimination…). 5. Règles concernant l’informatique Il s’agit de la déclaration à la Commission Nationale de l’Informatique et des Libertés (CNIL), du respect de confidentialité, de la protection contre la perte de données. 6. Règles concernant l’élimination des déchets Les matériels utilisés pour les prélèvements et les déchets produits par l’exécution des analyses sont classés en différents groupes correspondant à des filières d’élimination de modalités spécifiques. Le chapitre III concerne l’exécution des analyses proprement dites depuis le prélèvement des échantillons biologiques, leur identification, transport et transmission, jusqu’à leur conservation. Chacune de ces étapes doit s’appuyer sur des procédures et modes opératoires écrits, datés, validés et approuvés, non figés dans le temps mais évolutifs. S’agissant de la validation des résultats, elle est double : elle comporte une validation analytique, qui peut être réalisée par le personnel d’exécution sous la responsabilité du biologiste, et une validation biologique, qui est de la compétence exclusive du biologiste. L’expression des résultats et comptes rendus d’analyses doivent être conformes à des notions évidentes telles que l’indication des valeurs de référence, la méthode d’analyse et/ou les réactifs utilisés, la signature manuscrite du biologiste… La transmission des résultats doit assurer le respect du secret professionnel ; à défaut d’être remis au médecin, le biologiste ne révèlera au patient un résultat préoccupant le concernant qu’avec la plus grande circonscription, en main propre et au cours d’un entretien particulier. Trois groupes de cas particuliers font l’objet du chapitre IV : le cas particulier des examens de laboratoire destinés aux recherches biomédicales, celui des examens utilisant les techniques de biologie moléculaire et celui plus récent (ajouté par l’arrêté du 26 avril 2002) des bonnes pratiques de laboratoire en immuno-hématologie érythrocytaire. Le chapitre V revient sur l’organisation du système d’assurance de qualité du laboratoire, sur l’évaluation externe de la qualité (participation obligatoire au programme national, participation recommandée à d’autres contrôles organisés par des sociétés scientifiques, groupements de biologistes ou autres), sur le contrôle de qualité interne, indispensable, organisé par le biologiste. Le dernier chapitre a trait au stockage et conservation des archives : durée, locaux… Enfin trois annexes viennent compléter le guide et concernent les LABM de statut privé, en matière de règles d’organisation et de fonctionnement : la

Réglementation

fiche recommandée de suivi médical, la durée et la température de conservation de certains échantillons biologiques. En conclusion, après quelques années difficiles en raison du manque de moyens, de problèmes d’organisation, de communication…, le bilan et la mise en place de la démarche qualité ont permis de remédier aux dysfonctionnements existants au sein des laboratoires et de retenir plusieurs enseignements à différents niveaux : formation, information, communication, motivation et émulation du personnel constamment entretenues, planification des actions. Le personnel est en général fier de présenter les documents dont il est l’auteur, conscient que le GBEA n’est pas une fin en soi mais bien un outil évolutif.

2.2. L’après GBEA : les perspectives Une accréditation « obligatoire » des LABM, en ville comme à l’hôpital est envisagée dans le cadre d’un projet de réforme de la biologie médicale. L’objectif de cette accréditation « obligatoire » serait de « garantir une qualité prouvée pour tous les examens réalisés ». Il s’agirait de passer d’une obligation de moyens à une obligation de résultats tournée vers le patient. La norme de référence serait la norme NF EN ISO 15189.

3. Réglementation européenne concernant les Dispositifs Médicaux de Diagnostic In Vitro (DMDIV) 3.1. L’Europe de l’immunoanalyse Dans le domaine de l’immunoanalyse comme dans d’autres domaines, la mise en place du marché unique à l’intérieur de l’espace européen, prévue avant le 31 décembre 1992, nécessitait une harmonisation en matière de fabrication, de mise sur le marché et de contrôle des trousses d’immunodosages. Il existait alors de nombreuses entraves techniques aux échanges en raison de réglementations, de normes et de spécifications techniques très différentes d’un pays à l’autre. Une nouvelle approche en matière d’harmonisation technique d’une part (concept de directive « nouvelle approche ») et un rapprochement des exigences en matière d’attestation de conformité d’autre part (concept de directive « approche globale ») étaient nécessaires. Les réactifs et automates destinés à l’immunoanalyse répondent à la définition des DMDIV et relèvent de la directive 98/79/CE. Cette directive a été rédigée selon les concepts de la « nouvelle approche » et de « l’approche globale », dont les principes sont abordés ci-après (cf. § 3.2.).

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3.2. Concepts de directive « nouvelle approche » et « approche globale » 3.2.1 Nouvelle approche Le concept de directive européenne « nouvelle approche » est né en 1985. Il pose les bases d’une nouvelle stratégie de réglementation qui permet une approche innovante en matière d’harmonisation technique et de normalisation. Cette nouvelle approche pose les principes suivants : – L’harmonisation législative est limitée à l’adoption d’exigences essentielles auxquelles doivent répondre les produits mis sur le marché communautaire afin de pouvoir circuler librement. – Les particularités techniques correspondant aux exigences essentielles fixées par les directives sont énoncées dans des normes harmonisées. Ces normes techniques harmonisées établies sur mandat de la Commission européenne sont adoptées par le Comité Européen de Normalisation (CEN) ou le Comité Européen de Normalisation Electrotechnique (CENELEC), organismes de droit privé, sur la base d’un consensus entre les parties intéressées. Quelques exemples de ces normes sont rapportés en annexe (cf. annexe 1). – L’application de normes harmonisées ou d’autres normes est laissée à la discrétion du fabricant qui garde la possibilité d’appliquer d’autres spécifications techniques pour satisfaire aux exigences essentielles. – Les produits fabriqués conformément aux normes harmonisées bénéficient d’une présomption de conformité aux exigences essentielles correspondantes. – Une procédure de clause de sauvegarde offre à un État membre la possibilité de dénoncer la conformité d’un produit ou d’un groupe de produits aux exigences essentielles. Si cet État estime qu’il y a lieu, pour protéger la santé et/ou assurer le respect des impératifs de santé publique, d’interdire ou de restreindre la mise à disposition de ce produit ou de l’assortir de conditions particulières, il peut prendre toutes les mesures transitoires nécessaires et justifiées. Il doit avertir la Commission européenne qui, si les mesures nationales sont justifiées, adoptera les mesures communautaires nécessaires.

3.2.2 Approche globale L’harmonisation des normes et règles techniques ne suffisant pas à assurer la libre commercialisation des produits, le Conseil de l’Europe a décidé qu’il était également nécessaire « d’opérer un rapprochement des exigences en matière d’attestation de conformité, tant réglementaires que volontaires, afin d’éviter que les fabricants n’aient à multiplier les procédures de certification de leurs produits sur les différents marchés nationaux ». La Résolution du Conseil du 21 décembre 1989 relative à « l’approche globale » en matière d’évaluation de la conformité a posé les principes d’une politique communautaire dans ce domaine.

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L’approche globale a été mise sur pied par la décision 90/683/CEE du Conseil, laquelle a été remplacée et mise à jour par la décision 93/465/ CEE. Ces décisions fixent des lignes directrices générales et des procédures détaillées en matière d’évaluation de la conformité qui doivent être utilisées dans les directives « nouvelle approche » : – décomposition de l’évaluation de la conformité en modules (procédures) qui se rapportent à la phase de conception et à la phase de production des produits ; – promotion des systèmes d’assurance qualité des fabricants qui ont la liberté d’utiliser ou non les modules basés sur des techniques d’assurance qualité ; – notification d’organismes chargés de l’évaluation de la conformité par les états membres (organismes notifiés ou habilités) ; – définition des conditions d’apposition et d’utilisation du marquage « CE », qui est d’application obligatoire et qui permet la libre circulation des produits dans tout l’Espace économique européen.

3.3. La directive 98/79/CE relative aux DMDIV et sa transposition nationale La directive 98/79/CE relative aux DMDIV s’adresse à tous les États membres de la Communauté économique européenne. Ceux-ci ont dû intégrer les dispositions de cette directive dans leurs législations et réglementations et la transposer en droit national. Seul ce qui relève des sanctions, de l’éthique, de la maîtrise des dépenses de santé ou qui n’est pas couvert par le traité de Rome reste du ressort de chaque pays. L’ordonnance n˚ 2001-198 du 1er mars 2001 et le décret n˚ 2004-108 du 4 février 2004 transposent la directive 98/79/CE et modifient le code de la santé publique. Les dispositions de la directive sont obligatoires depuis le 7 décembre 2003. Quelques dates importantes relatives à la mise en œuvre de la directive 98/79/CE sont rappelées ci-après (fig. 1).

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Période transitoire pour la mise en oeuvre de la directive 98/79/CE

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1996

Décret 96-351 du 19 avril relatif aux réactifs mentionnés à l’article L.761-14-1 du code de la santé publique : enregistrement des réactifs avant mise sur le marché en France (agence du médicament)

1998

Loi n° 98-535 du 1er juillet relative au renforcement de la veille sanitaire et du contrôle de la sécurité sanitaire des produits destinés à l’homme. Directive 98/79/CE du 27 octobre relative aux dispositifs médicaux

2000 2001

Ordonnance 2001-198 du 1er mars qui transpose la directive 98/79/CE

2003

Dispositions de la directive 98/79/CE obligatoires à partir du 7 décembre

2004

Décret 2004-108 du 4 février relatif aux DMDIV modifiant le code de la santé publique

Figure : 1 – Quelques dates.

3.3.1 Définitions et champ d’application Les DMDIV sont définis à l’article L 5221-1 du code de la santé publique : « Constituent des dispositifs médicaux de diagnostic in vitro, les produits réactifs, matériaux, instruments et systèmes, leurs composants et accessoires, ainsi que les récipients pour échantillons, destinés spécifiquement à être utilisés in vitro, seuls ou en combinaison, dans l’examen d’échantillon provenant du corps humain, afin de fournir une information concernant un état physiologique ou pathologique, avéré ou potentiel, ou une anomalie congénitale, pour contrôler des mesures thérapeutiques, ou pour déterminer la sécurité d’un prélèvement d’éléments du corps humain ou sa compatibilité avec des receveurs potentiels ». Le tableau ci-après liste les dispositifs répondant ou ne répondant pas à cette définition (tableau 1).

Réglementation

tableau : 1 – Dispositif médical de diagnostic in vitro (DMDIV)

selon la directive 98/79/CE. Dispositif médical de diagnostic in vitro Oui

Non

Dispositif (réactif et automate) utilisé en biologie médicale humaine

Réactif non destiné à la biologie humaine

Dispositif (réactif et automate) utilisé en anatomo-cytopathologie

Dispositif destiné aux usages généraux des laboratoires (centrifugeuse)

Étalon et contrôle

Matériau de référence certifié au niveau international Matériel utilisé dans les contrôles externes de la qualité

Récipient pour échantillon (tube de prélèvement sanguin)

Dispositif invasif destiné à prélever des échantillons et en contact avec le corps

Dispositif pour autodiagnostic (test de grossesse)

Dispositif fabriqué et utilisé au sein d’une seule et même institution de santé et sur son lieu de fabrication ou dans des locaux situés à proximité immédiate

Dispositif destiné à l’évaluation de ses performances

On entend par (Art. R 665-64-4) : – accessoire : « tout article qui est destiné principalement par son fabricant à être utilisé avec un dispositif médical de diagnostic in vitro afin de permettre l’utilisation de ce dernier conformément à sa destination » ; – récipient pour échantillon : « tout dispositif médical de diagnostic in vitro, qu’il soit sous vide ou non, principalement destiné par son fabricant à recevoir directement l’échantillon provenant du corps humain et à le conserver en vue d’un examen de diagnostic in vitro » ; – dispositif destiné à des autodiagnostics : « dispositif médical de diagnostic in vitro, destiné par le fabricant à être utilisé dans un environnement domestique » ; – dispositif faisant l’objet d’une évaluation de ses performances : « dispositif médical de diagnostic in vitro soumis par le fabricant à une ou plusieurs études d’évaluation de ses performances dans des laboratoires d’analyses de biologie médicale ou dans d’autres environnements appropriés extérieurs à ses propres installations » ; – fabricant : « la personne physique ou morale responsable de la conception, de la fabrication, du conditionnement et de l’étiquetage d’un dispositif médical de diagnostic in vitro en vue de sa mise sur le marché en son nom propre, que ces opérations soient effectuées par cette personne ou pour son compte par une autre personne ;

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– mandataire : « toute personne physique ou morale établie dans un État membre de la Communauté européenne ou partie à l’accord sur l’Espace économique européen qui, après avoir été expressément désignée par le fabricant agit et peut être contactée par les autorités administratives compétentes en lieu et place du fabricant en ce qui concerne les obligations que le présent titre impose à ce dernier » ; – mise sur le marché : « la première mise à disposition à titre onéreux ou gratuit d’un dispositif médical de diagnostic in vitro autre qu’un dispositif faisant l’objet d’une évaluation de ses performances, en vue de sa distribution ou de son utilisation dans un État membre de la Communauté européenne ou partie à l’accord sur l’Espace économique européen, qu’il s’agisse d’un dispositif neuf ou remis à neuf » ; – mise en service : la mise à disposition de l’utilisateur d’un dispositif médical de diagnostic in vitro prêt à être utilisé pour la première fois sur le marché communautaire conformément à sa destination.

3.3.2 Les différents acteurs La directive 98/79/CE définit les modalités d’échange d’informations entre les différents acteurs ainsi que leurs obligations. 3.3.2.1 Les fabricants

• Avant la mise sur le marché – Les fabricants se déclarent et déclarent leurs activités auprès des autorités compétentes. Ils conçoivent, fabriquent et suivent la fabrication des produits dans le respect des exigences essentielles de la directive (tableau 2). Ils choisissent un mode de preuve de conformité en fonction de la classe du dispositif et du système de qualité du fabricant et suivent les procédures d’établissement de la conformité. Concernant les dispositifs de l’annexe II, liste A (cf. § 3.3.), ils doivent obéir aux spécifications techniques communes ou sinon adopter des solutions de niveau au moins équivalent. Ils élaborent et détiennent la documentation technique qui doit contenir, entre autres, les informations sur la conception, le système qualité utilisé, les résultats de l’analyse des risques, les données adéquates de l’évaluation des performances, les étiquettes et la notice d’utilisation, les résultats des études de stabilité. – Ils apposent le marquage CE sur le dispositif de manière visible, lisible et indélébile. – Ils notifient aux autorités compétentes la mise sur le marché des dispositifs.

Réglementation

tableau : 2 – Principales exigences concernant la conception, la fabrication du DMDIV et les informations fournies par le fabricant. Exigences générales(1) Les dispositifs doivent être conçus et fabriqués afin : - de ne pas compromettre l’état clinique et la sécurité du patient, des utilisateurs ou d’autres personnes, ni la sécurité des biens ; - de se tenir aux principes de sécurité et de pouvoir être utilisés comme spécifié par le fabricant en tenant compte de l’état de la technique généralement reconnu ; - d’atteindre les performances fixées par le fabricant ; - de garantir la traçabilité des valeurs attribuées aux matériaux d’étalonnage et/ou matériaux de contrôle ; - de conserver leurs performances et leurs caractéristiques pendant toute la durée de vie du dispositif et dans les conditions de stockage et de transport prévues par le fabricant.

Exigences de conception et fabrication Concernent principalement : - les propriétés physiques et chimiques des dispositifs ; - l’élimination ou la réduction des risques d’infections et de contaminations microbiennes ; - l’environnement d’utilisation du dispositif ; - la constance et la précision des instruments et appareils ayant une fonction de mesurage ; - la protection contre les rayonnements ; - la sécurité des dispositifs raccordés à une source d’énergie ; - les performances des dispositifs d’autodiagnostic ; - les informations fournies par le fabricant.

Informations fournies par le fabricant Concernent principalement la destination(2) et la notice d’utilisation(3) qui doit comprendre entre autres : - la procédure d’utilisation, - les caractéristiques des performances analytiques(4), - les interférences pertinentes(5), - la limite de la méthode, - la méthode mathématique servant de base au calcul du résultat analytique, - les informations sur le contrôle de qualité interne, y compris les méthodes de validation, - les intervalles de référence et la population de référence. Obligations vis-à-vis des langues : décision de traduction laissée aux États membres

(1) : Présomption de conformité si utilisation de normes harmonisées. (2) : Il s’agit de la destination clinique qui doit être en accord avec les performances analytiques du dispositif (par exemple en terme de sensibilité).

(3) : La notice doit être conforme dans la forme et dans le fond. (4) : Les performances du dispositif doivent être identiques à celles indiquées dans la notice. Ces performances doivent être vérifiées par l’utilisateur. L’incertitude de mesure doit être estimée par le biologiste. (norme NF EN ISO/CEI 17025, GBEA décret 2002-637 [notion d’information de bénéfice risque pour le patient]).

(5) : La liste des interférences pertinentes peut être très différente d’un fabricant à l’autre pour des dispositifs permettant de doser le même analyte.

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Immunoanalyse

• Après la mise sur le marché – Les fabricants tiennent à la disposition des autorités compétentes, pendant une période de cinq ans après la date de dernière fabrication, les certificats de conformité, la documentation technique pour l’évaluation de la conformité aux exigences essentielles ainsi que les décisions et rapports des organismes habilités ayant participé à ces procédures. – Ils notifient aux organismes habilités les modifications substantielles apportées aux dispositifs de l’annexe II et ceux destinés à l’autodiagnostic. – Ils appliquent les procédures de surveillance du marché. – Ils notifient aux autorités compétentes les incidents (réactovigilance). – Ils procèdent éventuellement aux rappels de lots. 3.3.2.2 Les autorités compétentes dans chaque État membre

– Ces autorités désignent et contrôlent les organismes notifiés (habilités). – Elles participent aux travaux européens de coordination. – Elles enregistrent les fabricants et dispositifs. – Elles surveillent et contrôlent le marché (évaluation des dispositifs, contrôle national de qualité, contrôle du marché, inspection). – Elles organisent et appliquent leur système de vigilance et de police sanitaire. – Elles se donnent la possibilité d’échanger des informations grâce à la mise en place d’une banque de données européenne centralisant des informations relatives aux fabricants et à leurs mandataires, aux dispositifs mis sur le marché, aux certificats délivrés, suspendus ou retirés ainsi qu’à la procédure de vigilance (EUDAMED). – Elles peuvent utiliser des clauses de sauvegarde. L’Agence Française de Sécurité SAnitaire des Produits de Santé (AFSSAPS) est l’autorité compétente en France dans le domaine des dispositifs médicaux. 3.3.2.3 Les organismes notifiés (habilités)

– Ce sont des tierces parties désignées et contrôlées par leur autorité compétente. – Ils doivent satisfaire à des critères d’indépendance et de compétence. – Ils définissent et vérifient les obligations du fabricant pour les dispositifs de l’annexe II listes A et B et pour les dispositifs destinés à l’autodiagnostic. – Ils examinent le système qualité du fabricant pour les dispositifs de l’annexe II, et pour ceux de la liste A, ils vérifient lot par lot la conformité des produits fabriqués. – Pour les dispositifs destinés à l’autodiagnostic (autres que ceux inscrits dans l’annexe II liste A), ils examinent si la conception du produit est conforme aux dispositions de la directive et délivrent dans ce cas, un certificat d’examen CE de la conception.

Réglementation

– Ils interviennent pour délivrer les certificats nécessaires à l’établissement de la conformité. – Ils exercent une surveillance des fabricants auxquels ils ont délivré des certificats. – Ils tiennent à la disposition des autorités compétentes et des autres organismes notifiés les informations nécessaires. – Ils participent aux travaux européens de coordination et d’harmonisation des pratiques des organismes notifiés. Le LNE/G-MED est le seul organisme notifié français au titre des directives européennes applicables aux dispositifs médicaux. Cette notification couvre toutes les catégories de dispositifs médicaux et toutes les procédures d’évaluation de la conformité. Tout organisme notifié de la Communauté européenne peut être utilisé par le fabricant dans le cadre des tâches pour lesquelles cet organisme a été habilité. 3.3.2.4 Les utilisateurs

– Les utilisateurs régulent le marché. – Ils participent à la vigilance.

3.3.3 Classement des dispositifs Les DMDIV peuvent être regroupés en deux catégories principales en fonction de leur mode de certification : « auto-certification » par le fabricant ou établissement d’un certificat de conformité par un organisme notifié (Art. R 665-64-5). • Pas d’intervention d’un organisme notifié : « auto-certification » par le fabricant Cela concerne la grande majorité des dispositifs qui « ne présentent pas un risque direct pour les patients et sont utilisés par des professionnels dûment formés ». Les procédures d’évaluation de la conformité se déroulent sous la seule responsabilité du fabricant. • Intervention d’un organisme notifié Le besoin de recourir à des organismes notifiés est circonscrit à des dispositifs déterminés, dont « la fiabilité conditionne une bonne prise en charge du patient et dont les défaillances sont susceptibles de causer un risque grave pour la santé ». Les dispositifs concernés sont les DMDIV destinés à des autodiagnostics, ainsi que les DMDIV dont la liste est fixée par la directive. Ces dispositifs sont classés en deux listes (A et B) selon le niveau d’exigence requis pour l’évaluation de leur conformité (cf. annexe 2). Sont concernés à ce jour, dans le domaine de l’immunoanalyse, les réactifs utilisés par exemple dans le contexte des sérologies du sida et de certaines hépatites, des infections congénitales comme la rubéole et la toxoplasmose ou encore les réactifs destinés à l’évaluation du risque de trisomie 21 ou au dosage du PSA. Ces dispositifs doivent non seulement être conformes à des exigences essentielles mais également répondre, pour les réactifs de la liste A, à des

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« spécifications techniques communes » que les fabricants sont tenus de respecter (à moins de démontrer l’équivalence de leurs propres spécifications). Ces spécifications établissent les critères d’évaluation des performances, les critères de libérations des lots, les méthodes et les matériaux de référence. Elles sont établies par les autorités compétentes et publiées au Journal officiel de l’Union européenne (décision de la commission du 7 mai 2002 portant spécifications techniques communes des dispositifs médicaux de diagnostic in vitro 2002/364/CE, J.O.C.E. du 16/5/2002).

3.3.4 Procédures d’évaluation de la conformité et choix de la procédure Les procédures d’évaluation de la conformité sont les suivantes (Art. R 665-64-16). 3.3.4.1 Déclaration CE de conformité, système complet d’assurance qualité

Dans cette procédure, le fabricant assure et déclare que les dispositifs considérés satisfont aux exigences de la directive qui leur sont applicables. Le fabricant, ou son mandataire établi dans la Communauté, appose le marquage « CE » sur chaque dispositif et établit une déclaration écrite de conformité. Le fabricant met en œuvre un système qualité approuvé pour la conception, la fabrication, l’inspection finale des produits et les essais. Il soumet une demande d’évaluation de son système qualité auprès d’un organisme habilité. L’organisme habilité tient compte des rapports d’audits effectués au titre de la certification volontaire des systèmes d’assurance qualité lorsqu’ils témoignent de la conformité des systèmes aux normes ISO/CEN correspondantes (ISO 9001 et EN ISO 13485, la norme ISO 9001 n’est pas une norme harmonisée et ne donne pas de présomption de conformité aux exigences essentielles). Pour les dispositifs énumérés dans la liste A de l’annexe II de la directive, le fabricant introduit également une demande d’examen de la conception auprès d’un organisme habilité. L’organisme habilité doit être averti de toute modification ultérieure concernant le dispositif. Il assure par ailleurs la vérification des produits fabriqués. 3.3.4.2 Examen CE de type

Dans cette procédure, un organisme notifié (habilité) constate et atteste qu’un exemplaire représentatif de la production, dénommé type, satisfait aux dispositions de la directive qui s’y appliquent et est fabriqué conformément à la documentation technique fournie par le fabricant. L’organisme habilité délivre un certificat d’examen CE de type et doit être averti de toute modification ultérieure. La demande d’examen « CE de type » est introduite par le fabricant, ou par son mandataire établi dans la Communauté, auprès d’un organisme notifié de son choix.

Réglementation

3.3.4.3 Vérification CE

Dans cette procédure, un organisme habilité contrôle que les dispositifs fabriqués conformément à un type approuvé et décrit dans un certificat d’examen CE de type sont conformes avec le type et avec les exigences essentielles. Le fabricant prend toutes les mesures nécessaires pour que le procédé de fabrication assure la conformité des dispositifs au type décrit dans le certificat d’examen « CE de type » et aux exigences de la directive qui s’y appliquent. Le fabricant ou son mandataire établi dans la Communauté appose le marquage « CE » sur chaque dispositif et établit une déclaration de conformité. L’organisme habilité appose ou fait apposer son numéro d’indentification sur chaque produit et établit une attestation de conformité relative aux essais effectués. 3.3.4.4 Déclaration CE de conformité, assurance qualité de la production

Dans cette procédure, le fabricant assure et déclare que les dispositifs concernés sont conformes au type décrit dans l’attestation d’examen « CE de type » et répondent aux exigences de la directive qui leur sont applicables. Le fabricant ou son mandataire établi dans la Communauté appose le marquage « CE » sur chaque produit et établit une déclaration écrite de conformité. Le fabricant doit appliquer un système approuvé de qualité de la production, effectuer une inspection et des essais des produits finis. Il introduit une demande d’évaluation de son système qualité pour la fabrication auprès d’un organisme habilité de son choix, pour les dispositifs concernés. L’organisme doit s’assurer que ce système est appliqué en permanence. Il tient compte des rapports d’audits d’effectués au titre de la certification volontaire des systèmes d’assurance qualité lorsqu’ils témoignent de la conformité des systèmes aux normes ISO/CEN correspondantes (ISO 9001 et EN ISO 13485). En outre, pour les produits de l’annexe II liste A, un contrôle de la production est réalisé par un organisme habilité. Quel que soit le dispositif, le fabricant peut choisir entre une ou plusieurs procédures d’évaluation de la conformité. Ce choix dépend de la classe à laquelle appartient le dispositif et du système qualité mis en place par le fabricant (tableau 3). Chaque procédure liée à un dispositif ne peut faire l’objet d’une demande qu’auprès d’un seul organisme habilité (Art. R. 665-64-19).

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Immunoanalyse

tableau : 3 – Procédures d'évaluation de la conformité

en fonction de la nature du dispositif. Classe de dispositif

Procédures applicables

Dispositifs destinés à l’évaluation des performances

Procédure décrite dans l’article R665-64.21 et établissement de la déclaration prévue dans cet article

Dispositifs concernés par l’annexe II, liste A de la directive 98/79/CE

Selon le choix du fabricant : déclaration CE de conformité, système complet d’assurance qualité ou examen CE de type + déclaration CE de conformité, assurance qualité de la production Dans tous les cas, vérifications des produits fabriqués (libérations des lots) par l’organisme notifié

Intervention d’un organisme notifié

Dispositifs concernés par l’annexe II, liste B de la directive 98/79/CE Intervention d’un organisme notifié

Dispositifs destinés à l’autodiagnostic (autres que ceux liés à l’évaluation des performances et ceux concernés par l’annexe II de la directive 98/79/CE) Intervention d’un organisme notifié

Tous les autres dispositifs Pas d’intervention d’un organisme notifié

Selon le choix du fabricant : déclaration CE de conformité, système complet d’assurance qualité ou examen CE de type + vérification CE ou examen CE de type + déclaration CE de conformité, assurance qualité de la production Selon le choix du fabricant : déclaration CE de conformité + demande d’examen de la conception → certificat d’examen de la conception délivré par organisme habilité ou procédures applicables aux dispositifs concernés par l’annexe II, liste A ou procédures applicables aux dispositifs concernés par l’annexe II, liste B Déclaration CE de conformité par le fabricant

3.4. Marquage CE Tout DMDIV importé, mis sur le marché ou mis en service doit être revêtu du marquage « CE » ( Art. R. 665-64-9), à l’exception :

Réglementation

– des dispositifs faisant l’objet d’une évaluation de leurs performances ; – des dispositifs définis à l’article L 5221-5 du code de la santé publique (dispositifs fabriqués par des établissements dispensant des soins, pour leur propre usage et utilisés exclusivement au sein de cet établissement). Le fabricant ne peut apposer le marquage « CE » que si le dispositif est conforme aux exigences essentielles définies aux articles R. 665-64-7 et R. 665-64-8 et a fait l’objet des procédures d’évaluation qui lui sont applicables (Art. R. 665-64-38). Lorsqu’un dispositif entre dans le champ d’application d’autres directives, il doit être conforme aux exigences essentielles de toutes les directives qui s’y appliquent. Le marquage « CE » témoigne alors de cette conformité générale. Le marquage « CE » est apposé sous la responsabilité du fabricant ou de son mandataire sur le dispositif, la boîte et la notice, accompagné le cas échéant du numéro d’identification de l’organisme notifié auquel a été confiée la mise en œuvre des procédures d’évaluation de la conformité.

4. Réactovigilance Le décret n˚ 2004-108 relatif aux DMDIV précise les dispositions prévues par l’ordonnance n˚ 2001-198 de transposition de la directive européenne 98/79/CE. Le décret détaille l’organisation de la vigilance applicable à ce type de dispositifs médicaux, dite réactovigilance.

4.1. Dispositions générales La réactovigilance s’exerce sur l’ensemble des DMDIV répondant à la définition de l’article L-5221-1 du livre V bis du code de la santé publique, après leur mise sur le marché (Art. R. 665-64-46). Elle permet aux autorités compétentes de chaque État membre de la Communauté économique européenne de prendre les mesures nécessaires pour protéger la santé publique. La réactovigilance comporte (Art. R. 665-64-47) : – « le signalement de tout incident ou risque d’incident consistant en une défaillance ou une altération des caractéristiques ou des performances d’un dispositif médical de diagnostic in vitro ou une inadéquation dans l’étiquetage ou la notice d’utilisation susceptibles d’entraîner ou d’avoir entraîné directement ou indirectement des effets néfastes pour la santé des personnes » ; – « l’enregistrement, l’évaluation et l’exploitation de ces informations » ; – « la réalisation de toutes études ou travaux concernant la qualité ou la sécurité d’utilisation des dispositifs médicaux de diagnostic in vitro » ; – « la réalisation et le suivi des actions correctives décidées ».

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4.2. Qui signale quoi ? « Le fabricant ou son mandataire, l’importateur, le distributeur, les professionnels de santé utilisateurs sont tenus de signaler sans délai à l’AFSSAPS toute défaillance ou altération d’un dispositif médical de diagnostic in vitro susceptible d’entraîner des effets néfastes pour la santé des personnes » (Art. L. 5222-3).

4.3. Les acteurs du système national de réactovigilance (Art. R. 665-64-48) et leurs obligations (Art. R. 665-64-57 à R. 665-64-63) 4.3.1 L’agence française de sécurité sanitaire des produits de santé (AFSSAPS) – En cas d’incident de réactovigilance, elle élabore et valide, en concertation avec les fabricants, des courriers d’information et de recommandations d’utilisation et/ou de retraits de lots adressés aux utilisateurs. – Elle assure la mise en œuvre du système national de réactovigilance. – Elle anime et coordonne les actions des différents intervenants. – Elle veille au respect des procédures de surveillance : sécurité d’emploi, efficacité et qualité des produits de santé, surveillance des effets ou événements indésirables liés à leur utilisation. – Elle mène des actions d’information auprès des professionnels de santé et du public pour améliorer le bon usage des produits de santé. – Elle communique à la Commission nationale les informations relatives aux DMDIV recueillies dans le cadre du contrôle de qualité des analyses de biologie médicale. – Elle prend éventuellement des mesures de police sanitaire concernant les produits ou activités soumis à autorisation ou enregistrement. Dans ce cas, les mesures de polices (suspension, abrogation, restriction) sont prévues par les dispositions législatives et réglementaires propres à chaque produit ou activité. Concernant les produits ou activités non soumis à autorisation ou enregistrement, les mesures de police sont prévues par les articles L. 5312-1 et suivants du code de la santé publique. – Elle tient à jour le fichier national des correspondants locaux de réactovigilance.

4.3.2 La commission nationale des dispositifs médicaux de diagnostic in vitro – Elle participe à l’évaluation des informations concernant les incidents ou risques d’incidents. – Elle donne un avis sur les mesures prises ou à prendre pour éviter que les incidents ou risques d’incidents ne se reproduisent, les programmes et les résultats des contrôles et des évaluations organisés par l’AFSSAPS et menés dans le cadre de la surveillance du marché et toute question

Réglementation

relative à la mise sur le marché et à l’utilisation des DMDIV et des normes qui s’y appliquent. – Elle participe à la veille technologique. Cette commission est composée de représentants des institutions françaises en charge de la santé et de personnalités scientifiques compétentes dans le domaine des DMDIV.

4.3.3 Les établissements de santé et les établissements de transfusion sanguine – Ils doivent désigner un correspondant local de réactovigilance. Celui-ci doit être un médecin ou un pharmacien doté d’une expérience en matière de DMDIV. – Ils doivent communiquer le nom du correspondant local de réactovigilance à l’AFSSAPS (cf. annexe 3). Les hôpitaux des armées et le centre de transfusion sanguine de l’armée sont considérés pour l’application de ces dispositions comme respectivement des établissements public de santé et comme un centre de transfusion sanguine.

4.3.4 L’établissement français du sang – Ils désigne un représentant qui siège à la commission nationale. – Il participe à la réactovigilance.

4.3.5 Les correspondants locaux de réactovigilance – Ils enregistrent et analysent tout incident et ou risque d’incident signalé. – Ils établissent sans délai une déclaration auprès de l’AFSSAPS au moyen d’une fiche de déclaration, disponible sur le site Internet de l’AFSSAPS (cf. annexes 4 et 5), et en concertation avec le signalant. – Ils informent les fabricants, mandataires, importateurs et distributeurs de DMDIV. – Ils informent éventuellement les autres vigilances des produits de santé de l’établissement. – Ils participent aux enquêtes, évaluations et expertises susceptibles d’être mises en œuvre. – Ils donnent leur avis et conseils aux professionnels de santé utilisateurs de DMDIV n’exerçant pas dans les établissements de santé et de transfusion sanguine. – Ils sensibilisent l’ensemble des utilisateurs à la réactovigilance. – Ils aident à l’évaluation des données concernant la sécurité et les performances des DMDIV.

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4.3.6 Les professionnels de santé utilisateurs de DMDIV exerçant dans les établissements de santé et de transfusion sanguine Ils doivent déclarer au correspondant local de réactovigilance (ou en cas d’urgence à l’AFSSAPS) les incidents ou risques d’incidents mettant en cause un DMDIV. Le correspondant de réactovigilance doit informer les fabricants ou leurs mandataires, les importateurs et les distributeurs de DMDIV des incidents ou risques d’incidents déclarés à l’AFSSAPS.

4.3.7 Les professionnels de santé utilisateurs de DMDIV autres que ceux exerçant dans les établissements de santé et de transfusion sanguine Ils doivent déclarer directement à l’AFSSAPS tout incident ou risque d’incident dont ils ont eu connaissance. Ils doivent informer les fabricants ou leurs mandataires, les importateurs et les distributeurs de DMDIV des incidents ou risques d’incidents déclarés à l’AFSSAPS.

4.3.8 Les fabricants ou leurs mandataires, les importateurs et les distributeurs de DMDIV Ils conservent, pour chaque transaction, les informations relatives à la date de transaction, la dénomination du DMDIV, la quantité reçue ou fournie avec les numéros de lots, le nom et l’adresse du fournisseur et du destinataire. Ses informations doivent pouvoir être communiquées à l’AFSSAPS pendant au moins cinq ans. 4.3.8.1 Les fabricants ou leurs mandataires

– Ils désignent une personne en charge de la réactovigilance dont le nom et la qualité sont communiqués à l’AFSSAPS. – Ils déclarent sans délai à l’AFSSAPS tout incident ou risque d’incident dont ils ont eu connaissance. – Ils préparent des rapports de synthèse concernant les incidents ou risques d’incidents portés à leur connaissance et les transmettent à l’AFSSAPS. – Ils fournissent à l’AFSSAPS toute information relative aux DMDIV : conception, composition au dossier d’évaluation analytique, fabrication, stockage, distribution, notice d’utilisation, procédures et résultats des contrôles de lot avant libération et en cours d’utilisation, mise à disposition, traçabilité et vente. – Ils effectuent les enquêtes et travaux nécessaires à l’exercice de la réactovigilance demandés par l’AFSSAPS. – Ils doivent être en mesure de fournir, pour tout nouveau DMDIV, à tout moment et pendant une durée de deux ans, un rapport sur l’expérience acquise relative à ce dispositif après sa mise sur le marché.

Réglementation

4.3.8.2 Les distributeurs ou les importateurs

Ils fournissent à la demande de l’AFSSAPS toute information relative au stockage, à la distribution, à l’utilisation et à la traçabilité des DMDIV ainsi qu’à leur vente.

Références • Textes réglementaires Ordonnance n˚ 96-346 du 24 avril 1996 portant réforme de l’hospitalisation publique et privée. Arrêté du 2 novembre 1994 relatif à la bonne exécution des analyses de biologie médicale (JORF n˚ 281 du 4 décembre 1994). Directive 98/79/CE du Parlement européen et du Conseil du 27 octobre 1998 relative aux dispositifs médicaux de diagnostic in vitro (JOCE du 7 décembre 1998, L331). Arrêté du 26 novembre 1999 relatif à la bonne exécution des analyses de biologie médicale (JORF n˚ 287 du 11 décembre 1999). Ordonnance n˚ 2001-198 du 1er mars 2001 relative à la transposition de la directive 98/79/CE du Parlement européen et du Conseil du 27 octobre 1998 relative aux dispositifs médicaux de diagnostic (JORF du 3 mars 2001). Arrêté du 26 avril 2002 modifiant l’arrêté du 26 novembre 1999, relatif à la bonne exécution des analyses de biologie médicale (JORF n˚ 104 du 4 mai 2002). Décision de la commission du 7 mai 2002 portant spécifications techniques communes des dispositifs médicaux de diagnostic in vitro (2002/364/ CE) (JOCE du 16/5/2002). Décret n˚ 2004-108 du 4 février 2004 relatif aux dispositifs médicaux de diagnostic in vitro et modifiant le Code de la santé publique (deuxième partie : Décrets en Conseil d’État) (JORF n˚ 31 du 6 février 2004). • Articles Cheminel V et al., « Guide de bonne exécution des analyses. Expérience de mise en place dans un laboratoire hospitalier », Revue française des laboratoires, 1997, 297 : 19-24. Cœur A et al., « Guide de bonne exécution des analyses de biologie médicale : l’assurance qualité dans le laboratoire », Spectra Biologie, 1995, 95 : 17-22. Simonnet C, « Les Référentiels et leurs procédures de reconnaissance en biologie médicale. Normalisation, certification, accréditation : comment s’y reconnaître ? », Ann Biol Clin, 1997, 55 : 348-55.

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• Sites Internet http://www.legifrance.gouv.fr http://afssaps.sante.fr http://www.gmed.fr http://agmed.sante.gouv.fr http://www.afnor.fr http://www.has-sante.fr http://europa.eu.int/comm/enterprise/newapproach/standardization/ harmstds/reflist/invimedd.html: Directive 98/79 CE http://ec.europa.eu/enterprise/medical_devices/ca/list_ca.html : liste des autorités compétentes http://www.sante-jeunesse-sports.gouv.fr, rapport Ballereau (2008) définissant les bases d’une réforme des laboratoires d’analyses de biologie médicale.

Annexe 1 : Référence et titre de quelques normes à statut

Annexe 1 : Référence et titre de quelques normes à statut de « norme européenne harmonisée » pour la directive 98/79/CE concernant l’immunoanalyse • NF EN 375:2001 Informations fournies par le fabricant avec les réactifs de diagnostic in vitro pour usage professionnel. • NF EN 980:2003 Symboles graphiques utilisés pour l’étiquetage des dispositifs médicaux • EN 12286:1998 Dispositifs médicaux de diagnostic in vitro — Mesure des grandeurs dans des échantillons d’origine biologique — Présentation des modes opératoires de mesure de référence. • EN ISO 13485:2003 Dispositifs médicaux — Systèmes de management de la qualité — Exigences à des fins réglementaires (ISO 13485:2003). • EN 13640:2002 Essais de stabilité des réactifs de diagnostic in vitro. • EN 13641:2002 Elimination ou réduction du risque d’infection relatif aux réactifs de diagnostic in vitro. • EN 13975:2003 Procédures d’échantillonnage utilisées pour l’acceptation des essais des dispositifs médicaux de diagnostic in vitro — Aspects statistiques. • EN 14136:2004 Utilisation des programmes d’évaluation externe de la qualité dans l’évaluation de la performance des procédures de diagnostic in vitro. • EN ISO 14971:2000 Dispositifs médicaux — Application de la gestion des risques aux dispositifs médicaux (ISO 14971:2000). • EN ISO 17511:2003 Dispositifs médicaux de diagnostic in vitro — Mesurage des grandeurs dans des échantillons d’origine biologique — Traçabilité métrologique des valeurs attribuées aux agents d’étalonnage et aux matériaux de contrôle (ISO 17511:2003).

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Annexe 2 : Liste des dispositifs appartenant à la liste A et B (Annexe II de la directive 98/79/CE) • Liste A – Réactifs et produits réactifs, y compris les matériaux associés d’étalonnage et de contrôle, pour la détermination des groupes sanguins suivants : système ABO, rhésus (C, c, D, E, e) anti-kell. – Réactifs et produits réactifs, y compris les matériaux associés d’étalonnage et de contrôle, pour la détection, la confirmation et la quantification dans des spécimens humains de marqueurs de l’infection HIV (HIV 1 et 2), HTLV I et II et hépatite B, C et D. • Liste B – Réactifs et produits réactifs, y compris les matériaux associés d’étalonnage et de contrôle, pour la détermination des groupes sanguins suivants : anti-Duffy et anti-Kidd. – Réactifs et produits réactifs, y compris les matériaux associés d’étalonnage et de contrôle, pour la détermination d’anticorps irréguliers antiérythrocytaires. – Réactifs et produits réactifs, y compris les matériaux associés d’étalonnage et de contrôle, pour la détection et la quantification dans des échantillons humains des infections congénitales suivantes : rubéole, toxoplasmose. – Réactifs et produits réactifs, y compris les matériaux associés d’étalonnage et de contrôle, pour le diagnostic de la maladie héréditaire suivante : phénylcétonurie. – Réactifs et produits réactifs, y compris les matériaux associés d’étalonnage et de contrôle, pour la détermination des infections humaines suivantes : cytomégalovirus, chlamydia. – Réactifs et produits réactifs, y compris les matériaux associés d’étalonnage et de contrôle, pour la détermination des groupes tissulaires HLA suivants : DR, A et B. – Réactifs et produits réactifs, y compris les matériaux associés d’étalonnage et de contrôle, pour la détermination du marqueur tumoral suivant : PSA. – Réactifs et produits réactifs, y compris les matériaux associés d’étalonnage et de contrôle, ainsi que le logiciel, spécifiquement destinés à l’évaluation du risque de trisomie 21. – Les dispositifs destinés aux autodiagnostics suivants, y compris les matériaux associés d’étalonnage et de contrôle : dispositif pour la mesure du glucose sanguin.

Annexe 3 : Fiche d’enregistrement des correspondants de réactovigilance

Annexe 3 : Fiche d’enregistrement des correspondants de réactovigilance

ENREGISTREMENT DES CORRESPONDANTS DE REACTOVIGILANCE SYSTEME D’ALERTE

DIRECTION DE L’EVALUATION DES DISPOSITIFS MEDICAUX Département des Vigilances Unité Gestion des Signalements de Vigilance DVI-DOC6

à retourner par télécopie au 01 55 87 42 82 (pour toute nomination de correspondant local de réactovigilance et/ou modification apportée à l’un des éléments ci-dessous)

1. ETABLISSEMENT DE SANTE (entité juridique, hôpital ou groupe hospitalier selon l’organisation choisie) Nom : ………………………………………………………………………………………………………………………….. Adresse : .………………………………………………………………………………………………………………………. …………………………………………………………………………………………………………………………………… Code postal : ………………… Ville : ……………………………Tél. Standard : ………………………………………… Type d’établissement : CHU

CHR

Etablissement public Hôpital local

CH

Org. Privé non lucr. Centre hospitalier spécialisé

Org. Privé comm. Autre (préciser)……………..

N° FINESS…………….

1 SEUL NUMERO DE FAX SUR LEQUEL VOUS SOUHAITEZ RECEVOIR LES ALERTES EN REACTOVIGILANCE ……………………………….

2. CORRESPONDANT LOCAL DE REACTOVIGILANCE : Nom, prénom ………………………………………………………………………………………………………………….. Service : ………………………………Fonction : ……………………………. Qualité : ……………….…………………. Tél : ……………………………………Fax (pour toute correspondance avec l’afssaps) :……………………………… Email : …………………………………………….

Le : Le Directeur de l’établissement : Signature et tampon : 143/147, boulevard Anatole France – 93285 SAINT-DENIS Cédex

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Annexe 4 : Fiche de déclaration d’incident ou de risque d’incident REACTOVIGILANCE Cadre réservé à l’AFSSAPS

Numéro Attributaire Date d’attribution

DECLARATION D’UN INCIDENT OU RISQUE D’INCIDENT

143/147, bd Anatole France 93285 Saint-Denis Cedex

Date d’envoi du signalement

Fax : 01.55.87.42.82 www.afssaps.sante.fr ENVOI PAR FAX : Si un accusé de réception ne vous est pas parvenu dans les 10 j, prière de confirmer le signalement par ENVOI POSTAL AVEC AR

Le dispositif concerné

Le déclarant Nom, prénom

Type de Dispositif Médical de Diagnostic in Vitro (DMDIV) (*)

réactif

(*)

récipient pour échantillon

(*)

autotest

accessoire

autre

(*) Dans ce cas merci de joindre par fax la copie de la notice d’utilisation Nom commercial / modèle / type / référence

Qualité

Adresse professionnelle

code postal E-mail

Domaine d’application

commune Dénomination commune

Téléphone

N° de série ou de lot

Fax

Date de péremption

Etablissement de santé

Fabricant

automate

Mandataire

LABM privé Le déclarant est-il le correspondant de réactovigilance ? OUI NON

EFS

Version logicielle

Date de mise en service

Nom et adresse du distributeur

Distributeur

Autre

code postal

commune

Nom et adresse du fabricant

Nom du correspondant :

Tél. : Fax. : Afssaps - Juillet 2007

code postal

commune

Annexe 5 : Guide d’utilisation de la fiche de réactovigilance

Annexe 5 : Guide d’utilisation de la fiche de réactovigilance La réactovigilance a pour objet la surveillance et l’évaluation des incidents et risques d’incidents résultant de l’utilisation d’un dispositif médical de diagnostic in vitro (DMDIV). Le décret n˚ 2004-108 du 4 février 2004 détaille l’organisation de cette vigilance. RECTO DE LA FICHE 1.

Le déclarant

Déclarant : personne chargée de déclarer à l’Afssaps les incidents ou risques d’incident qui lui sont signalés. Il s’agit : – des correspondants locaux de réactovigilance des Établissements de santé et des Établissements de transfusion sanguine – des professionnels de santé utilisateurs n’exerçant pas dans un Établissement de santé ou Établissement de transfusion sanguine (pas de correspondant local de réactovigilance) – des fabricants, mandataires, importateurs, distributeurs. Dans ce cas, la déclaration est faite par la personne en charge de la réactovigilance désignée par le fabricant ou son mandataire. Signalant : professionnel de santé utilisateur d’un DMDIV qui constate un incident ou risque d’incident en rapport avec celui-ci. Il le signale au moyen d’un support préalablement défini, au correspondant local de réactovigilance de son établissement. En pratique, pour les Établissements de santé et les Établissements de transfusion sanguine, sauf cas d’urgence, la fiche sera remplie par le correspondant local de réactovigilance en concertation avec le signalant. En cas d’urgence, c’est le signalant qui déclare l’incident directement à l’Afssaps au moyen de la fiche de déclaration de réactovigilance. Il en informe a posteriori le correspondant. Concernant le déclarant, il est nécessaire de préciser : 1.1.

Son identité : nom et prénom.

1.2.

Sa qualité : médecin, pharmacien, sage femme, infirmier, infirmière ou autre à préciser. De même pour les industriels du diagnostic in vitro cette case renseignera sur les fonctions exercées par le déclarant : responsable des affaires réglementaires, directeur assurance qualité… Ses coordonnées : adresse, téléphone, fax, e-mail. S’il est au moment de la déclaration correspondant de réactovigilance pour un établissement de santé ou de transfusion sanguine. Si tel n’est pas le cas : il faut cocher la case « non » et indiquer les coordonnées du correspondant de réactovilance (nom, téléphone et fax).

1.3. 1.4.

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Immunoanalyse

De même, pour les industriels du diagnostic in vitro, si le déclarant n’est pas la personne en charge de la réactovigilance désignée par le fabricant tel que prévue par l’article R.665-64-56 du décret mentionné en introduction, il est nécessaire de cocher la case « non » et d’indiquer le nom et les coordonnées de la personne désignée. 2. Le dispositif concerné Définition d’un DMDIV : Article L 5221-1 du code de la santé publique (ordonnance n˚ 2001-198 du 1er mars 2001) : Constituent des dispositifs médicaux de diagnostic in vitro les produits, réactifs, matériaux, instruments et systèmes, leurs composants et accessoires, ainsi que les récipients pour échantillons, destinés spécifiquement à être utilisés in vitro, seuls ou en combinaison, dans l’examen d’échantillons provenant du corps humain, afin de fournir une information concernant un état physiologique ou pathologique, avéré ou potentiel, ou une anomalie congénitale pour contrôler des mesures thérapeutiques, ou pour déterminer la sécurité d’un prélèvement d’éléments du corps humain ou sa compatibilité avec des receveurs potentiels. Aucune liste exhaustive de DMDIV n’est disponible à ce jour. On peut cependant identifier 5 grandes catégories : – les réactifs de biologie médicale y compris les étalons et contrôles, – les automates d’analyses de biologie médicale, – les dispositifs pour auto-diagnostic, – les dispositifs d’anatomo-cytopathologie, – les récipients pour échantillons. 2.1. Type de DMDIV Il faut se reporter aux grandes catégories définies ci-dessus en notant que pour les étalons et contrôles, il faut cocher la case réactif et pour les dispositifs d’anatomo-cytopathologie il faut cocher la case autre. Il est très important de joindre chaque fois que possible la notice du dispositif pour permettre une évaluation de l’incident. L’incident ou risque d’incident observé peut concerner un réactif, un automate, un tube de prélèvement ou l’association de deux d’entre eux. Le lien entre l’incident et l’un des trois types de DMDIV n’est pas obligatoirement identifiable d’emblée. Dans ce cas, il sera nécessaire de remplir une fiche par DMDIV potentiellement concerné pour avoir les renseignements indispensables à l’évaluation de l’incident. 2.2. Nom commercial/ modèle/type/référence Il s’agit de la dénomination commerciale du produit et des caractéristiques telles qu’elles sont indiquées sur l’emballage et/ou la notice du produit.

Annexe 5 : Guide d’utilisation de la fiche de réactovigilance

2.3. Domaine d’application Il s’agit des spécialités du diagnostic in vitro dans lesquelles le dispositif intervient : – biochimie – bactériologie – virologie – mycologie/parasitologie – immuno-hématologie – auto-immunité – immunologie – anatomo-cytopathologie – hémostase – hématologie – pharmaco/toxicologie – génétique – autre. 2.4. Dénomination commune Elle correspond au groupe générique auquel appartient le dispositif. Exemples : – Nom commercial : PTU-AB. – Domaine d’application : immuno-hématologie. – Dénomination commune : contrôle ultime pré transfusionnel. – Nom commercial : Api urine. – Domaine d’application : bactériologie. Dénomination commune : identification bactérienne. Nom commercial : GTI PF4. Domaine d’application : hémostase. Dénomination commune : Ac anti facteur 4 plaquettaire. La version logicielle est une donnée importante à renseigner lorsque l’incident ou risque d’incident met en jeu un automate géré par un logiciel informatique susceptible de subir des mises à jour. En effet, les défaillances signalées peuvent être spécifiques d’une version logicielle. 2.5.

Le nom et l’adresse du fabricant sont indiqués sur l’étiquetage et la notice du produit. Le distributeur correspond au fournisseur du produit qui peut, le cas échéant être aussi le fabricant. 2.6.

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VERSO DE LA FICHE Circonstances et conséquences de l’incident ou du risque d’incident Il est nécessaire de préciser : 1.

la date de survenue de l’incident ainsi que le service ou laboratoire dans lequel il s’est produit

2.

les coordonnées du professionnel de santé utilisateur qui a constaté l’incident ou risque d’incident, si celui-ci n’est pas le déclarant. Dans les établissements de santé et établissements français du sang, il s’agit du signalant précédemment défini.

3.

la nature de l’incident correspond à la qualification succincte de la défaillance ou du défaut de performance.

ex : résultat faux négatif (ou faux positif), résultat surestimé, erreur d’identification de prélèvement. 4.

Description des faits et conséquences constatées

Il est absolument nécessaire de décrire chronologiquement et précisément les faits ayant conduit à la déclaration. Pour permettre l’évaluation de l’incident, il est indispensable de disposer des éléments documentés et chiffrés sur le défaut constaté. Les résultats des examens complémentaires doivent également être joints. Par exemple, si la nature de l’incident est un résultat faussement négatif avec un réactif pour sérologie HIV, il faudra décrire : les valeurs de DO et ratio obtenues avec le réactif en cause et les autres réactifs utilisés, les tests complémentaires effectués ainsi que les données issues de l’anamnèse du patient lorsqu’elles sont connues. Le déclarant doit indiquer les conséquences effectives ou possibles pour la ou les personnes impliquées dans l’incident. 5.

Information du fabricant ou fournisseur

En effet, pour faciliter l’évaluation et l’expertise des incidents, le décret d’application cité en préambule prévoit que toute déclaration d’incident ou risque d’incident faite à l’Afssaps fera l’objet d’une information par le déclarant, aux fabricants, mandataires, importateurs ou distributeurs concernés. En pratique, cette information peut se faire à l’aide de la même fiche. 6. Mesure conservatoire Indépendamment de l’attitude préconisée par le fournisseur face au problème qui lui est rapporté par l’utilisateur, il est indispensable d’indiquer la mesure conservatoire prise par l’utilisateur le cas échéant. En pratique il s’agit de la mesure de protection immédiate prise par le responsable du laboratoire pour prévenir la survenue ou la récurrence de l’incident.

Annexe 5 : Guide d’utilisation de la fiche de réactovigilance

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Chapitre 6

Critères de choix analytiques des principaux paramètres biologiques Auteurs : Isabelle Lacroix, Michèle d’Herbomez, Catherine Massart, Bruno Mathian, Jean-Marc Riedinger, Rémy Sapin, Jean-Claude Souberbielle

1. Le bilan thyroïdien 1.1. L’hormone thyréostimulante (TSH) Synthétisée par l’antéhypophyse sous l’influence du TRH (ThyrotropinReleasing-Hormone) hypothalamique, la TSH est formée de deux sousunités α et β, la sous-unité β lui conférant sa spécificité biologique. La TSH circule dans l’organisme sous diverses isoformes, et la glycosylation joue un rôle fondamental dans la modulation de l’expression de la bioactivité hormonale. La TSH représente le principal agent stimulant de la glande thyroïde. Le dosage de TSH doit être le paramètre de première intention pour affirmer l’euthyroïdie en présence d’un goitre simple, d’un nodule isolé et en cas d’adaptation par de la thyroxine des hypothyroïdies. Il est aussi le paramètre de première ligne pour dépister des dysfonctions thyroïdiennes chez le nouveau-né, lors de la prise de certaines médications, après irathérapie, en présence d’anticorps antithyroïdiens et chez les patients hospitalisés. L’association américaine de thyroïdologie (ATA) (1) recommande la réalisation d’un dosage de TSH tous les cinq ans à partir de 35 ans. Une méthode possédant une limite de détection fonctionnelle optimale est le critère de choix d’un dosage de TSH qui occupe une place stratégique dans la recherche de dysfonction thyroïdienne. Elle doit être inférieure ou égale à 0,02 mUI/L et, de préférence, évaluée par chaque laboratoire selon un protocole bien défini (1). Les dosages de type sandwich font appel à des anticorps monoclonaux sans réaction croisée avec les glycoprotéines de structure voisine (hCG, LH et FSH). Le standard international est le 2nd IRP 80/558. Les valeurs usuelles doivent être déterminées sur une population d’au moins 120 adultes euthyroïdiens sans anticorps anti-thyroïdiens décelables ni goitre. Elles sont de l’ordre

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de 0,4 à 4,0 mUI/L, toutes techniques confondues, pour les sujets en ambulatoire. Elles sont comprises entre 0,05 et 10 mUI/L pour les patients hospitalisés et doivent être inférieures à 2,5 mUI/L pour les femmes enceintes au premier trimestre de grossesse.

1.2. Hormones libres thyroïdiennes La T3 et la T4 circulent dans la circulation sanguine sous deux formes : une forme majoritaire liée aux protéines de transport (la TBG, la transthyrétine et l’albumine) et une forme minoritaire libre (T3 libre et T4 libre) qui représente la forme hormonale active. Le dosage de T3 libre n’a aucun intérêt en cas de suspicion d’hypothyroïdie. Par contre, il permet le diagnostic des hyperthyroïdies à T3. Le dosage de la T4 libre est indiqué pour quantifier le degré des hyperthyroïdies et hypothyroïdies, ainsi que pour le suivi des dysthyroïdies traitées (2, 3). Les dosages des hormones T4 libre et T3 libre présentent des difficultés liées aux faibles concentrations mesurées (la T4 libre ne représente que 0,02 % de la T4 totale) et liées à l’équilibre dynamique hormone/protéine porteuse. En effet, cet équilibre ne doit pas être perturbé par l’addition des réactifs lors du dosage par immunoanalyse. Les techniques de référence jadis pratiquées comportaient une séparation physique de T4 libre par dialyse à l’équilibre ou ultrafiltration avant dosage de l’hormone sur le dialysat ou l’éluat. Cependant la longueur technique et le coût élevé en excluent l’utilisation dans les laboratoires de routine (cf. chapitre 3, tableau 5). Ces méthodes dites « absolues » ont été remplacées par des méthodes dites « relatives », plus faciles et plus rapides, effectuées directement sur l’échantillon sérique. Ce sont des immunodosages à deux étapes qui, pour la grande majorité d’entre eux, lorsque la capacité de fixation du sérum est abaissée, présentent un biais négatif lié à la perturbation de l’équilibre préexistant entre les formes libres et liées. Cette perturbation est due à la dilution du sérum et à la sequestration d’une certaine quantité d’hormone par l’anticorps (cf. chapitre 3, tableau 5). Globalement toutes les techniques actuelles ne permettent qu’une estimation hormonale de la T4 libre. Par ailleurs, des interférences analytiques peuvent se rencontrer notamment avec des anticorps anti-hormones (pour les méthodes en une étape) et le facteur rhumatoïde ou des anticorps hétérophiles (cf. chapitre 3, encadré 3). En cas de discordances avec la clinique et le taux de TSH, le biologiste devra suspecter une interférence ou un biais analytique.

1.3. Anticorps anti-thyroïdiens Trois antigènes majeurs sont décrits pour la glande thyroïde : la thyroperoxydase (TPO), la thyroglobuline et le récepteur de la TSH (R-TSH). Les anticorps antithyroperoxydase (Ac anti-TPO) représentent les marqueurs les plus précoces et les plus sensibles de la présence d’une thyroïdite autoimmune (4). Leur concentration est corrélée à l’abondance de l’infiltrat lymphoplasmocytaire de la thyroïde. Les dosages d’Ac anti-thyroglobuline

Critères de choix analytiques des principaux paramètres biologiques

sont indispensables pour la validation des dosages de thyroglobuline dans le suivi des cancers différenciés de la thyroïde (cf. chapitre 3, encadré 2) et doivent remplacer le test de récupération jadis effectué (1). Les dosages d’Ac anti-TPO et d’Ac anti-thyroglobuline par hémagglutination passive doivent être supprimés et supplantés par des immunodosages par compétition ou par immunométrie utilisant des marqueurs isotopiques, enzymatiques ou luminescents. Les recommandations de l’ATA (1) prônent l’utilisation de TPO recombinante ou très hautement purifiée. Même si les résultats d’Ac anti-TPO sont peu comparables d’une technique à l’autre, ils sont relativement cohérents en termes de concordance (positif-négatif). La présence d’Ac anti-thyroglobuline positifs impose un résultat de thyroglobuline sous réserve et le suivi de l’évolution des Ac anti-thyroglobuline par une technique quantitative à large spectre (1). Les anticorps anti-récepteurs de la TSH (Ac anti-R-TSH) sont pertinents lors du diagnostic et du suivi pronostique des patients présentant une maladie de Basedow (5). Les techniques d’immunoanalyse des Ac anti-RTSH dosent les anticorps sans préjuger de leur action bloquante ou stimulante. Seules les techniques de cultures cellulaires différencient les anticorps bloquants des anticorps stimulants. Deux types de dosages d’Ac antiR-TSH se sont succédés : les uns utilisent des récepteurs porcins, les autres des récepteurs humains. Ces derniers ont amélioré la sensibilité clinique du dosage qui a augmenté de 82 à 98 % dans le diagnostic de la maladie de Basedow (6). Des dosages utilisant un anticorps monoclonal (M22) dirigé spécifiquement contre la poche du récepteur de la TSH liant l’hormone viennent d’être commercialisés mais leur intérêt en biologie clinique reste à démontrer (7).

2. Le bilan de fertilité 2.1. Hormone chorionique gonadotrope ou human chorionic gonadotropin (hCG) L’hCG est une hormone glycoprotéique composée de deux sous-unités hCGα et hCGβ liées de façon non covalente. La sous-unité alpha est commune à toutes les hormones hypophysaires (hCG, FSH, LH, TSH) et la sous-unité bêta détermine la réactivité biologique et immunologique de la molécule intacte d’hCG. L’hCG est normalement secrétée au cours de la grossesse par les cellules syncytiotrophoblastiques. Le dosage d’hCG est indiqué pour le diagnostic et le suivi des grossesses pathologiques, alors que l’hCG et sa sous-unité hCGβ libre sont d’excellents marqueurs des tumeurs placentaires et testiculaires. L’hCG sérique existe sous plusieurs formes : hCG intacte, sous-unités libres hCGα et hCGβ, formes clivées, dégradées, hyperglycosylées, dont les proportions varient selon les patients et les pathologies considérés (8). La configuration de l’immunodosage conditionne la reconnaissance des différentes formes d’hCG (9).

221

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Immunoanalyse

En effet, la plupart des dosages d’hCG (configuration β-β, dit dosages d’hCG totale) reconnaissent l’hCG intacte, l’hCGβ libre et une partie des formes tronquées (utilisation au suivi de grossesse et en cancérologie). La configuration α-β reconnaît l’hCG dimérique seule (restriction d’utilisation au suivi de grossesses normales). La sous-unité β libre peut être reconnue par une configuration β-β dont un des anticorps monoclonaux est spécifiquement dirigé contre un site masqué par liaison de l’hCGβ à l’hCGα (restriction d’utilisation au suivi des tumeurs trophoblastiques). En 2004, parmi les trente et une trousses de dosage de l’hCG sérique disponibles en France, sept trousses reconnaissent l’hCG dimérique, seize trousses l’hCG totale (hCG et hCGβ), six trousses la sous-unité hCGβ, 1 trousse la sous unité hCGα et une autre trousse l’hCG hyperglycosylée (10). Selon le degré de reconnaissance des différentes formes moléculaires de l’hCG et de ses dérivés, les concentrations mesurées sur un même échantillon par différentes trousses peuvent présenter des variations considérables en fonction de la spécificité de l’anticorps, comme en témoigne un contrôle surchargé en sous-unité β libre et dosé avec plusieurs méthodes (fig. 1).

hCG SERUM : 7I 6A (13/11/07) Moy Tr

+2 ET Tr

160

120

80

40

0 0.0

31.0

62.0

93.0

124.0 155.0

186.0

217.0

248.0

279.0 310.0

Figure : 1 – Valeurs de hCG (mUI/L) obtenues en novembre 2007 avec le contrôle CIDM 71 6A (surchargé en sous-unité b libre) (ProBioQual).

Critères de choix analytiques des principaux paramètres biologiques

Les dosages d’hCG sont construits sur un compromis : meilleure sensibilité de la méthode, gamme élargie pour doser des valeurs parfois très élevées le plus souvent au détriment de leur sensibilité dans les faibles valeurs. Une sous-estimation des valeurs d’hCG par effet crochet peut être observée car les concentrations mesurées au stade diagnostic sont parfois très élevées et les dosages d’hCG devront être répétés après dilution. En cancérologie, le biologiste doit faire preuve d’une extrême vigilance pour le choix de la technique et pour l’interprétation des résultats. En effet, si le dosage de l’hCG est réalisé par une seule technique, celle-ci devra doser à la fois l’hormone dimérique hCG et l’hCGβ libre (dosages hCG totale) car certaines tumeurs ne sécrètent que la sous-unité β libre (30 % des séminomes). Par ailleurs, une valeur positive chez la femme obtenue avec cette méthode spécifique de l’hormone dimérique et de la fraction libre peut traduire la présence d’un carcinome en l’absence de grossesse (11).

2.2. Hormone folliculostimulante (FSH) et hormone lutéinisante (LH) Les hormones FSH et LH sont des glycoprotéines dont les dosages sont principalement utilisés lors de l’exploration de l’hypofertilité chez la femme ou l’homme et lors des troubles pubertaires chez l’enfant. Les dosages de LH, associés au dosage d’œstradiol servent au suivi de freination/ stimulation ovarienne. Les dosages sériques sont réalisés par des techniques de type « sandwich » immunométriques, chaque molécule étant reconnue par deux anticorps monoclonaux préparés contre des sites antigéniques éloignés l’un de l’autre, de manière à éliminer les réactions croisées avec les autres peptides porteurs de la même chaîne α. Les standards les plus utilisés sont le 2nd IRP 78/549 pour la FSH et le 2nd IS 80/552 pour la LH. La variation inter-techniques est de l’ordre de 10 % pour ces techniques nombreuses sur le marché. Ce sont à l’heure actuelle des dosages qui présentent les problèmes méthodologiques liés à l’immunoanalyse classique et sans difficulté particulière, comme le démontre la précision de quatorze techniques : toujours inférieure à 10 % quelle que soit la technique utilisée et la concentration sérique testée (fig. 2).

2.3. Œstradiol Chez la femme, l’œstradiol est un stéroïde synthétisé et sécrété par l’ovaire. C’est le paramètre incontournable du suivi de la stimulation de l’ovulation, effectué notamment lors de procréation médicalement assistée. Le dosage de l’œstradiol permet dans ce cas d’apprécier la réserve ovarienne en début de cycle, de vérifier la désensibilisation hypothalamohypophysaire parfois pratiquée avant une stimulation ovarienne, enfin d’adapter les doses thérapeutiques nécessaires à la stimulation en fonction du nombre et de la taille des follicules visualisés à l’échographie. Le dosage est réalisé par une technique d’immunoanalyse par compétition utilisant des marqueurs radioactifs ou non isotopiques sur automates.

223

Figure : 2 – Reproductibilité obtenue avec 14 dosages : (a) de la FSH (mUI/L) effectués sur 6 sérums à niveaux croissants de concentrations (ProBioQual) (b) de la LH (mUI/L) effectués sur 6 sérums à niveaux croissants de concentrations (ProBioQual).

224 Immunoanalyse

Critères de choix analytiques des principaux paramètres biologiques

La littérature, l’étude-marché en 2004 de l’AFSSAPS ainsi que les résultats des contrôles nationaux de qualité mettent en évidence des variations intertechniques extrêmement importantes (parfois de 35 %) et des écarts considérables par rapport à la chromatographie en phase gazeuse-spectrométrie de masse (CPG-SM) représentant la technique de référence (12). Lors des protocoles de traitement d’hypofertilités dans le cadre de l’Assistance Médicale à la Procréation (AMP), le taux d’œstradiol permet de vérifier, avant la stimulation, la désensibilisation hypothalamo-hypophysaire sous agoniste du Gn-RH (Gonadotrophin Releasing Hormone) : dans ce cas, les dosages d’œstradiol doivent présenter une excellente sensibilité et reproductibilité dans les valeurs faibles (10 ng/L). Le rapport de contrôle de marché de l’AFSSAPS de 2006 indique que six techniques sur vingt et une commercialisées à l’époque présentaient les performances analytiques requises à cet effet (12). Au cours du monitoring de la stimulation d’une ovulation, le dosage répété d’œstradiol permet d’adapter les doses thérapeutiques et l’œstradiolémie sera corrélée à l’analyse échographique du nombre et de la taille des follicules. Un taux d’environ 300 ng/L d’œstradiol par follicule est le plus souvent retenu mais doit souvent être adapté en fonction de la technique utilisée (13, 14). Les dosages doivent alors présenter une bonne linéarité qui doit être vérifiée par des tests de dilution pratiqués à chaque changement de lot de réactifs utilisés. Les variations inter-techniques imposent de conseiller à la patiente stimulée pour ovulation que les dosages soient toujours effectués dans un même laboratoire pour chaque cycle de stimulation pratiqué. Au total, une technique très sensible et linéaire sur toute l’étendue de sa gamme de mesure doit être choisie dans le cadre de l’AMP. Chez l’homme et chez l’adolescent, le dosage d’œstradiol est parfois prescrit devant une gynécomastie, dans l’exploration des troubles pubertaires chez l’enfant. Le manque de sensibilité et de spécificité de certaines techniques impose de doser l’œstradiol à l’aide de techniques qui présentent une précision et une limite de détection fonctionnelle correctes dans les faibles concentrations (inférieures à 10 ng/L) (13). L’exactitude des dosages évaluée par rapport à la technique de référence (CPG-SM) observée lors du contrôle de qualité de 2007 (fig. 3a) montre des variations considérables notamment dans les faibles concentrations. Bien que ces résultats doivent être interprétés avec prudence car les échantillons de contrôle envoyés aux laboratoires présentent une matrice modifiée, la variabilité des résultats selon le dosage pratiqué doit être néanmoins constatée. Par ailleurs, la figure 3b confirme l’imprécision (supérieure à 10 %) de certaines méthodes dans la zone des basses concentrations.

225

Immunoanalyse

OEstradiol - Moyenne des différentes trousses exprimée en % de la valeur CPG-SM 2007 220

Moy/CPG-SM %

180 140 100 60 20 7I 1A (134,7pmol/L)

7I 2A (498,6pmol/L)

7I 4A (665pmol/L)

7I 3A (1374pmol/L)

7I 6A 7I 5A (2262pmol/L) (3586pmol/L)

Figure : 3a– Exactitude de 11 dosages d’œstradiol évaluée par rapport à la chromatographie en phase gazeuse-spectrométrie de masse (contrôles ProBioQual de 2007).

OEstradiol - Reproductibilité par technique 2007 30

20 CV Tr %

226

10

0 7I 1A (134,7pmol/L)

7I 2A (498,6pmol/L)

7I 4A (665pmol/L)

7I 3A (1374pmol/L)

7I 6A 7I 5A (2262pmol/L) (3586pmol/L)

Figure : 3b – Reproductibilité obtenue avec 11 dosages d’œstradiol (pmol/L) effectués sur 6 sérums à niveaux croissants de concentrations (ProBioQual).

Critères de choix analytiques des principaux paramètres biologiques

2.4. Progestérone La progestérone est une hormone stéroïdienne, sécrétée essentiellement par l’ovaire chez la femme, par le placenta au cours de la deuxième partie de la grossesse. Le dosage de la progestérone est prescrit pour évaluer la qualité de la phase lutéale ou pour apprécier l’imprégnation hormonale en début de grossesse chez des patientes ayant présenté des faussescouches à répétition ou après procréation médicalement assistée. Le dosage de la progestérone est réalisé par immunodosage par compétition, principalement automatisée. La variabilité inter-techniques est importante, particulièrement dans les valeurs faibles de la phase folliculaire des cycles stimulés (fig. 4). Dans le cadre d’un suivi d’une réimplantation d’embryon, il faut demander à la patiente de se faire prélever toujours dans le même laboratoire et à la même heure, compte tenu des variations inter-techniques observés et du cycle nycthéméral (15). Une grande variabilité est observée pour certaines méthodes dans les valeurs basses, comme le montre la figure ci-après (fig. 4).

Progestérone - Reproductibilité par technique 2008 25

CV Tr %

20

15

10

5

0 8I 1A (1,63nmol/L) 8I 6A (2,92nmol/L) 8I 4A (8,3nmol/L) 8I 2A (16,1nmol/L) 8I 5A (41,1nmol/L) 8I 3A (56,6nmol/L)

Figure : 4 – Reproductibilité obtenue avec 11 dosages de la progestérone effectués sur six sérums à niveaux croissants de concentrations (ProBioQual).

2.5. Prolactine Les dosages de prolactine sont prescrits devant des signes cliniques d’hyperprolactinémie, à l'origine d'un dysfonctionnement gonadique (aménorrhée, hypofertilité…), accompagné ou non de manifestations mammaires (gynécomasties, galactorrhée). Une hyperprolactinémie confirmée doit orienter rapidement vers une imagerie de la région hypophysaire, à la recherche d’un adénome. Le prélèvement doit être effectué chez

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Immunoanalyse

un sujet au repos sans traitement pouvant impliquer une hyperprolactinémie comme certains psychotropes, hypotenseurs, antiémétiques ou antiulcéreux (cf. chapitre 3). Le dosage de la prolactine est réalisé par techniques immunométriques à deux sites, principalement automatisées (16). Actuellement vingt dispositifs du marché permettant le dosage de la prolactine ont été répertoriés en France par l’AFSSAPS. Plusieurs étalons de référence existent pour la calibration des trousses de dosages, mais pour un même étalon, il existe différents facteurs de conversion μg/L vers UI/L, impliquant de se conformer strictement à la notice du fournisseur. La difficulté de ce dosage reste actuellement liée à l’hétérogénéité des formes circulantes (17). En effet, la prolactine active monomérique s’accompagne parfois de formes lourdes inactives représentées par la big prolactine et la big big prolactine appelée encore macroprolactine (cf. chapitre 3, encadré 1). À l’heure actuelle, aucun dosage ne permet de mesurer uniquement la prolactine monomérique en présence de macroprolactine et de donner un résultat reflétant réellement et constamment la prolactine active. Les immunodosages répertoriés détectent tous la macroprolactine avec une sensibilité variable selon l’automate utilisé (18). La précipitation des formes lourdes par le PEG à 25 % volume à volume, la protéine A ou la protéine G a été proposée (cf. chapitre 3). Il faut savoir que la précipitation au PEG présente de nombreuses limites. En effet, dans certains dosages, le PEG peut entraîner un effet matrice ou générer des interférences incompatibles avec la technique. Par ailleurs, il s’accompagne d’une co-précipitation non spécifique de la forme monomérique active, ce qui exige de redéfinir des valeurs normales dans des conditions opératoires similaires. Pour le choix d’une technique, le biologiste doit porter une attention particulière aux performances du réactif utilisé concernant notamment l’immunoréactivité du dosage vis-à-vis des différentes formes circulantes de prolactine, le raccordement au standard international 84/500 et l’effet crochet (18). Devant une hyperprolactinémie modérément élevée discordante avec la clinique, la seule alternative pour évaluer la concentration réelle de prolactine monomérique active consiste à envoyer le sérum dans un laboratoire référent utilisant un dosage pratiqué après séparation des formes lourdes par chromatographie de filtration sur gel. Avant toute exploration complémentaire, il convient de réaliser un deuxième prélèvement dans les conditions optimales, après interrogatoire sur les thérapeutiques et/ou pathologies associées. Éventuellement, le biologiste pourra adresser le sérum à un confrère utilisant un autre système d’analyses entraînant peu de réaction croisée avec la macroprolactine. Cette pratique permet d’éviter un diagnostic erroné d’hyperprolactinémie inquiétant inutilement le patient et générant des examens coûteux d’imagerie médicale dans certains cas.

Critères de choix analytiques des principaux paramètres biologiques

2.6. Testostérone La testostérone est le stéroïde androgénique majeur, d’origine essentiellement leydigienne chez l’homme et d’origine surtout périphérique chez la femme, par conversion des androgènes surrénaliens et ovariens. La testostérone circule dans l’organisme essentiellement liée à des protéines porteuses mais seule la fraction libre est physiologiquement active. Les trousses de testostérone couramment commercialisées permettent le dosage de la testostérone liée aux protéines de transport et de la testostérone libre circulante. Les dosages s’effectuent par compétition et présentent une variabilité inter-techniques importante, particulièrement dans les faibles valeurs. Des méthodes directes de dosage de la testostérone sont disponibles sur divers automates, adaptées aux valeurs attendues chez l’homme. Par contre, une extrême vigilance est demandée pour les dosages chez les femmes, chez les enfants et chez les hommes traités par anti-androgènes lors du suivi du cancer de la prostate (19). Pour ces trois situations où de basses concentrations de testostérone sont en général observées, il est préférable de réaliser une extraction préalable par un solvant avant de doser la testostérone par radioimmunologie, évitant ainsi d’éventuelles interférences et réactions croisées comme il l’a été récemment démontré (20). Par ailleurs, de très grandes variations sont constatées notamment dans la plage des faibles concentrations (fig. 5).

Testostérone - Reproductibilité par technique 2008 40

CV Tr %

30

20

10

0 8I 1A (1,56nmol/L)

8I 6A (4,33nmol/L)

8I 4A (7,98nmol/L)

8I 2A (9,6nmol/L)

8I 5A (16,8nmol/L)

8I 3A (23,3nmol/L)

Figure : 5 – Reproductibilité obtenue avec 10 dosages de la testostérone (nmol/L) effectués sur 6 sérums à niveaux croissants de concentrations (ProBioQual).

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Immunoanalyse

3. Les marqueurs tumoraux 3.1. Introduction Le dosage des marqueurs tumoraux peut avoir de telles conséquences sur la prise en charge d’un patient qu’il doit faire l’objet d’une attention toute particulière dans la définition et le respect des bonnes pratiques (21). Malgré une amélioration sensible de la reproductibilité inter-techniques (fig. 5), l’existence de discordances importantes sur certains sérums impose de suivre chaque patient avec le même dosage, dans un même laboratoire. Celui-ci devra d’ailleurs éviter des changements trop fréquents de techniques, ceux-ci devant conduire à la reprise systématique du sérum antérieur pour tous les patients connus. La constitution d’une sérothèque est légale (conformément au GBEA) et indispensable pour valider les valeurs usuelles proposées par le fabricant, étudier les performances de nouveaux marqueurs mais surtout pour contrôler dans une même série deux sérums consécutifs dont le sens et/ou l’amplitude de variation sont inexpliquées par le contexte clinique et/ou thérapeutique. Généralement la limite supérieure des valeurs usuelles préconisée par les fabricants n’est applicable qu’au stade diagnostic de la maladie, c’est-à-dire avant tout traitement. En cours de traitement, la valeur seuil varie en fonction de différents critères dont la nature et la finalité du traitement institué. Au cours du suivi, l’interprétation dynamique des marqueurs doit prévaloir sur celle de dépassement d’un seuil décisionnel unique. Le tracé de la courbe d’évolution des concentrations sériques de marqueurs en coordonnées semi-logarithmiques (concentrations en échelle logarithmique décimale, temps en échelle linéaire) est recommandé, ainsi que le calcul des différents critères cinétiques associés : concentration initiale, demi-vie, nadir et délai d’obtention (22). Ces graphes et les valeurs des paramètres cinétiques doivent être intégrés au compte-rendu. La concentration d’un marqueur ne doit pas être interprétée isolément mais doit être examinée à la lumière des éléments cliniques, histologiques et thérapeutiques. Du fait des conséquences potentielles du résultat et de leur impact psychologique sur le patient, le biologiste doit pouvoir proposer au clinicien, dans la mesure de ses compétences, une aide à l’interprétation. La plupart des dosages des marqueurs tumoraux sont immunométriques et automatisés. Un grand nombre de trousses sont commercialisées pour chaque paramètre. L’effet crochet est aujourd’hui exceptionnel du fait de la plus grande robustesse des trousses, de l’utilisation de techniques à deux étapes avec pré-dilution de l’échantillon (dosage du CA 15-3 par exemple) et du diagnostic plus précoce des pathologies. Néanmoins l’effet crochet peut s’observer, surtout avec des marqueurs tels que la thyroglobuline, le CA 125, le CA 19-9 et l’hCG. Il peut être souhaitable pour ces marqueurs de réaliser pour tout nouveau patient présentant une maladie évoluée le dosage du marqueur sur le sérum pur et dilué. Certains sérums devront être contrôlés après reprise en dilution pour s’assurer de l’absence

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d’effet crochet devant un résultat faible contrastant avec les données cliniques (cf. fig. 2 et 3 du chapitre 3).

3.2. Alpha-fœtoprotéine (AFP) L’AFP est une glycoprotéine oncofœtale de 69 kDa dont la structure est proche de celle de l’albumine. Sa concentration à la naissance est très élevée et décroît rapidement pour atteindre en un an les valeurs usuelles de l’adulte. L’interprétation des concentrations sériques et de la demi-vie d’AFP chez les enfants de moins d’un an nécessite l’utilisation de tables de valeurs normales spécifiques. L’AFP présente une grande hétérogénéité liée à la taille (mono-, bi- ou trimère), à la charge (sialylation de la molécule) et à la structure glycanique de la molécule. Les variations structurales de la chaîne glycanique peuvent être analysées par des techniques d’électrophorèse sur gel de lectines. L’AFP est un marqueur privilégié des carcinomes hépato-cellulaires, des tumeurs embryonnaires telles que les tératocarcinomes et les tumeurs germinales non séminomateuses (composante vitelline et carcinome embryonnaire essentiellement) (23). Plus d’une trentaine de trousses de dosage sont actuellement disponibles sur le marché français dont la grande majorité utilisent des anticorps monoclonaux comme anticorps de capture et de révélation. Un étalon international est disponible au niveau européen (WHO standard 72/225). La plupart des méthodes s’avèrent étroitement corrélées.

3.3. Antigène carcino-embryonnaire (ACE) L’ACE est une glycoprotéine oncofœtale de 180 kDa appartenant à la superfamille des immunoglobulines. Il existe des molécules apparentées, potentiellement interférentes dans les dosages, présentant des homologies structurales avec l’ACE : NCA (Non specific Cross reactive Antigen), antigènes fécaux normaux (NFA), glycoprotein bilaire-1 (BGP-1). L’ACE est le marqueur privilégié des cancers coliques (24). Néanmoins l’ACE est un marqueur très ubiquitaire et peu spécifique et peut être élevé dans différentes localisations cancéreuses et dans diverses pathologies bénignes. Près de trente trousses de dosage sont actuellement disponibles sur le marché français utilisant au moins une quinzaine d’anticorps monoclonaux sélectionnés pour l’absence de reconnaissance des NCA. Le standard international de référence est le 1er IRP 73/601. La variabilité intertechniques qui peut atteindre 49 % sur certains échantillons justifie que l’ACE soit toujours dosé avec les mêmes réactifs. La présence dans les échantillons sanguins d’anticorps anti-immunoglobulines (anticorps anti-souris, facteurs rhumatoïdes, anticorps hétérophiles…) est susceptible de produire des interférences sur le dosage dans le sens d’une diminution ou d’une augmentation artificielle des concentrations.

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Immunoanalyse

3.4. Antigène spécifique de la prostate (PSA) Le PSA est la kallicréine 3 (hK3), une sérine-protéase tissulaire de 237 acides aminés d’activité enzymatique de type chymotrypsine. Le PSA serait sécrété sous la forme d’un précurseur inactif, le pré-pro-PSA, transformé en proPSA dans le réticulum endoplasmique. Environ 30 % du PSA sérique circule sous forme libre et 70 % sous forme liée à des inhibiteurs de protéases dont l’α2-macroglobuline et l’α1-antichymotrypsine. Cinq épitopes non chevauchants du PSA sont actuellement connus. Le dosage du PSA total est la somme du PSA libre et du PSA lié à l’α1-antichymotrypsine, la liaison du PSA à l’α2-macroglobuline masquant tous les sites antigéniques du PSA et empêchant son accessibilité aux immunodosages. Le PSA est le marqueur privilégié des cancers prostatiques. Près de vingt trousses de dosage sont actuellement commercialisées. L’hétérogénéité des résultats des dosages de PSA s’explique en partie par la nature des anticorps utilisés dont la spécificité peut différer d’une trousse à l’autre (reconnaissance d’épitopes différents). Ces anticorps doivent reconnaître de manière équimolaire le PSA libre et le PSA lié à l’α1-antichymotrypsine, quelles que soient leurs proportions relatives : un dosage non équimolaire va reconnaître préférentiellement la forme libre et la surestimer. Sur vingt dispositifs de dosage de PSA total testés par l’AFSSAPS en 2006, seuls neuf dispositifs présentent des résultats équimolaires (25). Pendant longtemps, le dosage du PSA s’est heurté à un problème de standardisation du fait de la co-existence de deux types de calibration, Yang et Hybritech, dont les résultats pouvaient varier du simple au double selon le dosage utilisé. L’adoption généralisée du standard de « Standford 90/10 » ou « OMS NIBSC 1st IS 96/ 670 », composé de 90 % de formes liées et 10 % de formes libres est de nature à minimiser l’hétérogénéité des résultats, tout en respectant plus fidèlement la proportion des formes moléculaires à doser. En 2002, la variabilité inter-techniques était d’environ 15 % et l’écart entre les résultats le plus bas et le plus haut était de 80 %. Il est capital de suivre les patients par la même trousse, dans le même laboratoire si possible. La sensibilité de la méthode est importante à prendre en considération dès qu’il s’agit de détecter le plus précocement possible une récidive après prostatectomie radicale. À la limite de détection analytique indiquée par les fournisseurs, il faut préférer la limite de détection de cancer résiduel (LDCR) qui représente le taux de PSA total en dessous duquel aucun patient n’a présenté de récidive tumorale clinique lors du suivi. La LDCR est de 0,10 μg/L mais varie selon le test de PSA utilisé. Enfin le biologiste doit être alerté par l’existence d’un effet matrice reporté dans les notices techniques de certains dosages actuellement commercialisés.

3.5. Antigène spécifique de la prostate libre (PSA libre) Le PSA libre est la fraction du PSA, libre de toutes les liaisons aux protéines et représente en moyenne 30 % du PSA total. La fraction du PSA libre est très hétérogène et comprend un précurseur inactif, des formes clivées,

Critères de choix analytiques des principaux paramètres biologiques

des variants de glycosylation, des formes délétées, ainsi que des produits de dégradation. Ces différentes populations coexistent dans le sérum sans que l’on sache comment elles sont reconnues par les différents dosages de PSA libre commercialisés. Ce taux de PSA libre est plus bas en cas de cancer de la prostate et selon les études et les trousses, les valeurs seuils du rapport PSA libre/PSA total proposées varient de 14 % à 25 %. Ce rapport est plus élevé en cas d’hypertrophie bénigne de prostate qu’en cas de cancer : le rapport PSA libre/total augmente la valeur prédictive positive avec une sensibilité identique pour des valeurs de PSA comprises entre 4 et 10 μg/L. Au-delà du seuil de 25 % du rapport PSA libre/total, les biopsies ne seraient pas justifiées. Le dosage du PSA libre n’est pas recommandé en première intention. Près de vingt trousses de dosage sont actuellement disponibles sur le marché français, dont deux permettent le dosage du PSA complexé. Il existe trois approches de dosage du PSA libre. Dans la première approche, l’anticorps de capture est un anti-PSA total et l’anticorps marqué est dirigé contre le site spécifique du PSA libre. Une seconde approche consiste à précipiter dans un premier temps le PSA complexé avant de doser le PSA total. Une dernière approche consiste à doser le PSA complexé à l’aide de trois anticorps : un anticorps de capture anti-PSA total, un anticorps dirigé contre le site antigénique du PSA libre empêchant la reconnaissance de cette forme par l’anticorps marqué. Pour le PSA libre, il n’y a pas vraiment de recommandations internationales, même s’il existe une préparation internationale NIBSC 96/668. Sur dix-huit dispositifs de dosage de PSA libre testés par l’AFSSAPS en 2006, seuls neuf dispositifs ont rendu des résultats satisfaisants en termes d’exactitude. La variabilité inter-techniques est très importante. Les coefficients de variation tronqués sont d’environ 30 %, l’histogramme des valeurs est trimodal et l’écart entre le résultat moyen le plus bas et le résultat le plus haut est d’environ 90 %. Ces variations en PSA libre entraînent des variations significatives du rapport PSA libre/total.

3.6. Calcitonine La calcitonine est un peptide monocaténaire de trente-deux acides aminés (3 600 Da). Chaque technique de dosage de calcitonine possède ses propres valeurs usuelles. La technique recommandée par le groupe d’étude des tumeurs endocrines (26) est immunoradiométrique à deux anticorps spécifiques de la calcitonine mature monomérique et les valeurs de référence sont actuellement inférieures à 10 ng/L pour les hommes et les femmes adultes. Suite à un travail français (27), les normes prochainement éditées tiendront compte du sexe et du tabac. La calcitonine est le marqueur privilégié du cancer médullaire de la thyroïde (CMT) : calcitonine basale pour le diagnostic des formes macroscopiques, calcitonine sous stimulation par la pentagastrine pour le dépistage des stades microscopiques dans les formes familiales. La prévalence des CMT est faible (de l’ordre de 0,4 %). Les formes circulantes de la calcitonine sont très hétérogènes chez

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Immunoanalyse

le sujet sain et plus encore lors des cancers médullaires de la thyroïde : coexistent des molécules mono- et dimériques de calcitonine, des précurseurs inactifs et des métabolites intermédiaires. Cinq techniques de dosage de la calcitonine étaient enregistrées à l’AFSSAPS en 2000. En l’absence d’étalon de référence, la standardisation doit utiliser la calcitonine humaine en raison des spécificités d’espèce et des réactions croisées possibles avec les produits apparentés. Dans le suivi des patients, il est indispensable de conserver la même technique de dosage pour éviter les problèmes de reconnaissance immunologique selon l’origine des couples d’anticorps. La variabilité inter-techniques est fonction de la trousse utilisée et peut avoir un impact sur l’interprétation des résultats. Le temps de doublement des taux de calcitonine chez les patients opérés de CMT mais non guéris apparaît comme un facteur indépendant de survie. L’utilisation du dosage systématique de calcitonine en pathologie nodulaire est prônée dans le consensus européen pas dans l’américain. Des élévations de la calcitonine sérique, non dues à un CMT, ont été observées dans environ 4,5 % des dosages (28). Elles peuvent être dues à une mauvaise adaptation des seuils d’interprétation, à des causes fonctionnelles (insuffisance rénale, hypercalcémie et hypergastrinémie), à d’autres tumeurs endocrines et au tabac.

3.7. Cancer Antigen 125 (CA 125) Le CA 125 est une glycoprotéine de la famille des mucines, définie par la reconnaissance de l’anticorps monoclonal OC 125 dirigé contre des cellules humaines de cancer ovarien séreux. Le CA 125 est le marqueur privilégié des cancers ovariens non mucineux. Des variants de CA 125 provenant de clivage partiel, délétion ou variation dans la nature et le degré de glycosylation ont été décrits. Cette hétérogénéité moléculaire peut entraîner des altérations conformationnelles de la molécule et modifier l’immunoréactivité de la molécule. Des polymorphismes individuels ou des différences d’agrégation ont également été évoquées pour expliquer certaines discordances entre résultats. Plus de vingt trousses de dosage sont actuellement disponibles sur le marché français. Initialement le dosage du CA 125 utilisait le même anticorps monoclonal OC 125 comme anticorps de capture et anticorps de révélation. Puis l’introduction d’un nouvel anticorps monoclonal de capture (M11) a amélioré considérablement les performances du dosage. Depuis d’autres sociétés ont développé leurs propres anticorps monoclonaux ou polyclonaux. Il n’existe pas actuellement de référence internationale et les résultats sont exprimés en unités arbitraires (U/mL ou kU/L). Les dosages de CA125 sont sensibles à la présence d’anticorps hétérophiles anti-souris, surtout chez les gens en contact fréquent avec des souris (personnel de laboratoire) ou ayant bénéficié d’une immunoscintigraphie utilisant des anticorps monoclonaux murins.

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3.8. Cancer Antigen 15-3 (CA 15-3) Le CA 15-3 est une glycoprotéine de la famille des mucines définie par sa réaction immunologique avec deux anticorps monoclonaux : le 115D8, dirigé contre la membrane du globule graisseux de lait humain et le DF3, dirigé contre la membrane de cellule humaine de cancer du sein. Sa composition exacte n’est pas connue. Le CA 15-3 est le marqueur privilégié du suivi des cancers du sein (29). Plus de vingt trousses de dosage sont actuellement disponibles sur le marché français. Pendant près de dix ans, la plupart des techniques commercialisées en France utilisaient les anticorps Centocor®, 115D8 et DF3. Actuellement de nouveaux systèmes font parfois appel à des anticorps différents qui reconnaissent des molécules appartenant au groupe des mucines : CA 27-29, CAM26, CAM29 et CA 549. Il n’existe pas actuellement de référence internationale et les résultats sont exprimés en unités arbitraires (U/mL ou kU/L). Un contrôle de marché des dispositifs de dosage du CA15-3 et mucines apparentées réalisé par l’AFSSAPS en 2006 montre que, en dépit d’une variabilité inter- techniques importante qui rend indispensable le suivi patient par une même méthode, la majorité des systèmes identifie correctement les patients avec ou sans métastase, sous réserve de l’utilisation des normes adaptées à la technique. La présence dans le sérum du patient d’anticorps humains anti-immunoglobuline animale peut entraîner des résultats erronés, en général surestimés.

3.9. Cancer Antigen 19-9 (CA 19-9) Le CA 19-9 appelé aussi GICA (pour Gastro Intestinal Carbohydrate Antigen) est défini par sa reconnaissance immunologique avec l’anticorps 1 116 NS 19.9, dirigé contre la membrane de cellule humaine de cancer du colon. Le CA 19-9 est un antigène polysaccharidique présent sur les mucines de haut poids moléculaire (200 à 800 kDa) et de structure identique à celle de l’antigène du groupe sanguin Lewis a. Le CA 19-9 est le marqueur privilégié des cancers du pancréas et des voies biliaires. Différents variants moléculaires de CA 19-9, provenant de clivage partiel, de délétion ou de variation dans la nature et le degré de glycosylation, ont été décrits. Plus de vingt trousses de dosage sont actuellement commercialisées. La plupart des fabricants utilisent le même anticorps monoclonal (1 116 NS 19.9) comme anticorps de capture et de révélation. Plus récemment, des techniques utilisant d’autres anticorps ont été commercialisées. Il n’existe pas de standard international. Le CA 19-9 est l’un des marqueurs dont les corrélations entre les techniques sont les plus faibles. Sa variabilité inter-techniques est évaluée autour de 25 % et est plus ou moins importante d’un patient à l’autre. Les anticorps hétérophiles et le facteur rhumatoïde peuvent créer des interférences dans les dosages. L’effet matrice est particulièrement important pour le CA 19-9 car lors de la dilution d’un échantillon, la molécule de CA 19-9 peut révéler des épitopes précédemment masqués entraînant une augmentation de reconnaissance par les anticorps du dosage et donc une augmentation de la

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concentration mesurée. Par ailleurs, il est indispensable de contrôler un CA 19-9 indétectable par un dosage de CA 50 devant une pathologie pancréatique ou colique.

3.10. Cyfra 21-1 Le cyfra 21-1 est un fragment de la cytokératine 19 (CK19) abondante dans les épithéliums simples. Le cyfra 21-1 contient 400 acides aminés et sa masse molaire est de 40 kDa. Les cytokératines sont insolubles, certains fragments libérés par la nécrose ou par lyse tissulaire dans le sang circulant sont solubles et accessibles au dosage. Le cyfra 21-1 n’a aucune spécificité d’organe et affiche des sensibilités variables selon l’organe touché par le cancer (poumon, vessie, col de l’utérus, tête et cou). Des augmentations non spécifiques peuvent apparaître lors d’insuffisance rénale. Les fragments solubles peuvent être dosés dans le sérum, en utilisant deux anticorps monoclonaux, BM 19-21 et KS 19-1, obtenus par immunisation de souris par les cellules MCF-7. Ces anticorps reconnaissent un ensemble de molécules immunoréactives, fragments de CK 19, que l’on regroupe sous le nom de cyfra 21-1.

3.11. Thyroglobuline La thyroglobuline est une glycoprotéine dimérique (660 kDa) exclusivement synthétisée par le follicule thyroïdien sain ou tumoral. Cette molécule hétérogène peut avoir une composition différente en cas de cancer thyroïdien (moins iodée) et donc une immunogénicité différente. L’évaluation du taux de thyroglobuline circulante est le reflet de trois éléments : la masse de tissu thyroïdien, le degré de stimulation et les phénomènes inflammatoires. Le taux de thyroglobuline doit être interprété en fonction du taux de TSH (patients en freination ou défreination) et de la présence ou non d’Ac anti-thyroglobuline. Les recommandations de l’ATA (1), reprises dans les consensus cliniques européens de prise en charge des cancers différenciés de la thyroïde (30) précisent les principales caractéristiques des dosages de thyroglobuline. Les dosages doivent être immunométriques, calibrés sur le standard CRM 457 et présenter une sensibilité fonctionnelle inférieure à 1 μg/L. Il n’y a pas d’indication quant au traceur qui peut être radioactif, enzymatique ou luminescent. Toute détermination de thyroglobuline doit être précédée d’une recherche des Ac anti-thyroglobuline (1). Les dosages d’Ac anti-thyroglobuline peuvent être compétitifs ou immunométriques (il faut proscrire les méthodes par hémagglutination ou semi-quantitatives). Toutes les méthodes de dosage de thyroglobuline sont sensibles, dans des proportions diverses, à l’interférence des Ac anti-thyroglobuline, ce qui minore la concentration de thyroglobuline. En présence d’Ac anti-thyroglobuline, les résultats de thyroglobuline doivent être rendus sous réserves au clinicien. En présence d’Ac anti-thyroglobuline, un résultat de thyroglobuline supérieur à la limite de détection fonctionnelle, même si on sait qu’il est inexact, doit être pris en

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compte comme le signe d’une sécrétion résiduelle de thyroglobuline. Un résultat de thyroglobuline inférieur à la limite de détection en présence d’Ac anti-thyroglobuline n’est pas forcément le signe d’une guérison. Le dosage de la thyroglobuline dans le liquide de rinçage d’une aiguille de cytoponction ganglionnaire peut aider au diagnostic de récidive ganglionnaire : son utilisation se généralise en complément de la cytologie.

4. Le bilan cortico-surrénalien 4.1. Cortisol Le cortisol est le glucocorticoïde majoritaire sécrété par la corticosurrénale. Son dosage est réalisé soit de manière isolée (le matin), soit au cours d’un cycle nycthéméral, soit au cours d’épreuves dynamiques (stimulation, freination). Les immunodosages s’effectuent par compétition à l’aide de méthodes de plus en plus automatisées. En 2007, vingt-trois dispositifs de dosage étaient commercialisés. Des variations importantes par rapport à la méthode de référence CPG-SM peuvent être observées notamment dans les concentrations basses circulantes (fig. 6). Par ailleurs, des interférences sont constatées en présence : • de certains médicaments ou des métabolites thérapeutiques de médicaments corticoïdes : prednisolone, méthylprédnisolone, interférence faible pour la prednisone mais celle-ci administrée par voie orale se transforme rapidement en prednisolone ; • de précurseurs de la biosynthèse du cortisol, composés dont les concentrations sont augmentées dans les déficits enzymatiques, notamment 11-désoxy-cortisol, 21-désoxy-cortisol, 17 hydroxyprogestérone… ; • de certains métabolites réduits du cortisol accumulés au cours de l’insuffisance rénale. Au vu des renseignements cliniques et/ou du traitement du patient, le biologiste doit consulter la notice du fournisseur pour connaître les réactions croisées potentielles et afficher près des résultats un commentaire à ce sujet. Par ailleurs, la majorité des fabricants mentionne comme limite basse de la plage de mesure la limite de détection analytique au lieu de citer la limite de détection fonctionnelle qui, rappelons-le, doit être utilisée à cet effet (31). La figure 6 démontre la variabilité notamment pour les faibles concentrations, ce qui implique d’apprécier avec une extrême prudence les résultats obtenus avec certaines méthodes après les différents tests de freinage pratiqués dans l’exploration des hypercorticismes.

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Cortisol - Reproductibilité par technique 2008 25 20 15

CV Tr %

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10 5 0 8I 1A 8I 6A 8I 4A 8I 2A 8I 5A 8I 3A (78,1nmol/L) (112nmol/L) (238,4nmol/L) (380,4nmol/L) (477,4nmol/L) (835nmol/L)

Figure : 6 – Reproductibilité obtenue avec 11 dosages du cortisol (nmol/L) effectués sur 6 sérums à niveaux croissants de concentrations (ProBioQual). Le dosage du cortisol libre urinaire sur urines de 24 heures est considéré comme un des paramètres les plus sensibles dans le diagnostic d'un syndrome de Cushing. En effet, dans les hypercorticismes, la capacité limitée de la transcortine entraîne une augmentation de la cortisolurie parallèle à celle de la cortisolémie. Le dosage du cortisol libre urinaire nécessite des techniques spécifiques et le plus souvent des étapes préalables d’extraction et de purification qui ne sont pas toujours systématiquement préconisées par le fournisseur générant ainsi une surestimation des résultats (31).

4.2. Adréno CorticoTrophic Hormone ou corticorticotrophine (ACTH) L’ACTH est la stimuline hypophysaire qui agit sur la surrénale pour stimuler sa sécrétion notamment celle du cortisol. C’est un peptide de 39 acides aminés dont 24 sont nécessaires à son activité. Elle provient d’une grosse protéine, la Pro-Opio-Mélano-Cortine (POMC) qui va se scinder pour former, outre l’ACTH, des endorphines, des MSH et des LPH. Son dosage contribue à l’exploration des syndromes de Cushing. Le dosage est également réalisé au cours de certains tests dynamiques. La grande fragilité de l’ACTH exige de prélever sur EDTA additionné d'une antiprotéase, l'aprotinine, le prélèvement doit être centrifugé puis congelé dans la demi-heure suivant la prise de sang. Les dosages utilisés sont essentiellement de type immunométriques à deux sites. Ils manquent bien souvent de sensibilité et les valeurs peuvent varier du simple au double en fonction des techniques utilisées.

Critères de choix analytiques des principaux paramètres biologiques

4.3. Aldostérone L’aldostérone est un stéroïde à action minéralocorticoïde secrété par le cortex surrénalien. Le dosage est prescrit pour : • affirmer l’existence d’un hyperaldostéronisme devant une hypokaliémie associée ou non à une hypertension ; • différencier un hyperaldostéronisme primaire d’un hyperaldostéronisme secondaire ; • réaliser le diagnostic étiologique de l’hyperaldostéronisme primaire (syndrome de Cohn) ou hyperplasie des surrénales. De nombreux facteurs influencent les taux circulants d’aldostérone, d’où la nécessité de respecter certaines conditions pour une interprétation correcte des résultats. En effet, il convient de connaître la position du sujet couché (3 h de décubitus) ou debout (au moins 1 h de déambulation) puisque le passage en orthostatisme s’accompagne d’une augmentation rapide des valeurs. Par ailleurs, il est indispensable d’effectuer les prélèvements chez des sujets ayant un régime normalement sodé puisque les taux d’aldostérone s’avèrent inversement liés aux apports en sodium. Enfin il est demandé d’arrêter les diurétiques, bêta-bloquants et inhibiteurs de l’enzyme de conversion au moins quinze jours (ou un mois pour les anti-aldostérone) avant toute exploration du système rénine-angiotensine-aldostérone. Les dosages sont pratiqués par immunoanalyse, à l’aide de techniques par compétition utilisant des marqueurs isotopiques (125I), enzymatiques ou luminescents. Des méthodes directes pratiquées sur sérum ont remplacé les techniques anciennes qui utilisaient une extraction préalable et éventuellement une séparation par chromatographie sur colonne. Cependant il faut savoir que de nombreux précurseurs ou stéroïdes de structure voisine peuvent interférer et générer une surestimation artéfactuelle des résultats. En effet, il a été récemment montré que les valeurs d’aldostérone obtenues avec des dosages radioimmunologiques directs pouvaient varier du simple au double (et même au triple) en l’absence d’extraction et de séparation préalables par manque de spécificité (32). Les réactions croisées variables selon les anticorps utilisés permettent d’expliquer les différences intertechniques observées. Par ailleurs, l’absence de sensibilité des dosages directs par radioimmunologie ou chimiluminescence a été également dénoncée (32). Un dosage d’aldostérone après extraction préalable est donc recommandé pour une optimisation des critères de qualité.

4.4. Déhydroépiandrostérone (DHEA) et sulfate de déhydroépiandrostérone (SDHEA) La DHEA est synthétisée dans le cortex surrénalien, elle circule liée à l'albumine, puis elle est convertie pour l'essentiel sous forme sulfatée (SDHEA) au niveau surrénalien, rénal ou hépatique. La forme sulfatée, hydrosoluble est la forme circulante prépondérante du DHEA (environ 1 000 fois plus que la forme libre).

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Immunoanalyse

Le dosage du SDHEA par immunoanalyse présente en général une bonne reproductibilité inter-techniques, compte-tenu des valeurs élevées (de l’ordre du mg/L) circulantes observées.

5. Le bilan de croissance 5.1. Hormone de croissance (GH) Le dosage de la GH permet le diagnostic de déficit en GH chez l’enfant, et chez l’adulte, il est réalisé pour le diagnostic et le suivi thérapeutique de l’acromégalie traitée par certains médicaments. La GH ne devrait pas être mesurée sur un prélèvement isolé peu informatif mais lors d’explorations fonctionnelles (tests de stimulation pharmacologique ou cycles nocturnes pour le diagnostic de déficit en GH, épreuve de freinage par hyperglycémie par voie orale pour le diagnostic d’acromégalie). Le dosage de la GH est réalisé sur sérum uniquement, par technique immunométrique à deux sites à l’aide de marqueurs isotopiques, luminescents ou enzymatiques. Les valeurs seuil diagnostiques et thérapeutiques sont utilisées par les cliniciens, quelle que soit la technique de dosage de GH utilisée (33). Il est donc essentiel que les différentes trousses disponibles produisent des résultats comparables. À cet effet, des recommandations ont été publiées par un groupe de travail de la SFBC (34) : • étalonnage contre le standard de GH recombinante IS 98/574 à partir du 2e trimestre 2004 tous les dosages de GH devaient être étalonnés ; • utilisation de la GH recombinante 22 kDa comme étalon de travail ; • éviter l’effet matrice en diluant le standard international à l’aide de sérum humain sans GH ; • expression des résultats en mUI/L et non en μg/L ; • mesure de la GH sur sérum et non plus sur plasma. À l’heure actuelle, tous les dosages (sauf un) sont calibrés sur l’étalon recombinant permettant ainsi une harmonisation des résultats (fig. 7).

hGH (mUI/L)

Critères de choix analytiques des principaux paramètres biologiques

30

25

20

15

10

5

0

Médiane 25 % - 75 % Min-Max

B9

BN

BO

DL

OE

SA

RÉACTIFS

Figure : 7 – Valeurs de GH obtenues lors d’un contrôle national de qualité de l’AFSSAPS. Diagramme du type « boîte à moustache » des résultats obtenus lors de l’opération 06HGH1 avec les réactifs les plus utilisés.

5.2. Insulin-like Growth Factor I (IGF-I) Le dosage de l’IGF-I, effecteur de la GH, reste nécessaire chez l’enfant pour l’exploration des troubles de la croissance, notamment pour le diagnostic de déficit en GH. Il est également réalisé chez l’adulte pour le diagnostic et le suivi de l’acromégalie traitée. La difficulté du dosage d’IGF-I tient à sa liaison à des protéines spécifiques de très haute affinité, les IGFBP, au nombre de six, qu’il faut préalablement éliminer par une phase d’extraction. La méthode de référence utilisée à cet effet est la filtration sur gel, technique trop lourde pour être pratiquée en routine. La méthode actuellement pratiquée repose sur la saturation des sites des protéines porteuses par de l’IGF-II ajouté en excès à l’échantillon acidifié (35). Cette technique est considérée comme la plus performante par les experts à deux conditions. La première exige que les anticorps utilisés dans l’immunodosage ne reconnaissent pas du tout l’IGF-II (sinon risque d’erreur par excès). La seconde impose que la quantité d’IGF-II ajoutée soit suffisante, en particulier dans des situations cliniques comme l’insuffisance rénale chronique ou l’acromégalie s’accompagnant d’une élévation d’IGFBP (sinon risque d’erreur par défaut). L’IGF-I est dosé sur sérum ou plasma EDTA (pas d’héparine) par des techniques immunométriques à deux sites utilisant un traceur isotopique ou non. Les trousses commerciales sont aujourd’hui calibrées contre un standard international (87/518) mal purifié et composé d’IGF-I méthionylé (71 acides aminés au lieu de 70

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Immunoanalyse

pour l’IGF-I natif) (36). Un nouveau standard international a été préparé par un panel d’experts et la recalibration des différentes techniques devrait induire une baisse des valeurs mesurées. La dernière difficulté du dosage d’IGF-I est liée à la fluctuation des taux notamment selon le statut nutritionnel, le bilan hormonal et l’âge du patient. Ces variations imposent d’établir pour chaque technique de dosage des valeurs normales stratifiées par tranches d’âge sur une large population de sujets à jeun pour une interprétation correcte des résultats (37). Un groupe de travail établi pour un protocole hospitalier de recherche clinique vient d’être récemment constitué pour établir ainsi les valeurs de référence des différents dosages commercialisés quand ils seront recalibrés sur l’étalon recombinant natif.

6. Le bilan phosphocalcique 6.1. Parathormone (PTH) La PTH est un peptide de 84 acides aminés sécrété par les glandes parathyroïdes en réponse à une baisse de la calcémie ionisée. La PTH est la première hormone à doser lorsqu’une anomalie du bilan phospho-calcique « de base » (calcémie, phosphatémie, calciurie) a été détectée. La PTH est également dosée chez les patients atteints d’insuffisance rénale chronique (IRC) afin d’approcher le type d’anomalie osseuse (ostéodystrophie rénale) éventuellement présent. Les néphrologues se basent sur des recommandations internationales, les K/DOQI (38), qui définissent la fréquence des mesures et les concentrations cibles à maintenir en fonction du stade d’insuffisance rénale chronique (par exemple, un dosage de PTH par trimestre et le maintien des concentrations entre 150 et 300 ng/L chez les dialysés). Ces recommandations sont basées sur la corrélation entre des données histomorphométriques de biopsies osseuses (la méthode de référence pour diagnostiquer l’ostéodystrophie rénale) et des concentrations de PTH obtenues avec une technique qui n’est plus disponible aujourd‘hui (la trousse Allegro de la société Nichols Institute Diagnostics). Elles sont utilisées par les néphrologues quelle que soit la technique de dosage de PTH, alors qu’il a été montré récemment une variabilité des résultats selon la méthodologie utilisée conduisant ainsi à des attitudes thérapeutiques opposées (39). Les dosages de PTH sont réalisés par des méthodes immunométriques utilisant des traceurs isotopiques, luminescents ou enzymatiques. La première difficulté est liée au prélèvement de l’échantillon sanguin. En effet, la PTH est aujourd’hui dosée sur sérum ou sur plasma EDTA, alors qu’il vient d’être démontré qu’avec certaines techniques, les résultats peuvent être significativement différents dans ces deux types d’échantillons (40). Il est donc actuellement conseillé de pratiquer le dosage de PTH prélevée sur tube sec sans anticoagulant. La deuxième difficulté repose sur la spécificité des anticorps utilisés. En effet, les dosages de PTH « intacte » commercialisés

Critères de choix analytiques des principaux paramètres biologiques

depuis une vingtaine d’années sont ainsi dénommés car on pensait qu’ils ne mesuraient que la PTH 1-84. Il est maintenant bien établi que ces dosages présentent des réactions croisées variées avec toute une famille de fragments dont le plus abondant est la PTH 7-84. Des techniques dites de troisième génération et ne mesurant pas la PTH 7-84 ont été développées. Actuellement ces dosages n’ont pas démontré de supériorité par rapport aux dosages de PTH intacte quant à leur sensibilité diagnostique pour l’ostéodystrophie rénale (41) ou l’hyperparathyroïdie primitive (42). Si la technique ciblée donne des résultats proches de ceux de la technique Allegro qui avait servi de référence pour l’établissement des recommandations K/DOQI, les valeurs normales établies de 10 à 46 ng/L (43) pourront être conservées. Dans le cas contraire, un facteur de correction devra être appliqué selon les corrélations précédemment rapportées (39). Des travaux sont toutefois en cours pour harmoniser les dosages de PTH et il conviendra d’être attentif aux résultats et recommandations des différents groupes travaillant sur le sujet.

6.2. 25 hydroxy Vitamine D (25OH-D) Le rôle le mieux connu de la vitamine D est de stimuler l’absorption intestinale du calcium et du phosphore. La 25OH-D, ou calcidiol, représente la réserve en vitamine D. C’est le paramètre qu’il faut mesurer pour évaluer le statut vitaminique D d’un individu afin de lui prescrire (si la concentration de 25OH-D est basse) une supplémentation en vitamine D. Si la vitamine D synthétisée par les cellules de la peau ou contenue dans les poissons gras est la vitamine D3 (cholécalciférol), il existe une autre vitamine D, la vitamine D2 (ergocalciférol) d’origine végétale, présente dans plusieurs médicaments. Même si certains travaux suggèrent que la vitamine D3 est plus efficace que la vitamine D2, cette dernière est encore relativement largement prescrite. Ceci impose d’utiliser une technique de dosage qui reconnaît de la même manière la 25OH-D2 et la 25OH-D3. La méthode de référence pour doser la 25OH-D est la spectrométrie de masse. Certains laboratoires utilisent également des techniques par HPLC. Néanmoins, en routine, les dosages sont réalisés par immunoanalyse, à l’aide de techniques par compétition, avec marqueur isotopique incluant préalablement une phase d’extraction. Des techniques automatisées utilisant un marqueur luminescent viennent d’être récemment commercialisées. Contrairement à la plupart des paramètres biologiques, les valeurs de référence ne doivent pas être établies dans une population apparemment saine mais être définies comme les concentrations de 25OH-D pour lesquelles on pourra profiter de manière optimale des effets bénéfiques de la vitamine D. Depuis 2007, les valeurs souhaitables proposées par la majorité des experts sont de 30 à 80 μg/L (soit 75 à 200 nmol/L) (44). Cette plage de valeurs est donnée quelle que soit la technique de dosage utilisée. Il est donc important d’harmoniser les différentes techniques de dosage (45) et un groupe d’experts y travaille actuellement. À l’heure actuelle, le choix

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Immunoanalyse

d’une technique repose donc essentiellement sur la spécificité du dosage qui doit reconnaître les deux formes D2 et D3 de la 25 OH vitamine D.

6.3. Marqueurs de résorption osseuse La matrice du tissu osseux est résorbée par les ostéoclastes, libérant dans la circulation sanguine, puis dans les urines des marqueurs biologiques utilisés pour l’étude de la résorption osseuse, notamment dans le suivi du traitement de l’ostéoporose et de la maladie de Paget. À cet effet, le télopeptide C-terminal (CTX) ou N-terminal (NTX), ainsi que la désoxypyridinoline libre (qui tend néanmoins à devenir obsolète) représentent à l’heure actuelle les paramètres les plus intéressants. Les dosages sont pratiqués par immunoanalyse sur les urines et également sur sérum pour le CTX. Les variabilités intra- et inter-individuelles imposent d’optimiser les conditions pré-analytiques bien définies rapportées par un groupe de travail de la SFBC (46) : à cet effet, il convient notamment : • d’utiliser toujours le même marqueur biologique pour le suivi longitudinal d’un patient ; • de recueillir l’échantillon biologique toujours dans les mêmes circonstances (rythme circadien iªnfluencé par le jeûne, avec un pic en fin de nuit et un nadir en fin d’après-midi) ; • de réaliser le prélèvement à distance de la thérapeutique, en particulier pour les traitements hebdomadaires ; • pour les échantillons sériques, d’effectuer le prélèvement le matin, strictement à jeun et de congeler le sérum dans les quatre heures ; • pour les urines, de pratiquer le recueil sur la première ou la deuxième urine du matin à jeun et de réaliser le dosage de la créatinine sur le même prélèvement. Les dosages s’effectuent principalement par des techniques immunométriques avec un marqueur isotopique, luminescent ou chimiluminescent. Les résultats sont plus élevés chez la femme que chez l’homme et augmentent avec l’âge. Les valeurs de référence de la femme adulte doivent être établies pour chaque technique de dosage chez des femmes non ménopausées, âgées de 30 à 45 ans, avec des cycles réguliers et un taux normal de FSH sérique.

7. Le bilan diabétologique Le diagnostic positif du diabète repose sur la mesure de la glycémie. L’insuline, hormone hypoglycémiante, joue un rôle fondamental dans le contrôle glycémique. Dans les cellules β des îlots de Langerhans du pancréas, la production de l’insuline à partir de son précurseur, la proinsuline, aboutit à la libération de peptide C et de peptides intermédiaires (des 31,32 proinsuline et des 64,65 proinsuline).

Critères de choix analytiques des principaux paramètres biologiques

Les dosages d’insuline et de peptide C sont des outils intéressants pour le diagnostic étiologique de certains diabètes (insulinoprives ou insulinorésistants). Combinés à celui de la glycémie, ils sont faits à jeun ou après stimulation par un repas, une charge en glucose ou une injection de glucagon. Les dosages d’insuline et de peptide C contribuent également au diagnostic des hypoglycémies relatives à un hyperinsulinisme (insulinomes). En diabétologie, l’immunoanalyse est aussi impliquée dans la mise en évidence des auto-anticorps anti-insuline, anti-GAD (glutamique acide décarboxylase) et anti-IA2 (glycoprotéine de la famille des tyrosines phosphatases) marqueurs immunologiques du diabète de type 1.

7.1. Insuline Dans le sérum, l’insuline circule sous forme libre avec de petites quantités de précurseurs, proinsuline intacte et des 31,32 proinsuline essentiellement, la des 64,65 proinsuline étant un composant mineur, sauf dans le cas très rare d’hyperproinsulinémie familiale. Le dosage de l’insuline joue un rôle central dans l’évaluation de la capacité sécrétrice des cellules bêta et de la relation entre glycémie et insulinémie qui permet d’apprécier l’insulinorésistance (calcul de l’indice HOMA, HOmeostasis Model Assessment). Les anciens dosages compétitifs RIA avec anticorps polyclonaux qui présentent en général des réactions croisées non négligeables avec la proinsuline (≈ 40 %) ont été presque totalement abandonnés au profit de dosages immunométriques à deux sites avec marqueurs isotopiques, enzymatiques ou luminescents. Il ressort des résultats de deux études récentes (47, 48) qu’une grande majorité des dosages (8/10 dans une étude) sont maintenant considérés comme spécifiques de l’insuline (réactions croisées avec la proinsuline et la 31,32 proinsuline inférieures à 3 %). Par ailleurs, la variabilité inter-techniques demeure très importante (variations du simple au double pour des concentrations moyennes et d’un facteur vingt pour des concentrations basses). Ces variations peuvent être attribuées en majorité à des effets de matrice et parfois à la présence de deux standards d’insuline humaine, l’IRP 66/304 (encore très majoritaire et utilisant des facteurs de conversion propre à chaque trousse) et le 83/500. La limite de détection annoncée correspond encore trop souvent à la limite de détection analytique sans que soit précisée la sensibilité fonctionnelle. Ce paramètre est pourtant important, en particulier lors de l’exploration des hypoglycémies dans lesquelles les concentrations d’insuline sont souvent basses (49). Les pièges du dosage d’insuline sont l’hémolyse qui, en libérant l’Insulin Degrading Enzyme, entraîne une baisse de la concentration mesurée par les dosages immunométriques, et la présence dans le sérum d’anticorps anti-insuline (induits par un traitement insulinique ou préexistant au traitement, auto-anticorps) qui majorent le résultat du dosage. Le dosage de la forme libre, active est possible après précipitation des immunoglobulines par le PEG (rapidement après le prélèvement sanguin) (cf. chapitre 3, encadré 1). L’influence d’anticorps hétérophiles semble très rare, de même que l’effet crochet (concentrations > 6 000 mUI/L). Les insulines thérapeu-

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tiques, notamment les analogues, présentent des réactions croisées variables selon la trousse commercialisée (fig. 8). Le biologiste devra connaître la spécificité exacte des dosages proposés afin de choisir une technique appropriée à l’utilité clinique de reconnaître ou non la molécule injectée.

INSULINE

SERUM : 8I 2A (9/04/08)

+2 ET Tr

Moy Tr

-2 ET Tr 20

15

10

5

0 22.0

26.4

30.8

35.2

39.5

44.0

48.4

52.8

57.2

61.6

66.0

Figure : 8 – Valeurs d’insuline (mUI/L) obtenues en avril 2008 avec le contrôle CIDM 81 2A surchargé avec de l’insuline humaine recombinante (ProBioQual).

7.2. Peptide C Bien que co-sécrété mole pour mole avec l’insuline, le peptide C se trouve à une concentration plus importante dans le sang en raison d’une demi-vie de trente minutes plus longue que celle de l’insuline (quatre minutes). Le dosage du peptide C n’est affecté ni par l’hémolyse ni par la présence d’anticorps anti-insuline. C’est une des raisons pour lesquelles il est souvent considéré comme un marqueur plus fiable de l’insulinosécrétion que l’insuline elle-même. En plus des indications vues précédemment, le dosage du peptide C est essentiel pour le diagnostic des hypoglycémies factices par injection cachée d’insuline. S’il subsiste encore quelques dosages par compétition, les dosages immunométriques avec marqueurs isotopiques, enzymatiques ou luminescents leur sont maintenant souvent préférés en raison de leur meilleure reproductibilité. Des protocoles de dosage du peptide C dans les urines sont proposés mais sont sans grand intérêt clinique. Bien qu’un seul standard international (WHO 84/510) soit utilisé, les dosages présentent une grande

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variabilité puisqu’un écart moyen de 25 % entre les résultats de deux dosages peut être observé. Une standardisation des dosages par rapport à la spectrométrie de masse permettant une harmonisation des résultats obtenus avec différentes méthodes a été récemment rapportée (50).

8. Le bilan hématologique 8.1. Ferritine La ferritine joue un rôle clé dans le métabolisme du fer dont elle assure le stockage dans l’organisme. Son dosage permettant d’évaluer les réserves tissulaires mobilisables est donc principalement indiqué dans le diagnostic et dans le suivi des patients atteints de carence martiale, observée notamment dans certaines anémies hypochromes. Le dosage de la ferritine permet également d’apprécier une surcharge en fer dans l’hémochromatose et l’hépatosidérose dysmétabolique. Les immunodosages par compétition avec marqueurs isotopiques, enzymatiques ou luminescents sont maintenant classiquement utilisés. La standardisation doit être calibrée par rapport au 2e étalon international (OMS 80-578). Ces dosages présentent les problèmes méthodologiques liés à l’immunoanalyse classique et présentent des variabilités de résultats importantes (fig. 9), observées pour certaines techniques surtout dans les valeurs basses. Les taux physiologiques sont plus élevés chez l’homme que chez la femme. Ils sont particulièrement élevés à la naissance et augmentent après la ménopause.

8.2. Vitamine B12 et folates La vitamine B12, ou cyanocobalamine, et la vitamine B9, ou folates, jouent un rôle fondamental comme coenzymes dans la synthèse des acides nucléiques, intervenant notamment dans la maturation des érythrocytes. L’absence d’un de ces deux paramètres entraîne l’apparition d’une anémie dite mégaloblastique (normochrome macrocytaire). Les dosages de ces vitamines sont indiqués devant toute perturbation hématologique de type anémie macrocytaire ou devant une hypersegmentation des polynucléaires. La photosensibilité de la vitamine B12 impose le transport de l’échantillon sanguin à l’abri de la lumière. Par ailleurs, la fragilité des folates nécessite un transport rapide des échantillons au laboratoire. Enfin l’absence d’hémolyse doit être vérifiée pour éviter toute interférence éventuelle des folates érythrocytaires. Les méthodes microbiologiques de référence trop longues et laborieuses ont été abandonnées au profit d’immunodosages plus rapides en routine. Les immunodosages s’effectuent par compétition sur sérum à l’aide de marqueurs isotopiques ou luminescents de plus en plus automatisés actuellement. Des dosages de folates sont parfois réalisés sur culot érythrocytaire afin d’apprécier les réserves en vitamine B9.

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Figure : 9 – Reproductibilité obtenue avec 17 dosages de ferritine (μg/L), effectués sur 6 sérums à niveaux croissants de concentrations (ProBioQual).

248 Immunoanalyse

Figure : 10 – Reproductibilité obtenue avec 13 dosages de folates (nmol/L) effectués sur 6 sérums à niveaux croissants de concentrations.

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Une méthode possédant une bonne sensibilité fonctionnelle est le critère de choix d’un dosage de vitamine B12 et de folates afin de détecter les états de carence. À ce propos, il convient de noter que la variabilité des résultats demeure extrêmement importante pour les dosages de folates et peut atteindre 38 % dans les concentrations basses observées dans ces pathologies (fig. 10). Cette dispersion des résultats peut être attribuée notamment aux réactions croisées variables selon la spécificité de l’anticorps utilisé. À l’inverse, les variabilités restent plus modérées pour les résultats de vitamine B12 avec des valeurs en général inférieures à 10 % pour les différentes méthodes évaluées.

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Critères de choix analytiques des principaux paramètres biologiques

36.

37.

38. 39.

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Immunoanalyse

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Sites Internet www.aacc.org/NACB 2000 www.afssaps.fr www.probioqual.com

Glossaire

Adjuvant : préparation destinée à augmenter la réponse immunitaire. Affinité (intrinsèque) : caractéristique d’un anticorps traduisant l’intensité des forces de liaison à l’antigène ; elle est exprimée quantitativement par la constante d’affinité ou d’association à l’équilibre Ka (L/mol).

Affinité fonctionnelle : cf. Avidité. Analyte : substance dosée. Anticorps : immunoglobuline ayant

la propriété de se lier de manière

spécifique à un antigène.

Antigène : substance capable de se lier à un anticorps spécifique. Apoenzyme : partie protéinique d’une enzyme. Avidité (ou affinité fonctionnelle) : caractéristique d’un immunsérum traduisant l’intensité de sa liaison à l’antigène. L’avidité dépend de l’affinité intrinsèque de chaque anticorps et des conditions physicochimiques dans lesquelles se fait la liaison.

Becquerel (Bq) : unité internationale de radioactivité correspondant à une désintégration par seconde ( 3, 7 ⋅ 1010 Bq = 1 Ci (Curie)).

Bioluminescence : phénomène observé chez certains organismes vivants, résultant d’une réaction de chimiluminescence impliquant l’action d’un système enzymatique. Blanc : échantillon idéalement identique en tous points à l’échantillon à doser mais de concentration nulle en analyte.

Chimiluminescence : phénomène de luminescence provoqué par l’excitation chimique d’un luminophore. Chromogène : molécule dont la transformation chimique entraîne l’apparition d’une bande dans son spectre d’absorption optique. Clone : population de cellules identiques dérivant d’une même cellule initiale. Co-enzyme : partie non protéique de l’enzyme. Compétition (Méthode par) : méthode de dosage qui, le plus souvent, met en jeu la compétition entre un antigène à doser et un traceur vis-à-vis d’un anticorps en défaut.

Conjugué : molécule résultant d’une réaction de couplage.

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Immunoanalyse

Contrôle de qualité :

ensemble des opérations de vérification effectuées dans le but d’estimer et d’améliorer la qualité des résultats d’un dosage.

Couplage : procédé permettant de lier de façon covalente deux molécules de fonctions différentes, par exemple un antigène et un marqueur ou un haptène et un porteur. Critères de qualité : ensemble de critères quantitatifs utilisés pour le choix des conditions expérimentales optimales lors de la mise au point d’un dosage et pour le contrôle de qualité au moment de son utilisation en routine.

Déterminant antigénique : synonyme d’épitope. Distribution de référence : distribution de probabilité

des valeurs qui pourraient être obtenues dans la population de référence, généralement établie à partir de l’échantillon de référence.

Échantillon de référence : sous-ensemble formé d’individus issus de la population de référence, représentatif de cette population. Épitope : partie de la molécule d’antigène reconnue par l’anticorps. Erreur aléatoire : écart, de signe et de grandeur imprévisibles, entre un résultat et la valeur « vraie » ou sa meilleure estimation.

Erreur systématique : écart toujours de même signe entre un résultat et la valeur « vraie » ou sa meilleure estimation.

Étalon (Solution) : solution contenant une quantité connue d’une substance à utiliser pour réaliser une courbe d’étalonnage. Étalon biologique international :

étalon reconnu par un accord international pour servir de base internationale à l’attribution de valeurs aux autres étalons de la grandeur concernée

Exactitude : étroitesse de l’accord entre le résultat d’un mesurage et la valeur « vraie » du mesurande.

Fidélité (précision) :

aptitude à donner des indications très voisines lors du dosage répété du même mesurande dans les mêmes conditions de mesure.

Fidélité intermédiaire (reproductibilité intra-laboratoire) : étroitesse de l’accord entre les résultats des mesurages du même mesurande, mesurages effectués au sein d’un même laboratoire, en faisant varier les conditions de mesure.

Fluorescence : phénomène de photoluminescence caractérisé par une durée de vie courte des états excités.

Haptène : antigène, de faible masse molaire, incapable à lui seul de provoquer la formation d’anticorps spécifiques chez l’animal.

Glossaire

Hybridome :

cellule résultant de la fusion d’une cellule de myélome et d’un lymphocyte B d’une souris immunisée conventionnellement, dans le cas de la production des anticorps monoclonaux.

Immunodosage :

dosage faisant appel à une réaction antigène-

anticorps.

Immunogène : antigène capable de provoquer la formation d’anticorps spécifiques chez l’animal.

Immunoglobuline : globuline ayant une fonction anticorps. Immunométrique (Méthode) :

méthode de dosage dans laquelle l’anticorps est en excès, de manière à lier la totalité de l’antigène à doser.

Immunsérum : sérum contenant des quantités importantes d’immunoglobulines dirigées contre un antigène donné. Intervalle de référence :

domaine des valeurs comprises entre la limite inférieure et la limite supérieure de référence.

Justesse :

aptitude d’une méthode d’analyse à donner des résultats exempts d’erreur systématique.

Ligand : dans les dosages par liaison, il s’agit de la substance qui se lie au réactif de liaison spécifique (anticorps, récepteur cellulaire ou tissulaire, protéine vectrice, etc.). Limite de détection analytique :

plus petite concentration fournissant une réponse significativement différente de celle d’un blanc.

Limite de détection fonctionnelle :

concentration produisant un coefficient de variation inter-essais de 20 % calculé sur une période de six mois à un an, à l’aide d’au moins deux lots différents de réactifs.

Limite(s) de référence :

limite(s) calculée(s) par des moyens statistiques appropriés à partir de la distribution de référence.

Luminescence : émission de lumière par une substance, provoquée par toute autre cause qu’une élévation importante de température (incandescence).

Luminophore : groupement chimique susceptible d’émettre de la lumière sous l’effet d’une excitation appropriée (photonique, chimique, etc.).

Marqueur : entité (atome, molécule, ion, etc.) liée chimiquement à une molécule d’antigène ou d’anticorps et délivrant un signal (direct ou indirect) quantitativement mesurable. Mesurage :

ensemble d’opérations ayant pour but de déterminer une valeur d’une grandeur.

Mesurande : grandeur particulière soumise à mesurage.

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Immunoanalyse

Paratope : partie de l'anticorps qui assure la fonction de reconnaissance de l'antigène.

Phase hétérogène (Méthode en) :

méthode nécessitant la séparation des complexes antigène-anticorps et des formes libres.

Phase homogène (Méthode en) : méthode de dosage ne nécessitant pas la séparation des complexes antigène-anticorps et des formes libres.

Phosphorescence : phénomène de photoluminescence caractérisé par une durée de vie longue des états excités.

Photoluminescence : phénomène provoqué par l’excitation lumineuse d’un luminophore. Fluorescence et phosphorescence sont deux types de photoluminescence.

Population de référence : ensemble de tous les individus répondant à des critères bien définis (le nombre d’individus la constituant est le plus souvent inconnu).

Précision : cf. Fidélité. Quantile a (ou d’ordre a) de la distribution d’une concentration : concentration en deçà de laquelle la probabilité de trouver une valeur est égale à α (par exemple, la médiane est le quantile d’ordre 0,5).

Quenching :

affaiblissement de l’intensité de luminescence d’une substance par les molécules environnantes (désexcitation non radiative et/ou absorption par le milieu).

Rendement de marquage :

quantité de marqueur fixé sur la molécule à marquer, rapportée à la quantité totale de marqueur mise en jeu au cours de la réaction de marquage.

Répétabilité :

étroitesse de l’accord entre les résultats des mesurages successifs du même mesurande, mesurages effectués dans la totalité des mêmes conditions de mesure.

Reproductibilité interlaboratoires :

qualité de l’accord, dans une zone définie de concentrations, entre des mesures répétées, effectuées dans différents laboratoires.

Sandwich (Méthode) : méthode de dosage immunométrique utilisant deux anticorps spécifiques complémentaires en excès, dont l’un est marqué et l’autre fixé sur une phase solide.

Site anticorps :

partie de la molécule d’anticorps qui reconnaît le site

antigénique.

Site antigénique : synonyme d’épitope. Spécificité : la spécificité d’un anticorps pour un antigène est sa capacité à ne reconnaître que cet antigène.

Glossaire

Taux de marquage : nombre de moles de marqueur par mole d’antigène ou d’anticorps marqué.

Traceur :

molécule marquée (antigène ou anticorps) utilisée dans les immunodosages.

Valeurs de référence : valeurs obtenues pour une variable biologique particulière sur les individus de l’échantillon de référence.

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