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French Pages [181] Year 2007
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BAR S1678 2007 LEGRAND
Fabrication et utilisation de l’outillage en matières osseuses du Néolithique de Chypre : Khirokitia et Cap Andreas-Kastros
FABRICATION ET UTILISATION DE L’OUTILLAGE EN MATIÈRES OSSEUSES
Alexandra Legrand
BAR International Series 1678 9 781407 301167
B A R
2007
Fabrication et utilisation de l’outillage en matières osseuses du Néolithique de Chypre : Khirokitia et Cap Andreas-Kastros Alexandra Legrand
BAR International Series 1678 2007
Published in 2016 by BAR Publishing, Oxford BAR International Series 1678 Fabrication et utilisation de l’outillage en matières osseuses du Néolithique de Chypre: Khirokitia et Cap Andreas-Kastros © A Legrand and the Publisher 2007 The author's moral rights under the 1988 UK Copyright, Designs and Patents Act are hereby expressly asserted. All rights reserved. No part of this work may be copied, reproduced, stored, sold, distributed, scanned, saved in any form of digital format or transmitted in any form digitally, without the written permission of the Publisher. ISBN 9781407301167 paperback ISBN 9781407331553 e-format DOI https://doi.org/10.30861/9781407301167 A catalogue record for this book is available from the British Library BAR Publishing is the trading name of British Archaeological Reports (Oxford) Ltd. British Archaeological Reports was first incorporated in 1974 to publish the BAR Series, International and British. In 1992 Hadrian Books Ltd became part of the BAR group. This volume was originally published by Archaeopress in conjunction with British Archaeological Reports (Oxford) Ltd / Hadrian Books Ltd, the Series principal publisher, in 2007. This present volume is published by BAR Publishing, 2016.
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Merci également aux membres de l’Institut de Préhistoire Orientale de Jalès et en particulier à Madame D. Stordeur, ainsi qu’au personnel du Musée d’Argentomagus (Saint-Marcel) pour leur accueil. Les expérimentations sur le travail des fibres végétales n’auraient pu être présentées ici sans l’aide de Mesdames H. Cazé, F. Médard et M.-P. Puybaret. Je les en remercie. Merci également à A. Méjean pour l’expérimentation conduite sur le travail de l’argile.
REMERCIEMENTS Ce travail a été réalisé dans le cadre d’une thèse de 3e cycle de l’Université de Paris I, Panthéon-Sorbonne. Je voudrais donc tout d’abord adresser mes remerciements aux membres du jury : Mesdames M. Lichardus (Professeur à l’Université de Paris I), C. Perlès (Professeur à l’Université de Paris X), A. M. Choyke (Professeur à l’Université de Budapest), I. Sidéra (Chargée de recherche CNRS), et Monsieur A. Le Brun (Directeur de recherche CNRS) ainsi que mon directeur de thèse, Monsieur J.-P. Demoule (Professeur à l’Université de Paris I).
Les observations macro- et microscopiques se sont déroulées au Laboratoire de Microscopie de la Maison de l’Archéologie et de l’Ethnologie René Ginouvès à Nanterre. Je remercie les responsables, Monsieur P. Rouillard, Mesdames S. Méry, S. Thiébault et I. Sidéra, de m’en avoir facilité l’accès. Je remercie également Madame A. Van Gijn, Professeur à l’Université de Leiden, de m’avoir accueillie au sein du Laboratoire de Préhistoire pour compléter ma formation en tracéologie fonctionnelle sur les matières osseuses.
Mes remerciements vont ensuite à Odile et Alain Le Brun pour la confiance qu’ils m’ont accordée, leur accueil sur le terrain, leur aide, leurs conseils et leur soutien. Je remercie également Isabelle Sidéra d’avoir accepté d’être le tuteur de cette thèse et de m’avoir prodigué les meilleurs conseils pour sa réalisation.
Je remercie la Fondation A.G Leventis pour son soutien financier qui m’a permis de présenter mes premiers résultats de thèse lors du 4e Congrès International ICAZ Worked Bone Research Group, qui s’est déroulé à Tallinn (Estonie) en août 2003.
Je remercie Messieurs S. Hadjisavvas et P. Flourentzos, directeurs du Département des Antiquités de Chypre, de m’avoir délivré les autorisations nécessaires pour l’étude de l’outillage osseux. Je remercie également le personnel des musées de Larnaca et de Nicosie pour leur disponibilité.
Une pensée pour tous les habitants du village de Khirokitia et en particulier Eleni et Andreas pour leur accueil chaleureux.
Je tiens également à remercier les membres de l’équipe UMR 7041 « Protohistoire européenne » ainsi que ceux de l’équipe UMR 7041 « Préhistoire en Méditerranée Orientale : Chypre et Jordanie » et en particulier sa responsable Madame G. Dollfus. Merci également aux membres de la Mission Archéologique de Khirokitia.
Je remercie mes amis pour leur appui et plus particulièrement Dominique Plongeur-Plondomi pour ses dessins. Enfin, je voudrais remercie ma famille pour leur soutien. Mon père, le Docteur Jean-Jacques Legrand, m’a toujours laissé suivre mon inspiration, il m’a encouragée tout au long de ces années me donnant tous les conseils nécessaires pour ne jamais perdre de vue l’essentiel. Ma mère, Madame Catherine Legrand, et mes frères, Christophe et Rodolphe, m’ont également apporté tout leur soutien et leur tendresse. Leur présence à mes côtés a été pour moi une source de réconfort. Un grand merci à Jérôme qui a partagé au quotidien cette aventure avec moi.
Une grande partie de l’expérimentation présentée dans ce travail n’aurait pu être réalisée sans l’aide de Madame M.-C. Frère-Sautot (SAPRR) qui nous a accueillis en Bourgogne pendant quatre années avec une extrême gentillesse et un grand enthousiasme. L’Archéodrome de Beaune fut un endroit exceptionnel pour ce travail. Je remercie l’ensemble du personnel de l’Archéodrome et tous les membres du groupe de travail « Obsidienne : traces et fonctions » dirigé par L. Astruc.
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À mes grands-mères Ida Offrey et Giuseppina Legrand
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TABLE DES MATIÈRES
1.4.6. Perforation ...........................................................26 1.4.7. Évidage ................................................................26 1.4.8. Traitement thermique...........................................26 2. Analyse fonctionnelle ...............................................27 2.1. État actuel des recherches ...................................... 27 2.2. Méthode d’analyse des usures ................................ 28 2.2.1. Orientation de l’analyse dans le cadre de l'étude des industries osseuses de Chypre .................................28 2.2.2. Les moyens d’observation ..................................28 2.2.3. Les attributs d’usure.............................................29 2.2.3.1. Les altérations du volume .................................29 2.2.3.2. Les altérations de surface..................................32 2.2.4. Le développement de l’usure : une méthode........35 2.2.4.1. Les zones d'usure ..............................................35 2.2.4.2. La chaîne d'usure...............................................35 2.2.5. Méthode de description de l’usure .......................36 2.3. Le référentiel expérimental ..................................... 36
Introduction ................................................................... 5 Chapitre I - Contexte chronologique et culturel ......... 7 1. Documentation et acquis ...........................................7 1.1. Les débuts de l'occupation ........................................7 1.1.1. Une présence sans lendemain ................................7 1.1.2. Les premières communautés agro-pastorales sédentaires .......................................................................7 1.1.3. D'une influence proche-orientale encore présente .9 1.1.4. À la disparition progressive des affinités procheorientales..........................................................................9 1.2. Aspects économiques et matériels du Néolithique pré-céramique récent....................................................... 9 1.2.1. La situation géographique des villages ................10 1.2.2. Une volonté de limiter les villages.......................10 1.2.3. L’organisation du village .....................................10 1.2.4. L’économie ..........................................................10 1.2.5. La culture matérielle ...........................................11 1.3. Aspects économiques et matériels du Néolithique céramique ...................................................................... 11 1.4. Une lacune documentaire : l’industrie osseuse ...... 12 1.4.1. Acquis sur l’industrie osseuse du Néolithique précéramique ......................................................................12 1.4.2. Acquis sur l’industrie osseuse du Néolithique céramique ......................................................................13 2. Problématique et orientation de l’étude ................13 3. Khirokitia .................................................................14 3.1. Présentation du site ................................................ 14 3.1.1. Historique des fouilles .........................................14 3.1.2. Cadre géographique .............................................14 3.1.3. Stratigraphie.........................................................14 3.2. Présentation du corpus ........................................... 15 3.2.1. Conditions de récolte ...........................................15 3.2.2. Composition de l’industrie...................................15 3.2.3. Répartition stratigraphique ..................................17 3.2.4. État de fragmentation et de conservation.............18 4. Cap Andreas-Kastros ...............................................19 4.1. Présentation du site ................................................ 19 4.1.1 Historique des fouilles ..........................................19 4.1.2. Cadre géographique .............................................19 4.1.3. Stratigraphie.........................................................19 4.2. Présentation du corpus ........................................... 20 4.2.1. Conditions de récolte ...........................................20 4.2.2. Composition de l’industrie...................................20 4.2.3. Répartition stratigraphique ..................................20 4.2.4. État de fragmentation et de conservation.............20
2.3.1. Le protocole................................................................... 37
2.3.2. Le travail des matières animales ..........................37 2.3.2.1. La peau..............................................................37 2.3.2.2. L'os....................................................................40 11 2.3.3. Le travail des matières végétales..........................40 2.3.3.1. Le bois...............................................................40 2.3.3.2. L'écorce.............................................................40 2.3.3.3. Les fibres végétales...........................................41 2.3.4. Le travail des matières minérales.........................42 Chapitre III - Analyse du matériel archéologique ....43 1. Les modalités de production et d’utilisation de l’outillage de khirokitia ...............................................43 1.1. Les matières premières ........................................... 43 1.2. Typologie de l’industrie .......................................... 44 1.2.1. Outils à partie active pointue ...............................44 1.2.2. Outils à partie active tranchante...........................45 1.2.3. Objets divers ........................................................47 1.2.4. Conclusion ...........................................................48 1.3. Fabrication de l’industrie ....................................... 50 1.3.1. Outils à partie active pointue ...............................50 1.3.1.1. Pointe sur os entier............................................50 1.3.1.2. Pointe sur segment transversal de métapode avec épiphyse entière .............................................................50 1.3.1.3. Pointe sur segment longitudinal de métapode avec épiphyse partielle...................................................50 1.3.1.4. Pointe sur segment longitudinal de diaphyse sans épiphyse .........................................................................54 1.3.1.5. Aiguilles à chas .................................................56 1.3.2. Outils à partie active tranchante...........................59 1.3.2.1. Outil tranchant sur ulna et sur segment transversal d'os long.......................................................59 1.3.2.2. Outil tranchant sur segment longitudinal de métapode avec épiphyse partielle ..................................59 1.3.2.3. Outil tranchant sur segment longitudinal de diaphyse sans épiphyse ..................................................59 1.3.3. Objets divers ........................................................60 1.3.3.1. Objets sur scapula .............................................60 1.3.3.2. Objets sur segment transversal de matière ........60 1.3.3.3. Objets sur segment longitudinal de diaphyse ....60 1.3.4. Fragments proximaux d’outils .............................61 1.3.4.1. Fragment sur ulna .............................................61 1.3.4.2. Fragment sur segment transversal de métapode avec épiphyse entière .....................................................62
Chapitre II - Méthodologie ......................................... 22 1. Typologie et technologie ..........................................22 1.1. État actuel des recherches ...................................... 22 1.2. L’exploitation des matières premières.................... 23 1.3. Vers l’élaboration d’une typologie ......................... 23 1.4. Les techniques de fabrication : terminologie et méthode.......................................................................... 23 1.4.1. Fracturation longitudinale par percussion............24 1.4.2. Entaillage par percussion lancée......................... 24 1.4.3. Sciage...................................................................25 1.4.4. Abrasion...............................................................25 1.4.5. Raclage ................................................................25
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1.3.4.3. Fragment sur segment longitudinal de métapode avec épiphyse partielle...................................................62 1.3.4.4. Fragment sur segment longitudinal de diaphyse sans épiphyse .................................................................64 1.3.5. Conclusion ...........................................................65 1.4. Fonction de l’industrie ........................................... 65 1.4.1. L’échantillon........................................................65 1.4.2. Outils à partie active pointue ...............................66 1.4.2.1. Pointe sur os entier et sur segment transversal de métapode avec épiphyse entière ....................................66 1.4.2.2. Pointe sur segment longitudinal de métapode avec épiphyse partielle...................................................68 1.4.2.3. Pointe sur segment longitudinal de diaphyse sans épiphyse.........................................................................72 1.4.2.4. Aiguilles à chas.................................................76 1.4.3. Outils à partie active tranchante...........................83 1.4.3.1. Outil tranchant sur ulna.....................................83 1.4.3.2. Outil tranchant sur segment longitudinal de métapode avec épiphyse partielle ..................................84 1.4.3.3. Outil tranchant sur segment longitudinal de diaphyse sans épiphyse ..................................................85 1.4.3.4. Fragment d'outil tranchant ................................88 1.4.4. Objets divers ........................................................88 1.4.5. Conclusion ...........................................................88 1.5. Distribution spatiale du matériel osseux de Khirokitia ...................................................................... 90 1.5.1. L’échantillonnage ................................................90 1.5.2. Le niveau C..........................................................91 1.5.2.1. Les constructions ..............................................91 1.5.2.2. Les espaces extérieurs.......................................94 1.5.2.3. Les fosses..........................................................96 1.5.3. Le niveau B..........................................................96 1.5.3.1. Les constructions ..............................................96 1.5.3.2. Les espaces extérieurs.....................................103 1.5.3.3. Les fosses........................................................103 1.5.4. Le niveau III ......................................................105 1.5.4.1. Les constructions ............................................105 1.5.4.2. Les espaces extérieurs.....................................108 1.5.5. Le niveau II........................................................110 1.5.5.1. Les constructions ............................................110 1.5.5.2. Les espaces extérieurs.....................................113 1.5.5.3. Les fosses........................................................116 1.5.6. Conclusion .........................................................116 2. Les modalités de production et d’utilisation de l’outillage du Cap Andreas-Kastros..........................117 2.1. Les matières premières ......................................... 117 2.2. Typologie de l’industrie........................................ 118 2.2.1. Outils à partie active pointue .............................118
2.2.2. Outils à partie active tranchante.........................119 2.2.3. Objets divers ......................................................120 2.2.4. Conclusion .........................................................120 2.3. Fabrication de l’industrie ..................................... 121 2.3.1. Outils à partie active pointue .............................121 2.3.1.1. Pointe sur ulna et sur segment transversal de matière .........................................................................121 2.3.1.2. Pointe sur segment longitudinal de métapode avec épiphyse partielle.................................................121 2.3.1.3. Pointe sur segment longitudinal de diaphyse sans épiphyse .......................................................................121 2.3.1.4. Hameçon et aiguille à chas..............................121 2.3.2. Outils à partie active tranchante.........................121 2.3.2.1. Outil tranchant sur scapula..............................121 2.3.2.2. Outil tranchant sur segment longitudinal d'os long ..............................................................................122 2.3.3. Objets divers ......................................................122 2.3.3.1. Objet sur segment transversal de matière........122 2.3.3.2. Objet sur segment longitudinal d'os long ........122 2.3.4. Fragments proximaux d’outils ...........................122 2.3.5. Conclusion ........................................................122 2.4. Fonction de l’outillage.......................................... 123 3. Khirokitia et Cap Andreas-Kastros : caractères communs et différences .............................................123 Chapitre IV - Évolution chronologique des industries .....................................................................................126 1. Khirokitia ...............................................................126 1.1. Les matières premières ......................................... 126 1.2. Typologie et technologie ....................................... 127 1.3. Les fonctions ......................................................... 130 2. Cap Andreas-Kastros .............................................131 2.1. Les matières premières ......................................... 131 2.2. Typologie et technologie ....................................... 131 3. Conclusion ..............................................................133 Chapitre V - Chypre et le continent : tradition culturelle ou originalité ?...........................................135 Conclusion ..................................................................139 Bibliographie ..............................................................140 Liste des tableaux.......................................................159 Liste des figures..........................................................161 Liste des planches.......................................................165 Planches ......................................................................166 English Abstract.........................................................178
9HXLOOH]QRWHUTXHOH&'UpIpUHQFpGDQVOHWH[WHDpWpUHPSODFpSDUXQWpOpFKDUJHPHQWGLVSRQLEOHVXU ZZZEDUSXEOLVKLQJFRPDGGLWLRQDOGRZQORDGVKWPO
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1993 a, 1998 ; Maigrot 2003), d’Europe méditerranéenne (Camps-Fabrer 1966 ; Moundrea-Agrafioti 1981 ; Choi 1999 ; Christidou 1999) et du Proche-Orient (Stordeur 1978 a, 1988 a, 1988 b, 1995 a, 1995 b, 1996 ; Campana 1989 ; Sidéra 1998, 2005 ; Stordeur et Christidou sous presse). Cette démarche s’appuie sur une approche technologique complète, de la caractérisation des modalités de production – matières premières et techniques de fabrication – à la fonction de l’outillage. L’exploitation des matières premières ouvre le premier volet de cette étude. Il s’agira de montrer si, en fonction de leur disponibilité et de leur accessibilité, toutes les matières premières ont été ou non sélectionnées. L’exploitation des espèces animales sera également envisagée ainsi que les modalités qui ont régi le choix des parties anatomiques. Les espèces animales exploitées sont-elles représentatives du bestiaire sauvage comme du bestiaire domestique du Néolithique de Chypre ? Au contraire, une sélection a-t-elle été opérée ? Si oui, que traduit-elle du système économique des groupes humains ? Sur quels critères a-t-elle été élaborée : disponibilité, accessibilité, critères techniques ou encore culturels ? C’est à partir des supports osseux, de leur segmentation mais aussi de la conservation ou de la modification de leurs caractères morphologiques que je procéderai, ensuite, à la typologie des industries. Une réflexion autour de la représentativité des objets au sein des corpus et de leur variabilité morphologique sera conduite. Après avoir été largement plébiscitée au début des années 1970, l’approche typologique est aujourd’hui moins investie au profit de l’analyse tracéologique au sens général du terme. Dans le cadre de cette étude, nous verrons que cette approche se révèle, néanmoins, capitale pour mettre en évidence les premières spécificités culturelles des assemblages chypriotes et ainsi mesurer l’influence du contexte insulaire sur leur formation. Les techniques de fabrication seront ensuite abordées à partir des catégories et des types d’objets identifiés. Les procédés de découpe, les techniques et méthodes de débitage, les techniques de façonnage seront successivement considérés pour, à terme, caractériser les schémas opératoires mis en œuvre dans la production de l’outillage osseux. Je viserai à définir ces schémas en termes de rapidité d’exécution, de degré de technicité ou encore d’investissement technique. Relèvent-ils de techniques rapides ou de techniques lentes ? Que traduisent-ils sur le plan des savoir-faire techniques ? Sont-ils ou non similaires d’une catégorie d’objets à une autre ? L’outillage osseux est-il ou non conçu comme une même entité, indépendamment des catégories morphofonctionnelles ? Une approche fonctionnelle fondée sur une analyse macroscopique et microscopique des volumes et des surfaces sera ensuite conduite. Il s’agira tout d’abord de reconstituer les modes d’action et d’identifier les matières travaillées afin de replacer l’outillage osseux et plus spécifiquement l’outillage pointu particulièrement abondant dans les industries étudiées, dans la chaîne opératoire d’utilisation. Parallèlement, les résultats
INTRODUCTION Les récentes découvertes et les études conduites à Chypre ces dernières années ont profondément bouleversé nos connaissances sur les débuts du Néolithique pré-céramique. La Culture de Khirokitia considérée alors comme la première occupation permanente du Néolithique pré-céramique, apparaît aujourd’hui comme le résultat d’un processus de colonisation commencé, à Chypre, à la fin du IXe millénaire av. J.-C. cal. ou peut-être même avant (Guilaine et Briois 2001 ; Le Brun 2001 a). C’est donc à la phase récente du Néolithique pré-céramique (VIIe millénaire - moitié du VIe millénaire av. J.-C. cal.) que la Culture de Khirokitia fait désormais référence. Grâce à la qualité des fouilles et à la variété des études conduites sur deux sites majeurs, Khirokitia, dans la partie méridionale de l’île et Cap Andreas-Kastros, à sa pointe est, le Néolithique pré-céramique récent est, aujourd’hui, le mieux documenté. Les techniques de construction, l’architecture, la faune, la flore, les industries en pierre et les pratiques funéraires offrent une documentation importante qui a non seulement permis de préciser le mode de fonctionnement et d’organisation de ces villages mais aussi de dégager les particularités insulaires de ce Néolithique (Dikaios 1953, 1962 ; Le Brun 1981, 1984 a, 1989 c, 1994 a ; Astruc 2002). L’industrie osseuse est restée à l’écart de cette dynamique de recherche. Seules quelques études surtout typologiques et descriptives (Dikaios 1953, 1961, 1962 ; Todd 1978, 1979 a, 1979 b ; Chavane 1980 ; Le Brun 1981 ; Peltenburg 1982) et plus rarement, technologiques (Stordeur 1984, 1985), nous permettent d’avoir une image partielle des assemblages osseux du Néolithique à Chypre. Considérant que l’étude de l’industrie osseuse est déterminante pour la reconstitution et la compréhension de l’économie, des techniques et des choix culturels des sociétés préhistoriques, le réexamen de ces productions selon une approche thématique et synthétique est donc pleinement justifié. Les industries de Khirokitia et du Cap Andreas-Kastros ont été sélectionnées dans cette perspective. Leur richesse, près de 2 451 objets et leur bonne conservation en font des corpus tout à fait exceptionnels, qui offrent également la possibilité d’étudier deux milieux différents : Khirokitia est situé à l’intérieur des terres et Cap Andreas-Kastros, sur la côte (Le Brun 1993, 1996 b ; Le Brun et Daune-Le Brun 2003). La question légitime de l’incidence du milieu sur les industries en matières osseuses pourra ainsi être évaluée. Incidence qui peut intervenir à plusieurs niveaux : typologique, technique et fonctionnel. La composition des assemblages, les schémas opératoires mis en œuvre et la fonction des outils sont-ils similaires ou différents ? Répondent-ils à des besoins spécifiques liés à l’économie ou à l’environnement des villages ? Ma démarche s’inscrit plus largement dans la continuité des travaux entrepris sur les outillages en matières osseuses du Néolithique d’Europe continentale (Billamboz 1977 ; Sénépart 1983, 1992 ; Sidéra 1989,
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manifeste, sur l’outillage osseux, le développement ou l’introduction sur l’île d’une nouvelle culture, de nouvelles techniques, de nouveaux besoins, etc. ? Voit-on apparaître de nouveaux comportements techniques et/ou un outillage différent ?
fonctionnels obtenus seront confrontés aux données morphométriques des outils afin de mettre en évidence une éventuelle concordance entre la morphologie de l’outil et son utilisation. Le rôle de l’outillage osseux dans le système économique des communautés étudiées et son éventuelle complémentarité fonctionnelle avec les autres productions humaines et notamment l’outillage lithique, sera également abordé. Enfin, une analyse spatiale de l’industrie osseuse de Khirokitia concluera l’étude du matériel archéologique. Contrairement à l’industrie osseuse du Cap AndreasKastros, celle de Khirokitia n’a encore jamais fait l’objet d’une analyse spatiale. Pourtant, par sa taille et ses occupations successives bien distinctes, le village de Khirokitia se prête tout à fait à ce type d’analyse. Il conviendra de matérialiser la place de l’outillage osseux dans le village et de mettre en évidence d’éventuelles aires d’activités liées à la production ou à l’utilisation de l’outillage pour à terme tenter d’appréhender l’organisation sociale de cette communauté.
Enfin, je tenterai, à partir des données bibliographiques disponibles, de replacer les industries insulaires dans le contexte plus général du PPNB (Pre-Pottery Neolithic B) proche-oriental. Mesurer le poids des traditions continentales au sein des assemblages chypriotes et dégager des particularités insulaires seront les principaux objectifs de cette partie qui constitue une première étape vers une analyse comparative plus exhaustive. Considérant que les communautés insulaires se sont développées dans un certain isolement sans relation continue avec le continent (Le Brun 1986, 1989 b), plusieurs scénarios peuvent être envisagés. Il semble, en effet, peu probable que les industries osseuses insulaires soient l’exact reflet de celles du continent tant au niveau de la morphologie de l’outillage que des techniques ou même des fonctions. En revanche, on ne peut exclure la persistance de quelques ressemblances dont il conviendra de mesurer l’intensité. Les populations de Chypre peuvent, en effet, avoir conservé un passé technique commun auquel sont venus se greffer de nouveaux comportements techniques. Une adaptation des savoirfaire continentaux au milieu, aux besoins ou encore au système économique et social dans lequel ces communautés ont évolué, n’est pas non plus à écarter.
Une fois les industries osseuses de Khirokitia et du Cap Andreas-Kastros caractérisées sur le plan morphologique, technique et fonctionnel, il s’agira d’en apprécier l’évolution chronologique au cours du Néolithique précéramique récent et entre ce Néolithique et le Néolithique céramique. Cette question est d’autant plus pertinente à considérer que ces occupations sont séparées par un hiatus d’environ 1 000 ans pendant lequel l’île semble être inoccupée. En outre, la prise en compte, dans ce travail, des objets de Khirokitia attribués à l’occupation du Néolithique céramique permettra de franchir un premier pas vers une analyse plus détaillée de l’industrie osseuse du Néolithique céramique de Chypre qui n’a suscité jusqu’alors que très peu d’intérêts (Dikaios 1961 ; Chavane 1980 ; Peltenburg 1982). Comment se
C’est donc à la fois à la caractérisation de l’outil dans un système technique donné et à celle des sociétés néolithiques de Chypre, que ce travail, fondé sur une investigation multiple des assemblages osseux, se destine.
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théories se sont opposées. La première considérait que l’origine était locale sans que l’on en ait retrouvé les premiers signes (Watkins 1973, p. 47). La seconde privilégiait une colonisation à partir du continent (Stanley-Price 1977, p. 67), dans la continuité de l’exode vers les régions du littoral levantin qui s’est effectué à partir de 7500 av. J.-C., c’est-à-dire au PPNB Récent (Cauvin 1997, p. 220). Les récentes découvertes et le réexamen de certains sites ont profondément bouleversé nos connaissances sur les débuts du Néolithique précéramique à Chypre (Guilaine et Briois 2001 ; Guilaine et Le Brun 2003 b ; Peltenburg 2004 a). L’examen stratigraphique du site de Parekklisha-Shillourokambos, dans la région d’Amathonte au sud de l’île, révèle une occupation continue depuis la fin du IXe millénaire av. J.-C. cal. au VIIIe-VIIe millénaire av. J.-C. cal., précédant ainsi celle de Khirokitia (Guilaine et al. 1992, 1995, 1996, 2000 ; Guilaine 2003) (tabl. 1). La Culture de Khirokitia illustre donc désormais la phase récente du Néolithique pré-céramique et apparaît comme le résultat d’un développement interne à partir d’acquis procheorientaux (Le Brun 2001 a ; Guilaine et Briois 2001 ; Guilaine 2003). Par ailleurs, le réexamen stratigraphique de Kalavasos-Tenta 51 non loin de Khirokitia, et la fouille des sites de Kissonerga-Mylouthkia 1 à l’est de l’île et d’Akanthou-Arkosyko, sur la côte nord, apportent également des indices en faveur d’une occupation néolithique plus ancienne que celle supposée initialement (Peltenburg et al. 2000, 2001 a ; Todd 2001, 2003; ùevketo÷lu 2002 ; Peltenburg 2003 a). Au regard de ces nouvelles données, le débat suscité par le peuplement de Khirokitia se pose désormais en termes nouveaux. Le hiatus qui existe entre la présence humaine d’AkrotiriAetokremnos et les premiers établissements sédentaires pose cette fois le problème de l’origine du peuplement des sites du Néolithique pré-céramique ancien. Les occupations des sites de Parekklisha-Shillourokambos, de Kissonerga-Mylouthkia 1 et de Kalavasos-Tenta 5 correspondent-elle au début de la colonisation de l’île ou plutôt à une série d’allers-retours entre Chypre et le continent pour préparer et assurer une installation définitive (Peltenburg et al. 2000 ; Vigne et al. 2000) ? L’étude archéozoologique conduite à ParekklishaShillourokambos favoriserait la seconde hypothèse (Vigne et al. 2003).
CHAPITRE I - CONTEXTE CHRONOLOGIQUE ET CULTUREL 1. DOCUMENTATION ET ACQUIS Avec une superficie de 9 251 km², Chypre est la troisième île de Méditerranée (Knapp et al. 1994, p. 390). Séparée du continent depuis le Miocène, elle est aujourd’hui située à environ 60 km de la côte turque et à 100 km de la côte levantine (Le Brun et al. 1987, p. 283). Sa topographie se partage entre un paysage montagneux avec au centre ouest, le Mont Troodos culminant à 1 953 m et au nord-est, la chaîne de Kyrénia, et un paysage de plaines et de vallées (Adovasio et al. 1975, p. 339). À l’époque où la première présence humaine sur l’île est attestée, le rivage était plus avancé sur la mer qu’il ne l’est aujourd’hui. Une première montée du niveau de la mer intervient entre 15 000 et 14 000 BP, puis une seconde vers 9 000 BP (fig. 1). Autour de 5 000 BP, l’île atteint quasiment sa configuration actuelle (Gomez et Pease 1992). La localisation de certains sites par rapport à la côte pourrait donc être faussée. Le site de Petra tou Limniti, au nord de l’île, était vers 9 000 BP rattaché à la terre, aujourd’hui, en raison de la progression du niveau de la mer d’environ 1 km, c’est un îlot. On peut donc supposer que certains sites côtiers et notamment ceux situés sur la côte sud ont été totalement ou partiellement détruits par l’érosion marine, c’est le cas du site d’Akrotiri-Aetokremnos, voire submergés puisque le niveau de la mer a progressé par endroits d’environ 1,5 km à 2,5 km (Gomez et Pease 1992, p. 4). 1.1. Les débuts de l’occupation 1.1.1. Une présence sans lendemain La plus ancienne présence humaine sur l’île connue aujourd’hui remonte au début du Xe millénaire av. J.-C. cal. sur le site côtier d’Akrotiri-Aetokremnos, dans la péninsule d’Akrotiri au sud de l’île (Simmons 1995 b, 1996, 2001) (cf. fig. 1). Dans l’état actuel de nos connaissances, cette occupation semble avoir été ponctuelle et sans lendemain. Des outils en pierre taillée y ont été découverts mais leur contemporanéité avec les dépôts contenant des restes d’hippopotames nains (Phanourios minutus) est contestée (Bunimovitz et Barkai 1996).
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La stratigraphie du site de Kalavasos-Tenta n’est pas, dans l’état actuel de nos connaissances, totalement précisée (Todd 2001, 2003). La zone « top of site » qui inclut la période 5 et la période 2 est totalement déconnectée de celle du « lower south slope » ce qui limite considérablement toute interprétation chronologique et stratigraphique. Néanmoins, grâce en partie à l’étude de l’industrie lithique, la période 5 serait contemporaine de la de la période 1A de Mylouthkia et de la phase ancienne de Parekklisha-Shillourokambos (McCartney 2003, p. 141). Les périodes 2, 3 et 4 correspondraient aux phases moyenne et récente de Parekklisha-Shillourokambos et à la période 1B de Mylouthkia. Enfin, seule la période 1 serait contemporaine de Khirokitia.
1.1.2. Les premières communautés agro-pastorales sédentaires Situé dans la partie méridionale de Chypre, le site de Khirokitia – VIIe millénaire - milieu du VIe millénaire av. J.-C. cal. – fut longtemps considéré comme le premier village agro-pastoral de l’île (cf. fig. 1). L’origine de son peuplement et plus largement celle du Néolithique précéramique, a suscité de nombreuses interrogations. Deux 7
Fig. 1 : Carte du Néolithique de Chypre (d'après Gomez et Pease 1992). Première présence humaine : I - Akrotiri-Aetokremnos (site E) ; Néolithique pré-céramique : 1 - Khirokitia ; 2 - Kalavasos Tenta ; 3 - Mari-Mesovouni ; 4 - Parekklisha-Shillourokambos ; 5 - Kholetria-Ortos ; 6 - Kritou Marottou-Ais Yiorkis 7 - Kissonerga-Mylouthkia 1 ; 8 - Petra tou Limniti ; 9 - Kataliondas-Kourvellos ; 10 - Dhali-Agridhi ; 11 - Klepini-Troulli 12 - Cap Andreas-Kastros ; 13 - Cap Greco ; 14 – Akanthou-Arkosyko ; 15 - Palaeokamina ; 16 - Kelaidhoni 17 - Asprokremnos ; 18 - Kissonerga-Mosphilia. Néolithique céramique : a - Sotira-Teppes ; b - Ayios Epiktitos-Vrysi c - Philia-Drakos A ; d - Paralimni-Nissia ; e - Kantou-Kouphovounos. Sites Parekklisha-Shillourokambos Briois et al. 1997, p. 96-97
Phase/Période/Niveau Phase ancienne A Phase ancienne B
Kissonerga-Mylouthkia Peltenburg et al. 2001, p. 63
Kalavasos-Tenta Todd 1987, p. 117
Khirokitia (fouilles récentes) Le Brun 1994 a, p. 27-29, 1987, 1988 Le Brun et Evin 1991
Cap Andreas-Kastros Le Brun 1981, p. 71 Dhali-Agridhi Lehavy 1974, p. 98 Kholetria-Ortos Simmons 1994 b, p. 42, 1996 b, p. 40
Phase moyenne B Phase récente Période 1A – well 116-124 Période 1A – well 116-124 Période 1B – well 133-264 Période 1B – well 133-264 Période 5 Période 4 Période 4 Période 4/3 Période 4/3 Période 3 Période 3 Période 2 Période 2 Niveau F Niveau F Niveau C Niveau III Niveau III Niveau VI Niveau V Pré-céramique
BP 9 310 r 80 9 205 r 75 9 110 r 90 8 930 r 75 8 655 r 65 8 760 r 80 8 125 r 70 9 315 r 60 9 110 r 70 8 185 r 55 8 025 r 65 9 240 r 130 7 430 r 90 7 120 r 90 7 380 r 100 6 300 r 80 7 250 r 100 7 110 r 90 8 480 r 110 8 020 r 90 7 470 r 140 7 930 r 130 7 000 r 150 7 100 r 150 6 930 r 90 7 775 r 125 7 450 r 120 7 990 r 80 7 400 r 60 7 550 r 70 7 500 r 60 7 360 r 60 7 280 r 60
Tabl. 1 : Datations des sites du Néolithique pré-céramique.
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BC 8 521 - 8 113 8 114 - 8 049 8 347 - 7 973 8 083 - 7 729 7 884 - 7 543 7 940 - 7 593 7 300 - 6 791 8 430 - 8 200 8 330 - 8 030 7 260 - 7 040 7 040 - 6 760 8 600 - 8 000 6 420 - 6 040 6 160 - 5 740 6 390 - 6 000 5 430 - 5 050 6 250 - 5 860 6 160 - 5 730 7 900 - 7 100 7 250 - 6 600 6 550 - 5 950 7 250 - 6 450 6 200 - 5 550 6 200 - 5 600 5 945 - 5 615 7 050 - 6 350 6 460 - 6 020 7 200 - 6 600 6 380 - 6 050 6 500 - 6 230 6 450 - 6 230 6 390 - 6 070 6 240 - 6 010
similitudes avec les techniques de fabrication de la vallée de l’Euphrate (Stordeur 2003, p. 362). L’existence de contacts entre Chypre et le continent est également pressentie sur les sites de KissonergaMylouthkia 1 et d’Akanthou-Arkosyko en raison de la nature des vestiges recueillis (Peltenburg et al. 2000, 2001 a ; ùevketo÷lu 2002 ; McCartney 2003 ; Peltenburg 2003 a, 2003 b). L’obsidienne de Cappadoce est utilisée dans la fabrication de l’outillage et certaines céréales comme le blé et l’orge sont présentes sous leur forme domestique. Enfin, les récentes études conduites sur l’industrie lithique de Kalavasos-Tenta 5 montreraient une certaine influence levantine et anatolienne (McCartney 2003).
Les stratégies d’abattage des porcs semblent révéler la présence de deux populations. La première représente des animaux âgés de 1 et 2 ans et abattus sur place. Elle constituerait la population domestiquée. La seconde désigne des porcs âgés de 2 à 5 ans abattus à l’extérieur du village. Sachant que le porc n’est pas une espèce insulaire, l’introduction d’une population avant la première occupation du site, de laquelle dériverait la seconde population sauvage et marronne, est envisageable. Si le statut domestique des moutons est désormais bien attesté, même si la chasse d’individus issus d’une population marronne ne peut être exclue, celui des chèvres se réfère à un tout autre système d’exploitation. L’abattage non sélectif des chèvres selon leur âge et leur sexe suggère davantage la chasse d’animaux sauvages et marrons. 1.1.3. D’une présente…
influence
proche-orientale
1.1.4. …À la disparition progressive des affinités proche-orientales
encore Après une phase de « consolidation » définie par E. Peltenburg (2004 b, p. 72), l’île basculerait dans une phase « d’expansion » durant laquelle les éléments de tradition proche-orientale disparaissent progressivement dès la phase moyenne de Parekklisha-Shillourokambos. On assiste alors au développement de caractères culturels insulaires qui trouveront leur apogée avec la Culture de Khirokitia. Ainsi, le bœuf disparaît au cours de la phase moyenne de Parekklisha-Shillourokambos pour ne réapparaître qu’au IIIe millénaire av. J.-C. (Guilaine et al. 1998, p. 610 ; Vigne et al. 1999, p. 52). Il est néanmoins présent en très faible quantité (1,2 % des os identifiés) parmi la faune du site de Kritou Marottou-Ais Yiorkis (Néolithique pré-céramique récent) (Croft 1998 a, p. 5). Ajoutons également qu’un fragment de métapode a été découvert dans la couche 2 de Khirokitia attribuée au Néolithique céramique (Davis 2003, p. 263). Quant aux matières premières destinées à la production lithique, les importations d’obsidienne diminuent (Guilaine et al. 2000, p. 593). Les lames de petites dimensions provenant de nucléi soigneusement préparés, caractéristiques des phases anciennes de ParekklishaShillourokambos, deviennent plus robustes et irrégulières attestant une simplification des concepts technologiques (Guilaine et al. 1997, 1998 ; Guilaine et Briois 2001).
Les occupations de Parekklisha-Shillourokambos correspondent à la période qui s’étend au Levant du PPNB ancien au PPNB récent (8 200-7 000 BC cal). Les relations entre Chypre et le continent sont encore bien établies du moins pour les phases anciennes A et B de Parekklisha-Shillourokambos. Plusieurs indices liés aux ressources de subsistance, à l’approvisionnement en matières premières et aux concepts technologiques des industries lithiques et osseuses se réfèrent, en effet, au Proche-Orient. Des espèces animales non insulaires comme le bœuf et le daim, ont été introduites sur l’île et constituent, au côté de populations marronnes de porcs, de moutons et de chèvres, l’essentiel de la faune retrouvée à Parekklisha-Shillourokambos. Le daim (Dama mesopotamica) semble être la seule espèce sauvage chassée (Ducos 1965 ; Davis 1984 ; Vigne et al. 1999, 2000, 2003). Néanmoins, leur transport suppose un apprivoisement partiel d’autant que contrairement aux autres cervidés, ils sont « easy to keep enclosed in parks » (Davis 2003, p. 260). Parmi les céréales identifiées à ParekklishaShillourokambos, l’orge sauvage (Hordeum spontaneum), présent dans la phase ancienne A, est soit d’origine insulaire, car l’orge pousse aujourd’hui au pied du massif du Troodos, soit d’origine exogène, l’orge aurait alors été importée du continent sous sa forme sauvage (Guilaine et al. 2000 ; Willcox 2000, 2003). L’engrain à deux grains (T. boeoticum thaoudar) serait également présent sous sa forme sauvage. L’obsidienne de Cappadoce est utilisée en quantité relative au côté des matières premières locales comme le chert dont l’exploitation est prépondérante pour la production lithique (Guilaine et al. 1993, p. 717, 1995, p. 741, 1997, p. 830 ; Briois et al. 1997, p. 104). Les armatures de flèches aux retouches parallèles et régulières obtenues par pression rappellent celles du PPNB Levantin (Guilaine et al. 1997, p. 825). Enfin, l’étude préliminaire de l’outillage osseux de ParekklishaShillourokambos a également montré quelques
1.2. Aspects économiques et matériels du Néolithique pré-céramique récent La phase récente du Néolithique pré-céramique de Chypre est la mieux documentée. Une trentaine de sites a été reconnue sur l’île (Cherry 1990, p. 154). Certains ont fait l’objet de relevés de surface ou de fouilles restreintes, d’autres, en revanche, ont été fouillés de façon plus extensive. Ce sont sur ces derniers et plus particulièrement sur les sites de Khirokitia et du Cap Andreas-Kastros que j’insisterai dans cette partie. Leurs caractéristiques géographiques et architecturales, leur économie, puis leur culture matérielle seront envisagées. L’industrie osseuse sera analysée séparément afin de mieux dégager les acquis et les lacunes qu’il convient de combler.
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occupées, les défunts restent ainsi présents au sein de la communauté des vivants (Le Brun 1989 c). Le tissu villageois du Cap Andreas-Kastros est, au contraire, plus aéré. Plusieurs annexes sont regroupées autour d’un élément central de plan circulaire. L’ensemble s’ouvre sur un espace aménagé au sein duquel se trouvent des installations à usage domestique. Les structures d’habitation sont plus éloignées les unes des autres et dépourvues, à l’exception de bassins et de foyers, d’aménagement intérieur (Le Brun 1985 b ; Le Brun et al. 1987 ; Le Brun et Daune-Le Brun 2003). La seule sépulture dont la position stratigraphique est établie, se trouve à l’extérieur d’une habitation. Cet unique exemple ne permet, cependant, pas de considérer cette pratique comme une règle adoptée par les habitants de ce village.
1.2.1. La situation géographique des villages L’île de Chypre offre un paysage contrasté propice à l’installation villageoise, un avantage dont les communautés néolithiques ont su tirer profit. L’implantation géographique de certains villages semble répondre à une volonté de la part des habitants de dominer l’espace qui les entoure (Nicolaou 1967, p. 40 ; Adovasio et al. 1975 ; Todd 1989, p. 6 ; ùevketo÷lu 2000, p. 98). Certains sites installés à l’intérieur des terres comme Khirokitia-Vouni2 et Kholetria-Ortos sont, en effet, implantés au sommet d’une colline, dominant respectivement la vallée du Maroni (Le Brun 1984 a, p. 7) et celle du Xéropotamos (Fox 1987, p. 22, 1988, p. 29 ; Simmons 1994 b, p. 3). Les sites côtiers du Cap Andreas-Kastros, Troulli et Petra tou Limniti surplombent la mer (Dikaios 1962 ; Gjerstad et al. 1962 ; Le Brun 1981).
1.2.4. L’économie Moutons, chèvres, porcs et daims constituent l’essentiel du spectre faunique des sites du Néolithique pré-céramique récent (Schwartz 1974 ; Helmer 1981 ; Davis 1984, 1989, 1994 ; Simmons 1994 b ; Croft 2003 a). Au Cap Andreas-Kastros et à Khirokitia, ils représentent 95 % de l’assemblage faunique, les 5 % restant sont constitués, entre autres, par des renards, des chats et des rongeurs. Si l’élevage occupe une place importante dans l’économie des villages implantés à l’intérieur des terres, comme Khirokitia, la pêche y joue, en revanche, un rôle minime. Seuls quelques os et fragments osseux de serranidés et de sparidés y ont été découverts (Desse 1984 ; Desse et Desse-Berset 1989). En revanche, c’est une activité plus largement pratiquée sur les sites côtiers et notamment au Cap AndreasKastros où la taille importante de la majorité des espèces identifiées – mérous (Epinephelus sp.), thonines (Euthynnus alleteratus), daurades (Sparus aurata) et sargues (Diplodus) – qui correspond à des spécimens âgés, reflète une exploitation optimale du milieu préservé de toute activité humaine (Garnier 1981 ; Desse et DesseBerset 1993, 1994, 2003 ; Le Brun 1996 b). Enfin, la chasse des oiseaux ne semble pas représenter une activité importante puisque seule une espèce – le pigeon ramier (Columba palumbus) – est directement liée à l’occupation humaine de Khirokitia (Pichon 1984, p. 164).
1.2.2. Une volonté de limiter les villages S’ajoute au caractère stratégique de ces emplacements, une volonté de limiter les villages. Lorsqu’ils ne sont pas naturellement protégés par une falaise, comme au Cap Andreas-Kastros, les villages sont limités par des murs comme à Khirokitia-Vouni (Le Brun 2000, p. 203). Si ces constructions d’intérêt collectif laissent supposer la cohésion du groupe, elles montrent également, sinon un certain isolement, au moins une volonté de marquer un territoire qui pourrait se définir comme l’espace de vie de la communauté (Ibid., p. 203). 1.2.3. L’organisation du village Le plan circulaire des structures d’habitation est une des spécificités des sites chypriotes. En effet, sur les sites contemporains du Proche-Orient, le plan quadrangulaire est déjà adopté (Le Brun 1989 a, p. 162). Les études relatives à l’architecture et aux techniques de construction conduites à Khirokitia, ont permis de définir la maison comme le regroupement de plusieurs structures d’habitation disposées autour d’une cour non couverte où se trouve généralement une installation de meunerie (Le Brun 1985 a, p. 76-77, 1985 b, p. 37). La juxtaposition des structures d’habitation et d’étroits passages servant de zone de rejets ou de voies de circulation, donne l’impression d’un tissu villageois confiné. L’aménagement intérieur complexe de certaines habitations constitué par des plates-formes et des murets, renforce cette impression (Le Brun 1985 b ; Le Brun et al. 1987 ; Le Brun et Daune-Le Brun 2003). Les pratiques funéraires mises en évidence à Khirokitia témoignent encore de cette volonté de vivre dans un monde fermé. Inhumés sous le sol des maisons encore
L’engrain (triticum monococcum) et le blé (triticum dicoccum) sont les deux espèces de céréales les mieux représentées dans des proportions à peu près équivalentes sur les sites de Khirokitia, Cap Andreas-Kastros et Kholetria-Ortos (Van Zeist 1981 ; Hansen 2001). En revanche, l’orge sauvage (Hordeum spontaneum) est absente ou difficilement identifiable faute d’une bonne conservation (Hansen 1978, p. 184, 1979, p. 297, 1991, p. 231, 2001, p. 121-123). Exception faite des lentilles (Lens culinaris), les légumineuses sont peu fréquentes. Tandis que les figues et les pistaches (Pistacia sp.) sont attestées dans les trois échantillons, les olives (Olea sp.) ne sont présentes que sur les sites de Khirokitia et du Cap
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Le site de Khirokitia est constitué de deux chantiers. Le premier, Khirokitia-Vouni (Kh), est situé au sommet de la colline et le second, Khirokitia-Potamos (KhP), désigne celui situé au pied de la colline, près de la rivière Maroni.
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l’industrie est constituée essentiellement de lames (Watkins 1979 ; Simmons et Corona 1993 ; Simmons 1994 b, 1995 a). Des éclats, des lames, quelques pointes Levallois et de rares outils perforants – becs, perçoirs et pointes à retouches marginales – composent l’outillage de Khirokitia (Cauvin 1984 ; Astruc 2002). Le caractère fruste a souvent été mis en avant pour définir cette industrie mais les récentes études montrent, au contraire, son originalité qui relève « d’une bonne adaptation aux ressources en matières premières locales pour une production laminaire ou d’éclats allongés à moindre coût » (Astruc 2002, p. 178). L’analyse tracéologique entreprise parallèlement démontre que trois catégories de matières ont principalement été travaillées : les matières végétales, animales et minérales. Le travail des matières osseuses qui nous intéresse ici tout particulièrement, est peu représenté (Ibid., p. 101). Des éclats laminaires, des éclats courts plus ou moins réguliers et des outils cassés dont les angles ont servi comme dièdre ou trièdre, ont été utilisés selon un mode d’action longitudinal dans des opérations de rainurage et de sciage. Les outils utilisés selon un mode d’action transversal lors d’opérations de raclage, présentent des parties actives de morphologies différentes. Certaines pièces esquillées ont pu également servir au débitage des os de faible diamètre par percussion lancée ou posée. La disproportion entre le nombre d’outils lithiques destinés au travail des matières osseuses (20 exemplaires) et le nombre d’objets en matières osseuses (2317 objets) est importante. L’introduction de produits finis à l’intérieur des espaces étudiés, le nettoyage des sols, le rejet des pièces lithiques, l’utilisation d’autres matériaux que le chert, sont autant de possibilités pour expliquer ce déséquilibre (Ibid., p. 180-181).
Andreas-Kastros (Van Zeist 1981, p. 98 ; Hansen in Le Brun et al. 1987, p. 311 ; Hansen 2001, p. 123). Enfin, signalons la présence sur le site du Cap Andreas-Kastros, de quelques graines de lin attribuées à Linum bienne/usitatissimum. Son origine domestique ou sauvage n’a pu être précisée (Van Zeist 1981, p. 98). Les résultats de l’étude palynologique conduite dans les niveaux récents de Khirokitia démontrent la présence de graminées et de céréales et celle, en faible quantité, de plantes aquatiques (Potamogeton, Sparganium, Typha et Cypéracées), de quelques pins et arbres ligneux (Renault-Miskovsky in Le Brun et al. 1987 ; RenaultMiskovsky 1989). L’étude des restes anthracologiques entreprise sur ce même site, montre que le couvert végétal se caractérise, au début de l’occupation du village, par une forte représentativité des chênes à feuille caduc et des pistachiers (Thiébault 2003). Un changement brutal est ensuite perceptible au cours de l’occupation. La présence du chêne à feuille caduc, du frêne, du peuplier/saule et du platane reste régulière mais le pistachier et l’olivier diminuent, le pin augmente et le genévrier apparaît. Ces changements pourraient résulter soit de l’aridification du climat, soit du développement de l’agriculture et de l’élevage (Ibid., p. 228). 1.2.5. La culture matérielle Sur le continent, la céramique est présente dès la fin du PPNB. À Chypre, elle est inexistante. Quelques tentatives restées sans lendemain ont toutefois été relevées à Khirokitia (Dikaios 1953, p. 43-44 ; Le Brun 1994 b, p. 664). En revanche, la vaisselle en pierre est un des éléments de la culture matérielle le plus caractéristique. On la retrouve sur les sites du Cap Andreas-Kastros, de Khirokitia et de Kholetria-Ortos (Le Brun 1981 ; Mouton 1984 ; Saliou 1989 ; Simmons 1994 b). Les formes sont variées. On distingue une vaisselle grossière fabriquée à partir de calcaire et composée de bassins et de plats, et une vaisselle fine en andésite, diorite et diabase, constituée de coupes, coupelles, plats, récipients à bec verseur ou à tenons, décorés de motifs incisés ou en relief. La maîtrise des techniques de transformation des matières premières, les décors incisés ou en relief mais aussi l’aménagement des becs verseurs et des anses, expriment un réel savoir-faire (Le Brun et al. 1987, p. 299).
Enfin, divers éléments de parure, des perles, des pendentifs, des anneaux – simples, ouverts ou pointés – fabriqués en picrolite, en jaspe vert, en calcite, en coquillages et plus rarement en os, ont été découverts à Khirokitia et au Cap Andreas-Kastros (Le Brun 1981 ; Astruc 1994 a). 1.3. Aspects économiques et matériels du Néolithique céramique Sans qu’aucune explication satisfaisante ne puisse aujourd’hui être apportée, les sites du Néolithique précéramique récent sont soudainement abandonnés au milieu du VIe millénaire av. J.-C. Dans l’état actuel de nos connaissances, l’île semble être inoccupée pendant environ 1 000 ans. Puis au cours du Ve millénaire av. J.-C., Chypre est réoccupée par une population maîtrisant la céramique. Cette réoccupation résulte soit d’une seconde colonisation au départ du continent, soit d’une évolution locale dont nous n’avons pour l’instant aucun témoignage (Watkins 1973 ; Todd 1985 ; Knapp et al. 1994). Tandis que certains sites occupés au Néolithique pré-céramique comme ParekklishaShillourokambos, Kalavasos-Tenta et Khirokitia sont
Un important matériel de mouture, de broyage et de concassage caractérise également ces assemblages. Un outillage en pierre non taillée réalisé à partir de diabase ou d’andésite et composé de ciseaux, de haches à tranchant droit ou convexe et de haches miniatures, a également été retrouvé notamment à Khirokitia (Cluzan 1984 ; Astruc 1994 a, 1994 b). L’industrie lithique du Cap Andreas-Kastros se compose d’éclats, de nucléus, de lames, d’éléments de faucille, de percuteurs, de pièces à dos et de pics (Le Brun 1981). Sur les sites de Kholetria-Ortos et de Kataliondas-Kourvellos,
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réoccupés au Néolithique céramique, de nouveaux villages sont bâtis, parmi lesquels Sotira et KantouKouphovounos au sud de l’île, Ayios Epiktitos-Vrysi et Philia-Drakos A au nord et Paralimni-Nissia sur la côte est (Dikaios 1961 ; Watkins 1971 ; Peltenburg 1972, 1975, 1978, 2003 c ; Stanley Price 1979 b ; Karageorghis 1990 ; Flourentzos 2003 ; Mantzourani 2003) (cf. fig. 1). L’établissement de ces nouveaux villages répond aux mêmes règles – emplacement géographique, structure interne – que celles mises en place au Néolithique pré-céramique récent (Stanley Price 1979 b ; ùevketo÷lu 2000 : 102). Ainsi, sur les sites de Philia-Drakos A, Ayios Epiktitos-Vrysi, Troulli II et Paralimni-Nissia, des constructions d’intérêt collectif comme des murs doublés parfois de fossés, sont attestées (Watkins 1971 ; Peltenburg 1979, 1982 ; Karageorghis 1990 ; Le Brun 2000 ; Flourentzos 2003). Les aménagements architecturaux sont toutefois plus complexes. Sur le site de Philia-Drakos A, par exemple, des réseaux d’accès à des puits, des tunnels et des chambres, sont construits en sous-sol tandis qu’à la surface les structures d’habitations sont de plan subrectangulaire et non plus circulaire.
1.4. Une lacune documentaire : l’industrie osseuse
L’économie est proche de celle qui caractérise le Néolithique pré-céramique récent. Les moutons, les chèvres, les porcs et les daims composent le spectre faunique des sites du Néolithique céramique. Sur le site de Ayios Epiktitos-Vrysi, les caprinés représentent environ la moitié de l’assemblage, suivis des daims et des porcs (Peltenburg 1978, p. 64 ; Legge 1982, p. 79). L’économie de Sotira reposerait, au contraire, sur une large proportion de daims (Ducos 1965 ; Peltenburg 1978). Les ressources marines sont également exploitées comme à Ayios Epiktitos-Vrysi (Peltenburg 1982). Ces communautés se sont installées à proximité de terres arables ce qui a vraisemblablement favorisé la diversité des ressources agricoles exploitées (ùevketo÷lu 2000, p. 103). Aux céréales identifiées sur les sites du Néolithique pré-céramique, viennent s’ajouter le blé tendre (Tr. Aestivum), le seigle (Secale cereale), l’avoine (Avena sp.), les pois chiche (Cicer arietinum), la vigne (Vitis sylvestris), les pommiers (Mallus sp.) et les micocouliers (Celtis australis) (Peltenburg 1982 ; Hansen in Le Brun et al. 1987 ; Le Brun 1996 b).
1.4.1. Acquis sur l’industrie osseuse du Néolithique précéramique
La culture matérielle des sites du Néolithique précéramique récent est, comme nous venons de le voir, relativement bien documentée, notamment celle de Khirokitia. Néanmoins, il manque à ces informations, des données sur l’industrie osseuse qui, tout autant que l’industrie lithique ou la céramique, participe à la compréhension générale du système technique de ces populations. Les quelques données disponibles pour le Néolithique pré-céramique sont inégales en raison de la variabilité numérique des assemblages, d’un état de conservation parfois médiocre mais aussi en raison de l’orientation donnée aux études conduites, bien souvent descriptives et survolant les aspects techniques et fonctionnels. Les données concernant le Néolithique céramique sont encore plus restreintes. Elles reposent sur quelques descriptions. Seuls les sites de Sotira et d’Ayios Epiktitos-Vrysi semblent avoir livré une industrie osseuse assez bien fournie mais malheureusement très peu exploitée (Dikaios 1961, p. 202 ; Peltenburg 1982, p. 34).
Les données concernant l’industrie osseuse des sites du Néolithique pré-céramique ancien sont inégales. L’industrie osseuse du site de ParekklishaShillourokambos qui a fait l’objet d’une étude technologique, montre quelques similitudes avec les industries de la vallée de l’Euphrate (Stordeur 2003, p. 362). Plus précisément, la technique si particulière de perforation des aiguilles de Mureybet a été observée sur un outil composite fabriqué sur un andouiller. Cette technique consiste, après un rainurage longitudinal, à percuter le fond de la rainure pour éliminer la fine membrane de corticale encore présente. L’industrie de Mylouthkia 1 se compose essentiellement d’outils pointus, de même que celle d’Akanthou-Arkosyko qui comprend également des hameçons, une aiguille à chas et une spatule (ùevketo÷lu 2002, p. 104 ; Croft 2003 b, p. 41). Enfin, l’industrie osseuse de Kalavasos-Tenta dont la chronologie ne peut être précisée au vue des problèmes stratigraphiques (cf. note 1, p. 7), se compose de 171 pièces dont une majorité d’outils pointus de formes et de tailles variées, fabriqués sur des métapodes (Todd 1978, p. 179, 1979 a, p. 277-279, 1979 b, p. 21-22, 2005, p. 264-269). Une dent polie et un fragment de perle en os ont, en outre, été signalés dans cette industrie.
Enfin, on note également, entre l’occupation du Néolithique pré-céramique récent et celle du Néolithique céramique, des simitudes au sein de la culture matérielle. Tandis que la vaisselle fine en pierre si caractéristique disparaît, la vaisselle grossière continue d’être fabriquée malgré l’apparition de la céramique (Dikaios 1961 ; Karageorghis 1990 ; Le Brun 1996 b). Sans exclure l’existence d’échanges de savoirfaire, deux régions, l’une au nord, représentée par Ayios Epiktitos-Vrysi et l’autre au sud, représentée par Sotira, se distinguent par leur production céramique notamment au niveau du traitement des surfaces et des techniques de réalisation des décors (Dikaios 1961 ; Peltenburg 1978).
L’outillage osseux du Néolithique pré-céramique récent est mieux documenté, notamment grâce à l’étude conduite sur 250 pièces provenant des niveaux récents du site de Khirokitia (Stordeur 1984, 1985). Le principal objectif de cette étude était de dégager des correspondances avec les industries du Proche-Orient afin de répondre aux problématiques de l’époque sur l’origine du peuplement de Khirokitia. La méthode de la
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Ces résultats doivent maintenant être réexaminés et une étude plus systématique, conduite.
classification multiple a été utilisée (Stordeur 1977 a). Les résultats obtenus font, tout d’abord, état d’une grande homogénéité typologique puisqu’une forte proportion d’outils pointus a été notée. La bonne représentation de ces outils destinés à des activités de transformation contraste fortement avec l’absence d’objet comme les corps de faucille et les outils de pêche ou de chasse, que l’on pourrait rattacher aux activités d’acquisition (Stordeur 1984, p. 142). Une homogénéité qui marque également la sélection des matières premières. L’utilisation de l’os prédomine sur celle du bois de daim. Paradoxalement, le daim est l’espèce animale la plus exploitée ce qui démontrerait un choix délibéré pour le seul animal sauvage (Ibid., p. 136). Le métapode est le support osseux le plus souvent sélectionné. Pour découper ces os, deux techniques ont été utilisées dans des proportions similaires : le sciage et la percussion. Mais il semble que chacune d’elles soit destinée à la réalisation d’objets plus ou moins investis techniquement. Les outils les plus élaborés, c’est-à-dire ceux pour lesquels le façonnage est envahissant, sont fabriqués par sciage. Les outils peu élaborés sont toujours le produit d’un débitage par percussion. Le façonnage est réalisé par abrasion et/ou par raclage. Contrairement à ce qu’il est commun de rencontrer sur les industries contemporaines du Proche-Orient, le raclage ne domine pas à Khirokitia. En revanche, la technique du traitement thermique, identifiée sur une trentaine de pièces, rappelle les industries osseuses du continent. Une évolution chronologique des techniques est observée. Du niveau III au niveau I, on assiste à une « simplification des gestes, une diminution des exigences de qualité » (Ibid., p. 142). Cette étude offre une vision préliminaire sur les choix et les habitudes techniques des habitants de Khirokitia. Mais l’objectif principal qui consistait à définir cette industrie par rapport aux assemblages proche-orientaux, n’a pas réellement été atteint. L’usage prépondérant de l’abrasion n’est pas un élément suffisant pour démontrer à lui seul le caractère original de cette production. En outre, les caractères techniques qui pouvaient laisser présager une tradition proche-orientale comme la « fréquence des outils pointus et celle des poignées intégrées » (Ibid., p. 143), se révèlent finalement trop généraux, puisqu’ils sont communs à l’ensemble du Néolithique, pour être pris en compte. L’outillage osseux du Cap Andreas-Kastros rassemble 155 objets qui proviennent de tous les niveaux d’occupation (Le Brun 1981). Une description du mobilier par catégorie d’objets, intégrant à la fois les matières premières – os, bois de cervidé et dent – et les caractères techniques et morphométriques, a été entreprise. Pointes, aiguilles à chas, spatules, hameçons et éléments de parure sont ainsi minutieusement passés en revue et classés. Cette première approche montre que la composition de l’outillage du Cap Andreas-Kastros diffère de celle de Khirokitia par la présence de hameçons et d’éléments de parure. On remarque encore, en raison de l’utilisation des dents, que les matières premières exploitées sont plus variées qu’à Khirokitia.
1.4.2. Acquis sur l’industrie osseuse du Néolithique céramique Une dizaine d’objets travaillés en os et en bois de daim, parmi lesquels des pointes, des aiguilles et des pics, a été retrouvée à divers stades de fabrication sur le site de Ayios Epiktitos-Vrysi (Peltenburg 1972, p. 11). Ce site se caractérise également par la découverte dans une maison, d’un atelier de fabrication de perles en os (Ibid., p. 7). L’industrie osseuse de Sotira se compose, pour les objets les mieux représentés, de pointes, de ciseaux et d’aiguilles de morphologies variées. On notera également la présence de pics et de manches en bois de daim (Dikaios 1961, p. 202-204). 2. PROBLEMATIQUE ET ORIENTATION DE L’ETUDE Le premier objectif de ce travail est de caractériser les assemblages de Khirokitia et du cap AndreasKastros, issus de contextes différents. Nous l’avons vu, ces deux sites se différencient par leur situation géographique, Khirokitia se situe à l’intérieur des terres et Cap Andreas-Kastros, sur la côte. Cette localisation qui permet une exploitation diversifiée du milieu a peutêtre eu une incidence sur la formation des assemblages osseux. L’examen préliminaire des industries de Khirokitia et du Cap Andreas-Kastros offre déjà quelques éléments de réponse notamment par la présence au Cap Andreas-Kastros, d’hameçons. L’organisation interne des villages diffère également d’un site à l’autre. Khirokitia se distingue par la construction de structures d’intérêt collectif, à diverses étapes de l’occupation, qui expriment sans controverse la cohésion de la communauté et donc une structure interne bien établie. La densité du tissu villageois et les pratiques funéraires confirment également cette unité. En revanche, au Cap Andreas-Kastros, l’absence de construction imposante et le tissu villageois plus lâche, impliquent non pas un défaut de structure interne mais plutôt une organisation différente de celle de Khirokitia. Il sera donc particulièrement intéressant de mesurer l’effet de cette organisation sur les comportements techniques mais aussi sur la répartition spatiale de l’outillage à l’intérieur comme à l’extérieur du village. L’économie de subsistance varie car elle est en partie liée au contexte environnemental. Les ressources carnées sont importantes à Khirokitia tandis qu’au Cap Andreas-Kastros les ressources marines sont plutôt privilégiées. En revanche, la part des ressources agricoles et végétales est relativement équivalente, excepté le lin qui n’est présent qu’au Cap AndreasKastros. La plupart de ces ressources sont des matières premières potentielles, soit pour la fabrication de l’outillage, soit pour la confection de produits divers comme les paniers, les filets de pêche, les tissus, les
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cordages, etc. Quel profit ces populations ont-elles su tirer de toutes ces ressources ? À quelle conception de l’exploitation du territoire l’industrie osseuse fait-elle référence ? Les hommes ont-ils exploité leur environnement direct, en sélectionnant les animaux domestiques ou ont-ils privilégié des zones plus éloignées, en préférant le seul animal sauvage, le daim ?
3. KHIROKITIA 3.1. Présentation du site 3.1.1. Historique des fouilles Le site a été reconnu en 1934 par P. Dikaios qui y effectue des sondages puis des fouilles de 1936 à 1946 (Dikaios 1953). En 1972, une campagne est conduite sous la direction de D. Christou et N. P. Stanley Price, au nom du Département des Antiquités (Stanley Price et Christou 1973). En 1976, une mission conjointe de la British School of Archaeology in Jerusalem et du Centre National de la Recherche Scientifique est menée par A. Le Brun et N. P. Stanley Price (Le Brun et Stanley Price 1977). Depuis 1977, les fouilles sont dirigées par A. Le Brun sous l’égide du Centre National de la Recherche Scientifique et de la Direction Générale des Relations Culturelles du Ministère Français des Affaires Étrangères (Le Brun 1984 a, 1989 c, 1994 a).
Le second objectif de ce travail est de suivre l’évolution chronologique des industries. L’homogénéité des productions osseuses au cours de la phase récente du Néolithique pré-céramique mais aussi sur un horizon chronologique plus large intégrant le Néolithique céramique, sera testée. Cette analyse permettra, en outre, d’apporter de nouvelles données sur l’industrie osseuse du Néolithique céramique qui, nous l’avons vu, est encore méconnue. Mais, l’intérêt d’une comparaison entre les industries du Néolithique pré-céramique récent et celles du Néolithique céramique est de montrer si, après un hiatus de 1 000 ans, elles ont évolué et de quelle manière. Voit-on apparaître de nouveaux outils ou de nouveaux comportements techniques ? La conception des outillages est-elle différente d’une période à une autre ? Au contraire, certains caractères techniques ou morphologiques des industries du Néolithique précéramique récent persistent-ils dans celles du Néolithique céramique ?
3.1.2. Cadre géographique À 6 km à vol d’oiseau du rivage actuel, le village de Khirokitia est installé sur les flancs d’une colline culminant à 210 m au-dessus du niveau de la mer. Au nord, à l’est et au sud, il est limité par un des méandres de la rivière Maroni qui descend du Mont Troodos. Sa superficie totale est estimée à environ 1,5 hectares (Hesse et Renimel 1978). La surface fouillée par P. Dikaios lors des premières fouilles est d’environ 2 700 m². Lors des fouilles récentes, 470 m² ont été dégagés pour le secteur est et 800 m² pour le secteur ouest (dont 237 m² à l’extérieur du village). Une surface totale de 3 970 m² a donc été fouillée (fouilles anciennes et récentes).
Enfin, il s’agira de tester l’originalité des industries insulaires. Originalité déjà dégagée dans les pratiques architecturales, l’industrie lithique, la vaisselle en pierre ou encore dans les pratiques funéraires (Le Brun 1986, 1989 b ; Astruc 2002). Considérant la documentation disponible, il convient ici de nuancer quelque peu ce dernier point puisque les données sur les industries des sites datés du Néolithique pré-céramique ancien et celles des sites attribués au Néolithique céramique sont soit en cours d’étude, soit peu importante pour envisager une étude comparative. Aussi, la vision chronologique de l’industrie osseuse du Néolithique de Chypre sera-t-elle limitée. La comparaison des industries contemporaines de Khirokitia et du Cap Andreas-Kastros, paraît être un moyen approprié de remédier à ce manque de données. Comparer ces industries à celles du Proche-Orient, où les données sont nombreuses, semble également être une voie de recherche prometteuse.
3.1.3. Stratigraphie En 1936, les fouilles de P. Dikaios mettent au jour une construction longiligne en pierre qui traverse le village du nord au sud (structure 100). La contemporanéité supposée des différentes structures d’habitation situées de part et d’autre de cette construction amène P. Dikaios à l’interpréter comme une voie centrale de circulation ou « main road » (Dikaios 1953) (fig. 2). La stratigraphie importante révélée lors des campagnes de fouille de 1977 à 1981 montre au contraire que les structures d’habitation sont diachroniques (Le Brun 1983, 1984 b, Le Brun 1988 ; Le Brun et Daune-Le Brun 2003). La structure 100 n’est alors plus considérée comme une voie centrale de circulation mais comme la limite de la première occupation du village, également appelée secteur est. Par la suite, la population s’étend à l’ouest, au-delà de cette limite et s’implante sur une zone encore inoccupée, c’est le secteur ouest. Un nouveau mur – structure 284 – délimitant cette seconde occupation est alors construit. L’un des accès au village matérialisé par un escalier est intégré à ce mur (Le Brun 1992, p. 23).
Pour répondre à ces objectifs, j’ai opté pour une approche intégrée de l’outillage osseux qui semble être, d’après les études récentes conduites sur des assemblages du Néolithique européen, adaptée pour comprendre les modalités de production et de gestion de l’outillage (Sidéra 1993 a, 2000, 2001 b). Il s’agit maintenant et c’est ici l’ambition de ce travail, de l’appliquer et de la développer en considérant l’ensemble des aspects de la chaîne opératoire, de l’acquisition des matières premières à l’abandon des objets.
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Vouni et KhP pour Khirokitia-Potamos et de l’année de fouille, est inscrit sur une étiquette attachée au sachet. La majorité de l’industrie osseuse est conservée à la maison de fouille dans le village actuel de Khirokitia. Des pièces rares et une partie du matériel issu des premières années de fouille – de 1977 à 1986 – sont conservées au Musée de Larnaca.
Sept niveaux architecturaux de G le plus ancien à A, subdivisés en sous-niveaux, ont été reconnus dans le secteur est 3 (fig. 3). Trois niveaux architecturaux, III, II, et I composent le secteur ouest (fig. 4). Ce secteur n’étant pas intégré au village primitif, il a d’abord servi de zone de rejet des détritus (niveau IV). Les débuts de l’occupation du secteur ouest seraient au plus tôt contemporains du sous-niveau B1. Le besoin de se procurer des matériaux pour l’édification du mur 284 et des structures d’habitation du niveau III, expliquerait le démantèlement des constructions de B1 qui a nécessité l’aménagement de fosses (Le Brun et Daune-Le Brun 2003, p. 53). L’ensemble de la zone fouillée qui couvre à la fois le secteur est et le secteur ouest est recouvert d’une couche d’érosion – couche 2 – qui contient des tessons de poterie et qui témoigne de la réoccupation du site au Néolithique céramique (Le Brun 1984 a, p. 13 ; Le Brun et Daune-Le Brun 2003, p. 53). En 1972, un autre secteur – tranchée 6 – situé en contrebas de la colline est mis au jour par l’ouverture d’un chemin. Cet aménagement a permis de dégager une coupe de 20 m de long et de 4 m de haut faisant apparaître des dépôts archéologiques qui laissaient présager une importante occupation au Néolithique pré-céramique (Le Brun et Daune-Le Brun 1986, p. 2 ; Le Brun 1998, p. 679). En 1997, la mission archéologique française décide de fouiller ce secteur appelé Khirokitia-Potamos (cf. fig. 2). L’objectif de la fouille est de définir la relation existante entre le village et sa limite naturelle, la rivière Maroni (Le Brun 1998, 1999). L’étude stratigraphique de ce chantier est en cours d’étude.
Les 700 000 restes fauniques retrouvés sur le site font l’objet depuis la reprise des fouilles en 1977, d’une étude minutieuse conduite par S. Davis. Tous les os qui présentent des incisions, des fractures ou des perforations qui pourraient avoir une origine anthropique sont systématiquement isolés. Estimant ainsi disposer de la totalité de l’industrie exhumée, les restes fauniques n’ont pas fait l’objet d’un tri supplémentaire. 3.2.2. Composition de l’industrie Le corpus publié en 1984 par D. Stordeur (1984, 1985) comptait 250 pièces. Aujourd’hui, l’industrie osseuse de Khirokitia (Khirokita-Vouni et KhirokitiaPotamos) rassemble 2 317 pièces4 (fouilles récentes conduites de 1977 à 2003). Elle est inégalement répartie entre les deux chantiers. Le matériel provenant de Khirokitia-Vouni rassemble 2224 pièces tandis que celui de Khirokitia-Potamos ne compte que 93 objets. L’inégalité de la superficie des zones fouillées : 1 270 m² pour le premier chantier (fouilles récentes) et 80 m² pour le second, explique cette disproportion. Aussi, l’intégralité de l’industrie osseuse de Khirokitia sera-t-elle considérée lors de l’examen typologique, technologique et fonctionnel. Le corpus a été classé en trois catégories en fonction de la nature des traces techniques observées sur les pièces, de leur localisation et de leur finalité : 1/ les produits finis ; 2/ les ébauches ; 3/ les produits de débitage. Certains objets sur lesquels les traces n’ont pu être clairement interprétées ont été classés avec réserve comme ébauches ou produits de débitage possibles. Parfois, en raison d’une fragmentation importante ou d’un mauvais état de conservation, l’attribution des objets à l’une des catégories n’a pu être possible. Ils ont alors été regroupés dans la catégorie des indéterminés (tabl. 2).
3.2. Présentation du corpus 3.2.1. Conditions de récolte La fouille est réalisée au piochon. Outre les fractures et autres endommagements que cette technique peut provoquer sur le matériel osseux, elle présente le grand avantage, en donnant la priorité à la reconnaissance des sols des éléments d’habitation et des espaces extérieurs, de positionner parfaitement le matériel archéologique sur le plan stratigraphique et spatial. Le tamisage à l’eau des sédiments est effectué pour chaque locus, sol d’habitation, sol extérieur, fosse, etc. Des échantillons de sédiments sont aussi prélevés de façon aléatoire dans d’autres zones du gisement. On peut donc considérer le matériel osseux recueilli comme représentatif du matériel enfoui. Celui-ci est directement isolé, grossièrement nettoyé à l’eau, marqué et conditionné en sachet individuel. Le numéro de catalogue précédé des initiales du chantier Kh pour Khirokitia-
Produits finis Ébauches Ébauches possibles Produits de débitage Produits de débitage possibles Indéterminés TOTAL
Effectifs N % 2 210 95,38 51 2,20 12 0,52 38 1,64 3 0,13 3 0,13 2 317 100
Tabl. 2 : Khirokitia – Catégories d’objets en matières osseuses.
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Les campagnes de fouille de 2005 et de 2006 ont mis au jour deux niveaux supplémentaires antérieurs au niveau le plus ancien jusqu’alors reconnu, le niveau G. Le matériel récolté dans ces niveaux n’a pas été considéré dans ce travail mais il fera l’objet d’une étude ultérieure.
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Viennent s’ajouter à ce décompte les pièces provenant des fouilles anciennes dont le nombre s’élève à environ 122 objets qui n’ont pas été pris en compte dans ce travail (Dikaios 1953, p. 293-296).
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Fig. 2 : Plan général du site de Khirokitia (Le Brun 2001 b, fig.1).
Fig. 3 : Khirokitia-Vouni - Stratigraphie du secteur est.
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Fig. 4 : Khirokitia-Vouni - Stratigraphie du secteur ouest.
Une distorsion importante existe entre le nombre de produits finis et celui des produits de débitage (89 exemplaires au total incluant les ébauches) (pl. 8). La faiblesse numérique de ces derniers apparaît comme une limite certaine à l’étude technologique. Les données sur les techniques et méthodes de débitage mises en œuvre seront partielles et la succession chronologique des différentes opérations techniques ne pourra être précisément établie. Aussi, l’analyse technologique sera-t-elle essentiellement fondée sur l’examen des produits finis qui peuvent présenter, en fonction de leur degré de transformation et/ou de leur usure, peu ou pas de trace technique. Cette faible représentation qui constitue une caractéristique commune au Néolithique, pose à la fois le problème de la reconnaissance des produits de débitage et celui du lieu de production de l’outillage osseux. Considérant que les deux sphères – alimentaire et technique – sont étroitement liées, le traitement des carcasses et le travail des matières osseuses pourraient alors prendre place au sein d’une même aire d’activité (Sidéra 2000 a). Aussi, restes de boucherie et produits de débitage seraient-ils intimement mêlés. Si certaines matrices peuvent être identifiées grâce à la présence de traces techniques tangibles, d’autres, ne sont pas toujours repérables. C’est le cas des esquilles qui peuvent à la fois résulter de l’éclatement des os pour récupérer la moelle ou pour produire des supports destinés à l’industrie. On peut donc se demander si, à Khirokitia, le déficit de produits de débitage ne serait pas lié, du moins en partie, à l’emploi préférentiel de la percussion pour la fabrication de l’outillage ? Concernant le lieu de production, deux hypothèses peuvent être envisagées : 1/ le travail de l’os pourrait prendre place au sein d’une ou de plusieurs zones d’activité définies, situées à l’intérieur du village, les produits de débitage seraient rejetés à l’extérieur ; 2/ l’outillage osseux serait fabriqué à l’extérieur de
l’établissement, auquel cas, il serait introduit sous sa forme finale. Toutefois, les différents sondages réalisés sur les autres versants de la colline ou à son sommet, par ailleurs inappropriés à l’installation villageoise, n’ont pour l’instant fourni aucun indice de l’existence d’une zone de rejet ou d’un lieu de production extérieur. Si ce ou ces lieux existent, ils seraient alors plus éloignés du village ou localisés dans un secteur encore non exploré. Ajoutons enfin que le problème de la faible représentation des produits de débitage et plus largement celui du lieu de production de l’outillage ne concerne pas seulement l’industrie osseuse mais également l’outillage lithique de Khirokitia (Astruc 2002, p. 49). 3.2.3. Répartition stratigraphique Rappelons que le chantier de Khirokitia-Vouni se divise en deux secteurs : est et ouest, qui matérialisent chacun une phase chronologique de l’occupation du site au Néolithique pré-céramique récent. Une occupation au Néolithique céramique recouvre ces deux secteurs (couche 2). Pour envisager la représentativité du corpus sur le plan chrono-stratigraphique, la répartition du corpus par secteur et par niveau architectural, a été examinée. L’industrie est répartie également entre les secteurs est et ouest malgré une superficie des zones fouillées différente : 470 m² pour le secteur est et 800 m² pour le secteur ouest (tabl. 3). Le mobilier osseux exhumé est donc représentatif de l’ensemble du chantier de Khirokitia-Vouni.
N %
Secteur est 1034 44,63
Khirokitia-Vouni Secteur ouest Hors contexte 1119 71 48,30 3,06
TOTAL 2224 95,99
Tabl. 3 : Khirokitia-Vouni – Répartition des objets en matières osseuses par secteur. 17
Lorsque l’on examine la répartition de l’industrie par niveau architectural, on remarque, au contraire, une certaine inégalité quantitative. Une majorité d’objets se concentre dans les niveaux B et C du secteur est de Khirokitia-Vouni, tandis qu’ils sont rares dans les niveaux G et F (tabl. 4). La superficie de la zone fouillée plus importante dans les niveaux B et C, explique en partie cette bonne représentation (Le Brun 1989 b, p. 13). Le matériel osseux du secteur ouest provient essentiellement du niveau II fouillé sur une superficie plus grande que sur les autres niveaux (400 m²) (tabl. 5). On remarque que les objets provenant de la couche 2 attribuée au Néolithique céramique sont plus nombreux dans le secteur ouest où les dépôts archéologiques sont plus importants. Leur nombre reste, néanmoins, faible comparativement à celui des objets provenant des niveaux attribués au Néolithique pré-céramique récent. La distorsion numérique qui marque les différents niveaux architecturaux, apparaît comme une limite certaine à l’étude, c’est pourquoi l’intégralité de l’assemblage sans différenciation spatiale ni chronologique sera, dans un premier temps, envisagée. Niveaux Néolithique céramique
Néolithique pré-céramique récent
Effectifs N
%
5
5
0,48
94
9,09
6
0,58
A
94
A-B
3
AB1
3
A-C
1
1
0,10
A-D
1
1
0,10
B
8
B1
122
B2
48
B3
151
455
44
B4
62
B5
61
B5-4
3
C
228
228
22,05
C-D
2
2
0,19
D
13
D1
64
173
16,73
D2
96
D-E
7
7
0,68
E
18 44
4,26
7
E2
16
E3
3
Néolithique céramique
Néolithique pré-céramique récent
TOTAL
2
E1
Niveaux
E-F
1
1
0,10
F
3
3
0,29
G2
2
2
0,19
Hors stratigraphie
12
1,16
TOTAL
1034
100
Effectifs
2
61
I
10
Ia
2
Ib
46
Ic
55
Icc
4
TOTAL N
%
61
5,45
117
10,46
I-II
13
13
1,16
II
684
684
61,13
II-III
8
8
0,71
I-III
8
8
0,71
III
181
181
16,18
IV
8
8
0,71
Hors stratigraphie
39
3,49
TOTAL
1119
100
Tabl. 5 : Khirokitia-Vouni – Secteur ouest. Répartition des objets en matières osseuses par niveau.
3.2.4. État de fragmentation et de conservation L’outillage osseux de Khirokitia est très fragmenté (93,14 %, soit 2106 pièces sur 2261 ébauches et produits finis). Seulement 155 pièces sont entières (soit 6,86 %). Deux types de cassures ont été observés sur les fragments : les cassures anciennes très nombreuses (près de 73 % au total) et les cassures récentes produites à la fouille (tabl. 6). Peu de remontages ont pu être réalisés à partir des cassures récentes. Le nombre élevé de fragments distaux et mésiaux et la rareté des pièces dont la morphologie générale peut être restituée malgré la fracture (pièces subentières), montrent la limite de la documentation relative à la fabrication et à la fonction de l’outillage (tabl. 7). En effet, si les fragments distaux sont attribuables à une catégorie morpho-fonctionnelle, l’identification des techniques de débitage est, en revanche, très difficile. À l’inverse, l’examen des fragments mésiaux et proximaux apporte davantage d’informations sur les techniques employées mais leur attribution à une catégorie morphofonctionnelle est limitée. Aussi, l’analyse technologique et fonctionnelle sera-t-elle en grande partie tributaire de cet état de fragmentation. L’élaboration d’un échantillonnage en fonction des objectifs recherchés sera donc nécessaire. Cet échantillonnage sera représentatif de l’ensemble de l’industrie puisque la distribution des fragments est relativement homogène d’un secteur à l’autre ce qui implique une absence de conservation différentielle.
Tabl. 4 : Khirokitia-Vouni – Secteur est. Répartition des objets en matières osseuses par niveau.
18
Effectifs Ancienne Récente Ancienne et récente Indéterminée TOTAL
N 1280 501 238 87 2106
Effectifs % 60,78 23,79 11,30 4,13 100
A B C TOTAL
Subentier Proximal Mésial Distal Indéterminé TOTAL
% 0,88 56,79 42,33 100
Tabl. 8 : Khirokitia – État de conservation des objets.
Tabl. 6 : Khirokitia – Types de cassures. Khirokitia-Vouni Secteur Secteur Ouest Est 39 55 146 242 311 344 432 350 24 17 952 1008
N 20 1284 957 2261
TOTAL N
%
94 388 655 782 41 1960
4,79 19,80 33,42 39,90 2,09 100
A B C TOTAL
Khirokitia-Vouni Secteur est Secteur ouest 9 10 593 609 412 470 1014 1089
TOTAL N % 19 0,90 1202 57,16 882 41,94 2103 100
Tabl. 9 : Khirokitia-Vouni – État de conservation des objets par secteur.
Tabl. 7 : Khirokitia-Vouni – Répartition des fragments par secteur. Concrétions, craquelure, dissolution et exfoliation sont autant d’altérations post-dépositionnelles liées à l’action d’agents biologiques, végétaux ou animaux, aux conditions d’enfouissement ou encore à la nature des sols (par exemple, Semenov 1964 ; Brain 1967 ; Binford 1981 ; Vincent 1984 ; Morel 1986 ; O’Connor 1987 a ; Bonnichsen et Sorg 1989 ; Patou-Mathis 1994 ; Miller 1994 ; Christidou 1999). À Khirokitia, ce sont les concrétions calcaires qui constituent la principale cause d’altération. Secondairement, les surfaces présentent les indices d’une dissolution ou d’une exfoliation partielle. Ces différentes altérations ne semblent pas affecter les pièces dont la surface colorée, et vernie, suggère la pratique d’un traitement thermique (Stordeur 1984, p. 138). En effet, la chauffe qui modifie la structure de l’os, semble participer à la conservation des surfaces. Sur le site de Kovaþevo (Néolithique ancien - Bulgarie) l’examen des objets en os chauffés montre, en effet, que leur surface est « lisse et jamais endommagée par les racines » (Sidéra 2001, pl. VII.3). Pour qualifier et quantifier l’état de conservation des objets de Khirokitia, je me suis appuyée sur la classification d’I. Sidéra qui distingue différents états de conservation en fonction de la lisibilité des traces techniques et fonctionnelles (Sidéra 1993 a, p. 29-30). Néanmoins, une nouvelle classification fondée sur l’état de conservation des surfaces apprécié au microscope stéréoscopique et au microscope optique à réflexion, sera nécessaire lors de l’analyse fonctionnelle, j’y reviendrai. Trois types qui rendent compte de l’état de conservation général des pièces, ont donc été retenus : 1/ état A : très bonne conservation ; 2/ état B : conservation moyenne ; 3/ état C : mauvaise conservation. En considérant que les pièces exploitables du point de vue technique et fonctionnel sont celles classées en A mais aussi une partie de celles classées en B, on peut estimer que l’industrie de Khirokitia est plutôt bien conservée (tabl. 8). Par ailleurs, on ne relève aucune conservation différentielle entre les deux secteurs étudiés (tabl. 9).
4. CAP ANDREAS-KASTROS 4.1. Présentation du site 4.1.1. Historique des fouilles En 1961, P. Dikaios est le premier à signaler l’existence du site. En 1962, puis 1967, il est de nouveau mentionné (Karageorghis 1962 ; Nicolaou 1967). Entre 1970 et 1973, le gisement fait l’objet de fouilles sous la direction d’A. Le Brun avec le soutien du Centre National de la Recherche Scientifique (Le Brun 1974 a et b, 1975-77, 1981). En 1974, les fouilles sont arrêtées lorsque l’armée turque envahit l’île. Ce site n’a alors plus fait l’objet de recherche. 4.1.2. Cadre géographique Le site du Cap Andreas-Kastros est localisé à l’extrême est de l’île, dans la Péninsule de Karpas. Le site est installé au pied d’un éperon rocheux et domine la mer d’une dizaine de mètres environ. Seul un passage étroit à l’ouest permet de communiquer avec l’extérieur. Sa superficie peut être estimée à 1 700 m² dont 250 m² ont été fouillés (fig. 5). Les limites du gisement n’ont pu être clairement précisées (Le Brun 1981, p. 13). 4.1.3. Stratigraphie La campagne de fouille de 1970 s’est concentrée sur le versant nord-est où des outils en silex et des fragments de vaisselle en pierre ont été retrouvés. Lors des campagnes suivantes, la fouille du versant sud met au jour les premières constructions (Le Brun 1981, p. 12). Six niveaux architecturaux, de I le plus ancien à VI le plus récent, sont progressivement dégagés. Ils représentent une occupation continue sans période d’abandon (Le Brun 1981, p. 13 ; Le Brun et Daune-Le Brun 2003, p. 50). Les niveaux III et IV sont
19
fouillés sur une surface de 15 m² pour le premier et de 30 m² pour le second. Les niveaux V et VI sont ensuite explorés sur une étendue respective de 145 m² et de 150 m². Le niveau I n’est représenté que par des parcelles de sols repérés en coupe dans un sondage.
Niveaux
Effectifs N 25 56 12 10 19 12 134
VI V IV III II Hors stratigraphie TOTAL
4.2. Présentation du corpus
% 18,66 41,79 8,96 7,46 14,18 8,96 100
Tabl. 11 : Cap Andreas-Kastros – Répartition des objets en matières osseuses par niveau.
4.2.1. Conditions de récolte Les mêmes méthodes de fouille et de traitement que celles appliquées à Khirokitia ont été utilisées au Cap Andreas-Kastros. Les objets marqués portent le numéro de catalogue précédé des initiales du site (CAK). La totalité de l’industrie osseuse est conservée au Musée de Nicosie.
4.2.4. État de fragmentation et de conservation Les fragments sont nombreux (87,69 % du corpus, soit 114 objets sur un total de 130 produits finis). Les cassures anciennes sont majoritaires (tabl. 12). Aucun remontage entre les fragments n’a pu être effectué. Les fragments distaux et mésiaux sont les plus nombreux (tabl. 13).
4.2.2. Composition de l’industrie L’assemblage, composé de 163 objets, est moins riche que celui de Khirokitia en raison de la brièveté des fouilles et de la superficie du site bien inférieure à celle de Khirokitia (cf. p. 14). Vingt-neuf objets inaccessibles n’ont pu être étudiés5. L’analyse repose donc sur un total de 134 pièces. Un premier classement selon la nature des produits montre une distorsion numérique entre les produits finis et les produits de débitage (tabl. 10). Le déficit des produits de débitage peut être expliqué, comme à Khirokitia, par un repérage difficile de ces produits, par une spécialisation des aires de production, par le rejet des produits de débitage à l’extérieur du village ou par l’importation de produits finis à l’intérieur du village. Signalons enfin l’absence d’ébauche.
Les concrétions sont à l’origine de la majorité des endommagements relevés sur les pièces. Avec une majorité d’objets classés en C et l’absence d’objets en A, l’industrie osseuse du Cap Andreas-Kastros est plus altérée que celle de Khirokitia (tabl. 14). Cet état est probablement lié à la situation géographique du site. Implanté sur un éperon rocheux qui domine la mer, le site est, en effet, très exposé aux vents et à l’érosion. La mauvaise conservation du matériel a un impact non négligeable sur l’analyse fonctionnelle qui ne pourra s’effectuer selon la même démarche que celle envisagée à Khirokitia. Effectifs
Effectifs Produits finis Produits de débitage TOTAL
N 130 4 134
N 55 24 9 26 114
Ancienne Récente Ancienne et récente Indéterminée TOTAL
% 97,01 2,99 100
Tabl. 10 : Cap Andreas-Kastros – Catégories d’objets en matières osseuses.
% 48,25 21,05 7,89 22,81 100
Tabl. 12 : Cap Andreas-Kastros – Types de cassures. Effectifs N 3 14 37 39 21 114
Subentier Proximal Mésial Distal Indéterminé TOTAL
4.2.3. Répartition stratigraphique La distribution des objets par niveau stratigraphique est globalement homogène. Toutefois, en raison de la superficie de la zone fouillée – 145 m² – et de la densité des constructions mises au jour, le niveau V est particulièrement riche (tabl. 11) (Le Brun 1981, p. 19). Aucun objet étudié ne provient du niveau I.
% 2,63 12,28 32,46 34,21 18,42 100
Tabl. 13 : Cap Andreas-Kastros – Types de fragments. Effectifs B C
5
Certains des objets non étudiés ont été publiés et illustrés (Le Brun 1981). Il s’agit des numéros suivants : 630.1 (fig. 50) ; 728.3, 478.2 (fig. 51) ; 770.1, 702.3 (fig. 52) ; 871.1, 797.1, 866.1, 602.2, 911.1 (fig. 53) ; 664.1, 660.3 (fig. 54) ; 850.1 (fig. 55) ; 637.1, 695.1, 662.1, 478.1 (fig. 56).
TOTAL
N 57 77 134
% 42,54 57,46 100
Tabl. 14 : Cap Andreas-Kastros – État de conservation des objets.
20
Fig. 5 : Plan général du site du Cap Andreas-Kastros (Le Brun 1981, fig.2).
Les assemblages de Khirokitia et du Cap AndreasKastros viennent d’être examinés en termes de conditions de récolte, de composition, de répartition stratigraphique et de conservation. Grâce aux conditions de récolte et au tri systématique des restes fauniques, le matériel recueilli sur chacun des sites reflète l’ensemble de l’industrie osseuse. Le déficit de produits de débitage étant lié, semble-t-il, à un tout autre phénomène. La répartition stratigraphique du matériel osseux relativement homogène sur chaque site renforce, par ailleurs, la bonne représentativité du corpus. Elle permettra notamment de suivre l’évolution chronologique de ces deux ensembles.
Seul l’état de fragmentation et de conservation qui diffère d’un site à l’autre peut apparaître comme une limite aux objectifs fixés. En ce qui concerne Khirokitia, l’échantillonnage sera représentatif de l’ensemble des dépôts archéologiques en raison de l’absence de conservation différentielle. En revanche, sur le site du Cap Andreas-Kastros, l’état de conservation plutôt médiocre est peu compatible avec une analyse fonctionnelle. Il conviendra alors de réorienter l’analyse en privilégiant davantage la morphologie des objets. Toutefois, et malgré ces limites qui caractérisent de nombreuses industries, l’investigation multiple envisagée dans ce travail pourra être entreprise.
21
microscope stéréoscopique et l’utilisation de grilles de lecture des traces techniques. En outre, dans la continuité des travaux de S.A. Semenov, le recours aux référentiels expérimentaux et ethnographiques se systématise (Dauvois 1976, 1977 ; Camps-Fabrer et d’Anna 1977 ; Le Mouël 1977 ; Newcomer 1977 ; Stordeur 1977 b ; Murray 1979). Une documentation précise sur les différentes traces de fabrication et leurs caractéristiques est alors progressivement rassemblée.
CHAPITRE II - MÉTHODOLOGIE 1. TYPOLOGIE ET TECHNOLOGIE 1.1. État actuel des recherches Avant même d’exposer les principes technologiques sur lesquels repose la méthodologie utilisée, il est nécessaire, ici, de présenter un historique des recherches typologiques et technologiques afin de la replacer dans le contexte plus large de l’étude des industries en matières osseuses pré- et protohistoriques.
Les années 1980 : L’approche intégrée des industries osseuses Ces premiers travaux sont à l’origine de plusieurs études qui tendent vers une approche intégrée des séries archéologiques. L’exploitation des matières premières et la gestion de l’environnement, les techniques de fabrication et leurs implications culturelles ainsi que la fonction de l’outillage sont considérées et aboutissent à caractériser des ensembles chrono-culturels variés. Aussi, les industries du Paléolithique supérieur (Julien 1982), celles du Natoufien au Proche-Orient (Stordeur 1988 b ; Campana 1989) ou encore les assemblages néolithiques du nord, du sud et de l’est de la France (Sénépart 1983 ; Voruz 1984 ; Sidéra 1989) sont-ils caractérisés. En complément de ces travaux d’envergure, des études portant sur des types d’objets spécifiques se développent par le biais des fiches typologiques (Camps-Fabrer et al. 1988 a, 1988 b). Parallèlement, les expérimentations qui apparaissent désormais comme un domaine incontournable, se généralisent (Barge 1982 ; Murray 1982 ; Ettos 1985).
Les années 1960 : Les premiers travaux En réalité, les débuts de l’analyse technologique remontent aux années 1950, avec les travaux de J.G.D. Clark et M.W. Thompson sur les techniques de débitage du bois de renne au Paléolithique et Mésolithique d’Europe (Clark et Thompson 1953). Mais c’est au cours des années 1960 que des travaux novateurs vont constituer les fondements de l’analyse technologique. L’ouvrage de référence « Prehistoric Technology » du chercheur russe S.A. Semenov (1964) accorde une partie importante aux techniques de débitage des matières osseuses. Mais au-delà de leur classification, il entreprend une analyse tracéologique qui lui permet d’associer, à partir d’un référentiel expérimental, une technique à des traces caractéristiques. En 1966, l’étude conduite par H. Camps-Fabrer sur le mobilier osseux nord-africain montre que les objets les plus caractéristiques ne sont plus seulement considérés comme des fossiles directeurs mais qu’ils participent, avec les objets les moins significatifs, à la construction d’une vue d’ensemble des productions osseuses (Camps-Fabrer 1966).
Depuis les années 1990… L’approche intégrée des industries osseuses se multiplie (par exemple, Sénépart 1992 ; Sidéra 1991, 1993 a, 2000 ; Stordeur 1995 a, 1995 b, 1996 ; Christidou 1999 ; David 1999 ; Liolios 1999 ; Averbouh 2000 ; Provenzano 2001 ; Maigrot 2003 ; Goutas 2004 ; Pétillon 2004 ; Le Dosseur 2006). Elle contribue à des projets de recherche interdisciplinaires et régionaux qui montrent que l’industrie osseuse participe, au même titre que les autres vestiges, « à toutes les sphères de l’activité, qu’elle soit économique, culturelle ou symbolique et qu’elle recèle des informations tout autant culturelles que sociales à condition de mettre en œuvre les méthodes d’étude adaptées à ces sujets » (Sidéra sous presse). Les expérimentations se systématisent et cherchent à documenter les aspects techniques relatifs aux productions osseuses (par exemple, Sénépart 1991 ; Nandris et Camps-Fabrer 1993 ; Provenzano 1999 ; Choi 1999 ; Christidou 2004 ; Maigrot 2001 ; Schibler 2001 ; Sidéra 1993 a, 2001 a ; David 2003). Aussi, la combinaison, étude intégrée et expérimentation, conduit-elle à une meilleure connaissance des techniques de fabrication des objets osseux et participe-t-elle à la construction d’une discipline encore jeune qu’est la technologie osseuse (Ramseyer et al. 2004).
Les années 1970 : Le développement de l’approche technologique Sous l’impulsion d’H. Camps-Fabrer, une réelle dynamique de recherche se met en place. Plusieurs chercheurs, chacun avec sa méthodologie et leur problématique, se rassemblent à l’occasion de deux colloques internationaux en 1974 et 1976 (CampsFabrer 1976, 1977). Des réunions de travail sur les industries du Néolithique et de l’Âge des Métaux sont ensuite organisées (Camps-Fabrer 1979). Différents types d’objets comme les ciseaux, les lissoirs, les sagaies, etc., sont examinés sous un angle typologique (Deffarges et al. 1974, 1977 ; Stordeur-Yedid 1974 ; Poplin 1976 b), tandis que des études technologiques de séries archéologiques sont réalisées (Chech 1974 ; Leroy-Prost 1975 ; Billamboz 1977, 1979 ; Stordeur 1978 a, 1979). La compréhension et la caractérisation des techniques de fabrication deviennent des thèmes privilégiés au côté de l’approche typologique. Cette nouvelle orientation amène les spécialistes à prendre exemple sur les lithiciens et à développer des méthodes d’analyse impliquant l’emploi d’un
22
1.2. L’exploitation des matières premières
1.3. Vers l’élaboration d’une typologie
Comprendre les modalités d’exploitation des matières premières, des espèces animales et des parties anatomiques est l’une des étapes essentielles de l’analyse technologique. Les déterminations archéozoologiques se fondent sur la présence de caractères anatomiques caractéristiques comme les épiphyses. Néanmoins, le matériel archéologique bien souvent fragmenté ou totalement façonné limite parfois ces déterminations. Il convient alors d’examiner d’autres caractères comme l’épaisseur de l’os cortical qui varie selon le type d’os ou encore la présence d’une cavité médullaire qui caractérise les os longs (O’ Connor 1987 b ; Barone 1999). Ainsi, dans certains cas, et très souvent avec l’aide d’un archéozoologue, il est possible de distinguer les types morphologiques d’os comme les os longs et les os plats (Barone 1999, p. 43). Plusieurs informations peuvent être extraites de ce premier travail. Tout d’abord, l’identification des matières premières conduit à une réflexion sur les modalités d’exploitation et de gestion de l’environnement immédiat des hommes (par exemple Sidéra 1989, 1991, 1993 a ; Sénépart 1989 ; Sénépart et Sidéra 1991 ; Christidou 1999 ; Maigrot 2003). Les sources d’approvisionnement peuvent être locales, c’est-à-dire dans l’environnement direct du village, elles concernent alors principalement les animaux domestiques. Les hommes peuvent aussi tirer profit d’un environnement plus ou moins éloigné du lieu d’habitat en chassant des animaux sauvages. Le choix des matières premières peut également refléter un courant de diffusion. C’est le cas, par exemple, du bois de cervidé dont l’exploitation est rare dans les contextes PPNB ancien du Levant et plus intense au VIIe millénaire av. J.-C., en Anatolie (Mellaart 1970 ; Redman 1973 ; Stordeur 1988 a ; Russell 2001 a, 2001 b, 2003). L’identification des parties anatomiques sélectionnées peut faire apparaître des choix culturels et/ou techniques (Stordeur 1981, 1986 ; Sidéra 1989, 2001 b ; Christidou 2001 b). Par exemple, le métapode de petits ruminants largement exploité au Néolithique pour la fabrication des pointes est un marqueur d’identité culturelle particulièrement fort pour le Chasséen méridional (Sénépart et Sidéra 1991). Enfin, les transformations opérées sur la matrice osseuse et leurs objectifs peuvent être mieux compris. Par exemple, sur le site grec de Limenaria (5700-5200 B.C. cal., île de Thasos) les métapodes de cervidés sont sélectionnés selon leur taille. Les plus grands sont préférés et destinés à la fabrication de longues pointes dont la fonction semble répondre à une certaine spécialisation (Christidou 2005). La détermination des espèces et des parties anatomiques permet donc, d’après ces quelques exemples, de conduire une réflexion globale sur l’organisation de la production et sur son implication culturelle et sociale. C’est dans cette perspective que sera abordée, au chapitre III, l’exploitation des matières premières sur les sites de Khirokitia et du Cap Andreas-Kastros.
Les premiers travaux conséquents sur l’outillage osseux se sont presque exclusivement attachés à établir des typologies à partir de caractères morphologiques, dimensionnels ou relatifs aux matières premières exploitées, au risque, parfois, de minimiser les aspects techniques et fonctionnels (Camps-Fabrer 1966 ; Billamboz 1977 ; Voruz 1984). Les approches typologiques plus récentes rendent compte de l’ensemble des caractères morphométriques, techniques et fonctionnels et permettent de visualiser sous une forme synthétique, les principales composantes morphofonctionnelles, techniques et stylistiques de l’assemblage étudié (Stordeur 1984, 1986 ; Sidéra 1989, 1993 a, 1996, 2000). La comparaison des types d’objets d’un même assemblage mais aussi entre assemblages est alors facilitée. La typologie mise en place pour caractériser les assemblages osseux de Chypre s’inscrit dans la continuité des travaux précédents et s’appuie essentiellement sur des caractères morpho-fonctionnels. La morphologie de la partie active est tout d’abord hiérarchisée pour distinguer les différentes catégories d’objets. Le second caractère considéré est lié aux principes appliqués à la transformation de la matière première. Excepté les os entiers pour lesquels il n’y a aucune segmentation, on distingue les segments transversaux et les segments longitudinaux. Enfin, le troisième caractère est relatif à la conservation et à la modification des caractères anatomiques des supports comme les épiphyses. Cette typologie est le fondement de ce travail puisque l’étude techno-fonctionnelle s’articulera autour des types d’objets identifiés, l’objectif étant de dégager une interaction entre morphologie, technique et fonction. 1.4. Les techniques de fabrication : terminologie et méthode Précisons que seules les techniques de fabrication identifiées sur le matériel osseux de Khirokitia et du Cap Andreas-Kastros ont été prises en compte dans cette partie. La terminologie et la démarche analytique suivies, s’appuient sur la méthodologie adoptée par I. Sidéra pour l’étude des assemblages osseux des Bassins Parisien et Rhénan (Sidéra 1993 a) à laquelle ont été ajoutés de nouveaux critères. Commençons par un rappel des définitions des termes utilisés : 1/ le débitage désigne « l’action intentionnelle de fractionner un bloc de matière première en vue d’utiliser tels quels, de retoucher ou de façonner les produits obtenus » (Inizan et al. 1995). Dans certains cas et notamment lorsque la forme naturelle du support est aménagée transversalement, le débitage est escamoté. L’objet est alors uniquement configuré par des opérations successives de façonnage (Sidéra 2004, p. 164) ; 2/ le façonnage est l’opération ou la série d’opérations destinées à mettre en forme le support ;
23
3/ la chaîne opératoire est l’ensemble de ce processus technique (Creswell 1976, p. 13) ; 4/ la technique se définit par le ou les moyens mis en œuvre pour transformer un matériau ; 5/ les procédés de découpe désignent les « différents schémas de division des matrices osseuses » (Sidéra 2004, p. 165). S’appliquant exclusivement au débitage longitudinal des métapodes de petits et grands ruminants, on distingue les procédés de découpe en deux, en quart et parfois même inférieur au demi ou au quart. La morphologie de la section du support obtenue est alors caractéristique du procédé de découpe employé (fig. 6-1 & fig. 6-2). Ces observations sont envisageables lorsque le produit fini n’est pas intégralement façonné, auquel cas la morphologie initiale du support et celle de sa section sont transformées ;
1
5x
5x
1
2
Fig. 7 : Accidents lors d’une fracturation longitudinale d'un métapode par percussion posée indirecte. 1 - Surplus de matière ; 2 - Enlèvements de matière (clichés A. Legrand). La fracturation longitudinale de l’os par percussion lancée directe vise à produire plusieurs éclats de tailles et de morphologies variées (Camps-Fabrer et D’Anna 1977 ; Ettos 1985 ; Sidéra 1993 a, 2004 ; Christidou 1999, Provenzano 2004). Ces esquilles ne portent aucune trace d’impact, seul le façonnage, souvent limité à l’extrémité active, permet d’isoler les outils sur esquille, des simples restes de cuisine (Sidéra 1989, 2000 ; Christidou 1999).
2
Fig. 6 : Procédés de découpe et morphologie des sections mésiales. 1 – Procédé de découpe en deux, la section de la partie mésiale forme un croissant ; 2 - Procédé de découpe en quart, la section forme un boomerang.
1.4.2. Entaillage par percussion lancée L’entaillage par percussion lancée « consiste à entamer la matière par enlèvements successifs à l’aide d’un outil tranchant » (Maigrot 2001, p. 165). Cette technique est le plus souvent utilisée pour tronçonner transversalement du bois de cervidé en prédéterminant la longueur des supports. Les stigmates laissés sur la surface sont bien connus (Semenov 1964 ; Billamboz 1977, 1979 ; Christidou 1999 ; Ettos 1985 ; Sidéra 1993 a ; Maigrot 2001, 2003). Des copeaux de matières sont arrachés formant une gorge qui, lorsqu’elle est suffisamment entamée, permet une fracturation rapide du tronçon soit par flexion, soit en frappant la partie non souhaitée contre un support dur (fig. 8).
6/ les méthodes de débitage, particulièrement significatives sur le plan chrono-culturel (Christidou 2001 b ; Sidéra 2000 a, 2002, 2004), se définissent par l’éventuelle combinaison des techniques, leur localisation et leur étendue sur le support (Sidéra 2004 ; Legrand 2005). Les supports issus de ces différentes méthodes de débitage ont une morphologie identique : une partie de l’une des épiphyses est conservée comme moyen de préhension et les bords sont droits au contour plus ou moins régulier. 1.4.1. Fracturation longitudinale par percussion La fracturation longitudinale de l’os par percussion posée indirecte avec une pièce intermédiaire est utilisée pour diviser les os longs et en particulier les métapodes (Camps-Fabrer et d’Anna 1977 ; Ettos 1985). Cette technique peut intervenir à la suite d’un sciage longitudinal pour finir la découpe du métapode. Elle peut aussi être utilisée seule. Dans les deux cas, le contrôle de la fracture est difficile et demande alors, pour pouvoir exploiter au maximum la matière première, une certaine maîtrise technique. En effet, les accidents ne sont pas rares (Camps-Fabrer et d’Anna 1977 ; Ettos 1985) (fig. 7).
1.4.3. Sciage
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Fig. 8 : Entaillage par percussion lancée d'un andouiller de bois de cerf (expérimentation R. Christidou – cliché A. Legrand).
L’abrasion avec une pierre dure produit une « surface relativement homogène (…), les stries sont longues, de même direction » ; l’utilisation d’une pierre friable avec du sable produit « une surface irrégulière. L’orientation de la plupart des stries est constante mais leurs dimensions et leur espacement varient » (Christidou 1999, p. 74). Plusieurs catégories de stries probablement produites par différentes pierres abrasives, ont été observées sur le matériel archéologique de Chypre. Afin de documenter la variabilité de ces stries mais également de tester l’influence de la granulométrie et de la texture des pierres sur leur morphologie, leurs dimensions et sur leur organisation, plusieurs pierres (calcaire, grès, roche sédimentaire verte et jaspe) présentes sur les sites étudiés ou à proximité, ont été utilisées pendant une durée déterminée de 10 minutes. Quelques observations préliminaires sont présentées ici (fig. 11). Une expérimentation plus développée ainsi qu’une analyse fine de la texture, de la granulométrie et de la dureté des roches utilisées, seront nécessaires pour appréhender réellement ces formations.
1.4.3. Sciage Le sciage à l’aide d’un outil lithique se caractérise par des traces claires et bien définies qui consistent en un sillon linéaire de profil en V, dont les pans porte de nombreuses stries continues, longues et parallèles entre elles. Le sciage à la corde est principalement utilisé pour une découpe transversale de la matière (fig. 9-1). Deux méthodes ont été expérimentées. Dans la première – méthode A – l’os est frotté contre une corde enduite de sable et d’eau. Dans la seconde méthode – méthode B – l’os est maintenu avec le pied dans un mélange d’eau et de sable. La corde est placée sous l’os et tirée alternativement (fig. 9-2). Dans les deux cas, une gorge de profil en U, régulière et lissée se forme (Poplin 1976 a ; Billamboz 1977 ; Murray 1982 ; Campana 1989 ; Sidéra 1993 a, 2004) (fig. 10-1). À fort grossissement, il est possible d’observer de nombreuses stries fines associées à des stries plus larges (fig. 10-2).
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Fig. 9 : Méthodes de sciage à la corde. 1 - Méthode A ; 2 - Méthode B (expérimentations I. Sidéra & A. Legrand - clichés A. Legrand).
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Fig. 11 : Variabilité morphométrique des stries d'abrasion. 1 - Grès : les stries sont larges et rugueuses ; 2 - Calcaire : les stries sont de dimensions plus homogènes ; 3 - Jaspe :
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Fig. 10 : Sciage à la corde et stigmates. 1 - Détail de la gorge ; 2 – Stries (clichés A. Legrand).
1.4.5. Raclage Les traces de raclage apparaissent comme des faisceaux de stries profondes, continues, régulières, longues, parallèles entre elles et associées à des faisceaux de stries plus fines (Semenov 1964 ; Newcomer 1974 ; Murray 1982 ; Peltier 1986 ; Campana 1989 ; Sidéra 1993 a ; Christidou 1999, 2004). Les stries sont rarement droites mais plutôt ondulées car le mouvement exécuté n’est pas toujours linéaire en raison de la granulométrie et de la texture de la pierre utilisée, de la morphologie du tranchant lithique et de la topographie de la surface osseuse (Campana 1989, p. 31).
1.4.4. Abrasion L’abrasion oblique ou perpendiculaire à l’axe principal des fibres de l’os favorise une usure rapide de la surface pouvant provoquer de véritables facettes d’abrasion (Campana 1989, p. 32-33). Les récentes études tracéologiques ont démontré l’influence de la nature de la pierre abrasive (granulométrie, dureté et texture) et de l’ajout ou non d’eau et de sable, sur la formation des stries d’abrasion (Christidou 1999, 2004). 25
Un dernier point relatif à la distinction, sur les pièces archéologiques, des stries d’abrasion et des stries de raclage, mérite d’être discuté. Cette distinction a longtemps reposé, entre autres, sur l’orientation des stries : les stries transversales étaient associées à l’abrasion et les stries longitudinales, au raclage. Or, l’examen ou le réexamen de certaines collections archéologiques montre que cette logique n’est pas toujours valable (com. pers. I. Sidéra). En outre, l’altération des stries et/ou leur faible développement sur la pièce ajoutent à cette confusion. En revanche, si l’on examine ces stries et en particulier leurs bords et leur fond au microscope optique à réflexion à des grossissements de 100x et 200x, des différences apparaissent. Les stries de raclage présentent des bords droits et un fond finement strié et légèrement brillant. Les bords des stries d’abrasion sont incurvés et leur fond est non strié et rugueux (Christidou 2004, p. 56) (fig. 12).
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Fig. 13 : Perforation par rotation alternative à la main. 1 – Détail du chas ; 2 – Stries (clichés A. Legrand).
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Fig. 14 : Perforation par rotation alternative au foret. 1 – Détail du chas ; 2 – Stries (clichés A. Legrand).
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1.4.7. Évidage
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L’évidage concerne exclusivement les objets en bois de cervidé. « L’évidage consiste à enlever la matière spongieuse médullaire pour l’aménagement des douilles, mortaises et perforations longitudinales. Il se pratique à l’outil en silex en un mouvement tournant de la main » (Billamboz 1977, p. 102).
Fig. 12 : Caractéristiques des stries de façonnage à fort grossissement. 1 – Stries de raclage ; 2 – Stries d’abrasion (clichés A. Legrand) (n° de catalogue Kh95 10007.2).
1.4.8. Traitement thermique
1.4.6. Perforation
Le traitement thermique a été identifié à Khirokitia sur une trentaine de pièces (Stordeur 1984, p. 138). Les surfaces sont vernies et présentent des colorations allant du brun-rouge au noir. La coloration de la surface et sa brillance sont les principaux indices d’identification de cette pratique. Toutefois, il semble aujourd’hui que ces caractères ne suffisent plus à eux seuls pour démontrer clairement la pratique de la chauffe. En effet, si pour certaines pièces dont la surface mais surtout la section de l’os sont de coloris brun foncé ou noir, le traitement thermique est évident, la coloration brune de la surface comme la brillance peuvent résulter de tout autre phénomène taphonomique (Franchet 1933). Pour tenter d’identifier précisément l’usage du traitement thermique et ainsi de pouvoir en définir l’ampleur au sein des collections archéologiques, des protocoles d’analyses géo-chimiques commencent à se mettre en place (Maurer 2002).
À Khirokitia, deux techniques de perforation ont été identifiées sur les aiguilles à chas et les outils perforés : la perforation par rotation alternative à la main et la perforation par rotation alternative au foret (Stordeur 1984, p. 137-138). Les caractéristiques morphologiques du chas ainsi que les traces techniques liées à ces techniques sont bien documentées (Stordeur 1977 b, 1979). Néanmoins, en raison du nombre important d’aiguilles retrouvées à Khirokitia, ces deux techniques ont été expérimentées et les traces obtenues examinées. Dans le cas d’un percement à la main, le chas est plus ou moins régulier et les stries, localisées sur sa paroi interne, sont souvent irrégulières et entrecroisées (fig. 13). Lors d’un percement au foret, le chas est, au contraire, parfaitement circulaire et les stries sont régulières, concentriques et parallèles entre elles (Stordeur 1977 b, p. 255) (fig. 14).
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s’intègre, plusieurs spécialistes de l’os s’engagent dans cette voie (par exemple, Newcomer 1977 ; StordeurYedid 1974, 1983, 1988 b ; d’Errico et al. 1984, d’Errico et Giacobini 1985, 1986 ; Stordeur et Anderson-Gerfaud 1985 ; Julien 1985, 1986 ; Peltier 1986 ; Peltier et Plisson 1986 ; Campana 1979, 1989 ; Lemoine 1989 ; Sidéra 1989). C’est la caractérisation macroscopique de l’usure au microscope stéréoscopique à faible grossissement (de 10x à 80x) qui est alors privilégiée. Sous l’influence de la tracéologie lithique, l’analyse des surfaces conduite à fort grossissement (100x, 200x, 500x) au microscope optique à réflexion se développe progressivement. A. Peltier est la première à proposer un protocole d’analyse microscopique conduit au microscope optique à réflexion et fondé principalement sur la caractérisation du poli. Ce protocole qui s’appuie sur la méthodologie mise en place par H. Plisson en tracéologie lithique (1985), est dans un premier temps validé sur des surfaces osseuses expérimentales (Peltier 1986 ; Peltier et Plisson 1986). Les critères utilisés pour caractériser le poli – étendue, trame, coalescence, texture et luisance – lui permettent d’attribuer à une nature et à un état de matière travaillée, un poli spécifique. Des analyses chimiques de résidus ou une recherche de phytolithes sont, par ailleurs, réalisées au M.E.B. lorsque l’état de conservation des surfaces de la pièce était satisfaisant mais aussi et surtout lorsque la problématique suivie rendait son utilisation nécessaire (d’Errico et al. 1984 ; d’Errico et Giacobini 1985, 1986 ; Stordeur et Anderson-Gerfaud 1985 ; Lemoine 1989 ; Olsen 1989 ; Runnings et al. 1989). Ces différents objectifs, approches et moyens d’analyse ont ainsi permis d’établir des critères d’observation macro- et microscopiques qui serviront de base voire d’acquis aux recherches futures.
Le traitement thermique pose outre le problème de son identification, celui de la compatibilité entre l’usage du feu et les matières osseuses. Selon la température, la structure de l’os s’altère de façon plus ou moins accentuée, les fibres de collagène disparaissent fragilisant ainsi la matière et la rendant cassante (Shipman et al. 1984, p. 321). Les différents essais conduits par I. Sénépart (1991, p. 49), et I. Sidéra (2001 a, p. 53), aboutissent, en effet, bien souvent à la cassure de l’objet chauffé. Or, les outils archéologiques reconnus comme intentionnellement chauffés ont été, pour une grande partie, utilisés et parfois même de façon intensive sans qu’il y ait eu ou très peu de fractures d’usage (Ibid., p. 53). 2. ANALYSE FONCTIONNELLE 2.1. État actuel des recherches Les années 1960 : Une nouvelle approche C’est à S.A. Semenov que nous devons en 1964 les premiers travaux sur la fonction des outils lithiques et osseux. Sa méthode s’appuie sur la reconnaissance de stigmates d’usure macro- et microscopiques observés sur les parties actives des outils. Il démontre à partir d’un référentiel expérimental que ces stigmates forment, en fonction des gestes et des matières travaillées, des combinaisons caractéristiques de leur utilisation. Aussi, la fonction des objets n’est-elle plus seulement envisagée à partir d’indices morphologiques mais s’établit désormais à partir d’une analyse précise des attributs d’usure que sont les éclats, les émoussés, les stries et les polis. Les années 1970 et 1980 : La mise en place des méthodes d’analyse Sous l’influence des travaux de S.A. Semenov, une équipe de chercheurs de l’Université d’Harvard, constituée par R. Tringham et G. Odell, établit en 1974, un programme expérimental sur les outils lithiques incluant l’observation au microscope stéréoscopique à faible grossissement de 10x à 80x, aussi appelée « low power approach ». Ils parviennent à distinguer la dureté du matériau travaillé mais aussi le mode d’action de l’outil. Parallèlement, L.H. Keeley de l’Université d’Oxford développe une méthode d’analyse fondée, cette fois, sur l’observation à fort grossissement (de 100x à 400x) ou « high power approach ». Il est alors possible d’approfondir l’examen des stigmates d’usure comme les polis et les stries et de les attribuer à un mode d’action et à une matière travaillée (Keeley 1980). L’analyse fonctionnelle appliquée à l’outillage lithique se développe principalement à partir de la méthode de L.H. Keeley (par exemple, Anderson 1980 ; Cahen et Caspar 1984 ; Plisson 1985 ; Vaughan 1985 ; Beyries 1988 ; Grace 1989). Ayant compris tout l’intérêt d’une telle approche pour la compréhension fonctionnelle de l’outillage et plus largement celle du système technique dans lequel il
Depuis les années 1990 : Le développement des études fonctionnelles Les études fonctionnelles se développent et les référentiels expérimentaux rassemblant différents types d’outils utilisés selon des modes d’action divers sur une gamme variée de matières travaillées, se multiplient. Certaines méthodes d’analyse particulièrement celles élaborées en macroscopie sont reprises et enrichies. Par exemple, les travaux de I. Sidéra (1993 a) montrent, à partir d’un référentiel expérimental, l’apport de la caractérisation macroscopique de « la déformation mécanique du modelé initial » de la partie active à l’identification du mode d’action et des matières travaillées. L’application de cette méthode est possible sur l’os puisque celui-ci, en raison de ses propriétés plastiques, se déforme bien plus que le silex. Toutefois, malgré une certaine systématisation des traces d’usure selon la matière travaillée et donc d’une certaine fiabilité et représentativité des critères choisis qui font désormais référence, l’analyse macroscopique s’est révélée parfois insuffisante pour identifier précisément l’état de la matière travaillée. En effet, si cette méthode est pertinente sur des outils très usés et déformés, elle l’est moins lorsque l’outil est faiblement usé. L’intérêt d’un
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En raison de la fréquence des outils pointus dans les corpus archéologiques étudiés, un examen microscopique des surfaces a été privilégié. En effet, les attributs d’usure macroscopiques observés sur ces outils, le plus souvent des émoussés, s’avèrent bien souvent insuffisants pour déterminer avec précision la nature de la matière travaillée en raison notamment de leurs similarités (Sidéra 1993 a). En outre, la partie active de ces outils qui montre très peu de variation morphologique, peut tout aussi bien être adaptée à une utilisation par percussion indirecte, par pression ou par rotation, sur une grande variété de matériaux. La multifonctionnalité de ces outils apparaît donc comme un obstacle que les spécialistes ont souvent cherché à surmonter en faisant appel aux données ethnographiques. Ainsi, on leur a prêté différentes fonctions relatives au travail des peaux ou au montage des vanneries, mais la documentation tracéologique sur laquelle se sont appuyées ces propositions, était incomplète. Considérant ces différents obstacles, une analyse microscopique des surfaces qui permet d’isoler efficacement des attributs d’usure représentatifs d’une action et d’une matière travaillée, a été mise en place. Toutefois, les attributs d’usure macroscopiques liés à la déformation des volumes n’ont pas été négligés.
examen à fort grossissement pour approfondir les observations de surface apparaît alors de manière flagrante. Les études futures vont donc davantage axer leur démarche sur la complémentarité de ces deux échelles d’observation. Les analyses microscopiques de surface se développent pourtant les attributs d’usure utilisés sont encore aujourd’hui sujets à discussion, malgré un objectif commun : caractériser les éléments qui participent à l’usure des surfaces osseuses. En 1994, Y. Maigrot combine l’observation macro- et microscopique des surfaces osseuses au microscope stéréoscopique (grossissements jusqu’à 130x) en s’appuyant sur les méthodes d’analyse développées par I. Sidéra en macroscopie et par A. Peltier et H. Plisson en microscopie (Maigrot 1994, 1997). Sa démarche est ensuite généralisée aux autres matières osseuses comme l’ivoire et le bois de cervidé (Maigrot 1995, 2003). Les attributs microscopiques utilisés, instaurés à l’origine pour les matières lithiques, sont directement appliqués aux surfaces osseuses. Pourtant, les propriétés physiques et mécaniques des matières osseuses engendrent des modifications de surface bien différentes de celles rencontrées sur les outils en silex. En 1999, R. Christidou s’inspire des travaux des taphonomistes (Shipman 1993) et des lithiciens (Gonzáles Urquijo et IbáĖez Estévez 1994) pour mettre en place une nouvelle méthode d’analyse microscopique à des grossissements systématiques de 100x et de 200x (Christidou 1999). Celle-ci rend compte, par les attributs d’usure choisis - topographie, microrelief, dépressions linéaires et non linéaires - de la variation morphologique et dimensionnelle des éléments d’abrasion qui jouent un rôle essentiel dans la description des usures puisqu’ils en constituent une caractéristique principale. Au côté de ces études de séries, des analyses microscopiques ponctuelles qui s’attachent à résoudre des problématiques précises liées à une morphologie particulière de pièces ou à des traces spécifiques d’origine technique ou taphonomique, sont réalisées au microscope optique à réflexion ou au M.E.B. (d’Errico 1991, 1993, 1996 ; Meneses Fernández 1993 ; d’Errico et al. 1995 ; Aimar et al. 1998 ; d’Errico et Villa 1998, 2004 ; Christidou 2001 a ; Olsen 2001 ; d’Errico et Blackwell 2003 ; Villa et d’Errico 2004).
2.2.2. Les moyens d’observation L’examen tracéologique des pièces a été conduit à l’œil nu, au microscope stéréoscopique (Nikon SMZ1500, grossissements de 10x à 130x) et au microscope optique à réflexion (Nikon Eclipse ME600, grossissements de 100x et de 200x). Les observations réalisées ont pu être documentées par de nombreux clichés obtenus grâce à l’utilisation d’une caméra numérique (AxioCam Zeiss) reliée à un ordinateur. L’analyse d’image n’a pas été utilisée dans ce travail. Elle est encore très rarement exploitée en tracéologie osseuse, mais semble pouvoir, d’après les quelques essais réalisés, constituer une voie de recherche prometteuse. Quelques tests en profilométrie ont notamment été effectués par Y. Maigrot (2003, p. 121). L’analyse des niveaux de gris qui composent l’image permet de restituer le profil d’une surface usée. Dans le cadre de ce travail, l’apport de l’image binaire – image constituée uniquement par deux niveaux de gris – à une lecture plus efficace des surfaces, a été testé (fig. 15). Les étapes successives du traitement de l’image permettent d’isoler les différents éléments de la surface examinée d’après leur forme et leur taille. Leur agencement est alors mieux visualisé. Mais différents problèmes liés à la conservation et à la nature des surfaces osseuses et des traces d’usure freinent pour l’instant l’application systématique de ce type d’analyse. Par exemple, les dépressions naturelles présentes sur la surface osseuse et appelées ostéones, peuvent être confondues avec les dépressions non linéaires créées par l’usure. Il en est de même pour toutes les dépressions liées aux altérations taphonomiques. Le comptage automatique des éléments relatifs à l’usure à
2.2. Méthode d’analyse des usures 2.2.1. Orientation de l’analyse dans le cadre de l’étude des industries osseuses de Chypre La démarche fonctionnelle entreprise ici, repose sur une analyse objective qui s’appuie non pas sur la morphologie de l’objet, qui peut dans certains cas suggérer une fonction, mais sur les stigmates d’usure observés. Elle s’applique restrictivement à l’os puisque l’ivoire et le bois de cervidé ne sont que très faiblement représentés dans les corpus archéologiques examinés.
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partir d’une image binaire devient alors difficile. Il est donc nécessaire, avant d’effectuer toute opération de comptage ou de mesure, d’éliminer les éléments parasites sans perdre l’information recherchée. Ce n’est qu’après ce travail préliminaire qui demande à la fois une bonne maîtrise de l’analyse d’image et un investissement certain en temps, que l’examen peut débuter. Déjà bien avancée sur l’outillage lithique (Grace et al. 1985 ; Vila et Gallart 1993 ; Yamada et Sawada 1993 ; Gonzáles Urquijo et IbáĖez Estévez 2003), l’analyse d’image constitue, pour la tracéologie fonctionnelle, une approche novatrice sur laquelle nous pourrons nous appuyer pour développer à terme un programme d’analyse adapté aux matières osseuses.
délinéation concave du bord actif marque aussi les racloirs de potiers (Sidéra 1993 a, 2001 b ; Martineau et Maigrot 2004 ; Sidéra et Claustre sous presse). Différentes altérations du volume – émoussés, éclats d’usage et écrasements – sont à l’origine de ces déformations. Ce sont ces altérations, et plus particulièrement leur localisation, leur morphologie et leur intensité, qui vont maintenant être détaillées. Les émoussés Les émoussés sont directement liés au frottement répété de l’outil contre un matériau ce qui provoque à plus ou moins long terme une perte de matière à l’endroit du contact et donc une transformation du volume initial de la partie active (Semenov 1964 ; Peltier 1986 ; Peltier et Plisson 1986 ; Campana 1989 ; Sidéra 1989, 1993 a ; Maigrot 1997 ; Christidou 1999). Selon différents paramètres que sont la nature de la matière travaillée, son état, le mode d’action de l’outil, sa position par rapport à la matière, le temps d’utilisation, l’ajout de matières abrasives, etc., la localisation, la morphologie et l’intensité des émoussés varient. Par exemple, plus la matière est souple et enveloppante, plus l’émoussé est envahissant. De même, plus le temps d’utilisation est long, plus l’émoussé est prononcé, à condition bien sûr que le mode d’action soit inchangé (Campana 1989 ; Sidéra 1993 a ; Christidou 1999). D’après les données expérimentales publiées, l’ajout de matières abrasives – ocre ou cendre – accentue encore l’émoussé (Stordeur 1983 ; Peltier et Plisson 1986 ; Sidéra 1993 a ; Christidou 1999).
Ostéone
Dépressions non linéaires
1
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Fig. 15 : Image binaire. 1 - Cliché original ; 2 – Cliché traité (grossissement 100x - clichés A. Legrand ). 2.2.3. Les attributs d’usure
Selon la position de l’outil par rapport à la matière, la localisation des émoussés varie. Si l’outil agit perpendiculairement à la matière, l’émoussé est symétrique. Il affecte alors en fonction de la longueur de pénétration de l’outil dans la matière, la partie active c’est-à-dire l’apex ou le taillant, les arêtes de la pointe ou les bords du tranchant, et les faces de la pointe qui désignent la surface située entre deux arêtes ou celles du tranchant. Si au contraire l’outil est maintenu en oblique, l’émoussé est asymétrique. Il est alors plus développé sur une face de l’outil. Dans ce cas, une facette de profil droit ou bombé peut se former à l’endroit précis du contact (Stordeur 1983 ; Sidéra 1993 a ; Christidou 1999) (fig. 16). Cette facette se rencontre généralement sur les outils tranchants mais elle peut également affecter les apex comme nous le verrons sur les aiguilles à chas de Khirokitia. La longueur de cette facette est variable selon l’ouverture de l’angle de dépouille dans le cas d’un raclage en coupe positive et de l’angle d’attaque dans le cas d’un raclage en coupe négative (pour une définition des coupes positives et négatives voir Gassin 1996, fig. 8). Précisons que dans ces deux cas, des résidus de matière peuvent se trouver en contact avec la face opposée, pouvant aussi entraîner la formation d’une seconde facette. Mais celle-ci est alors toujours plus discrète. Enfin, lorsque l’outil est utilisé parallèlement à la matière et que l’une des faces de l’outil sert de zone active, l’émoussé affecte la surface et en premier lieu ses
Pour appréhender et caractériser la déformation du volume de la partie active et les altérations de surface, plusieurs attributs d’usure, déjà éprouvés lors de précédents travaux (Sidéra 1993 a ; Christidou 1999), ont été retenus, auxquels sont venus s’ajouter de nouveaux attributs. 2.2.3.1. Les altérations du volume En raison des propriétés physiques et mécaniques de l’os qui allient plasticité, résistance et élasticité, le « volume initial de la pièce » enregistre, au cours de l’utilisation, un certain nombre de déformations macroscopiques plus ou moins développées (Sidéra 1993 a, p. 206). Le raffûtage des objets peut accentuer ces déformations puisqu’il intervient généralement sur les zones usées. Les objets prennent alors des morphologies différentes de l’initiale qu’il convient de caractériser puisqu’elles reflètent, déjà en partie ou totalement, l’action voire le matériau travaillé. Par exemple, la course d’un outil pointu peut être matérialisée par une déformation sous forme d’un rétrécissement symétrique de l’apex qui conduit à l’individualiser du fût de l’outil (Ibid., fig. 89). Certains racloirs utilisés sur des matériaux étroits et bombés, présentent sur leur bord une concavité caractéristique qui renvoie directement à la morphologie convexe du matériau travaillé (Sidéra 1993 a, 2000). La
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alors très avancée puisque sa morphologie est totalement différente de celle obtenue après façonnage. Par ailleurs, si la longueur de pénétration est importante et le temps d’utilisation assez long, les traces de façonnage s’émoussent et les arêtes de la pointe se lissent progressivement puis disparaissent (Sidéra 1993 a ; Christidou 1999) (fig. 19). Parfois, si le contact avec la matière est localisé et continu, la pointe se dégage du fût de l’outil et matérialise ainsi la course de celui-ci dans la matière travaillée. Sur un outil tranchant, le fil et les bords du taillant s’arrondissent progressivement. Différents types d’émoussés ont été décrits par A. Peltier (Peltier et Plisson 1986). Elle distingue des émoussés symétriques, asymétriques, à facettes bombées et à facettes planes. Y. Maigrot propose également de caractériser la morphologie des émoussés de surface observés sur « la partie immédiatement supérieure de la face en contact avec la matière travaillée » (Maigrot 1997, p. 204). Les émoussés de surface plane s’opposent alors aux émoussés de surface courbe (Ibid. 97, fig. 14).
éventuelles parties saillantes. La zone de contact devient alors plus ou moins plane donnant à la surface un aspect en facette ou bombé (fig. 17). Ce type de formation a, par exemple, été reconnu sur des outils utilisés par frottement contre de l’argile ou de la peau sèche ocrée (Christidou 1999, p. 322). Certains outils comme les outils de potiers utilisés pour le façonnage de poteries présentent sur leurs bords un émoussé parfois important, à l’origine d’une concavité qui s’accentue progressivement au cours du travail (Sidéra 1993 a, 2001 b ; Sidéra et Claustre sous presse) (fig. 18).
10x
Fig. 16 : Plage de frottement plane observée sur l'une des faces d'un outil tranchant expérimental utilisé pour écorcer des branches de feuillu vert (n° L4) (cliché A. Legrand).
5x
Fig. 17 : Plage de frottement bombée observée au centre de la face de contact sur un outil tranchant expérimental utilisé pour lisser une céramique (n° T20) (cliché A. Legrand).
1
3
2
Fig. 19 : Schématisation de l'évolution de l'émoussé des arêtes d'une pointe. 1 - État initial de la pointe, les arêtes sont aigues ; 2 - Les arêtes sont émoussées ; 3 - Les arêtes disparaissent. Le temps d’utilisation et la nature abrasive de la matière travaillée entraînent une variabilité de l’intensité des émoussés. On distingue différents degrés d’émoussés (fig. 20) : 1/ le degré faible qui correspond à une déformation peu avancée de la partie active ; 2/ le degré modéré à l’origine d’une déformation avancée ; 3/ le degré important à l’origine d’une déformation très avancée de la partie active.
Fig. 18 : Racloir de potier de Corbèresles-Cabanes "grotte de Montou" (Montbolo-Pyrénées orientales, fouilles F. Claustre). À un grossissement de 40x, on observe sur le bord, de nombreuses stries larges, longues et rectilignes (Sidéra et Claustre sous presse). Sur un outil pointu ou tranchant, le frottement peut produire des émoussés de morphologie plus ou moins convexe, plate ou concave. Dans le cas d’une pointe, l’apex perd son acuité au cours de l’utilisation et s’arrondit pour devenir convexe ou plus ou moins plat. La déformation du volume initial de l’extrémité est
1
2
3
4
Fig. 20 : Schématisation du degré d’émoussé de l’apex d’une pointe. 1 - État initial ; 2 - Émoussé faible ; 3 - Émoussé modéré; 4 - Émoussé important. 30
Pour caractériser les émoussés qui affectent les perforations de certains outils, la même grille de lecture se rapportant à leur localisation, leur morphologie et leur intensité, est utilisée. Qu’il s’agisse du chas d’une aiguille ou de la perforation d’une perle, le frottement répété du lien enfilé ainsi que le contact avec la matière produisent un émoussé localisé sur la paroi interne de la perforation et/ou sur ses bords latéraux, aussi appelés branches (Stordeur-Yedid 1979, d’Errico 1993 ; Sidéra et Giacobini 2002, Bonnardin 2003) (fig. 21). L’émoussé de la paroi interne de la perforation se manifeste par un arrondi progressif de l’arête qui constitue la jonction entre les deux cônes de forage (Stordeur-Yedid 1979, p. 151). À terme, celle-ci peut totalement disparaître (fig. 22). De même, les branches de la perforation peuvent s’émousser. Dans des cas d’usure extrême, l’émoussé gagne les parties supérieure et inférieure de la perforation. La morphologie initiale de cette dernière est alors totalement modifiée. Elle peut être élargie ou même décentrée en fonction de la localisation et de l’intensité de l’émoussé. Les bords ou l’extrémité proximale de la perforation ainsi fragilisés, finissent par se briser (Ibid., p. 151) (fig. 23).
Bord ou branche
1
3
2
Fig. 23 : Schématisation de l’évolution de l'émoussé d’une perforation. 1 - État initial ; 2 - Les branches s'émoussent et la perforation se déforme ; 3 – La perforation est totalement déformée et son extrémité proximale se brise. Les éclats d’usage À la suite des premiers travaux en tracéologie lithique, les éclats d’usage ont souvent été considérés comme représentatifs du mode d’action de l’outil et/ou de la dureté de la matière travaillée (Semenov 1964 ; Tringham et al. 1974). Mais ils peuvent également résulter d’un processus d’usure plus ou moins avancé dans lequel le temps d’utilisation joue un rôle majeur. Enfin, les éclats peuvent apparaître lorsque la partie active est fragilisée par une ligne de faiblesse de l’os ou bien lorsque le mouvement opéré est mal maîtrisé. Les dimensions, la morphologie et la localisation des éclats rencontrés sur les objets osseux ont été formalisées dans une typologie (Stordeur 1983, p. 238) (fig. 24). Les « écaillures » sont des éclats en série, de petite taille qui modifient peu le contour de l’extrémité active. Les « ébréchures » sont des éclats de taille supérieure qui, dispersés sur l’extrémité, modifient son contour. Enfin, les « enlèvements » sont des éclats de taille plus importante, envahissants, superficiels ou profonds qui entraînent une déformation très avancée du contour de l’extrémité active jusqu’à son arrachement. Tous ces éclats peuvent être combinés sur une même partie active.
Partie supérieure
Partie inférieure
Fig. 21 : Schématisation des différentes parties d’une perforation.
10x
10x
1 1 1
2
3
2 10x
Fig. 22 : Schématisation de l’évolution de l'émoussé de l'arête qui marque la jonction entre les cônes de forage d’une perforation. 1 - État initial ; 2 - L'arête est émoussée ; 3 - L'arête a disparu.
Fig. 24 : Les éclats d’usage. 1 – Les écaillures ; 2 – Les ébréchures ; 3 – Les enlèvements (clichés A. Legrand). 3
31
surface proximale. Si elle est oblique, il est unilatéral ou périphérique. L’utilisation d’un percuteur dur produit de petits arrachements de matière nommés cupules. Le relief de la surface est également transformé, il apparaît bombé ou plat et brillant. En fonction du temps d’utilisation et de la force déployée, l’écrasement peut s’accompagner d’un repli des fibres qui débordent alors du fût de l’outil mais aussi d’enlèvements localisés sous le plan de frappe (fig. 27). Les stigmates sont moins significatifs quand ils résultent d’une percussion avec un percuteur tendre. La zone percutée est brillante et progressivement lissée (Sidéra 1993 a, p. 204 ; Christidou 1999, p. 330).
Les écrasements Les écrasements peuvent être localisés aux deux extrémités d’un outil. Lorsqu’ils sont présents sur l’extrémité active, ils résultent d’un choc ou d’une forte pression. Ceux situés sur la surface proximale indiquent une utilisation de l’outil en pièce intermédiaire. En fonction de la position de l’outil par rapport à la matière travaillée, du mode d’action, de la dureté du matériau travaillé et de la durée d’utilisation, les écrasements présentent des morphologies et des localisations variées. Examinons tout d’abord les écrasements situés sur l’extrémité active. Si l’outil est utilisé perpendiculairement à la matière travaillée, l’écrasement affecte l’ensemble de l’extrémité qui devient alors plate (fig. 25-1). Si l’outil est utilisé obliquement par rapport à la matière, l’écrasement envahit plus intensément l’un des bords ou l’une des faces de l’extrémité et lui confère une morphologie déjetée (fig. 25-2). Dans les deux cas, au cours de l’utilisation, l’écrasement s’intensifie et un bourrelet se forme (fig. 26-1). À terme, les fibres de l’os s’individualisent et se replient (fig. 26-2). Ces différentes formations résultent en réalité d’un même processus d’usure : 1/ écrasement ; 2/ formation du bourrelet ; 3/ repli et arrachement des fibres.
32x
1
1
2
Fig. 27 : Écrasement de la surface proximale d’un outil utilisé en pièce intermédiaire avec un percuteur dur. 1 – Vue de face ; 2 – Vue de profil (clichés A. Legrand).
2.2.3.2. Les altérations de surface Pour caractériser les altérations de surface et appréhender les processus d’usure des surfaces, la méthodologie mise en place par R. Christidou (1999) a été adoptée. L’observation microscopique de ces altérations est essentiellement réalisée à deux échelles de grossissements : 100x et 200x (fig. 28). À 100x, on examine la topographie de la surface usée. Il s’agit d’appréhender l’ensemble de la surface, c’est-à-dire l’agencement des dépressions et des élévations ainsi que leur variété morphologique et directionnelle. À 200x, on caractérise le degré d’usure du microrelief. À ce même grossissement, les élévations et les dépressions sont détaillées. Pour les premières, il s’agit de caractériser leur aspect, leur texture et leur brillance. Pour les secondes, on examine leur morphologie, leur dimension et l’aspect de leurs bords et de leur fond.
2
Fig. 25 : Morphologie des écrasements localisés sur l’apex. 1 – À plat ; 2 – Oblique (clichés A. Legrand).
1
2 1
32x
32x
32x
10x
5x
La topographie La topographie de la surface osseuse naturelle est parfois modifiée par différentes opérations de façonnage. On sait, en effet, que les techniques de façonnage (abrasion, raclage), le type d’outils (éclat brut, lame retouchée, outil métallique) et la nature de la pierre utilisée (grès, silex, obsidienne) modifient différemment le relief de la surface (d’Errico et Giacobini 1985 ; Peltier et Plisson 1986 ; Christidou 1999, 2004 ; Christidou et Legrand 2005 ; Cristiani et Alhaique 2005). Par exemple, une surface abrasée présente des dépressions profondes et larges accentuant l’altitude des élévations. Sur une surface raclée, le relief est moins prononcé (Christidou
2
Fig. 26 : Écrasement de la partie active et processus d’usure. 1 - Formation d’un bourrelet ; 2 – Individualisation et repli des fibres de l’os (clichés A. Legrand). Les écrasements de la surface proximale diffèrent en fonction de la position de l’outil par rapport à la matière et du type de percuteur utilisé. Si la percussion posée est perpendiculaire, l’écrasement est localisé au centre de la 32
élévations d’une surface. Selon leur degré d’usure, trois types de microreliefs ont été définis (Christidou 1999, p. 313) : 1/ le « microrelief irrégulier » : l’usure d’ensemble de la surface est faible, seules les plus hautes élévations sont usées (fig. 30-1) ; 2/ le « microrelief homogène » : l’usure d’ensemble est plus importante, elle est modérée, les élévations sont nivelées de façon homogène (fig. 30-2) ; 3/ le « microrelief régulier » : l’usure d’ensemble est maximale, les élévations disparaissent, la surface est lisse (fig. 30-3).
2004, p. 56). La formation mais surtout la distribution et le développement de l’usure sont alors influencés par la topographie issue du façonnage. C’est à partir de la topographie de la surface usée que l’on caractérise, à un grossissement de 100x, sa régularité (Christidou 1999, p. 312). La topographie est régulière si la morphologie des dépressions et des élévations, leur distribution et leur disposition, c’est-à-dire leur agencement, sont homogènes (fig. 29-1). La topographie est irrégulière si la morphologie, la distribution et la disposition de ces formations sont hétérogènes (fig. 29-2). Les stries sont alors pluridirectionnelles, de morphométries variées, associées à des dépressions non linéaires tout aussi diverses.
200x
200x
Dépressions non linéaires Stries
Caractérisation de la topographie à 100x
1
2 200x
Fig. 30 : Microrelief. 1 – Irrégulier ; 2 – Homogène ; 3 – Régulier (clichés A. Legrand).
Caractérisation des élévations et des dépressions à 200x
Observation d’une partie de la surface de l’objet
Coupe transversale
3 Restitution empirique du profil de la surface examinée
Les élévations Les élévations sont ensuite détaillées à un grossissement de 200x. Différents critères – aspect, texture et brillance – sont utilisés pour les caractériser. L’aspect rend compte de la morphologie de l’élévation. Il est bombé ou plat (fig. 31). La texture des élévations est évaluée en fonction de la fréquence et de la variabilité morphologique des dépressions linéaires et non linéaires qui les affectent. Si celles-ci sont nombreuses, variées et plutôt profondes, la texture des élévations est grenue (fig. 32-1). Si au contraire, elles sont discrètement présentes voire quasiment absentes, la texture des élévations est lisse (fig. 32-2). La brillance des élévations varie entre le terne, le brillant et le verni (fig. 33).
Élévations Dépressions
Fig. 28 : Méthode d’analyse microscopique des surfaces. 100x
100x
200x
1
200x
2
Fig. 29 : Topographie de la surface usée. 1 – Régulière ; 2 - Irrégulière ( clichés A. Legrand). Le microrelief L’examen de la surface se poursuit à un grossissement de 200x. On y observe tout d’abord le microrelief qui se définit comme l’ensemble des
1
2
Fig. 31 : Aspect des élévations. 1 – Bombé ; 2 – Plat (clichés A. Legrand).
33
200x
échelle, on peut également observer des stries continues ou discontinues (fig. 36).
200x
32x
32x
1
2
Fig. 32 : Texture des élévations. 1 – Grenue ; 2 – Lisse (clichés A. Legrand). 1
Fig. 34 : Orientation des stries d’utilisation. 1- Perpendiculaire à l’axe de l’objet ; 2 – Parallèle à l’axe de l’objet (clichés A. Legrand).
200x
200x
2
200x
200x
1
2 200x
Les stries
Fig. 33 : Brillance des élévations. 1 – Terne ; 2 – Brillante ; 3 - Vernie (clichés A. Legrand).
1
2 200x
3
Les stries d’utilisation Les stries sont des dépressions linéaires qui rendent compte de la position de l’outil lors de l’action et de sa cinématique (Semenov 1964 ; Peltier 1986 ; Peltier et Plisson 1986 ; Campana 1989 ; Sidéra 1993 a ; Maigrot 1997 ; Christidou 1999). Elles sont examinées à deux échelles d’observation. À l’échelle macroscopique, on apprécie leur fréquence, leur distribution, leur localisation, leur étendue, leur orientation par rapport à l’axe principal de l’outil, leur morphologie et leur organisation (fig. 34). À l’échelle microscopique, on évalue leurs dimensions. Les stries fines ont une largeur égale ou inférieure à 1 micromètre, les stries larges ont une largeur supérieure. L’observation de la surface s’effectuant en plan et non en trois dimensions, la profondeur des stries ne peut être qu’estimée et non mesurée. On parlera de stries profondes ou superficielles. Dans un second temps, on caractérise, à partir des stries larges, l’aspect des bords et du fond. Les bords sont anguleux ou émoussés. Le fond est rugueux, partiellement lisse ou totalement lisse (fig. 35). À cette
3
Fig. 35 : Aspect des bords et du fond des stries. 1 – Bords anguleux et fond rugueux ; 2 – Bords émoussés et fond partiellement lisse ; 3 – Bords très émoussés et fond lisse (clichés A. Legrand).
200x
1
200x
2
Fig. 36 : Types de stries. 1 - Stries continues ; 2 – Stries discontinues (clichés A. Legrand).
34
2.2.4.1. Les zones d’usure Une pièce fraîchement fabriquée présente des stries de façonnage profondes, rugueuses, au relief accentué et des arêtes de façonnage saillantes. Au cours de l’utilisation, ces stries et ces arêtes s’émoussent progressivement jusqu’à leur effacement complet. Sur une même pièce, on peut observer un effacement homogène de ces éléments comme différents niveaux d’effacement, on établit alors un séquençage de la partie usée en différentes zones d’usure. Le repérage de ces zones s’effectue à l’échelle macroscopique à un grossissement de 32x. On distingue : 1/ la zone d’usure 1 qui correspond à la partie de l’outil la plus sollicitée lors de l’utilisation, c’est-à-dire l’apex ou le taillant. Le degré d’effacement des stries de façonnage y est nécessairement le plus important. À l’inverse, plus on s’éloigne de cette zone, moins les stries sont émoussées ; 2/ la zone d’usure 2 qui se définit comme une zone de frottement intermédiaire ; les stries de façonnage y sont persistantes mais souvent émoussées, leur degré d’effacement est modéré ; 3/ la zone d’usure 3 qui représente la zone d’extension maximale de l’usure. Les stries de façonnage sont à peine émoussées, leur degré d’effacement est faible. Le repérage des zones permet d’apprécier le développement de l’usure et de le caractériser. Si une seule zone d’usure est mise en évidence, le développement de l’usure est homogène. Au contraire, si plusieurs zones d’usure ont été définies, le développement est dégressif. La notion du développement de l’usure est rarement évoquée dans les travaux en tracéologie osseuse, pourtant, elle est essentielle puisque la présence d’une ou de plusieurs zones d’usure correspond aux différents paramètres qui interviennent dans la formation de l’usure. Cette méthode de travail qui isole chaque zone d’usure pour définir séparément leurs caractères macro- et microscopiques conduit à une analyse dynamique du développement de l’usure le long de la partie active d’un outil donné. Elle permet aussi de mesurer avec précision l’étendue de l’usure à condition que celle-ci soit nette ce qui n’est pas toujours le cas. Ajoutons enfin que cette caractérisation fondée sur le degré d’émoussé des stries de façonnage, prévaut pour les objets façonnés. Si les objets ne sont pas ou peu façonnés d’autres attributs macroscopiques comme l’émoussé des arêtes, les stries d’utilisation et les dépressions non linéaires, sont utilisés pour faire apparaître la ou les zones d’usure.
Les dépressions non linéaires En fonction de leur taille, les dépressions non linéaires sont appelées cratères ou microtrous. Les premiers étant plus grands que les seconds inférieurs au micromètre. La grille de lecture employée pour les caractériser est identique à celle utilisée pour les stries. À l’échelle macroscopique, seuls les cratères sont caractérisés, les microtrous n’étant généralement pas visibles (fig. 37-1). À 200x, on apprécie leurs dimensions, l’aspect de leurs bords et de leur fond (fig. 37-2). En raison de leur petite taille, les microtrous ne peuvent être caractérisés qu’en termes de présence et de fréquence. Les cratères sont plus ou moins circulaires ou ovales, il convient donc de les distinguer des ostéones caractérisés par des lamelles concentriques, emboîtées les unes dans les autres (fig. 38) (Barone 1999, p. 53).
64x
1
200x
2
Fig. 37 : Cratères. 1 – À l’échelle macroscopique ; 2 – À l’échelle microscopique (clichés A. Legrand).
200x
Fig. 38 : Ostéone avec lamelles concentriques (flèche noire) (cliché A. Legrand).
2.2.4. Le développement de l’usure : une méthode Pour systématiser l’étude de l’usure, deux méthodes fondées sur le développement de l’usure ont été utilisées. La première consiste à évaluer le développement de l’usure sur chaque pièce en divisant la partie active en zones d’usure (Sidéra et Legrand 2006). Cette méthode s’inspire des travaux de D. Cahen et J.-P. Caspar (1984) et de B. Gassin (1996) pour l’outillage lithique et de ceux de R. Christidou (1999) pour l’outillage osseux. La seconde méthode consiste à séquencer les différentes étapes de l’usure sur un ensemble de pièces données de même nature. On reconstitue ainsi la « chaîne d’usure » (Sidéra et Giacobini 2002).
2.2.4.2. La chaîne d’usure Pour mieux comprendre les processus d’usure, il est également possible de reconstituer la chaîne d’usure sur une même catégorie fonctionnelle d’outils. Il convient alors de les classer selon leur degré d’usure, du plus faible au plus avancé, pour visualiser la progression de l’usure d’un outil à l’autre et mesurer le développement de l’usure à partir d’un ensemble d’objets. Trois stades peuvent alors être définis (Sidéra et Giacobini 2002, fig. 9, p. 223) :
35
concerner alors qu’une seule face de l’outil, ou être bifaciale. Dans ce dernier cas, elle peut être symétrique ou asymétrique selon qu’elle affecte de manière plus prononcée ou plus étendue l’une ou l’autre des faces de l’objet. L’étendue et le développement de l’usure sont ensuite examinés. L’étendue est mesurée de l’extrémité active vers la partie mésiale de l’objet (Peltier et Plisson 1986 ; Sidéra 1993 a ; Maigrot 1997 ; Christidou 1999). À partir des outils étudiés, quatre étendues ont été identifiées : 1/ l’étendue marginale : l’usure affecte la partie active sur une longueur égale ou inférieure à 5 mm ; 2/ l’étendue modérée : l’usure affecte la partie active sur une longueur comprise entre 5 mm et 2 cm ; 3/ l’étendue envahissante : l’usure affecte la partie active sur une longueur supérieure à 2 cm ; 4/ l’étendue couvrante : l’ensemble de la pièce est usé. Le stade d’usure de la partie active de l’outil est enfin défini. Chaque zone d’usure identifiée est ensuite examinée. L’examen fonctionnel débute à l’échelle macroscopique à un grossissement de 32x et de 64x si l’usure est peu développée. Les altérations du volume et les altérations de surface sont alors caractérisées. L’examen fonctionnel se poursuit, ensuite, à l’échelle microscopique. On apprécie à un grossissement de 100x la régularité ou l’irrégularité de la topographie de la surface et à 200x, les éléments qui la composent – élévations et dépressions. Dans un troisième temps, l’usure des parties mésiale et proximale est analysée. On caractérise par exemple les traces de manipulation qui affectent la partie mésiale de l’outil ainsi que les stigmates de percussion localisés sur le plan de frappe.
1/ le stade d’usure 1 désigne une déformation peu avancée de la partie active. Son extrémité et/ou ses bords sont faiblement émoussés et peuvent parfois comporter des écaillures (fig. 39-1) ; 2/ le stade d’usure 2 se manifeste par une déformation avancée de la partie active. L’émoussé est alors plus important et plus envahissant. Il peut aussi être accompagné d’ébréchures ou encore d’enlèvements (fig. 39-2) ; 3/ le stade d’usure 3 désigne une déformation très avancée de la partie active. L’émoussé prononcé affecte l’ensemble de la partie active. Des enlèvements ou des écrasements peuvent également être observés (fig. 39-3). En fonction du degré de développement des stigmates, des formes qu’ils affectent et de leur combinaison, le modelé initial de la partie active est plus ou moins modifié. Précisons que cette classification par degré d’usure s’applique aussi aux parties proximales des outils utilisés en pièce intermédiaire qui présentent des déformations qu’il convient de caractériser.
32x
32x
1
2 32x
Fig. 39 d’usure. 1 d’usure 1 ; d’usure 2 ; d’usure 3 A. Legrand).
:
Stades – Stade 2 – Stade 3 – Stade (clichés
L’usure observée sur les outils expérimentaux (cf. CD joint) et archéologiques a été appréhendée suivant cette démarche. Celle-ci vise à mettre en évidence les similitudes et les différences entre les usures observées pour aboutir à une documentation aussi complète que possible.
3
2.3. Le référentiel expérimental Pour attribuer les stigmates d’usure macro- et microscopiques à un mode d’action et à une matière travaillée, un référentiel expérimental fondé sur des exemples ethnographiques doit être mis en place. Ce référentiel peut soit répondre à une problématique ciblée relative à la morphologie particulière d’un objet ou à un type de traces (Stordeur et Anderson-Gerfaud 1985 ; d’Errico 1993 ; Meneses Fernández 1993 ; d’Errico et al. 1995 ; Legrand 2000 ; Christidou 2001 a), ou encore à une activité spécifique (Meneses Fernández 1994 ; Martineau et Maigrot 2004 ; Christidou et Legrand 2005), soit répondre à une problématique générale posée par un assemblage archéologique constitué de différentes catégories fonctionnelles d’outils. Dans ce dernier cas, les expérimentations réalisées mettront en œuvre plusieurs modes d’action sur différentes matières travaillées
2.2.5. Méthode de description de l’usure Avant de débuter l’examen macro- et microscopique proprement dit, il est nécessaire dans un premier temps de définir la localisation de l’usure sur l’outil, son développement, son étendue et enfin le stade d’usure de la partie active. Pour localiser l’usure et isoler la partie active de l’outil, la nomenclature suivante a été utilisée (Camps-Fabrer et Stordeur 1979) : 1/ la face inférieure de l’objet désigne la face interne de l’os caractérisée par la présence du canal médullaire ou du tissu spongieux ; 2/ la face supérieure lui est opposée ; 3/ la latéralisation de l’objet s’effectue à partir de la face inférieure. L’usure peut donc être unifaciale et ne
36
la distribution des traces sur la partie active varient donc a priori en fonction de la nature de la matière travaillée. À l’issue de l’analyse du référentiel expérimental, il sera intéressant de montrer dans quelle mesure certains attributs d’usure macro- et microscopique sont représentatifs de ces différentes matières travaillées (cf. CD joint).
(Peltier et Plisson 1986 ; Campana 1989 ; Sidéra 1993 a ; Lemoine 1997 ; Maigrot 1997, 2003 ; Christidou 1999). C’est dans cette dernière perspective que se place mon programme expérimental réalisé en grande partie à l’Archéodrome de Beaune grâce au financement de la Société des Autoroutes Paris-Rhin-Rhône et de l’UMR 6130 du CNRS. Les expérimentations ont été conduites par moi-même, seule ou en collaboration, au sein du groupe de travail « Obsidienne, traces et fonctions » dirigé par L. Astruc. Pour certaines activités comme la vannerie ou le tissage qui demandent un savoir-faire particulier, j’ai bénéficié de l’aide de professionnels comme H. Cazé pour la vannerie et M.-P. Puybaret pour le tissage.
D’autres paramètres ont été testés au cours de ces expérimentations afin d’apprécier leur incidence sur la formation des altérations du volume et des surfaces (Gutiérrez Sáez 1993 : 480). Il s’agit du mode d’action (percussion posée directe ou indirecte, percussion lancée) ; de la direction du geste (longitudinal ou transversal) ; du mouvement (unidirectionnel, bidirectionnel ou alternatif) ; de l’angle de travail par rapport à la matière travaillée (perpendiculaire ou oblique) ; de l’état de la matière travaillée (frais, sec ou humide) ; du mode de préhension ; du temps de travail (de 5 minutes à 40 heures) ; du support et de l’ajout de matériaux extérieurs abrasifs (ocre).
2.3.1. Le protocole Quatre-vingt quatre outils – pointes, aiguilles et outils tranchants – composent ce référentiel expérimental. R. Christidou, I. Sidéra et A. Van Gijn ont par ailleurs enrichi ce corpus en mettant à ma disposition leurs propres collections expérimentales. Les espèces que l’on retrouve dans la faune des sites étudiés n’ont pu parfois être exploitées pour des raisons d’accessibilité, c’est précisément le cas du daim. Des os longs de caprinés ou de bœuf – principalement des métapodes – débités en deux ou en quart par sciage et/ou par percussion et façonnés par raclage et/ou par abrasion, ont été utilisés à l’état frais et sec. Ils ont été.
2.3.2. Le travail des matières animales 2.3.2.1. La peau L’outillage osseux qu’il s’agisse d’outils pointus ou d’outils tranchants a souvent été associé soit à l’issue d’une étude fonctionnelle, soit par analogie à un référentiel ethnographique, au travail des peaux (par exemple, Stordeur 1983 ; Julien 1986 ; Sidéra 1993 a, 1993 b ; Maigrot 1997, 2003 ; Christidou 1999 ; Legrand 2003 ; Van Gijn 2005 ; Stordeur et Christidou sous presse). Les données ethnographiques et actuelles sont, en effet, particulièrement abondantes (Gansser 1951 ; Miles 1963 ; Steinbring 1966 ; Jemma 1971 ; Stewart 1973 ; Le Mouël 1977 ; Bird et Beeck 1980 ; Beyries 1999 ; Ibáñez et al. 2002 ; Rodríguez Rodríguez 2002).
La documentation ethnographique ainsi que les données archéologiques et environnementales, particulièrement riches sur le site de Khirokitia, ont guidé la construction de ce référentiel. Diverses actions – perforer, gratter, fendre, entailler, tasser et lisser – ont été réalisées sur trois catégories de matières travaillées : 1 / les matières animales : peau (fraîche, reverdie, tannée et sèche) et os sec ; 2/ les matières végétales : bois sec et vert (feuillu, saule, érable, chêne, noisetier, conifères, épicéa, pin), écorce sèche et humide (chêne), canne sèche et verte, lin, carex et paille de seigle ; 3/ les matières minérales avec l’argile (tabl. 15). Ces matières présentent des propriétés physiques et mécaniques différentes qui varient en fonction de multiples paramètres que sont, par exemple, le taux d’humidité et la température ambiante. Le changement de propriétés en fonction de ces paramètres n’a pas été testé dans le cadre de ces expérimentations. Le degré de variabilité relatif à la souplesse et à l’élasticité des peaux, à la rigidité ou à la ténacité des diverses essences de bois travaillés, ne sera donc pas pris en compte ici. Néanmoins, un premier niveau de hiérarchisation peut être effectué entre les matières souples et les matières plus dures. En effet, on constate que les matières souples comme la peau fraîche, favorisent la pénétration de l’outil dans la matière et enveloppent et épousent la morphologie de l’outil. Au contraire, sur les matières dures comme le bois ou l’os, la pénétration de l’outil dans la matière est quasiment nulle et la zone de contact est restreinte à la seule extrémité active. La formation et
Deux des principales phases du traitement des peaux – l’écharnage et l’assouplissement – ont été expérimentées (Christidou et Legrand 2005). Trente outils, 14 pointes et 16 outils tranchants ont été utilisés sur des peaux fraîches de mouton, de cerf et de vache. Les peaux de mouton et de cerf ont été choisies en fonction des espèces animales présentes sur les sites étudiés. La peau de vache présentait l’intérêt de travailler une peau bien plus épaisse, résistante et élastique. Les peaux ont été, dans un premier temps, perforées pour être ensuite étendues sur un cadre en bois et écharnées. Les pointes ont été utilisées entre 10 et 85 minutes par rotation ou par percussion posée indirecte afin d’observer et de comparer l’étendue et le développement de l’usure sur la partie active mais également les altérations du volume et notamment les traces d’impact. La perforation par rotation est tout à fait efficace sur les peaux fines comme la peau de cerf ou la peau de mouton, en revanche, elle l’est moins sur les peaux épaisses comme la peau de vache (fig. 40-1). Dans ce dernier cas, il est nécessaire de procéder par
37
Actions
Modes d’action
Percussion posée directe
Perforer
Percussion posée indirecte
Gratter
Percussion posée directe
Percussion lancée
Fendre
Percussion posée indirecte
Percussion posée directe Entailler
Percussion posée indirecte
Matières
Durée d’utilisation
N° d’inventaire
Peau fraîche
de 10’ à 85’
P7, P10b, P12, P17, P19, P24
Peau sèche
90’
P22b
Peau tannée
De 15’ à 110’
P16, P22, A1, A3, A7
Os sec
30’
P9, P60
Ecorce humide
20’ et 45’
P5, P20
Ecorce sèche
15’ et 20’
P61, P63
Lin
de 20’ à 40 heures
A2, A4, A5, A6, A20
Carex
15 heures
P28, P29
Paille de seigle
10 heures
P62
Peau fraîche
de 5’ à 70’
1a, 3b, P1, P4, P6, P11, P13, P14
Peau sèche
105’
P26
Peau tannée
10’ et 45’
P15, P31
Ecorce humide
10’ et 20’
P3, P23
Ecorce sèche
15’ et 30’
P2, P30
Peau fraîche
de 10’ à 100’
20a, 21a, 5a1, 5b, L15, Os4, Os9b, Os30, T13, T14, T15, T16, T18
Peau sèche
20’
Os16
Peau reverdie
30’ et 60’
3a, L2
Ecorce humide
40’ et 45’
H1, L4
Peau fraîche
de 40’ à 90’
L3, T11, T12
Bois vert
de 10’ à 25’
Os2, Os6b, Os10, T3, T4
Bois sec
de 10’ à 25’
T2, T5, T7, T9
Canne sec
20’
L5
Canne vert
55’
P8
Bois vert
de 7’ à 40’
Os1, Os5, T6
Bois sec
10’ et 20’
T8, T10
Tasser
Percussion posée directe
Lin
40 heures
P21
Lisser
Percussion posée directe
Argile
90’
T20
Tabl. 15 : Récapitulatif des expérimentations conduites. percussion indirecte (fig. 40-2). Si ce mode d’action présente des avantages certains, il est particulièrement difficile de mesurer et de contrôler la pénétration de la pointe dans la matière, d’autant que celle-ci est particulièrement résistante et qu’il faut donc percuter fortement la base de l’outil. L’écharnage a ensuite été réalisé avec des outils tranchants biseautés ou non dont le taillant est de morphologie convexe, rectiligne ou dentée6. Ces outils
1
2
Fig. 40 : Perforation de peaux fraîches. 1 – Par rotation ; 2 – Par percussion posée indirecte (expérimentations A. Legrand – clichés A. Méjean).
6
Ce type d’outil a été remarqué, entre autres, par J.-F. Le Mouël (1977) dans une série ethnographique provenant de la côte Nord-ouest du continent américain. Différentes hypothèses d’utilisation en relation avec le traitement des peaux ont été avancées parmi lesquelles l’écharnage et l’ébourrage sont les plus probantes (Ibid., p. 334).
ont été utilisés par raclage en coupe positive ou par percussion lancée sur des peaux tendues sur un cadre ou
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posée sur une planche ou directement sur le sol (fig. 41). Dans tous les deux cas, la position de l’outil par rapport à la matière travaillée était oblique et l’angle de dépouille variait de 10° environ pour les outils utilisés par raclage, à environ 45° pour les outils utilisés par percussion lancée. Le temps d’utilisation varie de 10 à 100 minutes. L’efficacité de ces outils est certaine surtout lorsqu’ils présentent un biseau simple dont l’angle est égal ou inférieur à 30° (Christidou et Legrand 2005). En revanche, ils sont peu efficaces sur des peaux trop humides car les outils glissent et s’émoussent rapidement. Afin d’observer l’impact d’une substance abrasive sur l’efficacité de l’outil et sur la formation des traces d’usure, de l’ocre a été utilisé.
Pour compléter les expérimentations conduites sur le travail des peaux, des peaux sèches et tannées ont été travaillées. Un outil tranchant emmanché dans un manche droit a été utilisé pendant 20 minutes pour écharner une peau sèche de cerf par percussion posée directe en coupe positive. La peau était tendue sur un cadre. L’angle de dépouille était d’environ 70°. Deux pointes ont été utilisées pendant 15 et 20 minutes pour perforer cette même peau, respectivement par rotation et par percussion indirecte (fig. 43).
Fig. 43 : Perforation d’une peau sèche par rotation alternative (exp. A. Legrand – cliché R. Christidou).
Sept outils, 4 pointes et 3 aiguilles, ont été utilisées pour perforer par rotation et par percussion indirecte des peaux tannées non assouplies (fig. 44). Le temps d’utilisaiton 1 2 varie de 10 à 110 minutes. Les aiguilles utilisées pour Fig. 41 : Écharnage de peaux fraîches. 1 – Par raclage ; coudre se sont révélées être tout à fait résistantes et 2 – Par percussion lancée (exp. A. Legrand et R. Christidou efficaces, aucune perforation préalable n’a été nécessaire – clichés A. Rodriguez Rodriguez et A. Legrand). (fig. 45).
L’assouplissement est relativement peu expérimenté en raison de la variété des méthodes mises en œuvre et de la contrainte temporelle de cette activité. Néanmoins, il m’a paru nécessaire de tester quelques outils tranchants sachant que cette étape du traitement des peaux est l’une des plus essentielles. Deux méthodes ont été expérimentées sur une peau de cerf reverdie. La première consiste à étendre la peau sur le sol et à l’humidifier avec de la salive. Les deux outils tranchants ont été utilisés pendant 30 et 60 minutes, par percussion posée directe selon un mouvement transversal avec un angle de dépouille d’environ 5°. La seconde méthode consiste à fixer des esquilles osseuses dans une branche d’arbre et à frotter la peau contre ces éléments selon un mouvement de va-et-vient (fig. 42). L’assouplissement de la peau est, dans ce cas, bien plus rapide.
1
1
Fig. 44 : Perforation de peaux tannées. 1 – Par rotation alternative ; 2 – Par percussion posée indirecte (exp. A. Legrand – clichés S. Tymula).
2
Fig. 42 : Assouplissement d'une peau reverdie. 1 – Dispositif ; 2 – Mouvement de va et vient (exp. L. Astruc – clichés A. Legrand).
2
Fig. 45 : Couture sur une peau tannée (exp. A. Legrand – cliché J. Pineau). 39
2.3.2.2. L’os Bien souvent les expérimentations conduites sur le travail de l’os se sont attachées à tester le fendage longitudinal des côtes (Christidou 1999, Legrand 2000, Maigrot 2003). L’expérimentation a, cette fois, été orientée vers la perforation de l’os pour répondre à un problème archéologique précis. À Khirokitia, le nombre d’aiguilles à chas est extrêmement élevé (plus de 600 aiguilles), pourtant, les outils perforants sont quasiment absents de l’industrie lithique (Astruc 2002, p. 114). Deux pointes en os ont donc été utilisées par rotation alternative pour perforer une plaquette en os de 5 mm d’épaisseur et pour réaliser le chas d’une aiguille (fig. 46). Le temps d’utilisation est de 30 minutes. Sur os sec, le travail est peu concluant mais en ajoutant de l’eau, l’os est attendri et le travail plus facile. Les outils se révèlent efficaces mais sous la forte pression exercée, l’écrasement de l’apex est rapide (quelques minutes) et demande un raffûtage constant.
pieux, de récipients, de manches ou de haches (Ibid., p. 69). Quatorze outils tranchants ont été utilisés pour fendre (n = 9) et entailler (n = 5) des branches sèches et vertes de feuillus – érable, chêne, noisetier – et de conifères – pin. Le fendage a été effectué parallèlement aux fibres, l’outil étant tenu perpendiculairement à la matière. Le temps d’utilisation de 10 à 25 minutes. L’entaillage a été pratiqué perpendiculairement aux fibres. L’outil était tenu obliquement par rapport à la matière travaillée et l’angle de dépouille était d’environ 45° (fig. 47). Le temps d’utilisation varie de 7 à 40 minutes. L’efficacité des outils utilisés sur du bois vert et sec, déjà reconnue lors d’expérimentations précédentes, a été confirmée (Sidéra 1993a ; Maigrot 1997 ; Christidou 1999 ; Legrand 2000).
Fig. 47 : Entaillage par percussion posée indirecte d'une branche sèche de feuillu (exp. et cliché A. Legrand).
2.3.3.2. L’écorce D’après les données ethnographiques, l’écorce est utilisée pour la confection de récipients, de cordages, de tissus, etc. (Osgood 1940 ; Miles 1963 ; Stewart 1973, 1984 ; Lemonnier 1984). L’intervention d’outils en os dans ce type d’activités est également attestée. L’objectif de ces expérimentations était de produire des traces d’usure en fonction de l’état de l’écorce bien plus que de parvenir à fabriquer un récipient par exemple.
Fig. 46 : Perforation par rotation alternative d'une plaquette en os sec (exp. A. Legrand – cliché J. Pineau). 2.3.3. Le travail des matières végétales Le travail du bois et de l’écorce est, d’un point de vue expérimental, relativement bien documenté (Sidéra 1993 a ; Maigrot 1997, 2004 ; Christidou 1999 ; Legrand 2000). Si certaines activités liées au travail du bois et de l’écorce ont été reproduites ici, j’ai également axé l’expérimentation sur le travail des fibres végétales comme le lin, le carex, la paille de seigle et la canne, bien moins documenté.
Deux outils tranchants ont été utilisés entre 40 et 45 minutes pour écorcer des branches vertes de saule et d’érable par percussion posée directe selon un mouvement longitudinal, en coupe positive (fig. 48). L’angle de dépouille était d’environ 45°. Comme l’avait déjà remarqué R. Christidou (1999 : 308), l’écorçage de branches vertes est tout à fait efficace.
2.3.3.1. Le bois Certaines des espèces travaillées, notamment le saule/peuplier (Salix/Populus), le chêne (Quercus f.c et Quercus sp.) et l’érable (Acer) sont présentes à Khirokitia (Thiébault 2003, tabl. 1). Certaines d’entre elles présentent une faible densité, une bonne résistance mécanique, une forte porosité et une bonne résistance à l’oxydation qui leur confèrent de bonnes qualités technologiques compatibles avec leur transformation (Noël et Bocquet 1987, p. 67). L’érable, par exemple, se travaille facilement et a pu être destiné à la fabrication de
Fig. 48 : Écorçage par percussion posée directe d'une branche verte de feuillu (exp. A. Legrand – cliché R. Christidou).
40
Quatre pointes ont été utilisées pour perforer par rotation alternative (n = 2) et par percussion indirecte (n = 2) des fragments d’écorce humides de chêne. Quatre autres pointes ont été utilisées par rotation (n = 2) et par percussion indirecte (n = 2) pour perforer des fragments d’écorce sèche de chêne (fig. 49). Le temps d’utilisation varie de 15 et 45 minutes. La perforation d’écorce humide provoque rapidement une fissure qui la rend inexploitable. En revanche, la perforation d’écorce sèche produit de bien meilleurs résultats.
1
pendant 40 heures. Sachant qu’aucun témoin direct d’une activité de tissage – fragment de métier à tisser, peson, etc. – n’a été retrouvé sur les sites étudiés, la technique du tissage cordé pour laquelle un simple cadre en bois suffit, a été retenue et expérimentée avec l’aide de F. Médard. Parmi les nombreux dispositifs proposés, celui dans lequel la tension est exercée sur les éléments passifs a été choisi (Médard et Moser 2001, p. 69). Deux baguettes amovibles sont fixées au cadre selon la longueur du tissu souhaitée. Les fils de lin tendus verticalement entre ces deux baguettes intermédiaires sont appelés fils passifs. Par opposition, les fils horizontaux sont nommés fils actifs. À l’aide d’aiguilles à chas ou à la main, selon l’expérience et la dextérité du tisserand, les fils actifs sont passés alternativement devant et derrière les fils passifs sélectionnés (un à un ou deux à deux en fonction du motif souhaité) (fig. 50-1). Une fois le rang réalisé, la pointe permet de le tasser contre le rang précédent (fig. 50-2). La couture de tissus en lin a également été testée (fig. 51).
2
Fig. 49 : Perforation de fragments d’écorce sèche de chêne. 1 - Par rotation ; 2 – Par percussion posée indirecte (exp. A. Legrand – clichés J. Pineau).
2.3.3.3. Les fibres végétales La découverte d’empreintes de tissus, de vanneries, de cordes, ou encore de vestiges textiles démontrent le savoir-faire technique des populations néolithiques impliquant les fibres végétales (Collectif 1989 ; Cardon et Feugère 2000 ; Médard 2000 ; Médard et Blin 2005). L’utilisation d’objets en os est archéologiquement et ethnographiquement attestée pour le tissage et la vannerie (Boas et al. 1928 ; Balfet 1952 ; Miles 1963 ; Anquetil 1979 ; Mason 1984 ; Mc Gregor 1985 ; Gregonis et Reinhard 1988 ; Kehoe 1992, 1999 ; Chazelles 2000 ; Smith 2001). Pourtant, les expérimentations mettant en œuvre les fibres végétales sont encore peu fréquentes (Stordeur et Anderson-Gerfaud 1985 ; Meneses 1993 ; Sidéra 1993 a, p. 222 ; d’Errico et al. 1995 ; Van Gijn 2005). Différents témoins archéologiques découverts à Khirokitia indiquent très clairement l’exploitation de fibres végétales dans la réalisation de divers objets (Le Brun 1989 d, 1994 c et com. pers. A. Le Brun). Il était donc plus que nécessaire de commencer à combler ces lacunes en mettant en place une première expérimentation sur l’utilisation de différentes fibres végétales – lin, carex et paille de seigle – dans des activités spécifiques telles que le tissage et la vannerie. D’autres fibres comme le liber également utilisé pour le tissage, n’ont pas été testées dans ce travail mais feront prochainement l’objet d’une expérimentation (Stewart 1984 ; Barber 1991 ; Médard 2000). Dans un premier temps, l’expérimentation s’est orientée vers le travail du lin. Une pointe et 2 aiguilles ont été utilisées pour le tissage de fils de lin industriel non traité
1
2
Fig. 50 : Tissage. 1 – Les fils de lin sont passés avec une aiguille alternativement derrière et devant les fils passifs ; 2 – Les rangées de fils sont ensuite tassées à l’aide d’une pointe (exp. A. Legrand – clichés A. Legrand et R. Christidou).
Fig. 51 : Couture sur lin (exp. et cliché A. Legrand). Les tiges de roseaux, de graminées, de liber, de jonc (Juncus) ou de lin sont des fibres souvent utilisées dans la fabrication de vanneries (Miles 1963, p. 94 ; Anquetil 1979, p. 159 ; Körber-Grohne 1991, p. 93-94). Différentes techniques existent mais il semble d’après les données actuelles et ethnographiques, que la vannerie spiralée soit la seule technique nécessitant l’usage d’une pointe ou d’une aiguille qui permet en écartant les spires, de faire passer un lien pour les maintenir assemblées (Balfet 1952, p. 270 ; Miles 1963, p. 94 ; Anquetil 1979, p. 161 ; Mason 1984, p. 245). Dans ce domaine
41
également les expérimentations sont peu nombreuses, il convenait donc de commencer à combler ces lacunes. Le montage de paniers selon la technique de la vannerie spiralée a été réalisé par H. Cazé. Trois pointes dont 2 sur du carex (famille des Cypéracées) et une sur de la paille de seigle, ont été utilisées par poussée longitudinale entre 10 et 15 heures (fig. 52). Ces fibres ont été choisies en fonction des données environnementales disponibles pour les sites étudiés. Précisons que le seigle (Secale cereale) bien qu’absent des sites du Néolithique pré-céramique récent a été identifié sur certains sites du Néolithique céramique (Hansen in Le Brun et al. 1987, p. 309 ; Le Brun 1996 b, p. 11).
2.3.3.4. La canne
2.3.4. Le travail des matières minérales Le travail des matières minérales et plus précisément de l’argile avec des outils en os a déjà fait l’objet de plusieurs expérimentations (Sidéra 1993 a ; Meneses Fernández 1994 ; Christidou 1999 ; Martineau et Maigrot 2004). Bien que les assemblages osseux étudiés dans ce travail proviennent surtout de contextes datés du Néolithique pré-céramique, le travail de l’argile a été expérimenté et ceci pour plusieurs raisons. Tout d’abord, le matériel osseux récolté dans la couche 2 de Khirokitia datée du Néolithique céramique, est pris en compte. Certains outils ont donc pu avoir été utilisés pour la fabrication de poterie. Par ailleurs, quelques tessons, un fragment de récipient en terre et une petite jarre globulaire façonnés dans une pâte appelée « grey ware », ont été découverts dans les niveaux du Néolithique pré-céramique de Khirokitia (Dikaios 1953, p. 43-44 ; Le Brun 1994 b, p. 664). Enfin, dans l’unique objectif de produire des traces, l’argile en raison de son pouvoir abrasif constituait une matière tout à fait intéressante à travailler. L’expérimentation a donc porté sur la réalisation d’une assiette fabriquée à partir d’argile naturelle humide et très sableuse (provenant des bords de Saône), mélangée avec 1/3 d'argile industrielle (expérimentation A. Méjean) (fig. 54). L’assiette a été régularisée et lissée à l’aide d’un outil tranchant. Le taillant de ce dernier a servi à enlever de l’argile tandis que le centre de la face supérieure du tranchant ainsi que son bord droit, ont été utilisés pour lisser la surface (fig. 55-1, 55-2). Le temps de travail a été de 90 minutes.
Fig. 52 : Montage d’un panier en fibres de carex (exp. H. Cazé – cliché A. Legrand).
Les plantes aquatiques présentes à Khirokitia ont vraisemblablement été utilisées comme matériaux de construction notamment pour les toitures (Le Brun 1984 b, p. 931 ; Daune-Le Brun et Le Brun 1996, p. 2223). Lors d’un projet d’aménagement et de mise en valeur du site de Khirokitia, un programme expérimental financé par les autorités Chypriotes et visant à reconstituer les maisons de Khirokitia, a été conduit en collaboration avec la mission archéologique de Khirokitia. Des cannes sélectionnées immédiatement après leur coupe ont été utilisées pour la réalisation des toitures. Pour les fendre, les artisans chypriotes ont écrasé les nœuds à l’aide d’un galet puis les ont écartées à la main (Daune-Le Brun et Le Brun 1996, p. 23 et com. pers. O. Daune-Le Brun). Aucun outil n’a donc été nécessaire. Toutefois, j’ai voulu tester l’efficacité des outils en os pour le fendage de cannes vertes et sèches. Une pointe a donc été utilisée 55 minutes pour fendre des cannes vertes par percussion posée directe selon un mouvement longitudinal. Elle s’est révélée assez efficace même si une fois entamée, la canne se fend facilement à la main. Un outil tranchant employé en pièce intermédiaire avec un percuteur dur a été utilisé pendant 20 minutes pour fendre des cannes sèches (fig. 53).
Fig. 54 : Travail de l’argile (exp. A. Méjean – cliché A. Legrand).
1
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Fig. 55 : Détail de fabrication d’une assiette en argile avec un outil tranchant. 1 – Le taillant est utilisé pour enlever le surplus de matière ; 2 – Le bord droit de l’outil est utilisé pour lisser la surface (exp. A. Méjean – clichés A. Legrand).
Fig. 53 : Fendage par percussion posée indirecte d’une canne sèche (exp. et cliché A. Legrand). 42
CHAPITRE III - ANALYSE ARCHÉOLOGIQUE
DU
1. LES MODALITÉS DE PRODUCTION DE L’OUTILLAGE DE KHIROKITIA
MATÉRIEL Palme 3%
ET D’UTILISATION
Merrain 11 %
1.1. Les matières premières
Andouiller d’œil 8%
Les restes fauniques de Khirokitia sont composés par quatre espèces majeures : les daims (Dama mesopotamica), les moutons, les chèvres et les porcs. Parmi ces animaux, les daims et les caprinés sont les mieux représentés (Davis 1984). Il s’agit dans cette partie de montrer si l’exploitation des matières premières pour l’industrie reflète ou non l’exploitation faunique. Le premier caractère frappant de l’industrie osseuse de Khirokitia, est la très large exploitation de l’os par rapport à celle du bois de daim qui est tout à fait secondaire (tabl. 16). Le second caractère qui marque la sélection des matières, indépendamment des espèces, est la très grande majorité des os longs et en particulier des métapodes qui représentent 94,88 % des os longs identifiés. Les épiphyses distales comme proximales ont été utilisées mais avec une préférence pour les premières (224 exemplaires contre 111 pour les épiphyses proximales). Les ulnas et les tibias ont été rarement choisis puisqu’ils ne représentent que 5,12 % des os longs. L’exploitation des os plats est mineure (1,06 %). La sélection des matières et des parties anatomiques est donc extrêmement déterminée, d’autant plus que l’ensemble des os du squelette est représenté parmi les restes fauniques (com. pers. S. Davis). Les bois de daim employés pour l’industrie proviennent essentiellement de la mue (7 meules de mue contre 3 meules de massacre), donc de collectes. Il en va de même dans la faune. S. Davis envisage même une collecte destinée à l’industrie (Davis 1984, p. 155). Les parties utilisées sont préférentiellement l’andouiller secondaire et le merrain qui constituent finalement les seules parties exploitables du bois (tabl. 17 & fig. 56).
Meule 33 %
Fig. 56 : Khirokitia – Schématisation des différentes parties d’un bois de Dama mesopotamica (d'après Croft in Peltenburg 1983, fig. 3).
L’échantillon des espèces animales identifiées, grâce à une collaboration avec S. Davis, est restreint au regard du corpus total (400 déterminations, soit 17,26 % de l’ensemble de l’industrie). La distinction entre caprinés et daims n’a pas toujours été possible à partir des objets façonnés puisque la taille des supports est à peu près équivalente. Les caprinés sont, en effet, particulièrement imposants et leur taille s’accroît au cours de l’occupation du site (Davis 1984 tabl. 5-6 & tabl. 10-11, 1994, p. 308, 2003, p. 264). Par ailleurs, la plupart des objets ont été fabriqués, comme nous le verrons, à partir de segments de diaphyse ne conservant aucun caractère anatomique. Leur attribution à une espèce ou à un type d’os spécifique est par conséquent très difficile. L’échantillon d’espèces déterminées fait, néanmoins, apparaître une nette prédominance des daims qui pourrait refléter, au regard du nombre important d’espèces indéterminées, un effet de détermination plutôt qu’une réalité archéologique (tabl. 18). Aucun argument ne permet, dans l’état actuel des données, de pondérer l’importance de cette proportion, mais il est admis que le daim a joué un rôle majeur dans l’économie de ces communautés insulaires au détriment des caprinés (Ronen 1995, p. 187). Si l’aspect technique ne semble pas entrer en ligne de compte pour expliquer ce choix puisque les os de daim et de caprinés ont une taille assez équivalente (cf. supra), qu’en est-il de l’aspect symbolique ? Le daim est, en effet, le seul animal sauvage et pourrait avoir eu, à ce titre, un statut particulier (Stordeur 1984, p. 136). Toutefois, les récentes données archéozoologiques viennent nuancer cette hypothèse (Davis 2003). Les femelles et les jeunes figurent en nombre important parmi les restes de daims, ce qui pourrait suggérer une possible semi-captivité de ces animaux. Ils auraient alors un statut proche de celui des animaux domestiques. Pourtant, cette hypothèse reste à considérer puisque la fréquence des individus femelles et jeunes constituant des proies plus faciles que les mâles, pourrait également s’expliquer par un changement de structure au sein du groupe sous l’effet de l’ouverture du couvert végétal, entraînant alors une division des deux populations (Vigne et al. 2003, p. 245).
Effectifs Os Bois de daim TOTAL
N 2281 36 2317
% 98,45 1,55 100
Tabl. 16 : Khirokitia - Matières premières sélectionnées Effectifs Andouiller secondaire Merrain Meule Palme Meule et merrain Meule, merrain et andouiller d’œil Meule et andouiller d’œil Indéterminés TOTAL
N 13 4 2 1 7 2 1 6 36
Andouiller secondaire 36 %
% 36,11 11,11 5,56 2,78 19,44 5,56 2,78 16,67 100
Tabl. 17 : Khirokitia – Parties des bois de daim sélectionnées. 43
Espèces animales Daims Caprinés
Mouton Ind.
Porcs Oiseaux Poissons TOTAL
reconnus, ont-ils été considérés ici. Au total, 456 objets ont été classés.
Effectifs N 279 38 79 2 1 1 400
% 69,75
1.2.1. Outils à partie active pointue
29,25 0,5 0,25 0,25 100
Cette première catégorie est la plus importante du corpus. Au total 1 423 outils pointus – 799 pointes et 624 aiguilles – ont été reconnus parmi lesquelles 264 pointes et 142 aiguilles ont pu être rattachées à un type particulier.
Tabl. 18 : Khirokitia – Espèces animales exploitées pour l’industrie.
TYPE I : Pointe sur os entier (6 exemplaires) L’analyse des matières premières sélectionnées pour l’industrie montre une détermination très importante qui se manifeste par une nette préférence : 1/ pour l’os ; 2/ pour les os longs et plus particulièrement pour les métapodes ; 3/ pour le daim. L’homogénéité du système d’exploitation des matières premières à Khirokitia est indéniable mais son interprétation est délicate en raison de la fragmentation importante du mobilier osseux et de la faible proportion des déterminations anatomiques et zoologiques au regard de l’ensemble. Il convient maintenant de remettre en perspective les principales caractéristiques de cette exploitation afin de mieux définir les choix effectués. On sait que le daim est largement exploité aussi bien pour sa viande que pour ses os, mais que l’exploitation des bois, qui repose surtout sur une collecte, est minoritaire en comparaison de celle de l’os. L’exploitation du bois et celle de l’os sont donc bien différenciées et relèvent vraisemblablement de deux systèmes différents. Dans le premier, l’approvisionnement peut se dérouler à l’extérieur du village puisqu’il ne dépend pas nécessairement des activités de boucherie. Dans le second, en revanche, l’approvisionnement en matière première prolonge le traitement des carcasses et peut prendre place à l’intérieur ou à l’extérieur du village. L’animal abattu est alors perçu comme un pourvoyeur de fournitures nécessaires au besoin : viande, peau, tendons, graisse, poils, os et accessoirement bois. Si l’on examine plus largement la situation, l’exploitation prépondérante de l’os par rapport aux autres matières osseuses disponibles est, comme nous le verrons, une caractéristique des sites du PPNB et du Néolithique ancien du Levant et des Balkans (Stordeur 1988 a ; Sidéra 1998). L’industrie osseuse de Khirokitia pourrait donc se placer dans une même tradition du travail de l’os. L’exploitation massive des métapodes pourrait également relever de cette même tradition. Cet os est, en effet, largement exploité dans la plupart des contextes chrono-culturels du Néolithique pour la fabrication de pointes essentiellement.
I.A : sur fibula (1 exemplaire) (fig. 57-1) - conservation des caractères anatomiques de l’os ; - longueur : 143 mm ; largeur mésiale : 10 mm ; épaisseur mésiale : 4 mm. I.B : sur ulna (4 exemplaires) (fig. 57-2) - conservation des caractères anatomiques de l’os ; - pas de standard métrique, longueur de 65 à 145 mm (moyenne : 114,33 mm) ; largeur mésiale de 4 à 12 mm (moyenne : 7,67 mm) ; épaisseur mésiale de 3 à 5 mm (moyenne : 4 mm). B.1 : avec perforation (1 exemplaire) (fig. 57-3) I.C : sur rayon dur dorsal de poisson (1 exemplaire) (fig. 57-4) - conservation des caractères anatomiques de l’os ; - longueur : 32,5 mm ; largeur mésiale : 2,5 mm ; épaisseur mésiale : 2 mm. TYPE II : Pointe sur segment transversal de métapode avec épiphyse entière (6 exemplaires) - conservation d’une partie plus ou moins importante de la diaphyse et de l’intégralité de l’épiphyse sur laquelle des modifications peuvent être apportées ; - les longueurs varient de 38 mm à 139 mm (moyenne : 98,25 mm). Les largeurs et épaisseurs mésiales sont plus homogènes, respectivement comprises entre 15 et 20 mm (moyenne : 18,25 mm) et entre 6 et 15 mm (moyenne : 10,25 mm). II.A : avec épiphyse naturelle (3 exemplaires) (fig. 57-5) II.B : avec épiphyse aplanie (3 exemplaires) (fig. 57-6) TYPE III : Pointe sur segment longitudinal de métapode avec épiphyse partielle (88 exemplaires) - contours réguliers et droits ; - section mésiale : convexo-concave, ovale, circulaire, rectangulaire, plano-convexe ou triangulaire ; - portion d’épiphyse distale ou proximale naturelle ou modifiée ; - pas de standard métrique : la longueur totale varie de 30 mm à 160 mm (moyenne : 75,65 mm), la largeur mésiale de 3 à 18 mm (moyenne : 9,77 mm) et l’épaisseur mésiale de 2 à 12 mm (moyenne : 5,86 mm).
1.2. Typologie de l’industrie La typologie mise en place se fonde sur des critères morphologiques relatifs à la segmentation appliquée à la matière et aux parties anatomiques sélectionnées. Aussi, seuls les objets pour lesquels ces critères ont pu être
44
B.2.2 : perforation non proportionnelle à la partie proximale (2 exemplaires) (fig. 57-22) Dimensions petit module : longueur de 21,5 à 66 mm (moyenne : 43 mm) ; largeur proximale de 1,5 à 3 mm (moyenne : 2,34 mm) ; diamètre de la perforation de 0,5 et 2 mm (moyenne : 1,28 mm). Dimensions grand module : longueur de 43 à 101 mm (moyenne : 66 mm) ; largeur proximale de 4 à 12 mm (moyenne : 7,5 mm) ; diamètre de la perforation de 1 à 5 mm (moyenne : 2,78 mm).
III.A : épiphyse distale (32 exemplaires) A.1 : naturelle (14 exemplaires) (fig. 57-7) A.2 : aplanie (18 exemplaires) (fig. 57-8) III.B : épiphyse proximale (56 exemplaires) B.1 : naturelle (48 exemplaires) (fig. 57-9) B.2 : aplanie (4 exemplaires) (fig. 57-10) B.3 : perforée (3 exemplaires) (fig. 57-11) B.4 : rainurée (1 exemplaire) (fig. 57-12) TYPE IV : Pointe sur segment longitudinal de diaphyse sans épiphyse (164 exemplaires)
V.C : base rectiligne (18 exemplaires) C.1 : petit module (5 exemplaires) (fig. 57-23) C.2 : grand module (13 exemplaires) C.2.1 : perforation proportionnelle à la partie proximale (8 exemplaires) (fig. 57-24) C.2.2 : perforation non proportionnelle à la partie proximale (4 exemplaires) (fig. 57-25) C.2.2.1 : à bord échancré (1 exemplaire) (fig. 57-26) Dimensions petit module : longueur de 23 mm ; largeur proximale de 2 mm à 3,5 mm (moyenne : 2,71 mm) ; diamètre perforation de 0,5 et 2 mm (moyenne : 1,36 mm). Dimensions grand module : longueur de 75 à 98 mm (moyenne : 86,4 mm) ; largeur proximale de 3 à 15 (moyenne : 8,29 mm) ; diamètre de la perforation de 1,5 à 11,5 mm (moyenne : 3,79 mm).
IV.A : sur segment régularisé (46 exemplaires) - contours réguliers et droits ; - section mésiale : convexo-concave, ovale, circulaire, rectangulaire, ou carrée ; - pas de standard métrique : la longueur totale varie de 33,5 mm à 138 mm (moyenne : 74,59 mm), la largeur mésiale de 3 à 18 mm (moyenne : 8,06 mm) et l’épaisseur mésiale de 2 à 10 mm (moyenne : 4,65 mm). A.1 : à base rectiligne (37 exemplaires) (fig. 57-13) A.1.1 : à encoches latérales (1 exemplaire) A.2 : à base convexe (7 exemplaires) (fig. 57-14) A.3 : à spirale (1 exemplaire) (fig. 57-15) A.4 : à base dentée et perforée (1 exemplaire) (fig. 57-16) IV.B : sur segment non régularisé (118 exemplaires) (fig. 57-17) - contours irréguliers ; - pas de standard métrique : la longueur totale varie de 47 mm à 101 mm (moyenne : 67,3 mm), la largeur mésiale de 3 et 14 mm (moyenne : 8,2 mm) et l’épaisseur mésiale de 2,5 à 8 mm (moyenne : 4,7 mm).
1.2.2. Outils à partie active tranchante La catégorie des outils à partie active tranchante est la seconde catégorie d’outils identifiée. Au total, 54 outils tranchants ont été reconnus dont 21 ont pu être rattachés à un type.
TYPE V : Aiguille à chas (142 exemplaires)
TYPE VI : Outil tranchant sur ulna (2 exemplaires)
- outil rectiligne et allongé entièrement façonné ; - différentes formes de bases ; - diamètre de la perforation proportionnelle ou non à la largeur de la base de l’objet. - Deux modules : grand et petit. V.A : base ogivale (97 exemplaires) A.1 : petit module (93 exemplaires) (fig. 57-18) A.2 : grand module (4 exemplaires) (fig. 57-19) Dimensions petit module : longueur de 22 à 81 mm (moyenne : 45,91 mm) ; largeur proximale de 1 à 10 mm (moyenne : 2,52 mm) ; diamètre de la perforation de 0,5 à 5 mm (moyenne : 1,23 mm). Dimensions grand module : longueur de 68 à 125 mm (moyenne : 87,5 mm) ; largeur proximale de 3 à 11,5 mm (moyenne : 6,5 mm) ; diamètre de la perforation de 1,5 et 4 mm (moyenne : 2,83 mm).
Ce type se définit comme le type I.B (fig. 58-1). Seule la morphologie de l’extrémité active diffère. - taillant frontal, convexe et étroit ; - longueur : 102 mm ; largeur mésiale : 8 mm ; épaisseur mésiale : 3 mm ; longueur du taillant : 6 mm. TYPE VII : Outil tranchant sur segment transversal d’os long (3 exemplaires) - outils probablement fabriqués sur fémur ou humérus (fig. 58-2) ; - contours irréguliers ; - taillant frontal, rectiligne et large. TYPE VIII : Outil tranchant sur segment longitudinal de métapode avec épiphyse partielle (7 exemplaires)
V.B : base convexe (27 exemplaires) B.1 : petit module (18 exemplaires) (fig. 57-20) B.2 : grand module (9 exemplaires) B.2.1 : perforation proportionnelle à la partie proximale (7 exemplaires) (fig. 57-21)
Ce type se définit comme le type III par un fût aux bords réguliers et droits et par une portion d’épiphyse distale ou proximale naturelle ou modifiée.
45
-
Fig. 57 : Khirokitia – Outils à partie active pointue (dessins O. Daune-Le Brun et A. Legrand). - section mésiale : convexo-concave ou plano-convexe ; - taillant frontal, convexe et étroit ; - pas de standard métrique : la Longueur totale varie de 66 mm à 108 mm (moyenne : 91,11 mm), la largeur mésiale de 9 à 17 mm (moyenne : 14,44 mm), l’épaisseur mésiale de 5 à 11 mm (moyenne : 8,33 mm). La longueur du taillant est comprise entre 3 et 7 mm (moyenne : 5,5 mm). VIII.A : épiphyse distale (6 exemplaires) A.1 : naturelle (1 exemplaire)
A.2 : aplanie (5 exemplaires) (fig. 58-3) VIII.B : épiphyse proximale (1 exemplaire) B.1 : naturelle TYPE IX : Outil tranchant sur segment longitudinal de diaphyse sans épiphyse (9 exemplaires) IX.A : sur segment régularisé (6 exemplaires) (fig. 58-4) - contours réguliers et droits ; - section mésiale : convexo-concave ou rectangulaire ; - taillant frontal, convexe ou rectiligne et étroit ;
46
Fig. 58 : Khirokitia – Outils à partie active tranchante (dessins O. Daune-Le Brun et A. Legrand).
- longueur de 153 à 157 mm (moyenne : 154,8) ; diamètre de la perforation de 9 à 30 mm (moyenne : 19,5 mm) ; profondeur de la perforation de 15 à 43 mm (moyenne : 29). Pour certains de ces objets, il pourrait s’agir de manche à insertion longitudinale mais en l’absence de trace technique et/ou fonctionnelle, une telle fonction ne peut être confirmée. A.2 : sur partie basilaire (5 exemplaires) (fig. 59-3) A.3 : sur palme avec perforation (1 exemplaire) (fig. 59-4)
- pas de standard métrique : la Longueur totale varie de 23 mm à 81 mm (moyenne : 58,86 mm), la largeur mésiale de 8 à 15,5 mm (moyenne : 12,86 mm), l’épaisseur mésiale de 4 à 9 mm (moyenne : 6,57 mm). La longueur du taillant est comprise entre 4 et 5,5 mm (moyenne : 4,75 mm). IX.B : sur segment non régularisé (3 exemplaires) (fig. 58-5) - contours irréguliers ; - taillant frontal, convexe et étroit ; - longueur de 53 mm à 84 mm (moyenne : 70,33 mm) ; largeur mésiale de 8 et 15 mm (moyenne : 11,5 mm) ; épaisseur mésiale de 4 à 9 mm (moyenne : 6,5 mm) ; longueur taillant : 5 mm
XI.B : sur tibia proximal perforé (4 exemplaires) (fig. 595) - conservation de l’intégralité de la diaphyse et de l’épiphyse proximale de l’os ; - perforation localisée près du bord de fracture soit sous l’épiphyse ; - longueur de 53 mm à 71 mm (moyenne : 61,75).
1.2.3. Objets divers Cette catégorie regroupe 29 objets.
XI.C : sur diaphyse intégrale d’os long : les éléments tubulaires (2 exemplaires) - portion de diaphyse intégrale (fig. 59-6) ; - morphologie et section de l’os conservées.
TYPE X : Objet sur scapula (1 exemplaire) - conservation de la morphologie naturelle de l’os (fig. 59-1) ; - présence d’une ouverture au centre de l’os. Cet objet rappelle les « omoplates encochées » de Ganj Dareh (Iran) utilisées comme égrénoir (Stordeur et Anderson-Gerfaud 1985 ; Stordeur 1994). Mais sa fragmentation ne permet pas de pouvoir reconstituer sa morphologie initiale et d’identifier d’autres perforations ou encoches qui pourraient confirmer cette hypothèse.
TYPE XII : Objet sur segment longitudinal de diaphyse sans épiphyse (12 exemplaires) XII.A : avec dents (6 exemplaires) - section rectangulaire. A.1 : latérales (5 exemplaires) (fig. 59-7) A.2 : frontales et perforation (1 exemplaire) (fig. 598)
TYPE XI : Objet sur segment transversal de matière (16 exemplaires)
XII.B : avec rainures transversales (3 exemplaires) (fig. 59-9) - contours réguliers et rectilignes ; - section rectangulaire ;
XI.A : sur bois de daim (10 exemplaires) - conservation de la morphologie du bois qu’il s’agisse des andouillers, des parties basilaires ou de la palme. A.1 : sur andouiller évidé (4 exemplaires) (fig. 59-2) - perforation circulaire ou évasée ;
47
- rainures transversales, bifaciales et équidistantes les unes des autres. XII.C : avec extrémité encochée (1 exemplaire) - objet de petite dimension (45x4x3 mm) (fig. 59-10) ; - deux encoches bilatérales et obliques constituent l’une des extrémités. XII.D : avec extrémité en crochet (1 exemplaire) (fig. 5911) - objet de petite dimension : 23 mm de long ; - aménagement d’une ouverture latérale. Cet objet est morphologiquement proche des anneaux pointés en pierre ou en coquillage retrouvés à Khirokitia et interprétés comme de possibles éléments de parure (Dikaios 1953 ; Cluzan 1984 : 118 ; Astruc 1994 a : 250, fig. 101 : 281). XII.E : avec perforation (1 exemplaire) (fig. 59-12) 1.2.4. Conclusion Au total, douze principaux types relatifs aux trois catégories d’objets identifiées, ont été décomptés. Contrairement aux outils tranchants qui ne représentent que 3,66 % de l’outillage, les outils pointus dominent très largement le corpus avec un total de 1 423 sur 1 477 outils (soit 96,34 %) (fig. 60). Cette tendance prévaut également dans de nombreux assemblages du PPNB au Proche-Orient et du Néolithique ancien et moyen d’Europe. On peut donc se demander dans quelle mesure cette prédominance peut s’inscrire dans une tradition culturelle qui marque le Néolithique, j’y reviendrai. Cette prédominance peut-elle également refléter une certaine spécialisation du village, dans la nature des activités pratiquées et des outils qui s’y rapportent ? Précisons, en outre, que le nombre très important d’aiguilles (au total 624 aiguilles, soit 42,28 % de l’outillage osseux) qui singularise l’assemblage de Khirokitia, pourrait conforter cette hypothèse. Enfin, contrairement aux outils tranchants en os qui peuvent éventuellement trouver, au sein de l’outillage lithique, un substitut fonctionnel, les outils pointus n’ont, à Khirokitia, aucun équivalent morpho-fonctionnel dans les autres catégories d’outillage. Cela pourrait alors expliquer le déficit des outils tranchants et la bonne représentation des outils pointus. L’analyse fonctionnelle permettra, sans doute, d’apporter des éléments de réponse à ces différentes hypothèses.
Fig. 59 : Khirokitia – Objets divers (dessins O. Daune-Le Brun et A. Legrand).
% 120
100
80
A iguille 42,28
60
40
Pointe 54,06
20 3,66
Les pointes ont été classées en fonction du type de segmentation appliquée à la matière première. On distingue les pointes sur os entier, sur segment transversal de diaphyse et sur segment longitudinal de diaphyse conservant ou non une partie des caractères anatomiques. On différencie alors 2 types : 1/ type III : sur segment longitudinal de métapode avec épiphyse partielle ; 2/ type IV : sur segment longitudinal de diaphyse sans épiphyse. Ces derniers sont majoritaires
0 O utils p ointus
O utils tranchants
Fig. 60 : Khirokitia - Représentation numérique des outils pointus et des outils tranchants.
48
dans l’industrie. Ils sont peu différenciés sur le plan morphologique, le contour des bords de la partie mésiale est plus ou moins régulier et la section mésiale est le plus souvent en forme de croissant (fig. 61). Seuls les différents traitements ou aménagements des parties proximales – perforation, encoche, spirale – contribuent à donner à ce type une relative variabilité morphologique.
exploitée et d’autre part, de la présence d’aménagements divers : perforation, encoche, incision.
N 10
Ou tils tran ch an ts
9 8 7 6
% 70
5
Pointes
4
60
3
50
2
40
1
30
0 Ty p e VI
Ty p e VII
Ty p e VIII
Ty p e IX
20 10
Os entier
Segment transversal
Segment longitudinal
0 Type I
Os entier
Type II
Segment transversal
Type III
Type IV
Fig. 62 : Khirokitia – Représentativité des outils tranchants par type.
Segment longitudinal
L’outillage de Khirokitia présente, à l’exception des aiguilles qui constituent à elles seules une spécificité propre à cette industrie, deux principaux caractères. Le premier est relatif au type de segment recherché. Quelle que soit la morphologie de la partie active, pointue ou tranchante, les outils sont majoritairement fabriqués sur des segments longitudinaux de matière qui ne conservent aucun caractère anatomique (fig. 63). Les outils sur os entier ou sur segment transversal conservant l’intégralité de l’épiphyse sont peu fréquents au regard de l’ensemble du corpus. On peut alors se demander si cette homogénéité morphologique reflète aussi une homogénéité fonctionnelle et dans ce cas, quel serait le rôle des outils sur os entier et sur segment transversal ? En outre, on remarque que ces segments sont plus fréquemment utilisés pour la fabrication des outils tranchants. Leur morphologie et leur robustesse peuvent-elles être mises en relation avec une utilisation plus intense de ces outils ou sur des matériaux durs ? On peut également s’interroger sur l’homogénéité technique de cet ensemble, pointes et tranchants. Les techniques mises en œuvre dans la production des segments longitudinaux sont-elles similaires d’un type à l’autre ? Ces questions essentielles à la compréhension du système technique seront traitées lors de l’analyse technologique et fonctionnelle.
Fig. 61 : Khirokitia – Représentativité des pointes par type.
Contrairement aux autres types, les aiguilles (type V 142 exemplaires considérés) présentent une variabilité morphométrique plus importante. Les extrémités proximales revêtent, en effet, différentes morphologies : ogivale, convexe ou encore rectiligne. Sur le plan métrique, deux modules, petit et grand, ont été distingués. Le diamètre du chas et sa proportion par rapport à la largeur proximale de l’aiguille peuvent aussi varier. Parmi les sous-types reconnus, le type V.A.1 (aiguilles de petit module à terminaison ogivale avec un chas proportionnel à la largeur de l’extrémité proximale) prédomine (97 sur 142, soit 68,31 %). Les segments longitudinaux de diaphyse sans épiphyse (type IX) sont également les plus fréquents lorsque l’on considère les outils tranchants (fig. 62). La morphologie générale de ces outils est proche de celle décrite pour les pointes du type IV. Seule la morphologie de la partie active diffère. Celle-ci présente majoritairement un taillant frontal, convexe et étroit. La variabilité morphologique des extrémités proximales des outils tranchants est bien plus faible que celle observée pour les pointes. Les aménagements sont rares. Aucune perforation, incision ou encoche n’a, en effet, été relevée. On peut alors se demander dans quelle mesure ces aménagements pourraient constituer un caractère fonctionnel propre aux pointes ? Quant aux objets divers, leur variabilité morphologique relève d’une part, de la nature de la matière première
Le second caractère, qui découle du premier, est relatif à la morphologie du support. Qu’il s’agisse de pointes ou d’outils tranchants fabriqués sur des segments longitudinaux ou transversaux, avec ou sans épiphyse, la morphologie des supports est, pour une très large majorité, similaire (cf. supra). À l’exception de la 49
Une pointe montre une surface brillante, de teinte panachée allant du brun moyen au brun foncé. Un traitement thermique, difficile à placer dans la chaîne de fabrication en l’absence d’ébauche, a pu être pratiqué.
% 100 90 42,86
80 70
1.3.1.2. Pointe sur segment transversal de métapode avec épiphyse entière Comme les outils précédents, les 6 outils du type II ne font l’objet d’aucun débitage (pl. 1). Ils sont, en revanche, mis en forme par percussion directe, lors d’une première étape de façonnage. Abrasion et raclage succèdent à la percussion pour donner à l’extrémité active sa morphologie finale. Les stries d’abrasion sont transversales (n = 2) ou obliques (n = 2). Elles peuvent être grossières, larges et profondes (n = 2) ou fines, superficielles et serrées (n = 1). L’utilisation de sable ou de pierres abrasives de granulométrie et de texture différentes, qu’il est impossible d’identifier dans l’état actuel des expérimentations, est vraisemblablement à l’origine de cette variété morphométrique. L’étendue du façonnage est de faible ampleur et limitée à la pointe (degré de transformation 1). Des traces de raclage qui correspondent très probablement au nettoyage de l’os avant même la mise en forme du support, ont été identifiées sur la partie mésiale de deux outils.
60 50
33,33
40 30 20
9,52 2,27
62,12
14,59 2,27
33,33
10 0 Os entier
Segment transversal Segment longitudinal Segment longitudinal avec épiphyse sans épiphyse
Pointe
Outil tranchant
Fig. 63 : Khirokitia – Types de segments utilisés dans la fabrication des pointes et des outils tranchants.
morphologie de la partie active, les pointes et les outils tranchants sont peu différenciés. Dans ce contexte, on peut aisément comprendre la difficulté d’identifier et de classer l’ensemble des fragments mésiaux et proximaux. Ces caractères montrent donc que la conception de l’outillage repose, à Khirokitia, sur une certaine homogénéité qu’il conviendra, par ailleurs, de confirmer lors de l’examen technologique des pièces.
1.3.1.3. Pointe sur segment longitudinal de métapode avec épiphyse partielle Quatre-vingt-huit outils entiers ou subentiers du type III ont été étudiés. L’ensemble de ces outils conserve une portion d’épiphyse proximale ou distale (pl. 1 & 2).
1.3. Fabrication de l’industrie Procédés de découpe Deux procédés de découpe ont été employés, le procédé de découpe en deux, le plus fréquent, et le procédé de découpe en quart. Dans le premier cas, les pointes sont des outils au fût large et à la section mésiale en forme de croissant (tabl. 19). Leur partie proximale est le plus souvent plane puisque l’articulation proximale des métapodes est conservée (56 exemplaires). Des outils plus ramassés, aux sections en forme de boomerang, ont été obtenus par un procédé de découpe en quart ou inférieur au demi et au quart (ci-dessous 2 – et 4 –) (46,59 %). Ces derniers conservent systématiquement l’épiphyse proximale.
L’analyse technologique de l’assemblage osseux de Khirokitia doit permettre de caractériser les procédés de découpe, les techniques et les méthodes de débitage utilisés. L’objectif étant de montrer si un ou plusieurs schémas opératoires ont été mis en œuvre lors d’une même segmentation des matrices osseuses. La production osseuse de Khirokitia peut-elle être ou non considérée comme un ensemble de conception homogène ? 1.3.1. Outils à partie active pointue 1.3.1.1. Pointe sur os entier Les 6 outils du type I sont simplement façonnés (pl. 1). Le débitage est inexistant. Le façonnage est réalisé par abrasion transversale principalement et dans une moindre mesure par raclage. Le forage a également été employé lors de l’aménagement des parties proximales (cf. fig. 57-3). Le façonnage est de faible amplitude, se limitant à la partie active de l’outil. Ces outils ont un degré de transformation O7.
sur os entier dont le façonnage se limite à la partie active ; 2/ degré de transformation 1 : ce sont des supports sur os segmenté transversalement ou sur esquille. Le façonnage peut s’étendre à la partie mésiale ; 3/ degré de transformation 2 : il s’agit de supports sur os segmenté longitudinalement avec épiphyse. Le façonnage s’étend à la partie mésiale. Il peut aussi être couvrant mais les caractères anatomiques comme les épiphyses sont très peu modifiés ; 4/ degré de transformation 3 : les supports sont entièrement transformés par un façonnage couvrant. Les caractères anatomiques ont totalement disparu.
7
Quatre degrés de transformation des supports ont été établis à partir de la classification de D. Stordeur (1978 b, 1984) : 1/ degré de transformation 0 : il s’agit de supports
50
Procédés de découpe En 2 En 2 En 4
Techniques
Effectifs
Effectifs
N
%
N
45
51,14
26
9 1 possible 19 3 possibles
Percussion indirecte
11,36
9
10,23
Ind.
2
2,27
TOTAL
88
100
31,82
Sciage et percussion ind.
27
30,68
Sciage
13
14,77
Ind.
20
22,73
TOTAL
88
100
25
En 4 -
2 possibles
%
Tabl. 20 : Khirokitia – Type III. Techniques de débitage.
Tabl. 19 : Khirokitia – Type III. Procédés de découpe.
Le procédé de découpe en quart est attesté dans d’autres contextes chrono-culturels. Dans le Néolithique du nord de la France, il correspond à une économie de débitage puisque tous les segments des métapodes sont employés pour l’outillage, tandis que dans le sud de la France, un seul segment semble avoir été quasi systématiquement sélectionné (Sidéra et Claustre sous presse). Considérant ces données, il était intéressant de chercher à comprendre l’intention à l’arrière-plan des différents procédés de découpe mis en œuvre à Khirokitia. Les portions extraites de 10 métacarpes proximaux (3 droits et 7 gauches) et de 11 métatarses proximaux (3 droits et 8 gauches) ont été examinées (fig. 64). La quasi-totalité des métapodes a été exploitée. Les segments non extraits sont rares. Par ailleurs, l’utilisation des métacarpes et des métatarses est indifférenciée, contrairement à ce qui a été observé dans d’autres contextes chrono-culturels, comme par exemple dans le Chasséen méridional où le métatarse est quasi exclusivement sélectionné (Sénépart et Sidéra 1991, p. 306). Ce rapport opportuniste à la matière indique clairement que les habitants de Khirokitia n’ont pas cherché à prélever un segment particulier de matière pour obtenir une forme spécifique et prédéterminée, mais qu’ils ont exploité toutes les parties disponibles. Il s’agit donc là d’une véritable économie de débitage.
Procédés de découpe
Techniques de débitage
En 2
Percussion indirecte Sciage et percussion ind. Sciage Percussion indirecte
En 2 -
En 4
Sciage et percussion ind. Sciage Percussion indirecte Sciage et percussion ind. Sciage Percussion indirecte
En 4 TOTAL
Sciage et percussion ind. Sciage
Effectifs N 17 16 7 1 1 possible 3 2 4 7 1 possible 2 3 1 possible 1 2 68
% 25 23,53 10,77 2,94 4,41 2,94 5,88 11,76 2,94 5,88 1,47 2,94 100
Tabl. 21 : Khirokitia – Type III. Procédés de découpe et techniques de débitage. sciage s’étend à l’une des épiphyses, il est intégral. S’il est limité à la diaphyse, il est partiel. La percussion indirecte intervient parfois en complément du sciage pour finir de découper l’os (fig. 65). À Khirokitia, cinq méthodes ont été identifiées : 1/ le sciage bifacial et intégral ; 2/ le sciage bifacial, intégral et percussion ; 3/ le sciage bifacial, partiel et percussion ; 4/ le sciage unifacial, intégral et percussion ; 5/ le sciage unifacial, partiel et percussion (tabl. 22). L’utilisation fréquente du sciage bifacial, partiel et du sciage unifacial, intégral, associés à la percussion montre encore que les habitants de Khirokitia privilégiaient des schémas opératoires rapides dans lesquels la percussion joue un rôle essentiel. Si on ne peut interpréter l’application de ces méthodes en termes de variabilités culturelles, on peut néanmoins supposer qu’elles reflètent une variabilité individuelle puisque toutes aboutissent au même « morpho-type » (Sidéra 2004). La comparaison de ces résultats avec ceux obtenus sur d’autres séries archéologiques est limitée puisqu’un examen approfondi de ces méthodes est rarement conduit. Le Néolithique de Grèce et celui d’Europe occidentale et orientale, sont, en revanche, bien documentés (Sidéra 1993 a, 2004, sous presse ; Christidou 1999, 2001 b).
Techniques de débitage La percussion indirecte combinée ou non au sciage est majoritairement utilisée quel que soit le procédé de découpe employé (31,82 %) (tabl. 20-21). Le sciage seul est plus rare. Les outils du type III reposent donc sur une exécution rapide et maîtrisée puisque les pièces accidentées sont rares. La percussion est une opération technique bien plus aléatoire que le sciage, qui fonctionne par une érosion lente et progressive assurant davantage la réussite de la segmentation. Méthodes de débitage Les méthodes de débitage ont été définies en fonction de la localisation et de l’extension des stries de sciage sur le support. Si le sciage affecte les deux faces du métapode, on parle de sciage bifacial. Au contraire, si une seule face est sciée, on parle de sciage unifacial. Si le
51
1
2
3
4
Fig. 64 : Khirokitia - Type III. Schématisation des parties extraites des métapodes proximaux. 1 - Métacarpe droit ; 2 - Métacarpe gauche ; 3 - Métatarse droit ; 4 - Métatarse gauche. : Sciage
P : Percussion FS : Face supérieure FI : Face inférieure 1
2
3
4
Fig. 65 : Schématisation des méthodes de débitage. 1 - Sciage bifacial et intégral ; 2 - Sciage bifacial, partiel et percussion ; 3 - Sciage unifacial, intégral et percussion ; 4 - Sciage unifacial, partiel et percussion. Procédés de découpe
Méthodes de débitage Sciage bifacial intégral
En 2 En 4 En 2 En 4 Sous total TOTAL N
2 1 possible 1 possible 1 possible 5
Sciage bifacial intégral et percussion 2 1 1 4
Sciage bifacial partiel et percussion 4
2 possibles 1 7 20
TOTAL N Sciage unifacial intégral et percussion 3 3 1 7
Tabl. 22 : Khirokitia - Type III. Méthodes de débitage. 52
Sciage unifacial partiel et percussion 1 1 possible 2
13 6 4 2 25
À titre d’exemple on peut souligner qu’au Chasséen méridional, la très grande majorité des pointes est obtenue par sciage bifacial et intégral (Sidéra et Claustre sous presse). Au Chasséen septentrional, il s’agit, en revanche, de la méthode du sciage unifacial et percussion (Sidéra 1993 a, p. 153).
10
8 6
4
2
0 Partie distale
%
Abrasion
38
62,30
Raclage
10
16,39
Abrasion et raclage
13
21,31
TOTAL
61
100
Partie distale Partie mésiale Partie mésio-distale Partie mésio-proximale Couvrant TOTAL N
Orientation des stries
Dimension des stries
Partie mésiodistale
Partie mésioproximale
Couvrant
Abrasion
Raclage
11 15 7 4 1 38
2 2 5 1 10
Abrasion et Raclage 1 4 1 7 13
TOTAL N 13 18 16 5 9 61
Tabl. 25 : Khirokitia - Type III. Étendue du façonnage et techniques employées. Traitement thermique L’usage possible de la chauffe pourrait avoir concerné 24 pointes. Dans 92 % des cas, la surface serait entièrement traitée. Les coloris et la brillance des surfaces varient mais les teintes mouchetées proches du brun foncé dominent (tabl. 26). Cette homogénéité montre que les paramètres de chauffe, s’il s’agit bien d’un traitement thermique, sont parfaitement contrôlés.
Tabl. 23 : Khirokitia - Type III. Techniques de façonnage.
Effectifs
Abrasion
Partie mésiale
Fig. 66 : Khirokitia - Type III. Localisation et types des stries d’abrasion.
Effectifs N
Abrasion fine
12
Techniques de façonnage Des traces de façonnage ont été repérées sur 61 pièces (69,32 % des outils du type III). L’abrasion transversale et grossière est majoritaire (tabl. 23-24). L’utilisation du sciage et du forage est marginale (4 exemplaires). Aucune complémentarité entre l’abrasion grossière et l’abrasion fine ne semble pouvoir être établie puisque l’abrasion grossière domine sur l’abrasion fine quelle que soit la ou les parties considérées (fig. 66). L’utilisation de pierres abrasives de texture et de granulométrie différentes pourrait alors davantage résulter d’une utilisation opportuniste plutôt que d’un choix technique. Le façonnage est essentiellement destiné à la mise en forme de la partie mésio-distale (degré de transformation 2) (tabl. 25). Le forage probablement effectué au foret et le sciage au silex sont utilisés pour transformer localement la partie proximale.
Techniques
Abrasion grossière
N 14
N
%
Transversale
30
58,82
Oblique
12
23,53
Transversale et oblique
4
7,84
Transversale et longitudinale
4
7,84
Oblique et longitudinale
1
1,96
TOTAL
51
100
Grossière
41
80,39
Fine
10
19,61
TOTAL
51
100
Étendue
Distribution
Coloration
Brillance
Tabl. 24 : Khirokitia - Type III. Caractéristiques des stries d’abrasion.
Couvrant Envahissant Marginal Uni Panaché Moucheté Brun clair à foncé Brun moyen à foncé Brun moyen Brun foncé Terne Brillant Verni
Effectifs 22 1 1 4 7 13 6 14 1 3 4 15 4
TOTAL N 24
24
24
23
Tabl. 26 : Khirokitia - Type III. Caractéristiques des surfaces probablement chauffées.
53
L’étendue du façonnage mesurée sur un échantillon de 44 pièces entières et subentières est soit limitée à la partie mésio-distale, soit couvrante (tabl. 31). Ces deux tendances reflètent les deux sous-types qui composent le type IV : les produits sur segments non régularisés (type IV.B) (degré de transformation 1) et ceux sur segments régularisés (type IV.A) (degré de transformation 3). Dans ce dernier cas, le façonnage intégral pourrait correspondre à un aménagement en vue d’un emmanchement ou bien répondre à un tout autre objectif. Si toutes les techniques semblent être davantage utilisées pour le façonnage de la partie mésio-distale, l’usage combiné de l’abrasion et du raclage est plus fréquent pour un façonnage intégral des pointes. Aucune complémentarité entre l’abrasion grossière et l’abrasion fine ne semble pouvoir être établie, car les deux types de stries ont majoritairement été observés sur la partie distale (fig. 71).
1.3.1.4. Pointe sur segment longitudinal de diaphyse sans épiphyse L’examen technologique des outils du type IV repose sur 164 pièces entières ou fragmentées (pl. 3). Procédés de découpe En l’absence d’épiphyse, l’identification des procédés de découpe se réfère ici à la morphologie de la section du fût qui peut être caractéristique du procédé mis en œuvre (cf. fig. 6). Le procédé de découpe en deux reste le plus utilisé (tabl. 27).Précisons que les outils sur esquilles n’ont pas été, ici, considérés puisque la morphologie du support est directement liée à la fracturation aléatoire de l’os.
Procédés de découpe En 2 En 2 En 4 Ind. TOTAL
Effectifs N 5 1 2 2 possibles 24 34
% 14,71 2,94 11,76
Techniques
70,59 100
Tabl. 27 : Khirokitia - Type IV. Procédés de découpe.
Techniques et méthodes de débitage La percussion directe domine. La percussion indirecte combinée au sciage et le sciage seul sont des techniques peu employées (tabl. 28). Le système de production de ces outils repose sur un schéma opératoire mettant en œuvre des techniques rapides mais contraste avec celui observé pour les outils du type III puisque le degré de technicité est ici bien moindre. Seules deux méthodes de débitage ont été mises en évidence sur respectivement 2 outils : 1/ le sciage intégral bilatéral ; 2/ le sciage partiel bilatéral et percussion.
Techniques Percussion directe Sciage et percussion ind. Sciage Ind. TOTAL
%
Abrasion
59
60,20
Raclage
15
15,31
Abrasion et raclage
24
24,49
TOTAL
98
100
Tabl. 29 : Khirokitia - Type IV. Techniques de façonnage.
Effectifs
Abrasion
Effectifs N 129 1 possible 3 3 28 164
Effectifs N
% Orientation des stries
79,27 1,83 1,83 17,07 100
Tabl. 28 : Khirokitia - Type IV. Techniques de débitage. Dimension des stries
Techniques de façonnage Des traces de façonnage ont été observées sur 98 pièces, soit 59,39 % des outils du type IV. L’abrasion transversale et grossière domine (tabl. 29-30 & fig. 67). L’emploi du sciage pour la réalisation d’aménagements situés sur la partie proximale est peu courant (3 exemplaires) (fig. 68-69), de même que le forage probablement effectué à la main (fig. 70).
N
%
Transversale
54
65,06
Oblique
14
16,87
Longitudinale
1
1,20
Transversale et oblique
8
9,64
Transversale et longitudinale
2
2,41
Oblique et longitudinale
1
1,20
Transversale, oblique et longitudinale
3
3,61
TOTAL
83
100
Grossière
61
75,31
Fine
17
20,99
Grossière et fine
3
3,70
TOTAL
81
100
Tabl. 30 : Khirokitia - Type IV. Caractéristiques des stries d’abrasion.
54
16x
28x
Abrasion
Raclage
7 4 2 1 4 5 23
1 1 2 4
Partie distale Partie mésiale Partie mésio-distale Partie proximale Partie mésio-proximale Couvrant TOTAL N
1
Abrasion et Raclage 1 1 15 17
TOTAL N 8 5 2 2 5 22 44
Tabl. 31 : Khirokitia - Type IV. Étendue du façonnage et techniques employées.
2
Fig. 67 : Khirokitia - Type IV. Stries d’abrasion. 1 - Abrasion grossière (Kh90 6725) ; 2 - Abrasion fine (Kh96 10726) (clichés A. Legrand).
N 18
16 14 12 10
7x
8
25x
6 4 2 0 Partie distale
1
Partie més iale
Partie mésiodistale
Partie Couvrant Partie mésio- proximale proximale
2 Abrasion grossière
Fig. 68 : Khirokitia - Type IV.A.1.1. 1 - Pointe sur segment longitudinal d’os long à base encochée ; 1 - Détail de la partie proximale ; 2 - Détail de l’encoche (Kh89 5956.1) (clichés A. Legrand).
Abrasion fine
Abrasion grossière et fine
Fig. 71 : Khirokitia - Type IV. Localisation et types des stries d’abrasion.
Traitement thermique Quarante et une pièces pourraient avoir été traitées. Une grande homogénéité apparaît dans l’étendue du traitement, sa coloration et sa brillance (tabl. 32). Certains coloris brun foncé ou noir signent clairement, même s’ils restent rares, l’usage de la chauffe.
15x
Fig. 69 : Khirokitia Type IV.A.3. Pointe sur segment longitudinal d’os long à base spiralée (Kh88 5660.1) (cliché A. Legrand).
Étendue Distribution
Coloration
Fig. 70 : Khirokitia - Type IV.A.4. Pointe sur segment longitudinal d’os long à base dentée et perforée (Kh80 1453.2) (cliché A. Legrand).
Brillance
Couvrant Envahissant Uni Panaché Moucheté Brun clair à foncé Brun moyen Brun moyen à foncé Brun foncé Brun foncé à noir Terne Brillant Verni
Effectifs 38 1 11 9 20 8 5 18 5 4 8 23 7
TOTAL N 39 40
40
38
Tabl. 32 : Khirokitia - Type IV. Caractéristiques des surfaces probablement chauffées. 55
forme vraisemblablement prédéterminée du support impliquant une faible réduction de son volume pourrait expliquer l’usage plus intensif du raclage.
1.3.1.5. Aiguille à chas Au total, 624 aiguilles entières ou fragmentées ont été analysées (pl. 4). Techniques de débitage Malgré la présence de 51 ébauches qui nous renseignent sur les étapes de façonnage, les techniques de débitage restent indéterminées. Toutefois, trois pièces pourraient être attribuées à des produits de débitage d’aiguilles. Il s’agit de supports sur os longs, probablement des métapodes, découpés longitudinalement en deux sans que la technique puisse être identifiée. Chaque bord porte plusieurs négatifs d’enlèvements réalisés par sciage qui pourraient correspondre à l’extraction de baguettes destinées à la fabrication d’aiguilles (fig. 72). Leur largeur est, en effet, proche de celle des aiguilles de petit module, majoritaires dans ce corpus. Ces pièces pourraient également avoir été reconnues dans l’industrie de Çayönü – 9 600-6 200 av. J.-C., Anatolie – où plusieurs objets sur os longs avec des incisions longitudinales, profondes et parallèles entre elles, ont été interprétés comme des produits de débitage d’aiguilles (Redman 1973, p. 257).
Techniques
Effectifs N
%
Abrasion
97
50
Raclage
62
31,96
Abrasion et raclage
35
18,04
TOTAL
194
100
Tabl. 33 : Khirokitia - Type V. Techniques de façonnage.
Effectifs
Abrasion
Orientation des stries
Fig. 72 : Khirokitia - Possible produit de débitage d’aiguilles à chas. La flèche indique les rainures profondes observées sur le bord (KhP01 50902) (cliché A. Legrand).
Dimension des stries
N
%
Transversale
57
43,18
Oblique
47
35,60
Longitudinale
10
7,58
Transversale et oblique
6
4,55
Transversale et longitudinale
8
6,06
Oblique et longitudinale
3
2,27
Transversale, oblique et longitudinale
1
0,76
TOTAL
132
100
Grossière
112
88,89
Fine
11
8,73
Grossière et fine
3
2,38
TOTAL
126
100
Tabl. 34 : Khirokitia - Type V. Caractéristiques des stries d’abrasion.
Ce schéma opératoire a été reproduit expérimentalement (fig. 73). Le métapode a été découpé en deux, puis une première baguette a été extraite par sciage du bord du demi-support. Le profil en V du négatif forme deux nouvelles arêtes de part et d’autre desquelles une autre baguette peut être dégagée. Au fur et à mesure, la plage d’extraction s’élargit, plusieurs baguettes peuvent alors être obtenues. Un tel schéma opératoire offre le double avantage de pouvoir prédéterminer la morphométrie des aiguilles et de réduire considérablement le temps de façonnage. Si ce schéma est bien celui mis en œuvre dans la fabrication des aiguilles de petit module, il contraste fortement avec celui observé pour la fabrication des pointes et des outils tranchants. L’investissement technique accordé au débitage est ici plus élevé.
L’examen des ébauches montre que cette partie est aplanie par abrasion avant le percement du chas afin de réduire au maximum l’épaisseur de l’os à perforer (fig. 74). Mais la mise en forme de l’extrémité proximale avant la perforation du chas peut avoir comme autre objectif la recherche de la symétrie (Stordeur 1979 a, p. 142). La partie proximale est alors presque définitivement calibrée et la position du chas est ainsi parfaitement centrée. Le raclage semble, en revanche, plus utilisé pour façonner l’intégralité de l’aiguille avec comme principal objectif de régulariser le support. Il peut aussi intervenir pour réduire le volume du fût (fig. 75). La pièce Kh91 7755.1 présente, en effet, un rétrécissement mésial important réalisé à partir de chacun des bords. La finalité de cet aménagement n’a pas été définie.
Technique de façonnage Des traces de façonnage ont été observées sur 194 aiguilles (soit 31,09 % de l’ensemble). L’abrasion transversale et grossière reste majoritaire, tandis que l’usage du raclage est plus fréquent (tabl. 33-34). La
56
Fig. 73 : Schéma opératoire hypothétique de fabrication des aiguilles à chas de Khirokitia.
Abrasion
Raclage
Abrasion et raclage
TOTAL N
Partie distale
2
-
-
2
Partie mésiodistale
-
1
3
4
Partie mésioproximale
1
2
2
5
Partie proximale
8
1
-
9
Couvrant
3
6
7
16
TOTAL N
14
10
12
36
Techniques de perforation Les techniques de perforation du chas ont été observées sur un échantillon de 128 pièces, soit 68,45 % de l’ensemble des aiguilles entières et des fragments proximaux (187 exemplaires au total). L’identification des techniques de perforation a parfois été difficile en raison des nombreuses concrétions qui masquent le plus souvent l’intérieur des perforations et empêchent la lecture des traces. Deux types de stries ont, néanmoins, pu être observés. Les premières sont concentriques et discontinues avec des points d’arrêt, elles ont été attribuées à une perforation rotation alternative à la main, (fig. 76-1). Les secondes, les plus courantes, sont concentriques et régulières. Leur morphologie, leur organisation ainsi que la régularité du chas indiquent un percement par rotation alternative vraisemblablement au foret (fig. 76-2). Comme l’avait déjà souligné D. Stordeur, la perforation au foret est problématique puisque d’après les résultats de M.-C. Cauvin, « il n’y a pas de mèches de foret en pierre à Khirokitia ni, semble-t-il, d’outils conservés pouvant jouer ce rôle » (Cauvin cité in Stordeur 1984, p. 138). Cette observation a été confirmée par l’étude tracéologique conduite sur l’industrie lithique (Astruc 2002, p. 113). Pour pallier l’absence d’un outillage spécialisé, on peut envisager l’emploi d’un éclat brut présentant une extrémité pointue (Stordeur 1977 b, p. 254). Ce type d’éclat a été testé expérimentalement. Les traces d’usure produites sur l’extrémité active sont extrêmement ténues ou inexistantes en raison soit de l’utilisation brève – environ 2 minutes – soit de l’endommagement important de l’extrémité active. Leur reconnaissance parmi le matériel archéologique peut donc se révéler difficile et leur absence n’est donc pas nécessairement très significative. Toutefois « la rotation alternative est un mode d’action bien particulier, proche du rainurage (…) et du raclage » qui n’a pas été identifié sur le matériel lithique : « ni la position des zones actives, ni la disposition des écaillages, des polis et des stries
Tabl. 35 : Khirokitia - Type V. Etendue du façonnage et techniques employées.
Fig. 74 : Khirokitia - Partie proximale d’une ébauche d’aiguille façonnée par abrasion oblique grossière (Kh78 951.1) (cliché A. Legrand).
Fig. 75 : Khirokitia – Partie mésiale d’une aiguille aménagée par raclage (Kh91 7755.1) (cliché A. Legrand). 57
d’utilisation sur les outils de raclage reconnus ne correspondent à ce type d’utilisation » (Astruc 2002, p. 114). Des pointes en os expérimentales ont alors été utilisées mais les stries laissées à l’intérieur du chas sont pratiquement inexistantes (cf. p. 40). Or, les stries observées sur les aiguilles archéologiques sont bien développées et parfois très profondes. L’utilisation de pointes en os pour la réalisation du chas des aiguilles de Khirokitia est donc, pour l’instant, à exclure. L’hypothèse d’une production extérieure au village ou bien à l’intérieur du village mais dans une zone encore non explorée, peut, ici, être avancée.
16x
1
14x
Chas
Fig. 77 : Khirokitia – Perforation du chas par sciage longitudinal (flèches) (Kh86 4223.3) (cliché A. Legrand).
12x
28x
Fig. 78 : Khirokitia – Chas décentré (Kh97 11159.3) (clichés A. Legrand).
2
Fig. 76 : Khirokitia – Techniques de perforation par rotation alternative. 1 – À la main (la flèche indique le point d’arrêt) (Kh88 5569.1) ; 2 – Au foret (Kh97 11248) (clichés A. Legrand).
28x
La perforation a principalement été exécutée à partir des deux faces de l’aiguille (63,28 %, 81 exemplaires sur 128 identifiées), on parlera dans ce cas d’un forage bifacial. Dans seulement 12,5 % des cas (16 exemplaires), elle est amorcée à partir d’une seule face, le forage est alors dit unifacial. Dans ce cas, une technique particulière de perforation a été mise en évidence. Un fragment proximal entièrement concrétionné, montre en effet, une préparation par rainurage longitudinal (fig. 77). Cet aménagement a été observé sur les aiguilles du site syrien de Mureybet (Stordeur 1978 a, p. 85). Sa présence dans l’outillage de Khirokitia pose alors le problème du maintien des traditions anciennes proche-orientales à Chypre, j’y reviendrai. Lors de l’examen du façonnage des aiguilles, la notion de symétrie a été évoquée (cf. supra). Les aiguilles sont, en effet, pour une grande majorité parfaitement symétriques tant au niveau de la position du chas par rapport à la partie proximale (un seul exemplaire montre une perforation décentrée Kh97 11159.3) (fig. 78) que du forage. Le forage symétrique appelé ainsi lorsque les deux cônes de forage se font parfaitement face, domine l’échantillon (79,69 %, 102 exemplaires sur 128). Sur 18,75 % des aiguilles (24 exemplaires), ils sont décalés, le forage est alors dit asymétrique (fig. 79).
1 28x
2
Fig. 79 : Khirokitia – Types de forage. 1 – Symétrique (Kh93 8319) ; 2 – Asymétrique (Kh01 12499) (clichés A. Legrand). Traitement thermique Cent cinquante et une aiguilles (soit 24,20 % de l’ensemble des aiguilles) présentent des surfaces principalement brillantes, aux teintes mouchetées allant du brun moyen au brun foncé, qui pourraient témoigner d’un possible traitement thermique (tabl. 36). La coloration noire, grise ou blanche des surfaces, identifiée sur un nombre non négligeable d’aiguilles (17 exemplaires),
58
indique, en revanche, clairement la pratique du traitement thermique. La variété notée dans les teintes est plus importante que celle jusqu’alors observée. Sans pouvoir précisément replacer le traitement thermique dans la chaîne opératoire, la présence d’ébauches dans cet échantillon indique que ce traitement est réalisé alors que l’aiguille n’est pas totalement achevée.
Étendue Distribution
Coloration
Brillance
Couvrant Uni Panaché Moucheté Brun clair à foncé Brun moyen Brun moyen à foncé Brun moyen à noir Brun foncé Brun foncé à noir Brun foncé à blanc Noir Gris Blanc Terne Brillant Verni
Effectifs 151 45 17 189 26 14 70 2 17 4 1 15 1 1 21 69 55
Techniques et méthodes de débitage Dans 6 cas, la percussion indirecte est combinée au sciage. Elle est employée seule dans un seul cas. Son utilisation vient confirmer l’habileté technique des artisans de Khirokitia, d’autant plus que le seul métapode découpé en quart, l’a été par percussion indirecte. Deux méthodes de débitage ont été identifiées : le sciage bifacial intégral et percussion (3 exemplaires) et le sciage bifacial partiel et percussion (1 exemplaire). Contrairement à ce qui a été observé pour les pointes, la méthode de débitage par sciage seul est absente, le sciage combiné à la percussion indirecte est exclusivement bifacial et le sciage partiel a été peu utilisé.
TOTAL N 151 151
Techniques de façonnage Seulement 3 pièces portent des traces de façonnage claires. Deux outils ont été façonnés par abrasion et le troisième par raclage. Il s’agit une nouvelle fois d’un façonnage d’appoint qui consiste à mettre en forme la partie distale des outils. Le degré de transformation des supports est de 2.
151
Traitement thermique Les surfaces sont, pour 4 outils, de teintes panachées ou mouchetées allant du brun moyen au brun foncé (tabl. 37).
145
Tabl. 36 : Khirokitia - Type V. Caractéristiques des surfaces probablement chauffées.
Étendue
1.3.2. Outils à partie active tranchante
Distribution
1.3.2.1. Outil tranchant sur ulna et sur segment transversal d’os long Ces deux types d’outils (types VI et VII) sont, ici, regroupés en raison de la faiblesse numérique de l’échantillon (n = 5) (pl. 5). Le même schéma opératoire que celui mis en œuvre pour les pointes des types I et II est appliqué aux outils tranchants. Les outils sont mis en forme par abrasion longitudinale. Dans certains cas, le façonnage peut s’étendre à la partie mésiale (degré de transformation 0 ou 1). Trois pièces ont vraisemblablement été traitées thermiquement, leurs surfaces sont ternes ou brillantes et panachées allant du brun foncé au noir.
Coloration Brillance
Effectifs
TOTAL N
Couvrant
4
4
Panaché
2
Moucheté
2
Brun clair à foncé
1
Brun moyen à foncé
3
Brillant
3
Verni
1
4 4 4
Tabl. 37 : Khirokitia - Type VIII. Caractéristiques des surfaces probablement chauffées. 1.3.2.3. Outil tranchant sur segment longitudinal de diaphyse sans épiphyse Ces outils (type IX) sont au nombre de 9 (pl. 5). Le procédé de découpe en deux est le seul procédé identifié (4 exemplaires). Concernant les techniques de débitage, l’échantillon est faible mais la percussion continue de jouer un rôle majeur dans le débitage des os longs (tabl. 38). Lorsqu’elle est combinée au sciage, la méthode mise en œuvre consiste en un sciage unifacial et partiel. Ces outils sont façonnés par abrasion transversale et grossière (2 exemplaires) ou par raclage (2 exemplaires) En fonction de l’étendue du façonnage et de la régularité du support, le degré de transformation est de 1 ou de 3 On distingue alors le type IX.A : segment régularisé et le type IX.B : sur segment non régularisé. Les indices d’un possible traitement thermique sont minces puisque seulement 2 pièces présentent une surface vernie et mouchetée aux teintes brun clair et brun foncé.
1.3.2.2. Outil tranchant sur segment longitudinal de métapode avec épiphyse partielle Le type VIII compte 7 objets. L’épiphyse distale ou proximale du métapode est conservée. Procédés de découpe Une majorité d’outils du type VIII a été obtenue par un procédé de découpe en deux (n = 6) (pl. 5). Il s’agit d’outils au fût large (moyenne : 14,44 mm) qui présentent une section mésiale en croissant. Leur base est systématiquement constituée par l’articulation distale du métapode. Un seul outil a été obtenu par un procédé de découpe en quart. Son fût est étroit (largeur mésiale : 9 mm) et de section mésiale en forme de boomerang. Sa base est formée par l’épiphyse proximale du métapode.
59
Techniques
Effectifs N
Percussion directe
3
Sciage et percussion indirecte
2
Sciage
2 possibles
Ind.
2
TOTAL N
9
Tabl. 38 : Khirokitia - Type IX. Techniques de débitage. 2
1
1.3.3. Objets divers 1.3.3.1. Objet sur scapula L’objet fabriqué sur scapula (Type X) présente au centre de la fosse subscapulaire une perforation dont la technique n’a pu être déterminée (pl. 6 & fig. 80-1). L’épine scapulaire a été enlevée probablement par percussion directe (fig. 80-2). Le degré de transformation du support est faible (type 0).
Fig. 81 : Khirokitia – Type XI.A.1. 1 – Pièce entière ; 2 – Détail des traces d’entaillage (Kh95 9945) (clichés A. Legrand).
2
1 0
1
3 2 cm
Fig. 82 : Khirokitia - Type XI.B. 1 – (Kh95 9487) ; 2 – (Kh95 9542) ; 3 – (Kh95 9477) (clichés A. Legrand).
2
Fig. 80 : Khirokitia – Type X. 1 – Vue médiale avec bord actif (flèche blanche) ; 2 – Vue latérale, l’épine scapulaire a été détachée par percussion (flèche noire) (Kh03 13570)(clichés A. Legrand).
Type XI.C : objet sur segment de diaphyse intégrale (2 objets) (pl. 6). Les éléments tubulaires sont produits par sciage transversal combiné à une percussion. Le sciage a vraisemblablement été exécuté avec un outil lithique mais on ne peut exclure totalement l’usage de la corde en raison de la morphologie de la rainure. Sur le fût de ces objets, des stries d’abrasion transversales ou obliques et grossières ont été observées.
1.3.3.2. Objet sur segment transversal de matière Type XI.A : Objet sur bois de daim (10 objets) (pl. 6). Les segments de bois ont été sectionnés par entaillage vraisemblablement par percussion lancée (fig. 81). Pour le type XI.A.1, la technique d’évidage n’a pu être déterminée faute de trace technique.
1.3.3.3. Objet sur segment longitudinal de diaphyse Type XII.A : objet à dents latérales ou frontales (6 objets) (pl. 7) Les techniques de débitage n’ont pu être mises en évidence. En revanche, les dents ont été réalisées par sciage avec un outil lithique. Quatre objets sont façonnés par abrasion transversale ou longitudinale. Le façonnage est destiné à donner au support une section quadrangulaire. Sur l’objet à dents frontales (type XII.A.2), la perforation est bifaciale et symétrique (fig. 83). Quelques stries ont été observées à l’intérieur de celle-ci. Un objet (Kh90 6812) semble avoir été traité thermiquement.
Type XI.B : objet sur tibia proximal (4 objets) (pl. 6). Le sciage transversal associé à la percussion a été utilisé pour découper transversalement les tibias (fig. 82). Les perforations vraisemblablement réalisées au foret peuvent être bifaciales et asymétriques lorsqu’elles sont localisées sous l’épiphyse ou unifaciales lorsqu’elles sont situées près du bord de fracture. Trois de ces 4 objets ont été chauffés. Leur surface est de teinte unie ou panachée, noire ou brune et leur brillance plutôt terne.
60
16x
Fig. 83 : Khirokitia – Type XII.A.2. (Kh90 6785.1) (cliché A. Legrand).
2
1
Fig. 86 : Khirokitia – Type XII.D. 1 – Pièce entière ; 2 – Détail de l’aménagement opéré sur la convexité (Kh02 13144) (clichés A. Legrand).
Type XII.B : objet à rainures transversales (3 objets) (pl. 7) Les rainures ont été réalisées par sciage vraisemblablement avec un outil lithique (fig. 84). Ces objets pourraient être des produits de débitage car l’un d’entre eux présente une extrémité sciée puis fracturée ce qui suppose le détachement de supports. Toutefois, la morphologie de ces derniers ne correspond à aucun objet en os retrouvé sur le site.
Type XII.E : objet sur os perforé (1 objet) (pl. 7) Comme dans les cas précédents, la technique de débitage n’a pu être identifiée. La technique de perforation est également indéterminée. La face supérieure de l’objet est marquée par de profondes stries concentriques et irrégulières sur une longueur d’environ 1,5 mm (fig. 87-2). La configuration et la morphologie de ces stries rappellent celles décrites sur des objets natoufiens et proto-néolithiques du Zagros, interprétées comme le résultat du frottement répété d’une corde ; la perforation aurait alors pour fonction de retenir une corde pour suspendre un objet (Campana 1989, p. 126-127). L’objet de Khirokitia ne permet pas en raison de son état de fragmentation et de conservation de pouvoir interpréter précisément la finalité de ces stries.
Fig. 84 : Khirokitia – Type XII.B. (Kh78 1041) (cliché A. Legrand).
8x
Type XII.C : objet à extrémité encochée (1 objet) & Type XII.D : objet à extrémité en crochet (1 objet) (pl. 7) Ces objets ne présentent aucune trace de débitage. En revanche, on observe pour le premier (Kh01 12702) des encoches bilatérales et obliques réalisées avec un outil lithique (fig. 85) et pour le second (Kh02 13144) un rétrécissement bifacial effectué par raclage puis régularisé par abrasion grossière (fig. 86-2).
0
2 cm
1
2
Fig. 87 : Khirokitia – Type XII.E. 1 – Pièce entière ; 2 – Détail des stries (KhP00 50656) (clichés A. Legrand). 0
1.3.4. Fragments proximaux d’outils 1.3.4.1. Fragment sur ulna Le schéma opératoire mis en œuvre dans la fabrication de ces 5 objets (pl. 8) est similaire à celui observé pour la fabrication des pointes et des tranchants sur ulna. Des traces de façonnage par abrasion
2 cm
Fig. 85 : Khirokitia – Type XII.C. (Kh01 12702) (cliché A. Legrand). 61
transversale et grossière mais aussi par raclage ont été observées sur la partie mésiale de 3 outils. Le façonnage consiste alors à régulariser légèrement les bords de l’outil sans en modifier le volume. Le degré de transformation des supports est donc faible (type 0).
Techniques
Effectifs
Percussion indirecte Sciage Sciage et percussion ind.
1.3.4.2. Fragment sur segment transversal de métapode avec épiphyse entière Ces outils (11 exemplaires) fabriqués sur des métapodes distaux ou proximaux sont mis en forme par percussion (degré de transformation 1) (pl. 8). Des traces d’abrasion transversales (n = 4) ou de raclage (n = 1) relevées sur les parties mésiales, semblent correspondre au nettoyage de l’os avant sa mise en forme. Un outil (Kh00 12309) semble avoir été chauffé. Sa surface est brillante, mouchetée de teintes allant du brun moyen au brun foncé.
Ind. TOTAL
Procédés de découpe
En 2
169
82,84
En 2
2
0,98
En 4
25
Sciage et percussion ind. Sciage Percussion indirecte
En 4
En 4 TOTAL
13,24 39,71 34,80 100
Effectifs N 18 2 possibles 73 1 possible 20 3
% 15,27 56,49 15,27 2,29
Sciage et percussion ind.
6
4,58
Sciage Percussion indirecte Sciage et percussion ind. Sciage
5 1 possible 1 1 131
3,82 0,76 0,76 0,76 100
Tabl. 41 : Khirokitia - Fragments sur segment longitudinal de métapode avec épiphyse partielle. Procédés de découpe et techniques de débitage. Méthodes de débitage Une nouvelle fois, les méthodes qui consistent à employer la percussion indirecte pour finir le débitage dominent ce qui confirme le rôle prépondérant joué par cette technique au sein du système de production de l’outillage osseux de Khirokitia (tabl. 42). Pourtant, le sciage bifacial et intégral est bien représenté dans cet échantillon.
Effectifs %
12,25
Techniques de débitage
Percussion indirecte En 2
Procédés de découpe Le procédé de découpe en deux domine (tabl. 39). Aucun segment particulier de matière ne semble avoir été privilégié, la quasi-totalité des métapodes a donc été exploitée (fig. 88). Toutefois, notons que les segments non exploités proviennent davantage des métacarpes. La production de l’outillage à Khirokitia semble donc bien reposer sur une économie de débitage.
N
%
Tabl. 40 : Khirokitia – Fragments sur segment longitudinal de métapode avec épiphyse partielle. Techniques de débitage.
1.3.4.3. Fragment sur segment longitudinal de métapode avec épiphyse partielle Deux cent quatre fragments d’objets fabriqués sur métapodes à épiphyse partielle (distale ou proximale), ont été analysés (pl. 8).
Procédés de découpe
N 22 3 Possibles 27 80 1 Possible 71 204
12,75
1 possible En 4 -
2
0,98
Ind.
5
2,45
TOTAL
204
100
Techniques de façonnage Des traces de façonnage ont été observées sur 80 outils soit 39,22 % de l’ensemble de l’échantillon. Des traces d’abrasion ont été observées sur 90 % de l’échantillon tandis que le raclage reste une technique peu employée. Le forage est, en revanche, particulièrement bien représenté (tabl. 43). Douze outils présentent, en effet, une perforation au niveau de leur partie proximale. Dans 5 cas, il s’agit d’un forage unifacial et dans 3 cas, d’un forage bifacial. Des stries concentriques et parfois profondes ont été repérées sur 4 outils. Dans un seul cas, il s’agirait d’une perforation par rotation alternative au foret. On remarque sur ces fragments qu’il existe un traitement particulier par abrasion des parties articulaires des métapodes et notamment de l’articulation distale (fig. 89). On pourrait y voir un aménagement en vue de faciliter l’emmanchement de l’outil. Toutefois, parmi ces
Tabl. 39 : Khirokitia - Fragments sur segment longitudinal de métapode avec épiphyse partielle. Procédés de découpe.
Techniques de débitage Les techniques de débitage utilisées pour découper les métapodes sont les mêmes que celles mises en évidence pour les autres catégories d’outils mais la proportion du sciage apparaît ici supérieure à celle jusqu’alors observée (tabl. 40–41).
62
Fig. 88 : Khirokitia – Fragments sur segment longitudinal de métapode avec épiphyse partielle. Schématisation des parties extraites des métapodes proximaux. 1 - Métacarpe droit ; 2 - Métacarpe gauche ; 3 - Métatarse droit ; 4 - Métatarse gauche.
outils, la moitié est percutée sur leur base ce qui écarte toute hypothèse d’emmanchement, du moins pour cette moitié-là. Par ailleurs, sur certains outils, seule la surface articulaire est abrasée. On peut alors émettre l’hypothèse que cette abrasion est davantage destinée à préparer une surface plane en vue d’une utilisation en pièce intermédiaire. On peut néanmoins se demander pourquoi les artisans n’ont pas alors plutôt utilisé l’épiphyse
Procédés de découpe
En 4
6
3 possibles 1
Sous-total N TOTAL N
Traitement thermique Vingt-huit pièces présentent une surface majoritairement brillante, aux teintes mouchetées allant du brun moyen au brun foncé que l’on peut attribuer à un possible traitement thermique (tabl. 44).
Méthodes de débitage
Sciage bifacial intégral
En 2
proximale des métapodes qui présence une surface naturellement plane.
TOTAL N
Sciage bifacial intégral et percussion
Sciage bifacial partiel et percussion
Sciage unifacial intégral et percussion
Sciage unifacial partiel et percussion
20
8
12
11
60
1
1
1
1
5
21
9
13
12
10
55
65
Tabl. 42 : Khirokitia - Fragments sur segment longitudinal de métapode avec épiphyse partielle. Méthodes de débitage.
63
Techniques
esquilles osseuses obtenues par percussion directe ont été identifiées. Le reste est indéterminé. Le façonnage est le plus souvent réalisé par abrasion transversale et grossière (tabl. 46-47). Différents coloris ont été observés, parmi lesquels, certains comme le noir signe clairement l’usage du traitement thermique (tabl. 48).
Effectifs
Abrasion Raclage Abrasion et raclage TOTAL
N 59 8 13 80
% 73,75 10 16,25 100
Forage
12
13,68
Tabl. 43 : Khirokitia - Fragments sur segment longitudinal de métapode avec épiphyse partielle. Techniques de façonnage.
Procédés de découpe
Effectifs N 6 1 possible 1 18 26
En 2 En 4 Ind. TOTAL N
Tabl. 45 : Khirokitia - Fragment sur segment longitudinal de diaphyse sans épiphyse. Procédés de découpe.
10x
14x
2
1
Fig. 89 : Khirokitia – Traitement des épiphyses distales des métapodes. 1 – Les reliefs latéraux de la poulie sont abrasés (Kh03 13421.1) ; 2 – La surface articulaire est aplanie (KhP98 50387) (clichés A. Legrand).
Techniques Abrasion Raclage Abrasion et raclage TOTAL N
Effectifs N 9 1 7 17
Forage
2
Tabl. 46 : Khirokitia - Fragment sur segment longitudinal de diaphyse sans épiphyse. Techniques de façonnage. Abrasion
Étendue Distribution
Coloration
Brillance
Couvrant Envahissant Uni Panaché Moucheté Brun clair à foncé Brun moyen Brun moyen à foncé Brun moyen à noir Brun foncé Brun foncé à noir Noir Gris Terne Brillant Verni
Effectifs 26 2 9 3 16 4 1 13 1 3 1 4 1 5 20 3
TOTAL N
Orientation des stries
28 28
Dimensions des stries
Transversale
Effectifs N 13
Oblique
2
Transversale et oblique
1
TOTAL N Grossière Fine TOTAL N
16 14 2 16
Tabl. 47 : Khirokitia - Fragment sur segment longitudinal de diaphyse sans épiphyse. Caractéristiques des stries d’abrasion.
28
Étendue
28
Distribution
Tabl. 44 : Khirokitia - Fragments sur segment longitudinal de métapode avec épiphyse partielle. Caractéristiques des surfaces probablement chauffées. Coloration
1.3.4.4. Fragment sur segment longitudinal de diaphyse sans épiphyse On décompte 26 fragments obtenus pour une majorité par un procédé de découpe en 2 (pl. 8 & tabl. 45). Le sciage associé ou non à la percussion indirecte a été reconnu sur 3 objets. Trois autres pièces ont été découpées par percussion posée indirecte. Enfin, 3
Brillance
Couvrant Uni Panaché Moucheté Brun clair à foncé Brun moyen Brun moyen à foncé Brun moyen à gris Brun foncé Brun foncé à noir Noir Terne Brillant Verni
Effectifs 10 4 3 3 3 1 1 1 1 1 2 1 1 8
TOTAL N 10 10
10
10
Tabl. 48 : Khirokitia - Fragment sur segment longitudinal de diaphyse sans épiphyse. Caractéristiques des surfaces probablement chauffées.
64
1.3.5. Conclusion
1.4. Fonction de l’industrie
Avant d’aborder la fonction de l’outillage osseux de Khirokitia, il convient ici de faire un premier bilan sur le système de production. L’examen typologique de cet assemblage a mis en évidence une certaine homogénéité qui s’exprime par une préférence pour les segments longitudinaux sans épiphyse comme supports pour l’industrie. L’examen des techniques de fabrication avait pour objectif de tester cette homogénéité. L’analyse technologique montre que le système de production de l’outillage est similaire quelle que soit la catégorie d’outils considérée, pointes et outils tranchants. Ces outils sont alors indifférenciés sur le plan morphologique et technique. Seule la morphologie de leur extrémité active permet de les distinguer. De ce premier résultat, une première interrogation relative à la conception de l’industrie peut être posée. Dans quelle mesure la finalité morphofonctionnelle de l’outillage est-elle ou non envisagée dès la phase de débitage ? Les supports sont-ils fabriqués à l’avance et leur morphologie définitive établie dans un second temps, au fur et à mesure des besoins du groupe ? Ou bien existe-t-il une vraie intentionnalité morpho-fonctionnelle dès lors que l’os est sélectionné puis découpé ? Dans l’état actuel de ces observations, aucun élément ne permet de favoriser l’une ou l’autre de ces hypothèses.
La documentation archéologique du site de Khirokitia est exceptionnelle tant par la pluridisciplinarité des études conduites que par la richesse numérique et qualitative des témoins archéologiques retrouvés. On dispose, en effet, de données solides sur le cadre environnemental dans lequel a évolué cette communauté. Ces données témoignent d’une exploitation importante d’un milieu naturel riche et diversifié ainsi que d’espaces cultivables (Cluzan in Le Brun et al. 1987 ; Hansen in Le Brun et al. 1987 ; Renault-Miskovsky in Le Brun et al. 1987 ; Renault-Miskovsky 1989 ; Hansen 1991, 2001 ; Thiébault 2003). Aussi, les matières végétales susceptibles d’avoir été travaillées sont-elles potentiellement nombreuses. Des empreintes de végétaux sur des fragments de pisé brûlé provenant de l’effondrement d’une toiture après un incendie, des empreintes de vanneries et de nattes, un fragment de tissu vraisemblablement en fibres végétales, suggèrent une telle exploitation (Le Brun 1989 d, 1994 c ; Daune-Le Brun et Le Brun 1996). On peut donc s’interroger sur le rôle de l’outillage osseux dans la transformation de ces matières. Les outils pointus sont-ils des outils de vannier ? Les aiguilles ont-elles servi à coudre des tissus ? Les outils tranchants ont-ils été utilisés pour fendre du bois destiné à la construction ? Les matières animales constituent également un domaine potentiellement exploitable. D’après les données ethnographiques et les résultats expérimentaux, l’outillage osseux peut intervenir à différentes étapes du traitement des peaux (par exemple, Miles 1963 ; Steinbring 1966 ; Stewart 1973 ; Le Mouël 1977 ; Bird et Beeck 1980 ; Beyries 1999). Les outils tranchants en os de Khirokitia sont-ils des écharnoirs ou des palissons ? L’outillage pointu a-t-il été utilisé dans des activités de couture sur du cuir ? Toutes ces hypothèses sont envisageables d’autant que l’analyse tracéologique conduite sur l’outillage lithique montre que le travail des matières animales est peu fréquent (Astruc 2002). L’objectif de cette partie est donc, au travers de l’identification des modes d’action et des matières travaillées, de tenter de restituer les activités techniques auxquelles a participé l’outillage osseux de Khirokitia.
Le débitage des os longs repose le plus souvent sur un procédé de découpe en deux exécuté par percussion indirecte associée ou non au sciage. Une certaine variabilité interprétée comme une variabilité individuelle, caractérise les méthodes de débitage. Le façonnage des outils est réalisé principalement par abrasion. Son amplitude sur la pièce est relativement faible, la partie distale plus que les parties mésiale ou proximale est façonnée. Cela signifie d’une part, que ces outils étaient majoritairement tenus à main nue et d’autre part, que la partie distale est fonctionnellement la partie essentielle de l’outil. Il sera d’autant plus intéressant de montrer, au cours de l’analyse fonctionnelle, si, malgré une homogénéité des techniques de fabrication, les caractéristiques morphométriques des parties actives sont équivalentes d’un type à l’autre au sein d’une même catégorie d’outils et si elles relèvent d’une homogénéité fonctionnelle. Les procédés et techniques mis en œuvre reflètent également une rapidité d’exécution combinée à une habileté technique certaine. Le degré de technicité est élevé mais paradoxalement, l’investissement technique est relativement faible lors du débitage. La percussion indirecte requiert, en effet, un savoir-faire plus important que le sciage si l’on souhaite exploiter au maximum la matière première. Ce schéma contraste alors fortement avec celui des aiguilles vraisemblablement fabriquées par sciage. L’investissement technique est, dans ce cas, bien plus important. L’outillage osseux semble donc répondre à deux systèmes de production bien distincts qui reflètent deux conceptions de l’outillage.
1.4.1. L’échantillon Dans un souci de représentativité et d’exhaustivité, un échantillonnage du corpus parmi les trois principales catégories d’objets : outils pointus, outils tranchants et objets divers, a été réalisé. Des fragments d’outils pointus ou tranchants qui n’ont pu s’inscrire dans le cadre d’une typologie, ont également été considérés. Au total, ce sont donc 363 pièces qui ont été analysées (tabl. 49). L’état de fragmentation et de conservation des pièces est un paramètre primordial à considérer. L’ensemble des pièces entières et subentières qui représentent 22,59 % de l’échantillon, a été sélectionné, ainsi que les fragments (tabl. 50). Ces derniers sont principalement des fragments distaux de pointes, d’aiguilles ou de tranchants mais les
65
déformation du volume initial de la partie active a été privilégiée et notamment lorsque la pointe est nettement individualisée du fût, marquant ainsi la course de l’outil dans la matière travaillée. Trois calibres ont été établis : 1/ le calibre fin : inférieur ou égal à 20 ; 2/ le calibre moyen : compris entre 21 et 45 ; 3/ le calibre lourd : supérieur ou égal à 46. Dans le cas présent, les outils présentent, indépendamment des sections distales, un calibre fin ou moyen (tabl. 51).
fragments mésiaux et proximaux des aiguilles ont également été retenus puisqu’ils sont, au même titre que la pointe, soumis à l’usure. Pour apprécier l’état de conservation des surfaces, un premier examen au microscope stéréoscopique puis au microscope optique à réflexion a été réalisé. Trois états de surface ont été établis en fonction de la lisibilité des macro- et microtraces d’usure : 1/ état de surface A : excellent état ; 2/ état B : très bon état ; 3/ état C : bon état (tabl. 50).
Catégories d’objets
Outils pointus
Outils tranchants Objets divers TOTAL N
Types I II
Effectifs 4 2
III
24
IV V Indéterminé VI VIII IX Indéterminé X
45 155 105 1 3 4 19 1
TOTAL N
335
27 1 363
Fig. 90 : Khirokitia – Exemples de pointes des types I et II sélectionnées pour l’analyse fonctionnelle. 1 – Type I.A (KhP97 50200) ; 2 – Type I.B.2 (Kh95 10007.2) ; 3 – Type I.C (Kh03 13580) ; 4 – Type II (Kh81 2276.3).
Tabl. 49 : Khirokitia – Pièces sélectionnées pour l’analyse fonctionnelle.
Fragments Entier Subentier Proximal Mésial Distal TOTAL N
État A 3 1 8 2 4 18
État B 17 5 27 19 36 104
État C 50 7 38 6 140 241
TOTAL N 70 13 73 27 180 363
Sections Ovale Circulaire TOTAL N
Calibre fin 2 1 3
Calibre moyen 2 1 3
TOTAL N 4 2 6
Tabl. 51 : Khirokitia – Types I et II. Caractéristiques morphométriques des parties actives.
Tabl. 50 : Khirokitia – États de fragmentation et de conservation des surfaces.
Modes d’action et macrotraces Deux modes d’action ont été reconnus : la percussion posée directe (n = 4) et la percussion posée indirecte (n = 2). Les outils utilisés par percussion posée directe présentent une usure d’étendue marginale ou envahissante dont le développement est homogène (n = 3) ou dégressif en 2 zones d’usure (n = 1). Cela implique une pénétration variable de la pointe dans la matière, une dureté de celle-ci plus ou moins importante ou encore un temps d’utilisation plus ou moins long. Les altérations macroscopiques du volume consistent en un émoussé combiné ou non à des écaillures localisées sur l’apex (fig. 91). L’émoussé affecte à la fois l’apex et les arêtes de façonnage même si l’étendue de l’usure est marginale. Ces altérations sont à l’origine d’une déformation souvent très avancée de la pointe (tabl. 52). En raison des déformations notées, il semble que l’acuité de l’apex n’a pas joué un rôle déterminant dans le fonctionnement de l’outil. La quasi-absence de raffûtage sur ces outils (seulement 1 exemplaire) confirme, en
1.4.2. Outils à partie active pointue 1.4.2.1. Pointe sur os entier et sur segment transversal de métapode avec épiphyse entière Les deux types I et II ont été, ici, regroupés en raison du faible échantillon. Six outils dont 5 pièces entières et 1 outil subentier ont été examinés (fig. 90). Morphométrie des outils La morphologie et les dimensions de ces outils sont proches de celles de l’os sélectionné, qu’il s’agisse d’un ulna, d’une fibula ou d’un rayon dorsal de poisson. Les deux outils du type II conservent une partie de la diaphyse du métapode et l’intégralité de son épiphyse distale. La section des parties distales est majoritairement ovale. Leur calibre distal a été mesuré en multipliant la largeur et l’épaisseur à l’endroit où l’étendue de l’usure est maximale. Lorsque celle-ci n’a pu être mesurée, la
66
L’extrémité proximale constituée par l’épiphyse distale du métapode présente un écrasement parfois très marqué (stade d’usure 2 ou 3). Une perte de matière estimée à plusieurs millimètres dans les cas extrêmes, peut être observée (fig. 92) Cet écrasement peut s’accompagner d’un repli des fibres de l’os. Ces stigmates, en raison de leur intensité, ont très probablement été produits par un percuteur dur. Des « marteaux » fabriqués à partir de galets d’andésite qui portent des traces d’utilisation ont été retrouvés sur le site (Cluzan 1984, p. 117), ils pourraient correspondre à une telle utilisation.
effet, que même émoussée ou écaillée, la pointe restait performante. Au regard des expérimentations réalisées, la ou les matières travaillées ne devaient donc pas être très résistantes. À faible grossissement, les altérations de surface observées sur l’apex consistent en de nombreuses stries d’utilisation majoritairement longitudinales, longues, parallèles entre elles ou entrecroisées et associées à de fréquents cratères.
32x
32x
1
2 32x
32x
Fig. 92 : Khirokitia - Type II.A.2. Pointe utilisée par percussion posée indirecte (Kh81 2276.3) (cliché A. Legrand).
Matières travaillées Une seule usure microscopique a été mise en évidence sur un outil (type I.C) de calibre fin utilisé par percussion posée directe. L’usure consiste en (fig. 93) : - une topographie irrégulière de la surface usée ; - un microrelief régulier. La surface vernie et lissée ; - des stries d’utilisation pluridirectionnelles, entrecroisées, courtes, fines (inférieures à 1 μm), superficielles, droites et désordonnées ; - des cratères peu fréquents, circulaires et d’un diamètre de 9 μm. Leurs bords sont émoussés et leur fond est rugueux ou partiellement lisse. On peut attribuer cette usure au travail du cuir. La texture de la surface, la morphométrie et la pluridirectionnalité des stries d’utilisation ainsi que la fréquence modérée des cratères rappellent les principales caractéristiques de l’usure observée sur l’outil expérimental P22 utilisé pour perforer par rotation du cuir (fig. 94). En outre, l’émoussé important qui affecte l’ensemble de la pointe archéologique (cf. fig. 91-2) est similaire à celui observé sur l’outil expérimental. Toutefois, le lissage du microrelief est, dans le cas de l’outil archéologique, bien plus important. La nature du cuir, sa souplesse ou encore le temps d’utilisation sont des paramètres qui peuvent être à l’origine de cette différence. Ceci permet donc de penser que l’outil Kh03 13580 a été utilisé comme poinçon pour perforer par rotation alternative du cuir dans le cadre, peut-être, d’activités de couture. On pourrait alors envisager l’assemblage de pièces en cuir pour la fabrication de vêtements par exemple (Stewart 1973 ; Bird et Beeck 1980).
4
3
Fig. 91 : Khirokitia – Type I. Pointes utilisées par percussion posée directe. Altérations macroscopiques du volume. 1 & 2 – Émoussé (KhP97 50200, Kh03 13580) ; 3 & 4 – Émoussé et éclats (Kh94 9042, Kh95 9914.2) (clichés A. Legrand).
Stades d’usure de la pointe 1
2
TOTAL N
3
Émoussé
1
1
2
Émoussé et éclats
-
-
2
2
TOTAL N
1
1
4
6
4
Tabl. 52 : Khirokitia – Type I. Pointes utilisées par percussion posée directe. Macrotraces et déformation de la pointe. Les macrotraces observées sur les deux outils utilisés par percussion posée indirecte (type II) sont bien plus homogènes. L’étendue de l’usure est envahissante et son développement est dégressif en 2 zones d’usure. Les pointes sont exclusivement affectées par un émoussé qui déforme de manière très avancée le contour initial de l’apex. Aucun indice de raffûtage n’a été relevé. À faible grossissement, aucune altération de surface n’a été observée sur la zone de l’apex.
67
100x
200x
Fig. 93 : Khirokitia – Type I.C. Perforation par rotation alternative sur du cuir (Kh03 13580) (clichés A. Legrand).
100x
200x
Fig. 95 : Khirokitia – Exemples de pointes du type III sélectionnées pour l’analyse fonctionnelle. 1 – Kh95 9873 ; 2 – Kh97 11037 ; 3 – Kh97 11175 ; 4 – Kh96 10562.1 ; 5 – KhP97 50142 ; 6 – Kh96 10540.1. Fig. 94 : Pointe expérimentale utilisée pour perforer du cuir par rotation alternative pendant 50 minutes (P22) (clichés A. Legrand).
1.4.2.2. Pointe sur segment longitudinal de métapode avec épiphyse partielle On décompte 24 outils du type III sélectionnés (fig. 95). Il s’agit de pièces entières (n = 18) et d’outils subentiers présentant une cassure récente (n = 6).
Sections
Calibre fin
Calibre moyen
TOTAL N
Circulaire
12
4
16
Ovale
3
2
5
Rectangulaire
2
-
2
TOTAL N
17
6
23
Tabl. 53 : Khirokitia – Type III. Caractéristiques morphométriques des parties actives. reconnus. Les usures observées sur les outils utilisés par percussion posée directe, montrent une étendue et un développement variable d’une partie active à l’autre (tabl. 54). Aucune matière ne semble donc avoir été privilégiée. L’émoussé est l’altération du volume la plus fréquente. Il affecte à la fois l’apex et les arêtes de façonnage et déforme peu l’extrémité active. En revanche, lorsqu’il est associé à des éclats ou à un écrasement, la déformation est plus importante (tabl. 55 & fig. 96). Les ébréchures et les enlèvements peuvent être longs et rasants modifiant la morphologie de l’apex en plan et en profil. Les écrasements, accompagnés d’un repli des fibres de l’os, sont à l’origine d’un aplatissement total de l’apex. Trois pièces seulement montrent des traces de raffûtage par abrasion sur le pourtour de la pointe. Comme pour les outils précédemment étudiés, l’acuité de l’apex ne semble pas avoir été entretenue. À faible grossissement, les altérations de surface observées sur l’apex consistent en de nombreuses stries d’utilisation majoritairement longitudinales, longues, parallèles entre elles ou entrecroisées et associées à de fréquents cratères.
Morphométrie des outils Ces outils ont été fabriqués à partir de métapodes découpés longitudinalement. Une portion de l’épiphyse proximale ou distale qui constitue la base de l’outil, est conservée. Deux formats ont été recherchés : 1/ des outils d’une longueur moyenne de 84,36 mm, au fût large (largeur moyenne 11,86 mm ; épaisseur moyenne : 7 mm) et à la section mésiale en forme de croissant ; 2/ des outils plus courts d’une longueur moyenne de 77,69 mm, au fût étroit d’une largeur moyenne de 8,35 mm et d’une moyenne épaisseur de 5,08 mm. La section mésiale est en forme de boomerang. La section distale est majoritairement circulaire quel que soit le format du support. Le calibre distal, qui n’a pu être mesuré sur l’ensemble des pointes, est principalement fin (compris entre 5 et 20) (tabl. 53). Modes d’action et macrotraces La percussion posée directe (n = 18) et la percussion posée indirecte (n = 6) sont les deux modes d’action
68
Développement dégressif
Étendues
Développement homogène
Ind
À faible grossissement, des stries longitudinales, longues et parallèles entre elles ont été observées sur la surface (fig. 98). L’écrasement observé sur la base de ces outils s’accompagne d’un repli des fibres et parfois d’enlèvements longs, profonds ou rasants, situés sous le plan de frappe (stades d’usure 2 ou 3) (fig. 99).
TOTAL N
Marginale
2
1
1
4
Modérée
1
2
4
7
Envahissante
2
-
2
4
TOTAL N
5
3
7
15
Tabl. 54 : Khirokitia – Type III. Pointes utilisées par percussion posée directe. Étendue et développement de l’usure. Stades d’usure de la pointe
20x
32x
TOTAL N
1
2
3
Émoussé
4
1
1
Éclats
-
1
2
3
Émoussé et éclats
-
2
6
8
Émoussé et écrasement
-
-
1
1
TOTAL N
4
4
10
18
6
1
Tabl. 55 : Khirokitia – Type III. Pointes utilisées par percussion posée directe. Macrotraces et déformation de la pointe.
2
Fig. 97 : Khirokitia – Type III. Pointes utilisées par percussion posée indirecte. Altérations macroscopiques du volume. 1 & 2 – Émoussé, éclats et écrasement (KhP97 50142 et Kh00 12229) (clichés A. Legrand).
32x
20x
80x
1
2
Fig. 96 : Khirokitia – Type III. Pointes utilisées par percussion posée directe. Altérations macroscopiques du volume. 1 – Émoussé et éclats (Kh95 9898) ; 2 – Émoussé et écrasement (Kh88 5177) (clichés A. Legrand).
Fig. 98 : Khirokitia – Type III. Pointes utilisées par percussion posée indirecte. Altérations macroscopiques de surface (Kh96 10540.1) (cliché A. Legrand).
Les macrotraces observées sur les outils utilisés par percussion posée indirecte sont bien plus homogènes. L’étendue de l’usure est principalement marginale et son développement est homogène. Le contact avec la matière semble avoir été plus localisé et la nature de la matière travaillée plus résistante que dans le cas des outils utilisés par percussion directe. Les altérations du volume confirment ce premier constat. Les émoussés associés à des éclats et/ou à des écrasements endommagent de façon très importante la pointe de ces outils (fig. 97). Le raffûtage est proportionnellement plus fréquent que précédemment (3 pointes sur 6). La nécessité de travailler avec des pointes relativement piquantes semble, ici encore, confirmer la nature plutôt rigide des matières travaillées.
5x
Fig. 99 : Khirokitia – Type III.B.2. Écrasement de la surface proximale en vue supérieure (Kh97 11142.2) (cliché A. Legrand).
69
Cette usure peut être attribuée au travail des fibres végétales. L’émoussé d’étendue modérée qui correspond vraisemblablement à un contact diffus et continu avec la matière, l’aspect du microrelief mais surtout l’organisation et la morphométrie des stries d’utilisation ainsi que la présence de cratères, rappellent l’usure observée sur une pointe expérimentale utilisée par percussion directe pour fixer des cordes en fibres d’écorce d’orme destinées au montage d’une maison (coll. exp. R. Christidou) (fig. 103). L’outil Kh96 10562.1 pourrait donc avoir été en contact avec des cordages fabriqués à partir de fibres végétales.
Matières travaillées Trois usures distinctes ont été mises en évidence sur 5 pointes. L’usure n° 1 a été observée sur trois pointes de section circulaire ou ovale, de calibre fin ou moyen, utilisées par percussion posée directe (fig. 100). L’usure microscopique se manifeste par : - une topographie irrégulière marquée par de profondes dépressions linéaires liées au façonnage ; - un microrelief homogène. Les élévations extrêmement vernies présentent un aspect bombé et une texture grenue ; - des stries d’utilisation très nombreuses, pluridirectionnelles mais majoritairement transversales, parallèles entre elles ou entrecroisées, courtes ou longues, fines ou larges (jusqu’à 10 μm), profondes, continues et désordonnées. Leurs bords sont émoussés et leur fond est rugueux ou partiellement lissé ; - des cratères circulaires fréquents, d’un diamètre compris entre 15 et 25 μm. Leurs bords sont peu émoussés et leur fond est rugueux. Les microtrous sont également fréquents. Cette usure n’a pu être précisément attribuée à une matière travaillée. En effet, aucun outil expérimental ne présente une telle usure. Néanmoins, quelques indices fonctionnels peuvent être exploités. La pluridirectionnalité des stries d’utilisation pourrait résulter d’une utilisation par rotation. L’homogénéisation des élévations les plus hautes ainsi que la rugosité du fond des dépressions les plus larges, cratères et stries de façonnage, évoquent le travail d’une matière abrasive et rigide. L’aspect verni et métallique des élévations suggère le travail de matières végétales. Enfin, la présence d’émoussés associés ou non à des éclats ou à un écrasement confirme la dureté du matériau. Plusieurs activités relatives à la confection de paniers, de cordages, de nattes, de vêtements, etc., peuvent donc être envisagées.
L’usure n° 3 a été observée sur une seule pointe de section circulaire et de calibre fin, utilisée par percussion posée indirecte. L’usure microscopique se manifeste par (fig. 104) : - une topographie irrégulière ; - un microrelief irrégulier, des élévations vernies d’aspect bombé et de texture grenue ; - de nombreuses stries d’utilisation pluridirectionnelles, entrecroisées, courtes, fines ou larges (entre 5 et 10 μm), superficielles et profondes, continues et désordonnées, localisées sur les élévations. Leurs bords sont peu émoussés et leur fond est rugueux ou partiellement lissé ; - de fréquents cratères, circulaires d’un diamètre d’environ 20 μm. Leurs bords sont émoussés et leur fond est rugueux ou partiellement lisse. Les microtrous sont également fréquents. Les altérations macroscopiques du volume – émoussé associé à des ébréchures – la brillance des élévations, la morphométrie et l’orientation des stries, rappellent les principales caractéristiques de l’usure n° 1, bien que ces deux pointes aient été utilisées selon un mode d’action différent. Néanmoins, l’orientation pluridirectionnelle des stries d’utilisation proche de celle observée sur les pointes utilisées par percussion posée directe, laisse supposer qu’un mouvement par rotation, dans le but de faire pénétrer la pointe dans la matière après l’avoir perforée, a été réalisé. Ces deux usures présentent également des différences notamment dans l’aspect du microrelief. Homogène dans le cas de l’usure n° 1, il est irrégulier dans le cas de l’usure n° 3. Outre le mode d’action, on peut expliquer cette différence par une nature des fibres végétales travaillées différente (elles seraient dans ce cas moins abrasives et/ou plus rigides) et/ou par une durée d’utilisation plus brève. À l’échelle microscopique, des traces de préhension ont été repérées sur la partie mésiale de deux outils pour lesquels l’usure de la pointe n’a pu être déterminée (fig. 105). À 100x, la topographie d’origine est partiellement modifiée par l’usure. À 200x, le microrelief est homogène. Les élévations sont vernies, d’aspect bombé et de texture lisse. Les stries sont pluridirectionnelles, courtes et fines.
L’usure n° 2 a été reconnue sur une seule pointe de section distale rectangulaire et de calibre fin, utilisée par percussion posée directe. L’usure microscopique se caractérise par (fig. 101) : - une topographie irrégulière ; - un microrelief régulier. La surface est vernie et lissée ; - de nombreuses stries d’utilisation pluridirectionnelles, entrecroisées, courtes, larges (environ 2,5 μm), profondes, droites ou courbes, continues ou discontinues et désordonnées. Leurs bords sont émoussés et leur fond est rugueux ou partiellement lissé ; - des cratères plus fréquents que dans le cas de l’usure n° 1. Ils restent circulaires mais leur diamètre est plus petit : environ 12,5 μm. Leurs bords sont émoussés et leur fond rugueux ou partiellement lisse. Les microtrous sont également fréquents.
70
100x
200x
Fig. 100 : Khirokitia – Type III.B.1. Usure microscopique n° 1. Travail des fibres végétales par rotation alternative (Kh97 11037) (clichés A. Legrand).
100x
200x
Fig. 101 : Khirokitia – Type III.B.2. Usure microscopique n° 2. Travail des fibres végétales par rotation alternative (Kh96 10562.1) (clichés A. Legrand). 200x
200x 200x
Fig. 102 : Pointe expérimentale utilisée pour fabriquer des cordes en écorce d’orme. Utilisation : environ 6 heures (coll. exp. et cliché R. Christidou).
100x
200x
Fig. 103 : Khirokitia – Type III.A.2. Usure microscopique n° 3. Travail des fibres végétales par percussion posée indirecte (Kh00 12229) (clichés A. Legrand).
100x
200x
Fig. 104 : Khirokitia – Type III.B.1. Traces de préhension (Kh00 12304) (clichés A. Legrand).
71
1.4.2.3. Pointe sur segment longitudinal de diaphyse sans épiphyse Quarante-cinq outils entiers ont été analysés auxquels s’ajoutent 105 fragments mésio-distaux de type indéterminé (total : 150 outils) (fig. 105).
Modes d’action et macrotraces Les modes d’action par percussion posée directe (n = 25) et par percussion posée indirecte (n = 4) ont été reconnus. Le premier mode d’action a été repéré sur des pièces entières mais également sur certains fragments mésio-distaux qui présentent une morphologie étroite ou un rétrécissement symétrique de la pointe (cf. fig. 105-4), incompatibles avec un mode d’action par percussion indirecte. Sur ces outils, l’usure affecte l’ensemble de l’apex et les arêtes. L’étendue de l’usure est surtout modérée et son développement est majoritairement dégressif en 2 (n = 5) ou 3 zones d’usure (n = 1) (tabl. 57). Ceci signifie d’une part, que le contact avec la matière est relativement diffus et d’autre part, que la matière travaillée est plutôt souple. Les émoussés, très fréquents, affectent l’ensemble de la pointe et aboutissent parfois à une individualisation de celle-ci par rapport au fût de l’outil (fig. 106). Ils matérialisent ainsi la course de l’outil dans la matière. Des enlèvements et/ou des écrasements peuvent être associés à l’émoussé entraînant alors une déformation importante de l’apex (tabl. 58). Les indices de raffûtage sont peu nombreux (3 exemplaires). La même logique fonctionnelle qui consiste à utiliser l’outil jusqu’à sa totale exhaustion sans quasiment aucune phase de raffûtage est ici, suivie. À faible grossissement, on observe de nombreux cratères et des stries d’utilisation majoritairement pluridirectionnelles et entrecroisées qui, par analogie au corpus expérimental, correspondent à une utilisation par rotation. Sur d’autres outils, ces stries sont bien plus homogènes. Elles sont longitudinales, longues, parallèles entre elles. Le mouvement opéré serait alors davantage un mouvement par poussée longitudinale comme celui pratiqué expérimentalement pour le montage des vanneries par exemple.
Morphométrie des outils Ces outils ont été fabriqués sur des segments longitudinaux d’os longs (type IV). En fonction de l’amplitude du façonnage, ces supports présentent des bords au contour régulier ou irrégulier. On distingue alors les pointes du type IV.A (14 exemplaires) et celles du type IV.B (31 exemplaires). Quel que soit le type, la longueur moyenne est de 70,5 mm, la largeur mésiale est de 8 mm et l’épaisseur mésiale est de 4,54 mm. Ces pointes sont relativement proches sur le plan métrique des pointes les plus larges du type III (cf. p. 68). Leur section distale est majoritairement circulaire. Leur calibre distal qui n’a pu être mesuré sur l’ensemble des outils, est principalement fin (tabl. 56). La morphométrie des parties distales est équivalente à celle mise en évidence pour les pointes du type III. Cela indique donc qu’indépendamment du support, des pointes circulaires de calibres fins ont été recherchées.
200x
Circulaire Ovale Rectangulaire Carrée Triangulaire TOTAL N
Calibre fin 48 19 1 1 3 72
Calibre moyen 19 12 1 32
Calibre lourd 1 1
Développement homogène
Ind.
TOTAL N
Marginale
-
2
5
7
Modérée
5
3
5
13
Envahissante
5
-
-
5
TOTAL N
10
5
10
25
Tabl. 57 : Khirokitia – Type IV. Pointes utilisées par percussion posée directe. Étendue et développement de l’usure.
Fig. 105 : Khirokitia – Exemples de pointes du type IV et fragments de pointes sélectionnés pour l’analyse fonctionnelle. 1 – KhP98 50476 ; 2 – Kh94 9382 ; 3 – Kh88 5660 ; 4 – Kh93 8140 ; 5 – Kh00 12306.2. Sections
Développement dégressif
Étendues
Stades d’usure de la pointe Émoussé
TOTAL N 68 31 2 1 3 105
1
2
3
8
6
2
TOTAL N 16
Éclats
-
-
1
1
Émoussé et éclats
1
1
4
6
Émoussé et écrasement
-
2
-
2
TOTAL N
9
9
7
25
Tabl. 58 : Khirokitia – Type IV. Pointes utilisées par percussion posée directe. Macrotraces et déformation de la pointe.
Tabl. 56 : Khirokitia – Type IV. Caractéristiques morphométriques des parties actives. 72
Les altérations du volume présentes sur les fragments distaux dont le mode d’action n’a pas été déterminé, sont relativement similaires à celles qui viennent d’être présentées (fig. 110). Les émoussés restent fréquents. Les éclats et écrasement sont, en revanche, peu nombreux. Les altérations de surface pourraient bien plus que les altérations du volume préciser le mode d’action de ces outils. En effet, certaines pointes montrent des stries transversales ou obliques qui pourraient être mise en relation avec une utilisation par rotation (fig. 111). D’autres, présentent des stries longitudinales caractéristiques d’une utilisation par percussion indirecte ou par percussion directe selon un mouvement de poussée longitudinale. Les cassures peuvent également, en fonction de leur morphologie, révéler tel mode d’action ou tel autre. Dans cet échantillon, les cassures par flexion, les plus nombreuses, pourraient témoigner de contraintes mécaniques importantes dues à une utilisation en pièce intermédiaire.
7,5x
Fig. 106 : Khirokitia – Fragment distal d’une pointe utilisée par percussion posée directe. Altérations macroscopiques du volume. Emoussé et éclats (Kh93 8140) (cliché A. Legrand). Les outils utilisés par percussion posée indirecte (n = 4) présentent une usure d’étendue modérée avec un développement homogène ou dégressif. Les pointes sont affectées par des émoussés associés ou non à des éclats (fig. 107). Leur déformation est peu avancée (n = 2), avancée (n = 1) ou très avancée (n = 1). Les altérations macroscopiques du volume observées sur ces outils ne diffèrent pas de celles mises en évidence sur les pointes utilisées par percussion posée directe. Des stries unidirectionnelles, longitudinales et parallèles entre elles associées parfois à de nombreux cratères, sont également observées. Les écrasements observés sur les surfaces proximales sont accompagnés d’un repli des fibres de l’os et d’éclats courts et profonds situés sous le plan (stade d’usure 2 ou 3) (fig. 108).
15x
32x
1
32x
2 32x
32x
15x
3
1
4
Fig. 109 : Khirokitia – Fragments distaux de pointes. Mode d’action indéterminé. Altérations macroscopiques du volume. 1 – Émoussé (Kh90 6807.3) ; 2 – Émoussé et éclats (Kh00 12306.2) ; 3 – Écrasement (Kh88 5481) ; 4 – Éclats (Kh97 11093.2) (clichés A. Legrand).
2
Fig. 107 : Khirokitia – Type IV. Pointes utilisées par percussion posée indirecte. Altérations macroscopiques du volume. 1 – Émoussé (Kh89 5752) ; 2 – Émoussé et éclats (Kh00 12248) (clichés A. Legrand).
48x
32x
10x
Fig. 108 : Khirokitia Type IV.A.1. Écrasement de la surface proximale avec repli des fibres de l’os (flèche) (Kh95 9896) (cliché A. Legrand).
1
2
Fig. 110 : Khirokitia – Fragments distaux de pointes. Mode d’action indéterminé. Altérations macroscopiques de surface. 1 - Kh88 5481 ; 2 - Kh97 11093.2 (clichés A. Legrand). 73
élévations rappellent l’usure n° 1. Sur le plan macroscopique, les altérations du volume sont également similaires. En revanche, contrairement à l’usure n° 1, les bords et le fond des dépressions les plus larges sont, ici, davantage affectés par l’usure, ce qui pourrait correspondre au travail de matières végétales souples. En outre, les stries d’utilisation sont bien plus homogènes dans le cas de l’usure n° 2. Cette homogénéité indiquerait un mouvement plus régulier qui pourrait correspondre à une utilisation par percussion indirecte ou par poussée longitudinale. En l’absence d’outil entier percuté à la base présentant cette usure, le mouvement par poussée longitudinale serait à privilégier.
Matières travaillées Quatre usures microscopiques ont été repérées sur 27 pointes entières ou fragmentées. L’usure n° 1 a été observée sur 13 pointes. Une est attribuée au type IV.A et 4 au type IV.B. Huit objets sont des fragments distaux. La section distale est circulaire et le calibre principalement fin et dans une moindre mesure moyen ou lourd. Deux pointes ont été utilisées par percussion posée directe. Le mode d’action reste indéterminé sur le reste de l’échantillon. Cette usure se caractérise par (fig. 111) : - une topographie irrégulière marquée par de nombreuses dépressions aux bords peu émoussés et au fond rugueux ; - un microrelief homogène ou régulier. Dans le cas d’un microrelief homogène, les élévations sont brillantes ou vernies, d’aspect bombé et de texture grenue. Lorsque le microrelief est régulier, la surface est de texture grenue et brillante ; - des stries d’utilisation pluridirectionnelles, longues, majoritairement larges (entre 3 et 7 μm), profondes, droites ou courbes, continues, parallèles entre elles ou entrecroisées et désordonnées. Leurs bords sont peu émoussés et leur fond est rugueux ; - de nombreux cratères circulaires d’un diamètre compris entre 9 et 25 μm. Leurs bords sont faiblement émoussés et leur fond rugueux. On observe également des microtrous en nombre variable. La topographie irrégulière, l’aspect du microrelief, la présence de stries pluridirectionnelles larges, profondes, courbes, aux bords peu émoussés et au fond rugueux ou partiellement lisse et le nombre important de cratères rappellent fortement l’usure observée sur l’outil expérimental P20 utilisé par rotation pour perforer de l’écorce humide de chêne (fig. 112). L’hypothèse de l’utilisation des outils archéologiques comme poinçons pour perforer par rotation de l’écorce est donc tout à fait envisageable.
L’usure n° 3 a été observée sur deux fragments distaux. Sur le plan morphologique, ces pointes ont une section distale circulaire ou ovale et un calibre distal fin. Cette usure se caractérise par (fig. 114) : - une topographie irrégulière ; - un microrelief homogène, des élévations vernies, d’aspect bombé et de texture grenue ; - des stries d’utilisation pluridirectionnelles, courtes, majoritairement larges (jusqu’à 5 μm) mais aussi plus fines, profondes ou superficielles, droites, désordonnées et continues. Les bords des stries larges sont peu émoussés et leur fond est rugueux ; - de nombreux cratères, circulaires ou ovales, d’un diamètre compris entre 5 et 11 μm. Leurs bords sont faiblement émoussés et leur fond rugueux. On observe également quelques microtrous. Le lissage progressif du microrelief, la présence de stries assez larges et la faible usure des bords et du fond des dépressions les plus profondes rappellent l’usure n° 2 mise en évidence sur les pointes du type III (cf. fig. 101). Les altérations macroscopiques sont également assez proches de celles qui caractérisent ces pointes. L’étendue de l’usure est envahissante et les émoussés associés ou non à des ébréchures affectent l’apex. Il s’agit là d’outils vraisemblablement utilisés par rotation sur des fibres végétales abrasives pour la fabrication possible de cordages.
L’usure n° 2 a été observée sur 11 pointes. Deux sont attribuées au type IV.A, une au type IV.B. Enfin, 8 objets sont des fragments distaux. Sur le plan morphologique, ces pointes ont une section distale principalement circulaire et un calibre distal fin. Le mode d’action par percussion posée directe a été reconnu sur 3 pièces. L’usure se manifeste par (fig. 113) : - une topographie irrégulière ; - un microrelief homogène ou régulier, des élévations vernies, d’aspect bombé et de texture lisse ou grenue ; - des stries d’utilisation majoritairement longitudinales, longues, parallèles entre elles, assez fines, superficielles, droites, serrées, ordonnées et continues. De rares stries courtes, fines et obliques sont également présentes ; - de fréquents cratères circulaires, d’un diamètre d’environ 15 μm. Leurs bords sont faiblement émoussés et leur fond rugueux. On observe également des microtrous en nombre variable. L’irrégularité de la topographie, le lissage progressif du microrelief, l’aspect bombé et la texture grenue des
L’usure n° 4 a été observée sur une pièce entière utilisée par percussion posée directe (type IV.A.2). Sa pointe est de section ovale et son calibre distal est fin. L’usure observée se caractérise par (fig. 115) : - une topographie régulière ; - un microrelief irrégulier. Les élévations sont vernies, d’aspect bombé et de texture lisse ; - de nombreuses stries longitudinales, parallèles entre elles, longues, fines, superficielles, droites, serrées, ordonnées et continues. De rares stries transversales ou obliques, entrecroisées, courtes et fines, ont aussi été repérées ; - quelques microtrous. L’usure affecte les élévations mais également les bords et parfois même le fond des stries de façonnage. Par comparaison au référentiel expérimental, cette usure est 200x proche de celle observée sur l’outil expérimental P22 200x utilisé par rotation pour perforer du cuir (fig. 116).
74
100x
200x
Fig. 111 : Khirokitia – Fragment distal de pointe. Usure microscopique n° 1. Travail de l’écorce par rotation (Kh95 9946) (clichés A. Legrand).
15x
200x
100x
Fig. 112 : Pointe expérimentale utilisée pour perforer par rotation alternative de l’écorce humide de chêne pendant 20 minutes (P20) (clichés A. Legrand).
100x
200x
Fig. 113 : Khirokitia – Fragment distal de pointe. Usure microscopique n° 2. Travail des fibres végétales souples selon un mouvement longitudinal (Kh97 11089) (clichés A. Legrand).
100x
200x
Fig. 114 : Khirokitia – Fragment distal de pointe. Usure microscopique n° 3. Travail des fibres végétales probablement par rotation alternative (Kh00 12306.2) (clichés A. Legrand).
200x
100x
Fig. 115 : Khirokitia - Type IV.A.2. Usure microscopique n° 4. Travail du cuir par rotation alternative (Kh97 11130) (clichés A. Legrand).
75
Toutefois, l’usure qui caractérise l’outil expérimental est bien plus développée que celle observée sur l’outil archéologique. La nature du cuir, sa souplesse ou encore la durée d’utilisation sont des paramètres qui pourraient être à l’origine de cette différence. L’hypothèse d’une utilisation comme poinçon pour perforer du cuir est tout à fait probable d’autant que les altérations du volume : émoussé associé à des éclats, sont similaires sur les deux outils. Les activités déjà envisagées pour l’outil Kh03 13580 (type I.C) – confection de vêtements, de récipients, de sacs, etc. – peuvent, ici, également être avancées (cf. p. 67).
100x
Morphométrie des outils Les aiguilles de petit module dominent largement cet échantillon (145 aiguilles sur 155, soit 93,55 %). Parmi elles, les aiguilles du type V.A.1, qui se caractérisent par une base ogivale et un chas dont la largeur est proportionnelle à celle de l’extrémité proximale, sont particulièrement bien représentées (68 exemplaires, soit 46,90 %). Ces aiguilles sont courtes, d’une longueur moyenne de 45,91 mm. L’extrémité proximale est très étroite, d’une largeur moyenne de 2,52 mm. Le chas est également extrêmement étroit, d’un diamètre moyen de 1,23 mm. Ces dimensions suggèrent un travail délicat, peu contraignant, sur des matériaux peu résistants et l’utilisation de fil très fin.
200x
Macrotraces Lorsque les aiguilles sont entières, l’usure est généralement localisée sur toute la longueur de la pièce soit de manière homogène, soit de manière hétérogène. Les traces de façonnage sont plus ou moins émoussées ou ont totalement disparu. De nombreux fragments composent cet échantillon (131 exemplaires). L’importance numérique des fragments justifie que l’on examine la morphologie des cassures anciennes observées sur le fût (n = 79). Les cassures en biseau ou en dents de scie sont fréquentes (51 exemplaires sur 79, soit 64,56 %). D’après les expérimentations conduites, ce type de cassures se produit généralement lors d’une pression assez forte contre une matière résistante. Toutefois, on ne peut totalement exclure le facteur temps dont on sait, sans l’avoir réellement mesuré, qu’il joue un rôle dans la fragilisation de l’outil. Plus l’outil est utilisé, plus la structure de l’os est soumise aux contraintes mécaniques et se fragilise.
200x 200x
Fig. 116 : Pointe expérimentale utilisée pour perforer du cuir par rotation alternative pendant 50 minutes (P22, zone 3) (clichés A. Legrand). 200x
1.4.2.4. Aiguille à chas Cent cinquante cinq aiguilles ont été analysées (fig. 117). L’échantillon se compose de pièces entières (n = 24) et de fragments distaux, mésiaux et proximaux (n = 131). 200x
La zone de l’apex laisse apparaître différentes altérations du volume. Parmi elles, l’émoussé est le plus fréquent (tabl. 59 & fig. 118). Il affecte uniformément la pointe mais il peut aussi être plus prononcé sur l’une des faces de celle-ci (n = 20) entraînant la formation d’une facette d’une longueur de 3 à 5 mm conférant à la pointe une morphologie déjetée par rapport à l’axe longitudinal de l’outil (fig. 119). Ce type d’usure, qui n’a pas été repéré sur les aiguilles expérimentales, suggère un angle de travail relativement faible et un contact très localisé avec la matière. Précisons toutefois que dans un seul cas (Kh97 11159.2) cette facette longue de 4 mm semble avoir été préalablement préparée par abrasion, le reste de l’aiguille est façonné par raclage. S’agit-il d’un aménagement spécifique pour favoriser la pénétration ou le glissement de l’aiguille sur la matière ? Aucun élément ne permet, pour l’instant, d’interpréter la finalité de cette préparation. Les écaillures, les ébréchures et les écrasements sont rares. Ces derniers sont systématiquement associés à un émoussé. Le repli des fibres de l’os a été observé sur une seule aiguille (fig. 120). Ces stigmates résultent a priori d’une contrainte mécanique assez importante que l’on peut rattacher soit à la nature de la matière travaillée qui aurait nécessité une forte pression lors de l’action, soit au temps
200x
Fig. 117 : Khirokitia – Exemples d’aiguilles à chas sélectionnées pour l’analyse fonctionnelle. 1 – Kh97 10862.3 ; 2 – Kh97 11159.2 ; 3 – Kh97 11238.5 ; 4 – KhP98 50491 ; 5 – Kh96 10653.1 ; 6 – Kh88 5330 ; 7 – Kh01 12574.2 ; 8 – Kh88 5569.1.
76
d’utilisation prolongé. Ces stigmates sont à l’origine d’une déformation plus avancée que celle produite par l’émoussé uniquement (tabl. 59). Sur un plan plus général, tous les stades d’usure sont représentés dans des proportions assez équivalentes. Une seule aiguille montre les traces de raffûtage par abrasion oblique limitées à l’apex.
Stades d’usure de la pointe 1 2 3 15 11 4 1 3 4 2
Émoussé Éclats Émoussé et éclats Émoussé et écrasement TOTAL N
Les émoussés affectent également le chas. Plus précisément, ils sont localisés sur les branches du chas (n = 74), sur les parois inférieure et supérieure (n = 28) ou bien être davantage prononcés sur l’une ou l’autre de ces parois (fig. 121-122). Dans ce dernier cas, c’est la paroi inférieure qui est la plus souvent usée (12 exemplaires contre 2 pour la paroi supérieure). Le passage du fil à l’intérieur du chas est à l’origine de l’émoussé observé sur la paroi inférieure. L’usure de la paroi supérieure est, en revanche, plus énigmatique et n’a pas été repérée sur le matériel expérimental. Dans l’état actuel des expérimentations, aucune explication ne peut être apportée quant à sa formation. En fonction de l’intensité de l’émoussé et de la déformation du volume du chas, ces aiguilles ont été classées en trois stades d’usure. Le stade d’usure 1 se manifeste par une très faible déformation du chas : la morphologie de l’extrémité est peu modifiée, les arêtes de forage sont bien marquées, l’émoussé des branches et des parois du chas est faible (n = 34) (fig. 123-1). Le stade d’usure 2 consiste en une déformation modérée du chas : la morphologie initiale de l’extrémité proximale est modifiée, les arêtes de forage s’effacent progressivement tandis que l’émoussé des branches et des parois du chas s’accentue (n = 40) (fig. 123-2). Le stade d’usure 3 se caractérise par une déformation très avancée du chas, le contour de l’extrémité proximale est totalement transformé, la perte de matière y est importante, les arêtes de forage ont disparu, enfin, l’émoussé des branches et des parois du chas est intense (n = 34) (fig. 123-3). Dans des cas d’usure extrême, le chas, comme le reste de l’aiguille, subit des contraintes mécaniques qui, ajoutées à l’usure des branches, peuvent avoir comme conséquence la cassure du chas. Celle-ci intervient au niveau des branches et se présente systématiquement comme une cassure droite (n = 5). On peut anticiper la cassure en aménageant en dessous du chas, une seconde perforation. Ce type de réparation n’a été identifié que sur une seule aiguille (Kh97 11014.1) (fig. 124). À l’échelle macroscopique, les surfaces apparaissent très réfléchissantes, au relief souvent totalement lisse. De nombreux cratères et des stries d’utilisation longitudinales ou pluridirectionnelles affectent toute la longueur de l’aiguille (fig. 125).
TOTAL N 30 4 6
-
-
3
3
15
16
12
43
Tabl. 59 : Khirokitia – Type V. Macrotraces et déformation de la pointe.
15x
1
15x
2
Fig. 118 : Khirokitia – Type V. Altération macroscopique du volume. 1& 2 – Émoussé (Kh88 5330, Kh97 11024) (clichés A. Legrand).
1
2
Fig. 119 : Khirokitia - Type V. Facette d’usure sur une face de l'apex. 1 –Kh97 11004.4 ; 2 – Kh96 10644.1 (grossissement 14x) (clichés A. Legrand).
28x
56x
1
Fig. 120 : Khirokitia Type V. Écrasement de l’apex. (Kh03 13434) (cliché A. Legrand).
2
Fig. 121 : Khirokitia – Type V. Émoussé des branches du chas (Kh97 11024, Kh93 8470.1) (clichés A. Legrand). 77
Matières travaillées Quatre usures ont été identifiées sur un échantillon de 71 aiguilles. L’usure n° 1 a été observée sur 38 aiguilles du type V.A.1 (n = 15) ou du type V.B.1 (n = 2) et sur 21 fragments distaux. L’usure qui est indifférenciée sur toute la longueur de l’aiguille consiste en (fig. 126) : - une topographie irrégulière ; - un microrelief régulier. La surface est vernie et de texture lisse ; - de nombreuses stries pluridirectionnelles, parallèles entre elles ou entrecroisées, droites, fines, superficielles, désordonnées et continues ; - de nombreux cratères circulaires, d’un diamètre d’environ 7 μm. Leurs bords sont faiblement émoussés et leur fond est rugueux. Les microtrous sont rares. Cette usure est proche de celle observée sur les aiguilles expérimentales utilisées pour coudre un tissu en lin (fig. 127). Elles ont en commun une topographie irrégulière, un microrelief régulier, de nombreuses stries d’utilisation longues et fines. En revanche, l’usure n° 1 se distingue des usures expérimentales par une texture lisse des élévations et par la présence de nombreux cratères au fond rugueux. L’usure n° 1 pourrait correspondre au travail de fibres végétales dans le cadre d’activités de couture ou de tissage.
28x
1
2
Fig. 122 : Khirokitia – Type V. Émoussé des parois du chas. 1 – paroi inférieure (Kh93 8470.1) ; 2 – paroi supérieure (Kh97 11024) (clichés A. Legrand).
28x
1
2
3
Fig. 123 : Khirokitia – Type V. Stades d’usure du chas. 1 – stade d’usure 1 (Kh97 11332.2) ; 2 – stade d’usure 2 (Kh91 7665) ; 3 – stade d’usure 3 (Kh02 13262) (clichés A. Legrand).
2x
Fig. 124 : Khirokitia Type V. Réparation du chas (Kh97 11014.1) (clichés A. Legrand).
56x
98x
Fig. 126 : Khirokitia – Type V. Usure microscopique n° 1. Travail des fibres végétales souples (Kh97 11159.2) (clichés A. Legrand). Fig. 125 : Khirokitia – Type V. Altérations de surface (Kh97 10948) (clichés A. Legrand).
78
32x
100x
200x
Fig. 127 : Aiguille expérimentale utilisée pour coudre du lin pendant 120 minutes (A20) (clichés A. Legrand).
L’usure n° 2 a été observée sur 22 aiguilles de petit module : 11 outils entiers ou fragments mésio-proximaux du type V.A.1 et 11 fragments mésio-distaux de type indéterminé. L’usure observée sur la pointe ou sur le fût dans le cas des fragments, consiste en (fig. 128) : - une topographie irrégulière marquée par de nombreuses dépressions non linéaires de morphologies et de dimensions variées ; - un microrelief régulier. La surface est de texture grenue et vernie ; - de nombreuses stries d’utilisation majoritairement longitudinales et longues et dans une moindre mesure, obliques et courtes sont observées. Elles sont fines, superficielles, droites, serrées, parallèles entre elles ou entrecroisées, ordonnées et continues ; - de fréquents cratères circulaires ou ovales, d’un diamètre compris entre 12,5 à 21 μm. Leurs bords sont émoussés et leur fond est rugueux ou partiellement lisse. Les microtrous sont également très fréquents. La topographie irrégulière, le microrelief régulier et les stries d’utilisation rappellent l’usure n° 1. Sur le plan macroscopique, les altérations du volume sont également similaires. Quatre aiguilles présentent une facette d’usure sur l’apex. Néanmoins, on note des différences entre les deux usures. Les cratères sont moins nombreux et peu affectés par l’usure. L’orientation des stries observées est, ici, plus homogène, elles sont majoritairement longitudinales. Cette uniformité peut s’expliquer soit par un mouvement plus régulier lors du travail, soit par une plus grande homogénéité des fibres. Une nature ou un traitement différent des fibres pourrait être, par exemple, envisagé. L’usure observée sur la zone du chas se distingue par un nombre plus élevé de cratères et par une pluridirectionnalité des stries. Cette usure correspond aux traces de préhension.
Fig. 128 : Khirokitia – Type V. Usure microscopique n° 2. Travail des fibres végétales souples. Traces de préhension dans la zone du chas (Kh96 10693) (clichés A. Legrand).
L’usure n° 3 a été observée sur 6 aiguilles de petit module fragmentées ou entières (type V.A.1 : 2 exemplaires ; type V.C.1 : 1 exemplaire ; type indéterminé : 3 exemplaires) et 1 aiguille de grand module (type V.C.2.2). L’usure observée sur l’apex ou sur le fût dans le cas des fragments, se manifeste par (fig. 129) : - une topographie irrégulière marquée par de nombreuses dépressions linéaires et par de nombreuses stries de morphologies et de dimensions variées ; - un microrelief régulier. La surface est vernie et de texture grenue ou lisse ; - de nombreuses stries d’utilisation pluridirectionnelles, parallèles entre elles ou entrecroisées, droites, larges (jusqu’à 10 μm) ou fines, profondes ou superficielles, désordonnées et continues. Les bords des stries larges sont plus ou moins émoussés et leur fond est rugueux, partiellement ou totalement lisse ; - de nombreux cratères circulaires, d’un diamètre assez homogène d’environ 15 μm. Leurs bords sont faiblement émoussés et leur fond est rugueux. Les microtrous sont moins fréquents que dans le cas précédent. On peut attribuer cette usure au travail de fibres végétales rigides probablement de l’écorce en raison de l’usure faible du fond des stries de façonnage et du lissage important des élévations. Les altérations du
79
- une topographie irrégulière ; - un microrelief homogène. Les élévations sont vernies et présentent un aspect bombé et une texture grenue ; - de nombreuses stries majoritairement longitudinales, parallèles entre elles ou entrecroisées, larges (jusqu’à 8 μm) ou fines, profondes ou superficielles, droites, serrées, ordonnées et continues. Les bords des stries sont émoussés et leur fond est rugueux, partiellement ou totalement lisse ; - de fréquents cratères circulaires d’un diamètre d’environ 12 μm. Leurs bords sont émoussés et leur fond est rugueux ou partiellement lisse. On observe également de fréquents microtrous. Le microrelief homogène, la morphométrie des stries et la présence de microtrous rappellent l’usure observée sur l’aiguille expérimentale A7 utilisée pour coudre du cuir (fig. 131). Par ailleurs, on note que l’usure affecte les bords et le fond des stries profondes de façonnage, ce qui signifie que la matière travaillée est relativement souple. Le travail de couture sur du cuir souple paraît être, ici, une hypothèse à considérer. La zone du chas, par ailleurs très émoussée, montre une usure légèrement différente de celle décrite sur le reste de l’aiguille. On y observe un microrelief homogène, des stries larges, désordonnées et associées à des stries courtes pluridirectionnelles. Les cratères ont quasiment disparu. Cette usure qui ne peut être rattachée à une usure de préhension, reste indéterminée.
volume qui consistent en un émoussé de l’apex jusqu’à produire une facette dans deux cas, contribuent également à supposer le contact avec un matériau rigide. Cette usure se rapproche de celle observée sur l’outil expérimental P20 utilisé pour perforer par rotation de l’écorce humide de chêne. On en déduit donc que ces aiguilles ont été utilisées dans le cadre de la confection de vêtements ou de paniers. La présence dans cet échantillon d’aiguilles de petit module aux côtés d’aiguilles de module plus large pourrait, par exemple, suggérer la production de paniers de taille variée. On peut également penser que ces aiguilles, en fonction de leur module, interviennent à différentes étapes de la confection des paniers. Autant d’hypothèses qu’il est difficile de préciser tant les chaînes opératoires sont complexes et diversifiées. La zone du chas montre à 200x un microrelief régulier, une surface extrêmement vernie et couverte de nombreuses stries fines et de cratères circulaires. Cette usure proche de celle précédemment décrite, correspond à une usure de préhension qui suggère par ailleurs, en raison de son développement important, que ces aiguilles ont été a priori longuement utilisées.
100x
100x
Fig. 129 : Khirokitia – Type V. Usure microscopique n° 3. Travail de l’écorce. Traces de préhension dans la zone du chas (Kh97 11238.5) (clichés A. Legrand). Fig. 130 : Khirokitia – Type V. Usure microscopique n° 4. Travail du cuir. Usure indéterminée repérée dans la zone du chas (Kh97 11163) (clichés A. Legrand).
L’usure n° 4 a été observée sur 4 fragments mésioproximaux d’aiguilles de petit module (3 exemplaires pour le type V.A.1 ; 1 exemplaire indéterminé). L’usure observée sur le fût se caractérise par (fig. 130) :
80
32x
100x
200x
Fig. 132 : Grotte de Nahal Hemar. Fragment de tissu (Schick 1989, fig. 16).
le matériel archéologique par une relative diversité des usures observées qui peuvent correspondre à deux catégories de fibres : 1/ les fibres végétales souples ; 2/ les fibres végétales plus rigides. La première catégorie est la mieux représentée parmi l’échantillon de pointes et d’aiguilles (68,27 %, 71 outils sur un total de 104) (cf. tabl. 60). La nature des fibres n’a pas été précisée mais on peut envisager l’utilisation de liber ou de lin dont on sait pour ce dernier, qu’il est susceptible d’avoir été exploité (Burnham 1965 ; Schick 1989 ; Stordeur 1989). Aucune graine de lin n’a été retrouvée à Khirokitia mais comme le souligne E. J.W. Barber « The flax stem yields the nicest fiber, incidentally, before the seed develops » (Barber 1991, p. 12). Cette absence ne signifie donc pas nécessairement que le lin n’a pas été exploité. En revanche, le lin a été reconnu, même s’il reste rare, sur les sites chypriotes de Mylouthkia 1 et du Cap AndreasKastros (Van Zeist 1981, p. 98 ; Peltenburg et al. 2001 b, p. 71 ; Willcox 2003, p. 235). À partir de ces données et des vestiges archéologiques retrouvés à Khirokitia (fig. 134), différentes activités qui reflètent à la fois un savoir-faire relatif à la récolte et au traitement des fibres et une connaissance parfaite de l’utilisation des ressources végétales, peuvent être envisagées. Parmi elles le tissage (fig. 135). Les indices matériels d’une telle activité sont inexistants à Khirokitia contrairement à d’autres sites et notamment à Bouqras et à El Kowm où des témoins faisant référence à des métiers à tisser horizontaux ont été découverts (Stordeur 1989, p. 22). Mais comme nous l’avons constaté lors des expérimentations, le tissage peut se réaliser avec un dispositif rudimentaire fabriqué en matière périssable (Médard et Moser 2001) (cf. p. 41). Il en est de même pour le filage qui peut être exécuté sans fusaïole, les fibres sont alors tordues entre les mains ou entre une main et une autre partie du corps (Médard 2005, p. 7). Ce système prévaut également pour la fabrication de cordes (Stewart 1984) (fig. 136). Outre les tissus, des sacs et des filets destinés à la chasse ou à la pêche pourraient avoir été fabriqués (Desse et Desse-Berset 1989, p. 230). Enfin, considérant le nombre particulièrement élevé d’aiguilles sur le site de Khirokitia, leur rôle au sein du système technique semble déterminant et ne peut se limiter
Fig. 131 : Aiguille expérimentale utilisée pour coudre du cuir pendant 95 minutes (A3) (clichés A. Legrand).
Conclusion Avant d’aborder la fonction des outils tranchants, résumons ici les premiers résultats fonctionnels obtenus sur les outils pointus de Khirokitia. La première caractéristique de cet échantillon est la prédominance du travail par percussion posée directe des matières végétales au détriment d’autres matériaux comme la peau dont le travail semble être marginal (tabl. 60) (Legrand 2003, sous presse). Ce sont donc des matériaux souples ou rigides, dont la dureté est bien inférieure à celle de l’os, qui ont été exploités. Aucune usure n’a pu être attribuée au travail de l’os par exemple. Fibres végétales souples
Matières Végétales rigides
Cuir
TOTAL N
Écorce
Ind.
62
8
6
6
82
Percussion posée indirecte
-
-
1
-
1
Indéterminé
9
12
-
-
21
TOTAL N
71
20
7
6
104
Percussion posée directe
Fig. 133 : Site d’El Kowm. Empreinte d’une vannerie spiralée (Maréchal 1989, fig. 3).
Tabl. 60 : Khirokitia – Pointes et aiguilles. Matières travaillées identifiées et modes d’action. L’utilisation importante des fibres végétales pour la confection de divers objets est une tendance qui marque la plupart des sites néolithiques du Proche-Orient (cf. par exemple Burnham 1965 ; Adovasio 1975-1977 ; Maréchal 1989 ; Schick 1989 ; Stordeur 1989 ; Wendrich 2000) (fig. 132-133). Considérant les données environnementales de Khirokitia, différentes matières végétales ont pu être utilisées. Cette variété se traduit sur
81
seulement à la couture de vêtements. D’autres activités et notamment le tissage, la vannerie ou encore la broderie de petits éléments décoratifs, peuvent aussi être envisagées.
1
Les fibres plus rigides, abrasives et rugueuses représentent la seconde catégorie des fibres exploitées à Khirokitia. La nature des fibres rigides n’a pu être précisément déterminée, exception faite de l’écorce. Par conséquent il est difficile de restituer la place de l’outillage pointu de Khirokitia dans les chaînes opératoires de transformation de ces matériaux. Néanmoins, il a été possible de préciser le mode d’action des pointes notamment. Deux modes d’action possibles ont été identifiés : la percussion posée directe selon un mouvement de rotation ou qui s’en rapproche et la percussion posée indirecte. Ce dernier mode d’action qui caractérise en général les outils tranchants, apparaît ici, comme une spécificité fonctionnelle des outils pointus de Khirokitia. L’utilisation des pointes en pièce intermédiaire semble être, en effet, peu courante – certaines pièces comparables ont été retrouvées à Byblos (Néolithique récent) (Dunand 1973). Douze pointes auxquelles peuvent être ajoutées 13 autres qui n’ont pas été considérées dans l’analyse fonctionnelle, présentent des traces de percussion à leur base constituée pour la plupart, par l’épiphyse distale des métapodes. Si l’on considère également les fragments proximaux d’outils, qui pour l’essentiel sont très probablement des pointes au regard de leur proportion au sein du corpus, le nombre de bases percutées augmente de manière non négligeable (89 exemplaires). L’usage de ces pointes en pièce intermédiaire répond vraisemblablement à un besoin fonctionnel précis en relation avec la nature de la matière travaillée. Toutefois, en raison de leur nombre important, on peut également se demander dans quelle mesure ce mode d’action ne pourrait pas traduire aussi un trait culturel propre à cette communauté. Quelle que soit la nature de la matière travaillée, l’usage de la percussion serait privilégié. À partir de ces premières données sur la nature des fibres et le mode d’action, diverses activités peuvent être envisagées. Quelques unes ont été précédemment citées. Résumons les ici. Si à Khirokitia, la vaisselle en pierre (récipients, bols, etc.) est particulièrement bien représentée (Mouton 1984), on peut également envisager à leur côté une large gamme de vanneries spiralées aux fonctions multiples, fabriquées à partir d’écorces, de roseaux, de paille etc., comme on en connaît encore aujourd’hui sur l’île (fig. 137). Les données ethnographiques révèlent également la fabrication de récipients ou de vêtements à partir d’écorce ou de liber (Stewart 1973) (fig. 138). Ces matériaux peuvent encore être recherchés pour la fabrication de nattes, de couvertures, de cordages, etc., soit autant objets qui reflètent les besoins quotidiens des populations.
2
Fig. 134 : Khirokitia – Vestiges en fibres végétales. 1 – Fragment de tissu (Le Brun 1989 d, fig. 1) ; 2 – Empreinte d’une natte tissée croisée (clichés O. Daune-Le Brun).
Fig. 135 : Fabrication d’un tissu cordé (dessin original de D. Plongeur-Plondomi).
Les outils pointus de Khirokitia ont donc, au regard de ces résultats fonctionnels, surtout participé à la transformation de matières végétales qui s’inscrit dans une étape finale de confection.
Fig. 136 : Fabrication de cordage en écorce de cèdre chez les indiens de la Côte du Nord-ouest (Stewart 1984, p. 149).
82
Types
I.C II IV.A IV.B Ind.
Modes d’action
directe directe indirecte directe directe directe
TOTAL N
Matières végétales rigides Écorce Ind. 4 1 1 4 8 2 13 7
Fibres végétales souples
Cuir
TOTAL N
2 1 8 11
1 1 2
1 5 10 18 33
Tabl. 61 : Khirokitia – Types de pointes et matières travaillées.
Fig. 137 : Fabrication de vanneries (dessin original D. Plongeur-Plondomi).
Si l’on considère maintenant le type d’aiguille et la nature de l’usure observée, on remarque que les aiguilles de petit module et notamment le type V.A.1, sont surtout utilisées sur des fibres végétales souples (tabl. 62). L’échantillon d’aiguilles de gros module (type V.C.2.2) dont l’usure a été déterminée est, en revanche, bien trop faible pour pouvoir valider une quelconque relation entre le module de l’aiguille et la matière travaillée. On peut toutefois noter que le seul exemplaire entier étudié a été utilisé sur de l’écorce. Fig. 138 : Fabrication d’un récipient en écorce de bouleau chez les indiens de la Côte du nord-ouest (Stewart 1973).
Écorce Type V.A.1 Type V.B.1 Type V.C.1 Type V.C.2.2 Ind. TOTAL N
La seconde caractéristique qui marque l’échantillon, est l’absence de concordance qui existe entre la morphologie de l’outil et son utilisation (Legrand 2003). Examinons tout d’abord les pointes. Les outils du type III, sur métapode avec une portion d’épiphyse, sont surtout des outils assez larges, de section distale circulaire et de calibre plutôt fin. Les outils du type IV, sur segment longitudinal d’os long sans épiphyse, sont, en revanche, plus étroits mais les caractéristiques morphométriques des parties distales sont équivalentes à celles du type III. Quelles que soient la nature et la morphologie du support, des pointes de section circulaire et de calibre fin ont été recherchées et principalement utilisées sur des fibres végétales rigides par percussion posée directe (tabl. 61). Si aucune concordance ne peut être établie entre la morphologie de l’outil et son utilisation, une question reste, cependant, ouverte : à quel(s) élément(s) peut-on attribuer la variété des supports ? Peut-on l’attribuer à une variabilité individuelle ? Existe-t-il un choix opportuniste du support en fonction des matrices disponibles, du temps imparti à la réalisation de l’outillage, des besoins ? Traduit-elle encore une évolution chronologique ou correspond-elle à une aire de production définie ? L’analyse chronologique et spatiale tentera d’apporter des éléments de réponse.
2 1 1 3 7
Fibres végétales souples 26 2 32 60
Cuir
TOTAL N
3 1 4
31 2 1 1 36 71
Tabl. 62 : Khirokitia – Types d’aiguilles à chas et matières travaillées.
1.4.3. Outils à partie active tranchante 1.4.3.1. Outil tranchant sur ulna L’outil (Kh95 9914.1) est entier. Sa section distale est ovale. Le taillant est frontal et étroit, d’une largeur de 6 mm et d’une épaisseur de 3 mm. L’usure est bifaciale et symétrique. L’étendue de l’usure est modérée et son développement est homogène. L’émoussé affecte le taillant et les faces du tranchant, il est associé à des ébréchures localisées sur les faces. La partie active est très déformée mais la morphologie initiale du taillant reste convexe. Aucun indice de raffûtage n’a été relevé. À l’échelle macroscopique, quelques stries d’utilisation longitudinales, longues et parallèles entre elles ont été observées. À l’échelle microscopique, l’usure n’a pu être caractérisée, la surface étant trop endommagée pour pouvoir entreprendre ce type d’examen. 83
1.4.3.2. Outil tranchant sur segment longitudinal de métapode avec épiphyse partielle Trois outils entiers du type VIII.A.2 : pointes sur métapode avec portion d’épiphyse distale aplanie, ont été examinés (fig. 139).
15x
Morphométrie des outils La section des parties distales est ovale (n = 2) ou rectangulaire (n = 1). Les taillants sont frontaux et de dimensions homogènes, leur largeur est comprise entre 5,5 et 7 mm et leur épaisseur est de 3,5 mm.
1
15x
2
Fig. 140 : Khirokitia - Type VIII.A.2. Outils tranchants utilisés par percussion posée indirecte. Altérations macroscopiques du volume. 1 – Éclats (Kh90 6812.2) ; 2 – Émoussé et éclats (Kh88 5157.3) (clichés A. Legrand)
Mode d’action et macrotraces Un mode d’action unique a été repéré : la percussion posée indirecte. L’usure est bifaciale et asymétrique ce qui suggère une utilisation selon un angle oblique. L’étendue de l’usure est marginale ou modérée en fonction de la face sur laquelle l’usure est la plus marquée. Le développement de l’usure n’a pas été défini. Les taillants peuvent être affectés par un émoussé associé ou non à des ébréchures localisées sur le bord du taillant (n = 2) ou par des enlèvements rasants, courts ou longs, situés sur les faces du tranchant (fig. 140). Dans tous les cas, la morphologie initiale du taillant en plan et en profil est très déformée (stade d’usure 3).
3,5x
Fig. 141 : Khirokitia – Type VIII.A.2. Écrasement de la surface proximale de l’outil (Kh96 10761) (cliché A. Legrand).
- une topographie irrégulière ; - un microrelief homogène. Les élévations ont un aspect bombé et une texture grenue ; - quelques stries d’utilisation pluridirectionnelles, courtes ou longues, fines, continues et désordonnées ; - de fréquents cratères ovales d’un diamètre d’environ 10 μm. Leurs bords sont peu émoussés et leur fond rugueux. Cette usure peut être attribuée au travail du bois sec. La déformation importante du tranchant, l’usure asymétrique ainsi que la présence de stries d’utilisation courtes et pluridirectionnelles se rapprochent des usures observées sur les ciseaux expérimentaux utilisés pour entailler du bois sec (fig. 143). On peut donc en déduire que cet outil est un ciseau à bois utilisé dans la construction des maisons ou dans la fabrication ou le décor de petits objets. Nous disposons de données précises sur l’architecture de Khirokitia qui indiquent que le bois pouvait, par exemple, intervenir dans la fabrication de linteaux de fenêtre, dans la réalisation des toitures des maisons ou encore de poteaux (Dikaios 1953, p. 47 ; Le Brun 1994 a, p. 62-64). L’absence d’altération de surface sur les parties actives des deux autres outils limite les interprétations fonctionnelles mais les endommagements très importants des taillants révèlent une utilisation sur un matériau dur comme le bois sec. Les endommagements du taillant sont, en effet, bien plus nombreux sur les outils ayant travaillé du bois sec, particulièrement dense, que sur les outils utilisés sur du bois vert, plus tendre (cf. CD joint).
Fig. 139 : Khirokitia – Exemples d’outils tranchants du type VIII sélectionnés pour l'analyse fonctionnelle. 1 – Kh 90 6812.2 ; 2 – Kh96 10761. Aucune altération de surface n’a pu être identifiée à l’échelle macroscopique. La base des outils est systématiquement endommagée par un écrasement important accompagné parfois d’éclats (stade d’usure 3) (fig. 141). Ces différentes altérations de volume qui affectent à la fois le taillant et la surface proximale, montrent que ces outils ont été utilisés sur un matériau relativement dur. Matières travaillées L’examen à l’échelle microscopique n’a porté que sur un seul outil (Kh90 6812.2). L’usure observée se caractérise par (fig. 142) :
84
Des traces de préhension ont été identifiées sur la partie mésiale d’un autre outil pour lequel aucune détermination fonctionnelle n’a pu être apportée. Difficilement visibles à faible grossissement, ces stigmates apparaissent, en revanche, tout à fait caractéristiques à l’échelle microscopique (fig. 144).
1.4.3.3. Outil tranchant sur segment longitudinal de diaphyse sans épiphyse Quatre outils attribués au type IX auxquels 17 fragments mésio-distaux ont été ajoutés, sont ici étudiés (fig. 145).
200x
Fig. 145 : Khirokitia. Exemples d’outils tranchants du type IX et de fragments distaux sélectionnés pour l'analyse fonctionnelle. 1 – Kh92 7838 ; 2 – Kh97 11325 ; 3 – Kh96 10689.
Fig. 142 : Khirokitia - Type VIII.A.2. Travail du bois sec. Altérations microscopiques de surface (Kh90 6812.2) (cliché A. Legrand).
100x
Morphométrie des outils Ces outils ont été fabriqués sur des segments longitudinaux d’os longs. En fonction de l’étendue du façonnage, ces supports présentent des bords au contour régulier (type IX.A - 3 exemplaires) ou irrégulier (type IX.B - 1 exemplaire). Leur longueur moyenne, quel que soit le type, est de 69,5 mm, leur largeur mésiale, de 13 mm et leur épaisseur mésiale, de 7 mm. Leur section distale est majoritairement ovale (14 sur 21). Enfin, les taillants sont frontaux et assez étroits (fig. 146).
200x
Fig. 143 : Outil tranchant expérimental utilisé pour entailler des branches de feuillu sec pendant 10 minutes (T10) (clichés A. Legrand).
5
100x
Epaisseur mm
4
100x
3
2
1
0 0
2
4
6
8
Largeur mm
n=1
Fig. 144 : Khirokitia. Type VIII.A.2. Traces de préhension (Kh96 10761) (clichés A. Legrand).
n=2
Fig. 146 : Khirokitia - Type IX. Dimensions des taillants (en mm).
85
Mode d’action et macrotraces Trois pièces entières ont été utilisées par percussion posée indirecte. Le mode d’action n’a pu être précisé sur le reste de l’échantillon (n = 18) composé de fragments distaux. Sur ces derniers, l’usure est généralement bifaciale et symétrique (n = 10) mais elle peut également être asymétrique (n = 2). L’étendue de l’usure est le plus souvent marginale et son développement est dégressif en 2 zones d’usure (tabl. 63). Émoussé, éclats et écrasement ont été identifiés seuls ou combinés (tabl. 64 & fig. 147). La déformation des parties actives est majoritairement très avancée (tabl. 64). Le contour initial du taillant est totalement modifié et aboutit à une morphologie rectiligne ou déjetée. Les indices de raffûtage sont peu nombreux (n = 2). Les altérations de surface sont souvent difficiles à observer à faible grossissement. L’usure étant majoritairement marginale et le tranchant très endommagé, les surfaces encore intactes qui préservent ces altérations, sont rares. Seuls les tranchants qui présentent un émoussé d’étendue suffisante peuvent être examinés. Parmi eux, un outil (Kh97 11325) présente des altérations de surface particulièrement bien développées qui consiste en de très nombreuses stries longitudinales, longues, parallèles entre elles ou entrecroisées ainsi que de nombreux cratères (cf. infra). Ces outils montrent dans 13 cas, des cassures anciennes dont la moitié résulte d’une cassure par flexion. Ce type de cassure concorde avec une utilisation en pièce intermédiaire et/ou sur un matériau résistant. Développement dégressif Étendue marginale
1
Étendue modérée
1
Étendue envahissante
1
TOTAL N
3
Développement homogène 2 2 4
Ind.
TOTAL N
9
13
1
3
1
2
11
18
L’usure observée sur les 3 pièces utilisées par percussion indirecte, est bifaciale et symétrique. Son étendue est marginale et son développement homogène ou dégressif en deux zones d’usure. Les taillants sont souvent très déformés par des écrasements ou par une combinaison de plusieurs stigmates : émoussé et éclats ou émoussé, éclats et écrasement. La surface proximale est également très déformée par un écrasement associé systématiquement à des enlèvements longs et profonds ou à des ébréchures, situés sous le plan de frappe.
15x
1
1
2
3
Émoussé
-
2
2
3
-
-
3
3
-
2
2
4
Émoussé et écrasement
1
-
1
2
Éclats et écrasement
-
-
3
3
Émoussé, éclats et écrasement
-
-
2
2
TOTAL N
1
4
13
18
4
Matières travaillées 15x Trois usures ont été mises en évidence sur 4 outils. L’usure n° 1 a été observée sur un outil entier utilisé par percussion indirecte (KhP97 50178) et sur un fragment distal (Kh97 11086) (fig. 148). - la topographie est irrégulière ; - le microrelief est homogène. Les élévations sont vernies, d’aspect bombé et de texture lisse ; - les stries d’utilisation sont majoritairement longitudinales, parallèles entre elles ou entrecroisées, longues, fines ou larges (supérieures à 2 μm), superficielles ou profondes, droites et continues. Les bords des stries larges sont émoussés et leur fond est partiellement lisse ; - les cratères sont fréquents, circulaires, d’un diamètre d’environ 9 μm. Leurs bords sont peu émoussés et leur fond rugueux. La surface est également piquetée par de fréquents microtrous.
4
Éclats
15x
Fig. 147 : Khirokitia – Fragments distaux d’outils tranchants. Mode d’action indéterminé. Altérations macroscopiques du volume. 1 – Émoussé (Kh97 11325) ; 2 – Éclats (Kh89 6011.1) ; 3 – Émoussé et éclats (Kh97 11125.1) ; 4 – Émoussé, éclats et écrasement (Kh97 11086) (clichés A. Legrand).
TOTAL N
Émoussé et éclats
2 10x
Tabl. 63 : Khirokitia – Fragments distaux d’outils tranchants. Mode d’action indéterminé. Étendue et développement de l’usure. Stades d’usure du taillant
15x
Tabl. 64 : Khirokitia – Fragments distaux d’outils tranchants. Mode d’action indéterminé. Macrotraces et déformation du taillant.
86
Cette usure n’a pu être précisément comparée à une usure expérimentale. Les stries hétérogènes associées à des cratères et microtrous font référence au travail des peaux mais la présence de stries de façonnage rugueuses ainsi que les altérations macroscopiques du volume qui résultent de contraintes mécaniques importantes, concordent davantage avec le travail d’un matériau dur comme le bois.
200x
100x
Fig. 150 : Tranchant expérimental utilisé pour écharner par raclage une peau fraîche pendant 35 minutes (L15) (clichés A. Legrand).
L’usure n° 3 a été observée sur un seul outil entier utilisé par percussion indirecte (Kh92 7838) (fig. 151) : - la topographie de la surface usée est irrégulière. Des stries profondes et larges liées au façonnage sont présentes et non affectées par l’usure ; - le microrelief est régulier. La surface est vernie, lissée et entièrement striée ; - les stries sont pluridirectionnelles, entrecroisées ou parallèles entre elles, courtes, fines ou larges (jusqu’à 5 μm), superficielles ou profondes, droites, assez ordonnées, continues ou discontinues ; - les cratères sont assez nombreux, circulaires ou ovales et d’un diamètre compris entre 4 et 11 μm. Les bords de ces différentes dépressions, stries larges et cratères, sont peu émoussés et leur fond est rugueux. On observe également de nombreux microtrous. Cette usure qui ne trouve aucun équivalent dans le corpus expérimental, reste indéterminée même si quelques indices macro- et microscopiques comme l’écrasement du taillant ou le lissage du microrelief, nous orientent vers une matière dure ou abrasive.
Fig. 148 : Khirokitia - Type IX. Usure microscopique n° 1. Matière travaillée indéterminée par percussion posée indirecte (Kh97 11086, KhP97 50178) 15x (clichés A. Legrand). L’usure n° 2 a été observée sur un fragment distal (Kh97 11325) (fig. 149) : - la topographie est irrégulière ; - le microrelief est homogène. Les élévations ont un aspect bombé et une texture grenue. Elles sont vernies ; - les stries d’utilisation sont fines ou larges (supérieures à 2 μm), superficielles ou profondes, droites et continues. Leurs bords sont plus ou moins émoussés et leur fond est rugueux ou partiellement lisse ; - les cratères sont circulaires, d’un diamètre d’environ 11 μm, leurs bords sont émoussés et leur fond est rugueux ou partiellement lisse. On observe également de fréquents microtrous. L’aspect du microrelief, l’usure des bords et parfois même du fond des stries de façonnage, mais surtout la morphométrie des stries d’utilisation sont assez proches des altérations observées sur les écharnoirs expérimentaux utilisés par raclage sur des peaux fraîches (fig. 150). L’émoussé important qui affecte les tranchants archéologiques et expérimentaux tend également à confirmer cette détermination.
100x
100x
200x
200x
Fig. 151 : Khirokitia - Type IX.A.2. Usure microscopique n° 3. Matière travaillée indéterminée par percussion posée indirecte (Kh92 7838) (clichés A. Legrand). Fig. 149 : Khirokitia – Fragment de tranchant. Usure microscopique n° 2. Travail de peau fraîche par raclage (Kh97 11325) (clichés A. Legrand). 87
1.4.3.4. Fragment d’outil tranchant Un seul fragment a été retenu. Il s’agit d’un fragment distal d’outil fabriqué sur une scapula (Kh83 3121). Le taillant est latéral et large. L’usure est bifaciale et symétrique. Son étendue et son développement n’ont pu être précisément mesurés en raison de l’endommagement important du taillant. Sur le plan macroscopique, cette usure consiste en un lissage des hauts points du relief sur lesquels on observe de rares stries d’utilisation perpendiculaires au taillant et parallèles entre elles (fig. 152-2). La pièce étant conservée au Musée de Larnaca et l’équipement optique disponible peu performant, elle n’a pu être observée sous microscope optique à réflexion. Toutefois, les altérations macroscopiques de surface indiquent, par analogie au référentiel expérimental, un possible travail du bois. La concavité du taillant qui correspond au négatif de la morphologie de la matière travaillée tend à confirmer cette hypothèse. Considérant la nature du support, la configuration du taillant mais surtout la direction des stries, on peut envisager que ce tranchant ait servi comme racloir selon un angle de travail oblique pour raboter de petites branches de bois.
56x
grossissement, on observe un émoussé important et symétrique qui affecte l’ensemble du bord. À plus fort grossissement (98x), une bande brillante d’étendue marginale apparaît le long du bord de façon discontinue. Des stries perpendiculaires au bord, parallèles entre elles, courtes, fines, droites et serrées y sont observées (fig. 153). Il est toutefois difficile d’interpréter précisément ces stigmates faute d’un référentiel expérimental adapté et d’un examen approfondi au microscope optique à réflexion.
98x
Fig. 153 : Khirokitia - Type X. Objet sur scapula. Altérations macroscopiques de surface (Kh03 13570) (cliché A. Legrand).
56x
1.4.5. Conclusion L’examen fonctionnel réalisé sur un échantillon de 363 objets s’est tout d’abord attaché, au sein des différentes catégories d’objets étudiées, à caractériser les altérations macroscopiques observées sur les parties actives. De leur examen, différentes interprétations fonctionnelles ont pu être données. Tout d’abord, elles révèlent le travail de deux grandes catégories de matériaux : 1/ les matériaux souples ; 2/ les matériaux durs. Le travail des premiers a été principalement mis en évidence sur les outils pointus. Les émoussés sont les altérations du volume les plus fréquemment observées. Combinés à une usure d’étendue souvent modérée et à un développement de l’usure dégressif, ils traduisent un contact diffus entre l’outil et la matière travaillée. À l’inverse, les altérations du volume observées sur les outils tranchants aboutissent à un endommagement très important des taillants qui résulte d’un travail localisé sur des matériaux durs. L’examen des altérations du volume associé à celui des altérations de surface a également permis de distinguer deux modes d’action : 1/ la percussion posée indirecte ; 2/ la percussion posée directe. Les écrasements importants repérés sur les surfaces proximales ont démontré qu’une partie des pointes comme des outils tranchants a été utilisée en pièce intermédiaire. La direction des stries d’utilisation qui relève de la cinématique de l’outil, a permis de préciser le mouvement effectué dans le cas de la percussion posée directe. Ainsi, on différencie un
Fig. 152 : Khirokitia – Outil tranchant sur scapula. Altérations macroscopiques de surface (Kh83 3121) (clichés A. Legrand). Différentes altérations de volume et de surface ont été observées sur des tranchants de morphologie assez similaire. Comme pour les pointes, il semble que les artisans de Khirokitia ont cherché à obtenir un certain standard morphométrique. Les tranchants sont étroits quelle que soit la morphologie du support utilisé. Il n’y aurait donc pas non plus de lien entre la morphologie et l’utilisation de l’outil. Cette morphologie pose néanmoins le problème de l’efficacité d’un tranchant étroit sur un matériau résistant. Le travail de faible ampleur s’intégrant dans une phase de finition d’objets en bois pourrait alors être envisagé. 1.4.4. Objets divers Au sein de la catégorie des objets divers, une seule pièce a été sélectionnée pour l’analyse fonctionnelle. Il s’agit de l’objet sur scapula (Kh03 13570 - type X). L’examen porte sur le bord de la perforation qui n’est conservé que sur la face médiale de l’os. À faible
88
Concernant le travail des peaux, des usures caractéristiques du travail du cuir ont été identifiées sur 6 outils pointus et celles du travail des peaux fraîches, sur un seul outil tranchant. Les données ethnographiques et actuelles font état de la variabilité des chaînes opératoires mises en œuvre dans le traitement des peaux. Les dispositifs mis en place pour l’écharnage sont nombreux – cadre, sol, billot, etc. -, la phase de tannage diffère également selon les caractéristiques que l’on souhaite donner au produit (Gansser 1951 ; Jemma 1971). Dans ce contexte, il est donc délicat de reconstituer fidèlement les activités techniques liées au travail des peaux. Toutefois, concernant le travail du cuir, on peut supposer des activités liées à la couture, à la réalisation de vêtements, de sacs, etc. (fig. 155). Le travail de peaux fraîches pourrait correspondre, au regard de la morphologie des taillants, à un travail d’écharnage sur des peaux fines, de petites tailles comme les peaux de caprinés.
mouvement par rotation et un mouvement par poussée longitudinale. Si l’analyse macroscopique du matériel archéologique permet un premier diagnostic fonctionnel quant à la nature des matières travaillées et au mode d’action, elle paraît insuffisante, du moins sur cet échantillon, pour préciser la fonction de l’outillage osseux. En complément de cette première approche, une analyse microscopique des surfaces a donc été envisagée. Si les altérations microscopiques de surface confirment l’existence de deux grandes catégories de matières travaillées, elles permettent d’en préciser, parfois, la nature. Le travail des matières végétales apparaît très largement dans cet échantillon et particulièrement dans celui des outils pointus où les déterminations sont plus nombreuses. Le travail des peaux est très secondaire quelle que soit la catégorie d’outils considérée. La caractérisation des altérations révèle une diversité des usures relatives aux matières végétales. Diversité déjà observée par les lithiciens (par exemple AndersonGerfaud 1981 ; Vaughan 1985 ; Plisson 1985 ; Astruc 2002) et qui peut être mise en relation avec la très large gamme de fibres exploitées. Au sein de cette catégorie, le travail de l’écorce et celui de fibres végétales rigides ou souples ont été identifiés sur les outils pointus. Les outils tranchants ont été utilisés sur du bois sec. Plusieurs activités faisant intervenir l’utilisation des matières végétales, peuvent alors être envisagées. Les outils pointus et notamment les aiguilles ont pu être utilisés dans le cadre d’activités de tissage, de couture ou de confection de paniers ou de cordages. Le travail du bois avec des outils tranchants peut s’inscrire dans le cadre de travaux de faible ampleur destinés au fendage ou à l’entaillage de branches pour la construction ou la réalisation de petits objets. Il est néanmoins difficile de déterminer la place des outils tranchants dans la chaîne opératoire. Les tranchants en os peuvent-ils s’insérer dans une étape d’ébauchage, de façonnage ou encore de finition ? En raison de la morphométrie étroite des taillants, la phase de finition est privilégiée. On peut par exemple, envisager l’utilisation de ces ciseaux dans la réalisation de décor sur divers objets en bois (fig. 154).
Fig. 155 : Perforation des peaux chez les indiens de la Côte du Nord-ouest (Stewart 1973).
Il convient maintenant d’évaluer la place de l’outillage osseux au sein des activités villageoises pour mettre en évidence une possible complémentarité fonctionnelle avec l’outillage lithique (Astruc 2002). Les données fonctionnelles sur l’outillage lithique montrent que celuici intervient dans la transformation de matières végétales rigides tendres (bois frais) ou denses (bois dur) dans le cadre de travaux de faible ampleur (Ibid., p. 180). Les tranchants en os participent également à de petits travaux de fendage ou d’entaillage sur des matériaux denses comme le bois sec. Ils pourraient s’inscrire dans le cadre de travaux secondaires comme la réalisation de décor. Cette apparente interaction des deux outillages pourrait expliquer la faible représentation des outils tranchants en os dans le corpus. Si les tranchants en os sont, d’après les données expérimentales et ethnographiques, tout à fait efficaces pour fendre ou entailler du bois, les outils lithiques plus coupants pourraient avoir été privilégiés par les habitants de Khirokitia. L’outillage lithique est également utilisé sur des matériaux rigides tendres siliceux, dans le cadre « d’un traitement minutieux de la plante, séparation des fibres, lié à la vannerie ou la corderie » (Ibid., p. 82). L’outillage en os s’inscrit davantage dans une étape finale de confection. Dans ce cas, la complémentarité fonctionnelle entre l’outillage lithique et osseux pourrait être établie.
Fig. 154 : Travail du bois chez les indiens de la Côte du Nord-ouest (Stewart 1973).
89
(cf. infra). L’espace de fouille peut donc être très morcelé et ne permet pas toujours d’obtenir une image complète de l’occupation des sols. Les données spatiales sont donc partiellement représentatives de l’ensemble de l’espace habité.
Le travail des peaux a été très peu reconnu dans les deux catégories d’outillages. L’outillage lithique interviendrait dans le cadre de petits travaux sur des peaux fraîches et/ou reverdies de petites tailles (Ibid., p. 180). Les usures observées sur les outils pointus en os se rapprochent des usures expérimentales relatives au travail du cuir. Les outils en os interviendraient alors dans une phase plus avancée du travail des peaux, celle de la finition. Si l’hypothèse de la complémentarité peut être posée pour les outils pointus, en revanche, les outils tranchants sembleraient davantage participer au côté de l’outillage lithique au traitement des peaux fraîches.
Rappelons que les constructions (notées S. suivi d’un numéro) sont de plan circulaire et sont disposées autour d’un espace extérieur (notés e. suivi d’un numéro) qui leur est directement associé (Le Brun 1985 a, p. 76-77, 1985 b, p. 37). L’ensemble ainsi composé définit la maison (Le Brun 1984 a, p. 197). L’espace intérieur des constructions peut être découpé par des murets, des piliers, des niches ou des banquettes. Des foyers sur plate-forme, des bassins et des cuvettes, considérés comme des installations à usage domestique, peuvent également y être installés. La superficie des constructions varie entre 2 m² (S. 119 au niveau B) et 17 m² (S. 117 au niveau C). Signalons encore des espaces extérieurs non bâtis indépendants des maisons, qui forment des espaces de rejet indifférenciés.
Si une certaine complémentarité peut se dégager entre ces deux outillages, ils répondent tous deux à des activités de transformation généralement de faible ampleur pratiquées, du moins pour le matériel lithique, dans la sphère domestique. Il convient dans la suite de ce travail de replacer ces résultats dans une perspective spatiale. 1.5. Distribution spatiale du matériel osseux de Khirokitia
Les niveaux les plus riches en mobilier osseux : B et II et ceux pour lesquels il existe une étude spatiale de l’outillage lithique : C et III (Astruc 2002), ont été sélectionnés. L’étude de ces quatre niveaux conduit à traiter deux secteurs diachroniques du village, les secteurs est et ouest, séparés par le mur d’enceinte (100). Le secteur est délimite un premier espace correspondant à l’intérieur du village primitif. Il est essentiellement représenté par des niveaux architecturaux comprenant des constructions. Le secteur ouest couvre à la fois l’intérieur du village récent et l’extérieur au-delà de la structure 284 dans laquelle a été aménagée l’une des entrées du village (cf. fig. 2) (tabl. 65). Aux constructions viennent s’ajouter des zones de rejet situées à l’extérieur du village. Seul le matériel provenant des sols d’occupation des constructions, parfaitement isolés grâce aux techniques de fouille, et des sols des espaces extérieurs associés aux constructions, a été considéré. Le matériel issu des fosses et des espaces extérieurs indépendants des constructions a également été pris en compte. En revanche, les pièces issues des remplissages, des remblais, des radiers, des préparations de sols, des murs et des sondages ont été exclues ainsi que l’outillage provenant des tombes, celuici étant peu fréquent (n = 2) et rarement associé au squelette. L’échantillon ainsi composé rassemble 1 193 pièces qui, quel que soit le niveau considéré, proviennent majoritairement des espaces extérieurs dépendants ou non des constructions (tabl. 66).
L’analyse spatiale a pour objectif de corréler l’étude de l’assemblage osseux avec les constructions et les espaces extérieurs non bâtis du village afin d’appréhender l’organisation des activités impliquant l’usage d’outils en os, au sein de l’espace habité. Les objets sont-ils majoritairement localisés à l’intérieur des constructions ou dans les espaces extérieurs, à l’intérieur ou à l’extérieur du village ? Le matériel recueilli à l’intérieur des constructions diffère-t-il de celui provenant des espaces extérieurs qui leur sont associés ? Une complémentarité fonctionnelle existe-t-elle entre les constructions et les espaces extérieurs qui en dépendent ? À l’instar de ce que L. Astruc a pu observer pour l’outillage lithique, peut-on repérer des aires d’activités, des aires de stockage ou encore des zones de rejet signalées par des concentrations particulières d’objets ? Seul le chantier de Khirokitia-Vouni sera considéré ici puisque le chantier de Khirokitia-Potamos est en cours d’étude et que la zone fouillée est trop faible (80 m²) pour envisager une telle approche. Ayant déjà fait l’objet d’une analyse spatiale, l’industrie du site du Cap Andreas-Kastros ne sera pas non plus traitée (Le Brun 1981). 1.5.1. L’échantillonnage Avant de présenter l’échantillon considéré, il est nécessaire d’indiquer que quel que soit le niveau étudié, l’analyse spatiale se heurte au problème de l’empilement des constructions. Ces dernières ne pouvant être démontées, la fouille peut être restreinte à une parcelle de sol. En outre, la superficie d’un espace extérieur non bâti peut évoluer au cours de son occupation. C’est le cas du niveau B où l’espace extérieur de l’ensemble 1 formé par 6 constructions, s’agrandit, au sous-niveau B4, sous l’effet de la destruction d’une construction (S. 130)
Niveaux
II III B C TOTAL
Intérieur du village N % 71 10,89 87 13,34 336 51,54 158 24,23 652 100
Extérieur du village N % 485 89,65 56 10,35 541 100
TOTAL N 556 143 336 158 1193
% 46,61 11,99 28,16 13,24 100
Tabl. 65 : Distribution du matériel osseux dans le village. 90
Niveaux II III B C TOTAL
Constructions N 33 40 39 26 138
% 23,91 28,99 28,26 18,84 100
Espaces extérieurs N % 474 54,23 101 11,56 199 22,77 100 11,44 874 100
Fosses N 49 2 98 32 181
La construction S. 122 se distingue par un espace interne, d’une superficie de 12 m², divisé en deux zones par un pilier rectangulaire échancré dans sa partie centrale. La première zone appelée « habitation » est située au nord du pilier, la seconde, appelée « réduit » est localisée au sud du pilier (Le Brun 1991, p. 809, 1994 a, p. 63) (fig. 158). Deux sols d’occupation ont été identifiés : 815 et 647. Quel que soit le sol considéré et contrairement à ce qui a été observé pour l’industrie lithique, les outils en os sont majoritairement concentrés dans l’habitation (10 objets au total), tandis qu’ils sont plus rares dans le réduit (2 objets) (fig. 159). Le découpage de l’espace intérieur en deux zones distinctes pourrait donc, et tout au long de son occupation, correspondre à deux aires aux fonctions différenciées. Examinons en détail ces deux espaces. Les aménagements du sol 815 de l’habitation consistent en un pilier, une plate-forme triangulaire, une aire brûlée et 19 trous de poteaux. Ces aménagements sont plus nombreux sur le sol postérieur 647. On y observe un foyer sur plateforme, 2 cuvettes et 12 trous de poteaux. Ces derniers semblent avoir eu une fonction particulière. En raison de leur faible diamètre (5 cm de moyenne) et de l’irrégularité de leur répartition, ils n’ont pu servir à soutenir la toiture. En revanche, par le matériel retrouvé dans 5 d’entre eux, ils pourraient plutôt avoir été utilisés comme « caches » (Le Brun 1991, p. 809). Le réduit est circonscrit et délimité par un pilier, une plate-forme trapézoïdale et une installation à usage domestique indéterminée. En raison d’une accumulation de nucléus et de lames de belle facture, cet espace a tout d’abord été considéré comme un lieu d’activités spécialisées (Le Brun 1990). Les études récentes du matériel lithique privilégient plutôt une fonction de remise ou de réserve (Astruc 2002, p. 157).
TOTAL
% 27,07 1,11 54,14 17,68 100
N 556 143 336 158 1193
% 46,61 11,99 28,16 13,24 100
Tabl. 66 : Distribution du matériel osseux par niveau étudié. 1.5.2. Le niveau C 1.5.2.1. Les constructions Six constructions organisées autour de différents espaces extérieurs ont été identifiées au niveau C (fig. 156). Les constructions S. 117, S. 118, S. 136 et S. 139, ont été édifiées au niveau C. Les constructions S. 122 et S. 140, respectivement construites aux sousniveaux E2 et D2, continuent de fonctionner au niveau C. À l’exception du sol 803 de la construction S. 136, partiellement détruit par une fosse et du sol 463 de la construction S. 118 conservé uniquement dans son quart sud-est, tous les autres sols d’occupation ont été entièrement fouillés (tabl. 67). Seule la construction S. 139 n’a pas été fouillée. Le nombre d’objets recueillis dans ces constructions est variable (tabl. 68). La construction S. 122 est, avec 12 objets, la plus riche tandis que S. 136 et S. 140 sont peu fournies (n = 2) (fig. 157).
S. 122 647 815
S. 140 924
S. 117 492 535
S. 118 463 481
S. 136 803 816
La construction S. 117 est particulièrement imposante (17 m²). Deux sols d’occupation y ont été reconnus : 535 et 492. De nombreux aménagements internes qui divisent l’espace, sont présents sur chacun de ces sols. Sur le sol 492, par exemple, deux piliers réunis par une plate-forme partagent l’espace en deux zones. Quel que soit le sol étudié, l’outillage osseux est concentré dans la partie nord de la structure, à proximité des piliers, ce qui impliquerait un lieu unique d’activités (fig. 160). Concernant ces dernières, aucune donnée fonctionnelle n’est disponible. Néanmoins, les données fonctionnelles sur l’outillage lithique font état de l’existence possible d’une zone de production occasionnelle d’outils en os (Astruc 2002, p. 158). Un outil de rainurage et une pièce esquillée ont respectivement été découverts sur les sols 535 et 492 mais en l’absence de produit de débitage et d’ébauche, on peut supposer que les déchets ont été rejetés à l’extérieur de l’habitation.
Tabl. 67 : Succession des sols étudiés dans les constructions du niveau C (la ligne inférieure correspond au sol le plus ancien).
Constructions S. 122 S. 140 S. 117 S. 118 S. 136 TOTAL N
sols
Pointes
Aiguilles
Fragments
647 815 924 492 535 463 * 481 803 * 816
5 3 1 1 2 1 11
1 3 1 1 1 1 10
1 2 1 1 5
TOTAL N 12 2 5 5 2 26
Tabl. 68 : Catégories d’objets par construction (niveau C) (* : sols partiellement conservés).
91
Fig. 156 : Plan général du niveau C (d’après Le Brun 1994 a, fig. 54).
92
Fig. 159 : Répartition spatiale du matériel osseux sur les sols 815 et 647 de S. 122 (niveau C) (d’après Le Brun 1994 a, fig. 23-24). 1 : cache contenant 1 outil en os ; 2 : cache contenant 2 outils en os ; 3 : cache contenant des galets de picrolite ; 4 : cache contenant un fragment de bois de daim ; 5 : cache contenant une hache brisée. Fig. 157 : Distribution du matériel osseux par construction (niveau C).
Fig. 160 : Répartition spatiale du matériel osseux sur les sols 535 et 492 de S. 117 (niveau C) (d’après Le Brun 1989 c, fig. 21-22).
Fig. 158 : Construction S. 122, sol 647 (niveau C) (Astruc 2002, fig. 88, d’après Le Brun 1994 a, fig. 24). 93
retrouvé à l’intérieur des constructions (tabl. 69). Il se distingue également par la présence mais en faible quantité, d’outils tranchants et de produits de débitage, objets absents des constructions (cf. tabl. 68).
Contrairement aux constructions précédentes, S. 118 est d’une faible superficie (2,40 m²) et ne présente que très peu d’aménagements internes, notamment sur le sol primitif 481 (le sol postérieur 463 est au trois-quarts détruit). Cinq outils ont été recueillis sur les deux sols d’occupations : 481 et 463 (fig. 161). Le nombre total d’objets retrouvés dans cette construction est équivalent à celui de S. 117, beaucoup plus grande avec un découpage bien plus complexe de son espace interne. La taille des constructions ne semble donc pas être étroitement liée à la proportion d’objets qu’elles contiennent.
Au nord, les éléments S. 118, S. 117 et S. 139 sont disposés autour du même espace extérieur : e. 594 (fig. 162). Celui-ci est pauvre en matériel osseux (n = 2). En revanche, l’espace e. 489 qui lui succède, présente un nombre d’objets bien plus élevé (12 objets au total). La composition de l’assemblage diffère de celui provenant de l’espace e. 594 par la présence de 2 aiguilles et d’un produit de débitage. Mais l’effectif réduit ne permet pas de conclure à un changement dans la fonction de cet espace au cours de son utilisation. Quelques pointes et aiguilles également été récoltées sur les situés entre les constructions l’ensemble de cette zone fonctionnelle n’est disponible.
Les constructions S. 122, S. 140 et S. 136 sont organisées autour de l’espace extérieur e. 764. Contrairement aux espaces précédents, celui-ci est particulièrement riche, 49 % de l’outillage du niveau C y est concentré. Cette proportion pourrait suggérer l’existence d’une zone de rejet privilégiée et/ou l’existence de plusieurs activités impliquant l’usage de pointes, d’aiguilles et de tranchants et/ou la fabrication occasionnelle d’outils en os. Toutefois, les outils tranchants et les produits de débitage sont rares et les données fonctionnelles sont peu nombreuses (seul le travail de fibres végétales souples a été identifié sur une pointe). Les données dont nous disposons pour l’outillage lithique font également état d’un nombre élevé d’outils et mentionnent la pratique d’activités multiples parmi lesquelles le traitement des matières animales souples serait privilégié (Astruc 2002, p. 165).
Fig. 161 : Répartition spatiale du matériel osseux sur les sols 481 et 463 de S. 118 (niveau C) (d’après Le Brun 1989 c, fig. 24).
Au sud-est de l’espace extérieur e. 764, un espace imposant et indépendant des constructions, a été mis en évidence. Séparé de l’espace e. 764 par un muret, il est marqué par l’aménagement d’une plate-forme (1108) grossièrement ovale, d’un diamètre minimum d’environ 3,60 m et d’une hauteur de 0,15 à 0,20 m dont le sommet est soigneusement enduit et dépourvu de toute trace d’une quelconque activité à caractère domestique (com. pers. A. Le Brun). Tandis que cette plate-forme est utilisée de manière continue tout au long de l’occupation du niveau C, l’espace qui lui est associé évolue. Quatre principaux états ont été reconnus : 1/ l’espace extérieur e. 1113, tout d’abord, a livré 9 objets dont une pointe utilisée pour perforer de l’écorce par percussion directe ; 2/ l’espace extérieur e. 1111, ensuite, qui fonctionne avec l’espace e. 873. Le nombre d’objets y est, comparativement à l’espace e. 1113, moins élevé (5 objets au total) ; 3/ l’outillage est de nouveau plus fréquent sur l’espace postérieur e. 1107 (8 objets au total) ;
1.5.2.2. Les espaces extérieurs Du nord au sud, plusieurs espaces extérieurs sur lesquels s’ouvrent les constructions ont été reconnus. Le matériel osseux recueilli y est plus abondant que celui Espaces extérieurs e. 489 e. 594 e. 781 e. 586 e. 764 e. 795 e. 873 e. 1100 e. 1107 e. 1111 e. 1113 TOTAL N
Pointes
Aiguilles
Tranchants
Fragments
4 1 4 1 18 2 3 3 5 41
2 1 10 1 2 2 2 1 21
1 3 4
5 1 17 3 2 2 30
Produits de débitage 1 2 1 4
(au total 6 objets) ont espaces e. 586 et e. 781 S. 117 et S. 122. Pour nord, aucune donnée
TOTAL N 12 2 4 2 48 4 2 4 8 5 9 100
Tabl. 69 : Catégories d’objets par espace extérieur (niveau C).
94
Fig. 162 : Distribution du matériel osseux par espace extérieur (niveau C).
95
comment évolue, au niveau B, la répartition de l’outillage dans ces deux constructions qui continuent d’être utilisées.
4/ enfin, le dernier espace extérieur e. 1100, postérieur à l’espace e. 1111, n’a livré que 4 objets dont 2 fragments d’outils et 2 aiguilles respectivement utilisées sur du cuir et des fibres végétales souples, ce qui impliquerait a priori, la pratique d’au moins deux activités différentes. La composition de l’outillage recueilli dans ces différents espaces extérieurs est relativement similaire à celle observée plus au nord sur les espaces e. 764 et e. 489. En revanche, le nombre d’objets y est variable. Ainsi, sur l’espace extérieur e. 764, d’une superficie d’environ 14 m², la proportion d’objets est élevée. À l’inverse, dans la zone sud-est où différents espaces ont été reconnus, le nombre d’objets est plus restreint tandis que sa superficie est bien plus importante (environ 40 m²). Ce faible nombre d’objets pourrait confirmer la nature particulière de cette zone déjà mise en évidence par d’autres éléments : « Ses dimensions, la qualité de son revêtement, l’absence d’installation à caractère domestique comme d’ailleurs de toute trace d’activité domestique, la présence en revanche d’une plate-forme, aménagement qui se rencontre habituellement à l’intérieur des constructions et non à l’extérieur, la rareté du matériel qui y a été recueilli qui tranche avec l’abondance en vestiges osseux et en outillage lithique des espaces interstitiels, toutes ces caractéristiques contribuent à le différencier de ces derniers » (Le Brun 1994 a : 139-140).
1.5.3. Le niveau B 1.5.3.1. Les constructions Le niveau B est subdivisé en 5 sous-niveaux (de B5 à B1). Du nord au sud, deux ensembles de constructions dont les étapes de fonctionnement varient, ont été reconnus : 1/ au sous-niveau B5, l’ensemble 1 se compose des constructions S. 117, S. 119, S. 118, S. 120, S. 131 et S. 130, toutes édifiées en B5, exceptées S. 117 et S. 118 construites en C (fig. 163). Le second ensemble est constitué par les constructions S. 122, S. 126, S. 125, S. 133, S. 134 et S. 156, une annexe de S. 134 ; 2/ au sous-niveau B4, l’ensemble 1 est modifié. S. 130 est détruite et une nouvelle construction S. 132 est édifiée au sud-est de S. 130 (fig. 164). De même, l’ensemble 2 est marqué par deux nouvelles constructions : S. 137 située entre S. 133 et S. 134, et S. 138 à l’extrême sud ; 3/ au sous-niveau B3, l’espace habité se resserre. La construction S. 117 de l’ensemble 1 n’est que partiellement conservée. Deux nouvelles constructions S. 121 et S. 124 sont édifiées à l’emplacement de S. 120 et S. 131 (fig. 165). Les constructions S. 137, S. 156 et S. 138 qui formaient l’ensemble 2 au sous-niveau B4, disparaissent ; 4/ Enfin, aux sous-niveaux B2 et B1, l’espace habité se resserre de nouveau. L’ensemble 1 comprend S. 124 et S. 142 (fig. 166). Les constructions S. 126, S. 125 et S. 134 composent l’ensemble 2. À l’exception du sol 635 de S. 130 seulement conservé dans sa partie sud et des sols 552 de S. 122 et 462 de S. 117 conservés sur une moitié, tous les sols d’occupation étudiés ont été entièrement fouillés (tabl. 71).
1.5.2.3. Les fosses Le niveau C est également caractérisé par plusieurs fosses qui appartiennent aux espaces extérieurs (cf. fig. 162). Au total 32 objets y ont été récoltés (tabl. 70). La morphologie et la fonction de cet outillage ne diffèrent pas des pièces retrouvées sur les espaces extérieurs ou à l’intérieur des constructions.
Fosses
Pointes Aiguilles
Tranchants
Fragments
Produits de débitage
TOTAL N
508
7
5
-
6
2
20
807
2
-
-
-
-
2
1122
6
-
1
2
-
9
821
-
-
-
1
-
1
TOTAL N
15
5
1
9
2
32
Le nombre d’objets en os recueilli à l’intérieur de ces constructions est plus élevé qu’au niveau C : 39 objets au total (tabl. 72). Toutefois, contrairement au niveau C, toutes les constructions n’ont pas livré du matériel osseux. Certaines, comme S. 125 et S. 134, toutes deux appartenant à l’ensemble 2, sont particulièrement riches. Les autres constructions n’ont livré que peu d’objets, pas plus de 4. En outre, certaines, particulièrement bien fournies au niveau C, présentent un matériel peu abondant au niveau B. C’est le cas notamment de la construction S. 122. D’autres, en revanche, comme S. 117, présentent, d’un niveau à l’autre, un nombre d’objets équivalent.
Tabl. 70 : Catégories d’objets par fosse (niveau C).
La distribution spatiale du matériel osseux du niveau C révèle qu’une grande majorité (près de 63 %, soit 100 sur 158 objets considérés) provient essentiellement des espaces extérieurs associés aux constructions. Sans qu’aucune aire d’activités n’ait été clairement identifiée, l’outillage récolté à l’intérieur des constructions pourrait davantage traduire par sa localisation, des zones d’activités relativement circonscrites, c’est le cas notamment de S. 122 et de S. 117. Nous verrons
La composition de l’outillage des constructions du niveau B est relativement similaire au niveau C puisque les pointes et les aiguilles restent majoritaires. Toutefois, on peut noter l’apparition, au niveau B, des outils tranchants, des objets divers ou encore des produits de débitage. Leur nombre est, néanmoins, peu élevé.
96
B2 B3 B4 B5 B5-4
S. 117
S. 119
462 *
430 470
Ensemble 1 S. 120 S. 130
S. 131
S. 121
S. 122
597 682 660
S. 126 635 *
634 668
Ensemble 2 S. 133 S. 134 1033 531 1070 769 686 1088 692
S. 125
S. 137 734
552 *
Tabl. 71 : Succession des sols étudiés dans les constructions du niveau B (la ligne inférieure correspond au sol le plus ancien ; * : sols partiellement conservés).
Fig. 163 : Plan général du sous-niveau B5 (d’après Le Brun 1994 a, fig. 56). 97
S. 156
1099
Fig. 164 : Plan général du sous-niveau B4 (d’après Le Brun 1994 a, fig. 57).
98
Fig. 165 : Plan général du sous-niveau B3 (d’après Le Brun 1994 a, fig. 58).
99
Fig. 166 : Plan général des sous-niveaux B2 et B1 (d’après Le Brun 1994 a, fig. 59).
100
Ensemble
2 1 1 1 1 1 1 14
1
Pointes
Aiguilles
Tranchants
Divers
Frag.
S. 117
462 430 470 682 660 668 634 597 552
2 1 1 1 1 1 1
1 1 1
-
1 1 1 2 -
635
-
-
1 -
531 769 686 692 1033 1070 1088 734 1099
1 1 1 11
2 2 1 1 9
1 2
S. 120 S. 130 S. 131 S. 121 S. 122 S. 126 S. 125
Ensemble 2
1
sols
S. 119 Ensemble 1
Produits de débitage 1
Constructions
S. 133 S. 134 S. 137 S. 156 TOTAL N
-
2 -
2
Soustotal 4
TOTAL N
2 3
15
1 1 4 2 2 8 2
24
7 1 2 39
39
Tabl. 72 : Catégories d’objets par construction (niveau B).
traduire une activité ou une aire de production spécifique. En ce qui concerne la fonction du reste de l’outillage, les données sont faibles, seul le travail du bois sec a été mis en évidence sur l’unique outil tranchant. Le sol postérieur (531) est, en revanche, bien plus pauvre en matériel osseux puisqu’il n’a livré que 2 aiguilles, objets, par ailleurs, absents du sol précédent. Il se distingue également du sol 769 par une configuration de l’espace interne radicalement différente, même si les aménagements sont identiques : un muret de cloisonnement et un foyer central sur plate-forme (551) (Le Brun 1991, p. 809). Les 2 aiguilles ont été récoltées dans la zone sud ainsi délimitée (fig. 169). En raison de l’évolution quantitative et qualitative de l’assemblage récolté et des changements de l’espace interne, on peut se demander dans quelle mesure la localisation et la nature des activités pratiquées au sein de cet espace interne, ont évolué au cours de son occupation. La construction S. 134 présente un caractère particulier. Les indices recueillis dans cette structure et notamment la présence d’une fine poussière de diabase (analyses F. Hourani), roche particulièrement utilisée dans la fabrication de vaisselles et d’objets divers, laissent, en effet, penser que S. 134 pourrait être le lieu d’une production spécialisée. Le nombre élevé de bouchardes destinées au dégrossissage et à la mise en forme de mobilier en pierre, confirmerait cette hypothèse (Astruc 2003). L’analyse du matériel osseux ne suggère, en revanche, aucune aire d’activité spécialisée. Les types d’objets rencontrés sont variés et peu significatifs, quant aux résultats fonctionnels, ils sont peu abondants. Une seule aiguille provenant du sol 1070 a été utilisée sur des fibres végétales souples.
Quinze objets ont été recueillis dans les constructions de l’ensemble 1 (fig. 167). Au sous-niveau B5, S. 117 est, avec 4 objets, la construction la plus riche. La composition de l’outillage et sa répartition sont similaires à celles du matériel retrouvé sur les sols de cette même construction au niveau C, malgré une conservation partielle du sol (cf. tabl. 68 & fig. 168). On peut donc en déduire une certaine continuité dans la nature et dans la localisation des activités pratiquées à l’intérieur de cette construction. Les autres constructions du même ensemble sont plus pauvres en mobilier osseux ce qui laisse penser qu’au sein de cet ensemble, S. 117 pourrait avoir été le lieu principal d’activités impliquant l’usage d’outils en os ou bien un lieu de stockage. Lorsque cette construction cesse d’être utilisée, au sous-niveau B3 et que l’espace habité se resserre, c’est une autre construction S. 121, édifiée au sous-niveau B3, qui semble prendre cette fonction. Aucune autre construction n’a livré du matériel osseux au sous-niveau B3. L’ensemble 2 est, avec 24 objets recueillis, un peu plus riche que l’ensemble 1. Ces objets ont principalement été découverts dans les constructions S. 125 et S. 134. Examinons tout d’abord la construction S. 125. L’outillage osseux se répartit sur deux sols d’occupation : 769 et 531. Six objets, tous concentrés au nord de la structure dans une zone délimitée à l’ouest, par un muret de cloisonnement et au sud, par un foyer central sur plate-forme (770), proviennent du sol 769 (fig. 169). Les objets divers singularisent cette construction puisque l’on ne les retrouve nulle part ailleurs dans ce niveau. Leur présence pourrait ainsi
101
Fig. 167 : Distribution du matériel osseux par construction (niveau B).
Fig. 168 : Répartition spatiale du matériel osseux sur le sol 462 de S. 117 (sous-niveau B5) (d’après Le Brun 1989 c, fig. 23). 102
1.5.3.2. Les espaces extérieurs Du nord-ouest au sud-est, plusieurs espaces extérieurs correspondant aux deux ensembles de constructions, ont été distingués. L’outillage recueilli sur ces espaces est similaire à celui retrouvé à l’intérieur des constructions mais il est plus abondant (tabl. 73 & fig. 170). Au nord, l’ensemble 1 s’ouvre, au sous-niveau B5, sur l’espace extérieur e. 478. Celui-ci évolue ensuite au sous-niveau B4 puisque la construction S. 130 disparaît et une nouvelle, S. 132, est édifiée au sud-est de S. 130. L’espace extérieur e. 603 est alors plus étendu que l’espace e. 478. Néanmoins, la composition et le nombre d’objets récoltés sont équivalents. En revanche, aux sous-niveaux B3, B2 puis B1, le nombre d’objets est un peu plus élevé et au côté d’une majorité de pointes, un outil tranchant et un produit de débitage ont été découverts. La fonction de cet espace est difficilement interprétable puisqu’aucune donnée fonctionnelle n’est disponible mais il semblerait, d’après les catégories d’objets retrouvés, que certaines modifications relatives aux activités de consommation ou de production aient pu avoir lieu à partir du sous-niveau B4. Plus au sud, un second espace situé entre l’ensemble 1 et l’ensemble 2, a été reconnu au sous-niveau B5 (e. 760) puis au sous-niveau B2/B1 (e. 554). Quel que soit le sous-niveau considéré, l’outillage osseux exhumé se rapproche, par sa composition, de celui provenant des espaces contemporains situés au nord. En revanche, le nombre d’objets y est plus important, notamment au sous-niveau B2/B1 (e. 554). Cette fréquence pourrait correspondre à une zone de rejet. En effet, les différents ensembles de constructions sont séparés les uns des autres par des espaces utilisés comme « décharges et/ou comme moyen de circulation » (Le Brun 1984 a, p. 197). C’est au sud-est de cet ensemble que l’essentiel de l’outillage osseux est concentré. Une première concentration d’objets est observée sur l’espace extérieur autour duquel s’organisent les constructions de l’ensemble 2 : S. 122, S. 126, S. 125, S. 133 et S. 134. La composition de l’outillage y est homogène, il s’agit surtout de pointes, d’aiguilles et de fragments d’outils. En revanche, sur le plan quantitatif, il varie. L’espace e. 676 au sous-niveau B3 est le plus riche. Une seconde concentration a été mise en évidence au sud de la première. Elle correspond à un espace imposant indépendant de l’ensemble 2. Au côté de l’outillage pointu, on rencontre, en faible quantité, des produits de débitage et des objets divers. C’est également au sousniveau B3 que l’outillage récolté est le plus abondant. Cet espace extérieur serait donc particulièrement utilisé au sous-niveau B3. En raison de la diversité des catégories d’objets rencontrées, on peut supposer que des activités multiples ont pris place dans cette zone. Néanmoins, la fréquence des aiguilles dont une majorité a été utilisée sur des fibres végétales souples, pourrait suggérer sinon une spécialisation, du moins une plus grande importance accordée aux activités de couture ou de tissage.
Fig. 169 : Répartition spatiale du matériel osseux sur les sols 769 et 531 de S. 125 (sous-niveaux B4 et B3) (d’après Le Brun 1994 a, fig. 26-27).
1.5.3.3. Les fosses Les quelques fosses utilisées en B1, dans lesquelles figurent de nombreux outils, pourraient avoir servi de zones de rejet (tabl. 74). Les catégories d’objets sont identiques à celles des espaces extérieurs. Il s’agit d’un mobilier souvent fragmenté et usé. Signalons que parmi les outils de la fosse 1032 (zone sud), 2 aiguilles ont été utilisées sur des fibres végétales souples et une pointe sur de l’écorce.
103
Sousniveaux
B2-B1
B3
B4
B5
TOTAL N
Espaces extérieurs e. 574 e. 573 e. 554 e. 575 e. 657 e. 658 e. 1069/1058 e. 783 e. 583 e. 676 e. 720 e. 721/1081 e. 603 e. 706 e. 738 e. 1091/1086 e. 478 e. 760 e. 672 e. 733 e. 784 e. 1096
Pointes
Aiguilles
Tranchants
Divers
Fragments
1 5 6 3 1 3 1 2 6 16 7 3 6 4 9 1 2 1 6 2 85
1 1 3 1 3 1 4 6 9 1 2 1 3 2 1 3 1 43
1 1
1 1
3 6 2 1 1 5 14 9 4 3 1 5 4 1 1 1 1 1 63
Produits de débitage 1 1 2 1 1 6
Tabl. 73 : Catégories d’objets par espace extérieur (niveau B).
Fig. 170 : Distribution du matériel osseux par espace extérieur (niveau B). 104
TOTAL N 2 9 16 3 3 2 7 3 8 24 33 22 7 9 5 17 7 3 3 10 2 4 199
Aiguilles
Tranchants
Divers
Frag.
Produits de débitage
TOTAL N
5
-
1
-
6
-
12
2
1
-
-
4
-
7
490
1
-
-
-
-
-
1
466
2
1
-
-
2
-
5
568
4
4
-
-
7
1
16
564
13
5
-
-
5
-
23
546
10
2
-
1
2
-
15
Fosses
Pointes
465 602
1032
5
9
-
-
5
-
19
TOTAL N
42
22
1
1
31
1
98
particulier. Suite à un incendie, sa toiture s’est effondrée sur le sol primitif 417. Le matériel recueilli sur ce sol, scellé par cet effondrement, constitue le témoin direct des activités qui y ont pris place (Le Brun 1989 b). La composition de l’assemblage ne diffère pas de celle provenant de l’intérieur des autres constructions. On y retrouve des pointes, des aiguilles et des fragments d’outils majoritairement localisés au nord de l’espace intérieur, à proximité du foyer sur plate-forme (437) (fig. 174). Le nombre non négligeable d’aiguilles, comparé à celui des autres constructions et la présence d’une ébauche pourraient être mis en relation avec des activités de production ou de finition d’aiguilles. Une pièce esquillée utilisée pour le fendage de matière(s) dure(s) pourrait se rapporter au travail de l’os et conforter ainsi, en partie, cette hypothèse (Astruc 2002, p. 148). Toutefois, il ne s’agit pas là d’une zone d’activités spécialisées puisque cette construction a également livré de la vaisselle en pierre, des molettes, des coquillages, des galets et des outils lithiques (Le Brun 1984 a, p. 195). La structure S. 94 qui appartient à ce même ensemble a livré un nombre d’objets assez équivalent à celui de S. 85. En revanche les catégories d’objets représentées diffèrent. Contrairement à ce qui a été observé dans S. 85, les aiguilles sont ici absentes tandis que les pointes sont plus fréquentes. Peut-on alors envisager que ces deux constructions puissent avoir été le lieu d’activités différentes et/ou complémentaires ? Leur découpage interne assez proche et la concentration d’outils dans la partie nord de l’habitation, près d’un foyer sur plateforme, suggèrent dans tous les cas, une organisation similaire (fig. 175).
Tabl. 74 : Catégories d’objets par fosse (niveau B).
1.5.4. Le niveau III 1.5.4.1. Les constructions Le niveau III comprend, du nord au sud, quatre ensembles formés de plusieurs constructions : 1/ L’ensemble 1 regroupe 4 constructions : S. 110, S. 105, S. 109 et S. 107. 2/ L’ensemble 2 rassemble les constructions S. 94, S. 85, S. 104 et S. 103. 3/ L’ensemble 3 est constitué par les constructions S. 90, S. 87, S. 97, S. 99, S. 101, S. 98 et S. 113. 4/ Enfin, S. 102, S. 108 et S. 114 appartiennent à l’ensemble 4 (fig. 171). Sur 18 constructions, 8, appartenant à chacun des quatre ensembles, ont livré du matériel osseux. Certaines sont particulièrement bien fournies comme S. 105, S. 85, S. 94 et S. 87. D’autres, en revanche, sont plus pauvres pourtant les sols d’occupation ont été entièrement fouillés (tabl. 75). Les pointes et les aiguilles restent majoritaires. Quelques ébauches d’aiguille (3 exemplaires), absentes des constructions précédemment considérées, apparaissent au niveau III (tabl. 76).
L’ensemble 3 semble répondre à la même organisation que celle mise en évidence au sein de l’ensemble 1 du niveau B où une structure unique semblait être le lieu principal d’activités impliquant l’usage d’outils en os. Dans le cas présent, S. 87 semble également tenir ce rôle puisque c’est la seule construction qui présente un nombre élevé d’outils (9 objets) répartis sur deux sols d’occupation : 272 et 221. L’espace interne est découpé, sur le sol 221, par un muret de cloisonnement et un bassin creusé (261). Les outils majoritaires sur ce sol, sont quasiment tous localisés au nord de l’espace, près du bassin (261), comme cela est également le cas pour S. 85 et S. 94 (cf. supra) (fig. 176).
Au sein de l’ensemble 1, seule la construction S. 105 a livré du matériel osseux (fig. 172). D’une superficie de 7 m², cette construction présente différents aménagements intérieurs sur chacun des deux sols d’occupation reconnus : 432 et 329. Un foyer sur plateforme (438), une zone brûlée, un pilier, 2 dépressions circulaires, un reste de muret de cloisonnement ou d’une plate-forme (?) et une niche, équipent le sol 432. L’unique outil retrouvé sur ce sol est situé à proximité du foyer 438. Sur le sol postérieur 329, de nouvelles installations participent au découpage de l’espace intérieur : une plate-forme trapézoïdale, un bassin (540), un foyer sur plate-forme (388), des trous de poteaux, 3 piliers et une niche. La majorité de l’outillage recueilli sur ce sol est localisée près des installations à usage domestique, entre le bassin (450) et le foyer sur plateforme (388) (fig. 173).
Quelques informations sur la fonction de ces constructions peuvent être données par le nombre d’outils récoltés, sans toutefois que celle-ci soit précisée puisqu’aucune donnée fonctionnelle n’est disponible. On observe, en effet, que le nombre d’outils en os augmente progressivement au cours de l’occupation des constructions S. 105, S. 94 et S. 87, ce qui pourrait suggérer soit un changement dans la fonction de la construction, ou du moins dans la nature des activités pratiquées, soit une systématisation de ces dernières. Cette seconde hypothèse semble plus probable puisque les catégories d’objets retrouvées sont relativement identiques d’un sol à l’autre.
L’ensemble 2 est, avec 16 outils, le plus riche. Parmi les constructions étudiées, S. 85 présente un intérêt tout
105
Fig. 171: Plan général du niveau III (d’après Le Brun 1984 a, fig. 8). Ensemble 1 S.105 329 432
Ensemble 2 S.94 S.103 288 396 417 397 354
S.85
Ensemble 3 S.87 S.97 221 272
331
Ensemble 4 S.102 S.108 376 818
Tabl. 75 : Succession des sols étudiés dans les constructions du niveau III (la ligne inférieure correspond au sol le plus ancien). 106
Constructions S. 105 S. 85 S. 94 S. 103 S. 87 S. 97 S. 102 S. 108 TOTAL N
Sols 329 432 417 288 396 397 354 221 272 331 818 376
Pointes 2 1 1 4 1 1 1 1 2 14
Aiguilles 1 3 1 1 6
Fragments 2 2 1 2 5 2 3 17
Ébauches 1 1 1 3
TOTAL N
Tabl. 76 : Catégories d’objets par construction (niveau III).
Fig. 172 : Distribution du matériel osseux par construction (niveau III). 107
6 7 8 1 9 2 3 4 40
Fig. 176: Répartition spatiale du matériel osseux sur le sol 221 de S. 87 (niveau III) (d’après Le Brun 1984 a, fig. 17-2).
Fig. 173 : Répartition spatiale du matériel osseux sur le sol 329 de S. 105 (niveau III) (d’après Le Brun 1989 c, fig. 19).
1.5.4.2. Les espaces extérieurs Comme aux niveaux C et B, l’outillage osseux du niveau III provenant des espaces extérieurs est relativement similaire à celui retrouvé à l’intérieur des constructions mais il est bien plus abondant (tabl. 77). Au nord, le premier ensemble s’ouvre sur l’espace e. 412 (fig. 177). La composition désormais classique de l’outillage récolté n’apporte aucune donnée sur la fonction de cet espace. Les constructions de l’ensemble 3 s’ouvrent sur l’espace extérieur e. 282. Aucune donnée fonctionnelle n’est disponible mais en raison de l’homogénéité de la composition de l’outillage, on peut envisager la pratique d’activités similaires à celles réalisées dans les autres espaces. Enfin, au sud-est, S. 102 et S. 108 s’organisent autour de l’espace e. 325, pauvre en matériel osseux. Fig. 174 : Répartition spatiale du matériel osseux sur le sol 417 de S. 85 (niveau III) (d’après Le Brun 1989 c, fig. 15).
Le niveau III a également été reconnu à l’extérieur du village, au-delà du second mur 284. La composition de l’assemblage récolté à proximité du dispositif d’accès au village sur l’espace e. 727, est proche de celle qui caractérise l’intérieur du village (cf. tabl. 77 & fig. 178). En revanche, leur proportion diffère. Les pointes sont majoritaires à l’intérieur du village et les aiguilles peu représentées. À l’extérieur du village, cette tendance s’inverse. La spécialisation ou la complémentarité fonctionnelle de ces deux zones serait à envisager mais sans donnée fonctionnelle suffisante (le travail de l’écorce et des fibres végétales souples ont été identifiés sur respectivement une pointe et une aiguille), les interprétations restent donc limitées.
Fig. 175 : Répartition spatiale du matériel osseux sur le sol 288 de S. 94 (niveau III) (d’après Le Brun 1984 a, fig. 21).
108
Intérieur du village
Espaces extérieurs e. 412 e. 326 e. 313 e. 381 e. 282 e. 413 e. 325 e. 836
Sous-total Extérieur du village TOTAL N
e. 727
1 2 3 7 2 15
Produits de débitage 1 2 3
TOTAL N 5 4 2 5 8 10 10 3 49
2
23
2
54
2
38
5
101
Pointes
Aiguilles
tranchants
Fragments
2 4 2 2 4 3 6 3 28
2 1 3
-
8
19
34
22
Tabl. 77 : Catégories d’objets par espace extérieur (niveau III).
Fig. 177 : Intérieur du village – Distribution du matériel osseux par espace extérieur (niveau III). 109
Fig. 178 : Extérieur du village – Distribution du matériel osseux par espace extérieur (niveau III).
1.5.5. Le niveau II 1.5.5.1. Les constructions Au niveau II on assiste à un changement d’organisation de l’espace villageois. La limite est reste inchangée mais la partie occidentale du versant est définitivement abandonnée. Un mur (245), perpendiculaire aux murs 100 et 284, est construit dans la partie nord de l’espace habité (Le Brun 1984 a, p. 64) (fig. 179). Du nord au sud, deux ensembles formés de plusieurs constructions ont été reconnus. Le premier ensemble comprend les constructions S. 92, S. 94, S. 84, S. 85, S. 88, S. 86, S. 97 et S. 104. Les éléments S. 102, S. 89 et S. 100 forment le second ensemble. Les sols d’occupation étudiés ont été entièrement fouillés (tabl. 78). Sur 11 constructions, 10 appartenant à chacun des deux ensembles, ont livré du matériel osseux (tabl. 79). La distribution de l’outillage par structure est inégale. Parmi les éléments les plus pauvres, S. 94 est un exemple particulièrement intéressant puisqu’au niveau précédent (le niveau III), le matériel recueilli était relativement abondant. L’évolution quantitative de l’outillage récolté à l’intérieur de ces structures rappelle celle mise en évidence entre les niveaux C et B. La fonction de cette construction semble également évoluée au niveau II. En raison de ses petites dimensions (environ 3,15 m² de superficie) et du faible soin apporté à la pose du sol, elle ne peut être considérée comme une habitation. Elle
S.84 241 273
Ensemble 1 S.94 S.88 231 251 252 237
S.85
S.86
S.97
Ensemble 2 S.89 S.100
218
308
332
358
Tabl. 78 : Succession des sols étudiés dans les constructions du niveau II (la ligne inférieure correspond au sol le plus ancien). Constructions S. 84 S. 85 S. 94 S. 88 S. 86 S. 97 S. 89 S. 100 TOTAL N
Sols 241 273 251 252 231 237 218 308 332 358
Pointes Aiguilles 2 1 3 3 1 3 1 1 1 1 1 14 4
Tranchants 1 1 2
Divers 1 1
Frag. TOTAL N 1 4 2 9 1 1 1 8 2 1 2 3 4 5 1 12 33
Tabl. 79 : Catégories d’objets par construction (niveau II). pourrait alors davantage fonctionner comme un lieu de stockage (Le Brun 1984 a, p. 64). En revanche, S. 85 qui appartient au même ensemble que S. 94, présente d’un niveau à l’autre, un nombre équivalent d’objets et une fonction vraisemblablement similaire, en raison du même nombre d’aiguilles retrouvées (fig. 180). Si l’on examine la répartition spatiale de l’outillage sur le sol 251 de cette construction, on remarque trois groupes de 2
110
Fig. 179 : Plan général du niveau II (d’après Le Brun 1984 a, fig. 10).
111
Contrairement à S. 88, où l’outillage est localisé plutôt au centre de l’espace domestique, celui de S. 89 (ensemble 2) provient davantage de sa périphérie (fig. 183). Cette structure se distingue donc des précédentes par le découpage de l’espace domestique mais également par la distribution de l’outillage. Plus largement les structures de l’ensemble 2 se distinguent de celles de l’ensemble 1 d’une part, par un nombre moins élevé d’objets en os (27 exemplaires pour l’ensemble 1 et 6 pour l’ensemble 2) et d’autre part, par la répartition des outils au sein des structures. Si l’ensemble 2 semble répondre au même schéma précédemment mis en évidence pour l’ensemble 1 du niveau B et l’ensemble 3 du niveau III, l’ensemble 1 du niveau II présente, au contraire, non pas une mais deux constructions : S. 85 et S. 88 qui présentent un nombre d’objets élevé.
objets à proximité du mur sud ainsi qu’une concentration, comme au niveau III, de 3 objets à proximité du foyer sur plate-forme (264) situé au nord de l’espace interne (fig. 181). Ces différentes concentrations pourraient refléter différentes zones d’activités. L’outillage osseux est peu fréquent dans les constructions attenantes à S. 85 et S. 94 et notamment dans S. 92 et S. 84. En revanche dans S. 88, qui appartient au même ensemble que les structures précédemment citées, le nombre d’objets est équivalent à celui de S. 85. Ces derniers sont particulièrement présents sur le sol primitif 237 et disposés de part et d’autre du muret de cloisonnement nord, à proximité du foyer sur plate-forme (238) et de la plate-forme (310) (fig. 182). Une nouvelle fois le découpage de l’espace interne semble influer sur la répartition spatiale de l’outillage.
Fig. 180 : Distribution du matériel osseux par construction (niveau II). 112
Fig. 181 : Répartition spatiale du matériel osseux sur le sol 251 de S.85 (niveau II) (d’après Le Brun 1984 a, fig. 16-2). Fig. 183 : Répartition spatiale du matériel osseux sur le sol 332 de S.89 (niveau II) (d’après Le Brun 1989 b, fig. 16).
1.5.5.2. Les espaces extérieurs Le matériel osseux récolté sur les espaces extérieurs est relativement similaire à celui retrouvé à l’intérieur des constructions mais il est plus abondant (tabl. 80). À l’intérieur du village, le premier ensemble s’organise au nord, autour de l’espace extérieur e. 312 (fig. 184). Huit objets y ont été découverts. Aucune donnée fonctionnelle n’est disponible. L’espace extérieur e. 550 de l’ensemble 2, présente un outillage assez similaire au précédent. À l’extérieur du village, deux principaux espaces extérieurs ont été reconnus : e. 400 et e. 981 (fig. 185). Le nombre d’objets y est plus élevé qu’au niveau III (tabl. 80). L’espace e. 400 correspond à une zone de rejets qui surmonte un remblai recouvrant l’ensemble du dispositif d’accès au village. Les aiguilles y sont particulièrement bien représentées. Le travail des fibres végétales souples y est majoritaire (20 aiguilles et 2 pointes). Le travail de l’écorce (2 aiguilles et 2 pointes), celui des fibres végétales rigides (1 pointe) et de la peau fraîche (1 outil tranchant), ont également été identifiés. Quant à l’espace e. 981, l’outillage récolté est numériquement moins important mais les aiguilles restent majoritaires. Le travail des fibres végétales souples a été identifié sur 4 aiguilles et 1 pointe et le travail du cuir sur 1 aiguille.
Fig. 182 : Répartition spatiale du matériel osseux sur les sols 237 et 231 de S.88 (niveau II) (d’après Le Brun 1984 a, fig. 18).
113
Intérieur du village
Espaces extérieurs e. 312 e. 211 e. 550 e. 768
Sous-total Extérieur du village Sous-total TOTAL N
e. 400 e. 981
Pointes
Aiguilles
tranchants
Divers
Fragments
4 6 5 15
1 2 3 6
1 1
-
3 8 2 3 16
Produits de débitage -
85 3 88
200 22 222
18 2 20
1 1
88 11 99
5 1 6
397 39 436
103
228
21
1
115
6
474
TOTAL N 8 17 10 3 38
Tabl. 80 : Catégories d’objets par espace extérieur (niveau II).
Fig. 184 : Intérieur du village – Distribution de l’outillage par espace extérieur (niveau II). 114
Fig. 185 : Extérieur du village – Distribution de l’outillage par espace extérieur (niveau II).
115
architecturaux. Ainsi, dans les constructions S. 117, au niveau C, et S. 125, au niveau B, l’outillage est concentré dans une zone circonscrite et délimitée par des foyers et bassins ou par un pilier ou par une plate-forme. Ce découpage pourrait correspondre à différentes zones d’activités potentielles comme à différentes zones de stockage. L’espace intérieur de la construction S. 122 pourrait, en revanche, répondre à d’autres fonctions pour l’instant non précisées. Une zone nommée habitation, pourvue de trous de poteaux dont la fonction probable, en raison du matériel recueilli, est celle de caches, comprend la majorité de l’outillage osseux de cette structure. Le réduit, qui constitue la seconde zone identifiée dans S. 122, comprend un outillage lithique abondant et peu d’outils en matières osseuses. L’hypothèse d’une utilisation comme remise ou réserve a été avancée pour cette zone (Astruc 2002, p. 157). Si aucune aire d’activité spécifique n’a pu être mise en évidence à l’intérieur des constructions, puisque les assemblages sont répétitifs d’un élément à l’autre et les données fonctionnelles insuffisantes, l’analyse spatiale révèle, néanmoins, une localisation privilégiée du matériel osseux qui pourrait correspondre soit à une aire d’activités, soit à un lieu de stockage.
1.5.5.3. Les fosses Une seule fosse (959) a été découverte à l’intérieur du village sur l’espace e. 550 (tabl. 81). Trois fosses aménagées à l’extérieur du village ont livré du matériel osseux. Seules les principales catégories d’objets identifiées y sont représentées et notamment dans la fosse 1002 qui a livré le plus grand nombre d’objets. Parmi ces outils, 2 aiguilles (fosse 1002) et 1 pointe (fosse 1008) ont été utilisées sur des fibres végétales souples.
Fosses 1002 1008 1009 959 TOTAL N
Pointes 5 2 3 3 13
Aiguilles 19 1 1 21
Fragments 6 1 7 14
TOTAL N 30 3 4 12 49
Tabl. 81 : Catégories d’objets par fosse (niveau II). 1.5.6. Conclusion L’analyse spatiale du matériel osseux montre que la majorité du matériel a été récoltée sur les espaces extérieurs non bâtis associés aux constructions. C’est également ce schéma qui caractérise la répartition spatiale du matériel osseux du Cap Andreas-Kastros (Le Brun 1981). Il s’agit donc sur les deux sites, d’un outillage domestique utilisé dans le cadre de la maison. La composition de l’outillage retrouvé à l’intérieur des constructions est relativement homogène. Néanmoins, certaines structures appartenant à un même ensemble peuvent présenter une composition différente. C’est le cas notamment des constructions S. 85 et S. 94 du niveau III. La première présente un nombre non négligeable d’aiguilles, tandis que ces outils sont absents de S. 94. À l’inverse, les pointes sont plus fréquentes dans S. 94. Les activités pratiquées à l’intérieur de ces deux constructions semblent donc être différentes, ce qui pourrait laisser sous-entendre une certaine complémentarité fonctionnelle entre ces constructions. Toutefois, le découpage de l’espace domestique est équivalent d’une construction à l’autre et la répartition de l’outillage similaire, ce dernier est principalement concentré dans la partie nord de l’espace interne. Ainsi, il semblerait que malgré la nature différente des activités pratiquées, une localisation privilégiée de ces activités au sein de l’espace interne des constructions puisse être établie. Cette hypothèse semble se conforter lorsque l’on examine la nature des installations à usage domestique aménagées à l’intérieur des constructions mais également le découpage de l’espace interne (Le Brun 1984 a, p. 195). Les objets sont le plus souvent localisés à proximité d’une ou de plusieurs installations à usage domestique comme les foyers sur plate-forme (S. 125 — niveau B ; S. 85 niveaux III et II ; S. 105 - niveau III et S. 88 - niveau II) ou les bassins (S. 105 et S. 87 niveau III). Par ailleurs, on observe que l’outillage est préférentiellement localisé dans des espaces limités par ces mêmes installations à usage domestique mais aussi par des éléments
Si la composition des assemblages des constructions est globalement répétitive, la quantité est bien plus variable. Certaines constructions sont plus fournies que d’autres. Cette variation peut suggérer différents modes d’organisation, comme nous le verrons, mais elle rend compte aussi de la fonction de la construction ou de l’ensemble. Ainsi, il est très probable que les constructions les plus riches étaient le lieu d’une activité dominante ou bien celui d’activités multiples (Le Brun 1984 a, p. 195). Le rôle fonctionnel de ces constructions semble évoluer au cours de leur utilisation au sein d’un même niveau mais également d’un niveau à l’autre, en fonction de la proportion d’objets recueillis. Cette évolution peut tendre vers une plus grande systématisation des activités réalisées avec des outils en os, c’est le cas des structures S. 105, S. 94 et S. 87 du niveau III où le nombre d’outils en os augmente progressivement au cours de leur occupation. Mais elle peut également tendre vers une diminution de ces activités. Ainsi, au niveau II, le nombre d’outils récoltés à l’intérieur de S. 88 diminue d’un sol à l’autre, tandis que celui provenant de la structure voisine S. 84 appartenant au même ensemble, augmente légèrement. Les constructions d’un même ensemble seraient-elles alors fonctionnellement différenciées et complémentaires ? L’évolution quantitative du mobilier osseux est également significative d’un niveau à l’autre. S. 122 et S. 94 ont respectivement livré aux niveaux C et III, un matériel abondant. Aux niveaux suivants, B et II, elles sont parmi les constructions les plus pauvres. Outre, des phénomènes d’érosion, notamment dans le cas de S. 122, cette diminution peut également être expliquée par un changement de fonction de la construction et plus largement de l’ensemble auquel elle appartient. D’autres structures ne sont, à l’inverse, marquées par aucune
116
d’aiguilles dont une majorité a été utilisée sur des fibres végétales souples. Tout comme ce qui a été observé pour les constructions, la fonction de ces espaces évolue d’un sous-niveau à l’autre. La fréquence du matériel récolté, sa composition et parfois sa fonction, supposent, en effet, des rythmes d’activités différents. En outre, certaines activités ne pourraient se pratiquer qu’à l’extérieur des constructions. On observe, en effet, qu’aucun produit de débitage n’a été retrouvé à l’intérieur de ces dernières, à l’exception d’un seul exemplaire récolté sur le sol 635 de S. 126 (niveau B). Même s’ils restent peu fréquents, ils sont, en revanche, présents sur les espaces extérieurs, dans les fosses ou même à l’extérieur du village. Si pour ces deux derniers lieux, l’hypothèse du rejet peut être envisagée, en revanche leur présence sur les espaces extérieurs associés aux constructions peut témoigner d’activités occasionnelles de fabrication d’outils en os. La découverte, sur ces mêmes espaces, de quelques outils lithiques ayant travaillé des matières dures d’origine animale, pourrait confirmer cette hypothèse (Astruc 2002). Néanmoins, le nombre de ces produits reste insuffisant par rapport au nombre d’outils en os recueillis. L’introduction de produits finis à l’intérieur de ces espaces ou encore l’existence d’un lieu de production plus ou moins éloigné du village ou dans une zone du village encore non explorée, restent des hypothèses à considérer.
évolution quantitative. D’un niveau à l’autre, la proportion d’objets retrouvés est stable. C’est le cas de S. 117 (niveaux C-B) et de S. 85 (niveaux III-II). Cette analyse permet donc de distinguer deux modes d’organisation des maisons. Le premier mode, le plus fréquent, implique qu’au sein d’un même ensemble, une seule structure soit le lieu principal d’activités impliquant l’usage d’outils en os, ou un lieu de stockage. Ce mode d’organisation a été relevé pour tous les niveaux où des ensembles distincts ont été reconnus. Au niveau III, l’ensemble 3 se caractérise par une structure, S. 87, particulièrement bien fournie en matériel osseux, tandis que les autres structures du même ensemble sont soit dépourvues d’outil en os, soit en ont livré en faible quantité. De même, au niveau II, seule la structure S. 89 de l’ensemble 2 est la plus riche. Au cours de l’occupation d’un même niveau, ce mode d’organisation peut évoluer tout en gardant les mêmes caractéristiques. Ainsi, au cours du niveau B, ce sont deux structures qui successivement sont majoritairement pourvues d’outils en os. Au sousniveau B5, il s’agit de la construction S. 117 puis lorsqu’elle cesse d’être utilisée au sous-niveau B3, c’est une autre construction, S. 121, qui lui succède. Dans le second mode d’organisation, au moins deux structures appartenant à un même ensemble, présentent un nombre d’outils équivalent. C’est le cas des structures S. 85 et S. 94 de l’ensemble 2 du niveau III et de S. 85 et S. 88 de l’ensemble 1 du niveau II. La présence de ces deux modes d’organisation sur un même niveau comme c’est le cas aux niveaux III et II, laisse sous-entendre que la fonction de ces maisons est différente. Cette différence n’exclut pas pour autant la pratique d’activités similaires mais leur fréquence pourrait alors variée.
2. LES MODALITES DE PRODUCTION ET D’UTILISATION DE L’OUTILLAGE DU CAP ANDREAS-KASTROS 2.1. Les matières premières Comme à Khirokitia, la sélection des matières premières est déterminée. L’os y est prépondérant. L’exploitation du bois de daim et des dents est marginale (tabl. 82). Malgré un nombre important d’indéterminés (88,52 %), les os longs parmi lesquels les métapodes, prédominent dans ce corpus (11 exemplaires soit 84,62 %). L’utilisation d’os plats est peu fréquente (2 exemplaires soit 15,38 %). Sur 6 dents exploitées, 4 sont des canines de sanglier. En l’absence de traces de découpe sur les objets, le mode d’approvisionnement choisi n’a pu être déterminé. On peut envisager soit le prélèvement de canines sur l’animal abattu, soit leur ramassage parmi les restes culinaires. Les principales parties exploitables du bois ont été sélectionnées (tabl. 83). Une seule meule de mue a été identifiée mais l’échantillon est bien trop faible pour savoir si la collecte est le moyen d’approvisionnement le plus couramment suivi.
Le matériel des espaces extérieurs associés aux constructions ne diffère pas de celui issu de l’intérieur des constructions. Il est, en revanche, bien plus abondant. Trois hypothèses peuvent être avancées : 1/ l’outillage récolté à l’intérieur des constructions est un matériel stocké. Les activités sont alors pratiquées à l’extérieur de la construction ; 2/ différentes séquences de chaînes opératoires sont représentées à l’intérieur et à l’extérieur des constructions. Cette hypothèse a été proposée pour le matériel lithique (Astruc 2002, p. 169) ; 3/ le matériel des espaces extérieurs provient du nettoyage des sols des constructions (Le Brun, 1984 a, p. 191). Des variations quantitatives entre les espaces extérieurs sont également observées. Au sous-niveau B3, par exemple, une concentration particulière d’outils a été mise en évidence sur l’espace e. 720/721 localisé au sud de S. 134. Le matériel recueilli y est particulièrement abondant et assez diversifié contrairement aux autres espaces extérieurs du même sous-niveau. Cet espace a donc probablement été le lieu d’activités multiples parmi lesquelles des activités de couture ou de tissage semblent avoir été privilégiées en raison d’un nombre important
Os Bois de daim Dent TOTAL
Effectifs N 122 6 6 134
% 91,04 4,48 4,48 100
Tabl. 82 : Cap Andreas-Kastros - Matières premières sélectionnées. 117
ont été identifiés, sont pris en compte dans cette typologie.
Effectifs N Andouiller secondaire
2
Meule et merrain
1
Merrain et andouiller
1
Indéterminés
2
TOTAL N
6
2.2.1. Outils à partie active pointue TYPE I : Pointe sur ulna (3 exemplaires) conservation de la morphologie naturelle de l’ulna (fig. 186-1).
Tabl. 83 : Cap Andreas-Kastros – Parties des bois de daim sélectionnées.
TYPE II : Pointe sur segment transversal de matière (5 exemplaires)
Le nombre des espèces animales identifiées est faible au regard du corpus total (34 déterminations, soit 25,37 % de l’ensemble de l’industrie). Néanmoins, on observe une nette prédominance des espèces sauvages – les daims et les oiseaux (85,3 %) – sur les espèces domestiques (tabl. 84). Contrairement à Khirokitia où les oiseaux étaient peu exploités, au Cap AndreasKastros, ils sont privilégiés tandis qu’ils sont peu nombreux dans les restes fauniques. À l’inverse, les caprinés, qui au côté des daims dominaient l’échantillon de Khirokitia, sont, au Cap Andreas-Kastros, très minoritaires. Pourtant les caprinés sont fréquents dans les restes fauniques. Si ces données relèvent réellement d’un fait archéologique, la sélection des espèces au Cap Andreas-Kastros ne s’inscrirait pas totalement dans le même système d’exploitation que celui de Khirokitia. Il s’agirait ici davantage d’un système d’exploitation qui repose sur un approvisionnement à l’extérieur du village.
Espèces animales
Effectifs N
%
Daims
15
44,12
Oiseaux
14
41,18
Sangliers (Sus scrofa)
4
11,76
Caprinés
1
2,94
TOTAL
34
100
II.A : sur dent (4 exemplaires) (fig. 186-2) II.B : sur partie basilaire de bois de daim (1 exemplaire) fig. 186-3) - conservation de la morphologie du bois ; - longueur totale : 140 mm. TYPE III : Pointe sur segment longitudinal de métapode avec épiphyse partielle (4 exemplaires) III.A : épiphyse distale (1 exemplaire) (fig. 186-4) III.B : épiphyse proximale (3 exemplaires) (fig. 186-5) - diaphyse aux bords réguliers et droits ; - section mésiale : convexo-concave ou circulaire ; - portion d’épiphyse distale ou proximale naturelle ; - la longueur totale des pièces entières est de 37 mm ou de 122 mm, la largeur mésiale est de 10 ou de 19 mm, l’épaisseur mésiale est de 5 ou de 12 mm. TYPE IV : Pointe sur segment longitudinal de diaphyse sans épiphyse (20 exemplaires) IV.A : segment régularisé (3 exemplaires) (fig. 186-6) - contours réguliers ; - section mésiale : convexo-concave, ovale, planoconvexe ou rectangulaire ; - la longueur totale des pièces entières est de 47 mm ou de 126 mm, la largeur mésiale est de 7 ou de 8 mm, l’épaisseur mésiale est de 4,5 ou de 5 mm. IV.B : segment non régularisé (17 exemplaires) (fig. 1867) - contours et sections irréguliers ; - longueur totale : 82 mm, largeur mésiale : 14 mm, épaisseur mésiale : 7 mm.
Tabl. 84 : Cap Andreas-Kastros – Espèces animales exploitées pour l’industrie.
La sélection des matières premières pour l’industrie montre une détermination très importante qui repose sur une exploitation majeure de l’os, une préférence pour les os longs et enfin, sur un choix particulier pour les espèces sauvages. L’exploitation du bois et celle de l’os relèvent vraisemblablement des deux systèmes mis en évidence à Khirokitia (cf. p. 44). Au système qui concerne l’exploitation de l’os, on peut ajouter celle des dents qui s’inscrit également dans le prolongement du traitement des carcasses.
TYPE V : Hameçon (8 exemplaires) V.A : Hameçon courbe à base rectiligne (2 exemplaires) (fig. 186-8) V.B : Hameçon courbe à base convexe (6 exemplaires) (fig. 186-9) - contours réguliers ; - section mésiale convexo-concave.
2.2. Typologie de l’industrie
TYPE VI : Aiguille à chas (2 exemplaires)
Cent deux objets pour lesquels des critères morphologiques relatifs aux parties anatomiques sélectionnées et à la segmentation appliquée à la matière
- fragment rectiligne et allongé entièrement façonné (fig. 186-10) ;
118
Fig. 186 : Cap Andreas-Kastros – Outils à partie active pointue (dessins O. Daune Le Brun). - grand module ; - diamètre de la perforation proportionnelle à la largeur de la base de l’objet. 2.2.2. Outils à partie active tranchante TYPE VII : Outil tranchant sur segment transversal de scapula (1 exemplaire) conservation de la morphologie naturelle de l’os (fig. 187-1) ; - Taillant latéral et concave. TYPE VIII : Outil tranchant sur segment longitudinal de métapode avec épiphyse proximale partielle (1 exemplaire) - contours réguliers et droits (fig. 187-2) ; - conservation d’une portion d’épiphyse naturelle ; - section convexo-concave ; - taillant frontal, convexe et large ; - longueur totale : 100 mm, largeur mésiale : 23 mm, épaisseur mésiale : 7 mm, longueur taillant : 14 mm. TYPE IX : Outil tranchant sur segment longitudinal de diaphyse sans épiphyse (1 exemplaire) - contours réguliers et rectilignes (fig. 187-3) ; - section circulaire ; - taillant frontal, convexe et étroit ; longueur totale : 86 mm, largeur mésiale : 8 mm, épaisseur mésiale : 7 mm, longueur taillant : 5 mm.
Fig. 187 : Cap Andreas-Kastros – Outils à partie active tranchante (dessins O. Daune Le Brun et A. Legrand).
119
2.2.3. Objets divers
2.2.4. Conclusion
TYPE X : Objet sur segment transversal de matière (19 exemplaires)
Au total 12 types relatifs aux 3 catégories d’objets, ont été identifiés. Avec 93,3% de l’outillage, les outils pointus dominent ce corpus au détriment des outils tranchants qui ne représentent que 6,67%. Parmi les outils pointus, les hameçons (type V) singularisent l’outillage du Cap Andreas-Kastros. En revanche, les aiguilles nombreuses à Khirokitia sont proportionnellement moins fréquentes au Cap AndreasKastros. Les pointes sur segment longitudinal de diaphyse, sont les plus fréquentes et particulièrement celles fabriquées sur des segments longitudinaux d’os long indifférencié sans épiphyse (type IV) (fig. 189). Leur morphologie et leurs dimensions différentes sont à l’origine d’une variabilité morphologique. C’est en effet dans ce type que sont rassemblés les segments régularisés et les segments non régularisés. L’échantillon des outils tranchants est numériquement faible (seulement 3 exemplaires considérés) et ne permet pas de tester d’une part, la fréquence des supports utilisés et d’autre part, la variabilité morphologique de ces outils.
X.A : sur andouiller (4 exemplaires) A.1 : naturel (1 exemplaire) A.2 : évidé (2 exemplaires) (fig. 188.1) - conservation de la morphologie du bois ; - perforation circulaire. A.3 : perforé (1 exemplaire) (fig. 188-2) X.B : sur diaphyse intégrale d’os long (14 exemplaires) - portion de diaphyse intégrale : tube (fig. 188-3) ; - morphologie et section de l’os conservées ; - la longueur totale varie de 14 à 45 mm (moyenne : 30,82 mm), la largeur mésiale de 4 à 5 mm (moyenne : 4,55 mm), l’épaisseur de 3 à 4 mm (moyenne : 3,59 mm). TYPE XI : Objet sur segment longitudinal de métapode avec épiphyse proximale partielle (1 exemplaire) - contours réguliers (fig. 188-4) ; - portion d’épiphyse proximale naturelle ; - perforation. TYPE XII : Objet sur segment longitudinal de diaphyse sans épiphyse avec perforation (2 exemplaires) - contours réguliers (fig. 188-5) ; - section ovale.
N 25
Pointes
20
15
10
5
0 T ype I
Os entier
T ype II
Segment transversal
T ype III
T ype IV
Segment longitudinal
Fig. 189 : Cap Andreas-Kastros – Représentativité des pointes par type.
L’approche typologique conduite sur l’outillage du Cap Andreas-Kastros révèle deux caractères morphologiques déjà mis en évidence à Khirokitia. D’une part, les outils et en particulier les pointes, sont majoritairement fabriqués sur des segments longitudinaux de matière qui ne conservent aucun caractère anatomique (fig. 190). D’autre part, les pointes et les outils tranchants sont morphologiquement peu différenciés quel que soit le type de segmentation appliqué à la matière.
Fig. 188 : Cap Andreas-Kastros – Objets divers (dessins O. Daune Le Brun et A. Legrand).
120
2.3.1.2. Pointe sur segment longitudinal de métapode avec épiphyse partielle Ces outils (type III - 4 exemplaires) ont été fabriqués sur des métapodes le plus souvent découpés en deux (n = 3) ou en quart (n = 1) (pl. 9). L’échantillon est trop faible pour pouvoir préciser les modalités d’exploitation de ces os, il est donc impossible, dans l’état actuel des données, de savoir si le système d’exploitation répond ou non à une économie de débitage et si une préférence s’est opérée en faveur des métatarses ou des métacarpes. La percussion et le sciage sont les deux techniques identifiées. Ces techniques ont été utilisées seules, respectivement repérées sur un outil, mais également combinées (n = 1). Dans ce dernier cas, il s’agit d’un sciage unifacial et intégral associé à la percussion. La tendance enregistrée sur le site de Khirokitia qui privilégie l’usage de la percussion au détriment du sciage, semblerait également marquer l’outillage du Cap Andreas-Kastros. Trois outils portent des stries d’abrasion transversales et grossières. Le façonnage mis en œuvre est un façonnage d’appoint qui peut s’étendre à la partie mésiale de l’outil (degré de transformation 2).
N 25 1 20
15
10
20 1
5
1
0 3
5
4
Sur segment transversal
Sur segment longitudinal avec épiphyse
0 Sur os entier
Pointe
Sur segment longitudinal sans épiphyse
Outil tranchant
Fig. 190 : Cap Andreas-Kastros – Types de segments utilisés dans la fabrication des pointes et des outils tranchants.
2.3.1.3. Pointe sur segment longitudinal de diaphyse sans épiphyse Examinons les outils du type IV (n = 20) (pl. 9). En ce qui concerne les pointes du type IV.A, les procédés de découpe et les techniques de débitage mis en œuvre n’ont pas été identifiés. Cela pour deux raisons, la première est liée à l’absence de trace de débitage et la seconde au façonnage couvrant qui masque ou modifie les sections. Seule la présence d’esquilles (n = 17), suggère l’emploi de la percussion directe. Neuf outils portent des traces d’abrasion transversale et grossière. Le forage, dont la technique est indéterminée, intervient dans trois cas. L’étendue du façonnage diffère selon le type. Pour les outils des types IV.A, le façonnage est modéré ou couvrant (degré de transformation 3). L’investissement technique accordé au façonnage est donc bien plus important que celui jusqu’à présent mis en évidence. En revanche, seule la partie active des pointes du type IV.B, est mise en forme (degré de transformation 1).
2.3. Fabrication de l’industrie Cette partie a pour objectif d’une part, de caractériser les schémas opératoires mis en œuvre dans la fabrication de l’outillage et d’autre part, de les comparer à ceux observés sur le site de Khirokitia afin de dégager ou non une homogénéité technique entre les deux sites. Voit-on apparaître de nouveaux procédés, de nouvelles techniques et méthodes de débitage ? S’agit-il d’une industrie élaborée, techniquement très investie ou au contraire est-elle fondée sur les mêmes principes techniques que ceux observés à Khirokitia ? Comme à Khirokitia, rappelons que les produits de débitage sont rares au Cap Andreas-Kastros, et les ébauches, absentes. Aussi, cette étude est-elle exclusivement fondée sur l’examen des produits finis. 2.3.1. Outils à partie active pointue
2.3.1.4. Hameçon et aiguille à chas Les traces techniques sont extrêmement ténues sur les hameçons et les aiguilles (pl. 10). Un seul hameçon porte des traces de sciage. Ces pièces sont façonnées par abrasion. Seul un hameçon présente une surface uniformément blanche et terne que l’on peut attribuer à une chauffe volontaire ou accidentelle.
2.3.1.1. Pointe sur ulna et sur segment transversal de matière Ces outils (8 exemplaires) ont été mis en forme par façonnage (pl. 9). Trois techniques ont été observées : l’entaillage (n = 1) (uniquement pour le type II.B), l’abrasion (n = 6) et le raclage (n = 1). Les stries d’abrasion sont majoritairement transversales (n = 5) et grossières (n = 2). Le façonnage de ces outils est de faible ampleur destiné à la mise en forme de la pointe (degré de transformation 0 ou 1). Ainsi, les caractères anatomiques ou la morphologie naturelle du matériau sont conservés.
2.3.2. Outils à partie active tranchante 2.3.2.1. Outil tranchant sur scapula Cet outil (CAK 864.3 – Type VII) (pl. 11) porte à une extrémité des traces transversales de sciage. La fracturation s’est ensuite produite par percussion.
121
Des stries d’abrasion transversales ont été observées sur la face inférieure de l’objet près de la zone de découpe. La finalité du façonnage est indéterminée puisqu’elle ne relève pas de la mise en forme de l’outil ou de sa partie active.
2.3.3.2. Objet sur segment longitudinal d’os long Le premier objet examiné a été fabriqué à partir d’un métatarse proximal de capriné (CAK 728.1) (type XI) (pl. 12). L’os a été découpé en quart probablement par percussion indirecte en raison de l’irrégularité des bords. Des traces grossières d’abrasion transversales et longitudinales ont été observées sur les deux faces du support. La mise en forme du support était sans doute destinée à amincir les faces pour faciliter la réalisation d’une perforation située sur la partie mésiale. La technique de perforation utilisée n’a pas été identifiée, mais elle semble avoir été amorcée à partir des deux faces du support.
2.3.2.2. Outil tranchant sur segment longitudinal d’os long L’outil CAK 679.1 (pl. 11) est fabriqué sur un métatarse à épiphyse proximale découpé en deux probablement par percussion indirecte (type VIII). La technique de façonnage utilisée est l’abrasion. Les stries sont transversales ou obliques et grossières. Le façonnage concerne aussi bien la partie active que la partie mésiale (degré de transformation 2). Dans le premier cas, il consiste à mettre en forme le biseau, dans le second cas, il s’agit de régulariser le fût de l’outil.
La même technique de mise en forme a été utilisée sur les deux outils du type XII. Les faces du support ont été amincies par abrasion transversale grossière. La technique de perforation n’a pas été déterminée. L’une des pièces semble avoir été chauffée. Sa surface est brillante et panachée, les teintes vont du brun foncé au noir.
Le type IX : tranchant sur un segment longitudinal d’os long sans épiphyse, n’est représenté que par un seul outil (CAK 558.1) (pl. 11). La technique de débitage n’a pas été déterminée. Le façonnage est intégral (degré de transformation 3). Le biseau double de la partie distale a été façonné par abrasion grossière transversale et oblique. Les bords et les faces de la partie mésiale ont été abrasés et raclés. Les stries d’abrasion sont transversales ou longitudinales. Enfin, la partie proximale est entièrement régularisée par raclage.
2.3.4. Fragments proximaux d’outils Les fragments proximaux au nombre de 35, ont tous été fabriqués à partir d’un segment longitudinal d’os long (pl. 12). Trois exemplaires ont été fabriqués à partir de métapodes découpés en deux. Pour l’un d’entre eux (CAK 689.1), le sciage est probablement bifacial. Pour les deux autres, la technique est indéterminée. Aucune trace de façonnage n’a été observée sur ces objets. Les techniques de débitage mises en œuvre dans la fabrication des objets sur segment longitudinal de diaphyse sans épiphyse (32 exemplaires) n’ont pu être précisément déterminées, excepté pour les objets façonnés sur des esquilles osseuses obtenues par percussion directe. L’abrasion transversale grossière reste la technique de façonnage la plus utilisée.
2.3.3. Objets divers 2.3.3.1. Objet sur segment transversal de matière Les segments transversaux fabriqués sur des andouillers (type X.A) (pl. 12) ne portent aucune trace technique. Mais par analogie aux objets de Khirokitia, on peut penser que les segments ont été obtenus par entaillage. De même, la technique employée pour l’évidage des objets du type X.A.2 n’a pas été reconnue. Les éléments tubulaires (n = 14) (type X.B) (pl. 12) montrent pour 7 d’entre eux des traces claires de sciage transversal réalisé avec un outil lithique (fig. 191). La percussion directe a ensuite été employée pour finir la découpe de l’os. Aucune trace de façonnage n’a été observée sur ces objets. Seule une pièce pourrait avoir été chauffée. Sa surface est uniformément brillante et de couleur brun foncé.
2.3.5. Conclusion Le schéma opératoire mis en œuvre dans la production de l’outillage du Cap Andreas-Kastros traduit un investissement technique faible allié à une certaine habileté technique. Malgré un échantillon restreint, les os longs semblent avoir été majoritairement découpés en deux par percussion indirecte combinée ou non au sciage. Les supports ainsi obtenus sont préférentiellement façonnés par abrasion transversale grossière. Quelle que soit la catégorie d’outils considérée, exception faite des aiguilles, ce schéma se répète. Ces outils sont alors, comme à Khirokitia, indifférenciés sur le plan morphologique et technique. L’attribution des fragments d’objets indéterminés à une catégorie morphofonctionnelle est donc limitée. On peut alors s’interroger, comme à Khirokitia, sur la conception de l’outillage. Peut-elle être considérée comme une conception opportuniste : on fabrique des supports qui sont façonnés en pointe ou en tranchant au fur et à mesure des besoins.
28x
Fig. 191 : Cap AndreasKastros – Type X.B. Traces de sciage transversal (CAK 778.1) (cliché A. Legrand).
122
l’économie de ce site est largement tournée vers l’exploitation des ressources marines. L’outillage osseux reflète ici clairement d’une part, l’économie et d’autre part, le milieu dans lequel s’est implantée cette communauté.
Ou bien s’agit-il d’une conception anticipée, auquel cas la finalité morpho-fonctionnelle des supports est envisagée dès la phase de débitage ? Cette question déjà envisagée pour Khirokitia, ne semble pas trouver d’élément de réponse au terme de l’examen technologique de l’outillage du Cap Andreas-Kastros.
L’approche fonctionnelle conduite sur le site du Cap Andreas-Kastros ne permet pas de pouvoir envisager l’ensemble des activités pratiquées. Mais grâce à la morphologie très particulière de certains objets comme les hameçons, on peut suggérer au côté d’activités similaires à celles mises en évidences à Khirokitia, la pratique d’activités propres à ce site côtier, comme la pêche. Activités qui contrairement aux activités de tissage ou de couture prennent place à l’extérieur du village. Les modalités d’utilisation de l’outillage osseux seraient alors, en partie, différentes de celles de Khirokitia.
2.4. Fonction de l’outillage Contrairement à l’analyse fonctionnelle entreprise sur le corpus de Khirokitia qui repose sur une approche tracéologique, celle conduite au Cap Andreas-Kastros s’appuie sur des éléments exclusivement morphologiques. À cela plusieurs raisons. Tout d’abord, le matériel osseux du Cap Andreas-Kastros est plus altéré que celui de Khirokitia. Ces endommagements limitent considérablement l’examen des traces macro- et microscopiques d’usure. S’ajoute à cette mauvaise conservation, le fait que ces objets sont conservés au Musée de Nicosie où il n’a pas été possible de conduire un examen microscopique des surfaces faute d’un matériel optique adapté. Ajoutons enfin que certains objets, souvent les mieux conservés, exposés en vitrine n’ont pu être retirés des supports sur lesquels ils étaient minutieusement attachés. Leur examen fonctionnel n’a pu être conduit. Il s’agit donc dans cette partie non pas de raisonner sur des stigmates d’usure mais sur des morphologies qui peuvent, par analogie avec d’autres industries et notamment celle de Khirokitia, nous orienter vers des hypothèses fonctionnelles. Source d’erreurs d’interprétation ou d’imprécisions, ce type d’approche qui prévalait dans les années 1970, apparaît, ici, comme le seul moyen d’aborder la fonction de cet outillage. L’outillage pointu du Cap Andreas-Kastros peut répondre, comme celui de Khirokitia, à différentes activités relatives à la vannerie, au tissage ou participer au travail des peaux. Il en est de même pour les aiguilles à chas. La présence de graines de lin sur le site pourrait suggérer l’exploitation de cette fibre dans la fabrication de tissus. En ce qui concerne les outils tranchants, la morphologie étroite de leur taillant suggère, comme à Khirokitia, des travaux de faible ampleur sur des matériaux de faible dimension. La détermination de la matière travaillée reste néanmoins limitée. Seulement un outil présente des traces de percussion à la base (CAK 558.1) ce qui pourrait indiquer une utilisation sur un matériau résistant comme le bois végétal, par exemple. Le travail du bois pourrait également être envisagé pour l’outil CAK 864.3 fabriqué sur scapula dont la concavité du tranchant suggère un contact avec un matériau étroit et convexe. L’échantillon étant bien trop faible, les interprétations fonctionnelles restent limitées. Les hameçons sont les seuls objets dont la fonction peut être, par analogie aux référentiels ethnographiques, envisagée. S’il semble communément admis que ces objets ont servi d’instruments de pêche, leur variété morphologique suggère différents modes d’attache ou bien différentes techniques de pêche. La présence de cet outillage sur le site de Cap Andreas-Kastros est peu surprenante puisque
3. KHIROKITIA ET CAP ANDREAS-KASTROS CARACTÈRES COMMUNS ET DIFFÉRENCES
:
La sélection des matières premières fait l’objet d’une détermination qui repose, quel que soit le site considéré, sur l’exploitation préférentielle de l’os. L’utilisation des bois de daim est très secondaire sur les deux sites puisqu’elle représente moins de 2 % à Khirokitia et un peu plus de 4 % au Cap Andreas-Kastros. Si l’exploitation des matières premières relève donc de choix similaires, le Cap Andreas-Kastros se distingue par l’exploitation, même si celle-ci reste négligeable (environ 4,5 %), de dents de suidé (fig. 192). La nécessité de se procurer des supports spécifiques sur le plan des formes et des propriétés physiques et mécaniques pour répondre à des besoins fonctionnels précis, pourrait expliquer l’utilisation de cette matière. L’exploitation non négligeable d’os longs d’oiseaux destinés à la fabrication d’éléments tubulaires pourrait également répondre à de telles exigences techniques. Malgré ces particularités, les villages de Khirokitia et du Cap Andreas-Kastros relèvent d’une même tradition fondée sur le travail de l’os. La sélection des matières premières se rapporte également aux mêmes systèmes d’exploitation. Le premier correspond à un approvisionnement externe au village et repose principalement sur la collecte de bois de daim. Le second peut prendre place à l’intérieur ou à proximité du village et succède aux opérations de boucherie, c’est le cas de l’os et peut-être des dents. La sélection des parties anatomiques est également marquée par des choix. Ainsi, on observe une très nette préférence pour les os longs et plus particulièrement pour les métapodes très majoritairement sélectionnés (près de 95 % des os longs identifiés à Khirokitia et 82 % au Cap Andreas-Kastros). Leur morphologie rectiligne ainsi que celle de l’épiphyse distale en font des os tout à fait appropriés à leur transformation. En revanche, l’utilisation des ulnas, tibias et fibulas, représente à peine 5 % des os longs exploités. Quant aux scapulas et côtes, leur utilisation est négligeable (à peine 1 % à Khirokitia).
123
Malgré ces quelques différences relevées sur chacun des sites que l’on pourrait rattacher à des choix culturels et/ou techniques, le système d’exploitation est globalement similaire et régi par des choix pour l’os, le métapode et le daim qui constituent une première originalité des assemblages chypriotes. Enfin, le daim pourrait bénéficier d’un statut particulier puisqu’il constitue avec 70 % des espèces identifiées à Khirokitia et 44 % au Cap Andreas-Kastros, l’espèce la plus exploitée. Les hypothèses avancées relatives aux aspects techniques et symboliques ne permettent pas, dans l’état actuel des données, de pondérer l’importance de cette proportion. Elle semble, néanmoins, refléter une réalité archéologique puisque cette préférence caractérise les deux assemblages tandis que d’autres espèces comme les caprinés et les oiseaux sont également exploités. On pourrait alors interpréter ce choix comme l’expression d’une tradition propre qui caractériserait la production de l’industrie osseuse du Néolithique pré-céramique récent de Chypre.
+++ : très fréquent
++ : fréquent
+ : rare
les éléments tubulaires, sont communs aux deux industries. Notons pour ces derniers que leur proportion est inégale sur chacun des sites. Peu présents à Khirokitia, ils composent, au côté des pointes, l’essentiel du corpus du Cap Andreas-Kastros (14 exemplaires). En revanche, d’autres types comme les objets dentés sont absents de l’assemblage du Cap Andreas-Kastros. La composition de l’industrie sur chacun des sites est donc sur le plan des catégories d’outils relativement similaire, malgré la présence de caractères propres que l’on peut rattacher, du moins pour les hameçons, à des facteurs environnementaux et économiques. Les deux industries présentent également des caractères similaires en ce qui concerne le choix des supports et leur morphologie. Ce sont surtout les segments longitudinaux sans caractère anatomique qui ont été choisis. Les pointes et les outils tranchants fabriqués à partir d’os entier et de segment de métapode qui conserve une partie de l’épiphyse, sont également présents dans les deux corpus. En revanche, les pointes aménagées sur des segments transversaux d’os longs sont absentes au Cap Andreas-Kastros. Pour obtenir ces supports, les procédés et techniques de fabrication sont similaires d’un site à l’autre. Les schémas opératoires identifiés révèlent une nette préférence pour la percussion combinée ou non au sciage et pour l’abrasion. Ils traduisent un investissement technique faible allié à une certaine habileté technique. Le degré de technicité est, en effet, élevé en raison d’une parfaite maîtrise de la percussion posée indirecte et d’une exploitation maximum de la matière première. Le façonnage est également peu investi puisqu’il concerne majoritairement la partie active, le reste de l’outil est peu modifié. Les rares aménagements secondaires localisés sur les parties proximales confirment cette tendance. Les deux assemblages qui reposent sur la production d’objets morphologiquement similaires, présentent donc une homogénéité qui se manifeste aussi bien dans le choix des procédés et des techniques de fabrication utilisées que dans la conception même de l’industrie.
- : absent
Fig. 192 : Exploitation des matières premières à Khirokitia et au Cap Andreas-Kastros. Les industries de Khirokitia et du Cap Andreas-Kastros ont en commun plusieurs types d’outils et d’objets divers (fig. 193). La catégorie des outils pointus domine ces ensembles, elle représente, en effet, près de 96 % à Khirokitia et 93 % au Cap Andreas-Kastros. Toutefois, la composition de cette catégorie diffère d’un site à l’autre. Khirokitia se singularise par une proportion très importante d’aiguilles à chas (42 %) qui constituent, à ma connaissance, le plus riche corpus du monde néolithique. Au Cap Andreas-Kastros, les aiguilles sont plus rares (2 exemplaires). En revanche, l’industrie du Cap Andreas-Kastros se distingue par la présence d’hameçons (type V), absents à Khirokitia. L’environnement maritime du Cap Andreas-Kastros ainsi que l’économie en partie tournée vers l’exploitation du monde marin expliquent très probablement la présence de ces objets. La catégorie des outils tranchants est faiblement représentée dans les deux assemblages. Elle représente 3 % de l’outillage à Khirokitia et 4 % au Cap Andreas-Kastros. En ce qui concerne les objets divers, certains types comme les objets sur andouiller évidé et
En fonction de la conservation des objets, l’approche fonctionnelle conduite sur les deux sites est différente. Fondée sur l’examen des stigmates d’usure macro- et microscopiques la démarche fonctionnelle s’inscrit, à Khirokitia, dans une approche objective. Au Cap Andreas-Kastros, cette approche est subjective, reposant essentiellement sur la morphologie des objets. Les résultats obtenus sur le site de Khirokitia suggèrent qu’une large majorité d’outils, notamment les pointes et les aiguilles, a été utilisée sur des fibres végétales de nature variée. Différentes activités prenant place à l’intérieur du village ont été envisagées comme la couture, la vannerie ou encore le tissage. Une partie de l’outillage pointu du Cap Andreas-Kastros, a pu également participer à ces activités. En revanche, la présence d’hameçons suggère la pratique de la pêche. Si cette hypothèse se vérifiait, une partie de l’outillage du Cap Andreas-Kastros serait alors utilisée à l’extérieur du
124
village et participerait directement à l’acquisition des ressources alimentaires. Ainsi, si l’outillage de Khirokitia semble être essentiellement rattaché à des activités de transformation des matériaux pour la production de
+++ : très fréquent
divers objets d’usage quotidien, celui du Cap AndreasKastros, s’inscrit à la fois dans des activités de transformation et dans des activités d’acquisition. Il serait alors omniprésent dans le système technique du groupe.
++ : fréquent
+ : rare
- : absent
Fig. 193 : Fréquence par site des types d’objets.
125
la séquence. On peut toutefois, souligner, qu’elle est proportionnellement plus importante dans la couche 2 (4,48 %) que dans tous les niveaux du Néolithique précéramique récent (4,24 %). Mais ce développement reste, néanmoins, marginal et n’est pas suffisant pour conclure à un changement chronologique dans la sélection des matières premières. Bien au contraire, celle-ci semble relever d’une véritable tradition du travail de l’os. Il n’y a donc pas d’évolution relative aux choix de la matière première.
CHAPITRE IV - ÉVOLUTION CHRONOLOGIQUE DES INDUSTRIES L’examen chronologique des industries osseuses de Khirokitia et du Cap Andreas-Kastros a pour objectif de mettre en évidence d’éventuels traits d’évolution, au cours de l’occupation des sites, dans la sélection des matières premières, la composition typologique des industries, le choix des techniques de fabrication ou encore dans les fonctions. Les industries étudiées se placent-elles dans une continuité morphologique, technique ou encore fonctionnelle des niveaux anciens du Néolithique pré-céramique récent au Néolithique céramique ? Ou au contraire, voit-on apparaître ou disparaître certains caractères au cours de la séquence ? En d’autres termes, ces assemblages reposent-ils sur une tradition technique marquée ou bien sur une évolution dynamique rythmée par des innovations ?
% 100 80 60 40
1. KHIROKITIA
20
Avant de débuter l’analyse chronologique du matériel osseux de Khirokitia-Vouni, il convient de rappeler la stratigraphie du site (cf. p. 14-15). Le site comprend deux secteurs, est et ouest, dont l’occupation est attribuée au Néolithique pré-céramique récent (cf. fig. 3& fig. 4). Le secteur est représente le village primitif. Sept niveaux architecturaux (sans compter ceux identifiés lors des campagnes de fouille de 2005 et 2006) y ont été reconnus, de G le plus ancien à A. Le secteur ouest correspond à l’expansion du village au-delà du mur d’enceinte (structure 100). Il est donc postérieur au secteur est. Trois principaux niveaux architecturaux, de III à I, y ont été distingués. Ils succèdent au niveau IV utilisé comme zone de rejet lors de l’occupation du secteur est. La séquence du Néolithique céramique correspond à la couche 2, qui couvre à la fois le secteur est et le secteur ouest. Une inégalité dans la répartition de l’industrie par niveau architectural a été observée (cf. p. 18). Les niveaux architecturaux B et II, dont la superficie de la zone fouillée est la plus importante, sont particulièrement riches en matériel osseux. L’examen de ces niveaux a donc été privilégié. Par ailleurs, les niveaux anciens G, F et E qui marquent le début de l’occupation pré-céramique et la couche 2 qui représente l’occupation céramique, ont également été considérés malgré un effectif plus faible.
0
G/F/E
B
II
2
Bois de daim
2,04
0,88
1,32
4,48
Os
97,96
99,12
98,68
95,52
Fig. 194 : Khirokitia-Vouni. Exploitation des matières premières par niveau (n = 1255).
Le daim est l’espèce animale la plus exploitée pour l’industrie puisque près de 70 % des parties anatomiques identifiées ont été attribuées à cet animal (n = 279 sur 400 déterminations). Les caprinés occupent, avec 29 %, une place secondaire (n = 117). Malgré une proportion de daims et de caprinés quasiment identique au niveau III, la prépondérance du daim marque toute la séquence stratigraphique, des niveaux du Néolithique pré-céramique récent à la couche 2 (fig. 195). Pourtant, dans les restes fauniques, on assiste à partir du niveau III, à une chute importante des restes de daims et à une hausse des restes de caprinés (Davis 2003, fig. 6) (fig. 196). La diminution du daim dans les restes fauniques n’a donc aucune incidence sur la sélection des espèces animales pour l’industrie, la matière première restant, semble-til, suffisamment disponible pour répondre aux besoins. Pour expliquer cette préférence marquée pour le daim, deux hypothèses ont été émises sans qu’aucune d’elle ne puisse, pour l’instant, être privilégiée (cf. p. 43). Dans ce contexte, on peut alors simplement rattacher ce choix à l’expression d’une tradition qui caractérise la production osseuse de Khirokitia. Tradition d’autant plus continue que la préférence pour le daim caractérise également l’occupation au Néolithique céramique.
1.1. Les matières premières Avec plus de 98 % des matières premières sélectionnées pour l’industrie, l’os est très largement exploité. Ce choix marque l’ensemble de l’occupation du site, des niveaux anciens du Néolithique précéramique récent (niveaux G, F et E) au Néolithique céramique (couche 2) (fig. 194). L’utilisation des bois de daim est, en revanche, très secondaire tout au long de
126
représentés au début de l’occupation du Néolithique pré-céramique récent (niveaux G-F-E) et dans la couche 2. Si l’ensemble des catégories d’objets est représenté tout au long de la séquence ce qui pourrait témoigner de besoins similaires et peut-être d’activités communes, qu’en est-il des types d’objets qui, en raison de leur variabilité morphologique, pourraient davantage refléter d’éventuels changements chronologiques ? Les types de pointes et de tranchants ont été établis en fonction de la nature de la segmentation appliquée à l’os. Les pointes et les outils tranchants sur segment longitudinal d’os long sans épiphyse (types IV et IX), largement majoritaires dans les niveaux anciens F, E et B, diminuent à partir niveau II jusqu’à la couche 2 (fig. 198). Parallèlement, la proportion des pointes et des outils tranchants sur segment longitudinal d’os long avec épiphyse (types III et VIII), augmente progressivement à partir du niveau B. Les segments transversaux de matière (type II) apparaissent au niveau B et perdurent jusqu’au niveau II. Ajoutons enfin, que les outils sur os entiers ne sont présents que dans les niveaux anciens F et E et que seuls les segments longitudinaux avec ou sans épiphyse, c’est-à-dire les supports les plus fréquents au Néolithique précéramique récent, caractérisent la couche 2. Une continuité entre les deux occupations apparaît donc au travers du choix des supports. En raison de ces différentes évolutions dans le choix des supports pour la fabrication des pointes et des tranchants, on peut également envisager une évolution chronologique des techniques de fabrication, j’y reviendrai. La distinction des types d’aiguilles repose sur la variété morphologique de l’extrémité proximale. Trois types ont été distingués : 1/ le type V.A, aiguille à base ogivale, 2/ le type V.B, aiguille à base convexe, 3/ le type V.C, aiguille à base rectiligne. Seules les aiguilles du type V.C sont présentes dans le niveau ancien E, tandis qu’elles deviennent minoritaires dans les niveaux suivants puis disparaissent dans la couche 2 (fig. 199-200). Dans les niveaux récents, les trois types d’aiguilles sont présents en proportion variable. Le type V.B est majoritaire au niveau B, Le type V.A, dans le niveau II. Au Néolithique céramique, seuls les deux types les plus courants au Néolithique pré-céramique récent, types V.A et V.B, sont présents. En ce qui concerne les objets divers, deux observations peuvent être faites. D’une part, les objets dentés (type XII.A) sont présents dans les niveaux anciens (n = 6) (du niveau F au niveau B) puis disparaissent ensuite (cf. fig. 200). D’autre part, un nouveau type d’objets, le type XI.B : objet sur tibia proximal perforé, apparaît au Néolithique céramique (n = 4). Il est absent des niveaux du Néolithique pré-céramique récent. Sur le plan morphologique ces objets sont suffisamment particuliers pour que l’on puisse les considérer comme caractéristiques de l’occupation du Néolithique céramique de Khirokitia. Ils pourraient plus largement caractériser le Néolithique céramique de Chypre si l’examen d’autres collections venait confirmer leur présence.
% 100 90 80 70 60 50 40 30 20 10 0
E
D
C
B
III
II
I
2
Capriné 33,33 17,24
25
28,79 51,72 29,66 29,63
40
66,67 82,76
75
71,21 48,28 70,34 70,37
60
Daim
Fig. 195 : Khirokitia-Vouni – Sélection des caprinés et des daims par niveau (n = 327).
% 100
90 80 70 60 50 40 30 20 10 0
G/F/E
D
C
B
III
II
I
Capriné
35
30
41
39
60
75
81
Daim
39
44
40
41
23
11
10
Fig. 196 : Khirokitia-Vouni – Fréquence par niveau des os de daim et de capriné dans les restes fauniques (d’après Davis 2003, fig. 6).
1.2. Typologie et technologie Toutes les catégories d’objets sont représentées du niveau G à la couche 2 (fig. 197). Toutefois, leur proportion varie d’un niveau à l’autre. Ainsi, celle des pointes chute au niveau II, tandis que celle des aiguilles augmente significativement de 23 % dans ce même niveau. Dans la couche 2, leur proportion s’équilibre de nouveau. La proportion d’outils tranchants et d’objets divers, minoritaires dans cet assemblage, est également variable. Les premiers sont plus nombreux à partir du niveau II et jusqu’à la couche 2. Les seconds sont bien
127
100
%
80 60 40 20 0
G/F/E
B
II
2
Objet divers
6,06
1,64
0,63
13,79
Outil tranchant
3,03
1,97
5,42
6,9
Aiguille
30,3
35,86
59,17
31,03
Pointe
60,6
60,53
34,79
48,28
Fig. 197 : Khirokitia-Vouni - Distribution des catégories d’objets par niveau (n = 846).
% 100
90 80 70 60 50
Fig. 200 : Khirokitia-Vouni – Évolution chronologique des types d'aiguilles et des types d’objets divers.
40 30 20 10 0
F/E
B
II
2
Seg. longitudinal s ans épiphys e
75
71,01
48,61
33,33
Seg. longitudinal avec épiphys e
0
24,64
45,83
66,67
Seg. trans vers al
0
4,35
5,56
0
Os entier
25
0
0
0
Fig. 198 : Khirokitia-Vouni - Distribution par niveau des supports utilisés dans la fabrication des pointes et des outils tranchants (n = 149).
En ce qui concerne les techniques de débitage, on assiste du niveau B au niveau II, à une légère baisse de l’utilisation de la percussion directe au profit de la percussion indirecte combinée ou non au sciage (fig. 201). Les techniques dites expédientes, faisant intervenir un outillage simple, seraient alors remplacées par des techniques plus élaborées comme la percussion indirecte et/ou le sciage, impliquant un outillage diversifié.
Techniques de débitage % 100 % 100
90
90
80
80
70
70
60
60
50
50
40
40
30
30
20
20
10
10
0
0
F/E
B
II
2
70
54,55
31,86
38,1 19,05
E
B
II
2
Percussion directe
Base rectiligne
100
7,41
5,17
0
Percussion indirecte
10
5,68
13,27
Base convexe
0
37,04
10,34
66,67
Sciage et Percussion
10
29,55
46,9
9,52
Base ogivale
0
55,56
84,48
33,33
Sciage
10
10,23
7,96
33,33
Fig. 199 : Khirokitia-Vouni – Distribution des types d’aiguilles par niveau (n = 89).
Fig. 201 : Khirokitia-Vouni – Distribution des techniques de débitage par niveau (n = 232). 128
Au Néolithique céramique, les techniques utilisées sont similaires, il n’y a donc aucune innovation technique. En revanche, on note une évolution chronologique dans la proportion des techniques utilisées. Ainsi, l’emploi du sciage seul peu fréquent dans les niveaux du Néolithique pré-céramique récent, s’amplifie dans la couche 2 où il est proportionnellement plus élevé (cf. fig. 201). L’emploi de la percussion directe qui, au niveau II, diminue, est de nouveau bien représenté dans la couche 2. Enfin, l’emploi de la percussion indirecte associée au sciage, majoritaire à la fin du Néolithique pré-céramique récent, diminue dans la couche 2. À l’inverse, l’usage de la percussion indirecte seule s’intensifie. Il y aurait alors entre les deux occupations, une pratique plus importante des techniques lentes au degré de technicité faible comme le sciage mais parallèlement une affirmation des savoirfaire techniques du Néolithique pré-céramique récent impliquant l’usage de la percussion indirecte. Les techniques de façonnage évoluent également au cours de l’occupation (fig. 202). Ainsi, l’utilisation du sciage est présente dans les niveaux anciens du Néolithique pré-céramique (G/F/E) puis diminue pour disparaître à partir du niveau II. Quant à la technique du forage, elle est utilisée tout au long de la séquence mais elle est proportionnellement bien plus fréquente au Néolithique céramique. L’abrasion et le raclage sont des techniques utilisées tout au long de la séquence en proportion globalement équivalente. Notons toutefois que l’utilisation combinée de l’abrasion et du raclage n’a pas été identifiée au Néolithique céramique. Malgré une proportion importante au niveau II, l’usage du traitement thermique semble légèrement diminuer entre les niveaux anciens et récents du Néolithique précéramique (fig. 203).
Techniques de façonnage % 100 90 80 70 60 50 40 30 20 10 0 Sciage
G/F/E
B
II
2
5,26
1,97
0
0 29,63
Forage
5,26
3,45
0,62
Abrasion et raclage
15,79
17,24
24,77
0
Raclage
28,95
30,54
21,36
22,22
Abrasion
44,74
46,8
53,25
48,15
Fig. 202 : Khirokitia-Vouni – Distribution des techniques de façonnage par niveau (n = 591).
Traitement thermique % 100
90 80
Ces différents résultats viennent compléter une première étude chronologique conduite sur un échantillon de 250 objets provenant des niveaux III, II et I (Stordeur 1984). Les résultats obtenus mentionnaient alors une évolution sur le plan des techniques qui tendait vers « une simplification des gestes », « une diminution des exigences de qualité » et « une création d’outils vite fabriqués, moyens, pratiques, peu spécialisés » (Ibid., p. 142). En considérant le corpus dont on dispose aujourd’hui, on constate que les supports dont le degré de transformation est de type 2 augmentent progressivement (fig. 204). Parallèlement, la proportion de supports dont le degré de transformation est de 1 ou de 3, diminue. Ajoutons enfin, que les supports très peu transformés (degré de transformation 0) sont plus nombreux dans les niveaux anciens. Toutefois, si l’on considère les techniques de façonnage secondaires comme le sciage et le forage, qui ajoutent au degré d’élaboration de l’outillage, on constate, en effet, qu’elles diminuent ou disparaissent dans les niveaux récents. Au Néolithique céramique, ce sont également les supports assez transformés qui prédominent, et avec eux des exigences de finition plus marquées.
70 60 50 40 30 20 10 0
E/D
C
B
A
III
II
I
2
Non traité
87,22
86,48
77,22
96,3
91,11
67,22
96,11
98,33
Traité
12,78
13,52
22,78
3,7
8,89
32,78
3,89
1,67
Fig. 203 : Khirokitia-Vouni – Distribution du traitement thermique par niveau (n = 540).
129
Degrés de transformation % 100 90 80 70 60 50 40 30 20 10 0
G/F/E
D
C
B
3
38,89
16,28
20
16,28
2
16,67
32,56
30,77
38,76
1
27,78
39,53
47,69
43,41
0
16,67
11,63
1,54
1,55
A
III
II
I
2
5,26
14,06
14,04
8,57
0
42,1
42,19
57,3
62,86
80
52,63
43,75
25,28
25,71
20
0
0
3,37
2,86
0
Fig. 204 : Khirokitia-Vouni – Distribution du degré de transformation des supports par niveau (n = 571).
1.3. Les fonctions
% 100 90
Dans un souci de représentativité, l’analyse chronologique a été réalisée par secteur et non plus par niveau (tabl. 85). La fonction des outils tranchants et des pointes ainsi que le mode d’action de ces dernières, évoluent peu d’un secteur à l’autre. Le mode d’action par percussion posée directe, le plus fréquent, est quantitativement comparable pour le secteur est (n = 16) et pour le secteur ouest (n = 15). Le travail des fibres végétales souples ou rigides, de l’écorce, du bois et du cuir, a été identifié dans les 2 secteurs (fig. 205). En revanche, le travail des peaux fraîches avec des outils tranchants ne concernerait que les niveaux récents (secteur ouest) L’échantillon ne permet pas, cependant, de pouvoir interpréter cette évolution comme le témoin d’un changement d’activités et de besoins. Dans la couche 2, seulement trois outils ont pu être fonctionnellement déterminés, il s’agit de 3 aiguilles utilisées sur des fibres végétales souples.
80 70 60 50 40 30 20 10 0
Mat. Végétale souple
Mat. Végétale rigide
Ecorce
Bois
T ranchant
0
0
0
100
0
Aiguille
75
0
36,36
0
50
Pointe
25
100
63,64
0
50
Cuir
1
% 100
90 80
Secteur est
70
Secteur ouest
60 50
N
%
N
%
Pointe
16
45,71
15
23,08
Aiguille
17
48,57
47
72,31
20
Outil tranchant
2
5,72
3
4,61
10
Total
35
100
65
100
40 30
0
Mat. Végétale souple
Mat. Végétale rigide
Ecorce
Bois
Cuir
Peau fraîche
0
0
0
100
0
100
Aiguille
85,71
0
33,33
0
100
0
Pointe
14,29
100
66,67
0
0
0
Tranchant
Total de l’échantillon
100/100
Tabl. 85 : Khirokitia-Vouni - Distribution des outils fonctionnellement déterminés par secteur.
2
Fig. 205 : Khirokitia-Vouni – Catégories d’outils et matières travaillées. 1 – Secteur est (n = 35) ; 2 – Secteur ouest (n = 65).
130
2. CAP ANDREAS-KASTROS %
Rappelons que six niveaux architecturaux, de I le plus ancien, à VI le plus récent, ont été reconnus sur ce site (cf. p. 19). La distribution de l’industrie par niveau est relativement homogène mais le niveau V est le plus riche. La superficie importante de la zone fouillée explique, sans doute, cette bonne représentation.
100 90 80 70 60 50 40 30 20
2.1. Les matières premières
10 0
L’os est la matière première la plus exploitée tout au long de la séquence (fig. 206). Sans pour autant exclure l’hypothèse d’une utilisation de bois de daim dans les niveaux anciens, on remarque que leur exploitation ne débute qu’à partir des niveaux récents (niveau V). L’exploitation des dents est discontinue et peu représentative d’une évolution chronologique.
II
III
IV
V
Bois
0
0
0
8,92
VI 4
Dent
5,26
0
8,33
7,14
0
Os
94,74
100
91,67
83,93
96
Fig. 206 : Cap Andreas-Kastros – Exploitation des matières premières par niveau (n = 122).
Le daim est, avec un peu plus de 44 %, toujours l’espèce la plus exploitée pour l’industrie. Le nombre de supports attribués aux oiseaux est également important (n = 14, soit 41 % des déterminations). Leur proportion varie d’un niveau à l’autre (fig. 207). Aucun os de daim n’a, par exemple, été identifié au niveau III, mais cette absence qui pourrait relever d’une réalité archéologique ou d’un effet de détermination, ne peut être pour l’instant précisément interprétée. On observe par ailleurs que le nombre de supports attribués aux daims et aux oiseaux est assez équivalent d’un niveau à l’autre, il ne semble donc pas y avoir de réel changement chronologique dans la sélection des espèces pour l’industrie au cours de l’occupation du village. En revanche, une évolution chronologique, inverse de celle observée à Khirokitia, marque les restes fauniques. En effet, des niveaux anciens aux niveaux récents, la proportion des restes de daim augmente régulièrement pour atteindre près de 50 % au niveau VI. Parallèlement la proportion des caprinés chute de 60 % à 20 % (Davis in Le Brun et al. 1987) (fig. 208). La tendance qui s’exprime au travers de l’industrie osseuse ne peut être appréciée pour cette dernière espèce puisqu’un seul objet fabriqué sur un os de capriné a été identifié (cf. tabl. 84). Rappelons, en effet, que l’échantillon d’espèces déterminées est faible (34 déterminations, soit 25,37 % de l’ensemble de l’industrie) et par conséquent peu significatif des choix opérés lors de la sélection des espèces.
N 16 14 12 10 8 6 4 2 0
II
III
IV
V
VI
Oiseau
2
1
2
7
2
Daim
2
0
1
8
2
Fig. 207 : Cap Andreas-Kastros – Sélection des oiseaux et des daims par niveau (n = 27).
% 90 80 70 60 50 40 30
2.2. Typologie et technologie
20 10
Plus diversifiée que l’industrie de Khirokitia en raison de la présence d’hameçons, l’industrie du Cap Andreas-Kastros est également plus hétérogène sur le plan chronologique (fig. 209). Les pointes et les objets divers sont présents dans tous les niveaux. Sans pour autant conclure à une innovation au sein de la composition de l’assemblage en raison du faible effectif, on peut, néanmoins, souligner l’apparition respective,
0
II
III
IV
V
VI
Capriné
61
45
20
25
18
Daim
20
30
34
45
50
Fig. 208 : Cap Andreas-Kastros – Fréquence par niveau des os de daim et de capriné dans les restes fauniques (d’après Davis in Le Brun 1987, fig. 21 : 306).
131
aux niveaux V et VI, des outils tranchants et des aiguilles. Quant à la distribution chronologique des hameçons, elle est discontinue et peu représentative.
Techniques de débitage % 100 90
Aucun trait significatif dans l’évolution du choix des supports pour la fabrication des pointes et des outils tranchants n’a été mis en évidence en raison principalement du faible effectif et de la concentration d’objets dans le niveau V. Toutefois, la présence de supports sur os entier dans les niveaux anciens II et IV pourrait apporter certains éléments de réponse quant à la contemporanéité des occupations du Cap AndreasKastros et de Khirokitia. En effet, ces supports sont, à Khirokitia, caractéristiques des niveaux anciens, l’occupation du Cap Andreas-Kastros et plus précisément celle des niveaux anciens, pourrait alors être contemporaine de l’occupation ancienne de Khirokitia (secteur est).
80 70 60 50 40 30 20 10 0
II
III
IV
V
VI
50
100
40
57,69
14,28
Percussion indirecte
12,5
0
20
0
0
Sciage et percussion
37,5
0
40
26,92
57,14
0
0
0
15,38
28,57
Percussion directe
Sciage
Chaque technique de fabrication révèle une certaine variabilité chronologique. On remarque, par exemple, que le sciage et l’abrasion associée au raclage sont des pratiques qui n’apparaissent qu’à partir du niveau V (fig. 210-211). Comme à Khirokitia, une tendance à une plus grande utilisation de la percussion indirecte associée au sciage s’observe des niveaux II au niveau VI. De même, le forage est comme à Khirokitia plutôt caractéristique des niveaux anciens. Ces caractères pourraient conforter l’hypothèse d’une contemporanéité des niveaux anciens du Cap Andreas-Kastros avec le secteur est de Khirokitia. En ce qui concerne le degré de transformation des supports, on observe que la proportion des degrés 0 et 1 est relativement homogène d’un niveau à l’autre, excepté au niveau III où le degré 0 est absent (fig. 212). En revanche, celle des degrés 2 et 3 évolue davantage. Ainsi, la proportion de support au degré de transformation 2 baisse du niveau II au niveau VI, tandis que celle des supports au degré de transformation 3 progresse significativement, passant de 6,25 % au niveau II à 44,44 % au niveau VI.
%
Fig. 210 : Cap Andreas-Kastros – Distribution des techniques de débitage par niveau (n = 48).
Techniques de façonnage
% 100
80 60 40 20 0 Forage
II
III
IV
V
VI
14,29
0
12,5
6,67
5,88
0
0
0
6,67
5,88
Abrasion
85,71
85,71
75
83,33
88,24
Raclage
0
14,29
12,5
3,33
0
Abrasion et raclage
Fig. 211 : Cap Andreas-Kastros – Distribution des techniques de façonnage par niveau (n = 69).
100 90
Degrés de transformation
80 70
% 100
60 50
80 60
40 30 20 10 0
40 20 0
II
III
IV
V
VI
Elément tubulaire
20
16,67
22,22
20
11,11
Outil tranchant
0
0
0
11,43
0
Aiguille
0
0
0
0
11,11
Hameçon
0
33,33
0
5,71
16,67
Pointe
80
50
77,78
62,86
61,11
3
II
III
IV
V
VI
6,25
57,14
20
26,19
44,44
2
25
0
10
16,67
11,11
1
56,25
42,86
50
47,62
33,33
0
12,5
0
20
9,52
11,11
Fig. 212 : Cap Andreas-Kastros – Distribution du degré de transformation des supports par niveau (n = 103).
Fig. 209 : Cap Andreas-Kastros – Distribution des catégories d’objets identifiées par niveau (n = 88). 132
anciens du Cap Andreas-Kastros avec l’occupation du secteur est de Khirokitia, soit l’occupation la plus ancienne du village. Ainsi, l’on pourrait suggérer que la période ancienne du Néolithique pré-céramique récent se caractérise par l’utilisation de supports peu élaborés, rapidement obtenus. Une plus grande élaboration des supports s’exprimerait au cours de l’occupation récente du Néolithique pré-céramique et jusqu’au Néolithique céramique. Cette définition se renforce lorsque l’on examine les pratiques techniques. On assiste, en effet, des niveaux anciens aux niveaux récents du Néolithique précéramique de Khirokitia, à une modification de celles-ci impliquant un degré de technicité plus élevé et un changement d’instrumentation. Dans les niveaux anciens, la percussion directe impliquant l’usage de simples percuteurs en pierre, domine. Dans les niveaux récents, c’est la percussion indirecte associée ou non au sciage qui est préférée, l’outillage lithique est alors, en partie, mis à contribution. Au Néolithique céramique, les mêmes techniques de fabrication que celles reconnues au Néolithique pré-céramique récent, ont été identifiées (fig. 213). Toutefois, quelques changements qui pourraient, s’ils se généralisaient, caractériser la production osseuse du Néolithique céramique de l’île, ont été relevés : le sciage et l’usage du forage sont, par exemple, proportionnellement plus fréquents que dans les niveaux attribués au Néolithique pré-céramique récent.
3. CONCLUSION Au terme de cette analyse chronologique, plusieurs points peuvent être rappelés. Tout d’abord, l’exploitation des matières premières et des espèces animales est homogène sur le plan chronologique. Une préférence pour l’os se manifeste très clairement tout au long de l’occupation des sites de Khirokitia et du Cap AndreasKastros. Plus précisément ce sont les os longs de daim et notamment les métapodes qui sont largement exploités au détriment des bois ou des dents qui pour ces dernières sont seulement utilisées au Cap Andreas-Kastros. Au Néolithique céramique, sur le site de Khirokitia, le travail de l’os reste privilégié et le daim majoritairement exploité (fig. 213). Aucun changement chronologique majeur dans la sélection de la faune pour l’industrie n’apparaît. Au contraire, il s’agit d’une continuité que l’on pourrait interpréter comme l’expression d’une tradition technique. L’évolution chronologique est plus sensible tant au niveau des types d’objets que des pratiques techniques. Ainsi, en ce qui concerne les types d’objets, on assiste à une évolution dynamique des niveaux anciens aux niveaux récents du Néolithique pré-céramique de Khirokitia et du Cap Andreas-Kastros. Certains types comme les aiguilles à base rectiligne (type V.C) sont majoritaires dans les niveaux anciens de Khirokitia puis deviennent minoritaires au profit d’autres types d’aiguilles (types V.A et V.B). Les objets dentés (type XII.A) ne sont présents que dans les niveaux anciens de Khirokitia. Le Néolithique céramique de Khirokitia se caractérise également par la présence, au côté d’un fonds commun d’objets : pointes, aiguilles et tranchants, de nouveaux types comme les objets sur tibia proximal perforé (type XI.B) qui sont absents des niveaux du Néolithique pré-céramique récent de Khirokitia et du Cap Andreas-Kastros.
Si le Néolithique chypriote est marqué par quelques changements techniques et innovations typologiques, il existe entre le Néolithique pré-céramique récent et le Néolithique céramique une continuité indiscutable d’autant plus sensible qu’environ 1 000 ans séparent ces deux occupations. Dans d’autres domaines de la culture matérielle, de l’architecture ou encore de l’économie, cette continuité a déjà été observée (Dikaios 1961 ; Watkins 1971 ; Peltenburg 1978, 1979, 1982 ; Legge 1982 ; Karageorghis 1990 ; Le Brun 1996 b, 2000). Dans ce contexte, on peut légitimement s’interroger sur les fondements de cette continuité qui, pour l’industrie osseuse, semble vraisemblablement répondre à une tradition technique. Deux hypothèses ont été proposées pour expliquer l’apparition du Néolithique céramique à Chypre : 1/ la communauté céramique serait le résultat d’une seconde colonisation à partir du continent ; 2/ elle résulterait plutôt d’une évolution locale dont nous n’avons pour l’instant aucun témoignage (Watkins 1973 ; Todd 1985 ; Knapp et al. 1994). Cette étude apporte quelques éléments de réponse. En raison de la continuité technique mise en évidence entre ces deux communautés au côté de changements et d’innovations morphologiques et techniques, la seconde hypothèse serait à privilégier (Legrand à paraître).
Les niveaux anciens du Néolithique pré-céramique de Khirokitia se caractérisent par un outillage, pointes et tranchants, surtout fabriqué sur des segments longitudinaux sans épiphyse et dans une moindre mesure sur des os entiers (fig. 213). Cette tendance s’inverse ensuite puisque dans les niveaux plus récents, les segments longitudinaux avec épiphyse sont majoritaires et les supports sur os entier disparaissent. Au Cap Andreas-Kastros les supports sur os entiers caractérisent également principalement les niveaux anciens. L’examen chronologique des techniques de façonnage et plus particulièrement de l’usage du forage révèle une certaine similitude entre les niveaux anciens du Cap AndreasKastros et ceux de Khirokitia. Ces caractères pourraient démontrer la possible contemporanéité des niveaux
133
Fig. 213 : Évolution chronologique des principaux caractères des assemblages osseux chypriotes.
134
caractérise, en revanche, les assemblages PPNB ancien/moyen d’Anatolie du Sud-Est (Cafer Höyük et Çayönü) et ceux du Néolithique ancien d’Anatolie du Sud-Ouest comme Hacilar. Certains types d’objets sont également particulièrement significatifs sur le plan culturel. Parmi eux, les objets dentés caractéristiques du site de Mureybet (PPNAPPNB ancien – Levant Nord) (Stordeur 1974). On les retrouve ensuite, avec quelques variantes, au PPNB récent dans le Levant Sud (Ramad) (de Contenson 2000) et dans le Zagros (Jarmo) (Braidwood et al. 1983). Les crochets, qui se distinguent des hameçons par une taille plus importante, par une perforation et par une hampe incisée (Sidéra 1998, p. 221), sont également considérés comme de bons marqueurs culturels pour le PPNB ancien et moyen d’Anatolie du Sud-Est (Cafer et Çayönü) (Redman 1973 ; Stordeur 1988 a) même si quelques exemples ont été repérés au Levant Nord (Dja’de – PPNB ancien ; Halula - PPNB moyen/récent ; Abu Hureyra – PPNB moyen/récent) et au Levant Sud (Nehal Hemar – PPNB moyen/récent) (Moore et al. 1975 ; Stordeur 1996 ; Sidéra 1998 ; Coqueugniot 2000). Leur présence est attestée en Anatolie, jusqu’au Néolithique ancien sur les sites de Ilipinar et Hacilar (Mellaart 1964, 1967, 1970 ; Marinelli 1995). Enfin, les cuillers présentes dès le Natoufien (Stordeur 1988 b ; Schroeder 1991) puis au PPNA (Jéricho – Levant Sud) (Marshall 1982 ; Le Dosseur 2006, p. 555), caractérisent surtout les assemblages PPNB récent d’Anatolie du Sud (Çatal Hüyük, Mersin et Hayaz Höyük) et ceux du Néolithique ancien d’Anatolie du Nord (Pendik, Ilipinar) (Garstang 1953 ; Mellaart 1964, 1970 ; Özdo÷an 1983 ; Clason 1985 ; Marinelli 1995). Les techniques de fabrication apparaissent également comme de bons marqueurs de diffusion culturelle. Ainsi, la technique de perforation par rainurage longitudinal qui caractérise les aiguilles à chas de Mureybet (Stordeur 1978 a) et qui se retrouve dans cette même région du Levant Nord au PPNB moyen (Halula), se diffuse en Anatolie du Sud-Est au PPNB ancien/moyen (Cafer Höyük et Çayönü) et au Levant Central au PPNB récent (Aswad) (Stordeur 1988 a 1995 a, 1996). Notons qu’au Levant Sud sur les sites de Motza (fin du PPNB ancien/début du PPNB moyen) et de Nahal Hemar (PPNB moyen/récent), ce procédé a été identifié sur des outils plats (Le Dosseur, p. 374 et 457). Enfin, pour terminer sur le registre des techniques, le traitement thermique caractérise les séries néolithiques du Levant depuis le Natoufien (Stordeur 1988 b, 1991, 1996). Reconnu aussi dans d’autres contextes géographiques et culturels, du PPNB récent d’Anatolie au Chasséen d’Europe continentale en passant par le Néolithique ancien balkanique et méditerranéen, le traitement thermique constitue un marqueur d’identité culturelle particulièrement pertinent à considérer (Sénépart 1991 ; Sidéra 2001).
CHAPITRE V - CHYPRE ET LE CONTINENT : TRADITION CULTURELLE OU ORIGINALITÉ ? L’objectif des premières études conduites sur le matériel osseux de Khirokitia était de mettre en évidence des similitudes avec les industries du ProcheOrient afin d’apporter des éléments de réponse sur l’origine de la Culture de Khirokitia. En raison des récentes découvertes qui ont clarifié les débuts du Néolithique pré-céramique sur l’île, cette question se pose, aujourd’hui, différemment. En effet, la culture de Khirokitia apparaît désormais comme le résultat d’un développement interne, à partir d’acquis procheorientaux, commencé au IXe millénaire sur les sites de Parekklisha-Shillourokambos, Kissonerga-Mylouthkia 1 et Akanthou- Arkosyko. Sachant que les relations entre l’île et le continent sont encore bien établies au début du Néolithique pré-céramique, le lien entre les industries insulaires et celles du continent serait alors davantage à chercher dans les assemblages des sites datés de cette phase. Pour l’instant, ces industries sont en cours d’étude ou encore non étudiées mais il semblerait que certaines techniques de fabrication identifiées dans la Vallée de l’Euphrate, aient été repérées dans l’outillage osseux de Shillourokambos (Stordeur 2003, p. 362). Toute la question est donc de savoir si ces traditions techniques ont ensuite perduré dans les industries des sites de la phase récente du Néolithique pré-céramique comme Khirokitia et Cap Andreas-Kastros, malgré l’absence de contact régulier avec le continent (Le Brun 1986, 1989 b). Rappelons, en effet, que dès la phase moyenne de Shillourokambos, les affinités proche-orientales se perdent (cf. p. 9). Pour répondre à cette problématique, il convient dans un premier temps de faire un point bibliographique sur les principales caractéristiques morphologiques, techniques et fonctionnelles des industries osseuses du Levant et d’Anatolie depuis le PPNB ancien au Néolithique ancien, pour tenter ensuite d’inscrire les industries chypriotes étudiées dans une ambiance typologique et technologique plus générale (fig. 214). Tenter de replacer les industries osseuses dans un contexte chrono-culturel plus large pour mettre en évidence une continuité ou au contraire une rupture entre les cultures n’est pas une problématique novatrice. Les chercheurs qui se sont engagés dans cette voie, ont établi un certain nombre de critères culturels qui leur ont permis de dégager pour les cultures néolithiques du Proche-Orient et d’Europe orientale, des caractères persistants ou originaux (Stordeur 1979 b, 1980, 1981, 1988 a, 2003 ; Sidéra 1998, 2001 a, 2002, 2005). Quelques exemples de ces critères culturels morphologiques et techniques sont ici cités. La très forte exploitation de l’os au détriment des autres matières osseuses comme le bois de cervidé notamment, est un premier caractère qui marque les industries du Levant Nord et Sud depuis le PPNB ancien au PPNB récent (Stordeur 1988 a ; Le Dosseur 2006). L’utilisation plus importante du bois de cervidé
135
Fig. 214 : Carte des sites du Proche-Orient ayant livré une industrie osseuse.
Ces critères culturels à partir desquels les industries de Khirokitia et du Cap Andreas-Kastros vont être envisagées, constituent les premiers éléments de définition du techno-complexe proche-oriental (Sidéra 2005). Il s’agira donc d’une part, de mettre en évidence l’existence de caractères de tradition proche-orientale dans les industries étudiées et d’autre part, de chercher les éléments originaux qui conforteraient l’hypothèse selon laquelle la Culture de Khirokitia s’est développée dans un certain isolement sans apport extérieur. Les assemblages osseux de Khirokitia et du Cap Andreas-Kastros reposent sur un même système d’exploitation des matières premières, régi par des choix marqués pour l’os, le métapode et le daim. Ces choix qui perdurent tout au long de l’occupation du Néolithique pré-céramique récent constituent une première originalité chypriote. En raison de la très large exploitation de l’os qui caractérise aussi les assemblages du PPNB levantin, les industries chypriotes comme celles du Levant pourraient appartenir à une même tradition de fonctionnement économique et social. Cette tradition pourrait également marquer la sélection des parties anatomiques. En effet, comme à Chypre, les industries du Levant Nord et Sud du PPNA au PPNB moyen et récent, se caractérisent par une sélection importante des métapodes (Le Dosseur 2006, p. 607-609). En revanche, ces industries se distinguent de celles d’Anatolie du Sud où l’outillage sur tibias est bien attesté au PPNB récent (Çatal Höyük et Mersin) (Mellaart 1964, 1967 ; Garstang 1953). Cette tendance marque également les industries du
Néolithique ancien d’Anatolie du Nord comme Ilipinar (Marinelli 1995) et des Balkans (Sidéra 1998). Les pointes sont majoritaires dans les industries chypriotes et plus particulièrement celles fabriquées à partir de segments longitudinaux de diaphyse sans épiphyse. C’est également ce type de segment qui a été privilégié pour la fabrication des outils tranchants, au côté des segments longitudinaux de métapode conservant une partie de l’épiphyse. Les aiguilles à chas constituent le second type d’outil le mieux représenté et notamment à Khirokitia où leur proportion atteint près de 43% de l’outillage pointu. Cette proportion ne trouve aucun équivalent dans les assemblages néolithiques d’Anatolie et du Levant malgré quelques exemplaires (Mellaart 1964, 1967 ; Redman 1973 ; Stordeur 1988 a). Elle constitue donc une autre originalité de la production osseuse de Khirokitia. En outre, les aiguilles retrouvées sur les sites du Levant Nord se placent parfois dans une tradition technique particulièrement significative sur le plan culturel. En effet, elles peuvent être rattachées à un même type, celui des aiguilles de Mureybet dont le chas est obtenu par rainurage longitudinal (Stordeur 1978 a) (cf. supra). À l’exception d’une seule aiguille, retrouvée dans les niveaux anciens de Khirokitia, dont le chas a été réalisé selon cette même technique, le forage s’effectue, sur les sites chypriotes, par rotation alternative à la main ou au foret. Comment interpréter la présence, de cet objet unique ? Peut-on la considérer comme la preuve, même si elle reste ténue, de l’existence de contacts entre Chypre et le continent, d’une persistance des traditions techniques
136
Le Dosseur 2006). L’outillage sur os entier, sur tibia brisé transversalement par percussion ou encore sur côte fendue longitudinalement, complète le registre des techniques de débitage observées sur le continent. L’abrasion est la principale technique de façonnage employée sur les sites chypriotes étudiés. Il s’agit essentiellement d’un façonnage d’appoint qui consiste à mettre en forme la partie distale des pointes et des outils tranchants. Sur le continent, le raclage semble au contraire avoir été privilégié (Stordeur 1984, p. 137). Les communautés insulaires ont donc conservé les principales techniques de fabrication : percussion, sciage, abrasion, raclage, mais en ont privilégié certaines comme la percussion et l’abrasion, mettant ainsi en place de nouveaux savoir-faire. Ajoutons que l’utilisation préférentielle de ces techniques est observée dès les niveaux anciens des sites étudiés mais leur développement est progressif. L’usage de la percussion indirecte associée ou non au sciage progresse de 10 % à 47 % des niveaux anciens aux niveaux récents du Néolithique pré-céramique de Khirokitia. Autre technique identifiée dans les assemblages chypriotes et également pratiquée sur le continent : le traitement thermique. Environ, 3 % de l’industrie de Khirokitia a été intentionnellement chauffée (seules les pièces de coloris : brun foncé, noir, gris, qui démontrent clairement l’usage de la chauffe, ont été considérées dans ce décompte). Les indices d’un probable traitement thermique sont rares au Cap Andreas-Kastros (3 exemplaires).
levantines ou bien s’agit-il d’une tentative à l’échelle individuelle, de tester d’autres techniques ou de réinventer des techniques anciennes ? La découverte de cette aiguille dans les niveaux anciens de Khirokitia conforterait plutôt les premières hypothèses. Au côté de cet outillage plutôt classique, on note la présence d’objets divers. À Chypre, quelques objets dentés ont été retrouvés dans les niveaux anciens de Khirokitia. Ils diffèrent de ceux retrouvés à Mureybet par la nature du support (les objets de Mureybet sont fabriqués sur des côtes fendues longitudinalement) et par l’absence de cupule (Stordeur 1974, p. 441). À Khirokitia, ces objets sont fabriqués sur des os longs et présentent le plus souvent des dents non pas frontales mais latérales, c’est-à-dire perpendiculaires aux fibres. Les éléments tubulaires sont aussi particulièrement bien représentés dans les industries insulaires, et notamment au Cap Andreas-Kastros. Tout comme les objets dentés, les éléments tubulaires constituent des éléments caractéristiques des industries continentales. On les rencontre dans différents contextes chrono-culturels au Levant Nord (par exemple Mureybet – PPNA/PPNB ancien, Halula – PPNB moyen/récent, Qdeir – Néolithique ancien), au Levant Sud (Aswad IB-II – PPNB ancien/moyen) (Aurenche et Cauvin 1982 ; Stordeur 1978 a, 1982, 1995 a, 1996), dans le Zagros (Ganj Dareh – PPNB ancien ; Ali Kosh – PPNB récent, Jarmo – PPNB récent) (Hole et al. 1969 ; Braidwood et al. 1983 ; Stordeur 1994) et en Anatolie (par exemple Cafer Höyük – PPNB ancien/moyen ; Ilipinar – Néolithique ancien) (Stordeur 1988 a ; Marinelli 1995). Parmi l’éventail de types et de morphologies rencontrés sur les sites du continent, dont certains exemples viennent d’être exposés, seuls quelques objets ont été identifiés sur les sites chypriotes : les pointes, les aiguilles, les tranchants, les objets dentés, les éléments tubulaires ou encore les hameçons. Il s’agit donc là d’un ensemble restreint au sein duquel deux types d’outils sont particulièrement développés : les pointes et les aiguilles. En revanche, d’autres objets comme les pointes et outils tranchants sur tibias, les crochets ou encore les cuillers, présents au Levant même s’ils restent peu fréquents, sont absents des assemblages insulaires étudiés. Les industries insulaires se démarquent une nouvelle fois des assemblages proche-orientaux et apparaissent donc comme tout à fait particuliers.
Enfin, en ce qui concerne la fonction de l’outillage, on remarque qu’il s’agit, à Chypre, d’un outillage essentiellement domestique utilisé dans le cadre de la maison. C’est également ce schéma qui semble caractériser la distribution spatiale du matériel osseux du Cap Andreas-Kastros (Le Brun 1981, p. 66). Quels que soient la catégorie d’outils – pointe, aiguille ou outil tranchant – la morphométrie des parties actives et le mode d’action, le travail des matières végétales est majoritaire. Les indices tracéologiques en faveur du travail des matières animales sont plus rares. La relative diversité des usures observées montre d’une part que la nature des matières végétales utilisées était variable et d’autre part, que leur traitement était différent répondant ainsi très certainement à des besoins divers : fabrication de paniers, de tissus, de nattes, d’objets en bois et en écorce, de vêtements, etc. Aussi, les différentes techniques de transformation des matières végétales étaient-elles connues et largement mises en œuvre et les savoir-faire relatifs à l’exploitation de ces fibres, bien maîtrisés. Les usures distales et proximales parfois très développées de certaines pointes entraînant souvent une déformation très avancée des extrémités, celles rencontrées sur l’apex et sur le chas des aiguilles, ainsi que les endommagements parfois importants de certains taillants, suggèrent une utilisation jusqu’à une exhaustion totale. La rareté des indices de raffûtage confirme cette hypothèse. Les outils sont rejetés vraisemblablement dans des zones plus ou moins éloignées de la maison ou
Les techniques de débitage utilisées dans la fabrication de l’outillage chypriote sont similaires à celles identifiées sur les sites du continent. À Chypre, la percussion indirecte associée ou non au sciage est principalement employée quelle que soit la catégorie d’outils, pointes ou outils tranchants. Sur le continent, le sciage et/ou la percussion indirecte sont mis en œuvre pour l’obtention de supports longitudinaux à partir d’os longs conservant une partie d’épiphyse (par exemple, Voigt 1983 ; Braidwood et al. 1983 ; Garstang 1953 ; Hole et al. 1969 ; Le Dosseur 2006). De simples esquilles servent également de supports pour le façonnage des pointes (Hole et al. 1969 ; Lechevallier 1978 ; Marinelli 1995 ;
137
d’un registre de formes et de techniques identifiées dans les industries du Levant, du Zagros et d’Anatolie, plusieurs éléments parmi lesquels certains sont particulièrement significatifs sur le plan culturel – objets dentés, éléments tubulaires, perforation par rainurage longitudinal, traitement thermique, etc. (cf. supra). Si certains d’entre eux perdurent tout au long de l’occupation au Néolithique pré-céramique récent sur les sites de Khirokitia et du Cap Andreas-Kastros, d’autres, en revanche, disparaissent rapidement dès les niveaux anciens de Khirokitia. Parallèlement, on assiste au développement et à la systématisation de comportements techniques – fabrication des pointes et des aiguilles et usage de la percussion, de l’abrasion et de la perforation par rotation alternative – qui participent à la caractérisation des productions insulaires. Un filtrage de l’outillage et des techniques d’origine proche-orientale semble se mettre en place rapidement et pourrait confirmer l’hypothèse selon laquelle les communautés insulaires se sont développées dans un certain isolement sans apport extérieur régulier. La rupture avec l’identité continentale se serait opérée avant l’essor de la Culture de Khirokitia, au cours de l’évolution du Néolithique de l’île. L’industrie osseuse de la Culture de Khirokitia serait alors le résultat d’une évolution locale et participerait ainsi à l’émergence d’une nouvelle identité culturelle dont l’originalité, déjà observée dans d’autres domaines de la culture matérielle (Le Brun 1986, 1989 b, 2001 ; Astruc 2002), se confirme par le biais de cette étude.
bien à l’extérieur du village. Au côté de cet outillage domestique utilisé au sein même du village et qui participe à la transformation de matières premières locales, l’outillage du Cap Andreas-Kastros se distingue par la présence d’hameçons qui participent à des activités externes au village. Ainsi, l’outillage du Cap AndreasKastros reflète davantage que celui de Khirokitia, les conditions d’exploitation du milieu naturel. Les comparaisons fonctionnelles avec les industries du continent sont limitées. En effet, les études tracéologiques restent rares malgré certains travaux d’envergure conduit sur des ensembles (Campana 1989 ; Stordeur et Christidou sous presse) ou sur des types d’objets spécifiques (Campana 1979 ; Stordeur et Anderson-Gerfaud 1985). Par ailleurs, les interprétations fonctionnelles reposent encore bien souvent sur des données purement morphologiques. Néanmoins, il ressort de ces analyses que les activités liées au travail des matières animales ou des fibres végétales, étaient largement pratiquées par les communautés néolithiques (Voigt 1983 ; Campana 1989 ; Stordeur et AndersonGerfaud 1985 ; Stordeur et Christidou sous presse). Les résultats obtenus sur l’échantillon de Khirokitia confirment ces interprétations mais démontrent que le travail des matières végétales tenait une place particulièrement importante dans le système technique. La comparaison des assemblages chypriotes avec ceux du continent, permet d’apporter des éléments de réponse sur les mécanismes de formation des industries chypriotes. Il est indéniable que ces communautés ont puisé, à partir
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principalement, quels que soient la morphométrie de la partie active et le mode d’action, aux étapes de transformation des matières végétales pour la production d’objets divers : paniers, tissus, nattes, etc., dans le cadre de la maison. La variété des usures microscopiques identifiées sur l’outillage de Khirokitia traduit à la fois la très large gamme de matières végétales utilisées parmi lesquelles certaines ont pu être précisément déterminées comme l’écorce ou le bois sec, et une maîtrise évidente des techniques de transformation de ces matériaux. La place de ces outils dans la chaîne opératoire de transformation reste, néanmoins, difficile à préciser en raison de la variété des étapes de transformation. C’est également ce schéma qui semblerait caractériser l’outillage osseux du Cap Andreas-Kastros. Toutefois, la présence d’hameçons très probablement destinés à l’exploitation des ressources marines, montre que l’outillage osseux jouait, sur ce site, un double rôle d’acquisition et de transformation des ressources. Ainsi, à partir d’éléments de tradition proche-orientale, les industries osseuses de Khirokitia et du Cap AndreasKastros peuvent être définies par l’émergence de concepts techno-fonctionnels originaux qui participent à la formation d’une nouvelle identité culturelle. C’est donc au cours de l’évolution du Néolithique de l’île et probablement sur les sites de la phase ancienne du Néolithique pré-céramique, que la rupture avec le continent s’est opérée.
CONCLUSION En choisissant de travailler sur les industries osseuses du Néolithique pré-céramique récent de Chypre, mon premier objectif était de commencer à combler une lacune importante de la documentation archéologique relative à la culture matérielle. En effet, aucune approche thématique et synthétique de ces industries n’avait encore été réalisée. Par ailleurs, il s’agissait d’étudier des communautés agro-pastorales sédentaires en contexte insulaire qui sans contact régulier avec le continent, ont développé des caractères originaux (Le Brun 1984 a, 1989 c, 1994 a ; Astruc 2002). Il convenait donc de mesurer l’impact de l’isolement de Chypre sur les assemblages osseux et d’en dégager l’originalité. Deux sites de référence pour la phase récente du Néolithique pré-céramique de Chypre, Khirokitia et Cap AndreasKastros, ont été sélectionnés. Au total, 2451 outils, objets, produits de débitage et ébauches, ont été analysés selon une approche intégrée, du choix de la matière première à l’abandon des pièces. Les résultats montrent d’une part, l’existence de caractères morphologiques, techniques et fonctionnels originaux qui définissent l’industrie osseuse du Néolithique de Chypre et d’autre part, une perte progressive des traditions culturelles d’origine continentales tandis que s’affirme une identité nouvelle et originale en Méditerranée orientale. Avec l’exploitation majoritaire de l’os, le système d’exploitation des matières premières de Khirokitia comme du Cap Andreas-Kastros, reste solidement enraciné dans les traditions de fonctionnement économique et social du continent. Toutefois, l’exploitation importante des métapodes et des daims constitue un caractère original proprement chypriote. Cette originalité marque également les types d’objets et les techniques de fabrication. Certains objets identifiés sur le continent et particulièrement significatifs sur le plan culturel comme les objets dentés disparaissent rapidement, tandis que d’autres plus communs se développent. Ainsi, de l’éventail varié des morphologies rencontrées sur le continent, les communautés insulaires ont surtout privilégié les pointes et les aiguilles. La proportion de ces dernières (près de 43 %) sur le site de Khirokitia est tout à fait exceptionnelle et constitue une originalité chypriote. Concernant les techniques de fabrication, ce schéma se répète. Les techniques anciennes comme celle du rainurage longitudinal pour la perforation des aiguilles disparaissent dès les niveaux anciens de Khirokitia et l’on voit se développer l’usage de la percussion posée indirecte associée ou non au sciage et de l’abrasion pour la fabrication et le façonnage des pointes et des outils tranchants. Les savoir-faire anciens se perdent tandis que de nouveaux se mettent progressivement en place constituant ainsi une nouvelle originalité des assemblages chypriotes. Il s’agit donc d’un outillage relativement homogène sur le plan des morphologies et des techniques qui participe
Les résultats de cette étude permettent également d’apporter des éléments novateurs sur l’évolution chronologique du Néolithique à Chypre. L’examen du matériel osseux de Khirokitia révèle, en effet, de nombreuses similitudes entre l’occupation du Néolithique pré-céramique récent et celle du Néolithique céramique, pourtant séparées par un hiatus de 1000 ans pendant lequel l’île semble être inoccupée. On observe une véritable continuité dans l’exploitation des matières premières, des espèces animales et des parties anatomiques que l’on pourrait interpréter comme l’affirmation d’une tradition technique propre à Chypre. Le Néolithique céramique se caractérise par la présence, au côté d’un nouveau type d’objets, d’un fonds d’objets commun au Néolithique pré-céramique récent. En ce qui concerne les techniques de fabrication, il existe également une certaine continuité entre les deux occupations malgré un emploi plus fréquent du sciage et du forage au Néolithique céramique. Au regard de ces nombreuses similitudes tant morphologiques que techniques, la Culture de Khirokitia semblerait constituer un héritage certain pour les communautés du Néolithique céramique dont l’origine n’est toujours pas déterminée. Parmi les hypothèses avancées (Watkins 1973 ; Todd 1985 ; Knapp et al. 1994), mon étude permet, sur la base de cette continuité manifeste, de privilégier une origine insulaire, c’est-à-dire résultant d’une évolution locale dont nous n’avons, pour l’instant, aucun témoignage. L’existence même du hiatus serait alors remise en question.
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Tabl. 33 : Khirokitia – Type V. Techniques de façonnage .......................................................................................56 Tabl. 34 : Khirokitia – Type V. Caractéristiques des stries d’abrasion.......................................................................56 Tabl. 35 : Khirokitia – Type V. Étendue du façonnage et techniques employées ....................................................57 Tabl. 36 : Khirokitia – Type V. Caractéristiques des surfaces probablement chauffées ...................................59 Tabl. 37 : Khirokitia – Type VIII. Caractéristiques des surfaces probablement chauffées ...................................59 Tabl. 38 : Khirokitia – Type IX. Techniques de débitage .......................................................................................60 Tabl. 39 : Khirokitia – Fragments sur segment longitudinal de métapode avec épiphyse partielle. Procédés de découpe ......................................................62 Tabl. 40 : Khirokitia – Fragments sur segment longitudinal de métapode avec épiphyse partielle. Techniques de débitage..................................................62 Tabl. 41 : Khirokitia – Fragments sur segment longitudinal de métapode avec épiphyse partielle. Procédés de découpe et techniques de débitage .............62 Tabl. 42 : Khirokitia – Fragments sur segment longitudinal de métapode avec épiphyse partielle. Méthodes de débitage ....................................................63 Tabl. 43 : Khirokitia – Fragments sur segment longitudinal de métapode avec épiphyse partielle. Techniques de façonnage...............................................64 Tabl. 44 : Khirokitia – sur segment longitudinal de métapode avec épiphyse partielle. Caractéristiques des surfaces probablement chauffées ...................................64 Tabl. 45 : Khirokitia – Fragments sur segment longitudinal de diaphyse sans épiphyse. Procédés de découpe ..........................................................................64 Tabl. 46 : Khirokitia – Fragments sur segment longitudinal de diaphyse sans épiphyse. Techniques de façonnage .......................................................................64 Tabl. 47 : Khirokitia – Fragments sur segment longitudinal de diaphyse sans épiphyse. Caractéristiques des stries d’abrasion.......................................................64 Tabl. 48 : Khirokitia – Fragments sur segment longitudinal de diaphyse sans épiphyse. Caractéristiques des surfaces probablement chauffées .............................64 Tabl. 49 : Khirokitia – Pièces sélectionnées pour l’analyse fonctionnelle ...................................................66 Tabl. 50 : Khirokitia – Etat de fragmentation et de conservation des surfaces...............................................66 Tabl. 51 : Khirokitia – Types I et II. Caractéristiques morphométriques des parties actives .............................66 Tabl. 52 : Khirokitia – Type I. Pointes utilisées par percussion posée directe. Macrotraces et déformation de la pointe .........................................................................67 Tabl. 53 : Khirokitia – Type III. Caractéristiques morphométriques des parties actives .............................68 Tabl. 54 : Khirokitia – Type III. Pointes utilisées par percussion posée directe. Étendue et développement de l’usure ............................................................................69 Tabl. 55 : Khirokitia – Type III. Pointes utilisées par percussion posée directe. Macrotraces et déformation de la pointe .........................................................................69
LISTE DES TABLEAUX Tabl. 1 : Datations des sites du Néolithique précéramique ........................................................................ 8 Tabl. 2 : Khirokitia – Catégories d’objets en matières osseuses ......................................................................... 15 Tabl. 3 : Khirokitia-Vouni – Répartition des objets en matières osseuses par secteur......................................... 17 Tabl. 4 : Khirokitia-Vouni – Secteur Est. Répartition des objets en matières osseuses par niveau .......................... 18 Tabl. 5 : Khirokitia-Vouni – Secteur ouest. Répartition des objets en matières osseuses par niveau.................... 18 Tabl. 6 : Khirokitia – Types de cassures........................ 19 Tabl. 7 : Khirokitia-Vouni – Répartition des fragments par secteur...................................................................... 19 Tabl. 8 : Khirokitia – État de conservation des objets ... 19 Tabl. 9 : Khirokitia-Vouni – État de conservation des objets par secteur ........................................................... 19 Tabl. 10 : Cap Andreas-Kastros – Catégories d’objets en matières osseuses........................................................... 20 Tabl. 11 : Cap Andreas-Kastros – Répartition des objets en matières osseuses par niveau..................................... 20 Tabl. 12 : Cap Andreas-Kastros – Types de cassures.... 20 Tabl. 13 : Cap Andreas-Kastros – Types de fragments . 20 Tabl. 14 : Cap Andreas-Kastros – État de conservation des objets ....................................................................... 20 Tabl. 15 : Récapitulatif des expérimentations conduites ....................................................................................... 38 Tabl. 16 : Khirokitia – Matières premières sélectionnées ....................................................................................... 43 Tabl. 17 : Khirokitia – Parties des bois de daim sélectionnées.................................................................. 43 Tabl. 18 : Khirokitia – Espèces animales exploitées pour l’industrie....................................................................... 44 Tabl. 19 : Khirokitia – Type III. Procédés de découpe .. 51 Tabl. 20 : Khirokitia – Type III. Techniques de débitage ....................................................................................... 51 Tabl. 21 : Khirokitia – Type III. Procédés de découpe et techniques de débitage................................................... 51 Tabl. 22 : Khirokitia – Type III. Méthodes de débitage 52 Tabl. 23 : Khirokitia – Type III. Techniques de façonnage ....................................................................................... 53 Tabl. 24 : Khirokitia – Type III. Caractéristiques des stries d’abrasion............................................................. 53 Tabl. 25 : Khirokitia – Type III. Étendue du façonnage et techniques employées .................................................... 53 Tabl. 26 : Khirokitia – Type III. Caractéristiques des surfaces probablement chauffées ................................... 53 Tabl. 27 : Khirokitia – Type IV. Procédés de découpe.. 54 Tabl. 28 : Khirokitia – Type IV. Techniques de débitage ....................................................................................... 54 Tabl. 29 : Khirokitia – Type IV. Techniques de façonnage....................................................................... 54 Tabl. 30 : Khirokitia – Type IV. Caractéristiques des stries d’abrasion............................................................. 54 Tabl. 31 : Khirokitia – Type IV. Étendue du façonnage et techniques employées .................................................... 55 Tabl. 32 : Khirokitia – Type IV. Caractéristiques des surfaces probablement chauffées ................................... 55
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Tabl. 56 : Khirokitia – Type IV. Caractéristiques morphométriques des parties actives ............................. 72 Tabl. 57 : Khirokitia – Type IV. Pointes utilisées par percussion posée directe. Étendue et développement de l’usure ............................................................................ 72 Tabl. 58 : Khirokitia – Type IV. Pointes utilisées par percussion posée directe. Macrotraces et déformation de la pointe ......................................................................... 72 Tabl. 59 : Khirokitia – Type V. Macrotraces et déformation de la pointe ................................................ 77 Tabl. 60 : Khirokitia – Pointes et aiguilles. Matières travaillées identifiées et modes d’action ........................ 81 Tabl. 61 : Khirokitia – Type de pointes et matières travaillées....................................................................... 83 Tabl. 62 : Khirokitia – Type d’aiguilles à chas et matières travaillées....................................................................... 83 Tabl. 63 : Khirokitia – Fragments distaux d’outils tranchants. Mode d’action indéterminé. Étendue et développement de l’usure .............................................. 86 Tabl. 64 : Khirokitia – Fragments distaux d’outils tranchants. Mode d’action indéterminé. Macrotraces et déformation du taillant................................................... 86 Tabl. 65 : Distribution du matériel osseux dans le village ....................................................................................... 90 Tabl. 66 : Distribution du matériel osseux par niveau étudié ............................................................................. 91 Tabl. 67 : Succession des sols étudiés dans les constructions du niveau C.............................................. 91 Tabl. 68 : Catégories d’objets par construction (niveau C) ....................................................................................... 91
Tabl. 69 : Catégories d’objets par espace extérieur (niveau C) .....................................................................94 Tabl. 70 : Catégories d’objets par fosse (niveau C) ......96 Tabl. 71 : Succession des sols étudiés dans les constructions du niveau B..............................................97 Tabl. 72 : Catégories d’objets par construction (niveau B) .....................................................................................101 Tabl. 73 : Catégories d’objets par espace extérieur (niveau B) ...................................................................104 Tabl. 74 : Catégories d’objets par fosse (niveau B) ....105 Tabl. 75 : Succession des sols étudiés dans les constructions du niveau III...........................................106 Tabl. 76 : Catégories d’objets par construction (niveau III) ...............................................................................107 Tabl. 77 : Catégories d’objets par espace extérieur (niveau III) ..................................................................109 Tabl. 78 : Catégories d’objets par construction (niveau II) .....................................................................................110 Tabl. 79 : Succession des sols étudiés dans les constructions du niveau II............................................110 Tabl. 80 : Catégories d’objets par espace extérieur (niveau II) ...................................................................114 Tabl. 81 : Catégories d’objets par fosse (niveau II) ....116 Tabl. 82 : Cap Andreas-Kastros – Matières premières sélectionnées ................................................................117 Tabl. 83 : Cap Andreas-Kastros – Parties des bois de daim sélectionnées .......................................................118 Tabl. 84 : Cap Andreas-Kastros – Espèces animales exploitées pour l’industrie............................................118 Tabl. 85 : Khirokitia-Vouni – Distribution par secteur des outils fonctionnellement déterminés ............................130
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LISTE DES FIGURES
Fig. 37 : Cratères............................................................35 Fig. 38 : Ostéone avec lamelles concentriques ..............35 Fig. 39 : Stades d’usure..................................................36 Fig. 40 : Perforation de peaux fraîches ..........................38 Fig. 41 : Écharnage d’une peau fraîche..........................39 Fig. 42: Assouplissement d'une peau reverdie ...............39 Fig. 43 : Perforation d’une peau sèche par rotation alternative.......................................................................39 Fig. 44 : Perforation de peaux tannées ...........................39 Fig. 45 : Couture sur une peau tannée............................39 Fig. 46 : Perforation par rotation alternative d’une plaquette en os sec .........................................................40 Fig. 47 : Entaillage par percussion posée indirecte d’une branche sèche de feuillu.................................................40 Fig. 48 : Écorçage par percussion posée directe d’une branche verte de feuillu..................................................40 Fig. 49 : Perforation de fragments d’écorce sèche de chêne ..............................................................................41 Fig. 50 : Tissage.............................................................41 Fig. 51 : Couture sur lin .................................................41 Fig. 52 : Montage d’un panier en fibres de carex ..........42 Fig. 53 : Fendage par percussion posée indirecte d’une canne sèche ....................................................................42 Fig. 54 : Travail de l’argile ............................................42 Fig. 55 : Détails de fabrication d’une assiette en argile avec un outil tranchant ...................................................42 Fig. 56 : Khirokitia – Schématisation des différentes parties d'un bois de Dama mesopotamica ......................43 Fig. 57 : Khirokitia – Outils à partie active pointue.......46 Fig. 58 : Khirokitia – Outils à partie active tranchante ..47 Fig. 59 : Khirokitia – Objets divers................................48 Fig. 60 : Khirokitia – Représentation numérique des outils pointus et des outils tranchants ............................48 Fig. 61 : Khirokitia – Représentativité des pointes par type ................................................................................49 Fig. 62 : Khirokitia – Représentativité des outils tranchants par type .........................................................49 Fig. 63 : Khirokitia – Types de segments utilisés dans la fabrication des pointes et des outils tranchants ..............50 Fig. 64 : Khirokitia – Type III. Schématisation des parties extraites des métapodes proximaux ...............................52 Fig. 65 : Schématisation des méthodes de débitage .......52 Fig. 66 : Khirokitia – Type III. Localisation et types des stries d’abrasion .............................................................53 Fig. 67 : Khirokitia – Type IV. Stries d’abrasion...........55 Fig. 68 : Khirokitia – Type IV.A.1.1. Pointe sur segment longitudinal d’os long à base encochée..........................55 Fig. 69 : Khirokitia – Type IV.A.3. Pointe sur segment longitudinal d’os long à base spiralée ............................55 Fig. 70 : Khirokitia – Type IV.A.4. Pointe sur segment longitudinal d’os long à base dentée et perforée ............55 Fig. 71 : Khirokitia – Type IV. Localisation et types des stries d’abrasion .............................................................55 Fig. 72 : Khirokitia – Possible produit de débitage d’aiguilles à chas............................................................56 Fig. 73 : Schéma opératoire hypothétique de fabrication des aiguilles à chas de Khirokitia...................................57 Fig. 74 : Khirokitia – Partie proximale d’une ébauche d’aiguille façonnée par abrasion oblique grossière ........57
Fig. 1 : Carte du Néolithique de Chypre .......................... 8 Fig. 2 : Plan général du site de Khirokitia ..................... 16 Fig. 3 : Khirokitia-Vouni – Stratigraphie du secteur est 16 Fig. 4 : de Khirokitia-Vouni – Stratigraphie du secteur ouest............................................................................... 17 Fig. 5 : Plan général du site du Cap Andreas-Kastros ... 21 Fig. 6 : Procédés de découpe et morphologie des sections mésiales ......................................................................... 24 Fig. 7 : Accidents lors d’une fracturation longitudinale d’un métapode par percussion posée indirecte .............. 24 Fig. 8 : Entaillage par percussion lancée d’un andouiller de bois de cerf................................................................ 24 Fig. 9 : Méthodes de sciage à la corde ........................... 25 Fig. 10 : Sciage à la corde et stigmates.......................... 25 Fig. 11 : Variabilité morphométrique des stries d’abrasion ...................................................................... 25 Fig. 12 : Caractéristiques des stries de façonnage à fort grossissement................................................................. 26 Fig. 13 : Perforation par rotation alternative à la main .. 26 Fig. 14 : Perforation par rotation alternative au foret .... 26 Fig. 15 : Image binaire................................................... 29 Fig. 16 : Plage de frottement plane observée sur l’une des faces d’un outil tranchant expérimental utilisé pour écorcer des branches de feuillu vert............................... 30 Fig. 17 : Plage de frottement bombée observée au centre de la face de contact sur un outil tranchant expérimental utilisé pour lisser une céramique ................................... 30 Fig. 18 : Racloir de potier de Corbères-les-Cabanes "grotte de Montou" (Montbolo) (Pyrénées orientales, fouilles F. Claustre) ....................................................... 30 Fig. 19 : Schématisation de l'évolution de l'émoussé des arêtes d'une pointe ......................................................... 30 Fig. 20 : Schématisation du degré d'émoussé de l’apex d'une pointe.................................................................... 30 Fig. 21 : Schématisation des différentes parties d’une perforation ..................................................................... 31 Fig. 22 : Schématisation de l'évolution de l'émoussé de l'arête qui marque la jonction entre les cônes de forage d’une perforation ........................................................... 31 Fig. 23 : Schématisation de l'évolution de l'émoussé d’une perforation ........................................................... 31 Fig. 24 : Les éclats d’usage............................................ 31 Fig. 25 : Morphologie des écrasements localisés sur l’apex ............................................................................. 32 Fig. 26 : Écrasement de la partie active et processus d’usure ........................................................................... 32 Fig. 27 : Écrasement de la surface proximale d’un outil utilisé en pièce intermédiaire avec un percuteur dur...... 32 Fig. 28 : Méthode d’analyse microscopique des surfaces ....................................................................................... 33 Fig. 29 : Topographie de la surface usée ....................... 33 Fig. 30: Microrelief........................................................ 33 Fig. 31 : Aspect des élévations ...................................... 33 Fig. 32 : Texture des élévations ..................................... 34 Fig. 33 : Brillance des élévations................................... 34 Fig. 34 : Orientation des stries d’utulisation.................. 34 Fig. 35 : Aspect des bords et du fond des stries............. 34 Fig. 36 : Types de stries................................................. 34
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Fig. 105 : Khirokitia – Exemple de pointes du type IV et fragments de pointes sélectionnés pour l’analyse fonctionnelle ..................................................................72 Fig. 106 : Khirokitia – Fragment distal d’une pointe utilisée par percussion posée directe. Altérations macroscopiques du volume............................................73 Fig. 107 : Khirokitia – Type IV. Pointes utilisées par percussion posée indirecte. Altérations macroscopiques du volume ......................................................................73 Fig. 108 : Khirokitia – Type IV.A.1. Écrasement de la surface proximale avec repli des fibres de l’os ..............73 Fig. 109 : Khirokitia – Fragments distaux de pointes. Mode d’action indéterminé. Altérations macroscopiques du volume ......................................................................73 Fig. 110 : Khirokitia – Fragments distaux de pointes. Mode d’action indéterminé. Altérations macroscopiques de surface .......................................................................73 Fig. 111 : Khirokitia – Fragments distal de pointe. Usure microscopique n°1. Travail de l’écorce par rotation alternative.......................................................................75 Fig. 112 : Pointe expérimentale utilisée pour perforer par rotation alternative de l’écorce humide de chêne pendant 20 minutes......................................................................75 Fig. 113 : Khirokitia – Fragments distal de pointe. Usure microscopique n°2. Travail des fibres végétales souples selon un mouvement longitudinal ..................................75 Fig. 114 : Khirokitia – Fragments distal de pointe. Usure microscopique n°3. Travail des fibres végétales probablement par rotation alternative ............................75 Fig. 115 : Khirokitia – Type IV.A.2. Usure microscopique n°4. Travail du cuir par rotation alternative.......................................................................75 Fig. 116 : Pointe expérimentale utilisée pour perforer du cuir par rotation alternative pendant 50 minutes............76 Fig. 117 : Khirokitia – Exemples d’aiguilles à chas sélectionnées pour l’analyse fonctionnelle.....................76 Fig. 118 : Khirokitia – Type V. Altérations macroscopiques du volume............................................77 Fig. 119 : Khirokitia – Type V. Facette d’usure sur une face de l'apex..................................................................77 Fig. 120 : Khirokitia – Type V. Écrasement de l'apex ...77 Fig. 121 : Khirokitia – Type V. Émoussé des branches du chas ...........................................................................77 Fig. 122 : Khirokitia – Type V. Émoussé des parois du chas ................................................................................78 Fig. 123 : Khirokitia – Type V. Stades d’usure du chas 78 Fig. 124 : Khirokitia – Type V. Réparation du chas ......78 Fig. 125 : Khirokitia – Type V. Altérations de surface..78 Fig. 126 : Khirokitia – Type V. Usure microscopique n°1. Travail des fibres végétales souples...............................78 Fig. 127 : Aiguille expérimentale utilisée pour coudre du lin pendant 120 minutes .................................................79 Fig. 128 : Khirokitia – Type V. Usure microscopique n°2. Travail des fibres végétales souples. Traces de préhension dans la zone du chas ....................................79 Fig. 129 : Khirokitia – Type V. Usure microscopique n°3. Travail de l'écorce. Traces de préhension dans la zone du chas ................................................................................80
Fig. 75 : Khirokitia – Partie mésiale d’une aiguille aménagée par raclage..................................................... 57 Fig. 76 : Khirokitia – Techniques de perforation par rotation alternative ......................................................... 58 Fig. 77 : Khirokitia – Perforation du chas par sciage longitudinal.................................................................... 58 Fig. 78 : Khirokitia – Chas décentré .............................. 58 Fig. 79 : Khirokitia – Types de forage........................... 58 Fig. 80 : Khirokitia – Type X. ....................................... 60 Fig. 81 : Khirokitia – Type XI.A.1 ................................ 60 Fig. 82 : Khirokitia – Type XI.B ................................... 60 Fig. 83 : Khirokitia – Type XII.A.2............................... 61 Fig. 84 : Khirokitia – Type XII.B .................................. 61 Fig. 85 : Khirokitia – Type XII.C .................................. 61 Fig. 86 : Khirokitia – Type XII.D.................................. 61 Fig. 87 : Khirokitia – Type XII.E .................................. 61 Fig. 88 : Khirokitia – Fragment sur segment longitudinal de métapode avec épiphyse partielle. Schématisation des parties extraites des métapodes proximaux.................... 63 Fig. 89 : Khirokitia – Traitement des épiphyses distales des métapodes................................................................ 64 Fig. 90 : Khirokitia – Exemple de pointes des types I et II sélectionnées pour l’analyse fonctionnelle .................... 66 Fig. 91 : Khirokitia – Type I. Pointes utilisées par percussion posée directe. Altérations macroscopiques du volume ........................................................................... 67 Fig. 92 : Khirokitia – Type II.A.2. Pointe utilisée par percussion posée indirecte ............................................. 67 Fig. 93 : Khirokitia – Type I.C. Perforation par rotation alternative sur du cuir .................................................... 68 Fig. 94 : Pointe expérimentale utilisée pour perforer du cuir par rotation alternative pendant 50 minutes............ 68 Fig. 95 : Khirokitia – Exemple de pointes du type III sélectionnées pour l’analyse fonctionnelle .................... 68 Fig. 96 : Khirokitia – Type III. Pointes utilisées par percussion posée directe. Altérations macroscopiques du volume ........................................................................... 69 Fig. 97 : Khirokitia – Type III. Pointes utilisées par percussion posée indirecte. Altérations macroscopiques du volume ...................................................................... 69 Fig. 98 : Khirokitia – Type III. Pointes utilisées par percussion posée indirecte. Altérations macroscopiques de surface....................................................................... 69 Fig. 99 : Khirokitia – Type III.B.2. Écrasement de la surface proximale en vue supérieure ............................. 69 Fig. 100 : Khirokitia – Type III.B.1. Usure microscopique n°1. Travail des fibres végétales par rotation alternative ......................................................... 71 Fig. 101 : Khirokitia – Type III.B.2. Usure microscopique n°2. Travail des fibres végétales par rotation alternative ......................................................... 71 Fig. 102 : Pointe expérimentale utilisée pour fabriquer des cordes en écorce d’orme. Utilisation : environ 6 heures............................................................................. 71 Fig. 103 : Khirokitia – Type III.A.2. Usure microscopique n°3. Travail des fibres végétales par percussion posée indirecte ............................................. 71 Fig. 104 : Khirokitia – Type III.B.1. Traces de préhension ....................................................................................... 71
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Fig. 158 : Construction S. 122, sol 647 (niveau C)........93 Fig. 159 : Répartition spatiale du matériel osseux sur les sols 815 et 647 de S. 122 (niveau C)..............................93 Fig. 160 : Répartition spatiale du matériel osseux sur les sols 535 et 492 de S. 117 (niveau C)..............................93 Fig. 161 : Répartition spatiale du matériel osseux sur les sols 481 et 463 de S. 118 (niveau C)..............................94 Fig. 162 : Distribution du matériel osseux par espace extérieur (niveau C). ......................................................95 Fig. 163 : Plan du sous-niveau B5 .................................97 Fig. 164 : Plan du sous-niveau B4 .................................98 Fig. 165 : Plan du sous-niveau B3 .................................99 Fig. 166 : Plan des sous-niveaux B2 et B1...................100 Fig. 167 : Distribution du matériel osseux par construction (niveau B)................................................102 Fig. 168 : Répartition spatiale du matériel osseux sur le sol 462 de S. 117 (sous-niveau B5)..............................102 Fig. 169 : Répartition spatiale du matériel osseux sur les sols 769 et 531 de S. 125 (sous-niveaux B4 et B3)......103 Fig. 170 : Distribution du matériel osseux par espace extérieur (niveau B). ....................................................104 Fig. 171 : Plan général du niveau III...........................106 Fig. 172 : Distribution du matériel osseux par construction (niveau III) ..............................................107 Fig. 173 : Répartition spatiale du matériel osseux sur le sol 329 de S. 105 (niveau III).......................................108 Fig. 174 : Répartition spatiale du matériel osseux sur le sol 417 de S. 85 (niveau III).........................................108 Fig. 175 : Répartition spatiale du matériel osseux sur le sol 288 de S. 94 (niveau III).........................................108 Fig. 176 : Répartition spatiale du matériel osseux sur le sol 221 de S. 87 (niveau III).........................................108 Fig. 177 : Intérieur du village - Distribution du matériel osseux par espace extérieur (niveau III).......................109 Fig. 178 : Extérieur du village - Distribution du matériel osseux par espace extérieur (niveau III).......................110 Fig. 179 : Plan général du niveau II ............................111 Fig. 180 : Distribution du matériel osseux par construction (niveau II)................................................112 Fig. 181 : Répartition spatiale du matériel osseux sur le sol 251 de S. 85 (niveau II). .........................................113 Fig. 182 : Répartition spatiale du matériel osseux sur les sols 237 et 231 de S. 88 (niveau II)..............................113 Fig. 183 : Répartition spatiale du matériel osseux sur le sol 332 de S. 89 (niveau II). .........................................113 Fig. 184 : Intérieur du village - Distribution du matériel osseux par espace extérieur (niveau II)........................114 Fig. 185 : Extérieur du village - Distribution du matériel osseux par espace extérieur (niveau II)........................115 Fig. 186 : Cap Andreas-Kastros – Outils à partie active pointue .........................................................................119 Fig. 187 : Cap Andreas-Kastros – Outils à partie active tranchante.....................................................................119 Fig. 188 : Cap Andreas-Kastros – Objets divers..........120 Fig. 189 : Cap Andreas-Kastros – Représentativité des pointes par type............................................................120 Fig. 190 : Cap Andreas-Kastros – Types de segments utilisés dans la fabrication des pointes et des outils tranchants .....................................................................121
Fig. 130 : Khirokitia – Type V. Usure microscopique n°4. Travail du cuir. Usure indéterminée repérée dans la zone du chas ........................................................................... 80 Fig. 131 : Aiguille expérimentale utilisée pour coudre du cuir pendant 95 minutes................................................. 81 Fig. 132 : Grotte de Nahal Hemar. Fragment de tissu ... 81 Fig. 133 : Site d'El Kowm. Empreinte d'une vannerie spiralée........................................................................... 81 Fig. 134 : Khirokitia – Vestiges en fibres végétales ...... 82 Fig. 135 : Fabrication d’un tissu cordé .......................... 82 Fig. 136 : Fabrication de cordage en écorce de cèdre chez les indiens de la Côte du nord-ouest .............................. 82 Fig. 137 : Fabrication de vanneries................................ 83 Fig. 138 : Fabrication d’un récipient en écorce de bouleau chez les indiens de la Côte du nord-ouest...................... 83 Fig. 139 : Khirokitia – Exemples d'outils tranchants du type VIII sélectionnés pour l'analyse fonctionnelle.. ..... 84 Fig. 140 : Khirokitia – Type VIII.A.2. Outils tranchants utilisés par percussion posée indirecte. Altérations macroscopiques du volume............................................ 84 Fig. 141 : Khirokitia – Type VIII.A.2. Écrasement de la surface proximale de l'outil............................................ 84 Fig. 142 : Khirokitia – Type VIII.A.2. Travail du bois sec. Altérations microscopiques de surface.. ................. 85 Fig. 143 : Outil tranchant expérimental utilisé pour entailler des branches de feuillu sec pendant 10 minutes.. ....................................................................................... 85 Fig. 144 : Khirokitia – Type VIII.A.2. Traces de préhension...................................................................... 85 Fig. 145 : Khirokitia – Exemples d'outils tranchants du type IX et fragments distaux sélectionnés pour l'analyse fonctionnelle.. ................................................................ 85 Fig. 146 : Khirokitia – Type IX. Dimensions des taillants (en mm) ......................................................................... 85 Fig. 147 : Khirokitia – Fragments distaux d'outils tranchants. Mode d'action indéterminé. Altérations macroscopiques du volume............................................ 86 Fig. 148 : Khirokitia – Type IX. Usure microscopique n°1. Matière travaillée indéterminée par percussion posée indirecte. ........................................................................ 87 Fig. 149 : Khirokitia – Fragment de tranchant. Usure microscopique n°2. Travail de peaux fraîches par raclage. ....................................................................................... 87 Fig. 150 : Outil tranchant expérimental utilisé pour écharner par raclage des peaux fraîches pendant 35 minutes .......................................................................... 87 Fig. 151 : Khirokitia - Type IX.A.2. Usure microscopique n°3. Matière travaillée indéterminée par percussion posée indirecte. ........................................................................ 87 Fig. 152 : Khirokitia – Outil tranchant sur scapula. Altérations macroscopiques de surface.......................... 88 Fig. 153 : Khirokitia - Type X. Objet sur scapula. Altérations macroscopiques de surface.......................... 88 Fig. 154 : Travail du bois chez les indiens de la Côte du nord-ouest ...................................................................... 89 Fig. 155 : Perforation des peaux chez les indiens de la Côte du nord-ouest......................................................... 89 Fig. 156 : Plan général du niveau C.............................. 92 Fig. 157 : Distribution du matériel osseux par construction (niveau C).................................................. 93
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Fig. 203 : Khirokitia-Vouni. Distribution du traitement thermique par niveau (n=540)......................................129 Fig. 204 : Khirokitia-Vouni. Distribution du degré de transformation des supports par niveau (n=571)..........130 Fig. 205 : Khirokitia-Vouni. Catégories d’outils et matières travaillées.......................................................130 Fig. 206 : Cap Andreas-Kastros – Exploitation des matières premières par niveau (n=122)........................131 Fig. 207 : Cap Andreas-Kastros – Sélection des oiseaux et des daims par niveau (n=27) ....................................131 Fig. 208 : Cap Andreas-Kastros – Fréquence par niveau des os de daim et de capriné dans les restes fauniques 131 Fig. 209 : Cap Andreas-Kastros – Distribution des catégories d’objets identifiées par niveau (n=88) ........132 Fig. 210 : Cap Andreas-Kastros – Distribution des techniques de débitage par niveau (n=48)....................132 Fig. 211 : Cap Andreas-Kastros – Distribution des techniques de façonnage par niveau (n=69).................132 Fig. 212 : Cap Andreas-Kastros – Distribution du degré de transformation des supports par niveau (n=103) .....132 Fig. 213 : Évolution chronologique des principaux caractères des assemblages osseux chypriotes .............134 Fig. 214 : Carte des sites du Proche-Orient ayant livré une industrie osseuse....................................................136
Fig. 191 : Cap Andreas-Kastros – Type X.B. Traces de sciage transversal......................................................... 122 Fig. 192 : Exploitation des matières premières à Khirokitia et au Cap Andreas-Kastros......................... 124 Fig. 193 : Fréquence par site des types d'objets........... 125 Fig. 194 : Khirokitia-Vouni. Exploitation des matières premières par niveau (n=1255) .................................... 126 Fig. 195 : Khirokitia-Vouni. Sélection des caprinés et des daims par niveau (n=327) ............................................ 127 Fig. 196 : Khirokitia-Vouni. Fréquence par niveau des os de daim et de capriné dans les restes fauniques ........... 127 Fig. 197 : Khirokitia-Vouni. Distribution des catégories d’objets par niveau (n=846)......................................... 128 Fig. 198 : Khirokitia-Vouni. Distribution par niveau des supports utilisés dans la fabrication des pointes et des outils tranchants (n=149) ............................................. 128 Fig. 199 : Khirokitia-Vouni. Distribution des types d’aiguilles par niveau (n=89)....................................... 128 Fig. 200 : Khirokitia-Vouni. Évolution chronologique des types d'aiguilles et des types d'objets divers ................ 128 Fig. 201 : Khirokitia-Vouni. Distribution des techniques de débitage par niveau (n=232) ................................... 128 Fig. 202 : Khirokitia-Vouni. Distribution des techniques de façonnage par niveau (n=591)................................. 129
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Pl. 8 : Khirokitia – Produits de débitage et fragments proximaux d’outils .......................................................173 Pl. 9 : Cap Andreas-Kastros – Pointes des types I, II, III et IV .............................................................................174 Pl. 10 : Cap Andreas-Kastros – Fragments distaux de pointes, hameçons et aiguilles à chas...........................175 Pl. 11 : Cap Andreas-Kastros – Outils tranchants des types VII, VIII, IX et fragments distaux ......................176 Pl. 12 : Cap Andreas-Kastros – Objets divers des types X, XI, XII et fragments proximaux d’outils.................177
LISTE DES PLANCHES Pl. 1 : Khirokitia – Pointes des types I, II et III.A. ...... 166 Pl. 2 : Khirokitia – Pointes du type III.B ..................... 167 Pl. 3 : Khirokitia – Pointes du type IV et fragments distaux.......................................................................... 168 Pl. 4 : Khirokitia – Aiguilles à chas ............................. 169 Pl. 5 : Khirokitia – Outils tranchants des types VI, VII, VIII, IX et fragments distaux....................................... 170 Pl. 6 : Khirokitia – Objets divers des types X et XI..... 171 Pl. 7 : Khirokitia – Objets divers du type XII .............. 172
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Pl. 1 : Khirokitia – Pointes des types I, II et III.A. 1 à 4 – Type I : KhP97 50200, Kh95 10007.2, Kh95 9914.2, Kh03 13580 ; 5 et 6 – Type II : Kh81 2276.3 Kh01 12709.1 ; 7 à 13 – Type III.A : Kh00 12229, Kh98 11674.1, Kh80 1717.1, Kh81 1810, Kh86 4121, Kh93 8376, Kh77 589.1 (dessins O. Daune-Le Brun et A. Legrand).
166
Pl. 2 : Khirokitia – Pointes du type III.B. Kh81 2352, Kh78 966.1, Kh86 4205, Kh80 1681, Kh83 2858.1, Kh97 11037, Kh88 5569.2, Kh96 10540.1, Kh77 528.1, Kh02 13151, Kh96 10562.1, Kh95 9873, Kh80 1841, KhP97 50142, Kh84 3345.1, KhP01 50867, Kh86 4325 (dessins O. Daune-Le Brun et A. Legrand).
167
Pl. 3 : Khirokitia – Pointes du type IV et fragments distaux. 1 à 7 – Type IV : Kh83 2661.1, Kh83 2705.1, Kh80 1453.2, Kh81 1827, Kh86 4806, Kh97 11356.1, Kh84 3218.1. 8 à 16 – Fragments : Kh78 805, Kh86 4585, Kh84 3794, Kh89 5896, Kh81 1882, Kh83 2723.1, Kh88 5660.1, Kh00 12306.2, Kh80 1428.1, Kh84 3232.1, Kh84 3345.1 (dessins O. Daune-Le Brun et A. Legrand).
168
Pl. 4 : Khirokitia – Aiguilles à chas. KhP98 50491, Kh97 11238.5, Kh84 3266.1, Kh97 11159.2, Kh81 2511, Kh91 7041.2, Kh84 3736.1, Kh83 3100.1, Kh91 7225, Kh97 10862.3, Kh96 10653.1, Kh81 2200.1, Kh84 3525, Kh01 12574.2, Kh96 10709, Kh88 5330, Kh91 7755 (dessins O. Daune-Le Brun et A. Legrand).
169
Pl. 5 : Khirokitia – Outils tranchants des types VI, VII, VIII, IX et fragments distaux. 1 – Type VI : Kh95 9914.1 ; 2 – Type VII : Kh91 7440 ; 3 à 5 – Type VIII : Kh90 6812, Kh96 10761, Kh97 11302 ; 6 & 7 – Type IX : Kh92 7838, KhP97 50178 ; 8 à 11 – Fragments distaux : Kh90 6458.1, Kh96 10689, Kh97 11325, Kh83 3121.1 (dessins O. Daune-Le Brun et A. Legrand).
170
Pl. 6 : Khirokitia – Objets divers des types X et XI. 1 – Type X : Kh03 13570 ; 2 à 6 – type XI : Kh95 9945, Kh95 10002, Kh95 9487, Kh95 9477 (dessins O. Daune-Le Brun et A. Legrand).
171
Pl. 7 : Khirokitia – Objets divers du type XII. Kh90 6785.1, Kh96 10601.1, Kh95 9960, Kh78 1041.1, Kh01 12702, Kh02 13144, KhP00 50656 (dessins O. Daune-Le Brun et A. Legrand).
172
Pl. 8 : Khirokitia – Produits de débitage et fragments proximaux d’outils. 1 à 6 – Produits de débitage : Kh01 12683.3, Kh81 1887.3, Kh91 7525.2, Kh91 7730.2, Kh98 11666, Kh81 2356 ; 7 à 15 : Fragments proximaux : Kh77 519.1, Kh95 9972, Kh02 13029, Kh86 4099.2, Kh83 2707.1, Kh83 2737.1, Kh81 2005.1, Kh81 2395.1, Kh88 5271 (dessins O. Daune-Le Brun et A. Legrand).
173
Pl. 9 : Cap Andreas-Kastros – Pointes des types I, II, III et IV. 1 – Type I : 727.1 ; 2 & 3 – Type II : 492.1, 565.1 ; 4 à 7 – Type III : 869.1, 869.2, 441.1, 543.1 ; 8 & 9 : Type IV : 535.1, 489.1 (dessins O. Daune-Le Brun).
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Pl. 10 : Cap Andreas-Kastros – Fragments distaux de pointes, hameçons et aiguilles à chas. 1 à 5 – Fragments distaux : 579.1, 558.3, 713.1, 602.1, 853.1 ; 6 à 9 – Hameçons : 710.1, 543.2, 740.1, 461.4 ; 10 & 11 – Aiguilles à chas : 758.1, 780.1 (dessins O. Daune-Le Brun).
175
Pl. 11 : Cap Andreas-Kastros – Outils tranchants des types VII, VIII et IX et fragments distaux. 1 – Type VII : 864 ; 2 – Type VIII : 679.1 ; 3 – Type IX : 558.1 ; 4 & 5 – Fragments distaux : 691.1, 487.1 (dessins O. Daune-Le Brun et A. Legrand).
176
Pl. 12 : Cap Andreas-Kastros – Objets divers des types X, XI et XII et Fragments proximaux d’outils. 1 à 4 – Type X : 660.1, 722, 511.1, 528.1 ; 5 – Type XI : 728.1 ; 6 – Type XII : 509.1 ; 7 & 8 – Fragments proximaux : 689.1, 509.3 (dessins O. Daune-Le Brun et A. Legrand).
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Results show a great homogeneity within the raw material selection, the categories of tools represented and the manufacturing techniques (fig. 213). In spite of the evolution of these assemblages through time, continuity is observed between the latest Aceramic Neolithic occupation of Khirokitia (from level G to level I) and the Ceramic Neolithic one (layer 2), although they are separated by a 1000 year gap. This continuity, interpreted as the expression of Cypriot tradition, raises the debate about the origin of the Ceramic Neolithic period in Cyprus. According to the results obtained in other fields of the material culture and my own results, the origin of the Ceramic Neolithic period could be insular.
ENGLISH ABSTRACT Between the emergence of insular characters and Middle-Eastern traditional reminiscences, the Khirokitian Culture (Late Aceramic Neolithic period; from the 7th millennium to the middle of the 6th millennium cal. BC), which forms the core of this study, can be considered as the result of a colonizing process which started in Cyprus at the end of the 9th millennium cal. BC (Guilaine & Briois 2001; Le Brun 2001 a). The study of the bone industries of Khirokitia, in the south of the island, and of Cap Andreas-Kastros, at its eastern extremity (fig. 1) which yielded a total of 2451 artefacts, allowed me to follow two principal aims. Firstly, it was advisable to measure the part MiddleEastern tradition played in these productions and to uncover their original character. As well as that, the island provided the possibility of studying sedentary agro-pastoral communities in an insular context where development occured in a certain isolation, without a regular relationship with the mainland (Le Brun 1986, 1989 b). It was therefore a question of understanding and measuring the effect of this isolation on the nature of the relationships between these communities and their environment, and on the formation of the bone industry.
Compared to bibliographical data available for the early PPNB to early ceramic Neolithic period bone industries of the Levant and Anatolia (fig. 214), the Cypriot assemblages show some original character. Originality appears in: 1) the large exploitation of the fallow deer (Dama mesopotamicus) metapodials, 2) the large proportion of needles (43% of the Khirokitia pointed tools), 3) the preferential and continuous use of percussion and grinding for tool manufacture. This originality is all the more important as the artefacts and techniques characteristic of Middle-Eastern industries, such as the denticulate bone objects and perforation by longitudinal incision, are quickly abandoned from the earliest levels of Khirokitia. One can thus consider that the rupture with the Middle-Eastern identity took place before the development of the Khirokitian Culture, during the evolution of the Neolithic of the island. Thus, the bone industry of the latest phase of the Aceramic Neolithic period of Cyprus can be defined by the emergence, commencing with morphological elements and techniques from the Middle-Eastern tradition, of specific and well established techno-functional concepts. These combined with the other fields of the material culture, take part in the formation of a new and original cultural identity: the Khirokitian Culture. This seems to constitute an unquestionable legacy for the Ceramic Neolithic communities of the 5th millennium.
These questions were subjected to technological analysis, from the characterization of the production methods – raw materials and manufacturing techniques – to the function of the tools. Because of the great proportion of pointed tools in the studied assemblages (more than 90%) it was necessary from an experimental corpus (cf. CD) to set and validate an appropriate usewear analysis which exceeds the framework of bone industries confined to Cyprus. It consists of characterizing both macro- and microscopic use-wear and the use-wear process through the examination of the use-wear development on the active part of the tool and within the same functional category of tools (Sidéra & Legrand 2006).
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