Mythologie Zoroastrienne: Vaches et taureaux en Iran (French Edition) 9782343145822, 2343145822

Éric Pirart rassemble ici les données de l'eschatologie générale mazdéenne. La rigueur philologique et la mythologi

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Mythologie zoroastrienne Vaches et taureaux en Iran
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Mythologie Zoroastrienne: Vaches et taureaux en Iran (French Edition)
 9782343145822, 2343145822

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Après l’eschatologie individuelle mazdéenne dont il fut traité dans Corps et âmes du mazdéen (L’Harmattan, 2012), Éric Pirart rassemble dans le présent ouvrage les données de l’eschatologie générale mazdéenne. La rigueur philologique et la mythologie comparée sont les deux outils mis en œuvre dans l’approche de la tradition zoroastrienne qui est fragmentaire. Lʼexamen des mythes grecs qui mettent en scène un taureau ainsi fournit-il quelques clés dans lʼinterprétation de textes iraniens singulièrement lapidaires. La poésie archaïque de lʼunité Y 29 de la première Gāθā qui rapporte la plainte dʼune vache est, elle aussi, décryptée : vaches et taureaux, chez des peuples conducteurs de troupeaux, étaient au centre de lʼimaginaire et de la métaphysique.

Éric PiraRt

Spécialiste des langues et civilisations indo-iraniennes anciennes, Éric Pirart, professeur émérite de l’Université de Liège et président de la Sociedad de Estudios Iranios y Turanios (Girona), est l’auteur de nombreux ouvrages ayant trait aux traditions védiques et avestiques tels que La naissance d’Indra (L’Harmattan, 2010) ou Les Adorables de Zoroastre (Max Milo, 2010).

Vaches et taureaux en Iran

Vaches et taureaux en Iran

Mythologie zoroastrienne

Mythologie zoroastrienne

En couverture : bas-relief de la porte d’Ishtar, musée Pergame de Berlin © Fedor Selivanov – 123rf.com

ISBN : 978-2-343-14582-2

39 €

9 782343 145822

Collection KUBABA

Éric PiraRt

Série Antiquité

Mythologie zoroastrienne

Vaches et taureaux en Iran

Mythologie zoroastrienne Vaches et taureaux en Iran

Collection KUBABA Série Antiquité

Éric PIRART

Mythologie zoroastrienne Vaches et taureaux en Iran

Président de l’Association : Michel MAZOYER Comité de rédaction Trésorier : Christian BANAKAS Secrétaire : Charles GUITTARD Comité scientifique : Sydney AUFRÈRE, Sébastien BARBARA, Marielle de BÉCHILLON, Nathalie BOSSON, Dominique BRIQUEL, Sylvain BROCQUET, Gérard CAPDEVILLE, Valérie FARANTON, Jacques FREU, Charles GUITTARD, Jean-Pierre LEVET, Michel MAZOYER, Paul MIRAULT, Dennis PARDEE, Eric PIRART, Jean-Michel RENAUD, Nicolas RICHER, Bernard SERGENT, Claude STERCKX, Patrick VOISIN Logo KUBABA : La déesse KUBABA, Vladimir TCHERNYCHEV Illustration : bas-relief de la porte d’Ishtar, musée Pergame de Berlin © Fedor Selivanov - 123rf.com

Ce volume a été imprimé par

© Association KUBABA KUBABA, Université de Paris I Panthéon – Sorbonne 12, place du Panthéon 75231 Paris CEDEX 05 [email protected]

© L’Harmattan, 2018 5-7, rue de l’École-Polytechnique, 75005 Paris http://www.editions-harmattan.fr ISBN : 978-2-343-14582-2 EAN : 9782343145822

Collection Kubaba Série Antiquité Sydney H. AUFRÈRE Thot Hermès l’Égyptien. De l’infiniment grand à l’infiniment petit Régis BOYER Essai sur le héros germanique Dominique BRIQUEL Le Forum brûle Jacques FREU Histoire politique d’Ugarit Histoire du Mitanni Régis BOYER Essai sur le héros germanique Dominique BRIQUEL Le Forum brûle Jacques FREU Histoire politique d’Ugarit Histoire du Mitanni Suppiliuliuma et la veuve du pharaon Anne-Marie LOYRETTE et Richard-Alain JEAN La Mère, l’enfant et le lait Éric PIRART L’Aphrodite iranienne L’éloge mazdéen de l’ivresse Guerriers d’Iran Georges Dumézil face aux héros iraniens Kutsa Corps et âmes du mazdéen

Michel MAZOYER Télipinu, le dieu du marécage Bernard SERGENT L’Atlantide et la mythologie grecque Une antique migration amérindienne Claude STERKX Les mutilations des ennemis chez les Celtes préchrétiens Le mythe indo-européen du guerrier impie Les Hittites et leur histoire en quatre volumes : Vol. 1 : Jacques FREU et Michel MAZOYER, en collaboration avec Isabelle KLOCK-FONTANILLE, Des origines à la fin de l’Ancien Royaume Hittite. Vol. 2 : Jacques FREU et Michel MAZOYER, Les débuts du Nouvel Empire Hittite. Vol. 3 : Jacques FREU et Michel MAZOYER, L’apogée du Nouvel Empire Hittite. Vol. 4 : Jacques FREU et Michel MAZOYER, Le déclin et la chute du Nouvel Empire Hittite. Hélène VIAL Incarnations littéraires d’une mère problématique Michel MAZOYER (éd.) Homère et l’Anatolie Valérie FARANTON et Michel MAZOYER (éds). Homère et l’Anatolie 2 Hélène NUTKOWICZ Destins de femmes à Éléphantine au Ve siècle avant notre ère Hélène NUTKOWICZ et Michel MAZOYER La disparition du dieu dans la Bible et dans la mythologie hittite

À Victoria

Du même auteur Les textes vieil-avestiques, 3 volumes, Reichert, Wiesbaden, 1988-90-91 [en collaboration avec Jean Kellens] ; Kayân Yasn (Yasht 19.9-96). L’origine avestique des dynasties mythiques, Ausa, Sabadell, 1992 ;  , 2 volumes parus, Université de Liège, Liège, 1995-2000 ; L’éloge mazdéen de l’ivresse. Édition, traduction et commentaire du  , L’Harmattan, Paris, 2004 ; L’Aphrodite iranienne. Étude de la dée     tion critique des textes avestiques la concernant, L’Harmattan, Paris, 2006 ; Georges Dumézil face aux démons iraniens, L’Harmattan, Paris, 2007 ; Zarathushtra entre l’Inde et l’Iran. Études indo-iraniennes et indo-européennes offertes à Jean Kellens à l’occasion de son 65e anniversaire, Reichert, Wiesbaden, 2009 [comme éditeur, en collaboration avec Xavier Tremblay] ; La naissance d’Indra. Approche comparative de mythes de l’Inde ancienne, L’Harmattan, Paris, 2010 ; Les Adorables de Zoroastre. Textes avestiques traduits et présentés, Max Milo, Paris, 2010 ; Kutsa. Étude d’un cas de discontinuité de la mythologie védique, L’Harmattan, Paris, 2011 ; Corps et âmes du mazdéen. Le lexique zoroastrien de l’eschatologie individuelle, L’Harmattan, Paris, 2012 ; Le sort des Gâthâs et autres études iraniennes in memoriam Jacques Duchesne-Guillemin, Peeters, Leuven - Paris - Walpole (Mass.), 2013 [comme éditeur] ; Études de linguistique iranienne in memoriam Xavier Tremblay, Peeters, Leuven - Paris - Bristol (Connect.), 2016 [comme éditeur].

Préambule La1 domestication du Bos taurus issu de lʼaurochs sauvage remonterait au VIIIe millénaire avant notre ère. Selon une analyse ADN, tous les bovins seraient issus dʼun groupe de 80 aurochs sauvages domestiqués il y a 10500 ans en Iran. Certains chercheurs émettent lʼhypothèse que le bétail européen ne serait pas issu dʼune domestication de lʼaurochs européen, mais des bovins domestiqués en Asie. Il aurait suivi les migrations des populations proche-orientales vers lʼEurope via la vallée du Danube ou les côtes méditerranéennes, comme ont été introduits la chèvre, le mouton ou la culture de céréales. Le bétail ainsi a-t-il circulé avec les mouvements de population, chaque peuple étant lié à une race particulière. Les peuples du néolithique dépendaient énormément de ces bovins domestiqués pour leur alimentation. Le lait que la vache ne peut fournir quʼaprès avoir vêlé vint à constituer une nourriture de première importance tandis que la viande des veaux retirés à leur mère et abattus avait souvent remplacé celle du gibier. Le rôle clé de la vache dans lʼinauguration de ce type de vie ou de survie bien différente de celle que les hommes du paléolithique avaient menée devait trouver écho dans la mythologie proto-indo-européenne comme dans bien dʼautres. Dans lʼÉgypte pharaonique, il y avait ainsi plusieurs taureaux sacrés ou dieux taureaux tels quʼApis, mais aussi diverses déesses vaches ou pouvant revêtir lʼapparence dʼune vache telles quʼHathor, Isis ou Nout. Et la Grèce ancienne, tout aussi bien, avait honoré dieux et déesses sous les formes de taureaux ou de vaches. Chez Homère, lʼépouse elle-même du maître de lʼOlympe montre le visage dʼune vache : βοῶπις πότνια Ἥρη. La forme primitive de cette déesse sans doute fut-elle effectivement celle dʼune 1

Avertissements. Dans les passages cités, les translittérations figurent en italiques ; les interprétations phonétiques pehlevies, en romains soulignés ; les reconstructions vieil-iraniennes, en romains gras. Les signes [ ] entourent ce qui est à biffer ou à considérer comme une interpolation ; < >, ce qui est à restituer ou fait défaut ; ( ), ce qui est à sous-entendre dans une traduction ; { }, ce qui est à considérer comme une glose. Les signes *, +, ˟ et † placés devant un mot avertissent respectivement de son caractère théorique et inattesté, de sa correction apportée avec l’aide des manuscrits, de sa correction avancée sans telle aide ou de son caractère insolite. Le nombre placé en exposant entre parenthèses au terme d’une séquence est celui des syllabes originales. Le signe V marque la séparation entre deux vers. 9

vache comme nous pouvons également le déduire du mythe dʼ Ἰώ, une prêtresse dans le temple dʼ Ἥρα à Argos, que Ζεύς avait transformée en une belle génisse blanche. La plupart des déesses de lʼInde védique sont données pour des vaches (gó-) : Áditi, Pr̥ś́ ni, Uṣás... Et le Mahābhārata proclame l’excellence de la vache2 : catuṣpadāṁ gauḥ pravarā « La vache est le meilleur des quadrupèdes » ; gaur variṣṭhā catuṣpadām « Le meilleur des quadrupèdes, c’est la vache ». Vue comme une déesse-mère, la vache jouit en Inde dʼune protection particulière3. LʼAntiquité, et non uniquement à Rome4, ce sont quelques goinfres et dʼinnombrables affamés. Le premier objet de préoccupation des hommes ordinaires des campagnes ibériques, attiques, indusiennes ou autres a toujours été dʼéviter de mourir dʼinanition, autrement dit : de défendre quelques réserves péniblement accumulées en prévision de prochaines famines. La mythologie y a trouvé une source dʼinspiration inépuisable ou sa raison dʼêtre : le héros lutte bien souvent contre les bandits et les monstres, bipèdes, quadrupèdes ou autres, qui menacent troupeaux, champs et silos. La vache en qui lʼInde contemporaine nʼa pas cessé de retrouver une mère était, depuis le néolithique, au centre de lʼimaginaire angoissé des pauvres humains. Ceux-ci à qui elle apportait réconfort allaient alors la défendre des voleurs, la protéger et lʼhonorer, mais le mythe, surtout dans lʼIran ancien, est un texte : lʼiconographie nʼy existe pas plus que dans lʼInde védique. Et le texte nʼest parfois plus que lambeaux ou souvenirs. Lʼapproche des mythes peut ou doit alors passer par lʼexamen de faits grammaticaux des plus ardus. Par contre, en Grèce, statues et vases à figures rouges ou noires guident lʼimagination des lecteurs dʼHésiode ou dʼApollodore comme à Rome, les mosaïques ou, chez les Étrusques, les miroirs gravés. Lʼalimentation humaine, par sa nécessité, par les mystères de la digestion, par la mort quʼelle entraîne dʼanimaux, en plus de lʼesthétique recherchée, conduit le poète à la réflexion, le métamorphose en visionnaire ou en philosophe et lui dicte une nouvelle façon de dire les mythes anciens.

2

G. DUCŒUR, 2004, p. 195, nº 2231a ; p. 263, nº 4512b. Sur la vache sacrée dans la religion hindoue, W. N. BROWN, 1964. 4 « Quelques goinfres, tant d’affamés... » est-il proclamé aux pages 82-3 du hors-série de Géo Histoire consacré à La vie quotidienne dans la Rome antique, Paris, 2010. 3

10

Dans le but de rendre compte de ces différentes facettes des mythes indoiraniens concernant vaches et taureaux, je réunis dans ce volume lʼétude approfondie dʼun poème védique dans lequel le barde nous parle des vaches et dʼun taureau (chapitre I), lʼétude tout aussi approfondie dʼun poème avestique archaïque dans lequel la vache mise en scène se plaint du sort que les dieux ont convenu de lui réserver (chapitre II) ou la comparaison de mythes de lʼIran zoroastrien et de la Grèce ancienne concernant un taureau (chapitre IV) et la mort dʼune déesse enceinte (chapitre VI). En outre, le commentaire médiéval du poème védique (I 4) comme ceux de lʼavestique (II 4) seront examinés en détail tandis que le mythe zoroastrien du taureau sera préalablement situé dans le cadre de la théorie des millénaires (chapitre III) sans laquelle sa compréhension, intimement liée à celle de l’eschatologie générale, resterait amoindrie. Les nécessités de lʼargumentation nous mèneront aussi à des réflexions étymologiques ou sémantiques autour des noms de la vache pleine ou de la déesse enceinte (chapitre V).

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I Les vaches Analyse du poème védique RS 6.28 I 1. Introduction La plupart des poèmes védiques rassemblés dans la collection du , le plus vieux monument de la littérature indienne1, sont des hymnes adressés aux divers dieux du panthéon, mais des exceptions existent. Parmi celles-ci, en plus des hymnes qui ne les interpellent pas directement, mentionnons         dients o   des données du processus sacrificiel. La vache qui fournit le lait entrant dans la composition des liba                  dans le sixième livre de la collection, celui dont la tradition attribue la composition à la famille du poète  Dans la collection, cette  Stuti    Éloge des Vaches » (RS 6.28) a été placée astucieu    nastuti (« éloge du don ») que l’on trouve en clôture de RS 6.27, un aindra!" # hymne à Indra ») dont j’ai donné une analyse approfondie dans les mélanges qui ont honoré la mémoire du professeur José Fortes Fortes 2. En effet, comme l’hymne faisant l’éloge rituel d’Indra (RS 6.27.1-3) lui avait permis de remporter la victoire sur les ennemis avec l’aide de ce grand dieu (RS 6.27.4-6), un roi récompensait le poète pour ses bons offices sacerdotaux et lui faisait don de vaches. Le poète faisait alors l’éloge de la générosité du roi (RS 6.27.7-8). Comme il est le principal destinataire des libations offertes et que, de surcroît, le poème RS 6.28 le nomme à deux reprise, la !  (BD 5.106cd = Tokunaga 3 $%&'  /?        @  :  " # ntyam V      $ « La deuxième strophe et le dernier vers de RS 6.28 honorent Indra, (mais avec le reste est fait) l’éloge des vaches ».

1

Pour supposer la présence des Perses, la composition des hymnes védiques ne remonte certainement pas au-delà du début du premier millénaire avant notre ère : voir É. PIRART, 2013c. 2 É. PIRART, 2016c. 3 M. TOKUNAGA, 1997. 13

Après la récitation en diction continue (saY /Z'    #//Z'     / \/ analyse approfondie  /   men  ^_?`4, un brahmane dravidien qui vécut à la court des rois de Vijayanagara au XIVe siècle et devint le plus fameux des commentateurs du Véda 5. Les traductions qui ont été données de la  Stuti   w/  

 de Karl Friedrich Geldner 6, de Ralph T. H. Griffith 7 et de Juan Miguel de Mora 8, mais aussi celles que William Dwight Whitney 9 ou Chatia Orlandi et Saverio Sani 10 ont données de la version atharvavédique de l’hymne.

4

Le saY /Z    //Z   !  ainsi que le texte du com _?`  / / ment dans les éditions suivantes : F. M. MÜLLER, 1849-74 ; N. S. SONTAKKE et C. G. KASHIKAR, 1933-$~@    aucune traduction du com   _?`         /   strophes de la !  est celle de K. F. GELDNER, 1951-7. ||| Dans le com _?`     /  \    

   /    `     V pour la séparation des vers. Les voyelles restituées pour la métrique figurent en exposant. 5 Voir J. GONDA, 1975, p. 41. 6 K. F. GELDNER, 1951-7, vol. II p. 127-8. 7 R. T. H. GRIFFITH, 1973, p. 302. 8 J. M. DE MORA, 1974, p. 226-7. 9 W. D. WHITNEY, 1905, vol. I p. 186-8. 10 Ch. ORLANDI et S. SANI, 1997, p. 267-9. 14

I 2. Sa         

   V   yantv asmé |        V    !  || 1 || % | % $| agman | utá | bhadrám | akran | "%  | go’sthé | &'  | asmé íti | #*% ’ "$| puru’+% #$| ihá |  $| / | #+"% $| 0'$| 2!$ || 1 || Les vaches sont venues et (nous) ont à nouveau porté bonheur. Qu’elles s’installent dans l’étable et se sentent bien chez nous ! Puisse la progéniture accompagner ici les multiformes (de façon) qu’elles donnent du lait à Indra pour de nombreuses aurores !    "# $% V ! 

svám mu  |        

 V 

" &    devayúm || 2 || /$| yájvane | #& | ca | 340 | úpa | ít |  | ná | svám | 0   | 7!+% $’7!+ $| rayím | ít | asya | vardháyan | ábhinne | khilyé | ní | ! | deva’yúm || 2 || Cherchant à se rendre utile à celui qui (lui) offre le sacrifice ou le comble, Indra se propose de (lui) faire des dons, non de lui voler les biens, et, lui augmentant encore et encore la richesse, place pareil adorateur des dieux sur une friche indivise.

   % 

  V     '    | " (%$   "  $V '   $ "'  || 3 || ná | % $| 3 | ná | 7! | '4$| ná |  |   '$|  ' !$| % | !0  | % | ca | % 7!$| yájate | ' | ca | jyók | ít | % 7!$| sacate | gó’# $| sahá || 3 || Elles ne doivent pas aller à leur perte ; aucun voleur ne doit (les) tromper ; aucun corrupteur            (vaches) qu’il offre en sacrifice aux dieux et dont il leur fait cadeau accompagnent le vacher pour longtemps.

   "!% "V ná sa(#   !    |    a(     V    $    || 4 || ná | % $| '| &2’448$| 3 | 15

ná | sa4 ’trám | úpa | yanti | % $| abhí | uru’ ' | ábhayam | tásya | % $| ánu | % $| mártasya | ví | caranti | '*$ || 4 ||     

   / \      / ; elles ne viennent pas à l’étal du boucher. Les vaches du mortel qui offre le sacrifice paissent en toute sécurité sur un vaste territoire.         " $  V   '   másya   |        V $ #  $  || 5 || % $| 7!'$| % $| /$| me | !| % $| sómasya | prathamásya | 7!40'$ |  % $| % $| % $| '$| ja$| /$| !% | ít | !% | '| cit | índram || 5 || ? „…    tune] ; les  @ „… / † ; les va     ‡ de sóma [= le breuvage  talité]. Les vaches que voici, gens, (sachez ' @ „…  /

    †ˆ‰ et pensée, je recherche donc Indra.  (  " #% ( cid V % ( $ #    | bhadrá( # ( # $ V #   cya "  || 6 ||

+ ' | % $| medayatha | 43' | cit | 3"' | cit | 4& !| su’#' "4 | bhadrám | !' | 4& !| bhadra’$| 7!' | $| ' $| ucyate | 7!%  || 6 || Vous les vaches, vous faites grossir même le maigre, même au laid vous donnez bonne mine. Vous portez bonheur à la maison, vous qui avez //

Š    vigorante est proclamée dans les assemblées.    ( %  V %      |   "

%    %(V  "   # || 7 || #*% ’ "$| su’yávasam | 3' "$| 3!% $| #'$| su’##| #/7 "$ |

% | $|  '$| "3 | % | aghá’3$| pári | $| ! /$| rudrásya | * $ || 7 || (Vous), riches en progéniture, broutant sur de bonnes pâtures, buvant l’eau pure de bons abreuvoirs, ni le voleur ni le dé      doivent avoir de mainmise sur vous. Puisse le trait de Rudra [= le courroux des dieux] vous épargner ! 16

úpedám upapárcanam V !' #$  | !#  V !"  ) || 8 || úpa | idám | upa’párcanam | 2| :0| úpa | #   | úpa | 07!' | rétasi | úpa | indra | táva | " ; || 8 || Š    /    @     ?   /gnation dans les vaches que voici, dans la semence du taureau et dans ta force de héros les suivant, Indra.

17

I 3. Analyse Pour l’analyse de la Gavāṁ Stuti, il est procédé vers par vers, mais la référence aux parallèles des Saṁhitā védiques ou des Brāhmaṇa est donnée au début de chaque strophe. Quant aux Sūtra et aux autres Vedāṅga, seuls leurs passages utiles seront invoqués dans le cours de l’analyse.

1 = AS 4.21.1, TB 2.8.8.11. 1a. ā́ gā́ vo agmann utá bhadrám akrant La métrique abrège ºo devant aº. ||| bhadrám akran : nous retrouvons la locution bhadráṁ KR̥ notamment à la sixième strophe et dans RS 1.1.6 yád aṅgá dāśúṣe tvám V ágne bhadráṁ kariṣyási | távét tát satyám aṅgiraḥ « Dès que tu décides, Aṅgiras Agni, de faire du bien à l’adorateur, ton œuvre existe ». ||| Le passé récent est exprimé au moyen de lʼindicatif aoriste : ā́ ... agmann ... akran. ||| Atonie des verbes indépendants ou coordonnés. 1b. sī́dantu goṣṭhé raṇáyantv asmé | Pour la métrique, une voyelle est à restituer dans raṇáyantuv. ||| sī́ dantu goṣṭhé : cf. 1.191.4a ní gā́ vo goṣṭhé asadan « Les vaches se sont installées dans l’étable ». ||| goṣṭhé ... prajā́ vatīḥ : cf. 10.169.3 yā́ devéṣu tanvàm áirayanta V yā́ sāṁ sómo víśvā rūpā́ ṇi véda | tā́ asmábhyam páyasā pínvamānāḥ V prajā́ vatīr indra goṣṭhé rirīhi « Les (vaches) qui s’élancèrent vers (ta) personne chez les dieux, celles dont Sóma connaît toutes les formes (= propriétés), ô Indra, donne-les-nous, qui se gonflent de lait et sont accompagnées de progéniture, dans l’étable ! » ||| raṇáya- : cf. 8.92.12 vayám u tvā śatakrato V gā́ vo ná yávaseṣv ā́ | ukthéṣu raṇayāmasi « Nous encore, (Indra) qui as cent astuces, comme des vaches (se plaisant) sur les pâturages, nous te rejouissons de nos hymnes ». ||| Le sens du locatif des personnes est « chez » : asmé. ||| L’impératif de demande est typique des prières : sī́ dantu... raṇáyantu. Accentuation des verbes en tête de proposition. 1c. prajā́ vatīḥ pururū́ pā ihá syur Optatif de souhait syuḥ. Ce mode ainsi que l’impératif du verbe précédent sont la marque de la prière. Cependant, aucun dieu n’est invoqué. Il s’agit donc d’une formulation indirecte. 1d. índrāya pūrvī́r uṣáso dúhānāḥ ||

19

Geldner1 pour le vers 1d renvoie à 8.6.19ab imā́ s ta indra pŕ̥śnayo V ghr̥táṁ duhata āśíram « Pour toi, Indra, les (vaches) bigarrées que voici ont donné ce beurre pour couper (l’enivrant sóma) », à 8.69.6ab índrāya gā́ va āśíraṁ V duduhré vajríṇe mádhu « Pour Indra porteur du foudre les vaches donnent de quoi couper l’enivrant » et à 1.84.11 tā́ asya pr̥śanāyúvaḥ V sómaṁ śrīṇanti pr̥ ́ śnayaḥ | priyā́ índrasya dhenávo V vájraṁ hinvanti sā́ yakaṁ V vásvīr ánu svarā́ jyam « Désireuses de caresses, les (vaches) bigarrées mélangent le sóma (de leur lait). Les (vaches) laitières, propices, incitent Indra à propulser le foudre. Les divines (vaches) ac(ceptent sa) souveraineté ». ||| Le verbe DUH est « traire », mais, à la voix moyenne, « donner du lait ». Accentuation inattendue du participe présent dúhānāḥ : nous attendions duhāná-.

2 = AS 4.21.2 (a ... gr̥ṇate ca śikṣate), TB 2.8.8.11 (d khille). 2a. índro yájvane pr̥ṇaté ca śikṣaty Comme à la strophe précédente, Indra est ici nommé à la troisième personne grammaticale. Nous parlerons donc d’éloge indirect. ||| Pour la métrique nous devons restaurer une voyelle dans śikṣatiy. ||| Nous retrouverons yájvan- à la quatrième strophe. Son sens de « sacrifiant » est illustré notamment dans la strophe RS 1.13.12 svā́ hā yajñáṁ kr̥ṇotanéVndrāya yájvano gr̥hé | tátra devā́ m̐ úpa hvaye « (En poussant le cri) Svāhā, faites un sacrifice pour Indra dans la maison du sacrifiant ! C’est là que je me propose d’appeler les dieux ». ||| Le même emploi de pr̥ṇánt- est illustré entre autres par 1.168.7c bhadrā́ vo rātíḥ pr̥ṇató ná dákṣiṇā « Votre générosité est heureuse comme les honoraires du (sacrifiant) qui nous comble ». ||| Le verbe śikṣati est construit aussi avec le datif de la désignation du sacrifiant notamment dans 8.59.1d yát sunvaté yájamānāya śíkṣathaḥ « quand vous portez appui au sacrifiant qui pressure le sóma » ou dans 1.81.2de yájamānāya śikṣasi V sunvaté bhū́ ri te vásu « tu portes appui au sacrifiant qui pressure le sóma : ta richesse est abondante ». ||| Il nʼest pas certain que la particule ca coordonne yájvane et pr̥ṇaté puisque ces deux mots représentent en principe une seule et même personne. Il faut donc envisager la possibilité dʼune subordonnée tonale en ca : « Pour chercher à se rendre utile à celui qui, généreux, (lui) offre le sacrifice, Indra se propose de lui faire des cadeaux, non de lui voler son bien ». Dans ce cas, il faudra restituer l’accent de ˟śíkṣati. Et, au lieu de la place attendue de ce ca subordonnant derrière índraḥ, nous lui reconnaîtrons malgré tout celle d’enclitique du mot qui est initial après la césure. 1

K. F. GELDNER, 1951-7. 20

2b. úpéd dadāti ná · svám muṣāyati | Le préverbe úpa atténue le sens du verbe « donner » : Indra ne donne pas encore, mais sʼy prépare. ||| La particule ít paraît fonctionner comme corrélatif de ca subordonnant. ||| Lʼanomalie métrique, le manque d’une syllabe que je symbolise par un point, est-elle à justifier par le caractère de glose incise que nous pourrions attribuer à ná svám muṣāyati par rapport à úpéd dadāti ? ||| Le verbe muṣāyáti est la variante en -yá- de muṣṇā́ ti. La même variation sépare le grec ὑφαίνω du védique ubhnā́ ti. ||| Atonie des verbes principaux ou indépendants. 2c. bhū́ yobhūyo rayím íd asya vardháyann Derrière la césure, la position seconde de ít et celle dʼenclitique de lʼinitiale seconde occupée par asya soulignent lʼisolement de lʼāmreḍita bhū́ yobhūyaḥ devant la césure. La particule ít est à nouveau employée en corrélation avec ca de 2b. ||| Lʼanomalie métrique des trois syllabes brèves qui suivent la césure coïncide pour ainsi dire avec lʼanomalie stylistique dʼun personnage nommé à deux cas distincts dans une seule et même phrase : asya ... devayúm. 2d. ábhinne khilyé ní dadhāti devayúm || Geldner2, en note, explique que khilyá- lui paraît désigner la terre en friche, que l’on exploite ou met à profit comme pâturage. ||| Les adjectifs en -yú- dérivés des verbes dénominatifs, en avestique, montrent plutôt le suffixe -iia-. Ainsi trouvons-nous le védique devayú- en face de l’avestique daēuuaiia-. ||| La place de l’accusatif devayúm derrière le verbe est irrégulière, à moins de considérer que, moyennant l’hypothèse de l’hypallage, ce serait l’épithète de rayím. Une autre solution consistera à corriger asya ... devayúm en ˟tásya ... devayóḥ˟, ce qui aura l’avantage d’aplanir la métrique du vers précédent et de résoudre l’anomalie phraséologique. En effet, la règle est que, derrière le verbe, nous ne pouvons trouver que des éléments de compléments dont l’expression a déjà commencé auparavant.

3 = AS 4.21.3, TB 2.4.6.9 (b nainā ămitro vyathir ā dadharṣati). 3a. ná tā́ naśanti ná dabhāti táskaro Concaténation ná tā́ ... ná tā́ avec 4a. ||| La répétition de la négation coordonne deux subjonctifs aoristes avec lʼindicatif dʼun présent secondaire : ná ... naśanti ná dabhāti V ná ... ā́ dadharṣati. Il y a deux raisons à cela : le 2

K. F. GELDNER, 1951-7. 21

désidératif nʼaime pas le subjonctif, et lʼaoriste du désidératif nʼexiste pas. ||| táskara- contient la forme préverbiale de támas- comme medhā́ - « la sagesse » combine *maḥ, la forme préverbiale de mánas-, avec DHĀ. 3b. nā́ sām āmitró vyáthir ā́ dadharṣati | Geldner3 signale en note le parallélisme de 3b avec RS 4.4.3 yó no dūré agháśaṁso yó ánty V mā́ kiṣ ṭe vyáthir ā́ dadharṣīt « Celui qui au loin dit du mal de nous, celui qui (en dit) de près, Agni, que nul n’ose affronter ton errance ! ». ||| L’hapax legomenon āmitrá- montre un allongement métrique légitime du préfixe négatif puisque cʼest une voyelle de fin de premier terme de composé. Lʼennemi appelé amitrá- est authentiquement lʼimpie qui, du fait de lʼabsence de sacrifices offerts, nʼinstaure aucun échange (mitrá-) entre les dieux et les hommes. Cependant, comme la nécessité de lʼallongement nʼexiste pas et que, de surcroît, le padapāṭha ne résorbe pas lʼallongement (contre TB), nous devons envisager la possibilité que le premier terme du composé soit le préverbe ā́ plutôt que le préfixe négatif. Dès lors, nous comparerons le mot avec lʼavestique *auui.miθra- « qui cor(rompt) ou at(taque) lʼéchange »4. 3c. devā́ ṁś ca yā́ bhir yájate dádāti ca Accentuation des verbes subordonnés. ||| Place dʼinitiale différée pour yā́ bhiḥ. ||| Place dʼinitiale nouvelle (anticipation) pour devā́ n. ||| Place dʼenclitique de lʼinitiale nouvelle pour le premier ca. 3d. jyóg ít tā́ bhiḥ sacate gópatiḥ sahá || Le prâcritisme jyók continue probablement *dyúḥ « avec les jours », un instrumental pluriel court. ||| Emploi emphatique de ít : jyóg ít « bien longtemps », autrement dit : « pour lʼéternité dans lʼau-delà ». Lʼordre des mots est : complément + verbe + sujet + postposition précisant le sens du complément. ||| C’est par décision de la diascévase qu’il y a atonie du verbe principal ou indépendant figurant immédiatement après la césure. ||| Concaténation avec 4b et 4c par la place de la postposition sahá. ||| Qui est gópati « le vacher » ? De deux choses l’une, ou bien il faut y reconnaître un nom d’Indra, ou bien en faire la désignation du sacrifiant au service duquel le poète tient le rôle du puróhita (prêtre au service d’un particulier). Ce sacrifiant est nommé de façon explicite au dernier vers de la strophe suivante.

4 = AS 4.21.4 (a ’śnute), TB 2.4.6.9, KS 13.16. 3 4

K. F. GELDNER, 1951-7. Sur ce mot, É. PIRART, 2000, p. 375 n. 20. 22

4a. ná tā́ árvā reṇúkakāṭo aśnute tā́ ḥ occupe une place dʼinitiale différée. ||| Sur l’hapax legomenon reṇúkakāṭa-, voir Mayrhofer5. Le second terme de ce composé, dont kakā́ ṭikāfém. « ein best. Theil des menschlichen Hinterkopfes »6 derive, sans doute est-il, comme le dit Geldner7, une variante de kŕ̥kāṭa- « Halsgelenk »8. Ce dernier est peut-être à rapprocher du premier terme du composé kr̥kadāśū́ « ein best. dämonisches Wesen »9 de RS 1.29.7ab sárvam parikrośáṁ jahi V jambháyā kr̥kadāśvàm « Frappe tout ce qui hurle à (notre) entour, écrase celle qui mord au cou ! » ||| Le coursier ou cheval dʼattaque quʼil chevauche a beau courir au combat au point de se couvrir lʼencolure de poussière, les vaches ne tomberont pas aux mains du voleur de bétail : elles broutent dans lʼau-delà. 4b. ná saṁskr̥tatrám úpa yanti tā́ abhí | Complexité de la combinaison et de lʼordre des préverbes. ||| Comme au vers 3d, lʼordre des mots est : complément + verbe + sujet + postposition précisant le sens du complément. ||| Faut-il considérer -trá-, avec Sāyaṇa commentant AS 4.21.4, comme un suffixe ou, avec Oldenberg10, comme le second terme dʼun composé, tiré de TRĀ « protéger » ? La présence de -sva-t-elle à l’encontre l’idée d’un dérivé de KR̥T « couper » ? Remarquons que saṁKR̥T est employé dans le ŚBM 3.1.3.4 et 11.6.1.4 pour la découpe des viandes. Les vers ab font ainsi allusion à une agression ennemie lors de laquelle il y a vol de bétail pour sa viande. 4c. urugāyám ábhayaṁ tásya tā́ ánu L’allongement métrique de la voyelle finale du premier terme du composé urugāyám n’a pas été noté. Remarquons que lʼisolement de ce mot devant la césure est souligné par lʼordre des mots qui suivent la césure, un procédé déjà rencontré au vers 2c. Lʼordre des mots est : complément + génitif + sujet + postposition précisant le sens du complément. 4d. gā́ vo mártasya ví caranti yájvanaḥ || Tout comme le substantif vyáthiṣ- rencontré à la strophe précédente, le verbe ví CAR paraît dénoter les déplacements des bovins sur la prairie où ils 5

M. MAYRHOFER, 1992-2001, vol. II p. 459. O. VON BÖHTLINGK, 1879-89, vol. IV p. 1. 7 K. F. GELDNER, 1951-7. 8 O. VON BÖHTLINGK, 1879-89, vol. IV p. 90 ; M. MAYRHOFER, 1992-2001, vol. I p. 388). 9 O. VON BÖHTLINGK, 1879-89, vol. IV p. 89. 10 H. OLDENBERG, 1909-12, vol. I p. 387. 6

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paissent. ||| En vertu de la règle stylistique, nous trouvons derrière le verbe la fin de ce qui a déjà commencé avant le verbe (tásya ... mártasya ... yájvanaḥ). ||| En indépendante-principale, le génitif se place derrière le mot quʼil détermine, mais il y a ici deux mots déterminés : urugāyám ábhayaṁ tásya tā́ ḥ ... gā́ vo mártasya ... yájvanaḥ.

5 = AS 4.21.5 (d ichāmi hr̥dā), TB 2.8.8.12, KS 13.16. 5a. gā́ vo bhágo gā́ va índro me acchān La métrique abrège ºe devant aº. ||| Ce vers rappelle RS 3.36.5c índro bhágo vājadā́ asya gā́ vaḥ « Indra est Bhaga ; ses vaches assurent (notre) alimentation ». ||| La combinaison cch est employée derrière voyelle brève11. ||| Accord du verbe avec le substantif attribut : gā́ va índro me acchān. ||| Indicatif aoriste exprimant le passé récent ou ponctuel : acchān(d-s-t). ||| me acchān ... sómasya ... bhakṣáḥ : de tels ingrédients peuvent être retrouvés dans 10.34.1cd sómasyeva maujavatásya bhakṣó V vibhī́ dako jā́ gr̥vir máhyam acchān « Pour moi, la vivacité du dé a la saveur du sóma du (mont) Mujavant ». ||| La combinaison de icchā́ mi avec l’instrumental interne mánasā est formulaire comme le montre notamment 10.53.1 yám áichāma mánasā sò ’yám ā́ gād V yajñásya vidvā́ n páruṣaś cikitvā́ n « Le (dieu) que nous cherchions en pensée, le voici venu, lui qui s’y connaît en matière de sacrifice et (en) comprend les rouages ». 5b. gā́ vaḥ sómasya prathamásya bhakṣáḥ | L’épithète prathamá- désigne le sóma fraîchement pressuré comme en 10.94.8 tá ū sutásya somyásyā́ ndhaso V’ṁśóḥ pīyū́ ṣam prathamásya bhejire « De la fleur du sóma pressuré les (pierres) ont consommé la crème de la première tige ». 5c. imā́ yā́ gā́ vaḥ sá janāsa índraḥ La clausule sá janāsa índraḥ coïncide avec celle des vers 2.12.1d-14d « celui-là, gens, c’est Indra ». ||| Accord du sujet avec lʼattribut : imā́ yā́ gā́ vaḥ sá ... índraḥ « Les vaches que voici, il est (= elles sont) Indra ». Sur l’équation d’Indra et des vaches, Bergaigne12. ||| Atonie du vocatif. 5d. icchā́ mī́d dhr̥dā́ mánasā cid índram ||

11 12

A. A. MACDONELL, 1916, p. 38 §51. A. BERGAIGNE, 1878-97, vol. II p. 179 et 23. 24

ít « voilà pourquoi » ? Position emphatique du verbe icchā́ mi. ||| Bégaiement stylistique : hr̥dā́ + césure + mánasā + cid, car la particule emphatique souligne l’ensemble des deux instrumentaux.

6 = AS 4.21.6, TB 2.8.8.12 (b kr̥ṇuyāt ; comm. kr̥ṇuthā). 6a. yūyáṁ gāvo medayathā kr̥śáṁ cid Par décision de la diascévase, il y a atonie du verbe indépendant medayatha même si un vocatif et la césure le précèdent immédiatement. 6b. aśrīráṁ cit kr̥ṇuthā suprátīkam | Il y a chiasme entre les deux premiers vers (yūyáṁ gāvo medayathā kr̥śáṁ cid V aśrīráṁ cit kr̥ṇuthā suprátīkam), lʼordre des mots en a étant sujet + vocatif + verbe + objet souligné ; celui des mots en b, objet souligné + verbe + attribut. ||| Pour suprátīka-, au lieu de « beau à contempler »13, je propose « qui a bonne mine » d’après le grec πρόσωπον « visage ». 6c. bhadráṁ gr̥háṁ kr̥ṇutha bhadravāco L’allongement métrique, pourtant noté dans le vers précédent, ne l’est pas cette fois-ci : kr̥ṇutha. Sans doute faut-il le restituer. L’hapax legomenon bhadravāc- qui occupe la clausule, pour y faire écho, souligne l’attribut de l’objet du verbe. 6d. br̥hád vo váya ucyate sabhā́ su || La laryngale qui, pour la métrique, fait encore position dans váyHaḥ est un argument en faveur de la haute antiquité du vers. ||| Ordre normal attribut + objet/sujet dans ces deux derniers vers : bhadráṁ gr̥háṁ kr̥ṇutha bhadravāco V br̥hád vo váya ucyate sabhā́ su. ||| Place libre du locatif sabhā́ su.

7 = AS 4.21.7 (= AS 7.75.1 ; a sūyavase ruśantīḥ ; d pari vo rudrasya hetir vr̥ṇaktu)14, TB 2.8.8.12 (a sūyavasaṁ ruśantīḥ). b = MS 4.1.1. c = VSM 1.1, 13

L. RENOU, 1955-69, vol. V p. 86, pour 7.61.1a. AS 7.75 ne compte que deux strophes : || (= AS 4.21.7) || 1 || padajñā́ stha rámatayaḥ V sáṁhitā viśvánāmnī | úpa mā devīr devébhir éta | imáṁ goṣṭhám idáṁ sádo V ghr̥ténāsmā́ nt sám ukṣata || 2 || || « Fécondes et brillantes dans un beau pâturage, buvant des eaux limpides à un bon abreuvoir, que le voleur ne sʼempare point de vous, ni le sorcier funeste, que le trait de Rudra vous épargne. Vous connaissez votre séjour, vous vous y plaisez, réunies, de toutes espèces : venez à moi, ô 14

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TS 1.1.1.1, MS 1.1.1, 4.1.1, KS 1.1, ŚBM 1.7.1.7, TB 3.2.1.5; cf. RS 2.42.3c (= KS 30.10). d : cf. RS 2.33.14a, 7.84.2c, KS 1.1, 17.16a, 30.10, TS 4.5.10.4a, TB 2.8.6.9, VSK 17.8.4a, VSM 16.50a, MS 2.9.9a. 7a. prajā́ vatīḥ sūyávasaṁ riśántīḥ Les deux premiers vers forment le groupe des épithètes détachées de lʼobjet du verbe de la strophe. ||| Les participes riśántīḥ et píbantīḥ sont précédés de leurs compléments respectifs sūyávasam et śuddhā́ apáḥ suprapāṇé. 7b. śuddhā́ apáḥ suprapāṇé píbantīḥ | Ordre épithète + centre : śuddhā́ apáḥ. ||| Le padapāṭha résorbe le caractère rétroflexe de la nasale dans suprapāṇé. 7c. mā́ va stená īśata mā́ gháśaṁsaḥ Sur le sandhi va stenáḥ < vaḥ | stenáḥ, MacDonell15. ||| mā́ + injonctif présent : inhibitif16. ||| L’apparente thématisation de la forme īśata, irrégulière pour la troisième personne du singulier de la voix moyenne de l’injonctif présent de ĪŚ, provient du fait que, primitivement, il était recouru à la désinence -at au lieu de -ta. Remarquons d’ailleurs l’inexistence de *īṣṭa et le sandhi excessif dans mā́ gháśaṁsaḥ même si Geldner17 renvoie à RS 2.42.3c mā́ na stená īśata mā́ gháśaṁsaḥ « Que le voleur ni le calomniateur n’aient aucune prise sur nous ! » Le vers peut être restauré comme suit : mā́ va ˟stenó ˟mā́ agháśaṁsa ˟īśat. En effet, comme l’idée d’un verbe conjugué au pluriel en combinaison avec un sujet singulier elliptique est indéfendable, il faut nécessairement penser à une forme retouchée. Celle-ci fut abondamment employée avec mā́ et mā́ kiḥ. En voici quelques autres exemples : 1.36.16d mā́ naḥ sá ripúr īśata « puisse un tel fourbe n’avoir aucune prise sur nous ! » ; 2.7.2ab mā́ no árātir īśata V devásya mártyasya ca « Que la défaveur du dieu ni celle du mortel n’aient aucune prise sur nous ! » ; 6.71.3d (= 6.75.10d) rákṣā mā́ kir no agháśaṁsa īśata « Protège(-nous) ! Que le (nuisible) calomniateur n’ait aucune prise sur nous ! » Alors même que, par ailleurs, le verbe se conjugue bel et bien comme un athématique. Exemple : 10.185.2c nahí téṣām amā́ caná V nā́ dhvasu vāraṇéṣu | ī́ śe ripúr agháśaṁsaḥ « Car, sur ces (dieux), ni dans la maison ni sur les chemins étrangers, le fourbe calomniateur n’a de prise ».

Déesses, avec les Dieux ; cette étable, cette demeure, vous-mêmes, aspergez tout cela de beurre » (traduction HENRY, 1904). 15 M. MACDONELL, 1916, p. 35 §43.3a. 16 Sur lʼinhibitif, K. HOFFMANN, 1967, p. 44 ; J. KELLENS, 1984a, p. 244 ; J. KELLENS et É. PIRART, 1988-91, vol. II p. 179. 17 K. F. GELDNER, 1951-7. 26

7d. pári vo hetī́ rudrásya vr̥jyāḥ || La présence du théonyme derrière la césure a entraîné un déficit syllabique parfaitement licite. L’hypothèse du développement d’une svarabhakti entre d et r18 est à rejeter. ||| Pour ce vers, Geldner19 renvoie à 2.33.14 pári ṇo hetī́ rudrásya vr̥jyāḥ V pári tveṣásya durmatír mahī́ gāt « Que l’arme de jet de Rudra nous épargne, que la grande malveillance du (dieu) redoutable (nous) esquive ! » ||| L’allongement métrique de la voyelle finale de pári est rarement noté. ||| La nasale est très probablement à restituer dans vr̥jyāḥ. ||| Le génitif complément du nom suit ce dernier sʼil est sujet (pári vo hetī́ rudrásya vr̥jyāḥ) ; le précède, sʼil est attribut (5b). ||| hetíḥ | rudrásya > hetī́ rudrásya : ce type de sandhi a dû exister pour dʼautres consonnes comme l’illustrent par exemple *arám+mati- > arámati- et *akám | mánas > avestique akō manō.

8 = AS 9.4.23 (a úpehópaparcana ; b asmín goṣṭhá úpa pr̥ñca naḥ ; c ... yád rétaḥ ; d ... vīryàm)20, TB 2.8.8.12 (c uparṣabhasya). Traduction de Victor Henry21 pour AS : « Approche-toi dʼici, toi qui tʼaccouples, en cette étable, approche-toi de nous ; quʼil sʼapproche, le sperme du Taureau ; quʼelle sʼapproche, ô Indra, ta virilité ». ||| AS 4.21 est, selon KauśS 19.2, prononcé sur une solution saline qui doit rendre les vaches fécondes. La strophe finale que nous trouvons dans RS 6.28 manque dans AS 4.21, mais existe sous une version différente dans AS 9.4.23. Le taureau de b serait le taureau du troupeau. 8a. úpedám upapárcanam L’hapax legomenon upapárcana- dérive du verbe úpa PR̥C « féconder, renforcer, ajouter-en-renforcement, combler »22. ||| Il y a deux úpa de trop si tous doivent entrer dans la même phrase : úpedám upapárcanam23 V āsú góṣū́ pa pr̥cyatām | úpa r̥ṣabhásya rétasy V úpendra táva vīryè. La solution sera de corriger le premier en ˟utá et de faire de a une présentative indépendante, idám se justifiant alors parfaitement comme cataphorique. 18

A. A. MACDONELL, 1916, p. 15 §15.1d. K. F. GELDNER, 1951-7. 20 Dernière strophe de lʼhymne glorifiant le nouveau taureau reproducteur que lʼon lâche parmi les vaches avec la récitation de la strophe unique d’AS 7.111 et de toutes les 24 d’AS 9.4 (voir KauśS 24.19-22). 21 V. HENRY, 1904. 22 L. RENOU, 1955-69, vol. XV p. 49 et 59, pour 1.40.8a et 2.24.15c. 23 Sur le caractère abusif de la répétition du préverbe en présence du dérivé nominal correspondant, É. PIRART, 2006b, p. 32. 19

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8b. āsú góṣū́ pa pr̥cyatām | úpa pr̥cyatām : impératif passif impersonnel de type sanscrit épique « il doit y avoir fécondation ». 8c. úpa r̥ṣabhásya rétasiy Pour la métrique, le sandhi, présent dans TB, est à rétablir entre úpa et r̥ṣabhásya. ||| On trouve vr̥ṣabhásya ... rétasi en RS 9.19.4b à propos du jus de sóma. Comme les deux ingrédients principaux des libations sont le jus de la plante et le lait, nous pouvons proposer « mélange » pour upapárcanad’autant que la racine avestique √ rit suggère que le védique rétas- désigne un liquide fondamentalement destiné au mélange. 8d. úpendra táva vīriyè || Emploi de la forme tonique táva, mais, derrière vocatif, nous pouvons pourtant trouver lʼenclitique tout aussi bien. Exemple : 1.84.1a ásāvi sóma indra te. Contre toute logique. ||| Trois personnes grammaticales sont à distinguer dans cette strophe : la troisième du féminin pluriel pour les vaches, la troisième du masculin singulier pour le taureau et la deuxième du masculin singulier pour Indra. Il est clair que la constation de cette triade empêche d’assimiler Indra qui est nommé au vocatif (indra táva) au taureau qui l’est à la troisième personne grammaticale (vr̥ṣabhásya). Dès lors, le vīryà du dieu, faut-il comprendre, fait allusion non à son statut de mâle reproducteur, mais bien plutôt à sa fonction de vīrá au sens étymologique de ce mot : le dieu qui accompagne, suit (VĪ) ou garde les vaches est un vacher (gópati-). ||| La dernière strophe est employée dans le Vr̥ṣotsarga, le rituel du remplacement dʼun vieux taureau par un jeune24. Dans lʼAgniṣṭoma, lorsque lʼon promène les vaches de la dakṣiṇā (= les honoraires sacerdotaux), le sacrifiant récite AS 4.2125 (= RS 6.28.1-7). Les vaches sont au nombre de 100, de 112 (= 16 x 7), de 60, de 21, de 7 ou de 1000. Selon le Śāṅkhāyanagr̥hyasūtra26 et le Kauśikasūtra27, on récite RS 6.28.1-7 lorsque les vaches sont revenues ; RS 6.28.8, pour les faire entrer dans lʼétable ; RS 10.169, une fois quʼelles sont dans lʼétable28. K. F. Geldner29 émet lʼhypothèse quʼil était 24

Sur le Vr̥ṣotsarga, Sh. EINOO, 2004. W. D. WHITNEY, 1905, p. 186-188 ; W. CALAND et V. HENRY, 1906-7, vol. II p. 293. ||| Absent de la Paippalādasaṁhitā. 26 ŚāṅkhGS 3.9. 27 KauśS 3.5.4-7 : pari vapasvedanaṁ vr̥ñjantu ghoṣiṇyas sa mā svastha gopate mā vo rakṣo mano riṣat pūṣā gā anvetu na iti gāḥ pratiṣṭhamānā anumantrayate || 4 || pari pūṣeti ... || 5 || ... ghr̥tācya ā gāvo agmann iti saptāgatāsu || 6 || uttamām ākurvan mayobhūr vāta iti ca sūktena gosthagatāḥ || 7 ||. 28 Voir V. HENRY, 1904, p. 103 n. 1. 25

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peut-être prescrit, à lʼorigine, de bénir les vaches offertes en cadeau comme honoraires à leur entrée dans la maison du nouveau propriétaire. Selon le Vaitānasūtra30 , le prêtre qui avait officié attendait les vaches prescrites comme honoraires avec l’hymne AS 4.21 (= RS 6.28.1-7).

Bilan La plainte dʼune vache fait lʼobjet dʼun poème zoroastrien. Quelle est cette vache ? De quoi se plaint-elle ? Et, si cette vache est pleine, bien dʼautres questions seront posées. Lʼidentité de la vache est une question à laquelle la Gavāṁ Stuti permet de répondre en bonne partie avant même de lire le poème zoroastrien. Les vaches du Véda, elles aussi, servent le sacrifice, y ont un rôle de premier plan. Au terme de lʼanalyse de lʼéloge védique des vaches, nous pouvons engranger aussi quelques données formelles. Le meilleur outil dans la recherche du plan d’un hymne védique (sūkta) est le relevé grammatical. Il permet de détecter aussi les strates de sa composition ou les pièces du collage. Strophes

Types strophiques

Personne grammicale des vaches

Personne grammicale d’Indra

1 2 3 4 5 6 7 8

triṣṭubh (4 × 11) jagatī (4 × 12) jagatī jagatī triṣṭubh triṣṭubh triṣṭubh anuṣṭubh (4 × 8)

3e --3e 3e 3e 2e 2e 3e

3e 3e ----3e ----2e

Nombre grammatical de la première personne pluriel ------singulier -------

L’isolement de la dernière strophe que ce relevé permet de détecter dans le sūkta est confirmé par les emplois que les manuels du rituel védique prescrivent. Les cinq premières strophes qui nomment à la troisième personne grammaticale non seulement Indra, mais aussi les vaches, ne sont adressées à personne en particulier alors même que la première personne est présente sous sa forme du pluriel dans la strophe d’ouverture et sous sa forme du sin29 30

K. F. GELDNER, 1951-7. VaitS 21.24. 29

gulier dans la cinquième. Les cinq premières strophes qui toutes nomment les vaches à l’exception de la deuxième forment un ensemble fait de prières indirectes dans lesquelles le dieu n’apparaît pas (1 et 3) et d’éloges indirects (2, 4 et 5). Éloges et prières sont parfaitement compatibles. Nous pouvons même affirmer que la prière n’est efficace que si l’éloge l’accompagne. Les strophes 6-7 sont adressées aux vaches tandis que la dernière interpelle le grand dieu dans une prière concernant leur fécondité. La métrique a joué un rôle non négligeable dans l’approche des difficultés du texte. Rappelons ici les mètres possibles pour la confection des hendécasyllabes et des dodécasyllabes31 : × ― × ―, × ― × ― ×, ― × ― ᴗ ―, ,×ᴗ― ,―ᴗ× ,×ᴗ ,ᴗ× ―ᴗ―× ―ᴗ―ᴗ× Les possibilités de lʼoctosyllabe ressortent du schéma suivant : ××××ᴗ―ᴗ× Les hendécasyllabes que nous avons trouvés dans RS 6.28 sont : ᴗ ― ᴗ ―, × ᴗ ― ― ᴗ ― × : 1c ; ᴗ ― ᴗ ―, ― ᴗ ᴗ ― ᴗ ― × : 7a ; × ― ᴗ ―, × ᴗ ― ― ᴗ ― × : 5a, 7b ; × ― ᴗ ―, ᴗ ᴗ ― ― ᴗ ― × : 6c ; × ― × ―, ― ᴗ × ― ᴗ ― × : 6a ; × ― × ―, ― ᴗ ᴗ ― ᴗ ― × : 7c ; × ― × ―, ᴗ ᴗ ― ― ᴗ ― × : 6b ; × ― ᴗ ― ×, ᴗ ᴗ ― ᴗ ― × : 1a, 1b, 1d ; ᴗ ― × ― ×, ᴗ ᴗ ― ᴗ ― × : 5c ; ᴗ ― × ― ×, × ᴗ ― ᴗ ― × : 6d ; × ― × ― ×, ᴗ ᴗ ― ᴗ ― × : 5b ; ― × ― ᴗ ―, ᴗ ᴗ ― ᴗ ― × : 5d. 31

× = syllabe de longueur indifférente ; ― = syllabe longue par position ou par nature ; ᴗ = syllabe brève ; , = césure ; . = lacune d’une syllabe. 30

Les dodécasyllabes de RS 6.28 sont : ᴗ ― × ―, ― ᴗ ᴗ ― ᴗ ― ᴗ × : 4a ; ᴗ ― × ―, ᴗ ᴗ ― ― ᴗ ― ᴗ × : 4c ; × ― × ―, ᴗ ᴗ ― ― ᴗ ― ᴗ × : 3d ; ᴗ ― ᴗ ― ×, ᴗ ᴗ ― ᴗ ― ᴗ × : 3a, 4b ; ᴗ ― × ― ×, ᴗ ᴗ ― ᴗ ― ᴗ × : 2d ; × ― ᴗ ― ×, ᴗ ᴗ ― ᴗ ― ᴗ × : 3c ; × ― × ― ×, ᴗ ᴗ ― ᴗ ― ᴗ × : 3b, 4d ; ― × ― ᴗ ―, ᴗ ᴗ ― ᴗ ― ᴗ × : 2a. Les octosyllabes de RS 6.28 : ᴗ ― ᴗ ᴗ ᴗ ― ᴗ × : 8a, 8d ; × ― × × ᴗ ― ᴗ × : 8b ; ᴗ ― ᴗ ― ᴗ ― ᴗ × : 8c. Trois vers irréguliers ont été relevés : ᴗ ― ᴗ ― ᴗ, ― . ― ᴗ ― ᴗ × : 2b où l’irrégularité, d’un type exceptionnel, a été justifiée tant bien que mal ; × ― × ―, ᴗ ᴗ ᴗ ― ᴗ ― ᴗ × : 2c où l’anomalie n’a pu être résorbée qu’avec difficulté ; ᴗ ― × ― ×, ― ― ᴗ ― × : 7d où le déficit syllabique, pleinement licite, est dû à la présence d’un théonyme derrière la césure. Une diphtongue est abrégée par position dans 1a et 4a (ºŏ aº) ; dans 5a (ºĕ aº). Un allongement est noté dans 6a (medayathā) ; dans 6b (kr̥ṇuthā) ; dans 7a (sūyavasam). Trois cas d’allongement non noté de la voyelle finale d’un mot ou d’un premier terme de mot composé sont à relever : 4c. urugāyám ; 6c. kr̥ṇutha ; 7d. pári. La métrique nous invite à restituer une voyelle u dans 1b (raṇáyantuv) ; i dans 2a, 8c et 8d (iy). Le sandhi est à rétablir dans 8c (˟úparṣabhásya). Une laryngale fait position dans 6d (váyHaḥ). Plusieurs amendements ont permis de rétablir si non le texte original, du moins la correction grammaticale et métrique de ce sūkta manifestement composite : 2a. índro yájvane pr̥ṇaté ca ˟śíkṣati 31

2c. bhū́ yobhūyo rayím ˟ít ˟tásya vardháyan 2d. ábhinne khilyé ní dadhāti ˟devayóḥ 4c. ˟urūgāyám ábhayaṁ tásya tā́ ánu 6c. bhadráṁ gr̥háṁ ˟kr̥ṇuthā bhadravācaḥ 7c. mā́ va ˟stenó ˟mā́ agháśaṁsa ˟īśat 7d. ˟párī vo hetī́ rudrásya ˟vr̥ñjyāḥ 8a. ˟utédám upapárcanam 8c. ˟úparṣabhásya rétasi.

32

I 4. Le commentaire de Sāyaṇa 0 ā gāva ity aṣṭarcam pañcamaṁ sūktam | atreyam anukramaṇikā gāvo gavyaṁ dvitīyaindrī1 vāntyaś ca pādo ’ntyānuṣṭub jāgatas V tr̥co dvitīyādir iti | bharadvāja r̥ṣiḥ | indro yajvana ityādyas tr̥co jāgataḥ | upedam ity antyānuṣṭup śiṣṭāś catasras triṣṭubhaḥ | kr̥tsnasya gaur devatā dvitīyāyāḥ2 sūktāntyapādasya ca vikalpenendro devatā | gavām upasthāna etat sūktam | sūtritaṁ cāgāvīyam eka iti || (Dans la troisième récitation [anuvāka-] du sixième cercle [maṇḍala-] de la Collection [saṁhitā-] du Savoir des Strophes [r̥gveda-])3, le cinquième poème [sūkta-] est celui dont l’incipit est formé des mots ā gāvaḥ et qui contient huit strophes [r̥c-]. À propos de ce (poème), la Table des matières (de la Collection)4 dit ceci : « Le (poème) dont l’incipit est formé des mots ā gāvaḥ concerne les vaches, (à ceci près que) la deuxième strophe et le dernier vers peuvent tout aussi bien5 concerner Indra. La dernière strophe est une anuṣṭubh, et le rondeau [tr̥ca-] que nous trouvons à partir de la deuxième strophe est fait de (trois) jagatī ». L’auteur du poème est Bharadvāja. Le rondeau de jagatī commence avec les mots indro yajvane. L’anuṣṭubh finale commence avec les mots upedam. Les quatre (strophes) qui restent sont des triṣṭubh. La divinité honorée par l’ensemble (du poème) est Go6, (mais), pour la deuxième strophe et le dernier vers (du poème), il y a l’alternative d’Indra comme divinité honorée. Ce poème (est récité) lors de l’hommage rendu aux vaches. Et le poème est enregistré dans le traité [sūtra-] avec la phrase commençant avec les mots « Certains l’Āgāvīya »7.

1

Accord avec le sujet le plus proche, dvitīyā {r̥k}. Sous-entendre r̥caḥ. 3 Sur les différents types de divisions de la RS, voir J. GONDA, 1975, p. 9. 4 Cette Table des matières de la R̥gvedasaṁhitā, la Sarvānukramaṇī, a été éditée par A. A. MACDONELL, 1886. 5 vā. 6 La divinité appelée Go « la Vache » pourrait être Pr̥śni, la mère des Marut et des Aśvin, ou Aditi, celle d’Indra et des autres Āditya, mais il y a beaucoup d’autres possibilités comme Sarasvatī, l’épouse de Brahman. 7 ĀśvGS 2.10.7. 2

33

1 gāva āgman | asmadīyaṁ gr̥ham āgacchantu | utāpi ca bhadram bhajanīyaṁ śubham akran kurvantu | tathā goṣṭhe ’smadīye gavāṁ sthāne8 sīdantūpaviśantu | tadanantaram asme ’smāsu raṇayantu ramantām | api cehāsmin goṣṭhe pururūpā nānāvarṇā gāvaḥ prajāvatīḥ prajāvatyaḥ 9 saṁtatisahitāḥ pūrvīr bahvya indrāyendrārtham uṣasa uṣaḥkālān prati10 duhānā dogdhryaḥ syur bhaveyuḥ || Que les vaches arrivent à notre maison et, de surcroît, (y) apportent un bonheur digne de vénération ! Par exemple, qu’elles entrent dans notre étable ! Ensuite, qu’elles se trouvent à l’aise chez nous ! En outre, dans cette étable, les vaches de diverses couleurs, accompagnées d’une progéniture = avec une descendance, nombreuses, pour Indra, chaque matin, puissent-elles être donneuses de lait ! 2 indro yajvane yajanaśīlāya pr̥ṇate ca stutibhiḥ prīṇayitre ca stotre11 śikṣaty apekṣitaṁ dhanaṁ dadāti | na kevalaṁ12 sakr̥d eva dānam api tu sarvadaivety āhoped dadāty upetya sarvadā dadāty eva | yajvanaḥ stotuś ca svaṁ svabhūtaṁ dhanaṁ na muṣāyati kadā cid api13 nāpaharati | api cāsyobhayavidhasya rayiṁ dhanam ātmanā dattam bhūyobhūyaḥ punaḥpunar vardhayann id vr̥ṣṭim prāpayann eva devayuṁ devam indram ātmana icchantaṁ taṁ14 janam abhinne śatrubhir15 abhedye khilye | khilam apratihataṁ sthānam | tad eva khilyam | svārthiko yat | anyair gantum aśakye sthale ni dadhāti nikṣipati | nivāsayatīty arthaḥ || daivīnāṁ haviḥṣu na tā naśanti na tā arveti godevatāyā16 yājyāpuronuvākye17 | gostome ’pi

8

La correction de l’avestique +gaostāna- que Ch. BARTHOLOMAE, 1904, col. 485, propose ne peut être acceptée. Nous devons conserver gauuō.stāna- : voir É. PIRART, 2012a, p. 249. 9 Sāyaṇa résorbe la différence dialectale avant de proposer un synonyme. 10 Apporte une nuance distributive. 11 Autrement dit : le sacrifiant et son purohita. 12 na kevalam ... api tu « non seulement..., mais aussi ». 13 La particule api doit apporter de l’emphase à kadā cit. 14 Dans la langue de Sāyaṇa, il est toléré que, dans une seule et même phrase, un même être soit mentionné à deux cas différents. Deux exemples peuvent en être trouvés ici : prāpayan ... indram ; asya ... taṁ janam. 15 En sanscrit védique, le cas employé pour le complément d’agent de l’adjectif verbal en -iya- ou équivalent est plutôt le datif. 16 Sous-entendre r̥caḥ. 17 ĀśvŚS 6.14. 34

marutvatīyaniṣkevalyayor ete sūktamukhīye18 | sūtritaṁ ca na tā arvā reṇukakāṭo aśnute na tā naśanti na dabhāti taskara iti19 || Indra offre la richesse attendue au (sacrifiant) qui lui rend habituellement un culte et au chantre qui le réjouit d’éloges. Non seulement, c’est de façon soudaine quand il donne, mais aussi de façon permanente, dit (le poète). S’il s’approche, c’est toujours pour donner. Au sacrifiant ni au chantre (Indra) certainement jamais ne retire les propres biens. En outre, la richesse que l’homme tenant les deux rôles20 est arrivé à détenir par lui-même, le dieu Indra, faisant en sorte que chaque fois davantage lui arrive la pluie si cet homme cherche à lui (rendre un culte), le khilya duquel les ennemis ne peuvent l’écarter ―Le khila, la friche est un endroit qui n’a pas encore été frappé (par le soc de la charrue) ; le khilya, c’est-à-dire : ce qui est en rapport avec le khila ; le suffixe -ya- est employé au sens propre―, (Indra à cet homme) assigne le terrain ferme21 où les autres ne peuvent aller, (Indra le) lui donne comme habitat, devons-nous comprendre. Entre les haviṣ des Daivī, (les strophes) 6.28.3 et 6.28.4 sont la puronuvākyā et la yājyā22 de celle qui a Go pour divinité [ou: qui a les vaches pour divinités]. Les deux strophes d’éloge de la Vache [ou : des vaches] qui forment la partie essentielle du poème sont récitées aussi au cours du Marutvatīyaśastra23 et du Niṣkevalyaśastra24. Et cela est enregistré dans le traité comme suit : « 6.28.4 et 6.28.3 ». 3 tā gāvo na naśanti | asmatsakāśān na naśyantu | kiṁ ca taskaraś coro ’pi na dabhāti | asmadīyā gā na hiṁsyāt | tathāmitro ’mitrasya śatroḥ sambandhi vyathiḥ śastram āsām imā gā nā dadharṣati nākrāmatu | gopatir evambhūtānāṁ gavāṁ svāmī yajamāno yābhir gobhir devāṁś cendrādīn uddiśya25 yajate yajanaṁ karoti | yā gā indrārthaṁ dadāti ca prayacchati ca tābhis tādr̥śībhir gobhiḥ saha jyog ic cirakālam eva sacate samgacchatām || 18

Sous-entendre r̥cau. Féminin duel. ĀśvŚS 9.5. 20 De sacrifiant et de chantre. 21 Non marécageux. 22 L’ordre des termes du dvandva, imposé par la grammaire, est à l’origine de l’inversion yājyāpuronuvākye. 23 L. RENOU, 1954, p. 123 : « MARUTVATĪYA(graha) n. de puisées à Indra Marutvant, accompagnées du śastra afférent constitué essenciellement par RS. X 73, K. X 3 3 CH. 276, 298 (second pressurage) ; libation afférente (homa) CH. 297 ». 24 L. RENOU, 1954, p. 87 : « récitation du hotr̥ au cours du second pressurage, consistant essentiellement en RS. I 32, cf. CH. 310 ». 25 Renfort de l’accusatif. 19

35

Que les vaches ne disparaissent pas de chez nous ! Autre chose : Puisse le voleur non plus ne causer aucun mal à nos vaches ! Par exemple, que le glaive appartenant à l’ennemi ne blesse pas les vaches que voici ! Les vaches qu’il offre en sacrifice aux dieux à commencer par Indra et dont il fait don à Indra, que le sacrifiant propriétaire de telles vaches soit associé avec de telles vaches et que ce soit pour longtemps ! 4 reṇukakāṭo reṇukasya reṇoḥ pārthivasya rajasa udbhedakaḥ26 | kaṭir bhedanakarmā | arvā yuddhārtham āgato ’śvas tā gā nāśnute na prāpnuyāt | tathā tā gāvaḥ saṁskr̥tatraṁ viśasanādisaṁskāraṁ nābhy upa yanti nābhigacchantu | api ca tā gāvo yajvano yāgaśīlasya tasya martasya manuṣyasyorugāyaṁ vistīrṇagamanam abhayam bhayavarjitam pradeśam anūddiśya vi caranti viśeṣeṇa gacchantu || Que, soulevant ―La racine KAṬ signifie séparer― de terre le poussier, la poussière, le nuage de poussière, le cheval venu combattre ne puisse atteindre les vaches ! Par exemple, que les vaches ne tombent pas sur les préparatifs d’un égorgement ! En outre, que les vaches de l’homme qui rend habituellement un culte (aux dieux) rejoignent précisément un lieu vaste, dépourvu de danger ! 5 gāva eva mahyam bhago dhanam bhavantu | indraś ca me mahyaṁ gāvo gā ’cchān yacchatu | gāvaḥ prathamasya haviṣāṁ śreṣṭhasya somasya bhakṣo bhakṣaṇam bhavantu | abhiṣutasya hi somasya gavyenājyādinā saṁskriyamāṇatvāt | he janāso janā imā evambhūtā yā gāvaḥ santi saḥ | tā ity arthaḥ | tā eva gāva indro bhavanti | dadhighr̥tādirūpeṇendrasyāpyāyanatvāt | evambhūtam indraṁ hr̥dā śraddhāyuktena manasā cit | cid ity apyarthe | icchāmīt kāmaya eva | sādhanabhūtābhir gobhir evambhūtam indraṁ yaṣṭum icchāmīty arthaḥ || Que les vaches fassent ma richesse ! Et qu’Indra m’offre des vaches ! Que les vaches fassent l’aliment du sóma, la meilleure oblation ! Telle est la raison de préparer le sóma pressuré notamment avec du beurre fondu liquide27 de vache. Ô gens, pour exister ainsi, de telles ―« tels » est mis pour « telles »― vaches deviennent Indra. En raison de (leur) caractère engraisseur d’Indra au moyen de ce qui, par exemple, a forme de lait sûri28 ou de beurre fondu solidifié29. À pareil Indra, même avec un esprit empreint de foi ―La particule cit a été employée au sens de « même »―, je désire 26 27 28 29

« Séparant vers le haut ». A. MINARD, 1949-56, vol. I §296a ; vol. II §222a. A. MINARD, 1949-56, vol. II §156a. A. MINARD, 1949-56, vol. I §296a. 36

―Comprenons : Je désire rendre un culte à Indra qui est devenu ainsi grâce aux vaches ayant cette efficace―.

6 he gāvo yūyam medayatha snehayatha | āpyāyanaṁ kuruthety arthaḥ | tathā kr̥śaṁ cit kṣīṇam apy aśrīraṁ cid aślīlam api supratīkaṁ śobhanāṅgaṁ kr̥ṇutha kurutha | he bhadravācaḥ kalyāṇadhvanyupetā gāvo ’smadīyaṁ gr̥ham bhadraṁ kalyāṇaṁ kr̥ṇutha | gobhir upetaṁ kurutha | sabhāsu yāgapariṣatsu he gāvo yuṣmākam br̥han mahad vayo ’nnam ucyate | sarvair dīyata ity arthaḥ || Ô vaches, vous, vous faites en sorte que soit gras ―Comprenons : Vous (lui) donnez de l’embonpoint―, par exemple, (que soit gras) même le maigre, vous, vous faites en sorte que soit beau de corps même le laidron. Ô vaches pourvues de bruits heureux, apportez le profit à notre maison ! Faites en sorte qu’elle soit pourvue de vaches ! Au cours des sessions sacrificielles, ô vaches, vous disposez, dit-on, grandement de quoi manger ―Comprenons : Tout un chacun (vous) donne (à manger)―. 7 he gāvo yūyam prajāvatīḥ prajāvatyo vatsābhir yuktā bhavateti śeṣaḥ | suyavasaṁ śobhanatr̥ṇaṁ riśantī riśantyo bhakṣaṇārthaṁ hiṁsantyo bhavata | suprapāṇe sukhena pātavye taṭākādau śuddhā nirmalā ’pa udakāni pibantīḥ pibantyaś ca bhavata | vo yuṣmān stenas taskaro meśata meśiṣṭa30 | īśvaro mā bhūt | tathāpy aghaśaṁso vyāghrādiḥ śatrur meśata | api ca vo yuṣmān rudrasya kālātmakasya parameśvarasya hetir āyudhaṁ ca pari vr̥jyāḥ parivr̥ṇaktu | pariharatu || Ô vaches, vous, soyez ―Ce verbe est à sous-entendre― flanquées d’un veau ! Soyez tueuses (de démons) à l’instant de brouter bonne herbe pour votre alimentation ! Et soyez buveuses d’eau pure, par exemple d’un étang d’eau potable ! Que le voleur ne puisse s’emparer de vous ! Qu’il ne devienne pas votre propriétaire ! Par exemple aussi, que l’ennemi du genre tigre ne puisse s’emparer de (vous) ! En outre, que l’arme du seigneur suprême chez qui le temps constitue l’âme ne vous atteigne pas ! 8 āsu goṣv idam upaparcanam āpyāyanam upa pr̥cyatāṁ sampr̥cyatām | he indra tava vīrye tvadīyavīrye 31 nimitta r̥ṣabhasya gavāṁ garbham ādadhānasya vr̥ṣabhasya retasīdam upaparcanam āpyāyanam | goṣu hy 30 31

Injonctif aoriste. ˟tvadīye vīrye˟ ? 37

āpyāyitāsu satīṣu tatsambandhikṣīrādihavirdvāreṇendra32 āpyāyito bhavatīty arthaḥ | upeti punarvacanam pādabhedānām pūraṇārtham iti || Puisse pareil embonpoint être associé à ces vaches ! Ô Indra, dans ta qualité de héros suiveur de bétail = dans la cause efficiente (que tu constitues), dans le semen du taureau placeur de l’embryon des vaches, il y a cette faculté d’apporter de l’embonpoint33. Car, devons-nous comprendre, une fois que les vaches sont devenues grosses, par le biais des oblations consistant notamment en ce lait qu’elles fournissent, Indra a pris de l’embonpoint ―La répétition de upa a pour but de remplir les lacunes des vers―.

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dvāreṇa « via, par le biais de, au moyen de ». Par sa qualité de vīrá et à la demande de l’adorateur, Indra facilite que le taureau féconde les vaches ou les rendent pleines. La mise bas d’un veau les amènera ensuite à donner le lait qui entrera dans la composition des oblations. L’adorateur, par ce biais, donnera de l’embonpoint au grand dieu. Vache pleine et dieu gras vont de pairs. Ceci constitue un échange de bons procédés entre le bouvier et Indra : comme la vache pleine lui aura permis de grossir grâce aux oblations, le grand dieu sera en mesure d’enrichir l’adorateur. 33

38

II La plainte de la vache Analyse du poème avestique Y 29 adroheṇaiva bhūtānām alpadroheṇa vā punaḥ | yā vr̥ttis tāṁ samāsthāya vipro jīved anāpadi || (Mānavadharmaśāstra 4.2)

II 1. Introduction Les Gāθā « cantates », cinq ensembles de strophes très vénérables, figurent au cœur du récitatif de la liturgie zoroastrienne, appartiennent donc à ce quʼil est convenu, voire habituel dʼappeler « Avesta » et constituent la couche la plus ancienne de la littérature iranienne. Leur langue est archaïque. Trois faits au moins le prouvent : lʼexistence dʼhiatus, révélés par la métrique, dus aux laryngales proto-indo-européennes ; un système verbal encore peu soucieux de la distinction des temps ou dans lequel les aspects et les modes tiennent le haut du pavé ; une batterie de pronoms enclitiques plus étendue quʼen avestique récent ou en védique. La première des cinq Cantates, lʼAhunauuaitī Gāθā, est divisée en sept unités (hāiti-). Le poème qui va être examiné en détail dans les pages qui suivent, constitutif de la deuxième unité de lʼAhunauuaitī Gāθā, concerne la vache. Mise en scène dans une conversation entamée avec les dieux et les hommes, la vache se plaint de son sort : comment peuvent-ils justifier les mauvais traitements qui lui sont infligés et admettre son immolation ? Sans doute le texte nʼest-il pas loin du pamphlet animaliste, et les dieux auront-ils du mal à trouver de quoi rassurer la vache. Le nombre des strophes de la hāiti précédente (Y 28)1, qui, elle aussi, en comptait onze2, certes pourrait être le fruit d’une entreprise secondaire. Par contre, cette hāiti-ci (Y 29), pour montrer à première vue une grande homo1 2

Sur la hāiti Y 28, É. PIRART, 2017a. Sur lʼhendécatropisme gâthique, J. KELLENS, 2007, p. 418. 39

généité, ne serait donc pas à mettre à la même enseigne3. Située à la suite de lʼAhiiāsā Hāiti, la Xšmāuuaiia.gə̄uš.uruuā Hāiti « Unité À-vous-le-Moi-dela-vache » paraît y être annoncée avec lʼhémistiche Y 28.1c2 yā xšnǝuuīšā gə̄ušcā uruu̯ānǝm « (la conviction) que tu pourras accueillir (mon âme) et celle de la vache ». Réalité primaire ou secondaire ? Dans la première alternative, nous pourrions considérer que les deux unités sont deux chapitres successifs dʼun seul et même texte4 ; dans la seconde, le diascévaste aurait tiré argument de lʼhémistiche Y 28.1c2 pour situer la Xšmāuuaiia.gə̄uš.uruuā Hāiti à la suite de lʼAhiiāsā Hāiti. La question me paraît pourtant dénuée dʼopportunité : lʼâme du sacrifiant comme celle de la vache, deux entités de première importance, sont logiquement et forcément omniprésentes dans le rituel, et aucune justification, aucune nécessité ne sont visibles ni prévisibles quʼil faille annoncer la Cantate traitant de lʼâme de la vache. Pour moi, reconnaître une telle annonce dans lʼhémistiche Y 28.1c2 relève du mirage. La Xšmāuuaiia.gə̄uš.uruuā Hāiti contient une conversation entre plusieurs divinités5. En plus dʼAhura Mazdā (« le Roi qui nous apporte la Sagesse ») et du dieu Aš ̣a Vahišta (« Agencement excellent »), trois des futurs Yazata (« (dieux) adorables ») interviennent : Narš Uruuan (« le Moi de l’Homme »), Gə̄uš Uruuan (« le Moi de la Vache ») et Gə̄uš Tašan (« le Configurateur de la Vache »). Jean Kellens n’exclue pas la possibilité de la mention d’un sixième dieu, Θβōrəštar6. Nous aurons bien sûr à nous demander qui sont cet homme et cette vache. Jean Kellens a déjà fort bien répondu à la question de l’identité de Gə̄uš Tašan il y a près de vingt-cinq ans7. « La plainte de l’âme de la vache », tel est le titre habituellement donné à cette deuxième unité de la première des cinq Cantates. Elle contient un mythe étiologique qui, comme beaucoup d’autres, fait de la plainte son re3

Sur les différentes opinions concernant le statut des unités (hāiti) gâthiques, J. KELLENS, 2007, p. 415-8. 4 Le Nērangestān (N 14.4) conserve lʼinformation peu banale que certains, par erreur, récitaient le Y 29 avant le Y 28. 5 Les indications données à la verticale, dans la marge de certains manuscrits du Yasna iranien pehlevi et du Yasna indien pehlevi, mais aussi de manuscrits du Yasna sanscrit, pour constituer une vraie distribution des rôles agrémentée dʼindications scéniques, font du texte de la Xšmāuuaiia.gə̄uš.uruuā Hāiti une conversation menée entre quatre personnages, Gə̄uš.urun, Ohrmazd, Aš ̣-vahišt et Vohu.man, tandis que Zaraθuštra tiendrait le rôle du récitant. Lʼhypothèse dʼune conversation est généralement acceptée, mais lʼidentification des personnages fait débat. 6 J. KELLENS, 1995, p. 349-50 ; 2015, p. 27. 7 J. KELLENS, 1995. 40

cours narratif. En effet, les mythes étiologiques du sacrifice, dans l’Avesta, démarrent souvent avec une plainte8 : une divinité, par exemple, se plaint devant le grand dieu que les hommes ne lui rendent aucun culte et met en avant tout ce dont elle serait capable si le sacrifice lui était offert. Sur base de l’argumentation développée, le grand dieu consent à ce que les hommes lui offrent à elle aussi le sacrifice et va jusqu’à en montrer lui-même l’exemple9. 8

Sur la plainte comme recours narratif des mythes étiologiques du sacrifice, É. PIRART, 2003a, p. 204 ; 2006b, p. 68 ; 2010b, p. 32. 9 J. KELLENS, 2016, p. 160, dans Yt 10.53-55 miθrǝm ... yazamaide ... .·. yō 1 bāδa ustānazastō (8) ˟garǝzaite2 ahurāi mazdāi (8) uiti aōjanō (5) .·. azǝm vīspanąm3 dāmanąm (7) nipāta ahmi huu̯apō (8) azǝm vīspanąm3 dāmanąm (7) nišharǝta ahmi huu̯apō (8) .·. āat̰ mā nō[it̰ ] maš ̣ii̯ āka (7) aōxtō.nāmana4 yasna yazǝṇte (9) yaθa ańiie yazatā̊ŋhō (8) aōxtō.nāmana4 yasna ˟yaziṇte5 (9) yeiδi zī6 mā maš ̣ii̯ āka (7) aōxtō.nāmana4 yasna †yazaiiaṇta7 (9) yaθa ańiie yazatā̊ŋhō (8) aōxtō.nāmana4 yasna ˟yaziṇte5 (9) frā nuru̯iiō aš ̣auuaōiiō (7) ˟aθβarštahe8 zarū āiiu (8) š́ ūš́ uiiąm9 (?) xvahe gaiiehe uv x anuuatō (9) amǝš ̣ahe upa.θβarštahe (8) jaγǝmiiąm10 (?) 11.·., souligne que lʼoptatif présent yazaiiaṇta ne peut entrer dans une structure dʼirréel du passé avec les optatifs parfaits š́ ūš́ uiiąm et jaγmiiąm, suggère de le corriger en optatif parfait ˟yaēziiaṇta. En réalité, comme il sʼagit dʼun discours direct mis dans la bouche de Miθra et que, de ce fait, nous attendons la structure de lʼirréel du présent (É. PIRART, 2006a, p. 123), mieux vaut garder yazaiiaṇta et analyser š́ ūš́ uiiąm et jaγmiiąm comme des présents intensifs : « Nous offrons le sacrifice à Miθra, lui qui, non sans dʼabord lui avoir rendu hommage les bras levés, *exposa ses griefs devant Ahura Mazdā en disant : Toi qui es capable de bonnes œuvres, (sache que) moi, de tous les êtres composant ton parti, je suis le protecteur. Toi qui es capable de bonnes œuvres, (sache que) moi, de tous les êtres composant ton parti, je suis le conservateur. Et les mortels ne mʼoffrent pourtant pas le sacrifice dans lequel mention soit faite de mes noms alors que les autres Adorables sont, eux, bel et bien honorés des sacrifices comportant la mention de leurs noms. En effet, si les mortels mʼoffraient le sacrifice dans lequel mention fût faite de mes noms ainsi quʼils le font pour les autres Adorables qui, quant à eux, se voient honorés des sacrifices comportant la mention de leurs noms, je pourrais à lʼenvi mettre en marche la durée du temps non découpé de ma propre vie, laquelle est ensoleillée ou immortelle, et intervenir pour une seule nuit ou deux ou cinquante ou cent du temps découpé »12. Notes. 1. Selon I. GERSHEVITCH, 1959, cet invariable, apparenté au sogdien β’δ ... β’δ « tantôt ... tantôt », doit signifier « at times ». Pour moi, apparenté au védique sabā́ dhaḥ « soudain, tout de suite », ce mot de valeur mal déterminable est à l’origine de be, la particule qui sert, en pehlevi, de marque du ponctuel. Je fais l’hypothèse qu’il a la même valeur qu’en pehlevi ou une valeur un peu plus forte (« non sans d’abord »), mais que le verbe « rendre hommage » au mode participe sur lequel il porte est ici sous-entendu comme c’est généralement le cas en présence de ustānazasta-. En effet, l’attitude que cet adjectif exprime est liée 41

L’âme de la vache est une entité divine connue de l’Avesta récent 10. Il serait donc bien question de la plainte que l’un des futurs Yazata adresse à Ahura Mazdā si, dans la Gāθā, le statut divin de l’âme de la vache n’était encore embryonnaire, car la plainte, au lieu de l’être au seul Ahura Mazdā, est adressée à l’ensemble des dieux : la vache se tourne vers eux en disant « vous ». Et elle n’est pas seule à se tourner vers eux : le récitant du premier vers, lui aussi, dit « vous ». Le statut divin de lʼâme de la vache nʼest donc guère assuré. Nous ne pouvons écarter que son âme ne soit rien dʼautre que ce quʼelle est, lʼâme dʼun bovin, ni ne jouisse dʼaucun statut particulier. Tout au plus pourrions-nous considérer que le propos est à généraliser et que le statut quʼil convient de lui accorder est celui de paradigme, même si, pour la Zand-āgāhīh, nous devrions plutôt reconnaître en Gə̄uš Uruuan lʼâme-moi de la vache primordiale11.

formulairement à l’idée d’hommage et l’implique (J. KELLENS et É. PIRART, 198891, vol. III p. 19-20). ||| 2. Comme γǝrǝzaite (K. F. GELDNER, 1886-96) serait l’une des rares formes de tudādi que √ garz produisît (Ch. BARTHOLOMAE, 1904, et, à sa suite, J. KELLENS, 1984a, p. 98, parlent de thématisation secondaire), que par ailleurs nous trouvons l’adādi comme en vieil-avestique et en védique (T. GOTō, 1987, p. 128), que l’exception RS 8.21.16b gr̥hāmahi peut être résorbée si nous y voyons l’injonctif aoriste thématique (contre K. HOFFMANN, 1967, p. 89) et que la seule autre forme qui puisse être invoquée, gǝrǝzaēta, est graphiquement ambiguë (langue originale gr̥zīta ?), il vaut sans doute mieux corriger ici la forme en ˟garǝzaite pour en faire un subjonctif présent. Ce subjonctif serait certes mal justifiable, mais, de toute façon, il faut penser à des réutilisations que la diascévase a dû faire de formes en dépit de toute logique syntaxique. Car, ne l’oublions pas, ici comme là, nous attendons assurément l’indicatif prétérit (= l’injonctif présent). Dʼautre part, nous devons envisager la possibilité que, pour ce verbe, lʼavestique ne coïncidât pas avec le vieil-avestique et que, face au présent radical que ce dernier documente, le dialecte récent optât pour le bhvādi comme le fait le sanscrit classique où nous trouvons garhate. ||| 3. Emploi factice de la finale casuelle des noms pour celle des sarvanāman : langue originale vispaišām. ||| 4. Langue originale uxta-nāmnā. ||| 5 . K. F. GELDNER, 1886-96, donne yazǝnti. Passif ? J. KELLENS, 1984a, p. 128, admet la possibilité de désinences actives pour le passif, mais je considère que cette possibilité ne peut être reçue que comme le fruit d’une manipulation grammaticale imputable à la diascévase dite « scolaire ». ||| 6. Langue originale yat zi ? ||| 7. Mis pour *yazaērǝm. ||| 8. É. PIRART, 2003b, p. 165. ||| 9. Langue originale śyauśyuyâm (védique *cyavīcyuyām). ||| 10. Langue originale jangamyâm (védique *ganīgamyām). ||| 11. Restitué d’après Yt 8.11. ||| 12. Cf. É. PIRART, 2010b, p. 134-5. 10 Selon le Dēnkard (Dk 3.7), le Gauš Ruvan du Y 29 est bel et bien un Yazata. 11 ZA 26.26. 42

Comme le recours narratif de la plainte sert très probablement le mythe étiologique d’un sacrifice, il convient d’identifier ce dernier ou de chercher dans le texte de la section Y 29 les mots utilisés pour le nommer. L’allusion que la septième strophe fait à la normative (mąθra-)12 concernant l’offrande (āzutōiš) et le lait (xšuuīd-) ainsi est-elle tout à fait capitale. Surtout que mąθrəm y constitue l’objet du verbe tašat̰ « il forge, configure » et que, de la sorte, parallélisme est tracé entre la vache et le mąθra qui, précisément, régente lʼemploi de son lait. Il semble donc que la matière oblatoire ne soit autre que le lait ou l’âme de la vache. Celle-ci ne peut accéder à l’immortalité que par le biais des actes et du comportement de son propriétaire. Le grand dieu aurait ainsi confié le sort de la vache au vacher. Dans la plainte quʼelle adresse aux dieux, la vache met alors en exergue la faiblesse ou l’incapacité du vacher : comment ce dernier pourra-t-il lui assurer l’immortalité ? Comme Zaraθuštra est probablement à reconnaître dans le vacher dont il est ici question, force nous est dʼenvisager la possibilité que la vache représenterait la daēnā māzdaiiasni (« la doctrine de ceux qui offrent le sacrifice au Roi qui apporte la Sagesse »). Rappelons que, selon les livres pehlevis, la vache est l’une des formes principales sous lesquelles la daēnā māzdaiiasni peut apparaître dans le discours mythique13. Cependant, l’enjeu, le thème débattu dans la hāiti pourrait bien être plus trivial : il serait question non seulement de la justification du fait de posséder ou d’avoir en propriété un animal, un être vivant, un être qui, par sa vie domestique, rappelle l’homme, mais aussi de celle de pouvoir en disposer au point de lui donner la mort ou de le manger. Souvenons-nous du procès intenté contre la hache lors des Bouphonies athéniennes 14 . Certes, faut-il bien voir, la possibilité de manger de la viande ou d’absorber du lait ne devait pas être si fréquente, mais l’exception ne pouvait que souligner le crime et la nécessité de lʼatténuer ou de l’excuser. Grande est la probabilité qu’il se fût agi de cela, du moins dans un premier temps ou à la base, lorsque le Gə̄uš Uruuan de l’unité éleva la voix. Sans compter que la mise des bestiaux à disposition de lʼhomme comprend aussi leur esclavage, leur service comme force de trait ou de labour15. Le rite instauré offrait-il lʼimmortalité à 12

Sur ce sens de mąθra-, É. PIRART, 2017a. VZ 30.57. 14 Sur les Bouphonies et lʼiconographie athénienne du sacrifice présenté comme sʼil nʼy avait pas de mise à mort, F. VIRET, 2008, p. 23. 15 Le fait de posséder un animal ou dʼen être le propriétaire n’allait sûrement pas de soi. Cʼest du moins ce que laisse penser lʼétymologie qui rapproche le verbe latin vendere du substantif venus. 13

43

lʼâme de la vache en échange des services rendus ? En définitive, cʼest toute lʼactivité humaine inaugurée au néolithique qui, dans La Plainte de la Vache, serait questionnée16. La question du bien-être animal est dʼailleurs évoquée à plusieurs reprises dans les livres pehlevis17. Comme celui de l’Āgavīya Sūkta (RS 6.28), le poème védique étudié dans le chapitre précédent, le titre de la hāiti Y 29 est tiré de lʼincipit, mais celui-ci, selon le document consulté, est plus ou moins long : Y 29.0 xšmāuuaiia.gə̄uš.uruua18 hāitiš Unité19 À-vous-le-Moi-de-la-vache20 En effet, le titre pehlevi de la hāiti, « Unité À-vous », diverge de lʼavestique, « Unité À-vous-le-Moi-de-la-vache » : Titre donné en fin de hāiti

Titre donné en tête

Avestique : xšmāuuaiia.gə̄uš.uruuąm hāitīm Pehlevi (J2) : hšmbd hʼt| 21 Scr. : ṣmāuīageūsaüruām prakr̥tim

Pehlevi (Mf4) : hšm|ʼybd hʼt| bvn

Comme les chapitres de plusieurs livres du Grand Avesta, selon le Dēnkard22, empruntaient leurs noms aux unités gâthiques, nous pouvons vérifier que le titre pehlevi du Y 29 divergent bel et bien de lʼavestique23 :

16

La Rivāyat pehlevie qui accompagne le Dādestān ī Dēnīg traite de la question à plusieurs reprises (RPDD 14, 26, 61.2-4). 17 CHP 7, Dk 3.388. Le contenu du Y 29 avait fait lʼobjet dʼune amplification dans le sixième chapitre du Varǝšt-mąθr Nask (Dk 9.28) et inspiré les considérations morales du cinquième chapitre du Baγ Nask (Dk 9.50). 18 Voir Ch. BARTHOLOMAE, 1904, col. 560. ||| Voir l’Annexe. 19 Comme il dérive de √ hā « lier, attacher », je préfère rendre le terme hāiti- par « unité » que par « section ». 20 J. DARMESTETER, 1892-3, vol. I p. 214 n. 1, signale que le manuscrit Pt4, à la suite du titre, donne lʼindication suivante : « Ici et à toutes les Gâthas verser du lait sur le Barsôm » (Danâ jîvâk ukulâ jîvâk gâsé jîv ol barsôm yadrûnishn). 21 Sh. D. BHARUCHA, 1910. 22 Voir l’Annexe. 23 Bha = Sh. D. BHARUCHA, 1910 ; Dr = M. J. DRESDEN, 1966 ; Md = Dh. M. MADAN, 1911 ; Sj = P. B. SUNJANA et D. P. SANJANA, 1874-1928. 44

SGN 5 hšmʼybd (Md, DH, K), hšmdydbd (Sj), hšm|ʼybd (MR) VMN 6 hšmʼyb (DH?), hšmʼybd (K), hšm’ybdd (Md, Sj) BN 5 hšmʼybd (Md, Sj, B, DH?)

Dk 9.5 Dk 9.28

Md II 790 ; Sj XVII 8 ; DH:269v20, K43b:22v07, MR:143.06 Md II 825 ; Sj XVII 79 ; DH:283r21, K43b:38r14

Dk 9.50

Md II 884 ; Sj XVIII 77 ; Dr (B) 233.15 ; DH:306r08

Annexe. Le titre des unités (hāiti) vieil-avestiques Yasna (phl. selon J2 ; scr. selon Bha) Y 27.13 ahunǝm vairīm ||| ʼhnvl ||| Bha om. ||| (Y 19 baγa ... ahunahe vairiiehe ; Vr 24.1, N 85.2 ahuna-) Y 27.14 aš ̣ǝm vahištǝm sraēštǝm amǝš ̣ǝm spǝṇtǝm ||| ʼhlʼdyh Y pʼhlvm ʼmlg ʼp̄ zvnyk ||| Bha om. ||| (H1 aš ̣ō.stūiti- ; Y 20.5 baγąm aš ̣ahe vahištahe) Y 27.15.3 ||| Bha om. ||| (Vr, Y 61.1 yeŋ́hē.hātāhufrāiiaštā- aš ̣aōnī- ; Y 21.5 baγąm yeŋ́hē.hātąm hufrāiiaštąm aš ̣aōnīm24) ahiiā.yāsā. hʼt| bvn. ||| Y 28.0 (*yānīmanō) ||| Bha om. ||| Y 28 ahiiāsąm hāitīm ||| aiiās.hʼt| ||| ahiāsāmp. Y 29 xšmāuuaiia.gə̄uš.uruuąm h. ||| hšmbd hʼt| ||| ṣmāuīageūsaüruām p. Y 30 at̰ .tāuuaxšiiąm h. ||| ʼttʼvhšyk[] hʼt| ||| Bha om. Y 31 tā.və̄.uruuātąm h. ||| tʼvlt| hʼt| ||| tā ve urvātām p. Y 32 xvaētumaiθiiə̄m h. ||| hvytvmyt| hʼt| ||| ṣuaetumaitim p. Y 33 yaθāišiθąm h. ||| ytʼyyšd hʼt| ||| iathāïsīyām p. Y 34 yā.š́ iiaōθanąm h. ||| yā[]aōθan. hʼt| ||| iāśiuthanām p. 24

Titres phl. selon Mf4

hšmvʼybd hʼt| bvn ʼttʼvhšš hʼt| bvn tʼvlt hʼt| bvn hvytmyt| hʼt| bvn ytʼyš hʼt| bvn yʼšydvdt| hʼt| bvn

Mis pour **baγąm yeŋ́hē.hātaiiā̊ hufrāiiaštaiiā̊ aš ̣aōniiā̊. 45

Y 35-41 yasnǝm sūrǝm haptaŋh. ||| yst|Y ʼp̄ zʼl Y 4+3 hʼt| ||| iaśnaṁ sādhanaṁ saptasargīyam

yšt| Y hp̄ thʼt| bvn

Y 42 Ø ||| avaravāraḥ saptasargasya ïaśnasya Y 43 uštauuaitīm hāitīm ||| ʼvštʼyt| hʼt| ||| ustaüaïtīm prakr̥tim Y 44 tat̰̰ .θβā.pǝrǝsąm h. ||| tttpʼypls hʼt| ||| tathvāpiriśām p. Y 45 at̰ .frauuaxšiiąm h. ||| ʼtplvhšd hʼt| ||| adaphravaśiyām p. Y 46 kamnamaēząm h. ||| kmnmyc hʼt| ||| kaṁnamejām p. Y 47 spǝṇtā.mainiiūm h. ||| spdrmt| hʼt| ||| spintaminio haitim Y 48 yeziδąm h. ||| yzit̰ . hʼt| ||| Bha om. Y 49 at̰ .māiiauuąm h. ||| at̰ māiiu. hʼt| ||| Bha om. Y 50 kat̰ .mōi.uruuąm h. ||| ktmvklvt hʼt| ||| Bha om. Y 51 vohuxšaθrąm h. ||| vhvhtl hʼt| ||| Bha om.

25

Y 52 (*vaŋhucąm hāitīm*) ||| Bha om. Y 53 vahištōištīm hāitīm ||| vhštvkyšt| hʼt| ||| Bharucha om. ʼylmn| hʼt| bvn ||| Y 54 airiiamanǝm išīm... amauuaṇtǝm vǝrǝθrājanǝm vit̰ baēšaŋhǝm mazištǝm aš ̣ahe srauuaŋhąm ||| ʼylmʼn hvʼdšnyh ... Y ʼmʼvnd Y pylvckl yvdt byš MNV mhst| MN ʼhlʼdyh slvb| ||| ādeśābhilāṣam ... yam mahābaliṣṭhaṁ vijayakaraṁ lābhadam ārogyakaram mahattaram puṇyaṁ vikhyātoktam ||| (Vr 24.1, N 85.2 airiiaman-)

vaŋhuca hʼt| bvn vhštvyšt| hʼt bvn

ʼvštʼyt| hʼt| bvn tt tpʼypls hʼt| bvn ʼtplvšk hʼt| bvn kmnmyc| hʼt| bvn spndmt| bvn yzd hʼt| bvn ʼtmʼyyv hʼt| bvn ktmvdlvk| hʼt| bvn vhvhštl hʼt| bvn

ʼylʼmn|| hʼt| bvn

Le tableau qui suit rassemble les titres que les manuscrits ou les éditions du Dēnkard donnent aux unités gâthiques. Les sigles Md, Sj et Dr y représentent les éditions respectives que Madan, Sanjana et Dresden donnèrent du Dēnkard ; les sigles SGN, VMN et BN, les trois Nask du Grand Avesta que les chapitres du neuvième livre du Dēnkard (Dk 9) décrivent, à savoir le

25

Mf4 donne ʼp̄ lvʼlk| Y hʼt hʼt|| yst| ycšnyk bvn, mais il faut lire ’p̄ lv’lk| Y hpt| h’t| ysṉ| ycšnyk bvn. 46

Stut-gar Nask, le Varǝšt-mąθr Nask et le Baγ Nask ; B, DH, K43b (ou K) et MR, les manuscrits des chapitres concernés. svtkl ; vlštmʼnsl ; bk| VMN 1 ʼslpʼytyš (Md, DH, K), ’slp’yt|yš (Md, Sj), ʼslpʼyt|š ʼslpʼyt|š (MR) SGN 1 ytʼyʼhvkvylyvk| cygvn ytʼyʼhvkvylyvk| (Md, Sj, DH), ytʼyʼhvk| cygvn ytʼyʼhvkvylyvk| (K), gʼs Y ʼhnvl (MR)

Dk 9 23

1

Md ; Sj ; Dr (B) ; DH, K43b, MR Md II 818 ; Sj XVII 66 ; DH:280v20, K43b:35r06, MR:189.10 Md II 787 ; Sj XVII 2 ; DH:268v16, K43b:21r16, MR:140.05

VMN 2 ytʼyʼhvkvylyvk (Md, Sj, DH), ytʼyʼhvkvylyvk| (K)

24

Md II 822 ; Sj XVII 72 ; DH:282r12, K43b:36v06

BN 1 bkʼn ʼhnvl (Md, Sj, B, DH) SGN 2 ʼšmvhvk| (Md, Sj, DH, MR)

46

Md II 873 ; Sj XVIII 58 ; Dr 151.19, DH:302r08 Md II 788 ; Sj XVII 5 ; DH:269r16, (K43b:21v19)26, MR:140.11

VMN 3 ʼšmvhvk (DH), ʼšmvhvk| (Md, Sj, K)

25

Md II 823 ; Sj XVII 74 ; DH:282v02, K43b:36v19

BN 2 bkʼn| ʼhlʼdyh (Md, Sj, B), bkʼn ʼhlʼdyh (DH) SGN 3 ýeŋ́hē.hātąm. (Md, Sj, DH, K, MR)

47

Md II 876 ; Sj XVIII 64 ; Dr 240.17, DH:303r15

3

Md II 789 ; Sj XVII 5 ; DH:269r18, K43b:22r01, MR:140.14

VMN 4 ýeŋ́hē.hātąm. (Md, Sj, DH), ýeŋ́hē.hātąm. (K)

26

Md II 823 ; Sj XVII 75 ; DH:282v08, K43b:37r06

2

26

K43b saute ce chapitre du fait dʼune erreur consistant, grosso modo, en un saut du même au même, le dernier mot du chapitre précédent, pʼtdhšn, 21v19, ressemblant assez au dernier mot de celui-ci, ptyhvyh. 47

BN 3 yʼnhyhʼtʼm (Md, Sj, B), bkʼn yʼnhyhhʼtʼm (DH) SGN 4 yʼnymnvk| (Md, Sj, DH, K, MR)

48

Md II 877 ; Sj XVIII 66 ; Dr 239.10, DH:303v05

4

Md II 789 ; Sj XVII 6 ; DH:269v04, K43b:22r08, MR:141.10

VMN 5 yʼnymnvk| (Md, Sj, DH, K)

27

Md II 823 ; Sj XVII 75 ; DH:282v14, K43b:37r12

BN 4 bk| yʼnymnk| (Md, Sj, B), bk| yʼnymnvk| (DH) SGN 5 hšmʼybd (Md, DH, K), hšmdydbd (Sj), hšm|ʼybd (MR)

49

Md II 878 ; Sj XVIII 67 ; Dr 238.09, DH:303v20

5

Md II 790 ; Sj XVII 8 ; DH:269v20, K43b:22v07, MR:143.06

VMN 6 hšmʼyb (DH?), hšmʼybd (K), hšm’ybdd (Md, Sj)

28

Md II 825 ; Sj XVII 79 ; DH:283r21, K43b:38r14

BN 5 hšmʼybd (Md, Sj, B, DH?) SGN 6 ʼtʼvhšd (Md, DH, K), ʼt|tʼvhšhh (Sj, MR)

50

Md II 884 ; Sj XVIII 77 ; Dr 233.15, DH:306r08 Md II 790 ; Sj XVII 9 ; DH:270r07, K43b:22v16, MR:144.04

VMN 7 ʼttʼdvhšyk (DH), ʼttʼdvhšd (Md, Sj, K)

29

Md II 828 ; Sj XVII 85 ; DH:284v09, K43b:39v15

BN 6 ʼtthšd (Md, Sj, B), ʼttʼvhš (DH) SGN 7 tʼvlt| (Md, Sj, DH, K, MR)

51

Md II 888 ; Sj XVIII 84 ; Dr 230.16, DH:307v09 Md II 792 ; Sj XVII 12 ; DH:270v06, K43b:23r19, MR:146.07

6

7

48

27

VMN 8 tʼdvlt (DH), tʼdvlt| (Md, Sj, K)

30

Md II 831 ; Sj XVII 90 ; DH:285v10, K43b:41r0727

BN 7 tʼvlt| (Md, Sj, B), tʼvlt (DH) SGN 8 hvtmyt (DH), hvtmyt| (Md, Sj, K, MR)

52

Md II 892 ; Sj XIX 1 ; Dr 227.20, DH:309r11 Md II 792 ; Sj XVII 13 ; DH:270v16, K43b:23v10, MR:147.07

VMN 9 hvtmyt| (Md, Sj, DH)

31

Md II 835 ; Sj XVII 98 ; DH:287v03

BN 8 hvmyt| (Md, Sj, B), hvtmyt| (DH) SGN 9 yʼsʼyš (DH, K), yʼyšdyš (MR), dddhhdš (Sj), y’dy’dyš (Md)

53

Md II 903 ; Sj XIX 19 ; Dr 219.17, DH:313r19

9

Md II 794 ; Sj XVII 16 ; DH:271r18, K43b:24r16, MR:150.01

VMN 10 ysʼʼyš (Sj, B, DH?), ykd’dykš (Md)

32

Md II 841 ; Sj XVIII 1 ; Dr 177.04, DH:289v13

BN 9 yt’dyš (Md), ytʼyyš (Sj, B, DH) SGN 10 yʼšyʼvsn| (Md, Sj, DH, K), šššvsn| (MR)

54

Md II 905 ; Sj XIX 22 ; Dr 218.20, DH:314r03 Md II 794 ; Sj XVII 17 ; DH:271v05, K43b:24v05, MR:150.13

VMN 11 y’šyy’vy’n (B), yʼyšyʼvʼn| (Sj), y’dšd’vsn| (Md)

33

Md II 843 ; Sj XVIII 5 ; Dr 175.04, DH:290v15

BN 10 y’š’vtn| (Md), yʼšydvtn| (Sj, B), yʼyšvʼvt (DH?) SGN 11 ʼsn| (Md, Sj, DH, K)

55

Md II 907 ; Sj XIX 26 ; Dr 216.10, DH:314v16

11

Md II 796 ; Sj XVII 21 ; Dr 243.06, DH:272r16,

8

10

La dernière page de K43b est 42v. 49

K43b:25v02. VMN 12 yst (Md, Sj, B), yst| (DH)

34

Md II 846 ; Sj XVIII 10 ; Dr 173.02, DH:291v13

BN 11 yst| (Md, B, DH), ssn| (Sj) SGN 12 ʼvštʼyt| (Md, DH, K), ʼvštvʼyt| (Sj, MR)

56

Md II 908 ; Sj XIX 29 ; Dr 215.17, DH:315v05 Md II 801 ; Sj XVII 30 ; DH:274r01, K43b:27r14, MR:157.13

VMN 13 ʼvštvʼyt (B), ʼvštvʼyt| (Md, Sj, DH)

35

Md II 849 ; Sj XVIII 16 ; Dr 171.17, DH:293r07

BN 12 ʼvštʼyt| (Md, Sj, B, DH)

57

SGN 13 tt spʼd pyls (Md, Sj, DH, MR), ttspadpyls (K)

13

Md II 913 ; Sj XIX 37 ; Dr 211.01, DH:317r15 Md II 801 ; Sj XVII 32 ; DH:274r15, K43b:27v09, MR:159.05

VMN 14 ttsp̄ ʼdpls (B, Sj), ttspʼypls (Md, DH)

36

Md II 851 ; Sj XVIII 20 ; Dr 169.10, DH:294r01

BN 13 ttsp̄ ʼsp̄ ls (Md, Sj, B, DH)

58

SGN 14 ʼtplvhšd (Md, Sj, DH, MR), ʼtplvhšdd (K)

14

Md II 918 ; Sj XIX 45 ; Dr 208.16, DH:319r09 Md II 802 ; Sj XVII 33 ; DH:274v07, K43b:28r01, MR:160.08

VMN 15 ’tplvhšd (Md, B, DH), ʼtplvhšdd (Sj)

37

Md II 854 ; Sj XVIII 24 ; Dr 167.09, DH:294v21

BN 14 ʼtplvhšd (Md, Sj, B, DH) SGN 15 kmnmyc| (Md, Sj, DH, K, MR)

59

Md II 921 ; Sj XIX 51 ; Dr 205.09, DH:320v01 Md II 803 ; Sj XVII 35 ; DH:275r02, K43b:28r19, MR:162.03

VMN 16 kʼmnmyc| (Md, Sj, B, DH)

38

12

15

50

Md II 856 ; Sj XVIII 28 ; Dr 166.17, DH:295v07

BN 15 kʼmnmyc| (Md, Sj, B) SGN 16 sp̄ dmyc (DH), sp̄ dmyt| (Md, Sj, K, MR)

60

VMN 17 sp̄ ndmt (B), sp̄ ndmt| (Md, Sj, DH)

39

Md II 860 ; Sj XVIII 35 ; Dr 162.08, DH:297r12

BN 16 sp̄ ndmt| (Md, Sj, B) SGN 17 yzdk (Md, DH, K, MR), yzdk| (Sj)

61

Md II 925 ; Sj XIX 59 ; Dr 202.10 Md II 806 ; Sj XVII 42 ; DH:276r14, K43b:29v16, MR:167.14

VMN 18 yzdk (Md, Sj, B, DH)

40

Md II 861 ; Sj XVIII 38 ; Dr 161.10-11, DH:297v12

BN 17 yzdk (Md, Sj, B) SGN 18 ʼtmʼyyvb| (Md, Sj, DH, K, MR)

62

Md II 926 ; Sj XIX 60 ; Dr 201.04 Md II 807 ; Sj XVII 43 ; DH:276v01, K43b:30r05, MR:168.13

VMN 19 ʼtmʼyyv| (Md, Sj, B, DH)

41

Md II 864 ; Sj XVIII 43 ; Dr 158.04, DH:298v17

BN 18 ʼtmʼyv| (Md, Sj, B) SGN 19 ktmvklvk| (Sj, DH, K, MR), ktmvdlvk| (Md)

63

Md II 928 ; Sj XIX 63 ; Dr 200.04 Md II 808 ; Sj XVII 46 ; DH:277r05, K43b:30v10, MR:171.06

VMN 20 ktmvklvk| (B, DH), ktmvdlvk| (Md, Sj)

42

Md II 866 ; Sj XVIII 46 ; Dr 157.11, DH:299r18

BN 19 ktmvklv| (Md, Sj, B) SGN 20 vvhvkhštl (Md, DH, K),

64

Md II 930 ; Sj XIX 67 ; Dr 198.03 Md II 810 ; Sj XVII 49 ; DH:277v09,

16

17

18

19

20

51

Md II 923 ; Sj XIX 54 ; Dr 204.13 Md II 805 ; Sj XVII 40 ; DH:275v20, K43b:29v01, MR:166.05

vhvkhštl (Sj, MR)

K43b:31r18, MR:174.03

VMN 21 vhvhštl (Md, Sj), vvhvhštl (DH)

43

Md II 867 ; Sj XVIII 49 ; Dr 155.02, DH:300r02

BN 20 vvhvhštl (Md, Sj, B) SGN 21 vhštvkyšt (DH), vhštvkyšt| (Md, Sj, K, MR)

65

Md II 932 ; Sj XIX 71 ; Dr 197.11 Md II 815 ; Sj XVII 58 ; DH:279r21, K43b:33v02, MR:182.10

VMN 22 vhštvkyšt| (Md, Sj, DH)

44

Md II 870 ; Sj XVIII 53 ; Dr 153.09, DH:301r03

BN 21 vhštvkyšt| (Md, Sj, B) SGN 22 ʼylmn| (Md, DH, K), ʼylymn| (Sj, MR)

66

Md II 934 ; Sj XIX 74 ; Dr 196.19 Md II 817 ; Sj XVII 63 ; DH:280r17, K43b:34v01, MR:187.02

VMN 23 ʼylmn| ’ylm’n| hv’dšnyh (Sj), ʼylmn| .·. ’ylm’n hv’dšnyh (Md, DH)

45

Md II 872 ; Sj XVIII 57 ; Dr 151.07, DH:301v18

BN 22 ʼylmn| bvn (Md, Sj, B) BN 23 (Dk 9.68.1 : QDM vcytk| Y MN hmʼk yšt| [Md : h’t|] vhšynytʼl HVE|d ºoº)

67

Md II 936 ; Sj XIX 77 ; Dr 195.21 Md II 936 ; Sj XIX 77 ; Dr 194.05

21

22

68

52

II 2. Texte et traduction 1 xšmaibiiā gə̄uš uruu̯ā gərəždā kahmāi mā θβarōždūm kə̄ mā tašat̰ ā mā aēšəmō hazascā rəmō [ā]hišāiiā dərəš[cā] təuuišcā nō[it̰ ] mōi vāstā xšmat̰ aniiō aθā mōi sąstā vohū vāstr[ii̯ ]ā .·. (Le récitant dit :) Le Moi de la vache [Gauš Ruvan] vous adresse cette plainte : « Pour qui m’avez-vous différenciée ? Qui m’a configurée ? Le (démon [Daiva]) Furieux [Išma] et (son acolyte) le Violent [Hazah], le (démon [Daiva]) Déséquilibre [Hrama] et (ses acolytes) la Chaîne [Dr̥z] et le Coup [Tuviš] m’ont attrapée [= mʼont rendue malade]. Comme je n’ai d’autre pâtre que vous, faites-moi donc le plaisir d’un bon fourrage ! » 2 adā tašā gə̄uš pərəsat̰ aš ̣əm kaθā tōi gauuōi ratuš hiiat̰ hīm dātā xšaiiaṇtō hadā vāstrā gaōdāiiō θβaxšō kə̄m hōi uštā ahurəm yə̄ +drəguuō.dəbīš aēšəməm vādāiiōit̰ .·. (Le récitant dit :) Alors le Configurateur [Taxšan] de la vache pose ces questions au (dieu) Agencement (excellent) [R̥ta] : « Toi qui te nourris d’elle [Gaudāyu], quelle place rituelle [ratu] accordes-tu à la vache à t’occuper d’elle avec le fourrage que (le Roi qui apporte la sagesse [Ahura Mazdā], sous lʼinfluence du rite,) a pu mettre en place ? Quel propriétaire [ahura] lui souhaitez-vous qui chasse le Furieux [Išma] malgré la présence des égarés [= les impies que l’Erreur accompagne, les drugvant] ? 3 ahmāi aš ̣ā nō[it̰ ] sarəjā aduuaēšō gauuōi †paitī.mrauuat̰ auuaēšą̃m nō[it̰ ] vīdu̯iiē yā ˟š́ auuaiṇtē ādrə̄ṇg ərəšuuā̊ŋhō hātą̃m huuō aōjištō yahmāi zauuə̄ṇg jimā ˟kərəduš ā˟ .·. 53

(Sache-le, dieu) Agencement [R̥ta], je ne convaincs pas (le Moi [ruvan] de) la vache en lui répondant [*paitī.mruuąs] ignorer, moi qui n’ai aucune hostilité envers elle, ce qui, parmi ceux-là [= ?]1, sert aux hauts (...)2 à se déplacer vers les (...) nécessiteux3. Le plus puissant des Êtres (surnaturels) [Hant], c’est à lui que je vais humblement adresser mes appels. 4 mazdā̊ saxvārə̄ mairištō yā zī vāuuərəzōi pairī.ciθīt̰ daēuuāišcā maš ̣ii̯ āišcā yācā varəšaitē aipī.ciθīt̰ huuō vīcirō ahurō aθā nə̄ aŋhat̰ yaθā [huuō] vasat̰ .·. Lui qui mémorise le mieux les préceptes et fait la différence entre (nos idées, mots ou) gestes (et) ceux, aussi bien passés que futurs, des démons/mauvais dieux [Daiva] et de (leurs) suppôts humains [Martiya], que le Roi qui apporte la sagesse [Ahura Mazdā] agisse à notre égard comme il lui plaira ! 5 at̰ vā ustānāiš ahuuā zastāiš frīnəmnā ahurāi.ā mə̄ uruu̯ā gə̄ušcā aziiā̊ hiiat̰ mazdą̃m duuaidī fərasābiiō nō[it̰ ] ərəžəjii̯ ōi frajiiāitiš nō[it̰ ] fšuiieṇtē drəguuasū pairī .·. Alors, moi et le Moi [ruvan] de la vache pleine, nous restons tous deux les mains levées4 à propitier le Roi qui apporte la sagesse [Ahura Mazdā] et à lui poser nos questions. N’y a-t-il donc aucune survie possible chez les égarés [drugvant, = les impies] ni pour l’éleveur ni pour (...)5 qui vit de façon rectiligne ? 6 at̰ †ə̄ vaōcat̰ ahurō mazdā̊ vīduuā̊ vafūš vii̯ ānaiiā nō[it̰ ] aēuuā ahū vistō 1

Il nʼa pas pu être déterminé de façon sûre qui sont ces personnages. Il nʼa pas pu être déterminé de façon sûre qui sont ces personnages. 3 Il nʼa pas pu être déterminé de façon sûre qui sont ces personnages. 4 Ceci doit-il nous convaincre que, dans le mythe, lʼâme-moi de la vache adopte une figure humaine ? 5 Il nʼa pas pu être déterminé de façon sûre qui est ce personnage. 2

54

na[ēd]ā ratuš aš ̣āt̰ cīt̰ hacā at̰ zī θβā fšuiiaṇtaēcā vāstraiiāicā θβōrəštā tatašā .·. (Le récitant dit :) Et, en recourant au souffle suspensif, le Roi qui apporte la sagesse [Ahura Mazdā] prononce ces strophes du chant avec science : « Une seule existence ne peut suffire à trouver dans lʼagencement (rituel) ni (le propriétaire [ahura] de la vache) ni le rôle que la vache doit jouer / la place qui lui est réservée / son destin [ratu]. C’est que (moi qui suis) le différenciateur, je t’ai configurée à l’intention du pâtre éleveur ». 7 tə̄m āzūtōiš ahurō mąθrəm tašat̰ aš ̣ā hazaōšō mazdā̊ gauuōi xšuuīdəmcā huuō.urušaēibiiō spəṇtō sāsnaiiā kastē vohū manaŋhā yə̄ ī dāiiāt̰ ə̄əāuuā marətaēibiiō .·. (Le récitant dit :) De commun accord avec l’Agencement (excellent) [R̥ta], le savant Roi qui apporte la sagesse [spanta Ahura Mazdā], avec la leçon, forge pour la vache la recommandation de la libation (ou : la recommandation concernant la façon de procéder à la libation) et (celle relative à lʼemploi du) lait en vue des repas, (mais pose cette question :)6 Qui, recourant à la pensée bonne, as-tu (trouvé) qui puisse retrancher ce (...)7 aux textes mémorisés ? 8 aē̃m mōi idā vistō yə̄ nə̄ aēuuō sāsnā̊ gūšatā zaraθuštrō spitāmō huuō nə̄ mazdā vaštī aš ̣āicā carəkərəθrā srāuuaiieŋ́hē hiiat̰ hōi hudəmə̄m diiāi vaxəδrahiiā .·. (Le Configurateur de la vache [Gauš Taxšan] dit :)8 « J’ai trouvé ici celui-ci qui fut le seul à écouter nos leçons : Zaraduštra descendant de Spītāma. (Sache-le,) toi qui apportes la sagesse [Mazdā] : il souhaite, avec un hymne de glorification, nous faire entendre, (à toi,) à l’Agencement (excellent) [R̥ta] et à moi... ». 6 7 8

J. KELLENS, 2015, p. 27 : « [Quelqu’un dit :] ». Nous ne pouvons savoir ce que représente le pronom ī. J. KELLENS, 2015, p. 27 : « [Quelqu’un répond :] ». 55

9 at̰ cā gə̄uš uruu̯ā raōstā yə̄ anaēšəm xšąnmə̄nē rādəm vācəm nərəš asūrahiiā yə̄m ā vasəmī +īšā xšaθrīm ̃ + kadā yauuā huuō aŋhat̰ yə̄ hōi dadat̰ zastauuat̰ auuō .·. Pourtant le Moi de la vache [Gauš Ruvan] ne cesse de pleurer : « Et dire que je dois me contenter de la voix sans force de l’homme incapable de (leur) donner les moyens dʼagir [= de (leur) octroyer le savah] alors que je le souhaite capable d’exercer l’influence (sur les dieux) et de (les amener à octroyer) la vigueur [iš] (à leurs adorateurs) ! Ne sera-t-il jamais là celui qui pourra donner un coup de main à ce (Zaraduštra) ? » 10 yūžə̄m aēibiiō ahurā aōgō dātā aš ̣ā xšaθrəmcā auuat̰ vohū manaŋhā yā +hušəitiš rāmąmcā dā̃ t̰ azə̄mcīt̰ ahiiā mazdā θβą̃m mə̄ŋ́hī paōuruuīm ̃ vaēdəm .·. Vous, Roi qui apportes la sagesse [Ahura Mazdā], eu égard à (leur) penser bon, donnez aux (adorateurs) la faculté de recourir au bon rite [r̥ta] pour exercer l’ascendant [aujah] et l’influence [xšaθra] leur permettant de pousser (la Déférence [Aramati]), (la déesse) qui (nous) offre bon habitat [Hušiti], à offrir le calme et le fourrage (à la vache) ! Quant à moi, je t’en tiens pour le premier fournisseur. 11 kudā aš ̣əm vohucā manō xšaθrəmcā at̰ mā †mašā yūžə̄m mazdā †frāxšnənē mazōi magāi.ā paitī.zānatā ahurā †nū.nā̊.auuarə̄ ə̄hmā.rātōiš yūšmāuuatą̃m ºoº Où sont l’Agencement (excellent) [R̥ta], le Penser bon [Vahu Manah] et l’Exercice de l’influence [Xšaθra] ? Vous, (Roi) qui apportes la sagesse [Ahura Mazdā], lorsquʼil sera question dʼen faire arriver, reconnaissez-moi, car je sais mʼorienter, et octroyez-moi le bénéfice : les rois applaudissent toujours à la générosité dont ceux qui vous accompagnent [= vos adorateurs] font preuve envers nous (qui officions). 56

II 3. Analyse Y 29.1 xšmaibiiā1 gə̄uš uruu̯ā gərəždā2 (7) kahmāi mā θβarōždūm kə̄ mā tašat̰ 3 (9) ā mā aēšəmō hazascā (7) rəmō [ā]hišāiiā4 dərəš[cā] təuuišcā (9) nō[it̰ ] mōi vāstā xšmat̰ aniiō (7) aθā mōi sąstā5 vohū vāstr[ii̯ ]ā6 (9) .·. 1a1 1a2 1b 1c1 1c2

Introduction Deux indépendantes interrogatives Indépendante Protase de diptyque tonal Apodose de diptyque tonal

Selon les indications marginales pehlevies7, cette première strophe comporte quatre parties : un discours de Zaraθuštra (1a1), une question double (1a2), une plainte (1b) et une prière (1c) de Gə̄uš Uruuan8. Ainsi, pour la tradition pehlevie, lʼauteur ou récitant ne serait-il autre que Zaraθuštra. Aucun vocatif ne permet d’expliciter le pronom « vous »9. Le pluriel θβarōždūm contraste avec le singulier tašat̰ , mais la concordance que l’hémistiche 6c2 affiche entre θβōrəštā et tatašā laisse penser que l’auteur de l’acte

1

Les formes en xšmº du pronom de la 2e personne du pluriel nʼexistent quʼen gâthique où, metri causa, elles coexistent cependant avec celles en yūšmº. Cette curiosité morphologique nʼa pas reçu de justification. 2 Réel du présent continu : voir J. KELLENS et É. PIRART, 1988-91, vol. II p. 74 §1.2.3. 3 Lʼinjonctif aoriste place ces deux actions dans le passé : voir J. KELLENS et É. PIRART, 1988-91, vol. II p. 66 §1.1.3.1. 4 Action passée constitutive dʼun état présent : voir J. KELLENS et É. PIRART, 1988-91, vol. II p. 80 §1.3.3. 5 Impératif aoriste conclusif avec aθā : voir J. KELLENS et É. PIRART, 1988-91, vol. II p. 96 §2.6.3. 6 Avec lʼanomalie de lʼemploi du suffixe ºii̯ a-, nous voyons que le texte des Gāθā nʼest pas complètement fiable. 7 Concernant ces indications, voir l’Annexe. 8 frāz-gōvišn ī zaraθušt (prʼc gvbšn Y zltvšt|), frašn ud garzišn ī gə̄uš.urun (plšn| Y glcšn| Y gvšʼvlvn|), yān ī gə̄uš.urun (yʼn Y gvšʼvlvn|). 9 Concernant la répartition des personnes grammaticales, voir l’Annexe. 57

connoté par la racine taš10 est l’un de ceux responsables de l’acte connoté par la racine θβars. Les deux questions de l’hémistiche 1a2 ne recevront aucune réponse claire puisque, bien évidemment, nous ne pouvons nous contenter de θβōrəštar comme réponse donnée à la première ni de tašan pour répondre à la seconde. Encore que nous ne puissions écarter complètement que lʼauteur ait cherché à établir une équivalence et voulu dire que lʼauteur de lʼune des deux actions est aussi celui de lʼautre. Autrement dit : le créateur de la vache serait aussi son chevillard ou le boucher qui la dépèce et découpe ses viandes. Les entités divines de la première strophe sont donc mal identifiables : nous y trouvons, à côté du Moi d’une vache non identifiée, deux entrées du panthéon encore moins explicites, représentées qu’elles sont par les pronoms « vous » et « qui ». Nous remarquerons que le « vous » dont le récitant fait usage paraît coïncider avec celui dont se sert le Moi de la vache. Pour corser le tout, le singulier du pronom interrogatif kahmāi, faut-il souligner, contraste avec le pluriel kaēibiiō que nous trouvons dans Y 44.6ae : tat̰ θβā pǝrǝsā (4) ǝrǝš mōi vaōcā11 ahurā (7) ... kaēibiiō azīm (4) rāńiiō.skǝrǝitīm12 gąm tašō (7) .·. « Je te pose cette question. Dis-moi sans détour,

10

Si, dans le zand, t’šytn| est un avesticisme, lʼalef pourrait représenter un a plutôt bref, mais, si ce verbe est authentiquement perse, nous ne pouvons écarter de le lire taxšīd (contre J. CHEUNG, 2007, p. 384), au vu des formes vieux-perses DNb hata-x-š-ta-i-y (hantaxšatai ou hantaxštai 3e sg. moy. indic. présent), DB ha-ma-ta-xš-i-y (hamataxšai ou hamataxši 1e sg. moy. indic. imparfait), DB ha-ma-ta-x-š-ta-a (hamataxšata ou hamataxšta 3e sg. moy. indic. imparfait), DB ha-ma-ta-x-š-ta-a (hamataxšanta ou hamataxšata 3e personne du pluriel moy. indic. imparfait). En avestique, la substitution de š à xš est donc artificielle comme dans ašī (= védique akṣī́ ) « les yeux » < proto-indo-européen *H3eku̯síH1. Le phénomène inverse, la substitution de xš à š, est illustré par l’avestique récent θβarəxštar- (= vieil-avestique θβōrəštar-). 11 Ici et partout, jʼai remplacé automatiquement ao et ou par aō et ōu pour adopter les propositions orthographiques de J. MARTÍNEZ PORRO, 2016. 12 La forme rāńiiō.skǝrǝiti- est le fruit dʼune retouche diascévastique. Le vers védique RS 10.112.10c nous permet dʼen reconstituer la forme originale : raṇakŕ̥t-. En effet, les lois de la morphologie nominale indo-iranienne ancienne recommande dʼéviter les dérivés secondaires tels que les adjectifs comparatifs au premier terme d’un composé. La comparaison de lʼavestique naire.manah- « avec un penser masculin » avec le védique nr̥máṇas- (É. PIRART, 2010a, p. 79, 148) nous permet de souligner non seulement la même volonté diascévastique de préciser ou dʼexpliciter le sens du premier terme à lʼintérieur des composés, mais aussi, pour ce faire, lʼhabitude de transgresser les lois morphologiques. 58

Roi : pour quels (...) as-tu configuré la vache pleine (et en as-tu fait) une source de joie ? ».

Par contre, il y est précisé que la vache est pleine et quʼelle est source de joie. Lʼune des deux autres occurrences de lʼadjectif rāńiiō.skǝrǝitīm nous conforte dans lʼidée que lʼadorateur pourrait bien se cacher derrière le pronom interrogatif kahmāi : Y 47.3 ahiiā13 mańiiə̄uš (4) tuu̯ə̄m ahī ˟ptā14 spǝṇtō (7) yə̄ ahmāi15 gąm rāńiiō.skǝrǝitīm hə̄m.tašat̰ (7) at̰ hōi vāstrāi16 (4) rāmā dā̊ +ārǝmaitī17 (7) hiiat̰ hə̄m vohū (4) mazdā [hə̄mǝ.]fraštā manaŋhā (7) .·. « Mazdā, tu es le père savant de Mańiiu [= le tašan] qui a collaboré avec (lʼadorateur) à la configuration de la vache qui lui soit une source de joie. (De concert) avec Ārmaiti [= la déesse Déférence, assimilée à la Terre], tu offres fourrage et tranquillité à la (vache) depuis que (cet adorateur) sʼest entretenu avec Vohu Manah [= le dieu Penser bon] ». (4)

Cette dernière strophe, en lui donnant le nom de Mańiiu, nous montre que le tašan de la vache est tenu pour le fils du grand dieu18 et que ce dernier se 13

Corrélatif de yə̄ ? Avec K5, mais pratiquement tous les autres manuscrits donnent tā tandis que le zand et Niriosaṅgha sautent le mot. Si la correction est à adopter, ce passage témoigne dʼune distinction établie entre Ahura Mazdā et Spəṇta Mańiiu. 15 Nous pourrions penser que ce datif, dans la rection de hə̄m.tašat̰ , est mis pour lʼinstrumental (« a collaboré avec lʼ(adorateur) »), mais le datif, comme dans le vers Y 44.6e, peut se justifier comme complément de rāńiiō.skǝrǝitīm (« qui lui soit une source de joie ») dʼautant que, pour respecter la loi stylistique ou de phraséologie selon laquelle un même être ne peut figurer à deux cas distincts au sein dʼune seule et même proposition, le cas du complément secondaire doit lʼemporter sur celui du complément primaire et que lʼastuce paraît avoir été soulignée en recourant à la forme tonique du pronom. 16 Duel en ºăi modifié secondairement en ºāi selon le même processus qui donna au locatif du nom de la maison la forme dəmānāi dans lʼhémistiche Y 46.11c2 (J. KELLENS et É. PIRART, 1988-91, vol. I p. 161 ; vol. III p. 207). Ce duel elliptique est flanqué de son explicitation partielle rāmā. 17 Lʼinstrumental est préférable avec le zand (PVN bvndkmynšnyh) et quelques rares manuscrits, la plupart donnant ārmaitīm. 18 Cf. Y 31.9a θβōi as ārǝmaitiš (7) θβə̄ ā gə̄uš tašā aš.xratuš (8) « Sʼy trouvent ta fille Ārmaiti et ton fils très performant Gə̄uš Tašan ». ||| Faire du Tašan un fils dʼAhura Mazdā nʼest certes guère significatif : une fois divinisée, sa figure, comme bien dʼautres, devait trouver pareille place dans le panthéon, mais Ahura Mazdā, en tant quʼinstigateur de toute célébration sacrificielle, est considéré comme 14

59

confond ou alterne avec lui comme auteur du procès gąm + √ taš. Le sens de √ taš ne va pas de soi puisque, dans la mesure où il y a coordination de la mention de la vache avec celles des rivières et des plantes, lʼidée dʼimmolation paraît peu vraisemblable : Y 51.7a dāidī mōi yə̄ gąm tašō (7) apascā uruuarā̊scā (7) « Mazdā, toi qui as configuré la vache, les rivières et les plantes, accorde-moi (lʼimmortalité) ! » À moins de penser aux rôles que les eaux et les plantes peuvent jouer dans les préparatifs de la cérémonie, respectivement dans les ablutions et dans la constitution des outils sacrificiels d’origine végétale que sont le barǝziš ou le barǝsman. Par contre, la présence du nom de lʼhomme comme objet de √ taš nʼexclut pas son immolation. En effet, le grand dieu tira toutes les espèces de quadrupèdes de Gaō Aēuuō.dātā « la Vache (originelle), le seul (quadrupède) mis en place (à l’origine) », mais tira tous les Airiia « les (hommes) pieux, (l’humanité telle qu’elle était avant l’intervention du Diable), les Iraniens » de Gaiia Marətan « (le premier homme ou) Principe de Vie des mortels » : Yt 13.87 gaiiehe marǝθnō V aš ̣aōnō frauuaš ̣īm yazamaide .·. yō paōirii̯ ō ahurāi19 mazdāi20 V ˟mąθrǝmca21 gūšta sāsnā̊sca (8) yahmat̰ haca frāθβǝrǝsat̰ (7) nāfō airiianąm dax́iiunąm (8) ciθrǝm airiianąm dax́iiunąm (8) .·. zaraθuštrahe spitāmahe V iδa aš ̣aōnō aš ̣īmca frauuaš ̣īmca yazamaide .·. « Nous offrons le sacrifice à la Préférence de lʼharmonieux Principe de Vie des mortels, lui qui, du Roi de la Sagesse, fut le premier à écouter les formules et les leçons, lui de qui le Roi de la Sagesse tira la famille des nations iraniennes et le Signe positif des nations iraniennes. Nous offrons de la sorte le sacrifice à la Conduite et à la Préférence de lʼharmonieux Zoroastre descendant de Très-fructueux »22.

Comment procéda-t-il donc ? La Zand-āgāhīh23 ne répond pas clairement à cette question, mais apporte l’information que la Terre fut mise à contribution. La tradition verra d’ailleurs en elle la mère de tous les êtres vivants de ce bas monde. Toujours est-il que, selon la Zand-āgāhīh, le bovin primordial est une vache, Gaō Aēuuō.dātā, et l’humain primordial, un homme, Gaiia Marətan, tandis que les couples sexués du taureau et de la vache ou de l’homme (Maš ̣iia) et de la femme (*Mašiiaēinī) comme d’autres ̣ le père d’Aš ̣a (R̥ta). Il est donc assez logique que tous les éléments constitutifs (ratu) du bon Agencement (aš ̣a) proviennent aussi de lui. 19 Mis pour le génitif. 20 Mis pour le génitif. 21 Les manuscrits donnent manasca. La correction est opérée dʼaprès le Yt 13.95.2d. Voir aussi Y 31.18a2. 22 Traduction É. PIRART, 2010b, p. 210. 23 ZA 14.5-6. 60

êtres et bestiaux n’apparaîtront qu’ensuite : la vache des origines et l’homme des origines ont donc été mis en place par deux fois24. Le tandem de l’homme et de la vache se retrouve à de multiples niveaux : Sacrifiant : nar spəṇta

Vache sacrificielle : gaō spəṇtā

Âme du sacrifiant : nərəš uruuan

Âme de la vache sacrificielle : gə̄uš uruuan

Ersatz de l’âme du sacrifiant : le haōma

Ersatz de l’âme de la vache : le lait

Homme primordial : Gaiia Marətan

Vache primordiale : Gaō Aēuuō.dātā

Présence de l’homme dans l’homme : uruuan

Présence de la vache dans l’homme : daēnā

Jean Kellens25 a tout à fait raison de souligner avec insistance que nous sommes incapables de préciser la nuance sémantique séparant les deux verbes synonymes √ θβars et √ taš ; car, à coup sûr, elle existe si nous ne pouvons accepter que les paroles de Gə̄uš Uruuan soient absurdes en ce sens que la première question répondrait à la seconde. Cependant, Jean Kellens estime quʼAhura Mazdā, avec la réponse du vers Y 29.6c, dénonce lʼabsurdité de la double question de son interlocuteur. Ne soyons pas aussi pessimistes : la différence sémantique que, sur base de passages tels que V 5.2 concernant l’abattage d’un arbre pour en tirer des planches 26 , nous pouvons reconnaître entre les deux racines √ θβars et √ taš27 donne à la première une charge violente ou négative, « couper, abattre », et à la seconde, une charge positive ou corrective, « retailler, façonner,

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Nous y reviendrons au Chapitre III 3. J. KELLENS, 1995, p. 348-9. 26 upa tąm vanąm aēiti yąm hō mǝrǝγō (7+4) āθre aēsmąn išaiti (7) .·. auui dim (5) jaiṇti auui dim θβǝrǝsaiti (6) auui dim tāšti (5) « Va al árbol al que (ha volado) el pájaro, busca leña. Lo tala, lo corta en trozos y lo convierte en tablas » (traduction A. CANTERA, 1998, p. 432). 27 A. CANTERA, 1998, p. 431-3 ; J. CHEUNG, 2007, p. 384 et 399-400. 25

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configurer ». La première peut connoter les idées dʼablation28 et de limitation ; la seconde, de finition et de réforme. Certes, toutes deux sont interchangeables pour entrer en concurrence avec la positive √ dā « mettre en place » dans des passages tels que Y 70.1.2 təm baγəm təm ratūm yazamaide (6+4) yim ahurəm mazdąm (6) daδuuā̊ŋhəm rapaṇtəm (6) taršuuā̊ŋhəm vīspa vohu (8) təm ratūm yazamaide (8) yim zaraθuštrǝm spitāmǝm (8) .·. « nous offrons le sacrifice au frayeur de chemins [baγa], à l’agenceur [ratu] Ahura Mazdā qui met en place, secourt et détermine toutes les bonnes (choses). Nous offrons le sacrifice à l’adéquat [ratu]29 Zaraθuštra descendant de Très-fructueux [Spitāma] »30.

La racine √ θβars possède aussi les sens de « déterminer, délimiter, différencier », par exemple dans le V 1.2.1

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Ceci ressort notamment de V 13.32-3 où upa.θβǝrǝsaiiǝn et upa.kǝrǝṇtaiiǝn paraissent avoir le même sens : paōirī̃m pasūm ˟auua.ja[γ]nat̰ (9) paōirī̃m narǝm raēšaiiāt̰ (8) dašinǝm hē gaōšǝm upa.θβǝrǝsaiiǝn (11) bitī̃m pasūm ˟auua.ja[γ]nat̰ (9) bitī̃m narǝm raēšaiiāt̰ (8) hōi̯ um hē gaōšǝm upa.θβǝrǝsaiiǝn (10) .·. θritī̃m pasūm ˟auua.ja[γ]nat̰ (9) θritī̃m narǝm raēšaiiāt̰ (8) ˟dašinąm hē paiδii̯ ąm upa.kǝrǝṇtaiiǝn (12) tūirī̃m pasūm ˟auua.ja[γ]nat̰ (9) tūirī̃m narǝm raēšaiiāt̰ (8) hōiiąm hē paiδii̯ ąm upa.kǝrǝṇtaiiǝn (11) .·. « Le (chien) provoque la mort dʼune première tête de bétail, blesse un premier homme, quʼils lui sectionnent lʼoreille droite ; il provoque la mort dʼune deuxième tête de bétail, blesse un deuxième homme, quʼils lui sectionnent lʼoreille gauche ; il provoque la mort dʼune troisième tête de bétail, blesse un troisième homme, quʼils lui sectionnent le tendon droit ; il provoque la mort dʼune quatrième tête de bétail, blesse un quatrième homme, quʼils lui sectionnent le tendon gauche ». 29 En plus de celui de baγa « déterminateur du parcours », Ahura Mazdā reçoit ici le même titre de ratu « pièce dʼun tout harmonieux » que Zaraθuštra pour former un tandem avec lui, mais le grand dieu et son chantre ne sont pas des ratu au même titre, le premier présidant à l’agencement et le second étant l’une de ses pièces essentielles. 30 Ou encore Y 1.1.3a yō nō daδa yō tataša yō tuθruiiē (4+4+4) « (Ahura Mazdā) qui nous met en place, façonne et nourrit ». Cf. Yt 19.52 bǝrǝzaṇtǝm ... apąm napātǝm ... V yō nǝrə̄uš daδa yō [nǝrə̄uš] tataša (8) yō upāpō *yazatanąm (8) srut̰ .gaōšōtǝmō [asti] yezimnō (8) .·. « Haut [Bərəzaṇt], le petit-fils des Rivières [Apąm Napāt], lui qui met les hommes en place et les configure, lʼaquatique parmi les (dieux) Adorables [Yazata], qui reste très bien à lʼécoute de ceux qui lui offrent le sacrifice ». 62

paōirī̃m asaŋhąmca (7) šōiθranąmca vahištəm (7) frāθβərəsəm (3) azəm yō ahurō mazdā̊ (8) airiianəm vaējō vaŋhu̯iiā̊ dāitii̯ aiiā̊ (5+6) .·. « La région ou le terroir que je délimitai (et rendis) excellent en premier lieu, ce fut le (pays) des Iraniens [Airiia] où les flots de la déesse (Rivière) de la Loi [Vaŋvhī Dāitiiā] tourbillonnent ».

Nous pouvons donc dire que √ θβars, avec le nom de la vache comme objet, ou bien signifie « immoler », ou bien « définir », tandis que √ taš renvoie plutôt à sa recomposition rituelle effectuée sur le coussin d’herbes appelé barəziš (= védique barhíṣ-) suite à la découpe de sa viande en morceaux. En effet, les vers Y 11.7ab du Haōm Staōt nous illustrent quʼil est recouru aussi à √ θβars pour la découpe de sa viande : θβāš ̣əm ā gə̄uš frāθβǝrəsō (8) taṇcištāi haōmāi draōnō (8) .·. « Si tu as découpé sans tarder cette portion de la vache pour le très ferme Haōma ».

La raison en est aussi que la portion qui est ici réservée au dieu Haōma est spécifique, différente de celles destinées aux autres dieux : l’action de √ θβars la définit. Concernant lʼimmolation, la description que la R̥gvedasaṁhitā offre du travail des dieux artisans R̥bhu me paraît instructive : RS 1.161.7 níś cármaṇo gā́ m ariṇīta dhītíbhir V yā́ járantā yuvaśā́ tā́ kr̥ṇotana | sáudhanvanā áśvād áśvam atakṣata V yuktvā́ rátham úpa devā́ m̐ ayātana « De la peau (prise comme matière première) vous avez extrait la vache à lʼaide de vos intuitions-poétiques ; les deux (êtres) vieillissants, vous les avez rendus jeunes. O fils de Sudhanvan, vous avez (à partir) dʼun cheval façonné un (autre) cheval ; ayant attelé le char, vous vous êtes approchés des dieux »31.

De cette strophe il ressort que la peau de la victime sacrificielle lui était enlevée, que cette peau était conservée dans la formation dʼun nouvel animal et que lʼopération était vue comme une source de jouvence ou comme une façon de lui faire rejoindre les dieux. La peau avec laquelle, selon cette strophe védique, la nouvelle vache est configurée rappelle évidemment aussi

31

Traduction L. RENOU, 1955-69, vol. XV p. 83. ||| Cf. RS 1.20.3c tákṣan dhenúṁ sabardúghām ; 3.60.2bc yáyā dhiyā́ gā́ m áriṇīta cármaṇaḥ | yéna hárī mánasā nirátakṣata ; 4.34.9b dhenúṁ tatakṣúr r̥bhávo yé áśvā. ||| Sudhanvan « pourvu d’un bon arc » est probablement un nom de Rudra, le dieu de la colère divine. 63

celle que Δαίδαλος utilisa pour la confection de cette vache creuse à l’intérieur de laquelle Πασιφάη allait prendre place32. La strophe Y 29.1, en plus de personnages positifs mal définis tels que Gə̄uš Uruuan, mentionne quelques forces négatives. Cinq entités démoniaques y sont réparties en deux groupes : Aēšəma est flanqué de Hazah33 tandis que Dərəz et Təuuiš épaulent Rəma [Hrama]. Ces hypostases ou acolytes disparaîtront, mais Rəma 34 lui-même, sans doute identique à l’Aγataša « rédacteur de textes inadéquats » [Agataxša] de l’Avesta récent35, finira par fusionner avec Aēšma Daēuua [Išma Daiva] : le Diablo Cojuelo n’est autre qu’Asmodée. Lʼévolution rassemble de la sorte toute une multiplicité dʼentités en une seule : Aēšǝma > Aēšma Hazah > Cojuelo de Vélez de Guevara ou Rǝma > Rǝma ou Aγataša Asmodée de Lesage Dǝrǝz Tǝuuiš Les hypostases reflètent certaines attitudes ou certains défauts du Daēuua36. Leur énumération constitue un hendiadys : comme le zand le suggère, il est recouru à la coordination de substantifs (hazascā ... dərəš[cā] təuuišcā) en lieu et place de lʼasyndète de leurs dérivés adjectifs (*hazaŋhā ... dərəzuuā̊ təuuīšmā̊*). Dans la mythologie de l’Avesta archaïque, Aēšəma37 n’est pas opposé de façon explicite à Səraōša38 « le fait de déclamer les textes ». Le démon auquel s’opposait Səraōša, c’y était encore Asrušti « l’absence de déclamation » (Y 43.12), mais il est vrai que l’Aēšəma de la strophe Y 30.6 (bąnaiiən ahūm) fait le contraire de ce que fait le Səraōša de la strophe Y 32

Voir Chapitre IV 2. Dans la RS, Sáhas « le fait de forcer » est le père dʼAgní (É. PIRART, 2010a, p. 59). 34 Y 29.1, 48.7, 49.4. ||| Pour le traduire par « immobilization », H. HUMBACH et K. FAISS, 2010, p. 77, paraissent analyser rǝmō à partir de √ ram « arrêter ». La mythologie comparée suggère pourtant que nous y trouvions plutôt lʼidée de « boiter » : proto-indo-européen √ *slemH. 35 Sur lʼassociation avestique récente et pehlevie des démons Aēšma et Aγataša, É. PIRART, 2007a. 36 Je persiste dans l’idée que la forme proto-indo-européenne est *dHoiu̯ó- et que ce mot ne dérive pas de *di̯ éu-, le nom du ciel diurne ou du jour. 37 Y 29.1, 30.6, 44.20, 48.7,12, 49.4. 38 Y 28.5, 33.5,14, 43.12, 44.16, 45.5, 46.17 ; cf. səraōšān- 50.4. 33

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44.16 (ahūm.biš) : avec l’Asmodée vieil-avestique, l’existence tombe malade ; avec Səraōša, elle se remet. Le verbe, du fait de sa position par rapport aux sujets coordonnés (A1 + B1ºcā + A2 + verbe + B2[ºcā] + C2ºcā)39, a pu demeurer au singulier. Ce verbe, ā+√ hī « attraper »40, explique l’épithète d’anāhitā- « inattrapable » que reçoit la grande déesse iranienne. Il faut avoir à l’esprit que si, en français, nous disons « attraper une maladie », l’image vieil-iranienne, par contre, est que « la maladie nous attrape ». En effet, lʼaction de ā+√ hī est à gloser avec le verbe bąnaiia- du Y 30.6b2-c : hiiat̰ vǝrǝnātā acištǝm manō (9) at̰ aēšǝmǝm hə̄ṇduuārǝṇtā (7) yā bąnaiiǝn ahūm marǝtānō (9) « En optant pour les pires idées, ils embrassent celles dʼAēšəma et, avec lui, infectent lʼexistence de celui qui a mémorisé les textes ».

Deux sens sont possibles pour le substantif vāstra- : la présence de vāstar- dans l’hémistiche c1 peut nous suggérer de choisir le sens de « rôle ou travail du pâtre », mais, au vu des contextes récents, du Yasna Haptaŋhāiti41 et de la suite du texte, celui plus concret de « fourrage » me paraît préférable. La vache se plaint des violences qui lui sont faites, mais aussi, peut-on penser, de la passivité de ses interlocuteurs « vous ». Nous ignorons qui se cache derrière les entités démoniaques accusées de la rendre malade ou de lui imposer corde et entrave. Le pâtre (vāstar) ne peut facilement être tenu pour responsable des mauvais traitements qu’elle subit : nous voyons mal pourquoi il la battrait ou l’enchaînerait. Cependant, remarquerons-nous, le vacher est compté au nombre des dieux si ceux-ci sont bien à reconnaître derrière le pronom « vous ». Qui est donc le coupable des souffrances de la vache ? Il faudra vérifier que le vacher est bien à considérer comme un dieu. Quant à elle, pour avoir pu accéder à ce statut, la vache aura été immolée. Comme il est bel et bien question de la seule âme de la vache ou quʼaucune allusion nʼest faite à son corps, la vache aura effectivement été immolée, mais, comme tuer une vache laitière relève de lʼabsurde dans dʼautres circonstances, son immolation, en principe, ne sʼexplique que si elle appartient à un vacher défunt. En l’absence de ce propriétaire, pour n’avoir d’autre vacher quʼeux, elle se tourne vers les dieux : pourquoi fallait-il l’immoler ? 39

Immédiatement à la suite du premier terme sujet coordonné du second groupe. Le sens « ligoter » que J. KELLENS, 2014, p. 273 ; 2015, p. 26, a encore adopté récemment est résolument à rejeter. 41 Notamment V 5.20, Vr 1.2, 2.11, Y 35.7. 40

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Avant qu’il lui soit répondu, les dieux en débattent avec Gə̄uš Tašan, un personnage qui pourrait bien être l’un d’eux. Si nous pouvons en juger par son nom, ce Gə̄uš Tašan serait aussi l’immolateur de la vache, mais il faut expliquer quʼil puisse à son tour poser les questions.

Y 29.2 adā tašā gə̄uš pərəsat̰ 42 (7) aṣ̌əm43 kaθā tōi gauuōi ratuš (9) hiiat̰ hīm dātā xšaiiaṇtō44 (7) hadā45 vāstrā46 gaōdāiiō47 θβaxšō48 (9) 42

Réel du présent continu : voir J. KELLENS et É. PIRART, 1988-91, vol. II p. 74 §1.2.3. 43 Cf. Y 46.9d2 yā aš ̣āi gə̄uš tašā mraōt̰ . 44 Pour J. KELLENS, 2014, dātā est un verbe conjugué à la 2e personne du pluriel et xšaiiaṇtō, un nominatif pluriel apposé à son sujet. C’est du fait même de considérer θβaxšō comme un substantif. En prenant θβaxšō pour un verbe conjugué à la 2e personne du singulier, j’ai la faculté de faire de dātā un adjectif verbal accordé avec vāstrā et de xšaiiaṇtō un génitif singulier agent de cet adjectif verbal. Nous ferons du participe xšaiiaṇt- un nom d’Ahura Mazdā sur base de Y 32.16, 43.1, 51.17. La place de la forme θβaxšō tout à la fois en compagnie du vocatif gaōdāiiō et à la clôture de la proposition est en faveur de cette analyse. 45 Curiosité : la préposition hadā (= védique sahá), dans ce contexte qui réunit vāstra- et gaōdāiiu-, rappelle le nom du dieu Hadiš des passages du Vr (étudiés É. PIRART, 2012b, p. 40-42), le dieu des greniers ou des silos. 46 De deux choses l’une, vāstrā est l’instrumental singulier ou bien de vāstar-, ou bien de vāstra-. Lʼexistence du syntagme vāstrǝm √ dā (Y 35.4) est en faveur de la seconde alternative. 47 Pour J. KELLENS, 2014, p. 274, nous devrions suivre Ch. BARTHOLOMAE, 1904, colonne 481, qui fait de gaōdāiiō l’accusatif neutre singulier d’un adjectif gaōdāiiah- et l’accorder avec le substantif neutre θβaxšō, mais, à mes yeux, le voisinage de vāstrā nous impose de tenir compte du Vr 2.11, d’analyser gaōdāiiō comme le vocatif de gaōdāiiu- (É. PIRART, 2012b, p. 40-2) et de l’accorder avec aš ̣ā sous-entendu. 48 Pour Ch. BARTHOLOMAE, 1904, col. 794, θβaxšō est le substantif « Rührigkeit, Eifer ». ||| Le sens de proto-indo-iranien √ *tu̯akš (sur quoi M. MAYRHOFER, 1992-2001, vol. I p. 683) est « donner de son temps, sʼappliquer à, se consacrer à, traiter avec soin ou dévouement » ; au moyen, « mettre à profit ». Ses autres occurrences sont : Y 9.15.2b yō θβaxšištō yō āsištō (8) « le plus efficace, le plus rapide » ; 11.10.2 †θβaxšāi haōma maδāi (?) hauuaŋvh̃āi aš ̣auuastāi (8).·. « Pour que tu en [= de mon corps] prennes soin, Haōma, pour ma bonne existence, pour ma qualité dʼaš ̣auuan » ; 33.3b2 vīdąs vā θβaxšaŋhā gauuōi « ou se dévoue avec labeur à la Vache » 66

kə̄m hōi uštā49 ahurəm (7) (traduction J. KELLENS et É. PIRART, 1988-91, vol. I p. 123) ; 46.12c ārǝmatōiš V gaēθā̊.frādō θβaxšaŋhā « grâce au labeur de la Déférence qui fait prospérer les troupeaux » (trad. J. KELLENS et É. PIRART, 1988-91, vol. I p. 162) ; Yt 5.65abcd hā hē bāzauua gǝuruuaiiat̰ (8) mošu tat̰ ās nō[it̰ ] darǝγǝm (8) yat̰ frāiiataiiat̰ θβaxšǝmnō (8) ao̯i ząm ahuraδātąm (8) « Elle le prit par le[s] bras et, en un rien de temps, le replaça avec soin sur la Terre que le Roi de la Sagesse avait mise en place » ; 10.14hi yahmii̯ a āpō nāuuaiiā̊ (8) pǝrǝθβiš xšaōδaŋha θβaxšǝṇte (8) « (un pays de hautes montagnes) où la force torrentielle de larges rivières en crue est mise à profit » ; 10.98.3c yō θβaxšištō yazatanąm (8) « le plus soigneux des Adorables » ; 11a.12.2c = Y 57.13.2c yūnąm θβaxšištǝm « qui est le plus soigneux des pubères » ; RS 1.100.15abc ná yásya devā́ devátā ná mártā V ā́ paś caná śávaso ántam āpúḥ | sá praríkvā tvákṣasā kṣmó diváś ca « Lui de la force duquel ni les dieux avec leur divinité, ni les mortels, ni les eaux mêmes nʼont atteint lʼextrémité, / il déborde en force la terre et le ciel » (trad. L. RENOU, 1955-69, vol. XVII p. 35) ; 2.33.6 ún mā mamanda vr̥ṣabhó marútvān V tvákṣīyasā váyasā nā́ dhamānam | ghŕ̥ṇīva chāyā́ m arapā́ aśīyaVā́ vivāseyaṁ rudrásya sumnám || « Le taureau (Rudra) avec les Marut mʼa-toujours soulevé-dʼivresse, grâce à sa force-vitale (la) plus robuste, moi qui ai besoin (dʼaide). / Puissé-je atteindre sans mal-physique, puissé-je gagner à moi la faveur de Rudra, comme (on atteint) lʼombre par la chaleur-torride ! » (trad. L. RENOU, 1955-69, vol. XV p. 158) ; 4.27.2b abhī́ m āsa tvákṣasā vīriyèṇa | « (Indra) a toujours le dessus grâce à son engagement et à son courage » ; 5.34.6abc vitvákṣaṇaḥ sámr̥tau cakramāsajó V ʼsunvato víṣuṇaḥ sunvató vr̥dháḥ | índro víśvasya damitā́ vibhī́ ṣaṇaḥ « Sans y aller par quatre chemins lors de la rencontre, se tenant à la roue du char, plein de haine pour celui qui ne pressure pas le sóma et de faveurs pour celui qui sʼy emploie, Indra, terrible dompteur de tout (impie) » ; 6.18.9ab udā́ vatā tvákṣasā pányasā ca V vr̥trahátyāya rátham indra tiṣṭha | « Indra, monte en voiture avec exaltation, engagement et savoir-faire en vue de frapper Vr̥tra » ; 8.20.6 ámāya vo maruto yā́ tave dyáur V jíhīta úttarā br̥hát | yátrā náro dédiśate tanū́ ṣuv ā́ V tvákṣāṁsi bāhuvójasaḥ || « Devant votre impétuosité, ô Marutʼs, (votre action de) marcher, le ciel a cédé, (se repliant) plus haut avec puissance, / quand les seigneurs ayant aux bras une force-formidable attestent sur leurs corps les (signes de leurs) actes-de-force » (trad. L. RENOU, 1955-69, vol. X p. 49) ; 10.44.1 ā́ yātuv índraḥ svápatir mádāya V yó dhármaṇā tūtujānás túviṣmān | pratvakṣāṇó áti víśvā sáhāṁsiy V apāréṇa mahatā́ vŕ̥ṣṇiyena || « Je veux quʼIndra, lui qui, du fait du maintien (que nous assurons de lʼagencement rituel), plein de fougue, est accompagné de la force de frappe, vienne de sa propre initiative sʼenivrer et mettre à profit ses capacités incomparables ou magnifiques de mâle bien au-delà de toutes nécessités ». 49 Réel du présent : voir J. KELLENS et É. PIRART, 1988-91, vol. II p. 66 §1.1.3.2. ||| La construction du verbe √ vas certes nʼest pas inusuelle (« vouloir acc. pour gén./dat. »), mais, au vu de la réponse, il faudrait corriger †uštā en ×vistā < *u̯ind-ta « vous avez fourni », malgré les traductions médiévales qui en font un nom 67

yə̄ +drəguuō.dəbīš50 aēšəməm vādāiiōit̰ 51 (9) .·. 2a1 2a2 2b 2c1 2c2

Introduction Suite a1 Prodose interrogative Apotase Prodose interrogative Apotase

Selon les indications marginales pehlevies, la deuxième strophe se compose de deux parties52 : dʼune part, un discours de Zaraθuštra, autrement dit : du récitant (1a1 + aš ̣ǝm) ; dʼautre part, un ensemble de questions dʼAhura Mazdā occupant tout le reste de la strophe. Lʼauteur des indications marginales identifiait donc Gə̄uš Tašan avec le grand dieu, mais cette identification, secondaire, repose sur l’idée que le grand dieu est comparable à quelque Viśvakarman. La deuxième strophe, au lieu de répondre aux questions de la première, en ajoute deux : nous cherchions un θβōrəštar et un tašan, mais à présent, nous cherchons plutôt un ratu et un ahura. De surcroît, pour de telles questions, Gə̄uš Tašan se tourne vers Aš ̣a pour lui dire pratiquement dʼemblée que cʼest Ahura Mazdā qui pourra y répondre dʼune façon qui satisfasse la vache. De fait, nous devrions avoir trouvé le tašan puisque c’est précisément lui qui a la parole. Lʼincongruïté pourrait être le signe dʼune altération du texte. Comment savoir ? Le personnage de tašan pose ses questions à l’une des rares divinités avérées du Y 28, Aš ̣a, mais en lui donnant le nom de Gaō-

de la félicité provenant du locatif singulier figé de ušti- « la volonté ». Cependant, nous ne pouvons envisager cette correction quʼen refusant de reconnaître quʼune citation de ce passage figure dans le Vr 18.1.1 ušta ahurǝm mazdąm yazamaide. Peut-être faut-il donc penser à l’adage Qui cherche trouve et penser que la volonté des dieux leur permet de produire un ahura. 50 La remarque de J. KELLENS, 1995, p. 354 n. 17, si nous interprétons lʼinstrumental par « malgré », nʼa plus guère de raison dʼêtre puisque ses sens sociatif de lʼobjet et sociatif négatif du sujet se confondent pratiquement. H. HUMBACH et K. FAISS, 2010, p. 77, recourent trop astucieusement à la parenthèse « (practiced) » pour rendre compte de lʼemploi de lʼinstrumental drǝguuō.dǝbīš. 51 Cet optatif exprime un procès quʼil est dans la nature même de lʼantécédent dʼaccomplir : voir J. KELLENS et É. PIRART, 1988-91, vol. II p. 89 §2.4.3.2. ||| Par sa morphologie, le verbe vādā̆iia- coïncide avec le grec ὠθέω : Ch. BARTHOLOMAE, 1904, colonne 1410. 52 frāz-gōvišn ī zaraθušt (prʼc gvbšn Y zltvšt|), frašn ī ohrmazd (plšn| Y ʼvhrmz̠ d). 68

dāiiu53. L’incertitude pesant sur le sens de ce nom de Gaōdāiiu ―signifie-t-il « celui qui nourrit la vache » plutôt que « celui qui se nourrit de la vache » ?― nʼa guère dʼincidence sur notre interprétation de la strophe. Dans ses questions, Gə̄uš Tašan, en mentionnant quelques figures négatives telles que le démon Aēšəma et certains drəguuaṇt, relaie la prière que Gə̄uš Uruuan, avec la strophe précédente, lançait aux dieux et dans laquelle il sollicitait leur protection contre de tels êtres négativement connotés. Une belle cohérence émane ainsi de la succession des deux strophes. Le Vīsp-rat donne le nom de Gaōdāiiu à un Yazata distinct54, lʼallégorie de lʼhomme qui nourrit la vache. Cet homme est très probablement identique au Yazata du Y 29.2, lequel est en réalité le Nar Aš ̣auuan mis en scène à la cinquième strophe (mə̄ uruuā) ou celui qui est nommé à la huitième strophe (nərəš), l’allégorie du sacrifiant dont le Yt 14.54 met l’âme en tandem avec celle de la vache. La divergence que le Y 29.2 montrerait par rapport aux passages du Vr concernant Gaōdāiiu n’est guère profonde puisque nous pouvons admettre qu’Aša,̣ pour représenter le bon agencement rituel des éléments de la cérémonie que le Nar organise, est à comprendre comme la synecdoque de ce dernier. L’épithète gaōdāiiu- qui lui est accordée, « qui nourrit la vache » ou « qui se nourrit de la vache », se comprend aussi sur base du rôle que le lait de la vache joue dans la performance sacrificielle qu’Aš ̣a constitue. 53

J. KELLENS, 1995, p. 354 n. 17, a mis en lumière les difficultés du deuxième vers de cette strophe : devons-nous ordonner la subordonnée introduite par hiiat̰ avec la première question ou avec la seconde ? Dans cette subordonnée hiiat̰ hīm dātā xšaiiaṇtō hadā vāstrā gaōdāiiō θβaxšō, le verbe est-il dātā ou θβaxšō ? La forme hīm du pronom représentant la vache me paraît interdire dʼopter pour dātā « vous lui avez accordé le labeur qui la nourrit » : nous attendrions le datif. De surcroît, dʼune part, nous sommes dans lʼobligation de faire de gaōdāiiō un vocatif et de sortir ainsi ce mot de la syntaxe de la proposition de façon que la vache, pour une bonne phraséologie, nʼy apparaisse quʼune seule fois ; dʼautre part, la deuxième personne du singulier de θβaxšō impose dʼordonner cette subordonnée avec une principale contenant un pronom de cette même personne, tē. ||| La traduction « en même temps que le soin de pâture » que J. KELLENS, 2015, p. 27, se risque à donner pour le syntagme hadā vāstrā me paraît indéfendable : en védique, sahá ne signifie jamais « en même temps que ». À mes yeux, il convient d’éviter pareille coordination déguisée du « soin de pâture » et du « labeur de traire ». L’invariable hadā, en soulignant le cas instrumental de vāstrā, met en exergue le moyen auquel le sacrifiant ou l’immolateur recourt pour prendre soin de la vache. 54 É. PIRART, 2012b, p. 40-42. 69

La question posée en génère deux autres : pourquoi est-ce à Aš ̣a que Gə̄uš Tašan pose la question ? Pourquoi est-ce Gə̄uš Tašan qui la lui pose ? Le pronom possessif tōi répond certes à la première de ces deux questions ―si elle lui est posée, cʼest pour son implication dans le sort de la vache―, mais en ne faisant que la déplacer. La bonne réponse, me semble-t-il, est que le ratu de la vache se situe dans Aš ̣a ou que ce dernier en est le cadre en ce sens que lʼexistence de la vache prend tout son sens et remplit sa vraie fonction à lʼintérieur de la cérémonie sacrificielle dont Aš ̣a, cosmos idéal, est la somme des ingrédients. Lʼimmolation situant à coup sûr la vache dans le cours de la fête, cʼest tout naturellement son immolateur qui, cherchant à justifier ses actes, pose la question. Ce nʼest dʼailleurs pas un hasard si, dans le Zaraθušt Nāmag55, cʼest Aš ̣a Vahišta qui dira aux mazdéens : AL AYŠ ʼytvn| gvsp̄ nd BRA kvštʼl YHVVNyt cygvn ZK pyš BRA kvštʼl YHVVNt| HVE|yt .·. « Que personne ne se fasse immolateur de Gaō Spǝṇtā comme auparavant vous avez été ses immolateurs ! »

La question « Quel ratu as-tu pour la vache ? » revient à dire : Comment la vache trouve-t-elle sa place parmi les ingrédients de la cérémonie sacrificielle ? Comment devient-elle lʼun des ratu de la cérémonie sacrificielle ? Car, du mot ratu-, littéralement « ce qui permet (ºatu-) un agencement (rº) », dérivé de la même racine que aš ̣a- (= védique r̥tá-), il existe deux sens fondamentaux : il faut y voir, dʼune part, lʼorganigramme qui permet de constituer un agencement et, dʼautre part, chacune des pièces qui le conforment avec exactitude. Remarquons que les deux mots aš ̣a- et ratu-56 figurent ensemble dans un même hémistiche ici comme dans Y 27.13a2 ou dans Y 29.6b2. La conjonction hiiat̰ nʼest aucunement lʼintroduction dʼune complétive57 qui contiendrait la substance dʼun ratu : il est plutôt question du champ 55

Dk 7.8.8. Les traductions que H. HUMBACH et K. FAISS, 2010, p. 77, proposent de aš ̣aet de ratu- par « Truth » et « judgement » sont la première un christianisme et la seconde, un pehlevisme. 57 Contre H. HUMBACH et K. FAISS, 2010, p. 77, qui soulignent que la séquence hīm dātā signifie « takes (care of) her », font de hiiat̰ lʼintroduction dʼune complétive apposée à ratuš ou régie par celui-ci, analysent xšaiiaṇtō comme un génitif et admettent un syntagme gaōdāiiō θβaxšō « cattle-milking zeal » dans lequel θβaxšō est le nominatif singulier du substantif de genre neutre θβaxšah- et gaōdāiiō, son épithète : « Thereupon the fashioner of the cow asks Truth: “What about your judgement on the cow, | (implying) that cattle-milking zeal of one capable of would take 56

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dʼapplication du ratu. Et ce ratu de la vache, au vu même de son étymologie, plutôt quʼune autorité ou une loi, est sa faculté dʼentrer dans le jeu cosmique, la place quʼelle occupe dans le cosmos ou le rôle quʼelle doit y jouer. Le ratu de la vache est encore ce qui met son existence en rapport notamment avec le fourrage. Pour y voir la désignation du temps-rituel, Jean Kellens58 reste tributaire de l’idée que ratu- coïnciderait avec le védique r̥tú- ou en serait l’équivalent. Même si, du fait de certains contextes, c’est assurément l’un des sens possibles du mot, il est clair, d’une part, que ce sens n’est pas le seul ou que d’autres séries de pièces formatrices d’un ensemble harmonieux telles que celles entrant dans l’organigramme sacerdotal peuvent recevoir cette même désignation ; d’autre part, que la morphologie de ratu- ne coïncide pas avec celle du védique r̥tú-. Tandis que ce dernier, devant le suffixe -tu-, montre le degré zéro radical, l’avestique, quant à lui, recourt au degré plein externe : védique r̥tú< proto-indo-européen *H2r̥-tú(cf. v.-av. ərəθβa-59) avestique ratu< proto-indo-européen *H2ré-tuLes articulations du temps ne sont pas les seules à porter le nom d’articulations ou de jointures. Les mots et les gestes, les participants et les victimes, les ingrédients des offrandes et les ustensiles, tout ce qui intervient dans la cérémonie sacrificielle fondatrice du monde est un ratu pour participer à la formation d’Aš ̣a. Le participe présent de √ xšā sʼapparente souvent à un auxiliaire de mode, notamment avec lʼimpératif ou lʼoptatif 60 , mais, combiné avec √ dā, il acquiert sans doute parfois un sens plus technique qui fait allusion au xšaθra, lʼinfluence que la cérémonie sacrificielle exerce sur Ahura Mazdā pour lʼincliner à satisfaire les prières que les adorateurs lui adressent. Nous devons éviter de faire de √ xšā un pur et simple auxiliaire de mode. Le participe présent xšaiiaṇt-, plusieurs fois ailleurs épithète d’Ahura Mazdā61, fait écho à l’exercice du xšaθra ou influence rituelle62. Et il convient de préciser (care of) her by (providing) forage? | Whom do You wish to be her lord, (one) who might break through (the wall of) fury (practiced) by the deceitful?” ». 58 J. KELLENS, 2015, p. 27. 59 Y 28.10, 46.13. 60 J. KELLENS, 1984a, p. 336. 61 Y 32.16b, 43.1b, 51.17c. 62 Voir Y 29.10ab. 71

que ෭ xšā, à la voix active, signifie non que la divinité a de l’influence, mais bien qu’elle est dopée par l’influence que les adorateurs exercent sur elle. Sans cet exercice de leurs adorateurs, les dieux ne peuvent rien. Parmi les richesses que les dieux, forts de l’énergie rituelle, offrent aux hommes figure celle d’assurer de verts pâturages ou le fourrage à leurs troupeaux. Les dieux, pour ainsi dire, sont les fournisseurs du fourrage, mais ne peuvent l’être que si le culte rendu leur en donne les moyens.

Y 29.3 Les graves difficultés de la troisième strophe ont été soulignées à plusieurs reprises63. Cʼest donc en prenant des décisions hardies, voire risquées, quʼil me sera possible de rendre compte de son contenu : ahmāi aš ̣ā nō[it̰ ] sarəjā64 (7) aduuaēšō gauuōi †paitī.mrauuat̰ (9) auuaēšą̃m nō[it̰ ] vīdu̯iiē65 (7) yā66 ˟š́ auuaiṇtē67 ādrə̄ṇg ərəšuuā̊ŋhō68 (9) 63

J. KELLENS, 2014, p. 272 n. 16. Il nʼest pas clair que cet indicatif présent de première personne exprime le cas de coïncidence, contre J. KELLENS et É. PIRART, 1988-91, vol. II p. 68 §1.1.6.1, mais il y a coïncidence de sarǝjā avec *paiti.mruuąs. ||| A. CANTERA, 1993, p. 2245, n’avale pas l’idée que la racine de l’indien ślāghate se retrouve dans sarəjā. H. HUMBACH et K. FAISS, 2010, p. 78, recourent au pis-aller « wall-breaking (hero) » pour traduire la forme sarəjā analysée comme le nominatif singulier dʼun composé en +jan- « qui frappe », mais cela leur permet de faire de la forme paitī.mrauuat̰ ce quʼelle est à première vue, la troisième personne du singulier du subjonctif présent de paitī+√ mrū. Cependant, je ne vois pas quʼil soit alors possible de séparer ahmāi et gauuōi comme ils le font ad sensum : « No wall-breaking (hero) well-disposed toward the cow will answer him through truth. | One does not wish to take note of (the things) that move/stir the low-ranking, O You high-ranking. | That one is the strongest among the existing to whom I want to get together with the (plaintiff) who uttered the cries (for support) ». 65 Nous ne pouvons plus analyser vīduiiē (vidvái) comme le datif de l’infinitif (ainsi en dernier lieu H. HUMBACH et K. FAISS, 2010, p. 78) puisque celui-ci est vīduuanōi (vidvánai) et que, dans le Y 28.2, dāuuōi est lʼaccusatif de lʼinfinitif face à dāváne qui, dans la RS, en représente le datif correspondant. Lʼhétéroclisie i/n observée dans ces infinitifs se retrouve dans les noms de lʼos (védique ásthi, asthnáḥ) ou de lʼœil (védique ákṣi, akṣṇáḥ). Un rapport similaire sans doute est-il à découvrir entre les infinitifs en -tē/-tōi du vieil avestique, apparentés aux infinitifs courts du persan, et ceux en -ta-na-i-y du vieux perse. 66 Interrogatif indirect dans la rection de vīduiiē (vidvái) ? 64

72

hātą̃m huuō aōjištō (7) yahmāi zauuə̄ṇg jimā69 ˟kərəduš ā˟ (9) .·. 3a1 3a2

Prodose a2a : apposition au a2b : apotase participiale sujet de l’infinitive b1 (régissant une infinitive en b1) 3b1 Infinitive en dépendance de la participiale a2b et basée sur un infinitif régissant une interrogation indirecte en b2. 3b2 Interrogative indirecte en dépendance de l’infinitif b1 3c1 Prodose nominale 3c2 Apotase Pour lʼauteur des indications marginales pehlevies, cʼest à présent le dieu Agencement excellent, Ašạ Vahišta, qui a dʼabord la parole, mais il sʼagit probablement dʼune erreur de la transmission puisque, selon ces mêmes indications, la strophe contient aussi un discours de Zaraθuštra (3a) et la réponse qu’Aš ̣a Vahišta donne (3bc) à la question quʼAhura Mazdā (alias Gə̄uš Tašan) lui avait posée70. Cette distribution ne nous convainc pas : nous voyons dans cette strophe la suite du discours de Gə̄uš Tašan. Le subjonctif présent paitī.mrauuat̰ est injustifiable. Nous attendons le nominatif masculin singulier du participe présent (*paitī.mruuąs). À mes 67

Réel du présent : voir J. KELLENS et É. PIRART, 1988-91, vol. II p. 73 §1.2.2. Comme le sujet ǝrǝšuuā̊ŋhō est du pluriel, la correction est nécessaire. Il sʼagit dʼun bhvādi non seulement comme en védique ou en vieux perse, mais encore au vu de la seule autre forme attestée en vieil avestique, š́ iiauuā̃ i (Y 33.8a2) : frō mōi [fra]uuōizdūm arəθā tā (7) yā vohū š́ iiauuā̃ i manaŋhā (9) yasnəm mazdā xšmāuuatō (7) « Vous me suggérez, ô Mazdā, les objectifs par le biais du penser bon de façon que, grâce à lui, je puisse me mouvoir vers le sacrifice que votre adorateur (vous) offre (= penser bon de façon que ce dernier me pousse à vous offrir le sacrifice de votre adorateur) ». Au lieu de considérer un objet dans le cadre d’un sens transitif « mettre acc. en mouvement par instr. », pour lequel nous attendons plutôt le thème de causatif ou, du moins, la voix active, mieux vaut admettre un accusatif de direction. 68 Le tandem contrasté ādrə̄ṇg ərəšuuā̊ŋhō reste imparfait puisque ādra-, dérivé en -ra- de √ nād « avoir besoin », ne signifie pas « ceux d’en bas », contre J. KELLENS, 2015, p. 27. Ne confondons pas ādra- avec aδara-, même si un jeu de mots ne peut être exclu. ||| H. HUMBACH et K. FAISS, 2010, p. 78, font de ǝrǝšuuā̊ŋhō un vocatif sans ancrage ! 69 Subjonctif aoriste volitif : voir J. KELLENS et É. PIRART, 1988-91, vol. II p. 85 §2.2.3.2. 70 frāz-gōvišn ī aš ̣-vahišt (prʼc gvbšn Y ʼšvhšt|), frāz-gōvišn ī zaraθušt (prʼc gvbšn Y zltvšt|), passaxv-gōvišn ī aš ̣-vahišt (pshv| gvbšn Y ʼšvhšt|). 73

yeux aujourd’hui, lʼadverbe en ºat̰ nʼest plus une hypothèse plausible. Pour une raison inconnue, le diascévaste aurait remplacé *paitī.mruuąs par son thème nu ou la forme de la troisième personne du singulier de la voix active du subjonctif présent. C’est au prix de cette hypothèse hardie que j’arrive à comprendre tant bien que mal la structure grammaticale des deux premiers vers de la strophe, mais, comme nous allons le voir, c’est aussi au prix d’autres idées risquées que j’y arrive sans être pourtant en mesure de lever finalement tous les sous-entendus. L’idée que sarəjā ... *paitī.mruuąs, au lieu d’un discours direct, régit une infinitive, avancée sans l’appui d’aucun autre exemple indo-iranien ancien, ainsi m’est-elle dictée par les seules nécessités de la compréhension. Il est malaisé de lever l’ambiguïté de la forme aduuaēšō : le mot est-il de genre neutre ou masculin ? Seule la seconde possibilité me semble pratiquable : si nous en faisons le nominatif masculin singulier de aduuaēša(= avestique récent at̰ baēša-71, védique adveṣá-)72 « sans hostilité », le mot s’accordera avec le sujet de sarəjā ... *paitī.mruuąs, mais la concurrence des datifs ahmāi et gauuōi au sein de la même proposition peut faire difficulté. En effet, nous devons éviter l’accord entre les deux datifs afin de garder au nom de la vache son genre féminin. La solution sera d’admettre que le pronom ahmāi représente son âme-moi (uruuan-) qui, même dans le cas dʼune vache, est une entité masculine et de placer gauuōi en tant que désignation de sa corporalité ou de son physique à l’intérieur de la proposition infinitive basée sur vīduiiē. Dans cette infinitive, gauuōi complètera aduuaēšō. Cependant, ces hypothèses ne nous permettent pas de lever les inconnues dont est semée l’interrogation indirecte introduite par yā, placée en dépendance de l’infinitif vīduiiē : que représentent les pronoms auuaēšąm et yā ? Que sous-entendent les épithètes ādrə̄ṇg et ərəšuuā̊ŋhō ? Cette troisième strophe, faut-il voir, adressée par le tašan de la vache à Aš ̣a comme la deuxième, inscrit dans la liste des personnages énigmatiques plusieurs entrées supplémentaires : certes « le plus puissant des Haṇt » doit être Mazdā, mais je ne puis déterminer qui sont « les hauts » ni « les nécessiteux ». Ajoutons que la restitution « le (uruuan de la vache) » reste incertaine. Et je nʼarrive pas à voir qui peuvent bien être les personnages ou les choses que désigne le pronom démonstratif « ceux-là » (auuaēšąm). Dans le dernier vers, celui qui 71

Dans lʼAvesta récent (Vr 21.3, Yt 11.2), le mot, en raison du voisinage de aδauuī̃m (< adabiyam), paraît avoir le sens passif : nǝmō vohū̆ (4) aδauuī̃m at̰ baēšǝm (7) « le bon Hommage que nul ne peut ni leurrer ni malmener ». Ce passage estil la citation dʼun vers vieil-avestique du type connu par lʼUštauuaitī Gāθā ? 72 Je ne puis écarter la possibilité que aduuaēša- représente adviša-, le participe en ºá- de √ duuiš. Sa formation serait alors parallèle à celle du védique animiṣá« qui ne ferme pas les yeux » (= ánimiṣant-). 74

a la parole, en se présentant comme un kǝrǝdu-73 et en adressant ses appels à un aōjišta-, paraît être lʼun des « nécessiteux » que les « hauts » devraient secourir. Dans cette hypothèse, nous pouvons considérer que ces derniers ne sont autres que les Haṇt, mais ceci ne résout pas lʼénigme de « ceux-là ».

Y 29.4 mazdā̊ saxvārə̄74 mairištō (7) yā zī vāuuərəzōi pairī.ciθīt̰ (9) daēuuāišcā maš ̣ii̯ āišcā75 (7) yācā varəšaitē76 aipī.ciθīt̰ 77 (9) huuō vīcirō ahurō (7) aθā nə̄ aŋhat̰ 78 yaθā [huuō]79 vasat̰ 80 (9) .·. 4a1

Premier volet du sujet de lʼapotase

73

Visiblement, lʼhypothèse que Jean Kellens et moi avons défendue concernant kǝrǝdušā (J. KELLENS et É. PIRART, 1988-91, vol. II p. 230 ; vol. III p. 35) nʼa pas convaincu H. HUMBACH et K. FAISS, 2010, p. 78, mais je ne vois pas comment ils peuvent arriver à traduire ce mot par « together with the (plaintiff) who uttered the cries (for support) ». 74 Dans leur traduction « The Wise One precisely remembers the acts of violence which have been perpetrated all around | by Daēvas/ devils and (bad) mortals, and those (He will remember) as well which will be perpetrated (by them) in the future. | He is the competent Lord. As He desires so it may happen to us », H. HUMBACH et K. FAISS, 2010, p. 78, donnent le sens de « acts of violence » à saxvārə dʼaprès le persan saxun. 75 La voix moyenne donne le sens passif aux verbes vāuuərəzōi et varəšaitē. Et l’hémistiche daēuuāišcā maš ̣iiāišcā constitue leur complément d’agent commun. 76 Temps du passé et du futur en contraste représentés respectivement par lʼindicatif parfait et le subjonctif aoriste : voir J. KELLENS et É. PIRART, 1988-91, vol. II p. 66 §1.1.2 ; p. 80 §1.3.3 ; p. 85 §2.2.3.1. 77 Lʼemploi de aipī, renfort du sens futur, rappelle ceux du védique ápi dans apiśarvará- (Chapitre III 2) ou du grec ἐπί dans ἐπιγείνομαι « je nais après ». 78 Emploi du subjonctif présent comme substitut de lʼimpératif : voir J. KELLENS et É. PIRART, 1988-91, vol. II p. 81 §2.1.1.3. 79 Cette interpolation diascévastique a pour but de signaler que l’hémistiche huuō vīcirō ahurō est une anticipation sur le sujet de vasat̰ . H. HUMBACH et K. FAISS, 2010, p. 78, ne tiennent aucun compte de lʼavertissement du diascévaste que huuō vīcirō ahurō est à considérer comme le sujet de vasat̰ . 80 Lʼattraction du verbe principal sans doute est-elle à lʼorigine de cet emploi du subjonctif présent derrière yaθā « comme » : voir J. KELLENS et É. PIRART, 1988-91, vol. II p. 83 §2.1.4. 75

4a2-b Deux interrogatives indirectes coordonnées introduites par c1 4c1

Second volet du sujet de lʼapotase (introduction des interrogatives indirectes de a2 et b)

4c2

Prodose

Apotase

La répartition selon laquelle lʼauteur des indications marginales pehlevies propose de donner à nouveau la parole à Zaraθuštra, puis à Aš ̣a Vahišta81, cette fois non plus, ne peut emporter notre conviction. Lʼensemble de cette quatrième strophe ne forme quʼune seule phrase sʼil faut accepter la suggestion du diascévaste. Celui-ci, en introduisant huuō dans le dernier hémistiche, considère que les mots de mazdā̊ à ahurō constituent le groupe sujet de la subordonnée en yaθā. Cette phrase appartient au discours de Gə̄uš Tašan. Son discours avait commencé à la deuxième strophe. En effet, même si elle n’est pas clairement reliable aux autres, sa teneur dʼéloge permet de ranger la quatrième strophe à la suite de la précédente parmi les mots du kərədu. Dès lors, nous avancerons que le locuteur a l’espoir quʼAhura Mazdā, vis-à-vis de « nous », se montrera à la hauteur des termes de lʼéloge qui lui est adressé. La mention de quelques forces négatives anonymes (daēuuāišcā maš ̣iiāišcā) ne s’oppose nullement à ce que nous fassions de Gə̄uš Tašan ce locuteur : il garderait donc la parole prise avec la deuxième strophe. Le pluriel du pronom « nous », dans cette hypothèse, serait à expliciter par l’addition du duel figurant dans la cinquième strophe (at̰ vā... mə̄ uruuā gə̄ušcā) et du vocatif présent dans la troisième (aš ̣ā) pour autant, bien sûr, que la locution « mon uruuan » signifie « moi qui suis Gə̄uš Tašan ». Pour Jean Kellens, les deux relatives coordonnées sont en dépendance de vīcirō82 : « qui sait faire la différence entre (lʼactivité-rituelle) que les dieuxcélestes ou leurs fidèles ont eues jadis et (celle) quʼils auront à lʼavenir ». La place de la particule zī plaide pour cette répartition. Néanmoins, ceci ne 81

frāz-gōvišn ī zaraθušt (prʼc gvbšn Y zltvšt|), passaxv-gōvišn ī aš ̣-vahišt (pshv|gvbšn Y ʼšvhšt|). 82 J. KELLENS, 1995, p. 355. Je ne m’explique pas comment, dernièrement, J. KELLENS, 2015, p. 27, a pu faire de saxvārə̄ l’antécédent des yā : « Mazdā murmure sans cesse les préceptes (?) qui ont été appliqués jusquʼici par les dieux et les hommes et ceux qui seront appliqués désormais. Il est lʼAhura qui sait distinguer (ceux-ci de ceux-là). Quʼil en aille pour nous comme il le veut ! ». 76

sʼoppose pas à lʼidée dʼune seule phrase, le syntagme saxvārə̄ mairištō pouvant être vu comme épithète plutôt que comme prédicat dans le cadre dʼune indépendante limitée au premier hémistiche. En outre, la distinction dont est capable le vīcira, à mes yeux83, est opérée non entre le passé et le futur, mais bien entre « nous » et les drəguuaṇt, « les (impies) accompagnés de lʼErreur », puisque le groupe qui dit « nous », constitué de Gə̄uš Tašan, de la vache et d’Aš ̣a, en tant que triade dʼallégories, se situe forcément à la fois dans le passé, dans le présent et dans le futur.

Y 29.5 at̰ 84 vā ustānāiš ahuuā85 (7) zastāiš86 frīnəmnā87 ahurāi.ā (9) mə̄ uruu̯ā gə̄ušcā aziiā̊ (7) hiiat̰ 88 mazdą̃m duuaidī89 fərasābiiō (9) 83

Contre J. KELLENS, 1995, p. 355 ; 2015, p. 27. Le rôle de cette particule est ici de souligner le passage dʼune personne grammaticale à lʼautre (huuō ... at̰ vā). 85 Le seul imparfait des textes vieil-avestiques est celui de √ ah « être » : voir J. KELLENS et É. PIRART, 1988-91, vol. II p. 79 §1.3.1. Cependant, nous nʼavons que faire ici dʼun imparfait. Le poète a eu recours à la première personne alors même quʼune stricte grammaire aurait exigé la troisième personne du verbe puisque son sujet mə̄ uruuā n’est pas azə̄m. Dans la traduction, afin d’éviter l’anacoluthe, j’ai traduit mə̄ uruuā gə̄ušcā simplement par « moi et le ruvan de la vache, nous » au lieu de « mon Moi et celui de la vache, nous » ou de « mon ruvan et celui de la vache, nous ». Remarquons, au vers Y 50.1a, que mōi uruuā est également construit avec un verbe conjugué à la première personne, isē (J. KELLENS, 1984a, p. 201). ||| H. HUMBACH et K. FAISS, 2010, p. 78, soulignent que ahuuā nʼest pas le verbe « nous deux étions » et quʼil convient dʼy voir lʼinstrumental singulier de ahuuā« energy, fervor » (= avestique récent aŋvhā-). Pour pareille hypothèse, nous devrions admettre que lʼinstrumental singulier des féminins en ºā- pourrait être ºā au lieu de ºaiiā. Lʼexemple daēnā quʼils en trouvent à la strophe Y 45.11 ne convainc personne. Par contre, ils ont raison de souligner que la compréhension que Jean Kellens et moi avons avancée (J. KELLENS et É. PIRART, 1988-91) suppose que nous corrigions ahuuā en ˟ahuuō et que aº représente le préverbe *ā́ . Pour défendre pareille correction, je veux alors tirer argument du fait que le mot zastāiš qui suit immédiatement commence avec une sifflante : proto-indo-iranien *āsu̯as | źhastāiš > proto-gâthique *āhu̯azzastāiš > *āhu̯a zastāiš. 86 Emploi du syntagme en lieu et place du bahuvrīhi. 87 Masculin duel puisque uruuan- est du masculin. Emprunté au subjonctif, le thème en ºa- de cette forme frīna- de √ frī qui, par ailleurs, produit un présent kryādi (frīnā-) lui imprime une nuance de but. 84

77

nō[it̰ ] ərəžəjii̯ ōi frajiiāitiš (7) nō[it̰ ] fšuiieṇtē drəguuasū pairī90 (9) .·. 5a-b1 Prodose 5b2 Apotase (introduction de c) 5c Indépendante interrogative Suite du discours de Gə̄uš Tašan. Quant à elles, les indications marginales pehlevies restent confuses. Pour lʼidentification des personnages impliqués, la cinquième est une strophe clé : elle nous permet de savoir que la vache forme un tandem avec l’orant et que le tašan de la vache ne serait autre que ce dernier. En effet, le tašan de la vache était clairement donné pour le personnage qui posait la question de la deuxième strophe ; or, à présent, nous apprenons que les deux personnages qui posent des questions sont le Moi (uruuan-) du sacrifiant et celui de la vache, mais, ainsi que l’emploi du pronom vā le révèle, le syntagme mə̄ uruuā « mon âme-moi » revient à dire azə̄m « moi ». En outre, la cinquième strophe apporte des indications quant à savoir à qui les questions étaient posées : le pronom « vous » représente forcément les dieux puisque Mazdā et Aš ̣a figurent forcément parmi ceux que le tandem de l’homme et de la vache interroge. Cependant, pour l’entériner, nous avancerons que le récitant et l’orant ne font qu’un. Le poète parle de lui-même à son auditoire, mais, pour ce faire, se met en scène, si bien que les dieux apparaissent à la troisième personne grammaticale lorsque le discours est adressé à cet auditoire, mais à la deuxième lorsque le poète rapporte les propres mots qu’il a eus pour interroger les dieux.

88

H. HUMBACH et K. FAISS, 2010, p. 78, pour arriver à la traduction « We two are thus devoting ourselves to the Lord with hands stretched our fervently, | my soul and that of the fertile cow, choosing/asking (Him,) the Wise One, to (give us) instructions: | (There is) no life prospect for the one living decently, (there is) none for the cattle breeder among the deceitful all around », paraissent avoir osé faire de hiiat̰ lʼintroduction dʼune complétive en dépendance de frīnəmnā. Je ne vois pas non plus comment il serait possible de donner le sens de « instructions » à fərasā̊biiō (sic avec ºā̊º). 89 Emploi de lʼinjonctif aoriste dans la prodose dʼune corrélation inverse at̰ ... hiiat̰ avec pleine valeur de prétérit dʼantériorité (voir K. KELLENS et É. PIRART, 1988-91, vol. II p. 79 §1.2.5.3), mais, à la première personne, l’injonctif aoriste peut aussi avoir le sens intentionnel. 90 pairī + locatif aussi Y 34.8. 78

L’identité des forces négatives mentionnées sous le nom de drəguuaṇt au dernier vers dans ce qui doit constituer une nouvelle question n’est pas clairement explicitée. Pour Jean Kellens91, ce nʼest pas une nouvelle question, mais sa compréhension de la fin de la strophe qui serait à ordonner avec le début de la suivante mʼéchappe. Il nous reste à déterminer qui sont le ərəžəjī et le fšuiiaṇt que la répétition de nōit̰ nous oblige à distinguer lʼun de lʼautre. Cette distinction nécessaire nous permettra de rendre compte du pronom ahmāi présent dans lʼun des deux autres passages contenant ǝrǝžǝjī-, Y 50.2bc yə̄ hīm ahmāi (4) vāstrauuaitīm stōi usiiāt̰ (7) ǝrǝžǝjīš aš ̣ā (4) pōurušū huuarə̄ pišiiasū (7) « le ərəžəjī qui souhaiterait que la (vache) accompagnée du fourrage appartînt à celui-là alors quʼil se trouve avec aš ̣a chez les nombreux pišiiaṇt... ».



Les drəguuaṇt de lʼhémistiche Y 29.5c2 sans doute sont-ils les nombreux pišiiaṇt de Y 50.2c2 ; or, selon Y 44.20 b2-c, ce sont les officiants de la doctrine réprouvée qui livrent aux Daēuua la vache destinée aux pišiiaṇt : yōi pišiieiṇtī aēibiiō kąm (7) yāiš gąm92 karapā (4) usixšcā aēšǝmāi dātā « Quelle vache (avez-vous donnée) aux pišiiaṇt (alors) que le karapan et lʼusij, avec leu(r complicité), la livrent à Aēšəma ? » (7)

Les drəguuaṇt du Y 29.5c2 ainsi sont-ils très probablement les impies. Les effets de leur mauvaise obédience inquiètent le ərəžəjī. Nous verrons dans ce dernier un pieux personnage au service de pieux éleveurs de bétail. La pauvreté le caractérise : Y 53.9d tat̰ mazdā tauuā xšaθrǝm (7) yā ǝrǝžǝjii̯ ōi dā̃ hī (7) drigauuē vahiiō (5) « Le xšaθra tʼappartient, Mazdā, avec lequel tu donneras le meilleur au pauvre ərəžəjī ».

Par sa pauvreté, le ərəžəjī du vers Y 53.9d fait écho au kərədu de Y 29.3c, mais, selon le vers Y 34.8a, les impies craignent les gestes rituels des pieuses gens : *tōi93 zī nā̊ š́ iiaōθanāiš baiieṇtē (7) yaēšū [as] pairī *pōurušū94 iθiiejō (9) « car, pour les gestes, ils nous craignent, eux les nombreux (drəguuaṇt pišiiaṇt) chez qui règne le (démon) Abandon [Θyajah] ». 91 92

J. KELLENS, 1995, p. 355. Ne faut-il pas renverser lʼordre de ces deux mots ? 79

La figure du ərəžəjī coïncide assez bien avec celle de Zaraθuštra.

Y 29.6 at̰ †ə̄95 vaōcat̰ 96 ahurō97 (7) mazdā̊ vīduuā̊ vafūš98 vii̯ ānaiiā99 (9) 93

Le texte possède tāiš. Le texte possède pōurubiiō. 95 Au lieu d’y reconnaître la graphie approximative de la particule *u, ne pourrions-nous admettre de corriger ə̄ en +ī pour en faire l’accusatif neutre pluriel de l’adjectif démonstratif proche accordé avec vafūš ? Même si la traduction médiévale PVN PVME (Chapitre II 5) recommande de conserver le timbre ə̄. Si nous optons pour +ī, le nombre pluriel doit alors attirer notre attention : où se trouvent donc les autres strophes auxquelles il est fait ici allusion ? 96 Réel du présent ponctuel : voir J. KELLENS et É. PIRART, 1988-91, vol. II p. 75 §1.2.4. 97 Cf. Y 45.3b yąm mōi vīduuā̊ (4) mazdā̊ vaōcat̰ ahurō (7). 98 Ici et Y 48.9c ǝrǝš mōi [ǝrǝž]ūcąm (4) vaŋhə̄uš vafūš manaŋhō (7). 99 Sur ce mot, voir É. PIRART, 2012a, p. 35 n. 37, mais J. KELLENS, 1995, p. 355 ; 2014, p. 274, suggère « en phrases scandées, avec scansion ». La forme figure aussi dans le vers Y 44.7c kə̄ uzǝmə̄m cōrǝt̰ (4) vii̯ ānaiiā puθrǝm piθrē (7) « Qui a recouru à la viānī pour offrir un fils... ? », et la métrique y en est identique. Malheureusement ce vers, pour contenir non moins de deux autres inconnues lexicales, uzǝmə̄m (zand dvstyh, Niriosaṅgha prītim) et piθrē (zand AB|, Niriosaṅgha pitā ; « pour le nourricier » ?), ne peut nous aider. Selon K. M. JAMASP ASA et H. HUMBACH, 1971, vol. I p. 47 n., la forme viiānīš dʼun passage des Pursišnīhā pour laquelle Ch. BARTHOLOMAE, 1904, col. 1478, avait baissé les bras nʼappartiendrait pas au même mot. La traduction pehlevie de ce passage des Pursišnīhā, sur base de laquelle J. DARMESTETER, 1892-3, vol. III p. 66, avait proposé « intervalle », suggère à K. M. JAMASP ASA et à H. HUMBACH, 1971, vol. I p. 47 n., quʼil sʼagirait plutôt de la deuxième personne du singulier de lʼoptatif présent de vī+√ an « faire une pause ». Si nous conservons lʼidée dʼun substantif, nous pouvons lui reconnaître un thème en ºī- et lui donner le sens de « pause » : P 30(31) vīspā̊ aṇtarə viiānīš « entre chaque pause ». Bien sûr, ce sens serait secondaire par rapport à celui qui se déduit du védique vyāná-. Ce dernier est admirablement défini dans la Chāndogyopaniṣad 1.3.3 : yad vai prāṇiti sa prāṇo yad apāniti soʼpānaḥ | atha yaḥ prāṇāpānayoḥ saṁdhiḥ sa vyāno yo vyānaḥ sā vāk | tasmād aprāṇann anapānan vācam abhivyā harati « quand on expire, cʼest souffle exhalé. Quand on inspire, cʼest souffle inhalé. Lʼintervalle entre souffle exhalé et souffle inhalé, cʼest souffle suspensif. (Or) souffle suspensif, cʼest parole. Cʼest pourquoi on nʼexpire ni nʼinspire quand on profère une parole » (trad. A. MINARD, 1949-56, vol. II §450). Fort diffé94

80

nō[it̰ ] aēuuā ahū100 vistō (7) na[ēd]ā ratuš aš ̣āt̰ cīt̰ hacā101 (9) at̰ zī θβā fšuiiaṇtaēcā (7) vāstraiiāicā102 θβōrəštā103 tatašā104 (9) .·. 6a Introduction 6b Protase de diptyque tonal 6c Apodose de diptyque tonal

rents lʼun de lʼautre, les deux contextes gâthiques pourraient bien avoir conservé le sens primaire, mais rien ne peut y être assuré. À tout hasard, vii̯ ānaiiā serait la forme de lʼinstrumental singulier de ce mot : viānyā « avec le souffle suspensif ». Et l’expression reviendrait à dire que le grand dieu prononce le texte avec soin, sans quʼune nécessité respiratoire ne lʼinterrompe, dʼune traite. 100 La tradition ultérieure, dans son incapacité à découvrir le mot sous-entendu auquel vistō est accordé, a fait de ahū une forme de nominatif singulier de 2aŋhu-, mais, contre Ch. BARTHOLOMAE, 1904, colonne 281, nous devons nous en tenir à l’instrumental singulier de 1aŋhu-. ||| Au vu de leur traduction « Thereupon the Wise Lord, who knows the texts through His vitality, speaks: | “No (judgement) has been found indeed by the Patron, no judgement in accordance with truth itself (is suitable). | For the shaper has fashioned you for the cattle-breeding herdsman », il est clair que H. HUMBACH et K. FAISS, 2010, p. 79, ne tiennent aucun compte de la particule ºā de coordination. Ceci semble être la cause de lʼusage quʼils font de la parenthèse « (is suitable) ». De surcroît, leur idée que ahū « by the patron » revient à dire « by myself » est tout à fait ad hoc et anachronique. 101 Voir É. PIRART, 2012a, p. 65 n. 293. ||| Je ne partage plus l’idée que le syntagme aš ̣āt̰ º hacā puisse jouer le rôle d’une épithète comme l’admet encore et toujours J. KELLENS, 2015, p. 27. 102 Littéralement : « pour l’éleveur et le pâtre » (J. KELLENS, 2015, p. 27). Sur la difficulté dʼinterpréter lʼapparente coordination ºcā... ºcā, voir KELLENS, 1995, p. 352 n. 12, tandis que H. HUMBACH et K. FAISS, 2010, p. 79, parlent dʼune « artificial dissociation » à propos de fšuiiaṇtaēcā vāstriiāicā tout en signalant que lʼordre habituel des mots est ici renversé. ||| Sur la morphologie de vāstraiia-, É. PIRART, 2007b, p. 73. 103 θβōrəštar-, comme théonyme et selon la même orthographe qu’ici, entre dans la formation d’un dvandva avestique récent avec pāiiu- « le (Feu) protecteur » (Y 42.2, 57.2), mais, avec l’orthographe θβarəxštar-, le mot caractérise les Amǝš ̣a Spǝṇta dans le Yt 19.18. Sur ces graphies, É. PIRART, 2007b, p. 71 n. 261. 104 Indicatif parfait exprimant une action passée constitutive dʼun état présent : voir J. KELLENS et É. PIRART, 1988-91, vol. II p. 80 §1.3.3. ||| Les syntagmes védiques tváṣṭā TAKṢ (RS 1.32.2b, 10.48.3a) et TAKṢ + acc. du nom de la vache (RS 1.20.3c, 1.111.1d) rappellent ce passage. 81

Les indications marginales pehlevies sont imparfaitement transmises. Le manuscrit J2 est le seul à conserver lʼindication que les deux derniers vers de la strophe sont à mettre dans la bouche du grand dieu comme lʼannonçait le premier vers, lequel est mis dans celle de Zaraθuštra105. Le sous-entendu d’un nominatif dans son voisinage immédiat, tout à la fois dans le Y 27.13 et le Y 29.6, a amené les exégètes antiques106 à faire de ahū le nominatif recherché, mais le mot sous-entendu dans le Y 27.13, accordé avec vairiiō107, devrait être mańiiuš et, dans le Y 29.6, au vu de la question dont il constitue la réponse, ahurō108 tandis que le Y 29.8 suggère zaraθuštrō. Lʼimportance d’Aš ̣a est soulignée non seulement par la place de sa mention aš ̣āt̰ º hacā à la fin du vers central de la strophe, mais aussi par la particule ºcīt̰ . Cʼest lui qui fournit le ratu comme nous le savions déjà par lʼAhuna Vairiia ; cʼest en Aš ̣a que se cache le ratu quʼil convient de trouver pour la vache. Comprenons que la place de la vache est à trouver dans cet 105

frāz-gōvišn ī zaraθušt (prʼc gvbšn Y zltvšt|), frāz-gōvišn ī ohrmazd (J2 seul). À la rigueur, la forme ahū pourrait être interprétée comme un nominatif duel elliptique à côté duquel ratušcā ferait office dʼexplicitation partielle (X Bºcā). Voir V 2.43 kō aēšąm [asti] aŋhu[ca] ratušca (8) « Qui ont-ils comme ahu et comme ratu ? » ; Vr 16.3 yaēšąm nō ahurō mazdā̊ (8) aš ̣auua yesne paiti vaŋ́hō vaēδa (11) aēšąm zaraθuštrō aŋhu[ca] ratušca (11) « Ceux dʼentre nous pour qui Ahura Mazdā connaît ce qui est le mieux ont Zaraθuštra pour ahu et pour ratu » (cf. Y 51.22ab) ; Yt 13.91 yahmi paiti vīspǝm.mąθrǝm (8) aš ̣ǝm srauuō vīsruiiata (8) .·. ahu ratušca gaēθanąm (8) staōta aš ̣ahe yat̰ mazištaheca vahištaheca sraē̃štaheca (5+1+5+5+5) paiti.fraxštaca daēnaiiāi (8) yat̰ haitinąm vahištaiiāi (8) .·. « Zoroastre grâce à qui lʼÉnoncé agencé contenant toutes les formules fut diffusé, Zoroastre qui fut tout à la fois lʼExistence et le Modèle des troupeaux, tout à la fois le laudateur de lʼAgencement, lui qui le donnait pour ce quʼil y avait de plus grand, de meilleur et de plus beau, et le commentateur de la Doctrine, lui qui la donnait pour la meilleure des déesses » (trad. É. PIRART, 2010b, p. 210-1). Aujourdʼhui, en conformité avec ce que jʼai avancé concernant le Y 28 (É. PIRART, 2017a), je comprends autrement le syntagme vīspǝm.mąθrǝm aš ̣ǝm srauuō qui désigne probablement lʼAvesta : ce dernier était vu comme étant lʼensemble agencé des textes qui sont à dire au cours des célébrations et sont accompagnés de toutes les recommandations dʼemploi les concernant. 107 Et sur base de Y 30.5a aiiā̊ mani̯ uu̯ā̊ varatā (7) yə̄ drəguuā̊ acištā vərəziiō (8) « Il a choisi des deux mańiiu celui qui est drəguuaṇt en exécutant les très mauvais gestes » et de Y 43.16abc at̰ ahurā (4) huuō mańiiūm zaraθuštrō (7) vǝrǝṇtē mazdā (4) yastē cišcā spə̄ništō (7) « Ahura Mazdā, cʼest Zaraθuštra qui se range à lʼavis que tu es le plus savant de tous ». 108 Sur lʼellipse du mot ahurō dans 6b1, J. KELLENS, 1995, p. 348 ; 2014, p. 273 n. 17. 106

82

agencement que le rite constitue. Lʼimmolation sera la façon de donner à la vache la place qui lui revient dans lʼ« existence mentale ». La sixième strophe contient l’un des rares textes vieil-avestiques mis dans la bouche dʼAhura Mazdā, mais, curieusement, celui-ci adresse son exposé non à l’homme, mais bien à la vache, alors même qu’il s’agit pour le grand dieu de répondre aux questions qui ont été posées les premières par le Moi de la vache à « vous » et les dernières par le tašan de la vache à Ašạ (Y 29.2). Cependant, deux des réponses données, en plus d’être singulièrement brèves, sont négatives : Questions

Réponses

1a2

kahmāi mā θβarōždūm 6c kə̄ mā tašat̰

at̰ zī θβā fšuiiaṇtaēcā vāstraiiāicā θβōrəštā tatašā

2a2

kaθā tōi gauuōi ratuš

6b2 na[ēd]ā ratuš aṣ̌āt̰ cīt̰ hacā

2c1

kə̄m hōi uštā ahurəm

6b1 nō[it̰ ] aēuuā ahū vistō

Le retard étonne avec lequel les réponses sont données. De surcroît, leur ordre est renversé par rapport à celui des questions, et la correspondance que nous devons trouver entre la dernière question et sa réponse ne saute pas aux yeux. La réponse donnée aux premières questions revient à dire que le θβōrəštar et le tašan ne font qu’un et que les bénéficiaires de toutes deux actions de √ θβars et de √ taš sont le fšuiiaṇt « qui s’occupe du bétail [pasu] » et le vāstraiia « qui s’occupe du fourrage [vāstra] ». Pour Jean Kellens109, le ratu est « le plan divin archétypique qui définit la place de la vache dans lʼorganisation générale du monde » ; lʼahura, « la divinité spécifique qui assure officiellement la protection de la vache en faisant respecter le ratu ». La réponse négative du grand dieu, selon Jean Kellens110, conduirait à lʼidée que, dans le cas de la vache, seul lʼétat osseux existe, lʼétat de pensée qui est le propre des hommes, lui faisant défaut. Je ne puis partager cette idée : sʼils ont une âme-moi, lʼétat de pensée existe forcément aussi pour les bestiaux. En effet, la question de 7c doit être comprise en tenant compte de son second hémistiche même si le sens de ce dernier est loin dʼêtre assuré. Autre idée quʼil faut rejeter, celle de la tra-

109 110

J. KELLENS, 1995, p. 347. J. KELLENS, 1995, p. 348. 83

dition ou de nombreux spécialistes que Gə̄uš Tašan et Θβōrəštar ne feraient quʼun avec le grand dieu111.

Y 29.7 tə̄m āzūtōiš ahurō (7) mąθrəm tašat̰ 112 aṣ̌ā hazaōšō (9) mazdā̊ gauuōi xšuuīdəmcā (7) huuō.urušaēibiiō113 spəṇtō114 sāsnaiiā115 (9) 111

Voir J. KELLENS, 1995, p. 349-50. Injonctif aoriste exprimant le réel du présent ponctuel : voir J. KELLENS et É. PIRART, 1988-91, vol. II p. 75 §1.2.4. 113 Pour nous en tenir à la lecture que K. F. GELDNER, 1886-96, offre de l’hémistiche, nous disposons, pour l’analyse de uruša-, de trois racines indiennes, RUṢ « être irrité », RŪṢ « farder » et RŪKṢ « être sec, maigre ou aride », mais aucune d’elles ne nous offre de piste pratiquable, même si, sans nous éclairer davantage, HUMBACH et FAISS, 2010, p. 79, optent pour « emaciated » : « In harmony with truth, the Wise Lord fashioned for the cow | that (well-known) concept/mantra of fat and the milk, being beneficent to the emaciated by His teaching. | Whom do you have through good thought who would make the two available to the mortals? ». J. KELLENS, 2015, p. 27, baisse les bras, mais estime que le datif se justifie comme complément de spəṇtō : « faste pour les uruša (?) ». Comme le pronom huuō situé devant urušaēibiiō ne remplit apparemment aucun rôle dans l’architecture de la strophe, jʼadopte donc, en lʼaménageant, la solution que la tradition pehlevie nous offre. Sur base de cette tradition (ō xvardārān), Ch. BARTHOLOMAE, 1904, colonne 1857, lisait +huuō.uruša- en un mot pour y voir un dérivé de √ xvar « manger » et lui donner le sens de « der nach Nahrung verlangt ». Plus simplement, jʼattribue à ce dérivé en -uša- le sens de « consommateur ». Cependant, comme lʼinfection peut avoir caché une vr̥ddhi, nous devons envisager dʼy reconnaître hvāruša- le dérivé par vr̥ddhi de la syllabe initiale et thématisation en ºa- de la variante sigmatique dʼun mot dont nous connaissons le correspondant védique sváru- « le poteau sacrificiel », mais ceci ne devrait pas changer grand chose au sens général de la phrase puisque les commensaux banquettent aux environs de ce poteau dès lors appelé « mangeoire ». Cʼest du moins lʼétymologie que jʼavance de ce mot védique pour lequel M. MAYRHOFER, 1992-2001, vol. II p. 794-5, nʼavait pu recueillir aucune proposition suffisamment étayée. 114 L’étymologie de l’avestique spəṇta- est double : s’il est épithète de la vache ou de la Terre, sa racine est apparentée à védique ŚŪ, mais, s’il est épithète de mańiiu- ou de mazdā-, sa racine est apparentée à védique PAN. Dans le cas de Spəṇtā Ārmaiti, je partage donc tout à la fois l’avis de B. GEIGER, 1916, et celui de ses adversaires. 112

84

kastē vohū manaŋhā (7) yə̄ ī116 dāiiāt̰ 117 ə̄əāuuā118 marətaēibiiō (9) .·. 7ab Indépendante 7c1 Prodose interrogative 7c2 Apotase Avec la septième strophe, le poète se substitue au grand dieu pour compléter les réponses. Une nouvelle question remplit le dernier vers, mais son auteur n’est pas clairement identifiable. Selon les indications marginales pehlevies, le début de la strophe serait à mettre dans la bouche de Zaraθuštra, mais le grand dieu prononcerait la question qui la referme 119 . Kellens et moi120, nous avons approuvé cette répartition : le récitant dirait les vers ab, mais la question remplissant le vers c serait due au grand dieu parce que la mention de ce dernier figure au vocatif dans la réponse. En effet, nous relèverons la présence du pronom °tē dans la question et en tirerons toutes les conséquences. Les incertitudes qui enveloppent le pronom ī et le verbe dāiiāt̰ ə̄əāuuā ne peuvent être dissipées aisément. Si, comme le dit Jean Kellens 121 , nous devons lʼanalyser comme un duel, ī pourra remplacer la coordination āzūtōiš ... mąθrǝm ... xšuuīdǝmcā. En principe, nous ne pouvons exclure lʼanalyse qui fait de ī le résultat dʼun sandhi devant dentale pour īt̰ accusatif neutre singulier : « Qui, recourant à la bonne pensée, as-tu (trouvé) qui puisse affranchir les mortels de la (nécessité de se nourrir) ? » De surcroît, les incertitudes qui pèsent sur le dernier vers nous interdisent d’exclure l’hypothèse du traducteur médiéval122 que marəta- soit à expliquer

115

Au vers Y 31.18a mā ciš at̰ və̄ drǝguuatō (7) mąθrąscā gūštā sāsnā̊scā (8) « Cessez tous dʼécouter les recommandations et leçons du drəguuaṇt ! », mąθra- et sāsnā- sont coordonnés. 116 Est-ce le résultat d’un sandhi ? 117 Le sens de cet optatif aoriste nʼest pas clairement discernable (J. KELLENS et É. PIRART, 1988-91, vol. II p. 91 §2.5.3.3). 118 Faut-il penser au védique áva DO « retrancher » et faire de marətaēibiiō un ablatif ? J. KELLENS, 2015, p. 27, sans doute pense-t-il plutôt au védique áva DHĀ « placer en bas » : « Qui as-tu avec bonne Pensée qui les [= les deux types de libations] transmette aux hommes ? ». 119 frāz-gōvišn ī zaraθušt (prʼc gvbšn Y zltvšt|), frašn ī ohrmazd (plšn| Y ʼvhrmz̠ d). 120 J. KELLENS et É. PIRART, 1988-91, vol. III p. 30. 121 J. KELLENS, 1995, p. 356 n. 20. 122 Voir ci-dessous Chapitre II 5. 85

par √ 2mar (= védique SMR̥) « mémoriser »123. Il s’agit alors de « (textes) mémorisés ».

Y 29.8 Lʼidentité du personnage qui répond à la question de 7c avec la huitième strophe nʼest pas renseignée non plus. Selon Kellens et moi124, ce serait Gə̄uš Tašan : aēəm mōi idā vistō (7) yə̄ nə̄125 aēuuō sāsnā̊ gūšatā126 (9) zaraθuštrō spitāmō (7) huuō nə̄127 mazdā vaštī128 aš ̣āicā (9) carəkərəθrā srāuuaiieŋ́hē (7) hiiat̰ hōi hudəmə̄m diiāi129 vaxəδrahiiā130 (9) .·. 123

É. PIRART, 2001, p. 112. J. KELLENS et É. PIRART, 1988-91, vol. III p. 30. 125 Mis pour la deuxième personne ? 126 Injonctif aoriste exprimant le passé : voir J. KELLENS et É. PIRART, 1988-91, vol. II p. 70 §1.2.1 ; p. 76 §1.2.4. 127 Mis pour la deuxième personne ? 128 Réel du présent dʼemploi usuel : voir J. KELLENS et É. PIRART, 1988-91, vol. II p. 72 §1.2.2. 129 Ou hudəmə̄m diiā̃ i ou hudəmə̄m dii̯ āi. Je n’ai rien à proposer pour cet hémistiche. ||| Les traductions médiévales de hudəmə̄m sont hvdmn|yh et supadatvam, mais nous ne pouvons écarter que la sanscrite fût le fruit de la mauvaise lecture de la pehlevie (hvYMRVyh [hugōvīh]). Ch. BARTHOLOMAE, 1904, colonnes 1826 et 762, renvoie à RS 2.21.6d svādmā́ naṁ vācáḥ, fait de diiāi un infinitif « zu geben, verleihen » et traduit l’hémistiche comme suit : « so lasst uns ihm der Rede Lieblichkeit verleihen ». Selon J. KELLENS et É. PIRART, 1988-91, vol. II p. 83 §2.1.4, hiiat̰ introduirait une complétive et diiāi serait un subjonctif présent. Pour arriver à leur traduction, « This Zarathushtra Spitama here I have found, the only one who listens | to Our teachings. He wishes to sing lauds for Us, O Wise One, | and for Truth to let me perceive the beauty of his speech organ », H. HUMBACH et K. FAISS, 2010, p. 79, considèrent, semble-t-il, que hiiat̰ ouvre une proposition subordonnée de but dont le verbe est diiāi, répètent que hudəmə̄m ne signifie pas « sweetness » et pensent quʼil faut y reconnaître la forme archaïque de humnəm présent en FrW 9.2 (humnəm rāiti baraēta). De telles propositions ne peuvent être acceptées : le subjonctif de √ dī doit avoir trois syllabes (dīdayāi) ; aucune analyse du contexte de humnəm ni de sa morphologie ne permet dʼavancer le sens de « shapeliness, beauty ». J. KELLENS, 2015, p. 27, propose : « Il souhaite [...] nous faire savoir par un chant-de-célébration que je puis sucer le sucre de sa bouche ». 124

86

8a1 8a2-b1 8b2-c1 8c2

Prodose Apotase Prodose Apotase

Suite du discours de Gə̄uš Tašan ? Pour lʼauteur des indications marginales pehlevies131 qui a visiblement compris vohū manaŋhā de 7c1 comme un vocatif, cʼest Vohu Manah qui répond à la question posée à la fin de la strophe précédente. Remarquons ceci : Ahura Mazdā qui, jusquʼau début de la strophe 7, était vu comme le sage auquel les questions devaient être posées est à présent celui qui écoute les réponses ! Le pronom nə̄ résulte-t-il de la seule addition de « moi, Tašan », de « toi, Mazdā » et d’« Aš ̣a »132 ? Si Tašan est bien à reconnaître en « moi », il faudra le distinguer de Zaraθuštra pour en faire un donneur de leçons au même titre que Mazdā ou Aš ̣a, mais je vois mal comment y parvenir. Et, de toute façon, soulignons-le, il est peu vraisemblable que le texte omette parfois de spécifier lʼidentité du personnage qui a la parole. La seule exception tolérable est celle du récitant. Je ne puis que baisser les bras devant le dernier vers.

Y 29.9 at̰ cā gə̄uš uruu̯ā raōstā133 (7) yə̄ anaēšəm xšąnmə̄nē134 rādəm135 (9)

Précisons que la première personne du singulier de la voix moyenne du subjonctif présent de ෭ dā « sucer » sugérée par cette traduction désespérée ne peut convenir au vu du védique DHĀ / DHE :: dháyati qui est exclusivement actif. De toute façon, pour la métrique, il faut rejeter cette explication puisque *dhHái̯ aHai > diiāi ferait trois syllabes. 130 Voir É. PIRART, 2012a, p. 72 n. 359. ||| Ce dernier mot de la strophe pourrait être à l’origine du titre donné à l’un des livres du Grand Avesta (A. CANTERA oralement). 131 passaxv-gōvišn ī vohu.man (pshv| gvbšn Y vhvmn|), frāz-gōvišn ī zaraθušt (prʼc gvbšn Y zltvšt|). 132 Sans compter que, dans lʼabsolu, nə̄ pourrait représenter le génitif duel *nău. 133 Réel du présent continu : voir J. KELLENS et É. PIRART, 1988-91, vol. II p. 74 §1.2.3. 87

vācəm nərəš asūrahiiā (7) yə̄m ā vasəmī136 +īšā xšaθrīm ̃ +137 (9) kadā yauuā huuō aŋhat̰ 138 (7) yə̄ hōi dadat̰ 139 zastauuat̰ auuō (9) .·. 9a1 9a2-b1 9b2 9c1 9c2

Introduction Prodose exclamative Apotase Prodose interrogative Apotase

Lʼauteur des indications marginales pehlevies signale correctement que, comme le récitant140 le dit avec le premier hémistiche, cʼest Gə̄uš Uruuan qui a la parole dans cette strophe, mais, en outre, il est, avec ces indications, précisé quʼil sʼagit successivement dʼune plainte et dʼune prière, puis dʼune

134

Comme on sait (M. MAYRHOFER, 1992-2001, volume I p. 425-6), ෭ xšam (= védique KṢAM) est une racine seṭ. Si xšąnmə̄nē est un infinitif, la racine doit y figurer au degré zéro comme dans le védique vidmáne. L’étymon attendu en est donc proto-indo-iranien *kšm̥̄-mánai > *kšām-mánai > *kšāmánai. Comme le résultat du sandhi interne de m avec m aboutit à leur réduction à un seul m, le graphème n situé derrière ą est alors à considérer comme le développement ou le renforcement secondaire de la nasalisation de *ā. De telles conclusions de l’analyse de xšąnmə̄nē valent aussi pour ąnmə̄nē (Y 44.20). En effet, si la forme doit procéder de protoindo-iranien *āmánai < proto-indo-européen *H2n̥H1-ménH2oi, il est dès lors parfaitement envisageable de l’orthographier ˟ąmə̄nē. 135 Cet injonctif présent de première personne dʼun verbe exprimant un procès mental affirme la réalité dʼun état dʼesprit, lʼaccomplissement effectif dʼun acte de pensée dans le cadre du cas de coïncidence : voir J. KELLENS et É. PIRART, 1988-91, vol. II p. 70 §1.1.6.3. 136 Réel du présent dʼemploi usuel : voir J. KELLENS et É. PIRART, 1988-91, vol. II p. 73 §1.2.2. 137 En deux mots : É. PIRART, 2007b, p. 92 n. 389. La forme xšaθrī̃m appartient plutôt à xšaθraiia- « xšaθraya, qui exerce le xšaθra » quʼà xšaθriia- « relatif ou appartenant au xšaθra ». Deux autres exemples de ºayam > ºī̃m sont aš ̣ī̃m et vāstrī̃m. 138 Subjonctif présent de √ ah exprimant le futur en phrase interrogative : voir J. KELLENS et É. PIRART, 1988-91, vol. II p. 82 §2.1.2. 139 Subjonctif présent consécutif pour une action qui ne pourra sʼaccomplir quʼaprès lʼaccomplissement du procès principal : voir J. KELLENS et É. PIRART, 1988-91, vol. II p. 83 §2.1.3.6. 140 Selon l’auteur des indications marginales, le récitant n’est autre que Zaraθuštra. 88

prière et dʼune question141, et que Gə̄uš Uruuan gardera la parole dans la strophe suivante142. Si Gə̄uš Uruuan ne cesse de pleurer, nous en déduirons que cʼest pour avoir entendu le grand dieu répondre à la question de Gə̄uš Tašan. Lʼéchange de propos nʼest donc pas un tête à tête ; le débat réunit au moins quatre dieux : Ahura Mazdā, Gə̄uš Uruuan, Gə̄uš Tašan et Aš ̣a. Au vu de la strophe précédente, l’homme (nar-) dont il est ici question doit être Zaraθuštra, mais il est difficile de dire à qui font allusion les termes de la corrélation huuō ... yə̄ ... de 9c. Faut-il penser à la protection que Vīštāspa offrira à Zaraθuštra ? Quoi quʼil en soit, la faiblesse du personnage est à nouveau mise en exergue : 29.3b2 29.3c2 53.9d3 29.9a2 29.9b1

ādrakǝrǝdudriguanaēšaasūra-

L’instrumental īšā contraste avec l’adjectif anaēšəm. Les idées connotées par les deux racines √ iš (anaēšəm, īšā) et √ sū (asūrahiiā), comme on sait, sont complémentaires : la première concrétise l’aide que les dieux apportent aux hommes qui leur en donnent les moyens tandis que la seconde exprime comment les hommes donnent aux dieux la force d’exaucer les prières qui leur sont adressées : Les dieux ↑ sauuah ↓ īš Les hommes

Y 29.10 La dixième strophe, avec yūžə̄m... ahurā... mazdā, certifie que Gə̄uš Uruuan sʼadresse aux dieux : yūžə̄m aēibiiō ahurā (7) aōgō dātā143 aš ̣ā xšaθrəmcā (9) 141

frāz-gōvišn ī zaraθušt (prʼc gvbšn Y zltvšt|), garzišn ud yān ī gə̄uš.urun (glcšn V yʼn Y gvšʼvlvn|), yān ud frašn ī gə̄uš.urun (yʼn V plšn| Y gvšʼvlvn|). 142 yān ud frāz-gōvišn ī gə̄uš.urun (yʼn V prʼc gvbšn Y gvšʼvlvn|). 143 Impératif aoriste : voir J. KELLENS et É. PIRART, 1988-91, vol. II p. 92 §2.6.1. 89

auuat̰ 144 vohū manaŋhā (7) yā +hušəitiš145 rāmąmcā146 dā̃ t̰147 (9) azə̄mcīt̰ ahiiā mazdā (7) θβą̃m148 mə̄ŋ́hī149 paōuruuīm ̃ vaēdəm (9) .·.

144

Comme lʼanalyse qui fait de auuat̰ le démonstratif lointain nʼa de justification ni syntaxique ni stylistique, je préfère y reconnaître une préposition « eu égard à » régissant lʼinstrumental, tirée de lʼaccusatif neutre singulier de lʼadjectif āvant- « autant ». 145 Sur base du Y 48.11ab kadā mazdā (4) aš ̣ā mat̰ ārǝmaitiš (7) jimat̰ xšaθrā (4) hušǝitiš vāstrauuaitī (7) « (Dis-moi,) Mazdā : quand Ārmaiti, elle qui, pourvue en fourrage, offre bon séjour, viendra-t-elle avec Aš ̣a grâce au xšaθra ? » et malgré les convictions de J. KELLENS, 2014, p. 276, selon qui le sujet de dā̃ t̰ serait le feu, il faut probablement corriger hušǝitīš en +hušəitiš et y reconnaître une épithète d’Ārmaiti (Ch. BARTHOLOMAE, 1904, col. 1840 ; J. KELLENS et É. PIRART, 1988-91, vol. III p. 40), même si pareille interprétation reste incertaine pour les vers Y 30.10bc : at̰ asištā yaōjaṇtē (7) ā hušitōiš vaŋhə̄uš manaŋhō (9) mazdā̊̃ aš ̣ax́iiācā (7) yōi zazǝṇti vaŋhāu srauuahī (9) « mais les rapides (coursiers) qui remporteront le bon Srauuah seront attelés pour Hušiti (= Ārmaiti), Vohu Manah, Mazdā et Aš ̣a ». Selon Ch. BARTHOLOMAE, 1904, ou J. KELLENS et É. PIRART, 1988-91, vol. III p. 223, à la strophe Y 48.6, hušōiθmā est un nom d’Ārmaiti. Dans l’Avesta récent, hušiti- entre dans la désignation Yāiriiā Hušiti d’une entité proche de Hauruuatāt (S 1.6, 2.6) ou des Gnā (Y 1.6, 2.6). Si la déesse Yāiriiā Hušiti n’est autre qu’Ārmaiti, le couple formé avec le grand dieu sera mieux comparable à celui de Ζεύς et d’ Ἥρα, puisque lʼétymon du nom de cette dernière est proto-indo-européen *i̯ eH1rā- (P. CHANTRAINE, 1968, p. 1304). La différence morphologique que nous constatons entre le théonyme iranien Yāiriiā- et le grec Ἥρα est identique à celle qui sépare le védique Sū́ riya- ou le grec Ἥλιος (< proto-indo-européen *séH2uH1l-iH1o-) de l’alternative védique Sū́ ra-. 146 Si nous sommes amenés à lire +hušəitiš nominatif singulier, il s’ensuit que rāmąmcā est une coordination elliptique. Le terme sous-entendu est vāstra- d’après Y 35.4 gauuōi... V... fraē̃šiiāmahī V rāmācā vāstrǝmcā dazdiiāi (8) surunuuatascā... « Nous invitons les (dieux) qui nous entendent à offrir à la vache le calme et le fourrage » ou Y 47.3c at̰ hōi vāstrāi (4) rāmā dā̊ +ārǝmaitī (7) « (De concert) avec Ārmaiti [= la déesse Déférence, assimilée à la Terre], tu offres fourrage et tranquillité à la (vache) ». Et l’Avesta récent connaît un Yazata nommé Rāman Xvāstra « le Calme possesseur de bons fourrages ». 147 Le subjonctif aoriste, ordonné avec un verbe principal appartenant à un mode inaccompli, semble exprimer le futur : voir J. KELLENS et É. PIRART, 1988-91, vol. II p. 87 §2.2.3.5. 148 Remarquons la nécessité de la forme tonique derrière la césure. 90

10a-b1 Prodose impérative 10b2 Apotase 10c Indépendante (mańiiu) La difficulté principale de cette strophe est celle de justifier le nombre grammatical de rāmąmcā, mais je nʼai pu la résoudre. Quant à elle, l’identification des personnages que le pronom aēibiiō représente est assez aisée : par élimination, ce pronom représente les adorateurs. La protection que la vache peut espérer dans le monde est celle que les dieux lui assureront pour autant que les adorateurs leur en donnent les moyens. Aōjah150, l’ascendant que l’adorateur arrive à exercer sur la divinité, l’autorité dont il jouit à l’instant de lui demander une faveur, c’est l’une des entités qui, dans l’Avesta récent, fusionneront avec Xšaθra Vairiia, l’Exercice recommandé de l’influence rituelle. La déesse Fsəratū « la mise sous contrôle » en est un autre exemple. Le dernier vers est l’expression convenue d’un mańiiu « conviction, opinion, avis ».

Y 29.11 Le dédoublement des concepts fondamentaux concernant les activités, propriétés et attitudes sacrificielles, opéré par le biais de leur déification, peut expliquer que, dans la onzième et dernière strophe, les termes coordonnés aš ̣əm vohucā manō xšaθrəmcā figurent à la troisième personne grammaticale alors même que la parole est adressée à « vous, les dieux » : kudā aš ̣əm vohucā (7) manō xšaθrəmcā at̰ mā †mašā (9) yūžə̄m mazdā †frāxšnənē (7)

149

Lʼinjonctif aoriste dʼun verbe exprimant un procès mental affirme la réalité dʼun état dʼesprit, lʼaccomplissement effectif dʼun acte de pensée dans le cadre du cas de coïncidence : voir J. KELLENS et É. PIRART, 1988-91, vol. II p. 69 §1.1.6.3. 150 Accusatif aōgō. ||| Dans leur traduction, H. HUMBACH et K. FAISS, 2010, p. 80, se contentent des passe-partout « strength » et « power » pour rendre aōjah- et xšaθra-, considèrent que auuat̰ sʼaccorde avec xšaθrəmº, en font lʼantécédent de yā et, pour donner un sujet à dāt̰ , ne trouvent que lʼinconsistant « one », ce qui n’est guère séduisant : « O Lord, grant those (present) strength through truth and that power | through good thought by which one can establish comfortable dwellings and peaceful conditions! | I for my part realize that you, O Wise One, are its first/ foremost provider ». 91

mazōi151 magāi.ā paitī.zānatā152 (9) ahurā †nū.nā̊.auuarə̄† (?) ə̄hmā.rātōiš yūšmāuuatą̃m (9) ºoº 11a1 11a2 11b 11c

Indépendante interrogative Suite de a1 Début de b Indépendante impérative Indépendante

Lʼauteur des indications marginales pehlevies fait de cette dernière strophe une prière de Zaraθuštra153. Avec Jean Kellens154, nous comprendrons que cʼest le récitant, le poète : il relaierait donc lʼinquiétude de Gə̄uš Uruuan, mais, étant donné la possibilité de dédoublements, rien ne sʼoppose à ce que Gə̄uš Uruuan garde la parole. Malheureusement, Jean Kellens nʼa pas voulu traduire cette dernière strophe : dans Les textes vieil-avestiques155, lʼénigme du personnage qui reçoit le titre de fraxšnin, tout à la fois distinct de « vous, les dieux » et des adorateurs, nʼavait pas été relevée du fait que notre analyse faisait de frāxšnǝnē le locatif singulier du dérivé de fraxšnin- par vr̥ddhi de la syllabe initiale et thématisation en ºa-. Je ne suis plus aujourdʼhui persuadé que le ā long de la syllabe initiale soit à expliquer de la sorte, mais bien dʼautres écueils sont à surmonter. Il nʼest même pas du tout certain que cette dernière strophe appartienne bien au texte concernant la plainte de la Vache. Dʼautant que les deux premières strophes de lʼunité suivante (Y 30.1-2) pourraient parfaitement sʼordonner à la suite de celle-ci et compléter de deux autres volets la réponse donnée à la question posée avec lʼhémistiche Y 29.11a1 et le premier segment du suivant. En effet, lʼhémistiche Y 29.11a2 manō xšaθrəmcā at̰ mā mašā (9), du fait dʼun enjambement, est divisé en deux segments : manō xšaθrəmcā (5) at̰ mā mašā (4). Cependant, faut-il bien voir, la césure sabre dans le syntagme vohucā V manō au point que nous sommes pratiquement en droit de refuser sa réalité et de proposer une découpe prosodique du vers 11a en trois parties : kudā aš ̣ǝm (4) vohucā manō xšaθrəmcā (8) at̰ mā mašā (4). Le caractère exceptionnel de cette découpe nous empêche pourtant dʼen certifier la réalité ou de juger de son opportunité. 151

Sur le syntagme mazōi magāi.ā, J. KELLENS et É. PIRART, 1988-91, vol. II p. 22. Il se retrouve au Y 46.14ab zaraθuštrā (4) kastē aš ̣auuā u̯ruuaθō (7) mazōi magāi (4) ... vaštī (7) « (Dis-moi,) Zaraθuštra : quel est l’aš ̣auuan qui se soumet à lʼobservance pour que tu lui offres le bénéfice ? » 152 Impératif présent après une interrogation directe : voir J. KELLENS et É. PIRART, 1988-91, vol. II p. 97 §2.6.4. 153 yān ī zaraθušt (yʼn Y zltvšt|). 154 J. KELLENS, 1995, p. 357. 155 J. KELLENS et É. PIRART, 1988-91. 92

Une autre difficulté pèse sur le segment qui referme le premier vers, celle de savoir comment il convient dʼinterpréter mašā. La traduction que Helmut Humbach & Klaus Faiss proposent156 de la phrase introduite par at̰ est basée sur une analyse aventureuse : « Accept (us two) prudently, | O Wise One, (us two,) the mortal one (and his ward,) for the great contribution. | O Lord, (come) down to us now on account of the presents (offered) by us to those such as You ». Ils lisent maš ̣ā pour y reconnaître la graphie alternative dʼune forme de marəta- « le mortel » (= védique martá-), lʼanalysent comme un accusatif duel objet dans la rection de paitī.zānatā, jugent que ce duel est elliptique et considèrent que son explicitation partielle est à trouver dans le pronom mā « myself, the prophet, and the cow ». Pour notre part, Jean Kellens et moi157, nous avions adopté la proposition de James Darmesteter158 quʼil fallait faire de mašā une forme de mošu (= védique makṣū́ ). Cependant, les traducteurs médiévaux paraissent bien avoir lu *mąm aš ̣ā*, voire *mąm ārǝtā*, au lieu de mā mašā. En effet, leur interprétation par le pehlevi rasēned ou le sanscrit ˟prāpayanti159 paraît indiquer quʼils lisaient une forme du verbe ā+√ ar « faire arriver ». Certes, lʼhypothèse dʼun verbe est assez peu pratiquable, mais il est parfaitement possible dʼy voir le locatif du substantif dérivé en -ti- de ce verbe, ārǝiti-/aš ̣i- :: *aš ̣ā « dans le fait de (faire) arriver ». Dans cette hypothèse, *mąm serait mis pour mā puisque la forme enclitique est requise derrière at̰ et que la métrique dénoncera le recours fait à la forme tonique *mą̃m comme le fruit dʼune intervention diascévastique. Nous devons donc éditer at̰ ˟mą[m] ˟aš ̣ā (4). Cette analyse a aujourdʼhui ma faveur. En outre, je pense que la longueur de la syllabe initiale de frāxšnǝnē est secondaire, due à la prononciation liturgique ou à l’analyse diascévastique de la forme (*frā+xšninē), même si, dans cette hypothèse nouvelle, je suis obligé, au vers Y 43.14b maibiiō mazdā (4) tauuā rafǝnō frāxšnǝnǝm (7), de corriger frāxšnǝnǝm en ˟frāxšnǝnē 160 : « Pour moi qui sais mʼorienter, ô Mazdā, le secours tʼappartient ». Dans le vers Y 29.11b, yūžə̄m mazdā frāxšnənē (7) mazōi magāi.ā paitī.zānatā (9), il convient de remarquer que le mot suivant, mazōi, commence par un m si bien que la correction de frāxšnənē en ˟frāxšnənǝm est une opération envisageable. Nous pourrons lʼaccorder et lʼordonner alors avec le pronom *mā de la première personne du singulier161 que nous trouvons dans le dernier segment du premier vers : 156

H. HUMBACH et K. FAISS, 2010, p. 80. J. KELLENS et É. PIRART, 1988-91. 158 J. DARMESTETER, 1892-3, vol. I p. 218 n. 47. 159 Voir ci-dessous Chapitre II 5. 160 Sur la seule base des manuscrits Mf2 (frāxšnǝne) et L20 (frāxšnine). 161 Selon cette hypothèse nouvelle, toutes les attestations vieil-avestiques de fraxšnin- sʼordonnerait avec un pronom de la première personne du singulier : Y 157

93

...at̰ ˟mą[m] ˟aš ̣ā V yūžə̄m mazdā ˟frāxšnənǝm V mazōi magāi.ā paitī.zānatā V « Vous, Ahura Mazdā, lorsquʼil sera question dʼen faire arriver, reconnaissez-moi162 afin de m’octroyer le bénéfice, à moi qui sais mʼorienter ». Ceci dit, il nʼest sans doute pas nécessaire de transcrire la correction dès lors que frāxšnǝnē peut parfaitement apparaître comme le fruit dʼun sandhi devant mº. En effet, lʼanalyse suivie dans Les textes vieil-avestiques163 ne peut plus être conservée : elle revenait à admettre gratuitement que fraxšnin- et son dérivé avaient le même sens de « qui sait sʼorienter » et, de surcroît, à faire sans sourciller de ce dérivé lʼépithète dʼun inanimé tel que rafǝnō « le secours ». L’hypallage invoquée ne peut convaincre. Il faut donc ranger les formes frāxšnənē et frāxšnənəm directement sous fraxšnin-. Et les attestations avestiques récentes, elles aussi, font de fraxšnin- une épithète du pieux adorateur164. Autre curiosité : le pronom *mā que le verbe paitī.zānatā régit représente lʼadorateur humain alors que, dans lʼAvesta récent, nous trouvons la divinité comme objet du verbe paiti+√ xšnā 165 « reconnaître, admettre ». Par sa place, le verbe paitī.zānatā constitue une clôture. Une nouvelle phrase commence donc avec ahurā. 43.12a hiiat̰ cā mōi mraōš (4) aš ̣ǝm jasō frāxšnǝnē (7) « et que tu me dis, à moi qui sais mʼorienter, de rejoindre lʼharmonie » ; Y 43.14b maibiiō mazdā (4) tauuā rafǝnō ˟frāxšnǝnē (7) ; Y 44.7d azə̄m tāiš θβā (4) fraxšnī auuāmī mazdā (7). 162 Prière comparable à celle de RS 7.54.1 vā́ stoṣ pate V práti jānīhiy asmā́ n V u s vāveśó V anamīvó bhavā naḥ | yát tvémahe V práti tán no juṣasva V śáṁ no bhava V dvipáde śáṁ cátuṣpade « O Vāstoṣpati, reconnais nous ! Sois de bon accès pour nous, (nous) exemptant de maladie ! / Ce dont nous te prions, fais nous en faveur en retour ! Sois à bonheur pour no(s) bipède(s), à bonheur pour (nos) quadrupède(s) ! » (trad. L. RENOU, 1955-69, vol. XV p. 175). 163 J. KELLENS et É. PIRART, 1988-91. 164 Exemple : Yt 10.9 yatāra vā dim pauruua +frāiiazāite (11) †fraō̃rǝt̰ fraxšni auui.manō† (8) zarazdātōit̰ +aŋvhaiiat̰ haca (8) ātaraθra fraōirisiieiti (8) miθrō yō vōuru.gaōiiaōitiš (8) haθra vāta vǝrǝθrājanō (8) haθra dāmōiš upamanō (8) « Quelle que soit celle des deux nations qui lui offre le sacrifice en premier lieu, avec soin, science, concentration et confiance placée dans le rite, vers elle se tournent lʼÉchange roi des vastes prairies, les Vents briseurs des obstacles et le Reflet du Fondateur ». 165 Exemple : Yt 8.43 tištrī̃m stārǝm ... yazamaide V yō vīspāiš +naēnižaite simā̊ (9) apaiia ... sǝuuištō V yezi aē̃m bauuaiti yaštō (9) xšnūtō friθō paiti.zaṇtō (8) « Nous offrons le sacrifice à lʼastre Sirius qui lave tous les Défauts dans la rivière pour autant que le sacrifice offert lui ait donné de lʼembonpoint ou que la cérémonie célébrée en son honneur lʼait été de façon exemplaire, quʼil lui ait été réservé des attentions ou quʼil ait été satisfait et reconnu ». 94

Le dernier vers dans lequel le pronom de la première personne du pluriel figure anormalement deux fois échappe à lʼanalyse. Comment justifier lʼaccusatif nā̊ ? Les pronoms mā et nā̊ sont incompatibles dans une seule et même phrase. De surcroît, il est malaisé de résoudre les deux bizarreries que, tout en les entérinant, Jean Kellens et moi, nous avons soulignées166, la concurrence que nā̊ ferait à ə̄hmā.º et lʼidée que lʼinvariable auuarə̄167 ferait office de verbe régissant lʼaccusatif nā̊ (« Ahura, descendez vers nous dès lors que nous vous faisons les offrandes dues ! »). Explorons donc la possibilité que nū.nā̊.auuarə̄ soit une forme verbale. Dans cette optique désespérée, je corrige alors nū nā̊ auuarə̄ en ˟nū.nāuua[uua]rə̄ pour y voir la troisième personne du pluriel de la voix active de l’indicatif parfait de ā+√ nū̆ (= védique ā́ NŪ̆)168 « manifester bruyamment son avis, acclamer » : *ā́ nū̆nuHr̥ > *ā nūnuu̯ar > ˟ā.nūnāuuarə̄ (épenthèse en ºāº de u sur u) > ˟ā.nūnāuuauuarə̄ (bégaiement) > nū.nā̊.auuarə̄ (perte du préverbe ā à la suite de ahurā et morcellement de la forme). La restitution du préverbe, nécessaire pour la métrique169, sans doute l’est-elle aussi pour le sens. Le sujet du verbe ˟nū.nāuua[uua]rə̄ serait à reconnaître dans ahurā dont, certes, le nombre grammatical de ne peut être garanti, mais dont je ferais une désignation des rois en général. Gə̄uš Uruuan, devant le grand dieu, tirerait argument de ce que font habituellement les rois ou propriétaires de troupeaux.

Y 29.12 La Xšmāuuaiia.gə̄uš.uruuā Hāiti, dans la liturgie, est clôturée avec le cocktail de répétitions et de formules suivant : ― A. 2 × Y 28.1 ; ― B. 4 × Y 27.13 ; ― C. 3 × Y 27.14 ; ― D. xšmāuuaiia.gə̄uš.uruu̯ąm hāitīm yazamaide .·. ; ― E. 1 × Y 27.15.3. 166

J. KELLENS et É. PIRART, 1988-91, vol. III, p. 41. Il nʼest jamais rassurant de devoir admettre un hapax legomenon dont le correspondant védique est lui-même un hapax legomenon (RS 1.133.6a avár). 168 Sur cette racine dans les langues iraniennes, voir J. CHEUNG, 2007, p. 284. 169 Jean Kellens et moi, nous avions soupçonné (J. KELLENS et É. PIRART, 198891, vol. I, p. 89-90) que la présence dʼune forme de ahura- dans le premier hémistiche dʼun vers de lʼAhunauuaitī Gāθā en justifiait le caractère déficitaire. Comme jʼai moi-même mis en doute la réalité de ce phénomène dans mon étude récente du Y 28 (É. PIRART, 2017a) et que les deux seuls autres exemples de ahuraplacé en tête dʼun vers ne causent aucune catalexe, la présente hypothèse s’avère être nécessaire. 167

95

Le nombre total des strophes et formules de l’unité Y 29 ainsi est-il porté à 22 = 11 + 2 + 4 + 3 + 1 + 1, une quantité bien traditionnelle.

Conclusion La deuxième « unité » (hāiti) de lʼAhunauuaitī Gāθā, comme la première, nous livre les fruits de la réflexion que son auteur a développée concernant un point de rituel. La première traitait des modalités de la prière (yāna) en adoptant la forme même de la prière. La deuxième concerne lʼimmolation dʼune vache pleine, et, pour en traiter, son auteur endosse le rôle de lʼimmolateur. Au vu des seules deux premières unités de lʼAhunauuaitī Gāθā, nous sommes en mesure de proposer des Gāθā la définition suivante : elles sont le creuset de considérations et de réflexions comme il en existe dans les Brāhmaṇa du Véda, mais, au lieu de la prose, leurs développements recourent à la poésie pure. Il est remarquable que les Brāhmaṇa donnent le nom de gāthāà des strophes du même acabit, celles qui sont à l’origine des Upaniṣad en vers. Les conjectures que Jean Kellens170 a émises il y a près de vingt-cinq ans sont assez exactes : Gə̄uš Tašan est lʼallégorie de lʼimmolateur ou dépeceur qui, sur un barəziš vu comme une prairie, recompose la victime en y disposant les morceaux de viande et, de ce fait, configure une nouvelle vache, tandis que Θβōrəštar est le dieu qui lʼavait configurée la première fois et lʼavait rendue spécifique, cʼest-à-dire différente des autres quadrupèdes dont elle était pourtant vue comme lʼarchétype et lʼorigine171. Jean Kellens a bien vu quʼun parallélisme rapprochait cette séquence rituelle du mythe indien dans lequel le dieu Tvaṣṭar produit une créature particulièrement performante nommée Viśvarūpa quʼIndra frappera et dont un certain takṣan se chargera de couper les têtes172. Le caractère démoniaque de Viśvarūpa lui vient de confondre toutes les formes et de niveler les spécificités ou de les abolir alors que son créateur était un spécialiste de la différenciation173.

170

J. KELLENS, 1995, p. 352. ZA 13.4. Une contradiction affleure ici : l’immolateur de la vache primordiale serait à distinguer des immolateurs ultérieurs, le premier n’étant autre que l’archidémon Aŋhra Mańiiu, un assassin (ZA 1A.12, 4, 6E). 172 Selon le Mahābhārata (MBh 5.9), mais les versions brāhmaṇiques du mythe (JB 2.153-4, TS 2.5.1-2) font l’économie du personnage appelé takṣan en disant qu’Indra coupa lui-même les têtes du monstre tricéphale. 173 Sur Tvaṣṭar différenciateur, É. PIRART, 2003a. 171

96

Le poète auteur du texte qui est aussi le récitant, du fait même dʼappartenir au monde sacerdotal, est un immolateur. Le dieu Gə̄uš Tašan, lʼimmolateur par excellence, qui converse avec le grand dieu Ahura Mazdā représente ce poète ou en est la synecdoque tandis que la vache qui va être immolée ou lʼa été reflète la Vache, celle dont lʼâme-moi, Gə̄uš Uruuan, participe à la conversation. Celle-ci fait appel à un quatrième interlocuteur, Aš ̣a, celui que les Brāhmaṇa nomment Brahman ou Yajña et en qui Niriosaṅgha reconnaît Dharma, tout à la fois lʼorganisation de cérémonie sacrificielle et sa composante sonore faite des textes de la liturgie qui encadrent lʼimmolation animale. La mise de soi-même à distance permet une autodéification ou y conduit : le récitant qui lʼopère à lʼinstant de sʼinterroger sur son rôle dʼimmolateur se dédouble et envoie son double chez les dieux. Lʼadorateur ainsi finit-il son propre dieu. LʼAvesta récent le confirme où Gə̄uš Uruuan « le Moi de la Vache » nʼentre dans la formation de tandems quʼavec Gə̄uš Tašan « le Configurateur de la Vache »174 et Narš Uruuan « le Moi de lʼHomme »175 : lʼâme de lʼhomme nʼest autre que lʼimmolateur de la vache. Il est donc logiquement malaisé de différencier le récitant de Gə̄uš Tašan ou de Narš Uruuan ou même de Zaraθuštra du fait même que le récitant et Zaraθuštra sont tous deux Nar Spəṇta « lʼhomme qui est au courant » ou que Gə̄uš Tašan nʼest jamais que la mise en évidence de sa facette dʼimmolateur. Cependant, le détail de la teneur du texte et la façon dont son fil conducteur se joue des questions peuvent nous laisser perplexes. Les nombreuses questions (kahmāi 1a2, kə̄ 1a2, kaθā 2a2, kə̄m 2c1, kasº 7c1, kadā 9c1, kudā 11a1) qui sont posées ne reçoivent jamais de réponse cinglante et claire, mais il est vrai quʼelles allaient peut-être de soi dans un discours nʼayant, à lʼévidence, aucune visée didactique. Pour cette réflexion portant sur lʼimmolation animale, le poète ou récitant se met en scène sous la forme de diverses allégories (Gə̄uš Tašan, Narš Uruuan, Aš ̣a) et rapporte la conversation que celles-ci ont entamée avec lʼâme de la vache et le grand dieu. La conversation démarre avec les questions et la plainte de Gə̄uš Uruuan, mais, pour lui répondre, le récitant, par lʼentremise de ses représentants allégoriques Gə̄uš Tašan et Aš ̣a, sollicite lʼaide dʼAhura Mazdā. Celui-ci révèle que la seule existence matérielle ne peut suffire à tranquilliser Gə̄uš Uruuan et que, dans lʼau-delà, son sort est intimement lié à celui du sacrifiant. En effet, dans ce bas monde, l’examen du sort de la vache ne peut faire l’économie d’une question grave et lancinante. Celle-ci, qui est celle de lʼalimentation, sous-tend les débats : āzūiti- (7a1), xšuuīd- (7b1), gaōdāiiu- (2b2), 174 175

FrW 6.1, S 1.14, Vr 9.5, Y 1.2, 39.1, 70.2. P 33[34].2, V 5.20, Vr 11.3, Y 12.7, 28.1, Yt 13.10, 14.54, 19.69. 97

vāstar- (1c1), vāstra- (1c2, 2b2), vāstraiia- (6c2), huuō.uruša- (7c2). La vache dont, pour sûr, il n’a de cesse de se soucier de l’alimentation est aussi une source d’alimentation pour le vacher. Et le chevillard tient les portes du paradis. Il est assez clair que la façon correcte ou requise de célébrer les cérémonies sacrificielles est ce qui permet à la vache d’échapper au sort peu enviable qui serait le sien et que cette correction émane d’Ahura Mazdā qui en a mémorisé les attendus. Le grand dieu en a transmis les détails à travers des entretiens accordés à Zaraθuštra. Ils font l’objet de normatives ou de recommandations (mąθra) concernant non seulement la consommation de lait, mais aussi l’office de chevillard. Le sort de la vache est en outre intimement lié à celui de l’homme qui en a la garde au point que l’âme de la vache se confonde avec la conscience religieuse (daēnā) de cet homme et, dans l’au-delà, fasse la paire avec l’âme de l’homme. Le rôle de la vache, la place qu’elle tient dans la cérémonie sacrificielle, son ratu le démontre : son lait entre dans la composition des libations offertes aux dieux avec le haōma et la sève de grenadier lors des célébrations ordinaires, mais, devons-nous penser, la vache, par son immolation, vient garnir de viande les tables du banquet organisé lors des funérailles du vacher tandis que son âme et le schéma que les quartiers de viande projettent sur le barəziš où le boucher les a disposés font les délices des dieux honorés. Tout ceci, naturellement, au lieu d’un exposé circonstancié ou détaillé, ne fait l’objet que de notes fugitives : le poète, pour appartenir à la caste sacerdotale, n’a rien à expliquer à personne. Il lui suffit de faire sonner les strophes pour que son propre Moi et les autres dieux, parfaits connaisseurs des attendus du sacrifice, se réjouissent. Apparentée à la pensée, l’âme, fût-elle celle d’un chevillard, ne peut s’empêcher de s’interroger sur son propre sort et de réfléchir à son propre rôle. La réflexion la met à distance, la représente, la met en scène et la met aux prises avec les autres acteurs de la fête sacrificielle faisant naître ainsi tout un panthéon. La vache qui a lancé la conversation avec les premières questions finit donc par se retrouver dans le secret des dieux. LʼAvesta récent lui donnera bien avec raison le nom de Gaō Spəṇtā « la vache qui est au courant », avant que son épithète de spǝṇtā(< proto-indo-iranien *span-tā-) se confonde avec lʼindication quʼelle est grasse (< *śu̯an-tā-).

98

Annexe. Les personnes grammaticales et les personnages La répartition des personnes grammaticales et des personnages de la hāiti est exposée dans le tableau suivant (AM = Ahura Mazdā ; GU = Gə̄uš Uruuan ; GT = Gə̄uš Tašan) où la vache et son uruuan figurent en gras :

Y 29

Locuteur

1e pers.

2e pers.

3e pers.

1 a1 a2 b c1 c2

Récitant GU GU GU GU

mā, mā mā mōi mōi

xšmaibiiā θβarōždūm xšmat̰ sąstā

― gə̄uš uruuā ― kahmāi, kə̄ ... tašat̰ ― aēšəmō ... āhišāiiā ― vāstā ... aniiō -

2 a1 a2 b c

Récitant GT GT GT

-

tōi gaōdāiiō θβaxšō uštā

― gə̄uš tašā pərəsat̰ aš ̣əm ― gauuōi, ratuš ― hīm, xšaiiaṇtō, vāstrā ― hōi, kə̄m ... ahurəm yə̄ vādāiiōit̰ , drəguuō.dəbīš, aēšəməm

3 a

GT

sarəjā

b

GT

-

aš ̣ā (voc. sans ancrage) -

c

GT

jimā kərəduš ā

-

― ahmāi, gauuōi, aduuaēšō ― auuaēšąm ... yā, š́ auuaitē ... ərəšuuā̊ŋhō, ādrə̄ṇg ― hātąm huuō aojištō yahmāi

nə̄

-

4 a b c

― mazdā̊ ... mairištō ― daēuuāišcā maš ̣iiāišcā ― huuō vīcirō ahurō ... aŋhat̰ ... huuō vasat̰

5 99

a-b1

b2 c

vā... ahuuā frīnəmnā mə̄ uruuā duuaidī -

-

― ahurāi.ā

-

― gə̄ušcā aziiā̊, mazdąm ― ərəžəjiiōi, fšuiieṇtē, drəguuasū

6 a

Récit.?

-

-

b

AM

-

c

AM

- (agent de vistō?) θβōrəštā tatašā?

― vaōcat̰ ahurō mazdā̊ vīduuā̊ ― vistō, ratuš, aš ̣āt̰ cīt̰

θβā

― fšuiiaṇtaēcā, vāstriiāicā

7 ab

Récitant

-

-

c

AM ?

-

°tē

― ahurō ... tašat̰ ... hazaōšō mazdā̊ ... huuō ... spəṇtō, aš ̣ā, gauuōi, huuō.urušaēibiiō ― kas°... yə̄... dāiiāt̰ ə̄əāuuā, vohū manaŋhā

mōi, nə̄

-

nə̄ -

mazdā -

yə̄ ... rādəm, vasəmī

-

― gə̄uš uruuā raōstā ― nərəš asūrahiiā yə̄m ... xšaθrīm, huuō aŋhat̰ yə̄ ... dadat̰ , hōi

-

yūžə̄m ... ahurā ... dātā mazdā θβąm... paōuruuīm vaēdəm

― aēibiiō, aš ̣ā, hušəitiš

8 a-b1

b2-c1 c2 9 a1 a2-bc

10 ab c

Récitant GU

azə̄m° ... mə̄ŋ́hī

― aēm... vistō yə̄... aēuuō... gūšatā zaraθuštrō spitāmō ― huuō ... vaštī, aš ̣āicā ― hōi

100

11 a bc

mā ... † frāxšnənē, †nā̊ ...ə̄hmā.rātōiš

yūžə̄m mazdā... paitī.zānatā ahurā...yūšmāuuatąm

― aš ̣əm

Les indications pehlevies données dans la marge Les indications données à la verticale, dans la marge de certains manuscrits du Yasna iranien pehlevi (Mf4 [410], Pt4 [400] et T6 [420], contre E7 [450] et F2 [415]) et du Yasna indien pehlevi (J2 [500] et K5 [510], contre M1 [530]), mais aussi de manuscrits du Yasna sanscrit (K6 [672] et KM7 [682], contre S1 [677] et T7 [680]), pour constituer une vraie distribution des rôles agrémentée dʼindications scéniques, font du texte de la Xšmāuuaiia.gə̄uš.uruuā Hāiti une conversation menée entre quatre personnages, Gə̄uš.urun, Ohrmazd, Aš ̣-vahišt et Vohu.man, tandis que Zaraθuštra tiendrait le rôle du récitant. Lʼhypothèse dʼune conversation est généralement acceptée, mais lʼidentification des personnages fait débat. Du fait de sa position verticale dans la marge du texte manuscrit, la détermination du passage auquel lʼindication se rapporte reste parfois douteuse ou imprécise :

Références aux vers et extraits utiles à la détermination de la distribution des rôles

Indications pehlevies selon J2.K5.K6.Mf4.Pt4.T6

Remarques et traduction

1a1 xšmaibiiā gə̄uš uruuā gǝrǝždā

frāz-gōvišn ī zaraθušt J2 prʼc gvbšn Y zltvšt K5 prʼc gvbšn| zltvšt K6 prʼc gvbšn| zltvšt Mf4 prʼc gvbšnyh zltvšt| Pt4 prʼc gvbšnyh zltvšt| T6 prʼc gvbšnyh zltvhšt| frašn ud garzišn ī gə̄uš.urun J2 plšn| Y glcšn| Y gvšʼvlvn

Discours de Zaraº

1a2 kahmāi... kə̄...

101

Question et plainte de Gə̄uš Uruuan

1b

1c aθā mōi sąstā ...

2a1 adā tašā gə̄uš pǝrǝsat̰ aš ̣ǝm

2a2 kaθā...

2b

2c

3a ahmāi aš ̣ā nōit̰ sarǝjā aduuaēšō gauuōi paitī.mrauuat̰

3b

K5 plšn| glcšn| Y gvšʼvvlvn K6 plšn| glcšn| Y gvšʼvvlvn Mf4 plšn| glcšn| gvšʼvlvn| .·. Pt4 plšn| glcšn| gvšʼvlvn T6 plšn| glcšn| gvšʼvlvn| yān ī gə̄uš.urun J2 yʼn gvšʼvlvn K5 yʼn gvšʼvlvn K6 yʼn gvšʼvlvn| Mf4 yʼn Y gvšʼvlvn| .·. Pt4 yʼn Y gvšʼvlvn T6 yʼn Y gvšʼvlvn| frāz-gōvišn ī zaraθušt J2 prʼc gvbšn Y zltvšt K5 prʼc gvbšn| zltvšt| K6 prʼc gvbšn| zltvšt| Mf4 prʼc gvbšnyh zltvšt Pt4 prʼc gvbšnyh zltvšt| T6 prʼc gvbšnyh zltvhšt| frašn ī ohrmazd J2 plšn| Y ʼvhrmz̠ d K5 plšn| ʼvhrmz̠ d K6 plšn| ʼvhrmz̠ d Mf4 plšn| Y ʼvhrmz̠ d Pt4 plšn| Y ʼvhrmz̠ d T6 plšn| ʼvhrmz̠ d frāz-gōvišn ī aš-vahišt ̣ J2 prʼc gvbšn ʼšvhšt K5 prʼc gvbšnyh ʼšvhšt| K6 prʼc gvbšnyh ʼšvhšt| Mf4 prʼc gvbšnyh ʼšvhšt| Pt4 prʼc gvbšnyh ʼšvhšt| T6 prʼc gvbšnyh ʼšvhšt|

Prière de Gə̄uš Uº

frāz-gōvišn ī zaraθušt J2 prʼc gvbšnyh zltvšt| K5 prʼc gvbšn Y zltvšt| K6 prʼc gvbšn Y zltvšt| J2 (pshv| gvbšn) prʼc gvbšn| zltvšt| Mf4 prʼc gvbšnyh zltvšt|

Discours de Zaraº . . . Lʼindication, dans J2, figure donc deux fois .

102

Discours de Zaraº

Question dʼAhura Mº (Gə̄uš Tašan = Ahura Mazdā) entre 2b et 2c

Discours dʼAšạ Vº

entre 2c et 3a . entre 2c et 3a

3c

Pt4 prʼc gvbšnyh zltvšt| T6 prʼc gvbšnyh zltvhšt|

. .

passaxv-gōvišn ī aš-vahišt ̣ J2 pshv| gvbšn Y ʼšvhšt| K5 pshv| gvbšn| ʼšvhšt| K6 pshv| gvbšn| ʼšvhšt| Mf4 prʼc gvbšnyh Pt4 prʼc gvbšnyh ʼšvhšt|

Réponse dʼAšạ Vº dans lʼautre marge .

frāz-gōvišn ī zaraθušt T6 prʼc gvbšnyh zltvhšt| 4a

4b 4c

5b

et, dans lʼautre marge, ʼšvhšt| . Discours de Zaraº et, dans lʼautre marge, prʼc gvbšnyh ʼšvhšt|

J2 prʼc gvbšn| zltvšt| K5 prʼc gvbšn| zltvšt| K6 prʼc gvbšn| zltvšt| Mf4 prʼc gvbšnyh zltvšt| Pt4 prʼc gvbšnyh zltvšt| passaxv-gōvišn ī aš-vahišt ̣ J2 pshv| gvbšn| ʼšvhšt| K5 pshv| gvbšn ʼšvhšt| K6 pshv| gvbšn| ʼšvhšt| Mf4 prʼc gvbšnyh ʼšvhšt| Pt4 prʼc gvbšnyh ʼšvhš[ T6 prʼc gvbšnyh ʼšvhšt| J2 prʼc gvbšn[..] K5 prʼc| gvbšnyh K6 prʼc| gvbšnyh

Réponse dʼAšạ vahišta

frāz-gōvišn ī zaraθušt J2 prʼc gvbšn| zltvšt| K5 prʼc gvbšnyh zltvhšt| K6 prʼc gvbšnyh zltvhšt| Mf4 prʼc gvbšnyh zltvšt| Pt4 prʼc gvbšnyh zltvšt| T6 prʼc gvbšnyh zltvhšt| frāz-gōvišn ī ohrmazd J2 prʼc gvbšn| ʼvhrmzd

Discours de Zaraº . . . entre 6b et 6c . . Discours dʼAhura Mº

?

6a at̰ ə̄ vaocat̰ ahurō mazdā̊ vīduuā̊... 6b

6c

103

7a tə̄m āzūtōiš ahurō mąθrǝm tašat̰ aš ̣ā hazaošō mazdā̊ ... 7b 7c kastē vohū manaŋhā...

8a aēǝm mōi...

8b 8c

9a1 at̰ cā gə̄uš uruu̯ā raōstā

9a2 yə̄... xšąnmə̄nē rādǝm...

frāz-gōvišn ī zaraθušt K5 prʼc gvbšnyh zltvšt K6 prʼc gvbšnyh zltvšt| T6 prʼc gvbšnyh zltvhšt| J2 prʼc gvbšn| zltšt| K5 prʼc gvbšnyh zltvšt| Mf4 prʼc gvbšnyh zltvšt| Pt4 prʼc gvbšnyh zltvšt|

Discours de Zaraº

frašn ī ohrmazd T6 plšn| Y ʼvhrmz̠ d J2 plšn| ʼvhrmz̠ d K5 plšn| Y ʼvhrmz̠ d K6 plšn| Y ʼvhrmz̠ d Mf4 plšn| Y ʼvhrmz̠ d Pt4 plšn| Y ʼvhrmz̠ d passaxv-gōvišn ī vohu.man K6 pshv| gvbšnyh Y vhvmn| Mf4 pshv| gvbšnyh vhvmn T6 pshv| gvbšnyh vhvmn J2 pshv| gvbšn| vhvmn| K5 pshv| gvbšnyh Y vhvmn frāz-gōvišn ī zaraθušt Pt4 prʼc gvbšnyh zltvšt| T6 prʼc gvbšnyh zltvhšt| J2 prʼc gvbšn| zltvšt| K5 prʼc| gvbšn| zltvšt| K6 prʼc| gvbšnyh zltvšt| Mf4 prʼc gvbšnyh zltvšt|

Question dʼAhura Mº

garzišn ud yān ī gə̄uš.urun Pt4 glcšn| yʼn gvšʼvlvn J2 glcšn| gvšʼvlvn K5 glcšn| Y gvšʼvvlvn K6 glcšn| Y gvšʼvvlvn Mf4 glcšn| yʼn gvšʼvlvn

Plainte et prière de Gə̄uš Uruuan entre 8c et 9a

9b yān ud frašn ī gə̄uš.urun J2 yʼn| plšn| gvšʼ[...] Pt4 plšn| Y gvšʼvlvn T6 plšn| gvšʼvlvn| 104

. et, à hauteur de la fin du zand, prʼc gvbšn zltvšt|

Réponse de Vohu Mº entre 8a et 8b . .

Discours de Zaraº

entre 8c et 9a . . entre 8c et 9a

Prière et question de Gə̄uš Uruuan . . .

9c kadā... dadat̰ ...

10a yūžə̄m ... ahurā ... dātā... mazdā

10b

10c 11a kudā...

11b

11c

K5 yʼn plšn| Y gvšʼvlvn K6 yʼn plšn| Y gvšʼvlvn

. entre 9b et 9c

yān ud frāz-gōvišn ī gə̄uš.urun Pt4 yʼn prʼc gvbšnyh gvšʼvlvn T6 yʼn prʼc gvbšnyh gvšʼvlvn| J2 yʼn prʼc gvbšnyh gvšʼvlvn K5 yʼn prʼc gvbšnyh gvšʼvlvn K6 yʼn prʼc gvbšnyh gvšʼvlvn Mf4 yʼn prʼc gvbšnyh Y gvšʼvlvn frašn frašnīgīhā Mf4 pšn| plšnykyhʼ Pt4 plšn| plšnykyhʼ T6 plšn| plšn|ykyhʼ J2 plšn| plšnykyhʼ .·. yʼn K5 plšn| plšnykyhʼ K6 plšn| plšnykyhʼ

Prière et discours de Gə̄uš Uruuan .

yān ēv-tāg K5 yʼn ʼyvtʼk K6 yʼn ʼyvtʼk Mf4 yʼn ʼyvtʼk Pt4 yʼn ʼyvpʼk

? . . . .

yān ī zaraθušt Pt4 yʼn Y zltvšt| K5 yʼn zltvšt| K6 yʼn zltvšt Mf4 yʼn Y zltvšt| J2 yʼn| zltvšt|

Prière de Zaraθuštra

Pt4 vdhš T6 ʼp̄ dyhY

dans lʼautre marge dans lʼautre marge

K5 blyn| hʼtʼn| K6 blyn| hʼtʼn|

. .

105

. . . entre 9c et 10a entre 9c et 10a ?

sec. m., yʼn ʼyvtʼkyhʼ . .

.

12A

12B

12C

Mf4 blyn| hʼtʼn J2 blyn hʼtʼn| Pt4 blyn| hʼtʼn T6 blyn| hʼtʼn| J2 ycšn| PVN hʼt| sl K5 ycšn| PVN hʼt LOYŠE| Mf4 ycšn| hʼt| LOYŠE Pt4 ycšn| PVN hʼt| LOYŠE T6 ycšn| hʼt| LOYŠE Pt4 db vycyst| 3 gʼs .·.

entre 11c et 12a . . dans lʼautre marge . . et, dans lʼautre marge, 2 V ycst| 3 gʼs . . À lʼhorizontale

Le manuscrit KM7 (682), du fait de donner tout à la fois la traduction pehlevie et la sanscrite, balise mieux les différents paragraphes du zand et situe par rapport à ceux-ci les indications marginales pehlevies de façon nettement plus claire. Néanmoins, les indications marginales qu’il transmet sont beaucoup plus pauvres : 1a 1b plšn| glcšn| gvš’vlvn 1c y’n Y gvš’vlvn 2a pr’c gvbšn| zltvštY ; plšn| ’vhrmz̠ d 2b 2c (à l’horizontale) gvptn| gvsp̄ nd’n l’d 3a pr’c gvbšnyh ’švhšt| 3b pr’c gvbšnyh zltvšt[ 3c pr’c gvbšnyh ’švhšt| 4a pr’c gvbšnyh zltvšt| 4b 4c pr’c gvbšnyh ’švhšt| 5a 5b 5c pr’c gvbšnyh zltvšt| 6a 6b 6c

106

7a pr’c gvbšnyh zltvšt| 7b 7c plšn| Y ’vhrmz̠ d 8a pr’c gvbšnyh vhvmn 8b 8c pr’c gvbšnyh zltvhšt| 9a glcšn| y’n gvš’vlvn 9b plšn| Y gvš’vlvd 9c y’n| pr’c gvbšnyh gvš’vlvnd 10a 10b plšn| lsn|ykyh 10c 11a y’n ’yvp’k y’n| zltvšt| 11b 11c 12 blyn| h’t’n (pr’c)

107

II 4. Lexique a- (a- < pie. *H1e-) : pronom tonique de troisième personne. En dérivent l’adjectif-pronom i- et les invariables at̰ , aθā et auuat̰ . Voir aussi ta-. aēibiiō (aibyah ≈ védique tébhyaḥ) : datif masculin pluriel. ||| 10a1 yūžə̄m aēibiiō ahurā. ahmāi (ahmāi ≈ védique tásmai) : datif masculin singulier. ||| 3a1 ahmāi aš ̣ā nōit̰ sarəjā. ahiiā (ahya ≈ védique tásya) : génitif neutre singulier. ||| 10c1 azə̄mcīt̰ ahiiā mazdā. a+ (a+ = védique a+ < pie. *n̥+) : forme compositionnelle de la négation présente dans les mots aduuaēša-, asūra-. Devant voyelle, il est recouru à la variante an+ : anaēša-. aē̃m (ayam = védique ayám < pie. *H1ei-Hóm) : nominatif masculin singulier du pronom démonstratif prochain ou cataphorique tonique. Voir aussi i-. ||| 8a1 aē̃m mōi idā vistō. aēuua- « unique, seul » (aiva- < pie. *Hói-u̯o-, cf. védique éka-) : adjectif-pronom. aēuuō (aivah) : nominatif masculin singulier. ||| 8a2 yə̄ nə̄ aēuuō sāsnā̊ gūšatā. aēuuā (aivā) : instrumental masculin singulier. ||| 6b1 nō[it̰ ] aēuuā ahū vistō. aēšǝma- masculin singulier « Furieux » (išma- < pie. *H3is-mo-, cf. védique iṣmín-) : démononyme, substantif dérivé de √ iš « être furieux ». aēšəmō (išmah) : nominatif. ||| 1b1 ā mā aēšəmō hazascā. aēšəməm (išmam) : accusatif. ||| 2c2 yə̄ drəguuō.dəbīš aēšəməm vādāiiōit̰ . aōjah- neutre « ascendant, autorité » (aujah- = védique ójas- < pie. *H2éuge-s-) : substantif dérivé de √ ug. aōgō (augah < pie. *H2éugos) : accusatif singulier. ||| 10a2 aōgō dātā aš ̣ā xšaθrəmcā. aōjišta- « puissant, possédant une grande autorité » (aujišta- = védique ójiṣṭha- < pie. *H2éug-istH2o-) : superlatif de ugra-. aōjištō (aujištah) : nominatif masculin singulier. ||| 3c1 hātaąm huuō aōjištō.

109

at̰ (at < pie. *H1é-t) : particule marquant la première phrase dʼun nouvel ensemble. Dérivé de a-. ||| 2a1 adā tašā gə̄uš pərəsat̰ ; 5a1 at̰ vā ustānāiš ahuuā ; 6a1 at̰ ī vaocat̰ ahurō ; 6c1 at̰ zī θβā fšuiiaṇtaēcā ; 9a1 at̰ cā gə̄uš uruu̯ā raōstā ; 11a2 manō xšaθrəmcā at̰ mā [m]aš ̣ā. aθā (aθā < pie. *H1e-tH2ḗ, cf. védique táthā) : adverbe de manière, corrélatif de yaθā. Dérivé de a-. ||| 4c2 aθā nə̄ aŋhat̰ yaθā [huuō] vasat̰ . aθā (aθā = védique átha < pie. *H1é-tH2ē) : particule marquant la proposition principale dans un diptyque tonal. Dérivé du précédent par remontée de l’accent. ||| 1c2 aθā mōi sąstā vohū vāstr[ii̯ ]ā. adā < at̰ + ā (at u). aduuaēša- « non hostile, sans hostilité » (a+dviša- < pie. *n̥+du̯isó- ou a+dvaiša- = véd. adveṣá- < *n̥+du̯oisó-) : participe en ºá- négatif de √ duuiš (type védique animiṣá-) ou nom dʼagent négatif tiré de la racine mise au degré fléchi et thématisée en *ºó- (type grec ἀοιδός < *H2u̯oidó-). aduuaēšō (advišah ou advaišah) : nominatif masculin singulier. ||| 3a2 aduuaēšō gauuōi †paitī.mrauuat̰ . aipī « ultérieurement » (api = védique ápi < pie. *H1épi) : adverbe tiré d’un préverbe, renforce le sens futur du subjonctif aoriste. ||| 4b2 yācā varəšaitē aipī.ciθīt̰ . aipī.ciθīt̰ (api+cit+it) : conglomérat de trois invariables (« ultérieurement », « aussi » et « précisément »), → aipī, cīt̰ , īt̰ . aŋhat̰ : → √ ah « exister ». √ an « respirer » (√ an = védique AN < pie. √ *H2enH1) : → vī+√ an. an+ : → a+. anaēša- « dépourvu dʼénergie » (an+aiša- < pie. *n̥+H1oisH2ó-, cf. védique eṣá-) : adjectif négatif tiré de √ iš « mettre en mouvement ». anaēšəm (anaišam) : accusatif masculin singulier. ||| 9a2 yə̄ anaēšəm xšąnmə̄nē rādəm. ańiia- « autre » (anya- = védique anyá- < pie. *H2on-i̯ ó-) : adjectif-pronom.

110

ańiiō (anyah) : nominatif masculin singulier. ||| 1c1 nō[it̰ ] mōi vāstā xšmat̰ ańiiō. auua- (ava- < pie. *H1eu̯o-) : adjectif-pronom démonstratif lointain. auuaēšą̃m (avaišām) : génitif masculin pluriel. ||| 3b1 auuaēšą̃m nō[it̰ ] vīdu̯iiē. auuat̰ « eu égard à (+ instr.) » (āvat < pie. *H1e-H2u̯n̥t, cf. védique tā́ vat) : préposition tirée de lʼaccusatif neutre singulier de lʼadjectif de quantité « autant de ». ||| 10b1 auuat̰ vohū manaŋhā. auuarə̄ dans nū.nā̊.auuarə̄ : → ā+√ nū. auuah- neutre « aide, faveur » (avah- = védique ávas- < pie. *H2éuH1es-) : substantif dérivé de √ ū « favoriser ». auuō (avah) : accusatif singulier. ||| 9c2 yə̄ hōi dadat̰ zastauuat̰ auuō. auuā (ava = véd. áva) : préverbe indiquant que le mouvement est effectué de haut en bas. ||| 7c2 yə̄ ī dāiiāt̰ ə̄əāuuā marətaēibiiō (→ auuā+√ dā). auuā+√ dā « retrancher » (ava+√ dā = védique áva DO). dāiiāt̰ ə̄əāuuā (dāyāt ava) : 3e personne du singulier de la voix active de lʼoptatif aoriste radical. ||| 7c2 yə̄ ī dāiiāt̰ ə̄əāuuā marətaēibiiō. √ ar « mettre en mouvement » (√ ar = védique AR < pie. √ *H1er) : → ā+√ ar « arriver ». √ ar « agencer » (√ ar = védique AR < pie. √ *H2er) : → aš ̣a-, ratu-. √ arš « être haut » (√ r̥š = védique R̥Ṣ < pie. √ *H3r̥s) : → ərəšuua-. asūra- « incapable de donner (aux divinités) les moyens dʼagir » (a+sūra- < pie. *n̥+k̑uH1-ro-, cf. védique śū́ ra-) : adjectif négatif dérivé de √ sū « gonfler ». asūrahiiā (asūrahya) : génitif masculin singulier. ||| 9b1 vācəm nərəš asūrahiiā. azə̄mº (azam = védique ahám < pie. *H1eg̑-Hóm) : nominatif du pronom de la première personne du singulier. Voir aussi ma-, mā, mōi. ||| 10c1 azə̄mcīt̰ ahiiā mazdā.

111

azī- féminin « (vache) pleine » (azī- = védique ahī́-) : dérivé d’une racine inconnue. aziiā̊ (azyāh) : génitif singulier. ||| 5b1 mə̄ uruu̯ā gə̄ušcā aziiā̊. aš ̣a- neutre singulier « agencement, harmonie, rite, culte » (r̥ta- = védique r̥tá- < proto-indo-européen *H2r̥-tó- ou *H2r̥-tó+to-) : parfois théonyme. Dérivé de √ ar « agencer, ajuster ». aš ̣əm (r̥tam) : nominatif. ||| 11a1 kudā aṣ̌əm vohucā. aš ̣əm (r̥tam) : accusatif. ||| 2a2 aš ̣əm kaθā tōi gauuōi ratuš. aš ̣ā (r̥tā) : instrumental. ||| 7a2 mąθrəm tašat̰ aš ̣ā hazaošō, 10a2 aogō dātā aš ̣ā xšaθrəmcā. aš ̣āiº (r̥tāi) : datif. ||| 8b2 huuō nə̄ mazdā vaštī aṣ̌āicā. aš ̣āt̰ º (r̥tāt) : ablatif. ||| 6b2 na[ēd]ā ratuš aṣ̌āt̰ cīt̰ hacā. aš ̣ā (r̥ta) : vocatif. ||| 3a1 ahmāi aš ̣ā nō[it̰ ] sarəjā. aš ̣i- féminin « arrivée, chance » (ārti- < pie. *Hē-H1r̥-ti-) : dérivé en -tide ā+√ ar « arriver ». † mašā pourrait être à corriger en ˟[m] aš ̣ā˟ (ārtā), locatif de aš ̣i-, dans 11a2 manō xšaθrəmcā at̰ †mā †mašā. √ ah adādi « exister, être » (√ ah = védique AS < pie. √ *H1es. Voir aussi ā+√ ah. En dérive le substantif ahu-. aŋhat̰ (ahat = védique asat < pie. *H1es-H2e-t) : 3e personne du singulier de la voix active du subjonctif présent. ||| 4c2 aθā nə̄ aŋhat̰ yaθā [huuō] vasat̰ , 9c1 kadā yauuā huuō aŋhat̰ . √ ah « être roi » : → ahura-. ahu- masculin « existence » (ahu- = védique ásu-) : dérivé de √ ah « exister ». ahū (ahū) : instrumental singulier. ||| 6b1 nō[it̰ ] aēuuā ahū vistō. ahura- masculin « roi » (ahura- = védique ásura- < pie. *H2ésuro-) : dérivé de √ ah « être roi ». ahurō (ahurah) : nominatif singulier. ||| 4c1 huuō vīcirō ahurō, 6a1 at̰ ə̄ vaōcat̰ ahurō, 7a1 tə̄m āzūtōiš ahurō. ahurəm (ahuram) : accusatif singulier. ||| 2c1 kə̄m hōi uštā ahurəm. ahurāi.ā (ahurāya) : datif singulier. ||| 5a2 zastāiš frīnəmnā ahurāi.ā. ahurā (ahura) : vocatif singulier. ||| 10a1 yūžə̄m aēibiiō ahurā. ahurā (ahurā) : nominatif pluriel. ||| 11c1 ahurā †nū.nā̊.auuarə̄ (?).

112

ahma+ (ahma+ < pie. *n̥sme+) : forme compositionnelle du pronom de la première personne du pluriel (→ nā̊, nə̄, ə̄hmā.rāiti-). ahmāi : → a-. ahiiā : → a-. ahuuā : → ā+√ ah. 1

ā (ā = védique ā́ ) : préverbe renversant la direction du mouvement. ||| 1b1 ā mā aēšəmō hazascā (→ ā+√ hī), 3c2 yahmāi zauuə̄ṇg jimā ˟kərəduš ā˟ (→ ā+√ gam), 5a1 at̰ vā ustānāiš ahuuā (→ ā+√ ah), 9c1 kadā yauuā huuō aŋhat̰ (→ ā+√ ah). 2

ā « *à nouveau, même, aussi, pourtant » (u = védique u < pie. *H2H1u) : particule tirée du nom-racine de √ u « reparaître ». ||| 2a1 adā tašā gə̄uš pərəsat̰ , 6b2 na[ēd]ā ratuš aš ̣āt̰ cīt̰ hacā, 9b2 yə̄m ā vasəmī +īšā xšaθrīm ̃ +. ā+√ ar « arriver » (= védique ā́ +AR) : → aš ̣i-. ā+√ ah adādi « se trouver, être présent ». ahuuā fruit dʼun sandhi pour *ahuuō (āhvah) première personne du duel de la voix active de lʼindicatif présent. ||| 5a1 at̰ vā ustānāiš ahuuā. ºā ... aŋhat̰ (ā ... ahat) : 3e personne du singulier de la voix active du subjonctif présent. ||| 9c1 kadā yauuā huuō aŋhat̰ . ā+√ gam « venir, arriver ». jimā ... ā (jamā ... ā, cf. védique ā́ gamāni) : première personne du singulier de la voix active du subjonctif aoriste radical. ||| 3c2 yahmāi zauuə̄ṇg jimā ˟kərəduš ā˟. ādra- « nécessiteux » (ādra- = grec νωθρός < pie. *n̥H3dh-ró-) : dérivé de √ nād. ādrə̄ṇg (ādrānh) : accusatif masculin pluriel. ||| 3b2 yā ˟š́ auuaiṇtē ādrə̄ṇg ərəšuuā̊ŋhō. ā+√ nū « manifester bruyamment son approbation, acclamer » (= védique ā́ NŪ̆). ˟nū.nāu.a[uua]rə̄ (ānunuvar) : 3e personne du pluriel de la voix active de lʼindicatif parfait. ||| 11c1 ahurā ˟nū.nāu.a[uua]rə̄. āiiu- neutre « durée de vie » (āyu- = védique ā́ yu- < pie. *H2H1éi̯ u-) : dérivé d’une racine mal connue.

113

yauuā (yavā < pie. *H2H1i̯ éu̯ē) : instrumental singulier adverbial « dʼaventure ». ||| 9c1 kadā yauuā huuō aŋhat̰ . ā+√ zu « verser » (= védique ā́ HU) : → āzūiti-. āzūiti- féminin « libation » (āzuti- = védique ā́ huti-) : dérivé en -ti- de ā+√ zu. āzūtōiš (āzutaiš) : génitif singulier. ||| 7a1 tə̄m āzūtōiš ahurō. ā+√ hī « attraper ». ā ... [ā]hišāiiā (ā ... hišāya = védique ā́ siṣāya < pie. *+sisH2oi̯ -) : 3e personne du singulier de la voix active de lʼindicatif parfait. ||| 1b ā mā aēšəmō hazascā rəmō [ā]hišāiiā dərəš[cā] təuuišcā. ə̄ (6a1) pourrait être à corriger en +ī : → i-. ə̄əāuuā : → auuā. ərəš (r̥š < pie. *H3r̥g̑-s) : forme préverbiale en *-s tirée de √ raz « former une ligne droite ». Présente dans ərəžəjī-. ərəšuua- « haut, élevé » (r̥šva- = védique r̥ṣvá- < pie. *H3r̥s-u̯ó-) : dérivé de √ arš « être haut ». ərəšuuā̊ŋhō (r̥švāhah) : nominatif masculin pluriel. ||| 3b2 yā ˟š́ auuaiṇtē ādrə̄ṇg ərəšuuā̊ŋhō. ərəžəjī- « qui vit de façon rectiligne » (r̥š+jī- < pie. *H3r̥g̑-s+gu̯íH3-) : combine la forme préverbiale en *-s tirée de √ raz « former une ligne droite » avec le nom-racine de √ jiiā « vivre ». ərəžəjii̯ ōi (r̥žjiyai) : datif masculin singulier. ||| 5c1 nō[it̰ ] ərəžəjii̯ ōi frajiiāitiš. ə̄hmā.rāiti- féminin « générosité envers nous » (ahma+rāti- < pie. *n̥sme+HreH-ti-) : combine la forme compositionnelle du pronom de la première personne du pluriel (ahma+) et le dérivé en -ti- de √ rā « donner, offrir ». ə̄hmā.rātōiš ablatif singulier. ||| 11b2 ə̄hmā.rātōiš yūšmāuuatą̃m. i- (i- < pie. *H1í-) : adjectif-pronom démonstratif prochain tonique. Dérivé de a-. Voir aussi aē̃m. En dérive l’adverbe idā, l’enclitique i- et la particule īt̰ . ə̄ pourrait être à corriger en +ī (ī) accusatif neutre pluriel accordé avec vafūš dans 6a at̰ ə̄ vaōcat̰ ahurō mazdā̊ vīduuā̊ vafūš vii̯ ānaiiā. 114

i- (i- < pie. *H1i-) : pronom enclitique de 3e personne. Tiré du précédent. ī accusatif neutre pluriel (ī) ou forme en sandhi de lʼaccusatif neutre singulier (it > ī̆). ||| 7c2 yə̄ ī dāiiāt̰ ə̄əāuuā marətaēibiiō. ºīt̰ « précisément » (it = védique ít < pie. *H1í-t) : particule. Voir aussi nōit̰ . ||| 4a2 yā zī vāuuərəzōi pairī.ciθīt̰ , 4b2 yācā varəšaitē aipī.ciθīt̰ . idā « ici » (ida = védique ihá) : adverbe de lieu dérivé de i-. ||| 8a1 aē̃m mōi idā vistō. √ iš « mettre en mouvement » (√ iš = védique IṢ < pie. *H1isH2) : → anaēša-, īš-. √ iš « être furieux » (√ iš = védique IṢ < pie. *H3is) : → aēšǝma-. īš- féminin « vigueur » (iš- = védique íṣ-) : nom-racine tiré de √ iš « mettre en mouvement ». + īšā (išā) : instrumental singulier. ||| 9b2 yə̄m ā vasəmī +īšā xšaθrīm ̃ +. √ u « reparaître » (√ u = védique U < pie. √ *H2H1u) : → 2ā. √ ū « favoriser » (√ ū = védique Ū < pie. √ *H2uH1) : → auuah-. √ ug « être puissant » (√ ug = védique UG < pie. √ *H2ug) : → aōjah-, aōjišta-, ugra-. ugra- « puissant, plein dʼascendant ou dʼautorité » (ugra- = védique ugrá- < pie. *H2ug-ró-) : dérivé en -ra- de √ ug. Voir aōjišta-. us (us = védique út < pie. *úts) : préverbe indiquant que le mouvement se fait depuis le fond vers un extérieur situé en haut. Employé avec √ tan. us+√ tan « étendre vers le haut » : → ustāna-. ustāna- « tendu de bas en haut » (ustāna- = védique uttāná- < pie. *uts+tn̥H-nó-) : adjectif verbal en -na- de us+√ tan. ustānāiš (ustānāiš): instrumental masculin pluriel. ||| 5a1 at̰ vā ustānāiš ahuuā. uštā : → √ vah.

115

uštra- masculin « chameau » (= védique úṣṭra-) : → zaraθuštra-. ka- (ka- = védique ká- < pie. *ku̯ó-) : adjectif-pronom interrogatif. En dérivent les thèmes ci-, ku- et les adverbes interrogatifs kat̰ et kaθā. Étymologiquement apparenté à ºca. kə̄ (kah) : nominatif masculin singulier. ||| 1a2 kahmāi mā θβarōždūm kə̄ mā tašat̰ . kasº (kas) : forme en sandhi du nominatif masculin singulier. ||| 7c1 kastē vohū manaŋhā. kə̄m (kam) : accusatif masculin singulier. ||| 2c1 kə̄m hōi uštā ahurəm. kahmāi (kahmāi) : datif masculin singulier. ||| 1a2 kahmāi mā θβarōždūm kə̄ mā tašat̰ . kaθā « comment ? » (kaθā = védique kathā́ ) : adverbe interrogatif de manière tiré de ka-. ||| 2a2 aš ̣əm kaθā tōi gauuōi ratuš. kadā < kat̰ + 1ā. kat̰ « quand ? » (kat = védique kát < pie. *ku̯ó-t) : adverbe interrogatif de temps tiré de ka-. ||| 9c1 kadā yauuā huuō aŋhat̰ . √ kar « proclamer » (√ kar = védique KR̥̄ < pie. √ *kl̥ H2) : → carəkərəθra-. √ kard « ruiner, détruire (?) » (√ kard = grec πέρθω ?) : → kərədu-. kasº : → ka-. kahmāi : → ka-. kə̄ : → ka-. kə̄m : → ka-. kərədu- « humble » (kr̥du- = védique kr̥dhú-) : adjectif en -u- tiré de √ kard. ˟kərəduš (kr̥duš) : nominatif masculin singulier. ||| 3c2 yahmāi zauuə̄ṇg jimā ˟kərəduš ā˟. ku- (ku- = védique kú- < pie. *ku̯ú-) : thème d’interrogatif adverbial dérivé de ka- et présent dans kudā. kudā « où ? » (kuda = védique kúha) : adverbe interrogatif de lieu tiré de ku-. ||| 11a1 kudā aš ̣əm vohucā.

116

xšaθra- neutre singulier « emprise, influence exercée (sur les dieux) » (xšaθra- = védique kṣatrá-) : dérivé de √ xšā. xšaθrəmº (xšaθram) : nominatif. ||| 11a2 manō xšaθrəmcā at̰ †mā †mašā. xšaθrəmº (xšaθram) : accusatif. ||| 10a2 aōgō dātā aṣ̌ā xšaθrəmcā. xšaθraiia- « qui exerce lʼemprise rituelle sur les dieux » (xšaθra+ya-) : participe en *ºá- du dénominatif de xšaθra-. + xšaθrīm ̃ (xšaθrayam) : accusatif masculin singulier. ||| 9b2 yə̄m ā vasəmī + īšā xšaθrīm ̃ +. √ xšam « être patient, endurer » (√ xšam = véd. KṢAM < pie. *ku̯semH) : → xšąnmə̄nē. xšaiiaṇt- « que le rite a potentialisé ou mis en condition » (xšayant- = védique kṣáyant-) : participe présent actif de √ xšā. xšaiiaṇtō (xšayantah) : génitif masculin singulier. ||| 2b1 hiiat̰ hīm dātā xšaiiaṇtō. √ xšā « être (mis) en condition, être à même » (√ xšā = védique KṢĀ < pie. √ *kseH2) : bhvādi en ºaiia- ; → xšaθra-, xšaiiaṇt-. xšąnmə̄nē (xšāmánai < pie. *ku̯sm̥H-ménH2ei) : infinitif datif de √ xšam « être patient, endurer ». ||| 9a2 yə̄ anaēšəm xšąnmə̄nē rādəm. √ xšnā « connaître » (√ xšnā = védique JÑĀ < pie. √ *g̑sneH3) : → paitī+√ xšnā, frā+√ xšnā. xšm- (xšm-) : pronom personnel tonique de deuxième personne du pluriel. Alternative inexpliquée de yūšm-. Peut-être apparenté au thème pronominal grec σφ-. xšmat̰ (xšmat) : ablatif. ||| 1c1 nō[it̰ ] mōi vāstā xšmat̰ ańiiō. xšmaibiiā (xšmabya) : datif. ||| 1a1 xšmaibiiā gə̄uš uruu̯ā gərəždā. xšuuīd- féminin « lait » (xšvid-) : nom-racine tiré d’une racine mal identifiée. xšuuīdəmº (xšvidam) : accusatif singulier. ||| 7b1 mazdā̊ gauuōi xšuuīdəmcā. gaō- masculin « Bos taurus », féminin « vache » (gau- = védique gó- < pie. *gu̯ou-) : tiré d’une racine mal identifiée. gauuōi (gavai) : datif féminin singulier. ||| 2a2 aṣ̌əm kaθā tōi gauuōi ratuš, 3a2 aduuaēšō gauuōi †paitī.mrauuat̰ , 7b1 mazdā̊ gauuōi xšuuīdəmcā. 117

gə̄uš (gauš) : génitif féminin singulier. ||| 1a1 xšmaibiiā gə̄uš uruu̯ā gərəždā, 2a1 adā tašā gə̄uš pərəsat̰ , 5b1 mə̄ uruu̯ā gə̄ušcā aziiā̊, 9a1 at̰ cā gə̄uš uruu̯ā raōstā. gaōdāiiu- « qui se nourrit de la vache » ou « qui nourrit la vache » (gaudāyu- < pie. *gu̯ou+dhH1ei̯ -i̯ u-, cf. védique gódhāyas-) : composé de gaō- et du dérivé en -iiu- de √ daē. gaōdāiiō (gaudāyau) : vocatif neutre singulier. ||| 2b2 hadā vāstrā gaōdāiiō θβaxšō. √ gam « aller, marcher » (√ gam = védique GAM < pie. √ *gu̯em) : → ā+√ gam. gauuōi : → gaō-. √ garz « se plaindre » (√ garz = védique GR̥H) : adādi conjugué à la voix moyenne. gərəždā (gr̥žda) : 3e personne du singulier de lʼinjonctif présent. ||| 1a1 xšmaibiiā gə̄uš uruu̯ā gərəždā. gə̄uš : → gaō-. gərəždā : → √ garz. √ guš « écouter » (√ guš = védique GHUṢ < pie. √ *ghus) : tudādi conjugué à la voix moyenne. gūšatā (gušata) : 3e personne du singulier de lʼinjonctif présent. ||| 8a2 yə̄ nə̄ aēuuō sāsnā̊ gūšatā. carəkərəθra- neutre « hymne de glorification » (carkr̥θra-, cf. védique carkr̥tí-) : substantif dérivé de l’intensif de √ kar « proclamer ». carəkərəθrā (carkr̥θrā) : instrumental singulier. ||| 8c1 carəkərəθrā srāuuaiieŋ́hē. ºcā « et » (ca = védique ca < pie. *ku̯e) : conjonction de coordination enclitique. ||| 1b1 ā mā aēšəmō hazascā (A Bºcā), 1b2 (2 ×) rəmō [ā]hišāiiā dərəš[cā] təuuišcā (A ... B[ºcā] Cºcā), 4b1 (2 ×) daēuuāišcā maš ̣ii̯ āišcā (Aºcā Bºcā), 4b2 yācā varəšaitē aipī.ciθīt̰ (A ... Bºcā), 5b1 mə̄ uruu̯ā gə̄ušcā aziiā̊ (A Bºcā), 6c (2 ×) at̰ zī θβā fšuiiaṇtaēcā vāstraiiāicā θβōrəštā tatašā (Aºcā Bºcā), 7b1 mazdā̊ gauuōi xšuuīdəmcā (A ... Bºcā), 8b2 huuō nə̄ mazdā vaštī aš ̣āicā (X ... Bºcā), 10a2 aōgō dātā aš ̣ā xšaθrəmcā (A ... Bºcā), 10b2 yā +hušəitiš rāmąmcā daāt̰ (Bºcā), 11a kudā aš ̣əm vohucā manō xšaθrəmcā at̰ †mā †mašā (A Bºcā Cºcā). 118

ºcā « pourtant » (ca) : particule. ||| 9a1 at̰ cā gə̄uš uruu̯ā raōstā. √ ci « amonceler, collectionner » (√ ci = védique CI < pie. √ *ku̯i) : → vī+√ ci. ci- « qui ? » (ci- = védique kí- < pie. *ku̯í-), pronom interrogatif, dérivé de ka- : → ci- « qui que ce soit ». ci- « qui que ce soit » (ci- = védique ki- < pie. *ku̯i-), pronom indéfini enclitique, dérivé du précédent : → ºcīt̰ . ºcīt̰ « même, aussi » (cit < pie. *ku̯it) : particule emphatique. Identique à lʼaccusatif neutre singulier du pronom indéfini atone ci-. ||| 4a2 yā zī vāuuərəzōi pairī.ciθīt̰ , 4b2 yācā varəšaitē aipī.ciθīt̰ , 6b2 na[ēd]ā ratuš aṣ̌āt̰ cīt̰ hacā, 10c1 azə̄mcīt̰ ahiiā mazdā. ciθīt̰ < ºcīt̰ + īt̰ . jimā : → ā+√ gam. √ jiiā « vivre » (√ jyā = védique JYĀ < pie. √ *gu̯i̯ eH3) : → ərəžəjī-, frajiiāiti-. ta- (ta- = védique tá-) : adjectif-pronom démonstratif corrélatif. La plupart des cas obliques sont tirés du thème a-. Voir aussi ha-. tə̄m (tam) : accusatif masculin singulier. ||| 7a1 tə̄m āzūtōiš ahurō. √ tan « étendre » (√ tan = védique TAN < pie. √ *tenH2) : → us+√ tan. √ taš « tailler, sculpter, configurer » (√ taxš = védique TAKṢ = vieux-perse √ taxš) : → tašan-. tatašā (tataxša) : première personne du sing. de la voix active de lʼindicatif parfait. ||| 6c2 vāstraiiāicā θβōrəštā tatašā. tašat̰ (taxšat) : 3e personne du singulier de la voix active de lʼinjonctif aoriste thématique. ||| 1a2 kahmāi mā θβarōždūm kə̄ mā tašat̰ , 7a2 mąθrəm tašat̰ aš ̣ā hazaōšō. tašan- masc. singulier « configurateur, chevillard, boucher » (taxšan- = védique tákṣan-) : nom dʼagent en -an- tiré de √ taš. tašā (taxšā) : nominatif. ||| 2a1 adā tašā gə̄uš pərəsat̰ . tə̄m : → ta-. 119

tǝuuiš- neutre « coup » (tuviš-, cf. védique túviṣmant-) : dérivé en -iš- de √ tū. təuuišº (tuviš) : nominatif singulier. ||| 1b2 rəmō [ā]hišāiiā dərəš[cā] təuuišcā. ºtē : → tuu̯ə̄m. tōi : → tuu̯ə̄m. √ tū « faire pression sur, donner un coup à » (√ tū = védique TŪ < pie. √ *tuH) : → tǝuuiš-. tuu̯ə̄m (tuvam = védique tuvám < pie. *tu-Hóm) : nominatif du pronom tonique de la 2e personne du singulier. θβą̃m (θvaam = védique tvā̃́ m) : accusatif tonique. ||| 10c2 θβą̃m mə̄ŋ́hī paōuruuīm ̃ vaēdəm. θβā (θvā = védique tvā) : accusatif enclitique. ||| 6c1 at̰ zī θβā fšuiiaṇtaēcā. ºtē (tai = védique te) : génitif enclitique. ||| 7c1 kastē vohū manaŋhā. tōi (tai = védique te) : génitif enclitique. ||| 2a2 aš ̣əm kaθā tōi gauuōi ratuš. √ θβaxš « prendre soin, sʼoccuper de » (√ θvaxš = védique TVAKṢ) : bhvādi. θβaxšō (θvaxšah) : 2e personne du singulier de la voix active de lʼinjonctif présent. ||| 2b2 hadā vāstrā gaōdāiiō θβaxšō. √ θβars « rendre spécifique, différencier » (√ θvars = védique TVARŚ < pie. *tu̯erk̑) : → θβōrəštar-. θβarōždūm (θvr̥ždvam): 2e personne du pluriel de la voix moyenne de lʼinjonctif aoriste radical. ||| 1a2 kahmāi mā θβarōždūm kə̄ mā tašat̰ . θβarōždūm : → √ θβars. θβōrəštar- masculin singulier « différenciateur » (θvarštar- = avestique récent θβarǝxštar- = védique tváṣṭar-) : nom dʼagent en -tar- tiré de √ θβars. θβōrəštā (θvarštā) : nominatif. ||| 6c2 vāstraiiāicā θβōrəštā tatašā. θβā : → tuu̯ə̄m. θβą̃m : → tuu̯ə̄m.

120

√ daē « téter, se nourrir » (√ dai = védique DHE < pie. √ *dhH1ei) : → gaōdāiiu-. daēuua- masculin « mauvais dieu, démon, hasardeux » (daiva- ≈ védique devá- < pie. *dHoiu̯ó- « joueur, fatum ») : dérivé de √ diiu. daēuuāišº (daivāiš) : instrumental pluriel. ||| 4b1 daēuuāišcā maš ̣ii̯ āišcā. √ darz « immobiliser » (√ dr̥z = védique DR̥H < pie. √ *dhr̥g̑h) : → dǝrǝz-. √ dā « mettre, placer, conférer » (√ dā = védique DHĀ < pie. √ *dheH1) : hvādi ; → dāta-, mazdā-. dadat̰ (dadat < pie. *dhe-dh-H2e-t) : 3e personne du singulier de la voix active du subjonctif présent. ||| 9c2 yə̄ hōi dadat̰ zastauuat̰ auuō. dā̃ t̰ (daat) < pie. *dheH1-H2e-t) : 3e personne du singulier de la voix active du subjonctif aoriste radical. ||| 10b2 yā +hušəitiš rāmąmcā daāt̰ . duuaidī (dvadi) : première personne du duel de la voix moyenne de lʼinjonctif aoriste radical. ||| 5b2 hiiat̰ mazdaąm duuaidī fərasābiiō. dātā (dāta) : 2e personne du plur. de la voix active de lʼimpératif aoriste radical. ||| 10a2 aōgō dātā aṣ̌ā xšaθrəmcā. √ dā « couper » (√ dā = védique DO < pie. √ *deH2) : → auuā+√ dā. dāta- « ayant été mis » (dāta-) : adjectif verbal en -ta- de √ dā « placer ». dātā (dātā) : instrumental neutre singulier. ||| 2b1 hiiat̰ hīm dātā xšaiiaṇtō. dāiiāt̰ : → auuā+√ dā. dǝrǝz- féminin « lien, chaîne » (dr̥z-, cf. védique +dŕ̥h-) : nom-racine tiré de √ darz. dərəšº (dr̥š) : nominatif singulier. ||| 1b2 rəmō [ā]hišāiiā dərəš[cā] təuuišcā. †

diiāi ? ||| 8c2 hiiat̰ hōi †hudəmə̄m diiāi† vaxəδrahiiā.

√ diiu « jouer, tirer au sort » (√ dyu = véd. DYU / DĪV < pie. √ *d(H)i̯ u / *dHeiu̯) : → daēuua-. duuaidī : → √ dā.

121

√ duuiš « attaquer » (√ dviš = védique DVIṢ < pie. √ *du̯is) : → aduuaēša-. drǝguuaṇt- « accompagné de lʼerreur, égaré, impie, démon » (drugvant-, cf. védique drúhvan-) : dérivé en +u̯aṇt- de druj-. + drəguuō.dəbīš (drugvadbiš) : instrumental masculin pluriel. ||| 2c2 yə̄ + drəguuō.dəbīš aēšəməm vādāiiōit̰ . drəguuasū (drugvasu) : locatif masculin pluriel. ||| 5c2 nō[it̰ ] fšuiieṇtē drəguuasū pairī. √ druj « tromper » (√ druj = védique DRUH < pie. √ *dhrugh) : → druj-. druj- féminin « Erreur » (druj- = védique drúh- < pie. *dhrúgh-) : nomracine tiré de √ druj « tromper » ; → drǝguuaṇt-. paitī (pati, cf. védique práti) : préverbe apportant la nuance de répétition, de confrontation ou de contrepartie. paitī+√ xšnā « reconnaître » : kryādi. paitī.zānatā (< pie. *+g̑sn̥H3-nH2-te) : 2e personne du pluriel de la voix active de lʼimpératif présent. ||| 11b2 mazōi magāi.ā paitī.zānatā. paitī+√ mrū « répondre » (pati+√ mrū = védique prátiBRŪ) : adādi ; → paitī.mruuaṇt-. †

paitī.mrauuat̰ : → paitī.mruu̯aṇt-.

paitī.mruu̯aṇt- (pati+mruvant-) : participe présent actif de paitī+√ mrū. † paitī.mrauuat̰ est mis pour *paitī.mruu̯ąs (pati+mruvans) nominatif masculin singulier. ||| 3a2 aduuaēšō gauuōi †paitī.mrauuat̰ . paitī.zānatā : → paitī+√ xšnā. 1

pairī (pari = védique pári) : invariable renforçant le locatif. ||| 5c2 nō[it̰ ] fšuiieṇtē drəguuasū pairī. 2

pairī : invariable renforçant le prétérit. ||| 4a2 yā zī vāuuərəzōi pairī.ciθīt̰ .

paōuru̯ii̯ a- « premier » (parviya- = védique pūrviyá-). paōuruuīm ̃ (parviyam) : nominatif masculin singulier. ||| 10c2 θβą̃m mə̄ŋ́hī paōuruuīm ̃ vaēdəm.

122

pasu- masculin « tête de bétail, victime sacrificielle » (= védique paśú-) : → fšu+. pərəsat̰ : → √ fras. fraxšnin- « possesseur de la connaissance du chemin » (fraxšnin-) : dérivé en -in- de *fraxšnā- (= védique prajñā́ -), lʼabstrait féminin en ºā- tiré de frā+√ xšnā. † frāxšnənē (fraxšninai) : datif masculin singulier (?). ||| 11b1 yūžə̄m mazdā †frāxšnənē. frajiiāiti- féminin « survie » (frajyāti- < pie. *pró+gu̯i̯ eH3-ti-) : dérivé en -ti- de frā+√ jiiā. frajiiāitiš (frajyātiš) : nominatif singulier. ||| 5c1 nō[it̰ ] ərəžəjii̯ ōi frajiiāitiš. √ fras « interroger » (√ fras = véd. PRAŚ < pie. √ *prek̑) : tudādi inchoatif ; → fərasā-. pərəsat̰ (pr̥sat = védique pr̥cchat) : 3e personne du singulier de la voix active de lʼinjonctif présent. ||| 2a1 adā tašā gə̄uš pərəsat̰ . fərasā- féminin « question » (frasā-) : nom dʼaction tiré de √ fras. fərasābiiō (frasābyah) : datif pluriel. ||| 5b2 hiiat̰ mazdą̃m duuaidī fərasābiiō. frā (fra = védique prá < pie. *pró) : préverbe intensif dans frā+√ xšnā, frajiiāiti-. frā+√ xšnā (fra+√ xšnā = védique prá JÑĀ) : → fraxšnin-. frāxšnənē : → fraxšnin-.



frā+√ jiiā « survivre » : → frajiiāiti-. √ frī « propitier » (frī = védique PRĪ) : kryādi thématisé ; → frīnǝmna-. frīnǝmna- « propitiant » (frīnamna-) : participe prés. de la voix moyenne de √ frī. frīnəmnā (frīnamnā) : nominatif masculin duel. ||| 5a2 zastāiš frīnəmnā ahurāi.ā. fšu+ (= védique kṣu+), forme compositionnelle de pasu- : → fšuiiaṇt-.

123

fšuiiaṇt- masculin « éleveur de bétail » (fšu+yant-) : participe présent de la voix active du dénominatif de fšu+. fšuiieṇtē (fšuyantai) : datif singulier. ||| 5c2 nō[it̰ ] fšuiieṇtē drəguuasū pairī. fšuiiaṇtaēº (fšuyantai) : datif singulier. ||| 6c1 at̰ zī θβā fšuiiaṇtaēcā. na[ēd]ā : < nō[it̰ ] + 2ā. nā̊ dans nū.nā̊.auuarə̄ : → ā+√ nū. nə̄ (nah = védique naḥ) : génitif-datif du pronom enclitique de la première personne du pluriel. Les formes toniques obliques sont tirées du degré zéro de nə̄ affublé de +m(a)- : → ahma+. nə̄ (nah) : datif. ||| 4c2 aθā nə̄ aŋhat̰ yaθā [huuō] vasat̰ , 8b2 huuō nə̄ mazdā vaštī aš ̣āicā. nə̄ (nah) : génitif. ||| 8a2 yə̄ nə̄ aēuuō sāsnā̊ gūšatā. nar- masculin « héros, homme » (nar- = védique nár- < pie. *H2nér-). nərəš (nr̥š) : génitif singulier. ||| 9b1 vācəm nərəš asūrahiiā. √ nād « être dans le besoin » (√ nād = védique NĀDH < pie. √ *neH3dh) : → ādra-. nō[it̰ ] « non, ne... pas » (na = védique ná) : adverbe de négation. La diascévase lʼa presque toujours étoffé au moyen de la particule īt̰ . Sa forme compositionnelle est a+ ou an+ (< pie. *n̥+). ||| 1c1 nō[it̰ ] mōi vāstā xšmat̰ ańiiō, 3a1 ahmāi aṣ̌ā nō[it̰ ] sarəjā, 3b1 auuaēšaąm nō[it̰ ] vīdu̯iiē, 5c1 nō[it̰ ] ərəžəjii̯ ōi frajiiāitiš, 5c2 nō[it̰ ] fšuiieṇtē drəguuasū pairī, 6b nō[it̰ ] aēuuā ahū vistō na[ēd]ā ratuš aṣ̌āt̰ cīt̰ hacā (na[ēd]ā < nōit̰ + 2ā). √ nū « donner son assentiment » (√ nū = védique NŪ < pie. √ *nuH) : → ā+√ nū. nū.nā̊.auuarə̄ : → ā+√ nū. ma- « mien » (ma-) : adjectif possessif de la première personne du singulier. Voir azə̄mº. mə̄ (mah) : nominatif singulier. ||| 5b1 mə̄ uruu̯ā gə̄ušcā aziiā̊. maga- masculin « bénéfice » (maga- = védique maghá-) : dérivé d’une racine mal identifiée. magāi.ā (magāya) : datif singulier. ||| 11b2 mazōi magāi.ā paitī.zānatā.

124

√ man « penser » (√ man = védique MAN) : → manah-, mazdā-, mąθra-. mə̄ŋ́hī (manhi = védique maṁsi) : première personne de la voix moyenne de lʼinjonctif aoriste sigmatique. ||| 10c2 θβaąm mə̄ŋ́hī paōuruuīm ̃ vaēdəm .·.. manah- neutre « penser » (mānah- = védique mánas-) : dérivé de √ man. manō (mānah) : nominatif singulier. ||| 11a2 manō xšaθrəmcā at̰ †mā † mašā. manaŋhā (mānahā) : instrumental singulier. ||| 7c1 kastē vohū manaŋhā, 10b1 auuat̰ vohū manaŋhā. √ mar « mourir » (√ mar = védique MR̥ < pie. √ *mr̥) : → maš ̣ii̯ a-. √ mar « mémoriser » (√ hmar = védique SMR̥ < pie. √ *smr̥) : → mairišta-, marəta-. mairišta- « très mémorisateur de acc. » (hmarišta- < pie. *smér-istH2o-) : superlatif tiré de √ mar « mémoriser ». mairištō (hmarištah) : nominatif masculin singulier. ||| 4a1 mazdā̊ saxvārə̄ mairištō. marəta- « mémorisé » (hmr̥ta- = védique smr̥tá-) : adjectif verbal en -tatiré de √ mar « mémoriser ». marətaēibiiō : ablatif pluriel. ||| 7c2 yə̄ ī dāiiāt̰ ə̄əāuuā marətaēibiiō. mazōi « pour conférer » (mazai = véd. mahé) : infinitif datif de √ mąz. ||| 11b2 mazōi magāi.ā paitī.zānatā. mazdā- « qui met en pensée, qui apporte la sagesse » (mazdā- < pie. *mn̥s-dheH1-) : théonyme masculin singulier. Combine le nom-racine dʼagent masculin tiré de √ dā avec la forme préverbiale en *-s de √ man. mazdā̊ (mazdāh) : nominatif. ||| 4a1 mazdā̊ saxvārə̄ mairištō, 6a2 mazdā̊ vīduuā̊ vafūš vii̯ ānaiiā, 7b1 mazdā̊ gauuōi xšuuīdəmcā. mazdą̃m (mazdaam) : accusatif. ||| 5b2 hiiat̰ mazdą̃m duuaidī fərasābiiō. mazdā (mazdā) : vocatif. ||| 8b2 huuō nə̄ mazdā vaštī aš ̣āicā, 10c1 azə̄mcīt̰ ahiiā mazdā, 11b1 yūžə̄m mazdā †frāxšnənē. †

mašā : → aš ̣i-.

maš ̣ii̯ a- masculin « être humain mortel » (martiya- = védique mártiya-) : dérivé de √ mar « mourir ». maš ̣ii̯ āišº (martiyāiš) : instrumental pluriel. ||| 4b1 daēuuāišcā maš ̣ii̯ āišcā. 125

mā (mā = védique mā) : accusatif enclitique du pronom de la première personne du singulier. Voir azə̄mº. ||| 1a2 (2 ×) kahmāi mā θβarōždūm kə̄ mā tašat̰ , 1b1 ā mā aēšəmō hazascā, 11a2 manō xšaθrəmcā at̰ †mā †mašā. mąθra- masculin « recommandation, conseil » (manθra- = védique mántra- < pie. *mén-tro-) : dérivé en -θra- de √ man. mąθrəm (manθram) : accusatif singulier. ||| 7a2 mąθrəm tašat̰ aš ̣ā hazaōšō. √ mąz « conférer » (√ manz = védique MAM̐H) : → mazōi. mə̄ : → ma-. mə̄ŋ́hī : → √ man. mōi (mai = védique me) : génitif-datif enclitique du pronom de la première personne du singulier. Voir azə̄mº. mōi (mai) : datif. ||| 1c2 aθā mōi sąstā vohū vāstr[ii̯ ]ā. mōi (mai) : génitif. ||| 1c1 nō[it̰ ] mōi vāstā xšmat̰ ańiiō, 8a1 aēəm mōi idā vistō. √ mrū « dire » (√ mrū = védique BRŪ) : → paitī+√ mrū. ya- (ya- = védique yá- < pie. *i̯ ó-) : adjectif-pronom relatif ; → hiiat̰ . yə̄ (yah) : nominatif masculin singulier. ||| 2c2 yə̄ +drəguuō.dəbīš aēšəməm vādāiiōit̰ , 7c2 yə̄ ī dāiiāt̰ ə̄əāuuā marətaēibiiō, 8a2 yə̄ nə̄ aēuuō sāsnā̊ gūšatā, 9a2 yə̄ anaēšəm xšąnmə̄nē rādəm, 9c2 yə̄ hōi dadat̰ zastauuat̰ auuō. yə̄m (yam) : accusatif masculin singulier. ||| 9b2 yə̄m ā vasəmī +īšā xšaθrīm ̃ +. yahmāi (yahmāi) : datif masculin singulier. ||| 3c2 yahmāi zauuə̄ṇg jimā ˟kərəduš ā˟. yā (yā) : instrumental neutre singulier. ||| 10b2 yā +hušəitiš rāmąmcā dā̃t̰. yā (yā) : accusatif neutre pluriel. ||| 4a2 yā zī vāuuərəzōi pairī.ciθīt̰ , 4b2 yācā varəšaitē aipī.ciθīt̰ . ya- (ya- = védique yá- < pie. *i̯ ó-) : adjectif-pronom interrogatif indirect. yā (yā) : instrumental neutre singulier. ||| 3b2 yā ˟š́ auuaiṇtē ādrə̄ṇg ərəšuuā̊ŋhō. yaθā « comme » (yaθā = védique yáthā) : conjonction de subordination. ||| 4c2 aθā nə̄ aŋhat̰ yaθā [huuō] vasat̰ .

126

yauuā : → āiiu-. yahmāi : → ya-. yā : → ya-. yə̄ : → ya-. yə̄m : → ya-. yūšm- « vous » (yušm- = védique yuṣm- = grec ὑμ- < pie. *usm-) : complète la déclinaison de yūžə̄m. La forme compositionnelle est yūšma+. Voir aussi xšm-. yūšmāuuaṇt- « qui est avec vous, votre adorateur » (yušma+vant-) : dérivé en +u̯aṇt- de la forme compositionnelle yūšma+ de yūšm-. yūšmāuuatą̃m (yušmavataam) : génitif masculin pluriel. ||| 11b2 ə̄hmā.rātōiš yūšmāuuatą̃m. yūžə̄m (yužam ≈ védique yūyám) : nominatif tonique du pronom de la 2e personne du pluriel. La déclinaison est complétée par yūšm-. ||| 10a1 yūžə̄m aēibiiō ahurā, 11b1 yūžə̄m mazdā †frāxšnənē. vaēda- masculin « fournisseur » (vaida-) : dérivé de √ vid « fournir » (type grec ἀοιδός < *H2u̯oidó-). vaēdəm (vaidam) : accusatif singulier. ||| 10c2 θβaąm mə̄ŋ́hī paouruuīəm vaēdəm. vaōcat̰ : → √ vac. vaxəδra- nt. (?) « organe de la parole » (vaxθra- = sanscrit váktra- < pie. *u̯éku̯-tro-) : dérivé en -tra- de √ vac. vaxəδrahiiā (vaxθrahya) : génitif singulier. ||| 8c2 hiiat̰ hōi †hudəmə̄m diiāi† vaxəδrahiiā. √ vac « dire » (√ vac = védique VAC < pie. √ *u̯eku̯) : complète la conjugaison de √ mrū ; → vaxəδra-, vac-. vaōcat̰ (vaucat = védique vocat < pie. *u̯e-u̯ku̯e-t) : 3e personne du singulier de la voix active de lʼinjonctif aoriste à redoublement. ||| 6a1 at̰ ə̄ vaōcat̰ ahurō. vac- masculin (!) « voix, parole » (vac- ≈ védique vā́ c-) : nom-racine de √ vac. vācəm (vācam) : accusatif singulier. ||| 9b1 vācəm nərəš asūrahiiā.

127

√ vaf « tisser, chanter » (√ vaf = védique VABH < pie. √ *H1u̯ebhH2) : → vafuš-. vafuš- neutre « chant » (vafuš-) : dérivé en -uš- de √ vaf. vafūš (vafūš) : accusatif pluriel. ||| 6a2 mazdā̊ vīduuā̊ vafūš vii̯ ānaiiā. √ varz « agir, exécuter, œuvrer » (√ varz < pie. √ *u̯r̥g̑, cf. grec argien Fέργον). vāuuərəzōi (vāvr̥zai) : 3e personne du singulier de la voix moyenne de lʼindicatif parfait. ||| 4a2 yā zī vāuuərəzōi pairī.ciθīt̰ . varəšaitē (varšatai) : 3e personne du singulier de la voix moyenne du subjonctif aoriste sigmatique. ||| 4b2 yācā varəšaitē aipī.ciθīt̰ . √ vas « vouloir » (√ vas = védique VAŚ < pie. √ *u̯ek̑) : adādi. vasəmī (vasmi) : première personne du singulier de lʼindicatif présent. ||| 9b2 yə̄m ā vasəmī +īšā xšaθrīm ̃ +. vaštī (vašti) : 3e personne du singulier de lʼindicatif présent. ||| 8b2 huuō nə̄ mazdā vaštī aš ̣āicā. uštā (ušta) : 2e personne du pluriel de lʼindicatif présent. ||| 2c1 kə̄m hōi uštā ahurəm. vasat̰ (vasat) : 3e personne du singulier du subjonctif présent. ||| 4c2 aθā nə̄ aŋhat̰ yaθā [huuō] vasat̰ . √ vah « être lumineux, bon » (√ vah = védique VAS < pie. √ *u̯es) : → vohu-. vā (vā, cf. védique vā̃́ m) : nominatif enclitique du pronom de la première personne du duel. ||| 5a1 at̰ vā ustānāiš ahuuā. vācəm : → vac-. vādāiia- « chasser » (vādāya- = grec ὠθέω < pie. *u̯eHdhéi̯ e- ?) : dénominatif (?). vādāiiōit̰ (vādāyait) : 3e personne du singulier de la voix active de lʼoptatif présent. ||| 2c2 yə̄ +drəguuō.dəbīš aēšəməm vādāiiōit̰ . vāuuərəzōi : → √ varz. vāstar- masculin « pâtre » (vāstar-) : nom d’agent en -tar- tiré de √ vāh « faire paître ». vāstā (vāstā) : nominatif singulier. ||| 1c1 nō[it̰ ] mōi vāstā xšmat̰ ańiiō.

128

vāstra- neutre « fourrage » (vāstra-) : dérivé en -θra- de √ vāh ; → vāstraiia-. vāstrā (vāstrā) : instrumental singulier. ||| 2b2 hadā vāstrā gaōdāiiō θβaxšō. vāstr[ii̯ ]ā (vāstrā) : instrumental singulier. ||| 1c2 aθā mōi sąstā vohū vāstr[ii̯ ]ā. vāstraiia- « sʼoccuper du fourrage » (vāstra+ya-) : participe masculin en *ºá- du dénominatif de vāstra-. vāstraiiāiº (vāstra+yāi) : datif singulier. ||| 6c2 vāstraiiāicā θβōrəštā tatašā. √ vāh « faire paître » (?) : → vāstar-, vāstra-. vohu- « bon, divin » (vahu- = védique vásu-) : dérivé de √ vah. vohuº (vahu) : nominatif neutre singulier. ||| 11a1 kudā aš ̣əm vohucā. vohū (vahū) : instrumental neutre singulier. ||| 1c2 aθā mōi sąstā vohū vāstr[ii̯ ]ā, 7c1 kastē vohū manaŋhā, 10b1 auuat̰ vohū manaŋhā. vī (vi = védique ví < pie. *u̯í) : préverbe indiquant que le mouvement est divergent ou séparateur. vī+√ an « suspendre le souffle » (= védique vyÀN) : → vii̯ ānī-. vī+√ ci (vi+√ ci) : → vīcira-. vīcira- « qui fait la différence » (vicira-) : adjectif en -ra- tiré de vī+√ ci. vīcirō (vicirah) : nominatif masculin singulier ||| 4c1 huuō vīcirō ahurō. √ vid « savoir » (√ vid = védique VID < pie. √ *u̯id) : → vīdu̯iiē, vīduuah. √ vid « fournir, trouver » (√ vid = védique VID < pie. √ *u̯id) : → vaēda-, vista-. vīdu̯iiē « savoir » (vidvai) : infinitif datif en *-u̯éi de √ vid. ||| 3b1 auuaēšą̃m nō[it̰ ] vīdu̯iiē. vīduuah- « sachant, savant » (vidvah- = védique vidvā́ ṁs-) : participe parfait actif de √ vid. vīduuā̊ (vidvāh) : nominatif masculin singulier. ||| 6a2 mazdā̊ vīduuā̊ vafūš vii̯ ānaiiā. 129

vista- « ayant été trouvé, examiné » (vista-) : adjectif verbal en -ta- de √ vid. vistō (vistah) : nominatif masculin singulier. ||| 6b1 nō[it̰ ] aēuuā ahū vistō, 8a1 aē̃m mōi idā vistō. vii̯ ānī- féminin « souffle suspensif » (vi+ānī-) : dérivé de vī+√ an. vii̯ ānaiiā (vi+ānyā) : instrumental singulier. ||| 6a2 mazdā̊ vīduuā̊ vafūš vii̯ ānaiiā. raōstā : → √ rud. ratu- masculin « pièce dʼun ensemble harmonieux, entrée dʼun organigramme ; modèle, patron ; plan intégrateur » (ratu- < pie. *H2ré-tu-) : dérivé en -tu- du degré plein externe de √ ar « agencer ». ratuš (ratuš) : nominatif singulier. ||| 2a2 aš ̣əm kaθā tōi gauuōi ratuš, 6b2 na[ēd]ā ratuš aš ̣āt̰ cīt̰ hacā. √ ram « boiter » (√ hram) : → rəma-. √ raz « former une ligne droite » (√ raz = védique RAJ < pie. √ *H3reg̑) : → ərəš. √ rā « offrir » (√ rā = védique RĀ < pie. √ *H1reH) : → rāiti-. √ rā « s’arrêter, être calme » (√ rā = védique iláyati) : → rāman-. rāiti- féminin « générosité » (= védique rātí-) : dérivé en -ti- de √ rā « offrir » ; → ə̄hmā.rāiti-. √ rād « réussir à dat. » (√ rād = védique RĀDH). rādəm (rādam) : première personne du singulier de la voix active de lʼinjonctif aoriste radical. ||| 9a2 yə̄ anaēšəm xšąnmə̄nē rādəm. rāman- neutre « calme, tranquillité » (rāman-) : substantif en -man- tiré de √ rā « s’arrêter ». rāmąmº (rāmān) : accusatif pluriel. ||| 10b2 yā +hušəitiš rāmąmcā daāt̰ . rǝma- masculin singulier « déséquilibre » (hrama- < pie. *slémH2o-) : démononyme, tiré de √ ram « boiter ». rəmō (hramah) : nominatif. ||| 1b2 rəmō [ā]hišāiiā dərəš[cā] təuuišcā.

130

√ uru « bruire » (√ ru = védique RU) : → uruu̯an-. √ urud « pleurer » (√ rud = védique RUD) : adādi. raōstā (rusta) : 3e personne du singulier de la voix moyenne de lʼinjonctif présent. ||| 9a1 at̰ cā gə̄uš uruu̯ā raōstā. uruu̯an- masculin « âme-moi » (ruvan-, cf. véd. ruvaṇyú-) : nom d’agent en -an- tiré de √ uru. uruu̯ā (ruvā) : nominatif singulier. ||| 1a1 xšmaibiiā gə̄uš uruu̯ā gərəždā, 5b1 mə̄ uruu̯ā gə̄ušcā aziiā̊ , 9a1 at̰ cā gə̄uš uruu̯ā raōstā.

√ saṇd « sembler, être agréable à dat. » (√ sand = védique CHAND < pie. √ *sk̑end). sąstā (sansta) : 2e personne du pluriel de la voix active de l’impératif aoriste sigmatique. ||| 1c2 aθā mōi sąstā vohū vāstr[ii̯ ]ā. saxvārə̄ : → sāxvan-. sarəjā : → √ srāj. sāsnā- féminin « leçon » (sāsnā-) : dérivé en -nā- de √ sāh. sāsnaiiā (sāsnayā) : instrumental singulier. ||| 7b2 huuō.urušaēibiiō spəṇtō sāsnaiiā. sāsnā̊ (sāsnāh) : accusatif pluriel. ||| 8a2 yə̄ nə̄ aēuuō sāsnā̊ gūšatā. √ sāh (√ sāh = véd. ŚĀS < pie. √ *k̑eHs) : → sāsnā-, sāxvan-. sāxvan- neutre « propos, dire, ordre » (sāhvan-) : substantif en -u̯an- tiré de √ sāh. saxvārə̄ (sāhvār) : accusatif pluriel. ||| 4a1 mazdā̊ saxvārə̄ mairištō. sąstā : → √ saṇd. √ sū « gonfler » (√ sū = véd. ŚŪ < pie. √ *k̑uH) : → asūra-. √ span « mettre au courant » (√ span, cf. védique PAN) : → spəṇta-. spǝṇta- « informé, savant » (spanta-) : adjectif en -ta- tiré de √ span. spəṇtō (spantah) : nominatif masc. sing. ||| 7b2 huuō.urušaēibiiō spəṇtō sāsnaiiā. spitāma- « descendant de Spitāma » (spītāma-) : nom propre d’étymologie inconnue. 131

spitāmō (spītāmah) : nominatif masculin singulier. ||| 8b1 zaraθuštrō spitāmō. √ srāj « convaincre » (√ srāj = védique ŚLĀGH) : tudādi. sarəjā (sarjā) : première personne du singulier de la voix active de lʼindicatif présent. ||| 3a1 ahmāi aṣ̌ā nō[it̰ ] sarəjā. srāuuaiieŋ́hē (srāvayahai) : infinitif datif du causatif de √ sru. ||| 8c1 carəkərəθrā srāuuaiieŋ́hē. √ sru « entendre, écouter » (√ sru = védique ŚRU) : → srāuuaiieŋ́hē. zaōša- masc. « approbation » (zauša- = védique jóṣa-) : dérivé de √ zuš ; → hazaōša-. zauua- masculin « appel » (zava- = védique háva-) : dérivé de √ zū. zauuə̄ṇg (zavānh) : accusatif pluriel. ||| 3c2 yahmāi zauuə̄ṇg jimā ˟kərəduš ā˟. √ zar « être vieux » (√ zar = védique JAR < pie. √ *g̑erH1) : → zaraṇt-. zaraθuštra- masculin singulier « qui possède de vieux chameaux, Zoroastre » (zarat+uštra-) : bahuvrīhi de zaraṇt- et de uštra-. zaraθuštrō (zaraduštrah) : nominatif. ||| 8b1 zaraθuštrō spitāmō. zaraṇt- « vieux » (zarant- = védique járant- = grec γέρων) : adjectif tiré de √ zar ; → zaraθuštra-. zasta- masculin « main » (zasta- = védique hásta- < pie. *g̑hés-to-) : → zastauuaṇt-. zastāiš (zastāiš) : instrumental pluriel. ||| 5a2 zastāiš frīnəmnā ahurāi.ā. zastauuaṇt- « accompagné des mains » (zasta+vant-) : dérivé en +u̯aṇtde zasta-. zastauuat̰ (zastavat) : accusatif neutre singulier. ||| 9c2 yə̄ hōi dadat̰ zastauuat̰ auuō. zī (zi = védique hí) : particule emphatique. ||| 4a2 yā zī vāuuərəzōi pairī.ciθīt̰ , 6c1 at̰ zī θβā fšuiiaṇtaēcā. √ zu « verser » (√ zu = védique HU < pie. √ *g̑hu) : → ā+√ zu.

132

√ zū « appeler » (√ zū = védique HŪ < pie. √ *g̑huH) : → zauua-. √ zuš « approuver » (√ zuš = védique JUṢ < pie. √ *g̑us) : → zaōša-. √ ši « habiter » (√ ši = védique KṢI < pie. √ *ksi) : → šiti-. šiti- féminin « habitation » (šiti- = védique kṣití-) : dérivé en -ti- de √ ši ; → hušiti-. √ š́ iiu « se déplacer vers (acc.) » (√ śyu = védique CYU < pie. √ *ki̯ u) : bhvādi de voix moyenne. ˟š́ auuaiṇtē (śyavantai) : 3e personne du pluriel de lʼindicatif présent. ||| 3b2 yā ˟š́ auuaiṇtē ādrə̄ṇg ərəšuuā̊ŋhō. ha- (ha-) : complète au nominatif sing. animé la déclinaison de a- / ta-, mais la diascévase lui a substitué hāu. ha+ (ha+ = véd. sa+ < pie. *sm̥+) : préf. sociatif ; → hadā. √ hac (√ hac = védique SAC < pie. √ *seku̯) : → hacā. hacā (hacā = védique sácā) : invariable renforçant lʼablatif. Tiré de √ hac. ||| 6b2 na[ēd]ā ratuš aš ̣āt̰ cīt̰ hacā. hadā (hada = védique sahá) : invariable renforçant lʼinstrumental. Tiré de ha+. ||| 2b2 hadā vāstrā gaōdāiiō θβaxšō. √ haz « tenir, forcer » (√ haz = véd. SAH < pie. √ *seg̑h) : → hazah-. hazaōša- « dʼaccord avec (+ instr.) » (hazauša- = védique sajóṣa-) : composé de ha+ et de zaōša-. hazaōšō (hazaušah) : nominatif masculin singulier. ||| 7a2 mąθrəm tašat̰ aš ̣ā hazaōšō. hazah- neutre singulier « fait de forcer, violence » (hazah- = védique sáhas-) : démononyme tiré de √ haz. hazasº (hazasº) : nominatif. ||| 1b1 ā mā aēšəmō hazascā. haṇt- masc. « existant, entité surnaturelle » (hant- = véd. sánt-) : participe présent de √ ah « exister ». hātą̃m (hataam) : génitif pluriel. ||| 3c1 hātą̃m huuō aōjištō.

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hōi (hai) : génitif-datif singulier du pronom enclitique de la 3e personne. Voir aussi hīm. ||| 2c1 kə̄m hōi uštā ahurəm, 8c2 hiiat̰ hōi †hudəmə̄m diiāi† vaxəδrahiiā, 9c2 yə̄ hōi dadat̰ zastauuat̰ auuō. √ hī « lier » (√ hī / hai = véd. SĪ / SE < pie. √ *siH2 / *sH2ei) : → ā+√ hī. hīm (hīm) : accusatif féminin singulier du pronom enclitique de la 3e personne. Voir aussi hōi. ||| 2b1 hiiat̰ hīm dātā xšaiiaṇtō. hu+ « bien » (hu+ = védique su+ < pie. *H1su+) : préfixe. †

hudəmə̄m « ? ». ||| 8c2 hiiat̰ hōi †hudəmə̄m diiāi† vaxəδrahiiā.

hušiti- « offrant bonne habitation » (hušiti- = védique sukṣití-) : bahuvrīhi de hu+ et de šiti-. + hušəitiš (hušitiš) : nominatif féminin singulier. ||| 10b2 yā +hušəitiš rāmąmcā dā̃t̰. hiiat̰ « quand, lorsque, si » (yat = védique yát) : conjonction de subordination tirée de ya-. ||| 2b1 hiiat̰ hīm dātā xšaiiaṇtō ; 5b2 hiiat̰ mazdaąm duuaidī fərasābiiō ; 8c2 hiiat̰ hōi †hudəmə̄m diiāi† vaxəδrahiiā (?). huuō « celui-là » (hāu, cf. védique asáu) : nominatif masculin singulier du démonstratif lointain. Mis souvent pour le nominatif masculin singulier de ha-. ||| 3c1 hātaąm huuō aōjištō ; 4c1 huuō vīcirō ahurō ; 4c2 aθā nə̄ aŋhat̰ yaθā [huuō] vasat̰ ; 8b2 huuō nə̄ mazdā vaštī aš ̣āicā ; 9c1 kadā yauuā huuō aŋhat̰ . huuōuruša- masculin « consommateur » (hvāruša- ou hvaruša-, cf. védique sváru-) : dérivé de √ xvar « consommer ». huuō.urušaēibiiō (hvārušaibyah) : dat. pluriel. ||| 7b2 huuō.urušaēibiiō spəṇtō sāsnaiiā. √ xvar « consommer » (√ hvar = védique SVAR < pie. √ *su̯elH2) : → huuōuruša-.

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II 5. Les traductions médiévales Le texte pehlevi du zand du Y 29 et de son commentaire figure dans les manuscrits suivants : ― E7(450):211r08-219r06 ; ― F2(415):122v01-126v09 ; ― J2(500):180r09-183v12 ; ― K5(510):139v05-144r15 ; ― KM7(682):156v16-163r17 ; ― M1(530):348r01-358v01 ; ― Mf4 / D90 (410):344.6-352.15 ; ― Pt4(400):133r01-136r21 ; ― T6(420):119v06-125r02. Ce texte a été édité en caractères pehlevis par Dhabhar1 ; Malandra et Ichaporia2 en ont donné une transcription interprétative. Pour la traduction sanscrite que Niriosaṅgha Dhavalasuta a offerte de ce texte pehlevi, j’ai recouru aux éditions de Spiegel3 et de Bharucha4, mais l’usage des daṇḍa et l’harmonisation des sandhi sont de mon cru. Les manuscrits du texte pehlevi se répartissent en trois groupes : ― deux du Yasna iranien pehlevi, Pt4 (400)5 et Mf4 (410), datant tous deux des environs de 1780. Les manuscrits F2 (415), T6 (420), E7 (450), tous trois du XIXe siècle, dérivent de Pt4 ; ― deux du Yasna indien pehlevi, J2 (500) et K5 (510), datant tous deux de 1323. Le manuscrit M1 (530), daté de 1734, dérive de K5 ; ― un manuscrit donnant tout à la fois les versions pehlevie et sanscrite, KM7 (682).

0 6 .·. hšm|ʼyby7 hʼt| bvn .·. .·. xšmaibii hād bun .·. Ici commence la Xšmaibiiā Hāiti (« lʼunité dont l’incipit est "À vous" »). 1

B. N. DHABHAR, 1949, p. 129-34. W. W. MALANDRA et P. ICHAPORIA, 2010, p. 21-4. 3 F. SPIEGEL, 1861, p. 121-7. 4 Sh. D. BHARUCHA, 1910, p. 59-62. 5 Sur ce type dʼidentifiants numériques des manuscrits, A. CANTERA, 2014. 6 Avec E7.Mf4.Pt4, mais nous trouvons deux lignes blanches dans les manuscrits J2.K5.T6. 7 E7 hšm|ʼʼby. 2

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Le titre pehlevi de cette section diverge de l’avestique. Ce dernier figure principalement dans le paragraphe de clôture de la section (Y 29.12) tandis que le titre pehleví coïncide avec celui donné dans le neuvième livre du Dēnkard. La traduction pehlevie mot à mot ou zand proprement dit (avestique āzaiṇti-8) et le commentaire qui l’accompagne (paiti.paršti-9) sont donnés vers par vers10. Cependant, cette méthode conduisit souvent l’auteur pehlevi à considérer chaque vers comme une phrase grammaticalement complète. Le grand Avesta qui devait encore exister à l’époque sassanide se composait de 21 livres (nask) dont sept étaient censés avoir un rapport plus ou moins étroit avec les Cantates (Gāθā) : ce sont les livres dits gâthiques (gāθānīg). Le lien qui unit avec le commentaire pehlevi du Y 29 les chapitres correspondants des trois livres gâthiques décrits dans le neuvième livre du Dēnkard (Dk) ne s’avère être jamais très étroit. Le texte du Dk 9.5 dans lequel est décrit le 5e chapitre du Stut-gar Nask (SGN) ne nous sert pratiquement pas à élucider le commentaire du Y 29. Celui qui contient le plus de phrases parallèles à celles du commentaire du Y 29 est le texte du Dk 9.28 dans lequel est décrit le 6e chapitre du Varəšt-mąθr Nask (VMN), mais, dans le texte des Dk 9.50 et Dk 9.68 avec lesquels sont décrits respectivement les chapitres 5 et 23 du Baγ Nask (BN), le dernier étant un chapitre supplémentaire basé sur l’ensemble de la littérature archaïque, nous pouvons glaner plusieurs autres phrases parallèles. Sanjana, au début du XXe siècle, dans son édition du neuvième livre du Dēnkard11, avait déjà signalé ces parallélismes. Ceci nous aide considérablement surtout que son édition est accompagnée d’une traduction anglaise. Une autre aide non négligeable nous est offerte par James Darmesteter12 qui, pour l’interprétation de l’original avestique du Y 29, s’était abondamment appuyé sur la propre version pehlevie et sur la Zand-āgāhīh13. La traduction, lʼinterprétation que je propose du zand et des gloses ou commentaires qui l’accompagnent a fait l’objet de débats14 à l’Université de Salamanque avec Alberto Cantera et les quelques étudiants présents sans 8

Pour lʼétymologie, É. PIRART, 2012d, p. 138 n. 12. Hapax legomenon du Yt 10.33. 10 Ceci montre que l’auteur du zand et de ce commentaire connaissait parfaitement la division du texte en vers. Parfois même l’alternance entre traduction mot à mot et commentaire ou glose nous permet de voir qu’il connaissait aussi la division des vers en deux hémistiches (É. PIRART, 2012d). 11 P. B. SUNJANA et D. P. SANJANA, 1874-1928, vol. XVII-XIX. 12 J. DARMESTETER, 1892-3, vol. I p. 212-8. 13 ZA 4A. 14 Automne 2014. 9

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toujours aboutir à de pleines convictions tant elle est délicate à établir. Sans l’aide d’aucun précédent, nous n’avons pu aplanir les divergences devant chaque difficulté. Je n’ai donc pas toujours tenu compte de leurs avis. Pour arriver à comprendre correctement le zand, il faut qu’un dialogue soit instauré entre nous, le texte original avestique, le propre zand, le commentaire pehlevi, la traduction sanscrite du zand, la traduction sanscrite du commentaire pehlevi et les éventuelles phrases parallèles glanées dans les livres pehlevis. Dans ce dialogue à sept bandes, nous ne devons pas toujours ou nécessairement donner la préférence à la traduction sanscrite du commentaire pehlevi, même si celle-ci, plus d’une fois, s’avère ou paraît être basée sur une meilleure mouture du texte pehlevi. En tout cas, nous nous méfierons de la traduction sanscrite du zand. Effectivement, le sens lapidaire que l’auteur de la traduction mot à mot ou zand proprement dit a obtenu en cherchant avant tout à refléter génétiquement ou à imiter phonétiquement le texte avestique original et à en moderniser les pièces ne peut être compris que sur base du commentaire pehlevi : c’est dans ce dernier que les raisons peuvent être repérées qui, en plus des phonétiques, avaient guidé le traducteur dans le choix des mots qu’il allait considérer comme la modernisation des avestiques. Ceci dit, ce commentaire pehlevi connut toute une histoire et admit des retouches que seule sa traduction sanscrite nous permet parfois de détecter ou d’apprécier à leur juste valeur. En outre, le sanscrit nous aide bien sûr à nous dépétrer des hésitations que les caractéristiques arimaniennes de l’écriture et de l’orthographe de la langue pehlevie génèrent inévitablement. Niriosaṅgha lui-même, remarquons-le, n’a d’ailleurs pas toujours pu éviter les pièges de la graphie médiévale.

1a xšmaibiiā gə̄uš uruu̯ā gərəždā V kahmāi mā θβarōždūm .·. kə̄ mā tašat̰ .·. 15 ʼv| 16 LKVM ʼmhrspndʼn 17 gvšʼvlvn 18 glcyt| 19 AYT| 20 MNV ʼytvn| 21 YMLLVNyt22 ʼy23 †hvtʼdšyh24 gvpt25 OL26 ʼvhrmẕd lvn|27 AYḴ ʼv|28 MNV 15

Avertissements. Je donne en exposant ce qui, dans les manuscrits, figure audessus de la ligne ; en indice, ce qui figure sous la ligne ; place entre ( ) ce qui est biffé ; entre [ ] ce qui est interpolé ; entre < > ce qui manque ou est à restituer ; symbolise par W un signe illisible. Le trait vertical est un trait vertical. 16 Pt4 LOYN|’v| ; E7.T6 LOYN| ʼv|. 17 E7.KM7 ʼmhrsp̄ ndʼn| ; J2 est endommagé : ʼm[...]dʼn ; F2.K5 ʼmhrspndʼn| ; M1 ʼmhrsp̄ n|dʼn| ; Pt4 ’mhrspnd’n ; T6 ʼmhrspndʼ(m)n| yẕdʼn| ʼvhrmẕd. 18 E7.M1.T6 gvšʼvlvn|. 19 E7.M1 glcyt ; F2 glycyt. 20 E7.F2.K5.M1 AYT. 137

L blyhynyt|29 HVEm30 31PVN OŠTENtn|32 V33 dʼštn|34 V35 OL36 MNV L37 tʼšyt38 HVEm39 AYḴ ʼv|40 MNV YHBVNt41 HVEm42 .·. 43 ō ašmā amǝš ̣-spǝṇdān gǝ̄uš.urun garzīd ast kē ēdōn gōved ay ˟xvadāy ˟ā-š guft ō ohrmazd rōn kū ō kē an brēhēnīd hem V pad xvardan ud dāštan ud ō kē an tāšīd44 hem kū ō kē dād hem .·. 21

J2 ʼytvn||. Avec J2, contre E7.F2.Pt4 YMRRVyt ; K5.KM7.M1.Mf4 YMRRVNyt ; T6 YMRRVyt|. 23 J2 om. ; K5.M1 1 ; Pt4 ay. 24 Selon J2, contre K5.KM7.M1.Mf4.Pt4.T6 hvtʼdyh ; E7.F2 hvtʼyh. 25 E7.KM7.Mf4.Pt4.T6 gvpt|. 26 E7.F2.KM7.Mf4.Pt4.T6 ʼv|. 27 F2 lvnyn (pr. m.? pour obtenir LOYN) ; K5 lvn|| ; KM7 lvn| LOYN| ; E7.T6 LOYN|. 28 E7 ZK. 29 F2 blhynyt ; K5.T6 blyhynyt ; M1 tʼšyt. 30 E7.F2.Mf4.Pt4 HVE|m ; T6 HVE|myy. 31 M1 saute les mots PVN OŠTENtn| V dʼštn|. 32 J2 OŠTENtn ; F2, à la suite de OŠTENtn|, ajoute : blyn| hʼtʼn| ycšn| PVN hʼt LOYŠE (brīn hādān yazišn pad hād sar) « la division du Yasna en unités (est donnée) en fin d’unité ». 33 E7.F2.J2.K5.Mf4.T6 om. 34 E7 OŠTENtn|. 35 F2.J2 om. ; K5 W ; T6 ZK Y OLE ; M1 saute les mots V OL MNV L thšyt| HVE|m. 36 E7 ZK ; F2.KM7.Mf4.Pt4.T6 ʼv|. 37 F2 om. 38 KM7.Mf4.Pt4.T6 tʼšyt|. 39 E7.Mf4.Pt4 HVE|m ; F2 HVEm ; KM7 ’v| MNVm ; T6 HVE|(m)yy. 40 E7 ZK. 41 J2 endommagé : [...]BVN(y)t ; T6 YHBVNyt|. 42 Mf4 HVE|m ; E7.Pt4 HVE|m ; T6 HVE|myy ; KM7 ’v| MNm. 43 Je donne chaque fois le mot à mot en gras. ||| P. B. SUNJANA et D. P. SANJANA, 1874-1928, vol. XIX p. 62 n. 4 (ad Dk 9.68.46) : avô lekûm, amesûspendân, gôshâûrvan garzîd ; vol. XVIII p. 56 n. 1 (ad Dk 9.50.1) : avô lekûm amesûspendân, gŏshâûrûn garʼzîd.. avô mûn li brehînîd havâ-am.... ŏl mûn li tâshîd havâ-am (aêgh avô mûn yehabûnt havâ-am). ||| W. W. MALANDRA et P. ICHAPORIA, 2010 : ō ašmā [amahraspandān] gōšurun garzīd [ast kē ēdōn gōwēd ay xwadāyīh-iš guft ō ohrmazd-rōn] kū ō kē man brēhēnīd hom [pad xwardan ud dāštan] ō kē man tāšīd hom [kū ō kē dād hom]. 44 Ou lire taxšīd avec M. MOLÉ, 1967, p. 16, pour Dk 7.1.14 (7.2.15) ? 22

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yuṣmāsu gopaśūnām ātmā krandati | he susvāminaḥ | kasmā ˟abhinirmito ʼsmi | khādituṁ dhartuṁ ca | kasmai ghaṭito ʼsmi | kila kasmai pradatto ʼsmi |. Devant vous, Gǝ̄uš Uruuana se plaignit ―(le pronom « vous » représente) les Aməš ̣a Spəṇtab, (mais) il y a (un exégète) qui ditc que (ce pronom « vous » représente) le Seigneur, auquel cas (Gǝ̄uš Uruuan) se serait adressé (plutôt) à Ahura Mazdā―d : Pour qui ai-jee été façonnée comme nourriture et propriété ? Pour qui ai-jee été taillée ? = À qui ai-je été donnée ? a

. gvšʼvlvn procède de la simplification de gyvšʼvlvn, une graphie que nous trouvons parfaitement bien conservée dans le vers 9a. Le yod y représente ə̄. La réduction du groupe gy initial rappelle celle que nous observons dans yʼn| < *gaiiāna- « appartenant au principe de vie ». Les noms propres sont habituellement des emprunts faits à l’avestique. Dans ce cas-ci, la forme utilisée est celle du thème oblique (gə̄uš.urun-) au lieu de celle du nominatif (gə̄uš.uruuā). b . L’emploi du pluriel oblique en ºān pour le vocatif du nom des Aməš ̣a Spəṇta peut surprendre, mais il s’agit en réalité d’une explication. J’ignore si l’absence de reflet dans la traduction sanscrite est l’indice fiable que cette explicitation du pronom LKVM ne figurait pas dans le texte original pehlevi. En tout cas, nous pouvons observer des hésitations puisque quelques manuscrits ajoutent sans hésiter yẕdʼn « les Yazata ; Dieu »45 (Pt4, T6). ||| La séquence sp dans ʼmhrspndʼn reste sans ligature, car le mot est un nom propre avestique. La séquence hr est la réduction ou la simplification de yhr (< ǝš ̣) que certains manuscrits conservent parfois et que certains savants du XIXe siècle lisaient šu. Sans doute l’origine du caractère avestique š ̣ est-elle à rechercher dans cette séquence yhr. c . Le syntagme ast kē ēdōn gōved ay est usuel par exemple dans le Nērangestān pour introduire une opinion alternative. d . La lecture de cette incise reste incertaine. Niriosaṅgha ne reflète que xvadāy : he susvāminaḥ. En revanche, le commentaire pehlevi introduit une opinion alternative. La lecture que Malandra et Ichaporia proposent, xwadāyīh-iš, ne me paraît pas idéale : en plus de la position, sans doute peu habituelle, du pronom enclitique, je ne vois pas comment l’abstrait xvadāyīh pourrait entrer dans la phrase. Je propose donc sa correction en ˟hvtʼd ʼš˟ (˟xvadāy ā-š˟) en admettant que la particule ā ouvre une proposition exprimant ce qui est à comprendre dans le cadre de l’opinion alternative. 45

Ceci n’est guère différent puisque les Aməš ̣a Spəṇta ne sont jamais qu’une catégorie, la principale, parmi les Yazata. Il est malaisé de déterminer si, dans cette glose secondaire, yazadān a encore le sens avestique et est encore un pluriel ou s’il a déjà pris le sens persan épique de « Dieu ». 139

e

. L’uzvārišn pronominal L46 peut tout aussi bien représenter le nominatif an « moi ». C’est ce que montre la comparaison avec Dk 9.28.8.1 qui contient ANE : pvrsšn| Y gvšʼvlvn AYK OL MNV ANE blyhynyt| tʼsyt| HVE|ym .·.. 47

1b ā mā aēšəmō hazascā V rəmō [ā]hišāiiā dərəš[cā] təuuišcā .·. ZK48 L ZK49 ʼyšmn|50 MNVm51 PVN ʼyšm52 znyt53 V 54 sthmk|55 AYḴ56 m BRA ʼp̄ lyt57 V 58 [Y 59 ] lyškn| AYḴm 60 ʼp̄ tmʼn61 kvšyt62 hm ʼhvkynyt| 63 PVN hmʼk64 LAVHL V65 SDKVNtʼlc66 AYKm67 bvtvk68 zyt|69 BRA †OḆYDVN-ḆYN70 V tlptʼlc71 AYḴm72 BRA dvcyt|73 .·. 46

Certains spécialistes, pour cet uzvārišn, préfèrent lire LY (cf. arabe ‫)ﻟﻲ‬. Contre W. W. MALANDRA et P. ICHAPORIA, 2010 : kū ō kē man brēhēnīd hom [pad xwardan ud dāštan] ō kē man tāšīd hom [kū ō kē dād hom]. 48 E7 ZK Y. 49 KM7.Mf4.Pt4.T6 ZK Y. 50 E7ʼšmn| ; KM7.Mf4.Pt4.T6 ʼšmn ; F2 ʼšm. 51 M1 MNV. 52 J2.K5.M1 ʼyšmn| ; E7.F2.KM7.Pt4.T6 ’šm. 53 E7.F2.Mf4.Pt4.T6 MHYTVNyt ; KM7 MHYTVNyt. 54 E7.F2.K5.M1 om. ; Pt4 Y MNV. 55 F2.J2 sthmk ; KM7 sthmkY ; Pt4 sthmk| OḆYDVNd. 56 KM7 AYK̠|m ; F2.Mf4 AYḴm. 57 KM7 (’p̄ lyWW)’p̄ lyt. 58 F2 om. 59 E7.F2.T6 om. Jʼattendais V, mais la plupart des manuscrits donnent à la fois V et Y à la suite de ʼp̄ lyt. 60 KM7 AYK̠|m. 61 E7 HT mʼn| ; F2 ʼp̄ tmʼnk ; M1 ʼptmʼn ; T6 ʼp̄ tm’n|. 62 J2.K5.M1 kvštn| ; F2 OŠT EN yt kvšyt ; T6 kvšyt|. 63 E7.K5.KM7.M1.Mf4.Pt4 ʼhvkynyt ; F2 ʼyvkʼnyt. 64 J2 hmʼk|. 65 J2 om. ; F 2 sec. m. 66 E7.KM7.Pt4 SDKV tʼlc ; J2 (yc)SDKVNtʼlc ; Mf4.T6 SDKVN|tʼlc. 67 F2 V AYḴm ; KM7 AYK̠|m. 68 F2 bvt ; Mf4 bvt| V ; E7.Pt4 bvt| ; T6 bvt|―. 69 F2.K5.M1 zyt. 70 Mf4.Pt4 OḆYDVN-ą̑ ; E7.T6 OḆYDVN-ą. 71 J2 tlptʼl ME ; Mf4 t(p)lptʼlc ; F2.T6 tlpt’l. 72 F2 AYḴm (sec. m.). 73 F2.K5.M1 dvcyt. 47

140

74

ān-im ān aēšmin kē-m pad aēšm zaned ud stahmag ˟kē-m be appared ˟ud rēšken ˟kē-m a-paymān kušed ham-āhōgēned pad hamāg abāz darrīdār-iz ˟kē-m baōδō.jait be ˟kuned ud tirftār-iz ˟kē-m be duzed .·. sa māṁ kopālur yaḥ krodhena nihanti | haṭhī ca yo haṭhād dharati | īrṣyālur75 yo ʼpramāṇaṁ vadhyati | ābādhayati | sarvatra jñeyam | dārayitā ca stenaś ca yo me jīvavighātakaṁ kurute yaś ca māṁ corayati | 76 Ceu(x)-làa, l’irascibleb quic me frappe avec colère, le violent qui m’end lève et le méchant qui, sans modération, me bat, mea souille(nt)e ―(Ce verbe est) à ré(péter) avec tous (les adjectifs)―f, le déchireurg aussi qui me frappe à desseinh et le voleuri aussi qui s’empare de moi. a

. La séquence ZK L doit être lue ān-im, non ān man, car l’uzvārišn L peut représenter aussi bien la forme tonique que l’enclitique77. b . La graphie ʼ(y)šm(y)n| qui, par la suite, a fini par être lue h(y)šm(y)n|78, pour moi, est celle d’un avesticisme *aēšmin (= RS 5.52.16d, etc. iṣmín-). c . Pour ces phrases, les manuscrits hésitent entre MNV et AYḴ. Bartholomae79, Klingenschmitt80, Malandra et Ichaporia81 optent pour AYḴ tandis que Niriosaṅgha me pousse à préférer MNV. 74

J. DARMESTETER, 1892-3, vol. I p. 214 n. 5 : am âhûkînît pun kamâk ; p. 215 n. 8 : rîshkûn ; am apatmân kûshît ; sîkûntâr ; bôtôkzyat. ||| Ch. BARTHOLOMAE, 1904, colonne 1528 (s. v. rǝma-) : rēšakōn, erl.: kum apatmān kuštan am āhōkēnēt ; col. 649 (s. v. tǝviš-) : tirftār, erl.: kum apē duždēt ; col. 743 (s. v. dǝrǝš-) : darrītār, erl.: kum bōδak žait kunēt. ||| G. KLINGENSCHMITT, 1968, p. 199 (ad FiO 680) : ZK LY ZK ZY hšm +ʼYKm pt hšm znyt sthmk ʼYKm BRʼ ʼplyt| ZY lyškwn ʼYKm ʼptmʼn kwšyt ʼm ʼhwkynyt pt hmʼk LʼWḤL-SDKWNtʼlc ʼYKm bwtwkzyt BRʼ ‘BYDWNu W tlptʼlc ʼYKm BRʼ dwcyt « das (ist) mir, die Wut ― d. h. man schlägt mich aus Wut ― des Gewalttätigen ― d. h. man raubt mich ― des Verletzenden ― d. h. man tötet mich maßlos; da bin ich geschändet durch alle Zurück-Reißenden ― d. h. man tut mir bwtwzyt an ― und alle Diebe ― d. h. man stiehlt mich ». ||| W. W. MALANDRA et P. ICHAPORIA, 2010 : ān man ān ī xēšm [kē-m pad xēšm zanēd] stahmag [kū-m be āzārēd] ī rēškēn [kū-m apaymān kušēd] ā-m āhōgēnēd pad hamāg abāz-darrīdār-iz [kū-m bōdōzed be kunēd] ud truftār-iz [kū-m be duzēd]. 75 Faut-il corriger en īrṣyāluś ? 76 J. DARMESTETER, 1892-3, vol. I p. 215 n. 6-8 : « lʼhomme colère qui bat les animaux » ; « le brigand qui les enlève » ; « le brutal qui les tue sans mesure » ; « cʼest-à-dire quʼil leur fait bôtôkzyat ». 77 Sur la vraisemblance de l’enclitique en pareil contexte, voir Ch. J. BRUNNER, 1977, p. 100. 78 xē̆šmēn selon D. N. MACKENZIE, 1971, p. 94. 79 Ch. BARTHOLOMAE, 1904, par exemple, col. 649 (s. v. tǝviš-). 80 G. KLINGENSCHMITT, 1968, p. 199. 81 W. W. MALANDRA et P. ICHAPORIA, 2010. 141

d

. Lire ʼp̄ lyt|82 avec Klingenschmitt83. . ham-āhōgēned84 représente āhišāiiā. Le préverbe ham souligne que les actions décrites avec la série des adjectifs sont concomitantes de celle que ce verbe exprime. Évitons de lire ā-m puisque le pronom de la première personne du singulier complément du verbe qui reflète āhišāiiā a déjà été donné tout au début du zand de ce vers85. f . LAVHL (abāz) n’est ni le zand de āhišāiiā86 ni le préverbe de darrī87 dār . La traduction sanscrite sarvatra jñeyam « c’est à connaître chaque fois » montre que nous devons comprendre pad hamāg abāz comme une incise grammaticale88. g . Pour darrīdār-iz ˟kē-m baōδō.jait be ˟kuned ud tirftār-iz ˟kē-m be duzed, Niriosaṅgha suit un ordre différent : dārayitā ca stenaś ca yo me jīvavighātakaṁ kurute yaś ca māṁ corayati. h . Sur le sens de lʼavesticisme baōδō.jait(īh), quoique Niriosaṅgha (jīvavighātakam « le fait de frapper l’âme »)89 ne le confirme pas, il faut sans doute donner raison à Klingenschmitt90, d’autant que l’antonyme ʼbvd znšnyh (abōy-zanišnīh), présent dans Dk 3.388.491, impose celui de « coups donnés à dessein ». i . tǝuuišº, comme tirftār en est la traduction, doit avoir été confondu avec tāiiušº92. Il est difficile de savoir si la racine de tlptʼl (cf. tlvptk [truftag] « stolen »93 ; RS paśutŕ̥p- ; Naigh tr̥pu-) est √ tarp ou √ θrap94. ||| Il n’est guère rassurant que Bartholomae95 ait lu duždēt, que le verbe duzīdan96 ne e

82

Sur appurdan, voir J. CHEUNG, 2007, p. 7. G. KLINGENSCHMITT, 1968, p. 199, contre W. W. MALANDRA et P. ICHAPORIA, 2010, qui, eux, lisent ʼcʼlyt| (āzārēd). 84 Sur ʼhvkynytn| « profaner, souiller, altérer », voir H. S. NYBERG, 1964-74, vol. II p. 11. 85 Contre J. DARMESTETER, 1892-3, vol. I p. 214 n. 5 ; Ch. BARTHOLOMAE, 1904, col. 1528 (s. v. rǝma-) ; G. KLINGENSCHMITT, 1968, p. 199. 86 Contre Ch. BARTHOLOMAE, 1904, colonne 1801 (s. v. apāč). 87 Contre G. KLINGENSCHMITT, 1968, p. 199. 88 Contre J. DARMESTETER, 1892-3, vol. I p. 214 n. 5 : « mʼafflige de toute manière ». 89 Cf. Ch. BARTHOLOMAE, 1904, col. 919 ; J. KELLENS, 1984a, p. 119. 90 G. KLINGENSCHMITT, 1968, p. 199-201. 91 Voir J. DE MENASCE, 1973, p. 345. 92 A. MEILLET, 1902, p. 388. 93 D. N. MACKENZIE, 1971, p. 84. 94 Voir J. KELLENS, 1995, p. 25 ; É. PIRART, 1995, p. 79 n. 3 ; 2004, p. 290 ; J. CHEUNG, 2007, p. 383 ; M. MAYRHOFER, 1992-2001, vol. I p. 635. 95 Ch. BARTHOLOMAE, 1904, colonne 649 (s. v. tǝviš-). 96 D. N. MACKENZIE, 1971, p. 29 ; G. KLINGENSCHMITT, 1968, p. 199. 83

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coïncide qu’imparfaitement avec le persan duzdīdan et que Cheung97 n’en dise rien. 1c nō[it̰ ] mōi vāstā xšmat̰ ańiiō V aθā mōi sąstā . vohū vāstr[ii̯ ]ā .·. LA 98 L vʼdynytʼl99 ZK-HD100 MN LKVM AYḴ101 AYŠ-1102 LA YDOYTVNm103 MNVm nyvkyh ʼytvn|104 hcš cygvn105 MN106 LKVM ʼytvn|107 L108 lʼd109 sʼcyt110 ZK Y111 ŠPYL vʼstl .·. 112 nē-m vāyēnīdār any az ašmā kū kas-ēv nē dānem kē-m nēkīh ēdōn aziš ciyōn az ašmā ēdōn man rāy sāzēd ān ī veh vāstr .·. na mām pālayitā ˟yuṣmad anyaḥ | evam madarthaṁ sammārjayati | uttamaṁ ˟gopaśukarmāṇaṁ kam api na jāne | yasmāc˟ chubham evaṁ yathā bhavadbhyaḥ || 113 Je nʼai dʼautre guidea que vous = je ne connais personne à qui je doive autant de bonheur quʼà vous. Facilitez-moi doncc le bon fourrage ! a

. Niriosaṅgha explicite le sens de vāyēnīdār (v’dynyt’l)114 : na mām pālayitā ˟yuṣmad anyaḥ | evam madarthaṁ sammārjayati « Je n’ai d’autre conducteur que vous , de la sorte, prenne soin de moi ». L’étymologie de vāyēnīdan « to cause to fly, guide »115 reste incertaine. Je pro97

J. CHEUNG, 2007. E7 LA (LA) (pr. m.). 99 E7 vhšynytʼl ; K5.M1 ʼdynʼlt| ; Mf4 vvʼdynytʼl. 100 J2 ZK ; K5 ZK W ; KM7 ZTH (?). 101 E7 om. 102 E7.F2.KM7.Pt4.T6 AYŠ Y. 103 K5.M1 YDOYTVm. 104 J2 ʼytvn||. 105 J2 endommagé : [...]n. 106 F2 MNV. 107 F2ʼytvn. 108 E7.KM7.Mf4.Pt4.T6 om. 109 J2.K5.M1 LA. 110 J2.K5.M1 sʼcʼt ; T6 s’cyt|. 111 E7 om. 112 Ch. BARTHOLOMAE, 1904, colonnes 1416 et 1561 : vēh i vāstr. ||| W. W. MALANDRA et P. ICHAPORIA, 2010 : nē man wāsnīdār any az ašmā [kū kas-ē nē dānom kē-m nēkīh ēdōn az-iš ciyōn az ašmā] ēdōn man rāy sāzēd ān ī weh-wāstar. 113 J. DARMESTETER, 1892-3, vol. I p. 215 n. 9 : « faites que je sois bien traité ». 114 W. W. MALANDRA et P. ICHAPORIA, 2010, lisent wāsnīdār. 115 J. CHEUNG, 2007, p. 411 ; absent chez D. N. MACKENZIE, 1971. 98

143

pose que ce verbe soit analysé comme le dénominatif du vieux-perse *vāda« animal de trait » (= avestique vāza-, védique vāhá-). b . Dans la traduction sanscrite que Niriosaṅgha propose, l’ensemble uttamaṁ gopaśukarma | api na jāne yuṣmāc chubham evaṁ yathā bhavadbhyaḥ, dans l’édition de Bharucha, a été corrigé en uttamaṁ ˟gopaśukarmāṇaṁ kam api na jāne yasmāc˟ chubham evaṁ yathā bhavadbhyaḥ, avec bonheur, me semble-t-il. c . La phrase ēdōn man rāy sāzēd ān ī veh vāstr est restée sans reflet dans la traduction de Niriosaṅgha, mais, en réalité, le supplément que nous trouvons dans le commentaire qui précède coïncide en partie avec ce zand. ||| sʼhtn| (sāxtan, sāz-) « make, prepare ; tolerate »116 est l’ancien causatif de √ sac « être possible » (= védique ŚAK)117. La cohérence de la première strophe La méthode consistant à analyser le texte vers par vers ou même hémistiche par hémistiche nous empêche d’avoir facilement une vue d’ensemble et de pouvoir vérifier d’emblée la cohérence sémantique des strophes. Nous pouvons mieux en juger en nous appuyant sur les gloses ou les commentaires que sur le zand proprement dit. Pour ce qui est de la première strophe, il me semble qu’aucun accroc ne soit à signaler. Questions, plaintes et prières, tel est le cocktail avec lequel est inauguré le thème traité dans l’unité Y 29 selon la compréhension que les interprètes médiévaux développèrent. Dans la première strophe, le dieu Gə̄uš Uruuan a la parole et interpelle l’ensemble des autres dieux, pose la question de savoir au bénéfice de qui la vache a été configurée, dénonce les mauvais traitements que les impies lui font endurer et demande qu’un bon fourrage lui soit accordé. Nous pouvons donc répéter ici la compréhension que James Darmesteter, en se basant sur le texte pehlevi, a eue de la strophe avestique, mais j’ignore comment la vache y a pu devenir un bœuf, mais le genre grammatical masculin de la désignation de son âme doit avoir joué : « Géush Urvan se plaint aux Amshaspands. Les hommes maltraitent le bœuf, le battent, lʼenlèvent, le tuent à plaisir. Pour qui a-t-il été créé ? »

2a adā tašā gə̄uš pərəsat̰ · aš ̣əm kaθā tōi gauuōi ratuš .·. ʼytvn|118 ZK Y119 gvspnd120 thšytʼl121 ʼvhrmẕd pvrsyt|122 AYḴ ʼšvhšt|123 MNV LK gvspnd124 lt|125 126 AYḴt127 ẔNE DYNA128 cygvn AYḴt129 lt|130 Y131 gvspndʼn132 MNV133 .·. 116 117 118

W. W. MACKENZIE, 1971, p. 74. Voir J. CHEUNG, 2007, p. 323. E7 ʼytvn| zltvhšt ; K5 ʼytvn. 144

134

+ ēdōn ān ī gōspand taxšīdār ohrmazd pursīd kū aš-vahišt kē-t gọ̄ spand rat kū-t ēn dādestān ciyōn kū-t rat ī gōspandān kē .·. evaṁ ghaṭayitā gopaśūnāṁ hormijdo ʼpr̥cchad †dharmamb | kas te gopaśūnāṁ guruḥ | Ahura Mazdā, le configurateur de Gaō Spəṇtāa, posa cette question : Aš ̣a Vahištab, quel ratu as-tu pour Gaō Spəṇtāc ? = ta décisiond la concernant, comment est-elle ? = le ratu du bétail, quele est-il ? a

. Le nom de la vache gōspand a fini par désigner les ovins, l’évolution du climat ayant, de toute évidence, imposé que les ovins fussent substitués aux bovins. ||| L’apparente eżāfe que nous pouvons détecter dans J2.K5.M1 derrière gōspand constitue probablement un vestige de la finale génitive. ||| Niriosaṅgha, avec ghaṭayitā gopaśūnām, renverse l’ordre des mots ān ī gōspand taxšīdār et convertit le singulier de gōspand en pluriel. L’auteur pehlevi hésite entre le singulier et le pluriel de gōspand. Le Moi de la vache est une entité dans le nom de laquelle figure le nom de la vache qui partagea quelque protagonisme avec Gaiia Marǝtan dans un lointain passé mythi119

E7 om. E7.KM7 gvsp̄ nd ; J2.K5 gvspndY ; M1 gvsp̄ ndY. 121 Ou t’šyt’l. ||| J2 tʼyšytʼl ; KM7 t’šyt’l Y. 122 KM7 pvrsytY ; F2.K5.M1.Mf4.Pt4 pvrsyt ; T6 l’d pvrsyt|. 123 F2 ʼšvhšt. 124 E7 gvsp̄ ndʼn| ; F2 gvspndʼn| ; KM7 gvsp̄ nd’nY ; J2 endommagé : gvspn[...] ; M1 gvsp̄ nd ; Pt4 gvspnd’n. 125 J2 endommagé : [...]. 126 Seuls E7.T6 ; F2 AYT| ; J2.K5.KM7.M1.Mf4.Pt4 om. 127 E7.Pt4 AYḴ. 128 E7.F2.K5.M1.T6 dʼtstʼn| ; KM7.Mf4.Pt4 dʼtstʼn. 129 K5.M1 seuls ; Mf4.T6 om. ; E7.F2.J2.KM7.Pt4 AYK̠. 130 F2 lt. 131 KM7.T6 om. 132 E7 gvsp̄ ndʼn| ; M1 gvsp̄ ndʼn ; F2.KM7.T6 gvspnd’n|. 133 E7 ME. 134 P. B. SUNJANA et D. P. SANJANA, 1874-1928, vol. XVIII p. 56 n. 2 (ad Dk 9.50.3) : aêdûn zak î gaŏspend tâshîdâr pûrsîd aêgh: ashavahishta mûn lak gaŏspend ratû .. .. mûnash haît yehabûnêd vâstar. .. .. mûn gaŏspend barâ afzâyînêd ... ; vol. XIX p. 62 n. 5 (ad Dk 9.68.46) : aêdûn zak î gŏspend tâshîdâr aûharmazda pûrsîd, aêgh “ashavahishta mûn lak gŏspend ratû, (aêgh-at denâ dâdistân chîgûn, aêgh-at ratû î gŏspendân)...?” ||| Ch. BARTHOLOMAE, 1904, colonne 1502 : kē tō gōspand rat, erl.: kut ēn dādastān čigōn und kut rat i gōspandān kē. ||| W. W. MALANDRA et P. ICHAPORIA, 2010 : ēdōn ān ī gōspand tāšīdār [ohrmazd] pursīd kū ašwahišt kē tō gōspand-rad [kū-t ēn dādestān ciyōn kū-t rad ī gōspandān]. 120

145

que135. Pour sa part, le nombre grammatical pluriel se réfère bien évidemment au bétail contemporain de l’auteur du commentaire. La différence à opérer entre l’entité mythique et les bestiaux dont elle est l’allégorie ne s’observait pas de façon rigoureuse si bien que nous détectons des divergences en la matière entre le texte pehlevi et la traduction sanscrite qu’en a donnée Niriosaṅgha. b . Le copiste de J2 ou son modèle, en introduisant une ponctuation entre pǝrǝsat̰ et aš ̣ǝm, fait montre de sa connaissance de la division en hémistiches, car, théoriquement, aš ̣ǝm appartient à la phrase introductrice du discours direct, et, tout au moins, Niriosaṅgha l’avait vu : evam ... apr̥cchad dharmam | kas te gopaśūnāṁ guruḥ « Il posa cette question à Dharma : Quel maître as-tu pour le bétail / pour les bestiaux ? ». Ceci dit, même si dharmam est à l’accusatif comme aš ̣ǝm l’est dans le texte original avestique, l’emploi de ce cas reste problématique puisque l’ablatif sans doute eût été préférable en sanscrit mazdéen, puisque ce dialecte imite habituellement la syntaxe pehlevie. En outre, dans le zand pehlevi, le mot correspondant, pour avoir été intégré au discours direct ―nous le trouvons derrière kū―, doit forcément être analysé comme un vocatif : ēdōn ān ī gōspand tāšīdār ohrmazd pursīd kū aš-vahišt ˟kē-t gōspand rat. Je ne puis donc exclure quʼil faille ̣ corriger dharmam en ˟dharma. c . La présence de ast que nous détectons dans les manuscrits E7.F2.T6 suggère sa restitution derrière gōspand rat, mais le texte de Niriosaṅgha nʼy est pas favorable. d . Le commentaire, curieusement double, kū-t ēn dādestān ciyōn kū-t rat ī gōspandān kē, n’a pas de reflet dans la traduction de Niriosaṅgha. Le Dk 9.68.46 diverge (ZK Y gvsp̄ nd tʼšytʼl pvrsyt| .·. AYḴ MNV gvsp̄ ndʼn srdʼlyh), mais, malgré tout, vient confirmer l’acception impersonnelle ou abstraite de ratu- : dādestān « sentence, décision » dans le Y 29.2a, sālārīh « tutelle » dans le Dk 9.68.46. Il est encore question du ratu des bestiaux dans le Dk 9.50.3. e . Il ne faut pas biffer kē136 : c’est l’interrogatif. 2b. hiiat̰ hīm dātā xšaiiaṇtō V hadā vāstrā gaōdāiiō θβaxšō .·. MNV 137 ẔNE YHBVNt 138 pʼt|hšʼd 139 OŠTENtn| 140 V 141 dʼštn| 142 MNVš † AYT|143 YHBVNyt144 vʼstl145 V146 ZKc Y147 gvspndʼn148 dhšn|149 tvhšʼk150 135 136 137 138 139 140

Voir Chapitres III 3 et IV 3. Contre W. W. MALANDRA et P. ICHAPORIA, 2010, p. 21 n. 5. E7.F2.KM7.Mf4.Pt4.T6 V MNV. E7.J2.KM7 YHBVNt ; K5.M1 dʼt| ; F2.Mf4.Pt4 YHBVNyt ; T6 YHBVNyt|. J2 p’thšʼyh ; K5.M1 ŠLYTAyh ; F2 pʼt|hšʼd ; E7.Mf4.Pt4.T6 pʼt|hšʼ. E7.F2.J2.KM7.Mf4.Pt4.T6 OŠTENtn. 146

AYḴš151 vʼstl YHBVNyt|152 †AP̄š psvšhvlv|-1153 MN ZK pytʼkynyt|154 MNV gvspnd155 BRA ʼp̄ zʼdynyt|156 .·. 157 kē ēn dād pādixšāy xvardan ud dāštan kē-š ast dahed vāstr ud ān-iz ī gōspandān dahišn tuxšāg kū-š vāstr dahed †u-š pasuš.hauruu-ēv158 az ān paydāgēned ˟kū gōspand be abzāyēned .·. yas tebhyo dātā svāmī | saha gocāreṇa gosr̥ṣṭivyavasāyinam | kila gocāraṁ dadāti tebhyaḥ paśupātāraṁ ca [dadāti] yaḥ paśūn pravardhayati | A le droit de la manger ou de lʼavoir (en propriété)a celui qui donne vraiment le (vāstra)b au bétail ou se montre soucieux de lui donner ce dont il a besoin = (celui qui) lui donne le vāstra et le chien de gardec comme il se déduit du faitd qu’il assure la prospérité à Gaō Spəṇtā. a

. Les deux infinitifs coordonnés xvardan ud dāštan compléments de pādixšāy159 sont restés sans reflet dans la traduction de Niriosaṅgha. ||| Je ne sais si nous devons corriger pādixšāy en ˟pādixšāyīh sur base de la phrase 141

J2 om. E7.F2.KM7.Mf4.Pt4.T6 dʼštn. 143 F2 AYT. 144 T6 YHBVNyt|. 145 KM7 v’sltlvaatl ; T6 vastl. 146 E7.K5.M1 om. 147 E7.F2.K5.KM7.M1 om. 148 KM7 gvsp̄ nd’n ; E7.K5.M1 gvsp̄ ndʼn| ; F2.T6 gvspnd’n|. 149 E7 dʼt|. 150 F2.K5.M1 vtvhšʼk. 151 Mf4.T6 AYḴ. 152 E7.F2.K5.KM7.Mf4 YHBVNyt. 153 K5.M1.Mf4.Pt4 psvšhvlvv|-1 ; F2 psvšhvlvvY ; J2 Vpsvšhvlv|-1 ; E7 psvšhvlv| ; T6 psvšhvlvv|. 154 F2 pytʼk yvdt ; E7.K5.M1 pytʼkynyt ; Mf4.Pt4 pytʼkynyt. 155 E7.KM7.M1 gvsp̄ nd. 156 F2 ʼp̄ zʼyt ; K5.M1.Mf4.T6 ʼp̄ zʼdynyt. 157 P. B. SUNJANA et D. P. SANJANA, 1874-1928, vol. XVIII p. 56 n. 2 (ad Dk 9.50.3) : aêdûn zak î gaŏspend tâshîdâr pûrsîd aêgh: ashavahishta mûn lak gaŏspend ratû .. .. mûnash haît yehabûnêd vâstar. .. .. mûn gaŏspend barâ afzâyînêd .... ||| W. W. MALANDRA et P. ICHAPORIA, 2010 : kē ēn dād pādixšāyīh [xwardan ud dāštan] kē-š ast dahēd wāstar ud ān-iz ī gōspandān dahišn tuxšāg [kū-š wāstar dahēd u-š pašušhurw-ē az ān paydāgēnēd kē gōspand be abzāyēnēd]. ||| Ch. BARTHOLOMAE, 1904, colonne 1756 (s. v. 2ha|δa) : kēš a dt dahēt vāstr ; colonne 481 (s. v. gao-dāyah-) : gōspandān dahišn ; col. 794 (s. v. θβaxšah-) : tuxšāk. 158 Cf. ZA KLBA Y šp’n| (sag ī šubān). 159 Ou pāitixšaii (avesticisme). 142

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parallèle que nous trouvons dans le Dk 9.28.9 ud xvāstan ī gə̄uš.urun gōspandān rāy ayār ud srāyišn ud dādan ī ohrmazd ō ayārīh ī gōspand mard ī aš ̣auu ud srāyišn ī gōspandān rāy šīrēnīh andar āb ud uruuar kū xvardan ud dāštan ī gōspand ōy pādixšāyīh kē-š ast dahed vāstr ud ān-iz ī gōspandān dahišn tuxšāg kū-š vāstar dahed u-š pasuš.hauruu-ēv az ān paydāgēned †kē gōspand be abzāyēned ud ōy-iz kē ān ī druuand ī aēšmin ī anair vānišn dahed kū stō ˟kuned « (le chapitre traite de la) demande de Gə̄uš Uruuan qu’il y ait de l’aide et de la nourriture pour les bestiaux ; (traite de la) mission qu’Ahura Mazdā donna à Nar Aš ̣auuan d’aider Gaō Spǝṇtā ; (traite de la) saveur quʼ(Ahura Mazdā), pour l’alimentation des bestiaux, mit à l’intérieur des eaux et des végétaux ; (traite du fait) qu’il est légitime de manger ou dʼavoir (en propriété) Gaō Spǝṇtā pour celui qui lui assure le fourrage ou encore pour celui qui s’efforce avec habileté de garantir tout ce qui est à donner aux bestiaux en ce sens qu’il lui donne le fourrage ; (traite du) caractère utile du chien de garde comme il se déduit du fait qu’il permet le développement de Gaō Spǝṇtā et (traite du caractère utile) de celui qui permet de vaincre le druuaṇt aēšmin anairiia en ce sens qu’il l’étourdit », car, en contexte semblable, je trouve pādixšāy dans le Nērangestān : N 24.10 gōspand pad hamāg yazišn pādixšāy kuštan « Pour chaque yasna, il est légitime de tuer une tête de bétail » ; N 43.1 kū ciyōn baved gōšt pādixšāy xvardan « Comment se fait-il que manger de la viande soit légitime ? » b . Spiegel signale que les manuscrits donnent gocāra- au lieu de l’usuel gocara-. ||| L’auteur du zand, pour coordonner kē-š ast dahed vāstr avec āniz ī gōspandān dahišn tuxšāg, détermine deux volets dans le second hémistiche (2b2), d’une part, hadā vāstrā et, d’autre part, gaōdāiiō θβaxšō. Niriosaṅgha peut avoir considéré que la séquence gaōdāiiō θβaxšō formait un composé : gosr̥ṣṭivyavasāyinam « celui qui contrôle la libération des vaches ». ||| Bartholomae160 donne sa langue au chat concernant AYT| (ast ?) situé devant dahed. Le mot ast, si c’est bien de cette forme verbale qu’il s’agit, employé comme adverbe, doit refléter la première syllabe de hadā, mais je n’ai pu déterminer avec quel sens il a été utilisé ni dans ce passage-ci ni dans le Y 46.17c1 où hadā a été rendu par pad ast-dahišnīh (sahadātyā). Je me résous à expliquer AYT| en le lisant plutôt +hyt| et en y voyant un avesticisme : +haiθ « vraiment » (< haiθiia-). ||| Chose curieuse, en face de la complexité du zand kē-š ast dahed vāstr, Niriosaṅgha s’est contenté de recourir au syntagme saha gocāreṇa qui, pour sûr, est la traduction que nous attendions. Le commentaire ouvert avec kū en pehlevi et avec kila en sanscrit passe hadā sous silence : kū-š vāstr dahed « lui donne le fourrage » ; kila gocāraṁ dadāti tebhyaḥ « leur donne le fourrage ». c . Nous ne pouvons savoir en toute sécurité ce que signifie ān-iz ī gōspandān dahišn : s’agit-il de la mise en place du bétail ou du fait de lui 160

Ch. BARTHOLOMAE, 1904, colonne 1756. 148

donner ce qui lui est nécessaire ? La situation s’aggrave dans le commentaire, puisque nous ne pouvons déterminer exactement comment l’interprète pehlevi a coordonné le nom du chien de garde avec l’avesticisme qui désigne le fourrage, vāstr, car le chien est entouré d’un apparent excès de pronoms personnels : je ne vois pas comment expliquer la répétition du pronom enclitique -š (MNVš ... AP̄š). d . Niriosaṅgha ignore tout ceci, saute cette partie, mais, dans son texte, le verbe dadāti apparaît indûment répété. ||| Le syntagme az ān paydāgēned kū se rencontre notamment aussi dans le Dk 9.28.9. 2c kə̄m hōi uštā ahurəm V yə̄ +drəguuō.dəbīš aēšəməm vādāiiōit̰ .·. MNV OLE161 PVN nyvkyh162 hvtʼd163 AMTš164 plvlšn| LA165 OḆYDVNḆYN ʼc 166 ŠLYTA 167 OŠTENtn 168 MNV OLE 169 170 Y 171 dlvnd 172 Y 173 ʼyšmn| 174 ʼnʼyl v’nšn| 175 YHBVNyt 176 ẔNE pshv| 177 AYḴš178 stvb| †OḆYDVN-ḆYN179 .·. 180 kē ōy pad nēkīh xvadāy ka-š parvarišn nē ˟kuned ā-z pādixšāy xvardan kē ōy druuand ī aēšmin anair vānišn dahed181 ēn passaxv kū-š stō ˟kuned .·. 161 162 163

J2.K5.M1 ’v|. T6 nyvkyh Y. E7 hvtʼ º ; J2 hvtʼdyh Y ; KM7.Mf4 hvtʼd Y ; Pt4 hvtʼd Y ; T6 hvt’d

AYT|. 164

T6 MNVš. F2.T6 l’d. 166 E7 hc Y ; T6 ’š. 167 F2 pʼtšh ; J2 pʼthšhW ; KM7.Mf4.Pt4 pʼt|hšhy ; E7.T6 p’t|hšh. 168 F2 OŠTENt. 169 J2.K5.M1 ’v|. 170 Sur base du Dk 9.28.9. 171 Mf4 seul. 172 J2 endommagé : d[...] ; Mf4 dlvnd Y. 173 J2 endommagé ; Mf4 Y ; E7.F2.K5.M1 om. 174 E7.Mf4.Pt4 ʼšmn| ; F2 yšm ; T6 ’šm(n|) ; KM7 l’d’šmn|. 175 E7 vʼnlšn| ; K5 znšn|. 176 E7 YHBVNt. 177 F2 pshv. 178 E7 AYḴ. 179 F2 OḆYDVN|-ḆYN. 180 Ch. BARTHOLOMAE, 1904, col. 1382 (s. v. vas-) : pa nēwakīh. ||| W. W. MALANDRA et P. ICHAPORIA, 2010 : kē ōy pad nēkīh xwadāy [ka-š parwarišn nē 165

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kas teṣāṁ śubhasya svāmī | yo durgatimatām āmarṣasya tāḷanāṁ datte | kila yo durgatimatām anyāyaṁ nihanti | sa eva rājñāṁ rājā | teṣāṁ śubhaṁ khādituṁ svāmī || Qui est le seigneur du bonheur du (bétail) ? ―Sia (le bétail) ne lui fournit aucune nourriture, il a même le droit de le manger―. Celui qui lui permet de vaincre le druuaṇt aēšmin anairiiab ―telle est la réponse (donnée à la question formulée dans le premier hémistiche)―c = (Celui qui) le plonge dans la stupeurd. La traduction sanscrite : Quel est le seigneur de leur bonheur ? Celui qui inflige le châtiment à lʼimpatience des malandrins = Celui qui punit les malandrins pour lʼirrégularité commise, cʼest le roi des rois. Leur seigneur, pour bien manger. a

. La phrase ka-š parvarišn nē ˟kuned ā-z pādixšāy xvardan, un diptyque organisé avec la corrélation ka ... ā, n’a aucun reflet dans la traduction sanscrite ; les mots ēn passaxv kū-š stō ˟kuned, non plus. b . L’étiquette de druuaṇt aēšmin anairiia (drugvant išmin anarya) « le non Iranien qu’accompagnent Druj et Išma » doit être empruntée à quelque source avestique inconnue. c . L’indication marginale pehlevie que le dieu Aš ̣a Vahišta (R̥ta Vahišta) a la parole à partir de 2c2 (frāz-gōvišn ī aš-vahišt) complète le contenu de ̣ l’incise ēn passaxv « ―telle est la réponse (donnée à la question formulée dans le premier hémistiche)― ». d . La traduction sanscrite contient un commentaire sans correspondant dans le texte pehlevi conservé : « = Celui qui punit les malandrins pour lʼirrégularité commise, cʼest le roi des rois. Leur seigneur, pour bien manger ». La cohérence des strophes 1-2 La question de savoir si nous sommes en présence d’un texte unitaire et continu est toujours à poser. Selon les indications marginales, le récitant ne serait autre que Zaraθuštra tandis que Gə̄uš Tašan serait un autre nom d’Ahura Mazdā. De telles identifications sont en bonne partie à l’origine de la mauvaise compréhension que les interprètes médiévaux développèrent de la hāiti Y 29. Dans la première strophe, Gə̄uš Uruuan avait la parole ; dans la seconde, Ahura Mazdā se tourne vers Aš ̣a Vahišta, et ce dernier prend la parole dans le dernier hémistiche. Le traducteur médiéval conserve la bizarrerie que le grand dieu Ahura Mazdā, au lieu de donner lui-même une kunēd ā-z pādixšāy xwardan] kē ō druwand ī xēšmen [anēr] wānišn dahēd [ēn passox kū-š stō kunēd]. 181 Voir Ch. BARTHOLOMAE, 1904, colonne 1410 (s. v. vādāya-) : kē .. žanišn dahēt. 150

réponse aux questions que Gə̄uš Uruuan a posées, se tourne tout de suite vers Aš ̣a Vahišta comme pour lui refiler la patate et le charger de répondre à sa place, mais il répète les questions sous une forme technique qui fait place à la notion de ratu. Il s’agit d’une notion fondamentale de la philosophie mazdéenne primitive, car il est considéré que le grand dieu fut non un créateur comme dans d’autres doctrines, mais bien plutôt un ordonnateur du monde 182 , qu’il plaça chaque chose à la place qui lui convenait et assigna à chaque être son rôle de façon que, somme de toutes les choses et de tous les êtres, le monde formât un cosmos et tournât le dos à la possibilité du chaos. L’agencement de toutes les pièces se nomme Aš ̣a (R̥ta) tandis que les pièces et le directeur qui les situe comme il convient reçoivent les noms respectifs de ratu (ratu) et de ratu bǝrǝza(ṇt) (ratu br̥za(nt)). Selon la reformulation que le grand dieu en propose au dieu Aš ̣a Vahišta, la question fondamentale que Gə̄uš Uruuan vient de poser à l’ensemble des dieux est celle de savoir quel est le ratu de la vache ou du bétail. Il s’agit de comprendre le rôle que la vache et le bétail jouent dans le fonctionnement cosmique et dans la célébration sacrificielle qui en est le prototype, comment la vache et le bétail trouvent leur place dans le monde, s’agencent avec ces autres pièces de l’ensemble cosmique ou sacrificiel que sont l’homme pieux et les dieux euxmêmes. L’Avesta récent donne l’étiquette ou le titre de « ratu d’aš ̣a » ou « pièce de l’ensemble cosmique » à tous les éléments et ingrédients de la fête sacrificielle. Cependant, l’interprète médiéval, en donnant l’éleveur de bétail comme réponse à la question d’identifier le ratu confond l’homme pieux et le rôle de la vache, car le mot ratu désigne n’importe quelle pièce adéquate de l’ensemble cosmique si bien que le protecteur de la vache est un ratu et que la vache elle-même en est un tout aussi bien. Dans son rôle de protecteur ou de propriétaire de la vache, l’éleveur de bétail est un ratu qui peut se confondre avec celui de la vache du fait de la proximité que les notions de « propiétaire de la vache » et de « destin de la vache » présentent l’une avec l’autre. Le destinataire de la configuration de la vache, la personne à l’intention de laquelle les dieux configurèrent la vache, détermine le sort que la vache trouve dans le monde matériel : celui de donner à manger avec son lait et sa viande. C’est ainsi que l’expression de « ratu de la vache » peut passer de la désignation de sa place ou de son rôle à celle de son propiétaire, protecteur et consommateur. Nous pouvons tout de suite comprendre que les interprétations médiévales, malgré tout, ont pu conserver le sens général du texte original. Les personnages qui jouent les rôles les plus importants de la grande découverte néolithique sont installés ou présentés dès les deux premières strophes, sont questionnés, et les relations qu’ils entretiennent les uns avec les autres sont mises en scène. Il n’est pas étonnant que la vache, pour se retrouver d’entrée de jeu à la merci de l’homme, se plaigne devant les 182

J. KELLENS, 1989. 151

dieux du sort qui lui est réservé, d’autant que l’homme, quelle qu’en soit la raison, parfois est un impie dʼune cruauté sans pareille. Le plus haut responsable de son mauvais sort ne daigne pas répondre lui-même, mais se décharge de cette tâche sur le dieu qui, précisément, représente tout à la fois le principe de l’ensemble cosmique et celui de l’ensemble rituel. Selon les interprètes médiévaux, la réponse qu’Ašạ Vahišta offre aux questions d’Ahura Mazdā commence avec le dernier hémistiche de la deuxième strophe. Ici le dieu révélerait que le châtieur des impies est maître du bonheur du bétail. Niriosaṅgha ou quelque paṇḍita ultérieur ajoute que cʼest le roi des rois qui a la charge de châtier les impies et de veiller à la bonne alimentation du bétail. Nous pouvons comprendre que l’éleveur de bétail doit veiller au bien-être animal sous peine de châtiments. Au vu de cette compréhension digne de Brigitte Bardot, nous pouvons dire que les auteurs médiévaux ne dominaient déjà plus la philosophie mazdéenne originale. Nous pouvons répéter alors ici la compréhension que James Darmesteter, sur base du texte pehlevi, avait de la strophe archaïque : « Ahura Mazda se tourne vers Asha, personnification du Bien, et lui demande quel Maître spirituel (ratu) il a établi pour enseigner aux hommes leur devoir envers les animaux et quel Maître temporel (Ahura) pour protéger ces animaux contre la violence ».

3a ahmāi aṣ̌ā nōit̰ sarəjā V aduuaēšō gauuōi paitī.mrauuat̰ .·. OLE 183 MNV 184 ZK 185 Y 186 gvspndʼn| 187 tn| srdʼlyh 188 LA 189 PVN 190 ʼbyšytʼlyh191 MEš192 PVN193 byšytʼlyh194 ʼšvhšt|195 pshv|196 gvpt197 AYḴš198 pʼtplʼs199 OḆYDVN-ą̑200 .·. 183 184 185 186 187 188 189 190 191 192 193 194 195 196 197 198

T6 ʼv|. F2 MN. E7 ʼv|. E7.F2.K5.M1 om. E7.KM7 gvsp̄ ndʼn| ; K5.M1.Mf4.Pt4 gvsp̄ ndʼn. KM7 srt’lyh. Pt4 LA OḆYDVNd. Pt4 P(W)VN. K5 ʼbyšytʼlyh ºoº ; M1 ʼbyštʼlyh .·.. E7 LA YHSNNyt MEš ; KM7 (MEš)mmyh ; Pt4 LA YHSNNyt MEš. F2 om. T6 byšytʼlyh. F2 ʼšvhšt ; J2 ʼšvhʼt ; KM7 ’švhst|. E7 pʼshv|. E7.F2.Mf4.Pt4.T6 gvpt| ; KM7 gvptn|. KM7.Pt4 AYḴ. 152

201

ōy kē ān ī gōspandān tan sālārīh nē pad a-bēšīdārīh cē-š pad bēšīdārīh aš-vahišt passaxv guft kū-š pādifrāh +kunān .·. ̣ tasmai dharmo na svāmine ʼduḥkhakartr̥tayā gopaśūnām pratyuttaram abravīt | kila yo gopaśūnāṁ duḥkhakartr̥tayā svāmī | tasya nigrahaṁ kurute | Celui quia n’a aucune autorité sur le corps des bestiaux sans leur faire du mal et qui, de ce faitb, leur fait du mal, Aš ̣a Vahišta répondit (à Ahura Mazdā) quʼil punirait ce (druuaṇt)c. Traduction sanscrite : À celui qui nʼa aucune autorité sur le corps des bestiaux sans leur faire du mal, Dharma répondit = (Celui) qui a autorité sur eux en leur faisant du mal, il le punit. a

. Sans doute leurrés par la mauvaise compréhension que Niriosaṅgha suggère en recourant au datif tasmai ... svāmine, Malandra et Ichaporia202 proposent ō kē au lieu de ōy kē alors que le druuaṇt que décrit la subordonnée introduite par ce pronom kē est non le personnage auquel répond Ašạ Vahišta, mais bien celui qu’il se propose de châtier. Il reste que l’apparente erreur sanscrite étonne fortement : comment Niriosaṅgha a-t-il pu confondre Ahura Mazdā avec cet impie ? Cependant, remarquons que Niriosaṅgha suit lʼordre des mots de lʼoriginal avestique tandis que lʼauteur pehlevi a rejeté la mention dʼAš ̣a Vahišta (aš ̣ā = aš-vahišt) parmi les mots du second hémị stiche et anticipé celle de la vache (gauuōi = gōspandān) parmi les mots du premier. b . Niriosaṅgha a recouru à l’usuel kila pour introduire ce commentaire face à l’emploi exceptionnel de cē (ME) que nous trouvons dans le texte pehlevi. c . Malandra et Ichaporia203 indiquent que le verbe, dans la séquence de Dk 9.68.46 nē pad abēšīdārīh aš ̣-vahišt passaxv kū-š pādifrāh ˟kuned, est également écrit OBYDVN-ą̑, mais, pour ma part, je suggère de lire plutôt cette forme comme une première personne du singulier du subjonctif présent + kunān, car, après kū, nous attendons un discours direct malgré la troisième personne kurute à laquelle Niriosaṅgha recourt dans sa traduction. En fait, nous attendions que la locution verbale pratyuttaram abravīt régît une proF2 pʼtplʼh. 200 E7.K5 OḆYDVN-ą ; F2.KM7.M1 OḆYDVN-ḆYN ; Pt4 OḆYDVN(W)-ą̑ gvkk gnn ; T6 OḆYDVN-ą vgnnk gnnk. 201 J. DARMESTETER, 1892-3, vol. I p. 215 n. 14 : pasukh gûft aîghash pâtfrâs obdûnênd ; p. 215 n. 15 : sardâr. ||| Ch. BARTHOLOMAE, 1904, colonne 1566 (s. v. sarəgan-) : ān i gōspandān tan sardārīh nē pa abēšītārīh. ||| W. W. MALANDRA et P. ICHAPORIA, 2010 : ō kē ān ī gōspand-tan-sālārīh nē pad abēšīdārīh [cē-š pad bēšīdārīh] ašwahist passox guft [ka-š pādifrāh kunēd]. 202 W. W. MALANDRA et P. ICHAPORIA, 2010, p. 21 n. 10. 203 W. W. MALANDRA et P. ICHAPORIA, 2010, p. 21 n. 11. 199

153

position subordonnée complétive en yat. Les subordonnées de ce type, en sanscrit mazdéen, sont habituellement rédigées en suivant le modèle pehlevi en kū, c’est-à-dire comme si c’étaient des discours directs. Ici, dans le texte sanscrit que nous lisons, rien de semblable ne se produit, puisque nous y trouvons kurute au lieu d’une forme de la première personne du singulier du verbe KR̥. Je ne mʼexplique pas cette grave divergence. 3b auuaēšą̃m nō[it̰ ] vīdu̯iiē V yā š́ auuaitē ādrə̄ṇg ərəšuuā̊ŋhō .·. OLEšʼn204 LA ʼkʼs205 HVEd206 ZK Y207 †ʼštyh208 V209 lvšn| V210 lʼst|211 OLEšʼn 212 dlvnd pʼtplʼs 213 Y 214 PVN lvbʼn| 215 ME V 216 cnd OḆYDVN-ą̑217 LA YDOYTVNd218 .·. 219 avēšān nē āgāh hend ān ī ˟a-šādīh ud rōšn ud rāst avēšān druuaṇd pādifrāh ī pad ruvān cē ud cand kunend nē dānend .·. teṣāṁ na vettāsi | ye ’nānan[da]dāḥ parisphuṭāś ca satyāś ca | kila nigraho ya ātmani | kaḥ kiyān iti na jānāsi || 220 Eux ne peuvent savoira quelles (punitions) sont les sans-joieb, (lesquelles sont les) claires et (lesquelles sont les) droites ―(le pronom) « eux » 204 205 206 207 208 209 210 211

E7.F2.KM7.T6 OLEšʼn|. F2 ʼkʼs suivi dʼun point. E7.F2.KM7.Mf4.Pt4.T6 HVE|d. E7.KM7.Mf4.Pt4 om. F2 ʼdʼtyh. J2.Pt4.Mf4 Y ; K5.M1 V ; E7.F2.T6 om. F2.K5.M1 om. ; KM7.Mf4.Pt4.T6 V. F2 lʼst º ; Mf4 lʼst|. ||| Ch. BARTHOLOMAE, 1904, colonne 356 (s. v. ərəšva-) :

rāst. 212

E7.F2.K5.KM7.M1.T6 OLEšʼn|. F2 pʼtplʼh ; M1 pʼtlʼs ; KM7.Pt4 pʼt|plʼs. 214 E7.F2.J2.T6 om. ; Mf4 Y. 215 KM7 lvbW’n| ; K5.M1.Mf4.Pt4 lvbʼn. 216 J2.K5.M1.T6 om. 217 E7 OḆYDVNd ; F2 OḆYDVN-ḆYN ; Mf4 OḆYDVN-ą̑ ; KM7.T6 OḆYDVN-ą. 218 KM7 YDOYTVNd OLE l’d ; F2 YDOYTVNd ; K5 YDOYTVN-ą̑ ; Mf4 YDOYTVyt transformé en YDOYTVd̑(t). 219 J. DARMESTETER, 1892-3, vol. I p. 215 n. 16 : ûolâshân darvand pâtfrâs î pun ravân ci vacand obdûnand lâ khavîtûnand. ||| Ch. BARTHOLOMAE, 1904, col. 356 (s. v. ərəšva-) : rāst ; col. 322 (s. v. ādra-) : ōšān nē ākās hēnd ān i āštīh (Npü. erl.: dūstī) u rōšn i rāst. ||| W. W. MALANDRA et P. ICHAPORIA, 2010 : awēšān nē āgāh hēnd ān ī āštīh ud rōšn rāst [awēšān druwand pādifrāh ī pad ruwān cē ud cand kunišn nē dānēnd]. 213

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(représente) les druuaṇt―c = la punition que leur âme recevra, laquelle ce sera et combien de fois ils la (leur) infligeront, (les druuaṇt) l’ignorentd. Traduction sanscrite : Tu ne peux savoir, concernant ceux-là, quelles (punitions) sont les sans-joie, (lesquelles sont les) claires et (lesquelles sont les) droites = la punition que leur âme recevra, quelle elle sera et combien de fois (ils la leur infligeront), tu l’ignores. a

. La traduction sanscrite nous suggère221 de corriger la troisième personne du pluriel du verbe en seconde du singulier : avēšān nē āgāh ˟hē, mais, en réalité, il n’y en a aucune nécessité impérieuse. b . Selon Niriosaṅgha (ye ’nānan[da]dāḥ parisphuṭāś ca satyāś ca |), nous devons corriger ’štyh (āštīh) en ˟’š’tyh (˟a-šādīh). Sans doute faut-il admettre une interrogation indirecte ouverte avec ZK Y à l’intérieur de laquelle les trois adjectifs, pour occuper la case de prédicats, sont à coordonner au moyen de ud, si ce n’est qu’il eût été plus normal, me semble-t-il, de trouver ici trois interrogations : **ZK Y ’š’tyh V ZK Y lvšn| V ZK Y lʼst|. ||| L’obscurité de la relation existant nécessairement entre avēšān « de ceux-là » et ān ī ˟ašādīh « le (châtiment) qui est sans joie » ne peut être dissipée qu’à l’analyse du texte de Niriosaṅgha. En considérant que, chez Niriosaṅgha, le pronom ye est interrogatif indirect dans la rection de vettāsi « tu es connaisseur de quels sont... », nous avons la faculté d’isoler teṣām, de considérer que ce démonstratif n’entre pas en corrélation avec le relatif ye et de l’analyser de façon indépendante. Soulignons ici l’incise grammaticale avec laquelle l’interprète pehlevi indique que le pronom avēšān représente les impies. Il convient de souligner aussi le commentaire avec lequel Niriosaṅgha introduit le mot nigrahaḥ « châtiment ». La situation, dès lors, est assez claire : teṣām, ce sont les impies et ye ʼnānandāḥ parisphuṭāś ca satyāś ca, ce sont les châtiments qui leur sont infligés. Cependant, je ne sais au juste si, avec les trois adjectifs, l’auteur se refère aux mêmes châtiments ou si trois types de châtiments différents sont envisagés. L’emploi de la coordination ca est ambigu : « ceux qui sont à la fois sans joie, clairs et justes » ou « ceux qui sont sans joie, ceux qui sont clairs et ceux qui sont justes ». Comme souvent, nous ne pouvons voir en toute sécurité si les manuscrits contiennent le signe V ou Y ou les deux. En outre, j’ignore ce que signifie « un châtiment clair ». c . L’incise grammaticale avēšān druuaṇd n’a pas de reflet dans la traduction sanscrite. d . Comme, sur base de la traduction de Niriosaṅgha (kaḥ kiyān iti na jānāsi), la personne attendue est la deuxième, je propose de corriger dānend 220

J. DARMESTETER, 1892-3, vol. I p. 215 n. 16 : « ces méchants ne savent pas quel châtiment de lʼâme et combien grand on leur inflige ». 221 Contre Ch. BARTHOLOMAE, 1904, ou contre W. W. MALANDRA et P. ICHAPORIA, 2010. 155

en ˟dānē, mais il reste inquiétant que ce ne soit pas la seule fois que nous voyons la troisième personne du pluriel du pehlevi devenir une deuxième du singulier dans la traduction sanscrite. 3c hātaąm huuō aōjištō V yahmāi zauuə̄ṇg jimā ˟kərəduš ā˟ .·. MN 222 AYTʼn| 223 ZK 224 ʼvcʼvmndtl 225 AYḴ 226 ʼvc| 227 Y 228 ZK 229 Y 230 OLE PVN kʼltl231 MNV ʼv|232 ZK233 PVN KLYTVNšn|234 YHMTVNyt|235 ʼv| krtʼlyh 236 AYḴ 237 AMTš 238 KLYTVNd 239 AYḴ kʼl V 240 krpk 241 OḆYDVN 242 OḆYDVN-ḆYN243 .·. 244 az astān ān ōz-ōmand-tar kū ōz ī ān ī ōy pad-kār-tar kē ō ān pad xvānišn245 rased ō kardārīh kū ka-š xvānend kū kār ud kirbag kun ˟kuned .·. F2.T6 MNV MN ; Pt4 MN (W). F2 ʼytvn| ; K5.M1 AYT|ʼn| ; KM7.Mf4.Pt4 AYT|ʼn. 224 KM7 ’n|. 225 E7 ʼvc ʼvmn|dtl ; KM7 ʼvc ʼvmn|dt’l ; F2 ʼvcmndtl ; T6 ʼvcʼvmndt(|)l L. 226 F2 V MNV AYḴ. 227 K5.M1 ʼvc ; E7.F2.KM7.Mf4.Pt4.T6 om. 228 E7.F2.KM7.Mf4.Pt4.T6 om. 229 F2.KM7.Mf4.Pt4.T6 ʼn|. 230 E7.F2.KM7.Mf4.Pt4.T6 om. 231 M1 kʼltly (ou kʼltl-1 ?). 232 E7 ZK ; J2 OLE. 233 E7 ʼv|; F2 om. 234 KM7 K|RYTVNšn| ; Mf4 KRYTVNšn| ; E7.F2.Pt4.T6 KRYTVNšn|. 235 E7.F2.K5.KM7.M1.Pt4 YHMTVNyt ; Mf4 YHMTVN(WW)yt|. 236 F2 krtʼlyk. 237 J2 endommagé : [...]. 238 T6 (MN)AMTš. 239 E7 KRYTVNt ; Mf4 KRYTVd ; F2.KM7.Pt4.T6 KRYTVNd. 240 E7.F2.KM7.Mf4.T6 om. 241 J2 VV krpk| ; KM7.Pt4.T6 krpk|. 242 F2.KM7 om. ; Pt4.T6 OḆYDVN|. 243 F2 OḆYDVN-ḆYN. 244 J. DARMESTETER, 1892-3, vol. I p. 215 n. 17 : amatash karîtûnand âigh: kâr u karfak obdûn, obdûnad. ||| Ch. BARTHOLOMAE, 1904, colonne 467 (s. v. kǝrǝduš-) : hač astān ān ōžōmandtar kē ō ān pa xvānišn rasēt ō kartārīh, erl.: kaš xvānēnd ku ‘kār u karpak kun’ kunēt. ||| W. W. MALANDRA et P. ICHAPORIA, 2010 : az astān ān ōzōmanddar [kū ōz ī ān ī ōy kārdar] kē ō ān pad xwānišn rasēd ō kardārīh [kū ka-š xwānēnd kū kār ud kirbag kunēnd]. 245 Ch. BARTHOLOMAE, 1904, colonne 1668 sq. (s. v. 1zavan-) : pa xvānišn. 222 223

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satāṁ sa balavattamaḥ | ya ākāraṇena prāpnoti kartr̥tve | kiṁ cid ākārayanti yat kāryam puṇyaṁ kuru karoti ca || 246 Parmi les êtres, il est le plus puissanta = il a le pouvoir de celui qui est très actifb, celui qui, du fait d’être appelé, accède au statut d’agent en ce sens que, s’ils lui disent de fairec ce qui est à faire et ce quʼil est bon de faire, il s’exécute. a

. Le syntagme AYTʼn| ... ʼvcʼvmndtl se rencontre aussi dans Dk 9.28.10 et 9.50.7. b . Je n’arrive pas à comprendre l’opportunité du commentaire du premier hémistiche, car sa traduction sanscrite n’existe pas ou est perdue. Malandra et Ichaporia247 veulent biffer PVN que nous trouvons devant kʼltl, pensant que « makes no sense ». En réalité, il convient de reconnaître ici un adjectif composé pad-kār-tar « très possesseur d’action ». c . Le commentaire pehlevi du second hémistiche est organisé sous forme de diptyque. Dans ce diptyque, la protase, ouverte avec ka, contient, en dépendance de son verbe xvānend, un discours direct ouvert avec kū tandis que l’apodose est limitée au verbe ˟kuned. En revanche, Niriosaṅgha, en lieu et place de ce diptyque du commentaire pehlevi, recourt à la pure et simple coordination des deux propositions. En effet, dans sa traduction, aucune conjonction de subordination n’introduit la proposition dont le verbe ākārayanti reflète xvānend, et nous y trouvons la particule ca placée derrière le verbe de la seconde proposition, karoti. Le yat complétif dans la rection de ākārayanti, comme nous l’attendions en sanscrit mazdéen, ouvre un discours direct. Malandra et Ichaporia248, en cherchant à biffer OḆYDVN devant OḆYDVN-ḆYN pour y voir une « scribal dittography », méprisent le texte de Niriosaṅgha où cette forme est bel et bien traduite. La cohérence des strophes 1-3 Pour que les questions et les plaintes que Gə̄uš Uruuan avait formulées trouvent une réponse, Ahura Mazdā s’était tourné vers Aš ̣a Vahišta. Cependant, ce responsable, si c’est bien lui qui a la parole, au lieu de tranquilliser l’avocat de la vache ou de garantir sa sauvegarde, lui parle des châtiments que doivent recevoir ceux qui ne la traitent pas comme il convient. En outre, si nous laissons de côté la note donnée à la fin de la traduction sanscrite de la deuxième strophe, les châtiments évoqués ne sont infligés au coupable que dans l’au-delà alors que Gə̄uš Uruuan s’était plaint des mauvais traitements endurés ici-bas. Dans le dernier vers, aux yeux de 246

J. DARMESTETER, 1892-3, vol. I p. 215 n. 17 : « quand on lʼappelle pour lui dire : fais bonnes œuvres, il les fait ». 247 W. W. MALANDRA et P. ICHAPORIA, 2010, p. 22 n. 1. 248 W. W. MALANDRA et P. ICHAPORIA, 2010, p. 22 n. 3. 157

l’interprète médiéval, un nouveau personnage fait son apparition dont l’identité n’est pas révélée, mais qu’Aš ̣a Vahišta, pour l’instant, présente comme étant la solution. Nous pouvons répéter ici aussi la compréhension que James Darmesteter, sur base du texte pehlevi, s’est forgée de la strophe avestique : « Asha fait ressortir lʼaveuglement du mauvais maître qui ne sait pas le châtiment qui lʼattend, tandis que celui qui fait le bien auquel la loi le convie, sera récompensé et tout-puissant », mais la divergence que le texte sanscrit de la traduction de 3b montre par rapport au pehlevi jette le doute sur cet aveuglement. Le dernier vers de la troisième strophe, en contraste avec lʼaveuglement des impies, souligne, selon le commentaire pehlevi, lʼefficacité des pieux adorateurs.

4a mazdā̊ saxvārə̄ mairištō V yā zī vāuuərəzōi pairī.ciθīt̰ .·. ʼvhrmẕd †˟shvn’n| 249 ʼmʼlynytʼl 250 AYḴ PVN vnʼs 251 V 252 krpk 253 ʼmʼl OḆYDVN-ḆYN254 255MNVšʼn| vlcyt pyšc .·. 256 ohrmazd †˟sāxvan|ān āmārēnīdār kū pad vināh ud kirbag āmār ˟kuned kē-šān varzīd pēš-iz .·. † mahājñānināma vacasāṁ gaṇanākaraḥ | kila puṇyena ca pāpena ca saṁkhyāṁ kurute yāni cācāritāni pūrvaṁ cit | [devaiś ca manuṣyaiś ca |] 257 Ahuraa Mazdā est l’évaluateur des discoursb = il tient compte des crimes ou des bienfaitsc, (des projets) quʼils ont réalisés autrefoisd. a

. Malandra et Ichaporia258 signalent que Dk 9.28.11 « renders the entire strophe » : ud ān saxwan āmārēnīdār hom ... kē-šān warzīd andar astōmandān-axwān dēw ud mardōm kē-z warzēnd az hom be-wizīdārF2 shvʼn ; J2.K5.M1 shvn| ; KM7.Mf4 shvn|’n ; Pt4 shvnʼn ; E7.T6 OLEšʼn| shvʼn|. 250 J2 ʼmʼlynytʼl. . 251 J2(kʼl)vnʼs ; T6 vnʼsk. 252 E7.K5.M1 om. 253 M1 krpk ; E7.KM7.Mf4.Pt4.T6 krpk|. 254 E7 OḆYDVNd ; K5 OḆYDVN-ḆYN ºoº. 255 Avec Mf4 ; E7.F2.J2.K5.KM7.M1.Pt4.T6 om. 256 J. DARMESTETER, 1892-3, vol. I p. 215 n. 18 : sakhunân amârînîtâr. ||| Ch. BARTHOLOMAE, 1904, colonne 1145 (s. v. mairišta-) : āmārēnītār. ||| W. W. MALANDRA et P. ICHAPORIA, 2010 : ohrmazd saxwan-āmārēnīdār [kū pad wināh ud kirbag āmār kunēd] kē-šān warzīd pēš-iz. 257 J. DARMESTETER, 1892-3, vol. I p. 216 n. 18 : « il sait faire le compte des péchés et des bonnes œuvres ». 258 W. W. MALANDRA et P. ICHAPORIA, 2010, p. 22 n. 5. 249

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xwadāy ud ēdōn ast ciyōn man kāmag. ||| La présence dʼun pronom de la première personne du pluriel, suggérée par Bharucha, reste bien incertaine, mais il est assez clair que le nom de Mazdā est à restituer : ˟mahājñānī ˟no vacasāṁ gaṇanākaraḥ. b . L’identité du propriétaire des discours n’est facilitée ni dans le zand ni dans la traduction sanscrite. Un pronom, dans le commentaire pehlevi, le représente pourtant, l’enclitique -šān. Ce silence est comblé avec le vers suivant. c . kū pad vināh ud kirbag āmār ˟kuned : l’ordre des mots qui est observé dans la traduction de Niriosaṅgha diverge légèrement (puṇyena ca pāpena ca). La différence peut-être est-elle due à une exigence idiomatique du type de celle qui conduit les Français à parler de films en noir et blanc alors que, pour les Espagnols, ce sont des películas en blanco y negro. d . kē-šān varzīd pēš-iz : la traduction sanscrite réunit cette subordonnée avec le vers suivant (devaiś ca manuṣyaiś ca), mais arbore une coordination ca derrière yāni. 4b daēuuāišcā maš ̣ii̯ āišcā V yācā varəšaitē aipī.ciθīt̰ .·. 259 ŠDYAʼn260 V261 ANŠVTAʼn|262 V263 MNVc264 Y265 †vlcynd266 AHL .·. 267 daēuuān ud mardōmān ud kē-z †varzend pas268 .·. yāni cācāriṣyanti paścāt | ete devā manuṣyā ye ˟nikr̥ṣṭasaṁkhyāḥ || Eux les Daēuua et les humains, mais aussi des (projets) quʼils accomplironta par la suiteb.

259

E7 add. MNVšʼn ʼmʼl ʼhlvb| vlcyt pyš ; F2 add. MNVšʼn| vlcyt pyšc ; J2 add. MNVšʼn vlcyt V pyšc ; K5.M1 add. MNVšʼn| vlcyt pyš c ; KM7 MNVš’n vlcyt| pyšc ZK ; Mf4 add. MNVšʼn vlcyt| pyšc ; Pt4 add. MNV yzdʼn mʼl vlcyt| ʼhlvb| GBRA pyšc ; T6 MNVšʼn| ʼmʼl vlcyt| ʼhlvb| pyšc. 260 E7 ŠDYA ; F2.Mf4 ŠDYʼn ; K5 ŠDYAAʼn ; M1 ŠDYAAʼn|. 261 E7.KM7.M1.Mf4 om. 262 KM7 mltvm’nl’d ; Mf4.Pt4 mltvmʼn ; E7.F2.T6 mltvmʼn|. 263 E7.F2.KM7 om. 264 M1 MNV. 265 E7.F2.K5.KM7.M1.Mf4.Pt4.T6 om. 266 J2.K5.M1 vlcynd ; F2 vlcynynd ; Mf4 vlcy(t)nd ; E7.Pt4 vlcyt|d ; KM7 vlcytnd ; T6 vlcyt|nd. 267 W. W. MALANDRA et P. ICHAPORIA, 2010 : dēwān ud mardōmān ud kē-z warzēnd pas. 268 Ch. BARTHOLOMAE, 1904, colonne 83 (s. v. aipi) : pas. 159

a

. Les manuscrits hésitent entre le présent actif (vlcynd) et un prétérit passif atrophié (vlcytnd pour *vlcyt| HVE|d*). Cependant, nous attendons plutôt un présent-futur passif *varzīhend « et (les discours qui) seront mis en pratique (par les Daēuua et les humains) par la suite ». b . Niriosaṅgha ajoute un commentaire : « et ceux qui seront mis en pratique par la suite ―Les Deva, ce sont les humains dotés d’un esprit vil― ». La remarque est doublement exquise : non seulement, le mot sanscrit deva- qui, chez les hindous, désigne les dieux et, par extension, les nobles prend ici une valeur négative, mais, de surcroît, il ne s’agit jamais plus que de la désignation d’êtres humains sans aucune catégorie. Il est difficile de savoir à quel point Niriosaṅgha devait en être conscient. 4c huuō vīcirō ahurō V aθā nə̄ aŋhat̰ yaθā [huuō] vasat̰ .·. ZK BRA vcytʼl269 hvtʼd270 AYḴ271 kʼl V272 DYNA273 BRA vcynyt|274 ʼytvn| LNE275 HVEym276 cygvn OLE277 kʼmk|278 AYḴ LNEc ʼp̄ ʼdst|279 ZK Y280 OLE281 .·. 282 ān be-vizīdār xvadāy kū kār ud dādestān be vizīned ēdōn amā hēm ciyōn ōy kāmag kū amā-z abāyist ān ī ōy .·. asya vivektuḥ svāminaḥ | svāmī yaḥ kāryam puṇyaṁ vivinakti | evaṁ vayam asmo yathāsya kāmaḥ | kilāsmākam api samīhitaṁ tad yad asya ||

269

J2 vcʼtʼl corrigé en vcytʼl ; Mf4 vcytʼl(ʼn). KM7 (’vhrmz̠ d)hvt’. 271 E7.KM7.Pt4 om. 272 E7 om. 273 E7.F2.KM7.Mf4.Pt4.T6 dʼtstʼn|. 274 K5.M1 vcynyt ; T6 vcytyt. 275 T6 W LNE. 276 M1 HVEyE transformé en HVEym ; E7.Mf4.Pt4.T6HVE|ym. 277 K5.M1ʼv|. 278 F2.K5.KM7.M1.T6 kʼmk. 279 KM7.M1 ʼp̄ ʼst ; E7.F2.Mf4.Pt4ʼp̄ ʼst| ; T6 ʼp̄ ʼyt|. 280 Mf4 Y. 281 E7 OLE vcyntn| ; F2 LNE ; Pt4 OLE vcytn|. 282 J. DARMESTETER, 1892-3, vol. I p. 216 n. 20 : zak barâ vicitâr ; kâr udînâ barâ vicinît. ||| Ch. BARTHOLOMAE, 1904, colonne 1438 (s. v. vīcira-) : apē vičītār, erl.: kār u dātastān apē vičīnēt. ||| W. W. MALANDRA et P. ICHAPORIA, 2010 : ān bēwizīdār xwadāy [kū kār ud dādestān be wizīnēd] ēdōn amā hēm ciyōn ōy kāmag [kū amā-z ī abāyist āp ī ōy]. 270

160

283

Du seigneur à même de distinguera = (du seigneur qui) distingue ce qui est à faire et ce quʼil est licite de faire, nous devonsb donc nous plier à la volonté ―qu’il a― = notre volonté doit être la sienne. a

. ān be-vizīdār xvadāy kū kār ud dādestān be vizīned : Niriosaṅgha met au génitif le contenu du premier hémistiche (asya vivektuḥ svāminaḥ) en accord avec les exigences de la grammaire, car ce groupe génitif est complément de kāmaḥ. Cependant, dans la parenthèse avec laquelle il identifie le seigneur évoqué, nous le voyons rétablir le nominatif (svāmī yaḥ kāryam puṇyaṁ vivinakti «―le seigneur est celui qui distingue ce quʼil y a de bien à faire―»). Il convient de souligner la présence de asya devant kāmaḥ : c’est le reflet de la gentillesse du diascévaste avestique, mais je ne vois pas la raison de l’usage du pronom tonique dans ciyōn ōy kāmag : pourquoi le texte ne contient-il pas plutôt ciyōn-iš kāmag avec l’enclitique ? De toute façon, la traduction sanscrite coïncide parfaitement avec le texte pehlevi. Ou presque, puisque je ne comprends pas bien comment DYNA a pu être traduit par puṇyam. Et cela, sans parler de la question que pose la coordination kār ud dādestān, quelque fréquente qu’elle soit : la valeur sémantique de kār est compréhensiblement proche de celle d’un adjectif ; en revanche, l’emploi de dādestān au sens de « licite » s’explique moins aisément. b . Au vu du contexte et de la présence d’un yod dans la finale de HVEym, mais aussi du degré plein radical de la forme sanscrite, il faut probablement restaurer le subjonctif-impératif dans la traduction que donne Niriosaṅgha : evaṁ vayam asmo yathāsya kāmaḥ. Même s’il y a emploi de la désinence primaire -maḥ au lieu de la secondaire -ma. La cohérence des strophes 3-4 Curieusement, Aš ̣a Vahišta n’est pas le dieu chargé d’infliger le châtiment dont il menace pourtant les impies qui maltraitent la vache. C’est Ahura Mazdā qui l’inflige. Incohérence ? En tout cas, la quatrième strophe présente Ahura Mazdā comme s’il était le Soleil qui est au courant de tout et comme un juge capable de distinguer entre les performances des pieux adorateurs et les forfaits que les impies commettent. Selon les indications marginales, le dieu Ašạ Vahišta a la parole depuis 2c2 et, après les incises du récitant Zaraθuštra, la reprend en 3b et en 4b, mais la précision qu’il s’agit d’une « réponse » d’Aš ̣a Vahišta (passaxv-gōvišn ī aš-vahišt) au lieu d’un ̣ simple discours (frāz-gōvišn ī aš ̣-vahišt) n’est donnée qu’à ces deux occasions. L’interprétation médiévale de ces discours ne conserve que peu de la substance de l’ancienne philosophie du sacrifice pour se focaliser sur les 283

J. DARMESTETER, 1892-3, vol. I p. 216 n. 20-21 : « "il est celui qui choisit" (cʼest-à-dire qui décide de ce qui est juste) » ; « Cʼest-à-dire que son désir soit le nôtre ». 161

châtiments et la justice divine. Nous pouvons, une fois de plus, reproduire le résumé de James Darmesteter : « Mazda, en effet, observe le poète, fait le compte de tous les actes des démons et des hommes ; il est lʼarbitre du bien et du mal ; faisons donc selon son désir ».

5a at̰ vā ustānāiš ahuuā V zastāiš frīnəmnā ahurāi.ā .·. ʼytvn| MN LKVM ʼmhrspndʼn| 284 PVN ʼvstʼn| 285 ʼhvyh 286 mynšnyk287 V288 ʼvstʼn|289 ẕstyh290 tvhšʼkyhʼ291 plnʼmm ʼv|292 ʼvhrmẕd ZK293 AYḴ MN ʼmhrspndʼn|294 ʼv|295 MNDOM296 Y297 ʼvhrmẕd vyš plnʼmm298 V299 MNDOM300 Y301 ʼvhrmẕd302 vyš303 OḆYDVNm304 .·. 305 ēdōn az ašmā amǝš ̣-spǝṇdān pad ustān-ahuu|īh mēnišnīg ustān-zast|īh tuxšāgīhā franāmem ō ohrmazd ān kū az amǝš ̣aspǝṇdān ō tis ī ohrmazd vēš franāmem ud tis ī ohrmazd vēš kunem .·. E7 ʼmhrsp̄ ndʼn| ; K5 ʼmhrspldʼn ; M1 ʼmhrsp̄ ndʼn ; Mf4 ʼmhrspndʼn ; Pt4 ʼmhrspndʼn. 285 E7.K5.KM7.M1.Mf4.Pt4 ʼvstʼn. 286 F2 ʼnʼhvyh. 287 F2.K5 mynšnyk| ; Mf4.T6 mynšnyh. 288 KM7 seul. 289 K5 ʼvstʼn ; E7.M1 V ʼvstʼn ; Mf4.Pt4 V ʼstʼn ; T6 V ʼvstʼn|. 290 E7.F2.KM7.Mf4.Pt4.T6 YDEyh. 291 F2 V tvhšʼkyhʼ ; J2 endommagé : tvhšʼ[...]. 292 E7 dyn| ; T6 om. 293 E7 ʼn|. 294 E7.KM7 ʼmhrsp̄ ndʼn| ; F2 ʼmhrspndʼn| ; M1 ʼmhrsp̄ ndʼn ; K5.Mf4.Pt4 ʼmhrspndʼn. 295 J2 ʼv| ʼvhrmẕd ZK AYḴ MN ʼmhrspndʼn| ʼv| MNDOM vyš plnʼmm MNDOM Y ʼvhrmẕd vyš plnʼmm OḆYDVNm̨. 296 J2 om. 297 E7.J2.K5.KM7.M1.Pt4 om. 298 F2 om. 299 KM7 V Y V ; F2.K5.M1 om. 300 F2 om. 301 F2.KM7 om. 302 F2 om. 303 F2 om. 304 K5.M1 OḆYDVN-m̨. 305 J. DARMESTETER, 1892-3, vol. I p. 216 n. 22 : ûstân ahûîh... u ûstân zastîh. ||| Ch. BARTHOLOMAE, 1904, colonne 228 (s. v. azī-) : az ; col. 407 (s. v. ustānazasta-) : pa ustān dastīh ; col. 279 (s. v. 1ah- n. 31) : tuxšākīhā ; col. 1026 (s. v. frīne) : 284

162

evam bhavadbhya iajadā d uttānahastena vyavasāyitayā prabravīmi svāmine tat | kilāmarebhyo mahattarebhyaḥ kāryāya ca nyāyāya ca hormijdasya prabhūtataram prabravīmi | 306 Ainsi, parmi vousa ―(ce pronom « vous » représente) les Amǝš ̣a Spǝṇb ta ―, avec la qualité de celui qui possède la volontéc ustāna ―(c’est-àdire :) de façon intentionnelled―, avec la qualité de celui qui possède les mains ustāna ―(c’est-à-dire :) diligemment―, nous mettons en avant ce qui relèvee d’Ahura Mazdā = parmi les Amǝš ̣a Spǝṇta, nous mettons en avant et développons surtout ce qui relève d’Ahura Mazdāf. a

. Le traducteur médiéval interprète vā comme si ce fût une forme du pronom de la deuxième personne du pluriel. b . Niriosaṅgha nous rappelle que les Amǝš ̣a Spǝṇta sont des Yazata : evam bhavadbhya iajadāḥ. ||| Une fois de plus, nous trouvons le pluriel oblique en ºān pour l’explicitation d’un pronom de la deuxième personne du pluriel, ʼmhrspndʼn|. Peut-être devons-nous, pour expliquer ce génitif, comprendre que vā est un nom des Aməš ̣a Spəṇta. c . Le traducteur médiéval considère que la forme ahuuā appartient à aŋvhā- et entre dans la formation d’un composé avec ustānāiš. d . Pour obtenir un certain parallélisme avec tuxšāgīhā, Malandra et Ichaporia307, sur base de Mf4 qui contient menišnīh, suggèrent de corriger menišnīg en ˟menišnīhā. Cʼest aller à lʼencontre de la morphologie puisque, pour l’adverbe en ºīhā, nous devons partir de l’adjectif et proposer ˟menišnīgīhā. Dans la traduction sanscrite de la séquence, le premier volet pad ustānahuuīh menišnīg a été sauté, seul le second ustān-zastīh tuxšāgīhā y étant reflété. Sans doute est-ce le fruit d’une corruption, un saut du même au même : uttānahastena vyavasāyitayā « avec les bras levés ou avec l’attitude requise ». e . Le traducteur médiéval et Niriosaṅgha à sa suite considèrent que ā dans ahurāi.ā est un pronom : ō ohrmazd ān ; svāmine tat308.

franāmišn. ||| W. W. MALANDRA et P. ICHAPORIA, 2010 : ēdōn az ašmā [amahraspandān] pad ustān-axwīh [menišnīg] ustān-dastīh [tuxšāgīhā] franāmom ō ohrmazd [kū az amahraspandān ō tis ī ohrmazd wēš franāmom ud tis ī ohrmazd wēš kunom]. 306 J. DARMESTETER, 1892-3, vol. I p. 216 n. 22-3 : « cʼest-à-dire de toutes ses forces dʼesprit et de corps » ; « je prie surtout Auhrmazd entre tous les Amshaspands ». 307 W. W. MALANDRA et P. ICHAPORIA, 2010, p. 22 n. 6. 308 Contre W. W. MALANDRA et P. ICHAPORIA, 2010, p. 22 n. 7, qui veulent biffer le pronom ān : « The ān immediately following ohrmazd is dittography for the ān which begins (b) ». Ils veulent biffer aussi, p. 22 n. 8, kū « which begins (b) » 163

f

. Les commentaires, sans diviser le vers, ont traités les deux hémistiches ensemble au terme du zand proprement dit, mais le commentaire sanscrit diverge du pehlevi : kāryāya ca nyāyāya ca hormijdasya prabhūtataram prabravīmi |. Les premiers mots paraissent correspondre à un syntagme pehlevi **ō kār ud dādestān. Le commentaire pehlevi ō tis ī ohrmazd vēš franāmem nous montre que, dans le zand, la préposition ō régissait ān et que ohrmazd était le complément de ān. Ceci contredit la traduction sanscrite, puisque Niriosaṅgha, pour l’avoir rendu par svāmine et recouru au datif, considère que la préposition ō, dans le zand, régissait ohrmazd. Ensuite, Niriosaṅgha, dans le commentaire, poursuit une autre voie. En outre, il troque le datif pour le génitif hormijdasya. Cependant, il convient de souligner le changement de lexique que nous apercevons ici, hormijda- au lieu de mahājñānin-, si bien que nous ne pouvons écarter un accident de transmission qui aurait entraîné l’intervention d’un traducteur ou rédacteur ultérieur. Ceci dit, je ne sais ce que le traducteur médiéval, qui qu’il soit, a voulu dire avec les mots ō tis ī ohrmazd vēš franāmem ni ce que signifie au juste la phrase sanscrite kāryāya ca nyāyāya ca hormijdasya prabhūtataram prabravīmi. En tout cas, il ne nous est d’aucune aide que, dans le commentaire pehlevi, nous trouvions le supplément ud tis ī ohrmazd vēš kunem. Et il serait malvenu, voire grossier, que lʼadorateur arborât une préférence pour Ahura Mazdā au détriment explicite des autres Amǝš ̣a Spǝṇta. 5b mə̄ uruu̯ā gə̄ušcā aziiā̊ V hiiat̰ mazdą̃m duuaidī fərasābiiō .·. AYḴ 309 ZK Y 310 L lvbʼn| 311 TVRA Y 312 ʼz 313 LVTE YHVVNʼt| 314 AYḴm 315 lvbʼn 316 mzd YHBVNʼnd 317 ʼv| 318 ʼvhrmẕd 319 ZK Y 320 PVN 321

estimant qu’il s’agit d’une « dittography for the kū which begins the Gloss in (a) ». Je ne puis les suivre dans de tels forfaits. 309 F2 MN AYḴ. 310 KM7.Mf4.Pt4 om. 311 K5.M1.Mf4.Pt4 lvbʼn. 312 E7 om. 313 M1 h ; Mf4 hc. 314 E7.KM7 YHVVNyt ; K5.M1.Pt4 YHVVNʼt. 315 E7 AYḴ. 316 J2 om. ; E7.F2.KM7.Mf4.T6 lvbʼn|. 317 E7 YHBVNʼnd º ; Pt4 YHBVNʼnd .·.. 318 J2 ’v| Y ; E7.KM7.M1.Mf4.Pt4.T6 V ʼv|. 319 Pt4 ʼvhrmẕd AYḴ GBRA ; E7.T6 ʼvhrmẕd AYḴ GBRA. 320 E7 om. 321 KM7 om. 164

gvmʼnyk 322 hmpvrsynd 323 AYḴ 324 ZK Y 325 gvmʼnyk 326 YHVVNʼnd hm MN ʼvhrmẕd ˟LAVHL327 tvbʼn|328 YHVVNʼt|329 pvrsytn|330 .·. 331 kū ān ī man ruvān gāv ī az abāg bavād kū-m ruvān mižd dahānd ō ohrmazd ān ī pad gumānīg hampursend kū ān ī gumānīg bavānd ham az ohrmazd ˟abāz tuvān bavād pursīdan .·. ma ātmano goś cājīnāmnyāḥ | ajīnāmnī trivārṣikī gauḥ | ye mahājñānine saṁdehīyam pr̥cchanti | kila yena saṁdigdhāḥ santi tat sarvaṁ ye hormijdāya punaḥpunaḥ pr̥cchanti || Pour quea monb âme soit accompagnée de (celle de) la vache azī c = (Pour) donnerd la récompense de mon âme, (les juges)e s’entretiennent versf Ahura Mazdā sur cela qui est douteux = sur les points qui (leur) apparaîtront douteux, ils pourrontg s’entretenir encoreh avec Ahura Mazdā. a

. Dans le zand, la phrase est ouverte avec kū. Peut-être est-ce la conjonction « pour que », puisque le verbe placé en sa dépendance est conjugué au mode subjonctif, abāg bavād, mais Niriosaṅgha ne connaît ni ce kū ni ce verbe. b . Niriosaṅgha recourt vilainement à la forme atone me du génitif du pronom de la première personne du singulier comme si ce fût une forme tonique, en tête de phrase. c . Niriosaṅgha ajoute un commentaire : ma ātmano goś cājīnāmnyāḥ | ajīnāmnī trivārṣikī gauḥ. d . Les manuscrits E7 et Mf4, en plaçant une ponctuation derrière YHBVNʼnd, suggèrent que le syntagme ʼv| ʼvhrmẕd n’en est pas le complément. Le sujet du verbe YHBVNʼnd ne reçoit aucune identification. 322

KM7 om. KM7 om. ; E7 hmpvrsyn|d ; F2 hm PVN syn|d ; J2 hmpvrsyynd ; T6 hmpvrsynt|. 324 KM7 om. 325 E7 om. ; J2 V. 326 F2 ẔNE transformé en début de gvmʼnyk. 327 E7.J2.K5.KM7.M1.Mf4.Pt4 LVTE ; F2 LVTE LYAVHL ; T6 LVTE|. 328 KM7 tvb’nY ; Mf4.Pt4 tvbʼn. 329 F2 YHVVNyt ; K5.M1 om. ; J2 YHVVNʼt ; E7.KM7.Mf4.Pt4 YHVVNʼt. 330 KM7 pvrsytn| ; F2.J2 pvrsyt ; Mf4.T6 pvrsyt|. 331 Ch. BARTHOLOMAE, 1904, colonne 688 (s. v. 4dav-) : ōhrmazd ān i pa vimānīk hampursēnd ; colonne 1002 (s. v. fǝra-sāh-) : hampursēnd. ||| W. W. MALANDRA et P. ICHAPORIA, 2010 : ān ī man ruwān gāw ī az [abāg bawād kū-m ruwān mizd dahānd] ō ohrmazd ān ī pad gumānīh hampursēnd [kū ān ī gumānīg bawānd ā-m az ohrmazd abāg tuwān bawād pursīdan]. 323

165

e

. Dans la proposition suivante, l’auteur pehlevi, semble-t-il, ne facilite toujours pas l’identification de la troisième personne du pluriel ; Niriosaṅgha non plus ne paraît apporter aucune indication à ce sujet. Il faut alors penser que le sujet de nombre grammatical pluriel représente le tandem que l’âme du sacrifiant forme avec celle de la vache. Ceci doit être accepté, sans quoi nous nous retrouverions dans l’incapacité de comprendre la logique de Niriosaṅgha quand il introduit un pronom relatif ye à la fois dans la traduction du zand proprement dit et dans celle du commentaire : ye mahājñānine saṁdehīyam pr̥cchanti | kila yena saṁdigdhāḥ santi tat sarvaṁ ye hormijdāya punaḥpunaḥ pr̥cchanti « (mon âme-moi et celle de la vache) qui posent des questions devant Ahura Mazdā à propos de ce qui est douteux = (mon âme-moi et celle de la vache) qui, à propos de tout ce qui les chiffonne, posent encore et encore des questions devant Ahura Mazdā ». Cependant, nous verrons qu’une autre solution existe (ci-dessous g). f . L’emploi du datif hormijdāya correspond à celui de la préposition ō que nous pourrions être surpris de trouver dans le zand pehlevi (ō ohrmazd ān ī pad gumānīg hampursend). Attendu avec le verbe « poser une question à, interroger », l’ablatif de la mention de la personne interrogée ne figure que dans le commentaire pehlevi : ham az ohrmazd ˟abāz tuvān bavād pursīdan. Sans doute est-il utile alors de souligner que hormijdāya n’est pas mahājñānine. Le traducteur sanscrit, donc, ne serait peut-être plus le même. g . Les verbes YHBVN’nd et hmpvrsynd arborent une désinence de troisième personne du pluriel qu’il convient d’expliciter. Je propose « les juges Miθra, Rašnu et Sraōša ». ||| La case que le pronom de la première personne du singulier occupe dans la dernière proposition (ā-m ... pursīdan) paraît être problématique, car, en principe, les juges, bien plus que « moi », devront avoir la faculté de poser de nouvelles questions. Niriosaṅgha, à se passer de l’auxiliaire de mode impersonnel tuvān bavād, montre à première vue que la possibilité de poser des questions se trouve entre les mains des juges et que le pronom de la première personne est le fruit d’un mirage. Dès lors, nous sommes amenés à lire ham contre Malandra et Ichaporia qui, une fois de plus, montrent ne s’être guère attardés à lire attentivement le texte de Niriosaṅgha. Néanmoins, nous soulignerons le caractère tout à fait exceptionnel de l’emploi de la tmèse en pehlevi, car ham, dans cette hypothèse, s’ordonne avec pursīdan. h . Dans la dernière proposition (hm MN ʼvhrmẕd ˟LAVHL tvbʼn| YHVVNʼt| pvrsytn|), la leçon du manuscrit F2, LVTE LYAVHL, quelqu’isolée qu’elle soit face à LVTE (E7.J2.K5.KM7. M1.Mf4.Pt4) et LVTE| (T6), se trouve confortée par la traduction sanscrite punaḥpunaḥ si bien que, contre Malandra et Ichaporia, nous aurons à corriger abāg en ˟abāz.

166

5c nō[it̰ ] ərəžəjii̯ ōi frajiiāitiš V nō[it̰ ] fšuiieṇtē drəguuasū pairī .·. LA OLE Y 332 lʼst|333 zyvšn|334 prʼc335 +ʼp̄ syhšn[yh]336 AYḴ MNV PVN lʼstyh337 zyvyt|338 ’š ʼp̄ syhšn|339 Y340 PVN lvbʼn|341 LA YHVVNyt342 V343 LA OLE Y 344 pyhv|ynytʼl 345 AYḴ OLE Y 346 pyhv|ynytʼl 347 MNV 348 MNDOM PVN plʼlvn|yh 349 YHSNNyt 350 LA 351 ʼytvn| cygvn 352 BRA MN OLE Y353 dlvnd354 ME355 OLE Y356 dlvnd357 ḴN YHVVNyt358 .·. 359 nē ōy ī rāst-zīvišn ˟frāz-abesīhišn kū kē pad rāstīh zīved ā-š +abesīhišn ī pad ruvān nē baved ud nē ōy ī pīhvēnīdār kū ōy ī pīhvēnīdār J2 K̠N ; E7.F2.K5.M1.T6 OLE ; Mf4 OLEY ; Pt4 OLE Y. F2.Mf4 lʼst. 334 T6 zyvšnyh. 335 K5.M1 om. 336 E7 ʼp̄ ʼsʼdšn|yh ; F2 ʼp̄ ʼdššnyh; K5 ʼp̄ hššnyh ; KM7 ’p̄ ’s’šn|yh ; M1 ʼp̄ ʼdššnyh ; Mf4 ʼp̄ hyššn|yh ; Pt4 ʼp̄ ʼsʼšn|yh LA ; T6 ʼp̄ ʼdšnyh. 337 KM7 l’styh. 338 E7.K5.KM7.M1.Mf4.Pt4 zyvyt. 339 E7 ʼp̄ asʼšn|yh (pr. m.) ; F2 ʼp̄ synšnyh ; KM7 ’p̄ ’dhšn|yh ; M1 ʼp̄ ʼdššn| ; Mf4 ʼp̄ hyššn|yh ʼp̄shšnyh ; Pt4 ʼp̄ ʼsʼšn|yh ʼ̄pyššnyh ; T6 ʼp̄ ydshnyh. 340 E7.F2.KM7.Mf4.Pt4.T6 om. 341 Mf4 lvbʼn. 342 J2.K5.M1 YHVVNyt .·. ; F2.T6 YHVVNyt|. 343 F2.J2.K5.M1 om. 344 J2 K̠N ; K5.M1 OLE Y ; E7.F2.KM7.Mf4.Pt4.T6 OLE. 345 E7 pyhvynytal (pr. m.) ; T6 pšvynytʼl. 346 J2 ’v| ; E7.F2.K5.M1.Pt4.T6 OLE Y ; Mf4 OLEY. 347 E7.F2.KM7.Mf4.Pt4.T6 pyhvynytʼl. 348 F2 AYḴ. Par comparaison avec la glose de ōy ī rāst-zīvišn au moyen de kū kē..., il faut sans doute additionner la leçon de F2 (AYK̠) et celle des autres manuscrits (MNV). 349 J2 endommagé : [...]lvn|yh ; E7.F2.KM7.Mf4.T6 plʼlvnyh. 350 T6 YHSNyt º. 351 F2 ld. 352 K5 (BRA) cygvn. 353 F2.KM7.T6 om. 354 E7YḆLVNd au lieu de Y dlvnd. 355 J2 V ME. 356 J2 ’v| ; E7.F2 OLE ; K5.M1.Mf4.Pt4 OLE Y ; T6 ḴN. 357 J2 dlvvnd. 358 F2 YHVVNyt| ; J2 (dlv)YHVVNyt|. 359 Ch. BARTHOLOMAE, 1904, colonne 357 (s. v. ǝrǝžǝ-jī-) : rāst žīvišn, erl.: kē pa rāstīh žīvēt ; col. 979 (s. v. fra-jyātay-) : +apasihišnīh. ||| W. W. MALANDRA et P. 332 333

167

kē tis pad frārōnīh dāred nē ēdōn ciyōn be az ōy ī druuaṇd cē ōy ī druuaṇd ōh baved .·. na satyajīvaneḥ prakr̥ṣṭā hāniḥ | na ca vr̥ddhikartuḥ | kilaiteṣām prakr̥ṣṭā hānir mā bhūyāt | durgatinā vinā | yato ’sya bhūyād eva || 360 De quia mène vie droite, il nʼy a pas de destructionb = Chez celui qui vit avec droiture, la destruction pour son Moi nʼa pas lieu. (Il n’y a pas) non plus (destruction) de l’engraisseurc = Chez celui qui maintient les choses en bon étatd, (la destruction n’a pas lieu non plus). Ce n’est pas comme dans le case du druuaṇt, car (la destruction de) celui qui est druuaṇt a bel et bien lieu. Traduction sanscrite : De qui mène vie droite, la destruction complète, non. De celui qui assure la prospérité, non plus = Puissef leur destruction ne pas avoir lieu ! Sauf celle du druuaṇt puisque, dans son cas, elle doit bien avoir lieu. a

. Malandra et Ichaporia361 : « Dhabhar has nē ōy. However, J has ōh (nK ), which, like Hr| , must have been pronounced as ō by the scribes ». b . Avec ˟frāz-abesīhišn, le traducteur pehlevi montre qu’il interprète frajiiāiti- à partir de √ ziiā au lieu de ˲ jiiā. Malandra et Ichaporia362 relèvent que « DkM 179.4 nē ōy ī rāst-rawišn frāz-abesīhišnīh seems to continue the error while also substituting rawišn for zīwišn » et que « since ǝrǝžǝjyōi is dative we may assume that the original Gloss was correct with ō ». ||| La finale -īh de frāz-abesīhišnīh ne se justifie pas. L’origine de la corruption est à rechercher dans la présence de l’eżāfe derrière abesīhišn. c . À mes yeux, fšvnynytʼl363, est le fruit d’une illusion364. Nous devons lui préférer pyhv|ynytʼl qui montre le même ductus : pīhvēnīdār « engraisseur ». C’est d’ailleurs ce que suggère la traduction sanscrite vr̥ddhikartr̥-. d . Cette glose ne figure pas chez Niriosaṅgha. e . Je ne comprends pas la raison de la suggestion de Humbach que Malandra et Ichaporia365 reproduisent : « Since one expects a clause to follow ēdōn, Humbach suggests restoring on analogy of 6b ».

ICHAPORIA, 2010 : nē ō rāst-zīwišn frāz-abesīhišnīh [kū kē pad rāstīh zīwēd ā-š abesīhišnīh ī pad ruwān nē bawēd] nē ōy ī fšōnēnīdār [kū ōy ī fšōnēnīdār kē tis pad frārōnīh dārēd nē ēdōn ciyōn] bē az ōy ī druwand [cē ōy ī druwand ōh bawēd]. 360 J. DARMESTETER, 1892-3, vol. I p. 216 n. 26 : « Celui qui vit avec droiture, il nʼy a pas de mort pour son âme ». 361 W. W. MALANDRA et P. ICHAPORIA, 2010, p. 22 n. 9. 362 W. W. MALANDRA et P. ICHAPORIA, 2010, p. 22 n. 9. 363 En tout cas absent chez D. N. MacKenzie (1971). 364 Contre Ch. BARTHOLOMAE, 1904, colonne 1028 (s. v. 1fšav-) ; W. W. MALANDRA et P. ICHAPORIA, 2010. 365 W. W. MALANDRA et P. ICHAPORIA, 2010, p. 22 n. 10 (ad ʼytvn| cygvn). 168

f

. En recourant à l’optatif, Niriosaṅgha s’écarte un peu de l’original pehlevi ou y détecte l’expression de souhaits. La cohérence des strophes 4-5 Les indications marginales taisent le nom du personnage qui prend la parole avec la cinquième strophe. Parmi les sept manuscrits dans lesquels nous trouvons habituellement des indications seuls quatre contiennent quelque chose, mais J2.K5.K6 laissent frāz-gōvišn sans complément, et KM7 se contente de dire que 5c est un frāz-gōvišn ī zaraθušt. Cependant, le zand du premier vers de la sixième strophe paraît considérer que la cinquième était constituée d’un discours d’Ahura Mazdā. Devant la perspective des châtiments infligés dans l’au-delà, celui qui a la parole, mais de qui les interprètes médiévaux paraissent avoir perdu de vue l’identité, se propose d’observer scrupuleusement les volontés du grand dieu. Il a aussi la conviction que la vache l’accompagnera dans l’au-delà : celle-ci se confond avec la récompense. Conformément à ce qui, finalement, sera identifié clairement au vers 6a comme un discours prononcé par le propre grand dieu, celui qui mène une vie correcte peut espérer que garantie lui sera donnée de ne souffrir en rien de la faim après la mort. Pour l’impie, en revanche, la destruction arrivera indubitablement, car aucune vache ne pourra le sauver. James Darmesteter, dans son analyse, donne le résumé suivant de la cinquième strophe : « Lʼhomme de bien ne mourra pas, ―la mort nʼest que pour le méchant ; ―son âme recevra la récompense suprême et il sʼentretiendra au ciel avec Ahura », mais nous ajouterons que la récompense consiste en une vache qui doit assurer lʼalimentation et la survie de lʼâme du pieux adorateur.

6a at̰ ə̄ vaōcat̰ ahurō V mazdā̊ vīduuā̊ vafūš vii̯ ānaiiā .·. ʼytvn|š366 PVN367 PVME368 gvpt|369 ʼvhrmẕd370 ʼkʼsyhʼ všvpšn| vcʼlšn|371 AYḴš 372 dʼnšnyk 373 gvpt 374 AYḴ 375 ʼnʼkyh MN gnnʼk 376 mynvd 377 cʼlk378 AYT|379 .·. 366 367 368 369 370 371 372 373

F2 ʼytvnš; Mf4 ʼytvn|š. M1 om. F2 PVME NPŠE ; E7.KM7.Mf4.Pt4.T6 NPŠE. KM7 gvptn| ; F2.K5.M1 gvpt. T6 ʼvhrmẕd º. E7 vcʼlšn| lʼd ; Pt4 vcʼlšn| lʼd. KM7 AYK̠ W ; J2 AYḴš̱. Mf4 dʼnšn(yh)yk ; F2.T6 dʼnšnyh. 169

380

ēdōn-iš pad dahān guft ohrmazd āgāhīhā višōbišn vizārišn kū-š dānišnīg guft kū anāgīh az gannāg mańiiaōi cārag ast .·. evam mukhenāvocat svāmī mahājñānī viditvā vināśasya viśuddhim | idaṁ kiṁ cid vijñāyābravīt | yad anyāyo ya āharmanāt tasyopāyo ’sti || 381 Ainsia, de la bouche, Ahura Mazdā a exprimé, avec science, la solution de la destructionb = a exprimé judicieusement quec le remède existe à la méchanceté née d’Aŋhra Mańiiud. a

. Selon le traducteur médiéval, le vers 6a clôture donc un discours d’Ahura Mazdā au lieu d’en annoncer un. b . Cf. Dk 9.28.6 wišōbišn-wizārišnīh382. c . Il n’y a pas à répéter le pronom enclitique -š derrière le second kū383. En effet, Niriosaṅgha, en les traduisant respectivement par et yat, nous indique que le premier des deux kū ouvre le commentaire et que l’autre marque le début d’une proposition subordonnée complétive régie par guft. d . Niriosaṅgha reproduit pieusement l’eżāfe située derrière anāgīh avec laquelle, tant dans le présent commentaire que dans celui figurant dans le Dk 9.68.47384, le syntagme az gannāg mańiiaōi est introduit, mais, comme ce n’est possible qu’au nominatif, cela le conduit à recourir au corrélatif tasya : yad anyāyo ya āharmanāt tasyopāyo ’sti « la déconvenue causée par Aŋhra Mańiiu, à celle-ci le remède existe ». 374

E7.KM7.Mf4.Pt4.T6 gvpt|. K5 AYḴš. 376 F2.Mf4.T6 gnʼk. 377 KM7 mynvdAYT| ; K5.M1 om. 378 J2 endommagé : cʼ[lk] ; E7.KM7.Mf4 cʼlk|. 379 KM7 HNAAYT| ; F2 AYT. 380 Ch. BARTHOLOMAE, 1904, colonne 11 (s. v. 2a- [cf. col. 347 s. v. ǝ̄ ]) : pa dahān, NpüErl.: xvēš ; col. 1347 (s. v. vafav-) : višōpišn ; col. 1478 (s. v. +vyānā-) : vičārišn. ||| P. B. SUNJANA et D. P. SANJANA, 1874-1928, vol. XIX p. 63 n. 1 (ad Dk 9.68.47) : aêdûn-ash pavan fûmâ gûft aûharmazda, âgâsîhâ visûpishn vichârishn (aêgh-ash dânishnîg gûft, aêgh-ash anâgîh min ganrâg maînûg chârag haît.). ||| W. W. MALANDRA et P. ICHAPORIA, 2010 : ēdōn-iš pad dahān guft ohrmazd āgāhīhā wišōbišn wizārišn [kū-š dānišnīg guft kū anāgīh az gannāg mēnōg cārag ast]. 381 J. DARMESTETER, 1892-3, vol. I p. 216 n. 27 : « il a dit quʼil y a remède au mal qui vient dʼAhriman ». 382 W. W. MALANDRA et P. ICHAPORIA, 2010, p. 22 n. 11. 383 Contre le manuscrit K5 ou P. B. SUNJANA et D. P. SANJANA, 1874-1928, vol. XIX p. 63 n. 1. 384 Dk 9.68.47 harv kas-ēv dāned kū-š višōbišn ī az gannāg mēnōy cārag dānišnīg guft. 375

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6b nō[it̰ ] aēuuā ahū vistō V na[ēd]ā ratuš aš ̣āt̰ cīt̰ hacā .·. LA ʼytvn|385 ʼhvykyh386 vndšn| AYḴ ZK Y387 PVN gyvʼk cʼlk388 krtn| LA šʼyt| 389 HNA 390 lʼdc 391 hvtʼd PVN hvtʼd 392 LA dʼlynd 393 LA 394 dhšn| 395 [Y 396 ] ltyh 397 MN ʼhlʼdyh cykʼmcHD 398 AYḴ dstvblc 399 ʼytvn| 400 cygvn ʼp̄ ʼyt401 dʼštn|402 LA403 YHSNNd404 .·. 405 nē ēdōn ahuīgīh vindišn kū ān ī pad gyāg cārag kardan nē šāyed ēd rāy cē xvadāy pad xvadāy nē dārišn ud nē dahišn ī406 rat|īh az ašaiiīh ̣ 407 cegām-iz-ēv kū dastvar-iz ēdōn ciyōn abāyed dāštan nē dārend .·. 385

F2 ʼytvn. Mf4 ʼhv(p)yh ; T6 ʼhvyh. 387 F2.J2.K5.M1 om. 388 J2 (c)ālk ; E7.KM7.Mf4 cʼlk|. 389 E7.F2 šʼyt ; J2 om. 390 F2 HNA ; Mf4 HNA(lyh). 391 K5.M1 lʼdcY ; E7.KM7.Mf4.Pt4.T6 lʼd ME ; F2 lʼd ME|. 392 F2 hvtʼ ; K5.M1 hvtʼk. 393 F2 YHēNSN ; K5 (L)YHSNNd ; E7.KM7.M1.Mf4.Pt4.T6 YHSNNd. 394 F2.J2.Mf4 LA ; E7.K5.KM7.M1.Pt4.T6 V LA. 395 Mf4 dhsn|. 396 F2.J2 om. 397 J2 ltyh ; Mf4 ltyh. 398 J2 cyk’mc-1 ; Pt4 cykʼmcHD-1. 399 J2.K5 dstblc ; T6 dstvbl. 400 F2 ʼytvn. 401 E7.K5.KM7.Mf4.T6 ʼp̄ ʼyt|. 402 F2 dʼšt ; J2 (LA)dʼWn| ; KM7.Mf4.Pt4 dʼšt|. 403 F2 om. 404 F2 om. 405 Ch. BARTHOLOMAE, 1904, colonne 282 n. 3 (s. v. 1a-hū-) : nē ētōn axvīkīh vindišn, erl.: xvatāδ pa xvatāδ nē dārišn. ||| P. B. SUNJANA et D. P. SANJANA, 18741928, vol. XIX p. 60 n. 3 (ad Dk 9.68.34) : lâ aêdûn ahûîgîh vindishn, aêgh zak î pavan jîvâg chârag kardan lâ shâyad, hanâ râî-ich khûdâî pavan khûdâî lâ yakhsenund, va lâ dahishn ratûîh mîn yasharâyîh chîgâmchâî, aêgh dastôbarîh-ich aêdûn chîgûn âvâyad dâshtan lâ yakhsenund. ||| W. W. MALANDRA et P. ICHAPORIA, 2010 : nē ēdōn axwīgīh windišn [kū ān ī pad gyāg cārag kardan nē šāyēd ēd rāy cē xwadāy pad xwadāy nē dārēnd] ud nē dahišn ī radīh az ahlāyīh cegām-iz-ē [kū dastwar-iz ēdōn ciyōn abāyēd dāštan nē dārēnd]. 406 P. B. SUNJANA et D. P. SANJANA, 1874-1928, vol. XIX p. 60 n. 3, om. 407 P. B. SUNJANA et D. P. SANJANA, 1874-1928, vol. XIX p. 60 n. 3, dastvarīhiz. 386

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naivaṁ svāmibhraṣṭasya | kilaitasmin kasmiṁś cit sthāna upāyaṁ na śakyate | iti hetor ˟yat svāminaṁ svāmitvena na dadhate | nādadānasya ˟gurum puṇyād yathā kathaṁ cit | kila guruṁ caivaṁ yathā yujyate grahītuṁ na gr̥hṇanti | 408 On ne peut savoira en quoi consiste le rôle dʼahu = face à qui est en place, trouver remède nʼest pas possible, puisque ce serait refuser au seigneur son statut de seigneurb et que ce serait, de la part des (adorateurs) *aš ̣aiia409, ne jamais rien donner pour le rôle de ratu = ils nʼaccueilleraient pas non plus le dastour comme il convient de lʼaccueillir. a

. Il est bien difficile de comprendre et le zand et la traduction de Niriosaṅgha que voici : « De cette façon non de ce que le seigneur a perdu = en pareille circonstance remède il ne peut y avoir. Pour la raison qu’ils considèrent que leur seigneur n’est pas un seigneur. Non de celui qui a reçu de n’importe quelle façon le maître au lieu de la correcte = Et ils n’accueillent pas le maître comme il convient de l’accueillir ». Et la compréhension du passage du neuvième livre du Dēnkard dans lequel des phrases parallèles à celles du zand ou de son commentaire peuvent êtres repérées reste tout aussi difficile : Dk 9.68.34 pad ān garzišn ī-š guft ohrmazd kū nē ēdōn ahuīgīh vindišn ēn garzišn ēd rāy ka xvadāy pad xvadāy nē dārend ud nē dahišn ī radīh az aš ̣aiiīh cigām-iz-ēv ... « Dans cette plainte qu’Ahura Mazdā a formulée que, de la sorte, il n’y a pas moyen de savoir le rôle que tient l’ahu [nē ēdōn ahuīgīh vindišn] du fait même quʼils [ēd rāy ka] ne reconnaissent pas le seigneur comme seigneur [ka xvadāy pad xvadāy nē dārend] et qu’aucun cadeau [ud nē dahišn] jamais [cigām-iz-ēv] nʼest fait pour la charge de ratu (= dastour) [ī radīh] de la part des *ašaiia ̣ (= adorateurs) [az aš ̣aiiīh] ». b . Sur base de la traduction sanscrite svāminaṁ svāmitvena, nous devrions corriger xvadāy pad xvadāy en xvadāy pad ˟xvadāyīh, mais ce serait sans expliquer que la même erreur apparût dans le Dk 9.68.34. 6c at̰ zī θβā fšuiiaṇtaēcā V vāstraiiāicā .·. θβōrəštā tatašā .·. ʼytvn| LK| 410 OL 411 OLE 412 Y 413 pyhv|ynytʼl 414 V 415 vlcytʼl 416 blyhynyt 417 HVEyy 418 V 419 thšyt 420 HVEyy 421 AYḴ ʼv| 422 OLE Y 423 tvhšʼk 424 ˟V425 ptmʼnyk426 YHBVNt HVEyy427 .·. 408

J. DARMESTETER, 1892-3, vol. I p. 216 n. 28 : « On ne peut échapper [au mal qui vient dʼAhriman] parce que les hommes ne considèrent pas le Seigneur (le Khûtâ ou Ahu, le maître temporel) comme Seigneur... et ne traitent pas non plus comme il convient le maître spirituel (le Dastôbar ou Ratu) ». Darmesteter renvoie au V 1.20. 409 = védique r̥tā̆yú- « pieux ». 410 E7.F2.KM7.Mf4.Pt4.T6 LK. 172

428

ēdōn tō ō ōy ī pīhvēnīdār ud varzīdār brēhēnīd [hē]a ud taxšīd hē kū ō ōy ī tuxšāg ˟ud paymānīg dād hē .·. evaṁ yat tvaṁ vr̥ddhikartre ca kāryakartre ca ˟nirmitāsi | ˟ghaṭitāsi | kila tasmai yo vyavasāyī pramāṇī ca ˟pradattāsi || Ainsi toi, en faveur de l’(éleveur-agriculteur) qui engraisse (le bétail) et travaille (la terre), tu as été façonnée et tailléea = tu as été donnée à celui qui est diligent et modéréb. a

. La répétition de l’auxiliaire dans la coordination blyhynyt HVEyy V t’šyt HVEyy ne peut qu’être secondaire. b . Cf. Dk 9.28.8 ō ōy ī tuxšāg ud paymānīg. ||| Les attributs du sujet ī sont à coordonner. La cohérence des strophes 5-6 Le châtiment infligé aux impies dans la strophe antérieure allait de pair avec la récompense octroyée à l’âme pieuse dans l’au-delà. Ceci dit, ce châtiment est présenté comme étant le remède à la méchanceté d’Aŋhra Mańiiu. Dans le commentaire de la sixième strophe est enfin donnée la raison pour laquelle la vache a été offerte à l’éleveur de bétail sans pourtant 411

E7 ZK Y ; F2.K5.KM7.M1.Mf4 ʼv| ; Pt4 ʼv| ; T6 ʼv| ʼvhrmẕd. E7 OLE ʼvhrmẕd ; K5 OLE ºoº. 413 E7.F2.K5.M1 om. ; T6 lʼd. 414 F2 pyhv| ʼvhrmẕdynytʼl ; J2 pyhvynnytʼl ; KM7 (tvhš’kY) pyhv| ynyt’l ; T6 pyhvynytʼl. 415 J2 Y ; F2.K5.M1.Mf4 V ; E7.KM7.Pt4.T6 om. 416 Mf4 vlcytʼl. 417 F2 blhynyt ; T6 blyhynyt|. ||| Contre Ch. BARTHOLOMAE, 1904, colonne 798 (s. v. θwōrəštar-) : āfrīt, cf. D.N. MACKENZIE, 1971, p. 5, āfrīdan « create ». 418 KM7 HVE|yk ; E7.Mf4.Pt4.T6 HVE|yy. 419 KM7 VW ; F2 om. 420 KM7 tvhš’kY ; E7.Mf4 tvhšʼkY ; F2.Pt4 tvhšʼk ; T6 tvhšʼk|. 421 E7.KM7.Mf4.Pt4.T6 HVE|yy. 422 E7 ZK. 423 J2.Pt4 Y ; E7.F2.K5.KM7.M1.T6 om. ; Mf4 Y. 424 F2.J2 tvhšk. 425 Mf4 Y; E7.F2.K5.KM7.M1.Pt4.T6 Y ; J2 om. 426 J2 (PVN)ptmʼnyk. 427 E7.KM7.Mf4.Pt4.T6 HVE|yy. 428 J. DARMESTETER, 1892-3, vol. I p. 217 n. 29 : tûkhshâk u patmânîk. ||| Ch. BARTHOLOMAE, 1904, colonne 798 (s. v. θwōrǝštar-) : ētōn tō ō ōi .. āfrīt ē u tāšīt ē, erl.: dāt ē. ||| W. W. MALANDRA et P. ICHAPORIA, 2010 : ēdōn tō ō ōy fšōnēnīdār ud warzīdār brēhēnīd hē ud tāšīd hē [kū ō ōy ī tuxšāg ud paymānīg dād hē]. 412

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que je parvienne à en comprendre les attendus. Les détails et les rouages de l’argumentation que lʼauteur pehlevi a développée ici m’échappent. Et il n’est guère rassurant que les indications marginales, avec l’exception silencieuse de KM7, ne coïncident que pour le second vers de la sixième strophe : frāz-gōvišn ī zaraθušt. Le manuscrit J2 est le seul (contre K5) à indiquer que le dernier vers est constitué d’un frāz-gōvišn ī ohrmazd. Selon Darmesteter, « Ahura, en donnant sa loi, nous a donné le vrai moyen de lutter contre le mal : malheureusement, les hommes ne la suivent pas, ils nʼobéissent +ni au Maître spirituel ni au Maître temporel (cʼest-à-dire aux deux autorités légitimes). Cʼest seulement pour le laboureur bon quʼAhura a créé le bétail ».

7a tə̄m āzūtōiš ahurō V mąθrəm tašat̰ aš ̣ā hazaōšō .·. ZK [Y] ʼp̄ zvnykyh429 Y430 PVN mʼnsl ʼvhrmẕd OL OLE431 tʼšyt432 MNV433 PVN ʼhlʼdyh 434 hmdvššnyh 435 AYḴ ZK Y 436 mzd Y 437 MN438 mʼnsl pytʼk ʼv|439 OLE YHBVNd440 MNV441 kʼl V442 krpk|443 OḆYDVN-ḆYN .·. 444 ān [ī] abzōnīgīh ī pad mąθr ohrmazd ō ōy taxšīd445 kē pad ašaiiīh ̣ ham-dōšišnīh kū ān mižd ī az mąθr paydāg ō ōy dahend kē kār ud kirbag ˟kuned .·. F2 ʼp̄ dvnykyh (pr. m.). E7 OLEšʼn| krt| ; F2.K5.M1 om. ; Mf4 Y ; Pt4 Y OLE yẕdʼn| klt ; T6 OLEšʼn| krtn|. 431 P. B. SUNJANA et D. P. SANJANA, 1874-1928, vol. XIX p. 63 n. 2, comme K5.M1, donne OLE OL au lieu de OL OLE. 432 F2 tʼšytk (?) ; K5.M1 tvhšytʼl ; J2.Pt4 t’šyt’l ; E7.KM7 tʼšyt ; Mf4.T6 t’šyt|. 433 J2.K5 MNV ; E7.F2.KM7.Mf4.Pt4.T6 om. 434 Mf4 ’hl’dyh. 435 F2.Pt4 hmdvššnyh (pr. m.). 436 KM7 Y l’d ; K5.M1.Mf4.Pt4.T6 om. 437 E7.J2.K5.M1 om. 438 F2.J2 om. 439 Mf4 OL ; T6 āl. 440 Mf4 YHBVNd ; T6 YHBVNt. 441 E7.KM7 MN ; T6 om. 442 E7.F2.KM7 om. 443 KM7 krp|k| ; F2 krpk. 444 Ch. BARTHOLOMAE, 1904, colonne 344 (s. v. ā-zū̆tay-) : ān i awzūnīkīh pa mānsar ōhrmazd +ō +ōi tāšītār .., erl.: ān mizd i hač mānsr paδtāk ō ōi dahēnd ; col. 1796 s. v. ha-zaoša- : pa ham dōšišnīh. ||| P. B. SUNJANA et D. P. SANJANA, 18741928, vol. XIX p. 63 n. 2 (ad Dk 9.68.47) : zak î afzûnîgîh pavan mânsar aûharmazda ŏlâ ŏl tâshîdâr mûn pavan yasharâyîh ham-jûshishnîh. ||| W. W. MALANDRA 429 430

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tan mahattamatvaṁ svāmī mānthrīyam aghaṭayat puṇyena saha saṁghaṭitāya | kila tam prasādaṁ yam avistāvāksambhavaṁ tasmai dadau yena kāryam puṇyaṁ ca kr̥tam asti || 446 Tellea est l’utilité qu’Ahura Mazdā a façonnée avec le Mąθra (Spəṇta) à l’intention de celui qui s’est plié à Aš ̣a = (les Yazata) donnent la récompense issue du Mąθra (Spəṇta) à celui qui a accompli ce qui est à faire et ce qu’il est bon de faire. Traduction sanscrite : Telle est l’excellence que le seigneur (Ahura Mazdā), avec le Mąθra (Spəṇta), a façonnée pour celui qui est en accord avec Aš ̣a = (les Yazata) donnent la récompense issue de la parole avestique à celui qui a accompli ce qui est à faire et ce quʼil est bon de faire. a

. Malandra et Ichaporia, à vrai dire en accord avec la majorité des manuscrits, lisent tāšīdār pour la traduction de tašat̰ . Ni Niriosaṅgha ni le Dēnkard ne confirment cette lecture : Dk 9.28.12 ud tāšīdan ī ohrmazd mizd ō gaēθiiān pad mąθr-spand kē būd ested pēš raftār ī sūd-ōmandān kū-šān dastvar ... « (Le chapitre traite aussi de) la configuration qu’Ahura Mazdā, au moyen du Mąθra Spǝṇta, donne aux récompenses destinées aux gaēθiia, (car, faut-il savoir,) le (Mąθra Spǝṇta) fut instauré en tant que précurseur des (trois) Saōšiiaṇt en ce sens que le Mąθra (Spǝṇta) est le (futur) dastour de ces (Saōšiiaṇt) » ; Dk 9.68.47 harv kas dāned kū-šān andar rōšnīh pad vēnišn uruuāzǝmanīh447 ud ka harv kas-ēv ratīh ī ohrmazd āgāh ˟baved ud ka harv kas-ēv dāned kū-š višōbišn ī az gannāg mańiiaōi cārag dānišnīg ˟guft ud ka harv kas-ēv dāned kū ān abzōnīgīh ī pad mąθr ohrmazd tāšīd ... « Chacun sait qu’existe du plaisir dans le fait de les voir dans la lumière, quand chacun se rend compte du statut de ratu que possède Ahura Mazdā, quand chacun sait qu’il a dit avec science le remède contre la destruction que génère Aŋhra Mańiiu, quand chacun sait que l’utilité est celle qu’Ahura Mazdā a façonnée au moyen du Mąθra (Spǝṇta) ».

et P. ICHAPORIA, 2010 : ān ī abzōnīgīh pad mānsar ohrmazd ō ōy tāšīdār kē pad ahlayīh-hamdōšišnīh [kū ān mizd az mānsar paydāg "ō ōy dahēnd kē kār ud kirbag kunēd"]. 445 Ou tāšīd. 446 J. DARMESTETER, 1892-3, vol. I p. 217 n. 31 : « Les récompenses que promet la Parole sainte, il les donne à ceux qui accomplissent les bonnes œuvres de religion ». 447 Le graphème h qui a été lu dans cet avesticisme (ʼvlvʼhmnyh) est le fruit dʼun mirage : il faut lire ʼvlvʼzymnyh. 175

7b mazdā̊ gauuōi xšuuīdəmcā V huuō.urušaēibiiō spəṇtō sāsnaiiā .·. ʼvhrmẕd gvspnd 448 vhšynyt 449 AYḴš 450 BRA ʼp̄ zʼdynyt| 451 ʼv| hvltʼlʼn 452 AYḴ PVN ptmʼn 453 OŠTENyt| 454 OLE Y 455 ʼp̄ zvnyk 456 ʼvhrmẕd [V 457 ] PVN syn|vk459 msʼd460 V bʼcʼd msʼd461 .·. hmvht|458 462 ohrmazd gōspand vaxšēned kū-š be abzāyēned ō xvardārān kū pad paymān xvarend ōy ī abzōnīg ohrmazd hammōxt pad sēnag masāy ud bāzāy masāy .·. mahājñānī gopaśūn vikāśayati bhoktr̥bhyo mahattāṁ suśikṣitebhyaḥ | kila ye sīno masāe †bājāeya masāe kriyājapayajavidher mahattām āśikṣitās te || 463 Ahura Mazdā fait grandir Gaō Spəṇtā = assure la prospérité de (Gaō Spəṇtā), (le fait) au profit des consommateurs ―ilsa en ont une consommation modérée―. (C’est) enseigné par l’utile, (c’est-à-dire par) Ahura Mazdā, (dans un chapitre dont l’incipit est) : De la largeur du thorax et de la longueur du brasb. a

. Cette fois-ci, ni le second kū ni la particule kila ne sont employés pour ouvrir une glose. Ils ouvrent une incise avec laquelle des données addition448

E7.KM7.M1 gvsp̄ nd. E7.KM7.Mf4.Pt4 vhšynyt| ; F2 vhštyt. 450 T6 ʼv| AYḴš. 451 F2 ʼp̄ zʼdnyt ; J2 ʼp̄ zʼdynyt| ; K5.M1 ʼp̄ zʼdynyt ; KM7 ’p̄ z’dynyt|Y. 452 E7.F2.T6 hvltʼlʼn|. 453 E7.F2 ptmʼn| ; T6 ptmʼnk. 454 E7 hvlyt ; F2 OŠTENyt; K5.M1 OŠTENyt Y ; KM7.Pt4 OŠTENyt. 455 E7.F2 om. ; Mf4 Y. 456 Mf4 ’p̄ zvnyk. 457 E7.F2.K5.KM7.M1.Mf4.T6 om. 458 F2 hmvht. 459 K5 synvk ; KM7 s’nvk . ||| sēnag [synk|] « breast, chest » (D. N. MACKENZIE, 1971, p. 74 ; M. MAYRHOFER, 1992-2001, vol. II p. 662). 460 F2 myš ; K5 msh ; KM7 ms’ Y. 461 F2 myš ; KM7 ms’. 462 Ch. BARTHOLOMAE, 1904, colonne 562 n. 2 (s. v. xšvī̆d-) : vaxšēnēt, erl.: awzāyēnēt, alors même que le zand de xšuuid- est ailleurs šīrēnīh ; col. 1857 (s. v. + hvō.uruša-) : ō xvartārān ; col. 1574 (s. v. sāsnā-) : āmōčišn, āmōxtišn. ||| W. W. MALANDRA et P. ICHAPORIA, 2010 : ohrmazd gōspand waxšēnēd [kū-š be abzāyēnēd] ān xwardārān [kū pad paymān xwarēd] ī ōy abzōnīg [ohrmazd] hammōxt [pad sēnag-masāy ud bāzā-masāy]. 463 J. DARMESTETER, 1892-3, vol. I p. 217 n. 33 : « Pour quʼils sʼen nourrissent avec mesure ». 449

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nelles sont apportées, mais cette incise incorpore le reflet des mots spəṇtō sāsnaiiā auxquels, jusqu’alors, aucune attention n’avait été prêtée. Ceci dit, la divergence assez profonde que nous détectons dans le contenu de cette incise entre le texte pehlevi et le sanscrit est la preuve qu’un accident dut se produire au cours de la transmission : « Le grand sage (Ahura Mazdā) place le bétail en évidence devant les yeux des consommateurs qui ont reçu une bonne éducation concernant les quantités, puisque les sīno masāe et bājāe masāe donnent des indications concernant la quantité selon les règles en vigueur pour la kriyā, le japa et le yaja464 ». b . Sans doute faut-il corriger bājāeya en ˟bājāe ye˟ et admettre la répétition du pronom relatif. Je n’exclue pas que ces mots que Niriosaṅgha a laissés sans traduction représentent le titre du livre ou du chapitre contenant l’enseignement auquel il est fait allusion : il semble bien que la largeur du thorax ou la longueur du bras dont il est question dans cet incipit aient constitué des indications traditionnelles concernant la quantité de nourriture pouvant être consommée. Cette référence apparaît à plusieurs reprises dans la littérature pehlevie, mais, isolée de son contexte d’origine, reste évidemment absurde ou surprenante. Elle apparaît dans le zand du Y 32.8 et dans le Dk 7.9.2, notamment : Y 32.8b kē-š ō mardōmān cāšīd kū amāgān gōšt pad bazišn xvarēd hm’ck ANŠVTA’n PVN syn|k ms’d b’c’ddms’d .·: « Yima qui enseigna aux hommes que leur avait été accordé de manger de la viande et que leur repas serait "de la largeur du thorax et de la longueur du bras" » ; 465 Dk 7.9.2 ud ō abardom abzōn rasīdan ī ān ī gōspandān pēm ciyōn [ān ī] gōved kū ēk-iz gāv ī āz dušed ō hazār mard kū šīr and āvared cand hazār mard ud nizārīh ī šuy ud tišn ciyōn gōved kū az ēk-iz pīhv sagr baved se šabag .·. kē sēnag-masāy-ēv xvared ā-š se rōzān ud šabān vas « (Au cours du millénaire dʼUxšiiat̰ .nǝmah,) une utilité très haute du lait des bestiaux arrivera comme le dit (la Daēnā, à savoir) quʼil se traira une seule vache azī pour mille hommes = autant de lait elle apportera que mille hommes (en consommeront) ; la faim et la soif diminueront comme le dit (la Daēnā, à savoir) quʼun seul gras (de taureau) suffira à (les) rassasier pour trois nuits ; pour celui qui mangera la largeur du thorax, ce sera beaucoup alors pour trois jours et nuits ». Il en est également question dans le commentaire pehlevi du V 21.1, mais sans nous apporter davantage de précisions : nǝmasǝ tē gaōspǝṇta466 (6) nǝmasǝ tē gaōš.huδā̊ (6) nǝmasǝ tē frāδǝ̃ṇte467 (7) nǝmasǝ tē varǝδǝ̃ṇte468 (7) nǝmasǝ tē dāθrō469 baxtǝm (7) vahištāi aš ̣aōne (6) anaząθāi470 464

Il est malaisé de déterminer ce que sont au juste la kriyā « cérémonie », le japa « fait de marmonner » et le yaja « sacrifice ». 465 M. J. DRESDEN, 1966, p. 309 lignes 8-12. 466 Mis pour *gaōspǝṇte vocatif. 467 Mis pour frādayanti vocatif. 468 Mis pour vardayanti vocatif. 177

aš ̣aōne (7) .·. 471OSGE| LK TVRA Y ʼp̄ zvnyk AYḴt ʼp̄ zvn KBD hcš OSGE| OL LK TVRA Y hvdʼhk AYḴ PVN plʼlvnyh dʼt YKOYMVNyt OSGE| OL LK †plʼdhšnyhdhh† AYḴ[t] vyš BRA OḆYDVNyy OSGE| OL LK vʼlšn| †dhšnyhdhh AYḴ plpyhtl BRA OḆYDVNyy OSGE| LK MNV PVN dʼsl BRA HLKVNt| YKOYMVNyy PVN synk msʼd V bʼcʼd msʼd OL OLE pʼhlvm ʼhlvb| OLEc Y ʼY̱LYDVNtk ʼhlvb| .·.472 yā473 jahi mǝrǝṇcaite (6) aš ̣ǝmaōγō anaš ̣auua (8) maš ̣ii̯ asca druu̯ā̊ sāsta (8) .·. MNVt yyy mlcynnd ʼhlmvk Y ʼnʼhlvb| ʼy dhškyh YMRRVyt mltvmc Y dlvnd Y sʼstʼl ºoº474 « Hommage te soit rendu, Vache bénéfique {= qui offres grand profit} ! Hommage te soit rendu, Vache bien utile {= qui fut mise en place avec bonté} ! Hommage te soit rendu, toi qui permets la multiplication {= rends plus nombreux} ! Hommage te soit rendu, toi qui permets la croissance {= rends plus gras} ! Hommage te soit rendu, toi qui as été donnée en part {dans "De la largeur de la poitrine et de la longueur du bras"} à lʼexcellent harmonieux475 (et) à lʼharmonieux qui 477 nʼest pas encore né, eux deux que détruisent la jahī476, l’ašəmaōγa qui ̣ nʼest pas harmonieux {―cʼest la caractéristique quʼil donne―} et le mortel druuaṇt478 qui commande ». 7c kastē vohū manaŋhā V yə̄ ī dāiiāt̰ ə̄əāuuā marətaēibiiō .·. MNV LK HNA 479 vhvmn AYḴ HNA 480 ZYt 481 ḴN HYTYVNyt 482 MNV PVN483 ZK484 [Y]485 KRA 2486 ʼp̄ stʼk487 V488 znd PVME489 YHBVNyt490 ʼvšmvltʼlʼn491 ʼylptʼn|492 .·. 469

Mis pour dāθri vocatif. À corriger en ˟anaząθβāi ? 471 Le texte pehlevi est donné dʼaprès le manuscrit L4 (4600). 472 namāz tō gāv ī abzōnīg kū-t abzōn vas aziš namāz ō tō gāv ī hudāhag kū pad frārōnīh dād ested namāz ō tō ˟freh-dahišnīg hē˟ (ou ˟frāxvēnišnīg hē˟) kū[-t] vēš be kunē namāz ō tō ˟vālišn-dahišnīg hē˟ kū frabīh-tar be kunē namāz tō kē pad dāθr be-baxt estē {pad sēnag masāy ud bāzāy masāy ō ōy paš ̣ǝm aš ̣auu ud ōy-iz ī a-zādag aš ̣auu .·.. 473 Masculin duel reprenant vahištāi aš ̣aōne et anaząθāi aš ̣aōne ? 474 kē[-t] jeh murnjēnend ud aš ̣ǝmaōγ ī anaš ̣auu {ay daxšagīh gōved} mardōm-iz ī druuaṇt ī sāstār ºoº. 475 aš ̣auuan- « accompagné de l’agencement rituel, harmonieux, pieux ». 476 La mauvaise partenaire sexuelle. 477 Celui qui fait dévier l’agencement. 478 Accompagné de l’erreur, égaré, impie. 479 E7 ẔNE ; F2 ʼv|. 480 E7 ẔNE ; KM7 om. 481 J2 ou zlt ? T6 zyt|. Lire ZYt ? 470

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kē tō ēd vohu.man kū ēd ī-t ōh ānayed kē pad ān [ī] harv dō abestāg ud zand dahān dahed ōšmurdārān ērbedān .·. kas ta uttamamanā | yo dvitīyaṁ dadāti mukhenādhyayanakarebhyaḥ | kila yo dvitīyam avistāvistārthaṁ ca vidyārthibhyo jñāpayati || Qui est pour toi ce Vohu Manaha ? = Qui est celui-ci qui teb conduit de la sorte etc donne bouched avec ces deux que sont lʼAbestāg et le Zande aux professeurs qui les mémorisentf ? Traduction sanscrite : Qui est pour toi celui qui possède une pensée excellente et donne la paire (de textes) avec la bouche à ceux qui impartissent enseignement ? = (Qui) fait en sorte que les interessés par la science connaissent à la fois l’Abestāg et le sens de l’Abestāg ? a

. Pour Niriosaṅgha, l’emploi de l’instrumental vohū manaŋhā équivaut à recourir au bahuvrīhi uttamamanāḥ « possesseur d’une excellente pensée », mais le texte pehlevi ne le confirme apparemment pas. b . Malandra et Ichaporia494 indiquent que « All MSS have nK TEz av ēd ī-t ōh! » et qu’il faudrait lire ēd ˟ī tō˟. Ceci me paraît douteux. En outre, il n’a guère été vu que le pronom kē (MNV) situé derrière ānayed est interrogatif et sujet d’une proposition nominale dont le prédicat est le démonstratif ēd situé derrière kū ni que ce démonstratif ēd est l’antécédent du pronom relatif avec lequel est ouverte la proposition subordonnée ī-t ōh ānayed. c . Derrière ānayed kē, nous devons restaurer le pronom relatif ī reflet de l’avestique yə̄, puisque Niriosaṅgha le traduit. d . pad ān [ī] harv dō abestāg ud zand dahān dahed ōšmurdārān ērbedān : devons-nous faire confiance au manuscrit T6 ou plutôt à NirioJ2 HYT|YVNyt ; KM7 HYTYVNytY ; Mf4 HYT(V)YVNyt ; T6 HYTYV(ʼn|)Nyn. J2 endommagé : [...]. 484 E7.F2.KM7.Mf4.Pt4.T6 om. 485 E7.F2.J2.KM7.Mf4.Pt4.T6 om. 486 J2 om. 487 E7.Mf4.Pt4 ’p̄ yst’k. 488 K5.M1 om. 489 T6 PVN PVME (avec la seconde séquence PV sec. m. ?). 490 E7.F2.KM7.Pt4 YHBVNyt ; J2.K5.M1.Mf4 YHVVNyt ; T6 YHBVNt|. 491 E7 ʼmšvltʼlʼn| ; F2 ʼvšmltʼlʼn| ; K5.M1.T6ʼvšmvltʼlʼn|. 492 E7.F2.J2.K5.KM7.M1.T6 ʼylptʼn| ; Mf4.Pt4 ’ylpt’n. 493 Ch. BARTHOLOMAE, 1904, colonne 155 (s. v. 2ay-) : ān i har 2 ; col. 724 (s. v. 1dā(y)-) : kē pa ān i har 2 dahān dahēt ōšmurtārān ; col. 347 (s. v. ǝ̄ ǝāvā ‛uns beide’) : dahān. ||| W. W. MALANDRA et P. ICHAPORIA, 2010 : kē tō ēd wahman [kū ēd ī tō ānayēd] kē pad ān ī harw dō [abestāg ud zand] dahān dahēd ō ōšmurdārān [hērbedān]. 494 W. W. MALANDRA et P. ICHAPORIA, 2010, p. 23 n. 3. 482 483

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saṅgha et penser qu’il y a là un désordre des mots pour **PVN PVME ZK Y KRA 2...? Sanjana495, malgré le parallélisme de Dk 9.68.47 qui l’interdit496, n’hésite pas à considérer que dahān est l’objet de dahed : « mûn pavan zak î kolâ dô avistâg va zand fûmâ yehabûnêd aûshmûrdârân aîrpatân, “who gives the reciting priest mouth as to both the Avesta and Zand.” Reading: yông in the text, Gâthic Av. âŏngh, eêâŏngh, “mouth” ». Niriosaṅgha lui aussi interprète ǝ̄ǝāuuā comme si ce fût une forme de uba-/uua- « tous deux », mais rend ǝ̄ǝº par mukhena « avec la bouche ». e . Faut-il corriger avistāvistārthaṁ ca en ˟avistām ˟avistārthaṁ ca ou penser que le mot avistā, pour être un emprunt, est invariable ? f . Avec Malandra et Ichaporia497 pour qui « since one might expect ō ‘to’ with dahēd it is likely that the preposition was lost owing to the initial of ōšmurdārān. Thus one should restore nvLaTlHsvv ». ||| Il n’est pas assuré que marǝta- ne soit pas à expliquer par √ 2mar, même si Bartholomae498 est arrivé à dire que sa traduction « ōšmurtār, erl.: ēhrpat » aurait été opérée « auf Grund falscher Etymologie ». ||| Dans le texte pehlevi, ōšmurdārān « mémorisateurs » est glosé par ērbedān « professeurs » tandis que, chez Niriosaṅgha, le mot à mot comporte adhyayanakarebhyaḥ « aux enseignants » et le commentaire, vidyārthibhyaḥ « aux intéressés par la science ». La cohérence des strophes 6-7 Selon les indications marginales présentes dans tous les sept manuscrits, les vers 7ab forment un frāz-gōvišn ī zaraθušt tandis que le vers 7c contient un frašn ī ohrmazd. La récompense qui avait déjà été mentionnée dans le commentaire de la sixième est décrite dans celui de la septième strophe comme étant le fruit du Mąθra Spǝṇta qu’Ahura Mazdā utilise. Sans doute la septième strophe, au vu du commentaire, introduit-elle un nouveau personnage, le dieu Vohu Manah à qui Ahura Mazdā pose une question. Niriosaṅgha ne semble pas le confirmer, mais un certain rôle lui est assigné dans la transmission de l’abestāg et du zand du Mąθra Spǝṇta de professeurs à étudiants. Selon Darmesteter, « Ahura a donné la graisse au bétail, pour nourrir lʼhomme ; et à lʼhomme il a donné sa loi, pour lui apprendre à ménager la vie animale. Mais quel est lʼhomme, demande Ahura, qui, inspiré de Vohu-Manô, révélera cette loi aux hommes ? »

495

P. B. SUNJANA et D. P. SANJANA, 1874-1928, vol. XVIII p. 58 n. 5 (ad Dk 9.50.10). 496 Voir ad 7a. 497 W. W. MALANDRA et P. ICHAPORIA, 2010, p. 23 n. 4. 498 Ch. BARTHOLOMAE, 1904, colonne 1148 (s. v. marǝta-). 180

8a aēəm mōi idā vistō V yə̄ nə̄ aēuuō sāsnā̊ gūšatā .·. HNA 499 L 500 dhšn| nvst|-ą 501 AYḴ +mzd Y 502 ˟HNA Y TVRA Y˟ 503 ’yvk nvst|504 [ʼn|] ZK Y505 LNE hmvhtšn|506 HNA507 ʼyvk508 MNV509 ndvhšʼk510 .·.511 512 ēd-im dahišn nivist +im kū +mizd ī ˟ēd ī gāv ī˟ ēk nivist [ān] ān ī amā hammōxtišn ēd ēk kē niyōxšāg .·. ayam ma enāṁ dātim alabhata | gorūpām | yo ˟’smākam ekaḥ śikṣāṁ śuśrāva | Celui-ci m’aa annoncé ceb don = (Celui-ci m’)a annoncé cette récompense de la vache Aēuuō.dātāc, ici le seul à avoir écoutéd notre enseignement. a

. L’adjectif démonstratif enām présent dans la traduction que Niriosaṅgha propose du zand proprement dit du premier hémistiche correspond probablement à ce que nous détectons dans les manuscrits entre nivist et kū513. b . Je considère que l’uzvārišn L vaut aussi pour le pronom enclitique. c . Sur base de la traduction que Niriosaṅgha nous offre du commentaire pehlevi, la séquence ’ytvn| HD pourrait contenir +TVRA « bovin, vache » : E7 ʼv| ; M1 HNA. J2.K5 om. ; M1 L. 501 J2.K5.M1 nvst|ą ; E7.F2.Mf4 nvst|ym ; KM7 nvst (|’m)|ym ; Pt4 nvst|ym (|ym) ; T6 (vndt) nvst|ym. 502 F2 est seul à donner mzd Y, mais nous trouvons AYḴm ZK Y dans KM7.Mf4. Pt4.T6 tandis que E7.J2.K5.M1 om. mzd Y. 503 Au lieu de ˟HNA Y TVRA Y˟, nous trouvons : KM7.M1.Mf4.Pt4.T6 ’ytvn| HD ; F2 ʼytvn HD ; J2.K5 ’ytvn| HNA. 504 KM7 ; F2 nvst|m ; T6 nvst|m. 505 J2 om. ; E7 donne ZK Y ʼv| au lieu de ʼv| ZK Y. 506 Pt4 hmvhtšn|. 507 T6 ʼv|. 508 KM7.Mf4 ’yvk|. 509 J2 ʼn MNV. 510 E7.KM7.Mf4.Pt4 ndvš’k ; F2 ndvkšʼk ; T6 ndvšʼ. 511 Pt4 add. au-dessus de la ponctuation ẔNE KRA 2 BRA YHBVNyt. Avant la ponctuation, E7 donne HNA KRA 2 BRA YHBVNyt ; T6 donne ẔNE KRA 2 YHBVNyt|. 512 Ch. BARTHOLOMAE, 1904, colonne 365 (s. v. 2iδa) : ētōn ; col. 486 (s. v. gaoš-) : nigōšītan. ||| niyō(x)šīdan [n(y)dv(h)š-ytn|] « hear » (D. N. MACKENZIE, 1971, p. 60 ; J. CHEUNG, 2007, p. 115 et 221). ||| W. W. MALANDRA et P. ICHAPORIA, 2010 : ēd man dahišn niwist [kū-m ān ēdōn ēd ēwag niwist] ō ān ī amā hammōxtišn ēd ēwag kē niyōšāg. 513 W. W. MALANDRA et P. ICHAPORIA, 2010, n’en ont cure. 499 500

181

« Il a pris pour moi ce cadeau consistant en une vache, celui qui a été le seul à écouter notre enseignement », mais, par saut du même au même, le texte de Niriosaṅgha a été amputé de la plus grande partie du commentaire du premier hémistiche : gorūpām. Selon F2, le commentaire pehlevi a pu contenir mizd « la récompense » : AYḴ +mzd Y ˟HNA +TVRA Y+ ’yvk nvst|. d . Comme niyōxšīdan (ndvhšytn|), en principe, n’exige pas de préposition ō pour son régime, nous devons514 lire ’n| au lieu de ’v| et considérer que le scribe, sans se biffer, s’est ensuite répété ou corrigé en préférant l’uzvārišn correspondant ZK. 8b zaraθuštrō spitāmō V huuō nə̄ mazdā vaštī aṣ̌āicā .·. zltvšt| 515 Y 516 spytʼmʼn| 517 OLE 518 ZK Y LNE ʼvhrmẕd 519 kʼmk V 520 ʼhlʼdyhc521 AYḴ522 ʼp̄ ʼdst|523 [Y524] ʼv|525 kʼl526 V527 krpk|528 bvndk529 .·. .·. 530 zaraθušt ī spitāmān ōy ān ī amā ohrmazd kāmag ud ašaiiīh-iz kū ̣ abāyist ō kār ud kirbag bovandag .·. .·. jarathuśtraḥ spitamaputraḥ | asāv asmākam ˟mahājñāninaḥ kāmaṁ dharmasya ca | upāyakartr̥tvaṁ ca samudgirati | ˟kilāsmā evaṁ˟ rocate yad dīniḥ pravartamānā bhavati | upāyaṁ ca drūjasya kathayati | 514

Contre W. W. MALANDRA et P. ICHAPORIA, 2010. E7.K5.M1 zltvšt ; F2.T6 zltvhšt|. 516 E7.F2.T6 om. 517 E7 spytʼmʼn| HVEm ; KM7 sp̄ yt’m’n ; Mf4 spyt’m’n ; Pt4 spytʼmʼn ; T6 spytʼmʼn| HVE|m. 518 J2 ʼv OLE. 519 Mf4 ’vhrmẕd. 520 J2.Mf4.Pt4 om. ; F2.K5.M1.T6 V. 521 F2 ʼhlʼdyh ; K5.M1 ʼhlʼdyh c Y. 522 M1 AP̄ AYḴ. 523 E7.KM7.Pt4.T6 ʼp̄ ʼst| ; F2 ʼp̄ st| ; K5.M1 ʼp̄ ʼsyt ; J2.Mf4 ’p̄ ’syt|. 524 E7.J2.K5.M1 om. 525 E7 ZK ; F2 OLE ; KM7.Mf4.Pt4.T6 ’v| ; J2.K5.M1 K̠N. 526 M1 kāl. 527 E7.J2 om. 528 F2 krpk ; J2 (vyš) ; K5 krpk (vyš). 529 E7 bvndk OḆYDVNm ; M1 vyš bvndk ; Mf4 bvndk| ; Pt4 bvndk| OḆYDVNm ; T6 (K)B(D)vndk OḆYDVNm. 530 Ch. BARTHOLOMAE, 1904, colonne 1382 (s. v. vas-) : kāmak ; W. W. MALANDRA et P. ICHAPORIA, 2010 : zardušt ī spitāmān ōy ān ī amā ohrmazd kāmag ahlāyīh-iz [kū abāyist ō kār ud kirbag bowandag]. 515

182

531

Zaraθuštra descendant de Spitāmaa. Cʼest lui qui (formule) notre recherche d’Ahura Mazdā et d’Aš ̣a = Il faut se livrer pleinement à l’accomplissement de ce qui est à faire et de ce quʼil est bon de faireb. a

. Certains copistes tardifs ont introduit HVE|m « je suis » derrière spytʼmʼn| de façon à ce que Zaraθuštra apparaisse comme l’auteur du texte. ||| Dans les noms propres, il est habituel d’éviter l’emploi de la ligature sp̄ , car ce sont généralement des emprunts faits à l’avestique. b . Chez Niriosaṅgha, le commentaire est apparemment plus étendu : « Zaraθuštra fils de Spitāma. Celui-là formula notre désir de rencontrer le grand sage (Ahura Mazdā) et Dharma ainsi que de trouver un remède (à la méchanceté d’Aŋhra Mańiiu), car il lui semble que la Daēnā se propage et expose la façon d’affronter le Draōjina (= Aŋhra Mańiiu) ». En réalité, les mots upāyakartr̥tvaṁ ca samudgirati rendent 8c1. Le fait est exceptionnel : la division en vers ici n’est pas respectée. Une ponctuation placée dans J2 au terme de 8c1 va dans le même sens. 8c carəkərəθrā srāuuaiieŋ́hē .·. hiiat̰ hōi hudəmə̄m diiāi vaxəδrahiiā .|.·. V532 cʼlk533 krtʼlyhc534 slʼdyt|535 AYḴ cʼlk536 Y537 dlvcn538 ḆYN gyhʼn539 BRA YMLLVNyt|540 MNV ʼv| OLE hvdmn|yh541 YHBVNyt542 PVN gvbšn|543 AYḴ gvbšn| Y 544 plʼlvnyh 545 lʼd 546 ḴN YMLLVNyt| 547 ʼš TME 548 PVN mynvd549 gʼs Y550 nyvk551 Y552 plʼlvn553 YHBVNd554 .·. 531

J. DARMESTETER, 1892-3, vol. I p. 217 n. 35 : « Cʼest-à-dire que son désir est pour les bonnes œuvres parfaites ». 532 F2 Y ; J2.K5.M1 om. 533 K5.M1 cʼlk|. 534 F2 tʼlyc. 535 F2 slʼdyt ; J2 ^slʼst| ; Pt4 slʼdyt|. 536 E7.F2.KM7.Mf4.Pt4 c’lk|. 537 E7.F2.T6 om. 538 F2 dlvc ; K5.M1 dlvcY. 539 KM7 Y̠KTLVNt|gyh’n ; E7.K5.M1.T6 gyhʼn| ; F2 dhhʼn|. 540 K5 om. ; M1 ; E7.KM7.Mf4.Pt4 YMRRVyt ; F2.T6 YMRRVyt|. 541 E7 hvmn|yh ; F2 hvdmn||yh ; Mf4 hvdmn|yh. 542 T6 YHBVNyt|. 543 KM7 gvbšnyh. 544 E7.F2.J2.T6 om. 545 K5.M1 plʼlvnyh Y ; E7.Mf4.Pt4 pl’lvn ; F2.KM7.T6 plʼlvn|. 546 K5.M1 lʼd Y ; KM7 l’’dl’d ; Mf4 l’dY. 547 E7 YMRRyt ; F2 YMRRVyt| ; K5 YMLLVNyt ; KM7.Mf4.Pt4 YMRRVyt ; T6 V YMRR (yt|)ym. 183

555

ud cārag-kardārīh-iz srāyed V kū cārag ī draōjin ī andar gēhān be gōved V kē ō ōy †hu-dǝmnīh dahed pad gōvišn V kū gōvišn ī frārōn[īh] rāy ī ōh gōved V ā-š ānōh pad mańiiaōi gāθ ī nēk ī frārōn dahend .·. yad asmai ca supadatvaṁ dāsyati vacasā | kila vacasā tad evodgirati yad asya sthānam paraloke dāsyati || 556 a Et son récital est l’efficacité du remède = Il proclame le remède contre le Draōjina qu’il y a dans le monde, celui qui va lui offrir bon ...b en parole = pour la parole profitablec qu’il dit de la sorte, alors (les dieux) lui donnent une belle et bonne place là-basd, dans le Mańiiu [= (monde) abstrait]. a

. Les mots upāyakartr̥tvaṁ ca samudgirati qui rendent 8c1 ont été joints à ceux du zand de 8b2. b . Face à la perplexité de Bartholomae557 qui se résout à donner « hu d m n n īh », Sanjana558 lit hû-demânîh. En revanche, Malandra et Ichaporia559 éditent *hamgōwišnīh tout en indiquant que c’est « Instead of hamgōwīh ». Au lieu de le faire en tenant compte de l’original avestique hudəmə̄m, ils paraissent s’appuyer sur la traduction sanscrite supadatvam pour lire hnYMRRyh. La traduction sanscrite est pourtant ambiguë, puisque, 548

J2 T(V)ME. T6 mynvk̑| º [le signe suscrit transforme k en d]. 550 F2 om. ; Mf4 Y. 551 Mf4.Pt4 nyvk|. 552 E7.F2.K5.KM7.M1.Mf4.Pt4.T6 om. 553 E7.F2.K5.KM7.M1.Mf4.Pt4.T6 om. 554 T6 YHBVNt̑. 555 J. DARMESTETER, 1892-3, vol. I p. 217 n. 36 : aîgh cârak î drûj dar gêhân barâ yamalalûnêt. ||| Ch. BARTHOLOMAE, 1904, colonne 582 (s. v. carǝkǝrǝθra-) : čārak kartārīh, erl.: čārak i druž i andar gēhān ; col. 1645 (s. v. srāvayeŋ́hē) : srāyēt ; col. 1337 (s. v. vaxǝδra-) : gōwišn. ||| P. B. SUNJANA et D. P. SANJANA, 18741928, vol. XVIII p. 59 n. 2 (ad Dk 9.50.13) : mûn avô ŏlâ hû-demânîh yehabûnêd pavan gûbîshn, aêgh gûbishn î frârûnîh râî î ghal yemellûnêd, ash tamâ pavan maînûg gâs î nêvag yehabûnd. ||| W. W. MALANDRA et P. ICHAPORIA, 2010 : cāragkardārīh-iz srāyēd [kū cārag ī druz ī andar gēhān be gōwēd] kē ō ōy *hamgōwišnīh dahēd pad gōwišn [kū gōwišn ī frārōn rāy ōh gōwēd ā-š ānōh pad mēnōg gāh ī nēk dahēnd]. 556 J. DARMESTETER, 1892-3, vol. I p. 217 n. 36-37 : « cʼest-à-dire quʼil dira dans le monde le moyen dʼéchapper à la Drûj » ; « A cause des bonnes paroles quʼil dit, on lui donne belle place là-bas dans le ciel ». 557 Ch. BARTHOLOMAE, 1904, colonne 1826 (s. v. hudǝma-). 558 P. B. SUNJANA et D. P. SANJANA, 1874-1928, vol. XVIII p. 59 n. 2 (ad Dk 9.50.13). 559 W. W. MALANDRA et P. ICHAPORIA, 2010, p. 23 n. 5. 549

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dans supadatvam, pada- peut faire référence à un mot ou à un lieu. Il ne fait aucun doute que nous devons donner raison à Bartholomae et écrire hvdmn|yh même si pareil avesticisme nous laisse désarmés à l’instant de savoir ce que l’interprète médiéval a bien pu comprendre, mais ce n’est peutêtre qu’une apparence puisque le n de hvdmn|yh ne peut aucunement être justifié sur base de l’original avestique hudǝmə̄m, à moins qu’il faille le corriger en ˟hudǝmə̄n. Pour sa part, James Darmesteter560, à l’expliquer par le pehlevi damûn et le védique damûnas, lisait hû-damûnîh. c . gōvišn ī frārōn[īh] rāy: incompatibilité de ī avec ºīh. d . Les ingrédients pad gōvišn ... ā-š ānōh ... gāθ ... dahend rappellent ceux du Dk 9.50.13 ud ēn-iz kū ka tis ō ōy kas dahed kē yazadān vehān stāyed ā-š pad-iz gōvišn gāθ ānōh xvēšēnīd baved « (Le chapitre traite) aussi (de) ceci : Si quelqu’un donne quelque chose à celui qui adresse aux Yazata l’éloge de leur bonté561, une place lui est réservée dans l’au-delà en fonction du discours (prononcé) ». La cohérence des strophes 7-8 Sans tenir compte du silence de Pt4, nous pouvons dire que tous les manuscrits offrant des indications marginales coïncident : les deux premiers vers de la huitième strophe contiennent un discours de Vohu Manah, mais KM7 se limite à dire frāz-gōvišn ī vohu.man face au syntagme plus précis des autres manuscrits, passaxv-gōvišn ī vohu.man. Le dieu Vohu Manah, dont le nom apparaissait dans le dernier vers de la septième strophe, affirme que Zaraθuštra a apporté ce qui pourra être considéré à la fois comme une récompense octroyée à l’âme-moi du pieux défunt, comme la garantie qu’une place lui est réservée au paradis, comme un remède à la méchanceté d’Aŋhra Mańiiu, comme un enseignement bien utile et comme étant la propre vache par excellence. Si nous combinons la clarté de KM7 avec l’imprécision du lieu où les autres manuscrits les donnent, nous apprenons aussi, par les indications marginales, que le dernier vers de la huitième strophe constitue un frāz-gōvišn ī zaraθušt. Ceci paraît erroné. Les auteurs médiévaux ne devaient pas retirer la parole à Vohu Manah avant la neuvième strophe. James Darmesteter, non plus : « J’ai trouvé lʼhomme unique qui la [= la loi] recueillera, répond Vohu Manô ; cʼest Zarathushtra, lequel chantera aux hommes ce quʼil y a à faire pour lutter contre le mal ».

560 561

J. DARMESTETER, 1892-3, vol. I p. 217 n. 37. Un éloge dans lequel ils sont appelés « bons ». 185

9a at̰ cā gə̄uš uruu̯ā raōstā V yə̄ anaēšəm xšąnmə̄nē rādəm .·. ʼytvn|c 562 gyvšʼvlvn| 563 glcyt| 564 AYḴ OLE Y 565 ʼhvʼstʼl lʼd 566 567 Y ʼtvbʼn| 568 zltvšt| 569 ’m YHVVNyt ʼšʼt 570 mynšnyh PVN 571 ZK [Y] 572 ʼlʼt|573 dhšnyh574 †AMTš575 bvndk576 QDM BRA577 LA lʼtynynd578 .·. 579 ēdōn-iz gǝ̄uš.urun garzīd kū ōy ī a-xvāstār rāy ī a-tuvān zaraθušt ā-m baved a-šād-mēnišnīh pad ān [ī] arād-dahišnīh ˟kū-š bovandag abar be nē rādēnend .·. evaṁ ca gopaśūnām ātmā krandati | yo ’yācako ’nānandamanā adakṣiṇādānena | yad asyopari vapuḥ sampūrṇaṁ na dakṣiṇyam | ayācakaś cāśaktitayā | Gə̄uš Uruuan se plaignit aussi en disant cecia : De ce Zaraθuštra qui ni ne lance aucune prière ni n’a aucun pouvoir, jeb suis alorsc déçued, car aucune donation généreusee ne lui est faite = (les hommes) ne se montrent en rien généreux envers lui. a

. L’apparent adjectif-pronom relatif yat que nous trouvons devant asyopari vapuḥ doit correspondre au kū avec lequel est ouvert le discours direct complément de garzīd. 562

J2 endommagé: [...]ytvn| c ; E7.F2.KM7.M1.Mf4.Pt4.T6’ytvn|. E7.K5.Mf4.Pt4 gyvšʼvlvn ; KM7 gvš’vlvn ; J2 Y gvš’vlvn|. 564 F2.K5.M1 glcyt. 565 J2 ’v| ; E7.F2.KM7 OLE ; K5.M1 ʼv| Y V ; Mf4.Pt4.T6 OLE Y. 566 J2 sec. m. in marg. 567 E7.F2.J2.T6 om. 568 F2 ʼytvbʼn| ; Mf4.Pt4 ’tvb’n. 569 F2 zltvhšt ; T6 zltvhšt|. 570 J2.K5.M1 ʼšʼyt|. 571 J2 PVN PVN. 572 E7.F2 om. 573 F2.M1.Pt4 ʼlʼt. 574 KM7 dhšn|yh. 575 KM7 MNV ; E7.Pt4 MNVš. 576 F2 bvnd ; E7.KM7.Mf4.Pt4 bvndk|. 577 F2 BRA ME QDM au lieu de QDM BRA. 578 F2 lʼtynynḆYN ; J2 lʼtynd. 579 J. DARMESTETER, 1892-3, vol. I p. 217 n. 39 : shât-mînishn. ||| Ch. BARTHOLOMAE, 1904, colonne 69 (s. v. at̰ -cā̆) : ētōnča, ētōnči ; colonne 554 (s. v. xšąnmǝ̄ nē) : +ašāt (Npü.: nāšād) mēnišnīh ; col. 1521 (s. v. rāda-) : pa ān i arāt dahišnīh, erl.: +kuš bavandak apar apē nē rātēnēnd. ||| W. W. MALANDRA et P. ICHAPORIA, 2010 : ēdōn-iz gōšurun garzīd kū ōy ī axwāstār rāy [ī atuwān zardušt] ā-m bawēd ašād-menišnīh pad ān ī arād-dahišnīh [ka-š bowandag abar be nē rādēnēnd]. 563

186

b

. Visiblement, Niriosaṅgha n’avait pas sous les yeux le même texte pehlevi, car, dans la traduction qu’il offre n’apparaissent ni la première personne grammaticale ni le nom de Zaraθuštra, mais il est vrai que le texte sanscrit pourrait bien être lacunaire : « Et l’âme des bestiaux se plaint de la sorte : Lui qui sans aucune prière, déçu du manque de rétributions. Que la générosité nullement envers lui, et sans prière avec le manque de pouvoir ». c . La particule ā joue le rôle de corrélatif de rāy. d . Le zand a-šād-mēnišnīh suppose une mauvaise lecture de xšąnmə̄nē selon laquelle le mot commençait avec une négation de la joie (*aš́ āº). e . pad ān [ī] arād-dahišnīh : incompatibilité de ī avec ºīh. ||| Le zand arāddahišnīh décompose rādəm. 9b vācəm nərəš asūrahiiā V yə̄m ā vasəmī +īšā xšaθrī ̃m+ V 580 gvbšn|c581 Y 582 ʼv|583 GBRAʼn| 584 ʼnʼp̄ zʼlyh lʼd AMT dyn|585 bvn586 dk LA lvbʼk 587 MNVm OLEšʼn 588 kʼmk| 589 hvʼdšn| 590 Y 591 ʼv| 592 hv593 tʼdyh AYḴm594 OLEšʼn595 lʼd596 mgvptʼn|597 mgvptyh598 ʼp̄ ʼyt599 .·. 600 ud gōvišn-iz ī ō mardān anabzārīh rāy ka dēn bovandag nē ravāg kēm avēšān kāmag xvāhišn ī ō xvadāyīh kū-m avēšān rāy mov-bedān movbedīh abāyed .·. 580 581 582 583 584 585 586 587

F2.J2.K5 om. Mf4 gvbšn|(Y)c. E7.F2 om. J2 ʼv|(hrmẕd). F2 mltʼn| ; J2 GRBAʼn| ; Mf4.Pt4 GBRA’n. KM7 d’n|dyn|. F2 bvnd. F2 lvbʼk YHSNNyt (sec. m.) ; KM7 lvb(W)’k ; Pt4 lvbʼk

YHSNNd

; E7.T6 lvbʼk YH-

SNNd. 588 589 590 591 592 593 594 595 596 597 598 599

E7.F2.K5.M1.T6 OLEšʼn| ; J2 ’v| OLEš’n. F2.K5.M1 kʼmk. F2 hvʼdšn ; Mf4 hv’dšn|. F2 om. ; Mf4 Y. E7.F2.KM7.Mf4.Pt4.T6 OL. F2 hvtʼyh ; T6 hvʼdyh hvʼdšn|. J2.K5.M1 AYK̠m ; E7.F2.Mf4.Pt4.T6 AYḴš. F2.T6 OLEšʼn|. F2 om. J2 mhvptʼn ; K5.M1 mhvptʼn| V ; KM7.Mf4.Pt4 mgvpt’n. E7 mgvpt| ; F2 mgvpt ; M1 mhvptyh ; Mf4 mgvptyh. E7 ʼp̄ ʼst| ; KM7.Mf4.T6’p̄ ’yt| ; Pt4 ʼp̄ ʼyt| AYḴ gvspndʼn| lʼd pʼsp̄ʼnyk OḆYDVNd. 187

vācaṁ narāṇām asādhanatāyai | yad dīniḥ sampūrṇaṁ na pravartate | yas tasmā īpsayitā yācayitā rājyam | tasmai jarathuśtrāya | moïbadānām moïbadatvaṁ samīhate | 601 Et (je suis déçue aussi) du manque de ressources du discours qu’il adresse aux hommes, puisque la Daēnā ne se propage pas du touta. (Celui) quib souhaite que jec leur obtienne la souveraineté = (Celui qui) a besoin que jec sois le mage des mages pour euxd. a

. bovandag nē ; sampūrṇaṁ na : cf. 9a. . J’ignore quel est l’antécédent de ce pronom relatif. c . Niriosaṅgha nomme Zaraθuštra là où le zand pehlevi introduit un pronom de la première personne du singulier : « (Celui) quib cherche à lui faire obtenir la souveraineté ―(Dans cette phrase, le pronom "lui" (représente) Zaraθuštra― = (Celui qui) demande que (Zaraθuštra) soit le mage des mages ». d . Selon Pt4, le pronom « eux » (avēšān) représente les bestiaux, mais Niriosaṅgha ne reflète pas ce pronom. b

9c kadā yauuā huuō aŋhat̰ V yə̄ hōi dadat̰ zastauuat̰ auuō .·. cygvn hklc|602 ZK603 dhšn| AYT|604 AYḴ ZK ẕmʼnk|605 hklc|606 YHMTVN607 yt| AMT ʼv|608 OLE YHBVNyhyt609 PVN tvbʼn|610 hvʼdšnyh hdybʼlyh611 ʼv|612 OLE613 zltvšt|614 .·. 600

P. B. SUNJANA et D. P. SANJANA, 1874-1928, vol. XVIII p. 59 n. 3 (ad Dk 9.50.14) : gûbishn-ich avô gabrâân ana-afzârîh râî. ||| Ch. BARTHOLOMAE, 1904, colonne 211 (s. v. a-sūra-) : an ap z a r īh rāδ ; col. 375 (s. v. +īšā.xšaθrya-) : kēm ōšān kāmak xvāhišn i ō xvatāδīh, erl.: kum ōšān rāδ mavpatān mavpatīh apāyēt. ||| W. W. MALANDRA et P. ICHAPORIA, 2010 : gōwišn-iz ī ō mardān anabzārīh rāy [ka dēn bowandag nē rawāg] kē-m awēšān kāmag xwāhišn ī ō xwadāyīh [kū-m awēšān rāy mowbedān mowbedīh abāyēd]. 601 J. DARMESTETER, 1892-3, vol. I p. 217 n. 40-1 : « La religion nʼétant pas en progrès » ; « Revêtu du pouvoir de Mobed des Mobeds ». 602 F2 hklc. 603 T6 hmʼk ZK Y. 604 E7 ʼst| ; F2 AYT. 605 E7 ẕmʼnk ; F2 ẕmʼn| ; J2 Wẕmʼn ; KM7 Y z̠ m’nk|. 606 F2.KM7 hklc. 607 E7.F2.K5.KM7.M1.Mf4 YHMTVNyt ; Pt4 YHMTVNyt ; T6 YHMTVNyt|. 608 E7 ZK. 609 T6 YHBVN―yhyt|. 610 E7 tvbʼnyh ; K5.M1.Mf4 tvbʼn ; Pt4 tvbʼnyh. 611 F2 hdybʼlyh ʼhlʼdyh. 188

615

ciyōn hagriz ān dahišn ast kū ān zamānag hagriz rased ka ō ōy dahīhed pad tuvān-xvāhišnīh ayārīh ō ōy zaraθušt .·. kathaṁ dātiḥ kadā cit sāsti | kila saḥ kālaḥ kadā cit prāpnoti | yo ’smai dāsyati śaktitayā sāhāyyam | asmai jarathuśtrāya || Comment sera jamais cette offre? = Le jour viendra-t-il qu’il lui sera offert de lʼaide autant que faire se pourraa ―à lui = à Zaraθuštra ― ? a

. Le sens du syntagme pad tuvān-xvāhišnīh me paraît être « avec la qualité de celui qui a la possiblité d’acquérir, autant que faire se peut » ; celui de l’instrumental sanscrit śaktitayā, « dans la mesure du possible, au vu des circonstances ». La cohérence des strophes 8-9 L’intervention de Zaraθuštra dans le monde apparaît alors comme la solution par excellence, comme la réponse à donner aux questions, plaintes et prières de Gə̄uš Uruuan. Gə̄uš Uruuan n’est pourtant guère rassuré : l’intervention de Zaraθuštra, son succès et la diffusion de la Daēnā n’appartiennent encore qu’à la théorie. Pour l’instant, Zaraθuštra manque de tout. Il lui manque même la bouche avec laquelle il pourrait prononcer les mots de la Daēnā. Sʼagirait-il donc encore du prototype, de lʼidée ou de la version mānyava de Zaraθuštra plutôt que du Zaraθuštra en chair et en os ? Les indications marginales apportent la précision que le premier vers de la neuvième strophe contient un « discours de Zaraθuštra [= le récitant] » (frāz-gōvišn ī zaraθušt) et une « plainte que Gə̄uš Uruuan lance accompagnée d’une prière » (garzišn ud yān ī gə̄uš.urun) ; son second, une « prière que Gə̄uš Uruuan lance accompagnée d’une question » (yān ud frašn ī gə̄uš.urun) ; son dernier, une « prière que Gə̄uš Uruuan lance suivie d’une déclaration » (yān ud frāz-gōvišn ī gə̄uš.urun). Ceci est assez en accord avec la paraphrase que James Darmesteter offre de cette strophe : « A ces mots Géush Urvan gémit sur lʼimpuissance de son protecteur, sur la faiblesse de lʼapôtre qui devrait être maître absolu. Quand les puissants de la terre mettront-ils leur force à son service ? »

612

E7 ZK. J2 OLE Y. 614 F2 zltvhšt ; T6 zltvhšt|. 615 Ch. BARTHOLOMAE, 1904, colonne 1686 (s. v. zasta|vant-) : ka ō ōi dahīhēt pa tuvān xvāhišnīh ayāwārīh - ō ōi zaratušt. ||| W. W. MALANDRA et P. ICHAPORIA, 2010 : ciyōn hagriz ān dahišn ast [kū ān zamān hagriz rasēd] ka ō ōy dahīhēd pad tuwān-xwāhišnīh ayārīh [ō ōy zardušt]. 613

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10a yūžə̄m aēibiiō ahurā V aōgō dātā aš ̣ā xšaθrəmcā .·. LKVM ʼv|616 OLEšʼn|617 ʼvhrmẕd hdybʼlyh618 YHBVNyt619 ʼšvhšt|620 V621 hštvyr| 622 AYḴ zltvšt| 623 V 624 hʼvštʼn| 625 Y 626 zltvšt| 627 nyvkyh ptš 628 OḆYDVN-ḆYN629 .·. 630 ašmā ō avēšān ohrmazd ayārīh dahēd aš-vahišt ud xšaθ-vair kū ̣ zaraθušt ud hāvištān ī zaraθušt nēkīh padiš ˟kunēd .·. yūyam etebhyaḥ svāmin sāhāyyaṁ dattāśavahistāya ˟saharaverāya ca | dharmāya rājñe ca || Vous, Ahura Mazdā, apportez-leur de l’aide, à eux, (à)a Aš ̣a Vahišta et (à)a Xšaθra Vairiia ! = faites ainsi le bonheur de Zaraθuštra et de ses disciples !b a

. Niriosangha coordonne aśavahistāya ˟saharaverāya ca avec etebhyaḥ tandis que le traducteur pehlevi ne donne aucune indication quant à savoir si nous devons ou non considérer une coordination de ʼšvhšt| V hštvyr| avec LKVM. b . L’auteur pehlevi et Niriosaṅgha ne donnent pas le même commentaire de aš ̣ā xšaθrəmcā. Face à aš-vahišt ud xšaθr-vair kū zaraθušt ud hāviṣ̌ tān ī zaraθušt nēkīh padiš ˟kunēd, nous trouvons aśavahistāya ˟saharaverāya ca | dharmāya rājñe ca dans le texte sanscrit, mais, de toute façon, comme si, pour les exégètes médiévaux, les Aməš ̣a Spəṇta en question étaient devenus les disciples de Zaraθuštra.

E7 ZK Y ; K5 ʼv|. KM7.Mf4.Pt4 OLEš’n. 618 Mf4 (W)hdyb’lyh. 619 J2.Mf4.T6 YHBVNyt| ; Pt4 YHBVNyt|W. 620 F2 ʼšvhšt º. 621 F2.K5.M1 om. 622 K5 hhtvyr| ; KM7 hštlvl ; M1 štvyr| ; Mf4 štlvl ; E7.F2.Pt4 hštlvl. 623 E7 zltvšt HVE|m ; F2 zltvhšt| ; K5.KM7.M1 zltvhšt ; Pt4 zltvšt| HVEm. 624 E7.J2.Pt4 om. 625 Mf4 h’všt| ’n ; E7.Pt4 hʼvštʼn. 626 E7.F2 om. 627 F2.K5.M1 zltvhšt|. 628 F2 ptš (pr. m.). 629 E7 OḆYDVNd. 630 Ch. BARTHOLOMAE, 1904, colonne 39 (s. v. aogah-) : ayāwārīh. ||| W. W. MALANDRA et P. ICHAPORIA, 2010 : ašmā ō awēšān ohrmazd ayārīh dahēd ašwahišt ud šahrewar [kū zardušt ud hāwištān ī zardušt nēkīh padiš kunēnd]. 616 617

190

10b auuat̰ vohū manaŋhā V yā hušəitīš rāmąmcā dā̃ t̰ .·. ’ytvn|c631 vhvmn|632 MNV hvmʼnšnyh633 gʼs Y634 TME V635 lʼmšn|c636 ʼš YHBVNʼt637 .·. 638 ēdōn-iz vohu.man kē humānišnīh gāθ ī ānōh ud rāmišn-iz ā-š dahād .·. evaṁ cottamāya manase | gvahmanāya | yaḥ sunivāsatām ānandaṁ ca datte | sthānaṁ yat paralokīyam || Ainsi aussi (à) Vahu Manaha qui doit alors lui offrir non seulement une bonne demeure ―une place là-bas―b, mais aussi la quiétude. a

. L’auteur médiéval coordonne le nom de Vohu Manah avec ceux des entités du vers précédent. La fonction de ēdōn-iz, dans son interprétation, est celle de préciser que le verbe exprimé dans le premier vers est à sous-entendre ici. b . La glose de humānišnīh, gāθ ī ānōh, suit immédiatement tandis que celle de sunivāsatām, sthānaṁ yat paralokīyam, figure au terme de la traduction sanscrite. La présence de l’eżāfe dans la glose pehlevie est confirmée avec la glose sanscrite. 10c azə̄mcīt̰ ahiiā mazdā V θβą̃m mə̄ŋ́hī paōuruuī ̃m vaēdəm .·. ANEc639 OLE ʼvhrmẕd640 OLE zltvšt|641 ʼš MN LK642 mynm643 pltvm644 vndšn|645 AYḴš646 pltvm647 nyvkyh648 MN LK YHVVNyt|649 .·. .·. 631

F2 ʼytvnc. J2 vhvmn| vhvmn| ; K5.M1 vhvmn vhvmn ; E7.F2.KM7.Mf4. Pt4 vhvmn. 633 F2 hvmynšnyh transformé (sec. m.?) en hvmʼnšnyh. 634 E7.F2.Mf4.Pt4 om. 635 F2 om. 636 E7 lʼmšn| ; Mf4 l’mšn|c ; KM7.Pt4 lʼmšnc. 637 F2 YHBVNyt ; J2 YHBVNyt| ; KM7.Pt4 YHBVNʼt|. 638 P. B. SUNJANA et D. P. SANJANA, 1874-1928, vol. XVIII p. 59 n. 5 (ad Dk 9.50.5) : aêdûn-ich vohûman mûn hû-mânishnîh gâs î tamâ. ||| W. W. MALANDRA et P. ICHAPORIA, 2010 : ēdōn-iz wahman kē humānišnīh [gāh ī ānōh] rāmišn-iz ā-š dahād. 639 Mf4 ANEc|. 640 E7 ʼvhrmẕd. 641 E7 zltvšt| HVE|m ; F2.KM7 zltvhšt ; K5.M1 zltvhšt| ; Pt4 zltvšt| HVEm. 642 J2 LK. 643 E7.KM7.Mf4.Pt4 MNDOM ; F2 MN mynm dvm. 644 J2 pltvm. 645 KM7 vndšn ; E7 vndšn OḆYDVNm ; Pt4 vndšn OḆYDVNm. 632

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650

an-iz ōy ohrmazd ōy zaraθušt ā-š az tō mēnem fradom vindišn kū-š fradom nēkīh az tō baved .·. .·. ahaṁ cid ayam | jarathuśtraḥ | mahājñānin tvatto dhyāyāmi ˟prāktanīṁ labdhim | kila me prathamaṁ śubhaṁ tvatto bhavati | uktaṁ yad gorūpam || Moi aussi, celui-là, Ahura Mazdā ―(le pronom) « celui-là » (représente) Zaraθuštraa―, alors je pense que de toi vient sa première réussite = (je pense que) tu es à l’origine de son premier bonheurb. a

. Dans le texte pehlevi, l’incise grammaticale concernant le pronom de la troisième personne du singulier suit le vocatif de la désignation du grand dieu, mais, chez Niriosaṅgha, le précède. ||| Selon Niriosaṅgha, la première personne grammaticale coïncide avec Zaraθuštra : « Moi aussi ici ―(moi qui suis) Zaraθuštra―, grand sage (Ahura Mazdā), je pense que tu es à l’origine du premier succès = (je pense que) toi, tu es à l’origine de ma première félicité ―il a (déjà) été dit qu’elle avait la forme d’une vache― ». En effet, l’absence de traduction sanscrite de ā-š suggère que ayam | jarathuśtraḥ est fautif pour asya | jarathuśtrasya, mais cette idée bute sur la glose pehlevie qui est ouverte avec kū-š alors que la sanscrite l’est avec kila me. b . Il est inquiétant que le ductus des mots abardom nēkīh dans Dk 9.50.15 coïncide presque totalement avec celui que le syntagme fradom nēkīh montre ici. Étant donné que, dans le contexte, le fait de qualifier la félicité de première n’a guère de sens, nous pourrions proposer la correction de pltvm en ˟’p̄ ltvm « supérieure ». Cependant, Niriosaṅgha, avec son emploi de prāktanīm et de prathamam, paraît l’interdire. La cohérence des strophes 9-10 Je ne comprends pas les indications marginales pehlevies qui concernent les deux dernières strophes de la hāiti. Si nous devons faire confiance au manuscrit KM7, le premier vers de la dixième strophe appartient à l’ensemble yān ud frāz-gōvišn ī gə̄uš.urun qui a commencé en 9c. En revanche, le commentaire paraît indiquer que 10a et 10b ne peuvent être pris séparément et qu’ils constituent une seule et même phrase. Sur base de l’analyse que les interprètes médiévaux en offrent, je n’arrive pas à savoir qui, selon eux, aurait la parole dans la dixième strophe. Dans la neuvième strophe, Gə̄uš Uruuan s’était plaint du manque de moyens dont souffrait Zaraθuštra. Devant la nouvelle prière de Gə̄uš Uruuan 646

J2 (pltvm) AYḴš. KM7 pltvm. 648 E7.Pt4 nyvyh. 649 KM7 YHVVN’t ; E7.F2.K5.M1.Mf4.Pt4 YHVVNyt. 650 W. W. MALANDRA et P. ICHAPORIA, 2010 : az-iz ōy ohrmazd [ōy zardušt] āš az tō menom fradom-windišn [kū-š fradom nēkīh az tō bawēd]. 647

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qu’ils octroient le nécessaire à Zaraθuštra et lui permettent la diffusion de la Daēnā, Ahura Mazdā et les autres dieux doivent intervenir ou garantir son succès. C’est aussi ce qui ressort de la paraphrase que Darmesteter donne de la dixième strophe : « Elle [= Géush Urvan] appelle au secours de Zarathushtra Asha, le Bien, Vohu Manô, la Bonne Pensée, Khshathra, le Pouvoir, et avant tout Ahura ».

11a kudā aš ̣əm vohucā V manō xšaθrəmcā at̰ mā †mašā .·. AYḴ 651 dhšn| Y 652 ʼšvhšt| 653 V 654 vhvmn| 655 V 656 hštvyr| 657 MNV 658 ʼytvn| ʼv| 659 L YHMTVNynyt 660 [gvbšn| Y 661 zltvšt| 662 ] AYḴ ZK Y 663 mzd AYḴ gyvʼk664 YKOYMVNyt|665 .·. 666 kū dahišn ī aš-vahišt ud vohu.man ud xšaθ-vair [kē] ēdōn ō ̣ man rasēned [gōvišn ī zaraθušt] kū ān ī mižd kū gyāg ested .·. kva dānam aśavahisto gvahmanaḥ saharaveraś ca | evam mahyam ˟prāpayanti | kila puṇyam uttamaṁ ca mano rājyaṁ ca | sa prasādaḥ kva sthāna āste | ya evam mahyam ˟prāpayanti || 667 Où se trouve le don qu’Aš ̣a Vahišta, Vohu Manah et Xšaθra Vairiiaa me feront parvenirc de la sorte ? [―discours de Zaraθuštra―d] = Où se trouve le lieu de la récompense ? 651

E7 AMT. F2.J2.KM7.Mf4 om. ; E7 LK ; Pt4 LK. 653 Mf4 ’švhšt. 654 E7.F2.J2.K5.KM7.M1.Pt4 om. 655 E7.F2.KM7.M1.Mf4.Pt4 vhvmn. 656 J2 om. 657 KM7 hštlvl ; E7.F2.K5.M1.Mf4.Pt4 hštlvl. 658 J2 M(E)[...]. 659 E7 ZK Y ; J2 ^ʼv|. 660 K5 YHMTVNynyt. 661 E7.F2.KM7.Mf4.Pt4 om. 662 F2.K5.M1 zltvhšt| ; Mf4 zltvšt|. 663 E7.J2.KM7.Mf4.Pt4 om. 664 KM7 ZKgyv’k ; E7 gyvʼkY. ||| J’attendais gyv’k AYK̠ au lieu de AYK̠ gyv’k. 665 E7.F2.K5.KM7.M1.Mf4 YKOYMVNyt ; Pt4 YKOYMVNyt. 666 J. DARMESTETER, 1892-3, vol. I p. 218 n. 47 : îtûn ô li yâmatûnînêt ; zak mizd aîgh jîvâk yakôyamûnît. ||| Ch. BARTHOLOMAE, 1904, colonne 472 (s. v. ku|dā) : ku dahišn. ||| W. W. MALANDRA et P. ICHAPORIA, 2010 : kū dahišn ī ašwahišt ud wahman ud šahrewar kē ēdōn ō man rasēnēd [kū ān ī mizd kū gyāg estēd]. 652

193

a

. Le nominatif du nom des trois entités dans la traduction de Niriosaṅgha attire l’attention, mais, pour en tenir compte, nous devons corriger le verbe et le mettre au pluriel : « Où, pour sûr, Aš ̣a Vahišta, Vohu Manah et Xšaθra Vairiia ˟arriveront-ils à me faire le cadeau ? = À quel endroit se trouve la faveur que, pour sûr, Puṇya, Uttama Manas y Rājya m’˟auront réservée ? » Soulignons aussi le genre grammatical masculin qu’ont acquis leurs noms sanscritisés alors même que leurs gloses conservent le neutre. Cependant, au vu de la version pehlevie, nous ne pouvons écarter qu’il faille analyser aśavahisto gvahmanaḥ saharaveraś ca comme des génitifs en ºaḥ. ||| Malandra et Ichaporia668 font remarquer la graphie pehlevie peu usuelle hštlvl du nom de Xšaθra Vairiia, car, ailleurs, nous le trouvons généralement écrit štvyr|. Sans doute la bonne graphie de ce nom, en définitive un avesticisme, est-elle à la croisée de ces deux orthographes : ˟hštlvyl < xšaθrº vairº. Le nom sanscrit des trois premiers Aməšạ Spəṇta gvahmanaaśavahistasaharavera-

Gloses sanscrites de leur nom selon Y 29.10-11 uttama- manas- nt. « excellent penser » dharma- masc. « loi » ou puṇya- nt. « ce qui est bien » rājan- masc. « roi » ou rājya- nt. « royaume »

b

. L’interrogatif kē resté sans reflet chez Niriosaṅgha peut justifier le nombre singulier du verbe rasēned. c . Le causatif pehlevi rasēned contraste avec le futur sanscrit prāpsyati. Cette dernière forme pourrait être fautive pour ˟prāpaya(n)ti, mais ceci dépend de l’analyse grammaticale des théonymes qui précèdent. ||| Comme ce verbe suppose que l’interprète médiéval a pu lire un r dans mā mašā, nous devons probablement lire *mąm ārətā* avec le locatif du substantif en -titiré de ā+√ ar « à moi lors de l’envoi » (plutôt que l’aoriste moyen « m’est arrivé »). d . Bartholomae669 cite kē ētōn ō man rasēnēt gōwišn i zaratušt, alors 670 que la séquence gōwišn i zaratušt, sans reflet dans la traduction sanscrite,

667

J. DARMESTETER, 1892-3, vol. I p. 218 n. 47 : « où faites-vous ainsi venir à moi » ; « "Où viendrez-vous à moi" signifie "Où recevrai-je les récompenses dont vous disposez ?" » 668 W. W. MALANDRA et P. ICHAPORIA, 2010, p. 24 n. 1. 669 Ch. BARTHOLOMAE, 1904, colonne 1164 (s. v. maša-). 670 J. DARMESTETER, 1892-3, vol. I p. 218 n. 46, le dit. 194

a été introduite ici par erreur, car il s’agit de l’une de ces indications marginales dont j’ai dressé la liste dans l’Annexe au Chapitre II 3. 11b yūžə̄m mazdā †frāxšnənē V mazōi magāi.ā paitī.zānatā .·. LKVMm671 ʼvhrmẕd KBD PVN672 HNA ms mgy’673 pʼtdʼšnynyt|674 AYḴm PVN HNA675 Y676 ʼp̄ yck677 ŠPYLyh678 pʼtdʼšn| †OḆYDVN-ḆYN679 .·. 680 ašmā-m ohrmazd vas pad ēd meh magāi pādāšnēnēd kū-m pad ēd ī abēzag vehīh pādāšn ˟kunēd .·. yūyam mahājñānin prabhūtataram mahattamenottamatvena tena ˟prasādayata | kila tena nirmalatamenottamatvena mahyam prasādaṁ kuru || 681 Vous, Ahura Mazdā, rétribuez-moi grandementa pour ceb grand mac gāi ! = pour cette pure excellence, donnez-moi rétribution !d a

. La forme frāxšnənē a visiblement été interprétée à partir du verbe frā+√ vaxš. b . L’auteur pehlevi, avec l’antéposition de ēd, a rendu la finale ā de magāi.ā comme si ce fût un sarvanāman, mais Niriosaṅgha, avec tena, préfère en postposer le reflet. c . Fautif pour ˟mg’y ? ||| Niriosaṅgha rend mgy’ par uttamatva- « excellence », sans doute pour y reconnaître un dérivé de ms (meh). KM7 LKVM ; K5 LKVMm. Mf4 (PVN) PVN. 673 J2.T6 msmyh ; E7 ms myš KON ; F2 ms mšyh ; K5.M1 msmkyh ; KM7.Mf4. Pt4 ms mgyh. 674 E7.F2.K5.KM7.M1.Pt4 pʼtdʼšnynyt ; Mf4 p’td’šnynyt (ynyt). 675 J2.K5.M1.T6 HD. 676 F2 seul. 677 E7.KM7.Mf4.Pt4 ’p̄ yck|. 678 E7.F2.KM7.Mf4.Pt4 vyhyh. 679 E7 OḆYDVN-ḆYNm ; Pt4 OḆYDVN-ḆYN m. 680 Ch. BARTHOLOMAE, 1904, colonne 1156 (s. v. maz-) : pa masāk ; col. 1110 (s. v. maga-) : maγīh, erl.: apēčakīh, apēčak vēhīh ; col. 1012 (s. v. frā-xšnǝnē) : vas ; col. 1659 (s. v. 2zan-) : pātdahišnēnītan, erl.: pātdahišn kartan. ||| W. W. MALANDRA et P. ICHAPORIA, 2010 : ašmā-m ohrmazd was pad ēd meh-magīh pādāšnēnēd [kū-m pad ēd abēzag-wehīh pādāšn kunēd]. 681 J. DARMESTETER, 1892-3, vol. I p. 218 n. 48-9 : « cʼest-à-dire, pour ma pure vertu, donnez-moi un retour » ; « À présent que je connais mieux vos merveilles, je désire plus vivement votre bonté. Selon dʼautres : à présent que jʼai établi la loi, mes disciples et moi désirons une récompense ». 671 672

195

d

. Dans le texte de Niriosaṅgha, au lieu de kuru « Montre-toi favorable envers moi ! », nous attendons l’impératif pluriel ˟kuruta « Montrez-vous favorables envers moi ! », mais le singulier nʼest pas exclu, dʼautant que, pour le texte pehlevi, les manuscrits donnent une forme inattendue, OḆYDVNḆYN. 11c ahurā nū.nā̊.auuarə̄ V ə̄hmā.rātōiš yūšmāuuatą̃m .·. ʼvhrmẕd KON LNE kʼmk| 682 ZK Y 683 ʼv| 684 LNE 685 lʼtyh Y 686 MN 687 LKVM KON AMT 688 ʼp̄ dyh Y LKVM vyš YDOYTVNm 689 ’m 690 nyvkyh Y691 MN LKVM kʼmktl692 .·. YHVVNt MNV gvpt693 ’y KON AMT694 dyn| lvbʼk BRA YHVVNt L V695 hʼvštʼn|696 Y697 L698 nyvkyh699 V700 mzd701 Y702 MN LK703 kʼmk|704 .·. 705 ohrmazd nūn amā kāmag ān ī ō amā rādīh ī az ašmā nūn ka abdīh ī ašmā vēš dānem ā-m nēkīh ī az ašmā kāmag-tar .·. būd kē guft ay nūn ka daēn ravāg be būd man ud hāvištān ī man mižd ī az tō kāmag .·. 682

J2 endommagé : k[...]k| ; F2.K5 kʼmk. E7 om. 684 J2 OLE Y ; Mf4 OLE ; E7.KM7.Pt4 om. 685 F2 OLE. 686 E7.F2.J2 om. ; KM7 l’tyh Y ; Mf4 Y. 687 J2 MN Y. 688 E7 MN. 689 K5.M1 YDOYTVm. 690 F2 AMTm (sec. m.). 691 E7.F2.J2.K5.M1 om. ; Mf4 Y. 692 J2.M1.Pt4 kʼmktl .·. ; Mf4 k’mk|tl .·.. 693 K5.M1 YMRRVNyt ; KM7 gvpt| ; E7.Pt4 gvptn|. 694 E7.F2.KM7.Mf4.Pt4 om. 695 K5.M1 V V. 696 F2.KM7.Mf4.Pt4 h’všt’n. 697 E7.J2.K5.M1.Pt4 om. 698 J2.K5.Pt4 om. 699 E7.F2.K5.KM7.M1.Mf4.Pt4 om. 700 K5.M1 L ; E7.F2.KM7.Mf4.Pt4 om. 701 KM7 (ZZK)ZK. 702 E7.K5.M1 om. 703 F2 LKVM. 704 F2.K5.M1 kʼmk. 705 Ch. BARTHOLOMAE, 1904, col. 1519 (s. v. 1rātay-) : ōhrmazd nūn amāk kāmak ān i ō amāk rātīh i hač šmāk ; col. 176 (s. v. avar-) : kāmak. ||| W. W. MALANDRA et P. ICHAPORIA, 2010 : ohrmazd nūn amā kāmag ān ī ō amā rādīh ī az ašmā 683

196

svāminn ihāsmākam asmabhyaṁ ca dakṣiṇā tvattaḥ || Ahura Mazdā, maintenant nous cherchonsa à ce que vous montriez de la générosité envers nous, maintenant que je connais bien votre merveille, je cherche davantage le bonheur dont vous êtes la source ―Il y eut un (exégète) pour rendre (cette idée) comme suitb : Maintenant que la Daēnā est devenue courante, mes disciples et moi, nous attendons de toi la récompense―. a

. En le traduisant par kāmag, l’auteur pehlevi doit avoir interprété auuarə̄ à partir de √ var « préférer ». b . La traduction sanscrite n’est accompagnée d’aucun commentaire. La triple apparition de KON indique que deux commentaires successifs sont donnés dans le prolongement du zand proprement dit. Le commentaire supplémentaire est ouvert avec le syntagme būd kē guft ay. Ce supplément qui a tout l’air d’être la citation d’un passage tiré de quelque Zaraθušt Nāmag doit être secondaire. La cohérence des strophes 10-11 La garantie du succès est aussi celle de recevoir la récompense. Zaraθuštra et ses disciples la réclament pour le rôle déterminant qu’ils ont joué dans la diffusion de la bonne doctrine. Zaraθuštra, comme le pense Darmesteter, est donc entré en scène : « Zarathushtra paraît et demande à ses quatre protecteurs leurs récompenses célestes ».

[nūn ka abdīh ī ašmā wēš dānom ā-m nēkīh az ašmā kāmagdar būd kē gōwēd ay nūn ka dēn rawāg be būd man ud hāwištān ī man mizd az tō kāmag]. 197

III La théorie des millénaires III 1. Arithmologie du temps III 1.1. La strophe fondamentale Pour bien comprendre le mythe du taureau dont il sera question dans le chapitre suivant, nous devons tout d’abord exposer l’idée que Zaraθuštra s’était faite du temps et l’importance que, selon lui, aurait la vache tout au long de l’histoire du monde. Comme, dans cet exposé, une certaine arithmologie s’imposera, il convient sans doute, pour la clarté ou la facilité, que nous nous attardions préalablement sur la question de savoir comment les nombres, chez Zaraθuštra, arrivent à refléter le temps. Selon la tradition, toute la sagesse de Zaraθuštra était née d’une strophe faite de trois vers, l’Ahuna Vairiia1. En Inde aussi, les trois vers de la strophe appelée Gāyatrī Sāvitrī2 passe pour avoir été le creuset de toute la science du Véda. Et nous savons que l’Ahuna Vairiia et la Gāyatrī Sāvitrī partagent plusieurs autres caratéristiques. Parmi celles-ci, un certain rapport avec le nombre quatre : les textes indiens nous parlent d’un quatrième vers de la Gāyatrī Sāvitrī qui, à la différence des trois précédents, est fait de silence, celui d’une pause comme on peut en trouver entre deux strophes. Faite de trois vers, la Gāyatrī Sāvitrī finit ainsi par en compter quatre. Quant à lui, l’Ahuna Vairiia, aussi bien selon les indications liturgiques que selon les mises en scène mythiques, est toujours récité quatre fois. Les trois vers de l’Ahuna Vairiia ainsi sont-ils portés non au nombre de quatre, mais bien à celui de douze. Ahuna Vairiia Gāyatrī Sāvitrī

3 × 4 = 12 vers 3 + 1 = 4 vers

Trois, quatre, douze. Cette série de nombres va nous permettre d’appréhender la structure que Zaraθuštra avait vue dans le Temps. Il admit que le Temps était infini, mais que, devenu linéaire et fini pour que les forces délé1 2

Y 27.13. RS 3.62.10. 199

tères pussent y être cernées, il faudrait ensuite le remettre à zéro et récupérer ainsi son caractère fixe et infini. Le temps fini faisait au total 12000 ans. Le modèle de cette idée est sans aucun doute l’année faite de douze mois. Et nous savons que douze est le résultat de la multiplication d’une triade par le nombre quatre. Les quatre triades en question ne sont autres que les saisons qui vont, la première, de l’équinoxe de printemps au solstice d’été, la deuxième, de ce solstice à l’équinoxe d’automne, la troisième, de cette dernière équinoxe au solstice d’hiver et la quatrième, de ce dernier solstice à l’équinoxe de printemps ouvrant une nouvelle année. Cependant, si nous nous laissons inspirer par la strophe védique et considérons alors l’hésitation entre les nombres trois et quatre plutôt que la multiplication de l’un par l’autre, la possibilité d’une variation se fait jour dans le nombre des saisons : trois ou quatre. Toute la question, dans cette hypothèse, serait de savoir si l’hiver est une non-saison, la négation de lʼidée de saison. En effet, d’aucuns peuvent argumenter que la végétation, en hiver, est à l’arrêt et que, dès lors, il est abusif de parler de saison. Pour le compte des années, remarquerons-nous, l’hiver acquiert ou prend une grande valeur pour marquer de façon indubitable qu’une année est révolue. La garantie est donc offerte de l’écoulement d’un nombre d’années si nous parlons plutôt d’un nombre d’hivers : « mille hivers » signifie « mille ans révolus », autrement dit : « tout un millénium » (hazaŋhrō.zima-). -- printemps3 -vhʼl 3

------ été -----hʼmyn 3 +3

-- automne -pʼtyc| +3

--- ( hiver ) --zmstʼn| (+ 1) (+ 3)

De même le total des millénaires est-il de neuf ou douze, le résultat de lʼaddition de trois ou quatre trimilléniums. En effet, les premiers trois mille ans ainsi furent uniquement abstraits (mańiiauua) en ce sens que la réalité n’y étaient encore qu’à l’état de projet, tandis que les trois trimilléniums restant encadrent une réalité concrète (gaēiθiia).

3

Sur le caractère initial du printemps, Dk 3.419. 200

hazaŋhrō.zima hazaŋhrō.zima hazaŋhrō.zima hazaŋhrō.zima hazaŋhrō.zima hazaŋhrō.zima hazaŋhrō.zima hazaŋhrō.zima hazaŋhrō.zima hazaŋhrō.zima hazaŋhrō.zima hazaŋhrō.zima

1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12

mańiiauua mańiiauua mańiiauua gaēiθiia gaēiθiia gaēiθiia gaēiθiia gaēiθiia gaēiθiia gaēiθiia gaēiθiia gaēiθiia

(3 +)

9

La structure du type 3+1 que lʼensemble des trimilléniums du temps linéaire montre à l’image des saisons de l’année est une addition que nous pouvons retrouver dans la distribution des parties de la journée puisque la nuit qui la clôture à l’instar de l’hiver qui referme l’année est aisément envisageable comme une quatrième partie après celles de la matinée, du temps de midi et de l’après-midi. Le même raisonnement fera du nord une direction négative par opposition aux trois autres.

III 1.2. L’articulation des millénaires Revenons aux vaches. Le deuxième trimillénium est marqué par l’apparition de la vache primordiale (Gaō Aēuuō.dātā). Le troisième trimillénium s’ouvre avec l’intervention4 de l’archidémon Aŋhra Mańiiu, ce qui se traduit notamment par l’assassinat de la vache primordiale et l’apparition du premier taureau, celui que nous appellerons « taureau d’éternité ». Le quatrième trimillénium commence avec l’apparition de la bonne doctrine (vaŋvhī daēnā) à laquelle d’aucuns reconnaissent la forme d’une vache. Le parachèvement (frašō.kərəiti) du monde fini ou le retour à l’infini sont le fruit de l’immolation du taureau d’éternité. Les forces négatives, durant la première moitié du temps fini, ainsi n’ont-elles aucun effet. En revanche, le « mélange » en caractérise la seconde moitié. Dans l’affrontement des deux camps, l’enseignement de la bonne doctrine que Zaraθuštra put assurer au milieu du « mélange », de 9001 à 9057, sera déterminante, mais elle avait déjà régné dans le monde avec l’homme primordial (Gaiia Marətan) au cours du deuxième trimillénium et avec plusieurs des premiers hommes mortels du début du troisième trimillénium tels que Maš ̣iia ou Yima jusqu’au jour où le 4

Avestique *aibi.gaiti-. 201

Serpent Tricéphale de l’impiété (Aži Dahāka) parvint à prendre le pouvoir pour mille ans. La bonne doctrine, dans le futur, refera surface avec davantage de force grâce aux trois fils qui devront y naître de la semence de Zaraθuštra que les dieux ont mise en réserve. Les trois héros eschatologiques parviendront à parachever le monde en éliminant définitivement les démons5, mais, combinée avec le suc tiré de l’arbre Haōma Spaēta, la graisse que le troisième d’entre eux tirera du taureau d’éternité immolé repoussera définitivement les forces démoniaques pour offrir l’immortalité à toute l’humanité. 0-3000 3001-6000 6001-9000

9001 10001

11001

12000 12001-057

5

― Apparition de Gaō Aēuuō.dātā ― Intervention d’Aŋhra Mańiiu ― Assassinat de Gaō Aēuuō.dātā ― Apparition du taureau d’éternité ― Dahāka règne de 7001 à 8000 ― Zaraθuštra diffuse la bonne doctrine ― Nouvelle diffusion de la bonne doctrine grâce au 1er des trois fils futurs de Zaraθuštra ― Nouvelle diffusion de la bonne doctrine grâce au 2e des trois fils futurs de Zaraθuštra ― Nouvelle diffusion de la bonne doctrine grâce au dernier des trois fils futurs de Zaraθuštra ― Immolation du taureau d’éternité

Nous y reviendrons dans le Chapitre IV 3. 202

Trois hazaŋhrō.zima mańiiauua Trois hazaŋhrō.zima gaēiθiia Trois hazaŋhrō.zima gaēiθiia

Trois hazaŋhrō.zima gaēiθiia

Rallonge inexpliquée du temps gaēiθiia

III 2. La géométrie variable du jour Jean Kellens, dans le volume d’hommage offert à Pierre Lecoq, et Alberto Cantera, dans le volume dʼhommage offert à Helmut Humbach, ont publié, le premier, un article intitulé « Stratégies du Mihr Yašt »1 et, le second, une étude substantielle intitulée « Miθra and the Sun: the Role of Miθra in the Arrangement of the Avestan Liturgical Calendar »2. Je ne puis en partager les avancées : les prémisses mʼy semblent trop incertaines, voire erronées. En effet, lʼidée que le jour, composé de trois temps rituels dans lʼAvesta archaïque, serait passé à en contenir cinq dans lʼAvesta récent, basée sur la confusion de plusieurs concepts3, ne peut être retenue. Contrairement aux prémisses de Kellens ou de Cantera, la strophe vieilavestique Y 44.5 ne nous donne aucune indication concernant les temps rituels du jour, et les textes avestiques récents ne contiennent pas de claire distribution du jour en cinq temps rituels. En effet, il nʼy a pas de Rapiθβina en hiver. Et la rapiθβā ou arǝ̄m.piθβā « midi », par exemple, est plutôt la jonction ponctuelle entre les deux moitiés du jour, la matinée (fraiiara) et lʼaprès-midi (uzaiiara). Nous devons faire la distinction entre trois concepts : ce genre de jonctions ponctuelles, les parties du jour et les temps rituels. Ce que la triade gâthique rassemble, faut-il bien voir, ce ne sont pas les temps rituels du jour, mais bien plutôt ses articulations : ušah articule le jour avec la nuit qui le précède et xšapā, avec celle qui lui fait suite. Et arǝ̄m.piθβā, pour en marquer le milieu, complète la triade en articulant les deux volets du jour que sont la matinée et lʼaprès-midi : Y 44.5d ušā̊ arǝ̄ m.piθβā xšapācā

1

lʼaurore midi et le soir

J. KELLENS, 2016. A. CANTERA, 2017. 3 La confusion figure déjà chez F. M. KOTWAL et Ph. G. KREYENBROEK, 19922009, vol. III p. 136-9, qui, par exemple, ne font pas clairement la différence entre rapiθβina- et rapiθβā- dans leur traduction : N 31.1 kahmāt̰ haca rapiθβinanąm gāθanąm ratufritiš frajasaiti « From what time onwards does the gratification of the Ratus through the Gāθā recitations of the mid-day (Rapithwin) watch commence? » ; N 31.2 haca rapiθβaiiāt̰ maiδiiāi uzaiiarāi pairi.sacāiti « It lasts from mid-day (Rapithwin) until the middle of the afternoon ». 2

203

Seule la mythologie nous permet de justifier le genre féminin forcé ou artificiel des termes de la triade4. Comme bien d’autres, les déesses présidant aux articulations du jour ainsi formaient-elles une triade. Les articulations ou charnières en question sont le lever, le passage au zénith et le coucher du Soleil. Il ne sʼagit pas des parties du jour. Dès lors, remarquons que, dans cette triade, xšapā désigne ou patronne non la nuit, mais le soir ou, plus exactement, le terme du jour5. Nous déduirons clairement le statut de charnière que revêt lʼarǝ̄m.piθβā de lʼemploi que le Nērangestān fait de son reflet avestique récent rapiθβā dans la définition donnée du Rapiθβina, lʼun des temps rituels du jour (asńiia). Midi est la charnière réunissant les deux volets du jour que sont la matinée (fraiiara) et lʼaprès-midi (uzaiiara). Le statut dʼarticulation quʼil faut reconnaître à la rapiθβā ou arǝ̄m.piθβā est confirmé par le fait que le fraiiara et lʼuzaiiara ne sont nommés dans les définitions données des temps rituels que pour leur milieu. La rapiθβā ou arǝ̄m.piθβā marque donc bien le milieu du jour : N 31.1 kahmāt̰ haca rapiθβinanąm gāθanąm ratufritiš frajasaiti « Quand celui qui satisfait les Ratu en récitant les Gāθā du Rapiθβina commence-t-il ? » ; N 31.2 haca rapiθβaiiāt̰ maiδiiāi uzaiiarāi pairi.sacāiti « (La récitation du Rapiθβina) dure depuis la rapiθβā [= midi] jusquʼau milieu de lʼuzaiiara [= jusquʼau milieu de lʼaprès-midi] ».

Et le jour ne compte jamais que deux parties : la matinée et lʼaprès-midi. Cʼest dʼailleurs la substance du Frahang6 : FiO 746 aiiarǝ. YVM « aiiarə = la journée » ; FiO 747 MNV hcš nymHD º fraiar « (le jour) dont la première moitié (de la période utile) se nomme fraiiara "début de journée" » ; FiO 748 V nymHD ʼvzyl ŠM « et la seconde, uzaiiara "fin de journée" » ; FiO 749 MN ʼvzyl nymHD lpysp̄ yn| ŠM « La première moitié de l’ uzaiiara porte le nom de rapiθβina » ; FiO 750 V nymHD ʼvzylyn| « et la seconde, celui d’ uzaiieirina, » ; FiO 751 V PVN ẕmstʼn| bʼhl Y lpysp̄ yn LAVHL OL hʼvn gvmyhtyt « mais, en hiver, partie de rapiθβina se confond à nouveau avec hāuuani ».

4

Sur le genre féminin des trois termes, É. PIRART, 2017c, p. 620. L’emploi du même mot pour la désignation du soir et celle de la nuit est un phénomène bien connu. Ainsi, en catalan, l’expression ahir nit signifie-t-elle « hier soir ». 6 Texte selon K20:87r18-87v01. 5

204

Au lieu du tandem fraiiara + uzaiiara, le Vīdaēuu-dāt (V 21.3.1) offre une division du jour en trois parties, mais leur définition n’est pas complètement assurée : yezi uzīrō.huua mərəṇcaite V arəzahuua bišaziiāt̰ V yezi arəzahuua mərəṇcaite V xšapō.huua bišaziiāt̰ V yezi xšapō.huua mərəṇcaite V ušahuua bišaziiāt̰ « À dommage d’après-midi, guérison vespérale. À dommage vespéral, guérison nocturne. À dommage nocturne, guérison matinale ».

Les indications temporelles contenues dans ce passage du Vīdaēuu-dāt me paraissent pouvoir être ordonnées comme suit : Avestique ušah uzīrah arəzah xšapan

Zand ’vš ’vzyl ’p̄ yck vltšnyh7 LYLYA

Traduction de l’avestique le matin le jour l’après-midi (?) le soir « le combat » la nuit

Malheureusement, lʼétymologie de uzīrah- dont le lien avec uzaiiaranʼest pas établi au-delà dʼune simple ressemblance fait difficulté8. Dans la triade gâthique, il convient de souligner que xšap(an)- / xšapā- ne peut désigner la nuit et quʼaucune place nʼest donc réservée à cette dernière. La nuit est un terme négatif comme lʼinitiale nasale de son nom préhistorique *n̥ku̯té-u- le manifeste. Le balisage ternaire de la journée que nous trouvons dans la strophe gâthique nʼa rien dʼexceptionnel ni n’est l’apanage de textes archaïques. Nous le retrouvons dans la Cīdag Handarz ī Paōiriiō.t̰ kaēšºān : CHP 49

bʼmdʼt

bām-dād

lʼaurore

CHP 50

nymlvc

nēm-rōz

midi

CHP 51

ʼdvʼlk|

ēbārag

le soir

Le tandem proto-indo-européen que la nuit (*n̥ku̯té-u- > védique aktó-) formait avec le jour (*di̯ é-u- > védique dyó-), souligné au moyen de lʼindice de polarité *-u-9, nʼa pas été conservé tel quel en avestique récent : les noms 7

Le zand d’ arəzah- « le combat, le soir », ’p̄ yck vltšnyh « le retour à la pureté, la désinfection », renvoie à la forme ərəzauruuaēsa- attestée dans le FiO 754. 8 Peut-être faudrait-il explorer aussi la découpe *us+zīrah-. Sans compter que le thème en ºah- n’est pas assuré non plus : ºan- n’est pas exclu non plus. 9 Sur l’indice de polarité -u-, voir É. PIRART, 1993. 205

respectifs du jour et de la nuit y sont désormais azan- et xšap(an)-. Néanmoins, le vieux nom de la nuit, muni de lʼindice de polarité, subsiste à lʼintérieur du composé upa.naxt-u-r-10 « nocturne » dont la morphologie rappelle celle du latin nocturnus. Dans la strophe gâthique Y 44.5, pour la désignation du tandem contrasté du jour et de la nuit, il est recouru aux mots raōcah- « lumières » et tǝmah« ténèbres », et un second tandem, formé de la veille et du sommeil, explicite ou confirme que, de la sorte, il est effectivement fait allusion à celui du jour et de la nuit : tat̰ θβā pərəsā (4) ərəš mōi vaocā ahurā (7) kə̄ huu̯āpā̊ (4) raōcā̊scā dāt̰ təmā̊scā (7) kə̄ huu̯āpā̊ (4) xvafnəmcā dāt̰ zaēmācā (7) kə̄ yā ušā̊ (4) arə̄m.piθβā xšapācā (7) yā̊ manaōθrīš (4) cazdōṇghuuaṇtəm arəθahiiā (7) .·. « Je te pose la question. Dis-moi sans ambages, Roi : qui, par de bonnes œuvres, a mis en place les lumières (du jour) et les ténèbres (de la nuit) ? Qui, par de bonnes œuvres, a mis en place le sommeil et la veille ? Qui a fait en sorte que les (déesses) de lʼaurore, de midi et du soir rappellent au désireux lʼobjet (de son désir) ? »

Dans les livres pehlevis, la situation est intermédiaire entre le vieil avestique et lʼavestique récent pour opposer rōz (< raōcah-) à šab (< xšap(an)-). Le mot xšap(an)-/xšapā- nʼa donc pas le même sens en vieil avestique ou en avestique récent. De celui de « soir », il est passé au sens de « nuit ». Ceci dit, le Frahang11, pour rassembler les instants du coucher et du lever du Soleil sous la rubrique de la nuit, me paraît illustrer une phase de transition dans le processus évolutif. En effet, les parties claires situées avant le lever du Soleil ou après son coucher, voire celles qui entourent ces deux instants, y sont classées comme nocturnes : 10

V 7.79.2 hō bā aŋhat̰ (4) aš ̣ā̃ um zaraθuštra (7) yō aš ̣ǝm mainimnō aš ̣ǝm isǝmnō aš ̣ǝm +aparaōδaiiete1 (8) aš ̣ǝmca mainimnō (6) drujǝmca vīnasti (6) yō nasumaitīm āpǝm (7) vīzaōθrąm frabaraiti (7) yō upa.naxturušu2 tąθraēšu (?) vīzaōθrąm frabaraiti (7) .·. « Celui qui, pensant à Aš ̣a ou le recherchant, le néglige ou qui, pensant à Aš ̣a, trouve Druj, (sache-le,) harmonieux Zaraθuštra, cʼest parce quʼil apporte (sur lʼaire sacrificielle) une eau qui, souillée par Nasu, est impropre aux libations ou quʼil le fait dans les ténèbres de la nuit ». Notes : 1. K. F. GELDNER, 1886-96 : apa.raoδaiieite ; H. JAMASP, 1907 : aparaoδaiieiti. Sur le thème, J. KELLENS, 1984a, p. 139 ; sur la diathèse, J. KELLENS, 1984a, p. 30 ; sur la graphie, J. KELLENS, 1984a, p. 211. ||| 2. K. F. GELDNER (1886-96) : upa.naxturuš ̣u ; H. JAMASP, 1907 : upa naxtruš ̣u. 11 Texte selon K20:87v02-10. (11)

206

FiO 752 xš ̣afa. LYLYA « Et xšapā = la nuit. » ; FiO 753 MN LYLYA 4 bʼhl bʼhl Y pltvm º hufrāšmōdāitīm. hufrāš ̣mōdāt. KRYTVNd « Laquelle nuit compte quatre parties. La première porte le nom de hū frāšmō.dāiti » ; FiO 754 bʼhl Y dtykl º ǝrǝzauruuaēsāt̰ ºoº ʼp̄ yckʼn ltšnyh KRYTVNd « et la deuxième, celui de ərəzauruuaēsa (qui signifie) "désinfection", » ; FiO 755 ẔNE 2 bʼhl aiβisrūθrim. « ces deux parties formant l’ aiβisrūθrima. » ; FiO 756 bʼhl Y stykl º uš ̣ąm. sūrąm. uši. ʼp̄ zʼl KRYTVNd « La troisième, qui porte le nom de ušā sūrā "aurore capable", » ; FiO 757 MNV ʼvšhyn| ptš · ḆYN YATVNyt « coïncide avec l’ ušahina, » ; FiO 758 bʼhl Y chʼlvm. raōcaŋh(ǝ)ąm. fragatōit̰ ºoº lvšnyh V prʼc YHMTVNšnyh MNV ʼvš Y bʼm AP̄š12 hʼvn gʼs c13 KRYTVNd º « et la quatrième, nommée raōcaŋhąm fragaiti "début des lumières du jour", porte aussi les noms de ušah bāmaiiā "aurore illuminatrice" ou de hāuuani gāθā [= hāuuani asńiia] ».

Lʼidentification de la quatrième partie de la nuit avec le temps rituel Hāuuani doit être erronée ou imprécise si précédemment le Frahang avait fait coïncider ce dernier avec la matinée. En effet, la définition des temps rituels dans le Frahang, avons-nous vu, divise en deux le second des deux volets du jour : FiO 753 bʼhl Y pltvm FiO 754 bʼhl Y dtygl FiO 756 bʼhl Y stygl FiO 758a bʼhl Y chʼlvm

hū frāšmō.dāiti« le coucher du Soleil » ǝrǝzauruuaēsa(abēzagān vardišnīh « la désinfection ») ušā- sūrā(uš ī abzār « lʼaurore capable ») raōcaŋhąm fragaiti(rōšnīh frāz-rasišnīh « le début des lumières ») ou ušah- bāmaiiā(uš ī bām « lʼaurore illuminatrice »)

12

FiO 755 ẔNE 2 bʼhl = aiβisrūθrima-

FiO 757 = ušahinaFiO 758b = hāuuani- !!!

Je ne comprends pas bien l’emploi de AP̄š (u-š) dans le contexte, mais je comprends encore moins s’il faut lire hcš (aziš). 13 La place de la particule ºc nous invite à faire de h’vn g’sc un mot composé (hāuuan-gāθ-iz). 207

tandis que le fraiiara nʼy comprend que lʼasńiia Hāuuani, lʼuzaiiara se compose de deux asńiia, le Rapiθβina et lʼUzaiieirina.

fraiiara

Hāuuani

Rapiθβina uzaiiara Uzaiieirina

Cependant, le Nērangestān nous invite à la prudence pour situer lʼasńiia Hāuuani entre le lever du Soleil et le milieu de la matinée en été, mais entre le lever du Soleil et le milieu de lʼaprès-midi en hiver. La principale difficulté vient donc du fait que le Nērangestān tient compte des saisons dans la définition donnée des asńiia quand le Frahang ne le fait pas. Ceci nʼest peut-être pas tout à fait exact puisque le Frahang, en parlant du Rapiθβina, ne doit sans doute envisager que lʼété dʼautant que, lit-on, cet asńiia se confond avec partie du Rapiθβina ou que, selon le Nērangestān14, il nʼexiste tout simplement pas de Rapiθβina en hiver : N 28.1 kahmāt̰ haca ušahinanąm 15 g̱āθanąm ratufritiš frajasaiti « Quand celui qui satisfait les Ratu en récitant les Gāθā Ušahinī [= les Gāθā du ratu asńiia Ušahina] commence-t-il ? » ; N 28.2 haca maiδiiaiiāt̰ xšapat̰ hū vaxšāi pairi.sacāiti16 « (La récitation de lʼUšahina) dure depuis le milieu de la nuit jusquʼau lever du Soleil » ; N 28.3 iθa17 aiβi.gāme « Du moins, en hiver, » ; N 28.4 āat̰ hama18 yezi para hū vaxšāt̰ ˟ahunauuaitīmca19 ˟gāθąm20 srāuuaiieiti « car, en été, en ayant récité lʼAhuna14

Sauf indication, le texte donné est corrigé selon F. M. KOTWAL et Ph. G. KREYENBROEK, 1992-2009. 15 Le suffixe -ina- n’existe pas : il s’agit de la thématisation du suffixe -inlorsque le dérivé en -in- subit une vr̥ddhi (invisible). Comme il s’agit d’une formation tertiaire et que le féminin est alors en -ī-, ušahinanąm doit représenter langue originale āušahinīnâm. Sur le problème des vr̥ddhi invisibles, É. PIRART (2012a : 247-53). 16 Sur lʼincertitude de la diathèse, J. KELLENS (1984a : 30). 17 F. M. KOTWAL et Ph. G. KREYENBROEK, 1992-2009 : aθa. 18 F. M. KOTWAL et Ph. G. KREYENBROEK, 1992-2009 : *hami. 19 F. M. KOTWAL et Ph. G. KREYENBROEK, 1992-2009 : ahunauuat̰ ca. 208

uuaitī Gāθā [= Y 28-34], » ; N 28.5 yasnǝmca haptaŋhāitīm ˟uštauuaitīmca21 ˟hāitīm22 « le Yasna Haptaŋhāiti [= Y 35-41] et lʼUštauuaitī Hāiti [= Y 43-46] (avant le lever du Soleil), » ; N 28.6 anāstǝrǝtō pascaēta auuā̊ yā̊ ańiiā̊23 srāuuaiiōit̰ ā maiδiiāt̰ fraiiarāt̰ « il peut réciter alors le reste des (Gāθā) sans quʼil faille y voir une faute avant le milieu de la matinée » ; N 29.1 kahmāt̰ haca hāuuaninąm g̱āθanąm ratufritiš frajasaiti « Quand celui qui satisfait les Ratu en récitant les Gāθā du Hāuuani commence-t-il ? » ; N 29.2 haca hū vaxšāt̰ maiδiiāi fraiiarāi pairi.sacāiti « (La récitation du Hāuuani) dure depuis le lever du Soleil jusquʼau milieu du fraiiara [= jusquʼau milieu de la matinée] » ; N 29.3 hama iθa « Du moins, en été, » ; N 29.4 āat̰ aiβi.gāme maiδiiāi uzaiiarāi « mais, en hiver, jusquʼau milieu de lʼuzaiiara [= jusquʼau milieu de lʼaprès-midi] » ; N 31.1 kahmāt̰ haca ˟rapiθβinanąm24 gāθanąm ratufritiš frajasaiti « Quand celui qui satisfait les Ratu en récitant les Gāθā du Rapiθβina commence-t-il ? » ; N 31.2 haca rapiθβaiiāt̰ maiδiiāi uzaiiarāi pairi.sacāiti « (La récitation du Rapiθβina) dure depuis midi jusquʼau milieu de lʼuzaiiara [= jusquʼau milieu de lʼaprès-midi] » ; N 32.1 kahmāt̰ haca uzaiieirinanąm25 g̱āθanąm ratufritiš frajasaiti « Quand celui qui satisfait les Ratu en récitant les Gāθā de lʼUzaiieirina commence-t-il ? » ; N 32.2 haca maiδiiāt̰ uzaiiarāt̰ hū frāšmō.dātǝ̄ e pairi.sacāiti « (La récitation de lʼUzaiieirina) dure depuis le milieu de lʼuzaiiara [= depuis le milieu de lʼaprès-midi] jusquʼau coucher du Soleil » ; N 32.3 hama iθa « Du moins, en été, » ; N 32.4 āat̰ aiβi.gāme yezi para hū frāšmō.dātōit̰ ahunąsca vairiiąn frasrāuuaiieiti « car, en hiver, en récitant avant le coucher du Soleil les (quatre) Ahuna Vairiia [= 4 × Y 27.13], » N 32.5 †spǝṇta.mańiiūmca26 vacastaštīm†27 xšuuaš [ vahištǝm srāuuaiieiti] 28 « et les six strophes de la Spǝṇtā.mańiiu (Hāiti) [= Y 47], » ; N 32.6 anāstǝrǝtō pascaēta auuā̊ yā̊ ańiiā̊ srāuuaiiōit̰ maiδiiāt̰ 29 ˟xšapat̰ 30 « il peut alors reciter le reste sans quʼil faille y voir une faute avant le milieu de la nuit » ; 20

F. M. KOTWAL et Ph. G. KREYENBROEK, 1992-2009 : gāθanąm. F. M. KOTWAL et Ph. G. KREYENBROEK, 1992-2009 : uštauuaitīm. 22 F. M. KOTWAL et Ph. G. KREYENBROEK, 1992-2009 : hāitīmca. 23 F. M. KOTWAL et Ph. G. KREYENBROEK, 1992-2009 : aniiā̊. 24 F. M. KOTWAL et Ph. G. KREYENBROEK, 1992-2009 : rapiθβinąm. ||| Langue originale rāpiθβinīnâm. 25 Langue originale āuzayarinīnâm. 26 F. M. KOTWAL et Ph. G. KREYENBROEK, 1992-2009 : spǝṇta mainiiūmca. 27 Ces mots me paraissent fautifs pour *spǝṇtā.mańiiə̄ušca vacastaštīš*. 28 Sans reflet dans la traduction pehlevie. 29 Haplologique pour *maiδiiaiiāt̰ . 21

209

N 33.1 kahmāt̰ haca aiβi.srūθrimanąm g̱āθanąm ratufritiš frajasaiti « Quand celui qui satisfait les Ratu en récitant les Gāθā de lʼAiβisrūθrima commence-t-il ? » ; N 33.2 haca hū frāšmō.dātǝ̄ e maiδiiāi31 xšape pairi.sacāiti « (La récitation de lʼAiβisrūθrima) dure depuis le coucher du Soleil jusquʼà minuit » ; N 33.3 tat̰ 32 hama tat̰ aiβi.gāme « Été comme hiver ».

Le Frahang ou le Nērangestān, au lieu de ratu asńiia, parle des Gāθā que l’on y récite. Il y est, par exemple, question des Gāθā Aiβisrūθrimā (féminin pluriel) au lieu du ratu asńiia Aiβisrūθrima Aibi.gaiia (masculin singulier) des litanies du Yasna. C’est l’origine de la traduction pehlevie g’s donnée de l’avestique asńiia-.

Articulations

FiO

hū vaxša (ušah bāmaiiā)

bahr ī sidīgar : ušā sūrā = Ušahina bahr ī cahārom : raōcaŋhąm fragaiti = Hāuuani !!! rōz kē aziš : fraiiara

maiδiia fraiiara

Les asńiia de lʼété selon N Ušahina

Les asńiia de lʼhiver selon N

Ušahina

Hāuuani

rapiθβā Première moitié de lʼuzaiiara = Rapiθβina, mais, en hiver, = Hāuuani

Rapiθβina

Hāuuani

Seconde moitié de lʼuzaiiara = Uzaiieirina az šab ... bahr ī fradom : hū frāšmō.dāiti = Aiβisrūθrima bahr ī dudīgar : ǝrǝzauruuaēsa = Aiβisrūθrima

Uzaiieirina

Uzaiieirina

Aiβisrūθrima

Aiβisrūθrima ou Uzaiieirina

maiδiia uzaiiara

hū frāšmō.dāiti

maiδiiā xšap

30 31 32

F. M. KOTWAL et Ph. G. KREYENBROEK, 1992-2009 : xšapāt̰ . Haplologique pour *maiδiiaiiāi. Fautif pour ˟yat̰ ? 210

Si nous comparons les données du Frahang avec celles du Nērangestān, il apparaît que nous devons faire soigneusement la distinction entre articulations, parties du jour et temps rituels, que le vide de la nuit a été comblé par lʼextension des temps rituels de la fin et du début de la journée ou que, remplacé par lʼextension de lʼasńiia Hāuuani en hiver, lʼasńiia Rapiθβina nʼexiste quʼen été. Et la Zand-āgāhīh le confirme33. Comme les temps rituels (asńiia-) avaient fini par couvrir aussi bien la nuit que le jour, il fallut remplacer azan- « jour » par un autre mot à l’instant de désigner les parties strictement diurnes du jour. Le mot auquel il est alors recouru est aiian- dont le nominatif-accusatif singulier est aiiarə. Malheureusement, l’étymologie et le sens premier des mots azan-34 et aiian-35 restent incertains. Cependant, la distinction nʼest pas toujours opérée correctement dans le Frahang entre articulations et parties du jour. Par exemple, parmi les quatre parties que la nuit rassemblerait, nous trouvons le coucher du Soleil (hū frāšmō.dāiti-) et le lever du jour (raōcaŋhąm fragaiti-) qui, en réalité, sont plutôt des articulations alors que, pour le nombre des parties de la journée, midi (rapiθβā-) nʼest pas pris en compte. Ceci dit, le sens duratif du dérivé en -ti- qui désigne un processus pourrait avoir permis lʼanomalie : lʼarticulation comporte une durée, aussi brève soitelle. Le commencement des lumières du jour (raōcaŋhąm fragaiti-) rappelle la progression des énigmatiques « taureaux des jours » (yōi uxšānō asną̃m ... frō aš ̣ahiiā [fr]ārəṇtē) ou celle des Aurores (ušaŋhąm ... frǝ̄rǝti- ou †frāγmat̰ † ušā̊ŋhǝm †sūraiiā̊) : FrW 10.41 āat̰ ušaŋhąm para frǝ̄ rǝtōit̰ (8) aēšō mǝrǝγō yō parō.darš (8) aēšō mǝrǝγō yō karǝtō.dąsuš (8) āθrō vācǝm surunaōiti (7) .·. « Alors, avant l’avancée des aurores, (le coq,) cet oiseau qui les prévoit, cet oiseau dont le bec est un couteau, entend la voix du feu » ; H 2.9 (= Vyt 8.4) aŋ́hā̊ dim vātaiiā̊36 frǝ̄ rǝṇta37 (8) sadaiieiti yā hauua daēna (8) 38 kainīnō kǝhrpa srīraiiā̊ (8) xšōiθniiā̊ auruša.bāzuu̯ō (8)... 33

ZA 25.9-10. Voir M. MAYRHOFER, 1992-2001, vol. I p. 154. 35 P. CHANTRAINE, 1968, p. 416-7, voit dans l’avestique aiiarə un mot apparenté aux grec ἦρι « de bonne heure » dont dérivent ἠέριος « matinal » et *ἄερι → ἄριστον « déjeuner ». 36 Cette graphie représente vātiyāh qui est haplologique pour vātiyāyāh « de la (fille) du vent ». 37 Langue originale frârtā, locatif singulier de frârti-. Nous ne pouvons y voir un participe actif, car la voix moyenne est requise pour le sens de « s’avancer ». 38 = Yt 5.64.1b. 34

211

ǝrǝduuafšńiiā̊ sraōtanuu̯ō (8) 39āzātaiiā̊ raē[uuat̰ .]ciθraiiā̊ (8) 40paṇca.dasaiiā̊ raōδaēšuu[a] (8) 41kǝhrpa auuauuatō.sraiia (8) 42yaθa dāmąn sraē̃štāiš (7) 43 (8) .·. « Dans l’avancée de cette (aurore) fille du vent, il sent vers lui (s’avancer) la Doctrine qui lui est propre, sous les traits d’une belle jouvencelle, splendide, aux bras de rose..., les seins dressés, belle de corps, noble, avec le Signe positif d’avoir fait des offrandes et le développement de celle qui a quinze ans, sous des traits d’autant de beauté qu’en présentent les très beaux produits [= les rayons du Soleil] » ; Y 46.3ab kadā mazdā (4) yōi uxšānō44 asną̃m (7) aŋhə̄uš darəθrāi (4) frō aš ̣ahiiā [fr]ārəṇtē (7) « Quand aboutira donc, Mazdā, lʼavancée des taureaux des jours qui a pour but de soutenir Aš ̣a avec l’existence ? » ; Yt 5.62.2 45θraōšta xšapō θritii̯ aiiā̊ (8) †frāγmat̰ 46 †ušā̊ŋhəm47 †sūraiiā̊ 48 vīuuaitīm 49 upa ušā̊ŋhəm [upa.]zbaiiat̰ 50 (?) arəduuīm sūrąm anāhi-

39

Cf. Yt 5.64.1e. Cf. Y 9.5.2ab. 41 = Yt 17.11.1d : voir J. KELLENS, 1974, p. 378 ; É. PIRART, 2006b, p. 175. 42 = Yt 10.143.3a. L’instrumental sraēštāiš est mis pour l’accusatif neutre pluriel. Il est à souligner que la version pehlevie ne correspond pas à ce texte. 43 = Yt 10.143.3b. 44 Ceci rappelle le nom que le vers RS 1.64.2a donne aux Marut : divá r̥ṣvā́ sa ukṣáṇaḥ. ||| Cf. Y 46.4b, 50.10c. 45 Cf. H 2.7.1a (= V 19.28.3a). 46 J. KELLENS, 1984a, p. 353, 375 et 383, fait de frāγmat̰ la troisième personne du singulier de la voix active de lʼinjonctif aoriste radical thématisé de frā+√ gam. Pour moi, frāγmat̰ est à analyser comme le nominatif-accusatif neutre singulier du participe aoriste radical actif (proto-indo-européen *pro gu̯m-n̥t), et nous considérerons quʼil est employé de façon artificielle ou fautive pour la troisième personne du singulier de la voix active de lʼinjonctif aoriste radical (langue originale fra-jant). Lʼaoriste est employé ici en tant que passé récent ponctuel dans une subordonnée tonale tandis que zbaiiat̰ constitue la base de la proposition principale. 47 Pour en faire le sujet de frāγmat̰ , il faudrait considérer que le syntagme ušā̊ŋhǝm sūraiiā̊ est mis pour le nominatif ; en reconstituant frajant ušā sūrā, la ligne, certes, ne fera que six syllabes, mais nous pouvons compléter le vers en y admettant zbaiiat̰ puisque, dans le dialecte avestique récent, cette forme ne doit faire que deux syllabes. Ceci nʼest pourtant possible que si nous admettons que les mots vīuuaitīm upa ušā̊ŋhəm constituent une glose : frāγmat̰ ušā̊[ŋhǝm] sūra[iiā̊] {vīuuaitīm upa ušā̊ŋhəm} [upa.]zbaiiat̰ (8). 48 Cf. V 18.15.3b. 49 Accusatif féminin singulier du participe présent de vī+√ bā : voir J. KELLENS, 1984a, p. 89. 40

212

tąm (8) .·. « Au terme de la troisième nuit, dès que commença lʼopulente aurore, {à lʼapproche de lʼaurore illuminatrice,} 51 il appela la (Rivière) au flux opulent et inaltérable ».

Le statut de parties de la journée ou de la nuit que les articulations peuvent prendre provient probablement de la durée que leur procès suppose, mais aussi de lʼimportance que revêtent le lever ou le coucher du Soleil dans la détermination de la partie du jour réservée à la célébration dʼun service sacrificiel. Cʼest ce qui ressort de passages de lʼĀbān Yašt : Yt 5.91.2 ana mąm yasna yazaēša (8) ana yasna frāiiazaēša (8) haca hū̃ vaxšāt̰ (6) ā hū̃ frāšmō.dātōit̰ (7) .·. « Il convient que tu m’offres le sacrifice et que, pour offrir le sacrifice, tu procèdes entre le lever et le coucher du Soleil » ; Yt 5.94.2 kəm.i[δa] 52 tē zaōθrā̊ bauuaiṇti (8) ˟yā̊sə 53 tauua 54 frabarəṇte (?) druu̯aṇtō daēuuaiiasnā̊ŋhō (8) pasca hū̃ frāšmō.dāitīm (8) .·. « Qu’advient-il des libations que t’apportent, après le coucher du Soleil, en disant "pour toi", les égarés qui offrent le sacrifice aux Daēuua ? » Cependant, de telles allusions sont le témoignage que, du moins pour lʼauteur de lʼĀbān Yašt, mais contrairement aux indications du Frahang ou du Nērangestān, il nʼy avait pas de temps rituels adéquats avant le lever ou après le coucher du Soleil. La présence du Soleil est requise. En tout cas, son lever marque le début de lʼune des parties de la journée comme dans la strophe védique RS 8.1.29 où le locatif absolu sū́ ra údite ne permet aucun doute à ce propos, mais où il paraît exister un laps de temps utile antérieur à lʼaurore, lorsque les ténèbres ne parviennent plus à sʼimposer, et un autre, après le coucher du Soleil, lorsque les ténèbres ne parviennent pas encore à sʼimposer : máma tvā sū́ ra údite V máma madhyáṁdine diváḥ | máma prapitvé apiśarvaré vasav V ā́ stómāso avr̥tsata || « Les éloges que jʼai pu lancer une fois le Soleil levé, sur le temps de midi, lors du repas ou avant la tombée de la nuit, Vasu, tʼont concerné ». 50

Voir ad frāγmat̰ ušā̊ŋhǝm sūraiiā̊. Il y a répétition secondaire de upa comme si cʼétait le préverbe de zbaiiat̰ . 51 Glose ? 52 < langue originale kahmi. 53 Les manuscrits donnent yasə. 54 Emploi de la forme tonique comme dans Y 62.1.2 : voir É. P IRART, 2016a, p. 245. 213

En effet, selon lʼanalyse que jʼen ai donnée55, cette strophe paraît garder le souvenir de deux laps de temps utiles aux célébrations rituelles, *apivasúet apiśarvará-, situés le premier avant le lever du Soleil et le second après son coucher : *apivasáu sū́ ra údite madhyándine prapitvé apiśarvaré

en vue du jour une fois le Soleil levé durant le temps de midi le temps du repas (= lʼaprès-midi ?) en vue de la nuit

Dans lʼénumération, nous remarquerons que le lever du Soleil nʼest pas envisagé comme laps de temps et quʼil nʼy est fait allusion quʼà titre de point de départ dʼune partie de la journée, de toute évidence la matinée. Selon la strophe védique, il faut donc enregistrer trois parties entre le lever du Soleil et son coucher, mais deux autres parties de la journée sont à admettre, la première entre la fin de la nuit et le lever du Soleil et la seconde entre le coucher du Soleil et la tombée de la nuit. Ces deux parties supplémentaires, selon mes analyses, avaient dû porter respectivement les noms dʼ*apivasú et dʼapiśarvará56. La déification dʼ*Apivasú doit être à lʼorigine de la formation de la figure mythique du premier des neuf Kǝuui avestiques, Aipi.vaŋhu. Comme le laps de temps de ce nom était primitivement antérieur à celui de lʼaurore, la déesse Ušah ne pouvait logiquement pas être la mère de la figure mythique le patronnant. Elle ne pouvait avoir ce fils, selon le Bundahišn, que par adoption. Les textes avestiques paraissent bien admettre eux aussi lʼexistence dʼun laps de temps utile antérieur au lever du Soleil. Entre la fin de la nuit noire et le lever du Soleil, il semble bien que le Frahang admette au moins deux laps de temps utiles auxquels nous pourrions donner les noms dʼaube et dʼaurore tout en évitant de confondre cette dernière avec la première partie de la matinée. Remarquons ici le rôle de Miθra qui installe les parties utiles du jour :

55

É. PIRART, 2013a, 85. Le sens de api+ rappelle ceux de l’avestique aipī dans Y 29.4b2 et de ἐπί dans le grec ἐπιγείνομαι. 56

214

V 19.28 āat̰ mraōt̰ ahurō mazdā̊ .·. (7) 57†pasca para.iristahe† maš ̣ii̯ ehe pasca frasaxtahe† maš ̣ii̯ ehe (?) 59†pasca pairiθnǝm dǝrǝniṇti 61 (8) 62daēuua druu̯aṇtō duždā̊ŋhō .·. (8) 63θritii̯ ā̊ xšapō (8) ˟vīusaiṇti 65 (8) ˟ušā̊ raōcaite˟ 66 bāmaiia 67 .·. (8) gairinąm ˟aš ̣a.xuvāθrąm 68 (8) 69 āsǝnaōiti (8) †miθrǝm huzaēnǝm†70 (?) huu̯arǝxšaētǝm ˟uzii̯ ō.rǝiti71 (8) .·. « Et Ahura Mazdā dit : Lorsque lui vient la mort, au terme échu de sa vie, tous les Daēuua que lʼErreur accompagne, eux à qui lʼoffrande est mauvaise à faire, arrachent le mortel au cycle de la vie. Au terme de la troisième nuit, (?) 58†

57

Mis pour *para.irista maš ̣ii̯ ehe* (8) avec locatif du substantif en -ti- ou pour pasca ˟para.iristī(m) maš ̣ii̯ ehe ? 58 Mis pour *pairi.saxta maš ̣ii̯ ehe* (8) avec locatif du substantif en -ti- ou pour pasca ˟pairi.saxtī(m) maš ̣ii̯ ehe ? 59 Cf. V 18.19.2 auua mē āziš daēuuō.dātǝm (9) parōit̰ pairiθnǝm aŋhuu̯ąm (8) [auua.]dǝrǝnąn sadaiieiti (6) .·. « Āzi que les Daēuua mirent en place me paraît à même dʼinterrompre le cycle de la vie avant terme » ; Yt 8.54. 60 Mis pour *ahunąm. 61 Cf. Y 32.3a1 at̰ yūš daēuuā vīspā̊ŋhō. 62 = V 19.3.4a, etc. 63 = H 2.7.1a θritii̯ ā̊ xšapō +θraōšta ; cf. Yt 5.62.2a. 64 Locatif de θraōšti- « le terme » (cf. grec τρύω). 65 Comme le verbe conjugué de cette proposition est forcément ˟raōcaite, il convient de corriger viiusaiti (K. F. GELDNER, 1886-1896) en ˟viiusaiṇti pour en faire le nominatif féminin singulier du participe présent actif (= védique vyuchántī [RS 4.52.1b]). Cf. H 2.7.1bc viiusą ˟sadaiiete. 66 K. F. GELDNER, 1886-96 : uš ̣i.raocaiti ; H. JAMASP, 1907 : usi.raocaiieiti. Le verbe √ ruc, dʼaprès le védique (cf. RS 6.64.1a úd u śriyá uṣáso rócamānāḥ « Les aurores à nouveau pour la beauté (se sont) dressées brillantes », 6.64.2d úṣo devi rócamānā máhobhiḥ « déesse aurore qui brilles avec les (dieux) majestueux »), nʼexistant quʼà la voix moyenne (malgré J. KELLENS, 1984a, p. 30), nous devons corriger raocaiti de K. F. GELDNER en ˟raōcaite. De même, la forme raōciṇtāt̰ de A 4.5i (= A 4.7i ; J. KELLENS, 1984a, p. 105 et 320) raōciṇtāt̰ paiti āθrāt̰ « avec le feu allumé » ne peut être acceptée : elle est à corriger en ˟saōciṇtat̰ sur base de V 9.56g saōciṇtat̰ paiti āθrat̰ . 67 Participe en ºa- du dénominatif en +i̯ a- dérivant du substantif en -ma- tiré de √ bā. 68 K. F. GELDNER, 1886-96 : aš ̣axvāθranąm. 69 Dʼaprès Yt 10.13.1b. 70 Cf. V 19.15.3 nizbaiiemi miθrǝm (6) vōuru.gaōiiaōitīm huzaēnǝm (8) xvarǝnav ŋ hastǝmǝm zaiianąm (8) vǝrəθrauuastǝmǝm zaiianąm (8). 71 K. F. GELDNER, 1886-96 : uziiōraiti. La thématisation que supposerait la graphie avec ºaiº ne permet pas de justifier ºōº. 215

(sache-le,) Zaraθuštra, lʼaurore claire et lumineuse point, le vigilant Miθra monte au-delà de Harā, celui des monts où le bien-être découle dʼAš ̣a, et pousse le Soleil à se lever » ; Yt 10.13 yō paōirii̯ ō mańiiauuō yazatō72 (*8) tarō harąm +āsənaōiti73 (8) pauruua74 naēmāt̰ aməš ̣ahe (8) hū̃ yat̰ 75 auruuat̰ .aspahe .·. (8) yō ˟paōiriš76 zarańiiō.pīsō77 (8) srīrā̊ barəšnauua gərəβnāiti78 (8) aδāt̰ 79 vīspəm ādiδāiti80 (8) airiiō.šaiianəm səuuištō .·. (8) « (Miθra,) le premier des (Yazata) Mańiiauua à monter au-delà de Harā depuis lʼest du Soleil immortel qui a des chevaux dʼattaque, (Miθra) qui prend les nombreuses et belles (aurores) ciselées dʼor pour les placer au sommet (de la montagne), (Miθra) qui, de ce (sommet), comme (les sacrifices offerts) lʼinvigorent souvent, peut contempler lʼensemble du domaine que les Airiia habitent ».

Lʼadoption de parties utiles antérieures au lever du Soleil incombe naturellement à Miθra, le dieu de lʼéchange que les hommes entretiennent avec les dieux. Je ne pense pas que ce dieu soit à considérer comme le spécialiste des laps de temps intermédiaires situés entre la nuit et le jour, où il fait clair sans que le Soleil ne soit présent. Miθra intervient tout simplement en raison du statut de ces laps temps donnés pour utiles. La nuit, selon le Mihr Yašt, finit avant lʼaurore, et celle-ci point dès avant le lever du Soleil.

72

Lʼoctosyllabisme de ce vers peut être restauré comme suit : yō paōirii̯ ō *mańiiauuanąm. Sur la construction de paōiriia- avec le génitif pluriel, voir V 20.1.2a kō paōirii̯ ō maš ̣ii̯ ānąm. 73 Avec le V 19.28.4b, 19.30.3b (tarasca harąm bǝrǝzaitīm āsǝnaōiti) et J. KELLENS, 1984a, p. 170 et 172 n. 17, contre K. F. GELDNER, 1886-96, qui donne āsnaoiti. 74 K. F. GELDNER, 1886-96, propose pauruua.naēmāt̰ . Sandhi comme le prouve N 19.5 pauruuāt̰ vā naēmāt̰ aparāt̰ vā. 75 Cheville métrique. 76 Geldner paoiriiō. Faute de persévération de Yt 10.13.1a. Contre J. KELLENS, 1974, p. 49. Cf. RS 3.6.7b uṣó vibhātī́ r ánu bhāsi pūrvī́ ḥ « Tu brilles à la suite de nombreuses aurores brillantes ». 77 Accusatif féminin pluriel : J. KELLENS, 1974, p. 49. 78 √ graf + accusatif + locatif « prendre pour placer sur » figure aussi dans RS 9.86.43d hiraṇyapāvā́ ḥ paśúm āsu gr̥bhṇate « Les orpailleurs sʼemparent de la victime [= Sóma] pour la plonger dans les (eaux) ». 79 Mis pour langue originale atah. 80 Tandis que S. INSLER, 1971, p. 583-4, et J. KELLENS, 1984a, p. 184 n. 11, corrigent cette forme en ˟ādiδaēiti, A. CANTERA, 2016, p. 94, s’y refuse, mais pour une mauvaise raison (voir Chapitre V 2). 216

Ces laps de temps où il fait déjà ou encore clair sont adéquats pour la célébration des sacrifices, mais ceci va à lʼencontre des craintes exprimées dans lʼĀbān Yašt où la grande déesse iranienne les rejette en indiquant que, si les libations lui étaient offertes alors, les démons en seraient les bénéficiaires. Nous enregistrerons donc une divergence : selon ce que lʼĀbān Yašt rapporte, lʼopinion du Frahang, du Nērangestān ou du Yasna ne coïncide pas avec celle que professe la propre grande déesse iranienne. Le passage de trois à cinq temps rituels par jour est donc une idée quʼil faut rejeter. Il pouvait bien y avoir cinq temps rituels dès les origines. Il serait dʼailleurs exceptionnel que lʼévolution transformât trois en cinq. Cʼest habituellement lʼinverse que lʼon constate, la réduction dʼun nombre au lieu de son augmentation. Le mythe de la succession de Θraētaōna qui nʼa plus que trois fils alors que le védique Yayāti en a cinq est un bel exemple de cette évolution. En effet, il est tout à fait symptomatique que le deuxième des trois fils de Θraētaōna, malgré la réduction, porte encore le nom de Tura « quatrième ». Lʼévolution est plutôt à chercher dans les limites assignées aux temps rituels. Et nous devons tenir compte de la saison pour leur définition. Il est clair que le Frahang, le Nērangestān et le Yasna ont comblé le vide nocturne en tirant sur les temps rituels extrêmes de la journée, lʼUšahina et lʼAiβisrūθrima, mais que cette situation nʼétait pas celle des origines. Primitivement, la journée avait comporté ou non, selon les écoles, des parties utiles aux célébrations sacrificielles avant le lever et après le coucher du Soleil, mais la nuit noire, logiquement, ne comportait pas de parties utiles. La strophe gâthique Y 44.5 n’atteste donc pas que, primitivement, il n’y avait que trois temps rituels par jour, et les autres documents avestiques ne permettent pas de dire que de nouveaux temps rituels quotidiens auraient été introduits pour arriver à un total de cinq. De surcroît, ce nombre est variable, cinq en été, quatre en hiver. Remarquons-le aussi : la strophe védique RS 8.1.29 pourrait bien contenir le souvenir d’une série proto-indo-iranienne de cinq temps rituels quotidiens. Avant de refermer ce dossier, il faut que je revienne une fois de plus81 sur le terme de ratu- (< proto-indo-européen *H2ré-tu-82) qui est appliqué à la désignation des temps rituels. Malgré les affirmations répétées de Jean 81

É. PIRART, 2012a, p. 116 n. 33 ; 2014a, p. 116. D’autres substantifs en -tu- tirés de la forme de la racine montrant le degré zéro interne et le degré plein externe sont xratu- « la performance, l’intelligence » et fsəratū- « la mise sous contrôle ». 82

217

Kellens ou d’autres, ce terme ni ne signifie « temps rituels » ni n’est le correspondant du védique r̥tú- (< proto-indo-européen *H2r̥-tú-) « temps opportun, saison ». Le terme est employé comme indication du fait que les temps rituels constituent un ensemble organisé qui conditionne la célébration sacrificielle au même titre que bien d’autres. Pour nous en convaincre, il nous suffit de constater que les entrées de l’organigramme du corps sacerdotal reçoivent tout aussi bien la qualification de ratu-83. Et, c’est avec tous les ratu requis selon les plans du Ratu suprême (ratu- bərəza(ṇt)-) que le sacrifiant yá eváṁ véda parvient à voir Aša.̣

83

É. PIRART, 2012a, p. 247. 218

III 3. Les douze mille ans Le zoroastrisme, lʼobédience religieuse de plusieurs peuples de langues iraniennes tels que les Mèdes ou les Perses, se caractérise notamment par lʼidée que le temps est fini, linéaire et fait de douze millénaires. La vision que les zoroastriens en avaient est basée sur des spéculations mathématiques, mais la durée totale de douze millénaires leur fut bien évidemment suggérée par les douze mois de lʼannée. Dans lʼAvesta, le corpus de leurs textes sacrés, les douze mois de lʼannée comptent tous trente jours. Le total de 360 jours ou de 12 fois 30 jours était complété de cinq jours de fête situés en quelque sorte en dehors du temps ou faisant la jonction entre deux années consécutives. Entre les deux premiers siècles de lʼère commune, Plutarque1 de Chéronée, dans Isis et Osiris, nous offre un résumé de ce que Théopompe de Chios, un historien du quatrième siècle avant lʼère commune, savait de lʼobédience vieil-iranienne. Je schématise et modernise comme suit la substance de ce résumé : ― existence dʼun dieu bon, savant ou lumineux, Ahura Mazdā, et dʼun dieu mauvais, ignorant ou obscur, Aŋhra Mańiiu ; ― le mage Zoroastre [Zaraθuštra] est le fondateur de cette doctrine ; ― le dieu Miθra se situe entre Ahura Mazdā et Aŋhra Mańiiu ; ― le dieu mauvais est à désarmer au moyen de sacrifices apotropaïques dans lesquels le jus de Haōma est mêlé à du sang de loup en un lieu où le Soleil ne peut arriver ; ― certains animaux ou végétaux appartiennent au dieu bon ; dʼautres, au dieu mauvais ; ― le dieu bon comme le mauvais ont mis en place les autres dieux et démons, chaque dieu trouvant en face de lui le démon qui symbolise sa négation ou son contraire ; ― les étoiles sont au nombre des dieux, mais les planètes, au nombre des forces délétères ; ― le temps des démons est compté, le temps linéaire étant une parenthèse que le dieu bon a ouverte dans lʼinfini pour y enfermer le dieu mauvais et les démons ; ― une fois la parenthèse refermée, la terre sera dépourvue de montagnes, et les hommes parleront tous la même langue ; pour eux disparaîtra la nécessité de la nourriture, et ils ne projetteront plus dʼombre ; 1

Plutarque, Isis et Osiris 46-7. 219

― la parenthèse du temps linéaire se compose de trois périodes chacune de trois mille ans. La première fut le règne du dieu bon tandis que la deuxième, celui du mauvais, mais la troisième, lʼactuelle, est le théâtre de la guerre que les deux principes se livrent. Cette dernière période sʼachèvera avec la victoire du bien et de la lumière. À la lecture des propres livres zoroastriens, nous pouvons constater que, globalement, cette présentation est assez correcte ou nʼest erronée que dans le détail. Les neuf millénaires de Théopompe sont ceux du monde réel ou concret. Trois millénaires (0-3000) abstraits les avaient précédés2 au cours desquels la réalité nʼétait encore quʼà lʼétat de projet, mais, si nous en tenons compte, au total, le temps linéaire fait 12000 ans. Le grand dieu Ahura Mazdā « le roi qui nous apporte la sagesse », par définition, savait que, forcément, lʼinfini comportait tout à la fois le mal et le bien. Afin dʼen éliminer les forces délétères, il fallait ouvrir une parenthèse dans lʼinfini, il fallait instaurer le temps linéaire et fini dans lequel il serait possible dʼenfermer et de vaincre le mal. Ahura Mazdā amadoua le temps et lʼespace3 pour y délimiter ou en extraire le fini. Le temps linéaire est fait de 12000 ans4. Sans doute à l’image de l’année faite de douze mois, car l’ima2

ZA 36.1 (DH:229v03-06 ; TD1:102r04-07 ; TD2:238.06-09 ; K20a:128v1618 ; K20b:19v02-05 ; M6b:250v18-20) gōved pad dēn kū se hazār sāl mańiiaōi estišn būd kū dām a-menīdār ud a-ravāg ud a-griftār būd ud hazārag xvadāy varrag ud gāv ud dō-pahikar būd .·. « Dans la Doctrine, il dit que trois mille ans fut lʼétat abstrait dans lequel les (êtres) mis en place restaient sans penser, sans bouger et sans prise ou que, (dans le zodiaque,) les souverains du trimillénium furent le Bélier, le Taureau et les Gémeaux ». 3 Dk 3.208 ; VZ 1.9-10 (K35:234r15-234v01 ; TD4a:482.08-12) u-š bē aziš zamān be ō ayārīh xvāst cē-š dīd kū ahreman pad mayānjīgīh ī ēc rōšnīh abar nē ested ud zamān ast harv dōān pad ham-ayārīh ud rāst rāyēnīdārīh aviš niyāz .·. u-š pad se zamān kard ī harv zamān-ēv se-hazārag .·. « En conséquence, il appela le Temps à lʼaide, car il voyait quʼAŋhra Mańiiu [lʼarchidémon Funeste Avis] nʼaccepterait le jugement dʼaucun (être de) lumière, que le Temps leur viendrait en aide à tous deux et quʼil était nécessaire de trouver un arrangement juste. Et (Ahura Mazdā) divisa le temps en trois périodes chacune de trois mille (ans) ». Voir É. PIRART, 2003b ; 2010a, p. 129. Sur les dieux cadres, Dk 3.127. 4 ZA 1.42 (DH:162r10-15 ; TD1:04v07-13 ; TD2:10.01-08) cē zamān-iz ī dagrand-xvadāy nazdist dām ī-š frāz brēhēnīd cē a-kanārag būd pēš az gumēzišn hamēv-īh ud ohrmazd kanārag-ōmand brēhēnīd az ān a-kanāragīh kū az bun-dahišn ka dām dād tā ō frazām ka gannāg mańiiaōi a-kār baved paymānag-ēv ī dvāzdah-hazārsāl ud kū kanārag-ōmand pas ō a-kanāragīh gumēzed ud varded ud kū dām-iz ī ohrmazd abēzagīhā abāg ohrmazd ham-ēv bavend .·. « Car le Temps de longue 220

gination a besoin de modèles. Toute la mythologie zoroastrienne sʼinscrit dans ce cadre, mais il y a une rallonge inexpliquée de 57 ans aux 12000 ans, le total étant alors de 12057 ans. Les divisions majeures de ce temps fini, ce sont les trimilléniums. À lʼimage des saisons faites de trois mois, de lʼéquinoxe au solstice ou du solstice à lʼéquinoxe. Au cours des trois premiers millénaires (0-3000), lesquels étaient abstraits (mańiiauua-), la réalité était encore à l’état de projet5, mais Théopompe de Chios6 passe sous silence cette première période. Zādsparam ī Gušnjamān, dans ses Vizīdagīhā, fait de même. La deuxième période de trois mille ans (3001-6000) fut sans mélange comme la première7, puisque le bien et le mal y existaient séparément, mais de façon concrète cette fois, le premier étant situé en haut et le second, en bas. Le mélange entre le bien et le mal nʼavait pas lieu en raison dʼun espace vide, vaiiu- en vieil iranien avestique8, tvhykyh en moyen perse9, les séparant souveraineté est bien le premier des (êtres) mis en place à avoir été façonné. Car lʼÉternité était sans limite avant le mélange, mais Ahura Mazdā tira le limité de lʼinfini, de sorte quʼil y a, à partir de la mise en place des origines, lors de la mise en place des êtres, jusques à la fin, lorsquʼAŋhra Mańiiu deviendra inactif, un cycle de douze millénaires, mais de sorte que le limité, par la suite, trouvera lʼabsence de limites et deviendra infini et que les êtres dʼAhura Mazdā aussi, du fait de la pureté, se retrouveront avec lui pour toujours ». 5 ZA 36.1. 6 Chez Plutarque, Isis et Osiris 46-7. 7 ZA 1A.1 (DH:163v16-17 ; TD1:07r14-16 ; TD2:16.13-15) ka gannāg mańiiaōi stardīhā a-kār būd ciyōn-im abar nibišt se hazār sāl {pad stardīh nibast} .·. « Le temps que la confusion tenait Aŋhra Mańiiu dans l’inaction, comme je l’ai dit plus haut, fit trois mille ans {il gisait dans la confusion} » ; ZA 36.2 (DH:229v06-08 ; TD1:102r07-08 ; TD2:238.09-11 ; K20a:128v18-20 ; K20b:19v05-08 ; M6b:250v 20-251r01) se hazār sāl gaiiō.marǝt abāg gāv pad gaēiθii estišn būd hend a-paitiiāragīhā ud hazārag xvadāy karzang ud šagr ud dōšīzag būd hend ciyōn baved šaš hazār sāl .·. « Trois mille ans Gaiia Marǝtan avec Gaō (Aēuuō.dātā) fut dans lʼétat concret sans antagonisme. Et les souverains du trimillénium furent le Cancer, le Lion et la Vierge. De sorte que cela fait six mille ans ». 8 Lʼavestique vaiiu- (= védique vāyú-) est donc tiré non de √ vā « souffler », mais de la racine qui explique aussi le latin vānus « creux, dépourvu ». 9 Le pehlevi tvhyk « vide » ou le parthe tvsyg « vide » dérivent de la racine vieiliranienne *tuš (J. CHEUNG, 2007, p. 388) reflétée par lʼavestique √ tuš « être vide » (dans tusǝn [V 3.32] ou dans taōšaiieiti [Yt]) et coïncidant avec le védique TUṢ (dans tuchyá- « vide »). Pour la traduction de vaiiu-, au lieu du substantif tvhykyh « la qualité dʼêtre vide, le vide » que nous trouvons dans la Zand-āgāhīh (ZA 1.5-6), 221

complètement10. Cette deuxième période fut celle du premier homme, Gaiia Marǝtan, et de la première vache, Gaō Aēuuō.dātā11. Un tandem à lʼimage du Soleil et de la Lune12. Le début du troisième trimillénium (6001-9000) est marqué par lʼintervention13 néfaste de lʼarchidémon Aŋhra Mańiiu14. Cʼest celle du mélange ou de lʼaffrontement. Gaiia Marətan n’y vivra encore que trente ans, et le démon y assassinera aussi Gaō Aēuuō.dātā15, la vache primordiale. Cʼest la période au cours de laquelle apparurent le premier couple humain (*Mašiia ̣ 16 et *Maš ̣iiaēinī) et les diverses races animales, mais c’est celle au cours de laquelle les forces du mal remportèrent des succès importants comme lʼillustre le règne épouvantable du serpent tricéphale Aži Dahāka qui dura 1000 ans (7001-8000)17. Le troisième trimillénium est ainsi le cadre de bonne partie de la mythologie avestique18. Zaraθuštra passa les derniers instants de ce trimillénium à s’entretenir avec Ahura Mazdā « le Roi qui nous apporte la sagesse »19. Millénaires 6001-7000 7001-8000 8001-9000

Patronnés20 par Yima Dahāka

Zādsparam, dans ses Vizīdagīhā (VZ 1.1), recourt à vyšʼtkyh « la qualité dʼêtre ouvert ou détaché », terme tiré du verbe vyšʼtn| « détacher, ouvrir » (= védique ví ṢĀ) qui est employé à propos de la bouche (VZ 30.16), de la gueule (VZ 4.19), des fenêtres et des portes (VZ 29.2). 10 Théopompe pourrait avoir confondu Vaiiu, le dieu de cet espace vide de signe ambigu situé entre le bien et le mal, avec Miθra, le dieu juge qui fait le tri entre les bons et les mauvais. En effet, selon Théopompe, Miθra se situerait à mi-chemin entre le dieu bon et le dieu mauvais. Sachons que l’homologue indien Vāyu, devenu le vent dans une partie de la littérature indienne post-védique, était, primitivement, l’espace libre comme en Iran (É. PIRART, 2010a, p. 129-31). 11 VZ 2.8-9 ; ZA 1A.12-3, 1A.20-1. 12 ZA 7.9. 13 Avestique *aiβi.gaiti-. 14 ZA 4.1-5. 15 ZA 33.1.1, 36.3, DD 36.33. 16 ZA 33.1.2, 36.3-4. 17 ZA 36.6. 18 ZA 33.1-10, 36.4-8. 19 Dk 7.2-3, ZA 33.12. 20 Dk 3.329. 222

La dernière période (9001-12000), ouverte avec lʼapparition ou réactualisation de la bonne doctrine (vaŋvhī- daēnā-) que Zaraθuštra, âgé alors de trente et un ans, a reçue du grand dieu21, est celle que nous vivons et qui, après lʼhorreur des invasions grecque ou arabe de lʼIran, verra bientôt la victoire des forces lumineuses sur les délétères au terme de combats et de sacrifices menés sous la houlette des trois fils futurs de Zaraθuštra, les trois « Invigorateurs » (saōšiiaṇt-)22, même si, faut-il bien dire, de simples calculs, plus de mille ans après les invasions médiévales, montreront que nous sommes déjà bien au-delà de la fin du millénaire de Zaraθuštra (900110000). Le trimillénium qui va de lʼan 9001 à lʼan 12000 appartient, comme le précédent, à cette moitié du temps linéaire connue sous le nom de « mélange »23. Le millénaire de Zaraθuštra (9001-10000) avec lequel s’ouvre ce dernier trimillénium, grosso modo, correspond à une période que nous pouvons qualifier d’historique24. Comme les deux suivants, patronnés respectivement par les deux premiers des trois fils futurs de Zaraθuštra, Uxšiiat̰ .ərəta (10001-11000)25 et Uxšiiat̰ .nəmah (11001-12000)26, sont les derniers, il ne resterait apparemment aucun laps de temps pour que le troisième, Astuuat̰ .ərəta, pût jouer son rôle décisif. Autrement dit, les quatre figures que sont Zaraθuštra et les trois Saōšiiaṇt auraient dû se partager les honneurs de patronner les trois derniers millénaires, mais, en évitant la division complexe 21

ZA 36.8 (DH:230r05-07 ; TD1:102v11-13 ; TD2:239.14-240. 01) ud pas hazārag xvadāyīh ō vahīg mad zaraθušt ī spitāmān pad paygāmbarīh ī az dādār ohrmazd ō vīštāsp ī šāh āmad .·. « Et, ensuite, (lorsque) la souveraineté du trimillénium passa au Capricorne, Zaraθuštra descendant de Spitāma fut chargé par Dātar Ahura Mazdā de se rendre chez le roi Vīštāspa ». 22 Dk 7.0.42 (M. J. DRESDEN, 1966, p. 356 lignes 03-05) ud padiš kardārīh ī ōy puθrān uxšiiat̰ .ərə ud uxšiiat̰ .nəmāh ud saōšiiąs fraš-kərət andar axvān ī dāmān ī ohrmazd amarg ud nihangīhādar aziš varz ud xvarrah ud abdīh nihang-ēv azēr nibišt ud vindād estēd ºoº « Et, de ce fait, lʼaction de ses fils, Uxšiiat̰ .ǝrǝta, Uxšiiat̰ .nǝmah et le Saōšiiaṇt, mènera lʼexistence des êtres quʼAhura Mazdā a mis en place à sa perfection et la rendra immortelle. Et, divisé en chapitres concernant (leur) varǝcah, (leur) xvarǝnah et (leur) caractère merveilleux, un exposé plus bas a été écrit et fourni ». 23 Moyen-perse gvmycšn| (VZ 1.0). 24 ZA 33.12-21, 36.9-10. ||| Le millénaire de Zaraθuštra est le 4e de cette moitié du temps connue sous le nom de « mélange ». 25 Dk 7.8, ZA 33.29. 26 Dk 7.9, ZA 33.32. ||| Concernant lʼapparition de la bonne doctrine (Vaŋvhī Daēnā), RPDD 25.2 fait remarquer que 3000 ans la séparent de la Frašō.kǝrǝiti. 223

de trois par quatre, le concepteur du mythe aurait rejeté l’action du troisième Saōšiiaṇt en dehors du temps ou, plus exactement, sur une rallonge, un laps de temps supplémentaire fait de 57 ans. Millénaires 9001-10000 10001-11000 11001-12000 12001-12057

patronnés27 par Zaraθuštra Uxšiiat̰ .ǝrǝta Uxšiiat̰ .nǝmah Astuuat̰ .ǝrǝta

Un mythe à l’étude duquel un chapitre de mon ouvrage concernant la naissance d’Índra est consacré, fort comparable à celui d’ Ἐριχθόνιος et des filles de Κέκροψ à Athènes, explique comment il est possible que Zaraθuštra, pourtant né 30 ans avant le terme du troisième trimillénium, soit le père des trois futurs Saōšiiaṇt, ces figures eschatologiques et successives qui verront le jour à la fin des temps28. La doctrine zoroastrienne est un dualisme dont les racines plongent dans le polythéisme proto-indo-européen ou proto-indo-iranien, mais ce dualisme ne se définit pas, du moins primitivement, comme une approche éthique du monde. Lʼopposition du bien (vohu-) et du mal (aka-) nʼy est pas dʼordre proprement éthique, le bien étant plutôt ce qui fonctionne, ce qui est couronné de succès face au mal vu comme étant ce qui rate ou tourne court. Un handicapé, dans cette vision primitive, est un mauvais29. La définition du dualisme zoroastrien ne se limite pas à la mise en relief du tandem contrasté du bien et du mal ou du positif et du négatif. Un autre tandem important y est celui de lʼabstrait (mańiiauua-) et du concret (gaēiθiia-). Cʼest ainsi que nous trouvons, à côté de la déesse de lʼAurore (ušah-) qui est concrète ―nous pouvons effectivement en admirer les doigts de roses―, une autre déesse qui, elle, est abstraite : la bonne doctrine (vaŋvhī- daēnā-)30 avec lʼapparition ou réactualisation de laquelle sʼouvre le dernier trimillénium, la période décisive que nous vivons. Le grand dieu Ahura Mazdā est, quant à lui, la version abstraite du Ciel. Pour exprimer ce rapport, il est fait usage de la métaphore que le grand dieu en est vêtu31. 27

Dk 3.329, 3.407. É. PIRART, 2010a, p. 89-92. 29 LʼĀbān Yašt (Yt 5.92) ainsi condamne-t-il les malades, les invalides, les difformes ou les lépreux : voir É. PIRART, 2010b, p. 75. 30 É. PIRART, 2010a, p. 92-94. 31 Yt 13.3. 28

224

Niriosaṅgha Dhavalasuta, le traducteur médiéval indien, au lieu de celles de finition et d’abstraction, recourt compréhensiblement aux idées de visibilité et d’invisibilité, disant en sanscrit quʼil y a des êtres dr̥śyamūrti- et dʼautres adr̥śyamūrti-. Le zoroastrisme se caractérise aussi par lʼidée dʼune rétribution des actes dans lʼau-delà, mais ici aussi, quoi que Voltaire ou Nietzsche nous en aient fait croire, Zaraθuštra ne doit pas être vu comme lʼinventeur de la morale 32. Les actes dont il est question sont les sacrifices célébrés33 dans le cadre du culte rendu aux bonnes divinités, les adorables Yazata. Lʼeschatologie individuelle, dans le zoroastrisme, est aussi développée que lʼeschatologie générale, la première sʼarticulant parfaitement avec la seconde. Le sort réservé aux âmes des défunts est limité dans le temps, les supplices du pire des impies devant prendre fin à lʼaube de lʼinfini. En effet, les impies comme les pieux adorateurs accéderont à lʼéternité située au-delà du temps linéaire, au terme de châtiments qui les auront dégraissés des forces malignes présentes en eux34, car les mauvais dieux, les démons, quant à eux, ne survivront pas au grand parachèvement (frašō.kǝrǝiti-) que le troisième des fils posthumes de Zaraθuštra, le Saōšiiaṇt du nom dʼAstuuat̰ .ǝrǝta « possesseur dʼun bon agencement osseux », pourra mener à bien. Le dernier des trois fils posthumes ou futurs de Zaraθuštra, curieusement ou contre toute logique, démarrera son œuvre en l’an 12000 du monde, c’està-dire là où le cours du temps linéaire devrait arriver à son terme. De surcroît, les textes nous affirment qu’il mènera son œuvre à bien en 57 ans. Comment peut-il y avoir 57 ans après le temps ? Un texte va jusqu’à parler du millénaire d’Astuuat̰ .ərəta et à dire que ce sera un millénaire de 57 ans. Visiblement, les mots ne veulent plus dire ce qu’ils voulaient dire : 9001 9001-10000 10001-11000 11001-12000 12001-12057

apparition de la bonne Daēnā millénaire de Zaraθuštra millénaire d’Uxšiiat̰ .ərəta millénaire d’Uxšiiat̰ .nəmah millénaire (!) d’Astuuat̰ .ərəta

32

J. KELLENS, 1984b. Les sacrifices offerts constituent des mérites dont le défunt sera récompensé dans lʼau-delà. À ce sujet, voir entre autres RPDD 9, 15-16, 21, 27, 40. 34 RPDD 24, ZA 34.7, 34.27-31. 33

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Le dernier Saōšiiaṇt, Astuuat̰ .ərəta, devrait donc patronner un millénaire (hcʼlk) supplémentaire, qui, contre toute logique et au mépris de sa propre appellation de millénaire, ne serait fait que de 57 ans35, après ceux, bel et bien chacun de 1000 ans, que patronneront les deux Saōšiiaṇt précédents, Uxšiiat̰ .ǝrǝta et Uxšiiat̰ .nǝmah36. Ceci est évidemment absurde puisque le temps linéaire doit absolument être limité à 12000 ans et que l’affirmation dʼun millénaire de 57 ans reste inacceptable. Comme les textes sont là, nous nous trouvons dans l’obligation d’expliquer cette insupportable anomalie. Que faire ? C’est en scrutant les textes que nous trouverons un début de solution. Si nous concentrons notre attention sur le nombre 57 et que nous en relevons les attestations, il apparaît que ce nombre n’est pas l’apanage du troisième Saōšiiaṇt. Ce fut notamment déjà le nombre des années que Zaraθuštra mit à répandre la bonne doctrine37, mais le constat38 que 57 est le total que donne l’addition du nombre de 24 mots composant l’Airiiaman Išaiia39 avec ceux de 12 présents dans l’Aš ̣a Vahišta40 et de 21 que contiennent ensemble les trois Yasna qui suivent41 ne fournit aucune explication de la rallonge de 57 ans du temps linéaire fini. Néanmoins, nous comprenons un peu pourquoi, selon les Vizīdagīhā ī Zādsparam42, Airiiaman, la déification du Y 54.1.1, sera le guide d’Astuuat̰ .ərəta. En réalité, ce sont plutôt les autres données numériques que nous devons relever dans les textes parlant des deux derniers millénaires. En effet, faut-il 35

ZA 33.35. Sur les noms des Saōšiiaṇt, É. PIRART, 2013b. 37 Dk 7.4.1, 7.5.12, VZ 34.47. 38 VZ 28.7. 39 Y 54.1.1 ā airiiə̄mā išaiiō (7) rafǝδrāi jaṇtū (4) nǝrǝbiiascā nāiribiiascā (7) zaraθuštrahē (5) vaŋhə̄uš rafǝδrāi manaŋhō (7) yā daēnā vairī̃m (6) hanā̃ t̰ mīždǝm (5) aš ̣ahiiā yāsā aš ̣īm (7) yąm išaiiąm ahurō (7) masatā mazdā̊ (5) .·., pour autant que nous ne comptions pas les deux ºcā et que nous récitions la strophe une seule fois au lieu des quatre prévues dans la liturgie longue. 40 Y 54.1.2 (= Y 27.14) aš ̣ǝm vohū vahištǝm astī (9) uštā astī uštā ahmāi (8) hiiat̰ aš ̣āi vahištāi aš ̣ǝm (8) .·., pour autant que nous récitions la strophe une seule fois au lieu des trois prévues dans la liturgie longue. 41 Y 54.2.1-3 airiiamanǝm išīm yazamaide amauuaṇtǝm vǝrǝθrajanǝm vit̰ baēšǝm mazištǝm aš ̣ahe srauuaŋhąm .·. gāθā̊ spǝṇtā̊ ratuxšaθrā̊ aš ̣aōnīš yazamaide .·. staōta yesniia yazamaide yā dātā aŋhə̄uš paōuruiiehiiā .·., pour autant que nous laissions de côté le Yeŋ́hē.hātā (Y 54.2.4 = Y 27.15.3), en estimant que ce nʼest jamais quʼune balise signalant le terme de lʼunité Y 54. 42 VZ 34.48. 36

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souligner, le temps linéaire s’interrompera à trois reprises au cours des millénaires d’Uxšiiat̰ .ərəta et dʼUxšiiat̰ .nəmah : ― lorsque, vers le milieu du millénaire portant son nom (hc’lk| Y ’všytl’n), Uxšiiat̰ .ərəta, âgé alors de 30 ans (PVN syhs’lk|yh), ira s’entretenir avec Ahura Mazdā, le Soleil s’arrêtera (BRA ’styt) au sommet du ciel, au zénith (PVN b’lyst Y ’sm’n), pour une durée de 10 jours et nuits (dh lvc V šp’n)43 ; ― lorsque, vers la fin du millénaire d’Uxšiiat̰ .ərəta, son frère Uxšiiat̰ .nəmah, lui aussi à l’âge de 30 ans, ira à son tour s’entretenir avec Ahura Mazdā, le Soleil s’arrêtera au sommet du ciel pour une durée de 20 jours et nuits44 ; ― lorsque, vers la fin du millénaire d’Uxšiiat̰ .nəmah (hc’lk| Y ’všytlm’h’n), le Saōšiiaṇt Astuuat̰ .ərəta viendra lui aussi s’entretenir avec Ahura Mazdā, le Soleil s’arrêtera au sommet du ciel pour une durée de 30 jours et nuits45. La bonne doctrine, Vaŋvhī Daēnā, d’origine divine, ne pourra donc leur être transmise qu’en dehors du temps linéaire, lorsque le cours du temps symbolisé par celui du Soleil s’arrêtera. Si le Soleil s’arrête pour une durée de dix jours, cela signifie que ces dix jours n’en feront plus qu’un et que, dès lors, neuf jours ne seront pas comptés. Comme le Soleil s’arrêtera la première fois pour dix jours, la deuxième pour vingt et la troisième pour trente, il convient donc de soustraire du compte de l’ensemble des deux derniers millénaires les quantités de neuf, de dix-neuf et de vingt-neuf jours. En effet, si le Soleil ne se couche qu’une fois sur dix, vingt ou trente jours et que l’absence des nuits alternant avec eux ne permet plus de les compter, les dix, vingt ou trente jours n’en feront plus qu’un et ne compteront donc plus que pour un seul, si bien que neuf, dix-neuf et vingt-neuf jours, 57 en tout, manqueront à l’appel au terme des deux derniers millénaires. Autrement dit, au terme du millénaire d’Uxšiiat̰ .nəmah, il restera 9 + 19 + 29 = 57 jours pour quʼil soit arrivé au compte exact des 12000 ans. En effet, 28 jours manqueront au millénaire dʼUxšiiat̰ .ǝrǝta et 29 à celui dʼUxšiiat̰ .nǝmah. Les arrêts du Soleil les auront mis en réserve, de sorte quʼAstuuat̰ .ǝrǝta pourra mener à bien son œuvre définitive. À ceci près que, de façon inexpliquée, les jours mis en réserve se seront convertis en années. De surcroît, nous ne pouvons résoudre la divergence en décrétant que « jours et nuits » est erroné pour « années » puisque l’idée d’années n’offre 43 44 45

Dk 3.160, 3.407, 7.7.58, RPDD 48.1, ZA 33.29, ZVY 9.1-6. Dk 3.160, 3.407, 7.8.21, 7.9.2, RPDD 48.23, ZA 33.32. Dk 3.160, 3.407, 7.9.19, RPDD 48.38, ZA 33.34. 227

aucune alternance, du moins, aussi nette et parlante que celle des jours et nuits. De toute façon, les textes sont unanimes et coïncident à parler de jours et de nuits. Pouvons-nous dès lors résoudre la divergence en opérant dans le sens inverse, en corrigeant plutôt les 57 années des prouesses du troisième Saōšiiaṇt en 57 jours et nuits ? Pouvons-nous proposer la conjecture que le « millénaire » d’Astuuat̰ .ərəta ne ferait plus que 57 jours contre lʼunanimité des textes qui parlent de 57 années46 ? Le Soleil, en marquant le pas à trois reprises, aurait permis le parachèvement du monde, mais les millénaires, du moins selon la tradition, présenteraient une certaine élasticité. Il n’y a donc pas à proprement parler de millénaire d’Astuuat̰ .ərəta. Il convient d’ailleurs de corriger comme suit la table des matières du Zaraθušt Nāmag que jʼai donnée dans mon étude de la composition de lʼintroduction de ce livre du Dēnkard47 : ― Dk 7.0. Introduction ― Dk 7.1. Histoire du monde linéaire avant Zaraθuštra ― Dk 7.2. Suite de lʼhistoire ... jusquʼà lʼEntretien ― Dk 7.3. Suite ... jusquʼà la conversion de Vīštāspa ― Dk 7.4. Suite ... jusquʼà la mort de Zaraθuštra ― Dk 7.5. Suite ... jusquʼà la fin du règne de Vīštāspa ― Dk 7.6. Suite ... jusquʼà la chute du règne des Airiia ― Dk 7.7. Suite ... jusquʼà la fin du millénaire de Zaraθuštra ― Dk 7.8. Le millénaire patronné par le premier Saōšiiaṇt ― Dk 7.9. Le millénaire patronné par le deuxième Saōšiiaṇt ― Dk 7.10. Le parachèvement (frašō.kǝrǝiti-) patronné par le dernier des trois Saōšiiaṇt

L’emploi du mot pehlevi hc’lk (hazārag), littéralement « millénaire », dans le cas des 57 années ou jours de la carrière du dernier des trois Saōšiiaṇt, est abusif, mais ce n’est pas la seule fois que ce mot est employé au sens vague de « période ». Et, de fait, nous le trouvons tout aussi bien employé au sens de « trimillénium »48. 46

Dk 3.160, 3.177, 3.407, 7.10.1,7, VZ 28.7, 34.46-48, ZA 33.35, 34.7. É. PIRART, 2016b. 48 Par exemple, dans ZA 36.2 ud se hazār sāl gaiiō.marǝt abāg gāv pad ˟gaēiθii estišn būd hend ˟a-paitiiāragīhā ud hazārag xvadāy karzang ud šagr ud dōšīzag būd hend ciyōn baved šaš hazār sāl .·. « Et trois mille ans Gaiia Marǝtan avec Gaō (Aēuuō.dātā) fut dans lʼétat concret sans antagonisme. Et les souverains de (ce) hazārag [= trimillénium] furent le Cancer, le Lion et la Vierge. De sorte que, (depuis le début du temps linéaire, le compte) arrive à six mille ans ». 47

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Au terme de 57 ans49 de règne50, le troisième Saōšiiaṇt procédera à la Frašō.kǝrǝiti. Ce sera à ce moment-là qu’ Aŋhra Mańiiu périra et que la « personne future » (tan ī pasēn) entrera en vigueur51. Au cours de ce règne, il sera flanqué du roi Haōsrauuah52 et éliminera le Karapan Gaδarōs, un lointain descendant de celui qui avait assassiné Zaraθuštra, Tura *Brāθrō.raēša53. Ce Gaδarōs54 sans doute fait-il figure de version négative du troisième Saōšiiaṇt, mais, savons-nous par le troisième livre du Dēnkard55, les venues successives de Zaraθuštra et des trois Saōšiiaṇt correspondent à une diminution des forces démoniaques. Tout comme nous pouvons faire de son assassin Tura Brāθrō.raēša le pendant négatif de Zaraθuštra, son lointain descendant Gaδarōs apparaît comme la contrepartie négative du Saōšiiaṇt Astuuat̰ .ərəta. Ici aussi le principe de la composition en anneau, exprimé en avestique dans Y 56.1.2 hiiat̰ paōuruuīm ̃ tat̰ ustəməmcit̰ « ce qui est le début est aussi la fin »56, est respecté. De même, de nombreux héros du passé mythique reprendront du service vers la fin ou au terme du temps linéaire. Comme Tura Brāθrō.raēša57 et Zaraθuštra étaient l’un et l’autre le troisième frère de cinq, nous devons penser que, pour le parallélisme numérique, trois figures délétères feront face aux trois Saōšiiaṇt.

49

Dk 3.177, 3.407. Vu par erreur comme étant un millénaire (MX 2.93). 51 Dk 7.10.7, ZA 34. 52 Dk 3.282, 3.343, MX 57.7. 53 DD 72.8 ; Dk 3.343, 7.2.20-34, 8.34.13 ; Sd 9.5 ; VZ 5.3.2 ; ZVY 3.3. 54 Le nom de gaδarōs pourrait être expliqué à partir du V 15.5 yō gaδβąm ... xraōsiieiti (MNV KLBA ... hlvsynyt AYKš vʼng MN AHL̠ kvnd) « qui réprimande la chienne ». Sur le verbe, voir G. KLINGENSCHMITT, 1968, p. 225-8, et J. KELLENS, 1984a, p. 124. 55 Dk 3.51, 3.102, 3.105. 56 Traductions médiévales : cygvn pltvm ’ytvn| ’p̄ dvmc ; yathā pūrvaṁ tathā nidānaṁ cit. 57 Malgré son nom de Tura « quatrième » ! 50

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IV L’origine du Taureau de Crète IV 1. Introduction Lʼadmirable taureau dont la tête fait la forme de ce fameux rhyton minoen provenant du petit palais de Cnossos, daté du XVe siècle avant notre ère1, noir ou bleu-noir, cʼest le vrai taureau crétois. Il ne sera pas ici question de ce taureau. La mythologie athénienne, et non crétoise, a choisi la Crète comme toile de fond de plusieurs récits au cœur desquels un taureau blanc joue un rôle tellement important que nous le connaissons sous lʼétiquette de « Taureau de Crète ». C’est bien évidemment de ce dernier quʼil va être traité dans ce chapitre en raison de fortes similitudes constatées avec un taureau de la mythologie zoroastrienne. « Morts héroïques dans le mythe et lʼépopée »2, voilà un thème mythologique important et porteur si nous devons en juger sur base du dernier livre de Carlos García Gual, La muerte de los héroes3, mais, assez souvent, le héros ne meurt pas, arrive même à gagner l’immortalité, et cʼest plutôt lʼadversaire qui succombe et disparaît. Je veux ici mʼintéresser à cet adversaire, souvent un monstre ou un animal4, lequel est, en quelque sorte, un héros de signe négatif. Il y a toute cette faune que lʼhéroïque Ἡρακλῆς put châtier, oiseaux, hydre, lion, taureau...5 Le héros qui meurt est plutôt un héros secondaire comme Αἵμων dévoré par la Σφίγξ ou Ἀνδρόγεως qui tombe face au taureau de Marathon. Remarquons enfin lʼabsence de mise à mort ou la mort retardée de ce taureau : Ἡρακλῆς nʼavait pu que le maîtriser temporairement. Θησεύς sera 1

Conservé au musée dʼHéraclion (nº 1368). Voir ALTAÏR, 2008, p. 53. Tel était le titre du colloque organisé par la Société belge d’études celtiques le 18 novembre 2017 à l’Institut des Hautes Études de Belgique au cours duquel j’ai exposé la matière des cinq premières parties de ce chapitre. 3 C. GARCÍA GUAL, 2016. 4 Voir, à ce propos, A. ESTEBAN SANTOS, 2013. 5 Concernant les sources mythologiques grecques, le renvoi au dictionnaire de P. GRIMAL, 1951, suffit au propos du présent chapitre, aucune rareté nʼy étant à invoquer de prime abord, mais citons aussi A. LÓPEZ EIRE et M. H. VELASCO LÓPEZ, 2012, p. 362-3 et 667-72. 2

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qui parviendra à lʼimmoler. Θησεύς était vu comme un second Ἡρακλῆς6, au point dʼavoir été confondu avec lui sur un miroir étrusque7. Deux héros pour un seul et même adversaire. Un héros en double. De même, Θraētaōna, dans lʼIran zoroastrien, ne fera quʼenchaîner le serpent tricéphale Aži Dahāka. En effet, il faudra attendre la fin du dernier des douze millénaires pour que Kǝrǝsāspa le tue, car, dans lʼIran de Zaraθuštra, toute la mythologie sʼinscrit dans le cadre de la théorie des millénaires. Et certaines figures du passé héroïque, devenues immortelles, reprendront du service à la fin des temps comme ce Kərəsāspa que la flèche d’un Touranien a plongé dans le sommeil pour plusieurs millénaires8. Revenons à ce taureau de Crète ou de Marathon. Une autre singularité est la multiplicité des mythes qui lui sont attachés : nous le trouvons au moins avec Εὐρώπη, avec Πασιφάη, avec Ἡρακλῆς, avec Ἀνδρόγεως et, enfin, avec Θησεύς. Lʼiconographie est abondante et les sources écrites, tout aussi bien9. Il sʼagit de mythes à succès, très bien connus. Rappelons donc rapidement toute la trajectoire de ce Taureau, sans trop nous attarder sur les multiples variantes. De toute façon, nous laisserons de côté les analyses freu6

Plutarque, dans Thésée 6.5-9, fait de Θησεύς un admirateur dʼ Ἡρακλῆς qui voulut poursuivre son œuvre de débarrasser le monde des êtres malfaisants. Sur le tandem que Θησεύς forme avec Ἡρακλῆς, voir A. LÓPEZ EIRE et M. H. VELASCO LÓPEZ, 2012, p. 654-6 ; S. SAÏD, 2008, p. 29 ; F. VIRET, 2008, p. 63. 7 F. BORIE, 1898, p. 53. ||| Parmi les personnages que la scène réunit, en plus dʼ Ἡρακλῆς (étrusque ΗΕΡΓΛΕ), dʼ Ἀθηνᾶ (ΜΕΝΡFΑ), dʼ Ἀριάδνη (ΑΡΙΑΔΑ) et du Μινώταυρος, nous trouvons même Ἰόλαος (FΙΛΕ). 8 ZA 29.8 (DH:216v07-13 ; K20:123r10-19 ; TD1:83v17-84r07 ; TD2:197.14198.06) ud sām rāy gōvend kū a-hōš būd pad ān ka-š tar-menīd dēn ī mazdaiiasnān turk-ēv kē nʼyn| xvānd ka xvaft ested pad tigr be-vinast ud ānōh pad dašt ī pyšʼnsyy u-š ān ī abārōn būšiiąst abar burd ested mayān ī garmag nibast u-š vafr azabar nišast ested pad ān kār kū ka až ī dahāk harzag baved ōy āxēzed u-š be zaned u-š baēuuar frauuaš ̣ ī aš ̣auuān pānag hend .·. « À propos de (Kǝrǝsāspa) Sāma, ils disent que (son corps) a été mis à lʼabri de la déshydratation [= quʼil était devenu immortel], que, pour son mépris de la doctrine des mazdéens, un Turc du nom de nʼyn| le frappa dʼune flèche dans son sommeil et quʼil est là, dans la plaine de pyšʼnsyy, où lʼadverse (diablesse) Būšiiąstā lʼa enveloppé, où il est couché au milieu de la chaleur, où la neige sʼest amoncelée sur lui et où une myriade de Frauuaš ̣i dʼharmonieux [= de Frauuaš ̣i de pieux adorateurs] le gardent, en vue du jour quand Aži Dahāka se libérera de ses chaînes, de sorte quʼil se lève alors, frappe ce (serpent) et le tue » ; ZA 33.33-5. 9 Chez les divers poètes épiques, lyriques ou autres depuis Homère ou Hésiode, chez les dramaturges tragiques ou comiques et chez nombre de mythographes et autres bibliothécaires des époques classique, hellénistique, romaine et byzantine. 232

diennes ou psychologiques10 puisque notre propos sʼinscrit dans la recherche de lʼorigine préhistorique du Taureau avec un grand T et que cette recherche recourt à la seule mythologie comparée.

10

Comme celle que C. ACKER, 2002, p. 71-90, a menée. 233

IV 2. Le taureau de Crète et de Marathon La gracieuse Εὐρώπη1, sur une plage de Phénicie, joue avec ses amies, mais Ζεύς, en lʼapercevant, tombe éperdûment amoureux de la jeune fille. Il prend alors la forme dʼun taureau (Ταῦρος) dʼune blancheur éclatante, taureau par excellence, et, sortant des flots, vient sʼagenouiller devant la jeune fille. La première frayeur passée, elle finit par caresser lʼanimal et va jusquʼà sʼasseoir sur son dos, mais, à cet instant, le taureau se lève et se lance en mer. Elle a beau crier, le taureau lʼemporte au delà des mers, pour aborder enfin une plage crétoise. Un vase à figures rouges daté des environs de 480 avant notre ère, conservé au musée de Tarquinia, nous montre Εὐρώπη prête à monter sur le Taureau. Et la scène du Taureau qui l’emporte au milieu des flots est fréquemment représentée. Ce nʼest pas encore le Taureau furieux de la suite des événements. Ce Taureau, débonnaire, y apparaît vraiment tout gentil comme nous pouvons le lire dans les hexamètres du poète sicilien du deuxième siècle avant notre ère, Moschos de Syracuse2. Les mosaïques romaines aussi reproduisent la fameuse scène d’ Εὐρώπη assise sur le Taureau qui s’élance, notamment celle découverte à Trinquetaille3. Le Taureau, comme attendu, est blanc. Parmi d’autres, une mosaïque conservée à Cagliari ou une de Préneste confirment la robe blanche du Taureau4. 1

R. GRAVES, [1955] 2011, nº 58b. ||| Εὐρώπη est la fille d’un roi de Phénicie, Φοῖνιξ (Homère, Euripide) ou Ἀγήνωρ (Hygin). 2 Auteur du poème précisément intitulé Europe fait de 166 hexamètres : voir Ph.-E. LEGRAND, 1927, vol. II p. 139-51. 3 Conservée au Musée de l’Antiquité d’Arles, cette mosaïque est datée de la fin du deuxième siècle de notre ère ou du début du troisième. 4 Il est avancé que cette dernière mosaïque, datée de la première moitié du premier siècle de notre ère, reproduirait un tableau d’Antiphilos dʼÉgypte, célèbre peintre grec de la seconde moitié du IVe siècle qui travailla pour la cour de Macédoine, puis pour celle de Ptolémée Ier en Égypte : voir Dossiers d’archéologie 303, Dijon, mai 2005, p. 3. Sur lʼoriginalité de la présentation de lʼenlèvement dʼ Εὐρώπη sur cette mosaïque, voir O. WATTEL-DE CROIZANT, 1992. ||| À l’époque impériale, il arrive que le taureau des représentations romaines de l’enlèvement d’ Εὐρώπη ne soit pas blanc. Exemples : sur une fresque de Pompéi conservée au Museo archeologico nazionale di Napoli, sur la mosaïque découverte sous la Plaza de Armas à Écija en Bétique (El País, sábado 16 de mayo de 2015) ou encore sur celle décou235

À Gortyne, non loin du rivage méridional du centre de la Crète, Ζεύς, prenant alors lʼaspect dʼun jeune homme, sʼunit à Εὐρώπη, et celle-ci lui donnera trois fils, Μίνως, Σαρπηδών et Ῥαδάμανθυς5, mais un statère de Gortyne, au quatrième siècle avant notre ère, nous montre Εὐρώπη en plein accouplement avec un aigle6. Un aigle, voilà qui est mieux pour la représentation de Ζεύς. Le Taureau qui sort de l’eau, sans doute fait-il penser plutôt à Ποσειδῶν, mais nous y reviendrons7. Europe allait ensuite épouser le roi de Crète, Ἀστέριος8. Quant au Taureau dont Ζεύς aurait auparavant pris la forme, il allait poursuivre une trajectoire propre, sa figure restant alors clairement distincte de celle du grand dieu. De ce premier épisode, retenons que le taureau est capable de traverser les mers, quʼil transporte un être humain dʼun continent à l’autre et quʼil est dʼune blancheur éclatante.

verte à Sparte (Les Dossiers d’Archéologie 346, Dijon, juillet-août 2011, p. 60). Sur la couleur du Taureau, voir R. GRAVES, [1955] 2011, vol. I p. 453-4. 5 R. GRAVES, [1955] 2011, nº 88a. ||| Apollodore (Bibliothèque 3.1.1) signale qu’Homère (Iliade 14.321-2) ne nomme pas Σαρπηδών parmi les fils dʼ Εὐρώπη : il le donne plutôt pour un fils de Ζεύς et de Λαοδάμεια, la fille de Βελλεροφῶν (Iliade 6.198-9, 12.292). En revanche, les deux seuls fils que, pour sa part, Hérodote (Histoires 1.173) donnent à Εὐρώπη sont Μίνως et Σαρπηδών. 6 R. GRAVES, [1955] 2011, nº 58c. ||| Pour Moschos, dans Europe 155-6, ou Ovide, dans les Métamorphoses 2.850, notamment, le grand dieu avait pris lʼaspect dʼun taureau, mais tous les auteurs ne font pas du taureau une forme de Ζεύς. Diodore de Sicile, par exemple, ne paraît pas confondre Ζεύς avec le Taureau (Bibliothèque 5.78.1) : [...] τούτους γὰρ μυθολογοῦσιν ἐκ Διὸς γεγεννῆσθαι καὶ τῆς Ἀγήνορος Εὐρώπης, ἥν φασιν ἐπὶ ταύρου διακομισθῆναι προνοίᾳ θεῶν εἰς τὴν Κρήτην. « [...] Car (Minos, Rhadamanthe et Sarpédon) naquirent, disent les mythes, de Zeus et dʼEurope fille dʼAgénor, elle que les dieux, dit-on, avaient prévu de véhiculer sur le Taureau jusques en Crète ». Comme Apollodore (Bibliothèque 2.5.7) rapporte que, pour le mythographe Acousilaos dʼArgos qui vécut au VIe siècle avant notre ère, Ζεύς avait chargé le Taureau de ramener Εὐρώπη, il est assez clair que, pour lui, Ζεύς nʼen avait pas pris la forme. Le Taureau était donc anciennement une figure mythique distincte, quoi que nous en disent Apollodore plus loin (Bibliothèque 3.1.1) où le Taureau est donné pour une métamorphose de Ζεύς tout comme les scholies AB qui accompagnent lʼIliade 12.292 et selon lesquelles Hésiode ou Bacchylide véhiculaient la même idée. 7 Chapitre IV 7. 8 Apollodore, Bibliothèque 3.1.2 ; R. GRAVES, [1955] 2011, nº 88ab. ||| Appelé aussi Ἀστερίων (Hésiode, fragment 140 ; Bacchylide, fragment 10). 236

Μίνως9, devenu roi de Crète à la mort dʼ Ἀστέριος, refuse de partager le pouvoir disant que les dieux lui avaient réservé le trône. Pour preuve, affirme-t-il, les dieux satisferont toutes ses prières. Il offre alors un sacrifice à Ποσειδῶν en lui demandant de faire sortir un taureau de la mer et en lui promettant de lʼimmoler en son honneur. Ποσειδῶν lui envoie le Taureau, mais, parjure, Μίνως nʼoffre pas si bel animal en sacrifice au dieu. Le dieu se venge et rend alors le Taureau furieux. Ἡρακλῆς devra intervenir pour le maîtriser10. Il le conduira dans le Péloponnèse, mais le Taureau finira par s’échapper. De ce deuxième épisode, soulignons, même sʼil a pu sʼéchapper, le statut de victime sacrificielle du Taureau11 et le fait quʼil a surgi à nouveau des flots marins. Le statut sacrificiel du taureau est souvent illustré par des bas-reliefs ou des peintures sur vases. Le sacrifice rituel du taureau a survécu de nos jours dans le folklore grec, par exemple sur l’île de Lesbos12. Une représentation d’ Ἡρακλῆς maîtrisant le taureau figure sur une amphore attique à figures noires des environs de 510 avant notre ère13. Disons 9

Hérodote, Histoires 1.173 ; Apollodore, Bibliothèque 3.1.3 ; R. GRAVES, [1955] 2011, nº88c. 10 Sur cette prouesse dʼ Ἡρακλῆς, K. KERÉNYI, [1958] 2009b, p. 184 ; R. GRAVES, [1955] 2011, nº 129abc. ||| Selon Apollodore (Bibl. 2.5.7), le septième travail dʼ Ἡρακλῆς consista à ramener le Taureau de Crète (cf. Diodore de Sicile, Bibliothèque 4.13.4 ; Hygin, Fables 30.8). Pour Diodore de Sicile (Bibliothèque 4.13.4) ou Hygin (Fables 30.8), cʼest le Taureau qui fut aimé de Πασιφάη. Pausanias (Description de la Grèce 1.27.9) dit que ce Taureau est celui que Ποσειδῶν envoya chez Μίνως roi des mers pour se venger de la négligence montrée à lui rendre un culte. Pausanias (Description 5.10.9) se limite ensuite à dire que cʼest le Taureau qui se trouvait à Cnossos. Apollodore (Bibliothèque 2.5.7) dit aussi quʼ Ἡρακλῆς, afin de le lui montrer, ramena le Taureau à Εὐρυσθεύς, cʼest-à-dire, selon Diodore de Sicile, dans le Péloponnèse, pour le libérer ensuite. Le Taureau, pour en ravager (διελυμαίνετο) les terres, erra du côté de Sparte, puis à travers toute lʼArcadie avant de gagner Marathon en passant par lʼIsthme. Selon Pausanias (Description 1.27.10), Ἡρακλῆς le ramena à Argos dʼoù il sʼéchappa pour gagner Marathon via lʼIsthme en tuant notamment Ἀνδρόγεως sur son passage ; selon Hygin (Fables 30.8), à Mycènes. Μίνως devait alors, nous dit Pausanias (Description de la Grèce 1.27.10), attaquer et soumettre les Athéniens qui furent forcés dʼenvoyer sept garçons et sept filles comme tribut à Cnossos où demeurait le Μινώταυρος au fond du Labyrinthe. 11 Sur le Taureau vu comme victime sacrificielle, K. KERÉNYI, [1994] 1998, p. 90, 168 et illustration nº 58. 12 National Geographic España. Edición especial: Grecia antigua, entre los héroes y los dioses, Barcelona, 2009, p. 59. 13 Provenant de Vulci et conservée à Munich (Staatliche Antikensammlungen, nº 1583). 237

que le taureau blanc y est forcément noir. Diodore de Sicile spécifie quʼ Ἡρακλῆς, pour rejoindre le Péloponnèse depuis la Crète, sʼétait servi du Taureau comme dʼune barque14. Μίνως épouse Πασιφάη, lʼune des filles du Soleil15. Elle lui donne quatre fils dont Ἀνδρόγεως et quatre filles dont Ἀριάδνη16. Ποσειδῶν, toujours par vengeance, inspire à Πασιφάη un amour irrésistible pour le Taureau17, une maladie, une souffrance ou une manie18, à moins que ce ne soit Ἀφροδίτη qui ait pris la reine crétoise en grippe19. Ce Taureau est donc encore là sans que nous sachions exactement quand il était devenu furieux au point dʼexiger lʼintervention dʼ Ἡρακλῆς. La chronologie des événements ou leur suite logique flotte un peu. Les désirs de la reine étant des ordres, lʼingénieux Δαίδαλος qui est à son service construit une merveilleuse vache artificielle à lʼintérieur de laquelle Πασιφάη pourra venir se loger20 afin de recevoir lʼamour du Taureau21. La zoophile22, de ses amours monstrueuses, conçoit un fils monstrueux, mihomme mi-taureau, le Μινώταυρος23. En réalité, ce monstre se nomme Ἀσ14

Diodore de Sicile (Bibliothèque 4.13.4) : τὸ τηλικοῦτον πέλαγος ἐπ´ αὐτῷ ναυστοληθείς. 15 Apollodore, Bibliothèque 1.9.1 et 3.1.2 ; R. GRAVES, [1955] 2011, nº 88e. 16 Apollodore, Bibl. 3.1.2 ; R. GRAVES, [1955] 2011, nº 90a. 17 Apollodore, Bibl. 3.1.4 ; R. GRAVES, [1955] 2011, nº 88e. ||| Plutarque, dans Thésée 19, rationalise le mythe à outrance. 18 Nόσος, ἀλγός ou μανία : voir L. GOURMELEN, 2010, p. 386. 19 R. GRAVES, [1955] 2011, nº 88f. Sur la folie de Πασιφάη, L. GOURMELEN, 2010. Sur son caractère adultère, typique du monde des héros, S. SAÏD, 2008, p. 27. 20 Apollodore, Bibl. 3.1.4 ; Diodore, Bibl. 4.77 ; R. GRAVES, [1955] 2011, nº 92d. 21 Sur ce type d’hiérogamie, G. DEVEREUX, 1982, p. 230. 22 Sur la zoophilie de Πασιφάη, L. GOURMELEN, 2010. 23 Pour vérifier le sens du premier terme du composé, nous pouvons nous appuyer sur le vieil-indo-iranien *mánu(š)- « être humain » et imputer les anomalies phonétiques à lʼinfluence du nom de Μίνως (étrusque MINE), à moins de voir dans ce dernier une forme dialectale correspondant au terme vieil-indo-iranien qui fonctionne aussi comme nom propre de plusieurs des premiers hommes mythiques de la tradition zoroastrienne, *Manu Xvarǝnaŋvhaṇt, *Manu Xvarǝnara et Manu Ciθra, ou du Véda, Mánu Sā́ varṇi et Mánu Vaivasvatá. Le nom étrusque du Μινώταυρος, ΘΕFΡΥΜΙΝΕΣ (F. BORIE, 1898, 53), ne me paraît donner aucune indication à ce propos ; par contre, il nʼest pas sans intérêt que, pour Diodore de Sicile (Bibl. 4.60 ; cf. Plutarque, Thésée 20.8), il y ait eu deux Μίνως successifs si plusieurs Manu se sont suivis sur le trône de lʼIran mythique. ||| Je ne sais comment interpréter le 238

τέριος ou Ἀστερίων24 comme lʼépoux dʼ Εὐρώπη. Il est ainsi le second de ce nom dans la dynastie crétoise. Μίνως sʼempresse alors dʼocculter cette cause de honte et ordonne à Δαίδαλος de construire le Λαβύρινθος25, une prison26 au fond de laquelle ce fils monstrueux sera dissimulé et nourri de chair humaine, sept garçons et sept filles envoyés périodiquement27 comme tribut par les Athéniens. De ce troisième épisode, il faut retenir que Δαίδαλος a construit une vache, mais aussi la forteresse du Labyrinthe où le Μινώταυρος né du Taureau est enfermé. La scène de l’accouplement de Πασιφάη et du Taureau ou la façon dont elle s’y prit, à l’intérieur de la vache artificielle, pour arriver à ses fins, assez compréhensiblement, n’est jamais représentée28. En revanche, la figuration du Μινώταυρος enfant assis sur les genoux de Πασιφάη est attestée : sur le fond d’une coupe (κύλιξ) attique à figures rouges découverte en Étrurie, à Vulci comme beaucoup dʼautres29. S’étant mis au service d’ Αἰγεύς, le roi d’Athènes, suite à quelque péripétie, Ἀνδρόγεως, le fils préféré de Μίνως, avait trouvé la mort face au Taureau furieux. Il avait été chargé de débarrasser la plaine de Marathon ou lʼIsthme de Corinthe du Taureau qui ravageait les campagnes, mais sa mort

curieux génitif présent sur une coupe (κύλιξ) attique à figures noires datant du VIe siècle avant notre ère et conservée à Tolède, où la scène de Θησεύς tuant le Μινώταυρος est accompagnée des légendes ΘΕΣΕΥΣ et ΜΙΝΟΙΟ ΤΑΥΡΟΣ, car il suppose un thème Μινο- au lieu de Μίνω-. 24 Pausanias, Description de la Grèce 2.31.1 ; K. KERÉNYI, [1994] 1998, p. 83 ; F. FRONTISI-DUCROUX, [1975] 2000, p. 178 n. 38. 25 Apollodore, Bibl. 3.1.4, 3.15.8 ; Diodore, Bibl. 4.77. ||| Sur le Labyrinthe, voir K. KERÉNYI, 2006 ; R. GRAVES, [1955] 2011, nº 88g. 26 Plutarque, Thésée 16.1. 27 Chaque année, tous les trois ans ou tous les neuf ans (voir C. ACKER, 2002, p. 79 ; R. GRAVES, [1955] 2011, nº 98c). 28 Òscar Estruga Andreu n’a pas hésité à faire voir comment il imaginait cet accouplement. L’œuvre de ce sculpteur contemporain a été installée au bout de la plage d’Adarró à Vilanova i la Geltrú, pratiquement au milieu de l’eau. 29 Une œuvre datée des environs de 330 avant notre ère, conservée au Cabinet des Médailles de Paris. Reproduction notamment chez F. DÍEZ PLATAS, 2012, p. 101. 239

face au Taureau déclencha la colère des Crétois30. Μίνως déclarait alors la guerre à Athènes tenue pour responsable et lʼassiégeait tandis que la peste31 fondit sur ses habitants. La situation devenue désespérée, lʼoracle de Delphes conseilla dʼaccepter les conditions de Μίνως : au terme de chaque grande année ou périodiquement, les Athéniens seraient tenus d’envoyer en Crète sept adolescents et sept adolescentes comme nourriture du Μινώταυρος anthropophage32. Θησεύς, le fils du roi dʼAthènes33, mais que dʼaucuns donnent pour le fils de Ποσειδῶν34, lui qui, par la suite, parviendra aussi à capturer le Taureau et à lʼimmoler35, mettra fin à ce cauchemar. En effet, parmi ses exploits, il y aura aussi et surtout ceux de se glisser, avec la complicité dʼ Ἀριάδνη36, par30

Apollodore, Bibl. 3.15.7 ; R. GRAVES, [1955] 2011, nº 98a). ||| Pour Diodore (Bibl. 4.60) ou Plutarque (Thésée 15.1) qui ne parlent pas du Taureau, Αἰγεύς le fit assassiner. 31 Sécheresse et famine, selon Diodore (Bibl. 4.61) ; stérilité, maladie, sécheresse, selon Plutarque (Thésée 15.1). Pour Pausanias (Description 1.27.10), Mίνως lui-même dévasta le pays. 32 Apollodore, Bibl. 3.15.8 ; Diodore, Bibl. 4.61, 4.77 ; Plutarque, Thésée 15.1. ||| Sur lʼoracle, J.-P. SAVIGNAC, 2002, p. 124-5. ||| Sur les Δὶς Ἑπτά, A. VILLARRUBIA, 1990 ; R. GRAVES, [1955] 2011, nº 98c ; B. KOWALZIG, [2007] 2012, p. 88 ; A. FLÓREZ FLÓREZ, 2016. 33 Apollodore, Bibliothèque ép. 1.6. 34 Sur les variations de la généalogie de Θησεύς parfois donné pour le fils de Ποσειδῶν et de la fille du roi Πιτθεύς de Trézène, C. ACKER, 2002, p. 83. Plutarque (Thésée 6.1) fait de cette paternité de Ποσειδῶν un bruit que Πιτθεύς, le grand-père maternel de Θησεύς, aurait répandu. ||| Pour lʼétymologie du nom de Θησεύς, aucune des propositions anciennes (Plutarque, Thésée 4) ne me convainc, et P. CHANTRAINE, 1968, colonne 436b, dit quʼelle est inconnue. Cependant, Plutarque (Thésée 25.5), en donnant Θησεύς pour lʼinstaurateur des concours Olympiques et Isthmiques, paraît bien rattacher son nom à la racine de τίθημι. Et, selon J.-L. PERPILLOU, 1973 p. 224-5, nous devons y voir lʼhypocoristique dʼun composé du type φερέοικος à premier terme en *-ti- tiré de cette même racine (*θησι+). 35 Apollodore, Bibliothèque ép. 1.5 ; Diodore, Bibl. 4.61 ; Pausanias, Description 1.27.10 ; Plutarque, Thésée 14.1. ||| C’est la scène que nous pouvons contempler sur une coupe attique à figures rouges du cinquième siècle, connue sous le nom de Copa de Esón dʼaprès celui du céramographe athénien qui en est lʼauteur, Αἴσων. Elle est conservée à Madrid (MAN, nº 11265). Reproduction chez F. DÍEZ PLATAS, 2012, p. 98. 36 Apollodore, Bibl. ép. 1.8-9 ; R. GRAVES, [1955] 2011, nº 98k. ||| Apollonios, dans les Argonautiques 3.997-9, souligne qu’ Ἀριάδνη sauva Θησεύς des funestes épreuves que Μίνως avait ourdies. 240

mi les jeunes gens condamnés à faire la pitance du Μινώταυρος et de tuer ce dernier. Θησεύς tue le Μινώταυρος : amphore attique à figures noires datée du deuxième quart du 6e siècle avant notre ère et conservée au Musée du Louvre37. Les représentations sont très nombreuses. Nous sommes en présence d’un mythe à succès. Citons encore, d’une facture aussi archaïque, ce haut gobelet (σκύφος) béotien à figures noires daté du milieu du 6e siècle avant notre ère38. Certaines représentations nous apprennent que Θησεύς dut lʼenchaîner ou lʼentraver avant de le saisir par une corne et de lui donner lʼestocade, lui planter lʼépée dans le corps39. À moins que le Μινώταυρος, peut-être sur ordre de Μίνως lui-même, ne fût retenu de la sorte au fond du Labyrinthe. Θησεύς, pour tuer le Μινώταυρος, peut compter sur la protection d’ Ἀθηνᾶ tout comme Kərəsāspa, pour ses victoires remportées sur divers monstres, jouit de la protection de la déesse guerrière avestique, Nairiiā Hąm.varəiti. Nous pouvons le voir avec cette scène célèbre de Θησεύς qui, sous la surveillance d’Athéna, traîne le cadavre du Μινώταυρος hors du Labyrinthe. Sur la Copa de Esón déjà mentionnée40. Fuyant avec elle, Θησεύς prend la mer, mais abandonne sa complice Ἀριάδνη sur une île où elle sera recueillie par Διόνυσος41. Au terme de cet ultime épisode, je le répète, il a fallu deux héros, Ἡρακλῆς et Θησεύς, pour débarrasser le monde grec du Taureau furieux qui le ravageait. Retenons en

37

Provenant de la collection dʼAugusto Castellani (Louvre E850). Provenant de la collection dʼOlivier Rayet (Louvre MNC 675). Reproduction chez F. FRONTISI-DUCROUX, [1975] 2000, fig. 1. Contrairement aux peintures sur vases qui le montrent armé d’une épée, Apollodore (Bibl. ép. 1.9) précise que Θησεύς tua le Mινώταυρος à coups de poings. Sur leur duel, voir aussi Pausanias, Description 3.18.11, 3.18.16. 39 Voir M. HALM-TISSERANT, 1998, p. 81-2. 40 Reproduction chez K. KERÉNYI, [1958] 2009b, fig. 13. La même scène, mais sans Ἀθηνᾶ, se rencontre au fond dʼune coupe (κύλιξ) attique à figures rouges datée des environs de 435 avant notre ère, provenant de Vulci et conservée au British Museum de Londres. Reproduction chez K. KERÉNYI, [1958] 2009b, figure 15. 41 Sur la séparation de Θησεύς et dʼἈριάδνη, R. GRAVES, [1955] 2011, 98n ; F. JOUAN, 1966, p. 384-8. 38

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outre lʼimmortalité que Διόνυσος, pour faire dʼelle son épouse, accordera à Ἀριάδνη42. Dʼaucuns pensent que ces histoires du Taureau conservent le souvenir de la civilisation minoenne43 en ce sens que, veut-on croire, il y aurait été rendu un culte au taureau. Nous allons voir que cette hypothèse est à rejeter énergiquement : les ingrédients des récits mythiques concernant le Taureau peuvent aisément être repérés ailleurs dans le monde indo-européen. Principalement, dans la littérature zoroastrienne.

42

R. GRAVES, [1955] 2011, nº 98no. Analyse fouillée de l’apothéose d’ Ἀριάδνη chez M. DARAKI, [1985] 1994. Nous y reviendrons avec le Chapitre VI. 43 K. KERÉNYI, [1994] 1998, p. 91. 242

IV 3. Le taureau mythique iranien L’exploration de la mythologie zoroastrienne nous ramène en lʼan 6001 du monde, au début de la troisième période (6001-9000), celle quʼavait ouverte lʼintervention de lʼarchidémon Aŋhra Mańiiu. Elle appartenait au mélange ou à lʼaffrontement. La vache primordiale, Gaō Aēuuō.dātā, et le premier homme, Gaiia Marǝtan, avaient formé un tandem au cours du deuxième trimillénium, mais, au début du troisième, Aŋhra Mańiiu rendit lʼhomme mortel et assassinait aussi la vache. Cependant, des deux cadavres, les dieux tirèrent respectivement le premier couple humain et les cinq espèces de bestiaux. La mort du premier homme et celle de la vache primordiale étaient donc suivies de lʼapparition du premier couple humain, *Mašiia ̣ et *Maš ̣iiaēinī1, et des diverses races animales. Parmi celles-ci, les bovins2. Autrement dit, le cas de figure faisant que le premier homme soit en double, dʼabord Gaiia Marətan, puis *Mašiia, ̣ vaut aussi pour la première vache. Avec la seconde première vache, il y avait le premier taureau :

1

RPDD 46.36-8, VZ 3.71-2. VZ 3.51. C’est à cette nombreuse postérité que font allusion les épithètes de paṇcō.haiiā- « à l’origine des cinq types (d’animaux) » (Yt 13.10, 19.69 ; cf. ZA 13, 26.26) et de pōuru.sarəδā- « à l’origine de nombreuses sortes (d’êtres vivants) » (S 2.12, Yt 7.0). Tandis que la semence de Gaiia Marǝtan, à sa mort, vint féconder la déesse Terre et donner ainsi naissance à la race humaine, il fallut sans doute recourir à celle du dieu Lune pour que le cadavre de la vache primordiale fût à lʼorigine des différentes espèces animales, mais, sur ce point, les textes sont assez obscurs : ZA 13.1 (DH:184v03-05 ; TD1:38r02-04 ; TD2:93.09-11 ; K20a:101v05-08 ; M6b:238v 04-07) [...] ka gāv ī aēuuō.dāt be-vidard [...] .·. « [...] Lorsque la vache Aēuuō.dātā mourut, [...] » ; ZA 13.4 (DH:184v12-15 ; TD1:38r11-15 ; TD2:94.04-07 ; K20a: 101v14-18 ; M6b:238v13-18) šusr ī gāv abar ō māh pāyag burdag ud ānōh be pālūd hend ud gaōspəṇd ī purr-sardag frāz brēhēnīd ˟naxust dō gāv ēk nar ud ēk mādag ud pas az harv sardag-ēv juxt-ēv [...] .·. « les liquides du bovin furent portés à la station de la Lune en vue de leur distillation. La vache utile Pōuru.sarǝδā produisit tout dʼabord deux bovins, lʼun mâle, lʼautre femelle. Ensuite, un couple de chacune (des autres) espèces [...] » ; ZA 6E.1-4, RPDD 65.4, VZ 3.50. Lʼépithète de gaōciθraque le dieu Lune reçoit traditionnellement rappelle peut-être le rôle quʼil avait tenu dans lʼapparition des premiers animaux (ZA 7.6). 2

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3001-6000 6001-9000

le premier homme : Gaiia Marətan le premier couple humain : le second premier homme (*Maš ̣iia) + la première femme (*Maš ̣iiaēinī)

la première vache : Gaō Aēuuō.dātā le premier couple bovin : le premier taureau + la seconde première vache

Certes, la littérature zoroastrienne conservée ne nous en parle pas alors3, mais il faut probablement reconnaître la figure de ce taureau dans celui qui avait permis aux premières générations humaines de traverser les Océans et dʼessaimer ainsi sur dʼautres continents. Voilà qui rappelle la prouesse du taureau sous la forme duquel Ζεύς transporta Εὐρώπη à travers les flots de la Méditerranée depuis une plage de Phénicie jusquʼau rivage crétois. Ce taureau sur le dos duquel les hommes sʼen allèrent coloniser de nouvelles frontières porte le nom de *Θrisaōka « qui possède trois clartés »4. Ce 3

Il ne figure pas non plus dans la liste que Zādsparam dresse (VZ 23.2) des patrons (ratu-) des cinq espèces animales : au lieu du taureau blanc, il y est fait mention de lʼoryx blanc (hlbvc Y sp̄ yt|) comme ratu des animaux qui broutent les prairies (clk ʼlcʼnykʼn|). 4 Le mythe du taureau *Θrisaōka est situé sous le règne de Haōšiiaŋha (VZ 3.86 et ZA 14.36) ou sous celui de Taxma Urupi (ZA 18.9), ce qui revient au même puisque ces souverains héroïques du premier millénaire du « mélange », arrière-petitsfils du couple humain primordial, sont deux frères : *Maš ̣iia + *Maš ̣iiaēinī > *Siiāmaka > *Frauuāka > Taxma Urupi et Haōšiiaŋha (ZA 35.1-3). Par contre, selon le Dēnkard, il faut situer ces événements à lʼépoque de *Siiāmaka : Dk 3.312.3 (M. J. DRESDEN, 1966, p. 592 lignes 07-12) ud ān ī aštag-frēstišnīh handarz ī fradom ō siiāmak ī maš ̣ii pus u-š frazandān pad aštagīh ī vohu.man ud sraōš [...] abar vihēz ī mardōm az airiian-vaēj ō gēhān pāygōs ud zraii-franāmišnīh ī pad θrisaōk gāv ud zamīg-ravišnīh-iz ō kustag-kustag [...] « Le premier conseil qui fut envoyé par lʼentremise dʼun messager le fut à *Siiāmaka fils de *Maš ̣iia et à ses enfants, les messagers ayant été Vohu Manah et Sraōša. [...] (Ils invitaient) les humains à quitter lʼAiriiana Vaējah pour les confins du monde, à traverser lʼOcéan avec le taureau *Θrisaōka et à parcourir la Terre de tous côtés [...] » ; ZA 14.36 (DH:188v01-07 ; K20:106r 15-106v03 ; M6b:208v03-12 ; TD1:43r17-43v07 ; TD2:106.06-14) az ān pānzdah sardag ī-šān nō sardag pad pušt ī gāv ī θrisaōk pad ān ī frāxv-kard zraii ī ō ān šaš kišvar ī dudīgar vidārd ud ānōh nišāstag kard ud šaš sardag pad xvainīraθ mānd hend ud az ān šaš sardag juxt-ēv mard tāz ud zan tāzag nām būd hend u-šān pad dašt tāziyān būd ud dašt ī tāziyān nām ī ōy rāy ēdōn xvānend ud juxt-ēv mard haōšiiaŋh ud zan gūzag nām u-šān airāniyān aziš būd hend [...] « Des quinze races (nées de *Frauuāka et de *Frauuākānī), neuf races traversèrent sur le dos du taureau 244

nom paraît pleinement justifié par le transport que lʼanimal, en plus de celui des hommes, assurait des trois feux des mages, des guerriers et des éleveurs5. *Θrisaōka l’Océan Large-cuve [Zraiiah Vōuru.kaš ̣a] pour les six secteurs secondaires (de la Terre) et s’y installèrent tandis que six races restaient dans le secteur du Char Sonore [Xvainiraθa]. Et, de ces six races, il y eut le couple d’un homme nommé *Tāca et d’une femme nommée *Tācā. Et d’eux descendent les *Tāciya dans le désert. Et le nom de "désert des *Tāciya" vient de là. Et il y eut le couple d’un homme nommé Haōšiiaŋha et d’une femme nommée *Gūzā. Et d’eux naquirent les Iraniens [...] » ; ZA 18.9 (K20:107v17-108r05 ; M6b:210v05-16 ; TD1: 50v08-14 ; TD2:124.05-12) andar xvadāyīh ī taxmō.urup ka mardōm pad pušt ī gāv ī θrisaōk az xvainīraθ ō abārīg kišvar hamāg vidārd hend ud šab-ēv mayān ī zraii pad vād stāft ādur-gāh kē-š andar būd ciyōn pad pušt ī gāv ī pad se gyāg kard ested kē vād abāg ātarš be ō zraii ōbast avēšān harv se ātarš ciyōn se xvarrah pad gyāgīhā ī ādur-gāh ī pad pušt ī gāv hamāg vaxšīd hend tā rōšn be būd ān mardōmān pad zraii abāz vidard hend .·. « Sous le règne de Taxma Urupi, lorsque, juchés sur le dos du taureau *Θrisaōka, les humains traversèrent l’Océan [zraiiah] à partir du secteur du Char Sonore [Xvainiraθa] vers tous les autres, une nuit, le centre de l’Océan par le vent fut agité ; l’autel du feu dans lequel se trouvait le feu, dans la mesure où place lui avait été réservée sur le dos du taureau, tomba avec le feu dans l’Océan ; et tous ces trois feux, comme trois facultés existant (pour les humains) de trouver à se nourrir [comme trois xvarənah], sur les sièges de l’autel du feu se trouvant sur le dos du taureau, se mirent à briller de concert, si bien que lumière il y eut et que l’humanité put reprendre la traversée de l’Océan ». 5 VZ 3.86 (K35:244v08-14 ; TD4a:509.10-510.03) u-š gaēiθii paydāgīh {ī andar gēhān} abēr-tar būd pad xvadāyīh ī haōšiiaŋh ka mardōm pad gāv ī θrisaōk be ō kišvar hamāg šud hend pad nēmag ī rāθ šab-ēv pad vād ī škeft ādur-pāyag ī abar pušt ī gāv pad se gyāg ī dēsīdag {kē-š ātarš padiš būd} ō zraii ōbast ud gōhrīg ān ī ēk ātarš ī vuzurg paydāg būd ō se baxšīhist ud pad se ādurpāyag be nišast hend ud ān xvad būd se xvarrah kē-šān mehmān ī abar ādur ī farr-bāy ud ādur ī gušnasp ud ādur ī burzēn-mihr ºoº « Et la manifestation matérielle (de la facilité avec laquelle les hommes purent trouver de quoi se nourrir [= le X varənah]) {= sa manifestation dans le monde} fut très grande sous le règne de Haōšiiaŋha, lorsque les humains sur le dos du taureau *Θrisaōka depuis le (secteur) du Char Sonore [Xvainiraθa] gagnèrent tous les (six) autres secteurs (de la Terre) et que le réceptacle du feu qui avait trois places désignées sur le dos du taureau {= sur lequel le feu avait trouvé place}, à mi-chemin, avec le vent violent d’une nuit, tomba dans le l’Océan. Et l’unique grand feu qui apparut en substitution se divisa en trois pour s’installer sur les trois réceptacles et faire d’eux-mêmes (pour les humains) trois moyens de trouver de quoi se nourrir [xvarənah], (les feux) dont les demeures sont sur le foyer *Xvarənō.bāγa [« qui répartit le Xvarənah »], le foyer *Varšnaspa1 [« qui possède des chevaux mâles »] et le foyer *Bərəjaiiat̰ .miθra [« qui salue Miθra »]2 ». Notes. 1. Sur le védique Vr̥ṣaṇaśvá, É. PIRART, 2011, p. 82-90. ||| 2. Selon le Dēnkard 245

Chaque communauté installée sur de nouvelles terres, en effet, devait être composée des trois castes fondamentales. Malheureusement, l’interprétation qu’il convient de donner du caractère accidenté de la traversée, évoqué çà et là6, reste hors de portée. Nous ignorons même aussi par quel miracle, suite à cet accident, les choses purent rentrer dans l’ordre. Le nom du taureau *Θrisaōka n’est certes pas attesté dans les textes avestiques conservés, mais la graphie pehlevie reproduit visiblement et clairement un mot avestique dont la forme, de surcroît, coïncide avec celle d’un héroonyme védique, Triśóka. Comme il est usuel dans la graphie pehlevie, la dentale sourde spirantisée initiale de *Θrisaōka est représentée par un samek et, comme il est fréquent, le ductus du yod devant représenter la voyelle de la première syllabe se fond ou se confond avec le premier jambage du second samek. Pour la représentation de diphtongue qui garnit la deuxième syllabe, comme il est fréquent, il est recouru, par simplification, à la seule semi-consonne v. Comme son thème relève de la première déclinaison, le mot est donné en pehlevi sans la finale casuelle, avec le thème nu donné sous sa forme traditionnelle : *θrisaōk- > sl(y)svk. Le tableau ci-dessous rassemble les diverses graphies attestées du mot. Je fais figurer en gras les formes pāzand, qui, écrites avec des signes avestiques, reproduisent une prononciation pehlevie ignorante de la forme originale vieil-iranienne. Passages

Manuscrits

Leçons

Dk 3.312 ZA 13.36

Dresden 1966 DH TD1 TD2 DH, TD1, TD2 K20 M6b TD1, TD2 K20, M6b DH, TD1, TD2 K20 M6b

slsvk| slsv syn|mvlv| slyv| MNV syn|mvlv| slsvk srisaōk srisaok slsvk sarsaok. slyvk|c sarsvk. sarasvk

ZA 14.36

ZA 18.9 ZA 24.22

(Dk 6.293 [K43a: 215r08-11 ; M. J. DRESDEN, 1966, p. 410 lignes 11-13]) ou Zādsparam (VZ 3.84 [K35:244v03-05 ; TD4a:509.03-07]), le feu de la caste sacerdotale, celui de la caste guerrière et celui de la caste paysanne. Sur ces feux, voir aussi RPDD 46.31-5. 6 VZ 3.86, ZA 18.9 (voir les deux notes précédentes). 246

Lʼantiquité du taureau *Θrisaōka ne fait aucun doute. Nous ne pouvons pas y voir le fruit dʼune innovation zoroastrienne puisque la trace dʼun taureau Triśóka subsiste dans le Véda. Malheureusement, cette figure mythique est assez méconnue du fait que son nom de triśóka- n’est attesté que trois fois dans la R̥gvedasaṁhitā. Cependant, nous pouvons y relever assez d’éléments pour démentir les affirmations gratuites de la tradition védique tardive ou celles que notamment MacDonell et Keith ont avancées concernant Triśoka en qui nous devrions reconnaître un r̥ṣi7. Des indices existent qui nous invitent à admettre la nature taurine de ce Triśoka si bien qu’il est parfaitement envisageable de voir en lui le reflet védique d’un même taureau proto-indo-iranien que dans l’avestique *Θrisaōka. Certes, les strophes védiques ne sont guère explicites ni ne permettent de reconnaître d’emblée la nature taurine de Triśoka, mais il est assez clair que le soi-disant r̥ṣi Triśoka, donné pour l’un des fils de Kaṇva, est le fruit de la réinterprétation de données védiques primitives par les docteurs brāhmaṇiques. En tant que r̥ṣi fils de Kaṇva, Triśoka, dans le Jaiminīyabrāhmaṇa, pour n’y jouer qu’un rôle annexe, intervient dans un mythe dont le personnage principal reste son père Kaṇva8. Dans l’autre mythe brāhmaṇique où il apparaît9, Triśoka partage le premier plan avec son frère et rival Medhātithi. Les épreuves qu’ils s’infligent volontairement afin de se départager sont celles de traverser un feu et les flots d’une rivière. Triśoka en sort indemne, mais, aux dires de son adversaire, ce serait du fait que le feu et la rivière sont des dieux et que les dieux évitent d’entrer en contact avec le fils d’une Asurī10. La traversée des flots que ce Triśoka put effectuer sans dommage nous rappelle que le *Θrisaōka zoroastrien avait servi de véhicule à de nombreux descendants de Frauuāka à l’instant de traverser les flots océaniques et de gagner de nouveaux continents. Et la traversée du feu, un parcours effectué à travers les flammes, nous rappellera la traversée des feux, le transport des trois feux au delà des flots océaniques. Dans les hymnes de la R̥gvedasaṁhitā, Triśoka paraît certes n’être jamais qu’une alternative aux figures d’Indra ou de Br̥haspati dans le mythe de l’ouverture du Vala et de la libération des vaches11, mais, dans les vers RS 10.29.2cd, Triśoka est le char 7

A. A. MACDONELL et A. B. KEITH, 1912, vol. I p. 331. JB 3.72-4. Pour une traduction, voir W. DONIGER, 1985, p. 93-5. 9 JB 3.234-6. Pour une traduction, voir W. DONIGER, 1985, p. 58-60. 10 Une diablesse. 11 RS 1.112.12c yā́ bhis triśóka usríyā udā́ jata « Les aides avec lesquelles(, ô Aśvín, vous avez fait en sorte que) Triśóka poussât les (vaches) usriyā à l’extérieur (du Vala) » ; RS 8.45.30 yáḥ kr̥ntád íd ví yonyáṁ V triśókāya girím pr̥thúm | góbhyo 8

247

qui permit à Kutsa de véhiculer de nombreux hommes : ánu triśókaḥ śatám ā́ vahan nr̥̄́n V kútsena rátho yó ásat sasavā́ n || « Victorieux du néant, le char Triśoka, poursuivant sa route, transportait une centaine d’hommes avec Kutsa ». Ce transport de centaines d’êtres humains permet de comparer Triśoka avec le taureau avestique et d’avancer la conjecture d’une origine commune. L’information que le Jaiminīyabrāhmaṇa nous fournit ainsi peutelle être heureusement combinée avec celle-ci du dixième maṇḍala de la R̥gvedasaṁhitā pour nous suggérer qu’un *Triśoka proto-indo-iranien avait dû exister et qu’il s’agissait au moins d’un véhicule dont les hommes s’étaient servi pour la traversée des flots. Et cela, malgré la discontinuité que, par ailleurs, j’ai pu détecter entre les deux traditions védiques12. Les textes affirment que le troisième Saōšiiaṇt, à lʼautre bout des millénaires du « mélange », au cours des inexplicables 57 années de sa carrière, lors d’une cérémonie planétaire célébrée avec la collaboration de nombreux héros immortels, immolera ce même taureau13. Pour lʼoccasion, le taureau portera un autre nom, celui de *Haδāiiu, « accompagné de lʼéternité »14. Ce gātúṁ níretave « (Índra) qui ouvrit un passage dans le large massif montagneux pour que Triśóka pût en faire sortir les vaches ». 12 É. PIRART, 2011. 13 VZ 35.15, ZA 24.1, 26.27. 14 ZA 13.36.1 (DH:186v01-02 ; TD1:40v09-10 ; TD2:99.14-15) būd andar gāvān ān ī ciyōn gāv ī θrisaōk kē haδaiiąš. xvānend « Parmi les bovins, il y eut le taureau que (les textes de la Doctrine) appellent aussi bien *Θrisaōka que *Haδāiiu » et ZA 24.22 (K20:110r19-110v01 ; M6b:214r07-10 ; TD1: 63v03-06 ; TD2:153. 0911) gāv ī haδaiiąš. kē θrisaōk-iz xvānend rāy gōved kū pad bun-dahišn mardōm az kišvar ō kišvar vidārd ud pad frašō.kərət anōšagīh aziš virāyend .·. « Concernant le taureau *Haδāiiu que d’aucuns nomment aussi *Θrisaōka, il est dit que, lors de la mise en place originelle, les humains, purent traverser de secteur en secteur et que, lors du Parachèvement, ils retireront de lui l’incalcinabilité ». ||| La forme et le sens du mot haδāiiu- sont expliqués dans un passage du Dādestān ī Dēnīg : DD 36.86.2 (K35:147r13-147v01 ; TD4a: 264.10-16) ciyōn ān gāv ī a-vinast1 ī xvānīhed haδayąm. ī vizārīhed dagr-zīvišn kē pad ān ī ōy zōr spurr ud sagr bavānd ātaršºān ī xvardārān padiš anābīhed hamāg zōr ī āz az spańiiā̊ mańiiaōi dāmān ud pas zīvend pad-iz a-xvarišnīh ud ciyōn ān haōm ī spēd ī frāšm ī purr-xvarrah kē dāred bēšaz ī darmān ī a-margīh padiš bavend zīvandagān hamēv-zīvišn « Comme le taureau impérissable, qui est appelé *Haδāiiu d’un nom signifiant "avec longue vie", est celui par le pouvoir duquel les feux de la digestion dans les êtres que le Savant Avis [Spańiiah Mańiiu] met en place se montreront performants et rassasiés, de ce fait, tout le pouvoir du (démon) Envieux [Āzi] se verra rejeter hors des êtres que le Savant Avis met en place, si bien qu’ils vivront 248

nom nʼest guère étonnant du fait que ce taureau devra avoir vécu tout au long des 6000 ans du « mélange ». Comme l’avestique correspondant au védique sádā « toujours » n’existe pas, mieux vaut reconnaître dans le premier terme du composé *haδāiiu-, l’avestique correspondant au védique sahá « avec », fréquent dans cet emploi. Il faut donner alors au second terme le sens fort de « éternité » qui, à l’état isolé, lui est connu au datif, yauuōi « pour la durée de vie, pour toujours, à jamais », mais aussi et surtout en composition15. Le nom de *Haδāiiu que reçoit le taureau dans le cadre du mythe eschatologique n’est certes pas attesté non plus dans les textes avestiques conservés, mais il ne fait guère de doute que les graphies pehlevies en reproduisent le nominatif avestique comme il n’est pas rare dans le cas d’un thème en ºu-16 : Passages

Manuscrits

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VZ 35.15 VZ 35.60 ZA 26.27

TD4a TD4a TD1 TD2 DH, TD1, TD2

ht’ydvš (syjUaTX) htkd’t| (nTeEkTX) hty’vš ht’yvs ht’yvš

ZA 34.23

Graphies pāzand acceptables : sans même devoir manger. Et, comme le Haōma Spaēta, qui apporte la perfection et possède beaucoup de xvarənah, constitue le remède conférant l’indestructibilité, de ce fait, ils seront, parmi les vivants, vivants à jamais ». Note. 1. Dès lors que l’épithète d’a-vinast « impérissable » servant à le qualifier en est le zand habituel, nous ne pouvons écarter que le taureau portât aussi le nom avestique d’anāhita- « inaltérable » comme la grande déesse iranienne. Notons que l’explication de son nom de *haδāiiu- pourrait être ancienne puisque dagr-zīvišn est le zand habituel de l’avestique darəγəm.jīti- / darəγō.jīti- / darəgō.jiiāiti- (Ch. BARTHOLOMAE, 1904, colonnes 694-5) « pouvant vivre longtemps ». 15 J. KELLENS et É. PIRART, 1988-91, vol. II p. 291, 293. Le datif du mot possède d’ailleurs ce sens depuis le proto-indo-européen comme le correspondant grec ἀεί « toujours » < *HHi̯ éu̯ei invite à le penser. 16 D’autres exemples sont m’nvšº > manušº ; h(v)nvš < hunuš. Par contre, lšn| < rašnu- ; hlt| < xratu-. Comme le védique ā́ yu- alterne avec ā́ yuṣ-, nous ne pourrions complètement écarter la possibilité que ht’ydvš reproduisît un original vieil-iranien hada+āyuša- si la conservation de la voyelle brève de la syllabe initiale ne garantissait que, dans sa graphie avestique, le mot était trisyllabique. 249

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ZA 24.22

K20 M6b E. K. ANTIA, 1909 K20, K20b, M6b

hazaẏōš haδaẏōš. hadiiōš. hadaẏāvš.

ZA 34.23

Graphies pāzand incorrectes, dues à la confusion existant entre la semivoyelle v et la nasale n dont les signes pehlevis sont identiques : Passages

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DD 36.86

K35 TD4a K35 TD4a K35 TD4a K35 TD4a DH TD1 TD2 TD1 TD2 TD1 TD2

haδayąm. haδaš ̣ąm.·. haδayąš haδaš ̣ąm. haδayąš haδašąš haδaiiąš haδaiiąš.·. haδaiią hāδaiią.·. haδaiią. haδat̰ ąš haδatąš. haδaiiąš.·. haδaiiąš.

DD 36.100 DD 47.34 DD 89.4 ZA 13.36

ZA 24.22 ZA 26.27

En lisant ht’ynš au lieu de ht’yvš, le locuteur médiéval en vint à dire et à écrire haδaiiąš au lieu de *haδāiiuš. Ce taureau sera immolé en vue de fournir à lʼhumanité les moyens de lʼimmortalité. En effet, le troisième Saōšiiaṇt, afin de parachever le monde, tirera de la graisse17 de lʼanimal le moyen de rassasier définitivement, une fois pour toutes, les hommes ressuscités tandis que, plante poussant au fond de lʼOcéan, le Haōma blanc18 lui permettra de leur conférer une immortalité qui, compréhensiblement en Iran, est décrite notamment comme étant la 17 18

Moyen-perses clpyh (carbīh VZ 35.15, 35.60) et TLBA (pīhv ZA 34.23). DD 36.86.2, VZ 35.15, ZA 34.23. 250

garantie qu’ils seront incalcinables19 et se retrouveront à lʼabri de toute déshydratation20. La graisse de lʼanimal, pour libérer définitivement lʼhumanité de la nécessité de manger, éliminera le démon de la convoitise, Āzi21. Cependant, pour conserver jusques à la fin des temps la solution qui devra être offerte à lʼangoisse de la disette, il fallait mettre et garder en lieu sûr lʼindispensable ou précieux taureau depuis les premiers temps de lʼhumanité. Nous ne savons pas comment tout ceci fut organisé : les textes conservés ne nous donnent pas les explications utiles. Toujours est-il quʼun impie du nom de Fraŋhrasiiān22, un Touranien, aux époques héroïques de Manu Ciθra ou du Kǝuui Haōsrauuah23, assassina son propre frère Aγraēraθa24 qui avait donné un coup de main aux armées iraniennes25. Le grand dieu, en compensation de ce revers, accordait au malheureux Touranien la chance dʼavoir un fils immortel26. Récompense extrême. Le nom de ce dernier ne nous est pas 19

ZA 34.23. Lʼadjectif pehlevi ʼnvš (anōš) combine le préfixe négatif *an+ avec un dérivé de la racine proto-indo-européenne *H1eus du verbe « brûler » (védique UṢ, grec εὔω). 20 ZA 34.23. Lʼadjectif pehlevi ʼhvš (ahōš) combine le préfixe négatif *a+ avec un second terme tiré de la racine proto-indo-européenne *sH2eus de la sécheresse (avestique huška-, védique śuṣká-, grec αὗος). 21 DD 36.86.2. Cf. Dk 3.374. 22 Afrasiab fils de Pescheng chez J. MOHL, 1838-78. 23 Keï Khosrou chez J. MOHL, 1838-78. 24 Aghrirès fils de Pescheng chez J. MOHL, 1838-78. 25 ZA 33.5 ; 35.23-4 (DH:227r12-16 ; TD1:98v15-99r03 ; TD2:231.05-09) ud az aγraēraθ gvkptšh zād .·. ud ka plʼsyʼp̄ | manuš-cihr abāg ʼylʼnkʼn| andar gar ī paitiš.xvār griftār kard ud iθiiaj ud niyāz abar hišt aγraēraθ az yazadān ā-yāft xvāst uš ān nēkīh vindād kū-š ān spāh-gund ī ʼylʼnkʼn| az ān saxtīh bōxt .·. « gvkptšh naquit dʼAγraēraθa. Lorsque Fraŋhrasiiān put capturer Manu Ciθra et l’armée iranienne sur le mont *Paitiš.xvāra pour les plonger dans lʼabandon et la nécessité, Aγraēraθa demandait aux Yazata un bien et lʼobtenait, à savoir que lʼarmée des Iraniens fût sauvée de ce mauvais pas ». ||| Le mont *Paitiš.xvāra, situé dans le Varǝna Caθru.gaōša (ZA 9.20, 32.2), ne serait autre que le mont Mazišuuaṇt du Yt 19.2 (ZA 9.3). 26 ZA 35.25. La liste des immortels, humains ou autres, qui réapparaîtront vers la fin du temps linéaire pour prêter main forte aux Saōšiiaṇt est assez instable entre les livres pehlevis (DD, Dk 9.15.11, RPDD 54, VZ 35.4, ZA 29, ZVY 3.2), mais le fils dʼAγraēraθa y est toujours repris. Pour ce qui est de la naissance, ce fils qui allait devenir le gardien du taureau est à rapprocher de Piši.š́ iiaōθna. Tous deux sont nés en tant que récompense ou compensation. Le pieux Aγraēraθa obtint ce fils immortel en compensation d’avoir été assassiné par Fraŋhrasiiān tout comme Piši.š́ iiaōθna est le fils immortel que Vīštāspa obtint comme récompense pour avoir embrassé la bonne doctrine mazdéenne. ||| Remarquons-le, nous ne savons absolument rien du sort qui fut celui du taureau appelé *Θrisaōka ou *Haδāiiu durant de nombreuses 251

clairement connu, la forme moyen-perse gvkpytMLKA, habituellement lue Gōbed-šāh, nʼen ayant pas été interprétée de façon sûre. Cʼest ce fils immortel qui, nous est-il dit, assure la garde du taureau au fond dʼune forteresse souterraine, tout comme le poisson Kara, au fond de lʼOcéan, monte la garde autour du Haōma blanc27. Dans la comparaison, la forteresse où le taureau est enfermé apparaîtra comme la version iranienne du Labyrinthe, dʼautant que certains auteurs donnent la résidence du Minotaure crétois pour une

générations humaines, entre celle de Haōšiiaŋha et celles de Manu Ciθra ou du Kǝuui Haōsrauuah, autrement dit : pendant bien plus d’un millénaire et demi. 27 Selon ZA 17.14 (TD1:49v02 ; TD2:121.07 ; K20a:116v04 ; M6b:241v 20) kar ī māhīg ī arǝz dāmān ī ābīgān rat .·., le poisson Kara, appelé aussi « le combattant » (*arǝza- > pāzand ariz.), est le patron (ratu-) des êtres aquatiques. ZA 13.26 donne *Arǝza (E. K. ANTIA, 1909 : arǝz.) pour le premier des poissons. Ce nom lui est donné aussi chez Zādsparam (VZ 23.2.3a [TD4a:537.12-13]) : MN ʼp̄ [ʼr]ykʼn mʼhyk|HD [sltk|HD] ʼlz[|HD] ŠM .·. (az ābīgān māhīg-ēv ī arǝz nām .·.) « parmi les (êtres) aquatiques, un poisson du nom dʼArǝza ». Selon ZA 24, Ahura Mazdā nʼa pas chargé moins de deux ou dix poissons Kara de la garde ou de la protection du Haōma blanc : ZA 24.1 (DH:201v10-12 ; TD1:61v08-11 ; TD2:149.10-13 ; K20a:108v11-14 ; M6b:211v11-15) gōved pad dēn kū hōm ī spēd kē gaōkǝrǝn drāxt xvānend andar zraii ī frāxv-kard pad ān ī zofr var rust ested ud pad fraš-kǝrǝt kardārīh andar abāyed cē-š anōšagīh aziš virāyend .·. « Il dit dans la Doctrine que le Haōma blanc, appelé aussi "arbre Gaōkərəna", dans lʼOcéan Large-cuve, avait poussé dans le réservoir profond et quʼil sera bien utile lors de la mise en œuvre du Parachèvement (du monde) puisque les (êtres) devront en tirer lʼincalcinabilité » ; ZA 24.2 (DH:201v 13-14 ; TD1:61v11-13 ; TD2:149.13-14 ; K20a:108v14-17 ; M6b:211v15-212r 01) ud gannāg mańiiaōi pad ān ī ōy hamēstārīh andar ān zofr āb vazag-ēv kirrēnīd estend kū ān hōm be vināhend .·. « Et Aŋhra Mańiiu, pour sʼopposer à cela, dans le fond de lʼeau, produisit des tritons qui pussent abîmer ledit Haōma » ; ZA 24.3 (DH:201v14-18 ; TD1:61v13-62r01 ; TD2:149.14-150.04 ; K20a: 108v17-109r03 ; M6b:212r01-08) ud abāz-dārišnīh ī ān vazag rāy ohrmazd dō māhīgān kar ānōh dād estend kē pērāmōn ī hōm hām-vār hamēv gardend tā hamēv ēk-ēv az ān māhīgān sar ō ān vazag ud ham avēšān māhīgān mańiiu xvarišn hend kū-šān xvarišn nē abāyed ud tā ō fraš-kǝrǝt pad kōxšišn estend ud ast gyāg-ēv ī ān māhīg arǝz ī ābīg nibišt estend .·. (K20a et M6b, au lieu de dō, donnent dah) « Pour retenir de tels tritons, Ahura Mazdā y a mis en place les deux [ou dix] poissons qui ne cessent de tourner autour du Haōma de façon que la tête de lʼun dʼentre eux fasse toujours face aux tritons. Ahura Mazdā fit aussi en sorte que la nourriture de ces poissons fût abstraite, ce qui revient à dire quʼils nʼont aucun besoin de se nourrir, et quʼils se tinssent sur leurs gardes jusquʼau Parachèvement. Il y a un passage où ces poissons sont nommés par écrit "Combattants aquatiques" » ; ZA 17A.1. 252

caverne souterraine28 et que, du fait même de la nature calcaire de beaucoup de ses roches, la Crète est criblée de cavernes29. « Au fond du Labyrinthe » ou « à l’issue du Labyrinthe », cela reviendrait à dire « au terme de la Grande Année » sur base de l’étude que Claude Obsomer30 a menée il y a quelques années, dans l’hypothèse où, bien sûr, ce que nous trouvons à Cnossos sur une drachme du IVe siècle représenterait bel et bien ledit Labyrinthe. En effet, l’idée qu’il serait risqué d’en rejoindre le fond en raison de la difficulté d’en ressortir sans le secours du fil d’ Ἀριάδνη, d’une part, n’apparaît pas 31 à l’examen de cette représentation si fréquente puisque le visiteur, même aveugle, à ne rencontrer aucune bifurcation dans le couloir32, peut se contenter de suivre le mur de ce soi-disant Labyrinthe qui n’a rien d’un dédale ; d’autre part, le nombre des méandres, constant, fait écho à celui des années que totalise la Grande Année. De toute façon, les représentations du Labyrinthe, même fort complexes comme sur la mosaïque du premier siècle conservée au Museo Archeologico di Cremona, montrent que le fil dʼ Ἀριάδνη nʼétait dʼaucune utilité33. S’il en est le concepteur, nous ne voyons ni pourquoi Δαίδαλος n’en trouverait pas la sortie ni pourquoi, avec Icare, il devrait alors prendre la voie des airs. Surtout que, si c’est un souterrain, la sortie par le haut, en principe, est impossible34. Le motif du Labyrinthe concentre ainsi plusieurs apories. Il faut nécessairement envisager, à mon avis, la superposition secondaire de plusieurs données : le 28

C. ACKER, 2002, p. 76. Tandis que la Copa de Esón nous montre clairement un palais ou quʼun édifice d’interprétation malaisée figure sur le gobelet (σκύφος) attique reproduit chez K. KERÉNYI, [1994] 1998, fig. nº 30, selon dʼautres représentations telles que des mosaïques romaines, le Labyrinthe est un labyrinthe, mais, contre C. ACKER, 2002, p. 77, je ne crois pas que nous devions reconnaître le Labyrinthe dans la piste de danse que Δαίδαλος, nous dit Homère, construisit pour Ἀριάδνη. La tablette mycénienne de Cnossos KN Gg 702, pour mentionner la *Δαβυρίνθοιο Πότνια à côté de l’ensemble des dieux comme destinataires d’une offrande de miel reste énigmatique. La Πότνια, la Dame du Labyrinthe n’est pas nécessairement une divinité comme le pense K. KERÉNYI, [1994] 1998, p. 73. Et cette mention peut parfaitement nous inviter à voir dans le Labyrinthe la désignation d’appartements royaux. 29 M.-À. RODRÍGUEZ-ARIAS, 2008. 30 C. OBSOMER, 2011. 31 J. C. MCKEOWN, [2013] 2014, p. 264. 32 Notons ici que Θησεύς, en plus du fil dʼἈριάδνη, est muni dʼune couronne qui éclaire le couloir. Cʼest Ἀμφιτρίτη qui la lui a fournie : voir F. FRONTISI-DUCROUX, [1975] 2000, p. 179. 33 ALTAÏR, 2008, p. 90-8. 34 F. FRONTISI-DUCROUX, [1975] 2000, p. 141-4 et 175. 253

plan d’une piste de danse ou le croquis d’une chorégraphie, le palais de Mίνως, la prison souterraine et le schéma du décompte de la grande année35. Il faut envisager aussi l’incompétence probable des poètes ou des mythographes devant de si vieilles traditions. Nous ne pourrons vérifier non plus ni lʼexistence ni la nature du Labyrinthe. De lʼaveu même de Diodore de Sicile36, ce monument nʼexistait plus de son temps. De surcroît, son modèle égyptien qui aurait pu nous en donner une idée, attribué quʼil est à un souverain légendaire, ne peut être identifié. La mention du Labyrinthe sur une tablette mycénienne a beau refléter une réalité ou, tout au moins, le faire penser, le mythe, à l’adopter ou à l’intégrer, lui ôte toute historicité. Il est donc inutile de chercher à l’identifier sur le terrain. Le schéma de la piste de danse (χορός) que Δαίδαλος avait construite pour Ἀριάδνη est probablement à distinguer du plan du Labyrinthe qui servit à enfermer le Μινώταυρος, mais pourrait coïncider avec le schéma de la grande année et avec la figure que lʼon exécute avec le γέρανος « la danse de la grue » dont Θησεύς avait ramené de Crète la pratique sur lʼîle de Délos37. L’œuvre du Saōšiiaṇt Astuuat̰ .ərəta se déroulera donc sur la période des 57 années38 supplémentaires au douzième millénaire du temps linéaire. Son œuvre consistera notamment à parachever le monde, une opération nommée frašō.kərəiti- en vieil iranien avestique, pour le faire entrer dans l’infini, mais aussi à ressusciter les morts grâce à la célébration d’un sacrifice de dimensions planétaires offert avec la collaboration sacerdotale du dirigeant de chacun des six autres secteurs ou continents terrestres39. Le roi Haōsrauuah, devenu immortel, règnera à nouveau vers la fin du temps linéaire et, comme tel, tiendra le rôle du sacrifiant ou commanditaire de la cérémonie tandis que le troisième Saōšiiaṇt sera l’officiant en chef, le zaōtar, lors du grand sacrifice planétaire devant parachever le monde. Il est probable que 35

Apollodore (Bibliothèque 3.4.2), en disant qu’elle durait autant que huit années de son temps, conserve le souvenir que l’on s’y référait anciennnement. 36 Diodore de Sicile, Bibliothèque 1.61. 37 Plutarque, Thésée 21.1-2 ; F. FRONTISI-DUCROUX, [1975] 2000, p. 145-7 ; F. GARCÍA ROMERO, 1988, p. 164. 38 Dk 3.177, 3.407, RPDD 48.49. 39 Sur ces autorités sacerdotales, appelées ratu- du fait de former une série finie et structurée, voir ZA 29.2-3 : le ratu d’Arǝzahi (Yt 12.9) est Aš ̣āuuaŋhu Biuuaṇdaŋha (Yt 13.110) ; celui de Sauuahi (Yt 12.10), Jarō.daŋ́hu Pairištūra (Yt 13.110) ; celui de Fradaδafšu (Yt 12.11), Spiti Uspąsnu (Yt 13.121) ; celui de Vīdaδafšu (Yt 12.12), Ǝrǝzrāspa Uspąsnu (Yt 13.121) ; celui de Vōuru.barǝšti (Yt 12.13), Huuaspa (Yt 13.122) ; celui de Vōuru.jarǝšti (Yt 12.14), Caθβarǝ.aspa (Yt 13.122). Tout comme Zaraθuštra le fut jadis, le ratu du Xvainiraθa (Yt 12.15) ou continent central sera Astuuat̰ .ərəta lors de la Frašō.kərəiti. Voir aussi VZ 35.19. 254

Haōsrauuah, empereur du Xvainiraθa, y soit accompagné des empereurs des six autres continents, mais ils ne nous sont pas connus. Les ingrédients de ce sacrifice apporteront l’immortalité et la jeunesse éternelle aux humains ressuscités. Les deux ingrédients principaux, les seuls à être mentionnés dans les livres moyen-perses, seront la graisse du taureau Haδāiiu et une variété océanique de Haōma, le Haōma blanc [Spaēta] appelé aussi Gaōkǝrǝna40, dʼun mot qui, à première vue, devrait signifier « oreille de bovin ». Ces deux ingrédients41, dans la célébration, remplaceront le lait V 20.4 aδa azǝm yō ahurō mazdā̊ (10) uruuarā̊ baēšazaiiā̊ uzbarǝm (10) paōuruuiš [...] V ōĩm gaōkǝrǝnǝm pairi (7) .·. ēg-im kē ohrmazd hem ham uruuar baēšazēnīdār ul burd .·. ī purr [...] .·. ˟u-m ēk gaōkǝrǝn .·. haōm ī spaēt .·. « Moi qui suis Ahura Mazdā, en plus des plantes médicinales en grand nombre [une par maladie selon Dk 8.36.16], jʼexhibai alors un seul Gaōkǝrǝna {= Haōma blanc} » ; S 1.7, 2.7, Yt 1.30 : voir J. DARMESTETER 1892-3, vol. II p. 278-9 n. 18. Sur la haute valeur curative ou médicinale du Haōma blanc, Dk 8.43.80. 41 DD 47.34.3 (K35:168r04-06 ; TD4a:313.16-314.02) zōr ī pad gēhān frazām az haδaiiąš gāv [...] dahīhed ō ātarš ī mardōmān tan ud gumēzīhed u-š padiš bavend spurr ud sagr ud a-marg ud a-hōš-iz .·. « Le pouvoir qui, à la fin du monde, viendra du taureau *Haδāiiu [...] sera donné au feu du corps des humains et s’y mêlera de sorte qu’ils seront parfaits, rassasiés, sans destruction et aussi sans déshydratation » ; DD 89.4.2 (K35:197r07-08 ; TD4a: 385.06-08) ān gāv ī haδaiiąš kē-š padiš baved spurr sagrīh ī hāmist mardōm .·. « Le taureau *Haδāiiu est celui grâce (à la graisse) duquel il y aura la performance et la satiété pour toute l’humanité » ; VZ 35.60.1 (TD4a: 602.15-17) u-šān ān ast paymōzan ī bāmaii .·. a-zarmān .·. a-marg ud sagrīh carbīh ī gāv ī haδāiiuš .·. « Et les (hommes ressuscités) auront un habit lumineux, seront sans vieillesse, sans destruction, et la graisse du taureau *Haδāiiu les rassasiera (pour toujours) » ; ZA 26.27 (TD1:69r12-14 ; TD2:166.02-04) ud ēdōn-iz gāv ī haδāiiuš ī haδaiiąš. kē pad frašō.kərət anōš aziš virāyend .·. u-š parvardārīh ī dāmān kardan xvēš-kārīh .·. « Et ainsi aussi, (comme les cinq catégories de bestiaux,) le taureau *Haδāiiu (fut formé à partir de la vache Aēuuō.dātā), lui à partir duquel, lors du Parachèvement, ils prépareront l’incalcinabilité. Et (la vache Aēuuō.dātā) fut chargée de l’alimentation des êtres mis en place » ; ZA 34.23 (DH:225v08-11 ; TD1:96v11-14 ; TD2:226.03-06 ; K20:126r06 ; K20b:16r 07-11 ; M6b:249r07-12) yazišn ī pad rist-virāyišnīh saōšiiąs abāg ayārān kuned ud gāv ī haδāiiuš pad ān yazišn kōxšend az pīhv ī ān gāv ud haōm ī spaēt anōš virāyend ud ō harvisp mardōm dahend ud harvisp mardōm ahōš bavend ī tā hamēv-ravišnīh .·. « Le Saōšiiaṇt accomplira le sacrifice pour la restauration des morts avec ses collaborateurs. Et ils abattront le taureau *Haδāiiu avec ce sacrifice. Et, à partir de la graisse de ce taureau et du Haōma Spaēta, ils prépareront le caractère incalcinable et le conféreront à toute l’humanité. Et toute l’humanité se retrouvera à l’abri de la déshydratation à tout jamais ». ||| Les deux ingrédients se compléteront : la graisse 40

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et le Haōma des sacrifices ordinaires : « L’heure venue dʼy procéder, les êtres de race immortelle, pour offrir le sacrifice devant aboutir au parachèvement du monde, rassembleront les ingrédients suivants, selon les mêmes dispositions que celles du sacrifice avec lequel Zaraθuštra fut converti : en guise de Haōma, le vivifiant, c’est-à-dire le Haōma blanc que l’on trouve dans lʼOcéan et grâce auquel les morts deviendront vivants et les vivants, immortels ; en guise de lait, la graisse du taureau *Haδāiiu qui est gardé à l’intérieur d’une forteresse de métal sous l’autorité de gvpt|šh ; en guise de feu, le grand feu (de la digestion) qui maintient en vie les êtres vivants ; en guise de Yasna, le sacrifice et l’éloge spécifiques à la mise en œuvre du parachèvement du bien [...] »42 ; « Le Saōšiiaṇt accomplira le sacrifice pour la restauration des morts avec ses collaborateurs. Et ils abattront le taureau *Haδāiiu avec ce sacrifice. Et, à partir de la graisse de ce taureau et avec le Haōma blanc, ils prépareront le caractère incalcinable et le conféreront à toute l’humanité. Et toute l’humanité se retrouvera à l’abri de la déshydratation à tout jamais »43. La célébration du sacrifice planétaire qui devra parachever le monde ainsi sera-t-elle menée avec des ingrédients spéciaux tels que la graisse du Taureau au lieu du lait d’une vache ou le Haōma blanc en guise de Haōma, mais il y a aussi le remplacement du feu sacrificiel ordinaire par le feu qui est intérieur aux hommes et aux autres êtres vivants, celui de la digestion qui

du taureau que le Saōšiiaṇt fournira aux humains ressuscités les mettra définitivement à l’abri de la faim et de la nécessité de manger. Ils en seront à jamais portés à leur meilleur développement (DD 36.86.2, 47.34.3 et 89.4.2 spurr) et rassasiés (DD 36.86.2, 36.100.3, 47.34.3, 89.4.2 et VZ 35.60 sagr) tandis que le Haōma blanc, remède infaillible, les affranchira des maladies ou de la vieillesse (DD 36.100.3 et VZ 35.60 a-zarmān). Ils seront donc non seulement immortels, mais jouiront aussi de la jeunesse éternelle. L’immortalité qu’ils se verront conférer est décrite de trois façon : les hommes ressuscités seront indestructibles (DD 36.86.2, 36.100.3, 47.34.3 et VZ 35.15 a-marg), incalcinables (DD 36.100.3, ZA 24.22, 26.27 et 34.23 an-ōš) et à l’abri de toute déshydratation (DD 36.100.3, 47.34.3 et ZA 34.23 a-hōš). 42 VZ 35.15 (TD4a:590.13-591.06) ka frašō.kərət frazāmēnīdan kāmend yazišn ī abar frašō.kərət yaštan rāy az sardagān a-margān dāmān be ō ham āvarīhed pad handāzag ī ān ī yazišn yaštan ī zaraθušt padiš āstauuānīhist pad gōhrīg haōm ān ī zīvandag-kar ī ast haōm ī spaēt ī andar zraiiān kē-š murdagān padiš zīvandag ud zīvandagān padiš a-marg bavend ud gōhrīg šīr ī gāv ī haδāiiuš ī andar drupuštīh-ēv ī aiiō.xšust pad sālārīh ī gōbad-šāh pādag ud gōhrīg ātarš vuzurg ātarš ī zīvandag-dāštār ī gaiiān-barān ud gōhrīg yašt yazišn ud stāyišn ī abar frašō.kərətkartārīh ī vehīh [...]. 43 ZA 34.23. 256

explique aussi pourquoi les vivants dégagent de la chaleur44. Ce feu sacrificiel d’exception, tout à fait particulier, porte le nom de Vohu.friiāna « favorable au sang »45. La célébration des sacrifices ordinaires passe en effet par l’offrande de libations. Et celles-ci sont composées essentiellement de deux ingrédients : d’une part, le jus d’un végétal pressuré, lequel est appelé haōma, l’homologue du sóma des cérémonies védiques ; d’autre part, le lait d’une vache46. Comme il sera recouru à la graisse de l’animal plutôt qu’à du lait dans le sacrifice planétaire auquel le Saōšiiaṇt procédera et qu’il faudra donc l’abattre, nous devons penser qu’il s’agit bien d’un taureau plutôt que d’une vache. Déduction précieuse puisque les textes moyen-perses, la langue médiévale ayant perdu la distinction des genres grammaticaux du vieil iranien, n’avaient pas précisé le sexe de l’animal. Et il faudra donc abattre ce taureau, l’immoler alors même qu’il était immortel. Né de la vache primordiale, nous lʼavons vu, ce taureau avait joué un rôle important au début de l’histoire humaine. Il avait servi de navire à lʼhumanité à lʼheure de conquérir de nouvelles frontières. Le rassemblement des dirigeants sacerdotaux des sept continents devant constituer le collège sacerdotal indispensable à la célébration du giga-yasna de la Frašō.kǝrǝiti, pour lequel le taureau *Haδāiiu sera sacrifié, fait écho à lʼessaimage des premiers hommes sur les sept continents en question que ce même taureau, mais nommé alors *Θrisaōka47, avait facilité à lʼépoque de Haōšiiaŋha ou dʼUrupi. Composition en anneau. Comme l’iconographie zoroastrienne est extrêmement rare, ne boudons pas la représentation de Vohu Manah sur un ossuaire trouvé en Sogdiane et daté du VIIe siècle de notre ère48. Selon Frantz Grenet, le groupe divin des Aməš ̣a Spəṇta y figurent tenant en mains les instruments de la liturgie cosmique qui, lors de la Frašō.kərəiti, purifiera les divers domaines du monde : de gauche à droite, Amərətatāt tient une plante ; Ašạ Vahišta, un réservoir à feu et une pelle à cendres ; Hauruuatāt, le haōma et le mortier destiné à le broyer ; Xšaθra Vairiia, le métal en fusion des ordalies ; Vohu Manah, pa44

La Br̥hadāraṇyakopaniṣad (BĀUK 5.9 = ŚBM 14.8.10.1) lui donne le nom de Vaiśvānara. 45 Y 17.11, VZ 3.79, ZA 18.3. Ch. BARTHOLOMAE, 1904, colonne 1433, doit avoir raison de reconnaître un nom du sang dans le premier terme de ce composé, mais, selon ZA 18.3, son nom de vohu.friiāna- signifierait veh-franāftār « propagateur du bon ». ||| La Zand-āgāhīh (ZA 6G.1 et ZA 18) fait allusion à ce feu présent dans les végétaux, les humains et les animaux. 46 VZ 35.15. 47 ZA 24.22. 48 Sur l’ossuaire de Bija-Najman (Ouzbékistan), voir F. GRENET, 2012, p. 51. 257

tron des animaux, la cuiller destinée à l’offrande de graisse ; Spəṇtā Ārmaiti, patronne de la Terre qui devra restituer les os lors de la Résurrection, l’ossuaire et la clef du mausolée. La cuiller de Vohu Manah ferait ainsi allusion à la graisse du taureau. Depuis les premiers temps de l’humanité, en prévision des événements qui devront clore le temps linéaire, un ou deux gardiens retiennent le taureau *Haδāiiu au fond d’une forteresse ou derrière une palissade de métal quelque part au tiers de la Terre49. L’interprétation qu’il convient de donner de cette dernière indication, « au tiers de la Terre », malheureusement, reste malaisée. Le fils immortel dʼAγraēraθa est l’un des deux gardiens, mais le second, mentionné une seule fois, reste anonyme50. Le taureau est gardé vivant, mais le texte est endommagé là où il serait question d’un homme qualifié d’excellent le retenant avec des chaînes derrière une palissade51 : « Et, dans la 49

Sur la frontière de l’Airiiāna Vaējah : DD 89.4.1 (K35:197r05-07 ; TD4a: 385.04-06) gvpt šh xvadāy ī abar gvpt būm ī ham-vimand ī ō airiian-vaēj pad bār ī āb ī dāitii ud abar nigāh dāred « gvpt šh est le souverain de la terre de gvpt qui a frontière avec l’Airiiāna Vaējah [= la Médie ?] sur les bords de la rivière de la Loi [Ap Dāitiiā]1. Il a la garde2 du » ; MX 43.35 ; 61.31 (K43a:175v15-176r01) ud gvpyt|šh pad airiiān-vaēj andar ēn kišvar ī xvainiraθ .·. « gvpyt|šh se trouve dans lʼAiriiāna Vaējah, cʼest-à-dire dans ce secteur-ci de la Terre, à savoir le Xvainiraθa ». Notes. 1. pad bār ī āb ī dāitii = Yt 5.112 pašne āpō dāitiiaiiā̊. ||| 2. Le syntagme verbal abar nigāh dāštan est le zand usuel de l’avestique aiβiiāxšaiia- « surveiller » : voir Ch. BARTHOLOMAE, 1904, colonne 311. 50 DD 36.100.3 (K35:149r13-149r17 ; TD4a:269.03-07) u-š az ān ī veh pādār ud kē-z payvast az-iz ān ī haδayąš gāv zōr hamēšag sagrīh ud a-hōšīh abāz dahīhed zīvandagīhā ō tan ud dārend gaiiān ī anōšag ud bavend a-gandišn1 ud a-pūyišn ud azarmān ud a-marg ud a-bēš ud a-yask ud hamēv-zīvandag ud hamēv-sūd .·. « Et, par son bon gardien et son associé, à partir du propre pouvoir du taureau *Haδāiiu, l’éternelle satiété et l’absence de déshydratation seront accordées au corps (des humains) avec la vie (de sorte qu’)ils jouiront d’une vitalité incalcinable (et qu’ils seront) sans puanteur, sans pourriture, sans vieillesse, sans destruction, sans dommage, sans maladie, toujours vivants et toujours prospères ». Note. 1. Ce doit être le zand de Yt 19.89 afriθiiaṇt- (J. KELLENS, 1984a, p. 14 n. 8 ; J. CHEUNG, 2007, p. 88), mais Ch. BARTHOLOMAE, 1904, col. 102, lisait ašōδišn « nicht hungernd » (sur base de la traduction sanscrite du MX) tandis que P. K. ANKLESARIA, 1970, p. 13 n. 47a (pour Dk 7.7.50), en suivant la leçon du manuscrit B (M. J. DRESDEN, 1966, p. 314 ligne 05) ’svdšn| reproduite chez Dh. M. MADAN, 1911, p. 666 lignes 12-13, ou chez P. B. SUNJANA et D. P. SANJANA, 1874-1928, vol. XIV p. 80 ligne 09, avec la traduction « hungerless », vol. XIV p. 77, donne pourtant asōyišn « undecaying ». 51 Moyen-perse dlvpvštyh (dru-puštīh) « ensemble de "dos de bois", palissade, forteresse » : VZ 35.15, ZA 24.23. 258

Doctrine, il est dit qu’il est gardé vivant, enchaîné par l’homme excellent au tiers de cette Terre et qu’une palissade fut construite autour de lui dans l’attente du Parachèvement où il sera nécessaire »52. Les chaînes qui retiennent le taureau peuvent surprendre, mais rappellent celles dont le Tricéphale iranien finira par se libérer ou celles qui entravent le Minotaure dans les images du haut archaïsme grec telles que Monique Halm-Tisserant53 les a mises en lumière. Ni l’identité du gardien ni son nom ne sont clairs. Nous ne savons pas comment ce fils d’Aγraēraθa put devenir l’un des héros immortels qui reviendront au cours des derniers millénaires prêter main forte aux Saōšiiaṇt54. Si ce n’est que l’immortalité lui vint des 52

ZA 24.23 (K20:110v02-04 ; M6b:214r10-14 ; TD1:63v06-09 ; TD2:153.1114) ud gōved pad dēn kū zīvandag pad dām ī ān ī aγrii mard pad θrišuuºtag ī ēn zamīg u-š dru-puštīh-ēv pērāmōn kard ested tā ō frašō.kərət ka andar abāyed ºoº. Lʼadverbe pērāmōn se retrouve dans la description qui est donnée de la garde que le poisson Kara assure autour du Haōma blanc. 53 M. HALM-TISSERANT, 1998, p. 82 n. 312. 54 Pour nous en tenir aux seuls hommes héroïques du passé mythique qui reprendront du service vers la fin des temps, les textes nomment notamment ceux-ci : Piši.š́ iiaōθna fils de Vīštāspa, Fraδāxšti Xuṇbiia fils de Haōšiiaŋha, Aš ̣əm.yahmāi.ušta fils de Friia, Yōišta fils de Friia, Aš ̣auuazdah fils de Pōuruδāxšti, nlsyy fils de Vīuuaŋvhan, Uruuatat̰ .nara fils de Zaraθuštra, *Baērazda, Tusa, *Vīuua, le Kəuui Haōsrauuah, Kərəsāspa. ||| RPDD 54 (K35a: 81v04-07 ; TD4a:136.11-14) frašºkǝrǝt kardār vas hend ān a-hōš ud a-marg ēk piši.š́ iiaōθn ud ēk van ī jud-bēš ud ēk gvpt|šh ud ēk yōišt ī friiān ān kē-š gaiiān andar tus ud vīuu ud kǝrǝsāsp tan ast u-š gaiiān nēst .·. « Ceux qui procéderont au Parachèvement du monde sont nombreux. Ils sont à l’abri de la déshydratation et des injures. L’un (d’eux) est Piši.š́ iiaōθna, un autre Vanā yā Vīspō.biš, un autre gvpt|šh, un autre Yōišta Friiāna, ceux dont (seul) le principe de vie [gaiiāna] (est à l’abri de la déhydratation ou des injures) comme Tusa et *Vīuua, et celui dont le corps [tanū] l’est, mais non le principe de vie [gaiiāna], Kərəsāspa » ; VZ 35.4 (TD4: 587.13-588.03) ud nām ī haftān andar dēn ōvōn paydāg kū ast kē az tōxmag ī airiiºiz ī ast van ī jud-bēš ud aš ̣ǝm.yahmāi.ušt ud yōišt ī friiān ud gvkpt|šh ud ast kē az tōxmag ī turºiz ī ast aš ̣auuazd ī pōuruδāxštaiian ud ēk kē-š nām fraδāxšti ī xuṇbiiºān kē bīm az aēšm rāy andar xumb fravarīhist .·. « Le nom des sept immortels est donné dans la Doctrine : ceux qui sont de la famille dʼ *Airiiu, à savoir Vanā yā Vīspō.biš, Aš ̣ǝm.yahmāi.ušta, Yōišta descendant de Friia ou gvkpt|šh et ceux qui sont de la famille de Tura, à savoir Aš ̣auuazdah descendant de Pōuruδāxšti [cf. Yt 13.112], un nommé Fraδāšti Xuṇbiia qui, par crainte dʼAēšma, fut élevé dans une jarre [cf. Yt 13.138], » ; ZA 29.6. La jarre dans laquelle Fraδāxšti fut élevé rappelle celle dans laquelle Γλαῦκος fils de Μίνως fut ressuscité ou celle dans laquelle Εὐρυσθεύς était allé se réfugier. Le texte des VZ est visiblement corrompu : le minotaure iranien ne descend pas d’Airiiu, et 259

dieux en compensation pour la perte de son père. L’immortalité du fils en échange de la mort du père. De surcroît, l’interprétation de sa désignation qui paraît combiner gv(k)p(y)t avec šh ou MLKA, reste indécise. S’agit-il du roi des bouviers, du roi bouvier ou faut-il chercher une autre interprétation ? Car, en principe, tout héroonyme pehlevi doit continuer un mot avestique, ce qui, si nous devons y admettre sa présence, est impossible dans le cas de l’élément šāh. Le nom du gardien est toujours le même, les variations graphiques étant limitées. La graphie la plus complète paraît être gvkpyt|MLKA. Il s’agit probablement d’un composé plutôt que d’un syntagme. Le premier terme du composé n’est pas sûrement gvkpyt| < *gaōpaiti- (= védique góTura ne peut figurer parmi les ancêtres du fils de Vīštāspa. Il suffira d’intervertir les deux mentions d’autant que l’erreur est compréhensible, le Minotaure iranien étant habituellement mentionné à la suite de l’Œdipe iranien tandis que le fils de Vīštāspa figure en queue dans l’énumération des sept immortels qui prêteront main forte au dernier des trois Saōšiiaṇt, mais il est vrai que la mention du fils de Vīštāspa est le fruit d’une restitution que Ph. GIGNOUX et A. TAFAZZOLI, 1993, ont opérée. Certains manuscrits nomment en outre le Kəuui Haōsrauuah (cf. RPDD 48.49) après le tandem formé par Tusa et *Vīuua. ||| Le Zam-Yazat Yašt fait allusion à ces immortels qui accompagneront le Saōšiiaṇt Astuuat̰ .ərəta en se limitant à recourir à la désignation générique de haxaiiō « associés » (Yt 19.89, 19.95), sans mentionner donc le nom de chacun d’eux, mais ceci suffit pour que nous puissions affirmer l’existence de ce mythème au niveau des textes avestiques. L’un de ceux qui sont nommés dans les livres pehlevis, à savoir Uruuatat̰ .nara, apparaît dans les textes avestiques non en tant qu’immortel ayant vécu caché depuis les temps héroïques, mais pour connaître une nouvelle naissance et développer de la sorte une nouvelle Frauuaš ̣i (Yt 13.127.5-7), un nouvel engagement en faveur de la bonne obédience : jāmāspahe aparazātahe aš ̣aōnō frauuaš ̣īm yazamaide .·. maiδiiōi.mā̊ŋhahe aparazātahe aš ̣aōnō frauuaš ̣īm yazamaide .·. uruuatat̰ .narahe aparazātahe aš ̣aōnō frauuaš ̣īm yazamaide .·. « Nous offrons le sacrifice à la Frauuaš ̣i du pieux Jāmāspa qui naîtra dans le futur. Nous offrons le sacrifice à la Frauuaš ̣i du pieux Maiδiiōi.mā̊ŋha qui naîtra dans le futur. Nous offrons le sacrifice à la Frauuaš ̣i du pieux Uruuatat̰ .nara qui naîtra dans le futur ». En effet, le Fravardīn Yašt honore non seulement la Frauuaš ̣i de ce fils de Zaraθuštra, mais aussi celle que ce même Uruuatat̰ .nara, suite à sa naissance future, n’aura de cesse de développer (Yt 13.98, 13.127). Le passage avestique, en outre, mentionne deux autres personnages qui, malgré leur nouvelle naissance future, ne figurent pas parmi les héros immortels mentionnés dans les livres pehlevis, Jāmāspa et Maiδiiōi.mā̊ŋha, deux personnages appartenant à la série de ceux auxquels la tradition attache un livre. Certes, ce n’est pas le cas de Uruuatat̰ .nara, mais, selon la ZA 35.56, ce fils de Zaraθuštra réside dans l’enclos souterrain que Yima avait construit, le Vara, où il veille au respect de la bonne obédience, dans l’attente de la Frašō.kərəiti, ce qui, en principe, est peu compatible avec l’idée d’une nouvelle naissance dans le futur. 260

pati-) dont le sens théorique est « propriétaire de bovins, bouvier ». En effet, je ne veux pas exclure que *paiti soit le préverbe et qu’il faille reconnaître dans MLKA ou šh, plutôt que celle de šāh « le roi », une graphie du participe présent en *ºá- de √ xšā. Certes le verbe vieil-iranien *pati+xšaya- n’est attesté qu’en vieux perse55, mais le pehlevi p’t|hšyd, pour présenter l’allongement rythmique de la première syllabe d’un tétrasyllabe, a toute chance d’être un avesticisme et de documenter indirectement l’existence d’un avestique *pāitixšaiia- « dirigeant, gouverneur ». Dans cette hypothèse comme dans l’autre, il est admissible de considérer un dvandva adjectif « qui est tout à la fois taureau et gouverneur », en conformité avec la description qui nous est donnée dans le Dādestān ī Mańiiaōi Xrat du personnage portant ce nom. Dans la première, nous pouvons tout aussi bien envisager un karmadhāraya ou un ṣaṣṭhītatpuruṣa « roi bouvier » ou « chef des bouviers ». La situation est donc telle que, grosso modo, le sens du mot pourrait bien être connu, « tauromine » ou « chef des bouviers », mais la forme, difficile à certifier. Surtout que l’ancêtre avestique de šāh fait défaut, mais il est vrai que nous devons déterminer si šāh est le zand d’un mot avestique plutôt que son descendant. Le mot avestique recherché n’est pas ahura- « roi » dont le zand usuel est xvadāy. Le Frahang ī Ōīm56 nous propose précisément xšaiia-, le participe présent en *ºá- de √ xšā. Cependant, la possibilité d’une erreur n’est pas à écarter, le gardien du taureau n’ayant pas besoin d’être un roi ou un chef. Examinons donc les expressions qui traduisent son rôle de gardien. Le Dādestān ī Dēnīg en contient une qui retiendra notre attention : DD 89.4.1 gvpt šh [...] abar nigāh dāred .·. « gvpt šh [...] a la garde du ». En effet, le verbe avestique duquel le syntagme verbal abar nigāh dāštan est le zand usuel est précisément aiβiiāxšaiia- « surveiller »57, un verbe, certes dérivé du nom de l’œil58, mais dont la forme contient le mirage de xšaiia-. Je suis donc prêt à penser que gvkpyt|šh représente un avestique *gaōpaitiiā̆xšaiia- « qui surveille le bovin ». Le toponyme le plus spécifique concernant la localisation de la forteresse59 de métal que le fils immortel dʼAγraēraθa contrôle, moyen-perse DNa 18-19 a-da-ma-š-a-ma: p-ta-i-y-x-š-y-i-y: « moi, j’ai gouverné ces (nations) ». 56 FiO 288. 57 Ch. BARTHOLOMAE, 1904, colonne 311. 58 Proto-indo-européen *H3éku̯si. 59 Le pays de gvpt| bvm (« territoire du bouvier » ?) sur lequel régnerait ce souverain est-il bien réel ? Si ce toponyme est le fruit d’une interprétation secondaire erronée de gvptšh comme désignation de son roi, ce pays a peu de chances d’être historique et toutes chances d’être un mirage. De toute façon, il faut rejeter l’idée 55

261

ẕmyk Y svkpst’n, paraît signifier « terre de refuge pour la clarté »60. Le second mot de ce syntagme, énigmatique (< *saōka+apastāna- ?), est sans doute à rapprocher de l’autre nom du taureau *Haδāiiu, à savoir *Θrisaōka, car tous deux contiennent saōka- « le fait d’être allumé, la clarté, lʼacuité visuelle »61 : Manuscrits

Passages

Leçons

DH:216r18 DH:216r21 DH:216v21

ZA 29.5 ZA 29.6 ZA 29.13

om. ẕmyk Y ḆYN kykst’n| ẕmyk svkptst’n|

TD1:83v03 TD1:83v07 TD1:84r16

ZA 29.5 ZA 29.6 ZA 29.13

om. ẕmyk Y skykst’n| ẕmyk svkpst’n

TD2:197.02 TD2:197.05 TD2:198.14

ZA 29.5 ZA 29.6 ZA 29.13

om. ẕmyk Y kykst’n| ẕmyk Y svkpst’n

K20:122v15 K20:122v20 K20:123v08-09

ZA 29.5 ZA 29.6 ZA 29.13

ẕmyk sāvkavatā ẕmyk sā̊kāvast[ ẕmyk sāvkauuastąn

Malheureusement, nous ignorons les mythes où la déesse zoroastrienne qui représente cette clarté, Saōkā, avait pu jouer un rôle62. Toujours est-il quʼelle est la déification de lʼacuité visuelle, extraordinaire, du poisson Kara, que ce serait la Sogdiane (voir D. N. MACKENZIE, 2001). La mythologie, comme on sait, nʼa que faire des réalités géographiques. Elle obéit et recourt à sa propre géographie. 60 ZA 29.6, 29.13. Sur les incertitudes qui enveloppent sa localisation, voir E. W. WEST, 1880-97, vol. IV p. 202 n. 6). 61 saōka-/sūka- masc. Yt 14.3, 14.29, 16.3, 16.7 ; saōkā- fém. V 19.37, 22.3, S 1.3, 2.3, Yt 1.21, 5.26, 12.4, 13.42. 62 Le catalogue que la Zand-āgāhīh dresse des dieux reste presque muet à son propos (ZA 26.34). 262

le gardien du Haōma blanc63. Du fond de lʼOcéan, il perçoit, nous disent le Varhrān Yašt et le Dēn Yašt, la moindre vague en surface, fût-elle de lʼépaisseur dʼun cheveu64. Et, selon la Zand-āgāhīh où ils sont plusieurs, les poissons Kara possèdent une capacité de perception leur permettant de savoir, depuis le fond de lʼOcéan, si lʼeau, en surface, est plus ou moins touchée de la pointe dʼune aiguille65. La déesse participe ainsi à la protection du Haōma blanc. Un passage, avons-nous dit, fait état de deux gardiens. Lʼun des deux se chargera de lʼimmolation ou du dépeçage de lʼanimal lors du grand sacrifice que le Saōšiiaṇt célébrera à la fin du temps linéaire, mais nous nʼen savons guère plus. Néanmoins, réfléchissons à ce gardien du taureau iranien qui, lors du grand sacrifice avec lequel le monde sera parachevé, tiendra le rôle du chevillard. Les principaux dieux zoroastriens sont la déification dʼingrédients du sacrifice offert, dʼattitudes requises du sacrifiant, de textes prononcés et de rôles tenus dans les cérémonies du culte. Parmi eux, il y a le dieu chevillard, la déification du rôle que lʼimmolateur tient dans les cérémonies. Ce dieu porte le nom de Gǝ̄uš Tašan66. Ce nom signifie littéralement « configurateur de la vache » plutôt que « configurateur du taureau » puisquʼil entre souvent dans la formation dʼun tandem avec celui de Gǝ̄uš Uruuan et que ce dernier est explicitement donné pour lʼâme de la vache primordiale, Gaō Aēuuō.dātā67, mais il faut bien que d’autres chevillards prennent la relève. Nous parlons d’un configurateur dans 63

V 19.42, Yt 14.29, 16.7, MX 61.28 (K43a:175v10-11) ud haōm ī rist-virāstār pad zraii ī vōuru.kaš ̣ andar zofāy-tom gyāg rust ested .·. « Le Haōma qui doit permettre la restauration des défunts se trouve avoir poussé au plus profond de lʼOcéan Large-cuve » ; MX 61.30 (K43a:175v13-15) u-š kar māhīg pērāmōn hamēv garded u-š vazag ud abārīg xrafstr abāz hamēv dāred .·. « Le poisson Kara tourne sans cesse autour du (Haōma blanc) et empêche les tritons ou les autres xrafstra de sʼen approcher » ; ZA 16.5, 24A, 34.23. Les poissons Kara sont considérés comme les plus grandes des créatures dʼAhura Mazdā tout comme les Vazaγa « crapauds, tritons », les plus grandes dʼAŋhra Mańiiu (ZA 24.4). 64 Yt 14.29, 16.7. 65 ZA 24.5 (DH:201v21 ; TD1:62r05-07 ; TD2:150.08-10 ; K20a:109r07-10 ; M6b:212r13-17) ud ēn-iz gōved kū ān māhīg ī ōvōn mārāg kū andar ān ī zofr āb sōzan tēx mālišn ī āb padiš be abzāyed ayāb be kāhed dānend .·.. ||| Cette acuité visuelle du poisson avestique pourra faire écho à celle que la couronne de pierres précieuses reçue des mains dʼ Ἀμφιτρίτη donne à Θησεύς dans les boyaux du Labyrinthe. 66 Voir ci-dessus Chapitre II. 67 VZ 2.13, ZA 4A.2. 263

la mesure où ce boucher, en disposant les morceaux de l’animal découpé sur le barəziš, la jonchée végétale requise, le reconstitue selon un schéma nouveau, celui de l’immortalité. Gǝ̄uš Tašan offrirait ainsi un écho du côté iranien à la figure crétoise de lʼingénieux Δαίδαλος, le constructeur, le τέκτων de la vache de Πασιφάη, tout en montrant davantage d’à-propos. Le configurateur du taureau iranien, son immolateur, me paraît avoir un meilleur ancrage dans le récit mythique. Peut-être est-ce dû à la focalisation doctrinale qui marque toute la mythologie iranienne. Sur le bas-relief dʼErğili (= Daskyleion) en Phrygie hellespontique, là où, pour des raisons militaires et stratégiques, il y avait une importante colonie perse depuis lʼépoque de Cyrus le Grand, nous apercevons, le faisceau rituel à la main, deux mages zoroastriens68 en présence des têtes de victimes sacrificielles déposées sur la jonchée végétale, le barǝziš, quʼune planche retient, à côté de l’autel du feu. À propos de Δαίδαλος69, remarquons ceci : son nom pourrait bien faire écho à celui avestique de daŋhra-70 ou védique de dasrá- donné à lʼhomme « instruit, habile, détenteur dʼun savoir-faire, initié ». Autrement dit, lʼétymologie quʼApollonios dʼAlexandrie avait proposée à partir de δάω « jʼenseigne, jʼinstruis », mais que Françoise Frontisi-Ducroux juge fantaisiste71, à mon avis, pourrait bien être la bonne face à celle jugée savante, mais que Pierre Chantraine nʼavait avancée quʼavec hésitation72. Le recours proposé à la racine du latin dolō « je taille, façonne le bois » pour lʼexplication de son nom, à la rigueur, pouvait interdire de faire de Δαίδαλος un ancien immolateur tandis que lʼidée quʼil dérive de la racine proto-indo-européenne *dens en renforce la possibilité : Δαίδαλος, à qui Euripide accorde dʼailleurs le titre de τέκτων73, est assurément le détenteur dʼun savoir-faire tout comme Gǝ̄uš Tašan, le dieu boucher iranien. En réalité, me semble-t-il, il faut combiner les deux propositions étymologiques et faire du nom de Δαίδαλος un composé bahuvrīhi dans lequel le premier terme sera la forme de Caland de lʼadjectif tiré de la racine de δάω telle que nous la trouvons aussi dans δαΐφρων « intelligent, valeureux »74, 68

Car il en fallait au moins deux, ceux qui, en pāzand, portent les noms de zōt̰ et de rāspī. 69 Étrusque ΤΑΙΤΛΕ. 70 Ch. BARTHOLOMAE, 1904, colonne 681. 71 F. FRONTISI-DUCROUX, [1975] 2000, p. 43-4. 72 P. CHANTRAINE, 1968, p. 246. 73 Euripide, Les Crétois, fragment 6 (F. JOUAN et H. VAN LOOY, 2000, p. 332). 74 P. CHANTRAINE, 1968, p. 248 ; M. MAYRHOFER, 1992-2001, vol. I p. 689. 264

mais en admettant la synérèse de ºαΐº en ºαίº75, et le second un substantif apparenté certes au latin dolō76, mais aussi et surtout, même si Manfred Mayrhofer la rapproche plutôt de δέρω « jʼécorche »77, à la racine protoindo-iranienne √ *darH « fendre », bien connue par lʼépithète de puraṁdará- « pourfendeur de murailles » dont le Véda honore Índra, une racine qui, malgré les usages latins, nʼest donc pas réservée à la taille du bois. Lʼétymon du nom de Δαίδαλος, dans mon hypothèse, est donc *dn̥si-dl̥ H2o« expert en découpe ». Sʼil est en réalité un boucher, cela explique que le Śatapathabrāhmaṇa78 fasse du « carpenter »79, tákṣan-, un paradigme dʼhomme impur. Or, dans le Mahābhārata80, celui qu’Indra charge de couper (CHID) les têtes de Viśvarūpa cadavre avec une hache (paraśu-) ou un tranchoir (śastra-) est un takṣan. Et, remarquons-le, le même souci fait de lʼinventeur des Bouphonies athéniennes un métèque.

75 76 77 78 79 80

Même si cette diphtongue, chez Homère, figure sous lʼictus. Même sʼil est malaisé de justifier le timbre vocalique radical de dolō. M. MAYRHOFER, 1992-2001, vol. I p. 701-2. ŚBM 1.1.3.12. J. EGGELING, 1882-1900. MBh 5.9. 265

IV 4. Minotaure ou poisson Dans un texte, le gardien de la forteresse, fils immortel dʼAγraēraθa, très curieusement, est décrit comme un être hybride : seule la moitié supérieure de son corps est humaine, la moitié inférieure, pour la forme, relevant du taureau1, mais, comme le nombre de ses pattes nʼest pas révélé2, je nʼécarterais pas une faute de transmission. Il est parfaitement envisageable, voire mieux attendu, que le gardien du taureau, dans le texte primitif, fût taureau du buste au sommet et que lʼhumanité caractérisât plutôt le reste ou la moitié inférieure de sa figure3. 1

MX 61.32 (K43a:176r01-02) ud az pāy tā nēm tan gāv ud az nēm tan tā azabar mardōm .·. « À partir des pieds jusquʼà mi-corps, cʼest un taureau, mais, à partir de mi-corps jusquʼen haut, un homme ». La traduction sanscrite que Niriosaṅgha en a donnée est la suivante : pādād yāvad ardhaṁ śarīraṁ gorūpaḥ | ardhāt tanor yāvad ūrdhvam manuṣyarūpaḥ. 2 E. W. WEST, 1880-97, vol. II p. 257 n. 1. 3 Autrement dit : je rejette la théorie selon laquelle l’apparence hybride de gvpt šh serait empruntée à celle des taureaux ailés assyriens, connus sous le nom erroné de lammasu ou lamassu (voir D. T. POTTS, 2002), qui eux montrent un visage humain. Remarquons en outre la similitude stylistique que la description iranienne présente avec celle que nous trouvons chez Diodore (Bibl. 4.77) : Τοῦτον δέ φασι διφυῆ γεγονέναι, καὶ τὰ μὲν ἀνώτερα μέρη τοῦ σώματος ἄχρι τῶν ὤμων ἔχειν ταύρου, τὰ δὲ λοιπὰ ἀνθρώπου. Vidons ici une question qui ne serait pas dénuée dʼintérêt. Le père du minotaure iranien, cet Aγraēraθa qui fut la victime dʼun fratricide, porte dans les textes avestiques une épithète traditionnelle vieil-iranienne qui serait identifiable comme étant précisément la désignation du minotaure, *nara+gu̯a- > narauua- « homme-taureau » (Yt 9.18.4f aγraēraθaheca narauuahe, Yt 13.131.6a aγraēraθahe narauuahe). J. DARMESTETER, 1892-3, vol. II p. 436-7 n. 23, avait bien vu que cette épithète ne pouvait être un adjectif patronymique, les noms des ancêtres de ce personnage étant bien différents : ZA 35.17 le donne pour un descendant de Θraētaōna notamment par Tura et Pǝšō.ciṇgha. Cependant, lʼidée quʼAγraēraθa ne serait pas à distinguer du gardien du taureau, basée sur un seul passage moyen-perse, ne peut être retenue. Elle est le fruit dʼune mauvaise lecture (ZA 29.6, 35.23-5) due à lʼun des pionniers des études moyen-perses, E. W. WEST, 1880-97, vol. II p. 257 n. 1. Il reste que le composé tiré du dvandva des désignations de lʼhomme, *nara+, et du taureau, *+gu̯a-, est dʼun type inusuel. Et cela, cʼest sans compter que la forme de la désignation de lʼhomme, *nara+ au lieu de *nr̥+ comme premier terme de composition, présenterait ici une thématisation irrégulière ou inattendue. La forme nara+ ne sera possible quʼà partir du sanscrit épique comme l’illustre encore le prénom du Premier Ministre actuel de lʼInde, Narendra Modī. Ma préférence sera donc plutôt de reconnaître dans narauua- un composé bahuvrīhi signifiant « pos267

Le taureau avait donc été mis en lieu sûr, dans une forteresse, à la garde dʼun être le reflétant en partie, un minotaure. La figure de gvpt šh correspond donc tout à la fois à celle du Μινώταυρος et à celle du gardien de l’île de Crète, un certain Τάλως4. La présence de Τάλως sur les plages crétoises le rapproche aussi de gvpt šh du fait que ce dernier reste souvent au bord de lʼOcéan à offrir des sacrifices afin d’en tuer les monstres5. La facette animale du gardien du taureau nous étonnera moins si nous savons que celui du Haōma blanc est un poisson appelé Kara. Comme ce dernier est bel et bien nommé dans les textes avestiques ayant survécu6, nous sommes en droit d’avancer que l’absence de toute mention avestique du taureau et de son gardien est due au hasard. De toute façon, le taureau porte un nom avestique. Il est sans grande importance que les livres pehlevis situent le Kara dans le Zraiiah Vōuru.kaš ̣a, lʼOcéan Large-cuve où baigne le

sesseur de bovins bleus ». En effet, le premier terme du composé, nara+, pouvonsnous penser en l’absence d’une meilleure solution, coïncide nettement mieux avec le sanscrit nī́ la- « bleu marine ». La possession de tels bovins, envisageable sur base de celle de chevaux bleus connue par le sanscrit nīlāśva-, ferait allusion, pouvons-nous imaginer, à la relation quʼAγraēraθa et son fils entretiennent avec les flots azurés de lʼOcéan : le minotaure iranien reste assis au bord de lʼOcéan pour y offrir des sacrifices, et le taureau iranien comme le grec sont marins. Il nʼest pourtant pas exclu de reconnaître *nr̥+ dans le premier terme du composé narauua-, la quantité de syllabes ne pouvant être vérifiée, mais la finale ºa- du second terme suggère que le composé *nr̥+gu̯a- est à analyser comme un bahuvrīhi. Celui-ci signifierait « possesseur de bovins andro(morphe)s », puisquʼil est peu vraisemblable quʼun dvandva serve de base à la formation dʼun bahuvrīhi. De toute façon, remarquons-le, *nr̥+, dont lʼétymon coïncide avec celui du grec ἀνήρ, ne signifie jamais purement et simplement « être humain ». 4 R. GRAVES, [1955] 2011, nº 92b. ||| Apollonios de Rhodes (Argonautiques 4.1644, 4.1678-80) nous apporte les informations suivantes : Τάλως qui effectue quotidiennement trois fois le tour de l’île sera tué par Μήδεια. 5 MX 61.33-5 (K43a:176r02-05) ud hāmvār pad zraiiºīg bār nišīned .·. ud āyazišn ī yazadān hamēv kuned ud zōhr ō zraii rēzed .·. ud pad ān zōhr-rēzišnīh a-mar xrafstr andar zraii be mīrend .·. « Il reste assis au bord de lʼOcéan. Il ne cesse dʼoffrir le sacrifice aux Yazata en versant la libation dans lʼOcéan. Avec la libation versée, dʼinnombrables xrafstra, dans lʼOcéan, meurent ». ||| Je ne sais comment résoudre la contradiction que Gōbed-šāh tout à la fois monte en permanence la garde autour du taureau dans la forteresse souterraine et reste sur la plage à verser sans cesse des libations dans lʼOcéan. 6 Yt 14.29, 16.7, V 19.42 : voir É. PIRART, 1999, p. 499-503 ; 2008, p. 78-9. 268

monde, tandis que les textes avestiques parlent de la Raŋhā, le fleuve de Saveur qui fait le tour du monde. Comme la vigilance de Τάλως, le gardien et protecteur de l’île de Crète, était aussi efficace que celle du poisson Kara, un combattant (*arəza-7) qui, afin dʼassurer la protection ou la garde du Haōma blanc, ne cesse d’en faire le tour et se tient prêt en permanence à soutenir les assauts de lʼennemi, je ne puis que m’interroger sur l’étymologie à donner de leurs noms. Le ταῦ grec peut provenir de la labio-vélaire sourde proto-indo-européenne comme le kaph initial de kara-, et nous savons qu’il y a rhotacisme en proto-indoiranien de tous les *l proto-indo-européens. La variante Κάλως avec κάππα initial, présente chez Pausanias ou dans la Souda8, paraît confirmer lʼorigine labio-vélaire du ταῦ. Nous pouvons dès lors avancer que lʼichtyonyme avestique et le nom de Τάλως, apparentés au second terme des composés αἰπόλος « chevrier » ou βουκόλος « bouvier » du grec, font allusion à leur rôle de gardiens. Par ailleurs, Τάλως serait un robot, un géant de bronze9, un automate métallique, ce qui nous rappelle que le Labyrinthe iranien destiné à la conservation du taureau d’éternité est métallique lui aussi. En outre, son caractère métallique pourra rappeler que Kara est un poisson et que les poissons, le plus souvent, sont recouverts dʼécailles qui scintillent comme le métal. Le personnage de Τάλως mʼoblige à remonter dans le temps, car il avait existé un autre Τάλως, neveu et disciple de Δαίδαλος. Au départ, faut-il savoir, Δαίδαλος était un Athénien de souche royale qui avait dû sʼexiler suite au meurtre de ce disciple et avait trouvé refuge en Crète à la cour du roi Minos. Le maître artisan avait assassiné son neveu Τάλως par jalousie : celui-ci, malgré son statut dʼapprenti, sʼétait montré nettement meilleur technicien que lui.

7

Ce participe présent en ºa- est donné pour son nom dans VZ 23.2, ZA 13.26, 13.34, 17.14, 24.3. 8 F. FRONTISI-DUCROUX, [1975] 2000, p. 123 n. 20 et p. 159 n. 44. Pausanias dit Κάλως dans son premier livre (Description 1.21.4 et 1.26.4), mais Τάλως dans les 7e et 8e (7.4.8, 8.53.5), distinguant ainsi nettement l’Athénien du Crétois. Cependant, Pausanias, pour dépendre de poètes parfois bien anciens, doit assurément être victime dʼune dialectologie appartenant à un autre âge. 9 Apollonios de Rhodes (Argonautiques 4.1641-3) fait de lui un survivant de la race de bronze que Ζεύς avait confié à Εὐρώπη comme gardien de l’île de Crète. 269

Françoise Frontisi-Ducroux10 a très bien vu que les deux Τάλως, lʼAthénien et le Crétois, partageaient, en plus de leur nom, une caractéristique fondamentale : le mouvement circulaire. Le Crétois, pour la protéger dʼéventuelles incursions ennemies ou empêcher lʼévasion de prisonniers, ne cessait de faire le tour de lʼîle de Crète ; lʼAthénien, pour sa part, passait pour lʼinventeur dʼinstruments ou dʼoutils qui tournent : le tour du potier, la roue du tourneur, le compas. Jʼy ajoute la scie que Τάλως inventa en sʼinspirant de la forme dʼune arête de poisson11 puisquʼelle nous rappelle lʼexistence du poisson Kara et que, pour scier une branche, il faut sans cesse revenir et recommencer jusquʼà ce quʼelle cède tout comme le Soleil qui, chaque fois, revient à son point de départ et fait un jour nouveau. Jour après jour, le Soleil raccourcit ainsi notre durée de vie ; or, remarque Françoise Frontisi-Ducroux12, Hésychios fait de Τάλως un nom du Soleil. Le tour de garde que Τάλως ou Kara effectuent sans relève ni trève, le tour de potier dont lʼautre Τάλως fut lʼinventeur, le retour périodique de la scie ou du Soleil, voilà qui confirme lʼidentification de la racine proto-indoeuropéenne *ku̯el dans ce nom que le gardien sans faille, lʼartisan performant et lʼastre du jour partagent assurément, la racine qui est bien connue par le nom proto-indo-européen de la roue, *ku̯ekulo- > grec κύκλος, védique cakrá-, etc. Sans doute à retenir tout aussi bien si Hésychios donne le même nom au Soleil, la comparaison du Τάλως crétois avec Karṇa13, le héros solaire du Mahābhārata, tous deux porteurs dʼune armure métallique congénitale14, élucide leurs noms : le mot grec comme l’épique indien devraient signifier « qui tourne » alors que l’appellatif sanscrit karṇa- désigne l’oreille. Dans le cas du nom de gaōkərəna- que reçoit le Haōma blanc autour duquel le poisson Kara monte la garde, nous ne pouvons pas non plus penser aisément que ce végétal ressemblerait à une oreille de bovin. En effet, deux anomalies de poids seraient à relever. Tout dʼabord, lʼavestique karǝna- est le nom daivique de lʼoreille si bien que taxer quelquʼun de karǝna- « mauvaise oreille » revient à dire quʼil est sourd. Comme le Haōma blanc est éminemment positif et antidaivique, son nom de gaōkǝrǝna- resterait alors 10

F. FRONTISI-DUCROUX, [1975] 2000, p. 124. Apollodore (Bibl. 3.15.8) et Diodore (Bibl. 4.76) parlent d’une mandibule de serpent. ||| F. FRONTISI-DUCROUX, [1975] 2000, p. 124 n. 28. 12 F. FRONTISI-DUCROUX, [1975] 2000, p. 125. 13 Les jeux de mots présents dans lʼépopée indienne sur le nom de Karṇa ont été passés en revue par F. MAWET, 2006, p. 373-7. 14 Ch. ROSE, 1999. 11

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tout à fait injustifiable ou saugrenu. Ensuite, le sanscrit karṇa- qui, quant à lui, ne comporte aucune charge péjorative signifie simplement « oreille », mais nous ne voyons pas pourquoi le héros solaire épique indien porterait pareil nom. À moins quʼil faille écarter lʼoreille des prémisses du débat, nous rappeler des gardiens qui tournent ou penser que Karṇa doit son nom au fait dʼêtre le fils du Soleil, un dieu qui tourne. Lʼétymon de lʼhéroonyme indien ne ferait donc aucune difficulté, proto-indo-européen *ku̯ol-no-. Remarquons en outre ceci : comme le lobe de lʼoreille, pour ainsi dire, tourne lui aussi, cet étymon avancé pour lʼhéroonyme est sans doute à conserver pour lʼappellatif, lorsque le mot désigne purement et simplement lʼoreille. Le nom du héros épique indien ne signifie donc pas « oreille », et l’appellatif karṇa-, avant de désigner l’oreille, ferait allusion à ses contours ou à son caractère orientable. Par suite, le nom de Gaōkǝrǝna qui est donné au Haōma blanc, le végétal clé de lʼeschatologie zoroastrienne, signifierait grosso modo « qui fait tourner le bovin ». J’avance alors l’hypothèse intrépide que ce végétal des fonds océaniques aura sur la graisse du taureau un effet comparable à celui du Haōma de montagne15 qui, dans les cérémonies ordinaires, fait tourner le lait. Que dire de plus ? Karṇa, rappelons-le, lui qui porte donc le nom de « qui tourne », mourra pourtant parce que, dans la bataille, la roue de son char, sʼembourbant ou cassant, sʼarrêtera de tourner. Il ne faudrait pas en dire davantage concernant ce Τάλως ―ce serait trop nous éloigner du taureau iranien qui nous occupe―, mais je relève quʼune source fait de Τάλως un homme à tête de taureau16. Ainsi existe-t-il une variante faisant dʼun minotaure nommé Τάλως le gardien de la Crète. De fait, sur la didrachme de Phaistos17 qui lui donne des ailes sans doute d’origine solaire et le nomme Τάλων18, mais sans faire de lui 15

Le Haōma ordinaire pousse au sommet des montagnes (Y 10.3). R. GRAVES, [1955] 2011, nº 92m. 17 Datée des débuts du IIIe siècle avant notre ère et conservée au Cabinet des médailles de la Bibliothèque de France à Paris. 18 Ce qui est nécessaire à la justification de l’alpha dans Τάλως coïncide avec ce qui est nécessaire à la justification du a bref de kara- : une laryngale. Je pose dès lors *ku̯l̥ H2ó- pour l’étymon de kara- et pour celui du mot de base duquel Τάλως dérive. La variation Τάλως / Τάλων suggère que, pour cette dérivation, le suffixe a pu être celui de possession, *-H3n-. Au nominatif, la forme dut être *ku̯l̥ H2óH3ō > *ϙαλῶ > *ϙάλω (la remontée de l’accent est parfaitement envisageable pour un nom propre) > Τάλως ou Τάλων (l’aménagement sigmatique ou nasal est à envisager du fait de la rareté de la finale ºω en grec. La versatilité était d’ailleurs révélatrice). Il reste que le suffixe primaire *-H2o-, jusqu’ici, à ma connaissance, n’a pas été enre16

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un minotaure, Τάλως partage avec le Minotaure une autre caractéristique, celle de propulser de gros cailloux ou des rochers. Dʼautres échos du taureau nous sont fournis. En plus du nom de gaōkǝrǝna- que reçoit le Haōma blanc dont le troisième Saōšiiaṇt fera usage lors de la cérémonie sacrificielle prévue pour le parachèvement du monde, il y a le nom de *gaōciθra- « le signe du bovin » que reçoit le démon des éclipses19. Ce serpent, du fait de la fixité que le temps retrouvera, tombera sur la Terre du haut des nœuds lunaires. Il finira brûlé dans du métal en fusion20. Au lieu de « taureau » ou de « vache », je dis « bovin » pour ignorer si gaō-, au premier terme du composé avec lequel est nommé le démon des éclipses, est le mot masculin ou le féminin. Le nom du serpent des nœuds lunaires, parfaitement traduisible, reste pourtant énigmatique. Je n’ai rien à proposer. Sʼil y a des détails inconnus ou instables, nous ne devons pourtant pas nous décourager : nous savons que le taureau des mythes zoroastriens traverse les flots marins comme le taureau crétois, que tous deux le font pour aller dʼun continent à lʼautre, que tous deux sont blancs et quʼun minotaure, de part et dʼautre, figure dans une forteresse ou dans ses environs. Au terme dʼimmolations, savons-nous aussi, le vin tiré du Haōma blanc fournira lʼimmortalité aux hommes ressuscités tandis que Διόνυσος fera dʼ Ἀριάδνη une immortelle. La comparaison me paraît instructive même si les rôles sont distribués de façons parfois fort différentes : le taureau crétois nʼest pas minoen ; le taureau iranien est là pour nous prouver son origine proto-indoeuropéenne. Nous comprenons aussi pourquoi le mythe fit de la Crète sa patrie : elle est comme un continent en miniature au beau milieu de la mer.

gistré, mais est à rapprocher probablement de celui des kryādi (cf. védique gr̥bhṇā́ ti < *-néH2- ; gr̥bhāyáti < *-n̥H2-i̯ é- ; gr̥bhītá- < *-iH2- < *-H2-i-). Nous l’avions déjà rencontré ci-dessus dans l’étymon du nom de Δαίδαλος. 19 Dk 3.329.3 (M. J. DRESDEN, 1966, de la ligne 20 de la p. 585 à la première ligne de la p. 584) ud ka az gaōciθr ayāb abr nē pardag-ōmand ō gaēiθiiºān vēš ud ka pardag-ōmand kam paydāgīh ud pad-iz kam paydāgīh pad be spōxtan ī hamāg ī-š handēmān tom « Si Gaōciθra ou les nuages ne la voilent pas, (la lumière du Soleil) se manifeste fortement aux (êtres) du monde concret et, sʼils la voilent, elle se manifeste moins, mais, même alors, elle arrive à dissiper toutes les ténèbres devant elle ». Sur le démon Gaōciθra, PANAINO, 2014. ||| Curieusement, ce nom de Gaōciθra coïncide avec l’épithète traditionnelle du dieu Lune de l’Avesta, Mah Gaōciθra « qui a lʼaspect (du lait) de vache » (V 21.9, Y 1.11, 16.4, Yt 7, 12.33). Le parallèle approximatif présent dans lʼhymne orphique à la Lune, Ταυρoκέρως Μήνη « lune aux cornes de taureau », ne nous apporte pas dʼéclaircissement. 20 ZA 34.17, 34.31. 272

Malgré le manque de documents vieil-iraniens et le peu dʼinformations moyen-perses, il est clair que le taureau iranien occupait une place de première importance dans la mythologie zoroastrienne ancienne. Sa carrière, de près de 6000 ans, est contemporaine de celle de lʼhumanité puisquʼil avait assuré, au début des millénaires du mélange, la répartition des premiers hommes sur les divers continents et que sa graisse devra rassasier définitivement lʼhumanité ressuscitée lors du grand parachèvement.

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IV 5. D’autres taureaux

IV 5.1. *Barəmāiiaōna En Iran, *Barəmāiiaōna1, l’un des deux frères de Θraētaōna, est à rapprocher de la figure du taureau grec : les naseaux de cet autre taureau iranien porteur d’un nom le disant en rut sont des lance-flammes comme ceux du Taureau de Marathon. Disons que le taureau d’un mythe plus ancien avait fini par appartenir au stock de matériaux auquel d’autres mythes vinrent à puiser et que les mythes sont racoleurs.

IV 5.2. Le Taureau de Géryon et quelques autres Si, du côté de la mythologie grecque, nous complétons notre information en nous intéressant à dʼautres taureaux ou bovins, le statut marin de notre Taureau apparaît avec davantage de netteté : la génisse Ἰώ2 put traverser le Bosphore et lʼun des taureaux de Γηρυόνης, sʼéchapper en franchissant à la nage le détroit de Messine3 séparant lʼItalie de la Sicile. Il en va de même de son statut de victime sacrificielle paradigmatique : Ζαγρεύς avait la forme dʼun taureau lorsque les Τιτᾶνες vinrent lʼimmoler ; étranger vivant à Athènes, puis exilé en Crète, Σώπατρος revint à Athènes y instaurer le sacrifice du taureau. Concernant le Taureau de Γηρυόνης, remarquons ceci avec le déroulé de la scène représentée : le peintre a marqué le coup, s’est donné la peine de le mettre en blanc sur une amphore chalcidienne à figures noires, datée de 540 avant notre ère4. Le taureau du supplice de Δίρκη5 reine de Thèbes, celui quʼ Ἄρτεμις envoya tuer le roi Τμῶλος II de Lydie ou celui qui dévastait lʼArcadie et 1

É. PIRART, 2010a, p. 120-4. Sur la relation possible dʼ Ἰώ avec Εὐρώπη, Πασιφάη ou Ἀριάδνη, voir C. ACKER, 2002, p. 36. De toute façon, Εὐρώπη, fille dʼ Ἀγήνωρ, est une descendante dʼ Ἰώ. 3 Stretto di Messina, le Siculum Fretum de lʼAntiquité. 4 Conservée au Cabinet des Médailles de la Bibliothèque Nationale, Paris. Reproduction : Histoire Antique, février-mars 2003, p. 30. 5 Sur ce supplice, voir M. HALM-TISSERANT, 1998, p. 53-5. 2

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dont le roi Ἄργος II la libéra étaient tout aussi furieux que celui de Crète ou de Marathon, mais nous ne pouvons vérifier si cʼen furent bel et bien dʼautres. Le taureau Farnèse, trouvé dans les thermes de Caracalla à Rome, c’est la représentation de celui, furieux, que les jumeaux thébains Ἀμφίων et Ζῆθος maîtrisent à l’instant d’y attacher Δίρκη vive qui, traînée sur le sol, trouvera la mort. Une mosaïque romaine datée du IIIe siècle de notre ère, découverte à Écija, une ancienne capitale de la Bétique, nous permet de savoir que ce taureau du supplice de Δίρκη est blanc, comme celui qui transporta Εὐρώπη depuis une plage de Phénicie jusques en Crète.

IV 5.3. La mort d’Hippolyte Le Taureau est mort. Vive le Taureau ! Θησεύς lui-même, croyant à sa culpabilité, obtint de Ποσειδῶν quʼun énorme taureau sauvage surgît des flots et bousculât le char de son fils Ἱππόλυτος qui, dans lʼembardée, devait trouver la mort6. Ἱππόλυτος, son propre fils, mourut donc face au Taureau que Θησεύς avait pourtant immolé, mais dont il avait ensuite sollicité la résurrection à cette fin funeste. En oubliant de hisser les voiles blanches au lieu des voiles noires au retour de son expédition contre le Mινώταυρος, Θησεύς induisait Αἰγεύς en erreur, lui faisant croire que le monstre nʼavait pu être vaincu, et le poussait alors au suicide. Après celle de son père Αἰγεύς7, le voici responsable de la mort de son fils Ἱππόλυτος.

IV 5.4. Miθra tuant le taureau Il nʼest pas possible de refermer le dossier du taureau iranien sans dire un mot du celtique ni surtout de celui8 que le Mithra romain immole à la vue 6

Selon Apollodore (Bibliothèque ép. 1.17-9), mais Diodore (Bibliothèque 4.62) n’attribue à aucun taureau la cause de l’effroi de son attelage et de la fatale embardée. Sur la mort dʼ Ἱππόλυτος, voir R. GRAVES, [1955] 2011, nº 101fg ; J. A. LÓPEZ FÉREZ, 2002, p. 261 ; V. GÉLY, 2010 ; A. LÓPEZ EIRE et M. H. VELASCO LÓPEZ, 2012, p. 363. 7 Apollodore, Bibl. ép. 1.7, 1.10 ; Diodore, Bibl. 4.61 ; Pausanias, Description de la Grèce 1.22.5 ; Plutarque, Thésée 17.4-5, 22.1-2 ; D. HERNÁNDEZ DE LA FUENTE, 2008, p. 94. Sur le caractère parricide de Θησεύς, typique du monde des héros, voir S. SAÏD, 2008, p. 26. 8 Il est bizarre que tant de spécialistes aient confondu la vache primordiale et ce taureau. La confusion est bien évidemment présente chez M. VERMASEREN, 1960, p. 276

des initiés. Je veux parler de la fresque ou du bas-relief ornant le fond des mithraea. Le spectacle offert aux yeux des initiés est celui dʼune promesse dʼimmortalité. Il est vrai que beaucoup ont essayé de retrouver là notre taureau9, d’autant que, parmi d’autres représentations, la fresque du mithraeum de Marino (Rome) nous montre qu’il est blanc10, mais il y a tellement dʼinconnues dans la représentation de cette immolation que la plus grande prudence reste de mise : que dire du scorpion qui sʼattaque aux testicules de lʼanimal ? Que dire du chien et du serpent qui tous deux bondissent vers le sang qui gicle du col du taureau poignardé ? Pour qui sʼen tient aux textes du zoroastrisme ou se réfère à leurs exposés, tout ceci reste tellement insolite et aberrant que la seule issue est de baisser les bras. D’autant que le dadophore Cautopatès dont le nom pourrait évoquer celui de Gōbedšāh ne rappelle en rien ni ce minotaure ni le chevillard des livres moyen-perses.

IV 5.5. Le taureau celtique La structure dumézilienne des trois fonctions nʼest guère importante dans le mythe du taureau de Crète ou de Marathon. Tout au plus pouvons-nous mentionner les trois feux que transportait le taureau iranien, mais dʼautres mythes à succès de la Grèce classique comme celui de la naissance dʼ Ἐριχθόνιος à Athènes11 ou celui dʼ Οἰδίπους et de la Σφίγξ à Thèbes12 ne sont pas plus impérieusement vertébrés par les trois fonctions duméziliennes tout en ayant un terme de comparaison fort étroit dans lʼIran zoroastrien comme je lʼai montré à lʼoccasion de recherches antérieures. Je constate donc lʼexistence dʼune proximité helléno-iranienne en matière de mythologie. Les légendes attiques dont le statut régional est assez net13 occupent ici une place de premier plan.

15 et 57, comme chez R. TURCAN, 1993, p. 104. Nous la retrouvons alors chez les hellénistes qui nʼont pu vérifier le genre grammatical de gaō- dans les textes avestiques, par exemple chez C. ACKER, 2002, p. 81. Et M. L. WEST, 2007, p. 358, donne encore Gaō Aēuuō.dātā pour un « ox ». 9 Voir R. TURCAN, 1993, 111. 10 Reproduction : GEO Histoire. Hors-série, 2010, p. 20-1. 11 É. PIRART, 2010a, p. 89-95. 12 É. PIRART, 2015. 13 Voir F. JOUAN, 2002. 277

Les taureaux de la mythologie gauloise ou celtibère tels que le Tarvos Trigaranus « taureau aux trois grues » ou les Toros de Guisando14 ne me rappellent en rien le taureau helléno-iranien, mais il est vrai que nous nʼen savons pas assez à leur sujet pour nier complètement la possibilité dʼune origine commune. Cependant, il a bien existé une mythologie taurine chez les Celtes15. Il s’agit même d’un taureau blanc selon plusieurs récits irlandais. Le nom de Tarvos Trigaranus16 nous est connu par le fameux Pilier des Nautes de Paris17, daté du premier siècle de notre ère. Les trois grues qui accompagnent ce taureau nʼont, en principe, aucun lien avec la « danse de la grue », la danse crétoise dont Θησεύς avait ramené la pratique à Délos, mais allez savoir ! Et nous ne pouvons vérifier non plus si le Tarvos Trigaranus est à reconnaître dans le taureau à trois cornes dit « Taureau dʼAvrigney », daté lui aussi du premier siècle de notre ère18. Ce qui nʼest pas dans le Mahābhārata nʼexiste pas. Cet adage vaut sans doute aussi pour la R̥gvedasaṁhitā : nous pouvons effectivement y trouver un taureau tricorne, mais nous déchanterons vite en apprenant que ce tridhā́ tuśr̥ṅga- vr̥ṣabhá-19 nʼest autre que le dieu feu qui, comme on sait, est tricéphale (trimūrdhán-)20. Agni nʼest pas tricorne, mais, tricéphale, est trois fois cornu. Nous lui reconnaîtrons donc six cornes en tout. Certes le taureau iranien est le véhicule des trois feux, le taureau des Nautes est accompagnés de trois grues et le taureau du musée de Besançon porte trois cornes, mais aucune interprétation unitaire nʼexiste. Le faisceau des correspondances existant entre le Taureau de la mythologie grecque et celui de la mythologie zoroastrienne ne peut être retrouvé nulle part ailleurs, mais la faible documentation celtique peut justifier notre déception.

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Voir A. J. LORRIO et J. C. OLIVARES PEDREÑO, 2004. Au vu de la fiche 28a insérée dans Religions et Histoire 40, septembre-octobre 2011. ||| Comme il est question de traverser les flots, il conviendrait sans doute aussi de mentionner les bœufs primordiaux qui accompagnaient Hu Gadarn, le premier colonisateur de l’île de Bretagne, si lʼauthenticité de cette légende nʼavait été sérieusement mise en doute. 16 Voir G. CHARRIERE, 1966. 17 Sur le Pilier des Nautes, F. SARAGOZA, 2003. 18 Découvert en Haute-Saône et conservé au Musée des beaux-arts et dʼarchéologie de Besançon (nº 873.2.1). 19 RS 5.43.13d. ||| Triśr̥ṅga- « Tricorne », dans le MBh, désigne non un taureau, mais une montagne. 20 RS 1.146.1a. 15

278

IV 5.6. Taureau de Crète, Taureau d’Athènes Le Taureau de Crète, pour appartenir à un ensemble de mythes tournant autour de la figure de Θησεύς, est sans doute plus athénien que crétois : Θησεύς tue et le Taureau et le rejeton du Taureau. Déjà Αἰγεύς, son père adoptif, avait traité avec la famille de Μίνως : il avait envoyé le fils de Μίνως lutter contre le Taureau. Le mythe du Taureau est athénien. Et, quoi que lʼauteur de lʼIliade dise dʼelle21, Eὐρώπη, bien évidemment, n’est pas plus phénicienne que les Phéniciennes d’Euripide22. Ajoutons que Δαίδαλος et son neveu Τάλως passent pour être nés à Athènes23 et que lʼinstauration des Bouphonies à Athènes serait due à un certain métèque du nom de Σώπατρος qui avait été exilé en Crète et en était revenu. Le mythe du taureau iranien nous a révélé la raison du choix de la Crète comme patrie de Mίνως et lieu d’origine de la pratique du sacrifice du taureau : il fallait les vagues de toutes parts comme autour du continent central d’où, selon le mythe iranien, les premiers hommes sur le dos du taureau *Θrisaōka s’en furent coloniser de nouvelles frontières. Les convictions que les monnaies de diverses capitales de l’île, Gortyne, Phaistos et Cnossos, proclament vers la fin du quatrième siècle avec cet accouplement ornithologique d’ Eὐρώπη, avec ce Τάλως menaçant et avec ce soi-disant Labyrinthe, à mon avis, ont toutes chances d’avoir été adoptées sous l’influence d’Athènes et d’être donc des produits d’importation. L’existence du Labyrinthe en Crète n’est pas du tout vérifiée, même si d’aucuns voulurent le retrouver dans les cavités souterraines d’une antique carrière des environs de Gortyne24, mais il est vrai que nous ne savons pratiquement rien de la mythologie dorienne insulaire des époques archaïque et classique. Cependant, le fond historique du mythe du Taureau25 nʼest peut-être pas complètement à rejeter. Les Grecs étaient bien conscients que leur civilisation devait beaucoup à la Phénicie ou à lʼÉgypte et que la Crète avait dû servir de relais, mais lʼidée quʼAthènes dépendît politiquement ou même culturellement de lʼîle peut relever de lʼimagination. De toute façon, je pense avoir montré que le mythe du Taureau était antérieur aux éventuels événe21

Homère, Iliade 14.321. Kάδμος est donné pour le frère dʼ Εὐρώπη (R. GRAVES, [1955] 2011, nº 58a ; A. LÓPEZ EIRE et M. H. VELASCO LÓPEZ, 2012, p. 456). 23 Apollodore, Bibl. 3.15.8 ; Diodore, Bibl. 4.76 ; Pausanias, Description de la Grèce 7.4.5. 24 Voir S. MÜNSTER, 1544. 25 Voir C. GARCÍA GUAL, 2013, p. 176. 22

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ments historiques concernés. En plus dʼemprunts évidents et logiques à la géographie locale, sa présentation, néanmoins, peut les avoir mis à profit. Si le mythe du Taureau de Crète ou celui du Mινώταυρος plongent leurs racines aussi loin dans la préhistoire, nous ne serons aucunement surpris d’en trouver écho dans la documentation mycénienne de Cnossos : une *Δαβυρίνθοιο Πότνια y est nommée. Le Taureau de Crète avait beau être une figure fameuse de la mythologie athénienne, la ville d’Athènes, pour sûr, n’est pas aussi ancienne que lui. Quel que fût celui de la Crète, l’importance du rôle qu’Athènes dut jouer dans la transmission et la propagation du mythe du Taureau ne peut être négligée si, comme Kerényi26 le fait remarquer, le nom de Διόνυσος, dans le passage de l’Odyssée qui nous parle d’ Ἀριάδνη, apparaît sous sa forme attique.

IV 5.7. Le taureau indien Lʼimportance que lʼhindouisme accorde à la vache est bien connue et remonte à lʼépoque védique. Comme le Véda est parent de lʼAvesta, cette importance de la vache devrait pouvoir être retrouvée dans le monde zoroastrien, mais il est vrai que son importance, héritée du néolithique, constitue une donnée peu distinctive. En Grèce comme en Égypte ou ailleurs, la grande déesse montre souvent le visage dʼune vache. Il fallait sʼy attendre. Le taureau blanc des Celtes, dans la recherche comparative, ne peut guère rivaliser avec le taureau grec ou avec celui de la tradition zoroastrienne. Le taureau de Crète ou de Marathon, dʼ Eὐρώπη ou de Πασιφάη est un héros un peu particulier, mais qui côtoya certains des plus grands héros de la mythologie grecque, comme Ἡρακλῆς ou Θησεύς. Et dʼautres moururent face à ce taureau sans cesse recommencé, comme Δίρκη, Ἀνδρόγεως ou Ἱππόλυτος. En plus de leurs épopées marines, le taureau zoroastrien et son reflet grec m’ont conduit à lʼétablissement de nombreuses correspondances et de diverses étymologies. Avec les fruits de cette recherche, il a pu être aisément prouvé quʼune origine proto-indo-européenne ne fait aucun doute malgré les insuffisances constatées de la documentation dans dʼautres provinces. Lʼorigine minoenne27 ou phénicienne du taureau de nombreux mythes grecs ainsi est-elle démentie.

26 27

K. KERÉNYI, [1994] 1998, p. 82 n. 50. Telle que lʼévoquent notamment F. JOUAN et H. VAN LOOY, 2000, p. 306. 280

Nandin, le taureau de la mythologie indienne post-védique, la monture du dieu Śiva, a beau être blanc comme celui qui transporta Eὐρώπη depuis une plage de Phénicie jusques en Crète, nous ne pouvons rien tirer non plus des mythes le mettant en scène qui puisse étoffer le dossier comparatif du taureau des mythes zoroastriens.

IV 5.8. Le taureau hittite L’étymologie du nom du taureau grec mérite de retenir notre attention. Surtout que ce nom paraît bien avoir été un appellatif que secondairement même si pareil statut fut sans doute déjà préhistorique. Il n’est peut-être pas anodin que le grand dieu hittite, en plus d’être coiffé de cornes, figure debout sur un taureau28 et porte un nom, tarhunt-, dʼune forme rappelant celle du grec ταῦρος, car ce ne serait pas le premier animal dont le nom fût à l’origine un nom propre29, voire un théonyme30. Remarquons aussi le parallélisme que le grand dieu hittite, vainqueur du serpent illui̯ anka-, montre avec Índra, le grand dieu des hymnes du Véda, souvent présenté non seulement comme le vainqueur du serpent, mais aussi comme un taureau31. Cependant, le grand dieu ne coïncide pas toujours avec le taureau : Zεύς certes adopte lʼaspect du taureau pour transporter Eὐρώπη depuis une plage de Phénicie jusques en Crète, mais abandonne ensuite pareille métamorphose pour revêtir son apparence animale plus habituelle dʼaigle à lʼinstant de sʼaccoupler avec la princesse de Tyr ou de Sidon. Et le grand dieu védique parfois aussi se démarque du taureau comme dans la dernière strophe de la Gavāṁ Stuti32. Que le nom du taureau fasse penser au hittite tarhunt-, cela pourrait bien tenir du hasard si, dans les mythes, lʼéquation du grand dieu et du taureau se trouve çà et là démentie ou mise à mal et que, fondées sur les lois de la phonétique historique, de sérieuses réticences33 se font jour à l’instant de reconnaître dans *tauros une variante morphologique de ce théonyme ana28

Comme lʼillustre la stèle dressée dans la cour du musée dʼAlep si elle existe encore. 29 Cf. français Renard. 30 Cf. proto-indo-iranien *śaru̯á-, latin cervus (É. PIRART, 2007a, p. 119 n. 310). 31 Aussi bien vŕ̥ṣan- (par exemple dans RS 8.13.31c) que vr̥ṣabhá- (par exemple dans RS 1.33.10c) ou váṁsaga- (par exemple dans RS 1.7.8a), mais non jamais ukṣán-. 32 RS 6.28.8 (voir Chapitre I). 33 P. CHANTRAINE, 1968, p. 747 ; M. DE VAAN, 2008, p. 607. 281

tolien. À moins dʼun jeu de mots préhistorique. Le taureau hittite ainsi est-il aussi décevant que dʼautres pour qui cherche à étoffer un dossier où seuls le taureau grec et le taureau zoroastrien ont pleinement trouvé place. À moins dʼun jeu de mots préhistorique, disais-je. En effet, cʼest une possibilité tout à fait intéressante même si Pierre Chantraine34, pour lʼétymologie de ταῦρος, dit quʼil nʼy a pas lieu dʼévoquer les formes sémitiques, accadien šūru, araméen tōr35, hébreux šōr, et de supposer soit un emprunt à lʼindo-européen par le sémitique, soit un emprunt au sémitique par lʼindoeuropéen, ou encore deux emprunts parallèles à une source commune. Je crois que nous tenons là au moins un bon début de solution au problème de lʼétymologie de *tauros : la proximité du thème verbal documenté par le védique tárutar-36 ou le hittite tarhunt- et signifiant « traverser en vainqueur » dut jouer un rôle dans le mécanisme de lʼemprunt que le proto-indoeuropéen fit à une langue du Moyen-Orient37. Si le taureau des mythologies grecque et zoroastrienne est un animal extraordinaire permettant la traversée des mers, il est tout à fait intéressant que la forme de son nom fricote avec celle du verbe proto-indo-hittite signifiant « traverser victorieusement ». Remarquons-le : un taureau furieux qui dévaste les campagnes, c’est un animal fantastique, insolite, qui n’appartient pas à la réalité, mais que nous pouvons rencontrer aussi bien dans la mythologie grecque que dans celle des Sumériens. Les taureaux de nos campagnes, il est vrai, restent des animaux domestiques en ce sens que la présence d’un être humain ne les étonne plus, mais, il y a quatre mille ans, il pouvait encore en exister de sauvages qui devaient sans doute parfois surgir de nulle part et venir dévaster les jardins d’Uruk. Par contre, un taureau capable de traverser les flots marins, voilà qui nʼest en rien banal : seuls le Ταῦρος des Grecs ou le *Triśắuka proto-indoiranien répondent à cette présentation.

34

P. CHANTRAINE, 1968, p. 1097 ; cf. R. BEEKES, 2010, p. 1456. Cʼest le mot que reflète lʼuzvārišn TVRA. 36 Voir M. MAYRHOFER, 1992-2001, vol. I p. 630-1. 37 De toute façon, il faut laisser en dehors de la discussion le nom germanique du taureau, gotique stiur, en raison de son vocalisme *ºeuº et celui avestique du gros bétail, staōra-, quʼil faut sans doute rapprocher de la famille du védique sthūrá« gros, épais ». 35

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IV 6. Plongées sous-marines L’examen1 d’un détail éludé jusqu’ici fera découvrir un nouvel usage de la mythologie comparée. En effet, il me permet de parler d’un mythème zoroastrien qu’aucun texte en quelque langue que ce soit ne documente. Ce sont la seule nécessité logique et l’existence d’un mythème athénien qui m’y conduisent2. En lʼan 12057 du monde ou peu avant cette date, le troisième fils futur de Zaraθuštra, celui que les textes nomment tour à tour Astuuat̰ .ǝrǝta « agencement osseux » (= pehlevi tn| krt’l « fabricant de personnes »), Vǝrǝθrājan « briseur dʼobstacles » (= pehlevi pylvckl « victorieux ») ou simplement le Saōšiiaṇt « futur invigorateur » (= pehlevi svt’vmnd « accompagné de la prospérité »), officiera donc dans une cérémonie sacrificielle extraordinaire. Le caractère exceptionnel de ce giga-yasna est à la hauteur de son objectif. Nous le savons, une cérémonie sacrificielle ne peut être célébrée sans but, sans objectif, sans quʼune prière ne soit adressée aux dieux par laquelle ces derniers se verront honorés3. En effet, qui dit prière ou demande dit éloge. Lui demander un bien revient à dire que la divinité est capable de le fournir. Tout en adressant ses prières aux Yazata et en faisant ainsi étalage de vœux quʼils sont capables dʼexaucer, le sacrifiant fait donc aussi leur éloge. En lʼan 12057 ou peu avant cette date, disais-je, lʼobjectif sera de taille gigantesque : le temps linéaire arrivera à son terme, le monde devra être sauvé, la résurrection des morts et lʼimmortalité générale figureront parmi les objectifs de la cérémonie que ce fils futur de Zaraθuštra se proposera de mener à bien. Il sʼagira dʼune cérémonie dʼune dimension planétaire à laquelle participeront les dirigeants temporels et sacerdotaux de tous les sept secteurs ou continents de la Terre. Le sacrifiant, pour le secteur central appelé Xvainiraθa, sera le Kǝuui Haōsrauuah qui avait dʼores et déjà acquis lʼimmortalité. Il reviendra donc comme un certain nombre dʼautres héros des septième et neuvième millénaires. Les dirigeants sacerdotaux ou zaraθuštrōtǝma « suc1

La matière de cette sixième partie du Chapìtre IV est tirée dʼune communication faite à Ravenne le 5 février 2018 au cours dʼun colloque organisé par Antonio Panaino et Andrea Piras. 2 Car notre connaissance de la mythologie zoroastrienne est assez fragmentaire du fait de la perte sans doute considérable de données. Cette perte est principalement due, pouvons-nous penser, à des vicissitudes historiques au nombre desquelles il faut ranger notamment la magophonie achéménide, les destructions macédoniennes, les invasions médiévales et les intolérances dʼextrémistes de tous bords. 3 É. PIRART, 2014b. 283

cesseurs de Zaraθuštra » des différents continents formeront le collège des officiants de cette cérémonie. Zaraθuštrōtǝma du Xvainiraθa, le Saōšiiaṇt Astuuat̰ .ǝrǝta, par exemple, tiendra le rôle du zaōtar4. Ceci ne suffit pas à faire de cette cérémonie un giga-yasna qui soit à la hauteur des objectifs envisagés. En effet, ce sont la composition des libations et la nature du feu sacrificiel qui le permettront. Les ingrédients des libations apporteront l’immortalité et la jeunesse éternelle aux humains ressuscités. Les deux ingrédients principaux, les seuls à être mentionnés dans les livres moyen-perses, seront la graisse du taureau *Haδāiiu et une variété océanique de Haōma, le Haōma blanc appelé aussi Gaōkǝrǝna. Ces deux ingrédients5, dans la célébration, remplaceront le lait et le Haōma des sacrifices ordinaires. Astuuat̰ .ərəta, pour offrir l’immortalité à l’humanité ressuscitée, ne recourra donc pas seulement à la graisse du taureau *Haδāiiu : il se servira aussi du Haōma blanc ; or ce dernier est un végétal qui pousse au plus profond de l’Océan. Comment le Saōšiiaṇt pourra-t-il donc en disposer sans que quelqu’un ne le lui ait apporté ou que lui-même ne s’en soit emparé ? Et cela, non seulement après avoir eu la force de plonger dans dʼextrêmes profondeurs, mais aussi après avoir trompé la vigilance ou brisé la combativité du poisson Kara. Une séquence mythique manque clairement. Il y a là une nécessité logique. Il faut nécessairement que le Saōšiiaṇt ou quelqu’autre héros prenne la peine de plonger au fond de l’Océan et en ramène miraculeusement le précieux corail. Cette séquence ne figure nulle part, mais la mythologie comparée corrobore ou confirme son existence. Mίνως, venu à Athènes prendre personnellement6 livraison des jeunes gens devant faire l’ordinaire du Mινώταυρος, remarque parmi eux la très séduisante princesse Περίβοια7 et cherche alors à la violer, mais, aux cris de la jeune fille, Θησεύς s’interpose8, se vante d’être le fils de Ποσειδῶν9 et intime à Mίνως de respecter la princesse de Mégare. Pour mettre ce blanc bec à l’épreuve, Mίνως lance une bague à la mer et lui ordonne de la lui ramener. Ordalie par l’eau. Cela montrera s’il est vraiment le fils de Πο4

VZ 35.14-7. Voir Chapitre IV 3. 6 Plutarque, Thésée 15.1, 17.3. 7 Pausanias, Description de la Grèce 1.17.3. ||| Elle épousera Τελαμών et sera la mère dʼ Αἴας. Variantes : Ἐρίβοια, Μελίβοια. 8 Sur cette légende, L. SÉCHAN, 1955, p. 26-9. 9 Sur la naissance de Θησεύς, J. BOULOGNE, 1998. ||| Plutarque (Thésée 6.1) qui ne relate pas lʼépisode de la plongée fait de cette paternité de Ποσειδῶν un bruit que Πιτθεύς, le grand-père maternel de Θησεύς, aurait répandu. Et Περίβοια est purement et simplement reprise parmi ses multiples épouses successives (Thésée 29.1). 5

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σειδῶν. Θησεύς plonge sans hésiter et, reçu dans le palais sous-marin de son père, se voit remettre la bague tandis qu’ Ἀμφιτρίτη lui offre cette couronne de pierres précieuses dont la pure brillance lui sera bien utile dans l’obscurité des méandres du Labyrinthe. Revenu à la surface, Θησεύς, grâce à ce succès, peut libérer la princesse Περίβοια10. La plongée de Θησεύς qui ramène la bague de Mίνως et sauve ainsi la princesse Περίβοια d’un supplice extrême, c’est le mythème qui, dans le cadre de la comparaison, correspond à la plongée quʼun personnage, dans le mythe zoroastrien, devra effectuer à la recherche de ce Haōma blanc salvateur de l’humanité. Et, pour cette plongée, faut-il savoir, des modèles existent dans le Zam-yazat Yašt11. Nous y lisons que le funeste Touranien du nom de Fraŋhrasiiān qui cherchait à sʼemparer de Xvarǝnah, la déification de la faculté de sʼalimenter ou dʼalimenter autrui sans restriction, remonta chaque fois bredouille de trois plongées successives dans lʼOcéan Large-cuve (Zraiiah Vōuru.kaš ̣a). Par la substance de ses divers chapitres, le Zam-yazat Yašt sʼavère être un document assez parallèle à celui qui nous manque et devait faire le récit des opérations qui conduiront lʼhumanité à la satiété définitive, à lʼincalcinabilité et à lʼabri de toute déshydratation. Les ingrédients du giga-yasna ne sont pas mentionnés dans le Zam-yazat Yašt12. Ce texte se limite à parler de la Frašō.kərəiti que le Saōšiiaṇt devra mener à bien ainsi que du résultat des opérations sans doute parce qu’il y est question d’honorer Xvarənah, le dieu de la possibilité de trouver de quoi se nourrir sans aucune difficulté. En effet, la graisse du taureau effacera chez les humains la nécessité de se nourrir tandis que la notion de xvarənah fait allusion à cette nécessité. Le Zam-yazat Yašt, très logiquement, ne pouvait donc pas parler de la graisse en question. Les trois premiers chapitres concernent les dieux organisés de façon télescopique, Ahura Mazdā, les (autres) Amǝš ̣a Spǝṇta et les (autres) Yazata, mais les héros auxquels sont consacrés les chapitres suivants ont presque tous un rapport avec le mythe du taureau : Haōšiiaŋha et Urupi dont il est question respectivement dans les chapitres IV et V du Zam-yazat Yašt sont 10

Sur une coupe attique à figures rouges, œuvre du peintre Onésimos datée des débuts du cinquième siècle avant notre ère et trouvée à Cerveteri (Louvre G104), nous voyons Ἀμφιτρίτη qui reçoit Θησεύς dans le palais sous-marin de Ποσειδῶν. Le héros comme souvent est accompagné dʼ Ἀθηνᾶ. Reproduction notamment chez M. BETTINI et S. ROMANI, 2015, fig. 4. 11 Les trois plongées du Touranien Fraŋhrasiiān dans le Zraiiah Vōuru.kaš ̣a (Yt 19.56, 19.59, 19.62). 12 Yt 19.89. 285

les dirigeants humains de lʼépoque au cours de laquelle le taureau *Θrisaōka permit à lʼhumanité la colonisation de tous les continents ; Fraŋhrasiiān, nommé dans le chapitre VIII, est le Touranien fratricide dont les dieux mirent à profit le crime en suscitant par compensation la naissance du gardien immortel du taureau ; Haōsrauuah, évoqué au chapitre XI, reviendra à la fin du temps linéaire tenir le rôle du sacrifiant lors de la célébration du Yasna planétaire au sein duquel le taureau sera immolé ; Astuuat̰ .ǝrǝta, présent dans les chapitres IX, XIV et XV, y tiendra, quant à lui, le rôle du zaōtar, lʼofficiant en chef. Les autres héros mentionnés le sont pour compléter la série dʼune façon minimale : les chapitres concernant les sept premiers Kǝuui (X), Zaraθuštra (XII) et le neuvième Kǝuui (XIII) entourent celui consacré à Haōsrauuah, le huitième Kǝuui (XI) ; le long chapitre qui nous parle de Yima (VI) donne un aperçu de la Frašō.kǝrǝiti puisque ce héros sʼy essaya pour ainsi dire et que ses erreurs durent être colmatées tant bien que mal par Miθra, Θraētaōna et Kǝrǝsāspa. Le chapitre VII qui fait état de lʼaffrontement des deux Mańiiu par lʼentremise dʼenvoyés peut-être est-il moins facile à justifier. Les envoyés dʼAhura Mazdā sont Vohu Manah, Aš ̣a Vahišta et Ātar tandis quʼAka Manah, Aēšma et Aži Dahāka, ce dernier étant accompagné de Spitiiuru, forment le groupe de ceux dʼAŋhra Mańiiu. Seul lʼaffrontement des troisièmes envoyés est reflété par la suite du texte ; or, faut-il bien voir, le serpent tricéphale y menace le feu de le faire tomber dans lʼeau, ce qui fait précisément écho à un accident dont le sens ou la portée nous échappe, survenu au cours dʼune traversée des flots du Zraiiah Vōuru.kaš ̣a que certains des premiers hommes durent entreprendre sur le dos du taureau *Θrisaōka. Cet accident, ce fut la chute momentanée des trois feux *Xvarənō.bāγa, *Varšnaspa et *Bərəjaiiat̰ .miθra dans les flots de l’Océan Large-cuve, à cause d’une tempête et de vents adverses qui désarçonnèrent partie des bagages13. Certes l’épisode n’est guère facile à comprendre même s’il est clair que les trois feux que le taureau transportait sur le dos, celui des prêtres, celui des guerriers et celui des éleveurs, devaient assurer la bonne organisation trifonctionnelle des communautés humaines installées sur de nouveaux territoires, mais je ne vois pas bien la raison d’avoir imaginé cet accident. À moins de relever la mention dʼune relation que les trois feux entretenaient avec le Xvarənah et de penser que, dès lors, leur chute dans l’eau de l’Océan pourrait avoir libéré une semence capable de féconder les abysses et d’y faire croître le Gaōkərəna. Pure hypothèse14. Malgré lʼinconnue des rai13

ZA 18.9. Cependant, nous ne pouvons non plus exclure que, défini comme un arbre, le Gaōkǝrǝna, à pousser non loin de la Vanā (voir Yt 12.17.1 ; É. PIRART, 2009, p. 14

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sons de cet épisode, lʼévocation de lʼaccident survenu, la chute des trois feux dans les flots de lʼOcéan, me paraît suffisante à lʼinstant de justifier la présence de ce chapitre dans un Zam-yazat Yašt vu comme étant un texte dont les développements suivent ceux du texte avestique qui nous manque. Il est à remarquer que les événements du passé préfigurent en quelque sorte ceux du futur. Ceux qui marqueront le terme du temps linéaire feront écho à ceux de l’époque où, savons-nous par les Yašt, Haōma avait enchaîné Fraŋhrasiiān, le héros de signe négatif, de sorte que Haōsrauuah pût finalement le tuer15. En effet, Haōsrauuah, devenu immortel, reviendra comme commanditaire du sacrifice planétaire qui mènera le monde à la Frašō.kərəiti ; et la plongée de Fraŋhrasiiān fut la version négative de celle qu’un personnage non déterminé devra effectuer préalablement à la célébration de ce sacrifice planétaire au cours duquel le Haōma blanc sera consommé. La séquence mythique d’un Θησεύς qui plonge16 et ramène du fond de la mer l’anneau salvateur, d’autant que l’Iran zoroastrien nomme ici un poisson ou que Θησεύς lui-même, pour être le fils de Ποσειδῶν, tient du poisson, fait inévitablement penser à la légende d’Orval, même si celle-ci paraît avoir été imaginée bien tardivement dans le but de justifier la fausse étymologie du toponyme17. Lʼorigine marine de Θησεύς et la légende dʼOrval ouvrent deux pistes pour la restitution de la séquence zoroastrienne manquante : selon la première, le Saōšiiaṇt ou lʼun de ses collaborateurs, malgré leurs origines exclusivement terrestres, plongeront au fond de lʼOcéan pour en ramener le précieux Gaōkǝrǝna ; selon la seconde, la figure mythique qui le fournira aux officiants nʼest autre que le poisson Kara lui-même. Cette seconde alternative pourrait apparaître la plus vraisemblable puisque, par leurs origines, le Saōšiiaṇt et ses collaborateurs, que nous sachions, resteront, en principe, bien incapables de gagner les profondeurs de lʼOcéan. Cependant, dans la légende de Θησεύς, la plongée fait figure dʼordalie, tandis que, dans le mythe zoroastrien, deux interprétations sont à envisager : si le poisson Kara remonte spontanément le corail entre les dents comme celui dʼOrval ramena lʼanneau à Mathilde de Toscane, nous ne pouvons parler ni dʼordalie ni dʼablution ni même de plongée ; par contre, si le Gaōkǝrǝna ne pouvait être mis à disposition des officiants que suite à la plongée que seul 241), en soit né. La Vanā est lʼarbre immortel qui se situe au centre de lʼOcéan ou en plein courant de la rivière Anāhitā (ZA 16.5). Cet arbre est porteur des semences de tous les végétaux (ZA 6D.6),. 15 Y 11.7, Yt 9.17-8, 9.21-3, ZA 33.11. 16 Pour dʼautres plongeurs mythiques, F. DELPECH, 2006, p. 456-61. 17 Voir P. GOLINELLI, 2015, p. 24. 287

un héros dʼexception aurait pu effectuer, cela nous donnerait une version mythique offrant un meilleur pendant positif aux plongées de Fraŋhrasiiān, et nous pourrions parler alors dʼablutions comparables à celles qui sont préalables à tous sacrifices, mais nous nous retrouvons confrontés à une nouvelle question : qui sera donc ce héros ? Pour le dire dʼune façon directement avestique, qui constituera la version positive de Fraŋhrasiiān ? Ceci, bien évidemment, n’épuise pas le sujet, loin de là, puisque, dans la mythologie avestique ou zoroastrienne, tout est en double et que, théoriquement, un contre-giga-yasna doit avoir été imaginé. En effet, nous connaissons la version négative du Saōšiiaṇt Astuuat̰ .ərəta : nommé Gaδarōs en pāzand, c’est un lointain descendant du Zaraθuštra négatif, lequel n’est autre que l’assassin de Zaraθuštra. De temps à autre, la simple bribe d’un nom propre nous laisse entrevoir que nous avons perdu tout un botin. Un exemple : lors du giga-yasna, quatre personnages sont à envisager pour chacun des sept secteurs de la terre, à savoir : un empereur faisant office de sacrifiant ou commanditaire, la version négative de cet empereur, un zaraθuštrōtəma comme officiant (le zaōtar dans le cas de celui du X vainiraθa) et la version négative de ce zaraθuštrōtəma. Peu d’entre eux nous sont connus. Deux remarques. Tout d’abord, il est pour le moins étonnant ou curieux que les deux ingrédients du yasna planétaire de la Frašō.kərəiti aient été préparés dans la foulée d’interventions démoniaques : d’une part, les vents adverses, en les faisant tomber du dos du taureau, auraient permis que les trois feux sacrés ensemençassent les abysses ; d’autre part, la garde du taureau d’éternité est assurée grâce à la réponse divine donnée à l’assassinat d’Aγraēraθa quʼun être démoniaque avait perpétré. Comme si le bien plongeait quelques unes de ses racines dans le mal. La plongée de Θησεύς fait de lui un reflet de Διόνυσος, un explorateur de l’autre monde, les abysses marins pouvant être vus comme les antichambres de l’au-delà18, car Διόνυσος, pour échapper à ses poursuivants, mourut en plongeant dans le lac de Lerne19. Et ce n’est sans doute pas un hasard si le verbe víGĀH « plonger »20, dans la R̥gvedasaṁhitā, concerne toujours Sóma21. En voici un exemple : 18

M. DARAKI, [1985] 1994, p. 41. Les Argiens disaient que Διόνυσος avait disparu dans les profondeurs du lac de Lerne (W. OTTO, [1933] 2017, p. 91). 20 Sur GĀH viloḍane, T. GOTō, 1987, p. 128-9. 21 H. GRASSMANN, 1872-5, col. 396 : RS 9.3.6b, 9.7.2b, 9.67.14b, 9.86.8a, 9.86.40b, 9.99.7d. 19

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RS 9.3.6 eṣá víprair abhíṣṭuto V ʼpó devó ví gāhate | dádhad rátnāni dāśúṣe « Voilà le Devá que les enthousiastes célèbrent lors de sa plongée dans les eaux, lui qui place des joyaux pour lʼorant ».

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IV 7. Zeus ou Poséidon ? Dionysos ! Le doute s’est installé quant à savoir si le taureau qui surgit des flots pour ravir Eὐρώπη, enflammer Πασιφάη, ravager la Crète ou le Péloponnèse, donner la mort à Ἀνδρόγεως ou à Ἱππόλυτος devait être une forme de Zεύς ou de Ποσειδῶν. Cependant, la plongée et le séjour aquatique qui, en raison de ses origines, nʼont posé aucune difficulté à Θησεύς sont tout aussi typiques de Διόνυσος1. Le témoignage le plus ancien concernant cette caractéristique dionysiaque nous est offert par Homère. Il sʼagit dʼun passage de lʼIliade2 duquel Walter Otto3 nʼa pas manqué de tirer parti : οὐδὲ γὰρ οὐδὲ Δρύαντος υἱός, κρατερὸς Λυκόοργος4, δὴν ἦν, ὅς ῥα θεοῖσιν ἐπουρανίοισιν ἔριζεν· ὅς ποτε μαινομένοιο Διωνύσοιο τιθήνας σεῦε κατʼ ἠγάθεον Νυσήιον· αἱ δʼ ἅμα πᾶσαι θύσθλα χαμαὶ κατέχευαν, ὑπʼ ἀνδροφόνοιο Λυκούργου θεινόμεναι βουπλῆγι· Διώνυσος δὲ φοβηθεὶς δύσεθʼ ἁλὸς κατὰ κῦμα, Θέτις δʼ ὑπεδέξατο κόλπῳ δειδιότα· κρατερὸς γὰρ ἔχε τρόμος ἀνδρὸς ὁμοκλῇ· τῷ μὲν ἔπειτʼ ὀδύσαντο θεοὶ ῥεῖα ζώοντες, καί μιν τυφλὸν ἔθηκε Κρόνου πάις· οὐδʼ ἄρʼ ἔτι δὴν ἦν, ἐπεὶ ἀθανάτοισιν ἀπήχθετο πᾶσι θεοῖσιν· « Lycurgue même, le puissant fils de Dryas, nʼa pas vécu longtemps, du jour quʼil eut cherché querelle aux divinités célestes. Nʼavait-il pas un jour poursuivi les nourrices de Dionysos le Délirant sur le Nyséion sacré ? Toutes alors de jeter leurs thyrses à terre, sous lʼaiguillon, qui les poignait, de Lycurgue meurtrier, tandis quʼéperdu, Dionysos plongeait dans le flot marin, où Thétis le reçut, épouvanté, dans ses bras ; tant la peur lʼavait pris au ton grondeur de lʼhomme ! Mais, contre celui-ci, les dieux, qui vivent dans la joie, alors sʼindignèrent ; le fils de Cronos en fit un

1

W. OTTO, [1933] 2017, p. 179-91. Homère, Iliade 6.130-41. 3 W. OTTO, [1933] 2017, p. 181. 4 Sur Λυκοῦργος ennemi de Διόνυσος, F. JOUAN, 1992 ; F. VIRET, 2008, p. 71-6. Le nom de Λυκοῦργος « qui œuvre en faveur du Loup » le définit comme un impie. Comme dans le Véda ou dans lʼAvesta (É. PIRART, 2016c, 72), le nom de « loup » est ici donné aux démons que lʼon accuse les impies dʼhonorer. ||| Sur Περσεύς qui, à Lerne, massacre Διόνυσος et les femmes de la mer, dans un mythe pouvant être vu comme le doublet du combat de Λυκοῦργος contre Διόνυσος, P. SAUZEAU, 2005, p. 208-10. 2

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aveugle ; et, même ainsi, il ne vécut pas longtemps : il était devenu un objet dʼhorreur pour tous les Immortels »5.

Ceci trouve çà et là quelques confirmations. Les gens dʼArgos, par exemple, appelaient Διόνυσος à son de trompes, cherchant à le faire sortir du lac de Lerne et noyant dans ses eaux un agneau en offrande au Gardien des Portes, savons-nous par Plutarque6. Walter Otto7 relie bien à propos cette information à celle que nous offre une scholie de lʼIliade8 selon laquelle Περσεύς avait jeté Διόνυσος dans ce lac après lʼavoir vaincu, lui et son armée de femmes marines. Le nom de Βουγενής « né dʼune vache »9 sous lequel les Argiens appelaient Διόνυσος à sortir du lac doit retenir notre attention. Dʼautant que Walter Otto10 fait le lien avec la vache pleine dont il est question dans le De natura animalium11 dʼÉlien. Les gens de Ténédos, au terme de la mise bas, immolait cette vache qui passait sans doute pour la mère de Διόνυσος, le Διόνυσος Zαγρεύς tauromorphe que les Tιτᾶνες purent dépecer. Διόνυσος immolé, mis à mort, est comparable à Sóma, lui aussi immolé. Le pressurage védique est, en effet, donné pour une mise à mort libératrice de son âmejus12. Plutarque13 relève dʼailleurs la fréquence avec laquelle les artistes grecs représentaient Διόνυσος sous la forme dʼun taureau14. Il nʼy a donc pas à hésiter : nous ne devons reconnaître ni Zεύς ni Ποσειδῶν dans le Taureau marin dont il a été question dans ce chapitre ; il nʼest autre que Διόνυσος, même si cʼest plutôt sous la forme dʼun homme séduisant quʼil vint en barque recueillir Ἀριάδνη abandonnée dans lʼîle de Dia. Pour preuve, réunies 5

Traduction P. MAZON, 1937-8, vol. I p. 158. Plutarque, Isis et Osiris 35 ; voir W. OTTO, [1933] 2017, p. 181. 7 W. OTTO, [1933] 2017, p. 181. 8 Scholie à lʼIliade 14.319. 9 W. OTTO, [1933] 2017, p. 181 et 215 ; P. SAUZEAU, 2005, p. 205-7. 10 W. OTTO, [1933] 2017, 214-5. 11 Τενέδιοι δὲ τῷ ἀνθρωπορραίστῃ Διονύσῳ τρέφουσι κύουσαν βοῦν, τεκοῦσαν δὲ ἄρα αὐτὴν οἷα δήπου λεχὼ θεραπεύουσι (12.34). 12 Sur la mise à mort de Yajñá ou de Sóma, il y a notamment ŚBM 11.1.2.2 tám̐ hatvā́ yajñám | agnā́ v evá yónau réto bhūtám̐ siñcati « le sacrifice une fois tué, il le verse, semence, dans cette matrice, le feu » (traduction A. MINARD, 1949-56, vol. II §244) ; voir LÉVI, 1898, p. 80 n. 5. 13 Plutarque, Isis et Osiris 35. 14 Sur Διόνυσος-taureau, W. OTTO, [1933] 2017, p. 185 et 214-5 ; JOUAN, 1992, p. 81-2. 6

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au bord de la mer, les seize femmes d’Élis lancent leur appel, semble-t-il amoureux, à Διόνυσος-taureau, qui bondit hors des vagues, beau à voir, en compagnies des Χάριτες15. Et, bien évidemment, Διόνυσος tauromorphe coïncide avec le Sóma-taureau16 du Véda. Índra en devient taureau lui aussi, comme par osmose : RS 2.16.6cd vŕ̥ṣṇo mádasya vr̥ṣabha tvám īśiṣa V índra sómasya vŕ̥ṣabhasya tr̥pṇuhi « Taureau Índra, toi, tu disposes du breuvage mâle ; (dès lors), jouis-en, de ce sóma taureau ».

Sóma, comme ersatz de l’âme humaine, a beau ressembler à l’homme, le poète lui garde le nom de taureau : RS 9.86.38 tváṁ nr̥cákṣā asi soma viśvátaḥ V pávamāna vr̥ṣabha tā́ ví dhāvasi | sá naḥ pavasva vásumad dhíraṇyavad V vayáṁ syāma bhúvaneṣu jīváse « Toi, Sóma, tu ressembles en tous points à l’homme. Toi qui te purifies, taureau, tu disparais en courant au travers du (filtre). Comme tel, distille-toi en notre faveur avec le bien et l’or ! Puissions-nous exister de façon à vivre dans les mondes ! »

ukṣán- est employé principalement à propos de Sóma17, non jamais d’Índra. Le taureau offert, même appelé ukṣán-, n’est pourtant pas toujours Sóma : RS 8.43.11 ukṣā́ nnāya vaśā́ nnāya V sómapr̥ṣṭhāya vedháse | stómair vidhemāgnáye « Puissent les éloges nous permettre de rendre un culte à Agni, lui qui se nourrit du taureau et de génisses18, lui qui transporte le sóma sur le dos ! »

15

M. DARAKI, [1985] 1994, p. 94. ||| Sur Διόνυσος-taureau, voir M. DETIENNE, [1986] 1998, p. 86 ; Plutarque, Questions grecques 36.299a-b. 16 Sur Sóma-taureau, voir A. BERGAIGNE, 1878-97, vol. I p. 222. Deux exemples tirés de la R̥gvedasaṁhitā : RS 9.2.2 ā́ vacyasva máhi psáro V vŕ̥ṣendo dyumnávattamaḥ | ā́ yóniṁ dharṇasíḥ sadaḥ « Jus de (Sóma), dans un parfait contrôle de tes mouvements, accours très heureusement en taureau : nʼhésite pas à prendre place (chez nous) ! » RS 9.2.6 ácikradad vŕ̥ṣā hárir V mahā́ n mitró ná darśatáḥ | sáṁ sū́ ryeṇa rocate « Le taureau jaune (qui) a mugi, magnifique et beau à voir comme Mitrá, brille (à présent) avec le Soleil ». 17 RS 9.69.4a, 9.71.9a, 9.83.3b, 9.85.10b, 9.86.43d, 9.89.3d, 9.95.4b. 18 Le pluriel est probable puisque, dans RS, c’est le nombre que vaśā́ - montre toujours à l’état isolé. La présence en nombre des vaches autour du taureau Sóma, de toute façon, est souvent évoquée. Exemple : RS 9.69.4a. 293

Si la possibilité de reconnaître une désignation de Sóma dans le premier terme du composé ukṣā́ nna-, du fait de la concurrence de sómapr̥ṣṭha-, est à repousser, il est assez clair que l’ensemble des épithètes du feu sacrificiel mentionne trois figures distinctes, un taureau (ukṣán-), une ou des génisses (vaśā́ -) et Sóma, et que la figure du taureau en question, pour être nommé à côté de génisses et de Sóma, pourrait bien épouser les contours de celle du taureau avestique *Haδāiiu. Sóma, dans la R̥gvedasaṁhitā, apparaît aussi comme la garantie pour lʼâme des pieux défunts de trouver à se nourrir sans difficulté : RS 9.1.4 abhy àrṣa mahā́ nāṁ V devā́ nāṁ vītím ándhasā | abhí vā́ jam utá śrávaḥ « (Sóma,) que ton jus te permette de couler et dʼinviter ainsi les Deva magnifiques, dʼobtenir de quoi (nous) alimenter sans restriction et quʼun verdict (favorable soit prononcé à lʼencontre de nos âmes) ! »

Διόνυσος qui, à Naxos, conduit Ἀριάδνη au sommet dʼune montagne pour ensuite disparaître avec elle dans le ciel, cela rappelle la scène zoroastrienne de la daēnā qui conduit lʼuruuan au delà du sommet de Cakāta Dāitiia ou de Hukairiia. Tout à la fois le pont du Cinuuaṇt quʼils empruntent ou la voie lactée ou rivière céleste quʼils rejoignent sʼappuient sur de telles cimes pour sʼétirer vers le ciel. Dans la R̥gvedasaṁhitā, pour faire écho à la mort d’ Ἀριάδνη vue comme le préalable nécessaire de son apothéose, le fond de l’Océan qui pourrait ressembler à celle des enfers est l’antichambre du Ciel : RS 9.3.6-7 eṣá víprair abhíṣṭuto V ʼpó devó ví gāhate | dádhad rátnāni dāśúṣe || eṣá dívaṁ ví dhāvati V tiró rájāṁsi dhā́ rayā | pávamānaḥ kánikradat « Voilà le Devá que les enthousiastes célèbrent lors de sa plongée dans les eaux, lui qui place des joyaux pour lʼorant. Le voilà, sous (forme) de jet, partir pour le Ciel en courant à travers les étendues, lui qui se purifie en mugissant fortement ».

Zεύς avait pris la forme de lʼaigle pour sʼaccoupler avec Εὐρώπη tandis que le taureau broutait au revers du statère. Distance irréductible entre lʼavers et le revers. Et Ποσειδῶν, en définitive, est cheval bien plutôt que taureau même si son épithète dʼ ἵππιος, stricto sensu, signifie non tout à fait « cheval », mais « appartenant au cheval, équin, chevalin ».

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V Les mots avestiques pour doctrine, femme enceinte et femelle pleine V 1. Introduction Si le dieu Gə̄uš Uruuan, en dernière analyse, nʼest autre que lʼâme de la vache primordiale, nous devons penser que cette dernière était aussi une vache azī, une vache pleine, avant que lʼarchidémon lʼassassinât. Avec cette simple déduction, nous nous trouvons confrontés à la question ardue de savoir quel être avait bien pu féconder la vache primordiale. Il est sans doute remarquable que Daēnā, une déesse, la bonne doctrine de ceux qui offrent le sacrifice à Ahura Mazdā en suivant les recommandations de Zaraθuštra, soit donnée aussi pour lʼune de leurs âmes, la féminine, et que leur âme masculine, le uruuan, prenant la forme dʼun jeune homme, la rencontre sur le chemin de lʼau-delà sous les traits dʼune jeune femme et se félicite dʼapprendre quʼelle est enceinte. À lʼimage de la vache pleine sacrifiée lors des funérailles, la daēnā ainsi est-elle une jeune femme enceinte (carāitī), et les textes lui donnent même parfois la forme d’une vache 1. Cela demande semblablement une explication. Il est tout aussi malaisé de justifier lʼabandon dʼ Ἀριάδνη sur l’île de Dia ou à Naxos. Les anciens déjà sʼinterrogeaient sur pareille ingratitude de Θησεύς, mais, dans lʼignorance, se perdaient en conjectures et proposaient des réponses plutôt contradictoires ou hésitantes. La question de mythologie avestique et celle de mythologie grecque, pouvons-nous penser, nʼen font quʼune si certaines sources nous informent quʼ Ἀριάδνη mourut en couches. Avant de nous plonger dans la recherche de réponses à ces questions (Chapitre VI), nous nous pencherons sur quelques étymologies utiles (Chapitre V) : tout d’abord, je dois mʼinsurger contre la désinvolture avec laquelle Alberto Cantera rejette la correspondance que jʼai rétablie de façon étayée entre le védique dhénā- et lʼavestique daēnā-. Cela passera par la démonstration que lʼétymologie quʼil avance de ce dernier mot (V 2) est impossible. 1

Exemple : ZA 30.13. 295

Ensuite, si, malheureusement, je ne suis pas arrivé à débrouiller l’étymologie d’aucun des mots qui font de la victime immolée une vache pleine ou de l’âme féminine une jeune femme enceinte (V 3), en revanche, celle du nom d’ Ἀριάδνη non seulement est à portée de main malgré les mirages que les anciens proposèrent, mais en outre nous apprend que l’exténuement qu’elle connut sur l’île de Dia était écrit dans son nom (V 4).

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V 2. L’étymon de l’avestique daēnāAlberto Cantera1, ne croyant pas au caractère secondaire du trisyllabisme gâthique de daēnā-, mais tenant compte de ma remarque que le groupe -aiiaest préservé devant une nasale en syllabe ouverte2, recherche une nouvelle explication. Cantera3 rejette aussi la correspondance que, sur base de parallélismes formulaires et mythologiques, jʼai rétablie entre lʼavestique daēnā- et le védique dhénā-, mais sans dire pourquoi. Faute de le savoir, je nʼen dirai donc pas davantage. Sa volonté de maintenir lʼauthenticité gâthique des trois syllabes du mot lʼa poussé à passer sous silence que la séquence ºaēº du mot est bien monosyllabique en avestique récent4 alors quʼelle est dissyllabique dans le récent sraēšta-5 « très beau » tout comme parfois ºeº dans son correspondant védique śréṣṭha-6 < proto-indo-iranien *śráiH-ištHa-. Et la graphie ºayiº < *ºai-iº est illustrée par vícayiṣṭha-7 (= avestique viδcōišta-8) « qui fait très bien la distinction ». De surcroît, à lʼinstant de poser un proto-indo-iranien *dhaHinā-, il sʼappuie sur lʼétymon *raHiš9 généralement donné pour lʼavestique raēš et le védique rayíḥ, le nominatif singulier dʼun mot dont la déclinaison présente de nombreuses difficultés et dont les attestations avestiques récentes10 sont complexes. Examinons donc les formes avestiques récentes attestées de ce mot. Ce sont les suivantes : ― le nominatif singulier raēšº (= védique rayíḥ) est attesté en tant quʼaccusatif dans des octosyllabes tels que kahmāi raēšca xvarǝnasca11 ou ahmāi raēšca xvarǝnasca12 ; 1

A. CANTERA, 2016, p. 94 n. 14. É. PIRART, 2012a, p. 132. 3 A. CANTERA, 2016, p. 94 n. 14. 4 V 2.1.3a, 2.2.3a, Yt 13.99.4b, 19.79.2. 5 H 2.10, Yt 17.17.2c. 6 Exemple : RS 4.1.6a. 7 RS 4.20.9c. 8 Yt 12.7e. 9 M. MAYRHOFER, 1992-2001, vol. II p. 438. 10 Ch. BARTHOLOMAE, 1904, isole le génitif singulier vieil-avestique rāiiō (Y 43.1e) sous lʼentrée rāy-, colonne 1525, et range lʼensemble des attestations récentes sous lʼentrée rayay-, colonnes 1511-2. 11 Yt 10.108.2a. 2

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― lʼaccusatif singulier raēm (= védique rayím) est un hapax legomenon13 puisque sa forme nʼest attestée que dans Yt 19.79.3def raēm raēuuastǝmō xvarǝnō xvarǝnaŋvhastǝmō vǝrǝθra vǝrǝθrauuastǝmō .·., mais en étant employée comme instrumental de limitation complément de raēuuastǝmō ; ― lʼinstrumental singulier raiia14 (= védique rāyā́ ) figure dans lʼoctosyllabe ahe raiia xvarǝnaŋhaca15 ; ― la forme du génitif pluriel raiiąmº (= védique rāyā́ m16) entre dans une coordination avec xvarǝnah- comme toutes celles déjà citées : Y 60.4g fraš́ a.vaxšiiāi raiiąmca xvarǝnaŋhąmca. L’étymon posé pour le védique ou l’avestique, *raHiš < *HreH1ís, est inacceptable : ceux qui avancent pareil étymon ne tiennent aucun compte ni des formes compositionnelles du mot, avestiques +ri- (dans mązā.ri-17) et raē+ (dans raēuua(ṇt)- « riche ») = védiques +ri- (dans arí- « qui ne dispose pas de richesses », dans sūrí- « qui dispose de richesses » et dans br̥hádri-18 « qui dispose dʼune richesse haute ») et re+ (dans revánt- « riche ») ni des autres exemples illustrant la séquence *ºaHiº. D’une part, lʼétymon proposé ne nous permet pas de rendre compte des formes compositionnelles puisque la laryngale médiale entrerait en contact avec r et que la séquence *ºr̥HVº donne toujours ºirVº en védique ou ºarVº en avestique ; d’autre part, la séquence *ºaHiº aboutit à *ºāiº monosyllabique : ― ºāi (= grec ºῳ) finale du datif singulier des thèmes en ºa-, par exemple dans ahurāi « au roi » < proto-indo-iranien *ásura-Hi ;

12

Y 68.11a. La forme raēm que lʼon trouve dans le Xvaršēd Yašt (Yt 6.1, 6.4, 6.6) comme épithète du Soleil est un autre mot : lʼaccusatif masculin singulier de raēuua-, la variante de raēuuaṇt-. 14 Lʼabrègement de la première syllabe est du même type que celui rencontré dans vaiiu- (= védique vāyú-). 15 Y 57.3.1a, etc. 16 Hapax legomenon (RS 9.108.13b), la forme courante étant rayīṇā́ m (41 fois dans RS). 17 Dans le vers Y 43.12d səraōšō aš ̣ī V mązā.raiiā hacimnō (~ Y 27.6.2ab vaŋhuš sraōšō V yō †aš ̣ahe hacaite mązaraiia ; Vr 12.1.2ab vaŋhuš sraōšō aš ̣iiō V yō †aš ̣ahe hacaite mązaraiia « Voilà le dieu Sraōša soucieux de l’harmonie rituelle, lui qui est accompagné de la généreuse Aš ̣i »). 18 Hapax legomenon du vers RS 1.57.1a prá máṁhiṣṭhāya br̥haté br̥hádraye. 13

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― ºāi finale de la première personne du singulier de la voix moyenne de lʼindicatif présent des thèmes en ºa-, par exemple dans yazāi « jʼoffre le sacrifice » < proto-indo-iranien *i̯ áźa-Hi19 ; ― ºāi finale du locatif singulier des noms-racines en ºā-, par exemple ādāi20 « lors du dépôt (de lʼoffrande) » < proto-indo-iranien *ā+dháH-i ; ― ºāiš de la finale de lʼinstrumental pluriel des thèmes en ºa-, par exemple tāiš (= védique táiḥ) « avec eux » < proto-indo-iranien *tá-Hiš. Je ne vois d’ailleurs pas pourquoi la séquence *ºaHiº devrait aboutir à deux syllabes si la parallèle *ºaHuº n’en génère qu’une : *seH2uH1l-iH1o- > védique sū́ rya-21 « Soleil ». Deux exceptions22 sont pourtant à signaler. Il y a tout dʼabord les superlatifs du type védique dhéṣṭha- « qui met souvent » qui montrent une diphtongue brève inattendue e (< proto-indo-iranien *dháH-ištHa-), laquelle est, de surcroît, quelques rares fois disyllabique, par exemple dans jyéṣṭha- au vers RS 4.1.2c jyéṣṭhaṁ yajñávanasam (*źi̯ á-Hiš-tHam-i̯ aź-ná-u̯an-Ha-sam) « le (dieu) aîné vénéré avec l’offrande de sacrifices ». La seconde exception est celle de la 3e personne du singulier des aoristes passifs radicaux tirés de racines en ºā, du type ádhāyi « a été mis » (< protoindo-iranien *á+dhāH-i), mais, ici aussi, nous devons souligner que ce type est exclusivement védique. En présence de la première exception quʼAlberto Cantera aurait pu invoquer à lʼinstant de défendre les étymons en *ºaHiº proposés de lʼavestique daēnā- et du védique rayí-, il nous convient de remarquer que, comme pour la seconde exception, il put y avoir un phénomène de résistance morphologique, le refus quʼune caractéristique du suffixe fût noyée dans le vocalisme radical. Cʼest ce que lʼavestique tend à montrer en recourant à lʼartifice du sigmatisme dans le superlatif dāhišta-23 « qui donne très bien » < proto-in-

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La diphtongue brève ºe du védique yáje est analogique des autres personnes : yájase, ºate, ºāvahe, ºethe, ºete, ºāmahe, ºadhve, ºante (É. PIRART, 1986). 20 Y 33.11c. 21 É. PIRART, 2017b, p. 300. 22 En laissant de côté le problème étymologique et morphologique inextricable des formations du type bhāgadhéya-. 23 Yt 13.17.1b. 299

do-iranien *dās-ištHa- : par ce biais, il fut visiblement cherché à éviter la diphtongue24. Comme aucune forme de 3e personne du singulier de lʼinjonctif ou de lʼindicatif aoriste passif dʼune racine en ºā nʼest attestée en avestique25, nous nous trouvons dans lʼimpossibilité de vérifier lʼantiquité du yakāra présent dans le védique ádhāyi ou si, pour de telles racines, son développement devant la désinence ºi est hérité du proto-indo-iranien. Le type védique ádhāyi montrerait qu’une laryngale intervocalique se convertirait en *i̯ dans un contexte distinct de *ºiHVº > *ºii̯ Vº, mais il faut en souligner le caractère exceptionnel : ce cas de figure est limité à l’aoriste passif des racines en ºā-. De surcroît, il n’est pas du tout certain que ce soit la laryngale qui se transforme en yod : ce dernier pourrait être un développement ou un étoffement de la voyelle i comme dans bhū́ yiṣṭha- « très nombreux » < bhū́ -iṣṭha-, mais il est vrai que, dans ce dernier exemple, une analogie avec bhū́ yāṁs- « en plus grand nombre » peut avoir joué. Cependant, comme la voyelle radicale de lʼaoriste passif doit être longue en syllabe ouverte pour provenir de la protoindo-européenne *o, la longueur du ā nʼy est pas nécessairement dû à la laryngale. Néanmoins, il me paraît raisonnable de penser à une résistance morphologique pour le maintien exceptionnel de la voyelle i en dehors de la formation dʼune diphtongue : *-dhoH1-i > *-dhāï > *-dhāyi. Dans sa volonté furieuse ou intrépide de poser *ºaHiº > ºaē̃º dans daēnā-, Alberto Cantera est amené à faire abusivement et aveuglément confiance à la leçon ādiδāiti « il contemple » des manuscrits du Yt 10.13.2c26 et à dire que l’explication qui est donnée par Insler27 « as a spelling for ādiδaēiti is completely ad hoc »28, mais poser l’étymon *dhidheHti va à lʼencontre de toutes les autres attestations tant avestiques29 que védiques de la racine concernée qui partout ailleurs comporte un incrément i. La racine, partout ailleurs en indo-iranien, apparaît toujours sous la forme *dhăi̯ , non jamais *dhā. Certes, il est tout à fait clair que, pour la troisième personne du singulier de la voix active de lʼindicatif présent du verbe concerné, la graphie diδāiti 24

L’étoffement sigmatique, qu’il faille le considérer comme radical ou comme suffixal, est attesté aussi dans dā̊ŋ́hi-/ dāhi- (Y 19.8c, Yt 13.77b) « mise en place, installation ». 25 J. KELLENS, 1984a, p. 382. 26 A. CANTERA, 2016, p. 94. 27 S. INSLER, 1971, p. 583-4. 28 A. CANTERA, 2016, p. 94 n. 13. 29 diδaiiatąm (Yt 17.11.1e), aipi.daiδiiaṇtō (Yt 10.45f), vaēδaiianā-, daēman-, dōiθra-, etc. 300

montre une constance telle30 que nous devons reculer devant la correction quʼInsler a proposée, mais non nécessairement devant lʼétymologie que cette correction suggère, *dhidhHeiti, car, pour la représentation du fruit de lʼépenthèse de i sur la diphtongue ºaiº, nous ne pouvons exclure la graphie ºāiº à côté de ºaēiº dans la mesure où dʼautres exemples, certes rares, en existent tels que pāiri.sāite « sʼétend tout autour » < proto-indo-iranien *pári śaitai* (Yt 19.1.2a)31. Je considère quʼAlberto Cantera abuse de lʼautorité des manuscrits et que nous devons éviter dʼentériner leur leçon sans aucune critique grammaticale. Alberto Cantera ne manque pas non plus de signaler lʼhapax legomenon védique rā́ m32 sans doute pour affirmer la présence dʼune laryngale dans rayí- / rāy- alors même que la métrique ne l’exige nullement et que le sens du mot, à vrai dire, reste incertain : RS 10.111.7b citrā́ m asya ketávo rā́ m avindan « Les rayons du (Soleil) révélèrent la claire ... ». C’est Sāyaṇa qui, pour le rendre par rayim, est à l’origine du rangement de rā́ m sous rayí- / rāy-33 malgré la divergence de genre grammatical. En effet, rā́ m, au vu de l’épithète citrā́ m, est un substantif féminin tandis que rayí- est de genre masculin. Les deux autres exceptions féminines que H. Graßmann34 enregistre ne sont guère probantes à l’instant d’affirmer la possibilité de ce genre pour rayí-. Aux vers RS 1.120.9bc, le genre de rayí- a visiblement été aligné sur celui de íṣ-: rāyé ca no mimītáṁ vā́ javatyai | iṣé ca no mimītaṁ dhenumátyai « (Aśvin,) assignez-nous la richesse constituant une réserve de nourritures ! Assignez-nous aussi la vigueur lorsque (nous trayons) la (vache) laitière ! » De surcroît, la diascévase de ces vers n’inspire guère confiance pour y cumuler la répétition de mimītam avec l’emploi de ca ... ca à l’instant de coordonner les deux indépendantes impératives. Le vers RS 8.52.10a, qui, d’ailleurs, appartient au quatrième Vālakhilya, ne vaut guère mieux : sám índro rā́ yo br̥hatī́ r adhūnuta « Indra a fait confluer les hautes richesses ». En effet, l’adjectif br̥hatī́ ḥ accusatif féminin pluriel pourrait avoir remplacé un original ˟br̥hatáḥ masculin sous lʼinfluence 30

Dans la forme diδāiti, la graphie de la diphtongue ne montre jamais aucune variante : Yt 10.13.2c, 10.51.2a, 10.95.2f, 10.107.4c. 31 hā hama pāiri.sāite frāpaiiā̊ daŋ́huš ā.upaōšaŋhuuā̊sca .·. « Cette (montagne) [= Haraitī Bǝrǝz] sʼétend de façon régulière tout autour des nations quʼil y a en aval et de celles quʼil y a du côté de lʼorient ». 32 Le pluriel rā́ ḥ est un fantôme : voir K. HOFFMANN, 1965, p. 15-8. 33 A. LUBOTSKY, 1997, vol. II col. 1184b. 34 H. GRASSMANN, 1872-5. 301

du vers RS 8.52.9c pūrvī́r r̥tásya br̥hatī́r anūṣata qui précède. À moins qu’il faille faire de br̥hatī́- un substantif dans ces deux vers et de rāyáḥ un génitif singulier le complétant comme le suggère Griffith35 : « They have sung many a Bṛhatī of sacrifice [...]. Indra hath tossed together mighty stores of wealth ». Le rattachement de rā́ m à rayí- / rāy- a été motivé aussi par l’idée que, fondamentalement, le mot serait le nom-racine rā́ - tiré de RĀ « donner, offrir », mais son existence reste très incertaine36. En effet, lʼobscur composé śatárā-, par comparaison avec sahasradā́ -37 « qui donne mille », montre une accentuation irrégulière si nous devons y trouver ce nom-racine. De surcroît, il est attesté dans un contexte des plus abscons : RS 10.106.5b mitréva r̥tā́ śatárā śā́ tapantā « (Vous deux, Aśvin, vous êtes) comme Mitra et Varuṇa, ............ »38.

Graßmann 39 et Bartholomae 40 éclatent lʼensemble des attestations du mot sous deux entrées comme si une certaine hétéroclisie régissait sa déclinaison : rayí- et rái- en védique, rayay- et rāy- en avestique. Le type de cette hétéroclisie, de toute façon mal décrite, est inconnue pour dʼautres mots. Ceux qui se sont attaqués à lʼétymologie du mot sans doute ont-il eu raison de refuser toute hétéroclisie en dehors du glissement de lʼaccent entre ºí- et la voyelle des terminaisons obliques (nominatif singulier rayíḥ, génitif singulier rāyáḥ). Pour sûr, il est vraisemblable que, si nous laissons lʼaccent de côté, rayí- et rāy- représentent un seul et même thème. Nous l’avons déjà souligné, l’idée de poser une laryngale au début de la seconde syllabe de lʼétymon de rayíḥ se heurte à lʼimpossibilité dʼune laryngale dans les formes compositionnelles (avestiques +ri- et raē+ ; védiques +ri- et re+) puisque *ºr̥HVº aboutit à ºarVº en avestique et à ºirVº en 35

R. T. H. GRIFFITH, 1973, 468. M. MAYRHOFER, 1992-2001, vol. II p. 438. 37 RS 10.62.11a. 38 K. F. GELDNER, 1951-7, vol. III p. 326, a renoncé à traduire les strophes RS 10.106.5-8. Sāyaṇa comprend bien sûr śatárā comme un composé signifiant « apportant des centaines de richesses » et se perd en conjectures concernant le mot suivant. Je propose de voir dans śatárā, moyennant lʼhypothèse dʼune haplologie, le nominatif masculin duel du dvigubahuvrīhi de śatá- « cent » et de tára- « traversée » : « (Aśvin) qui sauvent des centaines (dʼadorateurs) ou de centaines (de dangers) ». 39 H. GRASSMANN, 1872-5. 40 Ch. BARTHOLOMAE, 1904. 36

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védique. Pour le génitif singulier dʼun thème proto-indo-iranien en *ºi-, deux possibilités existent, la première courante, *ºắiš, et la seconde, exceptionnelle, *ºi̯ ás, que documentent arí- :: aryáḥ, lorsque le mot, dérivant de AR « ajuster », signifie « dévot »41, et ávi- :: ávyaḥ « mouton ». Le mot qui nous occupe, rayí-, doit obéir au même patron morphologique que arí- « dévot ». Si nous ne pouvons poser de laryngale intérieure dans +ri- ni, dès lors, dans rayí-, il faudra bien que nous admettions une racine proto-indo-iranienne *Hrai̯ , celle que documente le kryādi védique RI :: riṇā́ ti « fluer » : rayí- < *Hrai̯ -í-. Nous devons donc clairement renouer avec la proposition d’Emile Benveniste42 et poser un étymon *H1rei̯ -i-. Sur base du génitif aryáḥ de arí-, celui de *Hrai̯ í- sera forcément *Hraii̯ ás. Pour la justification de la longue dans le génitif singulier rāyáḥ une fois posé un étymon *Hraii̯ ás tel que le supposait déjà Benveniste, nous ne pouvons malheureusement nous appuyer que sur le sandhi externe archaïque de *ºăi | i̯ º > *ºā̆i̯ º qui est parallèle à *ºău | u̯º > *ºā̆u̯º. Le sandhi externe archaïque *ºăi | i̯ º > *ºā̆i̯ º est attesté notamment dans le vers RS 8.39.1b agním īḷā́ yajádhyai pour lequel Geldner43 ne sʼétait posé aucune question. Il convient de corriger ce vers comme suit : agním ˟īḷā ˟yájadhyai « Je demande à Agni dʼoffrir le sacrifice ». Tout en faisant de ˟īḷā la forme que īḷe prend en sandhi devant un yakāra. Louis Renou, sur base de RS 3.1.15a ī́ ḷe ca tvā yájamāno havírbhiḥ « Et je tʼinvoque (moi-même en qualité de) sacrificateur-laïc avec des offrandes »44, avait bien vu que īḷā́ devait dissimuler īḷe et que lʼexistence dʼun hapax legomenon ī́ ḍ-45 était à rejeter46, mais, hésitant, avait opté pour une solution donnant à yajádhyai la valeur dʼun verbe conjugué : « je veux sacrifier à Agni par lʼinvocation »47. En effet, il est à remarquer que l’accentuation du vers est tout à fait douteuse puisque, partout ailleurs (treize fois), yájadhyai est ādyudātta48 et quʼil faut éviter de confondre les infinitifs en -dhyai avec ceux en -ádhyai. Les mots īḷā́ yajádhyai formant la clausule du vers présentent une accentuation à lʼemporte-pièce, la succession automatique et, partant, fautive dʼun trait horizontale souscrit et dʼun trait vertical suscrit. La compréhension que Sāyaṇa 41

Diacritique par rapport à ári- :: áreḥ « qui ne donne pas, ne fait aucune offrande, avare, non dévot » (< á+ri-). 42 E. BENVENISTE, 1935, p. 63. 43 K. F. GELDNER, 1951-7, vol. II p. 352 : « um Agni mit Anruf zu verehren ». 44 L. RENOU, 1955-69, vol. XII p. 50. 45 A. LUBOTSKY, 1997, vol. I col. 325b. 46 L. RENOU, 1955-69, vol. XIII p. 152. 47 L. RENOU, 1955-69, vol. XIII p. 70. 48 A. LUBOTSKY, 1997, vol. II col. 1124a. 303

a exposée nʼétait pourtant pas si éloignée de la solution : api cāgniṁ yajadhyai yaṣṭum īḷā stutyā staumīty arthaḥ « en outre, dʼAgni de façon quʼil offre le sacrifice, avec lʼéloge = je fais lʼéloge ». Dʼautant que le vers suivant nous présente Agni dans son rôle sacerdotal : agnír devā́ m̐ anaktu naḥ « Nous demandons à Agni dʼoindre les dieux ». Le sens du vers RS 8.39.1b est donc très proche de celui de RS 1.1.1ab : agním īḷe puróhitaṁ V yajñásya devám r̥tvíjam « Je demande au dieu Agni dʼêtre mon intermédiaire [puróhita] et dʼoffrir (aux dieux) le sacrifice à point nommé ». Le sandhi interne *ºăi-i̯ º > *ºāi̯ º peut-être est-il illustré par gaōdāiiu- (Y 29.2b2), si le second terme de ce composé est à analyser comme le dérivé en -i̯ u- de ˲ daē (= védique DHE) : proto-indo-européen *+dhH1ei-i̯ u-. Il sʼagit donc dʼobserver ici la loi de Stang. Un dernier détail concernant lʼétymologie de rayí- : les suffixes -í- dans rayí- et -iṣṭha- dans vícayiṣṭha- étant primaires, la règle illustrée notamment par le vieux-perse θāigraci- « (mois) de la récolte de lʼail » qui provient dʼun proto-indo-iranien *śigracai̯ a- « récolte de lʼail » par vr̥ddhi de la syllabe initiale et thématisation en ºi-49 nʼest pas dʼapplication. Dans rayí-, l’incrément i de la racine *H1er « avancer » lui fait donc adopter un thème II, *H1rei, comme dans véman- « rouet » < *H1u̯ei-mn-50 par rapport à ótum « filer » < *H1éu-tu-. De fait, l’apparition de l’incrément i passe toujours par l’adoption d’un thème II. Aucune racine proto-indoeuropéenne ne peut montrer le thème I si son troisième phonème constitutif est *i. Le nom de la vache laitière, védique dhenú- = avestique daēnu- < *dhH1oi-nú-, l’illustre aussi par comparaison avec l’infinitif dhā́ tave < *dhéH1-teu- du verbe « téter ». Comme on sait, le degré zéro des racines en ºā recourt très souvent à la forme incrémentée de i, mais en opérant une métathèse de ce i avec la laryngale : *sH1i-tó- > *siH1tó- > sītá- « ensemencé » par rapport au latin sēmen < *seH1-mn-. La fréquence du recours morphologique de lʼincrément i a dès lors généré en védique une nouvelle alternance, celle de ī avec ā, présente même là où, théoriquement, nous ne lʼattendons pas, notamment dans les kryādi comme le montre la comparaison de vr̥ṇīté « il préfère » avec lʼavestique vǝrǝṇte ou dans certains hvādi du type mímīte « il mesure ». Dans ce dernier type, il dut 49

É. PIRART, 2012a, p. 247-53. Cette loi imposait la suppression de *ºai̯ a- à l’instant de faire usage du suffixe secondaire *ºi-. 50 Le correspondant avestique de ce mot est probablement à détecter dans auui.mąm < *ā́ u̯áiman* « au pied du rouet » (V 5.60-1) : G. KLINGENSCHMITT, apud J. KELLENS, 1974, p. 241 n. 2. 304

y avoir aussi une certaine résistance morphologique, car la racine était menacée dʼune perte de visibilité ; car, en cas de redoublement, certes pour autant quʼaucun fait de résistance morphologique ne se produise, la laryngale, devenue finale, tombe si elle n’est pas précédée d’un degré plein en vertu de la règle que Cantera paraît ignorer51 et qui est illustrée en toute clarté notamment avec DHĀ :: dadhmási « nous mettons » et KR̥̄ :: carkarmi, carkr̥masi « nous célébrons ». Dans le cas du mot daēnā- « doctrine » < *dhH2éi-nā- qui est apparenté notamment à védique dhīrá- « avisé, sage » < *dhiH2ró- < *dhH2i-ró-, la racine primaire ou biconsonantique n’est pas attestée, mais il convient de souligner l’existence d’une racine apparentée en grec : dans le substantif θαῦμα « merveille » < *dhéH2u-mn- ou dans le béotien θᾱ́ᾱ = attique θέα « spectacle » < *dhéH2u̯ā-52. Symbolisée ici par (H), la perte régulière ou morphologique de la laryngale due à la présence d’un redoublement est illustrée pour la racine *dhH2ei « voir, penser » aussi bien en védique qu’en vieil-avestique : védique dīdhima53 < *dī̆dhima < *dhi-dhi(H)-me ; v.-av. daidiiat̰ 54 < *dī̆dhi̯ at < *dhidhi(H)-n̥t. Il est impossible de séparer daēnā- du védique dhénā- en raison des parallélismes formulaires et mythologiques mis en évidence. S’y résoudre pour expliquer le trisyllabisme gâthique de daēnā- sans en tenir compte relève d’une désinvolture inusuelle. Et, si nous devions adopter le thème radical *dheHi auquel Cantera recourt dans son étymologie de daēnā-, nous ne pourrions plus expliquer aussi facilement la formation de vaēδaiianā-55 « mirador » < *u̯i+dhHai̯ anā-, qui suggère *dhHei. En effet, il faudrait alors invoquer, certes parfaitement envisageable pour un mot de plus de trois syllabes, un abrègement de la seconde syllabe de *u̯idhāi̯ anā-, laquelle est ouverte.

51 52 53 54 55

« dīdhima is then problematic » (A. CANTERA, 2016, p. 94). P. CHANTRAINE, 1968, p. 424-5. RS 8.99.3d. Y 44.10d. Yt 10.45c. 305

V 3. La vache azī et la daēnā carāitī

V 3.1. Avestique azī- = védique ahī́Dans la strophe Y 29.5, nous avons rencontré1 lʼemploi du mot azī- comme épithète dʼune vache qui, selon les livres pehlevis, ne serait autre quʼAēuuō.dātā, la vache primordiale, et, dans le paragraphe H 2.10 des fragments du Haδaōxt Nask2, celui de carāitī- à propos de la daēnā, lʼâme féminine de lʼindividu. Leur interprétation nʼallant pas de soi, nous devons tout dʼabord vérifier le sens de ces mots et, ensuite, en tirer toutes les conséquences. D’une part, si Aēuuō.dātā était une azī, une vache pleine, et que l’archidémon la fit périr, nous devons répondre aux questions de savoir qui put la saillir et comment sa progéniture fut sauvée ; d’autre part, nous devons répondre à des questions similaires si l’âme féminine de l’individu, sur le chemin de l’au-delà, apparaît aux yeux de l’âme du pieux défunt sous les traits d’une jeune femme et que le terme de carāitī qui désigne cette dernière signifie qu’elle est enceinte. Selon Johanna Narten3, le mot azī- définit une caractéristique positive de la vache, « pleine, grosse » ou « donnant du lait ». Le traducteur pehlevi se contente de rendre le mot par la translittération ʼz, mais le commentaire xayūg « bave »4 pourrait faire allusion à certains suintements que lʼanimal présenterait. Le traducteur sanscrit, plus explicite, affirme quʼune vache recevant ce nom est âgée de trois ans (ajināmnī trivarṣikī gauḥ). Bartholomae5 a fort utilement vu que pauruuō.azī- pouvait être comparé au védique pūrvasū́ -6 « qui met bas pour la première fois » : N 67.6 θrǝuuitasti aspaiiā̊ pauruuō.aziiā̊ arǝjō « (la ceinture sacrée) de trois empans a la valeur dʼune jument pleine pour la première fois ».

La présence de la vache azī à son côté coïncide avec la piété de lʼorant ou paraît lʼillustrer dans les textes vieil-avestiques métriques, mais le sens du mot ne peut être aisément déduit du contexte : 1 2 3 4 5 6

Ci-dessus Chapitre II. É. PIRART, 2012a. J. NARTEN, 1986, p. 232-4. Ch. BARTHOLOMAE, 1904, col. 228 : xaδūk "Speichel". Ch. BARTHOLOMAE, 1904, col. 873. RS 2.35.5d (ci-dessous Chapitre V 3.3). 307

Y 29.5 at̰ vā ustānāiš ahuuā V zastāiš frīnəmnā ahurāi.ā V mə̄ uruu̯ā gə̄ušcā aziiā̊ V hiiat̰ mazdą̃m duuaidī fərasābiiō V nō[it̰ ] ərəžəjii̯ ōi frajiiāitiš V nō[it̰ ] fšuiieṇtē drəguuasū pairī .·. « Alors, moi et le uruuan de la vache azī, nous restons tous deux les mains levées à propitier Ahura Mazdā et à lui poser nos questions. N’y a-t-il donc aucune survie possible chez les drǝguuaṇt ni pour l’éleveur ni pour qui vit de façon rectiligne ? »7 ; Y 34.14b2 ˟ii̯ ōi zī gə̄uš vǝrǝzə̄nē aziiā̊ (9) « car je me tiens dans le clan de la vache azī pour vous adresser ma prière » ; Y 44.6e kaēibiiō azīm (4) rāńiiō.skərəitīm 8 gąm tašō (7) « pour quels (...)9 as-tu façonné la vache azī qui apporte la joie ? » ; Y 46.19cd ahmāi mīždǝm (4) hanǝṇtē parāahūm (7) manə̄.vistāiš (4) mat̰ vīspāiš gāuuā azī (7) « Pour celui qui gagne la récompense de lʼautre existence, (il y a) les deux vaches azī avec tous les (mots et gestes) connus de (Vohu) Manah10 ».

En revanche, l’attestation du mot azī- dans le Yasna Haptaŋhāiti, moyennant une conjecture, nous permet d’en entrevoir la signification : Y 38.5.1 apas[cā] vā̊ azīšcā [vā̊]11 mātərąšcā [vā̊] V agənii̯ ā̊ drigudāiiaŋhō V vīspō.paitīš āuuaōcāmā V vahištā̊ sraē̃štā̊ .·. « (Vous, les) Rivières exubérantes qui allaitez le nécessiteux, que vous soyez azī ou mères, (vous, les) nourricières du monde, nous vous qualifions dʼexcellentes et de très belles ».

La difficulté de ce passage, en l’absence de toute notation de l’accent et du fait de son caractère non métrique, réside dans la distinction qui doit être opérée entre le vocatif, l’accusatif de l’objet et l’accusatif de l’attribut de cet objet. Comme les trois termes coordonnés apascā... azīšcā... mātərąšcā n’ont pas tous le même statut, le premier dʼentre eux étant forcément un substantif ―« les rivières »― tandis que les deux autres apportent une qualité ―« azī ou mères »―, je propose les conjectures qui suivent : seul le premier était au vocatif, *āpah, avant que la diascévase dite scolaire le coor7

Pour les notes concernant cette strophe, voir ci-dessus Chapitre II. Le védique raṇakŕ̥t- (RS 10.112.10c) le confirme, la présence d’une forme de comparatif au premier terme de ce composé en dénonce le caractère retouché. 9 Le contexte ne permet pas de déterminer sûrement qui sont les bénéficiaires de l’opération qui, en principe, en est une de boucherie : sont-ils à chercher parmi les dieux ou parmi leurs adorateurs ? 10 Cela signifie : avec tous les atours abstraits dont la cérémonie sacrificielle les a revêtues selon les plans du Penser bon. 11 La répétition, irrégulière, est due à la diascévase dite scolaire. 8

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donnât au tandem azīšcā ... mātərąšcā. La présence artificielle du premier ºcā aurait alors causé l’abrègement de la voyelle initiale du nom des « Rivières ». Le tandem azīšcā ... mātərąšcā figure à l’accusatif pour regrouper les épithètes détachées du vocatif *āpah. Les deux termes de ce tandem contrastent entre eux : ou bien les rivières sont azī, ou bien elles sont mères. Avec cette analyse, certes conjecturale, le mot azī- apparaît clairement comme la désignation de femelles n’ayant pas encore mis bas. Les passages vieil-avestiques ne nous ont guère aidé à déterminer le sens exact du mot azī- à l’exception, conjecturale, du Y 38.5.1. Par contre, la teneur du premier contexte avestique récent nous invite assez clairement à poser « (vache) pleine ». En effet, les trois premiers bestiaux nommés dans un passage du Vīdaēuu-dāt sont des mâles insignes reproducteurs. Comme il est fait mention dʼelle en quatrième lieu, après le taureau, la vache azī a toute chance dʼêtre celle qui vêlera sous peu ou qui vient de vêler : V 9.37-38 āθrauuanǝm yaōždaθō V dahmaiiāt̰ parō āfritōit̰ V daŋ́hə̄uš daŋ́hu.paitīm yaōždaθō V uštrahe paiti aršnō aγriiehe V zaṇtə̄uš zaṇtu.paitīm yaōždaθō V aspahe paiti aršnō aγriiehe V vīsō vīspaitīm yaōždaθō V gə̄uš paiti uxšnō aγriiehe V nmānahe nmānō.paitīm yaōždaθō V gə̄uš paiti aziiā̊ .·. nmānahe nmānō.paitīm nāirikąm yaōždaθō V gə̄uš paiti frauuaitiiā̊12 V vaēsə̄sca pairiiaētrə̄šca13 yaōždaθō V gə̄uš paiti vaziiā̊14 V nitǝmǝmcit̰ apǝrǝnāiiūkǝm yaōždaθō V pasə̄uš garǝbuš15 anumaiiehe .·. « Tu purifieras le prêtre pour une habile propitiation. Tu purifieras le maître du pays pour un chameau reproducteur de qualité. Tu purifieras le maître de la région pour un étalon de qualité. Tu purifieras le maître du village pour un taureau reproducteur de qualité. Tu purifieras le maître de la maison pour une vache pleine. Tu purifieras lʼépouse du maître de maison pour une vache frauuaitī16. Tu purifieras les serviteurs ou 12

Graphie analogique de celle du nominatif frauuaiti, lequel est attesté dans lʼĒrbedestān 19.6. 13 J. NARTEN, 1986, p. 230. 14 Le thème de ce mot, plutôt que vazī-, doit être vā̆zā-, le féminin de vāza(= védique vāhá-), lequel est attesté dans les Gāθā (Y 51.12c). 15 Ch. BARTHOLOMAE, 1904, colonne 524, corrige en +gǝrǝbuš. Je ne puis suivre X. TREMBLAY, 2003, p. 232, qui, gardant garǝbuš, table sur une alternance par trop inouïe entre un nominatif *gu̯ólbhus et un génitif *gu̯élbhus. 16 Le mot est de sens inconnu : dʼune part, lʼaffirmation raisonnable que cʼest le participe présent de frā+√ bā nʼest guère éclairante ; dʼautre part, je ne sais dʼoù A. CANTERA, 2004, p. 10 n. 58, tire que gaō- frauuaitī- désigne la « covered cow », la seule autre occurrence de cette désignation figurant dans lʼĒrbedestān 19.6 où la version pehlevie ne donne aucune indication non plus. 309

les ouvriers pour une vache de trait. Tu purifieras enfin lʼenfant pour un agnelet ».

En revanche, le contexte de la seconde attestation avestique récente nʼapporte aucun élément utile à notre propos : FiO 221 aspō17 aγriiō.tǝmō daŋ́hauue varǝmanō ašta gauuąm azinąm arǝjō º SVSYA ʼḵlyvktvm18 MNV MTAʼn| dvšyt YKOYMVNyt PVN hvtʼd srdʼlyh ĪĪĪĪ ĪĪĪĪ TVRA ʼz ʼlcyt .·. « das hervorragendste Pferd, welches die Dörfer ausgewält haben, ist mit Bevollmächtigung des Herrschers acht trächtige Kühe wert »19.

Certes, le passage du Vīdaēuu-dāt sauve la donne, mais la difficulté vient aussi de la faiblesse des données védiques concernant la vache ahī́- et de la perte probable d’intelligence des vieux textes que le monde zoroastrien expérimenta au cours de son histoire fort accidentée. Lʼopposition des termes kainō et carāitī dans le Dēnkard20, ahurissante, en dit sans doute assez long sur lʼignorance qui dut sʼabattre sur le monde zoroastrien suite aux destructions que les invasions grecque, arabe et turco-mongole purent causer. Les attestations du mot védique ahī́- ne sont pas plus merveilleuses que celles de lʼavestique azī- avec lequel il coïncide étymologiquement. Dʼentrée de jeu, il convient dʼécarter le composé ahīśúva- « apportant la prospérité aux Serpents », épithète de lʼun des démons adversaires dʼÍndra, au premier terme duquel, moyennant lʼallongement métrique régulier de la voyelle finale, doit figurer plutôt le mot áhi- « serpent », même si le dernier de ces passages paraît établir un jeu de mots avec ahī́- : RS 8.32.2 yáḥ sŕ̥bindam ánarśanim V píprum dāsám ahīśúvam | vádhīd ugró riṇánn apáḥ « le puissant Indra qui, en tuant les (démons) Sŕ̥binda, Ánarśani, Pípru et le Dāsá apporteur de la prospérité aux Serpents, a libéré les rivières » ; RS 8.32.26 áhan vr̥trám ŕ̥cīṣama V aurṇavābhám ahīśúvam | himénāvidhyad árbudam « (Índra) Ŕ̥cīṣama21 a tué Vr̥trá, le rejeton de l’Araignée apporteur de la prospérité aux Serpents, et percé Árbuda avec le gel » ; 17

Texte dʼaprès G. KLINGENSCHMITT, 1968, p. 79, sauf indication. G. KLINGENSCHMITT, 1968, p. 79 : ʼγlyktwm. 19 G. KLINGENSCHMITT, 1968, p. 79. 20 Dk 3.75. 21 Deux interprétations me paraissent envisageables pour cette épithète d’Indra : ou « (Indra) tel que (le r̥ṣi le décrit) dans la strophe », ou « (Indra honoré chez le r̥ṣi) R̥cīṣama ». 18

310

RS 10.144.3-4 ghŕ̥ṣuḥ śyenā́ ya kŕ̥tvana22 V āsú svā́ su23 váṁsagaḥ | áva dīdhed24 ahīśúvaḥ « Le (Dāsa) apporteur de la prospérité aux Serpents ne prêta pas attention au fait que l’impétueux taureau (Sóma), parmi ses propres (femelles), était à portée de l’aigle efficace », yáṁ suparṇáḥ parāvátaḥ V śyenásya putrá ā́ bharat25 | śatácakraṁ yò26 ʼhyò vartaníḥ « le (Sóma) que, bonnes-plumes, le fils de l’aigle apporta du lointain muni de cent roues (pour Índra, le dieu) qui suit la (vache) ahī́ à la trace »27.

Le Naighaṇṭuka qui n’apporte rien de nouveau reprend le mot ahī́- parmi les neuf gonāmāni28 « noms de la vache », mais aussi parmi les vingt-quatre dyāvāpr̥thivīnāmadheyāni29 « dénominations de Ciel et Terre ». Et notre patience nʼest guère récompensée avec la lecture de strophes tirées des deux derniers maṇḍala de la R̥gvedasaṁhitā : RS 9.77.3 té naḥ pū́ rvāsa úparāsa índavo V mahé vā́ jāya dhanvantu gómate | īkṣeṇyā̀ so ahyò ná cā́ ravo V bráhmabrahma yé30 jujuṣúr havírhaviḥ « De façon que (les dieux), appréciant chaque formule et chaque oblation, les remarquent et les chérissent autant que les ahī́ ou que, dès lors, la sécurité alimentaire nous soit apportée moyennant la possession de vaches, les jus de (Sóma), antérieurs ou ultérieurs, doivent couler »31 ;

22

C’est l’épithète de Kutsa dans RS 8.24.25 : voir É. PIRART, 2011, p. 15 et 20. Catalexe à moins de lire suvā́ su. 24 Je fais l’hypothèse que ce verbe est construit avec un discours direct. 25 Cf. RS 2.21.1cd aśvajíte gojíte abjíte bharéVndrāya sómaṁ yajatā́ ya haryatám « J’apporte le Sóma agréable au dieu Índra qui est capable de gagner chevaux, vaches et rivières » ; RS 4.23.6 r̥jīpī́ śyenó dádamāno aṁśúm V parāvátaḥ śakunó mandrám mádam | sómam bharad dādr̥hānó devā́ vān V divó amúṣmād úttarād ādā́ ya « L’aigle R̥jīpín, pour la lui donner, depuis le lointain, le volatile qui vénérait les dieux, la tenant fermement, apporta à (Índra) la tige de Sóma (dont on extrait) le doux breuvage, arrachée au plus haut de ce ciel » ; RS 9.68.6b śyenó yád ándho ábharat parāvátaḥ « Lorsque l’aigle apporta du lointain la fleur ». 26 L’antécédent sous-entendu est un datif régime de ā́ bharat. 27 R. T. H. GRIFFITH, 1973, p. 640, trouve ces deux strophes inintelligibles. 28 Naigh 2.11. 29 Naigh 3.30. 30 L’antécédent sous-entendu est un datif complément de l’adjectif cā́ ravaḥ : « chers (aux dieux) qui ». 31 Le texte de l’explication ahyaḥ striya ā hananāt que Sāyaṇa fournit concernant ahyàḥ paraît erroné pour ahyaḥ striya ā ˟jananāt « ahyaḥ sont les femelles avant de vêler ». 23

311

RS 10.138.1 táva tyá indra sakhyéṣu váhnaya V r̥tám manvānā́ vy àdardirur valám | yátrā daśasyánn uṣáso riṇánn apáḥ32 V kútsāya33 mánmann ahyàś34 ca daṁsáyaḥ || « Índra, en bénéficiant de ta collaboration et en observant les séquences sacrificielles, de tels feux convoyeurs dʼoffrandes pourfendirent lʼenclos où tu initias les Aurores, les Rivières et les Vaches ahī́ tout en les vénérant et en les libérant en faveur de Kútsa quand il en fut question » ; RS 10.139.6 sásnim avindac cáraṇe nadī́nām V ápāvr̥ṇod dúro áśmavrajānām | prā́ sāṁ gandharvó amŕ̥tāni vocad V índro dákṣam pári jānād ahī́ nām || « (Indra) a trouvé le (dieu) gagnant dans le courant des rivières et ouvert les portes aux (vaches) parquées à lʼintérieur du rocher ; Gandharva a proclamé leurs (noms) immortels ; Indra a reconnu le pouvoir créatif des Ahī ».

Il convient donc de reconnaître la faiblesse de notre conviction que lʼavestique azī- désigne bel et bien la vache pleine. La situation nʼest pas aussi désespérée si nous tenons compte des attestations de lʼavestique carāitī- et dʼautres mots apparentés dʼautant que, parmi celles-ci, il y en a qui concernent aussi bien les animaux que la race humaine. Les mots en question sont tous attestés, eux aussi, à la fois en avestique et en védique : Proto-indo-iranien

Avestique

Védique

*aźhī́ *karā́ *kr̥tā*cárantī-

azīdans satō.karakǝrǝtācarāitī-

ahī́karā́ kŕ̥tācárantī-

V 3.2. Avestique *karā- = védique karā́ Les attestations du premier de ces trois autres mots sont assez explicites. Le composé satō.kara- du Yt 17.56 contient visiblement au second terme un mot *karā- qui, à lʼétat isolé, nʼest attesté que dans une strophe védique : 32

La même clausule est présente dans les vers RS 2.22.4d, 8.7.28c, 8.32.2c, 9.109.22b. 33 La mention de Kutsa est sans doute à l’origine de l’attribution que la Sarvānukramaṇī fait du sūkta à un certain Aṅga Aurava : voir É. PIRART 2011, p. 48. 34 Certains interprètes font de ahyàḥ la désignation de démons qu’Indra put châtier. Ainsi R. T. H. GRIFFITH, 1973, p. 637 : « when didst chastise dragons ». Cela leur fut suggéré par Sāyaṇa qui déjà traduisait ahyaḥ par aher vr̥trasya. 312

Yt 17.56 yat̰ cit̰ mą[m] tura pazdaiiaṇta (8) āsu.aspa naōtaraca (8) at̰ cit̰ azǝm tanū̃ m [a]guze (8) aδairi maēšahe garō (8) yat̰ varšnōiš satō.karahe (8) at̰ cit̰ mą[m] fraguzaiiaṇta (8) yōi apǝrǝnāiiu tauruna (8) yōi kainina anupaēta [maš ̣iiānąm] (8) yat̰ cit̰ mą[m] tura pazdaiiaṇta (8) āsu.aspa naōtaraca (8) .·. « Quand ceux du clan de Quatrième [Tura] ou de Passeur-enbarque [Naōtara] qui ont de rapides chevaux mʼont chassée, je [= la déesse Aš ̣i] me suis cachée la personne sous la gorge dʼun bélier reproducteur environné dʼune centaine de femelles pleines, sans quoi les garçons pubères et les filles vierges mʼauraient gardée en secret. Cʼétait quand ceux du clan de Quatrième ou de Passeur-en-barque qui avaient de rapides chevaux mʼavaient chassée »35.

Karā, dans les vers RS 1.116.13ab, doit précisément son nom au fait d’être une jeune femme enceinte paradigmatique : ájohavīn nāsatyā karā́ vām Vmahé yā́ man purubhujā púraṁdhiḥ « Karā vous avait appelés à grands cris, Nāsatya souvent salvateurs, elle qui était enceinte, que sa prière fût exaucée »36.

V 3.3. Avestique kǝrǝtā- = védique kŕ̥tāLʼhapax legomenon védique kŕ̥tā-37 nʼest pas si énigmatique si nous savons quʼil coïncide avec lʼhapax legomenon avestique kǝrǝtā-38 : V 19.30.1 hāu srīra kərəta (5) taxma huraōδa jasaiti (8) .·. spānauuaiti (3) 39 ˟nīuuiuuaiti +pusauuaiti (8) ˟yaōxštiuuaiti hunarauuaiti (9) .·. « La (daēnā) gravide une telle, vaillante et belle, bien développée, vient avec les deux chiens, vêtue de la nīuui et couronnée, pourvue de moyens d’adéquation et d’aptitudes »40.

35

É. PIRART, 2006b, p. 222-3 ; 2010b, p. 295-6. Sāyaṇa commet l’erreur de penser que tous les quatre vers de la strophe concernent une seule et même femme : voir É. PIRART, 1995, p. 179-80. 37 Mot inconnu : voir L. RENOU, 1955-69, vol. XIV p. 103. 38 É. PIRART, 2010a, p. 264-5. 39 Mot de sens incertain, mais, pour le védique nīví-, M. MAYRHOFER, 19922001, vol. II p. 51-2, donne : « umgebundenes Tuch, Schurz, bes. das von Frauen dicht am Leibe getragene Tuch ». Voir Chapitre VI 3. 40 Texte et traduction É. PIRART, 2012c, p. 42. 36

313

Néanmoins, une incertitude subsiste concernant la place syntaxique qui, dans la strophe l’attestant, est occupée par l’hapax legomenon védique : fautil faire de kŕ̥tāḥ le sujet de prasarsré ? J’opte aujourd’hui pour la négative et fait de kŕ̥tā iva une indépendante nominale elliptique, limitée à son prédicat : RS 2.35.5 asmái tisró avyathyā́ ya nā́ rīr V devā́ ya devī́ r didhiṣanty ánnam | kŕ̥tā ivópa hí prasarsré apsú V sá pīyū́ ṣaṁ dhayati pūrvasū́ nām « De façon quʼil ne chancèle pas, les trois Devī épouses (du sacrifiant) autorisent que la nourriture soit offerte à ce Deva. (Elles sont) bel et bien gravides, car il féconde les rivières. Il tète le lait nouveau de celles qui ont enfanté pour la première fois ».

Le sens de « gravide » que j’adopte m’est suggéré par la coïncidence d’emploi entre ce mot et carāitī- à propos de la daēnā tel que je l’expose ciaprès.

V 3.4. Avestique carāitī- = védique cárantīLa comparaison du V 19.30.1 avec H 2.10.2 nous invite à faire de kǝrǝtāun synonyme de carāitī- : H 2.10.2 (= Vyt 8.5.2) ˟kā cišca tū̃ m carāitiš [ahi] (8) yąm it̰ yauua carāitinąm41 (8) kǝhrpa sraē̃štąm dādarǝsa (8) .·. « Toi, qui es-tu pour être la gravide comme, parmi les gravides, dʼaussi belle dʼaspect je nʼen ai jamais vu ? ».

L’attestation de carāitī- dans le Vīdaēuu-dāt me paraît concerner une jument en raison de l’usage du mot aršan- pour la désignation de mâles42 : V 3.24 †nō[it̰ ]43 zī ī̃m zā̊ †š́ ā̊44 (?) yā darəγa akaršta +saēte (8) yā karšii̯ a karšiuuata45 (8) †aibiš46 tat̰ vaŋhə̄uš +aiβi.šōiθnə̄†47 (?) †iδa48 carāiti hu-



41

Mise pour ºaiṇtī- ou ºǝṇtī-, la finale ºāitī- du féminin du participe actif tiré dʼun thème en ºa- est attestée aussi par vījasāitī- (J. KELLENS, 1984a, p. 322) dans le vers Yt 8.40.2d et āzizanāitī- dans les vers Y 9.22.2a et ˟Yt 5.87d. 42 Je vois mal que ce mot convienne à la désignation d’êtres humains, malgré A. CANTERA, 1998. 43 L’octosyllabisme ne pourra être rétabli que si nous imaginons une coordination *naēδa ... naēδa* en lieu et place de nōit̰ ... iδa. 44 J. KELLENS, 1974, p. 238, admet un nom-racine, mais il est bizarre quʼun substantif de ce type soit employé comme attribut. Je préfère y voir le fruit dʼune corruption pour *š́ āta « quiète, heureuse ». 314

raōδa (8) yā darəγa apuθra †aēiti49 (8) †aibiš tat̰ vaŋhə̄uš aršānō† (?) .·. « Car cette Terre n’est pas heureuse si elle reste longtemps sans être labourée alors qu’un laboureur devrait la labourer, elle qui attend quelque chose de bon : avoir des habitants (qui la cultivent). Ni non plus (la jument) n’est pleine avec un beau développement si elle reste longtemps sans avoir de poulain, elle qui attend quelque chose de bon : avoir des mâles ».

Le dérivé carāitikā-, par contre, doit bien faire référence à une jeune femme : V 5.60de yauuat̰ aēša carāitika (8) auui.mąm harəkə̄ harəcaiiāt̰ « autant que les déchets que cette carāitikā rejette du fuseau ».

(8)

.·.

L’attestation de carāitī- la plus utile à notre propos figure dans l’Ābān Yašt : Yt 5.87abcde θβą̃m kaininō50 †vaδre.yaōna51 (9) †xšaθra52 huu̯āpā̊53 jaiδiiā̊ṇte54 (8) taxmǝmca55 nmānō.paitīm (8) .·. θβą̃m carāitiš ziza-



45

Fautif ou mis pour le datif *karšiuuaite puisque, normalement, tel est le cas du complément d’agent de l’adjectif verbal d’obligation. 46 J. KELLENS, 1974, p. 8-13, en fait un nom-racine tiré de aiβi+˲ iš, mais deux difficultés surgissent pour lʼaplanissement desquelles je nʼai rien à proposer : dʼune part, en indo-iranien, aucune racine ˲ *iš ne se combine avec le préverbe *abhí ; dʼautre part, la rection accusative de ce nom-racine est inattendue. 47 L’octosyllabisme ne pourra être rétabli que si nous faisons l’hypothèse que aiβi aurait remplacé un original *ā comme préverbe de ˲ ši dans la formation de ce mot. 48 Comme nous attendons une négation et que le mot précédent finit avec ºnə̄, il convient peut-être de restituer *naēδa à la place de iδa. 49 Fautif pour *saēte ? 50 La finale du duel a été maquillée en ºō comme dans yǝuuīnō (Y 42.2.3). 51 Il s’agit visiblement d’un dérivé de vaδairiiu- « en rut », lequel est dit du chameau (Yt 14.11c, 14.12f, 14.39f, 17.13.1d, FiO 403), un mot que Ch. BARTHOLOMAE, 1904, col. 1345, a rapproché du védique vadhūyú- « cherchant épouse ». Le rapprochement qu’il hésite à proposer avec vadharyántī- (RS 1.161.9c) nʼest pas à écarter. Je propose de corriger vaδre.yaōna en ˟vaδarə.yaōne « (la femelle) se trouvant avec le mâle en rut, (la femelle) réceptive » pour y voir le nominatif féminin duel du dérivé en +na- (type ahuna-) de vaδairiiu- en justifiant la graphie ºaōº comme dans jańiiaōš (= védique jányuḥ). 52 Fautif pour ˟xšaθri ? 315

nāitiš (10) †jaiδiiā̊ṇte56 huzāmī̃m57 (8) .·. « (lorsque) la demoiselle ou la femelle réceptive, (en disant : "Qu’il fasse) bonne œuvre !", te demandent (un bon mari) valeureux maître de maison (ou un mâle protecteur), lorsque la femme enceinte ou la femelle pleine te demandent de connaître un bon accouchement (ou une heureuse mise bas) ».

Lʼintérêt de ces vers de lʼĀbān Yašt réside dans le dvandva que carāitīforme avec zizanāitī-. En effet, carāitiš et zizanāitiš sont des féminins duels secondairement sigmatisés, et le second est la forme négative du participe aoriste causatif actif de ˲ zan 58 , azīzanantī- « qui n’a pas encore mis bas »59. La graphie ºāiº de la séquence ºanº du suffixe est présente dans les deux termes du dvandva, carantī+azīzanantī. Le préfixe négatif présent dans le second terme montre un allongement dû au grand nombre de syllabes du composé. Ce mot, dʼune grande importance pour notre propos, est attesté aussi dans le Haōm Staōt : Y 9.22.2ab haōmō āzizanāitibiš (8) daδāiti xšaētō.puθrī̃m (8) « Haōma offre aux femelles qui n’ont pas encore mis bas d’être mères de splendides poulains »60.

Quelques occurrences de cárantī- dans la R̥gvedasaṁhitā sont fautives pour kṣárantī- « (rivière) qui coule »61 ou en ont le sens, car il existe plus dʼune étymologie possible pour la racine CAR : RS 1.24.6 nahí te kṣatráṁ ná sáho ná manyúṁ V váyaś canā́ mī́ patáyanta āpúḥ | némā́ ā́ po animiṣám cárantīr V ná yé vā́ tasya praminánty ábhvam « Les oiseaux là-haut, dans leur vol, nʼarrivent jamais ni à exercer dʼemprise sur toi ni à te forcer à agir ni à se faire une idée de toi, non Nominatif singulier animé de huuapah- (= védique suvápas-), ce mot, en toute logique, pour ne sʼaccorder avec aucun autre de la phrase, est à considérer entre guillemets. 54 Fautif ou mis pour le duel. 55 Coordination elliptique. 56 Fautif ou mis pour le duel. 57 Coordination elliptique ? 58 Védique jī́ jana-. 59 Contre É. PIRART, 2004, p. 268. 60 Contre É. PIRART, 2004, p. 80. 61 Exemple de kṣárantī- : RS 7.34.2 vidúḥ pr̥thivyā́ divó janítraṁ V śr̥ṇvánty ā́ po ádha kṣárantīḥ « Elles savent le lieu de naissance de la terre, du ciel, les Eaux : elles entendent, certes, tandis qu’elles coulent » (traduction L. RENOU, 1955-69, vol. V p. 38). 53

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plus que les rivières ici-bas en coulant (même) sans répit ni que ceux qui régissent lʼénigme du vent » ; RS 3.33.4ab enā́ vayám páyasā pínvamānā V ánu yóniṁ devákr̥taṁ cárantīḥ « Nous (les rivières), nous gonflant de ce lait, (nous) sui(vons) en coulant le chemin que le Deva nous a tracé » ; RS 10.30.10 āvárvr̥tatīr ádha nú62 dvidhā́ rā V goṣuyúdho ná63 niyaváṁ64 cárantīḥ | ŕ̥ṣe jánitrīr bhúvanasya pátnīr V apó vandasva savŕ̥dhaḥ sáyonīḥ « Elles qui, en deux jets, se tournent de ce côté, elles qui, en coulant, suivent la pente, poète, comme ceux qui se battent pour les vaches, amadoue-les donc, les rivières génitrices et maîtresses du monde, (rivières) aux crues simultanées qui suivent une même route ».

L’épithète cárantī- est employée dans un seul vers de la R̥gvedasaṁhitā pour la qualification d’une jeune femme. Il s’agit de la fille de Manuṣ, mais sans que nous puissions déterminer le mythe auquel il est fugitivement fait allusion dans le cadre d’une comparaison : RS 1.167.3cd gúhā cárantī mánuṣo ná yóṣā V sabhā́ vatī vidathyèva sáṁ vā́ k65 « On dirait de Manuṣ la jeune femme qui, cárantī en cachette, dans lʼassemblée, a su gardé les formes » ;

Cependant, la littérature brāhmaṇique nous le suggère66, il y a fort à parier que cette fille de Manuṣ soit comparable à la Daēnā zoroastrienne. L’épithète cárantī- est employée à propos de vaches dans trois strophes de la R̥gvedasaṁhitā, mais deux d’entre elles ne nous éclairent pas sur son sens : RS 3.57.1 prá me vivikvā́ m̐ avidan manīṣā́ ṁ V dhenúṁ cárantīm práyutam ágopām | sadyáś cid yā́ duduhé bhū́ ri dhāsér V índras tád agníḥ panitā́ ro asyāḥ « Capable de faire la part des choses, Índra mʼa fourni lʼidée de la vache laitière ou cárantī, libre et sans gardien. Comme, même d’une seule traite, elle donne beaucoup de lait, les exégètes [panitár] du dhāsí [= de la réalité ?] (estiment) que cette (vache) est Agni » ;

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Particule emphatique s’ordonnant avec l’impératif. Ainsi les rivières sont-elles indirectement comparées à des vaches. 64 Mot inconnu selon L. RENOU, 1955-69, vol. XV p. 129, mais H. GRASSMANN, 1872-5, col. 732, proposait « in geschlossener Reihe » d’après O. VON BÖHTLINGK. 65 Cette forme verbale méconnue a été accentuée comme si c’était le nominatif singulier du nom de la parole. 66 S. LÉVI, 1898, p. 115-20. 63

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RS 10.27.8 gā́ vo yávam práyutā aryó67 akṣan V tā́ apaśyaṁ sahágopāś cárantīḥ | hávā íd aryó abhítaḥ sám āyan V kíyad āsu svápatiś chandayāte « Les vaches libres ont brouté l’orge du pieux adorateur. J’ai vu qu’elles étaient accompagnées d’un bouvier et qu’elles étaient cárantī. Les cris du pieux adorateur venaient les environner. Combien le propriétaire leur sera-t-il agréable ? ».

Par contre, l’allitération présente au troisième vers de la strophe qui nous reste à examiner est assez parlante, car la vache accompagnant les Marút y est dite ákṣarā « sans coulée (de lait) » sans doute pour n’avoir pas encore mis bas : RS 7.36.7 utá tyé no marúto mandasānā́ V dhíyaṁ tokáṁ ca vājíno ʼvantu | mā́ naḥ pári khyad ákṣarā cáranty68 V ávīvr̥dhan yújyaṁ té rayíṁ naḥ « À nouveau les Marút, dans la joie, doivent favoriser nos vues et notre descendance69, eux qui peuvent (nous) apporter la sécurité alimentaire [vājín70] ! La (vache) cárantī (qui les accompagne et) dont le lait ne coule pas encore [ákṣarā] ne doit pas nous mépriser ! Ils nous ont accru la richesse utile ».

L’enquête menée nous a montré que le vocabulaire utilisé n’était pas toujours différent selon qu’il fût question d’une jeune femme enceinte ou de la femelle pleine, mais il y a probablement aussi des différences dʼordre dialectal : Références Y 29.5, 34.14, 44.6 Y 46.19 Y 38.5 V 9.37 FiO 221 RS 10.144.4 Naigh RS 9.77.3, 10.138.1, 10.139.6 Yt 17.56 RS 1.116.13 67 68 69 70

Jeunes femmes

Femelles Une vache azī Deux vaches azī Rivières azī Une vache azī Huit vaches azī Une vache ahī́ Vache ahī́ Les vaches ahī́ 100 brebis *karā

Karā́ ... púraṁdhi

Alternance ABA'B'. Allitération. Association curieuse. ≈ avestique xvarǝnaŋvhaṇt-. 318

V 19.30 RS 2.35.5 H 2.10 (= Vyt 8.5) V 3.24 V 5.60 Yt 5.87 RS 1.167.3 RS 3.57.1 RS 10.27.8 RS 7.36.7

La daēnā kərətā Les devī kŕ̥tā La daēnā carāitī Une carāitī ? Une carāitikā Une carāitī Une cárantī

Une āzizanāitī Une vache cárantī Des vaches cárantī ? Une vache cárantī ?

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V 4. Lʼétymon dʼAriadne Pour son étymologie, il semble assez clair que le nom d’Ἀριάδνη soit un composé dans lequel le premier terme est le préfixe intensif bien connu ἀρι+1. En revanche, le second terme constituait déjà une belle énigme pour les anciens au vu des étymologies impossibles ou mystiques qu’ils en donnaient2. Deux évidences sont pourtant à relever : d’une part, le second terme doit être le dérivé en -νη- d’une racine apparaissant sous la forme ºαδº ; d’autre part, comme l’étrusque nous interdit de supposer la chute d’un digamma initial, la racine proto-hellénique recherchée est forcément *ad, *had ou *i̯ ad. La seule racine qui soit à disposition en grec pour l’explication du second terme du composé Ἀριάδνη est celle des mots ἄδος3 « satiété, fatigue » et ἀδαῖος « qui cause du dégoût » pour autant que nous les séparions de la famille de ἁδρός « solide, robuste »4. Si nous adoptons cette hypothèse, le sens du nom d’Ἀριάδνη ne devra pas être éloigné de « épuisée, éreintée, excédée, surmenée ». Jʼavance alors lʼinterprétation que le nom quʼelle porte ferait allusion à la fatigue extrême quʼelle connut, celle dʼune grossesse qui lui fut fatale.

1

P. CHANTRAINE, 1968, p. 108. Voir ci-dessous p. 341 n. 32 ; P. CHANTRAINE, 1968, p. 20 (s. v. ἁδνόν) ; K. KERÉNYI, [1994] 1998, p. 79, 82, 90 ; M. DARAKI, [1985] 1994, p. 98-9. R. GRAVES, [1955] 2011, nº 90a. Sur les étymologies anciennes du nom dʼ Ἀριάδνη, voir aussi R. GRAVES, [1955] 2011, vol. I p. 515 ; C. ACKER, 2002, p. 79 et 82. 3 Hapax leg. de l’Iliade 11.88. 4 Sur ces mots, P. CHANTRAINE, 1968, p. 20. 2

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VI L’immortalité dʼAriadne VI 1. Ariadne enceinte Quʼelle1 soit ou non identique à la vache primordiale de la mythologie zoroasrienne ultérieure, la vache dont il est question dans le poème vieil-avestique Y 29 est pleine comme est grosse la daēnā que l’âme-moi (uruuan-) du pieux défunt rencontre sur le chemin du paradis. Les questions inévitables qui se posent alors sont celles de savoir quel taureau a donc pu saillir cette vache, quel veau sera mis bas ou quel fils de lʼâme-moi naîtra dans lʼau-delà. En effet, la daēnā est enceinte des œuvres du jeune homme (yauuan-) sous la forme duquel lʼâme-moi du défunt apparaît dans le mythe de lʼeschatologie individuelle. Entité générale ou individuelle vue comme étant leur âme féminine, la personnification de la bonne doctrine de ceux qui offrent le sacrifice à Ahura Mazdā en suivant les recommandations de Zaraθuštra (vaŋvhī- daēnā- yā āhūiriš zaraθuštriš2), sa représentation sous la forme dʼune jeune femme enceinte (carāitī-3 ou kǝrǝtā-4) des œuvres de leur âme masculine (uruuan-) fait certes écho à la vache pleine (azī-) qui, selon ma compréhension de la hāiti Y 29, est immolée lors des funérailles du pieux défunt5, mais paraît bien correspondre aussi à la figure dʼ Ἀριάδνη qui, selon Péon dʼAmathonte6, mourut en couches. Dʼautant que la Daēnā rappelle aussi cette aimée de Διόνυσος pour être dite quant à elle haōma.canah- « aimée de Haōma »7. Toute la question, dès lors, est de savoir si la mythologie grecque nous aidera à débrouiller d’autres énigmes zoroastriennes concernant la Vache et le Taureau telles que celles de savoir comment Gə̄uš Uruuan, lʼâme-moi ou âme masculine de la Vache primordiale (Gaō Aēuuō.dātā), put avoir une 1

Je n’ai pu tenir compte du bel ouvrage que D. HERNÁNDEZ DE LA FUENTE, 2017, a consacré tout récemment au mythe de Dionysos et d’Ariadne. 2 É. PIRART, 2012a, p. 158-9. 3 Voir Chapitre V 3.4. 4 Voir Chapitre V 3.3. 5 É. PIRART, 1996, p. 7. 6 Plutarque, Thésée 20.3-7. 7 Yt 18.8.4. 323

descendance ou comment, suite à lʼassassinat dont cette vache fut la victime, le taureau *Θrisaōka put apparaître sur la scène mythique. Il va de soi que, pour un vacher, le bonheur éternel ne se conçoit pas sans la compagnie de cette vache dont il dépendit si souvent ici-bas pour sa survie. Le tandem de lʼâme-moi et de la bonne doctrine reflète alors celui du vacher et de la vache, tandis que le taureau qui doit naître de cette vache trouvera dans la figure eschatologique des Saōšiiaṇt un reflet essentiel. Surtout si ceux-ci sont bel et bien les enfants de lʼâme de Zaraθuštra. Comme elle nʼa obtenu lʼimmortalité quʼune fois morte en couches8, nous comparerons donc Ἀριάδνη à la vache pleine des textes vieil-avestiques (gaō- azī-), victime sacrificielle probable lors des funérailles dʼun pieux sacrifiant. Pour sa part, la déesse Daēnā fille dʼAhura Mazdā, à plusieurs reprises, descend dans le monde concret (gaēiθiia), puis, devenue lʼâme féminine du mazdéen, est fécondée par les idées, les mots et les gestes rituels attendus de ce dernier et y meurt avec lui avant de le retrouver là-bas sur la route du paradis. La Daēnā meurt ainsi de façon répétée, avec chacun des pieux adorateurs, mais, chaque fois enceinte dʼun futur sacrifiant immortel, un saōšiiaṇt. Celui-ci renforcera le monde divin face aux forces délétères et lui assurera la victoire définitive au terme des douze millénaires du temps linéaire. Le statut de sacrifiant eschatologique (saōšiiaṇt-) du fils du uruuan et de la daēnā ne paraît être assuré que dans le cas de Zaraθuštra si les trois vierges qui viendront successivement se baigner dans le lac Kąsaōiia9 conservant sa semence et, de ce fait, tomberont enceintes représentent sa triple daēnā10, mais, dans le cas d’autres mazdéens, aucune donnée textuelle n’apporte de certitude. À vrai dire, chacun dʼeux pourrait être à lʼorigine dʼun sacrifiant ou dʼun combattant eschatologique qui vînt augmenter les lignes des armées du bien face aux démons et à leurs suppôts, mais lʼexistence dʼautres possibilités est à vérifier à la lumière de la mythologie comparée, faute de textes zoroastriens pouvant nous éclairer à ce propos. La difficulté vient effectivement des silences iraniens puisque nous ne sommes informés de façon explicite ni sur le fruit des amours de lʼâme-moi et de la bonne doctrine ni sur celui de la vache azī ni quant à savoir de façon 8

Voir K. KERÉNYI, [1994] 1998, p. 82 ; C. ACKER, 2002, p. 84-9. ZA 35.60, à se contenter de la mention d’Anāhitā à qui Nairiia Saŋha avait confié la semence de Zaraθuštra, tait le nom de ce lac. ||| Le nom de ce lac mythique, kānsaviya-, si nous devons l’expliquer en nous appuyant sur l’indien kāñchati, signifiera « érotique » (É. PIRART, 2010a, p. 96 n. 25). L’étymologie qui, dans la dernière phrase de ZA 11C.5, est avancée de ce nom à partir de celui des Kəuui est clairement à rejeter. Elle est d’ailleurs absente des manuscrits iraniens. 10 ZA 33.36-8 ; É. PIRART, 2010a, p. 89-95. 9

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explicite si la Vache primordiale est bel et bien une azī ou si le taureau *Θrisaōka est directement ou indirectement né dʼelle. La plongée de la Daēnā, une mańiiə̄uuī ou entité abstraite, dans le monde gaēiθiia pour que le mazdéen lʼy ensemence et la retrouve enceinte au-delà de la mort, voilà qui rappelle le sort dʼ Ἀριάδνη : elle dut mourir enceinte pour que Διόνυσος fît dʼelle une déesse immortelle, une résidente à part entière de lʼOlympe. En principe, la mort dʼ Ἀριάδνη, consécutive à son abandon sur lʼîle de Dia, doit nous suggérer quelques pistes dans la compréhension des mythes zoroastriens de lʼeschatologie individuelle et de lʼeschatologie générale. Reprenons donc le dossier grec là où nous lʼavions laissé, lorsque Θησεύς, à la mort du Μινώταυρος, quitte précipitamment la Crète avec Ἀριάδνη et le groupe des jeunes gens qui auraient dû faire lʼordinaire du monstre.

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VI 2. Mariage et abandon Sur quelle île Θησεύς aurait-il épousé Ἀριάδνη ? Où Διόνυσος aurait-il épousé Ἀριάδνη ? Dans quel ordre de succession ces deux mariages auraient-ils été célébrés ? Sur quelle île Θησεύς l’aurait-il abandonnée ? Pourquoi l’aurait-il abandonnée ? Trois réponses ont été données à cette dernière question : elle était malade, il en aimait une autre, les dieux le lui ordonnèrent. Quelle est la bonne ? Selon la version quʼHygin rapporte dans l’Astronomie1, Ἀριάδνη sʼétait mariée avec Διόνυσος sur lʼîle de Dia, mais, dans les Fables quʼil lui consacre2, Hygin se montre plus explicite : elle était tombée amoureuse de Θησεύς, lʼaida à pénétrer dans le Labyrinthe pour y tuer le Μινώταυρος et, avec le fameux fil, lui permit dʼen ressortir avant de sʼenfuir de Crète avec elle et de lʼépouser3. Alors quʼelle sʼétait assoupie, Θησεύς lʼabandonna sur lʼîle de Dia où une tempête4 leur avait imposé de faire escale, mais Διόνυσος lʼy recueillit pour lʼépouser à son tour5. Ἀριάδνη, suite à ce nouveau mariage, prenait pied dans l’Olympe. Elle est ainsi comptée parmi les mortels qui devinrent immortels6. Pour Apollodore7, lors de l’escale que Θησεύς fit de nuit à Naxos, Διόνυσος enleva Ἀριάδνη pour l’emmener à Lemnos où elle lui donnerait quatre fils. Dans l’affliction de la perte d’ Ἀριάδνη, Θησεύς oublie de hisser les voiles blanches convenues en cas de succès de l’expédition devant éliminer le Μινώταυρος et cause ainsi le suicide de son père Αἰγεύς. Διόνυσος prend Ἀριάδνη comme épouse légitime. Elle devient son ἄκοιτις, sa-

1

Hygin, Astronomie 2.5.1. Sur les mariages d’ Ἀριάδνη, G. MORCILLO EXPÓSITO, 2008, p. 79 et 169. 3 Hygin, Fables 42. 4 Cette tempête pourrait à la rigueur être comparée à celle qui, dans le mythe zoroastrien, avait causé la chute des feux dans les flots de lʼOcéan lors de la traversée que les premiers hommes en avaient entreprise sur le dos du taureau *Θrisaōka. 5 Hygin, Fables 43 ; Pausanias, Description de la Grèce 1.20.3. ||| L’une des versions que Pausanias (Description 10.29.4) rapporte du mythe la fait enlever par Διόνυσος au cours d’un combat naval contre Θησεύς. 6 Hygin, Fables 224. ||| Sur les mariages entre mortels et immortels, K. KERENYI, [1958] 2009b, p. 65. 7 Apollodore, Bibliothèque ép. 1.9. Diodore (Bibliothèque 4.61), lui aussi, parle d’un enlèvement. 2

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vons-nous par Hésiode8. Et Ζεύς, faisant dʼelle une immortelle, entérine ce mariage9 : Χρυσοκόμης δὲ Διώνυσος ξανθὴν Ἀριάδνην, κούρην Μίνωος, θαλερὴν ποιήσατ’ ἄκοιτιν·10 τὴν δέ οἱ ἀθάνατον καὶ ἀγήρων θῆκε Κρονίων. « Dionysos aux cheveux dʼor, de la blonde Ariane, | de la fille de Minos, fit son épouse florissante | ―et le fils de Cronos la fit immortelle, soustraite à la mort et à la vieillesse »11.

Walter Otto le fait remarquer, l’union d’ Ἀριάδνη et de Διόνυσος n’est pas passagère. Il s’agit d’un amour extatique et permanent12. Nous pourrions le comparer à celui de Śiva et de Pārvatī. Ἀριάδνη est l’élue de Διόνυσος pour un mariage sans cesse recommencé. Fuyant avec elle, Θησεύς prend la mer, mais abandonne donc sa complice Ἀριάδνη sur une île où elle sera recueillie par Διόνυσος13. En réalité, lʼarrêt que, dans son voyage de retour pour Athènes, Θησεύς fait dans lʼîle de Dia14, qu’il s’agisse de l’île de Dia toute proche du rivage crétois ou de Naxos qui aurait porté anciennement ce nom15, nous oblige à revenir en arrière. En effet, selon certaines sources, Ἀριάδνη nʼabordait pas cette île pour la première fois. Si les dieux avaient déjà célébré le mariage dʼ Ἀριάδνη et de Διόνυσος sur lʼîle de Dia16 bien avant que Θησεύς vînt à y faire escale17, nous ignorons alors pourquoi Ἀριάδνη se trouvait à Cnossos lors de la venue de Θησεύς. Certes, fille de Μίνως, elle devait y avoir ses entrées surtout après la mort de son frère Ἀνδρόγεως, mais il est fort risqué de voir en elle la « reine du Labyrinthe » nommée dans une tablette mycénienne trouvée sur place. 8

M. DARAKI, [1985] 1994, p. 97 ; A. PEREZ JIMENEZ et A. MARTINEZ DIAZ, 1978, p. 111 ; F. J. CUARTERO IBORRA, 2012, p. 146-7 et 230 n. 251. 9 Hésiode, Théogonie 947-9. 10 948b = 946b. 11 Traduction A. BONNAFÉ, 1993, p. 149. 12 W. OTTO, [1933] 2017, p. 198 et 224. 13 Plutarque, Thésée 20.1. ||| Sur la séparation de Θησεύς et dʼ Ἀριάδνη, F. JOUAN, 1966, p. 384-8 ; R. GRAVES, [1955] 2011, nº 98n. 14 Apollonios, Argonautiques 4.425, 4.434. 15 K. KERÉNYI, [1994] 1998, p. 81, 86, 93-4. 16 À Naxos, une source de vin jaillit du sol au jour de sa fête en souvenir de ses noces avec Ἀριάδνη : voir M. DARAKI, [1985] 1994, p. 48. 17 Voir le commentaire que G. COLLI, 1978, donne du fragment B18 dʼÉpiménide. 328

Pour Apollonios de Rhodes18, Θησεύς ne s’était pas enfui de Crète : Μίνως, sa colère dissipée, s’était même mis d’accord avec lui pour quʼ Ἀριάδνη le suivît dans son voyage de retour pour Athènes, mais, apparemment, sans que le mariage ne fût consommé19, elle fut abandonnée à Dia. Autre difficulté, toutes les sources ne concordent pas à dire que Dia était lʼîle où son mariage avait eu lieu et où, plus tard, suite à son abandon par Θησεύς, elle trouva la mort. En effet, Naxos aurait aussi porté ce nom de Dia, et Péon dʼAmathonte affirme quʼelle mourut à Chypre plutôt quʼà Dia ou à Naxos. Quant à la danse de la grue chère à Ἀριάδνη, Θησεύς en aurait introduit la pratique non à Dia ni à Naxos ni à Chypre, mais à Délos. Disons donc quʼil y eut bel et bien escale dans une île sur le chemin dʼAthènes, mais que lʼîle, du nom de Δίη « la Céleste »20, nʼest probablement pas à rechercher en dehors de la réalité mythique. Le culte dʼ Ἀριάδνη à Amathonte fait dʼelle tout à la fois une femme morte en couches, une défunte enterrée avec son embryon et une déesse assimilée à Ἀφροδίτη21. Lʼénigme de cette apparente contradiction est à mettre en relation avec la tradition de Délos selon laquelle Ἀριάδνη avait offert une statuette d’ Ἀφροδίτη à Θησεύς22. Ἀριάδνη, épouse légitime de Διόνυσος, ne se détourne pourtant pas d’ Ἀφροδίτη. Elle en est, tout au contraire, le doublet, mais il est surprenant quʼune morte fasse une Ἀφροδίτη23. Selon le fragment 298 d’Hésiode, Θησεύς avait abandonné Ἀριάδνη par amour pour Αἴγλη fille de Πανοπεύς24, mais, bien plus tard, Θησεύς épousait Φαίδρα, autre fille de Μίνως, selon Plutarque ou Diodore25. Αἴγλη, faut-il remarquer, est aussi le nom de Κορωνίς, cette amante infidèle d’ Ἀπόλλων qui, tout comme Ἀριάδνη, fut tuée d’une flèche par Ἄρτεμις. Et le nom du père de l’ Αἴγλη que Θησεύς préféra à Ἀριάδνη est aussi celui d’un endroit nommé dans l’Odyssée comme étant le lieu où de belles danses sont 18

Apollonios, Argonautiques 3.1000-1, 3.1100-1. Apollonios (Argonautiques 3.998, 3.1099, 4.433) la qualifie de παρθενική. 20 < *diu̯ii̯ ā- : voir P. CHANTRAINE, 1968, colonne 286a. 21 Plutarque, Thésée 20.7 : voir K. KERÉNYI, [1994] 1998, p. 84 ; M. DARAKI, [1985] 1994, p. 98. 22 K. KERÉNYI, [1994] 1998, p. 84. 23 La déesse zoroastrienne Aš ̣i pourrait-elle apporter un début de réponse ? 24 Hésiode, chez Plutarque, Thésée 20.2 ; Athénée de Naucratis, Banquet des Savants 13.557a ; A. PÉREZ JIMÉNEZ et A. MARTÍNEZ DÍAZ, 1978, p. 340-1 ; K. KERÉNYI, [1994] 1998, p. 81-2. 25 Plutarque, Thésée 28.1 ; Diodore, Bibliothèque 4.62.1 ; K. KERÉNYI, [1994] 1998, p. 81. 19

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exécutées du fait que, selon Pausanias, les Thyades d’Attique qui prenaient la direction du Parnasse y offraient leurs danses26 : Λητὼ γὰρ ἥλκησε, Διὸς κυδρὴν παράκοιτιν, Πυθὼ δʼἐρχομένην διὰ καλλιχόρου Πανοπῆος. « car (Τityos) avait assailli la compagne de Ζeus, lʼauguste Léto qui sʼen allait à Delphes (en passant) par (la plaine de) Panopée où de belles danses (sont exécutées) »27.

Aux Oschophories28, des branches de vigne avec des grappes étaient portées d’Athènes à Phalère, des garçons nus dansaient en l’honneur de Διόνυσος, puis des remerciements étaient adressés à Διόνυσος et à Ἀριάδνη pour n’être pas venus à Athènes avec Θησεύς. Étranges remerciements, qui relèvent de la logique olympienne, prompte à barrer le chemin aux dieux infernaux. De tels remerciements paraissent peu compatibles avec l’idée d’un abandon et suggèrent quʼil y eut un ordre des dieux auquel Θησεύς aurait obtempéré. Il est paradoxal quʼ Ἀριάδνη soit vue comme lʼépouse modèle, tout à la fois amante et aimée, quand, par ailleurs, un double mariage la caractérise tout aussi bien. Comme la raison dʼêtre du paradoxe reste hors de portée, il convient, faute dʼune justification logique, de souligner que la comparaison démontre son antiquité : le double mariage de cette petite-fille du Soleil29 la rapproche de l’épouse de Sóma, la fille aînée du Soleil, à laquelle le Sūryāsūkta30 et, à sa suite, les Gr̥hyasūtra donnent non moins de quatre maris successifs.

26

Homère, Odyssée 11.580-1 ; Pausanias, Description de la Grèce 10.4.2-3 ; W. OTTO, [1933] 2017, p. 67. 27 Légère modification de la traduction de V. BÉRARD, 1924, p. 107. 28 Hésychios, s. v. Oschophorion ; Athénée, Banquet des Savants 14.631b ; Pausanias, Description de la Grèce 1.20.3 ; Plutarque, Thésée 22.4-7, 23 ; Proclos, Chrestomathie 88-91 ; P. VIDAL-NAQUET, [1981] 2005, p. 164-5 ; M. DARAKI, [1985] 1994, p. 23, 93-4. 29 Sa mère Πασιφάη est fille du Soleil. 30 RS 10.85.41. 330

VI 3. La couronne de lumière Qui avait fourni la couronne à Θησεύς ou à Ἀριάδνη ? La logique est-elle toujours bonne conseillère à l’instant de départager les versions du mythe ? Hygin1, qui reprend les données quʼÉratosthène de Cyrène lui fournit2, expose quʼ Ἀριάδνη, lors de son mariage avec Διόνυσος célébré à Dia, reçut une couronne comme cadeau dʼ Ἀφροδίτη et des Ὧραι avant que les autres dieux ne lui fissent eux aussi des cadeaux. Hygin, à la suite dʼÉratosthène, signale que, selon la tradition présente dans les Crétiques dʼÉpiménide3, cette couronne lui fut offerte par Διόνυσος dans le but de la séduire, quʼelle accepta ce cadeau, une œuvre dʼ Ἥφαιστος faite dʼor et de pierres précieuses venues de lʼInde fabuleuse, et que, par la suite, elle la céda à Θησεύς afin quʼil y vît clair dans lʼobscurité du Labyrinthe. Hygin rapporte aussi4 la version quʼil en a trouvée dans lʼArgolique : Ἀφροδίτη lui avait offert la couronne, mais, dans son désir de tirer sa mère de lʼHadès, Διόνυσος, de peur de la souiller au contact des morts, se défit de cette couronne, avant dʼy descendre. Lʼendroit où il avait placé la couronne le temps de sa descente dans lʼHadès, depuis lors, porte le nom de Στέφανος « Couronne », mais Διόνυσος la plaça ensuite parmi les astres afin dʼimmortaliser son nom. Hygin rapporte encore deux autres traditions concernant cette couronne : selon la première5, la Corona Borealis ne serait autre que celle de Θησεύς. Il était arrivé en Crète avec les sept jeunes filles et les sept garçons dʼAthènes, en présence du roi Μίνως lorsque ce dernier, séduit par la beauté de lʼune des jeunes filles, Περίβοια, voulut abuser dʼelle. Θησεύς sʼinterposa et prétendit être le fils de Ποσειδῶν. Afin de le vérifier, Μίνως enleva de son doigt un anneau dʼor, le lança à la mer et donna lʼordre à Θησεύς dʼaller le rechercher. Sans hésiter, Θησεύς plongea et reçut des Néréides lʼanneau de Μίνως tandis que Θέτις, par la même occasion, lui remettait la couronne brillante quʼ Ἀφροδίτη lui avait offerte lors de son mariage avec Πηλεύς. Selon la se1

Hygin, Astronomie 2.5.1. ||| Sur la Couronne, M. SANZ MORALES, 2002, p. 401 ; G. MORCILLO EXPÓSITO, 2008, p. 249-51. 2 Ératosthène, Catastérismes 5. 3 Entre les VIe et Ve siècles avant notre ère. 4 Hygin, Astronomie 2.5.2. 5 Hygin, Astronomie 2.5.3. 331

conde tradition6, ce fut Ἀμφιτρίτη qui avait remis cette couronne à Θησεύς. Et celui-ci en fit cadeau à Ἀριάδνη, mais Διόνυσος, à la mort dʼ Ἀριάδνη, plaça cette couronne parmi les étoiles. Selon Bacchylide de Céos7, Ἀμφιτρίτη remit à Θησεύς la couronne quʼ Ἀφροδίτη lui avait offerte lors de son mariage avec Ποσειδῶν. C’est la fameuse scène que le peintre Onésimos a représentée sur la coupe à figures rouges déjà mentionnée, mais Bacchylide ne limite pas à cette couronne le cadeau d’ Ἀμφιτρίτη8 : ἅ νιν ἀμφέβαλεν ἀϊόνα πορφυρέαν. κόμαισί τ’ ἐπέθηκεν οὔλαις ἀμεμφέα πλόκον, τόν ποτέ οἱ ἐν γάμῳ δῶκε δόλιος Ἀφροδίτα ῥόδοις ἐρεμνόν. « (elle) qui lui jeta sur les épaules une tunique de pourpre | et posa sur ses cheveux bouclés l’intacte couronne, | celle dont jadis lui fit cadeau à l’occasion | de son mariage, l’artificieuse Aphrodite, ombrée de roses ».

Daraki9 relève que la mer devait être vue comme l’antichambre du monde des morts et souligne les liens rapprochant Διόνυσος des divinités marines. Sa bien-aimée, Ἀριάδνη, ainsi se pare-t-elle d’une couronne, issue de la mer selon Bacchylide10, mais la couronne de la mariée nʼest donc pas le seul présent de bienvenue que la Néréide fait à son visiteur : il y a aussi la robe de la mariée, pouvons-nous extrapoler un peu, surtout en admirant le chiton court de type nuisette dont Θησεύς se trouve à peine vêtu devant la reine des abysses si nous nous fions à la représentation quʼOnésimos offre de la scène. Le terme employé pour nommer cette nuisette, malheureusement, fait difficulté, mais, en réalité, Onésimos dépeint Θησεύς vêtu de la tunique courte des adolescents tandis que Bacchylide, à propos du cadeau d’ Ἀμφιτρίτη, nous parle peut-être d’un autre type de vêtement. García Romero11 nous apporte les renseignements suivants : quatre interprétations ont été avancées. Selon la première, ἀϊόνα serait la forme dorienne de l’accusatif singulier de ἠϊών « bord de la mer ou d’une rivière » et signifierait « bord d’un vêtement, vêtement avec frange », un sens non attesté par ailleurs ; selon la deuxième interprétation qui est celle la plus commu6

Hygin, Astronomie 2.5.4. Bacchylide, frag. 17 (Dithyrambe « Les jeunes ou Thésée ») ; F. GARCÍA ROMERO, 1988, p. 162-9. 8 Bacchylide, frag. 17.112-6. 9 M. DARAKI, [1985] 1994, p. 41. 10 M. DARAKI, [1985] 1994, p. 41. 11 F. GARCÍA ROMERO, 1988, p. 168-9 n. 19. 7

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nément admise, il s’agirait d’un mot d’origine égyptienne désignant un vêtement de lin ; selon la troisième, le mot désignerait métaphoriquement la partie inférieure du visage si bien que le passage ferait allusion à un geste de bienvenue et devrait être traduit comme suit : « elle embrassa la moitié inférieure de son visage de pourpre » ; selon la dernière, il faudrait garder le sens premier du mot en admettant une correction assez risquée du contexte, ˟ἀμφέβαλ’ ἀν’˟ ἀϊόνα : « elle le conduisait embrassé le long du rivage de pourpre ». Cette dernière interprétation est résolument à rejeter si la scène doit avoir lieu au fond de la mer. Ma préférence, bien évidemment, va à la première interprétation en raison du parallélisme qu’elle permet de tracer avec une donnée avestique. Sur le chemin de l’au-delà, la daēnā, selon la version du Vīdaēuu-dāt, apparaît aux yeux de l’âme-moi du pieux défunt sous la forme d’une jeune femme décrite comme étant tout à la fois nīuuiuuaitī- « vêtue d’une nīuui » et pusauuaitī- « couronnée »12. Θησεύς serait-il donc un travesti, vêtu d’une robe de mariée et porteur de la couronne de celle qui se marie ? Arriverait-il à Cnossos déguisé en jeune fille ? Plutarque13 nous pousse à le penser. L’ambiance dionysiaque du mythe sans doute y est-elle pour quelque chose. Θησεύς, pour passer inaperçu, s’était déguisé, comme d’autres garçons, en jeune fille à l’instant de se glisser parmi les jeunes gens constituant le tribut que les Athéniens devaient payer au roi de Crète. Certes, les attestations du védique nīví- nous permettent de savoir que ce sont les femmes qui, le plus souvent, se nouent cette pièce de tissu autour du corps, mais, comme nous devons faire de lui le Διόνυσος védique, il est remarquable quʼun yajuṣ fasse de la nīví le vêtement de Sóma si, par ailleurs, c’en est un de féminin14 : sómasya nīvír asi « Tu es la nīví de Sóma »15.

Que la couronne fût offerte à Θέτις ou à Ἀμφιτρίτη, il s’agit toujours d’un cadeau de mariage qu’ Ἀφροδίτη fit à une Néréide. Θησεύς, lors de sa plongée, a beau recevoir cette couronne des mains de la reine des abysses, nous ne pouvons faire de lui la mariée. C’est donc comme si les Néréides savaient d’ores et déjà que Θησεύς prendrait la main de la princesse crétoise ou que celle-ci, de toute façon, allait se marier sous peu. Dans cette seconde alter12

V 19.30.1 : voir É. PIRART, 2012c, p. 42-3. Sur cette couronne, voir encore Yt 5.128 et FiO 477. Lʼavestique pusā- est à rapprocher étymologiquement des mots grecs ἄμπυξ « diadème » (dès Homère, Iliade 22.469) et πύκα « de façon serrée, solide » : voir P. CHANTRAINE, 1968, colonnes 78b et 953b. 13 Plutarque, Thésée 23.3. 14 Voir M. MAYRHOFER, 1992-2001, vol. II p. 51. 15 VSM 4.10 (= ŚBM 3.2.1.15, KS 2.3). 333

native, Θησεύς ferait, à son insu, office dʼentremetteur, de porteur de cadeaux ou d’agent de liaison. Pratiquement fluorescente par la quantité des pierres précieuses qui lʼornent, la couronne lui sert de lanterne, voire de sauf-conduit ou de talisman à l’instant de s’introduire dans le boyau du Labyrinthe, mais la pelote de fil qu’ Ἀριάδνη lui a remise lui permet de faire le chemin inverse, de retrouver la sortie et de revoir le jour. Ce lui sera comme une nouvelle naissance, et le fil d’ Ἀριάδνη apparaîtra donc comme un cordon ombilical salvateur. À peine arrivé en Crète, Θησεύς reçoit donc lʼaide bien utile et opportune de lʼune des filles du roi, Ἀριάδνη, qui, tombant amoureuse de lui, demande à Δαίδαλος, lʼarchitecte du Labyrinthe, comment elle pourra sauver ce bienaimé. Δαίδαλος lui répond que Θησεύς retrouvera le chemin du retour depuis le fond du Labyrinthe en attachant le bout dʼune pelote de laine à la porte dʼentrée et en déroulant ensuite le fil derrière lui. Ce stratagème et celui de prendre la fuite par le haut se retrouveront bien plus tard, dans le défi que Δαίδαλος, réfugié en Sicile, pourra relever, le défi de découvrir comment faire pour passer jusquʼau bout un fil dans les circonvolutions dʼun coquillage. Lʼingénieux Δαίδαλος voit tout de suite quʼil suffit de faire un trou à la pointe du coquillage, dʼy introduire une fourmi à laquelle le fil sera attaché et, par des mouvements, de lui en faire parcourir les circonvolutions jusquʼà ce quʼelle en ressorte par lʼouverture naturelle. Ce fil qui lui permet comme à la fourmi de retrouver la lumière du jour nʼest pas le seul outil quʼ Ἀριάδνη remet à Θησεύς. Il y a aussi la couronne que Διόνυσος a offerte à la fille de Μίνως et avec laquelle Θησεύς éclairera les méandres du couloir, mais une autre tradition rapporte que le héros athénien est déjà en possession de la couronne à son arrivée en Crète : cʼest Ἀμφιτρίτη qui la lui a remise lorsquʼil a plongé au fond de la mer à la recherche de lʼanneau que Μίνως, pour le mettre à lʼépreuve, y a lancé. Le fil salvateur qui permet le retour à la lumière et la couronne dont lʼutilité souligne encore lʼimportance de la lumière sont sans aucun doute des pièces à conviction dans le cadre de lʼenquête que nous menons sur les relations devant exister entre, dʼune part, le mythe dʼ Ἀριάδνη et, dʼautre part, les mythes du taureau *Haδāiiu, de la vache azī et de la daēnā carāitī que le uruuan du pieux défunt rencontre sur la route du paradis. Par la complexité quʼelle présente16, la cérémonie sacrificielle védique de lʼAgniṣṭoma peut rappeler les sinuosités du Labyrinthe ou celles des boyaux de la parturiente. Les textes védiques parlent en effet de lʼextension du fil du sacrifice, et lʼenfant qui voit le jour dispose de ce fil quʼest le cordon ombi16

Cette complexité fut mise en lumière par W. CALAND et V. HENRY, 1906-7. 334

lical. Une métaphore de ce type pourrait donc expliquer lʼorigine du fil dʼ Ἀριάδνη. La séquence rituelle védique de la dīkṣā, préalable à la célébration de lʼAgniṣṭoma, au cours de laquelle le sacrifiant adopte lʼapparence et les manières de lʼembryon17, nous pousse dʼailleurs aussi à le penser. Les circonvolutions du Labyrinthe sont comparables aussi à celles des boyaux du système digestif avec lesquels ou parmi lesquels se confondent ceux du système reproducteur. Et la chaleur digestive ou corporelle était expliquée par la présence d’un feu, celui appelé Vaiśvānara dans l’Inde védique, mais Vohu.friiāna dans l’Avesta, celui-là même auquel le Saōšiiaṇt recourra en vue de célébrer le sacrifice avec lequel le monde sera parachevé. La danse évoquée dans le dernier tableau dont Ἥφαιστος orne le bouclier d’ Ἀχιλλεύς18 sans doute rappelle-t-elle les circonvolutions du Labyrinthe, et le poète astucieux n’a pas oublié non plus de l’éclairer de belles couronnes : Ἐν δὲ χορὸν ποίκιλλε περικλυτὸς Ἀμφιγυήεις, τῷ ἴκελον οἶόν ποτ’ ἐνὶ Κνωσῷ εὐρείῃ Δαίδαλος ἤσκησεν καλλιπλοκάμῳ Ἀριάδνῃ. Ἔνθα μὲν ἠΐθεοι καὶ παρθένοι ἀλφεσίβοιαι ὠρχεῦντ’, ἀλλήλων ἐπὶ καρπῷ χεῖρας ἔχοντες· τῶν δ’αἱ μὲν λεπτὰς ὀθόνας ἔχον, οἱ δὲ χιτῶνας εἵατ’ ἐυννήτους, ἦκα στίλβοντας ἐλαίῳ· καί ῥ’ αἱ μὲν καλὰς στεφάνας ἔχον, οἱ δὲ μαχαίρας εἶχον χρυσείας ἐξ ἀργυρέων τελαμώνων· οἱ δ’ ὁτὲ μὲν θρέξασκον ἐπισταμένοισι πόδεσσι ῥεῖα μάλ’, ὡς ὅτε τις τροχὸν ἄρμενον ἐν παλάμῃσιν ἐζόμενος κεραμεὺς πειρήσεται, αἴ κε θέῃσιν· ἄλλοτε δ’ αὖ θρέξασκον ἐπὶ στίχας ἀλλήλοισι. Πολλὸς δ’ ἱμερόεντα χορὸν περιίσταθ’ ὅμιλος τερπόμενοι· δοιὼ δὲ κυβιστητῆρε κατ’ αὐτούς μολπῆς ἐξάρχοντες ἐδίνευον κατὰ μέσσους. « L’illustre Boiteux y modèle encore une place de danse19 toute pareille à celle que jadis, dans la vaste Cnosse, l’art de Dédale a bâtie pour Ariane aux belles tresses. Des jeunes gens, des jeunes filles, pour lesquelles un mari donnerait bien des bœufs, sont là qui dansent en se tenant la main au-dessus du poignet. Les jeunes filles portent de fins tissus ; les jeunes gens ont revêtu des tuniques bien tissées, où luit doucement 17

La Dīkṣā est parfois déifiée comme épouse de Soma. Homère, Iliade 18.590-606. 19 Sur la piste de danse construite pour Ἀριάδνη, K. KERENYI [1994] 1998, p. 18

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l’huile. Elles ont de belles couronnes ; eux, portent des épées en or, pendues à des baudriers en argent. Tantôt, avec une parfaite aisance, ils courent d’un pied exercé ―tel un potier, assis, qui essaye la roue bien faite à sa main, pour voir si elle marche― tantôt ils courent en ligne les uns vers les autres. Une foule immense et ravie fait cercle autour du chœur charmant. Et deux acrobates, pour préluder à la fête, font la roue au milieu de tous »20.

Certaines versions du mythe sont, en principe, aberrantes. Pour l’une d’elles, la couronne appartenait à Ἀριάδνη, fille du roi de Crète. Ἀριάδνη repoussa la proposition de mariage de Διόνυσος parce quʼil avait forme mortelle, car elle ne voulait pas se marier avec un être humain depuis que Θησεύς lʼavait abandonnée. Afin de démontrer sa divinité, Διόνυσος lui prit la couronne et la lança au ciel. Ἀριάδνη, convaincue, acceptait alors de se marier avec lui et devint immortelle. Selon une autre version, Διόνυσος offrit à Ἀριάδνη une couronne à lʼoccasion de leur mariage, mais, à sa mort, lança la couronne au ciel où elle devint une constellation, la Corona Borealis. Ζεύς ne la divinisa que par la suite. Pour la logique, nous aimerions que le mariage d’ Ἀριάδνη avec Διόνυσος eût lieu dans un premier temps et que l’infidélité montrée avec Θησεύς la fît assassiner par la suite. Selon Apollonios de Rhodes21, ce sont les Immortels, pleins d’estime pour Ἀριάδνη, qui placèrent sa couronne d’étoiles parmi les constellations. Il faut sʼy résoudre, nous ne pouvons connaître sûrement lʼorigine de la couronne. Nous alléguerons le peu dʼutilité de le savoir et soulignerons, en revanche, le bénéfice engrangé à lʼoccasion de lʼenquête : la comparaison, resserrée de la sorte, confirme lʼorigine proto-indo-européenne des éléments constitutifs des mythes étudiés. Le récit le plus cohérent est, me semble-t-il, celui qui, contre Apollodore ou Diodore, reprend l’épisode de la plongée et qui, avec Diodore22, explique que Διόνυσος enlève Ἀριάδνη lors de l’escale sur une une île et la divinise bien ultérieurement, suite à sa mort, en plaçant sa couronne parmi les astres. Dans cette hypothèse, il est aisé de compléter la séquence pour ce qui est de la couronne : Θησεύς qui l’a reçue des mains d’ Ἀμφιτρίτη, après s’en être servi dans le Labyrinthe, l’aura offerte à Ἀριάδνη comme promesse qu’elle serait reine d’Athènes, mais l’escale nocturne sur l’île de Dia permettra à Dionysos de l’enlever.

20 21 22

Traduction P. MAZON, 1937-8, vol. III p. 190. Apollonios, Argonautiques 3.1001-4. Diodore, Bibliothèque 4.61. 336

VI 4. La flèche dʼArtémis De quand datait sa grossesse ? Car, pour qu’elle mourût en couches à Dia, il fallait que le début de sa grossesse fût antérieure à l’arrivée de Θησεύς en Crète. Dans la Nékyia de l’Odyssée, il est dit qu’ Ἀριάδνη fut enlevée par Θησεύς avec l’intention de la conduire à Athènes. Cependant, avant d’y arriver, elle fut tuée d’une flèche par Ἄρτεμις à la demande de Διόνυσος lors dʼune escale à Dia. Le dieu devait donc avoir quelque droit sur Ἀριάδνη. C’est ce que remarque Walter Otto sur base du parallélisme que l’on peut tracer avec la mort de Κορωνίς1 : Φαίδρην τε Πρόκρίν τε ἴδον καλήν τʼ Ἀριάδνην, κούρην Μίνωος ὀλοόφρονος, ἥν ποτε Θησεὺς ἐκ Κρήτης ἐς γουνόν Ἀθηνάων ἰεράων ἦγε μέν οὐ δʼ ἀπόνητο· πάρος δέ μιν Ἄρτεμις ἔκτα Δίῃ ἐν ἀμφιρύτῃ Διονύσον μαρτυρίῃσι. « Je vis Phèdre2 et Procris3 et la belle Ariane, la fille de Minos4 à lʼesprit malfaisant : Thésée qui lʼemmena de la Crète aux coteaux dʼAthènes la sacrée, nʼen connut pas lʼamour. Dionysos lʼaccusait. Artémis, dans Dia, dans lʼîle entre-deux-mers, la perça de ses flèches »5.

En effet, Κορωνίς, elle aussi, fut abattue par Ἄρτεμις, cette fois à la demande d’ Ἀπόλλων pour l’avoir trompé avec un amant mortel, comme nous le lisons dans la première antistrophe de la troisième Pythique de Pindare6 :

τὸν μὲν εὐίππου Φλεγύα θυγάτηρ πρὶν τελέσσαι ματροπόλῳ σὺν Ἐλειθυί1

Homère, Odyssée 11.321-4 ; W. OTTO, [1933] 2017, p. 67 ; K. KERÉNYI, [1994] 1998, p. 80-1 et 83. 2 Les quatre filles de Μίνως sont Ἀκακαλλίς, Ξενοδίκη, Ἀριάδνη et Φαίδρα, mais, pour Diodore (Bibliothèque 4.62), Φαίδρα est la sœur de Μίνως. 3 Πρόκρις est une princesse athénienne, épouse infidèle de Κέφαλος et amante de Μίνως. 4 Sur Ἀριάδνη comme fille de Μίνως, K. KERÉNYI, [1994] 1998, p. 79. Faut-il penser ici à la yoṣā de Manuṣ (RS 1.167.3cd) ? 5 Traduction V. BÉRARD, 1924, p. 96. 6 Voir aussi Pausanias, Description de la Grèce 2.26.6. 337

ᾳ, δαμεῖσα χρυσέοις τόξοισιν ὕπʼ Ἀρτεμιδέος εἰς Ἀίδα δόμον ἐν θαλάμῳ κατέβα, τέχναις Ἀπόλλωνος. χόλος δʼ οὐκ ἀλίθιος γίνεται παίδων Διός. ἁ δʼ ἀποφλαυρίξαισά νιν ἀμπλακίαισι φρενῶν, ἄλλον αἴνησεν γάμον κρύβδαν πατρός, πρόσθεν ἀκερσεκόμᾳ μιχθεῖσα Φοίβῳ, « La fille de Phlégyas le chevalier | avant de lʼavoir porté jusquʼau terme avec lʼAccoucheuse, | Eleïthuïe, fut domptée par les flèches | dʼor dʼArtémis | en sa chambre et sombra dans le gîte dʼAïdâs | de par Apollon. Jamais nʼest dérisoire | le courroux des Enfants de Zeus. Faisant fi de Lui | dans lʼégarement de son cœur, | elle avait approuvé un autre mariage, se cachant de son père, | déjà mêlée au Cheveux-non-coupés, Phoïbos »7

Comme on sait par ailleurs, Ἄρτεμις est la déesse qui apporte la mort aux femmes en couches8. Κορωνίς meurt ainsi avant de donner le jour à Ἀσκληπιός. Nous devons donc combiner les données homériques avec la légende du culte chypriote selon laquelle Ἀριάδνη mourut en couches9. C’est à Walter Otto que nous devons ce rapprochement essentiel10. Maria Daraki11 le fait remarquer, morte enceinte et enterrée avec l’enfant, Ἀριάδνη fait de Διόνυσος, son époux, le père d’un enfant mort. Et Διόνυσος, selon l’Odyssée, est l’époux qui, pour la rendre comme lui divine et mortelle, rejoint Ἀριάδνη après l’avoir fait tuer par Ἄρτεμις. Daraki12 le précise, une Athénienne pouvait parfaitement comprendre l’histoire que l’Odyssée rapporte comme Jeanmaire l’a comprise : en faisant tuer sa promise par 7

Traduction J.-P. SAVIGNAC, 1990, p. 171. Selon Servius (Commentaire à lʼÉnéide 3.73), à peine née, Ἄρτεμις a aidé sa mère à donner le jour à Ἀπόλλων (TEMPE, 1998, p. 130). Par Catulle (Poésie 34) ou Horace (Chant séculaire 1-16 et 33-6), nous savons que, dans les douleurs de lʼaccouchement, les femmes sʼen remettaient à Ἄρτεμις (TEMPE, 1998, p. 134-5). Euripide (Iphigénie en Tauride 1445-67) nous apprend quʼil était cherché à lʼapaiser si une femme mourait en couches (TEMPE, 1998, p. 143). Comme le rappelle M. VALVERDE SANCHEZ, 1996, p. 237 n. 486, la mort soudaine des femmes était attribuée à Ἄρτεμις (Homère, Odyssée 18.202-3, 20.61-3 ; Apollonios, Argonautiques 3.774). 9 Plutarque, Thésée 20.3-4, citant Péon d’Amathonte. 10 W. OTTO, [1933] 2017, p. 67. ||| Sur Ἀριάδνη morte en couches ou tuée par Ἄρτεμις, K. KERÉNYI, [1994] 1998, p. 79-85. 11 Pausanias, Description 2.23.8 ; M. DARAKI, [1985] 1994, p. 22. 12 M. DARAKI, [1985] 1994, p. 93. 8

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une flèche d’ Ἄρτεμις, déesse prénuptiale en titre, Διόνυσος a agi en sa qualité de dieu infernal qui fait passer sa bien-aimée sous son empire. L’enlèvement de Κόρη par Ἅιδης et ses noces infernales sont tout à fait comparables à cette mort d’Ἀριάδνη et au mariage que, dans la foulée, elle contracte ou recontracte avec Διόνυσος. Maria Daraki13 fait remarquer que, selon l’Hymne homérique à Démétèr14, l’enlèvement de Κόρη avait eu lieu au cœur de la plaine nysienne. En effet, Nysa est la patrie de Διόνυσος, et, comme lʼaffirmait Héraclite15, Διόνυσος et Ἅιδης sont un seul et même dieu. Comme Διόνυσος, Ἀριάδνη a connu la mort plus d’une fois. Tuée par Ἄρτεμις, ou bien par Περσεύς, morte en couches ou pendue de désespoir, elle emprunte comme son époux les voies les plus diverses pour plonger dans le monde souterrain, où elle occupera, comme lui, une place d’honneur. Et elle reçoit, à Chypre et à Argos, les honneurs dus aux puissances souterraines16. Pour épouser un dieu, la jeune femme doit mourir. Enceinte des œuvres de Θησεύς ou, plutôt, de Διόνυσος17, Ἀριάδνη, à la demande de ce dernier, mourut en couches ou, pour le dire d’une façon mythologique, fut abattue d’une flèche par Ἄρτεμις18. Cette mort lui conférait l’immortalité et faisait d’elle l’épouse d’un dieu. Selon une autre version, Ἀριάδνη se pendit19. Elle est comptée, comme Ἄρτεμις, parmi les « dames-pendues », c’est-à-dire les dames-dans-l’arbre20. Ceci provient de l’assimilation à Ἀριάδνη d’une autre figure féminine aimée de Διόνυσος, Ἠριγόνη, la mère de Στάφυλος. Des bergers devant lʼivresse de certains dʼentre eux crurent à un empoisonnement et assassinèrent son père Ἰκάριος. Ἠριγόνη, en découvrant le cadavre, se pendit21. 13

M. DARAKI, [1985] 1994, p. 93. Homère, Grand Hymne à Démétèr 17. 15 Héraclite, fragment 15 : εἰ μὴ γὰρ Διονύσῳ πομπὴν ἐποιοῦντο καὶ ὕμνεον ᾆσμα αἰδοίοισιν, ἀναιδέστατα εἴργαστʼ ἄν· ὡυτὸς δὲ Ἀΐδης καὶ Διόνυσος, ὅτεῳ μαίνονται καὶ ληναΐζουσιν « Si ce nʼétait pour Dionysos quʼils font procession et chantent lʼhymne phallique, bien impudente serait leur conduite. Mais cʼest le même que Hadès et Dionysos pour lequel ils sont en délire et célèbrent le vin » (traduction R. MUNIER, 1991, p. 19. 16 M. DARAKI, [1985] 1994, p. 98-9. 17 Voir le commentaire que G. COLLI, 1978, donne du fragment B12 dʼÉpiménide. 18 W. OTTO [1933] 2017, 67 ; K. KERÉ́NYI, [1994] 1998, p. 80-81, 83. 19 Plutarque, Thésée 20.1 ; K. KERÉNYI, [1994] 1998, p. 83-84, 116. 20 M. DARAKI, [1985] 1994, p. 98. 21 K. KERÉ́NYI, [1994] 1998, p. 116. Sur ce récit, voir aussi M. DETIENNE, 1998, p. 48-9). 14

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Lʼéquivalence entre lʼhistoire dʼἈριάδνη et celle de la naissance dʼ Ἀσκληπιός fut formulée jusquʼà un certain point par Walter Otto dans son livre sur Διόνυσος, dans le but dʼexpliquer la version homérique de la mort de la fille du roi de Crète. Le parallélisme, nous dit Kerényi22, projeté de façon complète, établit les contours exacts de lʼun des mythologèmes les plus importants de la religion grecque. Ἄρτεμις assassina Κορωνίς sur ordre dʼ Ἀπόλλων. Cette dernière lui avait été infidèle, car il était le père du fils quʼelle portait. Le parallélisme saute aux yeux : Ἀσκληπιός naquit sur le bûcher où Ἀπόλλων put lʼarracher aux entrailles de sa mère morte. Pour sa part, Ἀριάδνη, à Chypre, mourut en couches. Néanmoins, dans lʼune des séquences sacrificielles du culte local, un jeune imitait les contractions de lʼenfantement23. En cela, pour ainsi dire, ce jeune les lui épargnait, interprétant ainsi aussi le rôle de Ζεύς. En effet, le grand dieu fit quelque chose de semblable lors de la naissance de Διόνυσος, se chargea de porter lʼembryon de Σεμέλη quʼil venait de foudroyer. Ζεύς assumait ainsi le rôle d’une mère porteuse, changeait de sexe en quelque sorte. La confusion des sexes est un trait dionysiaque que nous avons déjà rencontré avec Θησεύς porteur de la couronne de la mariée. Et dʼautres jeunes filles parmi les adolescents qui devaient faire lʼordinaire du Μινώταυρος étaient en réalité des garçons déguisés en filles24. Dieu psychopompe par ailleurs, Ἡρμῆς fut qui, selon Apollonios de Rhodes25, retira l’embryon des flammes dont la foudre de Ζεύς venait de calciner Σεμέλη. Les mythes de Σεμέλη, dʼ Ἀριάδνη et de Κορωνίς relatent tous les trois une naissance divine dans la mort, mais cʼest sans doute à Chypre que nous trouvons la version la plus radicale et mystérieuse de cette naissance : le nouveau né y est un mort, de surcroît anonyme26. Le lien existant entre le mythe de Κορωνίς et celui dʼ Ἀριάδνη est encore mit en évidence par le nom dʼ Αἴγλη que reçoit aussi la première et qui est identique à celui de la jeune fille pour laquelle Θησεύς se serait détourné de la seconde27. Le sens du nom dʼ Αἴγλη « éclat lumineux » peut-être est-il à mettre en relation avec Σεμέλη foudroyée. La mort de Σεμέλη préfigurerait ou annoncerait alors celle dʼ Ἀριάδνη abandonnée. 22

K. KERÉNYI, [1956] 2009a, p. 18-9. Plutarque, Thésée 20.7 ; M. P. NILSSON, 1906, p. 309 ; G. DEVEREUX, 1982, p. 200 n. 22 ; p. 280. 24 Plutarque, Thésée 23.3. 25 Apollonios, Argonautiques 4.1137 ; JOUAN, 1992, p. 78, 80. 26 K. KERÉNYI, [1956] 2009a, p. 19. 27 Plutarque, Thésée 29.2 ; K. KERÉNYI, [1956] 2009a, p. 20. 23

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Je ne puis suivre Karl Kerényi quand il fait dériver ces deux mythes dʼune même histoire sacrée préhellénique ou minoenne28, puisque, dans les grandes lignes, lʼeschatologie mazdéenne épouse de mêmes contours. Et, à mes yeux, il est loin dʼêtre assuré que le titre de « Dame du Labyrinthe » présent sur une tablette mycénienne de Cnossos29 désigne Ἀριάδνη. Au lieu dʼy reconnaître la désignation dʼune déesse, ne pouvons-nous en faire le titre porté par une autorité institutionnelle humaine et admettre que le nom de « Labyrinthe » fît référence à des appartements royaux qui, à lʼinverse dʼun territoire tenu à la botte du roi, fussent gérés par la reine ? Il faut retirer la mythologie des mains des historiens. Ἀριάδνη mourut en tant que fiancée infidèle d’un dieu, selon Walter Otto qui tire profit de la comparaison avec Κορωνίς la fille de Φλεγύας, le roi des Lapithes. Celle-ci fut tuée par Ἀπόλλων, avant de donner le jour à Ἀσκληπιός30. Κορωνίς « corneille » était un sobriquet, son vrai nom étant Αἴγλη31. Κορωνίς portait aussi le surnom d’ Ἀριδήλα « très claire » comme Ἀριάδνη32. Et le parallélisme est encore tracé avec Σεμέλη qui mourut foudroyée et dont l’embryon Διόνυσος fut sauvé par Ζεύς33. Le parallélisme que nous avons détecté entre la daēnā avestique et une Ἀριάδνη enceinte que Walter Otto compare avec Κορωνίς conduit à formuler lʼhypothèse que, pour son explication, le nom de cette dernière, authentiquement, est à rapprocher de ceux de carāitī et de κόρη plutôt quʼà donner pour un ornithonyme : le jeu sur le nom de la corneille doit être secondaire. L’épithète que l’île de Dia reçoit dans l’Odyssée34 ou chez Apollonios de Rhodes35, « baignée de deux courants », énigmatique, retient lʼattention. Au lieu d’admettre la tautologie d’une île entourée d’eau, nous pouvons y détecter une allusion discrète faite à la situation de cette île à la croisée des 28

K. KERÉNYI, [1956] 2009a, p. 20. KN Gg 702 pa-si te-o-i me-ri *209VAS 1 | da-pu2-ri-to-jo po-ti-ni-ja me-ri *209VAS 1 [= πᾶσι θεοῖσι μέλι ἀμφορεύς α´ | λαβυρίνθοιο πότνιαι μέλι ἀμφορεύς α´] « Une amphore de miel pour tous les dieux et une amphore de miel pour la dame du Labyrinthe ». 30 K. KERÉ́NYI, [1994] 1998, p. 82-4. 31 K. KERÉ́NYI, [1994] 1998, p. 82. 32 K. KERÉ́NYI, [1994] 1998, p. 82. ||| L’adjectif est ἀρίδηλος, -ος, -ον, mais Hésychios fait d’ ˟Ἀριδήλα le nom propre, moyennant correction de Ἀριήδαν· τὴν Ἀριάδνην Κρῆτες, dont l’entrée se situe celles d’ ἀρίδες et d’ ἀρίδηλον, en ˟Ἀριδήλαν. 33 K. KERÉ́NYI, [1994] 1998, p. 84. 34 Homère, Odyssée 11.324 : Δίῃ ἐν ἀμφιρύτῃ. 35 Apollonios, Argonautiques 4.425 : Δίῃ ἐν ἀμφιάλῳ. 29

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chemins de l’Hadès et de l’Olympe : c’est depuis cette île qu’ Ἀριάδνη, successivement, descendit en enfer et put rejoindre le ciel. Cette importante croisée des chemins, reflétée dans les fêtes naxiennes d’ Ἀριάδνη, l’une triste pour son aspect sombre ou mortel et l’autre joyeuse pour son côté lumineux et immortel36, rapproche Ἀριάδνη de la Lune37. Elle est, apparemment, une déesse lunaire 38 . Ἀριάδνη très claire, déesse pleine Lune, et Ἀριάδνη sombre, déesse nouvelle Lune. Ἀριάδνη, la bien-aimée de Διόνυσος et son double féminin, était honorée à Naxos par une fête aux aspects si contradictoires39, mêlant si étroitement la joie et la désolation qu’on a cru devoir en répartir les cérémonies entre deux divinités différentes40. Diodore situe l’ ἀπαγωγή d’ Ἀριάδνη sur une île, Naxos, lieu de son culte à deux sorties, l’une vers la mort, l’autre vers la vie. Elle y fut conduite par Διόνυσος, de nuit, sur le sommet d’une montagne où ils ont tous deux disparu41. Dans les sources zoroastriennes, le passage du pont Cinuuaṇt que les âmes des défunts empruntent pour rejoindre les unes les ténèbres infernales, les autres le paradis, lui aussi, démarre du sommet dʼune montagne. Et ce nʼest pas tout : le parallélisme que les livres pehlevis tracent entre le tandem que Gaiia Marətan forme avec la vache primordiale et celui des astres du jour et de la nuit ne peut que rappeler le couple de Διόνυσος et d’ Ἀριάδνη s’il faut voir un prototype de l’âme-moi, de nature solaire, dans le premier et le reflet de la Lune dans la seconde. La comparaison de la tradition zoroastrienne avec les données mythologiques grecques, une fois de plus, paraît singulièrement étroite.

36 37 38 39 40 41

K. KERÉ́NYI, [1994] 1998, p. 94. K. KERÉ́NYI, [1994] 1998, p. 82, 90. M. DARAKI, [1985] 1994, p. 98. Plutarque, Thésée 20.5, 20.8-9. M. P. NILSSON, 1906, p. 273 ; M. DARAKI, [1985] 1994, p. 26, 98. Diodore, Bibliothèque 5.51.4 ; M. DARAKI, [1985] 1994, p. 216. 342

VI 5. L’apothéose d’une défunte Il est tout à fait remarquable que l’autre héroïne morte en couches à la demande d’un dieu ou qu’ Ἄρτεμις transperça d’une flèche porte le nom de Κορωνίς dans la mesure où nous pouvons le rapprocher étymologiquement de l’avestique carāitī- « femme enceinte » et, partant, du grec Κόρη, au lieu de l’expliquer par celui de la corneille, mais aussi parce que la victime sacrificielle dans le Y 29 est une vache pleine (azī-). Et la communauté l’immole pour qu’elle rejoigne le défunt dans l’immortalité. Au terme dʼimmolations, savons-nous aussi, le vin tiré du Haōma blanc fournira lʼimmortalité aux hommes ressuscités tandis que Διόνυσος fera dʼ Ἀριάδνη une immortelle. Enceinte des œuvres du roi des dieux, Σεμέλη, la propre mère de Διόνυσος, elle déjà, était morte en couches, mais la mythologie traduisit cette immortalisation en disant que la foudre lui était tombée dessus1. Comme déesse, Σεμέλη se confond avec Δημήτηρ ou Περσεφόνη2. Daraki3, sans ambage, donne Διόνυσος pour le fils d’une femme morte, Σεμέλη, qualifiée de « mère infernale » dans le 49e Hymne Orphique. Les Deux Déesses se sont séparées, l’une olympienne, l’autre reine des Enfers, la détentrice du « myrte » de Σεμέλη4. Διόνυσος conduit à son apothéose la femme qui lui est chère. Aussi bien sa mère Σεμέλη que sa bien-aimée Ἀριάδνη. Comme Σεμέλη, Ἀριάδνη aussi connut l’apothéose sous la conduite de Διόνυσος, à bord d’un char. Διόνυσος ramena sa bien-aimée des Enfers. Mais il y a plus concret. Pour l’arracher au seigneur des morts, Διόνυσος a dû laisser un « substitut » de sa mère. Ἅιδης n’a consenti à la lui rendre qu’après en avoir reçu « en remplacement », « ce que le dieu aimait le plus au monde ». Et Διόνυσος céda le myrte, symbole du sexe féminin. Σεμέλη porte alors le nom de Θυώνη5, avec la charge de connotations sexuelles qui l’accompagnent. En somme, Διόνυσος conduit au ciel une partenaire duelle, homologue des Deux Déesses d’Éleusis, dont il 1

W. OTTO, [1933] 2017, p. 76. Sur le parallélisme que montre la mort d’ Ἀριάδνη avec celles de Κορωνίς et de Σεμέλη, K. KERÉNYI [1994] 1998, p. 83-5. 3 M. DARAKI, [1985] 1994, p. 22. ||| Eschyle, dans Sisyphe (fragment 228), faisait de Ζαγρεύς le fils d’ Ἅιδης. 4 M. DARAKI, [1985] 1994, p. 215. 5 Sur ce nom, voir Eschyle, fragment 358 (H. J. METTE, 1959) ; Diodore, Bibliothèque 4.25.4 ; P. VEYNE, 1985 ; M. DETIENNE, [1986] 1998, p. 85. 2

343

est également l’amant et le fils6. Tout à la fois mère et épouse, la partenaire de Διόνυσος s’apparente donc à la Daēnā endogamique7 de l’Avesta. Ἀριάδνη et Διόνυσος « marchent sur la mer » avec la même aisance. Première parmi les « femmes de la mer » qui suivirent Διόνυσος à Argos et replongèrent à sa suite dans l’Hadès par la voie de l’« élément liquide », doublet d’ Ἀφροδίτη issue de la mer, Ἀριάδνη est l’épousée à la couronne marine que, pour sceller leurs noces, Διόνυσος pose sur son front : elle est le don d’ Ἀμφιτρίτη, la reine des abysses8. Diodore place l’événement sous le signe d’une ἀπαγωγή, non une apothéose exactement, mais une « sortie vers l’au-delà »9. Διόνυσος a entrepris de ramener sa mère Σεμέλη (ou son épouse Ἀριάδνη) de chez les morts10, mais, en échange, dut offrir le myrte symbole du sexe féminin au roi des morts11. Σεμέλη et Ἀριάδνη forment un tandem comparable à celui des deux déesses dʼÉleusis12. La Thébaine et la Crétoise, avec cette remontée (ἄνοδος), purent retrouver la vie, mais ce fut pour en ressortir aussitôt par le haut, Diodore13 nous parlant alors dʼune ἀπαγωγή ayant eu lieu à Naxos : Ἀριάδνη, conduite de nuit par Διόνυσος sur le sommet dʼune montagne, y aurait disparu avec lui. Et nous savons par Hésiode que Ζεύς devait accorder lʼimmortalité à lʼépouse de Διόνυσος et lʼintégrer de la sorte au groupe des Olympiens. La sortie se convertit ainsi en ἀποθέωσις. Depuis Hésiode, son mariage avec Διόνυσος vaut à Ἀριάδνη une intégration dans la famille des « immortels »14. Διόνυσος, pour faire dʼelle son épouse, accorda l’immortalité à Ἀριάδνη15, mais, selon Hésiode, ce fut plutôt Ζεύς qui la lui accorda. Ramener une défunte aimée à la vie, Διόνυσος y parvint, mais Ὀρφεύς, in extremis, échoua. Son nom, apparenté à celui de l’orphelin16, l’y prédestinait : il serait à jamais séparé d’elle17. 6

M. DARAKI, [1985] 1994, p. 213-5. Sur lʼendogamie de Daēnā, voir É. PIRART, 2012a, p. 162-5. 8 M. DARAKI, [1985] 1994, p. 99, d’après Pausanias (Description de la Grèce 2.22.1) et Bacchylide (17.113). 9 M. DARAKI, [1985] 1994, p. 216. 10 Sur la κατάβασις de Διόνυσος à la recherche de sa mère Σεμέλη, voir P. SAUZEAU, 2005, p. 210-2. 11 M. DARAKI, [1985] 1994, p. 212. 12 M. DARAKI, [1985] 1994, p. 212. 13 Diodore, Bibliothèque 5.51.4. 14 M. DARAKI, [1985] 1994, p. 215. 15 R. GRAVES, [1955] 2011, nºs 98n et 98o. 16 P. CHANTRAINE, 1968, colonne 829b. 7

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Selon certaines sources, Ἀριάδνη aurait donné le jour à plusieurs enfants : certes Στάφυλος, mais aussi18 Οἰνοπίων roi de Chios, Θόας roi de Lemnos et Πεπάρηθος roi de Péparéthos. Sans que nous sachions exactement si leur père fut Θησεύς ou Διόνυσος. Dans le cas de Στάφυλος, le doute, bien évidemment, n’est guère permis surtout que le mythe d’ Ἠριγόνη donne clairement Διόνυσος pour le père. Dans celui des autres enfants, il est malaisé de se faire une opinion dʼautant que tous trois devinrent des rois insulaires et que cela rappelle que leur mère fut abandonnée de Θησεύς sur une île. La Frašō.kərəiti abolira la nécessité de manger, mais les hommes et les femmes ressuscités, immortels ou libérés des affres de la vieillesse et des maladies, n’auront plus aucune progéniture. L’union sexuelle ne débouchera plus sur la naissance d’enfants. De même, Ἀριάδνη et Διόνυσος, en accédant à l’Olympe, laissent derrière eux, abandonnent la mort sous la forme d’un embryon mort ou sous celle du raisin qui, pour devenir vin, est immolé19 ; car, selon certaines versions du mythe, le fils d’Ἀριάδνη ou d’ Ἠριγόνη, porte le nom de « raisin », Στάφυλος20. Διόνυσος et Ἀριάδνη ainsi sont-ils libérés de l’éducation de toute nouvelle descendance à l’instant d’accéder à l’Olympe tout comme le sont l’homme et la femme selon la doctrine mazdéenne concernant les effets de la Frašō.kərəiti. Στάφυλος, par son nom, est un nouveau Διόνυσος, non encore immolé. Διόνυσος s’engendre donc luimême et meurt pressuré chaque année, mais à jamais. La mort atroce qu’ Ἀριάδνη dut endurer, enceinte d’un embryon perdu dans la douleur qui la contorsionnait, la précipita dans les profondeurs infernales avant que Διόνυσος, descendu la rechercher, la fît revenir à la vie, mais immortelle, au plus haut du Ciel. Cette plongée au plus bas suivie d’une remontée définitive au plus haut, nous l’avions détectée dans les hymnes du neuvième maṇḍala qui font l’éloge de Sóma en recourant aux anciens mythes qui le mettent en scène à l’instant d’exprimer de façon imagée les opérations techniques du pressurage, du filtrage et des préparations21. Ce double 17

Diodore de Sicile (Bibl. 4.25.2-4) a souligné le parallélisme des mythes de Διόνυσος qui sortit Σεμέλη du monde des morts et d’ Ὀρφεύς qui tenta d’en ramener Eὐρυδίκη (C. GARCÍA GUAL et D. HERNÁNDEZ DE LA FUENTE, 2015, p. 33-4). 18 K. KERÉNYI, [1994] 1998, p. 85. 19 Sur la préparation du vin vu comme une mise à mort, M. DARAKI, [1985] 1994, p. 54. 20 Ce nom est la masculinisation de celui du raisin ou de la grappe, σταφυλή ou σταφυλίς. ||| Pour Plutarque (Thésée 20.2), Ἀριάδνη donne à Θησεύς deux fils, Οἰνοπίων et Στάφυλος. 21 Voir Chapitre IV 7. 345

mouvement dans lequel le fond de l’Océan ou l’obscurité crue de l’Hadès servent de tremplin pour l’âme qui doit rejoindre le sommet céleste, nous le retrouvons dans les rouages de la Frašō.kərəiti. Avant qu’il puisse être procédé au sacrifice qui comportera l’immolation de *Haδāiiu, le taureau d’éternité, et devra permettre ce grand parachèvement, ressusciter l’humanité et lui donner l’immortalité définitive, il faudra que le Saōšiiaṇt écoute les leçons d’Ahura Mazdā et fasse revivre la bonne Daēnā, mais aussi que soit effectuée une plongée au plus profond de l’Océan à la recherche de l’indispensable Haōma blanc. Le mouvement double de toucher le fond avant de rejoindre le sommet est reflété aussi selon un ordre chronologique inverse par le Haōma des cérémonies ordinaires et le Haōma blanc de la cérémonie finale, le premier poussant au sommet des montagnes tandis que le second ne pourra être cueilli que dans les abysses océaniques. Et les leçons que le grand dieu impartira aux trois fils futurs de Zaraθuštra plongeront de façon répétée la bonne Daēnā dans le monde du mélange avant que la Frašō.kərəiti ne lui rende la plénitude de son statut de déesse abstraite et immortelle. Il est assez clair que les ingrédients du mythe de l’eschatologie générale zoroastrienne remontent à la plus haute antiquité proto-indo-européenne si, en plus de parallèles védiques attendus, nous pouvons les retrouver de façon aussi complète dans certains des épisodes centraux des récits les plus célèbres de la mythologie grecque : Daēnā est Ἀριάδνη ; *Haδāiiu, Tαῦρος ; Haōma, Διόνυσος.

346

INDICES

anairiia- ... 148, 150 anāhita-, anāhitā- ... 65, 249, 287, 324 amərətatāt- ... 257 amǝš ̣a- spǝṇta- ... 163, 257, 286 aiian- ... 211 auuarə̄ ... 197 auui.mąm ... 304 *auui.miθra- ... 22 arə̄m.piθβā- ... 203-18 ariz ... 252 airiia- ... 60, 217 airiiana- vaējah- ... 62, 244, 258 airiiaman- išaiia- ... 226 arəz, *arǝza- ... 252 arǝzah- ... 205 arəzahi- ... 254 aršan- ... 309 astuuat̰ .ǝrǝta- ... 223-5, 227-8, 283-4, 286, 288 asńiia- ... 204, 208, 210 asrušti- ... 64 azan- ... 206 azī- ... 165, 177, 295, 307-312, 324, 334, 343 aš ̣a- ... 70, 97, 218 *aš ̣aiia- ... 172 aš ̣auuazdah- ... 259 aš ̣a- vahišta- ... 161, 226, 286 aš ̣āuuaŋhu- ... 254 aš ̣ǝmaōγa- ... 178 aš ̣ǝm.yahmāi.ušta ... 259 aš ̣i- ... 298, 313 ašī « yeux » ... 58 aš.xratu- ... 59 aži- dahāka- ... 202, 222, 232, 286 ahu- ... 64-5, 172 ahū ... 82

1

Index verborum Avestique et pāzand2 aēuuō.dātā- ... 60, 181, 222, 243-4, 255, 263, 277, 323 aēšǝma-, aēšma- ... 65, 286 *aēšmin- ... 141, 148, 150 aka- ... 224 aka- manah- ... 27, 286 aγataša- ... 64 aγraēraθa- ... 251, 258-9, 288 at̰ baēša- ... 74 aδauuīm ... 74 aparazāta- ... 260 apa.raōδaiiete ... 206 apascā ... 308 aipī ... 214 aipi.vaŋhu- ... 214 afriθiiaṇt- ... 258 *aiβi.gaiti- ... 201 aiβi.gāma- ... 208-10 aiβi.srūθrima- ... 203-18 aiβiš ... 315 aiβiiāxšaiia- ... 261 aŋhra- mańiiu- ... 170, 199, 201, 221-2, 229, 243, 286 1

201, 307, 259,

267,

183, 263,

Les nombres renvoient aux pa-

ges. 2

Ordre de succession observé : a ā ə/ə̄ o/ō ā̊ ą i/ī u/ū k x g/γ c j t/t̰ θ d/δ p f b/β ŋ/ŋ́/ŋv n/ṇ/ń m/m̨ y/ẏ/ii v/uu r uruu s z š/š́ /š ̣ ž h x́ xv. Ni zaraθuštrani ahura- mazdā- ne sont repris. Pour les mots du Y 29, voir p. 109-134. 347

ahuna- vairiia- ... 199-201, 315 ahūm.biš- ... 65 ahura- ... 68, 82-3 ahurāi ... 298 ātar- ... 286 ādāi ... 299 ā+√ dī :: ādiδāiti ... 300 ārǝiti- :: *ārətā ... 194 ārmaiti- ... 59, 90 āzaiṇti- ... 136 āzi- ... 215, 248, 251 āzizanāitī- ... 316 ərəθβa- ... 71 ǝrǝzauruuaēsa- ... 205 ərəzrāspa- ... 254 ąnmə̄nē ... 88 ˲ iš, īš- ... 89 uxšan- ... 293, 309 uxšānō asnąm ... 211 uxšiiat̰ .ǝrǝta- ... 223-7 uxšiiat̰ .nǝmah- ... 177, 223-7 upa.naxtur- ... 206 us+√ ar :: uziiōraiti ... 215 uspąsnu- ... 254 uzaiiara- ... 203-18 uzaiieirina- ... 203-18 uzīrah- ... 205 ušah-, ušā- ... 203-18, 224 ušahinī- ... 208 kainō ... 310 kara- ... 252, 263, 267-73, 284, 287-8 *karā- ... 312-3 karətō.dąsu- ... 211 karǝna- ... 270 kəuui- ... 286 kǝrǝtā- ... 313-4, 323 kǝrǝsāspa- ... 232, 241, 259, 286 kąsaōiia- ... 324 xuṇbiia- ... 259

xratu- ... 218 xrafstra- ... 263, 268 xšaθra- ... 71 xšaθra- vairiia- ... 257 xšap-, xšapan- ... 205-6 xšapā- ... 203 xšaiiaṇt- ... 71 xšąnmə̄nē ... 187 gaēiθiia- ... 200-2, 224, 324 gaō- ... 39-107 gaō- aēuuō.dātā- → aēuuō.dātā-. gaōkǝrǝna- ... 252, 255, 270-1, 284, 287-8 gaōciθra- ... 272 gaōdāiiu- ... 148, 304 gaō- spǝṇtā- ... 70, 98, 145, 176, 178 gaδarōs ... 229, 288 √ gam :: jaγmiiąm ... 72 gaiia- marǝtan- ... 60, 145, 201, 222, 228, 243-4, 342 *gaiiāna- ... 139 gauuō.stāna- ... 34 garəbu- ... 309 gāθā- ... 96, 208, 210 gə̄uš tašan- ... 39-98, 263-4 gə̄uš uruuan- ... 39-98, 263, 295, 323 gūzā- ... 245 cakāta- dāitiia- ... 294 caθβarə.aspa- ... 254 carāitī- ... 295, 307, 310, 312, 314-9, 323, 334, 341, 343 carāitikā- ... 315 cinuuaṇt- ... 294, 342 jańiiaōš ... 315 jarō.daŋ́hu- ... 254 jahī- ... 178 jāmāspa- ... 260 tašan- ... 59 tāiš ... 299 348

pāiiu- ... 81 pāiri.sāite ... 300 pǝšō.ciṇgha- ... 267 pōuruδāxšti- ... 259 pōuru.sarǝδā- ... 243 piši.š́ iiaōθna- ... 251, 259 pišiiaṇt- ... 79 pusauuaitī- ... 313 pusā- ... 333 fragaiti- ... 207, 210 fradaδafšu- ... 254 fraδāxšti- ... 259 fraŋhrasiiān- ... 251, 285-8 fraiiara- ... 203-18 frauuaitī- ... 309 frauuaš ̣i- ... 232, 260 frauuāka- ... 244, 247 frašō.kǝrǝiti- ... 201, 223, 225, 229, 254, 257, 260, 285-8, 345-6 frāγmat̰ ... 212 frā+√ bā ... 309 frāšmō.dāiti- ... 207, 210 frə̄rǝiti- :: frə̄rətōit̰ , frə̄rǝṇta ... 211 friia- ... 259 fsǝratū- ... 91, 218 *baērazda- ... 259 *baōδō.jaiti- ... 142 baγa- ... 62 *barǝmāiiaōna- ... 275 barəziš- ... 63 bāmaiiā- ... 207, 210 *bǝrǝjaiiat̰ .miθra- ... 245, 286 bǝrǝzaṇt- ... 62 bąnaiia- ... 64 biuuaṇdaŋha- ... 254 būšiiąstā- ... 232 *brāθrō.raēša- ... 229 naēδa ... 315 naōtara- ... 313 narauua- ... 267 nar- aš ̣auuan- ... 148

*tāca- ... 245 tāiiu- ... 142 tǝmah- ... 206 tištriia- ... 94 tura- ... 267, 313 tura- *brāθrō.raēša- ... 229 tusa- ... 259-60 √ tuš ... 221 √ θβaxš ... 148 θβarəxštar- ... 58, 81 iθiiejah- ... 79 θraētaōna- ... 222, 232, 267, 286 θraōšti- ... 215 *θrisaōka- ... 243-65, 279, 286, 324 daēnā- ... 98, 189, 197, 223-4, 294-5, 297-305, 307, 317, 323-4, 334, 341, 344, 346 daēnu- ... 304 daēman- ... 300 daēuua- ... 64, 79 daēuuaiia- ... 21 daŋhra- ... 264 darǝγǝm.jīti-, darǝγō.jīti-, darǝgō.jiiāiti- ... 249 dāitiiā- ... 62, 258 dāmōiš upamana- ... 94 dāuuōi ... 72 dāhi- ... 299 dāhišta- ... 299 dōiθra- ... 300 √ dī :: diδāiti ... 300 √ dī :: daidiiat̰ ... 305 draōjina- ... 183-4 paiti.paršti- ... 136 *paitiš.xvāra- ... 251 paṇcō.haiiā- ... 243 parō.dars- ... 211 pairištūra- ... 254 pauruuō.azī- ... 307 *pāitixšaiia- ... 147, 261 349

naire.manah- ... 58 nairiia- saŋha- ... 324 nar- spəṇta- ... 61, 97 narš uruuan- ... 97 nīuuiuuaitī- ... 313, 333 magāi.ā ... 195 maiδiiōi.mā̊ŋha- ... 260 manu- ... 249 manu- ciθra- ... 238, 251 manu- xvarǝnaŋvhaṇt- ... 238 manu- xvarǝnara- ... 238 mańiiauua- ... 200-2, 221, 224 mańiiə̄uuī- ... 325 mańiiu- ... 59, 82, 286 marǝta- ... 180 mazišuuaṇt- ... 251 mašā ... 194 maš ̣iia- ... 201 *maš ̣iia-, *maš ̣iiaēinī- ... 60, 222, 243-4 mąθra- ... 98 mąθra- spǝṇta- ... 175, 180 mązā.ri- ... 298 miθra- ... 94, 166, 215-7, 222, 286 yauuōi ... 249 yasna- ... 256, 283, 286, 288 yazata- ... 175, 225, 251, 283, 286 yazāi ... 299 yāiriiā- hušiti- ... 90 yōišta- ... 259 yima- ... 201, 222, 260, 286 vaēδaiianā- ... 300, 305 vaδairiiu- ... 315 vaδre.yaōna ... 315 vaŋvhī- daēnā- ... 201 vanā- yā vīspō.biš ... 259, 287 vaiiu- ... 221-2, 298 √ var :: vərəṇte ...304 vara- ... 260 varəna- caθru.gaōša- ... 251

*varšnaspa- ... 245, 286 vazaγa- ... 263 vazī-, vā̆zā- ... 309 vātaiiā̊ ... 211 vāza- ... 144, 309 vǝrǝθrājan- ... 94, 283 vǝrǝṇte ... 304 vōuru.kaš ̣a- ... 245, 248, 268, 285-7 vōuru.jarəšti- ... 254 vōuru.barəšti- ... 254 vohu.friiāna- ... 257, 335 vohu- manah- ... 59, 185-6, 179-81, 191, 244, 257-8, 286 vīdaδafšu- ... 254 vīduiiē, vīduuanōi ... 72 viδcōišta- ... 297 *vīuua- ... 259-60 vīuuaŋvhan- ... 259 vīspəm.mąθra- ... 82 vīštāspa- ... 223, 251, 259-60 viiānī- ... 60 raēm ... 298 raēuua(ṇt)- ... 298 raēš ... 297 raōcah- ... 206 ratu- ... 60, 62, 68, 70-1, 82-3, 98, 146, 151, 172, 218, 244, 252, 254 ratu- asńiia- → asńiiaratu- bərəza(ṇt)- ... 151, 218 rapiθβā-, rapiθβina- ... 203-18 raiia, raiiąmº ... 298 rašnu- ... 166, 249 rāńiiō.skǝrǝiti- ... 58-9, 308 rāman- ... 59 rāman- xvāstra- ... 90 rāiiō ... 297 rāspī ... 264 √ rit ... 28 √ ruc :: raōciṇtāt̰ ... 215 urupi- ... 244-5, 257, 286 350

haōsrauuah- ... 229, 251, 254, 259, 283, 286-7 haōšiiaŋha- ... 244, 257, 259, 286 haxaiiō ... 260 haiθiia- ... 148 haδaẏōš, haδaiiąš ... 250 haδa, hadā ... 249 *haδāiiu- ... 243-65, 284, 294, 334, 346 hadiš- ... 66 hama ... 208-10 hauruuatāt- ... 257 hazaŋhrō.zima- ... 199-202, 219-29 hāiti- ... 44 hāu ... 313 hāuuani- ... 203-18 hąm+˲ taš ... 58-9 hąmvarəiti- ... 241 hukairiia- ... 294 hudǝmə̄m ... 185 hušǝiti- ... 90 huuapah- ... 316 huuō ... 75, 84 xvainiraθa- ... 245, 254-5, 258, 283-4, 288 xvarənaŋvhaṇt- ... 318 245, 285, 287, xvarǝnah- ... 298 *xvarǝnō.bāγa- ... 245, 286

uruša- ... 84 uruuatat̰ .nara- ... 259-60 uruuan- ... 294-5, 323, 334 saēte ... 315 saōka-, saōkā- ... 262 saōšiiaṇt- ... 175, 223-4, 248, 254, 256-7, 259, 263, 283-5, 2878, 323-4, 346 satō.kara- ... 312 sauuahi- ... 254 sarsaōk ... 246 sāvkauuastąn ... 262 sima- ... 94 ˲ sū ... 89 sūka- ... 262 √ suc ... 215 staōra- ... 282 spańiiah- mańiiu- ... 59, 248 spǝṇta- ... 84 ; → aməš ̣a- spº, gaō- spº, nar- spº spəṇtā- ārmaiti- ... 258 spiti- ... 254 spitiiūru- ... 286 *siiāmaka- ... 244 sraēšta- ... 297 sǝraōša-, sraōša- ... 64, 166, 244, 298 srisaōk ... 246 zaōtar- ... 254, 283-4, 286, 288 ˲ zan ... 316 zaraθuštrōtǝma- ... 288 zōt̰ ... 264 zizanāitiš ... 316 š́ āta-, š́ ā̊ ... 314 √ š́ iiu :: š́ iiauuāi, š́ ūš́ uiiąm ... 72 haōma- ... 63, 98, 286, 316, 346 haōmacanah- ... 323 haōma- spaēta- ... 202, 249, 250, 252, 255-6, 263, 270, 272, 284-5, 343, 346

Grec3 Ἀγήνωρ ... 275 ἀδαῖος ... 321 ἄδος ... 321 ἁδρος ... 321 ἀεί ... 249 Ἀθηνᾶ ... 232, 241, 285 Αἴας ... 284 3

Ordre de succession observé : alphabétique grec. 351

Ἐλείθυια ... 338 ἐπιγείνομαι ... 75, 214 Ἐριχθόνιος ... 277 Εὐρυδίκη ... 345 Εὐρυσθεύς ... 237 Εὐρώπη ... 235, 239, 244, 269, 275, 279-80, 291, 294 Ζαγρεύς ... 275, 292, 343 Ζεύς ... 235-6, 244, 269, 281, 291-294, 327-8, 336, 338, 340 Ζῆθος ... 276 ἠέριος ... 211 ἠϊών ... 332 Ἥλιος ... 90 Ἥρα ... 90 Ἡρακλῆς ... 231-2, 237-8, 241, 280 ἦρι ... 211 Ἠριγόνη ... 339, 345 Ἡρμῆς ... 340 Ἥφαιστος ... 331, 335 θᾱ́ᾱ, θαῦμα ... 305 Θέτις ... 331, 333 Θησεύς ... 231-242, 283-289, 295, 323-346, 337-343 Θόας ... 345 Θυώνη ... 343 Ἰκάριος ... 339 Ἰόλαος ... 232 Ἱππόλυτος ... 276, 280, 291 Ἰώ ... 275 Κάδμος ... 279 Κάλως ... 269 κατάβασις ... 344 Κέκροψ ... 224 Κέφαλος ... 337 κόρη, Κόρη ... 339, 341, 343 Κορωνίς ... 329, 337-8, 340-1, 343 Λαβύρινθος ... 252-3, 279-80, 285, 327-9, 331, 334-5, 341 Λυκοῦργος ... 291

Αἰγεύς ... 239, 276, 279, 327 Αἴγλη ... 329, 340-1 Ἅιδης ... 338-9, 343 Αἵμων ... 231 ἀϊόνα ... 332-3 ἄκοιτις ... 327 ἄμπυξ ... 333 Ἀμφιτρίτη ... 253, 285, 332-3, 344 Ἀμφίων ... 276 Ἀνδρόγεως ... 231, 238-9, 280, 291, 328 ἄνοδος ... 344 ἀπαγωγή ... 342, 344 Ἀπόλλων ... 329, 337-8, 340-1 ἀποθέωσις ... 343-6 Ἀριάδνη ... 232, 238, 240-1, 253, 272, 280, 292, 294-6, 321, 323-346 Ἀριδήλα ... 341 ἄριστον ... 211 Ἄρτεμις ... 275, 329, 337-43 Ἀσκληπιός ... 340-1 Ἀστέριος, Ἀστερίων ... 236-7, 239 Ἀφροδίτη ... 238, 329, 331-2, 334, 344 Ἀχιλλεύς ... 335 Βουγενής ... 292 Βουφόνια ... 265, 279 γέρανος ... 254, 275 Γηρυόνης ... 275 Γλαῦκος... 259 Δαίδαλος ... 63, 238-9, 253-4, 264-5, 269, 272, 279, 334 δαΐφρων, δάω ... 264 δέρω ... 265 Δημήτηρ ... 343 Δία ... 295-6, 328-9, 341 Διόνυσος ... 241, 272, 280, 288-9, 291-4, 323-46 Δίρκη ... 275-6, 280 352

Latin4 cautopates ... 277 cervus ... 281 dolō ... 264 mithra- ... 276-7 nocturnus ... 206 semen ... 304 Tarvos trigaranus ... 278 vanus ... 221

Μίνως ... 236-40, 254, 259, 279, 284-5, 328-9, 331, 334, 337 Μινώταυρος ... 235-242, 267273, 280, 284, 325, 327 Οἰδίπους ... 260, 277 Οἰνοπίων ... 345 Ὀρφεύς ... 344-5 Πανοπεύς ... 329 Πασιφάη ... 63, 238-9, 275-80, 291, 330 Πεπάρηθος ... 345 πέρθω ... 116 Περίβοια ... 284-5, 331 Περσεύς ... 291, 339 Περσεφόνη ... 343 Πηλεύς ... 331 Πιτθεύς ... 240, 284 Ποσειδῶν ... 237-8, 240, 276, 283-9, 291-4, 331-2 Πρόκρις ... 337 πύκα ... 333 Σαρπηδών ... 236 Σεμέλη ... 340-1, 343-5 Στάφυλος ... 339, 345 σφ- (pron.) ... 117 Σφίγξ ... 231, 277 Σώπατρος ... 275, 279 Τάλων ... 271 Τάλως ... 267-73, 279 ταυροκέρως Μήνη ... 272 Ταῦρος ... 231-94, 346 τέκτων ... 264 Τελαμών ... 284 Τιτᾶνες ... 275, 292 Τμῶλος... 275 τρύω ... 215 ὑφαίνω ... 21 Φαίδρα ... 337 Φλεγύας ...337, 341 Χάριτες ... 293 χορός ... 254, 335

Moyen-perse5 ʼbvd znšnyh ... 142 ’gndšn| ... 258 ’hvkynytn| ... 142 ʼhvš ... 251, 256 ’mlg ... 256 ʼmyhrspnd ... 139 ʼnvš ... 251, 256 ʼpltvm ... 192 ’svdšn| ... 258 ʼšʼtyh ... 155 ’š’t mynšnyh ... 187 ʼštyh ... 155 ʼvnst| ... 249 AYT| ... 148 ʼvlvʼhmn, ʼvlvʼẕymn ... 175 ’zlm’n ... 256 b’c’d ms’d ... 177-8 clpyh ... 250 dlvpvštyh ... 258 DYNA ... 161 fšvnynytʼl ... 168 gʼs ... 210 gvkpytMLKA, gv(k)pt|šh, ... 252, 256, 259-61, 268, 277 h’myn ... 200 hcʼlk ... 225, 228 hlbvc Y sp̄ yt| ... 244 4

Ordre de succession observé : alphabétique latin. 5 Ordre de succession observé : alphabétique latin. 353

htʼydvš ... 249 hvdmn|yh ... 184 hvnvš ... 249 hvYMRVyh ... 184 k’l ... 161 L ... 140-1, 182 l’d ... 187 nlsyy ... 259 n(y)dv(h)šytn| ... 181 pʼt|hšyd, p’t|hš’d ... 261 p’tyc| ... 200 pltvm ... 192 PVN k’ltl ... 157 pylvckl ... 283 pyhv|ynytʼl ... 168 sʼhtn| ... 144 sl(y)svk ... 246 syn|k ms’d ... 177-8 svkpstʼn| ... 262 svt’vmnd ... 283 t’šytn|, thšytn| ... 138 tlpt’l ... 142 tn| krt’l ... 283 tvb’n| hv’dšnyh ... 188-9 tvhykyh ... 221 TVRA ... 282 vʼdynyt’l ... 143 vh’l ... 200 vyšʼtkyh ... 222 yʼn| ... 139 yẕd’n ... 139 zmst’n| ... 200

adr̥śyamūrti- ... 225 adveṣá- ... 74 ádhāyi ... 299, 300 animiṣá-, ánimiṣant- ... 74 ápi ... 34 *apivasáu ... 214 apiśarvaré ... 75, 214 amitrá- ... 22 arámati- ... 27 ári- :: areḥ, arí- :: aryáḥ ... 298, 303 ávaDO ... 85 ávi- :: ávyaḥ ... 303 aśavahista- ... 190 asurī- ... 247 áhi- ... 310, 312 ahī́- ... 307-12 ahīśúva- ... 310 āgāvīya- ... 33 ā́ NŪ̆ ... 95 āmitrá- ... 22 āharmana- ... 171 ít ... 21-2, 25 índra- ... 13-38, 67, 96, 247, 248, 265, 281, 293, 301, 310-2, 317 íṣ- ... 301 iṣmín- ... 141 ī́ ḍ- :: īḷā́ ... 303 īḷe ... 303 ĪŚ :: īśata ... 26 ukṣán- ... 281, 293-4 ukṣā́ nna- ... 294 utá ... 28 uttamamanas- ... 179 úpa ... 21, 27-8, 38 úpaPR̥C ... 27 ŕ̥cīṣama- ... 310 r̥jīpín- ... 311 r̥tú- ... 71, 218 r̥bhú- ... 63 ótum ... 304

Sanscrit6 aktú- ... 205 ákṣarā- ... 318 agní- ... 293, 303-4, 317 agniṣṭoma- ... 335 6

Ordre de succession observé : a ā i ī u ū r̥ r̥̄ l̥ e ai o au m̐/ṁ ḥ/ḫ/ẖ k kh g gh ṅ c ch j jh ñ ṭ ṭh ḍ ḍh ṇ t th d dh n p ph b bh m y r l v ś ṣ s h. 354

dāváne ... 72 dīkṣā- ... 335 dīdhima ... 305 dr̥śyamūrti- ... 225 devayú- ... 21 dyú- ... 205 drūja- ... 183 dvāreṇa ... 38 dharma- ... 97, 153, 183, 190 DHĀ :: dadhmasi ... 305 DHĀ :: ádhāyi ... 299, 300 dhā́ tave ... 304 dhāsí- ... 317 DHĪ :: dīdhima ... 305 dhīrá- ... 305 DHE ... 87, 304 dhénā- ... 295, 297-305 dhenú- ... 304 dhéṣṭha- ... 299 nandin- ... 281 nāsatyá- ... 313 nī́ la-, nīlāśva- ... 268 nīví- ... 313, 333 nr̥máṇas- ... 58 PAN ... 84 panitár- ... 317 paraśu- ... 265 paśutŕ̥p- ... 142 pārvatī- ... 328 puraṁdará- ... 265 púraṁdhi- ... 313 puróhita- ... 22, 304 pūrvasū́ - ... 307 prāktana- ... 192 barhíṣ- ... 63 br̥hádri- ... 298 br̥hatī́- ... 301 bŕ̥haspáti- ... 247 bráhman- ... 97 bharádvāja- ... 13, 33 bhāgadhéya- ... 299 bhū́ yāṁs-, bhū́ yiṣṭha- ... 300

aurṇavābhá- ... 310 kakāṭa-, KAṬ ... 23 kaṇva- ... 247 karā́ - ... 312-3 karṇa- ... 270-1 kāñchati ... 324 kútsa- ... 248, 311-2 kr̥kadāśū́ - ... 23 kŕ̥kāṭa- ... 23 kŕ̥tā- ... 313-4 kŕtvan- ... 311 KR̥̄ :: carkr̥masi ... 305 kṣárantī- ... 316 khilyá- ... 21 gandharvá- ... 312 gavāṁ stuti- ... 13 gāthā- ... 96 gāyatrī- sāvitrī- ... 199-201 gr̥bhāyáti, gr̥bhṇā́ ti ... 272 gó- ... 13-38 gocara-, gocāra- ... 148 gópati- ... 22, 28, 260 gvahmana- ... 191 cárantī- ... 314-8 jányuḥ ... 315 jī́jana- ... 316 jyéṣṭha- ... 299 jyók ... 22 TAKṢ ... 81 tákṣan- ... 96, 265 tárutar- ... 282 táskara- ... 22 tisŕ̥- devī́- ... 314 tuchyá-, TUṢ ... 221 tr̥pu- ... 142 táiḥ ... 299 tridhā́ tuśr̥ṅga- ... 278 trimūrdhán-, triśr̥ṅga- ... 278 triśóka- ... 246-9, 282 TVAKṢ ... 66-7 tváṣṭar- ... 81, 96 dānastuti- ... 13 355

VR̥J :: vr̥jyāḥ ... 27 vr̥ṇīté ... 304 vŕ̥ṣaṇ- ... 281 vr̥ṣaṇaśvá- ... 246 vr̥ṣabhá- ... 281 vr̥ṣotsarga- ... 28 véman- ... 304 vaiśvānara- ... 257, 335 vyāná- ... 80 vyáthiṣ- ... 23 śaktitayā ... 189 śatárā- ... 302 śarvá- ... 281 śiva- ... 281, 328 śyená- ... 311 śréṣṭha- ... 297 ŚLĀGH ... 72 saṁskr̥tatrá- ... 23 sarvatra jñeyam ... 142 saharavera- ... 190 sáhas- ... 64 sāvitrī- : → gāyatrī- sāvitrīsītá- ... 304 sudhánvan- ... 63 supadatva- ... 184 suprátīka- ... 25 sū́ ra- ... 90 sū́ ra údite ... 214 sūrí- ... 298 sū́ rya- ... 90, 299 sóma- ... 289, 292-4, 311, 330, 333, 335 sthūrá- ... 282 sváru- ... 84 hormijda- ... 164, 166

mánu(ṣ)- ... 317, 337 mánu- vaivasvatá-, mánu- sā́ varṇi- ... 238 marút- ... 318 mahājñānin- ... 164, 166 MĀ :: mímīte ... 304 mitrá- ... 22, 293 medhā́ - ... 22 medhātithi- ... 247 yájadhyai, yajádhyai ... 303 yáje ... 299 yajñá- ... 292 yat ... 187 yóṣā- ... 337 raṇakŕ̥t- ... 58, 308 rayí-, rayíḥ, rayím ... 297-9, 301-2 rayīṇā́ m ... 298 RĀ ... 302 rā́ ḥ ... 301 rā́ m ... 301 rāy- ... 301-2 rāyā́ , rāyé, rāyáḥ, rāyā́ m ... 298, 302 RI ... 303 rudrá- ... 63 reṇúkakāṭa- ... 23 rétas- ... 28 revánt- ... 298 rái- ... 302 váṁsaga- ... 281 vadharyántī-, vadhūyú- ... 315 vala- ... 247 vaśā́ - ... 293-4 vājín- ... 318 vāyú- ... 222, 298 víGĀH ... 289 vícayiṣṭha- ... 297, 304 víCAR ... 23 viśvarūpa- ... 96, 265 VĪ ... 28 vīrá-, vīryà- ... 28, 38

Autres langues7 Asmodée ... 64 Cojuelo ... 64 illui̯ anka- ... 281 7

Ordre de succession observé : alphabétique latin. 356

Orval ... 287-8 šūru (accad.) ... 282 tarhunt- (hitt.) ... 281-2 tōr (aram.) ... 282 θāigraci- (v.-p.) ... 304

357

61.33-35 ... 268 Index locorum Textes zoroastriens et sanscrits

Dēnkard (Dk) 3.7 ... 42 3.51 ... 229 3.75 ... 310 3.102 ... 229 3.105 ... 229 3.160 ... 227-8 3.177 ... 228-9, 254 3.208 ... 220 3.282 ... 229 3.312 ... 244 3.329 ... 222, 224, 272 3.343 ... 229 3.374 ... 251 3.388 ... 44, 142 3.407 ... 224, 227-9, 254 3.419 ... 200 6.293 ... 246 7 ... 228 7.0 ... 223 7.1 ... 138 7.2-3 ... 222 7.4 ... 226 7.5 ... 226 7.7 ... 227 7.8 ... 70, 223, 227 7.9 ... 177, 223, 227 7.10 ... 228-9 8.36 ... 255 9 ... 45, 47-52, 135-198 9.15 ... 251

Āfrīnagān (A) 4.5 ... 215 Atharvavedasaṁhitā de Śaunaka (AS) 4.21 ... 19-32 7.75 ... 25 7.111 ... 27 9.4.23 ... 27 Br̥haddevatā (BD) 5.106 ... 13 Chāndogyopaniṣad 1.3.3 ... 80 Cīdag Handarz ī Paōiriiō.t̰ kaēšºān (CHP) 7 ... 44 49-51 ... 205 Dādestān ī Dēnīg (DD) 36.33 ... 222 36.86 ... 248, 250-1, 256 36.100 ... 256, 258 47.34 ... 255-6 89.4 ... 256, 258, 261 Dādestān ī Mańiiaōi Xrat (MX) 2.93 ... 229 43.35 ... 258 57.7 ... 229 61.28 ... 263 61.30 ... 263 61.31 ... 258 61.32 ... 267

Fragments avestiques Westergaard (FrW) 9.2 ... 86 10.41 ... 211 Frahang ī Ōīm (FiO) 221 ... 310 288 ... 261 359

477 ... 333 746-51 ... 204 752-8 ... 207 754 ... 205

Pursišnīhā (P) 30 ... 80 R̥gvedasaṁhitā de Śākalya (RS) 1.1.1 ... 304 1.1.6 ... 19 1.7.8 ... 281 1.13.12 ... 20 1.24.6 ... 316 1.29.7 ... 23 1.32.2 ... 81 1.33.10 ... 281 1.36.16 ... 26 1.57.1 ... 298 1.64.2 ... 212 1.81.2 ... 20 1.84.1 ... 28 1.84.11 ... 20 1.112.12 ... 247 1.116.13 ... 313 1.120.9 ... 301 1.133.6 ... 95 1.146.1 ... 278 1.161.7 ... 63 1.161.9 ... 315 1.167.3 ... 317, 337 1.168.7 ... 20 1.191.4 ... 19 2.7.2 ... 26 2.12.1-14 ... 24 2.16.6 ... 293 2.21.1 ... 311 2.22.4 ... 312 2.33.14 ... 27 2.35.5 ... 314 2.42.3 ... 26 3.1.15 ... 303 3.6.7 ... 216 3.33.4 ... 317 3.36.5 ... 24 3.57.1 ... 317

Gr̥hyasūtra ... 330 Haδaōxt Nask (H) 2.7 ... 212, 215 2.9 ... 211 2.10 ... 297, 307, 314 2.36 ... 212 Jaiminīyabrāhmaṇa (JB) 2.153-4 ... 96 3.72-4 ... 247 3.234-6 ... 247 Kāṭhaka (KS) 2.3 ... 333 Kauśikasūtra (KauśS) 3.5.4-7 ... 28 19.2 ... 27 24.19-22 ... 27 Mahābhārata (MBh) 5.9 ... 96, 265 Naighaṇṭuka (Naigh) 2.11 ... 311 3.30 ... 311 Nērangestān (N) 19.5 ... 216 24.10 ... 148 28-33 ... 208-10 31.1-2 ... 203-4 43.1 ... 148 67.6 ... 307

360

9.3.6 ... 289 9.3.6-7 ... 294 9.7.2 ... 289 9.19.4 ... 28 9.67.14 ... 289 9.68.6 ... 311 9.69.4 ... 293 9.71.9 ... 293 9.77.3 ... 311 9.83.3 ... 293 9.85.10 ... 293 9.86.8 ... 289 9.86.38 ... 293 9.86.40 ... 289 9.86.43 ... 216, 293 9.89.3 ... 293 9.95.4 ... 293 9.99.7 ... 289 9.108.13 ... 298 9.109.22 ... 312 10.27.8 ... 318 10.29.2 ... 247 10.30.10 ... 317 10.34.1 ... 24 10.44.1 ... 67 10.48.3 ... 81 10.53.1 ... 24 10.85.41 ... 330 10.94.8 ... 24 10.106.5-8 ... 302 10.111.7 ... 301 10.112.10 ... 58, 308 10.138.1 ... 312 10.139.6 ... 312 10.144.3-4 ... 311 10.169 ... 29 10.169.3 ... 19 10.185.2 ... 26

3.60.2 ... 63 3.62.10 ... 199 4.1.2 ... 299 4.1.6 ... 297 4.4.3 ... 22 4.20.9 ... 297 4.23.6 ... 311 4.27.2 ... 67 4.52.1 ... 215 5.34.6 ... 67 5.43.13 ... 278 6.18.9 ... 67 6.27 ... 13 6.28 ... 13-38 6.28.8 ... 281 6.64.1-2 ... 215 6.71.3 ... 26 6.75.10 ... 26 7.34.2 ... 316 7.36.7 ... 318 7.54.1 ... 94 8.1.29 ... 214, 218 8.6.19 ... 20 8.7.28 ... 312 8.13.31 ... 281 8.20.6 ... 67 8.21.16 ... 42 8.24.25 ... 311 8.32.2 ... 310, 312 8.32.26 ... 310, 414 8.39.1 ... 303, 304 8.43.11 ... 293 8.45.30 ... 247 8.52.9 ... 302 8.52.10 ... 301 8.59.1 ... 20 8.69.6 ... 20 8.92.12 ... 19 8.99.3 ... 305 9.1.4 ... 294 9.2.2 ... 293 9.2.6 ... 293

Rivāyat pehlevie accompagnant le DD (RPDD) 9 ... 225 361

14 ... 44 15-6 ... 225 21 ... 225 24 ... 225 25.2 ... 223 27 ... 225 46.31-5 ... 246 46.36-8 ... 243 48.1 ... 227 48.23 ... 227 48.38 ... 227 48.49 ... 254 54 ... 251, 259 60 ... 225 65.4 ... 243

Taittirīyasaṁhitā (TS) 2.5.1-2 ... 96 Vaitānasūtra (VaitS) 21.24 ... 29 Vājasaneyisaṁhitā des Mādhyandina (VSM) 4.10 ... 333 Vīdaēuu-dāt (V) 1.2 ... 62 1.20 ... 172 2.1-2 ... 297 2.43 ... 82 3.24 ... 314 3.32 ... 221 5.2 ... 61 5.60 ... 315 5.60-1 ... 304 7.79 ... 206 9.37-8 ... 309 9.56 ... 215 13.32-3 ... 61-2 15.5 ... 229 18.15 ... 213 18.19 ... 215 19.3 ... 215 19.15 ... 216 19.28 ... 212, 216 19.30 ... 216, 313-4, 333 19.37 ... 262 19.42 ... 263, 268 20.1 ... 216 20.4 ... 255 21.1 ... 177 21.3 ... 205 21.9 ... 272 22.3 ... 262

Sad-dar (Sd) 9.5 ... 229 Śāṅkhāyanagr̥hyasūtra (ŚāṅkhGS) 3.9 ... 28 Śatapathabrāhmaṇa des Mādhyandina (ŚBM) 1.1.3.12 ... 265 3.1.3.4 ... 23 3.2.1.15 ... 333 11.1.2.2 ... 292 11.6.1.4 ... 23 14.8.10.1 ... 257 Sīh-rōzag (S) 1.3 ... 262 1.6 ... 90 1.7 ... 255 2.3 ... 262 2.6 ... 90 2.7 ... 255 2.12 ... 243

Vīsp-rat (Vr) 2.11 ... 66 362

10.3 ... 271 11.7 ... 63, 287 11.10 ... 66 16.4 ... 272 17.11 ... 257 19.8 ... 299 27-54 ... 45-6 27.6 ... 298 27.13 ... 70, 82, 199 28 ... 39 28.1 ... 40 28.2 ... 78 29 ... 39-198, 323, 343 29.2 ... 304 29.4 ... 214 29.5 ... 307-8 30.1-2 ... 92 30.5 ... 82 30.6 ... 64-5 30.10 ... 90 31.9 ... 59 31.18 ... 85 32.3 ... 215 32.8 ... 177 32.16 ... 66, 71 33.3 ... 66 33.8 ... 72-3 33.11 ... 299 34.8 ... 78-9 34.14 ... 308 35.4 ... 90 38.5 ... 308 42.2 ... 81 43.1 ... 66, 71 43.12 ... 64, 94, 298 43.14 ... 93-4 43.16 ... 82 44.5 ... 203, 206, 217 44.6 ... 58-9, 308 44.7 ... 80, 94 44.10 ... 305 44.16 ... 64

12.1 ... 298 16.3 ... 82 18.1 ... 68 21.3 ... 74 Vīštāsp Yašt (Vyt) 8.5 ... 314 Vizīdagīhā ī Zādsparam (VZ) 1.0 ... 223 1.1 ... 222 1.9-10 ... 220 2.8-9 ... 222 2.13 ... 263 3.50 ... 243 3.71-2 ... 243 3.79 ... 257 3.84 ... 246 3.86 ... 244-6 4.19 ... 222 5.3 ... 229 23.2 ... 244, 269 28.7 ... 226, 228 29.2 ... 222 30.16 ... 222 30.57 ... 43 34.46-8 ... 228 34.47-8 ... 226 35.4 ... 251, 259 35.14-7 ... 284 35.15 ... 250, 256-7 35.19 ... 254 35.60 ... 248, 250, 255-6 Yasna (Y) 1.1 ... 62 1.6 ... 90 1.11 ... 272 2.6 ... 90 9.5 ... 212 9.15 ... 66 9.22 ... 314, 316 363

5.91 ... 213 5.92 ... 224 5.94 ... 213 5.112 ... 258 5.128 ... 333 6.1 ... 298 6.4 ... 298 6.6 ... 298 7.0 ... 243 7 ... 272 8.40 ... 314 8.43 ... 94 8.54 ... 215 9.17-8 ... 287 9.18 ... 267 9.21-3 ... 287 10.9 ... 94 10.13 ... 216, 300 10.14 ... 67 10.45 ... 300, 305 10.51 ... 300 10.53-5 ... 41 10.95 ... 300 10.98 ... 67 10.107 ... 300 10.108 ... 297 10.143 ... 212 11.2 ... 74 11a.12 ... 67 12.4 ... 262 12.7 ... 297 12.9 ... 254 12.12 ... 254 12.13 ... 254 12.17 ... 287 12.33 ... 272 13.3 ... 224 13.10 ... 243 13.17 ... 299 13.42 ... 262 13.77 ... 299 13.87 ... 60

44.20 ... 79, 88 45.3 ... 80 45.11 ... 77 46.3 ... 212 46.4 ... 212 46.9 ... 66 46.11 ... 59 46.12 ... 66 46.14 ... 92 46.17 ... 148 46.19 ... 308 47.3 ... 59, 90 48.6 ... 90 48.9 ... 80 48.11 ... 90 50.1 ... 77 50.2 ... 79 50.10 ... 212 51.7 ... 60 51.12 ... 309 51.17 ... 66, 71 51.22 ... 82 53.9 ... 79 54.1 ... 226 54.2 ... 226 56.1 ... 229 57.2 ... 81 57.3 ... 298 57.13 ... 67 60.4 ... 298 62.1 ... 213 68.11 ... 298 70.1 ... 62 Yašt (Yt) 1.21 ... 262 1.30 ... 255 5.26 ... 262 5.62 ... 212, 215 5.64 ... 212 5.65 ... 67 5.87 ... 314-5 364

4.1-5 ... 222 4A.2 ... 263 6D.6 ... 287 6E.1-4 ... 243 6G.1 ... 257 7.6 ... 243 7.9 ... 222 9.3 ... 251 9.20 ... 251 11C.5 ... 324 13 ... 243 13.1 ... 243 13.4 ...243 13.26 ... 269 13.34 ... 269 13.36 ... 248 14.5-6 ... 60 14.36 ... 244 16.5 ... 263, 287 17.14 ... 252, 269 17A.1 ... 252 18 ... 257 18.3 ... 257 18.9 ... 244-6, 286 24.1 ... 248, 252 24.2 ... 252 24.3 ... 252, 269 24.4 ... 263 24.5 ... 263 24.22 ... 248, 257 24.23 ... 259 24A ... 263 26.26 ... 42, 243 26.27 ... 248, 255 26.34 ... 262 29 ... 251 29.5 ... 262 29.6 ... 259, 262, 267 29.13 ... 262 30.13 ... 295 33.1 ... 222 33.5 ... 251

13.91 ... 82 13.95 ... 60 13.98 ... 260 13.99 ... 297 13.110 ... 254 13.112 ... 259 13.121 ... 254 13.122 ... 254 13.127 ... 260 13.131 ... 267 13.138 ... 259 14.3 ... 262 14.11 ... 315 14.12 ... 315 14.29 ... 262-3, 268 14.39 ... 315 14.54 ... 69 16.3 ... 262 16.7 ... 262-3, 268 17.11 ... 212, 300 17.13 ... 315 17.17 ... 297 17.56 ... 312-3 18.8 ... 323 19.1 ... 301 19.2 ... 251 19.18 ... 81 19.52 ... 62 19.56 ... 285 19.59 ... 285 19.62 ... 285 19.69 ... 243 19.79 ... 297-8 19.89 ... 258, 260, 285 19.95 ... 260 Zand-āgāhīh (ZA) 1.5-6 ... 221 1.42 ... 220 1A.1 ... 221 1A.12-3 ... 222 1A.20-1 ... 222 365

3.1.3 ... 237 3.1.4 ... 238-9 3.4.2 ... 254 3.15.7 ... 239 3.15.8 ... 239-40, 270, 279 Ép. 1.5 ... 240 Ép. 1.6 ... 240 Ép. 1.7 ... 276 Ép. 1.8-9 ... 240 Ép. 1.9 ... 241, 327 Ép. 1.10 ... 276 Ép. 1.17-9 ... 276

33.11 ... 287 33.12 ... 222 33.12-21 ... 223 33.29 ... 223, 227 33.32 ... 223, 227 33.34 ... 227 33.35 ... 226, 228 33.36-38 ... 34 ... 229 34.7 ... 225, 228 34.17 ... 272 34.23 ... 250-1, 255-6, 263 34.27-31 ... 225 34.31 ... 272 35.1-3 ... 244 35.17 ... 267 35.23-5 ... 251, 267 35.56 ... 260 35.60 ... 324 36.1 ... 220-1 36.2 ... 221-2, 228 36.3-4 ... 222 36.4-8 ... 222 36.6 ... 222 36.8 ... 223 36.9-10 ... 223

Apollonios de Rhodes, Argonautiques 3.774 ... 338 3.997-9 ... 240 3.998 ... 328 3.1000-1 ... 328 3.1001-4 ... 336 3.1099 ... 328 3.1100-1 ... 328 4.425 ... 328, 341 4.433 ... 328 4.434 ... 328 4.1137 ... 340 4.1641-3 ... 269 4.1644 ... 268 4.1678-80 ... 268

Zand ī Vohu.man Yašt (ZVY) 3.2 ... 251 3.3 ... 229 9.1-6 ... 227

Athénée de Naucratis, Banquet des Savants 13.557a ... 329 14.631b ... 330

Index locorum Textes grecs et latins

Bacchylide de Céos, fragments 10 ... 236 17 ... 332, 344

Apollodore, Bibliothèque mythologique 1.9.1 ... 238 2.5.7 ... 236-7 3.1.1 ... 236 3.1.2 ... 236, 238

Catulle, Poésies 34 ... 338 366

Hérodote, Histoires 1.173 ... 236-7

Diodore de Sicile, Bibliothèque historique 1.61 ... 254 4.13.4 ... 237-8 4.25.2-4 ... 345 4.25.4 ... 343 4.60 ... 238-9 4.61 ... 240, 276, 327, 336 4.62 ... 276, 329, 337 4.76 ... 270, 279 4.77 ... 238-40, 267 5.51.4 ... 342, 344 5.78.1 ... 236

Hésiode, Théogonie 947-9 ... 327 Hésiode, fragments 140 ... 236 298 ... 329 Hésychios ... 330 Homère, Grand Hymne à Démétèr 17 ... 339

Élien, De natura animalium 12.34 ... 292 Épiménide de Crète, ments B12 ... 339 B18 ... 328, 331

Homère, Iliade 6.130-41 ... 291 6.198-9 ... 236 11.88 ... 321 12.292 ... 236 14.321 ... 279 14.321-2 ... 236 18.590-606 ... 335 22.469 ... 333 Scolies à lʼIliade 14.319 ... 292

frag-

Ératosthène de Cyrène, Catastérismes 5 ... 331

Homère, Odyssée 11.321-4 ... 337 11.324 ... 341 11.580-1 ... 329 18.202-3 ... 338 20.61-3 ... 338

Eschyle, fragments 228 ... 343 358 ... 343 Euripide, Crétois Fragment 6 ... 264

Horace, Chant séculaire 1-16 ... 338 33-6 ... 338

Euripide, Iphigénie en Tauride 1445-67 ... 338 Héraclite dʼÉphèse, ments 15 ... 339

Hygin, Astronomie 2.5.1 ... 327 2.5.2 ... 331 2.5.3 ... 331

frag-

367

Hygin, Fables 30.8 ... 237 42 ... 327 43 ... 327 224 ... 327

Plutarque de Chéronée, Questions grecques 36.299a-b ... 293 Plutarque de Chéronée, Thésée

Moschos de Syracuse, rope 155-6 ... 236

4 ... 240 6.1 ... 240, 284 14.1 ... 240 15.1 ... 239-40, 284 16.1 ... 239 17.3 ... 284 17.4-5 ... 276 19 ... 238 20.1 ... 328, 339 20.2 ... 329, 345 20.3-4 ... 338 20.3-7 ... 323 20.5 ... 342 20.7 ... 329, 340 20.8 ... 238 20.8-9 ... 342 21.1-2 ... 254 22.1-2 ... 276 22.4-7 ... 330 23 ... 330 23.3 ... 333, 340 25.5 ... 240 28.1 ... 329 29.1 ... 285 29.2 ... 340

Eu-

Orphée, Hymnes 49 ... 343 Ovide, Métamorphoses 2.850 ... 236 Pausanias, Description de la Grèce 1.17.3 ... 284 1.20.3 ... 327, 330 1.21.4 ... 269 1.22.5 ... 276 1.26.4 ... 269 1.27.10 ... 237 2.22.1 ... 344 2.23.8 ... 338 2.26.6 ... 337 2.31.1 ... 239 3.18.11 ... 241 3.18.16 ... 241 5.10.9 ... 237 7.4.5 ... 279 7.4.8 ... 269 8.53.5 ... 269 10.4.2-3 ... 329 10.29.4 ... 327

Proclos, Chrestomathie 88-91 ... 330 Servius, Commentaire à lʼÉnéide 3.73 ... 338

Plutarque de Chéronée, Isis et Osiris 35 ... 292 46-7 ... 219, 221 368

Abréviations bibliographiques, sigles et références Sur les manuscrits de lʼAvesta et de son zand (E7, F2, J2, K5, KM7, M1, Mf4 [= D90], Pt4, T6), voir pp. 177-8. A = Āfrīnagān. Ābān Yašt = Yt 5. C. ACKER, 2002 : Clara ACKER, Dionysos en transe : la voix des femmes, LʼHarmattan, Paris, 2002. Āfrīnagān (A) : voir K. F. GELDNER, 1886-96. Āfrīn ī Zaraθušt (Az) : voir N. L. WESTERGAARD, 1852-4. A. AGUD et alii, 2013 : Ana AGUD, Alberto CANTERA, A. FALERO, R. EL HOUR, M. A. MANZANO, R. MUÑOZ et E. YILDIZ éd., Séptimo centenario de los estudios orientales en Salamanca, Universidad de Salamanca, Salamanca, 2013. Ahuna Vairiia = Y 27.13. A. ALEMANY et alii, 2016 : Agustí ALEMANY, Núria OLAYA et Mariona VERNET éd., Florilegium Indogermanicum, Palaeohispanicum et Eurasiaticum in memoriam José Fortes Fortes (= Faventia 34-36 [2012-14]), Universitat Autònoma de Barcelona, Bellaterra, 2016. ALTAÏR, 2008 : Rédaction ALTAÏR, « El triunfo de la vida. Obras maestras de la civilización minoica », dans Creta, Rodas y Karpathos. En los confines del Egeo (= Altaïr 53, mai-juin, 2008), Barcelona, p. 50-8. ALTAÏR, 2008 : Rédaction ALTAÏR, « Laberintos, metáforas de la existencia », dans Creta, Rodas y Karpathos. En los confines del Egeo (= Altaïr 53, mai-juin, 2008), Barcelona, p. 90-8. J. AMOUZGAR et A. TAFAZZOLI, 2000 : Jaleh AMOUZGAR et Ahmad TAFAZZOLI, Le cinquième livre du Dēnkard. Transcription, traduction et commentaire, Association pour l’avancement des études iraniennes, Paris, 2000. C. AMPOLO et M. MANFREDINI, 1988 : Carmine AMPOLO et Mario MANFREDINI, Plutarco: Le vite di Teseo e di Romolo, Mondadori, Segrate (Milano), 1988. B. T. ANKLESARIA, 1956 : Behramgore Tahmuras ANKLESARIA, ZandĀkāsīh. Iranian or Greater Bundahišn. Transliteration and Translation in English, Rahnumae Mazdayasnan Sabha, Bombay, 1956. P. K. ANKLESARIA, 1958 : Peshotan Kavashah ANKLESARIA, A Critical Edition of the Unedited Portion of the Dādestān ī Dīnīk. Thesis submitted to the University of London, London, 1958. P. K. ANKLESARIA, 1970 : Peshotan Kavashah ANKLESARIA, « Dādestān ī Dīnīk, 89 », dans M. BOYCE et I. GERSHEVITCH, 1970, p. 8-13.

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Vizīdagīhā ī Zādsparam (VZ) : voir Ph. GIGNOUX et A. TAFAZZOLI 1993. VMN = Varǝšt-mąθr Nask. O. VON BÖHTLINGK, 1879-89 : Otto VON BÖHTLINGK, Sanskrit-Wörterbuch in kürzerer Fassung, 7 vol., Kaiserliche Akademie der Wissenschaften, St. Petersburg, 1879-80-82-83-84-86-89. L. VON SCHROEDER, 1881-6 : Leopold VON SCHROEDER, Mâitrâyaṇî Saṃhitâ herausgegeben, 4 volumes, Brockhaus, Leipzig, 1881-3-5-6. L. VON SCHROEDER, 1900-12 : Leopold VON SCHROEDER, Kâṭhakam. Die Saṃhitâ der Kaṭha-Çâkhâ herausgegeben, 4 vol. (IV: Richard SIMON, Index Verborum zu Leopold von Schroederʼs Kāṭhakam-Ausgabe), Brockhaus, Leipzig, 1900-9-10-12. Vr = Vīsp-rat. VSK = Vājasaneyisaṁhitā des Kāṇva. VSM = Vājasaneyisaṁhitā des Mādhyandina. Vyt = Vīštāsp Yašt. VZ = Vizīdagīhā ī Zādsparam. O. WATTEL-DE CROIZANT, 1992 : Odile WATTEL-DE CROIZANT, « LʼEnlèvement dʼEurope dans lʼAntiquité gréco-romaine », dans Vita Latina 125, Montpellier, p. 2-10. A. WEBER, 1852 : Albrecht WEBER, The Vâjasaneyi-Sanhitâ in the Mâdhyandina and the Kâṇva-Çâkhâ with the Commentary of Mahîdhara, Dümmler, Berlin ; Williams and Norgate, London, 1852. A. WEBER, 1855 : Albrecht WEBER, The Çatapatha-Brâhmaṇa in the Mâdhyandina-Çâkhâ with extracts from the commentaries of Sâyaṇa, Harisvâmin and Dvivedaganga, Dümmler, Berlin ; Williams and Norgate, London, 1855. A. WEBER, 1871-2 : Albrecht WEBER, Taittirîya-Saṃhitâ. Herausgegeben, 2 vol., Brockhaus, Leipzig, 1871-2. E. W. WEST, 1880-97 : Edward William WEST, Pahlavi Texts, 5 vol., Oxford University, Oxford, 1880-82-85-92-97. M. L. WEST, 1983 : Martin Litchfield WEST, The Orphic Poems, Oxford University, Oxford, 1983. M. L. WEST, 2007 : Martin Litchfield WEST, Indo-European Poetry and Myth, Oxford University, Oxford, 2007. N. L. WESTERGAARD, 1852-4 : Niels Ludvig WESTERGAARD, Zendavesta or the Religious Books of the Zoroastrians. Vol. I: The Zend Texts, Gyldendal, Copenhagen, 1852-4. W. D. WHITNEY, 1905 : William Dwight WHITNEY, Atharva-Veda-Saṁhitā. Translated into English. With critical and exegetical commentary. Revised and Edited by Charles Rockwell LANMAN, 2 vol., Harvard University, Cambridge (Mass.), 1905.

395

A. V. WILLIAMS, 1990 : Alan V. WILLIAMS, The Pahlavi Rivāyat Accompanying the Dādestān ī Dēnīg, 2 vol., Det Kongelige Danske Videnskabernes Selskab, Copenhagen, 1990. Xvaršēd Yašt = Yt 6. Y = Yasna. YANTE Jean-Marie éd., 2015, Les origines de lʼabbaye cistercienne dʼOrval. Actes du colloque organisé à Orval le 23 juillet 2011, Turnhout, Brepols. Yasna (Y) : voir K. F. GELDNER, 1886-96 ; B. N. DHABHAR, 1949 ; J. KELLENS et É. PIRART, 1988-91 ; J. KELLENS, 2006-13 ; W. W. MALANDRA et P. ICHAPORIA, 2010. Yašt (Yt) : voir K. F. GELDNER, 1886-96 ; É. PIRART, 2010b. Yeŋ́hē.hātā = Y 27.15.3. Yt = série des Yašt. ZA = Zand-āgāhīh. Zand-āgāhīh (= Grand Bundahišn) (ZA) : voir B. T. ANKLESARIA, 1956. Zand ī Vahman Yašt (ZVY) : voir C. G. CERETI, 1995. Zaraθušt Nāmag = Dk 7. ZVY = Zand ī Vahman Yašt.

396

TABLE DES MATIÈRES

I. I 1. I 2. I 3. I 4. II.

Préambule

9

Les vaches Analyse du poème védique RS 6.28 Introduction Saṁhitāpāṭha, padapāṭha et traduction Analyse Bilan Le commentaire de Sāyaṇa

13 13 15 19 29 33

II 4. II 5.

La plainte de la vache Analyse du poème avestique Y 29 Introduction Texte et traduction Analyse Conclusion Annexe. Les personnes grammaticales et les personnages Lexique Les traductions médiévales

III. III 1. III 1.1. III 1.2. III 2. III 3.

La théorie des millénaires Arithmologie du temps La strophe fondamentale L’articulation des millénaires La géométrie variable du jour Les douze mille ans

199 199 199 201 203 219

IV. IV 1. IV 2. IV 3. IV 4. IV 5. IV 5.1.

L’origine du Taureau de Crète Introduction Le taureau de Crète et de Marathon Le taureau mythique iranien Minotaure ou poisson D’autres taureaux *Barǝmāiiaōna

231 231 235 243 267 275 275

II 1. II 2. II 3.

397

39 39 53 57 96 99 109 135

IV 5.2. IV 5.3. IV 5.4. IV 5.5. IV 5.6. IV 5.7. IV 5.8. IV 6. IV 7.

Le Taureau de Géryon et quelques autres La mort dʼHippolyte Miθra tuant le taureau Le taureau celtique Taureau de Crète, Taureau dʼAthènes Le taureau indien Le taureau hittite Plongées sous-marines Zeus ou Poséidon ? Dionysos !

275 276 276 277 278 280 281 283 291

V. V 1. V 2. V 3. V 3.1. V 3.2. V 3.3. V 3.4. V 4.

Les mots avestiques pour doctrine, femme enceinte et femelle pleine Introduction L’avestique daēnāLa vache azī et la daēnā carāitī Avestique azī- = védique ahī́Avestique *karā- = védique karā́ Avestique kǝrǝtā- = védique kŕ̥tāAvestique carāitī- = védique cárantīL’étymon d’Ariadne

295 295 297 307 307 312 313 314 321

VI. VI 1. VI 2. VI 3. VI 4. VI 5.

L’immortalité d’Ariadne Ariadne enceinte Mariage et abandon La couronne de lumière La flèche d’Artémis L’apothéose d’une défunte

323 323 327 331 337 343

Indices 347 Index verborum 347 Index locorum 359 Abréviations bibliographiques, sigles et références 369

398

L’histoire aux éditions L’Harmattan

Dernières parutions

LES ORIGINES CHRÉTIENNES DE LA DÉMOCRATIE MODERNE La part du Moyen Âge

Georges Jehel Le passage de la démocratie antique à la démocratie moderne s’est réalisé par l’intermédiaire du Moyen Âge. Après la chute de l’Empire romain en Occident, les évêques se substituèrent aux pouvoirs civils défaillants. Les ordres monastiques posaient les bases d’une gestion collective ouvrant sur le parlementarisme par recours aux élections. Dans le même temps s’opérait une révolution intellectuelle qui suscita l’essor de la pensée critique dans l’université, alors aux mains du clergé... (Coll. Historiques, série Travaux, 23.00 euros, 216 p.) ISBN : 978-2-343-12608-1, ISBN EBOOK : 978-2-14-004237-9 NON-VIOLENCE : COMBATS D’HIER ET DE DEMAIN Non-violence et traits culturels et identitaires dans le monde globalisé du XXIe siècle

Sous la direction de Madhu Benoit et Jean-Pierre Benoit La frêle silhouette de Gandhi, la haute stature du pasteur Martin Luther King ou les bras ouverts de Nelson Mandela, rendu à la liberté après vingt-sept ans de prison, font partie de la grande geste de l’humanité, gravée dans tous les esprits à travers le monde. Trois hommes qui ont en commun d’avoir entraîné le peuple dans une lutte victorieuse, sans armes et sans violence. En ce début du XXIe siècle, ensanglanté par le terrorisme et des guerres atroces, la « non-violence » n’est-elle plus qu’une image d’Épinal ? Huit auteurs explorent ici l’histoire contemporaine à travers les luttes non violentes. (Coll. Discours identitaires dans la mondialisation, 17.50 euros, 164 p.) ISBN : 978-2-343-12313-4, ISBN EBOOK : 978-2-14-004203-4 CHRONIQUES D’HIER ET DE DEMAIN Publiées dans le journal La Croix (1988-2011)

Clergerie Jean-Louis Pendant un peu plus de vingt ans, de 1988 à 2011, l’auteur a collaboré au quotidien La Croix, où il analysait, en toute liberté mais également avec la rigueur de l’universitaire, l’actualité nationale, européenne et internationale. Voici l’ensemble de ses chroniques regroupées selon des axes nationaux, européens et internationaux, qui gardent toute leur pertinence. (30.00 euros, 298 p.) ISBN : 978-2-343-12094-2, ISBN EBOOK : 978-2-14-004356-7 GÉOGRAPHIE DU SOUVENIR Ancrages spatiaux des mémoires de la Shoah

Chevalier Dominique - Préface de Denis Peschanski La mondialisation des mémoires de la Shoah, telles que représentées dans des musées et des mémoriaux nationaux, constitue une caractéristique majeure des dimensions contemporaines de ce phénomène. Ce livre présente tout d’abord ces nombreux lieux du souvenir, leur géographie mais aussi leur insertion dans leur environnement urbain. C’est donc à la fois à un panorama des

musées et mémoriaux de la Shoah dans le monde que ce livre convie le lecteur, mais aussi à une analyse sensible de la manière dont ils sont pratiqués et insérés dans la ville. (Coll. Géographie et cultures, 22.00 euros, 244 p.) ISBN : 978-2-343-12443-8, ISBN EBOOK : 978-2-14-004093-1 DIX ANS D’HISTOIRE MARITIME (2007-2016)

Lemaître Vincent Vous découvrirez dans cet ouvrage les temps fort de l’histoire maritime de ces dix dernières années en parcourant la marine de commerce, la vie économique des ports, la pêche, la plaisance, la marine de guerre, la protection de l’environnement, les textes nationaux et internationaux qui ont été adoptés et leurs conséquences. L’auteur s’attache aussi à évoquer les accidents, les naufrages, les pollutions les plus marquantes. Au-delà de l’Hexagone, les thèmes de la piraterie, de la lutte contre les narcotrafics, du traitement de l’immigration sont notamment abordés. (14.00 euros, 122 p.) ISBN : 978-2-343-11730-0, ISBN EBOOK : 978-2-14-004292-8 POSÉIDON Ébranleur de la terre et maître de la mer

Andrieu Gilbert En étudiant Poséidon, on s’aperçoit que les légendes ont surtout servi à imposer un état d’esprit tout en écartant ce qui pouvait contredire l’ordre nouveau que les aèdes voulaient imposer. Les dieux servent surtout à justifier un art de vivre. Ainsi, cerner la personnalité de Poséidon ne consiste pas à en faire un portrait saisissant, mais à comprendre les mortels qui lui ont donné des fonctions particulières. (21.50 euros, 212 p.) ISBN : 978-2-343-12088-1, ISBN EBOOK : 978-2-14-003937-9 ARCHÉOLOGIE DE LA PENSÉE SEXISTE Du Moyen Âge au XXIe siècle

Labrecque Georges Bien des oeuvres révèlent, dans divers domaines de la pensée, le mépris adressé à la femme et inspiré de manuscrits remontant à l’Antiquité. Du Moyen Âge à aujourd’hui, des femmes ont voulu dénoncer ces injustices dans des documents d’autant plus remarquables qu’elles ont été peu nombreuses à prendre la plume. Quelle sera la relève au XXIe siècle ? Cet ouvrage propose de nombreux manuscrits et montre que les préjudices subis aujourd’hui par les femmes plongent leurs racines dans un passé lointain et se manifestent sous diverses formes. (42.00 euros, 484 p.) ISBN : 978-2-343-12339-4, ISBN EBOOK : 978-2-14-003975-1 LES CAMPEURS DE LA RÉPUBLIQUE

Lefeuvre-Déotte Martine le Groupement des campeurs universitaires (GCU) est aujourd’hui la plus importante association de campeurs en Europe avec 50 000 adhérents qui sont collectivement propriétaires d’une centaine de terrains. Bénévole, solidaire et autogestionnaire, ce mouvement, créé en 1937 dans l’élan du Front populaire, aménage bénévolement de jolis terrains pour y vivre l’été. L’auteure a mené son investigation au cœur de cette microsociété, ouverte aujourd’hui à tous ceux qui partagent ses valeurs fondatrices : humaines, laïques, solidaires et conviviales. (Coll. Esthétiques, série Culture et Politique, 24.50 euros, 240 p.) ISBN : 978-2-343-12210-6, ISBN EBOOK : 978-2-14-003917-1 LEÇONS DU TEMPS COLONIAL DANS LES MANUELS SCOLAIRES

Coordonné par Pierre Boutan et Sabeha Benmansour-Benkelfat La colonisation a régulièrement fait partie des contenus d’enseignement pendant cette période historique, comme après les indépendances. Les douze contributions réunies ici portent sur l’enseignement de l’histoire, mais aussi sur celui des langues : langue des colonisateurs, langue des colonisés… Elles étudient les variations selon les publics visés, les matières enseignées, les auteurs

et les éditeurs. Les exemples sont tirés en priorité des relations entre France et Algérie, avec une étude sur la Tunisie et le Maroc. (Coll. Manuels scolaires et sociétés, 25.50 euros, 240 p.) ISBN : 978-2-343-11598-6, ISBN EBOOK : 978-2-14-003837-2 ARCHÉOLOGIE DES INTERFACES Une approche de saisie et d’explication des systèmes socioculturels

Elouga Martin L’archéologie des interfaces est une approche des sociétés que propose l’auteur. Il s’agit de partir des faits observés sur le terrain pour reconstituer les interactions sociales et les rapports hommemilieu, ainsi que les activités qui en résultent et dont les traces structurent les sites. (17.50 euros, 160 p.) ISBN : 978-2-343-10421-8, ISBN EBOOK : 978-2-14-004130-3 LA TRADITION JUIVE ET SA SURVIVANCE À L’ÉPREUVE DE LA SHOAH (Tome 1)

Feinermann Emmanuel Exilé et dispersé parmi les nations, le peuple juif a été confronté deux millénaires durant à l’expérience de la survie. À l’aube du XXe siècle, il entrevoit enfin l’ère des grandes espérances. Sa survie dépendait, en premier lieu, de la chance et du sens donné à la vie avant le cataclysme hitlérien : une vie intérieure riche et catalysée par une forte culture et une foi religieuse profonde. Cet ouvrage revient donc sur la survivance de la tradition juive face à la prise du pouvoir par Hitler. (39.00 euros, 494 p.) ISBN : 978-2-343-09860-9, ISBN EBOOK : 978-2-14-004021-4 LA TRADITION JUIVE ET SA SURVIVANCE À L’ÉPREUVE DE LA SHOAH (Tome 2)

Feinermann Emmanuel Ce deuxième tome étudie le comportement humain et religieux dans les situations extrêmes sous la dictature hitlérienne. Afin d’assurer la survivance de la tradition juive, forts de leur expérience millénaire de la souffrance, les Juifs européens entrèrent en résistance spirituelle dans les lieux d’enfermement : ghettos, bunkers, camps de concentration et d’extermination. Dans cet univers de fin du monde, certains « métiers » imposés par les nazis ont en effet débouché sur la survie, et c’est donc ce que tente de mettre en avant cet ouvrage. (39.00 euros, 448 p.) ISBN : 978-2-343-12327-1, ISBN EBOOK : 978-2-14-004022-1 MAIS COMMENT EN EST-ON ARRIVÉ LÀ ? La terre de 4 000 à 4,5 milliards d’années

Rouffet Michel De l’Ancien Testament aux derniers calculs pour déterminer l’âge de la Terre, les chiffres varient considérablement : 4 000 ans, 75 000 ans, 4,5 milliards d’années... L’auteur raconte et démontre non seulement comment l’estimation de l’âge de notre planète a évolué au cours des siècles, mais également comment des points de vue si divergents peuvent converger et se retrouver complémentaires. Avec lui, nous découvrons que science et religion ne sont pas forcément aussi opposées que l’on pourrait le croire. (Coll. Acteurs de la Science, 23.50 euros, 236 p.) ISBN : 978-2-343-10343-3, ISBN EBOOK : 978-2-14-002270-8 ARCHÉOLOGIE DE LA PENSÉE SEXISTE L’Antiquité

Labrecque Georges Les œuvres de l’Antiquité révèlent à la fois le mépris et l’éloge adressés à la femme dans des domaines fort différents (théologie, morale, littérature, droit, philosophie, etc.), qui se sont développés dans diverses régions du monde. L’humanité a ainsi hérité d’une multitude de manuscrits très riches, encore qu’ils soient presque tous rédigés par des hommes bien souvent

sexistes avant la lettre. Cet ouvrage propose une relecture des œuvres principales de l’Antiquité et montre que les préjudices et les maux subis par les femmes en ce début du XXIe siècle plongent leurs racines dans un passé très lointain. (37.50 euros, 368 p.) ISBN : 978-2-343-10502-4, ISBN EBOOK : 978-2-14-002249-4 DICTIONNAIRE AMOUREUX DES DIEUX DE L’OLYMPE

Andrieu Gilbert Si les dieux sont amoureux, il ne faut pas oublier qu’ils ne sont que le produit des poètes et que leurs amours sont imaginées par des hommes. C’est donc en observant comment les dieux vivent leur passion, comment ils se comportent, que nous pouvons imaginer comment vivaient nos ancêtres du temps d’Homère et d’Hésiode. En regroupant les amours divines, l’auteur nous offre un délassement agréable et instructif. (24.50 euros, 242 p.) ISBN : 978-2-343-10839-1, ISBN EBOOK : 978-2-14-003671-2 HISTOIRE DES HUNS

Daniarov Kalibek L’Histoire des Huns dresse un tableau saisissant de l’histoire de ce peuple mystérieux, les Huns, depuis leur apparition à la chute de leur empire, survenue après la guerre menée par Attila en Europe (453 apr. J-C). Chercheur kazakh de renom, l’auteur présente ici une nouvelle analyse et synthèse de la culture hunnique. Il s’appuie sur des sources rares et inédites qui le conduisent à affirmer notamment que les Huns étaient des ancêtres probables du peuple kazakh. (25.00 euros, 276 p.) ISBN : 978-2-343-09492-2, ISBN EBOOK : 978-2-14-001332-4 1789 : LES COLONIES ONT LA PAROLE ANTHOLOGIE Tome 1 : Colonies ; Gens de couleur Tome 2 : Traite ; Esclavage

Biondi Carminella - Avec la collaboration de Roger Little Cette anthologie regroupe tous les écrits et les discours de l’année 1789 au sujet des colonies, des gens de couleur (tome 1), de la traite et de l’esclavage (tome 2). Voici un ensemble de controverses passionnées et passionnantes de l’époque où aucun Noir n’est admis (comme à la Conférence de Berlin, un siècle plus tard). ((Tome 1 – Coll. Autrement Mêmes, 25.50 euros, 218 p.) ISBN : 978-2-343-09854-8, ISBN EBOOK : 978-2-14-001623-3 (Tome 2 – Coll. Autrement Mêmes, 23.00 euros, 280 p.) ISBN : 978-2-343-09855-5, ISBN EBOOK : 978-2-14-001622-6 ANTIQUITÉ, ART ET POLITIQUE

Sous la direction de Bouineau Jacques Le lien entre ces différentes contributions se trouve dans l’utilisation de l’œuvre d’art comme vecteur politique, l’Antiquité sert de fil directeur et de multiples domaines artistiques sont concernés. Les domaines couverts sont les mondes anciens, l’Antiquité classique, le monde musulman, le monde slave et la culture européenne de l’époque moderne et contemporaine. (Coll. Méditerranées, 33.00 euros, 318 p., Illustré en noir et blanc) ISBN : 978-2-343-09346-8, ISBN EBOOK : 978-2-14-001407-9

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Après l’eschatologie individuelle mazdéenne dont il fut traité dans Corps et âmes du mazdéen (L’Harmattan, 2012), Éric Pirart rassemble dans le présent ouvrage les données de l’eschatologie générale mazdéenne. La rigueur philologique et la mythologie comparée sont les deux outils mis en œuvre dans l’approche de la tradition zoroastrienne qui est fragmentaire. Lʼexamen des mythes grecs qui mettent en scène un taureau ainsi fournit-il quelques clés dans lʼinterprétation de textes iraniens singulièrement lapidaires. La poésie archaïque de lʼunité Y 29 de la première Gāθā qui rapporte la plainte dʼune vache est, elle aussi, décryptée : vaches et taureaux, chez des peuples conducteurs de troupeaux, étaient au centre de lʼimaginaire et de la métaphysique.

Éric PiraRt

Spécialiste des langues et civilisations indo-iraniennes anciennes, Éric Pirart, professeur émérite de l’Université de Liège et président de la Sociedad de Estudios Iranios y Turanios (Girona), est l’auteur de nombreux ouvrages ayant trait aux traditions védiques et avestiques tels que La naissance d’Indra (L’Harmattan, 2010) ou Les Adorables de Zoroastre (Max Milo, 2010).

Vaches et taureaux en Iran

Vaches et taureaux en Iran

Mythologie zoroastrienne

Mythologie zoroastrienne

En couverture : bas-relief de la porte d’Ishtar, musée Pergame de Berlin © Fedor Selivanov – 123rf.com

ISBN : 978-2-343-14582-2

39 €

9 782343 145822

Collection KUBABA

Éric PiraRt

Série Antiquité

Mythologie zoroastrienne

Vaches et taureaux en Iran