Antoine Gizenga pour la Gauche en RDC 2296563597, 9782296563599

Ce livre tente de montrer que l'appel de Gizenga - pour une "Gauche nationaliste" contre la "Droite

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French Pages 130 [125] Year 2011

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Antoine Gizenga pour la Gauche en RDC
 2296563597, 9782296563599

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Antoine Gizenga pour la Gauche en RDC

« Dossiers, études et documents » (D.E.D.) Collection fondée et dirigée par Jean MPISI

Sous ce titre de collection, nous voulons proposer une manière plus ou moins objective, pédagogique et concise, de connaître ou faire connaître certains faits ou certains thèmes. Concrètement, la collection entend poursuivre un quadruple objectif. Primo, elle produira des monographies sur un sujet précis d’histoire, de science, de philosophie, de religion…, sur un pays ou une région du monde (guide), sur une personne (biographie), etc. Secundo, elle publiera des documents (des témoignages, des textes inédits provenant d’institutions plus ou moins officielles…), en les précédant d’une introduction utile ou en les habillant avec des commentaires appropriés. Tertio, elle s’attellera à éditer les travaux d’enquête des étudiants (à partir des résultats condensés de leurs mémoires ou de leurs thèses de doctorat), ainsi que les travaux des chercheurs universitaires ou indépendants (à partir de leurs investigations professionnelles ou de leurs réflexions). Quarto, elle tentera d’expliquer l’actualité, chaque fois que celle-ci sera focalisée sur un pays ou sur un thème, en allant à la source et en dégageant les enjeux, afin que l’événement garde toujours son actualité même si on la lit dans dix ans… Outre les quelques livres de Jean M PISI signalés à la page 4, il faut mentionner ceux des auteurs suivants : - Esdras KAMBALE, Du Shaba au Katanga. A propos du « massacre » de l’Université de Lubumbashi et de la période préinsurrectionnelle (1990-93), 2008. - NKERE Nkingi Ntanda, La crise financière internationale de 2008 et ses conséquences en Rd Congo, 2008. - NKERE Nkingi Ntanda, Education des Electeurs au CongoKinshasa : Un défi de la République, 2009. - Innocent UNYON Vakpa Katumba, Le conflit armé en Ituri (RDC) : La problématique de sa prévention et de sa gestion, 2009. - Jacques FUMUNZANZA Muketa, Kinshasa d’un quartier à l’autre, 2009. - Antoine GIZENGA, Ma vie et mes luttes, 2011.

Jean MPISI

Antoine Gizenga pour la Gauche en RDC

© L’Harmattan, 2011 5-7, rue de l’École-Polytechnique ; 75005 Paris http://www.librairieharmattan.com [email protected] [email protected] ISBN : 978-2-296-56359-9 EAN : 9782296563599

Etant donné que seule l’unité peut faire la force, c’est par le processus d’unification que les nationalistes progressistes ont été sauvés de la disparition politique. (…) Le PALU ne veut pas être l’auteur de la fissure du bloc des nationalistes de Gauche, qui a commencé à renaître. Le PALU refuse d’être ainsi un complice d’un retour funeste de la Droite, en général réactionnaire, aux commandes de notre pays. (…). Le PALU entend ainsi réagir par un appel à l’unité de la gauche nationaliste devant les manœuvres de regroupement de la Droite et le risque de retour de celle-ci à la tête de notre pays, car celui-ci n’oubliera jamais ce que cette Droite lui a fait et lui a causé comme préjudices sur tous les plans pendant près d’un demi-siècle. (…). Parlez au peuple souverain un langage de vérité, de patriotisme et d’espoir. Il finira, sans doute, par vous comprendre. Expliquez-lui que, pour le PALU, ce qui compte avant tout c'est la préservation de la Nation et l’évolution positive du peuple et du pays.’’ Antoine GIZENGA, 23 juillet 2011.

Les ancêtres, ou « nationalistes de 1ère génération »

Patrice Lumumba, Antoine Gizenga et Laurent-Désiré Kabila

Les « héritiers », ou « nationalistes de 2ème génération »

Le Président J. Kabila, encadré par le Secrétaire permanent du PALU (Godefroid Mayobo) et le Premier Ministre (A. Muzito).

1ère et 2ème générations réunies

ANTOINE GIZENGA, UN MILITANT DE LA « GAUCHE NATIONALISTE ET PROGRESSISTE » Depuis son entrée en politique en 1959 comme président du Parti solidaire africain (PSA), Antoine Gizenga n’a jamais cessé de lutter pour qu’émergent au Congo les valeurs républicaines cardinales suivantes : indépendance, unité, liberté, paix, justice et démocratie. Ainsi, dès juin 1960, il s’est attelé de consolider ces valeurs, aux côtés du Premier ministre P. Lumumba. Le peuple, qui leur avait confié une majorité au Parlement en mai 1960, estima que l’indépendance du Congo devait se faire dans l’unité. C’est pourquoi, quand la sécession du Katanga fut proclamée en juillet 1960, Gizenga la combattit avec toute son énergie, d’abord dans le Gouvernement Lumumba à Léopoldville, puis dans ce même Gouvernement qu’il délocalisa, à son éviction le 14 septembre 1960, à Stanleyville. Cette lutte sans merci contre le séparatisme katangais et pour la légalité conduisit Lumumba à la mort en janvier 1961 et Gizenga à la prison un an plus tard. Après la mort du héros Lumumba, il se résolut d’assumer son héritage spirituel et devint, par le fait même, le premier ennemi de ses assassins, qui avaient instauré la terreur et l’arbitraire au pays. A peine libéré en 1964, il réunit autour de lui les partis nationalistes, qui, le 22 août de cette année, fusionnèrent en une formation politique unique, le Parti lumumbiste unifié (PALU). Cette plateforme, qu’il dirige encore, s’est toujours opposée à tous les ennemis de la 9

liberté et de la démocratie. Deux mois après sa naissance, ses adversaires le remirent au silence. Quand Gizenga recouvra sa liberté, en novembre 1965, il reprit la lutte, cette fois-ci contre la dictature du nouveau régime militaire. Ayant échappé à un attentat, il se réfugia à l’étranger depuis le 19 février 1966. Pendant son exil, qui dura 26 ans, il continua sa lutte pour l’émergence de la démocratie pluraliste. Ce combat ne faiblit jusqu’à son retour au pays le 7 février 1992. Il redoubla d’intensité, se donnant comme priorité le départ du maréchal Mobutu Sese Seko. C’est LaurentDésiré Kabila, un vieux maquisard progressiste, qui, à la faveur d’une « guerre de libération », réussit à déloger le dictateur. Gizenga salua en lui un « frère lumumbiste », et pensa que son promotion à la tête de l’Etat signifiait le retour des nationalistes au pouvoir. Mais le président Kabila n’associa pas à l’exercice de ce pouvoir le PALU, comme celui-ci le désirait. C’est son fils et successeur, Joseph Kabila, qui, en 2006, comprit l’opportunité d’une coalition gouvernementale nationaliste avec le PALU. Au terme de cette entente, le patriarche Gizenga devint Premier Ministre le 30 décembre 2006, reprenant le siège de Patrice Lumumba perdu en septembre 1960. A sa démission volontaire, pour raison de santé, le 25 septembre 2008, c’est son fidèle partisan, Adolphe Muzito, qui le remplaça, avec pour mission de continuer l’œuvre de refondation de l’Etat, un Etat détruit depuis quatre décennies par les « tombeurs » de Patrice Lumumba et des nationalistes.

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L’« ancêtre », Gizenga, passait la main à l’« héritier », Muzito. Celui-ci, ainsi que Godefroid Mayobo, Secrétaire permanent et porte-parole du PALU, l’autre « héritier », inaugurèrent la « seconde génération des nationalistes », Patrice Lumumba et Antoine Gizenga constituant la « première génération des nationalistes », ou les « pères fondateurs du nationalisme de Gauche ». Deux autres combattants lumumbistes, en l’occurrence, Pierre Mulele et Laurent-Désiré Kabila, peuvent être joints à cette classe d’ancêtres ; ils forment beaucoup plus de « révolutionnaires ». C’est pourquoi Joseph Kabila se déclare leur descendant, constituant un « révolutionnaire de la deuxième génération ». Ainsi, l’Exécutif congolais aujourd’hui est conduit par deux « nationalistes (ou révolutionnaires) de deuxième génération », Joseph Kabila à la tête de l’Etat et Adolphe Muzito à la tête du Gouvernement. Tous deux travaillent sous l’œil d’un ancien, Antoine Gizenga, en retraite des affaires officielles de l’Etat. Reprenant ses responsabilités dans le PALU, le chef de file des nationalistes orienta son combat dans le maintien des nationalistes au pouvoir reconquis en 2006. Ce combat, qui a toujours été le sien depuis toujours, se résume en un affrontement « Gauche progressiste » – « Droite réactionnaire ». Il le rappelle avec gravité dans ses deux messages, ceux du 29 janvier et du 23 juillet 2011, relatifs aux élections de novembre 2011. Cet ouvrage tente de comprendre ce que recouvrent exactement, pour Antoine Gizenga et le PALU, ces deux concepts de « Gauche » et de « Droite ».

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Il se déclinera en cinq points, essentiellement axés sur le combat, en plusieurs étapes, pour le triomphe de la grande idée de « l’unité de la gauche nationaliste devant les manœuvres de regroupement de la Droite et le risque du retour de celle-ci à la tête de notre pays ». Ces cinq points constituent le SOMMAIRE de l’ouvrage : ANTOINE GIZENGA, UN MILITANT DE LA « GAUCHE NATIONALISTE ET PROGRESSISTE » 9 1. LE PALU, UN PARTI PAS COMME LES AUTRES

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2. MESSAGES DE GIZENGA CONCERNANT LES ELECTIONS DE 2011 21 3. LE COMBAT DE GIZENGA POUR UNE GAUCHE CONGOLAISE 31 4. NOTE : LA GAUCHE ET LA DROITE EN RDC

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5. COMMENTAIRES DE LA PRESSE CONCERNANT LES MESSAGES DE GIZENGA 99 Jean MPISI, 1er août 2011.

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1 LE PALU, UN PARTI PAS COMME LES AUTRES Dans le microcosme politique congolais, le Parti lumumbiste unifié (PALU), du leader charismatique et historique Antoine Gizenga, n’est pas un mouvement politique comme les autres. Le plus souvent, il ne se « mêle » pas aux autres partis : par exemple, on ne voit guère ses dirigeants s’afficher à la télévision ou à la presse écrite, pour prendre part à des débats qu’ils trouvent stériles ou sans objet. Des débats opportunistes qui ne visent qu’à faire la publicité malsaine de ceux qui y participent. Des débats qui ignorent les vrais problèmes du pays, les vrais dangers qui le menacent et les vraies solutions pour sortir de la crise née au lendemain de l’indépendance. Le PALU ne répond pas souvent également à des critiques qu’on lui adresse, des critiques qu’il trouve généralement infondées, malhonnêtes et vaines. Et, du moins depuis 2006, quand Antoine Gizenga ou son porte-parole parle, sa voix compte ; tout le monde l’écoute et la prend en considération. Tout le monde, du plus petit citoyen au Chef de l’Etat. Tout le monde l’écoute cette voix parce qu’elle vaut quelque chose, parce qu’elle veut dire quelque chose, parce qu’elle peut bouleverser la situation politique du moment ou à venir. A vrai dire, le PALU veut se mettre au-dessus de tous les partis politiques, pour plusieurs raisons. Il est d’abord, de tous ceux qui sont nés après l’indépendance, l’aîné : il a vu le jour le 22 août 1964, avant même l’apparition du mobutisme destructeur et 13

antipopulaire, alors que l’Union pour la démocratie et le progrès social (UDPS), dont on se trompe souvent en prétendant qu’il est le plus vieux parti politique congolais, n’est apparu que le 15 février 1982. Bien plus, le PALU revendique une légitimité historique, puisqu’il affirme être le parti que Patrice Lumumba, le héros bien-aimé de tous les Congolais, avait demandé, pendant qu’il vivait encore, de créer, afin de rassembler tous ceux qui militent pour le progrès réel de la République. Ensuite, avec l’UDPS, le PALU apparaît comme le seul parti qui soit né avec un but précis : combattre la dictature instaurée au Congo. La dictature dont parle le PALU émerge le jour où, le 5 septembre 1960, le président Joseph Kasa-Vubu limogea, en toute illégalité, le Gouvernement Lumumba issu de la majorité parlementaire et donc de la volonté du peuple, tandis que la dictature que l’UDPS évoque visa au départ les dérives d’un régime né le 24 décembre 1965, celui de Joseph-Désiré Mobutu, un régime que, pourtant, les fondateurs de cette formation avaient largement contribué à édifier et à consolider. Il faut souligner que la dictature intéressant le PALU a officiellement pris fin avec les élections législatives et présidentielle de 2006, un remake des élections démocratiques de mai 1960, qui ont consacré la victoire de ce que le Parti gizengiste appelle les « nationalistes progressistes de la Gauche ». Rangée dans ce que le PALU identifie sous le nom de la « Droite réactionnaire et funeste », l’UDPS, elle, considère que la dictature qu’elle dénonçait depuis 1982 court toujours. Le PALU, peut-être aussi avec l’UDPS, constitue également le parti le moins opportuniste : il n’est pas né pour une circonstance donnée et pour un intérêt égoïste. 14

Il est né pour défendre réellement l’intérêt national, que le moment s’y prête ou pas. C’est pourquoi il continue d’exister, qu’un régime succède à un autre ou pas. Pendant les 25 premières années de la dictature mobutiste, de tous les partis connus au Congo, seuls donc le PALU et l’UDPS existaient. Les autres ont été engendrés au lendemain du 24 avril 1990, quand le président Mobutu, à la tête d’Etat monopartite, décida de procéder à l’ouverture du pluralisme politique. A l’arrivée au pouvoir de Laurent-Désiré Kabila le 17 mai 1997, plusieurs de ces partis avaient cessé de vivre, et très peu de ceux qui survivaient encore disparurent en 2006. En cette année cruciale, d’autres partis avaient émergé et aussi disparu après les élections. En vue des échéances de 2011, des nouveaux partis se sont signalés et continuent à se faire enregistrer au ministère de l’Intérieur. Tous ces partis sont, décrète le PALU, des partis « alimentaires », « opportunistes », naissant pour espérer se retrouver dans un gouvernement ou dans les institutions étatiques. Le PALU est enfin le seul vrai parti de gauche de la RDC, peut-être même l’unique. C’est en effet un mouvement des masses, discipliné et structuré en cellules de base. Au contraire d’un parti élitiste, le PALU a une base, la respecte, compte sur elle et s’appuie sur elle en toute circonstance. A cette base, il enseigne les valeurs républicaines : indépendance, unité nationale, justice, démocratie, paix, travail, etc. Toutes ces valeurs cardinales constituent une idéologie progressiste, laquelle se fonde sur le nationalisme salvateur du héros Patrice Lumumba. Le lumumbisme, enseigné aux militants, prône que les ennemis du progrès du peuple congolais sont les hommes de la Droite. 15

L’on ne sait souvent pas si tous les autres partis congolais, que le PALU soupçonne d’être « alimentaires », sont de gauche ou de droite, tant ils ne présentent généralement aucun programme de société. Quand bien même certains se disent de gauche, c’est pour la forme, pour s’attirer la sympathie du peuple. En réalité, ces partis, selon le PALU, n’appartiennent le plus souvent qu’à la « Droite », une Droite diffuse et nuisible. Du bout des lèvres ou non, le PALU reconnaît que certains de ces partis – ils sont très peu nombreux – peuvent être acceptés comme faisant partie de la famille de la Gauche. Cependant, le PALU reproche à ces formations politiques d’intégrer en leur sein, consciemment ou non, des personnalités qui ne sont point de la Gauche ou qui ne croient pas – ou plus – aux valeurs de la Gauche. Sans le dire officiellement, le PALU leur reproche donc d’être des sortes de marmites contenant à la fois toutes sortes d’aliments (pinces de crabes, morceaux pimentés et salés de porc et de poissons, légumes amers et doux, le tout immergé dans une sauce sucrée, salée et huilée). Ces partis dits de gauche hébergeraient ainsi des loups dans leur bergerie ! Le PALU voudrait que ces partis se « gauchisent » réellement, en purgeant de leurs rangs les brebis galeuses ! En se purifiant, ces partis rejoindraient le PALU, afin de constituer une grande alliance des « nationalistes progressistes de Gauche », qui deviendraient assez forts pour barrer la route à une Droite malpropre en quête de la reconquête d’un pouvoir perdu en 2006. C’est, en gros, le sens du message que, le samedi 23 juillet 2011, le patriarche Gizenga a livré à ses partisans et à l’opinion congolaise tout entière. 16

2 MESSAGES D’ANTOINE GIZENGA RELATIFS AUX ELECTIONS DE 2011 23 juillet 2011 : ‘‘Peuple de Gauche, empêchez le retour funeste de la Droite réactionnaire’’ ! Camarades Cadres du Parti, Camarades Responsables des organes du Parti, Au nom de la Direction politique du Parti Lumumbiste unifié (PALU), notre Parti, je vous adresse à tous nos chaleureuses et patriotiques salutations. La rencontre de ce jour fait suite à celle du 29 janvier 2011, au cours de laquelle je vous avais déjà annoncé quelques directives de la Direction politique du Parti en rapport avec la situation et les enjeux politiques du moment. Je vous rappelle que vous représentez ici l’ensemble des militants du Parti regroupés dans leurs organes de base respectifs. Face aux élections qui s’approchent à grands pas, la Direction politique du Parti a estimé venu le temps de vous donner des indications et des orientations précises en rapport avec la vision de notre Parti sur ces échéances prochaines et avec la façon dont le Parti va y participer. En ce qui concerne la vision du Parti sur les élections prochaines, elle est clairement et fermement basée sur le souhait ardent de voir : 17

1. Notre Peuple consolider son pouvoir de souverain primaire. 2. La Nation devenir plus unie et plus crédible grâce au jeu démocratique. 3. Chaque tournée électorale être meilleure que la précédente. 4. La paix et la tolérance sortir renforcées par le processus électoral. Pour le PALU, les enjeux majeurs de ces élections sont donc : 1. Le maintien et la consolidation des nationalistes à la tête de I’Etat. 2. L’avènement des conditions pour une construction politique durable de la nation. 3. Le maintien et la consolidation de la position du PALU dans le leadership de gestion du pays. En ce qui concerne les nationalistes progressistes, comme vous le savez, ils ne sont pas encore tous dans le PALU. Ils se retrouvent dispersés dans plusieurs formations politiques et sociales du pays. Etant donné que seule l’unité peut faire la force, c’est par le processus d’unification que les nationalistes progressistes ont été sauvés de la disparition politique. Ils ont dû fusionner leurs partis respectifs pour donner naissance au PALU. C’est pour atteindre le même but que nous avons entrepris des contacts multiples avec les autres forces nationalistes progressistes significatives et, ce, depuis le 2 juin 2008 jusqu’à ce jour. 18

A cet effet, le PALU a proposé des projets d'entente politique à ces partenaires potentiels. Hélas, jusqu’à ce jour aucune réponse notable ne nous a été donnée. Aucun projet de construction politique véritablement nationaliste ne nous a été présenté. Et aucun accord politique conséquent, appelé à remplacer celui de 2006, n’a été conclu malgré la disponibilité permanente affichée par le PALU. Néanmoins, le PALU ne veut pas être l’auteur de la fissure du bloc des nationalistes de Gauche, qui a commencé à renaître. Le PALU refuse d’être ainsi un complice d’un retour funeste de la Droite, en général réactionnaire, aux commandes de notre pays. C’est pourquoi, la Direction politique du Parti annonce ce qui suit : 1. Le lancement de l’opération de dépôt et de sélection des candidats du PALU à la députation nationale et à la députation provinciale sur toute l’étendue du territoire national. Cette opération court du 18 juillet au 6 août. Les modalités pratiques de mise en œuvre de cette opération sont précisées dans des notes circulaires déjà diffusées dans tous les organes de base du Parti. 2. La mise au point du programme de gouvernance du pays pour la période 2012-2016. Le PALU aurait souhaité que ce programme soit finalisé ensemble avec les partenaires politiques potentiels de la Gauche congolaise. Mais, devant l’absence de répondant pour ce faire, le PALU sera obligé de le rendre public incessamment, de le 19

porter et de l’assumer même seul devant le peuple souverain. 3. La non-présentation par le PALU d’un candidat président de la République, issu de ses rangs, pour les échéances prochaines. Le PALU entend ainsi réagir par un appel à l’unité de la Gauche nationaliste devant les manœuvres de regroupement de la Droite et le risque du retour de celleci à la tête de notre pays, car celui-ci n’oubliera jamais ce que cette Droite lui a fait et lui a causé comme préjudices sur tous les plans pendant près d’un demi-siècle. Le PALU soutiendra le candidat nationaliste de Gauche qui présentera un programme de gouvernance conforme aux valeurs et principes auxquels les nationalistes lumumbistes croient et tiennent pour le progrès de notre pays. Face à un régime constitutionnel du type semiprésidentiel à forte tendance parlementaire, le PALU prend de la sorte le temps de se focaliser sur ce qui est tout aussi important que le contrôle du poste de président de la République, à savoir : le contrôle du Parlement et du Gouvernement de la République. Le PALU se met résolument à préparer très sérieusement et très profondément sa candidature à la présidentielle de 2016. Camarades Cadres du Parti, Camarades Responsables des organes de base du Parti, Voilà les dispositions arrêtées par la Direction politique du Parti en r:apport avec les élections prochaines. 20

Je vous demande de bien les expliquer à tous les membres du parti et à tous nos compatriotes sages et de bonne foi. Je vous exhorte tous à un engagement sans recul, avec détermination et optimisme, dans la rude bataille électorale qui s'annonce. Parlez au peuple souverain un langage de vérité, de patriotisme et d'espoir. Il finira, sans doute, par vous comprendre. Expliquez-lui que pour le PALU ce qui compte avant tout c'est la préservation de la Nation et l'évolution positive du peuple et du pays. A tous, je souhaite : santé et courage dans cette phase décisive vers les élections. La lutte continue et la victoire est certaine. Le peuple vaincra ! Fait à Léopoldville, le 23/07/2011. Pour le Parti Lumumbiste Unifié (PALU), Le Secrétaire Général, Antoine GIZENGA.

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29 janvier 2011 : ‘‘Soyez prêts pour le sacrifice’’ ! Discours de vœux et d’orientation politique aux responsables des organes de base du Parti Dans son message du 23 juillet 2011, Antoine Gizenga rappelait son discours tenu à l’occasion du nouvel an 2011. Le voici in extenso : Chers Camarades, Responsables des Organes de Base du Parti de la Région Urbaine de Kinshasa, Avant tout, je voudrais, au nom de toute la Direction politique de notre Parti, vous exprimer les vœux les meilleurs de santé, de bonheur et de succès pour cette année 2011 qui vient de commencer. Ces vœux vous sont exprimés pour vous et vos familles, pour les membres des Organes du Parti que vous dirigez ainsi que pour tous les Responsables des Organes de Base du Parti à travers tout le Territoire National, car vous les représentez aussi dans le cadre de cette rencontre. L’année 2011, dont je viens de parler, est une année très particulière pour le Peuple congolais et le Congo notre pays. En effet, c’est une année électorale. Après les élections démocratiques de 2006, le Peuple souverain devra, cette fois-ci encore, se choisir, librement et en toute transparence, ses dirigeants pour les cinq prochaines années. Point n’est besoin de vous expliquer la lutte que le Parti Lumumbiste Unifié « PALU », en particulier, et les Nationalistes Progressistes, en général, ont menée avec d’innombrables et immenses sacrifices pour qu’il en soit ainsi. En revendiquant en permanence la tenue des élections libres, démocratiques et transparentes, nous 22

n’avions pas d’abord en tête nos ambitions personnelles et les positions de prestige à occuper. Nous pensions surtout et avant tout aux droits inaliénables de souverain primaire pour le Peuple congolais, libéré du joug du colonialisme et menacé par le néo-colonialisme et ses valets locaux. Ces derniers n’avaient pas trouvé mieux que d’imposer à ce Peuple fier un régime de dictature, fait de terreur, de violations massives de droits de l’homme, de vol, de corruption et d’appauvrissement dramatique et continuelle de la population. Et le Peuple congolais, l’Afrique et les amis étrangers, venus investir et travailler au Congo, ont tous perdu en termes de richesse à créer et à posséder, de prospérité à générer et de contribution significative au progrès de l’Humanité. En ayant à l’esprit ce contexte historique, les élections prochaines exigent un sens profond que les militants du PALU doivent leur donner et, aussi, une attitude conséquente qu’ils doivent adopter. Quel sens le PALU doit-il donner à ces élections ? Nous disons que ces élections doivent marquer un pas de plus dans le sens du progrès politique pour la Nation congolaise. Comme en 2006, elles doivent permettre au PALU : 1°) de contribuer encore davantage à l’éloignement du risque de fracture du pays ; 2°) d’améliorer la stabilité politique, économique et sociale de la Nation ; 3°) de consolider le bloc nationaliste dans son rôle dirigeant du pays afin que celui-ci dispose d’une vision et

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d’un projet révolutionnaire et très dynamique pour la construction et la reconstruction du pays et ; 4°) de renforcer la conscience politique du Peuple souverain dans la prise en mains de son propre destin. Le PALU participera donc très activement à ce processus, avant, pendant et après les élections. Ainsi, j’annonce que : 1°) au mois de février, la distribution des fiches d’identification des militants du PALU sur toute l’étendue du territoire national sera entreprise ; 2°) dès le mois de mars, l’enregistrement et la sélection des candidats du Parti vont commencer afin de nous permettre d’être prêts avec les listes de ces candidats au début du mois de mai. Quel comportement doivent alors adopter les militants du PALU face à ces échéances ? 1°) Les militants du PALU doivent devenir encore plus unis et plus disciplinés. Car on ne va pas à la victoire dans des combats pareils sans une forte cohésion interne et sans discipline ; 2°) Les militants du PALU doivent être prêts à des sacrifices pour l’intérêt du Peuple et du Pays. Déjà avec la législature passée, le PALU a su prendre le risque de taire son amour-propre, son radicalisme et son orgueil pour contribuer au maintien de l’unité du pays et à la promotion de la tolérance, de la paix et de la stabilité politique dans notre Pays. Malgré tout, le PALU, ensemble avec d’autres Nationalistes, a su tenir une plateforme politique de travail et de gestion du pays. Le 24

PALU va pousser tout cet élan à se poursuivre et à s’amplifier pour que les Nationalistes continuent à conduire ce pays et lui insufflent une âme politique progressiste. 3°) les militants du PALU doivent être déterminés à aller à la conquête du pouvoir d’Etat de manière démocratique et avec les moyens provenant essentiellement d’eux mêmes. Tout cela pour, avant tout, se mettre au service du Peuple. Il faut aller confirmer au Peuple congolais que, malgré des accusations non prouvées formulées parfois contre l’un ou l’autre cadre du PALU, le PALU demeure le parti des masses et le parti de la Gauche congolaise tel qu’il l’a connu. Le PALU reste fermement proche des préoccupations légitimes de la population. Son idéologie est toujours le socialisme démocratique dont les bases essentielles du projet politique qui en découle sont le travail productif de tous, le bien-être de tous, la bonne justice distributive, l’État de droit et l’Union de l’Afrique. 4°) les militants du PALU doivent, enfin, se garder de suivre un autre guide que la Direction de leur parti. En effet, ils doivent absolument éviter de se laisser conduire par des rumeurs et des intoxications, ramassées en dehors du Parti, au lieu d’écouter les directives et les orientations indiquées par la Direction attitrée du Parti. Il faut savoir que la lutte n’a pas encore pris fin. Les ennemis du Peuple congolais et du PALU sont encore très nombreux et aux aguets. Camarades, Pour cette année 2011, je vous exhorte à aller tous fiers, unis, disciplinés, déterminés à gagner et prêts à endurer les sacrifices exigés par la lutte du Peuple. 25

Encore une fois, Bonne et Heureuse Année 2011. Que vive le Parti Lumumbiste Unifié ! Je vous remercie Antoine GIZENGA.

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Nous venons de lire les deux messages du patriarche Antoine Gizenga. Le plus important d’entre eux est le premier, où le guide des lumumbistes congolais se désiste en faveur d’un autre candidat de Gauche. Dans le chapitre qui suit, nous devons chercher à comprendre le sens que l’héritier spirituel de Patrice Lumumba donne à ce mot magique de « Gauche » et aux autres concepts épistémologiques (dont nationalisme et progressisme) qui lui sont proches ou attachés.

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3 LE COMBAT D’ANTOINE GIZENGA POUR UNE GAUCHE CONGOLAISE Soutenir un « candidat nationaliste de Gauche », pour éviter « un retour funeste de la Droite réactionnaire » Le samedi 23 juillet 2011, Antoine Gizenga prononça un discours que pratiquement tout le monde attendait, pour fixer l’opinion sur la position du PALU lors des prochaines élections présidentielle et législatives. En peu de mots, il affirma que son parti ne présentera pas de candidat à la présidence de la République mais sera bien présent aux députations nationale et provinciale ! Le PALU soutiendra, ajouta-t-il, un candidat « nationaliste de Gauche », qu’il ne nomma point (mais que, tout le monde le sut, ne put être que Joseph Kabila, le mieux placé à remporter l’élection présidentielle prévue). Aussi appelat-il à l’union de toutes les forces progressistes du pays, afin d’empêcher « un retour funeste de la Droite, en général réactionnaire, aux commandes de notre pays. » La Gauche doit se maintenir au pouvoir conquis en 2006 au terme d’un accord majeur entre l’Alliance pour la majorité présidentielle (AMP) et le PALU, martela le leader charismatique du mouvement lumumbiste. Doit être renouvelée cette entente électorale et gouvernementale, laquelle confiait à l’AMP la tête de l’Etat et au PALU la tête du Gouvernement. Dans cinq ans, c’est-à-dire, en 2016, l’accord devra persister, mais le schéma devra être inversé, le PALU devant prétendre à la Présidence et l’AMP (aujourd’hui la MP, Majorité présidentielle) devra se contenter de la Primature ! 27

Cette allocution du leader du mouvement nationaliste étonna plus d’un et suscita même des commentaires en sens divers. On y a lu le soutien du PALU à Joseph Kabila, lequel ne s’était toutefois pas encore déclaré officiellement candidat à l’élection présidentielle, mais en même temps, elle sembla énerver certains barons kabilistes qui ont toujours contesté au PALU le droit de diriger le pays. En tout cas, pour ceux qui savent lire l’histoire du Congo et connaissent bien Antoine Gizenga, sa position d’appeler à l’union de la Gauche pour soutenir un candidat progressiste afin de battre la Droite « réactionnaire » n’a rien d’anormal, d’original, de spontané, ou d’opportuniste. Elle n’obéit qu’à une logique, une logique implacable, constante, invariable, construite depuis son entrée en politique et jamais trahie. Le retour à l’histoire paraît nécessaire pour comprendre cette logique. L’accord Lumumba-Gizenga, pour ‘‘un regroupement des forces populaires contre les partis pro-colonialistes’’ Dès juillet 1959, lorsqu’il fut élu à la présidence du Parti solidaire africain (PSA), le mouvement politique fondé par Pierre Mulele, Antoine Gizenga, convaincu de l’alignement à gauche de cette formation, la défendra de toutes ses forces. En ce moment-là, le combat consistait à libérer le Congo du joug colonial belge. L’indépendance ne doit pas être donnée par la Belgique, comme pensaient alors certains Congolais étiquetés à droite (proches de l’Eglise catholique et de la colonisation), mais doit s’arracher, même au prix du sacrifice suprême. 28

C’est ainsi qu’en janvier 1960, alors que se déroula à Bruxelles une importante rencontre belgo-congolaise, connue sous le nom fameux de la Conférence de la « Table ronde », censée négocier l’indépendance du Congo, Gizenga, qui ne croyait pas à la sincérité des colonialistes, force réactionnaire de droite, se retrouva dans les pays socialistes de l’Est, ‘‘afin d’alerter l’opinion mondiale’’ sur le fait que la Belgique persistait à refuser au peuple congolais son droit à la gestion de ses propres affaires. Cette initiative était bonne, soutiendra le chef du PSA, car sa campagne à l’étranger contre les manœuvres des Belges avait contraint ceux-ci à retrouver les meilleurs sentiments et à ne plus confisquer le droit des Congolais, celui d’accéder à l’indépendance ! De retour au Congo, Gizenga tint, le 11 mai 1960, une mémorable conférence de presse, où il fit une déclaration sur sa ligne politique, qui sera celle de toute sa vie dans un Congo indépendant. Cette déclaration insista sur la consolidation de l’Unité nationale : ‘‘Les passions doivent faire place à la raison. Ne nous laissons pas influencer par ceux qui nous méprisaient hier, groupons-nous autour de cette solidarité bien africaine pour donner à ceux qui espèrent en nous, une vie meilleure même au prix de notre vie, si cela devait être pour la cause de l’Afrique et pour la paix du monde.’’ Les Congolais invités ne se groupèrent pas en une formation unique, mais en deux blocs : d’un côté, il y eut le groupe de ceux que Gizenga appela les « amis de ceux qui nous méprisaient hier », et de l’autre, il y eut celui des adversaires de ces colonialistes. Le PSA de Gizenga, mouvement politique résolument anticolonialiste, opta pour l’union avec d’autres forces 29

progressistes du pays. C’est ainsi que, le 10 juin 1960, le PSA, qui venait de s’affirmer aux législatives de mai comme le second parti nationaliste du pays, se rangeant juste derrière le tout-puissant Mouvement national congolais (MNC) de Patrice-Emery Lumumba, lequel avait remporté haut la main les élections, s’allia avec celui-ci, ainsi qu’avec deux autres formations nationalistes victorieuses, le Centre de regroupement africain (CEREA) d’Anicet Kashamura et le Cartel BALUBAKAT de Rémy Mwamba. Le protocole d’accord, défini autour d’un « Bloc nationaliste » (ou « Front commun des nationalistes »), a la même intonation que le discours de Gizenga du 30 septembre 2006 (accord AMP-PALU) ou de son message du 23 juillet 2011. Il dit : ‘‘En présence des intrigues qui se trament actuellement entre, d’une part, l’ancienne puissance coloniale et, d’autre part, des partis minoritaires procolonialistes – intrigues tendant à écarter les partis et les leaders nationalistes qui jouissent indubitablement de la confiance unanime du peuple ; Considérant que la libération du Congo est l’œuvre exclusive des partis nationalistes, et que le salut du peuple congolais repose actuellement dans le regroupement de ces forces nationalistes et démocratiques du pays ; Entendu que ce regroupement des forces populaires est indispensable pour faire échec aux manœuvres des impérialistes tendant actuellement à la désignation d’un gouvernement fantoche néocolonialiste ; Entendu que le résultat des élections démontre clairement que le peuple a voté pour les partis 30

nationalistes et que ces derniers commettraient un crime s’ils n’unissaient pas leurs forces autour d’une grande alliance ; En vue de déjouer toutes les manœuvres de division et d’assurer en même temps une victoire finale sur le colonialisme belge, le Mouvement national congolais (M.N.C.), le Parti solidaire africain (P.S.A.), le Centre de regroupement africain (CEREA) et la BALUBAKAT, ont décidé : 1. de se grouper en vue de la formation d’un gouvernement central anticolonialiste ; 2. de conclure un pacte d’amitié et de solidarité capable de sauvegarder l’unité politique et économique du pays ; 3. de combattre toutes les manœuvres de division et de séparatisme susceptibles de provoquer l’éclatement du Congo et des troubles sociaux au pays ; 4. de défendre, au sein des institutions nationales, une politique commune, tant sur le plan de la politique générale, que sur le plan économique et social.’’ Sans pouvoir les nommer, Lumumba, Gizenga et leurs partenaires accusaient leurs adversaires politiques, alignés à la droite de l’échiquier politique, de vouloir précisément diviser le pays, avec le soutien des colonialistes ! Le Gouvernement Lumumba limogé et remplacé par un Gouvernement de droite C’est fort de leur majorité parlementaire, que, le 24 juin 1960, Patrice Lumumba, désigné Premier ministre, et Antoine Gizenga, Vice-Premier ministre, formèrent le premier gouvernement de la République naissante. Un 31

gouvernement dirigé donc par les nationalistes progressistes, même s’il reprenait en son sein, pour cause d’unité nationale, quelques ministres de droite. Soucieux de la représentativité et de la concorde nationales, les deux partenaires, Lumumba et Gizenga, demandèrent et obtinrent de leurs parlementaires d’élire à la présidence de la République Joseph Kasa-Vubu, leur adversaire politique, le chef de file de la droite. Ce fut fait le 23 juin 1960. Mais bien vite, Lumumba et Gizenga se rendirent compte qu’ils avaient commis une erreur monumentale en incluant dans leur gouvernement des hommes de droite et, surtout, en appelant à voter à la tête de l’Etat leur leader. En effet, le 5 septembre 1960, soit seulement deux mois de gouvernement, Kasa-Vubu, en toute illégalité, limogea Lumumba et son cabinet, qu’il remplaça par Joseph Ileo et ses hommes de droite. Antoine Gizenga n’accepta jamais ce coup de force, confirmé le 14 septembre suivant par l’intrusion dans la politique d’un militaire, le colonel Joseph-Désiré Mobutu, lequel protégea Kasa-Vubu mais maintint Lumumba à l’écart du jeu politique. A la tête de son gouvernement, il nomma un antilumumbiste avéré encore en vie, Justin-Marie Bomboko, ancien ministre des Affaires étrangères du Gouvernement Lumumba. Dans cette équipe appelée « Collège des Commissaires généraux », on retrouva un certain Etienne Tshisekedi, un des fondateurs de l’Union pour la démocratie et le progrès social (UDPS) et son actuel président, considéré aujourd’hui, par le PALU, comme le chef de file de la Droite « réactionnaire ». 32

Délocalisation à Stanleyville du Gouvernement légal, pour chasser du pouvoir les fossoyeurs de la démocratie Pour résister aux « usurpateurs » de septembre 1960, fossoyeurs de la jeune démocratie congolaise, le président du PSA quitta clandestinement Léopoldville (aujourd’hui Kinshasa) et regagna Stanleyville (Kisangani), fief électoral de Lumumba, situé à l’est du pays, où il restaura, le 14 octobre suivant, le Gouvernement légal du Congo, un gouvernement que reconnurent 21 nations du monde progressiste. Désormais, le pays avait deux Gouvernements, l’un de droite, siégeant à Léopoldville et mené par Kasa-Vubu, Ileo et Mobutu, et l’autre de gauche, installé à Stanleyville et dirigé par le Vice-Premier Gizenga. Celui-ci attendait que Lumumba le rejoigne pour qu’il reprenne son poste de Premier ministre et chef de Gouvernement. Mais le Premier ministre, en route pour Stanleyville, fut arrêté par ses adversaires, emprisonné à Thysville (Mbanza-Ngungu) au Bas-Congo de Kasa-Vubu et livré au gouvernement de Moïse Tshombe qui, depuis le 11 juillet 1960, avait détaché sa riche province du Katanga de l’ensemble congolais. Le 17 janvier 1961, à Elisabethville, capitale de cet « Etat indépendant », les sécessionnistes ne firent qu’une bouchée de Patrice Lumumba et de ses deux compagnons, Joseph Okito et Maurice Mpolo. Parmi ceux qui avaient appelé au meurtre de son ami et patron, Gizenga, et l’histoire avec lui, n’oublie pas qu’il y eut Joseph Kasa-Vubu, Joseph Mobutu, Joseph Ileo, JustinMarie Bomboko, Albert Kalonji, Victor Nendaka… et Etienne Tshisekedi ! Tous de la Droite « réactionnaire ». 33

A la mort de Lumumba, Gizenga, de Stanleyville où il gouvernait plus de la moitié du territoire national, se résolut d’hériter l’idéologie et la politique de Patrice Lumumba, devenu pour lui et tous les nationalistes, un héros national. Il décida de venger sa mort en cherchant à réduire la sécession katangaise, pour laquelle Lumumba fut sacrifié, et à chasser ses tombeurs du pouvoir à Léopoldville. Il n’y parvint pas : en janvier 1962, ses adversaires le capturèrent et l’emprisonnèrent à l’île Bulambemba, toujours au Bas-Congo de Kasa-Vubu. Pierre Mulele, son ministre dans le Gouvernement Lumumba de Léopoldville et de Stanleyville, lui aussi déterminé à venger Lumumba, prit les armes et, dès le 1 er janvier 1964, déclencha, dans son Kwilu natal, à l’ouest du pays, la première insurrection populaire en Afrique noire postcoloniale. Quelque quatre mois plus tard, Gaston Soumialot, Nicolas Olenga et Laurent-Désiré Kabila suivirent son exemple, en instaurant le « front Est » de la lutte armée, en vue de renverser le gouvernement « réactionnaire » de Léopoldville. Ils parvinrent, en septembre 1964, à proclamer la « République populaire du Congo ». Il y eut donc à nouveau deux Congo, un de gauche à Stanleyville et un de droite, le même, à Léopoldville. Le Parti lumumbiste unifié, une union des nationalistes voulue par P. Lumumba et exécuté par A. Gizenga Sous la pression des combattants lumumbistesmulelistes du Kwilu et de l’Est, Moïse Tshombe, l’ancien président du Katanga sécessionniste, exilé en Espagne à la fin de son aventure le 17 janvier 1963 et imposé, le 1 er juillet 1964, par les forces occidentales comme Premier 34

ministre du Congo, remit en liberté, deux semaines après, Antoine Gizenga. Le 22 août 1964, celui-ci rassembla les partis nationalistes du Congo en un Parti lumumbiste unifié (PALU). La lecture de la Déclaration de la fondation du Parti lumumbiste unifié fut faite par Emmanuel Lonji, le 28 août 1964, à Léopoldville (Congo 1964, pp. 416-418) : ‘‘Le 22 août 1964, l’évolution de la vie politique congolaise vient de connaître un tournant décisif, par la création d’un parti politique dénommé Parti lumumbiste unifié, en abrégé « PALU », englobant en son sein, dans une fusion pure et simple, divers partis nationalistes inspirés par l’idéologie dynamique que nous a léguée Patrice-Emery Lumumba, notre héros national. L’instabilité de la vie politique congolaise fait suite au manque dans le pays d’un grand ensemble politique à l’échelle de la Nation, ayant une ligne de conduite unique, claire et cohérente. Nos masses populaires ont accordé jusqu’ici leur confiance à de petites organisations politiques à caractère régional, n’ayant souvent aucune idéologie politique, allant même jusqu’à se réclamer de la pensée politique combien dynamique et révolutionnaire de feu Patrice Lumumba. La multiplicité des partis politiques et l’éparpillement des forces nationalistes n’ont pas satisfait les aspirations de nos larges masses populaires. Cette dispersion a conduit à des contradictions internes dans le camp progressiste, dans le camp du Lumumbisme, contradictions et divisions qui nous ont amené jusqu’à la traîtrise et à la dénégation. Des frères, 35

qui normalement devraient rester unis, se combattent et se détruisent au profit des ennemis de notre peuple. Ainsi, dans notre division, les impérialistes et leurs agents trouvèrent un terrain de prédilection pour corrompre nos frères devenus très vulnérables. En 1960, par un acte d’une clairvoyance incomparable, Patrice Lumumba réunit les nationalistes congolais en une même formation politique, appelée à l’époque « Front Commun », qui groupait le MNC, la BALUBAKAT, l’UNIBAT, le CEREA, le PSA, l’Union Congolaise, la COAKA et le MUB. Grâce à cette coalition, les nationalistes obtinrent la majorité au Parlement et purent former le premier gouvernement de la première République de notre pays. Le 10 juin 1960, un protocole d’accord fut signé par lequel les chefs de file du nationalisme congolais se décidaient : « 1°) à se grouper en Front en vue de la formation d’un Gouvernement Central d’Union nationale et de lutte anticolonialiste et anti-impérialiste, 2°) à conclure un pacte d’amitié et de solidarité capable de sauvegarder l’Unité et l’Intégrité du pays, 3°) à combattre toutes les manœuvres de division et de séparatisme fomentées et entretenues par les impérialistes et susceptibles de provoquer l’éclatement de la nation et des troubles sociaux. 4°) à défendre, au sein des institutions nationales, une politique commune, tant sur le plan de la politique générale que sur le plan économique ». Dès cette période, le leader des nationalistes se rendit compte qu’il fallait dépasser le stade du « Front » pour aborder celui de la création d’un seul Parti unitaire 36

ayant un seul Chef, une seule doctrine, un seul statut. Ce projet était déjà à l’état d’exécution lorsque tout d’un coup, le Premier ministre fut contraint d’abandonner le pouvoir. Il allait bientôt verser son sang dans les conditions que l’on sait pour l’Indépendance, la liberté, l’unité et l’intégrité de son pays et de l’Afrique tout entière. Il demeure à jamais le Héros et le Martyr éternel de notre peuple et de tous les autres peuples colonisés. Après l’arrestation de Patrice Lumumba et sur ses instructions personnelles, le Camarade Antoine Gizenga fut chargé par le Héros lui-même de continuer et de parachever son œuvre. Arrêté à Stanleyville, Gizenga se mit sans tarder à matérialiser tous les projets de Lumumba. Il exécutait en cela les volontés clairement exprimées par Lumumba luimême. C’est dans cette optique que fut créé le Parti nationaliste Lumumba (PANALU) que des méthodes dilatoires dues à certains frères peu éclairés confinèrent à l’état de projet. Les événements se précipitèrent à Stanleyville jusqu’au conclave de Lovanium où se constitua, en août 1961, le Gouvernement de Cyrille Adoula, que tout notre peuple voulait de véritable réconciliation mais dont la mission échoua lamentablement parce que renfermant en son sein des éléments de sape, à la solde des impérialistes. Ce fut ensuite l’emprisonnement illégal et injustifié du Camarade, alors Vice-Premier ministre, emprisonnement auquel collaborèrent, hélas, certains frères momentanément égarés. A partir de ce moment-là, le Front Uni du Nationalisme Congolais se disloqua à l’extrême et ne présenta à la face de la Nation qu’une 37

cohorte pitoyable sans organisation, ni Chef, ni directive, à la merci des coups du colonialisme et de l’impérialisme et d’autant plus fragile qu’il était divisé. Des contradictions sans nombre surgirent ; des défections se firent nombreuses. Les nationalistes étaient au bord du gouffre. L’on aboutit à cette situation paradoxale où les Partis de la majorité furent condamnés à la minorité, parce que désunis, tandis que des individus sans aucune audience populaire régentèrent la vie politique du pays. Le MNC partagé entre plusieurs ailes plus ou moins déclarées luttait en ordre dispersé ; le PSA tout aussi autant divisé menait son combat isolément. Le CEREA avait cessé de vivre, tandis que la BALUBAKAT se débattait entre le tribalisme et le nationalisme. Plusieurs des nôtres connurent la geôle, d’autres passèrent dans le camp ennemi. Pendant ce temps, notre peuple meurtri ne cessait d’espérer ; il vivait et vit avec l’espoir d’arriver à une indépendance véritable, une indépendance qui soit politique, économique et culturelle. Sa déception demeure sans mesure, parce que les Partis du progrès, les Partis du nationalisme, les Partis du Lumumbisme, les Partis de l’espoir étaient incapables dans leur division de répondre à ses aspirations profondes. La misère de nos masses populaires ne fit que s’accroître. Le pays fut plongé dans un chaos politique et économique sans nom. Voilà, brossée en quelques lignes, la situation consécutive à l’éparpillement des forces nationalistes et progressistes privant le peuple d’un soutien qu’il était en droit d’attendre. C’est pourquoi, conscients de la fragilité de nos moyens de lutte et ayant devant les yeux cette phrase 38

chère à Lumumba : « Plus nous serons unis, mieux nous résisterons », persuadés que notre combat serait voué à l’échec, les forces pour le mener n’étant pas unifiées ; considérant la masse d’obstacles dressés sur notre chemin par les ennemis implacables de notre peuples ; convaincus cependant que cartels, fronts communs, bureaux de coordination et autres sont vains et portent en eux le ferment même de leur division, de leur désintégration, les Partis lumumbistes, unis dans un même idéal, alignés sur les mêmes méthodes, groupés autour du Lumumbisme, cette idéologie invincible du Héros Martyr dont ils sont déterminés à perpétuer la lutte jusqu’à la victoire finale, ont décidé de fusionner en une même formation, en un même et seul Parti politique, le Parti Lumumbiste Unifié, en abrégé « PALU », qui sera leur seule expression et qui les représentera en toute circonstance sous la direction éclairée de l’Héritier Spirituel de Patrice-Emery Lumumba, le Camarade Antoine Gizenga. En conséquence, fut signé le 22 août 1964 un protocole par lequel le Camarade Gizenga pour le PSA, le Camarade A.G. Lubaya pour l’UDA, le Camarade Petipeti pour la LUKA, le Camarade Mukonkole pour l’UPB, le Camarade Mabanda pour le PNCP, le Camarade Tshinkulu pour le PUA, le Camarade Mombele pour l’UNIBAT ainsi que le Camarade Mabika-Kalanda pour les Notables, déclarèrent leurs Partis respectifs dissous et intégrés automatiquement et irrévocablement dans le PALU. Le Parti lumumbiste unifié lance un appel pressant à toutes les organisations politiques congolaises : fusionnons-nous dans la lutte commune contre l’impérialisme et ses valets du dedans de notre 39

République, unissons au sein du PALU pour une victoire finale inévitable. La date du 22 août 1964 restera gravée dans toutes nos mémoires parce qu’elle vient de marquer le franchissement d’une étape importante dans la prise de conscience des masses congolaises aux graves problèmes de l’heure qui se posent au pays. Le PALU est placé sous la Présidence d’Honneur, à jamais, du Héros national Patrice-Emery Lumumba. Sa devise est « Le Peuple vaincra ». Son idéologie, « Le Lumumbisme ». […]. Le Congrès est l’instance suprême du Parti ; le Bureau politique en constitue l’organe de Direction. Voici la composition du Secrétariat exécutif du Bureau politique : Le Premier Secrétaire Général : Antoine Gizenga ; Les Vice-Secrétaires Généraux : André G. Lubaya, Yvon Mabanda, André Petipeti, Mukonkole, Brunon Binyanga, Pierre Mombele ; Secrétaire aux Affaire politiques : A. Mabika-Kalanda ; Secrétaire aux Affaires économiques : J.M. Tumawaku ; Secrétaire administratif : R. Akariko ; Secrétaire à l’Information, Presse et Propagande : Emmanuel Lonji ; Secrétaire aux Affaires sociales : F. Mungwa. Fait à Léopoldville, le 28 août 1964.’’

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Création du PALU, afin de “lutter contre l’impérialisme et ses valets du dedans de notre République” En créant le PALU, soutint Gizenga, il obéissait à la volonté de Patrice Lumumba qui voulait unir toutes les forces progressistes du pays, afin de s’engager “dans la lutte contre l’impérialisme et ses valets du dedans de notre République” (entendez les hommes de droite au pouvoir : Kasa-Vubu, Tshombe et consorts). Cette volonté clairement affichée valut à Gizenga, le 1 octobre 1964, une nouvelle privation de liberté et le PALU fut interdit et n’agit plus désormais que dans la clandestinité. Son leader fut libéré le 25 novembre 1965, le premier jour où le général Mobutu opéra son second coup d’Etat et s’empara du pouvoir suprême. er

Le nouvel homme fort du Congo reçut immédiatement après le chef des lumumbistes et, connaissant le prestige dont il jouissait auprès des masses congolaises, lui proposa, pour se faire accepter, d’être son ambassadeur auprès des pays progressistes d’Afrique et du monde. Non, fut la réponse de l’héritier spirituel du héros congolais. Pour la bipolarisation de la vie politique : existence d’un « parti de droite » et d’un « parti de gauche » En prenant le pouvoir le 24 novembre 1965, Mobutu avait promis de rétablir rapidement les libertés publiques et le droit aux associations sociopolitiques. Gizenga voulut le prendre au mot. En décembre 1965, il rédigea à son intention un « document de travail », dans lequel il suggéra de résoudre la crise congolaise en ces termes non moins éloquents : 41

« Pousser, d’autorité, les politiciens à se rendre compte qu’il est grand temps de songer sérieusement à la formation de deux partis politiques au maximum, susceptibles de mettre fin à l’éparpillement inutile des forces et aux discussions vaines et stériles de tout le temps. Un décret-loi dans ce sens, réduisant à deux seulement les partis politiques pour la grande sécurité et stabilité du pays, ne serait pas contre la constitution. Selon qu’il y a habituellement deux tendances majeures au Congo : « la droite et la gauche », les partis existants actuellement doivent fusionner dans une de ces deux tendances suivant leur idéal et cela, autour de deux leaders influents, jouissant d’une réelle popularité dans la tendance qu’ils représentent respectivement. Afin d’éviter la dispersion, ces deux leaders doivent être désignés par le chef de l’Etat, non pour diriger définitivement ces partis, mais pour permettre à ceux-ci de provoquer sous son couvert, des réunions de travail en vue de la formation de ces grands partis. » Ainsi, Gizenga proposa à Mobutu que le pays dispose de deux grandes forces politiques, l’une, de gauche, le PALU, et une autre, de droite, que le Chef de l’Etat dirigerait. La situation politique serait ainsi clarifiée : le pays aurait un parti au pouvoir et un autre dans l’opposition, et l’on éviterait l’émergence des mouvements nés des ambitions personnelles injustifiées. Le pays gagnerait en stabilité et en sécurité ! Gizenga pensa aussi que, avec deux tendances reconnues, les insurgés mulelistes au Kwilu et à l’Est déposeraient les armes et s’aligneraient sur le « mouvement de gauche » ! Mobutu n’accepta jamais cette idée gizengienne de la bipolarisation de la vie politique. Une nuit du 18 février 42

1966, il envoya sa milice politique, le Corps des volontaires de la République (CVR), pour liquider Antoine Gizenga. Celui-ci, ayant échappé à la mort, s’exila, le lendemain. Un exil qui le fit errer dans le monde, un exil qui dura pas moins d’un quart de siècle. Gizenga pour réunir tous les mouvements révolutionnaires, afin de déloger la droite au Congo Pendant son exil, long et pénible, Gizenga ne ménagea aucun effort pour combattre la nouvelle dictature instaurée au Congo, une dictature de droite qui traqua les nationalistes progressistes et leur refusa une existence politique légale. Pendant longtemps, il ne cessa d’appeler à l’union de toutes les forces progressistes, afin de déloger cette dictature de droite. Ainsi, du Caire, en Egypte, où il rencontra, en juin 1966, tous les dirigeants congolais en exil (dont Christophe Gbenye, Gaston Soumialot, Davidson Bocheley, Vital Pakasa… et Laurent Kabila de passage par là), il proposa d’abord un « Plan Gizenga » prévoyant l’unification des mouvements révolutionnaires sous son égide. Mais, en septembre 1966, il annonça la création d’un Front congolais de la Révolution (FCR), organisme censé canaliser tous les combats, militaires et non violents, qui se déroulaient au Congo contre le pouvoir « droitier » de Kinshasa. En réalité, le FCR ne fut pas tant un nouveau mouvement politique ; il ne serait que, comme l’assura Gizenga lui-même, le pendant extérieur du PALU.

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Contre Mobutu qui impose un parti unique, Gizenga prône le bipartisme parlementaire Le 20 mai 1967, le président Mobutu créa officiellement son Mouvement populaire de la Révolution (MPR), qu’il finit par imposer comme le parti unique congolais, mieux, comme un Parti-Etat. De son exil, Gizenga n’approuva évidemment pas le dictateur. Face au MPR, que le chef du PALU appela un « parti de droite », devait exister un « parti de gauche », le sien. Il le dit dans une lettre datée du 21 juillet 1967 à Berlin et expédiée au général-président. Dans ce courrier, il exprima sa foi au système bipartite, telle qu’il l’avait fait en décembre 1965 dans une missive à la même personne. Pour bien se faire comprendre, Gizenga commença par affirmer que « la solution à donner au problème congolais, je le répète, est avant tout politique ». Ce problème est consécutif au « conflit né depuis la chute de Lumumba » entre ses partisans (qui partagent avec leur chef « la politique indépendante basée sur la socialisation de l’économie ») et « ceux qui soutiennent peut-être sans trop le savoir les intérêts des monopoles capitalistes étrangers dans le pays ». Gizenga ajouta que les deux camps idéologiques existent et personne ne peut l’ignorer. ‘‘Un parti unique, qu’il soit de gauche ou de droite, ou même de centre, risquerait de faire basculer notre pays dans le chaos. Tandis que deux formations politiques qui, par un accord, se seraient engagés l’une envers l’autre à respecter les opinions politiques pendant l’exercice du pouvoir par celle qui aurait remporté la victoire aux élections, ce serait là la garantie réelle pour la survie du Congo.’’ 44

Gizenga déplore ‘‘le sort atroce que réserva Mobutu à Mulele’’ et exalte la lutte progressiste de ce dernier Pour combattre la dictature au Congo, dictature imposée par la Droite, Gizenga privilégiait la « voie pacifique », contrairement à Pierre Mulele et LaurentDésiré Kabila qui avaient choisi la voie des armes. Plusieurs gens pensèrent alors ou prétendirent que Gizenga désapprouva ces deux hommes. Il n’en était rien. On vit Gizenga attristé à la mort, le 2 octobre 1968, par assassinat, de Pierre Mulele. Il exalta sa lutte en ces termes (dans son ouvrage Mon témoignage) : ‘‘C’est sous la direction de Mulele que le CNL [Conseil national de libération] décida de prendre les armes afin d’en finir avec le fascisme au Congo. La marche victorieuse des maquisards sur presque toute l’étendue du territoire national était irréversible. Tout le peuple était enfin mobilisé pour sa propre libération. Il fallait donc atteindre le CNL là où se trouvait son chef, en la personne de Pierre Mulele… Le sort atroce que lui réserva Mobutu et qui aboutit à son assassinat n’était qu’un résultat d’un plan d’ensemble exécuté à partir de l’endroit où il fut livré.’’ En tuant Mulele, Mobutu et ses maîtres impérialistes avaient-ils étouffé le combat révolutionnaire engagé ? Non, répond Gizenga : ‘‘La roue tournera impitoyablement et la lutte qui se poursuit verra le triomphe du peuple congolais sur la coalition fasciste.’’ La « coalition fasciste », c’est-à-dire les hommes de droite. Et Gizenga entendit poursuivre la lutte contre ce « fascisme » avec plus d’ardeur. Mobutu le sut, qui se méfia de Gizenga, un chef politique qu’il considéra encore 45

plus dangereux que Mulele. Il ne manqua aucune occasion pour l’insulter (comme le 29 janvier 1973 dans un meeting populaire), pour chercher à le corrompre ou au contraire à l’éliminer physiquement… Le 11 mai 1968, soit près de cinq mois avant sa mort, Mulele, en route pour Brazzaville, où il sera livré aux autorités dictatoriales, adressa la copie d’une même lettre pathétique à Antoine Gizenga (se trouvant en ce moment au Mali), aux lumumbistes refugiés à Brazzaville et au maquis de Laurent-Désiré Kabila. La lettre appelle à l’unité des combattants lumumbistes : ‘‘Notre ennemi est puissamment armé. Pour l’écraser, nous avons besoin d’unité dans notre lutte… Nous connaissons tous la position actuelle de Gizenga, mais nous nous opposons à ce que quiconque essaie de miner son prestige.’’ Autrement dit, même en exil, Gizenga doit demeurer le chef de tous les lumumbistes – de l’intérieur comme de l’extérieur. A Hewa-Bora, dans le maquis de Laurent-Désiré Kabila Le message de Mulele était entendu par LaurentDésiré Kabila, le premier des mulelistes, l’homme qui avait ouvert un maquis à l’est du pays. C’est ainsi que, le 5 novembre 1973, il invita Gizenga à se rendre à Hewa Bora, dans son maquis du Sud-Kivu, pour encourager les combattants lumumbistes dans leur guerre contre le régime de Kinshasa. En 2006, Gizenga se souvint encore de sa présence à Hewa Bora : ‘‘Oui, j’étais allé le voir à Hewa Bora, j’ai gardé des photos. Alors que j’étais encore en Europe, il m’avait écrit 46

pour me proposer de regrouper tous les nationalistes désireux de continuer le combat… De là, depuis ce petit territoire libéré, j’avais l’intention de lancer un appel aux jeunes Congolais qui voulaient bien poursuivre le combat afin d’élargir le champ de bataille. Mais Kabila était très en difficulté, nous manquions d’armes et de munitions. Entre-temps, il y eut un incident : le maquis fut bombardé et détruit par les Américains et Kabila et les siens durent fuir en Tanzanie.’’ Fondation des « Forces démocratiques pour la libération du Congo », un mouvement d’« union de la Gauche » A son retour du maquis, Gizenga, nommé « membre du comité central du PRP », le parti de Kabila, milita pour lui en Europe. Mais, le 6 février 1975, il fonda les « Forces démocratiques pour la libération du Congo » (Fo.de.li.co.), un mouvement d’« union de la Gauche » congolaise censé regrouper tous les combattants de la liberté, pour faire face au parti dictatorial (« de droite ») de Kinshasa. Mais pour des raisons diverses, aucun mouvement de libération congolais ne répondra à l’appel de Gizenga, craignant sans doute d’être « étouffé » par le chef charismatique incontestable qu’il était ! En outre, à l’époque même où Gizenga initia les FODELICO, il était, peut-on dire, « court-circuité » par… son beau-frère Kikunga et surtout par Cléophas Kamitatu, son vieil adversaire politique, considéré comme un homme de droite, ou passé à droite. L’un et l’autre, en exil en Belgique même, y avaient monté des partis sans réelle assise populaire répondant aux noms qui rappellent bien le Parti solidaire africain (PSA) : le premier a flanché pour 47

le Parti populaire africain (PPA), et le second pour le Front socialiste africain (FSA). Les FODELICO ne feront pas ainsi long feu. Mais Gizenga ne baissa pas les bras. Appel ‘‘à toute l’opposition congolaise de s’unir en deux formations politiques’’, une de droite et une de gauche Le 18 mai 1983, de Berlin, il lança solennellement un vibrant ‘‘appel à toute l’opposition congolaise qui lutte contre le régime du despote’’, pour que celle-ci s’unisse ‘‘en deux formations politiques’’, l’une de droite, l’autre de gauche, cette dernière devant être placée sous l’autorité de Gizenga. Cette idée avait déjà été proposée à Mobutu en décembre 1965 et renouvelée en juillet 1967, à un moment où Gizenga pensait encore qu’il pouvait conduire une opposition « légale » face au pouvoir. L’appel de 1983, de bon sens, ne fut pourtant pas entendu par les différents partis, qui préférèrent chacun mener la lutte à sa manière, sans aucune unité de commandement ou de coordination commune. Ce qui ne put qu’être naturellement à l’avantage du régime dictatorial. La bipolarisation Gauche-Droite, plutôt que le pluralisme politique intégral Lors de l’ouverture politique décidée le 24 avril 1990 par le régime dictatorial, Antoine Gizenga, encore en exil, reprit son idée du bipartisme politique, s’opposant au tripartisme puis au pluripartisme intégral concédé par le 48

dictateur sous la pression des dirigeants politiques qui ne visaient que leurs intérêts et non ceux du peuple. Ce fut le 15 juillet 1990 que son message fut connu. On y lit que « le Parti lumumbiste unifié continue de proposer une démocratie bipartite par un choix concerté d’hommes politiques après avoir donné les raisons qui militent en faveur de ce système ». Le PALU regrette que « jusqu’ici les hommes politiques congolais n’ont pas encore saisi l’importance qu’il y a de se grouper en deux grandes formations politiques qui représenteraient les deux grands courants politiques au monde pour mieux gérer leur pays comme les Etats-Unis (U.S.A.) par exemple ». Ainsi, il y aurait, dans un Congo débarrassé de la dictature, deux grands blocs politiques, un de droite et un de gauche. Le PALU espéra ainsi que si le jeu démocratique était bien respecté, il serait, en alliance avec des mouvements de sa sensibilité idéologique, une organisation aussi importante que le parti au pouvoir. Il serait un parti d’opposition, en face du parti de la « majorité présidentielle », et le rôle serait inversé le jour où, par les élections, il accéderait au pouvoir. Mais le PALU se trouva presque le seul parti de l’opposition à soutenir le système bipartite. Au Congo, tout le monde voulut – et veut toujours – avoir son parti. Le PALU dut, malgré lui, admettre cette réalité, mais ne renonça jamais à diviser les formations politiques en « partis de gauche » et en « partis de droite ». Gizenga se focalisa à un appel au regroupement des partis de gauche (des partis nationalistes), afin de battre les partis de droite (des partis réactionnaires). 49

L’objectif prioritaire de Gizenga : exiger le départ de Mobutu, principal obstacle à la vie politique nationale A la Conférence nationale souveraine (CNS), ou en dehors d’elle, Gizenga défendit naturellement la vision lumumbiste du Congo, une vision de gauche : unité du pays, amour de la patrie, indépendance vis-à-vis des puissances impérialistes, démocratie, etc. Mais la politique nationaliste de Patrice Lumumba ne pouvait être mise en route tant que son adversaire gardait encore le pouvoir. Il fallut donc absolument tout entreprendre pour qu’il quittât la tête de l’Etat. Ainsi, le lundi 17 février 1992, soit seulement dix jours après sa réimplantation au Congo, Gizenga prit sa plume et écrivit une lettre publique, dans laquelle il demanda à Mobutu de démissionner du poste de chef de l’Etat ! Aucun politicien n’avait eu avant lui cette audace ! Le « vieux lion pende », comme on l’appelle parfois, n’avait jamais perdu de sa superbe, de sa témérité ! Il pouvait encore rugir, et fort ! Voici ce qu’il dit dans sa missive : ‘‘A peine rentré au pays après un long exil de 26 ans, je prends la liberté de vous écrire en ma qualité d’un des Pères de l’Indépendance du Congo, d’ancien vice-Premier ministre du Gouvernement Lumumba,… en tant que leader à la fois du Parti lumumbiste unifié et des Nationalistes progressistes congolais. C’est donc en cette triple qualité qu’en toute légitimité je me crois fondé de vous prodiguer des conseils… Le 24 avril 1990, vous avez fait preuve de courage en annonçant la fin de la dictature monopartite en faveur d’une démocratie pluraliste… Il ne vous reste qu’à faire preuve du même courage et 50

d’annoncer votre démission de toutes vos fonctions d’Etat…’’ Mais Gizenga dut s’armer de patience : Mobutu ne partira pas de sitôt. Il disposait d’une force armée, et lui Gizenga n’avait que son peuple démuni. Gizenga le comprit, qui se mit à mobiliser son peuple pour exiger le départ de Mobutu. Ce départ pouvait être obtenu par exemple par voie légale, par l’organisation des élections notamment. Pour le moment, l’on parla de l’élection – et non de la désignation par Mobutu – d’un Premier ministre capable de réduire le pouvoir du dictateur. Gizenga avalisa l’idée, espérant que le jour viendra où le despote, dépouillé de son pouvoir décisionnaire, finira par être débouté dehors. Gizenga soutient Thomas Kanza à la Primature : ‘‘Le moment est venu pour les nationalistes de gérer l’Etat’’ Dans une de ses séances, la CNS avait estimé que, pour sortir de la crise, ce ne serait plus le Président Mobutu qui allait nommer de son gré le Premier ministre du pays. Celui-ci, désormais, allait être élu par les représentants du peuple siégeant à la CNS. Ceux qui le voulaient allaient poser leur candidature. Aussitôt dit, aussitôt fait. Le 8 août, l’Union sacrée de l’opposition radicale (USORAL) désigne son candidat officiel : Etienne Tshisekedi. Elle voudrait que toute l’opposition n’ait pas un autre représentant. Pas d’accord, rétorqua l’Union des forces nationalistes (UFONAL), qui se prononça pour le sien : Thomas Kanza. Celui-ci fut le vieux compagnon de Patrice Lumumba, dans le gouvernement duquel il occupa en 1960 le poste du représentant du 51

Congo aux Nations unies, à New York. Plus tard, il exerça la même fonction dans le Gouvernement Lumumba perpétué à Stanleyville par Gizenga. Puis, après la fin de cette « aventure stanleyvilloise », il prit une part importante dans la lutte insurrectionnelle que menèrent les combattants lumumbistes en 1964 dans l’est du pays. Thomas Kanza fut donc l’homme de confiance de Gizenga et des lumumbistes. Gizenga ne put que soutenir sa candidature. Il la soutint. Les deux hommes scellèrent leur alliance le 9 août 1992, au siège du PALU, au pont Kasa-Vubu, au cours d’une assemblée générale de l’UFONAL. Candidat de l’UFONAL à la primature, Thomas Kanza fut, pour le PALU, résolument le « candidat de la réconciliation », réconciliation entre tous les Congolais qui ne se retrouvaient pas en Mobutu et en Tshisekedi, considérés comme les deux personnages auxquels tout se focalisait, en bien ou en mal, et qui furent, selon beaucoup d’observateurs, à la base du blocage politique que connaissait le pays depuis plusieurs années. Kanza serait la « troisième voie », une voie médiane entre le dictateur et son « ami » devenu son opposant. Ce fut un homme qui n’avait jamais beaucoup trempé dans le mobutisme, un homme qui, au contraire, s’était toujours battu contre ce système néfaste, lequel avait conduit le pays au chaos. Ce fut un vrai nationaliste, comme l’affirma Gizenga lui-même, et, comme il l’ajouta, ‘‘le moment est venu pour que les nationalistes gèrent l’Etat’’ ! Malheureusement, Kanza ne vainquit pas « l’homme de droite » qu’est Tshisekedi.

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L.-D. Kabila, ou retour aux affaires de l’Etat des nationalistes et revanche de Lumumba sur ses assassins Kanza échoua, mais Gizenga et le PALU ne perdirent pas totalement l’espoir au retour de la Gauche au pouvoir. Et la chance arriva avec Laurent-Désiré Kabila. Le 17 mai 1997, le chef insurrectionnel LaurentDésiré Kabila, à la tête de l’Alliance des Forces démocratiques pour la libération du Congo (AFDL), chassa la dictature trentenaire et obsolète du maréchal Mobutu Sese Seko et se proclama Chef de l’Etat. D’abord condamnée comme une « invasion » du pays par une coalition des Tutsi, l’opération militaire devint vite une « guerre de libération ». Gizenga vit alors en Kabila un « frère lumumbiste », et son pouvoir constitua donc le ‘‘retour aux affaires de l’Etat’’ des nationalistes et ‘‘la « revanche » politique de Lumumba sur ses détracteurs et ses assassins’’. Tous les nationalistes sincères, lumumbistes ou non, ayant combattu le mobutisme, dit Gizenga, doivent être intégrés dans l’exercice du nouveau pouvoir. Aussi le PALU sollicita-t-il la constitution d’un « Gouvernement des nationalistes », qu’il dirigerait, sous l’autorité du président Kabila, Chef de l’Etat. Des relations difficiles avec le « frère lumumbiste » A cette revendication d’Antoine Gizenga, Kabila répondit par un non catégorique. Surtout, il ne voulut d’aucun parti politique autre que l’AFDL. Inacceptable pour le PALU et toute l’opposition non armée. il,

En outre, Kabila et Gizenga se disputèrent, semble-tle leadership de la famille nationaliste et 53

singulièrement lumumbiste. Pour Gizenga, la victoire militaire de Kabila ‘‘n’a pu être le résultat du hasard mais plutôt la conséquence du refus de compromission avec la dictature mobutiste, opposé à celle-ci par les continuateurs de la lutte de Lumumba, dont le leader incontesté et légataire est M. Antoine Gizenga.’’ Donc, Gizenga se prenait pour l’unique guide suprême historique du lumumbisme. Kabila ne put peut-être accepter cela. C’est ainsi que, au grand étonnement d’opposants politiques congolais, il se mit à combattre son « frère lumumbiste » Gizenga et les militants du PALU. En fait, l’on saura plus tard qu’en lui-même, Kabila ne s’opposa point à une « rencontre des nationalistes », mais ce serait le « conglomérat d’aventuriers » (ce mot fort est de LD Kabila lui-même) qui l’empêchait d’opérer cette entente. Gizenga à Kabila : ‘‘Nous ne sommes pas vos ennemis, mais du même camp idéologique que vous, la Gauche’’ ! Selon François Malutshi, cadre du PALU devenu un des conseillers principaux du Premier ministre Gizenga puis assistant de son successeur, qui se confia à moi début octobre 2007 à Bruxelles et à Paris (au moment je terminais la rédaction de mon ouvrage Antoine Gizenga le combat de l’héritier de P. Lumumba), le patriarche envoya une délégation du PALU auprès de Kabila le 20 juillet 1998. Malutshi me raconta que le message de Gizenga à Kabila se libellait comme suit : ‘‘Vous êtes notre frère, Congolais comme nous. Vous devez vous considérer comme tel. Nous avons combattu la même dictature, que vous avez heureusement réussi à 54

renverser. Nous sommes du même camp idéologique que vous, la Gauche, longtemps écartée du pouvoir par les réactionnaires de la Droite. Nous ne pouvons que souhaiter la réussite de votre entreprise. Mais pour gagner, il faut nous associer à l’exercice du pouvoir. Nous ne sommes pas vos ennemis, mais vos amis. Nos critiques sont celles des gens du même camp, qui souhaitent que celui-ci l’emporte. Vos ennemis se comptent certes nombreux parmi l’opposition, mais ils siègent aussi au sein de votre propre gouvernement. Ces derniers nous paraissent être les plus dangereux. Ce sont eux qui cherchent à vous perdre, en cherchant à vous éloigner de nous. Ils finiront par vous perdre. Si vous ne le savez pas, ils sont en train de vous trahir…’’ Ce discours de bon sens sonna comme une prophétie. Il fut bien une prophétie : quelques jours après sa communication, les prétendus amis de Kabila manifestèrent leur vrai visage, en déclenchant, le 2 août 1998, une rébellion contre lui, une rébellion qui faillit emporter son régime et qui ensanglanta l’est du pays pendant plusieurs années. C’est aussi, le 16 janvier 2001, quelqu’un de son camp, son propre garde du corps, qui, sans doute manipulé par l’étranger, l’abattit d’un coup de fusil. Des bonnes relations avec Joseph Kabila, fils d’un « nationaliste de gauche » Avec Joseph Kabila, fils et successeur de LaurentDésiré, les opposants purent discuter, et le chef du PALU approuva sa démarche en faveur de la paix et du dialogue entre toutes les parties en conflit.

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Gizenga accepta ainsi de participer à toutes les rencontres pouvant aboutir au rétablissement de la paix et à la réconciliation nationale. Le plus important de ces dialogues intercongolais s’ouvrit le 25 février 2002 à Sun City (Afrique du Sud). Au terme de ce consensus obtenu avec labeur, signé à Pretoria le 17 décembre 2002 et endossé à Sun City le 2 avril 2003 par toutes les parties, la guerre fut donc officiellement finie, et une Transition politique de 24 mois fut décrétée, qui devrait aboutir à l’organisation des élections générales (présidentielle et législatives) en vue de désigner au suffrage universel direct les nouvelles autorités du pays. Un gouvernement d’union nationale pilotera la transition. Joseph Kabila fut maintenu à la tête de l’Etat, mais il dut partager son pouvoir avec quatre vice-présidents (la fameuse formule « 1+4 »). Le PALU aurait voulu que Gizenga, qui a signé les accords de Sun City, soit l’un de ces quatre vice-présidents, mais il y fut écarté. Pourtant, il ne bouda pas le processus démocratique engagé, croyant en la sincérité du Chef de l’Etat. C’est ainsi qu’il n’hésita pas d’appeler à voter pour le référendum constitutionnel des 18 et 19 décembre 2005 : cinq jours plus tard, la Constitution fut approuvée par une large majorité (84 % de oui). Resta l’organisation des élections : Gizenga fut l’un des premiers à s’inscrire comme électeur ! En juin 2006, il donna sa candidature à l’élection présidentielle, et le PALU s’engagea dans les élections législatives.

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Gizenga sortit 3e au scrutin présidentiel, avec 13,06 % de suffrages exprimés, de même son parti aux législatives, avec 34 députés nationaux. Etonnement au pays et dans le monde, de voir quelqu’un qu’on n’attendait pas, pour n’avoir même pas battu campagne, réaliser une telle performance. C’est dire que le phénomène Gizenga et le lumumbisme qu’il incarnait étaient réels et fonctionnaient dans le pays, personne ne pouvait plus le contester. Accord AMP-PALU : Kabila rend ‘‘hommage à ceux qui n’ont cessé de dénoncer l’usurpation du pouvoir’’ Au second tour de l’élection présidentielle prévu le 29 octobre 2006, les deux challengers se disputèrent les faveurs de l’heureux Gizenga. Celui-ci et son PALU, le 13 septembre, prirent acte des résultats publiés des élections législatives et présidentielle. La Direction politique du PALU déclare ce qui suit : 1. En remerciant le Peuple congolais pour les suffrages qu’il a bien voulu lui accorder aussi bien à la présidentielle qu’aux législatives nationales, le PALU entend capitaliser les résultats obtenus pour : - contribuer absolument et de manière décisive au maintien, à la sauvegarde et au renforcement de l’unité nationale ; - prendre part comme acteur et non comme figurant dans les institutions étatiques prochaines. - participer à la gestion du pays pour y introduire l’apaisement, la rigueur, l’intégrité et la justice sociale. 2. En ce qui concerne l’attitude à tenir au deuxième tour de la Présidentielle et les positions à prendre pour la 57

participation au Parlement et au gouvernement, le parti va se déterminer en tenant compte des considérations suivantes : 1°. Les valeurs idéologiques qui fondent les convictions politiques du parti : - l’unité du pays, à maintenir et à sauvegarder coûte que coûte ; - la souveraineté du Peuple, à restaurer et à respecter en tout temps ; - l’intégrité dans la gestion des affaires du pays et du Peuple, à pratiquer en permanence ; - l’amour de la patrie, à développer sans cesse en combattant la corruption et l’égoïsme ; - la justice sociale et la solidarité, à toujours faire prévaloir dans la répartition des richesses nationales ; 2°. L’élaboration des axes essentiels d’un programme commun de gouvernement définissant les grandes options et réformes nécessaires pour la construction de l’État et la mise en valeur du Congo. 3°. Les intérêts réels et légitimes du Parti et du Peuple: - l’émergence d’une nouvelle gouvernance, qui se base sur la justice avant tout, pour la conduite du pays ; - la participation effective et efficace du Parti à la gestion du pays ; - la consolidation et la pérennisation du parti à travers tout le territoire national ; - la capacité et l’engagement des candidats en lice de prendre en compte les mécontentements du peuple tel que leur exprimés par celui-ci au travers des résultats du premier tour, et d’y apporter des réponses appropriées dans la prochaine gouvernance. 58

4°. Les données de la situation, à savoir : - les résultats électoraux publiés par la CEI ; - la position politico-stratégique du Parti dans la configuration politique de l’heure.’’ Le 23 septembre, le PALU prend enfin sa décision : il accompagnera Joseph Kabila au second tour du scrutin présidentiel. C’est dit dans un communiqué de presse signé par Gizenga lui-même. Dans ce texte, le patriarche explique pourquoi il donnera des consignes de vote aux militants du PALU en faveur de Kabila : ‘‘Faisant suite à sa déclaration politique du 13 septembre 2006, le Parti lumumbiste unifié (PALU) avait initié des contacts de travail politique avec les groupes politiques significatifs de l’échiquier congolais. Il avait également entrepris une large consultation de sa Base en vue de l’élaboration d’une position politique idoine en rapport avec les enjeux nationaux de l’heure ainsi qu’avec ses convictions politiques fondamentales et ses intérêts légitimes. Prenant en compte les avis de la Base et considérant les réactions reçues de la part des uns et des autres à la suite des contacts de travail politique, notamment celle de l’AMP dont les vues et les objectifs se sont avérés convergents avec ceux du PALU, la Direction politique du Parti annonce les positions politiques suivantes, arrêtées par elle : 1. Le PALU s’inscrit dans la recherche de l’appartenance au groupe majoritaire qui sera constitué dès l’entrée en fonction de l’Assemblée nationale le 22 septembre 2006. 59

2. Comme ce groupe ne peut être obtenu que par coalition, le PALU va constituer la sienne avec l’AMP en vue de la mise au point d’un programme commun de gestion du pays, véritablement conçu pour une bonne gouvernance progressiste de la Nation, et dans le but de garantir une stabilité suffisante et nécessaire aux Institutions étatiques à mettre en place. 3. Pour le pilotage et la mise en œuvre de ce programme, le PALU entend occuper et jouer les rôles de tout premier plan. 4. En conséquence et, afin de permettre au pays de disposer bientôt de son Président de la République élu, appelé à maintenir et à consolider l’unité nationale et la paix ainsi qu’à garantir la sécurité à tous, le PALU va soutenir la candidature de Monsieur Joseph Kabila au deuxième tour de la présidentielle. A cet effet, il donnera des consignes de vote dans le même sens à ses militants et il demandera un report des voix dans le même sens à ses sympathisants et à tous ceux qui avaient voté pour son candidat au premier tour de la présidentielle, à savoir Monsieur Antoine Gizenga. Le PALU réaffirme qu’il ne s’est déterminé qu’avec la seule prise en compte de l’intérêt de la Nation qui, en tout premier lieu, est la non balkanisation du Congo, notre pays, ainsi que de ses propres convictions et intérêts politiques.’’ Ainsi, voici le PALU uni à l’AMP. Le PALU promit donc de soutenir Joseph Kabila, présenté comme un membre de la grande famille lumumbiste, puisque fils de LD Kabila, il fut élevé dans le lumumbiste militant et son comportement politique le manifestait. 60

Le samedi 30 septembre 2006, l’entente fut signée entre les deux parties, l’Alliance pour la majorité présidentielle (AMP) et le PALU, qui donna à ce dernier, avec la victoire de Kabila, le droit de gouverner le pays pendant toute la législature (jusqu’en 2011). Une alliance qui ressembla à celle que, le 10 juin 1960, Gizenga signa avec Lumumba, Kashamura et Mwamba (du parti Balubakat dont LD Kabila était un des jeunes dirigeants influents). Le partenaire Kabila se réjouit de cet accord avec Gizenga, à l’endroit de qui il ne manqua pas d’éloges : ‘‘Il y a près d’un demi-siècle, notre pays accédait à la souveraineté nationale dans la joie et l’exaltation de notre peuple qui voyait pointé à l’horizon un avenir radieux et plein de succès. Le peuple avait en effet choisi de porter au pouvoir le cartel des nationalistes patriotes ; mais sa joie fut de courte durée, car au lendemain de l’indépendance, les responsables nationalistes furent renversés au profit d’une minorité politique des cadres congolais qui ont gouverné le pays sans partage plus de quatre décennies durant avec les conséquences que nous connaissons tous. C’est ici le lieu de rendre hommage à ceux des nationalistes qui ne se sont jamais accommodés à cette situation et qui, depuis septembre 1960, n’ont cessé de dénoncer l’usurpation et ont mis tout en œuvre pour rétablir la légalité, la justice et l’équité. Parmi les nombreux compatriotes qui ont consacré leurs vies au combat démocratique ou à la lutte révolutionnaire contre l’oppression, nous citerons notamment le Patriarche Antoine Gizenga, le Camarade Pierre Mulele et Mzee Laurent-Désiré Kabila.’’ 61

Ainsi, pour Joseph Kabila, trois grands hommes, trois grands nationalistes, ont marqué la lutte de libération du peuple congolais initiée par Patrice Lumumba : Gizenga, Mulele et L.-D. Kabila. Celui-ci, sous-entendit Joseph Kabila, avait poursuivi la lutte armée commencée au Kwilu par le chef insurrectionnel Pierre Mulele, qui se réclamait lui-même du guide Patrice Lumumba et de son continuateur Antoine Gizenga. Commencée en 1964, cette lutte armée révolutionnaire a abouti le 17 mai 1997, avec la destitution du pouvoir usurpateur. ‘‘L’avènement de la Révolution du 17 Mai’’ avait pour ‘‘objectif déclaré’’ la restitution du ‘‘pouvoir au peuple pour que celui-ci puisse, enfin, décider librement de ses futurs dirigeants.’’ ‘‘Ceux qui avaient pris l’habitude de décider à la place de notre peuple ont cru pouvoir arrêter le projet de Mzee Laurent-Désiré Kabila en l’éliminant physiquement !’’ Ils ont échoué, grâce à la vigilance de Joseph Kabila, qui entendait reprendre le flambeau de son père et conduire le peuple ‘‘aux élections générales, libres, démocratiques et transparentes’’. Pour y parvenir, le jeune Président a su ‘‘résister à toutes les pressions et à toutes les manœuvres tendant à perpétuer le régime des arrangements politiques, loin du peuple, et contre les intérêts de ce dernier.’’ Parmi ceux qui avaient soutenu son projet électoral et s’y étaient engagés, il y avait au premier plan Antoine Gizenga. Celui-ci, avec sa notoriété nationale et internationale, est venu apporter du crédit au scrutin, après la défection d’Etienne Tshisekedi. Le boycott de Gizenga aurait été catastrophique et aurait disqualifié le processus électoral. Joseph Kabila le savait, et voulut 62

remercier solennellement le leader charismatique du mouvement lumumbiste : ‘‘Les résultats des élections du 30 juillet 2006 ont montré que le peuple congolais a la confiance dans la Révolution du 17 Mai, dans les idées qu’elle prône et dans les hommes qui la pilotent. Le 30 juillet 2006, les Congolais ont également rendu hommage à la lutte héroïque et exemplaire du Patriarche Antoine Gizenga que nombre d’observateurs, et même d’analystes politiques, avaient vite rangé dans les musées de l’histoire de la République Démocratique du Congo.’’ Joseph Kabila, qui se présenta comme le « révolutionnaire d’aujourd’hui », voulut dire qu’en accordant au chef du PALU, un « nationaliste d’hier », une étonnante et très honorable troisième place, les électeurs congolais avaient voulu l’impliquer dans la gestion de la nouvelle République congolaise. Le Chef de l’Etat continua son discours : ‘‘Les nationalistes d’hier et les révolutionnaires d’aujourd’hui se devaient donc de saisir le message que leur transmettait le peuple, ce peuple qui, lui, avait saisi le lien de continuité qui existe entre la pensée lumumbiste et les préoccupations de la Révolution du 17 Mai [1997]. C’est ainsi que l’AMP et le PALU ont été poussés par l’histoire et la volonté populaire à saisir cette occasion historique, pour répondre positivement aux souhaits du peuple en conjuguant leurs efforts en vue de remettre le pays sur les rails. Voila pourquoi l’AMP et le PALU ont décidé de former ensemble une coalition politique qui aura trois objectifs, à 63

savoir : l’élection du candidat Joseph Kabila au 2 e tour de l’élection présidentielle ; réunir la majorité des députés au sein de l’Assemblée nationale et des sénateurs au sein du Sénat ; et de former un gouvernement de coalition.’’ Ainsi, pour Joseph Kabila, le PALU devint un partenaire indispensable dans le prochain gouvernement. ‘‘Pour bien gouverner la République démocratique du Congo de demain, l’AMP et le PALU sont conscients qu’ils devront faire preuve d’ouverture’’, ouverture ‘‘au monde tout en privilégiant les intérêts du peuple congolais’’, mais aussi ouverture à toutes les parties nationales qui ‘‘souhaitent réellement travailler pour l’avènement d’un Congo fort, prospère et démocratique.’’ Seront spécialement accueillies au sein de la coalition, ‘‘d’autres forces progressistes qui partagent les valeurs républicaines de l’unité nationale, de la souveraineté du peuple, de la justice distributive, de la réconciliation nationale et de la lutte contre la corruption et les antivaleurs’’. Un discours quasi-identique à celui de Gizenga du 23 juillet 2011. Antoine Gizenga Premier ministre : ‘‘Le retour des nationalistes au pouvoir’’ La victoire de Kabila survint en novembre 2006. Et comme le prévoyait le protocole d’accord AMP-PALU du 30 septembre 2006, Gizenga fut nommé, le 30 décembre suivant, Premier ministre du Congo. Le leader du PALU venait d’accéder au trône de Patrice Lumumba, que ses adversaires avaient usurpé en septembre 1960. Le héros fut vengé par son ami et 64

dauphin. Dans sa tombe, il put jubiler. Antoine expliqua à une journaliste belge (Colette Braeckman, 26 octobre 2006) la signification historique des élections de 2006 et du score remarqué de son parti : ‘‘En 1960, le gouvernement Lumumba qui avait été élu et installé par le peuple a été victime d’un coup de force. Ses membres ont été assassinés ou dispersés, mais n’ayant jamais accepté cette défaite, les nationalistes n’ont eu de cesse de lutter pour que le peuple retrouve ses prérogatives, c’est-à-dire le droit de désigner les animateurs des institutions du pays. Ce combat a duré 46 ans, et le résultat d’aujourd’hui est une victoire du peuple sur ceux qui avaient voulu que le Congo ne puisse redresser la tête. Le Parti lumumbiste unifié résultait de la fusion de quatre grandes formations nationalistes et aujourd’hui je veux dire que nous avons fait le premier pas. En 1960, nous avions été élus pour gérer le pays, et c’est ce à quoi nous allons nous atteler aujourd’hui. Mais la situation n’est pas la même, il nous faudra désormais composer pour apporter un changement pas trop brutal. Le pays a été détruit, et du côté moral, il est très bas. Il faudra que nous puissions apporter un changement de ce côté-là, même si cela risque de ne pas plaire à tout le monde. Nous devrons donc nous attendre à des réactions, mais nous sommes décidés à ce que le Congo puisse reprendre sa place dans le concert des nations africaines et du monde. Le résultat d’aujourd’hui nous satisfait car notre objectif premier a été atteint : que le peuple puisse choisir lui-même ses représentants et dès maintenant il 65

va pouvoir continuer à le faire. Nos objectifs certes ne sont pas encore complètement atteints car nous sommes encore mélangés dans une coalition mais je pense bien qu’avec le temps les nationalistes réussiront à faire appliquer leur programme. Petit à petit le ciel finira par s’éclaircir, mais au début c’est sûr il y aura des tâtonnements… Pendant 46 ans le peuple a été trompé et lors des élections il a fini par s’étonner lui-même du résultat. Nous allons désormais le préparer pour que la prochaine fois, il vote mieux. Feu le président Laurent-Désiré Kabila avait voulu rendre le pouvoir au peuple mais il n’avait pas pu le faire, soit à cause de sa propre politique, ou à cause de l’extérieur… Maintenant il nous reste à bien préparer la gestion du pays, en éclairant bien la situation…’’ Le premier gouvernement de la IIIe République que le premier des nationalistes lumumbistes forma le 5 février 2007, fut donc un « Gouvernement des nationalistes », comme le fut le premier Gouvernement de la Ière République. Il se donna la priorité de refonder l’Etat congolais, un Etat comme celui qui existait au temps de Lumumba, et que ses bourreaux avaient méthodiquement détruit depuis plusieurs années. Adolphe Muzito, successeur de Gizenga : « Le mariage entre Kabila et Gizenga est éternel » ! Quand, le 25 septembre 2008, après 20 mois de gouvernement, Gizenga démissionna de son poste de Premier ministre, pour raison de santé, ce fut à son fidèle, Adolphe Muzito, que, le 10 octobre 2008, il rendit le tablier. Aux côtés de Joseph Kabila, le nouveau Premier 66

ministre, lumumbiste-gizengiste par essence, se définit comme le « nationaliste de la deuxième génération », le Chef de l’Etat l’étant également. Leur action s’inscrit clairement et logiquement dans la trame des ancêtres. Ces ancêtres ont noms : Patrice Lumumba, Antoine Gizenga et Laurent-Désiré Kabila. Ces trois hommes de légende demeurent les « nationalistes de première génération », les « pères fondateurs » qui continuent d’inspirer les « nationalistes de la nouvelle génération ». Devant les militants rassemblés le dimanche 12 octobre 2008 au quartier général du PALU à Matete/Debonhomme, qui se réjouissaient de la promotion d’Adolphe Muzito, celui-ci a remercié le président Joseph Kabila d’avoir choisi un membre du parti gizengiste Premier ministre. Malgré les doutes qui ont persisté pendant longtemps, le chef de l’Etat s’était placé au-dessus de la mêlée et avait nommé contre vents et marées un homme qu’il fallait à la place qu’il fallait. Pour le nouveau Premier ministre, sa nomination ne l’étonna point. Elle montrait que Joseph Kabila est bien un homme des principes, qui ne renie jamais sa parole ou sa promesse. ‘‘Le mariage qu’il avait scellé avec Gizenga en septembre 2006 est éternel’’, affirme-t-il avec assurance. Un mariage qui se voudrait d’amour, et que l’on ne devrait pas réduire à un simple mariage de raison ! C’est un mariage qui durera certes le temps du mandat de la première législature de la IIIe République (qui prendra fin en 2011), mais qui pourra bien se renouveler lors de la prochaine législature, dans le cas d’une nouvelle victoire de l’actuel président. 67

Car, les Congolais doivent le savoir, depuis 2006, les nationalistes se sont retrouvés, et Muzito ne voit pas qui pourra les séparer ! L’on ne vit plus l’année 1960 où les anti-lumumbistes, puissamment soutenus par les ogres étrangers, pouvaient nuire au pays, en chassant les nationalistes d’un pouvoir que le peuple souverain leur avait confié. Les nationalistes, qui ont reconquis ce pouvoir en 2006, toujours par la voie des urnes, ont mûri, et savent le protéger et se protéger des « sorciers » ! Muzito le dit avec force aux militants du PALU qui lui ont réservé un accueil triomphal au siège du parti. ‘‘Le PALU et le président Kabila ont les mêmes origines politiques : le nationalisme et le lumumbisme’’, soutient-il sous les applaudissements. Ils ont les mêmes origines politiques parce qu’ils ont un ancêtre commun, du nom de Patrice Lumumba. Antoine Gizenga a été, on le sait, un ami de ce héros et poursuit encore son œuvre aujourd’hui. Laurent-Désiré Kabila, lui aussi, se réclamait de Lumumba et avait mené tout son combat pour le faire revivre. Et comme Joseph Kabila est le fils de ce grand combattant, il est aussi un lumumbiste. Bien plus, il a été un compagnon de lutte de son père. Ce qui justifie son comportement nationaliste. Donc, ‘‘lui et nous du PALU, nous sommes tous des frères, des frères nationalistes’’ ! Certes, à un moment donné de l’histoire, la branche lumumbiste dirigée par Laurent-Désiré Kabila avait emprunté la voie des armes, tandis que le PALU est demeuré dans la non-violence. Cependant, leurs chemins se sont croisés avec le déroulement des élections de 2006 pour un pouvoir démocratique et un mariage qui privilégie la reconstruction nationale.

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C’est pourquoi, poursuit Muzito, les militants du PALU doivent soutenir les « Cinq chantiers » du Chef de l’Etat et continuer à se battre pour faire flotter le drapeau du nationalisme lumumbiste partout en RDC. Ce combat avait commencé avec le gouvernement Gizenga (2007-2008), lequel avait réalisé des « progrès » notables indiscutables. Le gouvernement qu’il va diriger, décréta Muzito, s’inscrit par conséquent dans la continuité du gouvernement précédent, un gouvernement nationaliste, engagé à améliorer progressivement le vécu quotidien des Congolais. Le PALU pour un nouvel accord entre nationalistes pour barrer la route à la Droite réactionnaire Très peu comprirent le sens du discours de Muzito. Celui-ci ne l’avait point inventé. Il le tenait de son mentor, le patriarche Gizenga. Ce discours voulait tout simplement dire que le PALU allait se battre pour conserver le pouvoir des nationalistes. C’est ainsi que pendant toute la durée de son gouvernement, Gizenga s’attelait à consolider l’accord AMP-PALU signé le 30 septembre 2006. Ainsi, depuis le 2 juin 2008, pendant qu’il était encore à la tête du Gouvernement, il initia des rencontres avec les forces nationalistes progressistes – sans les citer – qui comptent dans le pays. Le but était de les inviter à se rassembler pour conserver le pouvoir acquis en 2006 et de ne jamais le perdre au profit d’une Droite toujours menaçante et avide. A cet effet, le PALU leur proposa des projets d’entente politique. Hélas, regrette le Secrétaire général du PALU dans son message du 23 juillet 2011, « jusqu’à ce jour, aucune 69

réponse notable ne nous a été donné. Aucun projet de construction politique véritablement nationaliste ne nous a été présenté. Et aucun accord politique conséquent, appelé à remplacer celui de 2006, n’a été conclu, malgré la disponibilité affichée par le PALU ». Le Parti lumumbiste ne se décourage pas pour autant. Il continue d’espérer que cet accord viendra, afin que ne se fissure pas « le bloc des nationalistes progressistes de Gauche ». Cet accord est très important. S’il n’est pas signé, il y aura risque d’un « retour funeste de la Droite, en général réactionnaire, aux commandes de notre pays. » Cela, Gizenga ne le tolérera jamais. Pendant toute sa vie, depuis septembre 1960, il s’est battu contre la dictature néfaste qu’impose cette Droite, cette Droite qui avait écarté injustement les nationalistes lumumbistes de l’exercice du pouvoir que le peuple leur avait confié, cette Droite qui avait assassiné Patrice Lumumba, dont la mort a été à l’origine des troubles dans le pays et du sousdéveloppement du pays. Ainsi, comme en juin 1960 et comme pendant toutes les années qui suivirent le limogeage du Gouvernement des nationalistes, Antoine Gizenga appelle avec ferveur à « l’unité de la Gauche nationaliste devant les manœuvres de regroupement de la Droite et le risque de retour de celle-ci à la tête de notre Pays, car celui-ci n’oubliera jamais ce que cette Droite lui a fait et lui a causé comme préjudices sur tous les plans pendant près d’un demisiècle.’’ Antoine Gizenga a donc été conséquent avec luimême, quand, le 23 juin 2011, il annonça qu’il s’effacera 70

devant « le candidat nationaliste de Gauche » qui aura plus de chance de battre la Droite. Ce candidat devra présenter « un programme de gouvernance conforme aux valeurs et principes auxquels les nationalisteslumumbistes croient et tiennent pour le progrès de notre pays ». Ce candidat devra en même temps accepter le projet de société que le PALU élaborera, avec ou sans le concours des autres forces nationalistes progressistes. Ce programme de gouvernance couvrira la période 20122016. Pendant ce temps, le PALU exercera son leadership au Parlement et au Gouvernement. Sa candidature à la présidentielle ne viendra qu’en 2016. Ainsi, pour sauver la Gauche congolaise et pour qu’elle vive ad aeternam, Gizenga a toujours été prêt à faire des sacrifices, pour son parti et pour lui-même. Sa déclaration du 23 juillet 2011 n’est pas dans ce cas une nouveauté. Elle est la confirmation de son discours de toujours, un discours qui ne varie jamais, pour le bien, pense-t-il, de la mère-patrie, le Congo.

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4 NOTE : LA GAUCHE ET LA DROITE EN RDC Nationalisme, Gauche et Droite Antoine Gizenga parle abondamment de la « Gauche » et de la « Droite », nous venons de le voir. Pour beaucoup, ces deux concepts épistémologiques semblent être dépassés, tombés en désuétude à la chute du mur de Berlin en 1989. De même seraient relégués au panier de l’histoire des mots comme « colonialisme », « impérialisme », « progressisme » et surtout « nationalisme ». En Europe, ce dernier vocable a perdu depuis longtemps sa signification positive, synonyme de patriotisme sain, pour épouser une connotation nettement péjorative, équivalent d’extrémisme de droite et de haine envers l’étranger. Pourtant, dans de nombreux pays dits du TiersMonde, notamment ceux d’Afrique, le mot « nationalisme » garde encore son sens originel, celui de patriotisme. On y lit le mot « nation ». Un « nationaliste » serait celui qui aime avec passion son pays, s’attache indéfectiblement à lui, défend avec acharnement ses intérêts, le protège avec ardeur de la menace intérieure et surtout extérieure. Donc, un nationaliste est assimilé à un homme – généralement un homme politique – qui se bat pour son pays, pour l’intérêt de ses compatriotes. En RDC, les politiciens qui se disent de gauche se sont accaparés du terme « nationalisme » pour se l’attribuer, déniant aux politiciens qui se considèrent ou sont considérés comme de droite d’être des nationalistes. Ainsi, l’association « nationalistes de gauche » passe 73

mieux que « nationalistes de droite ». Le plus souvent, nationalisme se marie avec progrès, ou se confondent même, du moins pour les hommes de gauche. Ainsi, ceuxci se qualifient de « nationalistes » et/ou de « progressistes », ou parfois de « nationalistes progressistes » (des gens qui émanent de la « gauche progressiste »), ce qui serait une tautologie, si l’on considère que nationalisme (ou gauche) est synonyme de progrès. Ces hommes de gauche congolais prétendent que « nationalisme » s’oppose à « droite », et l’on ne peut concevoir. Car, selon eux, leurs homologues de droite sont ennemis du progrès du peuple, du fait que de tous les temps ils ont souvent sacrifié les intérêts nationaux à leur propre profit et/ou au profit de l’étranger. Ils n’auraient aucun projet de société qui prenne en compte les intérêts du pays et du peuple. Gizenga va plus loin, pour les qualifier d’éléments réactionnaires, et leur appartenance politique de funeste, comme dans le discours, devenu désormais célèbre, du 23 juillet 2011. Au début n’était que le nationalisme Pendant la période d’occupation européenne (portugaise puis belge) du Congo, les Congolais se battaient indistinctement contre le colonisateur, sans se dire ou se considérer comme appartenant à la Gauche ou à la Droite. Ils étaient tout simplement des nationalistes, des combattants contre l’ordre inique étranger. Les premiers d’entre les plus connus semblent être les Bakongo (habitants de l’actuelle province du BasCongo). Parmi eux, l’Histoire retient surtout trois personnages : une femme, Kimpa Vita ; un homme de 74

religion, le prophète Simon Kimbangu, et un homme politique, Joseph Kasa-Vubu. Appelée parfois la « Jeanne d’Arc du Congo » (Jeanne d’Arc, « la Pucelle d’Orléans » fut une Française brûlée vive par les Anglais sur un bûcher à dix-neuf ans au 15ème siècle en France), Kimpa Vita (1684-1706), de son vrai nom Béatrice Nsimba Ishipa (connue parfois ainsi sous le nom de Dona Béatrice), annonça l’avènement des temps nouveaux et le retour à l’âge d’or du royaume kongo. C’est ainsi qu’elle entreprit, en 1703-1704, sur le plan politique, une campagne pour le rétablissement de l’unité du royaume Kongo et le rejet de la tutelle de l’homme blanc, visant les gouverneurs portugais d’Angola et surtout les missionnaires capucins italiens. Furieux, ces derniers la diabolisèrent, la traitèrent de démoniaque, d’intrigante, de semeuse de troubles, d’hérésiarque et obtinrent du Conseil royal kongo de l’arrêter, de la juger et de la brûler vive, comme Jeanne d’Arc. Elle mourut le dimanche 4 juillet 1706 avec courage et dignité avec le nom de Jésus à la bouche. Elle n’avait que 22 ans. Considérée comme un vrai défenseur du christianisme africain, une sainte qui conversait souvent avec Dieu, la Vierge Marie et les Saints, elle fut béatifiée en 1909, et canonisée en 1920. Quant à Simon Kimbangu (12 septembre 1887 à Nkamba – 12 octobre 1951 à Elisabethville), catéchiste et prédicateur protestant, il annonça, dès 1921, la fin prochaine de la domination de l’homme blanc sur l’homme noir. Cet enseignement audacieux valut au « ngunza » (ou Ntumua ya Nzambi'a Mpungu, traduction en kikongo d’« envoyé de Dieu tout-puissant ») la peine de mort, commuée par le Roi des Belges en un 75

emprisonnement à vie au lointain Katanga. Le PALU le cite parmi les modèles du nationalisme progressiste, aux côtés de Patrice Lumumba, Joseph Okito, Maurice Mpolo et Pierre Mulele et appelle à leur résurrection ! Le troisième nationaliste kongo est Joseph KasaVubu, président de l’Association (puis Alliance) des Bakongo (ABAKO) depuis 1954. C’est sous lui que cette organisation tribale réclama, en 1956, une indépendance immédiate, un slogan que reprendront en chœur tous les partis progressistes engagés pour la libération du pays du joug colonial. Kasa-Vubu fut alors considéré par tous, y compris par la puissance coloniale, comme un nationaliste de gauche, pourrait-on dire, puisque intransigeant. Mais dès le début de l’année 1960, il devint un nationaliste timide, plutôt partisan d’une indépendance négociée avec la Belgique. Celle-ci l’apprivoisa et le prit désormais pour un « homme modéré », autrement dit, dans le langage des hommes de gauche, un « homme de droite ». Le PALU le considère même comme le père et le premier chef de file de la Droite, un homme qui est à l’origine des malheurs du peuple congolais, puisque c’est lui qui limogea Patrice Lumumba et son gouvernement nationaliste. En dehors du pays kongo, l’on connaît d’autres nationalistes congolais, qui se signalèrent à partir de l’année 1956. L’on peut citer l’abbé Joseph-Albert Malula (le futur archevêque de Kinshasa et premier cardinal du Congo) et ses poulains Joseph Ileo, ainsi que… PatriceEmery Lumumba évidemment. Dès 1959, des nouveaux nationalistes se manifestèrent, et dès ce moment, l’on commença à les distinguer en nationalistes de Gauche et de Droite. 76

« Front Lumumba » et « Front anti-Lumumba », ou les premiers blocs Gauche et Droite L’on peut considérer que les fondateurs de la Gauche et de la Droite sont les hommes qui créent et/ou dirigent les premiers partis politiques au Congo, et selon l’orientation qu’ils leur donnent. C’est à l’issue des élections législatives organisées en mai 1960 par la Belgique que se révélèrent les grands noms du nationalisme congolais moderne. C’est PatriceEmery Lumumba, du Mouvement national congolais (MNC), qui remporta haut la main ces élections. C’est autour de cet homme extraordinaire devenu la coqueluche des masses et contre lui que vont émerger la Gauche et la Droite congolaises, deux blocs antagonistes qui vont se disputer la direction d’un pays s’acheminant vers l’indépendance dont la date de proclamation fut fixée au 30 juin 1960. La Gauche, ou « Front Lumumba » Ceux qui se reconnaissent dans la Gauche viennent des partis politiques qui ont mené une campagne, parfois virulente, contre le colonialisme et ses méfaits. Les principaux partis de cette obédience sont, selon leur ordre décroissant en importance : - le Mouvement national congolais (MNC), - le Parti solidaire africain (PSA), - le Centre de regroupement africain (CEREA), - le cartel Baluba du Katanga (BALUBAKAT). Le 10 juin, ces partis formèrent un « Bloc des nationalistes », connu aussi sous le nom de « Front commun des nationalistes » ou « Front Lumumba ». 77

Les ténors de cette plateforme politique sont : - Patrice Lumumba, Joseph Okito, Maurice Mpolo, Christophe Gbenye, Joseph Kasongo…, pour le MNC ; - Antoine Gizenga, Pierre Mulele, Joachim Masena, Sylvain Kama…, pour le PSA ; - Anicet Kashamura, Marcel Bisukiro, pour le CEREA ; - Rémy Mwamba, pour le BALUBAKAT… La Droite, ou « Front anti-Lumumba » La Droite se forma surtout pour protester contre la prétention de Lumumba, grand vainqueur des élections, à diriger le pays. Tout serait parti le 21 mai 1960, lorsque, à l’issue des élections législatives, Albert Delvaux (futur Mafuta Kizola), président de la Luka, convoque ses ‘‘amis Bahizi, Anekonzapa, Ileo, Kamitatu, Sendwe, Bolikango, Kanza et de nombreux chefs coutumiers… à un congrès fixé le 30 mai, destiné à barrer la route à un régime de dictature crypto-communiste’’ 1. Par « cryptocommuniste », il faut entendre le gouvernement que Lumumba voulut mettre en place. Notons que Kamitatu est le seul membre du PSA cité parmi les « amis » de Delvaux. Le 24 mai, Jean Bolikango annonça officiellement la naissance d’une coalition anti-Lumumba, composée de ‘‘nationalistes modérés et raisonnables’’, lesquels ‘‘sont bien décidés à utiliser tous les moyens nécessaires, sans hésitation, pour contrecarrer l’action de tous ceux qui voudraient transformer le Congo en terre de sang et de feu’’2. Allusion à Lumumba et ses amis qui, forts de leur 1 2

Congo 1960, t. I, p. 273. Ibid., p. 269.

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victoire, revendiquèrent déjà l’exercice du pouvoir. C’est le 31 mai que le MNC-L annonça en effet officiellement sa candidature à la direction du pays, à la tête d’un gouvernement ‘‘au service de la Nation tout entière’’, qui instaurera ‘‘l’amitié entre les tribus et les races’’. Le 3 juin, Bolikango réagit en constituant un « Cartel d’union nationale » (comme l’« Union nationale » en 2006) ‘‘dirigé contre la dictature’’, au sein duquel prendrait part le PSA. C’est le 10 juin qu’il publia la liste complète des partis formant son groupe : ‘‘Abako, Abazi, Cerea, Conakat, Luka, Reko, A.R.P., Mederco, MncKalonji, MNC-Nendaka, PSA, Puna, Rdlk, Unimo, Unibat’’. Il s’agit ici du PSA-Kamitatu, puisque ‘‘l’aile Gizenga n’est nullement liée par ce protocole’’, lit-on dans Congo 1960. De même, il s’agit ici du CEREA-Sendwe. C’est pourquoi le même jour, 10 juin 1960, de la création du « Front Lumumba », ils se regroupèrent dans un camp appelé « Cartel de l’Union nationale », qu’on appela parfois le « Front anti-Lumumba ». Les partis de cette mouvance avaient mené une campagne qui ménageait le colonialisme et exaltait les valeurs de la « civilisation » du monde occidental. Elle fut sévèrement battue aux élections, en dépit du soutien que leur apportèrent le pouvoir colonial et l’Eglise catholique. Les principaux partis de cette tendance sont : - l’Alliance des Bakongo (ABAKO), - le Parti national du Progrès (PNP), - le Parti de l’Unité nationale (PUNA), - le Mouvement national congolais d’Albert Kalonji (MNC/K), - l’Union des Mongo (UNIMO), 79

- la Confédération des associations tribales du Katanga (CONAKAT)… Les meneurs importants du groupe, qui déclarèrent ouvertement anti-lumumbistes, sont :

se

- Joseph Kasa-Vubu, pour l’ABAKO ; - Joseph Ileo, Albert Kalonji, Joseph Ngalula…, pour le MNC/K ; - Jean Bolikango, Léon Eketebi…, pour le PUNA ; - Albert Delvaux, Paul Bolya…, pour le PNP ; - Justin-Marie Bomboko, Cyrille Adoula, Léon Engulu…, pour l’UNIMO ; - Moïse Tshombe, Godefroid Munongo, Jean-Baptiste Kibwe… pour la CONAKAT. Notons qu’un homme comme Cléophas Kamitatu, du PSA, ne suivit pas la ligne progressiste de son parti et se sentit proche de certains hommes de droite. C’est pourquoi il fut considéré comme un « nationaliste de droite », sans être nécessairement un anti-lumumbiste. Par contre, Joseph-Désiré Mobutu, Victor Nendaka et Etienne Tshisekedi, issus pourtant du MNC de Lumumba, se démarquèrent rapidement de ce dernier, pour rejoindre la Droite anti-lumumbiste. Selon le lumumbiste Anicet Kashamura 1, certains hommes de Droite étaient des « gêneurs » du gouvernement : ‘‘Les ministres du groupe modéré (MM. Bomboko, Delvaux, Mobutu, Bolya…) avaient accepté de participer au gouvernement, suivant les consignes données à Bruxelles : nous déranger, paralyser toute initiative progressiste, et ensuite trahir.’’ 1

A. Kashamura, De Lumumba aux colonels, p. 67. 80

Le premier affrontement Droite-Gauche, violent, pour l’occupation de la tête du Gouvernement C’est pour diriger le Gouvernement de la République que Droite et Gauche connurent leur premier affrontement, un affrontement qui ne cessera point et s’affirmera au cours des années. Rédigée par les Belges, la Loi fondamentale, une espèce de Constitution provisoire pour le Congo indépendant (elle sera remplacée par le Constitution de Luluabourg, écrite par les Congolais), était la copie conforme de la Constitution de l’Etat belge. Elle faisait du chef de l’Etat comme le Roi en Belgique : il ne peut être un chef de gouvernement ; il ne détient qu’un pouvoir symbolique, celui de garantir l’unité du pays. Homme hyperactif, Lumumba avait horreur de ne jouer qu’au roi ; aussi opta-t-il naturellement pour le Premier ministre du Congo, une fonction qu’il préféra à celui de Président de la République, parce qu’elle lui conférait le pouvoir d’élaborer et de conduire la politique nationale du pays, alors que le Chef de l’Etat ne serait là théoriquement que pour inaugurer les chrysanthèmes ! De son côté, Kasa-Vubu comprit aussi qu’il devait être Premier Ministre et non Chef de l’Etat ! Voilà pourquoi, au départ, Droite et Gauche voulurent, chacune, occuper la tête du Gouvernement, la tête de l’Etat n’intéressant personne. Ce poste se disputa donc entre les chefs de file de camp, Lumumba et Kasa-Vubu. Un jour, Gizenga fut invité par les « modérés », pour s’entendre dire qu’un Gouvernement Lumumba ne 81

passera pas au Congo. C’est Anicet Kashamura qui le rapporte1: ‘‘Le 13 juin [1960], un banquet financé par le patronat et le clergé et réunissant les tendances modérées fut organisé par le sénateur P.u.n.a. Promontorio. A ce banquet, il fut question d’envisager la formation d’un gouvernement sans Patrice Lumumba. Après, la rencontre eut lieu à l’Hôtel Regina. Etaient présents MM. Joseph Ileo, Edmond Nzenza-Nlandu, Albert Kalonji et Antoine Gizenga... et moi-même. M. Ileo parla d’un ton nerveux et menaçant en disant : - Si Lumumba forme le gouvernement, nous déclencherons des désordres qui l’emporteront comme un ouragan. Je lui répondis : - Pourquoi faut-il former un gouvernement d’où serait exclu Lumumba ? A mon avis, il faut avoir une personnalité comme lui à l’intérieur d’un gouvernement plutôt qu’à l’extérieur. M. Joseph Ileo répliqua d’un ton amer : - Vous les gens du Kivu, vous ne connaissez pas les Mongo. Nous n’hésitons pas à massacrer et ensuite à manger notre ennemi. Allez dire à M. Lumumba que s’il ne s’efface pas, le peuple mongo le mangera.’’ Ileo ne fut le seul anti-lumumbiste virulent. Bolikango compta parmi ceux qui déclarèrent la guerre à Lumumba au cas où celui-ci deviendrait Premier ministre. C’est dès le lendemain de la défaite de son camp qu’il brandit sa menace. Kashamura 2 le confirme : 1 2

A. Kashamura, De Lumumba aux colonels, p. 40. A. Kashamura, op. cit., p. 41. 82

‘‘Le cartel de droite, dirigé contre Lumumba, fut soutenu par une large opinion belge ; c’est la tentative que soutiendra plus tard M. Ganshof van der Meersch. La nuit suivant la constitution du cartel de droite, M. Joseph Kasa-Vubu fut invité à Bruxelles, pour y rencontrer les membres du gouvernement belge. Au lendemain de son retour de Belgique, M. J. Bolikango, un des leaders du cartel de droite, déclara : - Demain nous prendrons en main, sans Lumumba et ses amis, les rênes du gouvernement de ce pays.’’ Mais le moment ne fut pas encore venu de prendre le pouvoir par la force (ce sera fait le 5 septembre 1960). Pour l’instant, il fallut l’obtenir par le jeu des alliances. Kasa-Vubu et Lumumba le savaient, qui s’empressèrent d’aller vers ceux qui furent susceptibles de leur faire roi, dont le PSA. Après avoir assisté au banquet donné par Promontorio, Gizenga, que l’organisateur prit – à tort – pour un « homme de droite », venait de comprendre ce que sont les anti-lumumbistes : des gens violents, qui ne reculeront devant rien pour barrer la route aux nationalistes. Le même jour du lundi 13 juin où se déroula ce banquet, Lumumba reçut la mission de former une majorité parlementaire en vue de former un gouvernement. Cette majorité parlementaire étant acquise, Lumumba put donc se dire déjà formateur ; c’est avec confiance qu’il rendit ainsi, le jeudi 16 juin, compte de sa tâche à Ganshof. Mais, à sa surprise, celui-ci constata l’échec de sa mission d’information, pour la principale raison que Gizenga qui avait signé le protocole 83

avec lui n’engageait pas tout le monde, puisque, prétendit-il, ‘‘le parti P.S.A. comprend, de notoriété publique, deux ailes, celle de M. Gizenga et celle de M. Kamitatu.’’ C’est à Kasa-Vubu que la nouvelle mission fut confiée. Gizenga 1 note avec amertume que le président de l’Abako fut chargé de ‘‘la mission non d’informateur comme celle qui avait été confiée précédemment à Lumumba mais directement celle de formateur du gouvernement’’ ! En outre, il ne comprit pas que ce fut l’Abako, troisième parti national, et non le PSA, second parti national, qui fut désigné, pour succéder au MNC. Il se souvient que, ‘‘en accord avec Lumumba, je fis même une démarche auprès du Ministre’’ pour lui rappeler ‘‘sèchement’’ ces deux vérités ! De son côté, ‘‘Lumumba, au nom de nous tous, protesta véhémentement en qualifiant cette mesure d’escroquerie et d’injuste’’ envers les partis nationalistes. Ceux-ci voient ‘‘dans ce choix du Ministre, la volonté délibérée d’écarter les progressistes sur la voie de la formation par eux d’un gouvernement qui défendrait réellement les intérêts des populations’’. Lumumba fut déçu, mais n’entendit pas baisser les bras. Le 18 juin, poussé ou soutenu par Mulele, lui-même mandaté par Gizenga, le chef du MNC annonça au cours d’un meeting la création d’un gouvernement fondé sur le MNC, le PSA, le CEREA, le Cartel Balubakat et les alliés kazaniens du MNC. Le dimanche 19 juin, Kasa-Vubu – qui, selon Gizenga, rassemble ‘‘tout ce qui restait des partis désavoués par le peuple (PNP et consorts)’’ – déclara qu’il avait la majorité 1

A. Gizenga, Mon témoignage, p. 8. 84

parlementaire, grâce notamment aux voix du PSA et du CEREA. ‘‘Mais, MM. Gizenga, au nom du PSA, et Kas amura, au nom du CEREA, protestent en présence de M. Lumumba et déclarent que leurs partis ne sont nullement engagés.’’ Gizenga, en effet, dit, au cours d’une conférence de presse 1 : ‘‘Je proteste contre l’abus qu’a fait M. Kasa-Vubu du nom du PSA dans son énumération des partis qui le suivent. Je lui avais délégué M. Mulele, vice-président du parti, pour une prise de contacts à sa demande et à titre de simple information. A mon étonnement, M. Kasa-Vubu n’a pas reçu M. Mulele, mais lui a préféré trois interlocuteurs de mon parti non désignés : MM. Kamitatu, Kimvay et Mangobo, dont j’attends encore les rapports. Il est donc erroné de dire que le PSA, dont je suis le président, ait pu donner son accord de participation au gouvernement de M. Kasa-Vubu.’’ Le ministre Ganshof constata l’incapacité de KasaVubu de réunir une majorité parlementaire. Mais il n’entendit pas admettre la défaite de ses protégés de « droite », ainsi que l’écrit Gizenga (dans Mon témoignage) : ‘‘Monsieur le Ministre, après cet échec de Kasa-Vubu, fut contraint de faire, à nouveau, appel à Lumumba. Mais au lieu de se rendre à l’évidence et de cesser ses petites manœuvres inutiles, obéissant sans doute aux ordres aveugles de Bruxelles, il poussa le ridicule jusqu’à proposer à Lumumba une liste ministérielle confectionnée par Kasa-Vubu et son groupe, dans laquelle ne figuraient évidemment pas les noms de 1

Congo 1960, t. I, p. 286. 85

Gizenga, Mulele, Mpolo et Kashamura, lui demandant de la parrainer en tant que Premier ministre. Lumumba, devant une pareille absurdité, explosa en colère et fit comprendre au ministère que jamais semblable comédie n’a pu être faite dans aucun pays du monde et qu’étant donné qu’il détient la majorité au Parlement, ou il formait la liste ministérielle de son gouvernement, comme il l’entendait, avec ses partenaires ou rien du tout. M. le Ministre, craignant de se voir ridiculisé une fois de plus en public par Lumumba, se résigna et chargera celui-ci de la mission de formateur du gouvernement.’’ Kasa-Vubu devint furieux. Il venait de perdre ses chances d’être chef de gouvernement par la « faute » de Gizenga et de Kashamura. Désormais, ces deux personnalités deviendront ses pires ennemis. C’est le vote du Bureau de la Chambre des Représentants qui confirma la fin du rêve de Kasa-Vubu. En effet, à la Chambre des Représentants, ce furent les candidats du Front commun Lumumba qui triomphèrent. Le vote du Bureau eut lieu le 21 juin, auquel participèrent 133 députés. A l’issue du scrutin, le MNC-L Joseph Kasongo fut élu à la présidence de la Chambre, et le PSA Louis Mulundu, un gizengiste, à la 1 ère vice-présidence et le CEREA Kambale à la 2e vice-présidence. Kasongo avait battu le PUNA Jean Bolikango et l’Abako Madudu (74 voix contre 58 et 1), tandis que Mulundu avait étrillé l’Abako Madudu, le PUNA Bolikango et le PNP Mopipi, chacun obtenant respectivement 73, 50, 4 et 1 voix. Le poste de 1er secrétaire revint également à un PSA, également un gizengiste, Ambroise Iba, les autres secrétaires étant le 86

MNC-L Kihuyu et le Balubakat Mukalay. Ils avaient battu l’Abako Emmanuel Kini, le Luka Masikita, le PNP Mopipi et le Conakat Mumba. Au Sénat cependant, dont le vote s’effectua le 22 juin, ce fut un anti-lumumbiste, Joseph Ileo, qui enleva laborieusement la présidence, en battant le MNC-L Alexandre Mahamba par 41 suffrages contre 39. Mais la 1ère vice-présidence échut à un lumumbiste du Cartel Balubakat, M. Masangu, qui battit le PUNA Denge. La 2e vice-présidence revint également à un lumumbiste, le MNC-L Joseph Okito, qui fit échouer le Puna Ngbandua (44 voix contre 35). Le PSA s’en sortit bien, avec Justin Matiti comme secrétaire du Sénat. Avec ce vote, la mauvaise foi ou le doute ne fut plus permis : Ganshof désigna Patrice Lumumba chef du premier gouvernement congolais. Lumumba et Gizenga font élire à la tête de l’Etat… KasaVubu, leur adversaire de Droite ! Le 24 juin 1960, eut lieu, au suffrage universel indirect, l’élection du Chef de l’Etat. Puisqu’il avait choisi d’être chef de gouvernement, Lumumba aurait demandé à un homme de son camp de devenir chef de l’Etat et il l’aurait fait élire, le Parlement lui étant majoritairement acquis. Mais, homme intelligent et soucieux de l’équilibre des forces dans la Nation et de l’unité du pays, Lumumba ne voulut pas s’accaparer tous les pouvoirs. Ayant la majorité au parlement et au gouvernement, il souhaita que la présidence de la République revienne au groupe des vaincus, à un homme de Droite. Il opta alors pour la candidature de Kasa-Vubu, 87

plutôt que celle de Bolikango, un autre homme de Droite, connu pour être l’homme des catholiques. Aussi, en accord avec Gizenga et les « amis du PSA », selon Lumumba lui-même1, celui-ci n’hésita-t-il pas, à ordonner à son bloc de voter pour Joseph Kasa-Vubu. Gizenga dit pourquoi Lumumba et lui préférèrent Kasa-Vubu2 : ‘‘Tout de suite après la formation du gouvernement, la question du choix du chef de l’Etat vint immédiatement sur le tapis. Il fallait s’y résoudre au plus vite avant le 30 juin. Il apparut, après discussion entre Lumumba et moi, que ni lui ni moi n’aimions ce fauteuil de chef de l’Etat, estimant tous les deux qu’il nous fallait nous consacrer à la tâche la plus ardue et de responsabilité : celle de la conduite de la politique du pays au sein du gouvernement. Prenant ensuite l’avis des autres membres de la majorité, nous jugeâmes qu’il était sage et d’une bonne politique d’union nationale, d’attribuer ce poste à Joseph Kasa-Vubu, en soutenant sa candidature contre celle de Jean Bolikango, et cela pour plusieurs raisons. La première c’est que lui comme Bolikango avaient, tous deux, l’âge mûr en comparaison de nous deux qui n’étions âgés que de 35 ans seulement. La seconde c’est que Kasa-Vubu, contrairement à Bolikango, était celui qui, dans les premières heures de la lutte pour l’indépendance du pays, avait, le premier, élevé haut la voix pour la réclamer et connu, suite à cela, les exactions de l’appareil administratif colonial. La troisième c’est qu’il était, quand même, le dirigeant d’un parti qui venait en 1

Congo 1960, p. 832.

2

A. Gizenga, Mon témoignage, pp. 9-10. 88

troisième position [après le MNC et le PSA] à l’échelon national. La quatrième, c’est qu’il avait reçu, contrairement à Bolikango, une formation supérieure de par ses études de philosophie au Grand séminaire catholique de Kabwe au Kasaï, ce qui pourrait – croyionsnous – le mettre à l’abri des soubresauts politiques possibles.’’ Ainsi, c’est pour des raisons « objectives » plutôt qu’idéologiques ou partisanes que Lumumba et Gizenga décidèrent, comme l’écrit encore ce dernier, de porter ‘‘toutes les voix de notre majorité’’ sur Kasa-Vubu. Aux quatre raisons données par Gizenga pour soutenir la candidature de Kasa-Vubu, il faut ajouter une cinquième, avancée par Lumumba : la nécessité du maintien de l’unité nationale. En effet, Lumumba craignait que les bouillants dirigeants de l’Abako, qui s’estimèrent être insuffisamment représentés au gouvernement, appellent le Bas-Congo à la sécession (le parti de Bolikango n’avait pas la force et la consistance de l’Abako pour réussir la même opération à l’Equateur, une province dont l’Unimo de Bomboko voulut son attachement au Congo). Il le dit clairement, comme le rapporte Thomas Kanza1 : ‘‘Si Kasa-Vubu n’est pas élu, les Bakongo se révolteront et nous savons tous quels désordres peuvent s’ensuivre avant comme après l’indépendance. Ils pourront alors se rattacher au Congo-Brazzaville et ce serait le début de la fin pour notre indépendance si durement acquise.’’ 1

T. Kanza, Conflict in the Congo, Penguin Books, London, 1972, p. 128. 89

Selon l’anti-lumumbiste Ganshof van der Meersch1, “M. Lumumba fit une très pressante campagne du dernier moment en faveur de M. Kasa-Vubu”. Propos confirmé par Thomas Kanza 2 qui, avec son père Daniel et le député Maurice Mpolo, supplia, en vain, Lumumba de renoncer à orchestrer une telle campagne « absurde » et « dangereuse » : “Lumumba fut inébranlable. Sa décision, disait-il, était irrévocable [...]. Il était convaincu que KasaVubu ferait un excellent président, meilleur en tout cas que Bolikango, qui était, selon lui, un simple homme de paille de la Belgique et un protégé des catholiques”. L’ordre fut donc donné au groupe lumumbiste – MNC-L, PSA et alliés – de porter leurs voix sur Kasa-Vubu. A l’issue du scrutin, celui-ci battit ainsi, sans surprise, le candidat Jean Bolikango du PUNA, par 159 voix contre seulement 43 (et 11 votes nuls). Ce fut donc, comme l’écrit Gizenga 3, Kasa-Vubu qui ‘‘l’emporta aisément sur Bolikango par le score de plus de 2/3 de voix requises. Il devint dès cet instant, le premier chef de l’Etat congolais grâce donc à la volonté et à la sagesse de Lumumba et de ses compagnons.’’ En faisant élire son adversaire, Patrice Lumumba dément les propos malhonnêtes de ceux qui prétendent qu’il n’était qu’un « extrémiste », incapable de faire des compromis et de comprendre que la question du pouvoir ne se réduisait pas à une simple rivalité personnelle entre lui et Joseph Kasa-Vubu. 1

W.J. Ganshof Van der Meersch, Congo. Mai-juin 1960…, IRRI, Bruxelles, 1960, p. 226.

2

T. Kanza, Conflict in the Congo, p. 128.

3

A. Gizenga, Mon témoignage, p. 10. 90

Jusqu’au 5 septembre 1960, Joseph Kasa-Vubu fut reconnaissant à Patrice Lumumba d’avoir fait qu’il fut élu à la magistrature suprême. C’est ainsi qu’il travailla la main dans la main avec lui, dans la conduite difficile des affaires du Congo. Il lui fut apparemment loyal. Après Lumumba, Gizenga devient le chef de file de la Gauche et fait face à une Droite dure et brutale Après l’indépendance et au lendemain du limogeage à Léopoldville du Gouvernement Lumumba, plusieurs personnalités de gauche embrassèrent la Droite, soit par peur d’elle, soit par opportunisme. A l’inverse, très peu, ou prou, d’hommes de droite épousèrent la Gauche, puisque évincée du pouvoir. Incontestablement, Antoine Gizenga prit les rênes de la Gauche, comme l’avait voulu Patrice Lumumba. Les révolutionnaires lumumbistes (les combattants comme Pierre Mulele et Laurent-Désiré Kabila, ainsi que les militants non armés) demeurèrent fidèles à cet homme, qu’ils considérèrent désormais comme le successeur de Patrice Lumumba et donc le chef de file de la Gauche. Aucun militant lumumbiste ne lui contesta et ne lui conteste encore aujourd’hui ce leadership. Quant à la Droite, elle se renforça autour des tombeurs de Lumumba, à savoir Kasa-Vubu et d’un sextet impitoyable et terrifiant, dit « groupe de Binza » (Joseph Mobutu, Victor Nendaka, Cyrille Adoula, Justin-Marie Bomboko, Albert Ndele et Damien Kandolo). Ces hommes menèrent, non sans brutalité, la vie dure aux nationalistes lumumbistes ; ils les traquèrent, les arrêtèrent, les emprisonnèrent et les tuèrent même. 91

Quand Mobutu renversa Kasa-Vubu, il poursuivit la guerre contre eux. Il décréta qu’il n’y aura plus qu’un parti, celui de la Droite, dont il devient le chef. Tous les membres de son gouvernement se targuèrent d’être des mobutistes de cœur ou de raison. Les compagnons de Mobutu de première heure, comme les treize parlementaires qui le quittèrent en 1982, dont Etienne Tshisekedi, pour fonder l’UDPS, se présentèrent parfois comme les hommes reconvertis à la Gauche, mais les vrais hommes de Gauche comme ceux du PALU les prennent au contraire comme faisant toujours partie de la Droite. Voilà pourquoi fut impossible toute alliance entre le PALU et l’UDPS, même aux pires moments de la dictature mobutiste. Qui sont la Gauche et la Droite aujourd’hui ? Aujourd’hui, sont considérés par le PALU comme émanant de la Droite tous les anciens mobutistes, les héritiers politiques du mobutisme (comme les partisans de Jean-Pierre Bemba et ceux de Joseph Nzanga Mobutu), les tshisekedistes, les kasavubuistes, les tshombistes, les mobutisants et les tshisekedisants. De plus, tous ceux qui possèdent une idéologie ou un comportement qui ne cadrent pas avec ceux du PALU sont pris par celui-ci comme des mobutistes ou des tshisekedistes avérés ou déguisés, donc appartenant à la Droite. Depuis la chute de leur mentor Mobutu, beaucoup de ces gens, pour survivre, ont changé de casaque, pour embrasser les vrais nationalistes progressistes comme les Kabila père et fils. Le PALU se bat pour les dénoncer et les déloger de la Gauche qu’ils détestent en vérité.

92

La Gauche a toujours battu la Droite aux élections démocratiques ; qu’elle réédite ses exploits ! A toutes les vraies élections organisées en RDC, les nationalistes les ont toujours remportées. En mai 1960, nous l’avons dit, ce sont Patrice Lumumba du MNC, Antoine Gizenga du PSA, Anicet Kashamura du CEREA et Rémy Mwamba du BALUBAKAT qui ont constitué une majorité parlementaire. En 2006, ce sont Joseph Kabila soutenu par le PPRD et Antoine Gizenga du PALU, unis dans une coalition, qui, depuis cette année, dirigent l’Etat et le Gouvernement congolais. Voilà pourquoi, devant la montée en puissance des formations politiques de la Droite (dont l’UDPS d’Etienne Tshisekedi, le MLC de Jean-Pierre Bemba et tous les groupuscules qui se réclament d’eux ou s’agglutinent autour d’eux), Antoine Gizenga, gardien patenté du temple nationaliste lumumbiste, lança, le 23 juillet 2011, un cri d’alarme, pour remobiliser les partis et le peuple de gauche, afin de conserver, en décembre 2011, le pouvoir qu’ils avaient laborieusement (re)conquis en 2006. La bataille semble être rude, et la victoire de la Gauche ne peut résider que dans son union. Une union qui paraît plus que nécessaire. Une union appelée de tous leurs vœux par Antoine Gizenga et ses partisans. Kinshasa, 1er août 2011.

93

5 QUELQUES COMMENTAIRES DE LA PRESSE CONCERNANT LES MESSAGES D’A. GIZENGA Comme toujours, des « sorties » d’Antoine Gizenga (des déplacements ou des déclarations publiques) ne passent jamais inaperçues, tant elles sont rares et ont toujours un contenu et une signification qui vaillent, un contenu et une signification qui peuvent expliquer un fait de l’histoire, influencer une situation présente ou prévoir l’avenir. La presse ne manque jamais de décrire abondamment faits et gestes de cet homme considéré souvent comme un être énigmatique, profond et sage ; à l’occasion, elle cherche ou tente toujours de percer ce qu’elle appelle souvent le « mystère » de son déplacement ou de son discours. Nous avons sélectionné un petit florilège d’articles, favorables ou hostiles, qui avaient évoqué les messages du Patriarche du 29 janvier et du 23 juillet 2011, des articles qui confirment ou infirment notre propre analyse.

Antoine Gizenga du PALU déclare son parti non partant pour la prochaine présidentielle 2011 Le Palmarès, Kinshasa, 25/07/2011. Sortie prévue et sans surprise du leader du « Parti lumumbiste unifié », PALU, le ci-devant vétéran Antoine Gizenga, qui a déclaré que sa formation politique n’est pas partie prenante de la prochaine présidentielle 2011, mais qu’elle se prépare déjà pour celle 2018. 95

Le patriarche Antoine Gizenga a rompu le silence au sujet des élections de novembre 2011 en RDC. A quatre mois de ce scrutin, et en attendant l’annonce officielle de la candidature de Joseph Kabila, les directives ont été données aux militants du PALU. Le leader de ce parti a tenu le crachoir le samedi 23 juillet dernier dans une rencontre avec les cadres de sa formation politique dans sa résidence de Kintambo. Antoine Gizenga regrette la lenteur dans la mise au point du programme de gouvernance du pays pour la période 2012-2016. Le PALU, selon son Secrétaire général, a proposé des projets d’entente politique à ses partenaires potentiels, mais aucune réponse notable ne lui a été donnée. Aucun projet de construction politique véritablement nationaliste ne lui a été présenté. Par conséquent, aucun accord politique appelé à remplacer celui de 2006, n’a donc été conclu, malgré la disponibilité permanente affichée par le PALU. Ce parti politique aurait souhaité que ce programme soit finalisé dans l’ensemble avec les partenaires politiques potentiels de la Gauche congolaise. Il n’y a toutefois aucun signe de découragement dans le chef du vieux Lumumbiste qui le déclare à ce propos. Mais, devant l’absence de répondant pour ce faire, le PALU sera obligé de le rendre public incessamment, de le porter et de l’assumer, même seul devant le peuple souverain. D’aucuns sont même allés jusqu’à annoncer la présence des nuages dans les relations entre le PALU et les partis politiques de la Majorité présidentielle. (Le PALU ne fait pas partie de la MP, seul le soutien à Joseph Kabila unit les uns et les autres.) Ils faisaient justement 96

allusion à ce manque de répondant auquel faisait allusion le Patriarche du PALU au cours de sa rencontre avec les cadres de son parti. Tout se passe comme si les appels lancés par le PALU demeurent lettre morte. Mais, il faut souligner que le parti cher à Antoine Gizenga n’entend cependant pas s’écarter de la ligne de conduite qu’il s’est tracée. Pour Gizenga, la non-présentation par le PALU d’un candidat président de la République issu de ses rangs, pour les échéances électorales prochaines, répond au souci du regroupement des nationalistes. Le PALU entend ainsi réagir par un appel à l’unité de la Gauche nationaliste devant les manœuvres de regroupement de la Droite et le risque de retour de celleci à la tête de notre pays, car le parti de Gizenga n’oubliera jamais ce que cette Droite lui a fait et lui a causé comme préjudices sur tous les plans pendant près d’un demi-siècle. Le PALU soutiendra le candidat nationaliste de Gauche qui présentera un programme de gouvernance conforme aux valeurs et principes auxquels les Nationalistes Lumumbistes croient et tiennent pour le progrès de notre pays. Joint au téléphone à ce sujet, un membre du PPRD qui a requis l’anonymat, a commenté cette position en ces termes « Le fait de n’avoir pas déclaré que le PALU soutient la candidature de J. Kabila, laisse planer un doute qui n’arrange pas les relations PALU-PPRD. L’élection présidentielle est trop sérieuse et on ne peut pas badiner avec elle. Mais, nous nous faisons forts de croire encore en la bonne foi du PALU et espérons que le patriarche 97

Gizenga et les siens vont faire ce que nous attendons d’eux. » Les Lumumbistes unifiés renoncent à la course présidentielle mais se signalent avec énergie aux législatives. Les déclarations du Patriarche sont, certes, bien claires. Face à un régime constitutionnel de type semiprésidentiel à forte tendance parlementaire, souligne-t-il, le PALU prend de la sorte le temps de se focaliser sur ce qui est tout aussi important que le contrôle du poste de président de la République, à savoir : le contrôle du Parlement et du gouvernement de la République. Rien ne certifie, par contre, qu’Antoine Gizenga renonce totalement à la conquête démocratique de la magistrature suprême de la RDC. Le PALU se met résolument à préparer très sérieusement et très profondément sa candidature à la présidentielle 2016 », a-t-il déclaré. Dans son discours, le numéro un du PALU montre que son parti refuse d’être l’auteur de la fissure du bloc des Nationalistes de Gauche en pleine renaissance. Il refuse également de se présenter comme complice d’un retour funeste de la Droite, en général réactionnaire, aux commandes de la RDC. C’est ici le lieu de souligner que la vision du PALU sur les élections prochaines se base sur la vision sur la consolidation du peuple dans son rôle de souverain primaire, l’unification de la Nation congolaise et sa crédibilisation, grâce au jeu démocratique, l’amélioration de chaque tournée électorale par rapport à la précédente, le renforcement de la paix et la tolérance par le processus électoral. 98

Pour le Patriarche donc, ces élections impliquent des enjeux majeurs. Il a cité le maintien et la consolidation des Nationalistes à la tête de l’Etat, l’avènement des conditions pour une construction politique durable de la Nation, le maintien et la consolidation du PALU dans le leadership de gestion du pays.

Le PALU ne présentera présidentielle qu’en 2016

de

candidat

à

la

Bum, Agence congolaise de presse (ACP), 24/07/2011. Le Parti lumumbiste unifié (PALU) ne présentera pas de candidat issu de ses rangs à la présidentielle du 28 novembre prochain, a affirmé samedi à Kinshasa son secrétaire général, Antoine Gizenga, dans une communication de la direction du parti. Selon M. Gizenga, le PALU entend ainsi réagir par un appel à l’unité de la gauche nationaliste devant les manœuvres de regroupement de la droite et le risque de soutenir le retour de celle-ci à la tête du pays. Il a cependant assuré que son parti soutiendra « un candidat nationaliste de gauche » qui présentera un programme de gouvernance conforme aux valeurs et principes auxquels les nationalistes lumumbistes croient et tiennent pour le progrès de la République Démocratique du Congo. Le PALU, a-t-il ajouté, prend le temps de se focaliser sur le contrôle du Parlement et du gouvernement de la République, soulignant que ce parti alignera ainsi des candidats à la députation nationale et provinciale. Le secrétaire général du PALU a annoncé le lancement de l’opération de dépôt et de sélection des candidats du 99

parti à ces deux niveaux de scrutin sur toute l’étendue du territoire national, du 18 juillet au 6 août 2011. Il a également annoncé la mise au point du programme de gouvernance du pays pour la période 2012-2016. Le PALU se met résolument à préparer très sérieusement et très profondément sa candidature à la présidentielle de 2016, a poursuivi M. Gizenga. En vertu des accords le liant à la Majorité présidentielle, le PALU occupe depuis décembre 2006 le poste de Premier ministre. M. Gizenga qui a occupé ce poste de décembre 2006 à septembre 2008 a été remplacé par M. Adolphe Muzito, rappelle-t-on.

S’adressant aux militants du PALU, Antoine Gizenga: « Soyez prêts pour le sacrifice » Groupe L’Avenir, 25/07/2011. *Etre disciplinés et déterminés en vue d’offrir aux nationalistes une nouvelle victoire aux prochaines élections afin de leur donner l’occasion de conduire ce pays vers le progrès ; *Ne pas se laisser conduire par la rumeur, n’écouter que la direction du parti, car la lutte continue, l’ennemi est toujours là et aux aguets. La première législature de la 3ème République touche à sa fin. Dans les états-majors des partis politiques, l’heure est au remue-ménage voire au reniement. Beaucoup de questions se posaient au sujet de l’alliance que le PALU avait signée en 2006 avec le Chef de l’Etat, Joseph Kabila. Les débats sur la possible candidature du PALU à la présidentielle occupait une place de choix dans la rumeur. Il était donc important que 100

le PALU se prononce. Cette occasion de briser la glace que le PALU s’est offerte le samedi dernier à l’occasion de la présentation de vœux aux cadres et militants du parti par son Secrétaire général, le patriarche Antoine Gizenga. Dans un discours sans démagogie ni excès, Antoine Gizenga a fait savoir que l’expérience de coalition réalisée en 2006 mérite d’être non seulement poursuivie, mais aussi et surtout renforcée. Car, a fait savoir Antoine Gizenga, les raisons qui avaient présidé à ce choix sont encore présentes. Non seulement il faut donner la chance à la RDC d’être dirigée par le camp des nationalistes, mais aussi éviter la fracture Est-Ouest. C’est tout dire. Le PALU soutiendra la candidature de Joseph Kabila dans le cadre d’une plate-forme de gestion du pays consolidée et renforcée. Ce parti politique, comme l’a souligné Antoine Gizenga, veut mettre en place une organisation qui permettra une bonne préparation des élections. Au mois de mai, a-t-il souligné, les candidats du PALU seront connus en vue d’éviter toute précipitation et toute improvisation.

Le PALU annonce la mise au point du programme de gouvernance du pays pour la période 2012-2016 CongoNews, 25 juillet 2011. Le discours d'Antoine Gizenga, présenté le 23 juillet, à sa résidence, a provoqué des interprétations dans plusieurs sens. Nombreux dans les rangs du PPRD l'ont trouvé ambigu, notamment ceux qui avaient souhaité que le patriarche fit explicitement allusion à Joseph Kabila comme candidat du PALU à la prochaine élection présidentielle. Pour peu qu'ils se donnent la peine de 101

décrypter ce message, ils comprendront que « le candidat de gauche » qu'a évoqué Gizenga renvoie bien à Kabila. Le désaccord entre le PALU et le PPRD se situe plutôt ailleurs. « C'est pour atteindre le même but que nous avons entrepris des contacts multiples avec les autres forces nationalistes progressistes significatives et, ce, depuis le 2 juin 2008 jusqu'à ce jour. A cet effet, le PALU a proposé des projets d'entente politique à ces partenaires potentiels. Hélas, jusqu'à ce jour, aucune réponse notable ne nous a été donnée. Aucun projet de construction politique véritablement nationaliste ne nous a été présenté. Et aucun accord politique conséquent, appelé à remplacer celui de 2006, n'a été conclu, malgré la disponibilité permanente affichée par le PALU », a déclaré Gizenga pour cristalliser le malaise qui mine les relations entre le PALU et le PPRD. A tout comprendre, Gizenga a fait une concession à Joseph Kabila sur la candidature mais reste demandeur d'un contrat politique sur la base d'un programme pour le prochain mandat. Cela paraît encore plus clair là où il menace qu'à défaut de ce programme, le PALU fera cavalier seul. « La direction politique du PALU annonce ce qui suit : ... la mise au point du programme de gouvernance du pays pour la période 2012-2016. Le PALU aurait souhaité que ce programme soit finalisé ensemble avec les partenaires politiques potentiels de la gauche congolaise. Mais devant l'absence de répondant pour ce faire, le PALU sera obligé de le rendre public incessamment, de le porter et de l'assumer même seul devant le peuple souverain », menace le patriarche.

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Election Présidentielle /PALU Revue de presse, CongoForum, 25 juillet 2011. Le Parti lumumbiste unifié (PALU) ne présentera pas de candidat à l’élection présidentielle prévue en novembre prochain en RD Congo, a annoncé samedi son secrétaire général, Antoine Gizenga. S’exprimant devant des militants de son parti, il a affirmé que le PALU « soutiendra le candidat nationaliste de gauche », sans donner plus de précision. Il convient d’examiner quels avantages le PALU recherche ainsi (ou, ce qui revient un peu au même, quels inconvénients cela lui évite) et ce que cela change dans la donne électorale. Etant donnée la façon dont on conçoit, en RDC, la politique et les partis, c'est-à-dire en accordant une importance très grande aux personnes, il est presque naturel que tous les leaders et présidents de parti soient candidats présidentiels. En outre, il est connu que le PALU pratique un très fort « culte de la personnalité » envers Gizenga. La conclusion logique, à savoir la candidature de Gizenga, aurait cependant été absurde autant que logique, le Patriarche étant âgé de 86 ans. Se présenter pour un mandat de cinq ans aurait donc équivalu à un pari d’atteindre l’âge de 91 ans, pari que l’on peut difficilement considérer comme gagné à l’avance. Ne pas participer à la présidentielle est, de ce point de vue, logique, en ce sens que Gizenga ne se lance pas dans une aventure perdue à l’avance, mais ne se crée pas, non plus, les problèmes qui pourraient résulter de la désignation d’un « dauphin ». 103

D’autre part, en ne prenant aucune option pour la présidentielle, le PALU s’épargne les gros problèmes qu’il aurait eus s’il avait considéré son alliance de 2006 avec la MP comme valant aussi pour la campagne 2011. Il pourra ainsi faire campagne pour les législatives sans avoir à épargner personne et, en particulier, sans avoir à épargner JKK qui tire vigoureusement la couverture de son côté. Exemple : toute une série de dépenses, faites aux frais de l’Etat, sont présentées comme « dons du Président » et nul ne souligne que s’il y a de l’argent pour les faire, c’est à la suite d’allègements de dettes qui ont été obtenus par Muzito, dont la tâche principale, à la Primature, était de se concilier le FMI. Sur son terroir naturel du Bandundu, le PALU aura à compter surtout avec des concurrents qui, eux, sont membres de la MP, feront donc campagne pour Kabila et tendront à diminuer le rôle du gouvernement pour magnifier celui de la Présidence. Le PALU adopte donc la position qui le met dans la meilleure position tactique en vue de législative, et il a raison d’agir ainsi. On peut, bien sûr, s’interroger sur le sens de l’expression « soutenir le candidat nationaliste de gauche», sans plus de précision. Cela revient à dire que si Lumumba ressuscitait, le Parti lumumbiste voterait pour lui. On s’en doutait déjà un peu ! Mais qu’y a-t-il derrière cette expression qui peut désigner tout le monde et personne ? Il se pourrait très bien qu’il n’y ait en fait rien du tout, et que cette expression vague masque, aux yeux des gens simple de la base, un vide délibéré. La Constitution française, dont s’inspire celle du Congo, crée un système bicéphale, en laissant à 104

l’appréciation du Président et du Premier Ministre de déterminer de quelle manière leurs pouvoirs respectifs s’articulent. Le fonctionnement très« présidentiel » auquel on a assisté jusqu’ici au Congo n’en est pas la seule application possible. Comme on l’a vu ailleurs, cela peut aboutir à des épisodes de « cohabitation ». Le vote à la proportionnelle ayant été maintenu, la majorité gouvernementale devra être construite « à la belge » (si possible plus vite qu’en Belgique), ce qui veut dire qu’un parti qui s’avèrerait indispensable pour constituer une majorité pourrait se faire « payer » au prix fort, par exemple en obtenant de former le gouvernement. En outre, cela manifeste qu’aux yeux de Gizenga, ou plus généralement de l’état-major du PALU, la partie est loin d’être jouée d’avance et que les « certitudes » mises en avant tant dans le camp de JKK que dans l’opposition ont tout du « bluff électoral ». Ces vues sont sans doute un peu complexe pour l’électeur de base, d’autant plus que les partisans du PALU sont connus pour leur discipline et attendent des consignes. Leur en donner une qui vaut tout dire est une manière de les satisfaire sans s’engager. La Prospérité soutient que Antoine Gizenga, qui a décidé de ne présenter aucune candidature de son parti à l’élection présidentielle de novembre 2011, entend ainsi réagir par un appel à l’unité de la Gauche nationaliste devant les manœuvres de regroupement de la Droite et le risque de retour de celle-ci à la tête de la RDC. Le PALU, a indiqué Antoine Gizenga, soutiendra le candidat nationaliste de Gauche qui présentera un programme de 105

gouvernance conforme aux valeurs et principes auxquels les Nationalistes-Lumumbistes croient et tiennent pour le progrès de la RDC. Selon La Prospérité, en se désistant, ‘‘Yandi Kaka’’ entend ainsi réagir par un appel à l’unité de la Gauche nationaliste devant les manœuvres de regroupement de la droite et le risque de retour de celleci à la tête de la RDC. La même réflexion est relayée dans Le Potentiel, qui affiche en manchette : « Le PALU choisit le camp des nationalistes ». D’après ce journal, le PALU a finalement dissipé tout malentendu en donnant clairement sa position par rapport aux échéances électorales prochaines. Une position très attendue dans le camp de la Majorité présidentielle (MP) avant le dernier sprint du processus électoral. « Le PALU n’a pas de candidat à l’élection présidentielle de novembre prochain, renseigne ce quotidien. Toutefois, il présentera des candidats aux autres scrutins, notamment les législatives nationales et provinciales. Raison avancée : le PALU a choisi le camp des nationalistes. Cette position a été clarifiée le weekend dernier par le secrétaire général du PALU, Antoine Gizenga, au cours d’une rencontre avec les cadres de son parti ». Selon Antoine Gizenga, « l’option levée est justifiée par l’appel à l’unité de la Gauche nationaliste face aux manœuvres de regroupement de la Droite et le risque de retour de celle-ci à la tête du pays». « En clair, cette Gauche nationaliste n’est autre que la majorité présidentielle avec laquelle il avait signé des accords politiques en 2006 après le second tour de la présidentielle, fait remarquer Le Potentiel. A tout prendre, le PALU a choisi de ne pas rompre avec Joseph Kabila ». Mais au-delà, poursuit le journal, « le PALU 106

souhaite voir le peuple congolais consolider son pouvoir de souverain primaire et la nation congolaise devenir plus unie et plus crédible grâce au jeu démocratique ». Par ailleurs, a déclaré Antoine Gizenga, son parti entend prendre ses responsabilités. Ainsi, Il ne cache pas ses intentions d’assumer et rendre public incessamment le programme de gouvernance du pays pour la période 2012 – 2016 au cas où les partenaires politiques de la Gauche congolaise tarderaient à s’associer à sa confection. Pour l’essentiel, écrit Le Phare, le parti du patriarche Gizenga ne présentera pas de candidat à la présidentielle du 28 novembre prochain. C’est en 2016 que le PALU se mesurera à la présidentielle. Par contre, le parti alignera des candidats à tous les autres scrutins. Le Phare interprète les propos de Gizenga comme une main tendue à Kabila. D’après le confrère qui a repris l’intégralité du discours de « Yandi kaka », le PALU soutiendra le candidat nationaliste de Gauche qui présentera un programme de gouvernance conforme aux valeurs et principes auxquels les nationalisteslumumbistes croient et tiennent pour le progrès de notre pays. Et par « Nationalistes de Gauche », il faut entendre le clan politique ayant pour pères fondateurs Lumumba, Gizenga… pour fidèle lieutenant Mzee Laurent Désiré Kabila … et pour «héritiers spirituels» leurs « descendants », dont les deux têtes d’affiche que sont Joseph Kabila à la présidence de la République et Adolphe Muzito à la Primature. (On ne peut que remarquer que Le Phare est seul à donner un sens aussi clairement défini à l’expression «Nationalistes de Gauche » et à en faire pratiquement une déclaration de soutien à la candidature de JKK. Le 107

Potentiel, quant à lui, parle simplement de « ne pas rompre ». Serait-ce une fois de plus l’histoire du verre à moitié vide ou à moitié plein ? NdlR).

Un tête-à-tête J. Kabila – A. Gizenga confirme-t-il le pacte d’alliance scellé entre les deux leaders ? MZ, Le Climat Tempéré/MMC, 26/07/2011. Ceux qui suspectent une rupture entre le président Joseph Kabila et le patriarche Antoine Gizenga risquent de s’en prendre à eux-mêmes, puisque les deux leaders veillent scrupuleusement à maintenir leur pacte d’alliance au terme duquel le parti PALU va une fois de plus soutenir aux prochaines élections l’autorité morale de la Majorité présidentielle « Le Climat Tempéré » n’avait pas tort d’avoir annoncé, dans l’une de ses livraisons, que le Parti lumumbiste unifié est non partant à la présidentielle de novembre 2011. En effet, Antoine Gizenga a, en personne, levé le voile à ce propos samedi dernier au cours d’une matinée politique. Le patriarche a, à cette occasion, lancé à sa base, que « le PALU soutiendra le candidat nationaliste de Gauche qui présentera un programme de gouvernance conforme aux valeurs et principes auxquels les Nationalistes - Lumumbistes croient et tiennent pour le progrès du Congo-Kinshasa ». Cette déclaration du patriarche Antoine Gizenga lancée expressément à la base de son Parti Lumumbiste unifié (PALU) à la matinée politique qu’il a organisée le week-end dernier en dit long sur les stratégies que cette formation politiques arrête dans le cadre des préparatifs des prochaines élections. 108

Dans les milieux proches du Parti lumumbiste, l’on indique que les hautes instances de cette formation politique ont d’ores et déjà levé l’option de battre campagne en faveur du président sortant de la RD Congo. Des sources dignes de foi font même savoir que Joseph Kabila a dernièrement reçu, en privé, Antoine Gizenga, accompagné de ses deux lieutenants : Dovel Mpango, secrétaire permanent du PALU, et Godefroid Mayobo, secrétaire permanent adjoint et porte-parole de ce parti politique. Les deux personnalités ont, à cette occasion, tenté de jeter les bases du nouveau contrat politique qu’elles envisagent sceller incessamment. Les mêmes sources laissent entendre que Joseph Kabila a bien apprécié le cadeau politique que son interlocuteur lui a offert : la renonciation officielle à la présidentielle, en vue de militer pour sa réélection. En contrepartie, font-elles savoir, le « Raïs » lui a promis un soutien – financier ? – au PALU, en vue de lui permettre de rééditer, à défaut d’améliorer, ses exploits électoraux de 2006. Si cette alliance venait à porter les fruits escomptés, le PALU pourra de nouveau participer à la gestion de la « res publica » à la prochaine mandature. Cependant, renseigne-t-on, des ténors du Parti du Peuple pour la Démocratie et la Reconstruction (PPRD) ne voient pas de bon œil ce nouveau rapprochement KabilaGizenga. Le parti présidentiel redoute sans nul doute le spectre de voir la primature lui échapper, comme en 2006, quelle que soit la performance électorale qu’il pourrait réaliser. Depuis son université de septembre 2010, le PPRD ne cesse d’afficher sa détermination de s’adjuger la majorité 109

des sièges au Parlement et, partant, d’être aux commandes du pays avec une infime coalition, à défaut de contrôler seul le gouvernement. Il s’agit d’une ambition politique, du reste légitime, mais qui ne semble pas être de nature, pour l’heure, de favoriser le renouvellement de l’alliance entre la MP et le PALU. « … le PALU a proposé des projets d’entente politique à ses partenaires potentiels. Hélas, jusqu’à ce jour, aucune réponse notable ne nous a été donnée. Aucun projet de construction politique véritablement nationaliste ne nous a été présenté. Et aucun accord politique conséquent, appelé à remplacer celui de 2006, n’a été conclu, malgré la disponibilité permanente affichée par le PALU ». A entendre des observateurs politiques, ces propos tenus samedi par Antoine Gizenga laissent entrevoir un malaise entre le PALU et le PPRD, première force politique au sein de la MP. Joseph Kabila serait-il en train de prendre ses distances avec sa propre famille politique? Il est peut-être tôt d’y répondre.

PALU : Antoine Gizenga prône la discipline et l’unité Le Potentiel, 31 juillet 2011. Sortie d’Antoine Gizenga à l’occasion d’une cérémonie d’échange de vœux avec les cadres de base du PALU. La discipline et l’unité au centre du message du patriarche. « Les militants du PALU doivent devenir encore plus unis et plus disciplinés. Car, on ne va pas à la victoire dans des combats sans une forte cohésion interne et sans discipline ». Cette déclaration du chef historique du PALU a constitué le temps fort de son 110

adresse aux cadres de base du Parti lumumbiste unifié. Pour les prochains scrutins, le patriarche estime que « les militants du PALU doivent être prêts à des sacrifices pour l’intérêt du peuple et du pays ». Antoine Gizenga considère qu’avec « la législature passée, le PALU a su prendre le risque de taire son amour-propre, son radicalisme et son orgueil pour contribuer au maintien de l’unité du pays et à la promotion de la tolérance, de la paix et de la stabilité politique » de la RDC. Il se réjouit que malgré tout, le PALU, avec d’autres nationalistes, a su tenir une plateforme politique de travail et de gestion du pays. D’ailleurs, le chef du parti tient à pousser cet élan à se poursuivre et à s’amplifier pour que les nationalistes continuent à conduire, ce pays et lui « insuffler une âme politique progressiste ». Pour se faire, le mot d’ordre est d’aller à la conquête du pouvoir d’Etat par la voie démocratique et avec des ressources propres aux militants du parti. Abordant la question des accusations portées contre certains cadres du PALU aux affaires, Antoine Gizenga réaffirme l’attachement de son parti pour la cause du peuple. « Il faut aller confirmer au peuple congolais que, malgré des accusations non prouvées formulées contre l’un ou l’autre cadre du PALU, le PALU demeure le parti des masses et le parti de la gauche congolaise tel qu’il l’a connu ». Le chef du parti a renouvelé l’idéologie « socialisme démocratique » de son organisation politique. Les bases essentielles du projet politique sont le travail productif de tous, le bien-être de tous, la justice distributive, l’état de droit et l’union de l’Afrique, a-t-il ajouté. 111

Pour le patriarche Gizenga, les élections de 2011 doivent marquer un pas de plus dans le sens du progrès politique pour la nation congolaise. Comme en 2006, les élections visent, pour le PALU, « de contribuer encore davantage à l’éloignement du risque de fracture du pays, d’améliorer la stabilité politique, économique et sociale de la nation, consolider le bloc nationaliste dans son rôle dirigeant du pays afin que celui-ci dispose d’une vision et d’un projet révolutionnaire et très dynamique pour la construction et la reconstruction du pays et de renforcer la conscience politique du peuple souverain dans la prise en mains de son propre destin ».

RDC : Gizenga laisse le champ libre à Joseph Kabila pour la présidentielle Christophe Rigaud, 25/07/2011. Le Parti Lumumbiste Unifié (PALU) d'Antoine Gizenga ne présentera pas de candidat à l'élection présidentielle de novembre 2011 en République démocratique du Congo (RDC). L'ancien Premier ministre de Joseph Kabila a donc décidé de ne pas gêner la candidature du président sortant. Mais il compte tout de même faire entendre la voix de son parti aux élections législatives, où fort de ses 34 députés, il espère bien rester incontournable. Allié de longue date du président Joseph Kabila, le PALU a donc décidé de passer son tour pour les prochaines élections présidentielles en RD Congo fixées le 28 novembre 2011. Les militants ont décidé de ne pas présenté de candidat face à Joseph Kabila. Une décision qui apparaît comme une bonne nouvelle pour Joseph Kabila : Antoine Gizenga avait réalisé 13,8 % des suffrages 112

au premier tour de la présidentielle de 2006. Mais le parti lumumbiste entend bien rester présent sur l'échiquier politique et présentera des candidats aux prochaines législatives... une bonne manière pour Gizenga de rester un allié de poids à l'assemblée. Avec actuellement 34 députés nationaux, le PALU pourrait être un partenaire important au moment où le nouveau président congolais constituera sa majorité. Né le 5 octobre 1925 dans la province du Bandundu, Antoine Gizenga s'est opposé à l'ancien président Mobutu Sese Seko et a vécu plus de 30 ans en exil. Il est revenu dans son pays natal en 1991, à la faveur de la conférence nationale. Nommé Premier ministre de la République démocratique du Congo en novembre 2006 par le président Joseph Kabila à la faveur d'un accord politique, Antoine Gizenga avait démissionné en septembre 2008, pour des raisons de santé.

Le PALU choisit le camp des nationalistes Le Potentiel, 25/07/2011) Le PALU n’a pas de candidat à l’élection présidentielle de novembre prochain. Toutefois, il présentera des candidats aux autres scrutins, notamment les législatives nationales et provinciales. Raison avancée : le PALU a choisi le camp des nationalistes. Cette position a été clarifiée le week-end dernier par le Secrétaire général du PALU, Antoine Gizenga, au cours d’une rencontre avec les cadres de son parti. Le temps est en train de courir très vite par rapport aux prochaines échéances électorales. Chaque formation ou plate-forme politique est appelée à afficher ses 113

couleurs et ses ambitions sans tergiverser. Voilà l’explication qu’il faut donner à l’effervescence observée dernièrement aussi bien dans la majorité au pouvoir que dans l’opposition. Des alliances se font et se défont. Avec comme objectif la conquête du pouvoir ou sa conservation. Comme annoncé dans nos dernières éditions, le PALU a finalement, le week-end dernier, dissipé tout malentendu en donnant clairement sa position par rapport aux échéances électorales prochaines. Une position très attendue dans le camp de la Majorité présidentielle (MP) avant le dernier sprint du processus électoral. Le PALU n’alignera pas de candidat au scrutin présidentiel de novembre 2011 mais, il compte se préparer sérieusement pour la présidentielle 2016, a annoncé le secrétaire général Antoine Gizenga. Selon lui, l’option levée est justifiée par l’appel à l’unité de la Gauche nationaliste face aux manœuvres de regroupement de la Droite et le risque de retour de celleci à la tête du pays. En clair, cette Gauche nationaliste n’est autre que la majorité présidentielle avec laquelle il avait signé des accords politiques en 2006 après le second tour de la présidentielle. A tout prendre, le PALU a chois de ne pas rompre avec Joseph Kabila. Mais au-delà, le PALU souhaite voir le peuple congolais consolider son pouvoir de souverain primaire et la nation congolaise devenir plus unie et plus crédible grâce au jeu démocratique. Son vœu est de voir également la paix et la tolérance sortir renforcées par le processus électoral. D’où, les enjeux majeurs pour les 114

prochaines élections restent le maintien et la consolidation des nationalistes à la tête de l’Etat, l’avènement des conditions pour une construction politique durable de la nation ainsi que le maintien et la consolidation de la position du PALU dans le leadership de gestion du pays. C’est dans cet ordre d’idées que Antoine Gizenga a annoncé le lancement depuis le 18 juillet 2011 de l’opération de dépôt et de sélection des candidats du PALU à la députation nationale et provinciale sur toute l’étendue du territoire national. L’opération court jusqu’au 6 août prochain. De même, le PALU entend prendre ses responsabilités. Il ne cache pas ses intentions d’assumer et rendre public incessamment le programme de gouvernance du pays pour la période 2012 – 2016 au cas où les partenaires politiques de la Gauche congolaise tarderaient à s’associer à sa confection.

Le Parti Lumumbiste Unifié « PALU » non partant ! Tempête des Tropiques, 25/07/2011. Le parti cher à Antoine Gizenga qui compte aligner les candidats à la députation nationale promet de soutenir un candidat Président de République issu de la gauche congolaise. Au nom de la direction politique du Parti Lumumbiste unifié, PALU en sigle, Antoine Gizenga a annoncé le samedi 23 juillet d'importantes décisions en rapport avec les enjeux politiques de l'heure. Le Secrétaire général de cette formation politique a ainsi indiqué que le PALU ne présente pas un candidat issu de ses rangs à la 115

présidentielle prévue le 28 novembre prochain. Néanmoins, ce parti compte soutenir le candidat nationaliste de gauche d'après le patriarche, “qui présentera un programme de gouvernance conforme aux valeurs et principes auxquels les NationalistesLumumbistes croient et tiennent pour le progrès de la RDC’’. Il a aussi insisté sur la mise au point du programme de gouvernance du pays pour la période 2012-2016 qu'il souhaite voir finaliser avec les autres partenaires de la gauche congolaise. Il a par la même occasion lancé l'opération de dépôt et sélection des candidats du PALU à la députation nationale et à la députation provinciale sur toute l'étendue du territoire national. Deux raisons fondamentales sont à la base de la nonprésentation par le PALU d'un candidat Président de la République. Il s'agit premièrement de l'appel de ce parti à l'unité de la Gauche nationaliste devant les tentatives de regroupement de la droite. Deuxièmement, cette formation politique compte se focaliser sur ce qui est tout aussi important que le poste du Président de la République, à savoir le contrôle du Parlement et du Gouvernement de la République, au regard du régime constitutionnel du type semi-présidentiel à forte tendance parlementaire en présence. Compte tenu de cette situation, le PALU s'est résolu de préparer très sérieusement et profondément sa candidature à la Présidentielle de 2016. Tenue à Gombe en la résidence officielle du Premier ministre honoraire, cette manifestation a été voulue par le patriarche du PALU en vue de donner des indications et des orientations précises en rapport avec la vision du parti par rapport aux élections qui s'approchent à grands 116

pas. Concernant la vision de cette formation politique, elle est basée sur le souhait de voir le peuple congolais consolider son pouvoir de souverain primaire, la nation devenir plus unie et plus crédible grâce au jeu démocratique, la paix et la tolérance sortir renforcées par le processus électoral et chaque tournée électorale être meilleure que la précédente… Les enjeux majeurs de ces élections pour le PALU sont le maintien et la consolidation des Nationalistes à la tête du pays, l'avènement des conditions pour une construction politique durable de la nation et enfin le maintien et la consolidation de la position du PALU dans le leadership de gestion du pays. Antoine Gizenga e chargé la direction politique du parti d'expliquer à tous les membres du parti les dispositions arrêtées.

Antoine Gizenga n’est pas candidat ! SB, radio-okapi.net, 25/07/2011. C’est le samedi 23 juillet que celui qu’on appelle affectueusement « Yandi kaka » a fait cette annonce devant les cadres de son parti. Selon La Prospérité, En désistant, ‘‘Yandi Kaka’’ entend ainsi réagir par un appel à l’unité de la Gauche nationaliste devant les manœuvres de regroupement de la droite et le risque de retour de celle-ci à la tête de la RDC. La même réflexion est relayée dans Le Potentiel qui affiche en manchette : « Le PALU choisit le camp des nationalistes ». D’après ce journal, le PALU a finalement dissipé tout malentendu en donnant clairement sa position par rapport aux échéances électorales prochaines. Une position très attendue dans le camp de la 117

Majorité présidentielle (MP) avant le dernier sprint du processus électoral, croit savoir le confrère. Le Phare interprète les propos de Gizenga comme une main tendue à Kabila. D’après le confrère qui a repris l’intégralité du discours de « Yandi kaka », le PALU soutiendra le candidat nationaliste de Gauche qui présentera un programme de gouvernance conforme aux valeurs et principes auxquels les nationalisteslumumbistes croient et tiennent pour le progrès de notre pays. Et par « Nationalistes de Gauche », il faut entendre le clan politique ayant pour pères fondateurs Lumumba, Gizenga… pour fidèle lieutenant Mzee Laurent-Désiré Kabila… et pour « héritiers » spirituels leurs « descendants », dont les deux têtes d’affiche que sont Joseph Kabila à la présidence de la République et Adolphe Muzito à la Primature. (…).

Le PALU attend 2016 Kimp, Le Phare, 25 juillet 2011. Le PALU ne présentera pas de candidat à la magistrature suprême du pays pour 2011. Antoine Gizenga a fixé rendez-vous à ses cadres et militants pour 2016. La grande bataille à laquelle se préparent le Patriarche et ses troupes, dans l'immédiat, c'est celle du contrôle de la majorité parlementaire. Même si tout ceci paraît clair, chacun y va de sa petite interprétation de la mise au point de l’« Autorité morale » du PALU au sujet de sa main tendue qui n’a pas encore trouvé preneur au sein de la famille des Nationalistes de Gauche au pouvoir. Une chose est 118

certaine, il s’agit d’une main tendue en direction de Kabila. Selon l’entourage d’Antoine Gizenga, par « Nationalistes de Gauche », il faut entendre le clan politique ayant pour pères fondateurs Lumumba, Gizenga… pour fidèle lieutenant Mzee Laurent-Désiré Kabila… et pour « héritiers » spirituels leurs « descendants » dont les deux têtes d’affiche que sont Joseph Kabila à la Présidence et Adolphe Muzito à la Primature. Le souci majeur du PALU et de son chef spirituel est que le pouvoir récupéré par le peuple en 1997 par le biais du « libérateur » Laurent-Désiré et légitimé par les urnes en 2006 à travers la victoire du panel AMP-PALU-UDEMO, n’échappe pas aux Nationalistes de Gauche au profit de la Droite. Le silence du PALU au sujet de la candidature de Joseph Kabila à la présidentielle, indique-ton, s’explique par le fait qu’officiellement, ce parti n’est pas encore saisi à cet effet. Antoine Gizenga ne saurait prendre position à partir des ambitions politiques de l’actuel Chef de l’Etat discutées jusque-là au sein au sein de son parti et de la Majorité Présidentielle, une plate-forme partenaire du PALU. En d’autres termes, au nom du respect du pacte conclu en 2006 entre Nationalistes de Gauche, et au regard de la nécessité de formaliser un nouveau deal politique pour 2011, le Patriarche et ses ouailles apporteraient naturellement leur soutien à Kabila dès que sa candidature quitterait le domaine de l’« informel ».

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Le cliché de la main tendue se veut donc une invitation à Joseph Kabila et à la Majorité Présidentielle à se déterminer selon le délai de leur convenance. Le PALU n’a nullement l’intention de gêner une candidature virtuelle du Chef de l’Etat en exercice. Aussi a-t-il automatiquement reporté ses visées sur le fauteuil présidentiel pour 2016. Avec une prise de position sans équivoque, personne ne pourra reprocher à Gizenga, dans l’hypothèse d’une mauvaise gestion des enjeux politiques de l’heure, de n’avoir pas fait sa part de travail. Sa fidélité au respect des engagements passés et futurs avec les Nationalistes de gauche n’est pas à discuter.

Antoine Gizenga du PALU déclare son parti non partant pour la prochaine présidentielle 2011 Le Palmarès, Kinshasa, 25/07/2011. Sortie prévue et sans surprise du leader du « Parti lumumbiste unifié », PALU, le ci-devant vétéran Antoine Gizenga, qui a déclaré que sa formation politique n’est pas partie prenante de la prochaine présidentielle 2011, mais qu’elle se prépare déjà pour celle 2018. Le patriarche Antoine Gizenga a rompu le silence au sujet des élections de novembre 2011 en RDC. A quatre mois de ce scrutin, et en attendant l’annonce officielle de la candidature de Joseph Kabila, les directives ont été données aux militants du PALU. Le leader de ce parti a tenu le crachoir le samedi 23 juillet dernier dans une rencontre avec les cadres de sa formation politique dans sa résidence de Kintambo. Antoine Gizenga regrette la

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lenteur dans la mise au point du programme de gouvernance du pays pour la période 2012-2016. Le PALU, selon son Secrétaire général, a proposé des projets d’entente politique à ses partenaires potentiels, mais aucune réponse notable ne lui a été donnée. Aucun projet de construction politique véritablement nationaliste ne lui a été présenté. Par conséquent, aucun accord politique appelé à remplacer celui de 2006, n’a donc été conclu, malgré la disponibilité permanente affichée par le PALU. Ce parti politique aurait souhaité que ce programme soit finalisé dans l’ensemble avec les partenaires politiques potentiels de la Gauche congolaise. Il n’y a toutefois aucun signe de découragement dans le chef du vieux Lumumbiste qui le déclare à ce propos. Mais, devant l’absence de répondant pour ce faire, le PALU sera obligé de le rendre public incessamment, de le porter et de l’assumer, même seul devant le peuple souverain. D’aucuns sont même allés jusqu’à annoncer la présence des nuages dans les relations entre le PALU et les partis politiques de la Majorité présidentielle. (Le PALU ne fait pas partie de la MP, seul le soutien à Joseph Kabila unit les uns et les autres.) Ils faisaient justement allusion à ce manque de répondant auquel faisait allusion le Patriarche du PALU au cours de sa rencontre avec les cadres de son parti. Tout se passe comme si les appels lancés par le PALU demeurent lettre morte. Mais, il faut souligner que le parti cher à Antoine Gizenga n’entend cependant pas s’écarter de la ligne de conduite qu’il s’est tracée. Pour Gizenga, la non-présentation par le PALU d’un candidat 121

président de la République issu de ses rangs, pour les échéances électorales prochaines, répond au souci du regroupement des nationalistes. Le PALU entend ainsi réagir par un appel à l’unité de la Gauche nationaliste devant les manœuvres de regroupement de la Droite et le risque de retour de celleci à la tête de notre pays, car le parti de Gizenga n’oubliera jamais ce que cette Droite lui a fait et lui a causé comme préjudices sur tous les plans pendant près d’un demi-siècle. Le PALU soutiendra le candidat nationaliste de Gauche qui présentera un programme de gouvernance conforme aux valeurs et principes auxquels les Nationalistes Lumumbistes croient et tiennent pour le progrès de notre pays. Joint au téléphone à ce sujet, un membre du PPRD qui a requis l’anonymat, a commenté cette position en ces termes « Le fait de n’avoir pas déclaré que le PALU soutient la candidature de J. Kabila, laisse planer un doute qui n’arrange pas les relations PALU-PPRD. L’élection présidentielle est trop sérieuse et on ne peut pas badiner avec elle. Mais, nous nous faisons forts de croire encore en la bonne foi du PALU et espérons que le patriarche Gizenga et les siens vont faire ce que nous attendons d’eux. » Les Lumumbistes unifiés renoncent à la course présidentielle mais se signalent avec énergie aux législatives. Les déclarations du Patriarche sont, certes, bien claires. Face à un régime constitutionnel de type semiprésidentiel à forte tendance parlementaire, souligne-t-il, 122

le PALU prend de la sorte le temps de se focaliser sur ce qui est tout aussi important que le contrôle du poste de président de la République, à savoir : le contrôle du Parlement et du gouvernement de la République. Rien ne certifie, par contre, qu’Antoine Gizenga renonce totalement à la conquête démocratique de la magistrature suprême de la RDC. Le PALU se met résolument à préparer très sérieusement et très profondément sa candidature à la présidentielle 2016 », a-t-il déclaré. Dans son discours, le numéro un du PALU montre que son parti refuse d’être l’auteur de la fissure du bloc des Nationalistes de Gauche en pleine renaissance. Il refuse également de se présenter comme complice d’un retour funeste de la Droite, en général réactionnaire, aux commandes de la RDC. C’est ici le lieu de souligner que la vision du PALU sur les élections prochaines se base sur la vision sur la consolidation du peuple dans son rôle de souverain primaire, l’unification de la Nation congolaise et sa crédibilisation, grâce au jeu démocratique, l’amélioration de chaque tournée électorale par rapport à la précédente, le renforcement de la paix et la tolérance par le processus électoral. Pour le Patriarche donc, ces élections impliquent des enjeux majeurs. Il a cité le maintien et la consolidation des Nationalistes à la tête de l’Etat, l’avènement des conditions pour une construction politique durable de la Nation, le maintien et la consolidation du PALU dans le leadership de gestion du pays.

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Décryptage du message de Gizenga sur la présidentielle 2011 : le portrait-robot du candidat du PALU José Nawej, L’Avenir, Kinshasa, 25/07/2011. * En optant pour le maintien et la consolidation des nationalistes à la tête de l’Etat, et en déclarant soutenir le candidat de gauche qui présentera un programme conforme aux valeurs et aux principes auxquels croient les lumumbistes, le patriarche de Gungu fait allusion à Joseph Kabila sans le citer nommément. Difficile de lire Antoine Gizenga au premier degré et de croire l'avoir compris. Pas évident de percevoir le message de cet homme à cheval sur les principes si on ne l'intègre pas dans le processus de l'Histoire de la République et du peuple souverain. Pas facile enfin d'interpréter avec à propos les directives du leader du PALU si on n'a pas en arrière-fond l'attachement idéologique de Gizenga au camp des Nationalistes. Un primat au nationalisme qui, au PALU, passe avant les considérations individuelles. La communication politique faite, le samedi 23 juillet, par Antoine Gizenga, ne s'est pas départi de ces fondamentaux du PALU. Il n'y a donc pas eu d'ambigüité dans la prise de position du patriarche des lumumbistes congolais. Rien que la déclinaison des principes qui guident le PALU depuis plus de quarante ans ! Lorsque Gizenga annonce urbi et orbi que son parti soutiendra, pour la présidentielle, "le candidat qui présentera un programme de gouvernance conforme aux valeurs et principes auxquels les Nationalistes-Lumumbistes croient et tiennent pour le progrès de notre pays", il n'entretient 124

aucun flou sur sa préférence. Puisque dans le message, Gizenga souligne que, parmi les enjeux de ces élections, figure le maintien et la consolidation des Nationalistes à la tête de l'Etat. Qui ignore le groupe qui est au pouvoir en ce moment ? Ceux qui attendaient de voir le leader du PALU entrer dans le jeu des noms en ont eu, sans doute, pour leur spéculation. Gizenga ne mange pas de ce pain-là. Dès la double liquidation du bloc nationaliste élu et donc de la souveraineté populaire en septembre 1960, Antoine Gizenga se bat pour les principes. Si le PALU qui a toutes les potentialités pour briguer la présidence privilégie le collectif, il ne peut à ce stade avancer de nom. Puisque formellement, la Gauche nationaliste n'a pas encore présenté de candidat. De fait, on n'en est pas encore à la présentation des candidatures. Mais, pas besoin d'être clerc pour deviner le candidat nationaliste que le PALU va soutenir. En termes simples, le PALU a dessiné à grands traits le portrait robot de l'actuel chef de l'Etat, Joseph Kabila. A charge pour ce dernier de faire acte de candidature le moment venu. A charge aussi pour lui en sa double qualité de chef de la coalition des Nationalistes au pouvoir et d'autorité morale de la MP de créer les conditions d'une démarche cohérente pour ce qui est du programme de gouvernement. Au chef de la MP de donner aussi toute sa place au PALU dans le dispositif de la campagne pour la présidentielle. La politique étant au contraire de la religion un rendez-vous du donner et du recevoir.

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A ce propos, on ne peut pas dire que le PALU n'ait trouvé que des motifs de satisfaction dans le traitement que certains plénipotentiaires de la kabilie lui ont réservé. Suite au précédent, on ne peut non plus dire que la très exigeante base du PALU soit encline à se déployer sans un coup de barre clair à gauche dans le programme de gouvernance. La position de la base est loin d'être une formalité pour un parti qui doit tout à cette base. Laquelle se confond avec le Congolais type tant elle est constituée de vraies gens. Emanation des Congolais d'en bas, Antoine Gizenga ne peut ne pas intégrer les interrogations et les déceptions légitimes des masses dans sa démarche politique. Faire autrement serait se faire hara-kiri politiquement, et renier ses racines.

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Ouvrages de Jean MPISI, chez L’Harmattan - Tabu Ley « Seigneur Rochereau », innovateur de la musique africaine, 2004. - Jean-Paul II en Afrique (1980-2000). Ses discours entre politique et religion, 2005. - Le cardinal Malula et Jean-Paul II, Dialogue difficile entre l’Eglise « africaine » et le Saint-Siège, 2005. - Kivu, RDC : La paix à tout prix ! La conférence de Goma (6-23 janvier 2008), 2008. - Le Kivu pour la paix. Les Actes de la Conférence de Goma, 2008. - Traite et esclavage des Noirs au nom du christianisme, 2008. - Les papes et l’esclavage des Noirs. Le pardon de JeanPaul II, 2008. - Les évêques africains et la traite négrière : « Pardon de l’Afrique à l’Afrique », 2008. - Les prêtres africains en Occident. Leur mission et restrictions vaticanes sur leur séjour, 2008. - Rapport final de la Conférence provinciale sur la Reconstruction. Province du Bas-Congo, Matadi 14-20 décembre 1997, 2008. - Rapport final de la Conférence provinciale sur la Reconstruction. Province du Kasaï Occidental, Kananga 612 janvier 1998, 2008. - Rapport final de la Conférence provinciale sur la Reconstruction. Province du Katanga, Lubumbashi 15-24 décembre 1997, 2008. - Rapport final de la Conférence provinciale sur la Reconstruction. Province du Sud-Kivu, Goma 26 nov. 1997 – 9 janv. 1998, 2008. - Antoine Gizenga, le combat de l’héritier de P. Lumumba, 2007.

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