361 119 7MB
French Pages 144 [176] Year 2019
LIVRE DU PROFESSEUR
2
de
Programme 2019
AU FIL DES Textes
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Camille Dappoigny Sous la direction de
Hélène Lhermitte
Maela Auffray Camille Dappoigny
Franck HélèneMazzuccheli Lhermitte
ChristelleDufour Dufour Christèle ServaneGuégan Guégan Servane
Charles-Étienne Charles-ÉtienneMillon Sylvie Millon Néel Sylvie Néel
SoazigLe LeFloch Floch Soazig EmmanuelLesueur Lesueur Emmanuel
Audrey AudreyPanet Panet Hélène Picard Hélène Picard
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Édition : Clara Dagonia Maquette de couverture : Dame Yucca, studio de création graphique Maquette intérieure : STDI Mise en page : STDI
www.hachette-education.com © Hachette Livre 2019 58, rue Jean-Bleuzen – 92178 Vanves Cedex ISBN : 978-2-01-709797-6
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Partie 1 > OBJETS D’ÉTUDE LECTURE OBJET D’ÉTUDE
1
1
PARCOURS D’ŒUVRE
Émile Zola, La Bête humaine (1890) . . . . . . . . . . . . . . . . .14 ❯
Le désir rend-il inhumain ?
ee siècle ee siècle e siècle Le Leroman théâtre théâtre du XVII XVII siècle au auau XXI XXI Le et ledu récit du XVIII XXIesiècle siècle PARCOURS CHRONOLOGIQUE
Contexte : Qui est Émile Zola ? . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 15 Les transformations sociales et économiques au XIXe siècle . . . . . . . . 15 1 Le projet de Zola . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 15 2 Le portrait de Jacques Lantier . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 15 3 La mort de Lison . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 16 4 Le rêve de Séverine . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 17 5 Le suicide de Flore. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 17 6 Le meurtre de Séverine . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 18 7 Le cheminement du roman (Incipit) . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 19 8 Explicit . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 19 LECTURES COMPLÉMENTAIRES 9 Mme de La Fayette, La Princesse de Clèves, 1678 Écho du xviie siècle . . . . . . . . . . . . . . 20 10 L’abbé Prévost, Manon Lescaut, 1731 Écho du xviiie siècle . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 20 11 Albert Cohen, Belle du Seigneur, 1968 Écho du xxe siècle . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 21 12 Marguerite Duras, L’Amant, 1984 Écho du xxe siècle . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 21 13 Michel Houellebecq, Les Particules élémentaires, 1998 Écho contemporain . . . . . . . . . 22 14 Marie NDiaye, La Cheffe, roman d’une cuisinière, 2016 Écho contemporain . . . . . . . . . 22
2
PARCOURS D’ŒUVRE
Nicolas Bouvier, Le Poisson-scorpion (1982) . . . . . . . . . . . . . . . . .27 ❯
Peut-on s’inventer une vie ?
PARCOURS CHRONOLOGIQUE
Contexte : Qui est Nicolas Bouvier ? – Le Poisson-scorpion, 1982 . . . . . . . . . . . . 28 1 L’arrivée à Ceylan . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 28 2 « La cent-dix-septième chambre » . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 29 3 Pensées d’un voyageur . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 30 4 La lettre de la mère . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 30 5 « Padre » . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 31 6 Bestiaire : le paon . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 32 7 Bestiaire : l’escarbot . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 33 8 La renaissance . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 33 Lecture d’image Damien Hirst, Purgatorio, 2009 . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 34 LECTURES COMPLÉMENTAIRES 9 Homère, L’Odyssée, VIIIe siècle av. J.-C. Écho de l’Antiquité . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 35 10 Louis-Antoine de Bougainville, Voyage autour du monde, 1771 Écho du xviiie siècle . . . 35 11 Henry Miller, Préface au Colosse de Maroussi, 1972 Écho étranger . . . . . . . . . . . . . . . . 35 12 Muriel Cerf, L’Antivoyage, 1974 Écho du xxe siècle . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 36 13 Hugo Pratt, « Corto Maltese », 1970 Bande dessinée . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 36 14 Sylvain Tesson, Dans les forêts de Sibérie, 2011 Écho contemporain . . . . . . . . . . . . . . . 36
Sommaire 4 4Sommaire
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P001_012
5 5
PROLONGEMENT
artistique et culturel
Dépeindre le mouvement et capter le réel en peinture . . . . . 22
5
5
6
7
7
8
Qu’est-ce qu’une adaptation réussie ? Cinéma . . . . 23 Étude d’une œuvre Jean Renoir, La Bête humaine, 1938
ATELIER Langue & Expression
ÉCRIT
FICHE DE SYNTHÈSE
Sujet : Écrire une description en s’appropriant le style de Zola . . . 23 Grammaire Les expansions du nom La modalisation . . . . . . . . . . . . . . 23 Lexique Les mots du… désir . . . . . . . . . . . 23
9
L’écriture naturaliste ou la peinture d’un réel subjectif . . . . . . . . . . . . . 24 VERS LE BAC
◗ Dissertation . . . . . . . . . . . . . . . . 24 LECTURE CURSIVE Milan Kundera, Risibles Amours, 1970 . . . . . . . . . . . . 25
Carnet de lecture
9
0
0
1
1
2
2
8
8
Le reporter photographique : capturer le réel ou le transformer ? . . . . . . . . . . . . . . . . 37
9
0
1
3
3
4
5
FICHE DE SYNTHÈSE
Sujet : Écrire un récit d’aventure . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 38 Grammaire L’expression du temps Juxtaposition, coordination et subordination . . . . . . . . . . . . . . 39
0
2
ÉCRIT
Contexte : La photographie, document ou œuvre d’art ? L’Amérique de la Grande Dépression . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 37
Lexique Les mots de… l’aventure. . . . . . . . 39
Le récit de voyage du XVIIIe au XXIe siècle . . . . . . . . . . . . . . . . . 40 VERS LE BAC
◗ Dissertation . . . . . . . . . . . . . . . . 40 LECTURE CURSIVE Jean-Marie Gustave Le Clézio, L’Africain, 2004 . . . . . . . . . . . . . . . . . 41
Carnet de lecture
Étude d’une œuvre Dorothea Lange, Migrant Mother, 1936
5
D’autres lectures au choix . . . . . . . . . . . . . . . 42
5
Blaise Cendrars, D’Oultremer à Indigo, 1940
6
Amélie Nothomb, Attentat, 1997
6
6
2019 13:47
Sommaire Sommaire5 5
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LECTURE OBJET D’ÉTUDE
2
3 Lutter contre
l’esclavage . . . . . . . . . .46 ❯
Comment prêter une voix à ceux que l’on n’entend pas ?
ee siècle au ee siècle Le Lelittérature théâtre théâtredu duXVII XVII XXI siècle La d’idées et siècle la presseau duXXI XIXe siècle au XXIe siècle PARCOURS CHRONOLOGIQUE
Contexte : L’héritage des Lumières 1 Victor Schœlcher, Des colonies françaises : abolition immédiate de l’esclavage, 1842 . . . . 47
Contexte : Victor Hugo, les combats d’une vie 2 Victor Hugo, Lettre du 2 décembre 1859 . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 48 Lecture d’image Jean-Michel Basquiat, Marché aux esclaves, 1982 . . . . . . . . . . . . . . . . . 49
Contexte : La négritude 3 Léon-Gontran Damas, « Nous les gueux », Black-Label, 1956
. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 49
Contexte : L’esclavage, une question d’actualité 4 Christiane Taubira, L’Esclavage raconté à ma fille, 2015 . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 50 LECTURES COMPLÉMENTAIRES 5 Montesquieu, De l’esprit des lois, 1748 Écho du xviiie siècle . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 51 6 Joseph Conrad, Au cœur des ténèbres, 1899 Écho étranger . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 51 7 Aimé Césaire, Discours sur le colonialisme, 1950 Écho du xxe siècle . . . . . . . . . . . . . . . 51 8 Alain Mabanckou, Le Sanglot de l’homme noir, 2012 Écho francophone . . . . . . . . . . . . 52 9 Éric Vuillard, Congo, 2012 Écho contemporain . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 52 10 Colson Whitehead, Underground Railroad, 2017 Écho étranger . . . . . . . . . . . . . . . . . . 52
4
Le pouvoir de la presse . . . . . . . . .58 ❯
Un texte peut-il faire changer la société ?
PARCOURS CHRONOLOGIQUE
Contexte : L’abolition de la peine de mort 1 Victor Hugo, « Lettre aux habitants de Guernesey », L’Homme, 18 janvier 1854 . . . . . . . . . . 59
Contexte : La pauvreté 2 Jules Vallès, « Les Morts », Le Figaro, 3 novembre 1861 . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 60
Contexte : La condition de la femme dans la France du XIXe siècle 3 Séverine, « De profondis clamavi ad te… », Pages rouges, 1893 . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 61 Contexte : Le vote en France, un droit soumis aux aléas de l’histoire 4 Octave Mirbeau, « La Grève des électeurs », Le Figaro, 28 novembre 1888 . . . . . . . . . . . . 61 Contexte : L’affaire Dreyfus 5 Émile Zola, « J’accuse… », L’Aurore, 13 janvier 1898 . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 62 LECTURES COMPLÉMENTAIRES 6 Olympe de Gouges, « Déclaration des droits de la femme et de la citoyenne », 1791 Écho du xviiie siècle . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 63 7 Victor Hugo, Les Misérables, 1862 Écho du xixe siècle . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 63 8 Robert Badinter, « Discours à l’Assemblée nationale », 1981 Écho du xxe siècle . . . . . . 63 9 Martha Gelhorn, La Guerre de face, 1986 Écho étranger . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 64 10 Ignacio Ramonet, « Mensonge d’État », Le Monde diplomatique, juillet 2003 Écho contemporain . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 64 11 Kamel Daoud, « La triste vie des mandats à vie », Le Quotidien d’Oran, 8 décembre 2013 Écho francophone . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 65 Sommaire 6 6Sommaire
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P001_012
PROLONGEMENT
artistique et culturel
Des mots et des images pour lutter contre l’esclavage moderne . . . . . 52
7
8
9
Esclavage domestique . . . . . . . . . . 53
9
Étude d’une œuvre Ondine Millot et Raphaël Dallaporta, Esclavage domestique, 2006
0
ATELIER Langue & Expression
FICHE DE SYNTHÈSE
ORAL
Sujet : Prononcer une plaidoirie sur la liberté . . . . . . . . . . . . . . . . . . 53 Grammaire L’expression de l’opposition et de la concession Formuler une concession. . . . . . . . 54 Lexique Les mots de… l’oppression . . . . . . 54
La littérature d’idées du XIXe siècle au XXIe siècle . . . . . . . . . . . . . . . . . 55 VERS LE BAC
◗ Contraction de texte . . . . . . . . . . 55 LECTURE CURSIVE Maryse Condé, Moi, Tituba sorcière… Noire de Salem, 1988 . . . . . . . . . . . . 56
Carnet de lecture
1
1
1
2
2
2
La presse est-elle en danger ? . . . 65
9
0
1
1
Les métamorphoses de la presse . . . . . . . . . . . . . . . . . . 66 Étude d’une œuvre Rodney Graham, Rheinmetall/Victoria 8, 2003
2
ÉCRIT
FICHE DE SYNTHÈSE
Sujet : Écrire un article polémique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 67
Le pouvoir de la presse du XIXe siècle au XXIe siècle . . . . . . . 68
Grammaire L’expression de la condition La concordance des temps . . . . . . 67
◗ Essai . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 68
Lexique Les mots du… jugement . . . . . . . . 67
VERS LE BAC
LECTURE CURSIVE Florence Aubenas, Le Quai de Ouistreham, 2010 . . . . . . . . . . . . . 69
Carnet de lecture
3
3
D’autres lectures au choix . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .71
3
Denis Diderot, Supplément au voyage de Bougainville, 1772
4
Hugo journaliste : Articles et chroniques (1819-1876) Emmanuel Guibert, Didier Lefèvre et Frédéric Lemercier, Le Photographe, 2003
4
Colson Whitehead, Underground Railroad, 2017
5
2019 13:47
Sommaire Sommaire7 7
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LECTURE OBJET D’ÉTUDE
3
5 La poésie
de l’absence . . . . . . . .74 ❯
Comment évoquer ce que l’on a perdu ?
ee siècle au Le Lepoésie théâtre théâtre du duXVII XVII XXI XXIee siècle siècle La du Moyen Âgesiècle au XVIIIeau siècle PARCOURS CHRONOLOGIQUE
Contexte : Les troubadours (XIe-XIVe siècles) 1 Bernard de Ventadour, « Quand vois l’alouette… », XIIe siècle . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 74
Contexte : Le XIIIe siècle : un siècle de bouleversements 2 Rutebeuf, « La Complainte de Rutebeuf », 1260 . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 75 Contexte : Le XIVe et le XVe siècles, une période de troubles 3 François Villon, « Ballade des dames du temps jadis », 1460-1461 . . . . . . . . . . . . . . . . . . 76
Contexte : La Renaissance 4 Joachim du Bellay, « Las, où est maintenant… », 1558 . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 77
Contexte : La Pléiade 5 Pierre de Ronsard, « Comme on voit sur la branche… », 1578 . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 79 LECTURES COMPLÉMENTAIRES 6 Virgile, Géorgiques, entre 37 et 30 av. J.-C. Écho de l’Antiquité . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 80 7 François Pétrarque, « La vie fuit… », 1374 Écho étranger . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 80 8 Marceline Desbordes-Valmore, « Élégies », 1825 Écho du xixe siècle . . . . . . . . . . . . . 81 9 Guillaume Apollinaire, « Le Pont Mirabeau », 1913 Écho du xxe siècle . . . . . . . . . . . . 81 10 Paul Éluard, « Notre vie », 1947 Écho du xxe siècle . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 81 11 Jacques Réda, « Élégie de la petite gare », 2004 Écho contemporain . . . . . . . . . . . . . . 82
6 « La vie est
un songe » . . . . . . . . . .86 ❯
Le rêve et la réalité peuvent-ils se confondre ?
PARCOURS CHRONOLOGIQUE
Contexte : L’École lyonnaise 1 Louise Labé, « Tout aussitôt que je commence à prendre… », 1555 . . . . . . . . . . . . . . . . . 87
Contexte : La mouvance baroque et le courant libertin 2 Saint-Amant, « Le Paresseux », 1631 . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 88 Contexte : Plaire et instruire 3 Jean de La Fontaine, « La Laitière et le Pot au lait », 1678 . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 88 Lecture d’image Francisco de Goya, « Le songe de la raison engendre des monstres », 1797-1799 . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 89
Contexte : Des Lumières à la naissance du romantisme 4 André Chénier, « Ô nuit, nuit douloureuse ! », 1780 . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 89 LECTURES COMPLÉMENTAIRES 5 Victor Hugo, « Rêverie », 1829 Écho du xixe siècle . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 90 6 Arthur Rimbaud, « Aube », 1886 Écho du xixe siècle . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 90 7 Paul Verlaine, « L’horrible nuit d’insomnie », 1891 Écho du xixe siècle . . . . . . . . . . . . . . 91 8 Robert Desnos, « J’ai tant rêvé de toi », 1926 Écho du xxe siècle . . . . . . . . . . . . . . . . . 91 9 Mahmoud Darwich, « Le jardin endormi », 1977 Écho étranger . . . . . . . . . . . . . . . . . . 91 10 Michèle Voltaire Marcelin, « Il fait un temps de poème », 2010 Écho francophone . . . . 92 Sommaire 8 8Sommaire
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PROLONGEMENT
artistique et culturel
Tristan et Iseult : les parfaits amants . . . . . . . . . . . . 82
4
5
Étude d’une œuvre Bill Viola, Firewoman, 2005 . . . . . . . . 82
6
ATELIER Langue & Expression
FICHE DE SYNTHÈSE
ORAL
Sujet : Organiser un concours d’éloquence sur l’amour . . . . . . . . 83 Grammaire L’expression de la cause L’expression de la conséquence . . . 83 Lexique Les mots de… l’amour . . . . . . . . . 83
7
9
La poésie élégiaque du Moyen Âge au XVIe siècle . . . . . 84 VERS LE BAC
◗ Commentaire . . . . . . . . . . . . . . . 85 LECTURE CURSIVE Clémentine Beauvais, Songe à la douceur, 2016 . . . . . . . . . . 85
Carnet de lecture
0
0
1
1
1
2
L’imaginaire du rêve dans la peinture de Jérôme Bosch . . . . . 92
7
8
8
Le rêve, le sommeil et la mort dans la peinture du XVIIe siècle . . . . 92 Étude d’une œuvre Georges de La Tour, Le Songe de saint Joseph, vers 1640
9
9
ÉCRIT
FICHE DE SYNTHÈSE
Sujet : Rédigez un texte imaginatif et poétique à partir d’un tableau du XVIIe siècle . . . . . . . . . . . . . . . . . 93 Grammaire Les discours rapportés . . . . . . . . . 94 Lexique Les mots du… rêve . . . . . . . . . . . . 94
Le thème du rêve dans la poésie de la Renaissance au XVIIIe siècle . . 95 VERS LE BAC
◗ Commentaire . . . . . . . . . . . . . . . 95 LECTURE CURSIVE Jean de la Fontaine, Fables, second recueil, Livres VII à XI, 1679 . . . . . . . . 96
Carnet de lecture
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0
D’autres lectures au choix . . . . . . . . . . . . . . . 97
1
Marie de France, Lais, XIIe siècle Joseph Bédier, Le Roman de Tristan et Iseult, 1900 Robert Desnos, Destinée arbitraire, 1944 Christian Garcin, Vidas suivi de Vies volées, 1993
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Sommaire Sommaire9 9
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LECTURE OBJET D’ÉTUDE
7
4
PARCOURS D’ŒUVRE
ee siècleeau eXVII Le Lethéâtre théâtre théâtre du XXI XXIee siècle siècle Le dudu XVIIXVII sièclesiècle au XXI au siècle PARCOURS CHRONOLOGIQUE
Beaumarchais, Le Barbier de Séville ou la Précaution inutile (1775) . . . . . . .100
Contexte : Qui est Beaumarchais ? . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 101 Un théâtre en liberté . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 101
Peut-on affirmer sa liberté en s’amusant ?
2 La calomnie (acte II, scène 8) . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 102
❯
William Hogarth, Représentation de « L’Empereur indien ou la Conquête de Mexico » de John Dryden, 1732 1 Des retrouvailles (acte I, scènes 1 et 2) . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 101 3 Une arrivée inopportune (acte III, scène 11) . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 103 4 Le triomphe de l’amour (acte IV, scène 8) . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 104 LECTURES COMPLÉMENTAIRES 5 Plaute, Le Soldat fanfaron (acte II, scène 1), 254-184 av. J.-C. Écho de l’Antiquité . . . . . . 104 6 Molière, L’École des femmes (acte II, scène 5), 1662 Écho du xviie siècle . . . . . . . . . . . 105 7 Beaumarchais, Le Mariage de Figaro (acte I, scène 1), 1784 Écho du xviiie siècle . . . . . 105 8 Carlo Goldoni, Les Rustres, 1760 Écho du xviiie siècle . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 105 9 Victor Hugo, Ruy Blas (acte III, scène 5), 1838 Écho du xixe siècle . . . . . . . . . . . . . . . 106 10 Joël Pommerat, Cendrillon (Première partie, scène 10), 2011 Écho contemporain . . . . 106
8
PARCOURS D’ŒUVRE
Jean Cocteau, La Machine infernale (1934) . . . . . . . . . . . . . . . .112 ❯
Peut-on être maître de son destin ?
PARCOURS CHRONOLOGIQUE
Contexte : Qui est Jean Cocteau ? . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 113 La réécriture d’un mythe . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 113 1 L’ouverture (acte I, Ouverture) . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 114 2 Le fantôme de Laïus (acte I) . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 114 3 La rencontre avec le Sphinx (acte II) . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 115 Fernand Khnopff, Des Caresses, l’Art ou le Sphinx, 1896
. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 116
4 La révélation finale (acte IV) . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 116 LECTURES COMPLÉMENTAIRES 5 Sénèque, Œdipe, vers 63-64 apr. J.-C. Écho de l’Antiquité . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 117 6 William Shakespeare, Hamlet (acte I, scène 1), 1603 Écho étranger . . . . . . . . . . . . . . 118 7 Pierre Corneille, Œdipe (acte I, scène 3), 1659 Écho du xviie siècle . . . . . . . . . . . . . . . 118 8 Johann Wolfgang von Goethe, Faust, 1808 Écho étranger . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 119 9 Jean Anouilh, Antigone, 1944 Écho du xxe siècle . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 119 10 Jean-Luc Lagarce, Juste la fin du monde, 1990 Écho contemporain . . . . . . . . . . . . . . 119
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PROLONGEMENT
artistique et culturel
Mettre en scène un élément du décor : la jalousie . . . . . . . . . . 106
ATELIER Langue & Expression
FICHE DE SYNTHÈSE
ORAL
Sujet : Rédiger la note d’intention d’une scène et la jouer . . . . . . . . 107
Le Barbier de Séville à l’opéra : étude de la scène de la calomnie. . . . . . . . . . . . . . . . 107
Grammaire Les types de phrases Les formes de phrase . . . . . . . . . 108
Étude d’une œuvre Le Barbier de Séville par Coline Serreau, 2012
Lexique Les mots de… la voix et du chant 108
La comédie du XVIIe siècle au XXIe siècle . . . . . . . . . . . . . . . . 109 VERS LE BAC
◗ Dissertation . . . . . . . . . . . . . . . 109 LECTURE CURSIVE William Shakespeare, La Nuit des rois, 1601 . . . . . . . . . . . 110
Carnet de lecture
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3 3
La représentation du surnaturel chez Cocteau . . . . . . . . . . . . . . . . . . 120
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6
De la machine théâtrale au cinéma . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 121 Étude d’œuvres Jean Cocteau, La Belle et la Bête, 1946, Le Testament d’Orphée, 1960
7
ÉCRIT
FICHE DE SYNTHÈSE
Sujet : Comparer deux scènes d’exposition dont l’une est à la source de l’autre. . . . . . . . . . 122 Grammaire L’expression de la comparaison . . 122 Lexique Les mots du… tragique . . . . . . . . 122
La tragédie du XVIIe siècle au XXIe siècle . . . . . . . . . . . . . . . . 123 VERS LE BAC
◗ Dissertation . . . . . . . . . . . . . . . 123 LECTURE CURSIVE Sophocle, Œdipe roi, vers 430 av. J.-C. . . . . . . . . . . . . . . 124
Carnet de lecture
8
8
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D’autres lectures au choix . . . . . . . . . . . . . . 125
9
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Pierre Corneille, Médée, 1635 Molière, Les Fourberies de Scapin, 1671 Georges Feydeau, Un fil à la patte, 1894 Joël Pommerat, Cendrillon, 2011 Sommaire Sommaire11 11
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Partie 2 > Étude de la langue Grammaire
11 L’expression du but . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 140
1 Le langage, la langue et l’énonciation. . . . . . . 128 3 Les accords dans le groupe nominal . . . . . . . . 129
14 L’expression de la comparaison . . . . . . . . . . . . 141 15 L’expression de l’opposition et de la concession . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 142
4 Les accords entre le sujet et le verbe . . . . . . . 130 5 La valeur des temps . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 131 6 La concordance des temps . . . . . . . . . . . . . . . 132 7 Les types et les formes de phrases, la ponctuation . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 133
Lexique
8 Les phrases simples et les phrases complexes . 134
16 L’histoire des mots . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 143
9 Les propositions subordonnées relatives. . . . . 136
17 La construction des mots. . . . . . . . . . . . . . . . . 144
10 L’expression de la condition . . . . . . . . . . . . . . 137
18 Les relations lexicales. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 145
11 L’expression de la cause . . . . . . . . . . . . . . . . . 138
19 Les synonymes et le mot juste. . . . . . . . . . . . . 146
12 L’expression de la conséquence . . . . . . . . . . . 139
Partie 3 > Outils d’analyse La stylistique
Les genres
20 Les figures d’analogie et de substitution. . . . . 148 22 Les figures d’opposition . . . . . . . . . . . . . . . . . 151
31 Le narrateur et les points de vue . . . . . . . . . . . 161 32 Les paroles rapportées et le monologue intérieur . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 162
23 Les figures de construction . . . . . . . . . . . . . . . 153
33 La caractérisation du personnage . . . . . . . . . . 163
24 Nuancer son propos : la modalisation . . . . . . . 154
34 Le temps dans le récit . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 165
21 Les figures d’amplification et d’atténuation . . 149
35 L’espace dans le récit. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 166 36 Le texte et la représentation théâtrale . . . . . . 167 37 L’action au théâtre . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 168
Les tonalités 25 Les tonalités . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 155 26 La tonalité épique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 156 27 Les tonalités pathétique et tragique . . . . . . . . 157 28 La tonalité comique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 158 29 Les tonalités satirique et polémique . . . . . . . . 159 30 La tonalité lyrique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 160
38 La parole théâtrale. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 169 39 La versification . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 170 40 Les formes fixes . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 170 41 Poésie et musique : les rythmes et les sonorités. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 171 42 Les formes de l’argumentation . . . . . . . . . . . . 172 43 Les conditions et le contenu de l’argumentation . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 173 44 La stratégie argumentative : convaincre et persuader. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 174
Sommaire 12 12Sommaire
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OBJET D’ÉTUDE 1 Le roman et le récit du xviiie siècle au xxie siècle
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OBJET D’ÉTUDE
0 1
Le roman et le récit du xviiie siècle au xxie siècle > Les attendus des nouveaux programmes
contexte culturel, littéraire et plus largement artistique. En
Cette séquence se veut être en accord avec les nouveaux programmes en articulant une œuvre patrimoniale, son
outre, l’appropriation de l’œuvre est engagée par la com-
SÉQUENCE
1
Émile Zola, La Bête Humaine (1890)
Présentation de la séquence > La problématique Le désir rend-il inhumain ? La problématique se veut résolument concrète dans le but que les élèves puissent se l’approprier à travers l’œuvre d’Émile Zola. Il s’agit de tisser les liens entre la question et les personnages, leur vécu et ce qui détermine ou non leurs choix. Bien-sûr cette approche des personnages leur permettra d’aborder l’histoire littéraire et notamment les enjeux et les limites du naturalisme. > Le parcours d’œuvre Le parcours d’œuvre suit avant tout les personnages et leur caractérisation dans l’œuvre. Elle permet aussi à l’élève de ne pas se perdre dans les intrigues multiples de l’œuvre. Ainsi, c’est autour de Jacques Lantier et de Séverine que se resserrent nos choix. L’incipit et l’explicit sont mis en exergue à la fin du parcours afin que l’élève puisse en voir toutes les spécificités à travers une lecture plus réflexive de l’œuvre permettant de saisir les intentions de Zola. > Les lectures complémentaires Les lectures complémentaires allant de 1678 à 2016 se veulent ouvertes. Elles sont liées à la problématique du désir et permettent d’envisager l’évolution du genre romanesque dans sa forme comme dans ses écarts avec la morale de chaque époque. > Le prolongement culturel et artistique Le prolongement culturel et artistique est conçu pour que l’élève parvienne à construire le contexte dans lequel Zola évolue lors de son écriture du roman. En outre, ce parcours offre la possibilité de suivre le regard de Zola en tant que critique d’art. Donnant suite à la lecture du roman, nous proposons à l’élève de s’interroger sur l’adaptation du roman par Jean Renoir. Il s’agit d’analyser les choix opérés par le réalisateur et d’observer la manière dont l’art cinématographique du xxe s. prolonge la question du naturalisme entreprise au xixe s.
14
préhension des textes et l’étude de la langue.
O U V E RT U R E
> pp. 16-17
> pp. 16-17
> Introduction L’introduction et la citation permettent de créer un horizon d’attente avant la lecture du roman. Quant au tableau de Caillebotte, il donne à voir la ville de Paris et plus précisément le quartier de l’Europe, près de la gare St Lazare tel que Zola a pu les voir. > Réponses aux questions 1. Les deux artistes s’intéressent très concrètement à la société de leur époque. Zola évoque très concrètement le train, le réseau ferroviaire qui s’étend dans la deuxième partie du xixe siècle et Caillebotte peint avec réalisme la ville donnant autant d’importance aux personnages qui vivent qu’au décor moderne en peignant les immeubles haussmanniens et le pont de L’Europe, et suggère la voir ferrée de la gare Saint Lazare. 2. Le tableau met en place des lignes obliques suivant la structure du pont. Sur le pont, les personnages se croisent. De face, les deux personnages habillés plus richement, certainement bourgeois ; de dos, un homme vêtu d’habits moins nobles tout comme l’homme accoudé. Ces mouvements opposés mettent en valeur l’opposition sociale. 3. La structure métallique du pont permet de donner une perspective au cadre. Cette profondeur met en valeur le boulevard et l’architecture haussmannienne. À cette profondeur, s’ajoute la perspective sociale et sociétale. Les personnages sont en mouvement sur le pont. Le seul qui n’est pas en mouvement est dans une posture contemplative, il semble regarder le(s) train(s) hors champ qui passe(nt). Un deuxième personnage accoudé au pont les regarde avec la même attention. Le train est donc étonnant et digne d’être admiré. Comme pour Zola, la ville et plus largement la société, est donc ici symbole de modernité, c’est-à-dire de mouvement perpétuel, de nouveauté. La structure métallique du pont fait écho au train.
1 • Le roman et le récit du xviiie siècle au xxie siècle
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G RO U P E M E N T D E T E X T E S
> pp. 18-29
CONTEXTE L’auteur et l’œuvre
> p. 18
> Qui est Émile Zola ? Cette biographie, non exhaustive, cherche à rendre à l’élève le parcours personnel et artistique de Zola lui permettant de tisser des liens entre le personnage et les thématiques du roman et plus largement le projet des Rougon-Macquart. > Les transformations sociales et économiques du xixe siècle Le contexte social et économique est exposé pour faire un lien direct avec le roman et tenter de reconstruire de manière concrète le décor du xixe s. Ainsi, le tableau de Claude Monet est un complément essentiel avec les informations de cette double page et lé réflexion mise en place à la page 17 avec le tableau de Caillebotte. La gare St Lazare, lieu symbolique essentiel du roman, est représentée sous un autre angle et avec une subjectivité toute impressionniste, contrastant avec celle de Caillebotte. > Carnet de lecture L’élève est amené à opérer une lecture active l’invitant à porter son regard sur la société du xixe s et/ou sur un personnage. Son carnet lui permettra de garder de trace de sa lecture afin de pouvoir s’approprier le roman mais aussi d’envisager une étude plus approfondie au travers d’un commentaire ou d’une dissertation. L’élève est invité à projeter sa subjectivité à travers celle de Monet. Le flou impressionniste, travaillant les couleurs par touches et mettant en valeur le mouvement, incite déjà l’élève à s’interroger sur l’action qui sera représentée à travers le récit. 1 Le projet de Zola
> p. 20
> Présentation de l’extrait La préface est proposée en amont du roman pour compléter les esquisses proposées dans les pages précédentes. Le texte est entouré et complété par l’arbre généalogique qui tend à donner l’ampleur du projet de Zola tout en permettant à l’élève d’anticiper la présentation du personnage principal. > Réponse aux questions S’engager dans le texte 1. L’élève peut faire le lien entre les personnages des Rougon-Macquart. Jacques Lantier a pour mère Gervaise. Il a deux frères : Claude Lantier et Etienne Lantier et une sœur : Anna Coupeau (Nana). C’est donc par la mère que la « fêlure héréditaire » se transmet. Gervaise, dans L’Assommoir, finit alcoolique et dans la déchéance. 2. On peut amener les élèves à traiter ce texte comme un texte argumentatif et envisager cette question comme une contraction. La famille Rougon-Macquart sera symbolique d’une société qui se développe afin de montrer les effets de l’hérédité, de la transmission…
3. Il s’agit ici de vérifier la reconnaissance des verbes notamment auprès les élèves les plus en difficultés et de revoir les temps verbaux et leurs valeurs. Relevé des verbes Veux, me propose se comporte, paraissent, conduit, se rue, sont, se déclarent, déterminent, prennent, partent, s’irradient, montent, reçoivent, racontent xxx Verbes au futur Tâcherai, tiendrai, j’aurai, ferai, créerai, j’analyserai Verbes au s’épanouissant, en participe présent résolvant, Temps verbal Verbes au présent
Valeurs D’énonciation De vérité générale
Narration
Interpréter 4. L’élève se place alors dans une posture réflexive tout en se mettant dans la peau de l’auteur. L’élève envisagera les contraintes de fond suggérées par Zola dans sa préface (en complément du contexte donné aux pages précédentes) : la famille, l’hérédité et la transmission, les tempéraments, les liens entre les personnages, le déterminisme au sein de la famille et de la société, le Second Empire (faits historiques : Coup d’État / Défaite de Sedan). On pourra alors inciter l’élève à chercher des contraintes d’écriture sur la forme : temps du récit (imparfait, passé simple, plus-que parfait…), description des lieux, de contexte historique et des personnages, temps du dialogue (présent, passé composé, imparfait…), la ou les intrigues, le contexte social ou politique, la parlure et les niveaux de langue des personnages selon leur classe sociale… 2 Le portrait de Jacques Lantier
> p. 21
> Présentation de l’extrait Jacques Lantier est immédiatement saisi dans la première scène du roman dans une pulsion. Cet extrait suit donc logiquement la préface de Zola et permet d’analyser le portrait du personnage issu des Rougon-Macquart. > Lire en écho L’extrait de La Princesse de Clèves Mme de La Fayette permet de donner un écho aux sentiments du personnage romanesque. L’extrait des Particules élémentaires de Michel Houellebecq donne à voir la notion d’hérédité et notamment du manque de désir d’enfant. > Réponse aux questions S’engager dans le texte 1. Si la présence du narrateur comme élément extérieur à l’histoire est évidente avec l’usage de la 3e personne du singulier, dès la deuxième phrase, Zola opère un glissement. Le point de vue est interne. 1 • Émile Zola, La Bête Humaine (1890)
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2. Le lecteur a donc accès aux sentiments, aux questionnements et aux doutes de Jacques Lantier renforçant alors son lien avec lui. Le lecteur est amené par Zola à tisser du lien avec le personnage pour mieux s’interroger sur son comportement. Interpréter [Sa mère Gervaise, [il est vrai], l’avait eu très jeune, à quinze ans et demi] ; [mais il n’arrivait que le second], [elle entrait à peine dans sa quatorzième année], [lorsqu’elle était accouchée du premier, Claude] ; [et aucun de ses deux frères, ni Claude, ni Étienne, né plus tard, ne semblait souffrir d’une mère si enfant et d’un père gamin comme elle, ce beau Lantier], [dont le mauvais cœur devait coûter à Gervaise tant de larmes]. 3. Cette phrase est complexe car elle contient plusieurs verbes conjugués. On pourrait faire observer aux élèves l’enchainement des diverses propositions : juxtaposées, coordonnées et subordonnées. En une phrase, Zola retrace la généalogie de Jacques Lantier tout en y insérant déjà une incise « il est vrai » pleine de subjectivité. 4. Les élèves sont incités à définir le mot « fêlure » dans son contexte et à partir de son sens concret. Passant par glissement, au sens abstrait, ils pourront percevoir la métaphore s’appliquant à la famille et par conséquent à Jacques. Le mot est à mettre en regard avec la préface qui installe le terme « héréditaire » pour comprendre la transmission de cette cassure. VERS LE BAC ÉCRIT > Commentaire
1. Comment le portrait de Lantier s’inscrit-il dans un contexte familial ? – Il s’inscrit tout d’abord par la recherche d’une opposition (« Pourtant » l.1) et par le questionnement (l.2-3). – Puis la suite de l’extrait l’inscrit comme par fatalité dans la généalogie familiale. Il est porteur de la « fêlure héréditaire ». – Jacques est conscient de cette fêlure, il passe d’ailleurs en revue lui-même sa famille, les symptômes de cette fêlure, ses propres interdits et son analyse. 2. Qu’apporte le discours intérieur du personnage à la narration et au projet de Zola ? – Zola écrit ce portrait en utilisant le discours indirect libre mêlé au monologue intérieur et au discours indirect. – Ces choix de narration permettent de présenter le personnage sous un aspect plus intime rapprochant ainsi le lecteur du personnage. Il atténue la dimension morale au profit de la tonalité pathétique. – Quittant une simple approche scientifique, Zola peut élargir son projet en le rendant pleinement artistique. Il réfléchir à l’humain dans toutes ses complexités sans se contenter d’une vision, scientifique, morale ou réaliste. > Carnet de lecture Cette proposition d’écriture peut permettre à l’élève de se mettre à la place du personnage tout en déployant le lexique associé aux sentiments de doute, d’angoisse, de folie… Cet écrit peut être à la 3e personne du singulier pour s’approcher
16
de l’écriture de Zola ou à la 1re personne. L’objectif est d’opérer une appropriation du personnage puis du texte. 3 La mort de Lison
> p. 22
> Présentation de l’extrait Après Jacques, le deuxième personnage principal est peutêtre cet objet de désir si fiable et si fascinant : La Lison. L’image tragique de la locomotive en train de mourir, entourée des personnages principaux de l’intrigue, est marqué par la tension dramatique et met à jour la complexité de l’écriture de Zola. Ce déraillement peut aussi préfigurer la fin du roman. > Lire en écho L’extrait de Belle du Seigneur d’Albert Cohen peut être relié à la mort de la Lison par les sentiments ambivalents qu’ils mettent en exergue chez chacun des personnages. Quant à l’extrait de L’Amant de Marguerite Duras, il peut être comparé à ce passage par les expressions variées du désir. > Les mots de… Relevé : « s’est montrée rétive » (l.44), « sa maladie » (l.44), « sa faute » (l.45), « moins alerte » (l.45), « les membres » (l.46), « blessée à mort » (l.47), « agonie » (l.48), « la pauvre Lison » (l.48), « souffle » (l.49), « flancs ouverts » (l.50), « petite plainte d’enfant qui pleure » (l.51), « bave » (l.51), « vautrée sur le dos » (l.52), « entrailles crevées » (l.54), « ses organes » (l.55), « battre comme deux cœurs jumeaux » (l.55), « comme le sang dans ses veines » (l.56), « pareilles à des bras convulsifs » (l. 56-57), « les révoltes dernières de la vie », « son âme s’en allait » (l.58), « cette haleine immense » (l.59), « éventrée s’apaisa […] s’endormit » (l.60), « Elle était morte » (l. 61), « membres » (l.62), « organes meurtris » (l.63), « l’affreuse tristesse d’un cadavre humain » (l. 63-64), « dernier petit souffle » (l.68). Cette métaphore filée apporte une autre dimension au texte de Zola. Il s’écarte du réalisme au profit du fantastique. Il met au cœur de son récit la machine en tant que préfiguration de la chute de la société, se détournant alors de la connotation méliorative du progrès. > Réponse aux questions S’engager dans le texte 1. L’élève est incité à se faire une représentation mentale de la scène qui est très visuelle. Il s’agit de percevoir la démesure des portraits de Flore et de la Lison et la position de retrait de Séverine. La Lison devient définitivement un personnage par les éléments qui construisent la personnification. Ce personnage prend de l’ampleur par la dimension symbolique qu’elle atteint dans cet épisode. Interpréter 2. Relevé des détails et du vocabulaire technique : Zola fait entrer le lecteur par une description aux accents réalistes propres au domaine ferroviaire. 3. Zola met en valeur la tristesse, la pitié, la souffrance et le courage. Ainsi on peut les associer aux tonalités pathétique, tragique mais aussi épique.
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VERS LE BAC ÉCRIT > Commentaire
I – Comment cette scène de catastrophe aux abords réalistes devient-elle pathétique ? – Une scène réaliste par la description qui peut ressembler à un accident réel et les éléments techniques mentionnés. – Une scène qui donne une large place aux émotions : Les émotions de Flore qui tente de sauver Jacques et le désespoir de Jacques qui voit « mourir » sa locomotive. II – Comment la mort de la Lison se transforme-t-elle en récit épique et fantastique ? – Flore sauve Jacques en le retirant des décombres à elle seule. Elle montre une force surhumaine prend les atours d’un personnage héroïque. – La Lison personnifiée meurt en héroïne, telle une bête, dans d’atroces souffrance après un long combat. > Carnet de lecture L’élève est amené à reconstituer le contexte. Le train se développe, son réseau s’étend et il est synonyme de modernisation de la société. Cependant, s’il peut susciter l’admiration voire la fascination, il peut aussi susciter le rejet. 4 Le rêve de Séverine
> p. 24
> Présentation de l’extrait Cet extrait permet de suivre le développement du personnage de Séverine et approfondir son approche. Sur le plan narratif, il permet d’étudier la présence du narrateur, le point de vue interne et le discours direct et indirect libre. > Lire en écho L’extrait de Belle du Seigneur d’Albert Cohen permet d’entrer dans l’intériorité du personnage par le truchement de la voix du narrateur. > Réponse aux questions S’engager dans le texte 1. Le dialogue des deux amants est choquant car leur conversation porte sur leur bonheur qui dépend de la mort de Roubaud. Interpréter 2. L’imparfait est le temps du récit, de la description mais la particularité du temps verbal dans cet extrait réside dans son association au conditionnel. L’action est imaginée sous la seule condition que Roubaud est mort. Malgré la troisième personne du singulier, ces temps nous permettent d’accéder aux pensées du personnage. « Elle retombait dans cette imagination, la corrigeait, l’élargissait » (l.10) est la phrase symbolique de ce passage. 3. L’image des paquebots présente dans le texte et dans le tableau de Pissaro symbolise l’état d’esprit de Séverine toute à son imagination : son rêve de départ, sa projection dans une vie loin du viol de Grandmorin, du meurtre de celui-ci, de la déchéance de Roubaud et de l’illégitimité de son couple avec Jacques Lantier. 4. Zola privilégie les phrases déclaratives et affirmatives dans cet extrait. De plus, la forme active rend Séverine actrice de sa rêverie mettant en valeur cruellement son déterminisme hors de cette rêverie. L’ensemble du passage fonc-
tionne par expansion. Si la première phrase est simple, l’ensemble du passage du récit est constitué de phrases complexes. L’interjection « Oh ! » annonce le dialogue qui suit, et est repris écho à la ligne 42. La phrase interrogative est attribuée à Jacques qui ne connait rien des plans imaginés par Séverine. Les propos de Séverine sont ponctués de points d’exclamation, marques de ses émotions, son envie de partir avec Jacques. VERS LE BAC ÉCRIT > Dissertation
Le sujet permet de recenser avec les élèves les personnages, leurs caractéristiques, l’ensemble des épisodes qui relèvent de la moralité et de l’immoralité afin d’ouvrir vers une réflexion plus large sur la société et le déterminisme génétique et/ ou social. I – Des personnages en quête de moralité : Flore, Jacques qui résiste à ses pulsions… II – Des personnages immoraux : Grandmorin, les juges, Séverine et Roubaud qui tuent Grandmorin… III – Réflexion de Zola sur la difficile moralité de la société du xixe s. => Portrait pessimiste de la société conditionnée par le déterminisme. > Écrit d’appropriation L’élève est invité à s’inspirer de cet extrait pour mettre en œuvre le discours indirect libre. On pourra aussi proposer des manipulations en passant du discours direct au direct indirect puis au discours indirect libre. 5 Le suicide de Flore
> p. 26
> Présentation de l’extrait Flore peut apparaître comme une figurale spectrale, une amazone, une « vierge » ou une « guerrière » (l. 6). On pourrait faire le lien entre cet extrait et celui de la mort de la Lison dans lequel Flore apparait déjà comme une figure héroïque et surhumaine. > Lire en écho 1. L’extrait de La Princesse de Clèves de Mme de La Fayette peut faire écho à Flore dans la description des personnages féminins et à leur caractère extraordinaire. > Réponse aux questions S’engager dans le texte 2. La mort de Flore peut susciter la tristesse, la pitié, la compassion mais aussi l’admiration. On peut alors relier ces sentiments aux tonalités pathétique, tragique, épique. 3. Ce passage commence par une phrase exclamative suivie d’une phrase déclarative puis une phrase interrogative. Ces phrases empreintes des émotions ressenties par Flore sont l’indice du discours indirect libre. Zola fait donc entendre la voix de Flore. Il conserve une ponctuation expressive mais n’alourdit pas les structures en enlevant la subordination attendue des paroles rapportées indirectement. Le lecteur atteint quasiment la conscience du personnage.
1 • Émile Zola, La Bête Humaine (1890)
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Interpréter 4. Flore choisit dans cet extrait d’affronter la mort. Zola crée une mise en scène avec la métaphore du cheminement vers la mort. Le personnage est pourvu de qualités morales et physiques extraordinaires : « elle avait besoin de marcher jusqu’au bout, de mourir toute droite, par un instinct de vierge et de guerrière » (l.5-6), « Redressée dans sa haute taille souple de statue, balancée sur ces fortes jambes » (l. 11-12). Il est perçu en mouvement : « cheminerait » (l.2), « elle avançait maintenant d’un pas allongé » (l.12), « sans cesser sa marche d’obstination héroïque » (l.18), « elle marchait toujours, elle se dirigeait droit à cette fournaise » (l.25), « Et dans l’épouvantable choc, dans l’embrassade, elle se redressa encore » (l.27-28). Ces derniers mouvements apparaissent particulièrement hors normes et épiques : « dernière révolte de lutteuse » (l.28), « elle eût voulu éteindre le colosse, et le terrasser. » (l. 29) . VERS LE BAC ÉCRIT > Dissertation
I – L’écriture naturaliste propose « une reproduction exacte de la vie » (Zola, Les Romanciers naturalistes, 1881) – Une écriture aux approches scientifiques (ex : Intérêt de Zola pour la question de l’hérédité, du déterminisme…) – Une écriture ancrée dans le réel (ex : description de la gare Saint Lazare) – Une écriture qui se veut reproduire les comportements humains (ex : Jacques et ses pulsions, Séverine et ses envies, Roubaud et sa violence, Grandmorin violeur, l’injustice des juges…) – Une écriture qui veut dépeindre une époque historique (ex : ancrage dans les changements du Second Empire, la société bourgeoise, l’expansion du réseau ferroviaire…) II – Zola propose une écriture originale – Zola ou l’art du mouvement : l’écriture n’est pas figée (ex : l’incipit et le lien avec la peinture impressionniste) – Les descriptions sortent du réalisme pour plonger le lecteur dans le fantastique (ex : la mort de la Lison et le suicide de Flore.) – De la déformation de la réalité à la sublimation : la tonalité épique du roman (ex : Le portrait de Flore se suicidant) – Zola donne à voir la société grâce à sa subjectivité : la tragédie donne un caractère pessimiste à cette période et le progrès n’est pas enjolivé (ex : explicit). 6 Le meurtre de Séverine
> p. 27
> Présentation de l’extrait Cet extrait illustre l’impossibilité de Jacques de contrôler ses pulsions, la soumission à la « fêlure héréditaire » et le déterminisme dont il est victime. Cette scène permet aussi de constater que Zola ne cherche pas à respecter la bienséance mais plutôt à mettre en scène ce meurtre de manière crue tant par la description que par l’accès aux sentiments du meurtrier. > Lire en écho L’extrait de La Cheffe, roman d’une cuisinière de Marie NDiaye entre en résonance avec le meurtre de Séverine par les dimensions psychologique et corporelle que les auteurs
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explorent. On pourra aussi comparer les points de vue choisis par chaque auteur. > Réponse aux questions S’engager dans le texte 1. Il s’agit d’inciter l’élève à résumer sa lecture et/ou son impression en une phrase. 2. Cet extrait peut susciter la gêne, le dégoût, la stupéfaction tant pour la description du lieu et du corps que pour la réaction et les sentiments choquants de Jacques. Interpréter 3. Immobile, Jacques maintenant la regardait, allongée à ses pieds, devant le lit. Le train se perdait au loin, il la regardait dans le lourd silence de la chambre rouge. Au milieu de ces tentures rouges, de ces rideaux rouges, par terre, elle saignait beaucoup, d’un flot rouge qui ruisselait entre les seins, s’épandait sur le ventre, jusqu’à une cuisse, d’où il retombait en grosses gouttes sur le parquet. La chemise, à moitié fendue, en était trempée. Jamais il n’aurait cru qu’elle avait tant de sang. Et ce qui le retenait, hanté, c’était le masque d’abominable terreur que prenait, dans la mort, cette face de femme jolie, douce, si docile. Les cheveux noirs s’étaient dressés, un casque d’horreur, sombre comme la nuit. Les yeux de pervenche, élargis démesurément, questionnaient encore, éperdus, terrifiés du mystère. Pourquoi, pourquoi l’avait-il assassinée ? Et elle venait d’être broyée, emportée dans la fatalité du meurtre, en inconsciente que la vie avait roulée de la boue dans le sang, tendre et innocente quand même, sans qu’elle eût jamais compris. Mais Jacques s’étonna. Il entendait un reniflement de bête, grognement de sanglier, rugissement de lion ; et il se tranquillisa, c’était lui qui soufflait. Enfin, enfin ! il s’était donc contenté, il avait tué ! Oui, il avait fait ça. Une joie effrénée, une jouissance énorme le soulevait, dans la pleine satisfaction de l’éternel désir. Il en éprouvait une surprise d’orgueil, un grandissement de sa souveraineté de mâle. La femme, il l’avait tuée, il la possédait, comme il désirait depuis si longtemps la posséder, tout entière, jusqu’à l’anéantir. Elle n’était plus, elle ne serait jamais plus à personne. Jacques correspond à l’image de l’homme incontrôlable, tel un animal, qui annihile ses caractéristiques d’humain, qui réduit l’homme à son hérédité impossible à annuler malgré une lutte perpétuelle. Le meurtre apparait comme un accomplissement de la fatalité. Séverine revêt l’image de la femme fragile victime d’une fatalité annoncée depuis le début du roman et qu’elle n’aura pas comprise. Adjectifs et compléments de noms sont accumulés en cascades comme les touches de pinceau du peintre qui nuance son portrait pour le rendre plus vivant, plus saisissant, plus réaliste et complexe. 4. Zola donne à voir cette scène afin de démontrer le déterminisme qui soumet Jacques. Il peint une scène de meurtre à la fois réaliste et subjective. Zola veut certainement confronter son lecteur à la violence telle qu’elle peut exister tout en le faisant réfléchir la puissance et la fragilité de l’humain.
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La scène est-elle choquante ? Pourquoi ? La scène est choquante pour différentes raisons : – Elle expose le corps inerte et en sang de Séverine. – Le décor est aussi rouge que le sang de Séverine et semble recouvrir toute la pièce. – Zola fait entendre les pensées de Jacques, satisfait et surpris en utilisant le discours indirect libre. Quelle réflexion sur l’être humain Zola propose-t-il ? – La réflexion de Zola est avant tout réaliste. Elle propose au lecteur de se rapprocher des personnages (victime et bourreau) – Zola propose à son lecteur de réfléchir sur le déterminisme dans notre société. Le déterminisme peut être biologique via l’hérédité (famille Rougon-Macquart) mais aussi social (le juge a déterminé un coupable du meurtre de Grandmorin sachant que Roubaud et Séverine étaient coupables). – Zola propose aussi, en creux, une réflexion sur ce que peut dire ou montrer la littérature. Ainsi, il démonter toute l’utilité de la littérature dans l’approche de l’homme et de la société. Zola prend en compte l’homme dans sa dimension sociale et sociétale. > Carnet de lecture Si la lithographie de Kirchner donne une représentation cubiste de la scène, en plongée, il sera intéressant de confronter l’élève aux choix qu’il opérerait dans sa mise en scène. La scène de Zola part du décor, se concentre sur le corps de Séverine ensanglanté pour aboutir sur les sentiments de Lantier. Comment rendre ce mouvement littéraire ? Quels plans adoptés ? Quels mouvements ? 7 Le cheminement du roman (incipit)
> p. 28
> Présentation de l’extrait L’incipit est présenté en fin de parcours afin d’accentuer l’acuité de l’élève sur la volonté de Zola. En effet, il s’agit ici d’un incipit qui surprendra par l’absence de Jacques et la valorisation du lieu : la gare Saint Lazare. > Lire en écho L’extrait de Manon Lescaut de L’abbé Prévost est à lire en écho de l’incipit car les deux textes s’appuient sur l’implicite mis en place par les auteurs. S’engager dans le texte
références à la gare Saint Lazare. En effet, le tableau semble assez flou relevant plus de l’impression que de la précision réaliste. 4. La menace apparait de manière implicite, par touche, au cœur du tableau de Zola. L’une des premières notes de menace se trouve dans la grisaille « ciel gis du milieu de février » (l.), renforcé par un brouillage « poudroiement » (l.), « enfumés » (l.), « les branches […] allaient se perdre » (l.), puis les mentions des « tranchées » (qui peuvent faire écho à l’explicit) et enfin le « grand signal rouge tachait le jour pâle » peut être lu rétrospectivement comme le sang (référence aux meurtres du roman et à la guerre franco-prussienne mentionnée à la fin du roman). VERS LE BAC ÉCRIT > Dissertation
Il s’agira ici de traiter la présence de l’auteur et du narrateur dans le récit. On pourra avoir un regard rétrospectif sur les précédents extraits et les points de vue mis en jeu. I – Une approche de la réalité et une distance en apparence – Ancrage dans le réel (Lieux / Catégories sociales…) – Des personnages sous toutes les facettes (narrateur dans les pensées des personnages) II – Intrusion de l’auteur ou « le metteur en scène caché du drame » – Des descriptions révélatrices (Jeu de l’implicite, subjectivité…) – Le jeu des paroles rapportées entre discours direct, indirect et indirect libre – Un roman comme jeu de pistes orchestré III – Un auteur intéressé qui cherche à… – Choquer son lecteur – Faire réfléchir – Créer un projet dans un style unique 8 Explicit
> p. 29
> Présentation de l’extrait La dernière page du roman met en scène le « train fou » qui devient le symbole de la société entraînée dans la folie de l’industrialisation et de la guerre. Les autres personnages ont disparu et l’explicit montre le caractère épique, prophétique du roman de Zola.
1. En ce début de roman, nous nous attendrions à une description de personnage, la mise en place d’une intrigue. Cependant, Zola donne à voir un lieu : une chambre modeste, dans la gare Saint Lazare, dans le quartier de l’Europe à Paris.
> Lire en écho Le roman d’Albert Cohen annonce lui aussi, avec la lente dissolution de la passion, les ravages de la guerre à venir.
2. Le personnage est présenté par son nom de famille, Roubaud (l.1) et sa fonction sociale, sous-chef de gare (l.4). Il n’y a ni description physique, ni description morale. Il est placé dans un cadre et sert de regard pour observer l’extérieur.
1. La dernière phrase est construite d’une manière particulière : la proposition principale, très courte et répétée : « elle roulait, elle roulait » est encadrée par des compléments qui caractérise le sujet « elle », la bête humaine … La phrase est donc complexe et devra être lue plusieurs fois. Plusieurs mots importants peuvent arrêter les élèves, l’expression « sans conducteur » qui prend une signification symbolique et dit la course folle du monde. Le mot « ténèbres », qui donne au texte une signification symbolique : il ne s’agit
Interpréter 3. Les notations dédiées au mouvement, à la lumière et aux couleurs sont nombreuses. Elles n’offrent toutefois pas une description très précise bien les indications spatiales fassent
S’engager dans le texte
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plus de la nuit mais des « ténèbres » et le train est devenu un monstre de l’Enfer. Enfin, le dernier mot « chantaient », qui forme la chute de la phrase est, par son contraste avec ce qui précède, très violent : l’aveuglement des hommes, « chair à canon », qui courent à leur perte, à la mort, en chantant. Interpréter 2. Le personnage principal est la machine, nommée aux lignes 2 et 3 : « ce train fou ». Les autres personnages présents disparaissent dans une indétermination : métonymies (« la gare, le cri, … », verbes au passif « put être refoulé », pronom indéfini (cf. question 3), pluriel (« les employés ». Seul le train est véritablement agissant et individualisé. Il est présenté comme un monstre mythologique : masculin d’abord puis féminin à la fin du texte, animalisé (« galop », « sanglier »). La machine est une force « aveugle et sourde » et sa course la conduit vers la mort, « on ne savait où, là-bas ». 3. Le mot on est un pronom sujet indéfini. Il peut être utilisé pour toutes les personnes et prend des sens différents selon les moments du texte. À la première ligne le « on » désigne le train et ses chauffeurs disparus. Ligne 10, ce sont les employés de la gare de Rouen. À partir de la ligne 20 « on » désigne la foule terrifiée qui assiste au passage du train. Ligne 29 il s’agit d’une forme d discours indirect libre qui reprend l’expression orale « on ne sait où ». le « on » s’élargit davantage pour associer le lecteur aux spectateurs de cette course. Enfin, ligne 32, le pronom devient plus ambigu encore : qui a « lâché » cette bête : les mécaniciens, la société industrielle, les hommes avides, l’humanité tout entière ? VERS LE BAC ORAL > Entretien
Les travaux d’enquête menés par Zola témoignent de sa fascination pour l’univers ferroviaire. Comme beaucoup d’artistes de son époque (cf Prolongement artistique pp. 36-37) il découvre avec curiosité et enthousiasme ces architectures nouvelles. Il écrit en 1860 (lettre à J-B Baille « ce qui caractérise notre temps, c’est cette fougue, c’est cette activité dévorante (…) ». Les descriptions que fait Zola de la gare Saint Lazare, comme les tableaux de Manet ou de Monet donne à voir ces beautés nouvelles. Cependant, dans toute l’œuvre, le train est aussi l’image de la violence et représente un danger. De nombreux passages du roman peuvent le montrer et notamment ceux qui associent le passage du train aux crimes commis par les personnages.
Lectures complémentaires
9 Mme de La Fayette, La Princesse de Clèves (1678)
> p. 30-35
> p. 30
> Présentation de l’œuvre et de l’extrait Le roman de Madame de La Fayette décrit un univers bien différent de La Bête humaine. La Cour et son jeu social emprisonnent les désirs et les sentiments.
20
> Lire en écho 1. La rencontre entre M. de Nemours et Mme de Clèves est très mise en scène : après l’arrivée de la jeune-fille « parée », le duc fait une entrée théâtrale : annoncée par un « grand bruit » mais elle ne peut le voir. Le moment où ils se regardent est une « surprise » fulgurante, ce que permet de comprendre la succession des passé-simples : « Elle se tourna et vit un homme (…) ». Les deux personnages sont présentés en miroir l’un de l’autre : ils ont tous deux passé du temps à se « parer », sont admirés par la foule et leur vue provoque pareillement l’étonnement. 2. Le pronom « on » présent à la ligne 3 et à la ligne 5 désigne la foule des invités présents au bal, ils observent Mme de Clèves et M. de Nemours et jouent un rôle important dans la scène. Après le « murmure de louanges » de la foule, ce sont le roi et les reines qui observent le couple (Ligne 20). C’est d’ailleurs le roi qui a crié à Mme De Clèves « de prendre celui qui arrivait ». À aucun moment les deux jeunes gens ne se parlent directement et même leur nom est prononcé par un tiers : la Reine dauphine. 3. La description des sentiments éprouvés est-elle aussi indirecte : le texte précise « il était difficile de n’être pas surprise de le voir quand on ne l’avait jamais vu ». Seule la marque du féminin indique qu’il s’agit là de ce que ressent la princesse et non d’une affirmation générale concernant l’admiration que suscite M. de Nemours à la Cour. De plus, la formule négative crée une litote et une ambiguïté dans la phrase. La litote, figure d’exagération, montre que la violence de l’émotion ressentie (un coup de foudre) se doit d’être camouflée par les conventions sociales et la bienséance. De plus l’expression « il était difficile de » ne dit pas si la princesse a ou n’a pas été « surprise », c’est au lecteur de comprendre l’implicite. Une proposition presque identique décrit en symétrie ce qu’éprouve M. de Nemours. À deux époques et avec deux écritures très différentes Mme de La Fayette et Zola disent le poids des conventions et l’impossible liberté des hommes déterminés par leur situation dans la société. 10 L’abbé Prévost, Manon Lescaut (1731)
> p. 31
> Présentation de l’œuvre et de l’extrait Des Grieux raconte son histoire et comment il fut entraîné par l’amour et Manon Lescaut est devenue dans la littérature l’image de ces femmes « fatales » qui mènent les innocents à la perdition… Pourtant, si l’on lit attentivement le récit de leur première rencontre on voit bien déjà comment la jeunefille se plie aux désirs de Des Grieux et comment son récit façonne un personnage de femme dangereuse. > Lire en écho 1. L’entrée en scène de Manon est annoncée, le lecteur sait que quelque chose de terrible « Hélas ! » ligne 2), va se produire. De plus, elle est la seule qui demeure dans la cour de l’hôtellerie. Enfin, la longue phrase des lignes 16 à 22 décrit la fulgurance du désir de Des Grieux : la proposition circonstancielle consécutive, introduite par « si charmante que … », n’est achevée qu’à la toute fin de la phrase « je me trouvai tout d’un coup … » ce qui crée un effet d’attente
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et met en valeur cette conclusion. On observe d’ailleurs les hyperboles : « si charmante, jamais, enflammé, transport » et la rapidité de la naissance du désir : « tout d’un coup ». L’adjectif « charmante » est sans doute à lire ici dans son sens premier : Manon charme le narrateur comme par magie. 2. Le narrateur confie son histoire à un homme plus âgé, Renoncour, qui rapporte lui-même ce récit dans ses Mémoires. Le lecteur sait que cette passion sera tragique et les commentaires du narrateur qui juge son comportement de l’époque montrent le caractère inéluctable de son malheur. La rencontre est présentée comme la perte de « l’innocence » de Des Grieux et il précise ligne 34 que « le penchant au plaisir de Manon sera la cause de tous « leurs malheurs ». On peut s’interroger d’ailleurs sur la phrase (ligne 32 à 35) dans laquelle il raconte avoir exprimé ses sentiments à Manon. Si la proposition « c’était malgré elle qu’on l’envoyait à Amiens » est bien du discours rapporté (DIL), Des Grieux retranscrit la réponse de Manon, on peut questionner la suite et le complément de but « pour arrêter sans doute son penchant au plaisir … ». Présentée comme l’explication, forcément ajoutée a posteriori par le narrateur, aux agissements de Manon elle n’est en fait qu’une interprétation. On voit bien avec cet exemple comment le narrateur reconstruit son passé pour mettre en scène son innocence. C’est bien lui pourtant qui persuade la jeune-fille, par son « éloquence », de ne pas aller au couvent. 3. La rencontre est, on l’a dit, fatale. Le désir conduit Des Grieux à aller contre ce qui aurait dû être son parcours : rentrer chez son père… Leur passion conduit les deux jeunes gens au vol, au crime et l’Histoire du chevalier Des Grieux et de Manon Lescaut est bien une enquête sur la démesure des passions et la faiblesse humaine, de ce point de vue on peut rapprocher ce roman de celui de Zola. 11 Albert Cohen, Belle du Seigneur (1968)
> p. 32
> Présentation de l’œuvre et de l’extrait Le roman d’Albert Cohen, grand récit de la passion amoureuse, est aussi une satire de la société bourgeoise de l’entre-deux guerres et des mascarades du pouvoir. Les deux amants enfin réunis étouffent à ne vivre que de leur passion et Albert Cohen décrit dans cet extrait les désillusions de la passion. Il en propose une vision sans idéal ; la violence de sa jalousie et de sa souffrance conduira d’ailleurs Solal à des brutalités terribles envers Ariane. > Lire en écho 1. Le texte décrit de manière cynique les « pauvres bonheurs » de la vie luxueuse que mènent Ariane et Solal. Celui-ci se dit « engagé pour de la passion » et condamné aux belles phrases et aux dîners « raffinés ». Le vide de cette existence de loisir et de plaisirs l’amène à désirer être un facteur, à pouvoir échapper au piège de la passion pour mener une simple vie de tendresse domestique. Le texte prend donc le contre-pied de ce qu’on pourrait considérer comme la vie rêvée de quelques privilégiés et souvent présentée comme telle dans les médias. 2. Dans La Bête Humaine, le désir conduit l’homme à une forme de sauvagerie de « loups mangeurs de femmes » (cf.
page 21), l’amour n’est jamais un refuge aux souffrances. Le personnage de Séverine est à cet égard très intéressant. À aucun moment la passion n’est transcendante. Le regard sans illusion que porte Cohen sur les sentiments des deux héros et les mots crus qu’il utilise pour évoquer cette passion factice que Solal croit devoir jouer peuvent rapprocher ce roman de celui de Zola ; tous deux décrivent des mondes sans idéal 3. Les amants légendaires de la littérature, comme Tristan et Yseut, eux aussi adultères, (cf. 162 à 165), n’épuisent jamais leur passion… on pourrait donc les opposer aux deux personnages de Belle du Seigneur. Cependant, c’est précisément parce que Solal et Ariane quittent l’univers lyrique de l’amour fou pour se retrouver dans la cruauté du réel (société méprisante et antisémite, menaces de la guerre, solitude des amants déclassés …) que leur amour se fissure ainsi. 12 Marguerite Duras, L’Amant (1984)
> p. 33
> Présentation de l’œuvre et de l’extrait Le plus lu des romans de Duras, L’Amant, fait le récit d’un amour interdit, entre une toute jeune fille et un riche Chinois de Saigon. On peut lire dans La Musica, deuxième la phrase suivante : « Écrire, aimer, je vois que cela se vit dans le même inconnu. Dans le même défi de la connaissance mise au désespoir. » Le désir apparaît dans ce texte comme une force de transgression et de liberté, intimement associée à la création et à l’écriture. > Lire en écho 1. Les deux personnages se découvrent progressivement : la succession des phrases et leur brièveté permet de comprendre les hésitations de « l’homme élégant ». Il la « regarde » à la ligne 2 et elle le « regarde » ligne 17. Le texte commence lorsque l’homme sort de sa voiture : à la fin de deuxième paragraphe les bagages de la jeune-fille sont mis « dans « l’auto noire » 2. L’Amant, récit autofictionnel, est autant une réécriture du passé qu’une manière pour l’auteure de revivre ce passé. Dans le roman, la première personne (« Quand je suis sur le bac du Mékong, le jour de la limousine noire … ») et la troisième personne (dans notre extrait « la jeune fille au feutre d’homme et aux chaussures d’or » », ligne 2) alternent. La même scène est racontée, par bribes qui se répètent, de l’intérieur ou vue de l’extérieur, photographiée, comme pour permettre aux figures de la très jeune-fille et de son amant de s’éloigner, de devenir absolument romanesques. 3. Le texte mêle différents discours rapportés (cf. Fiche page 356) : discours direct « (…) mais d’où venez-vous ? », indirect « Il dit qu’il revient de Paris… », indirect libre « Il lui dit que le chapeau lui va bien, très bien même, que c’est …original …un chapeau d’homme, pourquoi pas ? elle est si jolie, elle peut tout se permettre. ». Le récit fait ainsi entendre le dialogue des deux personnages, leurs silences et le lien qui se tisse entre eux. Le discours rapporté permet aussi l’écho dans le présent de cette scène, essentielle dans l’histoire de l’auteure. Comme dans le roman de Zola, le discours rapporté permet de faire entendre la voix des personnages 1 • Émile Zola, La Bête Humaine (1890)
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dans une forme d’authenticité (DD, DIL) « réaliste ». Cependant, l’écriture de Marguerite Duras joue ici sur la répétition, les leitmotive du désir et de la mémoire et le discours rapporté, par ces variations, participe de ce rythme singulier. 13 Michel Houellebecq, Les Particules élémentaires (1998)
> p. 34
> Présentation de l’œuvre et de l’extrait L’écriture de Michel Houellebecq s’apparente à plusieurs titres à l’écriture naturaliste. La description qu’il propose de la société, crue et sans aucune illusion, se présente comme scientifique et pessimiste. Tout en disséquant les faux-semblants d’un monde sans amour, l’auteur donne à voir, avec mélancolie et humour, l’inanité des discours et des ambitions humaines. > Lire en écho 1. Janine et Serge sont présentés d’abord par rapport à leur situation sociale et à l’époque dans laquelle ils vivent et avec laquelle ils sont en parfaite conformité : études de médecine, boîtes à la mode. On décrit ensuite leur caractère sexuel : elle est belle et a eu « de nombreuses aventures », lui est « velu » et d’une « virilité puissante ». Leur rencontre n’est jamais présentée du point de vue des sentiments qu’ils pourraient éprouver. De même, la naissance est causée par un oubli de contraception et aucun amour maternel ni paternel n’est évoqué. La froideur ironique de cette description (« l’élevage d’un jeune enfant » ligne19) déconstruit toute possibilité de lien amoureux ou familial. 2. Le mariage et la filiation, analysés de manière crue dans leur fonction sociale et de reproduction perdent tout caractère sentimental. Le regard que porte Michel Houellebecq sur le monde peut être qualifié de naturaliste et de nihiliste. 14 Marie Ndiaye, La Cheffe, roman d’une cuisinière (2016)
> p. 35
> Présentation de l’œuvre et de l’extrait La Cheffe fait le portrait d’une cheffe, grande cuisinière qui sait donner à ses plats tout le génie sensible qu’elle n’exprime pas par la parole. La naissance de sa fille trouble son existence. Marie Ndiaye décrit dans cet extrait le retour des sensations physiques après l’« engourdissement » et la prise de conscience par la cheffe qu’elle s’est éloignée d’ellemême. Dans ce roman, c’est l’absence de désir qui rend inhumain. > Lire en écho 1. Les émotions de la cheffe reviennent grâce aux sensations : l’odorat d’abord (ligne 5 « elle la huma avidement »). Puis le toucher et le goût qui se mêlent dans le souvenir revenu de la cuisine : « la plus aromatique et la plus moelleuse des terrines » (lignes 8 et 9). Le désir d’être à nouveau elle-même en « compagnie de sa passion » (ligne 23) est décrit comme un désir physique, sensuel (lignes 6 et 7). 2. La faim (ligne 28) que ressent la cheffe est un désir de se retrouver (lignes 12 et 13 « cette jeune femme qu’elle avait été »). On peut comprendre que sa maternité l’a obligée à
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abandonner son travail de cuisinière et que ses « mains » désormais « bornées » (ligne 21) aux travaux domestiques. 3. Le mot « hébétude », très fort, signifie ici une absence à soi-même, causée ici par la solitude et la maternité. Les soldats évoqués par Émile Zola sont eux-aussi incapables de comprendre où ils vont et ce qui leur arrive, entrainés par leur destin de mort et par les illusions héroïques de la victoire à venir. Zola, dans une vision plus sombre, nous montre la foule tout absorbée par le mouvement de la « bête humaine » tandis que le personnage de Marie Ndiaye parvient, grâce à ses sens à se rendre compte de ce qu’elle a perdu.
PROLONGEMENT ARTISTIQUE ET CULTUREL
Dépeindre le mouvement et capter le réel en peinture
> pp. 36-39 > p. 36
> Introduction Les liens de Zola avec la peinture sont nombreux, et son rôle comme critique d’art a été très important. Les textes présentés dans le parcours montrent son intérêt pour l’œuvre de Manet et l’impressionnisme. Le monde se transforme et de nouveaux paysages apparaissent, mais c’est aussi le rapport au monde et le mode de représentation qui change. On cherche le vrai, la sincérité, l’expression de la lumière telle qu’elle est vécue, ressentie. La peinture de Manet comme l’œuvre de Zola a choqué un public qui attendait un art académique, fait pour plaire. > Écrit d’appropriation On attend un texte à la première personne du singulier et qui prenne en compte ce qui a été vu de l’impressionnisme : formes, couleurs, sujets, etc. > Réponse aux questions 1. Les descriptions de Zola sont très picturales : l’écriture de La Bête humaine est proche de celle de Monet qui cherche à donner à voir l’étrange beauté industrielle de la gare saint Lazare, les fumées des locomotives et le mouvement. On peut comparer le tableau de la page 36 à la description de l’incipit (page 28). La question du lien entre l’art et la réalité : c’est-à-dire ce que l’art choisit de représenter est aussi un enjeu important. Le choix des peintres impressionnistes de peindre « sur le motif » et de ne pas reconstituer une réalité dans un atelier peut s’apparenter à la volonté de Zola de se confronter à ce qu’il veut décrire, à enquêter de la manière la plus précise possible. 2. Les différents documents peuvent permettre d’identifier les liens étroits entre Zola et les peintres de sa génération. Le soutien qu’il apporte, en tant que critique d’art, aux peintres dont le travail est souvent violemment critiqué révèle sa position esthétique et politique. Ce sont d’ailleurs les premiers moments de l’impressionnisme que Zola défend, pour s’en éloigner ensuite à partir de 1880. 3. L’œuvre de Manet a été vue comme une provocation : le peintre reprenait certains éléments de la peinture traditionnelle (femme nue, position proche de celle de la Vénus d’Urbin de Titien, …) et faisait le choix d’une représentation crue. L’abandon du beau idéal et la représentation sans
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illusions de la vie moderne, quotidienne, loin des canons académiques ont été considérées comme scandaleuses. Les choix de Zola de s’intéresser à la nature « telle qu’elle est », de représenter des personnages de toutes les classes sociales, sans dissimuler leurs failles ou leurs laideurs et de donner à voir la violence de la condition humaine fait de beaucoup de ses œuvres, et notamment de La Bête humaine, des textes qui choquent, qui dérangent les lecteurs.
Qu’est-ce qu’une adaptation réussie ?
> p. 38
Étude d’une œuvre Jean Renoir, La Bête Humaine (1938) six premiers plans du film La Bête humaine est l’un des chefs d’œuvre de Jean Renoir, qui interprète le roman de Zola comme une tragédie en noir et blanc et donne à la machine un rôle de premier plan. > Réponse aux questions 1. C’est la description de la gare et la place de la locomotive, des rails, des jeux d’ombre et de lumière qui fait le lien entre le début du film et l’incipit du roman. La première image, qui met en valeur le feu de la machine peut être vue comme un écho à l’explicit du roman et à son train infernal. Le film opère une stylisation des décors et dans ces premières images cherche à faire éprouver des émotions fortes au spectateur davantage qu’à lui offrir une représentation du spectacle total de la gare comme le fait Zola. Il y a dans ce début de film un caractère presque expressionniste. 2. On peut observer le travail très pictural de Renoir : jeu des lumières, lignes très graphiques des voies et des poteaux (cf. Caillebotte pages 16-17). Les deux personnages sont transformés en figures fantastiques, presque mythologiques (feu, lunettes, visages assombris par la suie) comme le fait Zola. 3. On cherche ici à faire réfléchir sur la notion d’adaptation : le cinéma n’imite pas la littérature mais lui offre une variation qui prend tout son sens quand elle permet de nouvelles lectures de l’œuvre et qu’elle reflète la vision du réalisateur. > Carnet de lecture On peut s’interroger sur les réactions de Zola devant la transformation de certains personnages, notamment Lantier, presque romantique dans le film. Cependant, la lecture de Renoir n’est pas en contradiction avec les combats de Zola : on peut par exemple s’interroger sur le rôle de Cabuche, joué par Renoir lui-même.
ATELIER LANGUE & EXPRESSION
Écrit
> p.40
Écrire une description en s’appropriant le style de Zola > Introduction Le travail d’écriture permet ici, comme le préconisent les programmes, de construire des compétences langagières et de mieux s’approprier les textes littéraires en faisant l’expérience de l’écriture. La fonction de la description pourra aussi être bien mieux comprise par cet exercice.
É T U D E D E LA LA N G U E
> p. 42
Les expansions du nom et la modalisation > Corrigé des exercices Exercice 1 1. Adjectifs : « scientifique, étrange, différents, profonds, curieux, puissant, inassouvie, violent, vivants » Propositions relatives ; « qui peut se produire entre deux tempéraments différents, que les chirurgiens font sur des cadavres ». Compléments du nom « d’une nature sanguine au contact d’une nature nerveuse, de physiologie, de ces êtres ». 2. On peut observer le rôle des adverbes, qui mettent en valeur le caractère scientifique du travail de Zola : « scrupuleusement, simplement ». Les adjectifs utilisés permettent aussi de mettre en avant l’intérêt du travail de Zola, qui présente son roman comme l’étude d’un cas, une expérience : « étrange, curieux ». Certaines expressions appartiennent d’ailleurs au vocabulaire scientifique, mathématique même (« étant donné que »). Enfin, la présence de la première personne « je n’ai eu qu’un désir » montre son implication et sa volonté de convaincre ses lecteurs.
Les mots du… désir
> p.43
> Corrigé des exercices Exercice 1 La présence ou non d’un complément transforme le sens du verbe. De même, le fait que l’objet soit abstrait (désirer la liberté) ou concret (désirer un bijou) change le sens du verbe. Enfin, c’est la question de l’animé et du non-animé qui est à interroger. Quand le complément désigne une personne, que signifie alors le verbe ? (Roubaud désire Séverine). On peut ainsi se questionner sur l’interprétation à faire de cet usage : peut-on « désirer » un être comme on désire un objet ? Séverine désire l’amour et le bonheur. Des Grieux désire s’enfuir avec Manon. Solal désire échapper aux pièges de la passion. Les parents de Bruno désirent se débarrasser de leur enfant. Exercice 2 Désirable (suffixation), désireux (suffixation), désirant (suffixation), La Désirade… Desiderata : du latin desiderata : choses désirées, ce mot désigne les souhaits, les vœux, notamment dans le domaine de l’administration ou des affaires, dans un emploi plus courant il a donc souvent un sens ironique. Exercice 3 Ce sont les forces qui poussent Lantier à agir sans qu’il puisse résister, qui lui donnent ce désir de tuer. Le mot (cf. CNRTL) a aussi un sens physique : « propagation du mouvement dans un liquide ou dans un gaz », qui permet de faire le lien entre les forces qui agissent Lantier et la machine qu’il conduit, la bête dans l’homme. C’est aussi ce que donnent à voir les premières images du film de Renoir. 1 • Émile Zola, La Bête Humaine (1890)
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Exercice 4 Les élèves vont découvrir le mythe de Tantale, qui désire éternellement sans pouvoir assouvir sa faim ni sa soif et ainsi associer le désir à la frustration, le manque, la souffrance, la faim, la tentation, l’attente, la torture, etc. Exercice 5 Synonymes (par ordre croissant d’intensité) : attente, inclination, intérêt, motivation, attirance, besoin, avidité, convoitise, concupiscence, etc. Exercice 6 Antonymes : dégoût, apathie, dédain, inappétence, répulsion, aversion, etc. Ces adjectifs pourraient qualifier les sentiments éprouvés pour Grandmorin, qui est à l’origine de toutes les violences du roman : en abusant de Séverine enfant il a commis le premier crime qui entrainera tous les autres.
> Réponse aux questions de synthèse 1. La place des discours rapportés, des monologues intérieurs notamment évolue et s’amplifie dans la continuité du travail d’écrivains comme Zola. 2. Les choix de Zola peuvent être confrontés à ceux des différents auteurs des textes complémentaires. La violence des évènements évoqués, la tonalité presque épique de ces visions sont singulières. On observe cependant dans tous les extraits présentés l’importance du désir, parfois combattu, interdit ou parfois revendiqué comme le font Marguerite Duras et Marie Ndiaye, mais toujours au cœur de la condition humaine.
V E RS L E B A C
> p. 45
Exercice 7
Sujet bac Dissertation
Ces images désignent les lumières et les foyers de la mine vers laquelle se dirige le personnage. Dans son errance elles peuvent représenter un espoir et pourtant la métaphore indique déjà le danger et les violences à venir.
> Introduction Cette première approche de l’exercice est fondée comme le préconisent les programmes, sur un œuvre et pouvant s’appuyer sur les textes complémentaires. Il est important d’aborder la dissertation dès le début de l’année de seconde. Le travail est ici accompagné et vise à réfléchir sur l’analyse d’un sujet et à faire produire un paragraphe argumenté.
Exercice 8 Le désir, dans toutes ces expressions, est associé à la destruction et au mal. C’est une vision religieuse, morale qui condamne le désir (un « péché »). Dans la religion chrétienne les désirs conduisent à la perdition (cf. page 31 la « libido sciendi » de Des Grieux, qui le conduit au désir charnel puis à la perte de son « innocence »). > Construire son vocabulaire Mots abstraits Volonté, envie, besoin, aspiration, etc.
Concrets Faim, soif, émotion, boulimie, libido, énergie, bouillonnement, etc.
Manifestations physiques Un Tramway Chaleur, nommé désir, tension, feux, le désir démangeaison, vertige, aveugle, etc. prendre ses désirs pour des réalités, etc. Expressions
F I C H E D E S Y N T H È S E L’écriture naturaliste ou la peinture d’un réel subjectif
> p.44
> Introduction La fiche permet d’avoir une vision d’ensemble de la séquence et de faire le lien entre les différents textes étudiés. Il est important de permettre aux élèves de se l’approprier, notamment en l’utilisant pour un travail de synthèse personnel.
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> Réponse aux questions 1. Les mots « roman » et « expérience scientifique » sont à repérer et à confronter. L’adverbe est aussi à examiner (cf. pages méthodes 286 à 289). 2. Il est ici important de commencer à montrer qu’un sujet de dissertation n’est pas une question à laquelle il s’agirait de répondre « par oui ou par non » mais qu’il soulève une série de questions, de problèmes. 4. Par exemple : Bien que Zola fasse une œuvre de fiction, il observe le monde comme un biologiste ou Un roman peut-il avoir l’exactitude de la science ? 5. Attention à trouver des exemples précis (extraits de la Bête humaine, éléments des parcours artistiques, préfaces de Zola, …) 7. Exemple : Même si Émile Zola a fait des enquêtes très précises et s’est documenté sur le monde du train, son œuvre propose au lecteur une vision du monde subjective et non une expérience de « physiologie » comme il l’écrit dans la préface de Thérèse Raquin (page 42). Dans l’explicit du roman (page 29) le train fou qui avance irrépressiblement vers la mort n’a rien de réaliste, il est une allégorie de la société qui court à sa perte. Décrit comme « un sanglier dans une futaie » ou un « monstre échappé », le train devient une figure monstrueuse. Zola invente une mythologie de la modernité plutôt qu’un ouvrage scientifique.
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L E C T U R E C U RS I V E Milan Kundera, Risibles amours (1970)
> pp. 46-47
> Introduction Au-delà de la qualité littéraire de l’œuvre et des richesses interprétatives qu’elle recèle, la lecture de Risibles amours offre au professeur une certaine flexibilité. En fonction du temps que l’on aura à accorder à cette lecture cursive, on pourra se concentrer sur une ou plusieurs nouvelles ou bien analyser l’unité de l’ensemble pour approfondir l’approche des différentes formes de récit conformément aux programmes. Comme le rappelle François Ricard dans l’éclairante postface à l’édition Folio, Kundera voit dans la nouvelle une « petite forme » mais estime que le recueil appartient à la « grande composition » comme le roman. > Réponse aux questions 1. L’adjectif « risible » suggère la gaieté et l’amusement mais possède aussi une connotation péjorative. Est risible ce dont on se moque, ce qui est ridicule. a. L’association du nom et de l’adjectif dans le titre est donc étonnante. Bien que réunis dans un même groupe nominal, « risibles » et « amours » semblent s’opposer. L’amour est un sujet sérieux, il ne prête a priori pas à rire. Le même paradoxe se trouve dans « L’Insoutenable Légèreté de l’être » où l’association de la légèreté à la pesanteur est un oxymore. b. L’antéposition met en valeur l’adjectif. L’effet est presque poétique, invite le lecteur à s’extraire des habitudes de langage. Kundera semble insister sur l’absence de sérieux plus que sur l’amour. Dans L’Art du roman, il écrit : « Il ne faut pas comprendre ce titre dans le sens : amusantes histoires d’amour. L’idée de l’amour est toujours liée au sérieux. Or, risible amour, c’est la catégorie de l’amour dépourvu de sérieux. Notion capitale pour l’homme moderne. » 2. a. Les personnages sont abstraits, comme des pièces de puzzle qui n’arriveraient pas à s’emboîter. Ils sont reliés par un trait vertical mais leur baiser, leur union semble mise en échec. Cela semble à la fois triste et comique (la stylisation des personnages prévenant une réelle identification). b. Le tableau de Klimt représente au contraire un amour parfait. Les personnages enlacés ne forment qu’un, ils s’enlacent langoureusement dans une ambiance dorée et paradisiaque ainsi que le suggère le parterre de fleurs. 3. Le titre et le choix du tableau en couverture supposent que le lecteur doit s’attendre à des histoires d’amour amusantes mais défectueuses, des histoires entre comique et tragique. Le pluriel renvoie aux sept nouvelles du recueil. 4. « Le Jeu de l’auto-stop » est un jeu de rôles érotique où deux jeunes amants font semblant de ne pas se connaître. Le garçon joue le chauffeur et la jeune fille une autostoppeuse qui le séduit. 5. Dans l’extrait, la jeune fille semble enchantée du jeu. Elle peut-être virtuellement une personne qu’elle n’est pas du tout, séductrice sans pudeur. Le jeu a la vertu d’apaiser sa jalousie, elle devient elle-même le danger qu’elle redoute pour le jeune homme, la tentation. 6. La question appelle une réponse personnelle mais peut s’appuyer sur l’extrait. La jeune fille est dissociée : elle
devient un personnage qu’elle juge sévèrement (une « vile séductrice ») ce qui laisse supposer que le jeu présente des dangers ainsi que le remarque le narrateur p. 111 : « pour le joueur, le jeu est un piège ». Dans la nouvelle, le jeu séparera les amants. 7. Le recueil présente de nombreux personnages féminins mais les personnages principaux sont des hommes : le professeur, Martin et son ami, le patron et Havel, Edouard. Ils pourront paraître assez peu sympathiques aux jeunes lecteurs car beaucoup sont des séducteurs sans scrupule, collectionneurs cyniques de conquêtes féminines souvent négligées voire rabaissées. Mais une lecture qui opposerait seulement hommes et femmes serait réductrice. Les hommes n’ont pas l’apanage de l’infidélité (la femme âgée de la cinquième nouvelle a toujours trompé son mari) et ne sont pas les seuls à se jouer de leur partenaire (les deux Klara sont intéressées, la directrice s’appuie sur son autorité hiérarchique pour mettre Edouard dans son lit). 8. a. On peut découvrir les personnages de Pâris et Discorde grâce à un dictionnaire de la mythologie, au CDI ou en ligne (ex. : https://mythologica.fr/grec/paris.htm). b. Sur cette enluminure du Moyen-Age, les personnages sont idéalisés. Pâris est présenté comme un chevalier, un héros en armure qui remplit sa tâche avec courage. Les trois déesses se ressemblent : nues, elles évoquent la femme dans sa dimension charnelle bien qu’elles dissimulent partiellement leur corps. Le jugement de Pâris est aussi sa tentation : en choisissant Aphrodite, il déclenchera indirectement la guerre de Troie. L’image n’est pas sans rappeler l’épisode biblique du fruit défendu dans le jardin d’Eden. c. On pourra accepter les deux réponses possibles. L’élève peut trouver l’illustration trop éloignée du personnage de Martin, héros dérisoire d’une aventure du xxe siècle. Cependant, elle entre en résonance avec la tonalité épique que le narrateur emploie pour décrire son ami. Martin est une sorte de chevalier moderne agitant la « bannière de l’éternelle poursuite des femmes » p.86. 9. Le sentiment amoureux dans le recueil est lié à l’instabilité des valeurs du monde moderne. L’amant aguerri connaît l’insignifiance de l’amour. Les aventures amoureuses des plus jeunes sont autant d’étapes vers la désillusion, la découverte que l’amour n’est pas sérieux. L’amour est désacralisé. Ce qui ne signifie pas que cette chute de l’amour dans le domaine du non-sérieux soit risible sans amertume : au contraire, cette légèreté est pesante, presque insoutenable malgré la dérision dont font preuve certains personnages. 10. Les nouvelles présentent une grande diversité narrative. Deux sont à la première personne mais diffèrent du fait que le narrateur est le personnage principal de la première mais pas de la seconde. Les cinq autres présentent un narrateur extérieur avec des nuances importantes : le narrateur épouse les pensées de ses personnages dans les nouvelles III, V et VI ; ses interventions sont très fréquentes dans la dernière nouvelle où il exhibe ses choix narratifs (p. 315 : « je n’ai pas l’intention de couronner mon récit par un paradoxe aussi flagrant ») ; au contraire, dans la nouvelle centrale, il se contente d’être un metteur en scène, l’essentiel du récit étant occupé par les dialogues des personnages. Cette
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diversité narrative est paradoxalement une unité : Kundera réunit dans un tout toutes les focalisations possibles. 11. Pour François Ricard, les nouvelles se répondent deux à deux. La première et la dernière racontent les mésaventures de personnages qui essaient d’être désinvoltes dans un monde où l’humour n’est pas accepté. Ce sont les seules nouvelles qui s’insèrent dans un contexte historique précis (cf. p.273) ; le professeur perd tout pour avoir dit la vérité là où Edouard gagne sur tous les plans parce qu’il a menti. Les nouvelles II et VI mettent en scène des Don Juan maladroits partant à la conquête de femmes dans une petite ville thermale. L’ambiance y est plus légère et comique que dans les nouvelles III et V où les huis-clos réunissant des personnages anonymes dégagent une atmosphère plus pesante. 12. La nouvelle IV est isolée au centre du recueil. Plus longue, théâtrale (elle est divisée en « actes » contrairement aux autres récits), elle met en scène toutes les situations amoureuses possibles. Le titre qui fait référence au Banquet de Platon (« Colloque » est la traduction du tchèque « symposion » proche du « sumposion » grec) confère au récit une dimension théorique. Elle peut être considérée comme la clé de voûte du recueil, le récit qui, bien qu’encadré, encadre toutes les autres histoires. 14. Nekfeu, admirateur avoué de Kundera, propose une réécriture assez fidèle du recueil. La filiation est évidente par la reprise du titre. On peut également remarquer que Nekfeu reprend à son compte l’idée que l’amour est un « jeu » mais un jeu « lassant » où le léger le dispute au pesant. Comme beaucoup de personnages de Kundera, le personnage masculin est un Don Juan (« je vois se succéder les flirts ») moderne et insatisfait : la succession des amours suit toujours le même schéma « désir, pulsion, désillusion » et renvoie à un « vide » existentiel qui dépasse la situation amoureuse. On veillera à souligner la façon dont Nekfeu s’approprie le texte dont il s’inspire : énonciation à la première personne et dimension autobiographique (« Ken »), évocation crue de l’amour physique, reprise des topoï du rap (drogue, violence, verlan).
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15. Les œuvres littéraires sont à lire dans leur contexte ; or, celui de Risibles amours est toujours assez prégnant. L’homme confronté à l’amour, ou au doute sur le sens de sa propre existence sont des sujets toujours aussi contemporains comme en témoigne l’intérêt de Nekfeu pour l’auteur. VERS LE BAC ORAL > S’entraîner à l’entretien
1. La consigne sollicite plusieurs compétences : la capacité à présenter une nouvelle (et à en résumer l’intrigue) ; la capacité à justifier son choix et donc à argumenter à l’oral. On encouragera l’élève à organiser son discours, à en travailler la clarté. 2. Il s’agit d’expliquer à l’oral un des enjeux du recueil : la coexistence, l’imbrication de deux idées contradictoires, le sérieux et le non-sérieux. L’absence de sérieux n’est pas légère ; au contraire, c’est un « abîme » dans lequel on peut tomber. L’élève pourra s’aider de l’analyse du titre mais la réponse doit permettre de mettre en valeur une solide connaissance de l’œuvre. Les nouvelles I et VII sont celles où le sérieux et l’absence de sérieux, le tragique et le comique sont constamment liés. On pourra proposer aux élèves qui manqueraient d’idées de relire la dernière page de ces récits afin d’étayer leur réponse. > Carnet de lecture Il ne s’agit pas de réaliser une recherche exhaustive sur le personnage de Don Juan : la consigne peut être modulable en fonction des attentes du professeur et du temps dont dispose l’élève. Il paraît cependant indispensable de faire une place au Dom Juan de Molière dont Havel est le contrepoint. Dans « La Fin des Don Juan » (p.148), Havel explique que le changement du monde a conduit à la disparition du personnage. Don Juan était « tragique » parce qu’il transgressait l’ordre établi (ordre moral, social et religieux). Dans le monde du docteur « où tout est permis », il n’y a plus de résistance, plus rien à quoi s’opposer. De « conquérant », Don Juan est réduit à l’état de « collectionneur ». Il ne choque plus personne et se retrouve condamné à être « un personnage de comédie » pathétique et sans panache.
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SÉQUENCE
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Nicolas Bouvier, Le Poisson-scorpion (1982)
Présentation de la séquence > La problématique Peut-on s’inventer une vie ? La problématique invite à réfléchir aux liens qui unissent réalité et fiction. Le récit de voyage doit-il rendre compte scrupuleusement de l’expérience vécue ? Quelle valeur littéraire aurait un récit qui s’apparenterait à un enregistrement du réel ? Cette captation du réel est-elle même possible dans la mesure où la réalité dépend nécessairement d’un point de vue, d’un regard sur le monde ? Ce sont à ces questions que répond, au moins partiellement, l’œuvre de Nicolas Bouvier. Si celui-ci s’empare d’une expérience douloureuse bien réelle – son séjour au Sri Lanka en 1955 – c’est pour transformer cette épreuve en œuvre. Le récit permet moins de revivre que de repenser le voyage ; il lui donne un sens a posteriori. Il s’affranchit donc du monde réel mais s’il réinvente sa vie, c’est pour la rendre signifiante. > Le parcours d’œuvre Le récit étant composé de vingt chapitres courts, souvent refermés sur eux-mêmes, de nombreux passages se prêtent à une lecture analytique. Huit extraits sont proposés dans ce manuel : ils retracent le cheminement du narrateur (de son arrivée à son départ ; du poisson au scorpion) mais aussi son évolution (de l’enthousiasme au désarroi avant la renaissance). L’ordre est donc chronologique, à l’exception des extraits 6 et 7 qui offrent, sur une double page, une entrée dans le bestiaire de Bouvier. Les topoï du récit de voyage sont représentés : arrivée, installation, découverte, relations avec le pays d’origine, rencontres. Le parcours peut donc être thématique. Il s’agit également de mettre au jour la porosité générique du récit de voyage : les extraits 1 et 2 appartiennent bien au genre romanesque ; le 3e se rapproche de l’essai ; le 5e reprend les codes de la nouvelle fantastique. Enfin, le parcours permet de mettre en évidence la composition très concertée de l’œuvre : le personnage d’Ulysse, la présence obsédante des insectes sont autant de motifs qui structurent le récit et se retrouvent dans plusieurs des extraits (voir aussi : l’atelier langue et expression). L’enseignant peut donc suivre plusieurs chemins à l’intérieur du parcours proposé et construire sa séquence sans nécessairement aborder l’ensemble des extraits. > Les lectures complémentaires Le groupement de textes permet d’approfondir ou de compléter l’étude de l’œuvre intégrale. On y trouvera des textes de siècles et de langues différents mais surtout un élargissement générique. Tous sont en lien avec le personnage du voyageur et interrogent le regard qu’il porte sur le monde. Ils présentent des différences notables. Deux appartiennent à la fiction et s’inscrivent dans des genres très codifiés : l’épopée pour Homère et la Bande Dessinée pour Pratt. Bougainville au contraire se donne à lire comme un documentaire même si l’étude rend ce texte plus complexe qu’il n’y paraît. Les trois autres sont des récits de voyage mais présentent des nuances à exploiter : L’Antivoyage de Muriel Cerf peut être lu comme un roman ; le texte de Miller
> p. 48
est tiré d’une préface et permet une réflexion sur la posture de l’écrivain-voyageur ; l’extrait de Tesson introduit également une réflexion mais elle s’inscrit dans le récit. La variété des textes permet une approche diversifiée des différentes formes du récit ainsi que la recommande le programme. > Le prolongement culturel et artistique Nicolas Bouvier était écrivain mais aussi photographe et le lien entre son œuvre et la photographie est presque naturel. La séquence présente plusieurs photos de son ami Thierry Vernet, personnage plus effacé dans Le Poisson-scorpion que dans la réalité du séjour cinghalais. Ces images illustrent le voyage de Bouvier mais poussent aussi à s’interroger sur l’écart important entre son récit et la réalité. Le prolongement culturel et artistique propose donc de s’intéresser à cet art qui est né et a tant évolué en moins de deux siècles. Il permet de questionner le lien entre photographie et réalité, les fonctions de la photographie et son statut, longtemps incertain. L’accent est mis sur le style documentaire américain qui donne matière à réflexion puisque les photographies s’inscrivent dans un contexte historique très précis dans le même temps qu’elles prétendent à l’universalité et à l’intemporalité. Le carnet de lecture propose une ouverture à la photographie européenne.
O U V E RT U R E
> p. 48
>Introduction L’entrée dans l’œuvre peut se faire par un questionnement sur le lieu du voyage de Bouvier. Une île n’est pas un lieu comme un autre, comme en témoigne sa fortune littéraire (lieu de l’errance d’Ulysse, de l’ermitage de Robinson, il est aussi terre d’utopie de More à Perec en passant par Marivaux ou gardien du trésor chez Stevenson). Cet espace isolé et refermé sur lui-même évoque l’inconnu, le voyage et l’aventure mais c’est aussi un espace symbolique comme en témoignent la citation de Bouvier et le tableau de Lyonel Feininger, ce que le questionnaire s’attache à mettre en valeur. > Réponses aux questions 1. L’île en tant que lieu de « métamorphoses » est immédiatement reliée à la magie et à la légende. La comparaison avec le doigt posé sur la bouche souligne son caractère mystérieux. La mention d’Ulysse renvoie explicitement au monde légendaire de l’épopée et projette le narrateur dans un espace autre où le temps, repère des hommes, est incertain. La dernière comparaison est cependant plus triviale : en se comparant à une cartouche, Bouvier semble reprendre pied dans la réalité. 2. En fonction du temps dont on dispose, on peut se contenter de raviver les souvenirs de collège des élèves ou demander une recherche approfondie. Dans ce cas, l’exposition virtuelle de la bnf est une source intéressante : http:// expositions.bnf.fr/homere/index.htm Bouvier pressent qu’il 2 • Nicolas Bouvier, Le Poisson-scorpion (1982)
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va être « coincé » dans son île comme Ulysse chez Calypso (ou pendant son périple). Ce sont donc deux voyageurs dont l’itinéraire est perturbé comme l’indique l’image du canon. On peut imaginer retrouver chez Bouvier la même mélancolie que chez Ulysse (cf. : extrait 9 dont la lecture pourrait compléter l’entrée dans la séquence). 3. Dans le tableau, l’île est à la fois au centre et au loin. Elle a donc une importance capitale (elle donne son nom au tableau) mais le spectateur peut aussi la confondre avec les nuages dont les formes géométriques sont proches. Sa couleur bleu violet tranche dans le décor mais l’ensemble des éléments forme une unité un peu à la manière d’un arc-en-ciel. Ce qui se détache du tableau, c’est l’élément le plus petit et le moins coloré : l’homme, qui, au premier plan, se tient de profil et semble même ignorer l’île. On perçoit son isolement dans ce décor naturel. Ce personnage pourrait être Bouvier : Ceylan sera pour lui une terre inconnue, une terre de solitude. Venu découvrir l’île, il se découvrira finalement lui-même.
CONTEXTE L’auteur et l’œuvre
> p. 50
> Qui est Nicolas Bouvier ? La biographie de Nicolas Bouvier est intéressante car elle introduit l’auteur en même temps que le personnage. L’écrivain-voyageur (cf. dissertation p. 77) est autant un artiste qu’un aventurier, ce que permet de découvrir cette page. La photo montre un Bouvier jeune et souriant, installé sur une plage paradisiaque, tel qu’il fut sans doute au début de son séjour à Ceylan et tel qu’il ne sera pas montré (sauf au tout début) dans Le Poisson-scorpion. > Le Poisson-scorpion Les pistes de lecture attirent l’attention sur la singularité du récit dans la vie et l’œuvre de Bouvier mais aussi sur sa composition très concertée. Demander aux élèves de réfléchir au titre de l’œuvre avant la lecture est une possibilité pour les mettre en position de lecteur actif, voire d’enquêteur : dans Le Poisson-scorpion, de nombreuses choses sont à décoder. Cette page peut se lire en amont de l’étude du texte mais aussi à la fin, quand il s’agit de rassembler les éléments retenus pendant la séquence, en vue d’une dissertation par exemple. > Carnet de lecture Les consignes suggèrent une utilisation très personnelle du carnet. Il s’agit d’inviter les élèves au voyage (et à la lecture du texte !) en partant de leurs représentations et de leurs goûts. 1. Cette activité peut entrer en résonance avec la lecture de l’extrait 3, ou motiver l’élaboration d’une carte mentale sur le voyage (ou sur l’aventure cf. p. 75). 2. Que l’élève se reconnaisse ou non dans la lecture écoutée, on lui demande d’exprimer ses sensations, voire si possible de poser un jugement esthétique sur les textes lus. 3. C’est un exercice de créativité qui peut donner lieu à une mise en commun ou rester personnelle. On pourrait demander aux élèves d’imaginer une couverture pour illustrer leur titre imaginaire, voire une quatrième de couverture.
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G RO U P E M E N T D E T E X T E S 1 L’arrivée à Ceylan
> pp. 52-61 > p. 52
> Présentation de l’extrait Le passage correspond à la fin du premier chapitre qui raconte, comme on peut s’y attendre, l’arrivée dans l’île. Il annonce la suite du récit : l’enthousiasme du narrateur est déjà miné par de discrets signes de mauvais augure. On pourrait cependant envisager une lecture rapide du début du chapitre qui souligne davantage combien le voyageur est heureux et serein avant de passer la frontière. > Lire en écho La planche de BD d’Hugo Pratt représente le héros au seuil de son aventure. Elle peut donc venir compléter la lecture de l’extrait 1 : le voyage y est présenté comme l’inconnu, ce qui est devant, on y voit les personnages avant l’aventure ce qui dessine un horizon d’attente pour le lecteur. La lecture de l’extrait de Bougainville offre une autre approche : on peut observer comment la description de ce qui est découvert dépend du regard du voyageur, chacun s’appuyant sur ses représentations pour concevoir l’ailleurs inconnu. > Réponse aux questions S’engager dans le texte 1. Nicolas Bouvier se présente comme un voyageur expérimenté ; il a le voyage dans le sang : « J’avais deux ans de route dans les veines ». Il sait par avance qu’il ne sert à rien de négocier avec les fonctionnaires indiens et accepte le vaccin sans regimber. Sa connaissance de l’île est cependant réduite aux « prospectus » touristiques. Il lui reste donc à découvrir le vrai visage de Ceylan, d’où la conclusion du chapitre sur cette formule expectative : « On verra bien ». Interpréter 2. « Pas de piqûre, pas de visa. » ; « dix ans d’immunité au moins » ; « Contre quoi ? » ; « Tout doucement » ; toutes les phrases du 3e paragraphe : les phrases non verbales sont nombreuses. Elles insufflent une impression d’urgence au récit en nous livrant les pensées du personnage en situation, comme s’il prenait des notes mentales. 3. Deux métaphores associent l’île à une pierre précieuse. Ceylan est « une émeraude au cou du subcontinent » d’après les prospectus touristiques, c’est-à-dire un bijou, ce qui donne de l’éclat à l’Inde (pays « tant aimé » au début du chapitre). On peut donc s’attendre à un voyage extraordinaire et heureux. La 2e métaphore altère la vision méliorative : « gemme fuligineuse montée du fond de l’Océan sous le règne des mauvaises planètes », Ceylan paraît plus sombre, dangereuse, de mauvais augure. Le voyage promet d’être plus inquiétant qu’il n’y paraît. 4. Le narrateur se présente comme heureux et serein, désinvolte devant les vaccins, prêt à accueillir l’inconnu dans la dernière phrase. Les prospectus promettent la découverte d’une île paradisiaque mais on pourrait discuter le sens du mot « assurent » qui suppose une crédibilité incertaine. À partir de la l.15, les références de Bouvier sont plus inquié-
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tantes : l’île est associée à la magie noire. Le poisson (la murène) et le scorpion sont réunis dans la formule incantatoire et menaçante qui est citée. Enfin, la l.8 fonctionne comme une prolepse : il lui reste à apprendre à ses dépens combien le « bonheur rend faraud ». VERS LE BAC ÉCRIT > Commentaire
On peut reprendre les éléments repérés dans le questionnaire : Les attentes du voyageur : – la poursuite d’une vie insouciante ; – la découverte d’un pays inconnu : vision contradictoire des prospectus touristiques et des rituels aryens (cf. « mais » l.14). Les indices inquiétants : – la présentation méliorative des prospectus est suspecte ; – celle des rituels aryens est inquiétante. – la prolepse promet un voyage difficile. > Écrit d’appropriation Il s’agit d’engager les élèves dans la rédaction d’un récit avec les compétences langagières que cela suppose. Mais le texte doit aussi s’inscrire dans la continuité de l’incipit étudié : on attend de la rencontre qu’elle soit surprenante et ne correspondant pas aux clichés de « l’île-du-sourire ». Pour lancer l’activité, on peut laisser le choix de la rencontre aux élèves ou leur proposer comme sujet « le douanier » rencontré dans le chapitre II, ou bien encore leur proposer une sélection de portraits comme point de départ de l’écriture. 2 « La cent dix-septième chambre »
> p. 53
> Présentation de l’extrait La description des lieux est un topos du récit de voyage. La lecture du chapitre III permet un aperçu de la ville (on pourrait demander aux élèves d’en retracer le plan) ; l’extrait proposé se concentre sur la chambre de Bouvier où se déroulera l’essentiel du récit et dont la description a une valeur symbolique puisqu’elle préfigure l’expérience du voyageur. > Lire en écho L’austérité du décor annonce la solitude du personnage. Le voyage est aussi un voyage intérieur. On pourra mettre cet extrait en relation avec l’expérience de Tesson à ceci près que la démarche de ce dernier est volontaire ; l’ermitage consenti aboutit à une réflexion positive là où la solitude subie de Bouvier tourne au cauchemar. > Les mots de… L’antonomase consiste à employer un nom propre pour remplacer un nom commun. On pourra lister des antonomases où la référence au nom propre persiste (un Tartuffe, un Don Juan, un Casanova) et celles où le nom propre est lexicalisé : un atlas, une mégère, une furie, une poubelle. > Réponse aux questions
au minimum (lit, table, chaise, étagère : « c’est tout. ») et peu décrits ; ou alors les expansions du nom sont pour beaucoup dévalorisantes (plancher usé, Bouddha rongé). Le lieu est aussi isolé (en haut des marches) et « énigmatique » (l’outremer est « indicible », la vue sur l’océan « préoccupante »). 2. La comparaison avec un « modeste théâtre incendié » invite à une lecture symbolique du décor. Il présage la solitude douloureuse du narrateur ainsi que la dernière phrase le suggère. La chambre a été délaissée par ses amis ; Bouvier sait qu’il n’aura pas beaucoup de contacts avec les autres (la marche ne craquera pas car personne ne lui rendra visite). Même les punaises de lits ont battu en retraite. Les « huit pas de long, quatre de large » font penser à une cellule : la chambre est une prison. Interpréter 3. La présentation est rétrospective, Bouvier a intégré cette chambre depuis « quelques semaines ». Cependant le narrateur s’exprime au présent de l’indicatif. Présent d’énonciation (« je peux compléter ce matin ») qui permet de décrire (l’escalier « a » cinq marches ; le lit « est un cadre de bois » etc.). L’intrusion du présent de vérité générale (« Le soleil ne coûte rien ») contamine l’ensemble donnant l’impression que le lieu est figé dans le temps, suspendu entre passé, présent et futur. 4. En employant le présent pour décrire un lieu tel qu’il était trente ans plus tôt, Bouvier donne vie au décor. Le lecteur est immergé dans cette chambre où la narrateur l’a conduit (cf. : l’emploi de la 2e personne du pluriel, « vous traversez… vous montez »). On a donc l’impression de découvrir cet espace en même temps que le personnage. 5. L’insertion de la citation poétique modifie le regard porté sur la pièce. La littérature est un prisme : entre Bouvier et la chambre, il y a Dylan Thomas. Le poème influence la description de Bouvier des l.12 à 17 : l’auteur reprend les propos de Thomas à son compte (le soleil, les punaises et la phrase « Dieu soit loué ! ») On peut aussi commenter la tournure très poétique de ce paragraphe qui s’oppose à la relative sécheresse du reste du texte, plus factuel. Enfin, le poème par son thème surprenant et trivial produit un effet comique : ce qui est exprimé poétiquement c’est un soulagement commun, un peu vulgaire, celui de ne pas risquer les piqûres des punaises. VERS LE BAC ORAL > Lecture expressive
La lecture à voix haute suppose une bonne compréhension du texte. On pourra proposer aux élèves d’annoter l’extrait pour préciser à l’avance les intonations recherchées. On valorisera les propositions qui mettent en valeur les différents passages : isolement du poème cité ; contraste entre le 3e paragraphe et les deux suivants ; alternance des phrases courtes et longues qui rythme l’extrait. L’écoute de l’enregistrement audio pourra venir clôturer cette activité.
S’engager dans le texte 1. La chambre est dépouillée et offre un confort très sommaire. Elle est petite ; les éléments de décor sont réduits
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3 Pensées d’un voyageur
> p. 54
> Présentation de l’extrait Le chapitre V est constitué de plusieurs scénettes : Bouvier s’est déplacé à Colombo et vit ses premières désillusions ; le responsable de l’Alliance française refuse ses articles, il est malade et renvoyé à sa solitude ce qui le pousse à se retourner vers lui-même. Le récit de voyage n’est pas une simple narration, il s’accompagne d’une réflexion sur le voyage. > Lire en écho La référence à Ulysse parcourt tout le recueil. L’analyse de l’extrait d’Homère et plus particulièrement du statut de héros mélancolique et isolé peut faire écho au discours tenu par Bouvier dans l’extrait. Le texte de Muriel Cerf offre également un écho à celui de Bouvier. Le voyage se définit par ce qu’on en attend : enrichissement mais surtout dépouillement, découverte de soi. > Réponse aux questions S’engager dans le texte 1. La métaphore employée par Bouvier n’est pas sans faire penser aux conseils que Boileau délivre aux écrivains dans son Art Poétique : « Hâtez-vous lentement, et, sans perdre courage, / Vingt fois sur le métier remettez votre ouvrage. » Le voyageur, comme l’écrivain doit faire preuve de patience ; écrire comme voyager sont des épreuves que l’on ne surmonte pas aisément. Bouvier suggère que le voyage est moins extérieur qu’intérieur : le voyageur est un artisan dont la matière est lui-même et que le voyage consiste à modeler. Interpréter 2. « On ne voyage pas pour se garnir d’exotisme et d’anecdotes » : pour Bouvier, le voyage ne fonctionne pas par addition mais plutôt par soustraction. L’être est modifié, parfois malmené, mais toujours mis à nu comme l’indiquent les nombreuses métaphores employées : le voyageur est poncé, écorné, usé, plumé, rincé, essoré, élimé. Le moi est un « obstacle » dont le voyageur doit s’affranchir. 3. Le discours théorique correspond à la scène racontée par Bouvier : l’idée du dépouillement induit par le voyage naît du fait qu’il est en train de se raser (l.6). En ôtant la barbe qu’il portait « depuis l’Iran », Bouvier découvre son nouveau visage. L’expérience est nécessaire (« Un pas vers le moins est un pas vers le mieux » écrit-il sentencieusement) mais inquiétante car elle révèle une personne qu’il ne reconnaît pas et qui semble instable (« politesse hallucinée »). Cette scène de dédoublement est presque fantastique et préfigure la suite du récit (cf. : extrait 5). 4. On peut relever une énumération de trois éléments à la l.9 et les accumulations des l.16 et 19. Le narrateur peine à trouver le mot juste et les accumulations mettent en évidence son hésitation entre plusieurs nuances de sens en même temps qu’elles accélèrent le rythme du texte et s’accordent à son état mental gagné par l’instabilité.
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VERS LE BAC ÉCRIT > Commentaire
Voyager : – une action difficile à définir : définition par la négative l.14-15 ; recours aux métaphores et aux accumulations comme recherche de justesse. – une perte qui est un gain : voyager modifie l’être, est une lente érosion de soi. – voyager suppose la capacité à s’abstraire, à s’effacer pour observer (l.19-20) Le voyage révèle le voyageur : – le voyage est relié non à ce qui est vu mais au moi : voyageur est sa propre matière ; dédoublement de Bouvier. – voyager revient à ôter des couches de soi pour parvenir à l’essentiel : analyse de la référence à Ulysse (rappel du jeu sur Personne/ une personne). > Carnet de lecture On attendra des élèves qu’ils présentent leurs courts textes comme des définitions et qu’ils aient recours à des métaphores afin de saisir au plus près les états qu’ils souhaitent définir. 4 La lettre de la mère
> p. 55
> Présentation de l’extrait Le chapitre X se situe au centre du récit ; son importance est accentuée par la reprise du titre de l’œuvre. C’est un moment de bascule : incompris par sa mère, abandonné par sa bien-aimée, le narrateur se retrouve seul. Ses compagnons seront désormais les insectes comme par exemple les termites qu’il observe dans la deuxième moitié du chapitre (cf. : extrait p. 72). La lettre de la mère entérine sa rupture avec les siens et l’Europe. > Lire en écho Les expériences de Miller et de Bouvier sont inversées : le voyage du premier lui permet d’embrasser l’ensemble de l’humanité et de devenir un « citoyen du monde » tandis que le voyage du second conduit à une rupture avec les représentations erronées et idéalistes de ceux qui ne connaissent de l’ailleurs que des stéréotypes. Dans les deux cas, il s’agit d’interroger ce qu’apporte le voyage, que la révélation soit positive ou pessimiste. > Réponse aux questions S’engager dans le texte 1. La mère a une vision idéalisée de Ceylan. Pour elle, c’est un lieu extraordinaire et accueillant. L’expression « l’Île-dusourire-et-de-la-pierre-de-lune » est éloquente ; les traits d’union suggèrent que le lieu est précieux et indissociable de la douceur de ses habitants. La mère nie l’existence des « mauvaises personnes », qui plus est en grand nombre (« toutes »). 2. Cette vision n’est pas réaliste car très caricaturale. Le narrateur moque l’ignorance de sa mère (« Elle le sait de science innée ») ainsi que ses sources (des touristes de passage qui n’ont sont restés enfermés sur un bateau « de luxe » ou dans un « palace »).
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Interpréter 3. Les points de vue de la mère et du narrateur s’opposent radicalement. Ils ne se comprennent pas (l.1-2) Elle l’accuse de pousser « tout au noir » c’est-à-dire de donner une image volontairement dévalorisante de l’île. Au contraire, lui considère qu’elle est aveuglée (l.1). Il essaie de dévoiler une vérité et justifie les propos qu’il a pu tenir (« Toutes ces mauvaises personnes ») par des faits : une journée sans meurtre est suffisamment rare pour faire l’objet d’un article dans la presse. 4. Les paroles de la mère sont rapportées au discours indirect libre. Le narrateur donne donc à entendre les mots mêmes de la mère tout en restant le maître de la narration. Les propos de celle-ci sont donc simultanément rapportés fidèlement et discrédités ; le narrateur ne cache pas son désaccord avec la mère. 5. Tout l’extrait est ironique. Le narrateur se moque des idées préconçues de sa mère. L’adverbe « tout de même » souligne par exemple l’absence de logique maternelle. L’évocation du narrateur enfant est comique et s’achève sur l’opposition entre le « sucre » qu’il était et le « coitron sucré » qu’il est devenu. Le regard réprobateur et moqueur se perçoit aussi dans la parenthèse remplie de points d’exclamation et d’interrogation. Le danger inhérent à l’île est présenté ironiquement grâce au décalage induit par l’adverbe « joyeusement » et aux tournures imagées et légères qui rendent compte d’une violence réelle. Mais la dérision ne masque pas l’indignation de Bouvier et surtout le fait que les propos de la mère le blessent. La mention des « contemporains si heureux dans des situations d’avenir » renvoie Bouvier à son propre malheur et à son isolement, d’autant que cela est mis en relation avec le mariage au moment où il a reçu une lettre de rupture de celle qu’il aime. VERS LE BAC ÉCRIT > Dissertation
Le sujet peut dans un premier temps être restreint à l’extrait proposé. Bouvier donne à entendre avec fidélité les paroles maternelles. Il pourrait rendre compte d’une vraie lettre. Le recours au discours indirect libre tient en revanche de la recomposition de la réalité. Les paroles de la mère sont systématiquement commentées et modifiées par le regard ironique du narrateur. Le sujet peut être étendu à l’œuvre entière, la deuxième idée étant la plus intéressante à approfondir. I – Un compte rendu de la réalité : réalité du voyage et de la situation ; description documentée de Galle (chapitres III et IV) II – Une recomposition, une œuvre d’art : effacement de certaines données (nom de l’île, présence des amis Vernet et Stephani) ; expérience douloureuse remise en perspective et annoncée dès l’incipit ; récit encadré par les citations de White et Céline qui lient voyage et création littéraire ; structure recherchée du récit (vingt chapitres allant du poisson au scorpion) ; intrusion de la légende (chapitre XV) et du fantastique (chapitre XVI). > Écrit d’appropriation L’extrait est assez complexe puisque le narrateur reprend les propos de sa mère qui elle-même reprend une lettre
ancienne. Les deux sujets proposés permettent donc, outre l’exercice de langue qui consiste à changer de discours, d’affiner la compréhension du texte. On peut demander aux élèves de reconstituer les deux lettres afin qu’elles se répondent ou partager la classe en deux groupes afin que chacun s’intéresse à un des deux personnages. 5 « Padre »
> p. 56
> Présentation de l’extrait Le Poisson-scorpion, étant le récit d’un voyage plutôt solitaire, fait peu état des rencontres avec les autochtones. Les individus rencontrés sont moins des personnes que des personnages stéréotypés (comme « le douanier ») ou légendaire (comme « Circé ») qui éloignent le récit de la réalité. C’est le cas de la rencontre avec le Padre dont on apprendra après l’extrait qu’il est mort depuis longtemps. Cette rencontre, située dans le chapitre XVI nous montre Bouvier au bord de la folie, prêt à sombrer avant la renaissance finale. > Lire en écho Le texte de Bougainville s’inscrit en contrepoint de celui de Bouvier par l’attention qu’il accorde aux personnes habitant les contrées découvertes. On observera que la fonction des deux récits n’est pas du tout la même : Bougainville est tourné vers autrui, Bouvier replié sur lui-même. > Les mots de La chitine renvoie à l’entomologie. C’est un fil directeur important dans l’œuvre ainsi que permet de le mettre en évidence la carte mentale. On observera que le vocabulaire entomologique ne s’applique pas qu’aux insectes mais déborde ce cadre (ex. le Padre est lui-même associé à un insecte). Pour la carte, à partir du mot « entomologie », on peut lister plusieurs catégories : – les insectes nommés (scorpion, termites, punaises de lits, escarbot, fourmis) ; – le vocabulaire savant (entomologue, cimex lecturalius, des savants comme Buffon et Fabre) ; – le vocabulaire pour décrire : chitine, dard, pattes, stridulation ; – les références culturelles : La Fontaine et les fables, titre du chapitre XIII et proverbe cité ; – les expressions : coup de cafard, trace gluante. > Réponse aux questions S’engager dans le texte 1. La citation (qui vient couper le chapitre et mettre fin à la déambulation nocturne de Bouvier) a une double fonction introductive car elle peut s’appliquer aux deux protagonistes : Bouvier est en train de devenir l’ombre de lui-même ; le Padre s’avèrera une ombre, un fantôme. 2. Lorsqu’il rencontre le Padre, Bouvier est mal en point. On peut s’appuyer sur la lecture du début de chapitre ou sur le chapeau pour le montrer mais aussi sur l’extrait lui-même (il a peur d’oublier « jusqu’à [son] nom ». Il ressent une profonde solitude ; la rencontre est une « aubaine » et il relance le père Alvaro pour ne pas mettre fin à la conversation.
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Interpréter 3. Les phrases du premier paragraphe présentent une importante variété : phrases verbales et non verbales (la 1re et la 3e) ; mais aussi phrases simples et phrases complexes (la dernière). Cette diversité se retrouve aussi dans les types de phrases qui sont déclaratives, exclamatives ou interrogatives. Elles épousent l’état d’esprit du narrateur, désorienté et éperdu. 4. La rencontre est fantastique. Même si l’on ignore que le père Alvaro est décédé, on peut le deviner à partir de l’extrait. Le deuxième paragraphe introduit les éléments nécessaires à l’intrusion du surnaturel dans le monde réel conformément aux codes du fantastique : la vision est confuse (« j’aperçus »), brouillée par la lumière nocturne (il est « minuit », la « lune » seule éclaire) ; le personnage hésite entre réalité et illusion (« Je me pinçais pour m’assurer que je ne rêvais pas ») La rencontre s’achève avec l’assoupissement du narrateur pour lequel songe et réalité se confondent (« Je rêvais »). Le père est présenté d’abord comme une « forme » l.6 puis comme une « apparition » l.13. C’est « un petit être » dont la nature est incertaine ; il ne semble pas avoir de corps (l.19-20), il s’agit bien d’un fantôme aux pouvoirs magiques (son cigare apparaît comme par enchantement l.22). 5. Le Padre semble de prime abord comique. C’est un religieux qui ne prie plus et semble prendre la vie avec légèreté. Sa « voix d’opéra bouffe », sa petite taille (l.16, 19 et 48), son accoutrement grotesque n’incitent pas le narrateur à le prendre au sérieux. On peut cependant remarquer que l’incertitude sur sa personne est inquiétante de même que le parallèle esquissé entre le personnage et un insecte. Sa voix est comparée à celle d’une « cigale », le craquement de l’allumette tout comme sa toux « chitineuse » et proche d’un « grincement » font penser à une stridulation, faisant du religieux un nouvel insecte à ajouter au bestiaire de Bouvier. VERS LE BAC ÉCRIT > Dissertation
On peut décomposer l’expression pour en étayer chaque composante. L’univers du conte : – récit où le personnage principal est mis à l’épreuve – présence du surnaturel et de la magie noire qui règne sur l’île – proximité avec la légende d’Ulysse. La noirceur : – tonalité fantastique – présence obsédante des insectes – le narrateur dit vivre un « cauchemar ». L’exotisme : – décor tropical et insulaire – éloignement de l’Europe et des attaches familiales. 6 Bestiaire : le paon
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> Présentation des extraits 6 et 7 Les deux extraits amorcent une étude du bestiaire de Nicolas Bouvier. Le narrateur se détache progressivement des
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humains pour vivre en compagnie d’animaux et surtout d’insectes. On peut mener l’étude des textes séparément mais aussi conjointement si l’on veut étudier l’évolution du personnage. Dans le chapitre II, le paon est observé avec lucidité ; Bouvier porte un regard comique sur cet animal qui ne correspond pas à sa version idéalisée (comme dans la miniature indienne de l’école moghole). Dans le chapitre XVII, Bouvier est au bord de la folie : l’escarbot devient un compagnon de jeu et un interlocuteur ; c’est le regard même du personnage qui le transforme en héros épique. > Lire en écho La lecture de l’extrait de L’Antivoyage de Muriel Cerf peut compléter une réflexion sur le statut du narrateur. Ce qui est observé et raconté tient moins à la réalité qu’aux représentations du voyageur. Le paon descend de son piédestal sous le regard amusé Bouvier tandis que l’Orient promet d’être un espace de liberté et de non-conformisme pour Cerf, dévoilant ainsi au lecteur les ressorts de la création littéraire. > Réponse aux questions S’engager dans le texte 1. Le narrateur a été invité à souper et à dormir par l’épouse du douanier tamoul. Il est à l’écart de la soirée ; les convives jouent « dans [son] dos » alors qu’il est couché. La fête fonctionne comme un décor : le narrateur observe en spectateur attentif un paon ; le fait qu’il soit au lit rend propice la rêverie à laquelle il se livre (« Je battais un peu la campagne »). Interpréter 2. L’observation commence par une coïncidence : un paon est « à quelques pas » du narrateur. On pourrait donc s’attendre à une description objective de l’animal. Les l.10 à 15 créent cependant les conditions d’une rêverie. Bouvier se compare au paon (« aussi » l.16) chez lequel il « [flaire] une supercherie ». Il s’en remet donc à son intuition et cesse d’observer « ce » paon pour évoquer « le » paon en général. L’oiseau « n’a aucune réalité » selon lui ce qui renvoie bien à l’univers du songe. À l’animal réel, se superposent le motif artistique moghol, les paons balourds du Dekkan et l’image du banquet moyenâgeux. 3. L’auteur commence par contempler l’animal mais le regard est incisif et moqueur. Le paon serait un usurpateur ridicule : noble bête idéalisée dans l’art, il est en fait un oiseau qui ne sait pas voler. Le narrateur le condamne à orner des « pâtés géants », affirmant de façon cocasse que ce serait « sa véritable destinée ». 4. Deux propositions incises se dégagent entre tirets aux l.10-11 puis 22-24. La première a une valeur explicative ; Bouvier émet des hypothèses sur sa fièvre. La seconde a une valeur argumentative ; Bouvier renvoie à son expérience pour justifier son jugement. Bien que le narrateur semble immergé dans sa rêverie, on peut observer que les incises signalent l’intérêt qu’il porte à son lecteur. Le récit de voyage n’est pas un carnet intime, le réel est recomposé et adressé à un public.
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VERS LE BAC ORAL > Lecture expressive
La lecture orale suggère un travail des tonalités du texte. On peut demander aux élèves de qualifier l’atmosphère de chaque étape de la scène puis associer leurs remarques à une intonation. Il s’agirait de donner à entendre la mise en condition quasi lyrique des quatre premières lignes, la description amusante des convives ivres, l’apaisement lié au début de la méditation et le comique et l’ironie de la fin de l’extrait. > Écrit d’appropriation Les compétences sollicitées ou à affiner sont ici de deux sortes. Si besoin, on peut guider l’élève vers l’élaboration d’une description (ordre de la description et organisation du texte ; choix d’un temps verbal cohérent imposé ou non). Dans un deuxième temps, on attire l’attention de l’élève sur les procédés de la satire (à partir de l’étude de l’extrait/de ses connaissances/en travaillant à réécrire collectivement des propositions d’élèves). Proposer des images peut être un moyen de déclencher l’écriture. 7 Bestiaire : l’escarbot
> p. 59
> Lire en écho L’écho est plutôt thématique et peut permettre aux élèves de réfléchir sur la solitude. L’ermitage de Sylvain Tesson le conduit à une réflexion sur la vie de l’homme en société et sur ses besoins. La scène de l’escarbot est cocasse mais suggère tout autant un discours réflexif de l’homme sur lui-même : en se comparant à l’insecte dans la dernière ligne, le narrateur évoque avec lucidité et autodérision ce à quoi il est réduit. > Réponse aux questions S’engager dans le texte 1. L’expression dénote l’étonnement devant un milieu exotique où tout est disproportionné. Mais elle prépare aussi le comique de la scène : elle est aussi caricaturale que la créature dont le narrateur va faire la rencontre. Avant la lecture de l’extrait, on peut proposer aux élèves d’imaginer ce que serait un insecte « façon tropiques » et de le dessiner. Interpréter 2. Les comparaisons sont : « cinq fois plus gros que ceux que La Fontaine pouvait voir à Versailles » ; « la taille d’une tabatière de poche » ; « comme ces gisants impériaux (…) sans vie » ; « comme ces personnages-marmites (…) Bosch ». Elles permettent de se représenter l’insecte en mettant ses caractéristiques en regard d’objets et de références connues. Mais elles contribuent aussi à définir l’escarbot comme un personnage à part entière, un être doté d’émotions et de réflexion. Elles produisent enfin un effet comique par le décalage qu’elles induisent : la comparaison avec les gisants donne une grandeur disproportionnée à la petite bête là où celle avec les tableaux de Bosch confère à l’insecte un pouvoir terrifiant démenti par le rire du narrateur. On pourrait compléter cette question par le relevé et l’analyse des métaphores employées pour décrire l’escarbot. 3. L’escarbot est bien plus qu’un insecte sous la plume de Bouvier. Il est tout d’abord suffisamment exceptionnel pour
que le voyageur bondisse dans la rue alors que le barbier le rase (action étonnante qui pourrait faire écho à la réflexion sur le rasage de l’extrait 3). Surtout, il est personnifié et devient le compagnon du narrateur : Bouvier décrit ses pensées et émotions supposées (capacité à prévoir l.5-6 ; courroux l.9 puis 25 et 30 ; crainte et capacité à jouer la comédie l.11-12 ; lassitude l.19 ; incompréhension l.27). Plusieurs métaphores l’associent à un être humain : « citoyen de marcassite », « pensionnaire » ou « colosse ». La description de l’escarbot insiste sur le caractère exceptionnel de l’insecte : démesurément grand, avec des réactions excessives, c’est un personnage de comédie. 4. Le narrateur tisse une relation avec l’insecte : il le rencontre, l’installe dans sa chambre, se dispute avec lui. L’effet produit est comique car la scène révèle la perte de repères du personnage au bord de la folie mais aussi sa lucidité paradoxale. En s’associant à l’escarbot à la l.33, le narrateur se moque de lui-même mais aussi de tous les hommes dont la vie est rythmée par des rencontres, la recherche de confort et la difficulté à communiquer avec autrui. VERS LE BAC ORAL > Lecture expressive
En vue de la prestation orale, on peut demander aux élèves de rédiger la scène comme un extrait de théâtre. Mais une mise en scène muette pourrait s’avérer tout aussi intéressante. L’objectif est de mettre en évidence le comique de cette rencontre, de rendre visible ce qui est moins directement perceptible pour un élève dans le texte. Cette activité invite donc à une relecture de l’extrait après la mise en scène des élèves. 8 La renaissance
> p. 60
> Présentation de l’extrait Il s’agit de l’explicit. Cette page conclut le récit en en reprenant toutes les thématiques et se donne à lire comme une renaissance entre épiphanie et catharsis. On pourra réfléchir sur la citation de Céline qui clôt le livre : « Les pires défaites en tout, c’est d’oublier et surtout ce qui vous a fait crever ». En écrivant (longtemps après le voyage), Bouvier donne un sens à son expérience traumatique. > Lire en écho « Heureux qui comme Ulysse a fait un beau voyage… » écrit Du Bellay dans Les Regrets, alors qu’il aspire à rentrer chez lui. On amènera les élèves à réfléchir sur ce qu’apporte un voyage et sur ce qui motive qu’on en fasse le récit. Le voyage est une richesse qu’il soit vécu positivement (comme Miller) ou négativement (comme pour Ulysse et Bouvier). Mais ce qui en fait la valeur, c’est surtout le récit que les artistes en font, comme Homère, Miller ou Bouvier. > Réponse aux questions S’engager dans le texte 1. Les sentiments évoluent au fil de l’extrait : le personnage est « égaré » au début mais un sentiment de libération progressive le conduit à éprouver confusément de « l’allégresse ». C’est le cœur léger qu’il semble quitter Ceylan ; il constate qu’il y a été « prisonnier » mais ce dernier regard n’est pas associé à de la souffrance ou du regret. L’émotion 2 • Nicolas Bouvier, Le Poisson-scorpion (1982)
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laisse déjà place à une réflexion : en notant la « musique indicible » qui vibre dans la chambre, Bouvier promet déjà qu’il essaiera de mettre des mots sur cette expérience. 2. La mention du poisson-scorpion, dont la dernière apparition remonte au chapitre XV, permet de clore le récit et de lui donner une unité. L’animal est au seuil de l’œuvre, dans le titre ; il apparaît encore au chapitre I (cf. : extrait 1) ; puis au centre de l’œuvre (titre du chapitre X) ; le citer dans l’explicit permet d’équilibrer et de structurer le récit. À l’arrivée dans l’île répond le départ. Bouvier parvient à s’échapper : il a achevé son itinéraire du poisson au scorpion (signes astrologiques qui correspondent aux dates du séjour). Interpréter 3. Il y a alternance dans le texte entre mouvement et immobilité. Tout le passage est centré sur le départ du narrateur et sur la façon dont il va être rendu possible. Cela se traduit par l’expression du mouvement et des temps d’arrêt qui le perturbent tout autant qu’ils le mettent en valeur. Au début, le personnage se blesse brutalement (« aller donner du front »), puis il s’arrête (l.5) tandis que le sang, lui, ruisselle (l.5) ; il poursuit ensuite son chemin l.6 ; il rappelle qu’il a « touché le fond » ce qui s’oppose à l’expression « je remontais » qui suit immédiatement l.8. Sa tête se vide (l.9) ce qui s’oppose à la stagnation précédente (« pourrissait depuis trop longtemps » l.10) ; la mer est en mouvement en harmonie avec son cœur (« battait » l.12) ; puis il y a un temps d’arrêt (« assis » l.13) pendant que le narrateur observe « l’épanchement miraculeux » (l.14) ; suis un nouveau mouvement, le « retour » (l.15) dans la chambre avec le sang « se répandant partout » (l.15). Les sentiments se mettent en branle avec la montée de l’allégresse (l.17). À partir de cette ligne, le personnage est prêt à partir ce qui ne sera même pas dit dans l’extrait. Les derniers mouvements notés sont ceux des insectes qui lui disent adieu. 4. – « Je passai les mains (…) ruisselant » : proposition indépendante juxtaposée avec une autre proposition indépendante : « m’arrêtai pour lécher mes paumes » « – c’était délicieux et salé – » : proposition incise « poursuivis mon chemin (…) les insectes moribonds » : proposition indépendant coordonnée à « m’arrêtais pour lécher mes paumes » « que j’avais si souvent vus sur mon mur » : proposition subordonnée relative. La construction de la phrase évoque le mouvement. Les actions s’enchaînent de façon fluide (juxtaposition puis coordination) avec des temps d’arrêt (l’incise commente l’action). La dernière partie de la phrase est la plus longue et fonctionne par adjonction d’éléments (le gérondif, la comparaison, la subordonnée) comme pour signifier que le mouvement s’amplifie. 5. Le futur antérieur (« aurai bien voulu » l.1) marque une séparation entre Bouvier le personnage d’autrefois et le narrateur au moment de l’écriture. Le narrateur dévoile les pensées du personnage mais les organise pour leur donner sens. Il pratique même des coupes : « je ne veux plus nommer aujourd’hui » l.10-11 renvoie au temps de l’écriture. Le plus-que-parfait « avais été » l.25 suggère que Bouvier a déjà quitté l’île alors qu’il n’est pas encore sorti de la
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chambre dans le temps du récit ; celui-ci s’affiche donc comme rétrospectif. VERS LE BAC ÉCRIT > Commentaire
La renaissance du personnage : – le mouvement succède à l’immobilité et la légèreté à la pesanteur – le narrateur évoque la vie qui succède à la mort (l.7-8) – il se détache progressivement des insectes et animaux (l.6 opposée aux l.21-23) Une scène symbolique : – image cathartique de la purgation de l’expérience mauvaise – accord avec la nature – dimension « miraculeuse », magique et religieuse de la scène – adieu symbolique des insectes et du poisson-scorpion (associé aux points cardinaux cf. : extrait 1).
Lecture d’image Damien Hirst, Purgatorio (2009)
> p. 61
> Étude d’une œuvre 1. En utilisant comme matière des insectes, l’artiste puise dans la réalité. Il y a cependant bien un geste créatif : l’œuvre est composée comme l’atteste la disposition parfaitement symétrique des éléments. L’ensemble est harmonieux dans le dessin comme dans les couleurs. Le titre invite à une interprétation qui suggère que l’œuvre n’est pas un simple collage, tout comme la description qui lie la réalité scientifique (spécimens entomologiques) et la pratique artistique (peinture Hammerite sur toile). 2. Les émotions suscitées par le tableau sont contradictoires : la vue d’ensemble satisfait l’œil, procure un plaisir esthétique tandis que l’analyse du détail peut surprendre et susciter un certain dégoût. Le spectateur est invité à réfléchir sur la vie et sur la mort : Hirst exhibe la mort mais redonne une autre vie aux insectes en les immortalisant dans l’œuvre. On peut aussi lire le tableau comme une vanité moderne qui exposerait directement l’objet au lieu de le représenter. Ces émotions et réflexions devraient se retrouver dans les œuvres que les élèves découvriront avec l’activité « carnet de lecture ». 3. Le titre relie explicitement l’œuvre à la mort en même temps qu’il est une référence à Dante (soulignée par le choix de l’italien). Le tableau peut être mis en relation avec l’œuvre de Nicolas Bouvier dont le voyage s’apparente à une descente aux Enfers ou plutôt à un séjour au purgatoire dont l’écrivain parvient à s’échapper. La lecture de l’extrait 8 en regard de l’œuvre de Hirst peut être fructueuse, tout comme celle de l’extrait 7 et du texte proposé en atelier d’expression : les insectes sont en effet un des fils directeurs du Poisson-scorpion ; on observe que les deux artistes partagent thème et réflexion.
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Lectures complémentaires 9 Homère, L’Odyssée (viiie siècle av. J.C.)
> pp. 62-67
emploi du présent pour décrire, explications culturelles associées au détails mentionnés, référence à des savants comme Cornélius de Pauw.
> p. 62
2. La comparaison est une autre constante du documentaire. Pour décrire des hommes et des mœurs inconnus, Bougainville fait référence au connu. Les comparaisons permettent d’esquisser une histoire de l’humanité (où les peuples « incultes » diffèrent des Européens supposés civilisés) mais aussi de relativiser l’étonnement que pourraient susciter les Tahitiens nus et tatoués. En associant cette pratique à une « mode comme à Paris », l’explorateur suggère la proximité entre les hommes plutôt que leur disparité.
> Présentation de l’œuvre et de l’extrait Après quatre chants situés à Ithaque, le chant V met en scène le personnage d’Ulysse. Le voyage du héros commence donc par la fin et remet en perspective le périple accompli. > Lire en écho 1. L’île est à l’image de son habitante, très belle. Elle est propre à satisfaire tous les sens : chaleur du feu, beauté de la déesse et douceur de sa voix, parfums agréables. C’est donc un endroit digne d’un dieu comme Hermès. Le v.25 souligne la proximité entre les deux personnages ; même si Calypso n’est qu’une nymphe, elle partage avec Hermès l’immortalité. On peut montrer aux élèves le tableau de Jan Brueghel l’Ancien qui représente la grotte extraordinaire. 2. Ulysse, simple mortel, est en revanche à l’écart. Il n’est pas à sa place dans ce décor divin et paradisiaque. Homère indique qu’il est à l’extérieur de la grotte ; la mention du « promontoire » le sépare encore de Calypso puisqu’elle suggère qu’il est tourné vers la mer, vers l’ailleurs. Enfin, sa mélancolie profonde (on pourra analyser le v.29) contraste avec la satisfaction d’Hermès : pour lui, l’île est une prison, il veut fuir. 3. Cette situation rapproche le héros d’Homère de Nicolas Bouvier. Prisonnier de Ceylan comme le poisson-scorpion dans son bocal, Bouvier n’aspire qu’à quitter ce décor illusoirement paradisiaque. Les références à L’Odyssée sont nombreuses dans le récit ainsi qu’on peut le voir dans le parcours de lecture (citation en page d’ouverture, extrait 3) mais aussi dans d’autres passages (par exemple, l’épicière qui détient le poisson-scorpion s’appelle Circé). Bouvier revendique sa filiation avec le héros antique, d’abord parce que ce type de référence est une tradition du genre, mais surtout parce que l’itinéraire des deux personnages présente des similitudes : le voyage est une mise à l’épreuve, il révèle le personnage à lui-même (cf. : la mise à nu dans la scène du rasoir dans l’extrait 3). 10 Louis-Antoine de Bougainville, Voyage autour du monde (1771)
> p. 63
> Présentation de l’œuvre et de l’extrait Bougainville est un explorateur et non un écrivain. Le récit qu’il fait de son tour du monde n’est cependant pas un simple journal de bord mais une composition rétrospective qui inspirera Le Supplément au voyage de Bougainville de Diderot et contribuera à l’installation du mythe du « bon sauvage ». C’est pourquoi l’extrait choisi correspond à la découverte de Tahiti. > Lire en écho 1. L’expédition de Bougainville est avant tout scientifique. L’officier de marine a été missionné par le roi Louis XV afin de réunir des « connaissances utiles à l’humanité » comme il l’écrit dans la dédicace. L’ambition est donc documentaire. L’extrait présente les caractéristiques du texte explicatif :
3. « La nouvelle Cythère » est une façon valorisante de désigner l’île. Associée à la déesse Aphrodite, l’île grecque a une connotation paradisiaque qui rejaillit sur Tahiti. Mais Cythère est aussi le lieu devant lequel passe Ulysse avant d’être détourné vers les Lotophages. En nommant l’île ainsi, Bougainville lui confère une dimension légendaire. Comme dans l’œuvre de Bouvier, les relations entre fiction et réalité sont poreuses. 11 Henry Miller, Préface au Colosse de Maroussi (1972)
> p. 64
> Présentation de l’œuvre et de l’extrait La préface, postérieure au récit lui-même, ne propose pas la lecture d’un récit de voyage mais bien un discours réflexif sur le voyage lui-même. L’extrait permet de compléter l’étude du Poisson-scorpion, en s’intéressant à la façon dont le voyage transforme l’homme et l’écrivain. > Lire en écho : réponse aux questions 1. La transformation de Henry Miller est explicite et s’apparente à une épiphanie, une « révélation ». Miller a pu admirer les beautés naturelles de la Grèce (l.17 à 19) mais son enrichissement est surtout intellectuel. Il a découvert la valeur de l’être humain, bien au-delà de la nationalité (cf. énumération de la l.11). Le Colosse de Maroussi s’achève d’ailleurs sur cette profession de foi et ce message humaniste : « je refuse catégoriquement, à l’avenir, de tomber au-dessous de cette condition de citoyen du monde que je me suis accordée en silence, debout devant le tombeau d’Agamemnon. À dater de ce jour-là, j’ai dévoué ma vie à la restauration du caractère divin de l’homme. Paix à tous les hommes, dis-je, et vie plus abondante ! » 2. La Grèce selon Miller n’est pas qu’un pays. Sa beauté naturelle est extraordinaire, légendaire (« lumière surnaturelle » l.18) mais elle est surtout indissociable de la culture qu’elle recèle. Carrefour migratoire (l.15), « terre des héros et des poètes », la Grèce est le paroxysme de la civilisation. 3. Légende et réalité sont intimement liés dans le texte de Miller ; elles se confondent, au point que le pays n’est plus un lieu concret mais un « état d’esprit » que l’auteur peut revisiter virtuellement (l.5-6). Dans Le Poisson-scorpion, Ceylan représente moins un lieu géographique réel (l’île n’est pas nommée) qu’une impasse dont Bouvier doit s’extraire. 2 • Nicolas Bouvier, Le Poisson-scorpion (1982)
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12 Muriel Cerf, L’Antivoyage (1974)
> p. 65
> Présentation de l’œuvre et de l’extrait La proximité entre les œuvres de Nicolas Bouvier et Muriel Cerf est grande bien que les trajectoires des voyageurs soient inversées. Dans l’une comme dans l’autre, le voyage réel passe au second plan : Ceylan n’est que le décor d’une expérience personnelle douloureuse, Bombay celui d’une expérience enthousiasmante dont l’auteure a l’intuition avant même le départ de Paris ainsi que le suggère l’extrait qui se situe au seuil du voyage, au moment du départ. > Lire en écho 1. Les deux jeunes filles n’ont pas encore décollé mais la perception du temps est déjà modifiée. La narratrice ne compte plus les minutes et se projette dans le « temps-illusion » qu’elle croit être celui du monde oriental. L’emploi du futur (l.8-10) implique une certitude de ce qui va arriver comme si l’Inde était déjà atteinte. On peut néanmoins noter l’autodérision du personnage qui se présente encore comme une « ignare ». 2. Rita et Muriel sont pleines d’espoir (l.15). L’ailleurs est présenté comme un lieu paradisiaque (un « jardin des Héspérides »). Les jeunes filles ont soif de liberté, elles souhaitent échapper à un monde contraignant et médiocre (l.25-26). Le voyage est donc présenté comme une transgression (l.18-19), un espace où sera permis tout ce qui est interdit dans leur pays natal. 3. Si la narratrice rêve déjà sa vie indienne, le récit s’ancre cependant dans la réalité. L’Inde sera atteinte en « charter » et la scène se déroule dans un banal aéroport où les avions ont du retard. On peut comparer ce passage à l’arrivée de Nicolas Bouvier dans l’île : après avoir traversé l’Inde et avant d’atteindre Galle (que l’auteur nomme et décrit avec précision), Bouvier doit se faire vacciner et obtenir un visa. Le voyage est une aventure mais il s’inscrit aussi dans une réalité banale. 13 Hugo Pratt, « Corto Maltese » (1970)
> p. 66
> Présentation de l’œuvre et de l’extrait L’album « Sous le signe du Capricorne » réunit plusieurs aventures de Corto Maltese. L’extrait proposé est une page de transition qui relie deux histoires du célèbre marin. Proche par ses thématiques de l’œuvre de Bouvier, elle permet d’élargir l’analyse littéraire à l’univers de la BD. > Lire en écho 1. Pour Corto, voyager n’est pas un choix (« Je ne suis pas de ceux qui prennent racine »). Bouche Dorée le met en garde contre la posture de marin errant qu’il adopte. Selon elle, Corto poursuit une quête impossible (« Ce que tu cherches n’existe pas »). En lui disant qu’il est « aveugle comme une taupe », elle sous-entend que ce n’est pas par le voyage qu’il se trouvera mais en effectuant un retour sur lui-même. 2. Corto est un personnage énigmatique comme en témoigne ses réponses évasives dans les cases 2 et 4, le fait qu’il ne demande pas d’explication à Bouche Dorée dans la case 6 ou encore son absence de réponse dans la case 3.
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Ce caractère insaisissable se perçoit graphiquement : il apparaît de loin et de dos dans deux des images ; il est le plus souvent dessiné de profil, regardant au loin ou évitant le regard des autres personnages (notamment dans la dernière case où il sort presque du cadre). Dans la seule image où il apparaît de face, il est à l’arrière-plan et ses traits sont peu distincts. 3. L’exotisme se manifeste dans les éléments de décor (palmier, fauteuil et ombrelle tressés) mais ceux-ci sont peu nombreux. Les plans sont majoritairement resserrés et se concentrent sur les personnages. Le caractère insaisissable du héros contribue à créer une ambiance mystérieuse mais c’est aussi le cas du personnage de la magicienne : son nom (avec l’accent sur la bouche d’où sortent les augures), sa tenue, ses répliques la rapprochent d’une pythie moderne. Elle a d’ailleurs vraiment le don de seconde vue dans l’album. Le monde de Corto est à la fois réel et légendaire, tout comme celui de Bouvier. 14 Sylvain Tesson, Dans les forêts de Sibérie (2011)
> p. 67
> Présentation de l’œuvre et de l’extrait Dans les Forêts de Sibérie suit les codes du récit de voyage (déplacement, installation, découverte d’un lieu etc.). Tesson ne rencontre cependant personne (ou presque), axant le voyage sur l’introspection. L’extrait proposé illustre cela : on y voit le narrateur créer (une table) et réfléchir aux enseignements que l’on peut tirer de l’ermitage. > Lire en écho 1. L’ermitage s’accompagne d’un apaisement (l.14). La diminution du nombre d’activités possibles redonne du sens à ces activités. Ainsi Tesson éprouve une réelle satisfaction en construisant la table dont il retrace pas à pas l’élaboration. Le champ d’actions est limité mais l’auteur affirme que cette limite n’est pas une privation de liberté ; c’est au contraire une « source de joie ». La vie solitaire permet de reconsidérer la vie en société : « le citadin » qui peut tout faire mais ne profite de rien est-il moins résigné que celui qui est isolé dans la nature ? 2. L’auteur évoque les « robinsonnades » à la l.20 mais le parallèle entre lui-même et le héros de Daniel Defoe commence plus haut lorsqu’il se compare à un « naufragé » sur son « île ». L’univers marin est déjà discrètement présent dans la forme « en conque » du cèdre (l.8) et l’association de la table à un « bastingage » (l.11). C’est donc dans l’ensemble de l’extrait que le personnage de Robinson apparaît en filigrane. Les deux personnages, isolés dans la nature (la table, personnifiée, est la seule compagne de Tesson), sont amenés à reconsidérer leur vie. 3. La référence à Robinson (tout comme celle à Ulysse dans Le Poisson-scorpion) est une caractéristique fréquente du genre : le voyageur se place sous la tutelle d’un voyageur antérieur et illustre. L’auteur confère ainsi à son expérience réelle une dimension légendaire et mythique. De même, la réflexion du narrateur a une vocation universelle (cf. emploi de l’article défini à valeur généralisante : « le naufragé ; « l’ermite » ; « le citadin »).
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ARTISTIQUE PROLONGEMENT ET CULTUREL
> pp. 68-71
Le reportage photographique : capturer le réel ou le transformer ?
> pp. 68-69
> Introduction Le prolongement artistique et culturel permet de transposer dans le domaine de la photographie la réflexion engagée sur la littérature avec l’étude du Poisson-scorpion : la réalité est-elle à capturer ou à (ré)inventer ? Cette réflexion est à contextualiser : le rapport au réel et à l’art évolue considérablement entre le xixe et le xxe siècle. Le perfectionnement rapide de la photographie (retracé dans l’encadré p. 68) oblige l’artiste à renouveler son rapport à la réalité et au monde. La citation de Larrain et la photo de Feininger sont réflexives : elles interrogent la place du photographe, promeneur solitaire et rêveur chez Larrain et sujet de l’œuvre dans la photo. La photographie n’est pas qu’un acte technique, c’est une démarche d’artiste. On peut commencer l’étude du prolongement par l’histoire de la photographie. L’analyse des autres documents peut se faire séparément ou conjointement : la question 1 p. 69 les réunit. > Écrit d’appropriation L’exercice permet de poursuivre conjointement deux objectifs : l’appropriation culturelle d’une part, avec l’acquisition de connaissances sur l’art de la photographie ; le perfectionnement de la technique de la prise de notes d’autre part. À ce titre, l’exposé de Michel Poivert est aisé à suivre, les cinq étapes présentées étant clairement mises en valeur par l’historien. Étape 1 : 1830-1870 : la photo est une invention qui se perfectionne avec Niepce, Daguerre et Talbot. Étape 2 : à partir de 1890 : la photo amateur : la photo est une mémoire du monde, prise par n’importe quelle personne qui « appuie sur le bouton ». Pas de dimension artistique. Étape 3 : dans les années 1900 : les pictorialistes : la pratique esquisse un mouvement vers le domaine artistique. Étape 4 : dans les années 1930 : l’information : la photographie est associée à l’essor des magazines ; on reconnaît son pouvoir émotionnel. Étape 5 : deuxième moitié du xxe : la photographie contemporaine, reconnue comme une forme artistique. > Réponse aux questions 1. La citation de Sergio Larrain insiste sur la démarche artistique du photographe. Celui-ci ne saurait être simplement une personne qui active un bouton parce qu’il est en face d’un objet mémorable. Il y a de lui dans son œuvre (et il vaut mieux être « de bonne humeur »). Larrain se dépeint comme un aventurier mais aussi comme un contemplateur. Le photographe, que ne renierait pas Victor Hugo, doit « regarder » puis « regarder encore » c’est-à-dire déceler l’invisible dans le visible, capturer l’inconnu dans le réel (« ce que l’on n’a jamais vu »). Il détient un pouvoir démiurgique, suggéré par l’idée que « les images apparaissent ». La photo d’Andreas Feininger représente Dennis Stock comme une créature étrange, presque hybride, dont les yeux se fondent avec le flash et l’objectif. Le photojournaliste semble être celui qui voit autrement, à l’image des devins aveugles de
la mythologie. De plus, le photographe est suffisamment important pour être le sujet de la photographie : ce n’est pas un simple opérateur mais un être à part dont le statut mérite d’être interrogé. On peut enfin remarquer que l’artiste se dédouble dans un jeu de miroir ou de mise en abyme. Qui peut dire ce qu’est un photographe sinon un autre photographe ? Le cadrage serré et frontal de Dennis Stock donne l’impression que Feininger se regarde lui-même. Le jeu sur les ombres dévoile et en même temps dissimule le photographe : il en va de même dans l’œuvre du photojournaliste qui doit s’effacer tout en affirmant sa présence. 2. Les trois adjectifs pourraient convenir. La photo est documentaire puisqu’elle contribue à rendre visible une réalité, la présence des enfants vagabonds dans la capitale chilienne. La photo est aussi artistique : on peut observer comment l’enfant saisi en entier et en plein mouvement s’oppose par la clarté qui l’entoure aux enfants anonymes de la partie supérieure, assis sur le pont dont on remarque la noirceur. L’analyse des lignes dessinées par la photo serait intéressante et notamment des diagonales puisque la barre du pont, la jambe de l’enfant dans l’alignement de l’enfant au-dessus et la branche de l’arbre forment un dessin parfaitement symétrique. Enfin, la photo semble recouvrir une dimension argumentative. Le titre, « los abandonados » pousse à s’interroger sur l’agent de cet abandon et peut-être sur son inertie. Livrés à eux-mêmes, les enfants déguenillés et pieds nus sont représentés dans un espace incertain, sur et sous un pont, entre terre et ciel. Accrochés au pont, à cette construction humaine qui relie deux bords de la cité, les enfants semblent à la fois faire partie de la ville et s’en détacher, inclus et exclus de la société.
CONTEXTE La photographie, document ou œuvre d’art ? L’Amérique de la Grande Dépression
> p. 70
La double-page précédente met l’accent sur l’évolution de la photographie dans une perspective historique et diachronique. Il s’agit ici de s’intéresser à un mouvement, le style documentaire, dont la double-page présente trois grandes figures : Hine qui l’initie, Evans qui le théorise, Lange qui le pratique. Le premier contexte présente l’interrogation au cœur du prolongement : une photo peut-elle être simultanément documentaire et artistique ? Le second contexte permet de situer le travail de Dorothea Lange intimement lié à l’Histoire des Etats-Unis et d’introduire l’analyse d’image de la page suivante. Les deux photos en p. 70 sont des documents. Hine réalise un reportage sur le travail des enfants, Lange donne à voir l’intérieur des maisons des victimes de la Grande Dépression ; les titres sont redondants avec ce qui est montré. Les scènes sont banales mais leur analyse révèle une démarche artistique. On pourra repérer le dynamisme du cadrage de la première photo malgré l’immobilité du garçon ; la verticalité des objets dans la seconde. Ces photos sont des mises en scène, ainsi qu’en témoigne le regard du jeune livreur qui semble nous interpeller directement. On peut attribuer aux images une dimension argumentative. Hine semble dénoncer l’exploitation du jeune homme ; Lange souligne le dénuement de la cuisine. 2 • Nicolas Bouvier, Le Poisson-scorpion (1982)
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> Carnet de lecture Cette activité peut être réalisée en amont de l’étude du style documentaire ou venir la compléter. Il s’agit d’élargir la culture de l’élève (notamment à la photographie européenne), de lui permettre d’effectuer des choix personnels et d’argumenter son point de vue, tout en (ré)activant les connaissances méthodiques de l’analyse d’image. L’expression « photographie humaniste » est à interroger afin de mettre en lien la démarche artistique et l’expression d’une vision de l’homme et du monde. Étude d’une œuvre Dorothea Lange, Migrant Mother (1936) Cette photo très célèbre permet de mettre en évidence la valeur intemporelle des photos appartenant au style documentaire. Son pouvoir émotionnel, son universalité ont permis à cette image de traverser les décennies indépendamment du contexte historique appartenant aujourd’hui au passé. > Réponse aux questions 1. Cette photo est un portrait de Florence Owens Thomson. Le cadrage vertical (redoublé par l’avant-bras qui conduit l’œil au visage du sujet), le plan rapproché à hauteur d’objectif, mettent en valeur le personnage comme isolé dans un décor presque inexistant. Ce n’est que dans un deuxième temps que le spectateur repère les enfants. Deux têtes anonymes nous tournent le dos ; leurs chevelures dont la couleur contraste avec celle de Florence font comme un écrin pour celle qui est leur mère ainsi que le souligne le titre. On distingue à peine le visage du troisième enfant blotti contre le sein maternel et rendu visible par la surexposition du cliché. Peaux et vêtements se confondent par les couleurs et la texture de l’image comme pour mettre en évidence le dénuement de cette famille. 2. La mère semble perdue dans ses pensées et regarde au loin comme si elle était inconsciente de l’objectif qui la vise. L’image semble prise sur le vif. Les circonstances de la prise de vue indiquées dans le chapeau contredisent cette impression de naturel. En bas à droite de l’image, le pouce retient la tente : c’est un indice que la mère se donne à voir volontairement, que la photo est posée. L’image a d’ailleurs longtemps été reproduite avec une retouche, l’effacement du doigt, attestant de la volonté de gommer le caractère artificiel de la photo. La photo est donc un document, la situation de cette femme est réelle, mais elle est aussi une œuvre d’art, une réalité représentée. 3. L’image est intemporelle car elle peut être détachée de son contexte. Peu importe que Florence Owens Thomson soit une américaine victime de la crise économique des années 1930 : elle est avant tout une mère qui souffre. C’est ce que retient le titre, volontairement indéfini. Son regard inquiet et grave pourrait être celui de toute mère soucieuse pour ses enfants. Elle n’est donc pas sans rappeler les Pietà qui traversent les arts (on pourrait en montrer certaines aux élèves, celle de Michel-Ange bien sûr, mais aussi d’autres moins connues comme celle d’Emmanuel Lambardos ou celle, plus contemporaine, de David LaChapelle photographiant Courtney Love en 2006)
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> Carnet de lecture Tout comme Dorothea Lange, Walker Evans a été engagé par la FSA pour documenter la grande dépression. Allie Mae Burroughs, épouse d’un métayer d’Alabama est devenue une icône, le visage même de la Grande Dépression. Les photos de Lange et Evans sont reliées par des circonstances historiques identiques et ont été prises la même année, en 1936. Mais le travail des deux artistes présente d’autres points communs. Le décor est gommé, l’attention recentrée sur le personnage principal ce qui est encore plus frappant sur le cliché d’Evans dont le cadrage est très resserré. Les deux visages portent les stigmates de la pauvreté et de la souffrance. On y lit de l’inquiétude mais aussi de la dignité voire un air de défi : si Florence Owens Thomson semble ignorer le spectateur, Allie Mae Burroughs nous regarde droit dans les yeux (Evans a réalisé une série, sur certaines images que les élèves pourraient trouver, elle arbore un sourire de Joconde intéressant à analyser). Dans les deux cas, les photographes semblent s’effacer devant leur sujet.
ATELIER LANGUE & EXPRESSION
Écrit
> pp.72-73
Écrire un récit d’aventure > Introduction Dans Le Poisson-scorpion, Nicolas Bouvier joue fréquemment de la frontière entre réalité et fiction. La littérarité du récit naît de la façon dont il transfigure ses observations réelles, souvent banales, et leur donne une tonalité tantôt épique, tantôt fantastique ou comique propre à éveiller l’intérêt du lecteur. Dans cet atelier d’écriture, l’élève a donc à son tour la charge de transformer une anecdote banale en texte littéraire. La séance peut être menée suite à l’analyse de l’épisode de l’escarbot (extrait 7, p. 59) ou au contraire en préalable à l’étude de cette scène. Les procédés propres à la tonalité épique sont aisément identifiables et les exercices des p. 74-75 peuvent aider les élèves à affiner leurs connaissances. > Réponse aux questions Les trois étapes proposées peuvent être aménagées en fonction des compétences des élèves. L’étape 1 demande une attention à la cohérence générale d’un texte et aux liens qui unissent ses composants. C’est une étape décisive pour des élèves en difficulté : on peut cependant envisager, dans une classe où cette étape ne poserait guère de problème, de fournir un canevas commun aux élèves afin que leurs textes de départ soient identiques, ce qui permettraient de mesurer encore plus nettement les modifications induites par l’apport de la tonalité épique. Exemple : J’entendis le réveil. Je me levai. Je m’habillai. Je sortis de la maison. J’allai à l’arrêt de bus. Je pris le bus. L’étape 2 pousse l’élève à s’interroger sur la façon dont ses choix de mots et d’expression modifient le sens d’un texte. Cette phase peut se pratiquer individuellement ou en groupe. On pourra inciter les élèves à comparer les phrases modifiées avec les phrases d’origine afin de mettre en évidence la richesse sémantique des phrases transformées.
1 • Le roman et le récit du xviiie siècle au xxie siècle
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Exemple : 1. J’ouvris la porte // 2. Rassemblant mon courage, je franchis la barrière imposante qui me séparait du monde extérieur. L’étape 3 constitue une étape de perfectionnement. Elle peut être mise en relation avec un travail de grammaire sur les constituants de la phrase. Elle permet aussi de travailler la ponctuation (à laquelle on pourra demander d’être attentif notamment au moment de la mise en voix). On pourra envisager une restitution commune où les élèves liraient leur texte à l’ensemble de la classe. Ou encore un travail de rédaction ou d’amélioration collective d’un texte.
Circé. Au terme de son périple, il rejoint le port d’Ithaque. C’est alors qu’il tue tous les prétendants. Depuis longtemps, ceux-ci souhaitaient lui voler son épouse. 2. Ulysse veut regagner sa patrie : il entreprend un long voyage pendant lequel il traverse plusieurs fois la Méditerranée et essuie des tempêtes. Il affronte le Cyclope avant d’aborder chez les Lestrygons qui sont des mangeurs d’hommes. Après qu’il a échappé à la magicienne Circé, il rejoint le port d’Ithaque. C’est alors qu’il tue tous les prétendants car ils souhaitaient lui voler son épouse.
Les mots de… l’aventure
ÉTUDE DE LA LANGUE
> pp. 74-75
L’expression du temps et Juxtaposition, coordination et subordination > Corrigé des exercices Exercice 1 1. Les compléments de temps sont : « Depuis notre départ de San Fernando », « dans la matinée » (groupes nominaux), « lorsqu’on n’est que légèrement blessé » (proposition subordonnée) et « avant de recevoir des blessures plus graves » (infinitif). 2. Depuis que nous sommes partis de San Fernando, nous n’avons pas encore rencontré un seul canot sur cette belle rivière. Tout annonce la plus profonde solitude. Nos Indiens avaient pris, pendant que la matinée s’écoulait, au hameçon, le poisson que l’on désigne dans le pays sous le nom de caribe ou caribito, parce qu’aucun autre poisson n’est plus avide de sang. Il attaque les baigneurs et les nageurs auxquels il emporte souvent des morceaux de chair considérables. Après avoir reçu une légère blessure seulement, on a de la peine à sortir de l’eau avant que l’on reçoive des blessures plus graves. Exercice 2 Juxtaposition : Depuis notre départ de San Fernando, nous n’avons pas encore rencontré un seul canot sur cette belle rivière : tout annonce la plus profonde solitude. Coordination : Depuis notre départ de San Fernando, nous n’avons pas encore rencontré un seul canot sur cette belle rivière donc tout annonce la plus profonde solitude. Subordination : Depuis notre départ de San Fernando, nous n’avons pas encore rencontré un seul canot sur cette belle rivière si bien que tout annonce la plus profonde solitude. L’exercice, assez simple, permet de mettre en évidence le lien de causalité implicite qui existe entre les deux phrases dans le texte original et assure la cohérence du texte. Exercice 3 : 1. À la fin de la guerre de Troie, pour regagner sa patrie, Ulysse entreprend un voyage. Pendant des années, il traverse plusieurs fois la Méditerranée. À plusieurs reprises, il essuie des tempêtes. Parmi les premières épreuves, il affronte le Cyclope. Il aborde ensuite chez les Lestrygons, des mangeurs d’hommes. Il échappe enfin à la magicienne
Exercice 1 Le mot a pour origine le latin populaire « adventura », « ce qui doit arriver ». Les notions d’avenir et d’imprévisibilité sont fortement attachées au terme mais on peut observer une évolution dans son emploi. En ancien français l’aventure est synonyme de sort (comme dans « bonne aventure ») puis de hasard : l’aventure ne nécessite pas de participation de celui qui la vit. Cependant, le mot va se spécialiser pour désigner des événements singuliers et frappants et progressivement l’aventurier va naître : ce sera celui qui, au lieu de subir, sollicite les événements même s’il ne peut échapper à une part d’imprévu. Le mot s’enrichit de nouvelles acceptions et désigne alors des entreprises humaines souvent risquées et courageuses. Sans complétement le maîtriser, l’homme prend en main son destin. Exercice 2 a. aux nombreuses péripéties (impliquant des événements extraordinaires et parfois dangereux) b. le sort, le destin c. entreprise (remarquable par les difficultés et les risques) d. au hasard e. équipées (proche de prouesses, quêtes, épreuves) f. une liaison éphémère Exercice 3 On peut imaginer des phrases à partir des dérivés suivants : « aventurier », « mésaventure », « aventureux », « aventureusement », « aventurisme » ou « aventurer ». Exercice 4 La merveille est ce qui surprend, étonne mais aussi ce que l’on regarde et qui suscite l’admiration. Si de nos jours, l’appréciation positive l’emporte sur l’étonnement, ce n’est pas encore le cas à l’époque de Marco Polo. En intitulant son œuvre Le Livre des merveilles, il insiste sur le caractère prodigieux et extraordinaire de ce qu’il a vu. Son récit fait d’ailleurs une large place à l’exagération et tient parfois du récit merveilleux, comme le conte qui accepte la présence du surnaturel, de la magie. Exercice 5 Hugo a recours à la métaphore pour désigner Roland et Olivier. Les deux chevaliers sont présentés comme « deux enfants riant à leurs familles » dans le premier vers de l’ex2 • Nicolas Bouvier, Le Poisson-scorpion (1982)
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trait avant de se transformer en « deux spectres d’airain », « deux fantômes » puis « deux masques ». Dans une gradation inversée, chaque vers voit diminuer l’humanité des deux personnages, progressivement réduits à la rage de combattre, à cette « flamme » que laissent voir leurs masques. On peut proposer aux élèves d’imaginer d’autres métaphores terrifiantes indépendamment du poème ou bien d’insérer des groupes nominaux intermédiaires entre les « enfants » et les « spectres » comme par exemple « deux chevaliers pleins d’ardeur », « deux guerriers enragés » etc. Exercice 6 a. L’adjectif « grandissime » fonctionne comme un superlatif tandis que l’énumération des pays traversés souligne l’ampleur du voyage. b. Dans la première phrase, les faucons sont décrits grâce à une accumulation de superlatifs relatifs qui met en avant leur caractère extraordinaire (« les meilleurs », « les plus braves » et « les mieux volants »). Dans la seconde phrase, l’adverbe « démesurément » est hyperbolique tout comme proposition corrélative consécutive finale (« si…qu’il n’est oiseau qui puisse échapper à leur vol ») c. La comparaison « comme des ânes » induit une hyperbole tout comme le poids attribué à la queue (« trente livres et davantage »). On retrouve une proposition corrélative consécutive introduite par deux adjectifs ; la répétition de l’adverbe de degré « si » amplifie l’importance de la queue. d. On peut relever l’hyperbole « plus de six mille hommes », l’énumération des couleurs (« tout vermeil, vert, azur, bleu paon et jaune, enfin, de toutes les couleurs ») et les propositions corrélatives consécutives (introduites par « si vaste que… » et « si bien vernissés qu’… ») > Construire son vocabulaire Cette activité peut être réalisée de façon individuelle ou en groupe avec la constitution d’une carte collective au tableau. On peut partir de la liste des textes étudiés et demander aux élèves de proposer un mot par catégorie pour chaque texte. Il s’agit d’enrichir son vocabulaire pour le mettre au service de la lecture des textes dont l’analyse requiert le choix du mot juste.
F I C H E D E S Y N T H È S E Le récit de voyage du xviiie au xxie siècle
> p. 76
> Introduction En préalable, on pourra distinguer les textes appartenant au genre « récit de voyage » des textes proposant des histoires de voyage comme l’extrait d’Homère et celui d’Hugo Pratt. La fiche permet de mettre en évidence la porosité du récit de voyage avec d’autres genres littéraires puisque la première ligne du tableau met en évidence les liens que le genre entretient aussi bien avec le témoignage, qu’avec l’autobiographie, le roman ou l’essai. On pourra remarquer la tension entre réalité et fiction à mettre en lien avec la problématique de la séquence : les auteurs de récit de voyage partent tous d’une expérience concrète et personnelle. Celle-ci devient littéraire quand cette réalité est re-présentée, mise en perspective parfois
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jusqu’à glisser vers la fiction (Bouvier et Cerf). Même un texte à vocation documentaire comme celui de Bougainville offre une vision personnelle, réfléchie et recomposée du voyage scientifique effectué. > Réponse aux questions de synthèse 1. Le récit de voyage s’inscrit entre universalité et singularité. Les auteurs se confrontent à des lieux et des sociétés inconnus et sont donc attentifs au monde extérieur qu’ils décrivent et dont ils rendent compte pour leurs pairs. Mais leur statut d’étranger dans le monde visité les pousse à l’introspection : le voyage implique un retour sur soi, sur sa culture et plus généralement une réflexion sur l’homme et l’homme dans le monde. 2. Bouvier est sans doute l’auteur dont l’introspection est la plus flagrante. Le Sri Lanka, milieu hostile pour le personnage, n’est même pas cité dans le récit et l’écrivain-voyageur passe l’essentiel de son séjour dans sa chambre, replié sur lui-même. L’œuvre se distingue donc des autres récits de voyage mais on remarquera que Bouvier ne manque pas de s’inscrire dans une tradition – autre caractéristique du genre – puisqu’il esquisse un parallèle entre Ulysse et lui (tout comme Tesson se compare à Robinson par exemple).
V E RS L E B A C
> p. 77
Sujet bac Dissertation > Introduction Cet exercice engage les points essentiels de la démarche conduisant à la maîtrise de la dissertation à l’exception de la recherche d’arguments (qui peut cependant venir en prolongement de la question 8). Il est adaptable en fonction du moment de l’année où il est réalisé : on peut envisager que l’étape 3 soit réalisée à l’oral par exemple. On peut aussi tout à fait réduire le sujet à l’étude du Poisson-scorpion à la place ou en complément du travail sur l’ensemble des auteurs de la séquence. > Réponse aux questions 1. Selon Jacques Meunier, un écrivain-voyageur n’est pas un écrivain qui voyage ou un voyageur qui écrit ; il présente le voyage et l’écriture comme indissociables. 2. Les voyageurs : Bougainville encore que cela puisse être nuancé. Les écrivains : Homère, Hugo Pratt ; leurs œuvres sont ici mises à part ; on peut établir qu’elles ne sont pas à proprement parler des « récits de voyage » même si Pratt nourrit son œuvre de ses propres aventures. Les écrivains-voyageurs : Bouvier ; Miller, Cerf et Tesson (auxquels on peut ajouter Cendrars et Depardon s’ils ont été choisis en lecture cursive). Les écrivains-voyageurs sont majoritaires. 3. a. L’histoire du voyage a autant d’importance que le voyage : Bouvier ne quitte presque pas Galle dans Le Poisson-scorpion ; le récit est davantage centré sur l’expérience du voyageur que sur le voyage lui-même qui n’est que peu abordé. On pourrait aussi citer Sylvain Tesson dont le voyage est motivé par la perspective d’écrire. b. Le voyage déclenche une réflexion personnelle que l’auteur s’attache à mettre en mots. C’est vrai pour tous les auteurs abordés. Henry Miller en est peut-être l’exemple le
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plus frappant puisque la préface insiste moins sur le voyage que sur les conséquences du voyage. c. Le voyage est le point de départ et la matière du récit : on pourra s’appuyer sur le premier chapitre du Poissonscorpion qui raconte l’arrivée dans l’île mais aussi sur les titres des œuvres qui placent le voyage au cœur du récit : Voyage autour du monde de Bougainville ; L’Antivoyage et Muriel Cerf ou Dans les forêts de Sibérie de Sylvain Tesson.
> Réponse aux questions I – Avant la lecture 1. En confrontant la photographie en couverture et le titre, si la datation ne sera peut-être pas évidente pour les élèves, le vêtement colonial et le pont de singe – si caractéristique – renverront certainement les élèves vers un ensemble de mots voire de stéréotypes qui construiront un horizon d’attente.
4. Cette phase est cruciale car souvent négligée par les élèves. On peut proposer aux élèves de lister les différentes organisations possibles et de les comparer. La logique serait d’obtenir un plan suivant c/a/b. Mais on pourrait accepter a/c/b où c. viendrait nuancer a.
2. La quatrième de couverture permet d’identifier le récit autobiographique mêlant les différents temps : temps de l’enfance, temps du souvenir et temps de l’écriture. En outre, il justifie la raison de son livre : « retourner en arrière, recommencer, essayer de comprendre ». Cependant cette annonce d’autobiographie cache d’autres volontés à la fois littéraires et historiographiques.
5. On peut souligner la variété possible des exemples, l’intérêt qu’il peut y avoir à citer deux exemples pour étayer son argument et inciter les élèves à choisir l’exemple le plus adéquat : c’est celui qui est le plus frappant mais aussi le plus facile à expliquer dans une copie. Exemple : on pourrait très bien montrer que le voyage déclenche une réflexion personnelle en s’appuyant sur le texte de Tesson et la façon dont son ermitage conduit à une réflexion sur l’homme et ses besoins. Il serait cependant plus facile d’exploiter Miller dans une copie car on peut citer l’extrait étudié (« j’ai eu la révélation de celles de l’humanité tout entière ») ce qui rend l’explication plus aisée. 6. Jacques Meunier, dans Pour une littérature voyageuse, paru en 1992, affirme que les « deux moitiés » c’est-à-dire les deux facettes d’un « écrivain-voyageur », le voyage et l’écriture, sont indissociables. Nous allons soutenir son affirmation. 7. Selon le moment de l’année, on peut envisager de rédiger collectivement un paragraphe argumenté avant de demander aux élèves de se charger des suivants. On veillera à mettre en évidence la nécessite d’assurer la cohérence à l’intérieur d’un paragraphe (affirmation – connecteur ex. : « en effet » – exemple avec citation et interprétation de la citation) mais aussi à l’échelle du texte (importance des paragraphes et des connecteurs « Tout d’abord ; aussi ; enfin). 8. L’exercice n’implique ici que de soutenir l’affirmation de Jacques Meunier. On peut s’appuyer sur les élèves qui contesteraient sa thèse pour envisager le plan d’une autre partie qui séparerait l’écrivain de son voyage.
L E C T U R E C U RS I V E Jean-Marie Gustave Le Clézio, L’Africain (2004) > p. 78 > Introduction Ce roman autobiographique de J.M. G. Le Clézio présente de nombreux intérêts : Il est contemporain et accessible à des élèves de seconde, il permet de revenir avec eux sur la décolonisation à travers le parcours du père de l’auteur mais il offre aussi la possibilité – comme dans la séquence sur Bouvier – d’interroger le lien entre photographie et littérature tout en nourrissant la réflexion sur la singularité de chacune.
3. Il s’agit de faire émerger le lexique relatif à l’Afrique, aux lieux (paysages…), aux sensations, à l’histoire complexe et peut-être méconnue… 4. Ce propos d’ordre général et impersonnel ouvre la réflexion et offre une double lecture quant à la question de la filiation. Cette réflexion peut ramener le lecteur à sa propre filiation. Mais elle peut avoir un écho plus large : à l’Humanité. 5. « Tout cela est passé en nous ». Nous sommes le fruit de nos parents sur le plan biologique et culturel mais l’Homme est le fruit d’une Histoire. Peut-être Le Clézio incite – t-il le lecteur à se reconnaitre dans une double culture : singulière (familiale, culturelle…) mais aussi intrinsèquement humaniste et profondément ouverte. 6. Cet extrait et le titre du premier chapitre invite à se retourner de manière très concrète vers nos origines. Le corps est le premier réceptacle au monde. Le mot corps s’entend comme le corps de l’auteur et plus largement ceux qu’ils voient autour de lui enfant. Mais le corps est aussi vu comme le continent « Afrique ». Le Clézio déploie donc simultanément une double intention : reconstituer son histoire personnelle à travers la réception de son corps personnel et familial et retourner aux sources de cette Afrique qui a marqué son corps. II – Au fil de la lecture 7. Portrait du père : présentation : p. 19 « l’hôpital où travaillait mon père » – p. 22 / Son arrivée en Afrique p. 45-47 / Son caractère « étranger » (p. 50), autoritaire (p. 52) / Homme contraint financièrement (p. 58) / l’homme qui photographie (p. 59) et collectionne (p. 64) sa violence p. 107 / Sa haine du colonialisme au retour d’Afrique p .110-112. – Relation au père : distante et sans parole (« il n’en a jamais parlé » p. 46) et le questionnement (p. 47 – « Si je veux comprendre… » p. 91), le récit du père (p. 48), admiration (en creux), opposition, incompréhension. (p.108-109) 8. L’Afrique est décrite p. 13 « l’impudeur des corps était magnifique » / p. 16 / p. 19 « c’était la liberté totale du corps et de l’esprit » / « violence » p. 19-20 / « L’Afrique était puissante » p. 21. 9. Ce livre peut appartenir au roman autobiographique par le trajet personnel qu’il recompose. Il peut aussi être rapprocher du roman de voyage avec la transcription des lieux et du passage de l’un à l’autre avec des photos à l’appui.
2 • Nicolas Bouvier, Le Poisson-scorpion (1982)
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Cependant il peut être considéré comme un roman initiatique avec le parcours de l’enfant marqué par l’Afrique et la quête du père. Sans s’approcher strictement du roman historique, ce récit permet d’approcher l’Histoire de la colonisation et de la décolonisation.
La deuxième question invite l’élève à une relecture de la photo de couverture qui était déjà questionnée dans la rubrique « Avant la lecture ».
10. La carte manuscrite est celle rédigée par le père de Le Clézio. (p. 82). Elle contribue à introduire le questionnement du lecteur dans le récit. Elle annonce le parcours sinueux, imprécis de ce voyage en Afrique mais aussi – symboliquement – dans le souvenir.
LECTURES D’AUTRES AU CHOIX
11. Il s’agit ici de pousser l’élève à s’interroger sur la sens des photos incluses dans le livre. Cette photographie centrale n’est pas hasardeuse, c’est la photographie de la maison familiale mais l’auteur laisse au lecteur le soin de faire le lien avec son texte. 12. a. Les photographies sont anciennes, parfois de « mauvaise qualité » (p. 84) mais ont la puissance de l’authentique, de l’unique. Elles ont une dimension documentaires et affectives donnant des informations que le lecteur doit construire à l’aide du récit. b. Les photographies accompagnent le roman mais ne les illustre pas. Elles ouvrent une nouvelle perspective de lecture ou de relecture. III – Approfondir la lecture 13 à 16. Ces questions permettent de prolonger la vision de l’Afrique, la réflexion sur la colonisation et sur la manière de les écrire. Les visions de Senghor et Le Clézio se rejoignent bien que les formes littéraires employées diffèrent. Tous deux dénoncent la colonisation. D’ailleurs, Senghor était Africain par la naissance, Le Clézio imagine son père comme étant devenu Africain (p. 124). Il n’a donc pas assujetti mais a pris l’identité de la terre sur laquelle il a vécu et dont il s’est imprégné. Les deux auteurs louent la puissance de L’Afrique, la perçoivent comme terre nourricière, meurtrie par la colonisation. VERS LE BAC ORAL > S’entraîner à l’entretien
1. L’objectif est de remobiliser les connaissances de l’œuvre acquises (cf. questions 9) tout en ayant une réflexivité supplémentaire soulignant l’apparente modestie de l’auteur qui mêle, en réalité, de nombreuses pistes quant à la réflexion générique, littéraire et philosophique. 2. L’élève est incité à revoir son parcours de lecture : de l’incursion dans un voyage en Afrique, il est entrainé dans une quête du père, puis une quête de l’histoire de l’Afrique et enfin une quête de la valeur de l’Homme niée par la colonisation. 3. On pourra d’abord interroger le mot « réinventer » dans sa construction et son étymologie. Puis on pourra décliner ses sens à travers le récit de Le Clézio. Réinventer pourra être perçu au sens de reconstituer, reconstruire, sublimer, trahir. Cette question pourrait aussi faire l’objet d’un débat collectif préparant à la dissertation sur œuvre. > Carnet de lecture Le carnet de lecture sera au service de l’appropriation du roman pour l’oral du BAC. La première question incite l’élève à sélectionner des passages clés et à justifier ses choix de manière personnelle.
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> pp. 80-81
Blaise Cendras, D’Oultremer à Indigo (1940) > Introduction L’étude de ce recueil de nouvelles permet de prolonger le travail sur le récit de voyage initié avec Le Poisson-scorpion. Tout comme Bouvier, Cendrars mêle autobiographie et fiction et nous invite à réfléchir sur la capacité de la littérature à « mentir vrai ». On peut étudier les nouvelles isolément ou aborder la notion de recueil en étudiant sa structure et son unité. > Découvrez le recueil de nouvelles Le titre implique un parcours, un voyage d’une couleur à une autre. Il est empreint d’un certain exotisme : l’aventure en mer, le voyage avec « oultremer » dont Cendrars conserve l’orthographe désuète ; les pays tropicaux où l’Inde avec « indigo » selon que l’on pense aux pays où pousse l’indigotier ou à l’étymologie du mot (indicum signifie indien). Le lecteur reçoit donc une invitation au voyage même si l’on peut considérer la proximité de ces deux nuances de bleu qui sous-entend un trajet somme toute restreint. > Réponse aux questions 1. L’Amazonie est très présente : les aventures du « coronel Bento » se passent au Brésil, tout comme quatre des cinq « chasses » de la nouvelle centrale. L’Amiral se déroule sur un paquebot transatlantique. Le professeur de la dernière nouvelle fait le récit de son voyage sur l’Orénoque. On remarque cependant la présence plus discrète de la Scandinavie : « S.E. l’ambassadeur » est finlandais, « l’Amiral » est danois et « Monsieur le professeur » enseigne en Suède (les premières et dernières nouvelles sont dédicacées à un couple de Suédois). Claude Leroy y voit un hommage à l’amie de Cendrars, Elisabeth Prevost, avec laquelle l’auteur devait effectuer un tour du monde au départ de Finlande. Un autre lieu essentiel est Paris. La ville est mentionnée dans plusieurs nouvelles. Elle est surtout le point de départ du recueil qui s’achève à Montmartre. Comme si l’œuvre suggérait un voyage immobile ou au moins un voyage dont on revient, l’aventure exotique n’étant qu’une étape et non une finalité. 2. Cendrars parle de ses nouvelles comme d’« Histoires vraies ». Le titre est paradoxal tout comme le propos de l’auteur qui se présente dans l’extrait comme un « témoin » avant de reconnaître que l’écrivain donne un « coup de pouce » à la réalité en la transposant à l’écrit. Il dit se « mettre en scène » ce qui est le cas dans le recueil où Cendrars est un personnage inspiré mais distinct de Frédéric Sauser. La fin de l’extrait donne à entendre une évocation tout à fait extraordinaire de la vie sur un bateau dans la tempête : ce n’est pas une référence à un événement précis mais une rêverie que l’on entend comme initiée par les aventures réelles de l’écrivain.
1 • Le roman et le récit du xviiie siècle au xxie siècle
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Amélie Nothomb, Attentat (1997) > Découvrez le roman L’extrait vidéo permet de découvrir le personnage haut en couleur d’Amélie Nothomb. Mais il peut fonctionner aussi comme une entrée dans le roman : tout comme Epiphane, Nothomb se présente comme un être à part, ayant souffert de la solitude et dont la posture vis-à-vis de la médiatisation est ambiguë entre fascination et étonnement. > Réponse aux questions 1. Epiphane est une victime. Malgré son intelligence, il est exclu de la société à cause de sa laideur : il n’a pas d’ami, pas de travail au début du roman, il ne peut prétendre à l’amour et s’attire les regards hostiles ou moqueurs de tout ceux qu’il croise. Cette solitude injuste peut provoquer une certaine empathie chez le lecteur. Cependant, il est aussi un personnage à craindre. Devenu célèbre, il s’avère cynique et sans pitié dans son activité de mannequin comme vis-à-vis d’Ethel qu’il assassine sauvagement. Suscitant à la fois horreur et pitié, Epiphane est proche d’un personnage tragique.
2. La dédicace n’est pas univoque (tout comme le titre du roman). On peut la comprendre comme le désir de l’auteur d’avertir le lecteur, de le mettre en garde contre tous les Epiphane de la terre. Mais sa formulation inversée et atypique peut aussi donner à penser qu’elle est le fait du narrateur. Epiphane inscrirait le récit de sa vie « contre E. » c’est-à-dire Ethel, cette incarnation de la beauté et de la pureté qui le conduit à un « attentat ». 3. La proximité du roman avec le conte suggère la présence d’une morale mais celle-ci diffère des moralités traditionnelles. Si le récit peut bien se lire comme une critique de l’importance donnée à l’apparence physique (avec une satire du milieu de la mode), il ne s’agit pas de rappeler que la laideur cache souvent un trésor. Au contraire, Epiphane se révèle aussi laid moralement que physiquement. En tombant amoureux d’une femme sublime, il s’avère aussi dépendant des images que les personnages dont il moque la vacuité. Le roman suggère qu’il faut se méfier des apparences mais aussi des stéréotypes que les histoires véhiculent sur les apparences.
2 • Nicolas Bouvier, Le Poisson-scorpion (1982)
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3 • Lutter contre l’esclavage
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OBJET D’ÉTUDE
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La littérature d’idées et la presse du xixe siècle au xxie siècle
SÉQUENCE
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Lutter contre l’esclavage
Présentation de la séquence > La problématique Comment prêter une voix à ceux que l’on n’entend pas ? La séquence montre comment, du xviiie siècle jusqu’à nos jours, des auteurs engagés se sont relayés pour porter sur la place publique la parole de ceux qu’on humilie et qui par conséquent sont habitués à se taire. Oser prendre la parole nécessite que l’on n’ait pas peur. Montesquieu, Schoelcher, Hugo, Conrad, Vuillard sont des Européens dont les ancêtres n’ont pas vécu l’esclavage, mais qui au nom du respect universel de l’humain, s’en indignent. Quant à Césaire, Damas, Taubira, Mabanckou et Condé, ils portent la parole des victimes dont ils peuvent être les descendants. La séquence démontre donc que chacun peut se sentir concerné par l’esclavage qui est une atteinte fondamentale à la liberté humaine. > Le groupement de textes et les lectures complémentaires La séquence se construit chronologiquement et varie les types de textes afin de montrer la variété des recours argumentatifs. Ainsi, les textes 1 et 7 sont des discours, les textes 4 et 5 et 8 prennent leur place dans un essai. Le panel de l’argumentation directe se complète par la présence d’une lettre (texte 2) et d’un poème (texte 3). Enfin, l’argumentation indirecte, qui s’exprime par le récit fictionnel, est représentée par les textes 6, 9 et 10. La séquence propose des textes classiques incontournables (Montesquieu, Shoelcher, Hugo, Césaire) et des textes plus contemporains (Mabankou, Vuillard, Taubira, Whitehead) pour susciter l’intérêt des élèves. > Le prolongement culturel et artistique Il explore l’expression photographique et graphique. La B-D Aïna pourra susciter la curiosité des lecteurs les moins aguerris. Les affiches du CCEM et le travail collaboratif de Millot et Dallaporta permettront de mesurer les différents effets produits par la photographie : d’un côté l’on suggère que la banalité cache l’horreur, de l’autre on montre explicitement celle-ci pour choquer.
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O U V E RT U R E
> pp. 82-83
> Introduction La mulâtresse Solitude est une figure emblématique du marronnage en Guadeloupe. C’est aux auteurs Léon Schwartz-Bart (La mulâtresse Solitude, L’Ancêtre en Solitude aux éditions Points) et son épouse Simone qu’elle doit sa célébrité littéraire comme le montre l’émission radiophonique « ouvert la nuit ». > Réponses aux questions 1. La physionomie et la posture de l’esclave affichent de la détermination, une résolution à ne pas se soumettre. L’esclave porte la tête haute (le cadrage en contre-plongée de la photographie en accentue l’effet). Le menton comme les yeux sont levés pour exprimer la dignité. Le regard n’exclut pas l’expression d’une douleur, mais c’est au nom de cette douleur que la Mulâtresse Solitude se bat. Les deux mains aux poings repliés sur les hanches s’accordent avec cette résolution d’une femme qui n’a rien à perdre pour elle et pour les siens ; tout en portant un enfant qu’elle doit protéger, elle n’hésite pas à s’engager dans une lutte contestataire. 2. En cela, elle a l’étoffe d’une héroïne puisqu’elle se sacrifie pour la défense de son peuple. Courage et honneur sont les valeurs qu’elle incarne.
G RO U P E M E N T D E T E X T E S CONTEXTE L’héritage des Lumières
> p. 84-99 > p. 84
Le texte en contexte L’abolition de l’esclavage a pris de longues années de lutte. Si la première abolition date de 1794, l’esclavage est rétabli pour des raisons économiques par Napoléon Ier et il faut attendre l’implication littéraire et politique d’auteurs français comme Benjamin Constant, Victor Hugo et Victor Schœlcher pour qu’il soit définitivement aboli en 1848.
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1 Victor Schoelcher, Des colonies françaises : abolition immédiate de l’esclavage (1842) > p. 85 > Présentation de l’extrait Le texte est un extrait d’un discours de Victor Schœlcher, Des colonies françaises : abolition immédiate de l’esclavage, il date de 1842, c’est-à-dire 6 ans avant l’abolition définitive de l’esclavage. On peut ainsi comprendre qu’en dépit des accents de révolte et d’indignation du texte, la cause des esclaves mettra six ans à être entendue. La défense des opprimés nécessite donc, au-delà de la virtuosité argumentative qui passe par la persuasion et la conviction, une grande persévérance. Il s’agit pour Schœlcher du combat d’une vie. > Lire en écho Schœlcher a été largement inspiré par les auteurs du xviiie siècle et notamment par Montesquieu dont on présente l’extrait incontournable de l’Esprit des lois rédigé sur l’esclavage. La compréhension de ces recours ironiques est capitale pour sensibiliser les élèves aux subtilités du langage. L’extrait d’Au cœur des ténèbres entre en écho avec celui de Schoelcher par la manière dont il met en rapport l’enjeu économique de la colonisation et les crimes inhumains qui y sont associés. > Réponse aux questions S’engager dans le texte 1. La supériorité dont se revendique un homme qui prétend être maitre d’un autre est illusoire : membres d’une même espèce vivante, ils ne peuvent être hiérarchiquement placés. Cette prétention est ridicule. Cette vanité humaine suscite « des vertiges de rage » parce que ses conséquences sont terriblement cruelles : violence, meurtres sont autorisés au nom de cette supériorité illusoire (voir ligne 14). Dans les deux cas, « fou-rire » et « vertiges de rage » expriment des émotions intenses, extrêmes. Le rire, est ici évidemment plus moqueur que léger. 2. Voir ligne 20 : « c’est notre cri bien décidé ». C’est un cri parce qu’il exprime l’émotion naturelle, spontanée d’un homme révolté. Interpréter 3. Le verbe principal arrive en fin de phrase : « sont », c’est un présent à valeur générale car Schoelcher donne ici sa définition de la criminalité humaine qu’il fonde sur deux exemples. Les deux sujets de ce verbe se construisent en parallélisme (celui qui… cannes » et « celui qui… d’argent »). Les autres verbes sont construits en chiasme (présent de l’indicatif conditionnel/conditionnel, présent de l’indicatif) pour caractériser les sujets du verbe principal (celui qui… celui qui…) Prétend : indicatif présent, valeur générale Trouverait : conditionnel présent, condition, hypothèse, action non certaine Soutiendrait : conditionnel présent : condition, hypothèse, action non certaine A le droit : indicatif présent, valeur générale L’auteur choisit cette alternance de présent à valeur générale et de conditionnel présent pour réfuter les deux propositions. C’est une erreur d’être convaincu de deux faits discutables (l’esclavage et le vol).
4. Le discours acquiert une portée universelle par l’utilisation de termes généralisants : le terme générique « homme », le pronom personnel « on », le pronom indéfini « chacun », le déterminant possessif « notre ». L’expression « la liberté d’un homme est une parcelle de la liberté universelle » montre comment individu et espèce sont intimement liés. 5. L’émotion se ressent par l’emploi de termes de jugement intensifs : « fous, scélérats », « fou-rire », « vertiges de rages », Schœlcher recourt à la colère, au pathétique. La conviction repose sur l’usage de la raison et donc sur le recours aux liens logiques de la cause (« parce que »), de la condition (conditionnel), de la concession (cependant). VERS LE BAC ORAL > Lecture expressive
Le but de l’exercice est d’éviter la précipitation, de rendre compte de l’intensité et de la rigueur de l’écriture. Une lecture attentive à la ponctuation, faible et forte, permet de montrer le cheminement progressif des idées. Elle permet aussi à l’élève de reprendre son souffle et donc son assurance. On jouera sur la modulation du ton pour mettre en valeur les passages les plus émouvants portés par les termes intensifs. Si le repérage des liens logiques permet de mettre en évidence le tempo global du texte, leur soulignement ne doit pas être mécanique. > Écrit d’appropriation L’élève doit rendre compte de la transformation de son point de vue qui passe de l’indifférence au propos tenu par Schoelcher à sa pleine compréhension, suite à sa propre expérience de l’oppression. Le rapport entre littérature et vie vécue est donc ici interrogé. Le travail nécessite des aller-retours entre le texte de Schoelcher et l’évocation de la situation personnelle. Le texte pourra donner la parole à un oppresseur contre qui se retourne l’oppression, à une personne indifférente qui devient victime à son tour. L’expression littéraire de l’indignation (implication du locuteur, lexique de l’oppression, termes intensifs et polémiques, expressivité de la ponctuation) et de la réflexion (démonstration argumentée, liens logiques, recours aux exemples) seront travaillées.
CONTEXTE Victor Hugo, les combats d’une vie
> p. 86
L’auteur a mené de nombreux combats contre l’oppression (voir p. 86). Dans chacun d’eux, il défend la dignité fondamentale de l’humain qui passe notamment par sa liberté. La force de son argumentation, qu’elle soit directe ou indirecte, passe très souvent par la puissance de l’émotion, l’appel au sentiment. Hugo cherche à toucher le cœur et à fédérer ses lecteurs autour de causes universelles ; sa démarche est influencée par ses convictions religieuses. Il réclame que les lois humaines s’accordent à la loi divine qui prône l’amour et la fraternité ; son investissement politique en atteste. Le dessin de Vogel (p. 86) montre comment sa conviction résiste aux assauts de ses adversaires. L’image représente Hugo à la tribune (la prise de position nécessite toujours une mise en avant de soi), bras croisés (signe de résistance 3 • Lutter contre l’esclavage
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et de fermeté), serein en dépit du chahut de l’assemblée et des doigts levés et menaçants qui convergent vers lui. Le discours à l’Assemblée nationale du 9 juillet 1849 est toujours d’actualité puisqu’il évoque les misères de notre temps : l’insalubrité des logements, la pauvreté des démunis. Ces faits avérés ne sont pas « seulement des torts envers l’homme mais des crimes envers Dieu », ce pourquoi Hugo réclame des « lois contre la misère » : le mouvement des Gilets-Jaunes a bien montré en 2018 et 2019 comment certaines conditions de vie sont insupportables et réclament davantage de considération politique. Le discours d’Hugo est ouvertement polémique, attaquant. Il accuse les représentants politiques ne n’avoir rien fait tant que la misère perdure en France. La lettre consacrée à l’exécution de John Brown date du 2 décembre 1859, soit 8 ans jour pour jour après le coup d’état de Napoléon Bonaparte. Implicitement, par cette date commune, un rapprochement se tisse entre deux manifestations de l’oppression. Hugo se place lui-même dans la position de l’opprimé, car suite au 2 décembre 1851, il sera exilé à Guernesey, d’où il écrit sa lettre. C’est donc la date anniversaire d’une injustice, une incitation au devoir de mémoire. 2 Victor Hugo, Lettre du 2 décembre 1859
> p. 87
> Présentation de l’extrait Hugo rédige cette lettre à Hauteville-House (actuel musée Victor Hugo), la maison qu’il occupe pendant quatorze des dix-neuf années de son exil. C’est là qu’il compose de nombreux chefs d’œuvre : Les Misérables, Les Travailleurs de la mer, L’homme qui rit, La légende des siècles. Depuis la large fenêtre de son atelier d’écriture où il rédige debout, il voit la mer qui le sépare de la France ; si l’immensité d’eau le sépare aussi du continent américain, sa compassion pour l’oppression actuelle qui s’y exerce l’en rapproche. Car la presse lui permet de se tenir informé. > Lire en écho Dans sa lettre, Hugo évoque concrètement la situation des esclaves dans les plantations de Virginie, la possibilité de leur délivrance, de leur évasion. C’est dans ce cadre que s’inscrit l’ensemble du récit de Colson Whitehead, Underground Railroad. Il permet néanmoins d’envisager la réalité par le biais de l’imaginaire puisque le réseau clandestin des esclaves fugitifs y est figuré par un train souterrain. Les textes d’Hugo et de Whitehead mettent tous deux en scène l’aide apportée par des tiers aux esclaves. Un prolongement réflexif peut être mené sur les motivations et la valeur d’un comportement humanitaire mais aussi sur ses difficultés et ses limites. > Réponse aux questions S’engager dans le texte 1. La lettre s’adresse aux États-Unis d’Amérique, l’auteur l’a transmise à un journal américain pour en assurer la diffusion sur ce continent qui incarne depuis 1776 la démocratie naissante dans des états fédérés. Si la démocratie est apparue en France dans les pas de la Monarchie, les américains sont les premiers à avoir rédigé, collégialement, une constitution démocratique. Les pères fondateurs ont œuvré à cette
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réalisation : parmi eux George Washington dont il est question au début et à la fin de la lettre d’Hugo. Le destinataire (la Fédération des états américains) est donc l’incarnation même de la démocratie fondée sur le respect des droits de l’homme et de sa liberté. On peut d’autant plus lui reprocher de ne pas appliquer les principes sur lesquels il se fonde. Par cette adresse, Hugo n’oublie pas, même dans l’exil, sa stature d’homme politique qui ose s’adresser aux états. 2. À la ligne 34, on trouve l’expression « il y a quelqu’un ». Hugo personnifie ici « la conscience universelle », « œil ouvert » de Dieu sur le monde. L’expression indéfinie a deux intérêts : supposer que c’est la présence d’Hugo qui est désignée ici, et que sa vigilance est en fait celle dont n’importe quel humain est capable ; en cela la compassion serait la première valeur de l’humanité, et Dieu regarderait par les yeux des hommes. Interpréter 3. Au-delà du continent américain « qui est une gloire du genre humain (l.47), l’exécution de John Brown concerne « le monde civilisé » (l.31), l’Europe (l.35), c’est-à-dire tous les pays qui défendent la démocratie fondée sur le pouvoir du peuple, et opposée à l’exercice de la tyrannie qui assoit l’autoritarisme par la peur et la violence. (La Turquie est proposée comme contre modèle à la ligne 29). Les pays européens sont intimement concernés par le sort de l’Amérique qui constitue pour eux un modèle et un guide : elle « dépasse l’Europe dans de certaines audaces sublimes du progrès, elle est le sommet du monde ». 4. Hugo s’implique dans son discours par les marques de jugement qu’il emploie. La ponctuation exclamative et interrogative vient souligner son indignation, des expressions catégoriques lui donnent son assurance. Par l’utilisation de la première personne (d’abord du pluriel à la ligne 16 avec « disons-le » puis du singulier, avec « j’affirme sur l’honneur » dès la ligne 28.). L’avant dernier paragraphe se focalise sur son engagement, à la fois en minimisant la spécificité de sa voix (« je ne suis qu’un atome », « comme tous les hommes ») et en mettant en scène de façon spectaculaire et pathétique la prière qu’il adresse aux États-Unis dans l’avant dernier paragraphe. 5. À la ligne 10, l’adjectif « énervés » est employé dans un sens vieilli pour caractériser les esclaves qui ne répondent pas à l’incitation libératrice de John Brown. Le préfixe é– vient du préfixe latin ex-, qui signifie en dehors. Les esclaves, à qui l’on aurait ôté les nerfs par la soumission, ne pourraient pas réagir à la stimulation libératrice. L’expression « l’esclavage produit la surdité de l’âme » évoque une mutilation similaire. 6. Le texte se termine par la phrase : « Oui, que l’Amérique le sache et y songe, il y a quelque chose de plus effrayant que Caïn tuant Abel, c’est Washington tuant Spartacus. » Dans la Genèse, premier livre de l’Ancien Testament, Caïn, fils aîné d’Adam et Eve tue son frère cadet, Abel. Il est donc le premier meurtrier de l’humanité. Si le crime de Spartacus par Washington est plus effrayant, c’est que tous deux, dans l’Antiquité et à l’époque moderne, sont à la fois des exemples d’une fraternité que les frères bibliques n’incarnent
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justement pas, et de la revendication pour tous les hommes de la liberté. Que Washington tue Spartacus serait profondément contradictoire puisqu’il est en quelque sorte son cadet spirituel et son double politique. VERS LE BAC ÉCRIT > Dissertation
Pour montrer que l’engagement de Victor Hugo ne connait pas de frontière, on pourra d’abord considérer la particularité de la situation d’énonciation, puis rendre compte de l’universalité de l’histoire humaine, telle que Hugo la conçoit, notamment dans une optique religieuse. Enfin, on montrera la communauté des destins politiques, notamment des pays qui sont réunis par l’idéal démocratique.
Lecture d’image Jean-Michel Basquiat, Marché aux esclaves (1982)
> p. 89
> Introduction Slave Auction est l’un des nombreux tableaux qui montrent l’attention que porte le peintre à l’histoire, à la culture noire américaine dont il est l’héritier (voir aussi les œuvres Famous Negro Athletes, Hollywood Africans, John Coltrane, Cassius Clay, etc.). Il est le fils d’un père d’origine haïtienne et d’une mère portoricaine qui l’incitent à cultiver sa grande sensibilité artistique en fréquentant le MoMA. Le travail de Basquiat est ainsi influencé par la modernité artistique (voir le tableau King Picasso) qui se caractérise par un travail sur l’intensité des couleurs, une variété des techniques et des supports, un intérêt pour l’art de rue ; Basquiat commencera d’ailleurs par se faire connaître en tant que graffeur). Ses œuvres sont à la fois lumineuses et tourmentées, solaires et contestataires. > Étude d’une œuvre 1. La peinture de Basquiat, si elle est moderne, n’est pas totalement abstraite. Les aplats de couleurs froides (bleu foncé, bleu clair, noir) rappellent la pratique de l’abstraction, mais des figures, certes inachevées, subsistent sur ces fonds. Les personnages se résument essentiellement à la représentation de visages, simplifiés comme dans les dessins d’enfant ou les bandes-dessinées. C’est à l’arrière-plan qu’on trouve le plus de figures. Elles se séparent en deux groupes : celui des édentés et celui des personnages aux dents menaçantes. Comme le suggère l’émission d’Art d’Art !, cette distinction peut permettre d’opposer les exploitants aux opprimés. Mais, l’interprétation n’est pas si évidente, d’autant plus que l’opposition des couleurs de peau qui figurerait colonialisme blanc et esclavage noir n’est pas présente. Seul le joueur de baseball américain a, derrière son casque, la peau noire. Le visage du Christ, recouvert de la couronne d’épine qui symbolise le sacrifice, est lui d’un blanc lumineux, alors que c’est le peuple africain qui a été supplicié. L’épouvantail au visage blanc, revêt lui l’habit noir des jazzmen. Mais cette figure effrayante, pourrait aussi représenter le marchant d’esclaves devant les hommes qu’il oppresse. Le champ de l’interprétation des figures reste ouvert. C’est qu’à l’opposition noir/blanc, Basquiat substitue une autre symbolique des couleurs : l’or (peu lumineux) colore le navire négrier parce qu’il figure la motivation
financière de la traite négrière, face à lui, dans un effet de contraste se déploie (notamment dans le dégoulinement) le bleu, couleur associée au mouvement musical des esclaves africains, ce blues où ils expriment leurs souffrances. L’expression anglaise blue devils signifie ainsi « idées noires ». 2. Un effet chaotique est créé par le mélange des techniques. Peinture, dessin, graff, collage se côtoient dans un assemblage disparate mais aussi dynamique. 3. La violence du sujet est exprimée par différents moyens : l’expression des visages apeurés aux yeux écarquillés, le motif des piques, le quadrillage des dents, les traits de crayons hachés dont on peut sentir qu’ils ont été tracés avec force, en appuyant comme lorsqu’on griffe une surface. 4. Lorsque Basquiat dit : « Je ne suis pas un artiste noir. Je suis un artiste », il décale l’attention qu’on porte à sa couleur de peau vers la particularité de sa créativité qui définit n’importe quel artiste. Même si l’histoire du peuple noir est une thématique de son œuvre, elle ne peut la résumer.
CONTEXTE La négritude
> p. 90
La négritude est un mouvement d’idée créé pendant l’entredeux guerres par des intellectuels noirs dont les plus connus sont Léopold Sédar Senghor, Aimé Césaire et Léon-Gontran Damas. Il se développe dans le contexte tendu de la décolonisation et donne pour la première fois une voix littéraire et politique aux descendants d’esclaves, aux peuples colonisés. 3 Léon-Gontran Damas, « Nous les gueux » (1956)
> p. 91
> Présentation de l’extrait Le texte est extrait de Black-Label (1956), sorte de mélopée (chant mélancolique) rythmée comme une improvisation de jazz et construite en 4 parties. Les vers très brefs y clament l’injustice de l’oppression subie par le peuple noir ainsi que la beauté de l’âme africaine : chanson, rêverie et révolte s’y combinent pour rendre compte de la puissance tourmentée d’un auteur qui se revendique nègre, contre la culture coloniale. > Lire en écho Le texte écho est extrait du Discours sur le colonialisme d’Aimé Césaire. Il permet de mettre en résonance la force, l’agressivité des propos de deux représentants principaux du mouvement de la négritude. Les textes, vers ou prose, présentent tout deux un travail très particulier sur le rythme, notamment grâce aux effets d’accumulation qui, en réponse à l’oppression sociale subie, assènent les coups de la parole. > Vidéo La séance montre comment la création littéraire n’exclut pas l’engagement politique. Christiane Taubira rappelle donc que Léon-Gontran Damas fut député de Guyane et que la négritude a intimement lié poésie et politique. Pour l’oratrice Damas est un modèle, un père spirituel (comme elle guyanais) dont elle peut reprendre les propos pour les transposer dans le cadre du vote du mariage pour tous : ainsi relie-t-elle toutes les formes de discrimination pour les 3 • Lutter contre l’esclavage
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combattre. La vidéo montre aussi à quel point un argumentaire illustré par un exemple retenu par cœur emporte l’adhésion de l’assemblée, tant il prouve que Christine Taubira est habitée par les causes qu’elle défend. > Réponse aux questions S’engager dans le texte 1. Tout choix justifié par l’élève est entendable, à partir du moment où il ne propose pas de contresens sur l’enjeu du texte et qu’il en fait musicalement ressortir la violence, l’indignation, l’appel à la révolte en réponse au désespoir. 2. Le pronom « nous » désigne les nègres. On le comprend essentiellement dans le second paragraphe (vers 7 à 10) qui particularise leur identité marquée par la dépossession du passé : déportés d’Afrique, les noirs perdaient leurs racines, leur famille, leur culture et leur nom. Interpréter 3. Le mot « nègre » est associé aux adjectifs substantivés « gueux » et « maigres », aux adverbes substantivés « peu », « rien », et au nom « chiens » afin de décliner leur misère, de rendre compte de la déshumanisation humiliante qu’ils ont subie. 4. Le poème se compose d’une phrase interrogative sans ponctuation dont le verbe principal « attendons » figure à la ligne 17. C’est l’inversion du sujet qui nous assure du type de la phrase. Son sujet « nous » désigne « les Nègres », sa mise en valeur principale vient de l’usage récurrent du pronom de la première personne au pluriel par l’anaphore (répétition en début de vers). Le complément du verbe exprime un but introduit par la préposition « pour », et consiste en deux actions contestatrices : « jouer aux fous », « pisser un coup ». L’essentiel de la phrase peut se réduire ainsi : Qu’attendons-nous pour jouer, pisser ? La requête est évidemment un appel à la provocation. VERS LE BAC ÉCRIT > Essai
Pour défendre l’impact politique de la poésie et de la chanson on pourra évoquer : – la densité d’une argumentation rassemblée sur quelques vers, sur un refrain ; -la facilité mémoriel des deux genres qui permet de souder une collectivité autour d’un message (ex. : mémorisation par les maquisards des poèmes résistants de La Diane française d’Aragon) ; – le recours à la chanson pour symboliser les nations (les hymnes nationaux) ; – l’émotion portée par les deux genres, instrument de la persuasion ; (ex. : Les Châtiments de Victor Hugo, le chant de la Marseillaise entonné par le peuple dans La Fortune des Rougon de Zola qui se passe au lendemain du coup d’état de Napoléon III) ; – le martèlement d’une conviction (ex. : Liberté d’Eluard). Pour le contester on pourra considérer : – l’hermétisme (créé par les détours, les métaphores) de certaines formes poétiques, peu enclines à porter clairement le message politique essentiellement pragmatique et donc concentré sur le sens propre et non le sens figuré ;
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– la forme courte des textes qui ne permet pas de déployer un argumentaire structuré comme dans les discours (ex. : texte 1, Victor Schoelcher) ; – le désengagement des poètes du monde social, de la collectivité, la préférence pour la considération de l’intériorité, du sentiment personnel.
CONTEXTE L’esclavage, une question d’actualité
> p. 92
Après l’abolition définitive de l’esclavage-système au xixe siècle, il faut attendre le lendemain de la seconde guerre mondiale pour que la déclaration universelle des droits de l’homme sensibilise davantage au sort des esclaves, dans le passé ou le présent. Au début du xxie siècle, la France reconnait sa part dans la traite négrière et entame un travail mémoriel : reconnaissance de la traite (2001), ouverture du mémorial de l’abolition de l’esclavage à Nantes (2012), etc. Mais l’esclavage persiste, notamment dans ses formes domestiques. Le texte en contexte Si Christiane Taubira affirme de la loi Taubira de 2001 que ce « n’est pas sa loi », c’est qu’elle veut mettre en valeur le travail des parlementaires, c’est-à-dire le principe démocratique du vote, le long cheminement de rédaction du texte préparé par la culture anti– esclavagiste dont elle hérite. 4 Christiane Taubira, L’Esclavage raconté à ma fille (2015)
> p. 93
> Présentation de l’extrait Le livre de Christiane Taubira appartient à une collection de littérature d’idées du Seuil, qui met l’accent sur l’éducation des filles : L’esclavage raconté à ma fille, Le racisme raconté à ma fille, Auschwitz raconté à ma fille, L’économie racontée à ma fille, etc. > Lire en écho Le Sanglot de l’homme noir d’Alain Mabanckou peut entrer en écho avec celui de Christiane Taubira pour plusieurs raisons. Tous deux sont des représentants contemporains majeurs de la culture noire française, ils portent en outre une extrême attention à la langue française : l’outil de leur libération, de leur épanouissement, qu’ils ont contribué à régénérer. Dans Baroque Sarabande, Christiane Taubira fait d’ailleurs le récit de ses combats personnels et politiques à travers ses nombreuses lectures. Congo d’Éric Vuillard illustre très concrètement le crime contre l’humanité évoqué par Christiane Taubira. Il le rend sensible par l’évocation de la mutilation. > Réponse aux questions S’engager dans le texte 1. Le crime contre l’humanité est une incrimination créée en 1945 par le Tribunal militaire de Nuremberg. Il désigne une « violation délibérée et ignominieuse des droits fondamentaux d’un individu ou d’un groupe d’individus inspirée par des motifs politiques, philosophiques, raciaux ou religieux ».
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2. Comme dit précédemment, la collection du Seuil mentionne une destinataire commune à tous les titres qu’elle contient. Le but est de sensibiliser davantage les filles à la culture, d’en faire des destinataires privilégiées. En établissant une filiation, le déterminant possessif rapproche l’auteur de son lectorat qui peut s’identifier à la fille qui questionne. L’expression permet aussi de montrer que la transmission de ce sujet est capitale dans l’éducation de tout adolescent. Interpréter 3. La forme du dialogue permet d’éviter le monologue argumentatif qui réduit le propos à un seul point de vue. Les questions posées par « la fille » dynamisent le texte et permettent d’approfondir la réflexion, d’amener des nuances, d’éviter les contresens. Elles ébauchent le débat… 4. … ce qui permet de comprendre d’autant mieux que « les lois sont des compromis » (l.17). Compromittere signifie en latin « promettre ensemble ». Un compromis est donc un échange de promesses qui a été préparé par des négociations et des concessions. 5. Res publica désigne (par opposition à privatae res) la chose publique, c’est-à-dire le bien public, les affaires publiques, et par conséquent l’État, c’est-à-dire le système qui les organise. Christiane Taubira insiste sur le caractère démocratique des lois de la République française : c’est le travail du collectif des représentants élus par les citoyens qui construit les règles de l’État.
Lectures complémentaires
> pp. 94-99
5 Montesquieu, De l’esprit des lois (1748)
> p. 94
> Présentation de l’œuvre et de l’extrait De l’esprit des lois (1748) est un traité de théorie politique que Montesquieu a préparé pendant 14 ans, notamment par la rédaction des Lettres persanes. S’inspirant des principes empiristes de John Locke, il défend que le système politique idéal ne peut pas être défini dans l’absolu, mais en adéquation avec les conditions variables du mode de vie de chaque état. Il exprime néanmoins une préférence personnelle pour le gouvernement d’une aristocratie éclairée qui s’opposerait à la tyrannie qui règne par la crainte. L’esclavage est justement l’une des expressions de la tyrannie : l’extrait tend à montrer la bêtise et le ridicule de ses fondements. > Lire en écho 1. Le choix du mode conditionnel (« je dirais », l.2) est l’indice le plus éclairant pour comprendre que la défense de l’esclavagisme n’est pas admise par Montesquieu. La condition est d’ailleurs explicitée : « si j’avais à soutenir ». Le ridicule des arguments proposés nous dissuade définitivement d’attribuer cette pensée à Montesquieu, reconnu pour la subtilité de son esprit. 2. Le texte a une visée ironique : il faut comprendre que Montesquieu pense le contraire de ce qu’exprime l’esclavagiste. Or, comme il exprime ici une idée contraire à l’esclavage-système soutenu par le pouvoir monarchique de 1748, il est bien sûr menacé par la censure. Ce n’est qu’après la première abolition de 1789 que l’opposition à l’esclavage
peut être ouvertement formulée, comme c’est le cas dans le discours de Victor Schoelcher. 6 Joseph Conrad, Au cœur des ténèbres (1899)
> p. 95
> Présentation de l’œuvre et de l’extrait En 1899, Au cœur des ténèbres de Joseph Conrad est l’une des premières œuvres qui sensibilise à la cruauté du système esclavagiste. L’auteur se fonde sur sa propre expérience coloniale et montre comment au nom du Progrès civilisateur, l’Europe détruit la culture africaine et soumet avec barbarie les autochtones. > Lire en écho 1. Conrad rend physiquement sensible la condition des esclaves par la description du corps décharné de l’esclave à qui Marlowe tend un biscuit, par celle de sa physionomie morbide. 2. La symbolique du bout de coton blanc interroge le narrateur : il pose une série de sept questions à son sujet (l.1921). Le mystère reste entier sur le sens précis à donner à cet ornement. C’est un principe de rédaction constant dans Au cœur des ténèbres parce que Conrad veut montrer que, définitivement, la culture africaine, bien que menacée, échappe à la compréhension des européens. Quoiqu’il en soit, pour le congolais, la couleur blanche qu’il porte au cou peut avoir un tout autre sens que le blanc des visages et des costumes coloniaux… À moins que cet ornement ait été imposé par les esclavagistes pour afficher encore mieux leur propriété. Car le « bout de coton blanc d’outre-mer » fait référence au commerce triangulaire, c’est-à-dire à la déportation des africains en Amérique pour assurer la prospérité des exploitations cotonnières des colons blancs. 7 Aimé Césaire, Discours sur le colonialisme (1950)
> p. 96
> Présentation de l’œuvre et de l’extrait Aimé Césaire est l’un des représentants de la négritude avec Léopold Sédar Senghor. Anticolonialiste résolu, il est le fondateur de la revue L’Etudiant noir. Cet ancien élève de l’École normale supérieure est notamment célèbre pour son recueil Cahier d’un retour au pays natal (1939), son Discours sur la négritude (1987) et son Discours sur le colonialisme (1950) dont est extrait le texte proposé p. 96. Le discours est d’abord publié par la presse communiste car il s’inscrit dans cette perspective politique en dénonçant les abus du capitalisme bourgeois que Césaire juge décadent et donc faussement progressiste. > Lire en écho 1. « La vie stupide et bête » faite aux colonisés s’exprime par les expressions « parodie de formation culturelle » (l.4), « des élites décérébrées, des masses avilies » (l.12). D’ailleurs, la vie des colonisateurs n’est pas plus intelligente puisqu’ils sont réduits au rang de « pion », « d’adjudant », « de gardechiourme » (l.14-15). La colonisation détruit l’intelligence et la culture des autochtones : « cultures piétinées », « magni3 • Lutter contre l’esclavage
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ficences artistiques anéanties », « extraordinaires possibilités supprimées » (l.21). 2. Aux yeux de Césaire, le progrès qu’en Europe l’on a pensé justement comme le miracle de l’intelligence mis au service des hommes, anéantit les cultures étrangères et fait en cela régresser les peuples. Les conditions de travail des ouvriers qui construisent le port d’Abidjan sont dénoncées à la fin du passage. 8 Alain Mabanckou, Le Sanglot de l’homme noir (2012)
10 Colson Whitehead, Underground Railroad (2017) > p. 97
> Présentation de l’œuvre et de l’extrait Le Sanglot de l’homme noir (2012) est une réponse à l’essai polémique de Pascal Brückner, Le Sanglot de l’homme blanc. Tiers-monde, culpabilité, haine de soi (1983) où l’auteur s’attaque au sentimentalisme tiers-mondiste de la gauche européenne qui se complaît dans la culpabilité. Alain Mabanckou refuse quant à lui de se complaire dans le ressentiment et les larmes pour définir l’identité noire. La conscience noire doit être « une construction » plutôt qu’une « démonstration » fondée sur un passé de douleur. > Lire en écho 1. Le décalage entre les étudiants venus d’Afrique et les Français s’explique par leur usage de la langue. Tandis que les français pratiquent la langue maternelle abondamment et à l’oral, les étudiants africains l’ont essentiellement apprise dans les livres, d’où leur parler littéraire que les français jugent vieilli : « on ne s’exprime plus comme ça ! On croirait entendre des vieux ! » 2. C’est donc avec ironie qu’il considère le comportement des autochtones français qui ont appris la langue « dans les jupes de leurs mères » (l.11) et se dispensent de la respecter : « la langue des autochtones nous paraissait pauvre, pervertie par une paresse insolente. » (l.10) Il tourne aussi en dérision son respect sourcilleux des règles de grammaire française et les effets que cette virtuosité produit sur un certain auditoire : l’imparfait du subjonctif auquel les émigrés tiennent « comme à la prunelle de (leurs) yeux ! » (l.9) fait beaucoup d’effet « surtout devant les filles » (l.22). 9 Éric Vuillard, Congo (2012)
> p. 98
> Présentation de l’œuvre et de l’extrait Éric Vuillard est l’auteur de récits aussi courts qu’incisifs. Il y dénonce l’Histoire construite par les vainqueurs et rend sensible la médiocrité des motivations des hommes du pouvoir et par contraste, la beauté du monde qu’ils souillent. > Lire en écho 1. Le « crime contre l’humanité » s’illustre bien ici puisque, au-delà de l’exploitation barbare des congolais, la récolte des mains coupées offense leur dépouille. Même morts, les esclaves doivent être mutilés. Dans le dernier paragraphe, Vuillard rend encore plus flagrante la monstruosité de cette mutilation par l’hommage rendu au génie de la main humaine : « c’est elle la confiance, le signe, la paume ! » Autant de valeurs que les criminels ne respectent pas.
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2. La récolte des mains coupées montre que les colons n’ont aucun respect pour le membre du corps qui a justement servi aux récoltes du caoutchouc dont ils ont tant besoin. La collection de ces mains n’a qu’un intérêt comptable, et montre bien que les européens sont avant tout obsédés par des questions économiques : il ne faut surtout pas gaspiller des balles !
> p. 99
> Présentation de l’œuvre et de l’extrait Colson Whitehead est un journaliste et écrivain new-yorkais, lauréat du prix Pulitzer de littérature en 2017 pour Underground Railroad, roman traduit dans 36 pays. Le livre mélange histoire, baroque et fantastique pour approcher la vérité de l’esclavage, les cauchemars cachés de l’Amérique. Dans plusieurs de ses ouvrages, il montre comment questions racistes et abus capitalistes sont intimement liés. > Lire en écho 1. Au sens historique, l’underground railroad désigne un réseau d’humains qui aidaient les esclaves partis du Sud à se cacher avant de rejoindre les états du Nord. Lorsqu’on est enfant, on peut comprendre cette métaphore dans un sens propre et s’imaginer qu’il s’agit d’un véritable train. L’auteur choisit de donner vie à cette représentation enfantine pour rendre compte de la libération de ses personnages, notamment de la jeune Cora. 2. La description si détaillée du tunnel insiste sur la valeur du travail manuel, celui que justement les esclavagistes ne rémunèrent pas mais grâce auquel ils s’enrichissent : « Qui donc construit les choses dans ce pays ? » (l.25) Cette description permet aussi que le lecteur adhère à un univers créé de toutes pièces et non dénué de beauté : les parois du tunnel « étaient couvertes de pierres colorées, alternant des motifs clairs et sombres » (l.12-13)
PROLONGEMENT ARTISTIQUE ET CULTUREL > pp. 100-103
Des mots et des images pour lutter contre l’esclavage moderne ?
> p. 100-101
> Introduction Le prolongement artistique et culturel nous plonge dans le monde contemporain pour y considérer les formes sournoises prises par l’esclavage, malheureusement toujours présent dans la pratique alors même que la loi l’interdit. Cette évolution d’un esclavage-système à l’esclavage moderne est expliquée par une citation Christiane Taubira dont on a pu étudier les propos à la page 93. La page se concentre sur les pratiques françaises pour mieux montrer les paradoxes du pays « des droits de l’homme ». Elle met en lumière la place majeure que jouent les associations dans notre nation pour que les valeurs républicaines et démocratiques soient respectées : en effet, le CCEM (comité contre l’esclavage en France) nous alerte sur des pratiques insoupçonnées que notre indifférence participerait à autoriser tacitement. Le comité a été créé en 1994 à l’initiative de
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Dominique Torrès, journaliste française qui enquêtait sur le meurtre d’une jeune domestique marocaine à Londres. Depuis, le CCEM a accompagné plus de 680 personnes et s’est engagé dans 277 procédures judiciaires pour que les autorités publiques réagissent. > Recherche 1. Le Comité propose diverses actions concrètes pour soutenir les victimes : assistance sociale et juridique aux victimes de toute la France, interpellation des pouvoirs publics, sensibilisation de l’opinion publique, mise à l’abri des victimes, etc. 2. Le CCEM définit les formes de l’esclavage moderne, apporte des données chiffrées, rédige des rapports, rend compte des procès d’actualité, procède à la revue de presse des cas signalés et à celle de ses interventions, etc. > Réponse aux questions 1. Le texte a été mis en page pour barrer le visage de la victime, par pudeur pour son humiliation mais aussi pour signifier que ses conditions de vie l’enferment derrière des barreaux. Le mot peut paraitre obsolète mais sa taille atteint celle du visage qu’il couvre ; sa portée est par là même réactualisée. 2. La seconde affiche cherche à susciter la compassion de l’observateur par la présentation d’une image sombre et sordide : un gros plan sur le pied d’un cadavre, dissocié de toute identité, comme l’indique l’étiquette nouée à la cheville. Tout converge à réifier l’humain, à réduire son être à néant. Le slogan joue sur le choc créé par les termes antithétiques : « esclavage » et « libre ». Il vise à déranger les observateurs qui, bénéficiant d’une pleine liberté, peuvent devenir indifférents au sort des opprimés, et ne plus saisir le prix de cette indépendance. Le lecteur est impliqué puisqu’il est apostrophé à la deuxième personne du pluriel.
Un polar pour évoquer l’esclavage moderne
> p. 101
> Réponse aux questions 1. L’intrigue se déroule un soir de pluie dans une grande ville française. Elle met en rapport une maitresse de maison qui donne des ordres à son chauffeur et qui lui intime de rattraper une jeune fille qui s’échappe du véhicule ; on comprend que la jeune fille, d’origine africaine, est aussi au service de l’européenne. On soupçonne qu’elle est victime d’esclavage domestique. 2. La classe sociale des personnages est identifiable aux vêtements qu’ils portent : la bourgeoise porte un épais manteau de fourrure, tandis que la jeune fille est habillée de manière très commune. 3. L’atmosphère de la planche est angoissante ; on sent que la bourgeoise exerce une domination et que le chauffeur lui est soumis ; il répond avec politesse à ses ordres. « Bien, Madame ! » est peut-être l’une des formules qu’on l’a obligée à utiliser, comme celles évoquées page 103 par Aina.
Esclavage domestique
> p. 102
> Réponse à la question Le choix du cadrage sur les façades à partie liée avec la sensibilisation à l’indifférence qui est la nôtre. Nous ne
voyons que les dehors d’une réalité qui, dans l’intimité, se révèle monstrueuse. L’expression commune « ça n’est qu’une façade » illustre d’ailleurs la pratique de l’hypocrisie sociale. Étude d’une œuvre Ondine Millot et Raphaël Dallaporta, Esclavage domestique (2006) > p. 103 La journaliste indépendante Ondine Millot et le photographe Raphaël Dallaporta ont retrouvé les lieux de l’esclavage moderne avec l’aide du CCEM et exposé leur reportage aux rencontres photographiques d’Arles. Ce reportage est rassemblé dans le livre Esclavage domestique paru en 2006. > Écrit d’appropriation La description du voisin pourra insister sur la conformité du pavillon avec le rêve moyen d’habitation pour les français. Il pourra y projeter une vie heureuse, tranquille, opposer cet endroit à ceux sur lesquels on a généralement des a priori : la violence des quartiers de banlieue, des tours HLM, etc. > Réponse aux questions 1. Ni la photographie, ni le texte ne sont racoleurs. Racoler c’est au sens premier « prendre par le col ou le collet ». Au sens figuré, il s’agit de solliciter des individus dans le but d’en retirer un avantage, généralement de l’argent. Les journaux racoleurs ne reculent devant aucun effet pathétique ou tragique pour solliciter les émotions les plus fortes chez les lecteurs. La vie d’Aina est relatée sans émotion, sans jugement de la journaliste Ondine Millot ; c’est un récit factuel. Il intègre simplement le témoignage au discours direct de la victime et d’un témoin dans un récit qui retrace de manière concise les étapes du supplice. La restitution sommaire, par énumération (des lignes 17 à 18), des années de servitude est d’autant plus marquante. La photographie présente dans un plan d’ensemble une image très banale : un pignon de rue partiellement caché par un arbre, photographié un jour de ciel bleu. Rien ne semble à signaler dans cet environnement rassurant. En fait, ce lieu banal est le théâtre d’un crime contre l’humanité. 2. Dans la photographie, le malaise provient de l’absence totale de présence humaine, de la géométrie de l’image et peut-être de l’ombre portée par l’arbre sur le pignon. Le texte est glaçant par sa brièveté, la mécanicité de l’activité journalière de l’esclave domestique, le contraste entre ses motivations altruistes (« un travail, de l’argent pour pouvoir envoyer à ma famille » et ses conditions de vie : manger à part, dormir sur le carrelage.
ATELIER LANGUE
& EXPRESSION Oral
> p. 104
Prononcer une plaidoirie sur la liberté > Introduction Édouard Antoine Renard est un peintre, aquarelliste et dessinateur parisien né en 1802. La rébellion d’un esclave sur un navire négrier peinte en 1833 met en scène un esclave qui se libère de sa chaine. La représentation emprunte aux 3 • Lutter contre l’esclavage
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codes épiques, héroïques, afin d’émouvoir l’opinion publique, de valoriser l’esclave. L’un des geôliers est à terre : on aperçoit ses pieds dans le bas droit de l’image. On comprend que la lutte n’est pas terminée puisque l’esclave est prêt à frapper un adversaire qui se trouve hors champ. Le tableau est peint quatre ans après Tamango, une nouvelle abolitionniste écrite par Mérimée. Le sujet proposé permet de préparer à la spécialité Humanités, au lien du français à la philosophie, en leur faisant découvrir une thèse capitale de l’histoire des idées politiques du xviiie siècle. La Révolution française, la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen s’inspirent des propositions de Rousseau. > Réponse aux questions 1. La métonymie « dans les fers » désigne un état de servitude, d’aliénation. Elle fait référence aux entraves métalliques utilisées par les esclavagistes pour maintenir les hommes attachés. 2. La conjonction « et » revêt ici un sens adversatif. Elle peut être remplacée par « mais » pour rendre le paradoxe plus explicite. 3. L’homme est naturellement indépendant, mais partout il est aliéné.
ÉTUDE DE LA LANGUE
> p. 106
L’expression de l’opposition et de la concession et Formuler une concession > Corrigé des exercices Les élèves, par auto-évaluation s’en référeront à la leçon pour vérifier leurs propositions.
Les mots de… l’oppression
> p. 107
> Corrigé des exercices Exercice 1 Esclavage est formé par suffixation à partir du mot esclave, issu du latin « sclavus », autre forme de slavus qui signifie proprement « slave ». Dans le haut moyen âge, de nombreux Slaves des Balkans étaient réduits en servitude par les Germains et les Byzantins. Le mot s’est largement répandu en Europe, d’où l’italient scliavo, l’espagnol esclavo, l’allemand Sklave, l’anglais slave. Actuellement, le terme esclavage s’emploie au sens propre pour désigner des formes d’aliénation domestique, des travaux forcés. On l’emploie aussi au sens figuré pour désigner différentes aliénations (professionnelles, sociales, psychologiques). Exercice 2
4. Les fers qui entravent les hommes peuvent être d’ordre politique, familial, sentimental, psychologique. Toute relation de dépendance, tout abus de pouvoir peuvent être approchés par cette expression. Aujourd’hui, cette phrase n’a pas le même sens qu’en 1762 puisqu’au moment où Rousseau la prononce le système politique n’a pas permis la libération politique du peuple ; la monarchie est en place et ne sera renversée qu’en 1789. Du contrat social est un texte majeur de la philosophe politique qui affirme la souveraineté du peuple, appuyé sur les notions de liberté et d’égalité. Entre 1743 et 1744, Rousseau a pu observer le fonctionnement de la République de Venise. Chacun doit renoncer à sa liberté naturelle pour gagner la liberté civile. L’intérêt général doit être privilégié à l’intérêt particulier. La totalité du chapitre IV est consacrée à l’esclavage. Pour Rousseau, « renoncer à sa liberté, c’est renoncer à sa qualité d’homme » et l’on ne peut se vendre en l’échange de sa subsistance (contrairement à ce que pense Grotius).
Le mot chef est issu du latin caput qui désigne la tête, au sommet et s’applique au sens propre et figuré à ce qui gouverne. Maître est issu du latin magister qui signifie « chef, maitre ». Il se réfère à celui qui a l’autorité sur d’autres dans quelque domaine que ce soit. Son emploi s’est notamment développé dans les sociétés d’ancien régime (où le maitre est servi par des valets), des sociétés esclavagistes (les esclaves sont soumis au maitre, ils sont sa possession). Tyran désigne un souverain absolu, un monarque, un despote. En Grèce antique, il désigne plutôt l’homme qui prend le pouvoir par la force qu’un despote cruel vis-à-vis de son peuple. Mais le français a retenu le sens péjoratif pour désigner un usurpateur violent. Si le chef peut être obéi sans que la menace s’exerce, si son autorité peut être considérée comme légitime, le tyran exerce un pourvoir violent et souvent injuste. Le maitre peut être un modèle, un exemple à suivre mais il désigne dans certains contextes un être qui peut lui aussi abuser de son autorité.
5. Indépendance de chaque corps, séparé de celui de la mère par la rupture du cordon ombilical, autonomie de mouvement, capacité à réfléchir avec ses propres moyens intellectuels.
Exercice 3
6. L’homme ne vit pas seul, le groupe dans lequel il s’intègre peut se structurer par une hiérarchie aliénante qui soumet certains individus à d’autres. L’esclavage est répandu, il vient contredire l’instinct libéral de l’homme : des théories politiques (la Politique d’Aristote, suprématisme blanc) ont justifié l’esclavage en actant notamment l’infériorité de certains êtres par rapport à d’autres.
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Humiliation est emprunté au latin humiliation « action d’abaisser », « mortification ». Il désigne d’abord le fait de s’humilier devant Dieu, puis l’action qui blesse l’amourpropre d’une personne. Expression courante : mettre quelqu’un plus bas que terre. Exercice 4 Servitude vient du latin servus qui désigne l’esclave. Le suffixe -ude désigne un état. La liberté de l’homme asservi est réduite à néant, il est l’objet de son maitre et son pouvoir d’action est nulle. Tandis que la Soumission désigne l’acte
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de se ranger sous l’autorité de quelqu’un, le fait d’en dépendre et de lui obéir, sans pour autant être démuni de toute liberté. La servitude désigne un état d’aliénation totale tandis que la soumission exprime une obéissance. Toutefois, le terme soumission tend à prendre un sens intensif. Le Discours de la servitude volontaire émet l’hypothèse que les hommes se réduisent librement à l’état d’objet, état qui les dispense d’avoir à choisir, réfléchir, décider. Exercice 5 S’indigner, indignité, indignation, dignité, dignement, digne. Rester digne, exprimer son indignation, c’est indigne de toi, etc. Indignez-vous ! Est un titre accrocheur parce qu’il nous interpelle, nous incite à ne pas rester indifférent, à réagir face aux injustices sociales. Exercice 6 Termes proches d’oppresser : aliéner, asservir, opprimer, contraindre, dominer. Termes proches de libérer : affranchir, briser les chaînes de, s’émanciper, délivrer, relâcher.
principaux de l’argumentation : argumentation directe ou indirecte, genres et registres de l’argumentation. > Réponse aux questions de synthèse 1. Les textes de Victor Schoelcher, Victor Hugo, LéonGontran Damas, Aimé Césaire, Joseph Conrad, Éric Vuillard pourront être particulièrement mis en valeur. Chez Schoelcher, c’est l’implication et l’indignation face à l’absurdité de la situation qui priment. Hugo joue aussi de l’absurdité et déploie largement le registre pathétique par l’évocation du procès d’un John Brown à l’agonie. Le caractère percutant du poème de Léon-Gontran Damas touche au cœur et à l’Assemblée nationale, Christiane Taubira restitue parfaitement l’intensité du texte, notamment par la manière dont elle sépare chaque vers par un temps de silence. C’est surtout grâce au registre pathétique que Conrad nous sensibilise au sort des esclaves, alors que Vuillard procède à l’accusation du coupable et s’indigne de son inhumanité. 2. Le texte de Christiane Taubira, s’il n’exclut pas les termes sensibles, se concentre surtout sur l’exposé des faits.
Exercice 7 Le mot joug est issu du latin jugum qui désigne la pièce de l’attelage emboîtant le cou de l’animal. Il a pris le sens figuré de servitude, de contrainte qui pèse fortement sur qui la subit. Le verbe juguler appartient à la même famille lexicale.
> p. 109
Sujet bac Contraction de texte
Exercice 8 La victimisation signifie transformer en victime, c’est-à-dire se complaire dans cet état. Exercice 9 La coercition est l’action de contraindre quelqu’un à accomplir son devoir, quitte à passer par la répression. Exercice 10 L’addiction est une dépendance vis-à-vis d’une substance, d’une personne, d’une pratique. En cela elle peut devenir une forme d’esclavage si l’on ne peut plus s’en passer. On emploie le terme en rapport avec la consommation de drogue, pour les achats compulsifs, les dépendances psychologiques, amoureuses, etc. > Construire son vocabulaire Servir au sens d’accomplir son devoir : service public, rendre service, sergent, fonctionnaire, Servir au sens de subir une aliénation : asservir,
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> Introduction La synthèse rappelle le lien profond qu’entretient la littérature avec l’engagement politique et distingue les recours
> Réponse aux questions 1. Le thème c’est le colonialisme (apport et rapport entre populations). Le paratexte en donne l’indice, le titre – Discours sur le colonialisme– est programmatique et repris par un champ lexical : « colonisés », « colonisateurs et colonisés », « contact », « entre colonisateur et colonisé », « l’homme colonisateur », « l’homme indigène », etc. 2. La thèse de Césaire, c’est que contrairement à ce que laissent penser les européens, selon lui la colonisation détruit les peuples autochtones. Les marques de son jugement négatif, de sa dénonciation, sont nombreuses : « la force, la brutalité, la cruauté, le sadisme », « il n’y a de place que pour la corvée », « aucun contact humain », « sociétés vidées d’elles-mêmes », etc. 3. Arguments essentiels de chaque section. Le texte suit deux temps principaux : – la critique du rapport entre colons et colonisés (lignes 1 à 15) – la critique du progrès (lignes 16 à 28). Des lignes 1 à 7 : le colonialisme s’impose par le rapport de force et oblige les colonisés à se soumettre docilement à la loi du marché européen. Des lignes 8 à 12 : les multiples formes de l’oppression sont l’expression d’une prétention ignoble. Des lignes 13 à 15 : le colon est dégradé (« pion, adjudant ») par le système qu’il met en place pour réduire le colonisé au rang d’objet. Des lignes 17 à 18 : Aimé Césaire formule la thèse de ses adversaires pour qui la colonisation est synonyme d’améliorations médicales et économiques. 3 • Lutter contre l’esclavage
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Des lignes 19 à 21 : La contrepartie de ses apports est minimisée par la destruction culturelle qui l’accompagne. Des lignes 22 à 28 : L’argument de l’aménagement du territoire est contrebalancé par l’évocation des conditions de travail déplorables de la main-d’œuvre indigène.
détourne pas le regard. Sa physionomie exprime de la dignité. Le choix du cadrage et de la pose rappelle les portraits de nobles ou de bourgeois. Mais certains indices rappellent sa condition ; le sein nu est livré à la vue et une pointe d’inquiétude se lit dans le regard de la jeune femme.
4. Par des énumérations fréquentes, Aimé Césaire illustre ses arguments aux lignes 4 et 5, 10 à 12, 19 à 21. 5-6-7. La contraction peut être rédigée à partir des réponses précédentes.
5. La connotation raciste et esclavagiste du terme « négresse » n’est désormais plus tolérée.
L E C T U R E C U RS I V E Maryse Condé Moi, Tituba sorcière… Noire de Salem (1988)
> p. 110-111
> Introduction Maryse Condé est l’une des auteures majeures de la littérature francophone. Ses œuvres, tant par leur accessibilité que par la force éthique de leur contenu, sont à même de susciter la curiosité des élèves. Ils abordent notamment l’histoire du continent africain, de la colonisation mais aussi des thèmes d’une actualité brulante. Moi, Tituba sorcière… Noire de Salem permet tout particulièrement de questionner la désignation des boucs-émissaires dans les sociétés. > Réponse aux questions 1. a. Le titre se concentre sur les caractéristiques du personnage féminin : sa couleur de peau, sa part prise dans un événement historique, le jugement social qui pèse sur elle. Autant d’éléments discriminants que vient contrebalancer la mise en apposition du pronom personnel « moi » pour mettre en valeur la dignité du personnage. Les points de suspension peuvent venir figurer à la fois les sous-entendus du jugement social et l’hésitation, la difficulté du personnage à se nommer. b. Le titre nous annonce le récit de l’histoire des sorcières de Salem, du point de vue de Tituba. Cependant, la trajectoire de Tituba ne se limitera pas à Salem, qui ne représente pour elle qu’une période de sa vie. 2. Tituba était une esclave du révérend Samuel Parris, qui joua un rôle très important dans l’affaire des sorcières de Salem, étant l’une des premières accusées. Elle était une Amérindienne Arawak et non une esclave noire. Capturée en Amérique du Sud alors qu’elle était enfant, elle fut emmenée à la Barbade et vendue comme esclave. Elle avait entre 12 et 17 ans lorsqu’elle entra au service de Samuel Parris. 3. La question doit laisser à tous la possibilité d’exprimer sa subjectivité et de la justifier par une analyse de l’image. 4. La posture de l’esclave n’est pas celle des représentations traditionnelles comme dans le tableau de Francesco Bertolozzi, Esclave noire avec un boulet enchaîné à la cheville peint en 1796 (p. 94), où le visage de l’esclave au travail est caché, où l’esclave est placé dans un plan d’ensemble. Marie-Guillemine Benoist offre un plan rapproché à l’esclave qu’elle peint, en outre la jeune femme dont le visage se place au centre et en haut de l’image regarde droit devant elle et donc dans la direction de l’observateur dont elle ne
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6. Tituba inspire la pitié notamment parce qu’elle est la fille d’Abena, jeune Ashanti (du Ghana) enlevée et violée sur un vaisseau négrier, pour être vendue à des colons à la Barbade. Tituba découvre très tôt l’oppression de son peuple et devient orpheline. Mais le personnage peut aussi susciter l’admiration. Sa force vitale est révélée par Man Yaya, guérisseuse qui l’initie aux bienfaits des plantes et aux sacrifices rituels. C’est donc un être aux pouvoirs supérieurs mais qui vit presque constamment dans l’humiliation du fait de la bêtise, du racisme et de la méchanceté des autres. Sa persévérance, sa capacité à évoluer, à surmonter les catastrophes, à ne pas oublier la bonté (avec Azevedo par exemple) font d’elle une héroïne. 7. a. John Indien est l’homme qu’elle rencontre sur sa terre natale à la Barbade. Son mariage avec lui l’entraîne à Boston, puis au village de Salem au service du pasteur Parris. Tituba est la servante de Benjamin Cohen d’Azevedo, mais elle est aussi sa maitresse (pp.197-198). Il est « son doux amant bancal et contrefait » (p. 217) Iphigénie est l’homme qu’elle fréquente de retour sur sa terre natale. Il prend part aux révoltes des esclaves marrons. b. Tituba aime les hommes et les relations charnelles qu’elle peut avoir avec eux. Si la relation charnelle suffit à la lier à John Indien, elle trouve auprès des deux autres hommes des satisfactions intellectuelles et morales. c. Alors que John Indien a intériorisé sa condition servile (p. 46 : « Répète mon amour ! Ce qui compte pour un esclave c’est de survivre ! »), le juif Azevedo qui subit des discriminations comme Tituba, offre à la jeune femme sa liberté (voir les pages 208-209). Quant à Iphigénie, il revendique haut et fort la libération des esclaves et s’engage dans ce combat. Les trois relations sentimentales de Tituba marquent donc le cheminement progressif vers la liberté. 8. Tituba est initiée aux pouvoirs surnaturels par Man Yaya, guérisseuse et faiseuse de sorts. Ce sont des pratiques vaudous. Tituba s’en sert essentiellement pour guérir les êtres qui l’entourent mais les médisants puritains interprètent de manière détournée ses actes pour faire d’elle un parfait bouc-émissaire. La puritaine Betsey, qui avait d’abord accordé sa confiance à Tituba, se retourne contre elle et la mord. « Sa lèvre supérieure se retroussa en un laid rictus qui découvrit ses gencives maladives : -vous, faire du bien ? Vous êtes une négresse, Tituba ! Vous ne pouvez que faire du mal. Vous êtes le mal ! » (p. 123) De retour à la Barbade, l’un des grands bonheurs de Tituba est de ramener à la vie un nouveau-né (p. 234) 9. Voilà la leçon donnée par Man Yaya à Tituba : « Les morts ne meurent que s’ils meurent dans nos cœurs. Ils vivent si nous les chérissons, si nous honorons leur mémoire, si nous posons sur leurs tombes les mets qui de leur vivant ont eu leurs préférences, si à intervalles réguliers nous nous recueillons pour communiquer dans leur souvenir. Ils sont là, partout
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autour de nous, avides d’attention, avides d’affection. Quelques mots suffisent à les rameuter, pressant leurs corps invisibles contre les nôtres, impatients de se rendre utiles. » (p. 23) Tituba se sent fréquemment « visitée » par les morts. (ex. : p. 195) C’est parce que la parole des morts (d’Abena et Man Yaya, mère biologique et mère spirituelle) trouve toute sa place dans la vie que Maryse Condé l’intègre naturellement dans les dialogues. Elle rend donc compte d’une part d’irrationnel. Aux pages 44 et 45, la mère de Tituba intervient donc dans le récit comme si elle était encore vivante. 10. L’exergue montre la complicité imaginée par l’auteure avec son personnage. Le personnage fonctionne comme un alter ego, comme la confidente, la révélatrice de la pensée de l’auteure. Sorcière, elle pratique la maïeutique de l’esprit de Maryse Condé. Tituba est une part d’elle-même, notamment celle qui symbolise la lignée familiale d’esclaves dont elle est issue. 11. La vocation littéraire en levant le voile sur les atrocités de l’esclavage, en les exposant le plus possible dans les détails va à l’encontre du tabou familial sur la condition asservie des ancêtres de Maryse Condé. L’auteure est partagée entre la gêne, l’embarras et la volonté de révéler la vérité. 12. Les esclaves et descendants d’esclaves ont eu tendance à intérioriser leur humiliation. Or, c’est un crime qu’ils ont subi et ils doivent davantage se considérer comme des victimes. Cependant, Maryse Condé craint que la victimisa-
tion ne donne pas l’envie de se battre et qu’elle tarisse la créativité. La victimisation ne doit donc pas être complaisante. VERS LE BAC ORAL > S’entrainer à l’entretien
1. Les accusations en sorcellerie sont des moyens privilégiés pour ostraciser certains individus, retourner contre eux l’opinion publique et les condamner parfois à tort. La sorcellerie a rapport avec les croyances, les superstitions qui sont loin d’avoir disparu dans nos sociétés. Par exemple, au Togo, des enfants accusés de sorcellerie sont maltraités. Vous pouvez consulter à ce sujet la plaidoirie de la gagnante du prix national de plaidoirie 2019, Valérie Tete https://www. youtube.com/watch?v=7ad_MwM4MhA 2. Salem est la petite communauté puritaine où se déroule le célèbre procès des sorcières en 1692. L’atmosphère hystérique de ce procès est bien connue et aide à mieux comprendre le mépris que Tituba a dû subir. 3. La réponse doit être librement construite par l’élève et justifiées par des arguments précis. > Carnet de lecture Passages remarquables : – l’incipit qui fixe le sort tragique de Tituba (pp. 13-15) ; – l’injustice des procès de Salem, (p. 173) ; – les conditions judiciaires du xviiie siècle américain (pp.184185) ; – le rapprochement de Tituba et Azevedo (p. 197) ; – les retrouvailles de Tituba avec son peuple opprimé (pp. 222-223) ; – la mystérieuse maternité (p. 234).
3 • Lutter contre l’esclavage
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SÉQUENCE
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Le pouvoir de la presse
Présentation de la séquence > La problématique Un texte peut-il faire changer la société ? La séquence « le pouvoir de le presse » a pour objectif de faire réfléchir au rôle de la presse, de son âge d’or au xixe siècle à l’époque contemporaine. À travers des figures incontournables du journalisme, elle questionne l’engagement de l’auteur dans son texte et les leviers dont il dispose pour modifier l’opinion publique. Elle permet aussi de s’interroger sur l’efficacité de la démarche journalistique : les mots, les images ont-ils un réel poids ? Permettent-ils de faire évoluer la société, de transmettre des idées ? > Le groupement de textes Le groupement de textes propose des articles du xixe siècle, classés de façon chronologique. Ils ont été rédigés le plus souvent par des écrivains reconnus comme Victor Hugo et Émile Zola, qui trouvent dans la presse un moyen de prolonger leurs combats amorcés dans leurs œuvres littéraires en s’adressant à un autre public. Ils évoquent des sujets qui faisaient débat au xixe siècle et qui font écho à des problématiques contemporaines. Le premier texte de Victor Hugo présente ses arguments contre la peine de mort. Les deuxièmes et troisièmes textes de Jules Vallès et de Séverine évoquent les problèmes sociaux liés à la précarité et la grande pauvreté. Le quatrième passage rédigé par Octave Mirbeau présente un point de vue iconoclaste sur le droit de vote considéré comme inutile et illusoire. L’extrait de « J’accuse » d’Émile Zola s’inscrit dans le contexte de l’affaire Dreyfus qui met en jeu des problématiques judiciaires et politiques complexes. Il permet de construire l’image de l’intellectuel engagé dans les problématiques de son temps. > Les lectures complémentaires Les lectures complémentaires permettent un éclairage différent sur les textes du groupement. Classées dans un ordre chronologique, elles offrent des contre-points aux textes étudiés. Le texte n° 6 d’Olympe de Gouges permet de replacer la réflexion de la condition de la femme dans le contexte révolutionnaire qui va inspirer les penseurs du xixe siècle. Cette réflexion peut être complétée par l’extrait n° 7 tiré des Misérables de Victor Hugo qui fait de Fantine l’incarnation de la misère féminine. Le texte n° 8 est un extrait d’un discours de Robert Badinter demandant l’abolition de la peine de mort, il vient prolonger le travail effectué sur le texte n° 1. Les trois derniers textes ont été rédigés par trois journalistes. Martha Gellhorn y réfléchit sur les causes de la guerre en se basant sur son expérience de grand reporter. Ignacio Ramonet démonte les mécanismes qui ont conduit à l’invasion de l’Irak. Kamel Daoud jette un regard amer sur les élections présidentielles algériennes de 2014.
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> pp. 112-113
> Le prolongement culturel et artistique Le prolongement culturel et artistique ouvre la réflexion sur les mécanismes qui peuvent conduire à une limitation de l’expression des journalistes en se basant sur des dessins de presse et des photographies. Il permet d’évoquer la censure, les dangers que prennent les journalistes pour informer le public. Il ouvre aussi la réflexion à des problématiques contemporaines liées aux mutations du monde médiatique. Le développement d’internet, des réseaux sociaux, de la gratuité de l’information remet en cause la presse traditionnelle dont le modèle économique est déstabilisé. Enfin, l’installation de Rodney Graham, Rheinmetall/Victoria 8 (2003) propose une représentation esthétique et poétique de l’obsolescence des médias traditionnels.
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> pp. 112-113
> Introduction Les deux documents, de natures différentes, témoignent de l’intérêt pour la presse au xixe siècle. Le premier est une gravure de Louis Léopold Boilly, un peintre français (1761-1845) qui s’était spécialisé dans les scènes de genre minutieuses. Fin observateur des salons et de la vie de son temps, il aime à reproduire de façon détaillée les postures, les costumes et les visages de ses modèles dans des lithographies humoristiques. La citation, quant à elle, est issue de l’essai d’Alexis de Tocqueville (1805-1859), De la Démocratie en Amérique. Tocqueville a parcouru les États-Unis de 1831 à 1832 afin d’étudier le système pénitentiaire américain. Son essai naîtra de cette expérience : il y révèle les ressorts de la démocratie, l’importance des libertés individuelles, mais aussi les menaces qui pèsent contre ce régime politique (les excès de l’individualisme pouvant conduire à une atomisation de la société et à un régime autocratique.) > Réponses aux questions 1. Louis Léopold Boilly met en valeur l’engouement pour la presse de différentes façons dans cette gravure. Tout d’abord, il représente des personnages en train de lire les journaux. Les personnages échangent peu, tout le monde est concentré sur sa lecture. Tous les âges (du jeune homme à la femme âgée), les deux sexes (même si les femmes sont sous-représentées) sont regroupés autour d’une table recouverte d’une nappe verte. 2. La citation de Tocqueville associe presse et liberté en les liant intimement, l’une serait la condition sine qua non de la survie de l’autre comme le montre l’emploi de la négation dans l’expression « sans elle la liberté ne saurait vivre ». Mais l’auteur n’idéalise pas la presse qui est un mélange de « biens et de maux ». L’idée contenue dans cette antithèse est reprise en fin de citation : « avec elle l’ordre peut à peine se maintenir ». Garante des libertés individuelles et source de potentiels désordres, la presse est regardée avec intérêt et suspicion par l’essayiste.
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G RO U P E M E N T D E T E X T E S CONTEXTE L’abolition de la peine de mort
Interpréter > pp. 114-123 > p. 114
Recherche Le site d’Amnesty international propose des ressources à l’adresse suivante : https://www.amnesty.org/fr/what-we-do/ death-penalty/ Le texte en contexte Victor Hugo peut être qualifié d’engagé, car il met son art et sa renommée au service de certaines causes qu’il veut défendre. Ainsi il met tout le poids de sa célébrité pour empêcher la condamnation à mort de John Tapner dans sa « Lettre aux habitants de Guernesey ». Voici quelques données à retenir. En 2018, la Chine, l’Iran, l’Arabie saoudite, le Viêt-Nam et l’Irak sont les pays qui ont effectué le plus d’exécutions. 2 531 condamnations à mort ont été prononcées dans 54 pays. En dehors des statistiques, le site propose des éléments pour nourrir une réflexion sur cette pratique judiciaire, en particulier des arguments qui justifient son abolition comme son caractère irréversible, non dissuasif et discriminatoire. 1 Victor Hugo, « Lettre aux habitants de Guernesey » (1854)
> p. 115
> Présentation de l’extrait La « Lettre aux habitants de Guernesey » est parue dans le journal L’Homme, publié à Jersey, qui était le principal vecteur de la parole hugolienne lors de son exil, les journaux français ne pouvant faire paraître les textes des opposants au régime de Napoléon III. Victor Hugo y prend fait et cause pour John Tapner, condamné à mort par pendaison pour avoir cambriolé et incendié une maison après avoir tué sa propriétaire. L’écrivain n’obtiendra pas la commutation de la peine de Tapner qui sera exécuté le 10 février 1854 dans des circonstances sordides. Ce fut la dernière exécution à Guernesey. > Lire en écho Le texte de Robert Badinter est un extrait d’un discours politique qui aborde le même thème que celui de Victor Hugo, il s’agit dans les deux cas d’un plaidoyer contre la peine de mort. Les deux auteurs cherchent à convaincre et à émouvoir, pour l’un, le lecteur, pour l’autre, l’auditoire. > Réponse aux questions S’engager dans le texte 1. Victor Hugo cherche à émouvoir son lecteur dans cet extrait. Il veut lui faire ressentir de la tristesse face à la situation terrible de Tapner, ce qu’il met en avant avec l’expression « le cœur se serre en y songeant » (ligne 6). La pitié est également recherchée par l’auteur qui peint le portrait d’un homme « misérable » (ligne 7) et « frissonnant » (ligne 7) dans sa cellule. La peur peut aussi naître devant l’évocation de la mort qui rôde et qui est présentée de façon terrifiante avec la métaphore du « spectre qui grandit et qui approche » (lignes 8-9).
2. Au début du texte, Victor Hugo décrit avec précision l’état d’esprit de Tapner. Il met en scène un homme qui vit dans la peur de son destin fatal, « frissonnant » (ligne 7) d’angoisse, « qui vit l’œil fixé » (ligne 8) sur le calendrier indiquant la date de son exécution. L’attente d’une mort certaine, mesurable avec précision est une torture supplémentaire, un supplice. L’auteur l’oppose à l’insouciance des hommes libres soulignée par le parallélisme de construction « en cet instant, dans cette minute où nous respirons librement, où nous allons et venons, où nous parlons et sourions » (lignes 4-5). Le contraste entre le bonheur de la vie libre et les tourments auxquels est soumis Tapner dépeind avec force l’horreur de sa situation. 3. Les pronoms employés par Victor Hugo entrent dans sa stratégie argumentative. Dans le texte, le « vous » désigne les habitants de Guernesey que l’écrivain apostrophe plusieurs fois (« Guernesiais » ligne 12, « Peuple de Guernesey » ligne 17). Le « nous » recouvre une réalité plus complexe et mouvante : – parfois il est employé pour désigner les habitants de Guernesey, en incluant les exilés, comme le signale le glissement du « vous » au « nous » aux lignes 1 et 2. – à d’autres moments il évoque les hommes libres, s’opposant, par leur statut et leur ressenti, à John Tapner (lignes 4-5). – il désigne également les auteurs engagés, ceux qui alertent le peuple sur des dérives ou des dysfonctionnements que la population peine à percevoir : « Nous autres, nous sommes les souffrants, nous sommes les éprouvés, c’est-à-dire les penseurs » (lignes 20-21). Ils sont présentés presque comme des prophètes (« nous tâchons de toucher Dieu » ligne 22). 4. Victor Hugo en appelle à la charité et au pardon. Pour Hugo, Tapner doit être puni. La reconnaissance de sa culpabilité est juste, c’est le châtiment qui est disproportionné. Il entraine des souffrances qui sont inutiles et inexcusables. En luttant contre la peine de mort, supplice qui va à l’encontre de ses idéaux chrétiens, Victor Hugo défend la valeur de la vie humaine. Il fait référence aux dix commandements afin d’appuyer son propos (ligne 24), règles qui sont valables pour lui en toute circonstance (lignes 25-26 : « elle a été dite pour la loi, aussi bien que pour l’individu »). La justice humaine n’a pas à se soustraire à cette règle. Elle n’a pas à enlever une vie humaine, ce que Victor Hugo souligne avec un parallélisme de construction et une antithèse dans l’exemple suivant : « Devant la loi humaine, c’est juste ; devant la loi divine, c’est redoutable » (lignes 15-16). VERS LE BAC ÉCRIT > Essai
Dans ce passage, Victor Hugo emploie la métaphore du « plongeur » pour parler des penseurs. Cette image peut être employée pour qualifier les écrivains qui cherchent au-delà des apparences et des idées reçues, des réalités plus profondes. Hugo envisage l’artiste et le penseur comme des êtres liés à des vérités supérieures, proches des mages ou des prophètes. Cette dimension spirituelle peut être discutée tout comme la nécessité pour l’écrivain d’avoir cette fonction de révélateur. Des théories comme celle de 4 • Le pouvoir de la presse
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« l’art pour l’art » remettent en cause cette vision utilitariste et engagée de la littérature.
peut aussi ressentir de la colère face aux individus qui n’ont pas su reconnaître, aider et accueillir ces pauvres hères.
> Écrit d’appropriation Cet exercice permettra aux élèves de développer leur point de vue sur un sujet qui les touche tout en l’intégrant à un genre particulier, la lettre ouverte. Celle-ci prend la forme d’un texte argumentatif engagé qui s’adresse clairement à un individu, à un groupe. Il sera donc nécessaire d’employer des apostrophes, des pronoms personnels de première et de deuxième personnes.
2. Cette expression désigne les artistes morts dans l’oubli qui sont enterrés dans une fosse commune à cause de leur misère.
CONTEXTE La pauvreté
> p. 116
Recherche La consultation du site d’Emmaüs est un point de départ intéressant pour les recherches : http://emmaus-france.org/ tag/abbe-pierre/. Des pages reviennent sur l’action de l’abbé Pierre (19122007) qui a lancé un appel à la radio lors de l’hiver 1954 (« L’insurrection de la bonté pour les sans-logis »). Il fondera le mouvement Emmaüs, mouvement luttant contre la pauvreté et l’exclusion, à la suite de cette intervention. 2 Jules Vallès, « Les Morts » (1861)
> p. 117
> Présentation de l’extrait Dans ses articles intitulés les Réfractaires, d’abord parus dans le Figaro puis en volume en 1866, Jules Vallès propose des portraits d’hommes refusant la compromission, lui préférant la misère pour vivre conformément à leurs idées. L’extrait est tiré d’un des chapitres de cet ouvrage, intitulé « Les Morts ». L’accent est mis sur la pauvreté qui touche plus particulièrement les artistes. > Lire en écho L’extrait des Misérables de Victor Hugo propose une autre image de la misère au xixe siècle, celle qui touche les femmes. Fantine incarne une figure pathétique meurtrie par une société injuste. > Les mots de… Le terme « procès » est employé à la ligne 7 par Jules Vallès (« faire le procès de mon temps ») dans le sens de « mettre en cause, critiquer de façon systématique ». Le CNRTL propose différentes expressions contenant ce terme : – « sans autre forme de procès » : « sans jugement, sans observer la justice », dans un sens plus figuré « sans plus de formalité ». – « procès d’intention » : jeter le discrédit sur quelqu’un en lui prêtant des intentions malhonnêtes. – « Faire à quelqu’un procès de tendance » : « Le juger sur des intentions, non sur des actes » https://www.cnrtligne fr/definition/proc%C3%A8s > Réponse aux questions S’engager dans le texte
Interpréter 3. L’auteur prétend refuser de « faire le procès de son temps » (ligne 7). Néanmoins, il dénonce la cécité des hommes qui ne voient pas les souffrances de leur prochain et il cherche à leur ouvrir les yeux sur des réalités ignorées. Au lieu de prôner la révolte contre une société injuste, il incite tout un chacun à faire preuve de « charité » (ligne 16) en sortant de sa routine et de son indifférence coupable. Les expressions « sans le vouloir » (ligne 16) et « de bonne foi » (ligne 16) semblent souligner l’innocence de ceux qui n’ont pas su voir. Elles sont contrebalancées par des formulations plus violentes comme « empoisonné la vie » (ligne 17) et « précipité la mort » (ligne 17) qui témoignent des conséquences terribles de cette indifférence face à ceux qui sont hors-normes. 4. Le conditionnel passé souligne un changement dans l’attitude de J. Vallès face à la société. D’un comportement antérieur plus excessif, plus anarchiste, il est passé à une attitude plus apaisée. Il ne s’agit plus pour lui d’en appeler à la révolte, mais de rendre hommage à ces morts, ce qui souligne les références à des chants patriotiques ou religieux. Il est passé de « la Marseillaise », du « Dies Irae » pleins de colère à un « Requiem » commémoratif. Le futur de la ligne 14, « je ne me laisserai point égarer » contraste donc avec les conditionnels passés « j’aurais poussé peut-être un cri de guerre » (ligne 9.) et « C’eût été une satire » (ligne 12). VERS LE BAC ORAL > Explication de texte
Jules Vallès cherche à faire réfléchir le lecteur sur la condition des artistes qui mènent une existence différente, niée par un corps social grégaire qui refuse la différence. Il s’emploie également à proposer un portrait pathétique de l’artiste en être souffrant, vivant dans la misère et la douleur, sans qu’il puisse faire entendre sa parole ou qu’il soit reconnu par la société.
CONTEXTE La condition de la femme dans la France du xixe siècle
> p. 118
Les réseaux sociaux, par leur ampleur et leur réactivité, permettent la diffusion des idées et des informations. Des hashtags comme « me too », « paye ta schnek » ou « balance ton porc » ont libéré la parole des femmes qui ont pu témoigner des situations de harcèlement et de violence qu’elles ont vécues ou qu’elles vivent au quotidien. Ils permettent également l’expression et la diffusion des théories de féministes contemporaines que l’on peut suivre sur Twitter ou Facebook comme Mona Chollet ou Nadia Daam.
1. Jules Vallès cherche à toucher le lecteur, à lui faire ressentir de la compassion pour ces morts qui ont eu une vie de misère et de souffrance. Il multiplie les termes soulignant leur malheur dans des énumérations (lignes 24-25.) Le lecteur
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3 Séverine, « De profundis clamavi ad te… » (1893)
VERS LE BAC ORAL > Lecture expressive
> p. 119
> Présentation de l’extrait Séverine est une des rares journalistes femmes du xixe siècle. Elle a été formée par Jules Vallès et a été inspirée par ses idées anarchistes. Dans cet article, elle réagit à un attentat qui remet en cause ses croyances. Après un prologue où elle expose ses doutes, elle fait entendre la voix des plus pauvres, des enfants misérables, des vieillards, des hommes exploités par leurs employeurs, des femmes. > Lire en écho L’extrait des Misérables reprend la même thématique, celle de la femme pauvre maltraitée par le destin, mais dans un autre genre, le roman. Il permet de souligner combien ce thème est central dans la littérature du xixe siècle. > Réponse aux questions S’engager dans le texte 1. L’expression qui revient dans le texte est « Nous sommes les femmes » (ligne 1) repris dans la formule « Nous sommes les pauvres femmes » (ligne 21). Elle donne le sentiment au lecteur d’entendre directement, sans intermédiaire, la parole de ce groupe social, celui des femmes qui vivent dans la misère et que l’on entend peu. 2. Le texte fait naître de la tristesse, de la compassion devant la misère économique, sociale et morale qui accable les femmes du peuple. Interpréter 3. Severine fait un portrait très sombre du fonctionnement social de son temps. La femme semble être la victime de tout un système qui l’oppresse : – La femme est au service de sa famille tout au long de sa vie : elle doit s’occuper successivement de ses frères et sœurs, de son mari, de ses enfants ; – Elle occupe des emplois précaires ; – Elle est victime de violences sexuelles (ligne 11) ; – Elle est ostracisée en tant que fille mère et est qualifiée de prostituée très facilement (lignes 12-14) ; – Elle ne peut espérer qu’une vieillesse misérable, une mort et un enterrement indignes (lignes 17-18). La société exploite donc la femme, qui perd toute liberté, sans autre avenir que la souffrance et la misère. 4. Séverine insiste sur les âges de la vie de la femme pour montrer que celle-ci suit un destin tout tracé qui va de malheur en malheur. Dès son plus jeune âge (« huit ans » ligne 2) jusqu’à la vieillesse, elle ne fait que souffrir. Les indications d’âges soulignent aussi son vieillissement prématuré. Elle est fanée à « vingt ans », « vieilles à 25 ans » (lignes 19-20), ce qui l’oppose aux femmes plus aisées pour qui elle travaille (lignes 21-24). 5. Séverine emploie le présent de vérité générale, le discours qu’elle tient ne supportant aucune exception. Les femmes sont soumises à un destin fatal auquel elles ne peuvent échapper. L’emploi de la première personne du pluriel participe également à ce processus de généralisation.
Pour préparer cette lecture, l’élève doit se demander quel effet il veut produire sur le lecteur : l’émouvoir ? Le révolter ? Pour rendre cette lecture expressive, il doit travailler le texte en soulignant les mots qui doivent être mis en valeur comme par exemple l’anaphore « Nous sommes les femmes », les indications d’âge qui martèlent le texte, les énumérations (lignes 8 ; 17-18). Les exclamatives doivent également être interprétées car elles portent en elles toute la lassitude et la révolte que veut transmettre Séverine.
CONTEXTE Le vote en France, un droit soumis aux aléas de l’histoire
> p. 120
Recherche Voici quelques ressources concernant le droit de vote des femmes dans le monde : – Le site d’Amnesty international propose une chronologie et des pistes de réflexion : https://www.amnesty.be/je-veuxagir/agir-localement/agir-a-l-ecole/l-espace-enseignants/ enseignement-secondaire/dossier-papiers-libres-2004-lesviolences-contre-les-femmes/article/2-2-le-droit-de-votedes-femmes-dans-le-monde-un-combat-inacheve – Le site ONU femmes (https://interactive.unwomen.org/ multimedia/timeline/womenunite/fr/index.html#/1840) offre une exposition interactive détaillant les grandes dates du vote des femmes de 1840 à aujourd’hui. Le texte en contexte : la presse peut accompagner les changements sociaux en devenant la tribune des journalistes engagés, en rapportant les actions des militants, en relayant leur parole. Mais multiple par essence, elle fait aussi entendre d’autres voix, celles des contradicteurs, des opposants aux changements sociaux et politiques. 4 Octave Mirbeau, « La Grève des électeurs » (1888)
> p. 121
> Présentation de l’extrait « La Grève des électeurs » est une des plus célèbres chroniques d’Octave Mirbeau. Inspiré par l’anarchisme, il critique le droit de vote en montrant en quoi il est un moyen supplémentaire d’asservir le peuple. Mirbeau appelle les électeurs à faire la grève, en faisant enfin preuve de lucidité. Pour en faire comprendre le message, l’étude de ce texte peut s’accompagner d’une petite recherche préparatoire sur l’anarchisme au xixe siècle. > Lire en écho L’article de Kamel Daoud est aussi une réflexion sur le droit de vote, mais dans un tout autre contexte, celui des élections présidentielles en Algérie de 2014. Le journaliste y présente les raisons qui peuvent pousser un homme politique à se voir comme un homme providentiel et à refuser d’abandonner le pouvoir. > Réponse aux questions S’engager dans le texte 1. Cet extrait de « La Grève des électeurs » peut déconcerter un lecteur qui considère que le droit de vote est acquis 4 • Le pouvoir de la presse
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et indiscutable. En effet, Octave Mirbeau en fait la critique, le considérant comme inutile puisqu’il ne permet pas à l’électeur d’influer sur la marche du monde. 2. Octave Mirbeau interpelle le lecteur-électeur en employant des apostrophes dévalorisantes (« O bon lecteur, inexprimable imbécile, pauvre hère » ligne 16) et en employant la deuxième personne du singulier (« si tu lisais parfois » ligne 23). Interpréter 3. L’auteur emploie l’irréel du présent dans ses hypothèses du troisième paragraphe. Le fait que le lecteur soit en mesure d’ouvrir les yeux sur son rôle en tant qu’électeur semble improbable. Il faudrait que le lecteur soit en mesure d’échapper aux discours tenus par la presse et par les politiques, qu’il s’instruise en lisant des « philosophes qui en savent long sur [ses] maîtres » (lignes 24-25). Mais cela semble improbable compte-tenu du vocabulaire péjoratif qu’utilise Mirbeau pour qualifier son lecteur (« éternel badaud » ligne 22, « inexprimable imbécile » ligne 17). 4. Mirbeau dévalorise l’électeur en le plaçant à un niveau de réflexion inférieur à celui d’un mouton, animal connoté péjorativement pour son conformisme et son suivisme. L’électeur est « plus moutonnier que les moutons » (ligne 34), « il nomme son boucher » (ligne 15). Cette métaphore dévalorisante souligne l’illusion dans laquelle vit l’électeur qui croit exercer un droit en votant, alors que, pour Mirbeau, il ne fait que se soumettre à une élite qui va le dominer. VERS LE BAC ÉCRIT > Contraction de texte
Le premier paragraphe se présente comme un constat valable en tout temps et en tout lieu : les plus faibles sont écrasés par les forts. Le deuxième paragraphe met en avant le paradoxe du droit de vote. Alors que ce dernier n’a aucune efficacité réelle, l’électeur y tient et joue un jeu dont il est la dupe. Dans le troisième paragraphe, Mirbeau interpelle le lecteur et l’exhorte à prendre du recul, à s’instruire pour échapper aux mensonges politiques et médiatiques. Mais l’auteur doute que cela soit réellement possible. > Écrit d’appropriation Les arguments suivants peuvent être développés dans ce travail : – Le vote est le lieu de l’exercice de la liberté démocratique ; – La démocratie ne peut perdurer si les citoyens ne s’emparent pas des élections ; – Le droit de vote a été acquis difficilement, il faut le faire vivre ; – Ne pas voter justifie à terme la disparition du droit de vote, des assemblées ; – Ne pas voter mine la représentativité et l’assise des élus ; – Ne pas voter c’est laisser à d’autres le pouvoir de choisir.
CONTEXTE L’affaire Dreyfus
> p. 122
Recherche L’Aurore est un journal républicain socialiste fondé en 1897 par Ernest Vaughan. Il défend rapidement des idées dreyfusardes, ce qui justifie la publication de « J’accuse » dans ses pages. Le titre complet du journal, L’Aurore Littéraire. Artistique. Sociale, montre sa volonté de s’inscrire dans de nombreux champs différents à la fois esthétiques et sociaux. Un écrivain comme Zola y est donc tout à fait à sa place. 5 Émile Zola, « J’accuse… », L’Aurore (1898) > p. 123 > Lire en écho Dans cette lettre ouverte, Zola a pour objectif de faire comprendre les ressorts de l’affaire Dreyfus. Après une première partie où il explique les prémices de l’erreur judiciaire qu’il dénonce, il va dans un deuxième temps revenir en arrière pour expliquer les démarches effectuées pour accabler Dreyfus. Ensuite il va expliquer comment le véritable coupable a été identifié et protégé par l’armée et les pouvoirs publics. Le texte proposé se situe à la fin de l’article, au moment où Zola dénonce nommément ceux qui sont à ses yeux les vrais coupables de cette affaire. > Les mots de… L’adjectif « abominable » vient du latin « abominare » qui signifie « repousser comme un mauvais présage ». Il avait le sens très concret au xiie siècle de « physiquement répugnant ». Il prend progressivement une valeur plus abstraite au xviie siècle qualifiant des comportements qui inspirent l’aversion, l’horreur. > Réponse aux questions S’engager dans le texte 1. L’anaphore « J’accuse » donne un rythme particulier au texte, elle met l’accent sur les personnes que Zola dénonce. Elle place l’écrivain en position de juge. 2. Le lecteur peut être touché par l’audace d’Émile Zola qui n’hésite pas écrire, noir sur blanc, dans la presse, les noms des protagonistes de cette sombre affaire. La fougue et l’engagement de Zola dans son texte lui donnent une force particulière. L’écrivain emploie d’ailleurs la métaphore « protestation enflammée » (ligne 24) pour qualifier son investissement. Interpréter 3. Dans « J’accuse », Zola s’attaque aux dysfonctionnements de l’armée et de la justice : – une erreur judiciaire a été sciemment dissimulée et entretenue (lignes 1-2). – la hiérarchie a couvert les coupables et les erreurs par « esprit de corps » (ligne 13). – le mensonge et la calomnie ont été employés pour discréditer l’accusé et détourner l’attention des vrais coupables (lignes 15-17). Émile Zola mène son combat au nom de la victoire de la vérité et de la justice. 4. Zola emploie un vocabulaire péjoratif et dépréciatif pour qualifier les responsables de cette erreur judiciaire. Paty de
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Clam a « défendu son œuvre néfaste » (ligne 3), le général Billot s’est « rendu coupable de crime de lèse-humanité et de lèse-justice » (ligne 9). Des hyperboles dévalorisent également les actes des accusés : « les machinations les plus saugrenues et les plus coupables » (ligne 4), « une des plus grandes iniquités du siècle » (ligne 6) 5. Les cinq premiers paragraphes sont constitués d’une seule phrase, ponctuée de plusieurs virgules, ce qui donne un rythme particulièrement rapide et fluide à chacun d’eux. VERS LE BAC ÉCRIT > Commentaire
Dans ce texte Zola défend la justice et son corollaire, la vérité. Il emploie des métaphores valorisantes (« l’explosion de la vérité » ligne 20, « Je n’ai qu’une passion, celle de la lumière » ligne 23) pour les qualifier. Ces images s’opposent au vocabulaire dépréciatif qui qualifie ceux qui ont conspiré contre Dreyfus. Zola utilise les pouvoirs de la rhétorique pour rendre son texte efficace. Il émaille son discours d’hyperboles et de métaphores qui viennent donner du relief à son propos. Il s’engage aussi dans son texte en utilisant la première personne du singulier, ce qui donne plus de pouvoir de conviction à cette lettre ouverte.
Lectures complémentaires
> pp. 124-129
6 Olympe de Gouges, « Déclaration des droits de la femme et de la citoyenne » (1791) > p. 124 > Présentation de l’œuvre et de l’extrait La période révolutionnaire a été un moment propice à l’expression des femmes. Elles s’investissent dans la Révolution, mais n’obtiennent pas ou peu de droits. Olympe de Gouges rédige ce texte en réaction à la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen, car elle souhaite universaliser les droits humains. La Déclaration est publiée en 1791 dans une brochure Les Droits des femmes adressée à MarieAntoinette. Il s’organise de la façon suivante : une introduction, un préambule, dix-sept articles et un postambule. Le texte fut refusé par la Convention et ne sera jamais voté. > Lire en écho 1. L’homme est mis en accusation dans les trois premiers paragraphes. L’autrice met en avant le côté tyrannique de l’homme qui cherche à soumettre le sexe faible en l’opposant à la coopération des genres qui s’observe dans la nature (ligne 10). 2. Le préambule reprend les termes de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen en en donnant une version féminine. Il vient introduire les différents articles qui composent ensuite le texte en présentant les valeurs générales qui les sous-tendent. Les femmes sont présentées comme des citoyennes qui ont une place centrale dans la société. Le fait de minorer leur importance et de les reléguer au second plan est une cause de dysfonctionnement social. Leur reconnaître des droits doit assurer le « maintien de la constitution, des bonnes mœurs » et le « bonheur pour tous » (lignes 28-29).
3. Les deux autrices cherchent à défendre les droits des femmes de deux façons différentes : Séverine dénonce les conditions déplorables de vie des femmes au xixe siècle alors qu’Olympe de Gouges revendique des droits en pastichant un texte juridique. 7 Victor Hugo, Les Misérables (1862)
> p. 125
> Présentation de l’œuvre et de l’extrait Le roman Les Misérables est connu pour son récit puissant mettent en scène des personnages luttant pour vivre dignement. Certains passages constituent des pauses réflexives dans l’histoire. C’est le cas de cet extrait qui se trouve à la suite du récit de la pathétique histoire de Fantine. Elle a dû vendre ses dents, ses cheveux et se prostituer pour pouvoir payer les Thénardier qui ont la garde de sa fille Cosette et qui lui font croire qu’ils ont besoin d’argent pour soigner la petite fille. > Lire en écho 1. Fantine incarne la figure de la fille-mère. Elle est rejetée par la société qui la considère comme déviante. Elle n’a plus qu’une seule solution pour vivre : se vendre, devenir « une esclave » (ligne 2). La prostitution lui a fait perdre son humanité et ses espoirs : « elle est résignée de cette résignation qui ressemble à l’indifférence comme la mort ressemble au sommeil » (lignes 18-20). Fantine est également une figure émouvante, car elle représente la « maternité » (ligne 12) bafouée, prisonnière d’un destin fatal où « [elle] a tout ressenti, tout supporté, tout éprouvé, tout souffert, tout perdu, tout pleuré » (lignes 17-18). La dernière phrase de l’extrait laisse néanmoins entendre que malheureusement d’autres souffrances se préparent. 2. Par un jeu de questions-réponses (lignes 1 à 3), Victor Hugo cherche à ouvrir les yeux du lecteur sur le rôle de la société dans la chute de Fantine. Un parallélisme de construction souligne l’assentiment du corps social qui rejette la jeune femme et qui l’accable pour ce qu’elle est obligée de faire : « La misère offre, la société accepte » (ligne 5-6). Hugo dénonce cette situation dans la litote « Ceci n’est pas une des moindres hontes des hommes ». 3. Dans les textes de Séverine et de Hugo le thème de la misère est central. Les deux auteurs montrent comment la société crée et entretient cette pauvreté et détruit une partie de l’humanité : les femmes du peuple. 8 Robert Badinter, « Discours sur à l’Assemblée > p. 126 nationale » (1981) > Présentation de l’œuvre et de l’extrait Lors de sa campagne pour l’élection présidentielle de 1981, le candidat François Mitterrand s’était déclaré favorable à l’abolition de la peine de mort. C’est à son garde des Sceaux, Robert Badinter, avocat pénaliste déjà engagé dans ce combat, que reviendra la tâche de faire passer cette loi à l’Assemblée Nationale. Ce discours mêlant argumentation directe, registre émotionnel et phrases choc (« une justice qui tue ») saura convaincre les députés. La loi fut adoptée le 18 septembre 1981 par 363 voix contre 117. 4 • Le pouvoir de la presse
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> Lire en écho 1. Robert Badinter présente différents arguments abolitionnistes : – Un criminel peut s’amender (lignes 1-3). – La justice n’est pas infaillible, car elle est rendue par des hommes qui ne sont pas parfaits (lignes 3-5). – Il peut y avoir des « erreurs judiciaires » (ligne 5) qui font condamner des innocents. – Rendre la justice n’est pas une science exacte, des sentences différentes peuvent être rendues pour le même crime (ligne 10-17). L’orateur parle ainsi de « loterie judiciaire » (ligne 18) qui montre que l’aléatoire est de règle dans les cours de justice. – Seul Dieu peut enlever la vie à un homme, car la justice est « faillible » (ligne 25), – La conséquence de tout cela est que la peine de mort est « moralement inacceptable » (lignes 21-22). Elle réduit le système judiciaire à une « justice d’élimination », « d’angoisse et de mort » (ligne 32), alors que l’auteur aspire à une justice humaniste et éclairée.
(« Seuls les gouvernements préparent, déclarent et mènent les guerres »), ils conduisent une propagande menant leur population à croire que le combat est nécessaire et inévitable (lignes 7-9 et lignes 27-28). Par ailleurs, les États ne partagent pas les mêmes « intérêts vitaux » (ligne 14) que leur population. Martha Gellhorn pointe ainsi le comportement paradoxal des gouvernements qui trouvent toujours des financements pour combattre alors qu’ils « donnent à contrecœur de l’argent pour financer les services nécessaires aux citoyens » (lignes 22-23).
2. Robert Badinter, en avocat habitué à plaider, emploie différentes figures de style pour toucher son lecteur et intensifier son propos : – des parallélismes de constructions : « Aussi terribles, aussi odieux » (ligne 1), « Aussi prudente (…), aussi mesurés » (lignes 3-4). – des antithèses : « tels condamnés, pour des crimes moindres, seront exécutés » (ligne 15), « d’autres plus coupables, sauveront leur tête » (lignes 15-16). – des hyperboles : « l’injustice suprême » (ligne 9).
> p. 128
3. Ce discours de Robert Badinter peut être placé dans la lignée de « La Lettre aux habitants de Guernesey » car il est lui aussi abolitionniste. Il montre les limites de la justice humaine à qui ne doit pas revenir le droit de vie ou de mort sur les individus. 9 Martha Gellhorn, La Guerre de face (1986)
> p. 127
> Présentation de l’œuvre et de l’extrait La Guerre de face regroupe les articles rédigés par la reporter de guerre américaine Marthe Gellhorn qui a couvert entre autres la guerre d’Espagne, la libération du camp de concentration de Dachau et la guerre des six jours. Son expérience nourrit une réflexion sur les ressorts des conflits, sur les nouvelles formes qu’ils peuvent prendre au xxe siècle. Martha Gellhorn remaniera son ouvrage plusieurs fois. Notre extrait est tiré de la préface de l’édition de 1986 qui est particulièrement critique envers les gouvernements qui sont à l’origine des conflits armés. > Lire en écho 1. Martha Gellhorn emploie la métaphore médicale pour parler de la guerre : c’est une « maladie endémique de l’humanité » (ligne 2) dont les gouvernements sont les « vecteurs » (ligne 2). Elle utilise également le participe passé « contaminés » (ligne 6). La guerre devient donc un mal contagieux qui se répand sans qu’on puisse le contenir. 2. Pour la journaliste, les gouvernements sont les principaux responsables des conflits. Ils sont à l’origine des guerres
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3. Émile Zola et Martha Gellhorn développent dans leurs deux textes des critiques contre les pouvoirs publics. Zola dénonce les dysfonctionnements de l’armée, de la justice et de la classe politique qui ont conduit à la condamnation de Dreyfus, alors que Martha Gellhorn pointe du doigt les gouvernements qui font le choix de la guerre. 10 Ignacio Ramonet, « Mensonge d’État » (2003)
> Présentation de l’œuvre et de l’extrait L’article d’Ignacio Ramonet a été rédigé lors de la deuxième guerre d’Irak de 2003 qui a été menée suite aux attentats du 11 septembre 2001. Les États-Unis ont été particulièrement actifs dans le déclenchement de ce conflit et ont invoqué différentes raisons : la lutte contre le terrorisme, l’élimination des armes de destructions massives possédées par l’Irak, l’instauration d’une démocratie dans ce pays grâce à la destitution de Saddam Hussein. Ignacio Ramonet revient de façon critique sur ces justifications. > Lire en écho 1. Ignacio Ramonet propose une vision assez péjorative du gouvernement américain qu’il accuse de « mensonges » (ligne 5). En se basant sur des preuves nouvelles et des témoignages, le journaliste montre que les raisons invoquées étaient « fausses » (ligne 11). Il accuse le gouvernement d’avoir sciemment choisi de cacher des éléments importants comme l’absence de preuves concernant la détention par l’Irak d’armes de destruction massive. Il met en cause explicitement le président G. W. Bush qui « lançait de telles accusations » alors qu’il « avait reçu des rapports de ses services d’intelligence démontrant que tout cela était faux » (ligne s 17 à 17). L’état américain a, pour Ignacio Ramonet, mené une campagne de propagande mensongère pour convaincre la population et les états membres de l’ONU du bien-fondé de ce conflit. 2. Les textes d’Ignacio Ramonet et d’Émile Zola sont ouvertement polémiques. Ils portent des accusations contre des individus et des institutions de façon forte, en employant des termes péjoratifs et des hyperboles. Ainsi dans « Mensonge d’État », le journaliste du Monde diplomatique cite Jane Harman qui parle de « la plus grande manœuvre d’intoxication de tous les temps » (lignes 18-19) à propos de la campagne menée par le gouvernement américain. La métaphore « chapelet de mensonges » (ligne 5) est également extrêmement virulente.
2 • La littérature d’idées et la presse du xixe siècle au xxie siècle
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11 Kamel Daoud, « La triste des mandats » (2013)
> p. 129
> Présentation de l’œuvre et de l’extrait Dans ses chroniques publiées dans Le Quotidien d’Oran, le journaliste algérien francophone Kamel Daoud développe ses réflexions au jour le jour sur la vie dans son pays, en particulier sur le fonctionnement politique de cette nation. L’article proposé ici évoque la figure d’Abdelaziz Bouteflika qui a été président de l’Algérie de 1999 à 2019 où, sous la pression de la rue, il choisit de pas se présenter à sa réélection. Même si l’article prend l’exemple de ce cas particulier, il peut aussi être lu comme une réflexion plus générale sur la psychologie des politiques qui cherchent à se maintenir contre vents et marées au pouvoir. > Lire en écho 1. L’expression « mandat à vie » renvoie ici à une certaine vision du pouvoir politique où des dirigeants cherchent coute que coute à se maintenir au pouvoir d’une élection à l’autre, ce qui est le cas d’Abdelaziz Bouteflika. Kamel Daoud met en avant plusieurs raisons qui conduisent à cette situation. Tout d’abord, l’homme politique concerné se voit comme un homme providentiel, seul capable de gouverner son pays, ce qu’il vit comme un « devoir » auquel il ne peut se soustraire (ligne 28). Le candidat à la réélection perpétuelle remet aussi en cause la possibilité de la population à voter de façon intelligente : « le peuple (…) n’est pas apte à la démocratie (…) si on le laisse choisir, il va choisir le pire. » (Lignes 29-30). 2. Kamel Daoud porte un regard pessimiste sur la démocratie dans son pays et en particulier sur ses dirigeants qui s’illusionnent sur leur importance et sur leur popularité. Ceux-ci semblent vivre dans une sorte de « déni du réel » (ligne 5) où ils n’entendent pas les aspirations de « ceux qui protestent dans la rue » (ligne 12). Ils succombent au biais de confirmation, n’entendant que ce qui confirme leur point de vue. L’auteur qualifie de « palais de miroir » (ligne 20) le fait qu’on ne leur renvoie que ce qui étaye leur raisonnement. 3. Les textes d’Octave Mirbeau et Kamel Daoud traitent tous les deux du thème des élections selon deux angles différents. Octave Mirbeau, qui se place dans le courant de pensée anarchiste, dénie au droit de vote tout effet réel alors que Kamel Daoud envisage le point de vue du politique qui tente d’annexer les élections à son profit.
PROLONGEMENT ARTISTIQUE
ET CULTUREL
> pp. 130-133
La presse est-elle en danger ?
> pp. 130-131
> Introduction Ces pages permettent de construire une vision diachronique de l’évolution de la presse et des médias du xxie siècle à aujourd’hui. Elles permettent une ouverture historique qui complète les textes proposés dans le parcours qui étaient centrés sur le xixe siècle. Les pages 130 et 131 abordent la problématique de la liberté de la presse. Elles traitent en particulier de la censure à travers un corpus d’images constitués de deux caricatures et d’une photographie. Les deux citations de Victor Hugo et du Canard enchaîné témoignent
de la nécessité de la liberté de la presse dans une démocratie qui fonctionne sainement. > Lecture d’image Le dessin d’André Gil est une caricature parue en 1874. Elle met en scène un personnage féminin nommé Anastasie, aux traits grossiers, représentée avec une paire de ciseaux, un bonnet, des lunettes et une chouette. « Louis-Philippe censurant la presse » est une caricature d’après George Lafosse parue en 1867 qui attaque directement le monarque. Celui-ci est présenté en train de couper lui-même des articles dans un page de journal. Le troisième document est une affiche qui dénonce la censure. > Réponse aux questions 1. Les deux images présentent des personnages féminins qui ont des significations bien différentes. Dans la caricature d’André Gill, Anastasie est l’incarnation de la censure qui frappe la presse du xixe siècle. Elle est accompagnée d’une chouette qui symbolise l’obscurantisme et le conservatisme des censeurs. Sur l’affiche de la WAN-IFRA, le personnage féminin, pris en photo en très gros plan, est l’allégorie d’une presse limitée dans sa prise de parole. 2. Les objets accompagnant les figures féminines ont une valeur symbolique : – Le personnage de Madame Anastasie dans le dessin d’André Gill est armé de ciseaux disproportionnés. Ils sont l’instrument des censeurs qui « coupent » dans les articles. L’expression « les ciseaux d’Anastasie » deviendra au xixe siècle une périphrase pour désigner la censure d’État. – le personnage féminin de l’affiche de la WAN-IFRA est bâillonné avec un morceau de tissus rouge qui tranche avec les autres couleurs utilisées ici, avec le fond bleu en particulier. Il représente la censure qui vient empêcher la libre expression des idées et des informations, c’est « le silence » dont il est question dans le slogan qui accompagne l’image. 3. Ce sont des allégories, car elles représentent, sous la forme d’une image, d’un personnage, des concepts, ici la censure et les menaces qui pèsent sur la liberté d’expression. 4. Le slogan de l’affiche associe la liberté de la presse à la démocratie. La presse, en contribuant à l’expression des idées et des informations, participe à la transparence dans la vie publique et à l’instruction et à la réflexion des citoyens. Elle met en lumière les exactions et les dysfonctionnements des États ou des individus qui pourraient entraver la bonne marche de la démocratie. La démocratie, elle, peut aider à la presse de se développer sereinement en créant un climat propice au travail des journalistes, en faisant respecter leurs droits. > Carnet de lecture Reporters sans frontières est une ONG fondée en 1985 qui a pour objectif de défendre la liberté d’information et d’expression. L’association fait paraître tous les ans un classement mondial de la liberté de la presse. En tête des nations les plus respectueuses de ce droit en 2019, on trouve trois pays scandinaves, la Norvège, la Finlande et la Suède. La France se classe 32e sur 180, les États-Unis 48e, la Chine 177e. Le baromètre, mis à jour quotidiennement, indique le 4 • Le pouvoir de la presse
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nombre de journalistes et de journalistes citoyens emprisonnés et tués dans l’année en cours, Le site de la BNF permet d’informer les élèves sur les dernières évolutions du métier de journaliste. Il évoque la révolution numérique qui oblige les journaux à revoir leur mode de diffusion, la création des medias en ligne et le problème du financement de la presse aujourd’hui.
Les métamorphoses de la presse
> pp. 132-133
> Introduction Cette page met l’accent sur les transformations de la presse aujourd’hui à travers quatre documents : – des dessins de presse. Le premier dessin de Plantu est paru dans le Monde du 12 mars 2006. Le second a été conçu par Fabrice Erre, professeur d’Histoire-Géographie, qui croque son quotidien sur son blog hébergé par Le Monde. Ils évoquent tous les deux la révolution numérique qui touche la presse. – le troisième document est un article de presse du quotidien Ouest-France publié sur son site le 15 février 2018. À partir de données chiffrées, on peut comprendre l’évolution de la situation économique des journaux. Les ventes des numéros papier s’effondrent alors que la circulation des versions numériques et la fréquentation des sites est en hausse. – le quatrième document est le photogramme d’une installation de l’artiste canadien Rodney Graham, Rheinmetall/ Victoria 8 (2003). > Réponse aux questions 1. Plantu reprend dans son dessin la silhouette du crieur de journaux qui participait activement à la vente des quotidiens. Le personnage est vêtu à la mode du xixe siècle, casquette et foulard noué autour du cou, la bouche grande ouverte. Mais Plantu modernise cette image en faisant porter au personnage, en lieu et place des journaux, deux ordinateurs accompagnés de leurs souris. En fond deux kiosques détériorés et flanqués d’un panneau « fermé » symbolisent les difficultés économiques que rencontrent aujourd’hui les maisons de la presse. 2. Fabrice Erre s’inspire de son expérience d’enseignant dans cette image où deux personnages sont mis en scène, un professeur et son élève. Au centre, une page du Monde est mise en valeur par sa position dans le dessin et par sa couleur blanche qui tranche avec le fond vert. Un phylactère jaune reprend les paroles de l’élève. Ses mots soulignent son incompréhension face au journal, objet qui semble lui être inconnu et qui ne correspond pas à ses codes d’enfant du numérique. Le blogueur, de façon humoristique, nous fait sentir combien les pratiques face à l’information ont changé. > Carnet de lecture Pour lutter contre leur perte de vitesse, les journaux ont cherché de nouvelles voies. Certains ont décidé de privilégier la version papier et les ventes en librairie. C’est le cas des « MOOK, » contraction des termes anglais « book » et « magazine ». C’est une forme hybride entre le livre et la revue. On y trouve des grands reportages et des enquêtes au long cours. On peut citer dans cette catégorie XXI ou Usbek et Rica. L’autre voie possible est celle de la presse
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toute ligne, sans support papier, que l’on appelle aussi les pure players comme Rue89 ou Mediapart. La presse se métamorphose sous l’effet du numérique, mais ce dernier la met aussi en danger en la concurrençant sur le terrain de l’information et en mettant à mal son modèle économique. Étude d’une œuvre, Rodney Graham, Rheinmetall/Victoria 8 (2003) Rheinmetall/Victoria 8 (2003) est une installation du plasticien canadien Rodney Graham. L’artiste y met en scène une machine à écrire allemande de la marque Rheinmetall qu’il a trouvée dans une brocante et dont la conception et la facture le fascinent. Autre élément de cette installation, un projecteur italien Victoria 8 de 1961 de la société italienne Cinemeccanica que l’artiste décrit comme très belle et très puissante. Pour lui, ces deux objets obsolètes s’affrontent dans sa création. Si on se réfère à ce que dit l’artiste sur le site du centre Georges Pompidou, il voulait mettre en scène une réflexion sur la production mécanique des images propres au cinéma, qui est aujourd’hui tombée en désuétude avec l’arrivée du numérique. https://www.centrepompidou.fr/cpv/resource/cjk4kp/rbA997 > Réponse aux questions 1. L’image est tirée de la vidéo projetée par la Victoria 8. On y voit en gros plan la machine à écrire recouverte d’une épaisse couche de poudre blanche. L’éclairage met en valeur la poussière qui s’amoncelle sur les touches. La palette de couleurs est restreinte à un camaïeu de rose et de gris qui donne une touche « vintage » à l’image. 2. L’atmosphère qui se dégage est assez mélancolique. Les couleurs, la poussière, la machine à écrire elle-même renvoient à un temps ancien désormais disparu. 3. Cette image n’est pas accompagnée d’un titre explicite ou d’un discours de l’artiste. Elle offre donc une large place à l’interprétation personnelle. Elle peut se lire comme la métaphore de la disparition de la presse traditionnelle. La machine à écrire, objet fétiche des reporters du xxe siècle, est couverte de poussière, elle ne remplit plus sa fonction car elle est obsolète. L’image peut aussi se lire comme une Vanité moderne, le temps qui passe inexorablement serait symbolisé par le sable qui fait disparaître les contours des objets familiers. > Carnet de lecture La captation de l’œuvre de Rodney Graham permet de comprendre l’organisation spatiale de l’installation et de se représenter concrètement, du point de vue sonore et visuel, le projecteur Victoria 8. Elle permet également de comprendre que cette vidéo montre l’ensevelissement progressif de la machine à écrire qui est d’abord filmé avec précision, des gros plans étant effectués sur ses différents éléments.
2 • La littérature d’idées et la presse du xixe siècle au xxie siècle
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LANGUE &ATELIER EXPRESSION Écrit
> p. 134-135
Écrire un article polémique > Introduction Le sujet se place dans le prolongement des textes proposés dans le parcours. L’élève pourra y exploiter les procédés stylistiques employés dans les passages étudiés dans le cadre de la réaction d’un texte polémique. L’illustration proposée est la photographie d’une inscription réalisée par Reporters sans frontières sur l’ambassade syrienne à Paris le 3 mai 2011. Le slogan « C’est l’encre qui doit parler, pas le sang » souligne la nécessité de se battre avec des mots, non avec la force. > Réponse aux questions 1. Certains termes sont à définir ; – polémique : cet adjectif qui vient du grec « polemikos », « qui concerne la guerre », « batailleur, querelleur », est employé pour qualifier un débat critique, agressif. – cette idée est reprise dans le verbe « révolter » qui suppose l’indignation et le dégoût. 2 et 3. Le sujet est laissé au choix de l’élève. Voici quelques thèmes susceptibles d’intéresser : la guerre, la violence, la pauvreté, le changement climatique. 4. Dans un texte polémique, l’auteur attaque des idées. Il est important d’identifier la thèse adverse ainsi que les arguments qui l’étayent, afin de trouver des idées pour les contrer. 5. La structuration du plan est une étape décisive du travail. Il faut classer les idées de la moins importante à la plus importante pour construire une gradation dans l’argumentation. Il est utile également de mettre en valeur des liens entre les idées pour éviter un simple catalogue. 6. La forme va tenir une place essentielle dans la réussite de l’article. Le travail du brouillon permet de réfléchir au style du texte afin de le rendre plus efficace. Certains procédés comme l’antithèse, l’oxymore et les hyperboles sont à même de transmettre l’indignation du locuteur. De même le vocabulaire évaluatif (mélioratif ou péjoratif) trouve toute sa place dans cet exercice. 7. Le passage par la lecture à haute voix permet de faire entendre le texte et de mesurer son efficacité. 8. La mise en page vient parachever le travail : – la division en paragraphe met en valeur les idées et les étapes de la réflexion. – les jeux sur les polices de caractère, les tailles des lettres, les couleurs donnent du relief au texte. – des illustrations peuvent venir illustrer ou prouver les arguments développés dans le texte.
ÉTUDE DE LA LANGUE
> pp. 136-137
L’expression de la condition et la concordance des temps
> p. 136
> Corrigé des exercices Exercice 1 Dans ce passage Séverine utilise une subordonnée conjonctive introduite par la conjonction de subordination « si ». Le fait évoqué est tout à fait envisageable, éventuel, puisque les temps employés sont le présent de l’indicatif dans la subordonnée et le passé composé dans la principale dans la première phrase. La seconde est conjuguée au présent de l’indicatif. Exercice 2 Irréel du présent : « S’il était vrai qu’un officier d’infanterie de ligne, en garnison à La Rochelle, ait, « passant son sabre par-dessus la tête d’un gendarme, frappé Dreyfus avec le pommeau, et lui ait fait une blessure d’où le sang jaillissait », si le fait était vrai, celui-là commettrait une vile et déshonorante action. (…) Or, si l’officier cessait d’être un exemple à ses hommes, il leur deviendrait motif à scandale et à mépris. » Irréel du passé « S’il avait été vrai qu’un officier d’infanterie de ligne, en garnison à La Rochelle, eût, « passant son sabre par-dessus la tête d’un gendarme, frappé Dreyfus avec le pommeau, et lui eût fait une blessure d’où le sang avait jailli », si le fait avait été vrai, celui-là aurait commis une vile et déshonorante action. (…) Or, si l’officier avait cessé d’être un exemple à ses hommes, il leur serait devenu motif à scandale et à mépris. » Exercice 3 Dans l’hypothèse où il est vrai qu’un officier d’infanterie de ligne, en garnison à La Rochelle, ait, « passant son sabre par-dessus la tête d’un gendarme, frappé Dreyfus avec le pommeau, et lui ait fait une blessure d’où le sang jaillissait », si le fait est vrai, celui-là a commis une vile et déshonorante action. (…) Or, si en cessant d’être un exemple à ses hommes, il leur devient motif à scandale et à mépris.
Les mots du… jugement
> p. 137
> Corrigé des exercices Exercice 1 a) Sentence, décision de justice, arrêt. b) Jugement solennel rendu par Dieu qui aura lieu lors de la fin du monde pour les chrétiens. c) Avis personnel. d) Compréhension et appréhension d’une situation. Exercice 2 a) « Polémique », du grec « polemikos » : « relatif à la guerre ». b) Épidictique, du grec « epideiktikos », « qui sert à montrer.
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c) Blâme, du latin « blasphemare », « blasphémer ». d) Dithyrambique, du grec « dithurambos », « chant choral en l’honneur de Dionysos. e) Panégyrique, du grec « panêgurikos », « qui concerne une fête nationale ». Exercice 3 a. 2 b. 5 c. 3 d. 1 e. 4
2. Cette question laisse à l’élève la possibilité d’exprimer son point de vue en tenant compte de deux aspects :
Exercice 4 Vocabulaire mélioratif : magnifique, excellent, fabuleux, Vocabulaire péjoratif : catastrophique, lamentable, inique, mensonger, grotesque. Exercice 5 A. Incertitude. B. Chimériques. C. Contestables. D. Irréfutable. E. Indéniable. F. Fiabilité
> p. 139
Sujet bac Essai
Quelques exemples de verbes introduisant un avis personnel : considérer, croire, tenir pour, aimer, préférer, présumer, faire cas… > Construire son vocabulaire Le jugement valorisant Magnifique Excellent Fabuleux Extraordinaire Indéniable Incontestable
– le côté convaincant du texte : il faudra alors s’appuyer sur la thèse et les arguments développés par l’auteur en mesurant leur valeur, la qualité de leur agencement etc. – leur aspect persuasif : il sera nécessaire de se pencher sur les procédés littéraires et stylistiques employés par le journaliste (les apostrophes au lecteur, les figures de style, la construction des phrases, l’emploi des temps et des modes, etc.) et s’interroger sur leur adéquation avec le but poursuivi.
V E RS L E B A C
Exercice 6
Le jugement dépréciatif Catastrophique Lamentable Inique Invérifiable Infondé
F I C H E D E S Y N T H È S E Le pouvoir de la presse au xixe siècle au xxie siècle
> p. 138
> Introduction La fiche de synthèse résume les différents points traités dans le parcours. Elle définit les grandes caractéristiques de la presse au xixe siècle : elle est le vecteur dominant de la transmission de l’information à cette période. De fait, elle est une tribune privilégiée pour les auteurs qui ont pu y exprimer leurs idées en employant des formes variées. La deuxième partie de la fiche résume les différents traits stylistiques propres aux articles argumentatifs : la présence forte du journaliste dans son texte, la volonté de convaincre et de persuader, l’expression du jugement, l’interpellation du lecteur et la notion de combat idéologique.
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> Réponse aux questions de synthèse 1. Qualifier la presse de « 4e pouvoir » souligne que l’on peut voir ce média comme un contre-pouvoir face au législatif, à l’exécutif et au judiciaire. Ainsi la presse peut révéler les dysfonctionnements de l’État, on peut penser en particulier au scandale du Watergate. « J’accuse » de Zola en est aussi un exemple, car l’écrivain critique violemment les mensonges de l’appareil judiciaire et de l’armée. Les autres textes cherchent plus à faire évoluer les mentalités sur des sujets de société comme la misère, l’abolition de la peine de mort ou le droit de vote.
> Introduction Le sujet permet de s’interroger sur les forces et les faiblesses de la presse écrite. Les textes proposés dans le parcours ou en lecture complémentaire offrent une base de réflexion et des ressources pour illustrer les idées. Les pistes proposées par le prolongement artistique et culturel des pages 130 à 133 seront également exploitables. > Réponse aux questions 1. et 2. La presse écrite : l’expression désigne les journaux, mais aussi de façon plus large les moyens de diffusion de l’écrit (magazine, hebdomadaire, mensuel…), en les différenciant des autres médias audiovisuels (radio, télévision ou la presse en ligne…). Arme : le terme est à prendre ici dans le sens métaphorique de « moyen permettant de défendre son point de vue ». Défendre des idées : soutenir son point de vue. 3. – Quels sont les points forts de la presse aujourd’hui dans la diffusion des idées ? – Quelles limites peut rencontre la presse écrite dans son travail ? – En quoi peut-elle concurrencer les autres médias audiovisuels ? – Quelle concurrence lui fait internet aujourd’hui ? 4. En partant de la question posée et de celles induites par le sujet, il faut se questionner sur les avantages de la presse et sur ses limites. Noter tout en vrac permet de libérer sa réflexion sans se sentir contraint par la forme que pourra prendre l’essai. 5. Les textes du parcours et les documents complémentaires proposent des formes variées d’articles (lettre ouverte, chronique etc.).
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Ils permettent aussi de se pencher concrètement sur les ressources langagières employées pour persuader le lecteur (les apostrophes dans le texte d’Octave Mirbeau, l’emploi des pronoms personnels dans « Lettre aux Habitants de Guernesey » de Victor Hugo). 6. Il faut s’interroger sur ce qui empêche les journalistes de travailler et ce qui met en danger la transmission de l’information. 7. Les atouts de la presse – Elle permet une diffusion à grande échelle des idées et des informations par ses ventes, mais aussi par la reprise de ses articles dans les autres médias. – Les articles peuvent prendre des formes variées qui peuvent toucher des publics différents : la lettre ouverte (Balzac, Zola, « J’accuse »), le billet d’humeur ou la chronique (« La Grève des électeurs » de Mirbeau, « La Triste Vie des mandats à vie » de Kamel Daoud), l’article au long cours, le reportage (« Au Bagne » d’Albert Londres). – Certains articles sont développés et présentent des réflexions construites et étayées. Ils permettent de dépasser le temps court de la réaction immédiate pour aller vers plus de réflexion et de recul. L’extrait de « Mensonge d’État » d’Ignacio Ramonet est basé sur des preuves et des témoignages. On peut aussi faire référence aux pages « Idées » du journal Le Monde. – La presse écrite a une arme, le langage. Elle peut donc exploiter ses ressources rhétoriques (on peut penser à l’anaphore « J’accuse » dans la lettre ouverte du même nom). – Mais elle utilise aussi les ressources de l’image, de la photographie au dessin de presse (voir les dessins de Plantu ou les caricatures de Daumier). Les difficultés rencontrées par la presse aujourd’hui sont multiples : – La presse peut faire émerger des scandales, elle peut informer, mais elle ne peut pas contraindre au changement. – Les journaux se vendant de moins en moins, le modèle économique de la presse est déstabilisé. Les principales entreprises du net (les GAFAM notamment) qui utilisent les contenus de la presse écrite ne la rétribuent pas ou peu. – Les propriétaires des journaux sont souvent de grands groupes industriels qui peuvent avoir une influence sur le contenu éditorial. – La censure frappe aussi la presse dans de nombreux pays, en particulier sous les régimes les plus autoritaires (Chine, Corée du Nord…). – Les journalistes ne peuvent pas toujours exercer leur métier sereinement. On peut consulter avec profit le site de Reporters sans frontières qui indique le nombre de journalistes tués ou emprisonnés dans l’exercice de leur fonction. On peut aussi donner l’exemple de la journaliste de Novaïa Gazeta, Anna Stepanovna Politkovskaïa, assassinée en 2006, connue pour ses positions critiques face au conflit tchétchène ou de Jamal Khashoggi, reporter saoudien, tué en 2018 dans l’ambassade d’Arabie saoudite à Washington. – Les médias traditionnels sont remis en cause par internet, qui diffuse l’information rapidement par les réseaux sociaux. Tout citoyen peut transmettre des données sans avoir besoin d’être un journaliste.
8. L’introduction : La presse écrite, média triomphant du xixe siècle, semble aujourd’hui en perte de vitesse face au développement d’internet et des réseaux sociaux. Souvent décrite comme moribonde, même si ses ventes baissent, elle continue pourtant à intéresser les citoyens. Elle participe activement à la transmission de l’information, à la mise au jour de scandales ou de dysfonctionnement politiques ou judiciaires. Nous pouvons donc nous demander si la presse est une arme efficace pour défendre des idées, si elle est à même de transmettre efficacement les avis de ceux qui écrivent dans ses colonnes. Nous verrons dans un premier temps les atouts de la presse écrite qui lui permettent d’être à la fois convaincante et persuasive. Puis nous nous pencherons sur ce qui peut entraver le travail des journalistes et la diffusion des idées. Conclusion : En définitive, la presse écrite offre des avantages indéniables à ceux qui veulent diffuser leurs arguments. Riche de son lectorat, direct ou indirect, de ses formes variées, de sa capacité à convaincre et à toucher le public, elle permet l’expression des points de vue. Mais La censure et les menaces qui pèsent sur les journalistes viennent entraver leur action. La presse rencontre également des difficultés économiques, dans un univers très concurrentiel. Elle a dû effectuer sa révolution numérique pour survivre en créant des versions numériques enrichies de contenus multimédias. Certains journalistes de la presse écrite utilisent les réseaux sociaux pour attirer l’attention sur leurs scoops. La presse écrite n’a donc pas dit son dernier mot. 9. Développement : I – Les atouts de la presse. II – Les limites de son action.
L E C T U R E C U RS I V E Florence Aubenas, Quai de Ouistreham (2010)
> p. 140-141
> Introduction Le Quai de Ouistreham est un reportage au long cours qui permet de comprendre ce qu’est une enquête en immersion. Florence Aubenas s’est plongée pendant six mois dans le monde du travail précaire. Elle est ainsi devenue femme de ménage dans la région de Caen pour des sociétés d’intérim afin de toucher au plus près les conséquences de la crise économique de 2009. > Réponse aux questions 1. La couverture de l’édition de poche présente un quai avec, à gauche, un bateau et, à droite, des bâtiments. Une lumière aveuglante se verse sur le quai, ce donne le sentiment que le bateau se perd dans la brume. Des silhouettes traversent l’image pour se rendre sur ce qui pourrait être un ferry. 2. La couverture s’organise en grandes masses horizontales, le sol, les bâtiments et le navire constituent un continuum grisâtre qui se détache sur une bande de ciel plus lumineux. 4 • Le pouvoir de la presse
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Des lignes au sol (peut-être des rails) tracent des lignes de force en diagonale. L’image est prise un peu de biais, ce qui déstabilise celui qui la regarde et donne un sentiment d’insécurité. 3. L’absence de couleur, la luminosité à la limite de la surexposition, le cadrage créent une atmosphère dérangeante et déstabilisante. 4. Un avant-propos est une courte introduction placée au début d’un ouvrage où l’auteur explique sa démarche. 5. Dans son avant-propos, Florence Aubenas présente les raisons qui l’ont poussées à réaliser ce reportage. Elle souhaitait connaître les effets concrets de la crise économique de 2009 dont elle n’arrivait pas à bien cerner les contours : « j’ai eu l’impression de me retrouver face à une réalité dont je ne pouvais pas rendre compte parce que je n’arrivais plus à la saisir. Les mots mêmes m’échappaient. » Elle expose par ailleurs sa démarche : se rendre dans une ville où elle serait totalement inconnue, y trouver du travail, se présenter sous sa vraie identité, tout en s’inventant une histoire crédible : « J’affirmais m’être tout juste séparée d’un homme avec lequel j’avais vécu une vingtaine d’années, et qui subvenait à mes besoins, ce qui expliquait pourquoi je ne pouvais justifier d’aucune activité professionnelle durant tout ce temps-là. ». Elle avait également choisi d’arrêter son enquête quand elle serait engagée en CDI. 6. Le titre fait référence au travail effectué par les femmes de ménage sur le ferry qui relie la ville de Ouistreham à Caen. Ce poste est réputé comme étant extrêmement difficile : « Tout le monde m’avait mise en garde. Si tu tombes sur une petite annonce pour un boulot sur le ferry-boat à Ouistreham, fais attention. N’y va pas. Ne réponds pas. N’y pense même pas. Oublie-la. » (chapitre 6). La journaliste, qui y sera embauchée, va pouvoir le vérifier. Les horaires très contraignants, les tâches ingrates et fatigantes sont le lot des employées. 7. Florence Aubenas ne se contente pas de raconter son expérience, elle dresse aussi des portraits des personnes qu’elle a rencontrées. Voici quelques-unes de ces figures : – Philippe est un personnage récurrent du récit. Sans emploi, divorcé, il se lie d’amitié avec la journaliste qu’il a croisée au salon de l’emploi de Bayeux. Généreux, disponible, il lui rendra de nombreux services tout au long du livre. – Victoria est une ancienne femme de ménage de 70 ans avec un passé de syndicaliste. – Fanfan est une amie de Victoria qui travaillait dans la grande distribution. Elle a été renvoyée à cause de son engagement syndical. – Marilou travaille sur le ferry. Elle cumule les emplois en CDD pour obtenir un revenu décent. 8. Différents sentiments peuvent traverser le lecteur pendant qu’il parcourt ce reportage. Il peut être ému par le récit des tranches de vie qui lui sont présentées, des destins marqués par la fragilité et la précarité. Il peut également être révolté par les conditions d’existence de ces personnes. Elles ont des postes peu gratifiants, elles peuvent se retrouver à la merci de petits chefs que Florence Aubenas surnomme les « dragons » (chapitre 9). On peut être aussi atterré par les difficultés que rencontrent les chômeurs à trouver un travail, en particulier pendant les chapitres consacrés à Pôle Emploi.
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Mais certains passages peuvent aussi faire sourire. Le personnage de Philippe garde son sens de l’humour en toute occasion. 9. Le reportage de Florence Aubenas suit l’ordre chronologique de son expérience. Les chapitres balisent les différentes étapes de son récit et de sa découverte du monde du travail intérimaire. Certains chapitres sont consacrés plus particulièrement à des comptes-rendus de discussions avec des figures marquantes comme Victoria ou Fanfan. 10. L’auteur donne de la force à son récit en mettant en scène son quotidien de la façon la plus réaliste possible. Le lecteur la suit dans ses actions, il est avec elle en train de nettoyer les bureaux ou les « sani » du ferry. Florence Aubenas croque également avec finesse et respect les personnes qu’elle rencontre, en en dressant des portraits vivants, en montrant leurs difficultés et leur noblesse. Elle fait aussi beaucoup entendre la parole des individus qu’elle a croisé, un peu à la façon d’un entretien. 11. Le Quai d’Ouistreham donne la parole à une frange de la population que l’on entend peu, celle des demandeurs d’emploi, des travailleurs précaires des villes moyennes malmenées par la crise et la désindustrialisation. Le reportage évoque en particulier la situation des femmes pauvres. 12. Albert Londres (1834-1932) est un journaliste français. Il commence sa carrière en 1906 au Matin. Journaliste de guerre, puis grand reporter, il se rend en Russie, au Japon, en Chine. Il mènera des enquêtes poussées sur le monde des hôpitaux psychiatriques, de la prostitution etc. En 1923, il rédige, pour le Petit Parisien, une série d’articles sur le bagne de Cayenne regroupés dans Au Bagne. Ces textes connaîtront un tel retentissement que le bagne sera fermé en septembre 1924. Le prix Albert-Londres, fondé en 1933, récompense le meilleur journaliste francophone. 13. Florence Aubenas, comme Albert Londres, a été grand reporter. Ils partagent tous les deux le souci de décrire et de dénoncer des injustices sociales en partant d’un travail de terrain. VERS LE BAC ORAL > S’entraîner à l’entretien
1. Le Quai d’Ouistreham propose un journalisme d’enquête sur la durée, où le reporter est en totale immersion dans le milieu qu’il décrit. 2. L’autrice a plusieurs positions dans le texte : – elle est journaliste : elle recueille la parole de ceux qu’elle rencontre ; – elle est le témoin direct de ce qu’elle décrit ; – elle est actrice, car elle expérimente elle-même ce dont elle parle. Le texte prend alors une dimension autobiographique. – elle est écrivaine : elle donne forme aux informations qu’elle a recueillies. 3. Le Quai d’Ouistreham dénonce les effets de la précarité et de la crise sur l’emploi, en particulier l’emploi féminin. Mais plus qu’à dénoncer, le livre cherche plutôt à rendre visible des situations qui sont peu représentées dans les médias. Le livre n’est pas un récit froid ou clinique, il dépeint
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des tranches de vie au plus près des femmes et des hommes, au plus près de leur humanité. > Carnet de lecture Ce sujet d’écrit d’appropriation demande d’imaginer, sous la forme d’une lettre, les réactions d’une des personnes décrites dans le livre. Pour être réussi, ce travail demande d’emprunter la forme épistolaire en respectant sa présentation et son style (emploi de la première personne, utilisation d’une formule d’appel, d’une formule de politesse en fin de lettre, etc.). Du point de vue du contenu, le sujet invite à se pencher sur les réactions de l’épistolier face à la lecture du Quai d’Ouistreham. Comment a-t-il pris la découverte de la véritable identité de Florence Aubenas ? S’est-il senti trahi ? Se reconnait-il dans le portrait qu’en fait la journaliste ? Quelles critiques peut-il formuler sur la façon dont sont représentés sa vie, son histoire, son métier ? La lettre permet aussi d’imaginer une suite au destin de ce personnage : a-t-il évolué professionnellement, personnellement ? Une critique littéraire permet d’exprimer son avis sur une œuvre en développant des arguments et en se basant sur des exemples précis. Elle comporte au moins deux étapes : le résumé partiel de l’œuvre et l’argumentation proprement dite.
D’AUTRES LECTURES
AU CHOIX
> p. 142
Denis Diderot, Supplément au Voyage de Bougainville (1772) > Présentation de l’œuvre Le Supplément au Voyage de Bougainville, ou Dialogue entre A et B sur l’inconvénient d’attacher des idées morales à certaines actions physiques qui n’en comportent pas est un dialogue philosophique de Denis Diderot paru en 1772. Se présentant comme un segment oublié du Voyage autour du monde de Bougainville, il permet à Diderot de critiquer les mœurs européennes et de présenter, à travers les Tahitiens, un mode de vie idéal. > Réponse aux questions 1. Dans ce dialogue philosophique, Diderot critique différents aspects de la vie européenne : la propension au colonialisme, la volonté de réduire en esclavage les indigènes, le peu d’ouverture quant aux questions de morale affective et sexuelle. 2. Les Tahitiens, tels que les voit Diderot, incarnent pour lui un idéal de vie à l’état de nature. Ils vivent heureux dans une société égalitaire où la liberté sexuelle est totale. 3. Ces dialogues font entendre différentes voix (celle de A et B, celle d’Orou et de l’aumônier, celle du vieillard Tahitien) et donc différents points de vue. En dehors de donner de la vivacité au texte, ils permettent au lecteur de se construire son propre avis en confrontant les thèses et les arguments des différents intervenants.
Hugo journaliste : Articles et chroniques (1819-1876) > Présentation de l’œuvre En dehors de sa carrière de romancier, Victor Hugo a eu une intense activité journalistique. Cette anthologie permet de suivre chronologiquement l’évolution de cet aspect de son œuvre, tant du point de vue des thèmes traités que des formes employées. On y trouve des articles, des chroniques, des lettres ouvertes, des retranscriptions de discours, etc. > Réponse aux questions 1. Victor Hugo se sert de la presse pour transmettre ses convictions dans différents domaines : l’art, la littérature, la liberté de la presse, la politique, etc. On y retrouve les figures de style propres à son esthétique : les hyperboles, les métaphores et les antithèses entre autres. 2. L’élève est invité à constituer son anthologie à l’intérieur du recueil. Voici quelques articles notables : – Dans la partie « critique et chroniqueur » : « Le Conservateur littéraire, 15 avril 1820 MÉDITATIONS POÉTIQUES » où le journaliste fait l’éloge du recueil de Lamartine ; « Le Conservateur littéraire, 9 septembre 1820 PRÉFACE » où Victor Hugo justifie ses choix rédactionnels ; « La Muse française, juillet 1823 QUENTIN DURWARDOU L’ÉCOSSAIS À LA COUR DE LOUIS XI PAR SIR WALTER SCOTT » où Victor Hugo développe ses théories sur le roman. – Dans la partie « défenseur de la presse et des journalistes » : les retranscriptions des débats et des discours à l’Assemblée sur la liberté de la presse (« L’Événement, 2 août 1848 ASSEMBLÉE NATIONALE SÉANCE DU 1er AOÛT » ; « L’Événement, 12 octobre 1848 ASSEMBLÉE NATIONALESÉANCE DU 11 OCTOBRE » par exemple). – Dans la partie « la presse, tribune politique » : on peut y lire l’intégralité de la « Lettre aux habitants de Guernesey » dont il est question dans le parcours (p.115 du manuel) ainsi que celle qu’Hugo rédigea suite à l’exécution de Tapner (« L’Homme, 15 février 1854 À LORD PALMERSTON SECRÉTAIRE D’ÉTAT DE L’INTÉRIEUR EN ANGLETERRE ») Emmanuel Guibert, Didier Lefèvre et Frédéric Lemercier, Le Photographe (tome 1) « Au cœur de l’Afghanistan » (2003) > Présentation de l’œuvre « Au Cœur de l’Afghanistan » est le premier tome d’une trilogie intitulée Le Photographe qui raconte, sous forme de roman graphique et de photographies, le voyage de Didier Lefèvre en Afghanistan où il documentait une intervention de Médecins sans frontières. > Réponse aux questions 1. Ce voyage est une véritable épopée à travers l’Afghanistan. Les soignants et le reporter traversent des paysages somptueux où le danger rôde en permanence, car le pays est en guerre. Le récit s’attarde sur les personnes rencontrées et sur les actions de Médecins sans frontières auprès des malades et des blessés. 2. Les dessins et les photographies se mêlent dans le livre. D’après Emmanuel Guibert, qui est à l’origine des dessins, 4 • Le pouvoir de la presse
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« La bande dessinée intervient pour faire entendre la voix de Didier, combler les vides entre les photos et raconter ce qui se passe quand Didier, pour une raison ou une autre, n’a pas pu photographier. » (https://www.dupuis.com/ seriebd/le-photographe/570) La photographie apporte une dimension réaliste et journalistique à un dessin qui est beaucoup plus stylisé et dépouillé. 3. Ce récit montre les dangers que peut rencontrer un photojournaliste dans un pays en guerre, mais il présente aussi le plaisir que l’on peut avoir à prendre en photo des lieux, des situations et des hommes. Colson Whitehead, Underground Railroad (2017) > Présentation de l’œuvre Underground Railroad est un roman de Colson Whitehead qui permet d’aborder sous une forme fictionnelle le thème de l’esclavage en Amérique du Nord au xixe siècle. Le lecteur suit Cora, une esclave et descendante d’esclave, qui réussit à s’échapper de la plantation où elle travaille. > Réponse aux questions 1. Le roman présente les conditions de vie et de travail dans les plantations du sud. Il dépeint un univers fait de violence et de privation, où l’esclave est soumis selon le bon vouloir du « maître ». Mais la plus grande partie du récit se concentre sur l’Underground Railroad, le chemin de fer clandestin qui permettait à certains esclaves de s’échapper. En le suivant, le lecteur peut se rendre compte des différences de traitement des hommes de couleur selon les États durant cette période. 2. Différentes personnes aident Cora dans sa fuite : – Fletcher : il recueille l’héroïne après sa fuite et l’aide à attendre le chemin de fer clandestin. – les différents chauffeurs du train clandestin et les chefs de gare : Lumbly, un chauffeur noir, etc. – Miss Lucy : elle aide les anciens esclaves à s’intégrer professionnellement et socialement en Caroline du Sud. – Sam, un chef de gare blanc, va l’aider en Caroline du Nord, par conviction abolitionniste. Il sera dénoncé et on brûlera sa maison.
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– Martin Wells cache Cora chez lui, en Caroline du Nord, car il poursuit la mission que lui a donné son père. Mais il n’est pas convaincu du bienfondé de son action, il en a honte. Il cache Cora dans un grenier où elle peut assister à des scènes de lynchage de personnes noires. Après avoir été dénoncé, Martin sera lapidé avec son épouse. – Mr Valentine a ouvert sa ferme de l’Indiana à tous les esclaves fugitifs et aux afro-américains nés libres. Celle-ci est devenue une ferme communautaire où tout le monde participe à la hauteur de ses capacités. Un massacre mené par une milice blanche mettra un terme tragique à cette expérience. – Un pionnier partant vers l’est prendra Cora en charge au dernier chapitre. 3. Ce roman utilise les armes de la fiction pour transmettre son message. Il s’agit d’un véritable récit avec un suspens prenant. Le lecteur veut savoir ce qui va arriver à Cora, si elle va trouver la liberté. Les rebondissements s’enchainent. Certaines questions restent en suspens, comme la disparition de la mère de Cora, Mabel, et ne trouvent leur résolution qu’en fin de roman. Les personnages sont, par ailleurs, bien dessinés et le lecteur s’attache à certains comme à Caesar, un jeune esclave amoureux de l’héroïne, ou à Cora. Celle-ci est une jeune fille isolée dans la plantation, car sa mère a mystérieusement disparu. Elle doit affronter la violence entre esclaves, les privations et fera preuve, tout au long du livre, d’une farouche volonté de vivre libre. D’autres personnages incarnent des figures plus sombres et menaçantes. Ils permettent au récit d’avancer car ils sont à l’origine de rebondissements. C’est le cas d’Arnold Ridgeway, le chasseur de fugitifs, qui poursuit inlassablement l’héroïne. Le roman contient également une dimension fantastique. L’expression « chemin de fer clandestin » désignait de façon métaphorique la route qu’empruntaient les esclaves pour s’enfuir. L’auteur prend cette expression au pied de la lettre et imagine un réseau de chemin de fer qui serpente sous la terre, avec ses voies, ses gares, son personnel, ses trains. Ceci participe à l’intérêt que peut faire naître le livre sur le lecteur.
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OBJET D’ÉTUDE 3 La poésie du Moyen Âge au xviiie siècle
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OBJET D’ÉTUDE
La poésie du Moyen Âge au xviiie siècle > Les attendus des nouveaux programmes Le programme de seconde recommande l’étude de textes poétiques « rassemblés autour d’un thème ou d’une forme poétique ». Le thème choisi pour cette séquence, la tonalité élégiaque du Moyen Âge au xvie siècle, permet d’observer les métamorphoses de la langue et des écritures poétiques tout en s’appropriant la notion de tonalité par l’étude de la poésie élégiaque. La séquence propose l’étude de grands textes du patrimoine, associés à chaque fois à des textes
SÉQUENCE
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O U V E RT U R E
Le poésie de l’absence
> pp. 144-145
> Introduction L’enluminure illustre un texte de Boccace, La Théséide (vers 1340) et représente deux hommes emprisonnés observant une jeune fille dont ils sont tombés amoureux. Thésée les obligera à combattre pour que le vainqueur obtienne la main d’Emilie. Celui-ci est mortellement blessé par une Furie après sa victoire et demande cependant à épouser Emilie avant de mourir… Iseut chante son « lai mortel » lorsque, croyant à tort que Tristan est mort, elle décide de se tuer, dans un verger magnifique et après avoir revêtu ses plus beaux atours. Le poème est une « plainte » amoureuse, qui évoque la douleur de l’absence, un lai lyrique, accompagné à la harpe. > Réponses aux questions 1. On peut observer le visage penché de la jeune-fille, qui évoque la mélancolie, ainsi que la couronne qu’elle est en train de tresser : ce geste peut être associé à l’image du temps qui passe et que l’on file. Cette posture permet au spectateur d’imaginer les pensées d’Emilie et, même si la séparation est à venir, elle est déjà signifiée par la solitude du jardin et l’espace vide à droite de l’image. 2. Les éléments qui composent l’enluminure sont tous associés à la topique amoureuse : prison d’amour (celle-ci est concrète), jardin clos, murailles du palais de Thésée. Les roses roses et rouges symbolisent la chasteté et le désir et annoncent le récit amoureux. 3. L’expression associe le lyrisme (chant) à la peine (pleurs) : comme dans le mythe d’Orphée c’est la douleur qui est à l’origine de l’expression poétique. Il s’agit presque d’une définition de l’élégie.
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complémentaires appartenant à d’autres univers ou à d’autres époques. L’élégie, forme singulière du lyrisme, renvoie à des sentiments et des expériences universels ; l’étude des textes peut se fonder sur la réception des élèves, comme le propose la problématique de la séquence. Le parcours chronologique fait découvrir différentes formes poétiques, leurs variations, leurs intertextualités et permet de saisir les liens entre les questionnements des poètes sur ce qui leur échappe, ce qui leur semble disparu et un contexte d’écriture singulier.
> pp. 144-173
G RO U P E M E N T D E T E X T E S
> pp. 146-157
CONTEXTE Les troubadours (xie-xive siècles)
> p. 146
Recherche Alienor d’Aquitaine fut au centre du mouvement artistique et culturel de la fin’amor. Elle appartient à l’Histoire mais aussi à la légende littéraire du Moyen-âge. En se penchant sur son histoire, les élèves pourront découvrir le lien étroit entre la cour royale et le développement de l’amour courtois, le lien entre les royaumes de France et d’Angleterre et le statut singulier des femmes dans ces cours royales. Le texte en contexte La soumission qu’exprime le poète, qui s’abandonne au pouvoir de celle qu’il aime, sa « dame » est révélatrice de la relation amoureuse telle qu’elle apparaît dans la fin’amor. De plus, on lit dans le poème le lien insécable entre amour et poésie : à la fin du texte, le poète cesse de chanter car il se « dérobe » à l’amour. 1 Bernard De Ventadour, « Quand vois l’alouette… » (xiie siècle)
> p. 147
> Présentation de l’extrait Cette chanson de Bernard de Ventadour, très célèbre, permet de découvrir l’univers de la fin’amor et l’art des troubadours. La traduction donne à entendre la musicalité du texte et lui conserve une étrangeté qui fait approcher aux élèves la beauté des langues médiévales. On peut écouter la chanson en langue d’oc, par exemple : https://www.
3 • La poésie du Moyen Âge au xviiie siècle
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youtube.com/watch?v=I9gzaauL67s et ainsi montrer comment se mêlent poésie et musique. > Lire en écho Le poème de Marceline Desbordes-Valmore associe lui aussi l’amour et la poésie : la lyre personnifiée, amoureuse et douloureuse est une image de la lyrique romantique mais pourrait aussi représenter le troubadour délaissé. L’amour perdu est aussi le thème du Pont Mirabeau : Apollinaire, qui s’inspire souvent de la poésie médiévale et crée dans Alcools un univers fait de légendes anciennes donne à son poème les sonorités d’une chanson de troubadour : répétitions, mouvements… Le dernier vers fait écho à la chanson de Ventadour : « Les jours s’en vont je demeure »/ « Ma mort elle veut et je meurs. » > Réponse aux questions S’engager dans le texte 1. La question essaie d’amener les élèves à se représenter les images utilisées par le poète : l’alouette dans le soleil, Narcisse se mirant, le poète sur le pont, etc. Ils pourront ainsi s’approprier l’univers singulier de la chanson qui cherche à évoquer les brûlures de l’amour, la joie extrême qu’il procure et la souffrance de la dépossession en mêlent des images mythologiques à des métaphores évoquant la nature. 2. On peut attendre que les élèves identifient le désespoir du poète, son désir d’aimer et d’être aimé : son cœur fond de « désir » (vers 8), il est assoiffé (vers 16). On peut évoquer avec les élèves l’importance dans les chansons des troubadours de l’expression du désir et de la beauté du corps de la femme aimée. La progression de la chanson amène le poète au renoncement. Interpréter La négation, qui prennent des formes multiples, et on peut très utilement ici apprendre aux élèves comment se sont formés les adverbes de négation, est révélatrice de l’expression élégiaque : la perte de l’amour et de la joie, mais aussi l’aliénation du poète, qui n’est plus à lui (deuxième strophe) ni ne sait où il va … 2. L’énumération des vers 13/14 dit bien le pouvoir absolu de la dame ainsi que la puissance de sa volonté : « Ma morte elle veut et je meurs », où la conjonction et l’utilisation du présent montrent bien le caractère absolu de ce pouvoir. On peut associer cette relation à une forme de vassalité : le poète ne s’appartient plus, il est en « male merci ». VERS LE BAC ÉCRIT > Commentaire
Les questions peuvent être traitées séparément ou constituer un appui pour une écriture de commentaire ou la rédaction développée d’un commentaire. Le poème est construit sur un jeu de mouvements ascendants et descendants révélateurs des émotions du poète. Le passage de l’extrême hauteur de la joie d’aimer à la chute évoque le mythe d’Icare (« C’est qu’ai voulu monter trop haut » (vers 40) et le vertige de l’amour. L’extase de l’alouette qui chante dans le soleil est une image de cette joie, ce « joy d’amor », (vers 2, vers 52) si présente dans les textes des chansons de troubadours (« Toute la joie du monde est
nôtre/Dame si nous nous aimons » écrit Guillaume IX d’Aquitaine) et que seul donne le plaisir d’aimer. La chute est évoquée par la « perte » dans la fontaine de Narcisse et par l’image du pont. Ces mouvements de haut en bas sont associés à un mouvement horizontal : la fuite du poète, annoncée dès la deuxième strophe par l’accumulation des négations et plus particulièrement l’utilisation de ne/rien, ne/plus, se dit dans la succession des verbes de mouvement : « je pars d’elle, et m’en vais, je m’en vais me retire, me dérobe » qui disent à la fois le départ et le renoncement. Ces différents mouvements peuvent être associés au caractère musical du poème et à l’expression des émotions contradictoires du sujet amoureux. La femme aimée et l’amour sont associés étroitement comme l’indique le vers 45 : « Aussi je pars d’elle et d’amour », de même que renoncer à l’amour signifie renoncer à la poésie et au chant : « De chanter cesse et me retire/De joie et d’amour me dérobe ». On peut aussi observer que la dame n’est que très peu caractérisée, si ce n’est par sa volonté irrévocable, ce que dit bien la périphrase du vers 1. « Celle dont jamais rien n’aurai ». Elle représente LA femme aimée, et, précise le poète : « (…) bien sais que sont toutes ainsi »). Les yeux, seul élément du corps de la femme évoqué par le poète, sont un miroir dans lequel il vient mourir.
CONTEXTE Le xiiie siècle : un siècle de bouleversements
> p. 148
Recherche La découverte de la place de ce symbole dans l’imaginaire du moyen-âge permettra aux élèves de saisir le sentiment d’instabilité éprouvé par les hommes du xiiie siècle. Le texte en contexte L’omniprésence de la question de l’argent (loyer, bien, manque de bois, …) révèle les angoisses d’un homme qui vit dans une société bouleversée et dans une ville où règne la richesse. Les questions récurrentes du poète, qui expriment le sentiment de la perte du passé et sa solitude sont elles aussi caractéristiques des inquiétudes devant un monde qui change et qui semble perdre ses valeurs. Quelle place désormais pour la poésie, si ce n’est la satire ? 2 Rutebeuf, « La Complainte de Rutebeuf » (1260)
> p. 149
> Présentation de l’extrait Cet extrait de la Complainte offre aux élèves quelques-uns des plus beaux vers de cette période, et un refrain devenu universel « Que sont mes amis devenus … ». La traduction essaie de rendre le sens accessible, tout en conservant au texte la sonorité de ses rimes et l’alternance des vers courts et des vers longs. > Lire en écho La lecture du texte de Virgile permet de mesurer l’écart entre la situation du poète lyrique qui chante la perte de la femme aimée (comme le font beaucoup des poètes de cette séquence) et l’invention de Rutebeuf, « le rude bœuf », qui 5 • La poésie de l’absence
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forge une lyrique singulière, liée aux souffrances matérielles et aux questionnements de son époque. > Réponse aux questions S’engager dans le texte 1. Le terme bouleversé, au sens fort, ainsi que le titre du poème peuvent laisser croire, surtout dans un parcours entamé par l’évocation de Tristan et de la fin’amor, qu’il s’agit d’un poème d’amour, et les vers 3 et 4 peuvent créer un effet de chute, ou en tout cas de surprise. 2. Cette question invite les élèves à interroger leur conception de ce qu’est la poésie et de ce qui est « poétique ». Si les préoccupations triviales du poète les étonnent c’est parce qu’ils associent à la poésie une certaine vision du « beau » et entrer dans le texte par cette interrogation permet de comprendre et de s’approprier ce qui fait la poésie d’une écriture. Interpréter 3. « Je me demande ce que sont devenus mes amis, que j’avais tenus de si près et tant aimés. » La transformation permet de montrer la force du discours direct, qui implique le lecteur et fait résonner la question avec une intonation montante. 4. Il s’agit tout d’abord d’un vent d’hiver, qui inquiète le poète démuni et qui n’a pas de bois pour se chauffer mais ce vent prend une valeur symbolique, notamment grâce à l’effet des répétitions. Des amis « que vent emporte » sont des amis légers, de peu de poids et donc de peu de valeur. Le vent qui souffle est alors une image du temps qui passe et des transformations de la fortune. 5. Les élèves peuvent ici observer la structure du l’extrait, la forme des vers, les répétitions qui lui donnent une grande musicalité. La Complainte de Rutebeuf évoque par son titre les chansons sombres puis plus populaires que sont, précisément les complaintes. VERS LE BAC ÉCRIT > Commentaire
Les questions peuvent être traitées séparément ou constituer un appui pour une écriture de commentaire ou la rédaction développée d’un commentaire. • La métamorphose des réalités triviales de la rude vie du poète en évocation poétique de l’instabilité du monde se fait tout au long du poème. D’abord par le rythme et les sonorités, qui créent une musique et mettent en valeur certains mots. Le double sens de certaines expressions transforme la réalité évoquée : ainsi « mis à nu » au vers 1. qui signifie qu’il est démuni et ne possède plus rien mais aussi qu’il est sans protection, sans faux-semblants et que, par conséquent, sa poésie se transforme. Il doit maintenant utiliser des « mots mauvais », crus. C’est aussi par l’émotion, traduite par les interrogatives, et les hyperboles (« tant aimés, trop clairsemés, bien trahi, jamais, … » que la parole du poète devient lyrique. Enfin, les images, celle du vent par exemple qui « emporta » les amis comme de feuilles, donne à la complainte du poète abandonné une tonalité élégiaque.
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• La présence de la première personne du singulier, premier mot de l’extrait et récurrente tout au long du texte, ainsi que l’insistance sur le caractère exceptionnel de son malheur (vers 5 « Jamais personne … ») indiquent bien qu’il s’agit d’une expérience intime, ce que le titre d’ailleurs, dit bien. En lisant plusieurs extraits de la complainte, les élèves pourraient découvrir comment Rutebeuf partage ses soucis domestiques les plus intimes avec ses lecteurs. Cependant, et la postérité de ce texte le montre, la voix du poète est universelle. Les « amis » perdus ne sont pas caractérisés et « l’hiver » qui menace le poète est une image de la solitude et de l’abandon dans lequel il se sent. Il s’agit bien d’un poème élégiaque, qui exprime le désarroi du sujet face au passage du temps, au caractère éphémère des sentiments. Le vers 30, qui marque par sa brièveté : « L’amour est morte » évoque de manière universelle la perte. > Carnet de lecture L’écoute du poème réécrit par Léo Ferré et interprété par Philippe Léotard permet aux élèves d’entendre la musicalité du poème étudié ainsi que le caractère universel de la complainte. La tessiture du chanteur et le rythme choisi pour la mélodie s’accordent pour incarner une tonalité élégiaque. Le carnet de lecture permet ici aux élèves de s’approprier ce texte ancien et de s’interroger sur la notion de tonalité en l’associant au rythme, aux sonorités d’une voix.
CONTEXTE Le xive et le xve siècles, une période de troubles
> p. 150
Recherche On attend que les élèves observent le mélange des classes sociales, toutes égales devant la mort ainsi que l’opposition, très visuelle, entre la richesse des décors, des accessoires, des costumes et les squelettes qui mènent la danse. La taille de ses danses macabres et le lieu où elles étaient présentées peut aussi amener les élèves à interroger leur fonction : discours moral adressé aux populations comme un « memento mori ». Le texte en contexte Dans le poème de Villon, le défilé des belles dames disparues, qui n’ont pas pu résister, malgré leur grandeur, au passage du temps, évoque la forme de la danse macabre. La ballade était d’ailleurs une forme poétique chantée et dansée. On peut observer également, comme dans les représentations des danses, le contraste entre la légèreté apparente de la forme et la violence des morts évoquées dans le texte : suicide d’Echo, émasculation d’Abélard, noyade de Buridan, bûcher de Jeanne d’Arc 3 François Villon, « Ballade des dames du temps jadis » (1460-1461)
> p. 151
> Présentation de l’extrait L’étude de ce poème qui tient une place essentielle dans l’histoire de la poésie permet aux élèves d’approcher l’écriture de Villon et de découvrir l’image des « neiges d’antan », motif récurrent de l’élégie jusqu’aux écritures contemporaines.
3 • La poésie du Moyen Âge au xviiie siècle
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> Lire en écho « Le Pont Mirabeau », comme beaucoup d’autres poèmes d’Alcools, par exemple « Mai », « Marie » ou « La Chanson du Mal-aimé », reprend l’image élégiaque de la disparition. L’écriture du poème sur un refrain fait écho aux chansons et l’on sait par ailleurs l’importance pour Apollinaire de la poésie médiévale. > Réponse aux questions S’engager dans le texte 1. La question invite à interroger le lien qui s’opère entre le poète et les lecteurs. On peut aussi s’intéresser ici à la pragmatique des interrogatives : ne sont-elles pas ici proches d’exclamatives, exprimant l’émotion du locuteur plutôt qu’une question ? Enfin, l’étude de l’interrogation (cf. question 4) permet de saisir les particularités de l’écriture élégiaque, en suspens. 2. On attend ici que l’étrangeté du vocabulaire ne soit plus un obstacle à l’appropriation du texte par les élèves mais au contraire une entrée dans le poème. La fonction poétique du langage peut alors être abordée. 3. De même, le mystère, volontairement créé par Villon pour certaines d’entre elles, de ces figures légendaires, historiques ou parfois faussées (Alcibiade !) leur donne un caractère encore plus poétique et accentue le vertige de cette énumération « ballée ». Chaque personnage peut par ailleurs permettre d’entrer dans le texte en montrant l’ironie du poète « sage Hélois », Thaïs ou le mélange entre mythes et Histoire récente.
fond entre les mains et que l’on ne peut saisir : elle peut donc représenter ces choses si chères que l’on ne peut retenir et qui s’échappent inexorablement. VERS LE BAC ÉCRIT > Dissertation
Il s’agit ici de proposer aux élèves un écrit de travail, afin de leur permettre de s’entrainer à l’argumentation particulière de la dissertation et non une dissertation aboutie, qui nécessiterait un travail sur une œuvre intégrale. À ce moment de la progression dans la séquence, ils ont pu identifier plusieurs éléments communs aux textes et qui font de la poésie un lieu de mémoire : la mélodie, les refrains, les répétitions … mais aussi les images (cf. question 6. qui permettent de donner une forme à ce qu’on ne parvient pas à nommer. > Carnet de lecture L’écrit d’appropriation proposé permet aux élèves de se saisir de la thématique du parcours et de sa problématique : « comment évoquer ce que l’on a perdu ? ». Pour que l’histoire des formes littéraires prenne tout son sens il est essentiel de donner aux élèves la possibilité de s’emparer des enjeux de ces écritures et de leur montrer que les questionnements des poètes sont ceux de tous. Le sentiment de la perte, que cherche à faire entendre l’élégie, est universel et touche chacun.
CONTEXTE La Renaissance
> p. 152
Recherche Interpréter 4. Chaque strophe contient une longue phrase interrogative suivie de la question du refrain. Réécrire chacune de ces strophes permet d’en éclairer le sens et d’observer la succession des mots interrogatifs, ou leur disparition (vers 17). Par exemple : « Je voudrais que vous me disiez où et dans quel pays sont Flora, la belle romaine, Archipiades et Thais, qui fut sa cousine germaine. Je voudrais savoir où est Echo, qui parle quand on mène grand bruit sur les rivières ou les étangs et qui eut une beauté surhumaine. On constate ainsi que le discours direct donne plus d’émotion aux questions, et crée aussi une certaine confusion, qui accentue l’effet de vertige cherché par le poète. 5. La succession des dames mortes, rythmée par le refrain qui reprend le thème antique du « Ubi sunt ? » devient grâce à la forme de la Ballade légère comme le serait une danse. (cf. Contexte). En mêlant la gravité du thème de la mort et de la fuite du temps à ces figures hétéroclites et au rythme de la danse, Villon crée une tonalité élégiaque singulière et amène le lecteur à lire entre les lignes. 6. L’image de la « neige », qui représente ici les beautés disparues, est très intéressante. La neige, par sa blancheur et sa luminosité est souvent associée dans la poésie médiévale et dans le roman courtois à la beauté du corps féminin (Cf Chrétien de Troyes, Perceval ou Ventadour « Ah ! Tant de bonnes chansons » : « Son corps est beau et bon et blanc sous les vêtements (je ne le dis que par supposition) si bien que la neige, lorsqu’il est dénudé, paraît à côté de lui brune et obscure »). Mais la neige est aussi un élément fugace, qui
De nombreux articles dans les encyclopédies ou sur Internet sont accessibles aisément. On peut éventuellement orienter les élèves vers certains sites : http://www.cndp.fr/archive-musagora, http://expositions.bnf.fr , ou exploiter la documentation du CDI. L’essentiel est qu’ils identifient la fonction artistique des Muses, leur lien avec Apollon et le Parnasse. L’étude de la fresque de Raphaël p. 15. permettra de vérifier les connaissances des élèves : personnages représentés avec des objets symbolisant un art, Apollon en figure de poète, le laurier en haut du Mont Parnasse… Le texte en contexte Le lien entre les Muses et l’Antiquité étant établi, on attend que les élèves identifient leur présence dans le poème de Du Bellay comme un signe de l’intérêt des écrivains de la Renaissance pour les figures mythologiques : la fresque de Raphaël en est une illustration. Pour aller plus loin, on pourrait déjà amorcer ici l’analogie entre le poète et Apollon qui fonde la poétique de la Renaissance. Le lien avec la musique (lyre d’Apollon, « Musike » art des muses) permettrait aussi d’entamer la lecture du poème. 4 Joachim du Bellay, « Las, où est maintenant… » (1558)
> p. 153
> Lire en écho Le mythe d’Orphée est une représentation des enjeux de l’écriture poétique et singulièrement de l’élégie. Orphée retourné tendant la main vers celle qu’il aime et qui disparaît 5 • La poésie de l’absence
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pour toujours est une image du poète tentant de saisir l’insaisissable : « Orphée étend les bras mais ne saisit qu’une ombre » Le texte de Virgile, s’il n’est pas une élégie, permet donc de donner à voir aux élèves la construction de ce mythe essentiel à l’histoire de la poésie depuis l’Antiquité. Le chant d’Orphée fait écho aux élégies du parcours et aux regrets de Du Bellay ; on peut citer ici Jean-Michel Maulpoix (Une Histoire de l’élégie, Pocket 2018) : Définissant son travail de poète, Joachim Du Bellay écrit dans Les Regrets « Je remplis d’un beau nom ce grand espace vide ». Tel est le travail de l’élégie, remplir d’un poème le vide de l’idéal ou de l’amour. Là où quelqu’un ou quelque chose manque, l’élégie se déploie … Elle comble le silence de mots, elle élève un chant dans l’absence. > Réponse aux questions S’engager dans le texte 1. De nombreuses sonorités s’entrelacent dans ce sonnet : des allitérations : [S], [Z] ou [M] et des assonances : [A], [I]. Plusieurs réponses sont possibles. Le questionnement doit permettre aux élèves d’observer la musicalité du texte et le travail de composition du poète. La douceur et la lenteur de certains vers (« Et les Muses de moi, du livre du professeur comme étranges, s’enfuient. ») se mêlent à l’expression d’une souffrance vive (ex. « ennuient » / « enfuient » où le son [I] s’associe au sens du verbe « ennuyer ».) 2. Le premier mot, « Las » en en fonction d’interjection, donne le « ton », la note mineure de l’ensemble du texte. On peut amener les élèves à s’interroger sur cet adjectif, son lien avec « hélas » et ce qu’il révèle de l’émotion du locuteur. On peut aussi observer que ce monosyllabe, accentué, diffuse ses sonorités dans tout le sonnet et faire le lien avec le titre du recueil ou la complainte. Pour identifier des traits de l’écriture élégiaque on peut amener les élèves à associer ce premier mot à la série des interrogations. Interpréter 3. Les deux temps à identifier sont ici le présent et l’imparfait de l’indicatif. Le présent a une valeur de présent de l’énonciation (à associer à l’interjection initiale) qui révèle les souffrances du moment de l’écriture. L’imparfait est utilisé pour décrire une action non délimitée dans le temps, évoquée dans son déroulement (temps heureux de l’inspiration, « plaisirs » sans fin), ce que renforce le sens du verbe « souloir » (vers 10). L’opposition de ces deux espace-temps (ici/maintenant à Rome, la perte versus là-bas/ autrefois en France, la création) est au cœur de la construction du sonnet (quatrains versus tercets) et de l’expression de l’élégie. 4. Les questions sans réponse, que l’on peut qualifier de rhétoriques si l’on comprend bien qu’ici il n’y a pas d’effet oratoire mais l’expression vive d’une douleur, peuvent être rapprochées des interrogations présentes dans le texte de Villon (p. 151 et du thème médiéval de l’ubisunt (Contexte p. 150). Le désarroi du poète et l’absence de réponse attendue trouve sa manifestation dans ces interrogations qui ont ici un caractère intime, lyrique, puisque ce ne sont plus d’illustres disparus que l’on nomme mais des qualités du poète. Les interrogatives sont d’ailleurs à rapprocher des démonstratifs (« ce cœur vainqueur », « cette honnête flamme », etc.) qui montrent l’écart entre le sujet de l’énon-
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ciation et ce qu’il fut, et cette absence à soi-même qu’évoque le poème. 5. L’image du poète est ambivalente : il est associé à Apollon, qui fait danser les Muses et se présente comme hors du commun, immortel, grâce à son inspiration et à son détachement (« ce mépris de Fortune ») et pourtant ce portrait glorieux est défait par le poème. La perte de tous ses attributs fait du poète un dieu déchu, abandonné des Muses. La servitude (« maîtresse », « serf » … ») est opposée à la liberté créatrice du poète. Seule l’écriture élégiaque permet de retrouver, par l’expression de la perte, (présence du mot « regrets » dans le poème, qui est aussi le titre du recueil) la « flamme » qui avait disparu. > Écrit d’appropriation L’exercice vise à permettre le transfert de compétences d’écriture acquises au collège tout en offrant aux élèves la possibilité de s’approprier la notion d’inspiration et de paysage poétique pour comprendre le poème de Du Bellay. « Dessus le vert tapis d’un rivage écarté » (vers 7) : l’art de la brièveté, inhérent à l’écriture du sonnet, offre en un seul vers matière à imaginer… Une première approche de l’exercice peut d’ailleurs être un travail d’amplification de ce vers. La poétique des lieux est un élément important de l’univers de l’élégie et l’on voit bien ici comment la perte de cet espace sacré de la communion avec les Muses est associée à la perte de l’inspiration. Quel serait alors un lieu inspirant la création poétique ? Il faut d’abord amener les élèves à identifier les types d’espaces qui leur semblent pouvoir être source d’inspiration : nature, paysage urbain, lieux solitaires, lieux de rencontre, vieux bâtiments, sites mystérieux ou au contraire familiers, etc. Ce questionnement intime peut conduire les élèves à approfondir leur réflexion sur ce qu’est la création poétique, et sur ce qui la rend si fragile. Il s’agit ensuite de travailler la construction d’un texte descriptif et l’on peut accompagner les élèves en leur proposant plusieurs cheminements possibles pour leur description : suivre la déambulation d’un narrateur qui observe le paysage, décrire plan par plan, commencer par une description large pour ensuite donner à voir des détails, etc. VERS LE BAC ÉCRIT > Commentaire
Selon la progression choisie, on peut utiliser l’une ou l’autre de ces questions pour proposer aux élèves la rédaction d’un écrit de commentaire à l’issue de la lecture analytique ou envisager un commentaire littéraire guidé. • Le double sens du verbe « entendre » est ici important : il s’agit tout à la fois de faire sentir et de faire comprendre. Le premier mot du poème lui a donné sa tonalité, il s’agit d’une élégie dans laquelle s’écrit la douleur de l’exil. Les deux quatrains sont composés de trois phrases interrogatives, entamée par le même mot interrogatif « Où ». La forme interrogative donne aux vers une intonation montante et la répétition fait entendre le caractère lancinant de ces doutes. Les sonorités du poème sont douces et graves, presque en sourdine, ce que le rythme des alexandrins accentue. La tonalité élégiaque sert l’expression de l’asservissement ressenti par le poète. On peut observer que le mot « Fortune », placé en position de complément du nom au vers 1 est sujet du verbe au vers 9 tandis que le poète
3 • La poésie du Moyen Âge au xviiie siècle
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est devenu complément du nom. La reprise du mot « maître » / « maîtresse » montre aussi ce basculement de la liberté à la servitude. Les deux négations du dernier tercet, mises en valeur par leur construction identique dans le deuxième hémistiche et par l’adverbe « aussi », insistent sur le manque éprouvé. Dans le vers 11, tous les mots accentués, « serf », « maux », « regrets », « ennuient » expriment la douleur. L’hyperbole, accentuée par l’assonance en [M], « mille maux » et le verbe « ennuyer », dont le sens est très fort au xvie siècle (cf. étymologie) disent la souffrance éprouvée. La construction du sonnet met en avant l’opposition entre la liberté (dont l’image est développée dans le deuxième quatrain, associée au mot « plaisirs » et à l’évocation de la danse avec les Muses) et l’asservissement du moment de l’écriture : l’adverbe « maintenant » repris au vers 9, matérialisant cette rupture entre le passé et le présent. • Le dernier vers, toujours particulièrement travaillé dans un sonnet, est ici très intéressant. La conjonction initiale lui donne un caractère conclusif. On retrouve la douceur des sonorités présentes dans le poème (allitération en [M], assonance en [ã]), associées à une structure très régulière de l’alexandrin 3/3/3/3. Le déplacement du complément du verbe laisse la dernière place au verbe « s’enfuir » pour lui donner une plus grande force expressive et créer un effet d’attente puisque le sujet et le verbe sont très éloignés. La disparition des Muses, de l’inspiration créatrice, est ainsi accentuée, d’autant plus qu’il s’agit d’un verbe de mouvement et que le présent de l’énonciation semble ici indiquer que cette disparition, lente et inexorable, se fait au moment même de l’écriture et lorsque le sonnet s’achève. Pour étudier la comparaison « comme étranges » (vers 14), on peut d’abord revenir sur le sens de l’adjectif au moment où Du Bellay écrit. Le mot « étrange » vient du latin classique extraneus, qui signifie « du dehors, qui n’est pas de la famille, du pays » et son sens premier, depuis le Moyen Âge est « étranger » mais il a déjà aussi au xvie siècle le sens d’« extraordinaire » ou d’« inhabituel ». Les Muses lui sont donc étrangères, c’est-à-dire qu’elles sont devenues extérieures à lui, qu’il ne les accueille plus dans son « monde » poétique familier. L’image associe donc de manière très forte la douleur de l’exil et la perte de l’inspiration. Il est devenu lui aussi étranger aux Muses et cette absence à la poésie est présentée comme une absence à soi-même. Cette étrangeté est bien au cœur de la tonalité élégiaque.
CONTEXTE La Pléiade
> p. 154
Recherche La recherche a pour objectif de faire comprendre aux élèves les liens étroits entre la cour et la création artistique ainsi que le rôle de François Ier, notamment dans le lien entre la France et l’Italie. Le texte en contexte Le sonnet de Ronsard met en scène le pouvoir de la poésie qui offre l’immortalité aux choses mortelles (cf. Du Bellay « Cet honnête désir de l’immortalité »). C’est le sens du dernier vers « Afin que vif et mort ton corps ne soit que
roses ». Ronsard, Prince des poètes, peut donner l’éternité aux beautés éphémères du monde.
5 Pierre de Ronsard, « Comme on voit sur la branche… » (1578)
> p. 155
> Présentation de l’extrait Ce poème appartient bien, même s’il s’agit d’un sonnet des Amours à l’univers de l’élégie. La poésie est associée à des « larmes et [des] pleurs », comme dans le lai mortel d’Iseut (cf. pages d’ouverture). La déploration de la disparition de la femme aimée est un topos de l’écriture poétique et Ronsard s’inscrit ici dans la continuité de Pétrarque (cf. « La vie fuit … » page 157). Cependant il s’agit ici davantage d’une réflexion sur la fragilité des beautés humaines et sur le pouvoir de la poésie que de l’expression d’une douleur intime > Lire en écho Ronsard (cf. Contexte page 152) écrit dans la continuité de Pétrarque, qui invente le « Canzoniere », recueil de sonnets d’amour pour une femme inaccessible et inspiratrice dont s’inspirent les poètes de La Pléiade. La souffrance du deuil et de la perte, que Pétrarque exprime dans tous les poèmes évoquant la mort de Laure, devient par l’art du poète italien un topos poétique de la Renaissance. Le poème d’Eluard, « Notre Vie », s’il s’écrit en lien avec la tradition pétrarquiste (cf. le titre d’un autre recueil d’Eluard, L’Amour, la poésie), est un texte né de l’expérience intime et terrible du deuil. Brisé par la mort brutale de Nusch, le poète tente de trouver une voix dans l’indicible de la douleur. > Les mots de… L’exercice cherche à la fois à faire comprendre la construction du lexique et à montrer le lien entre l’invention de nouveaux mots et l’aventure de la « Renaissance » : les poètes créent un monde nouveau en inventant des mots neufs. Il est essentiel pour que le bouleversement de cette période et l’énergie créatrice du mouvement de la Pléiade soit perçue par les élèves leur permettre de saisir ce rapport d’invention qu’avaient les poètes avec la langue. Exemple, Par quel verbe nouveau nommeriez-vous l’état suivant : Attendre vainement un like sur une publication ? > Réponse aux questions S’engager dans le texte 1. La question permet aux élèves de se représenter la fleur, le rosier, peut-être de se demander dans quel univers le poète les transporte : mythologique (« La Grâce ») ? réel (« embaumant les jardins ») ? Il serait en tout cas intéressant qu’ils observent que les deux quatrains construisent un paysage métaphorique. 2. Le champ lexical de la mort est bien présent : « battue, elle meurt, tuée, cendre, obsèques, vase, mort, … » et cependant la douceur des sonorités n’évoque pas la douleur. S’interroger sur les effets produits pas le poème, donc sur sa tonalité, amène à percevoir la singularité de l’expression de l’élégie chez Ronsard. 5 • La poésie de l’absence
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Interpréter 3. Le temps est le présent et ici on peut presque parler de présent de l’énonciation : le poète décrit la destruction de la rose qui se défait devant lui : « languissante elle meurt, feuille à feuille déclose », l’expression « feuille à feuille » disant bien le rythme lent de cette destruction. Et pourtant, le présent utilisé pourrait être aussi un présent intemporel : « on voit » semble indiquer une portée générale, de même que le Complément de temps « au mois de mai », qui signifie que cette mort a lieu tous les mois de mai. L’étude de la valeur des temps permet donc de saisir la progression du poème : d’une vision universelle et générale de la mort des beautés naturelles au temps « immédiat » de l’écriture qui permet à Marie d’échapper à la mort : « Pour obsèques reçois mes larmes et mes pleurs ». 4. La beauté de la rose, traditionnellement associée à la femme, comme l’indiquent les personnifications des deux quatrains est aussi une image de la fragilité du monde. Le vers 4 entame la métamorphose en associant la rosée à des « pleurs » qui annoncent ceux du poète au vers 1 et contrastent avec l’évocation de la jeunesse et de la vie (« première jeunesse, première fleur, vive couleur »). Le verbe « embaumer » qui évoque le parfum rare de la rose est d’ailleurs dès le moyen-français également utilisé pour parler de la conservation des morts et le jardin si plein de vie (« vive couleur ») est en fait déjà teinté par le deuil. Le vers 7 et la conjonction « mais » apportent la brutalité de la destruction par la pluie et la chaleur tandis que le rythme lent, fondé sur les –e muets, du vers 8, évoque la tombée lente des pétales. 5. Le mot « rose » finit le premier et le dernier vers du sonnet. Dans le premier quatrain il représente la fleur du mois de Mai (mois dit « de Marie ») et dans le dernier tercet le corps mort de Marie métamorphosé en « roses » poétiques. La structure du sonnet, comparative (deux quatrains séparés par le terme comparatif « ainsi que » des deux tercets) permet une véritable opération de métamorphose qui est l’expression même du pouvoir de la poésie. VERS LE BAC ÉCRIT > Oral
L’exercice demande une lecture attentive des alexandrins et de leur rythme, en lien avec la réflexion menée depuis le début de la séquence sur la tonalité élégiaque. Les élèves sont amenés à repérer les jeux de sonorités du poème ; assonances, allitérations, rimes et le rythme cadencé des vers. Pour préparer la lecture il serait intéressant de travailler sur le texte comme sur une partition, en indiquant les syllabes accentuées, les sonorités à mettre en valeur, etc. Cet exercice permet de préparer l’oral les EAF, épreuve dans laquelle la lecture sera évaluée
Lectures complémentaires 6 Virgile, Géorgiques (entre 37 et 30 av. J.-C.)
> pp. 156-161 > p. 156
> Présentation de l’œuvre et de l’extrait Le mythe d’Orphée est une représentation des enjeux de l’écriture poétique et singulièrement de l’élégie. Orphée retourné tendant la main vers celle qu’il aime et qui disparaît pour toujours est une image du poète tentant de saisir l’insaisissable : « Orphée étend les bras mais ne saisit qu’une ombre » Le texte de Virgile, s’il n’est pas une élégie, permet donc de donner à voir aux élèves la construction de ce mythe essentiel à l’histoire de la poésie depuis l’Antiquité. Le chant d’Orphée fait écho aux élégies du parcours et aux Regrets de Du Bellay ; on peut citer ici Jean-Michel Maulpoix (Une Histoire de l’élégie, Pocket 2018) : « Définissant son travail de poète, Joachim Du Bellay écrit dans Les Regrets « Je remplis d’un beau nom ce grand espace vide ». Tel est le travail de l’élégie, remplir d’un poème le vide de l’idéal ou de l’amour. Là où quelqu’un ou quelque chose manque, l’élégie se déploie … Elle comble le silence de mots, elle élève un chant dans l’absence. » > Lire en écho 1. Dans le poème de Du Bellay ce sont les Muses qui « étranges, s’enfuient ». Virgile évoque la disparition d’Eurydice comme celle d’une « fumée » (vers 22) d’une « ombre » qu’on ne peut saisir (vers 23). L’abandon, la perte éprouvée par le poète qui voit s’échapper l’inspiration est comparable à celle d’Orphée se retournant pour voir disparaître son épouse « pâle et glacée », comme une étrangère désormais. 2. Le mythe d’Orphée, intrinsèquement lié à l’image des poètes et au sens de la poésie, éclaire l’importance de l’élégie dans l’expression lyrique. Le poète, Orphée, est celui qui chante la perte, qui regarde en arrière, « Impatient de revoir un visage adoré », pour apercevoir un instant ce qu’il va perdre à jamais. Symbole de tous les poètes, Orphée est aussi l’incarnation de l’élégie. 7 François Pétrarque, « La vie fuit… » (1374)
> p. 157
> Présentation de l’œuvre et de l’extrait Pétrarque, humaniste et poète érudit, inventa la poésie savante en « langue vulgaire », c’est-à-dire en italien et non en latin. Les poètes de la Renaissance française s’inspirent des formes poétiques du Canzoniere (le sonnet notamment) et des thèmes qu’il développe : amour absolu, fulgurant et sans espoir, deuil éperdu de l’amant. Le Sonnet IV évoque la perte de Laure, la femme aimée, dont le nom évoque le laurier, arbre sacré d’Apollon, dieu de la poésie et de la beauté. > Lire en écho 1. Les verbes de mouvement : « fuit, ne s’arrête pas, vient derrière » et les termes évoquant la durée : « heure, journées, choses présentes, choses passées et à venir » présents dans la première strophe montrent l’importance de la temporalité : le poète est prisonnier dans un présent douloureux (« les mâts et les cordages rompus ») et ni le passé ni l’avenir ne
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l’apaisent. Le poème de Ronsard évoque lui aussi le présent de l’écriture, qui s’oppose au passé de la jeunesse et de la vivacité de la rose et de la jeune-fille, mais le souvenir n’est pas un tourment et le présent célèbre la poésie. 2. La première strophe décrit le poète en suspens : entrainé par le temps (« la vie fuit ») et pris au piège du passé comme du futur, tout entier abandonné au sentiment de la perte. C’est bien une strophe élégiaque, qui appelle le présent à cesser sa course. 8 Marceline Desbordes-Valmore, « Élégies » (1825)
> p. 158
> Présentation de l’œuvre et de l’extrait Le lyrisme intime de Marceline Desbordes-Valmore est souvent élégiaque, comme L’indique d’ailleurs le titre du recueil choisi. La tonalité élégiaque s’accorde à la sensibilité romantique. L’expression de l’émotion de la poétesse se manifeste dans la ponctuation, les sonorités et le rythme du poème. > Lire en écho 1. Le motif de la lyre mêle poésie et musique : instrument d’Apollon, elle est l’emblème des poètes. Les écrivains romantiques utilisent souvent l’image de la lyre pour représenter les émotions du poète, vibrantes comme les cordes de l’instrument comme ici au vers 14 « Je confiais mon âme aux cordes animées ». La lyre, personnifiée devient à la fois une confidente de l’amante éperdue et une figure de la poétesse. Comme dans le poème de Ventadour, la parole poétique et la plainte amoureuse sont associées « Ton nom, toujours ton nom qui courait dans mes chants/Elle ne le dit plus, elle le pleure encore ! » 2. Les quatre premiers vers présentent la lyre, personnifiée, qui « pleure un tourment, un délire ». Les allitérations en [R] relient entre eux les mots de ce vers et associent les pleurs, le tourment et le délire (qui rime avec lyre), c’est-à-dire la plainte et l’inspiration poétique. On pourrait en effet définir ainsi la tonalité élégiaque, d’autant que le décor nocturne et le vent qui souffle accentuent le caractère sombre de ces vers. 9 Guillaume Apollinaire, « Le Pont Mirabeau » (1913)
> p. 159
> Présentation de l’œuvre et de l’extrait Alcools est un recueil dans lequel la tonalité élégiaque est très présente, Apollinaire tissant les thèmes de l’amour déçu et du passage du temps. Le caractère musical d’un poème comme le pont Mirabeau le rapproche des chansons présentes dans le parcours et l’univers symbolique du poète fait écho aux poèmes du Moyen-âge et de la Renaissance qui inspirent Apollinaire. > Lire en écho 1. C’est ici le motif de l’eau, présent dès le premier vers : « coule la Seine », qui symbolise la fuite du temps. Les variations se font à chaque strophe : « l’onde si lasse », « cette eau courante », « coule la Seine » et à chaque fois les métaphores expriment le mouvement et la répétition
qui disent l’impuissance du sujet face à cette disparition. De même, l’image des « neiges d’antan » (d’antan signifiant de l’an passé) évoque une matière que l’on ne peut retenir, qui fond comme s’échappe l’eau. La forme du poème, composé de manière hétérométrique, et le retour du refrain, évoquent aussi cette labilité de l’eau. 2. Après avoir écrit une première version d’Alcools, Apollinaire décide d’effacer la ponctuation, notamment pour rendre aux vers leur rythme intrinsèque et lui permettre de faire entendre ses mélodies intimes. La lecture devient par conséquent plus polysémique, les hésitations entre les formes plus riches (les vers 15 et 16 sont-ils exclamatifs ou seulement des comparaisons ?). Dans « Le Pont Mirabeau », l’absence de ponctuation et donc de pose apparente, accentue l’analogie entre la forme des vers et la fluidité de l’eau. Le rythme ainsi créé s’accorde à celui de l’élégie : ces vers que l’on ne peut saisir sont comme les instants qui passent et disparaissent. 10 Paul Eluard, « Notre vie » (1947)
> p. 160
> Présentation de l’œuvre et de l’extrait Paul Eluard est un poète pour qui l’expression du sentiment amoureux est absolument lié à l’écriture poétique. Le Temps déborde est un recueil particulier, écrit très peu de temps après la mort brutale de Nusch qui fut sa femme aimée et a inspiré beaucoup de ses poèmes. L’expression du deuil est donc dans ce poème l’expression d’une terrible et intime souffrance, la tonalité élégiaque trouvant ici une violence singulière. On peut rapprocher cette écriture de celle de Jacques Roubaud dans Quelque chose noir, paru en 1986. > Lire en écho 1. Le poème, construit en trois strophes, comme les étapes d’un récit, s’ouvre sur l’« Aurore » et le « beau matin de Mai ». Cette clarté devient dans la troisième strophe « Masque de neige » : la blancheur de l’aurore est devenue pâleur de la mort. Le vers central « Mais la mort a rompu l’équilibre du temps », (septième vers d’un poème de quinze vers), dit le basculement vers l’impensable de la mort. Ce renversement est également présent dans le sonnet de Ronsard, « Comme on voit sur la branche, … » où le vers 7 « Mais battue ou de pluie, ou d’excessive ardeur » dit aussi la brutale rupture de la destruction, on retrouve d’ailleurs la même conjonction, « mais ». Cependant, dans le poème de Ronsard l’apaisement vient de la métamorphose poétique qui permet de retrouver au dernier vers les roses disparues. Chez Eluard le poète perd la parole, envahi par le deuil. 2. Le poème compte un vers de plus qu’un sonnet, le dernier qui fait écart. Les vers pourraient être recomposés pour former un sonnet. Les trois strophes sont très construites et liées entre elles par les assonances et les rimes intérieures. Dans cette forme très compacte, Eluard met en scène le scandale de la mort. 3. Le dernier vers, qui se détache comme une conclusion, dit la disparition du poète, atteint d’aphasie. Le silence est ce vide que l’élégie tente de dire, elle s’écrit toujours tout au bord du silence. Le présent d’énonciation ici utilisé « (…) je fais place au silence » désigne le vide qui suit l’écriture. On peut penser ici à la page blanche qui dans Les 5 • La poésie de l’absence
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Contemplations évoque la disparition de Léopoldine le « 4 Septembre 1843 ». 11 Jacques Réda, « Élégie de la petite gare » (2004)
> p. 161
> Lire en écho 1. Le poème de Jacques Réda off re un écho contemporain à la question de l’inspiration et propose un autre paysage poétique. Il peut être proposé aux élèves comme lecture complémentaire après l’étude du poème de Du Bellay. Le sentiment de l’exil, si fortement lié à la tonalité élégiaque, peut être ainsi analysé avec davantage d’acuité. 2. L’élégie est d’une certaine manière cette écriture de l’absence, qui naît des espaces vides et du manque et la comparaison des deux textes permet de saisir cette signification.
PROLONGEMENT ARTISTIQUE ET CULTUREL > pp. 162-164
Tristan et Iseult : les parfaits amants > pp. 162-163 > Introduction Pour saisir les significations artistiques et poétiques de la fin’amor évoquée dans le parcours, les élèves peuvent se pencher sur la légende de Tristan. Celle-ci a peut-être été abordée au collège et ils pourront ainsi partir de ce qu’ils savent pour approfondir leur connaissance du mythe et en comprendre les différentes variations. L’extrait du lai de Marie de France développe la métaphore du chèvrefeuille, lien inextricable entre les amants, repris souvent dans l’iconographie par l’image de la ronce. Comme la passion elle fait souffrir tout autant qu’elle attache et elle détruit tout en rendant immortel le lien entre les amants. > Carnet de lecture Le lai de Tristan, qui rappelle celui d’Iseut, cité dans l’ouverture est un exemple de ces chansons de troubadours, poèmes accompagnés par la musique et dont la mélodie exprime comme les mots les émotions. La découverte de cette musique médiévale peut permettre aux élèves de s’approprier cet univers lointain qui dit pourtant l’amour comme on le ferait aujourd’hui. > Réponse aux questions 1. Dans le texte de Thomas, le chiasme unit les deux amants : « Tristan mourut par amour pour elle et la belle Yseut par tendresse pour lui ». Les premières lignes de l’extrait insistent sur leur union mortelle : « serre, enlacé, corps contre corps ». L’enluminure du Roman de la Poire est également construite sur une succession de liens : la forme extérieure du dessin, l’arbre qui les protège, le fond rouge qui les isole, leurs vêtements du même bleu et enfin l’épée qui les sépare et les relie (elle est d’ailleurs du même bleu). Comme l’image de la ronce, l’épée est à la fois ce qui sauve (Marc les épargne en voyant qu’ils dorment séparés) et ce qui tue. 2. Thomas dresse la liste de tous les « amants » pour lesquels il écrit. La liste fait se réunir tous ceux qui peuvent être touchés par l’amour, c’est-à-dire tout le monde … Il indique ainsi que ce récit s’adresse à tous les lecteurs. L’« histoire »
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de Tristan est présentée comme un exemple et comme un remède. Dès ces premiers récits écrits, Tristan et Yseut deviennent un mythe. > Présentation de Tristan et Isolde Le mythe des amants « inséparables et séparés » se transforme en un poème lyrique composé par Wagner en 186 et qui est l’un des opéras les plus importants du grand créateur romantique. La quête initiatique des amants vers l’absolu immatériel de l’amour, devient métaphysique. La passion, fatale, destructrice mais aussi purificatrice mène à une union qui ne peut se concevoir qu’au-delà de la vie. Nietzsche, dans Ecce homo (1888) écrit « (…) je cehreche en vain une œuvre qui ait la même dangereuse fascination, la même effrayante et suave finitude que Tristan et Isolde ». > Carnet de lecture La découverte de la musique de Wagner et de cet air si célèbre qu’est la Liebestod permet d’éprouver ce qui a été décrit tout au long de ce parcours et de la séquence : l’inextricable mélange de joie et de souffrance, de bonheur et de tourment qui fait l’amour. Waltraud Meier est l’une des interprètes les plus célèbres du rôle d’Isolde. Étude d’une œuvre, Bill Viola, Firewoman (2005) Le vidéaste Bill Viola dont l’œuvre joue un rôle essentiel dans l’art contemporain a lui aussi transformé le mythe de Tristan. Fasciné par l’opéra de Wagner il crée une série intitulée The Tristan project. Il y associe les images du feu et de l’eau et une réflexion sur la transfiguration et le passage vers l’ailleurs. Il a conçu pour Peter Sellars en 2005 une scénographie de l’opéra, dont Firewoman est un extrait. Ces vidéos accompagnaient le chant et créaient un univers d’eau, de feu et de lumière en mouvement. Isolde nimbée de bleu, Tristan de orange se retrouvent étroitement enlacés dans Firewoman où s’unissent les éléments pour devenir indissociables. > Réponse aux questions 1. Les élèves, après avoir observé la vidéo pourront faire le lien avec ce qu’ils ont compris des leimotive de la légende tristanienne : l’union des contraires, la mort qui délivre et permet d’accéder à un au-delà de l’amour. 2. L’œuvre de Bill Viola est extrêmement poétique : la passion est representée par les métaphores du feu et de l’eau et ce sont les mouvements, les ondes, qui animent ces deux éléments opposés qui les réunissent. On finit par ne plus distinguer l’un de l’autre. La vidéo met en scène un oxymore visuel, figure même de l’amour. 3. Le mystérieux personnage au centre de l’image se jette dans ce que l’on croit tout d’abord être un brasier et qui est en fait une étendue d’eau, les mouvements de caméra créant un trouble sur ce qui est en haut et ce qui est en bas. La vidéo donne à voir un passage vers l’ailleurs, très ritualisé, par le costume du personnage et la lenteur de ses gestes. > Carnet de lecture L’étude des fresques d’Arezzo permet de comprendre le lien qui unit un artiste contemporain qui utilise des techniques numériques et un peintre italien du quattrocento. L’univers mystique de Bill Viola fait écho à celui de Piero della Francesca. L’utilisation de couleurs est aussi un point
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de rapprochement de ces deux artistes. Enfin, les fresques sont peintes pour donner à voir une quête, un cheminement, ce que permet l’art vidéo, fait de mouvement.
É T U D E D E LA LA N G U E
> pp. 168-169
L’expression de la cause et de la conséquence > Corrigé des exercices
Exercice 1
ATELIER LANGUE & EXPRESSION
Oral
> pp.166-167
Organiser un concours d’éloquence sur l’amour > Introduction Les programmes mettent l’accent sur l’étude de la langue, qui doit permettre aux élèves d’améliorer leurs capacités d’expression et de développer des compétences langagières et linguistiques. Les Ateliers Langue & Expression et la double page Étude de la langue, présents dans chaque séquence, permettent d’aborder ces questions de manière approfondie. Les compétences d’expression, de compréhension et les connaissances linguistiques sont, comme le rappellent les programmes, complémentaires, et les ateliers proposent des situations de communication les mettant toutes en jeu. Ils peuvent être menés en classe ou de manière autonome et proposent des activités écrites et orales, des travaux individuels et de groupe. Les ateliers associent l’appropriation d’une thématique et d’un type d’écriture étudiés dans la séquence à la construction de compétences langagières et à la mise en application de connaissances linguistiques. Ces connaissances peuvent ensuite être revues ou enrichies par les exercices des pages Étude de la langue. Ces pages offrent donc des approches variées, que l’on peut moduler en fonction de sa progression ou du choix de différencier les activités proposées aux élèves. > Réponse aux questions L’Atelier s’inspire de la tradition des joutes poétiques médiévales, jeux ou débats (tenson) qui connurent un vif succès. Il propose donc aux élèves d’utiliser des connaissances acquises pendant la séquence et de réexploiter le lexique et les figures étudiés. Le dilemme proposé n’a volontairement pas de résolution possible, il est lié à des questionnements fréquemment présents dans la littérature et la réflexion des élèves peut être enrichie par différentes lectures (Lectures cursives du manuel, par exemple Songe à la douceur de Clémentine Beauvais, p. 172-173, textes de la séquence sur La Bête humaine, p. 21 à 29). Il s’agit aussi de montrer que la littérature permet de mieux comprendre le monde et les sentiments humains. La production finale de l’atelier est orale mais demande plusieurs travaux préparatoires à l’écrit. Chaque étape correspond à la construction de compétences langagières identifiées afin que les élèves puissent mesurer leur degré de maîtrise. Des étayages et des renvois aux fiches de la fin de l’ouvrage ou aux pages Étude de la langue sont donnés pour chacune de ces étapes.
Première strophe : la cause est la saveur délicieuse de la blessure d’amour ; la conséquence, le fait de mourir et de ressusciter cent fois. Connecteur : « si… que ». Deuxième strophe : la cause est le mal si bon à souffrir ; la conséquence, le fait qu’il préfère ce mal à tout autre bien. Connecteur : « si… que ». La cause est ce malheur d’aimer ; la conséquence, la joie venue après la peine. Verbe : « donner ». Exercice 2 Exemple : Cent fois par jour je meurs et puis ressuscite parce que cet amour me blesse le cœur d’une saveur absolument délicieuse. Je préfère ce mal à tout autre bien parce que ce mal me fait tellement de bien. La joie vient toujours après la peine à cause de ce malheur d’aimer. Exercice 3 Exemple : Tristan et Iseut s’aimèrent tellement qu’ils en moururent : ils deviennent fous d’amour à cause d’un philtre qu’ils boivent mais puisqu’Iseut épouse Marc ils doivent se cacher pour s’aimer. Marc les découvre et est si furieux qu’il pense les tuer et finalement les chasse. Comme Tristan blessé est tout proche de la mort, Iseut retourne à ses côtés. Ils ne pouvaient être séparés donc ils furent liés par la mort.
Les mots de… l’amour Exercice 1 On peut par exemple observer que le sens de « passion d’un sexe pour l’autre » (et cette signification serait d’ailleurs contestable aujourd’hui) est attesté depuis le xiie siècle, dans les romans courtois et sous l’influence des troubadours et de la langue d’Oc. Le mot devient progressivement masculin à partir du xvie siècle, pour imiter la forme latine, il demeure d’ailleurs féminin au pluriel dans une langue soutenue. « Faire l’amour » signifie dans la langue classique « courtiser ». Il est important de faire ainsi saisir aux élèves la labilité de la langue et le lien entre la langue et la littérature : le sens du mot amour a été inventé par les poètes du Moyen Âge. Exercice 2 – C’est le courant de l’existence qui nous entraîne… – Tout ce qui m’est arrivé est arrivé par accident. – Le destin nous a fait nous rencontrer. – Je crois aux hasards heureux qui ponctuent ma vie. – « Mektoub, my love » (titre d’un film d’Abdellatif Kechiche). Exercice 3 Le mot « cœur », dans le sens de « siège des sentiments » a aujourd’hui souvent une signification un peu affadie, liée sans doute à ses usages hypocoristiques. Montrer sa relation 5 • La poésie de l’absence
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étroite avec le mot « courage » et comprendre ainsi sa signification dans la langue de la Renaissance et la langue classique permet de faire comprendre la richesse des mots les plus banals.
Exercice 8
Exercice 4
Exercice 9
Domina : la maîtresse de maison. Mots de la même famille : domination, dominer, dominatrice, Madame, la dame du Lac… La relation qui unit le chevalier à sa dame est d’une certaine manière une relation de vassalité : le chevalier doit abandonner toute volonté et suivre celle de la dame…
Comme Roxane le demande à Christian, il s’agit ici de « délabyrinther » l’expression des sentiments… On peut proposer comme correction ou après l’exercice la scène 7 de l’acte III de Cyrano de Bergerac : https://urlz.fr/9fUe Les élèves peuvent également relever les formules rencontrées dans les textes étudiés.
Exercice 5 Mythe de Narcisse tel qu’il est raconté par Ovide dans Les Métamorphoses Narcisse, un très beau jeune homme, était aimé de la nymphe Écho mais l’avait repoussée, comme beaucoup d’autres, par fierté. L’une de ses victimes demande vengeance et est exaucée : un jour il aperçoit son reflet dans une source et tombe éperdument amoureux de lui-même. Il mourra de cet amour qui ne peut être assouvi. Écho, bien qu’elle ait souffert de sa cruauté, répète ses lamentations. À sa mort, son corps est transformé en fleurs : les narcisses. La réflexion sur le mythe permet de mesurer que dès son élaboration l’amour de soi est considéré comme mortifère : est-ce toujours le cas ?
Pour exprimer la dépendance : soumettre, dominer, assujettir, subir, addiction, esclavage, subordination, joug, aliénation, sujet, docile, abandonné, attaché, captif, enchaîné…
Exercice 10 L’ambivalence du sentiment amoureux, qui trouble et fait souffrir tout autant qu’il donne de la joie est apparue clairement dans les différents textes étudiés, dans le travail de l’atelier et sans doute aussi dans l’expérience de beaucoup d’élèves. Ce sentiment est, pourrait-on dire, par essence oxymorique : ainsi est-il souvent décrit dès la poésie des troubadours. Après avoir indiqué la nécessité du lien grammatical pour créer l’oxymore on peut laisser les élèves inventer les leurs. On peut leur présenter en guise de corrigé un poème par contradiction, comme celui de Louise Labé « Je vis, je meurs… » et leur demander d’identifier antithèses et oxymores.
Exercice 6 La dénotation du mot « flamme » est sa définition littérale, telle qu’on peut la trouver dans le dictionnaire, c’est-à-dire « mélange gazeux en combustion, dégageant de la chaleur et généralement de la lumière, produit par une matière qui brûle » (source TLFi). Les connotations sont toutes les significations associées au mot pour des raisons culturelles, sociales, etc. Celles-ci sont donc variables selon les époques et selon les individus. Certaines métaphores, par exemple celle du feu pour représenter l’amour, deviennent si fréquentes qu’on parle de métaphore codée : le mot est immédiatement compris comme signifiant autre chose. Dans la langue du xviie le mot « flamme » est ainsi très souvent utilisé pour dire l’amour. On retrouve cette métaphore jusqu’à aujourd’hui et l’on peut encore entendre l’expression « déclarer sa flamme ». Dans le poème de Du Bellay (page 153, vers 4), le mot « flamme » désigne l’enthousiasme ; les poètes de la Pléiade parlent même de « fureur », qui saisit le poète et donc le feu sacré de l’inspiration. Ce sont donc les images associées au mot « flamme » (lumière, vivacité, puissance, pureté…) qui ont permis l’élaboration de cette métaphore. Exercice 7 Champ lexical de la souffrance : « déconvenue, chagrin, peine, mal, tourment, détresse, torture, supplice, enfer, etc. » L’essentiel est ici de faire saisir les nuances de chaque mot pour amener les élèves à trouver le mot juste, à identifier une hyperbole ou un euphémisme.
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F I C H E D E S Y N T H È S E La poésie élégiaque du Moyen Âge au xvie siècle
> p. 170
> Introduction La fiche permet de présenter de manière synthétique tous les textes vus dans la séquence, elle serait un bon support pour un travail d’écriture ou pour la rédaction de synthèses personnelles des élèves. > Réponse aux questions de synthèse 1. La question permet aux élèves de se demander ce qui relie les textes du parcours, de nombreux titres sont possibles, qui montreraient l’expression de la perte, perte de l’amour, de la jeunesse, de l’inspiration … et ce sentiment de ne pouvoir, face à ces disparitions qu’écrire, garder des traces. 2. Les images utilisées sont nombreuses : la chute, la soif, le vent, la neige, la fuite, les feuilles qui se défont, … On peut observer à chaque fois le mouvement, le caractère impalpable des choses, le vertige aussi de ces disparitions. Les élèves peuvent à ce moment de la séquence vraiment saisir la singularité de l’écriture poétique qui cherche, comme l’écrivait Rimbaud dans « Alchimie du verbe », à fixer des vertiges. (« J’écrivais des silences, des nuits, je notais l’inexprimable. Je fixais des vertiges. ») Les images, les sonorités, les rythmes qui font la singularité du langage poétique permettent de donner à voir, à entendre, à partager des émotions et des visions qui seraient impossibles à expliquer.
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V E RS L E B A C
> p. 171
Sujet bac Commentaire > Introduction Le poème de Marceline Desbordes-Valmore reprend de nombreux motifs observés pendant la séquence et peut faire l’objet d’un travail de commentaire. L’exercice cherche ici à permettre aux élèves d’aborder les textes de manière autonomes et en confrontant leurs interprétations. Ils apprennent aussi à utiliser des écrits de travail et à identifier ceux qui leur sont les plus utiles (schéma, carte mentale, listes, notes sur le texte, etc.), il est important dans la perspective de l’écrit des EAF que les élèves puissent mettre à profit les 4 heures qui seront consacrées à l’exercice du commentaire. Le texte est ici très riche et de nombreuses pistes de lecture pourront être trouvées, l’essentiel étant de guider les élèves sur le lien entre le sens et l’écriture et de les aider à utiliser le vocabulaire de l’analyse littéraire.
monde de l’idéal baudelairien, voyage imaginaire et douceur des sens apaisés… 2. La couverture fait des mots une sorte de lien qui rapproche peu à peu les deux amants, comme dans un labyrinthe, la couleur rouge pouvant bien sûr évoquer la passion amoureuse. Les arabesques du titre sont aussi un moyen de montrer que c’est l’écriture, la littérature qui invente l’amour. 3. L’étude du calligramme, texte poétique disposé en forme de dessin, est un moyen intéressant pour faire comprendre la singularité de l’écriture poétique et la fonction poétique du langage : le sens, la forme sonore et la forme graphique des mots ont autant d’importance et s’associent. 4. Le tableau de Klimt reprend les motifs de l’union des amants et on pourrait le comparer à l’enluminure de la page 163. 5. Le roman de Pouchkine, dont Clémentine Beauvais s’est inspirée est un texte romantique et ironique, que les meilleurs lecteurs peuvent lire en œuvre intégrale. VERS LE BAC ORAL > S’entraîner à l’entretien
L E C T U R E C U RS I V E Clémentine Beauvais, Songe à la douceur (2016)
> pp. 172-173
> Introduction Le roman de Clémentine Beauvais est une œuvre originale : un récit contemporain en vers, qui intègre des calligrammes. L’auteure reprend donc la forme médiévale du roman courtois et joue avec toutes les possibilités du vers tout en suivant une narration. Le sujet du roman, réécriture d’Eugène Onéguine de Pouchkine, fait aussi écho aux textes rencontrés par les élèves dans la séquence. La question que pose le roman, et que pose sans doute toute la littérature, est celle que Faulkner écrit ainsi dans Les Palmiers sauvages : « Entre le chagrin et le néant, je choisis le chagrin. » Tristan et Yseut choisissent aussi le chagrin, de même que les poètes croisés dans la séquence. On sait que la Princesse de Clèves fera elle, un autre choix … Il s’agit donc d’une œuvre accessible, poétique et dans laquelle les lecteurs peuvent retrouver tous les motifs et tous les thèmes vus dans la séquence. Il est essentiel aussi que la poésie ne soit pas cantonnée aux temps anciens et que les élèves découvrent qu’elle est bien vivante aujourd’hui.
N’oubliez pas qu’on attendra de vous à l’oral une appropriation personnelle des textes : les questions doivent vous guider mais vous pouvez y répondre librement. L’essentiel est d’être précis, d’utiliser des arguments et des références à l’œuvre lue. 1. La poésie est avant tout un rapport au monde, une écriture qui cherche à faire éprouver au lecteur des émotions, des interrogations, des mystères que la langue peine à expliquer, analyser, décrire. Le récit de Clémentine Beauvais, même s’il est narratif est donc bien un poème, comme les lais de Marie de France ou les romans de Chrétien de Troyes. 2. Comme celle de Tristan et Yseut, l’histoire d’Eugène et Tatiana n’est pas liée à une époque, ces sentiments, ces peurs sont universels : à vous de vous demander si vous pourriez les partager … 3. Votre présentation doit témoigner de votre connaissance de l’œuvre, ne mentionnez pas seulement l’histoire mais aussi l’écriture, partagez vos étonnements, vos plaisirs de lecteur. Et ne dites pas tout … > Carnet de lecture Attention à la forme de la lettre : il s’agit d’un discours à la première personne, et cet exercice vous permettra d’éclaircir votre jugement face à ce roman pour préparer votre présentation orale.
> Réponse aux questions 1. Le « là-bas » de Baudelaire peut être mis en relation avec l’au-delà évoqué à propos de Tristan et Isolde. C’est le
5 • La poésie de l’absence
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SÉQUENCE
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« La vie est un songe »
Présentation de la séquence > La problématique Le rêve et la réalité peuvent-ils se confondre ? L’objet d’étude « La poésie du Moyen-Âge au xviiie siècle » invite à travailler sur un parcours chronologique autour d’un thème poétique. La séquence « La vie est un songe » a pour objectif de faire réfléchir les élèves aux liens que le genre poétique entretient avec la thématique du rêve. Elle s’appuie sur la citation de Caldéron qui sert de titre à la séquence pour mener une réflexion sur les pouvoirs de l’imagination et ses interactions avec le réel. Le rêve peut, en effet, être une source d’inspiration créatrice mais aussi une source de réflexion philosophique sur le sens de l’existence. Les frontières entre la réalité et le songe sont parfois ambigües ; le genre poétique, par la diversité de ses formes, peut justement rendre compte de la complexité de l’univers onirique dans la créativité du poète. La problématique vise à saisir la tension entre le rêve et la réalité comme des ressources poétiques à la fois indissociables et antithétiques. > Le groupement de texte Les textes étudiés dans ce parcours chronologique se situent entre le xvie siècle et le xviiie siècle. On propose d’étudier des formes poétiques différentes : sonnet, fable et élégie dans une perspective diachronique. Les poèmes de Louise Labé et de Saint Amant correspondent à la forme fixe du sonnet pour le xvie siècle et le xviie siècle. Ils proposent d’étudier le rêve comme un réconfort, un refuge face à la souffrance amoureuse pour Louise Labé ou face à la trivialité de la réalité pour Saint Amant. Le sonnet permet l’éloge du rêve dans les deux cas. Par ailleurs, le xviie siècle est aussi représenté par une autre forme poétique : la fable de La Fontaine « La Laitière et le Pot au lait ». Mais l’apologue sert alors à condamner l’illusion, le rêve et ses chimères. La réalité met le rêve en échec. Enfin, l’élégie d’André Chénier pour le xviiie siècle présente aussi le songe comme une chimère. Il est associé à la douleur amoureuse. On a ainsi un groupement qui interroge l’ambivalence du songe. > Les lectures complémentaires Les lectures complémentaires proposent de prolonger la réflexion aux siècles suivants. Le rêve et la réalité se confondent ou se confrontent encore du xixe siècle jusqu’à nos jours. Le rêve est source d’inspiration poétique chez Hugo et Rimbaud. Il devient alors vision sublime et fantasmée et se confond quasiment avec la réalité. Il redevient cauchemardesque chez Verlaine lorsque la nuit et l’insomnie brouillent la lucidité du poète et réveille ses angoisses amoureuses alors que le poème de Desnos transcende la passion amoureuse en l’associant au rêve. L’extrait du poème de Mahmoud Darwich propose lui aussi de réunir l’être aimé et le songe de façon harmonieuse. Enfin, Michèle Voltaire Marcelin célèbre la jubilation de l’écriture poétique lorsqu’elle se conjugue avec la liberté créatrice offerte par le rêve.
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> pp. 174-175
> Le prolongement culturel et artistique Tout d’abord, l’imaginaire du rêve dans la peinture de Jérôme Bosch permet d’envisager l’aspect plus sombre du rêve lorsqu’il est associé à un univers inquiétant. La fin du Moyen-âge est souvent hantée par le mystère de la mort et la peur de l’enfer. Les élèves sont invités à découvrir plus en détails l’extraordinaire richesse de la vision infernale de l’humanité selon Bosch. Ensuite, le rêve, le sommeil et la mort dans la peinture du xviie siècle permettent de mieux comprendre la dimension sacrée du rêve au siècle de la Morale. Le songe est le support d’une réflexion existentielle. L’art des vanités et la peinture de Georges de La Tour illustrent le questionnement spirituel du Grand Siècle et son pessimisme philosophique.
O U V E RT U R E
> pp. 174-175
> Introduction L’introduction propose d’envisager d’emblée le rêve que l’on fait la nuit et le rêve éveillé. On essaie de mettre en évidence l’aspect infini, extravagant ou délirant du rêve puisque son pouvoir imaginatif ne connaît aucune limite. Il est également marqué par un certain mystère tout comme peut l’être la poésie. Le songe paraît de ce fait une ressource inépuisable pour la création poétique. Cependant, on attire aussi l’attention sur l’aspect négatif du rêve lorsqu’il devient effrayant ou incontrôlé. L’illusion peut alors apparaître comme un piège. Le tableau de Jérôme Bosch a été choisi précisément parce qu’il représente une vision hallucinée et effrayante du monde. La mouvance baroque s’appuie, quant à elle, très largement sur le thème de l’instabilité du monde et sur la question de la vanité de l’existence, c’est ce que rappelle la citation de Chassignet. L’ouverture de la séquence invite à reconsidérer le rêve et à ne plus l’enfermer dans une vision trop idéalisée et réductrice. > Réponses aux questions 1. Les élèves peuvent être surpris et fascinés. La quantité des détails, la précision des motifs de même que l’étrangeté des scènes représentées peuvent aussi être l’objet d’une certaine incompréhension voire d’une critique pleine de perplexité. Dans tous les cas, on peut sensibiliser les élèves au caractère délirant du tableau de Bosch et le rapprocher de la nature extravagante des rêves que l’on peut faire la nuit. 2. La citation de Chassignet et le tableau de Bosch partagent tous les deux une vision désenchantée du rêve : mensonger pour l’un, diabolique pour le second. Pour les deux, le songe est révélateur des angoisses humaines.
3 • La poésie du Moyen Âge au xviiie siècle
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Recherche
> Réponse aux questions
L’analyse du tableau du site indiqué est claire et permet d’expliquer les trois panneaux. Cette recherche permet d’approfondir l’analyse de l’image et d’apporter quelques éclairages sur quelques motifs particulièrement déconcertants.
S’engager dans le texte
G RO U P E M E N T D E T E X T E S CONTEXTE L’École lyonnaise
> pp. 176-186 > p. 176
Louise Labé reçoit ainsi une éducation italienne qui lui permet d’apprendre le latin et l’italien. Cette éducation relève de l’éducation humaniste dans la mesure où elle est diversifiée : Louise Labé apprend la musique, elle est une habile écuyère et participe même comme son frère maître d’armes à des tournois. Cette éducation est originale pour une jeune fille de l’époque qui apprenait davantage à coudre, à broder notamment pour être une épouse modèle. Le sonnet de Louise Labé reflète l’ouverture d’esprit humaniste par l’aspect « scandaleux » de l’érotisme qui se dégage de sa poésie amoureuse. Le corps y est particulièrement présent. 1 Louise Labé, « Tout aussitôt que je commence à prendre… » (1555)
> p. 177
> Présentation de l’extrait Louise Labé aurait passionnément aimé un gentilhomme alors qu’elle avait seize ans. Ses sonnets contiennent toute la passion amoureuse à la fois le désir physique et la souffrance morale d’avoir perdu l’être aimé qui l’a quittée. > Lire en écho Le texte en écho proposé pour ce texte est celui de Robert Desnos « J’ai tant rêvé de toi ». En effet, il est intéressant de montrer que bien que plusieurs siècles séparent ces deux auteurs, et alors que leur poésie emprunte des formes très différentes, l’absence de l’être aimé semble pouvoir trouver une compensation dans le rêve. Le poète qui prolonge sa vie amoureuse en fantasmant l’être aimé. Le poète accepte l’illusion mensongère du songe plutôt que de renoncer à la passion. > Les mots de… Du latin somnium « songe, rêve ; chimère, extravagance », le mot « songe » connote implicitement l’idée d’illusion, de contradiction avec la réalité. Le mot « mensonge », en revanche, tire son origine du bas latin mentio qui signifie « mensonge, affirmation contraire à la vérité. Les deux mots « songe » et « mensonge » sont liés dans la littérature au xiie siècle. Ils ne partagent donc pas la même étymologie mais entretiennent un lien sémantique lorsque le « songe » est associé à une illusion de l’esprit trompeuse.
1. Ce sonnet présente l’amour comme une souffrance puisque l’être aimé est absent. L’esprit du poète est obsédé par la pensée de l’amant, il ne peut trouver d’apaisement dans le réel. 2. Le songe devient alors un réconfort. Le sommeil provoque le songe et prolonge l’amour. Le poète s’abandonne au rêve qui lui permet de retrouver à loisir l’être aimé. L’illusion du rêve devient presque une seconde réalité puisque le rêve est vraiment vécu et que cela compense l’absence. Interpréter 1. Dans la tradition du sonnet les quatrains et les tercets s’opposent notamment sur la thématique. Ici, les quatrains sont plus ancrés dans la réalité et correspondent à la souffrance vécue sans l’être aimé. La poétesse s’abandonne alors au pouvoir du songe dans les tercets en appelant de ses vœux la possibilité de rêver de l’amant. Seules ces retrouvailles oniriques avec son amour peuvent calmer la douleur de l’absence. 2. Les adjectifs épithètes du sonnet sont « mol » v. 2, « désiré » v. 2, « triste » v. 3, « tendre » v. 5, « doux » v. 9, « heureuse » v. 9, « plaisant » v. 10, « pauvre » v. 12, « amoureuse » v. 12. Ils donnent les émotions contrastées ressenties par le poète et signalent la sensualité. 3. Les oppositions du sonnet : « prendre » V.1 / « rendre » v.4, « désiré » v. 2/ « retiré » v. 3, « moi » v. 3/ « toi » v. 4, « triste » v.3/ « heureuse » v.9, « vérité » v.13/ « mensonge » v. 14. Les oppositions permettent de mettre en relief le déchirement intérieur et la souffrance engendrée par la frustration du désir. VERS LE BAC ORAL > Lecture expressive
La lecture expressive du texte peut être proposée pour un travail individuel, à deux ou à trois. La mise en voix peut s’appuyer sur les contrastes. Le sonnet propose un rythme binaire et une série d’antithèses qui méritent d’être soulignés par un travail de nuances de la voix ou encore d’échos.
CONTEXTE La mouvance baroque et le courant libertin
> p. 178
Une nature morte est un genre pictural qui représente des objets inanimés (fruits, fleurs, vases, ustensiles) assemblés d’une certaine façon. Cette composition entretient un rapport profond à la vie et à la mort. La vanité est une nature morte mais sa composition doit représenter le caractère éphémère de l’existence. Aux objets inanimés habituels se joint souvent un crâne. Ce genre s’est modifié. Au cours du xviie siècle, les vanités avaient un sens spirituel et rappelaient aux hommes qu’ils étaient mortels. L’art s’est constamment intéressé aux vanités, en véritable exercice de style parce que son message philosophique est universel. Des artistes comme Andy Warhol, Saverio Lucariello ou Christian Gonzenbach ont proposé des créations de vanités. 6 • « La vie est un songe »
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Le sonnet illustre cette réflexion sur la vie et la mort puisqu’il célèbre le plaisir langoureux de la vie terrestre mais dessine en creux la silhouette d’un gisant.
L’effet comique provient du rapport logique hyperbolique ainsi créé qui est empreint d’un humour noir. VERS LE BAC ÉCRIT > Commentaire
2 Saint-Amant, « Le Paresseux » (1631)
> p. 179
> Présentation de l’extrait Saint amant fait partie des poètes du libertinage. Décomplexé face à la peur de l’enfer et libéré des exigences de la morale religieuse, le poète célèbre le plaisir scandaleux de ne rien faire, de s’abandonner à l’insouciance et à la langueur du corps dans son lit. > Lire en écho Le poème de Michèle Voltaire Marcellin peut être rapproché de ce sonnet parce que ces deux textes sont des hymnes à l’inaction physique au profit de l’activité de l’imagination. Les deux prônent l’abandon délicieux du corps pour les charmes du sommeil, du rêve et de l’esprit. La notion de plaisir est fondamentale. > Les mots de… « Oisiveté » vient du latin otium qui signifie : inaction, désœuvrement, paix, calme, temps libre. C’est le repos honorable qui s’oppose au negotium (l’activité). Dans l’Antiquité, c’est une valeur positive. Le mot « loisir » correspond lui aussi au temps libre, temps disponible hors du temps de travail nécessaire. L’éloge de l’oisiveté est un ouvrage de Sénèque. Pour le sage, être oisif c’est la possibilité d’avoir une activité intérieure comme la méditation, la contemplation dans la recherche du bonheur. > Réponse aux questions S’engager dans le texte 1. La comparaison du vers 3 transforme le poète en pâté de lièvre. L’image est comique et burlesque. Le poète gras et repu engoncé dans son lit lui fait penser à une pièce de viande morte prête à être déguster. 2. Le poète prend plaisir à rêver dans son lit, le ventre plein, vidé de son énergie. C’est un plaisir physique mais aussi un réconfort moral qui chasse la « mélancolie » v. 1. Interpréter 3. Ce sonnet fait un éloge original : celui de la sieste, du repos du corps contrairement à la tradition qui valorise l’activité et le mouvement physique. 4. Les éléments qui montrent que le poète se moque de lui-même sont : « fagoté » v.2, « comme un lièvre sans os qui dort dans un pâté » v. 3, « Dom-Quichot » v. 4, « s’en enfler ma bedaine » v. 11. Les éléments qui montrent un sujet plus grave sont « mélancolie » v. 1, « folie » v. 4, « ensevelie » v. 8. 5. La proposition subordonnée de cause est : « puisque je vois déjà s’en enfler ma bedaine ». Les propositions subordonnées de conséquence construites avec des corrélatifs : « je trouve ce plaisir si doux et si charmant/que je crois que les biens me viendront en dormant » et « Et hais tant le travail, que, les yeux entr’ouverts/une main hors des draps (…) à peine/ ai-je pu me résoudre à t’écrire ces vers.
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I. la dégradation du corps et de l’esprit a. L’accablement physique : la paresse b. L’image du corps dévalorisée c. La langueur de l’esprit II. Une stratégie comique pour un éloge paradoxal a. Le comique de situation b. L’autodérision c. L’humour noir : le rire d’un gisant
CONTEXTE Plaire et instruire
> p. 180
La vue du château de Versailles par Patel permet d’évoquer l’absolutisme et le classicisme caractéristiques du xviie siècle. Le lien offre une analyse de l’image détaillée qui explique la puissance du pouvoir incarnée par les jardins, l’architecture et les perspectives du château. Les élèves peuvent retrouver les critères esthétiques du classicisme en s’inspirant de cette vue. La fable illustre aussi le classicisme dans la recherche de l’ordre et de la mesure : la versification rigoureuse, la métrique ciselée mettent en valeur la morale pessimiste du texte de La Fontaine. 3 Jean de La Fontaine, « La Laitière et le Pot au lait »
> p. 181
> Présentation de l’extrait Jean de La Fontaine rédige ses fables dans la seconde moitié du xviie siècle. Cette période connaît l’influence de Port-Royal qui condamne l’orgueil humain, l’imagination et les illusions trompeuses. « La Laitière et le Pot au lait » ne laisse aucune chance au rêve de fortune du personnage, la réalité le voue à l’échec. > Lire en écho On peut lire en écho « Rêverie » de Victor Hugo parce que les deux textes s’opposent sur les vertus du rêve. Si La Fontaine condamne le songe éveillé trompeur et illusoire, Hugo lui rend hommage en le magnifiant. L’antagonisme entre classiques et romantiques trouve ici un exemple édifiant. Recherche Le tableau de Fragonard du xviiie siècle s’oppose lui aussi à la vision sévère de l’estampe de Oudry p. 181. Perrette y est représentée pleine de sensualité, la jupe quasi retroussée, vaporeuse comme le nuage laiteux qui s’échappe du pot renversé. La peinture libertine aux couleurs pastel réhabilite la sensualité et met en œuvre un érotisme certain indissociable de la recherche du Bonheur prôné par le Libertinage. Fragonard s’inscrit dans ce mouvement libertin par la sensualité et la légèreté des scènes qu’il peint.
3 • La poésie du Moyen Âge au xviiie siècle
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> Réponse aux questions S’engager dans le texte 1. Au vers 22, le réel fait irruption dans la fable, c’est le moment où Perrette tombe. Elle « saute aussi, transportée ». 2. Si la chute de Perrette peut apparaître comique, son sort ne l’est pas vraiment. Ses rêves d’argent et de réussite s’écroulent de façon pathétique tandis qu’elle craint également d’être sévèrement punie par son mari en rentrant chez elle pour avoir perdu le contenu du pot au lait. Interpréter 3. Perrette exprime ses projets directement à partir du vers 12 jusqu’au vers 21. L’apparition du discours direct et l’emploi du pronom personnel à la première personne le montrent. L’intérêt de rapporter directement ses paroles est de mieux comprendre l’état d’esprit de Perrette. Cela rend aussi la fable plus vivante. 4. Dans la conclusion implicite du vers 30 à la fin, le pronom personnel « je » réapparaît de façon surprenante. Ce n’est plus le « je » de Perrette mais celui d’un locuteur indéterminé. Le pronom « nous » intervient au vers 36 ainsi que le « on » vers 40. Ces deux autres pronoms personnels permettent de donner à la morale un caractère universel. VERS LE BAC ÉCRIT > Essai
Les leçons qui sont faites de manière légère avec humour sont souvent plus édifiantes. En effet, elles dédramatisent souvent les situations et permettent d’instruire en douceur. Le rire est depuis longtemps une arme redoutable pour faire passer la morale. Insister aussi sur la stratégie argumentative du rire. Le divertissement et la légèreté ont des qualités didactiques certaines. Faire réfléchir les élèves aux humoristes, caricaturistes ou chroniqueurs qui connaissent beaucoup de succès tout en critiquant. > Écrit d’appropriation On peut donner quelques pistes aux élèves d’autant plus que l’écriture d’un texte comique est souvent un défi considérable. On peut d’abord leur rappeler les outils nécessaires : comique de situation, comique de geste, comique verbal, comique de répétition, comique de caractère. On peut aussi leur demander de construire le schéma narratif au brouillon avant de rédiger.
Lecture d’image Francisco de Goya, « Le songe de la raison engendre des monstres » (1797-1799)
> p. 183
> Introduction Le tableau de Goya condamne la folie et l’erreur lorsque la Raison n’opère plus. Les Caprices comprennent 80 gravures qui critiquent le comportement des hommes, leurs vices et leur stupidité. Sur une étude pour cette gravure, Goya a écrit : « L’auteur rêve. Son seul but est de bannir des idées dangereuses et répandues, et de perpétuer grâce à l’œuvre des Caprices le témoignage solide de la vérité. »
> Étude d’une œuvre 1. Au premier plan on distingue un homme affalé sur une table qui porte l’inscription « El sueño de la razón produce monstres ». Au second plan, derrière le personnage se trouvent des animaux qui le cernent, enfin en arrière-plan, d’autres volatiles plus sombres s’envolent. Le songe est évoqué par l’attitude du personnage qui cache sa tête entre ses bras sur sa table mais aussi par la présence des animaux qui forment un bestiaire inquiétant autour de lui ce qui semble figurer le songe de l’homme. 2. On distingue des hiboux, un chat noir, un lynx et des chauves-souris. Ces animaux sont actifs la nuit, nyctalopes, associés à l’angoisse nocturne. 3. Les animaux semblent menaçants autour du personnage. Le fond est sombre et métaphorise le monde intérieur peuplé d’images angoissantes. L’individu est dans une posture de repli, d’abandon de la conscience. Sa tête est cachée entre ses bras. Il dort. 4. La gravure permet de jouer sur les contrastes de clarté et d’obscurité. L’absence de couleurs renforce l’aspect angoissant et permet une certaine finesse dans le trait. > Carnet de lecture À partir de 1819 et jusqu’en 1823, Goya, sourd, malade, fatigué s’éloigne de la cour d’Espagne et réalise sur les murs de sa ferme 14 fresques marquées par les thèmes de la vieillesse, de la mort et de la folie. Ses œuvres sont impressionnantes par le désespoir qu’elles contiennent mais aussi par leur démesure. On peut citer « Homme lisant », « Saturne dévorant l’un de ses fils » ou « Le chien ».
CONTEXTE Des lumières à la naissance > p. 184 du romantisme Recherche L’activité de recherche propose de faire travailler les élèves sur un peintre du xviiie de leur choix. Ils peuvent reprendre Joseph Vernet ou bien choisir Fragonard, Boucher, Chardin ou encore Watteau. Le texte en contexte Le poème d’André Chénier rend compte du mouvement et de l’énergie de la fin du xviiie siècle par le rythme impulsé à son élégie XXII. Les enjambements, les interjections, les nombreuses exclamatives contribuent à cette impression de dynamisme et d’émotions heurtées qui préfigurent le romantisme du xixe. 4 André Chénier, « Ô nuit, nuit douloureuse ! » (1780)
> p. 185
> Présentation de l’extrait La poésie d’André Chénier est influencée par un goût pour l’hellénisme prononcé mais aussi par un lyrisme enthousiaste qui pose les jalons du romantisme. « Sur des pensers nouveaux faisons des vers antiques » écrit-il. Le poème réinterprète le thème de la nuit passée auprès de l’être aimé endormi. L’imagination trompeuse nourrit la jalousie de l’amant. 6 • « La vie est un songe »
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> Lire en écho Le poème de Verlaine « L’horrible nuit d’insomnie » fait écho à cette élégie par analogie thématique de même que l’extrait du poème de Darwich « Le jardin endormi ». Le réel et le rêve se confrontent douloureusement. > Réponse aux questions S’engager dans le texte 1. Dans ce texte le poète est éveillé. Il souffre d’insomnie. « Je me tourne et m’agite, et ne peux nulle part/ trouver que l’insomnie amère […] ». 2. Le début et la fin du poème évoquent tous deux certains thèmes comme la « nuit » et l’« insomnie ». Le poème s’ouvre et se clôt sur deux modalités exclamatives ce qui lui confère une structure circulaire. Interpréter 1. Les oppositions : « tardive » v. 1/ « rapide » v. 10 ; « venir » v. 2 / « fuite » v. 26 ; « insomnie amère » v. 5 et 24 / « douce insomnie » v. 26 ; « jour » v. 8/ « nuit » v. 9 ; « sommeil » v. 11 / « réveil » v. 12 ; « paisible » v. 13/ « pénible » v. 14 ; « toi » v. 15/ « moi » v. 16 ; « fermés » v. 19 / « entr’ouvre » v. 21 ; « auprès de moi » v. 16 / « loin de toi » v. 23. Ces oppositions révèlent le paradoxe de l’amour qui déchire l’être entre plaisir et angoisse. 2. Le champ lexical du corps : « flanc » v. 3 ; « paupière » v. 8 ; « cœur » v. 13 et 18 ; « tête » v. 15 ; « yeux » v. 19 ; « haleine » v. 20 ; « lèvres » v. 21 ; « bras » v. 24. Les éléments attendus sont soulignés et les éléments inattendus en caractère gras. Les topoï amoureux (éléments attendus) sont assez classiques pour évoquer l’amante le mot « haleine » surprend davantage car il évoque le parfum et la bouche de façon plus sensuelle. La « paupière » et le « flanc » se rapporte à l’amant insomniaque et signalent ainsi une corporalité moins érotisée. Le mot « cœur » est à prendre au sens figuré, mais il évoque aussi le corps. 3. La coordination du vers 4 à 7 est marqué par l’emploi de « et ». La polysyndète, v.4 signale l’accablement physique et moral du locuteur. Le connecteur adversatif « mais » v. 22 coordonne les propositions. Les propositions subordonnées relatives : « Qui retiens ma paupière ouverte jusqu’au jour » v. 8, « […] qui luit auprès de moi » v. 16, « […] qui s’échappe trop vite » v. 25. Une proposition participiale à valeur temporelle « […] En me lisant […] » v. 12. Quatre propositions subordonnées circonstancielles à valeur d’hypothèse « Si tu l’avais voulu […] » v. 9, « […] si mon cœur est paisible » v. 13, « […] si je me trompais […] si tu veilles » v. 22. Une proposition subordonnée circonstancielle à valeur de temps « lorsque loin de toi j’endure le tourment d’une insomnie amère […] ». La coordination renvoie à un état assez nerveux du poète, les subordonnées hypothétiques mettent en évidence les doutes et les tergiversations intérieures. La temporelle finale projette la paranoïa du poète angoissé d’être trompé.
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VERS LE BAC ORAL > Entretien
On invite les élèves à sélectionner quelques poèmes dans leur exposé et à les mettre en perspective dans leur contexte historique et littéraire. > Carnet de lecture Les élèves choisissent leur poème préféré des pages 177 à 185. Ils notent leurs impressions de lecteur/ lectrice. Le choix doit tout de même faire l’objet d’un temps d’explication.
Lectures complémentaires 5 Victor Hugo, « Rêverie » (1829)
> pp. 186-190 > p. 186
> Présentation de l’œuvre et de l’extrait Le xixe siècle a nourri une véritable fascination pour l’orientalisme. La féérie héritée des Mille et Une Nuits se retrouve dans ce poème des Orientales. Le thème du texte est traditionnel puisqu’il traite de l’angoisse de perdre l’inspiration. « Rêverie » revisite ce sujet en conférant à l’imagination et au rêve éveillé un pouvoir démiurgique puissant. Le rêve est la véritable muse hugolienne, riche, inépuisable et enchanteresse. > Lire en écho 1. Le poète voit un paysage au coucher du soleil. Les couleurs de l’automne sont exacerbées par la lumière rougeoyante du couchant. Mais l’ensemble porte l’empreinte d’une sourde tristesse. Il souhaite alors voir apparaître une ville exotique et orientale qui transpercerait la brume de son architecture verticale. Le poète semble lassé et en manque d’inspiration. Cette vision enchantée lui redonnerait l’inspiration dont il a besoin. 2. On perçoit l’inquiétude du poète par un certain nombre d’indices : les deux interjections « oh ! » vers 1 et 7 qui ouvrent les deux premiers sizains du poème lancent un cri de déploration, l’injonction « laissez-moi ! » appelle à l’isolement et à la solitude, la présence de verbes à connotation élégiaque « disparaît », « décline », « ont rouillé ». Dans le second sizain les trois interrogatives qui commencent par l’anaphore de « qui » marquent l’impatience du poète à espérer l’intercession des « génies » pour faire apparaître la vision enchantée. Dans le dernier sizain, la tonalité se fait plus inquiète aussi et l’on retrouve les échos des verbes de déclin « ranimer », « rembrunies », « s’éteignant », « étouffées ». 3. Dans le poème de Victor Hugo et dans la fable de La Fontaine, le pouvoir de l’imagination et du rêve est démiurgique. Le rêve crée et recrée des mondes et nourrit inlassablement la création. L’imagination est une ressource pour supporter la réalité et la sublimer. 6 Arthur Rimbaud, « Aube » (1886)
> p. 187
> Présentation de l’œuvre et de l’extrait Dans les Illuminations, Arthur Rimbaud explore un monde fantasmagorique et transcende la réalité dans une section intitulée « Fééries ». La sensualité du texte épouse la douceur du rêve poétique. Le poète procède au véritable dévoilement d’un monde intérieur mystérieux et charnel. La réalité et le rêve se confondent harmonieusement.
3 • La poésie du Moyen Âge au xviiie siècle
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> Lire en écho, réponse aux questions 1. Le poète affirme sa présence par l’emploi du pronom personnel « je » dès le premier vers. Le pronom sera souvent le sujet des verbes d’action très nombreux. Le poète agit et interagit avec son environnement comme s’il avait quelque pouvoir magique. À son passage le monde réagit et se métamorphose. 2. Le poème commence par « J’ai embrassé l’aube d’été » et se termine par « Au réveil il était midi », cela correspond à une ellipse temporelle. C’est comme si le poète avait dormi et rêvé dans cet intervalle de temps. Il fait dans le corps du texte le récit de ce rêve comme le souligne l’emploi du passé-composé et du passé-simple. D’ailleurs la présence des deux temps verbaux ancre la fois le récit dans le temps de l’énonciation (passé-composé) et à la fois le coupe de la situation d’énonciation (passé-simple) ce qui renforce l’ambiguïté entre le rêve et le réel. 3. Mahmoud Darwich et Rimbaud ont choisi les vers libres comme pour mieux libérer leur écriture. Le thème du rêve qui par essence échappe au conformisme et à la rigueur est ainsi bien représenté par une forme poétique plus souple. 7 Paul Verlaine, « L’horrible nuit d’insomnie » (1891)
> p. 188
> Présentation de l’œuvre et de l’extrait Après sa liaison chaotique avec Arthur Rimbaud, Paul Verlaine connaît un certain nombre d’états d’âme allant de la recherche de la contrition spirituelle au renoncement au salut par la foi religieuse. Les dernières années de sa vie consacrent la déchéance physique du poète et livrent ce recueil de poèmes d’une grande sensualité. L’amour est ambigu, à la fois maléfique et délicieux. > Lire en écho 1. La sensualité se manifeste dans le poème par la présence du lexique d’un corps érotisé « ton cher corps », « ta bouche tant baisée » v. 4, « ta bouche » v. 7. De plus les sensations physiques sont nombreuses : visuelles « yeux de sorcière », auditives « très plausible parler », tactiles « ton cher corps près de moi » « bouche […] baisée » « durs et doux », olfactives et gustatives « fleur et fruit ». Les cinq sens sont sollicités, ils sont même explicitement évoqués au vers 13 et 14 « Et surtout sans le pentacle / De tes sens […] » 2. Le deuxième sizain contient des rimes significatives aux vers 7 et 8 puisque « mensonge » rime avec « songe ». La recherche de la musicalité très forte chez Verlaine ne justifie pas totalement cette paronomase. Le poète suggère aussi l’aspect trompeur et piégeant de la passion amoureuse fantasmée. Les poètes usent souvent de cette dualité parce qu’elle est très musicale et très symbolique de la tension qui résulte de l’ambiguïté des illusions. 3. Les poèmes de Chénier et de Verlaine évoquent chacun l’insomnie qui dérègle l’imaginaire et le rêve. La nuit porteuse d’angoisse déforme aussi la perception du réel. Elle favorise les débordements de l’imagination en exagérant les perceptions. Associé à la passion amoureuse, l’insomnie est aussi créée par la jalousie qui dévore le poète et qui le pousse à imaginer le pire.
8 Robert Desnos, « J’ai tant rêvé de toi » (1926)
> p. 189
> Présentation de l’œuvre et de l’extrait La section « À la Mystérieuse » comprend des poèmes d’amour qui, chez Desnos, sont indissociables du rêve puisqu’il est par excellence le poète surréaliste du songe. La puissance onirique trouve aussi ses limites lorsque la réalité n’est plus à la hauteur de l’amour absolu rêvé. > Lire en écho 1. La relation amoureuse évoquée est marquée par la tristesse et le sentiment de la perte. Le poète utilise une hyperbole dans l’anaphore « J’ai tant rêvé de toi », il s’agit de l’emploi du corrélatif « tant » qui appelle une subordonnée de conséquence. À chaque fois la subordonnée construite contient une construction de la négation. « tu perds ta réalité » v. 1 ou « mes bras […] ne se plieraient pas » v. 4 et 5, « je deviendrais une ombre », v 7, « qu’il n’est plus temps », « qu’il ne me reste plus […] ». Le poète mesure ses limites et il semble à bout de force, épuisé par la passion. 2. Le rêve et la réalité se confrontent dès le vers 1 « J’ai tant rêvé de toi que tu perds ta réalité », c’est le rêve qui semble avoir épuisé la substance même de l’amour. L’obsession qui se manifeste par le rêve de l’être aimé a remplacé la réalité au point de créer une confusion dangereuse qui perd le poète. 3. Louise Labé se réfugie dans le rêve pour retrouver l’image et le corps de l’être aimé tout comme Robert Desnos. Cet amour fantasmé dépasse la réalité et permet d’accéder à un amour idéal qui selon l’acception platonicienne est véritablement seulement une idée absolue de l’amour. 9 Mahmoud Darwich, « Le jardin endormi » (1977)
> p. 190
> Présentation de l’œuvre et de l’extrait Mahmoud Darwich est un poète palestinien très célèbre dans le monde arabe. Son engagement politique et sa poésie de l’exil en ont fait une figure majeure de la lutte palestinienne. Chez ce dernier, la femme est très souvent associée à la représentation de la terre natale perdue. On comprend mieux le lien établi entre la femme et le « jardin » dans ce poème. La réalité douloureuse de l’exil vécu par le poète semble s’opposer aux rêves de la femme endormie insouciante et sereine dans son sommeil. > Lire en écho 1. L’atmosphère sonore du texte est contrastée. Les oppositions entre les bruits et le silence sont constantes. L’atmosphère sonore est rythmée par les « battements » de « cœur », le « tintement » des « pas », le son des « cloches », le bruit de la « pluie » et encore des « pas sur les marches ». Sons intérieurs et sons feutrés, l’atmosphère sonore propose ainsi un fond léger, une vibration en sourdine. La nuit et son silence sont évoquées explicitement à deux reprises « aucun bruit » v. 16 et « Pas un bruit » v. 26. C’est comme si le silence pesant de la nuit permettait de mettre en relief le moindre son. La mémoire aussi ravive des souvenirs sonores « j’ai entendu le tintement ancien de ses pas ». 6 • « La vie est un songe »
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2. La femme est endormie dans les textes de Chénier et de Darwich. Dans ce poème, elle est associée à des images apaisantes « jardin endormi ». Elle dort sans se douter que son amant la quitte à pas feutrés. Le poète la voit dormir et s’en émeut avec passion « elle dort comme un ange après l’amour ». Chénier, quant à lui, souffre de jalousie lorsqu’il voit la belle dormir près de lui, il la voit comme un être qui lui échappe alors que Darwich est celui qui s’en va. Tous deux contemplent le sommeil de l’être aimé mais ne réagissent pas de la même façon. 10 Michèle Voltaire Marcellin, « Il fait un temps de poème » (2010)
> p. 191
> Présentation de l’œuvre et de l’extrait Originaire d’Haïti, Michèle Voltaire Marcellin propose une poésie lyrique qu’elle se plaît à mettre en voix. Le choix de ce texte permet de célébrer l’activité poétique contemporaine et la francophonie. Ce poème est une ode au langage et à l’énergie que procurent les mots. > Lire en écho 1. Le lit peut apparaître comme un lieu d’inspiration parce qu’il représente un refuge pour le poète. Il est un lieu de bien-être, d’évasion et de plaisir pour l’imagination et par conséquent pour l’inspiration. Le lit est comme un endroit sacré, le lieu où le temps est suspendu. Lieu de rêve, de sommeil, lieu de « sieste », il est l’endroit qui transcende la réalité. Par métaphore, il suggère aussi le monde intérieur du poète, son intimité. 2. Saint Amant et Michèle Voltaire Marcellin trouvent tous deux un réconfort dans leur lit mais chez Saint amant il évoque quand même la mort. Or pour Michèle Voltaire Marcellin il est plutôt le symbole d’une vie intérieure riche et dynamique. L’imagination créatrice du poète tire son inspiration de cet état de retrait de la réalité.
PROLONGEMENT ARTISTIQUE ET CULTUREL > pp. 192-194
L’image du rêve dans la peinture de Jérôme Bosch
> pp. 192-193
> Introduction Le Quattrocento, c’est-à-dire le xve siècle, est une période décisive dans le monde entier et qui est même considérée par un certain nombre d’historiens comme la première ère de la mondialisation ce qui lui vaut d’être appelée « le temps de l’invention du Monde ». Par ailleurs les bouleversements religieux s’installent et la crainte de la fin du monde, de l’Apocalypse, est très forte. Les rêves et les cauchemars sont considérés comme des signes prophétiques de la fin des temps annoncée par les Ecritures. La citation de Dante, extrait de La Divine Comédie du livre « L’Enfer », illustre le climat d’angoisse et de terreur qui entoure la représentation de l’au-delà. C’est aussi le temps de la chasse aux sorcières et des bûchers pour les alchimistes. Jérôme Bosch s’inscrit dans cette période mouvementée et apparaît comme un artiste énigmatique tant son œuvre surprend par son langage symbolique. « La tentation de saint Antoine » a été choisie
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pour montrer un imaginaire délirant et infernal. Les détails choisis permettent de mieux percevoir la minutie et l’aspect foisonnant des motifs. Ils invitent à une observation attentive qui suscite une certaine fascination. > Carnet de lecture Le site propose une analyse de qualité du triptyque de Jéronimus Bosch peint autour de 1502. Les trois panneaux sont expliqués. Ils reprennent le thème de Saint Antoine très en vogue au Moyen-Âge. Saint Antoine doit affronter ses démons qui prennent des formes très différentes. On peut attendre que les élèves proposent une description minutieuse du détail choisi et qu’ils réagissent de façon originale. > Réponse aux questions 1. Les élèves doivent sélectionner un des quatre détails proposés. À la page 192, on peut identifier plusieurs démons qui emportent Saint Antoine dans les airs alors qu’il est en extase. Les explications des détails de la page 193 sont données sur le site. On remarque particulièrement les patins aux pieds de l’oiseau à l’entonnoir, la récurrence des poissons dans le triptyque, le nouveau né emmailloté et porté par une créature mi-arbre mi-homme près de la cruche sur pattes… 2. On peut faire observer aux élèves que Bosch crée des créatures délirantes en mariant le règne végétal, animal et humain. Ainsi on trouve des être difformes, des animaux terrifiants, des objets incongrus. Presque tout dans le triptyque reflète une imagination débordante. 3. La vision de l’humanité qui se dégage de l’œuvre de Bosch est assez monstrueuse. Les démons représentent les désirs et les illusions de l’esprit. Jérôme Bosch était croyant mais il rejette néanmoins le clergé. Pour lui l’homme est mauvais qu’il soit homme de foi ou paysan. Il condamne le plaisir facile et la débauche de l’existence de ses contemporains. Il ne leur voit pas d’autre perspective que celle de l’enfer.
Le rêve, le sommeil et la mort dans la peinture du xviie siècle
> p. 194-195
> Introduction De la fin du xvie siècle et pendant le xviie siècle la question de la Morale évolue. La fin de la Renaissance a, en effet, été le théâtre des massacres entre protestants et catholiques et la mouvance baroque a déstabilisé les certitudes philosophiques et religieuses. Le désordre semble avoir pris trop de place dans les arts et l’Honnête homme perd de sa vertu. Le sonnet de des Barreaux est un exemple de la poésie baroque et libertine qui s’appuie sur le thème de l’instabilité du monde. Le poète reprend l’idée que « la vie est un songe ». Cependant il livre un sonnet désenchanté qui dénonce l’aspect illusoire de la vie. Dans la seconde moitié du xviie siècle, Port Royal exerce une influence considérable sur l’élite de l’époque. La citation de Pascal des Pensées dénonce le caractère dangereux de l’imagination lorsque la raison fait défaut. Le rêve et l’illusion sont violemment repoussés par la morale sévère du Grand Siècle. > Lecture d’image La vanité de Philippe de Champaigne présente une construction ordonnée. Les trois objets représentés, la tulipe dans
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son vase, le crâne et le sablier sont parfaitement alignés sur un plan de pierre claire alors que l’arrière-plan très sombre entoure l’ensemble de la composition. Le regard du spectateur est plongé frontalement dans les orbites sombres du crâne qui occupe la position centrale. Le vase contenant la tulipe et le sablier sont disposés à équidistance du crâne. Les formes géométriques des objets (circulaires et triangulaires) composent avec les lignes horizontales et verticales un assemblage symétrique. Le tableau est idéal pour illustrer les critères esthétiques du classicisme : l’ordre, la rigueur, la symétrie et la clarté de la composition. Par ailleurs, la vanité rappelle aux hommes la fragilité de leur existence, leur orgueil doit s’abaisser face à Dieu. La tulipe est une fleur fragile et éphémère, plus humble que la rose, elle est le symbole de la vie. Le sablier est symbole du temps qui passe inéluctablement. Le crâne représente la mort certaine. On note aussi en observant les reflets de lumière et les ombres projetées que la lumière provient de la gauche, de l’ouest, comme pour marquer aussi le déclin du jour et métaphoriser le déclin de la vie. Cette vanité très sobre tranche sur les vanités baroques de la peinture hollandaise et représente bien le pessimisme sévère de la Morale en cette fin de xviie siècle en France. > Réponse à la question Les deux œuvres portent un regard pessimiste sur l’existence terrestre. Ils traitent de la vanité mais ils s’opposent sur leur esthétique respective : le sonnet est plutôt baroque tandis que la peinture répond aux critères du classicisme. L’esprit libertin du sonnet s’oppose fortement à la réflexion stricte et moralisatrice du tableau. Étude d’une œuvre, Georges de La Tour, Le Songe de saint Joseph (vers 1640) > Introduction « Le Songe de Saint Joseph » a été peint par Georges de La Tour vers 1640. Il peut être rapproché des vanités par le symbolisme de la chandelle qui se consume comme la vie. De La Tour a apporté une profondeur unique à ce songe en le nimbant d’une nuit douce et silencieuse. > Réponse aux questions 1. Ce tableau est captivant grâce aux jeux de lumières subtils et maîtrisés. La source de lumière est la flamme de la bougie cachée derrière le bras tendu de l’enfant. La lumière est répercutée sur le décor et en dessine les contours avec grâce. Les contrastes mettent en valeur le profil de l’ange, le dos de sa main gauche et les motifs raffinés des étoffes des vêtements. Les ombres portées sont remarquables de précision et de virtuosité. La nuit entoure Joseph et l’apparition de l’ange mais elle prend toute la dimension mystérieuse à l’aune de la lueur chaude de la bougie qui fait ressortir les couleurs ocre et rouge du tableau. 2. L’ange est ici représenté de façon très réaliste comme un enfant. On est loin des images traditionnelles d’un ange ailé et aérien. Ici l’ange a la grâce et la douceur de l’enfance. On ne sait pas s’il s’agit d’un garçon ou d’une fille. 3. Le clair-obscur en peinture est un équilibre entre l’ombre et la lumière pour créer le volume et le modelé. Ce tableau en est une illustration.
> Écrit d’appropriation Marin Marais est un compositeur de musique baroque. Il a composé de nombreux morceaux pour la viole de gambe. La rêveuse est une composition touchante qui peut inspirer les élèves par sa sensibilité et sa tonalité élégiaque.
ATELIER LANGUE & EXPRESSION
Écrit
> p. 196
Rédiger un texte imaginatif et poétique à partir d’un tableau du xviie siècle >Introduction L’atelier langue vise à rédiger un texte imaginatif et poétique à partir d’un tableau du xviie siècle. Les élèves doivent rédiger un texte dans lequel ils imaginent les rêveries de la jeune femme peinte par Vermeer. L’image support est le tableau intitulé « La liseuse à la fenêtre » de Johannes Vermeer de 1657. Le choix du sujet doit conduire à rédiger un récit complexe associant description et discours. Le support iconographique doit permettre aux élèves d’avoir un support pour leur éviter les problèmes d’inspiration. En même temps, il apporte un certain nombre de contraintes qui cadrent l’écriture et balisent l’invention. Le tableau de Vermeer est intéressant parce qu’il propose une lecture abordable de la scène représentée. Le décor réaliste de la chambre de même que l’activité simple de la jeune femme en train de lire ne présentent pas de difficultés d’interprétation pour un élève de seconde. En revanche, le mystère induit par le contenu de la lettre lue peut nourrir l’imagination des élèves. > Réponse aux questions L’atelier accompagne un travail d’écriture et de réécriture. La démarche réflexive de l’élève est au cœur du dispositif didactique. 1. Le titre ne donne pas de nom précis à la jeune femme qui est surtout définie par son acte de lecture, c’est la « liseuse ». Mais le titre valorise aussi la fenêtre comme élément du décor alors qu’elle n’occupe pas un espace important dans la composition d’ensemble. En traçant les diagonales du tableau on se rend compte qu’elle se croisent au-dessus de la tête de la Liseuse en lui conférant une place centrale quoique située dans la partie inférieure. Les couleurs sont assez chaleureuses mais contrastées : les teintes rouges s’opposent aux verts. Les lignes verticales et horizontales tracent un cadre à l’intérieur de la toile et créent ainsi une mise en abyme : la tringle à rideaux supérieure, les rideaux à droite et le lit forment ce premier cadre qui contient luimême le battant ouvert de la fenêtre et le chambranle de la fenêtre ouverte. Dans une perspective de profondeur, la Liseuse semble confinée dans cet empilement d’espace comme dans un coffret. La simplicité de la chambre est aussi celle de l’intimité du moment vécu par la Liseuse. Son reflet très léger dans la fenêtre fait alors converger le regard vers la lettre tenue par la jeune fille. La corbeille de fruits déstabilisée par les plis de la couverture apporte un certain désordre qui peut aussi être un indice pour comprendre 6 • « La vie est un songe »
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l’importance de la lettre et la concentration de la jeune femme qui ne se préoccupe plus de l’extérieur. 2. La fenêtre est ouverte vers un espace inconnu, elle apporte de la lumière et éclaire les éléments tels que le visage, les mains, la lettre et plus largement les rideaux du lit à baldaquin. La composition serrée du cadre évoque l’intimité de la chambre et invite à penser que la jeune femme est encore jeune, peut-être encore dans sa maison familiale. 3. Les pensées du personnage peuvent être rapportées directement ou indirectement. Elles pourraient commenter le contenu de la lettre. Cependant il ne s’agit pas dans le sujet d’imaginer le contenu de cette lettre mais de livrer les pensées de la jeune femme. 4. L’écriture poétique peut s’avérer intéressante si les élèves cherchent à imiter les formes rencontrées (sonnet, vers libres…) et ainsi se les approprier. En travaillant sur la musicalité du texte ils pourront aussi comprendre l’importance du rythme et des sonorités grâce à une première étape de réécriture et de transformation pour enrichir le texte. 5. Le travail de relecture est essentiel pour corriger la qualité de la langue et se rendre compte de ses erreurs. Il est nécessaire de rappeler aux élèves que leur travail d’écriture n’est pas encore abouti et que le travail de brouillon doit les amener à amender le texte. 6. La lecture à voix haute permet de vérifier la ponctuation. On peut aussi demander aux élèves d’enregistrer leur travail et de s’écouter ensuite pour pouvoir corriger. La grille d’autoévaluation est un outil indispensable qui s’inscrit surtout dans une démarche d’évaluation formative.
ÉTUDE DE LA LANGUE
> p. 198
Les discours rapportés > Corrigé de l’exercice Exercice 1. Jean-Jacques racontait qu’il ne se souvenait pas de s’être élancé jamais dans l’avenir avec plus de force et d’illusion qu’il fit alors ; et ce qui l’avait frappé le plus dans le souvenir de cette rêverie, quand elle s’était réalisée, c’était d’avoir retrouvé les objets tels exactement qu’il les avait imaginés. Il racontait que si jamais rêve d’un homme éveillé eut l’air d’une vision prophétique, ce fut assurément celui-là. Il n’avait été déçu que dans sa durée imaginaire ; car les jours, et les ans, et la vie entière, s’y passaient dans une inaltérable tranquillité ; au lieu qu’en effet, tout cela n’avait duré qu’un moment. Son plus constant bonheur fut hélas en songe. Son accomplissement fut presque à l’instant suivi du réveil. 2. Les pronoms personnels ainsi que le déterminant possessif de la première personne du singulier sont modifiés pour la troisième personne. Les verbes sont modifiés pour respecter la concordance des temps. Les marques du discours direct comme les interjections disparaissent.
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Les mots du… rêve
> p. 199
> Corrigé des exercices Exercice 1 L’origine de « chimère » est le latin chimaera qui est le nom d’un monstre tué par Bellérophon. Lorsqu’il désigne un être concret : un animal fantastique, une chose monstrueuse qui inspire l’épouvante, un gros poisson des mers froides. Au sens figuré : illusion, projet sans consistance, rêverie un peu folle. Dans le mythe grec c’est une créature fantastique malfaisante composite et étrange. Elle est symbole de rêves et de fantasmes impossibles. Exercice 2 Resver signifie au xiiie siècle « vagabonder, errer pour son plaisir ». Ce n’est plus le corps mais l’esprit qui « vagabonde » de nos jours, le sens du mot est resté uniquement pour le domaine de l’esprit. Exercice 3 L’onirologie est l’étude des rêves. Onirique, onirisme, onirologue sont des mots de la même famille. « Rêveur » n’est pas un synonyme d’« onirique ». « Rêveur » désigne « quelqu’un qui rêve, qui a l’air perdu dans ses pensées » et alors qu’« onirique » signifie « relatif au rêve, qui évoque le rêve ». On parlera d’un « enfant rêveur » mais d’une « atmosphère onirique ». Exercice 4 Thomas More invente le mot « utopie » en 1516 pour désigner la société idéale décrite dans son œuvre Utopia. Le mot est un néologisme grec composé de ou, non et topos, lieu qui veut dire « un lieu qui n’existe pas ». Une utopie est un rêve inaccessible de nos jours. De l’idée concrète d’endroit idéal qui n’existe pas, on est passé à la notion abstraite de rêve impossible. Exercice 5 Victor Hugo qualifie souvent le poète de « rêveur » car sa nature profonde le pousse à la contemplation du monde. Le poète est aussi doté d’une imagination puissante qui l’inspire. Ce mot connote la rêverie, la méditation mais aussi les projets insensés, les utopies politiques par exemple. Mais le mot connote aussi la naïveté et le côté peu sérieux. Exercice 6 « Songe-creux » est un substantif masculin invariable qui désigne une personne qui vit, se complaît dans les rêveries, les chimères. Il signifie péjorativement idéaliste, utopiste ; l’origine est le moyen français songier creux, « méditer profondément ». Exercice 7 Dans la mythologie grecque, Hypnos est le dieu du sommeil, connu chez les Romains sous le nom de Somnus. Il est le fils de Nyx (Nuit) et le frère jumeau de Thanatos, la personnification de la Mort. Il est aussi le père de Morphée, dieu des rêves. L’univers du rêve est heureux et inquiétant à la fois.
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Les dieux se manifestent aux hommes par l’intercession des rêves, mais le sommeil est aussi très lié à la notion de mort. Le rêve donne de bons ou de mauvais présages. Exercice 8 Expressions qui signifient que l’on rêve sa vie : « compter les étoiles », « tirer des plans sur la comète », « se faire des films ». Exercice 9 – Illusion > Étymologie : latin illusio> raillerie, moquerie. Sens précis : perception, croyance ou conception erronée de la réalité. – Apparence > Étymologie : bas latin apparencia > aspect extérieur, apparence. Sens précis : Aspect extérieur – Semblant > Étymologie : bas latin similare > ressembler, paraître. Sens précis : apparence extérieure – Mirage > Étymologie : verbe « mirer » issu du latin mirari (admirer) et suffixe –age. Sens précis : déception, illusion – Champ lexical : vision, fantasme, leurre, tromperie
2. La musicalité des textes illustre le thème du rêve en créant une certaine mélodie dans les textes, les allitérations et les assonances apportent une atmosphère sonore propice au songe tandis que les effets de rythme cadencent les rêveries. Les formes enfin représentent aussi le rêve : circonscrit et intime comme un sonnet, ou bien fantaisistes et libres comme les vers libres des poètes plus contemporains.
V E RS L E B A C
> p. 201
Sujet bac Commentaire
Exercice 10 Rêvasser > radical rêv– et suffixe –asser (péjoratif) > Se laisser aller à des rêveries, penser vaguement à quelque chose. Exercice 11 Expressions qui contiennent le mot « rêve » : faire de beaux rêves, rêver tout éveillé, la maison de ses rêves, réaliser un vieux rêve, créature de rêve, caresser un rêve, doux rêveur, c’est le rêve ! > Construire son vocabulaire – une fiction pour expliquer le monde : mythe (récit fabuleux ou récit mensonger). – une fiction pour faire réfléchir : fable (récit symbolique dans lequel l’imagination tient une grande part). – un monde rêvé : utopie (rêve idéal et impossible), illusion (perception erronée de la réalité), fantasme (représentation imaginaire) songerie (rêverie), mensonge (tromperie, illusion).
F I C H E D E S Y N T H È S E Le thème du rêve dans la poésie de la Renaissance au xviiie siècle
> Réponse aux questions de synthèse 1. De Louise Labé à André Chénier, le songe est pratiquement toujours associé à l’illusion. S’il est fantasme amoureux dans le sonnet de la Renaissance, il devient réconfort illusoire chez Saint Amant. La Fontaine se moque de son pouvoir sur la raison tandis que Chénier se laisse gagner par l’angoisse. L’illusion peut alors réconforter au bien terrifier les poètes mais ces derniers ne peuvent pourtant pas y renoncer.
> p. 200
> Introduction La fiche de synthèse permet de mieux comprendre les natures différentes du rêve ainsi que ses fonctions et ses enjeux. Elle permet de comprendre aussi son évolution dans l’histoire littéraire en replaçant chaque auteur dans une période donnée. Le rêve est ainsi l’objet d’une attention particulière dans la littérature à la fois parce qu’il concentre le mystère de l’imagination et parce qu’il est une source intarissable pour l’écriture.
> Introduction Le texte de Louise Labé propose une forme fixe, le sonnet qui présente un certain nombre de caractéristiques poétiques sur lesquelles les élèves peuvent prendre appui. La structure antithétique entre quatrains et tercets est aussi un axe d’étude pertinent pour rendre compte de la tension du texte. Les poètes de la Renaissance proposent souvent une vision idéalisée de l’amour et rendent compte d’une conception platonicienne : l’être aimé sublimé est quasiment dépourvu de corporalité. Le sonnet de Louise Labé fait preuve d’une grande sensualité voire d’un érotisme latent. On a ainsi choisi un texte qui évoque l’absence de l’être aimé tout en proposant une échappatoire par le rêve pour recréer les conditions de l’amour. Le rêve a ici un pouvoir important puisqu’il peut combler le manque. > Réponse aux questions La tension du texte relève d’une part de la perte du « bien » évoquée par le poète mais aussi de la recherche de ce « bien » dans le songe. Autrement dit, il s’agit de montrer comment le poète comble l’absence de l’être aimé dans ce sonnet. I – Dans cette première partie, on peut d’abord montrer la perte du « Bien » la souffrance physique et morale endurée par le manque. a. La séparation des amants est le point de départ du sonnet. Le lit devient un lieu symbolique d’intimité et d’échange amoureux. C’est là que le poète trouve refuge. On note les indications de lieux qui soulignent l’éloignement, le déchirement (« hors de moi » / « vers toi »). b. L’aliénation amoureuse surgit alors dans le poème, la dépendance physique et mentale est omniprésente. Le présent des verbes et les indications temporelles de l’immédiateté (« Tout aussitôt » « incontinent ») du premier quatrain permettent de comprendre que le poète est dans une sorte d’urgence dans l’instant présent. c. La sensualité affleure dans chaque vers, les sens sont sollicités et notamment le toucher. Le désir devient obsédant. 6 • « La vie est un songe »
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II – Dans la deuxième partie, il s’agit de mettre en évidence la recherche du « Bien », la stratégie mise en place par l’intercession du songe pour pallier le manque. a. Le poète aspire fortement au réconfort, il faut trouver un moyen de ne pas souffrir autant de l’absence de l’amant. Le poète s’en remet totalement au pouvoir de la « nuit » et du « sommeil » pour accéder au « songe ». Les injonctions abondent. b. Le rêve appelé de tous ses vœux est plein de promesses de sensualité, les tercets sont marqués par le lexique du bien-être. Les adjectifs qualificatifs en rendent compte : « doux », « heureuse », « plaisant ». c. L’amour est ainsi vécu à nouveau grâce au rêve. Le poète s’abandonne à l’illusion du rêve pour combler le manque dans la réalité. Le jeu entre « songe » et « mensonge » trouve dans le sonnet un écho à la rime et signale de cette façon la transcendance amoureuse.
L E C T U R E C U RS I V E Jean de La Fontaine, Fables, second recueil, Livres VII à XI
> p. 202-203
> Introduction La lecture cursive proposée porte sur les fables de La Fontaine pour mieux en saisir toute la richesse et la diversité. L’écriture poétique rigoureuse est ici au service de la morale. Le pessimisme du xviie siècle y est bien représenté. La citation de La Fontaine extraite du « Dépositaire infidèle », livre IX des Fables, invite à réfléchir à la vérité et au mensonge. La littérature invente, propose des histoires fictives certes mais sans prétendre à détenir la vérité : elle a le souci de vérité. La fiction est au service de l’universel. Si inventer c’est mentir alors l’illusion dit le vrai. > Réponse aux questions http://www.musee-jean-de-la-fontaine.fr 1. La fable « L’Homme et la Couleuvre » dite par Fabrice Luchini met en avant l’orgueil des puissants qui les empêche de se remettre en question. Leur mauvaise foi devant l’évidence est aussi dénoncée. On pourrait rapprocher cette fable des hommes politiques de nos jours qui n’écoutent pas assez le peuple selon Luchini. 2. a. Les différents personnages sont des animaux très variés (exemples : cochon, puce, huître, loup, milan, rossignol), des hommes célèbres (Démocrite), désignés par leur fonction parfois (exemples : savetier, financier, le berger, le roi, l’écolier), des profils plus généraux (des hommes, des femmes), des objets (le cierge, statue, trésor), des éléments naturels (torrent, rivière, tonnerres), des allégories (Sagesse, l’Éducation), des entités divines (Jupiter)… b. Certains titres sont surprenants : « Rien de trop », « Les femmes et le secret », « l’Horoscope »… c. La première fable est « Les animaux malades de la peste » et la dernière « Les Souris et le Chat-huant ». Elles sont plutôt effrayantes par leur cruauté et leur cynisme. d. L’épilogue a pour fonction de clore le chapitre XI. Il permet au fabuliste de justifier son œuvre, de se montrer modeste
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et d’expliquer aussi le caractère universel de ses fables avec l’argument naturel. « Car tout parle dans l’univers ». 3. a. Le parcours en dix fables évoque les thèmes suivants : la question de l’autorité et l’abus de pouvoir, la présomption et la modestie, l’art de l’esprit. b. Le pouvoir est montré dans toute sa puissance et son injustice. c. Le poète donne de lui-même l’image d’un être qui n’a que son esprit pour richesse et qui est sincère en toute circonstance. d. La fable « Le singe et le Léopard » décrit l’art de La Fontaine puisque Singe évoque explicitement la « diversité » qui est la seule richesse de son esprit. Le singe a pour talent de savoir divertir par sa finesse. e. On peut proposer aux élèves de s’appuyer sur une thématique, par exemple : dix fables qui ont pour titre des humains. f. Apprendre par cœur une fable : l’enjeu pour les élèves est de s’approprier un texte et de le comprendre. g. La Fontaine ne fait pas particulièrement la leçon au lecteur, il est moraliste parce qu’il porte un regard critique sur ses contemporains. Il donne plutôt des grandes lois universelles parfois cruelles mais pragmatiques. La mise en scène de Robert Wilson en 2004 à la Comédie Française propose une interprétation originale du texte de la Fontaine. Voilà ce que l’on peut lire sur le site de la Comédie Française : « Depuis trente-cinq ans, le metteur en scène américain Robert Wilson porte un regard singulier de plasticien et d’esthète sur les plateaux du monde entier. Théâtre, opéra ou danse, son registre chromatique, sa géométrie de l’espace, sa direction d’acteurs ont sondé tous les arts du spectacle, construisant au fil des années un univers puissant, architecturé comme une fastueuse cérémonie. Pour Les Fables de La Fontaine, créées sur le plateau de la Comédie-Française en janvier 2004, et représentées depuis dans le monde entier, Robert Wilson a choisi d’associer l’allégresse et l’humour d’une représentation éclatante d’inventions à la pureté des lignes qui est sa signature, à la splendeur des images environnées d’un dépouillement mystique. Les Comédiens-Français s’y transforment avec jubilation en une faune désopilante, et donnent chair à la sagesse de ces fous que sont les animaux parlant. Source : https://www.comedie-francaise.fr/fr/evenements/ fables-de-la-fontaine07-08# 4. La scénographie donne un caractère inquiétant : les masques des animaux sont figés, les lumières aux teintes froides apportent une atmosphère glaciale, la musique aussi est inquiétante, le personnage narrateur a l’air d’une sorcière malfaisante, enfin la diction hachée contribue à mettre en relief toute la cruauté de cette fable. 5. Ce choix de mise en scène est intéressant pour mettre en évidence le monde dangereux et cynique qu’a peint le fabuliste. La mise en scène propose de véritables tableaux qui s’animent mécaniquement. > Carnet de lecture On peut demander aux élèves de proposer la mise en scène d’une fable en s’inspirant de la vidéo de la Comédie Française. Ils peuvent aussi jouer avec des masques, des costumes symboliques proposer un fond sonore, se partager le texte. L’enjeu est de faire vivre le texte et se l’approprier
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aussi pour en saisir tout le sens. Le passage de l’écrit à l’oral permet aussi de travailler la musicalité du texte. Par le jeu, les parties narrées prennent aussi une autre dimension et les dialogues prennent vie. VERS LE BAC ORAL > S’entraîner à l’entretien
1. La Fontaine affirmait « Diversité est ma devise », on peut aisément comprendre cette allégation au regard de la richesse des fables proposées. Les thèmes sont très diversifiés, les tonalités variées parce qu’il recherche le naturel. Ses fables illustrent son goût pour la liberté et pour la surprise. Il aime innover, il se sert de tous les lexiques, il invente des noms propres. La composition même des livres et des recueils témoigne de cette diversité, La Fontaine est attentif à ce que les fables ne suivent pas une thématique identique, il alterne fable comique, et fable cynique, il mêle le monde des animaux à celui des dieux pour revenir au monde des humains. Enfin, les fables illustrent un certain mouvement spontané de la pensée qui est propre à la diversité que propose la nature elle-même. 2. Les fables sont-elles écrites pour les enfants ? Il existe différents niveaux de lecture pour les fables mais si l’on dépasse le caractère édifiant et naïf que l’on a longtemps pu attribuer à certaines fables, on se rend compte que la plupart d’entre elles sont assez cyniques et proposent finalement une morale immorale. On peut penser à « Le loup et l’agneau » qui est d’une grande cruauté et qui ne laisse aucune chance à la créature faible. La morale de la Fontaine est surtout un constat lucide de la vie et du comportement réel des hommes souvent plus vicieux que vertueux. Plus qu’une morale bienséante, La Fontaine livre des leçons de lucidité et de prise de conscience qui ont plutôt l’air de mises en garde. 3. En s’inspirant des animaux, La Fontaine met en relief les défauts des hommes mais on peut imaginer que les personnifications ne sont que de pâles caricatures au regard de la réalité. La Fontaine utilise les symboles et les métaphores animales par exemple pour mieux illustrer sa pensée, pour se servir des analogies dans la loi naturelle. Cependant, son point de vue n’est pas exagéré, il est même parfois euphémisé pour éviter de graves représailles. Parce que certaines fables étaient effrayantes et cruelles, Jean-Jacques Rousseau disait qu’elles portaient « plus au vice qu’à la vertu », c’est bien la preuve que les enfants ne sont pas les véritables destinataires des fables : leur complexité et leur lucidité sur la condition humaine demanderaient aux enfants une trop grande maturité pour en saisir tous les enjeux philosophiques.
D’AUTRES LECTURES
AU CHOIX
> pp. 204-205
Marie de France, Lais (xiie siècle) > Introduction Marie de France est notre première femme poète. Cultivée, érudite, elle a su raconter les légendes de la matière bre-
tonne avec beaucoup de créativité. Ils présentent non seulement le merveilleux romanesque et féérique mais aussi la peinture de l’amour. L’âme rêveuse des légendes celtes y trouve une place de choix. L’amour aussi est plutôt un amour rêvé plus important que la réalité. La spécificité musicale des lais en fait une œuvre poétique accessible aux élèves. > Découvrez les poèmes Le film d’animation réalisé par Emilie Mercier a remporté le premier prix au festival d’animation de Bruz en 2011. Elle a réussi à recréer l’ambiance médiévale en créant des décors envoûtants, le dessin faussement naïf reprend les symboles de l’époque. Les couleurs rappellent les vitraux des châteaux tandis que la musique contribue à se plonger dans cette époque lointaine et fascinante. > Réponse aux questions 1. Le secret joue un rôle important dans les douze lais parce qu’il permet d’entretenir la tension dramatique. La violation du secret est un motif central : l’amant ne doit jamais se vanter de son amour. 2. La poéticité des lais tient à la maîtrise du vers, à la recherche de la musicalité constante ainsi qu’au lyrisme. Le mot « lai » vient du celtique « laid » qui signifie « chanson ». Il était relié à une composition musicale. 3. Les personnages appartenant à l’univers merveilleux sont : le chevalier-oiseau, Muldumarec, dans « Yonec », les fées dans « Guiguemar » et « Lanval », le loup-garou dans « Bisclavret ». 5. Dans « Yonec », Muldumarec prend l’apparence d’un oiseau ou bien les traits de la dame. Il vit dans le Royaume merveilleux des fées. Il est le père de Yonec. Quand il a l’apparence humain il est un beau et gracieux chevalier. Joseph Bédier, Le Roman de Tristan et Iseut (1900) > Introduction La légende de Tristan et Iseut est un incontournable de la littérature médiévale. La version de Joseph Bédier, par sa qualité, permet une approche plus adaptée pour un élève de seconde. > Découvrez le roman L’adaptation d’Hervé Prudhon avec les élèves du Conservatoire Nationale d’art Dramatique que l’on propose de faire écouter est une réécriture qui est restée proche du texte de Bédier mais qui en a supprimé les éléments redondants ou répétitifs pour en garder toute la simplicité d’un vrai roman riche en dialogues. > Réponse aux questions 1. Le verger merveilleux dont parle Tristan n’est pas le verger du château décrit par Tristan au début du roman. C’est un verger imaginaire loin de Tintagel. 2. Le motif de la ronce apparaît la première fois au chapitre IV dans la scène cruciale du philtre d’amour fait du « vin d’herbes ». Le motif ne revient qu’à la fin dans le dernier chapitre, celui de la mort des amants. La ronce dessine dans l’espace un grand arc pour se planter dans la tombe voisine d’Iseut. Le motif de la ronce représente la fatalité du sentiment amoureux. 6 • « La vie est un songe »
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3. Quelques citations : – « Mais de quoi leur serviraient maintenant les recettes magiques, les herbes cueillies à l’heure propice, les philtres ? » chapitre II > programmatique du philtre d’amour – « Ah ! c’est pour toi, jeune fille, que j’ai combattu le dragon… » chapitre III > amour courtois, et prouesse du chevalier – « J’ai trouvé du vin ! » leur cria-t-elle. Non, ce n’était pas du vin : c’était la passion, c’était l’âpre joie et l’angoisse sans fin, et la mort. » (Chapitre IV) > épisode célèbre du philtre d’amour – « Les amants ne pouvaient vivre ni mourir l’un sans l’autre. Séparés, ce n’était pas la vie, ni la mort, mais la vie et la mort à la fois. » > fatalité de l’amour absolu – « de la tombe de Tristan jaillit une ronce verte et feuillue, aux forts rameaux, aux fleurs odorantes, qui, s’élevant par-dessus la chapelle, s’enfonça dans la tombe d’Iseut » dernier chapitre > mythe du roncier 4. D’autres récits d’amour impossible : Pyrame et Thisbé et Orphée et Eurydice in Métamorphoses d’Ovide, Roméo et Juliette de Shakespeare, Le Rouge et le Noir de Stendhal… les points communs sont les obstacles rencontrés : famille, rang social, rivaux, triangulation amoureuse, guerre et mort. Robert Desnos, Destinée arbitraire (1944) > Introduction Robert Desnos est le poète du surréalisme qui incarne le mieux le thème du rêve. Il est resté célèbre pour ses sommeils à la demande et ses rêves ont parfois été retranscrits par ses amis surréalistes. > Découvrez le recueil Le site de l’association des amis de Robert Desnos propose une présentation très complète du poète et de son œuvre. On peut y trouver des photographies et des portraits du poète, quelques dessins, des entretiens, et toute l’actualité relative au poète. > Réponse aux questions 1. Les poèmes peuvent prendre des formes très différentes : on y trouve des sonnets, des vers libres, des poèmes structurés. La présence de sonnets par exemple peut paraître surprenante pour un poète surréaliste, mais on peut com-
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prendre que cette forme fixe ancienne ait même charmé les poètes les plus inventifs pour ses contraintes et le défi poétique. 2. « Demi rêve », « Le rêve dans une cave », « Rêves », « Les charmes de la nuit », « Réveils » sont des titres qui évoquent le rêve. À la page 78, « Demi rêve » est étonnant parce qu’il est peut-être le fruit d’une expérience surréaliste, les mots ne veulent rien dire, tout est jeu d’assonance et d’allitération. L’effet est comique. 3. Les dessins de Desnos peuvent être une source d’inspiration pour les élèves lorsqu’ils devront illustrer les poèmes qu’ils ont choisis et recopiés. On peut aussi proposer aux élèves de travailler sur un thème (nature, animaux, prénoms). Christian Garcin, Vidas suivi de Vies volées (1993) > Introduction Vidas de Christian Garcin est une écriture fragmentaire qui peut aussi faire penser à un recueil de poèmes en prose. Les élèves peuvent choisir de lire les portraits dans l’ordre qu’ils le souhaitent. > Découvrez le roman L’activité de recherche vise à éveiller la curiosité des élèves en leur faisant découvrir d’abord les vrais visages des personnages évoqués ensuite dans l’œuvre de Garcin. Ils sont ainsi implicitement invités à comparer ce qu’ils ont découvert et ce qu’ils vont lire. 1. Les poètes sont : Ono Yokonari, Bonaventure Des Périers, Alain Gentil, Raimbaut d’Orange, Marina Tsvetaïeva, Catulle, Clara Pérol, Etienne Dolet, Kamo no chomei. Ils ont tous eu des existences brèves, de solitude et de marginalité. 2. Les deux recueils sont construits en différentes parties qui comportent chacune quatre portraits. Les titres des différents chapitres évoquent le point commun des existences des personnages. 3. Le livre peut être qualifié de poétique parce qu’il propose une écriture fragmentaire, les anaphores ponctuent souvent les paragraphes en lui conférant un rythme particulier. Les images abondent. Le ton est souvent élégiaque. 4. On peut proposer aux élèves de travailler sur un des poètes de la séquence étudiée pour les aider.
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OBJET D’ÉTUDE 4 Le théâtre du xviie siècle au xxie siècle
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OBJET D’ÉTUDE
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Le théâtre du xviie siècle au xxie siècle > Les attendus des nouveaux programmes Les programmes préconisent l’étude de deux pièces de théâtre « de genre et de siècle différents », la lecture du Barbier de Séville est intéressante à plusieurs titres. Héritière de la comédie du xviie, son étude permet d’aborder l’évolution de ce genre, à travers notamment le personnage du
SÉQUENCE
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Beaumarchais, Le Barbier de Séville ou la Précaution inutile (1775)
Présentation de la séquence > La problématique Peut-on affirmer sa liberté en s’amusant ? Le thème de la liberté, essentiel dans l’œuvre de Beaumarchais est au cœur de l’intrigue du Barbier. Il s’agit d’une œuvre qui revendique une liberté d’écriture mais aussi une liberté d’action. La virtuosité, la gaieté, caractéristiques de la pièce qui fait se succéder les intrigues à vive allure sont des manières pour Beaumarchais d’affirmer sa singularité d’homme et d’artiste. On peut penser à ce qu’il affirme en 1789 dans sa Requête à la commune de Paris : « Qu’étais-je donc ? Je n’étais que moi, et moi tel que je suis resté, libre au milieu des fers (…) ». La problématique proposée pour la lecture de l’œuvre intégrale permet aux élèves de s’interroger sur la force politique d’une comédie joyeuse et sur les différentes manières possibles pour affirmer la nécessité de la liberté. > Le parcours d’œuvre Les extraits présentés proposent dans la lecture de la pièce des scènes qui donnent à voir et à entendre la virtuosité d’écriture et les jeux de rôles permanents de l’œuvre. Les nombreux renvois à des mises en scène permettent d’éclairer les explications de texte ou d’entamer l’étude du texte par celle de la mise en scène. Ces morceaux, choisis pour accompagner la lecture de l’œuvre intégrale, mettent en avant les liens étroits entre la pièce de théâtre et l’opéra : chant et musique (Acte I, scène 1), air de la calomnie (Acte II, scène 8), voix entrecroisées (Acte III, scène 11) et finale (Acte IV, scène 8). > Les lectures complémentaires Pour permettre, comme le recommandent les programmes, d’approfondir la compréhension de l’œuvre et de ses motifs, un groupement de textes complémentaires est proposé dans le manuel. Les élèves peuvent ainsi comprendre l’inscription de la pièce de Beaumarchais dans une tradition dramatique, celle du valet et celle de la jeune fille soumise à un barbon, mais aussi de comprendre les significations de ses motifs jusque dans le théâtre contemporain, qui disent la difficulté à conquérir son identité et sa liberté.
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vieillard trompé et celui du valet. C’est, de plus, une œuvre qui tisse des liens avec d’autres formes des arts de la scène et bien sûr en premier lieu l’opéra. Enfin, le travail de dramaturge de Beaumarchais et notamment son intérêt pour la scénographie permet une réflexion riche sur les liens entre texte et représentation.
> pp. 206-235
> Le prolongement culturel et artistique En mettant en avant les liens entre la pièce et l’opéra et en faisant étudier les transpositions scénographiques d’un motif essentiel comme celui de la jalousie, le prolongement artistique et culturel permet d’éclairer les liens entre l’écriture du texte et l’écriture de la scène et de montrer la richesse et la variété des arts de la scène.
O U V E RT U R E
> pp. 206-207
> Introduction La citation, extraite d’une réplique de Rosine montre bien l’importance du thème de la liberté : Rosine est un personnage que Beaumarchais fait évoluer par rapport à la tradition classique, elle se rebelle contre son tuteur et participe à tous les subterfuges organisés par Figaro. Elle a souvent été représentée par les metteurs en scène comme enfermée dans une cage, ou derrière la « jalousie » de Bartholo, comme Agnès (cf. pages 219 et 224-225). La photographie montre une mise scène très classique de l’opéra de Rossini : son auteur, Jonathan Miller a choisi d’insister sur la gaieté de l’intrigue et de séduire ses spectateurs par un spectacle comique, allègre et vivant. Le jeu des chanteurs, très appuyé, comme le montre l’image, va dans le sens de la tradition de l’opéra bouffe. On parle de sujets graves (liberté de Rosine, pouvoir des maîtres, statut de Figaro) avec toute la légèreté possible. > Réponses aux questions 1. Les personnages, sauf la jeune-fille, la « pupille », ne sont pas aisés à identifier. Le metteur en scène a en effet choisi d’accentuer le grotesque de « l’Opera buffa », qui a d’ailleurs, lors des représentations été très apprécié pour sa légèreté et sa drôlerie. Le Comte Almaviva, ici en soldat, est presque costumé en pantin ou en jouet de plomb. La place du public est importante puisque tous les chanteurs
4 • Le théâtre du xviie siècle au xxie siècle
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font face à la salle. Figaro, de manière assez ambigüe, apparaît ici comme le jeune premier. L’image est donc une manière d’amener les élèves, dès cette présentation initiale, à interroger le rôle et le personnage de Figaro. 2. La position des personnages montre l’emboîtement des situations, l’une dépendant de l’autre mais aussi la fausseté des actions mises en scène : Almaviva menace Figaro qui protège Bartholo, alors que la situation est à l’opposé de ce qui se donne à voir.
G RO U P E M E N T D E T E X T E S
> pp. 208-217
CONTEXTE L’auteur et l’œuvre
> p. 208-209
> Qui est Beaumarchais ? Beaumarchais est un personnage romanesque : sa vie, ses multiples vies pourrait-on dire, sont autant de pistes pour comprendre son amour de la liberté et la forme plurielle de son œuvre. La découverte de la biographie d’un auteur comme Beaumarchais permet aux élèves de dialoguer avec lui. De voir dans la figure audacieuse de Figaro une des représentations que l’auteur fait de lui-même et qui caractérise aussi une époque de bouleversements : la fin d’un monde et les prémisses d’un monde nouveau dans lequel les identités sont à construire… Nattier, peintre officiel de la Cour de Louis XV, fait de Beaumarchais un portrait qui le présente, élégamment vêtu et avec une partition à la main : il est un familier de la Cour et enseigne la musique aux filles du roi. Ce n’est qu’une des facettes de cet homme qui fut aussi espion, homme d’affaires, dramaturge… > Carnet de lecture La biographie de Beaumarchais, passionnante, a inspiré de nombreux auteurs : la longue biographie écrite par Maurice Lever mais aussi l’ouvrage très récent d’Erik Orsenna, intitulé Un Aventurier de la liberté. On peut évoquer aussi le film d’Edouard Molinaro, Beaumarchais l’insolent. Tous mettent en avant le caractère pluriel de cette existence aventureuse, Orsenna cite même Pessoa : « N’être qu’un est une prison ». En faisant travailler les élèves sur le récit de la vie de l’auteur et en les amenant à réfléchir à la construction du personnage de Figaro, on leur permet de mieux comprendre l’œuvre et de saisir la complexité de cette époque. > Un théâtre en liberté Le théâtre, comme toute la société, est en mutation et les œuvres de Beaumarchais sont des exemples très riches de l’évolution des formes dramatiques à la fin du XVIIIème. Les élèves, peuvent observer les liens qui unissent la pièce au théâtre de Molière, qu’ils connaissent bien, et notamment à l’Ecole des femmes (manuel page 219), mais aussi mesurer les transformations dans la dramaturgie, les personnages et l’écriture scénique. > Carnet de lecture L’activité, en lien avec la problématique d’étude de l’œuvre, vise à amener les élèves à parcourir le texte, à se l’approprier. On peut proposer une collection de citations qui ensuite
sont mises en voix pour présenter la pièce. Les élèves peuvent ainsi se rendre compte que la question de la liberté concerne tous les personnages, Figaro, Rosine, le Comte… > Réponses aux questions 1. La règle des trois unités impose aux dramaturges classiques de concentrer l’action de la pièce en une seule intrigue, située en un lieu unique et se déroulant sur une journée. Cela afin de rendre la représentation vraisemblable. (CF Manuel page 366) On voit que Beaumarchais suit cette forme traditionnelle dans l’écriture du Barbier, en accélérant même l’allure pour donner à la succession des scènes un caractère vertigineux. (cf. préface : « et ce jour même en fait sa femme ») Il modifie en revanche les caractères traditionnels des personnages : l’ingénue se défend, le barbon n’est pas si bête et surtout, le « machiniste » est « un drôle de garçon, un homme insouciant, qui rit également du succès et de la chute de ses entreprises » (préface du Barbier). 2. La Mère coupable, qui suit Le Mariage de Figaro, est un drame, même si l’issue est heureuse. La première didascalie l’indique bien : « Suzanne, tenant des fleurs obscures dont elle fait un bouquet ». Les fleurs obscures sont bien éloignées de la joyeuse chanson de Figaro qui entame le Barbier. Le traitre Bégearss est appelé « l’autre Tartuffe », car, comme le personnage de Molière, il s’insinue dans la famille pour la détruire et la dépouiller de ses biens. 1 Des retrouvailles
> p. 210-211
> Présentation de l’extrait Les deux premières scènes de la pièce en constituent l’exposition. Elles permettent de saisir la tonalité de l’œuvre, les jeux de scènes déjà mis en place (fenêtre de Rosine, guitare, déguisements…) et de découvrir le duo Figaro/ Almaviva. > Lire en écho La lecture du texte de Plaute permet de faire comprendre comment Beaumarchais s’inscrit dans une tradition ancienne de la comédie mais aussi d’observer l’originalité de ces deux scènes. De même, la confrontation, violente, entre Ruy Blas et son maître fait entendre en creux la singularité des liens qui unissent Figaro et Almaviva. > Réponse aux questions S’engager dans le texte 1. La question cherche à amener les élèves à imaginer la scène pour la comprendre : l’étude des didascalies peut être une première entrée. On peut aussi proposer la réalisation d’un croquis avant d’entamer l’explication du texte. Enfin, l’un des fils d’étude de l’œuvre intégrale, la scénographie, (voir manuel pages 224-226) est ainsi initié. 2. Plusieurs aspects peuvent être relevés : l’ironie des personnages (ligne 36 « c’est la misère »), le contraste de leurs préoccupations (l’amour versus le vin et la paresse), le mélange d’amitié et de violence qui caractérise leurs rapports (« Maraud ! si tu dis un mot/voilà les bontés familières dont vous m’avez toujours honoré » lignes 32-34).
7 • Beaumarchais, Le Barbier de Séville ou la Précaution inutile (1775)
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Interpréter 3. On observe des indications de temps : « Le jour, l’heure, trop tôt, tous les matins » et de lieux : « derrière sa jalousie, sous les fenêtres d’une femme…, Séville », que reprennent les didascalies : « il tire sa montre, une rue de Séville où toutes les croisées sont grillées ». Ces deux indications vont dans le même sens : il s’agit d’un moment où le Comte ne devrait pas être là, d’une heure « entre chien et loup » qui est celle des mystères, ce qu’accentuent son costume, « chapeau rabattu », et l’accessoire. 4. Le costume d’Almaviva révèle sa fausse identité de manière presque caricatural (dans le style de l’opéra bouffe), de même que le discours qu’il tient : « … si je pouvais m’assurer sous ce déguisement…, appelle-moi Commentaire
Les questions peuvent être traitées séparément ou constituer un appui pour une écriture de commentaire ou la rédaction développée d’un commentaire. • Les deux personnages sont d’abord caractérisés par leur costume, et la lecture des didascalies initiales de la pièce indique l’importance de ces éléments pour Beaumarchais. Deux motifs apparaissent, associés aux deux personnages : l’intrigue amoureuse (manteau et chapeau font d’Almaviva la figure même de l’intrigant et la gaieté (paroles de la chanson, guitare…). Les deux hommes sont présentés comme en diptyque : d’un côté le Comte qui se dissimule et rêve d’amour, de l’autre Figaro, bruyant et qui chante « le vin et la paresse ». Ils se reconnaissent et s’accordent comme deux chanteurs pour un duo : opposés immédiatement par leur classe sociale (coquin/Monseigneur) ils ont en commun une ironie qui les associe : « C’est la misère/pauvre petit » (lignes 36-37). Le spectateur assiste à la mise en place de leur association, ce que met en valeur la symétrie des répliques lignes 29-30 : « c’est le Comte Almaviva/c’est ce coquin de Figaro ». La singularité du valet Figaro peut déjà être observée : il est en train de composer une chanson (Beaumarchais compose lui-même la musique de ses pièces), il semble s’opposer aux « messieurs de la cabale » : c’est donc une figure d’auteur, même s’il est présenté avec une distance ironique. Enfin, la traditionnelle scène de reconnaissance, qui amène souvent le dénouement dans le théâtre classique et que Beaumarchais reprendra dans le Mariage de Figaro, est ici une scène initiale et qui unit le maître et
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le valet. C’est dire l’importance de cette relation, qui est le cœur même de la pièce, peut-être davantage que l’intrigue amoureuse d’Almaviva. • Le rythme des deux scènes donne le tempo de la pièce. La hâte du Comte se manifeste par la présence de la montre dans la première didascalie. La pièce commence au petit matin et une fois l’action lancée par l’apparition de Rosine (« l’instant de la voir ») le rythme ne faiblira pas. Le verbe utilisé par Almaviva pour décrire le sens de la vie : « Chacun court après le bonheur » (ligne 7) dit bien que le rythme sera « allegro vivace ». Le monologue initial est bref et interrompu par l’arrivée de Figaro (« Au diable l’importun ! » lignes 12-13) et le dialogue de la scène 2 est composé de répliques courtes, de phrases inachevées parce que les deux hommes se coupent la parole. Ces scènes d’exposition, comme le ferait l’ouverture d’un opéra, donnent le rythme et la couleur de l’œuvre. 2 La Calomnie
> p. 212-213
> Présentation de l’extrait Cette scène très célèbre met en avant le personnage de Bazile, elle est aussi l’une des plus célèbres scènes de l’opéra de Rossini. On peut en l’étudiant comprendre le caractère très musical de l’écriture de Beaumarchais et lire la satire qu’il fait d’une société dans laquelle la rumeur a plus de puissance que le mérite. Cette problématique est évidemment au cœur des interrogations actuelles sur les effets des réseaux sociaux : « (…) il n’y a pas (…) de conte absurde que l’on ne fasse adopter aux oisifs d’une grande ville (…) », et permettra aux élèves de s’approprier ces questionnements en connaissance de cause … >Lire en écho On retrouve dans la première scène du Mariage de Figaro le « loyal Bazile » et la présentation d’un stratagème. > Réponse aux questions S’engager dans le texte 1. La question permet de vérifier la compréhension littérale d’un texte un peu difficile notamment du point de vue du vocabulaire et de faire comprendre la puissance de la calomnie, sujet dont l’explicitation, notamment en lien avec l’actualité, permettra aux élèves de saisir le sens des métaphores utilisées par Beaumarchais pour le décrire. 2. Le double registre a ici une fonction comique traditionnelle : Rosine et Almaviva ont déjà échangé des serments amoureux, ce que sait le spectateur et que Bartholo ignore. Interpréter 3. On constate que Bartholo pose des questions et attend les réponses de Bazile. Il dépend donc de celui-ci, qui lui soutire de l’argent en promettant d’assurer son mariage. C’est à nouveau l’originalité de Figaro qui est ici notable en contraste avec l’attitude de Bazile : il aide Almaviva plus par amour du jeu et de l’intrigue que par pur intérêt et, comme le note Beaumarchais, aime autant l’échec que le succès des entreprises menées. 4. La tirade, très rhétorique, est construite avec de nombreuses figures. Une longue métaphore, qui associe la
4 • Le théâtre du xviie siècle au xxie siècle
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calomnie à un air chanté tout en lui donnant vie (« murmure » ligne 18, « en courant » ligne 19). Cette métaphore filée devient ensuite une allégorie (« vous voyez Calomnie se dresser » ligne 22) dans laquelle la calomnie est transformée en une espèce de monstre mythologique, telle une hydre qui « siffle » (ligne 22) ou une harpie volante (« étend son vol » ligne 23). Ces figures d’analogie sont accompagnées de figures de construction qui donnent aux phrases le même rythme et la même forme que les monstres évoqués : énumérations, gradations (en lien avec le lexique musical : « crescendo » ligne 25). On comprend que cette tirade soit devenue un aria très célèbre ; elle est déjà, musicale par son rythme et ses sonorités. Bazile reprend la métaphore musicale pour évoquer le stratagème qui doit conduire au mariage de Bazile : « accord parfait de l’or » ligne 36. Beaumarchais joue ici de syllepses de sens sur les expressions faire chanter et maître-chanteur. 5. Les deux personnages sont présentés de manière grotesque (chapeau de Bazile), mais l’on voit bien à la position des corps que Bazile a une emprise sur Bartholo, qu’il l’envahit, à la fois par la longueur et l’art de son discours (persuasion) et par sa présence physique. VERS LE BAC ÉCRIT > Dissertation
Le sujet demande d’abord une identification des différentes formes de pouvoir mises en scène, ce qui permet aux élèves de reprendre l’ensemble de l’œuvre. On peut observer une multiplicité de puissances : l’aristocratie, les militaires, la bourgeoisie et le patriarcat, la censure, l’opinion publique… Chacune de ces puissances est représentée de manière satirique et soumise aux contre-pouvoirs que sont la jeunesse, l’amour, l’art et l’irrévérence joyeuse de la comédie. Le travail pourrait donc suivre le cheminement suivant : montrer tout d’abord l’importance de ces pouvoirs et leurs imbrications puis leur ridicule (militaire ivre, barbon joué, etc.) pour montrer comment Beaumarchais met ainsi en valeur le pouvoir de la liberté et la puissance de ceux qui n’ont aucun pouvoir, comme Figaro. > Écrit d’appropriation Il s’agit ici d’un écrit d’imitation, à mener après avoir étudié la tirade (cf. question 3). 3 Une arrivée inopportune
> p. 214-215
> Présentation de l’extrait Cette scène, chorale, est difficile à lire et très caractéristique de l’écriture de Beaumarchais, elle est donc intéressante à étudier, à la fois pour saisir le lien entre texte et représentation et pour approcher la singularité de l’œuvre. Le lien avec l’opéra, qui constitue un des fils d’analyse de l’œuvre intégrale est ici à nouveau essentiel. > Lire en écho La scène de Ruy Blas est elle aussi une scène de « stupéfaction » mais traitée sur une tonalité tragique, la comparaison de ces deux extraits permet donc de comprendre ce qui unit et ce qui oppose comique et tragique : on peut étudier par exemple les termes « diable, démon », qui désignent aussi bien Bazile que Salluste).
> Réponse aux questions S’engager dans le texte 1. Plusieurs procédés comiques sont ici à l’œuvre. On peut bien sûr identifier la position de Bazile, qui ne comprend rien à la scène tout en étant le centre des répliques de tous les autres. Les différents niveaux de compréhension des personnages : Bartholo croit comprendre alors qu’il est la dupe des autres. Les effets de répétition, la cupidité de Bazile, qui lui fait accepter un rôle qu’il ne comprend pas, les jeux d’apartés nombreux … tout concourt à mettre le spectateur dans la position de celui qui seul maîtrise la situation. 2. La scène, parce que les répliques se croisent, que les didascalies sont nombreuses et que les personnages se coupent la parole, est difficile à lire et à comprendre par une lecture à voix haute. La représentation (cf. Carnet de lecture) permet de saisir les interactions entre les personnages et la composition chorale de la scène, très inspirée de l’opéra. Interpréter 3. Les didascalies sont de différents types : certaines précisent le ton ou l’état du personnage, d’autres le mode d’énonciation (« bas, à part » …). On constate que Bazile est le seul à parler fort et à manifester son étonnement de plus en plus fort : « étonné, plus étonné, stupéfait, effaré, impatient, en colère, au dernier étonnement ». Tandis que les autres sont joyeux et semblent ligués contre lui (« ils l’accompagnent tous en riant » ligne 75) 4. Tous les personnages s’adressent à Bazile en utilisant l’impératif : « Taisez-vous, n’allez pas, écoutez seulement, dites-moi, allez vous coucher (5 fois) » ce qui crée un effet comique puisqu’il lui serait tout à fait impossible d’obéir à toutes ces injonctions successives. 5. Le terme est très fort et sert ici à désigner l’état d’étonnement extrême du personnage. Une grande part du comique de la scène vient de la déroute de Bazile qui dans les scènes précédentes semblait très sûr de ses manigances (cf. texte précédent pages 212-213), on peut d’ailleurs noter sur la photographie de la mise en scène de Jonathan Miller le jeu très exagéré du chanteur qui joue Bazile et qui donne à voir sa stupéfaction au public. VERS LE BAC ÉCRIT > Dissertation
Le sujet vise à amener les élèves à examiner les liens entre la pièce et les autres formes d’art musical comme le chant et la musique. Le terme de virtuosité est surtout employé au sujet de musiciens mais en observant l’écriture de Beaumarchais on peut comprendre comment il s’est inspiré de l’écriture de l’opéra pour Le Barbier : jeux de répétitions, de variations, répliques qui se croisent et se font écho, rythme « allegro » des dialogues, etc. La question vise donc à la fois à faire rédiger aux élèves un paragraphe argumenté qui les prépare aux écrits de dissertation et à leur permettre d’exploiter leur analyse de la scène.
7 • Beaumarchais, Le Barbier de Séville ou la Précaution inutile (1775)
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> Carnet de lecture Voir la représentation de G Marti permet de comprendre la scène mais aussi de réfléchir aux choix du metteur en scène pour être en mesure d’en proposer d’autres ou de jouer soi-même des extraits de la pièce. 4 Le triomphe de l’amour
> p. 216-217
> Présentation de l’extrait La scène finale voit le triomphe du Comte et de Figaro et met en avant la résistance à l’autorité : « Vous l’avez perdue, en en abusant » ligne 31. Cependant, on peut déjà s’interroger sur le rôle du Comte et sur la liberté très relative de Rosine, qui n’échappe à Bartholo qu’en devenant la femme d’Almaviva. > Lire en écho Comme Bartholo, Arnolphe veut épouser sa pupille et pense pouvoir l’empêcher de rencontrer quiconque, Beaumarchais s’est inspiré de cette pièce pour écrire Le Barbier. En lisant cette scène on comprend l’écho entre les deux œuvres et le choix du sous-titre du Barbier, que Figaro prononce à la fin de la pièce : La Précaution inutile. Le personnage de Lucietta est lui aussi intéressant à comparer avec Rosine : la question de la liberté des jeunes filles se pose de la même manière dans les deux pièces et l’on retrouve l’importance du balcon, lui intermédiaire entre la maison où sont enfermées les jeunes filles et l’extérieur, la rue où sont les « galants », Lindor ou Horace. > Réponse aux questions S’engager dans le texte 1. On peut faire observer les italiques qui indiquent qu’il s’agit d’une citation du sous-titre de la pièce. Comme tous les barbons des comédies du XVIIème, Bartholo a cru pouvoir empêcher sa pupille d’échapper à sa surveillance (« Jamais on ne l’ôtera de mes mains » ligne 38). On peut aller plus loin et noter que c’est Figaro, qui fut le metteur en scène de toute l’intrigue qui nomme ainsi la pièce dans la dernière scène devenant ainsi une figure de l’auteur. C’était le titre, en forme de présage, de la comédie chantée par Rosine dans les premières scènes et qui lui permet d’écrire à Almaviva. 2. En apparence, Figaro prononce bien une forme de « morale » finale dans sa dernière réplique en disant que la jeunesse et l’amour triomphent toujours des vieillards. Cependant, la conclusion de la pièce est plus ambigüe que cela. Le Comte revendique « l’autorité des Lois » (ligne 40) contre la violence de Bartholo alors qu’en vérité il a lui-même manipulé tout le monde, grâce à son pouvoir et à sa fortune. Et si Rosine s’est « émancipée » (ligne 33) c’est en devenant l’épouse du Comte, soit la future Comtesse trompée du Mariage de Figaro. De plus, on voit bien (cf. question 5) l’importance de l’argent, qui a fait basculer Bazile du côté du Comte et de Rosine au point de devenir le témoin de leur mariage et qui permet à Bartholo de supporter la perte de Rosine (ligne 53 « A la bonne heure, je le garde ». Au point qu’on peut se demander si, plus que l’amour et la jeunesse, ce n’est pas l’argent, « argument irrésistible » (ligne 29) qui a triomphé.
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Interpréter 3. La surprise de Bartholo, qui pensait arriver triomphant, se manifeste par une succession de phrases interrogatives. Elles sont de plusieurs types : phrases sans verbe : « Heure indue ? » (ligne 10), inversions sujet-verbe : « Vous moquezvous ? » (ligne 5), constructions avec un mot interrogatif : « Comment (lignes 6 et 7), que (ligne 8), où (ligne 25), qui (ligne 34), quel (ligne 50) »… 4. Plusieurs expressions désignent la tromperie : « fripons » (ligne 3), « vengée d’un trompeur » (ligne 23), « je me suis fourré la tête dans un guêpier » (ligne 49), « tromper un vieillard » (ligne 62). Effectivement, tous les personnages ont été trompés : Bartholo bien sûr, mais aussi Bazile, le Notaire, l’Alcade et même Rosine. 5. Plusieurs éléments de l’intrigue sont liés à l’argent (cf. question 2) : Almaviva a d’ailleurs, à la demande de Figaro, apporté beaucoup d’or (« C’est le nerf de l’intrigue », Acte I scène 6)) Figaro veut, lui, récupérer l’argent de Bartholo (ligne 42). Quant à celui-ci, il est depuis le début soupçonné de vouloir épouser Rosine pour conserver sa dot même s’il est, explique Figaro dans la scène 4 de l’Acte I, aussi avare qu’amoureux fou. VERS LE BAC ÉCRIT > Dissertation
Ce travail de dissertation permet une réflexion sur l’œuvre intégrale mais peut aussi s’enrichir du travail sur les textes complémentaires en vue de commencer à préparer l’épreuve de première. (cf. carnet de lecture p 221) Le sujet peut nécessiter une réflexion initiale sur les fonctions de la comédie et la relation au public (le « Castigat ridendo mores » du premier placet sur Tartuffe). Il faudrait ensuite s’interroger sur la notion de « leçon » et sur les liens entre littérature et morale. Enfin, le sujet invite à étudier ce que Beaumarchais, au-delà de l’apparente et joyeuse leçon aux barbons jaloux, dit de la société et de la manière dont les faibles (femmes, valets, …) peuvent échapper au pouvoir des puissants. Il faudrait donc aussi réfléchir à la réception qui pourrait être celle de la pièce aujourd’hui et pour cela partir de la lecture qu’en ont eu les élèves, des écrits d’appropriation et de leurs carnets de lecture. > Carnet de lecture La mise en scène de Jean-Luc Boutté met en avant la belle jeunesse et l’entente du trio Figaro-Almaviva-Rosine et le lien de la pièce avec l’opéra, en voir des extraits permet donc de mieux comprendre les enjeux des textes étudiés et de découvrir une autre lecture que celle proposée par J Miller et G Marti. Toutes ces captations permettent également de préparer l’Atelier Langue & Expression pp228-229.)
Lectures complémentaires 5 Plaute, Le Soldat fanfaron (iiie ou iie siècle av. J.-C.)
> pp. 218-223
> p. 218
> Présentation de l’œuvre et de l’extrait Texte fondateur pour l’histoire de la comédie européenne, l’œuvre de Plaute dessine déjà un personnage de valet intrigant qui va permettre à son maître de retrouver celle
4 • Le théâtre du xviie siècle au xxie siècle
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qu’il aime et qui a été enlevée par un « soldat fanfaron », personnage traditionnel de la comédie antique, dont s’inspireront notamment Molière (le faux soldat des Fourberies de Scapin) ou Corneille (Matamore). > Lire en écho 1. Palestrion s’adresse au public, on le comprend à diverses expressions : « vous êtes venus prendre séance » (ligne 4) ou « Soyez attentifs, je vais faire l’exposition » (ligne 14). La fonction de l’exposition est ici explicite (les spectateurs ont déjà vu le soldat dans le premier acte) et le monologue de Palestrion met en avant avec humour la complexité de l’intrigue. 2. Plusieurs points peuvent être relevés : en s’adressant au public et en revendiquant le caractère joyeux de la comédie, Palestrion se place dans une posture de metteur en scène. D’autre part, la critique qu’il fait des mœurs de son « maître » montre son insolence et son sens de la satire. Enfin, on le devine à la fin de l’extrait, c’est lui qui trouvera un stratagème pour, en étant introduit chez le Fanfaron, comme Figaro chez Bartholo, délivrer la jeune fille. 6 Molière, L’École des femmes (1662)
> p. 219
> Présentation de l’œuvre et de l’extrait Beaumarchais s’est beaucoup inspiré de l’Ecole des femmes, tout en donnant, il l’explique dans la préface du Barbier, plus de ruse à son barbon : « de cela seul que le tuteur est un peu moins sot que tous ceux qu’on trompe au théâtre, il a résulté beaucoup de mouvement dans la pièce, et surtout la nécessité d’y donner plus de ressort aux intrigants. » La scène dans laquelle Agnès avoue naïvement sa rencontre avec Horace illustre parfaitement le sous-titre du Barbier, La Précaution inutile. Sa lecture permet aussi de mesurer les choix de Beaumarchais qui fait de Rosine une jeune fille pas si ingénue que cela… > Lire en écho 1. L’un des effets comiques vient de l’impossibilité pour Arnolphe de réagir s’il veut entendre tout le récit qu’Agnès lui fait, sa rage et sa jalousie ne se peuvent manifester qu’en aparté et silencieusement. La situation est d’autant plus comique qu’Agnès lui donne sagement tous les détails, croyant le satisfaire. 2. Agnès est ici représentée comme un oiseau en cage (robe jaune canari, barreaux dorés, balançoire …) et son jeune âge est encore accentué par sa coiffure et son attitude d’enfant sage. Le balcon à jalousie de Rosine, et l’obsession de Bartholo de la garder enfermée (cf. page 216, ligne 38 : « Jamais on ne l’ôtera de mes mains. » pourraient en effet être représentés par un tel décor. On pourrait ainsi symboliser le fait que les femmes sont enfermées et transformés en objets par ceux qui croient pouvoir les posséder. 7 Beaumarchais, Le Mariage de Figaro (1784) > p. 220 > Présentation de l’œuvre et de l’extrait Il est essentiel pour comprendre la richesse de l’œuvre de Beaumarchais d’envisager la trilogie de Figaro et l’évolution des personnages. Cette première scène du Mariage montre
la transformation de la figure du valet : il s’agit non plus de marier le Comte mais Figaro et l’intrigue amoureuse est donc centrée sur son couple. De plus, la rivalité qui l’oppose à Almaviva et qui s’amorce dans cette scène éclaire la fin du Barbier d’un jour cruel (cf. lignes 12 et 13). Enfin, on retrouve les motifs de la première pièce : « De l’intrigue et de l’argent, te voilà dans ta sphère » (ligne 40). > Lire en écho 1. Au début de la scène, Figaro évoque Almaviva en le nommant « Monseigneur », puis « Monsieur le Comte ». Suzanne reprend d’ailleurs avec ironie son nom entier : « Monsieur le Comte Almaviva » (ligne 13). A la fin de l’extrait Figaro nomme son maître en l’appelant « ce grand trompeur » (ligne 38). A la rivalité amoureuse et au danger que représente Almaviva (par sa richesse et sa puissance) s’ajoute pour Figaro le désir de triompher de son maître par la ruse : « le faire donner dans un bon piège » (ligne 39). Ce désir semble même plus fort que la colère qu’il pourrait éprouver. 2. Le ton des deux personnages est léger, badin (« le loyal Bazile » ligne 15 « Tu ris, friponne ! » ligne 38). Cependant, la situation aurait pu être évoquée de manière plus sombre : Almaviva règne en maître et seul son orgueil de séducteur le conduit à vouloir obtenir par consentement ce qu’il pourrait avoir par violence. La pièce, ne l’oublions pas, est contemporaine des romans de Sade, qui écrit Aline et Valcour de 1786 à 1789, alors qu’il est embastillé. 3. L’écho entre les deux intrigues est rendu comique par la duplicité de Bazile : le voici de nouveau opposé à Figaro, mais cette fois parce qu’il veut convaincre Suzanne de céder au Comte. A nouveau, l’argent se mêle à la manipulation : le Comte offre une belle dot à Suzanne en échange de ce « certain quart d’heure, seul à seule » (ligne 27). Le « guêpier » qu’évoquait Bartholo est ici mis en place contre Figaro qui va organiser son propre stratagème : « un bon piège » (ligne 39). 8 Carlo Goldoni, Les Rustres (1760)
> p. 221
> Présentation de l’œuvre et de l’extrait La pièce de Goldoni oppose le clan des femmes et celui des hommes autour du mariage de la jeune Lucietta. Les maris, puissants et violents (les rustres du titre) veulent enfermer femmes et filles mais échouent cependant face à l’intelligence de leurs femmes. La pièce montre l’impuissance d’une autorité abusive et la puissance du désir de liberté. Elle est très intéressante à lire en écho au Barbier de Séville et a été représentée dans une mise en scène remarquable par Jean-Louis Benoit (cf. Carnet de lecture). > Lire en écho 1. Les deux femmes souffrent de ne pas pouvoir sortir, mais la mère, Margarita, regrette son passé plus libre lorsqu’elle était jeune fille tandis que Lucietta envisage le mariage comme une libération. On peut d’ailleurs noter que l’évocation de la liberté de la jeune Margarita se fait en lien avec l’évocation du théâtre et des spectacles qu’elle voyait. C’est dire le caractère subversif du théâtre et son lien avec le désir de liberté.
7 • Beaumarchais, Le Barbier de Séville ou la Précaution inutile (1775)
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2. Comme Rosine, Lucietta est enfermée et le balcon est son seul espace de communication avec l’extérieur (ligne 26). > Carnet de lecture La très alerte mise en scène de Jean-Louis Benoit donne à voir la violence de l’opposition entre les hommes et les femmes et le pouvoir paradoxal des faibles. L’une des répliques que l’on peut entendre dans l’extrait : « Tout ça c’est la faute de la liberté » fait écho au Barbier de Séville et au combat mené par Figaro. La mise en scène accentue la sensation d’étouffement : petites pièces, couleurs sombres et la brutalité grotesque des maris. Les élèves peuvent être étonnés du choix du metteur en scène de ne pas mettre en avant le caractère vénitien de l’œuvre et de préférer des costumes et des décors très sobres. Une réflexion sur ces choix de mise en scène peut s’amorcer autour la lecture de la critique de la représentation par Fabienne Pascaud sur le site de Télérama le 11/12/2015 et enrichir la dissertation proposée page 217. 9 Victor Hugo, Ruy Blas (1838)
> p. 223
> Présentation de l’œuvre et de l’extrait Ruy Blas reprend la figure du valet pour en faire un personnage romantique. Dans cette pièce c’est le maître, le démoniaque Salluste, qui orchestre les pièges pour se venger de la Reine. La confrontation du maître et de son valet, rendue plus forte par l’inversion des rôles et des costumes, toute en discours implicites et en silences, permet de comprendre la manière dont Victor Hugo a transformé le traditionnel couple des comédies classiques pour incarner la violence du pouvoir et la quête de l’identité. Ruy Blas ne deviendra libre qu’en revendiquant qui il est : « Je m’appelle Ruy Blas et je suis un laquais » (Acte V, scène 2). >Lire en écho 1. La question de la tonalité se pose pour le drame romantique qui mêle le sublime et le grotesque, la lumière et l’ombre. Dans cette scène, l’arrivée de Salluste est associée au retour du malheur (vers 4) et on peut parler de tonalité tragique tant ce retour annonce la fin terrible de Ruy Blas. D’autant que Salluste revient au moment même où « César » se découvre aimé de la reine, il s’agit donc d’une forme d’ironie tragique. Cependant, le ton de la scène est aussi donné par l’ironie de Salluste, qui, malgré sa cruauté, ne manque pas d’humour : « J’ai pris votre livrée et la trouve à mon goût » vers 9 ou « Croyez-vous ? C’est possible » vers 11. 2. En vantant l’efficacité de son déguisement qui le rend « invisible », Salluste dit à Ruy Blas qu’il n’existe pas ou seulement grâce à l’illusion que lui, Salluste, a bâtie. Malgré la position du faux César à la cour il a suffi que le maître surgisse pour que Ruy Blas perde tout pouvoir, les didascalies montrent bien la violence symbolique exercée par Salluste : « Il se couvre, il s’assied dans un fauteuil ». 3. La tonalité des deux scènes est très différente (cf. question 1) mais on peut observer la même réaction de rejet face au « démon » qui surgit. Cependant, tandis que Bartholo se fait manipuler par tous les autres personnages, Salluste, tant l’empreinte de sa domination est grande, parvient à retrouver immédiatement son pouvoir sur Ruy Blas.
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10 Joël Pommerat, Cendrillon (2011)
> p. 223
> Présentation de l’œuvre et de l’extrait En reprenant l’histoire de Cendrillon, Joël Pommerat donne une nouvelle image au personnage de la servante : la jeune fille, que ses « méchantes sœurs » nomment Cendrier, accepte les tâches les plus humiliantes tant elle souffre de ne pouvoir faire le deuil de sa mère. Il crée ainsi un personnage de « servante », Sandra-Cendrier-Cendrillon, qui se démarque de la figure traditionnelle de la domestique espiègle et habile. On peut faire découvrir la mise en scène de Joël Pommerat aux élèves : https://www.youtube.com/ watch?v=Ago6uWYqlfY. > Lire en écho 1. La tension vient du décalage entre leur deux attitudes : à la colère et à la violence de la belle-mère s’oppose la satisfaction incompréhensible de la jeune fille. Elle semble également incapable de voir la réaction de sa belle-mère qui devient plus violente à chaque fois qu’elle évoque sa mère disparue et de comprendre les signes que lui adresse son père. L’opposition est nette avec la scène de rencontre entre Almaviva et Figaro dans laquelle, même si Almaviva insulte son valet (« Maraud ! » ligne 32 page 210), les deux hommes se répondent comme dans un duo. 2. Les trois personnages dialoguent sans vraiment communiquer : on observe grâce aux didascalies le progressif abandon du père (« Le père a l’air accablé » ligne 24), la colère grandissante de la marâtre et le détachement de la jeune fille. De plus, les indications scéniques permettent d’identifier les interlocuteurs des personnages : le père s’adresse à la belle-mère, qui s’adresse à la jeune fille qui s’adresse à son père. Il n’y a donc pas de véritable dialogue. 3. La scène est très cruelle et la violence de la belle-mère ainsi que l’impuissance du père n’ont rien de comique. Pourtant, l’excès de la colère de la marâtre face à la placidité de la très jeune fille prend un caractère grotesque qui peut devenir comique lors d’une représentation. De même les réponses de la très jeune fille, par leur incongruité mécanique peuvent devenir comiques : « c’est dégueulasse, ça va me faire du bien ». Un humour noir et cruel qui rend au conte sa force et fait éprouver au spectateur la difficile initiation de Sandra vers la liberté et la vie.
PROLONGEMENT ARTISTIQUE
ET CULTUREL
> pp. 224-227
Mettre en scène un élément du décor : la jalousie > pp. 224-225 > Introduction L’étude de la pièce a montré l’importance de la scénographie. On considère d’ailleurs Beaumarchais comme l’un des premiers dramaturges à travailler ainsi cet élément de l’écriture théâtrale (cf. Jacques Schérer, La Dramaturgie de Beaumarchais et la notion de « troisième lieu »). La jalousie, objet évidemment symbolique par son nom, a un rôle très important et est à la fois un élément dramatique qui sert le comique (comme dans la première apparition de Rosine qui fait descendre Bartholo pour aller chercher sa partition) et
4 • Le théâtre du xviie siècle au xxie siècle
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une représentation de l’enfermement dans lequel se trouve la jeune-fille. > Questions 1. La fenêtre est ici découpée dans une feuille de partition et les barres des portées évoquent les lames de la jalousie. 2. La scénographie a un effet spectaculaire et met en évidence le lien entre le texte et la musique, entre l’écriture (livret) et l’écriture musicale (portées). Elle met aussi les personnages au cœur de la page musicale, comme s’ils étaient des éléments de la musique, des notes. La stylisation qu’amènent les lumières et les couleurs fait écart avec les mises en scène traditionnelles du Barbier, plus colorées ou joyeuses (cf. pages précédentes et suivantes). > Carnet de lecture La comparaison des différentes mises en scène permet de développer un jugement esthétique mais aussi de réfléchir sur l’interprétation donnée à la pièce : légère, bouffonne, satirique, philosophique… ? Le carnet de lecture permet aux élèves de partir d’impressions de spectateurs : observations, ressentis, étonnements, déceptions, plaisirs… pour ensuite progressivement construire un jugement argumenté fondé sur leur expérience. > Questions 1. Les différentes mises en scène montrent des partis pris et des choix esthétiques très différents : • Une représentation très conventionnelle au Capitole avec un balcon en fer forgé qui expose le duo Rosine/Bartholo tout en montrant leur séparation. • Un choix poétique à la Comédie-Française où JL Boutté se détache de l’univers « espagnol » et accentue la légèreté et la jeunesse qui sont pour lui les clés de l’œuvre (cf. manuel page 217). • Le dispositif mis en place aux Chorégies est plus complexe : œil de bœuf grillagé dont la forme ronde évoque celle des poursuites, projection sur le mur de la maison : A Siviana met ainsi en avant la complexité des stratagèmes de communication. On devine les lunettes noires d’Almaviva et une voiture rouge dont le phare rappelle aussi un projecteur : tout l’univers du cinéma est ainsi évoqué, dans un décor qui doit rappeler aux spectateurs le cinéma italien et Cinecitta. 2. À nouveau, la question amène les élèves à faire le lien entre les analyses des textes, leur interprétation et les choix des metteurs en scène pour développer tout à la fois leur esprit critique et leurs compétences d’expression écrite et d’argumentation…
Le Barbier de Séville à l’opéra : étude de la scène de la calomnie
> pp. 226-227
> Étude d’une œuvre Les liens entre la pièce de théâtre et l’opéra ont été évoqués tout au long de l’étude de l’œuvre, ils sont créés par la volonté de Beaumarchais d’associer théâtre et musique et au succès de l’opéra de Rossini (1816, livret de Cesare Sterbini). L’air de la « calomnie », déjà presque chanté dans la pièce est devenu l’un des airs les plus célèbres de l’opéra-bouffe italien.
> Carnet de lecture Les élèves peuvent comparer le rythme de la tirade de Bazile (manuel page 212) et la composition de Rossini. > Questions 1. Le propos de la metteuse en scène était de rendre à la situation de Rosine toute sa gravité : « Pour que cette histoire nous parle aujourd’hui, j’ai voulu qu’elle se passe dans un monde où l’enfermement de la moitié de l’humanité est encore la règle. », écrit-elle dans sa note d’intention. Les décors et les costumes évoquent la Séville arabo-andalouse et donnent à voir le parcours de Rosine jusqu’à la liberté. Cependant, le comique n’est pas absent qui vient au contraire donner rythme et énergie à l’opéra, comme ici où l’on voit le très sérieux Bazile, rendu plus sérieux encore par sa barbe grise et son costume entonner l’air de la calomnie sous les yeux effrayés de Bartholo. Bazile fait rire tout autant qu’il pourrait faire peur. 2. Comme le carnet de lecture, la question invite ici les élèves à faire le lien entre l’écriture musicale et l’écriture théâtrale. > Carnet de lecture La découverte de cet univers très étranger sans doute aux élèves leur permet de saisir la singularité de la création de Rossini.
ATELIER LANGUE
& EXPRESSION Oral
> pp.228-229
Rédiger la note d’intention d’une scène et la jouer > Introduction Les programmes préconisent des exercices variés autant à l’écrit qu’à l’oral et notamment, pour l’objet d’étude Théâtre, la « rédaction d’une note d’intention de mise en scène » et la pratique du « jeu théâtral ». L’atelier permet aux élèves de développer des compétences d’interprétation, d’expression écrite et d’expression orale mais aussi de travailler en autonomie et de s’engager dans un travail collaboratif. > Réponse aux questions 1. Il s’agit ainsi de s’approprier l’œuvre intégrale et d’être en mesure de faire un choix justifié par l’étude de la pièce. 2-3. L’organisation du travail et la création d’une « troupe » permet de mettre en œuvre le travail collaboratif. 4. L’argumentation orale de chaque élève peut ainsi être développée, comme le recommandent les programmes et comme l’horizon de l’épreuve orale du baccalauréat nous invite à le faire. Les situations de débat d’interprétation sont également très riches en ce qu’elles favorisent les échanges entre élèves et l’appropriation des textes. 5. Ce sont ici les écrits de travail qui sont mis en œuvre, qui permettent la construction de compétences de rédaction et doivent trouver toute leur place dans les apprentissages des élèves, notamment en vue de préparer les épreuves écrites du baccalauréat. 6. La construction d’une argumentation cherchant à défendre un choix esthétique et un jugement critique est très forma-
7 • Beaumarchais, Le Barbier de Séville ou la Précaution inutile (1775)
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trice. C’est notamment l’un des attendus de l’épreuve orale des EAF.
L’air, qu’on ne peut saisir mais qui nous touche et nous transporte… cf. https://www.cnrtl.fr/etymologie/air
7. Le travail sur le rythme fait écho aux différentes lectures littéraires menées en classe et permet d’améliorer la lecture à haute voix, comme le recommandent les programmes. Il s’agit d’un élément évalué à l’oral des EAF (cf. Note de service DGESCO n°1910625N : « une lecture à voix haute juste, pertinente et expressive du texte »)
« En avoir l’air et la chanson » signifie que l’on est ce qu’on semble être, au contraire, « l’air ne fait pas la chanson » veut dire que les apparences ne sont pas la réalité.
9. Le travail sur le corps et la prise en compte de l’espace sont essentiels pour développer des compétences d’expression orale. De même, la prise en compte des spectateurs, du contexte et de la réception permettra aux élèves de capter l’attention de leur public et de se préparer ainsi à l’épreuve du « grand oral » de Terminale. 10. Les deux exercices proposent des formes variées d’écrits oralisés, très différents et très formateurs, qui font travailler la lecture mais aussi l’écoute et l’échange.
É T U D E D E LA LA N G U E
> pp. 230-231
Les types et les formes de phrase > Corrigé des exercices Exercice 1 Les deux extraits mêlent les formes et les types de phrases : a. exemples : interrogative : « Mais que nous font… injuste ? », injonctive : « Ne regarde pas… où tu vas », déclarative : « elle t’accepteras, j’en réponds. » b. exemples : exclamative : « Hé bien ! », emphatique : « elle a… ma mère ! », restrictive : « il n’y a que » Exercice 2 Savez-vous bien qui est Figaro ? Si vous l’ignorez : courez voir la pièce de Beaumarchais… Un valet extraordinaire ! Un homme libre et joyeux ! Il n’est pas manipulé par son maître mais choisit son propre destin. Il agit comme il le désire : qu’il vente ou qu’il neige, il va son chemin… C’est ce qu’on peut proposer de plus original comme personnage de comédie. Exercice 3 Réfléchir sur les usages de la ponctuation et comprendre son histoire permet aux élèves de mieux maîtriser cet élément de l’écriture souvent trop négligé.
Les mots de… la voix et du chant > Corrigé des exercices Exercice 1 Le mot air a trois origines différentes : son sens de « fluide gazeux » vient du latin aer, son sens d’« apparence » dérive du premier, et le troisième « mélodie, morceau de musique » vient de l’italien aria. Ces trois sens sont liés et le mot italien est lui-même associé aux deux autres significations du mot.
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Exercice 2 Le mot italien signifie « œuvre » et est associé au domaine musical en France depuis le xviie siècle. Auparavant il désignait une chose « excellente et difficile à faire ». Faire opéra est un terme de jeu qui désigne le fait de tout gagner. Mots dérivés : opérette, Opéra-rock, Opéra-ballet et l’anglais Soap-opera. Exercice 3 Le ton désigne la modalité d’une voix en fonction de son intention et/ou de l’état du locuteur, aussi retrouve-ton souvent ce terme dans les didascalies. On peut citer celle qui précède le long monologue de Figaro dans le Mariage : « Figaro, seul, se promenant dans l’obscurité, dit du ton le plus sombre » (https://gallica.bnf.fr/mariage-figaro/monologue). Le mot tonalité appartient à la fois au domaine de l’analyse littéraire (cf. manuel p. 342) et à celui de la musique et des instruments. La question permet de faire un lien entre l’analyse stylistique des textes et notamment la question de leur réception, de leur « tonalité » et le langage musical. Les élèves peuvent ainsi comprendre que l’on parle de la musique d’un texte et que les effets produits par la musique peuvent se comparer à ceux que provoque la littérature. Exercice 4 Le mot chant vient du latin cantus : chant humain, chant d’oiseau, son d’un instrument, poème. Il désigne à la fois la musique vocale et l’expression poétique (on peut parler du « chant » d’un poète, cf. manuel p. 144-173). Mots de la même famille : chanteur, chanson, chansonnier ou peut associer aussi les mots enchanteurs, enchanter, incantations issues du latin incantare : « chanter des paroles magiques », lui-même dérivé de cantare. Exercice 5 On peut relever le vocabulaire du chant : soprano, colorature, aria… du rythme : adagio, allegro, andante, cadence,… des morceaux de musique : cantate, concerto, etc. Les différentes voix sont classées selon leur tessiture : Du contre-ténor à la basse par exemple. Le site www.lamusiqueclassique.com possède une riche page lexique. Exercice 6 Un virtuose en musique est un interprète qui possède une maîtrise parfaite et extraordinaire de son instrument ou de sa voix, le mot peut aussi désigner quelqu’un qui possède une technique parfaite dans des réalisations intellectuelles ou matérielles (artiste, artisan, orateur, cuisinier, etc.). Virtuosité : talent, brio, maestria, habileté, maîtrise,…
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Exercice 7 Quelques exemples : murmurer, sussurrer, marmonner, pépier, souffler, froufrouter… L’essentiel est de faire saisir aux élèves la richesse du vocabulaire et les nuances des mots dont le sens est proche. (cf. manuel p. 330-331)2) Quelques exemples : bredouiller, vociférer, trembler, hésiter, bégayer, bafouiller, rugir, soupirer, s’extasier, se lamenter, s’emporter,…. A nouveau il importe surtout de faire saisir toutes les variations de sens des mots contigus et de permettre aux élèves d’enrichir leur connaissance du lexique. 3) Les trois mots appartiennent au même univers, celui de l’orage (fulmen : éclair, coup de tonnerre en latin) et on peut montrer en quoi ils offrent une évocation métaphorique des affects et font entendre le ton et la couleur des voix furieuses… Exercice 8 Les richesses des inflexions des voix sont infinies : chercher comme décrire sa voix, celle des autres, celle de comédiens ou de chanteurs permet d’enrichir sa perception autant que son vocabulaire. Ce travail de lexique peut de mener en même temps que l’atelier (pages 228-229) pour amener les élèves à approfondir leur réflexion sur les effets du jeu et à poursuivre leur expérience de comédiens. 2) De nombreuses expressions imagées sont associées à la voix : voix de crécelle, voix de stentor, voix d’outre-tombe, voix cristalline, voix de velours, voix violoncellante, voix de tête, voix de rogomme, voix de sirène,… Exercice 9 Un maître-chanteur est un membre d’une association de poètes (cf. l’œuvre de Wagner, Les Maîtres chanteurs de Nuremberg) mais aussi quelqu’un qui pratique le chantage. Bazile est donc à la fois le maître de chant de Rosine et celui qui cherche à faire « chanter » chacun pour en tirer bénéfice et Beaumarchais joue sur tous les sens du mot. On peut penser à la fable de La Fontaine, dans laquelle le renard fait « chanter » le corbeau pour en tirer bénéfice… > Construire son vocabulaire Puissance Brutale, violente, ténue, sonore, ardente, légère, sourde, etc.
Grain Douce, rauque, rocailleuse, veloutée, soyeuse, sirupeuse, etc.
Timbre, couleur Aigüe, grave, vive, chaude, glacée, acide, basse, haute, etc.
F I C H E D E S Y N T H È S E
d’une fiche personnelle, d’un exposé, d’une carte mentale, d’un dossier…) par les élèves qui auront ainsi la possibilité de s’approprier ces connaissances. > Réponse aux questions de synthèse 1. La question conduit à revenir sur la lecture de l’œuvre intégrale et sur son interprétation : les différentes mises en scène présentées montrent bien que plusieurs lectures sont possibles : celle que propose Coline Serreau mais aussi celle de Jean-Luc Boutté. Il s’agit donc pour les élèves de rédiger une argumentation fondée sur leur connaissance de l’œuvre mais aussi sur leur expérience de lecteur et/ou de spectateur. On peut aussi bien sûr les amener à se demander si ces deux notions : divertissement et morale sont vraiment opposées… (cf. manuel p.217). 2. Il faut ici utiliser les connaissances synthétisées pour les confronter à ce que l’on sait de l’œuvre intégrale : à la fois dans le choix des personnages, dans la construction de l’intrigue et dans son propos la pièce s’inscrit dans une tradition. Cet exercice prépare les élèves au travail de dissertation et réactive leurs connaissances en histoire littéraire (notamment sur les œuvres de Molière étudiées au collège).
V E RS L E B A C
> p. 233
Sujet bac Dissertation > Introduction La dissertation est un exercice des EAF pour les séries générales. Elle porte sur l’œuvre et le parcours associé. Cet exercice, très formateur est un exercice de délibération et d’argumentation. Il permet de développer des compétences d’analyse, d’interprétation et de rédaction mais aussi d’acquérir par la réflexion une meilleure connaissance des œuvres. Le travail de dissertation doit partir de l’expérience de lecteur des élèves et leur offrir la possibilité de formuler un jugement de la manière la plus nuancée et précise possible. Dès la classe de seconde, la pratique de dissertations, sur œuvre et sur parcours est nécessaire. Le sujet proposé ici associe des temps de travail à l’écrit et des échanges entre pairs. Tous les textes de la séquence peuvent être utilisés pour le traiter. > Réponse aux questions 1. Les exemples de situations ridicules ou de comportements que l’on pourrait mépriser sont nombreux dans le Barbier, cette étape permet à chacun de proposer une paraphrase de la citation et de commencer à collecter des exemples.
> Introduction L’étude du Barbier de Séville permet d’amener les élèves à découvrir le genre de la comédie et son évolution, notamment en s’intéressant au personnage du valet et à ses variations.
2. Le terme « imitation » est complexe et pourra être analysé avec attention. Il est important que les élèves observent le contexte d’écriture de cette citation pour comprendre la fonction morale que son auteur assigne à la comédie. Enfin, le mot « mépris » est à interroger : est-ce vraiment ainsi que Beaumarchais présente ces personnages, même Bazile et Bartholo ?
La fiche renvoie aux différents textes de la séquence, elle pourra faire l’objet d’un travail de réécriture (sous la forme
3. La comédie guérit la société de ses comportements erronés.
La comédie du xviie siècle au xxie siècle
> p. 232
7 • Beaumarchais, Le Barbier de Séville ou la Précaution inutile (1775)
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4. Cette question reprend la réflexion menée tout au long de l’étude : la pièce propose-t-elle une leçon aux spectateurs ? La comparaison avec les textes complémentaires peut être ici éclairante. 5. Outre le fait que Beaumarchais ne présente pas de situations qui suscitent le mépris on peut s’interroger sur l’efficacité de la comédie : est-ce bien un moyen de « retirer à tout spectateur » le désir de mal agir ? 6. Ici il faut veiller à associer chaque argument à un exemple précis et développé. Ex : Le Barbier met en scène des personnages grotesques et présente de manière comique aux spectateurs leurs illusions et leurs erreurs. Ainsi, les mensonges et les ruses de Bartholo pour conserver Rosine chez lui et empêcher toute rencontre échouent. Comme l’explique à la fin Figaro toutes ces précautions étaient « inutiles ». 7. L’exercice demande que le groupe s’accorde sur la réflexion et organise sa prise de parole.
L E C T U R E C U RS I V E William Shakespeare, La Nuit des rois (1601)
> pp. 234-235
> Introduction Les programmes incitent à la lecture d’œuvres offrant un panorama varié de la littérature et à proposer de la littérature étrangère. L’œuvre de Shakespeare, qui mêle poésie et bouffonnerie et joue des ambiguïtés des apparences offre aux élève la découverte d’une comédie dont les singularités enrichiront leur représentation de ce genre.
croquis on saisit la composition en miroir voulue par Shakespeare (présente même dans l’onomastique Viola/ Olivia). A) On peut considérer le quatuor Viola/Sébastien Orsino/Olivia comme les personnages principaux mais la richesse de l’intrigue et l’importance des personnages « secondaires » rend ce choix contestable. Il serait intéressant de savoir quel personnage les élèves ont préféré, lesquels ils souhaitent retenir. B) Sir Toby, Malvolio, Andrew et Maria, mais aussi Teste le « fou ». 5. Le duc est rendu fou par son amour pour Olivia : il a perdu le goût de la chasse, et se sent devenu un gibier pour la femme qu’il aime et qui le repousse. Il est « transformé en cerf » comme Actéon chassé par Diane : http://cartelfr.louvre. fr/cartelfr/visite?srv=car_not_frame&idNotice=18822 Les thèmes qui s’associent dans cette première scène sont donc l’amour souffrant, la cruauté, la musique… 6. Tous les personnages secondaires sont comiques. On veillera à ce que la réponse soit développée par l’analyse précis d’une scène. Le comique se mêle dans cette pièce au lyrique et la poésie de Shakespeare tisse des liens entre le féérique et le grotesque. La détresse du duc dans la première scène, par exemple, devient drôle parce qu’elle est hyperbolique tout en demeurant lyrique. 7. Maria et sir Tobie veulent se venger de Malvolio, l’intendant puritain et odieux d’Olivia, en le rendant fou : ils parviennent à lui faire croire qu’il est aimé de sa maîtresse et lui font faire les actions les plus grotesques. 8. Le quiproquo principal est celui que crée le travestissement : Viola aime le duc qui aime Olivia qui aime Viola, en croyant aimer Césario. De nombreux quiproquos se succèdent et s’imbriquent : Malvolio se croit aimé et se ridiculise, Sir Andrew se croit séduisant et se ridiculise, etc.
1. La Nuit des rois, ou Tout ce que vous voulez (Twelfth Night Or What you will) est une pièce écrite entre 1600 et 1601 par Shakespeare pour être jouée pendant les fêtes de l’hiver, pendant lesquelles se déroulaient de nombreuses mascarades. Le titre anglais évoque la douxième nuit, qui est traditionnellement la douxième après Noël, soit l’épiphanie, la nuit des rois mages…
9. Le sous-titre de La Nuit des rois est « Tout ce que vous voulez », et on peut en effet interpréter la volonté de Maria de ridiculiser Malvolio (celui qui veut « mal ») et son puritanisme extrême qui l’amène à condamner tout rire, tout jeu toute chanson comme l’expression d’une volonté de liberté carnavalesque qui s’oppose aux refus du plaisir incarné par Malvolio.
2. a. Les deux affiches bien que très différentes, évoquent toutes deux le thème du travestissement et du renversement, de l’illusion. Les deux visuels évoquent aussi la question du couple : deux visages n’en formant qu’un ou deux jambes semblant pourtant être unies dans la marche. b. On note des couleurs vives (vert/bleu) ou des contrastes assez forts (noir/bistre) qui annoncent une pièce rythmée, allègre. Le mot « Nuit » associé à ces visuels peut aussi évoquer l’idée d’une fête… costumée.
10. La pièce est composée de 5 actes.
3. La couverture reprend l’idée du couple, ici traité par le thème du double. Les deux personnages semblent découpés et leur position en fait presque des cartes à jouer. On devine en observant ces deux affiches et cette couverture que les questions du jeu, du même et de l’autre seront présentes dans la pièce. 4. La carte permet d’éclaircir la complexité des personnages : par leur nombre, leur nom, les jeux de masques ils pourraient être un obstacle à la compréhension alors qu’en les représentant sous la forme d’un schéma, d’une carte ou d’un
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11. Les deux personnages, jumeaux, ne peuvent pas être en même temps sur la scène, puisque le quiproquo vient de la transformation de Viola en garçon, donc en double de son frère. « Un même visage, une même voix, un même costume et deux personnes ! une vision naturelle qui est et qui n’est pas ! » s’exclame le duc dans la dernière scène. C’est l’apparition de Sébastien à la dernière scène qui résoudra l’intrigue en permettant à Olivia d’aimer Viola sous les traits d’un « véritable » homme. 12. Dans la première scène le duc Orsino révèle sa passion pour Olivia qui le repousse, tandis que les jumeaux se croient morts et se désolent. Deux couples impossibles, donc : la pièce par ses multiples faux-semblants et ses quiproquos transforme la situation : Orsino aime Viola et Olivia aime Sébastien. 13. Les femmes ne pouvant pas monter sur scène dans le théâtre elisabéthain le rôle de Viola, jeune fille travestie en homme, était donc joué par un homme. L’ambigüité du rôle
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et de ses relations avec les hommes et les femmes est renforcé par ce « triple » travestissement. 14. L’essentiel de l’intrigue se déroule dans ou autour de la maison d’Olivia, mais deux autres espaces sont présents : le bord de la mer où échoue Viola et le palais du duc. L’unité se fait sur le pays imaginaire de l’Illyrie, lieu de tous les possibles, c’est-à-dire du théâtre. 15. On peut voir des images et lire le très riche dossier pédagogique de la mise en scène de Thomas Ostermeier sur le site de la comédie française : https://www.comedie-francaise.fr/fr/evenements/la-nuit-des-rois-ou-tout-ceque-vous-voulez18-19# > Écrit d’appropriation Lorsque Viola aborde en Illyrie elle est désespérée parce qu’elle croit son frère mort. Elle se déguise en homme et entre au service d’Orsino dont elle tombe amoureuse. Celui-ci l’envoie chez Olivia car il la considère comme un envoyé fidèle mais Olivia est séduite par Viola en raison de son déguisement. Sébastien réapparaît à la fin et, puisqu’il
est le frère jumeau d’Olivia, il lui ressemble comme un double. Orsino peut par conséquent aimer Viola et Olivia Sébastien : tout rentre dans l’ordre. VERS LE BAC ORAL > S’entraîner à l’entretien
1. La présentation doit montrer une connaissance de l’œuvre : rôle du personnage, présence sur scène, fonction dramatique, mais aussi une capacité à verbaliser un jugement esthétique et une expérience de lecteur. 2. En observant la scénographie hétéroclite et colorée, les élèves peuvent comprendre certains partis pris du metteur en scène. L’espace de l’Illyrie par exemple (cf. photographie page 235) est représenté comme une rêverie, une île, une utopie théâtrale. > Carnet de lecture Le carnet de lecture permet un investissement personnel des élèves dans leur lecture, très important dans la préparation de l’épreuve orale des EAF. Il s’agit ici de faire un choix personnel et d’être en mesure de le justifier.
7 • Beaumarchais, Le Barbier de Séville ou la Précaution inutile (1775)
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SÉQUENCE
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Jean Cocteau, La Machine infernale (1934)
Présentation de la séquence > La problématique Peut-on être maitre de son destin ? En complément de la séquence autour du Barbier de Séville, et en conformité avec les programmes qui demandent de travailler « deux pièces de genres et de siècles différents », la pièce de Jean Cocteau, La Machine infernale, est une œuvre qui présente de nombreux intérêts en classe de seconde. D’un abord accessible, elle offre une intrigue susceptible d’éveiller la curiosité des élèves par le recours au fantastique, au parodique, au burlesque et une dimension mythologique toujours appréciée par les lycéens. Le lien avec le texte fondateur de Sophocle permet d’explorer la richesse de la littérature théâtrale depuis ses origines, et ses réécritures multiples, en textes complémentaires, présentent l’avantage de parcourir toutes les époques du programme. La problématique fait écho directement à la tragédie avec l’idée d’un déterminisme. L’angle choisi permet de mettre à jour les mécanismes par lesquels le destin s’accomplit ici, tout en montrant les spécificités de l’écriture théâtrale. De plus, cette pièce permet de mettre l’accent sur les questions de représentation et de mise en scène, au cœur des programmes. En effet, le recours au fantastique est un défi en soi à la mise en scène. Cocteau souligne dès la dédicace « l’enchantement » que permet l’illusion théâtrale et il rend hommage à C. Bérard, créateur de décors et de costumes avec qui il a collaboré. Le théâtre est bien une œuvre collective, dans laquelle la scène vient appuyer le texte et lui donner sens. Enfin cette pièce peut servir de porte d’entrée idéale pour l’approche du genre théâtral au xxe siècle et du théâtre contemporain. > Le parcours d’œuvre Les textes choisis correspondent à des passages clefs au niveau de la dramaturgie. Mais nous les avons également sélectionnés car ils sont représentatifs de l’esprit de l’œuvre, de ses dimensions multiples et registres divers. Ainsi, l’ouverture et le discours de la Voix s’inscrivent dans la tradition tragique, faisant écho au prologue antique, au rôle du chœur et condamnant d’emblée le personnage. Le second extrait reflète la fantaisie qui caractérise Cocteau. Le ton burlesque masque à peine les références théâtrales majeures que Cocteau détourne par l’angle parodique. On retrouvera ici l’ouverture d’Hamlet et, derrière l’humour de l’extrait, l’impuissance tragique des personnages s’écrit. Au-delà de la désacralisation comique, l’extrait évoque les difficultés des hommes pour communiquer et s’entendre et la fin d’une époque. La rencontre avec le Sphinx est un incontournable de la légende œdipienne et de cette pièce. Cocteau la traite ici avec un angle surprenant, qui interroge sur le statut héroïque d’Œdipe et renouvelle le personnage. Enfin le dernier acte est représenté par l’extrait de la révélation. On retrouve ici le tragique à l’œuvre, sans ménagement, dans toute sa violence et sa froideur.
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> pp. 236-267
Les quatre extraits présentent ainsi un parcours complet de l’œuvre, explorant tous ses aspects et permettant de réfléchir la richesse du genre théâtral. > Les lectures complémentaires Les textes proposés en lectures complémentaires permettent d’enrichir l’étude de la pièce en l’éclairant par des extraits riches et fondateurs. Ils font écho directement aux extraits du parcours. Ainsi l’ouverture de la pièce, avec le monologue de la voix qui annonce le destin d’Œdipe est mis en relation avec la reprise de la tradition du prologue dans l’ouverture d’Antigone d’Anouilh ou de Juste la Fin du monde de Lagarce. Dans les deux textes, les ouvertures condamnent pareillement les personnages dès les premiers mots de l’œuvre, tout en parvenant à aiguiser la curiosité du spectateur et lui donner envie de voir la réalisation de ce destin à l’œuvre. La scène du fantôme de Laïus est reliée à la scène d’ouverture d’Hamlet dont elle constitue un hypertexte parodique. La scène de la rencontre avec le Sphinx est elle comparée ici avec les versions de Corneille au XVII et de Goethe, au XIX, permettant l’ouverture sur un texte de littérature étrangère. Enfin le texte du dénouement trouve son écho dans l’extrait de la tragédie antique de Sénèque. > Le prolongement culturel et artistique Le parcours culturel et artistique permet d’exploiter la dimension scénique du théâtre. Les questions d’esthétique et de représentation sont abordées à partir de la mise en scène du surnaturel. Le titre de la pièce renvoie également à l’idée de machinerie théâtrale, et ce sera l’occasion de travailler avec les élèves sur la création d’une illusion par un système d’artifices et des procédés techniques qui font partie du théâtre. La rencontre avec des professionnels du spectacle ou la visite d’un théâtre pourra être un complément riche pour les élèves dans cette approche du genre.
O U V E RT U R E
> pp. 236-237
> Introduction Cette double page d’ouverture associe une photographie de mise en scène et une citation extraite du prologue de l’acte I. La citation met l’accent sur la dimension tragique, en lien avec la problématique de la séquence. D’emblée, le destin d’Œdipe est scellé : il est condamné. En écho, la photographie correspond au dénouement, et donc à l’accomplissement du destin, sous les yeux du spectateur. L’étymologie du nom « théâtre », associée à l’idée de ce qui se voit, est ici on ne peut plus évidente : la tragédie est visible, au-delà des mots.
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> Réponse aux questions 1. Deux hommes sont visibles. Tirésias, le devin, est debout, avec sa canne et son regard absent qui renvoie à sa cécité. Œdipe, à genoux, implorant, a les yeux percés. La couleur rouge inonde littéralement la scène, redoublant symboliquement la violence et le sang de ce dénouement tragique. Le mur contre lequel s’appuie Œdipe prend lui aussi des allures symboliques : il est l’obstacle contre lequel l’homme ne peut lutter, le destin et il évoque aussi le mur des fusillés, dans une lecture moderne. Œdipe n’est-il pas une nouvelle figure du condamné à mort ? La présence du ciel est évoquée avec un croissant de lune. Mais son artificialité ne fait pas de doute. Les dieux ont bien abandonné leur personnage. La transcendance est ici parodiée dans le décor. 2. Par définition, le mythe repose sur sa plasticité qui permet aux artistes de se l’approprier, de le renouveler. Recourir à un mythe permet de dépasser une représentation réaliste et d’élever le message à une réflexion plus universelle. La reprise d’un mythe permet également d’apporter une ouverture poétique à l’œuvre. Le mythe est un espace mouvant dans lequel chacun peut créer, inventer, bouleverser les codes et jouer sur les symboles, les images, les rythmes… Enfin le mythe autorise un jeu de reconnaissance et de complicité avec le spectateur ou le lecteur. 3. La citation, au début de l’œuvre, annonce la fin. Tout l’intérêt de la pièce réside alors dans la manière dont va s’accomplir ce destin. Et c’est bien ce que pointe l’auteur dans la citation, s’adressant directement au spectateur sur le mode injonctif (« regarde »).
CONTEXTE L’auteur et l’œuvre
> p. 148
> Qui est Jean Cocteau ? Artiste éclectique, sa présentation est ici placée sous le signe du mythe œdipien qui traversa son œuvre. La photographie illustre sa plasticité artistique et sa fantaisie. > La réécriture d’un mythe > Introduction La Machine infernale est une extension de la pièce de Sophocle selon le mot de Genette cité page 239. Il est intéressant de mesurer la subjectivité, la richesse et la modernité que Cocteau lui apporte, tout en lui donnant sens dans son contexte de création. > Réponse aux questions 1. Le nom « machine » renvoie à l’aspect technique, dénué d’humanité. La machine est ce qui broie, sans émotion : c’est l’image du Destin ici. L’adjectif qualificatif « infernale » renvoie aux enfers et à l’emprise divine qui pèse sur cette intrigue. Le titre désigne par sa périphrase la fatalité, implacable et cruelle qui écrase les hommes, malgré leur résistance. Mais la machine est aussi un terme relevant du lexique théâtral. La « machinerie », au théâtre, correspond à l’ensemble des moyens techniques. En intitulant ainsi sa pièce, Cocteau fait le lien avec l’artificialité de la représentation et ses ressorts. Il permet une double lecture : la machine infernale peut être le Destin qui broie les hommes, mais ce peut être aussi le théâtre, qui se sert du Destin comme d’un
ressort. On pourra approfondir ce point en travaillant avec les élèves sur le prolongement artistique et culturel de la page 256. 2. Si les personnages de la tragédie de Sophocle et du mythe constitue le socle de cette liste des personnages, cette dernière rassemble des personnages de mythologies différentes : celle de l’antiquité gréco-romaine et égyptienne. Ce mélange peut être lu comme un symbole de la dimension fantaisiste qui caractérise Cocteau. D’autant plus que des créatures fantastiques viennent compléter cette liste : Sphinx, fantôme… Avec Anubis, chien noir ou homme à tête de canidé qui a pour fonction dans la mythologie égyptienne d’accompagner les défunts dans l’autre monde, c’est la mort qui s’annonce d’emblée dans cette liste. Ce syncrétisme peut s’expliquer par le lien que le Sphinx entretient avec ces deux mythologies. En Grèce, ce monstre est représenté par un buste féminin et un corps de lion avec des ailes d’oiseau. En Égypte, il désigne la créature hybride née de l’union du dieu Soleil et du Pharaon (avec un corps de lion, une tête humaine ou de rapace). De plus, la ville de Thèbes peut aussi faire le lien entre les deux mythologies car il s’agit de l’ancien nom de Louxor en Égypte et du nom de la ville grecque où se déroule le mythe d’œdipe. 3. Cette dédicace reprend le début d’un poème de Cocteau paru dans le recueil Opéra en 1927. Elle repose sur l’antithèse entre « dieux » et « diable » et mêle le polythéisme de la mythologie grecque à la figure du Mal reliée aux religions monothéistes. L’art de Cocteau, en célébrant l’équivalence des mythologies, est bien de mêler les contraires, les univers qui semblent non miscibles, et de créer un Œdipe renouvelé, sa variation du mythe. La méfiance vis-à-vis des dieux et de la religion s’exprime dans cette dédicace qui interroge aussi, et surtout, la liberté humaine. Les verbes « exister » et « être » affirment dans le vers cette menace et la rendent effective. > Carnet de lecture C’est sur Laïos que repose la faute originelle. Son comportement vis-à-vis de Chrysippos lui vaut la colère d’Héra et d’Apollon. Pélops, le père de Chrysippos, victime de Laïos, appelle d’ailleurs la malédiction d’Apollon sur la descendance de Laïos. Cocteau fait le choix de ne pas le mentionner et de se concentrer sur Œdipe. Il réécrit et adapte le mythe. Œdipe, Oidipous en grec, signifie « pieds enflés ». Ce nom fait référence à l’épisode où l’enfant est pendu à un arbre par les pieds. La réalisation de l’arbre généalogique de la famille des Labdacides va permettre aux élèves de s’approprier le mythe et ses conséquences.
8 • Jean Cocteau, La Machine infernale (1934)
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PA RC O U RS D ’ Œ U V R E
> pp. 240-247
1 L’ouverure
> p. 240
> Présentation de l’extrait L’extrait constitue l’ouverture de l’œuvre. Il est fondamental car il reprend le principe du prologue antique, et annonce l’intrigue jusqu’à son dénouement. Il pose ainsi les fondements de la tragédie et l’implacable fatalité que la pièce va conter. > Lire en écho Les deux textes en écho sont des lectures comparées donnant à lire d’autres variations autour de la reprise de prologue antique. Recherche Le chœur, constitué de 15 personnes et d’un chef nommé le coryphée, servait de lien entre les spectateurs et les acteurs. Ce lien était physique tout d’abord car le chœur évoluait en contrebas de la skéné, dans l’orchestra : il était donc au niveau des spectateurs mais commentait l’action présentée sur la skéné. Ce lien était également au niveau de l’intrigue puisque le chœur représentait souvent des gens du peuple, qui, par leurs commentaires, faisaient office de double du public. Les chants du chœur rythmaient l’action. Le fatum, qui a donné la fatalité en français, correspond à la notion de destin irrévocable. Représenté sous les traits de l’oracle de la Pythie dans l’illustration, il est la parole contre laquelle les humains ne peuvent gagner, malgré une lutte, qui, même si elle sera vaine, leur confèrera le statut de héros. > Réponse aux questions S’engager dans le texte 1. Il s’agit de la parole de l’oracle de la Pythie. C’est une citation dans le texte, celle qui scelle le destin d’Œdipe, victime de la malédiction d’Apollon et Héra que Pélops a lancé sur les descendants de Laïos. 2. Le spectateur est interpellé directement : « Regarde » (l.36). C’est le destinataire de ce texte, prononcé de la voix de l’auteur dans ses premières mises en scène. En outre, ce prologue sert à pallier au besoin le défaut de connaissance du spectateur au sujet du mythe. Interpréter 3. Le champ lexical de la mort jalonne l’extrait avec des termes comme « assassineras », « tuera », « mort », « tue », « veuve » … Celui de l’atrocité lui répond et le prolonge (« parricide », « inceste », « décime », « monstrueuses » …). Ces champs lexicaux installent le contexte tragique. L’ouverture crée ainsi un horizon d’attente chez le spectateur. 4. Les phrases sont courtes et souvent simples, avec une certaine sècheresse des juxtapositions. Cela confère un effet de rapidité au texte, expédiant la diégèse, comme un couperet, froid et brutal. Le niveau de langue est courant (« tombe du ciel », « prend le large », « tombe de haut » …). Ces phrases simples juxtaposées et ce niveau de langue cadrent mal avec les attentes d’une tragédie traditionnelle dont les personnages sont haut placés. On assiste ici à
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l’introduction du burlesque par cet effet de désacralisation du contenu. 5. Le temps principal de cette scène d’exposition est le présent. Ce dernier a dans la majeure partie du texte une valeur de narration, d’actualisation : il donne à entendre le récit comme s’il se déroulait en direct. Mais il prend aussi une valeur de vérité générale à partir de la ligne 28 et, à partir de la ligne 35, nous avons un présent d’énonciation. En utilisant le présent, Cocteau actualise le destin d’Œdipe et le condamne tragiquement. De plus, ce récit au présent peut servir d’écho à l’oracle qu’il met en abime. En annonçant à son tour la diégèse tragique, il remplit la même fonction par rapport à la pièce que la Pythie par rapport au destin d’Œdipe. Ce présent oraculaire fait le lien entre le destin « machine infernale » qui broie les hommes et le théâtre, « machine » dramatique qui condamne et enferme ses personnages dans les intrigues. 6. La dernière phrase détaille le titre : elle explique ce qu’est cette « machine infernale » qui va s’abattre sur les personnages. Le « ressort », « remonté à bloc[.] », renvoie à l’écriture dramatique : la pièce va exposer comment le destin s’accomplit. Mais le suspense est bien absent : la tragédie est inéluctable. Le destin se referme comme un piège. Les termes du champ lexical de la machine (« remontée à bloc », « ressort », « machine ») soulignent le caractère mécanique de ce destin et font le lien avec le vocabulaire du théâtre. Il est pertinent ici de faire le lien avec la page d’ouverture et avec la question 1 de la page 239. VERS LE BAC ÉCRIT > Commentaire
Il s’agira de montrer en première partie comment les personnages sont présentés au spectateur (noms, fonctions, liens qui les unissent, rôle dramatique…), comment le cadre est installé (lieu, contexte) et comment l’intrigue est donnée. Il s’agira ensuite de rebondir sur l’analyse des valeurs des temps (question 5), sur celle des champs lexicaux (question 1) et sur l’interprétation de la dernière phrase (question 6) pour montrer comment la tonalité tragique s’installe d’emblée. On gagnera ici à travailler en complément avec la fiche page 346. On pourra ajouter qu’Œdipe est présenté dans un double statut ambigu, entre coupable et victime. Enfin, il serait pertinent de souligner que le tragique se double ici d’un burlesque inattendu et surprenant en reprenant les éléments de réponse de la question 2. 2 Le fantôme de Laïus
> p. 242
> Présentation de l’extrait Cet extrait du premier acte présente les personnages royaux de Jocaste, accompagnée du devin Tirésias et de Laïus. Ce dernier, en fantôme, apparait sur les remparts de Thèbes. Mais si les gardes le voient, il demeure invisible en présence de Jocaste. La scène constitue une parodie de la scène d’exposition d’Hamlet et installe dans l’œuvre un ton décalé mêlant le burlesque au tragique.
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> Lire en écho Le texte choisi en écho est l’hypotexte de cette scène. La lecture comparée, qui permet aux élèves de travailler un texte fondateur de la littérature anglaise (et un travail en lien avec le cours d’anglais), servira aux élèves qui pourront saisir toute la richesse de l’écriture de Cocteau qui prend appui sur Sophocle et parodie Shakespeare. > Les mots de… Un laïus correspond à un discours creux, un peu emphatique. Ici, le changement du nom de Laïos en Laïus prend un sens humoristique car le personnage ne parvient pas à s’expliquer et à transmettre son message. La question de la communication et du langage est soulignée, Cocteau se positionnant ici en précurseur du théâtre de l’Absurde. > Réponse aux questions S’engager dans le texte 1. Le comique est évident dans cette scène : de mots (« Zizi », l’ironie « tiens, on n’y avait pas pensé »), de situation (Laïus présent et que personne ne voit ni n’entend), de caractère (Jocaste qui s’énerve après Tirésias dans sa dernière réplique), de gestes (le soldat touche Laïus), de répétition ( le cri « Jocaste ! » de Laïus)… Pourtant, il est aussi inattendu et déroutant pour le spectateur : le titre et l’ouverture dessinaient un horizon d’attente bien plus tragique. 2. Le personnage de Laïus a une fonction comique. Avec cette apparition, impossible pour le spectateur de faire peser sur lui la responsabilité de la malédiction : il n’a pas la stature pour cela. Il est enfermé dans la tonalité burlesque. Dès lors, c’est sur Œdipe que Cocteau va faire reposer le tragique et centrer sa tragédie. Interpréter 3. Jocaste interroge les soldats pour tenter de comprendre la situation. La majorité de ses questions sont ainsi construites avec des adverbes interrogatifs (« comment » et « où ») qui interrogent sur les circonstances de l’apparition. Elle questionne sur le message du fantôme, à l’aide du pronom « que » (« que disait-il ? ») et avec une interrogative construite sur l’inversion du sujet (« avez-vous compris quelque chose ? ») qui est une fausse question totale. En effet, c’est bien sur le « quelque chose », le « quoi », « qu’avez-vous compris ? », que porte sa question. Tirésias, puis Jocaste, complètent leur interrogatoire avec des questions fonctionnant sur le même principe de fond, mais sans l’inversion du sujet, ce qui confère à leur discours une dimension plus simple qui contribue à leur désacralisation : « Vous n’avez rien pu saisir de clair ? », « Et il ne précisait rien ? » Enfin, les interrogations portent sur l’incompréhension des personnages (« pourquoi » de la part de Jocaste et Laïus). Les questions des lignes 32 et 38 formées sur l’adverbe interrogatif « pourquoi » renvoient au complément circonstanciel de but, ce qui met en valeur leur incompréhension. La dernière question de l’extrait (« Croyez-vous qu’il puisse encore apparaitre ? ») est une question totale formée sur l’inversion du sujet : Jocaste s’en remet à l’avis du soldat, elle témoigne ici de sa propre impuissance.
L’ensemble des questions soulignent le fait que la situation échappe aux personnages, qui ne la maitrisent pas du tout et qui semblent perdus. 4. La désacralisation est marquée par la tonalité burlesque. (On pourra ici faire le lien avec la page 348. La relation entre les soldats et les personnages royaux est inattendue : les gardes se moquent de Jocaste (l. 6), avec une ironie qu’elle ne parait pas comprendre et ils emploient avec elle un niveau de langue relâché (« une espèce de », « du grabuge »). Tirésias et Jocaste apparaissent dépassés par la situation comme en témoigne leur interrogatoire, stérile et partant dans toutes les directions. Laïus ne parvient pas à se faire entendre et voir, son impuissance est totale et le ridiculise avec un comique de situation et de répétition, centré sur ses cris (l. 14,17,22,31,40…). Tirésias se retrouve affublé d’un surnom ridicule et dégradant. Les pouvoirs du devin illustrent par leur échec les difficultés à comprendre les intentions divines. La scène que lui fait alors Jocaste, rejetant ses « oracles » et ses « poulets », montrent combien son prestige et celui de son pouvoir de voyant sont affaiblis dans la pièce. Il ne sert à rien, puisqu’il ne peut éviter les « cataclysmes », qu’elle voit, elle, bien venir. 5. Le cadre tragique et son personnel traditionnel sont identifiables avec les remparts, les temples et les costumes. Mais les effets de déformation, l’aspect caricatural et les mains qui ne parviennent pas à se toucher, sont autant de signes qui parodient ce cadre tragique dans l’illustration. 6. Laïus peut se lire ici comme un précurseur des personnages du théâtre de l’Absurde. Avec lui, Cocteau parodie le modèle tragique, souligne les difficultés de communication des hommes et l’absence de sens qui régit le destin des hommes. Le tragique n’est plus ici l’incarnation du poids du divin mais il est vu comme une dimension absurde que l’on ne peut éviter (et qui renvoie à la condition de mortel). VERS LE BAC ORAL > Lecture expressive
Il s’agira de parvenir à faire entendre dans la lecture la compréhension fine des enjeux du texte, en s’appuyant sur le questionnement mené. 3 La rencontre avec le Sphinx
> p. 244
> Présentation de l’extrait L’extrait correspond au cœur du mythe d’Œdipe. La rencontre avec le Sphinx qui va le confronter à son énigme est un des épisodes fondateurs de la mythologie. Or Cocteau parvient à créer du nouveau dans cet épisode, à se l’approprier. Il écrit dans Opium (Stock, Paris, 1930) qu’il « rêve » « d’écrire un Œdipe et le Sphinx, sorte de prologue tragi-comique à Œdipe-Roi, précédé lui-même d’une grosse farce avec des soldats, un spectre ». On comprend bien ici qu’il réalise ce « rêve » et que l’acte I correspond à cette « gosse farce ». > Lire en écho Il est intéressant de comparer ici la version de la rencontre avec le Sphinx dans un autre texte théâtral inspiré du même mythe, celle de Corneille. La rencontre avec une créature fantastique liée à l’univers de la mort est aussi au centre du 8 • Jean Cocteau, La Machine infernale (1934)
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Faust de Goethe, qui permet de faire dialoguer deux mythes et leurs réinterprétations, et de confronter les élèves à un texte majeur de la culture allemande. > Lecture d’image et recherche En Grèce, le Sphinx est représenté par un buste féminin et un corps de lion avec des ailes d’oiseau. En Égypte, il désigne la créature hybride née de l’union du dieu Soleil et du Pharaon (avec un corps de lion, une tête humaine ou de rapace). De plus, la ville de Thèbes peut aussi faire le lien entre les deux mythologies car il s’agit de l’ancien nom de Louxor en Égypte et du nom de la ville grecque où se déroule le mythe d’œdipe. > Réponse aux questions S’engager dans le texte 1. Les mythologies grecque antique et égyptienne sont ici associées. Ces créatures se mêlent et se confondent. Sur ce point, on pourra faire le lien avec la réponse à la question 2 de la page 239. 2. Le ton semble badin, comme dans une scène de rencontre amoureuse, de séduction. Cette dimension semblait d’ailleurs annoncée par la discussion entre Anubis et le Sphinx, qui louait l’apparence physique du jeune homme. Interpréter 3. Pour Œdipe, le Sphinx est « presque un animal » (l.22-23). Il s’interroge d’ailleurs sur se caractéristiques animales, se demandant s’il a « des griffes, un bec, des ailes » (l. 42), « s’il tient du tigre ou du vautour » (l.42). C’est aussi selon lui le « criminel à la mode » (l.44), un « monstre » (l.48). Cocteau présente un personnage qui se leurre sur la créature qu’il cherche, incapable, comme seul un héros pourrait le faire, de reconnaitre qu’il l’a sous les yeux. 4. Les répliques du début du dialogue entre Œdipe et le Sphinx s’enchainent très vite et rebondissent sur des emplois lexicaux (« Presque ? » « Presque », « Je l’avoue », « vous avouez », « pour une jeune fille », « il ne s’attaque pas aux jeunes filles » …). Ce dynamisme de la conversation crée une complicité entre les deux personnages. 5. Oedipe est ici un personnage à la recherche de l’aventure qui lui permettra d’accéder au statut héroïque. « un peu d’imprévu », c’est une épreuve qualifiante, l’épiphanie héroïque qu’il ne manquera pas d’avoir réussie en criant « vainqueur ! » après la défaite du Sphinx dans la suite de la scène, sans comprendre qu’il est en train d’écrire son propre destin funeste et qu’il ne doit sa victoire qu’à la créature elle-même : ni son courage, ni son intelligence ne lui auront souffler la réponse et le moyen de battre le Sphinx. Il parait ainsi déçu de sa rencontre et c’est l’arrogance et la fatuité du personnage qui sont mises en relief, résonnant avec son ton plein de certitudes de la ligne 38. VERS LE BAC ÉCRIT > Dissertation
Le personnage que Cocteau fait rentrer en scène est loin d’être présenté en héros. Tout d’abord, il apparait comme un être peureux et arrogant à la fois. Ainsi, le jeune homme fait son entrée « tête basse » et il « sursaute » (l. 15). À rebours d’un héros qui ne sourcille
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pas face au danger, la didascalie annonce un Œdipe surpris et peureux face à l’apparition d’une jeune fille. Cependant il refuse de le reconnaitre mais son hésitation renvoie à une autre marque de son manque d’assurance. En effet, il répond « C’est-à-dire… non… mais je rêvais » (l. 18) Les points de suspension témoignent d’une attitude de doute, d’incertitude, autant de caractéristiques qui s’opposent à une figure héroïque. Et son arrogance, sa suffisance, mise en valeur par son ton condescendant dans la réplique de la ligne 3. « Et si je le devinais, moi, ce but » ou bien dans la phrase qui clôture l’extrait, vient confirmer qu’il ne correspond pas aux valeurs d’un héros. > Carnet de lecture La rencontre avec le Sphinx chez Pasolini se caractérise par sa brièveté. Le Sphinx a à peine le temps de lui dire que la malédiction est en lui. Œdipe, aveuglé et arrogant, se jette sur lui sans comprendre son message. La créature monstrueuse est représentée dans le film avec un corps d’humain et un masque lui couvrant la tête et rappelant les origines archaïques du mythe. Point de transformation en jeune fille mortelle et séduisante comme chez Cocteau. Point de séduction et de dialogue badin. Mais la même arrogance et une attitude qui cherche l’aventure, l’acte héroïque. 4 La révélation finale
> p. 246
> Présentation de l’extrait Dix-sept ans plus tard, la peste ravage Thèbes. Le dénouement tragique est un invariant du mythe et un attendu. L’acte IV correspond à la réécriture de la pièce de Sophocle, dont le reste du texte constitue une extension. Cocteau mêle ici Le Berger, Tirésias, Antigone et Créon à une scène souvent traitée sur le mode de l’intime. Le hors scène et les sorties et entrées des personnages accordent à cet extrait une dramatisation qui en fait l’acmé tragique du texte. > Lire en écho En écho à ce dénouement, on remontera à la tragédie antique de Sénèque. Elle propose une fin qui présente une symétrie avec celle de Cocteau. Jocaste y découvre la vérité après Œdipe et la tragédie prend un autre sens. > Réponse aux questions S’engager dans le texte 1. L’expression « chef d’œuvre d’horreur » comporte tout d’abord une dimension oxymorique évidente : la connotation méliorative du « chef d’œuvre » s’oppose brutalement à l’ « horreur ». Mais cette notion de « chef d’œuvre » renvoie surtout à l’idée de « hors normes », d’extraordinaire, de monstrueux au sens littéral. 2. Créon parait ne pas comprendre la scène qui se déroule sous ses yeux. Lui-même le signale ligne 55 : « J’en ai assez de vos devinettes et de vos symboles ». Homme de pouvoir, homme politique, il est dans l’action et le présent. Avec lui, Cocteau sépare la tragédie intime vécue par Œdipe de la tragédie politique. C’est un des points qui sépare la pièce de Cocteau de celle de Sophocle, pour lequel l’association des deux dimensions était centrale.
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Interpréter 3. Tout d’abord, l’acte se déroule en plein jour. De plus, le champ lexical de la lumière est présent (« Lumière est faite », « j’y vois clair », « il serait malhonnête de poser une seule ombre »). C’est donc paradoxalement et symboliquement au moment où Œdipe voit clair qu’il s’aveugle. La vérité est insupportable à regarder en face. Mais la vie continue pour les autres et pour Thèbes, toujours dans la lumière du jour. 4. Cette troisième réplique d’Œdipe est constituée de quatre phrases sans liens logiques les reliant. Et pourtant, tout les relie, à commencer par le fil du destin… Cette construction donne à sa réplique un aspect de froideur : il prend conscience de l’horreur de la situation comme de manière distanciée, sous le choc. Il semble dire les choses pour les intégrer, presque de manière performative pour sa conscience. La construction des trois premières phrases repose sur un parallélisme syntaxique : proposition principale-proposition relative, avec une anaphore en « J’ai » qui ouvre la phrase avec l’auxiliaire du passé composé et permet de remonter ce fil fatal. Les propositions relatives de ces trois phrases sont des relatives périphrastiques introduites par une locution constituée d’un pronom démonstratif (dans la principale) et d’un pronom relatif. Elles sont ainsi déterminatives et permettent de pointer, comme un acte de reconnaissance, la faute commise ou la personne ciblée. 5. Créon s’exprime avec autorité. Les remarques autoritaires et le ton injonctif émaillent ses propos : « il faut », « je le veux », je vais donner des ordres », « Impossible. », « personne ne m’empêchera » … Concentré sur le pouvoir dont il note qu’il « retombe entre [s]es mains », il s’oppose à Antigone, toute à sa douleur personnelle, et surtout à Tirésias et Œdipe, concentrés, eux, sur l’accomplissement de la fatalité et du destin imposés par les dieux et annoncé par l’oracle. Œdipe « accepte », reconnait ses erreurs et son aveuglement (lignes 41-43), Tirésias essaie d’expliquer la situation à Créon (« vous devez admettre ») mais Créon ne saisit pas, ne comprend pas. La tragédie personnelle et la tragédie politique empruntent deux voix/voies différentes ici. 6. Cet épisode est tragique. Pour autant, la fantaisie n’est pas complètement absente et Cocteau glisse dans ce mouvement des marques qui confinent presque à l’humour. Ainsi, la réaction et le personnage de Créon (qui prend les métaphores ésotériques au pied de la lettre (l.52-53), craint le scandale politique (l.46-47)) ou bien des répliques comme la remarque d’Œdipe à la ligne 4. (« la journée sera rude », qui se lit comme un doux euphémisme) apportent à la scène ces touches inattendues ou décalées qui permettent de supporter la violence de la scène et son pathos. VERS LE BAC ÉCRIT > Commentaire
La première question porte sur la dimension scénique avec le mot « représentés ». La révélation a lieu lors de la discussion avec le Berger. C’est donc par la parole qu’elle s’accomplit et se fait entendre, de même que l’oracle qui ouvrait la pièce. Ses effets sont liés à la dimension scénique du texte, puisque c’est dans le
hors-scène qu’ils ont lieu véritablement. Ainsi c’est par le récit d’Antigone que le spectateur apprend l’acte de Jocaste et celui d’Œdipe. Ce récit fonctionne d’ailleurs comme une description permettant de visualiser la scène et n’épargne pas au public une dimension tragique et sanglante. Celle-ci est redoublée car l’horreur n’est pas absente de la scène et aux lignes 26 et 27, la didascalie mentionne l’apparition d’ « Œdipe aveugle ». Le pathos se mêle ici au tragique avec l’image de la jeune Antigone qui expose sa souffrance dans sa gestuelle, comme lorsqu’elle « s’accroche à [l]a robe » de son père et avec l’image de l’affection et de la réconciliation entre Tirésias et Œdipe, unis dans la cécité et la voyance. C’est ici l’accessoire scénique que constitue le « bâton d’augure » qui incarne ce lien (lignes 38 à 41). C’est avec brutalité que le destin s’écrit ici, dans la précipitation, la violence et la douleur propres à un dénouement de tragédie. L’entretien d’Œdipe avec le Berger est bref, de même que le constat froid dressé par Œdipe dans sa troisième réplique. Puis les phrases exclamatives d’Antigone et sa première réplique font basculer l’extrait et créent un emballement dramatique. Œdipe, détaché des autres personnages, loin d’être ancré dans la réalité politique comme Créon, accepte son sort par ce geste d’aveuglement qui peut apparaitre comme une soumission au destin qu’il a tenté de contrôler. Tout à l’expression de sa culpabilité, il invoque la vengeance sur lui dans une accumulation de termes violents qui le présentent comme la proie des dieux : « Qu’on me chasse, qu’on m’achève, qu’on me lapide, qu’on abatte la bête immonde ». Avec l’intervention de Tirésias, sa douleur prend une certaine hauteur, au-delà de l’exacerbation pathétique. > Écrit d’appropriation Il s’agit d’un écrit personnel qui permet de faire le lien entre deux objets d’étude et leurs caractéristiques : le théâtre et le roman et le récit.
Lectures complémentaires
> pp. 248-253
5 Sénèque, Œdipe (vers 63-64 apr. J.-C.)
> p. 248
> Présentation de l’œuvre et de l’extrait Cet extrait ouvre les élèves à un texte de l’antiquité et à la question des réécritures. La pièce de Sophocle, présentée en lecture cursive pages 264-265 la pièce de Cocteau et celle de Sénèque reprennent en effet le même mythe, créant trois versions originales à partir du même matériau narratif. Il s’agit ici du dénouement qui fait directement écho au texte de la page 246-247. > Lire en écho 1. Les personnages sont ici les proies de forces supérieures qui les accablent. Le « Destin » et les « dieux » sont nommés et Jocaste se présente comme « la victime » du « Destin ». Elle affirme ensuite sa culpabilité et celle de son fils/époux dont elle est « complice » des « crimes ». En nommant Laïus et son « époux » et son « beau-père », elle signe sa situation tragique et l’assume. Le vocabulaire de la souffrance qui est le prix du châtiment tragique émaille l’ensemble du texte : « sanglantes orbites », « corps mutilé », « expiation » « horreur », « frappe ces flancs coupables », « le sang qui s’en échappe avec violence »… 8 • Jean Cocteau, La Machine infernale (1934)
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2. Œdipe se pose ici en coupable. Si Jocaste tente de lui dire qu’il est « victime », il répond de manière assez forte « Assez, ma mère, assez ». Le choix de l’appellation « ma mère » montre qu’il se voit comme le fils incestueux et non comme le mari innocent. Il la conjure ensuite, au nom de tous les innocents qui vont souffrir, au nom de son « corps mutilé » et des « liens sacrés ou impies » qui les « unissent ». Jocaste consent alors à le voir comme un criminel dont elle serait la « complice ». La mutilation d’Œdipe comme le suicide de Jocaste sont des châtiments qu’ils s’infligent pour expier leurs fautes. 3. La mort de Jocaste sur scène, sous les yeux des spectateurs provoque un saisissement d’horreur, qui redouble celui provoqué par la vision des yeux crevés du personnage éponyme. La violence est ici à son paroxysme et l’horreur du châtiment à la hauteur des crimes. Œdipe, en découvrant la vérité avant Jocaste, est mis au centre de la dramaturgie tragique. Il assume ses crimes et le premier, les expie. Il s’érige en coupable et sa mutilation n’est pas une conséquence de la découverte de Jocaste pendue comme chez Cocteau ou Sophocle. Il comprend le premier et assiste, impuissant et aveugle au suicide de sa mère, ce qui renforce sa culpabilité. 6 William Shakespeare, Hamlet (1603)
> p. 249
> Présentation de l’œuvre et de l’extrait Le texte propose de découvrir un extrait issu d’un texte européen fondateur. Shakespeare met en scène un personnage exalté et tragique, qui va marquer les esprits et l’histoire du théâtre. Cocteau reprend ainsi la scène d’exposition, liant deux mythes tragiques (Hamlet et Œdipe) et les adaptant à sa manière. Hamlet est ici parodié, dans une forme d’hommage. > Lire en écho 1. Horatio évoque à la ligne 6 « la peur et l’étonnement ». Les effets physiques sont soulignés par Bernardo qui s’exclame « vous tremblez et vous êtes tout pâle » (l. 17). Les deux gardes s’interrogent sur la réalité de cette apparition, espérant qu’il ne s’agisse que d’ « imagination » (l. 18), mais le « témoignage sensible et évident » de leurs yeux les contraint à accepter l’invraisemblable. Ils dépassent leurs peurs pour tenter d’entrer en contact avec le spectre et lui parler et ne peuvent que constater à quel point il « ressemble » au roi. 2. Les points communs sont évidents : deux gardes, la nuit, assistent sur les remparts d’un château royal à l’apparition d’un spectre qui ressemble au défunt roi. Les deux spectres ont des difficultés à communiquer, l’atmosphère fantastique est identique, dans un cadre spatio-temporel semblable (deux royaumes en difficulté). Dans la tragédie anglaise, le fantôme du roi du Danemark, cherche à avertir son fils qu’il a été assassiné par Claudius, aidé de Gerturde, sa femme. Il demandera à son fils de le venger. Chez Cocteau, Laïus cherche à prévenir Jocaste, et à la mettre en arde quant à la réalisation de l’oracle. 3. Si dans Hamlet, le spectre génère la peur, chez Cocteau, le pauvre Laïus, apparaissant près des égouts, clignotant quand il cherche à délivrer son message et ne pouvant se
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faire voir de celle qu’il cherche à joindre, est une version burlesque du spectre shakespearien. La parodie s’appuie sur les personnages des gardes, qui n’hésitent pas à se moquer des personnages royaux, dont le chef croie à une blague et sur le personnage du spectre lui-même, impuissant et à la limite du ridicule quand il s’obstine à crier « Jocaste ! ». Les comiques de situation, de répétition, de caractère se mêlent ici pour servir la parodie. 7 Pierre Corneille, Œdipe (1659)
> p. 250
> Présentation de l’œuvre et de l’extrait La pièce de Corneille permet d’aborder le théâtre classique, en montrant comment il adapte les mythes antiques. On pourra revoir avec les élèves l’histoire de la tragédie à partir de la synthèse de la page 26 et revenir sur les principes du théâtre à l’époque classique. Les règles classiques et la bienséance l’exigeant, la rencontre ne peut être montrée sur scène. Comme la scène du monstre marin dans Phèdre, c’est donc par la parole que la scène est relatée, respectant la règle de Boileau : « Ce qu’on ne doit point voir, qu’un récit nous l’expose » (Art poétique) > Lire en écho 1. Le Sphinx est présenté comme un « monstre » dès le troisième vers et ce terme est repris au vers 19. Son hybridité est mise en avant : « aigle, femme et lion ». Corneille s’inscrit donc dans la lignée de la mythologie grecque. Cette monstruosité est renforcée par l’idée d’être hors-norme, de « prodige » au vers 8. De plus, la créature se révèle mortifère et violente. Les termes péjoratifs qui jalonnent l’extrait le démontrent : « rage », « cruauté », « cruelles morts » … 2. Œdipe se distingue en héros. Il réalise, en tuant le monstre, son épreuve qualifiante, son épiphanie héroïque dans la lignée des héros antiques. Ainsi, il affronte la créature, sans crainte pour délivrer le peuple de Thèbes de son emprise. (« venge aussitôt sur lui tant de sang répandu », vers 20) et recevoir la récompense (« le salaire »). Le fait de souligner la cruauté et la violence du monstre accentue l’héroïsme du personnage. L’hyperbole du vers 2 va dans ce sens. Le Sphinx est une menace des plus importantes (vers 11). Celui qui ose l’affronter témoigne de son courage. Le vers 1. prouve qu’Œdipe est de ceux-là. La gradation « j’arrive, je l’apprends, j’y hasarde ma vie » démontre sa vivacité. Il n’hésite pas. Il est actif, comme le met en relief l’abondance des pronoms de première personne : c’est lui qui est à l’origine des actions (« j’arrive », « je demande », « j’en cherche le sens », « j’en dévoile l’image » …). 3. Cet épisode est présenté de manière très différente dans les deux textes. Œdipe n’accède pas au statut héroïque chez Cocteau : il attend l’action (« j’espérais un peu d’imprévu), ne fait pas preuve de courage (il « sursaute » en rencontrant la jeune fille) … Le Sphinx est également très différent dans les deux textes. Ambigu chez Cocteau, sous les traits d’une jeune fille qui badine avec Œdipe et ne souhaite pas sa mort, Corneille le présente de manière manichéenne comme un monstre mortifère.
4 • Le théâtre du xviie siècle au xxie siècle
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8 Johann Wolfgang von Goethe, Faust (1808)
> p. 251
> Présentation de l’œuvre et de l’extrait Cet extrait d’un texte majeur de la littérature allemande et européenne relate la rencontre du diable et du docteur Faust. Les points communs avec l’œuvre de Cocteau sont évidents : un mythe, repris au théâtre et mettant en contact un personnage ambigu et une créature fantastique. > Lire en écho : réponse aux questions 1. Le cadre spatio-temporel nous est donné dès les premières lignes. La métaphore « le monde se couvre déjà de ténèbres » annonce la tombée de la nuit de manière lyrique et menaçante à la fois. Le dernier terme appelle une nuit dangereuse, entretenant un lien de proximité avec la mort. L’idée se confirme dans la suite de la phrase qui note que l’ « air se rafraîchit » et que le « brouillard tombe ». Les personnages sont donc dans un univers où les repères tentent à disparaître, où le froid et l’obscurité s’installent progressivement : toutes les conditions sont réunies pour le surgissement du fantastique. Le cadre de la promenade, d’apparence tranquille, se relève menaçant et annonciateur de la rencontre diabolique. 2. La rencontre ne génère pas la même réaction chez les deux personnages. Tandis que Vagner n’y voit que la marque d’un hasard et d’une situation des plus naturelles (« rien d’extraordinaire », « je ne vois rien qu’un barbet noir »), Faust cerne immédiatement l’incongruité et la menace. La première réplique de Vagner signale que Faust s’« arrête[.] », observe avec « attention » l’animal et semble « étonn[é] ». Il tente de justifier sa réaction et d’exposer à Vagner son ressenti en le justifiant des lignes 1 à 19, puis rejoint la thèse de son étudiant à la ligne 27 : « tu as bien raison ». 3. Comme chez Cocteau, cette scène met aux prises l’univers fantastique et le théâtre. Faust repère les signes du diable, représentés par les « spirales » et la « trace de feu ». Les ronds que le chien dessine autour des personnages sont bien une image des cercles de l’Enfer, évoqué par la flamme qui le poursuit. Le cercle « se rétrécit » et la menace se rapproche. Le champ lexical de la créature fantastique est installé : « extraordinaire » « fantôme », « magiques », « esprit » … Pourtant Faust cherche à se convaincre, appuyé par Vagner, que toute cette scène rejoint le rationnel. Le lien avec Œdipe se confirme ici : Faust, comme Œdipe, se trompent sur la nature de la créature qu’ils rencontrent. Cependant, Faust doute tout d’abord et pressent la menace. Œdipe, lui, arrogant et fat chez Cocteau, ne cerne rien de la véritable nature de la jeune fille et pense même être capable de deviner ses intentions (« Et si je le devinais, moi, ce but » l.38). 9 Jean Anouilh, Antigone (1944)
> p. 252
> Présentation de l’œuvre et de l’extrait Œuvre majeure du xxe siècle, pour le genre théâtral et en ce qui concerne les réécritures mythologiques, la pièce d’Anouilh s’ouvre sur un prologue qui fait écho, comme le texte de la page 24 aux ouvertures antiques et au chœur.
> Lire en écho : réponse aux questions 1. Le spectateur est directement interpellé dans ce texte. Le prologue s’adresse et s’associe à lui comme le montre le pronom personnel « nous » employé aux lignes 10 et 11 Le verbe renvoyant à la vue est à rapprocher de l’étymologie des noms « spectateur » et « théâtre » et signale bien l’identification de l’énonciateur au spectateur : les deux « regarde[nt] » Antigone, sont dans une posture d’observateurs, celle du public. On rapprochera ceci du rôle du chœur antique, qui faisait le lien entre les spectateurs et les acteurs. (voir sur ce point l’activité de recherche page 241). Faisant le lien entre scène et salle, le prologue connait les personnages, leur histoire et les présente à la salle. C’est ici le sens du pronom « vous » dans les lignes qui concluent l’extrait : « maintenant que vous les connaissez, ils vont pouvoir vous jouer leur histoire. » Le spectateur est donc au cœur de ce texte et le prologue remplit bien le rôle de son double antique : il assure le lien entre ce qui se déroule sur la scène et ceux qui l’observent. 2. Antigone est présentée en premier, comme personnage principal, ce qui est conforme à son statut de personnage éponyme. Des termes à connotations péjoratives lui sont associés : « noiraude », « renfermée » … Elle est également reliée à l’idée de solitude avec la répétition de l’expression « seule en face de » aux lignes 5 et 6, et avec la mention de la ligne 5, annonçant que « personne ne [la] prenait au sérieux ». Son existence liée aux épreuves et sa mort sont annoncées d’emblée, de même que son aptitude à suivre la voie tracée pour elle : « il va falloir qu’elle joue son rôle jusqu’au bout ». La polysémie de l’expression renvoie aussi bien au théâtre qu’au rôle de chacun sur l’échiquier de la destinée. Le lien est ici évident avec Œdipe dans l’ouverture de Cocteau, présenté d’emblée comme victime de son destin et jouant « son rôle » jusqu’au bout. 3. C’est sur le mode pathétique que l’intrigue est annoncée ici : « elle pense qu’elle va mourir, qu’elle est jeune et qu’elle aussi, elle aurait bien aimé vivre ». En mettant l’accent sur la jeunesse et l’héroïsme de ce personnage, qui accepte son destin, le prologue prend aussi une dimension tragique. Antigone n’a pas d’autre choix que de suivre ce qui est écrit, dans le texte (au théâtre pour l’acteur) et dans les lignes divines (le destin, pour le personnage mythique). Cette force supérieure qui condamne l’héroïne d’emblée est bien le principe même du tragique. De plus, l’écriture au présent, comme chez Cocteau dans la page d’ouverture, actualise déjà tragiquement la réalisation de la destinée funeste annoncée. 10 Jean-Luc Lagarce, Juste la fin du monde (1990)
> p. 253
> Présentation de l’œuvre et de l’extrait Ce texte est une autre adaptation du prologue tragique antique, cette fois dans un contexte moderne assez proche de nous. Les invariants du prologue tragique sont repris et réinvestis dans un texte mêlant les références antiques et modernes. Comme Cocteau, Lagarce s’approprie les critères d’une tragédie antique pour faire jaillir une œuvre personnelle. 8 • Jean Cocteau, La Machine infernale (1934)
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> Lire en écho 1. Ce texte, contrairement à l’ouverture de Cocteau ou au texte d’Anouilh en vis-à-vis sur la double page, n’est pas prononcé par un personnage en dehors de l’histoire. Ici, l’auteur s’affranchit d’un double du chœur antique : c’est le personnage principal lui-même qui parle en « unique messager ». La ligne 31 peut ainsi se lire comme une métaphore de ce texte : le personnage est bien cet « unique messager », qui certes va « annoncer [lui]-même » sa mort à sa famille, mais c’est aussi l’ « unique messager » de l’auteur dans ce prologue, annonçant sa mort aux spectateurs. Les codes du prologue antique sont bien repris : l’intrigue est annoncée, jusqu’à la mort du protagoniste et tout l’intérêt de la pièce ne va pas, de fait, reposer sur le suspense, mais sur l’intérêt éveillé par ce prologue : comment va se dérouler le fil dramatique énoncé d’emblée ? L’horizon d’attente tragique est posé et le choix de la forme, les versets – repris par exemple de l’écriture dramatique de Claudel –, font aussi le lien avec les interventions du chœur antique, qui chantait. Le rythme choisi, qui associe poésie et théâtre sans que l’on puisse véritablement parler de versification, mais avec ces retours à la ligne qui échappent aux classifications traditionnelles et que l’on nomme versets, confèrent au texte une dimension particulière, presque sacrée, au-delà du religieux. Cette dimension est une manière moderne de conserver à l’extrait son lien avec la teneur spirituelle et symbolique des tragédies antiques. 2. La tonalité tragique s’impose par l’annonce, sans détour, de la mort, dès la seconde ligne : « j’allais mourir à mon tour ». La sècheresse de l’annonce interdit tout espoir et le fait que l’énonciateur évoque sa propre mort accorde une tournure pathétique qui s’associe au tragique ici. Louis évoque sa « peur » et l’absence d’ « espoir » : « sans jamais espoir de survivre ». La mort est « prochaine et irrémédiable ». Les deux adjectifs qualificatifs de cette ligne 30 confirment l’horizon d’attente tragique : les spectateurs vont voir cette mort approcher et être représentée sur scène. Les répétitions, les anaphores, induites et soulignées par les versets, font résonner l’annonce de cette mort et, comme un sablier fatal, mettent en exergue le temps qui échappe au personnage, notamment par la reprise du complément de temps « l’année d’après ». 3. Contrairement à Œdipe qui cherche à contrer son destin, Louis l’affronte ici. Les derniers mots du texte font entendre l’idée de « responsab[ilité] » et d’être son « propre maitre ». Louis est ici proche d’Antigone et des héros mythiques, dont la grandeur naît de leur attitude : si la lutte est vaine, ils affrontent leur destin. > Carnet de lecture Le prologue de ce texte est d’un intérêt dramaturgique majeur pour toutes les raisons évoquées ci-dessus et ce n’est pas un hasard s’il est le sujet d’une réflexion scénique de nos jours. Les metteurs en scène affrontent ce texte et cherchent à représenter sa teneur symbolique et son lien avec l’antiquité, en en faisant un texte qui se détache de la pièce et indique sa lecture symbolique, comme une mise en abime (Louis est le messager de sa mort auprès du public comme auprès de ses proches, dans une sorte de dédoublement des niveaux dramatiques). En visionnant les différentes adaptations, les élèves pourront être sensibles à la
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manière de représenter ces éléments et il faudra surtout leur permettre d’exprimer un ressenti, puis de l’objectiver par le recours à l’analyse des éléments scéniques (placement, lumière, musique, décor…)
PROLONGEMENT ARTISTIQUE
ET CULTUREL
La représentation du surnaturel chez Cocteau ?
> pp. 254-257 > p. 254-255
> Introduction Le parcours proposé permet de mettre au cœur de la réflexion la dimension scénique, pointée comme une approche centrale de l’objet d’étude dans les programmes. Contrairement aux autres genres littéraires, le théâtre se distingue par cette dimension scénique. La dramaturge doit s’associer à d’autres artistes (costumiers, comédiens, metteurs en scène, décorateurs, musiciens…) car l’aboutissement de son œuvre est un travail collectif. Or, le recours au fantastique, par le biais de créatures surnaturelles chez Cocteau, constitue un défi pour la représentation, défi à relever par l’équipe technique. De plus, ce parcours permet de réfléchir à l’illusion théâtrale : le spectateur, dans la salle, accepte de croire en la réalité de ce qu’il sait être faux, sur la scène. Mais comment faire quand l’invraisemblance est affirmée par le texte ? > Carnet de lecture La question du décor est souvent celle que les élèves traitent en premier. On pourra se référer ici en partie à l’analyse menée sur la photographie de la page d’ouverture de la séquence, issue de la même mise en scène que le document 2. Pour le document 1, le mur est présent également, avec la même symbolique d’enfermement et de contrainte tragique. Les élèves rebondiront sur les réponses aux questions 1 et 2 de la page pour la représentation du Sphinx et pour le placement ambigu des comédiens. Ils pourront évoquer le rôle des costumes, notamment dans la mise en scène de Cocteau et noter que le surnaturel est moins marqué dans la mise en scène de Gloria Paris, par contre plus symbolique. > Réponse aux questions 1. Le Sphinx est incarné par une actrice dans les deux photographies, conformément au texte de Cocteau la présentant sous les traits d’une jeune fille. Son costume renvoie à sa nature surnaturelle : Cocteau la représente avec les ailes du monstre mythologique. Lors de la scène de la rencontre, c’est la sorte de toge blanche qui permet d’associer le Sphinx à l’univers mythologique et divin dans le document 2. Debout, droite et dans une posture de juge chez Cocteau, elle démontre son autorité et sa domination. Cocteau exigeait par ailleurs que sa voix et son élocution, à la manière d’une mitraillette agressive contraste avec son physique, comme pour souligner l’effet de décalage avec lequel il reprend le mythe. La créature semble plus humaine chez Gloria Paris, presque implorante. Pourtant la couleur rouge de la scénographie et le signe symbolique que peut incarner ce croissant de lune artificiel ( voir réponse 1 de la page 236) renvoient à l’univers mythologique et au surnaturel : la menace est bien présente et le sang est appelé.
4 • Le théâtre du xviie siècle au xxie siècle
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2. Le texte de La Machine infernale souligne l’attirance entre Œdipe et le Sphinx, pourtant condamné par les Dieux, représentés par Anubis, à poser l’énigme à Œdipe. Cette ambiguïté entre la créature mortifère et l’être las de sa propre cruauté, séduit par Œdipe, est représentée sur la première photographie dans la posture et le placement. Œdipe, paralysé, est à genoux devant le Sphinx, dans une posture de soumission et de révérence contre laquelle il tente de se débattre. Le jeu est ici particulièrement délicat pour le comédien qui doit mimer la lutte contre le sort maléfique jeté, lui interdisant d’exploiter son corps. Contraint par une force supérieure, son corps est entraîné vers la créature. Dans la seconde mise en scène, lors de la rencontre, le Sphinx est derrière Œdipe, et l’attirance est perceptible dans le placement : la comédienne tend son corps vers Œdipe, qui lui tourne le dos, tout en laissant sa tête tendre vers elle. La tension physique est palpable dans ce jeu d’attraction-répulsion.
De la machinerie théâtrale au cinéma > pp. 256-257 > Introduction La réflexion sur la dimension scénique se poursuit, rebondissant sur les moyens techniques de représenter ce surnaturel et sur le choix de Cocteau lui-même d’intituler sa pièce La Machine infernale. Avec ce titre, il met l’accent sur l’idée de machinerie, dont il file la métaphore dans l’ouverture de la pièce (on reprendra ici efficacement la question 6 de la page 241). > Les mots de… Le terme deus ex machina est une expression latine que l’on retrouve dans l’univers théâtral pour désigner l’élément de résolution, inattendu ou du moins surprenant dans sa réalisation, qui permet de dénouer l’intrigue. À l’origine, cela renvoyait à la machinerie permettant à un comédien (qui incarnait un dieu résolvant la situation) d’arriver sur scène comme s’il descendait du ciel, par un système de poulies et de cordes accrocher aux cintres. > Réponse aux questions 1. Ce texte revient sur le rôle primordial de la machinerie au théâtre. Elle est l’alliée du dramaturge, des comédiens, et est attendue par le public, qui cherche à être impressionné. En permettant de représenter l’invraisemblable, la machinerie permet de capter l’attention du spectateur et de le faire entrer dans l’univers de l’œuvre. Elle est la clef de l’illusion théâtrale. 2. La machinerie est l’élément premier et central au théâtre : avant l’écriture ou le jeu, elle s’avère indispensable au succès d’une pièce. Étude d’une œuvre Le lien entre théâtre et cinéma est évident. Les élèves ont tous déjà pu voir des adaptations cinématographiques de pièces, et fait le lien entre le regard du réalisateur et la fonction de metteur en scène. Le cinéma est d’ailleurs souvent mieux appréhendé par les élèves et ce peut être une porte d’entrée dans l’œuvre pour beaucoup. Si les potentialités techniques diffèrent, elles se rejoignent sur de nombreux points, le lien étant fait par les métiers artistiques du spectacle qui passent de la scène au plateau (décorateur, maquilleur, costumier, comédiens…). Cocteau
a ainsi travaillé au cinéma comme au théâtre et son regard, sa fantaisie, sa subjectivité, son esprit et l’atmosphère fantastique si particulière qui est celle de ses œuvres, se retrouvent aussi dans ses films. Il s’agit ici d’analyser à travers deux photographies la manière dont il a pu représenter des créatures fantastiques au cinéma, et parmi les plus célèbres. > Réponse aux questions 1. La Belle et la Bête sont représentés sur la première image. La seconde présente un personnage, devant un Sphinx. Avec leurs connaissances sur la pièce de Cocteau, les élèves pourront identifier Œdipe grâce au regard fixe et artificiel. L’image d’un voyant, d’un être en relation avec des forces supérieures, sera en tous cas à relever. Ils identifieront aussi Cocteau lui-même. 2. Le décor est une clef pour représenter ici le surnaturel. Dans le premier document, la table et les éléments qui y sont posés, à commencer par la main tenant le candélabre, installent cette atmosphère. Les costumes et le travail de maquillage et de masque complètent cette approche, dans les deux images. La Bête, dans la première, le Sphinx et le travail sur le regard dans la seconde, sont autant d’entorses à la vraisemblance et de portes d’entrée vers cet univers décalé, surprenant et inquiétant qui créent l’atmosphère si particulière des films de Cocteau. Le noir et blanc vient par ailleurs amplifier cette dimension, en renforçant les contrastes. 3. Certains éléments se retrouvent dans les deux univers : le décor, le costume, le masque, le maquillage, le jeu des comédiens (par exemple la posture du Sphinx dans le document 1 de la page 255 ou bien celle de Cocteau dans la seconde image de cette page). Cependant, du fait de sa réception immédiate et en direct sur scène, le théâtre dispose de moins de ressources et de moins de souplesse pour représenter le surnaturel. Le cinéma peut prendre davantage de temps et les potentialités techniques y sont de plus en plus pointues. Cependant, ces avancées techniques servent aussi la scène et le théâtre, comme par exemple lors de la création de l’adaptation de Vingt mille lieux sous les mers par la Comédie Française en 2016. > Écrit d’appropriation Les deux bandes annonces illustrent parfaitement la part centrale du surnaturel dans ces films. Au cœur de l’intrigue, le surnaturel est la clef de l’univers de ces deux œuvres, et ce autant grâce à son importance dans l’histoire (avec les voyages à travers les miroirs ou l’histoire de la Bête) que grâce aux réalisations techniques qui surprennent et impressionnent les spectateurs (on fera ici le lien avec les lignes 12 et 13 du texte de la page 256 : le public attend ces éléments, il « les exige et les réclame » depuis toujours…). Le surnaturel est mis en valeur par les moyens techniques, les effets spéciaux (les objets volent, se déplacent…) mais aussi dans les paroles (« puissances magique », « l’impossible est possible », « pièges et poisons de la réalité »), le lien avec l’animalité et la frontière poreuse entre monstruosité et humanité (avec la Bête qui parle et boit en lapant l’eau, sa relation avec Belle, main dans la main à la fin de la bande annonce et à égalité de traitement dans le titre lui-même…). L’attention des élèves pourra être attirée vers deux motifs centraux de ces œuvres : les miroirs et les masques. Ces 8 • Jean Cocteau, La Machine infernale (1934)
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deux éléments permettent d’interroger la frontière entre l’apparence et la réalité comme l’annonce la voix à la fin de la bande annonce du Testament d’Orphée (à 2’50).
L’étape 5 correspond à la rédaction et l’élève devra travailler l’expression de la comparaison. Il s’appuiera au besoin sur la page suivante. Enfin l’étape 6 et l’auto évaluation permettront de mettre l’accent sur la rigueur nécessaire à tout travail d’écriture.
ATELIER LANGUE & EXPRESSION
Écrit
> pp. 258-259
Comparer deux scènes d’exposition, dont l’une est à la source de l’autre > Introduction Les programmes donnent en exemple d’écrits d’appropriation liés à l’objet d’étude qu’est le théâtre la « comparaison entre deux pièces dont l’une est à la source de l’autre ». Cet atelier répond correspond parfaitement à cette direction et à cet esprit. L’élève va produire un texte qui lui permettra de valider sa lecture des textes, d’approfondir sa maitrise de l’expression de la comparaison, de la composition d’un paragraphe argumentatif (puisque au moins deux sont attendus (lui laissant la possibilité de choisir un axe points communs/différences) et de travailler en autonomie, à son rythme, guidé par les étapes. > Réponse aux questions La première étape impose de revoir les attentes d’une scène d’exposition (présentation des personnages, du cadre, amorce de l’intrigue, construction d’un horizon d’attente, captatio). L’analyse du sujet conduira à revoir la notion de chute tragique et de mettre en avant le point de grammaire à maitriser, l’expression de la comparaison. La seconde étape mettra en valeur dans le texte de Sophocle la forme dialoguée et la posture politique d’Œdipe, roi dans lequel le peuple et le Prêtre remettent toute leur confiance. La tonalité pathétique est renforcée par la description de la ville de Thèbes et de ses habitants. C’est Créon, en messager, qui vient annoncer le prix demandé par les dieux : venger la mort de Laïos en punissant son meurtrier. Le public, averti, comprend que le destin est scellé par cette ironie tragique qui mène Œdipe à remonter sa propre piste. Chez Cocteau, l’ouverture est très différente. La Voix, intermédiaire entre public et personnages, annonce sur le mode tragique et brut l’intrigue qui va se dérouler. Tout est dit, froidement (quand c’est à décoder chez Sophocle), sèchement, au présent (voir l’analyse des pages 240-241). Point de pathos ici. La troisième étape permettra de distinguer les points de convergence (présentation des personnages, fonction annonciatrice, chute tragique annoncée, ironie tragique…) et les différences (pathétique marqué chez Sophocle, forme du texte, implicite vs explicite…) L’étape 4 permet à l’élève de prendre du recul et de structurer son devoir : il va devoir choisir l’axe qui lui parait le plus pertinent pour le développer en dernier, dans une logique argumentative d’efficacité. Au sein des paragraphes, il s’agira de répondre à la même logique pour les exemples. Ici, c’est le travail de préparation à la dissertation qui est en jeu.
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É T U D E D E LA LA N G U E
> pp. 260-261
L’expression de la comparaison > Corrigé des exercices Exercice 1 D’autres réponses que celles des textes originaux sont acceptables bien sûr. a) plus/ comme/plus/que/aussi/que b) comme c) semblable d) ressemblait e) De même que/de même Exercices 2 et 3 Plusieurs réponses sont possibles. Exemple pour la première phrase de chaque exercice : 2. a) Alors que Tirésias pressent la vérité, Œdipe, lui, ne se doute de rien. 3. a) Le personnage de comédie est souvent davantage stéréotypé que le personnage tragique.
Les mots du… tragique > Corrigé des exercices Exercice 1 Le terme passion signifie à l’origine « action de souffrir ». Associé au préfixe latin cum, il donne compassion : « souffrir avec ». Exercice 2 Formé avec le préfixe mal et le suffixe ion sur le radical dict, le sens littéral de malédiction est « mauvaise parole ». Prononcé par des créatures malfaisantes ou cherchant à se venger, on retrouve des malédictions dans les récits merveilleux, fantastiques, mythiques, contes de fées… Exercice 3 Issu de tragôdos, grec : « chant pendant l’immolation du bouc lors des fêtes dionysiennes » (tragôs : bouc, odos : chant). Le théâtre est alors une fête liée au culte de Dionysos. De nos jours, une tragédie renvoie à un événement funeste ou à un genre dramatique présentant un personnage héroïque en proie à un destin funeste qui procure terreur et pitié au spectateur. Le titre choisi par Cocteau renvoie à cela avec l’idée de déshumanisation, comme un destin aveugle et brutal (« machine ») et l’idée funeste reprise par l’adjectif « infernale ».
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Exercice 4 Destin : existence, sort, puissance supérieure, avenir. Dérivés : destin-ée, destin-ation, pré-desti-nation… Le nom oracle vient du verbe latin orare : « parler » et signifie « parole d’un dieu » étymologiquement
destin et tout l’art du poète dramaturge est de parvenir à inscrire la réalisation de ce destin dans une trame dramatique personnelle, qui renouvelle le mythe sans modifier ses invariants.
Exercice 5 On peut aiguiller les élèves vers des dictionnaires en ligne comme Cnrtl ou Larousse, avec une recherche par synonymes, pour la réalisation de cet exercice. Exercice 6 Le sort et le charme ne portent pas la connotation très péjorative du terme malédiction, induite par son préfixe. L’idée d’une parole est propre à ce terme également. Le sort renvoie davantage au destin et le charme à l’univers merveilleux. Exercice 7 On reprendra ici l’analyse menée à la réponse 1 de la page 239. Le terme machination signifie « complot, manœuvre déloyale » Exercice 8 La catharsis renvoie à la purification des passions, l’effet libérateur de la tragédie au théâtre. Là encore, les sites Cnrtl ou Larousse permettront aux élèves de mener les recherches attendues en 2 et 3. > Construire son vocabulaire Force supérieure : destin, sort, malédiction, charme… Ressenti du héros : souffrance, accablement, désespoir, peur… Effets sur le spectateur : terreur, pitié, peur, émotion douloureuse, compassion… Thèmes : vengeance, pouvoir, destin, amour, mort… Dénouement : solitude, mort (réelle ou symbolique), désespoir, anéantissement…
F I C H E D E S Y N T H È S E La tragédie du xviie siècle au xxie siècle
> p. 262
> Introduction Cette fiche synthétise les connaissances attendues sur la tragédie et servira de repère aux élèves. Elle permet également de situer les différents textes travaillés dans la séquence. > Réponse aux questions de synthèse 1. Le thème du destin, sous les traits de la malédiction prononcée par l’oracle, celui du devoir politique qui vient s’opposer au destin individuel et le thème de la mort sont des thèmes tragiques se retrouvant dans la pièce étudiée. 2. Le principe même de la réécriture mythique suggère que l’intrigue est connue par avance, du créateur comme du public. Dès lors, le personnage ne peut échapper à son
V E RS L E B A C
> p. 263
Sujet bac Dissertation > Introduction Cette citation permet de revenir sur un texte fondateur en littérature, qui définit la tragédie et sert toujours de référence. La citation met en relation la définition même d’une tragédie et l’œuvre de Cocteau. Véritable préparation à l’exercice du baccalauréat, ce sujet répond également aux enjeux des programmes et de l’objet d’étude. > Réponse aux questions Étape 1. On guidera pour cette étape les élèves vers la méthode expliquée à la page 287. L’analyse du sujet mettra en relief l’effet d’une pièce tragique sur le spectateur. Cet effet est lié, d’après Aristote, au récit et non à la vue. La citation insiste aussi sur la notion de construction de l’intrigue : le dramaturge tragique doit, (l’idée d’obligation est présente dans le « il faut ») construire sa pièce de manière à marquer les esprits, générer les sentiments de terreur et pitié. La pièce de Cocteau répond-t-elle à ces critères ? Étape 2. On peut attendre un plan dialectique. Première partie : Cocteau répond en partie à ces exigences d’Aristote : sa pièce génère terreur et pitié sur le spectateur. Premier paragraphe : la pièce inspire de la terreur au spectateur Second paragraphe : la pièce lui inspire également de la pitié Troisième paragraphe : le déroulé dramatique est construit de manière à créer une intensité tragique dans son dénouement. L’idée même de « machine infernale » qui se déroule sert cet enjeu. Quatrième paragraphe : les textes de la voix ouvrant les actes et le récit d’Antigone dans le dernier acte (relatant l’énucléation et le suicide de Jocaste) sont bien des récits servant à marquer les esprits et à souligner le pathos Seconde partie : Mais il associe pour générer ces effets au récit et au déroulé dramatique la vision et le spectaculaire. Premier paragraphe : le dénouement fait apparaitre Œdipe sur scène, avec ses yeux crevés. Second paragraphe : la présence des fantômes ou la scène de la rencontre avec le Sphinx sur scène relève bien du spectaculaire Troisième paragraphe : Cocteau construit sa pièce sur une série de décalages burlesques et de touches fantaisistes qui mettent à mal l’effet de terreur et de pitié. Étape 3. Il ne s’agit pas de montrer de correction modélisante. L’élève doit pouvoir sélectionner les informations nécessaires à la présentation du contexte et de l’œuvre les pages 23 et reprendre sa problématique La phrase d’accroche peut s’effectuer autour de l’idée de réécriture de la fable d’Œdipe évoquée par Aristote au ive siècle avant 8 • Jean Cocteau, La Machine infernale (1934)
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Jésus-Christ et reprise au xxe par Cocteau. Ou bien on peut préférer une approche autour de l’étymologie du nom théâtre, qui suggère le recours à la vue, qu’Aristote semble mettre en question ici. Étape 4. De la même façon, l’élève doit s’approprier l’exercice : la synthèse de chaque partie doit apparaitre comme une réponse à la problématique. Une ouverture n’est pas exigée. Si elle est présente, elle doit être efficace. Ici, on peut choisir d’ouvrir sur la question de l’évolution de la tragédie ou au contraire de son peu d’évolution depuis des siècles.
L E C T U R E C U RS I V E Sophocle, Œdipe-Roi (env. 430 av. J.-C.)
> pp. 264-265
> Introduction Texte mythique et fondateur, cette œuvre entre particulièrement en résonance avec la pièce de Cocteau, dont elle constitue l’hypotexte. Il est pertinent de lire cette œuvre pour comprendre la démarche de Cocteau et ses enjeux. > Réponse aux questions 1. Le tyrannos est l’individu qui obtient le pouvoir par la force. Le choix de ce titre montre que Sophocle propose ici une réflexion politique sur la démocratie qui n’en est qu’à ses balbutiements en Grèce à cette époque. Ce titre met l’accent sur le caractère excessif d’Œdipe, auquel Tirésias reprochera souvent ses colères et emportements. 2. Le temple Apollon à Delphes est le lieu où l’on vient entendre l’oracle de la Pythie. C’est un lieu cultuel majeur de la Grèce antique. 3. Le théâtre antique se jouait lors de cérémonies en l’honneur de Dionysos. Les acteurs, des hommes, masqués, jouaient sur l’ancêtre de la scène, en hauteur (skéné). Le chœur, personnage incarné par une quinzaine de personnes, représentait les citoyens et, au pied de la skéné, dansait et chantait dans l’orchestra. Sa position même en faisait le lien entre spectateurs et acteurs. Il commentait l’action. Les représentations avaient lieu en présence de tous les citoyens. 4. C’est la peste qui accable Thèbes. 5. Créon rapporte la parole des dieux : elle est envoyée pour « chasser la souillure » de la ville. Elle ne pourra disparaître que lorsque sera vengé le meurtre de Laïos.
10 et 11. L’œuvre peut se lire comme une intrigue policière avec la recherche d’un coupable, le dévoilement et la chute finale. Le prologue présente une situation précise : un meurtre a été commis. Il faut enquêter et trouver le coupable. Le premier épisode présente ensuite des révélations que l’enquêteur refuse d’entendre. Il s’égare, sur une fausse piste, débordé par ses propres passions et colères. Le conflit entre Créon et Œdipe constitue l’acmé de cette étape. Puis, avec la confrontation avec Jocaste, les certitudes de l’enquêteur commencent à flancher. Vient ensuite le défilé des témoins, comme autant de scènes d’interrogatoires (Le Corinthien, le berger de Laïos). Avec ses rebondissements (l’annonce de la mort du père d’Œdipe semble être une bonne nouvelle, avant que le témoin ne révèle qu’il n’était pas son père naturel), l’enquête progresse alors et la lumière est faite. Vient le dénouement tragique. La pièce fonctionne donc comme une histoire policière, de l’obscurité à la lumière. 12. Le chœur de cette tragédie représente des vieillards, citoyens thébains. Leur présence est symbolique : ils commentent l’action et constituent une sorte de double du public en ce sens. Ils représentent le respect des règles et de la cité et condamnent la démesure. Ils font le lien entre la scène et les gradins. Leurs interventions chantées ont une dimension spectaculaire : ils dansent, chantent et évoluent dans l’orchestra, au pied de la scène. Ils peuvent chanter d’une voix, dialoguer avec les acteurs comme dans la fin de la pièce, ou bien parler via leur représentant, le Coryphée ; Toutes ces variantes dynamisent le dialogue et rythment l’action. 13. Le tragique repose d’abord sur les effets sur le spectateur : la pitié et la terreur. Mais les commentaires du chœur dans l’exodos, invitent les spectateurs à réfléchir et permettent de dépasser le pathos et le choc de l’apparition d’Œdipe les yeux crevés. C’est aussi une attente du tragique, qui ne se limite pas à l’émotion. Les ressorts du tragique sont surtout liés à la construction de l’intrigue : le public sait qui est coupable dès le prologue et l’enchaînement des événements est inéluctable. Sa perte est signée d’emblée. Cet aspect tragique est renforcé par le fait que son rôle politique entre en conflit avec sa situation personnelle : en bon roi, il voudrait aider son peuple. Mais sa perte en est le prix à payer. L’enchaînement rapide des témoins et des contradicteurs vient redoubler cet effet tragique de la construction de l’intrigue, comme une chute annoncée et que l’on voit venir, étape par étape.
8. Œdipe incarne la démesure et Créon la maitrise de soi.
14. Œdipe entre en scène chez Sophocle dès le prologue : c’est sur lui que va se concentrer l’intrigue et il est à la fois l’enquêteur, qui veut sauver son peuple, et le criminel, qui va se châtier pour cela. Il dirige la pièce, vers sa propre perte. Chez Cocteau, ce statut héroïque est mis à mal. Son entrée retardée crée un effet d’attente autour de sa personne, mais son apparition au second acte est décevante : Œdipe n’est pas le héros altruiste attendu. Il attend que qu’un événement survienne et ne vient pas sauver Thèbes.
9. Tirésias s’oppose à Œdipe : le vieillard aveugle mais voyant se confronte sur scène au jeune homme qui voit mais est aveuglé. Il annonce dès leur premier conflit la vérité et la culpabilité d’Œdipe (vers 356-357) mais Œdipe refuse de l’entendre. Il est comme son guide sur le chemin de la vérité.
15. Le surnaturel est sacré chez Sophocle : la voix de l’oracle, le personnage de Tirésias, les morts sont considérés dans le texte avec dignité. Chez Cocteau, le burlesque apparait en prise avec ce surnaturel. La désacralisation du personnage de Tirésias, nommé Zizi, et qui manque de s’étrangler avec
6. Œdipe annonce qu’il va se mettre à la recherche du meurtrier. Or, le public sait qu’il est à la fois l’enquêteur et le coupable. Mais lui, tragiquement et ironiquement, l’ignore. On peut relever comme phrases d’Œdipe porteuses d’ironie tragique : « Quel que soit l’assassin, il peut vouloir un jour me frapper d’un coup tout pareil. Lorsque je défends Laïos, c’est moi aussi que je sers. »
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4 • Le théâtre du xviie siècle au xxie siècle
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l’écharpe de Jocaste, ou bien celle du fantôme de Laïus sont évidentes. Si l’oracle est mis en exergue au départ, Cocteau interroge cette dimension surnaturelle du mythe et le mélange des mythologies accentue la fantaisie avec laquelle il adapte ce registre.
2. Médée ne se repent pas, elle assume ses actes et les revendique même. Hormis dans quelques passages comme le monologue de V, 2 où elle semble hésiter, sa détermination est sans failles. Sa monstruosité s’affirme dans cette version du mythe.
16. Cette question peut servir d’approche de la dissertation sur œuvre. Comme Colette l’indique, la reprise d’un « sujet connu de tous » est l’occasion pour Cocteau de désacraliser le mythe d’Œdipe. Il aborde ainsi avec distanciation et burlesque la dimension surnaturelle du mythe et son rapport au sacré. Cependant, fait-il preuve d’ « irrévérence » dans cette approche qui conserve a tragique toute sa part ? Colette ajoute l’adjectif « apparente » qu’il est nécessaire de placer au centre de la réponse : entre ce qui est affiché et ce qui résonne, la distance est parfois importante. Le rôle du spectateur et son recul réflexif sont nécessaires sur ce point.
3. Jason se suicide à la fin. Ce choix est étonnant car il ne reprend pas le mythe. Il montre l’humanité de ce personnage accablé. La pièce ne s’achève pas par l’envol de Médée mais par la mort, ce qui consacre le tragique.
> Carnet de lecture Œdipe a servi de support à de très nombreuses œuvres et les élèves ne manqueront pas d’être interpellés par certaines. Au-delà des traditionnels tableaux de Khnopff ou de Gustave Moreau, les élèves pourront étudier l’opéra de Sacchini, les sculptures de Hugues ou de Chaudet… VERS LE BAC ORAL > S’entraîner à l’entretien
1. La réponse est subjective, même si l’on peut attendre une approche dialectique : héros, protégeant son peuple et menant l’enquête, Œdipe est également humanisé par son excès et sa démesure. 2. Cette pièce est véritablement une tragédie de la parole. Comme le commente Aristote dans la citation qui sert de support à la dissertation de la page 263, tout passe par le récit et les dialogues. 3. La lumière de la vérité passe paradoxalement par l’énucléation. En se privant de la vue, Œdipe devient voyant, comme Tirésias. Cette thématique ambiguë et paradoxale est la base symbolique du mythe : le champ lexical de la vue parcourt d’ailleurs l’œuvre de Sophocle, associé à celui de la connaissance ; voir ou savoir… telle est la question.
D’AUTRES LECTURES AU CHOIX
> pp. 266-267
Pierre Corneille, Médée (1635) > Introduction Œuvre classique, cette pièce est également la reprise d’un mythe, ce qui fait le lien avec la pièce de Cocteau. Elle permet de revenir sur les caractéristiques du théâtre à l’époque de la naissance du mouvement classique (avec quelques traces du baroque encore visibles). > Découvrez la pièce de théâtre 1. On peut par exemple relever « Sachant ce que je puis, ayant vu ce que j’ose,/Croit-il que m’offenser ce soit si peu de chose ? » (I, 4), « La trahison, le meurtre, et tous ceux que j’ai faits » (elle évoque ses forfaits) (III, 3), « Enfin je n’ai pas mal employé la journée/ Que la bonté du roi, de grâce, m’a donnée » (pour l’ironie sarcastique en V, 6)
Molière, Les Fourberies de Scapin (1671) > Introduction Œuvre classique et comique, cette pièce est rassurante pour les élèves en général. Ils ont pu rencontrer des extraits du texte au collège et retrouvent ici les caractéristiques d’une comédie classique. > Découvrez la pièce de théâtre 1. Même si la question est subjective, on peut s’attendre à ce que la scène du sac, sommet comique, soit relevée ici par les élèves. 2. La relation présente de manière traditionnelle dans une comédie un valet cherchant à duper son maitre et un jeune homme ayant besoin des services d’un valet ingénieux. Le conflit de classe sert ici de support comique. 3. Nous sommes dans une comédie. Il est évident que dans la société, le comportement de Scapin ne serait pas envisageable, sa dépendance financière est importante vis-à-vis de son maitre. Courageux ou inconscient, les élèves défendront en débat leur point de vue. Georges Feydeau, Un fil à la patte (1894) > Introduction Cette pièce de Feydeau permet de revenir sur une période moins étudiée du théâtre et sur les ressorts d’un vaudeville. Le comique domine et les adaptations contemporaines en font une pièce simple d’accès. > Découvrez la pièce de théâtre 1. Le personnage de Bouzin, de par ses maladresses et son manque de finesse est certainement un des plus comiques. Il est lié à du comique de caractère, de situation, de mots, de répétition… 2. Divertissante, la pièce propose aussi une réflexion sur la notion de couple, de mariage et de bonheur dans la société de son temps. 3. La vivacité, le jeu, emportent cette adaptation dans un rythme enlevé et très comique, qui semble correspondre tout à fait à la lecture que l’on peut faire de l’œuvre. Joël Pommerat, Cendrillon (2011) > Introduction Œuvre contemporaine et réécriture très accessible, faisant écho à un conte connu de tous, cette œuvre saura séduire les élèves. > Découvrez la pièce de théâtre 1. S’il reprend le conte, Joël Pommerat lui insère une dimension nouvelle avec cette parole de la mère de Cendrillon sur son lit de mort. Dès lors, la dimension merveilleuse prend 8 • Jean Cocteau, La Machine infernale (1934)
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moins de place et le pathos s’installe davantage. La langue aussi est renouvelée et le décalage devient un des enjeux porteurs de sens. 2. Les passages comiques et les répliques savoureuses installent le comique. Cependant cette tonalité contraste et complète une veine pathétique et tragique avec la mort qui ouvre l’œuvre et sert de fil conducteur.
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3. La communication est mise à mal tout d’abord par les difficultés d’interprétations de Sandra face aux derniers mots de sa mère. Les êtres de cette pièce se comprennent mal et le lien entre les hommes semble bien fragile. Heureusement que l’univers merveilleux est là…
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ÉTUDE DE LA LANGUE
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ÉTUDE DE LA LANGUE 1 Le langage, la langue et l’énonciation
> p. 294
S’interroger
Exercice 3
1. Qu’est-ce qui, selon Rousseau, unit les hommes ? Rousseau donne l’usage de la parole et l’élaboration des langues comme une preuve de l’union des hommes.
1. Définissez à l’aide de la première note la situation d’énonciation. Chateaubriand est l’énonciateur, les lecteurs les énonciataires. Chateaubriand souhaite laisser un témoignage de son existence, contenu et but de l’énoncé, écrit dans une langue soutenue.
2. Quelle est, selon lui, l’origine de cet élément ? Selon Rousseau, l’homme est un animal sensible qui ne se borne pas seulement à satisfaire des besoins primaires. C’est cette sensibilité qui l’a amené à se regrouper au sein de communautés sociales, et par voie de conséquence à développer les langues. Il peut ainsi mieux communiquer sa pensée et ses sentiments. Exercice 1 1. Expliquez en quelques phrases ce qui empêche la communication de s’établir. Camille ne comprend pas le langage adopté par Lucienne. Il n’en maitrise pas le code. Lucienne emploie bien pourtant le même code que lui, la langue française, mais en altère la structure phonétique en ne prononçant que les voyelles. 2. Quel est l’effet recherché auprès du spectateur ? Le spectateur rit du dialogue de sourds qui s’installe par l’impossibilité de Camille d’entrer en communication avec Lucienne. Exercice 2 1. Déterminez l’énonciateur, l’énonciataire, le but de l’énonciateur et la manière dont est formulé l’énoncé. a. Énonciateur : le cuisinier romain Apicius Enonciataire : les cuisiniers potentiels But de l’énonciation : expliquer la manière de cuisiner des morceaux d’autruche Manière dont est formulé l’énoncé : L’énoncé est une recette de cuisine, écrite dans un niveau de langue courant et de façon explicative. b. Énonciateur : le poète Ronsard Enonciataire : mignonne, la belle que courtise le poète, Cassandre But de l’énonciation : persuader mignonne de profiter du jour présent et notamment de sa jeune beauté Manière dont est formulé l’énoncé : L’énoncé est un poème au style particulièrement travaillé, écrit dans une langue soutenue. 2. Dites, en justifiant votre réponse, lequel est littéraire. Le second extrait relève de la littérature. Il n’a pas pour seul destinataire la dame à laquelle le poète s’adresse directement. Par le choix d’une forme versifiée, par le recours aux métaphores (« votre âge fleuronne », « cueillez votre jeunesse »), le poète s’adresse aussi aux lecteurs, amateurs de poésie.
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2. Délimitez le passage coupé de la situation d’énonciation. Quels éléments grammaticaux vous ont permis de le repérer ? La première longue phrase est la partie coupée de la situation d’énonciation du texte. Les temps du passé et l’emploi et les adverbes de temps indiquent que cette partie relève du récit. 3. Quels autres éléments grammaticaux vous permettent de dire que le reste du texte est ancré dans la situation d’énonciation ? L’emploi du passé composé et du futur, l’interrogation rhétorique signalent que la seconde partie est ancrée dans la situation d’énonciation. Exercice 4 1. Dans quel niveau de langue s’expriment Mongicourt et la Môme ? La Môme s’exprime dans un langage familier. Mongicourt parodie le langage de La Môme (cf. présence des guillemets). L’on devine qu’il s’exprime habituellement dans un langage courant, comme l’indique la réplique : « Mâtin, du classique ! ». 2. Comment la Môme justifie-t-elle son niveau de langue ? La Môme explique qu’elle a été détournée de l’école par un séducteur. Au lieu d’être institutrice, elle a mené une mauvaise vie. 3. Quel est le niveau de langue des vers prononcés par la Môme ? Quelle didascalie indique qu’il n’est pas naturel ? La Môme cite des vers de Boileau écrits en langue poétique. La didascalie (« Déclamant ») signale le caractère soutenu et peu naturel de la langue poétique du xviie siècle. 4. Montrez comment Feydeau joue sur les niveaux de langue pour provoquer le rire. Le franc parler de La Môme constitue une source de comique en soi. La parodie qu’en fait Mongicourt redouble ce comique de mots. Enfin le dernier ressort comique issu des niveaux de langue tient dans le décalage entre le langage familier de La Môme et sa déclamation des vers classiques de Boileau.
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3 Les accords dans le groupe nominal S’interroger 1. Quelle est la nature des fautes de français commises par Émile Zola ? Les fautes commises par Emile Zola sont des fautes d’accord. Il a oublié de faire l’accord entre le déterminant et le nom (« des ouvrier(s) ») et n’a pas accordé l’adjectif épithète « capital(e) » avec le nom féminin « scène ». 2. La conclusion tirée par les auteurs qui ont repéré ces fautes vous semble-t-elle amusante ? Les auteurs s’amusent à voir que Zola, l’écrivain qui s’est attaché à dénoncer les conditions de vie des mineurs dans son roman Germinal, a commis des fautes sur les mots « ouvriers » et « capital ». Ces mots rappellent en effet le combat de la classe ouvrière contre le capitalisme triomphant de la fin du xixe s. Exercice 1 Mettez au pluriel ou au singulier les groupes nominaux. a. des idées pertinentes et stimulantes b. des paragraphes compliqués et bien longs c. une cour publique/un cours publique d. des publics de qualité e. des phénomènes banals f. un riche champ lexical g. des alpinistes en difficulté h. un progrès prodigieux i. des vernis bleu vert Exercice 2 Mettez au pluriel ou au singulier les groupes nominaux. a. un groupe d’auteurs exceptionnels b. des garçons court vêtus c. des demi-copies d. les destins de Paul et de Jacques e. des savoir-faire f. les première et deuxième personnes du pluriel g. ceux qui sont ambigus h. des acteurs parlant haut et clair i. un porte-documents Exercice 3 1. Faites les accords des mots signalés entre parenthèses. Quelle est leur nature ? aiguës (adjectif qualificatif) – vives (adjectif qualificatif) – pures (adjectif qualificatif) – semées (participe passé) – prodigieuse (adjectif qualificatif) – leurs (déterminant possessif) – énormes (adjectif qualificatif) – blancs (adjectif qualificatif) – serrés (participe passé) – durs (adjectif qualificatif) – pâle (adjectif qualificatif) – frisés (participe passé) – grandes (adjectif qualificatif) – rouges (adjectif qualificatif) – rouges (adjectif qualificatif) – superbes (adjectif qualificatif) – liede-vin (adjectif qualificatif) – sombre (adjectif qualificatif)
> pp. 298-299
2. Pourquoi Zola emploie-t-il autant de groupes nominaux dans ce passage ? Dans son roman Le Ventre de Paris, Zola décrit avec un grand souci du détail l’activité des anciennes halles, d’où l’abondance des groupes nominaux. Sa description prend ici les allures d’une symphonie où chaque légume joue sa partition. Exercice 4 1. Faites les accords des mots mis entre parenthèses. Quelle est leur nature ? vraie (adjectif qualificatif) – vrai (adjectif qualificatif) – parisiennes (adjectif qualificatif) – introuvables (adjectif qualificatif) – désert (adjectif qualificatif) – hospitalières (adjectif qualificatif) – décriées (participe passé) – haletante (adjectif qualificatif) – lâchés (participe passé) – violâtre (adjectif qualificatif) – blancs (adjectif qualificatif) – noir (adjectif qualificatif) – roses (adjectif qualificatif) – mille et mille (déterminants numéraux cardinaux) – blanches vivantes (adjectifs qualificatifs) – froides (adjectif qualificatif) – effeuillés (participe passé) – fondantes (adjectif qualificatif) 2. Montrez que les groupes nominaux donnent une dimension picturale à la description de la scène. Sur le fond blanc constitué par la neige (« la vraie neige », « le vrai froid »), se détache « un crépuscule violâtre » strié de « tourbillons blancs ». En arrière-plan du tableau, se dessine la ville de Levallois marquée de « deux feux roses » et sur laquelle tombent des flocons que Colette compare à « un voile chenillé de mille et mille mouches blanches vivantes ». Au premier plan, les enfants sont eux aussi recouverts de flocons, comparés alors à des « fleurs effeuillées ». Exercice 5 1. Relevez les groupes nominaux dans cet extrait et analysez leur composition. – un lieu habitable (article indéfini, nom commun, adjectif qualificatif épithète) – un meuble de velours jaunâtre (article indéfini, nom commun, préposition, nom commun, adjectif épithète) – à fleurs satinées (préposition, nom commun, participe passé adjectivé) – un guéridon à tablette de marbre (article indéfini, nom commun, préposition, nom commun, préposition, nom commun) – des consoles, surmontées de glaces (article indéfini, nom commun, participe passé, préposition, nom commun) – aux deux bouts de la pièce (article défini, déterminant numéral cardinal, nom commun, préposition, article défini, nom commun) – le milieu du parquet (article défini, nom commun, article défini, nom commun) – un lustre garni d’un étui de mousseline blanche (article indéfini, nom commun, participe passé, préposition, article Étude de la langue
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indéfini, nom commun, préposition, nom commun, adjectif qualificatif épithète) – de chiures noires (préposition, nom commun, adjectif qualificatif épithète) – six lithographies représentant les grandes batailles de Napoléon (déterminant numéral cardinal, nom commun, participe présent, article défini, adjectif qualificatif épithète, nom commun, préposition, nom propre)
– des consoles, surmontées de glaces : sujet du verbe « s’appuyaient » – aux deux bouts de la pièce : CC de lieu – le milieu du parquet : COD – un lustre garni d’un étui de mousseline blanche : Sujet – de chiures noires : Complément d’agent – six lithographies représentant les grandes batailles de Napoléon : Sujet du verbe « étaient pendues »
2. Expliquez les accords. – un lieu habitable : accord de l’adjectif « habitable » au masculin singulier avec le nom « lieu » – un meuble de velours jaunâtre : accord de l’adjectif « jaunâtre » au masculin singulier avec le nom « velours » – à fleurs satinées : accord du participe passé adjectivé « satinées » au féminin pluriel avec le nom « fleurs » – des consoles, surmontées de glaces : accord du participe passé « surmontées » au féminin pluriel avec le nom « consoles » – aux deux bouts de la pièce : accord des déterminants défini « aux » et numéral cardinal « deux » au masculin pluriel avec le nom « bouts » – un lustre garni d’un étui de mousseline blanche : accord du participe passé « garni » au masculin singulier avec le nom « lustre » ; accord de l’adjectif qualificatif épithète « blanche » au féminin singulier avec le nom « mousseline » – de chiures noires : accord de l’adjectif qualificatif épithète « noires » au féminin pluriel avec le nom « chiures » – six lithographies représentant les grandes batailles de Napoléon : accord de l’article défini « les » et de l’adjectif qualificatif épithète « grandes » au féminin pluriel avec le nom « batailles »
4. Quelle image donnent-ils du salon de Félicité Rougon ? Les groupes nominaux signalent un lieu défraichi (« un meuble de velours jaunâtre », « de chiures noires », « six lithographies représentant les grandes batailles de Napoléon ») et un peu vide (« aux deux bouts de la pièce », « le milieu du parquet »).
3. Donnez la fonction grammaticale de chacun des groupes nominaux. – un lieu habitable : attribut du COD « en » mis pour « salon » – un meuble de velours jaunâtre : Complément d’agent – à fleurs satinées : Complément du nom « meuble » – un guéridon à tablette de marbre : Sujet du verbe « se trouvait »
Exercice 6 1. Relevez et justifiez les accords des adjectifs et participes dans l’extrait suivant. – « Frères humains » : accord de l’adjectif qualificatif épithète « humains » au masculin pluriel avec le nom « frères » – « cœurs […] endurcis » : accord du participe passé adjectivé « endurcis » au masculin pluriel avec le nom « cœurs » – « attachés » : accord du participe passé « attachés » au masculin pluriel avec le pronom « vous » – « nourrie » : accord du participe passé « nourrie » au féminin singulier avec le nom COD placé avant lui « chair » – « dévorée » : accord du participe passé « dévorée » au féminin singulier avec le pronom sujet « elle » – « pourrie » : accord du participe passé « dévorée » au féminin singulier avec le pronom sujet « elle ». 2. Quels sentiments contribuent-ils à provoquer chez le lecteur ? En décrivant la réalité de la pendaison (« attachés ») et de la putréfaction des corps (« dévorée et pourrie »), Villon tente de susciter la compassion de ses semblables (« Frères humains »).
4 Les accords entre le sujet et le verbe S’interroger 1. Quelle faute de français a commise Martine ? Par quel terme Bélise la désigne-t-elle ? Martine n’accorde pas le sujet avec le verbe (« je n’avons »). Elle commet ce que Bélise nomme un « solécisme ». 2. Pourquoi Martine ne comprend-elle pas la leçon de Bélise ? Martine n’a pas reçu une éducation suffisante. Elle méconnait la terminologie grammaticale qui lui aurait permis de comprendre l’explication de Bélise.
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> pp. 300-301
3. Que pouvez-vous en déduire sur l’usage de la langue comme code ? Les règles de grammaire qui régissent la langue constitue un code. Leur respect permet d’établir la communication, d’assurer un codage correct par le destinateur et rend possible le décodage par le destinataire. Exercice 1 Dans ces phrases qui évoquent l’extrait des Femmes savantes de la page de gauche, conjuguez les verbes au présent en les accordant avec leurs sujets. a. tentent – fait b. commettent – tiennent c. sont signées
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2. Réécrivez en français moderne la première réplique de Martine dans le texte de la page de gauche. Mon Dieu ! je n’ai pas étudié comme vous, et je parle directement comme nous parlons chez nous. 3. Relevez et donnez la nature de tous les sujets de l’extrait. Que constatez-vous ? Pronoms personnels : « je », « je », « je », « tu » ; pronom indéfini : « on » ; pronom interrogatif : « qui » ; groupe nominal : « ton esprit », forme conjuguée au présent de l’indicatif : « avons ». On constate que le sujet peut prendre des natures très diverses et qu’il peut être inversé. Exercice 2 1. En vous aidant au besoin de tableaux de conjugaison, accordez les verbes aux temps demandés. 2. Donnez la nature de leurs sujets. Formes – a commencé – appellerai – prenait – manquât – perdît – arrivait – étaient soumises – appelle
Sujet – proposition subordonnée relative (« ce que j’appellerai… ») – pronom personnel (« je ») – pronom indéfini (« tout ») – groupe nominal (« le raisonnement » – groupe nominal (« la mémoire » – pronom relatif (« qui ») – groupe nominal (« mes actions ») – pronom indéfini (« on »)
Exercice 3 Réécrivez ce passage au passé à la première personne du pluriel en conjuguant le premier verbe à l’imparfait. Chaque jour, pourtant, nous retournions au ravin, comme si nous allions enfin trouver ce que nous cherchons. Nous ne pouvons nous détacher de cette faille dans les flancs de la vallée, sans herbe, sans rien qui bouge ou qui vive, avec seulement la lumière qui se réverbère sur les pentes rouillées de la montagne et les roches de basalte. Exercice 4 1. Réécrivez en français moderne, en suivant l’ordre de la conversation courante, ces vers de Villon. Dites-moi où et dans quel pays est Flora, la belle Romaine, Alcibiade et Thaïs, qui était sa cousine germaine ; Echo, qui
5 La valeur des temps S’interroger 1. Comment Mlle Laurencin justifie-t-elle l’emploi du présent dans la fable ? Mlle Laurencin montre comment la brusque apparition de ce présent dans un récit au passé implique le lecteur au point de lui faire vivre la scène : « Il survient. On a peur. ».
résonne, quand on fait du bruit, au-dessus de la rivière ou sur l’étang, elle qui avait une beauté surhumaine ? Mais où sont les neiges d’autrefois ? 2. Où sont placés les sujets ? À l’exception des pronoms indéfini « on » et relatif « qui », tous les sujets sont inversés puisqu’il s’agit d’interrogations. 3. Montrez comment Villon s’appuie sur la place des sujets pour exprimer la fuite du temps. L’inversion de sujets provoque un effet d’éloignement propre à traduite la fuite du temps. Exercice 5 1. Relevez et donnez la nature de tous les sujets, puis justifiez tous les accords entre les sujets et les verbes. – Accord du verbe « accoutumons » à la première personne du pluriel avec le pronom personnel sujet « nous ». – Accord du verbe « seront servis » à la troisième personne du pluriel avec le groupe nominal sujet « mille moutons ». – Accord du verbe « pouvaient » à la troisième personne du pluriel avec le groupe nominal sujet inversé « mes amis ». – Accord du verbe « eût versé » à la troisième personne du singulier avec le groupe nominal sujet « un mot ». – Accord du verbe « est » à la troisième personne du singulier avec le pronom indéfini sujet « tout ». – Accord du verbe « ont eu » à la troisième personne du pluriel avec le pronom personnel sujet « ils ». – Accord des verbes « vivez » et « soyez » à la deuxième personne du pluriel avec le sujet sous-entendu et repris par l’apostrophe « amis ». – Accord du verbe « ai » à la première personne du singulier avec le pronom personnel sujet « je ». – Accord du verbe « vivez » à la deuxième personne du pluriel avec le sujet sous-entendu et repris par l’apostrophe « amis ». 2. Qui désignent les sujets ? Quelles oppositions révèlentils ? Le pronom personnel « je » renvoie au poète qui attend la mort dans sa cellule. Le pronom personnel « nous » désigne ses compagnons d’infortune. Ces sujets s’opposent au groupe nominal « mes amis », repris dans un mouvement de généralisation par le pronom indéfini « tout ». Cette opposition souligne l’abandon pathétique que ressent le poète condamné.
> pp. 302-303
Le recours par La Fontaine au présent de narration explique donc son intention d’actualiser le récit. 2. Qu’est-ce qui fait l’intérêt de la littérature selon Éric Orsenna ? À travers l’enthousiasme de Mlle Laurencin et son explication de l’emploi des temps dans la fable de La Fontaine, Éric
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Orsenna met en avant le pouvoir de l’imaginaire de la littérature, sa capacité à faire vivre des émotions au lecteur.
b. « prendras » : futur ; valeur modale : un ordre c. « allez » : présent de l’indicatif ; valeur modale : ordre
Exercice 1
Exercice 4
1. Conjuguez les verbes au temps demandés. s’était sauvée – tourna – alla – donna – jeta – fouilla – prit – ferma – s’enfuit – tenait – osait.
1. Quels temps emploie successivement Maupassant au début de cette nouvelle ? Maupassant emploie tout d’abord le présent (« il y a »), puis le plus-que-parfait (« avait réuni ») et l’imparfait (« buvions », « fumions »), et à nouveau le présent (« s’ouvre », « entre », « devinez », « viens », « s’écrie »).
2. Quelle est la valeur temporelle de ces verbes ? Le plus-que-parfait (« s’était sauvée ») indique une action antérieure à celles décrites par les passés simples et les imparfaits. Les passés simples décrivent la succession rapide des courtes actions accomplies par Germinie au moment du vol (« tourna », « alla », « donna », « jeta », « fouilla », « prit », « ferma », « s’enfuit »). Les deux imparfaits figent l’action dans la durée une fois le vol commis. Exercice 2 Quelle est la valeur temporelle du présent dans ces phrases ? a. Le présent « nous nous apprêtons » marque une action non accomplie (valeur aspectuelle), car sur le point de s’achever (valeur temporelle de futur proche). b. Le présent « sont » indique une action qui dure (valeur aspectuelle) parce qu’il renvoie à une généralité d’état (valeur temporelle). c. Les présents « trace » et « parais » indiquent des actions qui durent (valeur aspectuelle) et s’inscrivent dans le présent de l’énonciation (valeur temporelle). d. Le présent « a » indique une action qui dure (valeur aspectuelle) parce qu’il renvoie à une généralité d’état (valeur temporelle). e. Le présent « viennent » marque une action accomplie (valeur aspectuelle) ; il a donc une valeur de passé proche. Exercice 3 Dites à quel temps est conjugué chacun des verbes en gras, puis quelle est sa valeur modale. a. « aura été fâché » et « aura été distrait » : futur antérieur passif ; valeur modale : une hypothèse
2. De quelle valeur principale (aspectuelle, temporelle, modale) chacun est-il porteur ? Le présent « il y a » inscrit le texte dans le présent de l’énonciation de l’écriture (valeur temporelle). Le plus-que-parfait « avait réuni » indique une action antérieure (valeur temporelle) à celle rapportée dans le récit. Les imparfaits « buvions » et « fumions » inscrivent la scène dans la durée (valeur aspectuelle). Les présents « s’ouvre », « entre » et « s’écrie » sont des présents de narration (valeur temporelle) et marquent une action ponctuelle (valeur aspectuelle). Enfin, les présents « devinez » et « viens » s’inscrivent dans le présent d’énonciation (valeur temporelle) du personnage qui parle. 3. Expliquez comment ces valeurs permettent d’installer progressivement le lecteur dans le récit. Le lecteur est tout de suite interpellé par le présent d’énonciation. Les imparfaits duratifs l’installent dans une scène de genre, la conversation entre amis. Les présents de narration viennent brutalement rompre la tranquillité de la scène. Les présents d’énonciation du style direct s’adressent autant aux invités qu’au lecteur. Personnages amis et lecteur ne forment alors qu’un seul auditoire. 4. À la manière de Maupassant, vous imaginerez le début d’une histoire en jouant sur les temps et sur leurs valeurs pour retenir l’attention de votre lecteur. On attend des élèves qu’ils comprennent que la valeur des temps est un moyen efficace pour retenir l’attention des lecteurs. Ils doivent pouvoir en jouer en s’inspirant du texte de Maupassant.
6 La concordance des temps S’interroger 1. Quels temps évoque Jean Dutour ? De quel phénomène grammatical dépend leur emploi ? Jean Dutour évoque l’emploi des présent et imparfait du subjonctif dans le cadre de la concordance des temps. 2. Comment Jean Dutour explique-t-il les sentiments contraires qu’il manifeste à l’égard de ce phénomène ? Jean Dutour est écartelé entre la nécessité de remplacer les subjonctifs imparfaits par des subjonctifs présents, comme
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l’appelle l’usage de la langue courante, et les lois de la concordance des temps héritée de l’histoire et envers laquelle, en tant qu’écrivain, il se sent redevable. Exercice 1 1. Conjuguez les verbes mis entre parenthèse au temps que réclame la concordance des temps. Quel est ce temps ? était encombré – avait été amenée – n’avait pas servi – s’était déclaré. Il s’agit du plus-que-parfait de l’indicatif.
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2. Justifiez son emploi du point de vue de la concordance des temps en plaçant les verbes sur l’échelle temporelle (passé, présent, futur). Les actions signalées par les verbes au plus-que-parfait sont antérieures à celle de l’imparfait « refoulaient ». Il faut donc les placer avant l’imparfait sur l’échelle des temps. Exercice 2 1. Identifiez tous les temps et leur voix. « fut finie » : passé antérieur actif de l’indicatif « renvoya » : passé simple actif de l’indicatif « avait amenés » : plus-que-parfait actif de l’indicatif « demeura » : passé simple actif de l’indicatif « avait attirés » : plus-que-parfait actif de l’indicatif « se fussent retirés » : passé antérieur voix pronominale de l’indicatif 2. Réécrivez cet extrait au présent en respectant la concordance des temps. « Lorsque la sérénade est finie, don Côme renvoie les musiciens chez eux dans les mêmes carrosses qui les ont amenés, et demeure dans la rue avec Domingo, jusqu’à ce que les curieux que la musique a attirés se sont retirés. » Exercice 3 1. Identifiez tous les temps et leur voix. « aiment » : présent actif de l’indicatif « aille » : présent actif du subjonctif « ont » : présent actif de l’indicatif « devienne » : présent actif du subjonctif « prenne » : présent actif du subjonctif « a » : présent actif de l’indicatif 2. Réécrivez cet extrait au passé en respectant de façon stricte la concordance des temps. « D’ailleurs les gens n’aimaient pas trop que [Lalla] allât si souvent voir le Hartani. Peut-être qu’ils avaient peur qu’elle devînt « mejoun » elle aussi, qu’elle prît les esprits malins qu’il y avait dans le corps du berger. » 3. Quel temps le français courant n’aurait pas modifié ? Le présent courant aurait gardé les subjonctifs présents « aille », « devienne » et « prenne »
Exercice 4 1. Donnez le temps et le mode des verbes mis en gras dans ces extraits du roman épistolaire de Laclos, Les Liaisons dangereuses (1782). a. « a » : présent actif de l’indicatif b. « aie eu » : passé actif du subjonctif c. « espérai » : passé simple actif de l’indicatif d. « soit prise » : présent passif du subjonctif e. « avait craint » ; « n’avait pas osé » : plus-que-parfait actif de l’indicatif 2. Puis justifiez le choix du mode. a. L’indicatif « a » indique que le sujet « elle » revendique son indifférence. b. Le subjonctif « aie eu » signale une mise à distance de l’aveu de plaisir par le sujet « je ». c. L’indicatif « espérai » indique que le sujet « je » avoue avoir réellement espérer. d. Le subjonctif « soit prise » manifeste la crainte du sujet « je ». e. Les plus-que-parfaits « avait craint » et « n’avait pas osé » soulignent la certitude de la mère quant à la volonté de sa fille de se faire Religieuse. Exercice 5 1. Repérez puis justifiez l’emploi du passé composé. Le passé composé « a créé » marque l’antériorité de la création par rapport au présent de l’énonciation. 2. Comment expliquez-vous l’emploi des futurs au sein de la concordance des temps ? Les futurs signalent un fait (« n’aura pas ») ou une action (« donnera ») postérieures au présent de l’énonciation. 3. En vous appuyant sur l’ensemble des temps et de leurs rapports, montrez dans un court paragraphe comment le personnage d’Alcmène vit pleinement le moment présent. Les présents employés par Alcmène décrivent ce qu’elle éprouve ou pense au moment où elle parle (« je ne crains pas », « je sens », « je pense », « je le suis »). Elle s’appuie aussi sur des vérités générales (« est », « c’est ») qui échappent à toute temporalité.
7 Les types et les formes de phrases, la ponctuation S’interroger 1. Quels éléments grammaticaux permettent de donner vie à un texte ? Les signes graphiques qui constituent la ponctuation contribuent à donner son sens à un texte. 2. Pourquoi, selon Hervé Bazin, la langue écrite est-elle limitée ? La lecture à voix haute permet d’enrichir le sens d’un texte, d’en faire entendre toutes les subtilités. Selon Hervé Bazin,
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la ponctuation ne suffit donc pas à indiquer tout ce que peut permette l’intonation. Exercice 1 Dites à quel type de phrase est combinée chacune des formes exclamatives. a. une interrogation b. une injonction c. une déclaration d. une interrogation Étude de la langue
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Exercice 2 1. Rétablissez la ponctuation dans cet extrait de la nouvelle de Prosper Mérimée, « Carmen » (1845). – Parlez plus bas, me dit Antonio, au nom de Dieu ! Vous ne savez pas qui est cet homme-là. C’est José Navarro, le plus insigne bandit de l’Andalousie. […] – Bandit ou non, que m’importe ? répondis-je ; il ne nous a pas volés, et je parierais qu’il n’en a pas envie. – À la bonne heure ; mais il y a deux cents ducats pour qui le livrera. […] Que le diable vous emporte ! lui dis-je. Quel mal vous a fait ce pauvre homme pour le dénoncer ? 2. Pourquoi facilite-t-elle la compréhension du passage ? La ponctuation permet de distinguer les différentes prises de parole des personnages et leur intonation. Elle sert aussi à rythmer le texte en contribuant à servir la montée de la tension. Exercice 3 Dans cet extrait du roman d’Henri Barbusse témoignant de la Première Guerre mondiale, repérez les phrases à la forme passive puis transformez-les en phrases actives. – « Les uniformes de ces rescapés sont uniformément jaunis par la terre » : la terre jaunit les uniformes de ces rescapés – « ils sont habillés de kaki » : la couleur kaki les habille – « le drap est tout raidi par la boue ocreuse » : la boue ocreuse raidit le drap – « la capote est serrée et sanglée » : le lieutenant serre et sangle sa capote Exercice 4 1. Réécrivez les phrases de la façon la plus neutre possible en supprimant les marques de l’emphase. a. Cet homme téméraire est le personnage au front chauve.
b. À la Saint-Jean prochaine, mon homme sera mort depuis deux ans. c. J’ai acheté tantôt un bouquet… à une mendiante. d. En effet, des animaux gigantesques étaient là, tout un troupeau de mastodontes, non plus fossiles, mais vivants. e. On a embauché cet homme ce matin. 2. Choisissez l’une de ces phrases pour commencer un court récit qui mettra en scène le personnage dont il est question. Vous veillerez à employer des types de phrase variés. On invitera les élèves à bien tenir compte des données de la phrase choisie pour assurer la cohérence avec leur proposition de suite. Il faut aussi les inviter à pratiquer la réécriture pour améliorer leur texte et l’enrichir des différents types de phrases. Exercice 5 1. Expliquez comment la ponctuation et les types de phrase servent la visée argumentative des quatre premiers vers. Dans les quatre premiers vers, La Fontaine explique la difficulté commune aux femmes et aux hommes à garder un secret. Les points de suspension et les deux points ponctuent chaque étape de l’explication. Après l’énoncé de deux vérités générales juxtaposées (v1 et 2), La Fontaine procède à une généralisation. 2. À quoi servent-elles dans les vers suivants ? La Fontaine recourt au style directe pour dynamiser l’écriture de la fable. Les guillemets, les tirets, les points d’exclamation et d’interrogation rythment l’échange entre le mari et la femme, constitué de courtes répliques. Le texte de la fable est ainsi extrêmement vivant.
8 Les phrases simples et les phrases complexes S’interroger 1. Combien de verbes compte chaque phrase ? La première phrase compte cinq verbes ; la seconde un seul. 2. Comment est appelée chaque phrase d’un point de vue grammatical ? La première phrase est une phrase complexe, la seconde une phrase simple. 3. Laquelle vous semble stylistiquement la plus efficace ? La seconde phrase, qui est la réécriture de la première, parvient à exprimer la même idée d’une façon plus concentrée et plus intense. Exercice 1 1. Quelle nuance de sens percevez-vous dans chaque conjonction de coordination ? a. La conjonction de coordination « et » a une valeur adversative.
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b. La conjonction de coordination « mais » a une valeur de surenchère. c. La conjonction de coordination « et » a une valeur de conséquence. 2. Remplacez chaque conjonction par une autre. a. Ah, de grâce, ne songe plus à tout cela, mais pense à me donner le secours que je te demande. b. Je crois avoir entendu pourtant deux ou trois fois le mot de jolie : et j’ai entendu bien distinctement celui de gauche. c. Le gendarme le pria de se taire, Scipion donc obtempéra de bonne grâce. Exercice 2 1. Pour chaque phrase, isolez la proposition principale et donnez la nature de la proposition subordonnée. a. Chemin faisant (proposition subordonnée participiale) il vit le cou du Chien pelé (proposition principale).
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b. Mes plaintes furent interrompues par une visite (proposition principale) à laquelle je ne m’attendais pas (proposition subordonnée relative). c. Avoue au moins (proposition principale) que tu ne les estimes pas (proposition subordonnée complétive) d. Chaque femme de la plaine (première partie de la proposition principale), tant qu’elle était assez jeune pour être désirée par son mari (proposition subordonnée circonstancielle de temps), avait son enfant chaque année (seconde partie de la proposition principale). 2. Reformulez ces phrases complexes en phrases simples en résumant le contenu des subordonnées par des groupes nominaux. a. Le long du chemin, il vit le cou du Chien pelé. b. Mes plaintes furent interrompues par une visite inattendue pour moi. c. Avoue au moins ton mépris pour lui. d. Chaque femme de la plaine, suffisamment jeune pour être désirée par son mari, avait son enfant chaque année. Exercice 3 1. Relevez les deux subordonnées que contient chaque phrase complexe et donnez leur nature. a. « qu’elle avait cru » (subordonnée complétive conjonctive) – « que c’était M. de Nemours » (subordonnée complétive conjonctive) b. « auquel on dit pour la première fois 3 + 3 = 9 » (subordonnée relative) – « s’il s’agit de pommes ou de moutons » (subordonnée complétive interrogative) 2. Donnez ensuite la nature de la proposition à laquelle se rattache chaque subordonnée. a. La subordonnée « qu’elle avait cru » se rattache à la proposition principale « Elle lui avoua » ; la subordonnée « que c’était M. de Nemours » se rattache à la proposition subordonnée complétive « qu’elle avait cru » b. Les subordonnées « auquel on dit pour la première fois 3 + 3 = 9 » et « s’il s’agit de pommes ou de moutons » se rattache à la proposition principale « L’enfant […] demande aussitôt ». Exercice 4 1. Dans ce portrait de Gavroche, indiquez si chaque phrase est simple ou complexe. Les première, quatrième et cinquième phrases de l’extrait sont complexes puisqu’elles comportent toutes au moins deux verbes. Les deuxième et troisième phrases sont simples car elles ne comportent qu’un seul verbe.
et le parallélisme de construction de la dernière phrase de l’autre, mettent en valeur sa situation d’orphelin. Chaque proposition agit comme un coup porté à l’enfant. Exercice 5 1. Combien de propositions comptent ces deux débuts de roman ? a. Le premier extrait compte cinq propositions. b. Le second extrait compte trois propositions. 2. Quelle est la nature de ces propositions ? a. « Durant les nuits d’hiver, le bruit ne cesse dans la rue Saint-Honoré que pendant un instant « : proposition indépendante juxtaposée « les maraichers y continuent […] le mouvement » : proposition indépendante et principale juxtaposée « en allant à la Halle » : proposition subordonnée participiale « qu’ont fait les voitures » : proposition subordonnée relative « qui reviennent du spectacle ou du bal » : proposition subordonnée relative. b. « Depuis la veille, l’œillard de l’étang, grand ouvert, tirait » : proposition indépendante juxtaposée « cela faisait à la surface de l’eau un entonnoir aux parois luisantes, un tourbillon tranquille et fort, si continument régulier » : proposition indépendante et principale juxtaposée « qu’il apparaissait immobile » : proposition subordonnée circonstancielle de conséquence. 3. Comment sont-elles liées les unes aux autres ? a. Les indépendantes sont reliées par un point-virgule. Les subordonnées sont reliées à la proposition principale par une préposition « en » et par les deux pronoms relatifs « qu’ » et « qui ». b. Les indépendantes sont reliées par deux points. La subordonnée est reliée à la proposition principale par le corrélatif « si » et la conjonction de subordination « que ». 4. D’après la construction des phrases, quelle est, selon vous, l’intention des deux romanciers ? a. Par la longueur et la complexité de la phrase, Balzac cherche à plonger le lecteur dans l’atmosphère mouvementée des nuits d’hiver parisiennes. b. De la même façon, Genevoix recourt à une phrase longue et complexe pour amener le lecteur à plonger son regard au milieu de l’étang et à le fixer sur le tourbillon intriguant qui occupe son centre.
2. Quelles remarques pouvez-vous faire sur l’organisation des phrases complexes ? Les première et quatrième phrases sont des phrases coordonnées par les conjonctions « mais » et « et ». La cinquième phrase comporte deux propositions subordonnées relatives. 3. Commentez dans un court paragraphe les effets que tire Hugo de la construction et de l’enchainement des phrases. Hugo dresse un portrait pathétique de l’enfant (Gavroche). Les balancements antithétiques marqués par la reprise des conjonctions de coordination « mais » et « et » d’une part,
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9 Les propositions subordonnées relatives
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S’interroger
Exercice 4
1. Comment se nomment les propositions subordonnées introduites par le mot « qui » ? Les propositions subordonnées introduites par le mot « qui » sont des propositions subordonnées relatives.
1. Relevez toutes les subordonnées relatives dans ces extraits, et dites à quelle proposition elles se rattachent. a. – La subordonnée relative « où quatre caissiers gardaient les deux coffres-forts géants » se rattache à la proposition principale « [Mouret] redescendait, visitait la caisse centrale ». – La subordonnée relative « dans lesquels venaient de passer, l’année précédente, quatre-vingt-huit millions. » se rattache à la subordonnée relative « où quatre caissiers gardaient les deux coffres-forts géants » – « qui occupait vingt-cinq employés, choisis parmi les plus sérieux » se rattache à la proposition principale « il donnait un coup d’œil au bureau de la vérification des factures ». b. Les subordonnées « qui s’arrêtait et dans laquelle on chargeait en hâte des paquets » se rattachent à la proposition principale « Chez Giraudat, on avait entendu, vers deux heures du matin, une carriole » – La subordonnée « qui tombaient mollement » se rattache à la subordonnée relative « dans laquelle on chargeait en hâte des paquets ».
2. Se rattachent-elles toutes à la proposition principale ? La première proposition relative se rattache à la principale, les autres dépendent chacune de la subordonnée relative qui la précède. 3. En quoi consiste l’exercice de style pratiqué par Queneau ? Queneau a intitulé cet exercice de style « Polyptotes ». Le polyptote consiste à utiliser les mots d’une même famille, en l’occurrence « contribuer ». L’enchâssement des subordonnées relatives amplifie le polyptote en amplifiant l’effet de boucle. Exercice 1 Dans ces extraits des Liaisons dangereuses de Choderlos de Laclos (1782), associez le pronom relatif de forme simple à son antécédent, puis donnez sa fonction. a. Les pronoms relatifs « dont » et « qui » ont pour antécédent le nom « Monsieur » et ont respectivement pour fonction COI du verbe « ai parlé » et complément circonstanciel d’accompagnement. b. Les pronoms relatifs « qui » et « quoi » ont pour antécédent le nom « idées » et ont respectivement pour fonction sujet du verbe « tourment » et complément circonstanciel de lieu. c. Les pronoms relatifs « que » ont pour antécédent le nom « lettre » et ont respectivement pour fonction COD des verbes « joins », « lirez » et « remettez ». d. Le pronom relatif « qui » a pour antécédent le nom « raisons » et a pour fonction sujet du verbe « retiennent ». Attention ! « où » n’est pas ici un relatif mais un interrogatif. Exercice 2 Dans ces extraits de pièces de théâtre de Racine, dites pour tous les « que » s’ils sont pronom relatif ou conjonction de subordination. a. pronom relatif b. pronom relatif – conjonction de subordination – conjonction de subordination c. conjonction de subordination d. pronom relatif – conjonction de subordination Exercice 3 Quelle est la particularité de ces subordonnées relatives extraites des Fables de La Fontaine ? Comment l’expliquez-vous ? Les pronoms relatifs (« qui », « qui », « quiconque ») de ces subordonnées relatives n’ont pas d’antécédent. Ces phrases se présentent en sous la forme de proverbe ou de vérité générale, d’où l’absence d’antécédent.
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2. Indiquez si elles sont déterminatives ou explicatives. a. « où quatre caissiers gardaient les deux coffres-forts géants » : relative explicative « dans lesquels venaient de passer, l’année précédente, quatre-vingt-huit millions. » : relative explicative « qui occupait vingt-cinq employés, choisis parmi les plus sérieux » : relative explicative b. « qui s’arrêtait » : relative déterminative « dans laquelle on chargeait en hâte des paquets » : relative déterminative Exercice 5 1. Relevez toutes les subordonnées relatives et leurs antécédents. Sont-elles déterminatives ou explicatives ? Subordonnée – « dont je voyais […] Milly » – « dont les voyageurs […] images » – « dont j’avais […] Goethe » – « dont mes études […] pensée » – « qui jette […] éloignées » – « que l’imagination […] d’avance » – « qui semble […] nouveau »
Antécédent – les Alpes – la mer – le ciel italien – cette Antiquité romaine – la distance – les aventures – le changement de langue
Type – déterminative – déterminative – déterminative – déterminative – déterminative – déterminative – déterminative
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2. Après avoir isolé la proposition principale, dites quel mot reprend tous les antécédents des relatives. La proposition principale est « tout cela fascinait mon esprit ». Le pronom indéfini « tout » reprend tous les antécédents des relatives.
3. En quoi les relatives permettent-elles de traduire l’émotion de l’auteur ? L’énumération des objets de fascination et leur développement systématique par des subordonnées relatives restituent chaque mouvement de l’âme qui ont animé l’auteur au moment de leur découverte. La longueur de la phrase vise à maintenir dans un temps suspendu le flot des émotions.
10 L’expression de la condition S’interroger 1. Quelle est la nature du mot sur lequel repose l’anaphore ? Quelle circonstance introduit-il ? L’anaphore repose sur la conjonction de subordination « si » qui introduit une proposition subordonnée de condition. 2. Que pensez-vous des hypothèses envisagées par Tardieu ? À travers la succession des hypothèses, Jean Tardieu souligne le pouvoir créateur des arts, et notamment de la poésie, qui peuvent s’affranchir du réel pour mieux l’interroger. Exercice 1 1. Dites quelle est la fonction des groupes prépositionnels en gras dans les phrases. Tous les groupes prépositionnels en gras sont des compléments circonstanciels de condition. 2. Reformulez la condition en utilisant des propositions conjonctives. a. « s’il n’y a pas de grand scandale » b. « si nous sommes malades » c. « si c’est l’hiver ou les gros temps » d. « s’il en avait le désir » Exercice 2 1. Mettez les verbes au temps qui convient. a. pouvais b. n’avait pas été pendu c. soyez préféré d. éclatait 2. Déterminez la nuance indiquée par la proposition subordonnée de condition. a. Le potentiel b. L’irréel du passé c. L’éventuel d. L’irréel du présent
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b. « S’il s’agissait d’un repas, Athos l’ordonnait mieux qu’aucun homme du monde, plaçant chaque convive à la place et au rang que lui avaient faits ses ancêtres ou qu’il s’était faits lui-même ». c. « Gervaise, retombée sur la chaise, se plaignait doucement, par courtes phrases. […] si tu recommences, je deviendrais folle… ». Exercice 4 1. Repérez les moyens grammaticaux exprimant la condition. Donnez la nuance de chaque condition. – « à moins que l’enflure de l’amour-propre ne le gagne. » : proposition subordonnée circonstancielle exprimant l’éventuel – « Si sa cervelle tient bon et qu’il ne soit pas emporté par un coup de tête, » : propositions subordonnées circonstancielles exprimant l’éventuel – « Il doit promptement croitre ou décroitre ; il y a des chances pour que M. Thiers devienne un grand ministre ou reste un brouillon. » : deux propositions juxtaposées exprimant l’éventuel – « s’il eût donné l’ordre d’attaquer la flotte anglaise, supérieurs en force comme nous l’étions alors dans la Méditerranée » : proposition subordonnée circonstancielle exprimant l’irréel du passé 2. Montrez comment l’expression de la condition contribue à dresser un portrait satirique d’Adolphe Thiers, président du Conseil des ministres en 1836. Chateaubriand dresse un portait à charge contre Thiers. Il recourt à une série de propositions subordonnées qui envisagent comme comiques les éventuelles évolutions du caractère et de la carrière de l’homme politique. La dernière subordonnée de condition constitue un jugement sévère de la politique étrangère du président du Conseil que Chateaubriand considère comme un échec.
Exercice 3 Réécrivez ces phrases en rendant l’expression de la condition explicite. a. « À supposer que je vous parle franchement, notre métier [de médecin] auprès des grands ne m’a jamais paru agréable ». Étude de la langue
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11 L’expression de la cause S’interroger 1. Relevez toutes les causes exprimées par les personnages. Par quels mots sont-elles introduites ? Les causes sont exprimées par des propositions subordonnées : « parce que mon mari disait… », « puisque le pompier est là. », « puisque la quatrième ne compte pas. ». Elles sont introduites par la locution conjonctive « parce que » et la conjonction de subordination « puisque ». 2. Les rapports entre les faits et leurs causes vous semblent-ils logiques ? Si dans la réalité il peut y avoir un rapport logique entre le fait d’entendre sonner et la présence d’un individu derrière la porte, thèse défendue par M. Smith, la logique défendue par Mme Smith défie la logique. Pour elle, le fait de sonner signale l’absence de quiconque derrière la porte. Cette mise à mal de la logique participe de la déconstruction du langage à laquelle procède Ionesco, dramaturge de l’absurde. Exercice 1 Repérez les propositions subordonnées conjonctives compléments circonstanciels, puis exprimez la cause par un autre moyen de votre choix. a. « Puisqu’il en est question » : À cause de cela b. « Parce que vous êtes un grand seigneur » : en raison de votre statut de grand seigneur c. « Attendu que le prévenu […] objecte du droit absolu … le sien » : en raison de l’objection par le prévenu du droit absolu… Exercice 2 1. Repérez les moyens d’exprimer la cause et donnez leur nature grammaticale. a. « puisque la reine m’aime » : proposition subordonnée circonstancielle b. « faute d’argent » : groupe prépositionnel c. « Comme il n’y a jamais eu de cérémonie qui ne fût suivie d’un grand diner » : proposition subordonnée circonstancielle d. « grâce à notre sénat » : groupe prépositionnel e. « sous prétexte qu’il fallait faire place nette pour accueillir le nouvel instituteur » : proposition subordonnée circonstancielle 2. Déterminez la nuance de la cause exprimée. a. cause certaine b. cause négative c. cause neutre d. cause positive e. cause prétextée Exercice 3 1. Repérez l’expression de la cause dans ces extraits du roman de Maupassant Bel-Ami (1885). a. « à la suite d’une bronchite que j’ai attrapée à Bougival, l’année de mon retour à Paris » b. « faute de pain »
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> pp. 314-315 c. « par crainte des courants d’air » d. « sous prétexte de fatigue » 2. Donnez la nature grammaticale des mots qui l’introduisent. Tous les compléments circonstanciels de cause sont introduits pas des locutions prépositionnelles (à la suite de, faute de, par crainte de, sous prétexte de). 3. Réécrivez les phrases à l’aide de propositions subordonnées de même sens. a. parce que j’ai attrapée une bronchite à Bougival, l’année de mon retour à Paris b. vu qu’ils manquent de pain c. dans la mesure où il craignait des courants d’air d. sous prétexte qu’il était fatigué Exercice 4 1. Par quel moyen implicite est exprimée la cause dans ces deux extraits de pièce de théâtre de Racine ? a. « Craignant toujours pour vous quelque nouveau danger… » : proposition subordonnée participiale b. « Je connais votre cœur : … » : juxtaposition 2. Reformulez les phrases en rendant la cause explicite et en adoptant un niveau de langue courant. a. Combien j’ai pleuré vos malheurs parce que je craignais toujours pour vous un nouveau danger que je ne pouvais partager avec vous, malgré mon amitié b. Parce que je connais vos sentiments, vous devez vous attendre que je le frapperai à l’endroit le plus tendre Exercice 5 1. Distinguez la cause explicite de la cause implicite. Cause explicite « car on ne forçait personne » « comme disait M. Verdurin » « non que cette musique lui déplût » « parce qu’elle lui causait trop d’impression »
Cause implicite « … : on avait chez eux « son couvert mis » »
2. Reformulez cette cause à l’aide du subordonnant « parce que ». Les Verdurin n’invitaient pas à diner parce qu’on avait « son couvert mis ». 3. Expliquez l’attitude de Mme Verdurin en vous appuyant sur l’expression de la cause. Le lecteur perçoit que c’est Madame Verdurin qui organise et orchestre ses dîners. C’est elle qui choisit ses convives, comme l’indique l’expression implicite de la cause dans la première phrase. C’est elle qui, en dépit de l’apparente liberté, les morceaux de musique, comme l’indique cette fois l’opposition des subordonnées de cause dans la dernière phrase.
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Exercice 6 Écrivez à un proche une lettre d’invitation à une soirée. Vous donnerez en trois paragraphes argumentés toutes les raisons qui vous poussent à organiser cet évènement. Vous penserez à varier les moyens d’exprimer la cause. Ce sujet d’invention suppose un nécessaire travail au brouillon pour recenser et organiser les motivations. Il faut aussi
rappeler aux élèves de tenir compte des codes épistolaires (date, adresse, nature et statut du destinataire, formule de politesse). Enfin, l’exercice suppose une bonne maitrise de la leçon portant sur la cause dont il s’agit de faire varier l’expression.
12 L’expression de la conséquence
> pp. 316-317
S’interroger
Exercice 2
1. Dressez la liste des causes et des effets qui en découlent.
1. Lisez attentivement ces extraits et dites si la conséquence est exprimée de façon explicite ou implicite. a. conséquence implicite b. conséquence implicite c. conséquence explicite d. conséquence explicite e. conséquence explicite
Causes – « tout est fait pour une fin » – nous avons des nez – nous avons des jambes – les pierres ont été créées – quand on est le plus grand baron – les cochons ont été créés
Effets « tout est nécessairement pour la meilleure fin » – nous portons des lunettes – nous portons des chausses – nous les taillons et en faisons des châteaux – on doit être le mieux logé – pour que nous les mangions
2. Que pensez-vous des rapports logiques qui les lient ? Pangloss établit de faux rapports logiques entre les causes et les effets qu’il énumère. Il accumule les sophismes qui n’ont de logique que la répétition d’une même construction grammaticale. Il ne démontre pas ce qu’il tient d’emblée pour une vérité. 3. Qu’en déduisez-vous sur le regard que Voltaire porte sur son personnage ? Voltaire tourne en ridicule ce personnage de savant. Il met à jour la fausseté de ces connaissances en même temps que le danger qu’il peut y avoir à s’appuyer fermement sur ce qui parait logique. Exercice 1 Repérez les propositions subordonnées conjonctives compléments circonstanciels, puis exprimez la conséquence par un autre moyen de votre choix. a. « de façon à ce qu’il pût le prendre » : de manière à lui faire prendre b. « tant … que l’individu se trouve obligé de combattre la Société » : c’est pourquoi l’individu se trouve obligé de combattre la Société c. « au point qu’il ne voyait même déjà plus le soleil » : jusqu’à ne même plus voir déjà le soleil d. « de sorte que […] l’on aurait fait le monde à son gré » : ainsi […] l’on aurait fait le monde à son gré
2. Exprimez clairement le rapport entre la cause et sa conséquence en commençant par la formule « C’est parce que… que… ». a. C’est parce qu’il n’y avait rien d’intéressant que Chick sortit de la boutique. b. C’est parce que vous chantiez, j’en suis fort aise, que vous danserez maintenant. Exercice 3 1. Repérez dans ces vers du théâtre classique la partie des phrases qui exprime la conséquence. a. « Ne parlons plus ici de Claude, et d’Agrippine » b. « L’un me semble trop bon, l’autre trop inhumaine » c. « Je n’y puis plus tenir, j’enrage, et mon dessein / Est de rompre en visière à tout le genre humain 2. Reformulez-les en français courant de manière à faire apparaître l’expression de la conséquence. a. Ma mère a ses projets, Madame, et j’ai les miens si bien que nous ne devons plus parler ici de Claude et d’Agrippine. b. Emilie et César me gêne l’un et l’autre de sorte que l’un me semble trop bon, l’autre trop inhumaine. c. Quand je vois vivre entre eux les hommes comme ils font, je ne peux plus résister, je suis en colère, et mon projet est de rompre toute relation avec le genre humain. Exercice 4 Expliquez en quelques lignes l’effet recherché par le poète en analysant l’expression de la conséquence. Agrippa d’Aubigné dénonce l’horreur de la guerre civile. Les subordonnées de conséquence (« si bien que leur courroux par leurs coups se redouble », « si furieux / Que d’un gauche malheur ils se crèvent les yeux ») montrent le déchainement d’une violence sans limite qui fait s’entre-tuer même des frères. Par ses images baroques, le poète veut frapper de stupeur le lecteur, le faire réagir contre un crime contre l’humanité. Étude de la langue
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13 L’expression du but
> pp. 318-319
S’interroger
Exercice 3
1. Listez ce qui motive les départs en vacances. Liste des motivations des départs en vacances : voir beaucoup de choses, en parler, passer le temps.
1. Par quel moyen implicite est exprimé le but ? a. deux propositions subordonnées relatives b. une proposition subordonnée circonstancielle introduite par une locution conjonctive elliptique qu’au lieu de pour que
2. Par quels mots sont exprimées ces motivations ? Les motivations sont exprimées par des groupes prépositionnels (avec le désir de voir, pour en parler, pour eux, pour réellement voir). 3. En vous appuyant sur le titre de son ouvrage, dites quel regard porte le philosophe Alain sur elles. Alain déplore que ce qui motive les départs en vacances tient moins dans le désir de vraiment découvrir un ailleurs ou un autre que dans la recherche d’un faire-valoir social auprès de ses semblables. Exercice 1
2. Reformulez les phrases en rendant la cause explicite et en adoptant un niveau de langue courant. a. Et comme dans toutes les comédies anciennes on voit toujours un valet farceur pour qu’il fasse rire les auditeurs, comme aujourd’hui dans toutes nos pièces, il faut toujours un marquis ridicule pour qu’il divertisse le public. b. Donne-moi la main pour que je la serre, comme dans cette époque de joie et de misère Exercice 4
1. Repérez et recopiez les compléments circonstanciels de but dans ces phrases de Victor Hugo. a. « afin qu’on l’exécute demain matin au plus tard » b. « pour se venger », « pour améliorer » c. « afin qu’il y eût le plus de regards possible sur son passage »
1. Repérez l’expression du but dans ces extraits des Illusions perdues (1837-1843) de Balzac. a. « afin qu’il puisse mettre au moins deux articles par mois » b. « pour battre son voisin » c. « pour que le nouveau directeur croie la chose faite d’hier » d. « qui pussent vous satisfaire »
2. Transformez les groupes prépositionnels en propositions subordonnées conjonctives et les subordonnées en groupes prépositionnels. a. pour une exécution demain matin au plus tard b. pour qu’elle se venge, pour qu’elle améliore c. pour avoir le plus de regards possible sur son passage
2. Donnez la nature des mots qui l’introduisent. a. afin que : locution conjonctive b. pour : préposition c. pour que : locution conjonctive d. qui : pronom relatif
3. D’après vous, qu’est-ce qui a motivé Victor Hugo au moment où il écrivit ces phrases ? Victor Hugo a lutté pour l’abolition de la peine de mort. Par l’emploi de l’expression du but, il veut faire réfléchir ses contemporains sur les finalités de cette peine, sur sa prétendue efficacité. Exercice 2 1. Déterminez la nuance du but exprimée dans chacune de ces phrases. a. but à atteindre b. but à éviter c. but à éviter d. but à atteindre 2. Restituez cette nuance en reformulant l’expression du but par un autre moyen de votre choix. a. « pour que je trouve bon secours en vous » b. de crainte d’entendre la maladie me dire c. comme de peur que ce regard ne s’enfonçât plus avant d. pour que je n’aie plus devant les yeux un visage bougon
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3. Quelle image est renvoyée du monde de la presse au xixe siècle ? Balzac peint le milieu de la presse du xixe siècle comme un monde d’ambitieux et d’arrivistes qui s’embarrassent peu de scrupules, comme le dénoncent toutes les expressions du but contenues dans les phrases. Exercice 5 1. Comment est exprimé le but dans cet extrait célèbre ? Le but est exprimé par des groupes infinitifs prépositionnels qui sont tous construits de la même façon. 2. Dans un paragraphe organisé, expliquez en quoi l’expression du but sert à dramatiser la fin du conte. Le Loup déguisé en mère-grand ne s’embarrasse pas de longs discours pour répondre au Petit Chaperon Rouge. Il utilise un présentatif et donne immédiatement la finalité de chaque partie de son anatomie qui renvoie explicitement à la prédation : « pour mieux courir », « pour mieux écouter », « pour mieux te voir », « pour mieux te manger ». Ces finalités obéissent donc à une gradation qui manifeste l’impatience dévoratrice du Loup et nourrit la tension dramatique.
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14 L’expression de la comparaison S’interroger 1. Quelle principale figure de style utilise le poète pour qualifier le regret du pays natal ? Joachim du Bellay recourt à la comparaison pour exprimer son regret. 2. Comment est-elle construite grammaticalement ? L’expression de la comparaison est construite de deux manières : au moyen de la conjonction de subordination « comme » et au moyen du comparatif « plus… que ». Exercice 1 1. Identifiez la nature des mots qui expriment la comparaison. a. comme : conjonction de subordination b. autant que : locution conjonctive de subordination c. semblables : adjectif qualificatif d. de plus … que : conjonction de subordination en corrélation 2. Réécrivez les phrases en formulant la comparaison par un autre moyen de votre choix. a. « Je suis Déesse, autant que tu es Dieu : mon nom est Folie. b. L’amour que j’ai pour toi tourne en haine pour elle : l’un fut grand comme l’autre sera cruelle c. Il n’y a ni deux feuilles d’arbre sur la terre, ni deux globes dans les champs infinis du ciel qui se ressemblent. d. Donc je ne suis qu’un animal de rien du tout, les hommes diraient une bête sauvage, comme si on ne comptait pas une bêtise et une sauvagerie supérieure à la nôtre dans l’espèce. Exercice 2 1. Repérez l’expression de la comparaison dans ces extraits des Trois Mousquetaires d’Alexandre Dumas (1844). a. « Tel maitre, tel valet » b. « pareil à celui que vous avez montré à cette femme qui était chez lui » - « pour un mouchoir marqué de la même manière » c. « plus facile à équiper que messieurs les mousquetaires » d. « comme ferait un homme qui se réveillerait après un somme de cent ans » e. « comme si vous étiez aux arrêts » f. « mieux que la veille »
> pp. 320-321
3. Identifiez la nature de la comparaison exprimée. a. L’égalité b. L’équivalence c. L’inégalité d. L’équivalence e. L’équivalence f. L’inégalité Exercice 3 1. Identifiez-la (les) circonstance(s) exprimée(s) par les subordonnants dans ces extraits du conte philosophique de Voltaire, Candide (1759). a. La conséquence b. La comparaison c. La conséquence d. La cause 2. Récrivez chaque phrase en utilisant un autre subordonnant pour distinguer la comparaison des autres circonstances. a. Candide avait amené de Cadix un valet de telle sorte qu’on en trouve beaucoup sur les côtes d’Espagne et dans les colonies. b. Candide, qui tremblait à la manière d’un philosophe, se cacha avec la meilleure manière qu’il put pendant cette boucherie héroïque. c. Les trompettes, les fifres, les hautbois, les tambours, les canons, formaient une harmonie de telle sorte qu’il n’y en eut jamais en enfer. d. Parce qu’il avait au doigt un diamant énorme, et qu’on avait aperçu dans son équipage une cassette prodigieusement pesante, il eut aussitôt auprès de lui deux médecins qu’il avait mandés. » Exercice 4 Comme du Bellay, évoquez le souvenir d’un lieu que vous aimez en le comparant à d’autres dans lesquels vous vous sentez moins bien. Vous veillerez à employer les différentes nuances de la comparaison. On invitera les élèves à recenser au brouillon les éléments de comparaison en recensant les qualités, les émotions ou les éléments positifs attachés au lieu aimé, à classer ces éléments de comparaison selon une gradation susceptible d’émouvoir le lecteur. On invitera les élèves à varier et à nuancer l’expression de la comparaison.
2. Donnez la nature des mots qui l’introduisent. a. tel… tel : conjonctions de subordination en corrélation b. pareil à : adjectif qualificatif - de la même manière : préposition c. plus… que : conjonction de subordination en corrélation d. comme : conjonction de subordination e. comme si : locution conjonctive de subordination f. mieux que : locution conjonctive de subordination
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15 L’expression de l’opposition et la concession S’interroger 1. Relevez les marques de la concession. Les marques de la concession : « bien qu’ayant des oreilles », « cependant », « quel qu’il fût », « Sans que pour tout ce culte à son hôte échût… » 2. Que nous apprennent-elles sur l’attitude du païen ? Le païen manifeste tout d’abord un esprit vénal. Il honore l’idole pour son propre compte et à des fins toutes matérielles. Il fait preuve de bêtise ensuite : il s’entête à honorer une idole qui pourtant ne lui donne rien en retour, comme le signale l’expression de la concession. Exercice 1 Relevez et expliquez pour chaque cas ce qui, selon vous, relève de l’expression de l’opposition ou de l’expression de la concession. a. Le personnage féminin a été empêchée de dormir. Il s’agit donc d’une contrariété exprimée par la concession. b. Le personnage vit malgré son grand âge. Il s’agit d’une contradiction exprimée par l’opposition. c. Julien s’occupe autant de son avenir que de son apparence extérieure. Il s’agit donc d’un compromis exprimé par la concession. d. Malgré sa situation critique au milieu du désert, l’aviateur se met à dessiner. Il s’agit d’un paradoxe exprimé par la concession. 2. Réécrivez ces phrases en introduisant l’opposition ou la concession par des mots d’une nature grammaticale différente. a. La nuit se passa tout entière alors même qu’elle ne put fermer un moment la paupière. b. Il vit encore, malgré son âge avancé, et il use le reste de ses jours à travailler pour s’enrichir. c. Julien était ivre d’ambition et non pas de vanité, donnant cependant une grande part de son attention à l’apparence extérieure. d. Bien que cela me semblât très absurde à mille milles de tous endroits habités et en danger de mort, je sortis de ma poche une feuille de papier et un stylographe. Exercice 2 1. Repérez les propositions subordonnées conjonctives compléments circonstanciels. a. « sans qu’elle le sache » b. « quoiqu’on t’ait rien pris » c. « bien qu’il le soit pas encore » d. « tout petit qu’il est » e. « quand même nous n’y pensons pas » 2. Reformulez les phrases pour exprimer la concession, d’abord au moyen d’un adverbe, puis au moyen d’un groupe prépositionnel. a. On la tient prisonnière, et cependant elle ne le sait pas. – Sans le savoir, on la tient prisonnière
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> pp. 322-323
b. Car toi, Loup, tu te plains, on ne t’a pourtant rien pris. Car toi, Loup, tu te plains en dépit de tout vol. c. Dites mon mari ; car, vous le regardez comme tel et pourtant il ne l’est pas encore. - Dites mon mari ; car, à défaut de l’être déjà, vous le regardez comme tel. d. Souvent à son âge un enfant dans sa position comprend qu’il faut plaire, et se met, pourtant tout petit, à jouer un rôle. - Souvent à son âge un enfant dans sa position comprend qu’il faut plaire, et se met, malgré sa petitesse, à jouer un rôle. e. Les objets du dehors nous tentent d’eux-mêmes, et nous appellent, toutefois nous n’y pensons pas. - Les objets du dehors nous tentent d’eux-mêmes, et nous appellent, sans y penser. Exercice 3 1. Repérez dans les extraits l’expression implicite de la concession. a. La concession est exprimée par la juxtaposition. b. La concession est exprimée par la juxtaposition (« Vous êtes discrète et vous n’êtes point défiante » et la coordination (« vous aimez vos amis, et vous ne vous faites point d’ennemis ») À noter que « sans être faible » est un complément circonstanciel de concession explicite ! c. La concession est exprimée par un participe (« se croyant laide ») d. La concession est exprimée par la coordination. 2. Rendez explicite la concession en les introduisant par la conjonction de subordination « bien que ». a. Bien que tout vous soit Aquilon, tout me semble Zéphyr. b. Vous êtes discrète, bien que vous ne soyez pas défiante ; vous êtes douce sans être faible ; vous êtes bienfaisante avec discernement ; vous aimez vos amis bien que vous ne vous fassiez point d’ennemis. c. Si humble, bien qu’elle se croie laide, elle a donné sa beauté, son charme à toute la nature. d. On leur avait construit des maisons bien qu’ils vécussent dehors. Exercice 4 1. Relevez les marques de la concession. – « quoique déclarée par la justice plus que suffisante pour en acquitter les dettes » – « quelque peu considérables qu’ils fussent » 2. Quel effet produisent-elles dans la construction de la phrase ? Les subordonnées circonstancielles de concession alourdissent la phrase par les digressions qu’elles occasionnent. 3. Appuyez-vous sur l’expression de la concession pour expliquer, dans un paragraphe organisé, les difficultés évoquées par Bernardin de Saint-Pierre. La longueur de la phrase, qui donne dans le détail le déroulement et les circonstances de la succession de ses parents,
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en traduit à la fois le caractère complexe et en même temps l’esprit procédurier auquel Bernardin de Saint-Pierre a dû se livrer. Les deux subordonnées concessives soulignent
l’acharnement des créanciers malgré la conformité de la procédure et le peu de bien en jeu.
16 L’histoire des mots
> pp. 324-325
S’interroger
Exercice 3
1. François Rollin donne l’étymologie de deux mots, lesquels ? François Rollin donne l’étymologie du verbe « mithridatiser » et de l’épithète « Eupator ».
1. Cherchez le sens des mots ou groupes de mots signalés en gras dans ce texte de la Renaissance. aucuns : certains ; rien moins que : nullement ; déprisent : déprécient ; stoïque : de l’air méprisant d’un philosophe stoïcien ; émerveiller : étonner ; vulgaire : langue maternelle
2. Comment ces deux mots sont-ils construits ? Le verbe « mithradiser » est formé à partir du nom du roi Mithridate, l’épithète « Eupator » est constitué des mots grecs « eu », qui signifie « bien », et « pator » qui vient du mot « pater » signifiant « père ». Exercice 1 1. Retrouvez les doublets et associez-les au mot latin dont ils sont issus. apprehendere : apprendre/appréhender ; auscultare : écouter/ausculter ; captivus : chétif/captif ; causa : chose/cause ; computare : conter/compter ; directus : droit/direct ; fastidiosus : fâcheux/fastidieux ; fragilis : frêle/fragile ; hospitale : hôtel/hôpital ; ministerium : métier/ministère ; navigare : nager/naviguer ; potio : poison/potion ; pietas : pitié/piété ; rigidus : raide(roide)/rigide ; votum : vœu/vote Exercice 2 1. Cherchez le sens des mots signalés en gras dans ce poème du Moyen Âge. pavillon : tente tresgente : très noble émerillon : faucon de petite taille et rapide pour la chasse bailla : donna, piqua 2. Lesquels ont disparu ? Lesquels ont pris d’autres sens ? Le pavillon dans le sens de tente militaire a disparu. Un pavillon désigne aujourd’hui le drapeau que l’on hisse sur un bateau pour en indiquer la nationalité. L’adjectif gent(e) a complètement disparu. Le terme émerillon est un terme de fauconnerie devenu rare, puisque ce mode de chasse a disparu. Le verbe bailler dans le sens de donner a disparu. 3. À quelle métaphore filée participent ces mots ? Charles d’Orléans file une métaphore cynégétique (relatif à la chasse) pour décrire la manière dont il a été saisi par l’amour de sa dame. Son pavillon (tente) fut pour lui un piège, sa bougie un instrument de torture, son amour un aiguillon.
2. Lesquels ont disparu ? Lesquels ont pris un autre sens ? Le sens positif de l’indéfini « aucun » est plus rare et s’accompagne aujourd’hui de l’adverbe négatif « ne ». La périphrase « rien moins que » n’a plus le sens de « nullement ». Le verbe « dépriser » est d’un usage très rare et littéraire. L’adjectif « stoïque » a perdu sa valeur méprisante et signifie « inébranlable, ferme ». Le sens du verbe « émerveiller » s’est renforcer et signifie « frapper d’étonnement et d’admiration ». Le sens du nom « vulgaire » est devenu péjoratif et désigne « le commun des hommes, la foule ». 3. En vous aidant du titre de son ouvrage et des mots recherchés, dites quel est le but que se fixe du Bellay. Joachim du Bellay participe au mouvement de la Pléiade qui cherche à promouvoir le français, langue maternelle (« vulgaire »), comme langue littéraire. Il entreprend de la défendre et de l’enrichir comme l’indique le titre de son ouvrage pour que ses contemporains ne s’étonnent plus (« émerveiller ») devant son usage. Exercice 4 1. En vous aidant du contexte et au besoin d’un dictionnaire, proposez une définition ou un synonyme des mots hérités de la langue classique et signalés en gras dans les extraits. a. abhorre : déteste au plus haut point b. traits : coups ; animosité : haine c. courroux : colère d. dessein : projet, plan e. fourbes : déloyaux, hypocrites ; fomenteront : susciteront f. funestes : qui annoncent la mort ; apprêts : préparatifs g. idolâtre : qui aime et honore comme une divinité 2. Imaginez une phrase dans laquelle le sens du mot apparaisse clairement. a. Nous abhorrons cet homme qui s’est rendu coupable de crimes contre l’humanité. b. L’animal est tombé sous les traits des chasseurs. - Que t’ai-je fait ? Pourquoi me poursuis-tu d’une telle animosité ? c. Dans la mythologie, les hommes subissent souvent le courroux des dieux. d. Je te vois pensif : à quel dessein songes-tu ? Étude de la langue
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e. En grandissant, il faut apprendre à se méfier des individus fourbes. f. Le chat noir ou les cris du hibou sont considérés par les superstitieux comme de funestes présages. - Nous avons réalisé tous les apprêts ; la cérémonie peut commencer. g. Elle était pour moi comme une déesse que j’idolâtrais. Exercice 5 1. D’après Diderot, de quelle langue vient le mot « spleen » ? Le mot « spleen » vient de la langue anglaise.
2. En synthétisant le texte, proposez une définition simple de ce mot. Le spleen est un état de profonde mélancolie et de profond dégout de toute chose. 3. Quel poète du xixe siècle a rendu populaire ce mot dans la langue française ? Il s’agit de Charles Baudelaire dont une section de son recueil des Fleurs du Mal (1857), s’intitule « Spleen et Idéal ». 4. Quel(s) mot(s) le remplace(nt) aujourd’hui dans la conversation courante ? Aujourd’hui, on parle d’ennui, de cafard, de déprime, de dépression…
17 La construction des mots
> pp. 326-327
S’interroger
Exercice 2
1. En vous aidant au besoin d’un dictionnaire, dites comment les mots signalés en gras sont formés. Péninsule est constitué de deux mots latins paene signifiant « presque » et insula signifiant « île » ; parasol est issu du latin parasole, lui-même composé de la préposition grecque para signifiant « contre » et sole signifiant « soleil » ; Hippocampelephantocamélos est un mot inventé par Rostand dans l’esprit d’Aristophane et composé de trois noms grecs d’animaux hippocampe, éléphant, chameau.
Classez ces mots selon que le préfixe dé- indique soit une séparation, une négation (variante dés-, dis-), soit une intensité. Vous prendrez soin de souligner le préfixe et chercherez le sens des mots que vous ne connaissez pas.
2. De quelles langues proviennent-ils ? Péninsule vient du latin, parasol vient à la fois du grec et du latin, Hippocampelephantocamélos du grec. 3. Comment expliquez-vous qu’ils soient tous les trois placés à la rime ? Cyrano manie aussi habilement l’épée que l’alexandrin. C’est ce qu’il montre dans la fameuse tirade où il s’amuse à imaginer toutes les manières dont son adversaire aurait pu qualifier son nom. Voilà pourquoi il s’emploie à mettre ces qualificatifs grotesques à la rime. Exercice 1 Classez ces mots selon que le préfixe a- indique soit une privation, une négation (variante an-), soit une destination, un passage (variantes ac-, ad-, af-, al-, am-, ar-, as-, at-). Vous prendrez soin de souligner le préfixe et chercherez le sens des mots que vous ne connaissez pas. Privation, négation abattre – amorphe – anarchie – analphabète – amoral – aphonie - asocial – apensateur – annihiler - atone
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Destination, passage aborder – acquérir – arriver – allonger – amener - affadir – attendre – assouplir – admettre – assiéger – accompagner -allouer
Séparation, négation Intensité Démultiplier – décupler défaire – décharger – décharné – débarquer – disparaitre – déraisonnable – découper – dissemblable – dégrader – désordre déplier - désaccord - disjoindre - débrancher - dénier – délester
Exercice 3 1. Donnez le sens commun au suffixe de ces listes. Vous chercherez le sens des mots que vous ne connaissez pas. Les suffixes -able et en -ible indiquent une capacité, une possibilité. 2. De quelle manière le suffixe est-il modifié dans les séries b. et d. ? Dans les listes b et d, les mots sont pourvus d’un préfixe de sens négatif en in- (variantes en im-, ir- et il-) qui nient la capacité ou la possibilité. Exercice 4 1. Relevez la famille de mots contenue dans chaque extrait. a. Famille du mot « mort » : morts, meurt b. Famille du mot « vie » : vivent, vie c. Famille du mot « fusiller » : fusillé, fusillade
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2. Montrez comment elle met en valeur le sens. a. La famille du mot « morts » se trouve placée au centre du vers, comme pour montrer que la mort est le lot commun, un terme inévitable. b. La famille du mot « vie » souligne la proximité des paysans avec la nature sur laquelle ils règlent leur existence. c. La famille de mot « fusiller » montre l’effronterie naïve de Gavroche qui défie les balles comme s’il s’agissait d’un jeu.
danseuse se tiennent à une distance assez petite l’un de l’autre et mettent leur corps en ondulation suivant le rythme de la musique. ».
Exercice 5
1. Relevez la liste des mots de la famille de « rime ». rime – rimant -enrime -rimailleurs – rime – rimassez – rime
1. Expliquez la construction des néologismes contenus dans ces extraits du roman de Boris Vian, L’Écume des jours. Le néologisme pianocktail est formé des mots « piano » et « cocktail », conformément à sa fonction. Cette machine imaginaire permet dans le roman de réaliser des cocktails en jouant des morceaux de musique. Le néologisme biglemoi est composé du verbe bigler, signifiant « regarder du coin de l’oeil », et du pronom personnel « moi ». Il s’agit d’une danse que Vian définit ainsi dans le roman : « « En l’espèce, dit Nicolas, le danseur et la
2. Quelle tonalité donnent-ils au roman ? La création de ces mots et leur signification confère au roman une tonalité fantaisiste. Exercice 6
2. Quelle valeur donnez-vous au suffixe -ailleur dans le mot « rimailleur » ? La valeur du suffixe -ailleurs est péjorative. 3. Quelles images donnent du poète et de la poésie les différentes compositions ? Les mots de la famille de rime donnent une image paradoxale du poète et de la poésie. Le poète est à la fois un écrivain méprisé, un « rimailleur » qui « s’enrime », mais en même temps un virtuose qui s’est jouée du langage.
18 Les relations lexicales
> pp. 328-329
S’interroger
Exercice 2
1. Les mots signalés en gras sont-ils employés avec le même sens ?
1. Quelle est la nature grammaticale des mots polysémiques signalés en gras ? a. fête : nom commun b. amère/amer : adjectif qualificatif c. merci : nom commun, remercierai : verbe
2. Donnez le sens de chacun d’eux. Dans les premières occurrences, Christian Bobin désigne le temps et la vie en général, indépendamment de tout contexte, dans les secondes occurrences le temps et la vie renvoient à l’espace temporel de chaque être humain et aux événements qui le marquent. 3. Quelle tonalité donne aux phrases cette reprise de mot avec des sens différents ? Cette double reprise de mots évoque le caractère à la fois pathétique et tragique de l’existence humaine, limitée par la mort. Exercice 1 1. Quels sont les différents sens des noms d’animaux signalés en gras dans les extraits ? a. renard : animal ; personnage fin et rusé b. loups : animaux ; êtres prédateurs et cruels c. éléphant : animal ; être de grosse taille 2. Expliquez de quelle manière les trois mots se sont enrichis d’un second sens. Les mots ont enrichi leur sens propre d’un sens figuré en mettant en lumière une caractéristique de chaque animal.
2. Donnez les deux sens dans lesquels est employé chaque mot. a. fête : ensemble de réjouissances ; fête : bonheur, joie b. amère : salée ; amer : douloureux c. merci : pitié ; remercierai : montrerai ma gratitude 3. Quels sentiments amoureux met en lumière la polysémie ? a. La polysémie sur le mot « fête » met en évidence la plénitude qui envahit le personnage. Il est littéralement transporté de bonheur. b. La polysémie sur l’adjectif « amer » dit combien peut faire souffrir l’amour. c. La polysémie sur le mot « merci » décrit l’amour courtois fait de dévouement et d’hommage du chevalier servant pour sa dame. Exercice 3 1. Repérez dans chaque extrait les mots polysémiques et dites quelle est leur nature. a. pris-prendre : verbe b. entendre-entendre : verbe c. mesurez-mesurerons : verbe
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2. Quels en sont les différents sens ? a. prendre : attraper ; surprendre b. entendre : écouter ; comprendre c. mesurer : modérer ; évaluer par une mesure
Exercice 4
3. Quelles tonalités donne le jeu sur la polysémie ? a. La reprise polysémique du verbe « prendre » est ironique et donne un tour comique à cette moralité de fable. b. La reprise polysémique du verbe « entendre » donne également un tour comique à la scène qui tourne au dialogue de sourds. c. Le retournement polysémique opéré sur le verbe « mesurer », en même temps qu’il montre la gravité du personnage qui en est à l’origine, donne un tour comique au passage.
2. Pourquoi peuvent-ils constituer des pièges pour qui les prononce ? La proximité phonétique de ces mots rend leur confusion fréquente, surtout pour un étranger qui apprend le français, comme c’est le cas dans le texte. Le premier couple de paronymes a en commun la majeure partie de leurs syllabes excepté les trois premières qui constituent des anagrammes. Le second couple de paronymes ont commun également deux syllabes sur trois. Seul varie l’orthographe de leur préfixe.
1. Quels mots redoute le narrateur ? Les mots que redoute le narrateur sont des paronymes : « percepteur-précepteur », « décerner-discerner »
19 Les synonymes et le mot juste S’interroger 1. Quel usage fait le jeune Vallès du dictionnaire ? Jules Vallès cherche dans le dictionnaire les mots qui lui manquent quand il écrit. 2. Que reconnaît-il privilégier ? Il avoue privilégier le résultat à sa qualité. L’épithète peut constituer une impropriété, l’essentiel est d’en avoir trouvé une. 3. Comment comprenez-vous la phrase « Je perds la notion juste » ? Jules Vallès est conscient du danger de ne pas s’attacher au sens des mots. Ne pas les utiliser dans leur sens juste risque de fausser le regard qu’il porte sur le monde, de vivre dans l’approximation, dans l’illusion. Exercice 1 1. Parmi les mots français placés entre guillemets, recherchez dans un dictionnaire ceux que vous ne connaissez pas. Travail à effectuer par chaque élève selon ses besoins. 2. Sur quelle relation lexicale est fondé le jeu décrit par le narrateur ? Le jeu décrit par le narrateur est fondé sur la synonymie. 3. Jouez à votre tour en partant de l’adjectif « livide ». Par quel adjectif passez-vous ? À quel adjectif aboutissez-vous ? Proposition de suite de synonymes : livide, blanc, pâle, blême, blafard, terreux, cireux, jaunâtre, glauque, gris, bis, noir. De l’extrême blancheur on arrive donc au noir. Exercice 2 Dans son roman Bouvard et Pécuchet (1881), Flaubert raconte les expériences incessantes et vaines des deux personnages en quête de notoriété. Identifiez les différents
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> pp. 330-331
domaines qu’ils explorent en donnant le terme générique (hyperonyme) pour chaque liste de mots (hyponymes). a. L’hyperonyme est légumes. b. L’hyperonyme est organes. c. L’hyperonyme est relief. d. L’hyperonyme est édifices religieux (église, cathédrale) ou architecture religieuse Exercice 3 1. Quel est l’hyperonyme des objets évoqués dans cet extrait ? On peut dégager deux hyperonymes : les rayons du magasin (galeries du rez-de-chaussée, ganterie, lainages, rayons de l’entresol, service de départ) et les produits, principalement vêtements et linge de maison (pièces, le blanc, serviettes, mouchoirs, fourrures, confections, dentelle, lingerie). 2. Quels sont les deux champs lexicaux qui jalonnent tout le texte ? Dressez la liste des mots qui les composent. Les deux champs lexicaux sont : la vente : « vendeurs », « comptoirs », « rayons », « maison », « paquets » la guerre (le champ de bataille après la bataille) : « débâcle », « saccagés », « furieux », « débandade », « barricade », « détruites », « ruines », « ravages », « soldats », « combat », « jetées », « désordre », « coup » 3. Dans un bref paragraphe organisé, vous expliquerez l’effet recherché par Zola en entremêlant ces deux champs lexicaux. Zola dresse un tableau épique d’un grand magasin après une journée de vente. Il use du point de vue omniscient pour faire parcourir au lecteur les différents rayons du magasin, comme l’indique le champ lexical de la vente. L’étendue du désordre mis par les clients est alors comparée à un champ de bataille, qui constitue le second champ lexical, et qui dit combien violente a été la frénésie d’achat. Cette page décrit assez bien la naissance de ce que l’on appellera au xxe s. la société de consommation.
Étude de la langue
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O U T I L S D ’ A N A LY S E
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20 Les figures d’analogie et de substitution Exercice 1 1. Sur quelle figure de style principale cet extrait reposet-il ? Identifiez au moins trois expressions le démontrant. La Lison, locomotive qui porte un nom de femme, est ici animalisée, voire personnifiée, tout au long de l’extrait. Elle est en effet sujet de verbes d’action comme « se cabrait » qui l’assimile à une jument, ou « continuait sa marche », « avançait », « entrer » qui la rendent vivante. C’est aussi une locomotive vivante, qui semble respirer, puisqu’il est fait allusion à son « haleine éperdue » ainsi qu’à son « souffle » qui s’éteint. Sa structure est comparée à des termes physiques comme « les reins », et toute son action s’apparente à une lutte, un combat humain : « elle repoussait » la neige, « elle parut (…) vaincue », elle « se délivra », combat voué à l’échec et à la mort « expirante, morte ». 2. Quel effet cette représentation de la locomotive donnet-elle au texte ? Cette personnification amplifie l’importance de la locomotive, en lui conférant une dimension épique. Ici, il ne s’agit plus d’une simple panne mécanique, mais d’un combat grandiose entre la machine personnifiée et les éléments (la neige, le vent), qui se mène une guerre sans merci, au cœur d’une « tranchée ». 3. Quelles autres figures d’analogie et de substitution retrouvez-vous dans cet extrait ? Comparaison : « c’était comme un creux de torrent » Métaphore : métaphore de l’eau « la neige (…) bouillonnait et montait, en un flot révolté » Personnification : « la neige dormait » Exercice 2 1. Dans chacune des phrases suivantes, identifiez la figure d’analogie ou de substitution. 2. Expliquez comment l’image ainsi donnée renforce le sens de la phrase. a. Les cuivres se firent entendre dès l’ouverture de l’opéra, suivis de près par les bois. ➞ Métonymie : les « cuivres » et les « bois » représentent les instruments à cuivre ou à bois, par un rapport de la matière à l’objet. Les deux métonymies font ici ressortir la distinction des sons produits par ces familles d’instruments aux sonorités plus claironnantes ou plus étouffées. b. « Paris est un véritable océan. Jetez-y la sonde, vous n’en connaitrez jamais la profondeur. » ➞ Métaphore filée de l’océan pour désigner la ville de Paris. Ici, la métaphore met en relief l’immensité de la ville, mais aussi sa dimension inquiétante et mystérieuse. On ne peut en effet en connaitre la « profondeur », c’est-à-dire tout ce qui s’y joue. c. [Le vent] « déracine / Celui de qui la tête au ciel était voisine » ➞ Périphrase pour désigner le chêne. Ici, la périphrase insiste sur la taille gigantesque du chêne, qui côtoie le ciel, voire le divin…
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> pp. 332-333
d. Sa Majesté Lionne un jour voulut connaitre / De quelles nations le ciel l’avait fait maitre. ➞ Personnification du Lion, qui devient, par les termes employés, un roi, une « Majesté », qui dirige des « nations », et qui semble tirer son pouvoir du « ciel » ; La Fontaine semble faire ici allusion à la monarchie de droit divin. e. Et cette terre était proche, et elle lui apparaissait comme un bouclier sur la mer sombre. ➞ comparaison de la terre à un « bouclier ». L’image du bouclier donne une dimension épique à la terre, à l’ile entraperçue, qui prend une tournure militaire ici. f. Il a voulu manger toute la boite ! ➞ métonymie : la « boite » représente en fait son contenu. La phrase est ici passée dans le langage courant, mais l’image souligne la gourmandise ou l’appétit démesuré du mangeur. Exercice 3 1. Repérez les images présentes dans chacun des extraits suivants. 2. Pour chacune, identifiez le procédé employé. 3. Quel sens ces images produisent-elles, dans chacun de ces extraits ? a. « ce bras » ➞ synecdoque (= le locuteur qui se bat) « le bruit… renverse les murailles… » ➞ personnification (« le bruit » agit tel une armée) « le foudre est mon canon, les Destins mes soldats » métaphores Ces différentes images amplifient le discours de Matamore. Il se présente en héros guerrier, invincible et tout-puissant. Elles contribuent à exagérer son propos de façon épique en insistant sur sa force extraordinaire. Leur caractère excessif cependant permet de mettre en doute l’héroïsme de ce personnage vantard, transformant la tonalité épique en tonalité burlesque. b. « il retrouvait Paris, gras, superbe », « la ville gourmande » ➞ personnification de la ville « les Halles, dont il commençait à entendre le souffle » ➞ personnification « Paris, débordant de nourriture » ➞ métaphore de Paris en étal de marché Ici, la ville de Paris est confondue avec le quartier des Halles, haut lieu de marché, où se fournissaient tous les vendeurs de denrées alimentaires. Le portrait de la ville en personnage gras, colossal fait d’elle un ogre qui semble tout dévorer. Cette abondance gargantuesque vient par ailleurs contraster fortement avec le personnage principal, qui est tiraillé par la « faim », et dont la peau est « collée aux os ». Exercice 4 1. Don Diègue, ancien chef militaire espagnol, a été humilié par le comte de Gormas. Comment le sentiment d’humiliation est-il représenté ? L’humiliation du personnage est rendue dans le texte par l’expression du désespoir et de la honte : « l’infamie ». Il blâme sa « vieillesse » assimilée à une « ennemie », et oppose
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toute une vie dévolue à son roi « les travaux guerriers, tant de fois, tant de jours » à un seul jour suffisant à le dégrader « en jour, en un jour effacée ». 2. Quelles images illustrent le contraste entre sa gloire militaire passée et son sentiment de honte actuel ? – « mon bras qui… a sauvé cet empire (…) trahit ma querelle » ➞ synecdoque du bras qui symbolise la force guerrière et semble à présent être extérieur à Don Diègue, puisqu’il
le « trahit ». Ici, la synecdoque devient presque personnification. – Image des « lauriers » flétris ➞ métonymie traditionnelle des « lauriers » pour désigner la gloire, ici développée par la métaphore des feuilles qui fanent, symbolisant la honte et l’humiliation. – Image du « précipice élevé » ➞ métaphore du gouffre, amplifiée par la matérialisation (ou personnification) de « l’honneur » qui y tombe. Le contraste entre la hauteur et la chute souligne l’humiliation de Don Diègue.
21 Les figures d’amplification et d’atténuation
> pp. 334-335
Exercice 1
Exercice 2
1. Identifiez les figures d’atténuation utilisées dans les phrases suivantes.
1. Identifiez les figures d’amplification présentes dans chacune de ces propositions.
2. Quelle est leur fonction dans chacune de ces phrases ? a. Nous avons eu la tristesse d’apprendre que la doyenne du village nous avait quittés. ➞ Euphémisme : tournure atténuée pour dire « elle est morte », et qui adoucit cette triste annonce. b. Voilà trois heures que nous marchons sans interruption, je ne serais pas contre une petite pause. ➞ litote : formule atténuée pour signifier « j’aimerais beaucoup » que nous fassions une pause. L’atténuation du propos ici renforce l’intensité du souhait, qui exprime l’épuisement du locuteur. c. « Vers des clartés nouvelles / Nous allons tout à l’heure ensemble ouvrir nos ailes. / Partons d’un vol égal vers un monde meilleur ». ➞ Euphémisme : les deux expressions ici donnent une vision imagée et adoucie de la mort, qui se prolongerait dans un autre monde, « meilleur » et lumineux. La mort n’est alors plus considérée comme une fin douloureuse, mais une étape prometteuse de bonheur. d. « On vint lier après le diner le docteur Pangloss et son disciple Candide, l’un pour avoir parlé, et l’autre pour l’avoir écouté avec un air d’approbation : tous deux durent menés séparément dans des appartements d’une extrême fraîcheur, dans lesquels on n’était jamais incommodé du soleil ». ➞ Litotes : les deux expressions atténuent le sens du propos ; en effet les « appartements » sont glaciaux, et dépourvus de fenêtres et de lumière. Les litotes ici permettent de mettre en relief l’horreur de la prison dans laquelle les deux personnages sont enfermés.
2. Expliquez comment elles modifient le sens de la phrase. a. « Que l’Orient contre elle à l’Occident s’allie ; / Que cent peuples unis des bouts de l’univers / Passent pour la détruire et les monts et les mers ! » ➞ Hyperboles : Camille ici profère des imprécations et souhaite non pas qu’un peuple ou qu’une armée s’oppose à Rome, mais que le monde entier se ligue contre elle. À travers le grand nombre « cent peuples », les pluriels « et les monts et les mers », elle élargit la géographie de la guerre en souhaitant que la terre entière, « l’univers », d’un bout à l’autre, de « L’Orient » à « l’Occident », mène un combat contre Rome. b. « On ne lui a pas appliqué la peine du talion, à cet assassin de son enfant, on n’a pas supplicié ce lâche, on ne l’a pas enterré vivant à côté de la morte ! » ➞ Gradation : ici, on observe un rythme ternaire qui va croissant dans la vengeance possible qui aurait pu s’exercer contre l’assassin. La violence progressive du châtiment évoqué (de la « peine du talion » à l’enterrement « vivant » en passant par le « supplice ») souligne la colère, la haine presque du narrateur à l’encontre de l’assassin, révolté par le crime commis. c. « Qu’on se figure un caractère timide et docile dans la vie ordinaire, mais ardent, fier, indomptable dans les passions, un enfant toujours gouverné par la voie de la raison, toujours traité avec douceur, équité, complaisance. » ➞ Accumulations : Rousseau combine ici rythmes binaires (« timide et docile » / « toujours gouverné… toujours traité… ») et accumulations d’adjectifs et substantifs caractérisant son caractère d’une part, son éducation d’autre part. Les accumulations amplifient le rythme de la phrase, tout en martelant de façon efficace le sens donné au texte. Les trois adjectifs « ardent, fier, indomptable » soulignent le caractère émotif de l’enfant, tandis que les substantifs « douceur, équité, complaisance » mettent en évidence la bonté dont les autres ont fait preuve envers lui.
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d. « Me voici à l’âge de trente-sept ans – et je vais te dire : je ne sais rien. Rien du peuple parmi lequel je suis née, de la terre qui m’a nourrie, rien de ma propre culture, de mes propres origines, de ma propre langue, de ma propre religion. » ➞ Driss Chraïbi combine ici l’anaphore (« rien du peuple, rien de ma propre culture ») et l’accumulation de compléments (« du peuple, de la terre » / « de ma culture, de mes origines… »). Ces accumulations renforcent le reproche que le personnage adresse à son mari ; elle ne se contente pas de déplorer son ignorance. En effet, elle insiste sur tout ce qu’elle aurait dû savoir, ce à quoi elle aurait dû avoir normalement accès, comme si elle avait été privée de son identité, de ce qui devrait lui appartenir de droit. Exercice 3 Remplacez le passage souligné par un mot ou une expression qui renforce ou atténue son sens, en utilisant la figure donnée entre parenthèses. a. La situation du pays est chaotique. Nous sommes proches de la guerre civile. Il est indispensable (litote) que le gouvernement reprenne le contrôle. ➞ La situation du pays est chaotique. Nous sommes proches de la guerre civile. Ce ne serait peut-être pas une mauvaise chose que le gouvernement reprenne le contrôle. b. La tempête a paralysé (euphémisme) la région entière. ➞ Les aléas climatiques ne permettent pas actuellement aux transports de fonctionner normalement dans la région. c. Le match s’est à nouveau terminé par une défaite (hyperbole). ➞ Le match s’est à nouveau soldé par une effroyable capitulation. d. Toute la population du village (accumulation) s’était rassemblée autour de la place. ➞ Tous les hommes valides, toutes les femmes, tous les vieillards, tous les enfants en âge de marcher, s’étaient rassemblés autour de la place. Exercice 4 1. Lisez le texte suivant. 2. Relevez et identifiez les différents moyens par lesquels Émile Zola donne de l’ampleur à son discours. Accumulation : « par tous les moyens / par des campagnes / par des communications / par des influences » ; « quel nid de basses intrigues, de commérages et de dilapidations » Hyperbole : « tous les moyens imaginables » / « quel coup de balai » / « le jour terrible » / « ce sacrifice humain »… Gradation : « des imaginations folles, des pratiques de basse police, des mœurs d’inquisition et de tyrannies » 3. Quel est le but recherché par l’auteur dans cet extrait ? Ces amplifications, accentuées par les métaphores du « coup de balai », du « nid », des galonnés qui « mettent leurs bottes sur la nation » ainsi que par le vocabulaire du sacré « asile sacré, sacrilège » visent à susciter l’indignation face au sort réservé au capitaine Dreyfus. Zola dénonce avec virulence dans son article le mensonge d’état et la bassesse du gouvernement, dressant un tableau apocalyptique de la nation mise à terre par l’armée.
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Exercice 5 1. Repérez la figure d’atténuation présente dans chacune de ces phrases. 2. À quel domaine appartiennent ces phrases ? Quel est le but de ces atténuations ? 3. Reformulez chaque phrase de façon à exprimer clairement son propos, sans atténuation. a. L’opération de maintien de l’ordre mise en place atteste du fait que le ministère de l’Intérieur considère la situation comme sérieuse. ➞ Ici, les euphémismes consistant à parler de « maintien de l’ordre » pour évoquer la présence de forces armées et de « situation sérieuse » pour dire qu’elle est plus que préoccupante visent à minimiser l’opération de police mise en œuvre. = la présence des forces armées atteste du fait que le ministère de l’Intérieur redoute la situation qu’il considère comme inquiétante. b. Le plan de recrutement annoncé n’aura pas forcément les effets escomptés, tant le ministère du Budget reste frileux sur les engagements de campagne. ➞ L’euphémisme « n’aura pas forcément les effets escomptés » atténue ici l’échec du plan de recrutement, tandis que la litote « reste frileux » insiste sur le paradoxe voire la contradiction qui anime le ministère du Budget, dont les décisions vont à l’encontre des engagements de campagne. = le plan de recrutement annoncé ne répondra pas aux attentes, car le ministère du Budget ne met pas en œuvre les engagements de campagne. c. Il me semble que vous devriez retirer votre amendement, qui ne contribue guère à clarifier une loi déjà complexe. ➞ Ici, la litote « ne contribue guère à clarifier » est une façon ironique de souligner les méandres complexes de la loi, tandis que l’euphémisme « déjà complexe » semble une façon plus modérée de montrer la difficulté que chacun a de comprendre la loi. = Vous devriez retirer votre amendement, qui rend la loi encore plus compliquée à saisir qu’elle ne l’est déjà. d. Les chiffres de ce soir manifesteront une amélioration de la situation avec une baisse tendancielle de l’augmentation du nombre de chômeurs. Cette augmentation sera assez modérée. ➞ Les deux euphémismes visent à camoufler la faible réussite de la politique en faveur de la baisse du chômage. Le nombre de chômeurs ne baisse pas, en effet, mais sa croissance est moins forte que les mois précédents. = Les chiffres de ce soir manifesteront une amélioration de la situation. L’augmentation du nombre de chômeurs perdure mais est moins élevée que d’habitude. e. Les régiments d’infanterie ont procédé à une opération de pacification qui a donné lieu à une série limitée de dommages collatéraux. ➞ Ici, l’euphémisme « dommages collatéraux » vise à camoufler la réalité beaucoup plus éprouvante de la guerre et de la mort. L’opération de « pacification » pourrait presque être considérée comme une litote, tant la « pacification » semble contradictoire avec la guerre qui se déroule.
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= les régiments d’infanterie ont procédé à une intervention militaire pour contrôler la zone, et n’ont pu éviter de toucher aussi des civils et des lieux extérieurs aux zones militaires. Toutes ces phrases appartiennent au domaine politique ou diplomatique. Elles sont prononcées par des responsables
haut placés, dont le langage « politiquement correct » vise à ménager l’auditoire et donc l’électorat. Les termes techniques employés cherchent à atténuer la réalité ou limiter la portée d’une information.
22 Les figures d’opposition
> pp. 336-337
Exercice 1
Exercice 2
1. Identifiez les figures d’opposition utilisées dans les phrases suivantes.
1. Dans les sentences suivantes, repérez le procédé d’opposition mis en œuvre.
2. Quel est l’effet recherché par chacune ? a. Nous étions venus chercher la détente, nous avions trouvé l’angoisse. Nous voulions le repos, nous sommes rentrés épuisés. ➞ antithèse : la « détente » s’oppose à « l’angoisse », le « repos » à « épuisés ». On cherche ici à renforcer le contraste entre les attentes et la réalité. b. Tout n’est que faux-semblant chez Tartuffe, une générosité égoïste, une piété pécheresse et une innocence coupable. ➞ oxymore : les termes associés sont contradictoires. Cette image souligne l’hypocrisie de Tartuffe, l’écart entre ce qu’il veut montrer et ce qu’il est vraiment. c. « Pas un bonjour, ni un merci ! Elle est belle la jeunesse ! » ➞ Antiphrase : il faut comprendre ici l’inverse de « elle est belle, la jeunesse ! ». La jeunesse est désolante. L’antiphrase permet à l’énonciateur de mettre en avant sa critique. L’exagération créé un effet comique. d. Je sais que tu me redoutes comme concurrent, mais comme ami tu as toute ma confiance. ➞ Chiasme : « tu me redoutes » (A) « concurrent » (B) // « ami » (B) « confiance » (A). Les deux propositions s’opposent en miroir. Cette figure renforce le parallèle entre les deux constructions et met ici en avant l’amitié et la confiance. e. Les dernières volontés de son père restaient vivaces. Elle avait gagné une liberté contraignante. ➞ osymore : « liberté » et « contraignante » sont contradictoires. Dans la phrase, la « liberté » semble montrer que son père exerçait une autorité pesante. L’adjectif « contraignante » fait référence aux dernières volontés de son père. f. « Le pénible fardeau de n’avoir rien à faire ». ➞ paradoxe : a priori, n’avoir « rien à faire » est plutôt plaisant, or, dans la phrase, l’inactivité devient un « pénible fardeau », quelque chose de douloureux et pesant. Boileau cherche ici à surprendre, à faire réfléchir au danger de l’inactivité.
2. Expliquez en quoi l’opposition est particulièrement efficace dans ces phrases proverbiales. a. « À vaincre sans péril, on triomphe sans gloire ». ➞ antithèse, mise en relief par le parallélisme entre « vaincre » et « triompher ». L’absence de danger rend toute gloire caduque. La sentence ici dévalorise la victoire obtenue sans effort. b. « Selon que vous serez puissant ou misérable / Les jugements de cour vous rendront blanc ou noir » ➞ double antithèse, entre « puissant » et « misérable », et entre « blanc » et « noir ». Le parallélisme entre les deux segments de phrase met en relief le lien entre le pouvoir et l’exercice de la justice, en en soulignant la partialité. c. « J’aime mieux un vice commode / Qu’une fatigante vertu. » ➞ chiasme : le « vice » s’oppose à la « vertu », de même que l’adjectif « fatigante » répond à l’adjectif « commode ». La phrase proverbiale souligne la facilité avec laquelle on s’accommode du vice, de la faute morale quand la vertu exige un effort souvent peu gratifiant. Elle dénonce les petites compromissions de chacun avec sa conscience. d. « L’imagination imite, l’esprit critique créé. » ➞ Antithèse : l’imitation s’oppose à la création, mettant ainsi en évidence l’infériorité de « l’imagination » sur « l’esprit critique », ici valorisé. e. Il faut manger pour vivre, et non pas vivre pour manger. ➞ chiasme : la tournure inverse les deux termes de la sentence « vivre » et « manger », en soulignant leur relation évidente. Se nourrir est un besoin vital et nécessaire à la vie. Exercice 3 1. Lisez les titres suivants, puis expliquez pourquoi leur construction est efficace. 2. À votre tour, recherchez des titres de roman, de poème, de fable, de film, qui reposent sur l’antithèse ou l’oxymore. – Le Rouge et le Noir (Stendhal) ➞ l’association des deux couleurs interroge sur leur symbolique et leur signification. La copule « et » peut signifier tant la relation que l’opposition, ici, en créant un effet d’attente.
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– « Le lièvre et la tortue » (Jean de La Fontaine) ➞ les deux animaux sont ici opposés dans l’imaginaire des lecteurs ; à la vitesse, répond la lenteur, à la finesse et l’agilité répondent l’aspect massif et la lourdeur de l’animal à carapace. L’antithèse laisse entendre que le vainqueur ne sera pas forcément celui que l’on croit. – Guerre et Paix (Léon Tolstoi) ➞ ici, Tolstoï oppose deux notions, la « guerre » et la « paix », laissant entendre que les deux s’agencent et sont la conséquence ou l’aboutissement de l’une ou de l’autre. – Quatre mariages et un enterrement (Mike Newell) ➞ l’opposition entre « mariage » et « enterrement » est d’autant plus forte qu’elle est soulignée par l’opposition des chiffres : « quatre » et « un ». Le titre du film met en relief le lien entre les épisodes les plus marquants d’une vie : le mariage, symbole de bonheur et de commencement, et l’enterrement, qui rassemble lui aussi tous les membres d’une même famille.
Exercice 5
Exercice 4
2. Repérez les antithèses et expliquez comment elles rendent compte d’une réflexion sur le mariage et les rapports entre femmes et hommes au xixe siècle. – Antithèses entre « de vous ou de moi », entre « qui porte une jupe » et « la barbe du menton » ➞ ici, le mari d’Indiana insiste sur l’opposition entre homme et femme, entre mari et épouse, en insistant sur le mépris dans lequel il tient la femme, cantonnée à des travaux domestiques. – Antithèse entre « l’esclave » et « le seigneur », repris par « le maitre » et « le plus fort » ➞ ici, Indiana montre à quel point la femme, soumise à son mari, est réduite à l’état de servitude par les lois du pays et les lois du mariage. Ce faisant, elle dénonce le déséquilibre flagrant entre le mari et sa femme. – Antithèse entre « vous pouvez (lier mon corps) » et « vous ne pouvez rien (sur ma volonté) », et entre « Monsieur, vous ne pouvez rien » et « Dieu seul peut » ➞ Ici, Indiana oppose le corps et l’esprit, et revendique ainsi une liberté de penser et de volonté qui ne peut se réduire et par lesquelles elle exprime son indépendance d’esprit sur son mari. Malgré tout, elle reste libre, en rabaissant son mari à un rang d’homme, sans pouvoir ni puissance.
1. Relevez des figures d’opposition dans cet extrait de fable. « baisser la tête / cependant que mon front … arrête les rayons du soleil » « le moindre vent / l’effort de la tempête » « tout vous est aquilon ; tout me semble zéphir » 2. En quoi ces figures contribuent-elles à mettre en relief le sens de la fable ? Ici, les antithèses, accentuées par le connecteur d’opposition « cependant » et par le parallélisme de construction « tout vous est / tout me semble », mettent en relief l’aspect antithétique du Roseau et du Chêne. A la fragilité répond la force, à la petitesse la grandeur, à l’humilité la fierté. Cependant ces antithèses sont formulées par le Chêne, qui parait ici grandiloquent et vaniteux, plein de sa grandeur et de condescendance pour le Roseau. La Fontaine ménage ainsi, par cette tirade, son effet de chute, qui verra le chêne déraciné par la tempête.
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1. Identifiez et expliquez les antiphrases utilisées par Sganarelle dans l’extrait suivant. – « A-t-on jamais rien vu de plus impertinent ? » – « cent autres sottises de pareille nature ! » – « J’admire votre patience » ➞ Sganarelle dit précisément l’inverse de ce qu’il pense et de ce qu’il veut dire à son maitre. En réalité, ces phrases ne sont pas adressées au père de Dom Juan mais à son maitre. 2. Quel est l’effet produit par ces antiphrases sur le spectateur ? L’effet recherché est le comique. Le spectateur sait que Sganarelle ne partage pas le discours de son maitre. Il rit donc de ce double langage. Exercice 6 1. Lisez le texte suivant.
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23 Les figures de construction Exercice 1 1. Identifiez les figures de construction dans les phrases suivantes. 2. Réécrivez chaque phrase de façon neutre (en supprimant la construction particulière, ou en ajoutant ce qui a été omis volontairement). Quel changement de sens cela produit-il ? a. « Je n’avance guère. Le temps beaucoup. » ➞ Ellipse ➞ Je n’avance guère, tandis que le temps avance beaucoup. L’ellipse crée un effet lapidaire, et accentue l’opposition entre le locuteur et le temps qui passe inexorablement. b. « Ô mon Dieu, vous m’avez blessé d’amour / Et la blessure est encore vibrante. » ➞ Hypallage ➞ Ô mon Dieu, vous m’avez blessé d’amour et la blessure me fait encore vibrer. L’hypallage souligne la force de la blessure amoureuse, qui « vibre » et semble vivante. c. « Ils savent compter l’heure et que la terre est ronde. » ➞ zeugma ➞ Ils savent compter l’heure et savent que la terre est ronde. Le zeugma crée un effet comique que son absence efface. Les deux savoirs ne sont pas du même ordre, ce que la construction différence du verbe souligne. d. « Français, Anglais, Lorrains, que la fureur rassemble / Avançaient, combattaient, frappaient, mouraient ensemble. » ➞ Asyndète ➞ Les Français, les Anglais et les Lorrains, rassemblés par la fureur, avançaient, pour combattre ; ils frappaient mais mourraient aussi ensemble. La force de l’asyndète est de donner du rythme à la phrase, d’accélérer les actions successives comme si elles étaient quasi simultanées. e. « Un vol noir de corbeaux s’envola avec des croassements. » ➞ hypallage ➞ Un vol de corbeaux noirs s’envola avec des croassements. Associer l’adjectif « noir » au « vol » et non aux oiseaux renforce l’impression sinistre du vol de corbeaux et donne une dimension lugubre à la description. f. « Je t’aimais inconstant, qu’aurais-je fait fidèle ? » ➞ ellipse ➞ Je t’aimais lorsque tu étais inconstant, qu’aurais-je fait si tu avais été fidèle ? L’ellipse accentue l’antithèse entre l’inconstance et la fidélité, ainsi que l’amour inconditionnel ici évoqué. Exercice 2 1. Transformez les phrases suivantes pour former des zeugmas ou des hypallages. 2. En quoi ces modifications changent-elles le sens de la phrase ? a. Après avoir raccompagné ses invités, il leur fit ses adieux et la vaisselle. ➞ le zeugma crée une impression insolite et rend les adieux bien moins solennels, presque ridicules. b. Emma sentait l’odeur neuve de sa robe. ➞ l’hypallage qui associe l’adjectif « neuve » à l’« odeur »
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et non plus à la « robe » met en relief l’importance des sens (ici, l’odorat). c. Les habitants regardaient le ciel sinistre. ➞ l’hypallage insiste sur l’interaction entre l’atmosphère et les habitants, entre les gens et le lieu où ils se trouvent. Leur regard subjectif est empreint de leur état d’esprit. d. Terrifié, il prit en toute hâte ses affaires et la porte. ➞ Le zeugma crée un effet comique, et emploie un niveau de langue plus familier (« prendre la porte »). Exercice 3 1. Lisez les extraits suivants. 2. Repérez les liens de coordination. 3. Réécrivez les extraits de façon à créer des asyndètes. En quoi leur sens ou leur rythme en est-il modifié ? a. Elle quitta sa chaise, (puis) passa dans la pièce voisine. Toutes les femmes, une à une, la suivirent. Elles entourèrent la rôtissoire, (et elles) regardèrent avec un intérêt profond Gervaise et maman Coupeau qui tiraient sur la bête. (Puis) Une clameur s’éleva, où l’on distinguait les voix aigües (et) les sauts de joie des enfants. (Et) Il y eut une rentrée triomphale ; Gervaise portait l’oie, les bras raidis, (et) la face suante, épanouie dans un large rire silencieux ; les femmes marchaient derrière elle, (et) riaient comme elle ; (tandis que) Nana, tout au bout, les yeux démesurément ouverts, se haussait pour voir. ➞ la suppression des liens logiques de succession accélère le rythme des phrases et donne l’impression que les actions se succèdent plus rapidement, se juxtaposent. b. Une voix cria « Christiane ! ». Elle se retourna, c’était son frère. Il courut à elle, l’embrassa ; (et quand) il serra la main d’Andermatt, prit sa sœur par le bras (et), l’entraina, laissant par-derrière son père et son beau-frère. (Et) Ils causèrent. ➞ Là encore, les actions semblent presque simultanées, grâce aux asyndètes qui suppriment les marques de succession. Exercice 4 1. Lisez le texte suivant. 2. Repérez et identifiez les différentes figures de construction. 3. Expliquez l’effet produit par chacune d’elles. On trouve dans le texte de nombreuses asyndètes, marquées par les points-virgules. Roxane accumule ainsi les actes commis, comme si elle en faisait une liste qu’elle lançait à la tête de son destinataire. Dans le dernier paragraphe, elle rend compte, par l’asyndète, de la rapidité de sa mort prochaine, causée par le poison, ce qui accentue le pathétique et le tragique de la situation. On trouve aussi des anaphores et parallélismes « du sacrifice / de ce que je me suis / de ce que j’ai ». Là encore, Roxane accumule les actions dont elle a fait preuve, qui sont autant de sacrifices et de compromis, pour accuser encore son interlocuteur et lui montrer ce qu’elle a accepté de faire. Outils d’analyse
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Exercice 5 1. Repérez les anaphores et parallélismes dans la tirade de Camille. 2. Quels sentiments ces figures de construction renforcent-elles ? – Anaphore : répétition de « Rome » en début de vers / répétition de « voir » x3
– Parallélisme « qui t’a vue naitre / et que ton cœur adore », « Que l’Orient / que cent peuples », « renverse ses murailles / déchire ses entrailles » / « voir ses maisons en cendre, et tes lauriers en poudre » ➞ Ces figures traduisent la colère et la violence du personnage du personnage. La douleur de la mort de son amant se traduit par une volonté de vengeance qui la conduit à la folie. Elle martèle ainsi ses imprécations, qui rythment et redoublent sa fureur.
24 Nuancer son propos : la modalisation Exercice 1 1. Relevez les modalisateurs dans les phrases suivantes. 2. Quelle nuance apportent-ils à chaque propos ? a. Le premier candidat était un jeune homme fort disgracieux qui s’avança gauchement vers elle. ➞ vocabulaire évaluatif qui formule un jugement esthétique péjoratif sur le jeune homme. b. Il avait passé toute sa carrière au même poste, dans la même entreprise. Quelle vie trépidante ! ➞ L’exclamative ironique cherche à influencer le lecteur dans son jugement en orientant son point de vue sur la monotonie de la vie de la personne évoquée. c. Nous avons accès à une connaissance plus étendue, mais il semble que nous soyons moins cultivés qu’avant. ➞ verbe de jugement qui émet une objection possible, sans l’affirmer de façon catégorique. d. Il faudrait généraliser les referendums sur les questions les plus importantes. ➞ emploi de l’auxiliaire modal « falloir » qui exprime la nécessité ; le conditionnel souligne par ailleurs le conseil donné. e. Il est certainement le pire entraineur que l’équipe nationale ait jamais connu. ➞ adverbe de certitude qui émet un jugement subjectif sur l’entraîneur. f. Je doute que les débriefings et autres brainstormings de la novlangue simplifient la vie en entreprise. ➞ Verbe de jugement associé à deux termes en italiques : ces tournures mettent à distance les mots anglais que l’auteur de la phrase ne reprend pas à son compte et considère comme inutiles. Exercice 2 1. Réécrivez le texte suivant en supprimant tous les modalisateurs. Vous pouvez, s’il le faut, modifier certains termes. 2. Votre texte conserve-t-il le même sens ? Il avait toujours été très fier de lui. Ses amis ne faisaient que l’écouter raconter ses aventures et ses voyages dans plus
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de trente pays. Son discours continuait à captiver l’auditoire. Tous croyaient à ce qu’il disait. ➞ La suppression des modalisateurs de jugement, qui mettaient en doute les propos du personnage et exprimaient un avis péjoratif sur lui, rend le texte beaucoup plus neutre. Le personnage n’apparait alors plus comme un vantard et menteur, mais comme un homme qui aime à raconter ses voyages. Exercice 3 1. Dans chacun de ces extraits de presse, relevez les modalisateurs et précisez leur type. 2. Expliquez quelle est la pensée sous-jacente du journaliste. Est-il d’accord avec les différents propos qu’il rapporte ? Justifiez. Phrase 1 : « selon l’élu » : modalisateur lexical (tournure adverbiale) ; « permettrait » et « privilégieraient » : emploi du conditionnel présent ; « conflits d’intérêts » : usage des guillemets et de l’italique (typographie) ➞ Ici, le journaliste met à distance les propos de l’élu qu’il cite. Il ne reprend pas à son compte ce qu’il affirme ; il semble en fait mettre en doute l’efficacité du texte présenté, nous faisant ainsi part d’une forme de scepticisme. Phrase 2 : « suprême » et « petit » : adjectifs évaluatifs ; « mondial du « fric » et de la « corruption » » : usage des guillemets (typographie) ; « n’a aucune culture foot » : guillemets et italique ; « peu », « grassement » : adverbes péjoratifs évaluatifs ➞ A nouveau, le journaliste ici montre bien qu’il rapporte des propos et des jugements qui ne sont pas de lui ; la comparaison finale avec les précédents mondiaux vient bien souligner que l’auteur de l’article remet en cause ici les critiques formulées à l’encontre du Qatar, pays dont il semble prendre la défense en voulant souligner la mauvaise foi de ceux qui critiquent le choix de la FIFA. Exercice 4 À partir des notes données ci-dessous, écrivez un paragraphe exprimant la certitude, puis un article journalistique émettant un doute, une mise à distance des sources. = exercice d’écriture d’invention
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Exercice 5
Exercice 6
1. Lisez le texte suivant et relevez les modalisateurs.
1. Quels passages, dans le texte suivant, indiquent la présence du jugement du narrateur ?
2. Comment renforcent-ils le point de vue de l’auteur, qui s’oppose à l’idée d’une « nature » féminine ? – Typographie : lettres majuscules « ELLE EST » ; italiques « inférieurs » ; guillemets « naturelles » – ponctuation expressive : points de suspension et exclamatives qui expriment l’ironie ou la moquerie – marques de 1e personne : « vous m’avez comprise » – vocabulaire évaluatif dépréciatif « papotaient » (niveau de langue familier), « aguicheurs », « allumeurs » ➞ Ces divers modalisateurs, qui jalonnent tout le texte de Gisèle Halimi, permettent de souligner sa thèse. En effet, elle l’exprime en exposant de façon ironique la thèse adverse qui consiste à penser qu’il existerait une « nature » féminine. Par la typographie, elle souligne l’absurdité du vocabulaire employé par ses adversaires, ainsi que ce qu’il signifie véritablement. Par les phrases exclamatives et la ponctuation, elle cherche l’adhésion de ses lecteurs en suscitant la moquerie. Enfin, en s’impliquant à la première personne, et en dressant un portrait volontairement caricatural des hommes de la tribu Tchombouli, elle inverse le cliché de la « nature » féminine et persuade ainsi de façon efficace ses lecteurs.
25 Les tonalités Exercice 1. Quelles images différentes du conflit et des combattants sont présentées ? Le premier texte propose une image violente de la guerre. Les combattants français sont présentés comme des héros qui luttent pour défendre leur patrie, leurs valeurs, leur honneur. Le texte de Voltaire présente la guerre comme un évènement cruel et absurde. Les combattants sont vus comme des pions tombant sur un plateau de jeu où la défaite est la règle. Personne ne gagne, personne ne sort de la guerre en vainqueur. Le troisième texte montre une image terrible et cruelle de la guerre également. Fabrice est présenté comme un anti-héros qui ne comprend pas ce qui lui arrive, qui est perdu au milieu d’une horreur sans nom et de combattants surexcités au combat, se réjouissant de la cruauté infligée à l’armée ennemie. Le dernier texte illustre la terrible réalité de la guerre et les conditions de vies des soldats.
2. Montrez que les modalisateurs sont ici essentiellement ironiques. Le narrateur transparait dans cet extrait à travers ses commentaires ironiques. Il associe « l’esprit » du maire à un faible nombre de plaisanteries « une demi-douzaine », ce qui montre bien le peu de crédit qu’il accorde à cet « esprit ». Il commente par ailleurs la présence de ces plaisanteries en les qualifiant « d’héritage » d’un « oncle », soulignant ainsi qu’il n’en a même pas la paternité. De même, l’allusion aux « grandes occasions » laisse entendre qu’il ne s’agit que de simples réceptions, et le « souvenir de choses aussi délicates » devient des « anecdotes » ici dépréciées. L’adjectif appréciatif « fort poli » pourrait passer pour un jugement favorable au personnage, s’il n’était contrebalancé par le commentaire « excepté lorsqu’on parlait d’argent », qui est une façon ironique de souligner son avarice. Enfin, le verbe « il passait pour » laisse entendre, malgré le commentaire qui semble aller dans ce sens « avec raison », que le narrateur ne voit pas en M. de Rênal quelqu’un de particulièrement aristocratique. Le mépris qu’il a pour lui en ressort d’autant plus.
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2. Quels effets chacun de ces textes produit-il sur le lecteur ? Identifiez des procédés d’écriture produisant ces effets. Pouvez-vous sur ce point rapprocher certains textes ? Le premier texte peut générer de l’admiration chez les lecteurs : le combat sanglant est mené avec courage par de valeureux guerriers qui luttent pour leurs idéaux et ceux de leur patrie. Les hyperboles, les accumulations, gradations, l’utilisation du pluriel et des termes collectifs contribuent à cet effet. Le texte de Voltaire peut générer un sourire sarcastique et use de l’humour comme d’une arme de dénonciation. Ainsi, les antiphrases, l’utilisation du pluriel, des nombres et des accumulations hyperboliques vont dans ce sens. Le texte de Stendhal relève, lui, d’un réalisme morbide et peut choquer en ce sens le lecteur. L’utilisation de la description, le champ lexical de la guerre y contribuent. L’attitude de Fabrice, comme anti-héros peut rejoindre en partie celle de Candide dans le texte précédent. Les deux personnages, ne partageant pas l’esprit guerrier et conquérant de leurs camarades, illustrent par leur décalage la critique des auteurs à propos de la guerre. Le texte de Hugo produit quant à lui un effet pathétique sur le lecteur. Le champ lexical de la souffrance et de la mort, les accumulations, les hyperboles et la focalisation sur les
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faibles entretiennent cet effet de pitié en mettant en relief les souffrances endurées lors de cette retraite. 3. À quelles tonalités rattacheriez-vous ces textes ? Certains résistent-ils à un tel classement ? Pourquoi ? Le premier texte relève de la tonalité épique. Au contraire, Voltaire utilise la tonalité polémique et satirique. L’extrait de Stendhal se révèle plus délicat à classer et résiste aux étiquettes de tonalités. Il possède ainsi des caractéristiques du registre épique mais n’exalte pas du tout les combattants. Il possède des accents polémiques et anti militaristes, ainsi que des traits satiriques. Le texte de Hugo est polémique et attaque directement l’empereur. Mais il est aussi pathétique et tragique avec la mort en ligne de mire.
4. D’après vous, quel est le but de chacun des auteurs ? Le texte de la Chanson de Roland a pour but de célébrer les combattants menant les croisades au nom de Dieu et de leur rendre hommage. Il cherche aussi à créer un effet de corps et de solidarité, à entrainer et soutenir ces guerres. Le but de Voltaire est opposé : à l’époque des Lumières, il cherche à critiquer la guerre qu’il voit comme absurde et inhumaine, et ceux qui la dirigent, menant leurs hommes au massacre. Le troisième texte cherche aussi à critiquer la guerre et ses conséquences. Il peut en cela rejoindre le texte de Voltaire, même s’il ne partage pas complètement sa démarche. Enfin le réalisme brutal du texte de Hugo dénonce la guerre et le comportement des chefs militaires.
26 La totalité épique Exercice 1 Recherchez au besoin la définition des termes suivants. Quel est leur point commun ? Le point commun de ces termes est leur connotation méliorative. Exercice 2 1. Relevez les procédés épiques d’amplification et de schématisation. On les laisse passer ; tout leur parait tranquille : Point de soldats au port, point aux murs de la ville. Notre profond silence abusant leurs esprits, Ils n’osent plus douter de nous avoir surpris ; Ils abordent sans peur, ils ancrent, ils descendent, Et courent se livrer aux mains qui les attendent. Nous nous levons alors, et tous en même temps Poussons jusque au ciel mille cris éclatants. Les nôtres, à ces cris, de nos vaisseaux répondent ; Ils paraissent armés, les Mores se confondent, L’épouvante les prend à demi descendus ; Avant que de combattre, ils s’estiment perdus. 2. Comment ce texte fait-il l’éloge des combattants dirigés par Rodrigue ? L’éloge des combattants repose sur l’exaltation de leur ruse, de leur courage, de leur force, avec les hyperboles notamment et le manichéisme qui structure l’extrait. Exercice 3 1. Relevez les adjectifs et les compléments du nom qui donnent de la grandeur aux personnages. Il dit, et l’ayant brandie lança sa pique à l’ombre longue. Elle frappa Ajax sur son terrible bouclier, fait de sept peaux de bœufs, sur le revêtement de bronze qui en était la huitième couche. Six furent traversées et déchirées par le bronze inflexible ; à la septième peau, il s’arrêta. À son tour Ajax, descendant de Zeus, lança sa pique à l’ombre longue, et
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frappa le fils de Priam sur son bouclier bien équilibré. À travers le bouclier brillant, la lourde pique passa, à travers la cuirasse bien ouvrée, où elle se fixa ; de part en part, le long du flanc, elle déchira la tunique, cette lance. Mais Hector s’effaça et évita la noire divinité. Tous deux, ayant retiré leurs longues piques, ensemble, avec la main, tombèrent l’un sur l’autre, comme des lions mangeurs de chair crue, ou des sangliers dont la force est difficile à vaincre. Homère, L’Iliade, viiie siècle av. J.-C. 2. Par quels moyens Homère parvient-il à rendre ce combat épique ? Homère rend ce combat épique grâce au champ lexical du combat et des armes. Les verbes d’action soulignent aussi la force du combat singulier, en insistant sur la symétrie des deux combattants, dont les armes semblent combattre toutes seules (« elle frappa Ajax »). Par ailleurs, les deux guerriers sont désignés par leurs ascendants, pour leur donner un aspect héroïque (« descendant de Zeus »), et les images renforcent encore la tonalité épique du passage. La mort est désignée comme la « noire divinité », funeste et effrayante, tandis que les héros sont comparés à des « lions » ou encore « des sangliers », bêtes féroces et cruelles, caractérisées par la force et la volonté. Exercice 4 1. Identifiez les procédés de l’écriture épique dans cet extrait. On retrouve ici tous les procédés de l’amplification épique : hyperboles, usage du pluriel, termes collectifs, phrases amples avec des accumulations, … Le champ lexical de la guerre et des armes vient en appui à cette dimension épique. 2. Quel effet cette tonalité produit-elle sur le lecteur ? L’effet produit sur le lecteur est celui d’une certaine admiration pour ces hommes et cette bataille hors normes. La description épique marque ici les esprits.
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Exercice 5 Transformez le paragraphe suivant pour lui donner une tonalité épique. En 79, le gigantesque et titanesque Vésuve entra en éruption. Des cendres, des roches, de la lave à n’en plus finir jaillirent de son cratère funeste. Par des projections innombrables et mortelles, le fatal Vésuve ensevelit les habitants de Pompéi et d’Herculanum. La mer, secouée par ces assauts de lave, acheva de recouvrir ces villes, dans une catastrophe telle qu’il n’y en eut jamais auparavant dans l’empire romain. Exercice 6 Comment Victor Hugo exalte-t-il l’héroïsme des soldats français de la Révolution face à la menace de l’alliance des monarchies européennes ? Pour répondre, étudiez les images, le travail du rythme ainsi que les figures
d’amplification et d’opposition. Victor Hugo utilise des images marquantes comme au vers 4 avec la comparaison à l’hydre. Cette référence mythologique inscrit dans la monstruosité et l’extraordinaire l’image de l’Europe qui se lève contre les soldats révolutionnaires français. Face à ce monstre mythique, seuls des êtres d’exception peuvent faire front. Ainsi, la comparaison finale de ces combattants à des « démons » (vers 12 montre leur détermination et leur rage de vaincre. Le rythme vient exacerber cette exaltation de leur héroïsme : les phrases sont amples, chargées d’accumulations mettant en relief leurs qualités (vers 5 et 6, 11 et 12) et les difficultés qu’ils endurent et affrontent avec courage (vers 10). Ces accumulations sont parfois structurées sur des antithèses comme au vers 7. Il s’agit ici de montrer l’amplitude de leur résistance : ils sont partout et prêts à tout moment. Enfin l’utilisation de termes pluriels et collectifs montrent ces soldats unis et faisant corps ensemble (vers 5, vers 11…).
27 Les tonalités pathétique et tragique Exercice 1 Recherchez au besoin la définition des termes suivants. Distinguez ceux qui renvoient au personnage pathétique et ceux qui renvoient à l’effet sur le lecteur. Personnage pathétique : accablement, désolation, souffrance, peine Effet sur le lecteur : apitoiement, compassion, commisération Exercice 2 Quel effet sur le lecteur cette description cherche-t-elle à provoquer, et à quelle tonalité la reliez-vous ? Cet extrait renvoie à la tonalité pathétique. Le spectacle des souffrances de Manon Lescaut cherche à attendrir et apitoyer le lecteur sur son sort. On peut ainsi relever dans ce sens l’adjectif « pauvre » au sens de « malheureuse » à la ligne 1, la métaphore hyperbolique associant ses pleurs à un « ruisseau de larmes » à la ligne 4 ou bien encore le champ lexical de la souffrance physique. Exercice 3 1. Quelle tonalité domine dans cet extrait ? Justifiez votre réponse en vous appuyant sur des procédés d’écriture. On notera ici les marques de la tonalité pathétique avec l’expression de la souffrance d’enfants innocents : « pas un seul ne rit » (vers 1), « que la fièvre maigrit » (vers 2), « cheminer seules » (vers 3)… L’opposition entre leur condition d’enfants et celles de victimes d’un travail harassant et injuste est soulignée entre autres par les antithèses et la construction binaire des vers : « Innocents dans un bagne, anges dans un enfer » (vers 9), « Jamais on ne s’arrête et jamais on ne joue » (vers 11), « Il fait à peine jour, ils sont déjà bien las » (vers 13). De plus, la violence et la pénibilité de leur
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travail sont marquées par le rythme pesant et cyclique du vers « Dans la même prison le même mouvement » (vers 6) et la personnification quasi-fantastique de la machine, décrite comme un « monstre hideux qui mâche on ne sait quoi dans l’ombre » (vers 8). 2. Dans quel but l’auteur utilise-t-il ici cette tonalité ? La tonalité pathétique a ici une visée persuasive : il s’agit pour Victor Hugo de toucher et émouvoir les lecteurs en vue de servir son argumentation contre le travail des enfants. Exercice 4 1. Identifiez les figures de style associées au temps qui passe. Horloge ! dieu sinistre, effrayant, impassible, Dont le doigt nous menace et nous dit : « Souviens-toi ! Les vibrantes Douleurs dans ton cœur plein d’effroi Se planteront bientôt comme dans une cible, Le plaisir vaporeux fuira vers l’horizon Ainsi qu’une sylphide au fond de la coulisse ; Chaque instant te dévore un morceau du délice À chaque homme accordé pour toute sa saison. Trois mille six cents fois par heure, la Seconde Chuchote : Souviens-toi ! – Rapide, avec sa voix D’insecte, Maintenant dit : Je suis Autrefois, Et j’ai pompé ta vie avec ma trompe immonde ! 2. Comment se manifeste dans ce texte l’idée de fatalité ? La fatalité est manifestée dans cette image du temps qui défile inexorablement et mène l’homme à sa fin, sa mort. Ainsi la vie humaine, comme une « saison » est menée à son terme par le Temps qui la ronge fatalement. Les images du temps qui « dévore » et « pompe » la vie sont semblables à celles d’un sablier dans les vanités en peinture. Outils d’analyse
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3. Quelle tonalité domine dans ce texte ? Quel est le message de son auteur ? La tonalité tragique domine ici avec cette fatalité qui pèse sur l’existence humaine. Le message est celui du memento mori, lié ici au spleen baudelairien. Exercice 5 1. Denis Diderot rédige un texte pour commenter l’esquisse du tableau Le Fils puni, de Jean-Baptiste Greuze, et mettre en valeur les sentiments qu’il représente. Quelle est la tonalité mise en avant dans le tableau et dans le texte ? Il s’agit ici de la tonalité pathétique. 2. Quels éléments dans le tableau et dans le texte soulignent cette tonalité ? Cette tonalité pathétique est marquée dans le tableau et le texte par la présentation d’un cercle familial, d’une intimité douloureuse au moment de la mort du père. L’émotion est
perceptible dans le tableau de Greuze par le recours à une gestuelle emphatique et symbolique : l’enfant tend les bras vers sa mère qui lève les yeux au ciel, un des fils est agenouillé, la tête entre les mains, la mère parait présenter le triste tableau de la souffrance et de la mort du père par de grands gestes au fils qui apparait mortifié… La souffrance de chacun est rendue de manière presque excessive. Dans le texte de Diderot, la tonalité pathétique repose sur une dramatisation, soulignée d’emblée par la construction des deux premières phrases et de leur rythme, frappées d’une question rhétorique là encore pleine d’emphase. Un même effet de dramatisation pathétique est visible avec l’opposition du passé (« C’était ») et du présent (« C’est ») dans le parallélisme des lignes 3 et 4. Les champs lexicaux de la douleur et de la mort jalonnent ensuite l’extrait, renforçant cette tonalité avec des termes comme « douleur » (ligne 4), « misère » (ligne 4), « mort » (ligne 5), « ombre » (ligne 7), …
28 La tonalité comique Exercice 1 1. Recherchez au besoin la définition des termes suivants. Ces termes renvoient à différents comiques. 2. Quelles nuances les distinguent ? Lesquels se rejoignent ? Cocasse – truculent – désopilant : se rapprochent par l’idée de décalage, de surprise farce – plaisanterie – boutade : ont en commun l’idée d’un comique voulu, d’une intention pitrerie – pantalonnade : ces termes peuvent se rapprocher par l’idée de mime, de jeu scénique spirituel : se distingue ici par l’idée de finesse récréatif – ridicule : portent sur les effets Exercice 2 1. Quels sont les ressorts du comique dans cette scène ? Le comique de langage domine dans cet extrait avec des déformations de mots en jouant sur les accents, comme dans l’expression « jé lé trouberai » (ligne 6). Mais les autres types de comique ne sont pas en reste. Le comique de situation est évident car Scapin monte ici un stratagème visant à faire croire à Géronte l’imminence d’un danger qu’il invente. Il va jusqu’à faire se cacher Géronte dans un sac. Le comique de répétition est marqué par les cessions successives de coups donnés au sac dans lequel se cache le vieillard et les différents accents pris les uns à la suite des autres. Le comique de geste est lié aux coups de bâtons donnés. Et enfin le comique de caractère est employé pour souligner le caractère naïf de Géronte qui est ici manipulé bien facilement par Scapin.
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2. Quels en sont les effets sur le spectateur ? Les effets sont ceux du comique : le sourire et le rire. Le spectateur se moque ici de Géronte et une complicité s’instaure avec le personnage de Scapin. Exercice 3 1. Sur quels types de comique repose cet incipit de roman ? Le comique repose principalement dans cet extrait sur du comique de mots. D’emblée le premier terme, celui qui ouvre le roman, est en effet une déformation liée à la dimension sonore et orale d’une expression : « Doukipudonktan ». L’effet visuel est à la fois déroutant et comique. On retrouve plus loin dans le texte d’autres jeux de déformations linguistiques comme « Barbouze, un parfum de chez Fior » (ligne 18). Enfin l’emploi de termes relevant d’un niveau de langage oral familier, voire vulgaire (« tarin », ligne 14) ; « ils doivent pas », ligne 5…), et contrastant avec des termes élégants et recherchés (« extirpa », ligne 13…) participent de cette dimension comique. 2. Qu’apporte cette tonalité à ce début de roman ? Ce comique présente une dimension satirique, mais vise surtout à parodier les romans traditionnels en les déformant d’une manière burlesque et grotesque. Un horizon d’attente se dessine ainsi ici dans l’incipit, et contribue à assurer la captatio benevolentiae, à donner envie au lecteur de poursuivre sa lecture. Exercice 4 1. D’où vient le comique de cet extrait ? Le comique repose tout d’abord sur la répétition du nom « poumon ». À ce comique s’ajoute celui de caractère avec
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le jeu entre les deux personnages et Toinette se moquant de la crédulité de son maitre. Enfin le comique de situation est mis en relief par la mise en abime, Toinette étant déguisée et jouant le rôle d’un docteur auprès de celui qui lui sert de maitre d’habitude.
2. Quelle est la fonction du comique ici ? La première fonction de ce texte comique est le divertissement. Mais celui-ci se double d’une visée satirique, Molière caricaturant ici une attitude et un type de comportement. Le burlesque est également présent puisque cette consultation, sérieuse pour d’Argan, est tournée en ridicule par le jeu de rôle de la servante.
29 Les tonalités satirique et polémique Exercice 1 Recherchez au besoin la définition des termes suivants. Quelles nuances de sens les distinguent ? Les termes « raillerie », « satire » comportent une notion de comique, de moquerie. Les termes « pamphlet », « diatribe », « blâme » sont reliés à l’idée d’une forme littéraire. « L’invective », « l’accusation », « la diatribe » sous-entendent une notion d’attaque directe, au contraire de « la raillerie », « le dénigrement », « la satire » par exemple. Exercice 2 1. Relevez les marques de la tonalité satirique dans cet extrait. Père Ubu : Apportez la caisse à Nobles et le crochet à Nobles et le couteau à Nobles et le bouquin à Nobles ! Ensuite, faites avancer les Nobles. On pousse brutalement les Nobles. Mère Ubu : De grâce, modère-toi, père Ubu. Père Ubu : J’ai l’honneur de vous annoncer que pour enrichir le royaume je vais faire périr tous les Nobles et prendre leurs biens. Nobles : Horreur ! À nous, peuple et soldats ! Père Ubu : Amenez le premier Noble et passez-moi le crochet à Nobles. La satire passe ici par le comique de répétition, les parallélismes, la caricature du personnage de Père Ubu avec son manque de nuances et de mesure, et l’antiphrase entre « honneur » et « faire périr » dans sa seconde réplique. 2. D’après vous, que cherche à dénoncer l’auteur ? L’auteur dénonce les comportements extrémistes, les jugements hâtifs, le manque de modération de certains dirigeants. Exercice 3 1. Relevez les marques de la tonalité polémique dans cet article. Déshonorons la guerre ! Un artiste habile en cette partie, un massacreur de génie, M. de Moltke1, a répondu, voici deux ans, aux délégués de la paix, les étranges paroles que voici : « La guerre est sainte, d’institution divine ; c’est une des lois sacrées du monde ; elle entretient chez les hommes tous les grands, les nobles sentiments, l’honneur, le désintéressement, la vertu, le courage, et les empêche en un mot de tomber dans le plus hideux matérialisme ! »
> pp. 350-351
Ainsi, se réunir en troupeaux de quatre cent mille hommes, marcher jour et nuit sans repos, ne penser à rien, ne rien étudier, ne rien apprendre, ne rien lire, n’être utile à personne, pourrir de saleté, coucher dans la fange, vivre comme les brutes dans un hébétement continu, piller les villes, bruler les villages, ruiner les peuples, puis rencontrer une autre agglomération de viande humaine, se ruer dessus, faire des lacs de sang, des plaines de chair pilée mêlée à la terre boueuse et rougie, des monceaux de cadavres, avoir les bras ou les jambes emportés, la cervelle écrabouillée sans profit pour personne, et crever au coin d’un champ tandis que vos vieux parents, votre femme et vos enfants meurent de faim ; voilà ce qu’on appelle ne pas tomber dans le plus hideux matérialisme ! Les hommes de guerre sont les fléaux du monde. 2. En quoi ce texte est-il avant tout un texte à visée argumentative ? Les hyperboles, les animalisations des soldats servent à critiquer la guerre, en proposer une image désacralisée, brutale, violente, de cruauté et d’inhumanité. Les antiphrases et antithèses accompagnent cette critique virulente en s’opposant au discours du pouvoir en place, cherchant à valoriser ce que l’auteur voit comme un des « pires fléaux du monde ». Exercice 4 1. Identifiez la tonalité dominante de cet extrait. Nous sommes ici dans la tonalité satirique et non polémique. 2. Quelles en sont les marques ? Cette tonalité est marquée par le portrait dépréciatif et comique du prélat, tant au niveau physique (avec la métaphore du « double étage » de son menton, l’association des termes péjoratifs « courte grosseur » au vers 4, « molle épaisseur » au vers 5…) que dans son attitude (il vient de déjeuner et attend le diner en sommeillant…) L’intention de Boileau est de générer le rire du lecteur. Exercice 5 1. Qui est la cible de la critique de ce texte ? La cible de la critique est le peuple français et les Parisiens en particulier. Montesquieu propose une satire de ses concitoyens.
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2. Quels procédés inscrivent cet extrait dans la tonalité satirique ? La satire passe dans ce texte par la comparaison et le regard extérieur que le personnage persan porte sur la ville de Paris et ses habitants. Ainsi, par une métaphore comique, les immeubles deviennent des « maisons si hautes qu’on jugerait qu’elles ne sont habitées que par des astrologues », « six ou sept maisons les unes sur les autres ». Dans un autre raisonnement par analogie, le personnage compare le « pas réglé » des « chameaux » aux « machines » des français et il insiste sur la démesure de ce peuple, toujours dans une
effervescence inefficace avec la gradation hyperbolique « ils courent, ils volent ». Il critique ce mouvement également avec une anecdote caricaturale : un passant le poussant lui « fait faire un demi-tour », puis « un autre » le « remet soudain » dans le bon sens. 3. Sur le modèle de cette lettre, rédigez à votre tour la description critique d’un lieu, vu à travers le regard d’un étranger. Il s’agira de reprendre l’idée d’un regard extérieur permettant de critiquer par le recul et une comparaison comique un lieu et les habitudes de ses habitants.
30 La tonalité lyrique Exercice 1 Recherchez au besoin la définition des termes suivants. Lesquels renvoient à l’élégie ? Les termes « nostalgie », « mélancolie » et « affliction » renvoient à l’élégie. Exercice 2 1. Ce tableau de Gustave Moreau représente une partie du mythe d’Orphée. Faites une recherche sur cette toile pour comprendre la scène qu’elle représente. Ce tableau de Gustave Moreau représente une partie du mythe d’Orphée. Faites une recherche sur cette toile pour comprendre la scène qu’elle représente. Le tableau relate une des variantes de la fin du mythe d’Orphée. La tête du poète, portée par les flots, sur sa lyre, est ramassée sur la plage par une jeune fille thrace. 2. Quelles caractéristiques du lyrisme et de l’élégie retrouve-t-on dans cette œuvre picturale ? Les couleurs douces, crépusculaires, les jeux de lumières, l’attitude contemplative de la jeune fille et paisible du poète, les roches escarpées et la présence de la nature, tout concourt à donner une impression d’élégie. Une nostalgie se dégage de cette œuvre, qui aurait pu être bien plus morbide : le regard de la jeune fille et l’impression de douceur générale permettent de ne pas sombrer dans cette dimension funeste. Gustave Moreau réinterprète ici la fin du mythe. Exercice 3 1. À quel mouvement culturel ce poème appartient-il ? Ce poème exprimant la douleur de la perte de l’être aimé et la solitude du poète, en communion avec la nature, appartient au mouvement romantique. 2. Quelles sont les marques du lyrisme ? L’expression des sentiments personnels, les marques de la première personne, le travail sur le rythme, les thématiques de l’intériorité et de la nature, sont autant d’indices qui inscrivent ce texte dans la tonalité lyrique.
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> pp. 352-353
3. Relevez des indices de l’élégie. L’élégie est mise en relief par la fuite du temps qui se fait l’écho de la perte de l’être aimé. L’impossibilité de mettre un terme à cet écoulement fatal du sablier (reprise sous forme métaphorique de l’eau qui s’écoule (vers 6, vers 14…) qui nous conduit à la mort, la mention répétée de la « nuit » qui symbolise cette finalité de la vie humaine, la répétition de la négation « point de » au vers 15 sont caractéristiques de cette dimension élégiaque. 4. Quel thème universel est le sujet principal de ces strophes ? Comment ce thème est-il associé ici à la nature ? La fuite du temps est ici au cœur du poème. Le poète l’associe à l’eau qui coule, comme une clepsydre fatale. L’élément naturel qu’est l’eau est donc ici allégorique de la finitude de l’existence humaine, sans possibilité d’en remonter le cours. Le champ lexical de cet écoulement jalonne tout le texte : « cours », « coulez, coulez », « m’échappe et fuit », « point de port », « point de rive », « il coule ». Une analogie assimile la destinée humaine à un bateau dont la destination est inéluctable. On retrouve ici une version poétique des vanités en peinture, à l’image du texte de Baudelaire « L’horloge », plus pessimiste car détaché de cette dimension lyrique et de la nature. Exercice 4 1. Relevez la référence à Orphée et au lyrisme. Les lignes 16 et 17 évoquent dans une métaphore associant le « cœur » à une « lyre » la figure d’Orphée. 2. Le texte évoque la relation entre l’homme et la nature. Comment est-elle présentée ? L’impression d’une communion entre l’homme et la nature est ici manifeste. La nature se fait l’écho de l’intériorité de l’homme. La Nature est allégorisée, ses « chants » reflètent les cris du cœur humain. Une dimension sacrée surgit de cette harmonie.
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3. Quels autres éléments mettent en valeur la tonalité lyrique dans cet extrait romanesque ? Le travail sur le rythme avec des phrases amples et des cadences étales consacre cette tonalité lyrique et reflète cette harmonie qui associe homme et nature. Le rythme, évoqué par la mention de la musique, est ici le lien direct avec le lyrisme : les « accents », « les soupirs » de la dernière ligne sont autant d’indices de cette musicalité lyrique.
Le théâtre repose sur le principe du dialogue. Ici, l’enchainement des répliques permet de renforcer le lyrisme de l’extrait avec les reprises lexicales : les personnages rebondissent sur les mots de l’interlocuteur et se les approprient (« ne m’en veux pas » - « je ne vous en veux pas », « j’en mourrai » - « que tu meures pour si peu »…). De même, les pleurs de dona Sol sont repris par Hernani dans sa réplique suivante. Le lyrisme amoureux se poursuit donc au fil de l’échange et s’entretient par le dialogue.
Exercice 5
3. Comment le genre théâtral peut-il mettre en valeur cette tonalité ? La dimension scénique et visuelle du théâtre concourt aussi à renforcer la tonalité lyrique de l’extrait. Ainsi les pleurs de la comédienne, le ton exalté, les gestes de tendresse, qui appartiennent au hors-texte mais font partie intégrante du théâtre, mettent en relief le lyrisme et le rendent visible sur scène.
1. Quelle métaphore lyrique de l’amour est filée dans ce texte ? L’extrait présente une métaphore filée qui associe le feu à l’amour. 2. Comment la forme dialoguée renforce-t-elle le lyrisme et l’élégie ?
31 Le narrateur et les points de vue
> pp. 354-355
Exercice 1
Exercice 3
Voici trois versions de la même histoire. Déterminez quel est le point de vue adopté dans chacune d’elles en justifiant votre réponse. a. ➞ Point de vue externe : « un type », « un voisin » sont des termes vagues, indéfinis. On ne voit que ce qu’un témoin de la scène pourrait voir : récit factuel, sans commentaires. b. ➞ Point de vue omniscient : connaissance d’éléments liés à la vie du personnage « le ruban, à cause de son usure / ramassé dans le métro / depuis le matin ». Notations sur son comportement « querelleur par nature » ; commentaires du narrateur « alors que ce dernier n’y était pour rien ». c. ➞ Point de vue interne : Verbes de sentiments et de pensée associés au personnage « détestait, soupira, s’irrita, regardait, supportait, se rendit compte, songea ».
Transformez les phrases suivantes pour passer du point de vue externe au point de vue interne. a. Le jeune homme contourna la voiture garée devant lui. Il glissa la main dans sa poche et en ressortit un carnet noir. Il y traça quelques lignes rapidement, puis le rangea à sa place, le regard fixe. ➞ Le jeune homme contourna sa voiture. Il se dit qu’il devait écrire et glissa la main dans sa poche pour y prendre le carnet noir qu’il aimait tant. Il le regarda, décida d’y tracer quelques lignes, puis choisit de le ranger. Il regardait fixement au loin. b. La scène resta déserte un moment ; une jeune actrice longiligne entra alors. Un frémissement parcourut le parterre et le silence se fit. ➞ La scène resta déserte un moment sous ses yeux ; le public vit alors une jeune actrice entrer. Il se mit à frémir d’impatience, et fit immédiatement silence. c. La maison semblait inhabitée. Une muraille grise s’élevait sur trois étages, percée de petites fenêtres étroites et sombres. Devant la porte, un sac en toile de jute était posé. ➞ La maison lui semblait inhabitée. Il voyait une muraille grise s’élever sur trois étages, tout en étant intrigué par les fenêtres étroites et sombres qui l’inquiétaient. Devant la porte, il remarqua un sac en toile de jute.
Exercice 2 Indiquez le point de vue adopté dans chaque phrase, en citant au moins un élément qui le justifie. a. Ce spectacle l’égayait beaucoup. Il regardait avec amusement les danseurs qui se contorsionnaient sur scène. (interne : verbes de sentiment et de perception) b. Le vieil homme se retourna. Sa silhouette se découpait sur le ciel gris. Il portait des souliers noirs, cirés, alors que son acolyte était nu-pieds dans des sandales usées. (externe : termes indéfinis, éléments descriptifs sans commentaires) c. Les deux amis de vingt ans se demandaient ce que le sort leur réservait. Jean, conscient de l’attachement viscéral que lui portait son camarade, lui prit le bras. Sentant cette pression amicale, Lucien lui adressa un sourire dans lequel il avait voulu faire passer toute son affection. (omniscient ➞ verbes de pensée et termes de sentiments reliés aux deux personnages ; éléments sur le passé des personnages)
Exercice 4 1. Lisez le texte suivant. 2. S’agit-il d’un point de vue interne ou omniscient ? Justifiez votre réponse avec précision. Il est difficile de déterminer le point de vue adopté ici. Le narrateur semble ici plutôt omniscient. En effet, les verbes de Outils d’analyse
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perception ont comme sujet le pronom impersonnel « on » : « on entendait », et certains aspects de la description semblent commentés par un narrateur au fait de ce qu’il raconte : des explications sont ajoutées « car les étudiants étaient partis dans leurs familles », des jugements formulés sur les marchands qui « interrogeaient » les fenêtres « inutilement », et le narrateur semble décrire les gens de façon générale à travers des indéfinis ou des pluriels englobants « un savetier, les marchands, au fond des cafés, la table des cabinets de lecture ». Par ailleurs, la fin du texte semble se focaliser sur Frédéric, qui « s’arrêtait », se « retournait » ou « n’allait pas plus loin ». Nous n’avons toujours pas ses perceptions, mais son attitude. Cependant, le personnage semble velléitaire, empli d’un ennui et d’une mélancolie qui le figent. Or, la description insiste sur l’aspect « morne » des murs, la solitude des cafés, les bâillements des tenancières de café… comme si les lieux étaient perçus à travers le regard subjectif de Frédéric. Exercice 5 1. Lisez le texte suivant. 2. Quels sont les différents points de vue présents ? Deux points de vue se succèdent : celui de Lucien (indices soulignés dans le texte), puis celui de Mme de Bargeton
(indices en gras dans le texte). En effet, des verbes de perception « remarquer », d’opinion « lui parut, se dit-il », ainsi qu’un vocabulaire dépréciatif « vieillerie, goût affreux » et des négations « n’étaient de mode » soulignent le jugement négatif que Lucien porte sur sa maîtresse. De même, le verbe d’opinion « se permettait d’étranges réflexions » ainsi que les adjectifs péjoratifs « courtes, méchants, étriqués, ridicule » intensifiés par le « trop » et l’adverbe hyperbolique « prodigieusement » expriment le mépris nouveau de Mme de Bargeton sur son amant. 3. Quel est le sens de leur alternance ? Les deux points de vue alternent, grâce à la phrase centrale « Les yeux de Lucien faisaient la comparaison que Mme de Bargeton avait faite » qui souligne la similitude des attitudes et jugements des deux personnages. Cette alternance met en relief le processus identique qui se produit chez les eux, au contact de la capitale, et insiste sur le double désenchantement dû au regard nouveau des personnages. C’est la comparaison avec « plusieurs jolies Parisiennes » ou avec « Châtelet » qui produit ce jugement défavorable, et le commentaire du narrateur lié au proverbe « dans le royaume des aveugles… » renforce l’amertume de ces deux regards.
32 Les paroles rapportées et le monologue intérieur Exercice 1 Ci-dessous figurent des phrases transcrites au discours indirect avec une erreur. Repérez et corrigez cette erreur. a. Il s’exclama : « Un bon plat de pâtes me fera du bien ! » ➞ Il s’exclama qu’un bon plat de pâtes lui fera du bien. ➞ …. Lui ferait du bien. La concordance des temps nécessite d’employer le conditionnel (futur dans le passé) dans la subordonnée qui suit une principale au passé. b. Il les fit entrer et leur demanda : « Que souhaitez-vous boire ? » ➞ Il les fit entrer et leur demanda ce que vous souhaitez boire. ➞ … ce qu’ils souhaitaient boire. Le passage au discours indirect nécessite un changement de personne ; la 2e personne du pluriel devient, dans la narration, la 3e personne du pluriel. Par ailleurs, la principale au passé réclame la concordance des temps, et donc le passé dans la subordonnée. c. Elle demanda fermement à la jeune fille : « Levez-vous ! » ➞ ll demanda fermement à la jeune fille qu’elle se levait. ➞ Elle demanda… qu’elle se levât. La correction de la langue demande ici que le présent (impératif) devienne du passé dans la subordonnée. Le verbe « demander » impliquant le subjonctif, il faut donc conjuguer au subjonctif imparfait. Cependant l’usage accepte aussi le subjonctif présent (qu’elle se lève) dans ce cas. d. Il me demanda : « M’aimes-tu vraiment ? »
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> pp. 356-357
➞ Il me demanda si tu m’aimais vraiment. ➞ … si je l’aimais vraiment. Le passage au discours indirect implique un changement de personne pour correspondre aux pronoms employés dans la narration. Exercice 2 Transformez ces phrases pour qu’elles deviennent du discours indirect. a. Jean affirma : « Il est hors de question que je m’en aille d’ici aujourd’hui ! » Jean affirma qu’il était hors de question qu’il s’en aille (s’en allât) de là le jour même. b. Elle répondit : « J’irai dès demain poster ce message. » Elle répondit qu’elle irait dès le lendemain poster le message. c. Il demanda : « Tous les habitants souhaitent-ils participer à la fête de la semaine prochaine ? » Il demanda si tous les habitants souhaitaient participer à la fête de la semaine suivante. d. Son avocat s’exclama : « Bien sûr que vous allez pouvoir être libéré rapidement ! J’y travaille ! » Son avocat s’exclama qu’il était évident qu’il allait pouvoir être libéré rapidement. Il ajouta qu’il y travaillait.
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Exercice 3 Réécrivez ces passages au discours indirect libre. a. Il se dit qu’il n’était pas possible de revenir bredouille. Il pensait que toute la famille attendait le résultat de sa mission. Il réfléchit. Il n’était pas possible de revenir bredouille. Toute la famille attendait le résultat de sa mission. b. Elle réfléchit : « Et si je partais ce soir ? Je pourrais arriver à l’heure pour la cérémonie ! » Elle réfléchissait. Et si elle partait ce soir ? Elle pourrait arriver à l’heure pour la cérémonie ! c. Pierre répondit : « Je suis toujours partant ! » Il ajouta qu’il aimait bien aller de l’avant. Pierre formula une réponse. Il était toujours partant ! et puis, il aimait bien aller de l’avant. Exercice 4 Précisez pour chaque exemple quel est le type de paroles rapportées employé. a. Elle raconta alors les difficultés de son voyage, et les péripéties qui s’ensuivirent. (résumé de paroles) b. Il se dit que s’il ne demandait pas tout de suite une augmentation, il ne l’obtiendrait jamais. (discours indirect) c. Elle était frigorifiée. Pourquoi fallait-il toujours qu’elle oublie son écharpe lorsqu’il y avait du vent ? Elle s’en voulait, comme d’habitude. (Discours indirect libre) d. Je ne veux pas, dit-il, que tu agisses ainsi sans réfléchir. Cela ne peut que te nuire. (discours direct) e. Il fit le récit de son ascension. Une montée formidable ! magnifique ! inoubliable ! (résumé de paroles + discours indirect libre) Exercice 5 1. Lisez le texte suivant. 2. Transformez les paroles rapportées directement en paroles rapportées indirectement. Pensez à varier les verbes introducteurs de parole pour rendre compte de la tonalité des phrases. Le colonel l’interrogea d’un ton acerbe pour savoir si elle daignerait lui apprendre où elle avait passé la matinée et peut-être la nuit. (…)
33 La caractérisation du personnage Exercice 1 Complétez ces phrases en donnant à chaque personnage une caractéristique morale suggérée par sa description physique. a. Madame Vacher avait les cheveux grisonnants, des yeux perçants enfoncés dans leurs orbites et le teint terreux. … des yeux perçants qui suggéraient sa méfiance envers tout le monde, et le teint terreux de ceux qui passent leurs journées enfermés à observer les autres.
Elle répondit avec vivacité que son intention n’était pas de le lui dire. (…) Il répliqua, d’une voix chevrotante et lui demanda si elle espérait le lui cacher. Elle expliqua d’un ton glacial qu’elle y tenait fort peu, et que si elle refusait de lui répondre, c’était absolument pour la forme ; elle ajouta qu’elle voulait le convaincre qu’il n’avait pas le droit de lui adresser cette question. Il s’indigna et jura à cette idée. Il exigea de savoir qui était donc le maitre dans leur maison, d’elle ou de lui, et qui portait une jupe et devait filer une quenouille. Il l’accusa de prétendre vouloir lui ôter la barbe du menton. Il la traita de « femmelette », en affirma ironiquement que cela lui seyait bien. Elle rétorqua qu’elle savait qu’elle était l’esclave et lui le seigneur, que la loi du pays l’avait fait son maitre, et que s’il pouvait lier son corps, garrotter ses mains, gouverner ses actions, car il avait le droit du plus fort d’après la société, il ne pouvait rien sur sa volonté. 3. Reformulez le dialogue sous forme de résumé de paroles. Le colonel demanda des comptes à sa femme sur la nuit qu’elle avait passé. Le ton monta, et le couple se disputa, l’un marquant sa volonté et son pouvoir, l’autre soulignant sa liberté de pensée inaliénable. Exercice 6 1. Lisez l’extrait suivant. 2. Distinguez, dans les propos de M. Dufour, les différents types de paroles rapportées. Discours direct ➞ souligné d’un trait simple Discours indirect ➞ souligné d’un trait irrégulier Discours indirect libre ➞ en gras 3. Peut-on parler, dans certains passages, de résumé de paroles ? Justifiez votre réponse. On peut considérer que les passages en italiques sont du résumé de paroles, car le verbe « plaisanta » laisse entendre une série de commentaires sur le terme « dames ». De même, l’attitude qui consiste à « pérorer » fait référence à un acte de paroles, sans que l’on sache précisément ce qui s’est dit.
> pp. 358-359
b. La beauté de la duchesse ne lassait pas d’être regardée. Son front pur et altier, l’ovale de son visage et sa peau délicate attiraient tous les regards. … son front pur et altier, signe de sa grandeur d’âme, l’ovale de son visage qui soulignait sa bonté, et sa peau délicate attiraient tous les regards. c. M. de Saillais se tenait droit ; son habit, fait d’une solide pièce de laine, semblait taillé sur lui.
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M. de Sallais se tenait droit, avec la raideur d’un homme de loi. Son habit, fait d’une solide pièce de laine, semblait taillé sur lui et exprimait le souci d’économie du personnage. Exercice 2 Que disent ces paroles rapportées des personnages qui les prononcent ? Justifiez votre réponse. a. « – Tiens ! c’est vous, madame Boche !... Oh ! j’ai un tas de besogne, aujourd’hui ! » Émile Zola, L’Assommoir, 1877. ➞ langage populaire, ouvrier b. « – Vous voulez que j’vous vendions Charlot ? Ah ! mais non ; c’est pas des choses qu’on d’mande à une mère ça ! Ah ! mais non ! Ce serait une abomination. » Guy de Maupassant, « Aux champs », 1882. ➞ langage paysan, idiolecte et déformations grammaticales c. Voilà mon crime, messieurs, et il sera puni avec d’autant plus de sévérité que, dans le fait, je ne suis point jugé par mes pairs. Je ne vois point sur les bancs des jurés quelque paysan enrichi, mais uniquement des bourgeois indignés… Stendhal, Le Rouge et le Noir, 1830. ➞ langage soutenu, qui témoigne de la dignité et de l’éducation du locuteur Exercice 3 1. Quels sont les traits de caractère de Phileas Fogg ? 2. Peut-on ici parler de portrait ? Justifiez votre réponse. Phileas Fogg apparait ici comme un personnage particulièrement ponctuel et routinier. Le narrateur insiste tout particulièrement sur la précision des horaires et du « programme », de la « notice » de son personnage, dont la vie semble réglée parfaitement comme celle d’une machine. Tout manquement à la règle devient remarquable : Fogg est « coupable » d’inexactitude, et l’heure devient « insolite ». En outre, Phileas Fogg semble aussi être un homme organisé et affirmé. Il impose son idée à son domestique, n’exprime que l’essentiel, sans circonvolution, à travers des phrases courtes et catégoriques « pas de malles. Un sac de nuit seulement. Dedans, deux chemises… ». Tout semble prévu, sans laisser de place au hasard « nous achèterons en doute. Ayez de bonnes chaussures. » On ne peut ici parler de portrait, dans le sens où le personnage n’est pas décrit physiquement, ni psychologiquement. On ne connait pas grand-chose de lui, ce qui en fait quelqu’un d’assez mystérieux. Cependant, les habitudes (même perturbées) et les propos du personnage le caractérisent de façon implicite, puisque l’on peut dégager au moins deux traits de caractère de Phileas Fogg à travers ces quelques lignes.
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Exercice 4 1. Lisez le texte suivant. 2. Comment le cadre du boudoir met-il en relief le portrait de la duchesse ? Le boudoir est ici décrit comme un lieu particulièrement riche et splendide. Il s’agit d’un cadre harmonieux, agréable « frais », composé de tissus qui évoquent la douceur et la volupté : « velours, plis moelleux d’une mousseline ». Les couleurs, « vert, fond jaune, bronze doré » s’accordent entre elles dans un « demi-jour » esthétique. Enfin, la position de « l’ottomane », au centre d’un « demi-cercle », sous un « dais », entourée de « vases de Sèvres » fleuris accentue la symétrie du cadre. Le lieu s’apparente donc à une œuvre d’art, un « tableau » que voit Augustine, dans lequel la duchesse est elle-même une œuvre d’art, puisqu’elle est comparée à une « statue antique » puis à une « enchanteresse », mise en valeur par le boudoir qui contribue à sa séduction. Exercice 5 1. Lisez le texte suivant. 2. De quel type de portrait s’agit-il majoritairement ? Le portrait du personnage est un portrait statique : il lie l’aspect physique et vestimentaire, qui sont très développés (soulignés) et des éléments appartenant au portrait moral ou psychologique (en gras). 3. Quel est le rôle de la comparaison initiale ? La comparaison à Don Quichotte a pour but de ridiculiser le personnage d’emblée. Don Quichotte est un personnage qui se prend pour un chevalier, qui porte des attributs vieillots et rouillés, qu’il a lui-même fabriqués, et qui soulignent le fait qu’il vit dans un univers chevaleresque imaginaire et livresque. 4-5. Comment le narrateur porte-t-il un jugement sur le personnage qu’il décrit ? Quelle impression d’ensemble se dégage alors de ce jeune homme ? Le narrateur intervient dans la description qu’il nous livre de son personnage. Il porte sur lui un regard amusé, à travers la comparaison initiale, la comparaison au « fils de fermier en voyage », mais aussi à travers la précision de la couleur du pourpoint, transformée en une « nuance insaisissable ». Le commentaire sur le Gascon sans béret ajoute encore à l’humour du narrateur, qui pourtant laisse entendre que le personnage n’est pas ce qu’il parait. En effet, les deux commentaires sur l’aspect moral du jeune homme, son « astuce » et son « intelligence » font comprendre que le personnage présenté ici a aussi l’étoffe d’un héros.
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34 Le temps dans le récit Exercice 1 1. Les repères temporels, dans ces phrases, sont-ils relatifs ou absolus ? Justifiez votre réponse. 2. Quelles sont les fonctions de ces indications ? a. Le clair d’étoiles s’est éteint, le jour commence à poindre, une ombre cendreuse baigne à présent la grange. (repères relatifs ➞ donner une indication sur le moment de la journée ; fonction narrative) b. Trois jeunes gens, trois amis qui avaient fait ensemble le voyage d’Italie, visitaient l’année dernière le musée des Studii, à Naples. (repère relatif à la date de la narration ➞ volonté d’ancrer le récit dans le réel) c. Le 15 septembre 1840, vers six heures du matin, la Villede-Montereau, près de partir, fumait à gros tourbillons devant le quai Saint-Bernard. (repères absolus ➞ illusion réaliste) Exercice 2 1. Repérez les analepses ou les prolepses dans les extraits suivants. 2. Pour chacune d’elles, dites quelle est sa fonction. a. Ce vénérable édifice était surmonté d’un toit triangulaire dont aucun modèle ne se verra bientôt plus à Paris. (prolepse ➞ donner une idée de l’âge du lieu, le renvoyer à une autre époque pour en signifier la singularité) b. Entrée dans le monde dans le temps où, fille encore, j’étais vouée par état au silence et à l’inaction, j’ai su en profiter pour observer et réfléchir. (analepse ➞ rappel du passé, pour souligner l’évolution du personnage et faire comprendre sa personnalité) Exercice 3 1. Quelles sont les indications qui marquent l’écoulement du temps dans ces phrases ? 2. Que pouvez-vous dire du rythme de la narration ? a. C’était une belle matinée de la fin novembre. En pleine obscurité, sitôt après laudes, nous avions écouté la messe dans un village de la vallée. Puis nous nous étions mis en route vers les montagnes, au lever du soleil. ➞ Ici, la narration commence par l’évocation de la matinée. Cependant, celle-ci semble s’étirer, puisque la phrase suivante reprend le début de la journée « après laudes », lorsqu’il fait encore nuit, avant de mentionner le « lever du soleil ». L’indication temporelle « puis » ainsi que le verbe de processus « se mettre en route » indiquent le cheminement progressif des personnages, et la lenteur de la narration qui suit le rythme de leur marche. b. Blas de Santillane, mon père, après avoir longtemps porté les armes pour le service de la monarchie espagnole, se retira dans la ville où il avait pris naissance. Il y épousa une petite bourgeoise qui n’était plus dans sa première jeunesse, et je vins au monde dix mois après leur mariage. ➞ Le narrateur donne ici trois indications de temps : « après avoir longtemps porté les armes », qui renvoie aux années
> pp. 360-361 militaires, le « et » de succession, et le complément « dix mois après leur mariage ». En deux phrases, plusieurs années sont résumées, à travers l’accumulation de trois verbes : « il se retira, il y épousa, je vins au monde », qui marquent les étapes de la vie du père du narrateur. Le rythme est donc rapide, et le texte résume sommairement plusieurs années. c. De temps à autre, on entendait des coups de fouet derrière la haie ; bientôt la barrière s’ouvrait : c’était une carriole qui entrait. ➞ Les indications temporelles ici sont quasi simultanée, le « bientôt » exprimant la proximité de l’action avec la précédente. Par ailleurs, l’indication « de temps à autre » marque l’habitude, la répétition presque monotone de l’action, ainsi que l’imparfait semble aussi le suggérer. Ici, la succession des étapes marquée par les points-virgules (on entendait / la barrière s’ouvrait / une carriole entrait) se répète dans un temps qui semble s’étirer. Exercice 4 1. Lisez le texte suivant. 2. Relevez les indications temporelles. Quel rythme donnent-elles à la narration ? Les indications temporelles sont nombreuses (soulignées dans le texte). Elles contribuent à donner un rythme rapide à la narration, car on y trouve des termes exprimant la soudaineté de l’action (« tout à coup, déjà ») ainsi que la succession (« quelques instants après, puis »). 3. Quelle image du héros font-elles ressortir ? Ces indications soulignent que le héros semble toujours avoir un temps de retard. Il ne se rend compte de ce qui se passe qu’après coup, et ce qu’il voit ou perçoit ne prend son sens qu’a posteriori. Il s’agit donc non pas vraiment d’un héros à la guerre, mais d’un anti-héros, spectateur ignorant, incapable de suivre la stratégie de la guerre. Exercice 5 1. Lisez le texte suivant. 2. Relevez les marques temporelles et classez-les en fonction de l’époque à laquelle elles font référence. Plusieurs références temporelles émaillent l’extrait (soulignées dans le texte), et font référence à différentes époques : celle de l’énonciation, celle de l’événement qui s’est produit et dont il veut parler, et celles qui relatent la période intermédiaire entre les deux : « voici maintenant / à l’âge où je suis / Maintenant / quatrevingt-deux ans » « ce jour-là, pendant dix minutes » « voici cinquante-six ans / il ne se passe pas un mois / depuis cette heure » 3. Comment contribuent-elles à créer une atmosphère particulière dans ce récit ? Ces marques temporelles contribuent à créer une atmosphère particulière au récit, car la grande période écoulée
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entre « l’aventure » et le moment de l’énonciation semble presque nulle ; on a l’impression que cet évènement a marqué à vie le personnage, et que la peur ressentie alors est toujours actuelle. Ces termes temporels reflètent donc
l’angoisse du personnage, et installent une atmosphère mystérieuse et inquiétante, qui va constituer le cadre du récit attendu, en ménageant un suspens important.
35 L’espace dans le récit Exercice 1 Relevez les marques de déplacement spatial dans ces extraits. Que disent-elles du personnage concerné ? a. À peine le jour pointe-t-il, qu’Adam se met en route. Il sort de la ville, le livre au fond de sa poche. Il part pour Comala. Il s’en va au hasard, vers l’ouest, s’éloigne de la côte. Il longe des champs de coton, il voit le ciel rosir au ras des vergers. Il marche dos au soleil, son ombre est encore pâle, incertaine. ➞ Les marques de déplacement montrent un personnage en marche, et expriment le départ, voire la fuite ; les verbes employés marquent l’éloignement « il sort, il part pour, il s’en va, il s’éloigne », et témoignent d’un personnage en quête de quelque chose. b. Je marchais sur la plage désertée de la mer. Les grèves abandonnées du flux m’offraient l’image de ces espaces désolés que les illusions laissent autour de nous lorsqu’elles se retirent. ➞ Le verbe « je marchais », à l’imparfait, montre un personnage dont le déplacement est en fait prétexte à la rêverie ; c’est plus un état qu’un déplacement véritable d’un endroit à un autre. c. Ah ! quelle baraque, mon Dieu ! Rien n’en peut donner l’idée. Pour un oui, pour un non, Madame vous fait monter et descendre les deux maudits étages… On n’a même pas le temps de s’assoir dans la lingerie, et de souffler un peu que… drinn !... drinn !... drinn !... il faut se lever et repartir… ➞ Les verbes de mouvement employés sont souvent contradictoires : « monter » et « descendre », « s’assoir » et « se lever ». De même, le verbe « repartir » avec son préfixe « re » implique le mouvement perpétuel et incessant auquel est obligé de se plier le personnage. Il s’agit donc d’un mouvement contraint, sans raison, si ce n’est la volonté de « Madame » qui apparait ici comme arbitraire. Exercice 2 1. Quels sont les termes qui renvoient à l’espace du récit ? 2. Renvoient-ils à un lieu réel ou imaginaire ? Justifiez. a. La petite ville de Verrières peut passer pour l’une des plus jolies de la Franche-Comté. Ses maisons blanches avec leurs toits pointus de tuiles rouges s’étendent sur la pente d’une colline, dont des touffes de vigoureux châtaigniers marquent les moindres sinuosités. Le Doubs coule à quelques centaines de pieds au-dessous de ses fortifications. Les termes de lieu renvoient ici à un lieu en apparence réel, puisque la région et la rivière sont des indications absolues.
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> pp. 362-363
La ville de « Verrières », en revanche, n’existe pas, mais donne une illusion de réalité, puisqu’elle est située géographiquement par des indications précises. b. Monsieur le baron était un des plus puissants seigneurs de la Westphalie, car son château avait une porte et des fenêtres. Sa grande salle même était ornée d’une tapisserie. La « Westphalie » est présentée comme un lieu existant, même s’il est en fait le fruit de l’imagination de Voltaire. Il est cependant calqué sur le nom de régions allemandes existantes. L’autre lieu évoqué, le « château », est une indication relative, qui donne l’impression que l’on entre dans l’univers du conte. c. L’hôtel se trouvait sur le boulevard de la Chapelle, à gauche de la barrière Poissonnière. C’était une masure de deux étages, peinte en rouge lie de vin jusqu’au second, avec des persiennes pourries par la pluie. Les lieux évoqués sont des lieux réels, parisiens. L’hôtel, en revanche, sans nom, est une indication relative, et correspond à un lieu imaginaire, celui de l’action, mais ancré dans le réel. Exercice 3 1. Relevez les indices spatiaux dans les phrases. 2. Quelle est la fonction de la description dans chacun de ces extraits ? Justifiez. a. Enfin, on avait traversé la Seine une seconde fois, et, sur le pont, ç’avait été un ravissement. La rivière éclatait de lumière ; une buée s’en élevait, pompée par le soleil, et l’on éprouvait une quiétude douce, un rafraichissement bienfaisant à respirer enfin un air plus pur qui n’avait point balayé la fumée noire des usines ou les miasmes des dépotoirs. ➞ Ici, la description est d’abord référentielle et narrative : les personnages traversent « la Seine » (indication absolue), ce qui leur permet d’accéder à la campagne à laquelle ils aspirent et dans laquelle va se dérouler la nouvelle. Cependant, la fonction de la description est aussi esthétique. En effet, en mêlant les notations visuelles (« éclatait de lumière »), les notations tactiles (« buée », « rafraichissement »), Maupassant cherche à rendre compte de l’effet de l’air et de la lumière sur l’eau et l’atmosphère, tout comme les peintres impressionnistes à la même époque. Enfin, la description plonge le lecteur dans une atmosphère douce et agréable (« ravissement, éclatait, quiétude douce, bienfaisant, air pur »), qui semble présager de la suite. b. L’hôtel de Nana se trouvait avenue de Villiers, à l’encoignure de la rue Cardinet, dans ce quartier de luxe, en
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train de pousser au milieu des terrains vagues de l’ancienne plaine Monceau. ➞ Ici, la description est essentiellement documentaire et référentielle. Les indications de lieu sont absolues, et correspondent aux changements de la ville de Paris à l’époque haussmannienne (« avenue de Villiers, rue Cardinet, ancienne plaine Monceau »). Cependant, la description prend aussi une dimension symbolique : « l’hôtel de Nana », qui évoque le « luxe » des nouveaux riches méprisés par le narrateur (l’analogie avec les mauvaises herbes qui poussent dans les terrains vagues est frappante), est aussi construit sur d’anciens « terrains vagues », comme pour rappeler les origines basses du personnage et son incapacité à accéder à un autre milieu social que le sien. c. La salle des Archives est petite ; les hautes fenêtres ont de minuscules carreaux anciens ; les gens qui écrivent sont courbés sur leurs liasses comme des ouvriers de précision ; au fond, sur un pupitre en estrade, le conservateur surveille et travaille. L’atmosphère est grise, malgré la lumière, à cause du reflet des vieux murs. ➞ Ici, la description se fait explicative. De nombreux détails la jalonnent : la salle est « petite », les fenêtres sont « hautes », le conservateur est « au fond ». Les adjectifs qui qualifient la pièce évoquent par ailleurs son atmosphère poussiéreuse ; à l’ancienneté (« anciens, vieux ») s’ajoute l’étroitesse (« petite, minuscules »). Tout semble ici austère, ce qui transparait à travers la comparaison des gens à des « ouvriers », « courbés », et « surveillés » par le conservateur. La description prend alors aussi une fonction symbolique. d. Les avenues détrempées par les continuelles averses d’automne s’allongeaient, couvertes d’un épais tapis de feuilles mortes, sous la maigreur grelottante des peupliers presque nus.
➞ Ici, la description est essentiellement symbolique. Les lieux ne sont pas précis, et les adjectifs les décrivant renvoient au dénuement voire la mort : les feuilles sont « mortes », les peupliers d’une « maigreur grelottante » et « presque nus ». Par ailleurs, la phrase de Maupassant donne une impression de tristesse et de monotonie, à travers la longueur des « avenues » qui « s’allongeaient », et les « continuelles » averses. Le paysage est ici désolé, à l’image de l’état d’esprit du personnage du récit… Exercice 4 1. Comment les indications spatiales organisent-elles la description dans le texte suivant ? Les indications spatiales organisent la description de la maison du bas vers le haut. Après la première phrase qui donne une impression d’ensemble « chaque étage », la description s’élève progressivement par étape : « au premier, second étage, au troisième ». On découvre donc progressivement la maison. 2. Que suggère cette description ? Quelles attentes peutelle susciter chez le lecteur ? La description ouvre plusieurs horizons d’attente. Elle insiste d’abord sur l’âge de la maison et le fait qu’elle appartienne à un monde ancien (« ce débris, premiers efforts de la menuiserie »), tel un objet ayant place dans un musée « au Conservatoire des arts et métiers ». Elle laisse ensuite une impression de mystère, car elle décrit des « fenêtres » vues de l’extérieur, et qui ne laisse rien percer de l’intérieur des lieux « quatre fenêtres longues, étroites », « fenêtres du second, d’humbles croisées ». Elles sont caractérisées par leur petite taille et par des rideaux et des vitres colorées qui cachent « les mystères » aux yeux des « profanes ». L’intérêt porté par l’observateur (point de vue interne) au dernier étage attise la curiosité du lecteur.
36 Le texte et la représentation théâtrale
> pp. 364-365
Exercice 1
Exercice 2
Lisez cet extrait du dénouement de la pièce Dom Juan de Molière. Quels problèmes de représentation ce texte pose-t-il ? Prenez en compte sa date de première création (1665). Le problème majeur qui se pose ici au metteur en scène est celui de la présence d’un personnage surnaturel, la Statue : comment la représenter ? La didascalie finale de l’extrait présente en plus une autre difficulté : celle de représenter la chute de Dom Juan dans les entrailles de la terre, qui « s’ouvre » et dans un brasier avec de grandes flammes. Il faut donc mettre en scène cette mort spectaculaire et surnaturelle. Les difficultés se renforcent si l’on prend en compte la date d’écriture au xviie siècle : les moyens techniques de l’époque étaient loin de ceux de notre temps et les salles de théâtre n’offraient pas certaines possibilités de machinerie.
1. Lisez les textes suivants. 2. Quelles visions de l’art théâtral et de la représentation transmettent-ils ? Victor Hugo présente le théâtre sur le mode antithétique : ce n’est « pas le pays du réel » mais « le pays du vrai ». La motivation, la générosité, le travail et les efforts de l’ensemble des comédiens et de l’équipe technique qui les entoure transforme l’artifice en art. Le second texte est plus nuancé : la représentation est toujours source d’une certaine déception : l’imagination, reine des facultés humaines, projetait des détails précis, une perfection que ne peuvent atteindre la réalité d’un spectacle. Pour autant, la fin de l’extrait demande de se contenter de cette représentation, certes imparfaite, mais qui ne peut faire mieux.
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3. Quels sont leurs points de convergence ? De divergence ? Les deux textes se rejoignent donc dans le respect porté à ceux qui permettent les représentations théâtrales. Mais l’éloge de Hugo n’est pas partagé avec la même admiration par Louis Becq de Fouquières. Exercice 3 1. Que disent ces citations sur le métier de comédien ? Ce texte explique que la nature humaine est impossible à imiter car trop de choses échappent à la conscience. Le comédien ne peut donc espérer une imitation vraiment crédible. Sa meilleure arme est sa capacité à être habité par le rôle, à le ressentir et non le jouer. 2. Pourquoi le comédien a-t-il un rôle essentiel dans la représentation ? Le comédien est celui qui porte le spectacle : il est le premier maillon de la représentation et celui qui va permettre aux spectateurs de croire à l’histoire, d’oublier l’illusion et l’artifice. Son rôle est en cela essentiel : plus que les mots, il porte l’âme de la pièce et l’incarne, littéralement.
Exercice 4. À partir de l’observation des photographies, comparez les deux mises en scène de Cyrano de Bergerac et rédigez un paragraphe argumentatif pour expliquer celle que vous préférez et pourquoi. Les deux mises en scène photographiées proposent une approche très différente du même texte. Alors que la mise en scène de Petrika Ionesco repose sur un décor et une mise en scène réaliste et fidèle au contexte, celle de Daniel Scahaise fait le choix d’un décor, d’un éclairage tout à fait symboliste et quasi surréel. Tout est ici symbole à déchiffrer : le rôle de la lune, élément lyrique et baroque à la fois, la scène dépouillée, l’échelle qui mime la domination de Roxane… Entre réalisme et version symboliste, les deux mises en scène illustrent donc la diversité des approches possibles et le rôle prépondérant du créateur qu’est le metteur en scène. C’est bien la pièce de Rostand vue à travers le regard d’un metteur en scène que le spectateur voit.
37 L’action au théâtre Exercice 1 Comment le cadre spatio-temporel est-il mis en place dans l’extrait suivant ? Les didascalies mentionnent un certain nombre de repères qui fixent ce cadre. On peut ainsi noter le décor et les costumes qui proposent un contexte très précis : « à la mode d’Isabelle la Catholique », « à la mode castillane de 151. » … On se trouve ici plongé dans le cadre spatio-temporel de l’Espagne au sortir du Moyen Âge qui correspond bien à l’esthétique revendiquée du drame romantique. Exercice 2 1. Quels éléments du cadre spatio-temporel nous fournit la scène d’exposition suivante ? La didascalie initiale mentionne un « cabinet » entre « l’appartement de Titus et celui de Bérénice », à « Rome ». La scène se déroule donc dans un palais, un lieu officiel et pendant l’Antiquité : on retrouve ici toutes les caractéristiques d’un cadre de tragédie classique. 2. Qu’apprend-on sur les personnages ? Le statut social des personnages est précisé ainsi que leurs relations : Antiochus, présenté comme un des « plus grands rois » de « l’Orient », tutoie Arsace qui le vouvoie. Des relations hiérarchiques s’imposent donc entre eux et on peut en déduire qu’Arsace est le confident, sinon le serviteur d’Antiochus. De plus, le spectateur apprend qu’Antiochus fut « l’amant » de la reine Bérénice et que cette dernière se prépare à épouser Titus. En peu de vers, l’intrigue est déjà
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bien et clairement amorcée autour des problématiques de l’amour et du pouvoir. 3. Que peut-on s’imaginer sur la suite de l’intrigue ? Dès lors, le spectateur peut s’attendre à ce que le projet de mariage ne se déroule pas comme prévu entre Titus et Bérénice et le « secret entretien » réclamé en « importun » par Antiochus auprès de la reine semble porteur d’un élément déclencheur qui va modifier le cours de l’intrigue. Exercice 3 En quoi cet extrait illustre-t-il la crise de l’action et du cadre spatio-temporel dans le théâtre de l’absurde ? Les élèves repéreront facilement dans cet extrait les marques d’un dérèglement temporel. On peut ainsi confronter les phrases « il est mort il y a deux ans », « on a été à son enterrement, il y a un an et demi », « il y a déjà trois ans qu’on a parlé de son décès » et « il y avait quatre ans qu’il était mort ». Le cadre spatio-temporel ne présente donc plus ici de repères fiables et cela illustre parfaitement le théâtre de l’absurde qui remet en question tous les modèles traditionnels et entretient une confusion temporelle. Exercice 4 Dans la mise en scène suivante de la pièce de Samuel Beckett, Oh les Beaux jours, commentez le décor. Que vous évoque-t-il ? Le décor de la mise en scène représentée en photographie présente de toute évidence une caractéristique symbolique
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forte. Ici, rien de réaliste, tout est à décoder, déchiffrer : le jeu des couleurs, des formes, la position du personnage… Pas de repères temporels, des couleurs à dominante froide, l’impression d’un horizon se déroulant à l’infini, un personnage ridicule à l’échelle des éléments qui semblent naturels, un sentiment d’absurdité… voilà autant de remarques possibles des élèves. On retrouve l’illustration en image de ce que la page en vis-à-vis nous dit des caractéristiques du théâtre contemporain quant au cadre spatio-temporel.
Exercice 5 Dans l’œuvre théâtrale que vous avez étudiée cette année, identifiez les différentes étapes de l’intrigue, les scènes faisant référence à des lieux communs et analysez le cadre spatio-temporel. À adapter au programme de l’année et à l’œuvre choisie par le professeur.
38 La parole théâtrale Exercice 1 Retrouvez des didascalies internes dans l’extrait suivant. L’extrait propose deux didascalies internes : « je me jette à vos pieds » et « j’embrasse vos genoux ». Ces répliques présentent en effet des indications de jeu et de gestuelle pour les acteurs. Exercice 2 1. Ajoutez des didascalies dans l’extrait suivant. On peut imaginer une didascalie en ouverture pour présenter le décor du type : « Sur une plage. » ou bien « deux personnages s’avancent en titubant ». De même, on peut envisager d’insérer une didascalie associée à une prise de parole comme pour la seconde réplique d’Arlequin : « ARLEQUIN, sur un ton larmoyant ». 2. Quelles informations nous donne cet échange théâtral ? Cette scène expose au spectateur le récit de ce qui s’est déroulé avant le lever du rideau. Ce sont donc des informations de type narratif essentiellement, avec le récit du naufrage. 3. Quel type de texte pourrait-on trouver dans un roman pour donner les mêmes informations ? Dans un roman, ce naufrage aurait pu être l’occasion d’une longue description et d’une pause narrative. Ici, du fait de la forme théâtrale, le récit est brossé à gros traits et expédié. Il sert juste de déclencheur pour l’intrigue et n’a pas de fonction esthétique propre à lui. 4. Quelles fonctions a ici la parole théâtrale ? Dans cet extrait la parole théâtrale permet de mettre en place l’intrigue, d’exposer la situation. Exercice 3 1. Lisez ces extraits de la pièce Œdipe, de Voltaire. 2. Cette pièce a été qualifiée de « théâtre à thèse ». Quelle particularité de la parole théâtrale Voltaire utilise-t-il pour véhiculer ses idées ? Pour servir ses idées Voltaire utilise dans ces extraits le principe de la double énonciation : les répliques à lire dans cet exercice et issues de sa pièce Œdipe sont destinées aux
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personnages présents sur scène, mais surtout aux spectateurs. Il s’agissait d’inviter le public à réfléchir sur les problématiques de la concentration des pouvoirs dans la figure royale, de la divinisation de cette figure et de s’interroger sur le pouvoir de la religion et la manière dont le clergé pouvait l’utiliser. On entre ici dans les thématiques des Lumières et cette pièce s’inscrit parfaitement dans un théâtre politique, engagé, à thèse, sous des abords divertissants. La double fonction traditionnelle placere et docere de la littérature est ici parfaitement représentée. Exercice 4 1. Quels types de réplique trouve-t-on dans l’extrait suivant ? Les répliques sont des stichomythies. 2. En quoi ce choix est-il particulièrement adapté à une scène de dispute ? Ce sont des répliques très brèves et incisives, permettant de rythmer le dialogue, de le dramatiser et de le constituer en véritable joute oratoire. Ce choix est donc particulièrement approprié pour une scène de dispute. Exercice 5 1. Qu’apprend-on sur Don Juan dans cet extrait ? Le spectateur apprend tout d’abord que Dom Juan revendique son athéisme, ce qui constitue déjà un acte provocateur dans le contexte de l’époque. De plus, il oppose à la religion les principes concrets des mathématiques et des sciences. C’est un homme de raison, de logique, qui ne se laissera pas manipuler par les apparences et les mystères religieux. 2. Comment l’auteur utilise-t-il la parole pour nous faire comprendre la personnalité de Don Juan ? À la place d’avoir un portrait de Dom Juan assez figé, le texte dresse un portrait en action, ou plutôt en paroles. Dom Juan se définit lui-même au cours de cette discussion avec son serviteur. On retrouve ici une des fonctions du rôle de confident qui permet des scènes où les personnages principaux se livrent et révèlent ce qu’une description ou une focalisation interne auraient permis de montrer dans le genre romanesque par exemple. Outils d’analyse
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39 La versification Exercice 1 Indiquez la nature des deux strophes suivantes. La première strophe est un quatrain, la seconde un tercet. Exercice 2 Faites le découpage syllabique des vers suivants, en étant attentif au traitement du « e ». Sou/vent/, pour/ s’a/mu/ser/, les/ hom/mes/ d’é/qui/page Pren/nent/ des/ al/ba/tros/, vas/te/s oi/seaux/ des/ mers Exercice 3 Indiquez la mesure et le nom des vers utilisés dans cette fable de Jean Anouilh. Les vers de la fable de Jean de la Fontaine comportent respectivement 7, 7, 7, 7, 12, 12, 12 12, 10, 8 syllabes ; on a donc des heptasyllabes, des alexandrins, un décasyllabe et un octosyllabe. Exercice 4 1. Quel est le type de vers employé ? Les vers sont des alexandrins. 2. Étudiez la disposition, la valeur et le genre des rimes. Les rimes sont disposées selon un schéma : ABBA ABBA CCD EDE ; on a donc un sonnet français. Les rimes féminines et masculines sont alternées. La rime A est riche dans le premier quatrain et suffisante dans le second, la rime B est suffisante, la rime C est riche, la rime D est suffisante, la rime E riche. 3. Faites le découpage syllabique des vers du premier quatrain, en étant attentif au traitement des « e ». Ac/ca/blé/ de/ pa/ress/e et/ de/ mé/lan/co/lie, Je/ rê/ve/ dans/ un/ lit/ où/ je/ suis/ fa/go/té, Com/me un/ liè/vre/ sans/ os/ qui/ dort/ dans/ un/ pâ/té, Ou/ com/me un/ Don/ Qui/chott/e en/ sa/ mor/ne/ fo/lie.
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2. Quel est le rôle de la rime pour Boileau ? La rime est un jalon de la raison pour Boileau, elle doit servir et enrichir le sens (vers 8). Elle est un élément de clarté du discours poétique. Exercice 6 1. Quel est le type de vers employé dans l’extrait du poème suivant ? Les vers sont des alexandrins. 2. Faites le découpage syllabique de la deuxième strophe en étant attentif au traitement du « e » muet. Car/ pour/ lui/ dé/ro/ber/ ses/ lar/mes/ de/ ré/sine, L’hom/me, a/va/re/ bour/reau/ de/ la/ cré/a/ti/on, Qui/ ne/ vit/ qu’aux/ dé/pens/ de/ ceux/ qu’il/ a/ssa/ssine, Dans/ son/ tronc/ dou/lou/reux/ ou/vre un/ lar/ge/ si/llon ! 3. La deuxième strophe contient une diérèse : identifiez-la. La diérèse est sur « ti/on » ; seule possibilité pour obtenir un alexandrin. 4. Étudiez la valeur, le genre et la disposition des rimes. Les rimes des deux strophes sont croisées et alternées (masculines et féminines). Les rimes A et D sont riches et B et C sont suffisantes. Exercice 7 1. Étudiez la longueur des vers dans l’extrait du poème suivant. Les vers sont des dissyllabes dans la première strophe et des trisyllabes dans la deuxième. 2. Pourquoi peut-on parler de vers libres ? On pourrait parler de vers libres dans la mesure où les vers varient dans le poème, passant du dissyllabe dans la première strophe au trisyllabe dans la deuxième. Mais les vers ne sont pas véritablement libres puisqu’ils suivent malgré tout un schéma.
Exercice 5 1. Observez l’alternance des rimes masculines et féminines dans le texte ci-dessous. L’alternance est parfaitement respectée et s’observe bien grâce aux rimes suivies.
40 Les formes fixes Exercice 1 1. Montrez que le poème suivant est un sonnet. Le poème comporte deux quatrains et deux tercets, les vers sont des alexandrins.
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2. L’organisation des rimes est-elle celle des sonnets classiques ? L’organisation des rimes suit le schéma ABBA CDCD EEF DDF. Cette forme de sonnet n’est pas régulière, l’organisation des rimes ne correspond ni au sonnet français, ni au sonnet italien.
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Exercice 2 Expliquez pourquoi ce poème est une ode. Ce poème est une ode parce qu’il s’agit d’un poème lyrique et panégyrique (il célèbre la beauté de Cassandre) et les strophes sont identiques par la longueur et la mesure des vers : on a 3 sizains d’octosyllabes. Exercice 3 1. Que célèbre cette strophe ? Cette strophe célèbre l’enfant et l’enfance par opposition à la vieillesse. Le premier vers est explicite. 2. Pourquoi est-elle lyrique ? Le vocabulaire des émotions, renforcé par la modalité exclamative derrière le mot « Enfant » au vers 2 oppose les « douleurs » de l’âge au « rire » de l’enfance. Le « je » du poète est présent, inclus dans le « notre », enfin l’anaphore des vers 3 et 4 accentue la musicalité de la strophe et notamment celle du vers 3 parfaitement équilibré par un rythme 3/3//3/3. Exercice 4 1. À quelle forme appartient le poème suivant ? Le poème est de forme libre.
2. Sur quels procédés repose son organisation ? Son organisation repose des effets de rythmes créés par un refrain puis des anaphores : Un refrain formé des 4 premiers vers de la strophe, aux strophes 1 et 3 : Des anaphores qui créent un effet de scansion du poème : anaphore de « Et » et « Une » dans la deuxième strophe et anaphore de « Un jour » vers 19 et 20. Exercice 5 1. À quelle forme appartient ce poème ? Ce poème est une fable. 2. Identifiez la mesure des vers. La fable est en vers mêlés puisqu’elle mêle des alexandrins à des octosyllabes. 3. Identifiez le récit et la morale. La morale est isolée du récit graphiquement par un saut de ligne avant les deux derniers vers. Elle se reconnait également par le passage au présent de vérité générale « On voit » puis au passé composé, et la formule « tout le temps » qui lui donne une dimension atemporelle. Le récit est quant à lui composé de l’alternance d’une narration qui utilise les temps traditionnels du récit (imparfait/ passé simple) et de passages au présent pour marquer le discours direct.
41 Poésie et musique : les rythmes et les sonorités Exercice 1 Indiquez la césure et les coupes des alexandrins suivants. a. J’ai longtemps/ habité // sous de vas/tes portiques b. Je suis banni !/ Je suis proscrit !/ Je suis funeste ! Le deuxième vers ne comporte pas de césure, c’est un trimètre romantique. Exercice 2 Placez les césures dans les décasyllabes de la strophe suivante. Que remarquez-vous ? Je vous envoie// un bouquet que ma main Vient de trier// de ces fleurs épanies ; Qui ne les eût// à ce vêpre cueillies, Chutes à terre// elles fussent demain. Le rythme des décasyllabes est régulier. Exercice 3 Identifiez le rejet dans les vers suivants. Et la machine ailée en l’azur solitaire Fuyait, et pour la voir vint de dessous la terre. Exercice 4 1. Quel rôle jouent les allitérations en « r » et « s » dans ce poème ? Les allitérations en « r » reproduisent le grondement du tonnerre, par exemple dans les trois derniers vers tandis
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que allitérations « s » reproduit la zébrure de l’éclair, aux vers 6/7/8. 2. Étudiez le rythme du vers 12, que pouvez-vous en dire ? Le rythme en quatre temps reproduit le « va » et « vient des vagues de la mer : « Va, / vient/, luit/ et clame ». Exercice 5 Mettez en évidence les nombreuses répétitions et anaphores qui scandent ce poème de Baudelaire. On note d’abord l’anaphore de « Dans … de la chevelure » au début des paragraphes 4,5 et 6 qui agit comme un refrain. Chaque paragraphe contient des répétitions : « longtemps » dans le premier, « tout ce que je » dans le deuxième, « contiennent » puis « où » dans le troisième, « de toutes » dans le quatrième, « dans » (cinquième), « chevelure » (sixième), « mordre », « mordille » dans le dernier. Les reprises lexicales induisent également des reprises des structures syntaxiques qui contribuent à la scansion du texte. Exercice 6 1. Relevez les nombreux effets de rupture du vers dans le poème suivant. Les rejets. Le contre-rejet La ponctuation qui rompt le vers Outils d’analyse
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C’est un trou de verdure où chante une rivière, Accrochant follement aux herbes des haillons D’argent ; où le soleil, de la montagne fière, Luit : c’est un petit val qui mousse de rayons. Un soldat jeune, bouche ouverte, tête nue, Et la nuque baignant dans le frais cresson bleu, Dort ; il est étendu dans l’herbe, sous la nue, Pâle dans son lit vert où la lumière pleut. Les pieds dans les glaïeuls, il dort. Souriant comme Sourirait un enfant malade, il fait un somme : Nature, berce-le chaudement : il a froid. Les parfums ne font pas frissonner sa narine ; Il dort dans le soleil, la main sur sa poitrine, Tranquille. Il a deux trous rouges au côté droit.
Les deux derniers rejets insistent sur le calme apparent, mais introduisent en même temps l’idée d’une cassure et préfigurent le choc final. Le contre-rejet introduit l’idée négative de la maladie ; là encore il pointe un problème par un effet de contraste entre le lexique et la syntaxe. Mais à l’inverse du rejet qui introduit de la brutalité sur un vocabulaire positif, le contre-rejet gomme artificiellement la présence négative de « malade » par un étirement en apparence apaisant de la syntaxe. La rupture introduite par les deux points qui coupent le vers 11 en deux et isole un petit morceau à fin ; « il a froid ». Cela met en valeur à la rime un élément négatif qui nous rapproche de la fin terrible. Même effet dans le dernier vers qui vient renforcer la chute par la coupure du vers par le point après tranquille.
2. Quel est leur rôle, selon-vous ? Les rejets contrastent avec le tableau idyllique en introduisant des effets de rupture qui rompent l’harmonie portée par le réseau lexical.
42 Les formes de l’argumentation Exercice 1 Identifiez la forme d’argumentation développée dans chacun des textes suivants. Justifiez votre réponse. a. Argumentation directe. Le locuteur s’appuie sur son expérience personnelle pour nous livrer une réflexion sur la littérature. b. Argumentation indirecte. L’histoire de Jeanne, une femme du début du xxe siècle permet à l’auteur d’évoquer la place des femmes à cette époque. c. Argumentation directe. L’auteur utilise la presse pour s’adresser au président et exposer son point de vue sur les prisons. d. Argumentation directe. Il s’agit d’un discours adressé aux députés. Exercice 2 Pour chacune des formes indiquées, rédigez un court texte argumentatif d’environ 5 lignes sur le thème de la protection de l’environnement. a. Messieurs les députés. Je m’adresse à vous aujourd’hui pour vous alerter à propos d’un sujet que vous connaissez bien : la protection de l’environnement. Des dizaines de rapports vous ont été transmis, vous vous êtes engagés en signant les accords internationaux, vous êtes nombreux à mettre en avant cette question au moment de votre élection et pourtant… rien n’a été fait. b. Vous ! les propriétaires de 4X4, vous ! les plaisanciers qui jetez vos ordures à la mer, vous ! les industriels qui déversez les déchets dans les fleuves, vous ! les particuliers qui ne tenez aucun compte des consignes de tri, vous êtes des meurtriers. Oui, vous assassinez la nature à petit feux, vous étouffez un bien essentiel, vous signez à terme notre arrêt de mort à tous.
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c. Candice arriva en compagnie de son amie Martine dans au pays incroyable. D’abord, elles s’étonnèrent de respirer un air aussi pur, elles traversèrent une immense étendue naturelle qui semblait inhabitée, des animaux inconnus venaient les saluer. Elles rencontrèrent un habitant de cette contrée qui leur expliqua qu’ils respectaient la nature comme on s’occupe de ses propres parents… d. Chers compatriotes, un seul sujet me semble important aujourd’hui, préserver notre environnement. Ce combat conditionnera tous les autres. Si nous ne contenons pas la pollution de notre espace vitale, nous nous condamnons à une mort lente mais certaine. Exercice 3 1. Quelles formes d’argumentation sont utilisées dans ces deux textes ? L’extrait a/ est un discours. Il s’agit donc d’une argumentation directe. Victor Hugo s’adresse aux députés de l’Assemblée. L’extrait b/ est un poème tiré du recueil Les Châtiments. L’argumentation de Victor Hugo est également directe, le poète exprime ses idées directement sur la misère. 2. Comparez ces deux textes. Le changement de genre modifie-t-il le contenu et l’intensité de l’argumentation ? Le premier texte est un discours. Victor Hugo s’adresse directement à l’auditoire qu’il interpelle en utilisant l’impératif « figurez-vous ». La description est très réaliste pour donner à voir la situation dramatique qu’il a constatée. Le deuxième texte est poétique. Victor Hugo se met en scène descendant dans les caves comme s’il descendait aux enfers : « je vis ce morne enfer ». Cette métaphore de
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l’enfer est filée à travers les mots « fantômes », « souffre », « mort » … L’extrait des Châtiments est beaucoup plus imagé et renforce la tonalité tragique par l’utilisation de nombreuses figures de style (métaphore filée, antithèse, accumulation…). Exercice 4 1. Quel est le genre de cet extrait ? Cet extrait est un dialogue théâtral. 2. Comment cet extrait provoque-t-il la réflexion du spectateur sur la question de l’égalité entre les hommes et les femmes ? Cet extrait provoque la réflexion du spectateur sur la question de l’égalité entre les hommes et les femmes en mettant en scène une confrontation. Les femmes s’opposent violemment aux hommes et réclament les mêmes droits qu’eux. L’argumentation est renforcée par l’exagération et l’ironie : « À rien comme à l’ordinaire. »
Exercice 5 1. Montrez que la réponse du vieillard est à la fois un réquisitoire contre les Européens et un éloge du mode de vie des habitants du Nouveau Monde. L’argumentation du vieillard est un réquisitoire contre les Européens. En effet, ce dernier critique directement l’absurdité de leur comportement : « vous […] êtes de grands fols ». Il ne comprend pas pourquoi les Européens éprouvent ce besoin d’accumuler des richesses. L’argumentation est également un éloge du mode de vie des habitants du Nouveau Monde. Le vieillard valorise leur bon sens et l’attention qu’ils portent à leurs proches. 2. Cette argumentation est-elle directe ou indirecte ? Expliquez. Cette argumentation est indirecte. Le dialogue entre le vieillard et l’Européen invite le lecteur européen à réfléchir à son mode de vie et à ses priorités.
43 Les conditions et le contenu de l’argumentation Exercice 1 Quelles précisions les titres de ces œuvres donnent-ils sur les conditions de l’argumentation ? a. Une fable. Le titre suggère une réflexion sur le pouvoir. Période du classicisme, de la monarchie absolue. b. Roman par lettres. Période des Lumières. c. Roman. Réflexion sur la justice, sur la peine de mort. Romantisme. d. Article de journal. Le titre indique une polémique. Affaire Dreyfus. e. Poème. Date du conflit entre la France et la Prusse. Exercice 2 Rédigez une courte argumentation en respectant le type de texte, le thème et la thèse donnés. a. Monsieur le maire, Vous avez été élu pour le bien de votre commune et de ses habitants. Certains de ces habitants, et les plus vulnérables, sont en danger. Des écoliers sont chaque jour exposés à des ondes dont on ignore les conséquences sur la santé. Il est de votre devoir de supprimer les antennes relais. b. Mes chères collègues, Je ne m’adresse pas à vous comme député d’un bord politique, c’est à votre humanité que je m’adresse. Il est un droit fondamental que nous nous devons de combattre tous, le droit d’avoir un toit. c. Anne : Toi, du haut de tes 16 ans ! Tu penses que tu peux désigner celui qui dirigera le pays, ceux qui font les lois ? Toi qui passes une heure à choisir entre deux films devant le cinéma. Victor : Cela n’a rien à voir. Après tout, ces lois qu’ils vont voter, ces décisions, elles me concernent autant et peut-être
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même plus. Qui va créer la richesse, contribuer à la solidarité, participer à la culture pendant les 60 prochaines années sinon moi, du haut de mes 1 ans ? Exercice 3 1. Quelles sont les conditions d’argumentation de cet extrait ? Cet extrait est un article de presse publié dans le périodique « Gil Blas » le 1 octobre 1886. L’émetteur est Guy de Maupassant, il s’adresse aux lecteurs et plus précisément à ceux qui veulent élever la Tour Eiffel au cœur de Paris. 2. Quelle est la thèse avancée par Guy de Maupassant ? Guy de Maupassant s’oppose à la construction de la tour Eiffel. 3. Quels arguments avance-t-il ? Les arguments qu’il avance sont les suivants : – Cette tour est laide, elle s’oppose au « goût de l’architecture artiste ». – Cette tour est monstrueuse par sa taille gigantesque. – Cette tour n’étonnera que les imbéciles et effrayera tous les autres. Exercice 4 1. Quelle est la thèse développée par l’auteur dans le texte suivant ? Pour Albert Jacquard, l’action de l’homme sur l’environnement épuise les ressources de la planète et perturbe son équilibre.
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2. Quels arguments et exemples viennent renforcer sa thèse ? Arguments et exemples : – Nous détruisons des richesses pour des satisfactions sans importance (exemple des journaux sportifs ou des célébrités) – Nous accumulons les déchets sans en mesurer les conséquences (exemple des océans qui regorgent de déchets) – Nous privilégions le plaisir immédiat et ne mesurons pas les conséquences à long terme de nos actes.
Exercice 5 1. À quelle décision Étienne Lantier veut-il conduire les mineurs qui l’écoutent ? Étienne Lantier veut que les mineurs poursuivent le combat et n’abandonnent pas la grève. 2. Quels arguments expose-t-il pour développer sa thèse ? Les arguments d’Étienne Lantier : – C’est une question d’honneur. Ce serait une lâcheté de retourner au travail après une grève aussi difficile. – Il faut aller au bout pour mettre fin à un cycle qui ne s’arrêtera jamais autrement : la misère qui conduit à la révolte… – Les conditions de vie et de travail des mineurs sont insupportables, inacceptables.
44 La stratégie argumentative : convaincre et persuader
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Exercice 1
Exercice 4
Identifiez la démarche et le type d’argument exposé dans chacune des phrases suivantes. a. Argument déductif. Une règle générale s’applique à un cas particulier. b. Argument ad hominem. Pour déstabiliser l’adversaire, on l’attaque personnellement (ici il s’agit du tribunal). c. Raisonnement déductif qui prend la forme d’un syllogisme : on applique une règle générale considérée comme vraie à un cas particulier.
1. Quelle est la stratégie argumentative de l’auteur dans le texte suivant ? L’auteur cherche à convaincre le lecteur en articulant un raisonnement très logique. Il reprend plusieurs fois la même thèse et l’illustre pour qu’elle soit bien comprise.
Exercice 2
3. Dégagez les grandes étapes de ce texte et résumez chacune d’elles en une phrase. Étape 1 (l.1 à 7)- la thèse : il ne faut point changer les mœurs et manières par la loi mais par d’autres mœurs et manières. Étape 2 (l.8 à 11)- Reformulation de la même thèse. Étape 3 (l.12 à 18)- Exemple qui illustre exactement la thèse avancée. Étape 4 (l. 19 à la fin) – Prolongement : il faut que le peuple change les mœurs et manières par lui-même.
Par quels procédés et tonalités ces extraits cherchent-ils à persuader le lecteur ? a. Cet extrait utilise l’humour et l’ironie pour évoquer les risques de dérives en matière de sélection avant la naissance. L’auteur termine par une comparaison très excessive qui veut frapper l’imagination. b. L’auteur, pour défendre son point de vue, attaque ceux qui avancent la thèse opposée. Il dit d’eux qu’ils sont jaloux et médiocres. La persuasion passe donc ici par une certaine agressivité. Exercice 3 1. Quelle est la stratégie argumentative de l’auteur du texte suivant ? Justifiez votre réponse. L’Abbé Pierre cherche à persuader ceux qui l’écoutent. Il utilise notamment la tonalité pathétique pour engager les auditeurs à venir en aide aux plus démunis. 2. Par quels procédés l’abbé Pierre réussit-il à toucher les auditeurs pour les inciter à venir en aide aux plus démunis ? – la tonalité pathétique : « une femme vient de mourir gelée… » – l’énonciation. L’abbé Pierre utilise un ton très proche, très personnel : « mes amis » ; « écoutez-moi », « je vous prie » – L’abbé Pierre fait appel à l’humanité des auditeurs et à leur amour : une seule opinion doit exister entre hommes », « aimons-nous assez tout de suite pour faire cela ».
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2. Soulignez les mots ou expressions qui lui permettent d’articuler son raisonnement. « De là, il suit que », « Ainsi », « En général », « donc », « mais ».
Exercice 5 1. Quels arguments Victor Hugo développe-t-il ? Victor Hugo développe les arguments suivants : – La peine de mort va contre la « loi morale universelle ». – Un grand pays comme les États-Unis ne peut commettre un tel crime. – Tuer cet homme reviendrait à tuer son propre frère et renier ses principes : « Washington tuant Spartacus ». 2. Montrez qu’il utilise aussi les sentiments pour toucher le lecteur. Victor Hugo se met en scène pour toucher le lecteur. Il se décrit à genoux et pleurant pour supplier les États-Unis d’annuler cette condamnation : « je m’agenouille avec larmes », « je supplie à mains jointes ». Son appel prend la forme d’une prière.
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