Œuvres complètes: XX De la Religion, considérée dans sa source, ses formes et ses développements, Tome IV 9783110551037, 9783110519051

The volume 20 of the Complete Works comprises the 4th part of On Religion, dedicated to a comparison of sacerdotal and n

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French Pages 870 Year 2019

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Œuvres complètes: XX De la Religion, considérée dans sa source, ses formes et ses développements, Tome IV
 9783110551037, 9783110519051

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Benjamin Constant Œuvres complètes Œuvres XX

Benjamin Constant Œuvres complètes Série Œuvres XX Comité d’Honneur Président: Paul Delbouille André Cabanis, Michel Delon, Etienne Hofmann, Doris Jakubec, François Jequier, Claude Reymond † et Dennis Wood † Comité Directeur Président: François Rosset Vice-président: Giovanni Paoletti Léonard Burnand, Jean-Daniel Candaux, Cecil Patrick Courtney, Paul Delbouille, Lucien Jaume, Kurt Kloocke, Françoise Mélonio, Guillaume Poisson, Paul Rowe, Laura Wilfinger et Markus Winkler Commission des Œuvres Président: Kurt Kloocke Léonard Burnand, Paul Delbouille, Lucien Jaume, Françoise Mélonio, Giovanni Paoletti, François Rosset et Markus Winkler Ce tome XX appartient à la série intitulée Écrits sur la Religion dirigée par Kurt Kloocke La révision en a été assurée par Giovanni Paoletti La relecture en a été assurée par Lisa Azorin La supervision du traitement informatique a été prise en charge par Kurt Kloocke

Benjamin Constant De la Religion, considérée dans sa source, ses formes et ses développements Tome IV Volume dirigé par Kurt Kloocke Établissement des textes, introductions et notes par Kurt Kloocke et Laura Wilfinger Instruments bibliographiques et index par Laura Wilfinger

De Gruyter

Ce tome XX des Œuvres complètes de Benjamin Constant doit sa publication à la générosité de Sandoz – Fondation de Famille

ISBN 978-3-11-051905-1 e-ISBN (PDF) 978-3-11-055103-7 Library of Congress Control Number: 2019945319

Bibliografische Information der Deutschen Nationalbibliothek Die Deutsche Nationalbibliothek verzeichnet diese Publikation in der Deutschen Nationalbibliografie; detaillierte bibliografische Daten sind im Internet über http://dnb.dnb.de abrufbar. © 2019 Walter de Gruyter GmbH, Berlin/Boston Satz: pagina GmbH, Tübingen Druck: CPI books GmbH, Leck www.degruyter.com

Table des matie`res

Dans un souci de clarte´, les titres qui figurent dans cette table ont e´te´ dans certains cas modernise´s et uniformise´s. Ils sont ainsi parfois le´ge`rement diffe´rents des titres qui apparaissent dans le volume.

Table des illustrations . . . . . . . Principes d’e´dition des Œuvres comple`tes Signes, symboles, sigles et abre´viations Chronologie . . . . . . . . . . . Introduction ge´ne´rale au tome XX . . Sources . . . . . . . . . . . . . Manuscrits . . . . . . . . Imprime´s . . . . . . . . .

. . . . . . . . . . . . . . .

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. . . . . . . .

. . . . . . . .

. . . . . . . .

. . . . . . . .

XI

1 3 7 21 23 23 27

1. De la Religion, conside´re´e dans sa source, ses formes et ses de´veloppements. Tome quatrie`me DE

LA

RELIGION,

CONSIDE´ RE´ E DANS SA SOURCE, SES FORMES

ET SES DE´ VELOPPEMENTS

Texte e´tabli et pre´sente´ par Kurt Kloocke Introduction . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 31 De la Religion, conside´re´e dans sa source, ses formes et ses de´veloppements. Avertissement . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 71 Second Avertissement . . . . . . . . . . . . . . . . 73 Livre IX. DES RELIGIONS SACERDOTALES COMPARE´ ES AU POLYTHE´ ISME INDE´ PENDANT. Chapitre Ier. Objet de ce livre. . . . . . . . . . . . . 77 Chapitre II. De la figure des dieux, dans les religions sacerdotales. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 78 Chapitre III. Du caracte`re des dieux, dans les meˆmes religions. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 95

VI

Table des matie`res

Chapitre IV. D’une notion singulie`re dont on n’aperc¸oit, dans la religion grecque, que quelques vestiges, mais qu’on trouve de´veloppe´e et re´duite en dogmes dans les religions sacerdotales. . . . . . . . . . . . . . . . . . . Chapitre V. Des notions sacerdotales sur la destine´e. . . Chapitre VI. Des moyens de communication des preˆtres avec les dieux, dans les religions sacerdotales. . . . . . Chapitre VII. Des notions sur la vie future dans les religions domine´es par les preˆtres. . . . . . . . . . . . . . Chapitre VIII. Des demeures des morts et de la description des supplices infernaux, dans les religions sacerdotales. . Chapitre IX. De la me´tempsycose. . . . . . . . . . . Livre X. DES DOGMES PARTICULIERS AU POLYTHE´ ISME SACERDOTAL Chapitre Ier. Objet de ce livre. . . . . . . . . . . . Chapitre II. De la supre´matie d’un dieu sur les autres, dans les religions sacerdotales. . . . . . . . . . . . . . Chapitre III. Des dieux infe´rieurs, ou de la de´monologie sacerdotale. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Chapitre IV. Des divinite´s malfaisantes. . . . . . . . Chapitre V. Conse´quences de ce dogme, dans les religions sacerdotales. . . . . . . . . . . . . . . . . . . Chapitre VI. De la notion d’une chute primitive. . . . . Chapitre VII. D’un dieu me´diateur. . . . . . . . . . Chapitre VIII. Des divinite´s triples ou ternaires. . . . . Chapitre IX. Du dogme de la destruction du Monde. . . Chapitre X. Du Phallus, du Lingam et des divinite´s hermaphrodites. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Livre XI. DU PRINCIPE FONDAMENTAL DES RELIGIONS SACERDOTALES. Chapitre Ier. Expose´ de ce principe. . . . . . . . . . Chapitre II. Des sacrifices humains. . . . . . . . . . Chapitre III. Des privations contre nature. . . . . . . . Chapitre IV. Des rites licencieux. . . . . . . . . . . Chapitre V. De la saintete´ de la douleur. . . . . . . . Chapitre VI. De quelques dogmes qui ont pu s’introduire dans les religions sacerdotales, comme conse´quences de ceux que nous venons d’indiquer. . . . . . . . . . . Chapitre VII. De´monstration des assertions ci-dessus, tire´es de la composition du polythe´isme de l’ancienne Rome. .

115 125 129 143 155 164

173 174 180 189 208 211 216 219 224 234

251 255 298 304 314

328 337

VII

Table des matie`res

Livre XII. DE LA MARCHE DU POLYTHE´ ISME INDE´ PENDANT DES PREˆ TRES, JUS` SON PLUS HAUT POINT DE PERFECTIONNEMENT. QU’A Chapitre Ier. Comment les progre`s de l’e´tat social introduisent la morale dans la religion. . . . . . . . . . . . Chapitre II. Des contradictions qui caracte´risent cette e´poque du polythe´isme et de la manie`re dont ces contradictions disparaissent. . . . . . . . . . . . . . . . . . . Chapitre III. Que les poe`mes d’He´siode sont contemporains de la re´volution que nous de´crivons. . . . . . . . . . Chapitre IV. De Pindare. . . . . . . . . . . . . . . Chapitre V. De l’enfer de Pindare, compare´ a` celui d’Home`re et d’He´siode. . . . . . . . . . . . . . . . . Chapitre VI. Que la meˆme progression se fait remarquer dans les historiens. . . . . . . . . . . . . . . . . Chapitre VII. De la meˆme progression chez les tragiques grecs. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Chapitre VIII. D’Euripide. . . . . . . . . . . . . . Chapitre IX. Quelques mots sur Aristophane. . . . . . Chapitre X. Pourquoi nous ne parlons point ici de philosophes grecs. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Chapitre XI. Des rapports de la morale avec les deux formes religieuses. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Chapitre XII. Des ve´ritables rapports de la religion avec la morale. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .

383

388 391 400 407 413 425 441 457 464 465 486

Textes comple´mentaires 2. Manuscrits sur fiches pour le tome

IV

MANUSCRITS SUR FICHES POUR LE TOME IV . . . . . . . . . Textes e´tablis et pre´sente´s par Kurt Kloocke Introduction . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Fiches pour le livre IX, chapitres III et IV . . . . . . . DEUX CHAPITRES DU MANUSCRIT SUR FICHES POUR LE LIVRE FRAGMENTS DU MANUSCRIT SUR FICHES POUR LE LIVRE X Introduction . . . . . . . . . . . . . . . . Fiches pour le livre IX, chapitre III . . . . . . Fiches pour le livre IX, chapitre X, et le livre XI .

493 495 497

IX ET

. . . .

. . . .

. . . .

499 501 503 512

VIII

Table des matie`res

Fragments du manuscrit sur fiches pour le livre X, chapitres III et IV . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . LE

. . . . . . . . Introduction . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Livre X. Du principe fondamental des religions soumises aux preˆtres Ch. 1. Expose´ de ce principe . . . . . . . . . . . . Liv. X. Ch. 2. des Sacrifices humains . . . . . . . . Chapitre 3. des privations contre nature . . . . . . . Chapitre 4. Des Rites licencieux . . . . . . . . . . Chapitre 5. de la saintete´ de la douleur. . . . . . . . Chap. 6. de l’abdication des faculte´s intellectuelles. . . . Une fiche abandonne´e . . . . . . . . . . . . . .

MANUSCRIT SUR FICHES POUR LE LIVRE X

3. Manuscrits pour pre´parer le tome LE

529 531

533 536 557 561 571 580 581

IV

. . . . . . . . . . . . . Introduction . . . . . . . . . . . . . . . . Livre X, chapitre IV, Des divinite´s malfaisantes . Livre X, chapitre VII, Re´flexion sur la puissance parole . . . . . . . . . . . . . . . . . .

MANUSCRIT EN CAHIERS

LES

525

MANUSCRITS PRE´ PARATOIRES DU LIVRE XII

. . . de .

. . . . . . la . .

. . . . . . . . Introduction . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Fragments du chapitre sur He´siode . . . . . . . . . Chapitre 3. Que les poe¨mes d’he´siode sont contemporains de la re´volution religieuse que nous de´crivons. . . . . E´bauche d’une page sur He´siode . . . . . . . . . . Fragment de la mise au net d’une page sur He´siode . . Fragment d’une re´flexion sur la The´ogonie . . . . . . Fragment sur les Œuvres et les jours . . . . . . . . . E´bauche du fragment sur Uranus . . . . . . . . . . Fragment sur Uranus . . . . . . . . . . . . . . . Re´flexions sur He´siode . . . . . . . . . . . . . . Fragment sur Saturne . . . . . . . . . . . . . . . Fragment sur Saturne . . . . . . . . . . . . . . . Fragment sur les perversite´s des dieux . . . . . . . . Fragment sur les fables . . . . . . . . . . . . . . Fragments sur les contradictions d’He´siode . . . . . . Fragment de la fin du chapitre sur He´siode . . . . . . Fragments des chapitres sur Pindare . . . . . . . . . . . . . . E´bauche de la fin du chapitre IV sur Pindare

585 587 589 594 595 597 599 601 604 606 608 610 612 614 615 617 619 620 622 623 625 627 629

IX

Table des matie`res

Fin du chapitre sur Pindare . . . . . . . . . . . E´bauche d’une page sur Pindare . . . . . . . . . Fragments d’un chapitre sur l’enfer de Virgile . . . . Chap. 6. De l’enfer de Virgile . . . . . . . . . . Fragments sur les tragiques grecs . . . . . . . . . E´bauche d’un passage du livre XII, chapitre VII . . . Une page du chapitre sur les tragiques grecs . . . . Un passage du chapitre sur les tragiques grecs . . . . Suite d’ide´es pour un passage sur Sophocle . . . . . Notes pour le chapitre sur les tragiques grecs . . . . Ch. 8. De la meˆme progression chez les Tragiques Grecs Passage pour le chapitre sur les tragiques grecs . . . Fragment du chapitre sur les tragiques grecs . . . . De´but du chapitre sur Euripide . . . . . . . . . . Fragments pour le chapitre sur Aristophane . . . . . Suite d’ide´es sur Aristophane . . . . . . . . . . . Ch. 8. Aristophane . . . . . . . . . . . . . . . Chap. 9. Quelques observations sur Aristophane . . . Chap. 9. Quelques observations sur Aristophane . . . Ch. 8. Aristophane. Quelques mots sur Aristophane . Fragment sur Aristophane . . . . . . . . . . . . Ch. 9. Quelques mots sur Aristophane . . . . . . . Plan du chapitre XI . . . . . . . . . . . . . . .

. . . . . . . . . . . .

631 633 635 637 641 643 645 647 651 652 654 661 663 665 667 669 672 673 676 680 681 685 691

FRAGMENTS DU LIVRE XI, CHAPITRE II . . . . . . . . . . . Introduction . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Fragments du livre XI, chapitre II . . . . . . . . . .

693 695 697

4. Fragments du livre

XI,

chapitre

. . . . . . . . . .

II

5. Pre´face du 4e & dernier volume PRE´ FACE DU 4E & DERNIER VOLUME . . . . . . . . . . . . Introduction . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Pre´face du 4e & dernier volume . . . . . . . . . . .

701 703 705

6. Suite d’ide´es des livres 9, 10, 11 & 12. SUITE D’IDE´ ES DES LIVRES 9, 10, 11 & 12. . . . . . . . . . . Introduction . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Suite d’ide´es des livres 9, 10, 11 & 12. . . . . . . .

709 711 713

X

Table des matie`res

7. Fragments de textes non identifie´s FRAGMENTS DE TEXTES NON IDENTIFIE´ S . . . . . . . Introduction . . . . . . . . . . . . . . . Fragment de texte pour le livre IX, chapitre III . Note sur l’e´tat social et la religion . . . . . Re´flexions sur les oracles . . . . . . . . . Re´flexions sur les communications avec les dieux Re´flexions sur la religion grecque apre`s He´siode Addition au texte . . . . . . . . . . . . Polythe´isme Sacerdotal . . . . . . . . . . Sur la de´monologie des E´trusques . . . . . . Re´flexion sur les jeux de Sparte . . . . . . Re´flexion sur l’appel a` de nouveaux Dieux . . Notes sur les privations contre nature . . . . Sacrifices humains . . . . . . . . . . . . Re´flexions sur l’immortalite´ de l’aˆme . . . . Re´flexions sur Candaule et Gyge`s . . . . . . Privations contre nature & rites licencieux . . Note sur le moral dans les climats chauds . . Notes pour le livre XII . . . . . . . . . .

. . . . .

. . . . . . . . . . . . . . . . . . .

763 765 767 787 769 771 772 773 774 775 776 777 778 779 780 781 783 784 785

Abre´viations . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Bibliographie . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Ouvrages cite´s par Constant . . . . . . . . . . . . . . . .

789 791 807

9. Index des noms de personnes Index des personnes historiques et mythologiques

841

. . . . . . . . . . . . .

. . . . . . . . . . . . . . . . . . .

. . . . . . . . . . . . . . . . . . .

8. Instruments bibliographiques

. . . . . .

Table des illustrations

1. Page de couverture de la premie`re e´dition de De la Religion, tome IV, Paris : chez Pichon et Didier, E´diteurs, 1831 Collection particulie`re . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 70 2. Page de titre fautive de la premie`re e´dition de De la Religion, tome IV, Paris : chez Pichon et Didier, E´diteurs, 1830 Universitätsbibliothek Tübingen . . . . . . . . . . . . . . . 74 3. La premie`re page du texte de l’e´dition originale de De la Religion, tome IV Collection particulie`re . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 76 4. Portrait du Baron d’Eckstein Nicolas Burtin, Le Baron d’Eckstein, Paris : E. de Boccard, E´diteur, 1931 . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .

170

5. Une page du manuscrit en cahiers, 6e cahier du texte, premie`re page BCU, Co 3262/1, p. 121 . . . . . . . . . . . . . . . . .

172

6. Une page du manuscrit dit des Cahiers colle´s BCU, Co 3246, fo 110 . . . . . . . . . . . . . . . . . .

250

7. Une page du manuscrit en cahiers, 5e cahier des notes, 4e page BCU, Co 3262/2, p. 100 . . . . . . . . . . . . . . . . .

382

8. Un folio du manuscrit sur fiches BCU, 3267/1, fo 900ro . . . . . . . . . . . . . . . . . .

500

9. Verso d’un folio avec des notes pour le livre XV contenant deux fiches abandonne´es pour le livre X, chapitre III BCU, Co 4727, sans foliotage . . . . . . . . . . . . . . .

524

10. Le folio 9 du chapitre III du livre XII BCU, Co 3294/1, fo 4 . . . . . . . . . . . . . . . . . .

600

11. Un folio de l’e´bauche du chapitre sur Pindare BCU, Co 3294/6, fo 94 . . . . . . . . . . . . . . . . . .

628

XII

Table des illustrations

12. Fragment d’un folio du texte sur les tragiques grecs BCU, Co 4725, fo 35 . . . . . . . . . . . . . . . . . . .

640

13. Fragment du meˆme folio avec la suite du texte BCU, Co 4725, fo 93 . . . . . . . . . . . . . . . . . . .

642

14a. Un folio du texte sur Aristophane, moitie´ gauche BCU, Co 3294/4, fo 66 . . . . . . . . . . . . . . . . . .

682

14b. Un folio du texte sur Aristophane, moitie´ droite BCU, Co 3294/4, fo 66 . . . . . . . . . . . . . . . . . .

683

15. Recto d’un folio reconstitue´ d’un manuscrit de grand format, livre XI, chapitre II BCU, Co 4725, fos 120vo, 13ro et 12ro . . . . . . . . . . . .

694

16. Verso du folio reconstitue´ BCU, Co 4725, fos 13vo, 12vo et 120ro

. . . . . . . . . . . .

700

17. Un folio de la Suite d’ide´es se rapportant au manuscrit en cahiers BCU, Co 3481, p. 21 . . . . . . . . . . . . . . . . . .

710

Principes d’e´dition des Œuvres comple`tes

La pre´sente e´dition a pour re`gle de reproduire tous les textes connus, publie´s ou non, de Benjamin Constant. Elle donne, pour chacun, toutes les variantes. On a maintenu l’orthographe et la ponctuation des originaux. On a pre´serve´ la diversite´ des usages, selon qu’on avait affaire a` un autographe de Constant ou a` une copie. Dans le cas des imprime´s, on n’a corrige´ dans le texte, avec mention en note, que les seules fautes d’impression e´videntes. Pour les manuscrits, la re`gle est celle du respect maximal. Les ce´dilles n’ont pas e´te´ re´tablies. Les tildes et les traits horizontaux place´s sur certaines consonnes pour en indiquer le redoublement ont e´te´ conserve´s. En revanche, les capitales qui apparaissent parfois, dans l’e´criture de Constant, a` l’inte´rieur des noms communs, ont e´te´ conside´re´es comme de «grandes lettres», non comme de vraies majuscules, et ont de`s lors e´te´ normalise´es. Les capitales n’ont pas e´te´ re´tablies en teˆte des noms propres, ni en teˆte des phrases. Elles ont e´te´ respecte´es a` l’inte´rieur des noms propres (ex. «M. DeSaussure»). Les apostrophes et les traits d’union n’ont pas e´te´ re´tablis. Les mots lie´s ont e´te´ respecte´s («peutetre» pour «peut-eˆtre»). On n’ajoute aucun signe de ponctuation. En cas d’absence des parenthe`ses ou des guillemets fermants, une note signale le fait. On a respecte´ les tirets longs, mais non les traits qui, souvent chez Constant, ache`vent la ligne. On a respecte´ e´galement les deux points employe´s selon l’usage ancien. Les accents circonflexes et les tre´mas abusifs ont e´te´ maintenus. L’italique repre´sente les souligne´s simples ; l’italique souligne´ les souligne´s doubles. Lorsqu’il y avait doute dans l’interpre´tation d’une lettre, d’un accent ou d’une graphie quelconque, on a tranche´ en faveur de l’usage actuel. Lorsqu’il y avait he´sitation entre apostrophe et accent (exemple : «l e´te´» ou «l’ete´»), ou entre l’un de ces signes et la ponctuation de la ligne pre´ce´dente, on a privile´gie´ le signe de ponctuation par rapport a` l’apostrophe et a` l’accent, l’apostrophe par rapport a` l’accent. Les abre´viations ont e´te´ re´solues quand le signe n’existe pas en typographie. On explique en note celles qui feraient difficulte´ pour le lecteur. Les mots abre´ge´s ont e´te´ transcrits tels quels, avec une e´ventuelle explication en note. Pour la ste´nographie, une transcription en clair vient doubler la

2

Principes d’e´dition

transcription en abre´ge´. En revanche, les terminaisons de mots simplifie´es, sauf s’il s’agit d’une e´vidente volonte´ d’abre´viation, ont e´te´ restitue´es comple`tement, meˆme si les dernie`res lettres e´taient mal forme´es. Les fautes de syntaxe ont e´te´ transcrites telles quelles. On a e´videmment maintenu la graphie des mots grecs isole´s ou des citations. Dans le texte, les crochets carre´s [ ] indiquent les restitutions textuelles. ` l’inte´rieur d’une restitution, le point (la suite de points) indique la (les) A lettre(s) illisible(s). Dans la transcription des variantes, le mot ou le passage en cause est suivi d’un crochet carre´ fermant ], lui-meˆme suivi de la variante. Si le passage en cause est relativement long, il est de´signe´ par son de´but et sa fin, se´pare´s par trois points. Les crochets pointus 〈 〉 encadrent les mots ou les passages biffe´s. Les barres obliques a` droites / / encadrent le(s) mot(s) biffe´(s) a` l’inte´rieur d’une variante biffe´e. Chacun des volumes des Œuvres comple`tes, aussi bien dans la se´rie Œuvres que dans la se´rie Correspondance, est soumis a` l’attention d’un re´viseur de´signe´ par le Comite´ directeur, dont la taˆche consiste a` controˆler l’ade´quation du travail aux principes d’e´dition qui viennent d’eˆtre succinctement e´nonce´s. On voudra bien noter que l’accord donne´ par ce re´viseur a` l’issue de son examen n’implique nullement, de sa part, une adhe´sion aux opinions exprime´es et aux jugements porte´s par les collaborateurs de l’e´dition.

Signes, symboles, sigles et abre´viations

La liste qui suit ne reprend pas certaines abre´viations d’usage tre`s ge´ne´ral (etc., M., Mme, Mlle) ; elle ne reprend pas non plus celles qui apparaissent dans les cotes des bibliothe`ques, ni celles par lesquelles nous de´signons les ouvrages et les pe´riodiques souvent cite´s (on trouvera ces dernie`res dans les «Instruments bibliographiques» a` la fin du volume), ni les sigles par lesquels nous de´signons les manuscrits ou les e´ditions des textes que nous e´ditons (ils sont donne´s a` la fin des introductions, dans la section «E´tablissement du texte»).

[...] ] 〈〉 // /

? *

2

1905

a. add.

: restitutions textuelles ; le point (la suite de points) indique la (les) lettre(s) illisible(s). : signe qui, dans la transcription des variantes, suit le mot ou le passage en cause, et qui est suivi de la variante. : encadrent les mots ou les passages biffe´s. : encadrent le(s) mot(s) biffe´(s) a` l’inte´rieur d’une variante biffe´e. : indique, dans une note ou dans une variante, le retour a` la ligne. : indique, dans les vers cite´s en note ou en variante, la limite de chaque vers ; indique, dans la description des imprime´s, le retour a` la ligne ; indique, dans les textes de Constant, le changement de page ou de folio de la source. : le point d’interrogation suit toute indication conjecturale. : l’aste´risque, mis en exposant devant le nume´ro d’un folio dans la description des manuscrits, indique que le folio ainsi de´signe´ est perdu. : un chiffre mis en exposant devant l’anne´e de publication d’un ouvrage dans la bibliographie indique qu’il s’agit de la 2e (3e ...) e´dition. : autographe(s) : addition

4 AN app. attr. art. BC BCU BGE BL BnF br. ch. chap. col. coll. corr. c.r. e´d. e´d. orig. e´dit. fasc. fo fos frgt. IBC illis. inf. interl. J.I. lac. livr. mm ms. mss n. no nos p. part. pl. pp. ro ros re´impr.

Signes, symboles, sigles et abre´viations

: Archives nationales, Paris : appendice : attribue´(e)(s) : article(s) : Benjamin Constant : Bibliothe`que Cantonale et Universitaire, Lausanne : Bibliothe`que de Gene`ve, Gene`ve : British Library, Londres : Bibliothe`que nationale de France, Paris : broche´ : utilise´ dans les tableaux pour le mot chapitre : chapitre(s) : colonne(s) : collection : correction(s), corrige´(s), corrige´e(s) : compte rendu : e´dition : e´dition originale : e´diteur : fascicule(s) : folio : folios : fragment(s) : Institut Benjamin Constant : illisible(s) : infe´rieur(e) : interligne : Journal Intime : lacune : livraison(s) : millime`tres : manuscrit : manuscrits : note(s) : nume´ro : nume´ros : page : partiellement : planche(s) : pages : recto : rectos : re´impression

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Chronologie

1767, 25 octobre : Naissance de Benjamin Constant a` Lausanne. 1779 : Il compose Les Chevaliers. 1780-1782 : Se´jours en Angleterre, en Hollande, a` Lausanne, puis a` Erlangen, ou` il fre´quente l’Universite´. 1783-1785 : E´tudes a` l’Universite´ d’E´dimbourg. 1785 : Se´jours a` Paris, a` Bruxelles, a` Lausanne. Mise en chantier d’un ouvrage sur le polythe´isme. 1786 : Rencontre et amitie´ avec Mme de Charrie`re. 1788 : Se´jour a` Brunswick ou` il rencontre Minna von Cramm, qui deviendra sa premie`re femme, et en 1793 Charlotte von Hardenberg, alors e´pouse de Wilhelm Christian von Marenholz. Amitie´ avec Jacob Mauvillon, qui imprime aux e´tudes de BC sur la religion une nouvelle orientation. 1793 : Se´jour a` Colombier, pre`s de Neuchaˆtel, chez Mme de Charrie`re. 1794 : Premie`re rencontre avec Mme de Stae¨l. Il travaille a` son ouvrage sur la religion et re´dige un chapitre, «D’une nouvelle espe`ce de rapports que les the´ologiens modernes voudraient introduire dans la religion», le plus ancien manuscrit connu des e´crits de BC sur la religion. 1795 : BC accompagne Mme de Stae¨l a` Paris. Ils commencent a` jouer un roˆle politique. 1796, fin avril : BC publie sa premie`re grande brochure politique, De la force du gouvernement actuel et de la ne´cessite´ de s’y rallier. 14 novembre : Achat du domaine d’He´rivaux, sur le territoire de la commune de Luzarches.

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1797 : Il publie Des re´actions politiques et Des effets de la Terreur. Naissance d’Albertine de Stae¨l. BC est nomme´ par le Directoire pre´sident de l’administration de la commune de Luzarches, reconnaissance de fait de sa nationalite´ franc¸aise. 1798 : Rencontre et amitie´ avec Julie Talma. 1799, juillet : Il publie Des suites de la contre-re´volution de 1660 en Angleterre. Il travaille a` sa traduction de l’ouvrage de Godwin, Inquiry on Political Justice. 9 novembre : Coup d’E´tat du 18 Brumaire. 1800 : BC est membre du Tribunat, dont il sera e´limine´ avec d’autres opposants le 17 janvier 1802. Se´jour en Suisse. Il lit, dans la traduction franc¸aise de Gallois, le livre V de la Scienza della legislazione de Filangieri, «Des lois qui concernent la religion», et re´dige un long extrait des quatre premiers chapitres. 1802 : BC travaille a` un traite´ politique intitule´ Possibilite´ d’une constitution re´publicaine dans un grand pays. Ce travail sera abandonne´ au mois d’octobre de cette meˆme anne´e. Il pense peu apre`s a` la re´daction d’un ouvrage e´le´mentaire sur la liberte´. Il s’agit probablement de ce qui deviendra les Principes de politique. 22 mars : Vente d’He´rivaux. Achat des Herbages, domaine qui se trouve lui aussi sur la commune de Luzarches. BC y travaille a` son traite´ sur la religion. Il en re´sulte le dossier dit «manuscrit des Herbages», partiellement conserve´. 1803 : Lectures en vue de la re´daction de l’ouvrage politique. Janvier : BC re´dige Ame´lie et Germaine, abandonne´ le 10 avril. Il projette une Histoire de Fre´de´ric II, jamais re´alise´e. Mai : BC s’installe aux Herbages. 15 octobre : Mme de Stae¨l rec¸oit un ordre d’exil de´finitif. 19 octobre : BC et Mme de Stae¨l partent pour l’Allemagne. 26 octobre : Ils s’arreˆtent a` Metz ou` ils se lient d’amitie´ avec Charles de Villers, un des premiers a` faire connaıˆtre la philosophie de Kant en France. Mme de Stae¨l conc¸oit le projet d’e´crire un ouvrage sur l’Allemagne.

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14 de´cembre 1803 : Mme de Stae¨l arrive a` Weimar. BC la rejoint quelques jours plus tard. Il y restera jusqu’en avril 1804. Rencontres avec Goethe, Schiller, Wieland, le duc de Weimar et d’autres personnages de cette petite localite´. Travail soutenu a` son ouvrage sur la religion. BC de´couvre les axiomes fondamentaux de sa the´orie sur la religion. Il re´dige le plan dit «plan de Weimar». Celui-ci ouvre une se´rie de restructurations continues de l’ouvrage. 1804, 22 janvier : De´but du Journal Intime. BC rentre en Suisse tandis que Mme de Stae¨l se rend a` Berlin. 9 avril : Mort de Necker. BC, de retour a` Lausanne depuis le 7 avril seulement, repart pour rejoindre Mme de Stae¨l a` Weimar. De´cembre : De´part de Mme de Stae¨l pour l’Italie. Constant la rejoint a` Lyon pour prendre conge´ d’elle. De retour a` Paris, il retrouve Charlotte von Hardenberg, qui a e´pouse´ le vicomte du Tertre. 1805 : Passion pour Anna Lindsay. Mort de Julie Talma (mai) et de Mme de Charrie`re (de´cembre). BC travaille de janvier a` juin a` son ouvrage sur la religion, a` Paris et aux Herbages. 1806, 4 fe´vrier : De´but du travail aux Principes de politique. La re´daction du texte sera interrompue a` la fin de l’anne´e. 4 septembre : Il projette Wallstein. 19 octobre : BC revoit Charlotte von Hardenberg, dont il s’e´prend et qu’il songe a` e´pouser. 30 octobre : Il commence un roman d’ou` sortira Adolphe. 1807, 12 fe´vrier : Constant re´dige le plan d’un ouvrage intitule´ «Recherches historiques sur la religion des principaux peuples de l’Antiquite´». Pendant l’e´te´ il poursuit la re´daction de son ouvrage, en de´pit des diffe´rends avec Mme de Stae¨l et de tre`s nombreux de´placements entre Paris, Acosta, Dole et la Suisse. 1808, mars et avril : BC re´dige le Livre verd, un cahier avec des additions a` l’ouvrage sur la religion. Juin : Mariage avec Charlotte a` Brevans.

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1809 : Publication de Wallstein. Juillet : Constant fait copier par Audouin un plan tre`s de´veloppe´ des Recherches historiques. Ce plan dominera la re´daction du texte dont il reste des fragments importants. La re´daction est abandonne´e au moment ou`, en 1811, Constant partira pour Göttingen avec Charlotte. 1810 : Grosse perte de jeu et vente des Herbages. 1811, 17 janvier : De´part avec Charlotte pour la Suisse. 8 mai : BC fait ses adieux a` Mme de Stae¨l. 15 mai : De´part avec Charlotte pour l’Allemagne. Il reprend son Journal Intime. 18 mai : Les premie`res notes du Repertory, c’est-a`-dire du «Re´pertoire de morceaux et de notes de´tache´es sans destination fixe dans mon ouvrage sur la religion», sont re´dige´es. Ce recueil sera poursuivi jusqu’a` l’automne 1813. De`s son installation a` Göttingen, BC reprend le travail a` son ouvrage avec beaucoup de courage, convaincu d’avoir trouve´ «le moyen de tout concilier». 1812 : Se´jour a` Göttingen, ou` BC travaille au manuscrit qu’il appelle le Grand quarto bleu ou la Copie bleue, qui offrira une premie`re re´daction ` une date inde´termine´e, apre`s 1813 et probableacheve´e en 44 livres. A ment avant 1825, il fera e´tablir par deux copistes une mise au net de ce manuscrit, les Grands Cahiers blancs. BC travaille re´gulie`rement a` la bibliothe`que de l’universite´ et re´dige d’importants extraits de lecture qui constituent les mate´riaux de base de son futur travail. Ces dossiers comprennent environ 375 folios et beaucoup de notes e´parses. Ils seront exploite´s syste´matiquement pour la re´daction de l’ouvrage imprime´. 11 fe´vrier : Mort de Juste de Constant. 23 mai : De´part de Mme de Stae¨l qui quitte Coppet pour Moscou, SaintPe´tersbourg, Stockholm et l’Angleterre. BC apprend la nouvelle avec inquie´tude a` la fin du mois. Juin a` de´cembre : Campagne de Russie et retraite de l’arme´e napole´onienne en de´route. 1813 : BC commence Le Sie`ge de Soissons. L’ouvrage sera acheve´ en 1826.

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BC rede´couvre, avec le de´sastre de la campagne de Russie qui laisse espe´rer la chute de l’Empire, sa vocation politique. Il commence la re´daction de De l’esprit de conqueˆte et de l’usurpation et se rallie au prince royal de Sue`de. 1814, 30 janvier : De l’esprit de conqueˆte et de l’usurpation est publie´ a` Hanovre. Fe´vrier-avril : BC accompagne Bernadotte a` Lie`ge, puis a` Bruxelles, et retourne seul a` Paris, laissant Charlotte en Allemagne. 6 avril : Abdication de Napole´on. 24 mai : Publication des Re´flexions sur les constitutions, la distribution des pouvoirs, et les garanties dans une monarchie constitutionnelle. 10 juillet : Publication de De la liberte´ des brochures, des pamphlets et des journaux. 31 aouˆt : Passion subite pour Juliette Re´camier. E´te´ 1814 (?) : BC fait e´tablir par un copiste le Registre violet avec des additions et des notes de lecture pour l’ouvrage sur la religion. 1815, 10 fe´vrier : BC publie De la responsabilite´ des ministres. 6 mars : De´barquement de Napole´on a` Golfe-Juan. 20 mars : Fuite de Louis XVIII a` Gand. Avril : BC re´dige l’Acte additionnel. 2 juin : Il publie les Principes de politique, texte de 1815. 18 juin : Waterloo. 31 octobre : BC, toujours pris par sa passion pour Juliette Re´camier et inquiet du projet de restauration politique, quitte la capitale et rejoint sa femme en Belgique. 1816, janvier-juillet : Se´jour a` Londres. Il commence la re´daction de son «apologie», de laquelle sortiront les Me´moires sur les Cent-Jours. Juin : Il publie Adolphe. 23 juillet : Il confie les manuscrits de son ouvrage sur la religion a` Nathaniel May. De´part pour Bruxelles.

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26 septembre 1816 : L’ordonnance du 5 septembre qui dissout la Chambre introuvable encourage BC a` rentrer a` Paris. Il laisse son Journal Intime chez le banquier Schumacher a` Bruxelles. De´cembre : Il relance le Mercure de France et publie, a` la fin de ce mois, la brochure De la doctrine politique qui peut re´unir les partis en France. 1817 : BC se fait une re´putation de journaliste et d’auteur politique. 14 juillet : Mort de Mme de Stae¨l. Aouˆt : E´chec a` l’Acade´mie. Septembre : E´chec aux e´lections. Publication, avec Saint-Aubin, des Annales de la Session de 1817–1818, dont la dernie`re livraison paraıˆt en avril 1818. Octobre : Le premier tome du Cours de politique constitutionnelle est en librairie. Fin de´cembre : Le Mercure de France est supprime´. 1818, fin janvier : Publication de la premie`re Lettre a` M. Odillon-Barrot, avocat en la Cour de Cassation, sur l’affaire de Wilfrid Regnault, condamne´ a` mort. De´but fe´vrier : Fondation de la Minerve franc¸aise. 6 fe´vrier : Premie`re lecture a` l’Athe´ne´e royal sur la religion. Mi-fe´vrier : Publication de la 2 me Lettre a` M. Odillon-Barrot, sur le proce`s de Wilfrid Regnault. 18 mars : Deuxie`me lecture sur la religion a` l’Athe´ne´e royal. Avril : BC publie Du discours de M. de Marchangy, avocat du Roi, devant le tribunal correctionnel dans la cause de M. Fie´ve´e. 22 mai : Troisie`me et dernie`re lecture sur la religion a` l’Athe´ne´e royal. La suite annonce´e de ce cours ne se re´alisera pas. 25 juin : Il se blesse au genou dans le jardin de Mme Davillier. Juillet : Publication de De l’appel en calomnie de M. le marquis de Blosseville contre M. Wilfrid Regnault. BC intervient dans l’affaire Laine´ avec la Lettre a` M. Odillon-Barrot, sur le proce`s de Laine´, entraıˆne´ au crime de fausse monnaie par un agent de la gendarmerie et condamne´ a` mort.

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Octobre 1818 : E´chec e´lectoral. 30 novembre : De´but de la correspondance entre BC et Charles Goyet de la Sarthe. 2 de´cembre : BC prononce a` l’Athe´ne´e royal l’E´loge de Sir Samuel Romilly. C’est la premie`re lecture de son cours sur la constitution anglaise, qui se terminera en juin 1819. 1819, fe´vrier : De la liberte´ des anciens compare´e a` celle des modernes. Mars : Le tome III du Cours de politique constitutionnelle paraıˆt en librairie. 25 mars : E´lu de´pute´ de la Sarthe, BC intervient fre´quemment dans les de´bats de la Chambre. Son premier discours sera Sur le projet de loi relatif a` la re´pression des de´lits de la presse. De´but juin : Prospectus de La Renomme´e. 21 aouˆt : Il publie dans La Minerve un important article sur la traite des noirs. C’est le de´but d’une longue campagne contre l’esclavage. De´but septembre : La premie`re des Lettres sur les Cent-Jours est publie´e dans La Minerve. Fin octobre : BC de´fend dans La Renomme´e la «Socie´te´ des amis de la Presse». 29 novembre : Re´ouverture de la Chambre. 1820, janvier a` juillet : BC de´ploie une activite´ conside´rable a` la Chambre des de´pute´s, ou` il prend plus de quarante fois la parole. 23 janvier : BC publie dans La Minerve une re´ponse a` un article de Chateaubriand paru dans Le Conservateur. 13 fe´vrier : Assassinat du duc de Berry a` l’Ope´ra. 20 fe´vrier : Le ministe`re Richelieu succe`de a` celui de Decazes, force´ de de´missionner. Mars : De´poˆt le´gal du premier volume des Me´moires sur les Cent-Jours. 7 mars : Discours Sur la loi d’exception contre la liberte´ individuelle. 23–30 mars : Discours Sur la loi d’exception contre la liberte´ de la presse. 27 mars : Suppression de La Minerve.

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20 mai 1820 : Publication de la brochure Des motifs qui ont dicte´ le nouveau projet de loi sur les e´lections. Juin : Suppression de La Renomme´e qui sera remplace´e un mois plus tard par Le Courrier franc¸ais. Mi-juillet : BC distribue a` la Chambre les E´claircissements sur quelques faits, adresse´s a` MM. les membres de la Chambre des de´pute´s pour protester contre la saisie de lettres adresse´es a` Charles Goyet. L’affaire donnera lieu a` un proce`s qui se terminera en mars 1821. 15 juillet : Fin de la session de 1820. BC loue une maison de campagne a` Montmorency pour s’y reposer. Septembre : BC a accepte´ d’e´crire un «Commentaire» sur l’ouvrage de Filangieri, dont la traduction franc¸aise de Gallois sera re´e´dite´e. 20 septembre : BC publie une brochure e´lectorale, De la dissolution de la Chambre des de´pute´s et des re´sultats que cette dissolution peut avoir pour la nation, le gouvernement et le ministe`re. 20 septembre – de´but octobre : Voyage dans la Sarthe, avec Charlotte, pour prendre contact avec ses e´lecteurs. 7–8 octobre : Graves incidents a` Saumur. Des officiers de cavalerie menacent d’assommer BC. 19 octobre : BC publie la brochure Lettre a` M. le marquis de LatourMaubourg, ministre de la Guerre, sur ce qui s’est passe´ a` Saumur les 7 et 8 octobre 1820. Novembre : E´lections partielles pour le renouvellement de la Chambre. Les royalistes emportent 198 sie`ges sur 220. De´cembre : Chambre des de´pute´s, ouverture de la session de 1821. 1821 : BC travaille, depuis plusieurs mois de´ja`, a` un manuscrit sur la religion, dit «Copie a` chiffres romains». Entre le 13 fe´vrier 1820 et le 22 mai 1821, BC re´dige une brochure, De la charte constitutionnelle, telle que le ministe`re de 1820 l’a faite. Cette brochure est annonce´e mais ne sera pas publie´e. De´but mars : BC a un nouvel accident a` la jambe en quittant la tribune. Il ne pourra assister aux de´bats pendant un mois environ.

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Mars 1821 : BC est cite´ devant la cour d’Assises dans le proce`s de Sauquaire-Souligne´ et de Goyet. 6 et 14 avril : Grands discours de BC devant la Chambre : Sur l’interdiction de la parole, par suite de rappel a` l’ordre et a` la question. 19 mai : Discours Sur une pe´tition relative a` l’influence du clerge´ catholique sur l’e´ducation des protestants. Mort de Camille Jordan. BC publie un article ne´crologique dans le Courrier franc¸ais du 22 mai. 27 juin : Audacieux discours Contre la traite des noirs. BC semble avoir repris le travail a` son Commentaire sur l’ouvrage de Filangieri. Les manuscrits fragmentaires permettent de dire que la discussion sur l’esclavage conduit BC a` e´largir la mouture pre´ce´dente du texte qui n’en parlait probablement pas encore. 7 juillet : Discours de BC Sur la censure des journaux. 31 juillet : Cloˆture de la Chambre. BC est fatigue´ et de´courage´. Septembre : BC reprend le travail a` son ouvrage sur la religion. 15 octobre : BC s’installe 17, rue d’Anjou St. Honore´, ou` il reste jusqu’en janvier 1823. Il change alors de maison, passant au nume´ro 15, qu’il a achete´ et ou` il restera jusqu’a` sa mort. Novembre : BC travaille a` la seconde partie des Me´moires sur les CentJours qui paraıˆtront finalement en 1822. Le travail a` son Commentaire sur l’ouvrage de Filangieri se poursuit. 5 novembre : Reprise des se´ances de la Chambre des de´pute´s. Le comte de Ville`le devient pre´sident du Conseil des ministres. 1822, 19 janvier : La premie`re partie du Commentaire sur l’ouvrage de Filangieri paraıˆt en librairie. Juin : Mgr Frayssinous est nomme´ Grand-Maıˆtre de l’Universite´. Juillet : Le deuxie`me tome des Me´moires sur les Cent-Jours paraıˆt en librairie. E´te´ : Travail a` la quatrie`me partie du Commentaire sur l’ouvrage de Filangieri, qui comprend un important chapitre sur la religion. 13 novembre : E´chec aux e´lections de la Sarthe. BC se sent de´courage´, mais aussi libe´re´ d’une lourde charge.

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1823, 6 et 13 fe´vrier : BC est condamne´ en appel dans ses proce`s (affaires Mangin et Carre`re) et doit payer 2000 frs d’amende. Mars : Il reprend, dans l’espoir de pouvoir publier enfin son ouvrage, le travail au Polythe´isme et re´dige des plans pour une publication ainsi que des e´bauches de prospectus. Un grand nombre des notes du Repertory est inte´gre´ au premier tome. Juillet : Publication d’un prospectus qui donne le titre de´finitif : De la Religion conside´re´e dans sa source, ses formes et ses de´veloppements. Aouˆt : Signature d’un contrat de publication avec Bossange fre`res et Ponthieu. Septembre : Fin de la guerre d’Espagne mene´e par la France pour la de´fense de Ferdinand VII et contre laquelle BC s’est e´leve´ dans la presse. De´cembre : Dissolution de la Chambre. BC se porte candidat a` Paris. 1824, mars : BC est e´lu de´pute´ de Paris. ` partir de mars : Publication de plusieurs comptes rendus, souvent anoA nymes, de l’ouvrage De la Religion dans la presse. 30 mars : De´poˆt le´gal du premier tome de De la Religion. Avril : Dernier voyage en Suisse a` la recherche de papiers relatifs a` sa descendance maternelle pour re´pondre aux contestations quant a` sa nationalite´ franc¸aise. 29 mai : Le premier tome de De la Religion paraıˆt en librairie. BC re´dige a` partir du texte publie´ une «Suite d’ide´es» tre`s de´taille´e de l’ouvrage, qui permet une orientation rapide dans le texte. 25 juin : BC publie un article sur le tome Constitutionnel.

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de De la Religion dans Le

E´te´ : BC travaille a` la re´daction finale de la quatrie`me partie de son Commentaire sur l’ouvrage de Filangieri. 16 aouˆt : Les parties 2 a` 4 du Commentaire paraissent avec un retard conside´rable. Aouˆt : BC publie un article sur De la Religion dans la Revue europe´enne. Cet article avait de´ja` e´te´ publie´ en anglais dans la European Review le mois pre´ce´dent.

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16 septembre 1824 : Mort de Louis XVIII et ave`nement de Charles X. 29 septembre : BC commence son Carnet de notes, un journal de travail qu’il tiendra jusqu’au 4 aouˆt 1827. 4 et 6 octobre : Le journaliste Jean-Philibert Damiron publie un compte rendu e´logieux de De la Religion dans Le Globe. Novembre : BC tombe se´rieusement malade. 1825 : BC travaille au tome II de De la Religion, en meˆme temps qu’il assume sa fonction de de´pute´. 25 avril : Il publie dans l’Encyclope´die moderne l’article «Christianisme», repris d’abord dans Le Globe (7, 10 et 12 mai), puis dans les Me´langes de litte´rature et de politique sous le titre «Des causes humaines qui ont concouru a` l’e´tablissement du christianisme». Septembre : BC publie un Appel aux nations chre´tiennes en faveur des Grecs. Impression du tome II de De la Religion et pre´paration de la re´daction du tome III. 10 octobre : De´poˆt le´gal de De la Religion, tome II, mis en vente le 15 octobre. BC commence la re´daction d’un manuscrit sur fiches du tome III. 1826 : Activite´ parlementaire, nombreux discours a` la Chambre, articles et travail assidu a` la pre´paration du tome III de De la Religion. Janvier-fe´vrier : Le baron d’Eckstein fait paraıˆtre deux grands articles sur les premier et deuxie`me volumes de De la Religion dans Le Catholique. Mars : BC projette de publier une re´ponse a` la re´futation de sa doctrine par le baron d’Eckstein. 26 juin : BC publie dans l’Encyclope´die progressive l’article «Religion», qui sera repris dans les Me´langes de litte´rature et de politique sous le titre «Du de´veloppement progressif des ide´es religieuses». Cet article sera condamne´ par le Saint-Office. Aouˆt : BC commence la re´daction du Grand manuscrit du tome III de De la Religion. E´te´-fin de l’anne´e : BC travaille a` une restructuration de son ouvrage sur la religion jusqu’a` la re´ouverture de la Chambre en de´cembre 1826. 1827, janvier : Didot lance l’impression du tome III de De la Religion. BC arreˆte vers la fin du mois l’impression et proce`de a` une refonte en profondeur de son ouvrage.

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17 juin 1827 : Le tome I de De la Religion est condamne´ par la Congre´gation de l’Index du Saint-Sie`ge. Le «Bando» est affiche´ le 15 septembre aux portes des e´glises principales de Rome. Juin : La refonte du tome III s’ache`ve in extremis. Juillet : BC publie le premier tome de ses Discours a` la Chambre des de´pute´s. Aouˆt : De la Religion, tome III, paraıˆt en librairie. Voyage en Alsace. BC ne tarde pas a` pre´parer le volume suivant en repartant des manuscrits sur fiches. Il commence probablement la re´daction du manuscrit en cahiers. Octobre : Le baron d’Eckstein publie un grand article dans Le Catholique pour re´pondre aux violentes attaques de BC dans le tome III. 15–17 novembre : BC est e´lu a` la fois a` Paris et dans le Bas-Rhin. Il opte pour l’Alsace. 18 de´cembre : Il commence son Registre universel, un grand cahier qui nous renseigne sur son travail, sa bibliothe`que, sa fortune, ses correspondances et la socie´te´ qu’il fre´quente. 1828, fe´vrier : Le deuxie`me tome de ses Discours sort en librairie. Il est possible qu’il entreprenne peu de temps apre`s la re´daction du texte connu sous le nom du manuscrit des «Cahiers colle´s». Le plan du tome IV sera modifie´. BC ajoute un nouveau livre XII, qui traite de la marche du polythe´isme inde´pendant des preˆtres. Le livre sur les myste`res est repousse´ au tome suivant. Septembre : Voyage en Alsace. Il dicte ses Me´moires a` Coulmann. 1829, juin : Publication des Me´langes de litte´rature et de politique. Aouˆt : Voyage triomphal en Alsace. Octobre : BC publie ses «Re´flexions sur la trage´die» dans la Revue de Paris, tome VII. 1830, fe´vrier : Le premier des trois articles «Souvenirs historiques a` l’occasion de l’ouvrage de M. Bignon» paraıˆt dans la Revue de Paris. – Le secre´taire «aux longues barres de t» travaille probablement au manuscrit de grand format avec le texte du tome IV de De la Religion pour pre´parer l’impression de l’ouvrage.

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21 mars 1830 : Dissolution de la Chambre. Juin : Re´e´lection a` la Chambre. Juillet : Les deux derniers articles des «Souvenirs historiques a` l’occasion de l’ouvrage de M. Bignon» paraissent dans la Revue de Paris. Juillet : De la Religion, tome IV, est compose´ pour la publication, mais le tirage est retarde´ par les e´ve´nements politiques. Le premier «Avertissement» qui ouvre le tome IV parle des «devoirs politiques» qui ont retarde´ la sortie de l’ouvrage. 24 juillet : Publication des quatre ordonnances qui de´cre`tent la suspension de la liberte´ de la presse, la dissolution de la Chambre, la modification du re`glement des e´lections et la convocation des colle`ges e´lectoraux pour la mi-septembre. 27–29 juillet : Re´volution de Juillet. 29 juillet : La Fayette invite BC, qui se trouve a` la campagne, a` revenir a` Paris. 30 juillet : BC re´dige avec Se´bastiani une de´claration en faveur de LouisPhilippe. Aouˆt-octobre : BC prend une part tre`s active (15 discours et interventions) aux de´libe´rations de la Chambre. 27 aouˆt : Il est nomme´ Pre´sident de section au Conseil d’E´tat. Octobre : Il est e´lu de´pute´ de Strasbourg. E´chec a` l’Acade´mie franc¸aise. 19 novembre : Dernier discours de BC a` la Chambre. Novembre : Il corrige les e´preuves du tome

V

de De la Religion.

8 de´cembre : Constant meurt a` Paris. 12 de´cembre : Fune´railles grandioses. 1831, 6 avril : Parution des tomes

IV

et

V

de De la Religion.

1833, 10 avril : Publication de Du Polythe´isme romain, e´dition e´tablie par Jacques Matter.

Introduction ge´ne´rale au tome XX

Ce volume contient le tome IV de De la Religion. Nous reproduisons le texte de l’e´dition de Paris de 1831, avec, dans l’apparat critique, les variantes de tous les manuscrits connus qui se rapportent directement a` la re´daction du texte imprime´. Nous n’avons pas tenu compte, par contre, des manuscrits ante´rieurs a` 1826, puisqu’ils repre´sentent un autre e´tat de l’e´criture sur ce sujet qui sera pre´sente´ dans le tome XVI des Œuvres comple`tes. Et nous avons exclu, comme pour les autres volumes de cette œuvre, l’e´dition de P. J. de Mat, parue a` Bruxelles en 1833. Les textes comple´mentaires que nous ajoutons au pre´sent volume reproduisent d’une manie`re exhaustive tous les mate´riaux relatifs au travail de re´daction du tome IV que nous avons re´ussi a` identifier, mais qui ne se preˆtent pas a` eˆtre pris en conside´ration pour l’apparat critique. On trouvera dans les 21 chapitres de cette partie de l’ouvrage des textes destine´s dans un premier temps a` faire partie de l’ouvrage, mais e´carte´s par la suite, des fragments et des e´bauches pour la re´daction de la version imprime´e, enfin des documents purement techniques e´labore´s pour la re´daction de l’ouvrage (fragments de ce que Constant appelle des «suites d’ide´es»). Comme tous les volumes des Œuvres comple`tes de Benjamin Constant, celui-ci est le re´sultat d’un travail d’e´quipe. La saisie du texte imprime´ a e´te´ faite par Bettina Schäberle, le collationnement a e´te´ pris en charge par Lisa Azorin et l’e´diteur lui-meˆme. La saisie des manuscrits et la re´vision des textes comple´mentaires ont e´te´ assure´es par l’e´diteur et par Laura Wilfinger. Hermann Krapoth (Universität Göttingen) nous a aide´s a` comple´ter un certain nombre de notes ou a` identifier des ouvrages cite´s par Constant. Laura Wilfinger a veille´ a` l’uniformite´ de la re´daction des notes et e´labore´ les instruments bibliographiques. Paul Delbouille et Martine Willems ont relu la totalite´ du volume. Lisa Azorin s’est charge´e de la relecture du volume acheve´. L’hospitalite´ de Franc¸ois et Hanka Rosset a permis a` l’e´diteur plusieurs se´jours prolonge´s a` Lausanne pour assurer l’e´tude des manuscrits de la Bibliothe`que Cantonale et Universitaire. L’e´quipe de l’Institut Benjamin Constant de Lausanne et en particulier Guillaume Poisson ont efficacement soutenu nos recherches dans les fonds de la Bibliothe`que Cantonale et Universitaire de Lausanne. La nume´risation de nombreux manuscrits par le service de la BCU a e´te´ une aide pre´cieuse pour le travail de l’e´diteur. Nous

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De la Religion, IV

avons fait appel pour la re´daction de certaines notes explicatives a` Ernst August Schmidt (Universität Tübingen) pour des questions relatives a` la litte´rature grecque et latine, a` Julia Pfefferkorn (Tübingen) pour des renvois de Constant aux textes de Platon, a` Hans Reinhard Seeliger (Universität Tübingen) pour les proble`mes suscite´s par les textes de la tradition patristique et des questions touchant a` la premie`re chre´tiente´, et a` Hanns Christof Brennecke (Universität Erlangen) pour e´lucider des allusions aux œuvres d’Euse`be. Walter Groß (Universität Tübingen) nous a aide´s a` nous orienter face a` des questions the´ologiques lie´es aux livres de l’Ancien Testament, et Agnes Stache-Weiske (Grafing) nous a fourni de pre´cieux renseignements sur la tradition litte´raire indienne. Qu’ils trouvent ici l’expression de nos vifs remerciements.

Sources

La liste qui suit regroupe, en les re´sumant, les descriptions des sources de tous les textes contenus dans le tome XX. Pour les manuscrits, le regroupement se fait par bibliothe`ques et fonds d’archives, et a` l’inte´rieur de ceuxci, les mentions apparaissent dans l’ordre croissant des cotes. On notera cependant que la reconstitution de plusieurs manuscrits fragmente´s et par conse´quent re´pertorie´s sous diverses cotes ne´cessite des recoupements entre les entre´es. Pour les imprime´s, la liste donne les ouvrages et les articles dans l’ordre de leur publication.

Manuscrits A. Bibliothe`que nationale de France (BnF) – Paris A1.

NAF 18823, fos 20–37. Suite d’ide´es des livres 9, 10, 11, & 12. 1 cahier, 18 fos, 36 pp. a., 230 × 180 mm. Hofmann, Catalogue, IV/202.

A2.

NAF 18823, fo 64. L’homme n’est raisonnable 1 fo, 1 p. a., 130 × 110 mm. Hofmann, Catalogue, IV/39.

A3.

NAF 18823, fo 66. On peut distinguer deux manie`res de concevoir l’immortalite´ de l’ame 1 fo, 1 p. a., 115 × 100 mm. Hofmann, Catalogue, IV/42.

A4.

NAF 18823, fos 66, 111 et 121. [Manuscrit sur fiches] 3 fos, 3 pp. a., 200 × 155 mm. Hofmann, Catalogue, IV/162.

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De la Religion, IV

A5.

NAF 18823, fos 67, 124–134 et 143–146 [Manuscrit sur fiches] 16 fos, 16 pp. a., 180 × 100 mm. Hofmann, Catalogue, IV/41, IV/168 et IV/169.

A6.

NAF 18823, fo 112. [Une page sur Creuzer] 1 fo, 1 p. a., 245 × 180 mm. Hofmann, Catalogue, IV/46.

A7.

NAF 18823, fos 113–120. Pre´face du 4e et dernier volume. 1 cahier cousu, 8 fos, 8 pp. a., 200 × 150 mm. Hofmann, Catalogue, IV/227.

A8.

NAF 18823, fos 122–123 [Deux folios du manuscrit des cahiers colle´s] 2 fos, 2 pp. a., 340 × 220 mm. Hofmann, Catalogue, IV/47.

A9.

NAF 18823, fo 135. [Une page avec deux notes pour le livre X, chap. X]. 1 fo, 1 p. a., 300 × 180 mm. Hofmann, Catalogue, IV/48.

A10. NAF 18823, fo 136. [Une page avec une note sur des sacrifices humains]. 1 fo, 1 p. a., 180 × 110 mm. Hofmann, Catalogue, IV/49. A11. NAF 18823, fo 137. Privations contre nature. 1 fo, 1 p. a., 200 × 100 mm. Hofmann, Catalogue, IV/50. B. Bibliothe`que cantonale et universitaire (BCU) – Lausanne B1.

Co 3246 et BnF, NAF 18823, fos 122–123. [Manuscrit dit des «Cahiers colle´s»]. 166 fos, 166 pp. de la main du secre´taire aux longues barres de t, avec des corr. a., 340 × 220 mm. Hofmann, Catalogue, IV/277 et IV/47.

Sources

25

B2.

Co 3262. [Manuscrit en cahiers cousus]. 25 cahiers cousus, 321 fos, 623 pp. a., 195 × 160 mm. Hofmann, Catalogue, IV/216.

B3.

Co 3267 ; Co 4725, fo 108 ; Co 4727, fo 41vo et un fo non nume´rote´ ; Co 3293, 5 fos non nume´rote´s ; Co 3468, fo 1vo ; BnF, NAF 18823, fos 66, 111 et 121. [Manuscrit sur fiches du tome IV de De la Religion, livres IX et X]. 328 fos, 328 pp. a., formats variables ; la plupart des fiches mesurent environ 220 × 115 mm. Hofmann, Catalogue, IV/69, IV/71, IV/162, IV/224 et IV/244.

B4.

Co 3281 et Co 3425. [Placards pour des livres V, XI, XII et XIII] 8 fos et deux cahiers identiques pagine´s 293–300, avec des corr. a., formats variables. Hofmann, Catalogue, IV/203 et IV/280.

B5.

Co 3293. [Un folio nume´rote´ 2]. le courage, le bonheur 1 fo, 1 p. a., 140 × 110 mm. Hofmann, Catalogue, non re´pertorie´.

B6.

Co 3293. [Notes pour le t. IV de De la Religion]. 2 fos, 2 pp. a., environ 120 × 100 mm. Hofmann, Catalogue, non re´pertorie´.

B7.

Co 3294/1, Co 3294/2, Co 3294/3, Co 3294/4, Co 3294/5, Co 3295/6, Co 3459 et Co 3425. [Fragments des livres XII et XV de De la Religion]. 105 fos, 105 pp. a. et de la main du secre´taire aux longues barres de t, (sans compter les folios du livre XV). Formats variables. Hofmann, Catalogue, IV/278 et IV/280.

B8.

Co 3294/1 – 3294/3 ; Co 3294/4 et Co 3459 ; Co 3294/5 [Manuscrit sur fiches du livre XII, version imprime´e] Au moins 100 fos de la main du secre´taire aux longues barres de t,

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De la Religion, IV

environ 200 × 100 mm1. Hofmann, Catalogue, IV/278. B9.

Co 3294/1, fos 9, 13, 16–18 ; Co 3294/2, fos 24 et 40 ; Co 3294/3, fos 50–60 ; Co 3294/4, fos 61–72, 78–80 ; Co 3294/5, fos 82 et 84. [Un manuscrit de grand format du livre XII]. 35 fos, 35 pp. de la main du copiste aux longues barres de t, environ 310 × 200 mm. Hofmann, Catalogue, IV/278 (pas de´crit se´pare´ment).

B10. Co 3294, fos 4 et 6, 10, 9 et 13, 11, 15, 5, 16, 17 et 18, 25, 14, 8, 21vo et 24, 21, 94, 23, 26, 29 et 30, 41, 42–44, 96, 51/2, 34–39, 39/2, 40, 46 et 47, 45 et 48–49, 61, 68, 65–67 et 69–71, 74. Co 3425, fos 3ro, 4ro, 1ro. Co 4725, fos 35 et 93, 81. [Fragments du livre XII de De la Religion] 56 fos, 56 pp. a. ou de la main du secre´taire aux longues barres de t. Hofmann, Catalogue, IV/278, IV/280 et IV/71. B11. Co 3435/17. [Manuscrit sur fiches du texte sur Sophocle] 9 fiches a., 155 × 100 mm. Hofmann, Catalogue, IV/229. B12. Co 3453. [Fragment d’un manuscrit pour l’imprimeur]. 2 doubles-feuilles et 1 fo, 5 pp. de la main d’un copiste, 310 × 200 mm. Hofmann, Catalogue, IV/218. B13. Co 3455. Nous publions les deux derniers volumes. 3 fos, 3 pp. a., 260 × 200 mm. Hofmann, Catalogue, IV/231. B14. Co 3456. [Fragment d’un manuscrit de grand format pour le t. IV]. 2 fos, 2 pp. de la main d’un copiste, 340 × 220 mm. Hofmann, Catalogue, IV/217. 1

Voir ci-dessus, B7. Puisqu’il n’est pas toujours possible de distinguer les anciennes fiches d’autres manuscrits utilise´s pour fabriquer le grand manuscrit du livre XII, nous ne donnons qu’un nombre approximatif pour les fiches de cet ancien manuscrit.

27

Sources

B15. Co 4450 [Brouillon pour une note du livre XI, chapitre Une fiche isole´e. 1fo, 1 p. a., 80 × 110 mm. Hofmann, Catalogue, IV/300

VII]

B16. Co 4722, BnF, NAF 18823, fos 67, 124–134 et 143–146, Archives d’Estournelle, un fo sans cote. Livre X. Du principe fondamental des religions soumises aux preˆtres. [Manuscrit sur fiches II]. 281 fos, 281 pp. a., 160 × 110 mm. Hofmann, Catalogue, IV/166. B17. Co 4725, fos 12–15, 120 et 138. [Fragment d’un manuscrit de´truit pour le livre XI] 6 fos, 6 pp. a., environ 100 × 150 mm, un fo, 100 × 300 mm. Hofmann, Catalogue, IV/71. B18. Co 4725, fos 6, 42, 61, 80, 82, 87, 119, 120vo, 124 et 144 [Fragments avec des notes pour le t. IV de De la Religion] 10 fos, 10 pp. a., formats variables. Hofmann, Catalogue, IV/71 (re´pertorie´ se´pare´ment).

C. Archives d’Estournelles, Cre´ans C1.

Sans cote. [La fiche 191 du manuscrit sur fiches II]. 1 fo, 1 p. a., 160 × 110 mm. Hofmann, Catalogue, non re´pertorie´. Imprime´s

1.

DE LA RELIGION, CONSIDE´RE´E DANS SA SOURCE, SES FORMES ET SES DE´VELOPPEMENTS. PAR M. BENJAMIN CONSTANT. [deux lignes d’une citation grecque] (PLATON, Time´e) TOME QUATRIE`ME. [ligne ornementale enfle´e] PARIS, CHEZ PICHON ET DIDIER, E´DITEURS, RUE DES GRANDS AUGUS TINS, No 47. [petit filet ornemental] 1831. 215 × 140 mm (non coupe´). Courtney, Bibliography, 58a(4). Courtney, Guide, A58/1, (4).

28 2.

De la Religion, IV

DE LA RELIGION, CONSIDE´RE´E DANS SA SOURCE, SES FORMES ET SES DE´VELOPPEMENTS. PAR M. BENJAMIN CONSTANT. [deux lignes d’une citation grecque] (PLATON, Time´e) TOME TROISIE`ME. [ligne ornementale enfle´e] PARIS, CHEZ PICHON ET DIDIER, E´DITEURS, RUE DES GRANDS AUGUS TINS, No 47. [petit filet ornemental] 1830. 210 × 135 mm. Courtney, Bibliography, non re´pertorie´. Courtney, Guide, non re´pertorie´.

De la Religion, conside´re´e dans sa source, ses formes et ses de´veloppements 1831

Introduction

Le quatrie`me volume de De la Religion de´veloppe, sur la base des axiomes fondamentaux de la the´orie sur la religion telle que Benjamin Constant la conc¸oit, les arguments justifiant la the`se selon laquelle il faut admettre une diffe´rence fondamentale entre les religions sacerdotales et les religions non soumises aux doctrines the´ologiques des preˆtres. Cette opposition permet, selon Constant, de de´voiler les strate´gies de la caste des preˆtres qui se servent des traditions he´rite´es des croyances religieuses pour les transformer au cours des aˆges en syste`mes dogmatiques oppressifs. Ils re´agissent ainsi contre la marche progressive de l’humanite´ a` la conqueˆte de doctrines plus pures et plus humaines de´sire´es par les efforts continuels du sentiment religieux pour e´purer les doctrines he´rite´es. Le but essentiel des preˆtres est d’assurer, par leurs doctrines a` la fois puissantes et faussement conservatrices, la soumission des peuples. Constant soutient cette the´orie en s’appuyant sur une vaste documentation historique emprunte´e aux principales religions de l’Antiquite´ (religions e´gyptienne, grecque, de Me´sopotamie, de la Syrie, phe´nicienne, etc.) des peuples nordiques et celtiques, mexicains, africains, indiens, de la Chine et du Japon. La de´monstration aboutit ainsi a` un discours typologique. Les parcours historiques ine´vitables ajoutent une dimension comparatiste, sans pre´tendre e´crire une histoire des religions. Le but est pour ainsi dire philosophique, au sens des Lumie`res franc¸aises, non sans e´viter la pole´mique a` peine voile´e contre le catholicisme. Les sorties pole´miques contre le baron Ferdinand d’Eckstein ou contre Joseph de Maistre le montrent clairement. Cela n’est pas e´tonnant si l’on garde pre´sent a` l’esprit que les e´tudes du baron d’Eckstein peuvent eˆtre lues comme une attaque redoutable contre la doctrine de Constant, surtout contre la the`se de l’abus des preˆtres a` l’aide des doctrines oppressives. Contrairement a` ce que dit Constant, l’e´rudition du baron est relativement solide et e´tendue. Constant l’utilise d’ailleurs en de´marquant souvent les publications du Catholique sans indiquer la source1. 1

La meˆme pratique s’observe a` l’e´gard de Christoph Meiners. Constant utilise les recherches de celui-ci en exploitant les sources que Meiners indique dans les notes de ses e´tudes ou de ses ouvrages. BC reprend souvent les renvois sans mentionner leur provenance, suivant en ceci les usages de l’e´poque. Meiners lui-meˆme joint a` son ouvrage Kritische Geschichte une bibliographie exhaustive des publications qu’il a utilise´es.

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De la Religion, IV

L’originalite´ de la doctrine de Constant consiste en ceci qu’il a trouve´ une explication historiquement fonde´e et philosophiquement plausible a` la domination fatale des castes des preˆtres. Ceux-ci ont le plus souvent empeˆche´ l’e´panouissement d’une religion digne de l’esprit humain, qui puisse conque´rir, selon les intuitions du sentiment religieux, la doctrine pure et libe´ratrice, par conse´quent vraie, telle que le genre humain doue´ de la constante anthropologique religieuse est cense´ la de´sirer. Historique du texte Un point de repe`re. Le tome III de De la Religion paraıˆt au mois d’aouˆt 1827, apre`s un travail difficile, voire dangereux, de refonte de l’ouvrage qui se faisait pendant l’impression du volume, ou` e´taient meˆme e´limine´ des cahiers de´ja` compose´s1. Cette ope´ration avait une influence conside´rable sur la re´daction du tome IV, car une partie importante des mate´riaux, pre´vue dans un premier temps a` paraıˆtre dans le tome III, e´tait rejete´e dans le suivant. Il s’agit des livres VIII a` X, tels qu’ils apparaissent dans la table des matie`res du tome III que l’on trouve dans le Carnet de notes2. Cette table se rapporte indubitablement au Grand manuscrit du tome III ; elle repre´sente la premie`re version de ce volume telle qu’elle e´tait pre´vue pour la publication et qui retrace, livre par livre et chapitre par chapitre, les structures des livres VI a` IX et XI, en indiquant les pages du manuscrit. Seul le texte du livre X n’e´tait pas re´dige´. La refonte e´limine les livres VIII a` X, tandis que le livre XI sur les poe`mes home´riques devient le livre VIII et dernier de ce tome III. En examinant attentivement les folios conserve´s du Grand manuscrit, on constate que toutes les pages qui contenaient des textes a` publier dans le t. IV ont disparu3. C’est un indice pre´cieux et fondamental d’une refonte profonde des textes destine´s a` paraıˆtre dans le tome IV. Rappelons encore que la re´daction du Grand manuscrit utilise le manuscrit sur fiches e´tabli par Constant en 1825 en partant des mate´riaux dont il disposait, en particulier des cahiers du Grand Quarto bleu, d’anciens manuscrits plus ou moins complets, plus ou moins acheve´s, qui offrent le texte ou des parties du texte de certains chapitres a` pre´voir. Ce manuscrit sur fiches, lacunaire il est vrai, un ensemble de documents importants ne´anmoins, contient deux lots de fiches qui concernent le tome III, et un troisie`me lot de fiches qui pre´parent le texte du tome IV. Ce manuscrit est le premier document que nous devons analyser pour entrer dans le re´cit de l’historique du texte du tome IV. 1 2 3

Voir OCBC, Œuvres, t. XIX, pp. 103–105. Voir OCBC, Œuvres, t. XIX, pp. 94–96. Voir OCBC, Œuvres, t. XIX, p. 99 (tableau) et p. 100. Une hypothe`se qui corrige e´ventuellement cette constatation se trouve ci-dessous, p. 43, sous le no 3.

Introduction

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En de´pit de la richesse des documents manuscrits a` exploiter, il sera impossible de retracer les e´tapes de la re´daction de l’ouvrage en en pre´cisant les dates. Une documentation fiable manque, a` quelques exceptions pre`s, de sorte que nos re´flexions doivent se borner a` retracer la marche des progre`s re´dactionnels, restant presque toujours hypothe´tiques sur le plan de la chronologie. La description des mate´riaux pre´sente les dossiers en essayant de suivre cette marche. 1. Le manuscrit sur fiches I. Il s’agit d’un document transitoire et certainement pas du premier manuscrit qui concerne directement la re´daction du tome IV de De la Religion. Il contient, dans la mesure ou` l’on peut le ve´rifier, un texte proche de la version de´finitive, mais encore diffe´rent de celle-ci. Cette constatation est importante pour l’e´tablissement du texte, car elle justifie d’e´carter les re´dactions ante´rieures qui appartiennent a` un autre contexte1 et de reconstituer le travail de re´daction sur le texte du tome IV a` partir d’un des premiers documents atteste´s pour la composition de la version imprime´e. C’est justement ce manuscrit sur fiches, comme il ressort du Carnet de notes depuis 1825 et de l’examen mate´riel de ce manuscrit. Le manuscrit comprend pre`s de 325 fiches de formats variables, mais mesurant normalement 220 × 115 mm, sur un papier e´pais comparable a` celui du Grand Quarto bleu. Les versos sont tre`s souvent blancs. Beaucoup de fiches ont e´te´ re´dige´es en utilisant les versos de manuscrits ante´rieurs. Nous y trouvons des fragments du Commentaire sur l’ouvrage de Filangieri, des fragments de textes politiques, deux fragments d’un manuscrit du tome premier de De la Religion, des lettres adresse´es a` Constant, quelques fiches d’un manuscrit concernant d’autres parties du meˆme livre, et surtout un lot conside´rable du manuscrit du tome II de De la Religion livre´ a` l’imprimeur. Cela permet de dater le de´but du travail sur le manuscrit sur fiches : au plus toˆt apre`s le mois d’octobre 1825, soit apre`s la mise en vente du second volume de l’ouvrage. La se´rie des fiches avec le texte pour le futur livre IX de la version imprime´e commence avec la fiche nume´rote´e 874, ce qui inte`gre la se´rie qui s’ouvre ainsi dans la partie pre´ce´dente de ce manuscrit. Cela signifie donc que cette partie de l’ouvrage e´tait destine´e, vers la fin de 1825, a` eˆtre publie´e dans le tome III de De la Religion. La table des matie`res du tome III et le Grand manuscrit de 1826 confirment cette hypothe`se. Nous constatons en plus que la quasi totalite´ des fiches conserve´es concernent seulement le livre IX, a` l’exception de deux fiches de la dernie`re se´rie ainsi qu’un petit nombre de fiches e´parses, onze en tout, qui ont e´te´ retrouve´es dans d’autres manuscrits de Constant et attestent que la re´daction de cette nouvelle 1

Ces documents seront pre´sente´s dans le t. XVI des OCBC.

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De la Religion, IV

version du texte avait atteint le livre suivant. Mais il faut avoir pre´sent a` l’esprit que le livre IX du manuscrit sur fiches n’obe´issait pas au meˆme plan que la version imprime´e. De plus, l’e´tat actuel du texte sur fiches est le re´sultat d’au moins une, peut-eˆtre deux, restructurations de l’argumentation. Les preuves de cette hypothe`se sont d’une part des changements dans la nume´rotation des chapitres avec corrections dans la formulation des titres, d’autre part des changements dans la nume´rotation des fiches. Celle-ci atteste que cette grande section de fiches commenc¸ait dans un premier temps par une nume´rotation plus basse, peut-eˆtre le chiffre 1, puisque Constant semble avoir voulu distinguer les dossiers de diffe´rents livres. De plus, l’ordre de certains blocs de fiches e´tait diffe´rent de l’ordre actuel. Celui-ci a e´te´ bouleverse´ a` plusieurs reprises. Les interventions ont entraıˆne´ l’e´limination de lots conside´rables de fiches et des ajouts fre´quents de passages plus ou moins de´veloppe´s, reconnaissables aux tre`s nombreux bis, ter, quater, etc. qui viennent s’ajouter aux chiffres de la nume´rotation de´finitive. Constant inte`gre par conse´quent ces e´le´ments pendant ou apre`s la restructuration de son texte, en se servant d’anciens manuscrits qu’il de´coupe pour e´viter d’avoir a` se copier une nouvelle fois. Ces fiches, souvent d’un format diffe´rent des autres, peuvent contenir en plus des morceaux de phrases biffe´es du texte abandonne´, impossible a` retrouver ou a` identifier. Les tableaux re´sument ces transformations. Dans le premier (livre IX, chapitre 3), nous indiquons a` coˆte´ de la nume´rotation actuelle des fiches les nume´rotations pre´ce´dentes. Les re´dactions successives du texte sont ainsi reconnaissables. Nous signalons en plus dans la colonne de droite les textes des versos, s’il y en a, ou indiquons si ils sont reste´s blancs. Les tableaux suivants (livre IX, chapitre 5 ; chapitre 8 ; chapitre 10) sont moins complexes. Les donne´es sont en principe les meˆmes. Les versos des fiches sont blancs, a` l’exception de quelques fiches qui contiennent au verso des fragments de textes sur la religion ou de textes politiques. Le cinquie`me tableau concerne le livre X. Il re´sume ce qu’il nous reste des fiches pour ce livre. Le manuscrit sur fiches I Livre IX, chapitre 3 foliotage actuel

874 875 875bis 876

foliotages pre´ce´dents

versos des fiches

[201] 〈202?〉 〈203〉

meˆme texte, version pre´ce´dente blanc blanc Rel2

Introduction

877 878 879 880 881 882 883 883bis 883ter 884 885 886 887 887bis 887ter 887IV 887V 887VI 887VII 887VIII 888 889 889bis 890 891 892 893 893bis 893ter 894 895 895bis 895ter 896 896bis 896ter 896IV 896V 897 898 898bis 898ter 898IV 898V

〈204〉 〈205〉 〈206〉 〈207〉 〈209〉 〈210〉

〈129〉 〈130〉 〈131〉 〈132〉 〈133〉 〈134〉

〈176〉

〈215〉 〈216〉 〈217〉 〈218〉 〈219〉 〈220〉 〈221〉 〈222〉

〈44〉 〈45〉

〈223〉

〈46〉 〈47〉 〈48〉 〈49〉

〈49〉 〈50〉

〈211〉 〈212〉 〈213〉 〈214〉

〈224〉 〈225〉

〈162〉 〈163〉

Rel2 Rel2 Rel2 Rel2 Rel2 Rel2 Rel2 texte non identifie´ blanc Rel2 Rel2 Rel2 Rel2 frgt. de lettre, adresse de BC frgt. de lettre, adresse de BC texte non identifie´ blanc texte non identifie´ lettre a` BC texte non identifie´ Rel2 Rel2 blanc Rel2 Rel2 Rel2 Rel2 frgt. de lettre, adresse de BC Rel1 Rel2 Rel2 comptes d’aouˆt 1817 blanc Rel2 blanc facture du jardinier, juillet 1817 facture du jardinier, juillet 1817 blanc Rel2 Rel2 blanc blanc blanc blanc

35

36 898VI 898VII 898VIII 899 900 900bis 900ter 〈57〉 900IV 900V 〈58〉 900VI 〈59〉 901 902 903 903bis 903ter 903IV 903V 903VI 903VII 904 904bis 904ter 905 906 907 908 909 910 911 912 913

De la Religion, IV

〈164〉 〈165〉 〈166〉

〈226〉 〈227〉

〈167〉 〈168〉 〈169〉 〈170〉

〈228〉 〈229〉 〈230〉

〈179〉 〈180〉 〈181〉

〈231〉

〈189〉 〈190〉

〈232〉 〈233〉 〈234〉 〈235〉 〈236〉 〈237〉 〈238〉 〈239〉 〈240〉

le chiffre 23 frgt. de lettre, adresse de BC frgt. de lettre, adresse de BC Rel2 Rel2 facture facture Filangieri blanc blanc Rel2 Rel2 Rel2 lettre en anglais Filangieri, fo 31 texte politique ste´nogr. texte sur le sentiment religieux texte non identifie´ blanc Rel2 frgt. d’une lettre, adresse de BC blanc Rel2 Rel2 Rel2 Rel2 Rel2 Rel2 Rel2 Rel2 Rel2

Livre IX, chapitre 5 foliotage actuel

914 915 916 917 918 919

foliotages pre´ce´dents

〈429〉 〈430〉 〈431〉 〈432〉 〈433〉 〈434〉

foliotage actuel

964 965 966 967 968 969

foliotages pre´ce´dents

〈263〉 〈264〉 〈265〉 〈266〉 〈268〉

〈486〉 〈487〉 〈488〉 〈489〉 〈490〉 〈491〉

37

Introduction

920 921 〈919〉 922 923 924 925 926 927 928 929 930 931 932 933 934 935 936 937 938 939 940 941 942 943 944 945 946 〈illis.〉 947 948 949 950 951 952 953 〈243〉 954 955 〈245〉 956 〈246〉 956/2 〈248〉 957 〈illis.〉 958 〈249〉 959 〈250〉 960 〈251〉 961 〈260〉 962 〈261〉 963 〈262〉

〈435〉 〈illis.〉 〈436〉 〈437〉 〈438〉 〈illis.〉 〈441〉 〈442〉 〈443〉 〈444〉 〈445〉 〈446〉 〈447〉 〈448〉 〈449〉 〈450〉 〈451〉 〈452〉 〈453〉 〈454〉 〈455〉 〈456〉 〈457〉 〈458〉 〈illis.〉 〈478〉 〈479〉 〈illis.〉 〈460〉 〈480〉 〈481〉 〈482〉 〈463〉 〈461〉 〈470〉 〈471〉 〈473〉 〈illis.〉 〈474〉 〈illis.〉 〈475〉 〈476〉 〈483〉 〈484〉

970 971 972 973 974 975 976 977 978 979 980 981 982 983 984 985 986 987 988 989 990 994 995 996 997 998 999 1000 1001 1002 1003 1004 1005 1006 1007 1008 1009 1010 1011 1012 1013 1014 1015 1016 1017

〈269〉 〈270〉 〈271〉 〈272〉 〈273〉 〈274〉 〈275〉 〈276〉 〈277〉 〈278〉 〈279〉 〈280〉 〈281〉 〈282〉 〈283〉 〈284〉 〈285〉 〈286〉 〈287〉 〈288〉 〈289〉 〈293〉 〈294〉 〈295〉 〈296〉 〈297〉 〈298〉 〈299〉 〈300〉

〈497〉 〈498〉 〈500〉 〈501〉

〈506〉 〈507〉 〈508〉 〈509〉 〈510〉 perte de 3 fos 〈516〉 〈518〉

〈522〉 〈523〉

〈illis.ter〉 〈illis.〉 〈illis.〉 〈illis.〉 〈illis.〉

〈illis.〉

〈301〉 〈302〉 〈303〉

〈521〉 〈525〉 〈526〉 〈527〉 〈528〉 〈529〉 〈530〉

〈307〉

〈462〉 〈illis.〉 〈463〉

38

De la Religion, IV

Livre IX, chapitre 8 foliotage actuel

foliotages pre´ce´dents et remarques

foliotage actuel

foliotages pre´ce´dents et remarques

1018 1019 1020 1021 1022 1023 1024 1025 1026 1027 1028 1029 1030 1031

〈591〉 〈592〉 〈593〉 〈594〉 〈595〉 〈596〉 〈597〉 〈598〉 〈599〉 〈600〉 〈601〉

[1032] 1033 1034 1035 1036 1037 [1038] 1049 1040 1041 1042 1043 1044

[〈606〉] 〈606〉 〈607〉 〈608〉 〈609〉 〈610〉 [〈611〉] 〈612〉 〈613〉 〈614〉 〈615〉 〈616〉 〈617〉

〈604〉

perte du fo

perte du fo 〈569〉

Livre IX, chapitre 10 foliotage actuel

foliotages pre´ce´dents et remarques

foliotage actuel

1045 1046 1047 1048 1049 1050 1051 1052 1053 1054 1055 1056 1057 1058 1059 1060 1061 1062 [1063]

〈688〉 〈689〉 〈690〉 〈691〉 〈692〉 〈693〉 〈694〉 〈695〉 〈696〉 〈697〉 〈698〉 〈699〉 〈700〉 〈701〉 〈702〉 〈703〉 〈704〉 〈705〉 [〈706〉]

1101 1102 1103 1104 1105 1106 1107 1108 1109 1110 1111 1112 1113 1114 1115 1116 1117 1118 1119

perte du fo

foliotages pre´ce´dents et remarques

〈748〉 〈751〉 〈752〉

〈756〉 〈757〉 〈758〉 〈759〉 〈760〉 〈761〉 〈762〉

39

Introduction

1064 1065 1066 1067 1068 1069 1070 1071 1072 1073 1074 1075 1076 1077 1078 [1079] 1080 1080bis 1081 1082 [1082bis] 1082ter 1083

〈707〉 〈708〉 〈709〉 〈710〉 〈711〉 〈712〉 〈843〉 〈714〉 〈715〉 〈716〉 〈719〉 〈721〉 [〈722〉] 〈723〉 〈724〉 〈726〉

perte du fo texte politique

texte politique perte du fo

〈726〉

1084 1085 1086 1087 1088 1089 1090 1091

〈727〉 〈728〉 〈729〉 〈730〉 〈831〉

1092 1093 [1094] [1095] 1096 1097 1098 1099 1100

〈735〉 〈736〉 [〈737〉] [〈738〉] 〈739〉 〈740〉 〈741〉

1120 1121 1122 1123 1124 1125 1126 1127 1128 1129 1130 1131 1132 1133 1134 1135 1136 1137 1138 [1139] 1140 [1141] 1142 1143 1144 1145 1146 1147 1148 1149 1151

〈734〉

perte du fo perte du fo

〈763〉 〈764〉 〈765〉 〈766〉 〈767〉 〈768〉 〈769〉 〈770〉 〈771〉 〈773〉 〈774〉 〈775〉 〈776〉 〈777〉 〈778〉 〈779〉 〈780〉 〈781〉 [〈782〉] 〈783〉 [〈784〉] 〈785〉 〈786〉 〈787〉 〈788〉 〈789〉

1152 [1153] 1154 1155 1156 1157 1158 1159 non nume´rote´e

perte du fo perte du fo BnF, NAF 18823, fo 121

fiche 〈292〉 477 fiche 207 frgt. d’une note comptes de janv. a` juin 1826 Rel1 perte du fo fiche 204 fiche 196 Rel4 fiche 200 Rel4 fiche 194 Rel4 Rel3 Co 4725, fo 198

40

De la Religion, IV

Livre X, chapitres 2 a` 4 folios actuels

folios incipit pre´ce´dents

1192

〈367〉

1193

〈368〉

1195

〈370〉

1199

〈374〉

1206

〈378〉

1207

〈379〉

1208

〈380〉

1210

〈382〉

1219

〈392〉

1226 –

399

[12..]

[?]



452

place dans l’imprime´

cote

texte des versos ou rectos

Imprime´ : Co 3293 vo : Lyriques et tragiques grecs ch. II, p. 120 Imprime´ : Co 3293 vo : extrait ch. II, p. 120 d’Eckstein Imprime´ : – Co 3468 ro : note pour le livre des Re´sultats Il est d’une part Imprime´ : Co 3267 vo : note pour le ch. II, p. 119 livre des Re´sultats Cette notion Imprime´ : Co 4727 ro : note pour le ch. II, p. 121 livre des Re´sultats Le despotisme Imprime´ : – Co 4727 ro : note pour le livre des Re´sultats Les peuples Imprime´ : Co 3267 vo : note pour le septentrionaux ch. II, p. 121 livre des Re´sultats On remarque Imprime´ : – Co 3267 Note sur d’Eckstein Ils flattent Imprime´ : BnF, NAF – 18823 vo : blanc Chap. 4. Imprime´ : Co 3293 vo : extrait Dieux infe´rieurs ch. III, p. 123 d’Eckstein Mais dans Imprime´ : Co 3293 vo : extrait les cultes ch. III, p. 124 d’Eckst., religion scandinave [in]diquent aux Imprime´ : Co 4727 ro : note pour le hommes ch. III, p. 125 livre des Re´sultats L’homme Imprime´ : Co 3293 vo : extrait ch. IV, p. 134 d’Eckst. La divinite´ supreˆme le Dieu du Bhagavat Laflotte

Le texte du manuscrit sur fiches est parfois proche, mais pas du tout identique, au texte de l’imprime´, le plus souvent au contraire assez e´loigne´ de celui-ci. Les structures de l’argumentation diffe`rent conside´rablement. Le titre pre´vu pour ce livre IX e´tait : «De la re´sistance oppose´e par les preˆtres des religions sacerdotales a` tout perfectionnement des notions religieuses». Nous ne trouvons donc aucune comparaison avec les religions non soumises aux preˆtres, qui est l’objectif de la version imprime´e. Les chapitres conserve´s de ce livre se suivaient exactement dans l’ordre de fiches ; la nume´rotation actuelle (3, 5, 8, 10) est re´crite sur les chiffres 1 a` 4. Le premier plan est ainsi de´finitivement abandonne´. Le tableau suivant re´sume ces transformations.

41

Introduction

Le manuscrit sur fiches I num. des fiches

num. des livres et chapitres du ms.

num. des livres et chapitres de l’imprime´

cote des bibliothe`ques

874–913

livre IX, chap. III

livre IX, chap. II

Co 3267

914–1017

livre IX, chap. V

livre IX, chap. III

Co 3267

1018–1044

livre IX, chap. VIII

livre IX, chap. III

Co 3267

1045–1159

livre IX, chap. X

livre IX, chap. VII

Co 3267 et BnF, NAF 18823, fo 121

fiche non nume´- [livre IX, chap. ?] rote´e

livre IX, chap. VIII

Co 4725, fo 108

1192

livre X, chap. ?

livre X, chap. II

Co 3293

1193

livre X, chap. ?

livre X, chap. II

Co 3293

1195

livre X, chap. ?

livre X, chap. II

Co 3468, fo 1vo

1199

livre X, chap. ?

livre X, chap. II

Co 3267

1206

livre X, chap. ?

livre X, chap. II

Co 4727, fo 41vo

1207

livre X, chap. ?

livre X, chap. II

Co 4727, fo 41vo

1208

livre X, chap. ?

livre X, chap. II

Co 3267

1210

livre X, chap. ?

livre X, chap. II

Co 3267

1219

livre X, chap. ?

livre X, chap. II

BnF, NAF 18823, fo 66ro

[12..]

livre X, chap. ?

livre X, chap. II

Co 4727, fo non nume´rote´

1226

livre X, chap. 4

livre X, chap. III

Co 3293

399

livre X, chap. 4

livre X, chap. III

Co 3293

452

livre X, chap. 5 (?)

livre X, chap. IV

Co 3293

La se´rie de fiches ainsi restitue´e ne contient que quatre, peut-eˆtre cinq, chapitres qui re´apparaissent dans le livre IX de l’imprime´ (chapitres II, III, VII, VIII) et quelques fragments du livre X (appartenant a` trois chapitres) que nous avons retrouve´s dans plusieurs dossiers des papiers de Constant ou` ils se trouvent sans doute tout-a`-fait par hasard. La se´rie des fiches nume´rote´es 1192 a` 1226 couvre une se´quence d’une trentaine de pages appartenant toutes au chapitre II du livre X. Les pertes conside´rables signalent que Cons-

42

De la Religion, IV

tant avait abandonne´ cette partie de sa de´monstration et l’a remplace´e par une nouvelle re´daction entie`rement conserve´e, le manuscrit sur fiches II. Mentionnons, pour terminer cette analyse, deux faits que nous ne pouvons pas expliquer, mais qui semblent indiquer que Constant a pre´pare´ pour re´aliser la restructuration du livre IX un manuscrit sur fiches avec une nume´rotation inde´pendante de celle du manuscrit dont il disposait. Il s’agit d’une se´rie de fiches avec le texte du chapitre IV. Nous posse´dons deux fiches qui portent les nume´ros 230 et 247. Elles contiennent des passages que l’on retrouve dans le chapitre IV1 et une se´quence de 30 fiches de´crite dans le Catalogue d’E´tienne Hofmann2. Ces fiches, nume´rote´es de 308 a` 337, contiennent un passage du chapitre IV du livre IX de l’imprime´, comme il ressort du titre qu’on lit sur la fiche 308 : «D’une notion singulie`re qu’on n’apercoit que par intervalles & confuse´ment dans la religion grecque, mais qu’on retrouve de´veloppe´e & re´duite en dogme dans les religions sacerdotales»3. La nume´rotation des fiches pourrait eˆtre celle que l’on trouve cidessus entre parenthe`ses pointues dans le tableau pour les chapitres du livre IX. Constant les aurait donc de´place´es dans le manuscrit ou e´carte´es de la se´rie. Puisque les fiches n’ont pu eˆtre retrouve´es dans les dossiers du de´partement des manuscrits de la BCU, nous devons laisser cette question ouverte. Signalons enfin la fiche non nume´rote´e avec le titre et la premie`re phrase du chapitre VIII du livre IX de l’imprime´ qui se trouve dans le dossier Co 4725, fo 108. Cette fiche est l’unique te´moignage d’un nouveau manuscrit sur fiches projete´ ou commence´ pour ce chapitre. Le texte de cette fiche correspond a` peu pre`s a` celui de la version imprime´e. 2. Le manuscrit sur fiches II (Co 4722, BnF, NAF 18823, fos 67, 124–134, 143–146 et Archives d’Estournelles pour le fo 191). Le manuscrit sur fiches pour le livre X, futur livre XI, remplace la version pre´ce´dente, abandonne´e comme il ressort de la petite se´rie des e´paves que nous venons d’analyser. Cette ope´ration re´dactionnelle se fait a` l’e´te´ 1826, comme on peut le de´duire des versos de plusieurs fiches qui permettent une datation assez pre´cise : apre`s le 8 mars 1826, apre`s le 7 avril 1836, apre`s le 21 avril 1826, pour une autre se´rie de fiches apre`s le 9 mai 1826, et, enfin, apre`s le 20 juin 18264. Cette dernie`re date, une date post quem, est confirme´e par une entre´e 1 2 3 4

Voir ci-dessous, pp. 62 27 498. Voir Hofmann, Catalogue, IV/162, p. 155. Nous citons le titre d’apre`s Hofmann, Catalogue, p. 155. Les versos des fiches 224bis et 225 sont un faire-part de de´ce`s d’un sous-inspecteur des Finances, mort le 21 avril 1826. Le verso de la fiche 191 contient une lettre date´e du 20 juin 1826, les versos des fiches 126 et 248 attestent deux lettres de Lafayette et les versos des fiches 251, 260, 259, 257, 258, 253, 252, 64, 64ter, 255, 75, 76 81 contiennent des fragments du discours du 9 mai 1826. Voir Hofmann, Catalogue, IV/174.

Introduction

43

du Carnet de notes que l’on peut dater entre les 25 et 29 juin 1826, et qui ` ce moment-la`, ce pre´cise : «Copier les chap. composant le livre X»1. A livre X e´tait encore conc¸u comme une partie inte´grante du troisie`me volume. La preuve en est la table des matie`res et le Grand manuscrit de 18262. Ce plan ne se re´alisera peut-eˆtre pas, si le manuscrit pour le livre XI dont nous traiterons ci-dessous3 n’est pas le reste de ce travail re´dactionnel. Les fiches pour le livre X, qui deviendra le livre XI de la version imprime´e, donnent une version tantoˆt proche, tantoˆt assez diffe´rente des cinq premiers chapitres de la version de´finitive. Le chapitre VI est projete´, mais il est e´vident que Benjamin Constant abandonne, pour des raisons difficiles a` de´terminer, mais probablement lie´es a` la restructuration du troisie`me volume, le travail de re´daction de ce sixie`me chapitre, dont nous ne connaissons que le titre. Un argument en faveur de cette hypothe`se est le fait que quelques mate´riaux faisant partie du cinquie`me chapitre passeront, dans la version de´finitive, au sixie`me4. Il s’ensuit que le manuscrit sur fiches, inacheve´ par rapport a` un pre´ce´dent plan5, n’a jamais atteint un e´tat plus de´veloppe´. Le manuscrit est complet ; les pertes de quelques fiches ne sont pas importantes et sans doute fortuites. 3. Un manuscrit de´truit du livre XI. Nous avons pu identifier dans le dossier Co 4725 six fragments de textes qui appartiennent au chapitre II du livre XI de De la Religion. Ces fragments autographes attestent l’existence d’un manuscrit de grand format forme´ de doubles feuilles plie´es au milieu. Les pages e´taient divise´es en deux colonnes. Celle de droite portait le texte avec, au bas des pages, les notes. La colonne de gauche e´tait laisse´e blanche, pour pouvoir y inscrire au besoin des corrections ou des ajouts. Les passages du texte conserve´ (texte principal et notes) sont proches, mais nettement diffe´rents, de la version du manuscrit en cahiers et de l’imprime´. Il s’agit donc d’un manuscrit soigneusement re´dige´ par Constant, mais e´carte´ de´finitivement lors du travail re´dactionnel sur le manuscrit en cahiers. Ces pages sont peut-eˆtre les restes du manuscrit dont parle Constant dans son Carnet de notes en juin 18266. Si cette hypothe`se est exacte, la source des fragments du Co 4725 doit eˆtre le manuscrit sur fiches II dont nous avons parle´ plus haut. 4. Trois manuscrits sur fiches. L’analyse du manuscrit pour le livre XII du tome IV de De la Religion montre que Constant s’est servi de manuscrits 1 2 3 4 5 6

OCBC, Œuvres, t. XVII, p. 567. OCBC, Œuvres, t. XIX, pp. 94–99. Voir ci-dessous, pp. 58–59, no 10. Voir ci-dessous, p. 578, n. 1. Nous n’en avons pas connaissance, mais on peut supposer qu’il existait. La note cite´e du Carnet de notes le sugge`re. Voir ci-dessus, p. 32.

44

De la Religion, IV

anciens qu’il de´coupait et collait sur les versos blancs des folios re´cupe´re´s du manuscrit des Discours a` la Chambre des de´pute´s, en comple´tant parfois son texte par des passages qu’il ajoutait sur les folios. Il s’arrange pour pouvoir placer les notes au bas des pages en de´coupant celles-ci dans les folios qu’il utilise et en corrigeant au besoin la nume´ration des appels. Un nombre e´leve´ des pie`ces de ce collage provient de trois manuscrits sur fiches, comme il ressort des nume´ros biffe´s, souvent illisibles, que l’on de´couvre dans les angles gauches des anciennes fiches. Ces se´ries de fiches e´taient nume´rote´es en commenc¸ant par le chiffre 1. On retrouve dans le manuscrit Co 3294/1–3294/3 une se´rie de 51 fiches ([1] a` 112), dans Co 3294/4 et Co 3459 une se´rie de 14 fiches ([1] a` 15), et dans Co 3294/5 une se´rie de 35 fiches ([1] – 33bis), soit 100 fiches pour les trois se´ries. Les lacunes que nous signalons ici s’expliquent parfaitement par le fait que Constant a e´carte´ certaines fiches. Les pertes sont pourtant moins importantes qu’il n’y paraıˆt. Nous n’avons pas tenu compte des passages d’origine douteuse (une vingtaine pour la premie`re se´rie), parce qu’il est difficile de distinguer clairement les fiches dont la nume´rotation est de´coupe´e des fragments d’anciens manuscrits. La reconstitution des manuscrits sur fiches et l’analyse du montage des folios permettent d’e´mettre l’hypothe`se selon laquelle ces manuscrits sur fiches auraient probablement e´te´ re´dige´s pendant le travail mouvemente´ du le tome III de De la Religion et que le texte e´tait destine´, dans un premier temps, a` eˆtre publie´ dans ce meˆme volume. L’e´tat actuel est par conse´quent le re´sultat de transformations complexes du plan de l’ouvrage1. 5. Un manuscrit sur fiches pour le livre XII, chapitre VII. Nous posse´dons un petit manuscrit sur fiches du texte sur Sophocle qui pre´ce`de la version imprime´e. Le texte en est proche. La lacune (manquent les fiches 2 et 3) signele une correction. Constant a e´limine´ des passages a` supprimer. 6. Le manuscrit en cahiers. Le manuscrit en cahiers contient une version des livres IX, X, XI et XII de l’ouvrage sur la religion, qui correspondent aux trois premiers livres du tome IV (livres IX-XI de l’imprime´) et au premier livre du tome V, c’est-a`-dire au livre XIII de l’ouvrage. Ce manuscrit a sans doute e´te´ re´dige´ en vue de l’impression, a` partir de sources a` identifier avec des mate´riaux que nous posse´dons, du moins en partie. Mais le texte ainsi re´dige´ ne correspond pas a` la version de l’imprime´. Si les livres IX et X sont assez proches du texte de´finitif, le livre XI pre´sente par contre des modifications importantes, tandis que le livre XII deviendra le livre XIII en teˆte du tome suivant. Nous constatons donc que ce manuscrit atteste une phase 1

Hofmann, dans son Catalogue (IV/278), de´crit l’e´tat actuel du manuscrit composite Co 3294, auquel il joint a` juste titre le dossier Co 3459. La date qu’il propose pour ce dossier (1829–1830) se justifie par le travail re´dactionnel en cours pour achever l’impression du

Introduction

45

importante du travail de re´daction, l’apparat critique faisant e´tat de changements importants, de corrections du plan, d’interventions en profondeur, parfois de ve´ritables bouleversements de l’argumentation. Ce manuscrit comporte 25 cahiers cousus, de 195 × 160 mm. Tous les cahiers sont fabrique´s de six folios de grand format, plie´s au milieu et cousus, produisant ainsi douze folios, ou 24 pages. Tous les cahiers portent un titre et sont nume´rote´s (Texte, 2d Cahier du Texte, 3eme Cahier du Texte, etc. respectivement, Notes, 2d Cahier des Notes, etc.). Les pages ou les folios ne sont pas nume´rote´s, mais presque chaque page porte en haut, dans la colonne de gauche, un titre courant pre´cisant le nume´ro du livre et du chapitre en question (Livre 9, ch. 1. ; Liv. 9, ch. 2, etc.). Dans les cahiers des notes apparaissent les meˆmes titres courants, de sorte que l’orientation dans les deux se´ries est facile. Nous avons donc 14 cahiers de texte et 11 cahiers de notes. Cinq cahiers pre´sentent non pas 24 pages de texte mais plus, soit qu’ils e´taient de`s le de´but plus e´pais, soit que le nombre de folios a augmente´ parce que Constant a retravaille´ son texte en l’e´tayant. Ces ope´rations portent sur le cahier 11, qui comprenait de`s l’origine huit folios au lieu de six. La totalite´ des pages pour ce cahier s’e´le`ve a` 32. Les corrections concernent trois folios. On trouve un folio colle´ au fo 5ro, et deux folios colle´s aux fos 11ro et 11vo. La premie`re re´daction des passages en question est couverte par les feuilles contenant les corrections. La version pre´ce´dente de ces passages est perdue, bien que quelques rares mots du texte remplace´ soient encore lisibles en transparence. Signalons encore que le fo 2vo du 8e cahier des notes est une page manuscrite colle´e par des cachets de cire sur les notes pre´ce´dentes. Le texte pre´ce´dent est perdu. Le verso de la feuille avec les nouvelles notes contient un texte sur les Romains dont on trouvera une version retravaille´e dans le livre XII1. Les ope´rations qui ont transforme´ les cahiers de texte 13 et 14 ainsi que les cahiers de notes 10 et 11 sont tre`s complexes. Puisque le texte fait partie du livre XII, le futur livre XIII qu’on trouvera en teˆte du t. V de De la Religion, nous nous contenterons de signaler ici les interventions re´dactionnelles et la restructuration des cahiers en question sans entrer dans une description de´taille´e des changements. On la trouvera dans le volume suivant2. Dans les derniers cahiers des deux se´ries, il reste des pages blanches a` la fin. Beaucoup de pages ont e´te´ comple´te´es par des papillons colle´s contenant des ajouts ou de nouvelles notes.

1 2

t. IV. Nous croyons pourtant pouvoir distinguer dans ce lot plusieurs manuscrits, dont les trois manuscrits sur fiches datables de 1826. Voir ci-dessous, p. 337. OCBC, Œuvres, t. XXI, a` paraıˆtre.

46

De la Religion, IV

Quant a` la distribution du texte sur les pages de ce manuscrit, il faut savoir que chaque page est plie´e au milieu et divise´e ainsi en deux colonnes. Le texte est toujours e´crit dans la colonne de droite, celle de gauche e´tant re´serve´e a` des ajouts ou des corrections. Cette possibilite´ a e´te´ largement exploite´e par Constant. Les colonnes de gauche reste´es blanches sont plutoˆt rares, parce que la premie`re version du texte et des notes de ces livres a subi au cours des mois suivant son e´tablissement de tre`s importants remaniements, parfois meˆme plusieurs remaniements successifs d’un meˆme passage. Constant pre´pare donc l’impression des derniers livres de l’ouvrage, en transformant les papiers qu’il avait (manuscrits sur fiches ; morceaux e´pars) en un texte suivi, mais ce texte ne pouvait gue`re eˆtre conside´re´ comme une version pre´ce´dant imme´diatement l’impression. C’est plutoˆt l’entre´e dans la dernie`re phase de la re´daction. Ce manuscrit servait donc a` pre´parer l’e´tablissement d’une nouvelle re´daction du texte, une sorte de mise au net du texte remanie´. Au fur et a` mesure que la copie avanc¸ait, Constant ou le secre´taire ont biffe´ le texte copie´ d’une e´paisse barre verticale. De la sorte. le texte reste parfaitement lisible, et les progre`s du travail sont facilement reconnaissables. Les parties du texte a` supprimer, par contre, sont biffe´es par des barres horizontales. Les suppressions sont donc clairement indique´es. 7. Le manuscrit dit des «Cahiers colle´s». Le manuscrit des «Cahiers colle´s» atteste l’existence de deux e´tats re´dactionnels des livres IX a` XI et du futur livre XIII de l’ouvrage sur la religion. Nous pouvons en effet y retrouver un manuscrit hypothe´tique contenant les livres mentionne´s, que nous de´signons sous le nom de manuscrit aux espacements larges, et le manuscrit qui en de´coule appele´ manuscrit des «Cahiers colle´s». Les changements re´dactionnels dont il faut tenir compte concernent surtout le livre IX. Le manuscrit des «Cahiers colle´s», ou, si l’on veut, les deux manuscrits dont il est question ici, contiennent le texte des livres X et XI du tome IV de De la Religion, ainsi que le livre XII de cet ouvrage, le futur livre XIII du tome V. Le manuscrit hypothe´tique aux espacements larges offrait probablement encore le livre IX. Ce texte manque dans le manuscrit des «Cahiers colle´s». Dans le manuscrit des «Cahiers colle´s», les folios sont nume´rote´s en haut, dans l’angle gauche. Nous posse´dons les folios 1 a` 70 qui constituent le livre X, les folios 91 a` 104 et 109 a` 135, ce qui correspond a` peu pre`s a` la moitie´ du livre XI, enfin les folios 167bis a` 201 et 209 a` 241, soit presque la totalite´ du livre XII. Les pertes de texte pour le livre X se limitent a` un passage d’une dizaine de lignes et a` quelques mots qui ont e´te´ enleve´s par des de´chirures cause´es par la mauvaise qualite´ du papier. Celles du livre XI,

Introduction

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dont le texte est assez diffe´rent de la version imprime´e, sont conside´rables : plus de la moitie´ de ce livre a disparu. Celles du livre XII n’ont fait disparaıˆtre qu’un passage, assez important il est vrai, du chapitre IV (environ 15 pages dans la version imprime´e), mais pour le reste, le texte est complet1. Le manuscrit des «Cahiers colle´s» a e´te´ fabrique´ a` partir d’un manuscrit autographe de grand format, e´galement nume´rote´, au crayon en haut a` gauche, qui comprenait au moins 374 pages. Il s’agit du manuscrit aux espacements larges. Le premier folio atteste´ de ce manuscrit hypothe´tique est la page 176, identique au folio 1 du manuscrit des «Cahiers colle´s». Les folios perdus 1 a` 175 offraient suffisamment de place pour le texte du livre IX, ce qui sugge`re l’hypothe`se que la source imme´diate du manuscrit colle´ n’est rien d’autre que la mise au net du manuscrit en cahiers. Meˆme si cette supposition e´tait exacte, nous ne saurions expliquer ni la disparition du livre IX (il s’agit d’un lot important de papiers) ni pourquoi Constant n’en tient pas compte en re´digeant le manuscrit colle´. L’e´tablissement pre´cis de la date de ce manuscrit hypothe´tique est e´galement impossible. Il pre´suppose l’existence du manuscrit en cahiers. Constant pourrait l’avoir re´dige´ peut-eˆtre en 1827 ou 1828, apre`s la parution du tome III, certainement avec l’intention de restructurer le texte des livres suivants en travaillant avec un nouveau manuscrit. Le texte des livres pre´vus pour les derniers volumes de l’ouvrage e´tait sans doute conside´re´ par Constant comme provisoire et susceptible de corrections importantes. Pour facilter ce travail, il a laisse´ entre les lignes du texte et entre les notes, e´crites d’une manie`re plus serre´e2, l’espace d’une ligne environ ou un peu plus, pour pouvoir y ajouter des corrections3. La preuve qui confirme cette hypothe`se est le fait que plusieurs bandes de chutes de papier qui ont la meˆme forme (largeur et longueur) que les lignes de´coupe´es du texte ont servi pour le montage de certains papillons fort minces, que l’on trouve dans le manuscrit des «Cahiers colle´s»4. D’autres de´coupures contiennent des notes prises dans des manuscrits divers non identifiables, mais on les reconnaıˆt aux petits nume´ros souvent inscrits a` coˆte´ du chiffre d’appel de la premie`re des notes de ces feuilles, qui re´pe`te la pagination du folio auquel Constant les destine5. Les cascades de feuilles volantes sont le plus souvent fixe´es avec des cachets de cire6. 1 2 3

4 5 6

Voir OCBC, Œuvres, t. XXI, a` paraıˆtre. Voir p. ex. le fo 44, n. 2 ou le fo 49, n. 3 et 4. Il trouvera en 1824, avant la publication du tome II de De la Religion, une solution plus souple pour re´soudre ce proble`me, les manuscrits sur fiches, dont les premiers connus sont le manuscrit sur fiches pour le chapitre VII du livre V et le grand dossier pour la re´daction de plusieurs chapitres des livres VI, VII et VIII. Voir, pour le premier, Hofmann, Catalogue, IV/113, pour le second OCBC, Œuvres, t. XIX, pp. 89–93. Voir les fos 186, 188, 200 et 231. Voir le fo 94, pour en citer un des nombreux exemples. Voir p. ex. les fos 201, 209 ou 210.

48

De la Religion, IV

Le nombre de lignes par page du manuscrit hypothe´tique e´tait variable, mais atteignait le plus souvent 16 lignes. Cela peut signifier que Constant, en fabriquant le manuscrit des «Cahiers colle´s», a e´limine´ parfois des phrases, que les folios n’avaient pas toujours les meˆmes dimensions, ou encore que le nombre de notes infrapaginales e´tait plus e´leve´. Les notes pre´vues pour cette premie`re version du texte dans le manuscrit aux espacements larges n’e´taient pas nume´rote´es, mais Constant a inse´re´, dans le texte et avant les notes au bas des pages, des parenthe`ses vides pour y porter plus tard les chiffres d’appel1. Au cours du travail de re´daction du tome IV de De la Religion, ce manuscrit fera l’objet d’une refonte en profondeur. Nous datons cette ope´ration autour de 1828, puisque Constant cite dans ses notes plusieurs cahiers du Catholique du baron d’Eckstein, entre autres le cahier XXV paru au mois de janvier 1828. Au lieu de recopier son texte, Constant le de´coupe ligne par ligne, faisant disparaıˆtre ainsi les espacements, et colle les lignes d’une manie`re plus serre´e sur d’autres folios. Les interventions de Constant concernent surtout les notes. Il garde e´videmment la plupart de celles qu’il avait de´ja` re´dige´es, mais en ajoute d’autres qu’il tire de manuscrits pre´ce´dents en les de´coupant et en collant les papillons, voire tre`s souvent des folios entiers, au bas des nouvelles pages. Ce montage de textes a` la provenance non e´claircie aboutira a` un texte conside´rablement enrichi que nous lisons dans ce manuscrit, puis dans l’ouvrage publie´. Nous retrouvons du manuscrit pre´ce´dent, c’est-a`-dire du manuscrit aux lignes espace´es, pour le livre X les folios 176 a` 259, pour le livre XI les folios 276 a` 313, et pour le livre XII les folios 334 a` 374. Nous ne pouvons indiquer les provenances des folios ajoute´s, a` l’exception d’un passage du livre XII qui a e´te´ re´dige´ a` partir d’un manuscrit sur fiches2. En ce qui concerne le contenu de la source principale du manuscrit colle´, nous pouvons dire d’une manie`re ge´ne´rale que ce manuscrit aux espacements larges avait organise´ les mate´riaux en suivant un plan proche de celui du Grand manuscrit du tome III de De la Religion. Mais il est impossible de reconstituer certains de´tails. Les changements concernent la nume´rotation des livres, l’ajout de livres, une autre se´quence des chapitres des livres, la suppression de certains chapitres. Les structures globales seront pourtant conserve´es. Nous pouvons donc risquer l’hypothe`se de´ja` e´mise ci-dessus que les folios 1 a` 175 de ce manuscrit devaient probablement contenir une version du livre IX, qui correspond en partie aux livres VII et VIII de la «Table des matie`res du tome III» que l’on trouve dans le Carnet de notes 1 2

Nous savons que le manuscrit aux espacements larges pre´voyait des notes au bas des pages, se´pare´es du texte par un trait au crayon. Voir p. ex. les fos 1, 91 et 92. Voir OCBC, Œuvres, t. XXI, a` paraıˆtre.

49

Introduction

depuis le 29 septembre 18241. Le livre X suit presque entie`rement la distribution des chapitres du livre IX tel qu’elle est donne´e dans cette meˆme table. Le livre XI correspond au livre X pre´vu par la table des matie`res, mais qui ne formule que le titre du livre. Avec cela s’arreˆtent les comparaisons possibles, parce que ni le plan du Carnet de notes ni le Grand manuscrit de 1826 ne nous fournissent les informations indispensables. Le travail de re´daction qui aboutit aux manuscrits pre´parant la publication du tome IV se de´roule par conse´quent a` partir de 1827 et se poursuit l’anne´e suivante, avec une rapidite´ e´tonnante si l’on tient compte de la grande masse des mate´riaux a` maıˆtriser. Les nouvelles structures de l’argumentation et les buts envisage´s par Constant dominent les nouveaux manuscrits. On les retrouvera dans l’imprime´, car les livres X, XI et XII du manuscrit colle´ sont plus ou moins proches de la version imprime´e du texte. Le livre X ne pre´sente que tre`s peu de variantes. Le livre XII correspond largement au livre XIII du tome V. Seul le livre XI a subi des remaniements importants. Le plan de ce livre se distinguait dans un premier temps de celui adopte´ pour la version imprime´e, ce qui est reconnaissable a` l’ordre diffe´rent des chapitres conserve´s et a` la disparition des folios de l’ancien chapitre III. On ne peut pas exclure non plus que la perte des folios 136 a` 167 n’ait pas e´te´ cause´e par les ope´rations re´dactionnelles. Il s’agit, comme nous venons de le souligner, du livre X du Grand manuscrit dont la matie`re est identique a` celle de ce livre XI du manuscrit colle´, dont sortira le livre XI de la version imprime´e. La perte des folios 71–90, par contre, est sans doute tout simplement un accident fortuit. Le tableau suivant re´sume ce que nous venons de de´crire. Manuscrit colle´, livre XI [Du principe fondamental des religions sacerdotales] folios du manuscrit

1

titres des chapitres

titres des chapitres dans l’imprime´

71–90 (non conserve´s)

[Chapitre premier] (Titre inconnu)

Chapitre premier. Expose´ de ce principe Chapitre II. Des sacrifices humains

91–104

[Chapitre II] [Des sacrifices humains] [fin du chapitre II]

OCBC, Œuvres, t. XVII, pp. 569–570, 570–571, 571, 574 et 575. Et, pour une lecture plus commode, OCBC, Œuvres, t. XIX, pp. 94–96. Pour ce qui est du Grand manuscrit de 1826 on consultera dans ce meˆme t. XIX le tableau pp. 97–99.

50

De la Religion, IV

105–109 (non conserve´s)

[Chapitre III] (Titre inconnu)



109–112

Chapitre IV Des privations contre nature

Chapitre III Des privations contre nature

113–115

Chapitre V Conjecture que nous soumettons a` nos lecteurs

Chapitre VI De quelques dogmes qui ont pu s’introduire dans les religions sacerdotales, comme conse´quences de ceux que nous venons d’indiquer

116–122

Chapitre VI Des rites licentieux

Chapitre IV Des rites licencieux

123–132

Chapitre VII Chapitre V De la saintete´ de la douleur De la saintete´ de la douleur

133–135

Chapitre VIII D’un dogme que le principe dont il s’agit a pu introduire dans les religions sacerdotales



136–167 (non conserve´s) 167bis–241

Livre XII

Livre XIII

La version du texte telle qu’elle est documente´e par le manuscrit colle´ est donc a` la fois proche et diffe´rente de la version imprime´e, notamment celle du livre XI. Mais les fragments de ce livre que nous connaissons ne nous permettent pas d’en reconstituer les structures. Constant n’a conserve´ que les parties qui pouvaient lui servir a` re´diger le volume qu’il avait sur le me´tier. Nous avons donc pris le parti de re´pertorier les variantes des livres X et XI dans l’apparat critique, a` l’exception du fragment du chapitre VIII du livre XI dont le sujet est a` rapprocher du chapitre VII de l’imprime´ qui, pourtant, le traite autrement. Ce chapitre fragmentaire est reproduit dans la section des textes comple´mentaires. 8. Le dossier manuscrit pour les livres XII et XV de la version imprime´e. Les papiers pour pre´parer la re´daction des livres XII et XV sont re´unis dans un dossier de 137 folios de grand format. Le format unique et le fait que l’ordre des folios dans les liasses de la bibliothe`que corresponde a` la marche de l’argumentation qui re´git la distribution de la matie`re qu’on lit dans

Introduction

51

l’ouvrage publie´ pourraient sugge´rer que ces papiers forment un manuscrit cohe´rent. Mais il n’en est rien. Nous ne posse´dons pas de manuscrit complet des livres XII et XV, et les fragments des chapitres conserve´s sous les cotes Co 3294/1 – 3294/8 et Co 3459 repre´sentent des e´tats divers du texte. Ils comprennent des morceaux pre´paratoires, des suites d’ide´es, des plans, des re´dactions provisoires et des passages soigneusement re´dige´s de plusieurs chapitres, souvent assez proches de la version imprime´e, mais parfois aussi nettement diffe´rents de celui-ci. L’analyse de ce document exige donc une description soigne´e de l’e´tat de ces textes pour fournir des renseignements fiables de la dernie`re e´tape du travail re´dactionnel du tome IV de l’ouvrage sur la religion. Nous e´carterons ne´anmoins les parties du manuscrit concernant le livre XV dont il sera question dans le tome suivant1. En ce qui concerne les papiers pour le livre XII, nous constatons que les folios utilisent des feuilles re´cupe´re´es du manuscrit des Discours a` la Chambre des de´pute´s. Quatre folios seulement de ce dossier sont fabrique´s en utilisant des feuilles re´cupe´re´es d’autres manuscrits, a` savoir : un folio avec au verso le texte d’une loi ; un autre est confectionne´ en se servant de l’adresse d’une lettre de 1830 et d’un fragment d’une page avec des notes de lecture en allemand ; enfin deux folios sont tire´s du manuscrit pre´pare´ pour l’impression du tome III de De la Religion2. Les versos blancs des feuilles ont servi pour y coller des fiches d’un manuscrit ou de plusieurs manuscrits sur fiches3, ainsi que des morceaux de´coupe´s dans des manuscrits non identifie´s. Un autre type de folios se distingue nettement. Il s’agit de feuilles qui donnent une mise au net soigne´e du texte. Cette mise au net contient des passages dont on trouve des e´chos dans presque tous les chapitres du livre XII. Retenons toutefois qu’elle correspond rarement au texte des brouillons que nous posse´dons. Ceux-ci se rapportent par contre a` d’autres passages du texte publie´. Les deux types de documentation manuscrite se comple`tent, sans pour autant couvrir la totalite´ du dernier livre du tome IV. Tous les folios sont nume´rote´s dans l’angle gauche en haut, a` peu de folios pre`s qui ne portent pas de nume´ros. Cette nume´rotation est progressive, souvent corrige´e, et point univoque, car beaucoup de folios portent le meˆme nume´ro. Les corrections et les irre´gularite´s du foliotage signalent des 1

2

3

Il s’agit des folios classe´s sous les cotes Co 3294/8 et Co 3459, a` l’exception du dernier folio de ce manuscrit (le fo 25, nume´rote´ 74) classe´ par erreur sous cette cote. Le folio contient un morceau de texte du livre XII. Voir notre description de ce manuscrit dans OCBC, Œuvres, t. XIX, pp.–101–103. Il faut comple´ter cette description par les deux folios mentionne´s du ms. Co 3294/5, fos 92vo et 93vo qui appartiennent au livre VI, chap. VII. Nous venons de les identifier seulement en e´tudiant les mss pour le t. IV de De la Religion. Voir ci-dessus, p. 44, le ms. de´crit sous le no 4.

52

De la Religion, IV

perturbations fre´quentes. Elles permettent de de´celer des lacunes, d’identifier les brouillons, de s’assurer de la cohe´rence de certains passages de l’argumentation ou de reconstituer les anciennes dimensions de la mise au net. Meˆme s’il est e´vident que le dossier ne contient que des papiers qui traitent de la matie`re des livres XII et XV, il est e´galement certain que les feuilles repre´sentent plusieurs manuscrits que nous devons distinguer. Pour le livre XII, nous pouvons distinguer trois dossiers. Le plus petit est forme´ par des folios comprenant des esquisses et des brouillons ou des plans et des suites d’ide´es. Ces te´moignages du travail de re´daction n’ont que rarement une importance pour l’e´tablissement du texte, mais permettent d’aborder des questions relatives a` sa gene`se. Le deuxie`me dossier contient les fragments d’un important document fabrique´ en utilisant les manuscrits sur fiches et d’autres manuscrits d’anciens chapitres sur la religion. Constant choisit dans ces mate´riaux les passages qu’il veut utiliser pour les chapitres du livre XII. Ce lot composite est aussi celui ou` nous pouvons distinguer deux sortes de mate´riaux. D’une part des fragments d’anciens manuscrits non identifiables que Constant utilise pour construire son texte. Ces documents ne sont pas datables. D’autre part des restes de plusieurs se´ries du manuscrit sur fiches pour le livre XII. Le Carnet de notes sugge`re que Constant n’y a travaille´ qu’apre`s 1827, apre`s la publication du tome XIX de De la Religion. Ce manuscrit consistait peut-eˆtre en sous-unite´s dont les contours ne sont pour nous plus tre`s nets. Ainsi, les fiches que l’on peut identifier pour la fabrication des folios 2 a` 33 ne permettent pas une restitution meˆme hypothe´tique du manuscrit sur fiches perdu correspondant. S’agit-il d’une seule ou de plusieures se´ries de fiches ? Les fiches que l’on trouve dans le lot des folios 34 a` 47 repre´sentent une se´rie nume´rote´e de 76 a` 109 (avec lacunes) ; ces fiches appartiennent a` la meˆme se´rie que celle des premiers folios. Celle des folios 73 a` 89 et du folio 25 de Co 3459 pre´sentent une se´rie nume´rote´e de 2 a` 33bis, couvrant le chapitre XI du livre XII ; et enfin celles des folios 90 a` 93 une se´rie nume´rote´e de [1] a` 12, ce qui correspond au chapitre XII de ce meˆme livre. Les deux dernie`res se´ries permettent d’e´mettre l’hypothe`se qu’elles concernent uniquement les chapitres en question. Les deux premie`res par contre n’admettent pas de re´ponse univoque ; nous devons laisser la question ouverte. Constant les colle sur les versos blancs des folios, de´coupant les lignes du texte de chaque fiche pour obtenir ainsi un texte suivi et pouvoir placer les notes respectives au bas des pages en corrigeant les nume´ros d’appel. Parfois, il comple`te le montage des documents en ajoutant entre les pie`ces, dans les marges ou encore sur des papillons, des passages de transition ou des comple´ments. Le troisie`me dossier est forme´ des folios qui appartenaient a` un grand manuscrit soigneusement re´dige´ par le secre´taire aux longues barres de t. La

Introduction

53

distribution du texte se fait en deux colonnes, celle de droite pour le texte, celle de gauche e´tant re´serve´e a` des corrections ou des ajouts. Ce manuscrit a e´te´ retravaille´ par Constant pour arriver a` la version de´finitive. Il y intervient en prode´dant a` des corrections ou des ajouts a` coˆte´ des pages copie´es par son secre´taire. Ces interventions peuvent aboutir a` une nouvelle copie de la page en question. Ce manuscrit est tre`s lacunaire, le texte parfois proche, parfois assez diffe´rent de la version publie´e par Constant. Le foliotage de ces feuilles sugge`re l’hypothe`se selon laquelle ce grand manuscrit aurait autrefois couvert l’inte´gralite´ du livre XII, du moins jusqu’au chapitre X inclus. Sont conserve´s pour le livre XII les folios 11 a` 15, 16 (fragment), [?] (foliotage cache´), 48, 49 (deux folios qui portent ce nume´ro), 52 (deux folios nume´rote´s ainsi), 53–69, 74–77 et 80, soit 35 folios sur environ cent folios en tout1. Le foliotage sugge`re qu’on lit un texte suivi et cohe´rent, ce qui est exact, bien que quelques-unes des feuilles (les folios 16, 49 et 52) repre´sentent peut-eˆtre plusieurs e´tats du texte. Ce que nous posse´dons maintenant est un manuscrit de travail fragmentaire, dans lequel deux e´tats des parties acheve´es ainsi que des brouillons coexistent. Puisqu’un manuscrit contenant plusieurs e´tats d’un texte qui s’entremeˆlent ne peut servir a` l’impression, nous supposons que l’imprimeur devait disposer d’une copie du texte a` publier. Quelques fragments de ce manuscrit sont conserve´s2. Il est e´vident que le foliotage originel de ce manuscrit composite ne peut servir a` s’orienter dans la masse conside´rable des papiers. Nous avons duˆ adopter une nouvelle nume´rotation pour permettre une identification fiable des folios. Le tableau suivant re´sume les faits indispensables a` connaıˆtre pour se retrouver dans ce dossier complexe de Co 3294 et 3459. Nous indiquons dans la premie`re colonne le nume´ro d’ordre que nous donnons aux folios conserve´s. Les nume´ros imprime´s en gras de´signent les folios qui appartiennent au grand manuscrit. Le symbole ♦ qui accompagne les chiffres signale que le folio a servi a` l’e´tablissement du texte imprime´ et a` la re´daction 1 2

Dans notre nume´rotation que l’on retrouvera dans le tableau ci-dessous, il s’agit des folios 9, 13, 16–18, 24, 40, 50–72, 78–80, 82, 84. Le manuscrit pour l’impression pre´suppose une mise au net des documents dont nous disposons. Il se peut que ce manuscrit interme´diaire ait e´te´ organise´ en chapitres. Nous posse´dons un seul folio du chap. IX du livre XII («Quelques mots sur Aristophane»), qui sugge`re cette hypothe`se. Le texte est tre`s proche de la version de´finitive. Le folio porte le nume´ro 2 dans l’angle gauche supe´rieur. BC en a de´coupe´ quelques lignes au bas du folio. Le folio pre´ce´dent e´tait donc plus grand que ce fragment et pouvait contenir le titre et le de´but du texte. Nous ne disposons d’aucun indice supple´mentaire pour appuyer cette hypothe`se.

54

De la Religion, IV

de l’apparat critique. Le symbole ◊ annonce que le texte se trouve dans la partie des textes comple´mentaires. Le tiret indique que le folio ne concerne pas les textes du pre´sent volume. Dans la deuxie`me colonne, on trouve le foliotage du manuscrit, avec entre parenthe`ses pointues les nume´ros biffe´s. La troisie`me colonne reproduit les incipit des folios avec, en-dessous, le foliotage du manuscrit sur fiches s’il y a lieu. La quatrie`me colonne indique les chapitres de l’imprime´ ou` le sujet du folio est aborde´. La dernie`re re´pertorie le foliotage du texte des Discours a` la Chambre des de´pute´s que l’on trouve au verso (le ? indique ici la perte du chiffre) ou pre´cise la provenance des folios re´cupe´re´s pour fabriquer cette feuille du manuscrit.

Manuscrit des livres fo no

foliotage du ms.

XII

et

XV

de l’imprime´

incipit nos des fiches

chap. de l’imprime´

versos

chap. 1 chap. 1 et 2

238 235

chap. 2

?

chap. 3 chap. 3

233 ?

chap. 3

210

Rel5

518

chap. 3

201

chap. 3 chap. 3 chap. 3

452 232 112

Rel5 chap. 3 chap. 3 chap. 3

559 442 207 95

chap. 3

59

Co 3294/1 ♦1 ♦2 ♦3 ◊4 ◊5 ◊6 –7 ◊8 ◊9 ◊ 10 ◊ 11 – ◊ ◊ ◊

12 13

14 15

◊ 16

sans fo 〈3〉 5

Livre 12 L’amour de l’ordre 4, 5, ? 5 Mais a` mesure 11, 12, 13 〈6〉 9 Chapitre 3 〈8 ?〉 9 Uranus mutile´ 6, [7] 〈7〉 10 De la` les disproportions [8] 10〈bis〉 Des e´crivains distingue´s 9bis 〈10〉 11 alors aussi 27, 25bis 11 Des e´le´mens constitutifs 〈6〉 〈8〉 11 Chap. 4 des e´le´mens constitutifs 〈11〉 12 cette rapide analyse 29 〈11〉 12 et de nos jours 〈11〉 12 Tartare 〈7 ?〉 11 leur perversite´ 12 & 13 Les œuvres et les jours 2 fiches sans nos, 12 〈9〉 13 Uranus mutile´

55

Introduction fo no

foliotage du ms.

incipit nos des fiches

◊ ◊ – –

〈12 ?〉 14 〈10〉 15 15bis 〈11 ?〉 15

Saturne pre´cipite´ deviennent plus claires Ceci nous semble Ceci ne nuit

17 18

19 20

chap. de l’imprime´

versos

chap. 3 chap. 3 Rel5 Rel5

77 104 522 564

chap. 3 et 4

206

chap. 4 chap. 4 chap. 4 chap. 4

205 203 147 ?

chap. 5 chap. 5

144 215

chap. 5 e´carte´ e´carte´ chap. 6 chap. 6 chap. 6

81 196 135 138 140 80

chap. 7

75

chap. 7

74

chap. 7

78

chap. 7

143

chap. 7

73

chap. 7

56

chap. 7

?

chap. 7

195

chap. 7

102

Co 3294/2 ♦ 21 ♦ 22 ◊ 23 ◊ 24 ◊ 25 ♦ 26 ♦ 27 ♦ 28 ◊ 29 ◊ 30 ♦ 31 ♦ 32 ♦ 33 ◊ 34 ◊ 35 ◊ 36 ◊ 37 ◊ 38 ◊ 39 ◊ 40

16

He´siode appelle deux fois 37, [38 ?], [38bis ?] 17 est remarquable 18 Terminons 18 Ce n’est pas seulement 〈10 ?〉 19 Saturne pre´cipite´ 26 19 Ch. 4. De l’enfer de Pindare 20 grossie`res ou funestes 2 21 Royaume des ombres 22 Chap. 6 De l’enfer de Virgile 23 plusieurs des ide´es de Virgile 22 Ch. 7. que la meˆme progression 23 par son caracte`re 26 fut puni par les dieux 3 fiches, nos illis. 31 Ch. 8 De la meˆme 76, 77, 78 32 de´sirent. 1 fiche, no illis. 33 Eschyle fleurissait 84, 85, 86, 87 34 Les citations 88, 89, 90 35 qu’eˆtre son esclave 91, 92, 93 36 Le chant dans lequel les furies 94, 94bis manque Nous avons annonce´ Co 3294/3

◊ 41

manque

◊ 42

37

Lorsqu’on passe 102 (une partie) encore, lors meˆme 95, 96, 97, 98

56

De la Religion, IV

fo no

foliotage du ms.

◊ 43

38

◊ 44

manque

◊ 45 ◊ 46

40 40

◊ 47

41

◊ 48 ◊ 49 ♦ 50 ♦ 51/1 ◊ 51/2 ♦ 52 ♦ 53 ♦ 54 ♦ 55 ♦ 56 ♦ 57 ♦ 58 ♦ 59 ♦ 60

41 42 48 〈47〉 49 〈47〉 49 49 52 53 54 55 56 57 58 59

incipit nos des fiches

Sophocle qui [99], 100, 101 Le chœur, qui 102 (suite de la fiche), 103 Ch. 9 quelques observations Chap. 9 quelques observations 104, 105, 106 dans une note 107, 108, 109 & grossie`res traditions conduisaient au contraire rien, au premier c’est un arreˆt Ch. 7. Tragiques. Les dieux prononcent Chapitre 8. D’Euripide D’home`re, tandis que C’est qu’avant de se ge´ne´ralite´ de´place´es Sophocle ayant Les prie`res d’Euripide Les de´fauts d’Euripide D’andromaque

chap. de l’imprime´

versos

chap. 7

101

chap. 7

100

chap. 9 chap. 9

200 99

chap. 9

98

chap. 9 chap. 9 chap. 7 chap. 7 chap. 7 chap. 7 chap. 8 chap. 8 chap. 8 chap. 8 chap. 8 chap. 8 chap. 8 chap. 8

199 ? ? 91 91 405 390 389 388 662 661 660 659 658

chap. 9

?

chap. 8 chap. 8 chap. 8 chap. 9

657 460 492 397 et 491

chap. 9 chap. 9 chap. 9 chap. 9 chap. 9 chap. 9

490 395 485 483 482 481

Co 3294/4 ◊ 61

52

♦ 62 ♦ 63 ♦ 64 ◊ 65

60 61 62 63

◊ 66 ♦ 67 ◊ 68 ◊ 69 ◊ 70 ◊ 71

64 65 66 66 67 68

Chap. 8 Quelques mots sur Aristophane Avec du Talent elle a les meˆmes de´fauts mais ce n’est point par respect Ch. 9. Quelques mots sur Aristophane protecteurs inte´resse´s Aristophane, d’ailleurs Des institutions Aristophane ne voulait Quelquefois c’est pindare Cette explication

57

Introduction fo no

foliotage du ms.

♦ 72 ♦ 73

69 70

◊ 74

manque

♦ 75

71

♦ 76

72

♦ 77

73

♦ 78 ♦ 79 ♦ 80

74 75 76

incipit nos des fiches

Chapitre 10 Pourquoi nous Ch. 11 des Rapports 2 [plan du chap. XI] 3, 4, 5 Neptune, 〈Dans L’odysse´e〉 s’irrite – 3, 4, 5 Juste (1) & [6], 7, 8 dieux qui prote`gent 9, 10 Dans le polythe´¨ısme sacerdotal La morale s’alliant elles sont bonnes

chap. de l’imprime´

versos

chap. 10 chap. 11

480 455

chap. 11 lettre 12–4–1830 notes de lecture chap. 11 blanc chap. 11

454

chap. 11

475

chap. 11 chap. 11 chap. 11

470 458 ? (2 fos)

chap. 11

457

chap. 11 chap. 11

465 456

chap. 11 chap. 11

467 et 466 361

chap. 11

493

chap. 11

478

chap. 11

112

chap. 11

476 et fiche

chap. 12

11

chap. 12

12

chap. 12

ms. Rel3

chap. 12

ms. Rel3

Co 3294/5 ◊ 81

〈76〉 79

◊ 82 ◊ 83

77 78

◊ 84 ◊ 85

80 81

◊ 86

82

◊ 87

83

◊ 88

84

◊ 89

85

♦ 90

manque

♦ 91

2

♦ 92

3

♦ 93

4

et quelque le´ge`re 19, 20, 21 Chez les perses long-tems 16, 17, 18 Cette classe ne se borne pas de l’Egypte 22, 23, 23bis 〈il est meˆme a` remarquer〉 24, 25, 26 pense´es, fait 27, 28, 29 L’homme adopte 30, 31, 31bis a` L’ombrage d’un arbre 32, 33, 32bis, 33bis Ch. 12. des ve´ritables rapports [1], [2], 3 Les dogmes les plus salutaires [4], 5, 6, 7 C’est alors seulement 8, 9, 10 sphe`re au dessus de toutes 11, 12

58

De la Religion, IV

fo no

foliotage du ms.

incipit nos des fiches

chap. de l’imprime´

versos

chap. 4 chap. 4 chap. 7 chap. 7 chap. 7

? texte (loi) 64 ? (2 fos), 674 blanc

chap. 11 chap. 11

? 469 et 468

chap. 11

?

Co 3294/6 ◊ 94 ♦ 95 ♦ 96 ♦ 97 ◊ 98

t

20 cidv 23 pour avoir calomnie´ manque Suite d’ide´es. Ch. 5. de Pindare manque [suite d’ide´es] Sophocle, manque [long ajout pour le t. IV] 〈45 ?〉 Lorsqu’on passe D’Eschyle a` Sophocle ◊ 99 manque la morale ◊ 100 76 elles sont bonnes Co 3459 ◊ 25

74

Dans le polythe´isme sacerdotal [12], 13, 14, 15

9. Une suite d’ide´es sur Aristophane et une page sur Euripide. On trouve sur les versos blancs de deux placards avec des passages des chapitres II et VI du livre XI de De la Religion deux morceaux ste´nographie´s sur Aristophane et l’e´bauche d’une page sur Euripide. Il s’agit nettement de textes pre´paratoires pour le livre XII qui aborde ces sujets. Ils ont visiblement la meˆme fonction que beaucoup de pages du dossier cote´ Co 3294. Nous les reproduisons donc avec ces mate´riaux dans les textes comple´mentaires. Signalons encore que ces feuilles nous permettent de pre´ciser les conditions qui dominent la composition du livre XII. L’impression du volume est de´ja` en cours, Constant a corrige´ les e´preuves du livre XI et a demande´ des changements probablement importants. Car le chapitre VI, intitule´ «De la saintete´ de la douleur», deviendra dans la version de´finitive le chapitre V, et le placard avec des passages du chapitre II diffe`re, en ce qui concerne la disposition des aline´as du texte imprime´. Constant intervient donc dans les parties compose´es du livre XI et se voit force´ d’achever les chapitres du livre suivant pour permettre la suite de l’impression de l’ouvrage. Il se trouve, paraıˆt-il, dans une situation comparable a` celle que nous avons aperc¸ue en de´crivant les bouleversements qui dominaient le travail pour le tome III de son ouvrage. 10. Un manuscrit pour l’imprimeur. Les manuscrits pre´sente´s ne pouvaient servir a` l’impression de l’ouvrage. Le manuscrit dont disposait l’e´diteur commercial pour pre´parer l’e´dition du tome IV n’est pas conserve´. Il se peut d’ailleurs que ce manuscrit n’ait compris la totalite´ du texte imprime´, parce que l’imprimeur pouvait utiliser des chapitres de´ja` compose´s en 1827 lorsqu’il travaillait a` la publication du tome III. Cette hypothe`se est sugge´re´e par quelques pages de la main du copiste aux longues barres de t. Il s’agit

Introduction

59

de trois folios, deux doubles-feuilles et la moitie´ d’une double-feuille, cinq pages en tout, avec le texte du chapitre VIII d’un livre VII. Les pages, soigneusement e´crites, sont nume´rote´es en haut, dans l’angle a` droite, de 1 a` 5. Les versos sont blancs. On trouve a` coˆte´ du titre la signature d’un prote, «Combes», ce qui assure que ce texte a servi a` la composition de l’ouvrage. Dans le texte de´finitif, ce texte deviendra le chapitre IV du livre IX. Cette constatation nous oblige a` voir dans ce fragment le reste d’un manuscrit ayant servi a` l’impression du tome pre´ce´dent. Mais ce chapitre a e´te´ retire´ de ce tome par Constant au moment ou` il s’est de´cide´ a` bouleverser les structures argumentatives du tome III pour le classer avec les mate´riaux du suivant. La preuve en est la table des matie`res du Grand manuscrit qui contient effectivement, a` la fin du livre VII, un chapitre VIII, dont le titre commenc¸ait par les mots «D’une notion tire´e»1. Constant lui-meˆme confirme cette hypothe`se en ajoutant au dernier folio la note autographe : «fin du livre 7». Il faut donc accepter l’ide´e que le texte de ce chapitre a e´te´ compose´ dans l’atelier de Be´chet en juin 1827 et que l’e´diteur en a conserve´ les formes pour les utiliser pour l’impression du tome suivant. Le texte ne pre´sente que peu de variantes avec la version publie´e, changements de style surtout que Constant a pu faire en corrigeant les e´preuves. Il a pourtant conside´rablement e´toffe´ ce chapitre en introduisant une se´rie d’exemples supple´mentaires pour soutenir la de´monstration. 11. Un manuscrit de grand format. Nous posse´dons deux folios de grand format, nume´rote´s 105 et 106 dans l’angle gauche en haut, qui contiennent le de´but d’un chapitre III intitule´ «D’un dogme qui s’est introduit dans les religions sacerdotales, comme une conse´quence de la valeur attache´e au sacrifice». Le texte de ce chapitre, autonome a` l’origine, apparaıˆt presque sans variantes dans le livre XI, inte´gre´ dans le chapitre VI, dont le titre est en fait une variation du titre que nous venons de citer. Les deux folios ont e´te´ re´dige´s par le secre´taire aux longues barres de t. Nous ne connaissons pas le manuscrit auquel ils appartenaient. On peut supposer que le contexte de ces feuilles est la tentative de Constant de restructurer le livre XI du tome IV. Mais il est impossible de pre´ciser davantage cette hypothe`se. 12. Un folio nume´rote´ 2. Il existe sous la cote Co 3293 un folio nume´rote´ 2 dans l’angle gauche en haut qui contient un passage autographe d’environ 15 lignes du chapitre IX intitule´ «Quelques mots sur Aristophane». Le texte est proche, mais pas tout a` fait identique a` la version publie´e par

1

OCBC, Œuvres, t. XIX, pp. 99. Voir pour la restructuration in extremis du t. III pp. 105–107.

60

De la Religion, IV

Constant. Il pourrait provenir d’un ancien manuscrit repris pour la re´daction du livre XII de De la Religion. 13. Deux notes. Il existe dans le dossier composite de la BnF, NAF 18823 un folio de grand format avec le texte de deux notes qu’on retrouvera presques sans variantes dans le livre X, chapitre X («Du Phallus, du Lingam et des divinite´s hermaphrodites». Il s’agit d’un folio autographe soigneusement re´dige´ qui appartenait a` un manuscrit non identifie´. 14. La «Pre´face du 4e & dernier volume». Ce texte est un document pre´cieux pour nous faire apercevoir les raisons qui ont pousse´ Constant a` bouleverser a` la dernie`re minute les structures de son ouvrage. L’analogie avec le travail au tome III de De la Religion est manifeste1. Quant au tome IV, Constant croyait aussi pouvoir boucler sa de´monstration en e´cartant des re´flexions sur le polythe´isme libre des Grecs ou des Romains. La pre´face explique sa position. Elle a e´te´ re´dige´e probablement apre`s avoir lance´ l’impression, c’est-a`-dire au cours des premiers mois de 1830. Les re´flexions de Constant indiquent pre´cise´ment les raisons de corriger le plan en place pour la version livre´e a` l’imprimeur et dont nous trouvons des traces dans les placards conserve´s. Le manuscrit conserve´ a` la BnF nous fournit un texte en cours d’e´laboration. Nous supposons qu’aucune mise au net n’a jamais e´te´ faite. Le contenu de texte est re´ve´lateur en ce sens qu’il fournit un indice des raisons impe´ratives justifiant le changement majeur de l’ouvrage qui comprendra cinq volumes au lieu de quatre et obligera Constant a` composer rapidement le nouveau livre XII avec les mate´riaux dont il disposait. 15. Le manuscrit de la pre´face des tomes IV et V. Constant place en teˆte du quatrie`me volume de De la Religion un «Avertissement» pour expliquer le retard de la publication de ces volumes. Les «devoirs politiques» qui entraıˆnent ce retard conside´rable re´sultent de son e´lection a` la Chambre des de´pute´s. Le texte pre´cise certaines positions the´oriques et re´pond de manie`re ge´ne´rale aux pole´miques que les volumes pre´ce´dents ont suscite´es. Il esquisse de plus des positions pole´miques que Constant de´veloppera dans le volume. Le manuscrit lacunaire (la page 2 manque) est une copie soigne´e du texte qui figure sans variantes dans le volume IV. 16. Les placards pour les livres V, XI, XII et XIII. Les placards que nous posse´dons permettent d’identifier un certain nombre de transformations du texte ope´re´es pendant l’impression du volume. Dans le dossier Co 3281, nous trouvons deux exemplaires d’un jeu d’e´preuves, pagine´ de 293 a` 300 qui offrent le texte presque identique de la version imprime´e. Nous ne 1

Voir OCBC, Œuvres, t. XIX, p. 103

Introduction

61

tenons pas compte des corrections de fautes d’imprimerie, mais signalons l’ajout d’un passage a` une note de ce texte. Un des papillons porte au verso une liste des titres des chapitres du livre XII et les titres des nouveaux livres XIII et XIV a` placer dans le t. V. Cela date ces e´preuves : e´te´ 1830, avant la Re´volution de juillet. Le placard no 12 couvre plusieurs pages du chapitre XI du livre XII, avec un ajout qui transforme la fin de ce chapitre. Les deux placards du dossier Co 3452, contenant six colonnes avec le texte d’un long passage du chapitre V du livre XI, n’ont pas e´te´ corrige´s par Constant. Cette version diffe`re du texte publie´. Nous supposons qu’il s’agit de placards tire´s en 1827, avant la restructuration de l’ouvrage. 17. Un brouillon pour une note. Une feuille isole´e avec le brouillon de la note c (pp. 379–380) sur Cice´ron. Au verso de cette fiche se lit une observation sur le Conseil d’E´tat et une phrase sur le prodigue du lac d’Aphaga, destine´e a` l’ouvrage sur la Religion. Les analyses des sources manuscrites impliquent des re´flexions sur la chronologie du travail re´dactionnel. Disons d’emble´e que nous ne pouvons pas e´tablir une chronologie exacte des travaux pour l’e´laboration des textes. Nous pouvons seulement affirmer que la re´daction du tome IV commence imme´diatement apre`s la publication du tome III en 1827, qu’elle peut profiter des mate´riaux pre´pare´s pendant le travail sur le tome III, qu’elle suit les e´tapes successives auxquelles on peut s’attendre. C’est ainsi que les manuscrits sur fiches seront remplace´s l’un apre`s l’autre par les manuscrits en cahiers ou par les manuscrits en grands folios, que ce travail ne se fait pourtant pas sans bouleversements dangereux, parce que Constant introduit assez tard un nouveau livre XII sur la marche du polythe´isme inde´pendant des preˆtres et repousse l’ancien livre XII sur les myste`res au de´but du volume suivant, dont il constituera le livre XIII. Nous savons graˆce a` un plan pour le chapitre XI du livre XII que cette ope´ration se fait avant le 12 avril 18301 (mais de combien ?) et qu’elle a duˆ eˆtre acheve´e avant la Re´volution de Juillet 1830, car l’impression e´tait en cours a` cette date, comme l’atteste la fausse page de titre du tome IV2 et le confirme la pre´face de l’auteur3. Les e´ve´nements politiques interrompent le travail. Les deux volumes ne paraıˆtront qu’en 1831, apre`s la mort de Benjamin Constant.

1 2 3

Voir ci-dessous, p. 691. L’exemplaire unique connu a` ce jour est conserve´ par la Bibliothe`que de l’Universite´ de Tübingen. Voir ci-dessous, p. 68. Voir ci-dessous, p. 71.

62

De la Religion, IV

E´tablissement du texte Nous reproduisons dans le pre´sent volume le texte de la premie`re (et unique) e´dition du tome quatrie`me de De la Religion. Les variantes des manuscrits e´tablis entre 1825 et 1830 pour la re´daction de ce volume sont re´pertorie´es dans l’apparat critique au bas des pages. Ces manuscrits, tre`s souvent fragmentaires, offrent des re´dactions proches de l’imprime´. Lorsque les textes manuscrits diffe`rent trop de la version de´finitive, nous les reproduisons dans la section des «Textes comple´mentaires». Nous n’avons pas tenu compte de la contrefac¸on de l’e´diteur Ve P. J. Mat de Bruxelles. Manuscrits : 1. [Le manuscrit sur fiches I. Fiches des livres IX et X]. BCU, Co 3267, Co 3293, Co 3468, fo 1, Co 4725, fo 108, Co 4727, fo 41 et un fo non nume´rote´, BnF, NAF 18823, fos 66 et 121. 325 fiches, 325 pp. a., formats divers, le plus souvent 220 × 115 mm, pagine´es en haut, a` gauche ; le foliotage est souvent corrige´, parfois inexistant. Aux versos on trouve des fragments d’autres volumes de De la Religion, des fragments du Commentaire sur l’ouvrage de Filangieri, des fragments de lettres adresse´es a` Constant, des factures, des textes politiques parfois non identifie´s. Beaucoup de versos des folios sont blancs. Les fiches concernent les chapitres II, III, VII et VIII du livre IX et les chapitres II-IV du livre X. La nume´rotation des chapitres du manuscrit diffe`re de celle de l’imprime´. Date propose´e : au plus toˆt octobre 1825, plus probablement 1826. Hofmann, Catalogue, IV/162. Nous de´signons ce manuscrit dans les variantes par le sigle MF1. 2. [Un manuscrit sur fiches pour le livre IX]. BCU, Co 3267 et Co 4725, fos 46 et 47. Deux fiches d’un manuscrit sur fiches, nume´rote´es 230 et 247, et trente fiches du meˆme (?) manuscrit de´crit par E´tienne Hofmann dans son Catalogue. Ces fiches sont nume´rote´es de 308 a` 337 et contiennent une partie du chapitre IV du livre IX. Les nume´ros pourraient appartenir a` une des anciennes nume´rotations corrige´es par Constant, indique´es dans nos tableaux entre parenthe`ses pointues. Les fiches sont introuvables dans les fonds de la bibliothe`que. Nous les signalons ici en renvoyant a` la description d’E´tienne Hofmann. Date propose´e : 1826. Hofmann, Catalogue, IV/162, p. 155. 3. [Un manuscrit de´truit du livre XI]. BCU, Co 4725, fos 12–15, 120 et 138. 6 fos, 7 pp. a., de dimensions varie´es. Les fragments faisaient partie d’un

63

Introduction

manuscrit de doubles feuilles de grand format, plie´es au milieu pour obtenir quatre pages. Celles-ci e´taient divise´es par un pli en deux colonnes, celle de droite pour le texte, celle de gauche pour des corrections et des ajouts. Il s’agit du manuscrit du livre X mentionne´ dans le Carnet des notes sous une date autour du 25 juin 1826. Constant travaillait a` ce moment la` a` la re´daction du t. III de De la Religion. Le livre X e´tait pre´vu pour ce volume. Mais la restructuration de la matie`re a fait passer ce livre, le futur livre XI, au volume suivant. Date propose´e : juin 1826. Hofmann, Catalogue, non re´pertorie´. 4. [Trois manuscrits sur fiches pour le livre XII]. BCU, Co 3294/1-Co3294/3, fos 2, 3, 5–8, 11, 15, 21, 25, 27, 33–39, 41–44, 46, 47 ; Co 3294/4, fos ’73–77 et Co 3459, fo 25 ; Co 3294/5, fos 81, 83, 85–93. 39 fos, 39 pp. a. et de la main d’un secre´taire. Il s’agit d’un montage de fiches colle´es sur les versos blancs de folios du manuscrit ayant servi a` l’impression des Discours a` la Chambre des de´pute´s. Les fiches sont parfois de´coupe´es pour pouvoir placer les notes au bas des feuilles. Le foliotage des fiches sugge`re l’ide´e de distinguer trois se´ries. Date propose´e : 1826. Hofmann, Catalogue, IV/278. Nous de´signons ces trois manuscrits dans les variantes par le sigle MF3. 5. [Un manuscrit sur fiches avec le texte sur Sophocle] BCU, Co 3435/17, pagine´ 1, 4–11. 9 fos a. 155 × 100 mm. Aux versos des fragments des discours a` la chambre. Date propose´e : 1827 ? Hofmann, Catalogue, IV/229. Nous de´signons ce manuscrit dans les variantes par le sigle MF4/–. 6. [Un folio nume´rote´ 2]. BCU, Co 3293, sans foliotage. 1 fo, 1 p. a., environ 150 × 200 mm, nume´rote´ en haut, dans l’angle gauche. Le folio est de´coupe´ d’une feuille plus grande, re´cupe´re´e du manuscrit des Discours a` la Chambre. Reste d’un manuscrit soigneusement e´crit, avec des corr. a. dans les interlignes. Le texte, proche de l’imprime´, apparaıˆt dans le livre XII, chap. IX, sur Aristophane ; il est ante´rieur a` la version de´finitive. Date propose´e : probablement avant 1827. Hofmann, Catalogue, non re´pertorie´ se´pare´ment. Voir IV/69. Nous de´signons ce manuscrit dans les variantes par le sigle N2. 7. [Placards de quelques passages des livres V, gion]. BCU, Co 3281 et Co 3425.

XI, XII, XIII

de De la Reli-

64

De la Religion, IV

Les placards concernant les livres XI et XII portent les corrections des fautes d’imprimerie. Les deux passages du texte ajoute´s sur les e´preuves se trouvent dans les livres XI, chap. VI et XII, chap. XI. Ils sont signale´s dans l’apparat critique, ainsi que les e´carts des placards par rapport au texte de´finitif. Aux verso des deux placards cote´s Co 3425 (qualifie´s d’«inutiles» par BC) se trouvent des notes sur Aristophane et Euripide. Le papillon d’un des cahiers de Co 3281 avec le texte ajoute´ a` une note porte au verso une liste des chapitres du livre XII et les titres des livres XIII («Myste`res») et XIV («Re´sultats»), ce qui permet de dater ces documents de 1830. La de´cision de publier cinq volumes au lieu de quatre est prise, mais la structure du dernier volume s’e´carte de celle de la verison imprime´e. Date propose´e : entre 1827 et 1830. Hofmann, Catalogue, IV/203 et IV/280. Nous de´signons ces documents dans les variantes par le sigle Pl. 8. [Le manuscrit en cahiers.] [De la Religion, livres IX a` XII]. BCU, Co 3262. 25 cahiers cousus, 321fos, 623 pp. a., de 195 × 160 mm. Les cahiers sont confectionne´s de 6 folios de grand format (320 × 195 mm) plie´s au milieu pour former des cahiers de 12 folios ou 24 pages. Quatre cahiers sont plus e´pais, a` savoir le cahier no 11, qui comprend 8 folios, ce qui porte le nume´ro des pages a` 32 ; le cahier no 13, auquel Constant a ajoute´ de nouvelles feuilles obtenant ainsi 36 pages ; le cahier no 14 avec 19 folios ou 38 pages, dont 17 pages blanches ; le cahier no 25, qui comprend, augmente´ par des feuilles ajoute´es, 32 pages. Le 7e cahier des notes ne comprend que 20 pages. Il faut distinguer deux se´ries, 14 Cahiers du Texte, et 11 Cahiers des Notes. Chaque cahier porte un titre (Texte, 2d Cahier du Texte, Notes, 2d Cahier des Notes, etc.), mais les folios ou les pages des cahiers ne sont pas nume´rote´s. Presque toutes les pages portent un titre courant (Liv. 1, ch. 2, etc.), dans les cahiers des notes la premie`re page du cahier seulement (Notes 424–467, etc.) pour assurer l’orientation. Chaque page est plie´e au milieu pour former deux colonnes. Le texte est toujours inscrit dans la colonne de droite, celle de gauche e´tant re´serve´e a` des corrections ou a` des ajouts. Les colonnes de gauche reste´es blanches sont assez rares. Le manuscrit en cahiers a servi a` e´tablir une mise au net du texte profonde´ment remanie´. Les morceaux copie´s ont e´te´ marque´s par une e´paisse barre verticale pour signaler le progre`s du travail. Le texte barre´ reste parfaitement lisible. Constant note parfois le pensum de´ja` fait et la quantite´ de pages a` copier : «a faire pour finir le 9e livre 94 pages fait 35 1/2 reste 58 1/2» (2d Cahier du Texte, fo 6vo, col. de gauche). Ces notes ne sont pas date´es. On peut nettement reconnaıˆtre les passages supprime´s du texte. Les mots ou syntagmes a` enlever ou a` corriger sont biffe´s par des traits horizon-

Introduction

65

taux, et les corrections e´ventuelles se trouvent soit dans l’interligne, soit dans la colonne de gauche. Le texte des livres IX et X est assez proche de la version de´finitive, celui du livre XI par contre est tre`s diffe´rent de l’imprime´. Le livre XII de ce manuscrit figurera en teˆte du tome suivant dont il constituera le livre XIII. Date propose´e : 1827–1828. Hofmann, Catalogue, IV/216. Nous de´signons ce manuscrit dans les variantes par les sigles Ms-texte et Ms-notes. 9. [Fragment d’un manuscrit pre´ce´dant le tome IV de De la Religion]. BCU, Co 3453. 2 doubles-feuilles et une demie double-feuille, 5 fos, 5 pp. de la main d’un copiste, 310 × 200 mm, pagine´es en haut, a` droite, de 1 a` 5. Marge de 50 mm a` gauche, par un pli. Il s’agit du chap. VIII, «D’une notion singulie`re dont on n’aperc¸oit que des vestiges dans la religion grecque, mais qu’on ` retrouve de´veloppe´e & re´duite en dogme dans les religions sacerdotales». A la fin du texte, un ajout autographe «fin du livre 7». La signature dans la marge de la p. 1, «Combes» est celle d’un prote. Le manuscrit dont proviennent ces pages n’est pas identifie´. Le texte est proche de celui du chap. IV du livre IX de l’imprime´, avec pourtant des diffe´rences parfois importantes. Date propose´e : avant 1828, mais de combien ? Hofmann, Catalogue, IV/218. Nous de´signons ce manuscrit dans les variantes par le sigle MP1. 10. [Fragment d’un manuscrit pour pre´parer l’impression du tome IV de De la Religion]. BCU, Co 3456. 2 fos, 2 pp. de la main du copiste aux longues barres de t, 340 × 220 mm, pagination 105 et 106, en haut, dans l’angle gauche. Une marge de 45 mm a` gauche. Le texte, de´but d’un chap. III, intitule´ «D’un dogme qui s’est introduit dans les religions sacerdotales, comme une conse´quence de la valeur attache´e au sacrifice». Le texte est proche du de´but du chap. VI du livre XI. Le manuscrit auquel appartenaient ces folios n’est pas identifie´. Date propose´e : peut-eˆtre 1828. Hofmann, Catalogue, IV/217. Nous de´signons ce manuscrit dans les variantes par le sigle MP2. 11. [Le manuscrit des «Cahiers colle´s».] [De la Religion, livres X, XI et XII]. BCU, Co 3246 et BnF, NAF, 18823, fos 122–123. 179 fos, 179 pp. a., de formats variables, mais le plus souvent de 340 × 320 mm, pagine´es en haut, dans l’angle gauche. Quelques chiffres du foliotage ont disparu. On trouve : 1–66, [67], 68–70 ; 91–98, [99], 100–104,

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De la Religion, IV

les pp. 107–108 enleve´es par Constant, 109–135 ; 167bis–201, 209–228, [229], [2]30, [231], [2]32, 233–[241]. Le ms. est confectionne´ avec des bandes de papier colle´es sur des feuilles de papier. Chacune des bandes contient une ligne du texte ou une note de bas de page. Beaucoup de folios sont comple´te´s par des morceaux de folios de´coupe´s dans des manuscrits non identifiables, contenant des notes supple´mentaires. Un certain nombre de ces papillons offrent au verso des fragments des Discours a` la Chambre. Au verso du fo 70, on lit une note de Constant : «[C’]est l’ancienne copie correspondant aux placards qui y sont joints». Les placards en question ne sont pas identifie´s. Puisque nous savons que l’impression du tome IV e´tait en cours au mois de juillet 1830, cette remarque appuie la date que nous proposons. Elle implique e´galement que l’imprimeur disposait d’un autre manuscrit contenant la version de´finitive du texte. Notons encore que Constant ajoute en-dessous du nume´ro du fo 109 l’indication : «107 & 108 sont retranche´s». Le ms. contient le livre X, des fragments du livre XI, et le texte presque complet d’un livre XII qui correspond au livre XIII du tome V. Date propose´e : 1828 [–1829 ?]. Hofmann, Catalogue, IV/277. Nous de´signons ce manuscrit dans les variantes par le sigle MC. 12. [Dossier pour pre´parer la re´daction du livre XII]. BCU, Co 3294/1 – 3294/6, Co 3459, Co 3425 et Co 4725.. 70 fos, 70 pp. a. ou de la main d’un secre´taire. Il s’agit d’un dossier composite, sans unite´ e´vidente. Les folios sont presque tous de grand format, le plus souvent de 310 × 200 mm, parfois plus petits, souvent fabrique´s en collant des fiches ou des pie`ces de´coupe´es d’anciens manuscrits pour composer le texte. Quelques folios portent des notes ste´nographie´es. Au verso de beaucoup de folios le texte des Discours a` la Chambre des de´pute´s. Le manuscrit Co 3425 utilise deux placards (chap. 2 et 4–5 du livre XI, version publie´e). Brouillons pour le texte a` e´crire, suites d’ide´es, plans, notes. Date propose´e : 1829–1830. Hofmann, Catalogue, IV/278, IV/280 et IV/71. 13. [Un grand manuscrit pour le livre XII]. BCU, Co 3294/1, fos 9, 13, 16–18 ; Co 3294/2, fos 24 et 40 ; Co 3294/3, fos 50–60 ; Co 3294/4, fos 61–72, 78–80 ; Co 3294/5, fos 82, 84. 35 fos, 35 pp. de la main du secre´taire aux longues barres de t, avec des corr. a., environ 310 × 200 mm. Aux versos on trouve le texte des Discours a` la Chambre des de´pute´s. Mise au net du texte. Pour certains folios, nous connaissons les brouillons.

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Introduction

Date propose´e : 1830 ; le copiste a peut-eˆtre commence´ le travail a` la fin de l’anne´e 1829, ou meˆme plus toˆt encore. Hofmann, Catalogue, IV/278. 14. [Deux notes nume´rote´es sur le culte du Phallus et sur le Lingam] BnF, NAF 18823, fo 135. 1 fo, 1 p. a., 300 ×:180 mm. Les notes portent les nume´ros 4 et 5 entre parenthe`ses et correspondent a` deux notes du livre X, chap. X. Date propose´e : avant juillet 1830. Hofmann, Catalogue, IV/48. Nous de´signons ce manuscrit dans les variantes par le sigle N. 15. [Pre´face pour les tomes IV et V]. BCU, Co 3455. 3 fos, 3 pp. a., 260 × 200 mm, pagine´es en haut, a` gauche de 1 a` 4. Le fo 2 est perdu. Au verso des pages on trouve des fragments des Discours a` la Chambre. Le texte est identique a` celui de l’«Avertissement» place´ en teˆte du tome IV de De la Religion. Il pourrait s’agir du manuscrit qui a servi a` l’impression. Date propose´e : 1830. Hofmann, Catalogue, IV/232. Nous de´signons ce manuscrit dans les variantes par le sigle Pr. 16. [Brouillon pour une note du livre XI, chapitre Co 4450. Une fiche isole´e. 1fo, 1 p. a., 80 × 110 mm. Date propose´e : 1830. Hofmann, Catalogue, IV/300

VII]

Imprime´s : 1. DE LA RELIGION, CONSIDE´RE´E DANS SA SOURCE, SES FORMES ET SES DE´VELOPPEMENTS. PAR M. BENJAMIN CON STANT. [deux lignes d’une citation grecque] (PLATON, Time´e) TOME QUATRIE`ME. [ligne ornementale enfle´e] PARIS, CHEZ PICHON ET DIDIER, E´DITEURS, RUE DES GRANDS AUGUSTINS, No 47. [petit filet ornemental] 1831. Faux-titre : DE LA RELIGION . [tiret] TOME QUATRIE`ME. 215 × 140 mm (non coupe´). Pp. [i] faux-titre, [ii] publicite´, au bas de la page l’adresse de Firmin Didot, rue Jacob no 24, [iii] titre, [iv] blanche, [i]-iv Avertissement. [v]-vi Second avertissement, [1]–[8] publicite´ de 8 pages, [1]–112, Livre IX, [113]–200 Livre X, [201]–343 Livre XI, [344] blanc, [345]–509 Livre XII, [510] blanc, [511]–515 Table des chapitres du quatrie`me volume, [516] blanc.

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De la Religion, IV

Premie`re de couverture, titre, deuxie`me de couverture, liste de libraires, troisie`me de couverture, titre d’un livre, quatrie`me de couverture, publicite´1. Courtney, Bibliography, 58a(4). Courtney, Guide, A58/1, (4). Nous de´signons cette e´dition par le sigle Rel4. Exemplaire utilise´ : Collection particulie`re. Exemplaire utilise´ : Collection particulie`re. 2. DE LA RELIGION, CONSIDE´RE´E DANS SA SOURCE, SES FORMES ET SES DE´VELOPPEMENTS. PAR M. BENJAMIN CON STANT. [deux lignes d’une citation grecque] (PLATON, Time´e) TOME TROISIE`ME. [ligne ornementale enfle´e] PARIS, CHEZ PICHON ET DIDIER, E´DITEURS, RUE DES GRANDS AUGUSTINS, No 47. [petit filet ornemental] 1830. Faux-titre : DE LA RELIGION . [tiret] TOME TROISIE`ME. 210 × 135 mm. Pp. [i] faux-titre, [ii] publicite´, au bas de la page l’adresse de Firmin Didot, rue Jacob no 24, [iii] titre, [iv] blanche, [i]-iv Avertissement. [1]–112, Livre IX, [113]–200 Livre X, [201]–343 Livre XI, [344] blanc, [345]–509 Livre XII, [510] blanc, [511]–515 Table des chapitres du quatrie`me volume, [516] blanc. Courtney, Bibliography, non re´pertorie´. Courtney, Guide, non re´pertorie´. Exemplaire : Universitätsbibliothek Tübingen. Unique exemplaire connu avec la faute de la titraille et sans le texte du «Second avertissement». 3. DE LA RELIGION, CONSIDE´RE´E DANS SA SOURCE, SES FORMES ET SES DE´VELOPPEMENTS. PAR M. BENJAMIN CON STANT. [deux lignes d’une citation grecque] (PLATON, Time´e) TOME IV monogramme de l’e´diteur BRUXELLES Ve P. J. DE MAT, LIBRAIRE, o RUE DE LA BATTERIE, N 24. tiret 1833. Courtney, Bibliography, 58b(4). Courtney, Guide, A58/2, (4). E´dition non utilise´e pour l’e´tablissement du texte. Compte rendu : Karl Otfried Müller, Göttingische gelehrte Anzeigen, 60. Stück, 12. Januar 1834, pp. 585–5932. 1 2

Nous posse´dons un exemplaire avec la bonne page de titre, mais sans le «Second avertissement». Voir Kurt Kloocke et Ulrich Steller, «Les comptes rendus de De la Religion parus dans les Göttingische gelehrte Anzeigen», ABC, t. 10, 1989, pp. 133–160.

De la Religion, conside´re´e dans sa source, ses formes et ses de´veloppements.

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Par M. Benjamin Constant. Μεμνημε νον ωë ς οë λε γων, υë μειÄς τε οιë κριταιÁ , ϕυ σιν αÆ νθρωπι νην εÍ χομεν. . (PLATON, Time´e1)

Tome quatrie`me.

1

Pour l’explication de la citation, on se reportera au t. I de De la Religion (OCBC, Œuvres, t. XVII, p. 69). – On posse`de au moins un exemplaire de ce quatrie`me volume avec une faute sur la page de titre. Voir ci-dessus, notre introduction, p. 61 et l’illustration p. 74.

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1. Page de couverture de la première édition de De la Religion, tome IV, Paris : chez Pichon et Didier, Éditeurs, 1831. Collection particulière.

[I]

II

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Avertissement

Nous publions les deux derniers volumes d’un ouvrage que nous n’avons pu achever plutoˆt. Des devoirs politiques nous ont empeˆche´ de le rendre moins imparfait qu’il ne l’est sans doute : nous ne disons point cela pour nous excuser : le lecteur juge le me´rite intrinse`que d’un livre, non la position personnelle de l’auteur[.] Une observation est ne´cessaire, surtout pour la premie`re moitie´ du quatrie`me volume. Nous n’y pre´sentons que l’exte´rieur des religions sacerdotales, et nous y re´unissons indiffe´remment les faits qui appartiennent a` ces religions et les caracte´risent. C’est que leur exte´rieur e´tait pour les peuples domine´s par les preˆtres, toute la religion, et que l’inte´reˆt des preˆtres e´tant partout identique, elles ont eu partout les meˆmes dogmes et les meˆmes rites, sauf les modifications introduites par les climats et les circonstances. Si nous avions de´daigne´ cette portion vulgaire, et ne nous e´tions occupe´s que du sens mystique, nous nous serions donne´ un air de profondeur qui eut charme´ bien des gens. Il y en a qui se paˆment encore, quand on leur parle des preˆtres de l’E´gypte, ou des Brames, ou des Mages : on dirait qu’en admirant ces pre´tendus sages, ils deviennent aussi sages qu’eux. Nous disons ceci de la partie niaise : car il y en a que nous n’accusons point de niaiserie. Ils vantent ce qui e´tait, parce que ce qui e´tait leur conviendrait fort : ce qui est, et surtout ce qui s’annonce, leur convient peu. On nous a reproche´ d’avoir pris pour point de de´part, l’e´tat sauvage, parce qu’il n’est point de´montre´, nous a-t-on dit, qu’il ait e´te´ le premier e´tat de l’homme. Nous avions reconnu avant nos adversaires, que l’origine de notre espe`ce e´tait enveloppe´e de te´ne`bres impossibles a` dissiper ; mais nous avions de´E´tablissement du texte : Manuscrit : BCU, Co 3455 Imprime´ : De la Religion, conside´re´e dans sa source, ses formes et ses de´veloppements, t. IV, Paris : Chez Pichon et Didier, e´diteurs, 1830, pp. [I]–IV. 14–26 modifications ... peu. On ] modifi- lacune dans le ms., perte du f o 2 de Co 3455 On

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IV

De la Religion, IV

clare´ que, voulant suivre l’intelligence dans ses progre`s, nous avions duˆ partir du point ou` ces progre`s avaient commence´. Que l’e´tat sauvage soit le premier, peu nous importe : l’homme y est tombe´. Toutes les nations indiquent une e´poque ou` cet e´tat fut le leur : cela nous suffit. On a pre´tendu que nous aurions duˆ prendre pour base une re´ve´lation universelle, la montrer se perdant par degre´s, et retrouver ses traces a` travers ses de´gradations et ses souillures. S’il y a eu une re´ve´lation universelle, elle a e´te´ successive, individuelle et toute inte´rieure. Nous veut-on plus orthodoxes ? La re´ve´lation borne´e a` un peuple est reste´e e´trange`re aux autres peuples. Ils se sont agite´s au milieu des erreurs de l’ignorance la plus e´paisse, des barbaries, des superstitions les plus fe´roces, ou les plus licencieuses ; a` Dieu ne plaise que nous cherchions des traces d’une re´ve´lation divine dans les sacrifices humains de Tyr, ou dans les de´bauches d’Ecbatane !

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Second avertissement

[V]

VI

Ces deux volumes devaient paraıˆtre a` la fin de juillet dernier. Les heureux e´ve´nements de cette e´poque en ont retarde´ la publication ; mais comme la totalite´ e´tait imprime´e, sauf la table analytique, rien n’a e´te´ change´, si ce n’est une note de cinq ou six lignes a` la page 193 du tome Ve1. Nos lecteurs ne doivent donc s’e´tonner ni de quelques expressions qui e´taient peut-eˆtre, il y a trois mois, un acte de courage et qui ne seraient aujourd’hui qu’un anachronisme, ni de quelques jugements un peu se´ve`res, sur des hommes qui, a` cette e´poque, demandaient nos teˆtes. Ils sont vaincus, mais autre chose est l’oubli des injures, autre chose l’estime ; et si nous nous imposons l’un comme un devoir, nous ne nous croyons point oblige´ a` feindre l’autre, quand nous ne l’e´prouvons pas.

E´tablissement du texte : Imprime´ : De la Religion, conside´re´e dans sa source, ses formes et ses de´veloppements, t. IV, Paris : Chez Pichon et Didier, e´diteurs, 1830, pp. [V]–VI.

1

Cette note concerne la Charte. Il existe des exemplaires de ce tome qui offrent la premie`re version de cette note. Voir OCBC, Œuvres, t. XXI.

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2. Page de titre fautive de la première édition de De la Religion, tome IV, Paris : Pichon et Didier, éditeurs, 1830. La correction manucrite de la tomaison a été faite par un bibliothécaire. Universitätsbibliothek Tübingen.

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De la Religion, conside´re´e dans sa source, ses formes et ses de´veloppements. Livre IX. Des religions sacerdotales compare´es au polythe´isme inde´pendant.

E´tablissement du texte : Imprime´ : De la Religion, conside´re´e dans sa source, ses formes et ses de´veloppements, t. IV, Paris : Chez Pichon et Didier, e´diteurs, 1830, p. [1].

1–5 De la ... de´veloppements. ] le titre manque. Ms-texte premier mot a la fonction d’un titre courant. Ms-texte

6 Livre IX. ] Texte. Livre IX le

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3. La première page du texte de l’édition originale de De la Religion, tome IV. Collection particulière.

[1]

Chapitre premier. Objet de ce Livre.

On a vu, dans le volume qui a pre´ce´de´ celui-ci, quelles notions l’intelligence humaine, livre´e a` ses propres forces et jouissant de toute sa liberte´, conc¸oit sur la figure et le caracte`re des dieux, sur la destine´e et sur l’autre vie. Nous allons rechercher maintenant comment ces notions se modifient sous l’empire des preˆtres.

E´tablissement du texte : Manuscrit : BCU, Co 3262/1, pp. 1–2 [=Ms-texte] Imprime´ : De la Religion, conside´re´e dans sa source, ses formes et ses de´veloppements, t. IV, Paris : Chez Pichon et Didier, e´diteurs, 1830, p. [1].

3 On a vu ] a` la hauteur de ces mots dans la col. de gauche deux vers de Lord Byron For me, I know, nought, nothing I deny, admit, reject, contemn, and what know you ? D. Juan Canto XIV. Ms-texte, le meˆme texte dans le Nouveau Repertory, premie`re note Co 3488

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Chapitre II. De la figure des dieux dans les religions sacerdotales.

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De la Religion, IV

La figure des dieux, dans ces religions, reste stationnaire. Les E´gyptiens, dit Syne´sius a, ne permettent ni aux ouvriers, ni aux sculpteurs, de repre´senter les dieux a` leur gre´, de peur qu’ils ne s’e´cartent de la forme rec¸ue. Les Gaulois, au rapport de Denys d’Halicarnasse b, n’avaient pu se re´soudre, durant une longue suite de sie`cles, a` l’innovation la plus le´ge`re, soit dans leurs rites, soit dans les images de leurs dieux. Le motif de cette prohibition est facile a` comprendre, et la pre´caution n’e´tait pas sans prudence. Si l’imagination avait pu s’exercer en liberte´ sur les formes divines, elle euˆt peut-eˆtre e´tendu bientoˆt son ingouvernable activite´ sur leurs qualite´s morales ou leurs attributs me´taphysiques ; et de la sorte, une alte´ration le´ge`re en apparence serait devenue la source fe´conde de a

b

De Providentia, page 731. Il ajoute que les preˆtres faisaient jurer a` leurs rois, en les consacrant, que, sous quelque pre´texte que ce fuˆt, ils n’introduiraient un usage e´tranger. Voyez aussi Platon (de Legib., II2). En E´gypte, observe un critique allemand, lorsqu’une fois les preˆtres avaient dessine´ la figure d’une divinite´, avec ses attributs, ou la repre´sentation d’une fable, dans toutes ses parties, les artistes travaillaient pendant des milliers d’anne´es d’apre`s ce mode`le, sans y changer le moindre de´tail, pas meˆme les attitudes des personnages, de manie`re que, jusqu’au temps des Ptole´me´es, on ne peut distinguer aucune e´poque de peinture, de sculpture ou d’architecture. DEN. D’HAL., livre VII3. E´tablissement du texte : Manuscrit : BCU, Co 3262/1, pp. 2–14 [=Ms-texte] et Co 3262/2, pp. 1–16 [=Ms-notes] Imprime´ : De la Religion, conside´re´e dans sa source, ses formes et ses de´veloppements, t. IV, Paris : Chez Pichon et Didier, e´diteurs, 1830, pp. 2–18.

5 a` leur gre´ ] manque Ms-texte 8 images ] repre´sentations Ms-texte 11 les formes divines ] la figure des Dieux Ms-texte 13 serait devenue ] aurait pu devenir Ms-texte 14–15 Il ajoute ... e´tranger. ] phrase ajoute´e dans la col. de gauche Ms-notes 15 un usage ] jamais aucun usage Ms-notes 1

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Synesius de´crit l’e´lection d’un roi (pharaon) e´gyptien dans la premie`re partie, chap. 6 et 7 ; dans les chapitres suivants (8 a` 11), on trouve les sages conseils des preˆtres et du pe`re d’Osiris, mais il n’y est pas question d’un serment de veiller a` la purete´ des anciens usages. Avec les mots «Voyez aussi», BC ajoute une seconde dimension a` ce qu’il nomme le «stationnaire» de l’art e´gyptien. Platon, dans son dialogue Νομοι, 656d–657a parle des conventions artistiques des E´gyptiens (musique, peinture) qui n’ont pas change´ pendant des milliers d’anne´es. Le critique allemand, auquel BC fait re´fe´rence, n’est pas identifie´. Voir Les antiquite´s romaines de Denys d’Halicarnasse, traduites en franc¸ois par Bellanger, Chaumont : Cousot, an VIII, t. IV, p. 387. Dans l’e´dition Jakoby, livre VII, chap. 70, al. 4 (Lipsæ : Teubner, 1891, t. III, p. 111 ; e´d. de Cary, t. VII, p. 359).

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Livre IX, chapitre II – De la figure des dieux

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modifications importantes et inde´finies. Il valait mieux, pour le sacerdoce, que cette imagination, asservie et dompte´e, se brisaˆt contre d’immuables simulacres. Ces dieux qui ne subissaient aucun changement, tandis que tout changeait autour d’eux, semblaient de´fier le temps par leurs dehors antiques. Monuments immobiles des aˆges e´coule´s, ils remplissaient l’ame de respect, en paraissant sortir des te´ne`bres d’une nuit profonde. En conse´quence, tandis que, dans le polythe´isme inde´pendant, l’anthropomorphisme remplace le fe´tichisme et en efface presque toutes les traces, ce fe´tichisme, conserve´ en sous-ordre dans les religions sacerdotales, se prolonge jusqu’au milieu de la civilisation a. Partout ou` le sacerdoce est l’autorite´ supreˆme, l’embellissement des formes divines est repousse´ comme un sacrile´ge. Les piques et les troncs d’arbres b adore´s dans les Gaules ne prirent a` aucune e´poque des contours plus e´le´gants ; et lors meˆme que les Gaulois se fu rent familiarise´s avec un luxe barbare, ces monuments a

b

Starro, dieu que les Frisons invoquaient contre les inondations et les tempeˆtes, n’e´tait qu’un morceau de bois (SULZER, page 2911). Le dieu de l’air, chez les Mexicains, Quetzalcotle, e´tait un serpent couvert de plumes vertes2. Le Mercure de Phe´nicie, un poisson a` la teˆte de sanglier, surmonte´e d’une couronne (PROCLUS, in Tim. Firm., l. II, c. 73). Dagon avait la meˆme forme, et Jupiter celle d’un e´pervier. Les Teusar-poulat, fe´tiches de la Bretagne paı¨enne, e´taient des ge´nies sous forme de vaches, de chiens ou d’autres animaux domestiques (CAMBRY, I, 724). Simulachraque mœsta Deorum Arte carent, cæsisque exstant informia truncis. Phars. III. Et robora numinis instar Barbarici. CLAUD. Laud. Stilic. I. 1285.

15–16 Starro ... 291 ] cette premie`re phrase de la note ajoute´e dans la col. de gauche Ms-texte 1

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Un dieu de ce nom n’est pas atteste´ pour les religions scandinaves. Le renvoi a` Sulzer, Allgemeine Theorie der schönen Künste (Leipzig : Verlag der Dykischen Buchhandlung, 1800, 4 vols.) n’est pas juste, les articles des pages en question parlent d’autres sujets. La source de cette information sur Quetzalcoatl est probablement Clavigero, Geschichte von Mexico, qui parle du dieu azte`que du vent, du ciel et de la terre (t. I, pp. 350–354 et 371). On le repre´sente sous la forme d’un grand serpent, couvert des plumes de l’oiseau quetzal. Les renvois a` Proclus, Commentarii in Platonis Timæum et a` Firmicus Maternus, Matheseos libri VIII ainsi que les indications sur le Mercure phe´nicien sont copie´s chez Görres, Mythengeschichte, t. I, p. 295 (e´d. de 1935, p. 145). Görres explique lui-meˆme dans une note (p. 283, e´d. de 1935, p. 140, n. 1) que son tableau astrologique exploite l’e´crit de Firmicus. Voir ci-dessous, p. 89–90, n. 1. Voir Jacques Cambry, Voyage dans le Finiste`re, ou e´tat de ce de´partement en 1794 et 1795, Paris : de l’imprimerie du Cercle Social, an VII (1798), t. I, p. 72 : «Le Teusarpouliet [c’est le nom d’un ge´nie breton] se pre´sente sous la forme d’un chien, d’une vache, ou d’un autre animal domestique», dit Cambry en parlant des cantons autour de Morlaix. Deux passages sur des simulacres sans forme ve´ne´re´s par les Gaulois ou les Germains. Le premier est tire´ de la description du bois sacre´ des Gaulois de Lucain, La Pharsale (De bello civili, liv. III, vv. 412–413) ; le second de Claudius Claudianus, De laudibus Stiliconis libri tres, liv. I, vv. 229–230 (le renvoi de BC est faux ; voir ci-dessous, p. 537, n. 3).

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antiques excite`rent toujours plus de ve´ne´ration que les statues d’or a, qui s’e´leve`rent a` coˆte´ d’eux. Les preˆtres, d’ailleurs, re´pugnent a` donner aux dieux la figure humaine1. Ils tendent toujours a` mettre entre les adorateurs et les idoles une distance plus grande. Ce que nous avons dit b du myste`re qui re´side dans les ani- maux les rend plus propres a` inspirer des terreurs religieuses que ne le seraient des eˆtres pareils a` nous. Les E´gyptiens, qui ont e´leve´ des temples a` presque toutes les cre´atures vivantes, n’ont jamais place´ l’homme parmi leurs divinite´s c ; et les e´cria

b c

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Ces statues d’or existaient avant Ce´sar. (POLYB. II, 32). On l’accusa, non sans vraisemblance, d’en avoir enleve´ plusieurs et d’avoir se´duit ses concitoyens avec l’or de la Gaule (SUET. Cæs., 542). Liv. II, ch. 2, p. 156, seconde e´dition3. Deux passages, l’un de Porphyre (de Abstin. IV, 94), l’autre d’Euse`be (Præp. ev. III, 4–125), semblent contredire cette assertion : mais en premier lieu ces auteurs restreignent l’adoration de l’homme a` une seule ville nomme´e Anabin ; en second lieu, ils sont d’une e´poque qui donne peu de valeur a` leur te´moignage. Les preˆtres d’E´ gypte, suivant HE´ RODOTE (II, 142), niaient toute apparition des dieux sous une forme humaine, durant les 340

1 d’or ] dore´es Ms-texte 3-p. 82.4 Les preˆtres ... difformite´s ; ] la re´daction de´finitive est esquisse´e dans la col. de gauche a` coˆte´ du texte pre´ce´dent les Preˆtres – de l’esprit humain. Ce qu’il y a – humaine.( ) les Preˆtres finissent donc par en reve´tir leurs divinite´s : mais ils rappellent 〈toujours〉 dans leurs ce´re´monies – difformite´s. faire la note. Ms-texte 3 re´pugnent ] n’aiment point Ms-texte 4 Ils tendent ] a` la hauteur de ces mots, e´bauche d’une note (?) 〈on trouve dans le Rigveda un passage qui trahit peut-eˆtre la repugnance du sacerdoce pour la forme hu〉 Ms-texte 4–5 les adorateurs ... plus grande. ] l’essence divine & la nature de l’homme une distance incommensurable & ne veulent pas qu’elle puisse eˆtre franchie. Ms-texte 15–16 restreignent ... seule ville ] citent l’adoration de l’homme comme particulie`re a` une seule ville Ms-notes 16-p. 81.6 e´poque ... singe ] epoque beaucoup trop re´cente pour que leur te´moignage ait une grande autorite´ : enfin il est tre`s probable que la divinite´ d’Anabin n’e´toit pas un homme mais un singe Ms-notes 17-p. 81.6 Les preˆtres ... par eux meˆmes. ] phrase de´place´e par BC ; la premie`re version se lit a` la fin de la note Les preˆtres ... 142.) disoient que durant les 11 340 anne´es formant les 340 ge´ne´rations du re`gne des Pironis, ou gouvernement sacerdotal, ni avant cette e´poque, lorsque les Dieux gouvernoient eux meˆmes, aucun n’avoit pris la forme humaine, pour se manifester aux mortels. Ms-notes 1 2

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La variante montre que BC pensait ajouter ici une note qui n’a pas e´te´ re´dige´e. Le renvoi a` Polybe est proble´matique. Il n’y est pas question de statues d’or, mais d’insignes d’or des Insubres. Ils les ont appele´s les «immobiles» et les ont conserve´s dans le temple d’Athena. Le renvoi a` Sue´tone, De vita Cæsarum, concerne le texte consacre´ a` Jules Ce´sar : «In Gallia fana templaque deum donis referta expilavit, urbes diruit sæpius ob prædam quam ob delictum ; unde factum, ut auro abundaret ternisque milibus nummum in libras promercale per Italiam provinciasque divenderet» (§ 54). Voir OCBC, Œuvres, t. XVII, pp. 222–229. Porphyre, De abstinentia ab esu animalium libri quatuor, livre IV, § 9, p. 325 : «Post hæc animalia omnia, immo etiam hominem in Anabe uico colunt, ubi ei quoque sacrificia offerentur, & in aris uictimæ concremantur. Non igitur paulo post ea comederent, quæ eodem in honore quo homo, habentur. Sicut enim ab homine, ita ab aliis quoque abstinentum est.» Le renvoi a` Euse`be sugge`re l’ide´e que BC copie cette re´fe´rence, comme celle a` l’ouvrage de

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vains grecs, qui nous ont parle´ des hommes de´ifie´s chez les Scythes, sont tombe´s dans une erreur maintenant bien connue a. Ne´anmoins le sacerdoce ce`de toˆt ou tard a` l’impulsion naturelle de l’esprit humain. Ce qu’il y a de plus parfait aux yeux de l’homme, c’est la

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ge´ne´rations des Piromis, lorsque les dieux gouvernaient cet univers imme´diatement et par eux-meˆmes1. L’idole d’Anabin n’e´tait probablement pas un homme, mais un singe de l’espe`ce des cynoce´phales. (PAW, Rech. sur les E´gypt. et les Chinois, I2.) L’immortalite´ chez les Scythes e´tait le privile´ge de ceux qui mouraient de mort violente ou qui pe´rissaient sur les autels. Ils e´taient conside´re´s comme des messagers envoye´s aux dieux. Les Grecs imbus de leurs ide´es d’apothe´oses virent dans ces victimes des he´ros de´ifie´s. C’est ainsi que Lucien dit de Zamolxis, qu’il devint un dieu apre`s avoir e´te´ un esclave, ce qui signifiait simplement que cet esclave avait e´te´ immole´. Voy. HE´ RODOTE, IV, 94–953.

1 ont ] mot omis par inadvertance Ms-texte 8–13 L’immortalite´ ... 95. ] l’e´bauche ste´nographie´e de la version imprime´e de cette note se trouve dans le ms. dans la col. de gauche, a` coˆte´ de la premie`re version L’imm. chez les Scyth. e´tt. le priv. de ceux qui mouroient de mort violente, ou qui e´toient immole´s sur les autels. Ils e´t. csdere´s come des Mess. env. aux Dx pr leur port. les prier. des hommes. les Grecs, imb. de leur ide´es d’ap. vir. ds ces vict. des heros elev. au rang des Dx. c’est ainsi q Luc. dt de Z q les Ge`tes fir. un D. de qui n’avt e´te´ qu un escl. ¯ t e´te´ sacrif. la¯ premie`re version de la note e´tait conc¸ue ainsi ce qui signif simpl. q cet escl. av ¯ M. Pelloutier indique tre`s bien la cause de cette erreur, (Hist. des Celtes, III. 14.) Les Scythes donnoient l’immortalite´, c’e´toit l’expression consacre´e chez eux, a` ceux qui mouroient de mort violente, ainsi qu’a` ceux qu’ils sacrifiaient. Or, donner l’immortalite´, qui dans leur langue, ne signifioit qu’envoyer aupre`s des Dieux des victimes qu’ils conside´roient comme leurs messagers, signifioit, dans l’esprit des Grecs, e´lever aux honneurs divins. Ainsi, quand Lucien dit que les Scythes & les Ge`tes donnent l’immortalite´ a` qui il leur plait, & mettent au rang des Dieux qui ils veulent, de la meˆme manie`re qu ils y ont place´ Zamolxis qui n’e´toit qu’un esclave le sens historique de ce passage est simplement que Zamolxis fut sacrifie´. (Herod. IV. 94–95.) Ms-notes

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Porphyre, dans un ouvrage non identifie´. Les renvois de´signent de la Præparatio evangelica, le livre III, chap. 4, 10 et chap. 12, 5. Dans les deux cas, Euse`be cite Porphyre, d’abord De abstinentia, puis De cultu simulacrorum. Le nom du village est sans doute de´forme´. BC renvoie en fait a` deux chapitres d’He´rodote (II, 142–143), qu’il re´sume en simplifiant ses arguments. Il faut savoir que le mot «Piramis» du texte d’He´rodote est un mot e´gyptien pour de´signer l’homme, en particulier un homme qui se distingue par l’excellence de son noble caracte`re, comme celui-ci l’explique en traduisant le mot d’emprunt. L’allusion a` de Pauw vise sans doute un passage du premier volume des Recherches sur les Egyptiens et les Chinois qui pre´cise, en parlant des lois qui de´fendent de manger les «animaux quadromanes», que les singes, «auxquels on rendoit un culte a` Babylon pre`s de Memphis, a` Hermapolis & dans une ville anonyme de la The´baı¨de [...] ont donne´ lieu a` l’erreur de Porphyre, qui pre´tend que les Egyptiens avoient un temple particulier ou` ils adoraient un homme vivant» (e´d. Amsterdam & Leyde : Barth. Vlam & J. Murray, 1773, pp. 142–143). Dans le second tome de Pauw revient a` cette affaire (t. II, p. 133 ; dans l’e´dition de Londres, 1774, p. 154). Anabin : voir ci-dessus, p. 80, n. 4. He´rodote raconte au livre IV, chap. 94–95, l’histoire de Salmoxis, Esclave de Pythagoras, puis libe´re´ et devenu riche, il est retourne´ dans son pays, la Thrace. Il y de´veloppe une doctrine de l’immortalite´ qu’il sait imposer a` ses convives en vivant plusieurs anne´es cache´, comme s’il e´tait mort. Lorsqu’il se montre a` nouveau, on adopte sa doctrine et on le ve´ne`re

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forme humaine a : les preˆtres finis sent par en reveˆtir leurs divinite´s b ; mais ils se plaisent a` rappeler dans leurs ce´re´monies les vestiges de temps ante´rieurs c. Leurs dieux conservent toujours quelques restes de leurs anciennes difformite´s d ; et des alle´go ries ou des fables expliquent ces monstrua

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Cette pre´fe´rence de l’homme pour sa propre forme est constate´e par toutes les mythologies. Dieu fit l’homme a` son image (Gene`se). Os homini sublime dedit. OVIDE1. «Les divinite´s qui s’agitaient au sein de l’Oce´an supplie`rent le cre´ateur de leur accorder une forme. Il leur montra celle du cheval, de la vache, de tous les animaux successivement : elles n’en furent pas satisfaites. Enfin il leur pre´senta celle de l’homme, et toutes aussitoˆt parurent contentes.» (Rigveda2.) Nous avons de´ja remarque´ que la forme humaine est l’attribut des dernie`res incarnations de Wichnou3. La meˆme progression nous frappe en Syrie. Derceto est d’abord moitie´ poisson, moitie´ femme. Bientoˆt elle est femme de la teˆte aux pieds. Nous verrons sa figure se compliquer de nouveau, lors de la confusion des deux polythe´ismes4. Il a e´te´ dit plus haut que les preˆtres e´gyptiens s’adaptaient dans leurs feˆtes des teˆtes de loups, de chiens, d’e´perviers, et que les Mages, dans leurs myste`res, reveˆtus de peaux d’ours, de lions et de tigres, prenaient le nom de ces animaux5. Erlik-Khan, dans la mythologie Lamaı¨que (PALLAS, Mongol. Vœlkersch., II, 546) ; Vitzli–

4 des alle´gories ] a` la hauteur de ces mots commence une longue note de travail dont on retrouvera des phrases dans les notes de BC figures des Dieux, chez les nations sacerdotales. Pouleyar, Dubois II. 421–422. Brama avec 5 teˆtes. ib. 396. Ganeza une teˆte d’e´le´phant. sa me`re est le fille de montagne Himalaya. As. Res. III. 40. revoir sur la figure des Dieux un passage de Guigniaud. «l’image de la divinite´ – le sens en e´tait saint & sacre´. Introd. 72 – 74 – 76. Dschaeschick, dans la religion Lamaı¨que, est repre´sente´ avec une foule de teˆtes l’un sur l’autre

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comme un dieu. Lucien, qui connaissait e´videmment la fable d’He´rodote, parle de Salmoxis a` sa manie`re (L’assemble´e des dieux, LXXIV, 9). L’exe´ge`se de BC n’est peut-eˆtre pas justifie´e par les sources qu’il cite. Ovide, Me´tamorphoses, livre I, vers 85. BC paraphrase un passage qu’il attribue a` tort au Rig-Veda. Il l’a trouve´ dans l’e´tude de Henry Thomas Colebrooke, «On the Vedas, or Sacred Writings of the Hindus», Asiatic Researches, t. VIII, London : Vernor et al., 1808, pp. 377–497, et plus particulie`rement p. 422 (e´dition de Calcutta, 1805, pp. 369–476). Colebrooke traduit un passage de la Aitareya-upanisad (Aranyaka II, adhyaya I, khanda 2, mantra 1–3). Il s’agit d’un texte rituel. Le Aitareya ˙A’ranyaka est une Upanishad attache´e au Rig-Veda. ˙ Voir le livre VI, chap. VII (OCBC, Œuvres, t. XIX) ou ` il est question des diffe´rentes incarnations de Wichnou. BC simplifie. Derceto, la Dea Syria des helle´nistes, est d’abord une de´esse ve´ne´re´e a` Baalbek. La le´gende e´tiologique lui attribue plus tard la forme d’un poisson, signe de la puissance ge´ne´ratrice. Elle peut eˆtre repre´sente´e sans queue de poisson, selon les lieux du culte. Le syncre´tisme des cultes produit des identifications avec d’autres divinite´s (Astarte´, Se´miramis, Cybe`le), de sorte qu’elle finit par eˆtre accepte´e dans tout l’empire romain. Voir OCBC, Œuvres, t. XIX, pp. 265–266. BC renvoie a` la premie`re partie de l’ouvrage de Pallas, chap. VII «Von den Orten der Verdamniß und den Höllenstrafen» (t. II, pp. 53–60), et plus particulie`rement a` la description d’Erlik-Khan, roi du re`gne des Birid, peuple de monstres (pp. 53–54). Voir aussi les planches VIII et IX ou` l’on trouve reproduits deux simulacres de ce dieu des enfers.

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osite´s opiniaˆtres. Schiven, ayant, dans un acce`s de courroux, comme nous Putzli chez les Mexicains (CLAVIGERO, liv. I1), sont un compose´ de l’homme et de l’animal ; l’Astarte´ phe´nicienne avait des cornes de taureau ; Saturne une teˆte de singe et une queue de sanglier ; Prithivi qui, aux Indes, pre´side a` l’agriculture, reprend souvent la forme d’une vache. Le soleil chez les Chalde´ens e´tait un homme a` deux teˆtes avec une queue. (BEYER AD SELDEN, 2572.) L’Oanne`s des Phe´niciens e´tait un poisson avec deux pieds d’homme et une voix humaine. (HELLAD. ap. Phot., SELDEN de diis syris, III3.) Des enfants de Schiven, l’un est un e´le´phant, un autre un singe. Le Mithras des Perses a une teˆte de lion (LUCTATIUS, in STATII Theb. I, 7154), Anubis de chien, Typhon de crocodile, voy. sur ce dieu les recherches de M. Champollion.5 Ganeza, petit-fils de l’Himalaya, cette montagne si ce´le`bre dans la ge´ographie, la mythologie et l’histoire indienne (As. Res., III, 406), a une teˆte d’e´le´phant comme Poule´ar. (DUBOIS, II, 421–4227.) Le Gange est, comme Derceto (voy. ci.dessus, p. 7, note 28), moitie´ femme et moitie´ poisson. Les singes demi-dieux, allie´s de Rama, sont tantoˆt de purs animaux, tantoˆt un me´lange de la beˆte et de l’homme. (GUIGN., 202 et 719–7259.)

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(suite des variantes de la page pre´ce´dente) & 8 bras. Pallas, Samml. hist. Nachr. ueb. de mongol. Voelkersch. Mayer Art. Dschaeschick. fohi. art. fohi. la De´esse Ganga, 1/2 femme, 1/2 poisson. art. Ganga10. Astarte, d’abord femme & poisson, parvient a` une forme entie`rement humaine avec une foule d’attributs. Creutz. II. 62–63. Astarte´ avec la peau de taureau sur la teˆte, de´signant la lune. Dupuis III. Creutz. II. 106. Cartikeya ou Scanda, Dieu de la guerre a six bras. Schleg. W. d. Ind. 123. Bhavani a 8 ou 6 Bras, Agni le Dieu du feu en an 4 ; son double visage rappelle Janus, & ses 3 jambes lui donnent une de´marche ine´gale, qui implique quelqu’analogie avec le Phthas des Egyptiens ou l’ephaistos des Grecs. Le Mithras des Perses a souvent une teˆte de lion. Lactatius in Statii Thebaı¨d. I. 715. Anubis a` teˆte de chien, Typhon peut eˆtre a` teˆte de crocodile. v. sur ce Dieu les recherches de M Champollion. Hanouman & Sougriva, tantot demi hommes & demi animaux, tantot animaux seulement. Guign. 202. chez les Perses. Guign. 719–725. Ms-texte 16 polythe´ismes. ] polythe´ismes, & du triomphe de la tendance vers l’unite´. Ms-notes 2 sont un compose´ ... animal ; ] ont 1-p. 84.1 comme ... livre 6e, ] manque dans Ms-texte des figures me´lange´s de l’homme ... animal. Le Dieu de l’air chez le meˆme peuple Quettalcocle, e´toit un serpent couvert de plumes vertes. Ms-notes 4 sanglier ; ] re´daction diffe´rente de la note sanglier, mercure, le corps d’un poisson, une teˆte de pourceau, avec une couronne un bras noir, l’autre blanc. (Procl. in Tim. Firmic. Liv. II. c. 7.) 〈Dagon a presque la meˆme forme et Jupiter est un e´pervier.〉 Toutes ces divinite´ sont aile´es. 〈Tage`s, l’auteur des livres ache´rontiques, (v. ci-dess. Vol. I p. 16) e´toit un Dieu nain, (Serv. ad Æneid. Amm. Marcell. XXI. 1. XXVII. 10. Isidor. Orig. VIII. 8) comme le Vulcain de Memphis qu’He´rodote compare aux Cabires (He´rod. II. 37.) Herilus, fils de Feronia, la Proserpine des Sabins, avoit un triple corps. (Serv. ad Æn. VIII. 564)〉 Dix monstres figurent les dix e´toiles qu’adorent les Cingale´ses. (Knox, p. 76.) Ms-notes 4–15 Prithivi ... 725.) ] manque dans la note telle qu’elle apparaıˆt dans Ms-notes 4–5 Prithivi ... vache. ] l’e´bauche de cette phrase se trouve dans le ms. a` coˆte´ de la note a (ci-dessous, p. 86) Traces de fe´tichisme dans la figure des Dieux. Prithivi, tantot vache & tantot De´esse sous forme humaine pre´sidant a` l’agriculture. Guign. 250. Ms-notes 5 Beyer ] la source porte Beger faute de copie de BC que nous corrigeons 1

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BC cite probablement la traduction allemande de l’ouvrage de Francisco Javier Clavijero, Geschichte von Mexico aus spanischen und mexicanischen Geschichtsschreibern, Handschriften und Gemälden der Indianer zusammengetragen, Leipzig : im Schwickertschen Verlage, 1789. Le passage auquel il pense se lit p. 358. Nous ne savons pas d’ou` BC tire cette re´fe´rence incorrecte. Le fait qu’il cite les supple´-

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l’avons vu au chapitre 5 du livre 6e1, coupe´ la teˆte a` Dachsa, son beau-pe`re, consentit, quand la paix fut conclue, a` le rendre a` la vie ; mais la teˆte tranche´e pendant le combat e´tait tombe´e dans le feu : une teˆte de bouc lui

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(suite des notes de la page pre´ce´dente) ments de Beyer prouve qu’il n’a pas utilise´ l’e´dition monumentale des œuvres de Selden (Joannis Seldeni Jurisconsulti Opera omnia tam edita quam inedita, vol. II, Londini : Impensis J. Walthoe, G. Conyers [...], MDCCXXVI), qui contient l’ouvrage De diis syris, mais pas les supple´ments de Beyer. La re´fe´rence a` Helladius apud Photius provient de Creuzer, Symbolik, t. II, p. 68, note 117, qui renvoie a` la p. 874 de l’e´dition qu’il utilise. Helladios, rhe´teur et grammairien atteste´ a` la fin du IVe sie`cle apre`s J.-C., est l’auteur d’un lexique perdu, exploite´ par Photios (vers 820–891), patriarche de Constantinople et auteur du Myriobiblon, dans lequel il parle d’ouvrages d’auteurs de l’Antiquite´ et byzantins, aujourd’hui souvent perdus. – BC mentionne e´galement, comme Creuzer a` la fin de sa note, un passage de l’ouvrage de Selden, De Diis Syris, ou` l’on lit ceci : «Oannes enim memoratur, biceps animal, cætera Piscis, e` cujus cauda ad nascebantur pedes humanis similes. Vox ei humana item ; ex mari autem Erythræo emersum Babyloniam pervenisse ajunt» (Syntagma II, cap. III, p. 189). Il faut lire Lactantius. BC copie cette note chez Creuzer, comme il ressort de la faute dans le nom de l’auteur, faute que Creuzer ne corrige dans aucune des e´ditions de son ouvrage. Creuzer compose, en se servant du commentaire de Placidus Lactatius sur les derniers vers du livre premier de la The´baide qu’on trouve dans une ancienne e´dition de Statius : «Et hic Sol proprio nomine vocatur Mithra, quique eclipsum patitur, ideoque intra antrum colitur. Est enim in spelæo Persico habitu, leonis vultu cum tiara utrisque manibus bovis cornua comprimens» (Mythologie, e´d. de 1819, t. I, p. 784, n. 154). Ce Placidus Lactantius, un auteur du Ve sie`cle (?) et commentateur de la The´baide de Statius (a` ne pas confondre avec le the´ologien L. Cælius Firmianus Lactantius, IVe sie`cle), est encore mal connu puisqu’on ne posse`de pas d’e´dition critique. Creuzer a pu lire le texte dans l’e´dition de Statius qui se trouve dans un incunable de 1483. BC copie la note sans controˆler le texte de Creuzer. BC renvoie probablement a` l’ouvrage de Champollion, L’E´gypte sous les pharaons, ou recherches sur la Ge´ographie, la Religion, la Langue, les E´critures et l’Histoire de l’E´gypte avant l’invasion de Cambyse, Paris : de Bure fre`res, 1814, 2 vol., en particulier au chap. «Aouaris ou He´roˆopolis», t. II, pp. 87–92. Il n’y est pas question du crocodile. BC cite l’article d’Alexander Macleod, «A Royal Grant of Land in Carnata, communicated by Alexander Macleod, Esq., and translated from the Sanscrit by the President», Asiatick ` la p. indique´e, on trouve le Researches, London : Vernor et al., t. III, 51807, pp. 39–53. A texte de la source hindoue et une explication savante de l’e´diteur que BC adopte pour son raisonnement. BC cite l’ouvrage de Dubois, Mœurs, institutions et ce´re´monies des peuples de l’Inde et renvoie au passage relatif au dieu Gane´sa ou Poulle´yar du chap. V de la troisie`me partie qui re´sume l’histoire de ce dieu. Voir ci-dessus, p. 82, n. b. BC cite le premier volume de la traduction franc¸aise de l’ouvrage de Creuzer par Guigniaut (Religions de l’antiquite´). Dans le livre I (Religion de l’Inde), chap. III (Premie`re ide´e de la cosmogonie, etc.), p. 202, on trouve : «On les [= Sri-Rama et Sita, sa femme] voit presque toujours environne´s de leurs adorateurs ou de leurs guerriers, Lakchmana, les princes des singes, les singes eux-meˆmes, entre lesquels se distinguent facilement a` leurs couronnes, Sougriva et Hanouman, tantoˆt demi-hommes et demi-animaux, tantoˆt animaux seulement.» – Le renvoi aux pp. 719–725 est motive´ par les descriptions des chime`res de la tradition du Zendavesta. BC cite plusieurs articles du Mythologisches Lexicon de Majer, a` savoir : «Dschaeschick», t. I, pp. 518–527 ; «Fohi», t. II, pp. 115–119 ; «Ganga», t. II, pp. 165–170. OCBC, Œuvres, t. XIX, p. 198.

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fut substitue´e a, et Dachsa ressuscita ainsi de´figure´. De meˆme pour expliquer la figure de la de´esse Ganga b, moitie´ femme, moitie´ poisson, les Brames racontent que Schiven a me´tamorphose´ de la sorte un immense de´luge, ne´ de la sueur de son front, et l’a place´ sur sa teˆte de peur qu’il ne submergeaˆt le monde c. Le sacerdoce proteste donc toujours contre l’attria

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As. Res., VI, 476–4771. L’auteur du journal le Catholique, qui arrange a` sa guise ce qu’il a compile´ sur l’Inde, voit dans cette fable la re´miniscence d’une lutte entre les deux cultes. Dachsa, dit-il, pontife de Brama, fut e´gorge´ par Siva. Il y eut ensuite re´conciliation, etc., XXIV, 294. Cette hypothe`se est aussi fausse et aussi absurde que celle de Sainte-Croix sur les guerres religieuses entre les Grecs et les colonies. Il y a eu, sans doute, abolition du culte de Brama et proscription des Bramines, a` une e´poque et avec des circonstances que nous ignorons : mais travestir en e´ve´nements historiques et de´taille´s de pures fables, survivant au fe´tichisme et reveˆtues ensuite d’un sens myste´rieux, est une te´me´rite´ de critique que rien n’autorise. Dachsa, a` forme de bouc, avait e´te´ un fe´tiche ; Dachsa, beau-pe`re de Schiven, fut un dieu populaire ; Dachsa, s’abıˆmant dans le grand tout, finit par eˆtre un symbole panthe´iste. Le Gange. Voy. pour d’autres fables indiennes qui doivent leur origine a` la meˆme cause, Hamilton’s new account of the East-Ind., I, 268–277 ; SONNERAT, I, 153–154 ; KÆMPF., Hist. du Japon, trad. allem., II, 3103.

1–5 et Dachsa ... monde. ] manque dans Ms-texte 5 Le sacerdoce ] Ainsi le sacerdoce Mstexte 6–16 L’auteur ... panthe´iste. ] une note de travail qu’on lit dans la col. de gauche a` coˆte´ du texte de la note b (ci-dessus, pp. 87–88) pre´pare la pole´mique contre d’Eckstein rechercher si nous avons conserve´ le passage ou nous disions que les preˆtres inventoient des fables, pour expliquer les restes de fe´tichisme dans la figure des Dieux & ou` nous citions la fable de Dachsa. d’Eckstein voit dans cette fable la re´miniscence d’une lutte entre 2 cultes. Dachsa, dit-il, pontife de Brama fut e´gorge´ par Siva. il y eut ensuite reconciliation. &ca. d’Eckst. XXIV. 2942. hypothe`se aussi pue´rile que celle de Ste Croix. la version imprime´e qui en re´sulte remplace ce qu’il y avait dans le ms. meˆme pour expliquer la figure de la De´ese Ganga, (le Gange) moitie´ femme & moitie´ poisson, les brames racontent que Schiven a me´tamorphose´ de la sorte un de´luge, ne´ de la sueur de son front, & l’a place´ sur sa teˆte pour qu’il ne submergeaˆt pas le monde. suit maintenant pour terminer la note le texte de la note c, ci-dessus, lignes 18–20 Ms-notes 1 2

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BC renvoie a` Francis Wilford, «On Mount Caucasus», Asiatic Researches, t. VI, London : Sewell, Cornhill, Vernor et al., 1801, pp. 455–536, et plus particulie`rement pp. 475–477. La pole´mique contre Eckstein attaque les the`ses que celui-ci expose dans une se´rie de dix articles publie´s dans les t. XIII – XVI du Catholique entre janvier et de´cembre 1829 (nos 37 a` 48), «Du Siva Pourana». Le chapitre «De la guerre souleve´e entre Shiva et Dakscha, pontife de Brama» se trouve dans le cahier 38, pp. 216–229 (le renvoi de BC est faux). – L’allusion a` l’hypothe`se e´mise par Sainte-Croix vise les Recherches historiques et critiques sur les myste`res du paganisme, e´d. par Silvestre de Sacy (Paris : De Bure, 1817, t. I, pp. 17–28). Le renvoi a` l’ouvrage d’Alexander Hamilton, A New Account of the East Indies, Being Observations and Remarks of Capt. A. H., Edinburgh : John Mosman, MDCCXXVII, t. I, p. 272, vise probablement la le´gende de Gunnies, fils de Ram, qui renaıˆt avec une teˆte d’e´le´phant. Les autres pages de´crivent un service religieux, mais ne parlent pas d’une fable. – Le renvoi a` Sonnerat se rapporte a` l’e´dition allemande (Reise nach Ostindien und China, auf Befehl des Königs unternommen vom Jahr 1774 bis 1781, von Herren Sonnerat, [...] Zürich : Orell, Geßner, Füßli und Kompagnie, 1783, 2 vol.) ; il cite un passage tire´ du

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bution de la forme humaine aux dieux dont il dirige le culte. Dans les religions qu’il domine, cette forme n’est qu’un accessoire ; la signification myste´rieuse est l’ide´e essentielle. C’est le contraire dans les religions inde´pendantes a. a

Quand les dieux cessent d’avoir des figures d’animaux, on en voit a` leur suite ou leur servant de monture. Lorsque l’adoration des lances tomba en de´sue´tude chez les peuples du Nord, les dieux furent repre´sente´s une lance a` la main. Aux Indes, Schiven est monte´ sur un taureau, Brama sur un cygne (PAULIN, Syst. Bram. SONNERAT, I1), Cama, l’amour, sur un e´le´phant (COLEBROOKE, As. Res., IV, 4152). Dans les deux cas, la figure du dieu devient ou son symbole (MONTFAUC., Ant. expl., I, 223) ou l’un de ses attributs. Les Indiens de nos jours sont encore si imbus de ces ide´es, que voyant quelques saints du christianisme accompagne´s d’un animal, ils attribuent a` ces saints, comme a` leurs propres dieux, des transformations miraculeuses4.

8–9 Cama ... 415). ] manque dans Ms-notes a` cet endroit ; on trouve pourtant, a` coˆte´ du texte de la note b (ci-dessous, pp. 87–88) dans la col. de gauche, l’e´bauche de cette phrase ainsi qu’une phrase sur Ganeza Cama, l’amour, est monte´ sur un e´le´phant. Ganesa, le dieu de la sagesse a une teˆte d’e´le´phant & un corps d’homme. As. Res. IV. 415. Colebrooke. Ms-notes 11 si ] tellement Ms-notes

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second livre, consacre´ a` la religion et a` la mythologie des Indiens ; le texte concerne les fils de Schiven, ne´s de son haleine ou de sa sueur (pp. 153–155). – BC renvoie enfin a` la description et a` l’histoire du Japon d’Engelbert Kaempfer, mais le contexte ne justifie gue`re de mentionner ici cet ouvrage. Nous avons consulte´ l’e´dition de Lemgo : Meyersche Buchhandlung, 1777–1779 ; a` la page cite´e par BC, on trouve la description d’une divinite´ japonaise a` 33333 teˆtes qu’on ve´ne`re dans le temple San Man de Nagasaki. Cette divinite´ n’est pas indienne. BC ne semble pas savoir que le texte auquel il renvoie n’est nullement une traduction allemande, mais l’e´dition originale du grand ouvrage de Kaempfer (1651– 1716) qu’on a surnomme´ l’Alexander von Humboldt du Japon. Voir Paulinus a Sancto Bartolomæo, Systema Brahmanicum liturgicum mythologicum civile ex monumentis indicis Musei Borgiani Velitris dissertationibus historico-criticis illustravit Fr. Paulinus a s. Bartholomæo [...], Romæ : apud Antonium Fulgonium, 1791, p. 86 : «Ita pleraque Shivæ dei simulacra in Indiis bove vehuntur». – BC renvoie ensuite au livre II de l’ouvrage de Sonnerat, au chap. sur Brouma, ou` l’on trouve : «il [Brouma] prit la figure d’un oiseau nomme´ ‘Annon’», mot qui est explique´ en note par «Espe`ce de cygne ; c’est la monture de Brouma» (Voyage aux Indes, e´d. cite´e, t. I, p. 268). L’e´dition allemande parle dans le second livre de Schiven monte´ sur un taureau (t. I, p. 155), et de Bruma, monte´ sur l’oiseau ‘Annon’ (t. I, p. 130). BC se trompe. Il s’agit de l’article de l’astronome John Goldingham, «Some Account of the Cave in the Island of Elephanta», Asiatic Researches, t. IV, London : Vernor et al., 1799, pp. 409–417, plus particulie`rement p. 416 : «The beautiful figure on the elephant is, I imagine, Cama, or the Hindu God of Love.» BC cite Bernard de Montfaucon, peut-eˆtre de seconde main. Si le chiffre 22 de´signe une ` l’endroit indique´, il n’est pas question des page du premier tome, le renvoi est faux. A attributs d’une divinite´ qui deviennent son symbole. On pourrait citer la description des repre´sentations de Cybe`le ou` Montfaucon parle des variations des images ou statues de la de´esse et montre sur les planches attache´es a` ce chapitre les attributs varie´s qui, dans quelques cas, symbolisent la divinite´ (t. I, livre premier, pp. 3–18). Le renvoi pourrait de´signer la planche XXII qui donne des repre´sentations de Junon, et dans le commentaire de

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Cette lutte constante du sacerdoce imprime a` la figure des dieux une quadruple empreinte. L’ancien fe´tichisme y contribue de ses vestiges qui sont consacre´s a. L’esprit symbolique, plus raffine´, exprime les qualite´s divines par des images qui les indiquent b. Viennent ensuite les alle´gories scientifiques, a b

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Voyez t. III, page 3241. Porphyre, d’apre`s Bardesanes (de Styge, ap. STOB. phys. I, 4. PAULIN, syst. Braman. p. 272), nous donne de Brama une description qui de´note les efforts de l’esprit symbolique pour exprimer dans la figure des dieux toutes leurs fonctions et toutes leurs forces. Ce cre´ateur du monde est repre´sente´ non seulement comme hermaphrodite, mais comme entoure´ de tous les objets sur lesquels s’e´tend son empire. A sa droite est le soleil, a` sa gauche la lune, sur ses deux bras e´tendus en croix on voit des ge´nies aile´s, des e´toiles, les diffe´rentes parties du monde, le ciel, la terre, la mer, les montagnes, les fleuves, les animaux, les plantes, toute la nature. Le Saturne phe´nicien avait quatre yeux par devant et quatre par derrie`re, deux plumes sur la teˆte, quatre ailes dont deux e´taient replie´es et deux e´tendues. Le nombre de ses yeux signifiait, disaient les preˆtres, sa surveillance non interrompue. L’une de ses plumes indiquait sa supre´matie sur le monde intellectuel, l’autre son autorite´ sur l’univers physique. Ses ailes e´tendues et replie´es le de´signaient comme le principe du mouvement et du repos. Des explications sacerdotales de la meˆme subtilite´ pourraient

3 consacre´s. ] consacre´s : alors la figure des Dieux n’a aucun rapport avec les fonctions qui leur sont attribue´es[.] Ms-texte 12 ge´nies aile´s ] anges Ms-notes

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Montfaucon on lit : des cinq biches poursuivies par Diane, une fut sauve´e par Junon, «la biche est devenue par-la` le symbole de Junon conservatrice» (t. I, p. 56). Mais cette ide´e est en fait un cliche´ ge´ne´ral qu’on retrouve souvent dans cet ouvrage. Voir pour un autre exemple ci-dessous, p. 344, n. 4. Voir pour la source de cet argument ci-dessous, p. 507, n. 2. OCBC, Œuvres, t. XIX, pp. 324–325. Bardesan est cite´ par Porphyre et Stobe´e comme un homme familier avec la religion des Hindous. Bardesan (154–222), philosophe syrien, d’abord preˆtre a` Hierapolis au service de la «Dea syria», puis converti au christianisme, e´crivain et poe`te, a professe´ une version gnostique de la religion chre´tienne. Cette orientation est a` l’origine de la perte de ses œuvres que nous ne connaissons que par les e´crits de ses adversaires. – BC renvoie a` une re´flexion sur les attributs symboliques des divinite´s hindoues qui se lit chez Paulinus a S. Bartholomæo, Systema Brahmanicum, p. 78, qui cite la description d’une statue du dieu Brahma «statua dei Brahmæ ex Bardesane a Porphyrio lib. de styge descripta». «In illo antro statua est decem ut videtur aut duodecim cubitorum, habitu erecto manibus in formam crucis extensis, cuius dextera faciei pars virilis est, sinistra muliebris. Atque eadem ratione brachium ac pes, totumque dextrum latus virile, sinistrum vero muliebre [...] dexteræ mammæ illius statuæ solem insculptum esse aiunt, sinistræ lunam, ceteraque quæ in mundo continentur, videlicet cælum, montes, mare, fluvium, oceanum, plantas, & animalia & quidquid tandem in rerum natura exsistit.» Le meˆme passage se lit dans l’e´dition de Stobe´e faite par Heeren, Ioannis Stobæi Eclogarum physicarum et ethicarum libri duo, Gottingæ : apud Vandenhoek et Ruprecht, MDCCXCII, t. I, pp. 145, 147 et 149.

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partie souvent cache´e, mais inse´parable des cultes sacerdotaux a.

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rendre raison de la figure des dieux dans la mythologie lamaı¨que. Erlik-Khan, dont nous avons de´ja parle´1, a la crinie`re du lion, symbole de la force, le visage d’un buffle ou d’un bouc, et un e´norme phallus, emble`me de la fe´condite´, deux teˆtes, pour indiquer l’intelligence, et quatre bras, signe de l’accomplissement ine´vitable de sa volonte´. (PALLAS, Nachr. ueb. die Mongol. Voelkersch, II, 542.) Dagon exprimait par sa queue de poisson la qualite´ fe´condante. (SELDEN, de D. S. 261–263 ; GUASCO, de l’Usage des statues3.) L’Indien Ganeza, dieu de la sagesse, avait une teˆte d’e´le´phant (COLEBR., As. Res., IV, 4154). Scanda ou Cartikeya a six bras ; Eswara seize, Dourga dix (LAFLOTTE, p. 2095) ; Bhavani huit, avec lesquels elle tient des sabres, des e´pe´es, des piques et des haches. Bouddha se montre avec quatre bras a` ceux qu’il favorise. Agni ou Agnini, le dieu du feu, le purificateur, en a le meˆme nombre. (SONNERAT, I, 1576.) Brama est toujours repre´sente´ avec plusieurs bras et plusieurs teˆtes, comme le Dschoeschik du Tibet (PALLAS, loc. cit7.) ; et telle est la disposition des preˆtres a` se figurer les intelligences supe´rieures comme polyce´phales, qu’ils ont invente´ des dieux a` trente-six teˆtes, formant trois e´tages ou trois rangs. Le Tibe´tain Cenrezi en a onze en forme de pyramide. Celle qui en fait la pointe est entoure´e de rayons, et a un visage e´carlate autour duquel flotte une chevelure de couleur d’azur. Il a neuf bras : quatre portent une fleur, un arc, des fle`ches et un vase plein d’eau ; trois tiennent un chapelet, une roue et une bague ; les deux derniers joignent les mains comme pour prier. (PALLAS, ib.) Ce penchant a` se cre´er des divinite´s polyce´phales n’est point particulier aux peuples du Midi et de l’Orient. Suentavith, le dieu du soleil chez les peuples Slaves, avait quatre teˆtes et regardait les quatre parties du monde. Rugiavith, le dieu de la guerre, avait sept visages : Porevith deux, et Porenetz, inde´pendamment de sa teˆte quadruple, avait un visage sur la poitrine, et tenant son menton de la main droite, il touchait aux e´toiles de la gauche. (SAX. GRAMM. Hist. Dan. XIV, 319–3278.) Ainsi Mercure en Phe´nicie rappelait par la couleur blanche de l’un de ses bras et par la

1 cultes sacerdotaux. ] a` la hauteur de ces mots, dans la col. de gauche, l’e´bauche d’une note Les Tensarpoulat, de Morlaix, anciens fe´tiches, ge´nies sous formes de vaches, de chiens ou d’autres animaux domestiques. Cambry. I. 72. Ms-texte sacerdotaux. ] suit encore le mot hic ce qui est une note de travail Ms-texte 2 lamaı¨que. ] BC pre´voyait ici un ajout qu’il n’a pas utilise´, mais dont on trouve des traces dans plusieurs notes Lamaı¨que. Il [=Saturne] avoit chez les Chalde´ens une figure d’homme a` teˆte de singe & une queue de Sanglier. Jupiter avoit une teˆte d’e´pervier. Mercure le corps & la queue d’un poisson avec une teˆte de sanglier surmonte´e d’une couronne, l’un de ses bras blancs & l’autre noir. Le soleil e´toit un homme a` deux teˆtes avec une queue de sanglier. On peut voir les explications astronomiques de ces diverses figures dans Goerres. I. 291–295. on adoroit a` Ceylan six statues monstrueuses, dont chacune e´toit en rapport avec une 〈des〉 constellation particulie`re. Knox, Hist. & rel. of Ceyl. p. 30. Ms-notes 2–3 dont ... parle´ ] manque Ms-notes 7–9 L’Indien ... bras ] Aux Indes le Dieu de la Guerre, Scanda ou Cartikeya a six bras (Schleg. p. 148.) Ms-notes 13 comme ... loc. cit. ] manque Ms-notes 14 preˆtres ] Indiens Ms-notes 15 trois rangs ] a` la hauteur de ces mots on 1 2 3

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Voir ci-dessus, p. 82. Voir ci-dessus, p. 82, n. 6. BC se rapporte surtout au commentaire des illustrations de Pallas. BC revient au chap. III de la deuxie`me partie de l’ouvrage de Selden consacre´ a` la divinite´ syrienne Dagon («De Dagone», pp. 187–204, dans l’e´dition de Leipzig, 1568, pp. 261–279). – La mention de l’ouvrage de Guasco, De l’usage des statues chez les anciens, publie´ anonymement, Bruxelles : J. L. de Boubers, 1768, n’apporte rien de particulier aux re´flexions de BC. Il y est allusivement question de Dagon, p. 18. BC re´pe`te son erreur. Voir ci-dessus, p. 86, n. 2.

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Enfin, ces divers e´le´ments sont mis en œuvre et modifie´s par le penchant toujours inhe´rent au sacerdoce de remplir l’ame du peuple de surprise et de

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couleur noire de l’autre la succession des jours et des nuits. (PROCL. in Tim. Firmic., loc. cit1.) La peau de taureau qui couvrait la teˆte d’Astarte´ faisait allusion a` la lune (DUPUIS, III ; (suite des variantes de la page pre´ce´dente) trouve dans Ms-notes, dans la col. de gauche, une note de travail qui a laisse´ des traces dans l’annotation (ci-dessous, p. 505, n. c, texte de MF1) Tous les Dieux e´toient aile´s dans la mythologie phe´nicienne. Euse`b. præp. ev. I. Wagner. 80. 87. moloch avoit un corps d’homme une teˆte de veau. Beger pour le nom il faut lire «Beyer», on trouve la meˆme erreur dans la version imprime´e ad Selden 257. Derceto chez les Syriens est d’abord un poisson, puis devient une de´esse, moitie´ poisson, moitie´ femme. L’Oannes des Babyloniens est de meˆme un poisson avec des pieds d’homme & une voix humaine. Hellad. ap. Phot. Seld. De Diis syris, III. deux des enfans de Schiven ont des figures d’animaux le 1er, celle d’un e´le´phant, le 2d d’un singe. le 3e, Badrakaly appartient aux divinite´s effrayantes, le 5e est un Dieu polyce´phale. Ms-notes p. 88.15–16 Le ... onze ] Cenrezi, Dieu du Thibet, a onze teˆtes Ms-notes 1 Enfin, ces divers ] a` la hauteur de ces mots, dans la col. de gauche, un rajout, qui sera utilise´ dans le texte principal La diffe´rence de la figure des Dieux & de celle des hommes, dans les religions sacerdotales, quand une fois les Dieux ont pris la forme humaine, est tre`s poe´tiquement indique´e dans le Mahabarat. Les Dieux, compe´titeurs de Nala, se pre´sentent avec

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(suite des notes de la page pre´ce´dente) Le renvoi a` l’ouvrage de La Flotte (Essais historiques sur l’Inde, Paris : Herissant, MDCCLXIX) est faux. Il est bien question a` cet endroit de divinite´s subalternes (pp. 207–210), mais les dieux mentionne´s ont d’autres noms et ne sont pas dote´s de plusieurs bras. Renvoi a` un passage de l’e´dition allemande de Sonnerat (Reise nach Ostindien, t. I, p. 157) ou` l’auteur re´sume dans une note les attributs du demi-dieu Agnini (quatre bras, deux poignards dans deux de ses mains, la teˆte entoure´e de flammes ; il est monte´ sur un be´lier). Un autre passage qu’on trouve dans le livre II de l’ouvrage pre´cise, au sujet de Bruma, qu’«on le repre´sente avec quatre bras et quatre teˆtes» (Voyage aux Indes, t. I, p. 272). Voir la description du dieu Dschæschik, Ire partie, chap. X, «Von denen Burchanen oder Götzen der Lamaischen Mythologie», pp. 87–88, et la planche I, fig. 3. Dschaeschik ou Dsanrasik est repre´sente´ debout, veˆtu d’une robe le´ge`re, d’une stature plutoˆt petite, avec d’innombrables visages arrange´s sous forme d’une pyramide a` plusieurs e´tages, et huit bras. Pallas renvoie a` son tour a` P. Georgi, Alphabetum tibetanum, planche IV, ou` la meˆme divinite´ est mentionne´e sous le nom de Cenresi, que celui-ci identifie comme e´tant Brama. – Dans ce qui suit, les commentaires de BC sont justifie´s par les illustrations. BC renvoie au livre XIV de Saxonis Grammatici Historiæ Danicæ libri XVI. Dans l’e´dition que nous avons consulte´e (E recensione Ioannis Stephanii cum prolegominis et lectionis varietate edidit Christianus Adolphus Klotzius, Lipsiæ : apud Carolum Gvilielmvm Hollivm, 1771), nous trouvons ceci : «[...] quod Rugiævithum vocabant. [...] Præterea in eius capite septem humanæ similitudinis facies consedere, quæ omnes vnius verticis superficie claudebantur. [...] Hoc numen perinde ac Martis viribus præditum, bellis præesse crediderant» (p. 510). Les dieux suivants, «Poruithius simulacrum» et Porenutius, sont de´crits de cette manie`re : «Id quinque capitibus consitum, sed armis vacuum, fingebatur. Quo succiso, Porenutii templum appetitur. Hæc statua quatuor facies repræsentans, quintam pectori insertam habebat, cuius frontem læva, mentum dextera tangebat» (pp. 510–511). BC copie la description de Mercure ainsi que les renvois bibliographiques dans Görres, Mythengeschichte, t. I, p. 295 ; Görres est plus pre´cis : «Procl. in Tim. p. 257. Firm. L. II,

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terreur. La figure de Chandica ou Cali, surnomme´e aux Indes, la de´esse aux dents horribles, a manifestement ce but. Lorsqu’on lui offre des sacrifices, dit le Calicapouran a, on doit placer en ide´e a` coˆte´ d’elle deux assistants qui ont trois yeux enflamme´s, le corps jaune, la teˆte rouge, des oreilles e´normes, des dents longues et menac¸antes, un collier de craˆnes humains, et qui, arme´s de tridents et de haches, tiennent dans la main droite des teˆtes coupe´es et dans la gauche des vases remplis de sang. C’e´tait avec la meˆme intention

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CREUTZER, II, 1061), et les dix monstres des Cingale`ses e´taient en rapport avec dix constellations (KNOX, p. 30 et 762). On peut voir dans Gœrres les explications astronomiques de ces diverses figures, I, 291–2953. As. Res. 371–3904.

(suite des variantes de la page pre´ce´dente) ce prince devant Damayanti. Ils se tenoient debout, sans eˆtre couverts de sueur, l’oeil immobile. les couronnes de fleurs qu’ils portoient restaient fraiches & sans mouvement. Nulle poussie`re ne les souilloit, & ils ne touchoient pas le sol de leurs pieds, mais Nala portoit une couronne de fleurs fle´tries. souille´ de poussie`re & de sueur, il se tenoit debout sur la terre, & son corps e´toit le seul qui projetaˆt de l’ombre. d’Eckst. XXI. 472. Ms-texte 1 penchant ] de´sir Co Ms-texte 1 surnomme´e aux Indes ] aux Indes surnomme´e Ms-texte 7-p. 91.3 C’e´tait ... bruˆlante. ] l’e´bauche de ce passage se lit dans la col. de gauche de Ms-notes ; BC pre´voyait d’abord d’en faire une note a` accrocher au mot but (sur cette page, ligne 2) Tel e´tait aussi celui des preˆtres Vandales, dans leurs repre´sentations du Puestrich, nain difforme, dont la statue remplie d’eau bouillante vomissoit des flots d’une e´paisse fume´e. suivent les renvois a` des ouvrages critiques qu’on lit p. 91, note a Ms-notes

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c. 7» (voir ci-dessus, p. 79, n. 3). BC, se´duit par la force de l’imagination de Görres, sugge`re que le tableau de celui-ci est directement confirme´ par ces auteurs. Il n’en est rien. Le premier des deux renvois entre parenthe`ses de´signe le chap. XII du livre III de CharlesFranc¸ois Dupuis, Origine de tous les cultes ou Religion universelle, Paris : H. Agasse, an III (1795), t. II, p. 160a, ou` se trouvent ces phrases : «Les attributs tauriformes, donne´s a` l’Astarte´ de Sanchoniaton, e´toient ceux d’Isis et d’Io. Car la vache e´tait le symbole d’Isis». Le second concerne Creuzer (Symbolik, t. II, e´d. de 1820, pp. 65–66, et plus particulie`rement la n. 82), qui cite, entre autres, un passage d’Euse`be (Præp. Ev., I. 10) et un ouvrage des Zabiens, pour prouver que Astarte´ est une de´esse lie´e a` la fois a` la terre fructueuse et a` la lune. BC simplifie l’argument de Creuzer. Voir Robert Knox, An Historical Relation of the Island Ceylon, in the East-Indies, [...] by R. ` la p. 76 commence le chap. IV de la troisie`me K., [...] London : Richard Chiswell, 1681. A partie («Concerning their Worship, and Festivals») qui traite de divinite´s plane´taires : «There are nine Deities, which are called Gerehah, which are the Planets» (p. 76). Il ne parle pas des monstres des Cingale`ses. La p. 30 ne de´crit que des animaux de l’ıˆle. Voir ci-dessus, p. 88, la variante a` la ligne 2. BC renvoie a` un long passage de Görres, Mythengeschichte (e´d. de 1935, pp. 142–146) qui traite ce sujet. Voir ci-dessus, p. 88, la variante a` la ligne 2. BC veut renvoyer a` la publication de W. C. Blaquiere, «The Ruhdira´dhya´yaˇ, or Sanguinary Chapter ; Translated from the Calica Puran», Asiatic Researches, t. V, London : Sewell, Vernos and Hood, et al., 1799, pp. 371–391. Le texte qui re`gle les ce´re´monies a` observer pour les sacrifices en l’honneur de la de´esse Cali ne parle pas des assistants aux yeux

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que les preˆtres vandales repre´sentaient leur Puestrich comme un nain contrefait et malfaisant, vomissant a` travers des torrents de fume´e des flots d’une eau bruˆlante a. Cependant le sacerdoce trahit quelquefois un de´sir contraire. S’il veut que les formes de ses dieux soient stationnaires, ce qui les maintient monstrueux ; s’il veut qu’ils soient terribles, ce qui les rend des objets d’effroi ; il regrette, quand il les compare avec les mortels, de ne les avoir pas reveˆtus d’une beaute´ supe´rieure, et il s’efforce de cacher la difformite´ sous la richesse. Les divinite´s grecques sont simples et e´le´gantes, les simulacres des barbares surcharge´s d’ornements et de dorures, et dans leurs descriptions, c’est par un e´clat miraculeux, par l’immobilite´ du regard et de tous les membres, par la faculte´ de planer dans les airs, sans que les vents agitent ni les veˆtements, ni la chevelure, c’est-a`-dire par des attributs qui ne tiennent point au perfectionnement de l’art, que les preˆtres distinguent la race ce´leste. Le Mahabarad nous montre les dieux compe´titeurs de Nala pour la main a

FRENZEL, de diis Soraborum, cap. 17 ; SAGITTARII Antiq. gent., p. 6 ; PFEFFERCORN, Thüring. gesch, p. 59 ; NERRETER, Heiden=tempel, p. 10841.

4–15 Cependant ...race ce´leste. ] une e´bauche de cette ide´e avec quelques morceaux de phrases se trouve a` coˆte´ du texte de la note b (ci-dessus, pp. 87–90, et plus particulie`rement p. 88, ligne 39) dans la col. de gauche Tout en conservant a` leurs Dieux des figures d’animaux, les preˆtres les surchargent d’ornemens. on a souvent remarque´ cette diffe´rence entre les statues des Grecs & celles des barbares. (T. I. p. 165) Ms-notes

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enflamme´s. BC a duˆ trouver ces de´tails dans une autre source non identifie´e. Görres qui cite e´galement le texte du Calica Pourana dans la traduction de Blanquiere (Mythengeschichte, t. II, p. 557 ; e´d. de 1935, p. 256), ne parle pas non plus des assistants. BC cite ces re´fe´rences d’apre`s un ouvrage non identifie´. Il retient : Abrahami Frencelii, Commentarius philologico-historicus de diis Soraborum aliorumque slavorum, publie´ dans Scriptores rerum Lusatiacarum antiqui et recentiores, [...], Lipsiæ & Budissæ : sumpt. Davidis Richteri, 1719, tomus secundus, pp. 85–236. Frenzel parle de cette idole dans le chap. XXVII (non XVII), intitule´ «De Püstrico rituum ac religionibus neglectæ vindice Deo» (pp. 211–220). Le meˆme sujet est traite´ par Caspar Sagittarius (Casparis Sagittarii Antiquitates Gentilismi et christianismi Thuringici [...], Jena : Matthäus Birckner, 1685, pp. 6– 17, livre I, chap. II), par Georg Michael Pfeffercorn ou Pfefferkorn (Merkwürdige und auserlesene Geschichte von der berühmten Landschaft Thüringen [...], Frankfurt und Gotha : Augustus Bœtius, 1684, chap. XII, pp. 59–60) et enfin par David Nerreter (Der wunderwürdige Juden- und Heiden-Tempel, [...], Nürnberg : Wolfgang Moritz Endters, 1701, 2 1717, pp. 1084–1088 avec une illustration). Il est e´vident que tous les auteurs utilisent les meˆmes sources qu’ils citent parfois largement. Ils de´fendent tous l’hypothe`se que la statuette en bronze de´couverte au XVIe sie`cle et aujourd’hui conserve´e au muse´e de Sondershausen (Thüringen) repre´sente une divinite´ payenne. Cette hypothe`se est abandonne´e de nos jours, mais pas remplace´e par une autre qui soit ge´ne´ralement accepte´e.

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de Damayanti, entoure´s d’une splendeur toujours uniforme, couronne´s de fleurs toujours fraıˆches, parce qu’aucun souffle ne les fait mouvoir, l’œil fixe, et s’e´levant au-dessus du sol, sans que leurs pieds le touchent, tandis que Nala, couvert de sueur et de poudre, ne porte qu’une couronne fane´e : ses pieds trem blants reposent sur la terre, et son corps projette au loin l’ombre qui constate l’infe´riorite´ de sa nature a. L’habitude d’offrir a` l’adoration publique des formes bizarres, entraıˆne les artistes, qui travaillent sous les ordres des preˆtres, a` en introduire de pareilles dans les e´chelons infe´rieurs de la hie´rarchie mythologique. De la` cette foule d’animaux imaginaires b, qu’on rencontre dans toutes les mya b

Mahabarad, e´pisode de Damayanti1. V. t. II, 262 ; III, 124–125, 2442. Le roi des oiseaux, au regard perc¸ant, au plumage dore´, l’oiseau garouda ou garouva, assemblage fantastique de l’homme et de l’aigle, ou de l’e´pervier (As. Res. 1. 200, XIV, 467–4683), la grande abeille bleue (ib. I, 200), le cheval Ourschirava a` deux ou quatre teˆtes. Il est a` remarquer que les animaux de l’Apocalypse sont parfaitement semblables a` ceux des religions sacerdotales. Dans les ruines de Perse´polis, ville dont les de´bris attestent un luxe porte´ au plus haut point de raffinement, on ne trouve aucune forme pure et re´gulie`re : l’œil est fatigue´ partout de combinaisons e´tranges, d’ani-

7 L’habitude ... bizarres, ] L’habitude de pre´senter 〈ainsi〉 des formes bizarres a` l’adoration publique a` la hauteur de cette phrase, dans la col. de gauche, le mot hic Ms-texte 9–10 dans les ... mythologies. ] dans les ouvrages meˆmes qui n’ont aucun rapport direct avec la reli1

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BC parle du roman de Nala, roi de Nishada, et de la princesse Damayanti, amoureux sans se connaıˆtre. Le pe`re de celle-ci convoque tous les rois pour que Damayanti puisse choisir son mari. Meˆme les dieux Indra, Agni, Varuna et Yama se rendent a` la cour. Ils essayent de tromper la princesse, en vain, car la prie`re prononce´e par celle-ci pour reconnaıˆtre les dieux les touche, de sorte qu’ils reprennent dans l’assemble´e les signes de leur nature divine, comme BC le dit dans son texte. Damayanti identifie Nala qui s’y tient, «mit welkem Kranz, allein schattend, und mit Staub und mit Schweiß bedeckt». Les dieux acceptent le choix de la princesse et la comblent de pre´sents. Nous savons maintenant par le manuscrit Co 3262 (Ms-texte) que c’est le baron d’Eckstein qui a exploite´ la traduction allemande en re´digeant son article sur ce roman (Le Catholique, t. VII, cahier XXI, sept. 1827) et que BC utilise a` son tour le texte d’Eckstein en le citant, mais sans annoncer sa dette. Il se peut ne´anmoins qu’il ait lu la traduction allemande de Ludwig Kosegarten (Nala, eine indische Dichtung von Wjasa, Jena : Frommann, 1820, livre V, pp. 31–32) ou qu’il en ait pris en outre connaissance par l’interme´diaire d’August Wilhelm Schlegel qui a publie´ en 1823 dans le t. I de la Indische Bibliothek (Bonn : Eduard Weber) un compte rendu de la traduction latine de ce poe`me par Friedrich Bopp (Nalus : Carmen sanscritum e Maha`bha`rato, edidit, latine vertit et adnotationibus illustravit Franciscus Bopp, Londini, Parisiis et Argentorati : apud Treuttel et Würtz, 1819). OCBC, Œuvres, t. XVIII, p. 191, note c et t. XIX, pp. 188–189, 263. La premie`re partie de ce renvoi n’est pas e´lucide´e. Dans la seconde, BC re´sume et comple`te, peut-eˆtre d’apre`s une autre source, un passage de l’article de F. Wilford, «On the Ancient Geography of India», Asiatick Researches, Calcutta : Philip Pereira, t. XIV, 1822, pp. 373– 470, surtout pp. 467–468. «Garud’a is often represented somewhat like a griffin with the head, and wings of an eagle, the body and legs of a man ; but with the talons of the eagle.»

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thologies sacerdotales, tandis qu’il n’y en a point qui soient indige`nes dans le polythe´isme grec a. Quelquefois le sentiment religieux, par un essor tout-a`-fait disproportionne´ avec l’e´poque, a le de´sir et le besoin de rejeter tout simulacre b. Les preˆtres alors s’emparent de ce mouvement pour le diriger a` leur gre´. Il peut

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maux qui ont le corps d’un lion, les pieds d’un cheval, des ailes, la teˆte d’un homme a` longue barbe, coiffe´ d’un diadeˆme et d’une tiare. (Voy. de CHARDIN1. ) Il nous importe peu de savoir si ces figures e´taient indige`nes en Me´die et en Perse, ou si, pour y arriver, elles traverse`rent la chaıˆne de montagnes qui se´pare la Bac triane de l’Inde. L’esprit sacerdotal dominait e´galement dans ces diffe´rents pays. (HEEREN, Ideen, etc. I, 2952.) Le Sphinx, la Gorgone, la Chime`re, sont manifestement des inventions e´trange`res a` la Gre`ce. Les habitants du Holstein avaient une telle aversion pour les simulacres et les e´glises ferme´es de murailles, que Charlemagne voulant en faire construire une et y e´lever les symboles de la foi, fut oblige´ de faire baˆtir un village, ou` il plac¸a des chre´tiens, avec ordre de de´fendre leur e´glise3. Mais cette haine des simulacres n’e´tait point, comme on l’a cru, particulie`re aux peuples du Nord. Le sentiment religieux e´tant le meˆme partout, a fait partout les meˆmes tentatives, et les preˆtres se sont preˆte´s a` ces tentatives en en profitant et

(suite des variantes de la page pre´ce´dente) gion. Ms-texte 13 l’aigle ... e´pervier ] l’e´pervier ou de l’aigle Ms-notes 15 teˆtes. ] teˆtes. Guign. 185. Voir sur Garouda un passage relatif au Jupiter Grec fin du 2d vol. & sur le cheval un discours de Crishna a` Argoun. Vol. III4. Ms-notes 15–16 Il est ... sacerdotales. ] e´bauche de cette phrase ajoute´e a` ce qui pre´ce`de Les animaux de l’apocalypse pareils a` ceux des Religions sacerdotales. Guign. 339–342. Ms-notes 18 e´tranges ] fantastiques Ms-notes 3 un essor ] un 〈e´lan〉 essor Ms-texte 6 la teˆte ] & la teˆte Ms-notes 13–16 Les habitants ... e´glise. ] cette partie de la note ajoute´e dans la col. de gauche Ms-notes 16–17 Mais ... Nord. ] C’est a` tord qu’on a cru que cette haine des Simulacres e´toit particulie`re aux peuples du Nord. Ms-notes 1

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La description des ruines de Perse´polis se lit dans le t. VIII des Voyages du chevalier Chardin en Perse, et autres lieux de l’Orient, [...] nouvelle e´dition [...] par L. Langle`s, Paris : Le Normant, 1811, pp. 244–404, avec, dans l’album, des planches qui s’y rapportent. La description de Chardin ne justifie pas le jugement de BC, a` l’exception peut-eˆtre des phrases qui parlent des demi-reliefs devant les pilastres (p. 252). Le renvoi de BC est vague. Il pense e´videmment a` l’ouvrage de Heeren, Ideen über die Politik, den Verkehr und den Handel der vornehmsten Völker der Alten Welt, Erster Theil, Asiatische Völker, Dritte Abtheilung, Inder. Göttingen : Vandenhoeck und Ruprecht, 41824. ` la p. indique´e, on lit : «Die Religion ist das einzige Band, das diese Völkerschaften A umschlingt, und gewissermaßen zu Einem Volke gemacht hat.» Par la suite, il est question des castes, et en particulier de la caste des preˆtres. Dans l’e´dition de 1815 (Ideen, Erster Theil, Zweyte Abtheilung, p. 295), on ne trouve rien qui puisse correspondre a` l’ide´e de BC. Allusion non e´lucide´e. BC veut renvoyer au t. II, livre V, chap. 5 (OCBC, Œuvres, t. XVIII, p. 280) et au t. III, livre VI, chap. 5 (OCBC, Œuvres, t. XIX, p. 209). – Le renvoi a` Guigniaut quelques lignes plus loin vise un passage qui traite du meˆme sujet.

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leur eˆtre utile en ce qu’ils sont plus suˆrement les seuls interme´diaires entre les hommes et les divinite´s invisibles. Mais comme cette notion est hors de toute proportion avec l’e´tat des lumie`res, elle ne saurait se soutenir ; l’usage des simulacres a toujours triomphe´ a. On ne citerait pas un exemple d’un peuple qui n’ait jamais eu de simulacres, bien qu’on en puisse citer plusieurs chez lesquels la haine des simulacres e´tait un principe religieux. Ce n’est donc point une erreur comple`te que celle des e´crivains qui ont ce´le´bre´, comme une preuve d’un e´lan vers des ide´es e´pure´es, cette re´pugnance a` donner aux dieux une forme mate´rielle : mais l’erreur a commence´ lorsqu’ils ont voulu transformer en notion de l’esprit un sentiment vague : en examinant la question de plus pre`s, ils auraient vu que l’intelligence n’e´tant pas assez forte pour se maintenir a` cette hauteur, il n’y avait aucun avantage a` ce que le sacerdoce re´duisıˆt en maxime la haine des simulacres, puisque, d’une part, cette maxime e´tait constamment de´mentie par la pratique, et que, de l’autre, les dieux invisibles et immate´riels valaient moralement beaucoup moins entre les mains des preˆtres, comme nous le prouverons dans le chapitre suivant, que les dieux visibles et mate´riels des religions libres.

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en les interpre´tant. A Hie´ropolis, ou` tous les autres dieux avaient des statues, on voyait deux troˆnes vacants re´serve´s au soleil et a` la lune. Lorsque l’auteur du traite´ sur la de´esse de Syrie attribue´ a` Lucien, s’informa du motif de cette diffe´rence, on lui re´pondit que ces divinite´s, toujours visibles au haut du ciel, n’avaient pas besoin d’eˆtre pre´sente´es aux regards des hommes, tandis qu’il fallait des simulacres pour les dieux que l’œil humain n’apercevait nulle part1. Pour satisfaire a` la fois le sentiment qui repousse les simulacres, et l’imagination qui en a besoin, les dieux, disent les Cingale`ses, n’ont ni chair, ni os, ni corps solides, bien qu’on croie voir des cheveux sur leurs teˆtes, des dents dans leurs bouches, et sur leurs corps une peau brillante et lumineuse comme le soleil. Ce que les hommes voient ainsi n’est qu’une illusion : les dieux n’en sont pas moins invisibles et incorporels. (As. Res.,VII, 352.)

7 point ] pas Ms-texte 8 une preuve ... e´pure´es, ] 〈une〉 la preuve d’un e´lan vers 〈d’〉 des ide´es 〈qui tendoient a` s’〉 e´pure〈r〉es Ms-texte

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La note de BC est une paraphrase du § 34 de l’e´crit De dea syria dans lequel on trouve le re´cit de la visite du temple de Hierapolis, le sanctuaire de Derceto, et ou` il est question de ces deux troˆnes. Le doute de BC relatif a` l’attribution de ce traite´ au sophiste et satirique Lucien de Samosate (env. 120-apre`s 180) n’est pas confirme´ par les recherches modernes. BC cite, en traduisant le texte, un passage de l’e´tude du Captain Mahony, «On Singhala, or Ceylon, and the Doctrines of Bhooddha ; from the Books of the Singhalais», Asiatic Researches, London : Vernor et al., t. VII, 1803, pp. 32–56, et plus particulie`rement pp. 34–35.

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Chapitre III. Du caracte`re des dieux dans les religions sacerdotales.

Si, avant d’exposer a` nos lecteurs le caracte`re des dieux dans les religions soumises aux preˆtres, nous leur proposions le proble`me suivant : il y a deux sortes de religion ; l’une est le re´sultat des conjectures, des craintes, des espe´rances d’une multitude ignorante, livre´e a` toutes les erreurs ou` peut la pre´cipiter son ignorance ; l’autre est l’œuvre long-temps me´dite´e de l’e´lite de l’espe`ce humaine forme´e en corporations, qui ont recueilli toutes les connaissances qu’elles ont pu conque´rir par des travaux opiniaˆtres, des re´flexions profondes, les de´couvertes de la science, les subtilite´s de la me´taphysique, les raffinements de la contemplation. Dans laquelle de ces religions le caracte`re des dieux doit-il eˆtre le plus pur, le plus sublime, le plus de´gage´ de toutes les imperfections et de tous les vices ? certes, la pre´fe´rence serait accorde´e a` la seconde ; et ne´anmoins, en interrogeant l’histoire, on verrait les faits s’e´lever a` l’envi contre cette pre´fe´rence. Si l’orgueil, la ve´nalite´, la perfidie, sont les traits distinctifs des dieux home´riques, ceux du sacerdoce, non moins mercenaires et non moins superbes, sont mille fois plus capricieux, plus vindicatifs et plus trompeurs. Les preˆtres ont besoin de leur cruaute´, de leurs caprices et de leurs fraudes, pour mieux asservir en leur nom la foule cre´dule. L’esprit de corps les avertit de cette condition ne´cessaire de leur existence et de leur pouvoir ; et il en re´sulte, partout ou` ils dominent, une religion plus extravagante et plus oppressive que dans les contre´es ou` ils ne dominent pas. Instruments d’une corporation dont le but est un empire sans bornes, les dieux doivent vouloir ce que cette corporation veut, c’est-a`-dire subjuguer l’homme dans les petites comme dans les grandes choses, dans l’asile de ses pense´es comme dans sa conduite exte´rieure. Aussi rien n’est comparable a` la minutie de leur exigence, a` l’arbitraire de leur volonte´. Des pratiques en E´tablissement du texte : Manuscrits : 1) BCU, Co 3267, fos 1148vo, 1154vo, 1156vo 2) BCU, Co 3262/1, pp. 15–40 [=Ms-texte] et Co 3262/2, pp. 16–22 [=Ms-notes] Imprime´ : De la Religion, conside´re´e dans sa source, ses formes et ses de´veloppements, t. IV, Paris : Chez Pichon et Didier, e´diteurs, 1830, pp. 19–43. 7 long-temps me´dite´e ] pre´me´dite´e Ms-texte 10–11 de la me´taphysique ... contemplation. ] de la me´ditation. Ms-texte 27 sa conduite ... Aussi ] sa en surcharge sur 〈ses〉 〈actions〉 conduite la corr. dans l’interl. exte´rieure〈s〉. Aussi ce dernier mot dans l’interl. Ms-texte 28 leur volonte´ ] leurs volonte´s Ms-texte

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foule remplissent chaque instant du jour et pre´ce`dent ou suivent toutes les actions de la vie. Les modes d’adoration portent une empreinte d’abaissement et d’humiliation que repousse le polythe´isme inde´pendant. On ne pouvait entrer dans la plupart des foreˆts sacre´es de la Germanie sans s’eˆtre fait charger de fers. Il e´tait de´fendu de se tenir debout, ou meˆme a` genoux dans ces sanctuaires. On n’osait en sortir qu’en se roulant sur le sable a ; ces apparences de servitude e´taient les seuls hommages qui fussent re´pute´s dignes des dieux ; et toutefois entre ces dieux, que le sacerdoce veut ainsi rehausser, et les mortels qui les adorent, le trafic dont nous avons parle´ bien souvent de´grade les uns et corrompt les autres. Les premiers requie`rent impe´rieusement des victimes et des sacrifices b ; et ces offrandes confe`rent aux seconds des titres obligatoires. a b

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TACIT. Germ. 391. Quoi que tu fasses, quoi que tu manges, quoi que tu de´sires, fais-moi une offrande, dit Crischna a` son disciple. Bhag.-Gita, trad. fr., p. 922. Toutes les ruses des Brames et les fables qu’ils racontent pour obtenir les dons des fide`les, reposent sur la ve´nalite´ et l’avidite´ des dieux. (Voy. DUBOIS, II, 3623.) A l’e´poque de l’anne´e ou` le Cave´ry de´borde´ inonde les plaines bruˆlantes et ste´riles qui longent son cours, et y re´pand la fraıˆcheur et la fertilite´, vers le milieu de juillet, les habitants se rendent en foule sur ses bords, pour fe´liciter la rivie`re, et lui consacrer des offrandes de toute espe`ce, de l’argent pour ses de´penses, de la toile pour ses veˆtements, des bijoux pour sa parure, du riz, des gaˆteaux, des fruits, des ustensiles

3 portent ] prescrits par les preˆtres portent Ms-texte 4–7 On ne ... le sable ; ces ] passage qui se lit sur la fiche abandonne´e n o 200 Co 3267, f o 1156v o 5 la plupart ... Germanie ] plusieurs foreˆts de la Germanie Co 3267, f o 1156v o fers ] liens Co 3267, f o 1156v o 6 dans ces ] dans les Co 3267, f o 1156v o 7 le sable ] la terre Co 3267, f o 1156v o 10 le trafic ... souvent ] un trafic s’e´tablit qui Ms-texte 14 39. ] c. 39. Mein. C. G. I. 473. Co 3267, 16–18 Toutes les ruses ... 362.) ] ajoute´ dans la col. de gauche, re´daction f o 1156v o diffe´rente Toutes les ruses des Brames pour obtenir des fonds reposent sur la ve´nalite´ des 18-p. 97.9 A Dieux & sur leur ressemblance avec les hommes. Dubois, II. 362. Ms-texte l’e´poque ... 301.) ] passage ajoute´ dans la col. de gauche, a` la suite du texte d’une note sur l’expiation de Baldur, ci-dessous, p. 99, note c a` l’e´poque ... Dubois. II. 301. Consulter le meˆme sur les mœurs des Dieux &ca˙ II. 377 & 410. Ms-texte 1

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Tacite parle dans le chap. cite´ d’un peuple germanique, les Semnons, qui croyaient eˆtre la tribu la plus noble des Sue`ves. Pour une des feˆtes religeuses, des de´pute´s de toutes les tribus sue`ves se re´unissaient dans une foreˆt sacre´e. Dans cette meˆme foreˆt, personne ne pouvait pe´ne´trer sans porter de chaıˆnes («nemo nisi vinculo legatus ingreditur») en signe de soumission. Et si, par hasard, il tombait, il lui e´tait interdit de se lever ou de se faire aider pour se lever, mais il devait sortir de la foreˆt en se roulant sur la terre («si forte prolapsus est, attoli et insurgere haud licitum ; per humum evolvuntur»). Le meˆme passage est cite´ par Meiners, Kritische Geschichte, t. I, pp. 473–474, ou` BC a lu le texte, comme il ressort de la fiche abandonne´e cite´e dans les variantes. BC fausse le re´cit de Tacite en sugge´rant que les rites des Semnons se retrouvent partout parmi les peuples germaniques. BC cite une phrase de la 9e lec¸on. Le re´cit de Dubois sur les ruses des Brahmes s’e´tend sur plusieurs pages.

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Les dieux du sacerdoce ont, comme ceux d’Home`re, les mœurs des peuples qui les encensent. Ceux des Indiens placent leur bonheur dans le repos ; ceux des Scandinaves sont belliqueux et avides de carnage a. Mollement berce´s sur des vagues d’une blancheur e´clatante, ou retire´s sur la montagne qui leur sert d’Olympe b, les premiers tirent des sons harmonieux du Voune´¨ı c, rival de la lyre dont Apollon joue aux banquets de Jupiter. Odin, au contraire, assis sur les mers, une e´pe´e dans sa main puissante, ne respire que les tempeˆtes et la destruction. Ses cheveux enflamme´s flottent

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de me´nage, des corbeilles, des vases, etc. (DUBOIS, II, 3011.) On dirait une femme ve´nale ou coquette, accordant ses faveurs a` l’adulation qui la flatte ou a` la prodigalite´ qui l’enrichit. Un des surnoms d’Alfadur est Kerian le destructeur, d’autres Nicar le vainqueur, Vidar le de´vastateur, Suı¨dor l’incendiaire. Odin, ayant e´te´ confondu avec Alfadur, fut appele´ le dieu des combats (Edda, fab. 282), bien qu’a` proprement parler, ce fuˆt Thor qui pre´sidait a` la guerre : mais la conception d’un dieu pacifique, dirigeant l’Univers, ne pouvait eˆtre admise chez des tribus exclusivement livre´es a` des expe´ditions de piraterie et de pillage. Il y a dans la langue scandinave 130 e´pithe`tes pour exprimer les attributs belliqueux d’Odin. Le mont Me´rou. Le Voune´¨ı est une espe`ce de petite harpe indienne a` l’usage des castes supe´rieures et surtout des Brames. (DUBOIS, I, 72–733.)

2 encensent. ] encensent & sont les imitateurs serviles de leurs usages. Ms-texte 2–3 Ceux ... carnage. ] ce passage, sauf la note, se lit sur la fiche abandonne´e n o 204 Co 3267, f o 1154v o Ceux ] Les Dieux Co 3267, f o 1154v o 3–6 Mollement ... Jupiter. ] a` cet endroit commence un grand remaniement du texte avec des ajouts porte´s dans la col. de gauche ; nous les fractionnons Les Dieux Indiens jouent du Vouneı¨, dans leurs concerts ce´lestes, comme Apollon de la lyre dans les festins de l’Olympe. suit la note Le Vouneı¨ est une espe`ce de petite harpe, dont se servent les brames & d’autres Indiens des classes supe´rieures. Dubois. I. 72–73. suit encore le texte avec les notes Les Dieux de l’Inde ... char. voir ci-dessous, p. 98, lignes 6–8 et notes c et d Ms-texte 7-p. 98.2 Odin ... lointain. ] le texte ainsi que la note manquent Mstexte 12 Odin ... appele´ ] Odin est appele´ Ms-notes 13 ce fuˆt ... pre´sidait ] Thor pre´side Ms-notes 1

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BC transcrit presque litte´ralement un passage de Dubois («A l’e´poque ... des vases, etc.»). – Il ajoute deux renvois dans la version manuscrite. Le premier concerne la feˆte du dieu Vengatta-Souara, pendant laquelle les Brahmes qui pre´sident a` la ce´re´monie choisissent de jolies femmes sous pre´texte qu’elles sont destine´es au service du dieu. Le second se rapporte a` la re´pudiation de Sitte´ (ou Sita) par Rama, en de´pit de plusieurs e´preuves prouvant sa fide´lite´ conjugale. Ces deux exemples seront utilise´s plus tard. Voir ci-dessous, p. 100, n. 3 et p. 140. La fable 28 de l’Edda n’en parle pas. Chez Rühs, on trouve que le dieu supreˆme a douze noms : outre Alfadur, les noms mentionne´s avec une traduction par BC, a` savoir Herrain ou Herjan, Hnikar ou Nikar, Vidrirnir et Svidor. Rühs, p. 165. e´d. 1665, 3o fable. Odin est mentionne´ a` plusieurs reprises dans l’Edda ; le passage qui convient le mieux a` ce que dit BC ici se lit chez Rühs p. 182 : «Odin heißt Allvater, weil er aller Götter Vater ist, und Valvater, weil alle, die auf dem Wahlplatz fallen, ihm gehören.» BC re´sume Dubois.

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au gre´ des vents. Ses yeux brillent comme des e´clairs sur son te´ne´breux visage, et sa voix est pareille au bruit du torrent dans le lointain a. Les peuples du Nord et de l’Occident se rassemblaient sous de grands arbres pour leurs transactions civiles et judiciaires. Leurs dieux rendent la justice sous un freˆne b. Minerve et Junon vont tantoˆt a` pied, tantoˆt en char dans Home`re ; les dieux de l’Inde montent sur des chars qui se meuvent d’eux-meˆmes c : Siva et Parvatti n’auraient pu traverser l’Oce´an et regagner le ciel, si Dachsa ne leur euˆt preˆte´ son char d : mais Scada, femme de Niord, saisit son arc, et attachant ses patins a` ses pieds agiles, s’e´lance du ciel pour courir sur les glac¸ons a` la chasse des beˆtes farouches e. Les femmes, dans a

b c d e

Edda. Plusieurs traits de cette description se retrouvent dans les poe`mes d’Ossian, ou` la Scandinavie est nomme´e Lochlin et Odin Loda1. Edda, 8e fable2. As. Res., X, 1503. As. Res., XI, 564. Edda, 12e fable5.

10-p. 99.3 Les femmes ... Grecs, et les ] passage qui se lit sur la fiche abandonne´e n o 207 11–12 Edda. ... Loda. ] Les poe`mes d’Ossian ou` la Scandinavie est Co 3267, f o 1148v o appele´ Lochlin & Odin Loda le peignent sous des traits toujours terribles, ne respirant que des tempeˆtes & la destruction, assis sur les mers, une e´pe´e dans sa main puissante. Ses cheveux enflamme´s flottent au gre´ des vents. Ses yeux brillent comme des e´clairs sur son te´ne´breux visage, & sa voix est pareille au bruit du torrent dans le lointain. Ms-notes 10-p. 99.1 dans le Nord ] chez ces peuples Co 3267, f o 1148v o, Ms-texte 1

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Allusion p. ex. au morceau intitule´ «Cath-Loduinn» ou a` «Fionnghal», ou` la Scandinavie est de´signe´e par les noms cite´s par BC. L’argument n’a pas de valeur critique. BC ne sait pas encore que Macpherson a invente´ les pre´tendus poe`mes celtiques (Fingal, An Ancient Epic Poem in Six Books [...] Composed by Ossian, the Son of Fingal, London : T. Becket and P. A. de Hondt, 1762) et il a accepte´ ainsi de les lire comme une source ancienne. Dans l’e´dition de 1665, c’est la 14e fable qui en parle. Mallet, Edda, «C’est sous le freˆne Ygdrasil, que les dieux s’assemblent chaque jour & rendent la justice» (p. 106). BC utilise un de´tail qu’il a trouve´ dans la grande e´tude de Francis Wilford, «An Essay on the sacred Isles in the West with other Essays connected with that Work», en l’occurrence dans «Essay VI, part I, chap. 1», Asiatic Researches, t. X, London : Vernor et al., 1811, pp. 127–157. Le passage ou` il est question des chars qui se meuvent d’eux-meˆmes ne comprend que quelques lignes et ne parle que de certains dieux de l’Inde. Autre passage de la meˆme e´tude de Wilford («Essay VI, part I, chap. 2», Asiatic Researches, t. XI, London : Vernor et al., 1812). BC ne re´sume pas tout a` fait fide`lement cette anecdote sur le voyage de Siva et Parvatti et leur rencontre avec Dachsa. Scada ou Skade, femme de Niort, «sie läuft oft auf Schlittschuhen mit ihrem Bogen nach Thieren» (Rühs, p. 186). «Alors Skada s’en retourna dans les montagnes ou` demeure son pe`re & la` souvent prenant son arc & chaussant ses pantins, elle s’occupe a` la chasse des beˆtes fe´roces» (Mallet, Edda, p. 132).

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le Nord, exerc¸aient la me´decine ; aussi dans l’Edda, le me´decin des dieux est-il une femme a. Ce sexe, en ge´ne´ral, jouissait chez les nations septentrionales d’une plus grande conside´ration que chez les Grecs b, et les de´esses dans le Valhalla ont plus de cre´dit que dans l’Olympe. Nous avons vu chez les Grecs Apollon se faire expier du meurtre du serpent tombe´ sous ses coups : Odin, qui a tue´ le ge´ant Ymer pour cre´er le monde, a besoin de meˆme d’une expiation, et la mort de Balder est explique´e ainsi par les mythologues c. Aux Indes, In dra, qui a teint ses mains coupables du sang de ses compagnons, se plonge dans les eaux pour expier ce crime d. Les aliments meˆmes des dieux sont appreˆte´s sur le mode`le de ceux des hommes. Le vin les re´jouit dans Home`re presque autant que le nectar : les compagnons d’Odin s’enivrent de bie`re, et, chez les He´breux, qui, malgre´ les efforts de Moı¨se, avaient adopte´ beaucoup de coutumes et de locutions de leurs voisins, l’autel est appele´ la table de Dieu, le sacrifice son pain e ; a b c

25 d e

Edda, 28e fable1. MALLET, introd. a` l’hist. du Danem. p. 2722. MONE, Symbol., 421. Il y a peut-eˆtre ici une ide´e cosmogonique, mais qui ne change rien a` l’effet de la fa ble. Ymer est le chaos ou la matie`re non organise´e. Odin le tue, pour former l’Univers avec ses membres. La mort de Balder (le soleil) est une des re´volutions physiques qui menacent de bouleverser la cre´ation et de ramener le chaos3. Ramayan, 2704. MALAC. cap. I, v. 12 ; Nombr. 28, 2 ; E´ZECH. 44, 67.

2 en ge´ne´ral ] manque Co 3267, f o 1148v o 5–6 Nous avons vu ... coups. ] manque Ms-texte 6–8 pour ... mythologues. ] ajoute´ dans la col. de gauche doit se faire expier comme un mortel coupable. La mort de Baldur est son expiation ou son chatiment. suit la note c de cette page, avec des variantes Ms-texte 8–10 Aux Indes ... crime. ] texte et note ajoute´s sur un papillon incomplet colle´ dans la col. de gauche [...] Imitation. Indra qui a tue´ ses compagnons s’expie dans les eaux. Ms-texte 13–14 malgre´ les ] en de´pit des Ms-texte 16 28e ] 18e Co 3267, 18–21 Mone ... chaos. ] Mone. 421. Il y a ... cosmogonique. Ymer est ... le tue f o 1148v o pour cre´er l’univers ... Balder (le soleil) ... physiques qui bouleversent la matie`re & rame`nent le chaos. Ms-texte 1 2

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Le renvoi est faux (faute de copie ; voir la variante). La de´esse de la me´decine s’appelle Eyra. «Eyra fait la fonction de me´decin des dieux» dit la 18e fable (Mallet, Edda, p. 163). BC pense a` ce passage : «Chez les autres [c’est-a`-dire chez les Scandinaves] au contraire elles e´toient moins regarde´es com[m]e les instrumens d’une volupte´ sensuelle, que com[m]e des e´gales & des compagnes, dont l’estime aussi pre´cieuse que les faveurs ne pouvoit eˆtre glorieusement acquise que par des e´gards, des proce´de´s ge´ne´reux, & des efforts de courage & de vertu.» Introduction a` l’histoire de Dannemarc, ou` l’on traite de la religion, des loix, des mœurs & des usages des anciens Danois, Copenhague : s.e´d., M. DCC. LV, p. 197. BC re´sume les arguments de Franz Joseph Mone (Symbolik und Mythologie der alten Völker, [...] Fünfter Theil, Geschichte des nordischen Heidenthums, Leipzig und Darmstadt : Leske, 1822, pp. 420–422). BC cite l’e´dition de William Carey, accompagne´e d’une traduction en prose. «The thousand-eyed god, in a rage occasioned by hunger, killing his compagnon Numoochi, thus

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et le sel est ne´cessaire dans toutes les oblations, parce que sans sel aucun aliment n’est agre´able a` l’homme a. Ces aliments sont engloutis avec une avidite´ qui trahit une faim de´vorante. Les dieux du Ramayan b accourent en foule pour prendre leur part du sacrifice ; et les peuples de la Boheˆme, dans leurs plaintes contre Charlemagne, disaient : Il nous empeˆche de pre´parer pour nos dieux affame´s les mets du soir c. Les dieux du sacerdoce ne sont point doue´s d’une force sans bornes. Leurs efforts sont vains pour tendre l’arc de Rama d. Thor a besoin de reveˆtir sa ceinture magique, pour reprendre sa vigueur e, comme Junon de se reposer avec ses coursiers, apre`s avoir fendu les nuages, pour haˆter la prise de a b c

d e

Le´vit. II, 13. Pages 42, 1791. Anciennes poe´sies boheˆmes, publie´es en allemand par Wenzel. Prague, 18192. Voy. pour une foule d’autres exemples de cette imitation des mœurs et des coutumes humaines, DUBOIS, II, 377 et 4103. Ramay., p. 5504. MALLET, introd. p. 795.

2–4 Ces aliments ... en foule pour ... sacrifice ; ] nous voyons dans le Ramayan les Dieux de l’Inde comme ceux d’Home`re accourir pour ... sacrifice. 〈Les Dieux〉 Ils descendent en chariots, en litie`res & a` cheval pour contempler le Gange qui quitte le ciel pour couler sur la terre. Ramayan. p. 3966. ajoute´ dans la col. de gauche Ms-texte 4–6 et les peuples ... du soir. ] le texte ainsi que la note c manquent Ms-texte 7 sans bornes ] illimite´e Ms-texte 8 Leurs efforts ... Rama. ] la phrase et la note ajoute´es dans la col. de gauche Les Dieux Indiens ne peuvent tendre l’Arc de Rama. Ms-texte 8-p. 101.4 Thor ... la lumie`re du jour.] passage qu’on trouve plus loin dans Ms-texte

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became the muderer of his friend. The gods with the sages bathed him here [...] Indra was thus freed from him guilt and hunger, and completely purified» (livre I, chap. 23, pp. 270– 271 ; e´d de Londres, pp. 184–185). La premie`re citation ne concerne qu’une espe`ce de table des matie`res, la seconde raconte le fait, mais sans insister sur la faim des divinite´s (e´d. de Serampore, pp. 42 et 179–180 ; e´d. de Londres, pp. 29 et 120–121). BC e´voque (sans l’avoir consulte´) l’ouvrage Die Königinhofer Handschrift. Eine Sammlung lyrisch-epischer Nationalgesänge, [...] herausgegeben von Wenzel Hanka, Prag : Gottlieb Haase, 1819. Le passage auquel il fait allusion ne parle pas expresse´ment de Charlemagne. «Und was in dem fremden Land für Götter, Solchen mussten wir uns neigen, Mussten ihnen Opfer bringen, Durften nicht vor unsern Göttern An die Stirne schlagen, Noch am Abend ihnen Speise bringen» (pp. 40–41). Les notes de Dubois concernent le choix de jeunes filles pour le service d’une divinite´ (e´pouses) et la jalousie de Rama. L’e´preuve de l’arc est raconte´e dans le chap. 53 (e´d. de Serampore, pp. 548–551 ; e´d. de Londres, pp. 379–380). Dans l’e´dition de 1755, p. 59. Voir ci-dessous, p. 102, n. 3.

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Troie a ; et Veidar, ainsi que Mercure, doit la rapidite´ de son vol a` des sandales miraculeuses, qui le soutiennent dans les cieux et sur les eaux b. De tristes infirmite´s menacent ces dieux. Hother est prive´ de la lumie`re du jour c. Ils succombent a` la fatigue. Le bocage ou` Rama et sa fide`le e´pouse se repose`rent dans leurs voyages et baigne`rent leurs pieds fatigue´s d, ombrage encore la montagne de Kimour. Le malheur les atteint. Souvent frappe´s d’une calamite´ impre´vue, ils font sept fois le tour du monde, avec une ve´locite´ prodigieuse, en poussant des cris lamentables e. Freya, sœur et femme d’Odin, de´sole´e comme Ce´re`s ou Isis, parcourt tous les climats, cherchant son e´poux, et de la` les diffe´rents noms qu’elle porte chez les divers peuples. Siva et Wichnou perdirent un jour la belle Parvatty, et a b c d e

Iliad. IV, 26–281. Edda, 15e fable2. Edda, 15e fable3. As. Res., VII, 60–614. Ibid., VII, 4775.

2 soutiennent ] portent Ms-texte 3 Hother ] Hother, malgre´ sa nature divine Ms-texte 4–6 Le bocage ... Kimour. ] re´dige´ autrement sur la montagne de Kimour, on voit encore le bocage ou` se repose`rent Rama & Sita, dans leurs voyages, & la fontaine ou` ils baigne`rent leurs corps fatigue´s. 6 Le malheur les atteint ] ils sont expose´s a` la douleur, BC note une alternative au-dessus de ce mot «souffrance» menace´s par la vieillesse. Ms-texte 6–8 Souvent frappe´s ... lamentables. ] autre version Les Divinite´s de l’Inde, lorsqu’elles sont frappe´es de quelque malheur inattendu, font sept ... monde avec une 〈rapidite´〉 ve´locite´ ... & en poussant ... lamentables. Ms-texte 8–11 Freya ... peuples. ] autre version dans la col. de gauche Freya femme d’Odin est malheureuse comme ... Isis. elle porte plusieurs noms parce qu’elle a cherche´ son e´poux dans tous les climats, & que dans chacun elle a pris un nom diffe´rent. Mstexte 11-p. 102.5 Siva ... fleur. ] passage ajoute´ dans la col. de gauche, avec des variantes Siva ... larmes qu’il s’en forma un lac, appele´ le lac des pleurs. Saraswatti se promenait un jour un livre a` la main, lorsque distraite elle s’e´gara dans le de´sert & fut subitement assaillie par des de´mons hideux, avec un bruit terrible. Dans son effroi elle se cacha au fond de la terre & reparut sous la forme d’une fleur. As. Res. 395–396. Ms-texte 1

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L’observation de BC ne s’accorde pas tout a` fait avec ce qui est dit dans l’Iliade, qu’il a lue dans la traduction allemande de Voss : «Willst du, daß ganz umsonst ich arbeitete, daß ich vergebens Schweiß der Mühe vergoß, und umher mit ermatteten Rossen Völker erregt’, um dem Priamos Gram und den Söhnen zu schaffen ?» Reste ne´anmoins l’ide´e de la fatigue de Junon et de ses coursiers. Vidar, le taciturne, e´quipe´ d’un gros soulier. Rühs, p. 189. Mallet, Edda, p. 144. Le personnage s’appelle Hother dans l’Edda. C’est un des Ases, aveugle mais tre`s fort. Rühs, p. 189. Mallet, Edda, pp. 143–144. BC re´sume un aline´a de la description d’une expe´dition ; James T. Blunt, «Narrative of a Route from Chunarghur to Yertnagoodum, in the Ellor Cicar», Asiatic Researches, t. VII, London : Vernor et al., 1803, pp. 57–169. C’est le guide de cette expe´dition qui raconte l’anecdote. Le renvoi dans cette note est faux (la page indique´e fait partie d’un petit lexique) et n’a pu eˆtre corrige´.

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re´pandirent tant de larmes, qu’un lac se forma, appele´ encore de nos jours le lac des pleurs. Ces divinite´s imparfaites sont accessibles a` l’effroi. Saraswatti, perdue dans le de´sert, et que les de´mons poursuivaient de cris horribles, se cacha dans sa terreur au fond de la terre, et ne reparut que bien loin, sous la forme d’une fleur d. Le plus grand des maux, la vieillesse, n’e´pargne pas ces dieux. Une pomme les rajeunit : elle est sous la garde de la de´esse Iduna. Une fois elle leur fut enleve´e, et bientoˆt leurs che veux blanchirent, et leurs mains tremblantes soulevaient a` peine le poids de leurs armes a. Leur vue est faible et circonscrite. Lorsque le Gange, quittant le ciel, vint couler sur la terre, ils abandonne`rent leurs ce´lestes demeures, afin de s’assurer de pre`s de cette re´volution prodigieuse b ; et quand Je´hovah veut surveiller les prophe`tes, il s’e´veille la nuit et se le`ve matin c, comme un maıˆtre mortel, aiguillonnant des serviteurs paresseux. L’immortalite´, cet attribut douteux des dieux de la Gre`ce, n’est pas un privile´ge plus assure´ aux divinite´s du sacerdoce. Elles travaillent sans cesse d a b c

Ibid1. Edda, 14e fable2. Ramayan, page 3963. Rois, IV, XVII, 10 ; XXIII, 6, 274.

5–7 Le plus grand ... et bientoˆt ] menace´s par la vieillesse. Il y a sous la garde de la de´esse Iduna une pomme ce´leste qui rajeunit les Dieux du Nord. Cette pomme leur fut enleve´e & bientoˆt Ms-texte 14-p. 103.4 L’immortalite´ ... Odin. ] autre version dans la col. de gauche L’immortalite´ ... dieux Home´riques ... Sacerdoce. Celles de l’Inde ... sans relaˆche ... merveilleux que le sort a cache´ au fond de la mer. (Bagavadam, Liv. 8. Supple´ment au Bhaguat Gita de Wilkens & Sonnerat, I. 134.) En Scandinavie les Dieux de´libe`rent ... Loke une mort cruelle. (Edda 21e fable5) Freya ... Odin. suit la note Ms-texte 1 2

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Le renvoi, comme celui de la note pre´ce´dente, ne peut eˆtre pre´cise´. Mallet, Edda, p. 141. Il s’agit de plusieurs pommes, garde´es dans une boıˆte. Le grand risque dont il est question vers la fin de cette fable, l’enle`vement d’Iduna et le vol des pommes par le ge´ant Thiassi qui peut prendre la forme d’un aigle et la libe´ration d’Iduna par Loki, fait l’objet du Braga-vaedur, § 56. L’histoire du Gange fait l’objet du chap. 35. La phrase vise´e est celle-ci : «yea the gods, immeasurable in power, filled with surprize, came thither with chariots resembling a city, horses, and elephants, and litters, desirous of seeing the wonderful and unparalleled descent of Gunga into the world» (e´d. de Serampore, p. 396, e´d. de Londres, p. 273). L’explication de ce passage par BC est contestable. Les versets cite´s par BC parlent des rois Hoschea et Josia, mais pas de Jahwe se levant toˆt le matin pour surveiller les prophe`tes. On pourrait citer, a` la rigueur, Isaı¨e, 50.4, «[Dominus] eregit mane mane eregit mihi aurem ut audiam quasi magistrum», ou Sofonias, 3.5 «mane mane iudicium suum dabit in luce et non abscondetur» et Job, 7.18 «visitas eum [=hominem] diluculo et subito probas eum». Mais Dieu ne surveille pas ses serviteurs. Dans cette fable, il est effectivement question d’un conseil des dieux lie´s, sur le conseil de Loki, par un traite´ douteux, a` livrer Freya, le soleil et la lune en re´compense a` un architecte

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a` conque´rir l’Amrita, breuvage merveilleux qui la confe`re, et que le sort a cache´ au fond des mers a. Balder meurt pique´ par la ronce : les dieux de´libe`rent s’ils ne feront pas subir a` Loke un tre´pas douloureux b ; et Freya tremble pour les jours d’Odin c. Ainsi, borne´s dans leurs forces physiques, ces dieux le sont encore dans leurs faculte´s morales. Gna est leur message`re quand ils veulent savoir ce qui se passe parmi les hommes d, comme Iris est celle des dieux de l’Iliade.

a b c d

Bagavadam, liv. 8, SONNERAT, I, 1341. Supple´ment au Bhaguat-Gita par Wilkins. Edda, 2e fable2. MALLET. introd., page 2753. Edda, 8e fable4.

7 de l’Iliade ] home´riques Ms-texte a` la hauteur de ce mot BC note dans la col. de gauche deux passages qui exploitent Le Catholique du baron d’Eckstein, mais qu’il n’a pas utilise´s dans le t. IV ; premier extrait Quelquefois des Ide´es Indiennes inapercues e´tendent au de´la de leurs bornes ordinaires les formes & le pouvoir des Divinite´s Grecques. l’œuil d’un Dieu Indien courrouce´ re´duit en cendres l’objet de son courroux. ainsi les fils de Sagara furent re´duits en cendres par le saint Durvasas : ainsi le Dieu de la destruction Siva consume Kama dieu de l’amour, qui acquiert le nom d’Ananga, l’eˆtre sans corps. Et en Gre`ce Ce´re`s fait tomber

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charge´ de la construction d’une ville fortifie´e en l’espace d’un hiver. Peu de jours avant la fin des travaux, les dieux regrettent cette convention. «Ils convinrent tous que Loke e´toit l’auteur de ce mauvais conseil, & qu’il falloit lui faire subir une mort cruelle, s’il ne trouvoit quelque moyen de frustrer l’ouvrier de la re´compense qu’on lui avoit promise.» BC ne tient pas compte du contexte des motifs qu’il cite pour illustrer son raisonnement. La conqueˆte de la liqueur d’immortalite´ est raconte´e dans le livre VIII du Bagavadam. Voir la traduction de Foucher d’Obsonville (Paris : Tilliard & Clousier, 1788, pp. 192–199). BC cite ensuite une note du chapitre sur Vishnou (Sonnerat, Reise nach Ostindien, t. I, p. 133). Le Supple´ment au Bhagvad-Gita de´signe probablement, dans la traduction franc¸aise du Bhagvat-Geeta (voir ci-dessous, p. 105, n. 3), les Shasters que Parraud a ajoute´s a` sa traduction. Le renvoi est faux. L’histoire de la mort de Balder est raconte´e dans la 28e fable (Mallet, Edda, pp. 210–213) ; la vengeance des dieux contre Loki se lit dans les 30e et 31e fables (Mallet, Edda, pp. 221–223 et p. 224). Il se peut que BC pense a` la 18e fable de l’Edda qui raconte que Freya pleure depuis le de´part d’Odin des larmes d’or et traverse le monde pour retrouver son e´poux. Il faut lire : 18e fable. «Gna est la message`re que Frigga de´peˆche dans les divers mondes pour faire ses commissions ; elle a un cheval qui court dans les airs & sur les eaux.» Mallet, Edda, pp. 164–165.

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Odin de´couvre la terre du haut de son troˆne ; mais ce sont deux corbeaux perche´s sur ses e´paules qui lui racontent tout ce qu’ils observent a. Un ge´ant l’importune par sa renomme´e. Le dieu veut s’assurer si la science de ce rival surpasse la sienne. Freya le retient : elle lui de´conseille une lutte dan-

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Edda, 20e fable1. Chez les Perses, c’est e´galement un corbeau qui est assis sur l’e´paule du pe`re des dieux et lui inspire la sagesse. (Schahnameh de FERDOUCY2.)

(suite des variantes de la page pre´ce´dente) en cendres Triptole`me, pour punir l’indiscre´tion de sa me`re. mais aussi ceci seulement dans les myste`res. d’Eckst. XXIV. (lire XXIII.) 2583. Ceci ds le liv. des myste`res. – deuxie`me extrait comme il faut chercher des causes a` la malfesance des Dieux, les preˆtres imaginent des fables qui expliquent cette malfesance. l’homme de´chu, doit se relever par la soumission, la 1e`re des vertus sacerdotales. les Dieux lui font du mal pour voir comment il le supportera, s’il se re´signera a` leur volonte´. c’est l’ide´e dominante du livre de Job, de l’e´pisode de Nala & Damyayanti dans le Maharabat, &ca˙ Ide´e tout a fait e´trange`re a` la mythologie Home´rique. les Dieux d’Home`re font du mal aux hommes, parce qu’ils les haı¨ssent, non pour les e´prouver. – Les Dieux pre´cipitent les hommes dans l’infortune pour mieux les relever de leur de´che´ance. Le Roi Harichandra tombe dans un tel e´tat de mise`re qu’il est force´ de se faire Tchandala, Paria, & de remplir leurs fonctions qui sont de surveiller les fune´railles, & d’enlever les immondices des routes. Il de´pose successivement sur le bucher fune´raire son e´pouse & son enfant : son cœur se brise, mais sa confiance dans les dieux reste ine´branlable. Les e´preuves cessent, & l’infortune´ replace´ sur le trone retrouve en meˆme tems sa puissance & sa famille que lui rendent les Dieux. d’Eckst. XXI. 4554. Ms-texte 4 Freya ] Frigga Ms-texte

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6 Ferdoucy ] Ferdoucy. d’Eck.

XXIV.

333. Ms-notes

Le renvoi est incomplet. C’est la 5e fable qui dit : «Lorsqu’Odin s’y [a` savoir dans la forteresse Asgard] assied sur son troˆne sublıˆme, il de´couvre de la` tous les pays, voit les actions des hommes & comprend tout ce qu’il voit» (Mallet, Edda, pp. 84–85). Et la 20e parle des corbeaux : «Deux corbeaux sont toujours place´s sur ses e´paules & lui disent a` l’oreille tout ce qu’ils ont vu & entendu de nouveau ; l’un s’appelle Hugin (l’esprit), l’autre Munin (la me´moire), Odin les laˆche tous les jours, & apre`s qu’ils ont parcouru le monde, ils reviennent le soir vers l’heure du repas. C’est pour cela que ce dieu sait tant de choses & qu’on l’appelle le dieu des corbeaux» (Mallet, Edda, p. 175). Le renvoi au Shahnameh de Firdousi cite quasi litte´ralement une phrase que BC copie chez d’Eckstein, comme il ressort de la variante : «Hougr, corbeau assis sur l’e´paule du pe`re des dieux et lui inspirant la sagesse, est une des formes d’Odin» (Le Catholique, t. VIII, cah. XXIV, «De la the´ocratie primitive», pp. 225–450, et plus particulie`rement p. 332). BC copie un passage de l’essai sur Nala et Damayanti qui commente un e´pisode de ce roman. BC a` son tour ajoute un commentaire aux re´flexions du baron d’Eckstein. Autre passage copie´ chez d’Eckstein qui re´sume une fable indienne pour illustrer les paralle`les entre l’histoire de Job et Nala et Damayanti (Le Catholique, t. VII, cah. XXI, pp. 439– 474, et plus particulie`rement p. 455).

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gereuse. Les dieux imparfaits, lui re´pond-il, ont souvent besoin des lumie`res humaines a. Elle l’accompagne alors de ses vœux. Puisses-tu, s’e´crie-t-elle, avoir assez de science b ! Mais la source meˆme ou` la science se puise n’est pas en son pou voir. Mimis la garde : Odin n’en peut approcher sans qu’il le permette, et se voit contraint, pour de´sarmer ce surveillant jaloux, de lui laisser un de ses yeux en gage c. Aussi l’erreur est-elle souvent le partage de ces dieux. Dans le premier aˆge, le but de l’E´ternel fut de´c¸u : sa volonte´ fut e´lude´e d. Cette notion d’un dieu qui se trompe ou que les ruses des cre´atures parviennent a` tromper, rappelle la fable de Prome´the´e, et prouve la ressemblance des deux polythe´ismes sous l’un des rapports les plus importants e. a b c d e

SAX. GRAMM. III, 65, 661. MALLET, introd. p. 270–2732. Edda, 8e fable3. Pre´face du Bhaguat-Gita, page VIII4. La mythologie indienne fourmille d’anecdotes ou` les dieux sont pris pour dupes par les mortels. Soane, amoureux de la belle Nasmada, autre nom pour Bhavani, demanda cette de´esse en mariage. Bhavani envoya son esclave Johilla pour examiner le corte´ge et la pompe dont son amant e´tait entoure´. Johilla, frappe´e de la beaute´ de Soane, se fit passer

4 son pouvoir. Mimis ] en la puissance des Dieux : elle coule sous la racine du freˆne ce´leste. Mimis Ms-texte 6–10 est-elle ... importants. ] texte ajoute´ dans la col. de gauche Ms-texte 7–8 le but ... e´lude´e. ] e´bauche de cette phrase et de la note dans la col. de gauche Le but de Dieu ayant e´te´ trompe´ dans le 1er age &ca˙ Bh. G. Pre´f. VIII Ms-notes 8–10 Cette notion ... importants. ] meˆme texte dans la col. de gauche cette notion ... ou que la volonte´ ... parvient ... importans. Ms-notes 8 des cre´atures ] de ses cre´atures Ms-texte 15-p. 106.19 La mythologie ... 103. ] texte de cette note ajoute´ dans la col. de gauche ; re´daction diffe´rente Soane, un dieu indien, amoureux ... flots, & disparut a` l’endroit ou se forma des larmes de Johilla une petite ... nom. ... 103. 〈La manie`re dont〉 Ms-texte 1

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BC raconte librement. La re´ponse d’Odin ne s’adresse pas, dans le texte de Saxon le Grammairien, a` son e´pouse, mais est une remarque qu’on lit au de´but du re´cit des amours d’Odin pour Rinda, la fille du roi des Rute`nes (livre III). Voir La geste des Danois [...] traduit du latin par Jean-Pierre Troadec, Paris : Gallimard, 1995, p. 110. Il faut lire «Edda, p. 270–273». BC cite, d’apre`s la traduction de Mallet, une phrase de ce que celui-ci appelle «l’ancienne Edda», titre abandonne´ en faveur de «Lieder-Edda». Odin de´sire rendre visite a` Vasthrudnis, grand ge´nie, pour se mesurer avec lui. Freya, inquie`te, de´conseille ce voyage, en vain. Alors elle lui dit : «Puisses-tu aller, puisses-tu revenir sain & sauf, puisses-tu eˆtre conserve´ pour nous autres de´esses ! puisses-tu avoir, pe`re des sie`cles, assez de science quand tu t’entretiendras avec ce ge´nie !» Il est sous-entendu que le vainqueur de ce combat dicte la loi au perdant. BC paraphrase un passage du de´but de la 8e fable. Mallet, Edda, p. 35 (e´d. de 1763, pp. 103–104). BC renvoie a` la traduction franc¸aise Le Bhaguat-geeta, ou Dialogues de Kreeshna et d’Arjoon [...] Traduit du samscrit la langue sacre´e des Brahmes, en anglois, par M. Charles Wilkins ; et de l’anglois en franc¸ois, par M. Parraud [...], Londres [= Paris] : Buisson, 1787. ` la page C’est la seule e´dition qui a une partie pre´liminaire pagine´e en chiffres romains. A indique´e, il n’est pas question de la de´ception de l’E´ternel. Mais il se peut que BC pensait citer le de´but du Shaster, publie´ par Henry Lord, qui parle du premier aˆge du monde et de

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Mais c’est surtout par leurs passions et leurs vices que les divinite´s sacerdotales sont sem blables aux dieux de l’Iliade : ni la de´bauche, ni la cruaute´, ni le parjure ne les font reculer. Vous vous preˆtez aux de´sirs des hommes plus qu’aucune femme, dit Loke a` la de´esse Iduna a. Lachmi, femme de Wichnou, saisie pour Camadeva d’une ardeur effre´ne´e, quitte son e´poux, et poursuit sans pudeur l’amant qui repousse avec me´pris ses caresses bruˆlantes b. Dans le Nord, Odin, par ses volages amours, de´shonore le rang qu’il occupe : les autres dieux le privent de l’empire, et se choisissent un nouveau maıˆtre : et ce n’est qu’apre`s dix anne´es qu’il regagne leur bienveillance, et que, chassant son compe´titeur, il reprend son autorite´ c. Cette tradition a probablement un fondement historique, et nous serons appele´s a` y revenir. Mais dans l’esprit et dans la bouche du peuple elle tendait a` le convaincre des de´re´glements et de la licence de ses dieux. Dans le Midi, Brama se rend coupable de vol, et subit la peine d’un larcin honteux par la perte de son he´ritage. Ces dieux ne reculent point devant le parjure. Au me´pris de leurs serments, ils tuent l’architecte qui leur a construit la cita-

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pour Bhavani, qui, furieuse de cette infide´lite´, de´figura l’esclave coupable et pre´cipita son amant dans les flots. Les larmes de Johilla forme`rent une petite rivie`re qui porte son nom. As. Res., VII, 102–1031. Lokasenna2. As. Res., XI, 103–1043. SAX. GRAMM. III4.

2–3 l’Iliade : ... reculer. ] d’Home`re. Ms-texte 4–7 Lachmi, ... bruˆlantes. ] e´bauche de ce passage, y compris la note, dans la col. de gauche La Padma pourana raconte que Lachmi, femme de Wichnou, ... Camadeva, quitta son e´poux pour suivre le nouvel objet de ses desirs, qui, fide`le a` sa propre e´pouse, lui re´sista, mais ne lui e´chappa qu’avec peine. As. Res. XI. 103–104. Ms-texte 7–9 Dans le Nord ... regagne ] Les Dieux du Nord, trouvant qu’Odin de´shonorait par ses amours la dignite´ ce´leste, le prive`rent ... se choisirent ... ce ne fut ... regagna Ms-texte 13–15 Dans le midi ... he´ritage. ] la version pre´ce´dente dans la col. de gauche Brama convaincu d’un larcin envers les Dieux ses colle´gues fut puni par la privation d’une portion du Domaine qu’ils lui avoient ce´de´. Ms-texte 15 Ces dieux ] Ils Ms-texte 15–16 parjure. ... ils tuent ] parjure. Les uns tuent, au ... sermens, Ms-texte

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l’e´chec de la premie`re cre´ation des hommes. On en trouve la traduction franc¸aise aux pp. ILLVIJ. BC re´sume, en le traduisant partiellement, un passage du rapport de Blunt (voir ci-dessus, p. 101, n. 4) qui raconte l’anecdote sur Soane, Narmada et Johilla. Allusion a` la strophe 17 de la Lokasenna, une partie de la premie`re Edda. BC simplifie les paroles de Loki, ce qui rend son explication du passage assez douteuse. Le texte sugge`re plutoˆt que le mari d’Iduna, le rhapsode divin Bragi, est le meurtrier d’un des fre`res d’Iduna. La strophe de la Lokasenna est la source unique pour cette anecdote mythologique, d’ou` les incertitudes de l’exe´ge`se. BC revient a` l’e´tude de Wilford (voir ci-dessus, p. 98, n. 4) pour rapporter la folie de Lachmi. Certains de´tails de sa version («quitte son e´poux» et «qui repousse avec me´pris ses caresses bruˆlantes») ne se trouvent pas dans le re´cit de Wilford. BC re´sume, pas tout a` fait correctement, le re´cit qu’on lit dans le livre III de la Gesta Danorum. Voir La geste des Danois, pp. 113–115.

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delle qu’ils habitent a ; et telle est leur re´putation de perfidie, qu’un guerrier qu’ils appellent dans leur sein ne veut entrer au milieu d’eux qu’arme´ de toute pie`ce b. Lie´ par des engagements solennels envers Ravana, Brama s’occupe de les rompre, a` l’instant meˆme ou` il vient de les contracter c. Ce meˆme Brama, loin d’eˆtre touche´ des sacrifices d’un monarque plein de pie´te´, cherche a` de´couvrir quelque ne´gligence ou quelque oubli qui rende le sacrifice inutile d. Odin se`me, par ses prestiges, la discorde entre un roi de Sue`de et un roi de Danemarck e, comme le fils de Saturne trompe Agamemnon pour venger Achille. Tandis qu’Indra, jaloux des auste´rite´s d’un solitaire, reveˆt, pour le se´duire, un ge´nie perfide des attraits d’une courtisane f, le dieu des Juifs aveugle les fils d’He´li, pour qu’ils n’e´coutent point les avis de leur a

b c d e f

Gebrochen wurden Eide, Worte und Versprechungen[.] Voluspa. Voy. sur les parjures des dieux scandinaves, MONE, 3801. E´loge de HAQUIN2. Ramayan, page 1833. Ibid., 115. SAX. GRAMM. VIII4. Ramayan, page 5325.

1–3 et telle ... pie`ce. ] autre re´daction Les autres bercent de vaines promesses un guerrier, dont ils pre´parent la mort, mais qui, pre´voyant leur perfidie, entre au milieu d’eux couvert de ses armes. Ms-texte 3–7 Lie´ ... inutile. ] deux e´bauches de ce passage dans la col. de gauche Artifice de Brama pour e´chapper aux promesses qu’il a faites a` Ravana. Ramayan. p. 183. puis malveillance des Dieux. Brama surnomme´ espace libre pour pouvoir mettre un mot cherche avec soin des de´fauts dans le sacrifice de Dascharrata. Ramay. p. 115. Ms-texte 7 Odin ... prestiges ] Odin, par un prestige, se`me Ms-texte 9-p. 108.1 Tandis ... perte. ] Indra engage Rimabha a` tenter Wischwamitra. Ramayan p. 532. ces huit derniers mots dans la col. de gauche Dans les Annales He´braı¨ques, les fils d’Heli n’e´coutent point les avis de leur pe`re & c’est Je´hova qui les aveugle ; il a re´solu leur perte. Ms-texte 1 2

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Mone analyse, en partant de la phrase du Voluspa cite´e par BC, la signification du parjure dans la mythologie scandinave (Symbolik und Mythologie, t. V, pp. 380–381). BC cite un de´tail du Ha´kornarma´l (Chanson de Haquin) du scalde Eyvindr Finnsson skaldaspillir qui feˆte le roi de Norve`ge Hakon Aðalsteinsfo´stri (env. 930–960), chre´tien, mais respectant la religion paı¨enne de son pays et tombe´ dans une bataille ou` il s’e´tait engage´ pour le parti paı¨en contre le parti chre´tien soutenu par les Danois. Il y est question de deux Walkyries, charge´es par Odin de choisir sur le champ de bataille un roi de la race d’Yngvis pour le Valhalla ; elles se de´cident pour le roi Hakon qui entre tout ensanglante´ dans le Valhalla, mais refuse de de´poser les armes. L’histoire de Ravuna et la ruse de Brama est raconte´e dans le chap. 13 (e´d. de Serampore, pp. 181–183 ; e´d. de Londres, pp. 122–123). Allusion a` la guerre entre Haraldus, roi du Danemark, et Ringo, roi de Sue`de, dont il est question dans le livre VIII de la Gesta Danorum . Voir La geste des Danois, pp. 331–340. Le re´cit de Saxon le Grammairien ne s’accorde pas entie`rement avec l’ide´e sugge´re´e par BC. Cette histoire est raconte´e dans le chap. 51. Voir l’e´d. de Serampore, pp. 532–535 ; e´d. de Londres, pp. 367–370.

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pe`re, car il a re´solu leur perte a. Il endurcit le cœur de Roboam, afin de produire le de´chirement de son royaume. Il pousse Pharaon a` la de´sobe´issance, cause de sa ruine b. Il envoie un mauvais esprit entre Abime´lech et les Siche´mites : c’est une expression parfaitement semblable a` celles d’Home`re c. Il est a` remarquer que le sacerdoce fait assez habituellement un me´rite a` ses dieux de l’artifice et de la ruse. Mahomet, qui, malgre´ la se´ve´rite´ de son the´isme, avait emprunte´ ses ide´es sur la nature divine de deux religions e´labore´es par les preˆtres, appelle Dieu plus d’une fois le plus admirable des trompeurs d. La chose s’exa b c

d

Rois, I, 2, 24–25. Exode. Cette similitude se retrouve dans plusieurs passages du livre des Rois et de celui des Juges. Dieu rassemble ses anges pour de´libe´rer avec eux contre Achab qu’il veut perdre, en l’entraıˆnant dans une guerre contre les Syriens. Apre`s une longue discussion, un esprit de mensonge se pre´sente, qui dictera des paroles trompeuses aux preˆtres de Baal, pour qu’ils enflent le cœur d’Achab par la promesse d’une victoire (Rois, XXII, 19–22). Ailleurs, ennemi des Philistins, qui vivaient paisibles, Dieu inspire a` Samson de l’amour pour Dalila. Ses parents s’e´tonnaient de cette passion subite ; mais, dit la Bible, c’est que Dieu cherchait querelle aux Philistins (Juges, XIV, 4). «Præstantissimus dolose agentium» (Coran, cap. 3, v. 53 ; cap. 4, 156). Voyez la note du 3e vol., p. 3361. La` nous indiquons la cause naturelle de l’admiration des tribus sauvages pour la ruse et le mensonge. Ici nous montrons comment le calcul du sacerdoce en a profite´. Il est dit ailleurs dans le Coran : «Nous les avons jete´s dans l’incertitude et nous leur avons menti.» Dans le cate´chisme des Druses (Monit. du 9 mars 1808), l’instructeur demande a` l’e´le`ve : comment est-il dit dans l’e´pıˆtre de Rhamar-Ebn-Djaich-el-Selimani, qu’un he´re´tique est fre`re de Dieu ? Re´ponse : c’e´tait un pie´ge que Dieu tendait a` Rhamar pour le mieux

2 royaume. ] BC pre´voyait ici une note ; voir aussi la variante a` la ligne 8 de cette page S. 2–3 Il pousse ... ruine. ] apre`s avoir ordonne´ a` Philippe, Mon. des He´br. I. 260. Ms-notes Pharaon, en lui pre´disant les chatimens les plus severes de laisser partir les He´breux c’est Je´hova meme qui pousse ce monarque a` la de´sobe´issance. (Exode) Ms-texte 8 Mahomet ] a` la hauteur de ce nom on trouve dans la col. de gauche un passage que BC n’a pas utilise´ qu’on ne dise point que S. Philippe est un the´ologien suranne´. d’Eckstein en 8e 1827 reproduisoit les argumens de S. Philippe. «Je´hova ordonne l’extermination des Moabites, & commande les guerres saintes. Cependant il de´fend expresse´ment le meurtre & lui meˆme le chatie. c’est la` le myste`re que Dieu s’est re´serve´. c’est le secret de sa providence, myste`re a` la connoissance duquel l’homme ne peut pre´tendre» XXII. 28. v. aussi des extraits de l’abbe´ Gue´ne´e2 Ms-texte 13 retrouve ] reproduit Ms-notes 17 la promesse ] l’annonce Ms-notes 17–18 Ailleurs ... inspire ] Ailleurs, Dieu, ennemi ... paisibles, inspire Ms-notes 21–23 Voyez ... profite´. ] manque dans Ms-notes 24 Il est dit ] peut-il se trouver Ms-notes 26 Selimani ] la source porte Selimari faute que nous corrigeons d’apre`s le Moniteur 1 2

OCBC, Œuvres, t. XIX, p. 332, n. a. Dans cet ajout, BC copie un passage tire´ du compte rendu des Œuvres comple`tes de Platon, la traduction des dialogues que Victor Cousin a publie´e en 1822 (Paris : Bossange fre`res). La premie`re partie de ce compte rendu a e´te´ publie´e dans Le Catholique, t. VIII, cah. XXII, pp. 5–55 ; le passage cite´ se lit pp. 27–28. La phrase qui suit la citation et qui parle de Gue´ne´e concerne les notes de lecture de BC (BCU, Co 3293).

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plique quand on re´fle´chit que des dieux suspects de mensonge rendent d’autant plus indispensables des preˆtres qui pre´servent l’homme d’eˆtre trompe´ par ces dieux. L’envie les tourmente au sein de leur splendeur et de leur pouvoir. Le plus grand crime, dit le Ramayan a, c’est l’orgueil, c’est-a`-dire la confiance de l’homme en ses propres forces. Wichnou, dans sa neuvie`me incarnation, poursuit sans pitie´ un roi, qu’il fait pe´rir, malgre´ ses prie`res, et dont le seul tort est une prospe´rite´ trop constante. Les sectateurs du dieu ce´le`brent encore aujourd’hui par une feˆte cette victoire facile et cruelle b. Malecheren, roi de Mahabalipour, racontent les bramines des sept pagodes, ayant embelli sa re´sidence, les dieux jaloux submerge`rent une ville qui rivalisait de magnificence avec le se´jour ce´leste c. Ne croit-on pas entendre Neptune, se

a b c

tromper et lui oˆter la vie ; et plus loin : l’usage de Dieu est de tromper les uns et d’e´clairer les autres1. Cali, dans le poe`me e´pique le Naidshadya, de Sri-Harsa, gagne au jeu, par la fraude, le royaume de Nala, roi de Nishada. Ramay., page 1802. LAFLOTTE, 172–1803. As. Res. I, 156–1574. L’usage indien de ne jamais fe´liciter quelqu’un sur sa sante´ ou sur ses .

4–9 Le plus ... cruelle. ] passage pour lequel on trouve dans Co 3262 une e´bauche assez diffe´rente Le plus grand crime des mortels aux yeux des Dieux c’est l’orgueil[.] Ramayan. p. 180. c’est une autre manie`re d’exprimer la jalousie des Dieux. car pourquoi l’orgueil coupable ? pourquoi la soumission une vertu ? non soumission punie : c’est un de´ployement de force, non de justice. Ms-texte le texte de´finitif se lit dans les cahiers notes Wichnou ... le seul crime e´toit une ... cruelle. Ms-notes 1

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Dans la rubrique «Me´langes. – Histoire. Ge´ographie.» du Moniteur no 69, 8 mars 1808, pp. 272b–274c a e´te´ publie´ un article anonyme sous le titre «Notice sur les Druses». Il cite les Voyages de Volney pour donner les de´tails historiques expose´s dans la partie analytique de l’article et reproduit ensuite la traduction du Cate´chisme des Druses dont BC cite deux passages en paraphrasant le texte. BC vise cette phrase : «O Brahma, the Rakshus Ravuna by name, to whom a blessing was awarded by thee, through pride troubleth all of us the gods, and even the great sages, who perpetually practise sacred austerities» (Chap. 13, e´d. de Serampore, pp. 181–182 ; e´d. de Londres, p. 122). Voir La Flotte, Essais historiques sur l’Inde, pre´ce´de´s d’un journal de voyages et d’une description ge´ographique de la coˆte de Coromandel, Paris : He´rissant le fils, M. DCC. LXIX, le chapitre «Les neuf incarnations de Vichenou», pp. 172–186. Le re´sume´ des fables des neuf incarnations de Vishnou ne correspond pas a` ce qu’on trouve chez Laflotte. Celui-ci raconte pour la cinquie`me incarnation (pp. 176–179) une le´gende qui ressemble a` ce que nous lisons chez BC. La neuvie`me incarnation (pp. 180–186) raconte une histoire dans laquelle Vishnou poursuit son oncle impitoyablement pour le tuer. Mais cet oncle est luimeˆme un monstre. Voir l’essai de William Chambers, «Some Account of the Sculptures and Ruins at Mavalipuram, a Place a few Miles North of Sadras, and known to Seamen by the Name of the Seven Pagodas» (Asiatick Researches, t. I, Calcutta : Manuel Cantopher, 1788, pp. 145– 170).

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plaignant a` Jupiter de la muraille e´leve´e par les Grecs autour de leurs vaisseaux, et Jupiter apaisant Neptune en lui promettant de de´truire cet orgueilleux ouvrage des hom mes a ? Les idoles mexicaines ne valent gue`re mieux. Le pays d’Anahuac, lors de la grande inondation qui le submergea, e´tait habite´ par des ge´ants dont un petit nombre se re´fugia dans les cavite´s d’une montagne. Sortis de cet asile, ils voulurent ce´le´brer leur de´livrance par la construction d’une pyramide. Les dieux les frappe`rent de la foudre. On voit dans les poe´sies serbes, beaucoup plus re´centes, mais empreintes des traditions d’une mythologie ante´rieure, des traces de l’envie des dieux. Maxime Zernojewitch est fiance´ a` la fille du doge de Venise. Iwan, son pe`re, annonce en paroles superbes, qu’il viendra chercher sa bru. «On me verra, dit-il, sous les murs de Venise, avec mille hommes. Venise aussi enverra mille hommes d’e´lite pour ce´le´brer la gloire de mon fils. Mais nul n’e´galera, nul ne paraıˆtra plus magnifique et plus beau que Maxime, l’enfant che´ri de son pe`re.» Le Destin l’e´coute, et soudain une maladie affreuse de´figure le beau Maxime. Le pe`re le contemple, et le crime de ses paroles superbes se retrace a` son souvenir1.

a

succe`s, vient de l’ide´e de la jalousie des dieux. DUBOIS, 463, 4642. V. sur le meˆme usage chez les Grecs modernes, t. III, p. 3453. Iliad. XII, 4, 94.

3–7 les idoles ... foudre. ] manque Ms-texte une version diffe´rente de ce passage se trouve dans les cahiers notes Les Dieux des Mexicains ne sont pas meilleurs. Le pays ... d’une pyramide dont le sommet auroit touche´ les Cieux. Les Dieux jaloux les ... foudre. Ms-notes 8–17 On voit ... souvenir. ] passage ajoute´ dans la col. de gauche ; le texte est re´dige´ autrement On voit dans les poe´sies Serbes une trace de l’envie des Dieux. ... en paroles 〈orgueilleuses〉 superbes qu’il viendra 〈prendre〉 chercher sa bru. je reviendrai, dit-il, avec mille hommes. que Venise envoye aussi mille hommes d’escorte, pour recevoir dignement la bru de mon fils. De tes mille guerriers, des mille guerriers que je conduirai, nul ne paraıˆtra ... l’enfant de mon cœur, qui bientoˆt sera ton beau-fils che´ri. le destin l’e´coute & bientot 〈cependant〉 une maladie ... le contemple, & les paroles 〈imprudentes dont il s’est servi〉 superbes en prenant conge´ du Doge 〈reviennent〉 se retracent a` sa pense´e. d’Eck. VI. 391. Ms-texte 1

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La source de cet e´pisode de la poe´sie serbe est un article d’Eckstein, comme il ressort de la variante. Voir «Chants du peuple serbe, deuxie`me et dernier article», Le Catholique, t. II, cah. 6, pp. 373–410, en particulier pp. 390–391. BC re´sume un passage du chap. XIV de la seconde partie de l’ouvrage de Dubois (Mœurs de peuples de l’Inde, t. I, pp. 463–464). L’ide´e de la jalousie des dieux n’y est pas. OCBC, Œuvres, t. XIX, p. 337, n. f. BC cite deux vers du de´but du chant IV de l’Iliade ou` le poe`te annonce la destruction des fortifications qui prote`gent le camp des Grecs.

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A l’envie et a` l’imposture se joint la trahison. Le Mercure des Germains se laisse se´duire par Marc-Aure`le a. Lorsque Bomilcar, conjure´ carthaginois, veut renverser le gouvernement de sa patrie, il accumule les ce´re´monies pour se´duire les dieux b, et nous avons vu Xerxe`s, a` son invasion en Gre`ce, essayer de corrompre les divinite´s tute´laires de cette contre´e, en pratiquant les rites de leur culte. Aussi les nations sacerdotales prennent-elles contre leurs dieux les meˆmes pre´cautions absurdes ou injurieuses qui nous ont frappe´s chez les Grecs c. Les Tyriens, assie´ge´s par Alexandre, enchaıˆnent la statue d’Apollon ; et le conque´rant, maıˆtre de la ville, lui fait oˆter ses fers, en le proclamant l’ami d’Alexandre d. Sans doute, cet usage d’enchaıˆner des divinite´s perfides, usage dont nous montrons ici le sens populaire, avait aussi sa signification myste´rieuse. Ce que nous avons dit de la composition du polythe´isme sacerdotal a duˆ y pre´ parer nos lecteurs ; les dieux de ces religions, symboles des forces de la nature, e´taient enchaıˆne´s aux e´poques ou` ces forces semblaient de´croıˆtre. On oˆtait leurs liens lorsque la nature e´tait cense´e reprendre une vigueur nouvelle ; ce double sens servait au sacerdoce pour satisfaire les hommes instruits en contentant le peuple. Il disait aux uns qu’il enchaıˆnait et de´livrait tour-a`-tour des simulacres emble´matiques, pour exprimer la re´gularite´ des saisons et la renaissance du soleil, lorsqu’il recommence, vainqueur de l’hiver, sa carrie`re annuelle. Il a b c d

XIPHILIN1. DIODORE2. DIOD., XIII, 28 ; XVIII, 73. V. t. III, p. 3424.

4 dieux, ] Dieux, & il e´choue par les pre´cautions meˆmes qu’il prend en multipliant ces ce´re´monies myste´rieuses. le passage sur Bomilcar ajoute´ dans la col. de gauche Ms-texte 6 les rites ] les ce´re´monies & les rites Ms-texte 1

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BC cite l’extrait de l’Histoire romaine de Dion Cassius re´dige´ par Johannes Xiphilinos le jeune, moine a` Constantinople (XIe sie`cle). Le Mercure des Germains pourrait eˆtre Hermodr. Le renvoi n’est pas e´lucide´. Diodorus of Sicily in Twelve Volumes, with an English Translation by Russel M. Geer, t. X. Un conjure´ carthaginois Bomilcar (ou Bormilcar) est mentionne´ dans le livre XX, chap. X, 1–4 de la Bibliothe`que historique, crucifie´ en 307 pour avoir voulu s’emparer du pouvoir supreˆme. Mais il n’est pas certain que ce soit le personnage dont BC parle ici, car dans ce chap. X il n’est pas question de ce´re´monies religieuses pour se´duire les dieux. Il se peut que BC pense au de´but du chap. XLIII, ou` l’on trouve : «For those [Diodore parle de Bormilcar] who are about to undertake lawless and important enterprises are superstitious and always choose delay rather than action, and postponement rather than accomplishment» (p. 257). Les deux renvois ne parlent nullement de «pre´cautions absurdes» religieuses. Le premier contient le discours que Gylippus adresse au peuple de Syracuse ; le second passage raconte la re´volte des Grecs installe´s par Alexandre dans les Hautes Satrapies. OCBC, Œuvres, t. XIX, p. 335, n. a, et pour le renvoi de la note suivante pp. 334–335.

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disait a` l’autre que des divinite´s charge´es de fers ne pourraient le quitter pour suivre ses ennemis a. Mais cette dernie`re opinion, proportionne´e aux notions vulgaires, dominait seule dans la religion publique. Des dieux si imparfaits par leur nature physique, si vicieux par leurs attributs moraux, ne pouvaient pas plus que ceux des Grecs inspirer a` leurs adorateurs une ve´ne´ration profonde et since`re : les traditions sacerdotales ne sont pas moins que la mythologie home´rique remplies de fables qui montrent les hommes preˆts a` se re´volter contre les dieux. En Scandinavie, ils vivent retranche´s dans une citadelle, et leur portier Heimdall b garde soigneusement le pont c qui faciliterait l’entre´e de leur demeure. Hothar et Biarcon de´fient au combat tout l’Olympe du Nord et Odin lui-meˆme d. Gylfe brise dans la main de Thor sa pesante massue. Aux Indes, le monde est a` peine cre´e´, qu’un ge´ant chasse du ciel et de la terre toutes les divinite´s e. Un simple mortel les perce a` coups de fle`ches f. Plus tard, frappe´es de terreur, a

b c d e f

Il est assez curieux de comparer ces explications sacerdotales a` celles des artistes grecs. V. t. III, p. 341–3421. Edda, 5e fable2. L’arc-en-ciel. MALLET, introd., page 1733. As. Mag. I, 1314. Ramay., 53e sect., pag. 5495.

4–7 imparfaits ... la mythologie ] re´daction diffe´rente imparfaits dans leur ... vicieux dans leurs ... ne pouvoient inspirer a` leurs adorateurs ... since`re : aussi les traditions sacerdotales ne sontelles pas moins que la mythologie Ms-texte 8–10 En Scandinavie ... faciliterait ] re´daction diffe´rente Ceux des Scandinaves vivoient retranche´s ... Heimdall gardoit ... pont qui auroit pu faciliter Ms-texte 12-p. 113.3 Aux Indes ... nouvelles. ] re´daction diffe´rente, le texte et la note partiellement dans la col. de gauche a` peine le monde e´toit-il cre´e´ qu’un 〈Un〉 Ge´ant chasse de la terre & du ciel les divinite´s de l’Inde & les force a´ se re´fugier dans de sombres cavernes. Plutard, ces meˆmes Dieux frappe´s de terreur a` l’aspect d’un roi ... invincible, (Viranrisincha. As. Res. III. 46.) prennent chacun un nouvel attribut, un 3e œuil 4 teˆtes, 4 bras, 4 visages, un cimeterre, un glaive, une faulx. Ms-texte 1 2

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OCBC, Œuvres, t. XIX, pp. 334–335. Dans cette 5e fable, il est bien question de la demeure des dieux qui s’appelle Asgard, mais pas d’un gardien Heimdall. BC aurait pu renvoyer a` Mallet, Introduction a` l’histoire du Dannemarc, p. 65, ou` il est question de Heimdall et de l’arc-en-ciel, le pont qui permet d’entrer dans la demeure des dieux. La 7e fable de l’Edda parle de l’arc-en-ciel, mais pas de Heimdall ; son histoire est raconte´e dans la 15e fable (Mallet, Edda, pp. 97 et 143). Voir le livre IV de l’Introduction a` l’histoire du Dannemarc sur le combat victorieux mene´ par Hother contre Odin, Thor et d’autres dieux (e´d. de 1755, p. 139). Le nom de Biarcon y figure dans la note a, qui exploite un passage du livre I de Saxon le Grammairien. Le renvoi vise l’article de Friedrich Majer, «Die Verkörperungen des Wischnu» (Asiatisches Magazin. Verfasst von einer Gesellschaft Gelehrten und herausgegeben von Julius Klaproth, ` la page indique´e, Majer parle des t. I, Weimar : Industrie-Comptoir, 1802, pp. 116–138). A exploits du ge´ant Eruniakschen, qui chasse les dieux et les premiers habitants de la terre. Un autre motif de l’histoire des arcs est e´voque´ par BC. Voir le chap. 53 (e´d. de Serampore, pp. 548–549 ; e´d. de Londres, p. 379).

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a` l’aspect d’un roi couvert de gloire, et que ses auste´rite´s rendent invincible a, elles multiplient, pour lui re´sister, leurs yeux, leurs teˆtes, leurs bras, qui brandissent des armes nouvelles b. En E´gypte enfin, les dieux se transforment en animaux, se de´robant ainsi aux mortels qui les surpassent en audace et en force c. Chose bizarre a` dire, et ne´anmoins vraie ! ces absurdite´s, ces extravagances, cette de´gradation de la nature divine, prouvent, qui le croirait ! l’ascendant de la logique sur les preˆtres comme sur le peuple d. Leur inte´reˆt les a contraints a` faire de leurs dieux des eˆtres passionne´s, et, par conse´quent, vicieux et injustes ; le raisonnement les oblige ensuite a` les concevoir malheureux, parce qu’ils sont injustes et passionne´s. Le sentiment religieux se de´bat en vain contre les imperfections dont les religions sacerdotales entachent ses idoles : la raison qui s’e´claire essaie inutilement de rendre leurs attributs moins incohe´rents ou leur conduite moins scandaleuse. Les preˆtres s’y opposent. Ils aiment mieux briser le sentiment religieux que modifier une tradition, quelque re´voltante qu’elle soit devenue : ils aiment mieux e´touffer la raison que lui sacrifier un seul dogme. a b c

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Viranrisinha. As. Res., III, 461. DIOD. I, 2. Nous avons repousse´ l’usage que Diodore veut faire de cette fable, pour expliquer l’adoration des animaux en Egypte ; mais elle est pre´cieuse, comme dogme populaire, parce qu’elle constate l’opinion adopte´e sur les relations des dieux et des hommes2. V. au sujet de cette puissance de la logique chez les Grecs, le t. III, p. 356 et 3963.

3–5 En E´gypte ... force. ] re´daction diffe´rente Les Dieux de l’Egypte s’e´toient jadis me´tamorphose´s en animaux, parceque, moins nombreux que les mortels, ils n’avoient de´couvert que ce moyen de leur e´chapper. Ms-texte 5–9 Chose bizarre ... passionne´s, ] re´daction diffe´rente Tel est l’ascendant de la logique. Il pe`se sur ... inte´reˆt les force a` faire ... injustes, & le raisonnement les contraint a` les peindre comme expose´s au malheur, non moins qu’aux vices & aux passions. Ms-texte 17 dogme. ] dogme absurde. Ms-texte 1

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Voir la publication d’Alexander Macleod «A Royal Grant of Land in Carnata, communicated by Alexander Macleod, Esq., and translated from the Sanscrit by the President», Asiatick Researches, London : Vernor et al., t. III, 51807, pp. 39–53. BC re´sume le § 20 du texte (pp. 45–46). Le renvoi a` Diodore est impre´cis (livre I, deuxie`me partie). Il faut lire I, 90. C’est la` qu’on trouve en effet une explication au culte des animaux en partant des guerres entre les premiers hommes, ou` «le plus fort l’emportait toujours sur le plus faible. Mais par la suite, ceux qui e´taient les moins forts [...] se rassemble`rent et prirent pour signe de ralliement les animaux qui furent plus tard tenus pour sacre´s. [...] Et voila` pourquoi [...] les diverses populations de l’E´gypte honorent ceux des animaux qui ont e´te´ tenus pour sacre´s par eux de`s l’origine» (Bibliothe`que historique, t. I, Paris : 1993, pp. 166–167). On pourrait renvoyer aussi au chap. 86. OCBC, Œuvres, t. XIX, pp. 344–345 et 370.

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Ils croient e´luder les conse´quences qui les importunent en prodiguant a` des eˆtres pervers des e´pithe`tes que chaque re´cit de´ment ; et de la` re´sulte, dans ces religions, malgre´ leur arrangement syste´matique, plus de contradictions, et des contradictions plus palpables que dans les croyances simples et grossie`res que se serait construites l’esprit humain. Malgre´ les limites qui circonscrivent les forces physiques des essences divines, les preˆtres les proclament des eˆtres tout puissants ; malgre´ la jalousie qui tourmente ces divinite´s envieuses, ils leur attribuent une bonte´ sans bornes ; malgre´ les vices qui souillent leur caracte`re moral, et les erreurs qui obscurcissent leur intelligence, ils les appellent des eˆtres parfaitement justes et parfaitement sages ; et malgre´ les malheurs ine´vitables, suite de passions de´sordonne´es, ils leur assignent en partage le bonheur supreˆme. Ainsi, de tout temps, dans les religions sacerdotales, l’homme s’est de´battu douloureusement au milieu d’alle´gations discordantes. Loin d’avoir recueilli quelque avantage de sa soumission au sacerdoce, loin d’avoir e´te´ conduit par ce guide privile´gie´, seul investi du droit de l’instruire, vers une doctrine meilleure et plus pure, notre de´plorable et aveugle race a courbe´ sa teˆte sous des fables cent fois plus extravagantes que celles que son imagination aurait enfante´es. Elle s’est prosterne´e devant des eˆtres plus corrompus que les fantoˆmes de ses propres reˆves ; elle s’est pre´cipite´e dans un abıˆme plus profond de superstitions et de de´lire, et le prix de l’abdication de son intelligence a e´te´ pour elle durant des sie`cles l’esclavage, l’erreur et l’effroi. Cependant une autre re´flexion qui nous a de´ja frappe´ se repre´sente a` nous. Si l’homme a prodigue´ ses adorations a` des dieux imparfaits, corrompus et malfaisants, n’est-ce pas une preuve que l’adoration de divinite´s quelconques est un besoin de son ame ? Les Grecs, libres des preˆtres, perfectionnent ce qu’ils adorent : les nations soumises au sacerdoce adorent ce qu’il leur offre, sans pouvoir rien perfectionner. L’absurdite´ de certaines formes reli gieuses, loin d’eˆtre un argument contre la religion, est une de´monstration que nous ne pouvons nous en passer. Nous nous trouvons encore moins mise´rables sous la plus de´fectueuse de ces formes, que nous ne le serions d’une privation comple`te. L’histoire de la de´cadence du polythe´isme nous le prouvera.

2 de´ment ; ] dement & contrarie : Ms-texte 3–5 contradictions ... humain. ] 〈d’inconse´quences〉 de contradictions que dans la religion simple & grossie`re que l’esprit humain se seroit cre´e´e. dans la col. de gauche on trouve a` la hauteur de ces mots une note de 5–14 Malgre´ ... travail a` faire pour le 9e livre 94 pages[,] fait 35 1/2, reste 58 1/2 Ms-texte discordantes. ] manque Ms-texte 14 Loin ] Ainsi, loin Ms-texte

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Livre IX, chapitre IV – D’une notion singulie`re re´duite en dogme

Chapitre IV. D’une notion singulie`re dont on n’aperc¸oit, dans la religion grecque, que quelques vestiges, mais qu’on trouve de´veloppe´e et re´duite en dogme dans les religions sacerdotales.

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De toutes les opinions dont le sauvage se berce dans son ignorance, la premie`re qui semble devoir se de´cre´diter est celle qui suppose que les dieux peuvent eˆtre punis par les hommes, quand ils trompent leurs espe´rances et manquent a` l’engagement tacite qui, a` cette e´poque, sert de base a` la religion. En effet, cette opinion, inhe´rente au fe´tichisme, s’affaiblit a` mesure que le polythe´isme fait des progre`s : si les ne`gres brisent leurs fe´tiches lorsqu’ils pensent avoir a` s’en plaindre, les peuples qui se civilisent renoncent a` cet acte insense´ d’une vengeance illusoire. Ils croient long-temps, ils croient toujours peut- eˆtre, que leurs dieux se laissent se´duire, mais ils n’imaginent plus qu’on puisse les punir. Lorsque dans un passage d’Home`re, le fils de Pe´le´e accusant Apollon, dit qu’il se vengerait de ce dieu s’il en avait la force, il reconnaıˆt son impuissance, meˆme en manifestant sa cole`re. Pausanias rapporte a que Tyndare, imputant a` Ve´nus les adulte`res et la vie licencieuse de ses filles, fit voiler et enchaıˆner sa statue : mais Pausanias ne voit dans cette action que de la de´mence. Sans doute, dans les calamite´s impre´vues, au milieu des acce`s du de´sespoir, l’homme police´ revient quelquefois a` cette ide´e, parce que la a

Lacon. ch. 151. E´tablissement du texte : Manuscrits : 1.) BCU, Co 3453 2.) BCU, Co 3262/1, pp. 40–49 [=Ms-texte] et Co 3262/2, pp. 22–25 [=Ms-notes] Imprime´ : De la Religion, conside´re´e dans sa source, ses formes et ses de´veloppements, t. IV, Paris : Chez Pichon et Didier, e´diteurs, 1830, pp. 44–54.

1–4 Chapitre ... trouve ] Chap. 8. D’une ... n’aperc¸oit que des vestiges dans la religion grecque, mais qu’on retrouve Co 3453 9 a` l’engagement tacite ] aux engagemens re´ciproques Co 3453 e´poque, sert ] e´poque grossie`re, servent Co 3453 15 peut-eˆtre,] ce mot manque Co 3453 20–21 fit ... statue : ] lui fit e´lever une statue qui la repre´sentoit voile´e avec des chaines aux pieds. Co 3453 21–22 ne voit ... de´mence. ] de´clare absurde cette ide´e de vengeance contre une De´esse. Co 3453 1

Pausanias, Description de la Gre`ce, livre III, chap. XV, 11. L’auteur raconte deux le´gendes pour expliquer la signification de l’Aphrodite enchaıˆne´e de Sparte. La premie`re dit que cette statue symbolise la fide´lite´ conjugale ; l’autre, celle dont parle BC, est juge´e par Pausanias comme une tradition fautive et insense´e.

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passion bouleversant tout son eˆtre, le fait reculer en-dec¸a` de ses progre`s, et le reporte pour ainsi dire dans le chaos de l’e´tat sauvage. Il se pre´cipite alors sur ses dieux, renverse leurs autels, brise leurs statues. Tel on vit le peuple de Rome, apre`s la mort de Germanicus, traıˆner dans les rues les simulacres sacre´s, et leur prodiguer les insultes et les coups dont il euˆt voulu frapper Tibe`re a. Tel on le vit encore, apre`s le meurtre de Caligula, punissant les dieux d’avoir laisse´ re´gner un tel monstre. Mais cette fureur sacrile´ge n’est plus motive´e sur un dogme pre´cis, ce n’est plus un calcul sur le caracte`re des dieux, un chaˆtiment qu’on leur inflige dans l’espe´rance de les corriger ; c’est une victime expirante et de´sarme´e, qui s’e´lance sur ses bourreaux, par une impulsion irre´fle´chie. Le pouvoir absolu qui tourne les teˆtes, et met les tyrans au niveau et meˆme au-dessous de la populace la plus ignorante, entraıˆna Auguste aux meˆmes exce`s ; ayant, lors de la guerre qu’il faisait au jeune Pompe´e, perdu sa flotte dans une tempeˆte, il de´fendit qu’aux jeux du cirque, ou` l’on portait en pompe les images des dieux, on rendıˆt les meˆmes honneurs a` celles de Neptune b. Mais ce qui n’est dans le polythe´isme inde´pendant qu’un mouvement fortuit et de´sordonne´, devient dans les croyances sacerdotales, un dogme consacre´, re´gle´ par des rites solennels. a b

TACIT. Ann. II1. SUET. in Aug., cap. 162.

6–7 Tel ... monstre. ] phrase absente de Co 3453 8 motive´e sur ] l’effet d’ Co 3453 9 un chaˆtiment ] une punition Co 3453 10 c’est ... de´sarme´e, ] C’est le dernier effort d’une victime ... de´sarme´e. Co 3453 11 irre´fle´chie ] toute machinale Co 3453, Ms-texte 11–18 Le pouvoir ... solennels. ] Il en est autrement dans le Polythe´isme sacerdotal. La` ce dogme singulier se conserve dans toute sa force. Le sacerdoce proce`de re´gulie`rement & avec des formes solennelles au chatiment des Dieux rebelles a ses prie`res. Co 3453 Le pouvoir ... Neptune. ajoute´ dans la col. de gauche, y compris la note ; puis le texte continue comme dans Co 3453, a` l’exception d’un mot Il en est ... solennelles a` la punition ... prie`res. Ms-texte a` la hauteur de ce passage on trouve dans la col. de gauche un extrait du Catholique que BC a utilise´ ci-dessous, p. 121, lignes 12–14 La male´diction de Soucra empeˆche Boudha d’eˆtre adore´ dans les Indes. d’Eckst. XXIV. 3153. ceci se rapporte aux pages Juiv. Ms-texte 1

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Voir Tacitus, Annales, lib. II, cap. 82. Le re´cit de Tacite, bien que trahissant l’e´motion, est plus sobre que ne le sugge`re BC : «hos vulgi sermones audita mors adeo incendit, ut ante edictum magistratuum, ante senatus consultum sumpto iustitio desererentur fora, clauderentur domus, passim silentia et gemitus, nihil compositum in ostentationem ; [...] cursant per urbem, moliuntur templorum fores.» Sue´tone, De vita Cæsarum libri VIII, «Divus Augustus», chap. XVI, 2 : «die circensium proximo sollemni pompæ simulacrum dei detraxererit». BC note une ide´e qu’il a trouve´e dans le long article du baron d’Eckstein, «Nala et Damayanti, Episode tire´e du Mahabharata» (Le Catholique, t. VIII). D’Eckstein raconte l’amour de Soucra pour Bouddha qui refuse son amour. «Elle s’indigne et maudit son amant, male´diction qui le prive d’une partie de sa gloire et l’empeˆche d’eˆtre adore´ dans l’Inde» (pp. 315–316).

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Lorsque d’excessives chaleurs, nous apprend Plutarque a, ame`nent en ´Egypte une peste de´vorante ou d’autres malheurs, les preˆtres portent en silence, entoure´s des te´ne`bres de la nuit, dans des lieux e´carte´s, quelquesuns des animaux sacre´s qu’ils adorent. Ils s’efforcent d’abord de les effrayer par des menaces : mais si ces dieux sont inexorables et si le mal dure, les preˆtres les de´vouent et les immolent. Les Thraces lanc¸aient durant l’orage des fle`ches contre le ciel, pour punir le dieu dispensateur de la foudre b ; et le vent du midi ayant desse´che´ les citernes des Psylles, peuple de Libye, ils re´solurent de de´clarer la guerre a` la divinite´ qui dirigeait le vent du midi c. Les Indiens de nos jours, me´contents de leurs dieux, les accablent d’injures, a b c

De Isid1. HE´ ROD. IV, 902. HE´ ROD. IV, 1733.

3 te´ne`bres de la nuit ] a` la hauteur de ces mots commence dans la col. de gauche l’extrait d’un article du baron d’Eckstein dans la mythologie Indienne, une toute puissance est attache´e a` la male´diction, & quiconque a maudit ne peut annuller sa male´diction. elle est irre´vocable. cette espe`ce de fatalite´ tient au pouvoir magique de la parole, dans laquelle la vertu de la cre´ation est cense´e re´sider. on peut toutefois pre´venir les effets d’une male´diction, en maudissant soi-meˆme 5 inexorables ] insensibles Co 3453 6 les celui qui va maudire. d’Eckst. XXII. 1174. immolent. ] a` la hauteur de ces mots commence dans la col. de gauche un ajout comprenant trois ide´es La fille de Tarouka, un mauvais ge´nie, me´tamorphose´e en monstre par la male´diction d’un sage. Ramayan. p. 276. nous avons la force de 〈cha〉 forcer les Dieux a` changer de place, disent les filles de lacune pour le nom a` Vayou. Ramayan. p. 3285. Les Ve`des de´fendent formellement les male´dictions, tant leur puissance e´tait reconnue. d’Eckst. XXIV. 2566. 6 lanc¸aient ] tiraient Co 3453 9 de de´clarer ... midi. ] d’un consentement unanime de faire la guerre au vent du midi. Co 3453 10-p. 118.3 Les Indiens ... sacrifices. ] phrase absente de Co 3453 dans Co 3262, on lit dans la col. de gauche l’abbe´ Dubois qui a observe´ avec soin les Indiens de nos jours, raconte que lorsqu’ils sont me´contens de leurs Dieux ils les accablent ... d’injures, & que ceux ... l’autorite´ font boucler la porte des temples des Divinite´s avec ... puisse y entrer pour ... sacrifices. Dubois. I. 417 Ms-texte 1

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Paraphrase d’un passage de De Iside et Osiride, chap. 73, ou` Plutarque dit expresse´ment que le sacrifice des animaux conduits dans un lieu se´pare´ est conside´re´ par les preˆtres comme une punition des dieux. Il faut lire «IV, 94». La tribu lybienne des Psylles, a` cause d’une grande se´cheresse, a duˆ quitter la contre´e qu’elle habitait et a e´te´ e´crase´e par les Nasomones, leurs voisins au midi. He´rodote, dans sa description de la Lybie, raconte la fable de la guerre des Psylles contre le vent qui a de´sse´che´ leur pays. BC copie quelques phrases de l’article «Nala et Damayanti», cite´ ci-dessus, p. 92, n. 1 et p. 104, n. 3. Le contexte : la conspiration des mauvais esprits Kali et Dwapara contre Nala et sa femme. BC cite, dans la version du Co 3453 (voir la variante a` la ligne 6), deux passages du Ramayna. La premie`re se lit au chap. XXIV (e´d. de Serampore, p. 276 ; e´d. de Londres, p. 188), la seconde au chap. XXIX (e´d. de Serampore, pp. 327–328 ; e´d. de Londres, pp. 225– 226). Le nom a` ajouter dans la lacune est Koosha-nabha. BC re´sume un raisonnement du baron d’Eckstein sur la puissance de la male´diction de Damayanti contre le de´mon Kali qui a subjugue´ l’esprit de Nala.

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et ceux d’entre eux qui ont en main l’autorite´ ferment la porte de leurs temples avec des fagots d’e´pines, afin qu’on ne puisse y pe´ne´trer pour y offrir des sacrifices a. Il semble bizarre que la meˆme autorite´ qui travaille avec une ardeur et une activite´ soutenues a` mettre entre les dieux et les hommes un intervalle toujours plus vaste, maintienne, dans les religions dont elle s’empare, des pratiques blessantes pour la majeste´ divine. Cette singularite´ tient a` deux causes : d’une part a` la persistance dans tous les anciens usages ; de l’autre a` ce que, se constituant seul interme´diaire entre le ciel et la terre, le sacerdoce se rend en quelque sorte responsable de la conduite des dieux. Il a besoin alors de s’arroger sur eux une certaine juridiction, sous peine d’eˆtre conside´re´ comme un inutile et impuissant auxiliaire ; et, si l’on suppose les dieux obstine´s, cette juridiction, de quelques formes respectueuses qu’elle soit reveˆtue, avec quelque adresse qu’elle soit de´guise´e, doit aboutir, et aboutit en effet, a` une violence faite aux puissances surnaturelles, et meˆme a` des chaˆtiments qu’on leur inflige. Tous les peuples soumis aux preˆtres ont nourri des ide´es plus ou moins semblables. Les Sabe´ens concentraient dans des talismans et des amulettes l’influence des astres qu’ils obligeaient a` les exaucer. Quelques docteurs a

DUBOIS, I, 4171.

8 persistance dans ] persistance du sacerdoce dans Co 3453 9 seul ] l’unique Co 3453 9–10 le sacerdoce ] il Co 3453 10-p. 122.11 dieux. Il a ... explication ; ] Dieux & craignant que la divinisation ne se rebute par l’inutilite´ de ses tentatives, cherche a` la ranimer par l’exercice d’une jurisdiction imaginaire. Les usages, par leurs enchantemens pre´tendoient faire violence aux Dieux meˆmes. (note Herod. VII. 43. Plin. Hist. Nat. XXXI) Co 3453 17–18 Tous les peuples ... semblables. manque Ms-texte 19 obligeaient ] contraignoient Ms-texte 19-p. 119.1 Quelques ... contrainte. ] l’e´bauche de cette phrase et le texte de la note dans la col. de gauche Violences faites aux Dieux chez les Juifs. Vitringa ... V. 10. dans Reinhard2. Ms-texte 20 417. ] la source porte 427., faute de copie que nous corrigeons en adoptant la lec¸on de Ms-text

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BC utilise des formulations de la dernie`re phrase de la note qu’on trouve a` l’endroit indique´. La variante atteste que BC pensait encore ajouter a` la se´rie des auteurs cite´s ci-dessus Philipp Christian Reinhard, dont l’ouvrage Abriß einer Geschichte der Entstehung und Ausbildung der religiösen Ideen (Jena : Akademische Buchhandlung, 1794) est a` beaucoup d’e´gards tre`s proche de la the´orie constantienne, et ceci a` tel point qu’on peut se demander si cet essai n’a pas souvent inspire´ notre auteur. BC vise la p. 117 de l’ouvrage, ou` Reinhard parle des enchantements qui pouvaient faire violence aux dieux et cite deux sources (Diodore et Euse`be) que BC reprendra dans sa note. Voir les notes de lecture (BCU, Co 3293, note 15).

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juifs enseignaient contre Je´hovah des moyens de contrainte a. Aux Indes, les man trams b, et plus encore les deux irre´sistibles formules Bala et Attibala, a

b

VITRINGA, de Synag. Veter., lib. III1. ORIGE` NE, περιÁ ευÁ χηÄ ς. CASAUBON, Exercit. anti Baron. XIV, 82. Corresp. de Creutzer et d’Hermann3. DIOD. II. EUSEB. Præp. evang. IV., 1 ; V, 104. Les mantras ou mantrams sont des prie`res ou formules consacre´es qui ont la vertu d’enchaıˆner les dieux et qui leur imposent une obe´issance dont ils ne sauraient s’affranchir. L’univers, disent les Indiens, est au pouvoir des dieux ; les dieux au pouvoir des mantrams ; les mantrams au pouvoir des brames, donc les brames sont plus que des dieux. (DUBOIS, I,

4 Euseb. ] la source porte Enseb. Rel4 6–9 Les mantras ... dieux. ] le de´but de la note dans la col. de gauche Les mantrams ... les dieux & de les forcer a` faire ce que veulent ceux qui employent ces formules. l’univers ... les brames sont des Dieux. Il y en a dont la re´citation fait trembler toutes les Divinite´s rassemble´es. les sorciers posse`dent aussi ces derniers quatre mots re´pe´te´s par inadvertance des mantrams, non moins efficaces : on les prive de leur pouvoir en leur arrachant deux dents de devant : alors leurs mantrams, indistinctement articule´s, perdent la plus grande partie de leur force. Ms-text 1

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Cette note cite plusieurs auteurs qui ne confirment pas directement ce que dit BC, mais parlent ne´anmoins de faits qui s’y rapportent. Le premier, Campegius Vitringa (1659–1722), the´ologien re´forme´ a` l’universite´ de Franeker, a publie´ un ouvrage intitule´ Campegii Vitringæ, De Synagoga vetere libri tres [...] Leucopetræ : Apud Io. Frid. Wehrmannum, MDCCXXVI. Dans le livre I, pars II, cap. I (pp. 273–275), il est question de l’invocation justifie´e du nom de dieu. – BC cite Orige`ne, De orationibus et vise probablement le passage contre la battologie («in oratione vane loquitur»), PG, t. XI, col. 479 et 482. BC semble renvoyer a` un passage de l’ouvrage Isaaci Casauboni, De rebus sacris & ` l’endroit ecclesiasticis exercitationes XVI, Francofurti : curantib. Ruland, M. DC. XV. A indique´ par BC (Exercitio XIV, chap. VIII, pp. 234b–237a), on trouve des re´flexions sur des «Exempla battologiæ & multiloquii in precibus paganorum» (p. 234a) et des exemples de cette pratique dans les rites modernes : «battologiæ exempla in hodiernis formulis multa sunt : ut, cu verbi gratia, in Psalterio Iesu quindecim huiusmodi oratiunculæ proponuntur : ‘Iesu, Iesu, Iesu, miserere : Iesu, Iesu, Iesu, adiuva : Iesu, Iesu, Iesu, da hic mihi purgatorium meum’. quarum singulæ decies docetur repeti» (p. 235b). Les prie`res des paı¨ens ressemblent a` ce que dit BC des doctrines de certains docteurs juifs : «Adde quod Pagani crediderent, suos Deos coaceruatis elogiis & cogestis capi titulis» (p. 236b). Le renvoi a` Gottfried Hermann und Friedrich Creuzer, Briefe über Homer und Hesiodus, vorzüglich über die Theogonie, Heidelberg : August Oswald’s Universitäts-Buchhandlung, 1818, provient des notes de lecture de BC. Aucun passage de cette correspondance ne parle de ce genre de contraintes. La mention de Diodore renvoie sans doute aux pages sur les Chalde´ens (livr. II, 29–31) ou` il est question de la divination et de leur art de pre´venir les maux (e´d. de Strasbourg, t. II, pp. 88–97). – BC effectue deux renvois a` l’ouvrage d’Euse`be, au livre IV, chap. 1, qui traite des oracles paı¨ens en ge´ne´ral et re´fute leur efficacite´, au livre V, chap. 10, qui de´bute par cette phrase : «Je suis trouble´ a` la pense´e que ceux que l’on prie comme supe´rieurs se laissent donner des ordres comme des infe´rieurs : alors qu’ils exigent que le fide`le soit juste, ils consentent a` commettre eux-meˆmes l’injustice si on le leur commande ; ils n’e´couteraient pas l’appel de celui qui s’est souille´ dans les plaisirs de l’amour, mais eux-meˆmes n’he´sitent pas a` entraıˆner les premiers venus a` des amours illicites» (La pre´paration e´vange´lique, t. III, p. 305).

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attirent les immortels sur la terre a. Dans plusieurs espe`ces de sacrifices, et notamment dans les ce´re´monies fune´raires, le preˆtre demande aux fide`les

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168, 186–1941.) Me´nandre, he´re´tique ou plutoˆt magicien du premier sie`cle, disciple ou rival de Simon le magicien, faisait, disait-il, violence aux ge´nies cre´ateurs du monde. (IREN. adv. Hæret., I, cap. 212.) On trouve cette ide´e adoucie et e´pure´e dans le christianisme primitif. La prie`re, dit saint Chrysostoˆme, e´teint le feu, adoucit les animaux fe´roces, apaise les combats, calme les orages, chasse les de´mons, ouvre les portes du ciel, brise les liens de la mort, gue´rit les maladies, e´loigne les maux, raffermit les cite´s e´branle´es, de´joue les complots, etc. (De incomprehens. dei, I. 489. STAUEDLIN, Hist. de la morale, II, 2583.) A mesure que le christianisme de´ge´ne´ra de sa purete´ et que les preˆtres prirent plus d’empire, cette notion devint plus grossie`re, et les chre´tiens du moyen aˆge conc¸urent de l’efficacite´ de la prie`re des ide´es peu diffe´rentes de celles des Indiens sur les mantrams. (Voy. Mein. Cr. Gesch., 249–255 ; et Vergleichung des Mittel-alters, vol. III4.) Chez les Juifs, la manie`re dont Jacob (Gene`se, 27) surprend, par une supercherie, la be´ ne´diction paternelle, qui ne´anmoins a son effet, rappelle le pouvoir des formules indiennes, faisant violence aux dieux. Ramayan, p. 258. Voy. pour plusieurs autres exemples de dieux contraints par les invocations des preˆtres, Guigniaud, 835. Dans l’Attereya Brachmana du Rigveda, la puissance des

3–9 Me´nandre ... 258. ] passage ajoute´ dans la col. de gauche Me´nandre ... magicien, pre´tendoit qu’il pouvoit par la magie qu’il enseignoit a` ses e´le`ves, faire violence aux ge´nies ou anges cre´ateurs ... Chrysostome, quand elle part du fond du cœur, e´teint ... 258. Ms-texte 9–13 A mesure ... vol. III.) ] l’e´bauche de ce passage se lit au bas de la p. 49 de Co 3262 Les chre´tiens des sie`cles pre´ce´dens croyoient a` l’efficacite´ de la prie`re pre´cise´ment comme violence faite aux 13–15 Chez ... dieux. ] phrase ajoute´e dans la Dieux. v. Mein. Cr. Gesch. ... III. Ms-texte col. de gauche Ms-notes 1 2

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BC cite presque litte´ralement le de´but du chap. XII de la premie`re partie de l’ouvrage de Dubois, intitule´ «Des mantrams». Il faut corriger le renvoi. Ire´ne´e parle de Simon le magicien et Me´nandre a` la fin du chap. 23 (§ 5) du livre premier de Adversus hæreses. Me´nandre se vante de pouvoir vaincre les anges qui construisaient le monde. BC paraphrase des re´flexions de Chrysostome qu’on peut trouver dans l’Home´lie sur la prie`re (Home´lies, discours et lettres choisies de S. Jean Chrysostome, traduits par M. l’Abbe´ Auger, nouvelle e´dition, t. II, Lyon : F. Guyot, 1826, pp. 479–494). Le renvoi a` la Premie`re home´lie sur l’incompre´hensibilite´ de la nature de Dieu semble eˆtre une erreur. – BC cite, pour appuyer son raisonnement, Stäudlin, qui a e´dite´ et comple´te´ un ouvrage de Michaelis : Moral. Herausgegeben und mit einer Geschichte der christlichen Sittenlehre begleitet von Carl Friedrich Stäudlin, Göttingen : im Vandenhoeck-Ruprechtischen Verlage, 1799–1823. BC a fait des extraits (en 1812) pour son ouvrage (Co 3293) et en posse`de au moins deux volumes dans sa bibliothe`que. Voir le Catalogue. BC, assez proche de Meiners, reproduit dans cet aline´a sur les prie`res beaucoup des ide´es de´veloppe´es par Meiners, Allgemeine kritische Geschichte der Religionen (Hannover : Helwigische Hofbuchhandlung, 1806–1807), livre IX, «Geschichte der Gebete, Anbetungen und Eide», t. II, pp. 245–306. BC renvoie ici aux pages se rapportant directement au sujet dont il parle. – Dans le t. III de l’ouvrage Historische Vergleichung der Sitten, [...] und der Religion, der Wissenschaften, und Lehranstalten des Mittelalters mit denen unseres Jahrhunderts, Meiners parle de l’astrologie dans un long chapitre, «Über den Aberglauben der scholastischen Jahrhunderte» (pp. 182–464). Une observation sur la pratique des prie`res se trouve dans le chap. VIII (t. II, pp. 253–255). BC e´voque le chap. 21 du Ramayuna, peut-eˆtre a` tort (e´d. de Serampore, pp. 256–262 ; e´d. de Londres, pp. 173–177). – Guigniaut parle dans son «Introduction» de la doctrine des

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s’il faut que les dieux assemble´s descendent : il commande ensuite a` ces dieux de s’asseoir sur l’herbe sacre´e, puis il les conge´die et leur permet a` tous de se retirer dans leurs habitations a. Un danger pourtant est a` craindre pour les preˆtres dans l’exercice de cette juridiction myste´rieuse. Les dieux peuvent n’eˆtre pas dociles. Il faut au sacerdoce une excuse. De la` vient la notion qu’un oubli, une ne´gligence, une souil lure enle`vent a` la ce´re´monie son efficacite´ b. Si la prie`re, dans la bouche du preˆtre, est doue´e d’une si vaste influence, la male´diction n’est pas moins puissante. Nous avons traite´ ce sujet dans un de nos pre´ce´dents volumes c, sous le rapport de l’action du climat sur les conceptions indiennes. Nous nous bornons ici a` ce qui concerne la juridiction du sacerdoce sur les dieux atteints par ses male´dictions. Bouddha, maudit par une de ses amantes dont il a de´daigne´ les feux, est abandonne´ de tous ses adorateurs1. La fille de Tarouka, demi-dieu ou puissant ge´nie, est

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preˆtres est e´leve´e fort au-dessus de celle des dieux. Ni les fle`ches divines, y est-il dit, ni les bras des mortels, n’atteignent celui pour qui des brames instruits ce´le`brent l’abischeca, ce´re´monie dans laquelle on re´pand sur celui qui en est l’objet une liqueur compose´e d’eau et de miel. (As. Res., VIII, 4072.) As. Res., VII, 255–2653. Ramay., pag. 1154. II, 144 et suiv5.

mages «qui donna a` la prie`re le pouvoir de contraindre, de lier, en quelque sorte, les dieux et les esprits» (p. 83), et il cite (en renvoyant entre autres a` Jamblique, Ammien Marcellin, Kircher, etc.) outre les Perses, les Chalde´ens, les E´gyptiens et les Juifs. BC a trouve´ ce fait dans une e´tude du baron d’Eckstein intitule´e «De l’e´tat actuel de la France et de l’Europe», chap. III, «De la migration des peuples et des causes de´terminantes de cette migration», Le Catholique, t. VIII, cahier 24, pp. 315–316. Voir ci-dessus, p. 116, la variante aux lignes 11–18. Voir Henry Thomas Colebrooke, «On the Vedas, or Sacred Writings of the Hindus», Asiatic Researches, London : Vernor et al., t. VIII, 1805, pp. 377–497. BC utilise pour sa note plusieurs passages des pp. 407–409. Voir Henry Thomas Colebrooke, «On the Religious Ceremonies of the Hindus, and of the Bra´mens especially», Essay II, Asiatic Researches, London : Vernor et al., t. VII, pp. 232– 287. BC renvoie a` une description de´taille´e des ce´re´monies. BC pense a` cette phrase du chap. 8 : «Whoever performs a sacrifice without due regard to the ordinance, immediatly comes to nought» (e´d. de Serampore, p. 115 ; e´d. de Londres, p. 76). OCBC, Œuvres, t. XVIII, pp. 131–132.

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transforme´e en monstre par l’anathe`me d’un sage a. Un autre enle`ve a` Rama, par le meˆme moyen, les lumie`res sublimes qui appartiennent a` sa nature ce´leste b ; et Parwatti voit tomber son culte, parce qu’un pe´nitent outrage´ prononce contre elle des impre´cations dans sa cole`re c. Les dieux de l’E´gypte sont expose´s aux meˆmes pe´rils. Nous arreˆterons, disaient leurs preˆtres, le vaisseau du soleil : nous livrerons au jour les myste`res de l’abıˆme : nos commandements seront respecte´s des dieux, ou nous les ferons pe´rir, s’ils re´sistent d. Cette juridiction, que le sacerdoce s’arroge sur des eˆtres dont il n’est cependant que l’organe ou le ministre, nous re´ve`le la cause d’un fait ce´le`bre dans l’histoire grecque, et reste´ jusqu’a` pre´sent sans explication ; ce fut en a b c d

Ramay., 2761. DUBOIS, II, 4042. Ibid., 3963. Jamblique, ou l’auteur pseudonyme qui a pris le nom de ce philosophe, borne ces menaces aux de´mons, eˆtres mixtes entre les dieux et les hommes4. Plus les lumie`res font de progre`s, plus en effet cette notion e´trange doit se restreindre a` des puissances d’un rang secondaire.

1–4 Un autre ... cole`re. ] l’e´bauche de ces phrases se lit dans la col. de gauche Male´dictions d’un Brame qui privent Brama des lumie`res supe´rieures de la divinite´. Dubois II. 404. L’abolition du culte de Parwatty ? suivant quelques uns l’effet des maledicitions d’un pe´nitent qu’il avoit recu avec peu de respect. ib. 396. suit encore une anecdote que BC n’utilise pas Devandren, maudit par Duruwassen, qu’il avoit offense´, perd tout ce qu’il posse`de & se voit chasse´ du Ciel avec tous ses ge´nies. Mayer art. Duruwassen. ib. Hist. de Bhadrakaly & de Davida. art. 5 Les dieux ... pe´rils. Nous ] Les Preˆtres Egyptiens Bhadrakaly, & aussi Durwen5. Ms-texte menacoient de leurs impre´cations les habitans des sphe`res celestes. Nous Ms-texte 8 re´sistent. ] suit un passage biffe´ avec une note 〈Les Devins Toscans arrachoient a` Jupiter son tonnerre & le fesoient a` volonte´ descendre du Ciel.〉 la note 〈La tradition Plin. Hist. nat. II. 53. la tradition relative a` Tullus Hostilius essayant d’attirer la foudre, & consume´ par elle, tient certainement a` ce pouvoir myste´rieux que s’arrogeoient les preˆtres e´trusques. Tit. Liv. I. 31.〉 Ms-texte et Ms-notes 9–10 Cette juridiction ... nous reve`le ] Ceci Ms-texte 1 2 3

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Raconte´ dans le chap. 24 (e´d. de Serampore, pp. 275–276 ; e´d. de Londres, p. 188). BC se trompe sur les noms. BC cite la male´diction adresse´e par un Brahme a` Rama, coupable d’avoir fait avorter sa femme. BC se trompe. Il est bien question de Parawatty, la femme de Siva, a` la p. indique´e. Mais elle est la victime de Brahma, et sera venge´e par Siva «en abattant une des teˆtes de Brahma dans un combat singulier». La suite du re´cit parle exclusivement de l’amour incestueux de Brahma pour sa fille Sarasvatty, qui est aussi son e´pouse, une des explications de la raison pour laquelle il n’a ni temples ni cultes. Une autre explication est la male´diction lance´e par un pe´nitent sur Brahma, parce que celui-ci l’avait accueilli de manie`re irre´ve´rencieuse. BC pense probablement au livre IV de l’ouvrage de Jamblique qui traite d’un proble`me souleve´ par Porphyre : «comment est-il possible que nous invoquons les dieux comme ceux qui nous sont supe´rieurs, et que nous leurs adressons des ordres comme s’ils e´taient nos infe´rieurs». Un autre passage qui pourrait eˆtre cite´ se lit dans le livre VI, chap. 5. BC cite dans la variante deux articles de Majer, Mythologisches Lexicon, a` savoir l’article «Duruwassen», t. I, pp. 576–577 et l’article «Bhadrakaly», t. I, pp. 181–190.

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pre´sence des Mages, et probablement par leurs conseils, que Xerxe`s fit charger l’Hellespont de chaıˆnes, apre`s l’avoir fait battre de verges a. L’e´tonnement des Grecs fut extreˆme lorsque cette action leur fut rapporte´e. C’est que leur polythe´isme, ayant fait des progre`s avec leur raison, avait laisse´ loin derrie`re eux le poly the´isme sacerdotal. Mais ce qu’ils trouvaient inexplicable nous est explique´ par la doctrine des mages, qui pre´tendaient dicter des lois aux dieux par leurs enchantements, et les chaˆtier quand ces lois e´taient de´sobe´ies b. Nous reconnaissons donc ici le fe´tichisme prolonge´ par l’influence des preˆtres, et nous reconnaissons aussi ce fe´tichisme dans ses a b

HE´ ROD. VII, 351. PLIN. III, Hist. nat., XXX2. Plusieurs sie`cles apre`s Xerxe`s, l’un de ses successeurs, Sapor II, l’adversaire de Julien, dans la guerre ou` pe´rit ce prince, soupc¸onnant ses dieux de combattre pour les Romains au sie´ge de Nisibis, leur lanc¸a des fle`ches dans sa cole`re (JULIAN. Orat. I et II. THEODORET, II, 26. ZOSIME, III3).

1 pre´sence des Mages ] leur pre´sence Co 3453 2 charger ... verges. ] jeter des chaines dans l’Hellespont, apre`s que par son ordre on l’eut frappe´ de verges. Co 3453 3 extreˆme ] sans bornes Co 3453 5 eux le ] eux ce Co 3453 6–8 explique´ ... Nous ] re´ve´le´ par l’exemple des sauvages : & dans ce qu’ils conside´raient comme le de´lire d’un despote, nous reconnaissons la prolongation du fe´tichisme par l’influence des Preˆtres. Nous Co 3453 6–9 par la doctrine ... et nous ] par l’exemple des sauvages & dans ce qu’ils conside´raient comme le de´lire d’un despote, nous reconnaissons la prolongation du fe´tichisme par l’influence des preˆtres. Nous Ms-texte 10 VII, 35. ] VII. 35. les mages pre´tendoient dictee [il faut lire dicter] des lois aux Dieux par leurs enchantemens, & les chatier quand ces lois e´toient de´sobe´ies. (Plin. Hist. nat. XXX. 1.) l’indication bibliographique ouvre la note suivante dans l’imprime´. Msnotes 1

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BC cite le fameux chapitre qui parle de la punition de l’Hellespont ordonne´e par Xerxe`s. Trois cents coups de verges, des chaıˆnes pour lier les pieds, un discours insultant adresse´ a` la mer qui n’est pas divine, mais une eau sale´e immonde. Ceux qui e´taient charge´s de la construction du pont de´truit par les tempeˆtes ont e´te´ de´capite´s. Le renvoi a` Pline, Histoire naturelle, vise le de´but du livre XXX (§§ 1–13) qui parle de la magie. Il n’y est pas question de la pre´tention des mages de dicter des lois aux dieux. BC cite les deux premiers discours de l’empereur romain Julien, E´loge de l’empereur Constance. Voir L’empereur Julien, Œuvres comple`tes, t. I, 1e`re partie, Discours de Julien Ce´sar, Texte e´tabli et traduit par J. Bidez, Paris : Belles Lettres, 1972, «L’E´loge de l’empereur Constance», chap. 19 (pp. 37–38) et chap. 22, (pp. 41–44). Le deuxie`me discours, «L’E´loge de l’impe´ratrice Euse´bie» ne parle pas de cette guerre. – Le renvoi a` Theodoret, Historia ecclesiastica, vise le livre II, chap. 31, qui raconte le sie`ge de Nisibis par le roi de Perse Sapor. Le re´cit le´gendaire de cette bataille voue´e a` l’e´chec parle de la cole`re de Sapor contre Dieu qui combat pour les Romains et ajoute qu’il tire une fle`che dans le ciel contre le Dieu des chre´tiens. Le re´sume´ de BC ne correspond pas au re´cit de la source. – Zosime, dans son livre Historiæ, parle du roi perse Sapor et des campagnes contre l’empire romain et des sie`ges de Nisibis dans le livre III. L’auteur ne parle pas d’une punition des dieux par Sapor. Voir Zosime, Histoire nouvelle [...] Texte e´tabli et traduit par Franc¸ois Paschoud, Paris : Belles Lettres, 1971–1989, en particulier t. III, 2, l’index vo Nisibis et Sapor II.

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fluctuations, quand nous voyons le roi de Perse, apre`s avoir outrage´ la mer, vouloir l’apaiser par des pre´sents magnifiques, pre´cipite´s au fond des abıˆmes a. Tous ces faits sont autant de preuves d’une ve´rite´ qui se reproduit souvent. L’esprit humain se montre plus inconse´quent, plus de´raisonnable, moins religieux meˆme, lorsqu’une classe d’hommes s’arroge le privile´ge de le guider, que lorsqu’il suit en liberte´ sa marche naturelle.

a

Les singularite´s du culte de la de´esse Dourga, au Bengale, ne seraient-elles pas un vestige de l’ide´e dont nous exposons ici le germe ? Sa feˆte annuelle dure trois jours. Pendant les deux premiers, on lui prodigue les plus grandes marques de respect : le troisie`me, on l’accable d’injures, et on la jette enfin dans une rivie`re. (GRANDPRE´ , Voy. dans l’Inde, Paris, 18011. STAUEDLIN, Rel. mag., II, 148–1532.) Peut-eˆtre y a-t-il aussi, au fond de cette ce´re´monie, quelque chose du bouc e´missaire des He´breux.

4–5 souvent ] souvent dans ce livre Co 3453 7 naturelle. ] suit un paragraphe En re´fle´chissant sur le caracte`re des Dieux du Polythe´isme sacerdotal on s’e´tonne de ce que le genre humain a prodigue´ ses adorations a` des eˆtres d’une nature si imparfaite, si corrompus & si malfaisants. mais c’est encore une preuve que l’adoration de Divinite´s quelconques est un besoin de l’ame : les Grecs, libres des Preˆtres, perfectionnent ce qu’ils adorent ; les nations soumises au Sacerdoce adorent ce qu’il leur pre´sente, sans pouvoir rien perfectionner. L’absurdite´ de certaines formes religieuses, loin d’eˆtre un argument contre la religion, est une de´monstration que nous ne pouvons nous en passer. Nous nous trouvons encore moins mise´rables sous la plus de´fecteuse de ces formes, que nous ne le serions d’une privation complette. L’histoire de la de´cadence du Polythe´isme nous le de´montrera. ajout a. fin du livre 7. Co 3453 8–13 Les singularite´s ... He´breux. ] la nonte manque dans Co 3453

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BC copie le renvoi a` l’ouvrage de Degrandpre´ chez Stäudlin, Magazin für Religions- Moralund Kirchengeschichte, Hannover : Gebrüder Hahn, t. II, 1803, p. 160. Voir Voyage dans l’Inde et au Bengale, fait dans les anne´es 1789 et 1790, [...] par L. Degrandpre´, Officier de la Marine franc¸aise, Paris : Dentu, an IX. − 1801, t. II, pp. 56–66. L’auteur raconte l’histoire de «Madame Dourga» qui «divinise le Gange» (p. 62), dont la feˆte est ce´le´bre´e tous les ans au mois d’octobre. BC cite la description des ce´re´monies contradictoires (pp. 62–66) reste´es chez Degrandpre´ sans explication satisfaisante. Il faut corriger le renvoi et lire «II, 160–166» (les pp. 148–153 de ce vol. traitent des sacrifices humains en E´gypte). BC re´sume le texte de Stäudlin en traduisant quelques formulations : «Während der ersten beiden Tage gibt es fast keine Art von Huldigung, die man ihr [a` Dourga] nicht erwiese ; doch am dritten ändert sich die Szene, man beschimpft sie [...] endlich trägt man das Idol auf den Schultern und stürzt es, mit Flüchen beladen, in den Ganges» (p. 161).

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Livre IX, chapitre V – Des notions sacerdotales sur la destine´e

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Chapitre V. Des notions sacerdotales sur la destine´e.

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Nous avons vu a contre quels proble`mes la raison de l’homme se brise, a

Vol. III, pag. 358–3661. E´tablissement du texte : Manuscrit : BCU, Co 3262/1, pp. 50–52 [=Ms-texte] et Co 3262/2, pp. 25–27 [=Ms-notes] Imprime´ : De la Religion, conside´re´e dans sa source, ses formes et ses de´veloppements, t. IV, Paris : Chez Pichon et Didier, e´diteurs, 1830, pp. 55–59.

2 Des notions ] a` la hauteur du titre commence dans Co 3262 un long passage qui raconte une histoire indienne que BC n’a pas utilise´e dans son ouvrage La puissance que les Indiens attribuent aux impre´cations porte ne´cessairement de la confusion dans leurs notions de la destine´e. Le Roi Daspatha, entraine´ par sa passion pour la chasse, ne´glige le soin de son Royaume & parcourt seul les foreˆts. La nuit, il se fait un lit de fleurs & de feuilles & allume des ronces pour se re´chauffer. au point du jour, re´veille´ par le bruit des Oreilles de son e´le´phant, qui lui tenoit lieu des trompettes royales il e´coutoit avec de´lices le chant me´lodieux des Oiseaux. Un jour, comme il poursuivoit une antilope, il arriva sur son coursier couvert de sueur & d’e´cume aux bords du Tamasa, fleuve fre´quente´ par de pieux solitaires. Tout a` coup un son qui part du fleuve parvient jusqu’a` lui. Il croit entendre un Elephant marchand dans les ondes : il lance une fle`che, action sacrile`ge, car les Rois & les guerriers ne doivent tuer les Elephans qu’au fort d’une bataille. un cri douleureux se fait entendre, & le cœur plein d’angoisse le Roi pousse son cheval au milieu des roseaux. un jeune homme baigne´ dans son sang frappe ses regards. C’est le fils d’un saint hermite. Le Roi porte la victime a` ses malheureux parens. il retire la fle`che de la blessure, & le jeune homme expire. Le vieux hermite, se fesant de ses larmes la libation qui doit accompagner la prie`re, prononce contre le Roi l’impre´cation puissante : Puisses-tu, courbe´ comme moi sous la vieillesse, mourir du de´sespoir de la perte d’un fils bien aime´. Le Roi rend au mort les derniers honneurs & se retire accable´ du poids des anathe`mes, semblable a` l’Oce´an qui renferme en son sein le feu invisible qui doit le desse´cher un jour. As. Res. X. 447–4482. Ms-texte 3-p. 126.5 Nous avons ... inintelligibles. ] le de´but de ce chap. est re´dige´ autrement dans Co 3262 Les religions sacerdotales rencontrent, pour toutes les notions relatives a` l’empire de la destine´e & a` ses rapports avec les Dieux, des difficulte´s qui leur sont particulie`res. Elles aspirent a` concilier quatre principes qui se combattent, la toute puissance divine, la bonte´ parfaite, la pre´science infinie, & le libre arbitre de l’homme, ne´cessaire pour fournir a` la justice ce´leste une occasion de se de´ployer. De cette combinaison complique´e re´sultent des contradictions sans nombre, & pour les e´luder, 〈les preˆtres〉 des subtilite´s inintelligibles. a` ce mot, BC pensait accrocher une note La pre´science de Dieu, dit le Bhagvat-Gita s’e´tend sur toutes choses excepte´ sur les actions des eˆtres qu’il a cre´e´s libres. Mais la plupart des e´ve´nemens qu’il est cense´ pre´voir e´tant la suite des actions libres qu’il ne pre´voit pas, comment accorder sa prescience des effets avec son ignorance des causes ? suit encore un long de´veloppement que BC utilise pour re´diger la note a de la p. 128 ; voir ci-dessous, a` cette p., les variantes aux lignes 9–14 Ms-texte et Ms-notes 1 2

OCBC, Œuvres, t. XIX, pp. 346–350. BC re´sume en la traduisant partiellement la narration de la chasse du roi Daspatha qu’il a

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meˆme dans les croyances libres, lorsqu’elle aborde la grande question de la destine´e et de ses rapports avec les dieux. Ces proble`mes ne sont pas moins insolubles dans les religions sacerdotales. Seulement les preˆtres s’efforcent de les e´luder par des sophismes plus complique´s et des subtilite´s plus inintelligibles. Tantoˆt une destine´e immuable, irre´sistible, pe`se sur les dieux et sur les hommes a. C’est par la volonte´ du destin que l’enle`vement de Sita s’effectue, malgre´ l’inte´reˆt que les immortels prennent a` Rama b. La fatalite´ tibe´taine, qui a cre´e´ le monde par un tourbillon et par un de´luge, a fixe´ par des lois invariables tous les e´ve´nements depuis le commencement des eˆtres jusqu’a` leur fin. Tous les dieux de la Scandinavie essaient vainement de re´sister au de´cret fatal qui condamne Balder a` la mort. En vain Freya obtient de tous les eˆtres vivants ou inanime´s le serment d’e´pargner les jours du dieu a

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Nous aurions beau, disent les Indiens, descendre dans le Naraka (l’enfer), e´tablir notre demeure dans le se´jour de Brama ou le paradis d’Indra, nous pre´cipiter dans les abıˆmes de la mer, gravir le sommet des plus hautes montagnes, habiter les plus affreux de´serts ou la cite´ la plus magnifique, nous re´fugier aupre`s de Yama (le dieu des morts), nous ensevelir dans les entrailles de la terre, affronter les pe´rils des batailles sanglantes, se´journer au milieu des insectes les plus venimeux, ou nous e´lever jusqu’au monde de la lune, notre destine´e ne s’accomplirait pas moins, et il ne nous arriverait que ce qu’il n’est pas en notre pouvoir d’e´viter. (DUBOIS, II, 1991.) Personne, disent les sages, ne meurt avant son heure. Rien n’est fortuit en ce monde. Une destine´e irre´vocable re`gle tout. (Mahabarad, dans l’e´pisode de Damayanti.) Ramayan.

6–7 Tantoˆt ... hommes. ] manque Ms-texte 7–8 C’est ... Rama. ] L’enle´vement de Sita par Ravana dans le Ramayan, s’effectue par la volonte´ du destin. Le grand Dasaratha est innocent, dit Yadjanatha. le destin seul a dispose´ de nos jours. Chezy. Ms-notes 8–11 La fatalite´ ... fin. ] au Tibet, la fatalite´ qui a cre´e´ ... e´ve´nemens qui doivent marquer l’existence des etres, de leur commencement a` leur fin. Ms-texte 11-p. 127.3 Tous les ... accompli. ] dans Co 3262, ce passage est une note, accroche´e au mot Valhalla, ci-dessous, p. 127, ligne 11 La mort de Balder prouve la supre´matie de la destine´e sur les Dieux Scandinaves. Ils essayent en vain de re´sister au decret fatal. En vain Frigga obtient ... le serment de respecter les jours du dieu menace´. Il pe´rit ... solliciter. Ms-notes 14–21 Nous aurions ... 199.) ] nous aurions beau descendre ... le plus affreux de´sert, ou bien la ville ou` re`gne Koube´ra, nous ... Jama, nous ensevelir ... affronter les dangers des combats, se´journer ... ve´nimineux, enfin e´tablir notre se´jour dans le monde de la lune ... 199. suit encore la phrase sur Sita qui passera dans le texte principal Ms-notes

1

lue dans l’e´tude d’Henry Thomas Colebrooke, «On Sanscrı˘t and Pra´crı˘t Poetry», Asiatic Researches, vol. X, London : 1811, pp. 389–474, et plus particulie`rement pp. 442–443. BC cite litte´ralement la stance 60 que Dubois transcrit dans le chap. XXVIII de la seconde partie de son ouvrage. − Les dernie`res phrases de la note renvoient a` Nala et Damayanti, l’histoire du Mahabarad souvent e´voque´e par BC. Il l’a lue dans la version publie´e dans les cahiers du Catholique.

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qu’elle prote´ge. Il pe´rit blesse´ par la ronce que la de´esse avait oublie´ ou de´daigne´ de solliciter. Mais ce re´cit meˆme renferme une contradiction manifeste : sans la ne´gligence de Freya, l’arreˆt du sort ne se fuˆt pas accompli. D’autrefois les dieux ont dans le principe quelque autorite´ sur la destine´e : mais, lorsqu’une fois ils ont prononce´, ils ne sauraient revenir sur leurs propres de´crets. A la naissance de chacun, Brama inscrit sur sa teˆte le sort qui l’attend, et que rien alors ne peut modifier, et il juge ensuite les mortels selon leurs œuvres, inconse´quence qui se reproduit partout. Odin, de`s l’origine du monde, a tout de´termine´ par des lois irre´vocables, et ne´anmoins ses guerriers se consument en efforts constants pour e´viter un tre´pas paisible qui les priverait du Valhalla. Quelquefois la gloire des dieux tient la place de la destine´e. Ils ont on ne sait trop quels devoirs envers cette gloire, et les remplissent aux de´pens des hommes a. En de´pit de cette terminologie recherche´e, le sens est le meˆme. La gloire des dieux, comme le des tin, n’est autre chose au fond qu’une borne a` leur puissance. La prescience divine est encore une autre difficulte´. Le polythe´isme home´rique laisse cette question dans le vague. Les habitants de l’Olympe sont plutoˆt pre´voyants a` notre manie`re qu’ils ne sont doue´s d’une connaissance assure´e de l’avenir. La prescience de Dieu, dans le Bhaguat-Gita, s’e´tend au contraire sur toutes choses, excepte´, ajoute le docteur indien, sur les actions des eˆtres qu’il a cre´e´s libres. Mais la plupart des e´ve´nements qu’il est cense´ a

Dieu veut eˆtre prie´, dit saint Philippe, meˆme par ceux dont il pre´voit la re´probation, non parce qu’il veut leur pardonner, puisqu’ils doivent mourir dans l’impe´nitence finale, mais parce qu’il trouve sa gloire dans la confirmation du de´cret qu’il a porte´ contre eux1.

4–11 D’autrefois ... Valhalla. ] Re´dige´ autrement Tantot les Dieux ont dans ce mot re´pe´te´ en tournant la page le principe ... de´crets. une croix renvoyant a` un autre passage non pre´cise´ Ainsi les Indiens pre´tendent qu’a` la naissance ... qui l’attend, & qui par la meˆme devient irre´vocable, a` ce mot, BC accroche une note Voyez sur la fatalite´ des Indiens, Herder, Phil. de l’hist. III. 432. Crishna reconnoit deux destine´es qui decident des qualite´s de l’homme au moment de sa naissance. le texte reprend (ce qui est eloigner l’objection sans la re´soudre) & Brama juge ... inconse´quence qui se 〈retrouve〉 reproduit partout. Odin, suivant l’Edda, a, de`s le commencement du monde, e´tabli des lois que rien ne peut changer, & cependant ses guerriers ... efforts infatigables pour ... Valhalla. Ms-texte et Ms-notes 23 Dieu ... dont ] Des chre´tiens peu e´claire´s sont tombe´s comme d’autres dans cet absurde sophisme. Dieu ... par les hommes dont Ms-notes 1

2

BC cite La Monarchie des He´breux, par son excellence le marquis de Saint Philippe, traduit de l’Espagnol par M. A. de Beaumarchais, La Haye : Henri Scheurleer, 1728, t. I, pp. 349– 350. La citation n’est pas litte´rale. Saint-Philippe e´crit : «Dieu ... prie´, meˆme pour les hommes, dont ... contre eux.» Herder, Ideen zur Philosophie der Geschichte der Menschheit, pp. 453–454. – Le second renvoi cite les trois dialogues «Über Seelenwandrung» que Herder a publie´s dans Zerstreute Blätter, Erste Sammlung, Gotha : Carl Wilhelm Ettinger, 1785, pp. 217–243.

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pre´voir e´tant la suite des actions libres qu’il ne pre´voit pas, comment accorder sa prescience des effets avec son ignorance des causes a ? Ainsi, contre des difficul te´s insurmontables, les preˆtres e´chouent aussi bien que le reste des mortels. Leur logique impuissante se brise contre ce qui est inexplicable, comme la logique la plus vulgaire. Ils n’ont qu’un privile´ge, celui d’interdire l’examen, et de tenir ainsi plus long-temps leurs contradictions inaperc¸ues ; ressource e´phe´me`re qui ne trouve aucun point d’appui dans le sentiment, et qui ne repose que sur l’engourdissement de l’intelligence.

a

Voulez-vous un exemple de ces subtilite´s indiennes chez des auteurs chre´tiens ? «Dieu, dit saint Philippe (Monarch. des He´breux, I, 56–57), laissa les gentils pour e´prouver Israe¨l : non que sa prescience ait besoin d’expe´rience pour reconnaıˆtre en un moment l’e´ternite´ entie`re ; mais il veut donner occasion a` la repentance de l’homme, en cas qu’il reconnaisse sa faute, ou a` de nouveaux pe´che´s, s’il s’obstine a` mal faire ; en un mot, il ne trouble en rien le libre arbitre, et agit, en connaissant l’avenir, comme s’il l’ignorait.»

2–3 Ainsi ... insurmontables ] Contre des difficulte´s insolubles Ms-texte 8 l’intelligence. ] l’intelligence, & dont l’intelligence en se re´veillant fait justice tot ou tard. Ms-texte 9–14 Voulez-vous ... l’ignorait.» ] voulez-vous voir le pendant des subtilite´s indiennes ... 57) avoit ordonne´ aux He´breux d’exterminer les gentils. Ils de´sire`rent les conserver : ce qu’ils souhaitaient n’e´toit pas agre´able a` Dieu, mais parce qu’ils le souhaitaient malgre´ sa de´fense, il le veut a` son tour, non qu’il se proposoit uniquement de satisfaire sa justice offense´e. Il pouvoit soustraire les occasions de pe´che´ : mais sa toute-puissance e´tant inse´parable de sa justice, il laisse agir sa providence, & celle-ci se proportionne a` la liberte´ humaine, afin qu’elle puisse me´riter ou de´me´riter, apre`s quoi il lui donne ou lui retire son secours. C’est pourquoi l’e´criture ajoute (Juges ch. II. v. 22) que Dieu laissa les gentils pour e´prouver Israe¨l par leur moyen, non que la pre´science divine ait ... l’ignoroit. Dieux, dit Rollin, pour pre´venir l’aveuglement des payens, permit quelquefois que les de´mons rendissent des re´ponses conformes a` la ve´rite´1. hist. ancienne. Ms-notes

1

BC pense au chapitre sur le de´mon de Socrate (Histoire ancienne des Egyptiens, des Carthaginois, des Assyriens, des Babyloniens, des Me`des et des Perses, des Mace´doniens, des Grecs, livre IX, chap. IV, § II, dans l’e´d. de Halle, t. II, pp. 175–178), ou` Rollin traite cette question.

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Livre IX, chapitre VI- Des moyens de communication avec les dieux

Chapitre VI. Des moyens de communication des preˆtres avec les dieux, dans les religions sacerdotales.

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Les communications imme´diates des dieux avec les hommes, meˆme dans les religions inde´pendantes des preˆtres, deviennent d’autant moins fre´quentes, que l’expe´rience leur oppose le te´moignage des faits, et d’autant plus suspectes, que le sacerdoce, quelque limite´ que soit son pouvoir, a un vif inte´reˆt a` les de´cre´diter. A plus forte raison, la de´faveur jete´e sur les communications de cette nature est-elle plus rapide et plus profonde dans les religions sacerdotales. On a vu, dans notre troisie`me livre a, les innombrables impre´cations des bonzes, des mages, et des preˆtres de l’E´gypte, contre toute tentative des profanes pour s’ouvrir vers le ciel une route directe. Mais comme on ne peut enlever cette espe´rance a` la multitude sans la consoler par des de´dommagements, l’astrologie et la divination prennent plus de consistance et plus d’e´tendue. Leurs re`gles sont plus fixes, leurs formes plus myste´rieuses,

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T. II, 88–941.

E´tablissement du texte : Manuscrit : BCU, Co 3262/1, pp. 53–66 [=Ms-texte] et Co 3262/2, pp. 27–39 [=Ms-notes] Imprime´ : De la Religion, conside´re´e dans sa source, ses formes et ses de´veloppements, t. IV, Paris : Chez Pichon et Didier, e´diteurs, 1830, pp. 60–75.

2 Des moyens ] a` la hauteur du titre dans la col. de gauche une note de travail a` faire pour 4 Les communications ] Nous avons finir le 9e livre 94 pages fait 52. reste 42. Ms-texte remarque´ pre´ce´demment que les communications Ms-texte 5–6 deviennent ... fre´quentes ] 〈devenoient〉 deviennent d’autant moins fre´quentes syntagme ajoute´ dans la col. de gauche Mstexte 7 quelque ... pouvoir ] syntagme ajoute´ dans la col. de gauche Ms-texte 11 troisie`me livre ] 3e livre a` la hauteur de ces mots, dans la col. de gauche, l’e´bauche d’une note qui sera utilise´e ci-dessous, p. 287, lignes 8–9 ; voir aussi la variante a` ces lignes d’s le chap. ... Ramayan. p. 16. Ms-texte 16-p. 130.1 plus fixes ... sont souvent ] fixes ... formes myte´rieuses ... pompes imposantes, leurs rites souvent Ms-texte

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OCBC, Œuvres, t. XVIII, pp. 102–105.

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leurs pompes plus imposantes, et leurs rites sont souvent barbares. On a vu a l’empire de l’astrologie entre les mains des preˆtres e´gyptiens. Son application s’e´tendait jusqu’a` la me´decine, et nous avons encore des manuscrits grecs, d’une e´poque assez peu recule´e a` la ve´rite´, mais qui, compose´s a` Alexandrie, contiennent manifestement les notions de l’ancienne E´gypte, et qui exposent les rapports des constellations avec les plantes b. Les meˆmes superstitions re`gnent sur les Indiens. C’est aux signes du zodiaque, et a` l’e´toile sous laquelle ils naissent, qu’ils deman dent le secret de leur avenir c. Ils tuent ou abandonnent les enfants dont la premie`re heure de´pend d’une a b c

Tome III, page 30–31, 371. Manuscrit de la bibliothe`que de Leyde, cite´ par CREUTZ. Symb. I, 286–2872. DUBOIS, II, 533.

1–3 On a vu ... Son application ] Les Egyptiens, au rapport d’He´rodote BC accroche ici une note He´rod. II. 824. suite du texte avoient consacre´ chaque mois & chaque jour du mois a` un Dieu particulier, & pre´disoient 〈de〉 la 〈chacun〉 destine´e de chacun, sa bonne ou sa mauvaise fortune & son genre de mort, en observant le moment de sa naissance. Ils e´tudiaient, d’apre`s leurs tables astronomiques, les influences des plane`tes sur les eˆtres un mot illis. & de´terminoient les biens & les maux que leurs aspects annoncaient. accroche´e a` ce dernier mot une note Diod. I. 2. 29. suite du texte Le lever & le coucher du soleil e´toient grave´s sur la couronne d’Olymandras lecture hypothe´tique avec des indications astrologiques. accroche´e a` ce dernier mot une note Diod. I. 5. suite du texte Une classe de preˆtres qu’on nommoit Storologues accroche´e a` ce mot une note Porphyr. de Abst. IV suite du texte e´toit voue´e exclusivement a` l’astrologie, & portoit dans les feˆtes les symboles de cette Science. BC accroche une note Creutz. Symbol. I. 286–287. suite du texte Son application Ms-texte et Ms-notes 6-p. 131.1 Les meˆmes ... pre´sages. ] e´bauche de ce texte, avec des de´veloppements que BC n’utilise pas, ainsi que de la note c Les Indiens – opinions astrologiques dans les e´crits de Varaha, surnomme´ Mihera ou le soleil, a` cause de sa science, auteur du Varahi Sanhita, vivant environ 500 ans avant J.-C. & dans le Parasani Sanhita de Parasara, 1200 ans avant notre Ere. As. Res. II. 392–3944. Le sort futur des hommes du signe du Zodiaque & de l’e´toile sous laquelle ils viennent au monde. En les combinant, on connoit infailliblement si l’enfant est ne´ pour eˆtre heureux ou malheureux. Dubois, II. 53. Les Indiens tuent ou abandonnent les enfans ne´s sous des plane`tes funestes. ib. 226. Ceux qui ... Dubois. II. 299, & plus loin sur la destine´e 397. Ms-texte 1

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OCBC, Œuvres, t. XIX, pp. 136–137 et 139. – Notons que la variante de´veloppe certains aspects. BC renvoie au livre II d’He´rodote, chap. 82, dont il donne ici une paraphrase. Les renvois a` Diodore concernent le livre II, chap. 29 (e´d. anglaise, C. H. Oldfather, t. I, 1989, pp. 445–449), ou` il est question des e´tudes soutenues par les Chalde´ens sur l’astrologie. Le second renvoi est faux. BC renvoie a` l’analyse du texte ms. grec βοτανω Ä ν χυλω σεως conserve´ a` la bibliothe`que de Leyde qu’on trouve chez Creuzer (Symbolik und Mythologie, t. I). BC re´sume un passage du chap. 21 de la seconde partie de l’ouvrage de Dubois, qui parle de l’astrologie. BC utilise pour cet ajout l’essai de William Jones, «A Supplement to the Essay on Indian Chronology» (Asiatick Researches, t. II, Calcutta : Manuel Cantopher, 1790, pp. 389–403).

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plane`te funeste a, et l’amour et l’hymen se plient aux pre´sages b. Les Chalde´ens avaient place´ les professions diverses sous la protection des astres c. A chacun e´tait consacre´ un temple, dont la structure de´signait symboliquement la divinite´ qu’on y re´ve´rait. Cette divinite´, invoque´e de la manie`re prescrite, et honore´e par des sacrifices convenables, descendait dans l’enceinte, et confe´rait a` ses ministres le don de prophe´tie d. a b

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Ibid., 2261. Ceux qui vont demander une fille en mariage font choix d’un jour ou` tous les augures soient favorables, et chemin faisant, ils font bien attention aux pre´sages qu’ils remarquent. S’ils les jugent funestes, ils reviennent sur leurs pas. S’ils sont croise´s par un serpent, un chat, un jackal, ils renoncent a` l’union qu’ils avaient projete´e. DUBOIS, II, 299, et plus loin, 3972. Les agriculteurs sous celle de Saturne ; les savants, les magistrats et les preˆtres sous celle de Jupiter : les guerriers et les nobles avaient Mars pour patron, les princes et les grands le soleil ; les sculpteurs, les peintres, les poe`tes, tous les artistes au nombre desquels on rangeait les courtisanes, reconnaissaient Ve´nus pour divinite´ tute´laire. Mercure veillait sur les commerc¸ants, et la lune enfin e´tendait son influence sur les classes infe´rieures. «Les Chalde´ens nommaient les plane`tes interpre`tes des dieux. Ils ve´ne´raient surtout celle qui porte chez les Grecs le nom de Chronos (Saturne). Ils leur attribuaient une faculte´ prophe´tique, parce qu’au lieu d’eˆtre fixes, comme les autres e´toiles, elles ont une marche spontane´e, qui annonce. soit par leur lever et leur coucher, soit par leur couleur, ce que les dieux pre´parent. Le soleil donne les avertissements les plus importants et les plus nombreux. Ces plane`tes indiquent d’avance toutes les re´volutions du ciel et de la terre. Les Chalde´ens les appellent Βουλαι ους ΘεουÁ ς, Deos consiliarios, de´nomination qui re´pond aux Dii consentes des Romains. La moitie´ de ces e´toiles observe ce qui se passe sur notre globe, l’autre moitie´ ce qui arrive dans les cieux. Tous les dix jours, une e´toile supe´rieure descend parmi les infe´rieures ; et une infe´rieure monte vers les e´toiles supe´rieures. Cette marche leur est commande´e de toute e´ternite´.» (DIOD., II. 213.)

1–2 Les Chalde´ens ... astres. ] Chez les Chalde´ens, les diffe´rentes professions e´toient sous la sauvegarde des plane`tes. Ms-texte 1

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Voir Dubois qui parle a` l’endroit indique´ (t. II, p. 226) de cette atrocite´. «L’enfant ne´ sous une mauvaise e´toile est non-seulement voue´ lui-meˆme, d’apre`s la croyance vulgaire, a` toute sorte de malheurs et d’accidens durant le cours de sa vie, mais il y fait participer encore ceux auxquels il est uni par les liens du sang ; il n’est pas rare de voir des parens, [...] de´laisser en secret sur une grande route, d’innocentes cre´atures [...] il est meˆme de ces parens de´nature´s qui poussent la barbarie jusqu’a` e´touffer ou noyer [...] ces victimes.» Dubois ajoute, en note, que le gouvernement sous Wellesley n’a pu arreˆter comple`tement ce mal. Il faut se reporter au t. I de l’ouvrage de Dubois, dans lequel on lit a` la p. indique´e les faits relate´s par Dubois (BC emprunte ses expressions). Le renvoi a` la p. 397 semble eˆtre une erreur. On le trouve aussi dans le texte manuscrit. BC traduit le texte de Diodore qu’on lit dans le livre II, chap. XXX. Voir Diodore de Sicile, Bibliothe`que historique, t. II, livre II, texte e´tabli par Bernard Eck, Paris : Belles Lettres, 2003, pp. 56–57, dans l’e´dition de Strasbourg, t. II, pp. 91–94. La citation de la tournure grecque et la traduction latine qui suit sont la preuve que BC lit cette e´dition du texte de Diodore.

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Les preˆtres mexicains se distinguaient e´galement par leur attachement a` l’astrologie. Chaque pe´riode a avait, a` les entendre, un caracte`re spe´cial et un signe qui lui e´tait propre, et qui leur re´ve´lait tous les e´ve´nements et l’issue de toutes les entreprises. Mais quelque e´tendue et diversifie´e que fuˆt l’application de l’astrologie aux choses humaines, la divination se subdivisait encore en cate´gories bien plus varie´es et bien plus nombreuses b. Elle se composait a` la fois, et de l’interpre´tation des phe´nome`nes qui, tout en interrompant en apparence l’ordre de l’univers, n’en sont pourtant que des combinaisons moins connues, et du sens arbitraire attache´ aux accidents les plus habituels. Les divers modes de divination variaient suivant les climats. Les E´trusques, dont nous parlerons plus en de´tail ailleurs, cherchaient l’avenir dans les me´te´ores, et les prodiges ou monstres qui naissaient chez eux ; les Phrygiens et les Ciliciens, habitants des montagnes, dans le chant des oiseaux c ; les E´gyptiens et les Babyloniens uniquement dans les astres, a

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Les pe´riodes mexicaines e´taient compose´es du nombre treize : treize jours, treize mois, un cycle de treize ans, etc. On a vu, t. III, p. 3681, combien la divination e´tait de´daigne´e dans le polythe´isme inde´pendant ; mais ce n’est que la divination syste´matique des preˆtres. Celle que chaque individu tire de ses observations propres est, au contraire, fort en honneur. Comme la religion est l’e´lan de l’homme vers la puissance qui est hors de lui, toute action, tout e´ve´nement qui a lieu inde´pendamment de sa volonte´, il l’inse`re dans la religion. Toutes les choses fortuites lui paraissent le langage du ciel. Voy. HEYNE, Opusc., III, 198 et 285, et suiv., ou` il explique la divination des divers peuples, par l’histoire naturelle de leur pays, surtout pour les peuples du Latium2.

8–10 tout en ... connues ] bien qu’en interrompant ... l’ordre de la nature, n’en e´toient pourtant ... connues, & qui par la` meˆme sembloient re´gulie`res, Ms-texte 11–13 climats. ... me´te´ores ] climats. Cice´ron (de Div. II. 1 & 2.) observe que les Egyptiens & les Babyloniens cherche`rent a` lire l’avenir dans les astres, les Etrusques dans les me´te´ores Ms-texte 14 Ciliciens ... dans ] Ciliciens qui habitoient les montagnes ou` ils conduisoient leurs troupeaux dans Ms-texte 15-p. 133.4 les E´gyptiens ... prophe´tique. ] manque Ms-texte 20–23 Comme ... ciel. ] phrases qu’on trouve dans les cahiers notes dans un autre contexte Ms-notes 24–25 il explique ... Latium. ] il cherche a` expliquer la divination ... Latium. v. la` dessus Mein. C. G. II. 612. v. du reste sur la divination Guigniaud p. 95 & suiv. note 558–560. sur les oracles sacerdotaux 560–562. & Dubois II. 361. sur l’alectryomautiea Gruber art. Alastor. sur l’assentiment universel accorde´ a` la divination par tous les peuples Ciceron, loc. cit. & Meiners II 606 Ms-texte 1 2

OCBC, Œuvres, t. XIX, p. 352. BC copie le renvoi aux e´tudes de Heyne sur la divination des Romains chez Meiners, Kritische Geschichte, t. II, note l, pp. 612–613 (voir la variante) ; on y trouve plusieurs renvois que BC n’a pas utilise´s. Celui a` Meiners, Kritische Geschichte, vise un passage ou` l’auteur exploite Cice´ron, De divinatione (livr. I, chap. 1, 2 et 42), qui s’inte´resse a` la divination chez plusieurs peuples en l’expliquant par la nature des pays ; les passages cite´s de Guigniaut concernent l’introduction traitant de la divination des peuples de l’Antiquite´ (pp. 94–99) et les notes 11 et 12 sur le meˆme sujet ; enfin, celui a` Dubois vise la description des fraudes des Brahmes pour stimuler les offrandes des fide`les (t. II, pp. 361–364).

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ne voulant point soumettre leurs pre´dictions a` des e´ve´nements fortuits ou exte´rieurs, et pre´tendant avoir appris directement des dieux tout ce qu’ils re´ve´laient a. Mais chez les autres peuples, tous les phe´nome`nes mate´riels avaient un sens prophe´tique. Quand la terre tremblait, c’e´tait pour annoncer les de´crets des cieux. Quand les astres se couvraient d’un voile, c’e´tait un avertissement du sort : et non-seulement les grandes calamite´s, comme les tremblements de terre, les phe´nome`nes manifestes a` tous les regards, comme les e´clipses, e´taient le langage des dieux : tout ce que nous attribuons aux lois de la pesanteur, au me´canisme des corps, aux jeux du hasard b, a` l’instinct des ani maux c, leurs a b

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PLUT. Conv. sept. sap. 33. ÆLIAN. V. H. II, 311. Les Arabes avaient des fle`ches prophe´tiques nomme´es Acdah, avant Mahomet. Il de´fendit cette pratique. (Coran, Sure 5. POCOCK. Spec. Hist. arab. p. 3272. D’HERBEL. art. Acdah. SALE’s introd.) Les mahome´tans s’en de´dommage`rent, en appliquant les versets du Coran meˆme a` la divination (CHARDIN, III, 2053). Les Grecs avaient employe´ au meˆme usage les vers d’Home`re, les Romains ceux de Virgile. (Voyez sur ces Sortes Homericæ, Euripideæ, Virgilianæ, etc., VAN-DALE, de Orac. p. 2994.) PELLOUTIER, V, 335.

11 II, 31. ] la source porte 11, 31 faute d’imprimerie que nous corrigeons Rel4 bel. ] d’Herbelot Ms-notes 17 299.) ] 299–301. Ms-notes 1

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13 d’Her-

Le renvoi a` l’e´crit Le banquet des sept sages de Plutarque pourrait viser d’une part une phrase d’un des invite´s, Thale`s, relative a` l’influence des astres sur le sort des hommes, et d’autre part la fin du texte, «Le gouvernement de l’univers : la Providence divine». Les autres passages ou` les E´gyptiens sont mentionne´s (149a ; 150f ; 151b) ne concernent pas la divination. – E´lien, dans ses Variæ Historiæ, livre II, chap. 31, dit des peuples barbares : «Barbari hi [...] contendunt & esse Deos, & nostri curam gerere, & præsignificare futura per aves [...] & per insomnia, & ipsas etiam stellas, multa ajunt significari» (Cl. Æliniani sophistæ Variæ historiæ libri XIV, Basileæ : Schweighauser, 1774, p. 75). Voir Pokocke, Specimen historiæ Arabum, pp. 326–327. – Le renvoi a` la Bibliothe`que orientale, ou dictionnaire universel contenant tout ce qui fait connoıˆtre les peuples de l’orient de Barthe´lemy d’Herbelot de Molainville (La Haye : J. Neaulme & N. van Daalen, 1778) vise le petit article «Acda´h» qui dit : «Les Arabes Idolaˆtres usoient une espe`ce de sort qu’ils appelloient le sort des fle`ches.» Il s’agissait de trois fle`ches avec des inscriptions dont le devin charge´ d’administrer ce sort tirait une d’un sac pour faire connaıˆtre au sollicitaire la de´cision de l’idoˆle. – George Sale, The Koran, commonly called the Alcoran of Mohammed (t. I, Preliminary Discourse, Sect. 5, «Of certain negative Precepts in the Koran», London : Thomas Tegg, 1825, pp. 173–174) confirme ce que dit d’Herbelot. BC a copie´ le renvoi a` Chardin, Voyage en Perse chez Meiners, Kritische Geschichte, t. II, p. 665, note y. Meiners cite l’e´dition d’Amsterdam, 1735. Chardin de´crit que ceux qui «sont en peine de quelque chose» s’adressent a` un preˆtre pour le rite de la divination par le Coran. Voir Chardin, Voyage, e´d. Langle`s, t. IV, pp. 435–436. BC copie Meiners, Kritische Geschichte, p. 665, note z. Antonius van Dale, De oraculis ethnicorum dissertationes duæ. Voir Simon Pelloutier, Histoire des Celtes, t. V, pp. 32–33, ou` il est question du «ve´ritable moyen de bien connaıˆtre le passe´, le pre´sent et l’avenir» qui est «de consulter la Divinite´, qui re´sidoit dans toutes les cre´atures, & qui re´pondoit [...] a` ceux qui entendoient ce que l’on appeloit la science des pre´sages, & des divinations».

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mouvements, leurs cris, leur rencontre ou leur fuite, les moindres accidents de la nature inanime´e, l’agitation des feuilles, la couleur des flammes, la direction que prend la fume´e en s’e´levant dans les airs, le murmure des ondes a, la chute du tonnerre, tout ce qui dans l’homme est machinal ou involontaire, le battement du pouls, les e´ternuments, et surtout les songes b, si puissants sur les sauvages c, les songes ou` notre nature se complaıˆt comme pour nous faire douter de nous-meˆmes et auxquels la raison semble prendre part pour s’humilier et pour se confondre, toutes ces choses e´taient autant de manifestations de la volonte´ divine, car les dieux, au dire de leurs ministres, ne font rien sans raison, et tous les eˆtres leur obe´issent comme l’arc et la fle`che au bras de l’archer. Confucius, que nos philosophes se sont e´trangement obstine´s a` placer dans leurs rangs, enseignait a` ses disciples plusieurs de ces modes de divination d. Les Perses interme´diaires, comme nous l’avons dit e, entre les peuples du Nord et ceux du Midi, re´unissaient a` a b c

d e

MALLET, introd. 921. T. I, p. 228, 2e e´dit2. Les songes, observe Meiners (Cr. Gesch, II, 617–618), sont de toutes les espe`ces de divination celle a` laquelle l’antiquite´ et meˆme les philosophes accordaient le plus de confiance. C’est pour cela que les anciens dormaient dans les temples3. Notice de l’Y-King, page 4104. Tome II, page 1955.

5–7 les songes, ... et auxquels ] les songes, 〈cette parodie bizarre de la vie re´elle〉 que notre nature a place´s a` cote´ d’elle comme pour nous en faire douter, & ou` Ms-texte 11–15 Confucius, ... pyromancie. ] passage qui faisait d’abord suite a` la note b de la p. pre´ce´dente, remonte´ lors de la re´daction de´finitive dans le texte principal Confucius ... divination. (Notice de l’Y-King, p. 410.) dans une autre note (voir la p. suivante, lignes 12, on trouve la suite les Perses, interme´diaires, comme on l’a dit, entre ... Midi (V. Tome II. p. 195) re´unissoient l’astrologie a` la divination proprement dite. La pyromantie e´toit une partie essentielle de leur culte. (Izeschne´, ib. 67) Ms-notes ; dans les cahiers texte, on trouve a` coˆte´ d’un passage supprime´ la note suivante Confucius que nos philosophes − 410. Mein. II. 613. Les Perses − Pyromantie. les phrases se rapportent e´videmment aux cahiers notes Ms-texte 18–20 Les songes, ... temples. ] la note ajoute´e dans la col. de gauche, sauf la dernie`re phrase qui manque Ms-texte 1 2 3

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BC cite le chapitre «Des oracles & des Devins» de la premie`re partie de l’ouvrage. OCBC, Œuvres, t. XVII, pp. 311–313. BC cite un passage du livre XIII, «Geschichte der Vorbedeutungen, oder der Wahrsagungen, und Weissagungen», qui donne aux pp. 616–619 des exemples de l’importance accorde´e aux reˆves par des hommes d’E´tat ou des philosophes de l’Antiquite´. Note copie´e chez Meiners, Kritische Geschichte, t. II, p. 664, n. s. La «Notice de l’Y-King» fait partie de l’ouvrage Le Chou-King, un des livres sacre´s des Chinois, qui renferme les fondemens de leur ancienne histoire, les princies de leur gouvernement & de leur morale, ouvrage recueilli par Confuzius. Traduit et enrichi de notes par feu le P. Gaubil [...], revu & corrige´ par M. de Guignes, [...], Paris : Tilliard, 1770. On y lit (p. 410) : «Confucius nonseulement approuve ces sorts, mais encore il enseigne en termes formels, dans le Livre canonique des Changements [i.e. son Commentaire sur l’Y-king], l’art de les de´duire.» OCBC, Œuvres, t. XVIII, pp. 158–159.

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l’astrologie la divination, et en particulier la pyromancie. Les preˆtres scandinaves interpre´taient le croassement des corbeaux a : les a

RUHS. Scandin. antiq. p. 142–1431. La vie aventureuse des Scandinaves devait leur faire attacher a` tous les genres de pre´sages un inte´reˆt extreˆme ; plus les hommes bravent les

2 Les preˆtres ] 〈Les augures Toscans avoient divise´ le ciel en 18 parties, pour observer plus exactement & le cours des astres, & le vol des oiseaux,〉 BC pre´voit ici cette note 〈Les principes de la divination par le vol des oiseaux ou les augures chez les Etrusques, avoient une grande analogie avec ceux des Perses. Leurs oiseaux, un mot illis. prophe´tiques, (trois mots illis.) rappellent les quatre oiseaux ce´lestes de´signe´s dans les livres Zend. (Izeschne´, I, Ha 64. V. 892) Pline remarque qu’il y avoit sur les bas reliefs e´trusques des figures d’oiseaux inconnus de son tems, ce qui nous rame`ne aux oiseaux fantastiques de Perse´polis & d’Ecbatane. (Pline, Hist. nat. X. 15.)〉 suit encore le passage qu’on trouve ci-dessus, p. 134, dans la variante aux lignes 11–15 ; Les Perses ... (Izechne´, ib. 67) la suite du texte 〈& la direction des nuages, & le point de de´part de la foudre, & la couleur des e´clairs.〉 BC ajoute ici une longue note 〈La the´orie de la foudre & des e´clairs occupoit une grande place dans la discipline e´trusque. Ce qu’un e´clair avoit annonce´ e´toit plus sure que ce qui e´toit pre´dit par toute autre voye. Quand les entrailles des victimes ou le vol des oiseaux pre´sageoient des e´ve´nemens sinistres, un e´clair favorable dissipoit les craintes : mais aucun pre´sage ne pouvoit infirmer l’autorite´ prophe´tique d’un e´clair (titre illis. Senec. Nat. Quæst. II. 24.) On les divisoit en plusieurs classes, fulmina monitoria, pestifera, fallacia, deprecanea, peremptalia, attestata, atteranea, ebruta, regalia, hospitalia, auxiliaria (Senec. ib. 49.) Quelques unes de ces e´pithe`ques s’expliquent d’elles meˆmes. Les Romains e´toient en doute sur la signification de plusieurs autres. Ils distinguoient aussi les e´clairs en publica / /& privata/ / (qui avoient rapport a` l’e´tat) & privata (qui concernoient les particuliers). L’influence des fulimina familiaria ne se bornoit pas a` un e´ve´nement, mais s’e´tendoit a` toute la vie. Jupiter pre´sidoit spe´cialement aux e´clairs. (Senec. loc. cit. cap. 45) il en tenoit 3 dans sa main droite (Fest. in Vo Manubiæ) le 1er n’e´toit destine´ qu’a` avertir les hommes, le 2d, que Jupiter ne lanc¸ait qu’apre`s avoir consulte´ les 12 grand dieux, e´toit de´ja` un commencement de peines, le 3e e´toit le comple´ment du chatiment me´rite´. Il frappoit de mort les individus & bouleversoit les empires. les Dieux se voiloient & de la` l’e´pithe`te de Dii involuti. (Sen. loc. cit. cap. 41) Le Philosophe romain tire de cette tradition sacerdotale les re`gles morales qu’il adresse aux puissances de la terre. Plus la puissance est absolu, dit-il, plus elle doit eˆtre mode´re´e, & celui qui en est reveˆtu ne doit de´ployer la se´ve´rite´ qu’apre`s s’eˆtre entoure´ de conseils salutaires (ib. c. 43. Se´ne`que pensoit plus a` Ne´ron qu’a` Jupiter〉 suite du texte Les Preˆtres3 Ms-texte 3-p. 136.16 La vie ... 263.) ] passage ajoute´ dans la col. de gauche de Co 3262, avec quelques variantes les tribus qui me`nent une vie avantureuse ont d’autant plus d’envie de connoitre l’avenir. Les Phansicars ... Mysore, sont les homes les plus avides de pre´sages. Bien que ... Musulmans, ils invoquent dans les occasions pe´rilleuses les divinite´s Indiennes. Chacun ... obtiennent de leurs invocations, de leurs sacrifices, des convulsions des victimes &ca˙ ... 263. Ms-texte 1

2 3

BC cite Friedrich Rühs, Versuch einer Geschichte der Religion, Staatsverfassung und Cultur der alten Skandinavier, Göttingen : Johann Friedrich Röwer, 1801. Rühs parle a` l’endroit indique´ des corbeaux, les oiseaux sacre´s d’Odin, dont le «langage» e´tait entendu par les devins. Les quatre oiseaux ce´lestes s’appellent Hufraschmodad (le coq), Eorosch (le corbeau), Eoroschasp ou Simorg (ressemble a` l’aigle) et Aschtrenghad. Remarquons que certains passages de ce grand morceau seront utilise´s dans le livre XI. Voir ci-dessous, p. 355, n. a.

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Germains a attachaient une importance extreˆme a` toutes les paroles des femmes, parce que, disaient-ils, incapables d’une volonte´ suivie et rarement gouverne´es par la raison, elles recevaient d’autant plus facilement les impressions subites des puissances invisibles, dont elles e´taient a` leur insu les organes b. Ainsi l’antiquite´, suivant la remarque de je ne sais quel e´crivain, e´piait la nature dans ses plus petits de´tails, avec bien plus d’attention que les modernes : c’e´tait un effet de la superstition, et cet effet, a` son tour, devenait une cause. Il en re´sultait pour les preˆtres une science qui, s’appliquant a` tous les e´ve´nements de la vie et aux inte´reˆts de tous les instants, devait accroıˆtre immense´ment le pouvoir sacerdotal. Aussi l’e´tude des signes que nous

a b

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dangers, et tentent des expe´ditions dont les re´sultats sont incertains, plus ils ont soif de connaıˆtre l’avenir. Les Phansicars, bandes d’assassins qui infestent le sud de l’Inde et le royaume de Mysore, bien que presque tous musulmans, recourent dans leurs expe´ditions a` la divination indienne. Chacun de leurs pas est dirige´ par les indications qu’ils obtiennent du hasard, ou des convulsions des victimes dans les sacrifices. (As. Res., XIII, 2631.) CÆS., de Bell. gall. I, 502. TACIT., Germ., cap. 8. Les prophe´tesses de la Germanie sont ce´le`bres. Nornes de la terre, leur nom meˆme (weib), venait d’un mot qui signifiait tresser, de´signant et leurs travaux domestiques et le fil des Nornes3. Wizaga, prophe´tesse, a surve´cu a` la croyance dans le langage, en devenant le verbe prophe´tiser, Weissagen en allemand. Qui ne connaıˆt la Velle´da des Bructe`res4 ?

BC utilise un article du docteur Sherwood, «Of the Murderers called P’ha´nsiga´rs», inse´re´ par Colin Mackenzie dans les Asiatick Researches, t. XIII, Calcutta : Manuel Cantopher, 1820, pp. 250–281. Les de´tails dont parle BC sont de´crits pp. 261–262. Le passage en question concerne un e´ve´nement des pre´liminaires de la dernie`re bataille de Ce´sar contre Arioviste, chef des Sue`bes. Ce´sar apprend des captifs que l’usage attribuait chez les Germains un roˆle important a` la divination par les femmes : «apud Germanos ea consuetudo esset, ut matres familiæ eorum sortibus et vaticinationibus declarent, utrum proelium committi ex usu esset necne». En l’occurrence, la re´ponse e´tait ne´gative. On pourrait rapprocher de ce passage les Mœurs des Germains de Tacite, chap. VIII et X, qui de´crivent d’une manie`re plus de´taille´e la divination des Germains. C’est Tacite qui dit que les Germains accordent aux femmes un pouvoir prophe´tique, d’ou` leur respect pour les paroles des femmes. BC fait dire a` Ce´sar ce qu’il a lu chez Tacite. Le raisonnement est fonde´ sur une fausse e´tymologie. Voir Friedrich Kluge, Etymologisches Wörterbuch der deutschen Sprache, articles «weben» et «Weib». La prophe´tesse de la tribu germanique des Bructe`res jouait un roˆle important dans son entourage. Elle pre´disait la victoire des Bataves sous Civilis dans la re´volte contre les Romains et est morte a` Rome, captive des Romains. Tacite parle d’elle dans ses Historiæ (livre IV, 61).

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avons rapporte´s constituait-elle l’occupation principale des Druides a ; et la jeune noblesse, dont l’e´du cation leur e´tait confie´e, employait vingt anne´es a` se perfectionner dans l’art de comprendre et d’interpre´ter ces signes b. Un seul peuple demeura toujours, par ses lois au moins, e´tranger a` ces superstitions. Ce peuple est le peuple Juif c : et ce fait confe`re une force additionnelle a` une observation que nous avons de´ja faite, et que nous rappelons derechef aux me´ditations de nos lecteurs d. a

b c

d

PELLOUT. V, 23 ; VIII, 127 ; SIL. ITAL. III, 3441 ; LAMPRID. in Alex. Sev. p. 927. DIOD. JUSTIN. XXIV, 42 ; TIT. LIV. V, 343 ; TACIT. Germ. c. 10. CÆS. de Bell. gall. VI, 144. On ne voit point d’idoles en Jacob, disent les Nombres, XXXIII, 21, 22, 23 ; on n’y voit point de divination, ni de sortile´ges : c’est un peuple qui se fie au Seigneur, son dieu, dont la puissance est invincible. Tome II, pag. 117, 1185.

3 de comprendre ... ces signes. ] de les comprendre & de les interpre´ter. Ms-texte 4–5 Un seul ... Juif ] le texte et la note e´bauche´s dans la col. de gauche de Co 3262 La justice nous ordonne de remarquer ici que ces superstitions ainsi que beaucoup d’autres e´toient e´trange`res a` la religion juive. suit le passage qui passera en note On ne voit ... invincible. Ms-texte 1

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Le renvoi a` Pelloutier, Histoire des Celtes, et particulie`rement des Gaulois et des Germains, est faux. Il faut lire : t. V, p. 83. Les «superstitions extravagantes», comme le dit Pelloutier, «faisoient l’essentiel de la Religion [...] e´toient aussi le grand objet des recherches de leurs Druides». Et il ajoute l’observation de Ce´sar (De bello gallico, liv. VI, 14) : «Il ne faut pas eˆtre surpris [...] que la Noblesse des Gaules, dont on confioit ordinairement au Clerge´, employait jusqu’a` vingt ans anne´es [...] a` ces e´tudes.» – Dans La Guerre punique, livre III (vv. 340–344), Silius Italicus ne parle pas des druides, mais de l’intre´pidite´ des Celtes au combat : «Ils mettent leur honneur a` pe´rir au combat, mais jugent criminels de bruˆler le cadavre de ceux qui ont eu pareil tre´pas. Ils pensent prendre place au ciel, aupre`s des dieux, si le vautour affame´ de´chire leurs restes» (La guerre punique, texte e´tabli et traduit par Pierre Miniconi et Georges Devallet, Paris : Belles Lettres, 1979, t. I, p. 83). BC cite de l’Histoire Auguste la Vie d’Alexandre Se´ve`re d’Ælius Lampridius. – Voir Diodore de Sicile, livre V, chap. 31, 2–5, sur les druides (e´d. anglaise, C. H. Oldfather, t. III, 1993, pp. 179–181). – Le renvoi a` Justinus vise la phrase suivante : «nam augurandi studio Galli præter ceteros callent» (Iustini Historiæ Philippicæ cum integris Commentariis iac. Bongarsii, Franc. Modii [...] curante Abrahamo Gronovio Editio Secunda, Lugduni Batavorum : Apud Samuelem et Johannem Luchtmans, 1760, p. 510). En ce qui concerne Tite-Live, si le renvoi est exact, BC veut e´voquer le chap. sur la migration des Gaulois en Italie («transitus in Italiam Gallorum»), ordonne´e par la roi Ambigatus, pour conque´rir des re´gions de´signe´es par les dieux («in Italiam viam di dabant»). Voir Ab urbe condita, livre V, chap. 34. – Le chapitre sur les preˆtres des Germains qui pratiquent la divination avec des chevaux blancs e´leve´s dans des foreˆts sacre´es est un des plus longs de l’ouvrage de Tacite. Le chapitre 14 du livre VI du De bello gallico traite de la formation des druides. BC pense spe´cialement a` ce passage : «Tantis excitati præmiis et sua sponte multi in disciplinam conveniunt et a parentibus propinquisque mittuntur. Magnum ibi numerum versuum ediscere dicuntur. Itaque annos nonnulli vicenos in disciplina permanent.» Le renvoi est faux. BC veut citer les pp. 217 et 218 ; OCBC, Œuvres, t. XVIII, pp. 169–170.

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La divination passa du polythe´isme sacerdotal aux nations inde´pendantes du sacerdoce. Les Grecs la durent aux Phrygiens et aux Cariens e ; les Romains aux E´trusques a. Mais, comme nous l’avons observe´ plus haut b, elle n’occupa, surtout chez les premiers, qu’un rang subalterne. L’e´poque tardive de son introduction dans la religion grecque explique pourquoi l’on en rencontre bien moins de traces dans Home`re que dans les e´crivains poste´rieurs. On en trouve beaucoup moins aussi dans les poe`tes que dans les historiens. Les premiers, qui ne cherchaient que des applaudissements, restaient fide`les, autant qu’ils le pouvaient, au merveilleux plus brillant et plus e

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CLEM. ALEX. Strom. I, PLIN. Hist. nat. VIII, 56. On peut voir l’e´nume´ration des divers genres de divination dont les Grecs essaye`rent, dans la Symbolique de Creutzer, I, 191– 1961. CLEM. ALEX. loc. cit. LUCAN. I, 635. SERV. ad. Æn. VIII, 398 ; CICER. de Div. II, 50 ; OVID. Metam2. Tome III, pag. 3683.

14 Metam. ] Me´tam. lacune pour inscrire le nume´ro du livre 553. 〈Comme les traces des pratiques sacerdotales etoient plus profondes a` Rome qu’en Gre`ce, la divination y e´tait soumise a` un arrangement beaucoup plus me´thodique. Nous apprenons de Cice´ron qu’elle e´toit divise´e en deux grandes branches, les divinite´s elles-meˆme en plusieurs autres. La 1ere se composoit de ce que l’homme peut regarder comme une manifestation directe de la divinite´, les pressentimens des songes, les extases. La seconde consistoit en signes auxquels on avoit attache´ une signification. aussi appeloit-on la 1ere naturelle, la 2de artificielle. (Cicer. de Div. I. 64.)〉 Msnotes 1 2

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Le renvoi a` Pline, Histoire naturelle, est une erreur. – Le catalogue de Creuzer, Mythengeschichte, comprend la divination grecque et romaine. Cle´ment d’Alexandrie, ΣτρωματειÄς : «Selon certains auteurs, l’ide´e de sonder l’avenir par les astres viendrait des Cariens. Les Phrygiens prirent garde les premiers au vol d’oiseaux.» Les Stromates, t. I, introduction de Claude Monde´sert, S.J., traduction et notes de Marcel Caster. Paris : E´ditions du Cerf, 1951, p. 105. – L’allusion a` Lucain, De bello civili, renvoie aux vers 635–637 du livre I, qui parlent d’un mauvais augure : que le fondateur de notre art, Tages, fasse apparaıˆtre un meilleur, «conditor artis Finxerit ista Tages» (vv. 636–637). – Quant a` Servius, BC a consulte´ Commentarii in Virgilium Serviani ; sive commentarii in Virgilium, qui Mauro Servio Honorato tribuunter. Ad fidem codicum guelferbytanorum aliorumque recensuit, et potioribus variis lectionibus indicibusque copiossissimis instruxit H. Albertus Lion, Gottingæ : apud Vandenhoeck et Ruprecht, 1826. On y trouve : «Sed sciendum, secundum artis aruspicinæ libros et sacra Acherontia [...] quæ Tages composuisse dicitur, fata decem annis quadam ratione differri» (t. I, p. 480). – Cice´ron parle dans De divinatione de la naissance de Tages et de l’origine de la divination issue du premier discours que Tages adressa a` la population e´trusque : «omnem autem orationem fuisse eam, qua haruspinæ disciplina contineretur». – Ovide : BC pense au passage des Me´tamorphoses (livre XV, vers 553–559) qui raconte la naissance de Tages, le premier des devins des E´trusques, transforme´ d’une motte de terre en homme : «Tyrrhenus arator fatalem glæbam mediis adspexit in arvis sponte sua primum nulloque agitante moveri, sumere mox hominis terræque amittere formam oraque venturis aperire recentia fatis.» OCBC, Œuvres, t. XIX, p. 352. Il faut lire plus de texte : De divinatione, livre I, 4–12. Cice´ron y de´veloppe la distinction

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poe´tique qu’ils puisaient dans l’Iliade et dans l’Odysse´e ; tandis que les seconds, aspirant a` la confiance de leurs lecteurs, n’osaient les entretenir de fictions universellement rejete´es, mais rapportaient sans scrupule des prodiges de de´tail qui avaient conserve´ plus de faveur. Car la divination, telle l’imagination, lors meˆme que la cre´dulite´ perdait de sa force, ou l’imagination de sa complaisance, pouvait encore eˆtre respecte´e, et meˆme acque´rir un nouveau cre´dit, en raison des progre`s suppose´s de la science. Les e´preuves usite´es chez tous les peuples domine´s par les preˆtres, et qui, transmises des religions barbares au christianisme, pri rent le nom ce´le`bre de jugements de Dieu a, n’e´taient autre chose que l’application des moyens divinatoires aux relations qui existent entre les hommes. Ces e´preuves avaient lieu chez les Scandinaves b et les Germains. Ils donnaient la pre´fe´rence au duel, et c’e´tait une suite naturelle de leur passion pour la guerre ; mais les autres genres d’e´preuves ne leur e´taient pas inconnus c. Nous en a

b c

Jugements de Dieu par le feu, l’eau, la croix, le pain et le fromage be´nits, l’eucharistie, les caracteres sanctorum, ou sortes apostolorum, imitations des sortes virgilianæ. Le clerge´ chre´tien sanctifia les e´preuves par le duel, malgre´ toutes les re´clamations. PELLOUT. VIII, 156–2181. Schonings, Rikeshistor., II, 320 ; DALIN, Hist. de Sue`de, I, 1622. Cependant le combat singulier e´tait tellement pre´fe´re´, que les lois meˆmes soumettaient les autres e´preuves a` des conditions presque impossibles. Dans celle du feu, par exemple, l’accusateur devait entretenir le feu de sa propre main, depuis l’e´poque de l’accusation jusqu’a` celle de l’e´preuve, c’est-a`-dire quatorze nuits et quatorze jours sans interruption. Il pouvait d’ailleurs pour une somme d’argent permettre a` l’accuse´ de se justifier, en invoquant le serment de ses proches. L’e´preuve par l’eau bouillante n’e´tait impose´e qu’aux serfs, aux colons ou Lites, hommes du peuple affranchis par les Romains, et aux hommes libres insolvables.

5–6 lors meˆme ... complaisance ] lors meˆme ... l’imagination perdoit ... la cre´dulite´ ... complaisance Ms-texte 8 usite´es ] en usage Ms-texte 12 et les Germains ] manque Ms-texte 16 virgilianæ ] BC pre´voyait une note Mein. Crit. Gesch. 665. Ms-notes 17 sanctifia ... duel ] sanctifia meˆme les e´preuves par le combat singulier, Ms-notes

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dont parle BC : «duo sunt enim divinandi genera, quorum alterum artis est, alterum naturæ» (I, 11). L’explication des signes pre´monitoires par les augures et les astrologues concerne la divination que BC de´signe par le terme ‘artificielle’ («ea artis sunt»), la divination naturelle scrute les reˆves et les extases de la Pythie. BC renvoie a` un grand morceau du livre IV (posthume) de L’Histoire des Celtes consacre´ aux e´preuves du feu, de l’eau froide ou bouillante, du sort, etc. – BC transcrit la table des matie`res de Pelloutier – pour e´viter de de´crire les de´tails de ces rites. BC cite Gerhard Schøning, Norges Riiges Historie, Anden Deel [...] fra Aar 863 til 963, Sorøe : Heineck Mumme et al., 1773. Le renvoi a` Dalin se rapporte a` l’e´dition allemande. Olof Dalins Geschichte des Reiches Schweden, aus dem Schwedischen übersetzt durch Johann Carl Daenert, Greifswald : Hieronymus Johann Struck, 1756. L’e´preuve par le fer est raconte´e dans la premie`re partie, chap. 7, § 17, pp. 162–163.

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retrouvons de plusieurs espe`ces chez les Indiens a, qui, transportant aux cieux leurs usages, y soumettent b aussi leurs divinite´s. Accuse´e ou soupc¸onne´e par Rama, Sita se pre´cipite dans un buˆcher enflamme´. Une voix descend des sphe`res invisibles : une pluie de fleurs inonde la terre, et Rama, a

b

As. Res., I, 3891 ; PORPHYR. de Abst., IV, 172 ; Me´m. de l’acad. des inscript., XXX, 113, ou` il est parle´ du marais d’e´preuves3 ; E´preuve du Chyddy-Mandy, DUBOIS, II, 372–373–5464 ; As. Res., IV, 60–615. Aujourd’hui encore, lorsque quelque objet est vole´ dans une maison et que les soupc¸ons se portent sur quelqu’un, on le conduit au temple de Ganeza, et on lui plonge la main dans du beurre bouillant. S’il est innocent, il n’e´prouve aucun mal ; s’il est coupable, sa main est re´duite en cendres. (As. Res. I, 389–404.) Les lois de Menou contiennent une singulie`re application de l’ide´e qui sert de base aux e´preuves. Le te´moin qui, dans les sept jours poste´rieurs a` sa comparution en justice, e´prouve un malheur ou perd un de ses parents, doit eˆtre condamne´ comme coupable de faux te´moignage (Lois de Menou, c. 8).

2-p. 141.2 Accuse´e ... confiance. ] Les Dieux meˆmes s’y soumettent. Sita accuse´e par Rama se jette avec indignation dans le feu brulant. une voix ... invisibles : & une ... fleurs tomba sur la terre. Rama ... d’Agni, le Dieu du feu, que ... tache &ca˙ Ms-texte autre re´daction dans les cahiers de notes, col. de gauche Sita se soumet a´ l’e´preuve du feu pour prouver a` Rama sa purete´ conjugale. Guign. 204. Dubois II. 410. 4666. Ms-notes 5–8 As. Res. ... quelque objet ] Lorsque quelque chose Ms-notes le de´but de la note ainsi que quelques phrases du texte principal sont e´bauche´s dans les cahiers de notes, col. de gauche de Co 3262 ; nous donnons les phrases qu’on retrouve dans la note Epreuves ou jugemens de Dieu aux Indes. As. Res. I. 389. le marais d’e´preuves, Mem. Acad. Inscr. XXXI. 313. une phrase sur Sita qui passera dans le texte principal Epreuves ... Mahry. ib. (=Dubois) 372–374. Dubois II. 546. Idem As. Res. IV. 60–61. suit le passage sur les Perses et les Kamtschadales Ms-notes 1

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BC renvoie a` un article des Asiatick Researches, t. I (Calcutta : Manuel Cantopher, 1788, pp. 389–404), «On the Trial by Ordeal, among the Hindus, by Alı´ Ibra´hı´m Kha´n, Chief Magistrate at Bana´res. Communicated by Warren Hastings». Le meˆme article est cite´ dans la note suivante. BC renvoie au chapitre sur les «Gymnosophistes de l’Inde» (Porphyre, De l’abstinence, livre IV, chap. 17 et 18 ; e´d. Patillon et Segonds, Paris : Belles Lettres, 1995, t. III, pp. 27– 32). Le renvoi est peut-eˆtre faux. Si l’ouvrage cite´, les Me´moires de l’Acade´mie des inscriptions, t. XXX, est bien la publication vise´e, on trouve pp. 113–131 l’e´tude de Jean-Baptiste Bourguignon d’Anville, «Me´moire sur la situation de Tartessus, ville maritime de la Be´tique, et sur la largeur du Fretum gaditanum (avec une carte)». Mais cet article ne parle pas du «marais d’e´preuves». Il y est pourtant question, p. 116, de l’entre´e de l’enfer des Anciens. BC cite plusieurs exemples d’e´preuves en usage chez les Indiens (troise`me partie, chap. IV) et le dernier texte de l’appendice qui parle des «diverses espe`ces d’ordalies». Si l’indication est exacte, BC renvoie a` l’article de Thomas Shaw, «On the Inhabitants of the Hills Near Rajamahall» (Asiatic Researches, t. IV, London : Vernor et al., 1799. Mais la description de la ce´re´monie d’une feˆte religieuse ne correspond pas a` ce que dit BC dans son texte. Voir ci-dessous, p. 97, n. 1.

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convaincu par la parole d’Agni a, que Sita est pure et sans tache, lui rend sa confiance b. On peut conside´rer comme tenant a` la meˆme notion cette opinion des Per ses, qui, lorsqu’ils exposaient des malades aux beˆtes farouches, les regardaient comme impurs, si ces animaux les e´pargnaient c. Les He´breux, tout en repoussant la divination, admirent les e´preuves d, sans apercevoir l’identite´ du principe. Les Grecs, au contraire, n’offrent aucun vestige de pratiques semblables, si ce n’est dans un passage de l’Antigone de Sophocle, ou` les gardes, accuse´s par Cre´on d’avoir favorise´ la princesse dans sa pieuse de´sobe´issance, veulent se justifier en posant les mains sur un fer bruˆlant e : mais on peut ne voir dans cette offre qu’une manie`re e´nergique de protester de leur innocence, ou, ce qui nous paraıˆt plus proa b c

d

e

Le dieu du feu. Ramay., pag. 221. Agathias n’applique cette superstition qu’aux morts et a` la vie future. Les Perses, dit-il, examinaient soigneusement si les beˆtes sauvages de´chiraient les corps ou les laissaient intacts. Dans le premier cas, ils fe´licitaient les ames, comme parvenues a` une demeure de fe´licite´ : dans le second, ils les regardaient comme la proie d’Arimane. (AGATH., II, p. 60.) On trouve, suivant Steller, la meˆme hypothe`se chez les Kamtschadales, qui repoussent comme souille´s et indignes de vivre ceux qui tombent dans la mer ou dans un fleuve sans s’y noyer2. Voy. la Bible en plusieurs endroits, notamment, Nombres, V, II, 31, et ailleurs, ou` il est parle´ des eaux de jalousie. SOPH. Antig3.

2–4 On peut ... e´pargnaient. ] On peut regarder comme ... a` la notion des e´preuves l’opinion des Perses qui exposoient aux beˆtes farouches les hommes attaque´s de maladies graves. S’ils gue´rissoient, c’e´toient des hommes impurs, haı¨s des Dieux & devant eˆtre purifie´s par les Mages. Ms-notes 4–6 Les He´breux ... Grecs, ] & les He´breux bien qu’ils repoussassent la divination, comme nous l’avons de´ja observe´ y avoient recours, tandis que les Grecs Ms-texte 16 intacts ] la source porte intactes Rel4 18–20 On trouve ... s’y noyer. ] On trouve ... meˆme opinion ... noyer. Ms-notes 1

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Voir le Ramayana, chap. 1 (e´d. de Serampore, pp. 21–22 ; e´d. de Londres, p. 15). – La variante pour le re´cit de l’histoire de Sita ajoute deux autres renvois (voir la p. pre´ce´dente, variante a` la ligne 3 et suivantes). Le premier se rapporte a` la traduction de l’ouvrage de Creuzer par Guigniaut et cite la longue note 1, t. I, pp. 203–205 ; le second se rapporte a` Dubois, Mœurs et institutions, t. II, p. 410, qui donne une autre version de l’histoire de Sita ; a` la p. 466, on trouve la description des suites ne´fastes d’une ordalie. Voir Agathiæ scholastici myrinensis Historiarum liber II, PG, t. LXXXVIII, chap. 23, col. 1378. – Voir Georg Wilhelm Steller, Beschreibung von dem Lande Kamtschatka, dessen Einwohnern, deren Sitten, Nahmen, Lebensart und verschiedenen Gewohnheiten, Frankfurt und Leipzig : Johann Georg Fleischer, 1774, p. 273, ou` Steller parle du bonheur d’eˆtre de´vore´, apre`s la mort, par des chiens, et p. 295, ou` il est question de ceux qui se sauvent de l’eau, ce qui est un grand tort. «daher ließ ihn kein Mensch in die Wohnung, niemand redet mehr mit ihm, oder gab ihm die geringste Nahrung, noch ein Weib ; sondern sie hielten ihn für wirklich todt, und mußte er sein Glück in der Ferne suchen, oder zu Hause verhungern.» BC reproduit un argument de Meiners, Allgemeine kritische Geschichte der Religionen, t. II, p. 99 (Notes de lecture, Histoire critique, no 205). Sophocle, Antigone, vv. 264–266.

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bable encore, une allusion a` des coutumes e´trange`res, dont les Grecs avaient connaissance sans les pratiquer. Car Sophocle a mis les paroles qui se rapportent a` ces e´preuves dans la bouche des gardes de Cre´on, qui, comme tous les tyrans des villes grecques, n’avait pour gardes que des Barbares. Or, tous ces Barbares e´taient originaires de contre´es soumises a` des religions sacerdotales. Si, dans quelques occasions importantes, ces moyens de justification sont admis chez les Romains, c’est l’he´ritage de l’E´trurie a. En me´ditant sur ce qui pre´ce`de, on est, a` ce qu’il nous semble, frappe´ d’une contradiction manifeste dans les hypothe`ses sacerdotales. L’astrologie et la divination devraient aboutir au fatalisme le plus absolu, puisque la destine´e de l’homme est de´termine´e par les plane`tes de`s sa naissance, et que la direction ou la couleur d’un e´clair indique les e´ve´nements ine´vitables de la vie entie`re. Pourquoi les preˆtres n’ont-ils jamais admis ce re´sultat direct et incontestable de leur doctrine ? c’est que l’incertitude de l’avenir est ne´cessaire a` leur influence. Ils ont inculque´ la divination et l’astrologie, afin de se donner le me´rite d’interpre´ter les de´crets du ciel : puis ils en ont nie´ la conse´quence la plus e´vidente, pour conserver a` la de´votion ses espe´rances et a` leur intervention sa ne´cessite´.

a

La vestale Tuccia se justifie ainsi de l’accusation porte´e contre elle (DEN. D’HAL. II, 691). Des e´preuves par le feu avaient lieu dans le sanctuaire de Feronia (TIT. LIV. XXXII, 1 ; SERV. ad Æneid. VIII, 5642).

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Le renvoi a` Denis d’Halicarnasse provient de Creuzer, Symbolik, t. I, p. 195, note 274. Voir e´d. Jakoby, t. I, 1885, p. 253. BC cite Tite-Live et Servius d’apre`s Creuzer, Symbolik, t. IV, p. 480, comme le prouve la fausse indication d’un passage des Annales. Tite-Live parle de Feronia au livre XXII, 1, § 18, mais ne mentionne pas les e´preuves par le feu. Cette indication se trouve par contre e´galement chez Creuzer qui ne fait re´fe´rence a` aucun auteur pour justifier cette hypothe`se. Feronia est une de´esse lie´e a` la libe´ration des esclaves. Quant a` Servius, le renvoi est correct ; il parle a` l’endroit indique´ de la «Feronia mater ; nympha Campaniæ» (t. I, p. 490), ce qui ne permet pourtant pas l’identification du sanctuaire (Tarracina, Champ de mars a` Rome ?).

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Chapitre VII. Des notions sur la vie future, dans les religions domine´es par les preˆtres.

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On a vu le monde des morts et la destine´e de ceux qui l’habitent eˆtre les objets constants de la pense´e de l’homme, jusqu’a` ce que, fatigue´ d’efforts inutiles, il se de´termine a` de´tourner sa vue de ce qu’il ne doit jamais savoir ; re´solution violente et triste, qui le de´grade sans le calmer. Jusqu’alors, il interroge et sa raison qui doute, et son sentiment inte´rieur qui s’agite et qui tremble, et la nature exte´rieure qui se tait. Il invente mille pre´sages, il a recours a` mille ce´re´monies. Il attache un sens arbitraire a` mille circonstances minutieuses, pour conque´rir le secret obstine´ qui toujours lui e´chappe. Rien ne le satisfait, et le sacerdoce met a` profit ses incertitudes et son impuissance. La vie future est le domaine de ce sacerdoce, et c’est vers ce terme qu’il dirige tous les regards, toutes les espe´rances, et toutes les craintes. Les E´gyptiens ne mettaient d’importance qu’a` l’existence qui suit le tre´pas. Les maisons que l’homme baˆtit sur la terre leur semblaient des hoˆtelleries d’un jour : les tombeaux e´taient pour eux les demeures par excellence, les palais e´ternels a. Les inclinations belliqueuses des Scandinaves et des Gaulois, combine´es avec la domination sacerdotale, leur peignaient la mort nonseulement comme le terme, mais le but de la vie. Impatients de l’atteindre, a

DIOD. I1. E´tablissement du texte : Manuscrit : BCU, Co 3262/1, pp. 67–79 [=Ms-texte] et Co 3262/2, pp. 39–51 [=Ms-notes] Imprime´ : De la Religion, conside´re´e dans sa source, ses formes et ses de´veloppements, t. IV, Paris : Chez Pichon et Didier, e´diteurs, 1830, pp. 76–91.

4–13 On a vu ... impuissance. ] texte ajoute´ dans la col. de gauche ; quelques variantes Le monde 〈illis.〉 des morts ... habitent sont les objets ... de´tourner la vue ... minutieuses BC accroche a` ce mot une note qui sera reproduite ci-dessus, p. 141, note c. ... impuissance. 〈Dans les religions soumises aux preˆtres〉 Ms-texte 14 est le domaine ... et c’est ] est en quelque sorte 〈le un mot illis.〉 son domaine 〈du illis. particulier du Sacerdoce.〉 spe´cial. 〈Comme〉 il〈s〉 en dispose en liberte´, & c’est Ms-texte 16 ne mettaient ] n’attachaient Ms-texte 1

Diodore de Sicile, Bibliothe`que historique, livre I, chap. 60–61. BC copie cette re´fe´rence dans l’ouvrage de Heeren, Ideen über die Politik, den Verkehr und den Handel der vornehmsten Völker der alten Welt, Africanische Völker, Ägypter, e´d. de 1815, pp. 645–646, ou` se trouve la traduction du passage.

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ils s’e´lanc¸aient dans la meˆle´e, moins pour y vaincre que pour y pe´rir a. Ils ne s’efforc¸aient de triompher de leurs adversaires que pour tomber a` leur tour environne´s de plus de gloire. Chaque succe`s les invitait a` chercher ailleurs de nouveaux pe´rils ; et le guerrier qui ne pouvait trouver un tre´pas illustre sous le fer ennemi, e´tait re´duit a` se le donner de sa propre main b. Ce qui prouve que cette re´pugnance pour la vieillesse et pour une mort naturelle, a

b

On connaıˆt les vers de Lucain sur le me´pris des Gaulois pour la vie et leur amour pour la mort1. Il e´tait d’usage chez les Germains, les Slaves et les autres peuples du Nord, que les he´ros, quand ils sentaient leurs forces diminuer par l’aˆge, se fissent percer le cœur par leurs amis ou leurs preˆtres (PELLOUT., I, 441. MOEHSEN, Gesch. der Wissensch. I, 44–502). Odin, menace´ de mourir de maladie, se de´chira le corps pour voir couler son sang a` sa dernie`re heure (BOTIN, Hist. de Sue`de, I, 6, 243). Nyort, son petit-fils, suivit cet exemple, et se fit, avant d’expirer, plusieurs blessures avec une e´pe´e. D’autres se pre´cipitaient du haut d’un rocher, croyant ainsi conque´rir le Valhalla. «Nos anceˆtres, dit l’ancienne Saga, d’ou` cette tradition est tire´e, ont tous pris la route de ce rocher.» On l’avait surnomme´ le rocher d’Odin. Pline atteste cette coutume. Mors, non nisi satietate vitœ, epulis delibutis senibus luxu, ex rupe quadam in mare salientibus, hoc genus sepulturœ beatissimum. (Hist. nat., IV, 124.) «Chez les Islandais, dit Solin, lorsqu’une femme accouche d’un fils, elle demande aux

5-p. 145.4 Ce qui ... opprobre. ] manque dans Ms-texte, mais se lit dans les cahiers de notes, a` la fin de la note b, ci-dessus, pp. 144–145 Ms-notes 7 On connait ] 〈Ce qui prouve que cette domination y entrait pour beaucoup c’est que les Grecs non moins belliqueux que les peuples du Nord,〉 On Ms-notes 16 ce rocher.» On ] ce rocher. (Mallet, Introd. 180.) On Ms-notes 1

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Allusion a` Lucain, De bello civili, livre I, vv. 447–462. Les druides enseignent que l’aˆme ne descend pas dans l’E´re`be et le pays sans soleil de Dis Pater, mais que les he´ros poursuivent leur vie dans l’autre monde d’une autre manie`re. C’est la raison pour laquelle ils ne craignent pas la mort, mais ils se pre´cipitent vers l’acier et croient que craindre la mort est laˆchete´. «Inde ruendi In ferrum mens prona viris animæque capaces Mortis, et ignavum redituræ parcere vitæ» (vv. 460–462). Voir Pelloutier, Histoire des Celtes, et particulie`rement des Gaulois et des Germains, t. II, pp. 332–333, ou` Pelloutier parle de ce que BC re´sume ici. – Voir Johann Carl Wilhelm Moehsen, Geschichte der Wissenschaften in der Mark Brandenburg besonders der Arzneiwissenschaft, Berlin, Leipzig : Deckers, 1781. (Reprint : Hildesheim : Olms, 1976). Nous ignorons la provenance de ce renvoi. Il s’agit du livre d’Anders Botin, Utkast til Svenska folkets historia, Stockholm : Lars Salvii förlag, 1763–1766. BC a utilise´ la traduction allemande, Geschichte der Schwedischen Nation im Grundriß. Aus dem Schwedischen ins Deutsche übersetzt von Hartw[ig] Ludw[ig] Christ[ian] Backmeister, Riga, Leipzig : Johann Friedrich Hartknoch, 1767. Dans la premie`re partie, chap. 6, il est question du roi le´gendaire Oden (la forme sue´doise pour Odin), un grand conque´rant venu du dehors qui s’est e´tabli pre`s du lac Mäler et a dote´ son empire d’une le´gislation sage. Sur son lit de mort, il se fit blesser par une e´pe´e pour ne pas avoir l’air de mourir d’une mort naturelle (p. 24). La meˆme chose sera re´pe´te´e plus tard (pp. 92–93). Remarquons que l’histoire d’Oden se meˆle dans l’ouvrage de Botin avec les fables qu’on raconte sur le dieu germanique Odin. BC cite Pline l’Ancien, Naturalis historia (Histoire naturelle), livre IV, chap. 26. La phrase concerne les Hyperbore´ens fabuleux que BC identifie avec un peuple germanique, ce qui est une erreur.

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tenait en partie au moins a` la religion sacerdotale des peuples du Nord, c’est que les Grecs, non moins belliqueux, ne nourrissaient aucune opinion semblable. La vieillesse e´tait chez eux en honneur, et la mort naturelle n’e´tait point un opprobre. Les Indiens accordent a` la vie future la meˆme pre´fe´rence que les Scandinaves ou les E´gyptiens. L’immortalite´ de l’ame n’est pas seulement pour eux un de´sir vague, une espe´rance incertaine, c’est une conviction absolue, le motif de´terminant de toutes les actions, le ressort et le but de toutes les lois, de toutes les institutions, de toutes les pratiques a : mais cette opinion prend chez eux une autre forme. Ni les moyens qu’ils emploient ni le prix qu’ils ambitionnent ne sont les meˆmes. Les moyens ne sont pas une mort guerrie`re, mais une vie contemplative ; le prix n’est point une immortalite´ de combats, de plaisirs et de feˆtes, mais une e´ternelle apathie, une absence comple`te de toute individualite´ b. Cette fatigue de l’action de vivre, sous le plus beau ciel, au milieu de toutes les jouissances, est une chose fort remarquable. Recommencer pour l’e´ternite´ les occupations terrestres, est l’espoir le plus vif des peuples qui luttent ici-bas contre une destine´e rigoureuse et qui conquie`rent avec effort,

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dieux qu’il pe´risse en combattant» (Cap. 25)1. Apre`s leur conversion au christianisme, qui les forc¸a de renoncer au suicide, les guerriers de cette partie du monde s’armaient au moins de toutes pie`ces a` l’approche de l’instant fatal. SCHLEGEL, Weish. der Indier, pag. 1132. La re´compense des bons, dit le Bhaguat-Gita, est d’eˆtre absorbe´s en Dieu et de participer a` la nature divine inaccessible a` toute e´motion. Les Indiens, observe a` ce sujet le traducteur de cet ouvrage, font consister le bien supreˆme dans une insensibilite´, qui e´quivaut a` l’ane´antissement. Toutes les fois qu’ils parlent de l’ame re´unie a` Dieu, ils la peignent comme dans une impassibilite´ parfaite, e´galement e´trange`re a` la peine et au plaisir3.

5–6 que les Scandinaves ... E´gyptiens. ] manque Ms-texte 6–9 L’immortalite´ ... pratiques. ] e´tait le texte d’une note accroche´e au mot «pre´fe´rence» L’immortalite´ de l’ame, dit Schlegel (Weish. der Indier, p. 113.) ... seulement un de´sir ... absolue. L’ide´e d’une autre vie est le motif ... actions, dans celle-ci, le ressort ... pratiques, sans en excepter les plus minutieuses. Ms-notes 13 combats, de plaisirs ] plaisirs, de combats Ms-texte 16 fort ] assez Ms-texte 18 icibas ] 〈sur la〉 terre ici bas les deux derniers mots dans l’interl. le mot «terre» n’est pas biffe´ Mstexte 24–25 de cet ouvrage ] du Bhaguat-Gita Ms-notes 1

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Voir Caii Ivlii Solini Polyhistor, Ex Editione Clavdii Salmasii accvvrante M. Andrea Goezio Collectanea rerum Memorabilium, Lipsiæ : Bauer, 1777. La citation se trouve dans le chap. XXII, «Britannia. In ea de lapide Gagate et gentibus barbaris, insulisque circa eam claris». Solin ne parle pas des Islandais, mais des habitants de Hibernia, des Irlandais. «Puerpera, si quando marem edidit, [...] gentilibus votis optat, non aliter, quam in bello, et inter arma mortem oppetat» (p. 141). Cette note n’est pas acheve´e. Il est probable que BC pensait choisir dans Schlegel, Weisheit der Indier, un passage du deuxie`me chap., «System der Seelenwanderung und der Emanation» (pp. 95–113). Voir The Bha˘gvat-Geeta˘, lecture II, «Of the nature of the soul, and speculative doctrines»,

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a` travers les difficulte´s et les pe´rils, une subsistance toujours dispute´e. Ne plus revenir dans ce monde est l’unique de´sir de ces nations en apparence favorise´es, que la fertilite´ de leur sol et la douceur de leur climat pre´servent de toute peine et dispensent de tout travail. C’est que le travail, le besoin, les dangers, nous attachent a` la vie, en nous offrant a` chaque instant des luttes qu’il faut soutenir, un but qu’il faut atteindre ; tandis que le repos nous livrant a` nous-meˆmes, nous fait sentir douloureusement le vide d’un bonheur facile et l’insuffisance de ce que nous posse´dons. L’homme a besoin, pour ne pas succomber sous le fardeau qui l’accable, d’eˆtre force´ par les obstacles a` oublier la tristesse de sa destine´e, et a` de´velopper constamment ses faculte´s et ses forces. Le de´sir ardent d’eˆtre soustraits a` la condition humaine modifie dans la litte´rature des Indiens jusqu’aux ouvrages qui sont e´trangers a` la religion. Ils se sentent froisse´s, quand on retrace sur leur the´aˆtre les infirmite´s de notre nature. Ils veulent qu’on e´carte d’eux la repre´sentation de tout ce qui ressemble trop exactement a` la vie mate´rielle ; et la doctrine de l’absorption dans la Divinite´, influe aussi sur le de´nouˆment de leurs drames. Ce de´nouˆment ne doit jamais eˆtre malheureux : il contrarierait le dogme fondamental, la certitude d’une re´union de´finitive avec l’apathie ce´leste. Les notions grecques et les notions indiennes sont les deux opinions extreˆmes sur l’e´tat des ames apre`s la mort. L’enfer home´rique pre´sente ces ames comme des eˆtres individuels, affaiblis au moral et au physique, et le monde des morts comme une image de ce monde avec le regret de la re´alite´. L’absorption indienne est la ne´gation de toute faculte´, de toute me´moire, de

1 difficulte´s ... pe´rils ] pe´rils & les obstacles Ms-texte 8–11 L’homme ... forces. ] ajoute´ dans la col. de gauche, avec quelques variantes l’homme ... fardeau 〈de la vie〉 qui l’accable la corr. dans l’interl. d’eˆtre ... obstacles 〈ou les pe´rils qui l’entourent〉 a` oublier ... de´velopper sans cesse ses ... forces. au-dessus de ce passage une note de travail qui ne sera pas de´veloppe´e influence de ce de´gout de la vie sur la poe´sie dramatique des Indiens. d’Eckst. XXX1. Ms-notes 12-p. 147.2 Le de´sir ... d’ici-bas. ] manque Ms-texte

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pp. 34–43, un des chapitres qui expose cette doctrine (dans la traduction franc¸aise, pp. 31– 45). BC fait allusion a` l’introduction de Parraud qui parle des attributs de l’eˆtre supreˆme (pp. XXXI-XXXVI). BC pre´voyait une note en partant de l’e´tude du baron d’Eckstein, «De la poe´sie dramatique indienne», dont la premie`re partie a e´te´ publie´e dans Le Catholique, t. X, no XXX, juin 1828, pp. 426–493, et qui sera poursuivie dans les nos XXXI (pp. 80–132) et XXXIII (pp. 360–405). Ce qui l’inte´resse en re´digeant le manuscrit pour le t. IV, ce sont les re´flexions de l’auteur sur les huit espe`ces d’e´motions pre´sentes dans le the´aˆtre indien (pp. 438–441).

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toute personnalite´ de l’a me, qui est ainsi re´duite a` n’eˆtre qu’une abstraction, prive´e de tout ce qui lierait son existence a` venir a` son existence d’ici-bas. Parmi les nations soumises a` des corporations sacerdotales, il en est une toutefois qui pre´sente relativement a` la vie future une exception singulie`re. La loi mosaı¨que garde sur l’immortalite´ de l’ame un silence absolu. Elle n’entretient les Juifs que de re´compenses temporelles, et quelquefois les prophe`tes eux-meˆmes semblent ne pre´voir au-dela` du tombeau que le ne´ant a. Nous pensons ne´anmoins qu’on s’est fort exage´re´ l’absence de tout dogme sur l’existence future dans la religion juive b. Moı¨se parle, dans le a

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Le se´pulcre ne te ce´le´brera point, dit E´ze´chias a` l’E´ternel. La mort ne te louera point. Ceux qui descendent dans la fosse, ne s’attendent plus a` ta ve´rite´. Isaı¨e, ch. 38. Apre`s la mort on ne pense plus a` Dieu, on ne le loue plus, on ne le remercie plus. Ps. XXX, v. 9, 10 ; CXVIII, v. 18. Les morts ne connaissent plus la bonte´ de Dieu ; leur se´jour est la terre de l’oubli. Ib. LXXXVIII. Je ressemble a` ces morts auxquels tu ne penses plus, et dont ta main s’est retire´e. Il n’y a ni science, ni sagesse, ni projets apre`s la mort. Eccle´siaste. Job (ch. VII, v. 8–9 ; XIV, 8–13) paraıˆt indiquer de la manie`re la plus positive qu’il ne croit ni a` l’immortalite´ de l’ame ni a` la re´surrection ; et la secte des Sadduce´ens niait formellement toute re´compense et toute punition apre`s cette vie. Cette exage´ration date de Warburton1, qui, comme on sait, voulait trouver un nouveau genre de preuves de la ve´rite´ du christianisme, dans l’hypothe`se que la doctrine des He´breux ne sortait pas des limites du monde mate´riel, et que cette peuplade rejetait, ou pour mieux dire, ignorait le monde a` venir. Se´duits par les raisonnements inge´nieux et l’e´rudition souvent imposante d’un maıˆtre qui leur e´tait d’autant plus agre´able qu’il e´tait plus intole´rant et plus passionne´, les the´ologiens ont admis volontiers un syste`me, a` la faveur duquel le christianisme laissait loin derrie`re lui le judaı¨sme, son berceau ; et les incre´dules n’y ont point

3–8 Parmi ... ne´ant. ] a` la hauteur de cet aline´a dans la col. de gauche une note de travail Les 2 opinions extreˆmes sur l’e´tat de l’ame apre`s la mort sont : l’une l’enfer home´rique, pour prendre ce nom propre dans lequel [sous] ce dernier mot une proposition de lecture hypothe´tique pour un mot qui manque ici enfer on se figure les ames comme des eˆtres individuels affaiblis au moral & au physique, & le monde des morts, comme une image de ce monde avec le regret de la re´alite´ : l’autre la ne´gation de toute individualite´, de toute illis., de toute personalite´, de l’ame re´duite ainsi a` n’eˆtre qu’une abstraction prive´e de tout ce qui lie son existence d’alors a` son existence d’ici bas. Ms-texte 12 Apre`s ] 〈David dit qu’〉apre`s Ms-notes 16 Il n’y a ni ] Il n’y a, dit l’Eccle´siaste, ni le renvoi a` cette source manque devant le nom de Job Ms-notes 17 paraıˆt ] 〈semble〉 paraıˆt corr. dans l’interl. Ms-notes 18–19 et la secte ... vie. ] 〈Il un mot illis. que〉 & la secte des Sadduce´ens rejetoit nomme´ment toute immortalite´, toute re´compense ... vie. ajoute´ dans la col. de gauche Ms-notes 26-p. 148.1 point re´pugne´ ] a` la hauteur de ces mots commence une note qui n’a e´te´ employe´e que partiellement L’e´vangile de S. Matthieu, ch. 22, de S. Marc, ch. 12, les e´pitres de S. Paul, surtout celle aux He´breux, 1

William Warburton, The Divine Legation of Moses Demonstrated on the Principles of a Religious Deist, From the Omission of the Doctrine of a Future State of Reward and Punishment in the Jewish Dispensation, London : Fletcher Giles, 1738–1741. BC pense surtout aux livres V et VI de cet ouvrage, ou` le syste`me mosaı¨que et le christianisme sont traite´s. Voir plus particulie`rement les chap. V et VI du livre V (pp. 446–475).

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Deute´ronome a, de l’e´vocation des morts ; et les e´crivains sacre´s font a` l’immortalite´ de l’ame des allusions fre´quentes b.

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re´pugne´, heureux de trouver, de l’aveu d’un orthodoxe savant, le peuple dont la loi, bien qu’abroge´e, sert de base a` la noˆtre, e´tranger a` toute notion sur la vie future, et ravalant comme eux, sous ce rapport, la race humaine au rang des animaux. Deut. XXIII, 11. L’histoire de la Pythonisse d’Endor prouve que l’opinion d’un se´jour que les morts habitaient e´tait une opinion vulgaire1. Isaı¨e repre´sente le roi de Babylone, entrant dans leur demeure et poursuivi des moqueries et des sarcasmes de ceux qui l’y ont pre´ce´de´ (XXVI, 19). E´ze´chiel compare le re´tablissement des Juifs dans leur ancienne prospe´rite´ a` la re´surrection. L’on peut opposer au passage de Job cite´ dans la note pre´ce´dente, un passage non moins positif en sens contraire (XIX, 25–27). E´lie en ressuscitant l’enfant de la veuve, demande a` Dieu de faire revenir l’ame de l’enfant, et l’ame rentre dans ce corps de´ja sans vie (Rois, XVII, 3). L’Eccle´siaste, a` coˆte´ de son mate´rialisme, digne d’E´picure, dit que la poussie`re retourne a` la terre d’ou` elle est venue, et l’ame a` Dieu qui l’a cre´e´e (XII, 7). Daniel divise en deux cate´gories ceux qui sont couche´s dans la poudre, et dont les uns se rele`veront pour la vie e´ternelle, et les autres pour l’opprobre et le chaˆtiment (XXII, 2–3). Tobie (II, 15–28) compte sur la vie que Dieu donnera a` ceux qui ont une foi ferme et qui marchent dans ses voies avec confiance. Il est enfin parle´, dans plusieurs endroits de la Bible, de Be´lial, le roi des ombres, qui gouverne ceux qui ne sont plus. Du temps des Machabe´es, les Juifs prient pour leurs morts, et leur offrent des sacrifices. Les Machabe´es meurent en espe´rant une vie meilleure, et leur me`re les encourage par cet espoir. (Machab., liv. II, Jose`phe, Gue´ne´e, pag. 86.) Voy. le meˆme, pag. 94, sur le se´jour des morts (Sche´ol) et de plus Goerres I, 499, 506, 519, 5222, et Stauedlin, Relig. magaz. Ce dernier attribue a` des communications avec la Perse les ide´es de re´surrection et de jugement dernier qui se rencontrent dans E´ze´chiel et Daniel. Mais, dans tous les cas, il est e´vident que les paroles de Je´sus-Christ a` ce sujet, quoiqu’elles renferment un sens bien autrement spirituel et sublime, se fondent sur des notions ante´rieures.

semblent attester que les Juifs croyoient a` l’immortalite´ de l’ame Gue´ne´e p. 85. suit le passage sur les Machabe´es qui passera dans la note b de cette page Ms-notes 10–12 ressurrection. ... contraire ] ressurrection des morts. suit le passage sur la doctrine de Je´sus-Christ rejete´ a` la fin de la note On peut ... Job que nous avons cite´ un autre passage ... positif. 20–26 plus. Du temps ... Daniel. ] plus. signe graphique qui renvoie a` un passage deux pp. plus haut dans ce ms. et qui e´bauche la fin de la note Des le tems des Machabe´es, les Juifs ... sacrifices. Ils meurent (les Machabe´ens) en espe´rant une meilleure vie, & leur me`re ... Gue´ne´e p. 86. Sche´ol, le sejour des morts. ib. p. 94. v. Goerres, I. 499–506. 519–522. Staudlin. Rel. Mag. sur ce sujet. les ide´es de la Ressurection & du jugement dernier dans Ezechiel & Daniel venues probablement de Perse. Ms-notes 26–28 Mais ... ante´rieures. ] passage qu’on trouve plus haut dans cette meˆme note Le livre des Machabe´es implique des espe´rances d’une autre vie, & tout ce que dit Je´sus christ a` ce sujet, quoique ses paroles renferment un sens bien autrement spirituel & sublime, se fonde e´videmment sur des notions ante´rieures. Ms-notes 1

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Voir Samuel, chap. 28, 3–25. Pendant la nuit, Saul, de´guise´, rend clandestinement visite a` la Pythonisse d’Endor qui, apre`s quelques he´sitations, appelle Samuel. Il apprend ainsi son destin. Il sera vaincu et tue´ le lendemain par les Philistins lors de la bataille de Gelboe´. Les auteurs cite´s dans cette note indiquent la source des ide´es dont BC parle ici. Les observations sur les Machabe´es se trouvent chez l’abbe´ Antoine Gue´ne´e, Lettres de quel-

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On pourrait concilier cette contradiction apparente par une conjecture qui serait plausible. Chez presque tous les peuples soumis au gouvernement the´ocratique, les preˆtres, bien que reveˆtus d’un pouvoir immense, avaient a` lutter contre les rois et contre les guerriers : et l’e´poque des livres ou des traditions qui nous sont parvenues ne remonte nulle part jusqu’aux temps ou` le sacerdoce re´gnait sans rival. Les annales he´braı¨ques, au contraire, te´moignent du despotisme complet et inconteste´ des preˆtres jusqu’a` l’e´tablissement de la monarchie. Or, quand les preˆtres sont investis de tous les pouvoirs, et disposent directement de l’autorite´ divine, ils n’ont pas besoin d’ajourner son intervention, et peut-eˆtre meˆme craindraient-ils, en l’ajournant, d’affaiblir l’effet qu’elle doit produire. Mais s’ils rencontrent dans les puissances temporelles des rivaux jaloux de leur influence, ils cherchent a` regagner, par les craintes de l’avenir, la domination que le pre´sent leur dispute. Quand ils re`gnent dans ce monde, ils soignent moins l’autre ; quand la possession de ce monde leur est conteste´e, ils appellent l’autre a` leur secours. Les terreurs de la vie future sont pour eux des opinions auxiliaires. Ainsi le sacerdoce, successeur imme´diat de Moı¨se, aurait ne´glige´ ces opinions ; mais apre`s la substitution de la royaute´ a` la the´ocratie, les preˆtres he´breux les auraient invoque´es. C’est en effet a` cette e´poque que remonte le mythe de la pythonisse d’Endor. Cette hypothe`se ne paraıˆtra pas sans vraisemblance, si l’on re´fle´chit que ce dogme, qui ne fut jamais enseigne´ aux Juifs comme article de foi, prit surtout de la force dans la bouche des

6 rival. Les ] rival. 〈Chez les he´breux, au contraire, la lutte, bien que toujours existante, en〉 Les Ms-texte 8 monarchie. Or ] monarchie, 〈& meˆme sous le re`gne de plusieurs successeurs de David.〉 Or Ms-texte 14 ils soignent ] a` la hauteur de ces mots dans la col. de gauche une 18–21 Ainsi ... note de travail a faire pour finir le 9e Livre 94 p. fait : 73 21 Ms-texte hypothe`se ] dans la col. de gauche Ainsi ... apre`s 〈l’abolissement〉 la substitution ... a` la Theocr pure il les auroit invoque´es. C’est ... que se refere le mythe ... d’Endor. puis dans la col. de droite 〈De la` peut eˆtre la fluctuation qu’on remarque dans les notions religieuses des He´breux relatives a` l’immortalite´ de l’ame.〉 Cette hypothe`se Ms-texte 22 ne fut ] ne leur fut Ms-texte

ques Juifs portugais a` M. de Voltaire, avec des re´flexions critiques, etc., et un petit commentaire extrait d’un plus grand, Lisbonne [Paris : L. Prault], 1769. BC cite ici deux entre´es de ses notes de lecture (BCU, Co 3293). – Les pages cite´es de Görres se trouvent dans le volume II de l’ouvrage. Elles offrent des arguments qui s’accordent avec ce qui est dit dans la note de BC, inspire´e dans une large mesure de Görres qui analyse l’ide´e de la re´surrection finalement accepte´e dans la religion juive. – Le renvoi a` Stäudlin n’est pas e´lucide´. Aucun des passages de la section intitule´e «Beyträge zur besondern Geschichte der Religion einzelner, älterer und neuerer Völker» qui parlent de la religion des He´breux n’aborde ce sujet.

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prophe`tes et des ministres de la religion, lorsqu’ils eurent a` lutter contre une tyrannie indige`ne ou e´trange`re, et furent appele´s soit a` effrayer les oppresseurs, soit a` de´fendre ou a` consoler les faibles. Mais en laissant de coˆte´ cette conjecture sur un fait particulier, un fait ge´ne´ral est incontestable. Dans toutes les hypothe`ses que les preˆtres veulent inculquer, dans les descriptions a` l’aide desquelles ils veulent inspirer l’espoir ou l’e´pouvante, ils sont contraints a` suivre la pente naturelle de l’esprit humain. Ces descriptions, ces hypothe`ses, doivent avoir pour base une imitation plus ou moins exacte de la vie re´elle. Ses usages, ses e´ve´nements, ses occupations, sont le moule ou` se jettent toutes les notions sur le monde futur. Les femmes e´gyptiennes, avides de plaire dans l’Amenthe`s a, comme dans Memphis ou Alexandrie, faisaient ensevelir avec elles des couleurs et des pinceaux, pour ranimer l’e´clat de leur teint ou se noircir les yeux. Les Gaulois e´crivaient aux amis que la mort leur enlevait, et confiaient leurs lettres aux flammes, ajournant a` leur re´union apre`s cette vie le re´glement de

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L’Amenthe`s, copie de la terre, avait ses dieux, ses habitants, meˆme ses animaux. Dionysus et Ce´re`s, qui, d’apre`s l’explication d’He´rodote, ne sont autres qu’Isis et Osiris, re´gnaient dans ce monde souterrain, ou` Dionysus porte le surnom de Se´rapis (ZOEGA, p. 302–310). Ce Se´rapis avait son temple au milieu de l’Amenthe`s. Des loups e´taient pre´pose´s a` sa garde ; aussi voit-on fre´quemment des figures de loups sur les tombeaux1.

4–5 Mais ... incontestable. ] Mais 〈quelque soit a` cet e´gard l’empire du sacerdoce, il est toujours contraint a` suivre la pente naturelle de l’esprit humain.〉 corr. dans la col. de gauche quelqu’aient pu eˆtre a` cet e´gard les variations du sacerdoce He´breux & laissant de coˆte´ les conjectures sur ce fait ... incontestable. Ms-texte 5–6 Dans ... dans ] phrase corrige´e dans toutes 〈C〉les hypothe`ses 〈qu’il〉 que les preˆtres veu〈t〉lent 〈e´tablir〉 inculquer dans corr. dans l’interl. Ms-texte 6 ils veulent ] il 〈veut〉 veulent corr. dans l’interl., sans mettre le pronom au pluriel Ms-texte 7–8 ils ... hypothe`ses ] ajoute´ dans la col. de gauche 〈les preˆtres〉 Ils sont 〈force´s〉 contraints ... hypothe`ses Ms-texte 9 exacte ] 〈re´elle〉 exacte Ms-texte

1

BC renvoie pour l’identification de Ce´re`s avec Isis a` He´rodote, livr. II, chap. 59 et pour celle de Dionysos avec Osiris au livr. II, chap. 42. Il pense e´galement au chap. 123 du livre II, ou` il est question de Demeter et Dionysos qui re`gnent dans le monde souterrain. Le renvoi a` Zoega, De origine et usu obeliscorum (Romæ : Typis Lazzarini, 1797) comple`te les de´tails.

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leurs comptes avec leurs cre´anciers et leurs de´biteurs a. Les Perses environnaient les monuments fune´raires de leurs rois de tout ce qu’exigeaient les besoins de la terre b. On connaıˆt le culte si me´thodique et si minutieux des a

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b

DIOD. V, 201. VAL. MAX. II, 6,10. «Vetus ille mos Gallorum occurrit, quos memoriæ proditum est, pecunias mutuas, quæ his apud inferos redderentur, dare solitos, quod persuasum habuerint animas immortales esse2.» On a retrouve´ dans le tombeau de Chilpe´ric Ier les armes de ce roi des Francs, et les ossements du cheval qu’il comptait monter pour se pre´senter au dieu de la guerre. Dans un cercueil ouvert pre`s de Guben, un Germain avait fait en terrer avec lui des ustensiles pour les repas, des flacons et des coupes de toutes grandeurs. Les guerriers d’Hialmar en lui rendant les honneurs fune`bres prennent de l’or qu’ils enfouissent. Voy. l’extrait d’un poe`me scandinave, dans l’introduct. de Mallet, pag. 3033. Voy. la description du tombeau de Cyrus par Arrien, cap. 294. Les courtisans du roi des Perses devaient habiter autour de sa se´pulture. Bagorazus, l’un d’eux, ayant quitte´ la cendre de son maıˆtre, fut disgracie´ par son successeur ; et Bagapatis, l’inspecteur du se´rail de Darius, fils d’Hystaspe, demeura pendant sept anne´es, et mourut, pre`s du lieu ou` ce prince e´tait enseveli. (CTES. Pers. 46, id. 19 ; HEEREN, I, 2805.) Les Perses sacrifiaient tous les

2 monuments fune´raires ] 〈tombeaux〉 monumens fune´raires corr. dans la col. de gauche Mstexte 3-p. 152.2 On connait ... athe´isme. ] passage absent de Co 3262, mais pre´vu consult. sur le Culte des anceˆtres a` la Chine Mein. C. G. I. 306–307 Ms-texte 12-p. 152.11 Voy. ... monde. ] ordre des parties diffe´rent de cette note dans Co 3262 Les courtisans ... Heeren I. 280. Lucien nous montre ... avec lui. [NB. voir s’il n’y a rien de pareil dans les volumes pre´ce´dens] V. la description ... 29. Les Perses sacrifioient ... tombeau. Chardin ... monde. Msnotes 1 2 3

4

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Il faut lire «livre V, chap. XXVIII. «Ideo in funeratione mortuorum epistolas propinquis inscriptas in rogum coniiciunt, quæ a defunctis legantur (e´d. de Strasbourg, t. III, p. 309). BC copie, pas tout a` fait correctement, une phrase de Valerii Maximi dictorum factorumque memorabilium libre novem, Biponti : ex Typographia Societatis, M D CCLXXXIII, p. 105. BC pense a` l’«ode» qui raconte l’histoire des rois Carl et Grym et de Hialmar, fils du roi Harec de Biarmien. Lors d’un combat, Grym affronte Hialmar qui, blesse´ mortellement, est enseveli par ses guerriers avec de l’or de son tre´sor. La description du tombeau de Cyrus se lit dans l’Anabase ou Expe´dition d’Alexandre, livre IV. Voir pour une analyse du monument l’article «Grabbauten», Der Neue Pauly, t. IV, col. 1169. Ce monument est encore allusivement mentionne´ dans le livre III, lorsqu’Alexandre fait transporter le roi Dareios, mort pendant la campagne, a` Pasagardai, pour le faire ensevelir dans le tombeau des Cyrus. En ce qui concerne le service des «courtisans» (eunuques ?) des rois de Perse aux tombeaux des rois, BC suit Heeren, Ideen über die Politik, den Verkehr und den Handel der vornehmsten Völker der alten Welt, Göttingen : Vandenhoek und Ruprecht, 1824, t. I, p. 267, ou` se trouvent les notes sur Bagorazus et Bagapates, avec les renvois a` l’ouvrage de Cte´sias de Gnide (chap. 46 et 19) qui renvoient a` une e´dition non identifie´e. L’e´dition moderne de Cte´sias, La Perse, l’Inde, autres fragments, texte e´tabli, traduit et commente´ par Lucine Lenfant, Paris : Belles Lettres, 2004, connaıˆt une autre nume´rotation des morceaux ; elle ne parle pas de la disgraˆce de Bagorazus, mais confirme ce qui est dit sur Bagapate`s : «Et Bagapate`s mourut apre`s avoir veille´ sept ans pre`s du tombeau de Darius» (p. 123, fragment 13,23). – Le renvoi a` Heeren qui suit dans la note vise la description du tombeau de Cyrus, pp. 276–282.

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anceˆtres a` la Chine a, culte qui a transmis aux Chinois d’aujourd’hui des rites sacerdotaux, a` travers l’athe´isme. Les habitants du Tonquin, dans la feˆte solennelle qu’ils ce´ le`brent toutes les anne´es, pre´parent leurs maisons pour recevoir ceux qui ont cesse´ de vivre, et pour les he´berger comme des hoˆtes illustres b. Les Indiens placent des fruits et du lait aupre`s des cercueils c, et nonseulement les oc cupations et les besoins des ames dans l’autre monde, mais

a b

c

mois un cheval sur ce tombeau. Lucien nous montre le satrape Arsace, demandant a` monter son cheval dans les enfers, parce que ce cheval a e´te´ enterre´ avec lui1. Chardin nous apprend que les Gue`bres ont conserve´ de leurs anceˆtres l’usage d’enterrer avec leurs morts tout ce qui leur a servi dans ce monde2. MEINERS, Crit. Gesch., I, 306, 3073. MARIGNY, Nouvelles des royaumes de Tonquin et de Laos, p. 249–2504. «A minuit, le premier jour de l’anne´e, on tient les portes ouvertes, pour que les morts entrent. On e´tend des tapis pour qu’ils marchent, des lits pour qu’ils se couchent ; on pre´pare des bains, des sandales, des bambous pour qu’ils s’appuient. On pose des mets sur les tables pour qu’ils mangent, et quand on suppose qu’ils se retirent, on les reconduit avec des re´ve´rences et des ge´nuflexions.» Le pranata, ou le souffle qui a anime´ le mort, vient pendant dix jours boire et manger. (DUBOIS, II, 2095.) On pourvoit a` ce qu’il n’endure ni la faim, ni la soif, ni la nudite´ (Ib., II, 332–333), et ne renaisse ni sourd, ni aveugle, ni infirme (Ib. 213). Les Hindous sont tenus, par un pre´cepte des Ve`des, d’offrir un gaˆteau qu’ils appellent Pinda, aux maˆnes de leurs anceˆtres jusqu’a` la troisie`me ge´ne´ration. Les Ve`des ordonnent aussi de leur apporter de

2–5 Les habitans ... illustres. ] passage qu’on trouve un peu plus loin dans Ms-texte 6-p. 153.7 et non-seulement ... veˆtements. ] passage ajoute´, avec la note, dans la col. de gauche nonseulement ... veˆtemens. suit la note Ms-texte 13–18 A minuit ... ge´nuflexions. ] citation ajoute´e dans la col. de gauche Ms-notes 19-p. 153.23 Le pranata ... 220.) ] note ajoute´e dans la col. de gauche ; quelques variantes Le pranata ... 209.) ce´re´monies tendant a` ce que la mort n’endure ... 213. Rites en l’honneur des plane`tes dans les fune´railles. ib. 220. Les Hindous sont oblige´s par un pre´cepte ... 154.) feˆtes des anceˆtres chez les Indiens, toile pour les veˆtir. Dub. II. 332–333. Ms-notes 1

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3 4

5

Lucien, Dialogues des morts, le dialogue XXII. BC ne re´sume pas tout a` fait correctement l’anecdote qu’on raconte d’Arsaces (Lucian, with an English Translation by M. D. Macleod, t. VII, London : Heinemann, Cambridge, Massachusetts : Harvard University Press, 1961, pp. 127–129. Voir Chardin, Voyages, e´d. Langle`s, t. VIII, pp. 355–382. La phrase vise´e par BC est celle-ci : » On met proche du mort, a` son chevet, des bouteilles de vin, des grenades, des coupes de faı¨ence, un couteau et d’autres ustensiles, chacun selon ses moyens» (p. 380). BC invite a` lire la description du temple des anceˆtres dans les maisons des Chinois et les rites qui s’y pratiquent. BC cite l’ouvrage du missionaire je´suite Giovanni Filippo de Marini, Histoire nouvelle et curieuse des royaumes de Tunquin et de Lao, contenant une description exacte de leur origine grandeur & estendue ; [...] traduite de l’Italien du P. de Marini Romain, Paris : Clouzier, 1666. Renvoi a` plusieurs e´le´ments des ce´re´monies mortuaires de´taille´es dans le chap. XXX de la deuxie`me partie de l’ouvrage de Dubois.

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leurs voyages sont emprunte´s de la terre. Suivant le Garouda Pourana, les ames, re´duites a` la diminutive stature d’un pouce de hauteur, sont transporte´es a` travers les airs, par les serviteurs de Yama, sur des montagnes ou` elles se´journent un mois. Elles vont ensuite a` pied, sur les bords de l’Oce´an occidental, ou` Yama les juge. Il y a deux routes, l’une belle et facile pour les bons, l’autre pe´nible pour les me´chants. Les ames s’arreˆtent deux fois en chemin pour prendre de la nourriture et des veˆtements a. Enfin si les richesses des guerriers scandinaves sont bruˆle´es sur leur buˆcher, en l’honneur des dieux, c’est qu’on leur ouvre, par ce sacrifice, un champ de bataille ou` de nouveaux combats les attendent. Leur dignite´ dans le Valhalla de´pend des tre´sors qu’ils ont conquis. Admis dans ce se´jour de gloire, ils pro me`nent sur leurs compagnons d’armes des regards jaloux. Bientoˆt ils reveˆtent leurs armes brillantes, montent leurs coursiers, se de´fient et s’attaquent. L’air retentit du choc des lances et des e´pe´es. Le sang ruisselle, et les parvis ce´lestes sont jonche´s de champions frappe´s d’un second tre´pas. L’heure du festin sonne, la lutte cesse, les blessures se ferment, les morts revivent, pour s’asseoir a` la table de leur chef. La`, servis par les Valkyries aux formes ae´riennes, aux blonds cheveux, au sein de neige, ils de´vorent le sanglier Skrimner, qui renaıˆt chaque jour, et boivent la bie`re

a

l’eau chaque jour, et ce rite est appele´ tarpa, la satisfaction, l’apaisement. Quand il est ne´glige´, l’ame est pre´cipite´e aux enfers, pour rentrer dans le corps d’un animal impur. (Bhag.-Gita, note, p. 1541.) L’astrolaˆtrie se joint a` ces superstitions, et les plane`tes ont leur part dans les hommages rendus aux morts. (DUBOIS, II, 2202.) As. Res. XIV, 4413. Plusieurs ce´re´monies destine´es a` favoriser le voyage des ames, et sans lesquelles elles resteraient errantes, parmi les de´mons et les mauvais ge´nies, sont de meˆme copie´es des usages terrestres. Ib., VII, 263.

8–9 Enfin ... buˆcher ] passage remanie´ ; on peut distinguer trois versions ; premie`re version Enfin toutes les richesses des he´ros Scandinaves, bruˆle´es avec leur bouclier, leur deuxie`me version Enfin toutes les richesses des he´ros Scandinaves, brule´es apre`s leur 〈bouclier, leur〉 mort les corr. dans l’interl. la troisie`me corr. de´finitive produit le texte imprime´, biffant les mots qui disparaissent et ajoutant les corr. dans l’interl. Ms-texte 18–19 Valkyries ... bie`re ] re´daction diffe´rente Valkyries, ils de´vorent ... jour, pour leur servir de nourriture, & 〈boivent〉 recoivent de la main des Valkyries 〈quelques mots illis.〉 aux formes ae´riennes & au sein de neige la bierre Ms-texte 1 2

3

BC renvoie a` la note 6 de Wilkins accroche´e a` la dernie`re invocation d’Arjoon a` Kreeshna dans la premie`re lec¸on (traduction franc¸aise, p. 31, et le texte de la note pp. 153–154). Allusion a` la deuxie`me partie, chap. XXX, «Des diverses ce´re´monies pratique´es pour les morts apre`s les obse`ques», ou` on lit : «Le treizie`me jour, l’he´ritier fait le homam en l’honneur des neuf plane`tes, a` la manie`re accoutume´e.» BC re´sume un passage de l’article de Francis Wilford, «On the ancient Geography of India» (Asiatic Researches, t. XIV, London : Vernor et al., 1822, pp. 373–470), qui raconte la le´gende de la Garuda´-pura´n’a pour expliquer un nom ge´ographique (pp. 440–441). – Le second renvoi de´signe un passage de l’article de Colebrooke, «On the Religious Ceremonies of the Hindus» (voir ci-dessus, p. 121, n. 3), qui expose des rites fune´raires (pp. 263–264).

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enivrante et l’hydromel de´licieux. Le Niflheim renferme les femmes, les enfants, les vieillards, qui ont atteint sans efforts le terme d’une vie obscure. Eux aussi recommencent le passe´, conservent leurs noms, leur rang, leurs honneurs, et continuent le reˆve renouvele´ de la vie, aussi paisiblement qu’ils ont ve´cu sur la terre a.

a

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Avant que le destin de Balder fuˆt accompli (voyez ci-dessus, chap. de la destine´e), Odin descendit dans le palais d’Hela (la mort), pour demander l’explication des songes effrayants qui le poursuivaient. Il vit un banquet pre´pare´, des estrades orne´es de diamants, des couches e´clatantes d’or, des coupes remplies d’hydromel, en un mot tout ce qui caracte´rise les festins terrestres. Balder parut avec sa fide`le e´pouse ; ils se place`rent sur deux troˆnes, pour contempler la feˆte souterraine, semblable en tout a` celles que ce´le`brent les vivants (Edda, 44e fable1).

3 le passe´ ] leurs occupations passe´es Ms-texte 10 terrestres. ... se place`rent ] terrestres : & l’arret du sort ayant recu son exe´cution, Balder & sa fide`le e´pouse, qui n’avoit pu lui survivre, se place`rent Ms-notes

1

Le renvoi est faux. Il y a dans l’Edda une 44e fable, mais elle raconte comment Hermodur, un fils d’Odin, se rend a` la demeure de Hel pour reconduire Baldur chez les vivants. Il n’y est pas question d’un festin, ni de l’e´pouse de Baldur, Nanna, ni de reˆves pre´monitoires, etc.

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Chapitre VIII. Des demeures des morts, et de la description des supplices infernaux dans les religions sacerdotales.

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Le polythe´isme home´rique n’indique pour les morts qu’une seule demeure, qui n’est point un lieu de chaˆtiments re´serve´s au crime, mais un espace vaste et lugubre, ou` toutes les ombres, sans distinction, prome`nent la me´lancolie qui les accable, et que n’aggrave ni ne dissipe le me´rite moral de leur conduite passe´e a. Les religions sacerdotales ont des enfers plus nombreux et plus soigne´s. L’Edda en compte deux, le Niflheim et le Nastrond ; les Indiens tantoˆt trois b, tantoˆt quatorze c, et quelques sectes jusqu’a` quatre-

a b c

V. t. III, p. 3891. Bhaguat-Gita, p. 1342. LAFLOTTE, p. 2263.

E´tablissement du texte : Manuscrits : 1.) Co 4725, fo 108 2.) BCU, Co 3262/1, pp. 79–88 [=Ms-texte] et Co 3262/2, pp. 51–59 [=Ms-notes] Imprime´ : De la Religion, conside´re´e dans sa source, ses formes et ses de´veloppements, t. IV, Paris : Chez Pichon et Didier, e´diteurs, 1830, pp. 93–104.

4–8 Le polythe´isme ... passe´e. ] de´but re´dige´ autrement Nous n’avons vu, dans le Polythe´isme home´rique, qu’une seule demeure, commune a` tous ceux que la mort frappe : ms. sur fiche, 11 V. t. III, p. 389. ] manque Ms-texte fiche unique non nume´rote´e, Co 4725, f o 108 r o 13 226. ] 226. Dow’s Ess. on Hindost. p. 29–41. Ms-texte

1 2

3

OCBC, Œuvres, t. XIX, p. 366. Le renvoi est partiellement incorrect. Le Bhaguat-Geeta parle dans la lec¸on XVI (traduction franc¸aise, pp. 131–135) du Narak, le lieu «de l’impurete´». Mais dans ce chapitre, il n’est pas question de trois enfers, mais de trois chemins «qui conduisent au Narak, ou re´gions infernales : la concupiscence, la cole`re & l’avarice». Nous supposons que BC a confondu ce passage avec ce qu’il a lu dans l’article «Gnielva» du Mythologisches Lexicon de Friedrich Majer qui parle de trois enfers chez les Tibe´tains (et non pas chez les Indiens), comme le sugge`re la variante (ci-dessous, p. 156, variante aux lignes 5–8) qui repose sur une note de lecture (BCU, Co 3293, note 152, marque´e de «empl. 1828»). Le renvoi ne correspond pas a` ce qu’on trouve chez Laflotte dans les chapitres sur l’enfer de la religion des Indes (pp. 227–233). – La variante atteste que BC pensait renvoyer aussi a` un passage d’Alexander Dow, The History of Hindostan, London : T. Becket and P. A. De Hondt, 1772.

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vingts a. Chez les Perses b il y en avait sept ; il y en a cinq chez les Birmans, trente-trois chez les Japonais, trois au Tibet, mais subdivise´s en dix-neuf re´gions ou` les peines sont diversifie´es, car c’est surtout dans la description des supplices que le sacerdoce se5 complaıˆt c. a

b

c

Voy. Dubois II, 309–326, 522–5301 ; As. Res., VI, 215–224. Ces peuples rele`guent les enfers dans une terre au-dela` de l’Oce´an, opinion fonde´e sur une erreur de physique et de ge´ographie. Ils croient qu’un continent quelconque doit entourer les eaux, pour qu’elles ne tombent pas dans le vide. Ib. XI, 1052. Le pont qui conduit aux enfers est commun aux Perses et aux Scandinaves. Voy. sur ce pont, WAGN., 453 et MEINERS, Cr. Gesch., 771, 7723. Les enfers des Tibe´tains sont gnielva, jang-sci-jangso et nasme´. Le gnielva est divise´ en deux zones, celle du froid et celle du chaud, partage´es chacune en huit autres. Dans cette dernie`re, les damne´s sont couche´s sur une terre recouverte d’un fer rouge : ils avalent du feu liquide : ils sont e´crase´s entre deux rochers, puis mis dans des cuille`res ardentes, avec

1 il y en a cinq ] cinque Ms-texte 2 trente-trois chez les Japonais, ] manque Ms-texte 5–8 Voy. ... 105. ] 〈Enfers sacerdotaux. Qui (?) des Perses. Guig. 328–329. 707. Indiens.〉 Dubois II. 309–326. ... 224. les Indiens rele`guent ... vide. As. Res. XI. 105. Consulter sur les enfers des Anciens, Bayle, re´ponse aux questions d’un Provincial4. Enfers des Tibe´tains. May. Art. Gnielva. 33 lieux ou e´tats de l’ame suivant ses actions. May. Art. Japon. suit la phrase qui deviendra la note b de cette page Ms-texte 9–10 Le pont ... 772. ] la note est la dernie`re phrase d’un ajout dans la col. de gauche Le pont ... Scandinaves. v. sur ce pont Wagner 453. Valhalla, Mein. Cr. G. 771–772. Ms-texte 11-p. 157.20 Les enfers ... 266. ] dans Co 3262, cette note se lit dans les cahiers notes 〈les habitations de deux mots illis. sont 26 un mot illis.〉 les enfers ... fondus, scie´s ... 266. Ms-notes 1

2

3 4

Renvois sommaires au chap. II de la troisie`me partie ainsi qu’a` la deuxie`me annexe de l’ouvrage de Dubois, ou` les sujets sont traite´s. – BC cite ensuite l’article de Francis Buchanan, «On the Religion and Literature of the Burmas» (Asiatic Researches, t. VI, London : Vernor et al., 1801, pp. 163–308) qui reproduit aux pp. indique´es la traduction d’un texte sur les enfers. – Le dernier renvoi vise un passage de l’article de Francis Wilford, «On the Sacred Isles in the West» (voir ci-dessus, p. 98, n. 3). – On notera encore que BC pensait citer d’autres auteurs, comme l’atteste la variante a` cette note ; a` savoir, Friedrich Majer, Mythologisches Lexicon, article «Gnielva´» sur l’enfer tibe´tain (vol. II, pp. 226–227) et l’article «Japaner» qui, pourtant, affirme que les Japonais ne connaissent pas d’enfer (p. 391). BC renvoie a` Johann Jakob Wagner, Ideen zu einer allgemeinen Mythologie der alten Welt, Frankfurt am Main : in der Andreäischen Buchhandlung, 1808, ouvrage qu’il a lu a` Göttingen, comme il ressort de ses notes de lecture (no 127 : «Pont de l’autre vie chez les Perses», avec le mention «empl. 1826»). La phrase a` laquelle il pense est la suivante : «[die Seele] wird von den reinen Izeds über die Brücke in ein Land der Freuden geführt». – Le passage cite´ de Meiners, Kritische Geschichte, t. II, pp. 771–772, ne parle pas d’un pont, mais du Valhalla des Scandinaves. Les indications atteste´es par la variante sont plus exactes. BC re´sume un passage de l’article de F. Wilford, «An Essay on the sacred Isles in the West» (Essay VI), Asiatic Researches, t. XI, p. 105, qui parle de ce continent fabuleux. Voir Bayle, Re´ponse aux questions d’un provincial, seconde partie, chap. 87 : «Examen de ce que l’auteur du Livre sur l’origine du mal a dit sur les enfers». – Les renvois a` Majer, Mythologisches Lexicon, concernent deux articles. Pour le premier, «Gnielva», voir cidessus, p. 155, n. 2. Le second concerne l’article «Japaner» (pp. 366–404), ou` BC a trouve´ les pre´cisions sur les 33 cieux des Japonais (p. 391). Voir les notes de lecture, BCU, Co 3293, la note 183, marque´e «empl. 1828».

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Les enfers des livres Zend a sont place´s au bord d’une onde fe´tide, noire comme la poix, froide comme la neige. Les ames condamne´es s’y agitent sans cesse. Une fume´e e´paisse sort de cet antre te´ne´breux, et l’inte´rieur est rempli de scorpions et de serpents. L’Ifurin des Gaulois est une contre´e impe´ne´trable aux rayons du jour. Des animaux venimeux sont les compagnons et les bourreaux des habitants de cette affreuse demeure. Des loups affame´s les de´vorent. Ils invoquent la mort, mais en vain. Apre`s avoir servi de proie aux beˆtes farouches, ils renaissent pour leur offrir une paˆture nouvelle. Les plus coupables sont e´tendus dans une sombre caverne au milieu d’innombrables reptiles. Un poison qui les bruˆle tombe sur eux goutte a` goutte. Partout re`gne un froid si perc¸ant, que ces ombres mise´rables seraient bientoˆt converties en glace, si elles n’e´taient destine´es a` des douleurs sans fin b. Les Indiens, malgre´ la douceur de leurs dispositions naturelles, n’ont pas des enfers moins e´pouvantables. Yama, juge des morts, prononce la sentence. Ceux qui ont ne´glige´ les pre´ceptes de la religion sont punis durant un nombre d’anne´es e´gal aux cheveux qui couvrent leurs teˆtes. Les athe´es sont perce´s de part en part en tombant sur des armes aigue¨s. Les contempteurs

a b

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ils sont scie´s en deux ou jete´s sur des e´pe´es bruˆlantes, ou e´cartele´s en quatre, en huit, en trente ou en soixante parties. GEORG. Alphab. tib., p. 183, 265–2661. HYDE, de Rel. pers2. «Je verrai ton ame, dit a` l’une de ces victimes un Barde dans ses vers sacre´s ; je verrai ton ame, tantoˆt suspendue dans les entrailles d’un brouillard e´pais, tantoˆt jete´e au sein d’un nuage humide, jouet malheureux des vents qui t’agiteront dans l’espace ou` ne brille jamais le soleil» (Gall. Alterth. I, 62–63). Cette poe´sie druidique rappelle ces vers de Voltaire : ................. et moi pre´destine´, Je rirai bien, quand vous serez damne´3.

10 e´tendus ] couche´s Ms-texte 15 Yama ] Jama ajout dans la col. de gauche v. Guign. p. 247. Ms-texte 17 teˆtes ] teˆtes coupables Ms-texte 25 Gall. ] Gallische Ms-notes 1

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Georgi, Alphabetum tibetanum, donne aux pages indique´es la description des deux enfers des Tibe´tains, avec les de´tails dont parle BC, avec cette diffe´rence que la dissection des condamne´s est re´verve´e a` ceux qui sont jete´s dans l’enfer du froid. Le renvoi a` Thomas Hyde, Historia Religionis veterum Persarum, eorumque magorum, Oxonii : E Typographeo Clarendoniano, 1760, re´sume un passage du chap. XXXIII, ou` il est question d’un fleuve noir, «nigri fœtentis fluvii, cujus aqua ut pix, & frigida ut nix, in quem projectæ sunt miserorum animæ», ensuite d’un antre sombre «barathr[um] tenebricos[um], ex quo erumpebat fumus, & in quo erant scorpiones & serpentes & sanguisugæ pedes mordentes, & diaboli peccatorum animas jactantes, easque pungentes, & lacerantes, & vulnerantes, & mordentes, & rodentes ut canes rodunt ossa» (p. 407). La description des peines se poursuit avec beaucoup de de´tails jusqu’a` la p. 408. BC cite les Gallische Alterthümer oder eine Sammlung alter Gedichte aus dem Gallischen des Ullin, Ossian, Orran. Le renvoi est faux. BC utilise un passage de la poe´sie «Finan und Lorma» (t. I, p. 148) pour sa traduction. Ce qui le de´cide a` rapprocher ce passage de sa description du monde des morts des Celtes est la note du traducteur allemand (p. 149), si

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des brames sont coupe´s en pie`ces et jete´s dans le feu. L’adulte`re embrasse des simulacres rougis par la flamme. Des corbeaux au bec d’airain de´chirent l’infide`le qui a renie´ sa caste. Le meurtrier d’un homme ou d’un animal est plonge´ dans un gouffre infect. Le voluptueux marche pieds nus sur des ronces. Le calomniateur charge´ de chaıˆnes est nourri d’aliments immondes. L’avare est de´vore´ par des vers insatiables. Celui dont la main sacrile´ge a immole´ une vache, devient une enclume vivante frappe´e par un marteau bruˆlant. Le faux te´moin roule de rocs en rocs, teignant de son sang leurs pointes ace´re´es : et les corps de ces infortune´s, compose´s d’une matie`re impalpable, se rejoignent comme le vif-argent pour subir de nouveaux supplices a. On aperc¸oit dans ces tableaux soigne´s un calcul pre´me´dite´, une volonte´ de faire effet, un arrangement me´thodique. Cette multiplicite´ d’enfers, creuse´s pour ainsi dire les uns sous les autres, trahissent le de´sir de rendre plus profonde l’impression produite par l’e´pouvante de l’avenir. Les preˆtres ne trouvent jamais cette impression suffisamment forte ; ils diversifient leurs conceptions, ils les e´tendent. Ils traitent les cieux et les enfers comme des a

Bagavadam, liv. V1. Il est si vrai que ces raffinements de tortures sont inhe´rents a` l’esprit sacerdotal, que des catholiques ze´le´s les re´clament, quand on les leur dispute. Un auteur anglais nomme´ Sumner,2 de´sireux, dans son attachement au christianisme, de montrer la supe´riorite´ de cette croyance sur celle des peuples paı¨ens, l’avait loue´e de ce qu’elle re-

17 conceptions ] descriptions Ms-texte

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ce n’est pas l’article «Ifurin» du Mythologisches Lexicon de Friedrich Majer qui cite, vers la fin, le passage traduit par BC. – Les vers de Voltaire sont tire´s de la poe´sie De´fense du Mondain, ou l’Apologie du luxe. Le paragraphe auquel est accroche´ cette note paraphrase le Bagavadam, livre V, pp. 150– 152 (traduction de Foucher d’Obsonville). Il s’agit de John Bird Sumner (1786–1862), e´veˆque de l’E´glise anglicane, qui a publie´ l’ouvrage The Evidence of Christianity, Derived from its Nature and Reception, London : Hatchard and Son, 21826. La traduction franc¸aise par P. E. Lanjuinais a paru la meˆme anne´e (Ve´rite´ du christianisme, prouve´e par la matie`re meˆme de cette religion, et par le fait de son e´tablissement, Paris : Baudouin fre`res). Le compte rendu anonyme, signe´ par trois aste´risques, se trouve dans la Gazette de France no 230, 18 aouˆt 1826, pp. 3b–4b. L’auteur, un catholique convaincu, attaque a` la fois l’auteur et le traducteur en les traitant d’he´re´tiques. «En the´ologien de bonne compagnie, il [i.e. Sumner] voudrait nous donner a` entendre que notre enfer est un enfer tout-a`-fait convenable, et dont on peut parler entre gens qui savent vivre ; et M. le vicomte Lanjuinais, qui sent aussi son homme bien e´leve´, pense comme M. Sumner» (p. 4b). Suit la citation que nous lisons chez BC. Quant au second article de la Gazette de France, BC renvoie a` une glose anonyme parue le 20 octobre 1829 (no 658, pp. 2a–2b) sous le titre de «Caracte`res». L’auteur attaque Chateaubriand sous le nom de Cle´on, en paraphrasant d’abord quelques phrases des Me´moires d’outre-tombe (livre XI, chap. 4, e´d. de Jean-Claude Berchet, Paris : Bordas, 1989, t. I, pp. 602–604) et finissant en disant : «On pourrait ... lui appliquer les paroles du cardinal de Retz sur un ce´le`bre personnage de la Fronde, et dire de lui, qu’ayant pu devenir le he´ros du bon parti, il avait pre´fe´re´ se faire l’aventurier du mauvais» (p. 2b). Le passage vise´ par BC est le suivant :

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proprie´te´s qui leur appartiennent. Ils inventent de nouveaux cadres pour les remplir plus en liberte´. Souvent meˆme, pour pre´sider aux sentences, ils font paraıˆtre un dieu nouveau a. En un mot, ils retravaillent sans cesse la religion, tout en maintenant ses dogmes anciens, comme un ouvrier ame´liore ses instruments, ou comme un soldat polit ses armes. Ils meˆlent aussi l’espe´rance a` la terreur. Ils multiplient les paradis comme les enfers. Le Gimle vient chez les Scandinaves, apre`s le Valhalla, comme le Nastrond apre`s le Niflheim b. Les habitants de Ceylan comptent vingt-six paradis, vers lesquels les justes s’e´le`vent successivement, en retournant par intervalles dans un corps humain, jusqu’a` ce qu’ils parviennent enfin au

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pousse les peintures horribles des supplices de l’enfer. Aussitoˆt un catholique orthodoxe lui re´pond : J’en suis faˆche´ pour le novateur, mais ces pailles que le fils de l’E´ternel bruˆlera d’un feu inextinguible, cette geˆne du feu encourue par celui qui outrage son fre`re, cette ivraie qui est voue´e au feu a` la fin des sie`cles, ces anges qui rassemblent les coupables des quatre coins du monde et qui les jettent dans des fournaises ardentes, ces pleurs, ces grincements de dents, ces maudits qui seront a` la gauche de Dieu, et qu’il pre´cipitera dans le feu e´ternel, pre´pare´ pour le diable et ses anges, tout cela est dans l’E´vangile. (Gaz. de France, 18 aouˆt 1826.) Le meˆme journal reproche ame`rement (21 octobre 1829) a` M. de Chaˆteaubriand d’avoir ouvert aux paı¨ens l’entre´e du purgatoire. A l’e´poque ou` les drottes de Scandinavie introduisirent un second enfer et un second paradis, ce ne fut plus Odin, mais un dieu inconnu qui fut le dispensateur des chaˆtiments et des re´compenses1. Nous indiquerons dans une autre partie de cet ouvrage les diffe´rences qui distinguent ces deux enfers et ces deux paradis. Nous n’avons ici a` nous occuper que de leur nombre2.

1–3 Ils inventent ... un mot ] passage ajoute´ dans la col. de gauche Ms-texte 4 tout ... anciens, ] manque 5 instruments ] outils Ms-texte 6-p. 160.7 Ils meˆlent ... il permet ] passage compose´ a` partir de phrases qu’on lit dans les cahiers texte et cahiers notes de Co 3262 ils meˆlent l’espe´rance a` la terreur. ajoute´ dans la col. de gauche de Ms-texte on passe au cahier notes Il y a dans les religions sacerdotales la meˆme 〈un mot illis.〉 multiplicite´ de paradis que d’enfers. chez les Scandinaves, le Gimle vient apre`s ... divine. Inde´pendamment ... moyens manque dans Co 3262 retour au cahier texte Quand il leur convient de provoquer les libe´ralite´s des fide`les, il permet Ms-texte et Ms-notes 18–19 Le meˆme ... purgatoire. ] manque Ms-texte

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«La` [dans le Ge´nie du christianisme] tout se trouve horriblement confondu, la vertu et le vice, la ve´rite´ et l’erreur, le christianisme et l’idolatrie, les saints myste`res et les bacchanales, le ciel et l’enfer, jusques la` que la the´ologie de l’auteur lui fait hardiment placer les payens en purgatoire» (p. 2a). Nous ne connaissons pas la source de cette remarque. BC a pu trouver la de´signation des preˆtres scandinaves (drottes) chez Mallet (Introduction a` l’histoire du Danemarc), mais celui-ci ne parle jamais dans son analyse de la religion scandinave d’un changement de ce genre. Odin pre´side a` Valhalla, se´jour heureux des guerriers tombe´s au combat, Hela aux enfers. Il faut ne´anmoins retenir que le changement dont parle BC a eu lieu. L’image de l’autre monde de´crit par Mallet refle`te la transformation de l’unique et sombre se´jour des morts (le «hel» sous l’arbre Yggdrasil chez les peuples du Nord) dans un empire tripartite qu’on observe pour la premie`re fois dans les poe´sies de l’Edda. Voir l’article «Hel», Lexikon des Mittelalters, t, IV, col. 2115. Voir ci-dessous, livre X, chap. IX, p. 232.

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se´jour de la fe´licite´ comple`te a. Les paradis infe´rieurs des Indiens sont mate´riels. Leurs habitants se livrent a` l’amour, aux festins, aux jouissances grossie`res. Les paradis supe´rieurs sont consacre´s a` des plaisirs plus purs, la contemplation, l’extase. Enfin, dans le plus e´leve´ de tous, le Chattia Logam b, l’ame s’incorpore a` la nature divine c. Inde´pendamment de ces promesses et de ces menaces, le sacerdoce prend d’autres moyens de provoquer les libe´ralite´s des fide`les ; il permet a` l’abıˆme souterrain de s’entr’ouvrir. Larunda Mania, en E´trurie, conduisait trois fois par anne´e ses paˆles sujets au milieu des vivants, qu’ils effrayaient

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Asiat. Res., VII, 331. Ils appellent aussi ce paradis supreˆme Zabudeba. As. Res., VI, 224, 2332. Voir pour les paradis des Indiens plus de´taille´s, DUBOIS, II, 424, 5053, et les Recherches asiatiques, VI, 179 ; et pour leurs descriptions des plaisirs de l’autre vie, LANJUINAIS, sur l’Oupne´kat, page 83. Malgre´ toutes ces peintures de bonheur, l’horreur de la mort pre´vaut4. Les preˆtres qui pre´sident aux fune´railles inspirent de la re´pugnance. On les appelle maha-bramines. (Digest of hindoo laws, II, 175 ; As. Res., VII, 2415.)

12–16 Voir ... 241.) ] une e´bauche de cette note dans Co 3262, col. de gauche, texte diffe´rent Paradis des Indiens Dubois II. 424 ; 505. description des plaisirs de l’autre vie. Lanjuinais, Oupnekat, 83. description du Zabudeba ou du paradis supreˆme. As. Res. VI. 224–233. Demeures de bonheur & de chatimens. As. Res. VI. 179. chez les Gingale`ses, 26 Cieux ou paradis. Cinq d’entreux superieurs, nome´s Brachmaloke, lieux triomphans, ou` l’on jouı¨t de la ple´nitude de la gloire & de la fe´licite´. As. Res. VII. 33. Malgre´ ... 241. Ms-notes

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BC reproduit une description qui se lit dans l’article de Mahony, «On Singhala, or Ceylon, and the Doctrines of Bhooddha ; form the Books of the Singhalais», Asiatic Researches, London : Vernor et al., t. VII, 1807, pp. 32–56. BC renvoie a` l’article de Francis Buchanan, «On the Religion and Literature of the Burmas» (voir ci-dessus, p. 156, n. 1). Les deux passages qui traitent de ce sujet sous le titre de «Se´jours de be´atitude» ainsi que «L’Ourdoua-loca» se trouvent chez Dubois dans le t. II, pp. 424–428 et 505–506. – Le renvoi aux Asiatic Researches vise l’article de Buchanan cite´ dans la note pre´ce´dente, tandis que le dernier de´signe une note de l’article de Colebrooke, «On the Religious Ceremonies of the Hindus» (voir ci-dessus, p. 121, n. 3), note qui donne aussi la source cite´e par BC. Le renvoi a` l’ouvrage de Jean-Denis Lanjuinais, La religion des indoux selon les Ve´dah, ou analyse de l’Oupnek’hat (Paris : Dondey-Dupre´ pe`re et fils, 1823), une traduction partielle et commente´e de la traduction latine d’Anquetil-Duperron, signale au lecteur une source commode sur la religion des Indiens. BC vise le chapitre «Alle´gories sur le monde du Cre´ateur ou le paradis supreˆme» (pp. 82–89). BC cite l’article de Colebrooke, «On the Religious Ceremonies of the Hindus, and of the Bra’mens especially», (Asiatic Researches, t. VII, London : Vernor et al., 1809), et plus particulie`rement p. 241 la note qui est reproduite ici, avec le renvoi au Digest of Hindu Law.

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de leur aspect livide ou qu’ils poursuivaient de leurs cris aigus a. Les anceˆtres assistaient invisibles aux repas et aux sacrifices. Les maˆnes s’asseyaient autour du foyer paternel. Les lares e´taient l’objet d’une ve´ne´ration pe´riodique ; et durant les cinq jours e´pagome`nes, la feˆte d’Apherina-Ghan ramenait au sein des familles de la Perse les aı¨eux captifs dans la tombe, qui les rappelait au bout de quelques heures, pour se refermer de nouveau sur eux, a` moins que rachete´s par des dons et des offrandes, ils n’obtinssent d’Oromaze qu’il les se´paraˆt de la troupe immonde et leur ouvrıˆt la route des cieux. Une observation importante doit frapper ici nos lecteurs. Si, dans le polythe´isme home´rique, la morale ne de´cide en rien de l’e´tat des morts, les religions sacerdotales lui attribuent au contraire une grande influence. Partout on voit des juges pour ceux qui descendent aux enfers et des supplices pour les coupables b. Il est aise´ d’assigner le motif de cette a b

VARRO, de Ling. lat. VIII ; FESTUS, vo. Mania1. Yama, comme on l’a vu, est aux Indes le juge des enfers. A l’entre´e de chaque enfer des Birmans sont place´s des juges. Tout le monde connaıˆt les arreˆts ce´le`bres prononce´s en E´gypte, aux bords du fleuve, image de celui que les ombres traversaient. On sait qu’avant de proce´der a` la ce´re´monie fune´raire, un tribunal de quarante juges examinait la conduite du mort et de´cidait s’il me´ritait l’honneur de la se´pulture. En cas d’affirmative, on invoquait les dieux du monde souterrain, pre´side´s par Se´rapis. Ce tribunal des dieux paraıˆt assemble´ sur un cercueil e´gyptien de´pose´ au Muse´um britannique, et dont Zoega nous donne l’explication (de Obelisc. 3082). Un rouleau de papyrus, enseveli avec une momie que l’expe´dition d’E´gypte nous a procure´e, reproduit le meˆme tableau (DENON, Voy. en E´gypt., planche 1413. Cet antiquaire inge´nieux, mais un peu le´ger, y reconnaıˆt a` tort une initiation. Osiris y sie´ge avec ses attributs ordinaires, ayant devant lui une fleur de lotus, symbole de la vie e´ternelle, et une lionne. Une petite figure humaine est pese´e dans une grande balance, par

1–4 Les anceˆtres ... pe´riodique ; ] passage ajoute´ dans la col. de gauche presque partout les anceˆtres ... e´toient des objets de ve´ne´ration. Ms-texte 5 aı¨eux ] anceˆtres Ms-texte 10 doit frapper ] a du frapper Ms-texte 18 On sait ] 〈Avant〉 on sait Ms-notes 21 Se´rapis. ] Se´rapis. (Diod. I.) Ms-notes 1

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Voir Sex. Pompei Festi et Mar. Verrii Flacci De Verborum significatione (Amstelodami : Sumptibus Huguetanorum, M. DCC.), p. 223, l’article «Maniæ turpes» et les notes qui s’y rapportent. C’est la source des remarques de BC. BC e´voque la description du sarcophage qu’on lit chez Zoega, De origine et usu obeliscorum, p. 304. La faute du renvoi a` une p. 308 apparaıˆt de´ja` chez Heeren (voir ci-dessous, p. 162, n. 1), qui exploite aussi la planche 141 de Denon. BC analyse ce qu’il a trouve´ dans Vivant Denon, Voyage dans la basse et haute Egypte, pendant les campagnes du ge´ne´ral Bonaparte, Paris : P. Didot l’aıˆne´, an X, 1802. Son commentaire porte sur l’explication de la planche 141 (t. II, dernie`re planche) qu’on lit dans le t. I, pp. xlvij-xlviij (a` la fin du volume).

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diffe´rence. Les preˆtres qui ne tole`rent l’inde´pendance d’aucune de nos faculte´s, de nos conjectures, de nos rapports soit avec le ciel soit avec la terre, doivent s’empresser de courber sous le joug de la croyance qu’ils imposent les relations des hommes entre eux. Cette fusion de la religion avec la morale, fusion qui s’ope`re lentement et par degre´s dans la croyance grecque, s’effectue plus rapidement dans les cultes sacerdotaux. Mais l’espe`ce humaine y perd plutoˆt qu’elle n’y gagne. La morale sacerdotale est toute factice, fonde´e, non sur la valeur des actions humaines, mais sur la volonte´ des dieux. La soumission aux preˆtres, les dons sans mesure, les prodigalite´s aux de´pens de la justice ou des affections, sont la premie`re vertu a ; et comme rien n’assure mieux l’obe´issance que la pratique servile

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deux ge´nies a` teˆtes d’animaux, l’un de chien, faisant allusion aux inclinations mate´rielles, l’autre d’e´pervier, emble`me de la nature divine. Ces ge´nies ont tous deux une main sur la balance, et semblent plaider devant Osiris. Herme`s, a` la teˆte d’ibis, un rouleau a` la main, inscrit les vices et les vertus qui doivent motiver l’arreˆt d’Osiris. Heeren (Afric. III, 681) croit ce jugement des morts poste´rieur aux notions primitives de l’E´gypte : il rend compte de cette progression a` peu pre`s comme nous expli querons celle du polythe´isme grec. Mais nous pensons qu’il a e´te´ trompe´ par une analogie apparente. Les preˆtres en E´gypte ont devance´ l’introduction naturelle de la morale dans la religion et fausse´ l’une en l’asservissant a` l’autre1. Celui qui trompe un brame renaıˆt comme un de´mon a` figure hideuse : il ne peut ni habiter sur la terre ni vivre dans les airs. Rele´gue´ dans quelque e´paisse foreˆt, il ge´mit nuit et jour, et boit dans un craˆne humain en guise de coupe le jus infect du palmier, meˆle´ avec l’e´ cume du chien. DUBOIS, I, 240 ; II, 266, 379, 4642. «Hata ! hata ! s’e´cria un jour un singe, en voyant

3 croyance qu’ils imposent ] religion Ms-texte 4 Cette ] La Ms-texte 9–11 aux preˆtres ... vertu ] aux preˆtres est la premie`re vertu Ms-texte 11-p. 163.2 l’obe´issance ... naturelles. ] passage remanie´ 〈cette soumission〉 l’obe´issance que la pratique exacte de ce´re´monies, tantot sanguinaires, tantot re´voltantes, presque toujours sans utilite´, le code ... e´tranges, souvent oppose´es aux loix naturelles. Ms-texte 12 l’un ] l’une Ms-notes 16 il rend ] & il rend Msnotes 21-p. 163.18 Celui ... et suiv.) ] note remanie´e a` partir du texte qu’on lit dans le cahier notes de Co 3262 Celui ... Dubois, I. 240 ; morale sacerdotale. ib. 266 ; 379 ; 464. ce texte dans la col. de gauche, seconde moitie´ de l’ajout Hata ... chatiment. ce passage dans la col. de gauche, premie`re moitie´ de l’ajout Ceux ... et suiv.) premier e´tat de la note Ms-notes

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L’analyse critique par BC de la the´orie de Heeren relative a` la me´tempsycose et a` la croyance populaire de l’Amenthe`s dans la religion e´gyptienne touche un des axiomes essentiels de sa the´orie sur la religion. On se reportera a` Ideen über die Politik, den Verkehr und den Handel der vornehmsten Völker der alten Welt, Africanische Völker, Ägypter, e´d. de 1815, pp. 643–657. BC paraphrase dans sa note un passage qui se lit chez Dubois apre`s le dialogue entre le singe et le renard (chap. II de la seconde partie). Quant aux autres renvois, ils concernent les

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de ce´re´monies, souvent re´voltantes, toujours minutieuses a, le code des preˆtres est surcharge´ de lois e´tranges, destructives des lois naturelles. Cette observation e´tait ne´cessaire, et pour le moment elle est suffisante, parce que nous aurons plus tard a` comparer l’influence morale du polythe´isme perfectionne´ d’Athe`nes et de Rome, avec l’action des cultes de Brama, d’Isis, de Zoroastre ou d’Odin.

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un renard qui de´vorait un cadavre. Tu as donc commis des crimes inouı¨s, puisque tu es condamne´ a` te repaıˆtre de pareils aliments. He´las ! re´pondit le renard, je fus homme jadis : j’avais promis des dons a` un brame, j’ai manque´ de parole, tu vois mon chaˆtiment.» Ceux qui durant leur vie n’ont pas donne´ des provisions aux preˆtres, ceux qui ne les ont pas habille´s, leur ont fait violence, ou dit des injures, sont dans l’autre monde en proie a` la faim, a` la nudite´, au feu, a` des tourments de tout genre. Le meurtre d’un brame est plus criminel que le parricide, et il vaut mieux avoir tue´ son pe`re qu’exciter des divisions dans l’ordre des brames. L’incre´dulite´, le plus impardonnable des attentats aux yeux du sacerdoce, est punie plus se´ve`rement encore. Le feu qui consume les impies ne s’e´teindra jamais (As. Res. VI, 215–2201). L’homicide, en revanche, ne subit qu’un chaˆtiment temporaire, apre`s lequel les transmigrations offrent au pe´cheur de nouvelles chances de salut (HOLWEL. trad. allem. II, 51 et suiv2.). Les bouddhistes ne sont point sauve´s par leurs bonnes œuvres, s’ils ne les sanctifient en re´pandant de l’eau sur la terre (As. Res. VI, 215, 2203).

6 d’Isis, de Zoroastre ] de Zoroastre, d’Isis Ms-texte

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re`gles de conduite d’un Brame en pe´lerinage, le sacrifice volontaire de la vie par les fide`les qui se jettent sous les roues du charriot qui porte le simulacre, enfin la punition pour un sacrile`ge religieux. BC renvoie a` l’article de Francis Buchanan, «On the Religion and Literature of the Burmas» (voir ci-dessus, p. 156, n. 1). BC re´sume un passage de la deuxie`me partie de l’ouvrage de Holwell, Interesting Historical Events, Relative to the Provinces of Bengal, and the Empire of Hindostan, London : T. Becket and P. A. De Hondt, 1767, pp. 51–52 de l’e´dition anglaise. «The mortal forms wherewith I shall encompass the delinquent Debtah are the work of my hand, they shall not be destroyed, but left to their natural decay ; therefore whichsoever of the Debtah, shall by designed violence bring about the dissolution of the mortal forms, animated by their delinquent brethren, Thou Sieb, shalt plunge the offending spirit into the Onderah, for a space, and he shall be doomed to pass again the eighty-nin transmigrations, whatsoever stage he may be arrived to, at the time of such his offence.» Le terme Debtah de´signe des anges, Sieb est le nom d’un administrateur ce´leste qui exe´cute les commandes de Dieu, «the eternal One», Onderah est le nom du sombre empire des enfers. – Remarquons que BC renvoie a` l’e´dition allemande, mais il indique les pages de l’e´dition anglaise. Pour la version allemande, voir Holwell’s merkwürdige historische Nachrichten von Hindostan und Bengalen, Leipzig : in der Weygandschen Buchhandlung, 1778, p. 223. BC renvoie a` l’article de Francis Buchanan, «On the Religion and Literature of the Burmas», cite´ ci-dessus, n. 1.

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On a vu, dans notre premier volume a, que le dogme de la me´tempsycose se meˆlait aux conjectures du sauvage sur l’e´tat des ames apre`s cette vie. A mesure que l’intelligence se de´veloppe, l’incompatibilite´ de cette notion avec celle d’un monde a` venir, peu diffe´rent du noˆtre, acquiert plus d’e´vidence, et la me´tempsycose semble devoir eˆtre repousse´e des religions qui se re´gularisent et se coordonnent. Aussi ne la retrouvons-nous chez aucun des peuples qui se sont cre´e´ progressivement et librement leurs formes religieuses. Ni les Grecs ni les Romains ne l’ont admise dans leur culte public, bien qu’elle euˆt pe´ne´tre´ dans leurs syste`mes philosophiques et dans leurs myste`res ; mais elle a e´te´ consacre´e de la manie`re la plus positive chez toutes les nations sacerdotales ; et ce serait a` tort qu’on la rele´guerait dans les explications scientifiques des preˆtres. Sans doute elle en fit partie pour se combiner, tantoˆt avec des abstractions me´taphysiques, tantoˆt avec des calculs d’astronomie. Ainsi les Indiens b la a b

Tom. I, liv. II, ch. 4, p. 201–203, seconde e´dit1. Les Ve`des assignent cet univers pour purgatoire aux ames qui ont me´connu leur ce´leste origine ; enfonce´es dans la matie`re, elles s’incarnent dans les corps anime´s. C’est le chaˆtiment de leur infide´lite´. Voy. sur la me´tempsycose des Indiens, DUBOIS, II, 5052. Aussitoˆt que l’ame quitte son corps, elle se rend devant le juge des morts, pour y recevoir sa E´tablissement du texte : Manuscrit : BCU, Co 3262/1, pp. 88–94 [=Ms-texte] et Co 3262/2, pp. 59–62 [=Ms-notes] Imprime´ : De la Religion, conside´re´e dans sa source, ses formes et ses de´veloppements, t. IV, Paris : Chez Pichon et Didier, e´diteurs, 1830, pp. 105–112.

4 aux conjectures ] aux autres conjectures Ms-texte 16 en fit partie ] y pe´ne`tre Ms-texte 19-p. 165.10 Les Ve`des ... 35. ] cette note manque dans Co 3262 ; on trouve par contre a` sa place l’extrait suivant tire´ d’une e´tude du baron d’Eckstein Les ames, d’apre`s les ve`des, vont subir leur purgatoire 〈d’apre`s la〉 dans l’univers ou` elles transmigrent. De´chues de leur origine ce´leste, elles retombent dans la sphe`re de la matie`re ; captives, elles s’enfoncent & se perdent, dans cette atmosphe`re grossie`re. leur incarnation, dans les parties diverses du re`gne anime´ ou inanime´ punit leur 1ere apostasie. d’Eckst. XI. 199–2003. Ms-texte 1 2 3

OCBC, Œuvres, t. XVII, pp. 282–283. BC renvoie a` un petit texte sur la me´tempsycose, sans parler du contenu. BC copie un passage de l’essai du baron d’Eckstein «De la nature des e´le´mens selon les doctrines philosophiques et religieuses de l’Inde», chap. XI, «Des e´le´mens conside´re´s sous un point de vue mythologique» (pp. 192–216). La copie est fide`le, sauf la dernie`re phrase, qui abre`ge le texte sans en alte´rer le sens.

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rattachent plus particulie`rement a` leurs subtilite´s sur la nature et la purification des ames, tandis que les E´gyp tiens a, sans rejeter ce syste`me d’e´purations graduelles, unissaient la me´tempsycose a` l’astronomie par le cycle de trois mille anne´es1 qu’ils assignaient aux transmigrations b.

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sentence ; puis elle monte au ciel ou descend aux enfers, ou, suivant ses fautes, elle prend la forme d’un oiseau, d’un mine´ral ou d’un quadrupe`de. As. Res., I, 239–2402. Les Cingale`ses ont les meˆmes notions ; les morts, disent-ils, sont juge´s par l’un des dieux infe´rieurs, Yamman Raya (leur Yama), et renaissent en vertu de ce jugement, comme hommes ou comme brutes : ces renaissances continuent jusqu’a` leur arrive´e et leur se´jour de´finitif dans les Bramah-Loke ou paradis. As. Res., VII, 353. Voy. sur la me´tempsycose des E´gyptiens, He´rodote, II, 1234 ; Guigniaud, 882–8945 ; Dubois, II, 309–3166 ; Creutzer, III, 176, qui pre´tend que les notions e´gyptiennes e´taient communes aux Thraces ; Gœrres, 389–393. Les doctrines e´gyptienne et indienne diffe`rent en ceci, que la premie`re est plus scientifique et astronomique, et la seconde plus me´taphysique et morale. C’e´tait au nom des ames bienheureuses que les E´gyptiens prononc¸aient sur la tombe des morts la prie`re que nous rapporte Porphyre : «Soleil, maıˆtre de tous, et vous, dieux de

4 transmigrations. ] transmigrations que les ames devoient subir & apre`s lesquelles elles jouı¨ssoient d’une fe´licite´ sans me´lange. a` la hauteur de ce passage on trouve dans la col. de gauche une note a` mettre en rapport avec la note «a» de cette page (voir la variante aux lignes 11–15) revoir sur ce systeˆme des Egyptiens Goerres II, 389–393. Das aber ist die Geschichte − Osiris und Herme´s hernieder. Ms-texte 11–15 Voy. ... morale. ] l’e´bauche de cette note se trouve dans la col. de gauche, a` coˆte´ des premie`res phrases de ce chap. Me´tempsycose. Guigniaud 1

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Le parcours de trois mille ans de migrations se retrouve chez Guigniaut, Religions de l’Antiquite´, t. I, pp. 886–887, et BC l’adopte, comme il exploite toute la note 12 de Guigniaut pour re´diger son chapitre sur la me´tempsycose, y compris les observations critiques qu’il adresse a` Heeren. Voir William Jones, «On the Gods of Greece, Italy, and India : Written in 1784», Asiatick Researches, London : Vernor et al., t. I, 1788, pp. 221–275. BC reproduit les descriptions de Jones. Voir l’article de Mahony (voir ci-dessus, p. 160, n. 1) qui donne le nom du paradis p. 33. BC copie ce renvoi chez Guigniaut, Religions de l’Antiquite´, t. I, deuxie`me partie, p. 882, ou` l’on trouve la traduction franc¸aise du passage consacre´ a` la me´tempsycose chez les E´gyptiens. Voir aussi ci-dessous, p. 169, n. 1. – La variante donne davantage de renvois, traces d’un travail de re´daction assez intense, a` savoir : Guigniaut, Religions de l’Antiquite´, deux passages qui traitent de la me´tempsycose chez les Indiens et des E´gyptiens ; Dubois, renvoi au chapitre sur la me´tempsycose (t. II, pp. 309–326) ; deux autres passages de Guigniaut, dont l’un sur les Perses, sans rapport direct avec la me´tempsycose ; Creuzer, Mythengeschichte, qui e´tablit a` l’endroit indique´ un rapport entre les Thraces et les E´gyptiens en ce qui concerne l’infe´riorite´ de la vie terrestre en comparaison avec la vie e´ternelle ; enfin Görres, Mythengeschichte, t. II, pp. 389–393 (e´d. de 1935, pp. 187–189), consacre´ a` la tradition herme´tique, e´carte´ a` juste titre de ce chap. IX. Renvoi a` la longue note 12 de la traduction remanie´e de l’ouvrage de Creuzer ou` Guigniaut de´veloppe les re´flexions qu’on lit dans le livre III, chap. IV, entie`rement consacre´ a` la me´tempsycose chez les E´gyptiens et a` l’influence de cette croyance sur d’autres religions de l’Antiquite´. Renvoi au de´but du chap. II de la troisie`me partie de l’ouvrage de Dubois qui expose le syste`me de la me´tempsycose.

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De la Religion, IV

Mais, inde´pendamment de ses significations scientifiques, il est incontestable que la me´tempsycose faisait partie de la croyance publique des peuples re´gis par le sacerdoce. Favorise´e dans les climats du Midi par la sympathie et la pitie´ que ces climats inspirent pour tous les eˆtres vivants et souffrants a, transplante´e probablement dans le Nord par des colonies, elle a e´te´ conserve´e partout, peuteˆtre parce qu’offrant aux fide`les un spectacle re´el de re´compenses et de punitions, elle a paru aux preˆtres une lec¸on plus e´nergique que les dogmes qui rele`guent dans un monde invisible ces punitions et ces re´compenses. Nous venons de la voir aux Indes ; elle avait pe´ne´tre´ dans la religion des

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l’univers, dispensateurs de la vie, recevez-nous et rendez-nous les compagnons des dieux e´ternels.» (De abst., IV, 10 ; GOERRES, II, 3701.) HERDER, Phil. de l’hist. III, 42, 43. Zerstr. Blaett. I, 2182.

(suite des variantes de la p. pre´ce´dente) 274–277 461–467. chez les Indiens Dubois II. 309. chez les Perses : Guign. notes 700. en Egypte. Guign. 882–894. chez les Thraces comme en Egypte. Creutz. III. 176 Goerres, 389– 393. elle est moins scientifique & a moins de rapports avec l’astronomie chez les Bramines que chez les Egyptiens. Ms-texte p. 165.16-p. 166.12 C’e´tait ... 370.) ] ajoute´ dans la col. de gauche C’e´tait au nom de ces ames ... maıˆtre de tout ... 370. Ms-texte 4 Favorise´e ] Elle a e´te´ favorise´e Ms-texte 5–6 transplante´e ... Nord ] elle a e´te´ transplante´e dans ceux du Nord Ms-texte 6 colonies ... partout, ] colonies. 〈C’est un des dogmes fondamentaux de〉 la religion des les mots biffe´s ainsi que les trois derniers mots non efface´s remplace´s par Nous venons de la voir aux les six derniers mots dans l’interl. Indes. Ms-texte BC pre´voyait d’accrocher a` cette phrase une note qu’il a supprime´e Aussitot que l’ame quitte son corps, elle se rend devant le juge des morts, pour y recevoir sa sentence : puis elle monte au ciel, ou descend aux enfers. ou suivant ses fautes, elle prend la forme d’un oiseau, d’un 7 peut-eˆtre ... re´compenses. ] a` rapmine´ral ou d’un quadrupe`de (As. Res. I. 239–240.) procher d’un ajout place´ dans la col. de gauche a` la hauteur du mot «Romains» ci-dessus, p. 164, ligne 11 qui est une e´bauche de passage Le sacerdoce a trouve´ peut-eˆtre que la me´tempsycose, offrant aux fide`les sur la terre qu’ils habitent le spectacle des re´compenses & des punitions apre`s la mort, produirait une conviction plus coutumiere & plus ferme que les dogmes qui rele`guent dans un monde invisible ces punitions & ces re´compenses. Ms-texte 10 elle ] il BC n’a pas corrige´ le pronom Ms-texte

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BC traduit a` son tour la traduction allemande par Görres d’une phrase de Porphyre, De abstinentia ; voir Görres, Mythengeschichte, a` l’endroit indique´ (e´d. de 1935, p. 180). Herder, Ideen zur Philosophie der Geschichte der Menschheit, pp. 453–454. – Le second renvoi cite les trois dialogues «Über Seelenwandrung» que Herder a publie´s dans Zerstreute Blätter, Erste Sammlung, Gotha : Carl Wilhelm Ettinger, 1785, pp. 217–243.

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Livre IX, chapitre IX – De la me´tempsycose

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Gaulois a, des Perses b, des Ge`tes, et il n’est point suˆr qu’elle ait toujours e´te´ e´trange`re a` la mythologie des He´breux c. La prolongation de ce dogme, a` coˆte´ d’autres hypothe`ses qui auraient duˆ l’exclure, con firme ce que nous avons e´tabli ailleurs de la double doctrine des preˆtres, et de son peu d’action sur la religion publique. Ceux de l’E´gypte combinaient la me´tempsycose avec l’existence d’un monde souterrain, en en faisant les deux branches d’un meˆme syste`me a` la fois mystique et scientifique. Ce monde souterrain n’e´tait alors qu’un lieu de repos ou` les morts destine´s a` des purifications nouvelles, qui se rattachaient a` l’astronomie, attendaient le signal des transmigrations qui les purifiaient d,

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b c

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DIOD. V, 20 ; CÆS. de Bello Gallico, VI. Les peuples du pays de Galles, berceau des Druides et, par conse´quent, de la religion gauloise, admettaient e´galement la me´tempsycose. DAVIES, 463–4771. Voy. sur la me´tempsycose chez les Perses, GUIGNIAUD, notes, p. 7002 ; PORPH. de Abst., IV. Un passage de Jose`phe3 indique, au contraire, qu’elle e´tait la croyance au moins d’une secte. Toutes les ames sont immortelles, dit-il, suivant l’opinion des Pharisiens. Celles des hommes vertueux passent dans de nouveaux corps, celles des criminels sont condamne´es a` d’e´ternels tourments. Ainsi, ce qui sert chez les Indiens de punition aux me´chants, aurait chez les Juifs e´te´ la re´compense des bons. Virgile a transporte´ cette combinaison dans son E´ne´ide. Anchise dit a` E´ne´e; que les ames se´journent mille ans dans l’E´lyse´e, avant de passer dans de nouveaux corps. Mais dans l’e´tat ou` e´taient les croyances du temps de Virgile, ce poe`te ne tenait gue`re a` ses opinions. Il dit, dans les Ge´orgiques (IV, 218), que les ames des he´ros, des sages et des hommes vertueux

1 qu’elle ] qu’il BC n’a pas corrige´ le pronom Ms-texte 3 dogme ] dogme dans les religions sacerdotales Ms-texte 7–8 a` la fois ... scientifique ] syntagme ajoute´ dans la col. de gauche a` la fois mystique & 〈astronomique〉 scientifique Ms-texte 9–10 qui ... l’astronomie ] syntagme ajoute´ dans la col. de gauche Ms-texte 11–12 Les peuples ... 477. ] manque dans Co 3262 14 Voy. ... 700 ; ] phrase qu’on trouve dans la note de travail ajoute´e au de´but de ce chap. ; voir ci-dessus, p. 165, la variante aux lignes 11–15 21–24 Mais ... e´toiles. ] passage ajoute´ dans la col. de gauche dans l’e´tat ... croyances, Virgile ne tenoit pas beaucoup a` ses opinions. car il dit ... vertueux sont transporte´s dans les e´toiles. Ms-notes 1

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Le renvoi a` Diodore doit eˆtre corrige´. Il faut lire «livre V, chap. XXVIII. «Pythagoræ enim apud illos opinio invaluit, quod animæ hominum immortales, in aliud ingressæ corpus, definito tempore denuo vitam capessent» (e´d. de Strasbourg, t. III, p. 309 ; e´d. anglaise, Oldfather, t. III, pp. 171–173). – Ce´sar parle dans le livre VI, chap. XIV, de la me´tempsycose : «In primis hoc volunt persuadere non interire animas, sed ab aliis post mortem transire ad alios», une ide´e qui fonde la re´putation de l’intre´pidite´ des guerriers gaulois. – Le renvoi a` l’un des ouvrages de Davies est faux. Ni les Celtic Researches ni Mythology and Rites ne parlent aux pages indique´es de la me´tempsychose. Le renvoi aux notes de cette page de la deuxie`me partie se justifie par la richesse des sources cite´es (Perse) et par l’analyse critique des publications de Schlegel, Görres, Hammer-Purgstall, Hyde et Anquetil. – BC cible une seule phrase de Porphyre, De abstinentia, livre IV, § 16 : «Decretem enim apud primos [= chez les mages perses] habetur de animarum in diversa corpora transmigratione» (p. 350). Jose`phe, De bello iudaico, livre II, chap. 8, 14. La doctrine e´voque´e par BC est re´sume´e dans une phrase et se retrouve aussi dans les Antiquitates judaicæ, livre XVIII, chap. 1, 2–3,

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De la Religion, IV

et c’e´tait a` ce se´jour passager que se rapportaient des pratiques inconciliables avec la me´tempsycose a. La multitude demeurait indiffe´rente a` ces explications raffine´es, et suivant les enseigne ments isole´s et partiels qu’elle recevait, croyait tour a` tour

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passent imme´diatement dans les e´toiles. Les premiers Pe`res de l’E´glise, sans admettre la me´tempsycose, emprunte`rent de la doctrine e´gyptienne l’ide´e d’un se´jour passager des ames, avant leurs punitions ou leurs re´compenses de´finitives. Elles descendaient, disaientils, dans le monde souterrain : les justes avaient le pressentiment de leur bonheur, les me´chants de leurs peines, et leur destine´e s’accomplissait ensuite a` la re´surrection. Les martyrs seuls montaient imme´diatement de la terre aux cieux. V. Traite´ de la cre´ance des preˆtres touchant l’e´tat des ames apre`s cette vie, par BLONDEL, 1661 ; BAUMGARTEN, Hist. doct. de statu animar. separat., 1754. Saint-Augustin perfectionna cette doctrine, en faisant de ce se´jour des ames un lieu de purification. Cæsarius, e´veˆque d’Arles, et Gre´goire VI, la consacre`rent. De la` le purgatoire1. Cette observation s’applique e´galement a` la religion indienne, et sert de re´ponse aux objections de M. de Paw. «On ne saurait, dit-il, concevoir que les Indiens pre´tendent rejoindre leurs e´pouses, en les obligeant a` se bruˆler sur leurs buˆchers, puisqu’ils soutiennent que les ames voyagent d’un corps a` l’autre, de sorte que l’ame du mari pourrait se trouver dans l’embryon d’une souris, et l’ame de la femme dans celui d’un chat.» (Rech. sur les Ame´r., II, 1822.) Les meˆmes objections pourraient se reproduire contre la doctrine des Birmans. Leur croyance a` la transmigration devrait les pre´server de la crainte des revenants, et pourtant quelques personnes de l’ambassade chinoise e´tant mortes a` Amarapara, cet e´ve´nement sema la terreur dans le pays, parce qu’on supposait les ames des e´trangers plus malfaisantes que celles des indige`nes. (As. Res., VI, 1803.) En indiquant la composition double et complique´e des religions soumises aux preˆtres, nous croyons avoir leve´ la difficulte´.

16 Paw. ] Paw, 〈a` la perspicacite´ duquel la double nature de la religion Egyptienne avoit e´chappe´〉 Ms-notes BC re´dige, en se servant de sa note de travail place´e au de´but de ce chap., un ajout qu’il note dans la col. de gauche et utilisera dans la note b, pp. 164–165 (voir p. 165, lignes 6–10) Ms-notes 20–24 Les meˆmes ... 180.) ] passage ajoute´ dans la col. de gauche la meˆme objection pourroit se reproduire & eˆtre refute´e de meˆme a l’occasion des Birmans. la doctrine de la transmigration ... e´trangers plus inquie`tes ... 180. Ms-notes

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ou` Jose`phe re´pe`te ce qu’il a dit dans l’ouvrage sur la guerre juive. Voir G. P. Goold, Josephus in Nine Volumes, with an English Translation, t. II, The Jewish War (The Loeb Classical Library), London : Heinemann, 1976, p. 368. BC e´voque le livre VI de l’E´ne´ide (vv. 722–751), ou` le pe`re d’E´ne´e explique a` son fils le sort des aˆmes dans l’empire des morts. Le renvoi aux Georgiques vise les vers 219–227, qui sugge`rent l’ascension miraculeuse des aˆmes vers les e´toiles. – La suite de la note cite deux ouvrages de the´ologiens sur l’e´volution de la doctrine du purgatoire : David Blondel, Traicte´ de la cre´ance des Peˆres touchant l’estat des aˆmes apre`s cette vie et de l’origine de la prie`re des morts et du purgatoire, Charenton : A. Cellier, 1654 ; Siegmund Jakob Baumgarten, Historia doctrinæ de statu animarum separatarum, Halæ Magdeburgicæ : Io. Christiani Hendeli, [1754]. – St. Augustin (Enchiridium, ch. 108), Cæsarius d’Arles et le pape Gre´goire VI ont contribue´ a` e´laborer la doctrine qui changeait le «limbus» en purgatoire. BC cite une phrase des Recherches philosophiques sur les Ame´ricains de Corne´lius de Pauw, London : s.e´d., 1770, t. II, cinquie`me partie, section II, «De quelques usages bizarres, communs aux deux continents», p. 213. Renvoi a` l’article de Buchanan (voir ci-dessus, p. 156, n. 1) qui parle de cette doctrine.

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Livre IX, chapitre IX – De la me´tempsycose

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a` la me´tempsycose ou a` l’Amenthe`s, sans eˆtre frappe´e de l’opposition de deux opinions qu’elle n’avait pas la pense´e de rapprocher b. Ainsi se confirme toujours l’une de nos assertions les plus importantes. Tout ce qui, dans le polythe´isme inde´pendant, ne frappe l’imagination que d’une manie`re vague et passage`re, est enregistre´ dans le polythe´isme sacerdotal. Les conjectures les plus fugitives, celles qui paraissent ne pouvoir eˆtre admises que par des esprits encore plonge´s dans l’ignorance de l’e´tat sauvage, s’amalgament avec les doctrines moins grossie`res que les progre`s de l’intelligence ame`nent ; et s’il ne faut point attribuer la diffe´rence qui existe entre les deux espe`ces de polythe´isme aux inventions spontane´es du sacerdoce, il faut reconnaıˆtre ne´anmoins qu’elle provient en grande partie du soin qu’il prend de tout recueillir et d’empeˆcher que rien ne s’oublie.

b

L’importance que les E´gyptiens attachaient a` la conservation des corps, et la recherche qu’ils apportaient a` les embaumer (HEEREN II, 675), tenaient au dogme de l’Amenthe`s, ou` l’e´tat des ames destine´es a` recommencer leur vie passe´e de´pendait, comme sur la terre, de la perfection des organes mate´riels. La me´tempsycose servait de base a` d’autres portions du culte, exprimant symboliquement des notions plus abstraites1.

4 inde´pendant ] inde´pendant du sacerdoce Ms-texte

1

BC renvoie a` un long passage de l’ouvrage de Heeren, Ideen über die Politik, den Verkehr und den Handel der vornehmsten Völker der alten Welt, Zweyter Theil, Afrikanische Völker, Zweyte Antheilung, Ägypter, Göttingen : Vandenhoek und Ruprecht, e´d. de 1815, pp. 643–648. La note accepte les vues de Heeren, en particulier la distinction entre les spe´culations sacerdotales et la croyance populaire. Ajoutons qu’une partie importante des spe´culations de Heeren et de BC repose sur He´rodote qui parle (livre II, chap. 123) d’une doctrine e´gyptienne de l’immortalite´ de l’aˆme et, lie´e a` cette doctrine, de la me´tempsycose (dans un parcours de 3000 ans). Le re´cit d’He´rodote (et avant lui, l’e´crit de Pythagore) ne correspond pas a` ce que nous savons de l’e´volution du culte des morts de l’E´gypte. Ce qu’on appelle l’aˆme chez les E´gyptiens, le «Ba», e´tait dote´ de retourner pendant le jour, sous une forme qu’il choisissait (oiseau, serpent, etc.) dans le monde des vivants pour participer a` leur vie, leurs feˆtes, leurs rites, comme il ressort des textes rituels et de la de´coration (fresques et e´le´ments architecturaux) des tombeaux depuis le Nouvel Empire (1550–1070). Le sens de cette doctrine est la transgression d’un monde a` l’autre et l’inclusion de l’empire de l’«Ouest heureux» au monde des vivants. He´rodote semble avoir confondu des informations qu’on avait de la doctrine de la me´tempsycose indienne avec ce qu’on savait du «Ba» e´gyptien et avoir cre´e´ ainsi un malentendu tre`s tenace puisque les auteurs autour de 1800 lui font toujours confiance. Remarquons toutefois que l’exe´ge`se de Heeren, surtout sa me´fiance en ce qui concerne la me´tempsycose chez les E´gyptiens, est plus proche de la re´alite´ historique que celle de BC. Voir sur le retour du «Ba» dans le monde des vivants Jan Assmann, Tod und Jenseits im Alten Ägypten, München : Beck, 2001, chap. IX, «Das Herauskommen am Tage», pp. 285–318.

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4. Portrait du Baron d’Eckstein, par Alexandre-Evariste Fragonard (1845). Reproduit dans l’ouvrage de Nicolas Burtin, Le Baron d’Eckstein, Paris : E. de Boccard, Éditeur, 1931.

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De la Religion, conside´re´e dans sa source, ses formes et ses de´veloppements. Livre X. Des dogmes particuliers au polythe´isme sacerdotal.

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5. Une page du manuscrit en cahiers, 6e cahier, première page de ce cahier (p. 121). Le texte principal est écrit dans la colonne de droite, les ajouts se trouvent dans celle de gauche. On lit, en haut, dans la colonne de gauche, les titres courants permettant de s’orienter dans les cahiers. Le trait vertical désigne les passages qui ont servi à la rédaction du manuscrit suivant. Le trait horizontal élimine un mot. L’extrait d’Eckstein passera dans le livre qui parle de la magie. BCU, Co 3262/1, p. 121.

Chapitre premier. Objet de ce livre.

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Nous avons traite´ dans le livre pre´ce´dent des dogmes communs aux deux espe`ces de religions, et nous avons indique´ les diffe´rences que l’esprit sacerdotal introduit dans ces dogmes. Mais il y en a d’autres qui appartiennent plus spe´cialement aux religions dont les preˆtres disposent. Nous allons nous en occuper.

E´tablissement du texte : Manuscrits : 1.) BCU, Co 3246, fo 1 [=MC] 2.) BCU, Co 3262/1, pp. 95–96 [=Ms-texte] Imprime´ : De la Religion, conside´re´e dans sa source, ses formes et ses de´veloppements, t. IV, Paris : Chez Pichon et Didier, e´diteurs, 1831, pp. 113–114.

1 Chapitre premier. ] Ch. 1. MC

4 religions ] Polythe´ismes Ms-texte

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Chapitre II. De la supre´matie d’un dieu sur les autres, dans les religions sacerdotales.

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De la Religion, IV

Plusieurs passages d’Home`re prouvent que les dieux de la Gre`ce e´taient primitivement e´gaux a : Jupiter avait conquis certaines pre´rogatives ; mais les autres habitants de l’Olympe bravaient son pouvoir et de´sobe´issaient a` sa volonte´ b. Il n’en est pas de meˆme dans le polythe´isme sacerdotal. Chez les Indiens, Schiven, quelque fois Indra c, et Brama dans les Ve`des d ; chez les Perses a b

c

d

Notamment le discours de Neptune a` Jupiter. Iliad., XV, 185–199. La supre´matie de Jupiter semblerait, il est vrai, re´sulter meˆme dans l’Iliade, du symbole de la chaıˆne d’or. (Liv. VIII, v. 171.) Mais ce symbole, nous l’avons de´ja observe´ (t. III, p. 468– 4692), est visiblement emprunte´ d’une religion sacerdotale. Il se retrouve litte´ralement dans le Bhaguat-Gita ; tous ceux qui ont e´tudie´ Home`re ont e´te´ frappe´s de l’air e´tranger de cette fable (v. Creutz., I, 120) : c’est qu’elle n’appartenait pas a` la Gre`ce : elle venait d’Orient. Dans le XXXVIIIe chapitre du Rig-Ve´da3, Indra est choisi par les dieux pour leur chef supreˆme. Son troˆne est baˆti avec des textes tire´s des Ve`des, et les ce´re´monies de son installation sont en tout pareilles au sacre des rois indiens. On voit par-la` que le dieu supreˆme des religions sacerdotales n’est pas toujours le meˆme. L’empire se transporte de l’un a` l’autre, et cette variation est une des causes de l’obscurite´ qui re`gne dans les anciennes mythologies. Chaque dieu paraıˆt successivement reveˆtu des attributs de tous. Brama, qui est souverain dans les livres sacre´s, n’occupe jamais que le second rang dans les fables. Il est supplante´ par Siva ou Wichnou, suivant les diverses sectes. Cela tient a` l’abolition de son culte4. Nous en avons parle´ ci-dessus. E´tablissement du texte : Manuscrits : 1.) BCU, Co 3246, fos 1–8 [=MC] 2.) BCU, Co 3262/1, pp. 96–102 [=Ms-texte] et Co 3262/2, pp. 62–65 [=Ms-notes Imprime´ : De la Religion, conside´re´e dans sa source, ses formes et ses de´veloppements, t. IV, Paris : Chez Pichon et Didier, e´diteurs, 1831, pp. 115–122.

5 conquis certaines ] ses Ms-texte, MC 8 Il ... meˆme ] Il en est autrement Ms-texte, MC 9 quelquefois ... Ve`des ] manque Ms-texte 12 l’avons ] croyons l’avoir MC 12–13 nous ... 469), ] manque Ms-notes 14 Gita ] Gita, comme nous l’avons remarque´ ailleurs Ms-notes 1

2 3 4

L’exemple est e´voque´ par Creuzer, Symbolik, t. I, qui cite p. 119 les dix vers de l’Iliade. C’est Creuzer, qui avait fait le rapprochement avec un passage du Bhaguat-Gita, qu’il cite (pp. 117–118) d’apre`s Schlegel, Weisheit der Indier, t. IV, p. 303. Les re´flexions que Creuzer de´duit de ces te´moignages se lisent pp. 120–121, comme le dit BC. OCBC, Œuvres, t. XIX, pp. 415–416. BC re´pe`te ici ce qu’il a dit dans le t. III. On se reportera a` cet endroit ou` toutes les re´fe´rences de cette note sont explique´es. Renvoi non localise´. Il faut savoir que les invocations d’Indra comme dieu supreˆme sont dans les chants du Rig-Veda un ste´re´otype tre`s fre´quent. La source de cette observation est d’Eckstein, comme il ressort de la variante a` la ligne 24. BC a utilise´ l’essai «Du roˆle que joue le soleil dans la the´ologie de l’Inde», chap. I, ou`

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Livre X, chapitre II – De la supre´matie d’un dieu sur les autres.

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Zervan Akerene ; chez les Scandinaves, Alfadur ; chez les E´gyptiens, Cneph, occupent une place a` part, et re`gnent sur les autres dieux, sujets parfois rebelles, mais toujours infe´rieurs a` leur maıˆtre en force et en dignite´. Plusieurs causes impriment aux religions sacerdotales ce caracte`re distinctif. Premie`rement, les dieux de ces religions n’e´tant dans la doctrine scientifique que des personnifications de quelques parties de la nature ou des symboles de forces occultes, ils perdent ne´cessairement leur individualite´. Le syste`me ge´ne´ral qui les re´unit et les coordonne les classe comme fractions d’un ensemble, et dans la langue mythologique, cet ensemble devient la divinite´ supreˆme. Mais l’individualite´ e´tant aussi ne´cessaire a` la de´votion que la me´taphysique l’est a` la science, ce dieu supreˆme redevient ensuite le lien commun entre les doctrines, ayant tantoˆt une nature variable et active, adapte´e aux besoins et aux vœux populaires, tantoˆt une nature inactive et immuable, comme le demande la me´ditation philosophique. En second lieu, quand l’imagination s’est trop familiarise´e avec les objets de ses hommages, le sentiment re´clame quelque chose de moins connu, de plus imposant. Il n’est jamais parfaitement satisfait de ce qu’on lui pre´sente. (suite des variantes de la page pre´ce´dente) 14 tous ceux ... Home`re ] les commentateurs d’Home`re Ms-notes, MC 16–21 Dans ... de tous. ] la note ajoute´e dans la col. de gauche, quelques diffe´rences de re´daction Indra, choisi par les Dieux pour leur chef supreˆme. 38e Ch. du Rigveda. son trone bati avec ... Ve`des. les ce´re´monies ... Installation pareilles en tout a` celle[s] du sacre ... Indiens. nous avons dit Liv. VI. ch. 31. qu’il y avoit toujours 2 doctrines dans les religions sacerdotales l’une publique l’autre secrete. la 1ere repre´sente les Dieux come des eˆtres individuels & variables elle est necessaire a toute religion la 2de leur atribue une nature collective ou immuable, objet de me´taphysique & de science. le Dieux supreˆme le lien entre ces 2 doctrines. Ms-texte 16 XXXVIIIe ] 38e MC 23 fables. ... Wichnou, suivant ] fables populaires. Siva ou Wichnou le remplacent, suivant MC 23–24 a` l’abolition ... ci-dessus. ] aux guerres qui ont eu lieu dans l’Inde, & qui eurent pour suite l’abolition du Culte de Brama. v. d’Eckst. XV. MC 2 re`gnent ... dieux ] sont place´s en teˆte du reste des Dieux Ms-texte a` la hauteur de ces mots, dans la col. de gauche, un ajout que BC n’utilisera que partiellement dans la note d, p. 174 dans la religion populaire le Dieu souverain des Ve`des Brama n’apparaıˆt que d’une manie`re subalterne. Siva ou Wichnou le remplacent, suivant le culte que les peuples rendent a` l’un ou 3 parfois ] quelquefois Ms-texte, MC a` leur maıˆtre ] l’autre. d’Eckst. XV. 514. Ms-texte manque Ms-texte 6–7 n’e´tant ... que ] e´tant toujours ... scientifique Ms-texte, MC 8 forces ] mot re´pe´te´ par inadvertance MC 11–15 Mais ... philosophique. ] manque Mstexte 18-p. 176.2 Il n’est ... vague. ] ajoute´ dans la col. de gauche Il n’est ... pre´sente 〈six mots illis.〉 toute borne ... vague. Ms-texte d’Eckstein observe : «Le grand dieu, la divinite´ principale des Ve´das, est Brahma. Siva ou Rouchna, Vishnou ou He´ri, ne s’y montrent que comme e´pithe`tes du soleil. Dans la religion populaire, au contraire, le dieu souverain des Ve´das n’apparaıˆt que d’une manie`re subalterne. Siva ou Vishnou le remplacent toujours, suivant le culte que les peuples rendent a` l’une ou l’autre de ces divinite´s» (p. 514). 1

OCBC, Œuvres, t. XIX, pp. 130–150.

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Toute borne le blesse, et toute description, toute de´finition est une borne. Il tend a` s’e´lever plus haut, pour se trouver plus au large dans le vague. Les preˆtres alors lui re´ve`lent de nouveaux secrets, lui de´voilent une essence supe´rieure encore ignore´e, le flattant par la hauteur et par le myste`re, tan dis qu’ils re´veillent l’imagination par la nouveaute´. Aussi le dieu supreˆme des religions fac¸onne´es par les preˆtres est-il d’ordinaire un dieu diffe´rent de ceux qu’entoure l’adoration vulgaire. En Scandinavie, ce n’est pas Odin, c’est un eˆtre invisible, qui, lorsque les sie`cles seront accomplis, sortira de sa retraite inconnue pour replonger le monde dans le ne´ant a. En E´gypte, Cneph vient tardivement dominer, non-seulement sur les divinite´s populaires, Isis, Osiris, Horus, mais sur Phthas, qui auparavant e´tait le premier principe b. C’est de la bouche de Cneph que sort l’œuf mysa

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Ce qui prouve que c’est une progression, dans les notions religieuses des Scandinaves, c’est que dans l’Edda, Odin avec ses fre`res gouverne la terre et le ciel, et qu’il est le plus puissant des dieux (Edda, 3e fable1) ; doctrine contraire a` celle d’Alfadur, et qui est plus ancienne, puisqu’elle est plus grossie`re. On a voulu, nous le savons, regarder cette portion des fables du Nord comme une interpolation des moines chre´tiens ; mais le retour des meˆmes ide´es dans toutes les mythologies re´fute ce soupc¸on. CICER. de Nat. Deor. III, 2. DIOD. I, 12. ARNOB. Adv. Gentes. I, 42. JAMBLICH. de Myster3.

4 flattant par ] flattent de la sorte par Ms-texte a` la hauteur de ces mots, dans la col. de gauche, un ajout Le Dieu supreˆme des Religions sacerdotales n’est pas toujours le meˆme. Les pretres transporte[nt] souvent la supre´matie d’un Dieu a` l’autre, & cette variation ou progression est une des causes de l’obscurite´ qui re`gne dans les mythologies de l’antiquite´. Chaque Dieu parait successivement revetu des attributs de tous. Ms-texte 7 entoure ] entourait MC En Scandinavie ] Chez les Scandinaves Ms-texte 14–17 Ce qui ... grossie`re. ] ajoute´ dans la col. de gauche Ms-texte ; la dernie`re phrase de la note se lit dans Ms-notes 20 de Myster. ] BC pre´voyait une suite qui passera dans le texte principal Ms-notes et Ms-texte 1

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BC renvoie au passage suivant : «Bore, qui e´pousa Beyzla fille du ge´ant Baldorn. De ce mariage sont ne´s trois fils, Odin, Vile & Ve. Et c’est notre croyance que cet Odin gouverne avec ses fre`res le ciel & la terre, que le nom d’Odin est son vrai nom, & qu’il est le plus puissant de tous les dieux» (Mallet, Edda, p. 71). Les deux premiers renvois sont faux. Ni Cice´ron ni Arnobe ne parlent aux endroits indique´s de divinite´s e´gyptiennes. Nous supposons qu’il s’agit d’une faute de copie. Chez Diodore, on lit ceci : «Ignem porro Vulcanum per interpretationem dici, & ipsum magni Deo loco venerandum ; qui multum ad cunctorum generationem, & exactum incrementem contribunt» (e´d. de Strasbourg, t. I, chap. XII, p. 38 ; Bibliothe`que historique, t. I, p. 43). Wesseling ajoute dans une note : «Gentis Ægyptiæ sermone Pthas erat» (p. 317). On pourrait penser aussi que BC veut citer le chapitre suivant qui traite de la ge´ne´alogie des divinite´s e´gyptiennes, mais ne dit pas exactement ce qu’on lit chez BC. Ne´anmoins, les indications sur Cneph, le dieu Ammun de The`bes, et sur Phthas, le dieu principal de Memphis, cre´ateur de tout, correspondent, en de´pit d’une certaine impre´cision, partiellement a` ce qu’on trouve dans la tradition the´ologique de l’E´gypte (Bibliothe`que historique, p. 45). Voir Jamblique, De mysteriis ægyptiorum (ΠεριÁ τςÄ ν αιÆ γυπτι ων μυστηρι ων), livre VIII, chap. 3. Il y est question de Cneph, le premier des dieux, et du premier principe indivisible. Le passage pose proble`me dans la mesure ou` les noms des deux divinite´s ont e´te´ re´tablis par

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tique, dont Phthas brise l’enveloppe pour se montrer a` l’univers ; et ce dernier n’est plus qu’un dieu secondaire, puisqu’il doit sa naissance a` un autre dieu a. Zervan Akere`ne, chez les Perses, n’a rien de commun avec Oromaze ou avec Mithras. Il est se´pare´ des divinite´s actives ; et par une suite de la complication toujours inhe´rente aux dogmes sacerdotaux, il est a` la fois une puissance cosmogonique et un symbole astronomique, d’une part le temps sans bornes, cre´ature du verbe, de l’autre la grande pe´riode de 12000 ans b. Ce n’est pas tout. Par cela meˆme que les divinite´s actives des mythologies prennent inte´reˆt aux destins des hommes, et s’associent a` leurs de´bats, elles contractent ine´vitablement leurs imperfections et leurs faiblesses. Il y a dans leur caracte`re de la versatilite´ ; leur nature n’est pas immuable, a` l’abri de toute passion, inaccessible a` tout changement. Pour se de´dommager de cette espe`ce de de´gradation force´e, le sacerdoce place au faıˆte de la hie´rarchie ce´leste une divinite´ d’une nature qui semble plus e´leve´e, parce qu’elle est plus vague et plus inde´finissable. Son immobilite´ a quelque chose de majestueux. Sa comple`te apathie la distingue des eˆtres variables. Le dieu du Bhaguat-Gita, bien que pe´ne´trant ainsi que l’air dans la diversite´ des eˆtres, est e´tranger a` cette diversite´ : aucune modification ne l’affecte c. Amida, a

b c

PORPHYR. in Euseb. Præp. evang. III, 91. PLUTARCH. de Is. et Os. JABLONSKY, Panth. Æg. p. 932. Vendidad, Izeschne´ XIX, GOERRES, Asiat. myth. Gesch. I, 219–2203. As. Res. II, 2304.

4–8 Zervan ... 12000 ans. ] une e´bauche de ce passage se lit dans la col. de gauche, a` coˆte´ du texte de la note a de cette page Ms-notes Le Dieu supreˆme des Perses est de meˆme se´pare´ de toutes les divinite´s actives. ce n’est point Oromaze ou Mithras, mais Zervan Akerene, & par une suite ... sacerdodaux, 〈deux mots illis.〉 il devient a` la fois ... de 12000 ans. (Vendidad, 11 contractent ] contractent Izechne´ XIX. Ha. Goerres, As. Myth. I. 219–220) Ms-notes 〈jusq〉 Ms-texte 13-p. 179.4 Pour ... abstractions. ] la fin du chapitre est re´dige´e autrement ; on trouve le texte a` la fin de ce chapitre, dans l’apparat 19 est ... diversite´ ] corr. dans l’interl., le texte biffe´ illis. MC ne l’affecte ] ne 〈peut〉 l’affecte〈r〉 MC

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les e´diteurs du manuscrit (graphies contestables). Porphyre, De cultu simulacrorum, est cite´ chez Euse`be, Præparatio evangelica, livre III, chap. 11, 45–49 avec un passage qui parle de Cneph. Le renvoi au chap. 9 de ce meˆme livre semble eˆtre une erreur, bien que l’endroit indique´ contienne e´galement une citation d’un autre passage du meˆme ouvrage de Porphyre, Le renvoi a` Plutarque, De Iside et Osiride, vise probablement la fin du chap. 21, ou` il est question du dieu Cneph a` The`bes. Nous supposons que BC reproduit des notes de Creuzer (voir Symbolik, t. I, pp. 310–311). – Quant a` Jablonski, BC cite le livre I, chap. IV du Pantheon Ægyptorum, § 8, pp. 93–95, ou` il est surtout question du passage d’Euse`be cite´ dans cette note. Le renvoi a` Vendidad, Izechne´, XIX Ha, est copie´ chez Görres, Mythengeschichte, aux pages indique´es (e´d. de 1935, p. 113, avec la note 5). BC renvoie a` l’essai de Samuel Davis, «On the Astronomical Computations of the Hindus»,

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au Japon, est se´pare´ de tous les e´le´ments, indiffe´rent au monde qui s’agite et dont il ne partage point les agitations. Sommonacodom, chez les Siamois, est plonge´ dans un repos qu’aucune pense´e, aucune volonte´, aucune action ne troublent : mais pour concilier cette conception avec les exigences de l’anthropomorphisme, les Siamois ajoutent que leur dieu supreˆme n’a obtenu cette impassibilite´ que par des efforts inouı¨s, et la violence qu’il s’est impose´e a remplace´ le sang qui coulait dans ses veines par une liqueur blanche comme le lait et froide comme la neige. Cette notion n’est pas aussi de´veloppe´e dans les religions du Nord. Les peuples septentrionaux, tout entiers aux orages de la vie, ne pouvaient admettre un repos fonde´ sur l’absence de toutes les e´motions qui leur e´taient si che`res, une fe´licite´ semblable au ne´ant. Ne´anmoins leur dieu supreˆme ne joue aucun roˆle dans leur mythologie. Il n’apparaıˆt que pour planer sur ses ruines. Bien que le Je´hovah des He´breux fuˆt une divinite´ nationale, marchant, combattant, luttant avec son peuple, ou contre son peuple, les rabbins, dans leur cabale, de´claraient toute action indigne de la majeste´ divine. Ils appelaient le dieu supreˆme le pe`re inconnu, l’obscur Aleph. Nous pensons que nos lecteurs n’ont pas besoin d’eˆtre avertis de la liaison intime de ces conceptions sur l’impassibilite´ du dieu supreˆme avec le panthe´isme, dernier terme de la me´taphysique des preˆtres. Ainsi le sacerdoce courtise a` la fois le sentiment religieux qui, comme nous l’avons dit ailleurs a, e´loigne l’objet de son culte pour mieux l’adoa

Voy. tome

Ier,

2e e´dit., liv. II, ch. 21.

6–7 des efforts ... veines ] des efforts dont l’intensite´ a remplace´ le sang qui couloit dans ses veines MC 8 comme ] mot re´pe´te´ par inadvertance MC 11–12 un repos ... si che`res ] un 〈penchant a` la contemplation〉 repos fonde´ ... de la phrase n’est pas acheve´e MC 12 dieu ] ce mot re´pe´te´ MC 15 Bien ] & bien MC 22-p. 179.4 Ainsi ... abstractions. ] la fin du chap. est re´dige´e autrement C’est la` ne´anmoins ce que le sentiment religieux de´sire et re´clame. La versatilite´ le fatigue, & le changement le de´soriente. Les preˆtres viennent a` son secours par une habile condescendance ; leur Dieu supreˆme est une abstraction, insaisissable par son essence, incommensurable par sa dignite´, mais sans qualite´s sans attributs, sans pense´e, sans volonte´, sans activite´. BC pre´voit ici une longue note le Dieu du Bhaguat Gita, bien que pe´ne´trant ainsi que l’air, dans la varie´te´ des eˆtres, est lui meˆme invariable : aucune modification ne peut l’affecter (As. Res. II. 230) Amida, au Japon, est se´pare´ de tous les e´le´mens, immobile au milieu du monde qui s’agite, & toujours e´tranger a` ses agitations. C’est pourtant

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Asiatick Researches, t. II, Calcutta, 1790. pp. 225–287. La page cite´e ne se rapporte pas aux re´flexions de BC. Le renvoi est probablement faux. La meˆme faute se retrouve dans le manuscrit en cahiers ; voir sur cette page la variante aux lignes 22-p. 179.4 et au manuscrit sur fiches (ci-dessous, p. 527). OCBC, Œuvres, t. XVII, pp. 218–257.

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rer, et l’inte´reˆt, qui le rapproche pour mieux s’en servir, et cette ardeur d’abstraction qui s’empare des teˆtes humaines, lorsqu’elles abordent des questions insolubles qu’elles croient re´soudre, en marchant de subtilite´s en subtilite´s, et d’abstractions en abstractions.

(suite des variantes de la page pre´ce´dente) sous les roues de son char que les de´vots se font e´craser. le besoin de placer le Dieu supreˆme dans un repos parfait a porte´ les Siamois a` supposer qu’il est exempt de toute e´motion. mais pour concilier cette conception abstraite avec les exigeances de l’anthropomorphisme, ils ajoutent qu’il 〈n’〉a obtenu cette impassibilite´ 〈que〉 par des efforts si prodigieux que son sang en est devenu tout blanc. Cette notion n’est pas aussi de´veloppe´e dans les religions du Nord. Les peuples septendrionaux e´toient moins dispose´s a` des ide´es de supre´matie parcequ’ils jouissoient, sous quelques rapports, d’une liberte´ sauvage & toute entiere (?) aux orages de la vie, ils ne pouvoient admettre, dans leurs hypothe`ses religieuses, 〈illis.〉 un penchant a` la contemplation, une fe´licite´ 〈immuable〉, contraire a` leurs mœurs & a` leurs habitudes. Ne´anmoins leur Dieu supreˆme ne joue aucun roˆle actif dans leur mythologie. Bien que le Je´hova des He´breux fut une divinite´ nationale, marchant, combattant, luttant avec son peuple ou contre son peuple, les 〈Bien que rien ne soit plus contraire a` cette notion d’apathie que l’ide´e nationale du Jehova des He´breux les〉 Rabbins, 〈l’admettoient〉 dans leur Cabala, 〈Ils regardoient〉 de´claroient toute action 〈comme〉 indigne de la majeste´ divine. Ils appeloient le Dieu supreˆme le Pe`re inconnu, l’obscur Aleph. Nous pensons que nos lecteurs n’auront pas besoin d’eˆtre avertis de l’e´troite liaison de ces notions sur l’impassibilite´ du Dieu supreˆme avec le Panthe´isme dernier terme de la Me´taphysique des preˆtres. ce dernier mot termine la note Ms-notes suite du texte principal C’est ainsi que le Sacerdoce se de´dommage d’avoir e´te´ contraint a` repre´senter ses autres Dieux comme des eˆtres semblables a` l’homme. Il a besoin qu’ils soient tels, pour que les arreˆts qu’ils prononcent, & les moyens de de´tourner ces arreˆts soient enveloppe´s de l’incertitude indispensable a` son autorite´ : car des Dieux toujours invariables dans leurs de´terminations 〈rendront〉 rendroient l’intervention du sacerdoce inutile : mais il re´pare le tort que cette versabilite´ des Dieux feroit a` sa doctrine, en couronnant le sommet de sa hie´rarchie par une divinite´ immobile dans son impassibilite´, & majestueuse dans son inaction. Ms-texte 24 liv. II, ch. 2 ] manque MC

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De la Religion, IV

Chapitre III. Des dieux infe´rieurs ou de la de´monologie sacerdotale.

Le dieu supreˆme, place´ en dehors du monde et de ses inte´reˆts, semble avoir tout-a`-fait e´chappe´ a` l’homme. Le sentiment religieux qui l’a place´ a` cette hauteur, ne peut l’atteindre. Le faible mortel dirige vers les cieux de tristes regards, e´tonne´ qu’il est de la solitude ou` il se trouve, et de son impuissance a` re´tablir entre l’eˆtre immuable et lui des liens que sa soif de perfection a brise´s. Lorsque la religion est inde´pendante, ces liens se reconstituent d’euxmeˆmes. Libre de s’abandonner a` ses impressions successives, l’homme n’est pas enchaıˆne´ sans retour a` un syste`me ; et, suivant les besoins de son ame, tantoˆt il se plonge dans une contemplation vague qui lui peint l’eˆtre supreˆme comme hors de toute proportion avec sa nature ; tantoˆt il fran chit la distance et rappelle a` lui cet eˆtre pour mieux jouir de sa protection. Mais dans les religions dont le sacerdoce dispose, comme il enregistre les conjectures de l’homme, il le geˆne dans ses suppositions pre´sentes, par la sanction dont il a reveˆtu ses suppositions passe´es. Il faut alors qu’il se charge de pre´senter a` l’imagination qu’il retient captive, quelque hypothe`se qui remette la religion a` sa porte´e. De la` cette immensite´ de dieux subalE´tablissement du texte : Manuscrits : 1.) BCU, Co 3262/1, pp. 103–113 [=Ms-texte] et Co 3262/2, pp. 65–70 [=Ms-notes] 2.) BCU, Co 3246, fos 9–11, 14–19 [=MC] 3.) BnF, NAF 18823, fos 122–123 [=MC] Imprime´ : De la Religion, conside´re´e dans sa source, ses formes et ses de´veloppements, t. IV, Paris : Chez Pichon et Didier, e´diteurs, 1831, pp. 125– 133. 3-p. 181.2 Le dieu ... preˆtres. ] tout ce passage dans la col. de gauche ; il remplace l’ancien de´but de ce chapitre Le sentiment religieux, ce´dant de rehausser, par dela` toute mesure les objets qu’il adore, place au dessus des Dieux qu’il s’e´tait cre´e´s primitivement, une Divinite´ d’une nature plus e´leve´e & plus myste´rieuse. Le sacerdoce, s’appropriant cette vague conjecture, la transforme en dogme. mais l’inte´reˆt, qui cherche de toutes parts des protecteurs & des auxiliaires, impose a` l’homme un travail en sens inverse. Il place au dessous de ses Dieux des ge´nies interme´diaires, & le Ciel se trouve ainsi triplement peuple´. Le Sacerdoce s’empare encore de cette tentative nouvelle : il la consacre, il l’enre´gistre, il range dans un ordre re´gulier & fixe les essences secondaires que l’e´goı¨sme invoque & que 〈l’inte´reˆt〉 l’imagination lui pre´sente en foule. Ms-texte 3 et ... inte´reˆts ] manque Ms-texte 4 tout-a`-fait e´chappe´ ] e´chappe´ tout a` fait Ms-texte 4–5 qui l’a place´ a` cette hauteur ] manque Ms-texte 7 sa soif de perfection ] son impuissance meˆme Ms-texte 9 reconstituent ] re´tablissent Ms-texte, MC 19-p. 181.2 De la` ... preˆtres. ] e´bauche de cette phrase dans la col. de gauche De la` ces notions de Divinite´s interme´diaires &ca. Ms-texte

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Livre X, chapitre III – Des dieux infe´rieurs

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ternes, de ge´nies et d’eˆtres interme´diaires, qui peuplent les croyances soumises aux preˆtres a. Les E´gyptiens, dit Celse b, ont trente-six de´mons, qu’ils appellent de´cans ou dieux e´the´re´s. Trois sont attache´s a` chaque dieu supe´rieur, et chaque de´mon commande a` des intelligences infe´rieures, ce qui porte leur nombre a` trois cent soixante c. Ces de´mons ne sont point absorbe´s dans la contemplation, comme le dieu supreˆme d : ils agissent sans cesse, et leur activite´ est infatigable e. Les uns sont purs et bienfaisants, prote´gent les mortels, les a b

c d e

Le Ramayan (p. 415) parle de 600 millions d’Upsaras ou nymphes ce´lestes1. ORIGE` NE, contre Celse2. V. d’ailleurs pour la de´monologie e´gyptienne, Creutzer, Guign[i]aut, 447, 4563. LACTANT. de Falsa relig4. HERME` S ad Tatium. STOBE´ E, JAMBL. de myst5. JAMBLICH6. Ib.

III,

71, et

9 Le Ramayan ... ce´lestes. ] e´bauche de cette note dans la col. de gauche 600 Millions d’Upsaras ou nymphes dans le Ramayan. p. 415. Ms-texte 10 V. ... pour ] Voir pour Mstexte Creutzer ... 71, et ] manque Ms-texte 11 447, 456. ] 447–456 Ms-texte, MC 13 Tatium ... Jambl. ] Tat. ... Jamblich. MC 1

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Le Ramayuna of Valmeeki, translated from the Original Sungskrit, with Explanatery Notes by William Carey and Joshua Marshman (London : J. W. Morris, 1808) parle (chap. 36, pp. 286–287) des Upsaras : «Six hundred millions [...] were the number of these resplendent and divine Upsaras, of celestial form, adorned with glorious ornaments and endowed with beauty, youth, sweetness, and every grace» (e´d. de Serampore, p. 415). Le renvoi a` Orige`ne et son e´crit Contre Celse, la source unique de l’œuvre de ce philosophe paı¨en, est tire´ de Görres, Mythengeschichte (II, p. 383, note ; e´d. de 1935, p. 185, n. 1). BC re´sume une phrase d’Orige`ne (livre VIII, chap. 58, PG, t. XI, col. 1603). Tout ce que nous lisons sur les de´mons est un re´sume´ de Creuzer, Symbolik, t. III, e´d. de 1812 et de Görres, Mythengeschichte, qui traitent longuement des de´mons. Les sources indique´es par la suite se trouvent toutes dans les notes de ces auteurs. Voir Görres, e´d. de 1935, p. 185, notes 3, 9 et 10, ainsi que le texte principal, ou` se trouvent des phrases que BC cite en les traduisant. Guigniaut parle de ce sujet dans le livre III, chap. V de sa traduction de Creuzer et de´veloppe certains aspects dans ses notes 3 et 11 qu’il ajoute au chapitre cite´ de l’ouvrage de Creuzer dans le second volume. – Il faut lire 447–456, car BC vise tout le chap. V de la troisie`me partie de l’ouvrage, dont il re´sume des passages du de´but. Allusion a` un passage de l’ouvrage Divinarum institutionum adversus gentes, livre I, De falsa religione, chap. VII : «Quod si cultores Deorum, eos ipsos se colere putant, quos summi Dei ministros appellamus : nihil est, quod nobis faciant inuidiam, qui vnum dicamus, multos negemus. Si eos multitudo delectat, non duodecim dicimus, aut trecentos sexagintaquinque (vt Orpheus) sed innumerabiles esse arguimus eorum errores in diuersum, qui tam paucos putant» (L. Coelii Lactantii Firmiani Diuinarum Institutionum libri VII [...], Lugdun. : apud Ioannem Tornæsium, M.D.LXXXVII, pp. 27–28). Renvoi au chap. VI de Stobe´e. BC copie une note de Görres (e´d. de 1935, p. 185, n. 9). Le renvoi a` Stobe´e est peut-eˆtre une erreur, car aucun des tre`s nombreux extraits de l’e´crit herme´tique ne parle des de´mons. Dans ce chap. VI, on trouve deux extraits de Jamblique (e´d. Heeren, pp. 185–187), mais sans rapport direct avec ce que dit BC dans son texte. Il se pourrait que le renvoi a` Jamblique vise le livre I ou` il est question des diffe´rences entre les dieux comme des intelligences pures et les de´mons qui participent a` cette intelligence. Les

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avertissent, les secourent. Leur chef est Osiris, qui, couvert d’un manteau resplendissant, tient en main le Phallus mystique a. La nature des autres est impure et malfaisante ; une queue de serpent trahit leur malignite´ b. C’est la race des ge´ants, vaincus par Horus ou Hercule, et dont le sang, meˆle´ a` la terre, a produit la vigne, pre´sent dangereux, qui versant dans les veines des humains le sang d’une race criminelle, les jette dans un funeste de´lire c. Le chef de ces mauvais ge´nies est Typhon : car, par une cause que nous expliquerons tout a` l’heure, la notion de divinite´s me´chantes, notion e´trange`re au polythe´isme libre, fait toujours partie du polythe´isme sacerdotal ; et les divinite´s malfaisantes une fois admises, un certain penchant de notre esprit a` la syme´trie institue une hie´rarchie dans les enfers comme dans le ciel. Cependant cette de´monologie, qui par la faculte´ attribue´e aux de´mons de prote´ger les hommes ou de leur nuire, s’identifie d’un coˆte´ avec la religion a b c

KIRCHER, Œd. Æg1. GOERRES, II, 3852. PLUT. de Is. et Os3.

2–12 La nature ... ciel. ] ordre diffe´rent des phrases dans la version pre´ce´dente, quelques variantes La nature ... malfaisante. Car par une cause ... divinite´s me´chantes, e´trange`re au ... ciel. Ces demons pervers, dont la malignite´ se trahit par leur forme (152) une note est accroche´e a` ce dernier mot Goerres II. 385. Ils ont une queue de serpent. Ms-notes ; suite du texte : cherchent a` faire du mal aux humains. De ce nombre sont les Ge´ans, vaincus ... vigne. C’est pour cette cause que buvant dans cette liqueur dangereuse le sang d’une race criminelle, nous tombons dans un funeste de´lire. Le chef ... Typhon. Ms-texte et Ms-notes 2–6 La nature ... de´lire. ] passage remanie´ en changeant l’ordre des phrases, ope´ration esquisse´e dans une note de travail dans la col. de gauche ; les phrases a` prendre sont cite´es en abre´ge´ La nature des autres − malfesante. Une queue ... malignite´. ( ) C’est la race des Ge´ans qui − vigne, pre´sent dangereux qui versant dans le sang des mortels le sang − criminelle les jette dans − de´lire. Ms-texte 5 terre ] 〈vigne〉 terre MC 6–7 Le chef ... Typhon : ] phrase de´place´e ; dans la version pre´ce´dente, elle se trouve plus loin Ms-texte 10-p. 183.21 penchant ... personnifie´es. ] texte identique, a` quelques de´tails pre`s MC 17 Plut. ] Plutarch. MC

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2 3

(suite des notes de la page pre´ce´dente) diffe´rences e´tablies par Jamblique attribuent aux de´mons une activite´ qui est dirige´e vers la corporalite´ ; voir en particulier les chap. 15 et 16 (Jamblique, Les myste`res d’E´gypte, texte e´tabli et traduit par E´douard des Places, S. J., Paris : Belles Lettres, 1966, pp. 64–68). BC copie une note de Görres (e´d. de 1935, p. 185, n. 10). BC reproduit ici (pas tout a` fait correctement) une observation qu’il a lue chez Görres, Mythengeschichte, e´d. de 1935, p. 183, ligne 30 et note 10. Görres cite Kircher, Œdipus ægyptiacus, t. I, Syntagma II, plusieurs chapitres sur la le´gende d’Isis et Osiris qui contiennent des de´tails de ce genre, entre autres une description d’Osiris assis sur un troˆne, veˆtu d’un beau manteau et tenant dans sa main droite le sceptre, symbole de sa puissance (pp. 152–153). Osiris «ipse generationis principium» repre´sente´ avec le phallus comme un de ses insignes est de´crit dans le Syntagme III, p. 229. Voir aussi ci-dessous, p. 243, n. 4. Les serpents sont l’attribut de Serapis, selon Görres (II, p. 384 ; e´d. de 1935, p. 185). BC reproduit le re´cit de Görres (II, p. 385 ; e´d. de 1935, pp. 185–186) qui cite Plutarque, De Iside et Osiride, chap. 6. Le re´cit de Plutarque n’est pas tout a` fait conforme a` ce que dit

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populaire, rentre d’une autre part dans la doctrine scientifique, par les rapports e´tablis entre ces de´mons et les astres. Assujettir trois d’entre eux a` chacun des douze dieux supe´rieurs, c’e´tait les combiner avec les douze signes du zodiaque, et leur nombre de trois cent soixante est manifestement une division astronomique ; alors les de´nominations changent. Le chef des intelligences perverses n’est plus Typhon, c’est Se´rapis, le soleil en hiver, froid, paˆle, et n’exerc¸ant qu’une influence maligne a. Mais ce meˆme Se´rapis revient par une autre route se rattacher a` la croyance du peuple. Il est le Dieu des enfers, il pre´side au monde souterrain, a` l’Amenthe`s, ce se´jour des ames qui vivent sous la terre d’une vie terres tre b. Ainsi, comme nous l’avons avance´ dans un volume pre´ce´dent, la superstition vulgaire et la science des preˆtres se touchent continuellement, rentrent sans cesse l’une dans l’autre, se font des emprunts mutuels, e´changent des de´veloppements re´ciproques, et forment deux syste`mes tellement unis, tellement enlace´s, bien qu’admettant souvent des de´tails inconciliables, qu’il est impossible de ne pas courir a` chaque instant risque de les confondre. Il en est de meˆme de la de´monologie des Perses. Elle constitue une hie´rarchie de ge´nies bons et mauvais, qui, inde´pendamment du rang qu’ils occupent dans la religion publique, ont des significations astronomiques, cosmogoniques et me´taphysiques. Toutes les mesures du temps sont personnifie´es1. Les Fervers, ide´es prototypes c conc¸ues dans l’esprit du premier eˆtre, deviennent des cre´atures vivantes d, parce que la pense´e divine confe`re la vie. Les hommes, les astres, les animaux ont tous leurs Fervers particuliers : ces Fervers sont la source de toute purete´, de toute abondance, a b c d

PORPH. ap. Eus. Præp. ev. III2. PLUT. de Isid3. HEEREN, Ideen., Perses, 2724. GOERRES, I, 26 et suiv5.

10 qui vivent ] vivant MC 17 Perses. ] BC ajoute une note v. Guigniaud, 325–336, 703–705. Ms-texte MC 20–21 personnifie´es. ] BC ajoute une note Mayer, mythol. Lex. Art. Gaehs MC 25 Porph. ... III. ] l’appel de cette note existe dans le ms., mais le texte n’y est pas MC 28 Goerres ] Goerr. MC

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Görres et par conse´quent ne correspond pas non plus exactement au raisonnement de BC. BC cite dans la variante Majer, Mythologisches Lexicon, article «Gaˆhs», t. II, pp. 151–154. Le renvoi a` Porphyre dans La pre´paration e´vange´lique n’est pas pre´cis. Il y a plusieurs passages qui font allusion a` ce que dit BC. BC cite le chap. 29 de De Iside et Osiride. Plutarque diffe`re dans l’explication du nom Se´rapis. BC renvoie a` un passage de Heeren, Ideen, Erster Theil, Asiatische Völker, Erste Abtheilung. Dans l’e´dition de 1824, on trouve sur le terme «Ferver» : «Als Urbild denkt man ihn sich in der Gestalt dem Nachbild völlig gleich, aber nur reiner, herrlicher und unvergänglich» (p. 262). Heeren se sert d’une terminologie platonicienne pour expliquer le mot. Il faut lire : «242 et suiv.» Görres explique longuement a` cet endroit (et il y reviendra par la suite) la signification de cette ide´e.

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de toute beaute´. Le ruisseau limpide descend-il de la montagne pour fe´conder la plaine ? Un Ferver le dirige. Les arbres se couvrent-ils de fruits ou d’ombrage, les prairies de fleurs, les champs de moissons ? C’est l’œuvre des Fervers, pour qui l’homme doit prier, et qu’il doit en meˆme temps invoquer sans cesse1. Oppose´s aux Fervers, les mauvais ge´nies s’agitent2. La de´monologie indienne a est peu diffe´rente de celle de l’E´gypte b. Indra remplace Osiris, Moisazour Typhon, et les De´ve´tas ou les Daints, au nombre de plusieurs millions a` figure monstrueuse c, les de´mons subalternes. Indra est en meˆme temps le maıˆtre du firmament ; a` ses coˆte´s sont les e´le´ments et les astres, esclaves de sa volonte´. a b

c d

DUBOIS, II, 440, 4423. GOERRES, II, p. 386, en note. POLIER, Myth. des Indous, I, 12, 13. Voyez aussi WAGN. 180, Oupnekat, I, 2154. GOERR. II, 3865. A dater de cette captivite´, le dieu des Juifs fut de´peint entoure´ de sept anges, comme les sept amschaspans, et devint en tout pareil au dieu de Zoroastre. Daniel est de cette e´poque6.

5 cesse. ] BC ajoute une note Mayer, art. Ferver Ms-notes, MC Oppose´s ... s’agitent. ] manque Ms-texte s’agitent. ] BC ajoute une note de travail consulter Heeren, Guigniaud, Creutzer & le Paralle`le des Religions. MC 8 figure monstrueuse ] figures monstrueuses MC 11 Dubois ... 442. ] v. Guigniaud, 245–260 Dubois ... 442. MC note ajoute´e dans la col. de gauche Ms-texte 12 Voyez aussi ] manque MC 13 215. ] 215. Mayer, Myth. Lex. art. Devetas MC 15 A dater ] Creutz. III. 86. A dater MC 1 2

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BC cite dans la variante Majer, Mythologisches Lexicon, article «Ferver», t. II, pp. 68–76. La variante atteste que BC pensait approfondir cette observation. Il compte retourner aux ouvrages de Creuzer et de Guigniaut, mais aussi a` Heeren, Ideen über die Politik, den Verkehr und den Handel der vornehmsten Völker der alten Welt, t. I, qui traite des Perses, et a` l’ouvrage souvent utilise´, rarement cite´, de l’abbe´ Franc¸ois-Florentin Brunet, Paralle`le des religions, Paris : Knapen, 1792, qui parle dans le t. I de la religion des Perses. Nous savons que BC le posse`de dans sa bibliothe`que (voir le Catalogue). Il faut lire 440–442, car BC cite une section entie`re intitule´e «Boutams ou de´mons» du chap. VI de la troisie`me partie de l’ouvrage de Dubois. BC cite d’abord une longue note de Görres, Mythengeschichte (t. II, p. 386, note ; e´d. de 1935, p. 186, n. 2). Le renvoi a` l’ouvrage de Polier, Mythologie des Indous, se trouve dans la note de Görres, a` la fin ; celui-ci cite pourtant les chap. 12 et 13 du t. II. – BC ajoute Johann Jakob Wagner, Ideen zu einer allgemeinen Mythologie der alten Welt, Frankfurt am Main : in der Andreäischen Buchhandlung, 1808, ou` l’on trouve (pp. 180–182) une longue liste des de´mons de l’Inde. – Le renvoi a` cette page de l’Oupnekat est une erreur que nous n’avons pu corriger. – Dans la variante, BC ajoute encore Majer, Mythologisches Lexicon, article «Dewetas», t. I, pp. 480–487, qui confirme ce que BC dit sur Indra, autre nom pour Dewandren, le premier des Dewetas. Cette note vise le texte principal de Creuzer, et non pas la note dont il est question cidessus. Nous ne savons pas a` quel ouvrage BC pense ici. Il est bien connu que la tradition juive post-babylonienne connaıˆt des anges (Liber Tobiæ, textes Qumran), mais l’Ancien Testament ne parle jamais des sept anges du seigneur.

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Les He´breux eurent aussi leur de´monologie, surtout depuis la captivite´ de Babylone d. Leurs anges ressemblaient aux De´ve´tas indiens1. Cette de´monologie se fondait principalement sur le syste`me des e´manations. Des E´ons, substances immate´rielles, pareilles aux eˆtres interme´diaires des e´coles orphiques, pythagoriciennes et platoniciennes, e´taient sortis de Dieu : onze e´taient leur nombre, Aziloth leur nom. Trois de ces E´ons, la sagesse, le verbe et l’esprit, avaient cre´e´ le monde, et communiquaient aux hommes les de´crets divins a. Inde´pendamment et au-dessous de cette de´ monologie, moitie´ savante et moitie´ religieuse, on en distingue chez toutes les nations sacerdotales une autre d’un ordre infe´rieur, qui a moins de rapports avec la religion, et qui n’en a point avec la science, mais qui ne´anmoins prend son origine dans la croyance enseigne´e par les preˆtres, et qui en est l’imitation ou pour mieux dire la parodie. Elle se compose de ces esprits de l’air, des fleuves, des bois, des sources, des montagnes, des cavernes, eˆtres capricieux que l’Allemagne de´signe encore sous mille noms bizarres, et qui emploient leur pouvoir a

GLASNER, dissert. de Trin. Cabbal. et Rabbin. non christ. sed mere Platon. ; HELMST, 1741 ; BRUCKER, Hist. phil. judaı¨c. cabbal. Les chre´tiens, selon Creutzer, ont emprunte´ leur de´monologie, en partie des He´breux, et en partie des philosophes platoniciens. Il cite a` ce sujet deux passages tre`s-remarquables de Denys l’are´opagiste et de saint Bazile. Les Gnostiques, en comptant dans leur de´monologie 365 classes de ge´nies, avaient conserve´ le nombre astronomique, dont ils avaient perdu le sens (CREUTZ., III, 86–88)2.

1–2 Les He´breux ... Babylone. ] phrase prise dans les notes Ms-notes 2 indiens. ] BC ajoute une note Goerr. II. 527–528. surtout le passage so begegnen uns – an deinen Samen giessen. MC 4 substances ] 〈eˆtres〉 substances MC 9-p. 186.4 Inde´pendamment ... Bhagarati. ] ajoute´ dans la col. de gauche Inde´pendamment ... distingue une autre ... sauvages les 〈jeunes g〉 adolescens ... sexes. 〈mais〉 les victimes ... demeure reconnait la voix ... redoutables du Bhagavati. Ms-texte 20–22 Les Gnostiques ... 88). ] ajoute´ dans la col. de gauche Ms-notes 1

2

La variante a` la ligne 2 sugge`re que BC se propose de citer ou de traduire un passage de Görres, Mythengeschichte, t. II (e´d. de 1935, pp. 244–245) qui re´sume sept occurrences de l’Ancien Testament ou` il est question d’anges du seigneur ou du satan et qui se termine avec un collage de citations d’Isaı¨e. BC renvoie a` l’ouvrage de Justus Martin Gläsener, Dissertatio philologico-theologica de Trinitate in scriptis Cabbalistarum et Rabbinorum non christiana, sed mere platonica [...], Helmæstadii : Schnorrius, 1741, ainsi qu’au manuel standard de Johann Jakob Brucker, Iacobi Bruckeri Historia critica philosophiæ a mundi incunablis usque ad nostrum ætatem deducta, en particulier a` un chapitre du livre II : Liber secundus, De philosophia ivdæorum, cap. tertium, sectio II, «De philosophia Ivdæorum esoterica, sive cabbalistica», t. II, Lipsiæ : Breitkopf, 1742, pp. 916–1069. Il accepte les raisonnements de Creuzer, Symbolik, t. III,

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borne´ a` jouer aux humains des niches enfantines, effrayant la jeune fille, e´garant le voyageur, fantasques plutoˆt que me´chants, mais me´chants quand on les irrite. Tels sont aux Indes les ge´nies qui habitent pre`s des sources du Bhagarati, et qui pleins d’un amour ardent pour la jeunesse et pour la beaute´, attirent dans leurs retraites sauvages les adolescents des deux sexes. Les victimes enleve´es de la sorte deviennent pareilles a` leurs ravisseurs, dont elles trompent ainsi l’espe´rance. Un enfant qui jouait pre`s de leur demeure, tomba dans leurs pie´ges, en reconnaissant la voix de son pe`re, om bre inquie`te, se´pare´e du corps. L’amour paternel l’emporta sur le charme, et le pe`re obtint la liberte´ de son fils sous la promesse d’un profond silence. Cette promesse fut viole´e, et le jeune indiscret, prive´ de la parole, e´tait encore, il y a peu d’anne´es, cite´ comme une preuve vivante de la puissance des ge´nies, hoˆtes redoutables des bords ou des ondes du1 Bhagarati a. On voit clairement ici les traditions sacerdotales descendant par une de´gradation insensible au rang de la fe´erie. Les anciens Gallois avaient une de´monologie presque identique b.

a

b

As. Res. XIII, 1831. Ce qui prouve qu’il y a une relation entre la croyance religieuse et cette de´monologie infe´rieure, c’est que les Brames qui pe´ne`trent dans les lieux habite´s par ces esprits, pre´disent l’avenir, la mort des princes et les re´volutions des empires. DAVIES, Myth. Celt. 155–1562.

14–15 On voit ... fe´erie. ] ajoute´ dans la col. de gauche Ms-texte 16 Les anciens ... identique. ] e´bauche de cette phrase ainsi que de la note dans la col. de gauche voir sur la demonologie des anciens Gallois Davies Myth. Celt. 155–156. Ms-notes 17–19 As. Res. ... empires. ] ajoute´ dans la col. de gauche As. Res. ... il y a encore une ... empires. Ms-notes 20 Davies ... 156. ] ajoute´ dans la col. de gauche Ms-notes

1

2

pp. 86–88, soulignant l’importance du passage de Denys l’Are´opagite, De cœlesti hierarchia, t. I, cap. 4 («Le sens du mot ‘ange’»), et relevant Basile, Eunomium, III, 656b–657b (Basile de Ce´sare´e, Contre Eunome, suivi de Eunome, Apologie, introduction, traduction et notes de Bernard Sesbou¨e´, t. II, Paris : E´ditions du Cerf, 1983, pp. 149–151). Voir James B. Fraser, «An Account of a Journey to the Sources of the Jumna and Bhagirathi Rivers», Asiatick Researches, t. XIII, Calcutta, 1820, pp. 171–249. BC ne re´sume pas tout a` fait correctement, sans toutefois en alte´rer la sens, l’anecdote rapporte´e par Fraser a` la page indique´e. Voir Edward Davies, The Mythology and the Rites of the British Druides, London : J. Booth, 1809, pp. 155–157, ou` l’on trouve la fable sur un site miraculeux entoure´ d’un lac, le jardin des fe´es, les Tylwyth Te´g, ou` l’on pouvait arriver certains jours de l’anne´e pour participer a` une feˆte et eˆtre l’hoˆte de ces fe´es. Il e´tait interdit d’emporter quoi que soit en quittant les lieux. Une fois, un jeune homme imprudent emporta une des fleurs, et de`s qu’il eut quitte´ les lieux, il perdit la raison, et le spectacle merveilleux cessa pour toujours.

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Toutes ces notions sont e´trange`res au polythe´isme inde´pendant. Nous les chercherions en vain dans la ve´ritable croyance des Grecs a. Ce ne fut que lors de sa de´cadence qu’elles reparurent sous le nom de magie, pour servir d’aliment a` la cre´dulite´ qui ne savait ou` se replacer. He´siode, qui parle de dieux subalternes et de de´mons veillant sur les hommes b, avait puise´ dans des traditions me´ridionales ces ide´es qu’il entassait confuse´ment et sans les comprendre c. Plus tard les philosophes,

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CREUTZER, (Symbolic., Ire e´dit. allemande, III, 4) reconnaıˆt que les de´mons ou he´ros, comme eˆtres interme´diaires, ne se rencontrent point dans la mythologie home´rique. Le mot de´mon, dans l’Iliade, s’applique aux dieux. Pallas remonte dans l’Olympe, ou` elle rejoint les autres de´mons. Il., I, 221. Op. et Di., 8–9, 122, 2512. Tout ce qui est arrange´ syste´matiquement dans la religion perse, remarque Creutzer avec beaucoup de sagacite´ (Symbol. III, 70, Ire e´dit. allem.), n’est que fragmentaire et incohe´rent dans He´siode. Les notions importe´es par ce poe`te e´taient si peu analogues a` l’esprit grec, que ceux qui vinrent apre`s lui n’en firent aucun usage dans le merveilleux qu’ils employe`rent3.

1–2 Toutes ... inde´pendant. Nous ... Grecs. ] une premie`re version biffe´e 〈Toutes ces notions, moitie´ savantes & moitie´ religieuses sont oppose´es a` la nature du Polythe´isme inde´pendant. Nous les chercherions en vain dans la ve´ritable croyance des Grecs〉 Ms-texte ; cette premie`re re´daction est remplace´e deux pages plus loin dans la col. de gauche par la nouvelle qui passera dans l’imprime´ Toutes ... Polythe´isme 〈sacerdotal〉 inde´pendant. Nous ... de´cadence a` Rome qu’elles ... ne savoit ou` 〈deux mots illis.〉 se replacer. Ms-texte 5 qui parle ] qui le premier parle Ms-texte

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BC choisit dans le texte de Creuzer sur la signification du mot δαι μων (Symbolik, t. III, pp. 4–7, l’exemple du vers de l’Iliade (I, 222 ; non pas 22, comme le dit BC). Creuzer cite les commentateurs anciens. Le premier des renvois de BC ne parle pas de de´mons ou de dieux subalternes, mais de Zeus lui-meˆme qui soutient les faibles et opprime l’homme fort. Le deuxie`me passage raconte que les premiers hommes, vivant heureux dans la compagnie des dieux, sont transforme´s apre`s leur mort douce en de´mons qui prote`gent les vivants. Le dernier passage parle de 30000 de´mons qui surveillent les hommes et de´noncent ceux qui trahissent les lois. L’origine orientale de la doctrine sur les de´mons est proble´matique. BC renvoie a` la conclusion de Creuzer qui avait traite´ dans les pages pre´ce´dentes (pp. 66– 70) de la the´ologie des Perses pour en souligner la cohe´rence ; He´siode ne la saisit pas : «Aus dem allen ergibt sich, dass das was im Hesiodus und anderen Volksdichtern wie in Volkssagen der Griechen nur abgerissen und einzeln hervortritt, in der Theologie der alten Parsen systematisch durchgeführt war» (p. 70). BC reviendra ci-dessous a` cette ide´e (p. 392).

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admirateurs des doctrines emprunte´es aux barbares, s’empare`rent de leur de´monologie, pour e´purer et refondre le polythe´isme, mais ils avoue`rent toujours qu’ils devaient aux e´trangers ces pre´tendus perfectionnements. Plutarque, qui loue le compilateur be´otien d’avoir distingue´ les diverses natures intelli gentes qui nous unissent aux dieux a, ajoute qu’il ignore si cette de´couverte sublime est due aux Mages et a` Zoroastre, aux Thraces et a` Orphe´e, aux E´gyptiens ou aux Phrygiens b. La croyance populaire des Grecs repoussa long-temps ces additions exotiques, et s’ils eurent, a` des e´poques assez avance´es de leur polythe´isme, des dieux secondaires, ces dieux, de´laisse´s par le culte public et livre´s, pour ainsi dire, de´daigneusement aux superstitions individuelles, ne forme`rent jamais qu’une foule anarchique et incohe´rente, sans but, sans ordre, sans consistance et sans hie´rarchie. Ils n’avaient que des relations accidentelles avec les humains : ils n’en avaient point avec les habitants de l’Olympe. Leur nombre n’e´tait pas fixe´. Leur existence e´tait incertaine, et leur multiplication, spontane´e et fortuite, de´pendait du caprice de chacun. a

b

Il en forme quatre classes, les dieux, les de´mons, les he´ros et les hommes. (CREUTZ., III, 14.) The´opompe, dans E´lien (Var. Hist., III, 14), dit que Sile`ne est un eˆtre au-dessous des dieux et au-dessus de la race humaine1. De Oracul. defectu2.

3 aux e´trangers ... perfectionnements. ] ces pre´tendues perfectionnemens aux e´trangers Mstexte 6 Zoroastre, aux ] Zoroastre, 〈aux Egyptiens〉 aux Ms-texte 18 14 ] 18 MC 20 defectu. ] Def. MC 1

2

BC traduit dans sa note une phrase de Creuzer et ajoute le renvoi a` l’historien The´opompe (378/377-entre 323 et 300) dont celui-ci avait parle´ deux pages plus haut : «ein Wesen dunkler als ein Gott, besser als ein Mensch und dem Tode nicht unterworfen» (Symbolik, t. III, pp. 12–13). C’est la premie`re phrase d’E´lien, Varia historia, livre III, 18 (voir la variante ; Histoire varie´e, traduit et commente´ par Alessandra Lukinovich et Anne-France Morand, Paris : Belles Lettres, 1991, p. 40). Il est e´vident que BC a consulte´ en e´tudiant Creuzer l’ouvrage de Plutarque (De defectu oraculorum) puisqu’il en cite une phrase : «But Hesiod was the first to set forth clearly and distincly four classes of rational beeings : gods, demigods, heroes, in this order, and last of all, men» (Plutarch, Moralia, t. V, with an English Translation by Frank Cole Babbitt, Cambridge, Massachusetts, London : Harvard University Press, 1993, p. 379). Voir Plutarque, Œuvres morales, t. VI, Dialogues Pythiques, texte e´tabli et traduit par Robert Flacelie`re, Paris : Belles Lettres, 1974. BC copie la note de Creuzer, Symbolik, t. III, p. 14 et paraphrase le passage de Plutarque. «He´siode, le premier, divisa d’une manie`re nette et pre´cise les eˆtres doue´s de raison en quatre espe`ces, a` savoir celles des dieux, des de´mons, des he´ros et enfin des hommes, et il semble avoir mis a` part et fait passer des hommes, pris dans la race d’or, parmi les nombreux bons de´mons, comme certains demidieux parmi les he´ros» (t. VI, Sur la disparition des oracles, p. 112 ; 415B). L’observation relative aux mages de Zoroastre, aux Thraces et Orphe´e, aux E´gyptiens et Phrygiens pre´ce`de le passage que nous avons retranscrit ici.

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Livre X, chapitre IV – Des divinite´s malfaisantes

Chapitre IV. Des divinite´s malfaisantes.

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Parmi les conceptions du sauvage est celle de dieux malfaisants a. Cette conception n’est pas l’œuvre du sentiment religieux, mais de l’inte´reˆt. L’homme, qui veut que ses dieux lui soient utiles, les accuse de me´chancete´ quand ils s’y refusent. A plus forte raison conside`re-t-il comme des eˆtres pervers ceux qu’il soupc¸onne de lui eˆtre nuisibles. Mais il suffit que ses lumie`res fassent des progre`s, pour qu’il e´carte cette ide´e ; l’anthropomorphisme meˆme la repousse. Les dieux de l’anthropomorphisme sont des eˆtres me´lange´s de vices et de vertus, parce qu’ils ressemblent a` l’homme ; ils s’ame´liorent graduellement. Aucun ne fait le bien sans inte´reˆt, mais aucun ne fait le mal pour le mal. Il n’en existe point dont la vocation spe´ciale, l’inclination constante, soient de nuire a` l’espe`ce infe´rieure par laquelle ils veulent eˆtre adore´s. D’ailleurs, a` mesure que la nature est mieux observe´e et l’enchaıˆnement des faits mieux saisi, le bien et le mal, le plaisir et la douleur, tour-a`-tour cause et effet l’un de l’autre, semblent plus intimement lie´s, et n’exigent point, pour eˆtre explique´s, qu’on les attribue a` deux principes se´pare´s et a

Voyez tome I, page 166, 2e e´dit1. E´tablissement du texte : Manuscrits : 1.) BCU, Co 3262/1, pp. 114–132 [=Ms-texte] et Imprime´ : De Co 3262/2, pp. 70–85 [=Ms-notes] 2.) BCU, Co 3246, fos 20–36 [=MC] la Religion, conside´re´e dans sa source, ses formes et ses de´veloppements, t. IV, Paris : Chez Pichon et Didier, e´diteurs, 1831, pp. 134–157.

2 malfaisantes. ] a` la hauteur du titre commence un extrait d’Eckstein que BC utilisera plus loin ; voir ci-dessous, pp. 197–198 observation inge´nieuse sur l’influence du dualisme relativement a` la ge´ographie. «le systeˆme des 2 principes, la lutte entre le chaos & les te´ne`bres, l’ange & les de´mons, sont e´galement repre´sente´s d’une manie`re symbolique par les peuples & les territoires. quelques lieux sont envisage´s comme les portes des enfers. a` cote´ sont celles d’un e´lyse´e. L’arbre de la sagesse, dont les feuilles sont les sentences des pontifes le´gislateurs, dont les racines se´parent les deux empires de la lumie`re & des te´ne`bres, est cense´ s’e`lever a` la surface de ces re´gions, prote´ger l’une & couvrir l’autre de son myste´rieux ombrage. S’il est des peuples enfans de la lumie`re, il en est fils des te´ne`bres, voisins & rivaux des premiers, & de´clarant une guerre impie au territoire sacre´. d’Eckst.» III. 4632. Ms-texte 1 2

OCBC, Œuvres, t. XVII, p. 238. BC dans la variante copie presque litte´ralement un passage du chap. III («De l’e`re primitive des le´gislations sacerdotales») de l’essai «De l’Histoire» du baron d’Eckstein, Le Catholique, t. I, cah. III, pp. 450–487, et plus particulie`rement pp. 462–463.

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distincts. Nous ne trouvons en conse´quence aucune divinite´ essentiellement me´chante dans le polythe´isme grec a. Plutarque insinue que les habitants de certaines contre´es de la Gre`ce reconnaissaient deux principes oppose´s b ; mais il ne fortifie cette assertion d’aucun fait ; il la restreint a` quelques provinces ou` ce dogme avait pu facilement s’introduire de l’e´tranger c. Il e´crivait d’ailleurs a` une e´poque ou` les divers genres de polythe´ismes n’e´taient plus distincts. Les dogmes, les divinite´s et les pratiques de tous les peuples courbe´s sous le joug d’un peuple despote, se meˆlaient, se confondaient, ne composaient plus qu’une masse informe. Enfin Plutarque, dans le traite´ curieux, mais inexact, ou` cette assertion se rencontre, s’e´tait expresse´ment propose´ de retrouver la doctrine du double principe, dans toutes les religions comme dans tous les syste`mes de philosophie, et ce de´sir l’a conduit a` de´naturer les opinions qu’il a rapporte´es. On pourrait croire au premier coup d’œil que les Titans et les Ge´ants, monstres ennemis des dieux et a` formes hideuses, occupaient chez les Grecs la place du Typhon e´gyptien, ou du Loke des Scandinaves. Mais ces monsa

b c

Quand Arnobe veut insinuer que les prodiges dont se glorifiaient les paı¨ens, e´taient l’œuvre de Satan : «Quisnam iste est unus, dit-il, interrogabit aliquis ? Ne nobis fidem habere nolitis : Ægyptios, Persas, Indos, Chaldæos, Armenios interroget.» Preuve e´vidente qu’Arnobe savait que ces nations croyaient a` un mauvais principe, et que les Grecs et les Romains n’y croyaient pas1. De Isid. et Osir2. Dans les fables home´riques, Circe´ est une divinite´ malfaisante, puisqu’elle cherche a` de´grader ceux que le hasard livre a` sa puissance ; mais cette fable nous reporte a` la Colchide, et les habitants de la Colchide e´taient une colonie d’E´gypte3.

11 assertion ] doctrine Ms-texte 13 philosophie.] BC pre´voit une note v. Bayle, art. maniche´isme Ms-notes, MC les ] toutes les Ms-texte 17 e´gyptien ] Egyptien, 〈de l’Arimane des Perses,〉 Ms-texte 18–22 Quand ... pas. ] note ajoute´e dans la col. de gauche Ms-notes 26 E´gypte. ] Egypte (Creutz. IV. 27. 30. 31.) Ms-notes, MC 1

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Voir pour la citation Adversus gentes, livre IV, chap. 13.2 (Arnobio di Sicca, Difesa della vera religione contro i pagani, testo latino – italiano, traduzione italiana a cura di Biagio Amata, Roma : LAS, 2012, p. 449 ; e´d. Orellius, p. 144). L’exe´ge`se de BC est discutable. Le renvoi est vague chez BC, mais pre´cis dans sa source, le Dictionnaire de Bayle, qui cite (d’apre`s Amyot) le chap. 45 de De Iside et Osiride, «tant des nations barbares que des Grecs en plusieurs lieux». La variante a` la ligne 14 nomme l’article en question, «Maniche´ens» (Dictionnaire historique et critique, Amsterdam, Leide, La Haye, Utrecht : Brunel et al., 5 MDCCXL, t. III, pp. 302–307, en particulier la note C, pp. 303b–304a). Le «traite´ curieux», e´galement cite´ par Bayle, est Non posse suaviter vivi secundum Epicurum (p. 304a) : «Plutarque [...] dit formellement, que la nature de Dieu ne lui permet que de bien faire, & non pas de [...] nuire.» Bayle en de´duit «que cet Auteur ait e´te´ persuade´, [...] qu’il y avait deux Principes». Ce raisonnement, accepte´ par BC, est proble´matique. Voir Hella Adam, Plu– tarchs Schrift non posse suaviter vivi secundum Epicurum, Amsterdam : s.e´d., 1974. BC appelle Circe´ une divinite´ malfaisante. La fille d’He´lios et de Perse´e est dans la mythologie, comme Me´de´e, une magicienne. – BC re´sume dans sa note les re´flexions de

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tres ne jouent aucun roˆle dans la mythologie nationale ; ils n’ont aucune relation avec les hommes : on ne leur rend aucun culte. On n’e´tablit pas non plus des ce´re´monies pour les outrager, comme en E´gypte. Typhon, le dieu du mal, dans la croyance e´gyptienne, source de vice et de souillure, exerc¸ant sa funeste influence sur l’univers et la destine´e des hommes, devient en Gre`ce un monstre vaincu par les dieux a. Les divinite´s infernales des Grecs avaient sans doute quelque chose de malveillant et de sombre. L’analogie des ide´es attache na turellement des attributs menac¸ants et lugubres aux eˆtres qui pre´sident a` la destruction et a` la mort. Le dieu des enfers, dit Euripide b, se re´jouit de nos douleurs. Pluton se plaisait a` la vue des objets fune`bres, et dans ses feˆtes, les femmes grecques et romaines se de´chiraient les joues, et se meurtrissaient le sein c. Mais ces dieux infernaux n’agissaient point sur la terre, a` moins que ce ne fuˆt pour punir quelque grand crime (encore est-ce a` une e´poque tre`s-poste´a

b c

HOMER. Iliad. II, 78. HE´ SIOD. Theog. 820. Le Typhon e´gyptien pe´ne´tra plus tard dans la mythologie grecque. Plusieurs fables de cette mythologie en e´taient de´rive´es ; celle d’Adonis, par exemple, que Mars poursuit et tue sous la forme d’un sanglier ( LYCOPHR., 580), parce que Typhon, qu’on repre´sentait quelquefois sous cette forme, avait tue´ Osiris. Nonnus, dans ses Dionysiaques, de´crit les combats de Jupiter contre Typhon, en termes assez semblables a` ceux qu’emploient les preˆtres pour peindre la lutte des deux principes ; mais Nonnus est un mythologue tre`s-moderne, imbu d’alle´gories orientales (MOESER, Anmerk ad Nonni Dionys. VIII1). Suppl., 9232. Voss. ap. Serv. ad Æneid., III, 673.

3 comme en E´gypte. ] comme il y en avoit 〈en Perse &〉 en Egypte. Ms-texte 6 dieux. ] Dieux. ce n’est point un mauvais principe. Ms-texte 7-p. 192.2 Les divinite´s ... autres dieux. ] ajoute´ (avec les notes) dans la col. de gauche Les Di〈eux〉vin. infernales ... des ide´es conduite naturellement les hommes a` donner des attributs ... grand crime, & l’on ... dieux. Mstexte 14-p. 192.1 (encore ... poste´rieure) ] manque MC 17 Lycophr. ] Cyrill. Alex. in Ju. 21 Anmerk ] la source porte Ammerk faute de copie que nous T. II. Lycophron, Ms-notes 24 Voss. ] Varr. Ms-texte corrigeons REl4 22 VIII ] VII Ms-notes, MC

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Creuzer, Symbolik, t. IV, pp. 27–31, y compris l’ide´e de voir dans Colchis une colonie e´gyptienne, comme le prouve la variante a` la ligne 26. Il faut lire Moser. BC renvoie a` Georg Heinrich Moser, Nonni Dionysiacorum libri sex : ab octavo ad decimum tertium, res Bacchicas ante expeditionem indicam complectentes, emendavit omnium Nonni librorum argumenta et notas mythologicas adjecit Georgius Henricus Moser. Præfatus est Fridericus Creuzer, Heidelbergæ : ex Libreria Mohrii et Zimmeri academica, MDCCCIX. Le fait qu’il cite le titre en utilisant une abre´viation allemande pourrait indiquer que BC n’a pas consulte´ l’ouvrage lui-meˆme, mais qu’il copie cette re´fe´rence dans un ouvrage non identifie´. Le renvoi vise, dans la section du «Commentarius mythologicus», les observations de Moser qu’on trouve pp. 181–185. Allusion a` un vers du chœur des Suppliantes qui commente le discours d’Adrastos. «Et voici qu’Hades a recueilli le fruit de mon travail». Voir Euripide, t. III, He´racle`s, Les Suppliantes, Ion, texte e´tabli et traduit par Le´on Parmentier et Henri Gre´goire, Paris : Belles Lettres, 1976, v. 921, p. 138. Il faut lire : Varro (voir la variante). Car BC renvoie a` un passage du commentaire de

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rieure), et l’on ne voit point qu’ils perse´cutassent les mortels, plus que ne faisaient les autres dieux. He´cate est une divinite´ visiblement e´trange`re a et de plus elle cesse d’eˆtre mal faisante, lorsque, soumise a` l’action du ge´nie grec, elle emprunte les traits et le nom de Diane. a

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He´siode dit que Jupiter respecta toutes les pre´rogatives dont He´cate jouissait, avant qu’il euˆt usurpe´ l’empire. M. de Sainte-Croix, l’esprit toujours frappe´ des guerres religieuses qui avaient, si on l’en croit, substitue´ le culte de Jupiter a` celui des Titans, voit dans ce passage d’He´siode l’indication des peines a` venir re´serve´es au crime dans un autre monde par les deux religions qui se succe´de`rent1. Il est bien plus conforme a` la vraisemblance d’admettre qu’He´cate e´tait une divinite´ malfai sante, transporte´e par He´siode dans la mythologie grecque, et place´e derrie`re les divinite´s populaires (v. t. III, p. 3232), ce qui e´tait naturel, puisque celles-ci sont toujours la ge´ne´ration pre´sente. (V. tom. I, liv. I, ch. IX, 2e e´dit3.) C’est la` ce qu’He´siode exprimait, en disant que Jupiter n’avait point porte´ atteinte au pouvoir d’He´cate4. En effet, la sphe`re ou` elle e´tait rele´gue´e la mettait hors de tout contact avec les divinite´s agissantes. Elle n’est mentionne´e ni dans l’Iliade, ni dans l’Odysse´e, et son roˆle,

7–8 Sainte-Croix ... substitue´ ] Ste Croix 〈voit dans ce passage la confirmation de son hypothe`se favorite : les guerres religieuses entre les Grecs & les colonies, ayant〉 cherchant partout les traces des guerres religieuses qui avoient, si on l’en croit, substitue´ Ms-notes 10 bien 13 (V. tom. ... e´dit.) ] plus ] plus Ms-notes 12 (v. t. III, p. 323) ] manque Ms-notes, MC manque Ms-notes ; dans MC, un espace libre pour pouvoir y inscrire le nume´ro du chap. 16 divinite´s agissantes. ] la source, Rel4, porte divinie´s agissantes. divinite´s agissantes. (v. 16-p. 193.9 Elle n’est ... e´gyptienne. Son action ... Tome I. Liv. I. p. . 2de e´dit.) Ms-notes des eˆtres. ] L’action d’He´cate´ sur ... eˆtres. 〈deux mots illis.〉 He´cate n’est mentionne´e ... Egyptienne. Ms-notes

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Servius a` l’E´ne´ide : «Varro quoque dicit mulieres in exsequiis, et luctu ideo solitas ora lacerare, ut sanguine ostenso inferis satisfaciant, quare etiam institutum est, ut apud sepulcra et victimæ cædantur» (vol. I, p. 187). BC s’engage dans une discussion scientifique. Le passage de Sainte-Croix sur He´cate et Jupiter est le suivant : «Cet ancien poe`te [i.e. He´siode] ajoute que Jupiter ne retrancha a` He´cate aucune des pre´rogatives dont elle jouissoit sous le re`gne des Titans» (Recherches historiques et critiques sur les myste`res du paganisme, Seconde e´dition, revue et corrige´e par M. le baron Silvestre de Sacy, Paris : de Bure fre`res, 1817, t. I, p. 186). La the`se des guerres religieuses entre les Grecs et les colonies est expose´e dans le meˆme t. I, pp. 17–28. OCBC, Œuvres, t. XIX, p. 323, n. a. OCBC, Œuvres, t. XVII, pp. 182–213. L’argumentation de BC est assez complexe. Voici les e´le´ments essentiels. Il n’est pas e´vident que c’est He´siode qui a transplante´ He´cate de l’Asie mineure (la Carie) en Gre`ce. Home`re ne la mentionne pas (ce qui ne veut pas dire qu’il ne la connaıˆt pas). Sur les Argonautiques voir OCBC, Œuvres, t. XVIII, p. 263, n. 1. Le premier renvoi a` Creuzer, Symbolik, est faux, il ne parle pas d’He´cate dans le premier volume ; le second (Symbolik, t. II, pp. 120–122) contient des e´le´ments que BC inte`gre dans sa note ; les pages cite´es de Görres, Mythengeschichte (e´d. de 1935, pp. 128–129) font des rapprochements entre cette divinite´ et la tradition du Zendavesta. – BC cite la note 87 (pp. 45–46) de l’article sur He´cate de Martin Gottfried Hermann, Handbuch der Mythologie enthaltend die Mythen aus den Lyrischen Dichtern der Griechen, Berlin und Stettin : Friedrich Nicolai, 1790, qui donne quelques de´tails sur cette divinite´ des enfers. – Le renvoi a` Pausanias (livre II, Arcadie, chap. 30,2) est copie´ chez Creuzer qui est responsable de la fausse attribution d’une

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Le polythe´isme, sacerdotal, ou` toutes les notions, une fois rec¸ues, se maintiennent intactes, se contredisant sans se supplanter, ne permet pas a` l’intelligence qu’il opprime de re´pudier ainsi l’he´ritage des temps d’ignodans le poe`me bien plus re´cent des Argonautiques, est celui de Proserpine dans Home`re. (V. Creutz., I, 158 ; II, 120 et suiv. ; Goerr., I, 254–255 ; Hermann Handb. der Myth., II, 45 ; note 87 ; Pausan, II, 30.) Jablonski (Panth. Æg.) regarde He´cate comme la Titrambo e´gyptienne1. Son action sur la nature, ses attributs si diversifie´s, ses fonctions innombrables, sont un me´lange de physique, d’alle´gorie, de magie, et de traditions philosophiques sur la fusion des e´le´ments et la ge´ne´ration des eˆtres. Elle e´tait quelquefois repre´sente´e avec une teˆte de chien (He´sychius in α γαλμα Εκ2.) Pausanias avait vu une statue pareille faite par le ce´le`bre sculpteur Alcame`ne (PAUS, II, 30,). He´cate e´tait la nuit, et, par une extension de cette ide´e, la nuit primitive, premie`re cause ou premie`re motrice de tout. Elle e´tait la lune, et par la` se rattachaient a` elle toutes les notions accessoires, groupe´es autour de la lune : elle e´tait la de´esse qui trouble la raison des hommes, celle qui pre´side aux ce´re´monies nocturnes, et, par conse´quent, a` la magie : de la` son identite´ avec Diane pour la mythologie grecque, avec Isis pour l’e´gyptienne, et de la` aussi toutes ses qualite´s cosmogoniques, attribue´es a` Isis en E´gypte.

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1 Le polythe´isme ] a` la hauteur de ces mots, dans la col. de gauche, l’e´bauche d’un passage qui sera utilise´ plus loin ; voir ci-dessous, p. 198 Ms-texte 1–2 se maintiennent ... supplanter ] 〈subsistent〉 se maintiennent intactes, en de´pit de celles qui les contredisent sans les supplanter Ms-notes 2 se contredisant ] en de´pit de celles qui se contradisent MC 7 Son action ] l’action d’He´cate Ms-notes 9 eˆtres. Elle ] eˆtres. Elle rappelle par sa figure les Divinite´s Indiennes. elle a trois visages, trois corps, six mains. Elle est arme´e d’une e´pe´e, d’un poignard & d’un fouet. Elle tient des cordes, des flambeaux, des Clefs & une couronne. Elle a un dragon sur sa teˆte, un chien a` ses pieds. Euse`be remarque la diffe´rence de cette forme & de celle de toutes les divinite´s grecques. (Præp. ev. V. Goerr. I. 255) Elle MC ; dans la col. de gauche He´cate rappelle ... Indiennes. Elle a 3 visages, 3 corps, 6 mains. elle est arme´e ... sur la teˆte ... 255). He´cate Ms-notes 10 Pausanias ] dans la col. de gauche D’autrefois avec un triple visage. Pausanias Ms-notes 13 groupe´es autour de ] dans la col. de gauche rattache´es a Ms-notes 16–17 attribue´es ... E´gypte. ] dans la col. de gauche attache´es a` l’ide´e d’Isis en Egypte, voila` une des portions de mythologie dont se compose He´cate. Ms-notes du 5e livre, le 3e vol., p. 322–323, & tout le 17 E´gypte. ] V. sur He´cate le 2e vol. Ch. 8e livre3. MC ; dans la col. de gauche Voir sur He´cate le 3e vol. p. 322–323. note Ms-texte

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statue d’He´cate a` E´gine au sculpteur Alcame`ne. L’œuvre en question se trouvait a` Athe`nes sur l’Acropole. Voir Fernande Hölscher, Die Macht der Gottheit im Bild. Archäologische Studien zur Griechischen Götterstatue, Heidelberg : Verlag Antike, 2017, p. 194. – He´cate est mentionne´e dans les Argonautiques orphiques a` trois reprises comme une de´esse funeste. Allusion a` Jablonski, Pantheon Ægyptiorum, livre I, chap. V, § 5, p. 108. «Quod, quid quæso aliud est, quam Ægyptiace Tithrambo ?» Il renvoie a` Apule´e, Metamorphoses, livre IX : «Sive tu Ceres – seu nocturnis ululatibus horrenda Proserpina, triformi facie, larvales impetus comprimens.» La meˆme citation se trouve de´ja` chez Jablonski a` la p. 22. Le renvoi a` He´sychius d’Alexandrie (Ve ou VIe sie`cle ap. J.-C.) et son lexique (article αÍ γαλμα ëΕκα της) provient de Creuzer (Symbolik, t. II, p. 121) qui cite cette entre´e. Sur cette de´esse carienne voir Martin P. Nilsson, Geschichte der Griechischen Religion, München : Beck, 31976, t. I, pp. 722–725. BC veut renvoyer au chap. V du livre V (OCBC, Œuvres, t. XVIII, pp. 248–281, et en particulier pp. 255 et 264), a` la note a du chap. V, livre VII (OCBC, Œuvres, t. XIX, p. 323) et au livre VIII de ce meˆme volume consacre´ a` Home`re (OCBC, Œuvres, t. XIX, pp. 379–418).

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rance. Le culte des divinite´s me´chantes s’y perpe´tue, et plusieurs causes concourent a` sa prolongation. Premie`rement, il est tout simple que le meˆme dieu, qui, dans le syste`me astronomique, est le repre´sentant de l’astre des nuits, de la saison rigoureuse, ou dans la cosmogonie, celui de la destruction, devienne le mauvais principe dans la mythologie populaire a. En second lieu, les religions soumises aux preˆtres ont une difficulte´ de plus a` combattre que le polythe´isme livre´ a` lui-meˆme. Ce der nier n’a point a` concilier le respect pour la justice des dieux avec les e´ve´nements qui semblent les taxer d’injustice. Ses divinite´s une fois reconnues pour vicieuses et pour imparfaites, tout est conse´quent dans le reste du syste`me. L’homme ne recherche point pourquoi le caracte`re de ses dieux est tel qu’il se le repre´sente. Il le conc¸oit semblable au sien, et il le prend pour un fait. Mais les preˆtres disposant de la croyance ne peuvent admettre aucune imperfection dans les eˆtres dont ils sont exclusivement les interpre`tes et les ministres b. Ils commencent par donner a` leurs dispositions cruelles ou capricieuses des de´nominations honorables c. Leur se´ve´rite´ sans bornes n’est qu’une inflexible e´quite´ ; leur impitoyable jalousie est le soin qu’ils doivent a` leur propre gloire, gloire e´trange, insatiable a` la fois et minutieuse, a

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Cali et Bhavani e´taient a` la fois la lune et la force destructive ; leurs adorateurs se peignaient un croissant sur le front. Voyez sur les rapports de Cali avec Arte´mis, CREUTZ. II, 123, 1241. Les Druses sont le seul peuple qui reconnaisse positivement que Dieu est l’auteur du mal, et pour couper court aux objections, leur cate´chisme ajoute : «Le Seigneur a dit : Mes cre´atures me doivent bien compte de ce qu’elles font, mais je ne leur dois pas compte de ce que je fais2.» V. ci-dessus, liv. IX, p. 353.

4 de la saison ] a` la hauteur de ces mots, dans la col. de gauche, e´bauche d’une re´flexion et un extrait d’Eckstein La doctrine des 2 principes a tre`s bien pu prendre son origine dans la lutte des guerriers contre le preˆtres. Magie Une autre origine des divinite´s malfaisantes, mais dont nous n’avons point a` nous occuper ici, c’est la transformation des Dieux des religions de´chues en eˆtres pervers dans les religions qui succe`dent aux 1eres. «le Caucase est aujourd’hui selon ses habitans peuple´ d’esprits & de de´mons. la majeure partie ayant e´te´ convertie au christianisme, une autre a` l’Islamisme, les anciens se sont transforme´s en de´mons me´chans.» d’Eckst. XII. 4904. Ms-texte 5 ou ] 〈devienne〉 ou Ms-texte 14 peuvent admettre ] peuvent 〈dans aucun cas〉 admettre MC 20 lune ] 〈force〉 lune Ms-notes 21 un croissant ] une demie lune Msnotes 22 123, 124. ] 123–124. MC 23–26 Les Druses ... fais.» ] ajoute´ dans la col. de gauche Les Druses reconnoissent positivement dans leur Cate´chisme que Dieu ... couper aux objections leurs preˆtres ajoutent ... fais. Ms-texte 1 2 3 4

BC renvoie a` un rapprochement hypothe´tique possible, aujourd’hui abandonne´, dont parle Creuzer, Symbolik, t. II, pp. 123–124, entre Kali la terrible et Artemis. Sur le cate´chisme des Druses et la source de la citation, voir ci-dessus, p. 109, n. 1. Voir ci-dessus, p. 109. BC a lu le compte rendu d’un ouvrage de Klaproth que d’Eckstein a publie´ dans Le Catho-

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qui se complaıˆt dans les malheurs qu’elle impose et se nourrit des larmes qu’elle fait verser ; mais cela meˆme ne met pas un terme a` toutes les objections a. Les calamite´s pe`sent e´galement sur les fide`les et sur les impies. a

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Tant qu’on voudra s’en tenir a` la logique, le dilemme d’E´picure sera sans re´ponse. Ou Dieu, disait-il, peut de´truire le mal et ne le veut pas, ou il le veut et ne le peut pas, ou il ne le peut ni ne le veut, ou il le peut et le veut. S’il le veut et ne le peut pas, il est sans puissance ; s’il le peut et ne le veut pas, il est sans bonte´ ; s’il ne le veut ni ne le peut, il est a` la fois me´chant et faible ; s’il le veut et le peut, d’ou` provient le mal ? (LACTANT. de ira Dei, cap. 131.) Rien n’est plus e´vident, suivant les re`gles de la dialectique. La justice humaine doit le bonheur pour prix de la vertu. Si vous appliquez la meˆme re`gle a` la justice divine, ou le malheur doit eˆtre la preuve d’un crime cache´, ou l’existence du mal devient un proble`me insoluble. Ici e´clate de nouveau le danger de l’anthropomorphisme. Il confond la justice divine et la justice humaine. Il e´tablit entre l’eˆtre supreˆme et les hommes les rapports d’un monarque avec ses sujets. Mais si les relations sont les meˆmes, comme un monarque doit sa protection a` ceux de ses sujets qui obe´issent aux lois, Dieu doit le bonheur au juste. Certes la dette est rarement acquitte´e. Au contraire, si nous e´cartons l’anthropomorphisme, si nous concevons l’eˆtre supreˆme comme ayant marque´ pour but a` sa cre´ature, non le bonheur, mais l’ame´lioration, tout s’explique. Un nouvel horizon se de´couvre. Nous nous e´levons a` une hauteur nouvelle. Le bonheur et le malheur ne sont que des moyens : Dieu n’est point injuste en les employant. Toute autre solution de l’existence du mal est insuffisante, et ne repose que sur des sophismes. Le dualisme, la plus grossie`re de ces solutions, est encore la meilleure. Si nos lecteurs voulaient se convaincre de la ve´rite´ de ces observations, il leur suffirait de lire l’ouvrage le plus remarquable d’une e´cole a` laquelle d’ailleurs nous sommes fort oppose´s, nous voulons dire les Soire´es de St.-Pe´tersbourg, par M. de Maistre. L’auteur, doue´ d’une grande force de teˆte, d’une dialectique irre´sistible, quand il a raison, et en meˆme temps d’une e´loquence qui prend sa source dans une sensibilite´, meˆle´e de me´pris et d’amertume, comme l’est toujours celle du ge´nie, se de´bat presque avec fureur contre le dilemme que nous avons cite´, et pour y e´chapper il foudroie, et le syste`me des causes finales, et celui des lois immuables de la nature, qu’il de´clare incompatibles avec toute religion et avec tout culte : mais quand il a suffisamment tonne´ contre ces deux adversaires, il est pousse´ a` deux conclusions, l’une que la prie`re peut suspendre les re`gles ge´ne´rales qui gouvernent l’univers, l’autre que le malheur est toujours la suite du crime. Avec le premier de ces deux principes, il n’y a plus de science ; avec le second, il n’y a plus de pitie´. Le cours du soleil

4–22 Tant ... la meilleure. ] passage ajoute´ dans la col. de gauche Tant ... dilemme d’Euripide sera ... et ne le peut pas, il est faible, s’il le peut ... ne le veut pas, il est me´chant. S’il ne le peut ... ne le veut, il est ensemble & me´chant & faible. ... et le peut, d’ou` viennent les maux. (Ce dilemme est rapporte´ dans Lactance de Ira Dei cap 13.) La justice ... de la vertu. elle doit le malheur pour prix du crime. Si vous appliquez ... le bonheur au juste. S’il le lui refuse, ou c’est l’homme qui a me´rite´ ce refus ou Dieu est injuste. Mais si nous e´cartons ... bonheur, mais le perfectionnement, tout ... e´levons a` une nouvelle hauteur. Le bonheur ... meilleure. Ms-texte 9 Rien ... dialectique. ] manque MC 20 Toute autre ] Tou= tre faute de copie MC 22-p. 196.29 Si nos ... agre´able. ] manque Ms-texte, MC

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lique : «Klaproth, Voyage au Caucase et en Georgie» (t. IV, cah. XII, pp. 479–494, pp. 489– 490 pour le passage cite´). Il s’agit de Julius Klaproth, Reise in den Kaukasus und nach Georgien, unternommen in den Jahren 1807 und 1808, auf Veranstaltung der Kaiserlichen Akademie der Wissenschaften zu St. Petersburg, Halle : Waisenhaus, 1814. Lactance donne dans son ouvrage De ira Dei la forme classique de ce qu’il appelle «argumentum Epicuri» : «Deus, inquit, aut vult tollere mala, & non potest : aut potest, & non

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Il serait dangereux de les regarder toujours comme le chaˆtiment de quelque faute cache´e a. Que dirait le pontife, atteint au pied des autels de quelque infirmite´ douloureuse, ou frappe´ de quelqu’un de ces accidents que le sort re´serve, grace au ciel, a` la puissance comme a` la faiblesse ? Il faut donc assigner au mal une autre cause que la justice divine. Le mauvais prin-

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est a` la merci des invocations d’un preˆtre ou d’une femme, et l’innocent qui meurt sur la roue doit pe´rir charge´ de la re´probation de celui-la` meˆme qui connaıˆt son innocence, car il a me´rite´ son supplice par quelque forfait ignore´. Ce n’est que lorsque M. de Maistre, oubliant sa propre the´orie, est entraıˆne´ par l’e´lan de son ame hors de la sphe`re de la dialectique, lorsqu’il se re plie sur le sentiment religieux, sans essayer de le concilier avec le trafic que l’inte´reˆt sugge`re a` l’homme, c’est-a`-dire lorsqu’il abjure a` son insu l’anthropomorphisme dont il embrasse ailleurs la de´fense, ce n’est qu’alors qu’il devient sublime a` la fois et raisonnable ; ce qu’il dit, par exemple (t. I, p. 443), sur la prie`re, en la de´gageant de l’efficacite´ pue´rile qu’il lui attribuait quelques pages plus haut, et en de´crivant son effet moral sur celui qui prie, comme acte de soumission, de confiance et d’amour, est applicable a` toutes les formes religieuses et admirable dans tous les syste`mes, l’athe´isme excepte´, encore n’est-ce que l’athe´isme dogmatique, la plus e´troite et la plus pre´somptueuse de toutes les doctrines. Mais enchaıˆne´ malheureusement a` des dogmes fixes, qu’il a pour but de faire triompher, M. de Maistre ne reste pas long-temps dans cette atmosphe`re d’e´motion, de de´sinte´ressement et de purete´. Le sophiste, de´voue´ a` une forme exclusive, remplace bientoˆt l’homme religieux. La pense´e perd son e´tendue, le sentiment sa profondeur, le style son e´le´vation, sa clarte´ et sa force. M. de Maistre est pourtant de beaucoup le plus distingue´ des hommes de cette e´cole. M. de Lamennais vient apre`s lui, seul disciple digne de son maıˆtre, mais inconse´quent, jouet des vents qui soufflent tour a` tour sur son esprit, et craignant trop peu de se contredire. MM. Ferrand, de Bonald, d’Eckstein, n’ont emprunte´ de son syste`me que ce qu’il a de faux. C’est du galimatias sans verve, de l’agitation sans chaleur ; c’est dans les deux premiers une ignorance pre´somptueuse et de l’absurdite´ sans talent, dans le troisie`me une e´rudition superficielle, et un talent fausse´ par le de´sir d’eˆtre imposant et par le besoin d’eˆtre agre´able1. Les Saduce´ens, croyant que le bonheur e´tait une re´compense et le malheur une punition, conside´raient comme un acte de religion de ne pas secourir les malheureux ; inconve´nient naturel de l’ide´e de la justice divine applique´e aux e´ve´nements de cette terre.

2–3 de quelque ] 〈de quelque un mot illis.〉 d’une Ms-texte 30–33 Les Saduce´ens ... terre. ] note ajoute´e dans la col. de gauche Les Sadduce´ens ... re´compense, & les calamite´s un chatiment, regardoient comme ... applique´e temporellement. Ms-texte

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vult : aut neque vult, neque potest : aut & vult, & potest. Si vult, & non potest, imbecillis est : quod in Deum non cadit. Si potest, & non vult, inuidus : quod æque alienum a Deo. Si neque vult, neque potest, & inuidus, & imbecillus est, ideoque nec Deus. Si & vult, & potest, quod solum Deo conuenit, unde ergo sunt mala aut cur illa non tollit ?» (Lactantii Firmiani [...] De ira Dei liber I [...] e´d. Lugdun., M.D.LXXXVII, p. 645). – Dans la variante on trouve «dilemme d’Euripide», faute de copie e´vidente. Cette note est un exemple de la verve pole´mique de BC. La premie`re attaque est dirige´e contre Joseph de Maistre, un adversaire de BC depuis 1796, lorsqu’il a publie´, en re´ponse a` De la force du gouvernement actuel de la France, ses Conside´rations sur la France. Dans son ouvrage Les soire´es de Saint-Pe´tersbourg, paru en 1821, l’auteur soutient entre autres, comme dans son ouvrage De l’E´glise gallicane (1820), des positions dogmatiques d’un catholicisme traditionnel. Les paroles sur la prie`re releve´es par BC sont d’ailleurs une citation : «comme il est impossible de prier Dieu sans se mettre avec lui dans un rapport

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cipe, ou une classe de dieux faisant le mal par instinct, par nature, fournit une explication momentane´ment satisfaisante. On peut remarquer que la ne´cessite´ de cette hypothe`se devient plus pressante a` mesure que les croyances repre´sentent leurs dieux comme des eˆtres plus souverainement justes et puissants. Suivant les conclusions ne´cessaires de la raison humaine, le dogme du mauvais principe est un re´sultat ine´vitable des perfections divines, porte´es au plus haut point que l’intelligence puisse concevoir. Cette assertion est tellement vraie, que lorsque les phi losophes de la Gre`ce eurent e´te´ conduits par le progre`s des lumie`res a` rejeter les fables de la mythologie commune, pour e´purer le caracte`re des dieux, ils se rapproche`rent du dualisme. On ne peut me´connaıˆtre cette tendance dans les ouvrages des Platoniciens. Maxime de Tyr, dans son traite´ sur l’origine du mal, dit que les maux ne sauraient descendre du ciel ou` il n’y a point de natures perverses, mais qu’ils naissent pour le mal physique d’une de´pravation inhe´rente a` la matie`re, et pour le mal moral, d’une de´pravation inhe´rente a` l’ame. Cette de´pravation est une espe`ce de mauvais principe. Inde´pendamment1 de ces causes, qui ont leurs racines dans l’intelligence, des circonstances locales, des e´ve´nements particuliers ont duˆ favoriser le dualisme. Les preˆtres ont conside´re´ les guerriers qui luttaient contre eux, comme les agents des divinite´s malfaisantes. Des peuples, menace´s par des hordes avides de rapine, ont conc¸u assez naturellement la meˆme pense´e. Ils ont place´ sur leurs limites le royaume du mal. Un arbre myste´rieux se´pare les deux empires ; il couvre les enfers d’ombres e´ternelles. Les fils du jour 1 mal par ] entre ces mots une ligne avec un fragment de texte mal place´, biffe´ par BC 〈res de la raison humaine, le dogme du mauvais principe〉 ce morceau revient quelques lignes plus loin MC 5–6 les conclusions ... humaine ] les formes de notre logique Ms-texte 12 Platoniciens. ] Platoniciens, ceux de tous les Sages de l’Antiquite´ qui rendaient le plus hommage a` la justice & a` la bonte´ divine. Ms-texte 13 sauraient ] peuvent Ms-texte 17-p. 198.2 Inde´pendamment ... sacrile´ges. ] manque Ms-texte Mais inde´pendamment ... du mal, les portes des enfers. L’arbre de la sagesse, dont les racines se´parent les deux emprires de la lumie`re & des te´ne`bres s’e´le`ve entre les deux re´gions, prote´geant l’une & couvrant l’autre d’ombres e´ternelles. d’un coˆte´ sont les fils du jours, de l’autre ceux de la nuit, voisins & rivaux des premiers & renouvellant sans cesse leurs aggressions impies contre le territoire sacre´. BC pre´voit une note D’Eckst. III. 463. MC

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de soumission, de confiance et d’amour ; de manie`re qu’il y a dans la prie`re [...] une puissance purifiante dont l’effet vaut presque toujours infiniment mieux pour nous que ce que nous demandons [...] dans notre ignorance» (Œuvres comple`tes, t. III-IV, Gene`ve : Slatkine Reprints, 1979, p. 343). – En ce qui concerne Lammenais, on se reportera au tome premier de De la Religion (OCBC, Œuvres, t. XVII, p. 125–130 et 450–455). – Bonald n’est pas seulement un adversaire politique, mais aussi un de´fenseur engage´ de la foi catholique (il venait de publier en 1826 De la chre´tiente´ et du christianisme). – Ferrand est surtout un adversaire politique ; on trouve des pole´miques de BC contre cet auteur presque continuellement dans ses e´crits. Quant a` d’Eckstein, il s’agit d’une des remarques de BC contre ce publiciste qui de´noncent les opinions d’un critique incommode. ` partir de cet aline´a et jusqu’a` la fin du chapitre, le texte du manuscrit en cahiers est A profonde´ment remanie´. Le manuscrit colle´, par contre, est assez proche de la version im-

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et ceux de la nuit s’observent, s’attaquent ; et ces derniers, fre´quemment vaincus, renouvellent ne´anmoins sans cesse leurs agressions sacrile´ges1. L’impurete´ attache´e a` l’union des sexes a a probablement introduit dans la religion le dogme du mauvais principe par une autre route. La femme est toujours sa victime ou son agent, et souvent l’une et l’autre. E`ve se´duit notre premier pe`re ; le rapt de Sita par Ravana, de Rukme´ni par Sishupala, dans les deux e´pope´es indiennes2, de Kriemhild par un monstre dans les Niebelungen, montre partout la femme, coupable ou innocente, causant le carnage et la guerre, et principe fatal de tous les maux des humains. La fable de Pandore et le sujet de l’Iliade meˆme ont e´te´ rapporte´s, par un critique d’ailleurs tre`s-peu suˆr, a` ce dogme commun aux mythologies saa

V. t. I, liv. II, p. 172 et suiv., 2e e´dit3.

3–4 L’impurete´ ... route. ] manque dans Ms-texte 3 attache´e ] attache´e par les preˆtres MC 4-p. 199.2 La femme ... ignoraient. ] une e´bauche de ce passage sous forme d’un extrait d’Eckstein se lit dans Ms-texte voir ci-dessus, p. 193, la variante a` la ligne 1 Il est remarquable que dans le Dualisme, la femme figure toujours sinon comme le mauvais principe, au moins comme instrument du mauvais principe ou enleve´e par lui. Eve, Sita enleve´e par Ravana. Rukmeni, l’amante de Crishna, par Sishupala dans le Mahabarat. Chriemhild par le dragon dans les Niebelungen. de´livrer la femme en la maudissant, comme la cause des calamite´s de la terre, tel est le probleme de toutes les e´pope´es. Home`re meˆme, mais sans en concevoir le sens religieux. les liens de la femme tombent, & a` l’instant, le genre humain respire : mais affranchie de son esclavage, la femme est punie des maux qu’elle a fait naıˆtre. sauf dans Homere 6–8 le rapt ... dans les Niebelungen, pour la raison ci dessus. d’Eckst. IV. 127. Ms-texte montre partout ] Sita est enleve´e par Ravana, dans le Ramayan, Rukmeni, l’amante de Crishna, par Sishupal, dans le Maharabat, Kriemhild par le dragon dans les Niebelungen, partout MC 8-p. 199.1 causant ... rhapsodes ] cause le carnage, la guerre, la mort des he´ros qui combattent pour la conque´rir ou la de´livrer. meˆme en la de´livrant, ils la maudissent, comme source de toutes leurs fatigues & de tous leurs maux. la fable de Pandore & peut-eˆtre le sujet de l’Iliade meˆme semblent tenir a` cette mythologie Sacerdotale : mais les Rhapsodes MC 12 p. 172 et p. 2e e´d. espaces pour pouvoir y mettre les chiffres qui mansuiv., 2e e´dit. ] chap. quent MC

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prime´e. Ces particularite´s permettent d’e´tablir une chronologie approximative des te´moignages. Le manuscrit colle´ contient une nouvelle re´daction du texte en partant du manuscrit en cahiers, auquel viennent s’ajouter d’autres mate´riaux. La variante (p. 197.17-p. 198.2) donne la source des deux dernie`res phrases, dans lesquelles BC emprunte litte´ralement des formulations du baron d’Eckstein, qu’il a trouve´es dans l’article «De l’histoire» (Le Catholique, t. I, no III, mars 1826). BC cite l’e´pisode principal du Ramayana de Valmiki et un autre du Mahabharata de Vyasa, deux e´pope´es importantes de l’Inde. La variante (lignes 4–13) atteste que BC copie ces renvois chez le baron d’Eckstein qu’il de´signe par les mots «un critique d’ailleurs tre`s-peu suˆr». Il vise un passage de l’article intitule´ «De l’histoire» (Le Catholique, t. I, no II, fe´vrier 1826, pp. 169–204 ; no III, mars 1826, pp. 449–487 ; t. II, no IV, avril 1826, pp. 116–143). Le passage (cite´ aussi dans la variante aux lignes 6–8) parle de Kriemhild, d’He´le`ne de l’Iliade, de Sita et Rukmeni du Ramayana et du Mahabharata. La remarque de BC est proble´matique. OCBC, Œuvres, t. XVII, pp. 244–246.

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cerdotales : mais certainement les rhapsodes grecs, comme He´siode, avaient se´pare´ cette tradition du sens religieux qu’ils ignoraient. Ces diverses causes font du dualisme un dogme fondamental dans les religions soumises aux preˆtres. Comme Loke est le mauvais principe chez les Scandinaves a, et Typhon chez les E´gyptiens b, deux plane`tes exercent chez les Chalde´ens une influence pernicieuse c. Enfin, les Gaulois d et les a

b

c d

La fable de Loke indique la diffe´rence des deux polythe´ismes. Comme Prome´the´e, Loke est enchaıˆne´ sur un rocher. Il est, comme lui, livre´ a` des tortures toujours renaissantes. Au lieu du vautour qui de´vore le fils de Japet, un serpent verse sur le dieu du Nord un venin qui le bruˆle. (Edda, 31e fable1.) Mais dans la mythologie grecque, Prome´the´e est un dieu vaincu, un dieu ami de l’homme. Chez les Scandinaves, Loke est le mauvais principe2. Typhon e´tait l’objet d’un culte particulier dans plusieurs villes de l’E´gypte. Des temples toujours fort petits s’e´levaient a` coˆte´ des temples magnifiques des autres divinite´s. On les appelait des Typhoniums, Τυϕωνεια. Strabon, VII3. PLUT. de Is. et Osir4. HELMOLD. Chron. Slav., ch. 15. VOSS. de orig. Idol. HAGENBERG, Germ. med. Diss. 85.

2 ignoraient. ] BC pre´voit une note accroche´e a` ce mot v. d’Eckst. IV. 127. MC 3–4 Ces diverses ... Loke est ] Le Sacerdoce personnifie cette conception. Loke e´toit Ms-texte 4 Comme ] manque MC 5 et Typhon ] Typhon Ms-texte, MC 5–6 deux ... Chalde´ens ] Les Chalde´ens attribuoient a` deux planeˆtes Ms-texte, MC 6-p. 200.1 Gaulois ... Germains ] Germains ... Gaulois Ms-texte 7 La fable ] Cette fable MC 11 principe. ] principe. v. Mone, sur Loki, p. 421. MC 12–14 Typhon ... VII. ] note ajoute´e dans la col. de gauche Typhon ... l’E´gypte. ses temples ... s’e´levoient presque partout a` cote´ des ... VII. Guign. 419. 16 Voss. ] Vossius Ms-notes Ms-notes 14 VII. ] VII. Guign. 419. MC 1

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BC re´sume le re´cit de la 31e fable (Mallet, Edda, p. 224). L’hypothe`se selon laquelle Loki est le mauvais principe n’est pas formule´e dans l’Edda ; on la trouve dans les commentaires de Mallet, Edda, p. 153. La variante atteste que BC pensait accrocher a` ce mot un renvoi a` l’ouvrage de Franz Mone, Geschichte des Heidentums im nördlichen Europa, ou` se trouve un chapitre sur la mort de Baldur dans lequel Mone traite de Loki, le mauvais principe. La note sur Typhon reproduit presque litte´ralement ce qu’on lit chez Guigniaut, traduction de l’ouvrage de Creuzer, t. I, p. 419 (voir la variante qui donne la re´fe´rence. Le nom des temples de Typhon se lit, d’apre`s Strabon, Rerum geographicarum libri XVII, dans la note 3 de Guigniaut (voir l’e´d. de Casaubon de 1587, p. 560, ligne 45 «ea quæ Typhonia vocantur»). Renvoi a` la premie`re phrase du chap. 48. Les deux plane`tes me´chantes des Chalde´ens (Babyloniens) ne sont pas nomme´es chez Plutarque. On trouve leurs noms chez Ptolome´e (Tetrabiblos, 1.5) : Saturne et Mars. Le renvoi a` Helmhold est faux. Le chap. XV, «De Suein rege Danorum», de la Cronica Slavorum, ne parle pas de divinite´s me´chantes des Gallois. Il raconte la guerre de Svein, fils du roi danois Harold, pour conque´rir le royaume de son pe`re. (Helmoldi prebyteri Bozoviensis cronica Slavorum, editio secunda [...] recognovit Bernhardus Schmeidler, Hannoveræ et Lipsiæ : Impensis bibliopolii Hahniani, 1909, pp. 30–33). La chronique attribue des divinite´s me´chantes aux Slaves seulement. Voir le chap. LII. – Gerardus Joannes Vossius, De

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Germains a, et a` l’autre extre´mite´ du globe, les Mexicains b, re´ve´raient des divinite´s me´chantes. Si le panthe´isme des Indiens les a porte´s a` confondre avec l’eˆtre supreˆme la force destructive, dans la personne de Schiven, ils ont fait ne´anmoins du principe du mal un eˆtre a` part, Moı¨sasour, chef des anges rebelles, qui les entraıˆne a` la re´volte, et qui est pre´cipite´ avec eux dans l’Onderah, se´jour des te´ne`bres c : une moitie´ de la nature est soumise a` son empire d. a b

149 c d

Me´m. de l’acad. des inscript. XXIV. 3451. CÆS. de Bell. gall. VI2. Parmi leurs divinite´s malfaisantes, Tlacatecololotl occupe le premier rang ; c’est un hibou, doue´ d’intelli gence, qui se plaıˆt a` effrayer les hommes et qui leur fait du mal. Shastabade3. Quatre nuages donnent la pluie, Kambarta et Drona des pluies fe´condantes, Abarta et Pouchkara des inondations et des tempeˆtes. Sept e´le´phants portent les ames, soit au ciel, soit aux enfers. Quatre sont doux et bienveillants, trois sont malveillants et perfides. Sept serpents re`gnent sur tous les serpents. Ahanta et Karkata sont ennemis, Maha-Padnia est ami des hommes. DUBOIS, II, 50–524.

5 rebelles ] mot re´pe´te´ MC 6–7 une moitie´ ... empire. ] manque dans Ms-texte 10 et qui ] & a` leur le mot a` devrait eˆtre biffe´ Ms-note & leur MC 12–16 Quatre ... 50–52. ] la note manque Ms-texte et Ms-notes

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theologia Gentili et physiologia christiana : sive de origine ac progressu idolatriæ [...], Francofurti : Sumptibus Casparis Wæchtleri, MDCLXIII, t. I, lib. I, cap. XXXV. – Paulus Hachenberg, Germania media, Nalæ Magdeburgicæ : Officina Libraria Rengeriana, MDCCIX, «Dissertatio historica octava, De religione gentili veterum germanorum», pp. 177– 230, et plus particulie`rement pp. 179–180. BC s’appuie sur l’e´tude de l’abbe´ Fe´nel, «Plan syste´matique de la Religion & des dogmes des anciens Gaulois ; avec des Re´flexions sur le changement de Religion arrive´ dans les Gaules, & ensuite dans la Germanie, entre le temps de Jules Ce´sar & celui de Tacite». Me´moires de litte´rature, tire´s des registres de l’Acade´mie Royale des Inscriptions et Belles Lettres, t. XXIV, 1756, pp. 345–388. Le renvoi a` Ce´sar, De Bello gallico, vise les chap. XIV – XVIII et XXI du livre VI. Ce´sar ne parle de divinite´s me´chantes ni pour les Gaulois ni pour les Germains. BC utilise l’e´dition franc¸aise du Bhaguat-Geeta qui comprend des extraits du Shastabade. Le passage en question est celui-ci : «L’Eternel dont la connoissance, la pre´science & l’influence s’e´tendent sur toutes choses, excepte´ sur les actions des eˆtres qu’il a cre´e´s libres, vit avec autant de chagrin que de courroux, la de´fection de Moisasour, de Rhaabon, & des autres chefs des Anges. [...] L’Eternel commanda alors a` Sieb [...] de les pre´cipiter dans l’Onderah» (Le Bhaguat-Geeta, ou Dialogues de Kreeshna et d’Arjoon ; contenant un pre´cis de la religion & de la morale des Indiens, Londres, Paris : Buisson, 1787, pp. lxxxijlxxxiij). BC re´sume, en citant des phrases du texte de Dubois, une page du chap. XXI de la deuxie`me partie des Mœurs des peuples de l’Inde. Ce chapitre est consacre´ aux sciences des Brahmes. BC souligne ici le double aspect du panthe´isme indien.

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L’ide´e d’une divinite´ malfaisante n’e´tait point e´trange`re a` la religion juive a, et le christianisme lui-meˆme, toutes les fois qu’il a e´te´ mal compris, n’a pu se de´fendre d’accorder au mauvais principe une place e´minente. Les chre´tiens l’ont nomme´ le prince de ce monde, le dieu de ce sie`cle b. Les notions des Perses sont enveloppe´es, a` cet e´gard, d’assez d’obscurite´s. Ces obscurite´s tiennent a` une cause dont nous avons traite´ ci-dessus c. Le premier polythe´isme des Perses n’e´tant point une religion sacerdotale, n’admettait point de divinite´s malfaisantes par essence. Ce dogme vint de Me´die avec les mages appele´s par Cyrus : mais la doctrine des mages ne fut jamais comple`tement adopte´e par la nation. De la`, une contradiction frappante entre des auteurs presque contemporains. Les uns, Platon, He´rodote, Xe´nophon, ne parlent en aucune manie`re du dualisme des Perses. Les a

b c

On peut voir un expose´ tre`s-curieux du de´veloppement de ce dogme chez les He´breux dans le commentaire d’Eichhorn sur le Nouveau Testament, II, 159–160. E´vang. de Saint-Jean, XIV, 30 ; E´pıˆtr. aux Corinth., IV., 4. T. II., p. 182–1971.

1 L’ide´e ] BC supprime un aline´a avant ce mot et plusieurs notes 〈Le Pluton de l’Italie antique, nomme´ Juvie ou le destructeur, le Mantus des Sabins〉 texte de la note 〈Servius ad Æneid. x. 198. Mantus e´tait dans la doctrine sacerdotale une personnification de la mort, & peut eˆtre un Dieu qui conduisoit les ames de la terre aux enfers, & des enfers au Ciel comme Se´rapis. les Divinite´s qui sont malfaisantes dans la religion publique des //cultes// peuples sacerdotales, prennent fre´quemment dans la doctrine secrette un sens alle´gorique qui modifie leur caracte`re. Ainsi le Dieu de la destruction, me´chant par sa nature dans l’opinion populaire, ne l’est que par ne´cessitie´ dans le systeˆme cosmogonique, & souvent meˆme il devient un eˆtre bienfaisant, en ce sens qu’il pre´side aux renaissances. Mais le peuple s’inquie`te peu de ces subtilite´s, & quand ses preˆtres lui parlent du Diable, il ne s’attache qu’au sens litte´ral de leurs paroles.〉 suite du texte principal 〈le Sabinus Etrusque〉 note 〈Anys ap. Lyd. p. 68.〉 suite du texte 〈ont plusieurs traits de ressemblance avec le Typhon d’Egypte.〉 note 〈Creutz. Symbol. II. 478. 1ere e´d. allem2.〉 Ms-texte et Ms-notes 1–2 L’ide´e ... juive. ] phrase ajoute´e dans la col. de gauche Ms-texte ; on la retrouve aussi au de´but du texte de la note 〈& l’ide´e ... malfesant n’est ... Juive.〉 Ms-notes 2–3 compris, n’a pu ] compris & rabaisse´ jusqu’aux formes de la logique & aux conceptions de l’esprit, au lieu d’eˆtre conside´re´ comme une communication de la divinite´ avec le sentiment & avec l’ame, n’a pu Ms-texte 5-p. 202.16 Les notions ... commune. ] a` l’origine texte d’une note Ms-notes 5 Perses ... e´gard, ] Perses sur le mauvais principe sont enveloppe´es Ms-notes a` cet e´gard ] manque MC 7 n’e´tant ] 〈n’e´toit〉 n’e´tant corr. dans l’interl. MC 13–14 On peut ... 160. ] la note, pre´ce´de´e de la phrase cite´e dans la variante aux lignes 1–2, dans la col. de gauche Ms-notes 16 197. ] 197. voir aussi Goerr. 230–236. MC 1

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OCBC, Œuvres, t. XVIII, pp. 153–159. La variante atteste que BC pensait ajouter encore un renvoi a` Görres, Mythengeschichte, t. I, pp. 230–236 (pp. 118–121, e´d. de 1935). Il s’agit d’un long passage sur l’histoire de la cre´ation dans la tradition perse. Les notes pre´vues dans le passage supprime´ concernent le commentaire de Servius de l’E´ne´ide, livre X, vers 198, qui parle de la fondation de Mantoue (Servius, Commentarii, p. 561). – Lydus, De mensibus, ou` l’on trouve : «Anysius autem in libro De mensibus Februum inferum esse Thuscorum lingua ait» (e´d. Roether, p. 171). – Le passage de Creuzer, Symbolik, concerne les divinite´s des Sabins.

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autres, Eudoxe, ami de Platon et son compagnon dans ses voyages a, Aristote, The´opompe, disciple d’Isocrate, en font une mention positive et de´taille´e. Le silence d’He´rodote peut s’attribuer a` sa crainte excessive de s’expliquer indiscre`tement sur les myste`res : celui de Xe´nophon, a` ce qu’il ne connaissait de la religion perse que la partie publique : celui de Platon, a` ce qu’il ne s’est occupe´ de cette religion que fort en passant. Mais aucun historien des guerres mace´doniennes ne disant que les Perses, dans leurs revers, aient essaye´ d’apaiser Arimane, tandis que Plutarque de´crit les sacrifices terribles ce´le´bre´s en son honneur, cette circonstance nous porterait a` croire que le dogme du mauvais principe resta long-temps e´tranger a` la religion du peuple, et concentre´ dans l’ordre des mages. Sa publicite´ progressive se manifesta par la haine toujours croissante contre certains animaux nuisibles. Cette haine, d’abord particulie`re a` l’ordre sacerdotal, qui savait seul que ces animaux e´taient consacre´s au mauvais principe, se communiqua a` toutes les classes, a` mesure que le dualisme devint la croyance commune. Apre`s avoir ainsi proclame´ l’existence de dieux malfaisants, le sacerdoce sent le besoin de rassurer l’homme contre cette cre´ation qui l’e´pouvante. De-la` tour-a`-tour des fables, des promesses ou des ce´re´monies solennelles. Les fables reposent toujours sur la meˆme pense´e, essentiellement sacerdotale. La premie`re vertu de l’homme est la soumission. Les dieux le livrent au mauvais principe, pour qu’il se re´signe a` leur volonte´. C’est l’ide´e dominante du livre de Job, de l’e´pisode de Nala et Damayanti dans le Mahabarad, et surtout de l’histoire du roi Harichandra. Pre´cipite´ du troˆne, ce prince descend a` la condition de tchandala. Il enterre les morts, balaie les grands chemins, fonctions immondes que les seuls parias remplissent : sa fide`le compagne, son fils bien-aime´, expirent. Son de´sespoir ne lui arrache aucun murmure, sa confiance n’est point affaiblie ; et les dieux, apre`s ces e´preuves, le de´robant a` la puissance perverse, lui rendent non-seulement sa couronne, mais les objets che´ris dont la perte avait de´chire´ son cœur. a

V. HERMIPPE dans Diog. Laert., I, 81.

1 et son ... voyages ] manque Ms-notes 6 Mais aucun ] Il est remarquable qu’aucun Msnotes aucun MC 7 disant ] dise Ms-notes dit MC 11 mages. ] BC pre´voyait d’indiquer une source (Diog. Laert. Loc. cit.) Ms-notes 12 croissante ] la fin du mot re´pe´te´e MC 17 Apre`s ... malfaisants ] Inventeur du mauvais principe Ms-texte 19 des fables ] manque MC solennelles. ] solennelles. Ce dieu du mal peut eˆtre de´sarme´, en attendant qu’il soit vaincu. Oromaze devoit remporter une victoire de´finitive, & jusqu’alors Arimane e´toit contenu par les impre´cations des mages. MC 20–30 Les fables ... cœur. ] manque Ms-texte MC 1

Le renvoie de BC n’est pas pre´cis. Dioge`ne Lae¨rce cite souvent les Vies des philosophes de Hermippos de Smyrne, ouvrage qui est une de ses sources. En l’occurence, le passage cite´ par BC (livre I, chap. I, § 8) concerne la vie de Thale`s qui remercie les dieux de l’avoir

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Les promesses annoncent que le dieu du mal sera vaincu, et qu’en attendant on peut le de´sarmer. Oromaze doit remporter une victoire de´finitive, et jusqu’alors Arimane est contenu par les impre´cations des mages a. Mais les preˆtres laissent toujours planer sur ce myste`re le doute et l’incertitude. Nul ne sait, dit l’Edda, si Thor a tue´ le grand serpent b. Typhon, charge´ de chaıˆnes et jete´ dans un marais ou` il se cache, cherche les moyens de s’e´chapper c, et de´ja une fois il a re´ussi par l’imprudence d’Isis d. Il est donc ne´cessaire de se pre´munir sans cesse contre la divinite´ malfaisante, et les pre´cautions prises dans ce but sont de nouveaux appuis du pouvoir sacerdotal. a

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b c d

C’est la` ce qui a persuade´ a` des e´crivains d’ailleurs tre`s-judicieux, que la doctrine perse n’admettait pas le dualisme d’une manie`re absolue, mais comme forme accidentelle du the´isme. Cette doctrine, dit M. Guigniaut (p. 3221), ne s’arreˆte point au dualisme. Non, sans doute, elle ne s’y arreˆte pas, parce qu’aucune doctrine, soit religieuse, soit philosophique, ne s’arreˆte : toutes obe´issent a` la loi e´ternelle de la progression ; mais par-la` meˆme il faut reconnaıˆtre que la progression a ses e´poques, et que celle du dualisme est autre que celle ou` le the´isme vient le remplacer. Edda, 27e fable2. JABLONSKY, Panth. Æg. V, 10–223. PLUTARCH. de Is. et Os. DIOD. 1–224.

1–2 Les promesses ... de´sarmer. ] Le Dieu du mal peut eˆtre de´sarme´, en attendant qu’il soit vaincu. Ms-texte, MC 2–10 Oromaze ... sacerdotal. ] Oromaze devoit remporter ... Arimane e´toit ... se cache, me´dite ... sacerdotal. Ms-texte Oromaze devoit remporter ... Arimane e´toit ... sacerdotal. MC 6 cherche ] me´dite Ms-texte 9 prises dans ce but ] manque Ms-texte, MC 18 fable. ] fable. v. Mone, p. 208. MC, Ms-notes 20 1–22. ] I. 22. Guign. 184 & 709. Msnotes, MC

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cre´e´ homme, maˆle et Grec. Le chapitre sur Eudoxe se trouve dans le livre VIII, chap. VIII ou` il est dit qu’il a e´tudie´ chez Platon. Dioge`ne Lae¨rce cite dans ce contexte Hermippe et son ouvrage sur les Sept Sages pour louer Eudoxe d’avoir donne´ des lois aux citoyens de Cnide. La doctrine religieuse e´voque´e par BC n’est pas aborde´e par Dioge`ne Lae¨rce. Le renvoi a` Guigniaut (livre II, chap. II, «E´le´mens primitifs et dogmes fondamentaux de la religion des Perses») fausse un peu la pense´e de l’auteur qu’il cite. Celui-ci vise la dure´e limite´e du dualisme : «On voit donc que la doctrine des Perses ne s’arreˆta point au dualisme, comme nombre de savans l’ont pense´ : elle aussi, elle reconnut un principe supreˆme de la dualite´, la dure´e sans bornes, l’E´ternite´ ou l’E´ternel, Zervane Akerene, cre´ateur d’Ormuzd et d’Ahriman.» La re´flexion de Guigniaut ne parle point de l’ide´e du progre`s. Apre`s un long combat entre Thor et le grand serpent, l’Edda dit : «quelques-uns ajoutent, que Thor lanc¸a apre`s lui sa massue & qu’il lui brisa la teˆte au milieu des flots. Mais il est plus suˆr de dire qu’il vit encore dans les eaux.» Mallet, Edda, p. 207. – BC ajoute dans la variante un chapitre sur les dieux me´chants chez les Slaves (Mone, Geschichte des Heidentums im nördlichen Europa, § 44, «Die Schwarzgötter», pp. 208–212). Chez Jablonski, l’histoire de Typhon est explique´e dans le livre V, chap. II, pp. 39–111. Allusion a` Plutarque, De Iside et Osiride, chap. XIX, 358D. – BC renvoie en outre au livre I, chap. 21–22 de Diodore, qui parle de la mort d’Osiride, de la vengeance d’Isis, qui tue, avec l’aide de son fils Horus, le meurtrier de son fre`re et e´poux et re`gne ensuite sur l’E´gypte (Bibliothe`que historique, t. I, Paris : Belles Lettres, 1993, pp. 54–58, dans l’e´d. de Strasbourg, t. I, pp. 58–64).

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On peut toutefois remarquer l’effort du sentiment religieux contre un dogme qui le de´soriente et qui l’afflige. Il ne saurait admettre l’e´galite´ entre le bon et le mauvais principe. Il cherche donc a` rendre au premier la supre´matie que le dualisme lui conteste. Indra frappe de son tonnerre la montagne aimante´e, œuvre des mauvais ge´nies, et de-la` les ae´rolithes qui tombent du ciel a. Au bien seul, disent souvent les mages, appartient l’e´ternite´. Le mal est circonscrit dans le temps, et n’a qu’une dure´e passage`re b. Mais ici se pre´sente un nouvel inconve´nient. L’eˆtre e´minemment juste et bon devient le ve´ritable auteur de la malice infernale : elle n’est que son a b

As. Res. XIV, 4291. HYDE, de Rel. Pers. cap. I2. Il pre´tend que ceux des mages qui regardaient les deux principes comme e´ternels, ne formaient qu’une secte d’he´re´tiques. On la nommait Thanavea, dualite´. Ce te´moignage est, au reste, un peu suspect. Hyde arrangeait sans le vouloir les faits dans le sens le plus favorable a` son syste`me de the´isme. Creutzer, moins partial (Symbol. II, 198–199, Ire e´dit. all3.), reconnaıˆt deux doctrines chez les Perses, l’unite´, Zervan Akerene, cre´ateur d’Oromaze et d’Arimane, et le dualisme, ou Oromaze et Arimane, premiers principes e´gaux. Mais il fait de l’une de ces doctrines le secret des preˆtres, de l’autre la croyance populaire, et me´connaıˆt ainsi les fluctuations du sentiment religieux.

4–7 Indra ... passage`re. ] manque Ms-texte ; texte et note pre´sents dans MC 8 Mais ici se pre´sente ] Il rencontre alors Ms-texte 9-p. 205.2 elle n’est ... responsable. ] e´bauche ste´nographie´e dans la col. de gauche elle n’est q Son instr, & en bonne log. ce n’est pas l’instr c’est ¯ le mot. qui est resp le texte continue dans la col. de droite & l’on se demande comment le bon principe a pu cre´er le ce dernier mot re´pe´te´ en tournant la page mauvais. suit un aline´a que BC a supprime´ La difficulte´ reste insoluble, aussi longtems qu’une me´taphysique d’un ordre supe´rieur, placant l’eˆtre infini dans sa ve´ritable Sphe`re, n’adopte point pour but de la cre´ation le perfectionnement & non le bien eˆtre. Mais les religions Sacerdotales condamne´es a ne faire de la Divinite´ que l’instrument de l’ambition & de l’e´goı¨sme, & n’aspirant a` diriger l’homme que par des motifs inte´resse´s, ne trouveront jamais cette solution. Ms-texte 11–18 Hyde ... religieux. ] la note re´dige´e autrement Les Mages ne croyoient point, dit l’auteur du traite´ sur la religion des Perses (de Rel. Pers. Cap. 1) a` deux principes e´gaux, mais a` un bon principe e´ternel, & a` un mauvais principe cre´e´, & ceux qui les regardoient tous deux comme existant de toute e´ternite´ ne formoient qu’une secte d’he´re´tiques. On les nommoit 1

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BC se sert d’un passage de l’article de F. Wilford, «On the Ancient Geography of India» (Asiatick Researches, t. XIV, Calcutta, 1822, pp. 373–470), qui mentionne a` la page indique´e la le´gende de la cole`re d’Indra. Renvoi a` corriger. Hyde, Veterum Persarum et Parthorum et Medorum religionis historia (Oxonii : e Typographeo Clarendoniano, 2MDCCLX), cap. IX, «Persarum primitiva Principia duo, unum æternum, alterum creatum [...]». BC re´sume deux phrases : «Veterum Persarum Fides orthodoxa primitiva [...] posuit Unicum Boni Principium æternum, quod fuit Deus, eorum lingua dictus [...] Yezdaˆn, seu [...] Iza`d.» Puis celle-ci : «Deinde posuerunt aliud Mali Principium creatum, quod fuit [...] Ahaˆriman [...]» (p. 159). Ce qui est dit sur les dualistes se trouve dans le meˆme chapitre : «est Hæretica opinio, eaˆque ignorantium quorundam hominum qui peculiariter vocantur [...] Thanavıˆa, i. e. Dualistæ [...] Assertores seu Autores duorum principiorum» (p. 162). BC re´sume correctement les re´flexions de Creuzer, qui pourtant ne peut parler d’une fluctuation, mais postule une lutte de laquelle le bon principe sort vainqueur.

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instrument a, et, en bonne logique, ce n’est pas l’instrument, c’est le moteur qui est responsable. Expulse´ de ce poste, le sentiment religieux s’empare d’un autre, ou` sa de´faite est moins e´vidente. Le dieu dont il se plaıˆt a` concevoir la bonte´ sans bornes aussi bien que la puissance, ne saurait condamner aucune de ses cre´atures a` un malheur sans fin. Aussi le mauvais principe doit-il se re´concilier avec le principe bienfaisant b. Lors de la re´surrection ge´ne´rale, apre`s a

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b

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«Le De´mon,» dit un e´crivain tre`s-religieux (S. PHIL. Mon. des He´br. I, 1371), ne peut rien que par Dieu qui seul peut et qui lui accorde, par des vues secre`tes, un pouvoir si limite´ que ce n’est pas liberte´ dans le De´mon, mais pure obe´issance qui le fait agir. Il est l’instrument invisible des de´crets de celui qui le pre´cipita dans les enfers.» Il est curieux de voir les dualistes perses s’agiter dans ce cercle sans en pouvoir sortir. Sentant que si la lumie`re est e´ternelle et les te´ne`bres cre´e´es, les te´ne`bres sont le produit et par conse´quent le crime de la lumie`re, les uns, les Zervanites, disaient que la lumie`re avait cre´e´ Zervan, le temps, duquel Oromaze et Arimane e´taient e´mane´s, rejetant ainsi sur une seconde cause le tort dont ils pre´tendaient disculper la premie`re. Les autres faisaient venir de Dieu la lumie`re et les te´ne`bres, mais celles-ci, comme l’ombre qui suit ne´cessairement le corps. (HYD. cap. I2.) Dieu ne les a pas voulues, dit le traducteur de Creutzer, en interpre´tant leur pense´e (p. 324), mais il les a tole´re´es3. D’autres encore accusaient Arimane d’eˆtre pervers par sa volonte´, non par sa nature (Izeschne´, XXX. Ha4.). Sophismes vains, qui laissent toujours peser le reproche sur la toute-puissance, responsable, soit des eˆtres auxquels elle confie son pouvoir, soit de la ne´cessite´, mot vide de sens la` ou` il y a toute-puissance. Cette ide´e se reproduit dans certaines fables e´gyptiennes, dont nous parlent les poe`tes grecs. Typhon e´tait l’ennemi de l’harmonie. Il se plaisait a` contrarier les dieux et a` troubler l’ordonnance du monde. Herme`s, inventeur de la musique, l’ayant vaincu, lui laissa la vie :

Magiciens, & leur doctrine Thanavea, dualite´. Ce te´moignage de Hyde est un peu suspect, parce que sans le vouloir, il arrangeoit ... d’Arimane, l’autre le Dualisme ... sentiment se de´battant contre la logique. Ms-notes 6 Aussi le ] Aussi, dans plusieurs religions sacerdotales, le Ms-texte 8–22 «Le De´mon ... toute-puissance. ] cette note re´unit deux notes encore distinctes dans Ms-notes 18–19 Dieu ... tole´re´es. ] manque MC 24 e´tait ] la source porte eta Rel 4 1

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BC cite un passage (quelques coupures) de La Monarchie des He´breux, par son excellence le marquis de Saint Philippe, traduit de l’Espagnol par M. A. de Beaumarchais, La Haye : Henri Scheurleer, 1728, t. I, pp. 137–138. BC re´pe`te la meˆme faute que ci-dessus, page pre´ce´dente ; voir la n. 2. BC re´sume les raisonnements de plusieurs critiques sur le proble`me de la dualite´, et cite ici une phrase de Guigniaut qui est plus claire si on la lit dans son contexte : «Dieu qui reposait seul en lui-meˆme avant la naissance des deux principes, fit d’abord la lumie`re, et par une opposition ne´cessaire, ine´vitable, naquirent aussi les te´ne`bres. Dieu ne les a pas voulues, mais il les a tole´re´es, et cela par un motif e´minemment moral. Une carrie`re a e´te´ donne´e au mauvais principe identique avec les te´ne`bres, pour combattre et limiter son adversaire, la lumie`re ou le bon principe, afin que celui-ci, par un effort contraire, brise les limites qui lui sont oppose´es, et que l’e´nergie morale triomphe dans cette lutte glorieuse. Mais enfin toute barrie`re disparaıˆtra [...] et alors commencera un re`gne e´ternel de lumie`re sans ombre et sans tache» (Guigniaut, Religions de l’Antiquite´, t. I, pp. 324–325). Le meˆme chapitre de l’Izechne´ est cite´ ci-dessous, page suivante.

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que les me´taux bruˆlants auront purifie´ Arimane dans leur feu liquide, il se le`vera de´gage´ de toute sa corruption ante´rieure, et louant l’eˆtre cre´ateur et cet Oromaze, objet de sa longue envie, il entonnera les hymnes ce´lestes et prononcera les mots consacre´s a. Quelquefois de simples ce´re´monies tendent a` adoucir la notion importune du mauvais principe. Se´rapis e´tait confondu avec lui comme dieu du monde souterrain, de la mort, de la destruction. Pour de´sarmer sa malfaisance, on portait dans ses temples les malades, qu’on le suppliait d’e´pargner. Bientoˆt cette pratique sugge´ra une autre ide´e, celle qu’il les gue´rissait. Il devint en conse´quence un dieu bienfaisant. Il a pu en eˆtre de meˆme du Nil, divinite´ me´chante, lorsqu’avant la de´couverte de l’agriculture, ses inondations n’e´ taient que funestes, et dieu protecteur, apre`s cette de´couverte, parce qu’il fertilisait le sol cultive´. D’autres fois le sentiment religieux ne pouvant affranchir les natures divines de toute perversite´, les aime mieux capricieuses qu’essentiellement

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mais il fit de ses nerfs qu’il lui enleva, les cordes de sa lyre, contraignant ainsi ce qui est discordant a` former des accords, et ce qui est oppose´ a` l’unite´, a` concourir a` cette unite´. (PINDAR. Pyth. I, 25–31 ; Schol. ib. ; PLUT. de Is. et Os., 551.) Zendavesta, Izeschne´, XXX ; Boundehesch, p. 1042.

5–13 Quelquefois ... Nil, divinite´ ... cultive´. ] ajoute´ dans la col. de gauche Quelquefois ... a` adoucir l’ide´e du mauvais ... confondu 〈quelquefois〉 avec ... destruction. de la` 〈les un mot illis. pour〉 l espoir de le desarmer 〈de faire porter〉 en 〈fesant〉 le suppliant d epargner illis. dans son temple les malades 〈plusieurs mots illis.〉 Arrien de exped. Alex. VII. 263. bientot cette pratique amena une ... gue´rissoit. il devient ... Nil Ms-texte ; la suite du texte est e´bauche´e dans une note ; premie`re re´daction du texte Il est probable que le Nil fut la 1e`re Divinite´ malfaisante de l’Egypte, ses inondations n’e´toient que funestes, avant 〈l’invention de l’〉 la de´couverte de l’agriculture. Apre`s cette de´couverte, le Nil devint un Dieu bienfaisant. BC re´crit le texte pour arriver a` la fin de la phrase divinite´ me´chante, lorsqu’av. la decouverte de l’agriculture ses inondations n’e´taient que funestes & protecteur apre`s cette de´couverte parcequ il fertilist le sol cultiv. Ms-notes ; ce texte est litte´ralement transcrit dans MC 14-p. 207.6 D’autres fois ... nuire. ] aline´a ajoute´ dans la col. de gauche ; le texte est re´dige´ autrement ; certaines tournures reviennent dans le ms. colle´ Le sentiment religieux, re´pugnant a` l’ide´e de Divinite´s purement malfaisantes, a presque toujours tache´ d’adoucir cette notion en se creant des Divinite´s tour a` tour bienfaisantes & me´chantes. Voyez la Wila des Serbes deesse aux longs cheveux a` la robe trainante qui seme des roses en fendant les airs, tantot terrible, tantot 〈protectrice〉 tutelaire, condensant les nuages & fesant pleuvoir le sang sur les lieux the´atres ... tour a tour favorable & 〈funeste〉 fatale aux jeunes filles pour ... nuire. d’Eckst. II. 256. Ms-texte 1

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Pindare ne fait point allusion a` la fable qu’on lit chez Plutarque dans le chap. 55 de De Iside et Osiride, qui donne l’explication de ce mythe (Plutarque est la source unique) que BC reproduit ci-dessus. Chez Pindare, on ne trouve que la le´gende grecque sur Typhon, le monstre a` cent teˆtes et aux pieds forme´s de serpents, vaincu par Zeus et banni dans l’Etna. Ceci est le sujet du Izechne´, XXXe Ha (Kleuker, Zend-Avesta, t. I, p. 118) ainsi que de la fin du chap. XXXI du Boundehesch (Kleuker, Zend-Avesta, t. III, p. 115). BC cite Arriani nicomediensis Expeditionis Alexandri libri septem, livre VII, chap. 26, ou` il est question de l’oracle du Se´rapis, interroge´ sur l’utilite´ de transporter Alexandre mou-

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et constamment me´chantes. Voyez le Varouna des Indiens a ou la Wila des Serbes, dont la longue chevelure et les veˆtements a` mille replis flottent dans les airs, qui se`me des roses, mais rassemble aussi les noires nue´es ; verse le sang sur les plaines the´aˆtres de combats futurs, et tour-a`-tour propice ou fatale aux amants, se montre aux jeunes vierges, pour les conduire ou les e´garer, les aider ou leur nuire1. Le travail du sentiment religieux est donc manifeste. Il introduit dans le caracte`re des dieux malfaisants des modifications, des inconse´quences qui mitigent leurs penchants hostiles : il s’e´lance vers l’e´poque ou` ces eˆtres re´ge´ne´re´s doivent se re´unir a` la divinite´ apaise´e. Il arrache de la sorte au sacerdoce des concessions plus ou moins limite´es, et place, a` coˆte´ du de´couragement, l’espe´rance, a` coˆte´ de la terreur la consolation.

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V. le 3e vol., sur la doctrine secre`te des preˆtres, p. 1692.

2–4 dont ... plaines ] De´esse aux longs cheveux, a` la robe trainante, qui se`me des roses en fendant les airs, tantot terrible, tantot tute´laire, condensant les nue´es, & fesant pleuvoir le sang sur les plaines MC 4 et ] manque MC ou ] & MC 5 montre ] montrant MC 6 nuire. ] 7–9 Le travail ... hostiles : ] Les fluctuations du BC pre´voit une note d’Eckst. II. 256. MC sentiment religieux sont ici manifestes. Ms-texte 13 V. le ... p. 169. ] manque Ms-notes Guign. p. 248 & mon 3e vol. MC

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rant dans le temple, «percontantibus deum, an melius satiusque esset Alexandrum in templum suum, ut a se curaretur, deferri, oraculum redditum, non opertere eo deferri : sed melius ei si ibi maneat fore» (e´d. J. Gronovius, Lugduni Batavorum : Petrus van der Aa, MDCCIV, p. 308). La variante atteste que BC utilise l’article du baron d’Eckstein, «Chants du peuple serbe», que celui-ci publia dans Le Catholique (t. I, no II, fe´vrier 1826, pp. 243–269 et t. II, no VI, juin 1826, pp. 373–410). Dans la paraphrase de BC reviennent les formulations d’Eckstein. Voir OCBC, Œuvres, t. XIX, p. 216. La variante montre que BC s’inspire d’un passage de Guigniaut (Religions de l’Antiquite´, t. I, p. 248) ou` il est question du dieu de la mer Varouna, passage dont BC s’e´tait de´ja` servi pour re´diger les re´flexions du livre VI, chap. V.

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La supposition d’une ou de plusieurs divinite´s malfaisantes entraıˆne d’importantes conse´quences. Ces divinite´s, essentiellement ennemies de l’homme, s’efforcent de le rendre, nonseulement malheureux, mais criminel. Elles l’entourent de pie´ges, elles dressent des embuˆches sous ses pas, elles le troublent par leurs prestiges, elles le pervertissent par leurs tentations. L’E´ternel, dit le Shastabade, permet aux Debtahs rebelles d’entrer dans ce monde pour y se´duire les cre´atures qui doivent eˆtre e´prouve´es a. Chez les E´gyptiens, les ames qui, au lieu de s’eˆtre purifie´es, s’e´taient corrompues, poussaient au mal les nouveaux corps dans lesquels elles entraient b. La mythologie grecque nous montre quelquefois les dieux instigateurs des crimes, mais pour leur inte´reˆt personnel et dans des circonstances particulie`res. L’hypothe`se d’esprits se consacrant a` tenter l’homme et a` l’entraıˆner au mal, pour le seul plaisir de le corrompre, appartient exclusivement aux religions soumises aux preˆtres. La de´monologie dont nous avons parle´ favorise le de´veloppement et l’extension de cette hypothe`se. Il faut que a b

Bhag.-Gita, Pre´f. de Wilkins, p. HERME` S TRISM. §. 102.

XCII1.

E´tablissement du texte : Manuscrits : 1.) BCU, Co 3262/1, pp. 132–135 [=Ms-texte] et Imprime´ : De la Co 3262/2, p. 86 [=Ms-notes] 2.) BCU, Co 3246, fos 37–39 [=MC] Religion, conside´re´e dans sa source, ses formes et ses de´veloppements, t. IV, Paris : Chez Pichon et Didier, e´diteurs, 1831, pp. 158–161. 5 Ces ... essentiellement ] Les Divinite´s 〈malfesantes〉 essentiellement Ms-texte 9 Shastabade ] Shasta-bade Ms-texte, MC 11 de s’eˆtre ] 〈d’eˆtres〉 de s’eˆtre Ms-texte 16 se consacrant ] qui se consacrent Ms-texte 21 §. 10. ] MC ; la source (=Rel4) porte 3. 10. faute d’imprimerie que nous corrigeons en adoptant la lec¸on de MC 1

2

BC renvoie a` la traduction franc¸aise d’un extrait du Shastah-Bade (pp. LXXIX-CXVII) ; le passage en question parle du parcours de purification des esprits rebelles (Debtah) qui habiteront dans le corps mortel des hommes. BC simplifie les de´tails de la le´gende. Le renvoi de BC n’est pas pre´cis. Il se peut qu’il pense au chap. X du livre consacre´ a` Poimandre`s, ou` l’on distingue deux sortes d’aˆmes les bonnes, qui deviennent des de´mons, et les autres reste´es mauvaises. «Mais quand l’aˆme, apre`s eˆtre entre´e dans un corps humain, reste mauvaise, elle ne gouˆte pas l’immortalite´ et ne participe pas au bien. [...] La malheureuse, se me´connaissant elle-meˆme, est asservie a` des corps e´trangers et abjects ; [...] au lieu de commander, elle obe´it» (p. 61). L’autre passage contient un re´cit de la cre´ation :

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Livre X, chapitre V – Conse´quences de ce dogme

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l’imagination occupe les eˆtres qu’elle a cre´e´s. Tant que l’homme n’existait pas, dit un the´ologien, le diable n’avait rien a` faire a. Cette supposition influe sur la morale d’une manie`re faˆcheuse. L’homme ne sait jamais si les mouvements de son cœur, les e´lans de son ame, l’activite´ de son esprit ne sont pas les suggestions d’un pouvoir malin. La science peut n’eˆtre qu’une curiosite´ criminelle, le te´moignage satisfaisant d’une conscience pure un orgueil condamnable b, la pitie´ une re´volte contre les de´crets de la providence. Ce pe´ril plane sur les teˆtes les plus innocentes, et menace les intentions les plus droites. Il est d’autant plus ine´vitable, que les divinite´s corruptrices sont reveˆtues souvent de formes charmantes. Mohammaya, l’illusion perfide, est pare´e des attraits les plus se´duisants. La figure de Loke est pleine

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«Donec crearetur homo, non erat pro diabolo opus in mundo agendum.» (HYDE, de Rel. pers., cap. 3, p. 811.) Ainsi apre`s avoir cre´e´ le diable pour expliquer le malheur de l’homme, les the´ologiens ont imagine´ que Dieu avait cre´e´ l’homme pour donner de l’occupation au diable. On connaıˆt l’anecdote de l’ami de saint Bruno, damne´ pour s’eˆtre fe´licite´ en mourant d’avoir mene´ une vie irre´prochable2.

7 orgueil ] 〈mouvement〉 orgueil MC 11 charmantes ] se´duisantes Ms-texte, MC 11–12 Mohammaya ... se´duisants. ] ajoute´ dans la col. de gauche, sous la forme d’une note Mohammaya ... se´duisans. Guign. 197. Ms-texte ; dans MC, BC accroche a` cette phrase une note Guign. 1973.

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«les aˆmes, nouvellement enchaıˆne´es et ne supportant pas leur opprobre, voulaient rivaliser avec les Dieux ce´lestes, et fie`res de leur noble origine, se vantant d’avoir le meˆme cre´ateur qu’eux, se re´voltaient, et prenant les hommes pour instruments, les opposaient les uns aux autres et suscitaient des guerres intestines» (p. 195). Nous citons Herme`s Trisme´giste, traduction comple`te pre´ce´de´e d’une e´tude sur l’origine des livres herme´tiques par Louis Me´nard, Paris : Didier, 1867. BC cite une phrase de l’ouvrage de Hyde, Historia Religionis veterum Persarum, eorumque magorum, chap. III, «Disquiritur quænam qualisque fuerit veterum Persarum Religio». Son commentaire vise les re´flexions de Hyde qui suivent la phrase cite´e. BC e´voque une tradition le´gendaire qui se trouve parfois dans les re´cits de la vie de St. Bruno, le fondateur de l’ordre des chartreux. Le renvoi a` Guigniaut qu’on trouve dans la variante vise un petit aline´a qui raconte, avec plus de de´tails, la le´gende que BC re´sume dans sa note. La divinite´ se´duisante, «la fausse beaute´», s’appelle chez Guigniaut Mohani-Maya. «On la repre´sente mollement balance´e sur les flots de la mer de lait, d’ou` elle est sortie, et pare´e de tous les attraits les plus ravissants». Le nom que BC donne a` la de´esse est sans doute une faute de copie.

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de grace. Bien qu’Arimane soit hideux lui-meˆme a, Dsye´, mauvais ge´nie a` sa suite, est un adolescent d’une beaute´ sans de´faut ; et les couleurs e´clatantes du serpent captivent les yeux, son e´loquence charme les oreilles b. Dans cette doctrine, tout est danger, tout est pie´ge de la part de la divinite´ meˆme. Les meilleurs sentiments, les passions les plus nobles sont une source de doutes et de terreurs : et c’est au sacerdoce a` calmer ces terreurs et a` lever ces doutes.

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b

Boundehesch, ch. 3 ; Kleuker Anhang zum Zendavesta, II, 3, 1721. En revanche, les divinite´s bienfaisantes, dans les religions sacerdotales, prennent quelquefois des figures terribles. Dans un bas-relief qu’on voit au muse´e du Vatican, a` Rome, les furies sont belles et jeunes. On ne reconnaıˆt leur mission terrible qu’aux serpents qui sont entrelace´s avec leurs cheveux et aux torches qu’elles tiennent en main. Mais dans la mythologie grecque, les furies ne sont pas des divinite´s malfaisantes, ce sont des divinite´s vengeresses2.

1 grace ] 〈charme〉 grace Ms-texte 1–2 Bien qu’ ... suite ] Dsye´, mauvais ge´nie a` la suite d’Arimane, Ms-texte 4 Dans cette doctrine ] Ainsi dans la doctrine des preˆtres Ms-texte, MC 8–10 En revanche ... terribles. ] en revanche ... terribles, pour combattre les Dieux me´chans. Mayer. art. Dschikschid dans la col. de gauche de Ms-texte 9–10 terribles. ] terribles. v. Mayer, Art. Dschikschid3. MC 11–14 Dans ... vengeresses. ] dans la col. de gauche Dans ... en main. Mais aussi les furies ... malfaisantes, mais des divinite´s vengeresses. Ms-texte ; note pre´vue dans MC, mais le papillon avec le texte est perdu

1 2 3

Voir Kleuker, Zend-Avesta, t. III, Boundehesch, chap. III, pp. 64–65 et Anhang zum ZendAvesta, t. II, 3, p. 175, la note 342. La source de cet argument n’a pas e´te´ e´lucide´e. BC renvoie a` Majer, Mythologisches Lexicon, article «Dshikdshid», t. I, pp. 549–551. Il pense a` la description de la divinite´ terrible Dschikdschid, pp. 550–551, et a` l’illustration (no 18) a` la fin du volume.

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Livre X, chapitre VI – De la notion d’une chute primitive

Chapitre VI. De la notion d’une chute primitive a.

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Pour peu que l’homme rentre en lui-meˆme, il est averti de sa double tendance et de la lutte constante qu’il soutient dans son propre cœur, the´aˆtre de combats toujours renaissants, dont il est spectateur surpris et mise´rable victime. En vain travaille-t-il a` re´tablir une harmonie dont il n’est point destine´ a` jouir sur la terre. Tandis qu’il s’abandonne a` l’une de ses moitie´s discordantes, il ne saurait imposer silence a` l’autre. L’innocent succombe a` la tentation, le coupable au remords. L’opposition du bien et du mal, dans l’univers exte´rieur, a donne´ lieu au dogme du mauvais principe. L’opposition du bien et du mal, dans l’inte´rieur de l’homme, a donne´ lieu a` l’ide´e d’une chute, d’une transgression, d’un pe´che´ originel. Nous en trouvons des traces dans toutes les mythologies. Elles nous parlent toutes d’une faute, dont la souillure s’est transmise du premier individu de la race humaine jusqu’a` la ge´ne´ration pre´sente, ou meˆme d’un crime qui, ayant pre´ce´de´ la cre´ation, explique notre de´pravation et justifie notre mise`re actuelle. a

V. pour le germe de cette notion, t. I, p. 1641. E´tablissement du texte : Manuscrits : 1.) BCU, Co 3262/1, pp. 136–140 [=Ms-texte] et Co 3262/2, pp. 86–89 [=Ms-notes] 2.) BCU, Co 3246, fos 40–45 [=MC] Imprime´ : De la Religion, conside´re´e dans sa source, ses formes et ses de´veloppements, t. IV, Paris : Chez Pichon et Didier, e´diteurs, 1831, pp. 162–167.

2 primitive. ] primitive ou d’un pe´che´ originel. a` la hauteur du titre, dans la col. de gauche, l’e´bauche d’un texte qui passera partiellement dans la note a ; voir ci-dessous, p. suivante, la variante aux lignes 13–28 v. pour la Chute primitive Guigniaud. p. 279–280 & nommement pour les Perses p. 7072. l’ame ... Dubois. II. 85. ce dernier passage est suivi d’une observation sur la chute primitive L’ide´e d’une chute est si naturellement sugge´re´e a` l’home par la mise`re de ce monde qu’il l’applique tantot a` lui-meˆme, tantot a` Dieu, tantot aux anges. Les anges en se degradant & surtout par l’union des sexes deviennent des hommes. Tibet. Ms-texte 3 est averti de ] il remarque Ms-texte 4 lutte ] lutte 〈qu’il〉 Ms-texte 6 re´tablir ] re´tablir 〈en lui meˆme〉 Ms-texte 9–10 dans l’univers exte´rieur ] dans 〈l’inte´rieur de l’homme, a donc〉 l’univers exte´rieur BC se corrige MC 17 V. pour ... 164. ] la note manque Ms-texte et Msnotes 1 2

Le renvoi vise le t. I de De la Religion, livre I, chap. IX, qui commence a` cette page. Voir OCBC, Œuvres, t. XVII, pp. 182–213, et plus particulie`rement p. 199, lignes 15–23. Renvoi a` un passage du livre premier, chap. V sur la religion de l’Inde, et aux re´flexions de Guigniaut sur la religion perse (note 5, livre II, chap. II, pp. 707–708).

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Ce n’est toutefois que dans les religions sacerdotales que cette hypothe`se acquiert de l’importance et de la dure´e. Sans doute cette notion pe´ne´tra dans les syste`mes philosophiques des Grecs. Les disciples d’Orphe´e, dit Platon a, appelaient le corps une prison, parce que l’ame y est dans un e´tat de punition, jusqu’a` ce qu’elle ait expie´ les fautes qu’elle a commises dans le ciel : et la meˆme hypothe`se fut rec¸ue dans les myste`res, empreints des doctrines e´trange`res ; mais dans la croyance publique, cette opinion ne se reconnaıˆt qu’a` quelques traces assez confuses. La fable de Pandore et celle des quatre aˆges du monde dont l’ide´e premie`re fut transporte´e de l’Orient en Gre`ce b, ne se lient au culte populaire que par des traditions qui ne les modifient en rien. Les expiations n’e´ taient en usage que pour les crimes commis directement par les expie´s, et sans a

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b

Dans le Cratyle. Les ames qui s’abandonnent aux plaisirs des sens, dit-il aussi dans le Phe´don, restent sur la terre et entrent dans de nouveaux corps : celles qui ont travaille´ a` se de´gager de toute souillure se retirent apre`s la mort dans un lieu invisible. La`, continue-t-il dans le second Time´e, le pur s’unit au pur, le bon a` son semblable, et notre essence immortelle a` l’essence divine. Voyez encore l’alle´gorie du re`gne de Saturne dans le dialogue du Politique. Les Indiens s’expriment presque dans les meˆmes termes. L’ame unie a` un corps, disent-ils, est emprisonne´e dans l’ignorance et le pe´che´, comme une grenouille dans la gueule d’un serpent, jusqu’a` ce que par la pratique de la contemplation et de la pe´nitence, elles se re´unissent de nouveau et pour toujours a` la divinite´ (DUBOIS, II, 851). La diffe´rence entre les doctrines philosophiques et les syste`mes religieux, c’est que d’ordinaire les philosophes ne supposent pas que, pour l’expiation du genre humain, l’assistance divine soit autrement ne´cessaire que comme prote´geant la vertu, l’encourageant, et donnant a` l’homme la force de re´sister a` la tentation, tandis que les religions sacerdotales imaginent une assistance divine, d’une nature toute myste´rieuse, dans laquelle l’homme n’a aucun me´rite, puisque la divinite´ se charge de l’expiation vis-a`-vis d’elle-meˆme. V. plus bas le chapitre sur la saintete´ de la douleur, liv. XI. L’aˆge d’or, d’airain, d’argent et de fer, se reproduit au Tibet (PALLAS, Sammlung, etc2.).

3-p. 213.3 Sans doute ... des dieux. ] ce passage se trouve dans Ms-texte a` la fin du chap. Cette notion pe´ne´tra ... naturelle. Les Grecs, 〈livre´s a` leurs propres re´flexions, sans l’intervention du Sacerdoce,〉 ne furent ... des Dieux. Ms-texte 13–28 Dans le ... liv. XI. ] le texte de la note plusieurs fois remanie´ In Cratyle. Les ames ... de´gager de toutes souillures ... Politique. Ms-notes, note 204 Les Indiens ... termes. cette phrase manque dans Ms-texte et Ms-notes L’ame unie ... disent les Indiens, est ... pe´nitence, elle se re´unisse ... II. 85.) ce dernier passage dans la col. de gauche, Ms-texte ; la suite de la note dans Ms-notes, note 204 La Diffe´rence ... plus bas le chap. du livre suivant.) Ms-notes 28 sur ... douleur, ] pre´cision qui manque dans MC 1

2

BC cite presque litte´ralement un passage du chap. XXIII de la deuxie`me partie de Mœurs des peuples de l’Inde. Il est consacre´ a` la philosophie des Brahmes. BC souligne ici le paralle`le entre la pense´e (ne´o-)platonicienne et les ide´es des Brahmes. Pallas ne parle pas des quatre aˆges du monde, mais explique dans le chap. III de la premie`re partie intitule´ «Bevölkerung und Perioden unseres Weltsystems, Veränderungen desselben und des Menschengeschlechts» que le sort du genre humain suit un sche´ma de la de´cadence en quatre e´tapes qui sera suivie d’un retour graduel vers l’e´tat primitif et le bonheur initial (p. 19 et pp. 30–35).

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rapport avec un crime ante´rieur ou une de´pravation naturelle. Les Grecs ne furent conduits par le spectacle des maux de la condition humaine, qu’a` en conclure la jalousie et les passions des dieux. Dans tous les climats, au contraire, ou` l’empire the´ocratique s’affermit de bonne heure a, les hommes, ne pouvant concilier leurs souffrances et l’e´quite´ divine, imagine`rent un de´lit, soit ante´rieur a` notre race b, soit le´gue´ par son premier pe`re a` ses malheureux enfants c, soit commis par eux dans une autre sphe`re et une vie pre´ce´dente d. a

b

c d

V. pour l’Inde, la pre´face anglaise du Bhaguat-Gita, p. LXXXIV1 ; pour la religion lamaı¨que, Turner et Pallas2. Gœrres (II, 635–6383) trace un tableau fort inge´nieux de la progression qu’a suivie dans plusieurs religions le dogme de la chute primitive. V. pour la Perse, Guign., p. 279–2804. Dans le Shastahbade, la re´bellion des Debtahs est le crime qu’ils doivent expier en animant des corps nouveaux. Au Tibet, le crime des anges, c’est l’union des sexes. Les rabbins parlent d’un penchant inne´ au mal, he´ritage d’Adam et pesant sur toute sa race. Dayamanti, dans le Mahabarat, poursuivie par la caravane que les e´le´phants ont disperse´e, s’e´crie, en cherchant la cause de son malheur : «J’ai duˆ commettre avant ma vie, dans une autre existence, quelque e´pouvantable forfait5.»

4–8 Dans tous ... pre´ce´dente. ] ce passage place´ dans Ms-texte devant l’aline´a pre´ce´dent Aux Indes, & dans tous les climats ou` ... race, soit 〈transmis〉 le´gue´ ... enfans. Ms-texte 12 279– 280. ] 279–280 lecture hypothe´tique du premier chiffre & p. 207 MC 16–18 Dayamanti ... forfait. ] la note est un extrait d’Eckstein Dayamanti, poursuivie ... s’e´crie, dans le Mahabarath, en cherchant ... malheur, sans doute, j’ai du comettre ... quelque forfait exe´crable. d’Eckst. XXV. 10. Ms-texte, col. de gauche 18 forfait.» ] forfait. D’Eckst. XXV. 10. MC 1

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The Bha˘gva˘t-Geeta˘, or Dialogues of Kre˘e˘shna˘ and A˘rjo˘o˘n ; in Eighteen Lectures ; with notes ; translated from the Original, in the Sa˘nskre˘e˘t, or Ancient Language of the Brahma˘ns, by Charles Wilkins, London : C. Nourse, 1785. BC cite la traduction franc¸aise. BC cite deux ouvrages, sources importantes sur la religion lamaı¨que. Samuel Turner, An Account of an Ambassy to the Court of the Teshoo Lama, in Tibet ; containing a Narrative of a Journey through Bootan, and Part of Tibet, [...] London : Nicol, 1800. BC vise les descriptions des manifestations religieuses qu’on trouve dans la narration du voyage. Voir p. ex. le chap. VIII de la deuxie`me partie. – Peter Simon Pallas, Sammlungen historischer Nachrichten über die Mongolischen Völkerschaften, durch P. S. Pallas, [...] St. Petersburg : gedruckt bey der Kayserlichen Akademie der Wissenschaften, 1776 u. 1801. 2 vol. Le renvoi vise un long passage de Görres, Mythengeschichte (e´d. de 1935, pp. 291–292), qui commence avec la question de la chute primitive. Il faut re´pondre a` la question «wie das Böse die Gottheit, wesentlich das Urgute, doch befleckt ; wie der Sündenfall in das ewig Reine doch gekommen» (p. 635). Et la re´ponse de Görres qui a trouve´ l’accord de BC est celle-ci : «Ein Fortschreiten in der Entwicklung dieser Dogmen [a` savoir les doctrines autour de la chute primitive] ist daher durch alle Mythen zu bemerken, aber nur das Vorherrschende wird dabei als charakteristisch in das Gesetz aufgenommen» (p. 638). Il faut lire «379–380», car c’est la` que Guigniaut parle de la doctrine d’un dieu me´diateur (Mithras) de la religion perse. La faute du renvoi est ancienne, comme on peut le voir en se reportant a` la variante de la ligne 12. La source de cette information est d’Eckstein. BC cite litte´ralement une phrase de la plainte de Damayanti (Le Catholique, t. IX, no XXV, «Nala et Damayanti», pp. 5–19, en l’occurrence p. 10). Voir la variante a` la ligne 18.

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De la Religion, IV

Les preˆtres ont un puissant inte´reˆt a` accre´diter cette notion. Elle motive des purifications, des pe´nitences, des devoirs myste´rieux, des rigueurs non me´rite´es, impose´es a` l’homme par le dieu qui l’a place´ dans ce monde, non comme un eˆtre innocent qui a droit a` sa justice, mais comme un coupable, pour qui le malheur n’est qu’un chaˆtiment ; et le sacerdoce est l’organe, le repre´sentant de la divinite´ vengeresse. Une hypothe`se qui semble plus bizarre, mais qui s’explique, par un penchant que nous avons souvent remarque´ dans l’homme, celui d’attribuer a` ses dieux ses propres aventures, c’est la supposition d’une chute encourue par la divinite´ meˆme, en raison d’un crime qu’elle aurait commis. Saisi d’amour pour Saraswatti sa fille, Brama ne put re´sister a` ses attraits, et poursuivi des repro ches des Brames, ses cre´atures, il quitta le corps qu’il avait souille´, ou suivant une autre le´gende que transmettent les Pouranas, ce

1–6 Les preˆtres ... vengeresse. ] ce passage place´ dans Ms-texte devant l’aline´a pre´ce´dent 7-p. 215.5 Une hypothe`se ... sa faute. ] cet aline´a a e´te´ re´dige´ en utilisant un long extrait d’Eckstein qui se lit dans la col. de gauche de Ms-texte Les Ve`des pre´sentent le monde sous un point de vue expiatoire. c’est selon eux le cercle ou` se meuvent les ames dans leurs transmigrations. c’est le se´jour malheureux ou demeurent les esprits captifs. une double chute, dont les Pouranas donnent l’histoire explique, selon eux, cette conception ; Enorgueilli de la beaute´ de la cre´ation Brama tombe victime en meˆme tems de son orgueil & de sa concupiscence. Il se pre´cipite au sein de la matie`re & s’y enfonce comme dans un abyme. Il s’associe au mal identique avec la matie`re. Telle est la punition inflige´e a` Brahma par les Dieux supreˆmes qui gouvernent le monde & commandent au cre´ateur du ciel & de la terre, par Wichnou, selon les Wichnouı¨stes, & par Siva, selon les Sivaı¨tes. Il y a quelques rapports entre cette doctrine & celle de plusieurs sectes gnostiques des Maniche´ens ; la matie`re, d’apre`s leur systeˆme, e´toit le sie`ge du mal, & au dessus du Dieu cre´ateur etoit le Dieu supreˆme (ceci tient aussi a la supre´matie d’un Dieu sur les autres, & aux divinite´s malfaisantes.) La guerre des Dieux, chante´e dans les The´ogonies, guerre ante´rieure a` la cre´ation de l’homme, n’est apre`s tout que cette doctrine. De la cime des cieux, Brahma, pre´cipite´ par son orgueil, tombe au sein des enfers, dans le Naraka, ou` sa sphe`re eclatante le suit, & ou` se reproduit, en sens inverse, & dans les profondeurs du chaos, l’ordre tout entier qui re´git les choses ce´lestes. Brama e´toit cre´ateur : ce role ne lui a pas suffi ; il a voulu devenir le Dieu supreˆme & son orgueil a e´te´ chaˆtie´. Ainsi un eˆtre ce´leste tombe, entraine´ par le pe´che´ d’orgueil qui lui fait convoiter a` la fois le pouvoir souverain & la supreˆme beaute´ : l’homme le suit dans sa chute. Le Ramayan & le Mahabharat reposent sur cette double doctrine. leur donne´e principale c’est l’incarnation du principe divin, expiant la chute & de´livrant le monde. d’Eckst. XI. 198–1991. Ms-texte

1

BC utilise l’essai du baron d’Eckstein, «De la nature des e´le´mens, selon les doctrines philosophiques et religieuses de l’Inde», chap. XI, «Des e´le´mens conside´re´s sous un point de vue mythologique» (Le Catholique, t. IV, no XI, novembre 1826, pp. 192–216, et plus particulie`rement pp. 198–199).

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dieu cre´ateur enorgueilli de ses œuvres, voulut s’e´galer au dieu supreˆme dont il n’avait fait qu’accomplir la volonte´ ; mais il s’enfonc¸a dans la matie`re, entraıˆnant dans le Naraka toute la cre´ation a. Le Ramayan et le Mahabarat sont le de´veloppement de cette doctrine. Leur base est l’incarnation du principe divin, expiant sa faute. L’hypothe`se d’une chute primitive se combine facilement avec la me´tempsycose. Le passage de l’ame dans diffe´rents corps est une punition, et l’on a vu dans nos chapitres sur la composition du polythe´isme sacerdotal en E´gypte et aux Indes, la route que les ames ainsi chaˆtie´es prenaient pour expier leurs crimes et reconque´rir les cieux b.

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Cette doctrine est celle des Maniche´ens, qui plac¸aient le mal dans la matie`re, et distinguaient du dieu supreˆme le dieu cre´ateur de cette nature. CREUTZER (I, 339) a de tre`s-bonnes observations la`-dessus1.

2–3 mais ... cre´ation. ] mais pre´cipite´ au sein de la matie`re, il s’enfonca dans l’abyme de la corruption & tomba de la cime des Cieux dans le Naraka ou` il entraina la cre´ation toute entie`re. MC 5 faute. ] faute & de´livrant le monde. MC 6–10 L’hypothe`se ... cieux. ] l’e´bauche de ce passage et de la note se lit dans la col. de gauche La notion d’une chute primitive favorise celle de la me´tempsycose, & l’unit a` des systeˆmes de me´taphysique & de morale. Creutzer, I. 339, a de tre`s bonnes observations la` dessus. Ms-texte 11–12 Cette ... nature. ] Il ya quelque analogie entre cette doctrine & celle de plusieurs sectes gnostiques. Suivant les maniche´ens, la matie`re e´toit le sie`ge du mal, & au dessus du Dieu cre´ateur e´tait le Dieu supreˆme. MC

1

BC pense e´videmment a` cette phrase sur la divinite´ souffrante et mourante : «Dieses Principium [a` savoir d’une divinite´ souffrante] hat die Lehre von der Seelenwanderung zur unmittelbaren Folge ; und mit dem Satze, daß Alles ein trauriges Herabsinken von der vollkommenen Seeligkeit des göttlichen Wesens sey, ist auch der andere Satz von der allmählichen Rückkehr zu Gott verbunden» (Symbolik, t. I, p. 339). Ce passage ne se retrouve pas dans l’adaptation de l’ouvrage de Creuzer par Guigniaut.

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Chapitre VII. D’un Dieu me´diateur.

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De la Religion, IV

Livre´ sans de´fense a` l’action capricieuse et malfaisante d’eˆtres qui se plaisent a` lui nuire, victime des embuˆches que lui tendent les intelligences supe´rieures qui s’appliquent a` le tromper et a` le corrompre, ou vicie´ dans sa nature meˆme par une premie`re faute, dont le crime lui a e´te´ transmis et dont la peine lui est impose´e, l’homme tomberait dans le de´sespoir, s’il ne s’attachait a` quelque dogme, a` l’aide duquel il renoue avec la divinite´ la communication intercepte´e. Le sacerdoce qui a fait le mal, parce que ce mal e´tait dans son inte´reˆt, sent qu’il est de son inte´reˆt de fournir le reme`de. Une nouvelle combinaison s’offre a` lui, et il la met en œuvre. Une me´diation surnaturelle re´concilie le ciel avec la terre. Chez tous les peuples soumis aux preˆtres, nous rencontrons des dieux me´diateurs. Fohi remplissait cette fonction dans l’ancienne religion chinoise a, Mithras dans celle des Perses b. Plusieurs incarnations occupent la meˆme place dans la mythologie des Ina b

COUPLET et DUHALDE1. Les Perses, dit Plutarque (de Isid.), nomment Mithras, Me´sithe`s2, l’interme´diaire entre E´tablissement du texte : Manuscrits : 1.) BCU, Co 3262/1, pp. 141–144 [=Ms-texte] et Co 3262/2, pp. 89–90 [=Ms-notes] 2.) BCU, Co 3246, fos 45–47 [=MC] Imprime´ : De la Religion, conside´re´e dans sa source, ses formes et ses de´veloppements, t. IV, Paris : Chez Pichon et Didier, e´diteurs, 1831, pp. 168–170.

2 me´diateur ] a` la hauteur du titre commence dans la col. de gauche une longue re´flexion sur la puissance de la parole que BC n’utilise pas pour ce chapitre ; voir ci-dessous, p. 594 Mstexte 7 peine ] faute Ms-texte 10 est de ] est aussi de Ms-texte 14 Perses. ] Perses. 〈Janus chez les Etrusques est tour a` tour le Dieu supreˆme & un dieu secondaire, qui porte aux dieux supe´rieurs les peines des hommes & a` ceux-ci les faveurs des premiers.〉 Ms-texte 17 Isid. ] la source [=Rel 4] porte Ind. faute d’imprimerie, nous adoptons la lec¸on de MC 1

2

BC s’inspire de Görres, Mythengeschichte, t. I, pp. 152–153 ; e´d. de 1935, pp. 83–84, ou` l’on trouve des re´flexions de ce genre, mais autrement arrange´es. Görres cite e´galement Couplet, Tabula chronologica, et pense a` la partie qui re´sume les e´ve´nements pre´chre´tiens. On y trouve : «nascitur in India ex Regulo Cim fan & matre Mo ye auctor sectæ Bonzyorum & transmigrationis Pythagoricæ, Foe dictus» (Tabula chronologica Monarchiæ Sinicæ [...] ab anno ante Christum 2952, ad annum post Christum 1683, Auctore P. P. Philippo Couplet, nun primum in lucem prodit [...], Parisiis : s.e´d. : MDCLXXXVI, p. 10). Puis Görres renvoie a` Du Halde, Description ge´ographique, historique, chronologique, politique, et physique de l’empire de la Chine (Paris : Lemercier, MDCCXXXV). Le chapitre sur Fo se trouve au t. III, pp. 19–29. BC cite, d’apre`s Creuzer, Symbolik, t. II, p. 202, le terme grec dont se sert Plutarque dans le

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Livre X, chapitre VII – D’un Dieu me´diateur

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diens ; et bien que le Nord soit naturellement peu enclin aux raffinements de ce genre, Thor est quelquefois conside´re´ comme un me´diateur entre la race divine et la race humaine a. Le polythe´isme grec admet des dieux subalternes, mais non des dieux me´diateurs proprement dits. Le Prome´the´e de´livre´ d’Eschyle, trage´die perdue dont nous connaissons l’ide´e dominante, contenait a` quelques e´gards la

a

Oromaze et Arimane. Fre´d. Schlegel (Weish. der Ind., p. 129) pre´tend que Mithras e´tait l’interme´diaire entre l’homme et les deux principes. Kleucker (Anh. zum Zendavesta, III, 821) appuie l’assertion de Plutarque de plusieurs autorite´s. Le Mithras astronomique, au double visage comme Janus (CAI¨US BASSUS, ap. Lyd., p. 57), et qui e´tait tantoˆt le soleil, tantoˆt un interme´diaire entre la terre et le soleil, se ressentait de la notion religieuse : il ramenait les ames a` Dieu, en suivant la carrie`re du soleil, a` travers le zodiaque (GUIGN. 353 et 7322). MALLET, Myth. celt. p. 1273.

5 dits. ] dits. 〈L’ide´e de me´diation est une ide´e sacerdotale. Le sacerdoce, qui re´clame le monopole de l’intervention, e´tablit volontiers que dans le Ciel meˆme il y a des interme´diaires qui se chargent d’un emploi pareil au sien. Les Preˆtres ont invente´ les interme´diaires entre les Dieux & les hommes, comme les Courtisans entre le monarque & les sujets.〉 Ms-texte 6 dont ] mais dont Ms-texte 8 principes ] la source porte prncipes Rel 4 Zendavesta ] la source porte Zendaveska Rel 4 9–13 appuie ... 732). ] appuye cette 〈opinion〉 assertion de Plutarque ... autorite´s. Ces opinions diverses ont pu eˆtre combine´es. Le Mithras astronomique se ressent de la notion religieuse. Il est tantot ... le soleil. Son double visage fesoit allusion a` cette fonction comme a` plusieurs autres. (Caı¨us Bassus, ap. Lyd. p. 57.) ajout dans la col. de gauche : Mithras est l’interme´diaire incarne´, car il rame`ne les ames a` Dieu, en suivant ... 353. ib. 732. Ms-notes

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chap. 46 de De Iside et Osiride : «διοÁ καιÁ Μι θρην Πε ρσαι τοÁ ν μεσι την οÆ νομα ζουσιν». – Le renvoi a` Schlegel, Weisheit der Indier, e´galement copie´ chez Creuzer, vise le chap. 4 qui traite des deux principes, et plus particulie`rement cette phrase : «Das Gestirn des Tages, der Freund (Mithras) der Menschen, ist Mittler zwischen ihnen und der Gottheit.» BC fausse l’ide´e de Schlegel en supposant que le pronom «ihnen» de´signe les deux principes ; Schlegel pense aux «fervers», les ide´es des choses, dans un sens platonicien du terme. Le renvoi a` Kleuker, Anhang zum Zend-Avesta, vise la note 8 (t. II, 3, p. 82, entre´e 175) qui se rapporte au texte de Plutarque cite´ a` la p. 79, sous l’entre´e 168. – Le renvoi a` C. Bassus, cite´ par Lydus, vise la phrase suivante : «Cajus Bassus autem in libro De diis dæmonem (s. deum) eum esse putat constitutum in ae¨re, perque eum hominum preces perferri ad superos ad superos : quocirca biformis esse dicitur a facie et ad nos, ed ad deos conversa» (e´d. Roether, pp. 147–149). BC cite litte´ralement une phrase de Guigniaut, traduction de Creuzer, Symbolik, p. 353 (livre II, chap. IV) sur la religion perse et renvoie a` un passage de la note 8 a` ce meˆme chap. IV (pp. 732–733) qui de´veloppe les attributs de Mithras. Voir Edda ou monumens de la mythologie & de la poe´sie des anciens peuples du Nord, Gene`ve, Paris : Barde, Buisson, 31787, pp. 127–129. BC reproduit les remarques sur la 11e fable de Mallet, qui signale un rapprochement possible entre les mythologies scandinave et perse.

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De la Religion, IV

notion d’un dieu me´diateur. Hercule, fils de Jupiter et libe´rateur de Prome´the´e, re´conciliant les immortels et la race terrestre, est un interme´diaire assez semblable a` celui de plusieurs religions sacerdotales. Mais Eschyle avait emprunte´ ses traditions sur Prome´the´e de sources e´trange`res a` la religion grecque, soit par le pays, soit par la date a.

a

Nous traiterons d’Eschyle et de ses emprunts quand nous nous occuperons des tragiques grecs1.

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Voir ci-dessous, p. 425, le chapitre sur les tragiques grecs, et plus particulie`rement pp. 428– 434 sur Eschyle.

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Livre X, chapitre VIII – Des divinite´s triples ou ternaires

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Chapitre VIII. Des divinite´s triples ou ternaires.

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Ces diffe´rentes notions, encourage´es et enregistre´es par le sacerdoce, ont probablement donne´ lieu, dans presque toutes les religions qu’il a domine´es, a` ces divinite´s triples ou ternaires, qu’on y voit figurer au haut de la hie´rarchie surnaturelle a. Cette notion se reproduit chez les Indiens, sous une foule de formes varie´es. Les trois lettres de leur mot mystique correspondent a` leurs trois a

L’ide´e de la Trinite´, dit Goerres (638–641, 652–659) prend une de ses origines dans la notion du bon et du mauvais principe, et d’un dieu me´diateur. Il donne des exemples de Trinite´ dans toutes les mythologies sacerdotales1. E´tablissement du texte : Manuscrits : 1.) BCU, Co 3262/1, pp. 145–149 [=Ms-texte] et Imprime´ : De Co 3262/2, pp. 91–93 [=Ms-notes] 2.) BCU, Co 3246, fos 47–51 [=MC] la Religion, conside´re´e dans sa source, ses formes et ses de´veloppements, t. IV, Paris : Chez Pichon et Didier, e´diteurs, 1831, pp. 171–175.

7-p. 221.7 Cette notion ... triple essence. ] passage profonde´ment remanie´ en utilisant des morceaux du premier texte, des notes de lecture porte´es dans les col. de gauche et les notes des cahiers de notes La cre´ation la conservation & la destruction chez les Indiens, Ms-texte ; BC pensait ajouter une note Le mot mystique des Indiens exprime une trinite´. A est le principe cre´ateur, O le principe conservateur, M le destructeur. As. Mag. I. 852. Wagn. 180–1842. Les trois lettres correspondent aux trois Dieux, Brama, Wichnou, & Schiven. Ms-notes ; suite du texte principal & dans l’un des systeˆmes de la Perse, Ms-texte ; autre note Oromaze Brama, Mithras Wichnou, Arimane Schiven. Ms-notes ; a` cette premie`re re´daction viennent s’ajouter six notes de lecture dont on retrouve des formules et des ide´es dans le texte principal ; premie`re note Trinite´ Indienne. Guign. 176. Mithras, Dieu triple. Dionys. Areop. Epist. VII. Guign. 273. Amoun, Phthas, Osiris. Guign. 4083. Sueta Devi ou la Deesse blanche une des 3 Parcoe qui dans les Pouranas forment une trinite´ & qu’on nomme Tricala Devi. Cumari, ou la vierge Divine, sous une triple forme, ne´e sur le mont Cailasa, de la reunion des 3 Dieux. As. 1 2

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BC renvoie aux dernie`res pages de la Mythengeschichte de Görres. Son commentaire souligne un aspect seulement de la re´flexion de Görres. Il faut lire pour corriger le renvoi au Asiatisches Magazin II, p.132, note. – BC cite ensuite l’explication du mot sacre´ des Indiens, Haom ou Aom, que Wagner, Ideen zu einer allgemeinen Mythologie, expose pp. 183–184. La liste des de´mons se lit dans les pages pre´ce´dentes. Les trois entre´es de notes qui renvoient a` Guigniaut sont destine´es a` organiser le travail de re´daction. La premie`re mention concerne le de´but du chap. III consacre´ a` la religion indienne ; la deuxie`me reprend une note du chap. V sur la religion de la Perse, p. 373 (non pas 273) qui porte : «Τριτλα σιος, triplex. Dionys. Areopag., Epist. VII, 2, p. 91» (Lettre a` Polycarpe, PG 3, p. 1081,1 A ; la troisie`me est un passage du chap. II sur la religion de l’E´gypte.

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De la Religion, IV

dieux, Brama qui cre´e, Wichnou qui conserve, Schiven qui de´truit a. Celui dont le nom nous est inconnu, disent les Ve`des, s’e´veille et contemple le monde enferme´ dans son sein. Il veut le projeter au-dehors ; sa volonte´, c’est l’amour b, et la Trimourti se compose de Dieu, de l’amour et du monde. D’autres fois c’est le feu, produit de l’eˆtre e´ternel, qui est toute lumie`re, l’eau qu’engendre le feu, la terre qui s’e´le`ve sur la surface des eaux c ; ou le feu, le globe terrestre et l’air, dans lequel re´side Pradjapati, maıˆtre de a b c

WAGN. 180–184 ; As. Mag., I, 8521. Cama, l’amour, c’est l’E´ros des Orphiques2. Oupnekat3.

(suite des variantes de la page pre´ce´dente) deuxie`me note Res. XI. 1124. Trinite´ chez les Scandinaves. 1er ch. de l’Edda de Mallet5. Trinite´ des Vedes. Lui, Tad celui qui est sans nom, Dieu. il s’e´veille, il contemple dans son sein le monde intellectuel qui y est renferme´. Sidadha. il se manifeste par la volonte´ de cre´er au dehors. cette volonte´ c’est l’amour, Cama, l’Eros des Orphiques Dieu le monde l’amour Trinite´ Indienne. d’Eckst. IX. 415. troisie`me note Trinite´ dans l’Oupnekat le feu l’eau la terre. L’etre e´ternel voulant se multiplier sous diffe´rentes formes. de son eˆtre, qui est lumie`re il fit sortir le feu. le feu fit sortir l’eau de lui-meˆme. la terre parut ensuite ; ces 3 e´le´mens n’en font qu’un, la quatrie`me meˆme trinite´ se retrouve dans le 〈feu〉 soleil, la lune & l’e´clair. d’Eckst. X. 71. note On compte 3 Dieux dont les demeures sont la terre, la re´gion moyenne & le Ciel. C’est le feu, l’Air, & le soleil. Chacun d’eux se´pare´ment compose les divinite´s aux noms myste´rieux. le seigneur des cre´atures Pratjapati, re´side a` la fois dans ces trois Dieux. cinquie`me note La syllabe Om renferme chaque divinite´. Elle appartient a` Parameshthi celui qui habite la supreˆme demeure. Elle est due a` Brahme´, la vaste unite´. elle est la proprie´te´ de Deva ou de Dieu, d’Adhyatma ou de l’ame qui gouverne l’ensemble. d’autres divinite´s appartenant a` ces diverses re´gions forment autant de parties de ces trois Dieux. dans la re´alite´ cependant un seul Dieu existe, 〈illis.〉 Mahan Atma, la grande ame. Glossaire du Rig-Ve´da, ou 2de partie du Niructa . sixie`me note Trinite´ dans les loix de Manou. cap. 2. v. 78. Il n’y a que trois Dieux, dont les demeures sont la terre, le ciel ou le feu, l air ou le soleil. mais Pradjapati seigneur des creatures est la divinite´ de ces divinite´s. il est l’unite´, dans la triplicite´ de l’eˆtre unique & universel. 10 Il donne ] V. le meˆme auteur, ib. pour MsD’Eckst. XV. 5326. Ms-texte, col. de gauche notes 4 Trimourti ] la source porte Timourti faute d’imprimerie que nous corrigeons Rel 4 trinite´ MC 7 Pradjapati ] la source porte Pradjapate faute d’imprimerie Rel4 7-p. 221.1 maıˆtre ... cre´e´ ] le seigneur des cre´atures MC 10 Oupnekat. ] Oupnekat. d’Eckst. IX. 415. MC 1 2

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Voir la page pre´ce´dente, n. 2. La source de cette information est l’essai d’Eckstein, «De la nature des e´le´mens, selon les doctrines philosophiques et religieuses de l’Inde» (Le Catholique, t. III, no IX, sept. 1826, pp. 415–417), comme il ressort de la variante a` la ligne 7 de la page pre´ce´dente. La note reprend les formulations d’Eckstein. – Voir l’hymne 58 «Amour», Hymnes orphiques, Texte e´tabli et traduit par Marie-Christine Fayant, Paris : Belles Lettres, 2017, pp. 474–476. BC exploite le meˆme essai d’Eckstein (Le Catholique, t. IV, no X, oct. 1826). Voir dans les variantes la troisie`me note de BC et la variante a` la ligne 10 de cette page. BC re´sume le de´but du troisie`me chapitre de l’e´tude de Francis Wilford, «An Essay on the Sacred Isles in the West» (Asiatic Researches, t. IX, 1812). Voir ci-dessous, p. 98, n. 3. Edda ou monumens de la mythologie & de la poe´sie des anciens peuples du Nord, pp. 53– 55. BC reproduit la the`se de Mallet, p. 58, n. 3. BC re´sume dans cette sixie`me note, en utilisant les formulations de l’auteur, plusieurs pages

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tout ce qui fut cre´e´ a, et le trident de Schiven est l’emble`me de cette triple e´nergie b. Enfin les divinite´s secondaires elles-meˆmes se fondent quelquefois dans la Trimourti. Les Pouranas nous re´ve`lent la triple nature de Sue´ta-De´vi la de´esse blanche, et Coumari la vierge divine, est ne´e sur le mont Kaı¨lasa, de la re´union des trois dieux c. Chez les Perses, Oromaze est Brama, Mithras Wichnou, Arimane Schiven, et Mithras que nous avons vu le me´diateur absorbe les deux autres dans sa triple essence d. En Phe´nicie, c’est la lumie`re, le feu et la flamme ; au Tibet, le dieu supreˆme, la loi divine et l’univers, cre´e´ par ce dieu et coordonne´ par cette loi e ; en E´gypte, l’intela b c d e

Lois de Menou1. Le Trilinga2. As. Res., XI, 112. V. pour d’autres de´tails sur la trinite´ indienne, Guign[i]aut, 1763. DYONYS. AREOP. Epist. VIII4. GEORG. Alphab. tib. p. 272–2735. La trinite´ tibe´taine est quelquefois encore plus me´taphy-

1–2 le trident ... e´nergie. ] citation tire´e d’un essai d’Eckstein Le Trident de Schiven est l’embleˆme de sa triple e´nergie le Trilinga. d’Eckst. XV. 541. Ms-texte, dans la col. de gauche 3–4 Trimourti. ... Coumari ] trinite´. Sueta-De´vi, la de´esse blanche, est l’une des trois Parcoe dont les Pouranas nous re´veˆlent la triple nature, & Coumari MC 5–7 Chez les Perses ... essence. ] phrase e´bauche´e dans les cahiers de notes Oromaze Brama, Mithras Wichnou, Arimane Schiven Ms-notes 6 Mithras que ] Mithras 〈est un Dieu tri〉 que MC 7-p. 222.3 En Phe´nicie ... pre´sente ] la lumie`re, ... la flamme en Phe´nicie, le Dieu supreˆme ... par cette loi au Tibet, l’intelligence, ... l’image du monde chez les Egyptiens, le tre´pied ... adoration & qui pre´sente Ms-texte 10 Lois de Menou. ] 〈Glossaire du Rigveda, ou seconde partie du Nivata.〉 Lois de Menou. d’Eckst. XV. 532 MC 11 Trilinga. ] Trilinga. d’Eckst. XV. 541. MC 13 VIII. ] VIII. Guign. 273. MC

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de l’essai de d’Eckstein, «Du roˆle que joue le soleil dans la the´ologie de l’Inde» (Le Catholique, t. V, no XV, mars 1827, pp. 510–545, et plus particulie`rement pp. 532–533). Allusion au passage suivant : «A priest, who shall know the Ve´da, and shall pronounce to himself, both morning and evening, that syllable [a` savoir : AUM], and that holy text preceded by the three words, shall attain the sanctity which the Ve´da confers» ([W. Jones], Institutes of Hindu Law ; or the Ordinances of Menu, According to the Gloss of Callu´ca, Comprising the Indian System of Duties Religious and Civil ; Verbally translated from the Original Sanscrit, Calcutta : s.e´d., MDCCXCIV, p. 27). La source de cette information est d’Eckstein. Voir la variante a` la ligne 10 et ci-dessus, a` la page pre´ce´dente, dans l’apparat, la sixie`me note de BC. La source de cette remarque est le meˆme essai d’Eckstein. Voir la variante a` la ligne 11. Le renvoi aux Asiatic Researches, t. XI (London, 1812, pp. 11–152), vise le grand essai de F. Wilford, «An Essay on the Sacred Isles in the West, with other Essays connected with that Work», en particulier le chap. III, «Sweta´ Devı´ ; or the White Goddess» (pp. 110–131). La seconde partie de la note concerne Guigniaut, et plus particulie`rement au livre I le de´but du chap. III, «Premie`re ide´e de la cosmogonie». Il faut lire VII (ci-dessus, p. 219, la variante). La variante a` la ligne 13 confirme que BC a copie´ cette note (avec la faute) dans l’ouvrage de Guigniaut. Voir ci-dessus, p. 219, n. 3. BC cite les chap. 103 et 104, il aurait pu ajouter les chap. 105 a` 107, pp. 273–278, qui donnent des explications plus de´taille´es.

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ligence, le monde et l’image du monde, Amoun, Phthas et Osiris a. Le tre´pied, transmis aux Chinois par des traditions obscures, comme l’objet de leur plus ancienne adoration, pre´sente une Trinite´ compose´e du principe du bien, de celui du mal, et d’un me´diateur qui convertit l’un et apaise l’autre b. Toutes ces formes presque identiques, malgre´ la diversite´ des de´nominations, sont des moyens tantoˆt d’e´luder l’immutabilite´ du premier eˆtre inaccessible a` nos vœux, et pre`s duquel une me´diation nous est ne´cessaire, tantoˆt de contre-balancer la perversite´ des natures malignes, en leur opposant une puissance qui intervienne et interce`de pour nous, tantoˆt de nous relever de notre propre chute, a` l’aide d’un protecteur qui expie cette chute pour notre salut et en notre nom. Les dieux triples se re´unissent ensuite en un seul c, parce que le sentiment se plaıˆt dans l’unite´, et que la me´ditation entraıˆne l’esprit vers le panthe´isme.

a

b c

sique : l’univers cesse d’en faire partie. Elle se compose d’un dieu unique et triple, l’intelligence, le verbe et l’amour ; mais ce dieu n’en est pas moins mate´riel ; sa substance est l’eau la plus pure et la plus transparente. Cneph est l’intelligence ; l’image de Cneph est le monde ; l’image du monde est le soleil (MENS ad Mercur. § 11). Il y avait aussi une ou plusieurs trinite´s physiques chez les E´gyptiens : tantoˆt la terre, l’eau et le feu ; tantoˆt, comme en Phe´nicie, ce dernier, conside´re´ sous trois formes, la flamme, la lumie`re et la chaleur1. Voy., sur la trinite´ chez les Scandinaves, le Ier ch. de l’Edda2. Celui qui est visible et que les yeux ne voient point, s’appelle Ki ; celui qu’on comprend et que les oreilles n’entendent point, s’appelle Hi ; celui qui est sensible et que le tact n’atteint point, s’appelle Ouei. Les sens ne peuvent rien vous apprendre sur ces trois ; mais votre raison vous dira qu’ils ne sont qu’un ; la substance de Fo est une, mais il a trois images (Tchin, dans DUHALDE, III, 66)3. Il n’y a que trois dieux ; mais Pradjapati est le dieu ou` ces

10–11 expie ... nom. ] n’euˆt partage´ ni cette chute, ni les imperfections qui en re´sultent. Mstexte 15 l’univers ] l’univers 〈physique〉 Ms-notes 18 de Cneph ] de 〈l’intelligence〉 Cneph Ms-notes 19 § 11). Il ] § 11.) V. Goerres, (II. 368.) & pour les diffe´rences qu’il croit remarquer entre la trinite´ Indienne & l’Egyptienne. (Pre´f. XXVII-XXVIII). Il Ms-notes ou plusieurs ] ou 〈plusieurs〉 pour mieux dire plusieurs Ms-notes 20 dernier ] dernier e´le´ment Ms-notes 22 Edda. ] Edda de Mallet. Ms-texte, col. de gauche 27-p. 223.12 Il n’y a ... Rigveda.) ] phrase absente dans Ms-notes ; on la trouve dans Ms-texte ; voir ci-dessus, p. 220, dans l’apparat des variantes, la sixie`me note de BC 1

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Cette note paraphrase des re´flexions de Görres, dont BC traduit des phrases et cite la re´fe´rence ; comme il ressort de la variante a` la ligne 19, BC voulait annoncer les emprunts dans sa note. Voir Görres, Mythengeschichte, e´d. de 1935, pp. 189–180 et note 12 ; le passage de la pre´face cite´ dans la variante se lit pp. 11–12. BC utilise une note qu’on trouve plus complet ci-dessus, p. 220, dans l’apparat des variantes. La phrase sur Fo est la traduction d’une phrase de Görres, Mythengeschichte, t. I, p. 153 ; e´d. de 1935, p. 84, et la source, Du Halde, Description de la Chine, t. III, s’y trouve dans une note que BC cite a` son tour. Ce qui est re´sume´ dans la note c se trouve chez Du Halde

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La loi de Moı¨se, prise dans sa rigueur, et telle que son auteur l’avait promulgue´e, paraıˆt n’offrir aucune trace de trinite´ ; cependant une ide´e analogue s’introduisit chez les He´breux par leur de´monologie a. Le polythe´isme public de la Gre`ce ne connaıˆt aucune de ces subtilite´s : ses dieux lui suffisent aussi long-temps qu’il peut les ame´liorer. Quand il arrive a` la dernie`re limite de leur ame´lioration possible, il s’e´croule avec eux, sans jamais accueillir les conceptions e´trange`res que pourtant ses preˆtres appellent au secours d’une croyance ruine´e, et que ses philosophes meˆmes adoptent quelquefois comme solution de questions insolubles.

a

trois se confondent. Il est l’unite´ dans la triplicite´. (Lois de Menou, c. 2, p. 78.) La syllabe om renferme les trois dieux : mais dans la re´alite´ un seul dieu existe, Mahan-Atma, la grande ame (Glossaire du Rigveda.) Les trois E´ons, ou Aziloth, qui ont cre´e´ le monde, v. le ch. III ci-dessus et la note a` ce sujet, plus Euseb., Præp. evang. (VII, 5 ; XI, 101), et Maimmonide, Beresche Nabba2.

1–2 Moı¨se ... n’offrir ] Moyse est la seule religion sacerdotale qui n’offre Ms-texte ; a` la hauteur de cette phrase, dans la col. de gauche, l’extrait d’Eckstein utilise´ plus haut ; voir cidessus, p. 221, la variante aux lignes 1–2. 10–12 triplicite´. ... Rigveda.) ] manque, perte d’un papillon MC 13–14 Les trois ... plus ] manque Ms-notes ; les mots v. le ch. ... ce sujet e´bauche´s a` la hauteur du mot de´monologie. dans la col. de gauche v. ch. 3. Cah. (lecture hypothe´tique) 196 Ms-texte

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dans le chapitre «Dialogue ou` un philosophe chinois moderne nomme´ Tchin, esquisse son sentiment sur l’origine & l’e´tat du monde» (pp. 42–64). – Quant aux lois de Menou et autres indications relatives a` la religion de l’Inde, BC copie ce qu’il a trouve´ chez d’Eckstein. Voir ci-dessus, p. 220, note 2. Le premier renvoi a` la Pre´paration e´vange´lique vise le chap. 5 du livre VII ; ce passage n’a pas de rapport e´vident avec le sujet dont parle BC. Le second contient des hypothe`ses sur l’eˆtre «e´ternel, immuable», qui «demeure toujours dans le meˆme e´tat et se maintient identique a` lui-meˆme» (t. VI, p. 107). BC cite probablement Maimonide, Dux neutrorum (More hanevukhim), copiant sans doute la re´fe´rence dans une e´tude non identifie´e. Il faut peut-eˆtre lire «Beresche rabba». L’ide´e d’une analogie entre la de´monologie des He´breux et les the´ories trinitaires dans d’autres religions dont parle BC pourrait se de´duire de ce qui est dit dans la premie`re partie, chap. II («Jeder Kenner des Hebräischen weiß, daß das Wort [...] ‘Elohim’ homonym für Gott, für die Engel und für die Richter, welche die Staaten regieren, angewendet wird», t. I, p. 31) et dans la seconde partie, chap. VI («Du weißt aber, daß Elohim eine Bezeichnung für die Richter ist [...]. Und deshalb wurde die Bezeichnung auch auf die Engel und Gott übertragen, da Gott über die Engel Richter ist», t. II, pp. 53–54). Nous citons l’e´dition allemande de l’ouvrage, Mose Ben Maimon, Führer der Unschlüssigen, ins Deutsche übertragen und mit erklärenden Anmerkungen versehen von Dr. Adolf Weiss, Leipzig : Verlag von Felix Meiner, 1923.

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Chapitre IX. Du dogme de la destruction du monde.

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Nous avons vu, dans notre second livre a, l’effet que produit sur les notions religieuses du sauvage, le souvenir des calamite´s physiques et des bouleversements de la nature. Cet effet se prolonge chez les peuples police´s. Partout des feˆtes ou publiques ou secre`tes, des rites effrayants ou des comme´morations myste´rieuses, rappellent ces e´pouvantables catastrophes. Mais ici apparaıˆt encore une diffe´rence entre les cultes inde´pendants des preˆtres a

Tome I., pag. 225, 228, second. e´dit1. E´tablissement du texte : Manuscrits : 1.) BCU, Co 3262/1, pp. 149–162 [=Ms-texte] et Imprime´ : De Co 3262/2, pp. 93–99 [=Ms-notes] 2.) BCU, Co 3246, fos 51–61 [=MC] la Religion, conside´re´e dans sa source, ses formes et ses de´veloppements, t. IV, Paris : Chez Pichon et Didier, e´diteurs, 1831, pp. 176–188.

2 Du dogme ... monde. ] a` la hauteur du titre, dans la col. de gauche, commence un extrait d’Eckstein dont on trouve des formules ci-dessous, p. 226, n. a Transformation du dogme de la destruction du monde en systeˆme philosophique, (Inde) quelquefois Dieu repose, & le monde immortel qu’il renferme, repose avec lui. Le grand eˆtre cesse de se contempler dans l’universalite´ de ses attributs. & se concentre dans sa simple unite´. Le monde mate´riel & temporel disparaıˆt ; la cre´ation visible est rappele´e a` Dieu. Son œuvre mate´rielle cesse d’eˆtre pe´ne´tre´e du souffle ce´leste de sa puissance : il la quitte & tout ce qui e´toit mate´riel s’ane´antit. D’Eckst. IX. 414–415. Ms-texte 7 catastrophes. ] BC pre´voit une note Guign. p. 329. MC 7–8 Mais ici ] a` la hauteur de ces mots, dans la col. de gauche, commence une re´flexion sur la destruction du monde et un extrait d’Eckstein qui ne seront pas utilise´s pour la re´daction de ce chap. Le dogme de la destruction du monde, dans les Religions sacerdotales, se rattache a` celui de la cre´ation qui est tout diffe´rent dans ces religions de ce qu’il est dans les croyances populaires. Dans celles-ci, le chaos, une matie`re informe, en fermentation, cre´e par cette fermentation les Dieux, le monde, les hommes. (Ovide, encore impre´gne´ d’ide´es philosophiques poste´rieures. revoir He´siode) dans les religions sacerdotales, Dieu seul, me´ditant, se divisant, projettant hors de lui le monde partie de lui meˆme, la plupart du tems sous la forme d’un œuf. De la l’ide´e tres naturelle que le monde rentre dans son cre´ateur, ide´e favorise´e par la tendance au Panthe´isme. (revoir les 14 1ers nos du Catholique.) «La divinite´, renferme´e en elle meˆme, comme nuit myste´rieuse & lumie`re ineffable, y vit, contenant le monde arche´type. elle se manifeste enfin come cre´atrice du ciel & de la terre. son obscurite´ se me´tamorphose en eau de cre´ation, & sa lumie`re en œuf du monde. de cet œuf, nomme´ Brahmanda sort le cre´ateur lui meˆme.» D’Eckst. XV. 513–5142. Ms-texte 1 2

Il faut lire 225–228. Voir OCBC, Œuvres, t. XVII, pp. 310–311. L’ajout qu’on trouve dans la variante exploite un essai d’Eckstein, «Du roˆle que joue le soleil dans la the´ologie de l’Inde» (Le Catholique, t. V, cah. XV, mars 1827 et t. VI, no XVI, avril 1827) ; BC en copie ou re´sume plusieurs passages ; le passage ci-dessus est un montage de citations et de paraphrases.

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et ceux que le sacerdoce a fac¸onne´s. Les premiers n’ont conserve´ de ces convulsions effrayantes que des traces confuses, de´guise´es par des ce´re´monies dont le sens e´tait cache´ a. Les le´gislateurs se sont efforce´s d’e´carter des esprits l’inutile terreur d’un pe´ril ine´vitable. Les nations gouverne´es par le sacerdoce ont semble´, au contraire, prendre un triste plaisir a` se nourrir de ces souvenirs lugubres : elles les ont rattache´s souvent aux divinite´s malfaisantes qu’elles enseignaient a` redouter. Leurs rites ont e´te´ a` la fois comme´moratifs de malheurs anciens et prophe´tiques de nouveaux malheurs. Leurs feˆtes ont annonce´ le retour des e´ve´nements terribles, dont elles perpe´tuaient la me´moire. Toutes leurs mythologies nous peignent les dieux ne a

Voyez Boulanger, Antiq. de´voil. par ses usages1.

10 la me´moire. ] a` la hauteur de ces mots, dans la col. de gauche, commencent trois extraits d’Eckstein ; premier extrait C’est de moi que cet univers e´mane, dit Crishna dans le Bhavishya-Pourana ; c’est en moi qu’il s’ane´antira. d’Eckst. XV. 531. deuxie`me extrait Dans quelques passages des Ve`des, la destruction ou la mort est pre´sente´e, comme contemporaine de la cre´ation inhe´rente a` l’ide´e meˆme du tems. Cal, qui, en se succe´dant a` lui meˆme ne cesse de se de´truire. dans l’un des Oupanishads, la Divinite´ qui cre´e (l’Hiranya Garbha ou Haranguerbeha, le ventre d’or, gros de l’univers) e´prouve une faim de´vorante & engloutit la cre´ation a mesure qu’elle l’a produit. De la` une lutte entre la vie & la mort, lutte qui finit par la destruction de l’univers existant, & se renouvelle par la cre´ation d’un autre univers qui le troisie`me extrait Le demon Rahou veut boire l’amrita, l’ambroisie remplace. d’Eckst. XVI. Indienne, qui donne l’immortalite´. au moment ou Mohi, forme fe´minine de Wichnou, la pre´sente aux Dieux & aux Saints, Rahou se glisse sous la forme d’un serpent & en de´robe quelques gouttes. le soleil & la lune l’apercoivent. avertie par eux Mohini abat la teˆte du monstre mais cette teˆte est devenue immortelle par l’Amrita & Rahou poursuit, comme le Fenris des Scandinaves, le soleil pour le de´vorer. d’Eckst. XVI. 1592. Ms-texte 1

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Le renvoi a` Nicolas Antoine Boulanger, L’Antiquite´ de´voile´e par ses usages (Amsterdam : Marc Michel Rey, MDCCLXVI ; dans l’e´d. de Paris : Jean Servie`res, Jean-Frano¸is Bastien, 1792, t. I) concerne surtout le premier livre dans lequel il est question du de´luge et des fables des ge´ants. Boulanger insiste sur les tradtions confuses qui se sont maintenues en Gre`ce et dans d’autres pays de l’Orient. C’est BC qui introduit la distinction entre les religions libres et les religions sacerdotales. On pourrait pourtant signaler qu’a` la fin de l’ouvrage, on trouve des observations comme celle-ci : «On pourrait donner au re`gne des dieux le nom de re`gne des preˆtres ; en effet, c’est sous ce re`gne, que l’histoire ne nous a point fait connoıˆtre, que le sacerdoce a jette´ les fondemens de cette e´norme puissance dont on voit de´ja` les effets dans les annales des plus anciens peuples, et dont l’abus s’est fait sentir jusqu’a` nous» (e´d. de 1792, t. III, pp. 343–344). La suite des re´flexions de Boulanger a sans doute pu inspirer a` BC la recherche de ses axiomes. Les trois extraits sont tire´s de l’essai du baron d’Eckstein «Du roˆle que joue le soleil dans la the´ologie de l’Inde», Le Catholique, t. V, no XV (mars 1827), pp. 510–545 et t. VI, no XVI (avril 1827), pp. 135–185 et no XVII (mars 1827), pp. 357–390). Le premier extrait transcrit une phrase du premier chapitre, le deuxie`me re´sume un passage (pp. 138–139) du deuxie`me chapitre, et le troisie`me un autre passage du meˆme chapitre.

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re´sistant a` la force destructive que par des efforts et des ruses continuelles, et destine´s a` succomber toˆt ou tard dans la lutte. La portion scientifique et me´taphysique des religions sacerdotales donne a` cet e´gard aux preˆtres un grand avantage a. Les con naissances dont ils sont les seuls proprie´taires, leurs calculs astronomiques et l’observation des phe´nome`nes physiques, dont ils font une e´tude qu’ils se re´servent exclusivement, leur servent a` rattacher les re´volutions qu’ils pre´disent, soit au retour de ces phe´nome`nes, soit au cours des astres : leur philosophie s’y meˆle ensuite, et le panthe´isme, qui est son dernier terme, combine la destruc tion du monde avec cet eˆtre infini, immobile, inaperc¸u, inactif, qu’ils ont place´ au-dessus de tous les dieux actifs et visibles b.

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Dans la me´taphysique indienne, la destruction et la cre´ation sont une et meˆme chose. La cre´ation n’est point, comme dans le polythe´isme grec, l’effet de la se´paration du chaos, qui entre en fermentation et produit l’univers, les dieux et les hommes. Le dieu supreˆme existe seul dans son repos ineffable : il sort de ce repos, se contemple, me´dite, se divise en deux parts et projette hors de lui le monde mate´riel, partie de lui-meˆme. De la` re´sulte que lorsqu’il rentre dans son repos, lorsqu’il cesse de se contempler dans l’universalite´ de ses attributs, le monde immortel qu’il enferme en son sein, reste plonge´ dans l’unite´ myste´rieuse. Le monde mate´riel et temporel disparaıˆt : la cre´ation visible n’est plus anime´e du souffle ce´leste, et tout ce qui n’est pas Dieu s’ane´antit. C’est de moi que cet univers e´mane, dit Crishna dans le Bhavishyapourana ; et c’est en moi qu’il s’ane´antira. Dans l’un des Oupanishads, le dieu cre´ateur e´prouve une faim de´vorante, et engloutit son œuvre, aussitoˆt qu’il l’a produite. De la` une lutte constante entre la vie et la mort, lutte qui occasionne la destruction du monde existant et son remplacement par un monde nouveau. Wilson, dans son volumineux Traite´ de la poe´sie the´aˆtrale des Indiens, imprime´ a` Calcutta, en 1827, parle d’une pie`ce e´crite en rhythmes sacre´s, et repre´sentant la destruction du monde, la terre s’abıˆmant au fond des eaux, et reparaissant rajeunie et purifie´e1. Le Mah-Pirli, l’ane´antissement de l’univers, se termine, suivant le Bedang, par l’absorption de toutes choses en Dieu.

12–27 Dans ... purifie´e. ] la note est de´coupe´e dans MC

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Cette note exploite en fait deux sources : d’une part l’essai du baron d’Eckstein, «De la nature des e´le´mens selon les doctrines philosophiques et religieuses de l’Inde», en particulier le chap. II, dont on trouve dans le manuscrit en cahiers un extrait litte´ral (voir p. 225, la variante a` la ligne 10) ; d’autre part le traite´ de Horace Hayman Wilson, Select Specimens of the Theatre of the Hindus, translated from the Original Sanscrit (Calcutta : Asiatic Press, 1827). BC semble faire allusion a` un passage qu’on lit dans la premie`re partie de l’ouvrage «On the Dramatic System of the Hindus», qui analyse un type de pie`ces de the´aˆtre appele´es Samavacara (p. XXIX de l’e´d. de 1835 ; pp. XXVIII-XXIX de la traduction franc¸aise de 1828). Certains de´tails ne sont pas conformes a` ce que dit BC.

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A la fin des douze mille anne´es divines, qui sont e´gales a` quatre millions trois cent quatre-vingt-dix mille de nos anne´es, et qui composent un jour de Brama, ce dieu s’endort, et tout ce qu’il a cre´e´ disparaıˆt. A son re´veil, il cre´e de nouveau toutes les choses ; mais au bout de cent ans il meurt, et sa mort est suivie de la destruction de tous les eˆtres a. D’e´paisses te´ne`bres enveloppent le globe. Wichnou seul reste comme un point resplendissant dans l’espace. Les mers souleve´es couvrent les trois mondes. Le cheval blanc qui porte la dixie`me incarnation pose sur la terre son quatrie`me pied qu’il tient leve´ depuis le commencement des sie`cles, et dont le poids pre´cipite dans l’abıˆme la demeure des hommes. La tortue qui la soutient se retire. Le serpent dont les replis l’entouraient, Adiseschen aux mille teˆtes, vomit des flammes qui re´duisent tout en cendre. Schiven de´pose ses formes varie´es et s’agite comme un feu livide sur les ruines du monde brise´ b. a

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Les Indiens nomment ces re´volutions menwanturas. Leurs yogs, qui sont des aˆges pareils a` ceux de la mythologie grecque, se terminent par un de´luge, leurs menwanturas par un incendie universel. Plusieurs sectes indiennes comptent dix mille menwanturas. Il est vraisemblable que des calamite´s locales ont plus d’une fois accre´dite´ ces traditions. Le ge´ant Nirinache´ren, disent les bramines de Mahabalipour, voisins du lieu dit les Sept pagodes, roula la terre comme une masse informe et l’emporta dans l’abıˆme. Wichnou le poursuivit, le tua, et replac¸a la terre dans sa position primitive. D’apre`s la description des ruines de Mahabalipour par Chambers, on y aperc¸oit des traces manifestes d’un tremblement de terre. Les bramines du lieu ont ge´ne´ralise´ l’e´ve´nement partiel. (As. Res. I, 153–1541.) Bagavadam, liv. XII. Suivant d’autres livres sacre´s, six mille et une de ces re´volutions ont de´ja eu lieu. Le Shastabade n’en admet que quatre : Trois fois, dit-il, la race humaine a e´te´ de´truite : la terre, couverte de cadavres, a trois fois porte´ le repentir dans l’ame du dieu qui

1–2 quatre ... mille ] 4,390,000 MC 3 s’endort ] a` la hauteur de ces mots, dans la col. de gauche, une note sur la chronologie mythologique Chronologie mythologique chez les Indiens & destruction du monde. Guign. 625–628. Chaque Jog se termine par un de´luge, chaque Menvantara par un incendie universel. Guign. 181 & 190. Ms-texte 14–22 Les Indiens ... 154.) ] note de´coupe´e dans MC 16–22 Plusieurs ... 154.) ] ajoute´ dans la col. de gauche Plusieurs ... accre´dite´ cette opinion. Le ge´ant Nirinache´ren, racontent ... de Mavalipuran, voisins ... ruines de Mavalipuran ... 154. Ms-texte 24 lieu. Le ] lieu. (Wagner, p. 130, 147, 480–481. May. art. Yog2.) Le MC 1

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BC exploite pour cette note l’article de William Chambers, «Some Account of the Sculptures and Ruins of Mavalipuram, a Place a few Miles North of Sadras, and known to Seamen by the Name of the Seven Pagodas», Asiatick Researches, t. I, Calcutta, 1788, pp. 145–170, et plus particulie`rement pp. 153–158. BC adopte pour la ville la forme sanscrite du nom (Chambers, p. 146) et transcrit mal le nom du ge´ant qui est, dans le texte traduit par Chambers, «Hirinaˆcheren». La variante a` la ligne 24 atteste que BC pensait citer Wagner, Ideen, et l’article «Jogs» de Friedrich Majer, Mythologisches Lexicon, vol. II, pp. 452–492, qui traite des quatre aˆges du monde, selon la mythologie indienne.

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Chez les Birmans, un eˆtre myste´rieux descend sur la terre : ses veˆtements noirs flottent dans les airs ; ses cheveux sont e´pars : il pousse des cris aigus d’une voix tremblante. Des torrents de pluie gonflent soudain les mers et les lacs. Une affreuse se´cheresse succe`de a` ces inondations. Les plantes se fanent, la terre s’entr’ouvre. Les hommes se livrent des combats sans motifs et sans terme. Deux soleils dardent sur le globe des feux de´vorants. Le dernier arbre pe´rit desse´che´. Un troisie`me soleil tarit les rivie`res ; un quatrie`me et un cinquie`me les mers et l’Oce´an ; un sixie`me fait sortir de l’abıˆme des tourbillons de flammes ; un septie`me consume les habitations des dieux et des hommes, et s’e´teint enfin lui-meˆme faute d’aliments a. Les Mexicains reconnaissaient aussi quatre aˆges du monde ; l’un avait fini par un de´luge, le second par un tremblement de terre, le troisie`me par un ouragan ; le terme du quatrie`me n’e´tait pas e´loigne´. Dans cette attente, ces peuples, a` l’expiration de chaque sie`cle, ou de chaque pe´riode de cinquante-deux ans, e´teignaient tous les feux dans les temples et dans les maisons, et brisaient les meubles et les vases. Les preˆtres portant les

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avait donne´ cet ordre se´ve`re. Le quatrie`me aˆge dure encore ; mais le moment approche ou` tous les corps seront ane´antis, ou` Dieu rappellera dans son sein toutes les ames1. (As. Res. VI, 2452.) As. Res. VI, 246.

1 terre : ] BC ajoute une note de travail As. Res. 242–255. Goerr. II. 409. essentiel a` relire. MC la premie`re partie de la note se lit dans la col. de gauche Ms-texte, la seconde dans Ms-notes 11-p. 230.6 Les Mexicains ... tout de´truire. ] passage re´dige´ a` partir d’un long de´veloppement qui comple´tait l’actuelle note a de cette page Les Mexicains ... le terme du 4e approchoit. Dans cette attente, les Mexicains, ... les meubles, les vases & les ustensiles de me´nage. Les Preˆtres ... que pour reconnoıˆtre les intentions ... de feuilles 〈illis.〉 d’aloe´s, ... divise´e en 49 pe´riodes 〈dont chacune se terminoit par l’embrasement de l’univers.〉 Sept incendies ... avoir lieu a` l’e´quinoxe ... d’automne. (Orig. contre Celse V3.) la suite du texte dans la col. de gauche au lieu des inondations ... s’e´vanouit en 〈illis.〉 fume´e. ... qui commencent. retour a` la col. de droite La feˆte ... de´truire. notons encore que le passage qu’on lit dans la col. de gauche (au lieu des inondations ... qui commencent.) est pre´ce´de´ et suivi de deux autres que BC n’utilise pas ; le premier dit la mythologie Egyptienne reconnoissoit des pe´riodes qui devoient eˆtre termine´es par des re´volutions ge´ne´rales dans la nature. Tous les 3000 ans, l’e´quinoxe du printemps, quand la se´cheresse exerce son empire, quand on attend des bienfaits du Nil la corne de salut & 1 2

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BC re´sume le chapitre du Shastabade sur le quatrie`me aˆge du monde (Le Bhaguat-Geeta, traduction franc¸aise, pp. lxxvj-lxxviij). BC cite ici et dans la note suivante l’article de Francis Buchanan, «On the Religion and Literature of the Burmas» (Asiatic Researches, t. VI, 1801, pp. 163–308). – Il s’inte´resse surtout a` un passage de la Cosmographia Barmana traduite par Buchanan, en particulier aux chap. XXXV-XLII (pp. 242–255) qui parlent de la destruction du monde. Le passage qu’on lit ci-dessus, lignes 1–10, paraphrase une note de Görres, Mythengeschichte, t. II, p. 409, note (e´d. de 1935, p. 195, n. 7). Nous supposons que le renvoi a` Orige`ne, Contra Celsum, est une erreur que BC a fait disparaıˆtre. Orige`ne ne parle pas non plus d’un incendie universel des E´gyptiens. Pareille ide´e est atteste´e pour les Grecs : «Graeci norunt terram igne aut diluvio certis quibusdam temporum conversionibus purgari» (PG, t. XI, col. 1054).

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attributs de leurs dieux, se rendaient sur une haute montagne, et de´claraient aux assistants que toutes les divinite´s avaient quitte´ la ville peut-eˆtre pour n’y jamais revenir ; mais que, pour connaıˆtre les intentions divines, ils allaient essayer de rallumer les feux qu’ils avaient e´teints. Les femmes et les enfants se couvraient le visage de feuilles d’aloe`s, et la multitude fixait d’inquiets regards sur la torche de´positaire de sa destine´e. A l’instant ou` la flamme paraissait, des cris de joie saluaient les dieux pour les remercier du re´pit qu’ils accordaient aux hommes a. La dure´e du monde, au dire des Tibe´tains, e´tait divise´e en quarante-neuf pe´riodes. Sept incendies, suivis par un de´luge, se renouvelaient sept fois, et a` la dernie`re catastrophe, des fle`ches empoisonne´es sillonnaient l’espace : les ressorts de l’univers se brisaient, et toutes les existences devenaient la proie du ne´ant b. L’incendie universel des E´gyptiens devait avoir lieu tous les 3,000 ans, a` l’e´quinoxe du printemps ou a` celui d’automne. Au lieu d’inondations fe´condantes survient un de´luge de feu. Le monde entier est la proie des flammes, et la terre sacre´e d’Herme`s s’e´vanouit en fume´e ; mais c’est moins une destruction qu’un renouvellement de la nature. Au solstice d’e´te´ suivant, le soleil e´tant dans le Lion, la lune a` sa droite dans l’E´crevisse les a b

CLAVIG. Hist. of Mexico, I, 401–4021 ; Humboldt2. Voy. de Turner et de Pallas3.

l’abondance, au lieu des inondation ... qui commencent. suit le second passage Or chaque anne´e solaire repre´sente en petit cette grande anne´e de ruine & de renovation. Guign. p. 4384. Ms-notes 20 As. ... 246. ] perte du texte de la note, l’appel existe MC 14 d’automne. ] d’automne 〈a` cette premie`re e´poque, quand on attend les bienfaits〉. 19 Humboldt. ] Humboldt. May. Myth. Lex. Ms-notes, MC 20 Voy. de ... Pallas. ] Voy. de ... Pallas. Goerr. I. 1635. Ms-notes, MC ou` les deux premiers mots manquent, perte de papier MC 1 2

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BC cite en re´alite´ l’e´dition allemande et non pas la traduction anglaise de l’ouvrage de Clavigero. Les faits se trouvent dans le t. I, pp. 401–402, 408 et 432–438, Voir Alexander von Humboldt, Vues des Cordillie`res, et monumens des peuples indige`nes de l’Ame´rique, avec 19 planches, dont plusieurs colorie´es, Paris : N. Maze, 1824. La planche XV reproduit dix pages du magnifique Codex Borgia, conserve´ a` la Biblioteca Apostolica Vaticana. Le tableau no VIII est consacre´ a` la «ce´re´monie d’allumer le nouveau feu, lors de la procession qui se faisoit tous les cinquante-deux ans au sommet d’une montagne, pre`s d’Iztapalapan» (t. I, pp. 271–272). – La variante atteste que BC voulait renvoyer en plus au Mythologisches Lexicon de Majer sur les quatre aˆges du monde selon les Mexicains, c’est-a`-dire qu’il pensait citer l’article «Ehecatonatiuh», t. II, p. 9. BC combine les re´cits de Turner et de Pallas (voir ci-dessus, p. 213, n. 2). Quant a` Pallas, voir le re´cit du chap. III de la premie`re partie (p. 32), ou` il est question de la pluie des fle`ches empoisonne´es, de la pluie qui emporte les corps, et d’une autre pluie qui marque le de´but de l’aˆge nouveau de la terre renouvele´e. Les phrases sur l’anne´e sothiaque ont e´te´ copie´es chez Guigniaut (t. I, pp. 437–438). La variante indique la source des faits alle´gue´s par BC sur les aˆges du monde selon la religion du Tibet, a` savoir Görres, Mythengeschichte, t. I, pp. 163–164 ; e´d. de 1835, pp. 88– 89. Görres cite les meˆmes auteurs pour son texte sur le Tibet.

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plane`tes dans leurs demeures respectives, et le Be´lier au milieu du firmament, Sothis reparaıˆt et salue a` son lever le nouvel ordre de choses, et les temps nouveaux qui commencent. Une feˆte solennelle rappelait et annonc¸ait ces re´volutions. On y peignait en couleur de sang les troupeaux et les arbres : cette couleur e´tait expressive de la chaleur extreˆme qui devait tout de´truire a. a

E´PIPHAN. adv. Hær. V1. Sur le de´luge et la destruction du monde chez les Chalde´ens, Gœrres. I. 268–272, et sur ce dogme emprunte´ d’eux par les Juifs, ib. II, 522. Staudlin (Hist. de la Mor., II, 14) pre´tend qu’ils l’ont puise´ chez les Perses.

3 commencent. ] commencent. BC pre´voit une note, mais une perte de papier l’a fait disparaıˆtre, sauf la page de l’ouvrage cite´ p. 438. MC annonc¸ait ] perte du de´but de ce mot MC 7 Hær. V. Sur ] Hæret. 〈Les dix ages (γενη) des Etrusques ressemblaient aux Yogs des Indiens, bien qu’il[s] fussent plus court[s] – Les 8 1ers ne comprenoient en tout que 9 sie`cles. la fin de chacun de ces ages e´toit marque´e par des signes prodigieux (Varr. ap. Censor. de die nat. 17. Plut. in Sulla)2. Cette opinion s’e´toit perpe´tue´e a` Rome, puisque Servius (ad. Virg. Ecl. IX. 473) nous rapporte une prediction du Devin Volcatius, qui au milieu des jeux que ce´le´broit Ce´sar, de´clara que le 10e age venoit de commencer. (Creutz. II. 436–437.)〉 V. sur Ms-notes 8 522. Staudlin ] 522. 〈Dans le Zend avesta, comme dans le Mahabarat, ce sont les Come`tes qui mettront fin au monde actuel, quand il aura accompli les tems qui lui sont assigne´s. (Zend. LXVII. Ha. Guign. p. 7084.)〉 Staudlin le texte biffe´ se lit en note ci-dessous, p. 232, note b. MC 8–9 Staudlin ... Perses. ] l’e´bauche de cette phrase dans la col. de gauche la notion de la destruction du monde 〈chez〉 s’introduisit de Perse chez les Juifs. Staudl. hist. de la mor. II. 14. Ms-texte 1

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E´piphane parle a` trois reprises de la destruction du monde par le feu, une premie`re fois dans le passage contre les Valentins, puis deux fois dans ce que BC appelle ici le livre V (dans l’e´d. utilise´e aussi «contra Hæreses libri II, tom. II»). Tous ces passages ne se rapportent pas a` l’E´gypte, mais a` divers adversaires he´re´tiques, notamment aux maniche´ens. Voir Sancti Epiphanii episcopi Constantiæ Cypri contra actoginta hæreses opus [...], Lutetiæ Parisorum : Sumptibus Debastiani Cramoisy, MDCXII, col. 158, 542 et 561. – Le renvoi a` Goerres vise un passage de la Mythengeschichte (pp. 267–273, e´d. de 1935, pp. 135–137) sur les aˆges du monde chez les Chalde´ens pour comple´ter son raisonnement par un autre exemple. Le second passage (pp. 522–523, e´d. de 1935, pp. 242–243) ne parle pas de la destruction du monde, mais des emprunts de la religion juive a` la tradition des Chalde´ens. – BC cite Stäudlin, Geschichte der Sittenlehre Jesu pour justifier l’hypothe`se relative a` l’influence perse sur l’ide´e de la destruction du monde chez les Juifs, a` tort, car Stäudlin n’en parle pas. Censorinus, De die natali, e´d. Gruber, p. 74. – Voir Plutarque, Vies paralle`les, «Lysandros et Sulla», dans la partie sur Sulla, chap. 7. Le commentaire de Servius se rapporte au vers «Ecce Dionæi processit Cæsaris astrum» (Bucol. IX, 47) et on trouve l’anecdote e´voque´e par BC, ainsi que la remarque de Servius : «Sed Vulcatius aruspex in contione dixit cometen esse, qui significaret exitum novi seculi, et ingressum decimi, sed quod invitis Diis secreta rerum pronunciaret, statim se esse moriturum, et nondum finita oratione in ipsa contione concidit» (t. II, p. 161). Le renvoi a` Servius provient de Creuzer, Symbolik, t. II, p. 436, qui parle a` cet endroit aussi du devin ` la page 437 commence une discussion d’ordre me´thodologique sur les aˆges de Volcatius. A la mythologie e´trusque. Pour le renvoi au Zend-Avesta, voir ci-dessous, p. 232, n. 1. – Quant a` Guigniaut, BC renvoie a` un passage de la fin d’une des notes comple´mentaires du traducteur de Creuzer, ou` celui-ci re´sume la fable de la fin du monde cause´e par la plane`te Gourzscher.

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Les livres sacre´s du Nord sont remplis de descriptions non moins lamentables. Le cre´puscule des dieux a, dit la Voluspa, commencera par trois hivers terribles b que nul printemps, nul e´te´ n’interrompront. La nature, vieille et de´cre´pite, n’opposera qu’une faible re´sistance aux forces re´unies qui conspirent sa perte. Tous les e´le´ments franchiront leurs limites. Un monstre nourri par une magicienne ennemie des mortels, sortira de la foreˆt qu’il habite : des vents impe´tueux mugiront de tous coˆte´s. Le coq prophe´tique, agitant ses ailes noires, frappera les e´chos de ses cris sinistres. La nuit couvrira l’arc-en-ciel, pont myste´rieux entre les cieux et la terre. Surtur, le roi du feu, viendra du Midi avec ses phalanges invincibles. Il sera monte´ sur un coursier dont les naseaux fumants jetteront des flammes. Le vaisseau fune`bre c qui, depuis qu’He´la d exerce son empire, se construit lentement des os de ses victimes, cinglera vers l’Orient, conduit par le ge´ant qui lui sert de pilote e ; il recevra sur son bord les ge´nies impatients de consommer le grand œuvre de la destruction. Loke et Garmur, le Cerbe`re du Nord, se joindront aux enfants de la gele´e. Le loup Fenris a brise´ ses fers. Le serpent Mitgard, tel qu’un fantoˆme obscur, se dresse, sort des ondes et se roule sur le rivage. Les montagnes tremblant sur leur base s’entre-choquent avec un craquement effroyable. Le soleil paˆlit, la terre s’enfonce, Surtur approche, le ciel se fend. Les compagnons de Surtur pe´ne`trent par des bre`ches enflamme´es jusqu’a` la plaine immense que domine la citadelle des dieux. Heimdall f donne du cor au haut de la tour. Les Nains, a` l’entre´e de leurs cavernes, ge´missent et versent des larmes. Les hommes meurent en foule, et l’aigle les de´vore en poussant des cris de joie. Les dieux prennent leurs armes : les he´ros qu’Odin rassemble dans le Valhalla s’avancent, et il a b c d e f

Ragna-Rockur. Fimbul-Wetter. Negel-Fare. La Mort. Le ge´ant Rymer. Le portier ce´leste.

1 Les livres ] a` la hauteur de ces mots, dans la col. de gauche, e´bauche d’une note Mone. 2391. Sur la destruction du monde chez les Scandinaves. Ms-texte lamentables. ] BC pre´voit une note v. Mone, p. 239. MC 13 ge´ant ] BC pre´voyait une note le Dieu du mal. Ms-notes 14 il recevra ... ge´nies ] Il voguera vers l’Ouest pour recevoir les esprits Ms-texte 16 aux enfants ] a` cette arme´e avec les enfans Ms-texte 25 Valhalla ] Valhalla 〈depuis〉 Ms-texte 28 Negel ] perte du premier mot MC 29 La Mort. ] perte des trois premie`res lettres MC 30 Le ge´ant ] perte des trois premie`res lettres MC 31 Le ] perte du premier mot MC 1

Corriger le renvoi. Les deux chapitres sur la destruction du monde chez les Scandinaves se trouvent chez Mone, Geschichte des Heidentums im nördlichen Europa, pp. 439–464.

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les passe en revue. Sur sa teˆte est un casque d’or : ses membres sont couverts d’une armure e´tincelante. Il brandit sa lance jusqu’ici victorieuse ; mais il connaıˆt les arreˆts du sort. Sa perte est infaillible. Il n’en luttera pas moins vaillamment. Fenris ouvre sa gueule e´norme. Le serpent lance autour de lui des flots de venin. Thor lui porte un coup mortel ; mais il entoure de ses replis son vainqueur et l’e´touffe. Frey succombe sous les coups de Surtur. Le chien Garmur et le dieu Thyr pe´rissent l’un par l’autre. Fenris de´vore Odin, et tombe sous l’e´pe´e de Veydar. Loke et Heimdall s’entretuent. La fin des aˆges est accomplie. Le dieu inconnu prononce ses arreˆts. Les bons et les me´chants se´pare´s habiteront a` l’avenir diffe´rentes demeures a. Une terre nouvelle surgira du sein de l’onde : un jeune couple, enfant du soleil, la repeuplera. L’aigle, en se retirant, portera dans son bec les poissons jete´s par l’orage sur la cime des monts. Les dieux se baˆtiront un palais resplendissant, ou` de´sormais leur fe´licite´ sera sans me´lange, et Loke abjurera sa re´volte pour s’identifier a` l’eˆtre infini. Nos lecteurs remarqueront sans doute que dans ce tableau toutes les ide´es sacerdotales se combinent : le dieu supreˆme autre que les divinite´s agissantes, la lutte des puissances malfaisantes contre la force pre´servatrice, l’introduction de la morale, la division des morts en deux classes, enfin la de´faite et la conversion du mauvais principe. Partout les meˆmes dogmes et les meˆmes descriptions se reproduisent. Les Perses s’attendaient a` un incendie universel b. Une inondation ge´ne´rale e´tait annonce´e par les Druides c. La prophe´tie d’un e´ve´nement pareil contenu a b

c

Les bons, le Gimle ; les me´chants, le Nastrond. Dans le Zendavesta, comme dans le Mahabarad, ce sont les come`tes qui mettront fin au monde actuel, quand elles auront accompli les temps qui leur sont assigne´s. Zend. LXVII. Ha1. STRAB., Me´m. de l’acad. des inscript. XXIV, 3452.

3 infaillible. Il ] infaillible. n’importe. Il Ms-texte 5 il entoure ] le monstre enveloppe Mstexte il enlace MC 14 Loke ] Loke de´pouille´ de sa puissance Ms-texte 17 le dieu ] perte de ces mots, de´chirure MC 24 Les ] perte de ce mot, de´chirure MC 25–27 Dans ... Ha. ] [...] le Zendavesta ... Mahabarad, [...] les ... quand [...] auront ... Zend. [...] Ha. de´chirures ; BC ajoute a` la fin Guig. p. 708 MC 28 Strab. Me´m. ] ces deux mots emporte´s dans une de´chirure MC 1

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BC renvoie au texte qui est re´cite´ lors d’une ce´re´monie du feu (Kleuker, Zend-Avesta, t. I, Izeschne´, LXVIIe Ha, pp. 146–148). – Sur le passage de Guigniaut cite´ dans les variantes voir ci-dessus, p. 230, n. 4. BC revient a` l’e´tude de Fe´nel, «Plan syste´matique» (voir ci-dessus, p. 200, n. 1) qui parle au de´but de la destruction du monde par le feu et par l’eau selon la doctrine des druides (pp. 346–347). Fe´nel cite a` son tour la source de ses re´flexions, le livre IV de Rerum geographicarum libri XVII de Strabon (voir l’e´d. de Casaubon de 1587, p. 136, ligne 39 : «mundum tamen aliquando igne & aqua superatura»).

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dans le Chiking est probablement un reste du culte sacerdotal qui exista jadis a` la Chine1. On connaıˆt les passages relatifs a` cette catastrophe dans les e´crits des chre´tiens a : plus d’une fois l’E´glise a renouvele´ ces pre´dictions lugubres, et le pouvoir ou les richesses des preˆtres en ont toujours profite´ ; quoi de plus propre, en effet, a` donner aux terreurs religieuses un ascendant sans bornes que l’attente perpe´tuelle d’un bouleversement qui fera disparaıˆtre tous les inte´reˆts terrestres ? Les approches de la mort rame`nent d’ordinaire les individus a` la de´votion. Le dogme de la destruction du monde tient l’espe`ce entie`re dans une longue agonie.

a

V. l’E´pıˆtre de Barnabas, disciple de saint Paul. Il fixe la fin du monde a` la 6000e anne´e. STAUEDLIN, Hist. de la morale, II, 142.

4 ou les richesses ] manque Ms-texte 10–11 V. l’E´pıˆtre ... 14. ] ajoute´ dans la col. de gauche Ms-texte, une de´chirure a emporte´ quelques mots et parfois des lettres ; il reste «V. l’E´pıˆtre de Bar» «Il fixe la fin du mo» «la morale, II, 14» MC

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Allusion assez vague a` une des poe´sies du Shih-Ching (le Livre des odes ou chansons), un des livres canoniques du confucianisme, datable avant le IIe sie`cle av. J.-C. Il s’agit d’une anthologie ancienne d’environ 300 chansons populaires anonymes difficilement datables (entre les Xe et VIIe sie`cles avant J.-C. ?), conside´re´e comme le plus ancien monument poe´tique de la Chine. L’hypothe`se de BC de voir dans certains textes de cette anthologie (voir p. ex. le texte II, 4, 9) les traces d’une tradition sacerdotale primitive est proble´matique parce que l’ancienne religion chinoise, le culte des anceˆtres, n’avait pas de caste sacerdotale. Voir Shi-king. Das kanonische Liederbuch der Chinesen. Aus dem Chinesischen übersetzt und erklärt von Victor von Strauß, Heidelberg : Carl Winter’s Universitätsbuchhandlung, 1880. «Während sie jene Dinge [a` savoir des sacrifices, un rituel de´veloppe´ des ce´re´monies sacrificielles] in vollstem Maße besaßen, hat es bei ihnen nie einen Priesterstand oder auch nur einzelne Priester gegeben. Alles priesterliche Thun war Sache des Hausvaters, der [...] für sich und alle opferte» (p. 10). L’E´pıˆtre de Barnabe´ est un e´crit anonyme de la premie`re chre´tiente´, datable entre 70 (elle mentionne la destruction du Second Temple de Je´rusalem) et 132 (re´volte de Bar Kochba), attribue´ a` un Barnabe´ que BC nomme a` tort un disciple de Saint-Paul. Tenu pour canonique par Cle´ment d’Alexandrie, Orige`ne et Hie´ronymus (ce qui explique pourquoi il figure dans le Codex sinaiticus), il a e´te´ e´carte´ de l’E´criture par Euse`be. Les 6000 ans sont e´voque´s au chap. XV, 4 ou` on lit une prophe´tie base´e sur une lecture alle´gorique de textes bibliques. BC reproduit ici quasi litte´ralement une de ses notes de lecture (Co 3293, Staeudlin, entre´e 89) qu’il a prises en e´tudiant la Geschichte der Sittenlehre Jesu, Göttingen : im VandenhoeckRuprechtischen Verlage, 1802.

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Nous rencontrons enfin, dans les religions sacerdotales, une classe de dieux qui nous semblent bizarres, qui, par degre´s, deviendront re´voltants et scandaleux, et dont les religions inde´pendantes des preˆtres ne se sont souille´es que malgre´ elles, dans leurs rites secrets, en les repoussant toujours des rites publics. Nous voulons parler du Phallus, du Lingam et des divinite´s hermaphrodites. Rappelons d’abord que, de`s l’e´poque la plus recule´e, nous avons vu les preˆtres placer dans les religions dont ils s’emparaient, une doctrine secre`te, ou` e´taient de´pose´es leurs cosmogonies, exprime´es par des symboles. Rappelons encore que ces symboles e´taient le plus souvent emprunte´s de la

a

Ce n’est pas sans re´pugnance que nous sommes condamne´s a` parler de ces divinite´s obsce`nes et scandaleuses ; mais elles occupent une telle place dans les anciennes mythologies et dans les religions encore existantes de l’Inde et du Tibet, que nous n’aurions pu les passer sous silence, sans laisser une lacune, qui aurait eu pour ine´vitable re´sultat de jeter de grandes obscurite´s sur les autres parties de nos recherches. Il a donc fallu aborder ce sujet : nous avons taˆche´ d’y apporter de la re´serve et de la de´cence. On trouvera des de´tails mille

E´tablissement du texte : Manuscrits : 1.) BCU, Co 3262/1, pp. 162–172 [=Ms-texte] et 3.) BnF, Co 3262/2, pp. 99–107 [=Ms-notes] 2.) BCU, Co 3246, fos 62–70 [=MC] NAF 18823, fo 135 [=N] Imprime´ : De la Religion, conside´re´e dans sa source, ses formes et ses de´veloppements, t. IV, Paris : Chez Pichon et Didier, e´diteurs, 1830, pp. 189–200.

5–7 inde´pendantes ... publics. ] inde´pendantes, malgre´ des apparences qui ont trop souvent trompe´s les modernes, ne se sont jamais souille´es. Ms-texte 7 hermaphrodites. ] hermaphrodites. Ici nous expliquerons leur origine, plus loin le parti que le sacerdoce en a tire´. Mstexte 11 e´taient ... cosmogonies, exprime´es ] e´toi〈en〉t de´pose´e〈s〉 leur cosmogonie physique exprime´e Ms-texte e´tait de´pose´ leur cosmogonie exprime´e MC 11-p. 235.2 Rappelons ... cre´e´. ] une e´bauche de cette phrase dans la col. de gauche que l’ide´e d’engendrer & de naıˆtre e´toit l’une des locutions les plus 〈habituellement〉 fre´quemt employe´es dans ces cosmogonies & que leur symb. le pl. s (?) Ms-texte 12 encore ] de plus MC 13-p. 235.22 Ce n’est ... inscriptions. ] manque Ms-texte, Ms-notes, MC

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notion d’engendrer et de naıˆtre, applique´e a` la force productive et au monde qu’elle avait cre´e´. Quoi de plus naturel que de chercher l’image de cette force dans les organes ge´ne´rateurs ? L’union des sexes doit attirer toute l’attention de l’homme, aussitoˆt qu’il re´fle´chit sur lui-meˆme. C’est par la` qu’il tient d’une part aux races passe´es, et que d’une autre part il se lie aux races futures. Il cesse d’exister isole´ment ; il de´robe aux ravages du temps une portion de son eˆtre, et prend possession de l’e´ternite´. Tout ce qui se rapporte a` l’union des sexes est e´nigmatique et inexplicable. Cet oubli complet de notre individualite´, d’ailleurs si dominante et si obstine´e, ce renversement momentane´ de tou tes les barrie`res qui nous se´parent toujours des autres, et font de chacun de nous son propre centre et son propre but ; ce me´lange d’affection morale et de de´lire physique, cette suspension ou cette confusion de toutes nos faculte´s, cet amour impe´rieux et sans bornes qui s’e´le`ve en nous pour le fruit inconnu de la plus vive, mais de la plus courte de nos jouissances, tout fait de l’union des sexes le grand myste`re de la nature. Il a fallu toute la corruption de la socie´te´ pour de´senchanter et de´grader ce myste`re. Il n’est donc pas e´tonnant que les preˆtres des peuples anciens, e´trangers a` cet effet de la civilisation, ayent pris l’union des sexes pour symbole de

fois plus libres dans l’ouvrage de M. de Sainte-Croix sur les myste`res, et dans les me´moires de l’Acade´mie des inscriptions1.

2–3 que de ... ge´ne´rateurs ? ] perte de plusieurs mots et lettres que de chercher l’im[...] ge´ne´rat[...] MC 4 L’union ... doit ] L’acte de la ge´ne´ration est une chose tre`s importante dans la vie de l’homme, & doit Ms-texte aussitoˆt ] de`s Ms-texte 6 que ... lie ] qu’il se lie d’une autre part Ms-texte 7 temps ] tems qui le de´truit Ms-texte 8–9 l’union des sexes ... inexplicable. ] cet acte est myste´rieux & e´nigmatique. Ms-texte 13 confusion ] confusion 〈inexplicable〉 Ms-texte 17 de la socie´te ] perte de ces mots MC myste`re. ] myste`re. L’ironie y a re´ussi, en l’entourant du ridicule, & ici encore le ridicule n’est autre chose que le sublime de´grade´. Ms-texte 18 Il n’est donc pas ] perte de ces mots MC

1

BC pense probablement a` ce qui est dit dans les Recherches historiques sur le culte du phallus (voir l’index dans l’e´dition de Silvestre de Sacy). – Remarquons encore que le fait que cette note n’existe ni dans le manuscrit en cahiers ni dans le manuscrit colle´ permet de la dater de la dernie`re phase du travail de re´daction. Il se peut qu’il l’ait ajoute´e en pre´parant le manuscrit pour l’imprimeur ou en corrigeant les e´preuves.

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ce qu’ils imaginaient sur l’origine de cet univers. De la` le culte des dieux androgynes a. a

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L’adoration de dieux de ce genre est une conse´quence toute naturelle de la notion d’engendrer applique´e au monde. Avant la cre´ation, la puissance productive se trouve seule dans l’immensite´. En cre´ant, elle se divise en quelque sorte : elle remplit la fonction de l’eˆtre actif et de l’eˆtre passif, du maˆle et de la femelle. C’est la doctrine des Ve`des1, elle est tre`sexplicitement e´tablie dans le Manara-Dharma-Sastra. V. aussi les lois de Menou. As. Res. V, VIII2.

2 androgynes. ] hermaphrodites, divinite´s particulie`res au polythe´isme sacerdotal. Celles que nous rencontrons dans les myste`res Grecs n’appartenoient point au culte populaire : BC pre´voit une note Il n’y en a de trace que dans les hymnes Orphiques, dans les Argonautiques, & dans les androgynes de Platon. Dans ces hymnes, Minerve (Wagn. 308) la lune [V. As. Res. XI. 43. voir dans Selden, de Diis syr. p. 240 ou Heinrich, de Hermaphrod. p. 193. l’ancienne tradition sur Lunus & Luna] le texte entre crochets dans la marge de gauche (ib. 348) & Bacchus sont androgynes. (Hymne 29 & 41. Bacchus διϕυης) L’auteur des Argonautiques fait de l’Eros androgyne le 1er moteur de sa cosmogonie, & les androgynes de Platon e´toient certainement emprunte´s de quelque religion sacerdotale. Ms-notes ; retour au Ms-texte mais parmi les peuples soumis aux preˆtres, il n’en est aucun, qui n’aıˆt rendu hommage a` des Dieux androgynes. Ms-texte, une version pre´paratoire de la note se lit, dans la col. de gauche, sur la p. pre´ce´dente de Ms-notes l’Eros orphique, διϕυης, des deux sexes. hymne orphiq. Herman. 23. mise´, dans les vers orphiques, reine pure, sacre´e ineffable, male & femelle4. Ms-texte 3–7 L’adoration ... Sastra. ] la re´daction de cette note a e´te´ faite en partant d’un extrait d’Eckstein dans les philosophies Sacerdotales, notamment de l’Inde, la notion de la Divinite´ hermaphrodite prenoit une autre forme qui tient de l’ame ce dernier mot : lecture hypothe´tique & du Panthe´isme. la Divinite´, seule existence, renfermoit en elle le type du monde, la pense´e divine, la semence immortelle, au moyen de laquelle, dans la langue des Ve`des, s’effectue l’enfantement ce´leste de la Divinite´ qui s’engendre elle meˆme & se reproduit e´ternellement dans son propre sein. 6 Ve`des, ] Ve`des, d’Eckst. VIII. 351 MC d’Eckst. VIII. 351. Ms-notes, col. de gauche. 7 Sastra. ] Sastra. (Guign. 609 MC 8 VIII. ] on peut rapprocher de cette note une phrase qu’on lit dans la col. de gauche, a` la hauteur des mots «tout ce qui existe» (voir ci-dessous, p. 241, ligne 1) Explication des Divinite´s hermaphrodites par M. d’Eckst. II. 230–2315. MsVIII & d’Eckst. II. 230–231, XI. 205. MC texte 1

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La source de cette information est d’Eckstein, comme il ressort des variantes aux lignes 3–7 et 6. BC renvoie au chap. I de l’essai «De la nature des e´le´mens selon les traditions philosophiques de l’Inde» (Le Catholique, t. III, no VIII, aouˆt 1826, pp. 330–359, et plus particulie`` cela s’ajoute un passage de Guigniaut qui traite du rement pp. 351–352). A ManavaDharma-Sastra (note 6 au chap. III de sa traduction de Creuzer) et re´sume une re´flexion de Menou (voir les variantes). BC cite le petit article anonyme des Asiatic Researches, t. V, pp. IV-XI ; il ne cite que la fin de la liste des confrontations de citations choisies dans les Lois de Menou et la Gene`se. BC ajoute dans le manuscrit en cahiers et dans le manuscrit colle´ (voir les variantes) des renvois a` des articles du baron d’Eckstein (tire´s des t. I et IV du Catholique). Le renvoi a` F. Wilford, Asiatic Researches n’est pas maintenu. Sur Wagner et Selden, voir p. 247, n. 3 ; sur Heinrich, p. 237, n. 3 ; Bacchus διϕυης, voir ci-dessous, p. 247, n. 4. Mise´ est mentionne´ dans les Hymnes orphiques (42,4) comme une divinite´ hermaphrodite, a` l’origine probablement une divinite´ me`re phrygienne. Voir ci-dessous, p. 247, n. 4. BC renvoie ici a` une page du compte rendu du t. II de De la Religion par le baron d’Eckstein (Le Catholique, t. I, no II, fe´vrier 1826, pp. 205–242, plus particulie`rement pp. 230–231 sur la nature hermaphrodite de la puissance cre´atrice).

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L’Aphroditus a et l’Adonis b de Syrie ; l’Adagoous, re´ve´re´ par les Phrygiens c ; en E´gypte, Phthas et Neith d ; en Perse, Urania Mithra e ; Freya hera

b c

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Le culte d’Aphroditus fut transporte´ dans l’ıˆle de Chypre. (ARISTOPHANE.) Lœvinus dit que son sexe est incertain, et Philochore dans son histoire d’Attique le confond avec la lune. Suidas parle aussi de la Ve´nus barbue, qui avait les doubles organes ge´ne´rateurs, parce qu’elle pre´sidait a` toute ge´ne´ration, et qui e´tait homme de la ceinture en haut et femme de la ceinture en bas1. CREUTZ. II, 122. HE´ RODOTE, I, 105. HEINRICH, hermaphroditorum origines et causæ, III. SALMASII Exercit. Plinian. JABLONSKY, de lingua lycaonia, Opusc. p. 64. CREUTZ. I, 350. Agdestis, he´ros hermaphrodite, qui avait pe´ne´tre´ dans quelques fables assez peu connues et assez re´centes de la mythologie grecque, e´tait fils du Jupiter phrygien et du ge´ant Agdal.3 Le Phthas de l’E´gypte, dit Orphe´e (hymne V), le Protogone, le premier-ne´, qui parcourt les airs sur ses ailes d’or, hermaphrodite ineffable, qui jouissant de la puissance des deux sexes, a produit les hommes et les dieux. CREUTZ. I, 350–358. Minerve et Vulcain, Phthas et Neith, e´taient, suivant Horapollo, les seuls dieux hermaphrodites en E´gypte. Ils n’e´taient pas hermaphrodites en Gre`ce4. JUL. FIRMICUS, de errore prof. Relig. 1–5. C’est pour cela que des e´crivains grecs disent

2 Mithra ; Freya ] Mithra, 〈le Deus Ve´nus & Jupiter me`re des Dieux chez les Etrusques,〉 BC pre´voyait une note 〈Creutz. II. 430–431.〉 Ms-notes Freya Ms-texte 3 Aristophane ] Creutz. I. 350–358. Aristophane MC 10–12 Agdestis ... Agdal. ] l’e´bauche tre`s e´toffe´e se lit, dans la col. de gauche, d’une page des cahiers du texte Dieux hermaphrodites. Agdestis, he´ros hermaphrodite, fils de Jupiter Phrygien & du ge´ant Agdal. Guign. 371–372. Cosmogonie du Manara-Dharma-Sasthra. ayant divise´ sa propre substance, le pouvoir supreˆme devint moitie´ homme, moitie´ femme. Guign. 609. Pradjapati ne ressentoit aucune joye, & voila` pourquoi l’homme ne se re´jouı¨t point lorsqu’il est seul. il souhaita l’existence d’un autre & se trouva tout 1

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La note re´sume plusieurs passages de Creuzer, Symbolik. Le culte d’Aphroditus est traite´e dans le t. I, p. 350, avec un renvoi a` He´rodote, livre I, chap. 105 (la fondation du sanctuaire de Chypre) et a` Heinrich (voir la n. 3). Aristophane, Levinus et Polichorus sont cite´s dans le meˆme tome pp. 362–364, ou` Creuzer reproduit le passage de Macrobe, Saturnalia, livre III, chap. 8, la source pour les phrases de Levinus et Polichorus. – Pour la Souda voir Suidæ Lexicon Græce & Latine, textum græcum cum manuscriptis codicibus collatum [...] illustravit [...] indicesque auctorum & rerum adjecit Ludolphus Kusterus, Cantabrigiæ : Typis Academicis, MDCCV, t. I, p. 399 : «Fingunt quoque eam barbatam, & maris atque fœminæ instrumenta genitalia habentem, quoniam universæ generationis eam dicunt esse præsidem, & a lumbo usque ad superiores corporis partes virum, inferius vero fœminam.» Lire 102. BC cite le chapitre de Creuzer sur Adonis, ou` il est question de sa double nature. Cette note exploite plusieurs passages de Creuzer, Symbolik. Notons d’abord que le renvoi a` He´rodote est faux. Le passage indique´ ne parle pas d’Adagoous ou d’Agdestis, dont la le´gende est raconte´e par Creuzer, t. II, pp. 40–41, dont BC utilise quelques de´tails a` la fin de sa note (la le´gende du gea´nt Agdus). Le renvoi au chap. III de l’ouvrage de Heinrich Hermaphroditorum, artis antiquæ operibus illustrium, origines et causæ est copie´ chez Creuzer, t. I, p. 350, n. 40. Celui a` Salmasius, Funus linguæ Hellenisticæ, sive confutatio exercitationis de hellenisticis et linggua hellenistica (Lugduni Batavorum : Ioannis Maire, 1643), se trouve, avec celui a` Jablonski, dans la note suivante. BC cite Creuzer, mais confond quelques indications. Pour une partie des mate´riaux dont il est question dans cette note BC revient a` Creuzer, Symbolik, t. I, p. 358, (Phtas et Neith). Le renvoi a` Horapollo, Hieroglyphica, est copie´ chez Görres, Mythengeschichte, et vise plus particule`rement le livre I, chap. 11 et 12 (voir l’e´d.

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De la Religion, IV

maphrodite, dans son temple d’Upsal a ; Cenrezi au Tibet b ; aux Indes, Esvara, qui passionne´ment amoureux de la belle Parvatty, lui donna une

a

b

que Jupiter e´tait hermaphrodite chez les Mages (GOERR. I, 2541.) Kaiomorts, le premier homme, e´tait maˆle et femelle (GUIGN. 7062). L’arbre de la cre´ation avait la forme d’un homme et d’une femme, unis l’un a` l’autre. (Ib. 707.) GOER., II, 574–5753. Dans l’acte de la ge´ne´ration, disaient les Bardes, l’e´poux devient femme, l’e´pouse devient homme. (Mone, 3724.) Une le´gende scandinave pourrait bien eˆtre une re´miniscence des dieux hermaphrodites. Thor s’endort ; Thrymer lui de´robe son manteau dans la nuit de l’e´quinoxe. Thor, de´guise´ en femme, e´pouse Thrymer. Le mariage se consomme, et la fausse e´pouse tue son mari avec son marteau qu’elle reprend. (Mone, 406.) Cette fable a aussi un sens astronomique. WAGN. 1995.

(suite des variantes de la page pre´ce´dente) a` coup comme un homme & une femme unis ensemble. ib. 647. Perses Kaı¨omorts, le 1er homme male & femelle. ib. 706. l’arbre de la cre´ation fait comme un homme & une femme unis l’un a` l’autre, 〈Dieux〉 ib. 707. Dieux hermaphrodites Loix de Menou. As. Res. V. VII Mstexte 12 Agdal. ] Agdal. Guign. 371–372. MC 17 Gre`ce. ] Gre`ce. (Wagn. 279–280. 306.) Ms-notes, MC 18-p. 238.5 Jul. Firmicus ... 707.) ] plus de re´fe´rences Jul. Firmicus ... I – 5. 20. C’est ... 254.) Kaiomorts ... 707.) presque tous les mots de Creutz. II. 19–20. He´rodote. cette note ont disparu a` cause de la perte du papier ; on lit : [...] Firm. de error. prof. relig. I. 5. Creutz. II. 19– [...] c’est pour cela que les e´crivains [...e´]tait hermaphrodite, [... 2]54.) Kaiomortz, le 1er [...]le (Guign. 706.) l’arbre [...]e d’un homme & d’une [...]e. (ib. 707) 〈Les e´le´mens, [...]hrodite dans les illis. [...]〉 MC Dans l’acte ... 6–11 Goer. ... astronomique. ] Porphyre, ap. Euseb. præp. evang. III. MC astronomique. ] e´bauche de cette note dans la col. de gauche Sentence des Bardes. Dans l’acte ... ge´ne´ration, l’home devient femme, la femme devient ... scandine semble une re´miniscence ... Thrymer lui vole ... Thymer, reprend son manteau & le tue. Cette fable a aussi un

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de 1935, p. 178, et la note 4). Horapollo n’utilise que les noms grecs, de Pauw les noms latins. Voir Horapollinis Hieroglyphica græce et latine, [...] curante Joanne Cornelio Pauw, Trajecti ad Rhenum : apud Melchior. Leonardum Charlois, MDCCXXVII, pp. 18–25. BC pense, comme Görres, au chap. V, 2 du texte de Firmicus, ou` il est question de Mithra, de´ite´ maˆle, un voleur de bœufs (Firmicus Maternus, L’erreur des religions paiennes, texte e´tabli, traduit et commente´ par Robert Turcan, Paris : Belles Lettres, 1982, p. 86). BC renvoie a` un passage de la note V qui se rapporte au chap. II du livre II. Ce passage raconte l’histoire du premier homme, Kaiomorts, androgyne, qui n’avait pas d’enfants, mais duquel Ormuzd fit sortir, apre`s sa mort, un arbre dont un des fruits e´tait le couple Meschia et Meschiane, les anceˆtres du genre humain. BC vise une phrase de la Mythengeschichte, e´d. de 1935, p. 263, qui re´pe`te un passage des Gesta Hammaburgensis d’Adam von Bremen tire´ de la description de ce que celui-ci appelle le temple d’Upsal ; en parlant des simulacres il dit : «tertius est Fricco, pacem voluptatemque largiens mortalibus. Cuius etiam simulacrum fingunt cum ingenti priapo» (Scriptores rerum germanicarum in usum scholarum, Hannoveræ et Lipsiæ : Impensis Hahniani, 1917, p. 258). – Le renvoi a` Porphyre (variante) est vague. Voir ci-dessus, p. 183, n. 2. ˆ ge BC cite un argument que Mone fonde sur un passage d’un poe`te lyrique du Moyen A (Truchseß von St. Gallen). L’autre exemple est tire´ de l’histoire de Thor que Mone re´sume a` la page cite´e. Le commentaire de BC s’accorde bien avec le texte de Mone. Voir la description de Cenrezi (Ideen einer allgemeinen Mythengeschichte, pp. 197–199).

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Livre X, chapitre X – Du Phallus, du Lingam et des divinite´s hermaphrodites

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moitie´ de son corps, et fut depuis ce temps moitie´ homme et moitie´ femme a ; Brama, dont la statue maˆle du coˆte´ droit, et femelle du coˆte´ gauche, a e´te´ de´crite par Porphyre b ; Schiven c, qui dans une incarnation ne fait qu’un avec Wichnou, devenu sa femme, et se nomme Ardhanari d, ou Astanarrissura e ; Pourrou, fils de Bouddha, passant d’un sexe a` l’autre plusieurs fois en un mois, par l’effet d’une impre´cation ; Ila, fille de Manou et a b

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d e

ROGER, Pagan. In. II, 21. PAULIN., Syst. Brahman., p. 1952. PORPHYR., in Stob. Eclog. phys. I, 4. Schiven e´tait repre´sente´ avec le sein d’une femme, ce qui l’a fait prendre pour une Amazone, par Bardesanes, contemporain d’He´liogabale. HEEREN, Inde, p. 315. WAGN. 1673. Bagavadam, WAGN. 167. SONNERAT, I, 1484.

(suite des variantes de la page pre´ce´dente) sens astronomique. Mone. 406 Ms-notes ; suit, en dessous de cette note, une autre note qui contient une ide´e pouvant se rattacher a` ce que BC vient de dire l’ide´e que la femme est tire´e de l’homme est une de´rivation de l’ide´e que le Cre´ateur, hermaphrodite, s’est divise´ en 2 pour produire le monde. Ms-notes 3 une incarnation ] a` la hauteur de ces mots, une note de travail Vr les notes du 2d vol. 2, p. 439 & 1, p. 440, sur les Dieux hermaphrodites en Gre`ce, Jupiter Metropator5 Ms-texte, col. de gauche 5-p. 240.5 Pourrou ... plus haut ; ] ce passage, appele´ par une croix dans le texte, paraphrase un texte d’Eckstein La notion d’Hermaphrodite se reproduit dans les fables Indiennes pour les eˆtres infe´rieurs aux Dieux. Ila, fille de Manou, & femme de Boudha avoit commence´ par eˆtre garcon. la male´diction de Siva, que ce jeune chasseur troubla dans ses amours le changea en fille. d’Eckst. XXIII. 317. Pourou, fils de Bouddha change plusieurs fois de sexe 〈p〉 en un seul mois, par l’effet de la male´diction de Parvatti. ib. 317. Ms-texte, col. de gauche 5–6 Bouddha ... par ] premie`re version Bouddha qui change en un mois plusieurs fois le sexe, par deuxie`me version : c’est celle de l’imprime´ ; corr. dans l’interl. au-dessus des biffures MC 8 I, 4. ] I. 4. Creutz. I. 167. Ms-notes 1

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Abraham Rogers offene Thür zu dem verborgenen Heydenthum, [...] Aus dem Niederländischen übersetzt. Samt Christoph Arnolds auserlesenen Zugaben [...], Nürnberg : Johann Andreas Endter, MDCXIII. Pour la le´gende d’Esvara et Parvatti voir la seconde partie, chap. II, pp. 239–245. BC fait probablement allusion au commentaire de l’estampe no XXVI (pp. 195–196) du Syste`me Brahman. Mais il n’y est pas question de Brame hermaphrodite. – Voir, pour Porphyre, Ioannis Stobæi Eclogarum physicarum et ethicarum libi duo [...] Arn. Her. Lvdov. Heeren, Gottingæ : Vandenhoek et Ruprecht, 1792 : «In illo antro statua est decem, ut videtur, seu duodecim cubitorum, habitu erecto, manibus in formam crucis extensis, cuius dextera pars faciei virilis est, sinistra muliebris, atque eadem ratione brachium et pes, totumque latus dexterum virile, sinistrum vero muliebre» (t. I, chap. IV, pp. 145–147). Voir Heeren, Ideen, Erster Theil, dritte Abtheilung, Inder, e´d. de 1824, pp. 197–199. Il n’y est pas question d’une nature hermaphrodite. – Wagner insiste sur l’aspect androgyne. Il donne aussi le nom «Ardhanari» (hermaphrodite) que BC cite quelques lignes plus loin. Voir l’e´dition allemande de Sonnerat (Reise nach Ostindien, t. I, p. 148) ou` la double forme de Schiven est mentionne´e : «in [einigen Tempeln] sind sie zusammen vereinigt, und stellen nur Eine Figur dar, die halb Mann und halb Weib ist, und Arta=Narissura genennt wird.» OCBC, Œuvres, t. XVIII, p. 279. Il pense relire les notes b et c.

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De la Religion, IV

femme de Bouddha, jeune chasseur d’abord, mais transforme´ en fille par Schiven, dont il avait trouble´ les amours1 ; le soleil hermaphrodite dans les Ve`des, sous le nom de Savitri a ; la Gayatri, prie`re ineffable par l’efficacite´ de laquelle l’e´poux devient e´pouse, comme dans le symbole scandinave rapporte´ plus haut b ; Crischna, qui se de´clare a` la fois le pe`re et la me`re

a b

COLEBROOKE, on the relig. cerem. of the Hindoos, V. ci-dessus, p. 193, note 23.

XV,

5192.

2 amours ] BC ajoute une note d’Eckst. ib. MC 5 Crischna, qui ] sur une grande feuille dont le verso porte le de´but mutile´ d’un chap. 4 abandonne´ sur les «de´mons infe´rieurs dans les meˆmes religions», colle´e dans la col. de gauche, on lit un long extrait d’Eckstein que BC n’utilisera pas «l’esprit cre´ateur e´mane´ de Dieu a e´te´ envisage´ comme une puissance productive ou femelle, comme une e´nergie vitale qui engendre tout par la parole, figure du verbe, sacrificateur & sacrifie´. l’union de ces deux eˆtres ce´lestes dans l’unite´ divine a e´te´ de´signe´e par la forme de l’hermaphrodite : leur scission et leur se´paration a cause´ la mort du Logos et sa reproduction sous la forme de l’univers, en engendrant la puissance femelle. Lui, le maˆle, re´side comme arche´type, ou intelligence au sein de la nature : Elle, la femelle, y vit comme ame du monde, dans une union intime avec son e´poux. Dans la religion astrale, le Dieu sacrifie´ paraıˆt sous la forme du soleil, et la De´esse qui engendre y figure sous le nom de lune. Ils e´changent aussi leurs roˆles, la divinite´ maˆle devient alors femelle, comme re´ciproquement, car l’intellect et la parole divine sont essentiellement unis & identiques, l’une proce`de de l’autre, de meˆme qu’elle rentre e´ternellement dans le sein de l’unite´, dont elle est sortie pour accomplir l’acte de la cre´ation. La puissance maˆle, a` l’instar de l’Uranus des Grecs, de la lumie`re se´pare´e des te´ne`bres, est aussi, dans un autre sens incorpore´e au fond des Cieux : la puissance femelle, la Gæ des Grecs, l’est de meˆme dans la nature terrestre, dont le principe est dans les abymes. Ils ce´le`brent leur union apre`s une se´paration qui l’a pre´ce´de´e ; les cieux fe´condent la nature qui reproduit les cieux sous une autre forme. Dans l’ordre religieux, type en cela de l’ordre civil, le Dieu male devient le genre humain ; la divinite´ femelle est alors le systeˆme de re´ve´lation, la communaute´ religieuse au sein de laquelle l’autre est venu au monde»4. Ms-texte BC ajoute, sur un papillon colle´ au bas de la grande feuille, un autre extrait d’Eckstein Brama, devenu

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BC paraphrase d’Eckstein qui introduit dans le chap. III de la quatrie`me partie de son essai «De l’e´tat actuel de la France et de l’Europe» un passage sur les bouddhistes (Le Catholique, t. VIII, no XXIII, pp. 312–318). Voir la variante a` la ligne 6. Il faut lire VII, 301. Le renvoi au troisie`me essai de Colebrooke, «On the Religious Ceremonies of the Hindus» (Asiatic Researches, t. VII, London : Vernor et al., 1809, pp. 288– 311), provient d’Eckstein («Du roˆle que joue le soleil», Le Catholique, t. V, no XV, mars 1827, p. 519), comme l’atteste la variante a` la ligne 4 et la faute dans la note. Voir ci-dessus, p. 238, n. a. Le premier extrait est une copie litte´rale d’un passage du compte rendu du tome II de De la Religion que le baron d’Eckstein a publie´ dans le t. I, no II du Catholique (fe´vrier 1826, pp. 204–232, plus particulie`rement chap. II, «D’une pre´tendue opposition entre le fe´tichisme

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Livre X, chapitre X – Du Phallus, du Lingam et des divinite´s hermaphrodites

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de tout ce qui existe a ; Wichnou, auquel une subdivision de ses sectateurs b attribue cette double qua lite´ ; les e´le´ments comme le feu dans les livres Zend1, la lune chez plusieurs nations de l’Asie c ; tous ces objets de l’ado-

a b c

Bhaguat-Gita2. Les Ramanajages. PHILOSTRATE, Vie d’Apollonius de Tyane, III, 343. SPARTIAN. in vita Caracallæ, cap. 7. CASAUBON, Not. ad eundem. V. en ge´ne´ral, sur toutes les divinite´s hermaphrodites, MACROB., Saturn. III, 3. CREUTZ. I, 350–3634.

(suite des variantes de la page pre´ce´dente) Pourousha, ou ge´nie du monde, Pradjapati ou seigneur de l’univers, devient Viraj, sublime hermaphrodite, absorbe & recueilli en lui meˆme. il se se´pare ensuite en deux parts distinct[e]s, l’une male l’autre femelle & se re´unissant, il s’engendre en lui meˆme & par lui meˆme. d’Eckst. XI. 2055. Ms-texte 6 Colebrooke ... 519. ] note copie´e chez d’Eckstein le Soleil, dans les Ve´des, surnomme´ Savitri hermaphrodite. v. Colebrooke, on the religious ceremonies of the Hindus. d’Eckst. XV. 519 Ms-notes, col. de gauche, Colebrooke, ... relig. cerem of the Hindoos. d’Eckst. XV. 519. MC 3 Zend, ] BC accroche une note a` ce mot Creutz. II. 19–20 MC 3-p. 244.1 objets ... monstrueuse ] la moitie´ supe´rieure du folio qui contenait ce passage n’est pas conserve´e MC 5 34. ] 34. Creutz. 444. MC

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successivement et l’astrolatrie», pp. 204–232 ; l’extrait reproduit un passage des pp. 230– 231). La copie soigne´e indique que BC prenait la critique du baron tre`s au se´rieux. Nous savons qu’il voulait y re´pondre par une e´tude de´veloppe´e. BC reproduit une the`se de Creuzer (voir la variante) qui soutient la double nature du feu. Mais dans les livres Zend, le feu est nettement une force virile. Voir Kleuker, Zend-Avesta, t. III, Boundehesch, chap. XVI, p. 88. BC pense a` la lecture IX du Bhaguat-Geeta, intitule´e «Du principal Secret & de la souveraine Science». C’est un des grands discours de Krishna dans cette œuvre, ou` se trouve une se´rie de phrases qui sont pour ainsi dire une auto-de´finition de cette divinite´ : «Je suis le sacrifice ; je suis le culte ; se suis l’encens ; je suis l’invocation ; je suis les ce´re´monies qu’on fait aux maˆnes des eˆtres. Je suis les offrandes ; je suis le pe`re et la me`re de ce monde, le grand-pe`re & le conservateur [...] Je suis la ge´ne´ration & la dissolution, [...]. Je suis l’eˆtre & le ne´ant» (Le Bhaguat-Geeta, ou dialogues de Kreeshna et d’Arjoun, traduction franc¸aise, p. 90). BC cite Philostrate, Vie d’Appolonius de Tyane, livre III, chap. XXXIV. Voir la traduction franc¸aise (Berlin : Decker, 1774), t. IV, pp. 63–64, le chapitre «Damis chez les sages». Voir Historiæ Augustæ scriptores VI, Parisiis : s.e´d., 1620. Le texte de Spartian «Antoninus Caracallus» (pp. 85–90) parle des deux sexes de la lune : «ut qui Lunam fœmineo nomine putaverit nuncpupandam [...] qui marem deum esse crediderit» (p. 88). La note de Casaubon se trouve a` la fin du volume, p. 132a–132b. – Quant a` Macrobe, BC copie la re´fe´rence chez Creuzer, Symbolik, t. I, p. 362, note 58. Il faut corriger l’indication du chapitre et lire : 8. – Le renvoi a` Creuzer concerne le chapitre sur les dieux hermaphrodites, qui finit a` la p. 368. Cet extrait est une copie presque litte´rale tire´e d’un essai de d’Eckstein, «De la nature des

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De la Religion, IV

ration re´unissent les deux sexes a, et, par une suite de cette notion symbolique, les preˆtres changent de veˆtements, et prennent des habits de femme, dans les ce´re´monies institue´es en l’honneur de ces dieux, pour exprimer leur double nature b.

a

b

Il est remarquable que cette notion ait pe´ne´tre´ dans les reˆveries des mystiques chre´tiens. Antoinette Bourignon voyait Adam, doue´ des deux sexes, se fe´condant lui-meˆme, avec des de´lices ineffables, lorqu’il e´tait enflamme´ de l’amour de Dieu1. Les preˆtres d’Hercule, dans l’ıˆle de Cos, ceux de Cybe`le hermaphrodite dans l’ıˆle de Chypre. Macrobe (Saturn., III, 82) ajoute que la statue de cette de´esse e´tait nue avec une grande barbe ; ses preˆtres se de´guisaient en femmes pour leurs sacrifices, et les fide`les qui y assistaient prenaient les habits du sexe oppose´ au leur.

5–7 Il est ... Dieu. ] e´bauche de cette note, dans la col. de gauche, dans les cahiers du texte Antoinette ... voit ... Dieux. Bayle Art. Adam. Ms-texte 7 Dieu. ] Dieu. Bayle, art. Adam. MC 8–11 Les preˆtres ... au leur. ] e´bauche de cette note dans la col. de gauche Les Preˆtres de Cybe`le s’habilloient en femmes. Creutz. I. 364. II. 34–35. dans une feˆte de l’Isle de Cos, les preˆtres d’Hercule lui offroient des sacrifices en se de´guisant ainsi. ib. III. 445. La statue de Cybe`le a` Chypre avoit les attributs des 2 sexes. Macrob. Sat. III. 8. Elle e´toit nue, avec une grande barbe. Serv. in Æneid. II. 632. les hommes lui sacrifioient en habits de femmes, les femmes en habits d’hommes. Ms-texte 8 Cos ] Cos (Creutz. III. 445) MC 9–10 Chypre ... se de´guisaient ] re´daction diffe´rente Chypre (Creutz. I. 364. II. 34–35. Macrob. Saturn. III. 8. ou` il ajoute que la statue ... grande barbe) se de´guisoient MC

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e´le´mens selon les doctrines philosophiques et religieuses de l’Inde», publie´ dans les livraisons du Catholique. Le passage utilise´ ici appartient au chap. XI, «Des e´le´mens conside´re´s sous un point de vue mythologique» (t. IV, no XI, novembre 1826, pp. 192–216, et plus particulie`rement pp. 204–205). La source de cette note est l’article «Adam» dans le Dictionnaire de Bayle, comme l’attestent les variantes. Voir le Dictionnaire historique et critique, seconde e´dition, Rotterdam : Reinier Leers, MDCCII, t. I, pp. 74–77, et plus particulie`rement pp. 75–76, note G, qui reproduit une longue citation d’Antoinette Bourignon. Les commentaires de Bayle ont inspire´ la note de BC. Les variantes aux lignes 8–11 attestent la provenance de ce raisonnement. BC paraphrase les re´flexions qu’il a trouve´es chez Creuzer, Symbolik, t. I, pp. 362–364. Ce dernier y traite des divinite´s androgynes, en citant comme sources les hymnes orphiques et Macrobe, Saturnalia, livre III, chap. 8. Dans le t. II, pp. 32–35, on lit une observation relative aux preˆtres de Cybe`le en ge´ne´ral, qu’on pouvait de´signer par le terme de «Kyretes». Dans le t. III, pp. 444–445, Creuzer parle de la feˆte d’Hercule dans l’ıˆle de Cos. La description de la Cybe`le hermaphrodite provient de Macrobe. Creuzer cite le passage qui correspond a` ce que dit BC dans sa note, sauf que ni Macrobe ni Servius ne disent que le simulacre e´tait nu.

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Livre X, chapitre X – Du Phallus, du Lingam et des divinite´s hermaphrodites

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Mais un emble`me beaucoup plus commun, parce qu’il e´tait a` la fois plus simple et plus facile a` expliquer au peuple, c’e´tait l’or gane ge´ne´rateur isole´ a. Aussi rencontrons-nous partout le Phallus b, ou le Lin gam c, tantoˆt a

b

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c

V. pour l’adoration du Lingam, GUIGNIAUT, p. 145, 147, 149, et pour le Phallus, e´rige´ par Isis, en me´moire de la mutilation d’Osiris, le meˆme, p. 392. Lucien nous de´crit le Phallus colossal qu’on voyait dans le vestibule du temple de Saturne a` Hie´rapolis1. On portait dans les feˆtes d’Osiris, en E´gypte, des statues de ce dieu, avec des Phallus mobiles d’une grandeur e´norme (HE´ ROD. II, 482). On y montrait aussi le Myllos, ou le Cteis, pendant du Phallus. Arnobe explique par une anecdote l’origine de ce culte. Les femmes e´gyptiennes suspendaient a` leur col l’image du Phallus3. Il y avait a` Hie´rapolis deux Phallus, hauts de trois cents coude´es, que Bacchus avait offerts a` Junon. L’Osiris Arsaphe`s e´tait le Phallus de´ployant son e´nergie productrice (KIRCH. Œd. Æg. I4). Voyez sur ce culte, JABLONSKY, Panth. Æg. ZOEGA, de Obelisc. p. 213. CREUTZ. I, 319. GOERR. I, 24–25 ; II, 3695. Se´sostris fit e´riger des Phallus partout ou` il pe´ne´tra. He´rodote, imbu de l’esprit grec, explique ce fait en disant que Se´sostris exprime ainsi le courage viril de ses guerriers, et la laˆchete´ effe´mine´e des peuples qu’il avait vaincus (SCHLEG. W. d. Ind. p. 1206). Plusieurs e´crivains, tre`s-religieux, ont pre´tendu que la croix des chre´tiens avait e´te´ emprunte´e du simulacre du Phallus. (JABLONSKY, Panth. Æg. V, 757. LACROZE, Hist. du Christ. des Indes, p. 431. CARLI, Lettres ame´ric. I, 499 ; II, 504. LARCHER, Not. sur He´rodote, II, 260–272, dern. e´dition.) On trouve sur les modifications progressi ves du Phallus depuis son adjonction aux pierres consacre´es jusqu’a` sa re´union aux statues d’Osiris, des de´tails tre`s-curieux dans l’ouvrage de Dulaure sur le culte du Phallus, p. 498. Denon a vu encore de nos jours le Phallus adhe´rent aux Thermes. Atlas, pl. CXXV, no 159. V. DUBOIS sur le Lingam des Indiens, II, 42010. Ce culte a pris chez eux trois formes

4 Guigniaut ] la source porte Guigniant Rel 4 5–6 Lucien ... Hie´rapolis. ] e´bauche dans la col. de gauche Lingam colossal dans le vestibul du temple de Saturne Lucien. descr. du temple de Hierapolis. Goerres. I. 364. Ms-texte Lucien ... Hie´rapolis. Goerres. I. 364. MC 8–9 On y montrait ... culte. ] e´bauche de cette phrase dans la col. de gauche Le Myllos, pendant du Phallus. parties sexuelles de la femme. Le Cte´is. Anecdote d’Arnobe sur l’origine de culte du Phallus. Mein. Cr. Gesch. 257–260. Ms-notes, On ... phallus & qui repre´sentoit les parties sexuelles de la femme. Arnobe ... de ce Culte. (Mein. Cr. Gesch. 257–260) N 10 Phallus. ] Phallus. (Bayle, Art. Thesmophories) N 10–11 Phallus. ... Bachus ] Phallus. (Bayle. 1 2 3

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BC efface la source de cette information ; voir la variante aux lignes 5–6. BC cite le re´cit d’He´rodote, mais renvoie aussi a` Arnobe, Disputationum adversus gentes libri septem, livre V, chap. 25 (e´d. Amata, pp. 537–538 ; e´d. Orellius, pp. 186–187). La variante nous donne la source de ce de´tail : Bayle, l’article «Thesmophories» (Dictionnaire, t. IV, pp. 348–350, en particulier la note C, pp. 349b–350a), ou` la remarque sur les femmes e´gyptiennes, qui provient des Essais de Montaigne, est donne´e in extenso : «Les dames Egyptiennes, en la feste des Bacchanales, en portoient au col un de bois, exquisement forme´, grand et pesant, chacune selon sa force» (Livre III, chap. V, e´d. de la Ple´iade, Paris : Gallimard, 1950, p. 960). BC renvoie a` la fois a` la planche et a` l’explication de la planche (t. I, p. xl) ; celle-ci reproduit des illustrations d’un manuscrit «en bandelette ou de momie».

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adore´ seul sous une forme monstrueuse, tantoˆt combine´ avec les statues diffe´rentes. Une secte a personnifie´ la force productrice, et choisi pour symbole les parties viriles, une autre celles de la femme, et la troisie`me les a combine´es en une seule repre´sentation. (PATERS. As. Res. VIII, 54–55)1. L’adoration du Lingam est tellement enracine´e (suite des variantes de la page pre´ce´dente) Thesmophories) il y avoit dans le temple de Ve´nus a` Hie´rapolis ... coude´s, que, suivant une inscription, Bacchus Ms-notes 17 tre`s-religieux ] & parmi eux des hommes tre`s religieux Ms-notes 21 des de´tails ] des 〈descriptions〉 de´tails N 21 tre`s-curieux ] curieux Ms-notes 24 V. Dubois ... a pris ] V. Dubois ... 420. ajoute´ dans la col. de gauche L’adoration des principes ge´ne´rateurs a pris Ms-notes

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(suite des notes de la page pre´ce´dente) Cette phrase re´sume ce que BC a trouve´ chez Creuzer, Symbolik, t. I, p. 319, comme il l’indique lui-meˆme. Creuzer cite Jablonsky, Pantheon Ægyptorum pour la (fausse) e´tymologie du mot et Zoega, De origine et usu obeliscorum, pour l’abondance des informations relatives a` la phallogogie e´gyptienne (pp. 213–216). BC ajoute le renvoi a` Görres, Mythengeschichte. Le passage du livre premier (e´d. de 1935, pp. 25–26) est une explication pour ainsi dire psychologique de la gene`se des cultes autour de l’ide´e de la ge´ne´ration, sans rapport avec un culte pre´cis. Le second passage (e´d. de 1935, pp. 179–180) renvoie a` une remarque sur Osiris dans le contexte herme´tique. Les remarques sur le pharaon le´gendaire Se´sostris sont une paraphrase de ce que dit Friedrich Schlegel, Weisheit der Indier, pp. 120–121. He´rodote parle de lui et des statues qu’il fit e´riger dans le livre II, chap. 102. BC cite un passage (§ 14, pp. 75–77) du long chapitre sur Typhon dans lequel Jablonski explique que cette divinite´ repre´sente «spiritum malum, Principio bono oppositum». Il n’y a aucun rapport entre ce passage et les ouvrages cite´s par la suite. Renvoi a` un passage de J. A. Dulaure, Des divinite´s ge´ne´ratrices, ou du culte du phallus chez les anciens et les modernes, Paris : Dentu, 1805, qui parle des «varie´te´s progressives» du simulacre en E´gypte. «D’abord, Phallus simple et isole´, puis Phallus double, triple ; Phallus uni a` un corps quelconque, arbre, borne, terme, etc ; Phallus adhe´rent a` une figure humaine, sans de´signation ; enfin adhe´rent a` celle de´signe´e sous le nom du dieu Osiris» (p. 49). Le renvoi a` Mathurin Veyssie`re La Croze, Histoire du christianisme des Indes, La Haye : Fre`res Vaillant, & N. Prevost, MDCCXXIV, vise une phrase du livre VI, «De l’idolatrie des Indes» : «Il est bon d’observer que la meˆme figure [i.e. le phallus] se voit encore aujourd’hui sur les images de S. Antoine l’E´gyptien, & sur les Habits des Moines qui se disent de son ordre. Cette figure, dont l’Origine est si infame, est aujourd’hui honore´e du beau nom de Croix de S. Antoine» (p. 431). – J. R. Carli, Lettres ame´ricaines, Paris : Buisson, 2 1792. Les deux passages cite´s (I, pp. 498–499 et II, pp. 504–505) parlent du culte du phallus en E´gypte. – Pour Larcher, il faut lire «269–272. Larcher expose dans sa note 179, qui se rapporte a` la feˆte de Bacchus (He´rodote, livre II, 48), une explication des Pamylia en citant deux passages de Plutarque, De Iside et Osiride, l’une sur la naissance de Osiris, l’autre sur la feˆte, au centre de laquelle e´tait une statue d’Osiris avec le triple phalle. La note 182 transcrit un autre passage du meˆme ouvrage de Plutarque (Isis sammelt die Gebeine des Osiris), dans lequel il est dit qu’Isis, ne pouvant pas trouver le membre viril d’Osiris, le remplace par un simulacre. La note se termine par un commentaire de ce que dit La Croze. Dubois, Mœurs des peuples de l’Inde, t. II, renvoi sommaire a` un passage sur le lingam. BC cite l’e´tude de J. D. Patterson, «Of the origin of the Hindu Religion», Asiatic Researches, London, 1808, qui analyse l’origine des trois sectes. – Le renvoi a` Sonnerat vise

Livre X, chapitre X – Du Phallus, du Lingam et des divinite´s hermaphrodites

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des dieux a, les animaux et les pierres. Cette adoration ne renfermait dans l’origine aucune ide´e d’inde´cence. Il y a dans les fables indiennes des traits de pudeur e´trangement associe´s aux hommages rendus a` des repre´sentations qui blessent nos yeux et nos habitudes. Les brames de la pagode de Perwattum racontent qu’une femme, s’e´tant approche´e seule, mais nue, du Lingam pour l’adorer, un bras en sortit qui la repoussa, une voix se fit entendre qui lui de´fendit de se montrer aux dieux dans cet e´tat immodeste b. Mais a` mesure que la simplicite´ des

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dans les mœurs de l’Inde, que les missionnaires ont e´te´ force´s de transiger avec cette idolaˆtrie, et de permettre aux femmes qu’ils convertissent d’en conserver l’image en y re´unissant celle de la croix (SONNERAT, I, 2). Les Indiennes la placent dans leurs cheveux ou la peignent sur leur front (Rog. Pag. Ind. ch. 3). Erlik-Khan, dieu des enfers dans la religion lamaique, indique par un Phallus e´norme la re´union de la reproduction et de la destruction. (PALLAS, Samml. Hist. Nachr. ueb. die Mongol. Vœlkersch1.) As. Res. V. 3132.

p. 244.1–245.2 statues des dieux ... ne renfermait ] simul. des dx les animaux & les pierres, ce qui est une preuve qu’il remontoit aux premiers ages de la religion. car les preˆtres rendant les formes des Dieux stationnaires & prolongeant par conse´quent le culte des prierres & des animaux, ajoient a` ce culte, suivant leus 〈ide´es〉 notions ou leurs alle´gories poste´rieures. L’adoration des organes ge´ne´rateurs ne renfermoit Ms-texte a` la hauteur de ce passage, dans la col. de gauche, une note de travail retrouver dans le 14e livre Copie bleue une magnifique peinture du Culte du Phallus par Poerres. Ms-texte 1–2 pierres. ... ne renfermait ] pierres, ce qui est une preuve qu’il remontait aux premiers ages de la religion : car les preˆtres rendant les formes des Dieux stationnaires, & prolongeant par conse´quent le culte des pierres & des animaux, ajoutaient a` ce culte suivant leurs notions ou leurs alle´gories poste´rieures. L’adoration des organes ge´ne´rateurs ne renfermait MC 2 d’inde´cence. ] d’inde´cence ou d’impurete´. Il ne paraıˆt point, dit le chevalier Jones, BC pre´voit une note As. Res. II. 254–255. Ms-notes ; retour au ms. du texte qu’il soit entre´ dans la pense´e des le´gislateurs ou des peuples de l’Inde qu’aucun acte naturel peut eˆtre obsce`ne. Cette observation s’applique a` tous les peuples dans la 1er pe´riode de la civilisation. Ms-texte d’inde´cence ... paraıˆt, dit ... Jones la note accroche´e a` ce nom est perdue qu’il soit ... peuples perte d’une ligne Cette ... la premie`re pe´riode de la civilisation. Il y a dans les fables Indiennes des traits de pudeur e´trangement associe´es perte de plusieurs lignes MC 12 Rog. ] la source porte Rag. faute d’imprimerie Rel4 13–15 Erlik-Khan ... Vœlkersch.) ] le texte de la note est incomplet (perte de papier) MC

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l’e´dition allemande. – Sur l’ouvrage d’Abraham Roger, voir ci-dessus, p. 239, n. 1. Ici, BC renvoie a` Abraham Rogers Offene Thür, premie`re partie, chap. III, p. 37, qui pre´cise que les femmes d’une secte des Bramines, les Aradhiha, portent le lingam a` une corde autour du cou ou le placent dans leur chevelure. Le symbole qu’elles se peignent sur le front a une autre signification. BC reprend ce qu’il a dit dans un chapitre pre´ce´dent. Voir ci-dessus, pp. 87–88, n. b. Voir l’article du major Kirkpatrick, «Account of the Pagoda at Perwuttum, extract of a Journal by Captain Colin Mackenzie» (Asiatick Researches, London, 1799, pp. 303–314) qui contient a` la page indique´e l’anecdote en question.

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mœurs disparut, le culte du Lingam et du Phallus dut choquer davantage les ide´es de pudeur que de´veloppent les raffinements de la vie sociale : aussi fut-il repousse´ par les peuples dont les institutions inde´pendantes des preˆtres n’e´taient pas frappe´es d’immobilite´ : non-seulement les philosophes grecs, nomme´ment He´raclite et Xe´nophane rejete`rent toujours le culte du Phallusa ; mais la religion publique n’admit jamais ni ce culte ni les divinite´s androgynes b. Adonis, hermaphrodite chez les Syriens, n’e´tait en Gre`ce qu’un beau jeune homme c. Il en fut autrement dans les myste`res. L’E´ros a b

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VOSS, Anti-symb., p. 1951. Nous avons montre´ dans nos pre´ce´dents volumes toutes les divinite´s androgynes apporte´es en Gre`ce par les souvenirs des colonies, et de´pouille´es de cet attribut par l’esprit grec. T. II, p. 389, 407, 431, 440, et t. III, p. 240–2712. ALCIPHRON (III, 37) parle d’une chapelle d’Athe`nes, ou` Herme`s et Ve´nus e´taient repre´sente´s comme unis l’un a` l’autre3. On la nommait la chapelle d’Hermaphrodite, et les veuves y suspendaient leurs couronnes, comme les guerriers dans d’autres temples leurs armes devenues inutiles. Mais ces traces d’usages anciens ou e´trangers, ne changent rien a` la ve´rite´ de notre assertion en ge´ne´ral.

1 choquer ] blesser Ms-texte 3 les peuples ... inde´pendantes ] les 〈quelqu〉 peuples dont les institutions, 〈n’etant pas sous le joug〉 inde´pendantes Ms-texte 4–7 non-seulement ... les chants ] passage remanie´ en tenant compte des notes dans la col. de gauche Les Philosophes Grecs, nomme´ment He´raclite & Xe´nophane rejete`rent toujours le culte du Phallus. Voss. antisymb. p. 195. BC ajoute une autre note, tire´e du cahier des notes, pour re´diger la suite Adonis, hermaphrodite, n’e´toit chez les Grecs qu’un beau jeune homme. Creutz. II. 102 Ms-notes retour aux cahiers du texte Les Cabires re´unissent tous les dogmes sacerdotaux. Tome II. p. 430–433 Ni les chants Ms-texte 7–8 Adonis ... homme. ] version pre´paratoire Adonis, hermaphrodite, n’e´toit chez les Grecs qu’un beau jeune homme. Creutz. II. 102. Ms-notes, col. de gauche 12 271. ] 271. = Creutz. II. 102. MC 1

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BC cite un passage de Johann Heinrich Voss, Antisymbolik (Stuttgart : Metzler, 1824). Dans la seconde partie, il est question de Xe´nophane et d’He´raclite. Le premier parle d’un dieu, grand et non semblable aux hommes, l’autre re´clame pour le nom du dieu non pas une de´signation abstraite, mais le nom de Zeus, le pe`re de tout l’univers (pp. 195–196). OCBC, Œuvres, t. XVIII, pp. 256, 264, 275, 279 et t. XIX, pp. 259–285. Lettres Grecques ou anecdotes sur les mœurs et les usages de la Gre`ce, avec des notes historiques & critiques, par le rhe´teur Alciphron, Amsterdam, Paris : Nyon l’aıˆne´, 1784. Le renvoi a` l’ouvrage d’Alciphron est copie´ chez Heinrich, De hermaphrod. (voir ci-dessus, p. 237, n. 3), comme le prouve la faute. La lettre indique´e (III, 37) ne parle pas d’Herme`s et d’Aphrodite. Heinrich cite (pp. 7 et 32) la meˆme lettre, mais reproduit en fait un passage tire´ d’une autre (I, 29) pour soutenir qu’il y avait a` Athe`nes une chapelle consacre´e a` un nomme´ Hermaphroditos : «je la [=une guirlande de fleurs] portais au temple de l’Hermaphrodite» (p. 358). Au lieu de lire «l’herme d’un dieu androgyne nomme´ Aphroditos» (une Aphrodite barbue), BC comprend «l’union d’Herme`s et d’Aphrodite», ce qui est une erreur. Voir aussi W. H. Roscher, Ausführliches Lexikon der griechischen und römischen Mythologie, t. I, 2, article «Hermaphroditos», col. 2314–2342, et plus particulie`rement col. 2314–2316.

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Livre X, chapitre X – Du Phallus, du Lingam et des divinite´s hermaphrodites

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androgyne a, Mise´, maˆle et femelle, Minerve b, la lune c, Bacchus d, les Cabires e, qui, comme on l’a vu, e´taient le point de re´union de tous les dogmes sacerdotaux, paraissent dans ce culte secret, avec les attributs des deux sexes. Les hymnes orphiques les ce´le`brent, l’auteur des Argonautiques les chante f, et Platon, dont l’imagination bril lante s’emparait de tout pour tout e´purer, y puise le sujet d’une alle´gorie. Mais le Phallus porte´ en pompe dans les orgies, profana rarement les temples publics : les chants de Pindare ni les chœurs de Sophocle ne ce´le´bre`rent jamais ce hideux simulacre : le pinceau d’Apelles ni le ciseau de Phidias, ne l’offrirent jamais aux regards des Grecs. Le sacerdoce, au contraire, combinant cet he´ritage des temps antiques avec un principe dont nous allons traiter tout a` l’heure, s’en fit une arme pour dompter sous un double rapport les penchants de l’homme. a b c

d e f

’ΔιϕυηÁ ς, Hymn. orph. HERMANN, 231. WAGN., 3082. WAGN., 348, V. dans Selden, de Diis Syris, p. 2403, ou dans Henrich, de Hermaphr., p. 17, l’ancienne tradition sur lunus et luna. Hymne orph. 29 et 414. V. ci-dessus, t. II, p. 340–4335. L’auteur des Argonautiques fait de l’E´ros androgyne le premier moteur de sa cosmogonie6.

3–6 dans ce culte. ... Mais ] dans les myste`res, symboles emprunte´s aux religions soumises aux preˆtres. [ ... ] les trouve mots illis les hymnes orphiques, dans le poe`me des Argon[autes, dans les alle´]gories de Platon dont l’imagina[tion] pure sans faute, s’emparaıˆt de tout pour tout e´purer. Mais MC 7 rarement ] jamais MC 11 allons ... l’heure ] traiterons dans le livre suivant MC 12 l’homme. ] l’homme. 〈d’une part〉 Ms-texte 15 17. ] 19 MC 1 2 3

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` BC renvoie a` l’article «Eros» dans Hermann, Handbuch der Mythologie, t. II, pp. 19–30. A la p. 23, on trouve le terme grec διϕυηÁ ς, explique´ dans la note 36. Voir sur Minerve Wagner, Ideen einer allgemeinen Mythologie, pp. 307–308. BC cite les phrases sur la lune androgyne qu’on trouve chez Wagner, Ideen, p. 349. – La deuxie`me re´fe´rence vise le chapitre «De Astoreth», De diis syris, Syntagma II, cap. II, p. 240 de l’e´dition de 1568 : «Græci vel Ægyptii eo genere quo fœminam hominem etiam Lunam Deum dicant, mystice tamen deum dicunt». – Heinrich, Hermaphroditorum ... origines, voir ci-dessus, p. 237, n. 3 et la variante a` la ligne 3. BC devrait renvoyer aux hymnes 30 et 42, le premier adresse´ a` Dionysos, le second a` Mise´. Les deux personnages sont qualifie´s de διϕυηÄ . Voir Hymnes orphiques, e´d. Fayant, pp. 265 et 357. Le renvoi est faux. Il faut lire 430–433. OCBC, Œuvres, t. XVIII, pp. 275–276. Il s’agit des Argonautiques orphiques (4e–5e sie`cle apre`s J. C.) qui connaıˆt un Eros androgyne (v. 14) et qui dit, en de´veloppant une cosmologie (vv. 421–441) que le Chaos ge´ne`re successivement le ciel, la terre, la mer et Eros «l’aıˆne´ de tous, perfection premie`re, Amour, sagesse infinie et toutes les cre´atures qu’il engendra». Voir Les Argonautiques Orphiques, Texte e´tabli et traduit pas Francis Vian, Paris : Belles Lettres, 1987, pp. 75 et 104. Cela correspond a` la tradition. La mythologie grecque connaıˆt Eros comme le premier moteur de la cosmogonie. Voir Nilsson, Geschichte der Griechischen Religion, t. I, p. 621, ou` il est question de la The´ogonie : «Eros ist die treibende Kraft in der Entwicklung des Chaos zum Kosmos». Voir aussi ci-dessus, p. 236, la variante a` la ligne 2, ou` le meˆme passage est de´ja` cite´.

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De la Religion, conside´re´e dans sa source, ses formes et ses de´veloppements. Livre XI. Du principe fondamental des religions sacerdotales.

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6. Une page du manuscrit dit des Cahiers collés. Le folio de grand format est constitué de 14 bandes de papier contenant chacune une ligne du texte principal et découpées dans le manuscrit aux espacements larges. Les notes proviennent du même manuscrit, mais elles étaient écrites d’une manière serrée. Tous les éléments sont collés sur une page de papier de grand format. La numérotation des notes a été ajoutée entre les parenthèses vides. BCU, Co 3246, fo 110.

Chapitre premier. Expose´ de ce principe.

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Les diffe´rences que nous avons remarque´es jusqu’a` pre´sent entre les deux espe`ces de polythe´isme ne sont que partielles : il est temps de remonter au principe, qui fait de ces deux croyances deux syste`mes entie`rement oppose´s. Pour de´couvrir ce principe, nous devons repro duire ici une ide´e de´ja pre´ce´demment expose´e a` nos lecteurs, mais dont nous sommes appele´s maintenant a` de´velopper toutes les conse´quences. La notion du sacrifice, avons-nous dit dans notre premier volume a, est inse´parable de la religion. Exempte d’abord de tout raffinement, cette notion conduit l’homme a` partager avec ses idoles tout ce qui lui est ici-bas ne´cessaire ou agre´able. Si, a` mesure que la civilisation fait des progre`s, l’homme possesseur de choses plus pre´cieuses, offre a` ses dieux une portion de ces choses plus pre´cieuses, c’est toujours dans l’hypothe`se qu’ils en e´prouvent un ve´ritable besoin, et qu’ils font re´ellement usage de ce qu’il leur consacre, comme lui-meˆme fait usage de la part qu’il se re´serve. Mais avec la civilisation que nous pouvons nommer mate´rielle, s’introduit une civilisation morale. Les notions sur la nature di vine se modifient et s’e´pua

P. 169, 2e e´dit1. Il y a dans le syste`me de M. de Maistre, sur les sacrifices, des choses tre`scurieuses, et qui font connaıˆtre parfaitement la the´orie sacerdotale que nous de´crivons ici2. E´tablissement du texte : Manuscrit : BCU, Co 3262/1, pp. 173–181 [=Ms-texte] et Co 3262/2, p. 107 [=Ms-notes] Imprime´ : De la Religion, conside´re´e dans sa source, ses formes et ses de´veloppements, t. IV, Paris : Chez Pichon et Didier, e´diteurs, 1831, pp. 201– 207.

3 Les diffe´rences ] a` la hauteur de ces mots (col. de gauche), note de travail Retrouver dans les livres verds3 sur la perfectibilite´ l’essai ou` je propose que tout est sacrifice, meˆme l’e´goisme. Ms-texte 10–11 cette notion ] cette 〈ide´e〉 notion Ms-texte 12 agre´able. ] BC pensait accrocher ici une note p. 170. Ms-notes Si, a` mesure ] 〈Le chasseur leur fait hommage d’une portion de sa chasse, le peˆcheur d’une portion de sa peˆche〉 Si, a` mesure Ms-texte 1 2

3

OCBC, Œuvres, t. XVII, p. 242. La note supprime´e (voir la variante a` la ligne 12) renvoie au meˆme endroit. Cette observation, a` la fois admirative et pole´mique, caracte´rise parfaitement le texte de Joseph de Maistre, intitule´ E´claircissement sur les sacrifices. Surtout, les deuxie`me et troisie`me chapitres contiennent beaucoup de re´flexions base´es souvent sur les meˆmes sources que BC exploite dans son ouvrage et font e´cho a` son texte, mais sont e´crites dans un esprit contraire a` la the´orie de BC. BC nomme un important dossier de notes sur la religion, le Livre verd. Il s’agit d’un volume

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rent : l’homme s’e´le`ve a` des ide´es moins grossie`res ; il ne suppose plus que les eˆtres qu’il adore aient des besoins physiques semblables aux siens ; il les conc¸oit tout-puissants, il ne peut donc rien leur offrir dans ce monde qui de droit et de fait ne leur appartienne. Ils trouvent hors de lui, sans lui, leur fe´licite´, leurs plaisirs, leurs jouissances a. Alors le sacrifice se pre´sente a` l’esprit sous un nouveau point de vue : il n’est plus me´ritoire par la valeur intrinse`que des offrandes ; il ne saurait l’eˆtre que comme te´moignage de soumission, de de´vouement, de respect b. Dans les religions inde´pendantes des preˆtres, cette manie`re de conside´rer ce sacri fice n’a que des avantages. L’homme en conclut que les dieux attachent plus de prix a` la disposition inte´rieure de ceux qui entourent leurs autels qu’a` la valeur et au nombre des victimes. La morale profite de cette appre´ciation plus noble et plus releve´e ; les ce´re´monies perdent de leur importance ; la vertu, la purete´ du cœur, le triomphe remporte´ sur des penchants vicieux ou des passions fougueuses, deviennent les meilleurs moyens d’obtenir la protection et les faveurs ce´lestes. C’est la doctrine que consacrera le polythe´isme de la Gre`ce, dans la succession des e´crivains poste´rieurs a` l’e´poque home´rique, qu’ils soient historiens ou philosophes, prosateurs ou poe`tes. a

b

De quelle utilite´, demande Socrate dans l’Eutyphron, peuvent eˆtre pour les dieux les pre´sents que nous leur faisons1 ? Dans l’un des Shasters indiens, la raison humaine demande a` la sagesse divine d’ou` vient la ne´cessite´ des sacrifices. Dieu, dit-elle, mange-t-il et boit-il comme les hommes ? Dieu, lui re´pond Brimha, ne mange ni ne boit comme les hommes : mais les biens de ce monde e´tant l’objet de tous leurs de´sirs, Dieu veut qu’ils lui fassent volontiers le sacrifice de ces choses. (Extrait du Dirm shaster2.)

11 inte´rieure ] 〈de ceux qui〉 inte´rieure Ms-texte 14 le vertu ] la 〈purete´〉 vertu Ms-texte 16–17 la doctrine que consacrera ] le spectacle qu’offre Ms-texte 20–21 De quelle ... faisons ? ] note ajoute´e dans la col. de gauche De quelle utilite´ peuvent eˆtre ... faisons ? Socrate dans l’Eutyphron. Ms-texte 22–26 Dans l’un ... shaster.) ] note ajoute´e dans la col. de gauche Dans un ... Extr. du Dirm-Shaster. Pre´f du Bhag. Gita. p. 121–122. Ms-notes

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relie´ vert de 70 fos. Voir OCBC, Œuvres, t. XVI, a` paraıˆtre. L’essai a` rechercher n’est pas identifie´. Le dialogue de Platon est conscacre´ a` exploiter la notion de la pie´te´ (τοÁ οÍ σιον). BC renvoie a` un passage qui se trouve a` la fin du dialogue (14e–15a) : «quel profit les dieux peuvent bien tirer des pre´sents qu’ils rec¸oivent de nous. Ce qu’ils nous donnent, tout le monde le voit. Nous n’avons aucun bien qui ne nous soit donne´ par eux. Mais ce qu’ils rec¸oivent de nous, quel en est pour eux l’avantage ?» (Platon, Œuvres comple`tes, t. I, texte e´tabli et traduit par Maurice Croiset, Paris : Les Belles Lettres, 1985, p. 204). BC simplifie par conse´quent le raisonnement subtil de Socrate. Comme il ressort de la variante a` la ligne 22, BC exploite l’e´dition franc¸aise du Bhagvat Gita et plus particulie`rement la pre´face qui donne un extrait du Ne´ardisen Shaster (voir pp. CXXI-CXXII).

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Livre XI, chapitre I – Expose´de ce principe

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Mais le sacerdoce a sa logique particulie`re, qui, supplantant celle de l’esprit humain, sait mettre a` profit ses erreurs et s’autoriser de ses e´carts. De ce que les dieux doue´s d’une puissance illimite´e, d’une perfection sans bornes, d’une fe´licite´ inalte´rable a, n’ont pas besoin des hommes, leurs ministres n’en infe`rent point que les ce´re´monies sont superflues, et que les vertus suffisent. Ils en concluent que les sacrifices n’ayant de me´rite qu’en raison de ce qu’ils couˆtent a` ceux qui les offrent, il faut raffiner sur la douleur qu’ils causent pour ajouter a` leur me´rite. Tel est le principe dominant des cultes sacerdotaux ; et tout esprit e´claire´ doit facilement en pre´voir les conse´quences. Il impose d’abord a` l’homme le renoncement a` ce qu’il a de plus pre´cieux ; bientoˆt il lui prescrit d’immoler ce que ses affections ont de plus cher ; il lui fait un devoir ensuite d’une re´sistance douloureuse a` ses penchants les plus impe´rieux et les plus le´gitimes : enfin, il le condamne a` la violation de ce qu’il y a de plus sacre´ dans les vertus meˆmes. Alors se succe`dent, par une progression de´plorable, les sacrifices humains, la continence exage´re´e qui fait souffrir la nature, les rites licencieux qui outragent la pudeur, les mace´rations, les pe´ nitences, les mutilations, les tortures volontaires, le suicide, hommages injurieux prodigue´s par des mortels en de´lire a` des dieux qu’ils insultent en croyant les honorer. Certes, jamais exemple plus frappant ne nous fut pre´sente´ des conse´quences toutes contraires qu’entraıˆne le meˆme principe, quand c’est l’intelligence qui le de´couvre et le de´veloppe en liberte´, et quand c’est une caste qui s’en empare et s’en fait un instrument de pouvoir. Le sacerdoce de l’antiquite´ a tourne´ contre l’homme jusqu’a` ses progre`s. Ce qui rend la religion plus pure, plus de´sinte´resse´e, plus sublime, lorsqu’elle reste libre, a servi a` ceux qui se disaient ses ministres, pour la souiller de ce que la fe´rocite´ a de plus barbare, la de´bauche de plus re´voltant. Tout grossier qu’il est, le polythe´isme home´rique vaut mille fois mieux que les cultes vante´s a

Cette perfection, ce pouvoir et ce bonheur, attribue´s aux dieux des religions sacerdotales, ne sont point, comme on pourrait le croire, en contradiction avec les vices, les faiblesses et les infortunes de ces meˆmes dieux. Nous avons explique´ plus haut, p. 41 et 141–1421, par quels subterfuges les preˆtres, force´s de les pre´senter dans leurs fables comme malheureux et imparfaits, les proclament dans leurs doctrines parfaits et heureux.

1 Mais ] 〈Il en est autrement dans les religions sacerdotales〉 Mais ce dernier mot dans l’interl. Ms-texte 2 mettre ] pourtant mettre Ms-texte 4–5 leurs ministres ] les preˆtres Ms-texte 8 me´rite. ] BC pensait accrocher a` ce mot une note ; il l’a de´place´e quelques lignes plus bas et accroche´e au mot «honorer», mais a finalement renonce´ a` l’employer v. Tom. 1. p. 236. 2de edon2. Ms-notes 23–24 de l’antiquite´ a tourne´ ] tourne Ms-texte 25–26 a servi ... disaient ] sert ... disent Ms-texte 29–33 Cette ... heureux. ] note ajoute´e dans la col. de gauche Cette ... faiblesses & les calamite´s qui atteignent ces Dieux. ... explique´ par quels sophismes les Pretres force´s de pre´senter dans leurs fables les Dieux comme ... heureux. Ms-texte 1 2

Voir ci-dessus, pp. 113–114 et 194–195. Voir OCBC, Œuvres, t. XVII, p. 317.

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des nations orientales et me´ridionales. Des dieux e´goı¨stes, orgueilleux, passionne´s, exigeant des hommages qui flattent leur vanite´, des victimes qui re´jouissent leurs sens, laissent la partie morale de l’homme dans son inde´pendance. Les religions sacerdotales violent ce sanctuaire, font du sentiment religieux leur esclave et leur complice ; et ce qu’il y a de plus pur dans ce sentiment, le besoin de se sacrifier a` ce qu’il adore, se transforme dans les mains des preˆtres en une cause de de´lire, d’abrutissement et de cruaute´.

4 violent ] pe´ne`trent dans Ms-texte

7 une cause de de´lire, ] source Ms-texte

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Livre XI, chapitre II – Des sacrifices humains

Chapitre II. Des sacrifices humains.

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Nous avons expose´ dans notre second livre a les causes principales qui ont introduit chez tous les peuples l’horrible pratique des sacrifices humains b : nous disons chez tous les peuples, qu’ils aient e´te´ police´s ou saua b

V. t. I, p. 236, 2e e´d1. On peut consulter, sur les sacrifices humains chez les divers peuples, Euse`be (Præp. lib. IV, p. 1552), qui rapporte un extrait de Porphyre e´nume´rant toutes les nations chez lesquelles E´tablissement du texte : Manuscrits : 1.) BnF, NAF 18823, fo 67 [=MF2] 2.) BCU, Co 3262/1, pp. 182–212 [=Ms-texte] et Co 3262/2, pp. 107–139 [=Ms-notes] 3.) BCU, Co 3246, fos 91–104 [=MC] Imprime´s : 1.) Placard 10 (Co 3425) [=Pl] 2.) De la Religion, conside´re´e dans sa source, ses formes et ses de´veloppements, t. IV, Paris : Chez Pichon et Didier, e´diteurs, 1831, pp. 208–246.

3–5 Nous ... aient e´te´ ] L’horrible pratique des sacrifices humains est commune a` tous les peuples dans la col. de gauche on trouve l’e´bauche d’un ajout inspire´ par la lecture d’Eckstein que BC n’utilisera que partiellement Nous avons expose´ les causes qui ont introduit les sacrifices humains. mais inde´pendamment de ces causes il est une notion qui a favorise´ ces sacrifices chez les nations soumises aux preˆtres, c’est l’ide´e que la terre est souille´e par la domination temporelle. d’Eckst. XI. 2183. suivent deux autres ajouts qui seront utilise´s pour une note, ci-dessous, pp. 283–284, n. b Les Preˆtres traverserent l’home pour arriver au Roi. L’anthropophagie accomplissait reellement [le sacrifice] les mots omis ajoute´s d’apre`s d’Eckstein de l’home les sacrificateurs & les fide`les se nourissoient ensuite de cette chair comme d’une chair sacre´e. c’est le Ne´ramedha des Indiens. ib. 340. Ms-texte 8 nations ] peuples Ms-notes 1 2

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OCBC, Œuvres, t. XVII, pp. 317–319. BC pense au chap. 16 qui commence par un long extrait de Porphyre, De abstinentia (16, 1 – 16, 10 ; t. III, pp. 163–169). L’extrait de Porphyre contient plusieurs exemples e´galement cite´s par BC a` d’autres endroits. La suite de ce chapitre est un montage de citations tire´es de Philon de Byblos, Histoire Phe´nicienne, de Cle´ment d’Alexandrie, Exhortations aux Grecs, de Denys d’Halicarnasse, de Diodore, Bibliothe`que historique, et se termine par une re´flexion sur les pratiques douteuses de la religion israe´lite et l’apologie du vrai dieu qui auraient nomme´ les dieux des paı¨ens de mauvais de´mons. BC copie plusieurs morceaux qu’il a trouve´s dans deux articles du baron d’Eckstein. Le premier passage est tire´ du chap. XII («Des e´le´mens dans leurs rapports avec le culte : du roˆle qu’ils jouent dans les ce´re´monies, les purifications et les offrandes») faisant partie de l’essai «De la nature des e´le´mens selon les traditions philosophiques de l’Inde» (Le Catholique, t. IV, cah. XI, p. 218). La seconde citation provient du chap. III («De la migration des peuples, et des causes de´terminantes de cette migration») de l’essai «De l’e´tat actuel de la France et de l’Europe» (Le Catholique, t. VIII, no XXIII, pp. 339–340).

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De la Religion, IV

vages, anciens ou modernes, si nous classons parmi les modernes ceux chez lesquels le christianisme a` qui nous devons l’abolition de ces ce´re´ces sacrifices e´taient en usage : He´rodote (II, 4 ; IV, 1031) ; Pausanias (Attic. 432) ; Pomponius-Mela (II, 13) ; Solin (cap. 25) ; Lucien (Dialogues4) ; Cle´ment d’Alexandrie (Cohort. ad Gent.) ; Cyrille (Adv. Julian. IV5) ; Ammien-Marcellin (XXV, 8)6 ; Ovide (Epist. ex Ponto. III, 2–557) ; Strabon (liv. VII8) ; Minutius-Fe´lix (passim) ; Meursius (Græcia Feriata9) ; Meiners (de Sacrif. hum. Com. Soc. Goett. VIII, 68 ; IX, 6310) ; Goerres (I, 4211) ; pour les Huns en particulier, Menandre (in Excerpt. legat. p. 6412) ; pour les Islandais, Procope (Goth. II, 1513) ; pour les Goths, Jornande`s (cap. 414). 2-p. 257.1 christianisme ... n’a pe´ne´tre´ ] christianisme n’a pe´ne´tre´ Ms-texte honneur Ms-notes 6 (passim) ] manque Ms-notes 1

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3 usage ]

Le premier renvoi est faux. Dans le chapitre cite´ on parle du calendrier, des douze dieux et de leurs autels, de Mende`s. Le second concerne les habitants de la Tauride qui sacrifiaient les naufrage´s a` Iphige´nie, la fille d’Agamemnon, ou les captifs en leur coupant la teˆte. Le renvoi a` Pausanias, livre I, Attica, chap. 43 pourrait viser le de´but de ce chapitre, ou` il est question d’Iphige´nie, mais pas de sacrifices humains. Voir Pomponius Mela, De situ orbis libri III, livre II, chap. I, vers la fin : «Neuris statum singulis tempus est, quo si velint, in lupos, iterumque in eos qui fuere, mutentur. Mars omnium Deus ; ei pro simulacris enses & cinctoria dedicant, hominesque pro victimis feriunt» (e´d. Gronovius, Lugduni Batavorum : Apud Samuelem Luchtmans et Fil., 1742, p. 135. – Solinus, voir Commentaria in C. Ivlii Solini Polyhistoria, Basileæ : per Henrichum Petri, s.d. [1557], pp. 137–138, cap. XXV, «De Borysthene flumine, ac suis accolis. De natura canum. De Scytharum moribus». On y trouve : «Populis istis deus Mars est. Pro simulachris enses colunt. Homines victimas habent, ossibus adolent ignes focorum.» Lucien, Dialogue des dieux, dialogue III, ou` il y a une allusion aux sacrifices humains (Lucian with an English Translation, e´d. Macleod, t. VII, p. 251 ; un autre passage plus explicite se trouve dans On Sacrifices (e´d. Macleod, t. III, p. 169). – Voir Cle´ment d’Alexandrie, Cohortatio ad gentes, chap. III, qui e´voque les sacrifices humains offerts a` la Diane de la Tauride, et bien d’autres exemples de la meˆme nature. Voir Cyrille d’Alexandrie, Contre Julien, livre IV, chap. 19 et 20 ou` l’on trouve une se´rie impressionnante de sacrifices humains offerts aux dieux (Cyrille d’Alexandrie, Contre Julien, t. II, introduction et annotation par Marie-Odile Boulnois, texte grec par Christoph Riedweg, traduction par Jean Bouffartigue (†), Marie-Odile Boulnois et Pierre Castan, Paris : E´ditions du Cerf, 2016, pp. 359–365). Le chapitre cite´ de l’Histoire d’Ammien Marcellin raconte la retraite de l’arme´e romaine en 363–364 apre`s la traverse´e du Tigre et a` travers la Me´sopotamie jusqu’a` Nisibe´, ville forte. Il n’y est pas question de sacrifices humains. Le passage d’Ovide, Epistolæ ex Ponto, lettre II, adresse´e a` Cotta, raconte une fois de plus l’histoire d’Iphige´nie, de Pylade et d’Oreste, dans laquelle Iphige´nie exerce pendant sa captivite´ la fonction de preˆtresse, charge´e de tuer par l’e´pe´e les victimes. Le livre VII de Strabon parle des peuples vivant dans les re´gions de l’embouchure du Danube. Parmi eux, il de´crit les sacrifices humains des Cimbres. BC renvoie a` M. Minucius Felix, Octavius, § 9, 5 (sacrifice d’un enfant pendant les rites d’initiation) et § 30, 4–5 (sacrifices humains a` Carthage, en Tauride, chez les E´gyptiens, les Gaulois, enfin chez les Romains). – Quant a` Meursius, Græcia feriata, BC pense sans doute a` plusieurs entre´es ; voir p. ex. les articles Διαμαστιγωσις (pp. 85–92, surtout 87–88) ou Λυκαια (pp. 197–198).

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monies effroyables a, n’a pe´ne´tre´ que long-temps apre`s son triomphe dans l’Occident et l’Orient civilise´s. Mais, ainsi que nous l’avons annonce´ dans le meˆme chapitre b, ces sacrifices tombe`rent rapidement en de´sue´tude, dans les pays inde´pendants des preˆtres, et se perpe´tue`rent la` ou` le sacerdoce

a

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En reconnaissant au christianisme cet immense me´rite, nous ne nous e´cartons point de l’ide´e fondamentale dont la de´monstration est le but de notre ouvrage. Le christianisme est un progre`s, le plus important, le plus de´cisif des progre`s que l’espe`ce humaine ait faits jusqu’a` ce jour. En conse´quence, les termes que nous employons ici se re´duisent a` de´clarer que l’homme, en faisant des progre`s, s’affranchit ne´cessairement des opinions et des rites qui souillaient les e´poques de la barbarie et de l’ignorance. Tome I, p. 238, 2e e´dit1.

2–3 annonce´ ... chapitre ] dit ailleurs Ms-texte

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(suite des notes de la page pre´ce´dente) BC cite Meiners «De humanis sacrificiis» (Commentationes societatis regiæ scientiarum gottingensis, Historicæ et philologicæ classis ; pour la premie`re partie, t. VIII, 1785–1786, pp. 68–84 ; pour la deuxie`me, t. IX, 1787, pp. 63–81). Cet ouvrage est une monographie consacre´e exclusivement a` cette matie`re. Görres, Mythengeschichte (I, p. 42 ; e´d. de 1935, p. 35) mentionne seulement en un mot des sacrifices d’enfants qui existaient dans la secte indienne (?) des Sepacy. Me´nandre, le Protecteur, Excerpta de legationibus (PG, t. 113, col. 791–927) parle une fois des Huns, mais jamais de sacrifices humains (col. 849). Procope de Ce´sare´e raconte dans le livre II, chap. XV, qu’il y a des tribus gothes qui sacrifient a` leur dieu de guerre, a` identifier avec Odin, des prisonniers qu’ils tuent d’une manie`re cruelle. Dans la traduction franc¸aise de 1587 que BC a peut-eˆtre eue entre les mains, on lit sur les Thulites : «Souuentefois ils sacrifient aux uns, & aux autres [dieux] toute espe`ce d’Hostie. Mais leur plus grande victime est vn homme, lequel ils auront le premier prins a` la guerre, & le sacrifient a` Mars comme l’estimant le plus grand des Dieux. Et pour faire ceste immolation ils ont ceste coustume que non seulement ils tuent l’Hostie, mais ils la pendent premierement toute viue a` vn arbre, & puis la laissans tomber a` bas la tirent entre les espines, & buissons pour la faire mourir cruellement par telles, & miserables fac¸ons» (Histoire des gverres faictes par l’empereur Iustinian contre les Vandales et les Goths, Paris : Michel Sonnius, M. D. LXXXVII., p. 183). Jornandes : voir Jordanis de Getarum sive Gothorum origine et rebus gestis. Il faut lire «cap. 5», ou` se trouve la phrase qui confirme les sacrifices humains : «Martem Gothi semper asperrima placavere cultura (nam victimæ eius mortes fuere captorum), opinantes, bellorum præsulem aptie humani sanguinis effusione placandum» (e´d. Carol. Aug. Closs, Stuttgartiæ : Impensis Eduardi Fischhaber, 1861, p. 31). OCBC, Œuvres, t. XVII, p. 319.

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exerc¸a l’empire a. Un expose´ succinct de faits incontestables nous convaincra de cette importante ve´rite´. Les Mexicains immolaient des prisonniers, des femmes, des esclaves b. a

b

Cette relation entre la puissance du sacerdoce et les sacrifices humains se fait remarquer de`s l’e´tat sauvage. De tous les ne`gres, ceux de Widdha ou Juidah accordent le plus d’autorite´ a` leurs preˆtres ; aussi sont-ils de tous les plus adonne´s a` ces sacrifices. ROBERTS. (Hist. of Amer1.). A la conse´cration du grand temple du Mexique par Ahuitzal, huitie`me roi de cette contre´e, il y eut soixante a` soixante-dix mille prisonniers de sacrifie´s. (CLAVIGERO, IV, § 21–232.) Dans une autre occasion, cinq mille captifs furent e´gorge´s en un seul jour. Le nombre des victimes humaines se montait annuellement a` plus de deux mille. Les Mexicains les mangeaient, dans de certaines feˆtes, apre`s le sacrifice. Ils faisaient danser devant la statue de Centeotle une esclave reveˆtue des habits de la de´esse, et la tuaient ensuite. Ils offraient trois esclaves a` Texcat-Zoucat, le dieu du vin ; des enfants a` la de´esse des fleurs et aux fleuves, des hommes et des femmes aux montagnes (CLAV. ibid.). Les meˆmes rites se pratiquaient en l’honneur de Vitzliputzli. Les simulacres de plusieurs divinite´s e´taient faits d’une paˆte pe´trie de sang humain. Il y avait d’immenses baˆtiments ou` l’on

3 Les Mexicains ] a` la hauteur de ces mots commence dans la col. de gauche l’extrait d’un article d’Eckstein c’est sur l’autel que l’homme & la divinite´ se rencontrent. La` s’accomplit la myste´rieuse union de l’ame avec son cre´ateur. c’est la` que l’homme souffre & se re´ge´ne´re dans les flammes de l’holocauste. dans la famille primitive, chaque sacrifice e´toit le repas. le sacrificateur communioit avec la Divinite´ communioit ensuite avec le genre humain. chacun, en mangeant de la victime sacrifie´e, se nourissoit de la substance du cre´ateur devenu victime & cre´ature. on sacrifioit l’homme Dieu, & ceux qui assitaient a` ce sacrifice en qualite´ de pontife ou de simples fide`les, communioient avec le me´diateur, se nourissaient de sa divine substance. les ide´es ont profonde´ment pe´ne´tre´ dans le culte de Bacchus, Dieu du vin qui est le sang de l’univers, & dans celui de Ce´re`s, de´esse du pain, qui est la chair de ce meˆme univers. d’Eckst. XXIV. 2473. Ms-texte 5 ou Juidah ] manque Ms-notes 10 jour. ] jour. (Mall. Introd. 119.) Ms-notes 11 les ... feˆtes ] mangeoient quelquefois ces victimes Ms-notes 1

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BC pense a` William Robertson, The History of America, Vienna : F. A. Schraembl, 1787, t. III, pp. 202–204, le chapitre «Religion of the Mexicans». On y lit «Of all offerings, human sacrifices were deemed the most acceptable. This religious belief, mingling with the implacable spirit of vengeance, and adding new force to it, every captive taken in war was brought to the temple, was devoted as a victim to the deity, and sacrified with rites no less solemn than cruel.» Voir aussi la note XXXI (pp. 419–421) qui donne une appre´ciation critique du nombre tre`s e´leve´ de victimes avance´s par les historiens espagnols. Il est possible que BC ait lu cet ouvrage dans la traduction allemande, parue a` Leipzig : Weidmanns Erben und Reich, 1777. Voir Clavigero, Geschichte von Mexico, livre IV, chap. 23, qui parle de l’inauguration du grand temple baˆti par Ahuitzotl, huitie`me roi du Mexique. On sacrifiait, selon l’auteur, pendant la feˆte qui durait quatre jours, entre 64060 et 73344 prisonniers des guerres mene´es depuis l’arrive´e du roi sur le troˆne. Les autres sacrifices rituels sont relate´s aux pp. 390 (repas pre´pare´s avec les corps des victimes), 423–424 (sacrifice en l’honneur de la de´esse Centeotle), 416–417 (victime pour le dieu Tezcatlipoca), 414 (sacrifice de fleurs, non pas d’enfants, a` la de´esse Coatlicue), 430 (feˆte des dieux de l’eau et des montagnes, avec le sacrifice de simulacres et de quelques hommes), 419–420 (sacrifice pour Vitzli-Putzli), 428 (paˆte pe´trie de sang humain). BC cite, avec quelques coupes, un passage de l’article de d’Eckstein «De la the´ocratie primitive» (Le Catholique, t. VIII, cah. XXIII (non XXIV), pp. 225–254) ; la citation se trouve pp. 246–247.

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Les Gaulois honoraient de la meˆme manie`re Teutate`s, Taranis et leur Mercure qu’ils nommaient He´sus a. Les Scandinaves vouaient a` Odin ceux que leur livrait le destin des batailles b. Quand ils ce´le´braient la me´moire des he´ros, ils en informaient leurs maˆnes par des envoye´s mis a` mort sur

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de´posait les teˆtes des victimes. Les Espagnols en compte`rent jusqu’a` cent trente-six mille (LOPEZ DE GOMARA, Hist. des Indes occidentales, ch. 821). Un certain nombre de captives, pare´es comme l’idole, pe´rissait sur l’autel de la de´esse Huirtourhaal, qui pre´sidait aux salines, et le sacrificateur dansait ensuite, leur teˆte a` la main (GOMARA, ibid.) Me´m. de l’Acad. des inscr., XXVI ; SCHLEG. Weish. der Ind., p. 120 ; PLINE, Hist. nat., VI, 22. Ils avaient des simulacres d’osier d’une grandeur colossale, et les remplissaient de victimes pour y mettre ensuite le feu. (CÆS. de Bell. Gall, VI, 163.) Dans toutes ces ce´re´monies, ils recouraient au ministe`re des Druides. (AUG. de Civ. Dei, VII, 154 ; CÆS. loc. cit.) KEYSLER, Antiq. sept., 1345. XXVI

]

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Ms-notes

10 2. ] 2. Pomp. Mela

IV.

2. Ms-notes

BC cite l’ouvrage de Gomara d’apre`s une source non identifie´e. Il ne renvoie probablement pas a` l’e´dition franc¸aise de l’Historia general de las Indias qui a paru sous le titre Histoire generalle des Indes occidentales, et terres neuues, qui iusques a` present ont este´ descouvertes [...] composee en Espagnol par Franc¸ois Lopez de Gomara, et traduite en Franc¸ois par le S. de Genille´ Mart. Fume´e (Paris : Michel Sonnius, 1605) qui traite de la conqueˆte du Mexique. Les faits releve´s par BC se trouvent dans la seconde partie de cet ouvrage. Voir le chap. 41, «Des Dieux qu’adoroient les Indiens de la nouuelle Espagne» (fos 101vo–102ro). La description d’un temple construit avec les craˆnes des victimes se termine par la phrase re´sume´e par BC : «Andrez de Tapia vn iour compta ces testes qui estoient ainsi arrange´es en la massonnerie de ce theatre, & celles qui estoient sur ces soliuves, & en trouua cent trente six mille, sans celles des tours, lesquelles il ne peut co˜pter. C’estoit vn spectacle fort lame˜table pour estre toutes ces testes d’hommes ainsi miserablement assommez en leurs sacrifices.» Le texte de l’e´dition espagnole de 1552 (La conquista de Mexico, chap. «El hossario que los Mexicanos tenian para remembranc¸a de la muerte», fo XLIXro) et celui de la traduction anglaise («The Charnell house or place of dead mens sculles for remembrance of death») sont diffe´rents du texte franc¸ais, mais confirment le nombre des victimes. Voir The Pleasant Historie of the Conquest of the Weast India, now called new Spain, [...] Translated out of the Spanish tongue, by T. N., Anno 1578, London : Henry Bynneman (Reprint Ann Arbor : University Microfilms, 1966), pp. 206–207. – Quant au sacrifice en l’honneur de la de´esse Huitourhaal, nous n’avons pas re´ussi a` localiser le passage en question. Mais le fait que les victimes «estoient reuestuz d’accoustremens diuersifiez selon la deuise de l’idole, auquel on les offroit en sacrifice» (fo 179vo) est bien atteste´. Il faut lire «XXIV». BC fait re´fe´rence au me´moire de l’abbe´ Fe´nel, «Plan syste´matique de la religion & des dogmes des anciens Gaulois», pp. 349–350. – Schlegel rapproche certains dieux des religions de l’Antiquite´ de Shiva et Kali des Indiens, comme par exemple Baal ou Moloch des Puniques, et le dieu Esus des Gaulois : «Dahin gehört auch jener Esus, dem die Gallier solche Ströme von Blut vergossen haben, wie sonst in der alten Welt kein Beispiel gefunden wird, und sich nur in dem Götzendienst der Mexikaner wieder findet.» – Le renvoi a` Pline, Histoire naturelle, livre VI, 2 est faux, nous n’avons pu corriger l’erreur. Ce´sar, De bello gallico : «alii [i.e. d’autres tribus] immani magnitudine simulacra habent, quorum contexta viminibus membra vivis hominibus complent ; quibus succensis circumventi flamma exanimantur homines.» Cette atrocite´ n’est confirme´e nulle part ailleurs. Quant a` Augustinus, De civitate dei, il faut lire livre VII, chap. XIX. St. Augustin ne parle pas

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a` mort sur leurs tombes a. On tirait au sort, et les rois meˆmes n’e´taient pas excepte´s b. Les foreˆts de la Germanie, du temps des Romains, e´taient un a

b

A Lethra, en Se´lande, on sacrifiait tous les neuf ans 99 hommes, autant de chevaux et autant de coqs. DITHM. MERSEB., Chron, I, 121 ; KEYSLER, 159–326 ; MALL., Introd. a` l’hist. du Danem., 1162. KEYSL., 1333 ; LOCCENIUS, Antiq. Suewo-Goth, 154 ; BARTHOL. pag. 323, 393, 3945. On s’efforce inutilement, dit Rühs (Einleit. zur Edda, p. 29–306), de nier les sacrifices humains des Scandinaves ; des te´moignages unanimes les attestent. Dithmar de Merseburg constate

3–5 A Lethra ... coqs. Dithm. ... 116. ] A Lethra en Se´lande ils sacrifiaient ... coqs. la phrase fait partie du texte principal dans Ms-texte ; les renvois sont ainsi conc¸us Mall. introd. 116. Dithm. Merseb. Chron. 1. 12. Keysler Ant. Sept. 159–326. une note renvoyant a` Mallet a e´te´ supprime´e Ms-notes 6 Keysl. ... 15 ; ] ces renvois se trouvent dans Co 3262 a` la fin de l’entre´e pour la note 268, dans la col. de gauche pour ce qui regarde les sacrifices des Rois, v. Keysl. ant. septentr. 134 & Loccen. Antiq. Suevo-Goth. 15. Ms-notes

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des druides, mais des sacrifices humains : «deinde ideo dicit [i.e. Varro] a quibusdam pueros ei [a` Saturne] solitos immolari, sicut a Poenis, et a quibusdam etiam maiores, sicut a Gallis, quia omnium seminum optimum est genus humanum». Ce´sar par contre dit que les Gaulois se servent des druides pour ces sacrifices : «ad ea sacrificia druidibus utuntur». Voir Johann Georg Keyssler, Antiquitates selectæ septentrionales et celticæ, Hannoveræ : Sumtibus Nicolai Foersteri, MDCCXX. BC pense a` la traduction latine d’une citation tire´e de la Hervarar Saga, chap. II : «Heidrekus Rex aras sanguine Haraldi filiique ejus Haldani adspergi fecit, eosque Odino dedit, nec non omnes qui in pugna ceciderant» (p. 134). Le passage de la chronique de Diethmar von Merseburg est cite´ par Johann Georg Keyssler, Antiquitates selectæ septentrionales et celticæ, p. 326 : «Est unus in his partibus (selandia) locus, caput itius regni, Lederum nomine, in pago qui Selon dicitur, ubi post novem annos mense Januario, post hoc tempus, quo nos theophaniam Domini celebramus, omnes conveniunt, & ibi Diis suismet LXXXX & novem homines & totidem equos cum canibus & gallis pro accipitribus oblatis immolant, pro certo, ut prædixi, putantes, hos eisdem placaturos.» Le renvoi a` la p. 159 est une erreur que nous n’avons pu e´claircir. Mallet, chap. VII (e´d. de 1763), sur les ce´re´monies de la feˆte «Juul» (pp. 116–120), avec les de´tails re´sume´s par BC (e´d. de 1755, le chap. «Des offrandes & des sacrifices», p. 86). Dans son ouvrage Antiquitates selectæ septentrionales et celticæ, Keyssler parle d’Odin a` la page indique´e, mais pas de victimes humaines tire´es au sort. L’ouvrage de Johannes Loccenius, Antiquitatum Sueo-Gothicarum, ne parle pas dans le chapitre indique´ (livre II, cap. XV) du culte des morts. C’est au chap. XXV du meˆme livre, «De Funeribus antiqvorum Sveonum, & hodierno sepeliendi ritu», que ce sujet est traite´, mais sans mentionner des messagers tire´s au sort et mis a` mort sur les tombeaux des anceˆtres. Le renvoi a` Thomas Bartholin, Antiquitatum Danicarum de causis contemptæ a Danis adhuc gentilibus mortis libri tres ex vetustis codicibus ineditis congesti, Hafniæ : Literis Joh. Phil. Bockenfoffer, MDCLXXXIX, livre II, cap. V, p. 323 vise la traduction latine d’un passage de Snorri Sturluson, Ynglinga Saga, qui raconte le sort du roi le´gendaire Domaldi ou Domaldr, fils de Visbur. Son re`gne fut marque´ par une se´rie de mauvaises re´coltes, et les sacrifices en automne n’apportaient aucune ame´lioration l’anne´e suivante. La troisie`me anne´e, les chefs du royaume arreˆte`rent que leur roi Domaldr e´tait la cause de la disette et de´cide`rent de le sacrifier, «consultum ducebunt eum pro annonæ ubertate immolare ... ac aras sanguine illius illinere». – Aux pp. 393–394, on trouve la traduction latine d’un extrait de la Hervarar Saga, chap. II, cite´e ci-dessus, n. 5 pour la p. 259).

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objet d’e´pouvante pour les voyageurs, dont les regards e´taient frappe´s sans cesse d’arbres arrose´s de sang et de squelettes suspendus aux branches a. Les habitants de la Sicile apaisaient par de semblables offrandes les Palices,

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cet usage chez les Danois ; Adam de Breˆme chez les Sue´dois ; plusieurs autres e´crivains, chez les peuples du Nord en ge´ne´ral. Les historiens le prouvent par des monuments et des faits positifs. Dans le temple de Thor, e´tait un grand vase d’ai rain, de forme ronde, destine´ a` recevoir le sang des animaux et des hommes. Pre`s d’un autre temple e´tait une pierre, la pierre de Thor, Thorstein, ou` l’on cassait les reins aux victimes. Les Islandais, craignant d’eˆtre force´s de se convertir au christianisme, essaye`rent de de´tourner ce pe´ril en re´unissant un grand nombre d’e´trangers, de captifs, et meˆme de leurs concitoyens qu’ils choisirent pour les massacrer au pied des autels1. Lucis propinquis (apud Germanos) barbarœ arœ, apud quas tribunos ac primorum ordinum centuriones mactavere (au camp de Varus. TACIT. Ann. I, 612.) Les Germains, dit le meˆme auteur, adorent surtout Mercure, en lui sacrifiant des hommes (Germ. 10). Il de´crit les ce´re´monies pratique´es en l’honneur d’Hertha, la Terre ; des esclaves lavaient le simulacre de la de´esse, puis e´taient noye´s dans un lac (ibid. 40). Ce lac e´tait probablement situe´ dans l’ıˆle de Rugen ; car les habitants de cette ˆıle racontent encore aujourd’hui que leurs anceˆtres avaient consacre´ des vierges aux plaisirs du diable, et montrent le lac au fond duquel on les pre´cipitait, quand elles avaient cesse´ de lui plaire.

2 suspendus ... branches. ] mutile´s, suspendus ... branches. 〈Dans Denys d’Halicarnasse les Dieux des Pe´lages d’Etrurie demandent des sacrifices humains.〉 BC pre´voyait une note 〈Den. d’Halic. I. 5. v. aussi le Scholiaste de Pindare Pyth. II.〉 suite du texte biffe´e 〈Ils en obtenoient, en effet, non loin de Rome, dans la foreˆt d’Aricie, ou` le pontife lui-meˆme pe´rissoit souvent sur l’autel.〉 BC pre´voyait une note 〈Lucan. III. 86. VI. 74. Ovide. Me´tam. XIV. 331. Fast. III. 271–272. Serv. ad Æneid. II. 116. On e´gorgeait des enfans devant Larunda, la me`re des Lares. (Macrob.. Sat. I. 7.) On brulait des hommes en l’honeur de Vulcain (Festus). on sacrifiait des filles a` la Junon de Fale´ries (Creutz. II. 471–472) 300 soldats Romains furent immole´s par les habitans de Tarquinies, dans le 4e sie`cle de Rome (Tite Live V. 15.) Les Etrusques arrosaient de sang humain le simulacre de Jupiter Latialis (Lact. I. 21 Tertull. contra gnost. c. 7) Ennius atteste cette pratique, dans un vers souvent cite´. Ille sos (suos) deiveis mos sacrificare puellos.〉3 Ms-texte et Ms-notes 3 apaisaient ... les ] en offroient aux Ms-texte 5 peuples du Nord ] Normans Ms-notes 16 noye´s ] incontinent noye´s Ms-notes 6

BC re´sume les re´flexions de Rühs qui cite, pour appuyer son opinion, outre les sources mentionne´es dans cette note (Diethmar von Merseburg ; Adam von Bremen), encore Wilhelmus Gemeticensis (Guillaume de Jumie`ges, XIe sie`cle), Gesta normannorum ducum, Hist. des Normands., livre II, chap. VI, ainsi que l’ouvrage de Finnur Jo´nsson (1704–1789), e´veˆque islandais, Finni Johannæi Historia ecclesiastica Islandiæ.

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BC cite Adam von Bremen, Gesta Hammaburgensis ecclesiæ pontificum, livre IV, chap. 27, qui donne la description ce´le`bre du temple d’Uppsala et de la feˆte de toutes les tribus sue´doises qui avait lieu tous les neuf ans. C’est dans ce contexte qu’on trouve ceci : «Sacrificium itaque tale est : ex omni animante, quod masculinum est, novem capita offerentur, quorum sanguine deos placari mos est. Novem diebus commessationes et eiusmodi sacrificia celebrantur. Unaquaque die offerunt hominem unum cum ceteris animalbus, ita ut per IX dies LXXII fiant animalia quæ offeruntur» (PL, t. 146, col. 644). BC cite une phrase du livre I, 61 qui parle de la visite de Germanicus sur le champ de bataille ou` Arminius avait combattu Varus et les Romains pre`s du Teutberg (Teuteburger

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fils d’une nymphe et de Jupiter a. Diodore nous raconte qu’Amilcar, assie´geant Agrigente, immola, suivant la coutume des Carthaginois, un enfant a` Saturne b. De nos jours encore les Chinois jettent leurs enfants dans les a

b

Virgile dit, en parlant de ces sacrifices : Placabilis ara Palici. ÆN. IX, 6851. parce qu’ils avaient e´te´ remplace´s par d’autres moins affreux. (SERV. ad eund. loc.) DIOD. XIII, 242. Il jeta cette victime a` la mer, ce qui paraıˆt tenir au culte des e´le´ments. Le meˆme historien nous parle aussi d’une statue de Saturne a` Carthage, dans les mains de laquelle on plac¸ait les enfants destine´s a` l’holocauste, et qui les laissait tomber sur des brasiers ardents. Par une de ces conformite´s qui feraient croire a` l’origine commune de tous les peuples, il y a dans le palais du Samorin, roi de Calicut, une idole qu’on faisait rougir au feu pour placer des enfants dans sa bouche ; et nos missionnaires a` la Chine nous apprennent qu’un prince, qu’ils nomment Vou-ye´, fit construire une espe`ce d’automate, jouant aux e´checs contre les victimes de´signe´es qu’on mettait a` mort si elles perdaient la partie (Me´m. du P. Amyot a` M. de Guignes, inse´re´ dans les Observations sur le Chou-king3).

3 De ... Chinois ] Les chinois, encore aujourd’hui Ms-texte phrase Ms-notes

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4 dit ] ce mot place´ a` la fin de la

Wald). La description des lieux ne concerne pas les usages religieux des Germains, mais l’horreur de cette bataille, de´sastreuse pour les Romains. Les renvois a` la Germania du meˆme auteur visent le chap. IX, ou` il est question de Mercure et des sacrifices humains qu’on lui doit. Les ce´re´monies qu’on doit a` la de´esse Nerthus sont raconte´es dans le chap. XL. L’ıˆle ou` se de´roule cette ce´re´monie est peut-eˆtre Rügen. Le passage biffe´ de la variante est utilise´ pour plusieurs notes. Les renvois sont commente´s a` leurs endroits. Il faut lire «IX, 585». BC reproduit l’observation de Servius (ad. 584, p. 533), qu’on retrouve aussi dans les commentaires modernes. «Hi [i.e. Palici] primo humanis hostiis placabantur, postea quibusdam sacris mitigati sunt, et eorum immutata sacrificia. Inde ergo Placabilis ara ; qui mitigata sunt eorum numina». Voir Diodore, Bibliothe`que historique, livre XIII, chap. LXXXVI : «Hamilcar igitur, Deum formidine vulgus perterritum videns, primum ab eruendis sepulcris abstinet. Hinc Diis supplicationes ritu patrio instituens, puerum Saturno mactat, & Neptuno turbam victimarum in mare demergit» (Diodori Siculi Bibliothecæ libri qui supersunt e recensione Petri Wesselingii [...] nova editio, t. V, Argentorati : Ex typographia Societatis Bipontinæ, anno VII, p. 388). La statue d’airain de Saturne a` Carthage est de´crite dans le livre XX, chap. XIV (meˆme e´dition, t. IX, p. 40). BC cite un des textes du P. Jose`phe-Marie Amiot (1718–1793), dont Jose`phe de Guignes, un orientaliste franc¸ais d’un grand renom, a inse´re´ des fragments dans Le Chou-King, un des livres sacre´s des Chinois (voir ci-dessus, p. 134, n. 4). La «courte dissertation sur les trois Hoang» cite´e dans l’introduction n’est pas le texte auquel BC se re´fe`re ici, mais un morceau sans titre sur les «divinite´s nationales» des Chinois, que le P. Amiot identifie avec les «Esprits». Dans cet extrait on trouve l’histoire du prince ou roi Vou-ye qui, le premier, «fit faire de bois une statue de figure humaine, a` laquelle il donna le nom d’Esprit. Ce prince impie & cruel prenoit plaisir a` faire jouer avec ce pre´tendu Esprit ceux qui avoient eu le malheur d’encourir sa disgrace, & les faisoit mettre a` mort impitoyablement s’ils venoient a` perdre la partie» (p. 347). Le jeu dont il s’agit est «une espe`ce de jeu de dames».

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rivie`res en l’honneur de l’esprit du fleuve a. Au Tonquin, on les empoi sonne b ; a` Laos, on les enterre c. Les Phe´niciens1 pratiquaient des rites non a

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b c

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Me´m. sur les Chinois, II, 4002. Ceci n’est point en contradiction avec ce que nous avons dit de l’athe´isme chinois. Les craintes religieuses e´tant indestructibles, le fe´tichisme et ses pratiques se placent sous l’athe´isme des mandarins, comme sous le panthe´isme des brames. (As. Res. II, 3783.) OVINGTON, Voyage, II, 524. SONNERAT, II, 395. BC pense a` un passage qui se trouve chez Euse`be, La pre´paration e´vange´lique, livre IV, chap. 16 (e´d. des Places, t. III, p. 167) : «Les Phe´niciens, quant a` eux, lors des grandes calamite´s dues aux se´cheresses, sacrifiaient une victime prise parmi les eˆtres qu’ils che´rissaient le plus, et qu’ils de´signaient par un vote comme victime offerte a` Cronos ; les exemples de tels sacrifices abondent dans l’Histoire Phe´nicienne, que Sanchuniathon a e´crite en langue phe´nicienne et que Philon de Byblos a traduite en grec dans un ouvrage de huit livres.» On pourrait ajouter une autre phrase : «On raconte que les Anciens accomplissaient aussi ce genre de sacrifices en l’honneur de Cronos, de meˆme que cela se pratiquait a` Carthage, aussi longtemps que la ville subsista ; et chez les Celtes, jusqu’au moment ou` nous sommes, cela se passe ainsi, et chez d’autres peuples occidentaux, on immole des hommes» (La pre´paration e´vange´lique, p. 179). Le t. II des Me´moires concernant l’histoire, les sciences, les arts, les mœurs, les usages, &c. des Chinois par les Missionnaires de Pe´kin (Paris : Nyon, 1777) contient un long article tre`s critique sur l’ouvrage de C. de Pauw, Recherches philosophiques sur les Egyptiens & les Chinois (pp. 365–574). «Nous nous sommes attache´s a` montrer l’ignorance de l’auteur plus ` la page indique´e par BC, l’auteur anonyme parle des qu’a` combattre ses erreurs» (p. 573). A enfants jete´s dans la rivie`re, avec une courge vide qu’on leur lie au dos, non pas pour attirer le secours de la mise´ricorde sur eux ; «ces infortune´s enfans sont des victimes offertes a` l’Esprit de la rivie`re, d’apre`s des oracles, en vertu d’un sort, ou en exe´cution d’un de´vouement». Et il ajoute : «Ces de´vouemens, au reste, sont rares, & n’ont lieu qu’en certains cantons ou` le fanatisme de l’idoˆlatrie est horrible. Il subjugue tellement les esprits, qu’on re´siste a` la compassion qu’inspirent ces infortune´es victimes, pour ne pas attirer sur soi la cole`re du Dieu a` qui elles sont offertes» (pp. 400–401). BC reproduit un argument de Meiners, Allgemeine kritische Geschichte der Religionen, t. II, p. 98 (Notes de lecture, Meiners, Histoire critique, no 204). BC se re´fe`re a` un discours de William Jones, «The seventh Anniversery Discourse, Delivered 25 February 1790» (Asiatick Researches, t. II, Calcutta : Manuel Cantopher, 1790, pp. 365–381, et plus particulie`rement pp. 377–378). «We find, that the people of China had an ancient system of ceremonies and superstitions, which the government and the philosophers appear to have encouraged, and which has apparent affinity with some parts of the oldest Indian worship : they believed in the agency of genii or tutelary spirits, presiding over the stars and the clouds, over lakes and rivers, mountains, valleys, and woods, over certains regions and towns, over all the elements [...] and particularly over fire, the most brilliant of them : to those deities, they offered victims on high places.» Voir Ovington, A Voyage to Suratt in the Year 1669, New Delhi : Associated Publishing House, 1976, p. 154, ou` il est dit qu’il arrive que des habitants du Tonquin empoisonnent chaque anne´e un enfant innocent pour vivre mieux l’anne´e suivante. BC pense a` cette phrase : «Vermöge einer unmenschlichen Gewohnheit, werden bey dem Bau einer Pagode die Leute, welche am ersten vorbeigehen, in die Grundlage derselben geworfen» (Sonnerat, Reise nach Ostindien, t. II, p. 39).

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moins fe´roces a. Les Perses, dans leur invasion en Gre`ce, ensevelirent vivants neuf jeunes garc¸ons et neuf jeunes filles ; et la reine Amestris, parvenue a` une extreˆme vieillesse, fit mourir ainsi quatorze rejetons des plus illustres familles, en signe d’actions de graces aux dieux infernaux b. On aperc¸oit sur les ruines de Perse´polis des figures enchaıˆne´es preˆtes a` recevoir le coup mortel c. Les E´thiopiens immolaient des hom mes en l’honneur du soleil et de la lune d, les E´gyptiens en haine de Typhon ; et les

a b

c d

EUSE` BE de Ce´sare´e, PHILON Juif1 HE´ RODOT. VII, 114. Le meˆme auteur rapporte (ibid. 180) que les Perses, ayant pris un vaisseau grec, choisirent parmi les prisonniers un jeune homme qu’ils immole`rent sur le tillac2. Photius, dans sa Bibliothe`que, p. 1448, et Sozome`ne, Hist. eccl. III, 2, attestent e´galement les sacrifices offerts a` Mithras3. Voy. de Chardin4. HE´ LIODORE, The´age`ne et Charicle´e5.

12 Mithras. ] Mithras dans tout l’orient. Ms-notes

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Pour Euse`be et Philon, voir ci-dessus, p. 263, n. 1. Le premier passage cite´ d’He´rodote raconte l’histoire des neuf garc¸ons et neuf jeunes filles du pays qu’ils traversaient (celui des He´dones, un peuple thrace), victimes sacrifie´es par les Perses, ainsi que l’histoire d’Amestris. Le second passage concerne l’e´pisode du matelot Le´on de l’e´quipage d’un navire de Troize`ne, fait prisonnier et sacrifie´ par les Perses pendant les guerres de Xerxe`s. BC pense a` Photius, Bibliothe`que, (PG, t. 104, col. 151), ou` il est question du temple de Mithra d’Alexandrie, «in quo gentes olim Mithræ sacrificia facientes, viros, feminas et pueros mactabant». – Le renvoi a` Sozome`ne, Histoire Eccle´siastique, est faux et nous n’avons pas re´ussi a` le corriger. L’allusion de BC vise la description de la procession des sacrifices solennels (pp. 258–272) et plus particulie`rement p. 265 : «il me semble que l’homme, qui est mene´ par la main, est une offrande» (voir la planche LVIII). Il n’est pas question de figures enchaıˆne´es chez Chardin. Voir He´liodore, Les E´thiopiques (The´age`ne et Charicle´e), texte e´tabli par R. M. Rattenbury et Rev. T. W. Lumb et traduit par J. Maillon, Paris : Les Belles Lettres, 21960, t. III, livre X. Le de´nouement mouvemente´ du roman commence par raconter les pre´parations pour un sacrifice humain a` Me´roe´. The´age`ne et Charicle´e sont de´stine´s a` en eˆtre les victimes, mais ils seront sauve´s en re´ve´lant leur identite´ au roi, et les sacrifices humains cesseront de´finitivement. Nous supposons que BC a lu ce roman dans la traduction anonyme allemande (Theagenes und Chariklea. Eine Æthiopische Geschichte in zehn Büchern, Leipzig : in der Dyckischen Buchhandlung, 1767). Il est d’ailleurs assez risque´ d’alle´guer un motif narratif d’une œuvre fictionnelle du 3e sie`cle de notre e`re comme une preuve de l’existence de sacrifices humains chez les E´thiopiens.

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bas-reliefs de leurs temples repre´sentent par divers emble`mes ces pratiques cruelles a. a

V. sur l’immolation des victimes humaines en E´gypte, GOERRES, Pre´f. XXXVIIJ1, et DIODORE, I, 2, 32, avec les notes de Wesseling sur ce passage2. Eratosthe`ne soutient que la tradition portant que Busiris sacrifiait tous les e´trangers qui abordaient en E´gypte, venait de ce qu’on avait attribue´ a` un seul homme le crime de la nation entie`re3. He´rodote nie ces sacrifices. Mais Schmidt (de Sacerd. et Sacrif. ægypt. pag. 276–2794) explique tre`s-bien l’erreur d’He´rodote. (V. aussi LARCHER, Philos. de l’Hist.) MARSHAM, Canon. chronol. pag.

4 soutient ] 〈illis.〉 soutient Ms-notes 1

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7 sacrifices. ] Sacrifices (II. 45.) : Ms-notes

Il faut lire : «XXVIII». BC vise la phrase : «Das ist die feurige Trimurti, der nach dem Zeugniss des Manetho in Idithya in den Hundstagen lebende Menschen, Typhonische genannt, im Feuer geopfert wurden, und die frühe schon die ägyptischen Sonnenkönige gegen den Jehowa Wischnu des Hycsos in seinen früheren selbst noch Schiwaähnlichen Inkarnationen siegreich vertheidigten» (e´d. de 1935, p. 12). Notons que Görres utilise pour sa phrase un passage de Plutarque, De Iside et Osiride, chap. 73, qui, a` son tour, s’appuie sur l’ouvrage Ægyptiaca du preˆtre Manetho de Sebennytos (3e sie`cle av. J.-C.), dont on connaıˆt quelques fragments. Il faut lire «livre I, chap. LXXXVIII». On y lit : «Boves autem rufos immolare fas est, quod hunc colorem habuisse Typhon videatur ; qui per insidias Osirim oppressit, & propter viri cædum ab Iside supplicio affectus est. Homines quoque, aiunt, eiusdem, quem Typhon habuit, coloris, antiquitus ad Osiridis monumentum a regibus mactatos esse» (e´d. de Strasbourg, t. I, p. 259). Dans la note sur ce passage (t. I, p. 455), Wesseling reprend le proble`me des sacrifices humains chez les E´gyptiens. Il critique He´rodote, qui les nie, mais ils sont atteste´s par Porphyre («qui Amosin homines mactandi morem, Heliopoli olim probatum, sustulisse refert») et par Plutarque (De Iside et Osiride, chap. 73) qui cite Manetho, confirmant ainsi l’opinion de Diodore. L’e´dition franc¸aise de la Bibliothe`que historique ajoute a` ce de´bat que du temps d’He´rodote il n’y avait pas de sacrifices humains en E´gypte, mais que «le sacrifice des captifs est figure´ sur les monuments des XVIIIe et XIXe dynasties» (t. I, p. 164, n. 2, avec un renvoi a` J. Yoyotte, «He´ra d’He´liopolis et les sacrifices humains», Annuaire de l’E´cole pratique des Hautes-E´tudes, Ve section). – Notons au passage que le renvoi a` la note de Wesseling prouve que BC a utilise´ l’e´dition de Strasbourg pour son travail. Les re´flexions de BC s’inspirent de Meiners, Allgemeine kritische Geschichte der Religionen, t. II, p. 91. Nous ne savons pas ou` BC a trouve´ le renvoi a` E´ratosthe`ne de Cyre`ne (IIIe sie`cle av. J. C.), directeur de la bibliothe`que d’Alexandrie. Ni Jacoby, FGrHist, no 241, ni Powell, Collectanea Alexandrina, ne connaissent Busiris. La le´gende autour du roi Busiris, qui aurait institue´ des sacrifices humains pour venger la mort d’Osiris existe. Voir Diodore de Sicile, Bibliothe`que historique, IV, 18, 1 et IV, 27, 1 et Apollodore, Bibliothe`que mythologique, II, 5, 11 (e´d. Frazer, t. I, p. 224–225). La le´gende grecque raconte qu’il a e´te´ tue´ par Hercule au moment ou` Busiris voulait sacrifier celui-ci. Frid. Sam. de Schmidt, Dissertatio de sacerdotibus et sacrificiis Ægyptorum quam illustriss. Acad. Reg. Inscr. et lib. artium Lutetiæ Paris. præmio dignam iudicavit a. MDCCLXIV, Tubingæ, apud Joh. Georg. Cottam, MDCCLXVIII. BC renvoie a` la re´flexion de Schmidt sur les sacrifices humains atteste´s par Diodore de Sicile et en particulier au chapitre «De Hominibus ab Ægyptiis antiquissimis temporibus in Sacrificiis mactatis» (pp. 276–278). Voir surtout la note o, p. 278, qui montre l’erreur d’He´rodote (Histoires, livre II, chap. 45) en s’appuyant sur l’ouvrage de Paul Ernst Jablonski, Pantheon Ægyptiorum sive de diis eorum commentarius, Francofurti ad Viadrum : Kleyb, 1750–1752, vol. II, p. 75. C’est le passage indique´ par BC dans sa note (livre III, chap. III, § 8, pp. 72–77).

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De la Religion, IV

Le plaisir qu’e´prouve la divinite´ par le sacrifice d’une tortue, disent les Indiens, ne dure qu’un mois ; celui qu’elle rec¸oit du sacrifice d’un crocodile, dure trois mois ; une victime humaine, lui cause un plaisir de mille ans ; trois victimes humaines, un plaisir de cent mille ans. Le chapitre de sang du Calica-Pouran contient de tre`s-longs pre´ceptes sur les rites a` observer a, et les sculptures d’E´le´phante, pre`s de Bombay, en retracent

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317s1, et JABLONSKY, Panth. Æg. III, c. 3, § 8, ont e´galement prouve´ la me´prise de l’historien grec, et leurs arguments sont confirme´s par les peintures des ruines de Dendera et les bas-reliefs du temple d’Osiris dans l’ıˆle de Phile´. (DENON, Voy. en E´g.2) A l’e´poque ou` les Turcs s’empare`rent de ce pays, on jetait encore dans le Nil une vierge pour obtenir du fleuve une inondation favorable (SHAW, II, 1483. POCOCKE, V, 274). Nice´phore Calliste (XIV, 37) et Sozome`ne (Hist. eccl. VII, 20) racontent longuement un fait arrive´ sous *P+The´odose*-, et qui prouve l’attachement des E´gyptiens a` ces sacrifices, et Plutarque en transmet un autre (liv. des Fleuves) ; mais il le place dans une antiquite´ fort recule´e. On a conteste´ ces derniers te´moignages. Cependant le re´cit de Sozome`ne et surtout celui de Nice´phore nous semblent vraisemblables5. «En prenant la hache, dit le Calica-Pouran, on doit re´pe´ter deux fois l’invocation suivante : Salut, de´esse du tonnerre ; salut, de´esse au sceptre de fer, de´esse aux dents horribles ; BC cite encore John Marsham (Ioannis Marshami Canon chronicus Ægyptiacus, Ebraicus, Græcus et disquisitiones, Franequeræ : Ex officina Leonardi Strick, MDCXCVI). Il faut lire : «Canon chronicus, Seculum XI». Dans le petit chapitre «Amosis rex» (pp. 315–319) on trouve ceci : «Amosis immolandorum hominum consuetudinem sustulit in Heliopoli urbe Ægypti, ut testatur Manetho in libro de Antiquitate & Pietate. [...] Quorum in locum Amosis similes cereos suffici iussit» (p. 315). BC renvoie d’un manie`re assez vague au Voyage dans la Basse et Haute E´gypte de Vivant Denon (Paris : P. Didot aıˆne´, an X, MDCCCII) qui parle de Dendera et de Phile´ aux pp. 161– 169 et 210 et donne dans le vol. II une se´rie de planches. L’argument de BC n’est gue`re appuye´ par le texte de la description. BC renvoie a` Thomas Shaw, Travels, or Observations Relating to the Several Parts of Barbery and the Levant, London : Theater, 1737, 21757. Le fait devrait se trouver dans la section qui parle du Levant (chap. II, § 3) qui traite du Nil. Le seul passage qui parle de l’E´gypte sous les Arabes constate que les E´gyptiens rendent graˆce a` Allah d’avoir envoye´ l’inondation (e´dition de 1735, pp. 436–437), mais ne parle point d’une jeune fille sacrifie´e. Le renvoi a` Pococke est faux. Il faut lire «I. 27». BC cite l’e´dition anglaise de l’ouvrage. Voir la citation du texte anglais ci-dessous, p. 547, n. 1. Le renvoi a` Nice´phore Calliste Xanthopoulos (env. 1256-env. 1335), Histoire eccle´siastique doit eˆtre corrige´. Il faut lire : «livre XII, chap. 37». C’est a` cet endroit que Nice´phore rapporte le fait confirme´ aussi par Sozome`ne (PG, t. 146, col. 874). – Sozome`ne, Histoire Eccle´siastique, livre VII, chap. 20, parle de la crue exceptionnellement abondante du Nil pendant le re`gne de The´odose. On y trouve la phrase «Les E´gyptiens e´taient faˆche´s qu’il ne leur fuˆt pas permis de sacrifier au fleuve selon la coutume ancestrale», ou` BC reconnaıˆt une trace de sacrifices humains. Voir l’e´dition de Guy Sabbah, t. IV (Sources chre´tiennes, no 516), Paris : E´ditions du Cerf, 2008, p. 177. – Le renvoi a` l’ouvrage attribue´ a` Plutarque, De Fluuiorum & Montium nominibus, & de iis quæ in illis inueniuntur, vise le chap. «Nilvs» (e´d. de 1620, p. 1157) qui raconte le sacrifice d’Ægyptus pour assurer la fertilite´ du pays. Notons que la traduction d’Amyot ne connaıˆt pas ce texte.

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l’image a. En Arabie, la tribu des Kore´ishites sacrifiait des filles a` sa divinite´ Alura, et les Dumatiens un adolescent au commencement de l’anne´e b. Un roi captif fut e´gorge´ avec une pompe religieuse par le chef des Sarrasins que les Romains soldaient comme auxiliaires c. Le pe`re de Mahomet avait luimeˆme e´te´ de´voue´ a` ce genre de mort, et cent chameaux avaient rachete´

a b c

mange, de´chire, de´truis, tranche avec cette hache, garrotte avec ces fers, saisis, saisis, bois du sang, bois du sang, consume, consume.» La de´esse des te´ne`bres dirige alors elle-meˆme les coups porte´s par celui qui l’implore, et la perte de ses ennemis est assure´e. Nous avons dit (t. II, p. 1521) que les paroles prononce´es par le sacrificateur attestaient la douceur du caracte`re indien, et la re´pugnance qu’il e´prouvait, meˆme en se condamnant a` pratiquer des rites sanguinaires. Mais le sacerdoce ne veut point que cette concession, faite a` la disposition nationale, s’e´tende de l’homme a` ses dieux : s’il permet au premier de se laisser e´mouvoir par la pitie´, il maintient les seconds dans toute leur fe´rocite´ et leur exigence. As. Res. IV, 424–4342. PORPHYRE3. PROCOP. de Bello Pers. I, 284.

2-p. 268.1 En Arabie ... sa vie. ] passage remonte´ a` l’endroit actuel ; il e´tait place´ dans le ms. apre`s les mots et les Espagnols. ci-dessous, p. 269, ligne 4 En Arabie ... Sarrazins, auxiliaires des Romains de´ge´ne´re´s. Le pe`re ... mort, & ses parens avoient offert 100 chameaux en e´change de sa vie. Ms-texte 9–14 Nous avons ... exigence. ] ce passage, note´ dans la col. de gauche, a` la hauteur de l’ancien de´but biffe´ de cette note, a e´te´ reporte´ a` la fin 〈As. Res. VI. 371– 3915. Les paroles que le sacrificateur adresse a la divinite´, sont dans une telle opposition avec la douceur habituelle des indiens, & avec les hommages que le meˆme sacrificateur rend a` la victimme (voir ci dessus, p. , Tome ) qu’elles trahissent le calcul d’une caste, qui leur imposoit une fe´rocite´ contraire a` leur nation.〉 Ms-notes 1 2

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OCBC, Œuvres, t. XVIII, pp. 134–135, texte et la note b. BC renvoie a` l’article de John Goldingham, «Some Account of the Cave in the Island of Elephanta», Asiatic Researches, London : Reprinted for Vernor and Hood, t. IV, 1807, pp. 407–415. Pour les Dumatiens, allusion a` Porphyre, De l’abstinence, livre II, chap. 56, 6. Voir cidessous, p. 541, n. 2. Allusion a` un passage du chap. XXVIII du deuxie`me livre de l’Histoire de Perse de Procope, ou` il est raconte´ qu’Alamundarus (VIe sie`cle), le chef des troupes sarrasines soutenant l’empire perse, tue un des fils d’Arethas (?–569), roi des Ghassanides et vassal des Byzantins, et le sacrifie a` Aphrodite (al Uzza). Dans la bataille qui suit, c’est Arethas qui sort victorieux. BC ne tient pas compte du contexte historique tre`s complexe de cet e´ve´nement. Alamundarus n’a pas commande´ de troupes auxiliaires des Romains, bien que les Romains aient essaye´ de faire de l’allie´ des Perses un partisan des Romains. Cet e´cart s’explique par le fait que BC transcrit dans son texte une phrase de Gibbon, De´clin et chute de l’empire romain, chap. L, t. II, p. 481a, qui donne cette version de l’e´ve´nement, en renvoyant a` Procope. Voir ci-dessous, p. 280, n. 3.

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sa vie a. Enfin, pour abre´ger ces af freux de´tails, ajoutons en peu de mots que chez les Scythes les captifs b ; chez les Taures, tous les e´trangers c ; chez a

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c

EVAGRIUS, VI, 20. POCOCK. Spec. 72–86. GIBB. c. 501. Nous avons e´tabli dans notre second volume (pag. 49–522), que les Arabes n’e´taient point soumis aux preˆtres. Mais nous avons dit en meˆme temps que les Mages, disperse´s apre`s les conqueˆtes d’Alexandre, avaient porte´ dans le de´sert plusieurs usages sacerdotaux, entr’autres les sacrifices humains. Un auteur d’une e´rudition immense (M. Creutzer), et qui a meˆle´ a` des hypothe`ses beaucoup trop syste´matiques des aperc¸us tre`s-neufs et tre`s-inge´nieux, a voulu, dans son amour pour les cultes symboliques, faire en faveur de la religion de Lycie une exception peu fonde´e3. Il a pre´tendu que ce culte, consistant en pures offrandes de fruits et de gaˆteaux, n’avait jamais e´te´ souille´ par des sacrifices de cre´atures vivantes. Mais pour appuyer cette assertion il s’est vu force´ de de´mentir le te´moignage de Platon, qui dit qu’en Lycie on immolait des hommes (Minos), et il n’a infirme´ ce te´moignage qu’en proposant une correction grammaticale ; triste et facile ressource des e´crivains entraıˆne´s par des suppositions exclusives. HE´ ROD. IV, 72. EUSE` B. Præp. ev. I. HIERONIM. Adv. Jovin. II. VALES. ex Nicol. Damasc. et STOBE´ E, pag. 526. DIO. CHRYS. XIII, 2194. HE´ ROD. IV, 1035.

2 les Scythes les captifs ] les 〈Scythes immoloient leurs〉 chez Scythes captifs correction peu soigne´e dans la col. de gauche ; dans la suite du texte BC oublie de re´pe´ter le mot «chez» Mstexte 6 entr’autres ... humains. ] les sacrifices humains e´toient de ce nombre. Ms-notes 10 fonde´e ] 〈en faveur〉 fonde´e Ms-notes 11–15 Mais pour ... exclusives. ] texte proche de ce passage sur une fiche nume´rote´e 61 Mais ... assertion il a e´te´ force´ de ... te´moignage formel de Platon BC accroche une note Platon, Minos retour au texte principal qui ... exclusives. 14 entraıˆne´s ] emporte´s MC MF2, fo 67 1

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BC cite Euagrios Scholastikos, ÆΕκκλησιαστικηÁ ιë στορι α, d’apre`s Gibbon, De´clin et chute, t. II, p. 481, n. 3 (Gibbon indique le livre VI, chap. 21), de meˆme Pococke, Specimen, p. 87. – ` la p. 72, il n’est pas question du pe`re de Le renvoi a` Pococke, Specimen, est vague. A Mahomet , a` la p. 87, Pococke parle d’Evagrius, et les deux mentions de chameaux dans le texte de Pococke ne concernent pas la famille de Mahomet. – L’anecdote sur le pe`re de Mahomet est e´voque´e par Gibbon au meˆme endroit, qui donne comme source de cette tradition douteuse Jean Gagnier, La vie de Mahomet, Amsterdam : Wetstein & Smith, 1748. OCBC, Œuvres, t. XVIII, pp. 82–84. Voir Creuzer, Symbolik, t. II, pp. 128–132. L’argumentation de BC est fausse. Ce qu’il appelle «une correction grammaticale» concerne un syntagme du dialogue Minos (315c) pour lequel Creuzer souligne qu’il faut bien lire «ε ν τηÄì Λυκαια», ì «a` Lycaia, ville de l’Arcadie», lec¸on conforme a` la tradition manuscrite sans variantes. Minos ne parle point de Lycie, la re´gion de l’Asie mineure qui est au centre des re´flexions de BC. Peu importe en l’occurence que le dialogue Minos ne soit pas de Platon, mais d’un auteur anonyme du IVe sie`cle. Platon parle de sacrifices humains comme d’une fable dans sa Politique, 565d. Les sept renvois de cette note citent des auteurs cense´s attester les sacrifices humains, peuteˆtre l’anthropophagie chez les Scythes. Mais les auteurs cite´s ne confirment pas ce que dit BC. He´rodote parle au livre IV, chap. 72, des ce´re´monies fune´raires des rois chez les

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les He´rules, des vieillards a ; chez les Thraces, des vierges b ; chez les Frisons, des enfants pe´rissaient au pied des autels c ; le sacrificateur des Sarmates buvait le sang des victimes d ; et les meˆmes horreurs e´taient en usage chez les Bretons e et les Espagnols f. a b c d e f

PROCOP. II, 141. STEPH. de Urbib. p. 5122. Nachtraege zu Sulzers Theorie des Schœn. Künste, HELMOLD. Chron. Slav. I, 53 ; II, 124. ATHE´ NE´ E, IV5. STRAB. III6.

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VI,

2, 2893.

2 pe´rissaient au pied ] tomboient aux pieds Ms-texte

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Scythes. Les personnes sacrifie´es ne sont pas des captifs, mais des serviteurs du roi mort l’anne´e pre´ce´dente. – La seule mention des Scythes dans le premier livre de la Pre´paration e´vange´lique se trouve au chap. 4 : «les Scythes ont abandonne´ l’anthropophagie a` cause de la parole du Christ» (t. I, p. 123). – Le passage vise´ chez Euse`be et chez St. Je´roˆme, Adversus Jovinianum, se lit dans le livre II, chap. 7 qui traite de la nourriture des peuples paı¨ens et des rites observe´s pour l’enterrement des personnes de´ce´de´es. «Scythæ eos qui a defunctis amati sunt, vivos infondiunt cum ossibus mortuorum» (PL, t. XXIII, col. 309B). – Henri de Valois, Polybii, Diodori Siculi, Nicolai Damasceni, Dionysii Halicar., Appiani Alexand., Dionis et Ioannis Antiocheni Excerpta ex Collectaneis Constantini Augusti Porphyrogenetæ Henricus Valesius nunc primum Græce edidit, Latine vertit, Notisque illustravit, Parisiis : Sumptibus Mathvrini dv Puis, MDCXXXIV ; BC pense au petit extrait qui parle des Galactophages, «gens scythica», ce´le`bres pour leurs vertus guerrie`res (p. 511). Il n’y est pas question de sacrifices humains. – Le renvoi a` Stobe´e, Eclogarum physicarum et ethicarum libri II, vise le meˆme passage tire´ du Recueil des coutumes de Nicolas de Damas, atteste´ chez Stobe´e : ΙΩΑΝΝΟΥ ΣΤΟΒΑΙΥΟΥ ΑΝΘΟΛΟΓΥΟΝ, Johannis Stobbæi Florilegium ad manuscriptorum fidem emendavit et supplevit Thomas Gaisford, Lipsiæ : In bibliopolio Kuehniano, MDCCCXXIII, chap. V, p. 143. Voir Nicolas de Damas, Histoires, Recueil de coutumes, Vie d’Auguste, Autobiographie, textes traduits et commente´s par E´dith Parmentier et Francesca Prometea Barone, Paris : Belles Lettres, 2011, pp. 194–196 (fragment 104). Notons que le fragment 119, consacre´ aux Taures (une tribu Scythe), dit que ce peuple «ensevelit avec leur roi ses amis les plus proches» (p. 202). – Dans le 13e discours sur son bannissement, Dion Chrysostome e´voque au de´but l’usage des Scythes d’ensevelir avec les rois leurs serviteurs et concubines. BC revient aux sacrifices humains par les Taures dans le sanctuaire d’Iphige´nie, qu’He´rodote raconte dans son histoire des guerres de Dareios contre les Scythes. Procope parle dans le chap. XIV du livre II de l’histoire des Goths des usages religieux des He´rules, un peuple germanique e´tabli a` l’origine en Scandinavie, qui obligeaient ceux qui e´taient malades ou vieux a` prier leur famille de les faire tuer. On engageait un homme qui n’appartenait pas a` cette meˆme famille pour tuer la victime place´e sur un buˆcher ; de`s que le feu s’e´tait e´teint, on enterrait les os. Le renvoi a` Ste´phane de Byzance, De urbibus, semble eˆtre faux. La page du lexique qui est indique´e ne contient pas l’entre´e qu’il faudrait, et les entre´es sur les Thraces que nous avons consulte´es ne mentionnent pas de sacrifices. Le renvoi a` Sulzer est probablement une erreur. L’ouvrage, organise´ comme une encyclope´die avec des articles sur des sujets relatifs aux beaux-arts, ne posse`de pas d’articles sur des faits mythologiques.

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Tournons maintenant nos regards vers la Gre`ce. Nous verrons sans doute, dans les temps les plus anciens, ses habitants se livrer, comme tous les autres peuples, aux abominables pratiques que nous venons de de´crire. Nous ne parlons point ici du sacrifice d’Iphige´nie, ni de celui des filles d’E´rechte´e par leur propre pe`re. Ces e´ve´nements, qui remontent a` l’e´poque mythologique des annales grecques, peuvent eˆtre rele´gue´s au rang des fables a ; mais il est certain que les Arcadiens et les tribus de l’Achaı¨e faisaient pe´rir des hommes sur les autels de Jupiter b et de Diane c. Aux sie`cles les plus recule´s d’Athe`nes, on immolait un homme et une femme lors de l’expiation

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b c

La le´gende d’Iphige´nie ressemble a` celle de Jephte´, on en trouve de pareilles chez toutes les nations, mais toujours a` l’e´poque fabuleuse : elle n’a, par conse´quent, aucun poids historique. Le sacrifice d’Iphige´nie e´tait la suite d’un vœu qu’Agamemnon avait fait a` Diane, en lui promettant l’offrande du plus beau fruit de l’anne´e, et, dans cette anne´e, Clytemnestre e´tait accouche´e d’Iphige´nie. EURIP. (Iphig. in Taur. 20–241.) AUG. de Civ. Dei. XVIII, 17. PORPHYR., I2. PAUS. Achaı¨c., ch. 193.

10–12 La le´gende ... historique. ] phrase ajoute´e dans la col. de gauche Ms-notes

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(suite des notes de la page pre´ce´dente) Il faut lire «I, 52». «Post cesam hostiam sacerdos de cruore libat, ut sit efficacior oraculis capescendis» (Helmoldi presbyteri Bozoviensis cronica slavorum, [...] recognovit Bernhardus Schmeidler, Hannoveræ et Lipsiæ : Impensis Bibliopolii Hahniani, 1909, p. 102). Le second renvoi est faux et n’a pu eˆtre rectifie´. Peut-eˆtre une allusion a` Athe´ne´e, Les Deipnosophistes, livre IV, 160e, ou` il est question de l’usage des Celtes de sacrifier les prisonniers aux dieux. Allusion a` l’usage des Lusitaniens de sacrifier a` Mars des prisonniers, comme le rapporte Strabon dans le livre III, chap. 2, § 3. Voir Euripide, Iphige´nie en Tauride, premie`re sce`ne de la trage´die. Iphige´nie expose dans un grand monologue son histoire et cite les paroles du devin Calchas, arreˆtant son sort. BC cite St. Augustin, De civitate Dei, livre XVIII, chap. XVII, «De incredibilibus commutationibus hominum quid Varro tradiderit». Varron parle de la transformation d’hommes en loups chez les Arcadiens qui avaient la coutume de sacrifier a` leur Jupiter Lycæus des hommes ou de jeunes hommes. Varron cite l’exemple d’un homme change´ en loup qui avait mange´ de ce sacrifice «quod Arcades immolato puero deo suo Lycæo facere solerent». – Quant a` Porphyre, voir De l’abstinence, livre II, chap. 27, 2 : «Depuis lors et jusqu’a` nos jours, il se pratique, en Arcadie lors des Lykaia et a` Carthage en l’honneur de Cronos, des sacrifices humains officiels auxquels tout le monde prend part» (De l’abstinence, texte e´tabli et traduit par Jean Bouffartigue et Michel Patillon, Paris : Belles Lettres, 1979, p. 93). Voir ci-dessous, p. 273, n. 4.

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de la ville a. Dans les premiers temps de Sparte, les Lace´de´moniens mettaient a` mort des enfants et des prisonniers de guerre b. Tel fut le sort de trois cents Messe´niens tombe´s dans les fers. Les Argiens, maıˆtres de Myce`nes, offrirent aux dieux la dıˆme de leurs captifs c. Ces faits malheureusement sont incontestables ; mais il est e´galement de´montre´ que les Grecs repousse`rent de tre`s-bonne heure ces pratiques barbares, et les eurent toujours en horreur. L’ascendant obstine´ des superstitions antiques les y contraignit de temps a` autre, dans des circonstances pe´rilleuses. Ainsi le devin Euphrantide`s forc¸a

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On peut consulter sur les re´miniscences des Athe´niens relativement a` ces sacrifices, The´ophraste (ap. Porphyr. de Abst. II, 5) ; Euse`be (Præp. ev. I1) ; Platon (de Leg2.) ; Cle´ment d’Alexandrie (Strom. VII3) ; Aristophane (in Pace, 1020)4 ; E´lien (Var. hist. VII, 35). PAUS. Lacon. 166. DIOD., XI, 227.

Le renvoi a` Porphyre cite´ dans la Pre´paration e´vange´lique vise un passage de De abstinentia (livre II, chap. 5, 4), en particulier la dernie`re phrase de la citation : «Ensuite, comme ces offrandes sacrificielles aboutissaient a` des transgressions de la part des hommes, il s’introduisit une conception pleine de cruaute´ qui instaurait les plus affreux sacrifices. Si bien que semblaient trouver maintenant leur accomplissement les male´dictions jete´es autrefois contre nous, puisque les hommes e´gorgeaient des victimes et ensanglantaient les autels» (t. I, p. 173). Le seul passage sur les sacrifices humains dans Platon, Νομοι se trouve dans le livre VI (782c, 1). L’Athe´nien commence une partie de son argument en rappelant a` son interlocuteur Clinias qu’on rencontre toujours chez beaucoup de peuples ce cruel usage. Platon en parle d’ailleurs dans la Re´publique (565d, 7) et dans Minos (315c). BC semble citer dans ce contexte la section VI du livre VII des Stromates. Dans la re´flexion intitule´e «Les sacrifices agre´ables a` Dieu» (chap. 30–34), Cle´ment d’Alexandrie rappelle plusieurs exemples pour les sacrifices inutiles pratique´s dans le polythe´isme. (Les Stromates, Stromate VII, introduction, texte critique, traduction, et notes par Alain Le Boulluec, (Sources chre´tiennes, no 428), Paris : E´ditions du Cerf, 1997, pp. 113–129). BC vise un vers de la come´die La Paix ; c’est le secre´taire qui parle : «La Paix, je suppose, n’aime pas les tueries, et l’on N’ensangle pas son autel» (e´d. Conlon, t. II, p. 141). Le renvoi a` E´lien, Histoire varie´e, n’est pas e´lucide´. BC copie cette note chez de Pauw, Recherches philosophiques sur les Grecs, t. II, p. 338. De Pauw parle des flagellations d’e´phe`bes spartiates devant la statue de Diane Orthia pour arroser celle-ci de sang humain. Pausanias ne parle pas de prisonniers de guerre, mais de victimes humaines de´signe´es par le sort, coutume remplace´e plus tard par la flagellation. Diodore, Bibliothe`que historique, Livre XI, chap. LXV (Diodore de Sicile, Bibliothe`que historique, t. VI, Paris : Les Belles Lettres, 2001, p. 86). Dans l’e´dition de Strasbourg (t. IV, an VII, p. 223) on trouve : «Argivi, urbe potiti, cives in servitutem redigunt, & decimam ex illis coactam Deo consecrant.»

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The´mistocle a` verser sur l’autel de Bacchus Omeste`s a le sang de trois jeunes princes, parents du roi de Perse, et tombe´s au pouvoir des Grecs, avant le combat de Salamine b. Mais The´mistocle re´sista long-temps aux injonctions du prophe`te sanguinaire, et ce ne fut que pour ne pas jeter ses soldats dans un de´couragement funeste qu’il permit, a` regret, cette horrible exe´cution. Les sacrifices humains se prolonge`rent en Arcadie plus que dans d’autres contre´es de la Gre`ce c. La civilisation grecque entourait l’Arcadie, et n’y pe´ne´trait pas. Plusieurs vestiges de la religion des premiers Pe´lages s’y conserve`rent. Dans tout le reste de la Gre`ce, les divinite´s dont le culte exigeait des sacrifices humains, e´taient d’une origine e´trange`re. Les rites sanglants de Saturne avaient e´te´ apporte´s par les Phe´niciens d. Nous avons vu que Diane avait eu la figure des divinite´s sacerdotales e ; elle avait parcouru la terre avec une teˆte de taureau f. Les Lace´de´moniens, de leur propre

a b c d e f

Bacchus se nourrissant de chair crue. CREUTZ. III, 3421. PORPHYR. de non edend. animal. Lib. I2. SAINTE-CROIX, des Myste`res3. V. Tome II, p. 402–4034. APOLLODORE, Fragm. ed. HEYNE, p. 4025.

6 en Arcadie plus que ] plus longtems en Arcadie que Ms-texte 16 Porphyr. ... I. ] texte 18 V. Tome ... 403. ] diffe´rent Bayle, Art. Jupiter. Staudlin’s Relig. Mag. I. 490. Ms-notes texte de la note dans la col. de gauche ; elle remplace la note pre´vue dans un premier temps 〈v. T. II. p. . Diane ou Arte´mis se retrouve chez les Germains sous le nom d’Hertha. il y a ressemblance de noms & de rites.〉 Ms-texte et Ms-notes

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Le renvoi a` Creuzer, Symbolik, t. III, p. 342, confirme que BC reproduit une re´flexion de Creuzer. L’e´pithe`te ωÆ μηστης appartient a` Dionysos, et les trois princes perses sacrifie´s par The´mistocle appartiennent a` une tradition en fait de´ja` abandonne´e. Elle subsiste symboliquement dans les feˆtes des bacchanales ou` les femmes qui y participent tuent des chevreuils et mangent la chair crue. Il faut corriger le renvoi et lire «livre II». Le passage en question est le chap. 27, de´ja` cite´ cidessus, p. 270. On pourrait citer aussi le chap. 57 du meˆme livre. Voir Recherches historiques, e´d. de Silvestre de Sacy, t. I, p. 15. OCBC, Œuvres, t. XVIII, pp. 262–263. Allusion a` une note de Heyne qui cite Suidas, ou` on trouve pour Diane l’e´pithe`te «Ταυροπο λον», ou encore la remarque «cum Diana inter Tauros cultu divino habita facile animo occurrat». Notons que l’e´pithe`te revient chez Tite-Live, XLIV, 44 : «Diana, quam Tauropolon nominant».

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aveu, l’avaient emprunte´e de Tauride a, et le premier effet de son apparition avait e´te´ une fre´ne´sie qui avait cause´ des combats acharne´s et des meurtres innombrables. Tous ceux qui s’e´taient approche´s d’elle e´taient devenus furieux, tant elle effrayait des imaginations qui n’e´taient accoutume´es, ni a` ses formes monstrueuses, ni a` ses ce´re´monies re´voltantes b. Pausanias raconte fort en de´tail c comment les sacrifices humains furent institue´s en Arcadie, et comment ils y furent abolis. La tradition qui attribue leur origine aux amours de Me´nalippe et de Cometho, et l’aventure d’Euripyle qui les fit cesser, en rapportant de Troie une statue de Bacchus, sont indiffe´rentes a` notre sujet. Ce qui nous inte´resse, c’est qu’ils cesse`rent presque entie`rement, au retour des Grecs, apre`s le sie´ge de Troie, c’esta`-dire de`s les premiers temps de leur histoire. Le meˆme Pausanias, en parlant de Lycaon qui immola un enfant a` Jupiter Lycæus, ajoute qu’au milieu de la ce´re´monie ce prince coupable fut change´ en loup d. Les Grecs croyaient donc leurs dieux indigne´s de ces rites barbares. Il n’est pas invraisemblable que le huitie`me travail d’Hercule, faisant de´vorer Diome`de roi de Thrace par les cavales que ce prince nourrissait de la chair des e´trangers, est encore une tradition de´figure´e de l’abolition de ces sacrifices. a b

c d

SUIDAS, in Lycurg1. Lucien fait dire a` Junon que Diane, en vivant chez les anthropophages, avait pris leurs mœurs et leurs cruaute´s. (Dial. des dieux, XXI2.) Je ne puis croire, dit Iphige´nie dans Euripide, qu’une de´esse se plaise a` voir re´pandre le sang des hommes (Iphig. in Taur. 385–3913). PAUSANIAS, Achaı¨c. 194. Id. Arc. 25.

2 fre´ne´sie ] 〈de´lire〉 fre´ne´sie corr. dans l’interl. Ms-texte 3 d’elle ] de cet idole Ms-texte 5 re´voltantes ] 〈illis.〉 re´voltantes corr. dans la col. de gauche Ms-texte 15 dieux ] Dieux meˆmes Ms-texte 1 2

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4

5

BC cite un des quatre articles de Suidæ Lexicon, t. II, pp. 470–472, mais aucun de ces articles ne parle de la Diane de Tauride. Lucien, Dialogue des dieux. Il faut citer le dialogue XVIII entre He´ra et Le´to, ou` He´ra reproche a` Le´to que sa fille, Artemis, s’est installe´e chez les Scythes. Elle tue les visiteurs et les de´vore «like the Scythian cannibals» (Lucien, e´d. Macleod, t. VII, p. 325). BC renvoie a` la plainte et aux reproches qu’Iphige´nie adresse a` Artemis, un des passages les plus connus de la trage´die d’Euripide qui se trouve au de´but de cette pie`ce. Le morceau e´voque le sort de son fre`re Oreste et la le´gende de Tantale qu’elle qualifie de «fable» en contradiction avec le caracte`re des dieux. Pausanias, Achaia, chap. XIX, raconte l’origine des sacrifices humains au temple d’Artemis a` Aroe¨ (la le´gende de Melanippus et de Camaetho) et la le´gende d’Eurypylos qui les fit cesser en arrivant dans cette ville avec une boıˆte myste´rieuse qu’il avait trouve´e apre`s la chute de Troie. BC renvoie au chap. II du livre sur l’Arcadie qui parle de Lycaon, me´tamorphose´ en loup en sacrifiant un enfant.

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De la Religion, IV

Elle repose a` la ve´rite´ sur un anachronisme, puisqu’elle fait remonter a` une e´poque beaucoup trop recule´e cette abolition, qui ne date, pour Lace´de´mone, que du temps de Lycurgue. Mais cet anachronisme n’en de´montre que mieux le de´sir qu’avaient les Grecs de rejeter dans une antiquite´ fabuleuse des rites dont ils rougissaient pour leurs anceˆtres a. Tous les sacrifices qui de loin en loin se reproduisent dans l’histoire grecque s’expliquent par des haines nationales, des dangers pressants, en un mot des circonstances qui sortaient de l’ordre habituel b. Tout de´montre que ce n’e´tait pas une institution consacre´e, mais tantoˆt une de´plorable imitation a

b

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Lactance (Inst. div. I, 21) pre´tend qu’a` Salamine, dans l’ıˆle de Chypre, on immolait un homme, jusqu’au re`gne d’Adrien, en me´moire d’un sacrifice pareil institue´ par Teucer (PORPH. de Abst. II, EUSE` B. Præp. ev. IV, 161). Mais la date seule que Lactance assigne a` l’abolition de ce sacrifice prouve que le fait est faux : les Romains, qui s’oppose`rent, de`s le temps de Ce´sar, aux sacrifices humains partout ou` leurs armes pe´ne´tre`rent, ne les auraient pas tole´re´s en Chypre plus d’un sie`cle apre`s. Tacite, qui parle de la construction du temple de Salamine par Teucer, ne dit rien de cette anecdote (Annal. III2), et saint Cyrille (in Julian. IV.) affirme qu’il cessa sous le re`gne de Diphilus, qui substitua un taureau a` la victime humaine3. Dans la trage´die d’He´cube, sujet national, ou` il s’agissait de la gloire d’Achille, le he´ros grec par excellence, tout l’inte´reˆt se porte sur Polixe`ne, et l’indignation sur ses bourreaux4. IV.)

]

IV.

Bayle, art. Teucer) Ms-notes

Renvoi a` Porphyre, De abstinentia, cite´ par Euse`be. Le passage vise´ se trouve dans le livre IV de la Pre´paration e´vange´lique, chap. 16, 2–3 (e´d. des Places, t. III, p. 165). Ce chapitre est entie`rement consacre´ aux sacrifices humains. Quant au sacrifice de Salamine, on renvoie dans l’e´dition cite´e a` l’e´dition du t. II de Porphyre, De l’abstinence par J. Bouffartigue (p. 306, n. 169 ; the`se de 3e cycle, Paris, 1972), qui qualifie ce re´cit de confus et peu vraisemblable. – Le renvoi a` Lactance vise le livre I, chap. 21, 1. BC reproduit la premie`re phrase de ce chapitre. Le chap. 62 du livre III des Annales se termine par la phrase qui mentionne Teucer, le fils de Telamone, qui a construit a` Salamine le temple de Jupiter. Il n’y est pas question de sacrifices humains. Notons, comme l’atteste la variante a` la ligne 22, qu’une des sources pour ce renvoi est Bayle. BC cite Cyrille d’Alexandrie, Contre Julien, livre IV, chap. 20, ou` il est question du temple de Salamine. C’est la` qu’on sacrifiait des hommes a` Agraulis. «Cette coutume subsista jusqu’a` l’e´poque de Diome`de apre`s quoi elle subıˆt une modification, en ce sens que l’homme fut de´sormais sacrifie´ a` Diome`de» (Cyrille d’Alexandrie, Contre Julien, t. II, p. 363). Le texte, une citation de Porphyre, ne parle ni de Diphilus ni de la substitution d’un taureau a` la victime humaine. Les phrases qui le terminent de´crivent l’exe´cution cruelle. BC a trouve´ le nom de Diphilos chez Porphyre, livre II, chap. 55. Le personnage n’est pas identifie´. «Ce rite fut aboli par Diphilos, roi de Chypre qui ve´cut a` l’e´poque de Se´leucos le the´ologien» (e´d. Bouffartigue, p. 117). La note de l’e´diteur (p. 226) explique que l’indication chronologique (vers 310 ?, entre 181 et 116 ?) est «confuse et probablement non historique». Euripide, He´cube, trage´die consacre´e au sort d’He´cube, la vieille reine de Troie, e´pouse de Priame, tue´ dans les murs de la ville de´truite. De ses nombreux enfants ne lui restaient que

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d’usages e´trangers, tantoˆt l’e´garement d’un fanatisme subit et momentane´. L’horreur des Grecs pour ces coutumes e´clate dans tous les re´cits de leurs historiens. Me´ne´las est blaˆme´ par He´rodote d’avoir offert aux vents contraires deux enfants E´gyptiens a. Age´silas est loue´ par Plutarque de ce qu’il n’avait consacre´ a` Diane qu’une biche au lieu d’une vierge, bien que les habitants s’e´criassent que la de´esse exigeait des hommes et non des animaux b. Les pre´sages ayant e´te´ menac¸ants avant la bataille de Leuctres, les devins de The`bes propo se`rent a` Pe´lopidas d’apaiser les dieux par des victimes humaines ; mais il rejeta leur conseil c. Partout les Grecs substitue`rent a` ces pratiques des rites moins sanguinaires. Les enfants de l’Achaı¨e se rendaient aux bords d’un fleuve en habits de victimes et de´posaient aux

a b c

HE´ ROD. II, 119. V. la note de Larcher1. PLUTARQUE, Vie d’Age´silas2. PLUTARQUE.3

7–8 ayant ... d’apaiser ] ayant [e´te´] mot omis par inadvertance dans un sacrifice que Pe´lopidas offrait avant ... The`bes leur propose`rent d’apaiser Ms-texte

1

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Cassandre, la prophe´tesse, et Polyxe`ne, qui l’accompagnaient dans l’esclavage grec. Polyxe`ne, demande´e en holocauste par l’esprit d’Achille, se voue librement a` la mort sur le tombeau de ce he´ros. La description du sacrifice est donne´e par Thaltybios (He´cube, vv. 518–582). L’exe´ge`se de la trage´die par BC est contestable, voire aberrante. Le passage cite´ d’He´rodote vise un e´le´ment de la fable de l’He´le`ne e´gyptienne, le sacrifice d’enfants par Me´ne´las qui s’est rendu chez Prote´e, le fondateur de la 20e dynastie des pharaons, pour re´clamer He´le`ne et les tre´sors. Il obtint ce qu’il de´sirait, mais ne pouvant repartir a` cause des vents qui empeˆchaient son de´part, il sacrifia deux enfants e´gyptiens et dut s’enfuir, poursuivi de la haine des E´gyptiens. Larcher ajoute a` ce re´cit la note 407 (p. 422 de l’e´dition de 1802), ou` il est dit : «Ces sortes de sacrifices [d’enfants] e´toient ordinaires en Gre`ce, mais odieux en Egypte.» L’e´pisode dont il est question dans la note de BC concerne la pre´paration de la guerre des Grecs sous la direction des Spartiates et de leur roi Age´silas contre les Perses. Le reˆve que fait Age´silas a` Aulide, la ville ou` Agamemnon, obe´issant aux mages, pre´para l’immolation d’Iphige´nie, souligne le paralle`le entre la guerre de Troie et celle qui s’annonce. Pour le sacrifice qui devait eˆtre fait, Age´silas choisit, contre les re`gles en vigueur en Boe´tie, une biche, ce qui provoqua la cole`re des preˆtres. Le refus de Pe´lopidas de sacrifier une jeune fille avant la bataille de Leuctre est raconte´ dans le § 21 de la vie de Pe´lopidas, en e´tablissant le paralle`le avec l’histoire d’Age´silas dont

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De la Religion, IV

pieds de Diane les couronnes d’e´pis dont leurs teˆtes e´taient de´core´es a. A Sparte, les jeunes garc¸ons e´taient battus de verges sur les autels de la meˆme de´esse, qui, disait-on, accoutume´e a` des hommages sanglants, voulait en conserver du moins une faible image b. D’autres tribus de race dorique rougissaient de meˆme d’un peu de sang le tombeau de Pe´lops c. Bacchus avait approuve´ que les The´bains remplac¸assent par une che`vre la victime humaine, qu’ils lui offraient pre´ce´demment d, et nous ne serions pas e´loigne´s de reconnaıˆtre un adoucissement de meˆme nature dans la ce´re´monie annuelle de Leucade, ou` l’on pre´cipitait du haut du promontoire un homme qu’on s’efforc¸ait de sauver, en lui attachant des ailes pour le soutenir et en pre´parant des barques pour le recevoir e.

a

b c d e

PAUS. Ach. 20. Cet e´crivain remarque lui-meˆme cet adoucissement progressif. Le roi de la sauvage Arcadie, Lycaon, dit-il, avait re´pandu le sang d’un enfant sur les autels de son Jupiter. Cecrops ordonna qu’on de´poserait des gaˆteaux sur l’autel du Jupiter Athe´nien (Arcad. 33)1. MEURSIUS, Miscellan. Lacon. III, 42. PAW, Rech. sur les Grecs, II, 337–3383. PAUSAN. Bœot. 84. STRAB. X, 3115.

10–11 attachant ... revevoir. ] de´but du placard 10 Pl Bayle, art. Leucade. Pl, Ms-notes

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19 Strab. ... 311. ] texte diffe´rent

BC a parle´ dans la note pre´ce´dente. L’argument avance´ est que les dieux refusent des sacrifices humains, puisqu’ils ne ressemblent pas a` Typhon ou aux Ge´ants. Pausanias raconte, dans le livre VII, chap. 20, cette coutume et dit expresse´ment que les enfants portaient les couronnes qui autrefois de´coraient les victimes destine´es a` la de´esse Arte´mis. – La le´gende de Lycaon se lit dans le livre VIII, chap. 33. Il faut lire «II, 14». Meursius, Miscellanea Laconica libri IV, parle vers la fin de ce chapitre des sacrifices en l’honneur de la Minerve Chalciœcæ, la Minerve ve´ne´re´e a` Sparte dans un temple d’airain, et il cite le lexicographe Hesychius d’Alexandrie : «Amphistere, principium sacrificiorum, Lacedæmonii» (e´d. de Pufendorf, Amstelodami : apud Judocum Pluymer, MDCLXI, p. 165). Cornelius de Pauw, Recherches philosophiques sur les Grecs, Berlin : Decker, 1788, parle a` l’endroit indique´ des flagellations qui avaient succe´de´ aux sacrifices humains, en particulier de la coutume de certaines tribus doriques du Pe´loponne`se «qui versoient e´galement le sang des enfans sur le pre´tendu tombeau de Pe´lops, car c’est ainsi qu’on nommoit cet autel d’horreur» (t. II, p. 338). Pausanias, livre IX, chap. 8, raconte l’histoire du sanctuaire de Dionysos Aigobo´los (tueur de che`vres) que BC re´sume en supprimant les e´le´ments e´tiologiques. Voir Strabon, livre X, chap. 2, § 10 ou` il raconte cette anecdote. La variante a` la ligne 13 ajoute le renvoi a` l’article «Leucade» du Dictionnaire de Bayle, (e´d. de 1702, t. II, pp. 1802-

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Nous voyons chez les Grecs, ainsi qu’a` Rome, des actes de de´vouement volontaire, qui ont une fausse analogie avec les sacrifices humains. Lorsque E´pime´nide purifie Athe`nes, Cratinus, le plus beau des jeunes gens, s’offre pour racheter de son sang les fautes de ses concitoyens a : Pausanias, ge´ne´ral des Spartiates b, oblige ses guerriers a` rester immobiles, jusqu’a` ce que Callicratidas ait pe´ri. Thrasybule ordonne aux Athe´niens d’attendre qu’un des leurs pe´risse avant d’attaquer les trente tyrans c. Codrus se fait tuer pour le salut de son peuple. Deux Lace´de´moniens se pre´sentent pour eˆtre livre´s a` Xerxe`s, en expiation de l’assassinat commis par les Grecs sur les en-

a b c

ATHE´ NE´ E, XIII, 21. PLUTARCH2. XE´ NOPH., Hist. grecq.,

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III,

4, § 113.

1-p. 278.8 Nous voyons ... le´gal. ] manque Pl 5 oblige ] avec ce mot commence le f o 91 du ms. MC 6–7 Trasybule ... tyrans.] Les Athe´niens, marchant contre les trente tyrans ne les attaquent qu’apre`s le tre´pas de Trasybule. Ms-texte, MC

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1803), probablement la source de la note de BC. Bayle cite, dans sa note B, le passage de Strabon et de´crit ce qu’il appelle «la ce´re´monie de la pre´cipitation». Athe´ne´e, Δειπνοσοϕισται (Les Deipnosophistes), livre XIII, 602c. La purification le´gendaire d’Athe`nes par le the´ologien cre´tois Epime´nide (mentionne´ par Platon, Lois, I, 642d) a` la suite du sacrile`ge commis contre Kylon et ses partisans, tue´s au pied des autels de l’Acropole, est raconte´e par Athe´ne´e comme un e´pisode du temps d’Epime´nide, ce qui est faux. BC paraphrase Plutarque, Vie d’Aristide, ch. XVII, qui raconte cet e´pisode de la bataille de Plate´es. Pausanias, le ge´ne´ral des Spartiates, n’ayant pas rec¸u des oracles de signes favorables pour la bataille, ordonne a` ses troupes de s’abstenir des combats, pendant qu’il pre´sente de nouveaux sacrifices. Les troupes perses passent a` l’attaque, et Callicrate`s (BC se trompe de nom), un des plus braves combattants des Lace´de´moniens, meurt sous les fle`ches des ennemis. Plutarque parle avec beaucoup d’admiration du courage des Lace´de´moniens qui attendent la fin des sacrifices avant de passer a` la bataille. Xe´nophon, ëΕλληνικα (Les Helle´niques). Il faut lire II, 4, §§ 13–19. D’apre`s Xe´nophon, ce n’est pas Thrasybule qui ordonne a` ses guerriers de rester tranquilles, mais le devin qui leur annonce la victoire s’ils suspendent l’attaque des ennemis jusqu’a` ce que l’un des leurs trouve la mort. Apre`s avoir parle´ ainsi, le devin se pre´cipite sur les ennemis et tombe sous les coups des adversaires.

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De la Religion, IV

voye´s de Darius a. A Rome, Curtius se pre´cipite dans un gouffre b, et De´cius appelle sur sa teˆte les pe´rils dont la re´publique est menace´e c. Mais ces actes de de´vouement sont l’effet accidentel et spontane´ d’un patriotisme digne d’admiration, meˆme dans ses e´carts, l’acte he´roı¨que et volontaire d’un enthousiasme porte´ a` l’exce`s, par l’exce`s des dangers de la patrie. Il n’y a point la` de victimes traıˆne´es a` l’autel, en vertu d’un usage re´gulier, d’un devoir dont l’accomplissement pe´riodique fasse partie du culte le´gal. Au contraire, dans les Gaules, soumises au sacerdoce, ces sacrifices subsiste`rent toujours, malgre´ la se´ve´rite´ des lois romaines d. Les Druides a b c d

HE´ RODOTE, VII, 1341. TIT.-LIV., VII, 62. Ib. V. 283. TERTULLIEN, Apolog. 94 EUSE` B. Præp. ev. Ann. XIV, 30. SUET. in Claud. c. 306.

IV,

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15–175. LACTANT. Div. inst. I, 21. TACIT.

3 de´vouement sont ] de´vouement que nous apercevons de loin en loin, dans le Polythe´isme inde´pendant des Preˆtres, sont Ms-texte 7 devoir dont ] devoir 〈auquel〉 dont MC 9-p. 279.15 Au contraire ... existaient. ] suite du placard 10 Pl 1

5

BC n’utilise que le de´but de l’histoire de Sperties et de Bulis raconte´e par He´rodote. Ces deux Lace´de´moniens de noble origine acceptent de se sacrifier pour expier le sacrile`ge commis par les Spartiates en tuant les ambassadeurs de Darius. Xerxe`s qui les rec¸oit a` Susa leur permet de retourner a` Sparte, en refusant d’accepter le sacrifice pour expier la ville (Livre VII, chap. 134–137). La le´gende populaire sur M. Curtius qui se pre´cipite dans un gouffre ouvert sur le forum, interpre´tant l’oracle qui annonc¸ait que le gouffre se refermerait apre`s le sacrifice de ce qui e´tait le plus grand bien de Rome. Curtius pensait que l’oracle de´signait le courage du guerrier, et se pre´cipite tout arme´, sur son cheval, dans le gouffre (Tite-Live, Ab urbe condita, livre VII, chap. 6.1–6 ; Varron, De lingua latina, V, XXXII, 148). Il faut lire X, 28.12–18. Le sacrifice de Publius Decius Mus dans la bataille de Sentinum (295 av. J.-C.) contre les E´trusques et les Gaulois est de´cisif pour la victoire des Romains. BC choisit dans les chap. 26–30 le passage dans lequel De´cius incite les Romains a` la bataille en annonc¸ant sa mort. BC cite Tertullien, Apologeticum, chap. IX, 5, ou` il est question, apre`s l’e´vocation des sacrifices humains en Afrique jusqu’au proconsulat de Tibe`re, des Gaulois : «Maior ætas apud Gallos Mercurio prosecabatur» (Corpus Christianorum, t. I, Quinti Septimi Florentis Tertulliani Opera, Pars I, Apologeticum, Turnholti : Brepols, MCMLIV, p. 102). BC renvoie a` Euse`be, Præparatio evangelica, livre IV, chap. 14, 1–6. De larges extraits de Porphyre se trouvent dans ce livre qui traite des sacrifices (La pre´paration e´vange´lique, e´d. des Places, t. III, pp. 147–153). Lactantius dit, au de´but de son chap. 21 du livre I, de Divinæ institutiones, que les Gaulois apaisaient les dieux Esus et Teutates par du sang humain (e´d. Xaverius, t. I, p. 315). – BC renvoie a` Tacite, Annales, livre XIV, chap. 30, qui raconte la conqueˆte de l’ıˆle de Mona, situe´e au nord-ouest du Pays de Galles, pendant la guerre britannique sous Ne´ron (60 apr. J.-C.). «præsidium posthac [apre`s la bataille] inpositum victis, excisique luci sävis superstitionibus sacri : nam cruore captivo adolere aras et hominum fibris consulere deos fas habebant». – Quant a` Suetone, il faut lire «c. 25». De vita Cæsarum libri VIII, «Divus

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profite`rent, pour les perpe´tuer, de l’inde´pendance que rendaient aux peuples asservis les guerres civiles a. Cet usage se prolongea chez les Francs et les Goths jusqu’au huitie`me sie`cle b, et ce qui est horrible, mais constate´, les chre´tiens leur vendaient des esclaves pour eˆtre immole´s c. De nos jours encore, malgre´ les efforts des Anglais vainqueurs, les Indiens jettent dans le Gange des hommes qui sont de´vore´s par des requins. Les familles avides de poste´rite´ s’engagent a` restituer de la sorte aux dieux le cinquie`me des enfants qui leur sont accorde´s : et des matelots europe´ens ont vu, dans ces dernie`res anne´es, des parents impitoyables repousser dans les flots un jeune garc¸on qui se sauvait a` la nage d. L’on doit conclure de ces faits, a` ce qu’il nous semble, que, bien que les sacrifices humains aient eu d’autres causes que les calculs du sacerdoce, il a ne´anmoins toujours e´te´ dans l’esprit et dans l’inte´reˆt sacerdotal d’introduire ces sacrifices la` ou` ils n’existaient pas, et de les maintenir la` ou` ils existaient. a

b c d

LUCAN. Phars. I, 1501. Les Francs, dit Procope, observent encore une grande partie de leurs anciennes superstitions. Ils font pe´rir des hommes en l’honneur des dieux, et pratiquent des choses exe´crables (Goth. II, 152). GROTIUS, Hist. goth. p. 6173. GREGOR. III Papæ epist. ad Bonif. 1224. As. Res. V, 26–295.

1 perpe´tuer ] renouveller Ms-texte 3–5 Cet usage ... immole´s. ] passage ainsi que les notes ajoute´s dans la col. de gauche Ms-texte 4 horrible, ] horrible 〈a` dire〉, MC 12–13 bien que ... il a ] bien 〈que le sacerdoce n’aıˆt pas e´te´ l’inventeur des sacrifices humains〉 que les sacrifices humains aient eu d’autres causes que les calculs du sacerdoc[e], ces 13 mots dans l’interl. il a MC 14–15 d’introduire ... existaient. ] de perpe´tuer ces sacrifices. Ms-texte

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Claudius» : «Druidarum Religionem apud Gallos diræ immanitatis et tantum civibus ab Augusto interdictam penitus abolevit» (chap. XXV, 5). Le renvoi n’est pas exact. Il se peut que BC pense renvoyer aux vers 444–451 du livre premier de De bello civili, qui disent que le retrait des troupes fait retourner les peuples de la Gaule a` une vie de liberte´. Au chap. XV du livre II de l’histoire des Goths, il n’est pas question des Francs, mais des Thulites, une peuplade germanique qui vivait en Scandinavie. Voir ci-dessus, p. 257, n. 13. Voir Historia Gothorum, Vandalorum, & Langobardorum : ab Hugone Grotio partim versa, partim in ordinem digesta, Amstelodami : Apud Ludovicum Elzevirium, 1655. Grotius, partant d’un vers de Virgile («Gradivumque patrem Geticis qui præsidet arvis», E´ne´ide, livre III, 35 ; Gradivus est un nom attribut inexplique´ pour Mars, en usage chez les Romains), dit ceci : «Quem Martem Gothi semper asperrima placavere cultura. Nam victimæ ejus mortes fuere captorum, opinantes bellorum præsulem aptius humani sanguinis effusione placandum.» BC copie cette re´fe´rence chez Meiners, Allgemeine kritische Geschichte der Religionen, t. II, p. 93. Voir les Notes de lecture, «Histoire critique», no 196. BC cite de la premie`re lettre du pape Gre´goire III a` Boniface le point VIII : «Hoc quoque inter alia crimina agi in partibus illis dixisti, quod quidam ex fidelibus ad immolandum paganis sua venundent mancipia quod ut magnopere corrigere debeas, frater, commonemus, nec sinas fieri ultra : scelus est enim et impietas» (Migne, PL, t. CXXXIX, col. 578). Le renvoi est faux et n’a pu eˆtre corrige´. Voir pourtant ci-dessous, p. 548, n. 1.

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De la Religion, IV

Premie`rement le sacerdoce, nous avons de´ja pu nous en convaincre, ne renonce a` aucun usage ancien. En second lieu, les preˆtres auxquels e´tait naturellement confie´e la mission de de´signer les victimes, se trouvaient, et nous l’avons remarque´ ailleurs a, investis par la` du droit de vie et de mort. Ils atteignaient le souverain sur son troˆne b, le ge´ne´ral vainqueur au milieu de son arme´e. On conc¸oit l’avantage qui re´sultait d’un droit pareil. Ce qui indique a` la fois le calcul sacerdotal et l’influence du sacerdoce, c’est que d’ordinaire il se met a` l’abri par une exception spe´ciale. «Qu’aucun Brame n’offre son propre sang, dit le Calicapouran. Il ne faut jamais sacrifier un Brame ou le fils d’un Brame c.» Les grandes calamite´s triomphent quelquefois de cette exception. Dans les temps de guerre, de peste ou de famine,

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c

Tome II, p. 95 et suiv1. Chez toutes les nations soumises aux preˆtres, dit un e´crivain, qui, tout de´voue´ a` la cause de cette caste, laisse ne´anmoins e´chapper quelquefois des aveux remarquables, ceux-ci ont toujours enseigne´ que la terre e´tait souille´e par la domination temporelle, et dans les sacrifices humains ils traversaient l’homme pour arriver au Roi. (Catholique, no 11, p. 218 et 3402.) As. Res. I, 371–3813.

1–2 le sacerdoce ... ancien. ] il est dans cet esprit de ne renoncer a` aucun usage, une fois introduit dans la religion. Pl, Ms-texte 6 On ... pareil. ] 〈Les un mot illis.〉 On ... l’avantage qu’un droit pareil assuroit au Sacerdoce. Ms-texte 6–7 Ce qui ... c’est que ] Un indice a` la fois de son calcul & de son influence c’est que MC 7 indique ... sacerdoce. ] de´montre a` la fois & son calcul & son influence a` cet e´gard. Ms-texte 13–17 Chez ... 340.) ] une e´bauche de cette pole´mique contre d’Eckstein se trouve dans Co 3262 au de´but du chap. II ; voir cidessus, p. 255, la variante aux lignes 3–5. Ms-texte

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OCBC, Œuvres, t. XVIII, pp. 105–107. BC pense a` un passage de l’essai de d’Eckstein intitule´ «De la nature des e´le´mens selon les doctrines philosophiques et religieuses de l’Inde», chap. XII, «Des e´le´mens dans leurs rapports avec le culte : du roˆle qu’ils jouent dans les ce´re´monies, les purifications et les offrandes», Le Catholique (t. IV, no XI, pp. 217–226). La phrase vise´e est celle-ci : «En premie`re ligne de ces ce´re´monies imposantes [= les sacrifices royaux] se place toujours l’ide´e sacerdotale de la purification de la terre, cause´e par la domination temporelle.» Le second renvoi a` une p. 340 est faux. La provenance du passage sur les sacrifices humains provient d’un essai non identifie´ du baron. Le renvoi est faux. BC cite William Coates Blaquiere, «The Rudhira´dhya´ya˚, or Sanguinary Chapter ; Translated from the Calica Puran», Asiatic Researches, London : Vernor and Hood et al., t. V, 1799, pp. 371–391, et plus particulie`rement pp. 376 et 381–382.

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les Indiens, par une suite du principe meˆme que nous exposons ici, choisissent les Brames pour les immoler, comme des victimes plus pre´cieuses a. a

SONNERAT, I, 1891. Les Albanais, au rapport de Strabon (IX), immolaient aussi leurs preˆtres2, et l’on mettait a` mort, sur le tombeau du roi du Mexique, son directeur spirituel. (ACOSTA, Hist. nat. et mor. des Ind. occid3.)

1–2 choisissent ] a` la hauteur de ce mot commence dans la col. de gauche un long ajout inspire´ par un essai de Patterson que BC n’utilisera pas 〈une alle´gorie ou un symbole qui se glisse tre`s naturellement dans les religions sacerdotales & qui y introduit des rites affreux c’est la personification du jour & de la nuit, du tems & de l’e´ternite´. Il est tre`s simple de concevoir le tems comme produisant conservant & de´truisant.〉 Shiven fut identifie´ avec le tems. On le peignit avec trois yeux, pour exprimer le pre´sent, le passe´ & l’avenir. un croissant sur son front de´notait la mesure du tems par les phases de la lune. un serpent en guise de collier indiquoit la meˆme mesure d’apre`s les anne´es. un 2d collier de cranes humains repre´sentait la destruction des ge´ne´rations humaines. un trident dans sa main droite rappelait sa triple qualite´ de cre´ateur, conservateur, & destructeur. Dans son autre main un clepsydre de´signait d’une autre manie`re de calculer le tems. A la destruction universelle, quand le tems lui meˆme n’existe plus, on le peindra foule´ aux pieds par Cali, l’e´ternite´. Il est prive´ de son trident, de son croissant, & de ses colliers, pour montrer que son empire a cesse´. (Patterson As. Res. VIII, 56–574) Ms-texte 2–3 pre´cieuses. ] pre´cieuses que les individus des autres Castes. Pl, ... Membres ... Ms-texte 4–6 Sonnerat ... occid.) ] renvoi en note ; la note dans le texte principal Pl texte diffe´rent Sonnerat. I. 186. Il en allait de meˆme chez les Albanais qui habitoient entre le Pont-Euxin & la mer Caspienne. Ils immoloient sur leurs autels leurs preˆtres eux-meˆmes. (Strabon. XI) la suite dans la col. de gauche On sacrifioit au Mexique, sur le tombeau du Roi, le preˆtre qui avoit e´te´ le plus spe´cialement attache´ a` sa personne. Acosta. hist. nat. & mor. des Ind. occid. Ms-notes 4 IX ] XI MC 1

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BC renvoie a` un passage de l’ouvrage de Sonnerat (Reise nach Ostindien, t. I, p. 189) qui ne parle pas de sacrifices humains, mais de´crit la feˆte du charriot en l’honneur de Schiven, ou` il arrivait que des pe`res et me`res se lanc¸ent avec leurs enfants sous les roues de ces charriots ` la fin du de procession. La variante a` la ligne 4 indique probablement la bonne page. A chap. IV intitule´ «Von den Tempeln», il est question du sacrifice volontaire du premier des Brames d’un temple, sacrifice qu’on exige de lui si les prie`res, les jeuˆnes et les expiations ne suffisent pas pour e´touffer la cole`re des dieux. Il faut lire Strabon XI, 1, § 38. Les Albanais sont un peuple nomade de l’Asie habitant un pays caucasien situe´ entre la mer caspienne a` l’est, la Ge´orgie actuelle a` l’ouest et le fleuve Kura au sud, le Cyrus des ge´ographes anciens. Strabon et Ptole´me´e sont les seuls auteurs de l’Antiquite´ qui parlent des Albanais. Quant au sacrifice des preˆtres des Albanais, BC ne re´sume pas tout a` fait correctement ce que raconte Strabon. Il s’agit en fait d’un homme qui se distingue par ses rapports mystiques et prophe´tiques avec la de´esse Luna. On le saisit, le lie par une chaıˆne sacre´e, le nourrit magnifiquement pendant une anne´e pour le sacrifier a` la de´esse en le tuant avec une lance sacre´e. Il s’agit d’un rituel de purification. Voir Jose´ de Acosta, Historia natural y moral de las Indias, Sevilla : Iuan de Leon, 1590, Libro Quinte, Cap. 7 (p. 319) et Cap. 8 : «Y si era Rey, o Sen˜or de algun pueblo, le ofrecian esclauos para q˜ los matassen con el, y le fuessen a seruir al otro mundo. Matauan assi misme al sacerdote o capellan que tenia, porque todos los Sen˜ores tenian vn sacerdote, que dentro de casa les administraua las ceremonias, y assi le matauan para q˜ fuesse a administrar al muerto» (p. 321). BC reproduit un argument de Meiners, Allgemeine kritische Geschichte der Religionen, t. II, pp. 88–89, qui cite le meˆme passage. BC cite J. D. Patterson, «Of the Origin of the Hindu Religion», Asiatic Researches, t. VIII, London : Vernor et alii, 1808, pp. 44–87.

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De la Religion, IV

Les alle´gories scientifiques et cosmogoniques qui paraissent, au premier coup d’œil, n’eˆtre qu’imposantes et profondes, ont contribue´, d’une manie`re qui n’a pas e´te´ assez remarque´e, a` la prolongation des sacrifices humains ; celles qui se rapportent aux forces de la nature, a` la puissance cre´atrice ou destructive, ont fre´quemment re´uni ces deux puissances dans la meˆme divinite´ a. Alors, pour exprimer cette combinaison, l’homicide est devenu un symbole. Ainsi, le culte du Lingam, malgre´ la simplicite´ de son origine b, a produit partout, non-seulement l’obsce´nite´, mais le meurtre c. Dans les fables grecques Me´de´e, ressuscitant Æson en le faisant bouillir dans une chaudie`re, qui rappelle celle des Bardes bretons d ; dans les myste`res, les rites comme´moratifs du massacre de Bacchus et de Cadmille e ; aux Indes, la le´gende de Schiven, qui met en pie`ces son e´pouse Sati, et jette au hasard ses mem-

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b c d e

PATTERSON (As. Res. VIII, 57–581) nous de´crit une ancienne repre´sentation du temps qui produit et de´truit tout, sous le nom de Mahacal. Elle avait huit bras, dont deux sont brise´s ; avec deux de ceux qui lui restent, elle jette un voile sur le soleil pour l’e´teindre. Ses quatre autres bras sont employe´s a` l’immolation d’une victime humaine. D’une main il la saisit, de l’autre il brandit un glaive ; la troisie`me tient un bassin plein de sang, la quatrie`me sonne une cloche qui annonce le sacrifice. On e´gorgeait aussi des hommes devant Bhavani ou Dourga, qui est de meˆme le symbole de la destruction et de la fe´condite´. V. CREUTZER, II, 124–125, et GOERRES, sur le culte de Schiven, II, 557–5592. V. ci-dessus, p. 1953. V. t. II, p. 4654. Archæol. of Wales5. V. plus loin le Livre XIII, ou` nous traiterons des myste`res6.

7-p. 283.6 Ainsi ... vengeresse ? ] passage absent de Pl et de Ms-texte, y compris les notes ; dans Pl une phrase Il a e´te´ l’offrande de la vie au pouvoir myste´rieux qui donne tour-a`-tour le vie et la mort. 7–13 Ainsi ... l’offrande ] Il a e´te´ l’offrande MC 14–21 Paterson ... 559. ] l’e´bauche de cette note se lit dans la col. de gauche de Ms-texte ou` BC re´sume en le traduisant partiellement un passage de l’article de Patterson 〈Mahacal, ou le tems, a 8 bras. D’une main, il tient une figure humaine, de l’autre un glaive, dans la 3e un bassin plein de sang, dans la 4e une cloche qui annonce le sacrifice, 2 de ses bras sont brise´s, mais avec les deux qui restent, il tire un voile pour le jeter sur le soleil & l’e´teindre (ibid. p. 57–58.)〉 Ms-texte les re´fe´rences e´rudites se trouvent dans Ms-notes V. Creutz. ... 559. la De´ese Bhavani ou Dourga est a` la fois la De´esse de la destruction & de la fe´conditie´. on lui immoloit des hommes. Ms-notes 1 2 3 4

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Voir la p. pre´ce´dente, n. 4. BC reproduit la description de la divinite´ qu’on lit chez Patterson. Le passage vise´ concerne Kali ou Bhawani (Creuzer, Symbolik, t. II, pp. 123–124). – Pour Görres, Mythengeschichte, sur Shiva, voir l’e´d. de 1935, pp. 257–258. Voir ci-dessus, pp. 142–144. OCBC, Œuvres, t. XVIII, pp. 291–292. BC exploite a` cet endroit une re´flexion de Creuzer, Symbolik, t. II, pp. 81–82. Creuzer ne parle pourtant pas du meurtre comme conse´quence du culte du phallus. Voir Owen Jones, The Myvyrian Archaiology of Wales, collected out of Ancient Manuscripts, London : S. Rousseau, 1801–1807, 21870. Le texte est en langue celtique. BC n’a pu le consulter lui-meˆme mais a copie´ la re´fe´rence dans un ouvrage non identifie´. Nous n’avons pu trouver le passage en question. OCBC, Œuvres, t. XXI, a` paraıˆtre.

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bres de´chire´s, sont l’offrande de la vie au pouvoir myste´rieux qui donne tour-a`-tour la vie et la mort. C’est la renaissance par le sacrifice. Un autre dogme, qui a pu motiver ces rites affreux, a e´te´ celui de la chute primitive a. Quoi de plus simple, quand on conc¸oit l’homme comme coupable avant sa naissance, que d’offrir ce coupable en expiation a` la divinite´ vengeresse b ? a

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Les Ve`des ordonnent formellement le sacrifice de l’homme (Pourousha me´da), pour racheter le monde fle´tri par le pe´che´. E´coutons a` ce sujet l’un des apoˆtres les plus e´loquents et les plus de´voue´s de l’E´glise orthodoxe. «L’homme a e´te´ persuade´ de tout temps qu’il e´tait coupable, dit M. de Maistre (E´clairciss. sur les sacrifices, p. 372), qu’il vivait sous la main d’une puissance irrite´e, et que cette puissance ne pouvait eˆtre apaise´e que par les sacrifices.» Il e´tablit ensuite que l’homme a deux ames, que l’ame de la chair est dans le sang (p. 381), et il en conclut que l’homme e´tant coupable par l’ame qui est dans son sang, c’est ce sang qu’il faut verser. Il cite le Le´vitique (XIII,12), qui dit en termes expre`s : Je vous ai donne´ le sang, afin qu’il soit re´pandu sur l’autel, pour l’expiation de vos pe´che´s ; et bien que les He´breux n’en aient pas conclu que ce sang devait eˆtre celui des hommes, M. de Maistre, tout en de´sapprouvant l’extension du principe, trouve assez naturel que toutes les nations aient attribue´ a` l’effusion du sang humain une vertu expiatoire, qu’elles aient cru que la re´mission ne pouvait s’obtenir que par ce sang, et que quelqu’un devait mourir pour le bonheur d’un autre. (P. 394.) Cette efficacite´ du sang re´pandu plaıˆt singulie`rement a` M. de Maistre. Il y revient sans cesse. Tout en appelant le taurobole, ou` le sang coulait en forme de pluie, une ce´re´monie de´gouˆtante, il la de´crit avec une sorte de complaisance (p. 397) ; il se de´lecte dans la communion par le sang, «juste et prophe´tique dans sa racine» (p. 471). Il aime cette me´taphore de saint Augustin : «le Juif converti au christianisme boit le sang qu’il a verse´ (p. 470),» et termine son traite´ bizarre par une proclamation solennelle de la re´versibilite´ des me´rites de l’innocence payant pour le coupable, et en lettres majuscules, du salut pour le sang1. (P. 374.) Un de ses e´le`ves, que nous avons cite´ dans une des notes pre´ce´dentes, dit, en de´fendant la peine de mort : Le coupable est une victime ne´cessaire, dont le sacrifice expiatoire peut seul accomplir la re´conciliation avec Dieu, et re´tablir l’harmonie de´truite (Cathol., VIII,

1–2 C’est ... sacrifice. ] manque MC 9–28 E´coutons ... sang. (P. 374.) ] manque MC 29 Un de ses e´le`ves ... dit ] L’auteur dont nous venons de parler dans la note , dit MC 1

Cette note est un montage de citations du texte de Joseph de Maistre, Eclaircissements sur les sacrifices. La premie`re citation se trouve dans le chap. I de l’ouvrage (Œuvres comple`tes, t. V, p. 372) ; la suivante est une phrase d’Orige`ne, De principiis, livre III, 4 : «et nous croyons que cette aˆme de la chair re´side dans le sang» (p. 290, n. 1) ; la troisie`me est une phrase du Le´vitique, XVII, 11 : «La vie de la chair est dans le sang ; c’est pourquoi je vous l’ai donne´, afin qu’il soit re´pandu sur l’autel pour l’expiation de vos pe´che´s ; car c’est par le sang que l’ame sera purifie´e» (p. 297, n. 2) ; la quatrie`me fait l’objet d’une re´flexion de de Maistre avec une re´fe´rence a` Bryant’s Mythology explained (p. 300, et n. 1) ; la description du taurobole suit deux pages plus loin (pp. 302–303) ; la suivante est tire´e de ce passage : «Cette ide´e universelle de la communion par le sang, quoique vicie´e dans son application, e´tait ne´anmoins juste et prophe´tique dans sa racine, tout comme celle dont elle de´rivait» (p. 358) ; la citation de la phrase de saint Augustin provient du Sermon LXXVII (p. 357, n. 2) ; la dernie`re enfin doit eˆtre corrige´e, lire : «Le salut par le sang» (p. 360).

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Quelquefois, une simple analogie dans les mots, ou un de´sir d’imitation de´plorable, ont eu des effets e´galement funestes ; Hercule, repre´sentant de l’anne´e, de´vorait ses enfants, les mois et les jours. Les Carthaginois et les Tyriens lui offrirent les leurs en holocauste. Mais le principe, que nous avons indique´ comme essentiel aux religions sacerdotales, a duˆ favoriser plus que toute autre cause la prolongation de ces rites. Ce principe, chez presque toutes les nations, traıˆnait a` l’autel les enfants de parents pieusement fe´roces. Plus le cœur paternel e´tait de´chire´, plus l’offrande avait de valeur. Haquin, roi de Norwe`ge a, et Dag, le on-

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2721). Et ailleurs poursuivant la meˆme pense´e, dans son style mystique : La doctrine de l’expiation, dit-il, se manifeste de la manie`re la plus sublime dans cette le´gislation primordiale. Le sacerdoce en e´tait charge´. Le pontife e´tait un repre´sentant du genre humain, dont il expiait le pe´che´ par le sacrifice, en l’immolant dans la victime au pied de l’autel. Celle-ci e´tait cense´e ressusciter et monter au se´jour des dieux, au milieu de la flamme purifiante. On supposait ainsi que le pontife lui-meˆme s’enlevait vers l’empyre´e, au moyen de la victime, et que l’essence corporelle de l’eˆtre sacrifie´ devenait la nourriture du souverain maıˆtre des dieux, ce qui figurait l’absorption de l’ame du sacrificateur dans le sein de la divinite´. (Ib., III, 460.) Cet e´crivain, M. Ferrand et M. de Maistre, sont tellement pe´ne´tre´s de l’excellence et de la ne´cessite´ du sacrifice qu’ils sont enclins a` excuser l’anthropophagie qui, chez quelques peuples, l’accompagnait. Ils la de´finissent une tentative de l’homme pour s’unir a` Dieu. SAX. GRAMMAT. X2. BARTHOL. 228.

7 rites. ... chez ] rites. D’apre`s ce principe, plus un sacrifice re´pugne a` l’instinct naturel de celui qui l’offre, plus il est agre´able aux dieux. – Entre tous les sacrifices, les humains sont donc les plus me´ritoires, et parmi ceux-ci, les plus me´ritoires sont encore les plus douloureux. Dela`, chez Pl 7 traıˆnait ] a` la hauteur de ce mot dans la col. de gauche une note relative a` d’Eckstein Il y a dans d’Eckst. un esprit e´minemment sacerdotal un mot qui rappelle la tendance du sacerdoce aux sacrifices humains. Il dit en de´fendant la peine de mort : le coupable est une victime ne´cessaire dont le sacrifice expiatoire peut seul accomplir sa re´conciliation 21–22 l’accompagnait. ... avec dieu & re´tablir l’harmonie de´truite. VIII. 272. Ms-texte Dieu. ] l’accompagnait. Ils la de´finissent une tentative de l’homme pour s’unir a` Dieu. «l’anthropophagie accomplissait re´ellement espace laisse´ dans la ligne pour comple´ter le texte de l’homme. Le sacrificateur & les fide`les se nourissaient ensuite de cette chair comme d’une chair sacre´e. C’est le Ne´vadnadhar des Indiens. (ib. XI. 340) revoir l’original pour comple´ter la citation. MC 1

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BC cite d’abord une phrase de l’essai de d’Eckstein, «De l’influence des doctrines mate´rielles sur la civilisation moderne» (Le Catholique, t. III, cah. VIII, pp. 41–103, 251–312, 389–413), tire´e du chap. VII, «De´veloppement du mate´rialisme duˆ a` l’introduction des doctrines sentimentales dans la politique» (pp. 266–282). – La citation qui suit reproduit, avec quelques coupes, un passage de l’essai «De l’histoire», chap. III, «De l’e`re primitive des le´gislations sacerdotales» (Le Catholique, t. I, cah. III, pp. 449–487, et plus particulie`rement pp. 459–460). Notons que d’Eckstein e´crit «en s’immolant» et «maıˆtre des cieux». Les coupures n’alte`rent pas le sens du passage. BC reproduit ici un de´tail qu’il a trouve´ chez Mallet qui dit «Haquin Roi de Norve`ge offrit les siens [c’est-a`-dire ses fils] en sacrifice pour obtenir d’Odin la victoire sur son ennemi Harald» (p. 84, e´d. de 1755). – Pour le passage du livre X de Saxon le Grammairien voir Gesta Danorum, hrsg. von Alfred Holder, Strassburg : Karl J. Trübner, 1886, p. 327. «Duos

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zie`me successeur d’Odin a, immole`rent leurs fils. Aune le vieux b livra neuf des siens au couteau sacre´, pour obtenir que sa vie fuˆt prolonge´e c. Une preuve e´vidente de l’importance que le sacerdoce attachait a` ces pratiques, c’est qu’il les associait toujours a` la connaissance de l’avenir. Les Druides jugeaient des choses futures tant par la chute des victimes que par les palpitations de leurs membres et le ruissellement de leur sang d. Les a b c

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BOTIN. Hist. de Sue`de, 2e e´p., cap. 91. Id. ib. et BARTHOLIN, p. 7002. Ceci de´montre l’erreur de Ce´sar (de Bello Gall. 813), qui pre´tend que les peuples commence`rent par immoler des criminels, et que ce n’est qu’a` leur de´faut qu’ils prirent des innocents pour victimes. Le remplacement des seconds par les premiers a e´te´, au contraire, un effet assez tardif de l’adoucissement des ide´es ; adoucissement contre lequel les preˆtres lutte`rent toujours. Le chapitre de sang des Indiens de´fend expresse´ment de sacrifier aucun homme afflige´ d’une infirmite´ ou coupable d’un crime. «L’aveugle, l’estropie´, le de´cre´pit, le malade, l’hermaphrodite, le difforme, le timide, le le´preux, le nain, et celui qui a commis des crimes graves, comme de tuer un brame, de voler de l’or, ou de souiller le lit de son maıˆtre spirituel, celui qui n’a pas douze ans, celui qui est impur par la mort de ses parents, tous ceux-la` ne peuvent eˆtre offerts en sacrifice, quand meˆme ils seraient purifie´s.» (Calicapouran.) DIOD. V4.

1 livra ] a` la hauteur de ce mot commence dans la col. de gauche un long extrait d’Eckstein La doctrine de la me´diation & de l’expiation se manifestait de la manie`re la plus sublime dans cette le´gislation primordiale (la sacerdotale) le sacerdoce en e´toit charge´. Le Pontif e´toit un repre´sentant du genre humain, dont il expiait le pe´che´ par le sacrifice, en s’immolant dans la victime aux pieds de l’autel. Celle-ci e´toit cense´e ressuciter & monter au sejour des Dieux au milieu de la flamme purifiante. On supposait ainsi que le Pontife lui meˆme s’enlevait vers l’Empyre´e, au moyen de la victime, & que l’essence corporelle de l’eˆtre sacrifie´ devenait la nourriture du souverain maıˆtre des Dieux, ce qui figurait l’absorbtion de l’ame du sacrificateur dans le sein de la Divinite´. d’Eckst. III. 460. Ms-texte

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siquidem prestantissime indolis filios hostiarum more aris admotos pociende victorie causa nefaria litacione mactavit, nec sanguinis sui interitu regnum emere dubitavit, patrisque nomine quam patria carere maluit.» – Thomas Bartholin cite dans son ouvrage Antiquitatum Danicarum, livre II, cap. 1, p. 228 le meˆme passage de Saxo Grammaticus. BC reproduit un argument de Meiners, Allgemeine kritische Geschichte der Religionen, t. II, p. 80. Il faut lire «cap. 2». Voir la traduction allemande que BC utilise. Andreas Botins Geschichte der Schwedischen Nation im Grundriß, t. I, p. 39. Bartholin, Antiquitatum Danicarum, pp. 699–701, reproduit le texte de Snorri Sturluson avec la traduction latine qui raconte l’histoire d’Aune le vieux qui, ayant ve´cu 60 ans, sacrifie tous les dix ans un de ses fils pour prolonger sa vie, de plus en plus che´tive. Son dernier fils, Egil, surve´cut graˆce aux Sue´dois qui empeˆche`rent le sacrifice. Voir Meiners, Allgemeine kritische Geschichte der Religionen, t. II, p. 80. Le renvoi a` Ce´sar, De bello gallico, ne peut eˆtre exact. Il faut lire «livre VI, chap. 16», ou` l’on trouve une phrase qui correspond a` peu pre`s a` l’opinion que BC attribue a` Ce´sar : «Supplicia eorum qui in furto aut latrocinio aut aliqua noxia sint comprehensi, gratiora dis immortalibus esse arbitrantur. Sed cum eius generis copia deficit, etiam ad innocentium supplicia descendunt.» BC fait allusion au livre V, chap. XXXI de la Bibliothe`que historique qui raconte la ce´re´monie : «ils aspergent un homme d’eau lustrale et le frappent avec un coutelas dans la partie

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Pe´ruviens en multipliaient le nombre, jusqu’a` ce que les pre´sages fussent favorables a. Les Cimbres les disse´quaient pour lire dans leurs entrailles b. Les Lusitaniens les foulaient aux pieds pour provoquer des convulsions prophe´tiques c. Les Scythes re´pandaient leur sang sur un glaive, et le sort se faisait connaıˆtre a` la manie`re dont ce sang coulait d. L’agonie avait de la sorte sa signification myste´rieuse, et la curiosite´ devenue fe´roce s’armait contre la nature e. a b c d

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ZARATE, Hist. de la conqueˆte du Pe´rou, I, 521. STRABON, VII. MALLET, notes sur la 8e fable de l’Edda2. STRAB. XIII3. HE´ ROD. IV. Chez les Slaves, c’e´tait en le buvant que les preˆtres se procuraient une ivresse qui leur de´voilait l’avenir4. «Lorsque tu sacrifies un homme, dit le Calicapouran, si sa teˆte tombe a` l’est, elle te promet la richesse ; au sud, quelque sujet de terreur ; au sud-ouest, la puissance ; a` l’ouest, le succe`s ; au nord-ouest, un fils. Si des larmes s’e´chappent de ses yeux, c’est l’indication de quelque re´volution politique ; si la teˆte sourit, se´pare´e du corps, c’est pour le sacrificateur un gage de bonheur et de longe´vite´ ; si elle te parle, tu peux croire toutes ses paroles.»

7 nature. ] a` la hauteur de ce mot, dans la col. de gauche, l’e´bauche d’un passage qui sera inse´re´ plus bas, ci-dessous p. 290, lignes 1–2 et la note b Ombourisha veut faire un sacrifice humain. Indra sauve la victime. Ramayan. p. 512–513. ne serait-ce pas un adoucissement ? Mstexte dans MC cette ide´e apparaıˆt comme note a` accrocher a` des mots du passage perdu . L’ashwameda, sacrifice du Cheval, le Ramay. p. 512–513. voir pour des details Vol. III. p. Gomedha, sacrifice de la vache, sont des adoucissemens du Pouroushameda, sacrifice de l’homme. Les Ve`des recommandent formellement ce dernier, expiation solennelle, destine´e a` racheter le 1er monde ce´leste, dont le pe´che´ a de´truit la beaute´ originelle. Ces immolations, 〈sont〉 en horreur aux Ve´dantistes, sont l’objet des Anatheˆmes des Pouranas & ceux des Boud17 gage ... peux ] garant de ... elle vous parle, vous dhistes. d’Eckst. XI. 201–202. MC pouvez Ms-notes

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au-dessus du diaphragme ; l’homme tombe sous le coup et selon sa chute, d’apre`s les convulsions de ses membres et aussi d’apre`s l’e´coulement du sang, ils pre´sagent l’avenir» (Diodore de Sicile, Bibliothe`que historique, t. V, Paris : Belles Lettres, 2015, p. 42). BC renvoie, en reproduisant un argument de Meiners (Allgemeine kritische Geschichte der Religionen, t. II, p. 84), a` l’ouvrage de Zarate, Histoire de la conqueˆte du Pe´rou, Amsterdam : Lorme, 1700, premie`re partie, p. 52. Sur Strabon, voir ci-dessus, p. 256, n. 8. – L’allusion a` Mallet vise dans l’Edda la note sur les fe´es (pp. 112–115), et plus particulie`rement les phrases que voici : «J’ajouterai a` l’occasion des fe´es & du culte qu’on leur rendoit chez ces peuples [a` savoir les Germains et les Scandinaves], que les femmes partageoient avec leurs maris les fonctions du sacerdoce, qu’elles e´gorgeoient les victimes, & meˆme les victimes humaines, & fondoient, comme on le vit dans la guerre des Cimbres, leurs divinations sur la manie`re dont elles voyoient couler le sang de ces malheureux» (p. 114). Il faut lire : III. Voir ci-dessus, p. 270, n. 6. BC se re`fe`re a` He´rodote, livre IV, chap. 62, ou` il est dit que les Scythes sacrifient un prisonnier sur cent au dieu Are`s dans son sanctuaire ou` se trouve une immense montagne faite de branches. On tue les victimes, versant du vin sur leur teˆte, et recueille le sang dans un re´cipient que les sacrificateurs portent sur la cıˆme de la montagne de bois, ou` ils le laissent couler sur un glaive. Cette ce´re´monie ne fait pas partie des rites de la divination. Les Scythes pratiquent celle-ci avec des branches de saules (chap. 67).

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Nous ne nierons point que dans tous les pays, les sacrifices humains ne tendent a` s’adoucir a ; aucune puissance ne re´siste avec un succe`s complet a` la marche ne´cessaire de l’esprit humain. L’inte´reˆt et la pitie´ se re´unissent contre une coutume barbare, et meˆme dans les religions sacerdotales, elle tombe graduellement en de´sue´tude. Du temps de la conqueˆte de l’Ame´rique les Pe´ruviens y avaient renonce´ b. Ils se contentaient de tirer du front des enfants un peu de sang, qu’ils re´pandaient sur de la farine, avec laquelle

a b

(As. Res. V, 371–3911.) Dans le Ramayan, Rama tue le terrible Kabandha et le bruˆle sur un buˆcher ; celui-ci prend aussitoˆt une forme divine et re´ve`le a` Rama tout ce qu’il veut savoir. CREUTZ. II, 481 ; III, 28 et 3412. GARCIL. DE LA VEGA, Hist. des Ind. II, 263.

2 aucune ] a` la hauteur de ce mot, dans la col. de gauche, un extrait d’Eckstein qui servira a` re´diger la note b, ci-dessous, p. 290 l’Ashwamedha, sacrifice du cheval, le Gomedha, sacrifice de la vache, sont des adoucissemens du Pouroushameda, ou sacrifice de l’home. Les Ve`des recommandent formellement ce dernier, expiation solennelle, destine´e a` racheter le 1er monde ce´leste & lumineux, dont le pe´che´ a de´truit la beaute´ originelle. Ces immolations en horreur des Ve´dantistes, sont l’objet des anathe`mes des Pouranas, & de ceux des Bouddhistes. D’Eckst. XI. 201–2024. Ms-texte Ramay. p. 512–513. voir pour ... p. . L’Ashmaweda, ... l’homme. suit le texte repertorie´ ci-dessous, p. 290, variante a` la ligne 9 Les Ve`des ... 201–202 MC 5–6 de la .. renonce´. ] de Garcilano de La Vega, les Pe´ruviens n’e´gorgeoient plus de victimes humaines. Ms-texte de 〈Garcilano de la V〉 la ... renonce´. MC 8–9 Dans le ... savoir. ] manque MC Rama tue ... savoir. ] phrase, pre´ce´de´e d’une note, inscrite a` coˆte´ d’un passage du chap. VI du livre IX (voir ci-dessus, p. 129, la variante a` la ligne 11) ds le chap. des 12 Garcil. ... 26. ] Hist. des Sacrif. humains Rama ... savoir. Ramayan. p. 16. Ms-texte Incas. II. 26. suit un passage qui sera inse´re´ dans le texte ; ci-dessous, p. 291, lignes 4–8, et la variante a` ces lignes Ms-notes 1

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BC traduit quelques phrases du «Rudhira´dhya´ya˚» du Calica Puran. W. C. Blaquiere, «The Rudhira´dhya´ya˚, or Sanguinary Chapter ; Translated from the Calica Puran» (Asiatic Researches, t. V, London : Vernor et alii, 1799, pp. 371–391, et plus particulie`rement pp. 384 et 385). BC se trompe en disant que le texte parle des larmes de la victime humaine. Dans le Calica Puran, ce sont les larmes d’un buffle qui annoncent les re´volutions politiques. BC cite trois passages de Creuzer, Symbolik, qui parlent de l’abolition des sacrifices humains. Pour la dernie`re, voir ci-dessus, p. 272, n. 1. Garcilaso de la Vega, Histoire des Yncas, rois du Perou, Amsterdam : Jean Fre´de´ric Bernard, MDCCXXXVII. Il faut lire : «I, 25–26». BC vise un passage du chap. XI, «De leurs sacrifices» (pp. 24–26), qui constate que des Indiens ne pratiquaient pas les sacrifices humains mais «se contentoient d’offrir simplement de leur sang, qu’ils se faisoient tirer des bras ou des cuisses, selon que le sacrifice e´toit important» (p. 25). D’autres offraient des animaux ou des fruits, donc des nourritures juge´es agre´ables aux animaux divinise´s. BC copie un passage de l’essai de d’Eckstein «De la nature des e´le´mens», chap. XI «Des e´le´mens conside´re´s sous le point de vue mythologique» (Le Catholique, t. IV, no XI, pp. 201– 202). – Pour le Ramayana, cite´ dans cette variante, voir ci-dessous, p. 290, n. 2.

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De la Religion, IV

ils pe´trissaient des gaˆteaux, distribue´s solennellement au peuple. Les Syriens avaient substitue´ une biche a` la vierge immole´e pre´ce´demment a. La tradition des Gue`bres porte que les Perses pre´sentaient leurs fils au feu sacre´ ; cette ce´re´monie rappelait les victimes bruˆle´es en l’honneur des dieux b. Le roi d’E´gypte, Amosis, ordonna qu’on jetaˆt dans un buˆcher des simulacres de cire c. a b

c

PORPH. de Abst. II1. On retrouve la meˆme coutume chez les tribus voisines des Juifs : les princes idolaˆtres d’Israe¨l et de Juda, Achaz et Manassez, firent traverser les flammes a` leurs enfants pour les consacrer a` leurs idoles (ROIS. II, c. 16, v. 3, et c. 2, v. 6). PORPH. in Euse`b. Pr. ev. IV, 16. THE´ ODORET, de Sacrif. c. 82. En d’autres lieux, ces simulacres furent remplace´s par des gaˆteaux, comme en Ame´rique (ATHE´ NE´ E, IV3, MARSHAM, Can. Chron. sect. XI4. MEURS. de Rep. ath. I, 95). Plutarque rapporte que les preˆtres marquaient les animaux qu’ils se pre´paraient a` frapper d’un cachet figurant un homme a` genoux, les mains lie´es et la teˆte menace´e d’un glaive (de Isid.). Un e´rudit moderne a reconnu facilement a` ces traits une re´miniscence des sacrifices autrefois en vigueur (SCHMIDT, de Sacerd. et Sacrif. Ægypt. p. 2876).

2–3 pre´ce´demment. La ] pre´ce´demment. Les un espace libre pour y mettre le nom du peuple approchaient de l’autel des hommes de´voue´s aux Dieux, pour leur verser du vin sur la teˆte. 3 La tradition ] Les approchoient de l’autel les (note : Pomp. Mela, IV. 27.) MC hommes de´voue´s aux Dieux pour leur verser du vin sur la teˆte. BC pre´voyait une note dans Mstexte identique texte Pompon. Mela. IV. 2. retour au texte principal La tradition Ms-texte dans MC 1

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3 4 5

BC fait allusion a` une phrase de Porphyre, De l’abstinence, livre II, chap. 56, 4 : «Pallas, l’auteur qui a le mieux recueilli les renseignements concernant les myste`res de Mithra, de´clare que les sacrifices humains ont e´te´ abolis a` peu pre`s chez tous les peuples sous le re`gne de l’empereur Hadrien. Ainsi [...] a` Laodice´e de Syrie, on sacrifiait chaque anne´e une jeune fille a` Athe´na ; mais de nos jours on prend comme victime une biche» (e´d. Bouffartigue, p. 118). Une note de l’e´diteur (p. 228, n. 12) explique pourquoi cette assertion est probablement douteuse. BC cite Porphyre d’apre`s Euse`be, La pre´paration e´vange´lique : «De meˆme, a` He´liopolis d’E´gypte, Amosis abolit la loi instituant le meurtre de victimes humaines, comme en fait foi le te´moignage de Mane´thon, dans son ouvrage Sur la civilisation antique et la pie´te´. Ces victimes e´taient sacrifie´es a` He´ra et choisies apre`s examen, comme le sont les veaux parmi lesquels on cherche les spe´cimens purs, que l’on marque d’un signe distinctif. On en sacrifiait trois dans la journe´e ; a` leur place, Amosis ordonna qu’on mıˆt un nombre e´gal de personnages de cire» (e´d. des Places, t. III, p. 165). – Le renvoi a` The´odoret de Cyre, De sacrificiis, ne confirme pas directement ce que dit Euse`be. Dans ce livre VII (non VIII) de son ouvrage Theodoriti Cyrenensis episcopi De curatione Græcarum affectionum libri duodecim (Parisiis : In officina Henrici Stephani, 1519), il est question des sacrifices des E´gyptiens, mais d’une manie`re ge´ne´rale («Ægyptiorum dei, bruta animalia», fo 66ro), pour les opposer aux sacrifices des juifs. Allusion a` Athe´ne´e, Les Deipnosophistes, livre IV, 172d, ou` il est question de sacrifices humains en E´gypte remplace´s par des gaˆteaux. BC cite une nouvelle fois le passage de Marsham, Ioannis Marshami Canon chronicus, qu’il avait utilise´ ci-dessus ; voir p. 265, n. 5. BC cite Johannes Meursius, Regnum Atticum, sive de Regibus Atheniensium, eorumque rebus gestis, libri III, Amstelodami : Apud Ioannem Iansonium, MDCXXXIII, livre I, chap. I

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Les E´gyptiens ont conserve´ l’habitude de livrer au Nil l’image d’une vierge, le jour ou` l’on perce la digue pour faciliter l’inondation a. La plupart des re´formateurs de la reli gion indienne de´sapprouvent les sacrifices hua

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SAVARY. I, 131. SICART, Me´m. sur l’E´gypte. Lett. e´d. p. 4712. Il est assez curieux de retrouver chez les Chinois la meˆme progression pour l’immolation des animaux. L’empereur Kaotze´e voulut qu’on les remplac¸aˆt par de petites images (PAW, E´g. et Chin. II, 2123). Les habitants de Siam ont imite´, par e´conomie, ce que d’autres nations ont fait par humanite´. Toutes leurs offrandes sont en papier artistement de´coupe´, suivant la forme des objets sacrifie´s autrefois en nature (LALOUBE` RE, I, 3674).

1-p. 290.3 de livrer ... vivants. ] le texte ainsi que la note sur Savary (ci-dessous, n. 1) et l’article de Jones (ci-dessous, p. 290, n. 3) manquent dans MC

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sur le roi le´gendaire Ce´crops qui veille sur la religion «ac dercernit, ut Saturnum, atque Opem, venerarentur» et qui, ayant fait poser pour ces divinite´s des autels, oblige les hommes a` leur sacrifier des fruits. Allusion a` la note b (p. 287) dans laquelle Schmidt de´veloppe son raisonnement au sujet d’un passage de Plutarque (De Iside, p. 371) reproduit par BC ci-dessus. Il dit : «Imagines istæ sacrificandis bubus impressæ, combustæque ruforum hominum ceræ formæ [...] evidentia sunt vestigia humanarum victimarum, antiquissima ætate oblatarum». Les re´fe´rences aux ouvrages de John Marsham et de Jan van Meurs se trouvent e´galement dans cette note. BC reproduit la meˆme faute que ci-dessus, p. 259, variante a` la ligne 10. BC reproduit ici une re´flexion de Meiners, Allgemeine kritische Geschichte der Religionen, t. II, p. 85, mais se trompe en renvoyant a` la premie`re lettre de l’ouvrage de Claude Savary, Lettres sur l’Egypte (Paris : Onfroi, 1786), qui parle des inondations du Nil qui fertilisent le pays et transforment les terres du Delta en un immense jardin. Il n’y est pas question de l’image d’une vierge qu’on jette dans les flots. Il aurait duˆ citer les pp. 113–115, ou` ce rite est de´crit. Voir ses Notes de lecture, Meiners, Histoire critique, no 183. Notons encore qu’on doit a` Savary (1750–1788) une traduction du Coran (Paris : Knapen, Onfroy, 1783). BC cite, e´galement d’apre`s Meiners, le Discours sur l’E´gypte du Pe`re Claude Sicard (1677– 1726), paru dans le t. V des Lettres e´difiantes, et en particulier le chap. IV, «Le Nil», qui parle des inondations annuelles. Voir Claude Sicard, Œuvres, e´dition critique de Maurice Martin, t. II, Relations et me´moires imprime´s, s.l., 1982 (Institut franc¸ais d’arche´ologie orientale du Caire, Bibliothe`que d’E´tude, t. LXXXIV), pp. 245–249. On doit a` ce je´suite franc¸ais qui travaillait a` une description de´taille´e de l’E´gypte la premie`re carte moderne de ce pays. Voir le t. III de l’e´dition IFAO. Il faut lire : 217, car BC renvoie a` la note de cette page ou` de Pauw pre´cise : «Sous le re`gne de l’Empereur Kan-tsu on n’immole aucune victime pendant les grands sacrifices, & ce Prince ordonna de substituer des figures de paˆte aux animaux.» BC renvoie a` Simon de Laloube`re, Du royaume de Siam, par Mons r de La Loube`re, envoye´ extraordinaire du Roy aupre`s du Roy de Siam en 1687 & 1688, Amsterdam : Abraham Wolfgang, 1691. Le passage vise´ se trouve dans la troisie`me partie, «Des mœurs des Siamois suivant leurs diverses conditions», chap. XIX, «De la doctrine des Talapoins», § 13. Dans le contexte d’une re´flexion sur la coutume de bruˆler les femmes avec le corps du mari de´funt, Laloube`re constate que cette coutume n’existe pas dans le Siam et il ajoute : «& d’ailleurs ils ont e´tabli par une sage œconomie, qu’il suffisoit de bruˆler avec les corps des morts, au lieu de ve´ritables meubles & de ve´ritable monnoye, ces meˆmes choses figure´es en

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mains a. Dans le Ramayan, Ombourischa veut en offrir un : Indra sauve la victime b. Les Brames se servent de figures de paˆte, et proce`dent d’ailleurs a` la ce´re´monie comme s’ils immolaient des eˆtres vivants c. a

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c

Bouddha, la 9e ou la 19e incarnation de Wichnou, les proscrivit de la manie`re la plus formelle. V. Gita-Govinda, ou l’hymne de Jajadeva, en l’honneur des incarnations de Wichnou1. Ramay., p. 512–513. V. pour des de´tails, vol. III, p. 199–201. L’Aschwameda, sacrifice du cheval ; le Gomedha, sacrifice de la vache, sont des adoucissements du Pouroushameda, sacrifice de l’homme2. As. Res. I, 2653. On n’offre plus a` la de´esse Bhavani, dont nous avons parle´ ci-dessus, que des coqs et des taureaux au lieu d’hommes. On voit dans le Jajour-Ve`de des traces d’adou-

1 le Ramayan ] voir ci-dessus, p. 286, la variante a` la ligne 7 2–3 Les Brames ... vivants. ] Dans les circonstances ou` ils sont commande´s, les Brames en font des repre´sentations avec de la paˆte, & proce`dent ... comme si ces simulacres e´toient vivans. Ms-texte 3–6 Bouddha ... Wichnou. ] texte de la note e´bauche´ dans la col. de gauche Buddha, la 9e incarnation de Buddha ... Wishnou (ou la 19e˙ v. 3eme vol.) voulut abolir les sacrifices humains. Ms-texte 7–8 Ramay. ... l’homme. ] Wichnou, (v. 3me vol. p. ) les proscrivit ... Wichnou. MC manque Ms-texte et Ms-notes 512 ] la source, Rel4, porte 412 faute d’imprimerie que nous corrigeons en adoptant la lec¸on du manuscrit colle´ ; MC 9 l’homme. ] l’homme. Les Ve`des recommandent formellement ce dernier, expiation solennelle, destine´e a` racheter le 1er Monde ce´leste, dont le pe´che´ a de´truit la beaute´ originelle. Ces immolations 〈sont〉 en horreur aux Ve´dantistes, sont l’objet des Anathe`mes des Pouranas & de ceux de Bouddhistes. d’Eckst. XI. 201–202. MC

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papier de´coupe´, & souvent peint ou dore´ [...] le peuple dit que ce papier qu’on bruˆle, se convertit en l’autre vie aux choses qu’il repre´sente» (p. 367). BC a trouve´ cet argument chez Meiners, Allgemeine kritische Geschichte der Religionen, t. II, p. 734, n. f. BC a lu le poe`me the´aˆtral de Jayadeva (XIIe sie`cle) probablement dans la traduction anglaise de William Jones ou a consulte´ l’adaptation allemande par Friedrich Majer (Gita-Govinda, ein Indisches Singspiel von Jajadeva, Weimar : Landes-Industrie-Comptoir, 1802). Le renvoi n’est pas pre´cis. Il se peut que BC pense a` l’hymne a` Vichnou qui loue, a` la fin, Vichnou d’avoir en horreur les sacrifices sanglants. La traduction d’Adolph Wilhelm Riemschneider (Halle : Rengersche Buchhandlung, 1818) ne contient pas les passages adresse´s a` Vichnou. Notons que BC reviendra plus loin a` cet ouvrage (voir ci-dessous, pp. 312–313) dans sa pole´mique contre d’Eckstein. La source de cette information est d’Eckstein (voir ci-dessus, p. 287, la variante a` la ligne 2 et a` cette page, la variante a` la ligne 9). L’anecdote est raconte´e dans le chap. 48 du Ramayuna (e´d. de Serampore, pp. 512–513 ; e´d. de Londres, p. 354). BC cite l’article de William Jones, «On the Gods of Greece, Italy, and India, written in 1784, and now revised (Asiatic Researches, t. I, 1798, pp. 221–275, plus particulie`rement pp. 265–266). Il y est bien question du fait que les sacrifices humains ou les sacrifices de taureaux et de chevaux offerts jadis a` Cali sont abolis a` la fin du XVIIIe sie`cle ; il existe pourtant toujours des sacrifices d’enfants. Mais le remplacement par des figures de paˆte n’est pas mentionne´ dans cet article.

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Ainsi le pouvoir sacerdotal fle´chit, malgre´ lui, devant le travail de la nature et du temps ; mais ce n’est pas sans opposer a` ces deux adversaires une re´sistance obstine´e ; ce n’est pas sans remporter sur eux de fre´quentes victoires. Vainement un roi du Mexique a prohibe les sacrifices humains ; il est contraint a` les re´tablir, et tout ce qu’il obtient, c’est de les borner aux prisonniers de guerre. Vainement les peuples demandent a` Cente´otle b de les de´livrer de ces rites cruels. La de´esse promet, mais les preˆtres ajournent l’accomplissement de ses promesses. En de´pit des lois d’Amosis, les E´gyptiens offrirent long-temps des hommes pour victimes. En de´pit des re´formateurs indiens, et malgre´ l’autorite´ des incarnations, le Gange engloutit encore aujourd’hui des enfants et des femmes ; et le sacerdoce pro fite de

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a b

cissement. Il prescrit d’attacher a` des pieux cent quatre-vingt-cinq hommes de diffe´rentes tribus, professions et castes ; mais, apre`s un hymne re´cite´ en me´moire du sacrifice de Nayarana (Wichnou, As. Res. VII, 251), ils sont de´tache´s et mis en liberte´. Les animaux profitent d’une progression du meˆme genre. A la ce´le´bration des noces, ou lors de la re´ception de tout e´tranger distingue´, on avait l’habitude de sacrifier une vache, et, en souvenir de cet usage, un hoˆte est encore appele´ gohhna, tueur de vache. Aujourd’hui l’hoˆte interce`de, et la vache amene´e pre`s de l’autel est renvoye´e libre (As. Res. VII, 290–2931). V. ci-dessus, tome III, p. 2042. Nezahual-Cololt, roi d’Acolhuacan3. La de´esse de la fe´condite´.

4–8 Vainement ... promesses. ] passage ajoute´ dans la col. de gauche Vainement Nezahual prohibe ... Il est oblige´ de les ... Vainement les Tribus mexicaines ... promette〉nt〉, mais ... la version pre´ce´dente se lit dans le cahier des notes l’accompt de ses prom. Ms-texte Ne´zahual-Cojotl, Roi d’Acolhuacan, prohiba les sacrifices humains, mais fut oblige´ de les permettre de nouveau en les bornant aux prisonniers de guerre. Plusieurs Tribus adoroient particulie`rement Cente´otle, la De´esse de la fe´condite´, parce qu’ils croyaient qu’elle les de´livrerait toˆt ou tard de ces rites cruels. Ms-notes 9 long-temps ... victimes. ] longtems encore des homee pr ces deux derniers mots dans l’interl. victimes 〈humaines〉. Ms-texte 15 lors de la re´- ] derniers mots du placard 10 Pl 20 Cololt ] Cosotl MC

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L’article de H. T. Colebrooke, «On the Religious Ceremonies of the Hindus, and of the Bra´mens especially» (Asiatic Researches, t. VII, pp. 232–287 et 288–311) ne s’accorde pas tout a` fait avec ce qui est de´taille´ par la suite. Seul le dernier passage cite´ contient les prie`res prononce´es au moment de la libe´ration d’une vache dont parle BC renvoyant au t. III de De la Religion. OCBC, Œuvres, t. XIX, pp. 236–237, ou` BC transcrit des extraits des textes de la ce´re´monie. Il faut lire Nezahualcoyotl. Il s’agit du roi poe`te le´gendaire (e´poque pre´-colombienne) de la ville de Texcoco (1402–1472) qui, apre`s avoir reconquis la capitale de l’E´tat d’Acolhuacan, y re´gnait avec sagesse. On lui doit un code de lois, et en particulier une re´forme religieuse, interdisant les sacrifices humains dans sa ville (il les tole´rait ailleurs).

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toutes les circonstances pour re´clamer contre des innovations dont il s’irrite, et pour re´tablir avec une pompe triomphale les rites de l’antiquite´. Le relaˆchement n’est que momentane´. De`s que les peuples, assez malheureux pour eˆtre soumis a` l’empire des preˆtres, e´prouvent quelques revers, ou qu’un phe´nome`ne extraordinaire les effraie, la ne´gligence paraıˆt une criminelle tentative pour frauder les dieux de ce qui leur est duˆ, et l’homme abjure, au milieu des remords, un respect impie pour la vie de l’homme, le pe`re une pitie´ sacrile´ge pour les jours de ses enfants a. Les sacrifices fune´raires qu’on peut regarder comme de la meˆme nature que les sacrifices humains disparurent graduellement chez les Grecs. Il y aurait ignorance a` relever quelques faits e´pars pour en infe´rer l’existence d’un usage permanent. Lorsque Achille poignarde, sur le buˆcher de Patrocle, douze prisonniers troyens b, cette barbarie n’est ni motive´e, ni justifie´e a

b

Voyez le fait relatif aux Carthaginois, tome II, p. 169–1701. Il est si vrai que le principe sacerdotal est au fond de toutes ces notions, que les apologistes les plus ze´le´s de l’E´glise le reconnaissent en termes expre`s. «La the´orie e´galement consolante et incontestable du suffrage catholique, dit M. de Maistre, se montre au milieu des te´ne`bres antiques, sous la forme d’une superstition sanguinaire ; et comme tout sacrifice re´el, toute action me´ritoire, toute mace´ration, toute souffrance volontaire peut eˆtre ve´ritablement ce´de´e aux morts, le polythe´isme, brutalement e´gare´ par quelques re´miniscences vagues et corrompues, versait le sang humain pour apaiser les morts.» (Loc. cit. 4112.) Iliade3.

5–8 la ne´gligence ... enfants. ] ajoute´ de travers dans la marge ; texte re´pe´te´ f o 101 MC 14–21 Voyez ... 411.) ] manque dans Ms-texte et Ms-notes 14–21 Il est si vrai ... 411.) ] manque dans MC 1 2 3

OCBC, Œuvres, t. XVIII, p. 142. Joseph de Maistre, Eclaircissements sur les sacrifices (Œuvres comple`tes, t. V, p. 312), citation litte´rale. BC, qui lit l’Iliade dans la traduction de Voss, pense au livre XXIII, vv. 175–176. L’exe´ge`se qu’il donne de ces vers est discutable. On consultera Nicholas Richardson, The Iliad, A Commentary, vol. VI, Books 21–24 (Cambridge : University Press, 1993). Apre`s la de´couverte de la tombe d’un prince a` Lefkandi (Xe sie`cle av. J.-C.) ou` l’on avait trouve´ l’urne contenant les cendres d’un guerrier, des squelettes de chevaux et le squelette d’une femme, donc les meˆmes objets et offrandes dont parle l’Iliade, l’exe´ge`se du passage cite´ par BC a pris un tournant de´cisif ; le texte offre la description d’un sacrifice humain. «It seems [...] likely that the poet of the Ilias was aware that such practices existed in life, wether in heroic past or (more probably) in recent times.» Et le commentateur continue : «Human sacrifice was a remarkably common theme of Greec mythology at all times (cf. A. Henrichs, Entretiens Hardt XXVII (Vandœvres – Gene`ve 1981) 195–235). But the most striking aspect of the funeral of Patroklos is that all these elements, the slaughter of horses, dogs and human captives, are unique in the Homeric poems. The poet, it seems, is trying to portray a funeral

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par la religion, et l’horreur qu’en te´moigne le poe`te en la racontant prouve qu’elle n’e´tait conforme ni aux opinions, ni aux mœurs nationales. Virgile, dont toutes les descriptions de rites religieux sont emprunte´es d’Home`re, sauf les inexactitudes introduites par la philosophie contemporaine ou le de´sir de faire effet, Virgile, disons-nous, montre les Troyens, auxquels il attribue toujours les mœurs grecques, bruˆlant sur le buˆcher de Mise`ne ses veˆtements, sa trompette et ses armes ; l’ide´e de sacrifices sanglants ne se pre´sente point a` la pense´e du poe`te a. Si dans un autre livre de l’E´ne´ide b, il parle des captifs que son he´ros veut immoler aux maˆnes du fils d’E´vandre, c’est une imitation d’Home`re. Mais l’imitateur n’ajoute point que le sacrifice ait eu lieu. Le sacerdoce s’oppose encore a` cet effet du progre`s des ide´es. Sous son empire la fe´rocite´ de l’homme sauvage, la superstition de l’homme ignorant, traversent les e´poques de la civilisation qui s’en effraie sans s’en affranchir. Chez les Scandinaves, non-seulement les richesses des princes e´taient consume´es avec les armes qui leur avaient servi a` les conque´rir, mais

a b

Æneid. VI, 214–221. Æneid. X, 517–519, et aussi

XI,

81–821.

4 inexactitudes ] 〈imitations〉 inexactitudes Ms-texte 5 montre ] 〈attribue〉 montre Ms-texte 8–11 la pense´e ... ait eu lieu. ] passage remanie´ en utilisant une partie de la note sa pense´e. Cependant il parle d’Ene´e, voulant immoler des captifs sur le tombeau du fils d’Evandre. (a` revoir) Ms-texte et Ms-notes 16 consume´es avec ] consume´es sur leurs buchers, avec Mstexte 18 519 ] la source porte 515 faute d’imprimerie que nous corrigeons Rel4

1

of a special kind, and the excesses of destruction in which Akhilleus indulges are above all a demonstration of his intense grief at Patroklos’ loss» (pp. 188–189). Cette lecture contredit les re´flexions de BC, et confirme l’exe´ge`se du texte home´rique par Virgile. Les passages de l’E´ne´ide cite´s dans les notes a et b concernent le buˆcher de Mise`ne, un compagnon d’E´ne´e, ou` l’on ne pre´voit pas de sacrifice humain, ainsi que deux passages (livres X, 517–520 et XI, 81–82) ou` le poe`te raconte qu’E´ne´e destine quatre fils de Sulmo et autant d’Ufens a` l’holocauste de Pallas, jeune he´ros et allie´ d’E´ne´e. La ce´re´monie de l’holocauste de Pallas est raconte´e dans le livre suivant, le corte`ge mortuaire, le discours d’E´ne´e, la tristesse desespe´re´e d’Acoetes, la pre´paration du buˆcher avec les sacrifices a` bruˆler avec le he´ros mort. Virgile dit encore qu’E´ne´e lie les mains des captifs qu’il va sacrifier, «vinxerat et post terga manus, quos mitteret umbris inferias, cæso sparsurus sanguine flammas». L’acte n’est pas raconte´, mais le texte laisse entendre qu’il sera accompli. Si Virgile avait de´cide´ de supprimer dans cette ce´re´monie les sacrifices humains, il l’aurait raconte´, aurait duˆ en parler. Le contraire est e´vident. La mort de Pallas et la ce´re´monie mortuaire rappellent la ce´re´monie unique et cruelle qu’Achille pre´voit pour son ami Patrocle.

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leurs esclaves e´taient massacre´s, et leurs femmes enterre´es ou bruˆle´es avec eux a. Celles des Caciques de Saint-Domingue subissaient le meˆme sort, soit par une re´signation volontaire, soit par la contrainte exerce´e sur elles pour les re´duire a` l’obe´issance b. En Perse et en E´thiopie, les courtisans reveˆtus a

b

Hist. Norw. pass. OLAUS, TRYGGUES. Sag. KEYSLER Antiq. Select. p. 1471. Segride, reine de Sue`de, se se´para d’E´ric, son e´poux, parce qu’il n’avait plus que dix ans a` vivre, et qu’elle aurait e´te´ force´e de s’ensevelir dans le meˆme tombeau. (BARTHOL. Ant. 506 et suiv2.) Branhilda, dans l’Edda, monte sur le buˆcher de Sigourd, et entonne un chant de triomphe, en se laissant bruˆler avec lui3. V. ci-dessus, t. I, liv. II, chap. IV, p. 293–294, 2e e´dit4.

2–4 Celles ... l’obe´issance. ] texte re´dige´ en utilisant celui de la note chez les anciens habitans de St Domingue, deux au moins des femmes de leurs Caciques devaient eˆtre enterre´es vives avec eux. On leur fesait un devoir de se preˆter volontairement a` ce sacrifice, & au defaut de leur volonte´, on les y forc¸ait. V. Tome I. Liv. II. chap. 4. p. 293, 294. Ms-texte et Ms-notes 5 Keysler ] la source (Rel4) et plusieurs mss portent Kempf. faute que nous corrigeons en adoptant la lec¸on de la page de titre de l’ouvrage Ms-texte, MC 8–9 Branhilda ... lui. ] l’e´bauche de cette phrase est un extrait d’Eckstein note´ dans la col. de gauche L’Edda contient le chant de Brunhildur, lorsqu’elle se fait placer a cote´ de Sigourdur assassine´ & monte avec lui dans la ce´leste patrie, au milieu des tourbillons de feu & des cris de triomphe qu’elle pousse triomphe, en ] triomphe, dans son orgueil & dans sa fureur. d’Eckst. XXII. 183. Ms-texte qu’elle pousse dans son orgueil & dans ses fureurs. (D’Eckst. XXII. 183.) en MC 1

2

3

4

BC cite la traduction latine d’un passage de l’Oloff Tryggwazon Saga (chap. II) qui se trouve chez Johann Georg Keyssler, Antiquitates selectæ septentrionales et celticæ qui parle du divorce de Se´gride, dite Storrada, la superbe. Selon la tradition, elle cherche a` divorcer parce qu’elle ne voulait pas mourir avec son e´poux : «Verum alii perhibent, illam noluisse in matrimonio cum illo manere, quod patria lex esset, uxorem debere mortuo marito tumulo cum illo condi ; sciebat autem illa in fatis esse, ut ille ultra decem annos non viveret.» Voir dans Bartholin, Antiquitatum Danicarum, le passage sur l’usage de bruˆler les veuves ` la p. 507, on lit dans l’histoire de Se´gride cette phrase : «Novit avec les maris de´ce´de´s. A autem regem decem annos non supervivere posse, cum contra Styrbiornum dimicans vovisset, se non ultra decem annos vitæ exinde expetere.» Le vœu d’E´ric la de´cide a` divorcer. La source de cette information est une e´tude publie´e par d’Eckstein dans Le Catholique. Voir la variante a` la ligne 8. BC copie en partie le passage suivant : «La religion odinique seule ordonna la mort des veuves, et les encouragea a` monter sur le buˆcher fune´raire ; [...] L’Edda contient le chant grandiose de Brunhildur, lorsqu’elle se fait placer a` coˆte´ de Sigurdur assassine´, et monte avec lui dans la ce´leste patrie, au milieu de tourbillons de feu et des cris de triomphe qu’elle poussait dans son orgueil et sa fureur» (d’Eckstein, «De l’E´tat actuel de la France et de l’Europe et des affaires de la politique exte´rieure, conside´re´e sous le rapport spe´cial des inte´reˆts de la France. Quatrie`me partie : De la constitution de la socie´te´ franc¸aise», Le Catholique, t. VIII, no 22, oct. 1827, pp. 135–221, et plus particulie`rement p. 183). On trouve le texte du chant dans l’e´tude de Wilhelm Grimm, «Über die Entstehung der altdeutschen Poesie und ihr Verhältniß zu der nordischen», Studien, herausgegeben von Carl Daub und Friedrich Creuzer, t. IV, 1808, pp. 75–121 et 216–288, et plus particulie`rement pp. 266–270. Nous relevons encore que «Branhilda» est une mauvaise forme du nom de «Brunhilde» ou «Brunhildur». ` l’endroit indique´ (OCBC, Œuvres, pp. 278–280), il n’est pas question Renvoi impre´cis. A de Saint-Domingue, mais des ce´re´monies fune´raires cruelles des sauvages des iles caraı¨bes. La meˆme impre´cision se trouve dans Ms-note ; voir la variante aux lignes 2–4.

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de certaines dignite´s devaient mourir avec le monarque a. Au Mexique et au Pe´rou, les fre`res du roi pe´rissaient avec lui, et, malgre´ l’exception introduite d’ordinaire par les preˆtres en leur propre faveur, celui qui pre´sidait au culte prive´ du prince e´tait enferme´ dans son tombeau b. On enterrait avec le roi des Scythes, sa concubine, son e´chanson, son cuisinier, son ministre, ses e´cuyers, des chevaux, et a` l’expiration de l’anne´e, cinquante de ses serviteurs e´trangle´s e´taient place´s a` cheval autour de sa se´pulture c. Les Ephtalites renfermaient un certain nombre de guerriers dans la tombe de leurs ge´ne´raux morts en combattant d. Chez les Japonais, qui conservent a b

c d

XE´ NOPH. Cyrop. VII, 3. DIOD. III, 41. ACOSTA, Hist. nat. et mor. des Ind. occid. V, 78. On sacrifiait de plus des hommes difformes, pour que dans l’autre monde ils amusassent leurs maıˆtres. Singulier me´lange de religion, de bouffonnerie et de cruaute´2. HE´ RODOT. IV, 71–723. PROCOP. de Pers4.

4 enferme´ dans ] sacrifie´ sur Ms-texte 6 ministre, ses ] ministre, 〈son e´chanson〉 ses Mstexte 11 Acosta ] a` la hauteur de l’entre´e de cette note commence dans Co 3262 le re´sume´ d’une re´flexion d’Eckstein que BC n’utilisera que partiellement ; voir ci-dessous, p. 332, ligne 15 Manie`re dont le Panthe´isme se combine avec l’ide´e du sacrifice. Dieu e´tant tout, se nourrit de sa propre substance. le Pourousha des Indiens trouve en lui meˆme une nourriture ine´puisable, mange sa chair & boit son sang. il est a´ la fois son propre convive, son holocauste & son offrande, le sacrificateur & le sacrifice : car, le cre´ateur, existant seul, n’a de moyen de cre´er le monde que de se 〈sacrifier〉 transformer en cre´ature, de se sacrifier, de se livrer lui meˆme. Il est immole´, ses lambeaux sont disperse´s : c’est le sacrifice de Bacchus, d’Osiris, de Brahma, Pourousha, cre´ateur-cre´ature. Il a pour sacrificateurs ses propres faculte´s, les forces qui l’assistent dans l’œuvre de la cre´ation. Il s’e´puise, meurt & revit sous la forme de l’univers. a peine les Divinite´s furent elles cre´e´es qu’elles tombe`rent dans l’oce´an. Rigveda. Aitareya Aranya, Liv. 2. cap. 4. d’Eckst. X. 60–62. Ms-notes 15 Procop. ] 〈Relat. des Voy. qui ont servi a´ l’e´tabl. de la Cie Holland. des Indes Orient.〉 Procop. MC 1

2 3 4

BC renvoie au livre VII, chap. III de Xe´nophon, Cyrope´die, qui raconte sur un ton tragique la mort d’Abradats, roi de Suse, et de son e´pouse Panthe´e. Cyrus plaint la perte d’un allie´ et ami et ordonne sa se´pulture. La mort de l’e´pouse et de trois eunuques est pre´sente´e comme faisant partie des rites observe´s pour la se´pulture (Xe´nophon, Cyrope´die, t. III, livres VI-VIII, texte e´tabli et traduit par E´douard Delebecque, Paris : Belles Lettres, 1978, pp. 59–62). – Quant a` Diodore, BC aurait duˆ citer le chap. VII du livre III de la Bibliothe`que historique ou` il est dit qu’a` la mort du roi, tous ses amis se laissent mourir volontairement (v. la traduction de Ferdinand Hoefer, t. I, Paris : Hachette, 1865, p. 189). Voir Acosta, Historia natural, p. 321. BC revient a` la meˆme citation que nous avons indique´e ci-dessus, p. 281, n. 3. BC re´sume ce qu’on lit chez He´rodote sur les fune´railles des rois scythes. Allusion a` un passage du chap. III du livre I de l’Histoire des Perses. Mais chez Procope ce ne sont pas des ge´ne´raux tombe´s lors d’une bataille avec lesquels on ensevelit des amis vivants, mais des personnes riches qui partagent leur vie avec des amis qu’ils choisissent. L’usage exige que ces amis soient enterre´s avec l’ami mort avant eux.

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De la Religion, IV

soigneusement les formes d’une religion sacerdotale, dont le fond a disparu, on ensevelit des soldats et des es claves avec les chefs de l’arme´e et de la cour a. La coutume qui contraignait les femmes a` mourir avec leurs maris avait e´te´ en vigueur chez les Gaulois ; car Ce´sar nous dit que de son temps elle e´tait a` peine abolie b ; elle subsistait chez les He´rules c, et nous la retrouvons aux Indes d. Les deux femmes de l’Indien Ce´te`s, officier de l’arme´e d’Eume`ne, apre`s la mort d’Alexandre, furent la proie des flammes e. Cette pratique de´fie les a b c d e

Rel. des Voy. qui ont servi a` l’e´tablissement de la compagnie holland. des Ind. orient1. De Bello Gallic. VI, 192. POMP. MELA, III, 83. PROCOP. Goth. III, 144. SOLIN, XIV. V5. POMPONIUS MELA, II, 2, sur d’autres peuples6. VALER. MAX. II, 67. DIOD. XIX, 108

10 De Bello ] Bello Ms-notes 1

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3 4

5 6

7 8

BC renvoie d’une manie`re assez vague a` un re´cit de Rene´ Augustin Constantin de Renneville (e´d.), Recueil de voyages qui ont servi a` l’e´tablissement et aux progre`s de la Compagnie des Indes orientales, forme´e dans les Provinces-Unies des Pays-Bas, Amsterdam : Roger, 1710. Le passage vise´ n’est pas identifie´. Nous supposons qu’il a trouve´ cette re´fe´rence dans l’ouvrage de Meiners, Allgemeine kritische Geschichte der Religionen, Hannover : im Verlage der Helwingischen Hof-Buchhandlung, 1806, p. 516. Meiners cite les cinq volumes sans nommer Renneville. Ce´sar, dans le livre VI, chap. 19, parle des femmes marie´es chez les Gaulois. Mais son re´cit ne correspond pas a` ce que dit BC ici. Elles n’e´taient pas contraintes a` mourir avec leur mari, au contraire, elles he´ritaient de leur fortune commune. Au cas ou` l’on peut prouver une irre´gularite´ apre`s la mort du mari, la femme est tue´e par les membres de la famille. Le renvoi cite Pomponius Mela, De situ orbis libri tres, livre III, chap. VIII consacre´ a` la Mer Rouge, n’a aucun rapport avec le fait e´voque´ par BC. Il faut lire II, XIV pour le renvoi a` Procope. BC revient a` ce chapitre qui parle de l’usage des He´rules selon lequel la veuve e´tait oblige´e de se tuer pre`s du tombeau de son mari. Si elle n’observait pas cette obligation, elle e´tait conside´re´e comme une personne sans honneur. Le renvoi au chap. XIV du Polyhistor de Solin est faux. Il faut probablement lire «XV», ce qui renvoie au chapitre sur la Thrace. Le passage de Pomponius Mela, De situ orbis libri tres, vise ceci : «Nec feminis quidem segnis est animus. Super mortuorum virorum corpora interfici simulque sepeliri, votum eximium habent : & quia plures simul singulis nuptæ sunt, cujus it fit decus, apud judicaturos magno certamine affectant» (e´d. curante Abrahamo Gronovio, Lugduni Batavorum : apud Samuelem Luchtmans et fil., 1748, p. 137). Valerius Maximus, Dictorum factorumque memorabilium libri novem, lib. II, 6, 14, pp. 105– 106. Il faut lire «livre XIX, chap. XXXIV». La premie`re phrase de ce chapitre contient le fait cite´ par BC : «Quamquam enim lex unam simul comburi iubebat, ambæ tamen ad funerationem Cetei, de morte simul oppetenda [...] contendentes aderant» (e´d. de Strasbourg, t.VIII, p. 269).

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lois europe´ennes a` Be´nare`s et a` Bombay a : et ce sont les brames qui traıˆnent au buˆcher les malheureuses victimes, tantoˆt les enivrant de parfums et de liqueurs spiritueuses et les e´tourdissant d’une musique bruyante, tantoˆt les poursuivant de l’ide´e de l’opprobre, et meˆme employant la violence pour consommer l’affreux sacrifice ; car si la veuve se re´tracte, lorsque la ce´re´monie est commence´e, la force est permise pour la contraindre a` l’achever b.

a b

1

2

HERD. Phil. de l’Hist. III, 43. As. Res. IV, 2241. Histor. fragm. of the Mog. empire of the Marattoes, and of the English concerns in Hindostan, p. 1262.

Le renvoi a` Herder, Ideen zur Philosophie der Geschichte der Menschheit, doit eˆtre corrige´. BC pense a` la troisie`me partie, livre XI, chap. IV, ou` Herder traite de l’Inde (e´d. Bollacher, t. VI, Frankfurt : Deutscher Klassiker Verlag, 1989, pp. 453–454). – Le second renvoi concerne sans doute l’article de Henry Colebrooke, «On the Duties of a Faithful Hindu Widow», Asiatic Researches, t. IV, pp. 209–219 (lire probablement «IV, 214»). L’article parle des ce´re´monies a` observer et des punitions. Mais il n’y est pas dit qu’on peut la forcer a` monter le buˆcher. Une fiche dans Co 3293 renvoie a` cet article et re´pe`te la meˆme erreur : «Une veuve qui a promis de se bruler & qui recule peut y eˆtre force´e par ses parens. A. R. IV, 214 Colebrooke on the Duties of a faithful Indian Widow.» Colebrooke dit clairement : «should the widow recede, she incurs the penalties of defilement» (p. 214). BC renvoie a` l’ouvrage de Robert Orme, Historical Fragments of the Mogul Empire, of the Morattoes, and of the English Concerns in Idostan from the Year MDCLIX. Il y est question de la mort de Sevagy en 1680. «His funeral pile was administered with the same sacrifices as had been devoted the year before to the obsequies of the Maha Rajah, Jeffwont Sing, of Joudpore : attendants, animals, and wives, were burnt with his corpse» (dans l’e´dition de Londres (Wingrave, 1805) que nous avons consulte´e, p. 90).

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Chapitre III. Des privations contre nature.

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De la Religion, IV

Nous avons de´ja fait remarquer a` nos lecteurs a ce qu’il y a de myste´rieux dans le sentiment de pudeur ou de honte inhe´rent a` l’union des sexes ; nous avons indique´ par quelle transition fort naturelle ce sentiment inexplicable a pu sugge´rer a` l’homme l’ide´e de quelque chose de criminel dans les jouissances dont il rougissait. Meˆme aujourd’hui que la religion et la socie´te´ ont sanctifie´ la reproduction des eˆtres par des formes solennelles, une notion de souillure y demeure attache´e. L’e´pouse qui sort des bras d’un e´poux, nous semble, quand notre imagination veut la suivre dans les embrassements qu’elle a duˆ subir, avoir perdu de sa purete´, et la mater nite´ est ne´cessaire pour lui rendre cette purete´ sous un rapport nouveau. Il n’est donc pas e´tonnant que le polythe´isme sacerdotal, empreint de l’ide´e du sacrifice, se soit appuye´ sur la pudeur, pour commander a` l’homme le renoncement aux plaisirs des sens. a

T. I, p. 172, 2e e´dit1.

E´tablissement du texte : Manuscrits : 1.) BCU, Co 3262/1, pp. 217–221 [=Ms-texte] et Co 3262/2, pp. 140–144 [=Ms-notes] 2.) BCU, Co 3246, fos 109–112 [=MC] Imprime´ : De la Religion, conside´re´e dans sa source, ses formes et ses de´veloppements, t. IV, Paris : Chez Pichon et Didier, e´diteurs, 1831, pp. 247–253. 2 privations ] la source porte Privations 1 Chapitre III. ] Chapitre 4 Ms-texte Ch. 4. MC faute d’imprimerie que nous corrigeons en adoptant la lec¸on de la table des matie`res Rel4 3–15 Nous ... sens. ] le de´but du texte e´tait d’abord conc¸u ainsi Ce que nous avons dit des sacrifices humains s’applique e´galement aux privations contre nature. dans la col. de gauche, a` la hauteur de cette phrase, se trouve une note de travail ; quelques-unes des phrases se retrouvent dans la version de´finitive Ce ch. doit commencer par quelques observations sur la pudeur. en rappelant ce que j’ai dit dans le 1er vol. sur la myste´rieuse relation de la femme a` son mari, il faut ajouter que la honte inexplicable qui accompagne le plaisir a pu & du donner a` penser a` l’homme. il a pu voir un crime dans ce dont il rougissoit malgre´ lui & sans savoir pourquoi. Meˆme aujourd’hui l’ide´e de souillement s’attache a l’acte qui reproduit les eˆtres. L’e´pouse qui sort meˆme des bras d’un e´poux, nous semble, quand notre imagination la suit dans les embrassemens qu’elle a subis, avoir perdu de sa purete´ & la maternite´ est ne´cessaire pour lui rendre cette purete´ sous un rapport nouveau. Ms-texte 1

OCBC, Œuvres, t. XVII, pp. 244–247.

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Livre XI, chapitre III – Des privations contre nature

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Le polythe´isme inde´pendant a parfois sanctionne´ ces injonctions rigoureuses. La plupart des preˆtresses d’Hercule, de Minerve, de Diane et de Ce´re`s a, en Gre`ce, e´taient astreintes a` une continence plus ou moins longue. Mais les Grecs adoucissaient d’ordinaire les privations prescrites par la religion, soit en leur assignant un terme, soit en ne les imposant qu’a` une e´poque ou` l’aˆge amortit le besoin des sens. Les preˆtresses d’Hercule a` Thespis e´taient seules soumises a` une virginite´ perpe´tuelle b. a

b

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On a vu, tome II, Liv. V, ch. 51, que ces divinite´s e´taient un amalgame de notions sacerdotales, refondues par l’esprit grec : c’est peut-eˆtre par une re´miniscence de ces notions qu’on leur avait consacre´ des vierges. PAUSAN. Corinth2. (V. sur les vierges sacre´es chez les Grecs, MEURS. Lect. Attic. IV. 213.) La Pythie e´tait astreinte a` la continence. Eustathe dit que le ce´libat des preˆtresses ne s’introduisit en Gre`ce que long-temps apre`s les temps home´riques4. En effet, The´ano, preˆtresse de Minerve, e´tait femme d’Ante´nor (Iliad. XXIV, 503), et la preˆtresse de Vulcain chez les Troyens avait deux enfants (ib.). Il serait possible que les preˆtres grecs, bien que sans influence le´gale, eussent re´ussi a` glisser dans quelques portions de la discipline religieuse des imitations partielles d’usages sacerdotaux. Le livre XIII nous montrera cette imitation bien plus comple`te dans les myste`res5.

1–2 a parfois ... rigoureuses. ] ne les a pas toujours repousse´es. Ms-texte 3 longue. ] longue, & quelques unes a` une virginite´ perpe´tuelle. BC accroche ici une note que nous retrouvons en partie au bas de la page, en partie dans le texte principal Ms-texte 4–6 Mais ... sens. ] manque MC 4 prescrites ] commande´es Ms-texte 6–7 Les preˆtresses d’Hercule ... perpe´tuelle. ] manque Ms-texte celles d’Hercule ... perpe´tuelle. MC 9 peut-eˆtre ] probablement Ms-notes re´miniscence ] a` la hauteur de ce mot commence dans la col. de gauche un extrait d’Eckstein Selon les mate´rialistes, l’homme, brut dans son origine, ne trouve rien de mieux que d’assouvir sa faim sur la chair de son semblable. mais telle n’est pas la de´plorable origine de l’anthropophagie. elle de´rive d’un funeste e´garement de l’esprit. les Battas, peuple lettre´ de Sumatra, de´vorent leurs parens age´s, avec ce´re´monies & invocations religieuses. Ces barbares croyent assister a` un sacrifice. les prisonniers de guerre, chez les sauvages du Nord de l’Ame´rique, expirent sous les plus affreux tourmens, & s’ils soutiennent cette epreuve avec courage, on les adore come objets sacre´s, & on se nourrit de leur chair en conse´quence. Ceci tient au grand dogme du sacrifice de l’homme innocent mourant pour le coupable, & le rachetant par son sang, dogme ancien comme la chute du genre humain, & qui n’a recu son ve´ritable accomplissement que dans la religion chre´tiene. D’Eckst. XV. 4106. Ms-notes 11 Pausan. ] Par exemple, celles d’Hercule a` Thespis. Paus. Ms-notes 12 astreinte a` la continence ] oblige´e a` la continence (Heeren). Ms-notes 12–13 ne s’introduisit ] ne ce mot re´crit sur en 〈Gre`ce fut〉 s’introduisit Ms-notes 14 XXIV ] manque Ms-texte, MC 16 le´gale, eussent ] le´gale (v. T. [...]. [...].) les lacunes dans le ms. 〈fure〉 eussent Ms-notes 17 XIII ] suivant Ms-texte, MC 1 2 3

BC renvoie aux re´flexions tre`s de´veloppe´es du livre V, chap. V, OCBC, Œuvres, t. XVIII, pp. 248–281. Pausanias, Description de la Gre`ce, livre IX, chap. 27, § 6. BC renvoie a` Meursius, Atticarum lectionum libri VI (Lugduni Batavorum : Ex officina Elzeviriana, MDC. XVII, livre IV, cap. XXI, pp. 210–221), qui traite des thesmophories de Ce´re`s, et plus particulie`rement a` la p. 217, ou` il est question des vierges sacre´es : «Quin & fœminæ quædam, quæ sacris nimirum ministrarent, in summa castitate publice alibantur ; iisque locus ex re dictus θεσμοϕορειÄον.» Les phrases qui pre´ce`dent et suivent apportent des informations sur les sources qui parlent de cette institution.

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De la Religion, IV

Le polythe´isme sacerdotal consacre ces privations plus se´ve`rement a. Chaque pagode aux Indes a un grand-preˆtre auquel le mariage est interdit b. Les Ioguis et les Saniassis font vœu de continence c, et les moines du Tibet et de Siam, parvenus aux grades supe´rieurs de leur hie´rarchie, prennent le meˆme engagement : son infraction est punie de mort d. Le ce´libat e´tait ordonne´ aux preˆtres de la de´esse Cente´otle, au Mexique ; et les Japonais, dans leurs pe´lerinages, sont oblige´s de s’abstenir des plaisirs de l’amour, meˆme avec leurs e´pouses le´gitimes. Le meˆme artifice qui, pour re´concilier l’homme aux sacrifices humains, faisait de´pendre de ces sacrifices la connaissance de l’avenir, attachait a` la chastete´ cette meˆme connaissance. C’e´tait, de`s les temps les plus anciens, une condition indispensable a` la divination, chez une classe de gymnosophistes, et les Semnai qui observaient les astres et pre´disaient les choses futures, e´taient des vierges sacre´es. a b c

d

V. sur ce sujet, CREUTZER I, 190, et les notes. SONN., I. 1851. Ils peuvent emmener leurs femmes dans leur solitude, mais sans avoir de commerce avec elles. Personne, dans la secte de Bouddha, n’arrive a` l’e´tat de bienheureux hors du ce´libat. (As. Res. VI. 482.) L’une des sectes de la religion lamaı¨que permet le mariage a` ses preˆtres, l’autre le leur de´fend. Comme de raison, la plus se´ve`re est la dominante.

1 plus se´ve`rement ] d’une manie`re plus habituelle & plus rigoureuse Ms-texte 5–6 Le ce´libat ... Mexique ] phrase tire´e d’une note Ms-notes 6–13 et les Japonais ... sacre´es. ] passage construit en utilisant plusieurs notes La chastete´ de`s les tems les plus anciens, e´tait une condition ne´cessaire pour la divination, chez une classe de Gymnosophistes, & les Semnai qui observaient les astres & pre´disoient l’avenir, e´toient des vierges sacre´es. 14 sur ] a` Mstexte, MC 15 Sonn. ... 185. ] Sonnerat, I. 185. suit un de´veloppement sur le ce´libat qui passera dans le texte principal et dans d’autres notes Ms-notes Sonnerat ... 185. MC 16–17 Ils peuvent ... avec elles. ] phrase qu’on retrouve dans la note b, ci-dessous, p. 558 Ceux qui se vouent a` la vie contemplative apre`s s’eˆtre marie´s, peuvent ... avec elles. Ms-notes 18–20 Personne ... dominante. ] note construite en utilisant des phrases de deux notes abandonne´es Personne ... 48.) puis L’une ... dominante. (Mayer, art. Gadful, ib. art. Gellong) Msnotes pre´ce`de dans le ms. colle´ une phrase biffe´e, identique a` la note pre´ce´dente 〈Ceux qui se vouent a` la vie contemplative apre`s s’eˆtre marie´, peuvent ... avec elles.〉 Personne ... dominante. (Mayer ... Gellong) MC

5 6

(suite des notes de la page pre´ce´dente) Le renvoi au commentaire des poe`mes home´riques du moine Eustathe (XIIe sie`cle) de Constantinople est copie´ chez Creuzer, Symbolik, t. I, p. 190. BC indique lui-meˆme cet endroit dans la note suivante en citant les remarques laconiques de Creuzer sur les preˆtres. OCBC, Œuvres, t. XXI, a` paraıˆtre. Le passage, copie´ litte´ralement, est tire´ du compte rendu par d’Eckstein de Camille de Roquefeuil, Journal d’un voyage autour du monde pendant les anne´es 1816, 1817, 1818 et 1819, Paris : Ponthieu, Lesage, Gide, 1823 ; voir Le Catholique, t. V, no XV, mars 1827, pp. 399–417, et plus particulie`rement pp. 409–410.

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BC renvoie a` l’e´dition allemande. Le renvoi a` ce tome des Asiatic Researches est faux ; nous n’avons pas re´ussi a` le corriger.

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Livre XI, chapitre III – Des privations contre nature

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Les provinces pe´ruviennes envoyaient a` la cour un certain nombre de jeunes filles, dont les unes e´taient immole´es et les autres voue´es a` la virginite´ a. On connaıˆt les chaˆtiments terribles qui les attendaient, si elles n’e´taient pas inaccessibles a` la se´duction. Le feu les consumait vivantes, ou la terre s’ouvrait pour les engloutir. Le meˆme sort menac¸ait les trois cents vierges de Carangua b. La religion persane semble faire exception. Le Zend-Avesta de´fend expresse´ment les jeuˆnes, les privations, et surtout l’abstinence des plaisirs de l’amour. Cependant quelques passages du Boundehesch pre´sentent l’union des sexes comme la cause premie`re de la chute de l’homme et de la de´pravation de sa nature c. Cette contradiction ne peut s’expliquer que par les vestiges d’une religion plus ancienne que celle de Zoroastre, et que ce re´formateur ne parvint point a` faire comple´tement disparaıˆtre d. Comme le principe qui conduit l’homme a` cette exage´ration n’est pas susceptible d’eˆtre limite´, les fide`les se sont persuade´s bientoˆt que leurs a b c d

ACOSTA, V. ch. 51. ACOSTA, ib2. Boundehesch, p. 83–863 ; GOERR., 530–5314. Voyez ce que nous avons dit sur la re´forme de Zoroastre, t.

II5.

1 pe´ruviennes ] manque Ms-texte 2 les autres ... virginite´. ] dont les autres, vierges du soleil e´toient condamne´es a` la chastete´. Ms-texte 4–5 terre ... engloutir. ] terre qui s’ouvroit pour les engloutir, leur pre´paroit une mort plus lente & 〈plus〉 douloureuse. Ms-texte 5 trois ] deux Ms-texte 1

2 3 4 5

Il faut lire livre V, chap. XV . Voir Acosta, Historia natural, pp. 337–338. Les faits mentionne´s ici et quelques lignes plus bas sont indique´s par Acosta dans le chapitre sur les monaste`res de femmes. BC re´sume ici le re´cit de Meiners, Kritische Geschichte, t. II, pp. 222– 223 (voir les Notes de lecture, dossier Meiners, no 247), qui se sert du texte d’Acosta cite´ par BC et d’une autre source non identifie´e ou` il est question des deux cents vierges du temple du soleil a` Carangua, contre´e ou province du Pe´rou. Quant a` ces vierges, voue´es au service du Soleil, a` une virginite´ perpe´tuelle et promises a` une mort cruelle au cas ou` elles se laisseraient se´duire, il s’agit d’un fait bien connu qui est mentionne´ dans le dictionnaire ge´ographique publie´ par Christian Wolff, Historisch-politisch-geographischer Atlas der gantzen Welt, Leipzig : Heinsius, t. III, 1745, col. 537, article «Carangues». La source pourrait eˆtre l’ouvrage de Garcilaso de la Vega, Histoire des Yncas, t. I, pp. 182–183, qui parle des vierges de´die´es au Soleil et de la punition cruelle d’une religieuse de Cuzco qui ne respectait pas la virginite´ perpe´tuelle : «une loi portoit [...] qu’elle fuˆt enterre´e vive» (p. 183). Ce renvoi est faux. Voir la note pre´ce´dente. Voir Kleuker, Zend-Avesta, t. III, Boundehesch, chap. XV, pp. 83–86. Voir Görres, Mythengeschichte, e´d. de 1935, pp. 245–246. Görres raconte le mythe de l’origine des hommes et des peuples du Boundehesch. OCBC, Œuvres, t. XVIII, pp. 154–157.

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privations n’e´taient pas suffisamment pe´nibles. Ils ont provoque´ leurs sens, pour que la re´sistance fut plus me´ritoire. Ils ont recherche´ les tentations, pour que leurs dieux leur sussent plus de gre´ de les combattre. Les Fakirs des Indes, mystiques obsce`nes, s’enorgueillissent, au milieu des caresses de femmes de´votement impudiques, d’eˆtre non-seulement continents, mais impassibles a : et, qui le croirait ? le christianisme de´figure´ a renouvele´, dans le moyen aˆge, ces honteuses et ridicules e´preuves b. «Dans le midi de l’Europe, dit M. de Montesquieu c, ou` par la nature du climat, la loi du ce´libat est plus difficile a` observer, elle a e´te´ retenue. Dans le Nord, ou` les passions sont moins vives, elle a e´te´ proscrite.» C’est que le renoncement aux plaisirs des sens n’a semble´ un me´rite que la` ou` il e´tait une douleur : et il est si vrai que les religions sacerdotales recommandaient la continence comme un sacrifice, comme une victoire sur la nature, plutoˆt que sous le point de a b

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ANQUETIL, 365–3661. Le christianisme de´figure´, disons-nous, car St-Paul est bien plus mesure´ qu’on ne l’a e´te´ depuis relativement a` la valeur du renoncement aux plaisirs des sens. Il ne s’en fait point un me´rite a` lui-meˆme. Il ne regarde point le ce´libat comme un e´tat plus releve´, plus pur, que le mariage. Le mariage, dit-il, est la re`gle, le ce´libat l’exception (Eichhorn. Nouv. Test. vol. I, p. 130, 151, 158, 221, 228, 284, 2852). Il est tre`s-remarquable que toutes les exage´rations, les abstinences, les mace´rations excessives aient e´te´ de´sapprouve´es dans les premiers sie`cles par les chre´tiens encore dociles a` la direction de leur divin chef ; de sorte qu’on peut affirmer en toute ve´rite´ que loin d’avoir ajoute´ a` ce de´lire de l’espe`ce humaine, le christianisme a travaille´ toujours a` le mode´rer. Esp. des lois, XXV, 43.

3 de les combattre ] d’y re´sister 〈& dans〉 Ms-texte 7-p. 303.3 «Dans le midi ... pie´te´. ] manque, y compris les notes Ms-texte et Ms-notes manque dans MC a` cet endroit ; on trouve ce texte, sans variantes, a` la fin du chapitre V, «Conjecture que nous soumettons a` nos lecteurs», fo 115 18 le ] & le Ms-notes 1

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BC cite un passage d’Anquetil Duperron, Voyage en Inde, 1754–1762, qui raconte aux pages indique´es l’histoire d’un fakir : ce chef des joguis «fait sa re´sidence a` quelque distance de Surate, dans un jardin de palmiers et de cocotiers. Celui qui, en 1760, avoit ce titre, e´toit un gros homme d’une assez belle phisonomie. Il e´tait toujours nud comme la main, sans qu’on remarquaˆt que la pre´sence des femmes qui le servoient, lui fit la moindre impression. La religion de ce chef est le Lingam» (Voyage en Inde, 1754–1762. Relation du voyage en pre´liminaire a` la traduction du Zend-Avesta, pre´sentation, notes et bibliographie par Jean Deloche, Manonmani Filliozat, Pierre-Silvain Filliozat, s.l. : Maisonneuve et Larose, 1997, p. 379). Renvoi a` Johann Gottfried Eichhorn, Einleitung in das Neue Testament, Leipzig : Weidmann, 1804–1812, 1814, 1827. BC reproduit les entre´es nos 39, 41, 43, 52–54 de ses Notes de lecture qui re´sument des observations qu’on trouve dans le t. III de l’ouvrage. Ces notes portent dans la marge la mention «empl. 1826». BC cite un passage du chap. «Des ministres de la religion». Les observations de Montesquieu inspirent la pole´mique de BC.

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vue de sa valeur intrinse`que, que dans les meˆmes contre´es la ste´rilite´ e´tait une male´diction, une honte a. Mais se refuser a` ce qu’on de´sire, et fouler aux pieds ses penchants, e´tait un acte me´ritoire d’abne´gation et de pie´te´.

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MEIN., Cr. Gesch., I, 2391.

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Il faut lire «241». BC re´sume une re´flexion qu’on lit dans les Notes de lecture (Co 3293 ; dossier Meiners, Kritische Geschichte, no 67). «Meiners fait une observation importante et a` examiner. La virginite´, dit-il, n’excitoit pas dans l’esprit des anciens orientaux les ide´es de purete´ qu’elle nous rappelle et il n’y a aucun exemple de virginite´ exige´e, ni de Preˆtresses e´ternellement vierges dans les Cultes de l’orient. La virginite´ loin d’y eˆtre honore´e, la virginite´ y est regarde´e come une honte et une male´diction.» Tous les e´le´ments de la re´flexion de BC se retrouvent dans le texte de Meiners, bel exemple de l’approfondissement d’un argument trouve´ chez un autre.

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Chapitre IV. Des rites licencieux.

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Nos observations sur le devoir du renoncement aux plaisirs des sens, et sur les privations contre nature impose´es par les religions sacerdotales aux nations qui les professent, sont applicables a` des rites d’un genre tout oppose´. Nous voulons parler des rites licencieux, pratique´s dans le Midi, en Orient, et pe´ne´trant quelquefois jusque dans l’Occident et le Nord. Ces rites remontent a` l’e´tat sauvage : ils disparaissent dans le polythe´isme inde´pendant, ils se perpe´tuent sous l’empire des preˆtres. En E´gypte, les femmes forment des danses lascives autour du taureau, divinite´ de Lycopolis a. On a vainement nie´ la prostitution re ligieuse des

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De la Religion, IV

On peut consulter, pour connaıˆtre les inde´cences du culte e´gyptien, Heeren, Africa, p. 668 ; He´rodote (II, 60) sur celui d’Isis en particulier (ib. 51), et sur celui de Diane a` Bubaste (ib.)

E´tablissement du texte : Manuscrits : 1.) BCU, Co 3262/1, pp. 225–232 [=Ms-texte] et ImpriCo 3262/2, pp. 147–158 [=Ms-notes] 2.) BCU, Co 3246, fos 116–122 [=MC] me´s : 1.) Placard 13 [=Pl] 2.) De la Religion, conside´re´e dans sa source, ses formes et ses de´veloppements, t. IV, Paris : Chez Pichon et Didier, e´diteurs, 1831, pp. 254–266.

1 Chapitre IV. ] Chapitre 6 Ms-texte Chap. 6. MC 2 rites ] la source porte Rites faute d’imprimerie que nous corrigeons en adoptant la lec¸on de la table des matie`res Rel4 2 Des rites ] a` la hauteur du titre commence dans la col. de gauche un extrait d’Eckstein apologie des rites obsce`nes par d’Eckst. X. 134–135. Ceux qui institue`rent les feˆtes burlesques, & qui les place`rent a` cote´ des feˆtes sacre´es, avoient une connoissance profonde du cœur humain & savoient avec quelle adresse le ge´nie du mal s’y glisse, pour y contrebalancer la puissance ange´lique. Ils ne fonde`rent les feˆtes de la folie que pour prouver d’une manie`re bien positive que tout ce qu’il y a de ne´gatif en nous n’est bien re´ellement que de la folie. On voit en effet, ces feˆtes burlesques & impies. il faut en convenir en apparence subsister partout ou` les peuples sont encore religieux & disparaıˆtre a` mesure que l’indiffe´rentisme dans les croyances devient dominant. Ces feˆtes sont bannies alors, comme obsce`nes & grossie`res, comme un attentat a` la vertu & un outrage aux choses saintes : mais ces choses saintes s’effacent en meˆme tems de tous les cœurs & cessent d’occuper les esprits. cet extrait sera utilise´ pour re´diger la pole´mique contre d’Eckstein a` la fin de ce chap. Voir ci-dessous, p. 312–313. Ms-texte 3–8 Nos observations ... sauvage : ] de´but provisoire du chap. Mes remarques que ci-dessus relativement aux rites licencieux. Ils remontent jusqu’a` la croyance des sauvages. Ms-texte Les observations qui nous ont e´te´ sugge´re´es par les devoirs de renoncement aux plaisirs des sens & par les privations ... sauvage. MC

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Livre XI, chapitre IV – Des rites licencieux

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Babyloniennes a ; des traces de cette coutume s’aperc¸oivent en Lydie b, dans la Phe´nicie. c et a` Carthage d. Les prophe`tes juifs se plaignent fre´quem-

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avec les notes de Larcher (II, 267, 2681). V. aussi les fragments de Pindare dans Strabon (liv. XVII2). Les E´gyptiennes a` Chemnis se livraient aux embrassements du bouc Mende´s (SUIDAS in Priapo3 JABLONSKY. Panth. Æg. II, 74. PLUTARQUE, Dialogue intitule´, Que les beˆtes ont l’usage de la raison5). On voit encore a` pre´sent quelques restes des rites licencieux dans Achmin, ville baˆtie sur les ruines de Chemnis : on y entretient des congre´gations de filles, de´signe´es sous le nom de filles savantes et consacre´es a` la volupte´6. V. nos observations a` ce sujet, t. I, p. 351, 352. MEINERS, Cr. G. I. 393 ; et CREUTZER, II, 21, 22 et 55, 57, sur les amours des preˆtres de Cybe`le apre`s leur mutilation7. CREUTZER, II, 2498. SELDEN, de Dis Syris. Synt. II. 7. p. 2349. Ac. Inscr. XXVIII. 59. AUGUST. de Civ. Dei. IV. 10. On y adorait, ainsi qu’en Syrie et en Assyrie, le Phallus sous le nom de Pe´or ou de Phe´gor, et les jeunes filles lui sacrifiaient leur virginite´. (BAYER ad Seld. 235 et suiv. MICHAEL. Mos. Recht.) Isis, pendant ses courses, resta dix ans en Phe´nicie, suivant une tradition du pays, faisant le me´tier de courtisane. (S. EPIPH. e´dit. Petav., t. II10.) Les le´gendes de Marie l’E´gyptienne ne seraient-elles que la re´miniscence des aventures d’Isis ? V. Culte du Phallus, de Dulaure, p. 17011.

8 a` Chemnis ] de Chemnis Ms-notes, MC 1

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18 Phallus ... 170. ] Phallus, p. 170. Ms-notes

BC cite Heeren, Ideen über die Politik, den Verkehr und den Handel der vornehmsten Völker der alten Welt, zweyter Theil, zweyte Abtheilung, Ägypter, un petit chapitre qui parle des feˆtes religieuses du peuple, dans l’e´dition de 1815, pp. 640–641. Heeren, a` son tour, renvoie a` He´rodote, livre II, chap. 60, texte que BC consulte dans l’e´dition de Larcher, avec les notes de ce dernier (notes 219–221). Le chap. 60 d’He´rodote parle de la feˆte d’Artemis a` Bubastis, le chap. 61 (et pas 51) de la feˆte d’Isis a` Busiris. Le renvoi a` Strabon vise le livre XVII, § 272. Il y est question de la ville de Mende`s, ou` le bouc est adore´, culte dont parle Pindare dans le fragment 201 (e´d. de B. Snell, Leipzig : Teubner Verlagsgesellschaft, 1989, p. 244). Strabon cite les vers : «Voyez la Mende`s e´gyptienne au bord de la mer, a` l’embouchure du Nil, ou` les boucs qui cherchent les che`vres s’unissent aux femmes.» Suidæ Lexicon, article Πρι αποσ (Priapus), t. III, p. 172, parle bien du simulacre de Priape, identifie´ en E´gypte avec Horus, mais pas des E´gyptiennes de Chemnis. Quant a` Jablonski, BC vise le § 4 du chapitre cite´. Renvoi au dialogue satirique de Plutarque, Que les beˆtes ont l’usage de la raison. Voir le texte dans les Œuvres morales de Plutarque, chap. 5, ou` il est question du bouc de Mende`s qui n’e´prouve aucun de´sir de s’unir aux femmes enferme´es avec lui, ainsi que le chap. 7 qui reprend le meˆme sujet. La source de cette note sur Achmin, une ville de l’E´gypte, n’est pas identifie´e. Nous savons par les descriptions de voyageurs que BC a pu consulter qu’il y avait a` Achmin un monaste`re chre´tien pour filles. Mais cela n’explique pas sa remarque sur les «filles savantes». Voir OCBC, Œuvres, t. XVII, pp. 320–322. – Le renvoi a` Meiners, Kritische Geschichte, t. I, vise le re´cit sur le dieu babylonien Belus qui, selon He´rodote, e´tait repre´sente´ sous une forme humaine et avait le privile`ge de pouvoir s’emparer de toute femme qui avait e´veille´ son de´sir. La prostitution religieuse des Babyloniennes est traite´e par Creuzer, Symbolik, t. II, pp. 21–22, les feˆtes de Cybe`le a` Hie´rapolis, pp. 55–57. BC accepte ce que dit Creuzer a` l’endroit indique´ sur les Lydiens, en Asie mineure. BC renvoie a` Selden, De Diis Syris, Syntagmata II, cap. VII, «succoth Benoth», p. 234 de l’e´d. de 1580 : «Ipsissimum enim erat Babyloniæ Mylitte sive Veneris Uraniæ templum, ubi puellæ corollis revinctæ, & sedentes singulis in spatiis, quæ funiculis erant distincta, hos-

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ment de ce que les preˆtres des faux dieux se´duisaient les Israe´lites par des pratiques impudiques a. E´ze´chiel s’e´le`ve contre la fabrication du Phallus, et reproche aux Juives de rendre a` ce simulacre les hommages dus a` Jehovah b. En effet, nous le voyons e´rige´ en pompe dans le temple de Jehovah meˆme c. Lors de l’apostasie d’Osias, roi de Juda, le culte de Priape fut introduit dans le royaume. Josias abattit les cabanes des effe´mine´s qui e´taient dans la maison du Seigneur, et ces effe´mine´s n’e´taient que des preˆtres idolaˆtres, qui ce´le´braient des rites obsce`nes d. Des ce´re´monies semblables souillaient la religion du Mexique e. Parmi les feˆtes auxquelles donne lieu, dans le Raa

b c d e

Belphe´gor, un des dieux des idolaˆtres ennemis des Juifs, avait des formes priapiques, et l’on ce´le´brait en son honneur des rites licencieux. (KIRCHER, Œd. Æg. I, 3331.) Un passage de la Bible nous porterait a` croire que des pratiques du meˆme genre eurent lieu chez les Juifs lors de l’adoration du veau d’or (Exod. 32). EZECH., XVI, 16–17. Rois, II, 23, 7. Rois, ib. et IV. GARCIL. DE LA VEGA, Hist. des Incas, II, 62.

9-p. 307.2 Mexique. ... dansent aussi ] Mexique. Les femmes indiennnes dansent Ms-texte, MC 14 Ezech. ] manque Ms-notes

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pites opperiebantur, qui rite implorata Venere Mylitta, pecuniaque quantulacunque data (quæ Deæ sacra) cum eis a fano subductis rem haberent.» – Le second renvoi a` Selden cite par contre un passage des additions de Beyer, au chap. «De Baal Pe´or» (chap. V, Syntagmata I), d’apre`s l’e´dition de 1568, preuve manifeste d’ailleurs que BC n’a pas consulte´ luimeˆme l’ouvrage de Selden, mais copie´ les notes trouve´es chez d’autres auteurs. – BC renvoie en outre a` Johann David Michaelis, Mosaisches Recht, Fünfter Teil, Reutlingen : Johannes Grözinger, 21785, p. 224 : «Die Medianiter hatten, wie es scheint, die schändliche Sitte, daß ihre mannbar gewordenen Töchter ihre Jungfrauschaft dem Baal Peor zu Ehren ablegen mußten, und zwar dies bei einem eigenen Feste.» La meˆme chose est e´voque´e dans le livre II de l’ouvrage, p. 121. Le renvoi a` Epiphanii Constantiæ [...] episcopi operum omnium tomus secundus (Επιϕανιου Επισκοπου [...] απαντςν τςν σςζομενςν τομοσ δευτερσ) Dionysius Petavius Aurelianus [...] ex veteribus libris recensuit, Latine vertit, & animaduersionibus illustrauit Parisiis : Sumptibus Sonnii, Claudii Morelli, et Sebastiani Cramoisy, MDCXXII, vise le texte Ancoratus p. 107, ou` saint E´piphanie parle de ceux «qui filias suas, & vxores, ac sorores ad Deorum suorum imitanda facinora cohorta˜tur». Et d’Isis, il dit : «Præclarum vero Deum ; vtpote sub eiusmodi disciplina matris institutum, quæ decem totos annos in vrbe Tyro meretricis more sese prostituit.» Voir Jacques-Antoine Dulaure, Des divinite´s ge´ne´ratrices, ou du culte du Phallus chez les anciens et les modernes, Paris : Dentu, 1805. Il faudrait tenir compte des pp. 169–171 qui racontent la le´gende de Dido (Elissa chez les Phe´niciens), fondatrice le´gendaire de Carthage qui a transporte´ les coutumes de Chypre sur les bords de l’Afrique. BC renvoie a` Athanasii Kircheri [...] Œdipus Ægyptiacus, t. I, Syntagma IV, caput V, «De Beelphegor, qui est Deaster sive Idolum Ammonitarum» ; dans l’e´dition Romæ : Ex typographia Vitalis Mascardi, M DC LII, pp. 264–271, et plus particulie`rement pp. 265–267. ` la page indique´e, il n’est pas question Le renvoi a` Garcilaso de la Vega n’est pas e´lucide´. A de ces choses, bien que le passage de´bute par quelques mots sur la religion. Nous n’avons pu corriger la faute.

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mayan a, la re´ception de Bourroutta, figurent au premier rang des danses de courtisanes. De jeunes Indiennes dansent aussi le sein de´couvert devant les pagodes b. Les nouvelles marie´es offrent a` ces images hideuses les pre´mices de la virginite´ qu’elles vont perdre ; et, chose remarquable, cette pratique est pareille en tout a` celle que les Romains adopte`rent lors du me´lange de tous les polythe´ismes. Dans le culte de Cali, les sacrifices humains, les jouissances illicites c, et les chants obsce`nes, sont simultane´ment ordonne´s. a b

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Ram., p. 6371. On peut consulter MEINERS, Crit. Gesch., I, 263 ; HAMILTON, New account of the EastIndies. L’obsce´nite´ des figures du temple de Schiven a` E´le´phantine surpasse, dit Heeren, tout ce que l’imagination la plus corrompue pourrait concevoir. (Inde, 322.) Rien n’est plus licencieux que l’histoire de la de´esse Mariathale, et le culte de Dourga est un me´lange de fe´rocite´ et de de´bauche. (SCHLEG. Weish. der Ind. p. 1192.) LAFLOTTE, p. 2163. Chez quelques tribus indiennes (Moore’s. narrative of the operations of Captain Little’s Detachm. of the Mahratta army, p. 45. ; id. MEIN. C. G. II, 2644), et dans quelques temples du Mexique (KIRCH. Œd. Æg. I, 55, LAET, Beschryv. van West. Ind. V, 5), des feˆtes solennelles offraient la repre´sentation the´aˆtrale des plaisirs contre nature. Creutzer

6 polythe´ismes. ] BC pensait accrocher a` ce mot une note ; le texte biffe´ n’est gue`re lisible 〈le Dieu le nom est illis. avoit une analogie comple`te avec le lingam sur lequel on met aux Indes les jeunes marie´es a` cheval (Lact. de fals. Rel. & Arnob. adv. gent.)〉 Ms-notes 8 Ram. ... 637. ] la note manque Ms-texte, MC 9 consulter ] consulter du reste Ms-notes 14–15 (Moore’s ... 264) ] ajoute´ dans la col. de gauche Ms-notes 16 Beschryv. ] la source porte Beschryr. Rel 4 faute d’imprimerie que nous corrigeons Beschryv. MC 1

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Voir The Ramayuna of Valmeeki, chap. 63 : «gladdened with the sound of trumpets playing near, and followed by a number of beautiful courtezans, dancing in gaudy attire, Bhuruta entered the town» (e´d. de Serampore, p. 637 ; e´d. de Londres, pp. 437–438). BC mentionne dans cette note la documentation dont il s’est servi, a` savoir : Meiners, Kritische Geschichte, t. I, pp. 263–264, sur le culte du lingam ; A. Hamilton, A new account of the East indies, London : A. Bettesworth and C. Hitch, 21739, sans pre´ciser un passage (voir ci-dessus, p. 85, n. 3) ; Heeren, Ideen über die Politik, den Verkehr und den Handel, Erster Theil, Dritte Abtheilung, Inder, dans l’e´dition de 1824, pp. 27–28 (la page indique´e par BC est fausse) ; enfin Friedrich Schlegel, Über die Sprache und Weisheit der Indier, t. II, p. 119, qui parle du culte de Shiva et de Durga, «der Dienst des Sivo, und der furchtbare Durga [bieten] Bilder des Todes und der Wollust, blutige Menschenopfer und bakchantische Zügellosigkeit in einem grausamen Gemisch dar». Voir La Flotte, Essais historiques sur l’Inde ; BC renvoie a` la description d’une ce´re´monie licencieuse exe´cute´e par les filles de la pagode. Voir Edward Moor, A Narrative of the Operations of Captain Little’s Detachment and of the Mahratta Army Commanded by Purseram Bhow, London : Printed for the Author, 1794. BC renvoie au chap. IV ou` il est question, vers la fin (pp. 53–59), du culte du lingam et des de´corations inde´centes des idoles : «a great variety of not only human nudities in the most indecent, uncleanly situations, but men and beasts, and beasts and women, exposed in the most shameful combinations that a brutal imagination could suggest» (p. 57). – Quant a` Meiners, Kritische Geschichte, il faut lire «I, 264». Ce passage est de´ja` mentionne´ a` la note 4 de la page pre´ce´dente. Voir Kircher, Œdipus ægyptiacus, syntagma V, cap. V, e´d. de Rome, t. I, pp. 417–423. Kircher parle dans ce chapitre du culte du phallus (p. 422) et de la mise en sce`ne solennelle

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De la Religion, IV

L’aˆprete´ des climats du Nord ne pre´serva point leurs habitants des exce`s honteux d’une superstition raffinant sur elle-meˆme. Les Scandinaves, a` la feˆte de Thor, dans la nuit la plus longue de l’anne´e, se livraient, disent plusieurs Sagas, a` des de´bauches de tous les genres, et les jeunes preˆtresses de Frey servaient aux plaisirs du dieu ou de ses ministres a. A cet e´gard, comme dans ce qui se rapporte aux sacrifices humains et aux privations contre nature, la religion des Perses semble me´ riter moins de reproches que les autres. Cependant le jour de la feˆte de Mithras, le monarque persan avait ou la liberte´ ou le devoir de s’enivrer et de danser publiquement une danse nationale b, ce qui pouvait eˆtre un reste de quelques rites grossiers ou licencieux, que la re´forme de Zoroastre avait abolis, en faisant aux coutumes ante´rieures une concession rare et passage`re c. Ainsi que les sacrifices humains, les feˆtes impudiques avaient leurs explications scientifiques. La fable d’Attys, les amours de Cybe`le, la dispa-

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b c

rapporte un fait semblable sur les myste`res de Samothrace. Antoinette Bourignon (Vie continue´e) fait du pe´che´ contre nature l’incarnation du diable1. Serait-ce qu’a` son insu, et par la lecture de quelques mystiques des premiers sie`cles, imbus de traditions emprunte´es a` des religions sacerdotales, ces traditions s’e´taient meˆle´es a` l’extravagance de ses propres conceptions ? Oloff Tryggueson Saga, et Bartholin, Antiq. Danic., II, 52. La Saga sue´doise, qui nous est transmise par ces auteurs, est, a` la ve´rite´, l’ouvrage d’un moine, qui repre´sente toujours Frey comme le diable, et qui cherche a` rendre odieux le culte que le christianisme avait remplace´. Mais il n’est pas vraisemblable qu’il ait suppose´ ce qui n’e´tait pas, bien qu’il le soit qu’il a exage´re´ ce qui e´tait. ATHE´ N. X, 10 ; KLEUKER, Anhang Zum. Zendavesta, t. II, 3, p. 1943. Nous aurions pu prolonger a` l’infini cette e´nume´ration. Les rites licencieux se retrouvent chez les Chalde´ens (GOERR. I, 270 ; Paralip. II, 15–164), les Cappadociens (CREUTZ. II, 22), les Arme´niens (id. ib. 22–23), et dans toutes les ˆıles ou` les navigateurs e´trangers avaient

4 Sagas ] traditions Ms-texte 6–7 et aux ... nature ] ajoute´ dans la col. de gauche Ms-texte 13–14 explications ] 〈illis.〉 explications les deux premie`res syllabes re´crites sur la fin du mot biffe´ Ms-texte

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de sacrifices humains, parfois volontaires (pp. 421–422), mais pas de repre´sentations the´aˆtrales obsce`nes. – BC cite, probablement d’apre`s Meiners, Kritische Geschichte, Johannes de Laet, Beschrijvinghe van West-Indien, Leyden : Bij de Elzeviers, 1630. Mais ni les chap. 4 et 5, ni le chap. 9 de cet ouvrage, une description de´taille´e des Indes occidentales, ne parlent de repre´sentations the´aˆtrales. L’ide´e attribue´e a` A. Bourignon est fre´quente a` l’e´poque. BC exploite l’article du Dictionnaire historique et critique de Bayle (e´d. de 1702, t. I, p. 688, note R). Bartholin, Antiquitatum Danicarum, livre II, cap. V, contient plusieurs passages de la Olafs Tryggvasonar Saga qui parle de Frey ou Thor, mais ne dit rien sur les de´bauches. Pour Athe´ne´e voir Kleuker, Anhang zum Zend-Avesta, t. II, 3, p. 113, n. 1. – BC cite l’ouvrage, mais avec des erreurs. Il y est question des feˆtes des Persans a` la p. 192 et dans le t. III du Zend-Avesta, p. 247, mais sans les de´tails dont parle BC. Athe´ne´e, Les Deipnosophistes, livre X, 434e, cite un passage de Duris de Samos, ÆΙστορι αι, paraphrase´ par BC. BC cite Görres, Mythengeschichte, qui parle du mythe de Baal, fondateur de la ville de Babylone, inventeur du culte des astres (e´d. de 1935, p. 136) ; BC simplifie ses re´flexions

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rution1 de son amant mutile´, les orgies ce´le´bre´es par les fide`les qui le cherchent, et les inde´cences qui caracte´risent leur joie fre´ne´tique, lorsqu’ils le retrouvent, tou tes ces choses se rapportent a` l’astronomie a. Les rites obsce`nes, comme les rites sanglants, tendent a` tomber en de´sue´tude. Les sectes indiennes qui rendent hommage aux organes ge´ne´rateurs se divisent en deux branches, dont l’une admet, dont l’autre repousse les pratiques immodestes b : l’opinion fle´trit la premie`re. Mais le sacerdoce re´siste, et le plus pur des re´formateurs, Crishna, est honore´ encore aujourd’hui par les ce´re´monies inde´centes qu’il essaya de bannir c. Nous n’apercevons rien de pareil dans les religions inde´pendantes des preˆtres, telles qu’elles sont professe´es publiquement. Il y avait bien en Gre`ce des feˆtes ou` des femmes paraissaient nues ; mais ces femmes n’e´taient que des courtisanes d, tandis que les rites licencieux des religions sacerdotales forc¸aient a` l’inde´cence ou a` l’impudicite´ les femmes de toutes les conditions.

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porte´ leurs rites, telles que Samothrace, Lemnos, Chypre, la Sicile (ATHE´ N. XIV, 647 ; SAINTE-CROIX, 217, 4002). CREUTZ., t. II, p. 33–473. Les Indiens repre´sentent ces deux subdivisions par deux sentiers dont l’un conduit a` droite, et l’autre a` gauche. Celui de droite est un culte de´cent, celui de gauche se compose d’obsce´nite´s plus ou moins grossie`res. Le sentier a` gauche est de´sapprouve´ par ceux qui ne le suivent pas, et ses tantras ou livres sacre´s sont l’objet de leur repoussement et de leur me´pris. (COLEBROOKE, As. Res., VII, 279–2824.) V. tome III, p. 215 et la note5. STRABON (liv. VIII) raconte qu’a` Corinthe des femmes voue´es au culte de Ve´nus faisaient trafic de leurs charmes, et en de´posaient le prix dans le tre´sor du temple6. Mais le me´tier de

3 l’astronomie. ] l’astronomie, & le sens toujours double des religions soumises aux preˆtres ne sauroit ici eˆtre me´connu. Ms-texte 4 Les rites ] De meˆme encore, les rites Ms-texte 7 l’opinion ... premie`re. ] manque Ms-texte 8–9 honore´ ... aujourd’hui ] encore aujourd’hui honore´ Ms-texte 9 qu’il ... bannir ] manque Ms-texte 13 licencieux ] de´but du placard 13 21 par ] de Ms-notes 24 V. ... note. ] Repression des ce´re´monies obsce`nes, essaye´e par Crishna. 3e vol. p. 215 & note ajoute´ dans la col. de gauche Ms-texte V. ... note. ajoute´ dans la marge MC

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et copie le renvoi aux Chroniques de l’Ancien Testament (liv. II, chap. 15, v. 16 ; Paralipomena). BC ajoute a` son tour le renvoi a` Creuzer, Symbolik, t. II, ou` celui-ci traite de la de´esse Anaitis. – Le renvoi a` Athe´ne´e n’est pas e´lucide´. BC e´crit bien «disparution». Le TLF signale que cette forme ancienne se rencontre encore chez des auteurs du XIXe sie`cle (t. VIII, p. 284). BC cite la premie`re e´dition de l’ouvrage. Il faut lire «31–47». Creuzer raconte le mythe autour d’Attis, fils d’une nymphe. BC re´sume la note A, ajoute´e a` la fin du deuxie`me article de Colebrooke, «On the Religious Ceremonies of the Hindus, and of the Bra´mens especially», Asiatic Researches, t. VII, London : Vernor et al., 1803, pp. 279–282. OCBC, Œuvres, t. XIX, p. 244, avec la note a. Voir le livre VIII, chap. 3, § 22. Il ne dit pas que les courtisanes du temple de Ve´nus, dont le nombre s’explique par ses richesses, de´posaient leurs revenus dans le tre´sor du temple.

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Les filles de Sparte dansaient sans veˆtements avec les jeunes garc¸ons : mais bien que nous soyons fort loin d’admirer les lois moitie´ monacales et moitie´ sauvages de Lycurgue, nous ne saurions trouver entre ces lois et les rites de l’E´gypte ou de la Syrie aucune affinite´. Les pratiques licencieuses introduites en Gre`ce se rattachaient toujours a` des dieux e´trangers a. Dans les myste`res meˆmes, les femmes grecques, en adorant le Phallus, ne se prostitue`rent jamais comme celles d’E´cbatane ou celles d’He´liopolis. Diagondas avait interdit a` The`bes les feˆtes obsce`nes, et pour les mieux bannir il avait proscrit les rites nocturnes b. Aristophane propose, dans une de ses come´dies, de chasser les dieux qui prescrivent de telles pratiques. Nous verrons qu’il en fut de meˆme a` Rome, durant la purete´ du polythe´isme romain c. Cette diffe´rence entre les deux espe`ces de po-

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b c

ces femmes, malgre´ cet emploi de leur salaire, pouvait n’avoir avec la religion que des relations fort indirectes. Encore de nos jours dans un pays catholique, en France, une portion de l’impoˆt mis sur la de´bauche sert a` payer des e´crivains religieux, et peut-eˆtre des pe´pinie`res de preˆtres, sans que le catholicisme puisse eˆtre accuse´ de recommander des rites licencieux ; et Strabon appelle ces femmes corinthiennes des He´taires, au lieu que la prostitution des Babyloniennes s’e´tendait a` tout leur sexe. Strabon (XIII) met Priape au nombre des divinite´s les plus re´centes, inconnues a` He´siode1. Suivant plusieurs traditions, Priape e´tait le fils d’Adonis et de Ve´nus, ou plutoˆt le fruit d’un double mariage de cette de´esse avec Adonis et Bacchus (Schol. Apollon. Rhod. I, 932). Or Adonis et Bacchus e´taient l’un et l’autre des dieux e´trangers. Quand les poe`tes cherche`rent partout des alle´gories, ils explique`rent cette naissance de Priape par l’effet que produit sur les de´sirs physiques le vin qui les rend plus indomptables et plus grossiers. CICER. de Leg. II2. CICER. de Nat. Deor. III, 233 ; SAINTE-CROIX, des Myst. 4374.

5–6 Les ... myste`res ] Nous avons dit d’ou` venaient les obsce`nes simulacres des myste`res. Mais dans les myste`res Pl 8 les feˆtes obsce`nes ] les 〈fetes〉 ce dernier mot biffe´ pas inadvertance obsce`nes, 〈celebrees〉 Ms-texte 11 Nous verrons ] Nous montrerons alleurs Mstexte 12 Cette ] Cette nouvelle le dernier mot ajoute´ dans l’interl. Ms-texte 19 XIII ] Liv. XIII MC 23 sur ] 〈illis.〉 sur Ms-notes 1

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Voir Strabon, livre XIII, § 193, sur la ville de Priapos en Mysie, au bord de l’Hellespont, dont le nom s’explique par le culte du dieu de la Ge´ne´ration. La dernie`re phrase de ce passage dit ce que BC rapporte ici. BC reprend un argument qu’on trouve chez Meiners, Kritische Geschichte, t. II, p. 426, qui renvoie a` Cice´ron, De legibus, livre II, chap. 15 et cite la phrase en question. Il s’agit d’ailleurs d’un argument standard, qu’on retrouve aussi chez Filangieri, La science de la le´gislation, livre V, chap. 6 (Œuvres de G. Filangieri, Nouvelle e´dition, Paris : Dufart, 1822, t. V, p. 122, n. 1). – L’allusion a` une come´die perdue d’Aristophane repose e´galement sur Cice´ron qui ajoute a` la phrase sur Diagondas ceci : «Novos vero deos et in his colendis nocturnas pervigilationes sic Aristophanes facetissimus poeta veteris comoediæ vexat, ut apud eum Sabatius et quidam alii dei peregrini iudicati e civitate eiciantur.» Le renvoi a` Cice´ron, De legibus, vise un passage du livre II, chap. XV, 37. Le le´gislateur the´bain est Pagondas, qui interdit les feˆtes nocturnes : «Atque omnia [Bacchanalia] nocturna [...] in media Græcia Pagondas Thebanus lege perpetua sustulit.» La de´fense du culte nocturne de Bacchus Sabazius fut impose´e a` Rome par C. Corne´lius Hispallus en l’an 514. Voir Recherches historiques, e´d. de Silvestre de Sacy, t. II, p. 97.

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lythe´isme ne peut s’expliquer que par le principe dont nous de´veloppons ici les applications et les conse´quences. Le sacerdoce avait ordonne´ la chas tete´, sacrifice de la nature. Il a commande´ l’inde´cence, sacrifice de la pudeur a

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La meˆme de´viation, dans les notions du sacrifice, sugge´ra a` plusieurs he´re´tiques de diverses e´poques les pratiques les plus re´voltantes. Les Maniche´ens pre´tendaient que l’esprit venant du bon principe, et la chair du mauvais, il fallait, en haine de ce dernier, et pour sacrifier la chair, la souiller de mille manie`res, et, sous ce pre´texte, ils se livraient a` tous les genres d’impurete´. (BAYLE, art. Maniche´ens1.) De`s le second sie`cle, Prodicus, et dans le onzie`me Taulerus d’Anvers, recommandaient comme victoire sur l’instinct de la nature l’oubli le plus scandaleux de tout myste`re dans le plaisir. (THEODORET, Hæret. I, 6, v. 27 ; X, 202.) Sitoˆt apre`s la mort des apoˆtres, la doctrine de l’union mystique entre les fide`les fut symboliquement figure´e par l’union des sexes, appele´e l’initiation. Les Adamites, les Picards,

3 a commande´ ] commanda Ms-texte 8 tous les genres ] mille Ms-notes 9 Maniche´ens ] Maniche´isme MC 9-p. 312.13 De`s le second sie`cle ... quinzie`me sie`cle. Il paraıˆt d’ailleurs ... ardente. ] BC intervertit les deux e´le´ments Il parait d’ailleurs ... assez intime. v. le Cantique des Cantiques de la Gita Govinda des indiens. syntagme ajoute´ apre`s coup dans la col. de gauche, en haut Tous les Mystiques ... plus ardente. De´s le 2d sie`cle ... nature 〈illis.〉 l’oubli le plus scandaleux ... jusqu’au 15e Sie`cle. Ms-notes

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BC cite de Bayle, Dictionnaire historique et critique, l’article «Maniche´ens» (e´d. de Rotterdam, 1702, t. II, pp. 2022–2027), et surtout la note B (pp. 2022b–2023a), qui parle des conse´quences pratiques qu’ils tiraient des deux principes. Johannes Tauler (vers 1300–1361) est un dominicain allemand de Strasbourg qui avait pu re´unir autour de lui et de Heinrich Seuse, dans les pays rhe´nans, une grande communaute´ de croyants («Gottesfreunde»), attire´s par sa spiritualite´ mystique. L’ide´e de l’abstinence taule´rienne est le contraire de ce que dit BC ici. Elle apparaıˆt dans les sermons de Tauler a` maintes reprises. On peut citer, a` titre d’exemple, le sermon no 53 (Die Predigten Taulers aus der Engelberger und Freiburger Handschrift sowie aus Schmidts Abschriften der ehemaligen Straßburger Handschriften, hrsg. von Ferdinand Vetter, Berlin : Weidmannsche Buchhandlung, 1910, pp. 240–245). Luther appre´ciait les textes de Tauler et les cite tre`s souvent dans ses propres e´crits. Notons que Mme de Stae¨l parle de lui dans De l’Allemagne (livre IV, chap. 5, e´d. de Blaeschke, p. 748). – BC a copie´ le renvoi a` The´odoret de Cyre, Hæreticarum fabularum compendium (Migne, PG, t. CXXXIII, col. 335–556), dans un ouvrage non identifie´. Les indications concernant le livre I, chap. 6 (col. 351–354) concernent Prodicus, le fondateur de la secte des Adamites. «Uxores enim communes esse sancivit. Quare non solum in publicis conviviis, lucernæ lumine remoto, in quam quisque inciderat cum ea coibat, sed mysticum initiationis ritum incontinentiam hanc ducebant.» Et il ajoute, citant les Stromates : «Homines infelicissimi carnalem concubitus communionem consecrant, et hanc ipsos putant ad Christi regnum perducere.» Le second renvoi est faux. L’ouvrage ne comprend que cinq livres. Ou, si l’on comprend le chap. XX, ni I, 20 ni II, 20 ne traitent du sujet e´voque´ par BC.

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les Anabaptistes s’imposaient la nudite´ comme un devoir. (BAYLE, art. Turlupins1.) De-la` les processions des flagellants, ou` les hommes et les femmes, sans veˆtements aucuns, parcouraient les rues et les grandes routes. Ces pratiques ont dure´ jusqu’au quinzie`me sie`cle. Il paraıˆt d’ailleurs qu’inde´pendamment de cette manie`re de conside´rer le sacrifice, il existe entre la de´votion exalte´e a` l’exce`s, et la soif la plus effre´ne´e de volupte´, une relation assez intime. (V. le Cantique des cantiques et le Gita-Govinda des Indiens.) Tous les mystiques se sont laisse´ entraıˆner a` des actes, a` des descriptions, a` des alle´gories, a` des images tre`s-inde´centes. Pour s’en convaincre, il suffit de lire les mystiques anglais ou franc¸ais, Barrow, Mad. Guyon, Antoinette Bourignon surtout, que le caracte`re le plus aˆpre et le plus sec ne pre´serva point de cet e´cueil. Toutes les expressions destine´es a` de´crire les jouissances de la de´votion sont emprunte´es des plaisirs physiques, et les de´tails deviennent plus libres, a` mesure que la de´votion devient plus ardente2. Un auteur3, que nous avons fre´quemment cite´ dans cette partie de notre ouvrage, parce qu’il est l’apologiste constant, bien que plus ou moins direct, de tous les rites sacerdotaux et l’expression naı¨ve de l’esprit sacerdotal de l’antiquite´ voulant se glisser dans le christianisme, a e´crit a` ce sujet des pages tre`s-curieuses. Il commence par attribuer a` une connaissance profonde du cœur humain les feˆtes burlesques et obsce`nes, place´es a` coˆte´ des feˆtes sacre´es. Les hommes qui ont e´tabli ces feˆtes burlesques, obsce`nes, impies en apparence (il le reconnaıˆt), savaient, dit-il, avec quelle adresse le ge´nie du mal se glisse, pour contrebalancer la puissance ange´lique. Ces feˆtes subsistent partout ou` les peuples sont encore religieux, et disparaissent a` mesure que l’indiffe´rentisme dans les croyances devient dominant. Ces feˆtes sont bannies alors, comme obsce`nes et grossie`res, comme un attentat a` la vertu et un outrage aux choses saintes : mais ces choses saintes s’effacent en meˆme temps de tous les cœurs et cessent d’occuper les esprits. Et n’est-ce pas du sein des bouleversements et du de´sordre que l’ordre renaıˆt ? De meˆme les saturnales, commence´es par des feˆtes de de´bauches, se terminaient par des solennite´s. Passant ensuite de la the´orie a` l’application et meˆme a` l’image, notre auteur nous donne l’extrait du poe`me de Jayade´va, qu’on peut appeler le Cantique des cantiques des Indiens. Crishna, dit-il, le dieu pasteur, se fait aimer

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5-p. 313.35 Il paraıˆt ... 619.) ] manque Pl 14–29 Un auteur ... cantiques des Indiens. ] de´but de la pole´mique manque Ms-notes 25 esprits. ] esprits. (Le Cathol. X. 134–135.) MC 29-p. 313.34 Crishna, dit-il, ... Jayade´va. ] 27 solennite´s. ] solennite´s. (ib. XXIV. 249). MC long extrait d’Eckstein dans la col. de gauche Crishna, le dieu ... berge`res. c’est dit d’Eckst. le symbole ... diamans 〈qui repanden〉 chaine de l’amour, qui re´pandent ... harmonieuse. suppression de quelques mots ce poe`me dit d’Eckstein, a pour sujet ... son sauveur. d’Eckst. XIV. 362–379. Ce poe`me ... Jayadeva. d’Eckst. IV. 353–354. Ms-notes 1 2

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Voir Bayle, Dictionnaire historique et critique, l’article «Turlupins» (e´d. de Rotterdam, t. III, pp. 2920–2921), et en particulier la note Y, ou` BC trouve les de´tails de son argumentation. Antoinette Bourignon utilise, comme beaucoup de mystiques avant et apre`s elle, des me´taphores tire´es de la poe´sie d’amour pour de´crire ses transports religieux. Le mode`le est e´videmment le Cantique des cantiques de l’Ancien Testament. – Quant a` Mme Guyon, une observation analogue s’impose. – Le mystique anglais de´signe probablement Isaac Barrow, le mathe´maticien et the´ologien. Nous n’avons pas re´ussi a` pre´ciser l’allusion. BC termine cette note par une pole´mique contre d’Eckstein, pour laquelle il se sert de deux e´tudes parues dans les t. IV (1826) et V (1827) du Catholique. Il proce`de, sans nommer l’auteur, a` un montage de citations assez fide`les de passages tire´s d’abord de l’essai «Des syste`mes sceptiques depuis la Re´forme» (cah. X, pp. 134–135), puis d’une analyse du texte de Jayaveda intitule´ Gita Govinda, que d’Eckstein pre´sente a` ses lecteurs en partant de la traduction anglaise par William Jones (cah. XIII, pp. 341–384). La pole´mique de BC, en

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des jeunes berge`res, les Gopis ou Gopias, avant que lui-meˆme ait ressenti l’a mour. Ses jeux enfantins se meˆlent aux peintures mystiques, d’une manie`re qui souvent effraie la pruderie de nos mœurs civilise´es..... Enfin le feu du de´sir s’allume dans le cœur du jeune dieu, et la peinture de ce de´veloppement du jeune homme porte un caracte`re de gaıˆte´ naı¨ve que repousserait la re´serve de nos mœurs.... Raddha, la berge`re choisie de Crishna, s’alarme de ses danses avec les autres berge`res. C’est, dit l’auteur franc¸ais ou allemand, comme on le voudra, le symbole de la communion spirituelle du genre humain qui s’inquie`te de son divin sauveur, de son ami ce´leste. Les plus bruˆlantes expressions de la poe´sie orientale servent a` peindre sous les couleurs d’une passion terrestre la jalousie de Raddha... Il y a une mysticite´ charnelle, que l’on aurait tort de regarder comme uniquement terrestre et impure.... Partout l’amour ce´leste se voile des expressions les plus vives de l’amour profane... Que l’on imagine ce que le Cantique des cantiques offre de plus ve´he´ment, ce que l’expression du de´sir a de plus de´lirant, on aura quelque ide´e des transports de Raddha, transports pre`s desquels la fre´ne´sie de Phe`dre elle-meˆme semble paˆlir.... Crishna vient, et la pudeur qui avait trouve´ un dernier asile dans les noires prunelles de Raddha s’e´vanouit enfin. Les berge`res ont l’air, pour cacher leur malin sourire, de chasser les insectes aile´s qui voltigent. Elles se retirent de la grotte, et Raddha se penche avec un mol abandon sur la couche parseme´e de feuilles et de fleurs nouvelles... Le matin renaıˆt, et le de´sordre de sa parure et la fatigue de ses yeux trahissent une nuit passe´e sans sommeil. Le dieu la contemplant avec de´lices, me´dite sur ses charmes. Je ne puis, s’e´crie-t-il, la voir sans extase, bien que ses cheveux soient e´pars, que l’e´clat de son teint soit fle´tri, et qu’elle cherche a` cacher avec une pudeur remplie de grace le de´sordre de sa guirlande et de sa ceinture qui a mal de´fendu ses appas les plus secrets.... Bien-aime´ de mon cœur, lui dit Raddha, place sur ma paupie`re qui voile des rayons plus doux que les traits lance´s par l’amour, cette poudre odorante qui ferait envie a` l’abeille : suspends a` mes oreilles ces diamants, chaıˆne de l’amour, qui re´pand au loin une clarte´ si vive ; que tes yeux, guide´s par leur e´clat, puissent comme deux antilopes fugitives, parcourir mes charmes et poursuivre leur douce proie.... O toi dont le cœur est si tendre, remets dans leur ordre mes veˆtements, rends aux bijoux qui me parent leur place accoutume´e, et que mes clochettes d’or retentissent de nouveau autour de ma ceinture harmonieuse : et apre`s ce tableau fort adouci des inde´cences de l’auteur indien, notre e´crivain conclut de nouveau que ce poe`me a pour sujet l’attraction de l’ame vers son sauveur. Ce poe`me de Jayadeva est encore apre`s deux mille ans l’objet d’une feˆte religieuse. Pendant la nuit une pantomime exacte repre´sente les sce`nes du chant du pasteur, et les spectateurs re´citent les odes de Jayade´va. (V. PATTERSON sur la danse du Rasijatra, As. Res. XVII, 318–6191.)

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32 sauveur. ] sauveur. (ib. notes

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362–379.) MC

34–35 (V. Paterson ... 619.) ] manque Ms-

apparence mode´re´e, mais d’une ironie mordante («l’auteur franc¸ais ou allemand, comme on le voudra»), a pour but de de´noncer chez d’Eckstein un esprit sacerdotal plus ou moins affiche´ et de de´truire ainsi une the´orie fort contraire a` la sienne. Le renvoi est faux. Il faut lire : «VIII, 64». BC renvoie a` l’article de John David Paterson, «Of the Origin of the Hindu Religion», Asiatic Researches, London : Printed at the Honorable Company’s Press, t. VIII, 1808, pp. 44–87. La danse Rasijatra est mentionne´e a` la page indique´e. BC re´sume le passage de l’article de Patterson.

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En commenc¸ant le chapitre relatif au principe dominant des religions sacerdotales, nous avons dit que l’homme, lorsqu’il partait de ce principe, ne pouvait s’arreˆter. Il n’est satisfait d’aucun des sacrifices nombreux et varie´s qu’il se prescrit ; son cœur ne lui paraıˆt pas suffisamment de´chire´ par la perte de ce qu’il a de plus cher. Ses sens ne lui semblent e´prouve´s que d’une manie`re incomple`te par la privation des plaisirs les plus vifs. Il ne croit pas avoir fait assez, en abjurant, dans les temples des dieux, la purete´ meˆme, devant laquelle il a impose´ silence aux plus impe´rieux de ses penchants. Il lui faut des douleurs positives, visibles, qui ne puissent eˆtre me´connues, qui ne laissent aucun doute sur ses intentions. La tendance aux mace´rations est donc dans le cœur de l’homme a. On pourrait meˆme dire qu’elle prend sa source dans une ide´e vraie. C’est par la douleur que l’homme s’ame´liore. C’est comme principe d’activite´, ou moyen de perfectionnement que la Providence nous la prodigue, avec une abondance dont tout autre syste`me ferait une gratuite et inexcusable cruaute´. La douleur re´veille en nous, tantoˆt ce qu’il y a de noble dans notre nature, le courage ; tantoˆt ce qu’il y a de tendre, la sympathie et la pitie´. Elle nous apprend a` lutter pour nous, a` sentir pour les autres. Averti par l’instinct qui lui re´ve`le tant de ve´rite´s que ne devinerait pas la logique, le sentiment religieux cherche quelquefois la doua

Voyez tom. I1. E´tablissement du texte : Manuscrits : 1.) BCU, Co 3262/1, pp. 233–244 [=Ms-texte] et ImpriCo 3262/2, pp. 158–171 [=Ms-notes] 2.) BCU, Co 3246, fos 123–132 [=MC] me´s : 1.) Placard 13 [=Pl] 2.) De la Religion, conside´re´e dans sa source, ses formes et ses de´veloppements, t. IV, Paris : Chez Pichon et Didier, e´diteurs, 1831, pp. 267–282.

1 Chapitre V. ] Chapitre 7 Ms-texte Chap. 7 MC 10 de ses penchants. ] manque Ms-texte 12 La tendance ] Le penchant Ms-texte 13-p. 315.2 On pourrait ... de´plorables. ] mais il est passager, comme tous les mouvements de son imagination diverse et ondoyante ; l’action du sacerdoce consiste a` s’en emparer, a` le re´gulariser, a` le rendre durable. Pl 13 qu’elle ] que ce principe Ms-texte 15 principe d’activite´, ou ] ajoute´ dans la col. de gauche Ms-texte 17 re´veille en nous ] re´veille ce mot dans l’interl. en nous Ms-texte re´veille en nous en nous les derniers mots re´pe´te´s par inadvertance MC 18–19 notre nature ... pitie´. ] le courage, tantot ... tendre dans la sympathie. Ms-texte 1

OCBC, Œuvres, t. XVII. Le renvoi est vague parce que BC aborde ce sujet a` plusieurs reprises dans les deux premiers livres, mais ne le de´veloppe jamais. Voir p. ex. pp. 242–243, 300, 326–327.

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leur pour y retremper sa purete´ ou sa force. Mais le sacerdoce s’empare de ce mouvement, et lui imprime une direction fausse et de´plorable. Dans tous les cultes sacerdotaux, les ministres et ceux des sectateurs de ces cultes qui veulent s’e´lever au plus haut degre´ de perfection se condamnent a` des jeuˆnes, a` des mace´rations et a` des supplices qui nous inspirent une surprise voisine du doute. Les uns se de´chirent les bras a` coups de couteaux, d’autres se frappent de verges a, ou placent sur leur poitrine une me`che bruˆlante. D’autres se mutilent, croyant charmer les dieux, en cessant d’eˆtre hommes ; tantoˆt ils traversent pieds nus des charbons ardents b ; tantoˆt ils se suspendent a` des crochets de fer ; tantoˆt ils traıˆnent des poids e´normes, qu’ils font river autour de leur col, pour se soustraire a` la tentation de les de´tacher. D’autres fois, levant en l’air leurs bras qu’ils ne baissent plus vers la terre, ils attendent qu’une main de´vote porte les aliments a` leur bouche, ou rec¸oivent immobiles sur leurs teˆtes nues les eaux du ciel et les frimas de l’hiver c. a b

c

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LUCRET. de Nat. rer. II1. A Castabala, en Cappadoce (STRAB. XII2), chez les Samnites et les Sabins (SPANGENBERG, de vet. lat. relig., p. 48)3. On peut consulter sur ces faits les philosophes de l’antiquite´, les Pe`res de l’E´glise, les historiens et les voyageurs modernes. Voyez sur les jeuˆnes religieux chez les anciens, Morin (Ac. Inscr. IV, 294) ; sur les tortures volontaires chez les Mexicains, Robertson (Hist. of Amer5.) ; sur leurs mace´rations, leurs mutilations, leurs abstinences pendant cent soixante-

2 et de´plorable ] & l’e´gare. Ms-texte 4 degre´ ] 〈point〉 de´gre´ corr. dans l’interl. Ms-texte 5 inspirent ] infligent Ms-texte 9 hommes ; ] BC pensait accrocher une note a` ce mot ; elle sera inte´gre´e dans la note d, p. 322 ci-dessous Ms-texte et Ms-notes 18–19 chez les ... 48). ] ajoute´ dans la col. de gauche Ms-notes 21 Voyez ] V. Ms-notes 1

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BC pense au chapitre intitule´ «De Matre Magna», intercale´ dans le livre II sur les atomes. La description des processions qui se de´roulent en son honneur parle des Galli, des eunuques (v. 614) et de combattants arme´s, nomme´s cure`tes en grec, qui dansent en se mutilant «exultant sanguine pleti» (v. 631). La ville de Kastabala est mentionne´e par Strabon dans le livre XII, § 95, au de´but de sa description de Cappadoce. Voir aussi XII, 2,7. Il y avait a` Kastabala un sanctuaire de l’Artemis Perasia. BC cite l’ouvrage d’Ernst Peter Johann Spangenberg, Ernesti Spangenberg [...] de veteris Latii religionibus domesticis commentatio, Gottingæ : Dieterich, 1806. «Prope fanum erat lucus sacer, ubi numinis affaltu correpti homines, nudis pedibus prunarum ardentium struem illæsi perambulabant.» Spangenberg parle de Sabins et de Latins (Sabini, Latini) qui ont pratique´ ce culte. Le fait se trouve chez Strabon, livre V. Voir ci-dessous, p. 354, n. 6. BC cite l’article d’Henri Morin (1655–1728), «De l’usage du jeuˆne chez les anciens par rapport a` la religion», Me´moires de l’Acade´mie des Inscriptions, t. IV, 1713, pp. 29–44. Voir Robertson, The History of America, t. III, le chap. «Religion of the Mexicans» : «Fear was the only principle that inspired their votaries. Fasts, mortifications, and penances, all

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De la Religion, IV

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Par une suite du meˆme principe, on admirait encore, il n’y a pas cent ans,

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deux jours, Mayer (Myth. Lex. art. Cammaxtle1) ; Clavigero (Hist. of Mexic. I, 3632) ; Meiners (Crit. gesch. II, 1643). Durant des mois entiers, ils se tiraient du sang de diffe´rentes parties du corps. Les E´gyptiens se frappaient eux-meˆmes dans leurs feˆtes myste´rieuses (HE´ ROD. II, 61 ; MULL. de Myster. 192). Ils se flagellaient publiquement a` la feˆte d’Isis. (MEIN. Crit. Gesch. II, 165)4. Ægyptii sacerdotes, Saturno dicati, dit saint E´piphane, ferreis collaribus se ipsos alligabant, circulosque sibi naribus affligebant. Ab isto genere sacrorum non minoris insaniæ judicanda sunt publica illa sacra, quorum alia sunt matris Deuˆm, in quibus homines suis ipsi virilibus litant..... Alia virtutis quam eandem Bellonam vocant : in quibus ipsi sacerdotes non alieno sed suo cruore sacrificant. Sectis namque humeris et utraˆque manu destrictos gladios exerentes currunt, efferuntur, insaniunt5. Ces pratiques e´gyptiennes e´taient pareilles en tout a` celles des Joguis et des Saniassys de l’Inde (CHEREMON. adv. Jovinian. La mutilation des preˆtres de Syrie est assez ce´le`bre (LUCIAN. de Dea Syr. ; MULLER, de Myst. p. 59 ; WAGNER, 210, 211, 2166). Les Perses qui se faisaient initier aux myste`res de Mithras e´taient soumis a` des tourments quelquefois mortels (SUIDAS, Greg. Nazianz. ch. 4 ; HYDE, de Rel. Pers. 1097). Les preˆtres de Baal, dans leurs sacrifices, se de´coupaient la chair en dansant autour de l’autel, qu’ils arrosaient de leur sang (Rois, I, c. 19, v. 28). Voyez nomme´ment le sacrifice qu’ils offrent en opposition a` E´lie (Rois, II, ch. 5 Mull. ] Muller Ms-texte, MC 11 insaniunt. ] insaniunt. (Lact. Inst. div. I. 21) Ms-texte, 16 ch. ] cap. Ms-notes MC 13 Jovinian. ] Jovinian. Goerres, II. 343) Ms-texte, MC

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rigid, and many of them excruciating to an extreme degree, were the means employed to appease the wrath of their gods, and the Mexicans never approached their altars without sprinkling them with blood drawn from their own bodies» (e´d. de Vienna, p. 203). BC cite l’article «Cammaxtle» du Mythologisches Lexicon, t. I, pp. 342–344. On se reportera aux chap. 22 et 23 de l’ouvrage, dans l’e´dition allemande pp. 396–401. BC cite une page de la Kritische Geschichte dans laquelle Meiners re´sume ce qu’il a trouve´ chez Acosta et Zarate. BC cite une fois de plus le chapitre sur les mace´rations a` Busiris. Puis l’e´tude de Petrus Erasmus Müller, De hierarchia et studio vitæ asceticæ in sacris et mysteriis Græcorum Romanorumque latentibus, Havniæ : Joh. Frid. Schultz, MDCCCIII, qui commente (pp. 191– 193) le texte d’He´rodote, et enfin Meiners qui re´pe`te les faits dont parle He´rodote. BC cite, avec des coupures, de Saint E´piphanie, Adversus LXXX Hæreses, livre III, deuxie`me partie, un passage du chap. XI (Opera omnia, e´d. Petavius, t. I, p. 1092). Le renvoi a` Che´re´mon d’Alexandrie vise le passage cite´ par Saint Je´roˆme dans son traite´ Adversus Jovinianum, livre II, chap. 13, qui traite des preˆtres e´gyptiens. Voir Chaeremon, Egyptian Priest and Stoic Philosopher, The fragments collected and translated with explanatory notes by Pieter Willem van der Horst, Leiden : Brill, 1984, pp. 22–23. – Müller, De hierarchia, parle du temple de la Dea Syria a` Hie´rapolis, en s’appuyant sur le re´cit de Lucien. – BC renvoie enfin a` Wagner, Ideen, qui traduit (pp. 208–216), en abre´geant le texte, le passage de Lucien sur le temple de Hie´rapolis. Les pages indique´es parlent de la mutilation des preˆtres. Deux des trois renvois reposent sur Hyde, De religione Pers., p. 109, qui re´sume les sources dont il se sert, a` savoir Suidæ lexicon, l’article Μι θρασ, t. II, p. 559 : «Persæ Mithram putant esse Solem, eique multas victimas immolant. Nemo autem sacris initiari potest, quin certos cruciatuum gradus emensus, sanctum se & perturbationibus animi vacuum esse ostenderit.» Ensuite Hyde cite Gregoire de Nazianz, De Orat., chap. 3 (et non 4) : «Meminit ‘Cruciatuum & ustionum quæ in Mithræ Sacris’ & iterum describens crudelissimos cruciatus ‘Marci Arethusii’, ait, ‘Raptabatur per plateas, protrudebatur per cloacas, crinibus & alia quavis corporis parte (admista tormento contumelia) ab his trahebatur.»

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Livre XI, chapitre V – De la saintete´ de la douleur 271

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saint Sime´on Stylite, au haut de sa colonne, saint Franc¸ois d’Assise, pres18, v. 21). Les The´rapeutes des He´breux regardaient toute jouissance physique, et meˆme toute condescendance envers les besoins du corps, comme une œuvre de te´ne`bres (PHILON Juif1.) Les vierges du Pe´rou se de´chiraient le sein et les joues[.] Les preˆtres du meˆme pays se crevaient les yeux (ACOSTA, V, p. 14, 15, 172 ; ZARATE, Hist. de la conqueˆte du Pe´rou, I, 153). La religion populaire des Indes recommande les souffrances volontaires, soit en expiation des fautes qu’on a commises, soit comme un moyen d’obtenir les faveurs qu’on de´sire. Les pe´nitences qui donnent a` l’homme les droits les plus assure´s a` la mise´ricorde ou a` l’assistance divine sont de s’exposer au soleil dans le temps le plus chaud, au milieu de quatre brasiers ardents, et de se plonger dans l’eau glace´e pendant le plus grand froid. «Le sang qu’un fide`le tire de son corps pour faire une offrande, dit le Calica-Pouran, plaıˆt a` la divinite´, en proportion de la grandeur de l’instrument qu’il emploie. Celui qui offre son sang et sa chair avec ze`le et ferveur, voit ses prie`res exauce´es dans le cours de six mois ; et celui qui se laisse bruˆler patiemment par une me`che allume´e est bientoˆt comble´ de richesse et de bonheur» (As. Res. V, 371, 3913). V. aussi lois de Menou, ch. 5 (MILLS, Hist. of Ind. I, 351–3524). M. Duncan (As. Res. V, 37–52) rend compte des mace´rations de deux faquirs qu’il avait rencontre´s : l’un, apre`s avoir parcouru toute l’Inde et toute la Perse, e´tait arrive´ jusqu’a` Moscou, tenant toujours ses bras croise´s sur sa teˆte ; le second s’e´tait d’abord

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3 besoins du ] ajoute´ dans la col. de gauche Ms-notes 4 Juif.) ] Juif. Mein. Cr. Gesch. II. 178. Ms-texte, MC Joues ] Joues. (Mein. ib. 166). Ms-texte, MC 6 recommande ] recommande 〈e´galement〉 Ms-notes 15 391). ] 391.) 〈Les loix de Menou recommandent e´galement les auste´rite´s les plus rigoureuses.〉 BC indique dans la marge la raison de cette suppression : re´pe´te´ Ms-notes Hist. of Ind. ] manque Ms-notes 18–319.12 tenant ... inclination ] texte des notes manque, coupe´ Pl 1

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La variante a` la ligne 4 ajoute le renvoi a` Meiners, Kritische Geschichte, qui re´sume (t. II, pp. 177–182) le traite´ de Philon, De vita contemplativa sive supplicium virtutibus, sur les the´rapeutes e´gyptiennes, une re´union d’asce`tes he´breux qui vivaient, loin des villes, comme des chartreux dans des maisons isole´es, mais regroupe´es pour former une espe`ce de colonie sainte (De vita contemplativa, introduction et notes de F. Daumas, traduction de P. Miquel, Paris : E´ditions du Cerf, 1963). Le renvoi a` Philon, sans pre´ciser le titre, prouve que BC exploite Meiners, mais ne consulte pas le texte de l’auteur d’Alexandrie. Il faut lire probablement livre V, chap. 14, 15, 17. Les de´tails dont parle BC se trouvent dans ces chapitres qui traitent des services des preˆtres ou des monaste`res des vierges, bien que BC arrange certains de´tails a` sa manie`re. Les jeunes filles se sacrifient en effet, se blessant elles-meˆmes aux oreilles et re´pandant leur sang sur leurs joues. Le service des preˆtres et leur pe´nitence sont de´crits dans les chap. XIV et XVII. Le premier est organise´ en quatre ce´re´monies quotiennes, la seconde consiste en jeuˆnes se´ve`res, en mutilations et en fouettements cruels. Il arrive aussi que ces preˆtres se pre´cipitent d’un rocher pour se donner la mort (Acosta, Historia natural, pp. 339, 336 et 343–344). BC paraphrase en le traduisant partiellement un passage d’un chapitre du Calica Puran dont la traduction anglaise a e´te´ publie´e dans les Asiatic Researches, t. V, 1799, pp. 371–391 : W. C. Blaquiere, «The Rudhira´dhyat´a˚, or Sanguinary Chapter ; Translated from the Calica Puran». Le passage cite´ se lit p. 388. – BC renvoie aux Institutes of Hindu Law, or the Ordonances of Menu, According to the Gloss of Callu´ca, Comprising the Indian System of Duties Religious and Civil : Verbally Translated from the Original Sanscrit, Calcutta : s.e´d., 1794. Le chap. V est intitule´ «On Diet, Purification, and Women». BC aurait pu ajouter le chap. VI («On Devotion») ou encore le chap. XI («On Penance and Expiation»). Le renvoi a` James Mill, The History of British India, London : Baldwin, Cradock, and Joy,

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De la Religion, IV

sant dans ses bras des statues de neige, et tant d’autres dont le seul me´rite renferme´ dans une cellule ou` il avait fait vœu de supporter douze ans les piquˆres des insectes qui le de´voraient. En ayant e´te´ retire´ au bout d’une anne´e, il s’e´tait fait construire un lit he´risse´ de pointes de fer, sur lequel il avait passe´ trente-cinq ans a` lire et a` me´diter les livres sacre´s, en s’exposant de plus, pendant quatre mois d’hiver, a` la pluie et a` toutes les intempe´ries des saisons. Les Bouddhistes et les sectateurs de Fo, a` la Chine, ne sont pas moins barbares envers eux-meˆmes. Ces pe´nitences indiennes remontent a` l’antiquite´ la plus recule´e. L’Oupnekat parle (I, 2741) d’un brame, Raja-Brahdrateh, qui alla dans le de´sert, et s’y tint jusqu’a` sa mort sur un pied, fixant ses regards sur le soleil, ce qui est, mot pour mot, ce que Pline rapporte des anciens Brachmanes (Hist. nat. VII2). Suivant Cice´ron, ils se roulaient tout nus dans les neiges du Caucase. Voyez pour les crochets de fer auxquels ils se suspendaient, Roger (Pag. Ind.3) ; Ovington (Voy. II, 744) ; Lacroze (Christ. des Ind.5) ; Sonnerat (au chapitre des Pe´nitents Indiens6). 7 eux-meˆmes. ] eux-meˆmes. (Mayer, Myth. Lex. Art. Fo7) Ms-texte, MC 8 (I, 274) ] ajoute´ dans la col. de gauche Ms-notes Brahdrateh ] la source porte Brahdratch faute d’imprimerie que nous corrigeons en nous rapportant a` l’e´dition de l’Oupnekat de Anquetil-Dupeyron Rel4 Bradrateh lecture incertaine Ms-notes 3

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1826, t. I, pp. 351–352, vise la citation tire´e des Institutes of Menu, chap. VI, 3 a` 8 et 16 a` 32, qui traite des pe´nitences. BC paraphrase quelques passages de ce texte dans sa note. – BC re´sume l’article de Jonathan Duncan, «An Account ot two Fakeers, with their Portraits», Asiatic Researches, t. V, 1799, pp. 37–52. Il faut lire «I, 294–297». BC ne de´crit pas tout a` fait correctement ce qu’on lit au de´but du re´cit : Radjah Brahdrateh «intellexit quod hic mundus ad manendum non est. Ex hoc respectu cor ejus ab omnibus volitionibus frigidum factum, et cum deserto ivit, et initium in mortificatione magna fecit. Et illa mortificatio hæc fuit, quod, oculum suum cum sole suerat, et ambas suas manus sursum cum sustulit, stans manebat. Et tempus mille annorum cum ipso hoc modo stans fecit pertransire» (p. 294). BC pense a` Pline, Histoire naturelle, livre VII, § 22 : «Leurs philosophes, qu’on appelle gymnosophistes, restent, du lever au coucher, a` contempler le soleil en le fixant de leurs yeux et, pendant toute la journe´e, ils se tiennent alternativement sur un pied dans les sables bruˆlants» (Pline l’ancien, Histoire naturelle, livre VII, texte e´tabli, traduit et commente´ par Robert Schilling, Paris : Belles Lettres, 1977, p. 44). Le renvoi a` Roger, Offene Thür, est vague. Le chap. XVII parle de plusieurs mace´rations cruelles que les Bramines s’imposent. Mais il n’y est pas question d’un crochet de fer. BC pense au chap. «The faquirs near Surat» de l’ouvrage A Voyage to Suratt in the Year 1669 (e´dition de New Delhi pp. 160–171, et plus particulie`rement p. 163), ou` il est question de fakirs suspendus pour la prie`re a` l’aide de grosses cordes, la teˆte en bas, aux branches d’un arbre. Voir Mathurin Veyssie`re La Croze, Histoire du christianisme des Indes, La Haye : Fre`res Vaillant, & N. Prevost, MDCCXXIV, livre VI, «De l’idolatrie des Indes» et plus particulie`rement pp. 434–435 et 451–452. BC renvoie au livre III, chap. VIII, vers la fin (e´d. allemande, pp. 218–221). On y trouve aussi plusieurs illustrations. BC supprime cette indication de la source.

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Livre XI, chapitre V – De la saintete´ de la douleur 273

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e´tait d’avoir cherche´ la douleur a : et les lettres de nos missionnaires de la

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Saint Godin, qui mourut en Angleterre l’an 1170, usa trois chemises de fer qu’il portait a` nu. Il mettait de la cendre dans son pain, du sel dans ses plaies, et brisait la glace pour passer des nuits entie`res dans les rivie`res. (PENNANT, Tour in Scotland, p. 301 ; SAINT-FOIX, Essai sur Paris, V, 882.) Sainte Catherine de Cordoue paissait comme les animaux, et les jours de jeuˆne moins qu’a` l’ordinaire. Pascal, au rapport de sa sœur, portait une ceinture de fer, garnie de pointes, et lorsqu’il prenait quelque plaisir au lieu ou` il e´tait, a` la conversation ou a` toute autre chose, il taˆchait de l’expier, en redoublant la violence des piquˆres. Et qu’on ne s’y trompe pas, la fide´lite´ au principe de la saintete´ de la douleur caracte´rise le sacerdoce a` toutes les e´poques ; aujourd’hui encore, ouvrez la Bibliothe`que chre´tienne de l’abbe´ Boudon, imprime´e il y a trois ans a` Paris3. La sœur Ange´lique de la Providence y est propose´e pour mode`le aux jeunes filles. «Or cette sœur Ange´lique avait une inclination extraordinaire pour la proprete´... aussi dut-elle surmonter cette inclination, et que faisaitelle ? Elle re´pandait des balayures et des immondices dans la maison paternelle....» Le de´gouˆt nous empeˆche de continuer, et tous ces triomphes re´voltants de la sœur Ange´lique sur son penchant a` la proprete´, e´taient pour elle la route infaillible du salut, et font l’admiration de son de´vot biographe.

6–8 Pascal ... piquˆres. ] ajoute´ dans la col. de gauche Pascal, au rapport de Mde Perrier sa sœur, ... fer, pleine de pointes. Il la mettait nud sur son corps, & lorsqu’il ... chose, il se donnoit des coups de coude pour redoubler la violence de la douleur cause´e par les piquˆres. Ms-notes 10 aujourd’hui ... ouvrez ] & aujourd hui meme. Ouvrez Ms-notes 11 Boudon, ... Paris. ] Bou= Boudon (Paris 182 ) la premie`re syllabe re´pe´te´e en tournant la page Ms-notes

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Voir Thomas Pennant, A Tour in Scotland, MDCCLXIX, London : Benj. White, 4MDCCLXXVI, t. III, p. 37, note. BC re´sume ce qu’on y trouve sur la vie de l’ermite St. Godric (env. 1067–1170). Germain-Franc¸ois Poullain de Saint-Foix, Essais historiques sur Paris, Londres et Paris : ` l’endroit indique´, on trouve un passage qui cite un be´ne´dictin, Joseph de Duchesne, 1765. A Lisle, qui donne «plusieurs exemples d’auste´rite´s & d’abstinences presqu’incroyables» ; les auste´rite´s de la bienheureuse Catherine de Cordoue sont rapporte´es pour appuyer les re´flexions de Saint-Foix. Il n’y est pas question de saint Godin. Voir Henri-Marie Boudon, Vie de Marie Ange´lique de la Providence ou l’Amour de Dieu seul, Paris : Dufour, Boiste fils aine´, Me´quignon, 1826. Ce texte de l’abbe´ Boudon est reste´ ine´dit jusqu’en 1826. La citation (avec des coupes et des changements de mots) se lit pp. 55–56. Le de´gouˆt dont parle BC marque son aversion pour ce genre de de´votion. Notons encore que les «trois ans» permettent de dater le travail de re´daction : 1829.

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De la Religion, IV

Chine et du Japon manifestent la meˆme avidite´ de souffrance a.

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V. les lettres du P. Brito, dans le recueil des Lettres e´difiantes1. Saint Ignace, dans une e´pıˆtre aux fide`les (Epist. ad. Rom. ap. Patr. apostol. II, p. 272), les supplie de ne pas le priver, par leurs intercessions, de la couronne du martyre. Saint Basile de´crit les devoirs du moine, dans un style qui rappelle toutes les auste´rite´s du Sanyassi indien (STAUEDL. Hist. de la Mor., p. 2253).

2 V. ... e´difiantes. ] manque Ms-notes

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6 225 ] 215 Ms-texte, MC

Le renvoi est vague. Mais il est suffisant de citer quelques phrases d’une des dernie`res lettres de Jean de Brito, e´crite en attendant l’exe´cution ; apre`s une dispute the´ologique, il dit : «on m’a ramene´ en prison, ou` je suis encore a` pre´sent, attendant la mort que je dois souffrir pour mon Dieu. C’est l’espe´rance de jouir de ce bonheur qui m’a oblige´ a` venir deux ans dans les Indes. Il est vrai qu’il m’en a couˆte´ pour l’obtenir ; mais la re´compense que j’espe`re de celui pour qui je me sacrifie me´rite toutes les peines et de bien plus grandes encore. Tout le crime dont on m’accuse, c’est que j’enseigne la loi du vrai Dieu et qu’on n’adore plus les idoles. Qu’il est glorieux de souffrir la mort pour un tel crime !» (Lettres e´difiantes et curieuses concernant l’Asie, l’Afrique et l’Ame´rique, t. II, Paris : Auguste Desrez, 1811, p. 255). Il s’agit d’Ignace, e´veˆque d’Antioche et martyr (mort a` Rome vers 107). Il soutint pendant les perse´cutions de Domitien les fide`les d’Antioche et subit la mort a` Rome sous Trajan. On posse`de de lui plusieurs lettres en grec, dont une aux chre´tiens de Rome, dans laquelle il prie les Romains de ne pas empeˆcher sa mort comme martyr. Voir Die apostolischen Väter : griechisch-deutsche Parallelausgabe, auf der Grundlage der Ausgabe von Franz Xaver Funk, Karl Bihlmeyer und Molly Whittaker. Mit Übersetzungen von H. Dibelius und D. A. Koch neu übersetzt und herausgegeben von Andreas Lindemann und Henning Paulsen, Tübingen, Mohr, 1992, pp. 207–217. BC renvoie a` l’e´dition d’Isaac Vossius (1618–1689), SS. Patrum qui temporibus apostolicis floruerunt, Antverpiæ : Wetstenius, 1698 ou a` l’e´dition de Johannes Clericus, Amstelodami : Apud R. & G. Westenios, MDCCXXIV, t. II, pp. 25– 33, qui donnent le texte grec (Προς Ρωμαιους) accompagne´ d’une traduction latine et des notes. Il faut lire : «215» (voir la variante a` la ligne 6). BC reproduit une de ses notes de lecture (Co 3293, dossier Staeudlin, note 189) qui se rapporte a` Johann David Michaelis, Moral, herausgegeben und mit der Geschichte der christlichen Sittenlehre begleitet von Carl Friedrich Stäudlin, Göttingen : im Vandenhoeck-Ruprechtischen Verlage, 1792–1803. Le passage cite´ (pp. 215–217) appartient au chap. «Basilius der Große» (pp. 198–220) consacre´ a` l’analyse de la morale et de la conception d’une vie ce´nobite de l’e´veˆque de Ce´sare´e en Cappadoce (?–380).

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Livre XI, chapitre V – De la saintete´ de la douleur

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De cette saintete´ attache´e a` la douleur re´sulte assez naturellement l’ide´e d’une efficacite´ myste´rieuse dans les tourments que l’homme s’inflige. Dela` le pouvoir prodigieux des auste´rite´s chez les Indiens. De-la` ces e´pithe`tes sur lesquelles nous avons de´ja fixe´ l’attention de nos lecteurs, et qui reviennent sans cesse dans les prie`res et les poe`mes sacre´s de l’Inde : «puissants par la souffrance, riches d’auste´rite´s» ; et ces auste´rite´s, en effet, sont une richesse, car c’est l’arsenal ou` le mortel puise des armes pour lutter contre les dieux immortels. C’est par ses auste´rite´s que Dascharatta contraint le ciel a` lui accorder des enfants a. Ravana, he´ros, ge´nie ou incarnation rebelle, force par ses auste´rite´s Brama de le rendre invulne´rable b. Les mace´rations de Goutama le mettent de pair avec les dieux, auxquels il dispute la victoire c. Vaschitas, le pe´nitent ce´le`bre du Ramayan, place les a b c

Ramay., p. 105–1101. Ramay., 1902. Ramay., 4353.

1-p. 322.6 De cette ... incommensurable. ] un e´quivalent textuel manque dans Co 3262, y compris toutes les notes qui s’y rattachent ; mais on y trouve, dans deux col. de gauche, une longue se´rie de notes qui ont servi a` re´diger le texte qu’on lit dans MC et qui sera celui de l’imprime´ Puissance des Auste´rite´s chez les Indiens. Dascharatta se livre a` des auste´rite´s pour avoir des enfans. Ramayan. p. 105–110. Auste´rite´s par lesquelles Ravana force Brama a` le rendre invulne´rable, Ram. 190. Les Dieux font eux meˆmes des auste´rite´s. ib. 264. Wichnou pratiquant des auste´rite´s dans une solitude. 302. les Dieux appellent Wishnou pe´nitent le souverain des Dieux. 305. description des auste´rite´s de Bagivatta. 387–391. Ditty e´pouse de Cushioupa fait des austerites pendant mille ans. 419. goutama invisible, meme pour les Dieux, par ses auste´rite´s. 435. auste´rite´s de Wishwamitra. 476. Riche d’auste´rite´s, expression commune. Trisankou monte au ciel par les auste´rite´s de Wishwamitra. 507. celui-ci cre´e des Dieux nouveaux & subjugue les anciens par ses auste´rite´s. 508–510. Wishwamitra se´duit par une femme par une femme re´pe´tition de ces trois mots envoye´e par les Dieux perd le fruit de ses auste´rite´s. 526. (ainsi les auste´rite´s sont tellement puissantes que les Dieux luttent contre leur efficacite´ par la force.) Auste´rite´s nouvelles de Wishwamitra. 530. tes auste´rite´s ont e´te´ sans bornes, ton e´nergie incommensurable. 546–547. Washita, en louant Wishwamitra, place les auste´rite´s a` cote´ de la valeur comme moyen de destruction des ennemis. Ramayan. 240–258. Ms-texte 1

2 3

Il faut comprendre pp. 105 et 110. Sur Dusha-rutha, on consultera les chap. 6 et 7 (e´d. de Serampore, pp. 105 et 110 ; e´d. de Londres, pp. 65 et 72), et les chapitres suivants. Le succe`s des sacrifices de Dusha-rutha est raconte´ dans le chap. 13 (e´d. de Serampore, pp. 180–181 ; e´d. de Londres, pp. 120–121). C’est raconte´ dans le chap. 14 (e´d. de Serampore, pp. 189–190 ; e´d. de Londres, pp. 127– 128). C’est un sujet du chap. 38. «He saw Gontuma enter, resplendent with energy, and invincible even on the gods, through the power of Sacred austerities» (e´d. de Serampore, p. 435 ; e´d. de Londres, p. 301).

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auste´rite´s parmi les moyens de combattre et d’ane´antir ses ennemis a. Mais le moindre re laˆchement, la moindre faiblesse envers le plaisir, enle`ve aux mortifications leur me´rite. Wischwamitra, se´duit par une femme que les dieux ont envoye´e, perd le fruit de mille ans d’auste´rite´s b. Il les recommence, et les dieux subjugue´s s’e´crient : Tes auste´rite´s ont e´te´ sans bornes ; ton e´nergie sera incommensurable c. Quelquefois les rites licencieux se combinent avec les mace´rations et les pe´nitences : les meˆmes jeunes Indiennes, qui dansent a` demi nues devant les pagodes, s’infligent des souffrances cruelles et raffine´es d. Les preˆ tres de

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b c d

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Ramay., 240–2581. Vicramaditya, apre`s de longues pe´nitences infructueuses, e´tait preˆt a` se couper la teˆte, lorsque Cali lui apparut. Force´s de te ce´der, lui dit-elle, les dieux t’accordent un grand pouvoir et une longue vie. Tu auras mille ans de prospe´rite´s, puis tu pe´riras de la main d’un enfant, ne´ d’une vierge. (As. Res., IX, 119, tire´ du Vicrama Che´ritra.) On voit, dans la collection de fables intitule´e Sucasaptati, ou re´cits du perroquet, un pe´nitent se coupant toujours la teˆte, et la jetant aux pieds de Cali, qui chaque fois lui accorde sa prie`re. (Ib. 122.) Ramay., 5262. Ramay., 546–5473. LAFLOTTE, Essais historiques sur l’Inde, p. 2164. Les He´deschins, les effe´mine´s dont la Bible parle (Rois II, 23, 7), e´taient des eunuques, qui s’e´taient mutile´s par de´votion. (SELD. de Diis syr., p. 2375.)

10–16 Vicramaditya ... 122.) ] manque MC 17 526 ] la source porte 265 faute d’imprimerie que nous corrigeons en adoptant la lec¸on de MC Rel4 526 MC 19 Laflotte ... 216. ] ajoute´ dans la col. de gauche ; suit encore le passage sur la princesse allemande qui sera inte´gre´ dans la note suivante Ms-notes

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BC renvoie aux chap. 18–20 (e´d. de Serampore, pp. 240–255 ; e´d. de Londres, pp. 159– 172). BC cite un passage du chap. 50 qui raconte la se´duction de Vishwa-mitra par une tre`s belle femme et ses regrets qui suivent ce bonheur passager (e´d. de Serampore, pp. 526–527 ; e´d. de Londres, pp. 363–364). La phrase cite´e par BC se trouve au chap. 52 : «By those assembled have also thy numerous excellencies been heard ; unmeasurably have been thy austerities ; immense is thy power ; ever unmeasurably thine excellent qualities» (e´d. de Serampore, p. 545 ; e´d. de Londres, p. 376). Voir ci-dessus, p. 307, n. 2. Laflotte ne parle pas de mutilations cruelles que les jeunes filles s’infligent. Le chapitre consacre´ aux pe´nitents indiens (pp. 312–316) ne concerne que des hommes. BC renvoie a` Selden, De Diis Syris, Syntagma II, chap. II, «De Astoreth», e´d. de 1568, p. 237, ou` il est question des Hedeschim, mentionne´s dans l’Ancien Testament (Rois, II, 37).

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Cybe`le, qui se mutilaient, se livraient avec les femmes a` des impurete´s que leur impuissance rendait plus horribles a, et ce double triomphe sur la souffrance d’une part, et la honte de l’autre, leur attirait les respects de la foule. Ce raffinement dans les tortures va souvent jusqu’au suicide. Il e´tait commun aux Brach manes de se pre´cipiter dans les flammes b. Soudraka, prince et poe`te, auteur du drame de Mrichhakati, se bruˆla sur un buˆcher a` l’aˆge de cent ans, comme l’atteste le prologue de sa pie`ce ; et les Brames a

b

V. Sur les rites a` la fois inde´cents et sanguinaires des preˆtres de Bellone et de Cybe`le, LACT. (Inst. div., I, 21), BAYLE (art. Comana1), STRAB. (liv. X2.), CREUTZ. (II, 34). Les Derviches, les Santons et les Kalenders turcs se soumettent d’une part a` l’ope´ration tre`s-douloureuse de l’infibulation, et de l’autre recherchent des volupte´s que nous ne voulons pas indiquer ici. (LOCKE, Entend. humain, I ; voyage de BAUMGART., II, 1 ; PAW, Rech. sur les Ame´ricains, II, 1213.) On voit, dans une principaute´ d’Allemagne, voisine du Rhin, un chaˆteau qu’habitait il y a un sie`cle une princesse de la maison qui y re`gne encore4. Dans ce chaˆteau est une chambre consacre´e aux mace´rations. On y montre le lit de fer he´risse´ de pointes sur lequel couchait la royale pe´nitente, la discipline qui mettait en sang ses membres de´licats, et plusieurs instruments de torture. La princesse passait tous les ans quarante jours a` se mace´rer, et quand elle avait ainsi expie´ ses fautes, elle se pre´parait de nouveaux sujets d’expiation pour l’anne´e suivante. PHILARET., Oneisir. ap. Lucian5.

2 horribles ] re´voltantes Ms-texte 5-p. 324.3 Soudraka ... d’impie´te´. ] manque Ms-texte 11 voulons pas ] pouvons Ms-notes 14 de la ... encore ] d’une maison 6 II. 34. ] fin Pl souveraine 〈dont la chastete´ n’e´toit pas la vertu habituelle.〉 Ms-notes 17 plusieurs ] plusieurs autres Ms-notes 1

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Le renvoi a` Bayle, Dictionnaire critique, article «Comane» (e´d. de 1702, t. I, pp. 953–954), vise surtout la note C qui cite le passage de Lactance (livre I, 21, 16) que BC e´voque au de´but de sa note. – Le renvoi a` Creuzer, Symbolik, vise les pp. 34–37 ou` Creuzer expose ses ide´es sur les preˆtres de Cybe`le. – Le renvoi a` Locke, An Essay on the Human Understanding, concerne probablement le chap. IV qui traite du proble`me, si la notion de dieux est une ide´e inne´e. – BC renvoie ensuite a` la description du pe`lerinage de Martin Ritter von Baumgartner (ou Baumgarten) auf Breitenbach (1473–1535), publie´e d’abord en latin (Peregrinatio in Ægyptum, Arabiam, Palestinam & Syriam [...] Noribergæ, ex officina Gerlachiana, per Pavlvm Kaufmannvm, MDXCIV), ensuite dans une traduction anglaise dans l’ouvrage A collection of Voyages and Travels, some now first Printed from Original Manuscripts, Others Translated out of Foreign Languages, and now first Publish’d in English, London : Awnsham and John Churchill, MDCCIV. Dans le t. I de cette collection, le texte de Baumgarten se lit aux pp. 429–502, et le chap. I du second livre parle de ce qu’il appelle des «Mahometan Saints», des hommes vivant dans une entie`re liberte´ «domos quas volunt intrandi, edendi, bibendi, & quod majus est, concubendi» ou adonne´s aux pratiques sodomiques «asellarum concubitor atq mularu˜» (p. 73 de l’e´d. latine). Le renvoi a` Strabon provient probablement de Dupuis, Des Myste`res (t. II, 2, p. 113b), qui e´voque les raisonnements de Strabon sur les aspects bacchiques des myste`res, livre X, §§ 33, 35 et encore d’autres passages qui suivent. BC cite de Pauw, Recherches philosophiques sur les Ame´ricains, la fin du chapitre «De la circoncision & de l’infibulation» (Recherches philosophiques sur les Ame´ricains, quatrie`me partie, section IV, e´d. de Londres, a` partir de la p. 139). Allusion non e´lucide´e. Il faut lire Onesikritos (One´sicrite), historien grec d’Astypale´e (IVe sie`cle a. J. C.), disciple

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modernes, tout en profitant de l’abolition de cette coutume, disent qu’elle n’est tombe´e en de´sue´tude que dans le Cali-youg, l’aˆge de corruption et d’impie´te´. Les de´vots d’Arrakhan en agissaient de meˆme. Les adorateurs d’Amida se font e´craser sous les roues de son char ; et de nos jours, deux matelots anglais furent te´moins du de´lire religieux de trente-neuf Indiens qui se jete`rent ensemble dans le Gange a. L’ide´e que nous avons de´ja vue l’une des causes des sacrifices humains, la supposition d’une chute primitive, a sans doute contribue´ puissamment a` ce me´rite attache´ a` la douleur b. Toutes les affections c, tous les liens terres tres, ont semble´ une suite de la de´gradation que la race humaine a subie. Les de´sirs pour les choses de ce monde, dit le Neadirsen, sont une offense a` Dieu ; il faut les dompter par les mortifications et la pe´nitence. La notion de la division en deux substances a pu e´galement fortifier le penchant de l’homme aux mace´rations. Dans ce syste`me, la matie`re est a b

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En novembre 1801. ; As. Res. V, 26–291. Cette ide´e paraıˆt avoir e´te´ la base des croyances mexicaines. La nature de l’homme de´grade´e avant sa naissance, ne pouvait remonter a` Vitzliputzli et s’identifier a` ce dieu que par des tortures excessives. On lit dans la vie de mad. Guyon, e´crite par elle- meˆme, ces paroles curieuses : «Je perdis dans la meˆme semaine mon pe`re et mon mari, Dieu me fit la grace de ne regretter ni l’un ni l’autre2.»

4–6 son char. ... Gange. ] des chars qui portent leur idole. BC pre´voit une note V. ci dessus N. . retour au texte principal De nos jours, une foule d’Indiens se noya dans le Gange : deux matelots ... 39 personnes, hommes, femmes & enfans, qui se ... dans les ondes. Ms-texte 7–8 L’ide´e ... sans doute ] L’ide´e de la chute de l’homme a sans doute Ms-texte L’ide´e de la chute primitive a sans doute MC 9–10 les liens ... semble´ ] les penchans ... semblent Mstexte 12 la pe´nitence. ] les expier par la pe´nitence. Ms-texte 13-p. 325.7 La notion ... en lui. ] ajoute´ dans la col. de gauche La notion ... l’ennemie, la dominatrice le tyran de l’esprit ... enveloppe. 〈illis.〉 Il faut ... l’esprit pur, heurx de la lib. qu il a reconquise, s’e´le`ve ... en lui. une version ante´rieure de ce passage se lit dans la col. de gauche de la p. pre´ce´dente la saintete´ de la douleur re´sulte assez naturellement de la division en deux substances. la substance mate´rielle est l’ennemı¨e, la dominatrice, la corruptrice, le tyran de la spirituelle. Il faut donc vaincre cette ennemie, subjuguer cette dominatrice, de´troner ce tyran. par la`, la substance spirituelle se trouvant affranchie s’e´le`ve jusqu’a` la divinite´, & se confond ainsi avec elle. Or tout ce qui affaiblit la substance mate´rielle, les jeunes, les abstinences, la lutte contre contre les besoins ou les attraits des sens, les mace´rations, les tortures comme triomphe sur la sensibilite´ physique tendent a` ce but. Ms-texte 16–18 Cette ide´e ... excessives. ] texte de la note diffe´rent dans Co 3262, col. de gauche, et dans MC L’ordre social des Mexicains e´tait fonde´ sur l’ide´e d’une faute commise & de son expiation par l’union intime a` Vitzli-putzli au moyen du sacrifice : de la` les incroyables tortures auxquelles les Pontifs & le initie´s se soumettoient. Cathol. III. 481. , Ms-texte, MC

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de Dioge`ne, auteur d’une Histoire d’Alexandre, dont nous connaissons quelques fragments. Voir Lucien, La mort de Pe´re´grinus, LXVIII, 25 (Felix Jakoby, Die Fragmente der griechischen Historiker, t. II, B, p. 730, no 18). Le renvoi est faux. Nous n’avons pas re´ussi a` corriger l’erreur. Nous n’avons pas trouve´ la citation dans l’ouvrage La vie de Madame Guyon e´crite par

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l’ennemie et, pour ainsi dire, le tyran de l’esprit, emprisonne´ dans son e´paisse enveloppe. Il faut vaincre cette ennemie, de´troˆner ce tyran. Tout ce qui le fait souffrir ou ce qui l’affaiblit, les jeuˆnes, les abstinences, la re´sistance aux besoins ou aux attraits des sens, les tortures volontaires, sont des triomphes qui affranchissent de ses liens grossiers la substance spirituelle ; et l’esprit pur, rendu a` sa liberte´, s’e´le`ve jusqu’a` Dieu pour se confondre et se perdre en lui. Les raffinements de cruaute´ qu’on remarque dans les sacrifices humains chez certains peuples, tiennent au dogme de la saintete´ de la douleur. Chez les Mexicains, tantoˆt on traıˆnait les victimes par les cheveux jusqu’au haut de la pyramide sur laquelle elles devaient pe´rir ; tantoˆt on les e´corchait en vie, et les preˆtres se reveˆtaient de leur peau sanglante ; tantoˆt on les jetait dans un brasier ardent, pour les en retirer avec des crochets, pendant qu’elles respiraient encore, et les e´gorger sur l’autel. Observons toutefois que pour s’empreindre profonde´ment dans la religion, l’ide´e de la saintete´ de la douleur eut besoin toujours d’eˆtre seconde´e par le climat. On confondrait a` tort avec les mace´rations et les tourments spontane´s des nations me´ridionales les suicides fre´quents dans le Nord. Ces suicides prenaient leur source dans les habitudes guerrie`res, d’apre`s lesquelles une mort violente e´tant seule honorable, les he´ros impatients s’indignaient d’attendre de la vieillesse une de´gradation lente et progressive a. a

V. ci-dessus, p. 781.

8–14 Les raffinements ... l’autel. ] ajoute´ dans la col. de gauche Les ... cruaute´s qu’on ... humains tiennent au principe de la ... l’autel. Ms-texte 17 avec les ] avec 〈le motif mystique〉 les ce dernier mot re´crit sur 〈c〉es Ms-texte 20 violente ] 〈honorable〉 violente a` la hauteur de ce mot commence dans la col. de gauche un extrait d’Eckstein l’homme par sa nature tend toujours a` l’exage´ration, s’il s’impose des privations, si la tendance de son esprit le porte a` s’assujettir a` de rigoureux devoirs. Ce qui re´volte le plus son caracte`re, ses gouts, son amour pour le plaisir & sa propre nature devient pre´cise´ment pour lui l’objet d’une sorte de passion : & lorsqu’il est parvenu a` prendre un empire absolu sur ses sens c’est sur les choses qui lui paraissent les plus difficiles, surtout ce qu’il repoussoit avec le plus de violence qu’il excerce un pouvoir sans bornes & une autorite´ a` laquelle rien ne re´siste. d’Eckst. V. 2082. Ms-texte

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elle-meˆme (e´dition pre´pare´e par Benjamin Sahler, introduction par Jean Tourniac, Paris : Dervy-Livres, 1983). Mais elle correspond a` l’esprit qu’on y de´couvre. L’extase mystique qui la porte a` regarder dans le Christ son ve´ritable e´poux spirituel lui permet de formuler un sacrifice de cette nature, bien qu’elle ait eu la plus grande ve´ne´ration pour son pe`re et son e´poux, morts en juillet 1672, en meˆme temps que sa fille. Voir ci-dessus, pp. 144–145, n. b. Extrait d’un essai du baron d’Eckstein, «Coup d’œil sur la re´forme religieuse du seizie`me sie`cle, sur son caracte`re et sur ses conse´quences philosophiques et politiques» (Le Catholique, t. II, cah. V, mai 1826, pp. 189–260 et cah. VI, juin 1826, pp. 417–485). Le passage appartient au second chapitre, pp. 207–208. La copie est litte´rale.

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M. de Montesquieu, dont nous avons rappele´ plus haut une observation relative au me´rite de la continence, en fait une autre non moins juste, sur la contradiction qui semble exister entre la mollesse du Midi et la manie`re dont ses habitants courent au-devant de la mort, la bravent, la de´fient. Mais il n’a vu qu’une des causes de cette contradiction, et l’une de ses causes secondaires. La principale est la religion qui transforme le plaisir en crime et la souffrance en me´rite. La crainte du plaisir devient une fureur dans les climats qui portent impe´rieusement les hommes aux jouissances physiques. Comme les sens tourmente´s plutoˆt que soumis par les mace´rations et les abstinences, reprennent sans cesse leur empire, les consciences timore´es s’e´pouvantent de retrouver partout ce plaisir qu’elles fuient, et pour mieux combattre cet adversaire opiniaˆtre, elles entassent rigueurs sur rigueurs et supplices sur supplices. Ce sont les personnes les plus susceptibles d’affections vives, les plus porte´es a` la volupte´, qui se livrent aux auste´rite´s les plus recherche´es et sont comme saisies de l’amour de la douleur. Fatigue´es d’une lutte toujours inutile, elles se font de l’exce`s de la souffrance un rempart contre leur faiblesse et les se´ductions de la nature. Les Grecs repousse`rent toujours de leur religion publique les mace´rations ainsi que les rites licencieux. Les philosophes, jusqu’au deuxie`me sie`cle de notre e`re, nourris dans les lettres grecques, avaient tant de peine a` s’expliquer les auste´rite´s des solitaires de la The´baı¨de et les chaıˆnes de fer dont ils se chargeaient, qu’ils les croyaient frappe´s de de´lire, en punition de ce qu’ils avaient abandonne´ le culte des dieux a. Qu’on n’objecte pas que ces meˆmes philosophes, les stoı¨ciens, les nouveaux pythagoriciens, et les platoniciens d’Alexandrie, imposaient des dou-

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V. un ancien fragment, intitule´ le Philosophe, dans le 9e vol. des Me´moires eccle´siastiques de Tillemont, p. 661–6681.

1–3 dont ... contradiction ] dont l’Esprit des Loix BC pre´voit une note Esp. des Loix. XIV. ch. 3. retour au texte principal a releve´ la contradiction Ms-texte 4 la bravent, la de´fient ] & dont ils la bravent. Ms-texte 13 Ce sont ] On a remarque´ souvent que ce sont Ms-texte 19–20 licencieux. ... nourris ] licentieux. 〈Il en fut de meˆme a` Rome. Lorsque vers le 6e sie`cle le culte de Cybe`le y arrive de contre´es sacerdotales, les Romains prohibe`rent les danses fre´ne´tiques des corybantes qui se mutilaient.〉 BC pre´voit une note 〈Tit. Liv. XXIX. 10. 11. 14. Appian de Bello Annibal. XLV.〉 retour au texte principal Les Philosophes, nourris le passage biffe´ ainsi que la note seront utilise´s ci-dessous, p. 376–377, n. b Ms-texte

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Le renvoi a` Tillemont, Me´moires eccle´siastiques, est faux. Nous n’avons pas re´ussi a` corriger l’erreur.

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leurs et des auste´rite´s a` leurs disciples a. Il a pu y avoir dans Pythagore, qui, dit-on, fut oblige´ de se soumettre a` des tourments de tout genre, afin d’eˆtre admis a` la connaissance de la doctrine secre`te des preˆtres d’E´gypte, quelque imitation de leurs pratiques ; mais son e´cole les conside´rait comme des e´preuves du courage et de la discre´tion des re´cipiendaires, sans y attacher un me´rite religieux. Les stoı¨ciens voulaient de´montrer de la sorte que la douleur n’e´tait pas un mal ; et, quant aux platoniciens, auxiliaires a` demi vaincus d’une religion dans laquelle ils introduisaient des extravagances e´trange`res, croyant la rendre plus forte contre des rivaux qu’ils parodiaient, ils ne sauraient valablement eˆtre consulte´s sur l’esprit ve´ritable d’une religion que leurs efforts tendaient a` de´naturer.

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Ces auste´rite´s philosophiques remontent meˆme au temps de Socrate. Strepsiade, son pre´tendu disciple dans Aristophane (Nue´es, 38), se de´clare preˆt a` souffrir tout ce que voudront les philosophes : «Je livre volontiers, dit-il, mon corps au fouet, a` la faim, a` la soif, au froid ; et quand ils m’e´corcheraient vif, j’y consens, pourvu qu’ils me tirent des mains de mes cre´anciers1.»

6 de la sorte ] 〈illis.〉 de la sorte corr. dans l’interl. Ms-texte 7 platoniciens ] nouveaux platoniciens Ms-texte 10–11 sauraient ... de´naturer. ] doivent pas eˆtre ... ve´ritable de cette religion qu’ils de´figuroient. Ms-texte 12 Ces auste´rite´s ] Mein. Cr. Gesch. II. 145–146. Ces auste´rite´s Ms-texte, MC

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Il faut lire «Nue´es, 439–442». Le passage grotesque d’Aristophane, Les Nue´es, donne le discours du paysan e´conome Strepsiade, qui veut apprendre l’art de la rhe´torique chez Socrate, mais ne parle pas d’auste´rite´s philosophiques, comme le pre´tend BC.

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Chapitre VI. De quelques dogmes qui ont pu s’introduire dans les religions sacerdotales, comme conse´quences de ceux que nous venons d’indiquer.

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Avant de terminer ce livre, nous devons rapporter quelques effets singuliers d’une disposition que nous avons souvent remarque´e dans l’homme civilise´ ou sauvage : nous voulons parler de son penchant a` preˆter a` ses dieux ses inclinations, ses sentiments et meˆme ses aventures. Ce penchant s’est manifeste´ de la manie`re la plus e´vidente dans toutes les religions soumises aux preˆtres, et y a fait pe´ne´trer les dogmes les plus bizarres. Ainsi, les E´gyptiens croyaient Apis ne´ d’une ge´nisse fe´conde´e par le soleil a. Les Scythes rapportaient leur origine a` une vierge accouche´e par un prodige d’un enfant qu’ils nommaient Scytha b. Une vierge e´tait me`re de Tage`s c. Les Chia b

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VOGEL, Rel. der Ægyp. p. 1751. DIODORE. Cette vierge avait de la ceinture en bas la forme d’un serpent ou d’un poisson. Le fe´tichisme s’alliait ainsi a` l’ide´e mystique. He´rodote, au lieu de la supposer vierge, lui attribue avec Hercule un commerce secret. On reconnaıˆt la` l’esprit grec, c’est-a`-dire antisacerdotal, s’efforc¸ant toujours de s’assujettir les fables sacerdotales2. CICER. de Divin. II. 23. ARNOB. adv. Gentes, II, 623. E´tablissement du texte : Manuscrits : 1.) BCU, Co 3262/1, pp. 221–224 et 245–248 [=Mstexte] et Co 3262/2, pp. 145–146 et 171 [=Ms-notes] 2.) BCU, Co 3456, fos 105 et 106 4.) BCU, Co 3281 [=Pl] [=MP] 3.) BCU, Co 3246, fos 113–115 et 133–135 [=MC] Imprime´ : De la Religion, conside´re´e dans sa source, ses formes et ses de´veloppements, t. IV, Paris : Chez Pichon et Didier, e´diteurs, 1831, pp. 283–293.

1–4 Chapitre VI. ... d’indiquer. ] ch. 5. Conjecture que nous soumettons a` nos lecteurs. Mstexte, MC 5–10 Avant de ... les E´gyptiens ] Qu’il nous soit permis ici de proposer une conjecture qui n’est pas e´trange`re a` l’objet que nous traitons. Les Egyptiens Ms-texte, MC 1

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Voir Vogel, Versuch über die Religion der alten Ägypter und Griechen, Nürnberg : Frauenholzische Kunsthandlung, 1793. Vogel re´sume a` la page indique´e la le´gende d’Apis, ne´ d’une ge´nisse fructifie´e par la lumie`re du ciel, en particulier de la lune. Les signes e´taient la couleur (il devait eˆtre noir) et un triangle blanc sur le front, une tache blanche en forme de demi-lune du coˆte´ droit. Vogel soutient que l’art des preˆtres produisait ces animaux. BC ne reproduit pas correctement la fable raconte´e par Diodore. Dans le livre II, chap. XLIII (Bibliothe`que historique, Paris : 2003, p. 77), l’auteur parle d’une vierge sans nom, ne´e de la terre, moitie´ femme, moitie´ serpent, qui eut de Jupiter un fils nomme´ Skythe`s, roi du peuple auquel il donna son nom. La variante de l’histoire selon He´rodote se lit au livre IV, chap. IX-X. Voir Cice´ron, De divinatione, livre II, 50. Cice´ron raconte l’histoire du devin Tage`s en E´trurie, sorti d’un sillon. Il n’y est pas question d’une vierge, me`re de Tage`s. – Arnobe, Adversus gentes, II, 62 semble faire allusion au chap. LXIX du livre II, ou` il est question de Tage`s (e´d. Amata, p. 353 ; e´d. Orellius, pp. 99–100 ; e´d. Armisen-Marchetti, Paris : Belles

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nois, dont les traditions tiennent manifestement a` d’anciens dogmes sacerdotaux, disent que la naissance de Fo-Hi fut miraculeuse, en ce qu’il n’eut point de pe`re. Xaca, dans l’une de ses apparitions, au Tibet a, et Mexit-Li et Vitzliputzli, au Mexique, sortirent du sein d’une jeune fille e´trange`re aux myste`res de l’hymen. Les Asiomis, Dioscures indiens, qui, doue´s d’une beaute´ comme d’une jeunesse e´ternelle, parcourent a` cheval le globe, en gue´rissant les maux du corps et de l’ame, sont ne´s d’une cavale que l’astre du jour impre´gna de ses rayons. Sita, l’e´pouse de Rama eut un sillon pour berceau b ; et la plus glorieuse des incarnations de Wichnou est celle ou` sous le nom de Crishna il vit le jour, sans que sa me`re euˆt subi les caresses d’un homme c. Cette ide´e ne serait-elle pas venue de l’importance attache´e par les peuples sacerdotaux a` la saintete´ des abstinences et des privations contre nature ? Le germe se trouve sans doute dans le cœur humain. Nous l’avons a b c

GEORGII Alph. Tibet. Pref. p. 161. Ramayan, p. 3682. ROGERS, Pagan. Ind. II, 33 ; CREUTZ. III, 134. D’anciennes images de la vierge la repre´sentent comme une femme ayant les pieds sur un croissant et la teˆte couronne´e d’e´toiles ; et dans la mythologie indienne, la me`re de Crischna est repre´sente´e de meˆme.

1 dont les ] dont plusieurs Ms-texte 3–4 au Tibet ... Mexique, sortirent ] suivant les habitans du Tibet & Mexit-li, le Dieu de la guerre chez les Mexicains, sortirent Ms-texte la note sur Vitzliputzli est inte´gre´e dans le texte principal Vitzli-putzli, chez le meˆme peuple, avoit aussi une vierge pour me`re. Ms-notes 5–8 Les Asiomis ... rayons. ] passage ajoute´ dans la col. de gauche Les Asiomis ... sont ne´s, sans participation d’un maˆle, d’une cavale vierge impre´gne´e 8–9 Sita ... berceau ; ] des rayons du soleil par les narines. D’Eckst. XVII. 368 Ms-texte passage ajoute´ dans la col. de gauche Sita, e´pouse de Rama naquit miraculeusement & fut trouve´e dans un sillon. Ramayan. 582. Ms-texte 9–11 et ... homme. ] Les Indiens regardent comme la plus importante & la plus glorieuse des incarnations de Wichnou, celle, ou, sous le nom de Crishna, il a vu le jour, sans que sa me`re eut subi les embrassemens d’un e´poux. Mstexte 14-p. 330.3 Le germe ... s’incarnant ] passage ajoute´ dans la col. de gauche le germe ... l’avons montre´ en parlant des Sauvages. mais ... germe. Ils 〈ont, du〉 en ont ... mythologiques. Ils ont voulu qu’a` l’exemple des homes les Dieux regardassent l’union conj. impure aux cieux, non moins q sur la terre : & bientot la Div. meme en s’incarnant &ca Ms-texte ¯

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Lettres, 2018, p. 71). Arnobe ne parle pas d’une vierge, me`re de Tage`s, mais dit simplement, conforme´ment a` la tradition le´gendaire : «Antequam Tages Tuscus oras contingeret luminis.» Il faut lire pp. XV-XVI, ou` il est question de Xaca : «Et ecce Xaca, qui in regalis Puellæ sinum grandi prodigio repente ingreditur die XV. mensis stellæ Ciu-tong, id est sub constellatione, quam aquæ millenatium appellant.» Le renvoi est faux ; nous n’avons pas re´ussi a` le corriger. Roger, Offene Thür, deuxie`me partie, chap. III, p. 266. La huitie`me incarnation sous le nom de Krishna est plus glorieuse puisque Vishnou y est venu dans la ple´nitude de sa nature

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indique´ chez le sauvage : mais les preˆtres ont de´veloppe´ ce germe ; ils en ont fait un dogme qu’ils ont inse´re´ dans leurs re´cits mythologiques. L’union des sexes a e´te´ re´prouve´e dans les cieux comme sur la terre ; et la divinite´, meˆme en s’incarnant, n’a pas voulu devoir sa naissance a` un acte impur a. Il est a` remarquer que le de´sir d’e´pargner aux dieux les souillures d’une naissance mortelle a jete´ quelquefois les preˆtres dans des fictions plus inde´centes que la notion vulgaire qu’ils se proposaient d’e´viter. La belle Amogha devient enceinte de Brama par des moyens que nous ne pouvons de´crire, et l’oreille virginale de la jeune Andani lui sert a` concevoir d’une manie`re aussi obsce`ne qu’e´trange le fils de Schiven, Hanouman, le satyre des Indiens, et l’auxiliaire actif et intelligent des dieux dans leurs guerres. Ce qui confirmerait la conjecture que nous hasardons, c’est qu’aucune notion semblable n’apparaıˆt chez les Grecs, a` l’e´poque ou` leur mythologie devient un syste`me re´gulier. Si He´siode ou Nonnus nous transmettent quelques fables du genre de celles que nous venons d’emprunter a` l’Inde, elles sont ante´rieures au re`gne de Jupiter, ou ne racontent que les aventures de sa jeunesse. Ce dieu veut faire violence a` Ve´nus, et son ardeur trompe´e par la re´sistance de la de´esse, fe´conde une pierre qui accouche d’un fils au bout de dix mois b. Ce mythe remonte donc a` la pe´riode cosmogonique que nous avons prouve´ tant de fois eˆtre e´trange`re a` la Gre`ce. Minerve s’e´lance toute arme´e du cerveau de Jupiter, et Vulcain est le fruit du courroux solitaire de

a b

De-la` peut-eˆtre, chez les chre´tiens, les disputes sur la conception immacule´e. ARNOB. V, 162 ; NONNUS, lib. XIV1.

1 sauvage : ] BC pre´voit d’accrocher une note a` ce mot ; le texte n’est pas conserve´, le papillon qui le contenait est perdu MC 5–11 Il est ... guerres. ] manque Ms-texte, MC 12–13 Ce qui ... Grecs, ] Ce qui ... cette conjecture, c’est ... notion pareille n’apparait 〈frappe〉 chez les Grecs Ms-texte 13–20 a` l’e´poque ... Gre`ce. ] manque, y compris la note Ms-texte, MC 20 Minerve s’e´lance ] autre de´but de la phrase Rien de pareil nous frappe en Gre`ce. Minerve, a` la ve´rite´ s’e´lance Ms-texte Minerve a` la ve´rite´ s’e´lance MC 22 De-la` ... immacule´e. ] De la` les disputes sur la conception immacule´e. Ms-notes

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divine. – Creuzer, Symbolik, dit la meˆme chose sur Krishna : «Crischna [...] der, von einer Jungfrau geboren, das göttliche Wesen reiner als irgend ein Gottmensch vor ihm in diese leibliche Hülle herunterbrachte». BC pense au chap. X du livre V d’Arnobe (e´d. Amata, p. 512 ; e´d. Orellius, p. 174) qui parle de cette anecdote. – BC renvoie d’une manie`re impre´cise a` Nonnos de Panopolis, Les Dionysiaques, chant XIV, qui raconte le de´but de la guerre de Dionysos contre les Indiens.

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Junon contre un e´poux infide`le. Mais nous avons explique´ comment s’e´taient glisse´es dans la mythologie grecque ces deux fables dont la premie`re se rapporte a` l’Onga phe´nicienne et la seconde au Phthas e´gyptien a. Tout au plus l’orgueil que met Diane a` rester vierge, et ses rigueurs envers ses compagnes plus fragiles, paraıˆtraient se rapprocher des se´ve´rite´s sacerdotales : mais ce mythe, emprunte´ d’Hertha, n’eut jamais d’influence sur la religion, et finit meˆme par eˆtre pour les poe`tes un sujet de raillerie, tant il avait peu d’analogie avec les dogmes rec¸us et re´ve´re´s du peuple. Ce n’est pas seulement dans ce qui regarde la virginite´ et les naissances divines, sans l’intervention de l’union des sexes, que les preˆtres ont voulu que leurs dieux se conformassent aux notions des hommes1. Il en a e´te´ de meˆme relativement aux sacrifices humains, et a` la valeur myste´rieuse attache´e a` la souf france. L’adorateur, conside´rant l’offrande comme d’autant a

T. II, p. 3892.

2–3 la premie`re ] 〈l’une〉 la 1ere Ms-texte 4–8 Tout au plus ... peuple. ] le de´but de ce paragraphe apparaıˆt dans la marge de gauche de Co 3262 ; BC cite sans doute un ms. que nous ne connaissons pas Tout au plus l’attachement de Diane la suite du texte se recoupe avec ce que nous lisons dans MC Il est ne´cessaire d’observer que dans 〈les pays ou`〉 les religions sacerdotales, la continence e´toit recommande´e comme un sacrifice, un renoncement au plaisir, une victoire sur la nature, plutot que sous le point de vue de sa valeur intrinse`que. La virginite´ par elle meˆme n’e´toit pas en ve´ne´ration chez les Orientaux. La ste´rilite´ qui en re´sulte e´toit une male´diction & une honte. suit une note v. Meiners Cr. Gesch. I. 239. retour au texte Mais se refuser a` ce qu’on de´sire, & fouler aux pieds ses penchans e´toit dans les meˆmes climats un acte me´ritoire de devotion & de pie´te´. suit une note qui cite un passage de Montesquieu et se termine par le commentaire c’est que le renoncement aux plaisirs des sens n’a paru un me´rite que la` ou` il e´toit une douleur. retour au texte Or, les homes preˆtent toujours a` leurs Dieux leurs mœurs & leurs ide´es ; l’union des sexes e´tant sur la terre une impurete´, ils ont transporte´ cette notion dans le ciel. Ils n’ont pas voulu que la divinite´, meˆme en s’incarnant, dut sa naissance a` une union impure. suit la note ci-dessus, p. 330, n. a ; fin du chap. Ms-texte ; dans MC apparaıˆt un texte tre`s proche partant d’une observation de Montesquieu que BC a utilise´e cidessus, p. 302, ligne 7 a` 303, ligne 4 ; ce passage clot le chap. MC 9-p. 333.8 Ce n’est pas ... du ciel. ] le passage, y compris les notes, manque Ms-texte, MC 13-p. 333.8 L’adorateur ... protection du ciel. ] passage qui se trouve sur les deux f os de MP 13 L’adorateur ] mot pre´ce´de´ d’un titre et d’une phrase dans Co 3456 Chapitre 3. D’un dogme qui s’est introduit dans les religions sacerdotales, Comme une conse´quence de la valeur attache´e au[x] Sacrifices. Le raffinement dans Le sacrifice et dans La valeur de la Victime a eu, pour Les religions sacerdotales, des conse´quences fort singulie`res. L’adorateur MP 1

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Avec cette phrase commence la dernie`re partie du chapitre VI. BC utilise pour la re´daction du texte au moins trois sources : le chapitre VIII du manuscrit en cahiers (Ms-texte et Msnotes), deux folios d’un manuscrit qu’il a fait pre´parer par le copiste aux grandes barres de t (MP), enfin le chapitre VIII du manuscrit colle´ (MC). Les divergences entre ces sources et le texte imprime´ peuvent eˆtre conside´rables. OCBC, Œuvres, t. XVIII, p. 256.

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plus efficace, que l’objet offert e´tait plus pre´cieux, a d’abord pre´fe´re´ les animaux aux plantes, puis ses semblables aux animaux, puis enfin les dieux a` ses semblables. Il en est re´sulte´ que plusieurs nations ont cru que leurs dieux s’e´taient immole´s sur leurs propres autels. Cette ide´e, telle qu’elle se pre´sente dans les cultes de l’E´gypte, de la Phe´nicie et de l’Inde (car elle n’a nul rapport avec un dogme que nous devons respecter comme un objet de ve´ne´ration pour plusieurs communions chre´tiennes), ramenait la supposition que les dieux meˆmes ne sont point a` l’abri de la mort a, supposition que le polythe´isme inde´pendant s’empresse de rele´guer dans des traditions obscures ; et elle e´tait favorise´e par les alle´gories cosmogoniques. Dans les cosmogonies indiennes, fonde´es sur le panthe´isme, la cre´ation est un sacrifice. Le dieu qui existe seul se sacrifie, en se divisant violemment, et en tirant le monde de son essence b. Telle est l’une des significations de la le´gende de Bacchus de´chire´ par les Titans ; d’Osiris, dont les membres sont disperse´s sur tout l’univers ; de Mithras e´gorge´ par ses fre`res, sous le nom d’Iresch c ; Cenre´zy, au Thibet, se brise e´galement la teˆte contre un rocher pour cre´er le monde. a b c

Tome I, 2e e´dit1. V. le Rigve´da, dernier chapitre de l’Aitareya Brahmana2. Bouddha est sacrifie´ de la meˆme manie`re, mis en pie`ces par les de´mons, avale´ par son

4 autels. ] suit une note accroche´e a` ce mot (1) Les brames Dans Leurs prie`res demandent au Soleil Le sacrifice D’Indro. (Catholique no XVII p. 366) MP 5–11 Cette ide´e ... cosmogoniques. ] re´daction diffe´rente dans Co 3456 Cette ide´e qui, d’une part, rame`ne dans la religion L’une des extravagances Les plus grossie`res du fe´tichisme, La supposition que Les dieux meˆmes ne sont point a` L’abri de la mort, BC accroche a` ce mot la note avec le renvoi au t. I, ci-dessus, n. a supposition que Le polythe´isme inde´pendant s’empresse, sinon de rejetter formellement, du moins de rele´guer dans des traditions obscures ; cette ide´e, disons nous, est favorise´e d’autre part, dans les religions soumises aux preˆtres, par Leurs alle´gories Cosmogoniques. MP 13–14 se sacrifie ... essence. ] re´daction diffe´rente et de´veloppement dans Co 3456 se sacrifie, en sortant de sa quie´tude, en tirant le monde de son essence, en se divisant violemment, en s’arrachant, pour ainsi dire, une partie de Lui meˆme, dont Les fragments e´pars composent Le monde. dieu est d’abord tout a` la fois L’holocauste et L’offrande, Le Sacrificateur et Le Sacrifice, car il n a de moyen de cre´er, qu’en se transformant en cre´ateur. MP 2me e´dition. MP 20 V. le Rigve´da ... Brahmana. ] note 19 Tome ...e´dit. ] Tome I p. inexistante dans MP 21-p. 333.11–12 manie`re, mis ... pour lui. ] re´daction diffe´rente dans Co 3456 manie`re. Les Daytias, ou de´mons, emploient La magie pour L’ane´antir ; ils Le mettent en pie`ces, et Le Re´duisant en poudre impalpable, Le meˆlent a` une Liqueur qu’ils font boire a` Soucra, son pontife. celui-ci de´couvrant qu’il est devenu la prison de Bouddha se tue pour le rendre a` la vie. Bouddha ressuscite, ressuscite Soucra (Catholique XXIV. 314.) MP 1 2

OCBC, Œuvres, t. XVII. Le renvoi n’est pas spe´cifie´. La variante a` la ligne 19 montre que BC pensait comple´ter la note. Nous n’avons pas re´ussi a` identifier le passage. BC paraphrase un passage qu’il a lu dans le Catholique. La preuve est la source qu’il cite. Voir ci-dessus, p. 295, la variante a` la ligne 12.

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D’autres fois, imitant les usages de leurs adorateurs plus scrupuleusement encore, les dieux sacrifient ce qu’ils ont de plus cher, leurs enfants, race divine comme eux a. Cette notion d’un sacrifice divin avait donne´ lieu, chez les Mexicains, a` un e´trange usage. Dans une de leurs feˆtes les plus solennelles, les preˆtres frappaient au cœur le dieu que leurs hommages avaient honore´, et distribuaient aux assistants ce cœur mis en pie`ces, nourriture mystique qui leur procurait la protection du ciel b. A cette fiction de la mort des dieux, se joint le me´rite de la douleur volontaire1. Sommonacodom descend aux enfers pour y souffrir durant cinq

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pontife, qui de´couvrant qu’il sert de prison au dieu qu’il adore, se tue pour le mettre en liberte´ ; il renaıˆt et ressuscite a` son tour le pontife qui s’est immole´ pour lui. Mythologie phe´nicienne. (WAGNER, 285–2862.) On nommait cette feˆte Te´oculao, la feˆte du dieu qu’on mange. Un homme qui s’est applique´ a` commenter toutes les ide´es mystiques de la the´ologie indienne, et a` rattacher toutes les superstitions a` ce mysticisme, dit a` ce sujet des choses curieuses, en ce qu’elles montrent la se´rie de subtilite´s a` l’aide desquelles on a substitue´ aux sacrifices offerts a` Dieu, le sacrifice de Dieu lui-meˆme. «C’est sur l’autel que l’homme et la divinite´ se rencontrent. La` s’accomplit la myste´rieuse union de l’ame avec son cre´ateur. C’est la` que l’homme souffre et se re´ge´ne`re dans les flammes de l’holocauste. Dans la famille primitive, chaque sacrifice e´tait le repas. Le sacrificateur communiait avec la divinite´ ; il communiait ensuite avec le genre humain. Chacun, en mangeant de la victime sacrifie´e, se nourrissait de la substance du cre´ateur devenu victime et cre´ature. On sacrifiait l’homme-dieu, et ceux qui assistaient a` ce sacrifice, en qualite´ de pontifes ou de simples fide`les, communiaient avec le me´diateur, se nourrissaient de sa divine substance. Ces ide´es ont profonde´ment pe´ne´tre´ dans le culte de Bacchus, dieu du vin, qui est le sang de l’univers, et dans celui de Ce´re`s, de´esse du pain, qui est la chair de ce meˆme univers.» (Catholique, XXIII, 2473.)

2 sacrifient ] sacrifioient MP ont ] avoient MP 9–10 A cette ... volontaire. Sommonacodom ] la premie`re phrase du paragraphe remplace l’ancien de´but du chap. VIII Chapitre 8 D’un dogme que le principe dont il s’agit a pu introduire dans les religions sacerdotales. Reproduisons ici en deux mots une observation que chacun des sujets que nous traitons dans ce livre nous sugge`re. L’homme ayant sacrifie´ des hommes a voulu que ses Dieux se sacrifiassent. Ayant regarde´ l’union des sexes comme une souillure, il a voulu que des vierges enfentassent ses Dieux. Maintenant, conside´rant la douleur comme un me´rite, une chose sacre´e, il veut que ses Dieux s’infligent des douleurs affreuses. Sommonacodom Ms-texte, Ch. 8. d’un dogme ... se sacrifiaˆssent. ... enfentaˆssent ... douleurs effroyables. Sommonacodom MC 27 XXIII ] XXIV le chiffre romain peut-eˆtre re´crit sur XXII MP 1 2

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Avec cette phrase commence la partie de ce chap. VI qui correspond au chap. VIII du manuscrit en cahiers et de MC. Wagner, Ideen, traduit un passage de Sanchoniathon, d’apre`s le texte d’Euse`be (Paraskeve) ; BC vise le passage suivant : «Als aber Pest und Untergang kam, brachte Kronos seinem Vater Uranos seinen einzigen Sohn zum Opfer, und beschnitt seine Schaamtheile ; eben dies thaten auch seine Gehülfen von ihm gezwungen» (pp. 285–286). BC cite un aline´a de l’article «De la the´ocratie primitive» du baron d’Eckstein (Le Catholique, t. VIII, cah. XXII, pp. 225–254).

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cents ge´ne´rations successives a : Esmoun et Attys se mutilent b : Wichnou, dans sa quatrie`me incarnation, se mace`re au fond d’un de´sert c. Ditty, son e´pouse, pratique des auste´rite´s effroyables pendant mille anne´es. C’est la douleur divine, la pe´nitence de Dieu, la Tapasya, comme disent les Ve`des, qui a produit le monde : cette meˆme douleur est ne´cessaire pour le sauver. Les Indiens ont suppose´ de tout temps que la nature divine entrait dans les sacrifices, comme partie souffrante d. Leurs dieux en s’immolant expirent dans une agonie longue et cruelle. Le principe qui engageait les adorateurs a` tant de mace´rations qui nous font fre´mir les entraıˆnait a` se figurer les objets de leur adoration, s’imposant, suivant leur essence plus sublime, des mace´rations plus e´tonnantes encore et plus douloureuses. Mais comme l’intela b

c

d

LALOUBE` RE, II, 141. V. sur l’histoire d’Esmoun, CREUTZER (II, 148) ; WAGN. (286) ; MEIN. (Cr. Gesch., I, 70) ; et pour les diverses le´gendes sur les mutilations d’Attys, WAGNER (2382). V. sur les souffrances et les mutilations de Brama, ROGER (Pag. Indien, II, 1) ; SONNERAT (I, 128–1293) ; ANQUETIL (1394), et WAGNER (221–2285). V. les notes du traducteur de Sacontala, p. 2946.

1 Esmoun et Attys se mutilent ] Esmoun se mutile Ms-texte 2–3 Ditty ... anne´es. ] manque MC 4–5 Ve`des, ] Ve`des, d’Eckst. X. 69 Ms-texte 5–6 est ... sauver. ] racheˆte ce monde, separe de la divinite´ par ses crimes. Ms-texte 7 s’immolant ] s’immolant 〈sur leurs propres autels〉 Ms-texte 8 Le principe ] Le meˆme principe Ms-texte, MC 11 douloureuses. ] douloureuses. C’est par leurs souffrances qu’ils preˆtent a` l’espe`ce humaine une assistance surnaturelle. Ms-texte, MC ; accroche´e au mot «surnaturelle» une note C’est par le sang, c’est par la souffrance du Logos 〈que le〉 dit a ce sujet l’aut 〈du Cath. X. 69.〉 du cath. que le monde doit eˆtre reconcilie´ avec son auteur. II. 192. Ms-texte, col. de gauche, C’est ... sujet l’auteur du Catholique (II. 192) que ... auteur. MC ; retour au texte De la` l’hypothe`se de la purification de l’homme par les tourmens du Dieu qui l’expie. Ms-texte, MC 11-p. 335.14 Mais ... par sa mort. ] manque Ms-texte, MC 17 Sacontala ] la source porte Sacoutala faute que nous corrigeons d’apre`s Co 4722, fiche 266 Rel 4 1 2

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5 6

Laloube`re publie dans le t. II de son ouvrage Du royaume de Siam le texte de la «Vie de Te´vetat» qui parle de cet e´pisode de la vie d’un sage. Creuzer, Symbolik, t. II, pp. 148–150, raconte le mythe d’Esmoun selon la tradition phe´nicienne. – Les renvois a` Wagner, Ideen, sont faux. Aucune des pages indique´es ne parle ni d’Esmoun ni d’Attis. La le´gende sur la mutilation d’Attis est raconte´e p. 211, d’apre`s Lucien, et la le´gende de sa mort d’apre`s Diodore, p. 227. – Meiners ne traite a` la page indique´e ni d’Esmoun ni d’Attis. Roger consacre effectivement le premier chapitre de son ouvrage a` Brama, mais ne parle pas de souffrances. La mutilation pourrait eˆtre la perte de la cinquie`me teˆte avec laquelle il e´tait ne´ (Offene Thür, pp. 221–236). – BC cite l’e´dition allemande de Sonnerat (t. I, pp. 129– 131). Quant a` Anquetil-Duperron, Oupnekhat, BC renvoie au de´but d’un chap. «Sestan Brahmen» dont la premie`re phrase dit : «Cum vi intelligentiæ et mortificationis semptem alimenta producta fecit.» Le renvoi a` Wagner, Ideen, est faux. Les pages indique´es sont consacre´es a` Cybe`le et Attis. BC cite Sacontala, ou l’anneau fatal, drame traduit de la langue sanscrit en anglais,

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ligence, meˆme en s’e´garant, aime a` lier ses conceptions entre elles, et a` leur donner une sorte d’unite´, l’hypothe`se de la chute primitive est d’ordinaire le nœud de cette espe`ce de drame. Les dieux preˆtent par leurs souffrances une assistance surnaturelle a` l’espe`ce humaine de´chue. Le dieu me´diateur re´tablit la communication interrompue. La purification de l’homme s’ope`re par les tourments du Dieu qui l’expie a. La ne´cessite´ d’une telle expiation s’est transmise de sie`cle en sie`cle et a pe´ne´tre´ dans le christianisme pour s’y maintenir jusqu’a` nos jours b. «La foi nous apprend, disent des auteurs tre`smodernes, qu’il a fallu pour effacer le pe´che´ inhe´rent a` la nature de l’homme, une victime the´andrique, c’est-a`-dire divine et humaine tout ensemble. Peut-eˆtre les inventeurs des sacrifices humains chez les nations idolaˆtres avaient-ils appris cette ve´rite´ par quelque tradition vague, et les rites qui nous re´voltent n’e´taient de leur part qu’une tentative pour trouver la victime destine´e a` de´livrer le genre humain par sa mort c.»

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Cette expiation est de´signe´e dans l’ancienne religion chinoise (GOERRES, I, 146) et dans la croyance lamaı¨que (ib. I, 163–164) par le mot de re´demption. Les Brames dans leurs prie`res demandent au soleil le sacrifice d’Indra, descendant du rang de cre´ateur au rang de cre´ature, mourant et renaissant chaque jour pour consommer de nouveau la mort expiatrice. C’est par le sang, c’est par la souffrance du Logos, disent les chre´tiens indianisants de nos jours, que le monde doit eˆtre re´concilie´ avec son auteur. PELLOUTIER, VIII, 341 ; FERRAND, Esprit de l’histoire, I, 3742. M. de Maistre, par une suite de la meˆme ide´e, dit que «le genre humain ne pouvait deviner le sang dont il avait besoin.»

15–18 Cette expiation ... expiatrice. ] Cette expiation ... redemption. Ms-texte, MC ; la note est accroche´e au mot «l’expie.» 16–18 Les Brames ... expiatrice. manque Ms-texte, MC 19–20 disent ... jours, ] dit l’auteur du Catholique (II. 192) MC

1

par Sir W[illia]m Jones, et de l’anglais en franc¸ais par le Cit. A. Bruguie`re ; avec des notes des traducteurs, et une explication abre´ge´e du syste`me mythologique des Indiens, mise en ordre alphabe´tique, et traduite de l’allemand de M. Forster, Paris : Treuttel et Würtz, 1803. Il faut corriger le renvoi et lire «pp. 282–283», car BC vise une phrase de l’article «Issa» (un autre nom pour Shiva : «il est encore plus digne de remarque qu’ils [i.e. les Indiens] aient cru retrouver et personnifier la force et la pre´sence divine dans le sacrifice pur, (le Ghib) et cela avec une subtilite´ employe´ mille ans plus tard dans un autre systeˆme pour reproduire la Divinite´ elle-meˆme». L’ouvrage de Georg Forster, qui a re´dige´ cet article, a paru en 1791 (Sakontala oder der entscheidende Ring : ein indisches Schauspiel von Kalidas, Aus den Ursprachen Sanskrit und Prakrit ins Englische und aus diesem ins Deutsche übersetzt von Georg Forster, Mainz, Leipzig : Fischer). BC cite en l’abre´geant la note 44 qu’on trouve dans L’Histoire des Celtes, livre IV, chap. V, pp. 34–35, ajoute´e au texte de Pelloutier par son e´diteur Pierre Chiniac de La Bastide. Le

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Rien de pareil dans les religions inde´pendantes. Si les dieux d’Home`re sont expose´s a` souffrir, c’est une suite de leur nature imparfaite et borne´e. Leur douleur n’a rien de myste´rieux et ne profite point a` la race mortelle. (Eclairciss. sur les sacrif., p. 4551.) On ne verra point, nous l’espe´rons, dans cette re´futation d’ide´es qui nous paraissent hasarde´es ou fausses, une attaque dirige´e contre la croyance, pour laquelle nous avons si souvent manifeste´ notre reconnaissance et notre respect. Le christianisme, ramene´ a` sa simplicite´ primitive, et combine´ avec la liberte´ d’examen, c’esta`-dire avec l’exercice de l’intelligence que le ciel nous accorde, n’a rien a` perdre en se de´gageant des subtilite´s vaines et parfois fe´roces, dont l’imagination de ses commentateurs l’a environne´, et nous pensons servir cette doctrine ce´leste, en la de´livrant des auxiliaires qui lui donnent une ressemblance trompeuse avec les religions impose´es aux peuples de l’antiquite´ par des corporations ambitieuses, auxquelles le sacerdoce chre´tien s’indignerait certainement de se voir compare´.

4–13 On ne verra ... voir compare´. ] passage ajoute´ sur les e´preuves On ne verra ... Ciel nous a donne´e, n’a ... auxiliaires qui la rapprochent des religions ... compare´. version pre´ce´dente sur un autre jeu d’e´preuves On ne verra ... ambitieuses 〈qui lui avaient ravi l’usage de deur raison, & la jouissance de leur liberte´〉 auxquelles ... compare´. Pl

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(suite des notes de la page pre´ce´dente) raisonnement de Chiniac est plus complexe qu’il ne ressort du texte de BC : «J’ai vu des personnes savantes chercher dans la ve´ritable Religion, le fondement des victimes humaines. ‘La foi nous apprend, disoient-ils, qu’il a fallu une victime The´andrique, c’est-a`-dire, Divine & Humaine tout ensemble. Peut-eˆtre que ceux qui aborderent les premiers dans les Gaules, avoient appris des Descendans de Noe¨, qu’il viendroit quelqu’un qui, par sa mort, re´pareroit tout le mal des hommes & de sa nature. Dela` a` des victimes humaines le chemin est court.’» Chiniac s’engage ensuite dans une re´flexion the´ologique pour prouver que le raisonnement avance´ par un auteur non identifie´ «n’a aucune solidite´», a` cause de la «diffe´rence essentielle» entre le sacrifice du Christ et les sacrifices humains. Je´sus-Christ «s’immoloit lui-meˆme a` son Pe`re pour tous les hommes» pour les libe´rer de leurs pe´che´s, argument traditionnel des the´ologiens. Le renvoi de BC au premier volume de Ferrand, L’esprit de l’histoire, ou lettres politiques et morales d’un pe`re a` son fils, pose proble`me. S’il utilise la quatrie`me e´dition (Paris : Veuve Nyon, 1805), comme il l’a fait pour son Cours sur la constitution anglaise, il cite une page du t. I de l’ouvrage de Ferrand, sans rapport avec les ide´es exprime´es par Pelloutier et accepte´es par BC. Mais quelques pages plus loin il est question des sacrifices humains chez les Gaulois et de sacrifices the´andriques : ce sacrifice «s’est enfin ope´re´ dans la mort de l’Homme-Dieu qui repre´sentoit tous les hommes» (pp. 377–378). Nous supposons que cette note, qui ne se trouve dans aucun des manuscrits conserve´s, a e´te´ ajoute´e en pre´parant le manuscrit pour l’impression, et que BC renvoie a` Ferrand pour e´viter de mentionner d’Eckstein dont il est pourtant question dans ce contexte avec des phrases qui expriment exactement cette ide´e (voir p. 284, variante aux lignes 21–22). La meˆme constellation d’auteurs et le meˆme sujet se trouvent pp. 283–284, note b. Eclaircissements sur les sacrifices, Œuvres comple`tes, t. V, p. 346.

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Livre XI, chapitre VII – De´monstration des assertions ci-dessus

Chapitre VII. De´monstration des assertions ci-dessus, tire´es de la composition du polythe´isme de l’ancienne Rome.

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La composition du polythe´isme de l’ancienne Rome pre´sente la de´monstration la plus comple`te des assertions contenues dans les chapitres qu’on vient de lire. On voit, chez les Romains, durant les trois sie`cles pendant lesquels leur croyance s’est forme´e graduellement, la lutte manifeste de l’esprit sacerdotal contre l’esprit grec, c’est-a`-dire contre l’esprit inde´pendant de la direction sacerdotale. Au moment de la fondation de Rome, l’E´trurie a qui tenait sous son joug plusieurs peuplades de l’Italie antique, et qui exerc¸ait sur toutes beaucoup a

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Il serait tout a` fait e´tranger a` notre sujet de rechercher l’origine des diverses peuplades de l’Italie. Nous renvoyons les lecteurs curieux d’approfondir ces ques tions difficiles aux ouvrages de Plutarque, au traite´ de Varron sur la langue latine, et sur l’e´conomie rustique, aux Fastes d’Ovide, aux commentateurs de Virgile, Servius, Probus, Festus, etc., a` l’Histoire naturelle de Pline, aux Questions naturelles de Se´ne`que, aux Nuits attiques d’Aulugelle ; enfin aux fragments de Porcius Cato, de Fabius Pictor, de Cincius Alimentus, rassemble´s dans plusieurs e´ditions de Salluste ; et pour les modernes, au Tre´sor des antiquite´s grecques de Grævius, a` l’Etruria Regalis de Dempster, aux dissertations de Heyne dans les commentaires de Gœttingue, aux ouvrages de Winkelmann, a` la Symbolique de Creutzer, et surtout au Ier vol. de l’Histoire romaine de Niebuhr. Nous remarquerons seulement, qu’en parlant du culte de l’E´trurie, nous traitons de celui de toute l’Italie antique, jusqu’a` la fondation de Rome : car bien que le culte du Latium fuˆt diffe´rent dans quelques de´tails, son esprit n’en e´tait pas moins e´trusque. Les Ombriens, les Sabins, les Latins E´tablissement du texte : Manuscrit : BCU, Co 3262/1, pp. 248–277 [=Ms-texte] et Imprime´ : De la Co 3262/2, pp. 172–223 et p. 172, vo de la feuille colle´e [=Ms-notes] Religion, conside´re´e dans sa source, ses formes et ses de´veloppements, t. IV, Paris : Chez Pichon et Didier, e´diteurs, 1831, pp. 294–343.

1–3 Chapitre ... polythe´isme ] Chapitre 9 Demonstration ... composition 〈de la religion〉 du polythe´isme Ms-texte 5 comple`te ] e´vidente Ms-texte 6–7 Romains ... graduellement ] Romains, 〈depuis Romulus, jusqu’a` Tarquin〉 durant les 3 sie`cles ... graduellement corr. dans la col. de gauche Ms-texte 8–9 C’est-a`-dire ... sacerdotale. ] ajoute´ dans la col. de gauche Mstexte 10-p. 341.1 l’E´trurie ... habitants de toute l’Italie ... aux fontaines. ] le passage l’E´trurie ... habitans e´crit sur une feuille colle´e avec cinq cachets de cire sur le folio qui contient la version pre´ce´dente ; la dernie`re phrase du texte ancien de toute l’Italie ... aux fontaines. se lit dans la col. de gauche de la p. suivante du ms. Ms-texte 14 ouvrages ] ouvrages 〈suivans〉 Ms-notes 14–15 et sur ... etc. ] ajoute´ dans la col. de gauche Ms-notes 16–17 aux Nuits ... Aulugelle ] aux nuits ... Aulugelle, II, 28. Ms-notes

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De la Religion, IV

d’autorite´, n’e´tait gouverne´e ni par un seul monarque, ni par une assemble´e du peuple, ni par un se´nat. Elle obe´issait a` une caste oppressive, comme la caste sacerdotale d’E´gypte a ; et c’e´tait si bien une caste de meˆme nature,

a

avaient e´te´ long-temps dans la de´pendance de l’E´trurie et de sa fe´de´ration, forme´e de douze villes, dont chacune avait son chef. La die`te ou assemble´e ge´ne´rale de cette fe´de´ration se re´unissait a` Volsinium, dans le temple de Vulcain. (DEN. D’HAL., II, 15 et 161.) Les chefs politiques e´taient soumis a` un pontife commun a` tous les e´tats fe´de´re´s, et qui gouvernait tout l’ordre sacerdotal. Cette caste avait pour nom ge´ne´rique celui de Lucumon, qui signifiait primitivement posse´de´ ou inspire´, et dont on a fait un des Anceˆtres de Tarquin l’ancien. Les e´normes constructions de l’E´trurie, ces masses qui semblaient ne pouvoir eˆtre souleve´es par des bras mortels, et qu’en conse´quence l’antiquite´ appela d’abord Cyclope´ennes, pour les de´signer ensuite sous une de´nomination moins fabuleuse, celle de Pe´lasgiques ou de Tyrrhe´niennes, prouvent les travaux dont cette classe, comme en E´gypte, accablait les peuples. (V. cidessus, t. II, p. 802.) Aussi les annales e´trusques parlent-elles de fre´quentes re´volutions dont quelques-unes aboutirent a` l’expulsion des oppresseurs. La famille des Ciliciens fut chasse´e violemment d’Arretium. (TIT.-LIV., X, 33.) L’insurrection des esclaves de Volsinium est connue. Cette tyrannie sacerdotale contribua beaucoup aux succe`s de Rome. Les esclaves n’ont pas toujours la sottise de se battre pour leurs maıˆtres. On de´meˆle aussi dans l’histoire e´trusque comme dans l’e´gyptienne, quelques tentatives des rois contre les preˆtres. (V. ce qui a trait a` Me´zence, t. II, p. 1814.)

6 Volsinium ... Vulcain ] Volsinii ... Vulturna Ms-notes 16.) ] la source porte 61.) faute que nous corrigeons ; le livre II ne comprend que 22 chap. Rel4, Ms-notes 7 et qui ... tout ] & 〈pour le〉 qui ce dernier mot dans l’interl. gouvern〈ement duquel〉ait tout Ms-notes 9 Cette 11–14 l’E´trurie, ces ... Tyrrhe´niennes, caste ] 〈Cicer. de leg. II. 9.〉 cette caste Ms-notes prouvent ] l’E´trurie prouvent Ms-notes 14–15 les peuples ... 80.) ] le peuple. (v. t. II. p. 80.) texte entre parenthe`ses ajoute´ dans l’interl. Ms-notes 20 e´trusque ... e´gyptienne ] d’E´trurie comme dans celle d’Egypte Ms-notes

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Les chapitres cite´s des Antiquite´s romaines traitent de l’e´lection de Numa comme roi de Rome apre`s l’interre`gne, des mesures qu’il adopta pour re´former les institutions politiques de l’E´tat et y e´tablir le culte des dieux, ainsi que pour fonder le temple de Vesta (chap. 17). L’organisation de la fe´de´ration de l’E´trurie n’y est pas aborde´e. OCBC, Œuvres, t. XVIII, p. 98. Tite-Live parle dans le chapitre indique´ de la tre`s riche et puissante famille des Celnii chasse´e d’Aretium par les bourgeois : «Etruriam rebellare ab Arretinorum seditionibus motu orto nuntiabatur, ubi Cilnius genus præpotens divitiarum invidia pelli armis coeptum.» L’explication hypothe´tique de BC n’est pas justifie´e par le texte de Tite-Live. OCBC, Œuvres, t. XVIII, p. 152.

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que, jusqu’au temps de Cice´ron, les jeunes nobles de Rome e´taient envoye´s pre`s d’elle pour s’instruire dans la science sacre´e de la divination a. Nous n’avons point a` examiner si cette division en castes e´tait indige`ne en E´trurie, contre´e dont le climat b favorisait le pouvoir sacerdotal, ou si elle e´tait venue du Midi, peut-eˆtre de l’E´gypte meˆme, avec laquelle la marine commerc¸ante des E´trusques les avait mis de bonne heure en communication. Un fait incontestable, c’est que des colle´ges de preˆtres e´taient re´pandus dans toute l’Italie c, et que leur pouvoir e´tait sans limites. L’e´tude de l’astronomie d, de la me´decine e, leur e´tait re´serve´e. Ils e´taient les seuls a b c

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CICER. de Legib., X, 31. V. ce que nous avons dit du climat de l’E´trurie, t. II, p. 1632. Il y avait dans la ville d’Arde´e une corporation de preˆtres, nomme´s Saurani, et consacre´s au culte de la me`re des dieux (Vulp. vet. lat., v. 209 ; SERV. ad Æn3.) ; et dans plusieurs autres cite´s italiques, des corporations de meˆme espe`ce pre´sidaient aux rites d’autres divinite´s. Les corporations sacerdotales des E´trusques paraissent avoir eu des connaissances assez e´tendues en astronomie. Ce peuple avait de temps imme´morial un calendrier re´gulier. Numa, qui substitua l’anne´e solaire a` l’ancienne anne´e lunaire (MACROB., Sat. I, 134), se servit pour cette rectification du secours des preˆtres toscans, et M. Bailly a tre`s-bien prouve´ (Hist. de l’astron., VIII, p. 1955) qu’il n’avait pu recourir aux Grecs, alors tre`s-peu avance´s dans cette science. Les preˆtres e´trusques, comme les E´gyptiens, exer c¸aient seuls la me´decine. Ils avaient a` cet

12–14 Il y avait ... divinite´s. ] note remanie´e ; premie`re version 〈Il y avoit dans la ville d’Arde´es une corporation sacerdotale, consacre´e au culte de la me`re des Dieux. Vulpius, Vet. Lat. V. 209. Serv. ad Æneid. On nomoit les preˆtres de cette congre´gation Saurani.〉 deuxie`me version Il y avoit ... Serv. ad Æneid. la suite de la note manque Ms-notes 21 exerc¸aient seuls ] 〈illis.doient〉 exercoient exclusivement Ms-notes 1

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Le renvoi est faux. BC pense probablement a` De legibus, livre II, chap. 9, § 21 : «Prodigia portenta ad Etruscos haruspices si senatus iussit deferunto, Etruria principes diciplinam doceto.» Il faut noter que BC fait de la proposition d’une loi qu’on lit chez Cice´ron un re´cit de la le´gislation pratique´e a` Rome, ce qui est clairement une mauvaise interpre´tation du texte. OCBC, Œuvres, t. XVIII, pp. 141–142. Cette note n’a pu eˆtre e´lucide´e ; nous n’avons trouve´ ni d’un auteur qui pourrait convenir (il n’y a pas d’auteur latin dont le nom commence par la syllabe «Vulp») ni le vers de l’E´ne´ide commente´ par Servius (on pourrait penser au commentaire de VII, 412, ou` Servius parle d’Ardea, mais le contenu de ce passage et de quelques autres n’ajoute rien de substantiel pour comprendre cette note-ci). La caste des preˆtres que BC cite sous le nom de «Saurani» n’est pas atteste´e non plus. Nous savons par contre qu’on avait a` Ardea, ville du Latium, le culte de Ve´nus et de Junon. Voir K. Latte, Römische Religionsgeschichte, p. 184, n. 4 et 168, n. 3. BC cite le de´but du chap. 13, §§ 1–7, du livre I des Saturnalia ou` il est question de la re´forme du calendrier par Numa. BC cite Jean-Sylvain Bailly (1736–1793), plus particulie`rement son Histoire de l’astro-

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De la Religion, IV

historiens de l’E´trurie a. L’e´ducation de la jeunesse leur e´tait confie´e exclusivement b. L’adoration des astres et des e´le´ments constituait, nous l’avons de´ja prouve´, l’ancienne religion latine ou e´trusque c. Les habitants de toute l’Italie offraient des sacrifices aux fleuves, aux lacs, aux fontai-

a

b c

e´gard la meˆme renomme´e dans l’Occident que les E´gyptiens dans l’Orient. Si l’E´gypte e´tait surnomme´e le pays des plantes salutaires, l’E´trurie e´tait appele´e la patrie des reme`des. (MART. CAPELLA, de nupt. philos., cap. 61.) THE´ OPHRASTE (Hist. plant., IX, 15) cite un vers d’Eschyle en l’honneur des Toscans, maıˆtres dans l’art de gue´rir. Les Annales des E´trusques e´taient une histoire sacerdotale, comme les Pouranas indiens (NIEBUHR, I, 762). Cette histoire, re´dige´e par les preˆtres toscans, comme celle des Indiens par les Brames, e´tait renferme´e dans un cycle astronomico-the´ologique. Les e´ve´nements s’adaptaient au syste`me, plutoˆt que le syste`me aux e´ve´nements. Ils devaient cadrer avec les huit pe´riodes ou huit jours cosmiques assigne´s au genre humain. Chaque peuple devait durer un de ces jours, c’est-a`-dire dix sie`cles ou onze cents ans. (VARR. ap. Censorin., c. 173.) V. ci-dessous la note relative aux dix aˆges des E´trusques4. TIT.-LIV., V. 275. V. sur l’ancienne religion du Latium, le t. III, p. 8 et 96.

9 Les Annales ... comme ] les annales ... (Niebuhr. I. 76) passage ajoute´ dans la col. de gauche 〈l’histoire des Etrusques〉 cette histoire ces deux derniers mots dans l’interl. redige´e par 〈leurs〉 les preˆtres Toscans, comme Ms-notes 14–15 c. 17.) ... E´trusques. ] cap. 17.) voyez ci dessous la note 464. le renvoi de´signe une note dans le Ms-notes 16 Tit.-Liv. ... 27. ] v. Tite Liv. V. 27. sur les e´coles de Fale´ries. Ms-notes 17 9. ] 9. 〈ou` nous avons parle´ des animaux des pierres des arbres〉 la phrase biffe´e ajoute´e dans la col. de gauche Ms-notes

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nomie ancienne, depuis son origine jusqu’a` l’e´tablissement de l’e´cole d’Alexandrie (Paris : De Bure fils aıˆne´, 2M. DCC. LXXXI), un passage du livre VIII, «De l’astronomie des Grecs dans la secte de Pythagore, dans la secte Ele´atique, & des opinions de quelques autres philosophes», qui traite des re´formes du calendrier romain par Numa (pp. 194–195). Allusion a` une phrase du livre VI de Martianus Capella, De nuptiis Philologiæ et Mercurii : «cuius [i.e. Romæ] principium Ligures tenent, dehinc quæ ubertate soli sacrata occupauit Etruria regio, tam indigetis Æneæ foedere quam remediorum origine atque ipsius Tagetis exaratione celebrata» (Franciscus Eyssenhardt, Martianus Capella, Lipsiæ : in ædibus B. G. Tevbneri, MDCCCLXVI, p. 213). – Quant a` The´ophraste, BC fait allusion aux premie`res phrases du livre IX, chap. 15. Voir Niebuhr, Römische Geschichte, Berlin : Realschulbuchhandlung, 1811. BC reproduit une ide´e de Niebuhr : «Diese Annalen waren eine Priestergeschichte, wie die indischen Puranen.» Voir Censorinus, De die natali ex recensione et cum annotationibus D. Joannis Sigismundi Gruber, [...], Norimbergi : s.e´d., 1805, chap. XVII, §§ 6–9, pp. 74–76. Censorinus appartient au IIIe sie`cle apre`s J.-C. Voir ci-dessous, p. 350. Le chapitre cite´ parle de la soumission de Faleri sous la domination romaine, dans laquelle un pe´dagogue infide`le joue un roˆle. Il n’y est pas question des preˆtres e´trusques auxquels on aurait exclusivement confie´ l’e´ducation de la jeunesse. OCBC, Œuvres, t. XIX, pp. 124–126.

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nes a. Dans cette religion, comme chez tous les peuples sacerdotaux, le fe´tichisme s’e´tait place´ sous l’astrolatrie b. a

b

PITISCUS, au mot Fontes1. La religion romaine avait conserve´ des restes de cet ancien culte, aux feˆtes du Tibre, dans les mois de juin, d’aouˆt et de de´cembre. (OV., Fast. III et VI2 ; HORAT. III, 133.) Ces pratiques surve´curent a` l’introduction du christianisme, et se perpe´tue`rent jusqu’au temps de The´odose. (THE´ OD., Cod. de Pagan4.) Nous avons parle´ (t. III, p. 8 et 95) des animaux, des pierres, des arbres (Jupiter Fagutal, Jupiter Heˆtre), des lances, et du pivert rendant des oracles. Cybe`le e´tait une pierre (OV., Sat. IV6) ; Vesta, un globe (ib. VI) ; la bonne de´esse une pierre du Mont Aventin. PLINE (Hist. nat., II, 1977) fait mention d’une pierre miraculeuse a` Egnatia : HORACE (Sat. V, 18) s’en

7 Nous ... arbres ] e´bauche de cette phrase v. ci-dessus Note 446 ; loc. cit. ou` nous avons parle´ des animaux ... arbres Ms-notes 8 lances ] lances (Cle´m Alex. cohort. ad gentes, Arnob. VI) Ms-notes Sat. ] Fast. Ms-notes 9 pierre ] roche Ms-notes 9-p. 342.7 Pline ... moque´. ] ajoute´ dans la col. de gauche Ms-notes 1

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Voir Samuel Pitiscus, Lexicon Antiquitatum Romanarum : in quo ritus et antiquitates [...] sacræ et profanæ, publicæ et privatæ [...] exponuntur, Venetiis : ex typographia Balleoniana, MDCCXIX, t. II, pp. 170a–171a. L’article «Fontes» expose ce que l’on sait sur ces sanctuaires : «Nec tantum Romani fontibus, & fluviis divinitatem aliquam assignaverunt ; sed & Græci.» La remarque de BC est difficile a` justifier par les renvois a` Ovide, Fasti, livres III et VI. Le livre III parle des feˆtes du mois de mars, mais ne mentionne pas de feˆte du Tibre ; le livre VI e´voque, a` la date du 7 juin, les «ludi piscatorii» qui se de´roulent sur le champ de Mars (vv. 237–238). La feˆte du Tibre, au mois de de´cembre, est la comme´roration de la fondation du temple consacre´ a` ce fleuve qui se trouvait sur l’ıˆle du Tibre. Elle se de´roulait le 8. Voir K. Latte, Römische Religionsgeschichte, pp. 131–132, avec indication de l’inscription (CIL, I2, p. 336). Nous ignorons la source utilise´e par BC, ce qui rend difficile de bien appre´cier la valeur critique de cette observation. Allusion a` l’ode dans laquelle le poe`te parle de la fontaine Bandusia. Il s’agit du Codex Theodosianus, re´dige´ par une commission de juristes sur ordre de l’empereur The´odose II, dit le Jeune, en 438. Voir Codex Theodosianus cum perpetuis commentariis Jacobi Gothofredi, [...] Editio nova in VI tomos [...], Lipsiæ : sumptibus Maur. Georgii Weidmanni, MDCCXXXVI-MDCCXLIII. BC cite le livre XVI de ce recueil de lois, en particulier le chap. X, «De paganis, sacrificiis, et templis», t. VI, pp. 274–332. Les vingt-cinq lois re`glent la de´fense des pratiques religieuses du polythe´isme et la confiscation des temples et des sanctuaires. Voir la loi du 19 de´cembre 426, p. 331. OCBC, Œuvres, t. XIX, pp. 124–126. Le renvoi a` un texte d’Ovide est faux. Nous supposons qu’il faudrait lire : «Fast.» au lieu de «Sat.». Le livre IV des Fasti raconte l’histoire de la Magna mater (vv. 179–372), mais ne dit pas que Cybe`le e´tait une pierre. Cette version se trouve chez Arnobe, Adversus gentes, livre VII, chap. 49, § 2 (e´d. Amata, p. 709 ; e´d. Bernard Fragu, Paris : Belles Lettres, 2010, p. 71) : «lapis quidam non magnus [...] coloris furvi atque atri [...] quem omnes hodie [...] videmus in signo oris loco positum». Allusion a` un chapitre de l’Histoire naturelle, livre II, § 149, qui parle de pierres miraculeuses tombe´es du ciel, entre autres celle qui est tombe´e pre`s d’Aigos-Potamos (Pline l’Ancien, Histoire naturelle, livre II, texte e´tabli, traduit et commente´ par Jean Beaujeu, Paris : Belles Lettres, 1950, p. 65). Le renvoi est impre´cis. Les Satires ne comprennent que deux livres ; on pourrait comprendre : «I, 5». Dans ce cas-la`, les vers qui conviennent seraient les vers 97–103, qui racontent

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De la Religion, IV

Tous les dogmes, tous les rites, tous les usages caracte´ristiques des cultes soumis aux preˆtres faisaient partie du culte italique. On y retrouve les dieux a` figures monstrueuses, re´sultat de l’esprit sacerdotal, toujours stationnaire. Junon Lanuvienne porte une peau de che`vre et des cornes a ; Janus est fameux par son double visage b ; Herilus, fils de Feronia, la Proserpine des Sabins, et tout a`-la-fois le dieu tute´laire et le roi de Pre´neste, doit a` son

a b

e´tait de´ja moque´. On pre´tend, dit DENYS D’HALICARNASSE, qu’a` Matie`ne, ancienne ville des Aborige`nes, appele´e aussi Tiore ou Matie`re, il y avait un fort ancien oracle de Mars. Il e´tait a` peu pre`s comme celui de Dodone, excepte´ qu’a` Dodone c’e´tait un pigeon qui pre´disait l’avenir du haut d’un cheˆne sacre´ ; au lieu que chez les Aborige`nes, un autre oiseau envoye´ des dieux prophe´tisait du haut d’une colonne de bois. (Liv. I, 111.) Si nos lecteurs se souviennent de ce que nous avons dit (t. II, p. 3342) sur la combinaison du fe´tichisme et du pouvoir sacerdotal a` Dodone, ils sentiront que nos observations s’appliquent e´galement a` l’oracle italique, dont parle ici DENYS D’HALICARNASSE. HIRT., Mythol. Bilderb., I, 22 ; CICER., de Nat. Deor., I, 29 ; CREUTZ., II, 3853. OVIDE lui fait dire pour cette raison qu’il est diffe´rent de tous les dieux grecs : Quem tamen esse deum te dicam, Jane biformis ? Nam tibi par nullum Græcia numen habet. FAST. I4.

4 Junon ... cornes ; ] ajoute´ dans la col. de gauche, y compris la note Junon Lanuvienne, a` Lanuvium en Italie, avec une peau de che`vre & des cornes. Ms-texte 5–6 fils ... tout ] ajoute´ dans la col. de gauche Ms-texte

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que dans la ville de Gnatia [Egnatia], les sacrifices de´pose´s sur les autels s’enflamment d’eux-meˆmes («dum flamma sine tura liquescere limine sacro»). Il est bien dit que les visiteurs (Horace et ses compagnons) se moquent («dedit risusque iocosque»), mais retenons qu’il n’est pas question de pierres miraculeuses. Il faut lire : «I, 14, 5». BC paraphrase le texte de Denys d’Halicarnasse qui parle de cet oracle, de la colombe prophe´tique de Dodone et du pivert (picus) de Matiena des Aborige`nes (Denys d’Halicarnasse, Antiquite´s romaines, t. I, Introduction ge´ne´rale et Livre I, texte e´tabli et traduit par Vale´rie Fromentin, Paris : Belles Lettres, 1998, p. 96). Dans la note ajoute´e a` ce passage (pp. 230–231), on lit : «En ce qui concerne la the`se de l’origine helle´nique de l’oracle de Tiora Matiena, elle est entie`rement fausse : le culte du pivert, toujours lie´ a` celui du dieu Mars, est une donne´e italique, atteste´ chez les Osco-Ombriens et chez les Latins [...] et il ne doit rien a` la Gre`ce.» OCBC, Œuvres, t. XVIII, pp. 228–229. Cette note paraphrase assez fide`lement, en utilisant l’entre´e no 367 des Notes de lecture (Co 3293, dossier Creuzer), un passage qu’on trouve chez Creuzer, Symbolik, t. II, p. 385. Creuzer cite Aloys Ludwig Hirt, Bilderbuch für Mythologie, Archäologie und Kunst, Berlin : Sander, 1805–1806, ainsi que le passage chez Cice´ron, De natura deorum, livre I, chap. 29, qui n’est pas consacre´ a` la de´esse Junon mais parle des doutes de certains philosophes quant a` l’existence des dieux. BC aurait pu citer le chap. 82 du meˆme livre, qui mentionne la Junon Lanuvienne. BC cite les vers 89–90 du premier livre des Fasti qui ouvrent le passage sur Janus.

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triple corps l’honneur d’eˆtre chante´ par Virgile a. Tage`s, l’auteur des livres ache´rontiques, est un dieu nain b, comme le Vulcain de Memphis, qu’He´rodote compare aux Cabires c. Les Pe´nates de Lavinium sont de petits caduce´es d ; et ces dieux re´unissent aux formes sacerdotales les autres qualite´s caracte´ristiques des divinite´s que les preˆtres re´ve`lent. Tage`s, ne´ de la terre encore vierge, e´tonne les peuples par sa sagesse, apprend a` l’homme a` se relever de la chute qui l’a de´grade´, lui enseigne les sacrifices sanglants qui le rapprochent de la nature divine, et les purifications progressives qui le placent au rang des he´ros e. a b c d e

Æne´id, VIII, 564, et SERV. ad eund. loc1. SERV. ad. Æneid., I, 6 ; AMM. MARCELL., HE´ RODOTE, III, 373. Time´e ap. DEN. D’HAL., I, 154. ARNOB. adv. Gent., II, 625.

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1–2 l’auteur ... ache´rontiques ] ajoute´ dans la col. de gauche Ms-texte 2–3 comme ... Cabires ] ajoute´ dans la col. de gauche Ms-texte 3–4 Les Pe´nates ... caduce´es ; ] ajoute´ dans la col. de gauche, y compris la note Les Pe´nates de Lavinium e´toient de petits caduce´es de fer ou d’airain Ms-texte 1

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Allusion a` ce passage : «et regem hac Herulum dextra sub Tartara misi, nascenti cui tris animas Feronia mater – horrendum dictu – dederat». Servius, dans son commentaire, parle des trois aˆmes pour e´voquer un homme parfait (p. 490). Le renvoi a` Servius ne peut eˆtre exact. Le commentaire a` l’E´ne´ide, I, 6 ne parle pas de Tage`s. Il est mentionne´ une seule fois dans les commentaires de Servius (ad E´ne´ide, II, 781) sans dire de lui qu’il e´tait nain. – Ammien Marcellin dit ceci : «C’est un enseignement dont le maıˆtre, selon une tradition le´gendaire, est un certain Tage`s que l’on vit en pays e´trusque surgir brusquement de la terre» (livre XXI, chap. 1, 10). BC cite donc, outre l’ouvrage de Cice´ron, De divinatione, et celui d’Ovide, Les me´tamorphoses (livre XV, v. 553), un troisie`me te´moignage pour cette le´gende. – Quant a` Isidore, il faut lire «VIII, 9». Voir Isidori Hispalensis episcopi Etymologiarum sive originum libri XX recognovit [...] W. M. Lindsay (Oxonii : e typographeo Clarendiano, 1911), t. I, VIII, IX, 34–35 (e´dition non pagine´e) : «Aruspicinæ artem primus Etruscis tradidisse dicitur quidam Tages. Hic ex oris aruspicinam dictavit, et postea non apparuit. Nam dicitur fabulose, arante quodam rustico, subito hunc ex glebis exiluisse et aruspicinam dictasse, qua die et mortuus est. Quos libros Romani ex Tusca lingua in propriam mutaverunt.» BC ne reproduit pas correctement le contenu du chapitre cite´. Mais il est exact que l’idole de Vulcain repre´sente ce dieu comme un nain ; les Cabires de Memphis sont conside´re´s comme ses enfants. Il faut lire : «I, 67». BC vise la phrase suivante : «Au sujet de leur [i.e. des Pe´nates] aspect exte´rieur et de leur forme, l’historien Time´e de´clare que les objets sacre´s qui se trouvent dans la chambre secre`te de Lavinium sont des caduce´es en fer et en bronze et de la ce´ramique troyenne, et qu’il a obtenu personnellement ces informations des indige`nes» (e´d. Fromentin, p. 177). Une note de l’e´diteur renvoie a` l’e´tude d’Annie Dubordieu, Les origines et le de´veloppement du culte des Pe´nates a` Rome, Rome : E´cole franc¸aise de Rome, 1989. BC vise cette phrase : «[ne vous laissez pas surprendre] ni par l’E´trurie lorsqu’elle promet dans ses livres sur l’Ache´ron que si l’on offre du sang d’animaux pre´cis a` des divinite´s pre´cises, les aˆmes deviennent divines et sont soustraites aux lois de la mortalite´» (e´d. Armisen-Marchetti, p. 64).

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De la Religion, IV

Les clefs dont Janus a est de´positaire, le vaisseau sur lequel il est debout,

302 a

302

D’apre`s ce que nous avons dit des significations multiplie´es de chaque symbole sacerdotal, on ne s’e´tonnera pas de la foule des attributs de Janus. C’e´tait d’abord un dieu tout astronomique, qu’on adorait au commencement de l’anne´e et aux solstices, dans un temple a` quatre faces et a` douze autels, en l’invoquant comme l’ami de Saturne ou du temps, et l’e´poux de la lune. (BAILLY, Astron. anc. I, 991.) Il e´tait quelquefois pris pour le temps luimeˆme. (FRONTICUS ap. Lyd., 57–582.) Plusieurs de ses attributs lui sont communs avec les divinite´s de la Perse et de l’E´gypte. On le repre´sentait tenant dans sa main gauche une clef. (Clavemque sinistraˆ, OVID., Fast. I3.) Or, Mithras ou le soleil paraıˆt avec deux clefs dans l’Antiquite´ explique´e de Montfaucon (I, 24), et SPANHEIM observe que chez presque tous les peuples, une ou plusieurs clefs caracte´risent les divinite´s astronomiques. (SPANH. Observ. ad Callim., 591 ; LYD. de Mens., p. 55.) On retrouve Janus sur plusieurs me´dailles, avec le modius de Se´rapis (VAILLANT, Familles romaines, passim5), parce qu’il conduisait, comme Se´rapis, les ames des morts aux enfers. (LYD. ib.) Des auteurs anciens

1-p. 345.1 Les clefs ... garde ; ] Les clefs dont ces trois mots dans la col. de gauche Janus 〈aux deux faces est un Dieu tour a` tour me´diateur & symbolique. ses clefs qui ouvrent l’anne´e〉 est de´positaire, ces deux mots dans l’interl. le vaisseau ... debout, le syntagme les portes ... garde dans la col. de gauche Ms-texte 5 ou ] & Ms-notes 6–7 Il e´tait ... 58.) ] ajoute´ dans la col. de gauche Ms-notes 12 sur ] 〈avec〉 sur Ms-notes 13 Vaillant ... passim ] ajoute´ dans la col. de gauche Ms-notes 1

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3 4

5

Il faut lire «IV, 99». BC fait allusion aux re´flexions de Bailly dans son Histoire de l’astronomie ancienne (livre IV, «Des premiers tems apre`s le De´luge, & de l’astronomie des Indiens & des Chinois») sur l’origine septentrionale du dieu Janus, qu’on repre´sentait, selon Macrobe (livre I, chap. 9, § 10), tenant dans sa main droite les chiffres 300, dans la gauche les chiffres 65. «Ces deux nombres repre´sentent ne´cessairement les jours de l’anne´e», dit Bailly, qui voit dans la distribution curieuse des nombres une preuve de l’origine septentrionale de ce dieu, puisque «sous le paralle`le de 71o le soleil est 65 jours sans paraıˆtre» (p. 99). BC vise une phrase du chap. «Januarius» dans Lydus, De mensibus : «Frontejus autem in libro De signis præsidem eum universi tempi temporis esse arbitratur, ideoque duodecim aras habere ejus templum, secundum mensium numerum» (Ιωαννου Λαυρεντιου ϕιλαδελϕεωσ Λυδου Περι Μηνων. Joannis Laurentii philadelpheni Lydi De Mensibus quæ exstant excerpta [...] recognovit [...] Guilielmus Roether, Lipsiæ et Darmstadii : Typis Guilielmi Leskii, 1827, p. 147). Fasti, livre I, v. 99. Voir Montfaucon, L’antiquite´ explique´e, premie`re partie, t. II, p. 371. On y trouve la phrase : «L’un des deux Mithras tient une clef a` chaque main, peut-eˆtre parce qu’il e´toit un voleur & un brigant, comme l’appelle Commodien cite´ ci-dessus. Ces clefs pourroient signifier la couˆtume qu’il avoit d’entrer dans des lieux ferme´s pour faire ces vols. D’autres diront peuteˆtre qu’elles marquent que le soleil a la clef de toutes choses, & pe´ne`tre partout par la force, ou de ses raisons, ou de ses influences.» Le premier tome du Supple´ment au livre de l’Antiquite´ explique´e et repre´sente´e en figures (Paris : Giffart, Nyon, Briasson, [...], M. DCC. LVII), pp. 226–228, ajoute d’autres de´tails sur les attributs de Mithras, sans importance pour l’argumentation de BC. ` l’endroit indique´ de l’ouvrage de Spanheim, Ezechielis Spamhemii in Callimachi Hymnos A observationes (Ultrajecti : apud Franciscum Halman, Guilielmum van der Water, MDCXCVII), il est bien question de clefs, symboles de protection, de sorte qu’on dit de Minerve «clavigera etiam vocatur». La meˆme ide´e est expose´e pp. 694–695. Mais nulle part il n’est dit que les clefs seraient des attributs de dieux astronomiques. – Lydus, De men-

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Livre XI, chapitre VII – De´monstration des assertions ci-dessus 303

345

les portes de la nuit et du jour, confie´es a` sa garde ; Vesta, son e´pouse, qui est tantoˆt la lune et tantoˆt le feu ; le privile´ge en vertu duquel ainsi que (suite de la note de BC de la page pre´ce´dente) ne le distinguent point du Mercure de l’E´gypte, et Justin pre´tend que son culte avait passe´ d’Orient en E´trurie. (Hist. LXIII1.) On voit sur des pie`ces de monnaie romaines, d’un coˆte´ sa double teˆte, de l’autre une proue : Navalis in ære Altera siguata est, altera forma biceps. OV., Fast. I2. ´ Or, les Egyptiens, dit Porphyre (EUSEB., Pr. ev. III, 33), dans leurs images du soleil, le plac¸aient debout sur un vaisseau. Fabius Pictor donne pour e´pouse a` Janus Vesta ou le feu, au lieu de la lune. C’e´tait une combinaison de l’astrolatrie et du culte des e´le´ments. VIRGILE, qui voulait tout rapporter a` son he´ros, pre´tend que le feu de Vesta avait e´te´ allume´ par E´ne´e, sur le foyer du temple d’Ilion, et conserve´ soigneusement durant la traverse´e. Il le de´signe sous le nom de feu troyen (Æn. II4) : mais VIRGILE e´crivant dans un temps d’incre´dulite´ religieuse, n’est rien moins qu’un interpre`te fide`le des croyances anciennes, ni meˆme de celles qui survivaient. Janus est de plus le monde (SERV. ad. Æn. VI, 610 ; VARR. ap. Lyd. IV, 25), les saisons (LUCTAT. ap. Lyd. ib.), l’anne´e, et alors ses deux faces s’expliquent par le coucher et le lever du soleil (SERV. ib. 607 ; AUG. de Civ. Dei., VII ;

303

2-p. 346.2 feu ; ... sexes ; ] feu, 〈les portes de la nuit & du jour confe´re´es a` sa garde〉 le privile`ge ... sexes la corr. e´crite dans la col. de gauche Ms-texte

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sibus : «claves dextra ferentem» (e´d. Roether, p. 145. – Le renvoi a` Jean Vaillant cite Nummi antiqui familiarum romanarum perpetuis interpretationibus illustrati, per J. Vaillant Bellovacum, D.M. & S. Ducis Cenom. Antiquarium, Amstelædami : Apud G. Gallet, M. DCCIII, 2 vol. Cet ouvrage contient 152 tables avec, dans l’ordre alphabe´tique des familles romaines, les monnaies qu’on connaissait, suivies de descriptions de´taille´es des pie`ces. On y trouve une cinquantaine de pie`ces correspondant a` ce que dit BC. BC cite un livre LXIII de l’ouvrage de Justin qui n’existe pas. Il faut probablement lire «XLIII», livre qui parle de la premie`re histoire de Rome, sans pourtant mentionner le dieu Janus. Fasti, livre I, vv. 239–240. Euse`be cite Porphyre, L’antre des nymphes : «Ils [i.e. les E´gyptiens] symbolisent He´lios par un homme monte´ sur une barque, et la barque repose sur un crocodile. La barque de´signe le mouvement de l’e´le´ment humide, le crocodile l’eau potable, ou` se meut le soleil. On indiquait ainsi que le soleil accomplit sa re´volution dans l’air humide et doux» (La pre´paration e´vange´lique, livre III, chap. 11 ; e´d. des Places, t. II, p. 229 ; le renvoi de BC est faux). Voir Virgile, E´ne´ide, livre II, vv. 289–297. – Quant au renvoi a` Servius, il faut lire «VII, 610». Une des observations qu’on trouve est «Alii Ianum mundum accipiunt, cuius caulæ ideo in pace clausæ sunt, quod mundus undique clausus est, belli tempore aperiuntur, ad auxilium petendum, ut pateant. Nam quasi mundo ei duas facies dederunt, Orientis et Occidentis.» Le renvoi quelques lignes plus loin doit e´galement eˆtre corrige´ : «VII, 607». La remarque de BC n’est pas justifie´e par ce qui est dit a` cet endroit, mais par la dernie`re phrase cite´e ci-dessus. BC pense a` cette phrase : «Varro autem quarto decimo Rerum divinarum eum apud Tuscos

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346

304

De la Religion, IV

quelques autres divinite´s d’E´trurie, il jouit des faculte´s des deux sexes a ; son hymen incestueux b, sa mort expiatrice c, forment le me´lange de science,

a

b c

(suite de la note de BC de la page pre´ce´dente) HEYNE, Excurs. V. ad. Æn. VII1 ; CICER. de nat. Deor., II, 272), le principe de tout (Varr. ap. CICER. de Nat. Deor., II, 16), le chaos, et c’est lorsque les e´le´ments se sont se´pare´s qu’il a pris une forme. (OV., Fast., FEST. vo Chaos3.) Il est enfin un personnage historique, un roi de l’ancien Latium (ARNOB. adv. Gent., III, 1474), auquel presque tous les peuples latins rapportaient leur origine (PLUTARCH., Numa, 195), qui avait enseigne´ aux hommes les ce´re´monies de la religion (LYD. de Mens. 576), et engendre´ deux fils, dont l’un, tue´ sur les bords du Tibre, donna son nom a` ce fleuve, tradition qui peut avoir e´te´ transporte´e dans la le´gende de Romulus et de Re´mus. Janus, en sa qualite´ d’hermaphrodite, e´tait simultane´ment le soleil et la lune. (MACROB. Saturn., I, 7.) Les E´trusques avaient encore leur Deus Venus, et leur Jupiter me`re des dieux. (CREUTZ., II, 430–4317.) V. t. III, p. 240–2418. Suivant une tradition, Janus fut tue´ par des paysans, auxquels il avait enseigne´ l’art de

6 Fast. ] Fast.

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103. Ms-notes

7–8 Arnob. ... 19) ] ajoute´ dans la col. de gauche Ms-notes

coelum dici autor est et præsidem omnis actionis» (e´d. Roether, p. 147). Suit encore le renvoi a` un autre passage : «Lutatius vero Solem, inde quod in utraque porta imperet, orientis pariter atque occidentis» (e´d. Roether, p. 149). BC cite de l’e´dition de l’E´ne´ide de Virgile par Christian Gottlob Heyne (Lipsiæ : Fritsch, 1803) le chapitre intitule´ «Excursus V, Historiæ veteris mythicæ Italiæ capita potiora de Saturno, Iano, Pico, Fauno, Latino», ou` Heyne re´sume ce que l’on pouvait savoir sur le dieu Janus. Dans l’e´d. de 1833 (Lipsiæ : Sumptibus Librariæ Hahnianæ), t. III, pp. 193–195. Les deux renvois a` Cice´ron, De natura deorum, posent proble`me. Janus n’est mentionne´ qu’une seule fois dans cet ouvrage, livre II (c’est Balbus qui parle), chap. 67 : «principem in sacrificando Ianum esse voluerunt, quod ab eundo nomen est ductum, ex quo tranitiones, perviæ, iani foresque in liminibus profanorum ædium ianuæ nominantur». La re´flexion e´tymologique (Ianus de´rive´ du verbe «ire», qui a fait nommer les portiques et les portes des maisons particulie`res «ianus» et «ianua») ne s’accorde pas bien avec le raisonnement de BC. – Le second renvoi est faux, ce chapitre e´tant consacre´ a` une re´flexion de Chrysippe sur l’existence d’un eˆtre divin. Quant a` Ovide, il faut corriger le titre cite´. BC pense aux vers des Me´tamorphoses : «Unus erat toto naturæ vultus in orbe, Quem dixere chaos» (I, 6–7). L’article de Sex. Pompei Festi et Mar. Verrii Flacci De Verborum significatione (p. 76) confirme cette fable. Voir aussi Sexti Pompei Festi de verborum significatu, e´didit Wallace M. Lindsay, Lipsiæ : in ædibus B. G. Teubneri, MCMIII, p. 45. BC pense a` Arnobe, Disputationum adversus gentes libri VII, livre III, chap. XXIX, 3 (e´d. Amata, p. 409 ; e´d. Orellius, p. 126 ; e´d. Jacqueline Champeaux, Paris : Belles Lettres, 2007,

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Livre XI, chapitre VII – De´monstration des assertions ci-dessus

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d’astronomie et de mysticisme habituel dans les religions soumises aux preˆtres. La foule de ces dieux divers et e´nigmatiques reconnaıˆt un chef a, dont la supre´matie se confond souvent avec la destine´e, et se perd toujours dans le

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a

cultiver la vigne, et qui s’e´taient enivre´s. (PLUT., Quæst. rom1.) Cette tradition a quelques rapports avec une fable grecque dont nous avons fait mention ailleurs2 : mais cette fable ne produisit en Gre`ce qu’un usage fe´tichiste. En E´trurie, le meˆme re´cit servit d’enveloppe a` une doctrine myste´rieuse, admise dans toutes les religions sacerdotales, la doctrine de l’expiation de l’homme par la mort d’un dieu. Voy. le chapitre pre´ce´dent. Le Jupiter e´trusque, nomme´ Tina par les preˆtres, occupait un rang a` part de toutes les autres divinite´s. (CREUTZ., II, 4403.)

6 ailleurs : ] ailleurs. Tome. p. renvoi incomplet dans la col. de gauche Ms-notes 8 admise ] qu’on a vu admise Ms-notes 9 Voy. ... pre´ce´dent. ] manque Ms-notes 11 Creutz. ] 〈illis.〉 Creutz. Ms-notes

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8 1 2 3

(suite des notes de la page pre´ce´dente) p. 22). «Quod si accipiemus ut verum sit, sequitur, ut intelligi debeat nullum unquam fuisse Janum, quem ferunt Coelo atque Hecate procreatum in Italia regnasse primum, Janiculi oppidi conditorem, patrem Fonti, Vulturni generem, Juturnæ maritum» («Mais si nous admettons que c’est la ve´rite´, il s’ensuit qu’on doit comprendre que Janus n’a jamais existe´, lui qui, dit-on, ne´ du Ciel et d’He´cate, a e´te´ le premier a` re´gner en Italie, le fondateur de la place forte du Janicule, le pe`re de Fontus, le gendre de Vulturne, le mari de Juturne»). Sur la ge´ne´alogie complique´e de Janus, on consultera, dans l’e´d. Champeaux, les notes 8 et 9, pp. 122–124. BC cite la fin du chap. XIX de Plutarque, Vies paralle`les, «Lycurgue et Numa». Le contexte est une re´flexion de Plutarque sur les noms des mois chez les Romains, qui faisaient commencer l’anne´e par un mois portant le nom d’un «dieu ou d’un roi» qui aimait la paix. Renvoi a` cette phrase de Lydus : «Alius autem Janum heroe¨m fuisse dicit, et primum confecisse lucos atque honores diis obtulisse, ob idque mentionem ejus in sacris fieri solitam» (e´d. Roether, p. 149). Le renvoi a` Macrobe, Saturnalia, est probablement une erreur. Nulle part ou` il est question de Janus dans cet ouvrage Macrobe ne parle de la double nature de Janus ni du fait qu’il soit a` la fois la lune et le soleil. – BC re´sume en outre une re´flexion de Creuzer, Symbolik, qui pourtant ne parle pas uniquement des E´trusques mais des dieux de l’Italie ancienne. OCBC, Œuvres, t. XIX, pp. 259–261. BC cite Plutarque, Quæstiones romanæ. Ce texte mentionne Ianus a` trois reprises (268c ; 269a ; 274c) mais ne parle pas de la tradition le´gendaire e´voque´e par BC. Renvoi non e´lucide´. La note de BC reproduit une ide´e qu’on trouve chez Creuzer a` la page indique´e.

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De la Religion, IV

panthe´isme a. Cette foule s’accroıˆt par la de´monologie b ; les di vinite´s mala

b

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La doctrine me´taphysique de Tage`s conduisait, comme toutes les doctrines sacerdotales, a` la re´union de toutes les divinite´s, c’est-a`-dire de toutes les forces de la nature, en une seule divinite´ ou puissance productrice, conservatrice et destructive. (PLACID. LUCTAT. ad Stat. Theb., IV, 5161.) La de´monologie des E´trusques n’e´tait pas moins artistement travaille´e que celle des E´gyptiens, des Indiens ou des Perses. Leur Jupiter avait un conseil de douze ge´nies, sujets a` naıˆtre et a` mourir. (VARR. ap. Arn. Adv. Gent., III2.) Leurs Pe´nates e´taient divise´s en quatre classes ; ceux de la dernie`re, maˆles et femelles, prote´geaient les hommes dans toutes les occasions, et les femmes a` leur mariage, durant leur grossesse et lors de leurs couches. (CREUTZ., II, 441, 4493.) Les ge´nies fe´minins s’appele`rent d’abord Junons : mais la mythologie grecque ayant donne´ Junon pour femme a` Jupiter, cette de´nomination, applique´e a` des eˆtres secondaires, tomba en de´sue´tude. (PLIN., Hist. nat., II, 74 ; HEYNE, de Vestig. domest. relig. in art. Etrusc. oper. Novi Comment., VI5.) Les E´trusques croyaient de plus

4 Placid. Luctat. ] Placidius Luctatius Ms-notes 1

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III.

]

III.

Creutz. II. 429 Ms-notes

BC cite, pour appuyer son opinion, la longue note qu’on trouve chez Lactantius Placidus (environ entre la fin du IVe et le de´but du Ve sie`cle) dans son commentaire de la The´baide de Stace (Lactantii Placidi in Statii Thebaida commentum [...] recensuit Robertus Dale Sweeney, Stuttgardiæ et Lipsiæ : in ædibus B. C. Teubneri, MCMXCVII, t. I, pp. 293–295). Les re´flexions the´ologiques de Lactantius concernent les vers 516–517 du livre IV de la The´baı¨de : «Et triplicis mundi summum quem scire nefastum Illum – sed taceo» («je connais le souverain du triple monde dont vous de´fendez de prononcer le nom. C’est ... mais je me tais»). Stace, The´baı¨de, livres I-IV, texte e´tabli et traduit par Roger Lesueur, Paris : Belles Lettres, 1990, p. 102. Voir Arnobe : «Idem rursus in libro sexto exponit et decimo, disciplinas Ethruscas sequens, genera esse Penatium quatuor, et esse Jovis ex his alios, alios Neptuni, inferiorum tertios, mortalium hominum quartos, inexplicabile nescio quid dicens» (liber III, cap. XL, 1. e´d. Amata, p. 423 ; ed. Orellius, Lipsiæ : Sumtibus Frid. Christ. Guil. Vogelii, 1816, p. 132 ; e´d. Champeaux, p. 29 ; voir aussi la note 3 a` ce passage, pp. 160–161). Creuzer cite ce texte dans son ouvrage (Symbolik, t. II, p. 441). Il faut peut-eˆtre comprendre «441–449». Creuzer analyse avec beaucoup d’attention les diffe´rents aspects de la de´monologie e´trusque, et BC accepte cette analyse sans reproduire les de´tails. BC pense probablement a` la phrase qu’on lit chez Pline, Histoire naturelle, livre II, § 16, ou` l’on trouve sur les dieux et la population nombreuse des cieux la remarque «les individus aussi cre´ent d’eux-meˆmes un nombre e´gal de dieux en adoptant pour leur propre usage des Junons et des Ge´nies» (e´d. Beaujeu, p. 13). BC renvoie a` l’e´tude de Christian Gottlob Heyne, «De vestigiis domesticæ religionis patriique ritus in artis etruscæ operibus», Novi Commentarii Societatis Regiæ Scientiarum Gottingensis, t. VI, Gottingæ : apud Joann. Christian. Dieterich, 1776, Commentationes historicæ et philologicæ, pp. 35–58. Il ne pense pas a` un passage pre´cis, mais cite cette e´tude comme une monographie utile sur les œuvres d’art e´trusques qui repre´sentent des divinite´s ve´ne´re´es dans les demeures.

5

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Livre XI, chapitre VII – De´monstration des assertions ci-dessus

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faisantes y figurent a ; elles enle`vent a` l’homme son innocence, elles le fle´trissent d’inde´le´biles souillures, elles le plongent dans des abıˆmes affreux et sans nombre, d’ou` ses vains efforts ne sauraient le sortir, et qui ne s’ouvrent pour sa de´livrance que grace a` l’intervention d’un dieu me´diateur b, a`

a

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b

qu’a` chaque dieu e´tait attache´ un ge´nie, qui lui e´tait subordonne´ et lui rendait des services domestiques, pre´sidait a` sa toilette, le rafraıˆchissait avec un e´ventail, etc. (HEYN., Comment., II, 451.) Le Pluton de l’Italie antique, nomme´ Juvie ou le destructeur, le Jupiter vejovis ou jeune et me´chant (CREUTZ., II, 4852), le Mantus des Sabins (SERV., ad. Æn., X, 1983), le Februus e´trusque (ANYS., Ap. Lyd., p. 684), ont plusieurs traits de ressemblance avec le Typhon d’E´gypte. Mantus e´tait, dans la doctrine sacerdotale, une personnification de la mort, et parla` meˆme quelquefois, au lieu de Janus, il conduisait les ames de la terre aux enfers et des enfers au ciel. Il devenait alors un dieu bienfaisant. Les divinite´s qui sont malfaisantes dans la religion publique prennent fre´quemment dans la doctrine secre`te un sens alle´gorique qui modifie leur caracte`re. Ainsi le dieu de la destruction, me´chant par nature dans l’opinion populaire, ne l’est que par ne´cessite´ dans le syste`me cosmogonique, et souvent meˆme il devient un eˆtre bienfaisant, en ce sens qu’il pre´side aux renaissances. Mais le peuple s’inquie`te peu de ces subtilite´s, et quand les preˆtres lui parlent du Diable, il ne s’attache qu’au sens de leurs paroles. Janus est tour-a`-tour le dieu supreˆme, a` la place de Tina, et un dieu me´diateur, qui porte aux divinite´s supe´rieures les prie`res des hommes, et rapporte a` ceux-ci les faveurs des premiers.

3-p. 350.2 et qui ... acharne´es ] ajoute´ dans la col. de gauche Ms-texte 11 d’E´gypte. ] 12 Janus, ] Janus ou d’Herme`s d’Egypte (Creutz. Symb. II. 478. 1e`re ed. allem.) Ms-notes Ms-notes 13 bienfaisant. ] bienfaisant. 〈Il arrivoit〉 Ms-notes 19 sens ] sens litte´ral Msnotes

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Il faut lire «VI, 45–46», car BC renvoie a` Heyne, «Commentatio de vestigiis domesticæ religionis patriique ritus in artis etruscæ». Aux pages indique´es, Heyne parle de ces ge´nies associe´s aux divinite´s e´trusques dont les fonctions e´taient de leur rendre des services domestiques ou d’agir comme une garde d’honneur («seu ut ministerium deo præstaret, seu honoris causæ» (p. 46)). BC renvoie a` Creuzer, Symbolik, t. II, p. 485, ou` il est question du nom de Jupiter Vejovis, de Jupiter jeune et me´chant, de Jupiter Axur ou Anxur, noms qui signalent une divinite´ pe´riodiquement me´chante ou en cole`re. Servius, ad Æn. X, 198, remarque : «Mantuam autem ideo nominatam, quod Etrusca lingua Mantum Ditem patrem appellant», et quelques lignes plus haut l’origine de Oenus ou Ocnus, le fondateur de Mantoue, est explique´e : «Hic Mantuam dicitur condidisse, quam a matris nomine appellavit. Nam fuit filius Tyberis et Mantus Tiresiæ Thebani vatis filiæ, quæ post patris interitum ad Italiam venit.» BC pense a` cette remarque qu’on trouve au de´but du chap. «Febrarius» chez Lydus : «Anysius autem in libro De mensibus Februum inferum esse Thuscorum lingua ait, et coli a Lupercis pro fructuum incremento» (e´d. Roether, pp. 171–173).

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De la Religion, IV

la fois triple et unique, car l’E´trurie sacerdotale a aussi sa trinite´ a. Ces meˆmes puissances acharne´es menacent notre globe, et les prophe`tes toscans annoncent sans cesse la destruction du monde b. A ces dogmes empreints des couleurs fune`bres et des calculs raffine´s du sacerdoce, se joignent les rites cruels ou obsce`nes que nous avons rencontre´s chez tous les peuples qui ont subi son joug. Ici le sang des hommes inonde les autels c : plus a b

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c

V. les vers de´ja cite´s de Martial, t. II, p. 4141. Les dix aˆges (γε νη) des E´trusques ressemblaient aux Yogs des Indiens, bien qu’ils fussent plus courts. Les huit premiers ne composaient en tout que neuf sie`cles. La fin de chaque sie`cle e´tait marque´e par des signes prodigieux. (VARR., ap. Cens. de Die nat., 17 ; PLUTARCH. in Sulla ; CREUTZ., II, 4362.) Cette opinion s’e´tait perpe´tue´e a` Rome, puisque Servius (ad VIRG., Ecl. IX, 47) nous rapporte une pre´diction du devin Volcatius, qui, au milieu des jeux que ce´le´brait Ce´sar, de´clara que le dixie`me aˆge venait de commencer. Les re´volutions physiques de l’Italie, la se´paration de la Sicile d’avec le continent, p. e. (JUSTIN, ´ trurie le moyen d’appuyer, comme les brames de IV, 13), avaient fourni aux preˆtres d’E Mahabalipour, leurs pre´dictions lugubres sur des faits historiques4. L’Italie entie`re, avant l’arrive´e des colonies grecques, offrait des sacrifices humains. Lactance raconte que Faune immolait des hommes a` Saturne (de Fals. relig., I, 225), et Plu-

8 Les dix ] e´bauche d’un ajout dans la col. de gauche qui sera utilise´e a` la fin Plutarque, vie de Sylla, parle des dix ages des Etrusques. v. aussi Varron, ap. Censorin. de Die natali. Creutz. II. 436. Re´volutions physiques de l’ancienne Italie. Se´paration de la Sicile d’avec le continent. Justin. IV. 1. la suite dans la col. de droite Les dix Ms-notes 1 2

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OCBC, Œuvres, t. XVIII, p. 267, n. b. BC cite des vers sur l’Herme`s des Romains, en particulier celui-ci : «Hermes omnia solus et ter unus» (Martial, livre V, ep. 25). BC reproduit ici les re´flexions de Creuzer, y compris les auteurs que celui-ci indique dans son texte : «Varro, ap. Censorinum de die natal., 17 ; Plutarch, in Sulla [p. 456, A. Francof] ; Serviuus ad Virgil. Eclog. IX, 47». Sur Varron chez Censorinus voir ci-dessus, p. 340, n. 3. – Servius dit ceci : «Vulcatius aruspex in contione dixit cometen esse, qui significaret exitum novi sæculi, et ingressum decimi, sed quod invitis Diis secreta rerum pronunciaret, statim se esse moriturum, et nondum finita oratione in ipsa contione concidit.» BC cite le premier chapitre du livre IV de Justin, Historiæ philippicæ, consacre´ a` la nature de l’ıˆle de Sicile : «Siciliæ situs, & soli natura. Ætnæ montis, ac Scyllæ & Charybdis miracula». BC revient a` l’e´tude de William Chambers, «Some Account of the Sculptures and Ruins at Mavalipuram, a Place a few M iles North of Sadras, and known to Seamen by the Name of the Seven Pagodas», Asiatick Researches, t. I, pp. 145–170. Il l’avait de´ja` utilise´e pour parler des aˆges (des yogs) de la mythologie indienne ou de la disparition de la ville des sept pagodes (ci-dessus, p. 227, n. 1), fonde´e par le prince Male´cheren et de´truite, sur l’ordre des dieux, par une inondation gigantesque. L’ide´e de rapprocher les traditions le´gendaires de l’Inde a` celles de l’Antiquite´ europe´enne se trouve aussi chez Chambers. Tout le chap. XXII est consacre´ a` Faunus. On y trouve la phrase : «Faunus in Latio qui et Saturno avo nefaria sacra constituit» (I, 22, 9).

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Livre XI, chapitre VII – De´monstration des assertions ci-dessus 308/309

loin des

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lois se´ve`res proscrivent le plaisir a, tandis que des rites licen-

tarque ajoute qu’on lui sacrifiait tous les e´trangers. (Parallei1.) On voit dans DENYS 52) les dieux des Pe´lages d’E´trurie, qui demandent ces victimes (v. aussi le Scholiaste de Pindare, PYTH., II3), et ils en obtiennent. Non loin de Rome, dans la foreˆt d’Aricie, le pontife lui-meˆme pe´rissait quelquefois. (LUCAN., III, 86 ; VI, 744 : OV., Met., XI, 331 ; Fast., III, 271–2725 ; SERV., ad Æn., II, 1166.) On e´gorgeait des enfants devant Larunda, la me`re des Lares. (MACROB., Sat., I, 77.) On bruˆlait des hommes en l’honneur de Vulcain (FESTUS8), on sacrifiait des filles a` la Junon de Fale´ries (CREUTZ., II, 471–4729) ; trois cents 308 sol dats romains furent immole´s par les habitants de Tarquinies, dans le quatrie`me sie`cle de Rome. (TIT.-LIV. V, 1510.) Les E´trusques arrosaient de sang le simulacre de Jupiter Latialis. (LACTANT., I, 21 ; TERTULL., Contr. Gnostic., c. 711.) Ennius atteste cette pratique dans un D’HALICARNASSE (I,

5 quelquefois ] souvent Ms-notes 1

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Le renvoi a` Plutarque, Parallela græca et romana, peut viser trois passages (307F–308A, 311C et 315C). Dans le premier, Pausanias e´voque Saturne et les quatre fils qu’il avait eus avec la fille d’un laboureur appele´e Eutoria et l’art de cultiver le vin. Dans le second, Plutarque raconte l’histoire de Calpurnius Crassus et de Bysatia. Dans le troisie`me, il est question de Faunus qui sacrifiait a` Mercure tous les e´trangers. BC e´voque cette le´gende encore ci-dessous, p. 369. Il faut lire «I, 19, 3». BC vise l’inscription adresse´e aux Pe´lasges qui se lit sur un tre´pied a` Dodone : «Partons a` la recherche de la terre saturnienne des Sike`les Et de la Cotyle` des Aborige`nes, la` ou` flote une ˆıle ; Meˆlez-vous a` eux et envoyez une dıˆme a` Phoibos, Ainsi que des teˆtes au Cronide, et a` son pe`re adressez l’offrande d’une homme» (e´d. Fromentin, p. 103). Quant au scholiaste de Pindare voir Anders Bjørn Drachmann, Scholia vetera in Pindari carmina, Stutgardiæ : Teubner, 1910, t. II, Scholia in Pythionicas (scholie 2,2), ou` l’on trouve : «En ce qui concerne les sacrifices humains (ανθρω Ä ποθυτειÄν), dit The´ophraste, on les a arreˆte´s sur l’ordre de Gelon dans le territoire des Tyrrheniens.» Lucain ne parle pas du pontife, seulement de la petite distance entre le sanctuaire et Rome (Lucan VI, 74). Le renvoi a` Ovide, Me´tamorphoses, cite un vers de la le´gende de Dædalion qui ne peut convenir. Il se peut que BC pense a` un passage de l’histoire d’Hyppolite, tue´ par Neptune, rendu a` la vie par Esculape et vivant retire´ dans la foreˆt d’Aricie au service de Diane (livre XV, vv. 481–495. – Les deux vers des Fasti parlent des preˆtres de la foreˆt qui pe´rissent assomme´s par celui qui leur succe`de. Le passage cite´ de Servius parle de la Diane d’Aricie, enleve´e de la Tauride et transporte´e dans cet endroit par Oreste, «et Aritiam detulit. Sed cum postea Romanis sacrorum crudelitas displiceret, quanquam servi immolarenturm ad Laconas est Diana translata». BC revient, pour appuyer cette opinion, a` Macrobe, Saturnalia, livre I, chap. 7, de´ja` cite´ cidessus, p. 221, variante a` la ligne 2. Festus ne parle pas d’hommes bruˆle´s en l’honneur de Vulcain. BC cite le fait d’apre`s Creuzer qui renvoie a` son tour a` Plutarque, Quæst. Rom. 314. Il faut lire : Tite-Live, VII, 15. La phrase a` laquelle pense BC est la suivante : «Nec in acie tantum ibi cladis acceptum quam quod trecentos septem milites Romanos captos Tarquinienses immolarunt.» Voir Lactance, I, 21, 3 : «Latini quidem huius immanitatis expertes fuerunt, siquidem Latiaris Iuppiter etiamnunc sanguine colitur humano.» – Tertullian, «contra gnost. c. 7». Allusion non e´lucide´e. L’abre´viation du titre ne correspond a` aucun des ouvrages de Tertullien. Le meˆme renvoi se trouve ci-dessus, p. 221, variante a` la ligne 2.

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De la Religion, IV

cieux outragent la pudeur a, et que des tourments effroyables

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font

(suite de la note de BC des pages pre´ce´dentes) vers souvent cite´. Ille sos (suos) deiveis mos sacrificare puellos1. Les Sabins, lorsqu’ils se trouvaient dans quelques dangers, vouaient a` Mars les productions de toute l’anne´e (ver sacrum), y compris les garc¸ons et les filles qui naissaient (DEN. D’HAL., I, 16 ; STRAB., V2). Lorsque les sacrifices humains s’adoucirent, ces peuples se borne`rent a` envoyer leurs enfants ainsi de´voue´s en colonie hors de leur pays. (SERV. ad. Æn.) On avait immole´ des vierges dans le bois consacre´ depuis a` Anna Perenna. Et quod virgineo cruore gaudet Annæ pomiferum nemus Perennæ. MART., IV, 643. Dis e´tait honore´ par les meˆmes rites sur le mont Soracte. (DEN. D’HAL., I, 4.) V. aussi la note de SERVIUS, sur ce vers de Virgile : Summe deus, sancti custos Soractis Apollo4. Aux feˆtes du printemps, trente sexage´naires e´taient pre´cipite´s dans le Tibre. (PELLOUT. V, 1395.) Le sacrifice de ces trente sexage´naires pourrait bien avoir e´te´ un reste de la coutume des sauvages, de tuer les vieillards qui n’ont plus la force de les suivre. Ce serait alors un exemple frappant de la tendance du sacerdoce a` perpe´tuer dans la civilisation les pratiques de la barbare. (FEST. vo Sexagen6. ; PLUTARCH., Quæst. rom.) L’institution des vestales e´tait une institution e´trus que ; elle fut porte´e de la ville d’Albe dans celle de Rome. Le supplice de Rhe´a Sylvia, me`re de Romulus, fabuleux ou non, est la conse´cration d’une rigueur sacerdotale ante´rieure au culte romain, mais qui malheureusement s’y introduisit et s’y prolongea. CREUTZ.

III,

3377. Le culte du Phallus e´tait e´tabli chez les E´trusques, les Sabins, les Om-

18 suivre. ] suivre dans leurs expe´ditions de guerre ou de chasse. Ms-notes 25p. 353.2 Creutz. ... pendant ] passage remanie´ Culte du Phallus, partie de l’ancien culte des Etrusques, des Sabins, des Ombriens & d’autres peuples de l’ancien Latium. Creutz. III. 377. ce texte ajoute´ dans la col. de gauche ; la suite dans la col. de droite Le Culte du Phallus e´toit e´tabli a` Lavinium. Pendant Ms-notes 1

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BC cite une version abandonne´e du fragment 214 des Annales d’Ennius. Dans l’e´dition de re´fe´rence on lit : «[huic] Poeni soliti suos sacrificare puellos», «a` celui-ci [=Saturne] les Carthaginois ont l’habitude de sacrifier leurs propres enfants maˆles». Voir The Annals of Quintus Ennius, Edited with Introduction and Commentary by Otto Skutsch, Oxford : Clarendon Press, 21986. Il faut savoir que les mots «huic» et «suos» ne comprennent qu’une syllabe (huk, swos). BC reproduit le vers d’apre`s Nonius. Voir Denys d’Halicarnasse, Antiquite´s romaines, I, 16, 3–4 (e´d. Fromentin, p. 99). «Le dieu auquel ils [i.e. les Aborige`nes] e´taient de´voue´s au moment ou` on les faisait partir leur venaient ge´ne´ralement en aide [...] et favorisaient leurs colonies. C’est donc en vertu de cette coutume qu’alors, certains Aborige`nes aussi, a` cause de la surpopulation de leurs territoires – en effet ils n’admettaient pas de tuer un seul de leurs enfants, ce qu’ils conside´raient comme un crime a` nul autre pareil –, consacre`rent a` l’un des dieux les rejetons de l’anne´e, et quand ces enfants furent parvenus a` l’aˆge d’homme, ils les envoye`rent hors de leur terre.» – Strabon, livre V, §§ 20–21, parle bien des Sabins, mais ne mentionne pas les sacrifices. BC cite les deux vers de la Pharsale qui mentionnent le sanctuaire de la Diane d’Aricie. Servius commente ce vers de l’E´ne´ide (XI, 785) et explique sur le mont Soracte : «In hoc autem monte cum aliquando Diti patri sacrum persolveretur ; nam diis manibus consecratus

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Livre XI, chapitre VII – De´monstration des assertions ci-dessus

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(suite de la note de BC de la page pre´ce´dente) briens et autres peuples de l’ancien Latium. A Lavinies, pendant les feˆtes de Bacchus qui duraient un mois, on promenait chaque jour en pompe un priape de figuier. (FEST. vo Lucem facere ; MACROB., Sat. III, 6 ; DEN. D’HAL., I, 401.) Les matrones les plus irre´prochables e´taient choisies pour le couronner. (AUG. de Civ. Dei, VII, 212.) Les orgies de ce culte avaient donne´ a` l’E´trurie une renomme´e de corruption devenue proverbiale. (NIEBUHR, I, 963.) Les dieux complices, le conseil de Jupiter (v. la note ci-dessus), avaient des figures de Phallus. Plusieurs fables, moitie´ romaines et moitie´ e´trusques, se rattachaient a` ce culte ; v. entre autres celle qui concerne la naissance de Servius Tullius. (ARNOB. Adv. Gent4. ; 6–8 Les orgies ... 96.) ] phrase ajoute´e dans la col. de gauche Ms-notes v. la note 460 Ms-notes

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8 v. ... ci-dessus ]

(suite des notes de la page pre´ce´dente) est». – Le renvoi a` Denys d’Halicarnasse qui pre´ce`de imme´diatement est faux et n’a pu eˆtre e´lucide´ ; le mont Soracte n’est mentionne´ nulle part dans les Antiquite´s romaines. Le passage de l’Histoire des Celtes exprime la meˆme ide´e que BC expose. Pelloutier tient le sacrifice des trente sexage´ne`res qu’on jetait tous les ans dans le Tibre pour un rite celte, aboli par Hercule ; «Mais que pour ne pas effaroucher les esprits, qui demeuroient attache´s aux anciennes superstititions, on jugea a` propos de conserver une image de ce sacrifice, & de jetter tous les ans, dans le Tibre, trente hommes de paille» (livre III, p. 139). BC cite l’article «sexagenarios» de Sex. Pompei Festi et Mar. Verrii Flacci De Verborum significatione (p. 504), enrichi par des notes de l’e´diteur qui expose cette coutume. Il faut savoir que cet article assez long n’est conserve´ que fort incomplet (pertes du texte) ; voir aussi l’e´d. de Lindsay, p. 450. – Le renvoi a` Plutarque, Quæstiones Romanæ, vise probablement le § 32 ou` Plutarque parle des hommes de paille qu’ils appellent Arge´os et jettent dans le Tibre : «Est-ce pour me´moire que les Barbares qui anciennement habitoient en ce pays-la`, firent ainsi mourir les Grecs qu’ils pouuoient anciennement prendre ?» BC indique le de´but d’un long passage sur le culte du phallus dans l’ouvrage de Creuzer (Symbolik, t. III, pp. 337–342). La suite est un montage d’extraits de plusieurs sources, meˆme si la consistance des arguments peut eˆtre conteste´e. – Le renvoi a` Sex. Pompei Festi et Mar. Verrii Flacci De Verborum significatione, article «lucem facere» (p. 208) reste e´nigmatique. Cet article ainsi que la note qui s’y rapporte ne parlent pas du culte du phallus. L’article de Festus «Lucem facere» ne parle pas du culte de Bacchus. Il de´signe seulement l’usage chez les preˆtres de Saturne de faire les services la teˆte nue. – Le second renvoi vise Macrobe, Saturnalia, livre III, chap. VI, § 15, ou` il est question de Priape. Macrobe cite Virgile, Ge´orgiques, 4, 110. Les vers n’ont aucun rapport avec les bacchanales. – Le renvoi a` Denys d’Halicarnasse est faux, le livre I des Antiquite´s romaines ne comprend que 22 chapitres. L’utilisation des passages tire´s de St. Augustin, De civitate dei, suppose une lecture attentive. La premie`re citation, qui concerne le chap. XXI du livre VII, intitule´ «De turpitudine sacrorum quæ Libero celebrantur», vise donc le culte du phallus a` Lavinies, que BC de´crit en adoptant le point de vue de St. Augustin. Les deux renvois suivants paraphrasent des passages du chap. IX du livre VI, qui citent les noms des dieux pre´sents pendant les noces. Niebuhr, Römische Geschichte, t. I, pp. 95–96 ; mais Niebuhr apporte une note critique, puisque les histoires sur la de´cadence tyrrhe´nienne reposent sur les re´cits de Theopompus, un auteur d’une fiabilite´ douteuse. BC fait allusion a` Arnobius, Adversus nationes, liv. V, chap. 18, 4–5. C’est la` qu’il a trouve´ le motif des «dieux complices», «dei conserint», les pe´nates de Jupiter, qui prennent

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De la Religion, IV

fre´mir la nature a. Enfin, la divination, ce moyen d’empire, si soigneu-

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(suite de la note de BC de la page pre´ce´dente) v. OVID. Fast1.) A la feˆte d’Anna Perenna, les jeunes filles chantaient des chansons obsce`nes. Les dieux qui pre´sidaient aux mariages chez les anciens Latins e´taient d’une inde´cence qui se ressent a` la fois du culte licencieux des nations sacerdotales et de l’esprit alle´gorique du sacerdoce. Depuis la de´esse Virginensis, qui de´lie la ceinture de l’e´pouse, le dieu Subigus, la de´esse Pruna, la de´esse Pertunda (AUG. de civit. Dei, VI, 9), le dieu Mutunus Tutunus (TERTULL. ad Nat. II, 112 ; CREUTZ. II, 487–4883), les dieux ou les de´esses Anxia et Cincia (ARNOB. adv. Gent. III4 ; MARTIAN. CAPELLA, II5), la de´esse Persica (ARN. ib. IV), jusqu’a` Liber et Libera (AUG., loc. cit.), tout est de´crit avec la plus bizarre et la plus re´voltante exactitude. Le dieu Mutunus avait une analogie comple`te avec le Lingam, sur lequel on met aux Indes les jeunes marie´es a` cheval. Les bramines et les preˆtres e´trusques ont e´te´ conduits par la meˆme se´rie d’ide´es aux meˆmes pratiques. Ces divinite´s de l’ancien culte italique disparurent lors de la formation du polythe´isme a` Rome, et ne reparurent que lorsque les rites sacerdotaux inonde`rent l’empire. Les preˆtres e´trusques se de´chiraient les bras, se faisaient en diffe´rentes parties du corps de profondes blessures, ou marchaient sur des charbons ardents (STRABON, V6) ; leurs danses, dont ces rites sanguinaires faisaient une partie essentielle, ressemblaient aux contorsions

4–6 d’une inde´cence ... sacerdoce. ] 〈de l’〉 d’une inde´cence 〈la plus re´voltante.〉 qui ... sacerdoce. syntagme ajoute´ dans la col. de gauche Ms-notes 8 Creutz. ... 488 ] ajoute´ dans la col. de gauche Ms-notes 10 Libera ... de´crit ] Libera feminis emissionem præstantes (Aug. loc. cit.) tous les cultes dont se compose l’union des sexes sont de´crits Ms-notes 18 sanguinaires ] sanglans Ms-notes

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la forme de phallus. Arnobe continue : «Occrisiam prudentissimam feminam divos inseruisse genitali, explicuisse motus certos : tunc sancte ecferventia numina vim vomuisse Lucilii ac regem Servium natum esse Romanum» (e´d. Amata, p. 526 ; e´d. Orellius, p. 180). Le renvoi a` Ovide, Fasti, vise le livre VI, vv. 625–635, passage qui raconte l’origine divine de Servius Tullius, fils de Vulcain et de la captive et servante Ocresia. BC cite Tertullien, Ad nationes, livre II, chap. XI, qui parle de ces divinite´s. Le texte, assez mutile´, permet ne´anmoins d’identifier les noms e´voque´s par BC et les fonctions de ces divinite´s (Corpus Christianorum, t. I, pp. 58–60). Le renvoi vise dans l’ouvrage de Creuzer, Symbolik, la simple mention de Mutunus Tutunus, «ein Latinischer Priapus», dans le chapitre sur les divinite´s du Latium (pp. 484–491). Quant a` Arnobe, il faut corriger le nom de la premie`re de´esse et lire «Unxia», la seconde s’appelle «Xinxia». BC fait allusion au livre III, chap. 25, 1 : «Unctionibus [...] superest Vnxia, cingulorum Cinxia replicationi» (e´d. Amata, p. 405 ; e´d. Orellius, p. 124 ; e´d. Champeaux, p. 20). Le second renvoi vise Arnobe, liv. IV, chap. 7, 1. Il faut corriger le nom de cette divinite´ et lire «Perfica» : «Perfica una est e populo numinum, quæ obscenas illas et luteas voluptates ad exitum perficit» (e´d. Amata, p. 440 ; e´d. Orellius, p. 140). Allusion a` Martianus Capella, De nuptiis Philologiæ et Mercurii libri VIII, livre II, ou` l’on trouve une prie`re a` Junon ; une des phrases dit : «[...] Interducam et Domiducam Unxiam Cinxiam mortales puellæ debent in nuptiis convocare ut earum et itinera protegas et in optatas domos ducas et cum postes unguent faustum omen adfligas et cingulum ponentes in thalamis non relinquas [...]» (e´d. Franciscus Eyssenhardt, p. 42). Strabon, livre V, § 16, parle de l’autel d’une de´esse de Fe´ronia, que les fide`les honorent en marchant sur des charbons ardents. Dans ce contexte, il n’est pas question des preˆtres e´trusques.

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sement cultive´, si minutieusement de´veloppe´ par les preˆtres a, et toujours accompagne´ d’une sorte de juri diction qu’ils s’arrogent sur les

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fre´ne´tiques au milieu desquelles les corybantes et les cure`tes se mutilaient. (SPANGENBERG, de Veterib. lat. religionib., p. 481.) Les augures toscans avaient divise´ le ciel en dix-huit parties pour observer plus exactement le cours des astres, le vol des oiseaux, la direction des nuages, le point de de´part de la foudre, et la couleur des e´clairs. Ces derniers phe´nome`nes occupaient une grande place dans la discipline e´trusque. Ce qu’un e´clair avait annonce´ e´tait plus suˆr que ce qui e´tait pre´dit par toute autre voie. Quand les entrailles des victimes ou le vol des oiseaux pre´sageaient des e´ve´nements sinistres, un e´clair favorable dissipait les craintes : mais aucun pre´sage ne pouvait infirmer l’autorite´ prophe´tique d’un e´clair. (Cœcinna ap. SENEC. Nat. quæst. II, 342.) On divisait les e´clairs en plusieurs classes, fulmina monitoria, pestifera, fallacia, deprecanea, peremptalia, attestata, atteranea, obruta, regalia, hospitalia, auxiliaria. (SEN. ib. 49.) Quelques-unes de ces e´pithe`tes s’expliquent d’elles-meˆmes. Les Romains e´taient en doute sur la signification de plusieurs autres. Ils distinguaient aussi les e´clairs en publica (qui avaient rapport a` l’e´tat), et privata (qui concernaient les particuliers) ; l’influence des fulmina familiaria ne se bornait pas a` un e´ve´nement, mais s’e´tendait a` toute la vie. Jupiter pre´sidait spe´cialement aux e´clairs. (SEN. loc. cit., cap. 45.) Il en tenait trois dans sa main droite (Fest. in vo Manubiæ3) ; le premier n’e´tait destine´ qu’a` avertir les hommes ; le second que Jupiter ne lanc¸ait qu’apre`s avoir consulte´ les douze grands dieux, e´tait de´ja un commencement de peine ; le troisie`me e´tait le comple´ment du chaˆtiment me´rite´. Il frappait de mort les individus et bouleversait les empires. Les dieux se voilaient, et de-la` l’e´pithe`te de Dii involuti. (SENEC. loc. cit., cap. 41.) Le philosophe romain tire de cette tradition sacerdotale des re`gles morales qu’il adresse aux puissances de la terre. Plus l’autorite´ est absolue, dit-il, plus elle doit eˆtre mode´re´e, et celui qui en est reveˆtu ne doit de´ployer la se´ve´rite´ qu’apre`s s’eˆtre entoure´ de conseils salutaires. (SEN. ib., c. 41.) Se´ne`que pensait plus

1-p. 356.1 et toujours ... dieux ] ajoute´ dans la col. de gauche Ms-texte 10 mais ] a` la hauteur de ce mot, dans la col. de gauche, un ajout inacheve´ et biffe´ 〈nous apprenons de Cice´ron que la divination e´toit d〉 Ms-notes

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Le renvoi a` Spangenberg, De veteris Latii Religionibus domesticis commentatio, re´pe`te la note ci-dessus, p. 315, n. b. Spangenberg ne mentionne pas de rites sanguinaires. Le renvoi doit eˆtre pre´cise´. BC vise peut-eˆtre la premie`re phrase du chap. 34 du livre II : «Summam esse vim fulminum iudicant, quia, quidquid alia portendunt, interventus fulminis tollit. Quidquid ab hoc portenditur, fixum est, nec alterius significatione minuitur.» Le nom de Cæcinna n’apparaıˆt que plus loin (II, 39.1) : «Genera fulminum tria esse ait Cæcinna, Consiliarum, Auctoritatis, et quod Status dicitur. Consiliarium ante rem fit, sed post cogitationem; quum aliquid in animo versantibus, aut suadetur fulminis ictu, aut dissuadetur. Auctoritatis est, ubi post rem factum venit, quam bonam fortinam malamve significat. Status est, ubi quietis, nec agentibus quidquam, nec cogitantibus quidem, fulmen intervenit. Hoc aut minatur, aut promittit, aut monet» (L. Annæi Senecæ Naturalium Quæstionum libri septem, recognovit [...] G. D. Koeler, Gottingæ : sumptibus Vandenhoek et Ruprecht,

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dieux a, est porte´ dans l’Italie antique au plus haut degre´ de solennite´ et de profondeur. On le fait remonter jusqu’a` Picus, le premier roi des Abori-

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a` Ne´ron qu’a` Jupiter. Les principes de la divination par le vol des oiseaux ou les augures chez les E´trusques avaient une grande analogie avec ceux des Perses. Leurs oiseaux prophe´tiques (alites præpetes et oscines) rappellent les quatre oiseaux ce´lestes de´signe´s dans les livres zend. (Izeschne´, I, Ha 64 ; II, 891.) Pline remarque qu’il y avait sur les bas-reliefs e´trusques des figures d’oiseaux inconnus de son temps, ce qui nous rame`ne aux oiseaux fantastiques de Perse´polis et d’Ecbatane. (PLIN. Hist. nat., X, 152.) Tous les autres modes de divination e´taient en usage dans l’E´trurie, et la pyromancie se pratiquait a` Pre´neste, avec les meˆmes rites a` peu pre`s que dans l’Orient, et chez les He´breux, quand ils violaient les prohibitions de la loi mosaı¨que. (Esth. cap. III, 7 ; IX, 26, 28–29, 31–32.) Les preˆtres toscans arrachaient a` Jupiter son tonnerre, et le faisaient a` volonte´ descendre du ciel. (PLIN., Hist. nat., II, 533.) La tradition relative a` Tullus Hostilius tient manifestement a` ce pouvoir myste´rieux dont ces preˆtres se vantaient. (TIT. LIV. I, 314.)

2-p. 357.10 On le ... la destine´e. ] ajoute´ dans la col. de gauche On le ... e´le´mens, chez les Etrusques, e´toient prophe´tiques. L’air re´ve´loit ... sens. entre parenthe`ses le texte de la note b, p. 357 Le bruit des flots dans sa signification ... & du sein de l’abyme liquide e´toient sortis des prophe`tes ... dieux. le 〈fond〉 sein de la terre n’avoit pas e´te´ moins ... Tage´s avoit paru tout a` coup ... gouffres laissoient s’e´lever ... feu qui bruloit ... consumoit ... exprimoient ... destine´. Ms-texte 9 divination ] divination 〈Etrusque〉 Ms-notes 12–14 Les preˆtres ... 53.) La tradition ... 31.) ] Les devins ... 53.) ajoute´ dans la col. de gauche ; la suite dans la col. de droite la tradition ... myste´rieux que s’arrogeoient les Preˆtres Etrusques. (Tit. ... 31.) Ms-notes

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1819, pp. 58 et 60–61). Les diffe´rentes classes des e´clairs sont nomme´es dans le chap. 49 du meˆme livre (p. 66). – La phrase qui pre´cise qu’on croit «Iovem [...] mittere manu fulmina» se trouve au chap. 45 du livre II (p. 64). – La tournure de «Dii involuti» est une adaptation d’une tournure qui se trouve au chap. 41 (p. 62) en parlant du conseil des dieux «quos superiores et involutos vocant» ; les re`gles morales se lisent dans le chap. 42 (pp. 62–63). L’article «Manubiæ» chez Festus confirme ce que dit BC. La note ajoute´e a` cet article explique l’origine e´trusque ou peut-eˆtre grecque du mot (Festus, e´d. 1700, p. 226). Les indications de BC ne sont pas claires, puisqu’il les copie sous la forme dans laquelle on les trouve dans l’index du Zend-Avesta (t. III, p. 305). Kleuker renvoie a` Izeschne´, Ha LVI, LVII et LXI (t. I, p. 144) et au Jeschts Sade´s, chap. LXXXIX, carde 24 et 25 (t. II, p. 232). BC pense a` Pline, Histoire naturelle, livre X, § 87 : «Il y a en outre beaucoup d’espe`ces repre´sente´es dans le rituel e´trusque, qu’on n’a pas vues de nos jours» (Histoire naturelle, livre X, texte e´tabli, traduit et commente´ par E. de Saint-Denis, Paris : Belles Lettres, 1961, p. 40). BC pense a` Pline, Histoire naturelle, livre II, § 140 (d’apre`s une ancienne nume´rotation le chap. 53), ou` Pline cite l’ancienne tradition annalistique pour affirmer «que graˆce a` certains rites et certaines prie`res on commande ou on obtient la foudre» (e´d. Beaujeu, p. 61). L’histoire de la mort de Tullus Hostilius, de´ja` mentionne´e chez Pline, reviendra chez Tite-Live. Tite-Live, Ab urbe condita, le chapitre indique´ raconte le miracle de la pluie de pierres sur le Mont Albain et le re´tablissement du culte des Albains sous Tullus Hostilius a` Rome, et la

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ge`nes a. Tous les e´le´ments sont prophe´tiques. L’air re´ve`le l’avenir par le bruit du tonnerre, le mouvement, la couleur, les formes fantastiques des nuages, les oiseaux qui les traversent dans tous les sens b. Le bruit des flots a sa signification divinatoire, et du fond de l’abıˆme liquide sortent des prophe`tes et des dieux. Le sein de la terre n’est pas moins fe´cond. D’un sillon entr’ouvert par la charrue, Tage`s paraıˆt tout a` coup aux yeux des peuples. De toutes parts, des gouffres laissent s’e´lever jusqu’a` l’homme des inspirations surnaturelles ; enfin le feu qui bruˆle sur l’autel, la flamme qui consume la victime, expriment par leurs ondulations les myste`res de la destine´e. Les augures et les aruspices de la Toscane sont illustres dans l’histoire. Denys d’Halicarnasse et Diodore nous vantent leur habilete´ c ; et le superstitieux Julien consultait encore, dans le troisie`me sie`cle de notre e`re, des aruspices qu’il avait fait venir d’E´trurie.

a b c

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STRAB. VII ; PLUTARCH. Quæst. Rom ; DEN. D’HAL. I, 111. Et aves deus movit. SENEC. Quæst. nat., II, 322. DEN. D’HAL. IX, 23. Les habitants de la Toscane, dit Diodore (V. 27 et 40), se sont appli-

mort de ce roi tue´ par un e´clair de Jupiter en cole`re a` cause de la ce´re´monie religieuse de´prave´e («ira Iovis sollicitati prava religione fulmine ictum»). Le renvoi a` Strabon, Ge´ographie, livre VII, est probablement faux, ce livre e´tant consacre´ exclusivement aux pays de l’Europe occidentale et centrale et aux pays autour du PontEuxin. On trouve un passage sur les influences des E´trusques sur les Romains au livre V, chap. II : «On dit que les ornements du triomphe, les insignes des consuls et, d’une manie`re ge´ne´rale, les emble`mes porte´s par les magistrats ont e´te´ apporte´s a` Rome de Tarquinia avec les faisceaux, les haches, les trompettes, les ce´re´monies religieuses, l’art divinatoire et tout l’accompagnement musical des manifestations publiques romaines» (pp. 58–59). – Picus est mentionne´ une seule fois dans les Quæstiones romanæ (286f), mais Plutarque rappelle a` cet endroit seulement la le´gende de sa transformation en un pivert qu’on retrouve sous sa forme classique chez Ovide, Me´tamorphoses, livre XIV, vv. 308–440. – BC cite probablement une nouvelle fois le passage I, 14, 5 de Denys d’Halicarnasse, Antiquite´s romaines, e´d. Fromentin, p. 96 (voir ci-dessus, p. 342, n. 1). BC cite une phrase de Se´ne`que, L. Annæi Senecæ Naturalium Quæstionum libri septem, II, 32.3, p. 56. BC pense au livre IX, chap. 2, 5 des Antiquite´s romaines qui commente un e´pisode de la guerre des Romains contre Veius sous le consulat de Caius Manlius et Marcus Fabius ; la foudre tombe´e sur la tente de Caius Manlius est interpre´te´e comme un mauvais pre´sage, ce qui fournit a` Denys d’Halicarnasse l’occasion de louer l’art des devins e´trusques. – Ensuite, BC paraphrase un passage de la Bibliothe`que historique (livre V, chap. XL) ou` il est question des E´trusques (Tyrhe´niens) disant qu’ils se sont «beaucoup attache´s aux lettres, a` la physiologie, a` la science du divin et se sont applique´s plus que tous a` l’observation de la foudre» (Diodore de Sicile, Bibliothe`que historique, t. V, p. 56). Le renvoi au chap. XXVII du meˆme livre est une erreur.

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Tel e´tait l’e´tat religieux de l’Italie, quand des colonies grecques y aborde`rent. Nous n’entrerons point ici dans les discussions relatives a` ces colonies, dont tous les historiens racontent en de´tail l’arrive´e et les e´tablissements. Nous observerons seulement qu’il ne faut pas rejeter ces re´cits avec un de´dain trop superbe. L’auteur qui s’est livre´ sur cette matie`re aux recherches les plus assidues, bien qu’il soit peu favorable lui-meˆme aux te´moignages d’une e´poque ou` les renseignements e´taient rares, la critique imparfaite, et les esprits fausse´s par des pre´tentions de vanite´s nationales, convient ne´anmoins qu’il existait ante´rieurement a` la fondation de Rome des colonies grecques riches et1 florissantes a. Les premie`res de ces colo-

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que´s a` l’e´tude des lettres et de la philosophie, mais ils se sont particulie`rement attache´s a` la connaissance des pre´sages. Tanaquil, femme de Tarquin l’Ancien, est vante´e par Tite-Live pour avoir e´te´ instruite d’apre`s les re`gles de la discipline tyrrhe´nienne. «Perita, ut vulgo Etrusci, cœlestium prodi giorum mulier1.» Nous ne citons point ici Tanaquil comme un personnage historique ; mais les faits partiels, vrais ou faux, prouvent toujours l’opinion rec¸ue, et la tradition, qui se compose de fables, a ne´anmoins pour base une ve´rite´ que les de´tails, invente´s apre`s coup, ne sauraient infirmer. L’arrive´e d’E´ne´e et des Troyens dans le Latium, observe M. Niebuhr (Hist. Rom. I, 126), est suˆrement une fiction ; mais il serait absurde de lui refuser un fondement historique. Certainement la prise d’Ilion est fabuleuse, et pourtant il y a de l’histoire au fond2. NIEBUHR (Hist. Rom.) rejette les traditions relatives aux colonies œnotriennes et peuce´tiennes, mais il ne nie point que des colonies grecques n’aient exerce´ sur l’E´trurie et sur le Latium la plus grande influence. Il reconnaıˆt que, constitue´es en re´publiques, et de´truites vers l’an 400 de Rome, elles avaient fleuri pendant plusieurs sie`cles : donc elles e´taient ante´rieures a` sa fondation (Ibid. I, 1053). Quant a` la division de Niebuhr entre ce qu’il y a d’historique et ce qu’il y a de fabuleux dans les annales romaines, nous ne pouvons, tout en rendant justice a` la gravite´ des recherches et a` la nouveaute´ des aperc¸us, nous dispenser de dire qu’il y a beaucoup d’arbitraire dans cette division. On ne de´meˆle jamais suffisamment le motif de l’auteur pour accorder a` certains faits l’autorite´ de l’histoire, et pour la refuser a` d’autres, souvent de la meˆme nature et presque de la meˆme e´poque. C’est le re´gime du bon plaisir transporte´ dans la science.

13 instruite ] instruite dans l’art augural Ms-notes 14–20 mulier.» Nous ... fond. ] mulier (Tit. Liv. I. 34. & Den. d’Hal. III. 15) la suite dans la col. de gauche nous ne citons ... fond. Ms-notes 21–31 Niebuhr ... science. ] l’e´bauche de cette note dans la col. de gauche ; BC renvoie a` un autre manuscrit non identifie´ qui contient le texte complet, e´vitant ainsi de devoir recopier ici ; le texte se trouve avec quelques variantes dans les cahiers de notes Niebuhr. hist. Rom. rejette − influence. il recont l’exist. de ces col. Locr. Ach. & Dor. cstit. en Rep. & de´tr. vers l’an 400 de Rome − 105) Quant a sa divis. pre´t. entre ce qu’il − dans la science. Ms-texte Niebuhr ... influence. Quant a` sa division ... dans cette division. On ne 〈voit〉 de´me`le jamais 〈son〉 le motif de l’auteur ces trois derniers mots dans la col. de gauche pour accorder ... e´poque. 〈On diroit Il leur distribue〉 c’est le re´gime ... science. Ms-notes 1 2 3

Tite-Live, Ab urbe condita, livre I, chap. 34. BC re´sume une re´flexion e´le´gante de Niebuhr, Römische Geschichte, pour en retenir le principe critique de l’historiographe. BC reproduit les arguments de Niebuhr relatifs aux influences des colonies grecques sur l’E´trurie. La critique de la me´thode de l’historien n’est gue`re fonde´e.

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nies n’apporte`rent point, a` ce qu’il paraıˆt, dans les cite´s qu’elles construisirent, la religion de la Gre`ce, telle qu’Home`re nous la fait connaıˆtre a. Elles avaient quitte´ leur patrie, avant la re´volution ope´re´e dans son polythe´isme par les navigateurs e´gyptiens ou phe´niciens b ; et leur arrive´e en Italie n’eut d’autre effet que d’e´tablir entre cette contre´e et la Gre`ce Pe´lagienne des communications plus fre´quentes c. Mais plus tard, d’autres colonies grecques ayant de´barque´ dans le Latium, commence`rent a` re´former les rites fe´roces des indige`nes. Elles s’e´taient e´loigne´es de Gre`ce apre`s la formation du

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L’e´poque de l’arrive´e de la premie`re de ces colonies est fixe´e par la chronologie ordinaire a` l’an 1719 avant Je´sus-Christ. L’arrive´e de ces navigateurs est poste´rieure de pre`s d’un sie`cle et demi au de´part des premiers Pe´lages pour l’Italie. Il paraıˆtrait meˆme que, loin de de´truire la religion sacerdotale de l’Italie, ces colonies l’enrichirent de quelques notions e´galement sacerdotales. Elles y porte`rent, par exemple, le culte des Cabires, dont nous avons traite´ ci-dessus. Au moins les noms de Cabires e´taient-ils les meˆmes en Gre`ce et en Italie : ΘεοιÁ μεγα λοι chez les Grecs, et Dii potes, potentes, suivant l’explication de Varron (de Ling. lat. IV, 101), chez les Romains, successeurs et imitateurs des E´trusques. V. aussi (t. II, p. 4132) l’Herme`s sacerdotal apporte´ en E´trurie par les Pe´lages, repre´sente´ par une colonne, se combinant avec le dieu Terme, puis restant le dieu Terme seul, le Mercure grec remplac¸ant Herme`s. V. enfin le tome III, p. 318–319, texte et note3.

3 patrie ] a` la hauteur de ce mot commence un extrait du compte rendu du t. I de l’ouvrage de BC par d’Eckstein Les Etrusques, ayant la meˆme origine que les Pe´lages envoye`rent une colonie sacre´e chez les peuples du Latium ou` elle fut la souche du patriciat & par la suite du Se´nat de Rome. Appuye´e sur des corporations puissantes, dites Tyrse´niennes ou Thyrre´niennes, cette The´ocratie exploite les arts & le domaine entier d’une civilisation vraiment sacerdotale. C’est a` ces associations que nous devons ces constructions gigantesques, que l’Italie & la Gre`ce appelle`rent depuis pe´lasgiques ou Tyrse´niennes, & sous une plus ancienne de´nomination encore cyclope´ennes. Eckst. I. 50. Ms-texte 5–6 cette contre´e ... Pe´lagienne ] l’italie & leurs anciens concitoyens Ms-texte 9 L’e´poque de l’arrive´e de la premie`re ] Niebuhr reconnoit l’existence de diverses Colonies Locriennes, Ache´ennes & Doriennes, e´tablies en Italie, constitue´es en Re´publiques & de´truites vers l’an 400 de Rome, apre`s avoir fleuri pendant plusieurs sie`cles. donc elles e´toient ante´rieures a` sa fondation. (Nieb. I. 105) L’e´poque de la 1ere Ms-notes

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BC cite un passage de Varron, De lingua latina, chap. IV, e´d. de 1788, p. 18 : «Divi potes», probablement aussi la note explicative de Scaliger qu’on trouve dans le t. II, p. 37. OCBC, Œuvres, t. XVIII, p. 267. OCBC, Œuvres, t. XIX, pp. 319–320.

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du polythe´isme grec a ; elles baˆtirent plusieurs villes b ; elles y transporte`rent avec beaucoup d’autres usages, tous ceux qui avaient rapport a` la religion c. A Fale´ries, il y avait un temple de Junon d, construit sur le mode`le de celui d’Argos. On y pratiquait les meˆmes ce´re´monies pour les sacrifices. Des preˆtresses officiaient d’apre`s les rites grecs e ; et de jeunes filles, appele´es cane´phores, comme en Gre`ce, portaient les corbeilles sacre´es dans les pompes religieuses f. Ces colonies conserve`rent avec leur patrie ancienne des relations tellement e´troites, qu’elles envoyaient tous les ans a` Delphes la dıˆme de leur revenu g. Elles inspire`rent aux indige`nes assez de respect a b

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Un peu moins de 1300 ans avant l’e`re chre´tienne. Cære´, Pise, Saturnie, Alsion, Fale´ries, Fescennes et Larisse en Campanie, qui fut ainsi nomme´e du nom de la capitale du Pe´loponne`se. DEN. D’HAL. I, 31. DEN. D’HAL. ib2. Un autre temple de Junon passait pour avoir e´te´ construit a` Lanuvium, par les compagnons de Diome`de, apre`s la guerre de Troie. Cice´ron dit que, de`s les premiers sie`cles de Rome, le culte de Ce´re`s y avait e´te´ adopte´ ; qu’il avait e´te´ emprunte´ des Grecs, et qu’on faisait venir de Naples ou de Ve´lie des preˆtresses pour le ce´le´brer exactement. (Orat. pro Balbo, § 24, in Verrem. VALER. MAX. I, 13.) M. de Sainte-Croix pense que ce culte de Ce´re`s fut apporte´ de Gre`ce par les Tarquins. (Des Myst., p. 5044.) DEN. D’HAL. I, 35. DEN. D’HAL. ib6.

1–2 elles y transporte`rent ] Elles transporte`rent dans ces villes Ms-texte Peloponne`se. ] phrase inte´gre´e dans le texte principal Ms-texte 1

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11–12 Cære´ ...

BC cite les noms des villes qu’il a lus dans Denys d’Halicarnasse, Antiquite´s romaines, I, 20, 5–21, 1 et 21, 3 (e´d. Fromentin, pp. 104–105). Ces villes ont e´te´ fonde´es par les Pe´lasges apre`s leur traite´ avec les Aborige`nes. Allusion a` Denys d’Halicarnasse, Antiquite´s romaines, I, 21, 1–2, ou` il est question de la transplantation des rites religieux. BC vise ce passage : «Mais la preuve entre toutes la plus e´clatante de l’origine argienne de ces hommes qui chasse`rent les Sike`les, c’est le temple d’He´ra construit a` Fale´ries sur le mode`le d’Argos : le rituel des sacrifices y e´tait le meˆme, des femmes consacre´es e´taient au service du sanctuaire, une enfant, appele´e Cane´phore, pure de toute union, accomplissait les rites pre´liminaires aux sacrifices et des chœurs de jeunes filles ce´le´braient la de´esse par des chants ancestraux» (e´d. Fromentin, pp. 105–106). Cice´ron, Pro Balbo. Le passage vise´ par BC qui suit Sainte-Croix comprend la seconde ` moitie´ de ce chap. XXIV. Tous les faits cite´s par BC se trouvent dans le texte de Cice´ron. A cela s’ajoute un passage du deuxie`me discours contre Verre`s qui comple`te le passage indique´, a` savoir le livre IV, §§ 99–102. – Valerius Maximus, Dictorum factorumque memorabilium libri novem, lib. I, 1, 1, p. 32. «Cererique, quam more Græco venerari instituerant, sacerdotem a Velia, cum id oppidum nondum civitatis nomen accepisset, Calcitanam peterent, vel, ut alii dicant, Calliphennam ; ne deæ vetustis ritibus perita deesset antistes.» Voir Recherches historiques, e´d. de Silvestre de Sacy, t. II, pp. 41–42. Les renvois a` Cice´ron et Vale`re Maxime proviennent de Sainte-Croix (BC paraphrase son texte) qui les cite en note : «Or. pro Balbo, § 24 ; in Verr. act. II, lib. V, § 72» ; puis «Val. Max., lib. II, cap. I, § I» (p. 42, notes 1 et 2). Voir ci-dessus, n. 1. Allusion a` Denys d’Halicarnasse, Antiquite´s romaines, I, 18, 4 : «et ils envoyaient pour le

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envers les dieux grecs, pour qu’Arimnus, roi d’E´trurie, cruˆt devoir faire hommage d’un troˆne d’or a` Jupiter Olympien a. Enfin, elles communique`rent aux E´trusques la connaissance et le gouˆt des arts b. Leurs chefs firent en diffe´rents lieux des incursions plus ou moins heureuses, et partout ou` ils pe´ne´tre`rent avec succe`s, ils introduisirent quelques changements dans le culte italique. Ce ne fut ne´anmoins qu’a` Rome que l’influence des colonies grecques ope´ra une re´volution comple`te et de´cisive. Jusqu’a` la fonda tion de cette ville, les deux cultes subsiste`rent a` coˆte´ l’un de l’autre. La raison en est simple. Le sacerdoce e´trusque s’opposait, comme cela doit toujours eˆtre, a` toute innovation. L’on a souvent remarque´, dans les monuments de l’E´trurie qui nous sont parvenus, les diffe´rences qui existent entre ces ouvrages de l’art et les meˆmes ouvrages en Gre`ce. Ces diffe´rences tiennent peut-eˆtre a` ce que les colonies grecques avaient quitte´ leur pays, avant que les arts y fussent arrive´s a` leur perfection : mais l’esprit sacerdotal prohibitif, immobile, y eut sans doute la plus grande part. Les corporations the´ocratiques, a b

PAUS. Voy. en E´lide, ch. 121. HEYNE, de Etrusc. Com. Soc. Gœtt., et DEMPSTER Etruria Regalis, surtout sur Bacchus et sur Hercule2. Il serait absurde de nier, dit Niebuhr (I, 87), que l’embellissement des arts e´trusques ne soit duˆ aux Grecs, bien que leur architecture leur fuˆt particulie`re. Il ajoute que la litte´rature e´trusque ne fut jamais ame´liore´e par la grecque (ib. 88), ce qui est un effet et une preuve de la lutte dont nous allons parler3.

3 firent ] 〈porte`rent〉 firent Ms-texte 6 italique. ] Italique. 〈Ainsi l’on vit les formes des Dieux devenir plus e´le´gantes & les sacrifices humains disparaıˆtre ou s’adoucir.〉 Ms-texte 14 grecques ... quitte´ ] corr. imparfaite grecques qui 〈civilise`rent〉 l’Etrurie, avaient quitte´ Mstexte 16-p. 362.1 corporations ... avec succe`s ] corporations the´ocratiques, dans toutes les villes de l’Italie qu’elles domine`rent combattirent Ms-texte 22 parler. ] parler tout a` l’heure. Ms-notes

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dieu a` Delphes les dıˆmes pre´leve´es aussi leurs profits maritimes, pre´sents splendides s’il en fut» (e´d. Fromentin, p. 102). Pausanias, Voyage en Gre`ce, livre V, chap. 12, § 5. Ce roi Arimnestres n’est atteste´ nulle part ailleurs. Il est probable que BC pense a` l’e´tude de Heyne, «Commentatio de vestigiis domesticæ religionis patriique ritus in artis etruscæ» (Novi commentarii societatis regiæ scientiarum gottingensis, t. VI, commentationes historicæ et philologicæ, Gottingæ, Dieterich, 1776, pp. 35–58). – BC copie chez Heyne le renvoi a` l’ouvrage du latiniste et historien e´cossais Thomas Dempster (1579–1625), De Etruria regali libri VII, Florentiæ : Apud Joannem Cajetanum Tartinium, & Sanctem Franchium, M.DCC.XXIII. Cet ouvrage, e´crit a` la demande de Cosme III, fruit de longues recherches, parle peu de Bacchus, plus d’Hercule. Voir pour ce dernier surtout le livre II, chap. XXIV, pp. 161–162, «Etruscorum Rex Etruscus, filius Herculis, genti nomen dedit» et le livre III, chap. VIII. Dans l’appendice, on trouve des reproductions de monuments alors connus. Voir sur Hercule § V, p. 12 et sur Bacchus § IX, pp. 14–18, avec les tables respectives. Les vues de Niebuhr correspondent a` ce qui a e´te´ confirme´ par les e´tudes e´trusques modernes.

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dans les villes qu’elles domine`rent, combattirent avec succe`s l’action des colonies grecques. Il n’en fut pas de meˆme a` Rome. Ses habitants, re´unis par le hasard, et fugitifs de tous les pays, n’avaient point d’institutions pre´existantes ou consacre´es, et le me´pris meˆme dont les cite´s opulentes et paisibles qui les repoussaient de leur sein couvraient un ramas de brigands guerriers, les pre´serva de l’ascendant des corporations toutes puissantes dans ces cite´s. En conse´quence, au moment ou` leur culte prit une forme stable, les Romains puise`rent e´galement dans la religion de l’Italie antique et dans celle de la Gre`ce. Pendant quelque temps, les deux religions se dispute`rent le peuple romain : c’e´tait se disputer l’empire du monde. Pour de´crire cette lutte me´morable, nous citerons des faits, auxquels le de´sir d’eˆtre courts nous force d’attacher des noms d’individus qui n’ont peut-eˆtre jamais existe´ : mais nous les employons pour de´signer des e´poques, et les individus seraient des eˆtres fabuleux ou des noms ge´ne´riques a, que nos assertions n’en seraient point e´branle´es. Que Romulus, Numa, Tatius, Tullus Hostilius meˆme, bien qu’il y ait un peu plus d’histoire dans ce qui le regarde b, n’aient point eu d’existence re´elle ; que les colonies dites herculiennes n’aient point aborde´ en Italie, dans l’anne´e ou de la manie`re indique´e par des e´crivains, les uns cre´dules comme Tite-Live, les autres a

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Niebuhr regarde Romulus comme le nom ge´ne´rique du peuple romain, et Latinus, pe`re de Romulus, comme le nom ge´ne´rique des peuples du Latium. (Hist. Rom., I, 1481.) Voy. NIEBUHR, sur Tullus Hostilius2. Ce n’est pas qu’il n’y ait assure´ment beaucoup de fable dans ce qui concerne ce troisie`me roi de Rome ; car les historiens, Denys d’Halicarnasse par exemple (III, 1), le disent fils d’Hostus Hostilius, ge´ne´ral tue´ dans la guerre des Sabins, c’est-a`-dire qu’il aurait eu 80 ans a` son ave´nement au troˆne, et pourtant on lui attribue des penchants guerriers et des inclinations belliqueuses.

8 En conse´quence ] a` la hauteur de ces mots commence dans la col. de gauche un extrait d’Eckstein nous avons vu quelques unes des formes de la The´ocratie primitive se conserver meˆme dans les institutions conventionnelles de la Gre`ce & de Rome, a` une e´poque ou` l’esprit rationnel, s’affranchissant du joug des traditions & des croyances, divisait l’ordre social. Mais ce n’e´tait qu’une forme qui marchait de pair avec le domaine des basses classes de la socie´te´. Les riches, les puissans, les tribuns, les sophistes en riaient. d’Eckst. XXIV. 252. Ms-texte 25 ge´ne´ral ] ge´ne´ral 〈Romain〉 Ms-notes 27 inclinations ] expeditions Ms-notes 1 2

BC re´sume une re´flexion de Niebuhr, en la simplifiant peut-eˆtre trop e´nergiquement. Voir Niebuhr, Römische Geschichte, t. I, pp. 169–173, 206. – Quant a` Denys d’Halicarnasse, BC pense au livre III, 1, 2, ou` Tullus Hostilius est pre´sente´ comme le fils unique d’un Hostilius (chez Denys d’Halicarnasse sans pre´nom, mais qualifie´ par d’autres auteurs d’Hostus Hostilius), ancien citoyen de la ville de Me´dullie, mais venu s’e´tablir a` Rome avec toute sa fortune, et d’une femme appele´e Hersilia (Antiquite´s romaines, livre III, texte e´tabli et traduit par Jacques-Hubert Sautel, Paris : Belles Lettres, 1999, p. 1).

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compilateurs comme Denys d’Halicarnasse ; que Tarquin l’Ancien n’ait e´te´ ni le petit-fils d’un fugitif de Corinthe, ni de la famille des Bacchiades, peu nous importe. Nous n’en voyons pas moins tout ce qui est sacerdotal descendre d’E´trurie, et tout ce qui appartient au polythe´isme inde´pendant arriver de Gre`ce. Nous accordons a` la fiction tout ce que les nouveaux critiques re´clament pour elle : mais cette concession n’infirme en rien des ve´rite´s qu’on ne peut contester. Nous commencerons donc par Romulus, ou par le moment que son nom de´signe. De´ja` le penchant pour le culte grec se manifeste. Des ce´re´monies, en l’honneur de Jupiter, sont substitue´es a` l’adoration du cheˆne consacre´ a. Mais Tatius, roi des Sabins, as socie´ a` l’empire, apre`s la re´union des deux peuples, fait baˆtir des temples au soleil, a` la lune, au feu, a` la terre b. Numa, Sabin comme Tatius, transporte a` Rome ses dieux paternels. Il place dans son palais une lance, simulacre antique du dieu de la guerre c. Il de´fend a` a

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c

Voy. l’endroit ou` Tite-Live raconte que Romulus, ayant de´pouille´ de ses armes le ge´ne´ral ennemi, de´posa ce trophe´e au pied d’un vieux cheˆne adore´ par les bergers, et consacra cette place a` une divinite´, qu’il nomma Jupiter Fe´re´trien1. VARR. IV ; DEN. D’HAL. I, 32, et II, 12 ; OVIDE (Fast. VI), et PLUT. (vie de Numa), attribuent a` ce prince l’introduction du culte du feu a` Rome sous le nom de Vesta ; mais Numa e´tant Sabin de meˆme que Tatius, le re´sultat, pour ce que nous affirmons ici, serait identique. Tatius introduisit aussi un dieu guerrier sous la forme d’une lance. Tertullien (Apologet. 24) dit que c’e´tait un dieu des Falisques2. PLUT. in Numa3.

19–20 e´tant ... identique. ] ayant e´te´ Sabin comme Tatius, le re´sultat seroit le meˆme pour ... ici. Ms-notes 1 2

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Tite-Live, Ab urbe condita, livre I, chap. 10, §§ 4–7. La place choisie – le cheˆne sacre´ des bergers – sera celle du temple de Jupiter au Capitole. Varron, livre V, chap. 74 : «He vowed altars to Ops, Flora, Vediovis and Saturn, Sun, Moon, Vulcan and Summanus, and likewise to Larunda, Terminus, Quirinus, Vertumnus, les Lares, Diana and Lucina» (Varro, On the Roman Language, with an English Translation by Roland G. Kent, London : William Heinemann, Cambridge, Massachusetts : Harvard Univ. Press, MCMLXVII, vol. I, p. 71). – Le premier renvoi a` Denys d’Halicarnasse cite le chapitre dans lequel on traite de l’installation des Arcadiens dans le lieu qui deviendra Rome. Ils y e´rigent «des temples, dont le premier e´tait de´die´ a` Pan Lykaios [...] pour les Arcadiens le plus ancien et le plus honore´ des dieux» (e´d. Fromentin, t. I, p. 122). Le second vise le livre II, 50, 3, ou` ce fait est raconte´. Voir Dionysius of Halicarnassus, The Roman Antiquities, Books I-II with an English Translation by Earnest Cary, Cambridge, Massachusetts, London : Harvard University Press, 1937, 21990, t. I, p. 455. – Ovide, Fasti, livre VI, vv. 249–304. – Plutarque, Vies paralle`les. «Numa», chap. 9 et 10. – BC vise cette phrase : «Romanas, ut opinior, prouincias edidi, nec tamen Romani dei earum, quia Romæ non magis coluntur quam qui per ipsam quoque Italiam municipali consecratione censentur : Casiniensium Deluentinus, Narniensium Visidianus, Asculanorum Ancharia, Volsiniensium Nortia, Oriculanorum Valentia, Sutrinorum Hostia ; Faliscorum in honorem patris Curris et accepit cognomen Iuno» (Tertullien, Apologeticum, Corpus Christianorum, t. I, pp. 134–135). Plutarque, Vies paralle`les, «Numa», chap. 14, qui raconte la construction d’un palais, la «Regia», et d’une habitation sur le Quirinal, ne mentionne pas cette lance. L’ide´e meˆme de

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ses sujets d’attribuer aux immortels la figure humaine a. C’e´tait une interdiction sacerdotale. Quand il y eut chez les Romains de la philosophie, ils firent honneur de cette prohibition de Numa a` des ide´es philosophiques. C’est peut-eˆtre a` cause de la faveur accorde´e par ce prince a` l’ancienne religion de l’Italie, que lorsque les livres qu’on lui attribuait furent de´terre´s par une inondation, quatre cents ans apre`s sa mort, le se´nat voulut qu’ils fussent livre´s aux flammes. Le soin qu’on apporta de les bruˆler sur un buˆcher qu’allume`rent les officiers meˆmes qui servaient dans les sacrifices, prouve qu’en les de´truisant, on continuait a` les respecter b. Quoi qu’il en a

b

OVID. Fast. VI, 295 ; PLUT. in Rom. ; Varro, ap. AUG. de Civit. Dei, IV, 31–36. Cette de´fense fut long-temps respecte´e. Tite-Live, dans l’histoire des deux premiers rois, ne parle d’aucune image ni d’aucune statue des dieux1. TIT.-LIV., XL, 292. Il dit expresse´ment que le pre´teur qui, en affirmant par serment que ces

9 buˆcher ] buˆcher 〈meˆme〉 Ms-texte 14-p. 365.15 Tit.-Liv. ... sacerdotales. ] ajoute´ dans la col. de gauche 〈Il est〉 Tite Live XL. 29. Il est dit 〈ici〉 expresse´ment que ... sacerdotales Msnotes

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placer le simulacre du dieu de la guerre dans la demeure de ce roi le´gendaire est contraire a` la tendance pacifiste des mesures de Numa dont Plutarque parle dans son re´cit. Fasti, livre VI, v. 295, un des vers de la le´gende de Vesta, apporte´e par Numa a` Rome. – Voir Plutarque, Vies paralle`les, «Numa», chap. 8 (et non pas «Romulus»), qui raconte que Numa avait de´fendu aux Romains de mettre dans leurs temples des simulacres, ce qu’ils observe`rent pendant 170 ans. – Quant a` St-Augustin, il faut lire «IV, 31–34». BC cite la fin du livre IV de De civitate Dei. Les chap. 31 et 32 sont consacre´s a` l’analyse de Varron de la religion des Romains (Augustin le nomme «un des auteurs les plus perspicaces dans cette matie`re»). Une des phrases importantes pour l’argumentation de BC se trouve dans le chap. 31, ou` St. Augustin reproduit l’opinion de Varron selon laquelle les Romains ne posse´de`rent pas d’idoles pendant 170 ans («dicit etiam antiquos Romanos plus annos centum et septuaginta deos sine simulacro coluisse»). Les deux autres concernent l’arrive´e de la religion chre´tienne, issue de la religion juive en de´cadence. Tite-Live, Ab urbe condita, livre XL, chap. 29, 3–14, raconte comment les livres furent de´couverts pendant une pe´riode de grande se´cheresse (et non pas apre`s une inondation), sur un champ pre`s de la colline nomme´e Janicule, dans une des deux caisses de pierre trouve´es en labourant la terre ; l’une (le sarcophage de Numa) e´tait vide, l’autre contenait les livres («in altera [i.e. arca] duo fasces candelis involuti septenos habuere libros»). Sept des livres e´taient re´dige´s en latin et traitaient du droit pontifical («de iure pontificio erant»). Les sept autres, re´dige´s en grec, contenaient des textes de la doctrine secre`te en rapport avec Pythagore («de disciplina sapientiæ»). Les livres, lus par celui auquel appartenait le champ et par un pre´teur, furent juge´s dangereux par ce dernier pour la religion, et le Se´nat de´cida de les faire bruˆler sous la surveillance des victimaires. Ajoutons que Tite-Live raconte ici un e´ve´nement qu’il tient lui-meˆme pour douteux, ce qui n’est pas pris en conside´ration par BC. Voir l’excellent chap. «Die Bücher Numas» chez Kurt Latte, Römische Religionsgeschichte (Handbuch der Altertumswissenschaft, Fünfte Abteilung, vierter Teil), München : C. H. Beck’sche Verlagsbuchhandlung, MCMLX, pp. 268–270, 1809, t. I, pp. 85–86). BC cite cette premie`re e´dition ; la citation est conforme, avec des coupes.

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soit de ce fait par ticulier, le culte re´tabli a` Rome apre`s Romulus, par Tatius ou Numa, e´tait manifestement celui que professaient toutes les nations asservies par les preˆtres a. Dans l’histoire de Tullus Hostilius, e´clate, en traits non me´connaissables, la rivalite´ de la royaute´ et du sacerdoce. Mais ce n’est point en favorisant la religion grecque aux de´pens de celle de l’E´trurie, c’est en cherchant a` s’emparer des forces myste´rieuses de cette dernie`re, que le troisie`me roi de Rome paraıˆt avoir voulu re´sister au pouvoir spirituel. Il se de´clare l’e´mule des preˆtres toscans : il pre´tend pe´ne´trer les secrets de leur magie ; il de´robe leurs conjurations b pour e´voquer la fou dre a` leur manie`re ; et ils le punissent en attribuant sa mort a` quelque omission sacrile´ge dans les redoutables

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livres e´taient dangereux pour la religion, de´cida le se´nat a` les faire bruˆler, ne les trouvait tels que parce qu’ils e´taient contraires au culte e´tabli. Or ce ne pouvait eˆtre comme incre´dules qu’ils e´taient en contradiction avec ce culte ; c’e´tait comme contenant des doctrines ou des formules sacerdotales. «Orphe´e, dit Clavier (I, 861), avait, a` l’exemple des preˆtres e´gyptiens ses maıˆtres, une doctrine secre`te qu’il ne communiquait qu’a` des disciples choisis, et apre`s de longues e´preuves. Ce fut sans doute cette doctrine qui, e´nonce´e dans les e´crits qu’on trouva au tombeau de Numa, scandalisa tellement les pontifes romains, qu’ils ordonne`rent de les bruˆler. Il est tre`s-probable en effet que Numa connaissait cette doctrine secre`te d’Orphe´e, etc.» L’ensemble de l’hypothe`se est fort hasarde´ ; mais elle a ceci de vraisemblable, qu’en supprimant le nom fabuleux d’Orphe´e pour y substituer celui de doctrine Orphique, elle implique que la doctrine de Numa e´tait une doctrine de preˆtres. Denys d’Halicarnasse ajoute que Tatius honorait des dieux dont il n’e´tait pas facile d’exprimer les noms en grec. Cette observation prouve la diffe´rence des deux espe`ces de divinite´s2. Ces conjurations avaient e´te´ re´ve´le´es a` Numa par Picus et par Faune, apre`s qu’E´ge´rie l’eut averti de les garrotter. Elles avaient l’art de forcer les dieux a` faire connaıˆtre leur volonte´ par les e´clairs et le vol des oi seaux, signes que les mortels vulgaires n’obtenaient que par une faveur que les dieux pouvaient leur refuser. (NIEBUHR, I, 1673.)

2 professaient ] professent Ms-texte 8–9 l’e´mule ... pe´ne´trer ] leur e´mule : il 〈deux ou trois mots illis.〉 veut pe´ne´trer Ms-texte 17 de longues e´preuves. Ce ] des e´preuves longues & pe´nibles. On peut conjecturer qu’il enseignoit que les Dieux, objets du Culte vulgaire, n’e´toient que les embleˆmes des diffe´rens attributs de la Divinite´ ou plutot des diverses puissances de la nature. Ce Ms-notes 22 de preˆtres. ] sacerdotale. Ms-notes 1

2 3

Voir E´tienne Clavier, Histoire des premiers temps de la Gre`ce (Paris : Le´opold Collin, 1809, t. I, pp. 85–86). BC cite cette premie`re e´dition ; la citation est conforme, avec des coupes. Voir Roman Antiquities, e´d. Cary, t. I, p. 455 : «and to other gods whose names are difficult to be expressed in the Greek language». BC cite la page a` laquelle Niebuhr expose les faits dont il est question ici. Voir ci-dessus, pp. 350–351 et 356–357, une autre version de la meˆme histoire.

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ce´re´monies qu’il avait essaye´es d’une main profane a. Tarquin l’Ancien b repousse plus directement la religion e´trusque, pour introduire l’esprit de la religion grecque. Il appelle a` Rome des familles grecques de toutes les a

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«Tradunt volventem commentarios Numæ, quum ibi quædam occulta solennia sacrificia Jovi Elicio facta invenisse, operatum his sacris se abdidisse : sed non rite initum aut curatum id sacrum esse : nec solum ullam ei oblatam cœlestium speciem, sed ira Jovis sollicitati prava religione fulmine ictum cum domo conflagrasse.» (TIT. LIV. I, 311.) La tradition fait de Tarquin l’Ancien le petit-fils d’un fugitif de Corinthe. Elle raconte que son aı¨eul De´marate, de la race des Bacchiades, voyant sa famille opprime´e par la tyrannie des Cypse´lides, avait cherche´ un asile en E´trurie vers la 30e olympiade, et y avait amene´ plusieurs artistes grecs. (PLINE, Hist. NAT., XXXV, 3–5 ; STRAB. V2.) En effet, quelques anne´es apre`s l’expulsion des rois, des artistes grecs e´taient e´tablis a` Rome, et deux d’entre eux, Damophile et Gorgasus, travaille`rent a` la de´coration d’un temple de Ce´re`s. (PLIN. ibid. 123 ; DEN. D’HAL. VII, 174 ; TACIT. Annal. II, 9.5) Les 170 ans pendant lesquels, suivant Varron, les Romains n’eurent point de simulacres, finissent pre´cise´ment sous le re`gne de Tarquin l’Ancien, puisque, d’apre`s la chronologie Varronienne, ce prince mourut l’an de Rome 175 ; et nous apprenons de Pline (Hist. Nat., XXV, 12 et 456) qu’il avait fait placer dans le Capitole une statue de Jupiter, et dans un autre temple une statue d’Hercule. Il y a dans Tertullien un passage qui indique que les Romains avaient conserve´ le souvenir de cette re´volution : «Etsi a Numa concepta est curiositas superstitiosa, nondum tamen aut simulacris aut templis res divina apud Romanos constabat, frugi religio et pauperes ritus, ac nulla Capitolia certantia cœlo, sed temeraria de cœspite altaria, et vasa adhuc Samia et nidor ex illis, et Deus ipse nusquam. Nondum enim tunc ingenia Græcorum atque Tuscorum fingendis simulacris urbem inundaverunt.» (Apolog., cap. 257.)

2–3 la religion ... grecque. ] l’ancienne religion de l’Italie, pour introduire d’une manie`re plus de´cisive l’esprit de la religion grecque dans le Polythe´isme Romain. Ms-texte 6 ullam ] nullam Ms-notes 14–24 Les 170 ... 25.) ] ajoute´ dans la col. de gauche Les 170 ... Capitole une statue 〈d’Herme`s〉 de Jupiter ... inundaverent. apologet. cap. 15. Ms-notes 1 2

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BC ne copie pas tout a` fait fide`lement le texte. Le renvoi a` Pline, Histoire naturelle, vise la dernie`re phrase du livre XXXV, § 16, qui re´sume la biographie de Tarquin l’Ancien (Histoire naturelle, livre XXXV, texte e´tabli, traduit et commente´ par Jean-Michel Croisille, Paris : Belles Lettres, 1985, p. 43). – BC renvoie a` Strabon, livre V, chap. II, § 2, ou` se trouve la fable de De´marate et de son fils Lukumo et l’e´tablissement des arts grecs en E´trurie. Chez Pline, Histoire naturelle, livre XXXV, § 154, on trouve le re´cit de la de´coration du temple de Ce´re`s par les artistes grecs Damophilus et Gorgasus. «La partie droite e´tait l’œuvre de Damophilus, celle de gauche de Gorgasus» (e´d. Croisille, pp. 102–103). Le renvoi au livre VII des Antiquite´s romaines est une erreur. Denys d’Halicarnasse parle de la conse´cration du temple de Ce´re`s, acheve´ sous le Consul Cassius, dans le livre VI, 94, 3 : «Cassius [...] consecrated the temple of Ceres, Liber and Libera, which stands at the end of the Circus Maximus, being erected directly above the starting-place» (e´d. Cary, t. IV, p. 137). Le passage ne mentionne pas d’artistes grecs. Le passage indique´ des Annales ne parle ni de Tarquin l’Ancien, ni des artistes grecs, ni d’un temple de Ce´re`s. On pourrait renvoyer au livre II, chap. 49, qui mentionne le temple de Ce´re`s pre`s du grand cirque de Rome. Nous supposons que BC s’est servi d’une source non identifie´e sans relire le texte de Tacite. Le premier renvoi a` Pline, Histoire naturelle, parle du nom d’une plante, le deuxie`me renvoi est une erreur. BC copie pas tout a` fait fide`lement un passage de Tertullien, Apologeticum, chap. XXV

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parties de l’Italie ou` elles s’e´taient re´fugie´es a. Il ordonne la construction d’un temple de Jupiter sur le mont Tarpe´ien ; son fils l’ache`ve, et comme il y avait sur cette colline plusieurs autels e´rige´s a` des divinite´s italiques, on les en expulse solennellement b. Ainsi, comme nous l’avons dit en commenc¸ant ce chapitre, Rome naissante vit lutter dans ses murs les deux espe`ces de polythe´isme. L’ensemble de la lutte nous e´chappe, mais d’incontestables de´tails la trahissent. Cette lutte dut avoir ses vicissitudes et ses intervalles. Les rivalite´s des rois et des preˆtres engage`rent probablement les premiers, tantoˆt a` chercher contre les seconds des appuis dans les e´trangers qu’ils accueillaient et qui leur apportaient l’esprit anti-sacerdotal de la Gre`ce, tantoˆt a` ne´gocier avec des rivaux toujours a` craindre. Romulus avait fait venir des pontifes d’E´trurie, afin d’apprendre d’eux les rites ne´cessaires pour concilier aux villes nouvellement fonde´es la protection des dieux c. Tarquin l’Ancien, malgre´ son anathe`me contre les dieux d’Italie, emprunta des Toscans leurs jeux sacre´s et quelques ce´re´monies religieuses d ; et son fils, de´daigneux a

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b

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Notamment de Ve´litri, colonie grecque. SUET. in Augusto1. Le passage de TITE-LIVE (I, 55) prouve clairement la re´volution ope´re´e dans la religion par les Tarquins : «Tarquinius (superbus) Jovis templum in monte Tarpeio reliquit. Tarquinios ambos, patrem vovisse, filium perfecisse. Et ut libera a cæteris religionibus area esset, et tota Jovis templique ejus.... exaugurare fana sacellaque statuit, quæ aliquot ibi a Tatio rege consecrata inaugurataque fuerant2.» PLUTARCH. in Romulo3. TIT.-LIV. I, 35–384.

2 son fils l’ache`ve ] ajoute´ dans la col. de gauche Ms-texte 4 les en expulse solennellement. ] il les expulse sollennellement ces Divinite´s. Ms-texte 4–5 Ainsi ... vit ] Ainsi 〈Rome, durant les deux premiers sie`cles de son existence〉 la suite dans la col. de gauche 〈deux mots illis.〉 comme nous l’avons dit en 〈trois ou quatre mots illis.〉 commencant ce chapitre Rome naissante vit Ms-texte 8–10 Cette ... seconds ] passage remanie´ Cette ce mot re´crit sur Elle 〈eut vraisemblablement〉 lutte dut avoir ses vicissitudes ... intervalles. 〈Il est probable que〉 les rivalite´s des Rois 〈&〉 avec des preˆtres 〈les〉 engage`rent 〈quatre mots illis. a` ne´gocier avec ces rivaux toujours a` craindre〉 probablement les 1ers ce dernier syntagme ajoute´ dans la col. de gauche 〈ou〉 tantot a` chercher contr〈’eux〉 les seconds Ms-texte 11–14 tantoˆt ... des dieux. Tarquin ] ajoute´ dans la col. de gauche tantot ... des Dieux. 〈ainsi〉 Tarquin Ms-texte 20 ambos ] reges ambos Ms-notes

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(Corpus Christianorum, t. I, p. 137). Sue´tone, De vita Cæsarum libri VIII, «Divus Augustus», chap. I-II : «Gentem Octaviam Velitris præcipuam olim fuisse multa declarant. [...] Ea gens a Tarquinio Prisco rege inter minores gentis adlecta in senatum, mox a Servio Tullio in patricias traducta.» Tite-Live, I, 55, §§ 1–2. Citation presque conforme, quelques coupes. Plutarque, Vies paralle`les, «Romulus», chap. 11, qui raconte que Romulus fit venir d’E´trurie des hommes qui ordonne`rent la fondation de la ville d’apre`s des statuts secrets qu’ils observaient. Tite-Live, I, 35–38. Les chapitres cite´s ne confirment qu’imparfaitement ce que dit BC. Tite-Live parle de l’institution de jeux plus opulents qu’auparavant apre`s la victoire sur les

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d’abord des livres sibyllins, rendit ensuite un solennel et barbare hommage a a` ces feuilles recueillies par des devins e´trusques et de´positaires des destins de Rome b. Ce qui paraıˆt avoir mis un terme a` cette oscillation des deux cultes, et de´termine´ la victoire en faveur du polythe´isme grec, c’est l’expulsion des rois et l’e´tablissement de la re´publique. Chose singulie`re ! cette re´volution fut probablement l’ouvrage des preˆtres ; elle tourna contre eux. Sans elle les pontifes se seraient vraisemblablement coalise´s avec les monarques. Les premiers auraient fait recevoir, par les seconds, leurs dogmes et leurs rites, en preˆtant a` leur empire temporel une sanction sacre´e : mais la liberte´ politique, quelque diffe´rente qu’elle fuˆt chez les anciens de ce que nous nommons liberte´ dans nos temps modernes, opposa une puissante barrie`re aux empie`tements du pouvoir sacerdotal. Les gouvernements populaires, ou meˆme les aristocraties qui appellent beaucoup d’individus a` la participation des affaires, balancent, par les inte´reˆts de ce monde, l’autorite´ spirituelle. Le despotisme, versant a` grands flots sur ses esclaves tous les malheurs et tous les opprobres, les met a` la merci de quiconque leur promet un asile ailleurs, a` moins que le despotisme, habile a` tout avilir, n’avilisse aussi la religion ; mais ceci n’arrive que chez les nations tre`s-corrompues, et par un concours de circonstances heureusement assez rares c. a

b c

Il fit coudre dans un sac et jeter a` la mer un Romain qui avait donne´ ces livres a` copier. DEN. D’HAL. IV1. DEN. D’HAL. IV, 14. V. t. I, p. 60, 2e e´dition2.

1 solennel et barbare ] ajoute´ dans la col. de gauche Ms-texte 6–7 Chose ... Sans elle ] la premie`re phrase ajoute´e dans la col. de gauche ; la corr. suivante dans l’interl. Chose ... contr’eux. Sans 〈cette re´volution〉 elle Ms-texte 10–11 politique ] publique Ms-texte 13–20 Les gouvernements ... rares. ] ajoute´ dans la col. de gauche Les Gouvernemens populaires balancent par ... assez rares. Ms-texte

1

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Latins : «ludos opulentius instructiusque quam priores reges fecit» (chap. 35, 7), et il est question de l’augure qui devint un usage sacre´. Les deux renvois a` Denys d’Halicarnasse, Antiquite´s romaines, se rapportent au livre IV, 62, 1–6. L’auteur grec y raconte l’histoire des livres sibyllins. Offerts a` Tarquin le Superbe (le neveu de Tarquin l’Ancien) par une vieille femme (la Sibylle de Cumes ; selon la fable une message`re des dieux) pour une somme assez e´leve´e, celui-ci refuse deux fois l’achat. Chaque fois, la vieille bruˆle trois livres, de sorte qu’a` la troisie`me offre (elle demande toujours le meˆme prix) il ne reste plus que trois livres. Sur le conseil des augures, qui reconnaissent dans ce curieux comportement une action des dieux, Tarquin les ache`te et les fait de´poser, dans une caisse de pierre, dans le sanctuaire de Jupiter, confiant la garde de ce tre´sor a` deux esclaves. L’un d’eux, corrompu par un don d’argent, permet la copie de certains passages. Le forfait fut de´couvert et le coupable cousu dans un sac de cuir et jete´ dans le Tibre (e´d. de Cary, t. II, pp. 465–467). OCBC, Œuvres, t. XVII, pp. 137–139.

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Sans doute, les expe´ditions militaires des Romains contribue`rent aussi a` diminuer l’autorite´ des preˆtres. Un auteur franc¸ais remarque avec raison que si le re`gne guerrier de Tullus Hostilius n’euˆt succe´de´ imme´diatement au re`gne pacifique de Numa, la superstition la plus grossie`re aurait pese´ sur Rome naissante. L’esprit guerrier seul n’aurait pas sauve´ Rome. Les Scandinaves, plus belliqueux que les Romains, ont, a` une e´poque tardive a` la ve´rite´, subi le joug des preˆtres. Sans la liberte´, Rome pacifique euˆt e´prouve´ la meˆme destine´e que les E´gyptiens ; Rome guerrie`re, avec les diffe´rences que les climats entraıˆnent, la meˆme destine´e que les Scandinaves. Ce qui le prouve, c’est que toutes les re´formes qui de´cide`rent du ge´nie et de la tendance de la religion romaine, eurent lieu dans le sie`cle qui suivit l’abolition de la royaute´. Les dieux prirent alors des formes plus e´le´gantes. En adoptant la figure humaine, ils se de´gage`rent des monstruosite´s dont l’esprit symbolique, ente´ sur le fe´tichisme, les surcharge a. Les pe´nates, par exemple, au lieu d’eˆtre des vases informes, entoure´s de serpents, furent des adolescents arme´s de lances b. Alors aussi furent supprime´s les sacrifices humains c. Junius a b c

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CREUTZ. II, 3151. CREUTZ. ib. La suppression des sacrifices humains est attribue´e a` Hercule, dans toutes les traditions italiques. Il tua Faunus, qui immolait des hommes. (PLUTARCH. Parallel. Min. no 352.) Il expliqua aux Sabins le sens d’un oracle, sur la foi duquel ils offraient aux dieux des victimes humaines, et il les fit renoncer a` cette pratique. (DEN. D’HAL. I, 14 ; STEPH. Byz. in Αβοριγ3.) Il est e´vident que le nom d’Hercule est ici un nom ge´ne´rique ; ce he´ros occupe sans cesse la premie`re place dans toutes les le´gendes latines. Il intervient dans des e´ve´nements ou dans des fables qu’on racontait en Gre`ce sans faire aucune mention de lui ; son souvenir s’entremeˆle a` beaucoup de rites et d’institutions du culte romain. On offrait an-

2 l’autorite´ des preˆtres ] ajoute´ dans la col. de gauche Ms-texte 5 L’esprit ] Cependant l’esprit Ms-texte 13–17 Les dieux ... Alors aussi ] ajoute´ dans la col. de gauche, le dernier mot dans l’interl. Ms-texte 19 ib. ] ib. suit un passage biffe´ (huit lignes) illis. Ms-notes 1

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Dans cette note et la suivante, BC reprend un argument de Creuzer que celui-ci esquisse en se servant d’un passage de Denys d’Halicarnasse, Antiquitates Romanorum, livre I, chap. 67. Creuzer dit ceci : «Im alten Tempel zu Lavinium in Latium [...] sah man Schlangenstäbe von Erz und Eisen und irdenes Trojanisches Gefäß. [...] offenbar [...] ein Krug oder eine irdene Lampe ; und es hatte also dieser Tempel die alten Symbole roher Art beibehalten, während man zu Rom und anderwärts die Penaten als zwei sitzende Jünglinge mit Lanzen bildete» (Symbolik, t. II, p. 315). BC ne pense e´videmment pas a` renvoyer aux Vies paralle`les. Nous supposons qu’il a trouve´ les de´tails sur le roi le´gendaire de l’empire des Aborige`nes dans l’Italie pre´-romaine chez Benjamin Hederich, Gründliches mythologisches Lexicon, Leipzig : in Gleditschens Handlung, 1770, article «Faunus» (col. 1108–1111), ou` on lit : «Jedoch soll ihn [i.e. Faunus] auch Herkules hingerichtet haben, da er ihn [i.e. Hercule], seiner Gewohnheit nach, als einen Fremden, seinem Vater, dem Mercurius opfern wollen.» Hederich renvoie correctement («Dercyllus ap. Plutarch. parall. min. num. 38. p. 315. T. II. Opp.») a` un petit texte, Plutarchi parallela : id est historiarum Græcarum cum Romanis coniuncta recensio, ou`

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Brutus remplac¸a les en fants immole´s a` Larunda par des teˆtes de pavots, nuellement a` Rome un sacrifice avec des ce´re´monies purement grecques, en me´moire d’une tradition relative a` Hercule (DEN. D’HAL. I, 9, et VI, 11), et les seules familles sacerdotales qui existassent dans cette ville lui e´taient consacre´es. (DEN. D’HAL. VIII.). Denys d’Halicarnasse nous parle de vestiges de temples et d’autels en son honneur, ante´rieurs a` la fondation de Rome, et sur le lieu meˆme ou` elle fut construite (id. ib.). Nous pensons donc que le nom d’Hercule e´tait la de´signation collective de plusieurs des colonies grecques. Cette conjecture s’accorde tre`s-bien avec l’influence de ces colonies, et quand Denys d’Halicarnasse (ib.) nous dit qu’on trouverait a` peine dans l’Italie entie`re un endroit ou` l’on ne rendıˆt pas a` Hercule les honneurs divins, il de´montre clairement, ce nous semble, l’universalite´ de cette influence. Mais en meˆme temps l’abolition des sacrifices humains par les colonies grecques prouve que ces sacrifices tenaient, du moins quant a` leur prolongation, a` l’esprit sacerdotal. Les colonies grecques n’e´taient pas soumises a` la puissance du sacerdoce ; elles affaiblirent ou de´truisirent cette puissance partout ou` elles pe´ne´tre`rent, et les sacrifices humains disparurent avec elle. Une tradition particulie`re rapporte ne´anmoins cette abolition, non a` Hercule, mais a` un vainqueur aux jeux olympiques. Un des compagnons d’Ulysse, jete´ sur les coˆtes d’Italie, ayant viole´ une jeune fille de Tecmesse, les habitants le lapide`rent. Il devint un mauvais ge´nie, qui mettait a` mort tous ceux qu’il

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3 les seules ] les deux seules Ms-notes 10–11 de´montre ... l’universalite´ ] de´montre, ce nous semble e´videmment l’universalite´ Ms-notes 14–15 cette puissance ... avec elle. ] cette ce mot re´crit sur 〈la〉 puissance 〈du sacerdoce〉 partout ... disparurent avec 〈ce pouvoir〉 elle corr. dans l’interl. Ms-notes

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l’on trouve : «Hercules Geryonis boues per Italiam agens, hospitio usus est Fauni regis, qui Mercurij fuit filius, ac patri immolare hospites solebat : is agressus Herculem, ab ipso trucidatus. Dercyllus tertio Italicorum.» Dercyllus, un historien grec dont on ignore quand il a ve´cu, est cite´ par Plutarque avec un passage du livre III De Italicis ; voir Jacoby, FGrHist t. IIIA, no 288, Frgt. 2. BC accepte la le´gende et copie la re´fe´rence a` l’e´dition Plutarchi Chæronensis omnium, quæ extant, operum, tomus secundus, continens moralia, Gulielmo Xylandro interprete, Francofvrti : In officina Danielis ac Dauidis Aubriorum, & Clementis Schleichii, M. DC. XX. Allusion a` un passage important pour l’argumentation de BC. Denys d’Halicarnasse, Antiquite´s romaines, I, 38, 2 : «On dit aussi que les Anciens offraient a` Cronos des sacrifices comme il s’en faisait a` Carthage [...] des sacrifices humains ; mais qu’He´racle`s, de´sireux de mettre fin a` ce rite sacrificiel, e´rigea l’autel qui se trouve sur la colline de Saturne et inaugura le sacrifice de victimes sans taches offertes sur des flammes pures» (e´d. Fromentin, p. 131). – Le renvoi a` Ste´phane de Byzance, Εθνικων vise l’article Αβοριγινες avec les vers de l’oracle de Dodone : «Partez a` la recherche du pays des aborige`nes, offrez, comme eux, a` Apollon la dıˆme, a` Jupiter des teˆtes et a` Saturne les lumie`res de la vie.» BC renvoie a` deux passages de Denys d’Halicarnasse, Antiquite´s romaines, qui contiennent la meˆme information : «ce sont les Epe´ens qui e´leve`rent avec He´racles un autel a` Cronos qui subsiste encore aujourd’hui au pied de la colline sur la voie qui monte du Forum au Capitole, et que le sacrifice que les Romains accomplissaient encore de mon temps en observant le rituel grec fut institue´ par eux» (I, 34, 4 ; e´d. Fromentin, p. 126). L’autre passage se trouve dans le livre VI, 1, 1 : «On rapporte e´galement que se dressait auparavant au meˆme endroit un autel baˆti par He´racle`s, sur lequel ceux qu’il avait charge´s de ce culte faisaient bruˆler les pre´mices en sacrifice, selon le rite grec» (Antiquite´s romaines, t. VI, livre VI, texte e´tabli et traduit par Jacques-Hubert Sautel, Paris : Belles Lettres, 2016, p. 3). Le renvoi suivant vise un de´tail qu’on trouve dans les passages cite´s.

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et les trente sexage´naires qu’on jetait dans le Tibre, par trente simulacres faits de paille a. Des jeux solennels furent institue´s en me´moire de ce

a

rencontrait. Les habitants ayant consulte´ l’oracle de Delphes, il leur fut commande´ d’honorer la me´moire de celui qu’ils avaient tue´, en lui consacrant un bois, lui baˆtissant un temple, et lui sacrifiant tous les ans une vierge. Ils le firent jusqu’a` l’e´poque ou` un Lace´de´monien, Euthymus, qui avait me´rite´ une statue par ses victoires aux jeux olympiques, e´mu de pitie´ et d’amour pour la victime, offrit de combattre le mauvais ge´nie et en fut vainqueur. Alors le sacrifice fut aboli. (ÆLIEN, Var. Hist., VIII, 18 ; PAUSAN. VI, 61.) On voit que c’est toujours a` un Grec que cette abolition est attribue´e. Saturne et Ops, dit une autre le´gende, avaient, dit-on, mange´ de la chair humaine : Jupiter avait rejete´ ce de´testable usage. (MACR. Sat. I, 7 ; ARNOB. adv. Gent. II ; LACTANT. I, 202.) Ops et Saturne sont des divinite´s italiques ; Jupiter est un dieu grec. (V. tom. I, ch. 93.) OVID., Fast. V4 ; SERV. ad. Georg. I, 43 ; POMP. FEST. VARRO, de ling. lat. VI ; DEN. D’HAL. I.

2-p. 372.1 de ce ... humanite´. ] de l’abolition de ces sacrifices. Ms-texte 9–11 Saturne ... 20.) ] ajoute´ dans la col. de gauche Saturne et Ops avoient, disoit-on, mange´ ... 20.) la dernie`re phrase de la note manque Ms-notes 1

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E´lien, Histoire varie´e, donne a` l’endroit indique´ une version de la le´gende d’Euthymos. Voir le texte Paris : Belles Lettres, 1991, p. 88. – Pausanias, livre VI, chap. VI, 4–11, raconte la le´gende d’Euthymos que BC re´sume dans sa note. Cette le´gende se retrouve aussi chez Strabon. Le livre I, chap. VII des Saturnalia ne parle pas de la de´esse Ops et des Opalia. Le chap. X du meˆme livre traite d’Ops, mais ne mentionne pas cette coutume barbare. – BC pense aux derniers chapitres (LXX-LXXIV) du livre II d’Arnobe, qui traitent de Jupiter (e´d. Amata, pp. 354–362 ; e´d. Orellius, pp. 100–104 ; e´d. Armisen-Marchetti, pp. 72–78). – Le renvoi a` Lactance doit eˆtre corrige´. Il faut lire «I, XXI». Lactance parle dans ce chapitre des sacrifices humains chez les Anciens et cite les cas que nous retrouvons dans l’ouvrage de BC (Jovis Teucrus, les sacrifices a` la Diane des Taurides, les sacrifices des Gaulois) et critique l’usage chez les Romains (Jupiter Latiaris, les sexage´naires jete´s dans le Tibre). Il n’y est pas question du refus de Jupiter de manger de la chair humaine. Mais Lactance raconte la le´gende selon laquelle Hercule aurait aboli la pre´cipitation des hommes du pont Milvius (Lactantii Firmiani Opera omnia quæ extant [...] Biponti : Ex Typographia Societatis, 1786, pp. 72–80). OCBC, Œuvres, t. XVII, pp. 182–213. Le meˆme chapitre est de´ja` cite´ ci-dessus, pp. 192, n. 3 et 211, n.1. Fasti, livre V, vv. 621–662. Ovide ne parle pas de trente sexage´naires, mais de deux hommes sacrifie´s selon l’usage de l’ıˆle de Leukos, ou` l’on sacrifiait a` Apollon un homme en le pre´cipitant dans la mer. – Le commentaire de Servius (Ge´orgiques, I, 43) ne parle pas de ces sacrifices. – Voir Pompeius Festus, l’entre´e «Sexagenarios», et les notes accroche´es a` cet article (e´d. de 1700, pp. 504–505). – Varro, On the Roman Language, livre VII, chap. 44 : «Argei fiunt simulacra hominum XXVII ; ea quotannis de Ponte Sublicio a sacerdotibus publice deici solent in Tiberim» (e´d. Kent, vol. I, pp. 308–310). La meˆme ce´re´monie est raconte´e par Ovide, Fasti, livre V, vv. 621–662. – Le renvoi a` Denys d’Halicarnasse vise ce

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triomphe de l’humanite´ a. De`s-lors, ces ce´re´monies ne se renouvele`rent que comme de tristes exceptions, dans des circonstances extraordinaires b ; et lors meˆme que de telles circonstances ramene`rent, par intervalles, cette superstition de´plorable, les Romains en de´tourne`rent toujours leurs regards avec horreur. La mort d’un homme, bien qu’ordonne´e par les dieux, ne leur paraissait point, comme a` d’autres peuples, une occasion de feˆtes, mais de lamentations, de deuil et de regrets. Plutarque, en nous racontant que, dans l’espe´rance de de´tourner les calamite´s que l’incontinence des vestales et les livres sibyllins leur faisaient craindre, les Romains enterre`rent vivants un Grec et une Grecque, un Gaulois et une Gauloise, ajoute qu’un sacrifice expiatoire e´tait offert tous les ans aux maˆnes de ces victimes c. Ovide nie que des rites pareils eussent a b

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Ludi compitalitii1. PITISC. Les conspirateurs qui voulaient ramener a` Rome les Tarquins expulse´s s’e´taient engage´s re´ciproquement par le sacrifice d’une victime humaine. (PLUT. in vita Public2.) PLUTARCH. Quæst. Rom. no 83. La meˆme chose eut lieu du temps de Ce´sar. (PLIN. XXVIII, 2) ; mais il n’en est pas moins positif que ces rites avaient e´te´ prohibe´s a` Rome par une loi formelle l’an 655 de cette ville3.

12 victimes. Ovide ] victimes. Dans Virgile, Ene´e se pre´pare a` immoler de jeunes captifs sur le tombeau de Pallas, fils d’Evandre. BC pre´voit une note Æn. XI. 81–82. retour au texte mais dans la description meˆme des fune´railles de Pallas, il n’est plus question de ces captifs & il n’est point dit qu’ils soient immole´s. deuxie`me note ib. 182–202. Ms-texte et Ms-notes

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passage : «il [i.e. Hercule] apprit aux indige`nes [...] a` fabriquer a` la place des hommes qu’ils jetaient pieds et poings lie´s dans le courant du Tibre des mannequins a` figure humaine, habille´s de la meˆme fac¸on qu’eux et a` les pre´cipiter dans le fleuve» (Antiquite´s romaines, e´d. Fromentin, p. 131). BC cite l’article «Ludi compitales» de Samuel Pitiscus, Lexicon Antiquitatum Romanorum : in quo ritus et antiquitates [...] sacræ et profanæ, publicæ et privatæ [...] exponuntur, Venetiis : ex typographia Balleoniana, MDCCXIX, t. II, p. 490a. La feˆte, institue´e selon la le´gende par Tarquinius Priscus, ne comme´more pas, comme le dit BC, la re´forme du sacrifice des sexage´naires. Il y est pourtant question de l’abolition des sacrifices humains : «remoto scilicet scelere infaustæ sacrificationis : factum est ut effigies Maniæ suspensæ pro singulorum foribus periculum, si quod immineret familiis, expiarent». BC fait allusion au § 4 du re´cit de la vie de Publicola. Plutarque raconte que deux des fils du consul Brutus s’engagent, avec des repre´sentants de deux familles puissantes de Rome, a` ramener les Tarquins chasse´s de la ville. Cet engagement est solennellement conclu par le sacrifice d’un homme, tue´ dans la maison des Aquiliens. Un esclave, pre´sent par hasard, sera le te´moin de cette trahison, qu’il re´ve`lera aux se´nateurs. BC cite Plutarque, Quæstiones romanæ, chap. 83 ou` il est question de cet enterrement barbare au Forum Boarium (283e–284c). Mais il n’y est pas question d’un sacrifice expiatoire annuel. – Le renvoi a` Pline, Histoire naturelle, livre XXVIII, vise une phrase du § 12 (une partie du chap. 2, ancienne nume´rotation) : «Notre e´poque meˆme a vu enterrer vivants dans le marche´ aux bœufs un homme et une femme, Grecs ou de l’une des nations avec lesquelles nous e´tions alors en guerre» (Histoire naturelle, livre XXVIII, texte e´tabli, traduit et commente´ par A. Ernout, Paris : Belles Lettres, 1962, p. 22).

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jamais existe´ a` Rome. Il est naturel qu’un poe`te, e´crivant du temps d’Auguste, ne vouluˆt pas croire aux usages fe´roces de ses anceˆtres. Mais il y a, dans le meˆme poe`te, un dialogue curieux a` cet e´gard, entre Jupiter et Numa b ; et ce dialogue, qui contient, sous une apparence de plaisanterie, l’histoire exacte de cette re´volution dans le culte, prouve, en meˆme temps, que l’assertion d’Ovide n’e´tait pas fonde´e. A dater de la liberte´ de Rome, sa puissance fut toujours employe´e a` interdire les sacrifices humains chez les peuples allie´s ou vaincus. Elle en purifia d’abord l’Italie, et successivement elle travailla a` en de´livrer l’Espagne et les Gaules a. Ce´sar, pre´teur en Ibe´rie, abolit cet usage, que les Phe´niciens avaient porte´ a` Cadix b. Enfin, Tibe`re et Claude, voyant la perse´ve´rance obstine´e des Druides, les perse´cute`rent et les de´truisirent c. b

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b c

Cæde caput, dixit (Jupiter). Cui rex, parebimus, inquit. Cædenda est hortis erecta cæpa meis. Addidit hic, hominis : summos, ait ille, capillos. Postulat hic animam, cui Numa, piscis, ait. Risit. Fast. III. «Je veux une teˆte, dit Jupiter. Tu seras obe´i, re´pond le roi ; je couperai la teˆte a` un o[i]gnon qui s’e´le`ve dans mes jardins. Je veux la teˆte d’un homme, reprend le premier. Je t’offrirai, dit le second, l’extre´mite´ de ses cheveux. C’est une ame que je demande, s’e´crie enfin le dieu impatient. Tu auras celle d’un poisson, re´plique Numa. Le dieu se prit a` rire.» Notez que dans ce dialogue Jupiter paraıˆt e´voque´ par Faune et Picus, deux divinite´s de l’ancien Latium. Il est inutile de faire observer a` nos lecteurs que c’est a` tort qu’Ovide attribue a` Numa une re´forme qui ne fut comple`te que plus d’un sie`cle apre`s lui. PLUTARQUE (vit. Numæ) partage cette erreur1. V. dans PLINE (XXX,1) le se´natus-consulte promulgue´ l’an 657 de Rome, et qui regardait principalement les Gaulois2. CICER. pro Balbo, 433. PLINE (VIII, 24) fait de l’abolition de cette pratique un grand sujet d’e´loges pour ses compatriotes. «Non satis æstimari potest quantum Romanis debeatur, qui sustulere monstra in quibus hominem occidere religiosissimum erat, mandi vero etiam saluberrimum.»

9 l’Italie ... de´livrer ] l’Italie entie`re, et ... elle en de´livra Ms-texte 12 de´truisirent. ] 〈proscr〉 de´truisirent Ms-texte 30 de cette pratique ] des sacrifices humains Ms-notes 1

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Fasti, livre III, vv. 339–343. Les vers appartiennent au passage qui explique la feˆte des Mamuralies, du forgeron Mamurus. – Le renvoi a` Plutarque, Vies paralle`les, vise dans la «Vie de Numa» le chap. 15, qui raconte le meˆme e´pisode. BC pense a` Pline, Histoire naturelle, livre XXX, § 13 (ce n’est pas le de´but de ce livre) qui parle des Gaulois. Ils «ont e´te´ posse´de´s par la magie, et meˆme jusqu’a` nos jours. C’est seulement en effet sous le principat de l’empereur Tibe`re que l’on supprima leurs druides et cette engeance de prophe`tes et de me´decins» (Histoire naturelle, livre XXX, texte e´tabli, traduit et commente´ par Alfred Ernout, Paris : Belles Lettres, 1963, p. 27). Le texte de Pline est a` mettre en rapport avec les historiens anciens qui de´noncent les sacrifices humains. Il faut lire «XIX, 43». BC cible cette phrase : «inveteratam quandam barbariam ex Gaditanorum moribus disciplinaque delerit» (Cice´ron, Pro Balbo). BC affirme qu’il s’agit de sacrifices humains qu’on a abolis. Cette hypothe`se est probable, mais pas tout a` fait suˆre. Ce renvoi a` Pline, Histoire naturelle, est faux. Voir ci-dessus, n. 2.

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Quelques e´crivains ont conside´re´ comme une forme de sacrifices humains, les combats de gladiateurs usite´s a` Rome, et devenus, surtout dans les derniers sie`cles, une partie essentielle de toutes les pompes et de tous les plaisirs prodigue´s a` un peuple inquiet, corrompu et redoutable. Mais ces combats e´taient des amusements fe´roces, non des ce´re´monies religieuses. L’esprit de conqueˆte, toujours arrogant et toujours fa rouche, de´pouillait, aux yeux des vainqueurs, les malheureux tombe´s dans les fers, de tous les droits de la condition humaine. Les Romains, de´daigneux de leur sang sur le champ de bataille, se plaisaient a` voir couler, dans le cirque, le sang de leurs ennemis. Ce n’est pas leur religion, ce sont leurs habitudes guerrie`res qu’il faut accuser. La preuve en est dans le privile´ge que les spectateurs s’e´taient re´serve´, de faire grace au combattant qui se distinguait par son courage. Ils n’auraient ose´ frauder les dieux d’une victime que la pie´te´ leur aurait consacre´e. Enfin, c’e´taient des prisonniers que les Romains forc¸aient a` s’entr’e´gorger, et Rome se serait souleve´e contre l’insolent pontife qui aurait frappe´ l’un de ses citoyens d’un semblable arreˆt. Les rites licencieux furent e´galement e´carte´s du polythe´isme de Rome. L’histoire nous transmet une tentative du sacerdoce toscan, pour introduire dans cette religion des pratiques inde´centes. Les Sabines enleve´es demeuraient ste´riles. Leurs e´poux inquiets, consulte`rent Junon dans la foreˆt sacre´e du mont Esquilin. La cime des arbres antiques s’agita tout-a`-coup, un oracle scanda leux se fit entendre a. Heureusement la superstition ne put vaincre l’horreur nationale. Un devin, interpre`te de l’oracle, proposa d’e´luder l’ordre des dieux par une ce´re´monie moins re´voltante, qui devint partie des feˆtes lupercales, dans lesquelles des jeunes gens nus, ou presque nus, arme´s d’un fouet que formaient des courroies de peau de che`vre, frappaient les a

«Italidas matres, inquit, caper hirtus inito.» Fast.

III1.

8 sur ] 〈dans〉 sur Ms-texte 11–16 preuve ... arreˆt. ] on trouve au v o d’une feuille de´coupe´e dans un ms. non identifie´ une version ante´rieure de ce passage preuve en ... son courage ce qu’ils n’auroient ose´ sans [un ou deux mots cache´s] qu’ils avoient craint d’offenser [...] il apprit aux indige`nes [...] a` fabriquer a` la place des hommes qu’ils jetaient pieds et poings lie´s dans le courant du Tibre des mannequins a` figure humaine [...] a` pre´cipiter dans le fleuve» (e´d. Fromentin, p. 131). les Dieux. [plusieurs mots cache´s] prisonniers que les Romains forcoient a` s’entr’e´gorger [un ou deux mots cache´s] & Rome se seroit souleve´ contre le Pontife qui auroit frappe´ l’un de ses Citoyens d’une pareille sentance. Ms-notes 18 L’histoire ] 〈La repugnance〉 l’histoire Ms-texte 22 scandaleux ... entendre. ] se fit entendre : que les femmes d’Italie soient fe´conde´es par le mari d’une che`vre. Ms-texte 26 que formaient des ] forme´ de Ms-texte 1

Il faut lire : «sacer hirtus inito». Voir Fasti, II, 441. BC paraphrase, assez maladroitement d’ailleurs, les vers d’Ovide qui raconte l’histoire du devin e´trusque qui, pour obe´ir a` l’oracle, se fabrique un fouet avec la peau d’un bouc et frappe le dos des femmes. C’est l’origine le´gendaire du rite de la fe´condite´ en l’honneur du dieu Pan aux feˆtes lupercales (15 fe´vrier) a` Rome. La faute de BC s’explique peut-eˆtre en consultant l’e´dition des Fasti de F. de

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femmes qui se pre´sentaient devant eux. Il est impossible de me´connaıˆtre, dans ce re´cit, la tendance du sacerdoce, qui, jusqu’a` l’arrive´e des colonies grecques, avait domine´ l’Italie, tendance qui fut surmonte´e par le bon sens de ces colonies. Les re´glements qui prohibaient les rites obsce`nes, sont tous e´mane´s du se´nat apre`s l’affermissement de la re´publique a. Nous les verrons tomber en de´sue´tude, et les pratiques licencieuses renaıˆtre, a` l’approche de l’empire b. a

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b

Le de´cret du se´nat contre les bacchanales et les orgies dans lesquelles on portait le Phallus est de l’an de Rome 568, 86 ans avant J.-Ch., 100 ans apre`s l’asservissement de l’E´trurie par les Romains. (V. HEYNE, Monum. E´trusc. art. nov. Com. Soc. Goett. V. p. 49.) Les jeux floraux, ce´le`bres par leur obsce´nite´ qui obligea Caton a` se retirer, datent de la religion de l’E´trurie. VARRON (de ling. lat. IV) et DENYS D’HALICARNASSE (I, 32) font remonter l’institution de ces jeux a` Tatius, roi des Sabins. La tradition qui l’attribue a` une courtisane nomme´e Flora est fonde´e sur la ressemblance du nom, mais d’ailleurs tre`s-peu vraisemblable. Le se´nat, qui pouvait fermer les yeux sur un usage antique et consacre´, n’aurait pas permis une innovation scandaleuse1. Le dieu Mutunus Tutunus, dont nous avons parle´ ci-dessus2, et qui avait e´te´ banni de Rome dans les temps de la se´ve´rite´ aristocratique et de l’effervescence populaire, d’accord sur le seul point de la religion, reparut au milieu du de´lire des tyrans et de l’abjection des esclaves.

1 qui ... eux. ] qu’ils rencontroient Ms-texte 2 sacerdoce ... colonies. ] Sacerdoce Toscan, de ce sacerdoce qui jusqu’a` l’arrive´e des Colonies Grecques, avoient domine´ l’Italie, & qui fut repousse´e par 〈la raison〉 le bon sens de ces colonies, qui n’avoient pas subi son joug. Ms-texte 11–12 datent ... l’E´tru4 obsce`nes ] licentieux Ms-texte 10 Com. ] Coment. Ms-notes rie. ] e´toient certainement un vestige de la religion sacerdotale de l’Etrurie. 14–15 tre`s-peu vraisemblable ] tre`s invraisemblable Ms-notes 17–19 Le Dieu ... religion, reparut ] ajout non utilise´ dans la col. de gauche Sale´s divinite´ hermaphrodite chez les Etrusques. suit dans la col. de droite la note le Dieu Mutunus qui avoit disparu dans les tems de la 〈un mot illis.〉 se´ve´rite´ corr. dans l’interl. aristocratique & de ces deux derniers mots auraient duˆ eˆtre biffe´s & au milieu des resistances de la democracie, reparut Ms-notes

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Saint-Ange (Paris : Michaud, 1823, p. 191) qui e´crit «caper» et traduit «Femmes, allez, ditelle, et qu’un bouc vous fe´conde.» Heyne, «Monumentorum etruscæ artis ad genera sua et tempora revocatorum illustratio», Novi commentarii societatis regiæ scientiarum gottingensis, t. V, Commentationes historicæ et philologicæ, Gottingæ : Dieterich, 1775, pp. 37–52. Il faudrait lire, pour bien situer l’analyse des feˆtes bacchanales a` Rome, tout le passage (pp. 45–49) ou` Heyne parle de ces feˆtes en partant de Tite-Live (Ab urbe condita, livre XXXIX, chap. 8–19). C’est Spurius Postumius Albinus, pre´teur en 189, qui entame les actions contre les Bacchanales a` Rome en 186, consacre´es par le de´cret du Se´nat et les perse´cutions contre les initie´s de ce rite, accuse´s de de´bauches et d’autres crimes. Il faudrait donc corriger la date indique´e par BC : non pas 86, mais 186. Les autres dates, copie´es chez Heyne (p. 45), sont exactes. – Le renvoi a` Varron, De lingua latina, vise un passage du livre IV : «Ea re Sabinorum linguam olent, quæ Tatii regis voto sunt Romæ didicatæ. Nam ut annales dicunt, vovit Opi, Floræque» (e´d. de 1788, t. I, p. 22). La note de Scaliger (t. II, p. 54) mentionne que ce passage se retrouve dans Saint-Augustin. – Quant a` Denys d’Halicarnasse, BC fait allusion a` la feˆte des Lupercales (15 fe´vrier). Le passage des Antiquite´s romaines (I, 32, 5) ne contient aucun de´tail obsce`ne et ne parle pas de Tatius. Voir aussi I, 80 (e´d. Fromentin, t. I, pp. 122–123 et 202). Voir ci-dessus, p. 354, ligne 8 et les notes.

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En meˆme temps que les Romains repousse`rent les rites obsce`nes, ils mitige`rent, bien que le´ge`rement, les privations contre nature. A Albe, les vestales e´taient astreintes a` une continence perpe´tuelle ; a` Rome, elles pouvaient s’en affranchir apre`s trente ans a. Les tortures volontaires ne s’introduisirent que fort tard dans le polythe´isme de Rome, soit comme un usage e´tranger, soit comme re´miniscence des pratiques antiques, espe`ce de re´miniscence qui se re´veille facilement dans les calamite´s et dans les dangers b. a

339 b

Ce fut Numa qui transporta d’Albe a` Rome l’institution des vestales, et qui choisit lui-meˆme les quatre premie`res. (TIT. LIV. I, 201.) Dans la ville d’Albe, les vestales coupables e´taient battues de verges jusqu’a` la mort. Numa les condamna a` eˆtre lapide´es. Tarquin l’Ancien ordonna qu’elles seraient enterre´es vivantes. (DEN. D’HAL. VIII, 14 ; IX, 102.) On reconnaıˆt la` une conces sion de ce prince envers les preˆtres. Nous en avons parle´ ci-dessus. Les lois des douze tables de´fendaient expresse´ment aux femmes de se de´chirer les joues. Mulieres genas ne radunto. C’e´tait un usage e´trusque, emprunte´ des sacrifices fune´raires, ut sanguine ostenso inferis satisfiat. (VARR. ap. Rosin. antiq. Rom. ed. DEMPSTER, p. 4423.) Lorsque, vers la fin du cinquie`me et surtout dans le sixie`me sie`cle de Rome, le culte de Cybe`le y arriva de contre´es sacerdotales, les Romains prohibe`rent les danses fre´ne´tiques des Corybantes, qui se mutilaient. (LACT. de Fals. Rel. I, 21 ; JUVENAL, sat. IV ; PROPERT. ; PLUT. in Pyrrh. ; TIT. LIV. XXIX, 10, 11, 14 ; APPIAN. de bello Annibal., XLV4.)

10 20.) ] 20. Ac. des Inscr. Vol. texte et Ms-notes 1 2

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p. 165 Ms-notes

14–16 Les lois ... 442.) ] manque Ms-

Tite-Live, Ab urbe condita, livre I, chap. 20, § 3 : «virginesque Vestæ legit, Alba oriundum sacerdotium et genti conditoris haud alienum». Sur les Vestales et les punitions cruelles de celles qui perdaient leur virginite´, on lira dans les Antiquite´s romaines le livre II, 67, 1–5 (e´d. Cary, t. I, pp. 507–509). Les passages indique´s par BC se rapportent au texte de la traduction franc¸aise par Franc¸ois Bellanger (Paris : Lottin, 1723) et visent le sort de deux Vestales coupables, Opimia et Urbinia, ensevelies vivantes, comme les lois le pre´voyaient (voir Les antiquite´s romaines de Denys d’Halicarnasse, traduites en franc¸ais par Bellanger, Chaumont : Cousot, an VIII, pp. 234–235 et 361– 362 ; e´d. Cary, t. V, p. 277 et t. VI, p. 55). BC cite un passage qui se trouve dans l’ouvrage de Johannes Rosinus (1551–1626), Iohannis Rosini Antiquitatum romanarum corpus absolutissimum, cum notis doctissimis ac locupletissimis Thomæ Dempsteri J. C., [...] Amstelædami : Apud Salomonem Schouten, MDCCXLIII. Voir le livre V (qui parle, entre autres, des rites fune´raires), chap. XXXIX, «De funeribus & sepulchris». Rosinus explique a` la page indique´e que l’usage d’une automutilation remplac¸ait des sacrifices fune´raires sanglants ; on immolait au pied des buˆchers des hommes, d’apre`s Servius, on avait la coutume «ut ante rogos humanus sanguis effunderetur, vel captivorum, vel gladiatorum». Mais «sin captivorum, aut gladiatorum copia non esset, laniantes genas suum effundebant cruorem, ut rogis illa imago restitueretur, vel, quemadmodum Varro loquitur, ut sanguine ostenso inferis satisfiat». Cet usage fut interdit par la loi des XII Tables (BC cite la phrase). BC pense probablement a` Lactance, Inst. div., livre I, chap. 21, 16, de´ja` cite´ ci-dessus, p. 323. – Il renvoie a` la sixie`me satire de Juve´nal qui brosse un tableau virulent des de´-

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Livre XI, chapitre VII – De´monstration des assertions ci-dessus

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En re´sultat, nous apercevons a` Rome, d’une manie`re plus e´vidente que partout ailleurs, l’opposition fondamentale du polythe´isme sacerdotal et du polythe´isme inde´pendant. Si les habitants de Rome naissante e´taient reporte´s par quelques habitudes ante´rieures et des souvenirs traditionnels vers la religion de l’Italie, qui e´tait le culte de leurs anceˆtres, et vers l’histoire de l’Italie, qui e´tait leur histoire, le respect que les descendants des colonies avaient conserve´ pour leur patrie originaire plana, pour ainsi dire, sur ces souvenirs et ces habitudes. La religion italique fournit aux Romains un nombre infini de divinite´s a, beaucoup de le´gendes, d’usages et de rites b. a

b

Des noms e´trusques furent transporte´s a` ces divinite´s grecques. Pallas Athe`ne´, que les E´trusques nommaient Me´nerva ou Minerve, conserva cette appellation. (MICALI II, p. 48 et suiv1.) La musique dont les Romains se servaient dans leurs pompes religieuses e´tait l’ancienne musique e´trusque. (STRAB. V ; PLIN. Hist. Nat. XV, 26 ; VIRG. Georg. II, 193, ibiq. interpretes2.)

14–15 interpretes.) ] interpretes. Creutz. II. 417 Ms-notes

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bauches de Rome (Juve´nal, Satires, texte e´tabli et traduit par Pierre de Labriolle et Franc¸ois Villeneuve, Paris : Belles Lettres, 21931, pp. 60–85). – Quant a` Properce, voir les E´le´gies, livre III, 17, l’e´le´gie adresse´e a` Bacchus («Nunc, o Bacche, tuis humiles advolminur aris») ; elle donne une description des rites de la feˆte. – Plutarque, Vies paralle`les, «Pyrrhos» ne contient rien qui puisse eˆtre rapproche´ de la remarque de BC. – BC e´voque trois des douze chapitres de Tite-Live, Ab urbe condita, livre XXIX, qui brossent un tableau de´taille´ de la suppression des Bacchanales a` Rome et dans l’Italie par le se´natus-consulte de l’anne´e 186 av. J.-C. («SCtus Postumianus»). Les chap. 10, 11 et 14 racontent comment P. Æbutius, menace´ par les rites d’initiation qui sanctionnaient les de´bauches, fut sauve´ par le courage d’Hispala Faecenia, une esclave libe´re´e et sa concubine. Cet e´pisode romanesque est utilise´ par Tite-Live pour esquisser l’arrie`re-fond du de´cret de 186. – Le renvoi a` Appien, Histoire romaine, livre VII, Le livre d’Annibal, doit eˆtre corrige´. Le seul chapitre qui puisse convenir est le chap. LVI, qui raconte l’arrive´e de la Me`re des dieux a` Rome par un navire, bloque´ dans le Tibre jusqu’au moment ou` une femme «n’ayant jamais connu d’autre homme que son mari le tirerait». C’est Claudia Quinta, accuse´e a` tort d’adulte`re, qui «noua sa ceinture a` la proue de la barque : la de´esse suivit». Voir Appien, Histoire romaine, t. III, texte e´tabli et traduit par Danie`le Gaillard, Paris : Belles Lettres, 1998, p. 44. BC renvoie d’un manie`re impre´cise au t. II de la traduction franc¸aise de l’ouvrage de M. J. Micali, L’Italie avant la domination des Romains (Paris : Treuttel et Würtz, 1824). Le chap. XXII, «Religion» (pp. 33–94), contient beaucoup d’observations sur la religion des E´trusques, citant les e´crits des auteurs anciens. Il y est question de Numa et de la transplantation des dieux des Sabins a` Rome pp. 45–49. Voir Strabon, livre V, chap. II, § 2. – Le renvoi a` Pline, Histoire naturelle, est une erreur. Le livre XV ne traite que des arbres fruitiers. – BC cite Virgile, Ge´orgiques, livre II, v. 193 : «inflavit cum pinguis ebur Tyrrhenus ad aras» («si le gras E´trusque fait entendre sa fluˆte pre`s des autels»), vers dont il veut de´duire que les E´trusque ont apporte´ la musique a` Rome.

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Mais le ge´nie de la religion grecque s’empara de ces choses pour les modifier a, et comme les Athe´niens avaient nationalise´ Minerve b, les Romains identifie`rent a` leur histoire Jupiter Stator : un symbole scientifique devint un dieu protecteur de la cite´. Le soleil qui s’arreˆte rallia les le´gions en fuite. Le soleil qui renaıˆt fut Ve´turie c. Les Romains conserve`rent du premier de ces polythe´ismes tout ce qu’ils purent en conserver ; leur politique peupla les colle´ges des pontifes des citoyens les plus e´minents dans l’e´tat et l’arme´e, de´pouillant ainsi ces colle´ges de l’esprit the´ocratique d. La meˆme politique se fit de la divination un instrument qui pourtant re´agissait quelquefois contre elle e. Elle em prunta des E´trusques quelque chose de la division

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b c d

e

Romulus, c’est-a`-dire le peuple romain personnifie´ (v. ci-dessus). Romulus, dit DENYS D’HALICARNASSE (II, 7), prit dans les institutions grecques ce qu’il y avait de meilleur1. V. t. II, p. 3932. V. t. I, p. 184, 2e e´dit3. Le personnel des pontifes fut change´ ; les formes de la le´gislation pontificale reste`rent les meˆmes. (NIE´ B. I, 964.) Le se´nat envoya six fils des plus illustres familles chez six diffe´rentes peuplades de l’E´trurie pour y apprendre la divination. Labe´on traduisit en latin les six livres de Tage`s sur cette science. (TIT.-LIV. IX, 365.) La politique romaine rattachait habilement la divination a` la plus ancienne tradition nationale. Romulus et Re´mus, disait-on, se disputant l’empire,

1–5 choses ... Les Romains conserve`rent ] choses & les modifia. Les Romains conserve`rent Ms-texte 6–9 leur politique ... instrument ] leur politique s’empara des colle´ges des Pontifes, qu’ils peuple`rent des Citoyens les plus e´minens dans ... arme´e. & qu’ils de´pouillerent ainsi de l’esprit the´ocratique. cette dernie`re phrase dans la col. de gauche Elle s’empara de la divination dont elle se fit un instrument Ms-texte 15–16 Le personnel ... 96.) ] ajoute´ dans la col. de gauche Le personnel ... change´ : la le´gislation ... resta la meˆme ... 96. Ms-notes 19-p. 379.17 Tit.-Liv. ... 6.) ] ajoute´ dans la col. de gauche Tite Live ... divination a` la premie`re tradition qui fut nationale. Romulus ... augures. 〈Le premier〉 Celui qui ... 6.) Ms-notes 1 2 3 4 5

Denys d’Halicarnasse parle des institutions religieuses e´tablies par Romulus dans trois chapitres des Antiquite´s romaines, livre II, 21–23 (e´d. Cary, t. I, pp. 369–377). OCBC, Œuvres, t. XVIII, pp. 257–258. OCBC, Œuvres, t. XVII, pp. 193–194. Notons que les mots «2e e´dit.» sont errone´s, BC cite en fait la premie`re. BC vise probablement la p. 95, ou` l’on trouve : «Formen wurden erhalten, deren Wesen abgeschafft war.» Le chapitre cite´ de Tite-Live, Ab urbe condita, atteste uniquement l’avantage de connaıˆtre la langue e´trusque pour les Romains ; il n’y est pas question de jeunes nobles romains envoye´s dans les villes de l’E´trurie pour y apprendre la divination. La traduction ou peut-eˆtre seulement l’explication des livres sacre´s par Labe´on n’est pas mentionne´e chez Tite-Live ; on la trouve p. ex. chez Aulu-Gelle, Noctes atticæ, t. I, livre IV, chap. 6.

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en castes, pour ajouter une religieuse saintete´ aux relations des patrons et des clients a. Aussi long-temps que Rome fut une monarchie, ses rois, a` leur ave´nement au troˆne, reveˆtirent, d’apre`s les formes e´trusques, les signes de leur dignite´ b. Mais l’esprit du sacerdoce, les dogmes qui lui appartenaient en propre, les victimes humaines, les rites licencieux, le me´rite mystique attache´ aux privations ou a` la douleur, toutes ces choses furent bannies du culte pour n’y rentrer que fortuitement, quand la terreur e´garait les ames c, ou tardivement, quand la corruption les eut de´grade´es.

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e´taient convenus de laisser la de´cision aux augures. Celui qui en apercevrait de favorables avant son rival monterait sur le troˆne. Re´mus vit six vautours qui volaient du Nord au Sud : mais au lever du soleil Romulus en vit douze. (VARR. I, 18, ap. Censorin., 171 ; NIE´ BUHR, I, 1562.) Nous apprenons de Cice´ron que la divination romaine e´tait divise´e en deux grandes branches, subdivise´es elles-meˆmes en plusieurs autres. La premie`re se composait de ce que l’homme peut regarder comme une manifestation directe de la divinite´, les pressentiments, les songes, les extases. La seconde consistait en signes auxquels on avait attache´ une signification arbitraire. Aussi appelait-on la premie`re naturelle, la seconde artificielle. (CICER. de Div. I, 63.) NIE´ BUHR. I, 804. NIE´ BUHR. I, 965. Les traditions et les dogmes e´trusques ou sacerdotaux, laisse`rent dans les notions des Romains meˆme e´claire´s, des vestiges isole´s, mais remarquables. Cice´ron, l’e´le`ve, l’admira-

1 castes, pour ] castes, 〈dont〉 pour Ms-texte 2–4 Aussi long-temps ... dignite´. ] ajoute´ dans la col. de gauche Ms-texte 20-p. 380.9 Les traditions ... male´dictions. ] la note dans la col. de gauche les traditions ... e´trusques laisse`rent ... Alastor, qui, disoit la superstition vulgaire, recueilloit ... pouvoir. (Ide´e Indienne sur la force des male´dictions) Plutarque ... oracles. v. May. art. Alastor Ms-texte brouillon de cette note sur une feuille volante & comment ne seroit-il point autrement ? le de´sespoir egare les raisons les plus e´claire´es. Cice´ron, l’auteur des Tusculanes, l’e´le`ve, l’admirateur le critiqque & le juge des diverses philosophies Grecques, ne fut-il pas pas tente´ 〈lorsque〉 pour se venger de l’ingrat Octave, de se donner la mort sur l’autel d’un mauvais ge´nie qui[,] disoit la superst. vulgaire[,] recueillit l’Anathe`me de la bouche des mourants & s acharnait arme´e de cette malediction solennelle sur ceux qui avoient abuse´ de leur pouv. pr les opprimer ? Les tentatives des Soldats en des Provinces pour devenir inde´pendans furent 〈constamment〉 infructueuses ou leur succe`s ont peu de dure´e : ∞ Co 4450 1

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BC cite la fin du chap. XVII de Censorinus, De die natali, e´d. Gruber, p. 81, qui utilise Varron : «quid apud Varronem legerim, non tacebo, qui libro Antiquitatum duodevicesimo ait, fuisse Vettium Romae in augurio non ignobilem». Dans la note de l’e´diteur, on trouve une version plus de´veloppe´e de cette le´gende dans laquelle on parle aussi de Remus. BC renvoie a` la page de Niebuhr, Römische Geschichte, t. I, p. 154 (et non pas 156), qui contient le re´cit de cet e´ve´nement fabuleux. Il faut lire «I, 34». «Iis igitur adsentior, qui duo genera divinationum esse dixerent, unum quod particeps esset artis, alterum, quod arte careret.» Suit une re´flexion de´veloppe´e sur ces deux sortes de divination, paraphrase´e par BC. BC re´sume le re´cit de Niebuhr. Niebuhr dit : «Die Insignien der Magistratur nahmen, wie die Sage bekannt ist, die römischen Könige nach etruskischer Sitte an : der Capitolinische Tempel war etruskisch, in

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De la Religion, IV

Nous nous arreˆtons ici. La ve´rite´ que nous avions promis de prouver nous paraıˆt hors de doute, et nous n’aurons a` revenir sur la religion romaine que lorsqu’il s’agira de montrer les modifications ulte´rieures du polythe´isme.

teur, le critique et le juge des diverses philosophies grecques, fut tente´, pour se venger de l’ingrat et impitoyable Octave, de se donner la mort sur l’autel d’un mauvais ge´nie, Alestor ou Alastor, qui recueillait l’anathe`me de la bouche des mourants, et s’acharnait, arme´ de cette male´diction solennelle, sur ceux qui avaient abuse´ de leur pouvoir. (V. PLUT. Vit. Cicer. 34, et De la de´cadence des oracles1.) C’est une ide´e tout a` fait analogue a` la doctrine indienne sur la puissance des male´dictions.

1 ici. ] maintenant ici. Ms-texte 2–3 que ... polythe´isme. ] que 〈pour montrer〉 lorsque nous avons a` montrer le Polythe´isme a` son plus haut point de perfectionnement. quelques corr. dans la col. de gauche Ms-texte

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Hinsicht der Vereinigung der Götter denen er geweiht war wie seines Baus : es nicht zu bezweifeln, daß das ganze pontificische Recht aus Etrurien genommen war» (p. 95). Plutarque, Vies paralle`les ; le chap. 47 (et non pas 34) contient la seule allusion a` ce fait en parlant du projet avorte´ de Cice´ron de s’introduire dans le palais d’Octave et de s’y donner la mort devant l’autel des pe´nates pour appeler ainsi la vengeance. – Nous ne savons pas pourquoi BC cite Plutarque, Sur la disparition des oracles.

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De la Religion, conside´re´e dans sa source, ses formes et ses de´veloppements.

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Livre XII. De la marche du polythe´isme inde´pendant des preˆtres, jusqu’a` son plus haut point de perfectionnement a.

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Nous avons taˆche´ d’aller rapidement dans ce livre. La Gre`ce e´tant plus connue que l’Inde, et moins e´nig matique que l’E´gypte, nous avons cru pouvoir nous fier aux connaissances et a` la sagacite´ du lecteur.

5-p. 383.13 Livre XII. ... profitent pas de ] passage qu’on lit sur le f o 1 de Co 3294/1 9–11 Nous avons ... lecteur. ] manque Co 3294/1

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7. Une page du manuscrit en cahiers, 5e cahier des notes, 4e page de ce cahier, p. 100. La fin de la note 233 avec les ajouts dans la colonne de gauche permet d’analyser le travail de la rédaction (voir p. 236, variantes). BCU, Co 3262/2, p. 100.

Chapitre premier. Comment les progre`s de l’e´tat social introduisent la morale dans la religion.

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Nous avons e´tabli, comme la ve´rite´ principale a` de´montrer dans notre ouvrage, que chaque re´volution qui s’ope`re dans la situation de l’espe`ce humaine en produit une dans les ide´es religieuses, et nous avons de´ja vu le polythe´isme substitue´ au fe´tichisme, par le passage de l’e´tat sauvage a` l’e´tat barbare. Le polythe´isme subit d’autres modifications importantes, par le passage de l’e´tat barbare a` un e´tat plus civilise´ ; et les notions d’une justice distributive, d’une re´mune´ration e´quitable et infaillible, deviennent des dogmes pre´cis et positifs, au lieu de n’eˆtre que l’expression de vœux impuissants, d’espe´rances confuses. Cette re´volution s’ope`re d’une manie`re e´vidente chez les peuples que ne retardent ou n’enchaıˆnent aucune circonstance accidentelle, aucune calamite´ physique, aucune tyrannie religieuse ou politique. Forts de la jeunesse de toutes leurs impressions, excite´s par la nouveaute´ de ce qu’ils e´prouvent, les hommes n’ont encore a` se de´fendre ni de la lassitude inte´rieure, ni du me´ canisme exte´rieur, re´sultats tristes et ine´vitables d’une longue civilisation. Aucune arrie`re-pense´e ne les affaiblit, aucun scepticisme ne les trouble ; ils sont expose´s a` beaucoup de maux, mais l’expe´rience n’est pas la` pour les avertir qu’il y a des maux sans reme`de. Ils ne voient que des obstacles a` vaincre dans ce qui nous paraıˆt une ne´cessite´ a` subir. La` ou` nous nous re´signons, ils luttent ; et leur activite´ s’accroıˆt des difficulte´s qui de´couragent la noˆtre. Dans le passage de la vie purement belliqueuse a` la vie civile, de l’e´tat uniquement guerrier a` l’e´tat agriculteur, les peuples e´prouvent des besoins E´tablissement du texte : Manuscrit : BCU, Co 3294/1, fos 1 et 5. Imprime´ : De la Religion, conside´re´e dans sa source, ses formes et ses de´veloppements, t. IV, Paris : Chez Pichon et Didier, e´diteurs, 1831, pp. 345–353. 4 la ve´rite´ principale ] la ce dernier mot dans l’interl. ve´rite´ 〈que nous voulions〉 principale corr. dans l’interl. Co 3294/1 8 Le polythe´isme ... autres ] nous allons voir le polythe´isme subir des Co 3294/1 13 d’une manie`re e´vidente ] 〈rapidement〉 d’une manie`re e´vidente corr. dans l’interl. Co 3294/1 15 tyrannie ... politique. ] 〈oppression morale〉 tyrannie ... politique. corr. dans l’interl. Co 3294/1 17–19 de ce ... d’une ] de 〈tout〉 ce qu’ils ... encore a` 〈lutter〉 se de´fendre corr. dans l’interl. ni 〈contre〉 de la ... inte´rieure, ni 〈contre le〉 me´canisme exte´rieur, 〈deux〉 re´sultats 〈infaillibles〉 tristes & ine´vitables corr. dans la marge d’une Co 3294/1 24 de´couragent ] de´courage〈raient〉nt Co 3294/1 26 les peuples ] 〈les hommes〉 Les peuples Co 3294/1

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De la Religion, IV

d’une espe`ce tout-a`-fait nouvelle ; celui du travail a, qui a remplace´ l’emploi de la force, en substituant l’e´change a` la conqueˆte ; celui de la proprie´te´, sans laquelle le travail ne serait qu’une suite d’efforts illusoires ; celui de la se´curite´, sans laquelle la proprie´te´ serait pre´caire. Pour satisfaire ces besoins inconnus jusqu’alors, des institutions fixes sont indispensables. Elles ne tardent pas a` prendre la place que la ne´cessite´ leur assigne ; une force publique se forme, qui tend a` pre´server l’association des attentats de ses membres, et les membres de l’association de leurs violences re´ciproques. La force irre´gulie`re des individus conserve quelque temps ses funestes privile´ges, mais ils lui sont chaque jour plus conteste´s. L’injustice qui, pre´ce´demment, ne rencontrait d’obstacles que dans ceux qu’elle blessait d’une manie`re imme´diate, en rencontre maintenant dans la coalition de tous ceux qui ne profitent pas de ses succe`s. Il n’y avait jadis que les offense´s qui re´clamassent ; tous ceux qui sont de´sinte´resse´s re´clament. Le plus grand nombre fonde ses calculs sur l’observance des lois, c’est-a`-dire sur la justice et sur la morale. La morale et la justice deviennent le centre de la majorite´ des inte´reˆts, le point autour duquel se re´unit la majorite´ des forces. Cette re´volution dans les ide´es et dans les institutions en produirait une dans les notions religieuses, lors meˆme que l’inte´reˆt seul les modifierait. Cet inte´reˆt veut toujours employer a` son usage l’autorite´ des dieux. Tant que l’e´tat social, a` peine constitue´, n’influait sur les in dividus que d’une manie`re partielle et interrompue, l’inte´reˆt occupait ses dieux principalement de la protection individuelle. Maintenant il s’agit d’une protection plus ge´ne´rale ; l’autorite´ des dieux s’y consacre. Ces puissances invisibles, que nous avons de´ja remarque´es pre´ce´demment, se modelant sur les humains, et de fe´tiches e´pars composant un peuple ce´leste, suivent de nouveau l’exemple des hommes. Lorsque ceux-ci n’avaient pour occupations que des guerres perpe´tuelles, pour de´lassements que des plaisirs grossiers, pour moyens de salut ou de succe`s que leur a

V. le passage sur He´siode, t.

III,

p. 295–3001.

1–2 celui du travail ... celui de la ] 〈Le besoin〉 Celui du travail ... remplace´ 〈les combats, plusieurs mots illis.〉 l’emploi de la force corr. dans l’interl. 〈en〉 en substituant l’echange a` la conqueˆte ce dernier syntagne dans la marge 〈le besoin〉 celui de la Co 3294/1 3 celui de la ] le ce dernier mot aurait duˆ eˆtre biffe´ 〈besoin〉 celui de la Co 3294/1 5–7 ces besoins ... assigne ; ] ces 〈nouveaux〉 besoins 〈nouveaux〉 inconnus jusqu’alors corr. dans l’interl., des institutions 〈plus〉 fixes ... indispensables. le syntagme suivant dans la marge elles ne ... assigne Co 3294/1 10 temps ses ] tems 〈encore〉 ses Co 3294/1 12 maintenant dans ] maintenant 〈d’une espe`ce nouvelle〉 dans Co 3294/1 13 pas de ] fin du f o 1 de Co 3294/1 1

OCBC, Œuvres, t. XIX, pp. 302–305.

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vigueur ou leur adresse, pour chefs que les plus hardis et les plus violents, les objets de leur culte se livraient au haut des cieux a` un genre de vie tout semblable. Ils prote´geaient sans distinction les projets innocents et les desseins coupables, les de´sirs effre´ne´s et les entreprises le´gitimes. Les sacrifices et les pre´sents avaient droit de les inte´resser a` toutes les causes, et la vertu, comme le crime, e´tait oblige´e de les acheter. Mais aussitoˆt que les hommes ont des lois, des juges, des tribunaux, une morale publique, les dieux pre´sident a` l’exe´cution de ces lois, surveillent la conduite de ces juges, composent eux-meˆmes un tribunal supreˆme, et preˆtent a` la morale une assistance surnaturelle. Toutes leurs relations avec les hommes sont modifie´es conforme´ment a` cette tendance. Les moyens de se concilier leur bienveillance ne sont plus ce qu’ils e´taient auparavant a ; les hommages, les vœux, les offrandes perdent de leur efficacite´. Ne´cessaires encore pour que les dieux ne s’irritent pas de la ne´gligence des mortels, ils ne suffisent plus pour assurer a` l’injustice les secours ce´lestes. Fide`les aux usages de la premie`re e´poque du polythe´isme, les peuples qui entrent sur le territoire de leurs ennemis cherchent a` gagner en leur faveur les divinite´s tute´laires de ce territoire, mais ils croient n’y pouvoir mieux parvenir qu’en prenant ces divinite´s a` te´moin de l’e´quite´ de leur cause. L’homme n’ose plus demander aux dieux leur assistance pour les crimes qu’il veut commettre ; il essaie tout au plus d’obtenir d’eux son pardon pour les crimes qu’il a commis. Ils ne sont plus bassement envieux de toute prospe´rite´ humaine, mais ennemis se´ve`res de la prospe´rite´ des me´chants. Leurs foudres ne se dirigent plus contre les heureux, mais contre les coupables ; ils ne perse´cutent plus, ils punissent. Lorsqu’il arrive aux puissants de la terre quelque grande calamite´, ce n’est plus a` la jalousie des dieux qu’on l’attribue, c’est a` leur justice. Le sentiment s’associe avec enthousiasme a` ce changement dans les ide´es religieuses. Ces notions nouvelles re´pondent a` tous ses de´sirs ; elles lui permettent d’estimer ce qu’il adore ; elles donnent au caracte`re des dieux a

Les dieux, dit Zaleucus dans son pre´ambule (V. HEYNE, Legum Locris a Zaleuco scriptarum fragmenta, Opuscul. II, 72 et seq1.), ne se plaisent pas aux dons des me´chants comme de mise´rables hommes, mais veulent eˆtre honore´s par les sentiments ge´ne´reux et les actions vertueuses.

1

BC cite de Heyne des e´tudes consacre´es aux lois de Locris et de Zaleuco, le quatrie`me des textes «Epimetrum II, de Zeleuco» (Opuscula academica collecta et animadversionibus locupleta, t. II, Gottingæ : apud Io. Chr. Dieterich, 1787, p. 20) : «animum autem suum unusquisque ab omni vitiorum labe purum habeat et comparet, necesse est : siquidem numen non malorum sacrificiis et in rem sacram factis sumpribus, sed bonorum iustis et honestis studiis vitæque rationibus ac rectis factis gaudet.» Le renvoi aux pp. 72–73 vise un commentaire de Heyne.

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plus d’e´le´vation, plus de noblesse ; elles les rendent plus dignes d’eˆtre honore´s. La confiance succe`de a` la crainte. Meˆme a` l’aspect du crime triomphant, les mortels s’attendent a` voir bientoˆt le malheur fondre sur sa teˆte. Si quelquefois une e´vidence trop irre´sistible force l’homme a` reconnaıˆtre que, malgre´ la providence des dieux, la vertu peut souffrir, l’iniquite´ re´gner, il se persuade que toˆt ou tard viendront les jours de la re´paration et de la vengeance a. Ainsi pe´ne`tre dans son cœur l’ide´e d’un appel du pre´sent a` l’avenir, de la terre au ciel, recours solennel de tous les opprime´s dans toutes les situations, dernie`re espe´rance de la faiblesse qu’on foule aux pieds, de la vertu qu’on immole, pense´e consolante et fie`re, a` laquelle la philosophie n’a jamais essaye´ de renoncer, sans en eˆtre aussitoˆt punie par sa propre de´gradation. C’est donc ici l’e´poque de l’introduction formelle de la morale dans la religion. Nous avons prouve´ que, meˆme auparavant, la religion favorisait la morale. Les dieux, en the`se ge´ne´rale, doivent toujours pre´fe´rer le bien au mal, la vertu au crime. L’amour de l’ordre est inhe´rent a` l’homme aussi long-temps qu’il raisonne abstraitement. Le meˆme penchant est donc inhe´rent aux dieux, de`s qu’au lieu d’eˆtre, comme les fe´tiches, paye´s, si l’on me permet cette expression, chacun a` part, par les individus, ils le sont collectivement, par la socie´te´ toute entie`re. L’inte´reˆt de toute communaute´ se trouve dans la morale. Les dieux protecteurs de la communaute´ ne peuvent remplir leur emploi qu’en empeˆchant les individus d’offenser la morale, c’est-a`-dire de mettre en pe´ril la communaute´. a

Ce qui trompe les mortels, dit The´ognis (THEOG. v. 199 et suiv1.), c’est que les dieux ne les punissent pas dans l’instant ou` ils commettent le crime. Le parjure ne peut se cacher aux dieux, dit l’orateur Lycurgue contre Leocrate (v. LARCHER, note sur He´rod. VI, p. 1192), ni e´chapper a` leur vengeance. S’il n’en est pas lui-meˆme l’objet, du moins ses enfants et sa race entie`re tombent dans les plus grands malheurs.

16-p. 387.9 L’amour ... directement. ] passage qui se lit au f o 5 de Co 3294/1 18 aux dieux, de`s ... comme ] aux Dieux, 〈mais dans le ciel, comme sur la terre, les exceptions sont fre´quentes. les habitans de l’un et de l’autre monde, ne conforment leur conduite a` leurs opinions abstraites, que lorsque leur inte´reˆt n’est pas compromis. Les dieux doivent commencer a` prote´ger la morale〉 de`s 〈qu’ils ne sont plus〉 qu’au lieu d’eˆtre corr. dans l’interl. comme Co 3294/1 19 il le sont ] 〈mais〉 ils le sont corr. dans l’interl. Co 3294/1 1

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BC cite les vers 203–204 du livre I des Poe`mes e´le´giaques de The´ognis (The´ognis, Poe`mes e´le´giaques, texte e´tabli, traduit et commente´ par Jean Carrie`re, nouvelle e´dition, refondue et augmente´e, Paris : Belles Lettres, 1975, p. 69). Le renvoi a` la p. 119 du t. VI de l’e´dition d’He´rodote par Larcher est faux. Il n’y est question ni de Lycurgue ni de Leocrate.

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Mais, aussi long-temps que, dans l’exercice de ces fonctions, ils sont muˆs par des motifs mercenaires ; tant qu’ils n’agissent que par un inte´reˆt personnel ; tant que les re´compenses et les chaˆtiments assure´s aux hommes dans cette vie et dans l’autre, n’ont aucun rapport ne´cessaire avec leur conduite envers leurs semblables, la morale ne fait pas, a` proprement parler, partie de la religion. Pour qu’elle en fasse partie, il faut que l’injustice d’homme a` homme attire la rigueur des dieux, bien que le criminel n’ait me´rite´ leur cole`re par aucune ne´gligence, ou aucune insulte qui ait pu les blesser directement.

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Chapitre II. Des contradictions qui caracte´risent cette e´poque du polythe´isme, et de la manie`re dont ces contradictions disparaissent.

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Le passage de l’e´tat barbare a` l’e´tat civilise´, est un moment de grande fermentation. La justice lutte contre la violence, l’esprit de proprie´te´ contre l’esprit de rapine, les principes de la morale contre l’habitude de la force. Les hommes cherchent long-temps en vain une assiette fixe. Ils se voient assaillis tout a` la fois par les inconve´nients de la situation dont ils sortent, et par ceux, qui ne sont pas moins grands et qui sont plus inattendus, de la situation dans laquelle ils entrent. La religion se ressent de cette fermentation. Les maximes qui s’introduisent viennent se heurter contre celles que les souvenirs consacrent. Les opinions qui commencent a` se perdre, celles qui commencent a` s’e´tablir, se rencontrent et se contredisent a. Mais, a` mesure que la civilisation fait des progre`s, la morale s’identifie davantage avec la religion, la confusion cesse et les contradictions disparaissent ; la ve´nalite´ des dieux est encore reconnue ; l’e´goı¨sme ne peut renoncer a` ce dogme, dont il fait un si grand usage, et cette opinion traverse, avec plus ou moins de de´guisements, toutes les e´poques. Mais elle a subi de´ja une modification importante. Les dieux ne sont pas encore devenus des a

Un e´crivain pre´tend que lorsqu’un peuple a admis la morale dans sa religion, il ne permet plus aux dieux qu’il adore comme bons que des actions vertueuses, et que, s’il leur en attribue de mauvaises, c’est qu’il ne les regarde pas comme telles. Des exemples sans nombre, dans toutes les religions, prouvent le contraire. L’homme a une telle ve´ne´ration pour la force, qu’il respecte longtemps en elle des actions qu’il croit interdites a` la faiblesse. Cependant l’e´puration s’ope`re peu a` peu, et l’auteur qui avait tort finit par avoir raison. E´tablissement du texte : Manuscrit : BCU, Co 3294/1, fos 2 et 3. Imprime´ : De la Religion, conside´re´e dans sa source, ses formes et ses de´veloppements, t. IV, Paris : Chez Pichon et Didier, e´diteurs, 1831, pp. 354–358.

6 La justice ] 〈L’esprit de〉 la justice Co 3294/1 11 entrent. ] BC pensait accrocher ici une note qu’on lit dans la marge les plaintes d’He´siode contre la tyrannie des grands & des Rois ne sont que l’expression du 〈illis.〉 mal-aise d’un e´tat social encore imparfait & trouble´ par ceux meˆme qui ont mission de le faire respecter. v. T. III. 297–298. Co 3294/1 16 Mais ] 〈Ch. De la manie`re dont ces contradictions disparaissent.〉 Mais ce mot ajoute´ dans la marge Co 3294/1 18 dieux est ] dieux 〈toutefois〉 est Co 3294/1 19–20 usage, ... Mais elle ] usage, et nous 〈la〉 verrons en conse´quence cette opinion ces deux derniers mots dans l’interl. traverser avec ... e´poques 〈du polythe´isme〉 de la religion. Mais 〈ce dogme meˆme〉 elle corr. dans l’interl. Co 3294/1 24–27 Des exemples ... raison. ] 〈plusieurs〉 des exemples sans nombre ces deux derniers mots dans l’interl. dans toutes ... L’homme a un tel 〈respect〉 pour 〈la puissance et〉 la force qu’il respecte en elle ... faiblesse. la dernie`re phrase de la note manque Co 3294/1

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eˆtres de´sinte´resse´s, mais ils sont devenus d’honneˆtes gens, dans le sens ordinaire de ce mot. Ils se font payer pour faire le bien, mais ils ne permettent plus qu’on les paie pour faire le mal. Les gradations de ce perfectionnement sont lentes ; beaucoup de vestiges de notions anciennes s’y meˆlent et les retardent. Lors meˆme qu’on adopte, sur la conduite pre´sente des dieux, des opinions plus honorables, on rappelle leurs crimes ante´rieurs. Par degre´s, toutefois, les traditions qui leur sont de´savantageuses, sont rele´gue´es dans un lointain plus obscur. On se fait une espe`ce de scrupule de les raconter, et bientoˆt l’on arrive a` les re´voquer en doute. Ainsi, par une re´action heureuse, la morale, qui a trouve´ dans la religion une garantie, e´pure et ame´liore cette religion qui la sanctionne. Il y a une observation curieuse a` faire sur les hommes qui, a` cette e´poque, s’obstinent a` rappeler les traditions de´gradantes. Ce retour apparent aux opinions primitives, n’est souvent qu’un commencement d’incre´dulite´. Dans le polythe´isme sans morale, c’e´tait pour honorer les dieux, pour exalter leur puissance, qu’on parlait de leurs jalousies et de leurs vengeances implacables. Apre`s l’introduction de la morale dans le polythe´isme, c’est pour leur faire tort et pour les rabaisser dans l’esprit des hommes, que l’on reproduit ces meˆmes traditions. Ce que jadis les de´vots racontaient de bonne foi, comme des actes dignes de respect, les incre´dules le re´pe`tent plus tard avec ironie, comme des scandales. Ainsi, Bossuet et Voltaire se rencontrent pour entretenir leurs lecteurs de Samuel massacrant Agag. Le premier vante cette action fe´roce, le second la de´nonce. Les fide`les du dix-septie`me sie`cle y voient un mode`le a` suivre ; les philosophes du dix-huitie`me, un forfait a` de´tester. L’incre´dulite´, au reste, est toujours voisine du triomphe complet de la morale dans la religion. De`s que les hommes se sont bien pe´ne´tre´s de la ne´cessite´ de la morale, leur logique les force a` comparer les faits que la religion rapporte et les dogmes qu’elle enseigne, avec les principes nouveaux qu’elle est appele´e a` sanctionner. Il s’ensuit que, lorsque ces faits ou ces dogmes leur semblent contraires a` ces principes, ils re´voquent les premiers en doute : ils y sont d’autant plus oblige´s, que l’habitude de la 2 de ce mot ] ajoute´ dans l’interl. 4 lentes ; ] lentes, 〈sans doute〉. Co 3294/1 11–12 Ainsi ... sanctionne. ] phrase ajoute´e sur un papillon Co 3294/1 14 a` rappeler ... de´gradantes. ] a` 〈la〉 rappeler les traditions qui de´gradent les Dieux. les six derniers mots ajoute´s dans l’interl. Co 3294/1 21 comme ... respect ] comme des 〈prodiges〉 actes dignes de respect corr. dans l’interl. Co 3294/1 22 ironie ] 〈illis.〉 ironie Co 3294/1 22–26 Ainsi, ... de´tester. ] ajoute´ sur un papillon Co 3294/1 27 L’incre´dulite´ ... voisine ] 〈Le illis. de〉 l’incre´dulite´ au reste ces deux derniers mots dans l’interl. ... voisine 〈de celle〉 30–31 nouveaux ] 〈illis.〉 Co 3294/1 33-p. 390.1 l’habitude ... re´flexion ] l’habitude 〈du raisonnement〉 de ce mot re´crit sur «du» la re´flexion Co 3294/1

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re´flexion faisant des progre`s dans tous les esprits, des fables que, pre´ce´demment, l’on adoptait sans conse´quence, servent tout a` coup d’apologie aux coupables a. L’homme, frappe´ de ce danger, n’accepte plus la croyance que sous la condition expresse qu’elle prote´gera la morale. Il exige des dieux, pour prix de ce qu’il veut bien ne pas contester leur existence, qu’ils se rendent utiles ; et, loin de leur reconnaıˆtre, comme autrefois, des droits absolus, il leur impose des devoirs. La morale devient donc une espe`ce de pierre de touche, une e´preuve a` laquelle on soumet les notions religieuses, et qui ne peut manquer d’en faire contester une partie, et d’affaiblir la confiance qu’on accordait a` l’ensemble. C’est une suite de l’intervention de cette troisie`me puissance dont nous avons de´ja parle´ : le raisonnement, se constituant juge des de´bats qui s’e´le`vent entre le sentiment et l’inte´reˆt, trompe tour a` tour les de´sirs de l’un et les calculs de l’autre.

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C’est ainsi qu’OVIDE justifie l’inceste, par l’exemple de Jupiter. Jupiter esse pium statuit quodcunque juvaret, Et fas omne facit fratre marita soror. Phædr. ad. Hippol1. Et long-temps auparavant, dans Eschyle, le meˆme abus des fables anciennes se laisse entrevoir. «Jupiter, dit Oreste, prote´ge la dignite´ paternelle ; Jupiter qui a lui-meˆme attente´ contre son pe`re.» (Eume´nid., 643–6442.)

2–3 aux coupables ] a` ceux qui se rendent coupables de quelque crime Co 3294/1 3 la croyance ] la religion Co 3294/1 10 l’ensemble. ] l’ensemble. suit une phrase biffe´e illis. BC commente phrase de´ja` dans le livre 9 Co 3294/1 11–14 C’est ... de l’autre. ] passage tre`s remanie´ C’est 〈que par〉 une suite ... puissance, 〈le raisonnement que〉 dont ce dernier mot ajoute´ dans l’interl. nous avons de´ja` 〈mention〉 parle corr. dans l’interl. ci dessus. BC finit la phrase en mettant le point, puis reprend le raisonnement ces deux mots ajoute´s dans l’interl. se constituant ... l’inte´reˆt 〈et tour a` tour〉 tromp〈ant〉e tour a` tour ces trois derniers mots dans l’interl. les de´sirs de l’un et 〈tour a` tour〉 de´soriente le dernier mot dans l’interl. les calculs de l’autre. Co 3294/1

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Ovide, Epistulæ Heroidum, IV, «Phædra Hippolito», vv. 133–134. BC se trompe. Ce n’est pas Oreste qui parle, mais la premie`re du chœur des Eume´nides.

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Chapitre III. Que les poe`mes d’He´siode sont contemporains de la re´volution que nous de´crivons.

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Les poe`mes d’He´siode a nous sont parvenus, comme ceux d’Home`re, grace a

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Les deux poe`mes d’He´siode sont la The´ogonie et les Œuvres et les Jours. Le Bouclier d’Hercule est probablement un fragment de la The´ogonie, dont les deux derniers vers annoncent que l’auteur va parler des femmes des he´ros et de leurs enfants. Or, c’est pre´cise´ment le fils d’une de ces femmes, qui est le sujet du Bouclier d’Hercule. Ce fragment aura, par quelque hasard, e´te´ se´pare´ du corps du poe`me. Cependant le grammairien Aristophane ne le regardait pas comme authentique, et le de´clarait fort infe´rieur a` la The´ogonie proprement dite1. On reconnaıˆt, dans ce dernier poe`me, des portions de´tache´es d’un ou de plusieurs syste`mes sacerdotaux, te´ne´breux et mystiques, dont l’ensemble n’e´tait pas compris par le barde qui nous transmettait ces de´tails e´pars. Les hypothe`ses physiques d’He´siode sur l’origine des choses, le chaos et la matie`re informe, sur les enfants de Phorcys et de Ce´to, appartiennent a` la Phe´nicie. En ge´ ne´ral, ses alle´gories sont plutoˆt phe´niciennes qu’e´gyptiennes. Dans toutes les cosmogonies e´gyptiennes on rencontre, pour premier principe, l’œuf myste´rieux qui reparaıˆt dans les alle´gories grecques emprunte´es des E´gyptiens ; mais He´siode commence par le chaos, et les Phe´niciens sont le peuple du Midi auquel l’ide´e du chaos fut la plus familie`re. Les Gorgones, qui habitent l’Occident, doivent leur origine a` l’habitude des e´crivains de l’antiquite´, qui rele´guaient dans cette partie du monde, alors inconnue, tous les monstres et tous les prodiges. «A les entendre, dit VOSS (Ge´ogr. ancienne), le Nord et l’Occident e´taient peuple´s de magiciens et de magiciennes, qui commandaient aux vents et aux orages, tuaient ou me´tamorphosaient les e´trangers ; de ge´ants anthropophages, a` trois teˆtes avec un œil ; de nains hauts d’une coude´e, faisant la guerre aux grues ; de griffons gardant des tre´sors ; de vieilles femmes, n’ayant entre elles qu’une seule dent ; de monstres velus, dont l’aspect pe´trifiait les spectateurs ; d’hommes sans teˆte ou a` teˆte de chien, avec des pieds qui leur servaient de parasol quand ils e´taient couche´s, ou avec des oreilles dans lesquelles ils s’enveloppaient, comme d’un manteau pendant l’orage2.» Le sphinx est une importation e´gyptienne. Les traditions relatives a` l’Amour (l’E´ros, l’Amour cosmogonique, qu’il ne faut pas confondre avec celui que des poe`tes poste´rieurs ont donne´ pour fils a` Ve´nus), l’engendrement du ciel, des montagnes et de l’Oce´an, l’apparition des Titans, dont Saturne est le plus jeune, sont, d’une part, des fragments de cosmogonie qu’He´siode ne se met point en peine de classer par ordre, mais qu’il accumule au hasard, suivant E´tablissement du texte : Imprime´ : De la Religion, conside´re´e dans sa source, ses formes et ses de´veloppements, t. IV, Paris : Chez Pichon et Didier, e´diteurs, 1831, pp. 359–374.

3 re´volution ] la table des matie`res porte re´volution religieuse Rel4 1 2

L’argument d’Aristophane est ge´ne´ralement accepte´ par les critiques. BC traduit un passage de l’essai «Alte Weltkunde» de Johann Heinrich Voss (Kritische Blätter nebst geografischen Abhandlungen, t. II, Stuttgart : In der Metzler’schen Buchhandlung, MDCCCXXVIII, pp. 245–421, et plus particulie`rement p. 258). L’essai avait e´te´ publie´ d’abord en 1804 dans la Jenaischen Allgemeinen Literatur-Zeitung.

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a` des rhapsodes, qui, les chantant de ville en ville, sur les places publiques, les transmirent d’une ge´ne´ration a` l’autre, jusqu’au moment ou` des copistes les rassemble`rent, en les re´digeant par e´crit, et y introduisant de

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que chaque notion se pre´sente a` lui ; et, de l’autre part, le commencement d’une mythologie historique ou narrative, car les Cyclopes et les Centimanes sont les fre`res des Titans. Or les Centimanes et les Cyclopes sont, dans le langage d’un peuple qui se civilise, la re´miniscence de l’e´tat sauvage. Uranus mutile´ est encore un de´bris cosmogonique ; c’est la nature perdant sa force ge´ne´ratrice. Nous avons retrouve´ ce symbole dans plusieurs religions sacerdotales, avec cette diffe´rence qu’il est la base de toutes leurs ce´re´monies, et ne cesse jamais d’eˆtre pre´sent dans toutes leurs fables, tandis que le polythe´isme grec, apre`s lui avoir rendu un ste´rile hommage, l’e´carte comme un souvenir qui l’importune. Du sang d’Uranus, tombe´ sur la terre, naissent les ge´ants et les E´rynnies. Ve´nus est fille du ciel et de l’onde (THE´ OGON. 187–2061.) C’est l’ide´e primitive sous des de´nominations nouvelles. L’Amour avait e´te´ repre´sente´ comme fils du chaos, principe de toutes choses ; Ve´nus, qui remplace l’Amour, est appele´e fille de la mer, devenue le premier principe dans des cosmogonies plus re´centes. Cette naissance de Ve´nus sortant des ondes, cette ve´ne´ration pour la mer, me`re de tout, tenaient probablement en partie a` quelque connaissance imparfaite de la philosophie des barbares, et en partie aux souvenirs des colonies et a` la me´moire de leurs expe´ditions maritimes. Les filles de l’Oce´an portent les noms des diverses parties du monde, l’Europe, l’Asie, etc. He´siode dit qu’il y en a 3,000, et s’excuse de ne pas les nommer toutes, en ajoutant que ceux qui habitent aupre`s d’elles savent assez leurs noms2. Ne´re´e3, ce vieillard prophe´tique, fait allusion aux lois de la nature, d’apre`s lesquelles la mer est agite´e en hiver et paisible en e´te´. C’est manifestement un emble`me des premie`res observations des navigateurs sur l’ordre des saisons. Saturne, pre´cipite´ a` son tour dans le Tartare avec les Titans, est le signal du triomphe de la ve´ritable mythologie grecque (v. t. II, p. 446–4504). Les alle´gories d’He´siode deviennent de`s-lors plus claires, plus agre´ables, plus e´le´gantes ; les Muses sont filles de la Me´moire, l’Harmonie doit sa naissance aux embrassements de Mars et de Ve´nus, mais cette partie meˆme de la The´ogonie se ressent des emprunts sacerdotaux. Nous avons montre´ ailleurs qu’He´siode introduit dans la religion grecque la de´monologie orientale. Les Œuvres et les Jours sont un ouvrage agronomique qui embrasse l’e´tat social tout entier, et ou` la religion est bien plus applique´e a` la vie humaine que dans la The´ogonie. Il e´tait compose´, ainsi que ce dernier poe`me, de rhapsodies plus ou moins longues, dont chacune formait un tout. C’est un monument pre´cieux de la plus ancienne civilisation. On voit, pour ainsi dire, l’esprit humain dans son enfance, se de´velopper avec une activite´ paisible et croissante, dans les bornes e´troites que lui assignent ses travaux encore re´cents et sa proprie´te´ pre´caire, aupre`s de ses foyers tout nouvellement construits.

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Ce chapitre re´sume et paraphrase beaucoup de passages des poe`mes d’He´siode. Nous ne donnerons par la suite que quelques citations pour mieux illustrer les analyses de BC. On se rapportera a` He´siode, The´ogonie – Les travaux et les jours – Le Bouclier, texte e´tabli et traduit par Paul Mazon, Paris : Belles Lettres, 1986. BC paraphrase un passage de la The´ogonie qui parle des filles de Te´thys et d’Oce´an (vv. 347–371 ; e´d. Mazon, pp. 44–45). BC interpre`te les attributs de Ne´re´e et de ses cinquante filles (The´ogonie, vv. 233–264 ; e´d. Mazon, pp. 40–41). OCBC, Œuvres, t. XVIII, pp. 283–285.

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nombreuses interpolations qui ont fait souvent re´voquer en doute leur authenticite´ a. Mais l’e´poque a` la quelle ces poe`mes ont duˆ eˆtre compose´s n’en est pas moins indique´e par leur nature meˆme. Ce sont des ouvrages didactiques, poste´rieurs a` l’e´pope´e primitive ; des ouvrages ou` la re´flexion domine au lieu de l’inspiration, ou` l’envie de produire des effets d’artiste remplace l’e´lan spontane´ et la candeur naı¨ve des plus anciens poe`tes ; enfin, ou` l’individua lite´ entraıˆne les auteurs a` des digressions sur leur situation, leurs espe´rances, leurs craintes personnelles. He´siode, a` diffe´rentes reprises, parle de lui-meˆme, de sa position, de ses relations prive´es, tandis que, soit dans l’Iliade, soit dans l’Odysse´e, tout se rapporte au sujet, rien a` l’e´crivain. Les portions diverses qui entrent dans la composition des poe´sies d’He´siode n’ont aucune proportion entr’elles. Tantoˆt abre´viateur aride, tantoˆt rhe´teur diffus, il ne subordonne point l’e´tendue des de´veloppements a` celle de l’ensemble ; ce qui le de´termine, c’est la quantite´ de mate´riaux qu’il a pu recueillir dans les traditions les plus discordantes ; c’est un second symptoˆme d’un e´tat social de´ja plus complique´, et ou` la poe´sie e´tait un moyen plutoˆt qu’un but.

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Le ce´le`bre Heyne, dans sa dissertation sur la The´ogonie (Com. Soc. Goett.), indique beaucoup de passages manifestement interpole´s1. Pausanias confirme de son te´moignage l’assertion du savant moderne2. La tradition qu’Esculape e´tait fils d’Alcinoe´, dit-il, est un conte imagine´ par He´siode, ou par ceux qui ont pris la liberte´ d’ajouter leurs vers aux vers de ce poe`te. (Corinth. 26.) Pausanias va meˆme plus loin dans ses doutes ; il de´clare que, apre`s avoir lu la The´ogonie attentivement, il la tient pour suppose´e (Arcad. 18), et il s’appuie de l’opinion des Be´otiens, qui pre´tendaient, a` ce qu’il assure, que les Œuvres et les Jours e´taient le seul poe`me qui fuˆt ve´ritablement d’He´siode ; encore, ajoute-t-il, ces peuples retranchent l’exorde, ou l’invocation aux Muses (Bœot. ch. 27 et 31). Cette invocation, en effet, est peu d’accord avec le reste du poe`me. Les Muses qui dansent sur l’He´licon autour de l’autel de Jupiter, et qui louent ce dieu et son e´pouse, la Junon d’Argos ; les e´pithe`tes individuelles et caracte´ristiques attache´es a` chaque divinite´, tandis que les preˆtres ne donnent aux leurs que des e´pithe`tes cosmogoniques et me´taphysiques, sont des images et des conceptions comple`tement grecques. Mais ce n’est point un motif de rejeter cette invocation aux Muses. He´siode pouvait et devait confondre tous les genres, comme il confondait toutes les conceptions.

BC renvoie a` l’e´tude de Heyne, «De Theogonia ab Hesiodo condita. Ad Herodot Lib. II, c. 52. Commentatio recitata d. XVII. iun. MDCCLXXIX», Commentationes Societatis Regiæ Scientiarum Gottingensis, Historicæ et philologicæ classis t. II, MDCCLXXIX, pp. 125–154. Heyne parle des interpolations dans ses notes. Voir p. ex. pp. 151–152, notes p, s et t. Un exemple des interpolations dont parle Pausanias se trouve dans le livre II, Corinthe, chap. XXVI, § 8. Il s’agit en l’occurrence de la le´gende d’Ascle´pios, selon He´siode fils d’Arsinoe¨. Pausanias appelle cela une fiction invente´e par He´siode «or by one of Hesiod’s interpolators, just to please the Messenians» (e´d. Jones, t. I, p. 389).

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Le style d’He´siode serait, au besoin, une troisie`me preuve qu’il e´crivait dans un moment de crise et d’agitation sociale. Ce style, bien que sa douceur ait e´te´ remarque´e par Quintilien, est sombre, se´rieux, souvent triste ; et ce qui de´montre que ce caracte`re e´tait celui de son e´poque et non le sien, c’est qu’il saisit toutes les occasions qu’il rencontre ou qu’il fait naıˆtre pour s’e´tendre en descriptions et en digressions poe´tiques. Mais au milieu de ses efforts pour n’eˆtre que poe`te, il redevient sans cesse penseur. La terre est pleine de maux, dit-il, la mer en est remplie a. La description des diffe´rents aˆges de l’espe`ce humaine finit par les prophe´ties les plus sinistres b. C’est a` regret que les Parques filent aux mortels quelques jours heureux, et la Douleur, assise aupre`s d’elles, prome`ne sur leurs fuseaux ses yeux mouille´s de larmes. Les plaintes d’He´siode contre la tyrannie des grands et des rois ne sont que l’expression du malaise d’un e´tat social encore imparfait, et trouble´ par ceux meˆmes qui avaient mission de le faire respecter c. Produit ine´vitable de cette agitation et de ce malaise, la re´flexion reparaıˆt toujours, infatigable et de´courageante. L’homme a fait le pas irre´parable, ce retour sur lui-meˆme, sur le malheur de sa condition. Il a de´couvert les pie´ges dont il est environne´, les dangers de la confiance et la duperie de l’enthousiasme. Apre`s cette de´couverte, aucune illusion n’est long-temps comple`te. La purete´ d’ame, l’e´lan du sentiment religieux soule`vent parfois le fardeau qui pe`se sur l’imagination et le cœur. Quelques ge´nies privile´gie´s s’en de´gagent, nous en verrons un exemple dans Sophocle, mais la foule des e´crivains demeure courbe´e sous ce poids : la poe´sie traine alors apre`s elle une arrie`re-pense´e qui est contre sa nature, et dont elle veut en vain s’affranchir. Elle se de´bat pendant plusieurs sie`cles, elle varie ses formes, elle calcule ses effets, elle reprend des apparences de vie, mais elle porte en elle le germe de mort. Les contradictions qu’introduit dans les notions religieuses l’e´tat social sous l’influence duquel He´siode e´crivait, frappent a` chaque instant le lecteur attentif. On y voit d’abord, comme dans Home`re, Jupiter de´vore´ d’amour a b c

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The´ogon. 32 et seq1. Ib. 163–1642. V. t. III, p. 2973. BC commente un proble`me e´voque´ par Pausanias. Il faudrait relire les vv. 1–36 (e´d. Mazon, pp. 32–33), ou` He´siode raconte avoir rec¸u des Muses l’ordre de chanter ce qui e´tait et ce qui sera. BC cite les derniers vers de la description des premiers aˆges, avec la naissance des monstres Cottes, Briare´e et Gyge`s. «Fils issus de moi et d’un furieux, si vous voulez m’en croire, nous chaˆtierons l’outrage criminel d’un pe`re, tout votre pe`re qu’il soit, puisqu’il a le premier conc¸u œuvres infames» (e´d. Mazon, p. 38). OCBC, Œuvres, t. XIX, pp. 303–304.

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pour une mortelle a, Minerve encourageant Hercule a` blesser Mars b ; Mars, en conse´quence, blesse´ et renverse´ par Hercule c. L’Olympe ne se constitue que par la victoire des dieux sur les Titans, qui sont leurs rivaux et les attaquent a` forces e´gales d ; Typhe´e aurait ine´vitablement saisi l’empire de l’Univers, si Jupiter ne l’avait pre´venu en le frappant de la foudre e. Le Tartare d’He´siode f est en tout semblable a` celui de l’Odysse´e. Les vaincus y sont renferme´s g ; Gyge`s, Cottus et Briare´e en sont les gardiens h, avec leurs cent bras et leurs cinquante teˆtes i. Les crimes d’homme a` homme n’y sont point punis. Les Œuvres et les Jours contiennent cette ide´e fondamentale de la premie`re e´poque du polythe´isme, que les dieux et les mortels sont originairement une meˆme race, et qu’ils sont ne´s en meˆme temps k, c’est-a`-dire que les dieux ne diffe`rent des hommes que par la force et par la puissance l. a b c d e f g h i k

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Boucl. d’Herc. 31–361. Id. 331–3352. Id. 458–4623. Theog. 881–8854. Theog. 820–868. Ib. 724–804. Ib. 729–7315. Ib. 734–735. Ib. 148–152. Œuvres et Jours, 1086. Si nos recherches nous permettaient d’entrer dans tous les de´tails des mythologies, nous remarquerions que celle d’He´siode se rapproche davantage de l’Odysse´e que de l’Iliade. Mercure, par exemple, est toujours le messager des dieux et remplace Iris, ce qui fut, BC e´voque la le´gende de la naissance d’Hercule, fils de Zeus et d’Alcme`ne, fre`re jumeau d’Iphicle`s, fils d’Amphitrion (e´d. Mazon, p. 134). Dans le discours qu’Athe´na adresse a` Hercule, elle l’encourage a` attaquer Are`s : «quand tu auras prive´ Kycnos de la douce vie, laisse-le, lui et ses armes, ou` il sera ; surveille plutoˆt l’attaque d’Are`s, le fle´au des hommes, et la` ou` tes yeux verront un endroit de´couvert audessous de l’e´cu cisele´, frappe de l’airain aigu» (e´d. Mazon, p. 145). BC cite la description de l’attaque d’Hercule, prote´ge´ par Athe´na : «[Are`s] tira son e´pe´e aigue¨ et s’e´lanc¸a sur He´racle`s au cœur puissant. Mais, a` cette attaque, le fils d’Amphitrion, insatiable du cruel combat, vit la cuisse de´couverte sous le bouclier cisele´ et vigoureusement frappa. La lance bien dirige´e entailla largement la chair d’Are`s au milieu de la lice» (e´d. Mazon, p. 150). «Et, lorsque les dieux bienheureux eurent acheve´ leur taˆche et re´gle´ par la force leur conflit d’honneurs avec les Titans, sur les conseils de Terre, ils presse`rent Zeus l’Olympien au large regard de prendre le pouvoir et le troˆne des Immortels, et ce fut Zeus qui leur re´partit leurs honneurs» (e´d. Mazon, p. 63). «C’est la` que les Titans sont cache´s dans l’ombre brumeuse, par le vouloir de Zeus, assembleur des nue´es» (e´d. Mazon, p. 58). BC cite le vers qui dit que les dieux et les hommes sont ne´s en meˆme temps. C’est l’aˆge d’or pour les hommes qui ne connaissent pas de soucis, et vivent comme les dieux (e´d. Mazon, p. 90).

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Leur perversite´ est encore une opinion consacre´e. Jupiter envie a` l’espe`ce humaine l’usage du feu, parce qu’elle est l’objet de sa haine a. Il oˆte la voix aux maladies, de peur que les mortels avertis ne leur e´chappent b. Il les a destine´s a` d’e´ternelles discordes c. Tous les dieux concourent a` embellir Pandore pour la perte des hommes d. Prome´the´e connaıˆt si bien Jupiter, qu’il de´fend a` son fre`re E´pime´the´e de recevoir aucun pre´sent de ce dieu perfide e. Mais, a` coˆte´ de ces vestiges d’une religion qui preˆte a` ses idoles toutes les imperfections et tous les vices, les maximes e´nonce´es par le poe`te, prouvent que de´ja les dieux se sont ame´liore´s. Jupiter, dit-il, comble de biens les rois et les peuples justes f. Il chaˆtie le fourbe et dompte l’orgueilleux g. Il a donne´ a` l’homme l’E´quite´ pour supreˆme loi h. Cette de´esse est assise aupre`s de lui i. Trente mille dieux parcourent incessamment la terre, observateurs rigides des vices et des vertus k. Les Furies sortent du fond des enfers pour punir le parjure l. L’adulte`re, l’inceste, la spoliation des orphelins, l’ingratitude envers les parents, subissent des peines se´ve`res m, et ces peines s’e´tendent jusque sur la poste´rite´ du coupable n, car on sent de bonne heure que, pour l’honneur de la justice divine, l’exe´cution de ses arreˆts doit eˆtre place´e dans un autre monde, ou dans l’avenir de celui-ci. Les dieux, enfin, re´com-

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ainsi que nous l’avons observe´ plus haut, un changement a` la fable, poste´rieur a` l’opinion accre´dite´e par le chantre du sie´ge de Troie. Theogon. 563–568. Œuvres et Jours, 1041. Ib. 16. Ib. 81–82. Ib. 85–88. Œuvres et Jours, 224–235. Ib. 72. Ib. 274–2773. Ib. 254–260. Ib. 250–253. Ces dieux sont des de´mons ou eˆtres interme´diaires. On peut voir ce que nous avons dit, dans le livre X, de la de´monologie d’He´siode.4 Œuvres et Jours, 800–802. Ib. 236–245 ; 325–332. Ib. 282. «Les maladies, les unes le jour, les autres la nuit [...] visitent les hommes, apportant la souffrance aux mortels – en silence, car le sage Zeus leur a refuse´ la parole» (e´d. Mazon, p. 89). «Aise´ment il donne la force et aise´ment abat les forts, aise´ment il ploie les superbes et exalte les humbles, aise´ment il redresse les aˆmes torses et se`che les vies orgueilleuses, Zeus qui gronde sur nos teˆtes, assis en son palais tre`s haut» (vv. 5–8 ; e´d. Mazon, p. 86). «E´coute donc la justice, oublie le violence a` jamais» (e´d. Mazon, p. 96). BC prend le nom de «justice» comme le nom propre d’une vierge, fille de Zeus. Le renvoi est vague. On pourrait citer ci-dessus, pp. 187 a` 192.

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pensent le travail, condamnent la paresse a, enle`vent les richesses mal acquises b. Ce n’est pas seulement dans ces ide´es ge´ne´rales qu’He´siode re´unit des notions contradictoires ; le meˆme amalgame se reproduit dans ses descriptions de divinite´s particulie`res. Ici, Jupiter sujet a` l’erreur, est le jouet de Prome´the´e c. Ailleurs, il est appele´ deux fois celui qui connaıˆt les de´crets e´ternels d, et le poe`te se consume en subtilite´s the´ologiques pour concilier l’omniscience du dieu avec le succe`s des artifices de l’homme. Le premier, dit-il, connaissait la ruse et ne se laissait tromper que parce qu’il voulait du mal aux mortels e. L’anthropomorphisme a introduit dans toutes les mythologies des sophismes pareils. Dans le Bouclier d’Hercule, les Parques hi deuses, terribles, ne sont que des ge´nies malfaisants et sanguinaires f. Elles traıˆnent les morts a` travers la meˆle´e ; elles se disputent les blesse´s ; elles sacrifient ceux meˆmes qui n’ont rec¸u aucune blessure. Dans la the´ogonie, elles sont les filles de la Justice g ; elles ne poursuivent que les coupables, mais sont inexorables dans leur se´ve´rite´ contre les crimes des dieux et des hommes h. Cette expression, les crimes des dieux, dans le vers meˆme ou` le chaˆtiment est confie´ a` des divinite´s vengeresses, nous semble de´noter e´videmment le me´lange de deux ide´es d’e´poques diverses i. a b c d e f g h i

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Œuvres et Jours, 301–308. Ib. 319–324. Theogon. 5351. Ib. 550 et 561. Ib. 551–552. Boucl. d’Hercule, 156–1622. Theogon. 904. Ib. 218–2193. On pourrait a` quelques e´gards comparer la persistance des anciens a` conserver les traditions qui attribuaient aux dieux des actions coupables, a` celle des chre´tiens, qui, sous une religion de douceur et d’humanite´, n’en ont pas moins conserve´ long-temps les traditions juives, sur le caracte`re jaloux et cruel de Je´hovah4. Ici commence l’histoire du partage ine´gal du sacrifice d’un taureau, propose´ par Prome´the´e a` Zeus (e´d. Mazon, p. 51). BC cite un passage qui est un emprunt de l’Iliade (e´d. Mazon, p. 138, n. 2) ; voir la description du bouclier d’Achille dans l’Iliade, livre XVIII. «Elle [i.e. Nuit] mit au monde aussi des Parques et les Ke´re`s, implacables vengeresses, qui poursuivent toutes fautes contre les dieux ou les hommes» (e´d. Mazon, p. 40). Comme Schleiermacher BC rejette pour des raisons the´ologiques la puissante tradition des e´glises chre´tiennes qui parlent de la cole`re de Dieu. L’exemple le plus connu est l’hymne «Dies irae, dies illa» (attribue´e a` Thomas de Celano (XIVe sie`cle), mais on pourrait renvoyer e´galement aux repre´sentations de catastrophes (e´pide´mies de la peste ; tremblements de terre ou autres fle´aux de l’humanite´).

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Nous pourrions prolonger a` l’infini cette e´nume´ration. He´siode appelle deux fois le Styx une divinite´ incorruptible a, et quelques vers plus loin, il le nomme un monstre horrible et abominable b. Dans la The´ogonie, Ne´me´sis est la fille de la Nuit, le fle´au des mortels ; elle verse sur eux les maux indistinctement et se complaıˆt au spectacle de leurs mise`res c. Dans les Œuvres et les Jours, c’est une divinite´ qui habite au haut des cieux avec la Pudeur d. Ve´nus elle-meˆme, telle que la Bhavani des Indes, a deux caracte`res. Elle paraıˆt sur l’Oce´an, ayant a` sa suite l’amour, la fe´condite´, un corte´ge plein de se´duction, de charme et de joie e ; mais bientoˆt elle engendre la ne´cessite´, la mort et la haine f. Me´duse enfante E´chidna, vierge admirable de beaute´, et dont le soleil se plaıˆt a` faire briller les attraits, en arreˆtant ses rayons sur elle g. Deux vers plus loin, cette vierge si belle est un effroyable serpent h. a b c d

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Theogon. 389–3971. Theogon. 775–7762. Theogon. 2233. Œuvres et Jours, 198. Il y a de meˆme deux E´ris, l’une bonne et l’autre me´chante. La me´chante est la plus ancienne, car elle est fille de la Nuit. La bonne E´ris est la plus moderne ; Jupiter est son pe`re. (Theog. 226 ; Œuvres et Jours, 17.) Theog. 195–202. Ib. 219 225. Il est bien certain que l’Aphrodite dont He´siode parle vers 195, et la Nuit dont il est question vers 219, sont une et la meˆme divinite´. Nous en avons la preuve dans le troisie`me hymne orphique, ou` la Nuit me`re de tout est appele´e aussi Cypris, e´pithe`te qu’He´siode lui donne, et dans le 55e hymne, ou` Aphrodite est nomme´e la Nocturne, tour a` tour e´clatante et invisible, νυχτεριη, ϕαινομενι τ’αϕανης τε4. Theog. 2965. Ib. 298–299. Remarquez que dans He´siode ce monstre n’a point de pe`re : c’est beaucoup plus tard qu’Apollodore lui assigne pour parents la Terre et le Tartare. On reconnaıˆt donc ici le me´lange de deux ide´es sacerdotales, l’une relative a` la figure des dieux, l’autre tenant

«Il [i.e. Zeus] voulut qu’elle fuˆt ‘le grand serment des dieux’» (e´d. Mazon, p. 46). «De´esse odieuse, la terrible Styx» (e´d. Mazon, p. 60). «Ne´me´sis, fle´au des hommes mortels» (e´d. Mazon, p. 40). Allusion aux deux premiers vers du troisie`me hymne orphique : «C’est la Nuit que je vais chanter, ge´ne´trice des dieux (Νυ κτα Θεω Ä ν γενε τειραν) et des hommes. Nuit, origine de toutes choses, appelons-la aussi Cypris (Κυ πριν καλε σωμεν).» BC cite lui-meˆme deux e´pithe`tes du 55e hymne : νυκτεριÂ α «nocturne» (v. 3) et ϕαινομε νη τ’ αÆ ϕανη ς «visible et invisible» (v. 10) (Hymnes orphiques, e´d. Fayant, pp. 450–451). Les traditions mythologiques sur E´chidna divergent entre elles. L’une d’entre elles dit qu’elle est la fille de Chrysaor et de Callirhoe ; BC ne re´sume pas tout a` fait fide`lement la le´gende d’E´chidna, la fille de Ke´ta. Elle est «un monstre irre´sistible» (e´d. Mazon, p. 42), a` «l’aˆme violente. Son corps est pour moitie´ d’une jeune femme aux belles joues, et aux yeux qui pe´tillent, pour moitie´ d’un e´norme serpent, terrible autant que grand, tachete´, cruel». Et encore «l’atroce E´chidna, dont la jeunesse doit e´chapper a` la vieillesse et a` la mort».

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Ici se re´alise donc ce que nous avons dit des caracte`res qui distinguent la transition d’une e´poque a` l’autre. Les opinions s’entre-choquent, les hommes paraissent coupables des inconse´quences et des contradictions qui sont dans les choses ; mais ces inconse´quences vont disparaıˆtre, ces contradictions se concilier, a` mesure que le pre´sent triomphera du passe´.

aux conceptions miraculeuses, inde´pendantes de l’union des sexes. Mais He´siode rele`gue E´chidna loin des regards des dieux et des hommes (v. 384). Il semble avoir senti que toutes ces images e´taient repousse´es par la mythologie en circulation1.

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BC renvoie a` une phrase du livre II, chap. 2, qui dit que les parents d’Echidna e´taient Tartarus et Ge´ (Apollodore, Bibliothe`que mythologique).

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Pindare, e´crivant, suivant la chronologie vulgaire, pre`s de cinq cents ans apre`s He´siode, ne tombe presque jamais dans les inconse´quences dont ce dernier est rempli. Il repousse, le plus qu’il le peut, tout ce qui, dans les traditions antiques, ne s’accorde pas avec les maximes devenues, de son temps, une partie essentielle de la croyance publique.

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Nos lecteurs ne doivent pas s’e´tonner si nous passons rapidement d’He´siode a` Pindare. Nous avons scrute´ scrupuleusement et minutieusement les poe`tes qui remplissent un intervalle de pre`s de cinq sie`cles, mais a` peine avons-nous trouve´ quelques symptoˆmes presque imperceptibles de la marche dont nous essayons de rendre compte. Tyrte´e et Sapho ne nous ont rien offert ; les fragments de Ste´sichore sont pleins de traditions et d’images orphiques ou sacerdotales ; les odes tre`s-peu authentiques d’Anacre´on n’ont gue`re de poids ; Phocylide et The´ognis nous pre´sentent un petit nombre de sentences dignes d’attention, aussi les avons-nous cite´s quelquefois. Mais la re´volution religieuse qui nous occupe ne s’aperc¸oit d’une manie`re claire et manifeste que dans les ouvrages de Pindare ; encore faut-il e´carter ses allusions myste´rieuses a` des doctrines e´trange`res ou philosophiques, dont il avait et surtout dont il affectait d’avoir connaissance1.

E´tablissement du texte : Manuscrit : BCU, Co 3294/2, fos 21–22 et Co 3294/6, fo [95] Imprime´ : De la Religion, conside´re´e dans sa source, ses formes et ses de´veloppements, t. IV, Paris : Chez Pichon et Didier, e´diteurs, 1831, pp. 375–383.

1 IV. ] 5 Co 3294/2 3 e´crivant ] manque Co 3294/2 la note sur un papillon Co 3294/2

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8–18 Nos lecteurs ... connaissance. ]

BC nomme les pre´de´cesseurs de Pindare (520–445) pour justifier son choix. Tyrte´e de Sparte (VIIe sie`cle) ; on ne connaıˆt de lui que quelques e´le´gies. – Sappho de Lesbos (vers 600), selon Platon la dixie`me muse, ne parle pas de sujets mythologiques. – Ste´sichore de l’Italie me´ridionale, dont on connaıˆt des fragments de ses compositions sur Oreste et He´le`ne, sera cite´ parfois. – Anacre´on (vers 550) est un poe`te lyrique d’une inspiration qualifie´e de le´ge`re. – Phocylide de Milet (VIe sie`cle) est l’auteur d’un recueil de sentences en hexame`tres (ΓΝΩΜΑΙ). – On ne connaıˆt de The´ognis de Me´gare (VIe sie`cle) qu’un recueil de poe´sies didactiques (ΕΛΕΓΕΙΩΝ) adresse´es a` un jeune homme.

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Non-seulement toutes ses assertions ge´ne´rales sont conformes a` cette tendance. La Justice est assise a` coˆte´ de Jupiter a. Toutes les vertus viennent des dieux b. La fe´licite´ de l’homme irre´prochable est seule assure´e, celle du me´chant s’e´vanouit comme un songe c. Ces assertions ge´ne´rales ne seraient pas une preuve suffisante d’une modification dans la religion, puisque nous en voyons de pareilles seme´es c¸a` et la` dans l’Iliade et dans la The´ogonie, a` coˆte´ des traits les plus propres a` les de´mentir ; mais Pindare e´rige, en principe positif et direct, la ne´cessite´ d’e´purer la mythologie dans le sens de la morale. Il convient aux hommes, dit-il, de ne raconter sur les immortels que des choses honorables ; alors, en supposant qu’ils inventent, ils ne commettront qu’une moindre faute d. a b c d

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Olymp., VIII, 28 et 291. Pyth. I, 79–822. Isthm. III, 7–103. Olymp. I, 55–57 ; Pyth. III, 27 ; IX, 454. On trouve dans l’Edda quelque chose de pareil : Ne re´ve´lez pas vos destine´es aux hommes, dit l’e´pouse d’Odin aux dieux scandinaves, cachezleur ce que vous avez fait dans la naissance des temps. Lors meˆme, dit l’Edda (23e fable5), que Thor aurait eu le dessous dans quelque rencontre, il n’en faudrait pas parler, puisque tout le monde doit croire que rien ne peut re´sister a` sa puissance.

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] 〈VIII. 28–29 & 55–57〉

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BC renvoie a` Pindare, Olympiques, VIIIe ode, vv. 21–23 : «E´gine aux longues rames, ou` l’assistante de Zeus hospitalier, The´mis Salutaire, est honore´e plus que partout ailleurs !» (Pindare, Tome I, Olympiques, texte e´tabli et traduit par Aime´ Puech, Paris : Belles Lettres, 1970, p. 107). Nous adoptons partout la nume´rotation des vers de cette e´dition ; la nume´rotation utilise´e par BC est celle des e´ditions anciennes ; elle diffe`re conside´rablement de celle des e´ditions critiques modernes depuis la parution de la ce´le`bre e´dition d’August Boeckh (Lipsiæ : Weigel, 1811–1821) ; celles-ci tiennent compte des analyses des strophes et du me`tre des vers. «C’est aux Dieux que les qualite´s des hommes doivent leurs ressources ; les Dieux nous donnent le talent, la force des bras et l’e´loquence» (Pindare, tome II, Pythiques, texte e´tabli et traduit par Aime´ Puech, Paris : Belles Lettres, 1992, I, vv. 41–42, p. 30). «La fe´licite´, pour les justes, est plus durable, tandis que, pour ceux qui suivent des chemins obliques, elle ne saurait, en tout temps, e´galement fleurir» (Pindare, tome IV, Isthmiques et fragments, texte e´tabli et traduit par Aime´ Puech, Paris : Belles Lettres, 1961, III, vv. 5–6, p. 42). «L’homme ne doit attribuer aux Dieux que de belles actions : c’est la voie la plus suˆre» (Olympiques, e´d. Puech, I, v. 35, p. 28). BC cite encore deux exemples des odes pythiques. Le premier concerne la le´gende de Koronis, la fille de Phle´gyas, aime´e par Apollon, tue´e par Arte´mis a` sa demande parce qu’elle lui avait e´te´ infide`le (Pythiques, e´d. Puech, III, vv. 8–14, p. 54). Le second exemple raconte l’histoire de Cyre`ne, qui lutte sans armes contre un lion et sera aime´e par Apollon (Pythiques, e´d. Puech, III, vv. 26–75 ; pp. 135–138). BC cite un passage du de´but de cette 23e fable (Mallet, Edda, p. 187).

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Ce passage est remarquable sous deux rapports. Il indique les progre`s qui faisaient rejeter les fables de´savantageuses aux dieux et meˆme aux he´ros a, et, de plus, il contient l’aveu du poe`te, qu’il choisissait de pre´fe´rence, d’apre`s une certaine critique morale, entre les traditions consacre´es, les plus conformes aux nouvelles ide´es de dignite´, d’ordre et de justice qui avaient pe´ne´tre´ dans la religion. Il est a` remarquer que cette critique morale qui dirige Pindare, bien qu’elle doive aboutir, en de´finitive, a` l’incre´dulite´, n’y conduit point encore ce poe`te ; ce n’est point le fait qu’il re´voque en doute ; le merveilleux n’est point ce qui l’effarouche ; il ne cherche point a` e´branler la croyance en ce qui constitue re´ellement la mythologie, c’est-a`-dire l’action des dieux sur les hommes. Il pense seulement que le fait a e´te´ de´figure´, soit par le´ge`rete´, soit par malveillance. L’envie et la perversite´, dit-il, ont accre´dite´ secre`tement ces re´cits coupables b. Il ajoute c que de brillants mensonges ont trop souvent entraıˆne´ les hommes et leur ont de´guise´ la ve´rite´. C’est ainsi que les a

b c

Ste´sichore lui avait de´ja donne´ cet exemple en faisant amende honorable de ce qu’il avait dit sur He´le`ne, car les poe`tes travaillaient alors a` relever le caracte`re des he´ros comme celui des dieux1. Olymp. I, 472. Ibid., 283.

1 progre`s ] progre`s 〈du polythe´isme〉 Co 3294/2 2 et meˆme aux he´ros ] manque Co 3294/2 3–6 choissisait ... religion. ] dirait des choses de son invention. Co 3294/2 choisissait d’apre`s une certaine critique morale ... conformes a` la dignite´ des dieux. BC accroche a` ce mot la note sur Ste´sichore Co 3294/6 7-p. 403.9 Il est ... de´naturent. ] passage qu’on lit dans Co 3294/6 ou` il y a un folio intitule´ Suite d’ide´es. Ch. 5. de Pindare. note. 8 aboutir ] ajoute´ dans l’interl. Co 3294/6 9–11 n’est point ... en ce qui ] 〈meme〉 ne l’effarouche point (ce dernier mot re´crit sur pas) il ne cherche 〈point〉 pas a` e´branler la croyance 〈sur〉 en ce qui Co 3294/6 13–14 L’envie ... coupables. ] phrase remonte´e de la note ces re´cits coupable[s] dit-il ont e´te´ accre´dite´s secretement par la perversite´ & l’envie. Co 3294/6 15-p. 403.1 que les douces ... enchanteurs ] qu’Home`re aux douces paroles a amplifie´ les traditions relatives a` Ulysse : ses vers enchanteurs Co 3294/6 16–18 Ste´sichore ... dieux. ] manque Co 3294/2 1

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On consultera l’e´dition de Ste´sichore par M. Davies et P. J. Finglass (Stesichorus, The Poems, edited with Introduction, Translation, and Commentary, Cambridge : University Press, 2014, pp. 299–305). Les analyses confirment ce que soutient BC ici. Voir aussi David A. Campbell, Greek Lyric, III, Stesichorus, Ibycus, Simonides, and Others, Cambridge, Massachusetts, London : Harvard University Press, 1991, pp. 88–97. BC cite : «Ah ! le monde est plein de merveilles – et parfois aussi les dires des mortels vont au dela` du vrai ; des fables, orne´es d’adroites fictions, nous de´c¸oivent» (Olympiques, e´d. Puech, I, vv. 26–28b ; p. 27). BC veut citer le passage qui parle de la puissance de la poe´sie. «Le Ge´nie (Χα ρις), a` qui les mortels doivent tout ce qui les charme, les met [i.e. les fables] en honneur, donne cre´dit a` l’incroyable bien souvent !» (Olympiques, e´d. Puech, I, vv. 30–34 ; pp. 27–28).

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douces paroles d’Home`re et ses vers enchanteurs ont reveˆtu l’imposture d’une autorite´ imposante, et que son ge´nie a captive´ l’imagination des mortels cre´dules a. Pindare reconnaıˆt donc que le fond des fables est vrai, que la place qu’y occupe le surnaturel doit lui eˆtre laisse´e, mais il se de´fie des inventions et des embellissements poste´rieurs ; il les examine, non comme un sceptique railleur ou hostile, mais comme un de´vot se´rieux et orthodoxe ; il s’attache a` la croyance, tout en l’e´purant. Les fables ne sont point, a` ses yeux, des mate´riaux ou` il ait le droit de puiser a` son gre´ ; ce sont des faits qu’il a le devoir de de´gager des additions qui les de´naturent. S’il parle de Tantale, c’est en substituant au dogme populaire une fiction plus de´cente ; je ne puis regarder, ajoute-t-il, les dieux comme intempe´rants et comme voraces. Loin de nous cette pense´e criminelle b. S’il s’afflige souvent de l’instabilite´ des choses humaines c, et se laisse entraıˆner a` cette me´lancolie si naturelle aux esprits me´ditatifs, il ne prononce jamais un mot a b c

Nem. VII, 201. Olymp. X, 82–1022. Pyth. VIII, 108–1113.

3 Pindare ] Il Co 3294/6 4 se de´fie ] 〈distingue entre〉 se de´fie Co 3294/6 5 les examine ] 〈applique sa critique〉 les examine Co 3294/6 6 sceptique railleur ] 〈un mot illis.〉 sceptique railleur corr. dans la marge et dans l’interl. Co 3294/6 7 a` la ... l’e´purant. ] d’autant plus a la croyance qu’il se flatte de l’e´purer. Co 3294/6 8 a` ses yeux ] pour lui Co 3294/6 il ait ... puiser ] il puise Co 3294/6 9 a le devoir de de´gager ] de´gage Co 3294/6 de´naturent ] de〈figurent〉naturent Co 3294/6 11 plus de´cente ] moins grossie`re et plus de´cente Co 3294/2 12 pense´e criminelle ] criminelle 〈pense´e〉 un mot illis. Co 3294/2 16 X ] I ou X Co 3294/2 17 108 ] la source porte 188 faute que nous corrigeons d’apre`s le ms. Rel4 et Co 3294/2 1

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BC fait allusion a` un passage de la septie`me ode ne´me´enne : «J’imagine que la renomme´e d’Ulysse a de´passe´ ses e´preuves, graˆce au charme d’Home`re. Car les fictions et la poe´sie au vol sublime lui ont donne´ je ne sais quel prestige ; l’art nous dupe, en nous se´duisant par des fables» (Pindare, Ne´me´ennes, tome III, texte e´tabli et traduit par Aime´ Puech, Paris : Belles Lettres, 1967, VII, vv. 20–24 , p. 97). Il faut corriger le renvoi. L’histoire de Tantale et de Pe´lops est e´voque´e dans la premie`re ode des Olympiques : Pindare remplace la le´gende populaire (le meurtre de Pe´lops par son pe`re Tantale pour l’offrir aux dieux pendant un festin ) par une version plus douce (le rapt de Pe´lops par Neptune) et explique la punition cruelle de Tantale par son avidite´. Dans ce contexte, on trouve chez Pindare la phrase : «Non, je ne puis appeler cannibale aucun des Dieux ! Je m’y refuse !» (Olympiques, e´d. Puech, I, vv. 36–58, et plus particulie`rement v. 52 ; pp. 28–29). Allusion a` cette phrase : «Le succe`s ne de´pend pas des hommes. C’est la divinite´ qui le donne. Tantoˆt elle lance et e´le`ve l’un, tantoˆt sa main rabaisse l’autre» (Pythiques, e´d. Puech, VIII, v. 76 ; p. 123). Voir quelques vers plus loin la meˆme ide´e : «La fortune des mortels grandit en un instant ; un instant suffit pour qu’elle tombe a` terre, renverse´e par le destin inflexible» (v. 91, p. 124).

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qui inculpe les dieux ou les taxe d’une basse et cruelle jalousie a. Si nous retrouvons dans une de ses odes, comme dans He´siode, l’axiome fondamental de la mythologie home´rique, la race des dieux et celle des hommes de´clare´es une et la meˆme b, ailleurs, il parle des premiers, de leur supe´riorite´ sur l’espe`ce humaine, de leur science universelle, de manie`re a` indiquer l’intervalle immense qui avait, depuis peu, se´pare´ ces deux races c. Dans sa neuvie`me Olympique, il commence, a` l’exemple des poe`tes ses pre´de´cesseurs, a` raconter les combats des dieux ; mais, s’arreˆtant soudain, Loin de moi, s’e´crie-t-il, d’outrager dans mes vers la majeste´ ce´leste ; et il interrompt ces re´cits profanes d. L’auteur de l’Iliade e´tait bien loin d’e´prouver de pareils scrupules. Aussi Pythagore disait-il avoir vu Home`re dans les enfers, tourmente´ comme He´siode, pour avoir calomnie´ les immortels. Enfin, dans les deux endroits ou` Pindare parle de Ne´me´sis, il choisit entre les deux caracte`res e qu’He´siode donne a` cette de´esse, le plus instructif et le plus moral. Ce n’est plus Ne´me´sis fle´au des mortels, c’est Ne´me´sis qui a

b c d e

Phocylide, dans les vers que rapporte Stobe´e, dit comme Pindare, qu’il n’existe aucune envie parmi les dieux1. Nem. VI, 1–92. Pyth. 79–873. Olymp. IX, 15, 624. V. ci-dessus, p. 3675.

1 inculpe ... taxe ] 〈semble〉 inculpe〈r〉 ... taxe〈r〉 Co 3294/2 5 de manie`re a` indiquer ] en des termes qui 〈illis.〉 de´notent Co 3294/2 12 immortels. ] immortels. 〈home`re est le type du polythe´isme primitif. he´siode celui du me´lange et de la lutte des deux espe`ces de polythe´isme. L’un restreint a` des rapports grossiers de puissance et de force, L’autre empreint d’ide´es plus nobles et plus morales ; Pindare enfin nous offre cette dernie`re espe`ce de polythe´isme dans toute son e´le´gance et toute sa purete´ pour entourer cette notion d’une e´vidence nouvelle, Lorsque nous comparons L’enfer de Pindare avec celui d’Home`re et d’he´siode.〉 Co 3294/2 13-p. 406.14 Enfin ... Tartare.« ] la fin du chapitre ne se trouve pas dans le dossier Co 3294, excepte´e l’e´bauche pour ce passage dans Co 3294/6 (ci-dessous, p. 629) et la citation de Me´some`des dans Co 3294/1 (ci-dessous, p. 616) Co 3294/2 17 dieux. ] dieux. Bayle, art. Pe´ricle´s Co 3294/2 1 2

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Renvoi non e´lucide´. Stobe´e ne cite jamais Phocylide, Pindare une seule fois. BC renvoie a` la premie`re strophe de la sixie`me ode ne´me´enne qui reproduit en effet la the´ologie d’He´siode. L’exe´ge`se de BC est confirme´e par les e´diteurs modernes. Voir les notes de Puech, p. 80 de son e´dition. Renvoi incomplet. Nous pensons que BC veut citer la premie`re ode pythique (e´d. Puech, vv. 41–46 ; pp. 30–31 ; voir ci-dessus, p. 401, n. 2). BC combine deux passages de la neuvie`me ode olympique. Celle-ci e´voque au de´but «l’arc des Muses ... a` longue porte´e» (e´d. Puech, IX, v. 5, p. 116), puis on trouve plus loin, lorsqu’il commence a` raconter les combats d’Hercule contre Pose´idon, Apollon et Hade`s, le vers «Mais rejette ce propos, oˆ ma bouche ! Insulter les Dieux, c’est un art que j’abhorre ; l’insolence importune accompagne le chant de la folie» (vv. 35–39 ; p. 118). Voir ci-dessus, p. 395.

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punit l’abus de la puissance, et Pindare invite son he´ros a` ne pas l’irriter a ; c’est Ne´me´sis qui juge les actions des hommes, et dont les Hyperbore´ens sont heureux de ne jamais provoquer la cole`re. Nous remarquerons ici, en peu de mots, combien la progression de la religion grecque se fait apercevoir clairement dans cette conception de Ne´me´sis ; dans Home`re, ce n’est point une de´esse, c’est une exclamation, une espe`ce d’invocation qui de´tourne les mauvais pre´sages et le scandale ; dans He´siode, elle paraıˆt a` double, tour-a`-tour fille de l’abyme ou habitante des cieux. Pindare repousse ceux de ses attributs qui en font une force malfaisante b ; c’est comme juste que, tout-a`-l’heure, les tragiques l’invoqueront c ; et, plus tard, sa justice ne se bornera point a` des chaˆtiments mate´riels, elle devien dra, par un nouveau raffinement, par une nouvelle de´licatesse d’expression et de pense´e, la compagne de la mode´ration ; sa statue meˆme rappellera aux Grecs combien sont funestes les e´garements d’un orgueil sans bornes et l’enivrement du pouvoir. Le bloc de marbre employe´ par Phidias sera celui que les Perses, se croyant assure´s de la victoire, destinaient a` immortaliser, par un monument magnifique, le succe`s de leurs armes et l’asservissement de la Gre`ce d. Marathon les voit fuir, pe´rir dans les marais, ou rougir de leur sang les ondes ou` ils se pre´cipitent, et le marbre reconquis sur eux devient la de´esse qui pre´side a` l’e´quite´ dans les entreprises, et a` la modestie dans les espe´rances. a b

c d

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Olymp. VIII, 1441. HERDER nous semble avoir mal interpre´te´ l’e´pithe`te de διχοβουλον. Elle n’est nullement expressive d’une disposition malveillante ; c’est Ne´me´sis changeant de disposition, et c’est un avertissement a` Alcime´don de ne pas me´riter ce changement, en abusant d’une prospe´rite´ dont alors il ne serait plus digne2. Electre. 7933. PAUSAN. Attic. 334. Allusion aux derniers vers de la huitie`me ode olympique : «Puisse-t-il [i.e. le lutteur Alcime´don d’E´gine] donner aux Blepsiades d’accomplir exploits sur exploits et e´carter d’eux les maladies douloureuses ! Je le supplie de ne pas laisser la jalouse Ne´me´sis attenter a` leur fe´licite´» (e´d. Puech, VIII, vv. 84–85 ; p. 110). BC se rapporte a` l’e´tude «Nemesis» que Herder a publie´e dans les Zerstreute Blätter, Zweite Sammlung, 1786, ou` il traduit un vers des Olympiques (VIII, 86) par les mots «[das Volk das] scheut die richtende Nemesis» ([le peuple qui] craint Ne´me´sis qui condamne avec e´quite´) Νεμεσιν διχο βουλον. Voir Herder, Werke, t. IV, Schriften zu Philosophie, Literatur, Kunst und Altertum, 1774–1787, Frankfurt : Deutscher Klassiker Verlag, 1994, p. 552. Voir Pindar, e´d. Puech, I, p. 110 ; Puech traduit «la jalouse Ne´me´sis». Les deux traductions ainsi que l’observation de BC sont proble´matiques. Pindare n’e´voque point la de´esse, mais utilise le nom abstrait dans la signification de «distribution». La phrase en question est une prie`re adresse´e a` Zeus. BC renvoie a` Sophocle. E´lectre s’adresse dans son de´sespoir a` Ne´me´sis : «Entends, oˆ Ne´me´sis, vengeresse du mort qui vient de succomber» (e´d. Dain, t. II, p. 166). BC re´sume le re´cit de´veloppe´ de Pausanias (livre I, Attica, chap. 33, 2–8).

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Cette ide´e se transmit, s’e´purant de sie`cle en sie`cle, et Me´some`des, six cents ans apre`s Pindare a, la ce´le`bre encore dans ses vers. «O Ne´me´sis ! dit-il, de´esse aile´e, qui de´cides de la vie humaine ; de´esse au regard se´rieux, qui tiens d’une main se´ve`re les reˆnes de nos destine´es, a` nous mise´rables mortels, prompts a` nous e´garer ; tu vois l’orgueil qui nous perd, l’envie qui nous de´vore ; la roue du sort tourne toujours sans laisser de trace, tu la suis invisible, courbant le front superbe qu’e´le`ve une prospe´rite´ excessive, mode´rant l’abattement du malheur, pe´ne´trant dans les cœurs pour les calmer, et touchant du doigt la balance pour y re´tablir l’e´galite´ : soisnous propice, toi qui distribues la justice, Ne´me´sis aile´e, au front me´ditatif, inaccessible a` l’erreur, ne trompant jamais les humains, et n’ayant que l’E´quite´ pour compagne, l’E´quite´, qui e´tend dans les airs ses ailes blanches, l’E´quite´ puissante, qui nous pre´serve de nous-meˆmes, et de tes rigueurs, et du Tartare b.»

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1 2

Me´some`des e´tait contemporain d’Adrien ; mais, ainsi que tous les lyriques de cette e´poque, il avait recueilli et il conservait les ide´es morales de la religion grecque1. Anthol. grecq. II, 3472. On remarquera facilement dans cette ode la de´ge´ne´ration de la poe´sie et de l’art. L’affectation de Me´some`des a` re´pe´ter trois fois l’e´pithe`te d’aile´e, prouve que le gouˆt s’e´tait corrompu et avait perdu sa simplicite´ antique. Mais le fond des ide´es n’en e´tait pas moins ne´cessaire a` rappeler.

Me´some`de de Cre`te, un cithariste et poe`te lyrique de la premie`re moitie´ du IIe sie`cle ap. J.-C., d’apre`s la Suida un affranchi d’Adrien. BC cite la traduction de la troisie`me ode de Me´some`des adresse´e a` Ne´me´sis (ÏΥμνος εÆ ις Νε μεσιν) qu’il a trouve´e dans l’Anthologie grecque. La traduction n’est pas litte´rale, de sorte que les observations de BC ne sont pas pertinentes. Les re´pe´titions (il y en a plusieurs) s’expliquent par la technique lyrique. Notons encore que nous posse´dons la me´lodie de cette ode. Voir Friedrich Bellermann, Die Hymnen des Dionysius und Mesomedes, Text und Melodien nach Handschriften und den alten Ausgaben, Berlin : Albert Förstner, 1840. On trouvera aussi le texte dans Anthologia Græca sive poetarum græcorum lusus, Lipsiæ : in bibliopolio Dyckio, MDCCXCIV, t. III, p. 6.

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Chapitre V. De l’enfer de Pindare, compare´ a` celui d’Home`re et d’He´siode.

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La comparaison de l’enfer de Pindare avec celui d’Home`re et d’He´siode, est singulie`rement propre a` jeter un grand jour sur le sujet de nos investigations ; mais cette comparaison demande, pour eˆtre utilement faite, une attention suivie et des yeux exerce´s ; les diffe´rences e´chapperaient facilement a` des regards superficiels. Rien ne paraıˆt mate´riellement change´ a` qui ne conside`re que de loin l’empire des morts. La topographie du monde futur, si l’on peut employer cette expression, reste, a` beaucoup d’e´gards, la meˆme. Les meˆmes de´nominations se conservent, les meˆmes grandes divisions subsistent. Tout a pris ne´anmoins une destination diffe´rente, tout concourt a` favoriser le but nouveau de la religion. Nous avons vu dans l’enfer primitif un lieu de supplices, ou` ge´missent exclusivement les ennemis personnels des dieux. Par une transformation naturelle et facile, lorsque les dieux se de´clarent les de´fenseurs de la morale, ce lieu de supplices n’est plus consacre´ a` leurs vengeances particulie`res, mais au chaˆtiment de tous les crimes. L’ide´e de chaˆtiment entraıˆne celle de jugements et de sentences. L’imagination cherche en conse´quence de quoi former un tribunal chez les morts. Quoi de plus simple, que d’e´tendre aux actions commises pendant la vie, la juridiction des rois et des vieillards, juridiction de´ja reconnue dans l’enfer d’Home`re, mais ne s’exerc¸ant que sur les querelles accidentelles de ceux qui ont ve´cu a ? Devant ces juges, comparaissent donc, non plus les morts, pour des diffe´rents momentane´s, mais chaque mort, a` son arrive´e sur le fune`bre rivage. Il se pre´sente, charge´ du a

V. t.

III,

p. 3811.

E´tablissement du texte : Manuscrit : BCU, Co 3294/2, fos 26–28 Imprime´ : De la Religion, conside´re´e dans sa source, ses formes et ses de´veloppements, t. IV, Paris : Chez Pichon et Didier, e´diteurs, 1831, pp. 384–392. 1 Chapitre V. ] Ch. 4. Co 3294/2, f o 26 5 a` jeter ... investigations ; ] a` nous faire bien concevoir les modifications qu’apporte aux fables l’introduction de la morale dans la religion. 7 des yeux ecerce´s ] un œuil exerce´ Co 3294/2, f o 26 7-p. 408.14 faCo 3294/2, f o 26 cilement ... bienheureuses. ] facilement − bienheureuses. passage cite´ en renvoyant a` un ms. non identifie´ Co 3294/2, f o 26 1

OCBC, Œuvres, t. XIX, pp. 361–362.

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poids de ses fautes, ou accompagne´ de la me´moire de ses vertus ; et cet are´opage inflexible, tenant l’urne fatale en main, de´masque la ruse et l’adresse, condamne l’injustice a` expier ses succe`s, et punit la force arrogante qu’a de´sarme´e le tombeau. La rigueur exerce´e contre les morts coupables change ne´cessairement la destine´e des morts innocents ou vertueux. Ils ne font plus retentir le se´jour qu’ils habitent de ge´missements et de plaintes ; ils ne regrettent plus la vie ; ils ne se livrent plus a` des plaisirs grossiers ou farouches. Leur demeure devient celle de la fe´licite´ la plus pure. Tout y e´tait autrefois plus triste, plus terne, plus sombre que sur la terre : tout y prend maintenant des couleurs plus riantes et plus belles ; les vents sont parfume´s, la verdure est plus touchante, le soleil plus resplendissant. Le commerce des dieux, la contemplation des astres, la re´ve´lation des secrets de la nature, toutes les jouissances e´leve´es et e´le´gantes, sont l’e´ternel partage de ces ombres bienheureuses. Voyons si tel n’est pas en effet l’enfer de Pindare. Dans une des ˆıles Fortune´es, doucement rafraıˆchies par les vents de l’Oce´an, et de´co re´es de fleurs e´clatantes a, habitent, e´claire´s par un soleil e´ternel, et libres de peines et de fatigues, ceux qui, trois fois dans cette vie b, ont repousse´ la tentation du crime et de l’injustice. Ils ne fendent point avec effort la terre rebelle, ni avec danger l’onde perfide c. Leurs jours, exempts a b c

PIND. Olymp. I, 105–1451. Ceci est une allusion a` la philosophie pythagoricienne. Pindare bannit ainsi de l’E´lyse´e l’agriculture et la navigation, deux des occupations les plus habituelles de la vie ; tentative louable, mais impuissante, de ne plus faire du monde futur la copie de celui-ci. Si le succe`s ne re´pond pas a` l’intention du poe`te, puisqu’il n’assigne d’ailleurs a` ses bienheureux que des plaisirs imite´s de la terre, la tentative n’en est pas moins la preuve d’un progre`s.

15 tel n’est pas en effet ] tel est en effet Co 3294/2, f o 26 tel n’est pas en effet les trois derniers mots ajoute´s dans l’interl. Co 3294/2, f o 27 Pindare. ] Pindare. suit un paragraphe biffe´ 〈Observons d’abord combien 〈Pindare〉 ce poe`te consacre plus clairement & plus explicitement qu’Home`re la nature intelligente & presque divine de l’ame. note V. Hermann. I. 474. retour au texte Le corps, dit-il, est la proye de la mort toute puissante ; mais l’aˆme, qui vient d’une divinite´ ne sauroit mourir.〉 note Pindar. apud. Clem. Alex. Strom. IV. 640 & The´odoret Serm. VIII. 599. a ` coˆte´ du texte principal, dans la marge, une note de travail 〈a` transporter〉 voir cidessous, p. 410, lignes 3–6 Co 3294/2, f o 27 16-p. 411.4 Fortune´es ... du bonheur. ] fortune´es charge´e de chaines 1 − 4 les chiffres de´signent un passage en renvoyant a` un ms. sur 17 e´clatantes, ] fiches qui sera utilise´ pour fabriquer les f os 27 et 28 Co 3294/2, f o 26 24–25 du monde ... celui-ci. ] de la vie e´clatantes, 〈dit le poe`te lyrique〉 Co 3294/2, f o 27 27 progre`s. ] progres dans les notions religiefuture une copie de celle-ci Co 3294/2, f o 27 uses[.] Co 3294/2, f o 27 1

Il faut corriger le renvoi. La description de l’ıˆle des Bienheureux se trouve dans la seconde ode olympique, a` partir du vers 66 (e´d. Puech, t. IV, pp. 46–48). BC paraphrase l’avantdernie`re strophe de l’ode. Voir l’excellente exe´ge`se de ce passage par Puech, pp. 36–39.

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de larmes, se passent dans le commerce des favoris des immortels. Leurs occupations sont des chants, des hymnes, des courses, des concerts, des jeux, ou bien a` l’ombre de bosquets qu’embaument les parfums que l’on offre aux dieux sur la terre, ils se retracent dans leurs entretiens les souvenirs du passe´. Saturne les gouverne, assiste´ de Rhadamante et peut-eˆtre d’Æaque, qui avait autrefois prononce´ sur les disputes meˆme des dieux. Dans l’E´re`be, au contraire, ou` re`gne une nuit perpe´tuelle, les criminels, livre´s a` un e´ternel oubli, sont en proie aux tourments d’une inquie´tude qui ne doit jamais finir. Qui peut me´connaıˆtre ici la progression des ide´es ? Tout le royaume des ombres est, dans Home`re, un se´jour de ge´missements. Les jouissances, les peines, y sont purement physiques. Il n’y a point de juges pour les actions de cette vie. Æaque n’y est pas nomme´ ; Rhadamante habite l’E´lyse´e qui n’est pas la demeure des morts a, et la juridiction de Minos n’est qu’un arbitrage accidentel sur des diffe´rents passagers. Pluton punit les attentats qu’on lui de´nonce, mais sa fonction n’est pas de chaˆtier le crime, il ce`de seulement aux invocations de ceux qui l’implorent, il leur accorde leur demande, non comme e´quitable, mais comme il exaucerait toute autre prie`re. Il n’attend pas les humains aux enfers, il envoie les Furies sur la terre contre les vivants, comme Jupiter et Junon y font descendre Iris ou Mercure pour y poursuivre leurs ennemis. L’enfer, dans Pindare, est, au contraire, un se´jour de punitions et de re´compenses me´rite´es ; les chaˆtiments et les jouissances y sont intelleca

Odyss.

IV,

5641.

8 livre´s a` ] ensevelis dans Co 3294/2, f o 27 11 jouissances, ] jouissances ou Co 3294/2, f o 27 22 L’enfer ] 〈L’Elyse´e〉 l’enfer corr. dans l’interl. Co 3294/2, f o 28 22–23 punitions ... chaˆtiments ] 〈bonheur〉 chatimens & de recompenses me´rite´s. corr. dans l’interl. les peines Co 3294/2, f o 28 1

Il y a deux traditions sur Rhadamanthe, toutes les deux lie´es a` sa justice proverbiale. L’une fait de lui apre`s sa mort un juge des Enfers, l’autre le transporte sans qu’il meure dans l’ıˆle ˆ des Bienheureux. BC cite le passage de l’Odysse´e qui en parle : «Quant a` toi, Me´ne´las, O nourrisson de Zeus, sache que le destin ne te re´serve pas, d’apre`s le sort commun, de mourir en Argos, dans tes pre´s d’e´levage ; mais aux Champs E´lyse´es, tout au bout de la terre, les dieux t’emme`neront chez le blond Rhadamanthe, ou` la plus douce vie est offerte aux humains, ou` sans neige, sans grand hiver, toujours sans pluie, on ne sent que ze´phyrs, dont les rise´es sifflantes montent de l’Oce´an pour rafraichir les hommes» (Odysse´e, IV, vv. 558– 568 ; L’Odysse´e, «Poe´sie home´rique», t. I, texte e´tabli et traduit par Victor Be´rard, Paris : Belles Lettres, 91989, p. 107). BC aurait pu renvoyer aussi a` Pindare, Olympiques, II, vv. 82–86 : «ils [i.e. les Bienheureux] en [des fleurs d’or] tressent des couronnes, sous l’e´quitable surveillance de Rhadamanthe, l’assesseur qui se tient aux ordres du puissant anceˆtre des Dieux [i.e. Chronos]» (e´d. Puech, t. I, pp. 46–47). La le´gende de Rhadamanthe transporte´ a` l’E´lyse´e e´tait tre`s courante a` l’e´poque d’Eschyle.

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tuelles et morales. Il y a un tribunal e´tabli, Saturne le pre´side, Saturne, qu’Home`re nous montre de´pose´ par Jupiter et charge´ de chaıˆnes a. Observons encore combien le poe`te consacre plus clairement et plus explicitement qu’Home`re, la nature intelligente et presque divine de l’ame. Le corps, dit-il, est la proie de la mort toute puissante ; mais l’ame, qui vient d’une divinite´, ne saurait mourir b. Cependant, Pindare, malgre´ ses efforts pour e´chapper a` la loi qui influe toujours sur les descriptions du monde a` venir, est subjugue´ malgre´ lui, par cette loi. En peignant les occupations des justes, il est force´ de revenir aux plaisirs de cette vie, choisissant seulement les plus purs et les plus nobles. L’imagination est tellement impuissante dans ses conceptions de bonheur, qu’elle est re´duite a` emprunter, pour les jouissances du monde futur, celles qui de´ja ici-bas lui sont insuffisantes. Aussi, je ne sais quelle tristesse plane sur l’E´lyse´e, tout perfectionne´ qu’il est ; mais cette tristesse est diffe´rente de celle du polythe´isme primitif. Les ombres, dans Home`re, sont tristes de la a

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Platon, dans l’Apologie, pour mieux nationaliser ce tribunal, place a` coˆte´ des trois juges des enfers, Triptole`me, le favori de Ce´re`s, qui, le premier, donna aux Athe´niens l’agriculture, et avec elle les lois et la vie sociale1. PIND. ap. Clem. Alex. Strom. IV, 6402, et THE´ ODORET. Serm. VIII, 5993.

7-p. 411.4 Cependant ... justes, ... bonheur. ] Cependant on doit remarquer que Pindare est subjuge´ par la meˆme loi qui pre´side toujours aux descriptions du monde a venir. pour peindre les occupations des justes − sous le bonheur meˆme du bonheur. passage cite´ en renvoyant a` un Cependant 〈on doit remarquer que〉 Pindare ... bonheur. ms. non identifie´ Co 3294/2, f o 26 7–8 influe ... sur les ] pre´side ... aux Co 3294/2, f o 28 8 malgre´ lui ] Co 3294/2, f o 28 9 En peignant ] pour peindre 〈illis.〉 malgre´ lui corr. dans l’interl. Co 3294/2, f o 28 15 dans Home`re ] dans celui-ci Co 3294/2, f o 28 16 Apologie ] la Co 3294/2, f o 28 source porte apologie faute d’imprimerie que nous corrigeons Rel4 1

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BC renvoie a` Platon, l’Apologie, 41a. Socrate s’adresse, apre`s sa condamnation, a` ses juges, («aux soi-disant juges», comme il dit) et e´voque les trois juges de l’Enfer, ajoutant Triptole`me, prote´ge´ par Ce´re`s, qui lui fait cadeau d’un char tire´ par des dragons et de ce´re´ales pour qu’il enseigne l’agriculture aux hommes. Cle´ment d’Alexandrie cite deux fois Pindare dans le livre IV des Stromates. Le renvoi de BC pourrait viser la deuxie`me citation qui reproduit en fait des vers d’un auteur non identifie´. «celles [i.e. les aˆmes] des hommes pieux habitent le ciel, chantant dans leurs chœurs et leurs hymnes : grand, bienheureux». Voir Les Stromates, livre IV, chap. 167, 3 (Les Stromates, Stromate IV, introduction, texte critique et notes par Annewies van den Hoek, traduction de Claude Monde´sert, s.j. (Sources chre´tiennes, no 463), Paris : E´ditions du Cerf, 2001, p. 337). La doctrine de l’immortalite´ est plusieurs fois e´voque´e dans ce meˆme livre. Voir p. ex. le chap. 44 (e´d. cite´e, p. 133). BC cite The´odoret, Theodoreti Episcopi Cyri de Providentia sermones decem, Tiguri : [Froschauer], 1546, le Sermo VIII pp. 71–86. Ce texte, intitule´ «De Martyribus» est une de´monstration e´loquente de l’immortalite´ et des joies ce´lestes : «fugite, amici, daemonum errorem, praeviaque illorum [des martyres] face et ductu, viam capessite, quae ad Deum perducit, ut in immortali aevo illorum choris et praesentia perfruamini» (PG, t. LXXXIII, col. 1034).

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tristesse de la barbarie ; dans Pindare leur tristesse est celle de la civilisation. Les unes sont des enfants qui pleurent et se de´pitent ; les autres, des vieillards qui, promenant un regard calme, mais se´rieux, sur leur vie passe´e, ont quelque chose de me´lancolique sous les dehors meˆme du bonheur. Terminons ces courtes observations sur Pindare, par une re´flexion relative au changement progressif de la situation des poe`tes, observation que la lecture d’He´siode nous a de´ja sugge´re´e et que celle de Pindare corrobore. Les poe`tes du temps d’Home`re, errants, mais accueillis dans tous les palais, assis aupre`s des princes, ne parlent point de leur destine´e, parce qu’ils n’ont qu’a` s’en louer. Du temps d’He´siode, leur existence ide´ale a fait place aux relations communes et pe´nibles de la vie. La chute des rois leur enle`ve des protecteurs ; la naissance des re´publiques est accompagne´e d’orages ; ils nous entretiennent de leur sort, parce qu’ils ont a` s’en plaindre. Du temps de Pindare, ils s’interdisent meˆme la plainte. Ce n’est pas qu’ils soient plus heureux, mais ils sont plus timides. L’auteur e´le´gant et superficiel d’Anacharsis, nous disons superficiel, parce que la profondeur n’est pas dans l’e´rudition qui compile, mais dans la perspicacite´ qui appre´cie, l’auteur d’Anacharsis, nourri dans la lettre des chefs-d’œuvre de la Gre`ce, mais ne pe´ne´trant jamais leur esprit, nous vante, il est vrai, les longues prospe´rite´s de Pindare, sa statue qui porte un diadeˆme a, les honneurs qui lui sont de´cerne´s a` Delphes b, les oracles rendus en sa faveur, les banquets sacre´s ou` il assiste ; mais il suffit de lire le poe`te pour discerner l’erreur du pane´gyriste. Pindare est occupe´ sans cesse a` demander grace. Tout l’effraie. Il s’e´puise en efforts perpe´tuels, pour de´sarmer la malveillance ; il n’y re´ussit pas. Frappe´ d’une amende par ses concitoyens c, vaincu cinq fois par Corinne d, il se traıˆne aux pieds du tyran de Syracuse, redoutant sa cole`re, mendiant a b c d

ÆSCHIN. Epist. 4, p. 2071. PAUSAN. X, 242. PAUSAN. IX, 203. PAUSAN. I, 84.

1 dans Pindare ... celle ] dans 〈illis.〉 L’autre, on reconnait la tristesse Co 3294/2, f o 28 5-p. 412.9 Terminons ... flatteur. ] une e´bauche de ce passage, en partie ste´nographie´e, se trouve au f o 23 ; voir ci-dessus, p. 631 Co 3294/2 1

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E´schine d’Athe`nes (389–314), rhe´teur et homme politique, adversaire de De´mosthe`ne. Les douze lettres qu’on lui a attribue´es sont anonymes. BC cite la quatrie`me, qui parle de Pindare, «δια δημα εÍ χων» (Aechinis quae feruntur epistolae, edidit Engelbertus Drerup, Lipsiae : Sumptibus Dieterichii. MDCCCCVI, p. 57). Pausanias, livre X, Phokis, chap. 24, 5, parle du troˆne de fer de Pindare a` Delphes. Pausanias, livre IX, Be´otie, chap. 20, ne parle pas de Pindare. Nous n’avons pas re´ussi a` corriger l’erreur. Pausanias, livre I, chap. 8, 4, mentionne une statue de Pindare chez les Athe´niens. Mais il n’y est pas question de la poe´tesse Corinne (Ve ou IIIe sie`cle av. J.-C.). Elle est mentionne´e

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ses bienfaits et lui prodiguant en e´change des louanges que de´ment l’histoire a. Quelques tentatives pour repousser les traits de l’envie, en paraissant la de´daigner, le regret since`re ou affecte´ des jours ou` l’inte´reˆt ne souillait pas le langage de la poe´sie b, l’e´loge de la me´diocrite´ c, lieux communs de tous ceux qui n’ont pu acque´rir le pouvoir ni la richesse, n’oˆtent point aux chants de Pindare le caracte`re de de´pendance qui nous importune et nous afflige, au milieu des beaute´s dont nous sommes e´blouis, et nous ge´missons de voir le talent se re´signer a` n’occuper qu’un rang subalterne, et devenir par la` meˆme avide et flatteur.

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Ce roi de Syracuse que Pindare ce´le`bre, est Hie´ron Ier, que tous les historiens, et notamment DIODORE de Sicile, repre´sentent comme un mauvais prince1. Isthmiques II, 152. Pythiques XI, 763.

dans le livre IX, chap. 22, 3, qui e´voque Corinne ; elle aurait remporte´, selon Pausanias, Plutarque et E´lien, une victoire sur Pindare dans une compe´tition poe´tique. Le fait est contestable, vu l’incertitude des dates de sa vie. Allusion a` la seule phrase dans la Bibliothe`que historique qui porte un jugement se´ve`re sur Hie´ron, roi de Syracuse et successeur du roi Ge´lon, loue´ pour sa douceur. Diodore dit ceci : «Ce fut Hie´ron, le plus aˆge´ de ses fre`res qui lui [a` Ge´lon] succe´da dans la royaute´, mais il n’exerc¸a pas le pouvoir de la meˆme fac¸on a` l’e´gard de ses sujets. En effet, il aimait l’argent, e´tait violent et, d’une fac¸on ge´ne´rale, e´tait tout a` fait e´tranger a` la simplicite´ des mœurs et a` la noblesse d’aˆme de son fre`re» (Diodore, Bibliothe`que historique, Paris : Belles Lettres, 2001, pp. 87–88). Allusion a` ce passage : «C’est qu’alors [i.e. aux vieux temps] la Muse n’e´tait pas cupide ni mercenaire ; Terpsichore ne portait pas un masque d’argent sur son visage ; ses doux chants, ses chants suaves, ses chants berceurs n’e´taient pas a` vendre» (Isthmiques, II, vv. 6–8, e´d. Puech, t. IV, p. 30). BC renvoie a` l’e´loge d’un destin moyen : «Puisse´-je n’aimer que les biens qui nous viennent des Dieux, et borner mes de´sirs a` ce que chacun peut, selon son aˆge ! Quand j’observe que, dans la ville, les citoyens de condition moyenne, jouissent du bonheur le plus durable, je prends en de´gouˆt le destin des tyrans, et je n’aspire plus qu’aux vertus communes» (Pythiques, XI, vv. 50b–54, e´d. Puech, t. II, p. 161).

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Chapitre VI. Que la meˆme progression se fait remarquer dans les historiens.

La progression que nous venons de remarquer dans les poe`tes doit exister dans les historiens, avec des symptoˆmes diffe´rents. Quand les poe`tes sentent le besoin d’e´purer la religion, ils modifient les faits, les historiens modifient les causes. Nous n’avons point d’historien grec, contemporain du polythe´isme home´rique. La Gre`ce ne comptait que des poe`tes, mais nous avons un historien qui correspond assez, par ses notions religieuses. avec l’e´poque repre´sente´e par He´siode. Cet historien, c’est He´rodote. Comme il est poste´rieur en date a` Pindare, et que son polythe´isme est ne´anmoins beaucoup moins e´pure´, il faut expliquer la raison de ce retard dans ses opinions, et par conse´quent employer quelques instants a` conside´rer son caracte`re, ses circonstances, et l’influence de ces deux choses sur les tableaux qu’il nous a transmis. He´rodote, homme a` la fois curieux, cre´dule et timide, nourrissait un respect e´gal pour toutes les traditions et toutes les croyances, a` quelque temps et a` quelques peuples qu’elles appartinssent ; son but, comme il nous l’apE´tablissement du texte : Manuscrit : BCU, Co 3294/2, fos 26, 31–33 Imprime´ : De la Religion, conside´re´e dans sa source, ses formes et ses de´veloppements, t. IV, Paris : Chez Pichon et Didier, e´diteurs, 1831, pp. 393–409. 1 Chapitre VI. ] Ch. 7 Co 3294/2, f o 31 1–3 Chapitre ... historiens. ] e´bauche du titre suivie des noms des auteurs a` retenir Ch. 5 de la meˆme progression chez les historiens Phocyllide. The´ognis. 547 Ann avt J. C. 58e Olympiade Pindare 499 – – J. C. 65 ol. Hesiode 944. un 4 progression ] meˆme progression Co 3294/2, f o 31 calcul 944 499 445 Co 3294/2, f o 26 5 avec ] 〈mais〉 avec Co 3294/2, f o 31 7 les historiens ... causes. ] 〈quand〉 Les historiens 〈le peuvent, ils un mot illis. gue`res changer les faits, mais ils leur〉 se bornent a ces trois mots dans l’interl. assigne〈nt〉r aux faits ces deux mots dans l’interl. d’autres causes. 〈dix a` douze mots 9 La Gre`ce ] 〈a` cette e´poque〉 la Gre`ce alors Co 3294/2 illis.〉 Co 3294/2, f o 31 10–11 repre´sente´e ] 〈trois ou quatre mots illis.〉 repre´sente´e Co 3294/2, f o 31 16 les tableaux ... transmis. ] 〈huit a` dix mots illis.〉 les tableaux ... transmis. corr. dans l’interl. Co 3294/2, 17–19 He´rodote ... appartinssent ] passage remanie´ 〈Ch. 8 Du caracte`re et des illis. f o 31 religion D’he´rodote. he´rodote e´crivait dans une vingtaine de mots illis. des opinions, a` laquelle, d’ailleurs, il e´tait un mot illis.〉 He´rodote e´toit entraine´ a` son insu ces six derniers mots dans la marge par son caracte`re a` la fois curieux, cre´dule et Timide vers un respect e´gal pour toutes les traditions & toutes les croyances a` quelque tems & a` quelque peuples qu’elles appartinssent re´daction dans la marge a` partir du mot «vers» Co 3294/2, f o 32

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prend lui-meˆme, e´tait d’e´crire ce qu’il avait entendu dire a` chacun a. Il paraıˆt avoir fait, dans ce travail, abstraction comple`te de tout jugement individuel. Lorsqu’il ose avouer qu’une anecdote lui paraıˆt douteuse, il ajoute avec soin qu’un autre peut-eˆtre la trouvera vraisemblable b. Sa superstition est connue ; on en rencontre des preuves a` chaque page. Hippias annonce-t-il aux habitants de Corinthe qu’ils auront beaucoup a` souffrir des Athe´niens ? nul homme, ajoute He´rodote, n’avait une connaissance plus parfaite des oracles c. Mais Hippias, chasse´ avec toute sa famille par les citoyens d’Athe`nes, avait un inte´reˆt manifeste a` les repre´senter aux yeux des Corinthiens comme des ennemis dangereux. Cependant He´rodote aime mieux rendre hommage a` une science surnaturelle que reconnaıˆtre le langage d’un tyran fugitif, calomniant, comme ils le font tous, ses compatriotes. Les Potide´ates, assie´ge´s par Artabaze, attribuent-ils un accident qui fit pe´rir beaucoup de Perses a` la cole`re de Neptune, se vengeant ainsi de ceux qui avaient insulte´ sa statue ? He´rodote s’empresse de donner a` cette explication son assentiment d. Il pense que si aucun des vaincus, apre`s la bataille de Plate´e, n’essaya de se re´fugier pre`s des autels de Ce´re`s, c’est que la de´esse leur en interdit l’entre´e, parce qu’ils avaient livre´ aux flammes son temple

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HE´ ROD. II, 1221. HE´ ROD. V, 862. HE´ ROD. V. 96. Je n’ose contredire les oracles, et je n’approuve point que d’autres le fassent. HE´ ROD. VIII, 77. Preuve de la cre´dulite´ d’He´rodote et de l’incre´dulite´ naissante3. HE´ ROD. VIII, 1294.

1 e´tait ] n’e´tait que Co 3294/2, f o 32 10–12 aime mieux ... compatriotes. ] pre´fe`re de´meˆler dans ce discours un a` science les trois derniers mots sont un syntagme fautif surnaturelle, au lieu d’y reconnaıˆtre l’inte´reˆt e´vident d’un Tyran fugitif. Co 3294/2, f o 32 14 la cole`re de ] 18-p. 415.9 l’entre´e ... Cre´sus ] perte de deux folios ajoute´ dans l’interl. Co 3294/2, f o 32 Co 3294/2 21 96 ] 93 Co 3294/2, f o 32

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Il faut comprendre «t. II, p. 122». BC cite la premie`re phrase du chap. CXLVII du livre II : «Je vais raconter maintenant ce qui s’est passe´ en Egypte, de l’aveu unanime des Egyptiens et des autres peuples, et j’y joindrai des choses dont j’ai e´te´ te´moin oculaire.» BC pense a` cette phrase : «Ce trait me paroıˆt point vraisemblable ; il le sera peut-eˆtre pour quelqu’autre» (livre V, chap. LXXXVI ; e´d. Larcher, t. IV, p. 59). Quant au premier renvoi, il faut lire, avec Co 3294/2, «V, 93» (voir la variante). BC cite une phrase de ce chapitre (e´d. Larcher, t. IV, p. 71). Le second renvoi cite la dernie`re phrase du livre VIII, chap. LXXVII (e´d. Larcher, t. V, p. 213). Le commentaire de BC reproduit une observation de Valkenaer (p. 495, n. 113). BC paraphrase le livre VIII, chap. CXXIX, e´d. Larcher, t. V, p. 247.

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d’E´leusis a. Il ne s’exprime sur le culte et sur les fables qu’avec une terreur continuelle ; il demande pardon de tout ce qu’il e´crit aux dieux, aux he´ros et aux preˆtres b ; il se fait scrupule de rien omettre, de rien rejeter, de rien approfondir, de rien expliquer. Un tel historien devait confondre toutes les doctrines, sans distinguer leur date et sans remarquer leurs contradictions. Il devait eˆtre l’He´siode de l’histoire, et il l’a e´te´. Nous trouvons d’abord dans ses re´cits le caracte`re des dieux home´riques. Minerve emploie aupre`s de Jupiter les prie`res et les raisons (ce sont ses propres paroles), et ne peut le fle´chir c. Cre´sus, sur le buˆcher, implore Apollon contre le malheur qui le menace, et lui rappelle ses nombreuses et riches offrandes d. Le discours de ce prince n’est autre chose que la traduction en prose de celui de Chryse`s, dans le premier livre de l’Iliade. Jupiter poursuit d’un courroux implacable les descendants de Phryxus, parce que Cytisson, son fils, de´livre un malheureux que les Ache´ens voulaient sacrifier e. Les dieux le´gitiment l’assassinat de Candaule par Gyge`s, et rec¸oivent les a b c d e

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HE´ ROD. I, 13–141. HE´ ROD. I, 66–682. Id. VII, 1423. HE´ ROD. I, 874. HE´ ROD., VII, 1975. BC se trompe dans son renvoi. Il faut citer le livre IX, chap. 64 (e´d. Larcher, t.V, pp. 49–50). Les vaincus : il s’agit des Perses. «S’il est permis de dire son sentiment sur les choses divines, je pense que la De´esse leur en interdit l’entre´e, parce qu’ils avoient bruˆle´ son temple a` Eleusis.» On trouve ce renvoi ci-dessous, p. 416, n. a. Les autres renvois de cette note (livre VI, 27 et livre IX, 99, e´d. Larcher, t. IV, pp. 106–107 ; t, VI, pp. 74–75) concernent des pre´sages : «Lorsqu’une nation, ou une ville, doit e´prouver quelque grand malheur, ce malheur est ordinairement pre´ce´de´ de quelques signes» (t. IV, p. 106). On ne peut pas les citer dans ce contexte. Le renvoi est faux. Les chapitres cite´s racontent l’histoire du rapt des ossements d’Oreste a` Te´ge´e par le Spartiate Lichas. Un exemple des pre´cautions d’He´rodote se lit a` la note pre´ce´dente, un autre dans le livre II, chap. 45 : «je prie les Dieux et les He´ros de prendre en bonne part ce que j’ai dit sur ce sujet [l’exploit d’Hercule]. Larcher renvoie lui-meˆme a` la dernie`re phrase du chap. 3 du livre II. En commenc¸ant le re´cit sur l’E´gypte, il dit : «De tout ce qu’ils me raconte`rent concernant les choses divines, je ne rapporterai que les noms des Dieux, e´tant persuade´ que tous les hommes en ont une e´gale connoissance ; et, si je dis quelque chose sur la religion, ce ne sera qu’autant que je m’y verrai force´ par la suite de mon discours» (e´d. Larcher, t. II, p. 3). Il faut lire «141». BC cite les deux premiers vers de la Pythie de Delphes : «C’est en vain que Pallas emploie et les prie`res et les raisons aupre`s de Jupiter Olympien, elle ne peut le fle´chir» (e´d. Larcher, t. V, p. 94). BC pense a` cette phrase : «Alors Cre´sus [...] implore a` grand cris Apollon, le conjure, si ses offrandes lui ont e´te´ agre´ables, de le secourir, de le sauver d’un pe´ril si pressant» (e´d. Larcher, t. I, p. 71). La remarque de BC que le discours de Cre´sus est la traduction en prose du discours de Chryse`s (Iliade, livre I, v. 39) reproduit la n. 242 de Larcher (p. 360). L’anecdote e´voque´e par BC se lit vers la fin du chap. 197 du livre VII (e´d. Larcher, t. V, p. 138). Larcher e´crit correctement «Cytissore».

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pre´sents du meurtrier avec bienveillance a. Ils attachent le succe`s des entreprises, non pas a` la justice, mais a` des choses indiffe´rentes et a` l’exe´cution de leurs ordres arbitraires ; par exemple, dans la guerre des Lace´de´moniens contre les Te´ge´ates, a` la translation des ossements d’Oreste a` Sparte b. Leurs oracles sont trompeurs et funestes, et les surnoms meˆme que l’on donne a` plusieurs divinite´s font allusion a` leur perfidie. He´rodote, en rapportant ces surnoms, ne tente point de les expliquer, comme des e´crivains poste´rieurs l’essaient. Quand il parle de Jupiter Apatenor, c’est bien Jupiter Trompeur qu’il de´signe c. Ses expressions sur la jalousie des dieux sont formelles et pre´cises, bien que des savants modernes aient, a` cet e´gard, voulu faire son apologie d. Non-seulement il attribue a` Solon une opinion injurieuse a` la justice divine, lorsqu’il lui fait re´pondre a` Cre´sus que les dieux envient le bonheur des hommes et se plaisent a` le troubler e, mais il ajoute, en son propre nom, que la cole`re de ces dieux e´clata sur ce prince d’une manie`re terrible, en punition de ce qu’il s’estimait le plus heureux des mortels f. Il revient fre´quemment sur cette ide´e. Dieu, dans sa jalousie, a b c d e f

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HE´ ROD. IX, 64. V. aussi VI, 27 ; IX, 991. HE´ ROD. II, 452. HE´ ROD. I, 1473. V. la justification d’He´rodote, par l’abbe´ Geinoz, Me´m. de l’acad. des inscrip., HE´ ROD. I, 325. HE´ ROD. I, 346.

XIX,

1634.

La note est fausse, puisque BC choisit le mauvais renvoi. Il faudrait citer pour l’histoire de Candaule et Gyge`s le livre I, chap. 7–8 et 13–14, passages indique´s par erreur ci-dessus, p. 415, n. a. Le renvoi est faux. Il aurait fallu citer le livre I, chap. 66–68 (e´d. Larcher, t. I, pp. 50–53). Le livre II, chap. XLV (e´d. Larcher, t. II, pp. 39–40) raconte un e´pisode de la vie d’Hercule ; les E´gyptiens essayaient de le sacrifier a` Zeus, anecdote qualifie´e par He´rodote comme hautement invraisemblable. Cette fable n’a aucun rapport avec le sujet traite´ par BC ici. BC se trompe. He´rodote parle dans le chapitre cite´ de la feˆte des Apatouries, une tre`s ancienne institution des Ioniens qui ce´le`brent le pouvoir protecteur de Zeus. Le «Zeus Apatenor», le trompeur (c’est BC qui invente l’e´pithe`te), n’existe pas chez He´rodote. Il y a dans la mythologie une Venus apaturia, qui trompe, mais dans un autre sens. Par une ruse et avec l’aide d’Hercule, elle e´limine les ge´ants l’un apre`s l’autre. Il faut lire : «XIX, 136». Voir l’abbe´ Franc¸ois Geinoz, «De´fense d’He´rodote contre les accusations de Plutarque», Premier me´moire, Acade´mie des inscriptions, t. XIX, 1753, pp. 115–145, et plus particulie`rement pp. 135–137. Le raisonnement de l’abbe´ Geinoz est alimente´ par la le´gende de la rencontre de Solon et de Cre´sus et l’histoire de la de´faite de Cre´sus par Cyrus II, raconte´es par He´rodote (livre I, chap. 30–33 et 86–89). BC accepte son raisonnement, partiellement hypothe´tique. On se rapportera aussi a` l’e´dition de Larcher, t. VI, ou` est reproduit le texte de l’abbe´ Geinoz avec des notes de l’e´diteur (pp. 515–627, et plus particulie`rement pp. 549–550) qui formulent des critiques. On lira aussi la n. 84 au livre I, chap. XXXII (e´d. Larcher, t. I, pp. 243–245). BC vise cette phrase : «Moi qui sais que la Divinite´ est jalouse du bonheur des humains, et qu’elle se plaıˆt a` le troubler» (e´d. Larcher, t. I, p. 24). Allusion a` la premie`re phrase de ce chapitre (e´d. Larcher, t. I, p. 26).

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dit-il, envoie aux humains des terreurs, ou les frappe d’aveuglement a ; et si la vie est assaisonne´e de quelques plaisirs, c’est pour en rendre la privation plus pe´nible b. Si nous comparons a` cette opinion d’He´rodote celle de Platon c, qui dit que l’envie ne se trouve point parmi les dieux, ou celle de Plutarque d, qui de´clare la nature divine incom patible avec la jalousie, la crainte, la cole`re et la haine, ou plus tard celle d’Ammien Marcellin e, qui regarde la chute des grands comme un acte de la justice ce´leste, nous ne pourrons me´connaıˆtre le changement que la progression avait amene´. He´rodote, en meˆme temps, offre presque toujours une double explication des faits qu’il raconte. C’est une ressemblance nouvelle et frappante de cet a b

c d

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HE´ ROD. VII, 101. HE´ ROD. VII, 46. V. Larcher, notes sur HE´ ROD. I, 79, et les remarques de WESSELING et de WALKENAER dans leur e´dition de l’auteur grec, sur cette jalousie des dieux2. PLAT. in Phædon3. PLUTARCH. «Non posse suaviter vivere, secundum Epicuri decreta.» PLUTARQUE s’e´le`ve fortement contre la malignite´ d’HE´ RODOTE dans ce que ce dernier dit de la jalousie des dieux4. XIV, 175.

Allusion a` la phrase : «Dieu, dans sa jalousie, lui [a` une grande arme´e] envoie des terreurs, ou la frappe d’aveuglement» (e´d. Larcher, t. V, p. 14). BC cite la dernie`re phrase de ce chapitre (e´d. Larcher, t. V, p. 40). L’allusion a` une note de Larcher n’est pas e´lucide´e. – Pour les notes de Wesseling et de Valckenaer, cite´es par Larcher dans sa n. 88 (pp. 306–307), voir ΗΕΡΟΔΟΤΟΥ ΑΛΙΚΑΡΝΗΣΣΗΟΣ ΙΣΤΟΡΙΩΝ ΛΟΓΟΙ Θ [...] Herodoti Halicarnassei Historiarum libri IX, Musarum nominibus inscripti Gr. et Lat. ex Laur. Vallæ interpretatione, cum annotationibus Thomæ Galei et Iacobi Gronovii, Editionem curavit et suis itemque Lud. Casp. Valckenarii notas adiecit Petrus Wesselingius, [...] Amstelodami : Sumptibus Petri Schovtenii, MDCCLXIII, p. 532, note a` la ligne 77. Il faut lire «Phædros». BC paraphrase une observation de Socrate (247a) : «L’envie est bannie du chœur des dieux bienheureux.» Une observation du meˆme genre se lit dans le Time´e (29e), ou` Platon dit au sujet du dieu cre´ateur, essentiellement bon, qu’il ne peut d’aucune manie`re connaıˆtre l’envie. BC cite la traduction latine d’un titre de Plutarque, Non posse suaviter vivi secundum Epicurum. Le passage en question est celui-ci : «And Herodotus was wiser who said that ‘God. who has let us taste the sweetness of life, is seen herein to be envious,’ and especially of men who are accounted happy, for all their pleasure is for them a lure to misery, since what they taste will be taken from them» (Plutrach’s Moralia in sixteen Volumes, with an English Translation by Benedict Einarson [...] and Philip H. de Lacy, t. XIV, Cambridge, Massachusetts : Harvard University Press, London : William Heinemann, 1986, p. 147). La citation d’He´rodote se lit dans le livre VII, chap. 46. Contrairement a` ce que dit BC, Plutarque approuve les observations qu’il a trouve´es chez He´rodote. Le livre XIV n’a que onze chapitres. L’allusion n’a pu eˆtre e´lucide´e.

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historien avec He´siode. Ainsi, par exemple, apre`s nous avoir dit que Cre´sus fut puni par les dieux de la confiance que sa prospe´rite´ lui avait inspire´e, il porta, dit-il ailleurs, la peine du crime de son aı¨eul, assassin de son maıˆtre le´gitime a; de sorte que, dans la premie`re hypothe`se, c’est a` la jalousie, dans la seconde, a` la justice divine, qu’il attribue la chute de Cre´sus. Singulie`re justice, a` la ve´rite´ ; car ces meˆmes dieux avaient ordonne´ aux sujets de Candaule de se soumettre a` son meurtrier, qu’ils avaient de la sorte re´compense´ de l’attentat dont ils punissaient sa poste´rite´ b. Dans plusieurs re´cits d’He´rodote, la religion se perfectionne par le de´veloppement des ide´es humaines. Tantoˆt les dieux rec¸oivent de l’homme des lec¸ons de morale auxquelles ils sont force´s, comme par pudeur, de se conformer ; tantoˆt ils punissent leurs adorateurs de les avoir outrage´s par des questions ou par des prie`res qui les supposaient me´chants ou mercenaires. Pactyas, Lydien re´volte´ contre Cyrus, s’e´tant re´fugie´ a` Cyme, ville d’E´olie, les habitants consulte`rent l’oracle des Branchides, pour savoir s’ils devaient rendre le fugitif au roi de Perse qui le re´clamait. L’oracle leur ayant conseille´ l’extradition de cet infortune´, un de leurs principaux citoyens, qui de´sapprouvait cette re´ponse, enleva de leurs nids les oiseaux du temple. Le dieu se plaignit avec indignation de ce qu’on maltraitait ainsi ceux qui avaient pre`s de lui cherche´ un asile. Eh quoi ! re´pondit Aristodicus, vous a b

HE´ ROD. I, 911. V. a` ce sujet CICER. de Nat. Deor.

III,

382.

2–3 de la confiance ... ailleurs ] de s’eˆtre estime´ le plus heureux des des mot re´pe´te´ par inadvertance hommes, il nous raconte ailleurs qu’il porta Co 3294/2, f o 33 7 soumettre a` ] ajoute´ dans l’interl. Co 3294/2, f o 33 9 Dans ... perfectionne ] passage remanie´ 〈Chap. re´cits D’herodote qui prouvent une ame´riotion progressive dans le caracte`re des dieux〉 Il y a dans he´rodote 〈un〉 plusieurs re´cits 〈remarquable〉, ou nous voyons la religion se perfectionnant Co 3294/2, f o 33 11–14 Tantoˆt ... mercenaires. ] dans le 1er ces trois mots dans la marge Les dieux recoivent ce dernier mot re´crit sur recevant de l’homme une lecon de morale a` laquelle ils ... conformer. la suite du texte manque Co 3294/2, f o 33 18 cet infortune´ ] ce malheureux Co 3294/2, f o 33 19 enleva ] se 〈mit a`〉 enlev〈er〉a le mot «se» n’est pas biffe´ par inadvertance Co 3294/2, f o 33 du temple ] qui e´toient autour du temple Co 3294/2, f o 33 21 pre`s ... asile. ] cherche´ un azile pre`s de ses autels. Co 3294/2, f o 33 1

2

BC cite une phrase du de´but de ce chapitre : «Cre´sus est puni du crime de son cinquie`me anceˆtre, qui, simple Garde du Roi de la race des He´raclides, se preˆta aux instigations d’une femme artificieuse, tua son maıˆtre, et s’empara de la couronne, a` laquelle il n’avoit aucun droit» (e´d. Larcher, t. I, p. 74). Larcher cite, pour expliquer la contradiction d’He´rodote, une note de Bellanger (pp. 362–363) dont BC s’inspire. Le chapitre cite´ traite de l’ide´e d’un dieu sans vertu : «Qualem autem deum intellegere nos possumus nulla virtute præditum ?»

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rote´gez vos suppliants, et vous nous ordonnez de livrer les noˆtres ! Oui, re´pondit le dieu, afin qu’e´tant coupables d’une impie´te´, vous en pe´rissiez plus promptement, et ne veniez plus consulter les oracles, pour savoir s’il vous est permis de commettre un crime a. Qui peut me´connaıˆtre ici l’amalgame de deux opinions oppose´es et successives ? Le premier conseil de l’oracle avait e´te´ simple et positif ; et, sans la ruse d’Aristodicus, les habitants de Cyme auraient suivi ce conseil barbare. La seconde re´ponse du dieu n’est qu’une justification tardive, devenue ne´cessaire, et invente´e apre`s coup. Une autre anecdote nous montre les dieux s’ame´liorant par degre´s, mais de manie`re a` permettre encore aux hommes de compter sur leur ve´nalite´ et leur perfidie. Cle´ome`ne, marchant contre Argos a` la teˆte des Spartiates, arrive sur les bords d’un fleuve, dans le territoire des Argiens. Aussitoˆt, conforme´ment a` l’usage, il offre des sacrifices au dieu de ce fleuve, pour l’engager a` prote´ger les armes lace´de´moniennes. Mais ses sacrifices sont rejete´s, et il rend hommage a` la loyaute´ du dieu qui ne veut pas trahir ses compatriotes b. Dans ce re´cit, la tentative du ge´ne´ral spartiate, pour se´duire un dieu par ses sacrifices, prouve l’opinion rec¸ue que ces moyens de se´duction e´taient efficaces. La re´sistance du dieu prouve que cette opinion commenc¸ait a` s’affaiblir. L’histoire de Glaucus est du meˆme genre. Glaucus, consultant l’oracle de Delphes, pour savoir s’il doit rendre un de´poˆt qu’il a rec¸u sous la foi du serment, l’oracle lui repre´sentant l’infamie du parjure, Glaucus, e´pouvante´, renonc¸ant a` l’iniquite´ qu’il me´ditait, mais les dieux punissant son intention seule sur sa poste´rite´ la plus recule´e c, tout cela de´note une phase de la relia b c

HE´ ROD. I, 159–1601. HE´ ROD. VI, 762. HE´ ROD. VI, 86. L’histoire de Glaucus, dit HE´ RODOTE, prouve deux choses, l’une que les dieux punissent non-seulement les coupables, mais leurs descendants ; l’autre, que l’intention est punie aussi se´ve`rement que l’action elle-meˆme3. C’est ce que dit plus tard Juve´nal. Has patitur pœnas peccandi sola voluntas. XIII, 1994.

4 Qui peut ] il est impossible de Co 3294/2, f o 33 quatre folios Co 3294/2, f o 33 1 2

3 4

5-p. 424.3 Le premier ... jaloux. ] perte de

BC paraphrase l’histoire de l’oracle consulte´ par Aristodicus (e´d. Larcher, t. I, pp. 128–129). BC fait allusion a` cette phrase : «Lorsque Cle´ome`nes fut arrive´ sur les bords de ce fleuve, il lui fit des sacrifices ; mais comme les entrailles des victimes ne lui annonc¸aient rien de favorable en cas qu’il le traversaˆt, il dit qu’il savoit gre´ a` Erasinus de ne pas trahir ses concitoyens» (e´d. Larcher, t. IV, p. 140). BC re´sume le re´cit de la le´gende de Glaucus (e´d. Larcher, t. IV, pp. 146–149). Voir Juve´nal, Satires, livre V, XIII, v. 208.

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gion ou` les hommes pensaient encore que les dieux pouvaient approuver le crime, mais ou` ceux-ci commenc¸aient a` s’indigner de cette supposition comme d’une insulte. La conduite des habitants de Chio, qui ont acquis par un attentat contre l’hospitalite´ une petite province en Mysie annonce meˆme un pas de plus. Ils n’osent offrir, dans les sacrifices, aucune des productions de ce territoire. Ils ne consacrent a` aucun dieu les gaˆteaux pe´tris avec le ble´ de cette province : ils ne re´pandent sur la teˆte d’aucune victime l’orge qu’ils y recueillent. En un mot, tout ce qui provient de cette source impure est immonde et banni des temples et des lieux sacre´s a. He´rodote subit de la sorte l’empire de l’atmosphe`re qui commence a` l’entourer. Il se tourmente pour placer a` coˆte´ des faits, malgre´ les traditions, quelque cause qui fasse honneur a` la justice du ciel. Il se plaıˆt a` nous montrer Cle´ome`ne puni par la perte de sa raison, d’avoir de´pouille´ De´marate du troˆne, en corrompant la Pythie. Il ne veut pas qu’on assigne une autre cause a` la fre´ne´sie de Cle´ome`ne b. Les Spartiates l’attribuent, dit-il, a` l’habitude qu’il avait contracte´e de s’enivrer chez les Scythes, mais je pense plutoˆt qu’il a paye´ cette peine a` De´marate c. Arce´silas, roi de Cyre`ne, rec¸oit la mort pour prix de sa cruaute´ contre des ennemis sans de´fense d ; Phe´re´a b c d

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HE´ ROD. I, 1601. V. sur cette anecdote de Cle´ome`ne, MEINERS C. G., I, 4862. HE´ ROD. IV, 2053. HE´ ROD. VI, 244. BC re´sume la fin de l’histoire de Paktyas en se servant des formulations de Larcher : «Depuis cet e´ve´nement, il se passa beaucoup de temps, sans que les habitants de Chios osassent, dans les sacrifices, re´pandre sur la teˆte de la victime, de l’orge d’Atarne´e, ni d’offrir a` aucun Dieu des gaˆteaux faits avec de la farine de ce canton, et qu’on excluoit des temples tout ce qui en provenoit» (e´d. Larcher, t. I, pp. 129–130). Voir Meiners, Kritische Geschichte, t. I, pp. 486–487. Meiners traite de l’ide´e que les temples sont les demeures inviolables des dieux et que la destruction des temples ou le pillage e´taient punis par les dieux par la folie. BC cite ce passage de Meiners parce que celui-ci parle de l’exemple de Cle´ome`ne qui avait corrompu la Pythie : «Als Kleomenes von Sparta sich selbst in einer Anwandlung von Wahnsinn verstümmelt, und zuletzt umgebracht hatte, so erklärten Einige diese Unfälle für eine göttliche Strafe der Bestechung der Pythia». Meiners, a` son tour, ne fait qu’exploiter He´rodote, livre VI, chap. 75 (e´d. Larcher, t. IV, pp. 139–140). Ce renvoi est faux, il faut lire : «VI, 84». «Les Spartiates assurent eux-meˆmes que sa fureur ne vint pas des Dieux, mais de l’abus du vin auquel il s’e´toit accoutume´ en fre´quentant des Scythes» (e´d. Larcher, t. IV, p. 145). Les faits historiques e´voque´s ici concernent la dynastie grecque des Battiades, e´tablie a` Cyre`ne. BC exploite l’histoire du roi Arche´silas III, raconte´e par He´rodote dans le livre IV, chap. CLXII-CLXV (e´d. Larcher, t. III, pp. 235–238). Dans la phrase suivante, BC e´voque le sort de la me`re d’Arche´silas, Phe´re´time, e´pouse du roi Battos III. Elle finit sa vie en E´gypte ou` elle mourut d’une maladie cruelle. He´rodote voit dans cette fin une punition des dieux : «tant il est vrai que les Dieux haı¨ssent et chaˆtient ceux qui portent trop loin leur ressentiment» (livre IV, chap. 205, e´d. Larcher, t. III, p. 262).

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time, sa me`re, pour avoir venge´ son fils avec trop d’inhumanite´ a : tant il est certain, poursuit l’historien, que les dieux haı¨ssent et chaˆtient ceux qui portent trop loin leur ressentiment b. Ces assertions d’He´rodote portent d’autant plus clairement l’empreinte de la re´volution qui s’e´tait ope´re´e dans les notions religieuses, qu’elles sont en contraste avec les le´gendes pre´ce´dentes. Dans l’histoire d’Arce´silas, par exemple, ce n’est point pour avoir commis une action barbare, c’est pour n’avoir pas compris un oracle, que ce prince est l’objet de la cole`re des dieux c. He´rodote lui-meˆme le reconnaıˆt. Il fut victime, dit-il, de sa de´sobe´issance, ou volontaire, ou involontaire d. Mais, apre`s avoir paye´ ce tribut aux opinions ante´rieures, l’historien revient aux opinions de son temps, et voit de l’e´quite´ la` ou` les ge´ne´rations pre´ce´dentes n’apercevaient que du pouvoir. Passons maintenant d’He´rodote aux historiens qui lui ont succe´de´ ; nous remarquerons entr’eux et lui le meˆme intervalle qui nous a paru se´parer Pindare d’He´siode. Parmi ces historiens nous ne placerons pas Thucydide ; cet Athe´nien ce´le`bre ne s’occupe presque point de la religion dans son ouvrage, et lorsqu’il en parle, c’est avec assez de me´pris. Il semble avoir devance´ son sie`cle en fait d’incre´dulite´. Mais Xe´nophon, dans son Histoire grecque, qu’il e´crivit environ cent ans apre`s He´rodote, attribue constamment la bonne et la mauvaise fortune a` la cole`re des dieux, fonde´e sur les vertus et les vices des humains. Il reconnaıˆt, a b c

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HE´ ROD. IV, 1651. HE´ ROD. IV, 2052. L’oracle avait de´fendu a` Arce´silas de faire cuire les vases de terre, qu’il trouverait dans un fourneau ; il mit le feu a` une tour ou` s’e´taient re´fugie´s quelques rebelles, et de la sorte de´sobe´it a` l’oracle sans le comprendre. Ce fait vient a` l’appui de ce que nous avons dit de la nature des oracles chez les Grecs. HE´ ROD. VII, 1973. BC cite le chapitre qui raconte qu’Arce´silas vit dans la ville de Barka, y trouve la mort et que sa me`re Phe´re´time, reste´e a` Cyre`ne pour administrer les biens de son fils, passa apre`s le meurtre de celui-ci a` Barka, en E´gypte, cherchant l’aide d’Aryandes, satrape perse en E´gypte. Ce qu’He´rodote ne raconte que plus tard (livre IV, chap. 202), c’est qu’elle me`ne avec les troupes e´gyptiennes une campagne contre la ville de Barka, qui sera prise et cruellement punie. Le passage cite´ par BC ne suffit pas pour confirmer son raisonnement, bien qu’il donne des de´tails se rapportant a` Phe´re´time et son fils. Voir l’e´d. de Larcher, t. III, pp. 237–238. Voir ci-dessus, p. 420, n. 4. BC se trompe. Il faut renvoyer au livre IV, chap. CLXIV (e´d. Larcher, t. III, p. 238). BC fait allusion a` la dernie`re phrase de ce chapitre : «Ce fut ainsi qu’Arce´silas remplit sa destine´e, et qu’il pe´rit, pour avoir de´sobe´i a` l’Oracle volontairement ou involontairement.»

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a` la ve´rite´, qu’il est dans les natures divines d’abaisser les puissants et de relever les faibles a, mais il ne parle point de l’envie des dieux, et l’on doit simplement conclure de ses paroles que Xe´nophon savait, il y a plus de vingt sie`cles, ce que nous savons comme lui, que l’injustice et la puissance se tiennent de pre`s. Lorsque Tissapherne de´clare, au me´pris des traite´s, la guerre aux Spartiates, Xe´nophon nous montre Age´silas se fe´licitant de cet e´ve´nement. Tissapherne, dit-il, a rendu les dieux ses ennemis, et sa trahison les attache indissolublement au parti des Grecs b. Lorsque, dans l’expe´dition des dix mille, les Perses font emprisonner Cle´arque, Xe´nophon promet la victoire a` ses compatriotes parce que la justice est de leur coˆte´ c. Cette doctrine est de´veloppe´e bien plus clairement encore dans le re´cit de la conspiration qui de´livra The`bes de la tyrannie lace´de´monienne. Apre`s avoir raconte´ le succe`s de cette conspiration, trame´e par les exile´s the´bains, les Spartiates, dit-il, furent punis par ceux-la` seuls envers lesquels ils avaient e´te´ injustes. Jusqu’alors, aucune force mortelle ne les avait pu vaincre. Les dieux renverse`rent leur empire, sans employer d’autres mains que celles des bannis, pour donner une preuve me´morable de leur puissance et de leur e´quite´. Nous pourrions, continue-t-il, rapporter beaucoup d’exemples semblables, tant chez les Grecs que chez les barbares. On y verrait que les dieux ne ne´gligent jamais de frapper ceux qui exe´cutent ou qui projettent des crimes d. Si l’opinion que les dieux e´taient les protecteurs de la morale n’euˆt pas e´te´ l’opinion rec¸ue, Xe´nophon ne l’aurait pas professe´e, car il e´tait de tous les hommes le plus soumis aux dogmes comme aux pratiques de la religion de son pays. Nous de´montrerons ailleurs cette ve´rite´, quand nous le conside´rerons comme philosophe. a b c d

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Hist. grecque, liv. V1. XEN. Hist. gr. III, 4, § 112. XEN. Retr. des dix mille, III, 1 ; § 143. XE´ N. Hist. gr. V, 4, § 14. BC ne pre´cise pas le passage de Xe´nophon, Helle´niques. Il se peut qu’il pense au passage qu’il cite ci-dessous, note d. BC cite le passage de Xe´nophon, Helle´niques (livre III, chap. 4, § 11) qui contient la re´ponse d’Arge´silas aux envoye´s de Tissapherne, dans laquelle il remercie le ge´ne´ral perse d’avoir fait des dieux ses ennemis en rompant ses engagements, et de les avoir ainsi fait les allie´s des Grecs. Le renvoi est impre´cis. BC mentionne d’abord dans son texte l’emprisonnement de Cle´arque par Tissapherne, ge´ne´ral puissant du roi de Perse Artaxerxe`s II, qui le trompe et le fait tuer (Xe´nophon, Anabase, II, 5). Il cite ensuite le passage qui raconte le reˆve pre´monitoire de Xe´nophon et le discours que celui-ci adresse aux ge´ne´raux de Proxe`ne, e´galement tue´ par Tissapherne, dans lequel Xe´nophon re´ussit a` les inciter a` la re´sistance contre les soldats perses et a` gagner leur confiance. Il leur promet effectivement la victoire parce que les dieux, garants de la justice, les prote`geraient (livre III, 15–25). BC paraphrase le de´but de Xe´nophon, Helle´niques, livre V, chap. 4, § 1.

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L’introduction de la morale dans la religion place tous les faits sous un nouveau jour ; car les faits sont entre les mains des historiens, et rec¸oivent leur empreinte. Les e´crivains poste´rieurs a` He´rodote assignent des causes morales aux e´ve´nements auxquels il n’avait assigne´ aucune cause. En parlant de la destruction de Sybaris par les Crotoniates, il dit simplement que ces derniers prirent cette ville a. He´raclide de Pont, disciple de Platon et d’Aristote, pre´tend que les Sybarites, ayant massacre´ des suppliants, attire`rent sur eux la cole`re ce´leste b. He´rodote n’aperc¸oit dans la mort tragique de Polycrate, qu’un effet de l’envie des dieux. Amasis, nous dit-il, apprenant que le tyran de Samos avait retrouve´ son anneau, rompit avec lui tout commerce, pre´voyant qu’une fe´licite´ si comple`te attirerait infailliblement le courroux des immortels, toujours ennemis des prospe´rite´s humaines c. Diodore, e´crivant a` une autre e´poque de la religion, attribue au roi d’E´gypte un motif plus moral et plus honorable. Amasis, selon lui, n’ignorait pas qu’un prince qui gouverne injustement, ne peut e´viter la punition destine´e par le ciel a` la tyrannie d. Ainsi, dans ce passage de Diodore qui, du reste, n’est a b c d

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HE´ ROD. V, 441. ATHEN. Deipnos. XII, ch. 42. HE´ ROD. III, 40–43–1253. DIOD. I, 954. Renvoi au livre V, chap. 44 : Lorsque les Sybarites pre´paraient une campagne contre la ville de Crotone, les «Crotoniates, effraye´s, prie`rent Dorie´e de leur donner du secours, et que celui-ci leur en ayant accorde´, ils attaque`rent avec lui la ville de Sybaris, et la prirent» (e´d. Larcher, t. IV, p. 29). BC renvoie a` Athe´ne´e, Les Deipnosophistes, livre XII, 521e, ou` le passage d’He´raclide, ΠεριÁ δικαιοσυ νησ, est reproduit. BC renvoie a` cinq chapitres de l’histoire de Polycrate de Samos (chap. XXXIX-XLIII et CXXV, e´d. Larcher, t. III, pp. 34–38 et 100–101). On y trouve le re´cit de la guerre des Lace´de´moniens contre Polycrate ; du traite´ d’alliance entre Polycrate et Amasis, roi d’E´gypte de la 26e dynastie ; du conseil d’Amasis a` Polycrate, de jeter le bien qui lui e´tait le plus cher ; Polycrate jete son anneau dans la mer, le retrouve miraculeusement dans un poisson qu’un peˆcheur lui offre en cadeau ; enfin la mort cruelle de Polycrate, tue´ par Oroites, satrape persan ; Polycrate est crucifie´ apre`s sa mort ; les dieux avaient annonce´ cette fin a` sa fille dans un re`ve pre´monitoire. L’envie des dieux lui est signale´e par Amasis dans une lettre (livre III, chap. 40 ; e´d. Larcher, pp. 35–36) : «comme je connois la jalousie des Dieux, ce grand bonheur me de´plaıˆt. [...] Examinez quelle est la chose dont vous faites le plus de cas, et dont la perte vous seroit le plus sensible. [...] jetez-la loin de vous, et de manie`re qu’on ne puisse jamais la revoir. Que si, apre`s cela, la Fortune continue a` vous favoriser en tout, sans meˆler quelque disgrace a` ses faveurs, ne manquez pas d’y apporter le reme`de que je vous propose.» Allusion a` l’histoire de Polycrate, tyran de Samos, raconte´e dans la Bibliothe`que historique, livre I, chap. XCV (Diodore, Bibliothe`que historique, t. I, pp. 174–175). Dans l’e´dition de Strasbourg (vol. I, pp. 278–281).

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point conse´quent dans ses opinions religieuses, parce que, de son temps, la religion e´tait de´ja fort e´branle´e, dans ce passage de Diodore, disons-nous, les dieux sont e´quitables ; dans He´rodote, ils ne sont que jaloux a.

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Philippe de Mace´doine et Antiochus, roi de Syrie, dit ailleurs DIODORE, ayant entrepris des guerres injustes, et commis plusieurs sacrile´ges et autres actions barbares, la cole`re des dieux s’e´tendit sur leurs e´tats. Au contraire, les Romains n’ayant entrepris de`s-lors et depuis que des guerres justes, et ayant e´te´ toujours fide`les a` leurs serments et a` leurs traite´s, ce n’est pas sans cause que les dieux ont toujours paru favoriser leurs projets et leurs entreprises. DIOD. Fragm. XXVI1. Ceci est assure´ment une flatterie pour les Romains, car nul peuple ne fut plus injuste dans ses guerres : mais cette flatterie repose sur les ide´es rec¸ues, et cela nous suffit.

Dans les fragments du livre XXVI de la Bibliothe`que historique, il n’est question ni de Philippe de Mace´doine ni d’Antiochus.

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Chapitre VII. De la meˆme progression chez les tragiques grecs.

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L’on s’e´tonnera peut-eˆtre de ce que nous cherchons a` de´meˆler une marche progressive dans trois auteurs a` peu pre`s du meˆme temps ; car les tragiques grecs sont morts tous les trois dans un espace de vingt anne´es ; mais si les premiers pas de l’intelligence sont lents, a` raison des obstacles qu’elle rencontre, quand elle commence a` se mettre en marche a, les modifications qu’elle fait subir aux ide´es religieuses deviennent bientoˆt plus rapides. Lorsque la premie`re s’est ope´re´e, la seconde devient une ne´cessite´ ; elles se suivent de la sorte avec une vitesse acce´le´re´e, et des auteurs presque contemporains marquent assez souvent deux e´poques diffe´rentes. Sous un certain rapport, il entrerait dans notre sujet de remonter a` l’origine de la trage´die. L’invention des repre´sentations dramatiques a duˆ pre´ce´der le plaisir qu’elles font e´prouver aux spectateurs, et ne´anmoins l’espoir de ce plaisir est la seule cause inde´pendante de la religion, qu’on puisse assigner a` ces repre´sentations. C’est un cercle vicieux dont le sacerdoce nous aide a` sortir ; ses feˆtes, ses ce´re´monies ouvrirent au ge´nie une carrie`re ou` il s’e´lanc¸a, et dont il finit par exclure ceux qui les premiers avaient donne´ l’exemple. Ceux-ci, pour s’en venger, proscrivirent plus tard ce qu’eux-meˆmes avaient invente´. En Gre`ce comme aux Indes, la trage´die fut d’abord une composition religieuse, et l’acte d’y assister, un acte de culte ; alors ce spectacle importe´ de l’e´tranger e´tait a`-la-fois effrayant et grotesque, me´lange qui appartient e´minemment a` l’esprit des preˆtres, et dont nous apercevrons quelques traces a

V. ci-dessus, p. 2561. E´tablissement du texte : Manuscrits : 1.) BCU, Co 3294/3, fos 50–52 et Co 3294/6, fos 96–97 2.) BCU, Co 3435/17 [=MF4] Imprime´ : De la Religion, conside´re´e dans sa source, ses formes et ses de´veloppements, t. IV, Paris : Chez Pichon et Didier, e´diteurs, 1831, pp. 410– 436.

12-p. 427.8 Sous ... ne´cessaire. ] passage ajoute´ pendant l’impression, au placard n o 10 Co 3294/6 12–13 Sous un ... L’invention ] Il entrerait peut-eˆtre dans ... trage´die. Cette origine pourrait bien avoir e´te´ toute religieuse. L’invention Co 3294/6 19–20 Ceux-ci ... invente´. ] manque Co 3294/6 21 En Gre`ce ... Indes ] Aux indes, comme en gre`ce, Co 3294/6 22–23 importe´ de l’e´tranger ] manque Co 3294/6 1

Voir ci-dessus, pp. 305–306.

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dans les bouffonneries d’Aristophane, qui ont semble´ si long-temps inexplicables aux modernes. Les animaux figuraient dans les feˆtes de Rama, souvent demi-dieux et demi-hommes ; et dans les premiers essais des Grecs, aux feˆtes de Bacchus, les Satyres occu pe`rent la place des ours et des singes de l’Inde. Le ge´nie des Grecs ne tarda point a` repousser cet amalgame informe. Peu apre`s Thespis, les Satyres ne parurent plus sur la sce`ne grecque. La mythologie continua de fournir le fond des drames ; mais ce qu’il y avait de sacerdotal, les monstruosite´s des dieux, les orgies, les luttes cosmogoniques, s’effac¸e`rent toujours davantage. On les trouve encore dans un des ouvrages d’Eschyle : on ne les rencontre plus dans ceux de Sophocle. Les myste`res dont nous parlerons au livre suivant sont, pour ces deux poe`tes, comme pour Euripide, qui est au reste dans une cate´gorie toute diffe´rente, l’occasion d’allusions nombreuses ; mais la partie plus spe´cialement sacerdotale des myste`res y entre pour beaucoup moins que leur partie morale, et celle-ci meˆme y est pre´sente´e sous un tout autre jour. Les tragiques l’e´purent sans s’en douter, en prenant ses maximes et sa the´orie, et en la se´parant des pratiques et des devoirs factices qui, dans les myste`res, la de´naturaient et la souillaient a. Les grandes bases de la morale religieuse, la soumission aux dieux, la ne´cessite´ d’une vie sans tache, la doctrine du de´vouement et du sacrifice, y e´taient corrompues par l’alliage de l’esprit sacerdotal. Les tragiques, qui n’e´taient point domine´s par cet esprit, affranchirent de cet alliage et la morale et la trage´die. Malheureusement ces recherches nous conduiraient trop loin ; nous ne pouvons oublier que nous nous occupons principalement de l’influence populaire des croyances, et de la manie`re dont cette influence se modifie par la progression. Si nous nous livrions a` des investigations sur les emprunts faits, surtout par Eschyle, aux mythologies e´trange`res, nous re´pe´terions inutilement ce qui a e´te´ dit b du triomphe de l’esprit grec sur les dogmes importe´s par les colonies et les navigateurs, et c sur les e´le´ments constitutifs du polythe´isme de la Gre`ce. Nous devons e´galement repousser tout ce qui n’aurait de relation qu’avec les sectes de philosophie que les tra giques

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V. le livre suivant sur les myste`res1. T. II2. T. III3.

Voir le t. XXI, a` paraıˆtre. OCBC, Œuvres, t. XVIII, livre V, chap. V, pp. 248–281. OCBC, Œuvres, t. XIX, livre VII, pp. 287–378.

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avaient adopte´es a. Nous aurons d’ailleurs a` traiter ce sujet avec e´tendue, quand nous raconterons, dans un ouvrage qui comple´tera celui-ci, la chute du polythe´isme, et la part que les philosophes, a` dater de l’e´cole ionienne, prirent a` ce grand e´ve´nement intellectuel. Maintenant, quelque inte´ressantes que ces digressions pussent paraıˆtre, sous le point de vue historique, ou philosophique, ou litte´raire, nous avons duˆ nous les interdire. Nous ne pouvons rien dire de superflu, quand le temps et l’espace nous suffisent a` peine pour le ne´cessaire. Il doit y avoir plus de contradictions sur le caracte`re des dieux dans la trage´die que dans l’e´pope´e. Ici ce caracte`re se fait connaıˆtre par des actions, au lieu que chez les tragiques, il se manifeste par des axiomes qui, dans la bouche d’interlocuteurs inte´resse´s ou passionne´s, varient suivant les passions ou les inte´reˆts des personnages ; tantoˆt ils veulent tromper ceux qui les e´coutent, tantoˆt ils se trompent eux-meˆmes ; d’autres fois ils disent autre chose que ce qu’ils croient, ou cherchent a` ne croire que ce qu’ils de´sirent. Le caracte`re des dieux est pratique dans l’e´pope´e et de the´orie dans les tragiques. Une autre circonstance qui rend le te´moignage de ces derniers plus ou moins suspect, ce sont leurs allusions aux intrigues, aux usages, aux abus qui sont pre´sents a` l’esprit des spectateurs. Impatients de leur arracher des applaudissements instantane´s, les poe`tes dramatiques preˆtent a` leurs he´ros des opinions plus avance´es que celles de leur sie`cle. Ainsi, nous de´meˆlons dans Eschyle un effort constant pour e´lever Athe`nes au-dessus de Delphes, meˆme sous le rapport religieux, tentative qui s’accorde mal avec le respect qu’inspirait a` toute la Gre`ce cette cite´ sainte, centre de sa croyance, et envers laquelle toutes ses tribus rivalisaient de de´fe´rence et de ve´ne´ration ; plus loin, le poe`te prodigue a` l’Are´opage des e´loges que le sujet de sa pie`ce n’amenait point naturellement, mais qui e´taient la de´fense anticipe´e de ce tribunal auguste, dont l’autorite´, de´ja chancelante, devait bientoˆt succomber sous Pe´ricle`s b. Sophocle choisit de pre´fe´rence, dans les traditions relatives a` Œdipe, celles qui font le plus ressortir la pie´te´ des Athe´niens, la a

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Eschyle, suivant Cice´ron, penchait pour la secte pythagoricienne. La doctrine de Pythagore a probablement influe´ sur la conception des Furies e´pargnant Oreste dans le sanctuaire, et le saisissant de nouveau quand il veut quitter ce religieux asile1. Œdipe a` Colone. Voir Cice´ron, Tusculanæ disputationes, livre II, 23 : «Veniat Æschylus, non poeta solum, sed etiam Pythagoræus ; sic enim accepimus.» L’opinion selon laquelle Eschyle penchait pour la doctrine de Pythagore n’est atteste´e que chez Cice´ron, mais il ne l’a pas invente´e. Il cite une source non identifie´e, peut-eˆtre un passage des commentateurs de l’Antiquite´ que nous ne connaissons pas.

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douceur de leurs mœurs et leur respect pour les suppliants a. L’une de ses trage´dies b n’a pour but que de ce´le´brer The´se´e, le he´ros favori d’Athe`nes, et pour motiver mieux ses louanges, le poe`te met dans la bouche du fils d’E´ge´e, des maximes de mode´ration et de morale que ne professait assure´ment point le The´se´e des fables antiques c. Ce n’est pas que l’inconve´nient n’ait son avantage. Si ces allusions qui alte`rent la ve´rite´ historique repre´sentent mal le sie`cle du he´ros, elles en repre´sentent d’autant mieux le sie`cle de l’auteur. Eschyle fleurissait vers le meˆme temps que Pindare. La religion, toutefois, paraıˆt bien moins ame´liore´e dans les trage´dies du premier que dans les odes du second. Si nous accordions a` son Prome´the´e une foi implicite, nous a b c

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Eume´nides, 684–7131. Œdipe a` Colone, 901–902–961–966–1005–1007. L’enthousiasme des Athe´niens pour The´se´e leur faisait tole´rer les plus absurdes anachronismes. Dans le tableau du combat de Marathon, par Polygnote, The´se´e assiste a` cette bataille. (PAUSAN., Att. 152.) Un fait qui montre combien les tragiques de´figuraient l’histoire pour plaire a` la foule, c’est que Me´ne´las, grave, prudent, valeureux dans Home`re, est a` la fois laˆche et cruel dans toutes les trage´dies athe´niennes ; c’est un effet de la haine des Athe´niens contre Sparte ; et, pour comple´ter l’e´vidence, les pie`ces ou` Me´ne´las est injurie´ sans cesse, sont en meˆme temps remplies d’invectives contre les coutumes lace´de´moniennes. (V. l’Andromaque d’EURIPIDE, 595–601, 445–453.) Le poe`te, pour rendre ces allusions plus piquantes, commet un anachronisme3.

13 1005 ] la source porte 1155 faute de copie que nous corrigeons en adoptant la lec¸on de Co 3294/2, f o 35 Rel4 1

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Le raisonnement que BC de´veloppe dans ce paragraphe concerne Eschyle, mais il est peu consistant parce qu’il attribue par inadvertance les Eume´nides a` Sophocle. Il renvoie au discours qu’Athe´na adresse aux juges d’Oreste en instituant le grand Conseil : «Incorruptible, ve´ne´rable, inflexible, tel est le Conseil qu’ici j’institue, pour garder, toujours en e´veil, la cite´ endormie» (Eschyle, Agamemnon, Les Choe´phores, Les Eume´nides, texte e´tabli et traduit par Paul Mazon, Paris : Belles Lettres, 111983, t. II, p. 158). La suite de son raisonnement porte sur L’Œdipe a` Colone de Sophocle et fait en quelque sorte e´cho aux Eume´nides en plac¸ant l’action de cette pie`ce pre`s du sanctuaire des Eume´nides a` Colone dans l’Attique. Pausanias, livre I, chap. 15, 3, de´crit la Stoa Poikile, orne´e de tableaux des peintres les plus ce´le`bres de l’e´poque. BC mentionne en particulier le peintre et fondeur Polygnote qui a travaille´ entre 480 et 440 av. J.-C. a` Athe`nes. Le tableau dont parle BC repre´sentait le he´ros e´ponyme de Marathon. Il ne s’agissait pas, par conse´quent, d’une repre´sentation de la bataille. BC pense a` un passage du discours de Pe´le´e que celui-ci adresse a` Me´ne´las, et dans lequel il est question des femmes de Sparte qui s’entraıˆnent dans les palestres avec les hommes, ce qui explique les mauvais mœurs d’He´le`ne, l’e´pouse de Me´ne´las. Le second renvoi vise une attaque contre les Spartiates qu’Andromaque adresse a` Me´ne´las : «habitants de Sparte ! conseillers de fourbe, maıˆtres de mensonges, astucieux ourdisseurs de maux» (Euripide, t. II, Hippolyte, Andromaque, He´cube, texte e´tabli et traduit par Louis Me´ridier, Paris : Belles Lettres, 1969, p. 129).

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reculerions jusqu’a` l’Iliade1. La pense´e dominante de ce drame, si e´tincelant de beaute´s se´ve`res, et si effrayant dans sa conception, c’est la haine de Jupiter contre l’homme a. Ce maıˆtre du tonnerre est cruel, impitoyable, ingrat, perfide et fe´roce dans ses amours meˆmes b. L’Olympe est repre´sente´ comme sa proie c. Il le gouverne par des lois terribles que lui seul a faites, menac¸ant de sa lance les dieux qu’il a renverse´s d. C’est un usurpateur nouvellement e´tabli sur un troˆne qu’il a conquis par un parricide e ; il est de´teste´ des autres dieux f ; l’antiquite´ ce`de a` ses de´crets arbitraires, et plie en fre´missant sous sa volonte´ coupable g, car, nous dit Eschyle, un nouveau maıˆtre est toujours9 dur h. Les dieux, dans cette pie`ce, sont tellement semblables aux mortels, que la chute de Jupiter y est annonce´e comme de´sirable a b c d e f g h

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ESCHYLE, Prome´the´e, 9–11–28–82–83–120–123–238–233–944–9452. Ib., 304–306–734–737–893–905–1090–10933. Ib., 149–151–3104. ESCHYLE, ib. 403–4065. Ib., 199–203–909–9116. Ib., 10037. Ib., 149–1518. Ib., 34–359. Il faut attirer l’attention sur le fait que le raisonnement de BC au sujet de la religion professe´e par les personnages de la premie`re pie`ce d’une trilogie sur Prome´the´e est proble´matique. Il s’en aperc¸oit lui-meˆme, comme le prouve la phrase que nous relevons et les re´flexions qu’il de´veloppe ci-dessous, p. 432. Eschyle compose, comme le montre Paul Mazon dans son introduction a` Prome´the´e, une «e´ducation du maıˆtre du monde» (p. 153), ce qu’il fait en combinant les tradtions he´roı¨ques autour de Prome´the´e, d’Hercule qui abat l’aigle, et de Chiron, involontairement blesse´ par Hercule et descendant dans l’Enfer pour libe´rer de´finitivement Prome´the´e. BC cite six passages qui parlent de la haine de Zeus envers les hommes. Un passage du discours d’un personnage appele´ Pouvoir (7–11), un vers lance´ par He´phaistos contre Prome´the´e (28), un autre passage de Pouvoir contre Prome´the´e (82–83), un passage de la plainte de Prome´the´e (120–124), un autre du meˆme genre (228–238), enfin les premiers mots adresse´s par Herme`s a` Prome´the´e (944–946). Nous avons rectifie´ les indications de BC. Cinq renvois, dont les derniers vers de la pie`ce, pour appuyer l’exe´ge`se de BC. BC cite deux passages (149–151 ; 310) qui confirment ce qu’il dit (e´d. Mazon, t. I, pp. 166 et 172). Le chœur chante : «Voila` donc par quels tristes arreˆts, e´rigeant en lois ses caprices, Zeus fait sentir aux dieux d’antan son empire orgueilleux» (e´d. Mazon, t. I, p. 175). C’est Prome´the´e qui de´crit (199–203 ; 909–911) l’usurpation de Zeus (e´d. Mazon, t. I, pp. 168 et 198). «Elle sera de`s lors de tout point accomplie, la male´diction dont l’a maudit Cronos, son pe`re, le jour ou` il tomba de son troˆne antique.» BC ne cite pas correctement. En fait, c’est Prome´the´e qui dit : «celui que plus que tout j’abhorre» (e´d. Mazon, t. I, p. 196). La formule cite´e se trouve aux vers 36–37 (e´d. Mazon, t. I, p. 162) «N’as-tu pas en horreur le dieu maudit des dieux qui a ose´ livrer ton privile`ge [i.e. le feu] aux hommes ?» Elle s’applique a` Prome´the´e. BC re´pe`te un renvoi. Voir ci-dessus, la n. c. BC cite litte´ralement le vers 35, qui fait partie d’un discours d’He´phaistos (e´d. Mazon, t. I, p. 162).

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et comme possible a. Le langage de Prome´the´e est celui du chef d’une faction vaincue, dans une re´volution politique b. Il brave le fils de Saturne, comme ne devant re´gner que passage`rement c. Les temps changeront, s’e´crie-t-il, ils apprendront a` Jupiter lui-meˆme a` connaıˆtre le malheur d. N’aije pas de´ja vu deux souverains chasse´s de l’empire des cieux e ? Jupiter, charge´ de la male´diction paternelle f, perdra cet empire a` son tour de la main d’un de ses enfants g, et j’aime mieux souffrir, enchaıˆne´ sur ce roc, qu’eˆtre son esclave h. Meˆme dans les autres trage´dies d’Eschyle, les dieux sont toujours preˆts a` trahir leurs adorateurs i. Ils emploient contre l’homme la ruse et le mensonge k. Ils sortent des villes quand elles sont prises l ; on ne les retient a b c d e f g h i k l

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Ib., 162–1661. Ib., 199–223. Ib., 937–9392. Ib., 9803. Ib., 955–9584. Ib., 909–914. Ib., 759–967–906–9265. Ib., 967–9686. Les Sept devant The`bes, 105–107–172–1767. Les Perses, 93–1018. Les Sept devant The`bes, 223–2249. BC cite quelques vers du chœur : Zeus «dans son courroux, s’e´tant fait une aˆme inflexible, entend dompter la race d’Ouranos et ne s’arreˆtera qu’il n’ait assouvi son cœur ou que, d’un coup heureux, quelque autre n’ait conquis ce troˆne ardu a` conque´rir» (e´d. Mazon, t. I, p. 167). «Il ne sera pas longtemps le maıˆtre des dieux» (e´d. Mazon, t. I, p. 194). BC cite le vers 981 : «Il n’est rien que le temps n’enseigne, en viellissant» (e´d. Mazon, t. I, p. 195). Allusion a` la le´gende d’Ouranos et de Cronos (e´d. Mazon, t. I, p. 194). Il faut lire : «756–768» (e´d. Mazon, t. I, p. 187). Le second renvoi (907–927) est l’annonce de la chute de Zeus par la main d’un de ses enfants. Prome´the´e parle au chœur (e´d. Mazon, t. I, p. 193). Prome´the´e s’adresse a` Herme`s : «Contre une servitude pareille a` la tienne, sache-le nettement, je n’e´changerais pas mon malheur. J’aime mieux, je crois, eˆtre asservi a` ce roc que me voir fide`le messager de Zeus, pe`re des dieux !» (e´d. Mazon, t. I, p. 195). BC renvoie a` deux passages de la plainte du chœur de The`bes qui implore les dieux de ne pas abandonner la ville (e´d. Mazon, t. I, pp. 114 et 116). BC vise ce passage : «Oui, mais au pie`ge qu’a tendu le dessein perfide d’un dieu quel mortel pourrait e´chapper ? Qui sait alors, d’un pied agile, prendre son e´lan pour un bond heureux ? Caressante et douce, Ate´ e´gare l’homme en ses panneaux, et nul mortel ne peut ensuite s’en e´vader d’un saut et fuir» (Les Perses, e´d. Mazon, t. I, p. 66). Il faudrait citer les vv. 119–120 : «Ah ! que de mes jours je ne voie The`bes abandonne´e des dieux ici re´unis !» (e´d. Mazon, t. I, p. 118).

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qu’a` force de sacrifices a. Agamemnon, lorsqu’il reveˆt son manteau de pourpre, craint que tant de splendeur n’excite leur jalousie. Mais, pour juger Eschyle en connaissance de cause, il faut faire entrer en ligne de compte son caracte`re personnel. Son ge´nie impe´tueux, quelquefois sauvage, le reporte volontiers a` des e´poques de la religion plus orageuses, et par conse´quent plus pittoresques. Il semble regretter le chaos dont il se voit contraint de sortir. Ces forces cosmogoniques, fermentant dans l’abıˆme, impatientes de produire comme d’engloutir ce qu’elles ont produit, ces chocs effroyables, ces luttes de la nature, ces passions effre´ne´es, transporte´es au monde moral comme un he´ritage de l’ancien de´sordre du monde physique, plaisent a` cette imagination puissante qui se sent de force a` les dominer ; et Titan lui-meˆme, Eschyle aime a` se mesurer avec les Titans. Ajoutez a` ces traits primitifs l’exaltation des ide´es re´publicaines. Eschyle composait ses trage´dies au moment ou` le roi de Perse, a` la teˆte d’un million d’esclaves, menac¸ait de nouveau d’envahir la Gre`ce ; et le poe`te, dont le bras avait, a` Marathon, vaillamment combattu pour sa patrie, reproduisait dans ses vers cette horreur pour la servitude et cet amour pour la liberte´, qui avaient pre´side´ a` ses exploits. De-la` cette disposition altie`re et inquie`te qui influa sur sa vie prive´e comme sur ses ouvrages, et qui l’entraıˆna loin de cette Athe`nes, qu’il avait de´fendue, lorsqu’une de´faite litte´raire lui en eut rendu le se´jour odieux b. Cette disposition se manifeste non-seulement dans ses conceptions, mais dans son style aˆpre, saccade´, souvent dur et bizarre. Le retentissement de l’orage se prolonge quand de´ja l’orage commence a` s’apaiser. Le meˆme caracte`re distingue les pompes dont Eschyle accompagne ses repre´sentations the´aˆtrales. Ces pompes colossales portent l’empreinte d’un univers gigantesque. On sait quel effet terrible produisit sur les femmes qui assistaient au spectacle l’apparition des Furies c. a b

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Ib., 76–77–186–187–309–3101. Il fut vaincu par Sophocle, au jugement de Cimon et des neuf ge´ne´raux ses colle`gues, nomme´s par le premier archonte pour prononcer entre les deux rivaux. (PLUT. Vie de Cimon2.) On a nie´ la pre´sence des femmes dans les the´aˆtres des anciens. Cependant l’anecdote que nous rapportons, un passage de Platon (de Leg.), ou` il parle du gouˆt passionne´ des Athe´-

Il faut corriger le premier renvoi : «176–177» : «Souvenez-vous des sacrifices que ce peuple vous offrit, et que ce souvenir vous guide a` son secours» (e´d. Mazon, t. I, p. 116). Les deux autres semblent eˆtre erronne´s. Le premier n’a aucun rapport avec la constatation de BC, le second pourrait eˆtre lu comme une allusion a` la the`se propose´e. Voir Vies paralle`les, «Kimon et Lukullus» ; «Kimon», chap. 8, le dernier aline´a raconte cet e´pisode et le de´part d’Eschyle pour la Sicile, ou` il mourut.

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Et cependant, observez-le bien, son sie`cle oblige notre poe`te a` peindre une religion plus douce et des dieux plus justes. Ces Titans, ces monstres a` cent bras et a` cent teˆtes, les opinions contemporaines le forcent a` les de´sarmer, et a` offrir aux Grecs qui l’e´coutent des formes moins hideuses et des idoles meilleures. Il fait servir, presque malgre´ lui, ces puissances longtemps indompte´es, au triomphe de l’e´ternelle e´quite´ ; et ces divinite´s, jadis redoutables, deviennent bienveillantes pour les hommes qu’elles poursuivaient nague`re de leurs inimitie´s acharne´es. Il ne faut pas conside´rer isole´ment chacune des trage´dies d’Eschyle. La re´union de plusieurs est ne´cessaire pour former un tout complet et re´gulier. Agamemnon, par exemple, les Coe´phores et les Eume´nides composaient une trilogie destine´e a` montrer d’abord le crime triomphant, puis ce crime puni par un autre crime ; enfin, l’expiation de ce dernier attentat mettant un terme aux calamite´s et aux forfaits de la famille d’Atre´e. De meˆme le Prome´the´e que nous posse´dons n’est que le tiers de l’histoire de Prome´the´e. Eschyle l’avait pre´sente´ comme le bienfaiteur de l’espe`ce humaine, ensuite comme perse´cute´ par les dieux, irrite´s des faveurs qu’il accordait aux mortels, et le Prome´the´e de´livre´ terminait le drame, en montrant ce he´ros mis en liberte´ par Hercule, et faisant avec Jupiter sa paix et celle des hommes ses prote´ge´s1. Ces trilogies nous semblent l’expression manifeste de la marche du polythe´isme grec, puisque dans le meˆme poe`te, les traditions se succe`dent, toujours moins grossie`res, en raison des mœurs qui s’adoucissent et des ide´es qui s’e´purent. De la sorte, ce qui e´tait une contradiction dans He´siode est un progre`s dans Eschyle, et nous concevons qu’apre`s avoir offert a` nos yeux les violences des dieux home´riques dans leur effrayante nudite´, le meˆme auteur place la morale sous l’e´gide de ces dieux ame´liore´s. La divinite´ que les mortels appellent la Justice, est la fille de Jupiter a. Les cou-

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niennes pour la trage´die, et l’article de Pollux sur les spectatrices, prouvent qu’elles n’en e´taient pas exclues. Elles l’e´taient probablement de la come´die2. Coe´ph., 949–951 ; Suppl. 3653. Cette restitution de la trilogie de Prome´the´e n’est plus accepte´e par les e´rudits modernes. Voir dans l’e´d. Mazon, t. I, la «Notice», pp. 151–159, ou dans l’e´d. d’Oskar Werner (München : Heimeran, 1969), le chap. «Die Prometheia» (pp. 744–751), qui esquisse un raisonnement tout a` fait analogue. L’ordre des pie`ces tenu pour assure´ pre´voit un Prome´the´e de´livre´ suivi d’un Prome´the´e porte-feu. Le renvoi a` Platon, Nomoi, vise la phrase qu’on lit dans le livre II (658d,3) qui parle du penchant pour la trage´die que les femmes cultive´es partagent avec les jeunes hommes. – Le renvoi a` Pollux est vague ; il se peut que BC pense a` ce qui est dit sur le the´aˆtre. ΙΟΥΛΙΟΥ ΠΟΛΥΔΕΥΚΟΥΣ ΟΝΟΜΑΣΤΙΚΟΝ ΕΝ ΒΙΒΛΙΟΙΣ ΔΕΚΑ, Julii Pollucis Onomasticum Græce & Latine. Post egregiam illam Wolfgangi Siberi editionem denuo immane quatum emendatum, suppletum, & illustratum [...], Amstelædami : Ex officina Wetsteniana, MDCCVI, t. I, livre IV, chap. XIX, pp. 422–442. BC paraphrase un vers des Choe´phores (e´d. Mazon, t. II, p. 117). Le second renvoi vise la phrase «Themis, Suppliante, fille de Zeus» (Les Suppliantes, v. 360, e´d. Mazon, t. I, p. 26).

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pables se flat tent en vain que les dieux ne´gligent les choses humaines a ; leur providence veille, au contraire, sur la maison des hommes vertueux b ; les prie`res des me´chants sont impuissantes pour les fle´chir c. C’est une loi antique et sacre´e, que le sang qui rougit la terre exige et obtient du sang d. Nul n’e´change avec impunite´ l’innocence contre le crime e. Enfin, le chant dans lequel les Furies annoncent les maux qui se re´pandront sur le monde, si on les de´courage et qu’elles ne punissent plus les forfaits, est un plaidoyer poe´tique en faveur de l’appui que la religion preˆte a` la morale, car, dit le poe`te, les crimes contre les hommes sont la suite ine´vitable de l’impie´te´ envers les dieux f. a b c d e f

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Agamemnon, 378–3811. Suppl., 28–29–386–3892. Coe´ph., 958–8593. Coe´ph., 398–402 ; Suppl., 418–4214. Ib., 118–1195. Suppliantes, 536–537. Nous aurions pu multiplier les preuves a` l’infini. La furie E´rynnis punit le crime. (Coe´ph. 649–650.) E´rynnis qui punit lentement les ravisseurs. (Agamemn., 58–59.) Les dieux n’oublient pas les auteurs des meurtres. Les noires Furies poursuivent enfin celui qui est devenu heureux par le crime. (Agam. 469–470.) Si je vous livre, vous qui vous eˆtes re´fugie´es dans les temples des dieux, je crains d’exciter contre moi un vengeur terrible qui ne m’abandonnera pas, meˆme apre`s ma mort, dans les enfers. (Suppl., 418– 4216.) BC cite des vers du Coryphe´e : «Le Ciel ne daigne avoir souci, dit-on, des mortels qui foulent aux pieds le respect des choses sacre´es. C’est la` langage d’impie. La Ruine se re´ve`le fille des audaces interdites, chez ceux qui respirent un orgueil coupable» (Agamemnon, vv. 370–384, e´d. Mazon, t. II, pp. 23–24). «Zeus [...], qui garde les foyers des justes», Les Suppliantes, vv. 27–28 (e´d. Mazon, t. I, p. 14., Le second renvoi vise un vers du chœur (e´d. Mazon, t. I, p. 27). «On peut donc aujourd’hui ne plus servir le crime et re´ve´rer comme il convient la puissance qui re`gne aux cieux !» (Les Choe´phores, e´d. Mazon, t. II, p. 117). BC cite le Coryphe´e (e´d. Mazon, t. II, p. 95). Le second renvoi doit eˆtre corrige´. Il faut probablement lire «449–451» : «Mais, quand il s’agit du sang de nos fre`res, il faut, pour l’e´pargner, sacrifier, offrir a` tous les dieux toutes les victimes aptes a` reme´dier un tel malheur» (Les Suppliantes, e´d. Mazon, t. I, p. 29). Le renvoi pose proble`me. BC pense-t-il au vers 123 des Choe´phores ? «C’est pitie´ de payer le crime par le crime» (e´d. Mazon, t. II, pp. 84–85). BC donne une se´rie de renvois pour justifier son jugement. Le premier e´voque des vers des Suppliantes qui parlent de la justice de Zeus (e´d.Mazon, I, p. 32). Les vers cite´s des Choe´phores sont tire´s de la litanie du chœur : «L’autel de la Justice n’est pas plus toˆt a` terre que le Destin de´ja` forge son e´pe´e ; et voici l’enfant des meurtres anciens qui a` son tour entre dans la maison, sous la conduite de celle qui doit enfin en payer la souillure, l’E´rinys fameuse par ses noirs desseins» (Les Choe´phores, e´d. Mazon, t. II, pp. 104–105). BC cite ensuite un vers d’Agamemnon pour e´voquer la te´nacite´ d’E´rinys (e´d. Mazon, t. II, p. 12) et ` la fin un autre passage de la meˆme pie`ce sur «les noires E´rinyes» (e´d. Mazon, t. II, p. 26). A

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S’il e´tait vrai, comme le raconte Quintilien, que les Athe´niens, trouvant encore dans Eschyle des choses re´voltantes, eussent autorise´ les poe`tes poste´rieurs a` corriger ses pie`ces, en les admettant, ainsi corrige´es, a` concourir avec celles des auteurs vivants a, ce serait une autre explication des maximes diverses qui s’y rencontrent ; mais cette explication nous conduirait toujours au meˆme re´sultat. E´tudiez avec attention la Minerve d’Eschyle pour la comparer aux Minerves pre´ce´dentes, vous reconnaıˆtrez la progression. Il y a distinctement trois Minerves dans la religion grecque : celle de l’Iliade, celle de l’Odysse´e, celle d’Eschyle dans les Eume´nides. Cette der nie`re est le type du caracte`re ide´al des dieux, tel que le progre`s des lumie`res l’avait fait, comme dans Sophocle, celui de The´se´e est le type du caracte`re ide´al des he´ros. Lorsqu’on passe d’Eschyle a` Sophocle, on croit arriver sous un ciel plus serein, respirer un air plus pur. On e´prouve envers les dieux immortels une confiance jusqu’alors inconnue. Sophocle est le poe`te le plus religieux de l’antiquite´ : il a toute la grace de l’Inde, avec la purete´ de gouˆt de la Gre`ce. En lisant l’Œdipe a` Colone et l’Antigone, on se sent re´concilie´, pour ainsi dire, avec le polythe´isme, tant ses formes sont majestueuses, sa morale noble et e´leve´e, ses dogmes utiles, et nous dirons presque raisonnables b. La nature reprend dans Sophocle son harmonie et son calme ; partout re`gnent l’ordre et la mesure. Si le poe`te est ramene´ malgre´ lui a` des a

b

Les Athe´niens disaient a` ce sujet, qu’Eschyle avait remporte´ plus de prix apre`s sa mort que durant sa vie. Cette impression doit eˆtre bien profonde, puisque M. de Laharpe, de tous les critiques le plus e´tranger au sens moral de l’antiquite´, n’a pu s’empeˆcher de la ressentir1.

13–19 Lorsqu’on ... raisonnables. ] texte identique, y compris la note, dans Co 3294/6 16 il a ... Gre`ce ] manque MF4 20 La nature ] La nature au contraire MF4 La nature, 〈au contraire,〉 Co 3294/6

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de sa note se trouve le renvoi a` un passage du chœeur des Suppliantes qui rappelle au roi qu’il doit veiller sur la justice : «Ne consens pas a` voir la suppliante, en de´pit de la justice, entraıˆne´e loin de l’autel». Et il ajoute : «Sache-le, quoi que tu fasses, tes enfants et ta maison en devront un jour payer a` Are`s la stricte re´compense. Re´fle´chis bie:; le re`gne de Zeus est celui de la justice» (e´d. Mazon, t. I, p. 28). BC vise le chapitre sur Sophocle du Lyce´e, ou cours de litte´rature ancienne et moderne de J. F. de La Harpe (Paris : chez tous le principaux libraires, t. II, 1800, pp. 51–161). On pourrait consulter le passage qui de´veloppe une comparaison entre l’Œdipe roi et le Philocte`te pour avoir un exemple de la finesse d’analyse que BC atteste, un peu malgre´ lui, a` La Harpe (a` partir de la p. 130). Un autre passage serait un jugement de La Harpe sur Œdipe a` Colone : «Il re`gne dans toute cette pie`ce une sorte de terreur religieuse, une myste´rieuse horreur, qui plaıˆt beaucoup a` ceux qui aiment la trage´die. Il y a des beaute´s e´ternelles ; mais je crois qu’il faudrait beaucoup d’art pour accommoder le de´nouement a` notre the´aˆtre» (p. 94).

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traditions injurieuses pour les dieux, il s’empresse, soit de les adoucir, soit d’y ajouter quelques mots qui en sont l’excuse ou l’apologie. Hercule tue encore son hoˆte a ; mais Jupiter s’en indigne. Nous avons remarque´ b que le crime d’Hercule n’avait provoque´ que l’indignation d’Home`re, non celle de Jupiter dans l’Iliade. Le chœur, qui est toujours l’organe de l’opinion publique, ne manque jamais, dans Sophocle, de ce´le´brer l’e´quite´ des dieux, en exaltant leur toutepuissance c. Il promet a` E´lectre que Jupiter, a` l’œil de qui rien n’e´chappe, punira ses oppresseurs d ; les coupables, dit-il, sont infailliblement atteints par la vengeance de The´mis ce´leste e ; Pluton, Proserpine, Mercure, les Furies aux chiens e´cumants, poursuivent en tous lieux l’homicide et l’adulte`re f. Jupiter est le pe`re des lois qui font le bonheur des hommes g. De`s que les immortels, vigilants et justes, aperc¸oivent les forfaits, ils en pre´parent le a

b c d e f g

Trachin., 381. Si, comme plusieurs critiques l’ont pense´, les Trachiniennes n’e´taient qu’un ouvrage faussement attribue´ a` Sophocle, cette circonstance expliquerait encore mieux la le´ge`re difficulte´ qui pourrait embarrasser le lecteur. T. III, p. 3982. E´lectre, 472–5153. Ib., 175–1784. Ib., 1064–10655. E´lectr., 110–1156. Œdipe roi, 865–8687.

1 traditions injurieuses ] traditions facheuses MF4 traditions 〈fabuleuses〉 injurieuses Co 3294/6 4–5 n’avait ... Iliade. ] n’avoit point provoque´ l’indignation du Jupiter de l’Iliade. MF4, Co 3294/6 11 chiens e´cumants ] chiens terribles MF4 11-p. 436.2 poursuivent ... rebelle. ] texte identique, y compris les notes, dans MF4 14–16 Trachin. ... lecteur. ] Trachin. 38 Co 3294/6, MF4 17 T. III ] Tome III MF4 Tome III. p. 398 Co 3294/6 1

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Le renvoi au de´but des Trachiniennes (c’est De´janire, l’e´pouse d’Hercule, qui parle) ne fait que mentionner le meurtre d’Iphitos par Hercule. L’histoire est rapporte´e avec les de´tails qui expliquent les conflits de la trage´die, dans les re´cits de Lichas et du messager (vv. 225– 496 ; Sophocle, t. I, Les Trachiniennes, Antigone, texte e´tabli par Alphones Dain et traduit par Paul Mazon, sixie`me tirage revu et corrige´ par Jean Irigoin, Paris : Belles Lettres, 1989, pp. 22–32). L’hypothe`se selon laquelle Sophocle ne serait pas l’auteur de cette trage´die est abandonne´e par la critique. OCBC, Œuvres, t. XIX, p. 371. BC cite les paroles du chœur qui attend l’arrive´e de l’E´rinys. L’e´quite´ des dieux y est annonce´e, mais pas leur toute-puissance (e´d. Dain, t. I, pp. 155–156). «Le grand Zeus est toujours au ciel, d’ou` il voit tout et re`gle tout» (e´d. Dain, t. I, p. 144). «Non, par la foudre de Zeus, par The´mis qui re`gne au ciel, qui se conduit ainsi ne reste pas longtemps sans en porter la peine» (e´d. Dain, t. I, p. 176). C’est E´lectre qui invoque dans sa plainte l’aide des dieux et des E´rynies. «Les lois qui leur commandent sie`gent dans les hauteurs : elles sont ne´es dans le ce´leste e´ther, et l’Olympe est leur seul pe`re ; aucun eˆtre mortel ne leur donne le jour» (e´d. Dain, t. II, p. 103).

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chaˆtiment a ; et si Polynice est impuni, c’est que leur regard ne s’est pas encore tourne´ vers ce fils rebelle b. Si quelquefois Sophocle semble reculer vers des opinions moins e´pure´es, cette marche re´trograde s’applique aux rites, plus qu’aux maximes. De meˆme que dans Eschyle, Clytemnestre mutile le corps d’Agamemnon qu’elle vient d’assassiner, pour se mettre a` l’abri de la cole`re de ses maˆnes c, dans Sophocle, elle essuie aux cheveux de son e´poux le fer sanglant qu’elle a retire´ de sa poitrine, afin que son sang retombe sur sa teˆte d ; Œdipe s’arrache les yeux, pour ne pas voir dans l’autre vie son pe`re et sa me`re e. On reconnaıˆt, dans ces de´tails, les coutumes des hordes sauvages. Dans l’Alceste d’Euripide les dieux infernaux boivent encore le sang des victimes fune´raires f ; ce qui n’est qu’une assez le´ge`re modification de la description d’Home`re qui fait boire ce sang par les ombres meˆmes. Enfin, chose plus e´trange, dans Virgile, Deı¨phobus, a` qui les Grecs ont coupe´ le nez, les oreilles et les mains, se cache tout honteux de paraıˆtre ainsi de´figure´ aux enfers g. Il y a dans l’homme une lutte perpe´tuelle : les habitudes, les soua b c d e f g

Ib., 863–9101. Œd. a` Col., 1370–13712. Coe´ph., 4373. E´lectr., 445–4464. Œdipe roi, 1371–13735. Alceste, 844–8456. Æneid., VI 495–4977.

3-p. 437.4 Si quelquefois ... ope´re´e. ] le texte manque dans MF4 1 2

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C’est ainsi que BC interpre`te les paroles du chœur qui pourtant «s’interroge avec angoisse sur le cas d’Œdipe», peut-eˆtre coupable de de´mesure (e´d. Dain, t. II, p. 104, n. 1). «Aussi les dieux ont-ils les yeux fixe´s sur toi, moins encore a` cette heure que dans l’instant qui vient, si les colonnes dont tu parles s’e´branlent de´ja` vers The`bes» (e´d. Dain, t. III, p. 134). BC cite un passage (vv. 439–444) du re´cit que le chœur adresse a` Oreste (e´d. Mazon, t. II, p. 96). Cette note et la pre´ce´dente abordent le meˆme sujet. Paul Mazon explique dans une note ce qui se passe : «Le meurtrier coupait les mains et les pieds de sa victime, puis il les lui attachait par un cordon autour du cou et sous les aisselles. Il pensait ainsi re´duire le mort a` ` cela l’impuissance et n’avoir plus a` craindre sa vengeance» (e´d. Dain, t. II, p. 154, n. 1). A s’ajoute l’autre geste de Clytemnestre, «quand, pour se libe´rer, elle essuyait son arme ensanglante´e sur la teˆte de sa victime». «De quels yeux, descendu aux Enfers, eusse´-je pu, si j’y voyais, regarder mon pe`re et ma pauvre me`re, alors que j’ai sur tous les deux commis des forfaits plus atroces que ceux pour lesquels on se pend ?» (e´d. Dain, t. II, p. 122). «J’irai guetter le seigneur noir-veˆtu [il faut peut-eˆtre lire : aux ailes noirs (μελα μπτερον)] des morts, le Tre´pas, et le trouverai, je pense, en train de boire, pre`s de la tombe, au sang des victimes» (e´d. Me´ridier, t. I, p. 89). C’est He´racle`s qui parle, esquissant son plan d’attendre Thanatos pour lui arracher Alceste. Virgile, E´ne´ide, livre VI, qui raconte la descente d’E´ne´e aux Enfers ou` il retrouve Deı¨phobus, le fre`re de Paris, cruellement mutile´.

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venirs, le passe´ tout entier, s’attachent a` lui pour entraver sa route vers l’avenir ; mais il n’en suit pas moins cette route, et la prolongation des rites, formes mate´rielles qui se conservent apre`s que les opinions se sont modifie´es, ne de´ment qu’en apparence la modification qui s’est ope´re´e. Rien, au premier coup-d’œil, ne paraıˆt plus re´voltant que la seconde sce`ne d’Ajax, ou` Minerve insulte bassement a` son malheur, et ou` Ulysse, qu’elle prote´ge, donne les signes les plus ignobles d’une laˆchete´ ridicule. Mais avec quel art admirable le poe`te efface cette impression, pour la remplacer par une lec¸on plus satisfaisante et plus morale, lorsque Ulysse, l’ennemi d’Ajax, re´clame des Grecs irrite´s la se´pulture du he´ros tombe´ sa propre victime ! C’est la mode´ration, l’oubli de l’injure, la pitie´ pour l’infortune, le respect pour les morts, ce sont tous les sentiments ge´ne´reux personnifie´s et sanctionne´s par la religion, sous les traits de Minerve. Cette mesure si remarquable, ces me´nagements si de´licats, e´clatent encore dans la peinture des Furies. Eschyle les offre aux regards, fe´roces, alte´re´es de sang, et ce n’est qu’apre`s que l’expiation les a de´sarme´es, que le genre humain respire en suˆrete´ a. Sophocle les de´robe aux yeux des spectateurs. Il e´pargne meˆme a` leurs oreilles ces noms redoutables. De poe´tiques circonlocutions y supple´ent. Dans Eschyle, ces divinite´s sortent des enfers inexorables et impitoyables. Dans Sophocle, elles se retirent au fond d’un bois sacre´. L’haleine parfume´e des vents les apaise : elles reposent dans le silence, jusqu’a` ce que de nouveaux devoirs re´veillent leur activite´ contre les habitants de la terre b. a

b

Il les peint meˆme dans un endroit comme en horreur aux dieux et aux hommes. On reconnaıˆt la` la mythologie confuse et double d’He´siode.1 Le temple des Furies fut construit a` Athe`nes du temps de Solon, par l’ordre d’E´pime´nide. (DUPUIS, des Myste`res, 120–1892.) Athe`nes e´tait la ville de la Gre`ce ou` les Furies e´taient le plus re´ve´re´es, peut-eˆtre parce que la religion s’y de´veloppa plus vite, et s’unit a` la morale d’une manie`re plus intime que partout ailleurs. Les Furies e´taient les protectrices de l’Are´o-

5–13 Rien ... Minerve. ] texte identique dans MF4, Co 3294/3 15 fe´roces ] terribles MF4 〈terribles〉 fe´roces corr. dans la col. de gauche Co 3294/3 18–19 De poe´tiques ] d’harmonieuses MF4, Co 3294/3 19 Eschyle ] le premier MF4 〈le premier〉 Eschyle corr. dans l’interl. Co 3294/3 20 Sophocle ] le second MF4 〈le second〉 Sophocle corr. dans l’interl. Co 3294/3 24–25 Il les peint ... He´siode. ] manque MF4 ajoute´ dans la col. de gauche Co 3294/3 26-p. 438.25 Le temple ... Magaz., 491–492.) ] manque MF4 ajoute´ sur un papillon au bas du f o Co 3294/3 1 2

Allusion au discours d’Apollon a` Oreste dans Les Eume´nides, vv. 64–73. BC renvoie au Traite´ des Myste`res de Dupuis, Origine de tous les cultes, t. II [deuxie`me partie de ce volume], p. 120a. Dupuis parle longuement des myste`res grecs dans la «Deuxie`me partie», intitule´e «Examen Philosophique des Myste`res, conside´re´s dans leurs rapports avec la Politique et la Morale».

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Les notions rec¸ues sur la justice des dieux, bien qu’admises et professe´es par Eschyle, se fondent bien moins dans ses ouvrages, y composent un tout bien moins uniforme, que dans les trage´dies de Sophocle. Le poe`te parle sans scrupule des crimes des dieux. La morale est une the´orie que la pratique contredit encore. Le tribunal redoutable que nous avons vaine ment cherche´ dans Home`re, et que nous avons vu constitue´ dans Pindare, est consacre´ par les deux tragiques : mais tout est effrayant dans Eschyle. Pluton, juge puissant des mortels, exerce aux enfers la tardive vengeance a. Il n’est jamais question que du supplice des pervers. Dans Sophocle, Antigone espe`re la fe´licite´ des justes : l’amitie´ des ombres, re´pond-elle a` la timide Isme`ne, me sera plus durable que la faveur des vivants b. Dans Eschyle, les dieux se font craindre ; dans Sophocle, ils se font aimer ; et c’est un progre`s incontestable, que ce passage de l’e´pouvante a` l’amour. La religion s’identifie a` la poe´sie de Sophocle, bien plus qu’a` celle d’Eschyle. Celui-ci la fait sortir menac¸ante de la nuit e´paisse ; elle lance des flammes soudaines au sein de la foudre et des e´clairs. L’autre, par d’harmonieuses nuances, l’associe a` l’astre du jour ; l’azur des cieux est plus brillant, sans eˆtre moins paisible. Si nous ne craignions de hasarder une comparaison trop profane, nous di rions qu’Eschyle est en quelque sorte l’ancien Testament du polythe´isme ; Sophocle en est l’E´vangile. Lors meˆme que le but des deux poe`tes est identique, leurs moyens diffe`rent. Eschyle, dans les Eume´nides, aussi-bien que Sophocle dans l’Œdipe a` Colone, travaillent a` repre´senter Athe`nes comme la ville gardienne des

a b

page, et on les invoquait imme´diatement apre`s Jupiter sauveur et Apollon. (Stauedl. Rel. Magaz., 491–4921.) Coe´ph., 321–326–379–3802. Antigone, 80–823.

1–11 Les notions ... vivants. ] manque, y compris les notes MF4 ajoute´ dans la col. de gauche 12 Dans Eschyle ] 〈En ainsi que sur un papillon colle´ au bord gauche du f o Co 3294/3 ge´ne´ral〉 Dans Eschyle MF4 15 sortir menac¸ante ] sortir MF4 sortir menacante le second mot ajoute´ dans la col. de gauche Co 3294/3 15–16 elle lance des flammes ] 〈& brille de clarte´s〉 elle lance des flammes corr. dans l’interl. MF4 16–17 d’harmonieuses nuances ] par des nuances habiles MF4, Co 3294/3 17 l’azur ... est ] 〈&〉 l’azur ... en est MF4 18–20 Si ... l’E´vangile. ] manque MF4 ajoute´ dans la col. de gauche Co 3294/3 21 des deux poe`tes ] des deux poe`tes 〈dans les deux poe`tes〉 ajoute´ dans l’interl. Co 3294/3 leurs moyens ] les moyens MF4 leurs ce mot re´crit sur «les» moyens Co 3294/3 23 ville ] cite´ MF4 〈cite´〉 ville corr. dans l’interl. Co 3294/3 24 Stauedl. ] la source porte Staaedl. faute d’imprimerie que nous corrigeons en adoptant l’orthographe que BC utilise pour ce nom Rel4 1

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BC cite le compte rendu de C. A. Böttiger, Die Furienmaske, im Trauerspiele und auf den Bildwerken der alten Griechen, (Weimar : Hofmannische Buchhandlung, 1801) par Stäudlin (Magazin, t. I, pp.490–493). BC cite quelques phrases. Zeus est invoque´ d’envoyer «d’en bas» la punition tardive. Le renvoi est peu pre´cis. Dans la dispute entre les sœurs, on trouve cette phrase : «Ne

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lois, la demeure privile´gie´e d’une race supe´rieure, le boulevard devant lequel s’arreˆte le pouvoir injuste, le sanctuaire ou` s’expie le crime involontaire, ou le crime repentant. Mais dans le premier, les dieux prononcent un arreˆt reveˆtu de formes presque judiciaires ; dans le second, la supre´matie de la cite´ de Minerve pe´ne`tre plus lentement, mais plus profonde´ment, jusqu’au fond de l’ame, par une suite de sentiments et d’e´motions religieuses, qu’un prodige comple`te, sans les interrompre et les troubler. Eschyle paraıˆt l’esclave indocile et re´volte´ de son sie`cle. Sophocle en est le noble interpre`te, toujours fide`le et scrupuleux ; et, par un privile´ge malheureusement bien rare, la carrie`re de ce grand poe`te fut digne en tout de son talent. Citoyen du pays le plus e´claire´ du monde antique, doue´ des avantages de la naissance, de la fortune et de la beaute´, il parvint a` tous les honneurs, il conquit toutes les gloires. Choisi dans son adolescence pour ce´le´brer, a` la teˆte de ses jeunes compagnons, la victoire de Salamine ; pontife et ge´ne´ral, colle`gue de Pe´ricle`s et de Thucydide, dans son aˆge muˆr : il de´fendit, sanctifia, illustra son pays. Tandis que l’irritable Eschyle recherchait, comme l’avide Pindare, le patronage d’un tyran, Sophocle repoussait les invitations des rois barbares a. La vieillesse meˆme, en l’atteignant, sembla le respecter. Elle vint seule, sans le hideux corte´ge des infirmite´s qui l’accompagnent. L’ingratitude de ses enfants ne fut pour Sophocle que le sujet d’un nouveau triomphe. On dirait que les dieux de ce polythe´isme qu’il rendait si noble et si pur, e´prouve`rent envers lui de la reconnaissance, a

PLUTARQUE (vie de Pompe´e), nous a conserve´ de lui ces deux vers : «Quiconque n’e´vite pas les palais des rois, peut y entrer libre, mais y reste esclave1.»

2 s’arreˆte ] s’arreˆtait Co 3294/3 s’expie ] s’expiait MF4, Co 3294/3 3–4 les dieux ... judiciaires ] c’est par un arreˆt presque judiciaire, que les Dieux prononcent MF4 c’est 〈par〉 un arreˆt des Dieux, un arreˆt presque judiciaire, que les Dieux prononcent Co 3294/3 4–7 supre´matie ... troubler. ] c’est par une suite de sentimens & d’e´motions religieuses, qu’un prodige complette, sans les interrompre & sans les troubler, que se manifeste la supre´matie que tous deux s’efforcent de faire pre´valoir. MF4, Co 3294/3, f o 51 supre´matie ... troubler. Co 3294/3, 8-p. 440.5 Eschyle ... aı¨eux. ] manque MF4 Eschyle ... 〈digne〉 noble ... Salamine, f o 52 〈Archonte〉 Pontife corr. dans la col. de gauche ... de´fendit, 〈gouverna〉 sanctifia, illustra 〈sa patrie〉 son pays. Tandis que ... barbares ajoute´, avec la note, dans la col. de gauche La vieillesse ... Bienfaits. la suite dans la col. de gauche Le 〈moindre〉 plus e´clatant ... farouche 〈Lysandre〉 Spartiate empeˆcha que 〈son〉 le corps du poe`te les corr. dans l’interl. et la marge ... 8–9 Eschyle ... dans la 〈sepulture de ses anceˆtres〉 tombe de ses aieux. Co 3294/3, f o 52 scrupuleux ; ] Eschyle parait 〈en quelque sorte comme un homme fabrique´ par〉 premie`re corr. dans l’interl. 〈un mot illis.〉 l’esclave indocile de corr. dans l’interl. son sie`cle : Sophocle en est le digne ces deux derniers mots ajoute´s en dessous de la ligne 〈l’〉interpre`te 〈par〉 toujours ce mot dans l’interl. fide`le & scrupuleux passage ajoute´ dans la col. de gauche Co 3294/3, f o 51

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dois-je pas plus longtemps plaire a` ceux d’en bas qu’a` ceux d’ici, puisqu’aussi bien c’est la`-bas qu’a` jamais je reposerai ? (e´d. Dain, t. I, vv. 74–76 ; pp. 74–75). Plutarque, Vies paralle`les, «Pompe´e», chap. 78. Les vers cite´s appartiennent a` une pie`ce non identifie´e de Sophocle (fragment 789).

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tant ils le comble`rent de tous leurs bienfaits. Le plus e´clatant de ces bienfaits, fut sans doute de lui e´pargner le douloureux spectacle de la de´cadence de sa patrie : a` peine ses yeux s’e´taient-ils ferme´s, que la liberte´ pe´rit a` Athe`nes, sous la main des e´trangers, et le farouche Spartiate empeˆcha que le corps du poe`te ne fuˆt de´pose´ dans la tombe de ses aı¨eux. Pour juger du polythe´isme dans son enfance, il faut s’arreˆter a` l’Iliade a ; pour apercevoir ses premiers de´veloppements, il faut lire He´ siode. Eschyle nous le montre dans ses e´purations successives encore conteste´es, et si nous voulons le connaıˆtre dans sa perfection, c’est Sophocle surtout qu’il faut consulter.

a

Apre`s avoir compare´ Home`re aux poe`tes qui lui succe´de`rent, nous pourrions le comparer aux peintres qui puise`rent dans ses poe`mes le sujet de leurs ouvrages. Nous trouverions de nouvelles preuves de la modification des opinions. Bien qu’il soit parle´, dans le onzie`me livre de l’Odysse´e, de Pirithou¨s et de The´se´e, il n’y est point dit qu’ils subissent aucun chaˆtiment ; mais Polygnote, dans son tableau de la descente d’Ulysse (v. t. III, p. 4521), nous peint ces he´ros expiant, enchaıˆne´s sur des troˆnes d’or, leur impie´te´ et leurs flammes adulte`res. (PAUSAN., Phocide, 28–29 et 302.) Le tableau de Polygnote e´tait expose´ dans la Lesche´ de Delphes (la Lesche´ e´tait l’endroit ou`, dans chaque ville, les citoyens se rassemblaient). Le meˆme peintre, dans le meˆme tableau, repre´sente sous la barque de Caron plusieurs coupables punis, et rien de pareil ne se rencontrant dans le poe`te antique, ces additions n’ont pu eˆtre sugge´re´es au peintre que par les ide´es de son temps.

7–9 pour apercevoir ... le connaıˆtre ] pour le connoıˆtre MF4 〈pour〉 la suite dans la col. de gauche pour apercevoir ... & si nous voulons retour a` la col. de droite le connaıˆtre on lit dans la col. de gauche place´e pre`s du rajout une note de travail a` dicter Co 3294/3, f o 51 11–21 Apre`s avoir ... son temps. ] manque MF4, Co 3294/3, f o 51 ajoute´ sur un papillon ; perte de quelques lettres a` la fin de six lignes Co 3294/3, f o 52

1 2

OCBC, Œuvres, t. XIX, p. 407. Pausanias, livre X, Phokis. La description des tableaux de Polygnote se lit chap. 28–31.

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Chapitre VIII. D’Euripide.

Nous nous e´tions propose´ d’abord de ne point parler d’Euripide : c’est un peintre si peu fide`le de la religion grecque, un auteur si e´tranger a` toute exactitude et a` tout scrupule, que nous ne croyons, presque sur aucun point, devoir invoquer son te´moignage. Il est a`-la-fois incre´dule et rhe´teur. En conse´quence, loin de se complaire dans les perfectionnements de la religion, il aime a` exage´rer ses coˆte´s faibles. Ne´anmoins, le lecteur nous aurait reproche´ une lacune, et nous n’avons pas voulu me´riter ce blaˆme. Mais pour montrer avec quelle de´fiance il faut consulter ce troisie`me des tragiques grecs, et quel genre de lumie`res il peut re´pandre sur quelques de´tails, nous devons parler d’abord de son ca racte`re individuel, des circonstances de sa vie prive´e, du talent que la nature lui avait donne´, et de l’application de ce talent a` la trage´die. L’histoire de l’art dramatique en Gre`ce, bien que resserre´e, comme nous l’avons observe´ plus haut, dans un tre`s-court espace de temps, peut se diviser en trois e´poques. Durant la premie`re, le ge´nie s’avanc¸ait dans la carrie`re, rapide et fougueux, mais sans direction fixe. Durant la seconde, il profitait des expe´riences et des fautes de ses devanciers. Durant la troi-

E´tablissement du texte : Manuscrit : BCU, Co 3294/3 et Co 3294/4, fos 53–60 et 62–64 Imprime´ : De la Religion, conside´re´e dans sa source, ses formes et ses de´veloppements, t. IV, Paris : Chez Pichon et Didier, e´diteurs, 1831, pp. 437–459.

3 Nous nous e´tions ] a` la hauteur de ces mots, dans la col. de gauche, une note de travail J’attends plusieurs e´preuves en feuilles, & aussi de bonnes feuilles depuis la 15e. Co 3294/3 6 Il est ... rhe´teur. ] 〈Euripide〉 Il est a` la fois 〈un〉 incre´dule et 〈un〉 Rhe´teur. Co 3294/3 8 a` exage´rer ... coˆte´s ] 〈illis. rappeler illis.〉 exage´rer 〈c〉ses cote´s Co 3294/3 9 blaˆme. Mais ] bläme, 〈bien qu’il quatre ou cinq mots illis.〉 Mais ce mot ajoute´ dans la col. de gauche Co 3294/3 11 quel ... il peut ] quel〈le〉 genre de ces deux mots ajoute´s dans la col. de gauche lumie`res il peut 〈cependant〉 Co 3294/3 12 parler ... de ] parler d’abord syntagme ajoute´ dans la col. de gauche 〈deux lignes illis. biffe´es〉 de Co 3294/3 13–14 du talent ... trage´die. ] 〈et〉 du 〈grand〉 Talent ... donne´ & de ... trage´die. syntagme ajoute´ a` la fin de la ligne et dans la col. de gauche Co 3294/3 17 premie`re, ] premie`re, 〈quatre ou cinq mots illis.〉 Co 3294/3 18–19 seconde, ... devanciers. ] seconde, 〈les une ligne illis.〉 il profitait la suite dans la col. de gauche des ... devanciers Co 3294/3

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sie`me, le besoin de la nouveaute´ se faisant sentir, il s’agitait au hasard, cherchant tous les moyens de briller. Eschyle et Sophocle correspondent aux deux premie`res e´poques, Euripide a` la dernie`re. Cette circonstance devait a` elle seule rendre ses tableaux infide`les, mais son caracte`re particulier ajoutait a` l’influence de la cause ge´ne´rale. Euripide posse´dait plusieurs qualite´s brillantes, l’e´loquence, l’imagination, une mobilite´ extreˆme, qui ressemblait souvent a` la sensibilite´, une flexibilite´ remarquable, une ironie puissante et profonde : sous ce dernier rapport, Me´de´e est un chef-d’œuvre. Sa sce`ne avec Jason a, son amertume avec le vieillard qu’un instinct confus avertit de prote´ger ses enfants contre elle b, ses retours a` l’amour maternel, quand elle est preˆte a` saisir le fer qui doit les immoler c, e´branlent le lecteur meˆme aujourd’hui jusqu’au fond de l’ame, malgre´ l’absence de l’illusion the´aˆtrale. Mais a` ces dons de la nature, Euripide joignait un esprit inquiet, une vanite´ sans bornes, une excessive avidite´ d’applaudissements, un sentiment peu suˆr et peu de´licat des convenances. La ve´rite´ des mœurs, des opinions, des usages, lui paraissaient des objets subalternes. Les traditions antiques lui semblaient une proprie´te´

a b c

873–9001. 901–931. 1002–1080.

1–2 il s’agitait ... briller. ] 〈deux mots illis.〉 il s’agitoit corr. dans l’interl. au hazard 〈quatre ou cinq mots illis.〉 cherchant tous les cette corr. dans l’interl. moyens de 〈un mot illis.〉 briller la corr. dans la col. de gauche Co 3294/3 4 infide`les, mais ] infide`les 〈trois ou quatre mots illis.〉 mais Co 3294/3 5 cause ge´ne´rale. ] 〈un mot illis.〉 cause ge´ne´rale. suit un paragraphe biffe´ 〈A mesure que la civilisation fait des progre`s, le caracte`re individuel a plus d’influence sur les opinions de chaque e´crivain. il est, en conse´quence, plus indispensable de bien e´tudier ce caracte`re celui D’home`re ou des home´rides, comme nous l’avons dit, ne change rien a` la religion. celui D’he´siode y apporte illis. quelques changemens : celui D’Euripide le De´nature. Le caracte`re D’he´rodote est sans influence, pour la meˆme raison que celui D’home`re, tandisque L’incre´dulite´ auste`re de Thycidide semble de´pouiller le peuple qu’il de´crit, de tout sentiment religieux. Co 3294/3 6 posse´dait ] avait rec¸u de la nature Co 3294/3 7–14 la sensibilite´ ... un esprit inquiet ] une sensibilite´ profonde, une grande flexibilite´. mais il avait en meˆme tems, un esprit inquiet, Co 3294/3 16-p. 443.1 des opinions ... poe`tes ] 〈des Coutumes〉 des opinions, des ... subalterne[s] 〈deux mots illis. importance〉. les traditions ... poe¨tes et 〈l’on pre´tendait meˆme que〉 le mot «et» n’est pas biffe´ par inadvertance Co 3294/3

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BC commente, en e´voquant le passage central de la trage´die dans trois notes conse´cutives, l’art subtil d’Euripide.

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des poe`tes ; et plus d’une fois, sous plus d’un rapport, il les traita comme sa proprie´te´ a. Nous serions tente´s de croire qu’il avait voulu se livrer d’abord aux affaires publiques, bien que l’antiquite´ ne nous dise rien de pre´cis a` cet e´gard. Il s’e´tait exerce´ a` l’art oratoire, et ses allusions perpe´tuelles contre les orateurs, les de´magogues, la de´mocratie, le peuple d’Athe`nes, en un mot contre toutes les institutions de sa patrie, annoncent un amour-propre froisse´. Les de´fauts, les pre´tentions, les qualite´s meˆme d’Euripide s’opposaient a` ses succe`s dans la carrie`re de l’ambition. Mais il n’y renonc¸a probablement qu’avec peine : et qui peut, en effet, renoncer sans douleur, dans un e´tat libre, aux suffrages de ses concitoyens, aux jouissances du pouvoir, aux plaisirs de la popularite´ ? C’est tout autre chose, quand un homme seul gouverne. Ce n’est alors que l’opinion d’un homme qu’on se re´signe a` ne pas captiver, et l’on s’en console. Quoi qu’il en soit de ces premiers de´sirs et de ces premiers regrets d’Euripide, ce qu’il y a de suˆr, c’est qu’avant de se vouer aux lettres, proprement dites, il parut vouloir se consacrer a` la philosophie. Il fut quelque temps disciple d’Anaxagore et d’Arche´lau¨s, mais il quitta bientoˆt des recherches a

Les Corinthiens, par exemple, si nous en croyons d’anciens scholiastes, le se´duisirent et l’engage`rent, pour une somme de cinq talents, a` mettre a` la charge de Me´de´e le meurtre de ses enfants, que les habitants de cette ville avaient lapide´s. (SCHOL. Euripid., in Medeam, 9 ; ÆLIAN., Var. hist., V, 21 ; PAUSAN., Corinth., 31.)

3 Nous ... qu’il ] 〈Je serais〉 Nous serions corr. dans la col. de gauche tente´s le signe du pluriel ajoute´ dans l’espacement de ... qu’il〈Euripide〉 Co 3294/3 4–6 pre´cis ... le peuple ] 〈positif〉 pre´cis corr. dans la col. de gauche 〈deux ou trois mots illis. qu’〉il ... oratoire, 〈deux mots illis.〉 et ses ... orateurs, 〈contre〉 les de´magogues, 〈contre〉 la de´mocratie, 〈contre〉 le peuple Co 3294/3 7 de sa patrie ] ajoute´ dans l’interl. Co 3294/3 13 qu’on ] 〈que l’on〉 qu’on Co 3294/3 16 se vouer ] 〈C〉Se 〈livrer〉 vouer Co 3294/3 18 d’Arche´lau¨s ] D’archelau¨s, maıˆtre de Socrate Co 3294/3 19–21 Les Corinthiens ... lapide´s. ] passage dans le texte principal Co 3294/3 1

BC cite le scholion Euripide, Med. 9, qui contient outre la somme paye´ a` Euripide la meˆme tradition dont parle E´lien. Voir le dernier chapitre du livre V d’E´lien, Variæ historiæ libri XIV, Basileæ : apud Johannem Schweighauser, 1774, pp. 189–191 : «Historia quædam tradit, famam de Medea falsam esse. Non enim illam liberis suis mortem intulisse, sed Corinthios. Fabulam vero de Colchide, & Tragœdiam, Euripidem ajunt confinxisse, rogantibus Corinthiis» (traduction de Justus Vultejus). Le prestige du poe`te a fait accepter la fausse tradition a` la place de la bonne. – Pausanias, livre II, Argolis, chap. 3, 6, raconte la le´gende des fils de Me´de´e dont la tombe se trouve a` Corinthe, a` coˆte´ de l’Ode´on. «Their names were, Mermerus and Pheres, and they are said to have been stoned to death by the Corinthians owing to the gifts which legend says they brought to Glauce. But as their death was violent and illegal, the young babies of the Corinthians were destroyed by them until, at the command of the oracle, yearly sacrifices were established in their honour and a figure of Terror (ΔειÄμα) was set up» (e´d. Jones, t. I, p. 263).

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abstraites et fa tigantes, soit qu’il fuˆt effraye´ des perse´cutions qu’Anaxagore avait e´prouve´es, soit qu’il fuˆt se´duit par l’espe´rance des applaudissements plus bruyants et plus imme´diats, que des compositions the´aˆtrales promettaient de lui valoir. Il ne conserva de ses e´tudes philosophiques, que l’habitude des axiomes qu’il place a` tout propos dans la bouche de ses interlocuteurs. Du reste, il porta dans ses travaux litte´raires une disposition toujours ame`re et toujours me´contente : des succe`s e´quivoques vinrent la fortifier. Auteur de soixante et quinze pie`ces au moins, il obtint le prix tout au plus quatre ou cinq fois a. Non-seulement il fut e´crase´ par le souvenir de la supe´riorite´ de Sophocle, mais il rencontra des rivaux qui l’emporte`rent souvent sur lui b. Les railleries mordantes d’Aristophane le poursuivirent et l’humilie`rent. On dit que des chagrins domestiques se joignirent aux souffrances de sa vanite´, et que l’infide´lite´ d’une e´pouse fut la cause de sa haine et de ses invectives contre les femmes. Il mourut enfin loin de son pays c, qui rendit a` sa me´moire un inutile et tardif hommage. La marche de l’esprit humain e´tant toujours la meˆme, on retrouve parmi nous les trois e´poques de la trage´die, dans Corneille, Racine et Voltaire. Mais Corneille est toutefois bien plus diffe´rent d’Eschyle, et Racine de Sophocle, que Voltaire ne l’est d’Euripide d. a b c d

Aul. Gell. Noct. att., XVII, 41. Agathon par exemple2. A la cour d’Arche´lau¨s roi de Mace´doine3. V. t. III, p. 303–3044.

5 axiomes ... bouche ] 〈ide´es ge´ne´rale〉 axioˆmes corr. dans la col. de gauche qu’il ... propos 〈avec assez peu de discernement〉 dans la bouche Co 3294/3 15 hommage. ] hommage. 〈Il re´sulta de ces circonstances, qu’il faut accorder au caracte`re individuel D’Euripide, une part beaucoup plus grande dans ses ouvrages que dans ceux d’aucun autre ancien.〉 Co 3294/3 16 e´tant ... retrouve ] e´tant toujours ce mot ajoute´ dans l’interl. ... meˆme 〈chez tous les peuples que des calamite´s accentels ne viennet pas [...]bler〉, on 〈pourrait〉 retrouve〈r〉 Co 3294/3 23 V. ... 304. ] note ajoute´e dans la col. de gauche Co 3294/3 1

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Allusion a` un passage d’Aulu-Gelle, Les nuits attiques, livre XVII, chap. 4, 3, qui dit, en citant Marcus Varro, qu’Euripide, auteur de soixante-quinze trage´dies, n’a remporte´ le prix que pour cinq. Dans la note ajoute´e a` ce passage, on souligne que les chiffres varient : 75 ou 92 pie`ces, 5 ou 15 premiers prix (Aulu-Gelle, Les nuits attiques, t. IV, livres XVI-XX, texte e´tabli et traduit par Yvette Julien, Paris : Belles Lettres, 1998, p. 45). Agathon d’Athe`nes (seconde moitie´ du Ve sie`cle) est important pour l’e´volution de la trage´die grecque apre`s les grands classiques. Platon, dans le Symposion, et Aristote parlent de lui. Nous ne posse´dons que quelques fragments de son œuvre. Arche´lau¨s de Mace´doine (413–399), e´nergique mais sans scrupules, faisait de son royaume une puissance bien organise´e. Il institua aussi des jeux artistiques et fit venir beaucoup d’artistes grecs a` sa cour. Euripide e´tait un de ses hoˆtes et ce´le´brait Arche´lau¨s dans une de ses trage´dies (Nauck, Tragicorum graecorum fragmenta (Hildesheim : Georg Olms, 1964), Frgts. 228–264, pp. 426–436). OCBC, Œuvres, t. XIX, pp. 307–308.

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Euripide et Voltaire ont toujours un but, autre que la perfection de leurs ouvrages. Ils se`ment tous deux a` pleines mains des ge´ne´ralite´s de´place´es a. Ils rame`nent a` tout propos des allusions aux usages, a` la religion, a` la politique contemporaine. Dans une pie`ce dont le sujet pre´ce`de de huit sie`cles la guerre du Pe´lopone`se, l’auteur grec fait allusion a` l’alliance des Argiens avec les Spartiates b : plus loin, il injurie les orateurs c, les de´mago gues, la de´mocratie, choses dont aucune n’existait, quand Adraste re´gnait sur Argos. Ailleurs, il se jette dans une digression inattendue sur le pouvoir populaire et la monarchie d. Ailleurs encore, le meˆme The´se´e que de´ja Sophocle avait embelli, et qui, vainqueur des monstres et des brigands, ne a

b c d

Ide´es sur la vie et sur la vieillesse ; Eurip., Suppl. 1064–1097–1080–113 ; digression sur la jeunesse, Herc. fur. 637–652–627–2541. Suppl. 1094–1093–1181–11822. Ib. 734–738–744–749–864–865–879–8803. Suppl., 339–343–350–353–471–4934.

2 des ge´ne´ralite´s ] des 〈Ide´es〉 ge´ne´ral〈es〉ite´s a` la hauteur de ces mots une note de travail biffe´e 〈Note pour moi ici transporter ce qui se rapporte aux allusions d’Euripide dans le Ch. pre´ce´dent〉 Co 3294/3 4-p. 446.2 Dans une pie`ce ... civilisation. ] passage ajoute´, y compris les notes, dans la col. de gauche Co 3294/3 1

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Les renvois indique´s dans cette note ne correspondent pas toujours a` l’ide´e expose´e par BC. Les chiffres 1064–1097 indiquent dans les Suppliantes un passage qui n’a pas d’unite´ argumentative. Nous supposons que BC a oublie´ d’e´liminer ces chiffres en se corrigeant, car le passage 1080–1113 correspond a` un monologue d’Iphis sur la vie et la vieillesse (Euripide, t. III, He´racle`s, Les Suppliantes, Ion, texte e´tabli et traduit par Le´on Parmentier et Henri Gre´goire, Paris : Belles Lettres, 1976, pp. 144–146). Une faute pareille se re´pe`te avec les renvois a` He´racle`s. Le premier passage (637–652) de´signe une strophe du chœur sur les joies de la jeunesse et le fardeau de la vieillesse (e´d. Parmentier, p. 45). Les deux chiffres suivants ne concernent pas ce sujet et sont probablement des chiffres a` e´liminer. Les renvois de cette note posent proble`me. Les deux premiers chiffres renvoient au passage cite´ dans la note pre´ce´dente, sans rapport avec le sujet e´voque´ par BC dans la phrase sur les Argiens. Il faut peut-eˆtre lire «1194–1195», ce qui de´signe deux vers qui, avec les vers 1181–1182, parlent des Argiens et d’un traite´ d’alliance, ce qui est une allusion politique concernant la guerre du Pe´loponne`se (e´d. Parmentier, p. 149). BC donne de faux renvois ; nous n’avons su corriger l’erreur. Les passages cite´s ne concernent pas le sujet traite´ dans le texte. Le premier renvoi (734–738) de´signe le de´but d’une re´flexion d’Adraste sur le pouvoir de Zeus. Le second cite un argument du meˆme qui demande qu’on entame des ne´gociations. Les deux derniers sont tire´s d’un discours d’Adraste que celui-ci adresse a` The´se´e et dans lequel il fait l’e´loge d’E´te´ocle (e´d. Parmentier, t. III, pp. 130–131 et 135–136). Il faut corriger les renvois. Pour les deux premiers, il faudrait lire probablement «426–462». C’est dans ce discours adresse´ par The´se´e au he´raut the´bain que l’on trouve la digression sur la de´mocratie. Le dernier renvoi de´signe un passage de la re´ponse du he´raut qui proˆne la paix a` conclure (e´d. Parmentier, t. III, pp. 119–121).

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pouvait connaıˆtre que l’e´tat barbare, trace en vers pompeux l’histoire philosophique de la civilisation a. Euripide aurait pu faire une trage´die comme Tancre`de, c’est-a`-dire, il aurait re´uni dans la meˆme pie`ce une sensibilite´ passionne´e a` cette fureur de maximes et de de´clamations qui a porte´ Voltaire a` mettre dans la bouche d’une jeune fille, lorsqu’elle apprend que son amant cherche la mort au milieu de la meˆle´e, une dissertation sur les droits des femmes et sur l’injustice qui produit a` la fin l’inde´pendance. C’est ainsi que dans He´cube b, cette me`re infortune´e demandant a` Ulysse la vie de sa fille, fait une digression contre les orateurs qui trompent le peuple ; et que, plus loin, pleurant la mort de Polixe`ne, elle s’arreˆte pour examiner l’influence de l’e´ducation sur la jeunesse c. Si nous ne craignions de nous trop e´carter de notre sujet, nous ferions remarquer bien d’autres rapports entre Euripide et Voltaire ; tous deux terminent leurs trage´dies par des re´flexions morales, qui indiquent le besoin de prononcer un re´sultat propre a` captiver les applaudissements d. Dans l’auteur franc¸ais, comme dans l’auteur grec, les interlocuteurs ne parlent point entre eux, mais pour le public. La nature et la ve´rite´ sont continuellement sacrifie´es a` ce but. Me´ne´las, en E´gypte, apportant la fausse nouvelle de sa propre mort au roi de cette contre´e, ne re´pond jamais a` ses interrogations ce que a b c d

Bacchant., 249–252–270–2711. He´cub., 254–2572. He´cub., 592–6023. Ion, 1595–1596–1621–16224.

7–8 l’injustice ] l’injustice 〈des hommes〉 Co 3294/3 mens 〈des un mot illis.〉 Co 3294/3 1

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16 applaudissements ] applaudisse-

Les renvois au Bacchantes ne peuvent pas illustrer la dernie`re phrase de cet aline´a. Nous supposons que BC pensait renvoyer aux Suppliantes, vv. 195–245 (e´d. Parmentier, t. III, pp. 110–112). C’est dans ce long discours adresse´ a` Adraste que The´se´e donne ce que BC appelle «l’histoire philosophique de la civilisation» : «La somme de nos biens de´passe, a` mon ide´e, le total des maux. [...] Et je rends graˆce au Dieu qui re´gla l’existence des mortels, autrefois confuse et bestiale ; qui nous donna, d’abord, la raison, puis la langue, [...]». «Puisse´-je ne pas vous connaıˆtre, vous qui n’avez cure de nuire a` vos amis, pourvu que vos propos flattent la foule» (e´d. Me´ridier, t. II, p. 191). «Est-ce l’he´re´dite´ ou l’e´ducation qui l’emporte ? Il est suˆr qu’une bonne e´ducation enseigne le devoir ; quand on l’a appris, on reconnaıˆt le mal, avec le bien pour re`gle» (e´d. Me´ridier, t. II, p. 204). Les citations correspondent a` ce que dit BC : «Or Apollon, en somme, a bien mene´ l’affaire». et les derniers vers de la trage´die, prononce´s par le coryphe´e, sont un re´sume´ moral de cette pie`ce : «Oui, qui voit sur son toit s’acharner le malheur, doit reprendre courage et garder son respect pour les dieux ; car les bons trouveront re´compense a` la fin : les me´chants resteront mise´rables» (e´d. Parmentier, t. III, pp. 246 et 247).

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raisonnablement il devrait lui re´pondre. Son langage est plein d’e´quivoques affecte´es, en contre-sens avec sa situation. Il n’a en vue que les spectateurs qui l’e´coutent ; et, pour leur plaire, il risque sa suˆrete´, c’est-a`-dire toute vraisemblance a. Oreste, dans E´lectre, arrivant sur le the´aˆtre de´guise´, proscrit, me´ditant de venger son pe`re et de tuer sa me`re, et parcourant en trente vers les diffe´rents e´tats de la vie b, nous rappelle Alzire, et le traite´ qu’elle fait sur le suicide, quand son amant vient d’assassiner son e´poux. Sophocle ayant compose´ une E´lectre, de meˆme qu’Euripide, la comparaison de ces deux pie`ces est tre`s-propre a` faire connaıˆtre la diffe´rence des deux poe`tes. Dans Sophocle, le parricide est l’effet d’une destine´e irre´sistible. Dans Euripide, ce parricide est pre´me´dite´ ; on le discute sur le the´aˆtre, parce qu’Euripide ne peut jamais se refuser une discussion, et cet examen pre´alable rend le forfait mille fois plus re´voltant. Voltaire et Euripide ont, en ge´ne´ral, attaque´ la religion, et tous deux ont cherche´ des effets tragiques dans la religion meˆme, objet de leurs railleries. Euripide semble avoir fait ses Bacchantes c, pour consacrer le triomphe de la superstition la plus fanatique, oubliant qu’ailleurs il affichait l’incre´dulite´. C’est ainsi que Voltaire a fait Alzire et Zaı¨re : et, pour que la conformite´ fuˆt plus comple`te, le poe`te grec, dans une pie`ce destine´e a` montrer combien a b c

He´le`ne. E´lectre, 263–2901. Les Anciens croyaient qu’il avait beaucoup profite´ d’une pie`ce d’Eschyle sur le meˆme sujet, pie`ce qui ne nous est point parvenue2.

2 Il n’a ] 〈Il est evident (?) qu’〉Il n’a Co 3294/3 3 pour ] 〈que〉 pour Co 3294/3 4–7 Oreste ... e´poux ] 〈quand〉 oreste, Dans ... me`re, & parcour〈e〉ant en trente ... vie, 〈peut illis. d’〉 nous rappelle ces deux mots dans la col. de gauche Alzire 〈qui, deux lignes illis.〉 & le tarite´ ... suicide quand ... e´poux. syntagme ajoute´ dans la col. de gauche Co 3294/3 10–11 Dans ... irre´sistible. ] ajoute´ dans la col. de gauche Co 3294/3 11 ce ] 〈le〉 ce Co 3294/3 13 rend le forfait ] 〈trois mots illis.〉 rend le forfait les deux derniers mots ajoute´s dans la col. de gauche Co 3294/3 15 meˆme, objet ... railleries. ] meˆme 〈qui e´tait l’〉objet ... railleries 〈presqu’illis.〉 Co 3294/3 17 fanatique ... incre´dulite´. ] fanatique 〈et la plus grossie`re〉 oubliant ... affichait 〈illis.〉 l’incre´dulite´. 〈on croit en ge´ne´ral qu’il a beaucoup profite´ d’une pie`ce D’Eschyle sur le meˆme sujet qui ne nous est pas parvenue. mais quoi qu’il en soit de cette conjecture, les Bacchantes illis. a` prouver que ce poe¨te cherchait a` faire effet, sans s’embarasser de l’opinion qui deux mots illis. [...]ser ce succe`s.〉 Co 3294/3 22–23 Les Anciens ... parvenue. ] ajoute´ dans la col. de gauche Co 3294/3 1

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Le renvoi est peu pre´cis. BC renvoie probablement a` l’entretien entre Oreste, de´guise´, et E´lectre, qui ne le reconnaıˆt pas, dans lequel ils se communiquent les e´tapes de leurs vies et esquissent le plan de la vengeance (e´d. Parmentier, t. IV, pp. 202–203). Eschyle a bien e´crit une pie`ce consacre´e aux Bacchantes. Nous en connaissons un seul fragment de deux vers (Stefan Radt (ed.), Tragicorum graecorum fragmenta, Göttingen : Vandenhoeck & Ruprecht, t. III, 1985). Radt ne parle point d’une dette d’Euripide a` l’e´gard d’Eschyle.

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sont terribles les chaˆtiments des dieux contre l’impie´te´, ne peut se refuser a` des allusions irre´ligieuses a, de meˆme que Voltaire commence sa trage´die chre´tienne par ces vers ce´le`bres, si philosophiques et si de´place´s : «J’eusse e´te´ pre`s du Gange esclave des faux dieux, Chre´tienne dans Paris, Musulmane en ces lieux.» Les pie`ces d’Euripide, comme celles de Voltaire, ne sont, la plupart du temps, que des pre´textes pour faire triompher son ide´e dominante : sa sensibilite´ meˆme est subordonne´e a` son intention syste´matique. Le philosophe se met sans cesse aux prises avec le poe`te, et il en re´sulte tantoˆt des invraisemblances qui de´truisent toute illusion, et plus souvent encore une certaine monotonie dans les caracte`res, un retour perpe´tuel aux meˆmes pense´es, l’absence, en un mot, de cette impartialite´ dramatique, sans laquelle l’art n’arrive jamais a` la perfection. Toute litte´rature qui a un but hors d’elle-meˆme, peut eˆtre plus utile, plus efficace, comme moyen, mais elle est toujours moins parfaite qu’une litte´rature qui est elle-meˆme son propre but. La trage´die d’Œdipe roi, dans Sophocle, et celle des Bacchantes, dans Euripide, ont la meˆme tendance. Leur re´sultat est de donner un exemple de l’infaillibilite´ des oracles, et du danger de manquer de respect aux immortels. La destine´e atteste la ve´racite´ des dieux, dit Cre´on a` Œdipe ; c’est la a

V. toute la sce`ne de Bacchus avec Penthe´e, Bacch., 910–9741.

5 lieux.« ] suit un paragraphe biffe´ 〈Ce rapprochement entre Euripide et Voltaire, n’est nullement destine´ a` rabaisser le me´rite de ce dernier. Voltaire, comme tous les e´crivains du dix huitie`me sie`cle, s’e´tait propose´ de re´former beaucoup d’institutions, de de´truire beaucoup d’abus. cette intention le dirigeait dans tous ses ouvrages : et, quoiqu’il ait sans doute e´te´ quelquefois entraine´ fort au dela` du but, quoiqu’il e´tait adopte´ fre´quemment un ton de de´nigrement et D’ironie, froide, (?) non seulement a` couvrir de ridicule des erreurs absurdes, ou dangereuses, mais a` tarir la source de toutes les ide´es les plus e´leve´es et les plus nobles, son activite´ infatigable, la varie´te´ de ses effets et de ses succe`s, commandent, sous plus d’un rapport, notre admiration. mais on ne peut nier que cette tendance deux mots illis. et perte d’un mot dans une de´chirure nuisible a` sa supe´riorite´ (?) comme auteu[r] tragique ses pie`ces ne sont, la plupart du tems〉 Co 3294/3 6–7 Les pie`ces ... temps ] ajoute´ dans la col. de gauche Co 3294/3 7 pour faire ] pour 〈de´velopper des〉 faire Co 3294/3 9 sans cesse ] 〈illis.〉 sans cesse Co 3294/3 13–15 but ... but. ] 〈illis.〉 but ce mot dans l’interl. hors ... moyen 〈d’atteindre ce but〉, mais ... moins parfaite la suite dans la col. de gauche qu’une ... ce but. Co 3294/3 1

BC cite une des sce`nes de´cisives pour l’action des Bacchantes (vv. 912–976 ; Euripide, t. VI/2 : Les Bacchantes, texte e´tabli et traduit par Henri Gre´goire, avec le concours de Jules Meunier, Paris : Belles Lettres, 1961, pp. 278–281). L’exe´ge`se du texte par BC est magistralement confirme´e, approfondie et partiellement rectifie´e dans la «Notice» qui pre´ce`de l’e´dition Gre´goire. Voir plus particulie`rement les re´flexions de l’e´diteur, pp. 235–237.

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morale de la pie`ce. La meˆme conclusion e´mane du sort de Penthe´e, dans les Bacchantes. Mais ces trage´dies diffe`rent, parce que le caracte`re de leurs auteurs e´tait diffe´rent. Sophocle avait rempli les fonctions les plus importantes, tant militaires que civiles, et cette pratique de la vie lui avait enseigne´ la mesure et impose´ la gravite´. Il e´tait pe´ne´tre´ de respect pour la religion, d’a mour pour la constitution de son pays. Euripide, dont l’esprit n’avait point rec¸u l’e´ducation des affaires, ne saisissait, de toutes les institutions, que les inconve´nients. Incre´dule, il ne pouvait prendre le langage religieux, sans tomber dans le fanatisme. Sophocle porte, dans l’Œdipe roi, tout le se´rieux, tout le calme de la conviction. Euripide n’ayant point de conviction, n’a point de mesure. Il s’abandonne, dans les Bacchantes, a` la fougue, a` l’inconse´quence, a` l’exage´ration d’un homme qui n’est jamais averti par le sentiment qu’il e´prouve de l’effet qu’il produit. On pourrait remarquer, dans un moindre degre´, parce que Voltaire avait plus de gouˆt qu’Euripide, la meˆme diffe´rence entre Athalie et Zaı¨re a. Chose bizarre, l’incre´dulite´ d’Euripide ne le pre´serve point de l’abus du merveilleux. Des dix-huit trage´dies qui nous restent de lui, neuf se terminent par l’apparition d’un dieu sur la sce`ne. a

PLUTARQUE nous rapporte une anecdote bien propre a` nous convaincre de l’indiffe´rence d’Euripide pour les opinions qu’il preˆtait a` ses interlocuteurs, et du peu de rapport qu’il se proposait d’e´tablir entre ces opinions et leur roˆle. Il avait commence´ la trage´die de Me´nalippe par des vers qui semblaient re´voquer en doute la divinite´ de Jupiter. Les Athe´niens ayant te´moigne´ leur de´sapprobation par des murmures, Euripide aussitoˆt substitua des vers qui exprimaient une croyance tout oppose´e. (PLUT., in Amat1.)

1 morale ] moral〈ite´〉e Co 3294/3 2–3 parce que ... avait ] parce que ... diffe´rent. syntagme ajoute´ dans la col. de gauche Sophocle 〈un mot illis. citoyen,〉 avait Co 3294/3 4–5 et cette ... gravite´. ] ajoute´ dans la col. de gauche Co 3294/3 10 tout le se´rieux ] tout〈e〉 l〈e〉a 〈gravite´〉 se´rieux ce dernier mot dans la col. de gauche Co 3294/3 point ] 〈pas〉 point Co 3294/3 11 n’a point de mesure ] syntagme remanie´ premie`re re´daction ne pouvait avoir de mesure corr. en biffant le mot 〈avoir〉 et la dernie`re syllabe du verbe ; le reste re´crit Co 3294/3 12 fougue ... qui n’est ] fougue 〈de l’agitation〉, a` l’inconse´quence ... qui, 〈n’e´tant point illis.〉, n’est Co 3294/3 14 gouˆt ] 〈morale〉 gout Co 3294/3 15–18 Chose bizarre ... sce`ne. ] manque Co 3294/3 19–24 Plutarque ... Amat.) ] ajoute´ au bas de la page en utilisant les deux col. Plutarque ... in amat. Bayle art. Euripide Co 3294/3 1

Il faut corriger le nom et lire «Me´lanippe». Allusion a` Plutarque, Amatorius (ÆΕρωτικο σ), 56B–56C. Il s’agit d’un seul vers qui appartient au prologue d’une pie`ce intitule´e Me´lanippe la sage. Euripide avait d’abord dit : «Zeus, qui que ce soit, car je ne le connais que par ce qu’on m’a dit de lui», puis, pour faire taire les me´contents, il invoque le dieu en corrigeant ses expressions : «Zeus, comme on affirme avec ve´rite´». Voir Euripides, Fragmente, Der Kyklop, Rhesos, [...] Herausgegeben von Gustav Adolf Seeck, Darmstadt : Wissenschaftliche Buchgesellschaft, 1981, p. 210.

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Les de´fauts d’Euripide ne tiennent point, comme ceux d’Eschyle, a` l’ignorance de l’art ou a` des vestiges d’une grossie`rete´ a` peine subjugue´e. Ils appartiennent en propre a` ses conceptions affecte´es et ambitieuses. Ce sont des digressions sans rapport avec le sujet, des descriptions d’une longueur qui de´truit toute vraisemblance, des allusions qui oˆtent a` ses pie`ces toute couleur historique ou locale, des e´pigrammes qui deviennent absurdes dans la bouche de ses interlocuteurs. C’est contre les orateurs, qu’Hippolyte fait une sortie a. Oreste se perd dans des attaques indirectes contre le gouvernement d’Athe`nes b. Andromaque, au milieu de ses lamentations, s’interrompt et s’e´crie : c’est toujours la manie des femmes d’avoir sur les le`vres la douleur qui les tourmente, et de remplir l’air de leurs plaintes c. Lorsque Eschyle nous blesse, il a son apologie dans les souvenirs des mœurs qui avaient existe´. Mais ce qui nous choque dans Euripide, n’est conforme aux mœurs d’aucune nation. He´cube de´crivant les caresses que Cassandre, sa fille, esclave d’Agamemnon, prodigue a` ce destructeur de

a b c

Hippol., 486–4871. Oreste, 885–9522. Andromaque, 92–943.

2 de l’art ... subjugue´e. ] 〈des re`gles〉 de l’art, ou a` des 〈restes de〉 vestiges d’une corr. dans l’interl. grossie`rete´ 〈dans le illis. passions〉 a` peine subjugue´e ces trois mots dans la col. de gauche Co 3294/3 7 orateurs ] dans la col. de gauche BC note le de´but d’un placard Placard 19 Co 3294/3 8–9 des attaques ... d’Athe`nes. ] des 〈illis.〉 attaques indirectes contre le ces quatre mots dans l’interl. gouvernement 〈et illis.〉 d’athe`nes. Co 3294/3 12–14 Lorsque ... de´crivant ] dans la col. de gauche, plusieurs tentatives pour e´crire la premie`re phrase 〈Ce qui nous offense dans〉 puis 〈Lorsqu’Eschyle la suite illis.〉 Lorsqu’Eschyle ... existe´. retour a` la col. de droite Mais Ce qui nous choque les deux derniers mots ajoute´s dans l’interl. dans Euripide 〈choque les sentimens un ou deux mots illis. les convenances The´atrales,〉 n’est 〈dans les〉 conforme aux corr. dans l’interl. mœurs ... nation. Lorsqu’he´cube de´crit Co 3294/3

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Allusion a` ces vers : «Voila` ce qui, chez les humains, perd cite´s bien gouverne´es et familles : les discours trop se´duisants. Ce n’est pas le plaisir des oreilles que doit chercher la parole, mais de quoi assurer son renom» (e´d. Me´ridier, t. II, pp. 47–48). BC renvoie au re´cit du messager qui re´sume pour E´lectre les discours des de´fenseurs et accusateurs d’Oreste devant l’assemble´e des Argiens. Le jugement de´favorable de BC sur ce discours s’explique par un passage (vv. 907–913 ; Euripide, t. VI, 1, Oreste, texte e´tabli et annote´ par Fernand Chapouthier et traduit par Louis Me´ridier, Paris : Belles Lettres, 1973, pp. 67–70) qualifie´ d’interpolation par les e´diteurs modernes. BC paraphrase les vers 91–95 d’Andromaque (e´d. Me´ridier, t. II, p. 116).

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Troie a, Adme`te reprochant a` son pe`re, avec une durete´ ignoble, de ne pas vouloir mourir a` sa place b, sont des choses inexcusables, soit comme peinture de la nature, soit comme peinture des mœurs. L’on croirait que, plus les auteurs se proposent de plaire au public, plus ils doivent perfectionner l’ensemble de leurs ouvrages : cela n’est pas. Lorsque leur but unique est de faire effet, ils ne travaillent, pour ainsi dire, qu’a` baˆtons rompus, et ne soignent que les parties les plus propres a` captiver imme´diatement la foule. Mauvais calcul ! Pour dominer la multitude d’une manie`re durable, en litte´rature, comme en politique, le secret le plus suˆr est fre´quemment de la de´daigner. De meˆme que dans les poe`mes de nos jours, le plan est sacrifie´ aux e´pisodes et aux descriptions ; de meˆme, dans les trage´dies d’Euripide, le fond est sacrifie´ aux accessoires. Les expositions sont presque toujours mise´rables. Je n’excepte gue`re que celle d’Andromaque qui, d’un autre coˆte´, est l’une des trage´dies les plus faibles de cet e´crivain. Mais l’exposition est claire et naturelle, et fait connaıˆtre, de`s les premiers vers, ce que les divers caracte`res doivent amener. Les chœurs ne tiennent que faiblement au sujet. Aussi dirait-on que le poe`te l’a senti. Euripide leur te´moigne plus de de´fiance que Sophocle. Tantoˆt les interlocuteurs les menacent de la mort, s’ils les trahissent, tantoˆt ils leur font mille promesses, pour les engager au silence. Sophocle ne prend pas de telles pre´cautions, parce que ses chœurs sont partie inte´grante de ses pie`ces. Euripide, au contraire, se met, sans le a b

He´cube, 814–8321. Alceste, 629–6702.

1–2 Adme`te ... soit comme ] Lorsqu’Adme`te reproche ... place, ces choses sont inexcusables, ni comme ... nature, ni comme Co 3294/3 7–10 les parties ... de´daigner. ] que certaines parties pour 〈charmer〉 (?) 〈un mot illis.〉 dominer la multitude d’une manie`re durable, 〈comme pour la conduire, et〉 en litte´rature ... le plus sur, 〈dans beaucoup de circonstances, c’est〉 est frequemment les deux derniers mots dans la col. de gauche de 〈la illis.〉 la de´daigner. Co 3294/3 9 plus ] la source porte plur Rel 4 16 claire et naturelle ] claire & ce mot ajoute´ dans l’interl. naturelle, 〈deux mots illis.〉 Co 3294/3 18–19 Euripide ... Sophocle. ] il y a plus de De´fiance des chœurs dans Euripide, que dans Sophocle. Co 3294/3 1

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Allusion a` un passage de la plainte d’He´cube adresse´e a` Agamemnon : «A tes coˆte´s repose ma fille, la prophe´tesse que les Phrygiens nomment Cassandre. Comment montreras-tu, seigneur, que ses nuits te sont che`res. Des e´treintes d’amour que te donne sa couche quel gre´ aura ma fille, quel gre´ aurai-je d’elle ?» (vv. 826–830 ; e´d. Me´ridier, t. II, p. 212). BC e´voque le discours violent qu’Adme`te adresse a` son vieux pe`re Phe´re`s (e´d. Me´ridier, t. I, pp. 81–82). On consultera pour lire une interpre´tation plus convainquante que le commentaire de BC la notice de l’e´diteur (pp. 51–53).

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savoir, sans cesse en garde contre eux, parce que ce sont des intrus, qui ne paraissent sur le the´aˆtre que pour de´clamer a. Si c’e´tait ici le lieu de prouver combien Euripide s’e´carte du vrai caracte`re de l’antiquite´, nous nous bornerions a` citer quelques traits de sa pie`ce du Cyclope. Cette pie`ce est un assemblage d’impie´te´s, d’inde´cences, de plaisanteries spirituelles et d’une immoralite´ re´voltante b. C’est en quelque sorte la Jeanne d’Arc des Grecs, et c’est une nouvelle conformite´ d’Euripide avec Voltaire. Les de´fauts d’Euripide n’inspirent donc point cet inte´reˆt de curiosite´ qui nous soutient dans la lecture des auteurs anciens, dont les imperfections meˆmes sont instructives, parce qu’elles portent l’empreinte de leur sie`cle et de leur pays. Les de´fauts d’Euripide sont choquants, comme ceux d’un auteur moderne. Cependant c’est peut-eˆtre pour cette raison meˆme, que nous jugeons Euripide plus favorablement qu’il ne paraıˆt l’avoir e´te´ de son temps. Comme il arrive souvent dans le monde, c’est un vice de plus qui lui vaut notre indulgence. De tous les tragiques grecs, c’est le moins national, et, par conse´quent, le plus analogue a` nos ide´es. Avec du talent, de l’esprit, de la mobilite´, de l’instruction, de la verve, on peut e´galer Euripide. Mais on mettrait ensemble tous les e´crivains qui ont existe´ depuis la renaissance des lettres et probablement tous ceux qui existeront, on ne produirait pas un Sophocle. Nous ne voulons point dire, comme quelques e´crivains du jour le pre´tendent, que l’espe`ce humaine se de´te´riore : mais les circonstances des modernes ne cre´ent point en eux ce sentiment exquis de la beaute´ ide´ale, dont le climat, les institutions, la religion de la Gre`ce remplissaient tous ses habitants. Nos langues sont plus a

b

Sophocle ne tombe dans ce de´faut qu’une seule fois, c’est lorsque, dans l’Œdipe roi, le chœur demande dans un hymne, d’ailleurs tre`s-beau, quel dieu a donne´ le jour a` Œdipe, puisqu’il n’est pas le fils de Polybe, tandis que de`s-lors tout de´montre qu’il est celui de Laı¨us. V. surtout vers 315–3451.

2 de´clamer. ] de´clamer. suit ici un paragraphe qu’on lira ci-dessous, lignes 9–13 Co 3294/3 6 re´voltante. ] re´voltante. 〈aussi deux mots illis. de la pratique de nos jours.〉 Co 3294/3 20 e´galer ] 〈un mot illis.〉 e´galer Co 3294/4 21–23 probablement ... comme ] probablement mot ajoute´ dans l’interl. tous ... existeront 〈qu’〉on ... pas 〈un〉 Sophocle. 〈Je ne veux〉 Nous ne voulons point syntagme ajoute´ dans la col. de gauche point mot ne pas biffe´ dire 〈par la`〉, comme Co 3294/4 27–30 Sophocle ... Laı¨us. ] la note faisait partie du texte principal Sophocle ne tombe dans ce de´faut les trois derniers mots dans l’interl. qu’une seule fois 〈dans le de´faut que nous reprochons a` Euripide〉 c’est ... Laı¨us. Co 3294/3 1

BC renvoie au discours pantagrue´lique du Cyclope dans le drame satirique d’Euripide (e´d. Me´ridier, t. I, pp. 27–28).

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imparfaites, notre ordre social plus positif, nos calculs plus resserre´s, notre existence a` la fois plus monotone dans sa marche et plus agite´e dans son e´goı¨sme : toute notre nature, en un mot, est moins poe´tique. Assure´ment, ce n’est pas un mal ; les Grecs devaient en partie leur poe´sie a` leur loisir, leur loisir a` l’esclavage, qui refoulait sur une race proscrite et de´grade´e les travaux me´caniques. Nous aimons mieux avoir moins de poe`tes, et n’avoir plus d’esclaves. Le lecteur nous pardonnera cette digression sur Euripide, s’il re´fle´chit qu’elle e´tait indispensable, pour expliquer la confusion qui re`gne dans ses ouvrages, relativement aux opinions religieuses ; il parcourt tout le cercle de ces opinions, les meˆle, les amalgame, sans e´gard pour la ve´rite´ du costume, ou pour l’unite´ des caracte`res. Si nous ne posse´dions, pour concevoir l’antiquite´, que les trage´dies d’Euripide, il serait impossible de nous faire jour dans un pareil chaos. Ce poe`te est inexact, dans les petites comme dans les grandes choses. Il preˆte a` tous les peuples et a` tous les sie`cles les usages de ses contemporains et de ses compatriotes. Pour en prendre un exemple au hasard, il fait dire a` Me´de´e, qu’une femme qui veut avoir un e´poux, doit lui apporter en dot des tre´sors conside´rables a. C’e´tait la coutume athe´nienne du temps d’Euripide ; mais dans les aˆges he´roı¨ques, et par conse´quent du temps de Me´de´e, les maris n’obtenaient leurs e´pouses que par de magnifiques pre´sents. Dans sa trage´die de Rhe´sus, la catastrophe se rattache a` la pre´somption d’Hector b. Or, Hector, dans l’Iliade, n’est rien moins que pre´somptueux. a b

Me´de´e, 215–2241. Plusieurs critiques pre´tendent que Rhe´sus n’est pas d’Euripide. Mais cette trage´die, si elle n’est pas de lui, est certainement de son e´cole. Elle a les meˆmes de´fauts que les siennes, quelques-unes de ses beaute´s, et elle est compose´e d’apre`s les meˆmes principes2.

1 imparfaites ... positif ] parfaites que la leur, ... social plus 〈un mot illis.〉 positif corr. dans l’interl. Co 3294/4 3–7 Assure´ment ... d’esclaves. ] ajoute´ dans la col. de gauche Co 3294/4 10 religieuses ; ] religieuses qu’il 〈attribue a` ses illis.〉 devait (?) tous les mots, excepte´ «religieuses» devraient eˆtre biffe´s Co 3294/4 13–14 de ... un ] de 〈de´brouiller〉 nous faire jour dans ces quatre mots dans la col. de gauche un Co 3294/4 25–27 Plusieurs ... principes. ] passage du texte principal dans Co 3294/4 1 2

Il faut lire «230–237». «Il nous faut prodiguer l’argent pour acheter un e´poux et donner un maıˆtre a` notre corps, cruel surcroıˆt d’infortune» (e´d. Me´ridier, t. I, pp. 131–132). On doute, de`s l’Antiquite´, qu’Euripide soit l’auteur du Rhe´sus. Nous savons aussi qu’Euripide avait compose´ une œuvre qui portait ce titre. Il se peut que la tradition manuscrite ait remplace´ le texte perdu par le texte d’un auteur inconnu du IVe sie`cle, imitateur d’Euripide. La majorite´ des critiques modernes soutient l’hypothe`se selon laquelle Rhe´sus est un ouvrage apogryphe. Voir Dietrich Ebener (e´d.), Rhesos, Tragödie eines unbekannten Dichters, Berlin : Akademie-Verlag, 1966, pp. 22–23 ; Joachim Latacz, Einführung in die griechische Tragödie, Göttingen : Vandenhoeck & Ruprecht, 1993, p. 255.

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Sophocle change aussi quelquefois le caracte`re des anciens he´ros ; mais c’est pour l’ame´liorer et pour l’ennoblir. The´se´e, dans Œdipe a` Colone, parle de lui-meˆme avec une re´serve, une modestie bien oppose´e aux fanfaronnades des he´ros d’Home`re. Euripide, trouvant dans Home`re un caracte`re noble et soutenu, n’a pas su rester fide`le a` ce caracte`re. Ce que Sophocle a fait en bien, Euripide l’a fait en mal. Il est donc, comme nous l’avons dit en commenc¸ant ce chapitre, un garant tre`s-peu suˆr de l’e´tat re´el de la religion grecque, au mo ment ou` il composait ses nombreuses trage´dies. En les analysant toutefois avec attention, l’on peut y remarquer, a` travers les inconse´quences et les inexactitudes du poe`te, des preuves incontestables des progre`s de cette religion. «Je croirais les dieux insense´s, dit Clytemnestre, si j’osais les implorer pour un assassin. Quelle prie`re oserait adresser aux immortels le meurtrier de ses enfants a ?» Voila` donc l’efficacite´ des prie`res subordonne´e a` la valeur morale des actions. Lorsque He´le`ne veut se justifier de son adulte`re, en le rejetant sur la destine´e et sur la toute-puissance que Ve´nus exerce sur les dieux meˆmes, He´cube l’accuse de calomnie : «Les dieux, lui re´pond-elle, ne sont point les auteurs de tes e´garements ; ils ne t’en ont point donne´ le pernicieux exemple. La divinite´ qui t’a se´duite, c’est ton cœur perfide et ta passion insense´e b.» C’est presque la re´ponse de Socrate a` Eutyphron, quand ce dernier se justifie d’avoir e´te´ l’accusateur de son pe`re, en disant que Jupiter a chaˆtie´ Saturne. La raison lutte de la sorte a` chaque instant contre les fables antiques. Hercule repousse toutes les traditions de´savantageuses aux dieux c. Euria b c

Iphig. en Aul., 1185–11901. Troy., 971–9822. Herc. fur., 1341–13463.

7 Il ] 〈Euripide〉 Il Co 3294/4 11 de cette religion ] 〈que〉 de cette religion 〈illis.〉 Co 3294/4 14–15 valeur morale ] valeur ajoute´ dans la col. de gauche moral〈ite´〉e Co 3294/4 20–22 C’est presque ... Saturne. ] manque Co 3294/4 23-p. 455.2 La raison ... t’a commande´ ] passage profonde´ment remanie´ ; les ajouts et corr. se lisent dans la col. de gauche ou dans l’interl. 〈on voit a` chaque instant dans Euripide〉 la raison lutte〈r〉 de la sorte a` chaque instant contre les fables ... aux dieux. 〈Je ne crois point, dit Iphige´nie, que Diane se plaise aux sacrifices humains. mais ce peuple barbare attribue aux objets de son culte des penchans fe´roces. Je ne crois aucun mal des habitans de L’olympe. la note pre´vue e´tait Iphig. en Taur. 385–391. retour au texte 〈un mot illis.〉 Euripide 〈cependant〉 les rappelle cependant 〈trois mots illis. contraire, a` deux mots illis. du polythe´isme mais c’est pour e´branler cette croyance〉 mais ce n’est point par respect 〈pour la tradition〉 : lecture hypothe´tique c’est par hostilite´ 〈contre la croyance〉 «Phœbus t’a commande´ Co 3294/4 1 2 3

BC paraphrase un passage d’Iphige´nie a` Aulis (Euripide, t. VII, Iphige´nie a` Aulis, texte e´tabli et traduit par Franc¸ois Jouan, Paris : Belles Lettres, 1990, p. 107). BC cite, en la paraphrasant, la re´ponse d’He´cube a` He´le`ne (e´d. Parmentier, t. IV, pp. 76–68). BC cite un passage du discours d’adieu d’He´racle`s (e´d. Parmentier, t. III, p. 72).

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pide les rappelle cependant ; mais ce n’est point par respect, c’est par hostilite´ : «Phe´bus t’a commande´ le meurtre, dit Me´ne´las a` Oreste, tu comptais sur son assistance. Il tarde maintenant, suivant la coutume de ceux qu’on nomme les immortels a.» Apollon, que Pyrrhus a offense´, le fait pe´rir a` Delphes ; et le messager qui raconte cet e´ve´nement observe que le dieu s’est souvenu d’une ancienne querelle, et s’en est venge´ comme un me´chant homme. «Pouvons-nous, ajoute-t-il, le regarder, apre`s cette action, comme juste ou sage b ?» «O dieux ! s’e´crie He´cube, j’invoque, il est vrai, de perfides auxiliaires ; mais c’est une ombre d’espe´rance que de prier les immortels, quand le malheur nous atteint c.» Polynice demande a` Junon, E´te´ocle a` Minerve l’affreux succe`s de tuer un fre`re d. Le cœur de Jupiter est plein d’envie contre Rhe´sus e, et dans Oreste cette meˆme envie s’acharne impitoyablement sur tous les heureux f. Mais ces re´miniscences ne sont point un pas re´trograde vers la croyance, c’est un pas en avant vers l’irre´ligion. Les ouvrages d’Euripide sont les premiers ou` l’incre´dulite´ ait reveˆtu des formes publiques et populaires. Et

a b c d e f

Oreste, 419–4201. Androm. 1161–11652. Troy. 469–4713. Phe´nic. 1374–13854. Rhe´sus 456–4585. Orest. 340. 3446.

6 comme un ] comme 〈Le illis. fait un〉 Co 3294/4 8–15 «O dieux ! ... l’irre´ligion. ] manque Co 3294/4 16-p. 456.1 Et ... fables ] De meˆme ... lutte des 〈traditions〉 fables corr. dans l’interl. Co 3294/4

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Renvoi a` quelques vers d’Oreste. BC attribue les ide´es a` Me´ne´las, mais il s’agit d’un e´change de questions et de re´ponses entre celui-ci et Oreste (e´d. Chapouthier, t. VI, 1, p. 49). BC re´sume en peu de mots la trage´die Andromaque et finit sa re´flexion en citant une phrase du rapport d’un messager qui raconte a` Pe´le´e la mort de Ne´optole`me (ou Pyrrhus), le fils d’Achille (e´d. Me´ridier, t. II, p. 155). «O dieux ! j’appelle la` de mauvais allie´s, mais toutefois il est se´ant d’invoquer les dieux quand nous sommes aux prises avec l’infortune» (e´d. Parmentier, t. IV, p. 48). Il faut lire «1365–1376». BC renvoie aux deux prie`res de Polynice (Euripide, t. V, He´le`ne, Les Phe´niciennes, texte e´tabli et traduit par Henri Gre´goire et Louis Me´ridier, avec la collaboration de Fernand Chapouthier, Paris : Belles Lettres, 1985, pp. 209–210). BC comprend mal les paroles du chœur qui commente le discours adresse´ par Rhe´sus a` Hector. Zeus est prie´ d’e´loigner l’envie de Rhe´sus. BC semble renvoyer aux strophes du chœur : «oˆ vous, les coureuses aile´es, vous les de´esses du de´lire, [...] Eume´nides» (e´d. Chapouthier, t. VI, p. 45).

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de meˆme qu’Eschyle nous montre la lutte des fables et de la morale dans le polythe´isme primitif, Euripide nous pre´sente la lutte du polythe´isme devenu moral et de l’incre´dulite´. Dans les Phe´niciennes, il preˆte des paroles impies au caracte`re le plus vertueux de la pie`ce, celui d’Antigone a. Sophocle n’aurait jamais commis cette faute. Les trois E´lectres des tragiques marquent assez bien les trois e´poques. On voit dans celle d’Eschyle b, la fatalite´ dominant la religion ; dans celle de Sophocle, la morale allie´e a` elle ; dans celle d’Euripide, cette morale servant d’argument contraire. Re´sumons-nous en peu de mots : Euripide confond, comme He´siode, des doctrines de dates diffe´rentes, mais pour une raison oppose´e. He´siode s’e´tait trouve´ entre deux e´poques de la croyance de son pays. Euripide e´crivait, lorsque cette croyance marchait vers sa chute. En conse´quence, le premier puisait indistinctement, dans les opinions qui n’e´taient pas encore de´truites, dans celles qui n’e´taient pas encore e´tablies ; le second se servait avec indiffe´rence de toutes ces opinions, parce que toutes se de´cre´ditaient e´galement.

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Phen. 1717–17181. Nomme´e autrement les Coe´phores.

2 primitif ] manque Co 3294/4 4–5 n’aurait jamais ... faute. ] 〈ne l’〉 n’aurait 〈pas fait illis.〉 jamais ce mot re´crit sur le mot illis. biffe´ commis cette faute. syntagme ajoute´ a` la fin de la ligne Co 3294/4 7–9 fatalite´ ... contraire. ] passage profonde´ment remanie´ fatalite´ 〈deux mots illis. sans morale〉 dominant 〈le polythe´isme〉 la religion. dans celle de Sophocle, 〈le polythe´isme un mot illis.〉 la 〈justice〉 morale allie´e 〈a` la religion〉 a` elle : dans celle d’Euripide 〈le deux mots illis.〉 cette 〈illis.〉 morale 〈du polythe´isme〉 servant D’argument 〈contre la religion meˆme〉 contraire. Co 3294/4 10–15 Re´sumons ... dans celles ] passage remanie´ Pour nous ce dernier mot ajoute´ dans l’interl. re´sumer, en peu de mots, 〈ce qu’il faut prendre (?) du Tableau qu’Euripide nous offre des opinions religieuses, nous dirons que cet e´crivain〉 Euripide confond, ... dates 〈tre`s〉 diffe´rentes, ... raison 〈toute〉 oppose´e. ... de la 〈Religion〉 croyance de ... lorsque cette 〈religion commenc¨ait a` s’e´branler〉 croyance 〈approchoit de sa de´cadence〉 marchoit vers sa chute. ... indistinctement 〈tantoˆt〉 dans ... de´truites, 〈tantoˆt〉 dans celles Co 3294/4 18 1718. ] 1718 suit une note de travail (ve´rifier cette citation : peut-eˆtre 1724–1725. et voir si Euripide ne se sert pas du mot de Justice et non de dieux Co 3294/4 19 Nomme´e ... Coe´phores. ] ajoute´ dans la col. de gauche Co 3294/4

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Il faut corriger les renvois. C’est probablement aux vers 1749–1757 que BC pense (e´d. Gre´goire, t. V, p. 225).

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Chapitre IX. Quelques mots sur Aristophane.

Aristophane, le seul comique grec qui nous reste, n’est pas moins ne´cessaire a` e´tudier que les tragiques. Prises a` la lettre, ou mal comprises, ses pie`ces fourniraient contre les perfectionnements de la religion des objections puissantes. Il repre´sente les dieux de la Gre`ce, comme vicieux, abjects, ridicules ; et ces peintures outrageantes, tole´re´es par les magistrats, sont couvertes des applaudissements populaires. Plusieurs causes expliquent cette singularite´ : Premie`rement, la trage´die grecque avait pris son origine dans la partie se´rieuse de la religion ; la come´die dut sa naissance a` la partie grotesque du culte, partie transmise aux Grecs, comme nous l’avons dit, par l’importation des orgies sacerdotales. Car nous avons de´ja remarque´ que la bouffonnerie et la licence e´taient un trait caracte´ristique des religions soumises aux preˆtres ; elles privent leurs esclaves de toutes les jouissances e´leve´es, et les abrutissent pour les de´dommager. Il y a eu quelque chose de pareil, dans les pie`ces appele´es myste`res par les chre´tiens du moyen aˆge. Rien de plus audacieux, de plus satirique, contre les objets les plus re´ve´re´s : la de´votion pourtant re´gnait sans rivale, et ne voyait point dans ces drames burlesques une profanation des choses sacre´es. Peut-eˆtre meˆme une ide´e plus profonde avait-elle pre´side´ dans le sanctuaire a` ces imitations qui nous sembleraient sacrile´ges. Le mauvais principe, la matie`re impure, luttant contre le ciel, devenaient dans ces parodies des eˆtres bouffons, difformes de figure, haineux dans leur ironie, gais d’une gaiete´ perfide ou obsce`ne. Il faut se l’avouer, il y a dans la gaiete´, quand elle n’est pas le simple de´veloppement des joies enfantines, il y a dans l’ironie surtout, quelque chose qui approche du vice : tout ce qui est bon, est grave. La vertu, l’affection, le courage, le bonheur qui naıˆt de la paix de l’ame, sont choses se´rieuses. La gaiete´, dans les religions sacerdotales, a souvent repre´sente´ le E´tablissement du texte : Manuscrit : BCU, Co 3293, un fo nume´rote´ 2 [=N2] Imprime´ : De la Religion, conside´re´e dans sa source, ses formes et ses de´veloppements, t. IV, Paris : Chez Pichon et Didier, e´diteurs, 1831, pp. 460–472. 30-p. 458.15 le courage ... Alcme`ne. ] unique passage de ce chap. dont on posse`de un fragment ms. N2 30 qui ... l’ame, ] manque N2 31 souvent repre´sente´ ] 〈illis.〉 souvent repre´sente´, a du repre´senter souvent N2

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mauvais principe. Ne le repre´sente-t-elle pas aujourd’hui plus que jamais, dans nos socie´te´s civilise´es ? Nous n’appliquons point ces observations d’une manie`re directe au poe`te qui nous occupe. Il ignorait probablement lui-meˆme quel he´ritage il mettait en œuvre ; mais nous pensons que ces re´miniscences d’emprunts exotiques, bien que repousse´es du culte populaire, avaient pu pre´parer les Athe´niens a` quelque indulgence pour les acce`s d’une gaiete´ folle, qui avait l’autorite´ d’une tradition. Ajoutez a` cette conservation d’usages antiques le caracte`re du peuple d’Athe`nes, pour qui la raillerie e´tait un besoin, et qui croyait que ses dieux entendaient comme lui la plaisanterie. Les sculpteurs, les peintres, non moins que les poe`tes, ajoutaient aux re´cits mythologiques des traits qui les de´pouillaient de leur gravite´. Nous voyons sur un vase antique, Jupiter et Mercure avec des masques en caricatures, grimpant a` l’aide d’une e´chelle dans l’appartement d’Alcme`ne. En second lieu, les pie`ces d’Aristophane e´taient, pour la plupart, des parodies de quel que œuvre tragique, et principalement des ouvrages d’Euripide. Les Grenouilles, par exemple, l’une de ses come´dies ou` Bacchus est traite´ avec le plus d’irre´ve´rence, sont l’imitation burlesque de Se´me´le´ a, ou` ce dieu descendait aux enfers, pour chercher sa me`re. Dans la Paix, des railleries sanglantes sont dirige´es contre les habitants de l’Olympe, mais la Paix est une parodie de Belle´rophon b. Les Nue´es invoquant l’E´ther, en sont une d’He´le`ne c. a

b

c

Trage´die d’Eschyle (v. Fabric. Bibliothe`que grecque), ou d’Euripide, suivant le P. Brumoy, t. VI, p. 701. V. les fragments d’Euripide, dans l’e´dition de Leipzick, t. II, p. 4812. Belle´rophon est a` cheval sur Pe´gase, Trige´e sur un scarabe´e, Jupiter s’empare du scarabe´e, ainsi que de Pe´gase ; ni Trige´e ni Belle´rophon n’arrivent jusqu’aux dieux, parce que ceux-ci se sont retire´s au haut de l’Olympe. BERGLER, dans son commentaire sur Aristophane, indique les passages des tragiques qu’il a

1–2 Ne repre´sente-t-elle ... civilise´es ? ] phrase ajoute´e apre`s coup Elle le repre´sente aujourd’hui ... civilise´es. N2 3–4 d’une ... occupe. ] a` Aristophane d’une manie`re directe N2 7–8 avait ... tradition. ] leur sembloit une tradition. N2 12 ajoutaient ... des traits ] 〈pre´sentoient les〉 ajoutoient aux re´cits mythologiques 〈sous〉 des traits N2 14 grimpant ] grimper N2 15 Alcme`ne. ] BC pensait accrocher a` ce nom une note Schlegel. N2 1

Le premier renvoi signale que la trage´die Seme´le´ figure dans la liste des œuvres perdues. Voir Ioannis Alberti Fabricii, Bibliotheca Græca, sive notitia scriptorum veterum Græcorum, [...] editio quarta [...] curante Gottlieb Christophero Harles, volumen secundum, Hamburgi : apud Carolum Ernestum Bohn, MDCCLXXXI, p. 182. Fabricius exploite le lexique du grammairien Hesychios d’Alexandrie. – Quant au Pe`re Brumoy, l’affirmation a` laquelle renvoie BC n’apparaıˆt pas dans son ouvrage. Dans l’e´dition de 1763, Se´me´le´ n’est mentionne´e qu’une seule fois (t. II, p. 223, note). Brumoy re´sume la fable de Se´me´le´, amante de Jupiter et me`re de Bacchus. Le re´sume´ des Grenouilles (t. VI, pp. 178–219) ne parle pas non

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Quelquefois c’est Pindare qu’Aristophane travestit en meˆme temps qu’Euripide a. Il en re´sultait que les spectateurs, dans la me´moire desquels les vers du lyrique et surtout du tragique e´taient grave´s b, trouvaient qu’Aristophane se moquait de ces poe`tes, plutoˆt que des dieux c.

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parodie´s. L’habitude de ces parodies dura long-temps apre`s Aristophane, et la re´forme de la come´die ancienne, comme nous l’apprend un fragment de Timocle`s, dans Stobe´e1. La voracite´ d’Hercule est emprunte´e de ces deux poe`tes, v. Pindare, Olymp. I, 82, et le passage d’Alceste, v. 747–760, ou` l’intendant d’Adme`te suppute combien Hercule a bu de vin et mange´ de viande2. On voit dans Plutarque, vie de Nicias, que les grecs prisonniers en Sicile savaient par cœur les trage´dies d’Euripide3. Lorsque Aristophane, dans les Nue´es, pre´sente Socrate comme abandonnant les dieux de l’e´tat et n’adorant que le chaos, l’air et les nues qui invoquent l’E´ther leur pe`re (v. 568), les Athe´niens reconnaissaient tout de suite l’allusion a` Euripide, donnant a` l’E´ther une e´pithe`te qu’Aristophane renforce, pour la rendre plus ridicule (He´le`ne, v. 872). Quand il montre Bacchus (Grenouilles, v. 1469–1471) prote´geant le parjure, c’e´tait une autre allusion au vers fameux pour lequel Euripide avait e´te´ poursuivi4.

13 Nue´es ] la source porte nue´es faute d’imprimerie que nous corrigeons Rel4

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plus d’une œuvre de ce titre par Euripide. Voir Le the´aˆtre des Grecs, par le R. P. Brumoy, nouvelle e´dition, revue, corrige´e et augmente´e, Paris : Libraires associe´s, MDCCLXIII, 6 vol. BC renvoie a` Euripidis Tragoediæ et Epistolæ ex editione Iosuæ Barnesii nunc recusa accedunt fragmenta ex recensione Samuelis Musgrave, M. D., t. II, Lipsiæ : Sumtu E. B. Suikerti, MDCCLXXIX, pp. 431–434. L’observation sur Aristophane se trouve en teˆte des fragments. BC renvoie probablement a` Aristophanis comoediæ undecim, Græce et Latine, Ad fidem optimorum Codicum MSS, emendatæ cum nova octo Comœdiarum interpretatione Latina, & notis ad singulas ineditis ästephani Bergleri nec non Caroli Andreæ Dukeri ad quatuor priores. [...] Curante Petro Burmanno secundo, Lugduni Batavorum : Apud Samuelem et Joannem Luchtmans, MDCCLX. Les notes se lisent au bas des pages. – Le renvoi a` Stobe´e n’est pas e´lucide´. Le renvoi a` Pindare, Olympiques, I, est faux. Cette ode ne parle point d’Hercule, mais de Pe´lops, fils de Tantale. Pindare exploite la le´gende selon laquelle Tantale tue son fils et en pre´pare un festin pour les dieux, ses hoˆtes ; il parle de la re´surrection de Pe´lops graˆce a` Klotho et du mariage de Pe´lops avec Hippodameia. Dans ce contexte, Pindare dit qu’il est impossible d’accuser les dieux de voracite´. – Le second renvoi cite les paroles du serviteur qui de´crit la voracite´ d’He´racle`s pendant le repas par lequel Adme`te ce´le`bre la disparition de son e´pouse Alceste. La sce`ne se comprend mieux si l’on tient compte du fait qu’Alceste occupe apre`s une trilogie (Les Cre´toises, Alcme´on a` Psophis et Te´le`phe) la place du drame satirique (e´d. Me´ridier, t. I, p. 49 et, pour les vers cite´s, pp. 85–86). Voir Plutarque, Vies paralle`les, Nikias, chap. 5, 9 et 17. BC renvoie d’abord a` un vers des Nue´es prononce´ par le chœur : «notre pe`re au grand renom, l’E´ther tre`s auguste, qui entretient la vie universelle (καιÁ μεγαλω νυμον ηë με τερονα πατε ρ· ΑιÆ θε ρα σεμνο τατον, βιοθρε μμονα πα ντων·), allusion e´vidente a` un vers d’He´le`ne (voir Aristophane, t. I, Les Acharniens, Les Cavaliers, Les Nue´es, texte e´tabli par Victor Coulon et traduit par Hilaire van Daele, Paris : Belles Lettres, 1964, p. 187. Pour Euripide, voir l’e´d. Gre´goire, t. V, p. 86) : «et fais monter au fond de l’e´ther – rite auguste -

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Enfin la ve´rite´ que nous avons e´tablie dans notre ouvrage, la progression des ide´es religieuses, devait puissamment contribuer a` ce que les sarcasmes de l’auteur comique fussent pardonne´s et applaudis. Dans quelles traditions en effet puisait-il les fables qui semblaient livrer a` la de´rision les principaux objets du culte ? N’e´tait-ce pas dans l’ancienne mythologie, qui racontait les imperfections et les vices des dieux ? Pourquoi ces vices et ces imperfections, qui n’avaient point choque´ les Grecs du temps d’Home`re, les blessaient-ils sous Pe´ricle`s ? C’est qu’une disproportion immense avait se´pare´ ces notions des ide´es qui les avaient remplace´es. Loin que les succe`s d’Aristophane nous portent a` nier les progre`s de la religion grecque, ces succe`s nous prouvent les ame´liorations incontestables qui s’e´taient ope´re´es dans cette religion. Les Grecs ne pouvaient plus longtemps tole´rer des dieux sans morale, mercenaires, protecteurs inte´resse´s du crime, et achete´s par des sacrifices, en faveur de la fraude et de l’iniquite´ : leur sentiment religieux s’e´tait e´leve´ au-dessus des premie`res notions du polythe´isme, et, quand on l’y ramenait, il e´tait, suivant la forme sous laquelle on lui pre´sentait ces notions suranne´es, ou domine´ par le besoin de les e´purer, et alors Sophocle e´tait son interpre`te, ou frappe´ de leur absurdite´, et alors il applaudissait Aristophane. Ces explications nous paraissent plus naturelles et plus satisfaisantes que celles qu’on cherche dans la jouissance pre´tendue qu’e´prouvaient, dit-on, les Athe´niens a` voir rabaisser ce qui e´tait au-dessus d’eux. Cette disposition aurait garanti Aristophane de la vengeance des hommes puissants ; mais le peuple ne pouvait se plaire a` l’avilissement de ses dieux. Un peuple de´mocrate aime a` voir bafouer ceux qui le dominent, mais aucun peuple ne se complaıˆt a` ce qu’on de´grade les eˆtres qu’il adore, a` moins qu’il ne cesse de les adorer : or, les Athe´niens n’en e´taient pas a` ce point. Sans doute les succe`s d’Aristophane impliquaient un germe de de´cadence dans la religion : le comique de ses pie`ces e´tait fonde´ sur la disproportion qui existait entre l’immobilite´ du dogme et le perfectionnement de l’ide´e. Une disproportion pareille, lorsque la forme reste la meˆme, est un principe de mort pour une croyance ; car chaque perfectionnement en pre´pare un nouveau, et, par conse´quent, rapproche le moment ou` la forme doit eˆtre brise´e. Mais il n’en faut pas conclure qu’elle le soit encore : elle ne l’e´tait pas du temps d’Aristo phane. Le peuple, apre`s avoir ri, n’en courait pas moins dans les temples, n’en respectait pas moins les myste`res. Le germe de destruction, qu’un œil attentif de´meˆle, n’e´tait point de´veloppe´. Demandera-t-on comment les causes qui ont obtenu grace pour les attaques d’Aristophane contre l’ancienne mythologie n’ont pas pre´serve´ de la le souffre purificateur des vents du ciel». – Le second renvoi vise un passage fameux de la fin des Grenouilles, Dionysos, juge dans l’enfer pour attribuer la place d’honneur au meilleur des tragiques, l’attribue a` E´schile et fait ainsi le contraire de ce qu’il avait annonce´. Le dialogue reprend des vers des trage´dies d’Euripide cite´es par Dionysos (e´d. Coulon, t. IV, p. 154).

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perse´cution, de l’exil, de la mort, des philosophes qui attaquaient la meˆme croyance par le raisonnement ? Il nous semble facile d’expliquer ce phe´nome`ne. Amant passionne´ de la licence et des nouveaute´s, enthousiaste des arts qui faisaient ses de´lices et qui ont fait sa gloire, le peuple d’Athe`nes avait soustrait les poe`tes a` l’Are´opage et aux juges ordinaires a. Un tribunal particulier exerc¸ait sur eux sa juridiction. Les lois positives contre l’impie´te´ e´taient faciles a` e´luder, comme elles le seront toujours pour tout ce qui tient a` la pense´e et a` l’expression dont elle est reveˆtue. L’arbitraire seul peut atteindre les de´lits de ce genre ; et certes, si c’est un avantage, il est amplement contrebalance´ ; car l’arbitraire, en atteignant tout, e´touffe tout, le bien comme le mal, l’usage comme l’abus. Le tribunal, juge des poe`tes, les traitait avec indulgence. Euripide, coupable dans son Hippolyte d’une ce´le`bre apologie du parjure, fut poursuivi, mais fut absous b. Le peuple d’Athe`nes, jaloux de sa liberte´, craignait toujours qu’une autorite´, qu’il ne supportait qu’avec impatience, n’empie´taˆt sur ses droits ; et, lorsqu’il n’e´tait pas entraıˆne´ par une passion politique, il prenait, d’instinct et d’inclination, le parti des accuse´s auxquels il devait ses amusements, et dont une approbation bruyante l’avait en quelque sorte rendu le complice. a

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Les Athe´niens avaient e´tabli une action contre les impies (γραϕηÁ ν αÁ σε ζειας, POLLUX. VIII, 40) et contre les athe´es (α θεον). Cette action se portait devant le second archonte, charge´ de tout ce qui regardait le culte, et appele´ l’archonte roi, parce qu’autrefois l’administration du culte e´tait une pre´rogative royale. (POLLUX. ib. 90.) L’archonte soumettait l’accusation au tribunal des He´liastes. Mais les lois contre l’impie´te´ n’atteignaient que ceux qui niaient les dieux ou divulguaient les myste`res. Les ouvrages dramatiques ne leur e´taient point soumis, et les auteurs introduisaient sans danger des impie´te´s, pourvu qu’elles fussent dans la bouche de leurs personnages, et non dans la partie du poe`me conside´re´ comme appartenant au poe`te, par exemple dans les chœurs1. WALKENAER et BECK., sur Euripide, III, 272 ; BARTHE´ LEMY, Anacharsis, VI, ch. 712. BC cite de Pollux Onomasticum, livre VIII, chap. VI («De nominibus, & speciebus judiciorum»), un passage qui se trouve dans la section 40 (e´d. d’Amsterdam, t. II, p. 877). Les mots grecs n’apparaissent pas sous la forme choisie par BC dans l’article cite´. Il n’y est pas non plus question de punir les athe´es. – Le second renvoi vise un passage du chap. IX du meˆme livre ou` il est question des fonctionnaires de la juridiction. Celui qui est responsable de juger les de´lits contre la religion s’appelle «Rex» (ΒασιλευÁ σ). Il est question des He´liastes dans le chap. X de ce livre (e´d. d’Amsterdam, pp. 943 et 946). Le renvoi a` l’e´dition d’Hippolyte par Valckenaer pourrait de´signer celle publie´e en 1823 (Euripidis tragoedia Hippolytus quam latino carmine conversam a Georgio Ratallero adnotationibus instruxit Ludov. Casp. Valckenaer, Lipsiæ : Sumptibus Hartmanni), qui donne une note sur le vers cite´ (p. 248), qui offre plusieurs e´chos de la tradition litte´raire de l’Antiquite´. – Le renvoi a` Beck vise Euripidis Tragœdiæ Fragmenta Epistolæ ex editione Barnescii nunc Recusa, Lipsiæ : sumtu Engelh. Ben. Svikerti, MDCCLXXXVIII, t. III, p. 272, la glose du vers 612 de l’Hippolyte d’Euripide : «Est Eurip. propterea saepe ab Aristoph. exagitatus – – et in foro accusatus, tanquam periurii suasor ; dictum vero hoc inter inproba relatum a Cephisodoro». – BC cite Barthe´lemy, Voyage du jeune Anacharsis en Gre`ce, dans le milieu du quatrie`me sie`cle avant l’e`re vulgaire, Paris : De Bure l’aıˆne´, 1788, t. IV, pp. 29– 87. On consultera surtout les pp. 48 et 60 sur le parjure de Phe`dre.

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Aristophane d’ailleurs se me´nageait, contre les se´ve´rite´s le´gales, d’adroits subterfuges. Les traditions meˆme, dont il se jouait, lui servaient de sauvegarde ; elles e´taient litte´ralement dans l’ancienne mythologie home´rique. Si, dans la bouche de ses interlocuteurs, elles excitaient la gaiete´ du peuple, on ne pouvait accuser le poe`te de les avoir nie´es ou de´figure´es. Il avait grand soin de placer a` coˆte´ de ses ame`res plaisanteries, des e´loges de la justice et des hommages a` la dignite´ des dieux. Voyez dans Plutus, comme il s’e´le`ve contre l’ide´e que les hommes puissent les engager par des offrandes a` favoriser le crime a ; et comme, dans les Nue´es b, il parle affirmativement des punitions ce´lestes contre les me´chants et les impies. Il n’en e´tait pas ainsi des philosophes. En se de´clarant contre l’ancien polythe´isme, ils n’avaient ni l’appui de la foule dont ils ne captivaient pas les suffrages, renferme´s qu’ils e´taient dans le sanctuaire de leurs e´coles ou dans les bosquets de l’Acade´mie, ni la ressource d’un hommage aux fables qu’ils avaient attaque´es ; ils les niaient ou les interpre´taient, ce qui n’apaisait point les de´vots. Apre`s les repre´sentations d’une come´die d’Aristophane, que restait-il ? Le souvenir d’un spectacle qui avait provoque´ la gaiete´ des assistants, mais auquel on ne pouvait attribuer ni re´sultats positifs, ni conclusions formelles. Les doctrines d’Anaxagore, ou les lec¸ons de Socrate, conduisaient au contraire a` des conse´quences directes, indiffe´rentes a` la multitude, offensantes pour les preˆtres. Ces preˆtres, malgre´ leur autorite´ borne´e, en posse´daient assez pour perse´cuter des philosophes, odieux au peuple comme censeurs de la de´magogie, fatigants pour la classe e´claire´e comme de´nonc¸ant sa corruption, importuns a` tous comme re´formateurs. Aristophane ne voulait rien re´former : tout e´tait en butte a` sa moquerie ; il attaquait la phi losophie aussi bien que la religion, dont il redevenait, sous ce point de vue, l’auxiliaire utile, et qu’il ne semblait avoir blesse´e que par inadvertance. L’esprit sacerdotal traite avec assez d’indulgence les ennemis de ses ennemis ; il pardonne volontiers a` la licence, pourvu qu’elle se tourne avec lui contre la raison. a b

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Plutus, 11221. Nue´es, 14562. BC preˆte un sens moral au re´cit comique qu’Herme`s fait des temps heureux qui n’existent plus. «Auparavant j’avais chez les cabaretie`res toute sorte de bonnes choses, de`s l’aurore : gaˆteau au vin, miel, figues se`ches, tout ce qui est bon a` re´galer Herme`s» (e´d. Coulon, t. V, p. 143). Allusion aux paroles du chœur qui reproche a` Strepsiade de «s’eˆtre adonne´ a` des pratiques mauvaises», pour lesquelles il est justement puni, trompe´ par les conseils du chœur. «C’est ainsi que nous agissons chaque fois que nous reconnaissons en quelqu’un la passion des

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Ne´anmoins cette tole´rance a toujours ses limites et son terme. L’autorite´ souffre impatiemment l’inde´pendance de ses instruments. Antagoniste des philosophes et des orateurs, excitant contre eux les soupc¸ons de la multitude et la haine du pouvoir, Aristophane n’en fut pas moins frappe´ par le pouvoir meˆme, auquel il avait de´nonce´ la philosophie et la liberte´. Ce poe`te qui avait livre´ l’e´loquence a` la rise´e, et le raisonnement a` la perse´cution, fut baˆillonne´ par l’aristocratie, triomphante vers la fin de la guerre du Pe´loponne`se. La meˆme tyrannie qui avait puni les opinions de Socrate, e´touffa la verve d’Aristophane : il put juger alors quels maıˆtres il avait servis a.

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On a re´voque´ en doute l’influence de la come´die des Nue´es sur le proce`s et la mort de Socrate. Il nous semble que M. Cousin (Fragm. phil., p. 151–159) a parfaitement e´clairci cette question1 L’influence ne fut ni soudaine ni directe. La mort du philosophe n’entrait probablement point dans l’intention du poe`te : mais ses attaques pre´pare`rent les esprits, et nous ne pensons point qu’on puisse l’absoudre du re´sultat qu’elles amene`rent. Ce qui est constate´, c’est qu’il demeura spectateur paisible et indiffe´rent de l’e´ve´nement auquel il avait contribue´. Socrate pe´rit long-temps avant lui, sans qu’il essayaˆt de le sauver. La chose n’est pas e´tonnante. Aristophane e´tait a` Athe`nes ce que sont de nos jours les hommes qui voudraient que les sie`cles reculassent. Or, les meilleurs de cette opinion voient avec indulgence ce que font les mauvais. Inaccessibles aux ide´es, ils s’acharnent sur les personnes, croyant toujours que si tel homme n’existait pas, le triomphe de telle ide´e ne serait plus possible. La mort d’un individu leur semble la mort d’un syste`me. C’est pour cela, plus que par une perversite´ naturelle, qu’ils ne secourent et n’e´pargnent aucun ennemi. Pardonnons-leur : la nature fait contre eux ce qu’ils voudraient faire contre nous. Il ne faut qu’attendre. Ils disparaissent sans se recruter.

pratiques mauvaises, jusqu’a` ce que nous le jetions dans le malheur, pour lui apprendre a` craindre les dieux» (e´d. Coulon, t. I, p. 228). BC cite l’e´tude de Victor Cousin, «Socrate. De la part que peut avoir eue dans son proce`s la come´die des Nue´es» (Fragments philosophiques pour servir a` l’histoire de la philosophie, Philosophie ancienne, Paris : Dieder et Cie, Aug. Durand, 51865, pp. 82–87). L’analyse tre`s sobre et fort bien mene´e des sources pour montrer l’influence de plusieurs courants de l’opinion publique, surtout de la «toute-puissance de´mocratique» et du pouvoir sacerdotal, qui se voient confirme´s par Aristophane, «excellent citoyen, gardien et vengeur des lois de la religion, qui du haut de son the´aˆtre comme d’une tribune combattait sans pitie´ tout ce qui paraissait contraire a` l’ordre e´tabli, Aristophane, sentinelle vigilante, devait jeter un cri d’alarme a` l’apparition d’oisifs novateurs occupe´s des cieux plus que de la patrie, et dans les cieux trouvant des astres a` la place des dieux du pays» (p. 84) : cette analyse a convaincu BC. Il l’adopte, mais donne une tournure diffe´rente aux re´flexions de Cousin en les appliquant aux temps modernes.

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Chapitre X. Pourquoi nous ne parlons point ici des philosophes grecs.

Nous ne traitons point, dans ce livre, des progre`s de la morale dans le polythe´isme, tel que le conc¸urent les philosophes grecs. Ces philosophes, loin de travailler a` de´truire la religion populaire, s’efforce`rent long-temps de la concilier avec la morale, et de l’e´purer. Mais comme malgre´ leurs intentions, si pacifiques dans l’origine, leurs efforts n’aboutirent qu’a` la chute de la croyance publique, c’est lorsque nous de´crirons cette re´volution me´morable et les causes qui l’amene`rent, que nous pourrons placer plus convenablement quelques recherches sur la marche de la philosophie et sur ses rapports avec la religion.

E´tablissement du texte : Manuscrit : BCU, Co 3294/4, fo 72 Imprime´ : De la Religion, conside´re´e dans sa source, ses formes et ses de´veloppements, t. IV, Paris : Chez Pichon et Didier, e´diteurs, 1831, p. 473.

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Livre XII, chapitre XI – Rapports de la morale avec la religion

Chapitre XI. Des rapports de la morale avec les deux formes religieuses.

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Les perfectionnements du polythe´isme inde´pendant se font remarquer dans toutes ses parties. La figure des dieux, leur caracte`re, leurs aventures, leurs habitudes dans le ciel, leurs modes d’agir sur la terre, tout porte l’empreinte de l’ame´lioration ; mais c’est surtout dans ce qui tient a` la morale que cette ame´lioration est plus sensible, et que la diffe´rence entre les deux genres de polythe´isme est plus manifeste. La morale s’introduit par degre´s dans le polythe´isme inde´pendant de la direction du sacerdoce. Elle y pe´ne`tre et se perfectionne, a` mesure que la civilisation fait des progre`s et que les lumie`res s’e´tendent. Il en re´sulte que les dieux ne paraissent point les auteurs, mais les garants de la loi morale ; ils la prote´gent, mais ne la modifient pas. Ils ne cre´ent point ses re`gles ; ils les sanctionnent. Ils re´compensent le bien, punissent le mal ; mais leur volonte´ ne de´termine pas ce qui est mal et ce qui est bien ; les actions humaines tirent d’elles-meˆmes leur propre me´rite. Il y a sans doute des circonstances dans lesquelles les individus, et quelquefois les nations entie`res, mettent plus d’importance a` complaire a` la puissance divine qu’aux re`gles strictes de la morale. Ainsi, les Athe´niens veulent repousser Œdipe, aveugle, infirme, fugitif, parce que ce malheureux vieillard est l’objet du courroux ce´leste a. Neptune s’irrite contre les Phe´aciens, parce qu’ils ont rempli les devoirs de l’humanite´ envers Ulysse. Il change en rocher le vaisseau qui avait de´barque´ le he´ros sur les rives d’Ithaa

Œdip. Colon., 233–236, ib. 256–2571. E´tablissement du texte : Manuscrits : 1.) BCU, Co 3281 (Placard 12) 2.) BCU, Co 3459 3.) Co 3294/4, fos 73, 75–80, Co 3294/5, fos 81–89 et Co 3294/6, fos 98–99 Imprime´ : De la Religion, conside´re´e dans sa source, ses formes et ses de´veloppements, t. IV, Paris : Chez Pichon et Didier, e´diteurs, 1831, pp. 474–500.

7–8 que cette ame´lioration ] 〈quelle〉 que cette ame´lioration corr. dans l’interl. Co 3294/4 22 Neptune ] Neptune, 〈dans l’odyyse´e,〉 Co 3294/4 23 Ulysse ] Ulysse 〈et favorise´ son retour dans son pays〉 Co 3294/4 1

BC cite des vers prononce´s par le chœur et le coryphe´e : «Sache-le, fille d’Œdipe, notre compassion est e´gale pour lui, pour toi, quand nous voyons votre destin. Mais nous craignons les dieux et serions incapables de t’en dire plus que nous t’avons dit» (e´d. Dain, t. III, pp. 88 et 89).

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que, pour que ce peuple, dit-il, ne soit plus tente´ de preˆter ses navires aux e´trangers qui lui demanderaient du secours a. Alcinou¨s en tire en effet la conse´quence, qu’il faut s’abstenir de rendre a` ses hoˆtes de pareils services b. C’est par obe´issance pour les dieux qu’Oreste plonge le fer dans le sein de sa me`re ; et Pylade lui dit, en l’exhortant a` ce meurtre, qu’il vaut mieux braver l’indignation des hommes que l’inimitie´ des immortels c. Enfin, beaucoup plus tard, les Lace´de´moniens violent les droits de l’hospitalite´ pour obe´ir a` l’oracle de Delphes, ce qu’ils firent, ajoute He´rodote d, parce que les ordres des dieux leur e´taient plus pre´cieux que toute conside´ration humaine. Toutefois, meˆme alors, la morale ne change pas de nature ; elle est sacrifie´e dans l’occasion particulie`re, mais elle reste inde´pendante en principe ge´ne´ral. L’hospitalite´, malgre´ les inconve´nients qu’elle entraıˆne pour les Phe´aciens, n’est pas conside´re´e comme un crime. Les Athe´niens, lorsqu’ils balancent s’ils ne chasseront pas Œdipe, sentent qu’en faisant une chose qu’ils croient agre´able aux dieux, ils ne feront point une action vertueuse. C’est en vain qu’Oreste, apre`s avoir tue´ Clytemnestre, se justifie aupre`s de Me´ne´las, sur ce qu’il n’a fait que remplir les volonte´s d’Apollon ; ce dieu, lui

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Odyss. XIII, 1461. Odyss., 151. ESCH. Cœph. 9022. HE´ ROD. V, 633.

1 ce peuple ... ses navires ] les Phe´aciens, dit-il ... tente´s 〈de´sormais〉 de preˆter Leurs 〈vaisseaux〉 navires. Co 3294/4 6 des hommes ] des le «s» ajoute´ dans l’espacement 〈tous les〉 hommes Co 3294/4 16 vertueuse. ] vertueuse, honneˆte ou le´gitime. Co 3294/4 17–18 se justifie ... sur ce ] 〈re´pondra〉, se justifie aupre`s de Me´ne´las par ce Co 3294/4 20 Odyss., 151. ] ib. ib. 151 Co 3294/4

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Les deux renvois a` l’Odysse´e (livre XIII, vv. 128–186) concernent le conseil entre Zeus et Pose´idon qui est me´content de voir Ulysse retourner a` Ithaque. Zeus lui permet de changer le vaisseau des Phe´aciens en un rocher au moment du retour du navire dans le port du pays. Alkinou¨s se souvient d’un ancien pre´sage ne´faste annonc¸ant l’e´ve´nement et ordonnant un sacrifice expiatoire. BC cite la re´ponse de Pylade a` Oreste. Celui-ci lui avait dit : «puis-je tuer une me`re ?» La re´ponse de Pylade est nette : «Crois-moi, mieux vaut contre soi avoir tous les hommes plutoˆt que les dieux» (e´d. Mazon, t. II, p. 115). L’e´pisode cite´ par BC concerne l’e´limination des Pisistratides du pouvoir a` Athe`nes par les Lace´domoniens. BC cite cette phrase : «quoiqu’ils fussent unis tre`s particulie`rement avec eux par les liens de l’hospitalite´ : les ordres des Dieux leur e´tant plus pre´cieux que toute conside´ration humaine» (e´d. Larcher, t. IV, p. 42).

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re´pond le roi de Sparte, ne savait-il donc pas ce qui est juste a ? et le fils parricide, bien qu’il soit l’exe´cuteur des arreˆts ce´lestes, n’en est pas moins de´teste´ des hommes et poursuivi des Furies. Pour que la morale cessaˆt d’eˆtre inde´pendante dans le polythe´isme qui n’est pas soumis a` la direction sacerdotale, il faudrait deux choses que cette croyance n’admet pas, des dieux tout puissants, et dans ces dieux des volonte´s unanimes ; mais dans toutes les combinaisons de ce polythe´isme, la puissance des dieux est toujours plus ou moins borne´e. On ne saurait concevoir un grand nombre d’eˆtres tous e´galement reveˆtus d’un pouvoir sans bornes ; leur pluralite´ met un obstacle invin cible a` leur toute-puissance : cette pluralite´ sugge`re d’ailleurs l’ide´e d’inte´reˆts divers, et, pour de´cider entre ces inte´reˆts, l’homme ne peut recourir qu’a` sa raison. Comment reconnaıˆtrait-il pour juges compe´tents, des dieux qui ne sont pas d’accord ? Il n’est donc jamais asservi par ces dieux, entre lesquels il prononce. La protection de l’un le de´fend de la haine de l’autre b ; et si tous les eˆtres surnaturels le trahissent, il conserve le droit d’en appeler de leurs de´cisions a` sa propre conscience. Quand la morale et la religion s’unissent e´troitement dans le polythe´isme laisse´ a` lui-meˆme, c’est la religion qui se soumet a` l’autorite´ de la morale, et se de´clare dans sa de´pendance. «S’il y a des dieux qui prote´gent ce qui est e´quitable, et qui s’inte´ressent aux nobles projets, dit le consul Horatius, nous sommes suˆrs de leur protection ; si au contraire, des divinite´s ennemies s’opposent a` nos succe`s, rien ne sera capable de nous de´tourner d’une entreprise glorieuse et le´gitime c.» C’est le vers ce´le`bre de a

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EURIP. Orest., 415–4181. Il est a` remarquer dans ce dialogue d’Oreste et de Me´ne´las, qu’il n’y est point dit que l’ordre des dieux rende le´gitime l’action qu’ils commandent. On leur obe´it comme a` la force, non comme a` la morale. Sæpe` premente Deo, fert Deus alter opem2. DENYS D’HALICARN., X, 63.

9 tous e´galement ] 〈qui〉 tous 〈le savent〉 e´galement Co 3294/4 11 sugge`re ... l’ide´e ] d’ailleurs, sugge`re 〈toujours〉 l’ide´e Co 3294/4 13 compe´tents ] compe´tens 〈et sans appel〉 Co 3294/4 14 donc ] 〈en conse´quence〉 donc dans l’interl. Co 3294/4 17 propre conscience ] propre ce mot ajoute´ dans la marge conscience 〈et a` sa justice〉 Co 3294/4 religion ] religion 〈qui se soumet a` L’autorite´ de la morale et se de´clare dans sa de´pendance〉 Co 3294/4 21 Horatius ] BC a laisse´ de la place dans le ms. pour pouvoir comple´ter le texte Co 3294/4 1

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BC paraphrase l’e´change de questions et re´ponses entre Me´ne´las et Oreste. «[Phoibos] connaissait mal le bien et la justice», a` quoi Oreste re´pond : «Des dieux, bons ou mauvais, nous sommes les esclaves» (e´d. Chapoutier, t. VI, 1, p. 49). Ovide, Tristia, livre I, II, v. 4. BC renvoie au discours du consul Horatius qu’il adresse aux tribuns qui semblent s’opposer a` la formation d’une arme´e. La citation qu’il donne n’est pas litte´rale, mais rend l’essentiel. Voir la traduction de Franc¸ois Bellanger, e´d. de 1723, t. II, p. 500.

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l’auteur de la Pharsale a ; mais ces paroles sont plus remarquables dans un historien religieux, comme Denys d’Halicarnasse, que dans un poe`te sentencieux et philosophe. Ainsi, les dieux forment une espe`ce de public, non pas infaillible, non pas incorruptible, mais plus impartial et plus respecte´ que le vulgaire des mortels. L’opinion pre´sume´e et la force reconnue de ce public ce´leste ne sont pas sans avantages. L’homme souffre en pre´sence de ces te´moins augustes ; il les de´sarme par sa vertu ; il les frappe de respect par son courage ; et l’ide´e d’offrir a` des eˆtres d’une nature et d’une raison supe´rieure, le magnifique spectacle de l’homme irre´prochable, luttant contre le malheur, a quelque chose qui exalte l’imagination et qui e´le`ve l’ame. Dans le polythe´isme sacerdotal, au contraire, les preˆtres, maıˆtres du peuple, se haˆtent de lui donner un code de lois. Au lieu de se re´pandre dans les diverses fables, et de se fondre, comme en Gre`ce, avec la partie de la croyance, qu’on peut nommer historique, la morale compose un corps de doctrine. Elle se produit sous cette forme, dans le Vendidad des Perses, dans l’Havamaal des Scandinaves, dans le Samave`de des Indiens, et dans les lois de Menou b. Des codes pareils n’existent point dans la religion grecque. a b

Victrix causa Diis placuit, sed victa Catoni1. V. la pre´face du Bhaguat-Gita2. Les Athe´niens avaient un livre prophe´tique et myste´rieux : ils le cachaient avec tant de soin, qu’aucun passage n’en est parvenu jusqu’a` nous. Dinarque est le seul auteur qui en parle, dans sa harangue contre De´mosthe`ne, qu’il accuse d’avoir manque´ de respect envers ce volume, duquel de´pendait, selon lui, le salut de l’e´tat. (REISKE et PAW., Rech. sur les Grecs, II, 2053.) Mais rien n’annonce que ce livre contıˆnt des pre´ceptes de morale ; il prescrivait, probablement, des rites, des ce´re´monies et des prie`res. Le docteur Coray croit que les Athe´niens le regardaient comme renfermant le secret de leurs destine´es, secret confie´ a` The´se´e par Œdipe. (CHARD. DE LA ROCHE ; Me´langes, II, 445– 4514.) Le Scholiaste de The´ocrite (Idylle IV) mentionne aussi les livres que portaient les

4 Ainsi, ] Ainsi, 〈l’on peut dire que〉 Co 3294/4 7 avantages ] avantages 〈pour la illis.〉 Co 3294/4 17–18 et ... Menou. ] ajoute´ dans l’interl. suit un passage qu’on lira ci-dessous, p. 469, ligne 12 a` 472, ligne 1 Co 3459 18 Des codes ... grecque. ] ajoute´ a` la fin du paragraphe, partiellement dans la col. de gauche 19 Victrix causa ] la suite de la citation manque Co 3294/4 20-p. 469.18 Les Athe´niens ... Rome. ] dans le ms. une nouvelle note 1 2

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Lucain, La Pharsale, I, 128. BC renvoie a` la partie de l’extrait du Shaster qui traite du «Nouveau Livre de la Loi» (pp. LXI-LXXI). – BC cite les Institues of Hindu Law comme l’exemple le plus important des lois religieuses de la religion des Hindous. Voir de Pauw, Recherches philosophiques sur les Grecs, II, pp. 205–206. BC paraphrase ce qu’il a lu chez de Pauw, y compris le renvoi a` Reiske, Oratorum Græcorum, quorum princeps est Demosthenes, quæ supersunt, monumenta ingenii e bonis libris a se emendata, materia critica, commentariis integris Hieron. Wolfii, Io. Taylori, Iere. Marklandi, aliorum, et suis, indicibus denique instructa edidit Ioannes Jacobus Reiske, Lipsiæ : Sommerus, 1770–1775. Ni de Pauw ni BC ne citent le titre de l’ouvrage. Le renvoi a` Coray vise une lettre de l’e´minent helle´niste grec Adamantios Korais (1748-

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Or, quand la morale s’allie d’une manie`re pre´mature´e, et comme de force, avec la religion, elle est ine´vitablement plus imparfaite que lorsqu’elle s’y introduit naturellement. Dans ce dernier cas, elle y pe´ne`tre a` une e´poque avance´e de la socie´te´ ; elle y entre e´pure´e, ame´liore´e, enrichie de tous les progre`s qu’ont faits les peuples en se polic¸ant. Les preˆtres, en rendant la religion stationnaire, maintiennent la morale, telle qu’elle e´tait au sein de la barbarie : et de`s-lors, la religion, l’ayant sanctionne´e, s’oppose a` ce que les lumie`res qui se de´veloppent la corrigent ; de la sorte, des religions qui pouvaient faire a` une e´poque de´termine´e un bien relatif, ne font plus que du mal aux e´poques poste´rieures ; leur force conservatrice s’exerce en faveur de ce qu’il faudrait ne pas conserver. Ce n’est pas tout ; les dieux, au nom desquels le code de la morale sacerdotale est promulgue´, ne sont pas seulement des juges, ils sont aussi des le´gislateurs ; ils cre´ent la loi morale, ils peuvent la changer. Ils de´clarent femmes dans les Thesmophories1 ; mais l’observation qu’on vient de lire s’applique e´galement a` ces volumes sacre´s. Les livres des pontifes que Flavius, secre´taire de cette corporation, divulgua et qu’Ovide mit en vers dans ses Fastes, ne contenaient point de pre´ceptes moraux, mais l’indication des jours de feˆte et les le´gendes de l’ancienne Rome. 1-p. 470.4 Or, quand ... sont bonnes ] une re´daction ante´rieure de ce passage se lit dans Co 3294/6, f o 99 〈Il en re´sulta que〉 la morale s’alli〈ait ainsi〉ant d’une manie`re ces deux mots dans la col. de gauche pre´mature´〈ment〉e et comme de force avec la religion 〈est beaucoup〉 est ine´vitablement ces deux mots dans la col. de gauche & quelle est alors ces quatre derniers mots dans la col. de gauche plus imparfaite ... socie´te´. elle y entre ces trois derniers mots dans la col. de gauche e´pure´e ... peuples en se policant ces trois derniers mots dans la col. de gauche 〈car il faut se garantir d’une confusion d’ide´ess. les peuples barbares, plus simples que les peuples civilise´s, n’en ont pas moins une morale plus imparfaite. Transporter cette morale dans une situation qui exclut la simplicite´ des mœurs, c’est combiner tout ce qu’il y a de mauvais, en e´cartant tout ce qu’il y a de bon. l’on a la corruption de la civilisation, avec la rudesse de l’ignorance. or,〉 les preˆtres en ... la 〈conservent〉 maintiennent ... barbarie. & des lors ... conserver. le passage a` partir du mot «&» dans la col. de gauche Ce n’est pas ... sont 1–2 Or, ... ine´vitablement ] La morale s’alliant d’une ... bonnes fin du f o 99 Co 3294/6 6 maintiennent la morale ] la maintiennent religion, est ine´vitablement Co 3294/6, f o 99 Co 3294/4 12-p. 472.1 Ce n’est pas tout ; ... Illyriens ] il s’ensuit que les dieux, aux noms desquels on a promulgue´ ce code, ne sont ... juges, mais sont aussi ... plaisent. 〈il s’introduit dans la morale〉 De la ... figuier ou tuer un serpent, ces quatre derniers mots ajoute´s dans l’interl. sont ... Illyriens passage qui suit, avec les notes, directement la phrase sur la loi de Menou (ci-dessus, p. 468, ligne 15) dans Co 3459

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1833), ou Adamance Coray, qui avait adresse´ a` Simon Chardon de la Rochette une e´tude sur le «Testament secret des Athe´niens», publie´e par celui-ci dans ses Me´langes de critique et de philologie, t. II, pp. 445–460, sous le titre «Lettre du docteur Coray, sur le Testament secret des Athe´niens, dont parle Dinarque dans sa harangue contre De´mosthe`nes». BC ne retient que la premie`re partie de cette e´tude, sans en mentionner la fin qui e´tablit un rapport inte´ressant entre le discours de Dinarque et l’Œdipe a` Colone de Sophocle. BC pense a` la scholie de The´ocrite, Id. IV 25[c] : a` la feˆte annuelle des Thesmophories a` Athe`nes, des dames nobles et vertueuses portent dans la procession solennelle se dirigeant

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ce qui est mal et ce qui est bien. La re`gle du juste et de l’injuste est bouleverse´e a ; une re´ volution incalculable est produite dans la conscience de l’homme. Les actions tirent toute leur valeur du me´rite que les dieux y attachent ; elles ne leur plaisent plus parce qu’elles sont bonnes ; elles sont bonnes parce qu’elles leur plaisent : de-la`, deux espe`ces de crimes et deux espe`ces de devoirs ; ceux qui sont tels par leur nature, et ceux que la religion de´clare tels. Mille choses sans utilite´ re´elle deviennent des vertus ; mille choses sans influence nuisible sont transforme´es en crimes b. Ce qui ne sert de rien aux hommes peut eˆtre exige´ par les dieux, ce qui ne blesse personne peut les offenser. Les de´lits factices sont punis avec plus de rigueur que les ve´ritables. Les premiers sont des pe´che´s, tandis que les seconds ne sont que des fautes.

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Il est si vrai que dans cette croyance la protection des dieux justifie le crime, que les brigands indiens, les Phansigards, dont nous avons de´ja parle´ une fois1, se croient innocents et religieux, lorsqu’ils suivent les re`gles prescrites dans un code intitule´ Chaudra-Vidya, science des voleurs. On trouve dans une come´die indienne (le Mrichhatti) le formulaire un peu travesti des prie`res que les brigands adressent au dieu qui les prote´ge. Plusieurs lois des Juifs, dit un e´rudit tre`s-pieux (CUNÆUS, de Rep. hebr., II, 242), ne sont dicte´es, ni par la raison, ni par la nature, mais par l’inexplorable volonte´ de Dieu. Il se sert meˆme de l’expression incertaˆ numinis voluntate ; et par ce mot, incertaˆ, il indique que la volonte´ de Dieu changeant, les choses de´fendues, et par conse´quent mauvaises, deviendraient permises, et par conse´quent bonnes.

4–13 elles sont ... des fautes. ] passage e´galement atteste´ par Co 3294/6, f o 99, avec la note sur les lois juifs et avec la note sur Spencer (ci-dessous, p. 473, n. b) ; e´tat pre´ce´dant celui de 14–18 Il est ... prote`ge. ] manque Co 3294/4 19–23 Plusieurs ... Co 3294/4, f o 76 bonnes. ] ajoute´ dans la col. de gauche Co 3294/6 21 voluntate ] la source et le ms. portent volontate faute que nous corrigeons Rel4, Co 3294/4 et Co 3294/6

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vers Eleusis les livres saints sur leurs teˆtes. Voir Scholia in Theocritum Vetera, recensuit Carolus Wendel. Editio stereotypa editionis primae (MCMXIV), Stutgardiae : Teubner, MCMLXVII, p. 143. Voir ci-dessus, pp. 135–136, n. a et p. 136, n. 1. BC renvoie a` l’ouvrage de Petrus Cunæus, Petri Cunæi de Republica Hebræorum libri tres ; Variis annotationibus [...] nunc primum publici boni ergo in lucem editi a Johanne Nicolai [...] Lugduni Batavorum : Apud Henricum Teering, MDCCIII. Le chap. XXIV («De lege, quam Judæis Moses scripsit») contient, vers la fin, l’observation dont BC cite quelques mots : «Utique in capite undecimo Levitici, longa extat enumeratio eorum animantium, quarum esu tactuve polluerentur Hebræi. Multa illic in censu impurorum posita sunt, non naturæ aut rationis dictamine, sed incerta numinis voluntate. Itaque causas earum rerum exquerire, anceps est ; nec ideo assequare» (p. 368g).

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Chez les Perses, enterrer un chien, jeter de l’eau sur le feu a ; chez les ´Egyptiens, causer involontairement la mort d’un animal sacre´ b ; aux Indes, franchir, en s’approchant d’un membre d’une autre caste, la distance ordonne´e, ou rompre une branche de figuier c, ou tuer un serpent d, sont des actions non moins se´ve`rement de´fendues que la violence, la tyrannie et le meurtre. Les preˆtres arme´niens pardonnent les attentats les plus noirs, plutoˆt que l’infraction des abstinences prescrites e. Un voyageur raconte que des a b c d e

Hyde, I ; STRABON1. DIOD., I, 22. Pre´face du Bhaguat-Gita, p. 623. Rech. Asiatiques, IV, 35–374. TOURNEFORT, voyage au Levant, II, 1675. Il est frappant, dit Spencer6, que Dieu, chez son peuple, euˆt attache´ la peine de mort a` la moindre violation des rites, tandis que le rapt, le vol ou l’assassinat e´taient punis avec beaucoup moins de se´ve´rite´. «Proclive` est observare

9 2. ] suit encore quiconque Co 3459 11 Rech. ] Recherches Co 3294/5 est frappant ... 25.) ] manque dans Co 3459 1

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Il y a plusieurs chapitres dans Hyde, Historia Religionis veterum Persarum, eorumque Magorum. Le renvoi ne pre´cise pas le passage auquel pense BC. – Strabon, livre XV, chap. III, § 86, de´crit le culte du feu qui, une fois allume´ sur les hauteurs, ne peut eˆtre attise´ qu’au moyen de soufflets. Est puni de mort qui jette un corps mort ou des ordures, ou qui souffle dans le feu. Stabon ne dit pas qu’il est de´fendu d’y jeter de l’eau. Il faut lire Diodore de Sicile, livre I, chap. LXXXIII : «Quiconque tue volontairement l’un de ces animaux [i.e. un animal ve´ne´re´ dans un culte] est puni de mort. Mais s’il s’agit d’un chat ou d’un ibis, que le meurtre soit volontaire ou non, le coupable est de toute fac¸on mis a` mort, car la foule se pre´cipite sur lui et le traite de la fac¸on la plus cruelle» (Bibliothe`que historique, t. I, p. 156 ; e´d. de Strasbourg, p. 245). Quelques lignes plus loin, on trouve l’anecdote du Romain lynche´ par la foule pour avoir involontairement tue´ un chat. BC indique, dans le Bhaguat-Geeta, le de´but du chap. «Loi morale partage´e entre les tribus». Sur le figuier, arbre sacre´, voir pp. LXVII-LXVIII. BC renvoie sans doute au vol. IV des Asiatic Researches. La traduction franc¸aise du pe´riodique de Calcutta ne comprend que deux volumes. Nous n’avons pu identifier l’article vise´ par BC. Les pages indique´es appartiennent a` une e´tude de botanique qui ne traite pas de la religion. Allusion a` un passage qu’on trouve chez Pitton de Tournefort, Relation d’un voyage du Levant fait par ordre du Roy, contenant l’Histoire Ancienne & Moderne de plusieurs Isles de l’Archipel, de Constantinople, des Coˆtes de la Mer Noire, de l’Arme´nie, de la Ge´orgie, des Frontie`res de Perse & de l’Asie Mineure, [...], Lyon : Fre`res Bruyset, 1727, t. III, p. 280. En parlant de la confession, il mentionne que les pe´nitents «re´citent par cœur une liste de crimes e´normes» et ajoute : «S’ils se confessent d’avoir vole´ ou tue´, bien souvent les Confesseurs re´pondent que Dieu est tout plein de mise´ricorde ; mais il n’y a point avec eux de re´mission pour avoir rompu le Jeune, ou pour avoir mange´ du beurre le mercredi ou le vendredi ; car leurs Preˆtres font consister la religion a` faire de grandes abstinences.» BC cite une phrase de Spencer, De legibus Hebræorum ritualibus, et earum rationibus, libri tres, Hagæ-Comitum : apud Arnoldum Leers, MDCLXXXVI, liber primus, cap. I, sectio II, p. 8 ; dans l’e´d. Tubingæ : Sumptibus Johannis Georgii Cottæ, MDCCXXXII, p. 27. Les preuves tire´es des livres de l’Ancien Testament sont cite´es dans les marges ou au bas des pages.

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bri gands Illyriens massacre`rent le chef qui, depuis long-temps, les conduisait au carnage, et dont ils admiraient et imitaient la fe´rocite´, parce qu’il avait bu du lait dans un jour dejeuˆne a. Aucun forfait, disent les Turcs, ne ferme les portes du ciel a` celui qui meurt en jeuˆnant b. Suivant le code des Gentous, l’homme qui lit un Shaster he´te´rodoxe est aussi coupable que s’il avait tue´ son ami. Le Bhaguat-Gita place l’amour du travail et l’industrie, de pair avec l’intempe´rance et les desirs de´re´gle´s c.

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Deum cuilibet legi rituali, supplicium extremum statuisse, quum tamen peccatis suaˆ naturaˆ gravioribus, fornica tioni, furto, proximi mutilationi, et ejusmodi pœnas longe` mitiores dedisse.» (Ib., p. 48.) Il cite en preuve (Levit, VI, 2–3–4 ; VII, 20–21–25–27 ; X, 1–2 ; XI, 44–45 ; XVIII, 2–4–5–20–21–22–23–30 ; tout le chap. XIX, XX, 7–8 ; XXII, 3 ; XXIII, 22–29–30 ; XXIV ; 19 ; XXV, 36–38–39–43 ; XXVI, 34 ; Deute´ronome, V, 10 ; tout le chap. VI ; X, 12 ; XI, 26–27–28 ; XVII, 12 ; XXVI, 13–14–16–17 et 18 ; XXVII, 10 ; XXVIII, 1, 15 ; XXX, 8–10 ; Exode XXII ; 1, XXIII, 22 ; XXX, 33–38, XXXI, 14–15 ; Josue´, VIII, 24.) Si un homme pe`che contre un autre homme, Dieu pourra eˆtre apaise´ ; mais s’il pe`che imme´diatement contre Dieu, qui priera pour lui ? (SAMUEL, I, 2–24–25.) TAUBE, Descript. d’Esclavonie, I, 761. CHARDIN, IV, 1572. Bhag.-Gita, v. 1243.

1 long-temps ] e´tat ante´rieur de la re´daction sur le f o 16 du ms. sur fiches qui a servi pour fabriquer le f o 81 de Co 3294/5 〈tue`rent le chef qui, depuis〉 long-tems Co 3294/5 1

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BC cite Friedrich Wilhelm von Taube, Historische und geographische Beschreibung des Königreiches Slavonien und des Herzogthumes Syrmien, sowohl nach ihrer natürlichen Beschaffenheit, als auch nach ihrer itzigen Verfassung und neuen Einrichtung in kirchlichen, bürgerlichen und militärischen Dingen, Leipzig : s.e´d., 1777. L’anecdote dont parle BC ne se trouve pas dans cet ouvrage. Dans la premie`re partie, p. 70, il est question des re`gles se´ve`res du jeuˆne et du refus des soldats illyriens de de´sobe´ir a` ces re`gles, meˆme en y e´tant autorise´s par les me´tropolites. Le brigandage fait l’objet d’une analyse dans la seconde partie, pp. 67–72. BC attribue aux Turcs ce que Chardin rapporte des Persans. Voir «Description de la religion des Persans», chap. VII, «Du septie`me Article du Symbole des Persans» : «L’observance du jeuˆne est garde´e par tous les mahometans aussi exactement que la purification et la prie`re, et les docteurs de Perse [...] en recommandent la pratique a` l’e´gal de ces autres devoirs-la`. Le jeuˆne, disent-ils, est la porte et l’entre´e de la religion, tout homme qui meurt dans le temps du jeuˆne est bienheureux, et va suˆrement en paradis ; et leurs pre´dicateurs affirment a` la lettre qu’au commencement du jeuˆne, qui dure tout le mois de ramazan, les portes du paradis s’ouvrent, et celles de l’enfer se ferment pour tous les gens de leur religion» (Chardin, Voyages, e´d. Langle`s, t. VII, p. 132). Allusion au passage suivant : «L’amour du gain, l’industrie & l’ardeur pour le travail ; l’intempe´rance, les de´sirs de´re´gle´s, sont les effets de la supe´riorite´ de Raja» (BhaguatGeeta, traduction franc¸aise, p. 124). Le terme «Raja» de´signe une de trois qualite´s de la nature, a` savoir Satwa, la ve´rite´, Raja, la passion, Tama, l’obscurite´. Sur ces trois qualite´s et leurs actions, voir pp. 122–124.

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Le polythe´isme grec est en ge´ne´ral e´tranger aux devoirs factices. Si nous trouvons, dans He´siode, quelques actions innocentes ou indiffe´rentes qui soient de´fendues, comme outrageant les dieux a, et si les pre´ceptes de ce poe`te ont a` cet e´gard, pour le fond ainsi que pour la forme, assez de rapport avec ceux qui sont inculque´s dans les religions sacerdotales, c’est que ces pre´ceptes en e´taient probablement emprunte´s, a` l’insu meˆme d’He´siode ; mais ils n’avaient aucune influence sur la morale de la religion grecque, telle qu’elle e´tait conc¸ue par le peuple. Dans les religions sacerdotales, l’homme garrotte´ par une foule de commandements et d’interdictions arbitraires b, s’agite en aveugle dans l’esa b

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Œuv. et Jours, V, 725–7581. SPENCER, auteur d’un ouvrage d’une e´rudition immense et d’une intention tre`s-orthodoxe, a e´te´ conduit par la bonne foi qui luttait en lui contre sa qualite´ de the´ologien, a` reconnaıˆtre ce caracte`re arbitraire dans le style impe´rieux de la loi mosaı¨que2. Il n’y trouve aucune explication qui en de´voile la cause, ou morale ou naturelle. Il convient que ces mots qui pre´ce`dent et qui suivent presque toutes les lois : «Je suis l’E´ternel, votre dieu, gardez mes commandements», ne peuvent se traduire que par cette paraphrase despotique : «Ces commandements peuvent vous paraıˆtre futiles ou contraires a` vos ide´es du bien et du mal ; mais qu’il vous suffise que j’en sois l’auteur, moi, votre maıˆtre.» (SPENCER, de Leg. ritual. Hebr., p. 613.) SPENCER reconnaıˆt enfin que, dans tous les temps, les Juifs avaient regarde´ les lois divines comme e´manant d’un pouvoir discre´tionnaire. (Id. ib., p. 7.) Envisageant leur religion sous ce point de vue, les Juifs ont proclame´ sacrile´ge l’examen des motifs qui avaient dirige´ la Divinite´. (V. le livre intitule´ Coseri, in Buxtorfio, part. I, § 263.) En effet,

1 Si ] 〈cependant〉 Si corr. dans l’interl. Co 3294/5 3 et si ] ajoute´ dans l’interl. Co 3294/5 5–6 que ces pre´ceptes ] 〈qu’ils〉 que ces pre´ceptes corr. dans l’interl. Co 3294/5 6 d’He´siode ] a` la hauteur de ce mot, dans la marge, un mot illis. peut-eˆtre destine´ a` comple´ter la phrase ; puis on lit d’He´siode 〈qui trois ou quatre mots illis. de L’origine〉. Co 3294/5 9–10 l’homme ... d’interdictions ] 〈au contraire,〉 L homme ... par 〈tant〉 une foule corr. dans l’interl. de commandemens et 〈tant〉 d’interdictions Co 3294/5 12-p. 474.28 Spencer ... l’autocratie. ] note accroche´e dans Co 3294/5 au mot «offenser» (ci-dessus, p. 470, ligne 10) 22 proclame´ sacrile´ge ] conside´re´ comme un sacrile`ge Co 3294/4, Co 3294/6 1

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He´siode, Œuvres et jours, vv. 724–759 (e´d. Mazon, pp. 112–113). BC renvoie a` un long passage sur des libations et autres re`gles des sacrifices. On consultera encore dans le meˆme texte les vv. 334–341 (e´d. Mazon, pp. 98–99). L’exe´ge`se du passage est proble´matique. Voir, pour une analyse approfondie, Martin P. Nilsson, Geschichte der Griechischen Religion, t. I, München : Beck’sche Verlagsbuchhandlung, 1976, pp. 101–104. La de´fense dont parle He´siode de traverser un fleuve sans prier et se laver les mains dans l’eau du fleuve concerne l’impurete´ morale. Les dieux punissent celui qui ne´glige le devoir de l’ablution. Le premier renvoi concerne un passage qui se trouve chez Spencer dans le livre II, chap. XVIII, sect. II, e´d. de Hagæ-Comitum, p. 382. BC traduit le texte de Spencer. Le second re´sume une re´flexion de Spencer qu’on lit dans le livre I, chap. I, sect. II, e´d. de Hagæ-Comitum, p. 7, e´d. de Tübingen, p. 26. BC renvoie a` l’ouvrage Liber Cosri, continens colloquium seu disputationem de religione, habitam ante nongentos annos, inter regem Cosareorum, & R. Isaacum Sangarum Judæum [...] nunc in Lingua Sacra cultorum, recensuit, latinaˆ versione, & notis illustravit Johannes

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pace insuffisant qui lui reste ; de quelque coˆte´ qu’il se tourne, il se sent froisse´ dans sa liberte´. Bientoˆt il ne distingue plus le bien d’avec le mal, ni la loi d’avec la nature. Ce qui pre´serve du crime la majorite´ des hommes, c’est le sentiment de n’avoir jamais franchi la ligne de l’innocence ; plus on resserre cette ligne, plus on expose l’homme a` la de´passer ; et quelque le´ge`re que soit l’infraction, par cela seul qu’il a vaincu le premier scrupule, il a perdu sa sauvegarde la plus assure´e. Plusieurs e´crivains ont remarque´ ce danger. Les lois qui font regarder comme ne´cessaire ce qui est indiffe´rent, dit M. de Montesquieu, font bientoˆt regarder comme indiffe´rent ce qui est ne´cessaire a. Toutefois, comme pour arriver a` la ve´rite´, il faut conside´rer les questions sous toutes leurs faces, nous reconnaıˆtrons que cette exigence de la religion

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cet examen se trouve interdit par leurs lois meˆmes. (Nombres, XV, 39.) «Vous ne rechercherez point, d’apre`s votre cœur, ni d’apre`s vos yeux.» Les commentateurs des He´breux ajoutent : «La curiosite´ pervertit et de´nature la foi. Qui peut vouloir, sans impie´te´, pe´ne´trer dans les secrets de son dieu ? Si la raison d’un pre´cepte e´tait connue de l’homme, ou` serait la gloire de l’obe´issance ? (V. le liv. de la Gemara et le rabbin Schem-Yobh, dans SPENCER1.) Lorsque l’homme de´couvre le but de ce qui lui est prescrit, il est plus dispose´ a` s’en acquitter. Cette connaissance lui facilite l’exe´cution du pre´cepte ; et l’esprit frappe´ a` la fois de l’ordre et de la raison qui le motive, n’a plus le me´rite d’une pleine servitude.» Il y a, dans cette manie`re de concevoir les rapports de l’Eˆtre supreˆme avec l’homme, un singulier anthropomorphisme. Dieu est alors comme les despotes sur la terre, qui veulent eˆtre obe´is sans question, comme sans murmure, et qui sont flatte´s que leurs volonte´s soient remplies, sans eˆtre comprises. Si elles e´taient comprises ou approuve´es, leur autorite´ en souffrirait ; ils perdraient en pouvoir ce qu’ils gagneraient en approbation. Bochart (de Animal. sacris, p. 1, lib. II, 4912) est tellement tombe´ dans cet anthropomorphisme, qu’il appelle l’autorite´ de Jehovah de l’autocratie. MONTESQ. E. d. L., XXIV, 143.

12 Toutefois ... conside´rer ] pour arriver a` la ve´rite´, il faut toujours conside´rer Co 3294/5 19–21 Lorsque ... servitude.« ] ajoute´ dans la col. de gauche Co 3294/6 23–28 anthropomorphisme. Dieu ... l’autocratie. ] anthropomorphisme perte de ce mot, le reste ajoute´ sur un papillon colle´ au bas de la page Co 3294/6

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Buxtorfius, Basileæ : Sumptibus autoris, MDCLX. Le passage cite´ se lit p. 18. Ce renvoi a` Spencer, De legibus Hebraeorum, n’est pas e´lucide´. Spencer mentionne la Ge´mara, une partie du Talmud, a` plusieurs reprises ; mais les remarques sont sans rapport avec ce qui est dit ici. Le nom du rabbin est probablement estropie´. BC vise un passage dans l’ouvrage encyclope´dique de Samuel Bochart. Nous avons consulte´ Samuelis Bocharti [...] Hierozoicon sive de animalibus S. Scripturæ, recensuit suis notis adiectis Ern. Frid. Car. Rosenmüller, Lipsiæ : in Libraria Weidmannia, MDCCXCIII, sans pouvoir localiser la source de la remarque de BC. BC ne cite pas tout a` fait litte´ralement une phrase du chapitre intitule´ : «Comment la force de la religion s’applique a` celle des lois civiles» (Montesquieu, Œuvres comple`tes, t. II, texte pre´sente´ et annote´ par Roger Caillois, e´d. de la Ple´iade, Paris : Gallimard, 1951, p. 724).

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a son avantage ; elle accoutume l’homme au sacrifice ; elle l’habitue a` ne pas se proposer dans tout ce qu’il fait un but ignoble et rapproche´. Il est utile que l’homme se prescrive quelquefois des devoirs inutiles, ne fuˆt-ce que pour apprendre que tout ce qu’il y a de bon sur la terre, ne re´side pas dans ce qu’il nomme utilite´. Mais il en est de ceci, comme de tout ce qui tient a` l’exaltation, a` l’enthousiasme, au sentiment inte´rieur. Ce sentiment, cet enthousiasme, cette exaltation, sublimes quand ils sont spontane´s, deviennent terribles quand d’autres en abusent. La puissance de cre´er d’un mot les vertus et les crimes, quand elle est remise entre les mains d’une classe d’hommes, n’est plus qu’un moyen redoutable de despotisme et de corruption. Cette classe ne se borne pas a` placer au premier rang des forfaits toute re´sistance a` son pouvoir ; elle ne se borne pas a` commander des actions indiffe´rentes, ou inutiles ; elle en prescrit de nuisibles et de criminelles. La pitie´ pour les ennemis du ciel est une faiblesse de´sapprouve´e ou proscrite : au me´pris des liens les plus forts ou des affections les plus tendres, il est de´fendu de porter du secours a` celui qui s’est rendu l’objet de l’indignation divine. La cruaute´ contre les impies et les infide`les est un devoir sacre´ ;

7 inte´rieur. ] inte´rieur 〈de L’homme〉. Co 3294/5 9 d’autres en abusent. ] on en abuse. Co 3294/5 11 corruption. ] corruption. suit a` la fin du f o 79 le de´but supprime´ de l’aline´a suivant 〈Cette Classe ... dans les fastes〉 Co 3294/5 18 divine. ] BC pre´voyait d’ajouter une note nous avons de´ja indique cet inconve´nient (p. ). citons des faits, pour le de´montrer. les perses et leurs voisins fesaient de´chirer par des chiens Les hommes attaque´s de maladies dangereuses, pour ne pas irriter les dieux, en donnant des soins a` ceux qu’ils poursuivaient de leur haine (Mein. de rel. Vet. Pers. Com. de la Soc. de Goett1.) Les indiens trainent leurs agonisans pre`s du fleuve le plus proche et les abandonnent aux intempe´ries de l’air, pour ne pas se rendre coupables, en les assistant, contre la volonte´ du ciel qui les frappe (Tennants. Re´cre´at. ind. 1. 1082) les Kamschadales se font un scrupule de recevoir dans leur cabane, ceux qui n’ont

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BC renvoie a` Christoph Meiners, «Commentatio de variis religionis persarum conversionibus», Commentationes societatis regiae scientiarum Gottingensis, t. III, Gottingae : Joan. Christ. Dieterich, MDCCVXXXI, Commentationes [...] historicae et philologicae classis, pp. 99–132, et plus particulie`rement p. 124. BC cite la seconde e´dition de l’ouvrage de William Tennant, Indian Recreations, t. I, Consisting Chiefly of Strictures on the Domestic and Rural Economy of the Mahomedans & Hindoos, London, Edinburgh : Longman, Hurst, Rees, and Orme, 1804. On y trouve la description de cette coutume cruelle. «When a sick person’s life is despaired of, he is carried by his relations to the bank of the river, and there, exposed to the storm, or the intense heat of the sun, he permitted, or rathe forced, to resign his breath» (p. 108), et ainsi il meurt et on bruˆle son corps pour disperser les cendres dans le fleuve.

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la perfidie a` leur e´gard est une vertu ; et, de meˆme que la the´orie du de´vouement, pousse´ a` l’exce`s, fait du sacrifice le plus douloureux le sacrifice le plus me´ritoire, les vertus religieuses, quand les actions n’ont de me´rite que parce qu’elles sont conformes a` l’ordre des dieux, en ont d’autant plus qu’elles sont l’oppose´ des vertus humaines a. Nous voyons dans les

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Un auteur que nous avons cite´ quelquefois, bien qu’il ne soit distingue´ ni par l’e´rudition ni par le talent, mais parce qu’il a porte´, dans ses raisonnements, une candeur qui devient pre´cieuse, en l’empeˆchant de voiler les conse´quences des pre´misses qu’il adopte, est tre`scurieux a` lire sur ce sujet. Toutes les fois qu’il raconte quelque trait de cle´mence ou de pitie´ de la part des rois juifs envers les vaincus, «Les hommes, dit-il, auraient juge´ cette action

(suite des variantes de la page pre´ce´dente) e´chappe´ qu’avec peine a` quelque grand danger (Steller, Descript. du Kamschatka p. 2011) On apperc¸oit chez les grecs et chez les Romains quelques Traces de cette opinion, mais fort adoucies (Orig. Contre Celse Liv. III2) Les premiers n’admettaient, ni dans leurs feˆtes, ni dans leurs sacrifices, ni meˆme dans L’inte´rieur de leurs maisons, ceux qu’on avait crus morts, qu’apre`s leur avoir fait subir une purification Solennelle. (Plutarque3) Les autres ne permettaient aux parens dont ils avaient porte´ le Deuil, de rentrer chez eux, que par une ouverture qu’on fesait dans le toit, les regardant comme indignes de passer par la meˆme porte, par laquelle on sortait pour aller aux pompes religieuses et dans les temples des dieux (Lomeyer de veter. Gentill. Lustration. Ch. 304) Le Livre de Job montre les he´breux imbus de la meˆme notion et preˆtsa` traiter comme un criminel Le viellard innocent et vertueux. Le livre de Job est un plaidoyer contre cette ide´e (Eichhorn, introduction au nouveau Testament5) Co 3294/5 1–4 que la the´orie ... qu’elles sont ] que dans la The´orie du de´vouement ... l’exce`s, le sacrifice le plus douloureux paraıˆt le plus me´ritoire, les ... de me´rite qu’en e´tant conformes a` l’ordre des dieux, sont d’autant plus me´ritoires, qu’elles sont Co 3294/5

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Voir ci-dessus, p. 141, n. 2. BC reprend d’ailleurs une indication qu’il a trouve´e dans le texte de Meiners (voir ci-dessus, p. 475, n. 1). Orige`ne ne mentionne pas cet usage, ni dans le troisie`me livre ni ailleurs. BC re´sume Plutarque, Moralia, «Questions romaines», § 5, 264 D–265 B (Plutarch, Moralia, vol. IV, with an English Translation by Frank Cole Babbitt, Cambridge, Massachusetts, London : Harvard University Press, 51993, pp. 11–15). Renvoi a` Johannes Lomeier, De veterum gentilium lustrationibus syntagma, Ultrajecti : Apud Franciscum Halma, 1681, ou a` la seconde e´dition, Epimenides sive de veterum gentilium lustrationibus syntagma, nunc secundis curis auctius [...] Zutphaniae : sumptibus Johannis a Spyk & Danielis Schutten, 1700. Nous avons consulte´ l’e´dition de 1681. Le chapitre XXX (pp. 275–295), intitule´ «Amburbialia [...]», parle bien des «sacra privata ex occasione funerum» (p. 292), mais le de´tail e´voque´ par BC ne s’y trouve pas. Il se peut que BC ait copie´ la re´fe´rence dans une e´tude non identifie´e. Voir Eichhorn, Einleitung in das Alte Testament, Leipzig : In der Weidmannischen Buch-

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fastes de l’E´gypte, un roi puni pour sa douceur et sa bienfaisance. L’oracle ayant signifie´ a` Myce´rinus qu’il n’avait plus a` vivre que six anne´es: «D’ou` vient, re´pondit-il, que mes pre´de´cesseurs, les fle´aux de leurs sujets, sont parvenus paisiblement a` une vieillesse avance´e, et que les dieux me traitent

vertueuse, mais elle e´tait un crime, parce qu’elle e´tait contraire a` la volonte´ de Dieu.» (ST.-PHILIPPE, Monarchie des He´breux1. V. le re´cit de l’indulgence d’Achab pour Benhadad et mille autres passages.) Quand il nous peint le farouche Aza, menac¸ant sa me`re du dernier supplice, «Un prince, continue-t-il (ib. II, 305), lorsqu’il s’agit de la religion, ne tient aux hommes par aucune relation. Il n’est ni fils, ni pe`re, il est seulement le lieutenant de Dieu, dont il repre´sente le pouvoir, et qui l’a substitue´ pour exercer sa justice.» Enfin, quand il raconte l’assassinat de Sisara par Jahel (ib. I, 128), «Il y a, s’e´crie-t-il, de la grandeur et de la noblesse a` respecter dans un ennemi la confiance qu’il nous te´moigne ; mais la religion est-elle inte´resse´e dans notre conduite, la ge´ne´rosite´ n’est plus de saison. L’amour de la religion remua le bras de Jahel. La religion est le premier devoir des hommes. Jahel put, en conscience, employer toutes sortes de moyens, inviter Sisara d’un air ami, le couvrir de son manteau, le tuer dans son sommeil. Aussi l’ange qui annonc¸a l’incarnation ne put trouver en l’honneur de Marie des expressions plus glorieuses que celles que les He´breux avaient employe´es pour ce´le´brer la victoire de Jahel.» (V. encore dans le meˆme ouvrage le re´cit de l’assassinat d’Aglon par Aod.) «S’il e´tait vrai, dit Sozome`ne, en parlant de la mort de Julien, dont les chre´tiens e´taient accuse´s, que quelqu’un, pour le service de Dieu et de la religion, se fuˆt arme´ d’un courage pareil a` celui des anciens libe´rateurs de la patrie, on aurait peine a` le condamner.» (Hist. eccle´s. VI, 122.)

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handlung, t. III, 1803, pp. 533–605. BC se trompe en exploitant ses notes de lecture, citant l’introduction au Nouveau Testament. Il s’agit de l’ouvrage de Vicente Bacallar y Sanna de San Felipe, Monarchia Hebrea (La Haye : 1727), dont la traduction franc¸aise a paru en 1727 sous le titre La Monarchie des He´breux par le Marquis de Saint Philippe, traduit de l’espagnol [par A. de Beaumarchais], La Haye : Alberts & van der Kloot, 1727. Il faut lire «VI, 2». BC paraphrase le de´but du chap. 2, ou` il est question de la tradition d’attribuer la mort de Julien a` un chre´tien. «Il n’est pas invraisemblable en effet que l’un des soldats alors en service se soit dit que les Grecs et tous les hommes jusqu’a` maintenant font l’e´loge de ceux qui tue`rent jadis des tyrans, parce qu’ils ont choisi de mourir pour la liberte´ [...]. Et on aurait peine a` lui faire reproche s’il montra ce courage a` cause de Dieu et de la religion qu’il professait» (e´d. de Guy Sabbah, t. III, Sources chre´tiennes, no 495, p. 251).

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avec tant de rigueur, moi qui me suis consacre´ au bonheur de mes peuples ?» – Ces dieux, re´pliqua l’oracle, condamnaient l’E´gypte a` cent cinquante anne´es de mise`re et d’esclavage. Les monarques qui t’ont pre´ce´de´ ont rempli leurs de´crets ; tu les as viole´s. Ta mort est le chaˆtiment de ta de´sobe´issance.» Presque toujours, dans le polythe´isme sacerdotal, l’interdiction des crimes est accompagne´e d’une re´serve expresse, pour le cas ou` ces crimes seraient commande´s par les dieux. Quiconque commet un meurtre de sa propre volonte´, disent les bramines, ne jouira jamais du bonheur ce´leste ; mais Dieu ordonne-t-il a` un homme d’en tuer un autre, il le fait et vit heureux et content a. La morale religieuse ainsi conc¸ue peut avoir encore un autre inconve´nient. L’homme s’imagine eˆtre e´leve´ par elle au-dessus de tous les devoirs. Des he´re´tiques du quatorzie`me sie`cle, et long-temps auparavant quelques gnostiques, pensaient que, sauve´s par l’intervention divine, ils n’e´taient plus soumis a` la loi, et plusieurs d’entre eux se livraient en conse´quence publi-

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Asiat. Res. IV, 361. Dans un passage du Bhaguat-Gita, les principes religieux sur l’immortalite´ de l’ame sont employe´s a` pallier ou a` justifier l’homicide.

11 content. ] content. 〈mais quiconque tue son semblable sans l’ordre de dieux illis. Le De´truire. mais il ordonne a` un homme d’en frapper un autre, et il le frappe. mais quiconque frape son semblable par illis. spontane´, sera frappe´ a` son tour. quiconque fait du mal (?) a` son voisin, sans le commandement de dieu en est infailliblement puni. il est meˆme a` remarquer que dans un passage du //Bagua// Bhaguat Geeta, les principes philosophiques et religieux sur L’immortalite´ de L’aˆme sont employes a` pallier, ou a` justifier L’homicide.〉 Co 3294/5 12–16 La morale ... se livraient ] La religion peut avoir ... inconve´nient 〈pour la morale〉. elle repre´sente quelquefois L’homme comme e´leve´ ... au dessus des devoirs moraux. 〈Les Turlupins〉 Des he´re´tiques ... auparavant, Les gnostiques pensaient que 〈L’homme〉 parvenus a` un certain degre´ de perfection religieuse la suite dans la marge & sauve´s par l’intervention divine, ils retour a` une ligne normale n’e´taient plus soumis a` la loi, meˆme divine 〈un mot illis.〉 & plusieurs d’entr’eux ces quatre derniers mots dans l’interl. se livraient Co 3294/5 17–18 Dans ... l’homicide. ] phrase ajoute´e au bas de la page Co 3294/5

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BC cite un passage de l’essai de Thomas Shaw, «On the Inhabitants of the Hills Near Ra’jamahall», Asiatic Researches, t. IV, pp. 31–96, et plus particulie`rement p. 35 : «God orders a man to kill another, and he kills him, yet lives happily and content ; but no one must, from his own will and pleasure, destroy a fellow-creature, or God will destroy him». – Le renvoi au Bhaguat-Geeta vise la deuxie`me lecture, «De la Nature de l’ame, & des Doctrines spe´culatives» (traduction franc¸aise, pp. 32–45, et en particulier pp. 38–39).

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quement au plus re´voltant libertinage a. Les bonzes raisonnent de meˆme. Xaca et Amida, s’e´tant afflige´s des crimes des hommes, ont subi, pour les expier, de myste´rieuses souffrances. Le repentir et les bonnes œuvres sont autant d’outrages envers ces divinite´s, dont les sacrifices ont suffisamment efface´ toutes nos fautes b. Nous avons dit qu’en ge´ne´ral, dans le polythe´isme, le caracte`re personnel des dieux n’avait que peu d’influence ; mais cette assertion n’est comple`tement vraie, que lorsque la morale est inde´pendante de la religion. Les relations des socie´te´s humaines e´tant les meˆmes partout, la loi morale, qui est la the´orie de ces relations, est aussi partout la meˆme. Quand les dieux ne sont charge´s que d’appliquer cette loi, leur caracte`re individuel importe peu, parce que dans l’exercice de cette fonction, ils font abstraction de ce caracte`re. Mais lorsque la volonte´ des dieux de´cide de la loi morale, comme leur caracte`re influe sur leur volonte´, toute imperfection dans ce caracte`re produit un vice dans la loi. L’homme s’estime alors, en faisant le mal. Quand il obe´it a` la religion aux de´pens de la morale, il s’applaudit de cet effort, et en violant les plus saintes des lois naturelles, non-seulement il se flatte de se rendre agre´able aux dieux qu’il adore, mais ce qui est un inconve´nient plus grave, il se croit moralement vertueux. Subordonner dans ce sens la morale a` la religion, c’est produire, en morale, la meˆme re´volution que produit en politique l’axiome : Si veut le roi, si veut la loi. Les conse´quences pratiques de ce renversement d’ide´es, ne sont pas toujours e´gales a` ses dangers en the´orie. Le sacerdoce, comme toute autorite´ constitue´e chez les hommes, est force´, dans les circonstances ordinaires, a` maintenir les grandes lois de la morale, pour que la socie´te´ qu’il domine ne a b

GESEN. apud Prateol1. POSSEV. Bibl. Select., X2.

1–5 Les bonzes ... fautes. ] passage ajoute´ au bas de la p. et appele´ ici par un signe de renvoi Co 3294/5 26 Prateol. ] Prateol. Bayle art. Turlupins la meˆme note quelques lignes plus haut, biffe´e Co 3294/5 27 Possev. ... X. ] note ajoute´e au bas de la page Co 3294/5 1

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BC copie Bayle, Dictionnaire historique et critique, article «Turlupins», e´d. de Rotterdam, t. III, p. 2921 (variante a` la ligne 28). Lire «Gerson» (Jean Charlier, 1363–1429). La citation qu’on lit chez Bayle dans la marge est de Gabriel Du Pre´au, De vitis, sectis et dogmatibus omnium haereticorum [...] elenchus alphabeticus compactus per Gabrielem Prateolum, Coloniæ : apud Geruuinum Calenium, & haeredes Ioannis Quentel, M.D.LXIX, liber decimusoctavus, [no] 28, «Turilupini», p. 482b. Elle est la source de BC : «Cynicorum Philosophorum more omnia verenda publicitus nudata gestabant, & in publico velut jumenta coı¨bant, instar canum in nuditate & exercitio membrorum pudendorum degentes». Du Pre´au renvoie a` Jean Gerson, De examinatione doctrinarum (Œuvres comple`tes, Paris : Descle´e & Cie, t. IX, 1973, no 456, pp. 472–473) pour justifier son jugement. BC cite Antonio Possevino, Bibliotheca selecta. Dans l’e´dition que nous avons consulte´e (Antonii Possevini Mantuani Societatis Iesu Bibliotheca selecta de ratione studiorum [...]

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pe´risse pas ; mais la porte est ouverte a` toutes les exceptions, et la morale naturelle est sans cesse menace´e par une morale factice. Cette morale, inexorable a`-la-fois et capricieuse, poursuit l’homme dans les plus petits de´tails, ne lui laisse d’asile ni dans le sanctuaire de son ame, ni dans le secret de ses pense´es, fait de l’ignorance un de´lit, et chaˆtie les actions involontaires. De`s l’instant qui les a vus naıˆtre, les enfants peuvent eˆtre criminels. Les bramines pre´sentent a` la lune les leurs, aˆge´s de huit jours, pour leur obtenir l’absolution de leurs fautes. L’intention n’est plus qu’une garantie pre´caire. Le remords annonce le crime ; mais la paix de l’ame n’atteste point l’innocence. L’homme n’ayant plus le droit de consulter sa conscience, n’est jamais certain de n’avoir pas offense´ la Divinite´. Le judaı¨sme et le christianisme, souvent de´figure´s par l’esprit sacerdotal, nous en fournissent de nombreux exemples. «Seigneur, dit le psalmiste he´breu, pardonne-moi ceux de mes pe´che´s qui me sont inconnus a.» «Je ne me reproche rien, e´crit un apoˆtre, mais ce n’est pas une preuve de mon innocence b.» Cette incertitude peut eˆtre un bien dans une religion tre`s-perfectionne´e. L’homme qui a sur la Divinite´ des ide´es tre`s-pures, ne sait jamais si ses efforts suffisent pour le rendre digne de lui plaire. Il travaille sans relaˆche sur son propre cœur, pour en arracher tout ce qui le se´pare de l’eˆtre parfait qu’il adore ; son inquie´tude est d’ailleurs adoucie par la notion de la bonte´, unie a` celle de la sagesse et de la puissance. Mais dans un culte dont les dieux sont imparfaits et me´chants, une telle inquie´tude, loin d’eˆtre un encouragement pour la vertu, est une cause toujours renaissante d’abattement et de de´sespoir. L’homme adopte, pour s’en de´livrer, mille expe´dients bizarres. Tantoˆt, fatigue´ de se consumer en actions toujours douteuses, et sur la valeur desquelles plane une obscurite´ de´solante, il se condamne a` une inertie comple`te ; il met l’activite´, le travail, la bienfaisance, au rang des passions a b

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Psaume XIX, V, 13. Corinth. IV, 4. Nous avons parle´ du compagnon de saint Bruno1 qui, s’e´tant fe´licite´ en mourant de n’avoir jamais pe´che´, fut condamne´ aux feux e´ternels, en punition de sa confiance en lui-meˆme. Mais voyez combien les the´ologiens sont difficiles : Prudence, poe`te chre´tien, ne se permet pas d’espe´rer que son ame sera sauve´e ; il n’aspire qu’a` n’eˆtre pas plonge´ dans le plus profond des abıˆmes ; et les meˆmes auteurs qui trouvent e´quitable que le compagnon de saint Bruno soit damne´, pour s’eˆtre cru trop certain du paradis, de´clarent impie l’humble demande de Prudence, qui ne de´sire qu’un adoucissement aux souffrances de l’enfer. (BAYLE, art. Prudence2.) Colonia Agrippina : Apud Ioannem Gymnicum, MDCVII), il est question de la religion des Japonais, et en particulier de Xaca et Amida, «Iapaniorum magistri», livre X (pp. 409–434). Voir ci-dessus, p. 209. Voir Bayle, Dictionnaire historique et critique, e´d. de Rotterdam, t. III, pp. 2516–2518, surtout la note E, ou` BC a trouve´ son argument : «Quelques-uns le blaˆment extreˆmement d’avoir souhaite´ non pas la gloire du Paradis ; mais l’e´tat d’une souffrance me´diocre. Il se

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condamnables. D’apre`s l’axiome d’un des fondateurs d’une religion sacerdotale, il s’abstient dans le doute, c’est-a`-dire il reste immobile, de peur de se rendre coupable par un mouvement, et pour e´chapper au crime, il s’interdit jusqu’a` la vertu ; d’autres fois, il se pre´cipite aux pieds du sacerdoce, qui s’arroge a` lui seul l’important privile´ge de l’expiation. Ce moyen de re´concilier l’homme avec sa conscience a des avantages, quand son efficacite´ repose sur la disposition inte´rieure, sur la conduite future de celui que la religion retire ainsi de l’abıˆme ou` ses vices l’avaient plonge´. Mais dans les religions sacerdotales, l’expiation change de caracte`re. L’absolution des crimes les plus noirs est attache´e a` une cre´dulite´ implicite a, ou a` des pratiques minutieuses b et meˆme fortuites c, a` des rites qui ne supposent ni ame´lioration, ni re´paration, ni repentir d, a` la vue d’un temple a, a` l’ombrage a

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Les catholiques sont quelquefois tombe´s dans cette erreur. J’en connais un qui, aujourd’hui encore, reproche aux protestants du ze`le pour la morale et du refroidissement pour la foi. (Le Cathol. no V, p. 2301.) Tout Indien, quelle qu’ait e´te´ sa conduite, est sauve´, lorsqu’il meurt dans un lieu saint, ou en tenant en main la queue d’une vache, ou lorsqu’il est plonge´ mourant dans le Gange, ou qu’il y est jete´ apre`s sa mort, ou, enfin, lorsqu’il secoue sur lui une branche d’arbre, trempe´e dans l’eau de ce fleuve. (ROGER, Pagan. Ind2.) Le nom de Wichnou, prononce´ sans intention, a le pouvoir d’effacer tous les crimes. Les ce´re´monies et les ablutions prescrites purifient l’homme des actions les plus coupables, disent les brames, dans leurs prie`res expiatoires. (Rech. asiat., V, 3603.) C’est un des inconve´nients des ide´es d’impurete´ et de purification. L’homme passe facilement de la notion de la purification, a` celle que ces purifications l’absolvent de ses fautes. Dans une inscription samscrite, trouve´e pre`s de Gya, on lit ces mots : «Amara Deva a baˆti le saint temple qui purifie du pe´che´. Un crime, e´gal a` cent, sera expie´ par la vue de ce temple ; un crime, e´gal a` mille, par l’attouchement ; un crime, e´gal a` cent mille, par l’adoration.»

10 a` une cre´dulite´ implicite, ou ] ajoute´ dans la marge Co 3294/5 13–15 Les catholiques ... 230.) ] note ajoute´e dans la marge Co 3294/5 21 prescrites ] sacre´es et prescrites Co 3294/5

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de´clare content pourvu que son ame ne soit pas mise dans le plus profond cachot des enfers, & il ne demande pas un meilleur sort apre`s la resurrection» (p. 2917a). Suivent les noms de plusieurs the´ologiens qui ont condamne´ cette prie`re. Passage pole´mique dirige´ contre le baron d’Eckstein qui avait publie´ dans le cahier V du Catholique (t. II, 1826) un essai intitule´ «Coup d’œil sur la re´forme religieuse du seizie`me sie`cle, sur son caracte`re et sur les conse´quences en philosophie et en politique» (pp. 189– 260). Dans le chap. IV («De l’influence du calvinisme sur les formes et les institutions de la socie´te´»), d’Eckstein e´crit : «Les preˆtres calvinistes sont de ve´ritables censeurs, institue´s pour veiller sur les mœurs, sur la conduite publique et prive´e des gouvernans et des gouverne´s ; et le syste`me de Calvin n’est autre chose qu’un syste`me de discipline pour les laı¨ques. [...] de la`, ce ze`le pour la morale et ce refroisdissement pour la foi, inhe´rent au ge´nie de l’e´glise calviniste» (p. 230). BC renvoie une nouvelle fois a` Abraham Roger, Offene Thür, deuxie`me partie, chap. XVIII, pp. 413–426. BC renvoie a` l’e´tude de H. T. Colebrooke, «On the Religious Ceremonies of the Hindus, and of the Brahmens especially», Asiatic Researches, t. V, London, 1799, qui traite des ce´re´monies d’ablution aux pages indique´es.

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d’un arbre a, a` l’attouchement d’une pierre, a` l’ablution dans les eaux de certains fleuves b, a` la re´pe´tition me´canique de certaines paroles c, a` la lec-

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(As. Res., I, 2861.) Le pardon de tous les pe´che´s est attache´ a` la visite du temple consacre´ a` Rama dans l’ıˆle de Ceylan. (PAULIN, Syst. brahman2.) Il suffit de voir le Kolpo, ou le Toulochi, pour eˆtre releve´ de tous ses pe´che´s. Nous avons de´ja parle´ de l’efficacite´ des eaux du Gange ; les mourants dont on humecte la bouche avec l’eau de ce fleuve, sont purifie´s de tous leurs pe´che´s. (Pre´f. du Bhag., LXII, LXX3.) L’opinion des chre´tiens des premiers sie`cles sur l’efficacite´ du bapteˆme, est tre`s-peu diffe´rente de celle des Indiens. On sait que le bapteˆme e´tait souvent ajourne´ jusqu’au moment de la mort, comme un moyen suˆr d’effacer tous les pe´che´s commis pendant la vie. Constantin fut ainsi baptise´ peu d’instants avant de mourir. Les pe`res de l’E´glise, en blaˆmant ce calcul, ne niaient point l’effet du bapteˆme. (CHRYSOST., in Epist. ad Hebræos, Homel. 13 ; CHARD., Hist. des sacrem4.) Les syllabes om, am, oum, composent une prie`re tre`s-efficace pour la re´mission de tous les

3 286.) ] 286.) suivent deux lignes biffe´es, illis. Co 3294/5

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BC cite, en le traduisant, un passage de l’article «Translation of a Sanscrit Inscription, copied from a Stone at Bo˘o˘ddha˘-Ga˘ya˘, by Mr. Wilmot, 1785. – Translated by Charles Wilkins», Asiatic Researches, t. I, Calcutta 1788, pp. 284–287. Allusion au chapitre sur Shrirama, pp. 135–145, ou` Paullin parle du temple Ramishvaram situe´ sur l’ıˆle de Ceylan (pp. 143–144). Allusion a` un passage de l’extrait du Shaster, qu’on trouve dans le chap. «Loix ce´re´monielles : ablutions, onction, culte des bocages» (pp. LXV-LXVI). «Ils sont oblige´s de se laver fre´quemment le corps dans les rivie`res. En entrant dans l’eau, ils doivent se graisser de boue, comme un embleˆme de la souillure & de la corruption naturelle de l’homme ; ensuite s’avanc¸ant plus loin, ils se tournent vers le soleil, pendant que le Bramman fait cette prie`re : ‘O Dieu, cet homme est aussi sale & souille´ que la boue de cette rivie`re, mais l’eau qui coule, peut le nettoyer de cette ordure ; veuille de la meˆme manie`re le purifier du pe´che´ !’ Alors celui qui se lave, se plonge trois fois dans le courant, pendant que le Bramman re´pe`te le nom de la rivie`re & des autres rivie`res fameuses pour ces sortes de purifications.» BC cite, en copiant la re´fe´rence chez Chardon, Chrysostome, Homeliæ XXXIV in Epistolam ad Hebraeos, en particulier l’home´lie XIII. Voir PG, t. LXIII, col. 101–110, et plus particulie`rement col. 107–108, le § 4, «Contra eos qui baptismum differebunt usque ad mortem», dont Chardon cite deux extraits en les traduisant. – Le second renvoi de´signe l’ouvrage de Charles Chardon, Histoire des Sacremens, ou de la manie`re dont ils ont e´te´ ce´le´bre´s & administre´s dans l’Eglise, & de l’usage qu’on en a fait depuis les tems des Apoˆtres jusqu’a` pre´sent, Paris : Desprez & Cavelier, 1745. BC vise le premier livre intitule´ «Du bapteˆme», en particulier la premie`re partie, chap. III, «De l’origine du cate´chumenat». Voir Theologiæ cursus completus, [...] accurante J. P. Migne, Paris : apud J. P. Migne, t. XX, 1841, col. 24– 31, et en particulier col. 28–29 avec les re´flexions sur les abus et les extraits de Chrysostome.

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ture de certains textes sacre´s ; ou, ce qui est plus avilissant encore pour la religion, et plus corrupteur pour les hommes, l’expiation s’obtient a` prix d’argent b, et l’indulgence, ou plutoˆt la connivence divine devient l’objet d’un trafic honteux. Ainsi, dans ces religions, la morale est corrompue, et par la de´pendance ou` elle se trouve de la volonte´ des dieux, et par l’arbitraire qui s’introduit dans le nombre et dans la classification des de´lits, et par les moyens meˆmes que cet arbitraire offre aux coupables, pour apaiser le ciel et pour reconque´rir l’innocence. Car il ne faut pas se le de´guiser, la religion, dans ses rapports, avec la morale, est toujours place´e entre deux pe´rils. Si elle de´clare qu’il y a des crimes inexpiables, elle jette les hommes dans le de´sespoir. Si elle offre l’expiation pour tous les crimes, elle encourage les coupables par l’espoir de l’impunite´.

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pe´che´s. Les brames attribuent aussi un pouvoir expiatoire a` certains mots re´pe´te´s cent fois, ou mille fois de suite, en les comptant sur leurs chapelets. (As. Res. V, 3561.) Lorsque les paroles myste´rieuses ont e´te´ prononce´es sur la victime, dit le chap. de sang que nous avons cite´ ailleurs, Brama et toutes les autres divinite´s s’assemblent en elle, et quelque pe´che´ que le sacrificateur ait commis, il devient pur et irre´prochable. (As. Res.) La re´pe´tition d’une sentence des Ve`des, absout des pe´che´s les plus graves. (Lois de Menou, XI, 2602.) Les Chinois qui professent la religion de Fo, croient qu’en re´pe´tant les mots Omito-fo, ils obtiennent une absolution ple´nie`re. Une donation de terres a` des hommes pieux, pour de saints pe´lerinages, ou pour les feˆtes solennelles, est le moyen, disent les brames, de traverser l’Oce´an sans fond de ce monde. Une donation de terres par les souverains est le ve´ritable pont de justice..... Celui qui, par avarice, porte atteinte a` ces donations, se rend coupable de cinq grands crimes, et habitera long-temps la demeure de punition.... Le donateur de terres demeure dans le ciel 60,000 ans ; celui qui s’en empare, demeure le meˆme temps aux enfers. (Extrait d’une donation de

8 l’innocence. ] l’innocence. dans les religions libres, la morale ame´liore la religion, dans les sacerdotales, la religion fausse la morale. phrase ajoute´e dans la marge Co 3294/5 8-p. 484.2 Car il ... sacerdotales. ] manque dans Co 3294/5, passage ajoute´ sur le 12 e placard car il ne faut pas ... de´clare tels crimes inexpiables, elle jette les hommes dans le de´sespoir : si elle de´clare expiables tous les crimes, elle ... l’impunite´. Co 3281 13 pe´che´s. ] pe´che´s. la puissance miraculeuse de ces syllabes est reconnue dans l’ezourvedam, quoique ce livre soit l’ouvrage d’un re´formateur. Co 3294/5 17–18 La re´pe´tition ... graves. ] Agamanhana, sentence des Ve`des, par la re´pe´tion de laquelle on se purifie des pe´che´s les plus graves. Co 3294/5 1

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BC re´sume un passage de l’article de H. T. Colebrooke «On the Religious Ceremonies of the Hindus, and of the Brahmens Especially», Asiatic Researches, t. V, London, 1799, pp. 345–368. Il s’agit d’une prie`re appele´e Ga´yatri, re´cite´e silencieusement «with the triliteral monossyllable», et re´pe´te´e cent ou mille fois. BC cite le texte du no 260 du chap. XI : «Or he shall be released from all deadly sins, if he fast three days, with his members mortified, and twice a day plunge into water, thrice repeating the text ‘aghamarshana’». Pre´ce`de un texte qui contient la meˆme ide´e : «Or, if he thrice repeat a ‘Sanhite´’ of the ‘Ve´das’, or a large portion of them with all the mantras and bra´hmanas, dwelling in a forest with subdued organs, and purified by three ‘para´cas’, je shall be set free from all sins how heinous soever» ([W. Jones, e´d.], Institutes of Hindu Law ; or Ordinances of Menu, according to the Gloss of Cullu´ca, Calcutta : s.e´d., MDCCXCIV, pp. 342–343).

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De la Religion, IV

Mais ce danger est beaucoup moins grand dans les religions libres que dans les sacerdotales. Quand la morale reste elle-meˆme, elle contient les expiations dans de justes limites : quand elle est asservie, il n’y a plus ni terres, trad. du samscrit ; Rech. As., I, 363–3671.) Les Parsis qui ne savent, ou ne peuvent pas remplir eux-meˆmes les ce´re´monies prescrites, paient un preˆtre pour s’en acquitter a` leur place ; et ces ce´re´monies, faites par procuration, ont la meˆme efficacite´. (ANQUET., V. aux Indes ; Boundehesch, I2.) L’ide´e de pe´nitence subit, en ge´ne´ral, dans les religions sacerdotales, une modification singulie`re, relativement a` la morale. Les Talapoins (voy. LALOUBE` RE, Relat. de Siam3) et les preˆtres des Druses (NIEB., Voy. en Arab. II, 4294) de´clarent que la pe´nitence est ne´cessaire ; mais que les profanes, loin de s’en charger eux-meˆmes, doivent s’en remettre a` des preˆtres qu’ils paient. Avec cette pre´caution, ils peuvent commettre impune´ment des pe´che´s que d’autres expient valablement en leur place. 1-p. 485.4. Mais ... la morale. ] la premie`re phrase ajoute´e sans la marge du placard 12. Suit une autre version imprime´e et crorrige´e de la fin du chap. Dans les 〈religions〉 un mot illis., peut-eˆtre tems libres, la morale un mot illis. ajoute´ dans l’interl. ame´liore pas moins ce deux derniers mots ajoute´s dans l’interl. le religion ; dans les sacerdotales, la religion fausse la morale. Co 3282 2-p. 485.4 Quand la morale ... la morale. ] manque dans Co 3294/5, a` l’exception de l’e´bauche qu’on trouve ci-dessus, variante a` la ligne 1-p. 485.4 7 I.) ] Cap. I Co 3294/5 1

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BC utilise le titre franc¸ais d’un recueil de traductions d’essais des Asiatic Researches, pour renvoyer a` l’e´dition d’une inscription indienne. Voir «An Indian Grant of Land in Y. C. 1018, literally translated from the Sanscrit, as explained by Ra´malo´chan Pandit, communicated by General Carnac», Asiatic Researches, t. I, Calcutta, 1788, pp. 357–367. Les citations qui ont servi pour le montage des extraits se lisent aux pages indique´es. Le renvoi a` Anquetil, Voyage en Inde, 1754–1762, et au Boundehesch n’est pas e´lucide´. Il y a dans la description du voyage plusieurs endroits qui parlent des Parsis, mais pas des ce´re´monies religieuses exe´cute´es par procuration. Ni l’e´dition franc¸aise (Zend-Avesta, ouvrage de Zoroastre, contenant les ide´es the´ologiques, physiques & morales de ce Le´gislateur, les ce´re´monies du culte religieux qu’il a e´tabli, & plusieurs traits importans relatifs a` l’ancienne histoire des Perses : traduit en Franc¸ois [...] par M. Anquetil du Perron, Paris : N. M. Tilliard, MDCCLXXI) ni la traduction allemande par Kleuker (Riga : Hartknoch, 17761777) ne permettent de retrouver ce que BC indique dans sa note. Le renvoi au Boundehesch, chap. I, ne peut convenir, puisque ce texte parle de l’origine du monde et de la rivalite´ entre Ormusd et Ahriman. L’index de l’ouvrage connaıˆt une entre´e qui dit que le preˆtre «rec¸oit un salaire de celui pour qui il prie» ; celle-ci renvoie a` un chapitre du Ieschts Sade´s (chap. XXIX) qui ne parle pas de cette chose. BC s’est probablement trompe´ en copiant la note, nous n’avons pas re´ussi a` corriger l’erreur. Voir Laloube`re, Du Royaume de Siam, troisie`me partie, chap. XXI, «Des principes de la Morale indienne», § 11, pp. 387–389. «Les se´culiers [...] n’observent pas les Preceptes [des Talopoins]. [...] ils rache´tent leurs pe´chez par leurs bonnes œuvres, qui consistent principalement a` faire l’aumoˆne aux Temples & aux Talopoins» (p. 388). BC renvoie a` Carsten Niebuhr, Reisebeschreibung nach Arabien und anderen umliegenden Ländern, Kopenhagen : Nicolaus Möller, 1774–1778, t. II, pp. 428–455. Niebuhr parle des Druses dans le chapitre intitule´ «Anmerkungen von Syrien und besonders von den Bewohnern des Berges Libanon» (voir l’e´dition moderne par Stig Rasmussen et Barthold Georg Niebuhr, Zürich : Manesse Verlag, 21993, pp. 724–736). BC n’a peut-eˆtre pas consulte´ l’ouvrage, mais copie´ ce renvoi dans une source non identifie´e. Les faits qu’il pre´tend pouvoir attester par Niebuhr (pe´nitence ; la religion de´le´gue´e aux preˆtres) ne se trouvent pas dans le texte de Niebuhr.

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Livre XII, chapitre XI – Rapports de la morale avec la religion

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re`gle ni frein. Il en est des expiations comme du droit de grace sous les gouvernements absolus et sous les gouvernements constitutionnels. On arrive donc toujours a` ce re´sultat : avec la liberte´, la morale ame´liore la religion ; avec l’esclavage, la religion fausse la morale.

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De la Religion, IV

Chapitre XII. Des ve´ritables rapports de la religion avec la morale.

En accordant cette pre´fe´rence aux cultes libres de toute domination, nous ne voulons point dire qu’il y en ait eu dans l’antiquite´ qui aient suffisamment consacre´ les ve´ritables rapports de la morale avec la religion. Ceux qui ont e´crit sur ce sujet, autrefois comme de nos jours, nous paraissent avoir commis une grande me´prise. Les le´gislateurs anciens ne distinguaient point entre la morale vulgaire, qui se borne a` maintenir l’ordre en prohibant les de´lits, et la morale plus de´licate et plus releve´e qui pre´vient le crime, en inspirant a` l’homme une disposition d’ame qui ne lui permet plus de le commettre. Les modernes ont suivi les anciens dans cette fausse route. Taˆchons d’en sortir. Pour pre´venir les attentats grossiers en les punissant, les lois et les chaˆtiments suffisent. C’est pour changer l’inte´rieur de l’homme, au lieu d’arreˆter seulement son bras, que le sentiment religieux est indispensable. En restreignant la religion a` un genre d’utilite´ mate´riel et borne´, on la de´grade de son rang ve´ritable. On a de la sorte toujours me´connu sa dignite´, sa saintete´, sa plus noble influence. Le mal ne s’est pas arreˆte´ la`. On a fait de la religion un code pe´nal, et de`s qu’elle est un code pe´nal, elle est bien pre`s de devenir un code arbitraire. De-la` tous les dangers que nous avons de´crits dans le chapitre pre´ce´dent. Ces dangers seraient plus terribles encore dans le the´isme, parce que la puissance du dieu du the´isme est toujours illimite´e. Les dogmes les plus salutaires, les pre´ceptes les plus purs ne peuvent re´parer le mal qu’entraıˆne toute doctrine qui infirme ainsi la re`gle e´ternelle. Un culte dont les divinite´s seraient cruelles et corrompues, mais qui laisserait a` la vertu le tribunal de son propre cœur, serait moins pernicieux qu’une religion dont le dieu, reveˆtu des qualite´s les plus admirables, pourrait changer la morale par un acte de sa volonte´. La religion n’est point un code pe´nal, elle n’est point un code arbitraire, elle est le rapport de la Divinite´ avec l’homme, avec ce qui le constitue un eˆtre moral et intelligent, c’est-a`-dire avec son ame, sa pense´e, sa volonte´. E´tablissement du texte : Manuscrit : BCU, Co 3294/5, fos 90–93 Imprime´ : De la Religion, conside´re´e dans sa source, ses formes et ses de´veloppements, t. IV, Paris : Chez Pichon et Didier, e´diteurs, 1831, pp. 501–509. dvrel4

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Les actions ne sont de sa sphe`re, que comme symptoˆmes de ces dispositions inte´rieures. La religion ne peut rien changer a` leur me´rite. Œuvre de Dieu, comme le sentiment religieux lui-meˆme, e´mane´e de la meˆme source, la morale est comme lui, incre´e´e, inde´pendante. Sa re`gle est place´e dans tous les cœurs. Elle se de´voile a` tous les esprits, a` mesure qu’ils s’e´clairent. L’eˆtre que le sentiment nous fait connaıˆtre, ne peut eˆtre servi ni satisfait par aucune exception a` cette re`gle. Ce serait vouloir le servir, comme nous servons les puissants de la terre, en flattant leur inte´reˆt du moment, pour un temps donne´, dans une circonstance critique. Sans doute, quand une religion est excellente, sa morale est beaucoup plus douce, plus nuance´e, plus conforme a` toutes les de´ licatesses de la sensibilite´, et par-la` plus e´quitable que ne peut l’eˆtre la justice humaine. Mais ce n’est pas la re`gle, ce n’est que l’application qui varie, parce que la religion distingue ce que n’aperc¸oit pas le regard de l’homme. Celui-ci ne prononce que sur les actions ; il ne connaıˆt qu’elles : il ne voit que leur exte´rieur, et par cela seul, ses jugements sont imparfaits et injustes. La meˆme action, commise par deux individus, dans deux circonstances, n’a jamais une valeur uniforme. La loi sociale ne peut de´meˆler ces nuances. Semblable au lit de Procruste, elle re´duit a` une mesure pareille des grandeurs ine´gales. La religion casse ses arreˆts pour un autre monde. Mais ce n’est pas que les bases diffe`rent, ce n’est pas que la religion puisse y rien innover ; c’est seulement qu’elle est mieux instruite ; et, sous ce rapport, elle n’est pas moins souvent un recours contre l’imperfection de la justice humaine, qu’une sanction des lois ge´ne´rales que cette justice a pour but de maintenir. Conside´re´ sous ce point de vue, le sentiment religieux ne peut jamais nuire a` la morale. Les ministres de la religion ne peuvent jamais, au nom de la divinite´ qu’ils enseignent, de´cider de la valeur des actions. La religion laisse aux lois leur juridiction sur les effets : elle se borne a` ame´liorer la cause. Elle fait ainsi le bien, que les lois humaines ont toujours en vain tente´ de produire : l’axiome souvent re´pe´te´, qu’il vaut mieux pre´venir les crimes que les punir, est une source intarissable de vexations et d’arbitraire, quand l’autorite´ temporelle veut re´gler son intervention d’apre`s cet axiome. Mais le sentiment religieux qui pe´ne`tre jusqu’au fond des ames, peut atteindre ce but, sans arbitraire et sans vexations. Les lois, dans leurs tentatives hasarde´es et qu’elles font en aveugles, sont force´es de prononcer sur des appa4 lui ] elle Co 3294/5 6 sentiment ] religion Co 3294/5 14 regard ] regard borne´ Co 3294/5 27 Les ministres de la religion ] ses ministres Co 3294/5 31 Elle ] La religion Co 3294/5 35 le sentiment religieux ] la religion Co 3294/5

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rences, de se gouverner d’apre`s des de´tails qu’elles isolent, d’e´couter des soupc¸ons que rien ne prouve, et, pour empeˆcher ce qui pourrait eˆtre criminel, elles punissent ce qui est encore innocent. Le sentiment embrasse l’ensemble, e´pure au lieu de contraindre, ennoblit au lieu de punir. C’est alors seulement qu’on peut re´soudre un proble`me qui a embarrasse´ tous les philosophes. Dans tous les temps, a` peine la morale avait-elle pe´ne´tre´ dans une croyance re ligieuse, que tous les hommes e´claire´s, frappe´s des inconve´nients que nous avons de´crits ci-dessus, se voyaient force´s d’en revenir a` se´parer la morale de la religion. Ils s’y prenaient de diverses manie`res. Ils se de´guisaient leurs propres intentions. Mais le re´sultat de leurs efforts e´tait toujours le meˆme. Comparez les axiomes des Stoı¨ciens de Rome, avec les discours des he´ros d’Home`re. Ce que re´pond Hector a` Polydamas, est pre´cise´ment ce qu’e´crit Se´ne`que. Ainsi, a` l’e´poque ou` la morale e´tait le plus unie au polythe´isme, le langage des philosophes redevenait pareil a` celui que tenaient les hommes vertueux, lorsque la morale faisait a` peine partie de cette croyance. Dans les religions fonde´es sur le the´isme, les philosophes les plus religieux ont donne´ a` la morale le nom de religion, en laissant de coˆte´ et en sacrifiant tout ce qui constituait la religion proprement dite, et tout ce qui lui attribuait sur la morale une supre´matie dangereuse. Tel a e´te´, dans ces derniers temps, le travail des the´ologiens les plus e´claire´s de l’Allemagne. C’e´tait une autre route vers le meˆme but. Mais, en envisageant la religion comme nous le faisons, en plac¸ant sa juridiction a` la hauteur qui lui est propre, en laissant a` la justice humaine ce qui est de son ressort, les de´tails et les effets, pour ne soumettre a` la religion que ce qui est de sa sphe`re, l’ensemble et les causes, vous e´chappez a` tous les dangers. Vous empeˆchez que ses ministres, interpre`tes infide`les de ses lois, ne les de´naturent : vous assurez a` la morale la sanction divine, en consacrant ne´anmoins son inde´pendance inviolable et primitive. Ici une conside´ration nous frappe. Il est si vrai que la marche de l’esprit humain est progressive ; il est si vrai que, malgre´ ses apparences re´trogrades et ses de´plorables aberrations, il s’e´le`ve toujours vers des notions plus e´pure´es ; que la religion, conc¸ue de la sorte, nous conduit a` de nouveaux perfectionnements de la doctrine la plus admirable a` laquelle l’homme soit arrive´, d’une doctrine qui, sous le polythe´isme, a e´te´ le point de re´union de toutes les ames nobles et fie`res, l’asile de toutes les vertus e´leve´es, et qui,

26–27 pour ne ... que ] pour soumettre ... la religion Co 3294/5 ministres de la religion Co 3294/5

28 ses ministres ] les

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sous le the´isme, a souvent fait envie a` ce qu’il y avait de plus distingue´ parmi les sages des temps modernes a : je veux dire le Stoı¨cisme. Le Stoı¨cisme e´tait un e´lan sublime de l’ame, fatigue´e de voir la morale dans la de´pendance d’hommes corrompus et de dieux e´goı¨stes, et s’efforc¸ant, en rompant tous ses liens avec les dieux et avec les hommes, de se placer dans une sphe`re au-dessus de toutes les injustices de la terre et du ciel meˆme. Mais il y avait dans le Stoı¨cisme une sorte d’effort qui rendait son influence moins salutaire et moins durable. Pour arriver a` cette liberte´ inte´rieure qui bravait tous les coups du sort, il fallait e´touffer en soi le germe de beaucoup d’e´motions douces et profondes. Le sentiment religieux, tel que nous avons taˆche´ de le faire concevoir, assure a` l’homme le meˆme asile, en lui conservant ces e´motions inse´parables de sa nature, et qui font le charme et la consolation de sa vie. La morale n’est a` la merci, ni des le´gislateurs qui parlent au nom du ciel, ni de ceux qui commandent a` la terre. L’homme est inde´pendant de tout ce qui pourrait froisser et pervertir la plus noble, ou, pour mieux dire, la seule noble partie de lui-meˆme : mais il jouit de cette inde´pendance, sous l’e´gide d’un dieu qui le comprend, l’approuve et l’estime. Il est fort, comme le Stoı¨cien, de la force de son ame : mais de plus il est fort de la force d’un appel constant et intime au centre de tout ce qu’il y a de bon. Cette ide´e porte dans le Stoı¨cisme la vie et la chaleur qui lui manquent. Elle contente cette portion de notre ame, qui se refuse a` l’impassibilite´, et que le Stoı¨cisme est force´ d’ane´antir, faute de pouvoir la satisfaire. La re´signation devient la compagne du courage. L’espoir est a` la fois son guide et sa re´compense. La re´signation en est plus ferme et le courage en est plus doux.

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Montesquieu.

10–11 Le sentiment ... tel ] la religion telle Co 3294/5 11 le faire ] la faire Co 3294/5 19–20 d’un appel ... bon. ] de son dieu. 〈ce dieu n’est plus un despote pareil aux puissans d’ici-bas, s’expliquant par des ministres, variant dans le code de ses lois, re´duisant ainsi la vertu a` s’affranchir de ces lois variables. ce dieu, de´gage´ de tous ces restes d’antropomorphisme, est le centre commun ou` se re´unissent au dessus de l’action du tems et de la partie du vice, toutes les ide´es de Justice, d’amour, de fierte´, de pitie´ qui, dans ce monde d’un Jour, composent la dignite´ de l’espe`ce humaine. il combine dans son essence ineffable l’impe´rissable tradition de tout ce qui est beau, grand et bon, a` travers L’avilissement et L’iniquite´ des sie`cles, et sa voix e´ternelle que ne couvre plus la voix des hommes, re´pond a` la vertu dans sa langue quand la langue de tout ce qui l’entoure est celle de la Bassesse et du crime.〉 Co 3294/5

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Textes comple´mentaires

[Manuscrits sur fiches pour le tome IV]

Introduction

Nous avons essaye´ d’utiliser les manuscrits sur fiches pour l’e´tablissement du texte du tome IV de De la Religion publie´ par Benjamin Constant. Il restait ne´anmoins un certain nombre de documents ne pouvant entrer dans l’apparat critique du texte, et ce pour plusieurs raisons. La plus importante et la plus fre´quente est que les divergences textuelles sont trop grandes. Constant, en retravaillant son texte, a souvent profonde´ment transforme´ son texte en changeant la formulation, en ajoutant des passages, en de´plac¸ant ou en supprimant des phrases, voire des passages entiers, de sorte que le nouveau texte est tellement e´loigne´ de la version manuscrite qu’une description analytique des variantes n’est pas envisageable dans le cadre limite´ de l’ap` cela s’ajoutent les lacunes importantes dans les maparat philologique. A nuscrits, la perte de beaucoup de folios, l’e´cartement parfois de chapitres entiers, le morcellement des textes a` la suite des restructurations de l’argumentation, faits et ope´rations qui ont transforme´ en profondeur les premie`res pre´sentations des ide´es. Ce qui nous reste n’est pourtant pas sans inte´reˆt. On peut reconstituer, en lisant les mate´riaux anciens meˆme dans leur e´tat fragmentaire, parfois la gene`se, presque toujours le de´veloppement de l’argumentation scientifique qui aboutira a` la the´orie de la religion telle qu’elle est expose´e dans les volumes publie´s. Pour permettre une orientation rapide dans les dossiers mutile´s, nous pre´sentons les textes en suivant l’ordre et la structure du volume publie´. L’annotation aborde les questions qui ne sont pas traite´es dans la partie principale du pre´sent volume. Les recoupements ne sont pas signale´s.

[Fiches pour le livre

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*195 196

IX,

chapitres III et

IV1]

L’antropomorphisme est commun au Polythe´isme Sacerdotal & au Polythe´isme inde´pendant : mais il y a cette diffe´rence que dans celui-ci l’homme concoit les Dieux, comme l’inte´reˆt, le sentiment & la raison qui se de´veloppent le portent a` les concevoir, tandis que dans l’autre, les Preˆtres les lui pre´sentent, comme il leur est utile qu’il [...] Il en re´sulte que la religion populaire des peuples soumis aux preˆtres est plus extravagante encore que la mythologie des peuples abandonne´s a´ euxmeˆmes, & demeure telle, en de´pit du progre`s de toutes les ide´es co-existantes.

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On ne pouvoit entrer dans plusieurs foreˆts de la Germanie sans s’etre fait charger de liens. Il e´toit de´fendu de se tenir debout ou meˆme a` genoux dans les Sanctuaires. On n’osoit en sortir qu’en se roulant sur la terre a. Ces

*203 204

[...] b Les Dieux des Indiens placent leur bonheur dans le repos : ceux des Scandinaves sont belliqueux & avides de carnage. a

203[?]

b

Tacit. Germ. c. 39. Mein. C. G. I. 473. [...] ce´re´monie qui e´toit conside´re´e come rendant les sermons plus inviolables. (Mein., C. G. II. 279–2932. & cit. Michael. Mos. Recht. II. 9. VI. 1473. E´tablissement du texte : Manuscrits : 1.) BCU, Co 3267, fos 1157 (fiche 194), 1155 (fiche 196), 1156 (fiche 200), 1154 (fiche 204) et 1148 (fiche 207) ; 2.) Co 4725, fos 46ro et 47ro.

10 du progre`s de ] d〈e〉u 〈la marche〉 progre`s ce mot dans l’interl. de 1

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Nous avons reproduit ici la totalite´ des fiches identifie´es pour les chap. III et IV du livre IX. quelques-unes ont e´te´ utilise´es dans l’apparat des variantes de ce chapitre. Les notes que l’on peut lire ici au bas de la page sont commente´es ci-dessus, pp. 96, n. 1, 305–306, n. 9 et 103, n. d et n. 4. Le renvoi a` Meiners, Kritische Geschichte cite le chap. sur les serments et les rites qui les accompagnet. La note indique encore qu’il veut consulter l’ouvrage de Michaelis, Mosaisches Recht, ou` ce proble`me est traite´ pour le monde juif. Le texte auquel se rapporte la note de BC e´tant perdu, nous pouvons dire seulement que le

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De la Religion, IV – Textes comple´mentaires

Les femmes, chez ces peuples, exercoient la me´decine ; aussi, dans l’Edda, le Me´decin des Dieux est-il une femme a. Ce sexe jouissoit dans les Nations Septentrionales d’une plus grande conside´ration que chez les Grecs b : & les [de´esses dans le Valhalla ont plus de cre´dit que dans l’Olympe.]

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Ce fut en leur pre´sence & probablement par leurs conseils, que Xerxes fit jeter des chaines dans l’Hellespont, apre`s que par son ordre on l’eut frappe´ de verges c.

247

De`s qu’on leur preˆte des volonte´s humaines, il faut admettre que les mortels peuvent re´sister a´ ces volonte´s, & comme le chatiment d’une telle re´sistance n’est pas imme´diat, on ne sauroit expliquer cette lenteur qu’en supposant le crime ignore´.

a b c

Edda 18e fable. Mallet introd. a` l’hist. du Danem. p. 272. He´rodot. VII. 35.

6–9 De`s ... ignore´. ] texte biffe´ par un trait vertical Co 4725

premier passage cite´ de Michaelis, Mosaisches Recht (2e partie, § 70, p. 9) qui traite des male´dictions prononce´es contre ceux qui n’observent pas les lois e´crites sur les pierres (Moı¨se, livre V, chap. XXVII, 9–25). Le second passage (6e partie, § 302, p. 147) parle des sermons prote´ge´s par des male´dictions contre le parjure.

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[Deux chapitres du manuscrit sur fiches pour le livre IX et Fragments du manuscrit sur fiches pour le livre X] 1826

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8. La fiche 900 du manuscrit sur fiches se lit sur un petit folio découpé du manuscrit qui a servi pour l’impression du tome II de De la Religion. On lit, de travers à côté du foliotage l’indication «1 Texte» qui permettait l’orientation dans ce manuscrit de grand format. Au bord supérieur, restes de lettres du texte à imprimer. La correction du foliotage signale des corrections (élargissement de l’argumentation). Le passage biffé s’explique par l’étoffement de la démonstration. Constant intercale plusieurs fiches supplémentaires tirées d’un manuscrit non identifié et repousse ainsi la phrase biffée quelques lignes plus loin.

Introduction

Le manuscrit sur fiches e´tait destine´ a` pre´parer la publication du tome IV, en l’occurrence celle du livre IX de ce volume. Nous avons de´crit, dans la mesure du possible, les ope´rations complexes de restructuration du texte qui ont parfois entraıˆne´ des changements assez importants des chapitres. Ces transformations sont en principe re´pertorie´es dans l’apparat philologique du livre IX, mais les diffe´rences entre les versions imprime´e et manuscrite des deux chapitres qui suivent sont trop importantes pour les de´crire dans un apparat. Nous nous sommes de´cide´s a` reproduire la version manuscrite se´pare´ment afin de pouvoir analyser les transformations plus commode´ment. Le premier des textes ne concerne que le deuxie`me chapitre du livre IX, le suivant le chapitre VII du meˆme livre et le chapitre II du livre XI. Les notes explicatives aideront a` trouver les passages de la version imprime´e et comple`teront au besoin les notes que nous avons jointes au texte publie´ par Constant. Le premier manuscrit sur fiches comprenait e´galement une se´rie de fiches pour le livre X du volume IV. Constant les a e´carte´es de ses dossiers parce que la restructuration du texte exigeait une nouvelle re´daction de cette partie de l’ouvrage. Nous avons de´couvert, en analysant les manuscrits concernant le tome IV de l’ouvrage, une petite se´rie de fiches dont on trouve des e´chos dans les chapitres II a` IV du livre X. Nous les reproduisons ci-dessous, donnant ainsi un modeste aperc¸u de l’ensemble du texte e´carte´, sans tenir compte de ces e´paves dans l’apparat critique de la version imprime´e. Pour pouvoir localiser les fragments dans les dossiers des manuscrits de Constant, on consultera le tableau de notre Introduction. Les notes explicatives que nous ajoutons comple`tent les notes du corps du livre. E´tablissement du texte Nous reproduisons, avec quelques restitutions hypothe´tiques de mots perdus, le texte du manuscrit sur fiches et, pour les fiches du livre X, le texte des fiches que nous avons re´ussi a` identifier. Manuscrits : 1. Pour le livre

IX,

chap. III : BCU, Co 3267, fos 874–913.

502

De la Religion, IV – Textes comple´mentaires

2. Pour le livre IX, chap. X et le livre XI : BCU, Co 3267, fos 1045–1199, Co 4725, fo 108 et BnF, NAF 18823, fo121. Manuscrit sur fiches, 190 fos, 109 pp. a. (pour les deux dossiers), formats variables, la plupart d’environ 150 × 110 mm. Les fiches sont nume´rote´es en haut, dans l’angle gauche. Date propose´e : 1826. Hofmann, Catalogue, IV/162 et IV/71. 3. Pour le livre X, chap. III et IV : BCU, Co 3267 (fiches 1199, 1208, 1210) ; Co 3293 (fiches 1192, 1193, 1226, 399, 452) ; Co 3468 (fiche 1195) ; Co 4727 (fiches 1206, 1207, 12..) ; BnF, NAF 18823, fo 66ro (fiche 1219). Manuscrit sur fiches, 13 fos, 13 pp. a., formats variables, la plupart d’environ 150 × 110 mm. Les fiches sont nume´rote´es en haut, dans l’angle gauche. Date propose´e : 1826. Hofmann, Catalogue, IV/162 (pour les fiches 1199, 1208, 1210 et 1219), IV/244 (pour la fiche 1195), IV/162 (pour les fiches 1206, 1207 et 12..), IV/62 (pour les fiches 1192, 1193, 1226, 399 et 452 ; pas analyse´es dans une entre´e distincte).

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Manuscrit sur fiches, Livre IX, chapitre III

[Fiches pour le livre

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chapitre

III]

Ch. 31. que la figure des dieux dans la Polythe´isme Sacerdotal reste stationnaire

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IX,

Nous avons vu chez les Grecs, la figure des dieux s’embellir a` mesure que les notions des adorateurs deviennent plus pures. Il n’est pas ainsi dans le Polythe´isme de´pendant des preˆtres. Les Egyptiens dit Synesius a, ne permettent ni aux ouvriers ni aux sculpteurs de repre´senter les Dieux, de peur qu’ils ne s’e´cartent de la forme recue. les Gaulois, au rapport de Denys d’Halicarnasse b, n’avoient pu se re´soudre, durant une longue suite de sie`cles, a` l’innovation la plus le´ge`re, soit dans leurs rites, soit dans les repre´sentations de leurs Dieux. Le motif de cette prohibition est facile a´ comprendre, & la pre´caution n’e´toit pas sans prudence. Si l’imagination avoit pu s’exercer en liberte´ sur la figure des Dieux, elle eut peut-eˆtre e´tendu son activite´ ingouvernable sur leurs qualite´s morales ou leurs attributs me´taphysiques. Et de la sorte une alte´ration le´ge`re en apparence auroit pu devenir la source fe´conde de modifications importantes & inde´finies. Il valoit mieux pour le Sacerdoce que cette imagination, asservie & dompte´e, se brisaˆt contre d’immuables Simulacres. Ces Dieux qui ne subissoient aucun changement, tandis que tout changeoit autour d’eux, ces Dieux sembloient de´fier le tems par leurs dehors antiques. a b

Syn. de provid. p. 73. Liv. VII. E´tablissement du texte : Manuscrit : BCU, Co 3267, fos 874–913 [=MF1].

2 Ch. 3. ] 〈Livre IX. de la re´sistance oppose´e par les preˆtres des religions sacerdotales a` tout perfectionnement des notions religieuses.〉 Ch. 3. MF1 3 que ] 〈de〉 que corr. au-dessus du mot MF1 4 reste stationnaire ] ajoute´ dans l’interligne MF1 8 Egyptiens ] 〈Preˆtres〉 Egyptiens MF1 1

` maints endroits, le texte du chap. III de MF1 se distingue beaucoup du texte corresponA dant (chap. II) de la version imprime´e. Les notes explicatives que nous ajoutons traitent ici seulement des matie`res qui ne sont pas aborde´es ci-dessus, au chap. II du livre IX.

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Monumens immobiles des sie`cles passe´s, ils remplissoient l’ame de respect, en paraissant sortir des te´ne`bres d’une nuit profonde. En conse´quence, tandis que nous verrons dans le Polythe´isme inde´pendant, l’antropomorphisme remplacer le fe´tichisme, & en effacer presque toutes les traces, ce fe´tichisme conserve´ en sous ordre dans les religions sacerdotales, se prolonge jusqu’au milieu de la civilisation. Partout ou` le Sacerdoce est l’autorite´ supreˆme, l’embellissement des formes divines est repousse´ comme un sacrile´ge. Les piques & les troncs d’arbres, adore´s dans les Gaules ne prirent a` aucune e´poque des contours plus e´le´gans & lors meˆme que les Gaulois se furent familiarise´s avec un luxe barbare, les monumens antiques a exite`rent toujours plus de ve´ne´ration que les statues dore´es qui s’e´le´ve´rent a´ cote´ d’eux b. Les Preˆtres, d’ailleurs, n’aimaient pas a` donner aux Dieux la figure humaine. Ils tendent toujours a` mettre entre l’essence divine & la nature de l’homme une distance incommensurable, & ne veulent pas que cette distance puisse eˆtre franchie. Ce que nous avons dit c du myste`re qui reside dans les animaux, les rend plus propres a inspirer des terreurs religieuses que des traits qui nous rappellent des eˆtres trop pareils a` nous. Les Egyptiens qui ont e´leve´ des temples a` presque toutes les cre´atures vivantes, n’ont jamais place´ l’homme parmi leurs Dieux animaux d a

b

c d

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De la Religion, IV – Textes comple´mentaires

Simulacraque mœsta Deorum arte carent, cæsisque extant informia truncis Phars. III. Et Robora numinis instar Barbarini. Claud. laud. Stiliconi. I. 128. Ces Statues dore´es existoient avant Ce´sar. (Mein. Cr. Gesch. I. 433. Polyb. II. 32.) On accusa ce conque´rant d’en avoir enleve´ plusieurs, & d’avoir se´duit ses concitoyens avec l’or de la Gaule. (Sueton. Cæs. 54.) Liv. II. ch. 2. p. 229. un seul endroit de Porphyre, (de abstin. IV. 9.) & d’Euse`be Prop. ev. III. 4–12 semble contredire cette assertion : mais en premier lieu, ces auteurs citent l’adoration de l’homme comme particulie`re a` une seule ville, nomme´e Anabin ; 2o, ils sont d’une e´poque beaucoup trop re´cente pour que te´moignage aıˆt une grande autorite´ : enfin les savans qui ont approfondi cette question avec scrupule & exactitude, ont e´te´ conduits a´ conjecturer que la Divinite´ d’Anabin n’e´toit pas un homme, mais un singe de l’espe`ce des cynoce´phales. (Paw, Eg. & Chin. I.) les Preˆtres d’Egypte, suivant He´rodote, (II. 142) disoient que durant les 11340 anne´es formant les 340 ge´ne´rations du re`gne des Piromis, ou gouvernement Sacerdotal aucun Dieu ne s’e´toit manifeste´ sous une forme humaine, & qu’on n’avoit rien vu

13 de ] 〈rent toujours plus〉 de MF1 34 contredire ] pre´ce`de suite de la note puis une ligne du texte principal 〈Grecques nous parlent des hommes〉 contredire MF1 39 He´rodote ] dans la marge gauche suite de la note une ligne du texte principal 〈de´ifie´s chez les Scythes sont tom=〉 He´rodote MF1

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Et les e´crivains Grecs qui nous parlent des hommes de´ifie´s chez les Scythes sont tombe´s dans une erreur maintenant bien connue a Le Sacerdoce est ne´anmoins contraint tot ou tard de ce´der a´ l’impulsion naturelle de l’esprit humain & il finit par repre´senter ses Divinite´s sous les traits de l’homme b. mais il aime a` rappeler dans ses ce´re´monies les vestiges des tems ante´rieurs les Preˆtres Egyptiens s’adaptoient dans leurs feˆtes des teˆtes de loups, de chiens, d’Eperviers, & les mages dans leurs myste`res, reveˆtus de peaux d’Ours, le lions & de tigres prenoient le nom de ces animaux. Les Pretres conservent a` leurs Dieux meˆmes quelques restes de leur ancienne & monstrueuse figure c.

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de pareil, soit dans les tems ante´rieurs soit dans les tems poste´rieurs a´ cette e´poque. Ils ajoutoient qu’avant ces 340 ge´ne´rations les Dieux avoient re´gne´ en Egypte, mais non pas sous une forme humaine. (He´rod. II. 144.) La fable Grecque d’Io, transforme´e en genisse, & reprenant sa figure premie`re pour eˆtre adore´e par les Egyptiens sous le nom d’Isis, (la lune) est peut eˆtre l’expression philosophique & alle´gorique du passage de l’astrolatrie du fe´tichisme, toujours combine´s, comme on l’a vu, a´ l’antropomorphisme, c’est a´ dire a l’adoration d’etres a forme humaine, presidant aux Astres. (Vogel 158) M. Pelloutier indique tre`s bien la source de cette erreur. (Hist. des Celtes. III. 14.) Les Scythes donnoient l’immortalite´ (c’e´toit l’expression consacre´e chez eux) a` ceux qui mourroient de mort violente, ainsi qu’a` ceux qu’ils sacrifioient. Or, donner l’immortalite´ qui, dans leur langue ne signifioit qu’envoyer aupre`s des Dieux des victimes qu’ils conside´roient comme leurs messagers, signifioit dans l’esprit des Grecs e´lever aux honneurs divines. Ainsi quand Lucien dit que les Scythes & les Ge´tes donnent l’immortalite´ a` qui il leur plait, & mettent au nombre des Dieux qui ils veulent, de la meˆme manie`re que Zamolxis qui n’e´toit qu’un esclave, le sens historique de ce passage est simplement que Zamolxis fut sacrifie´. Voir He´rodote sur Zamolxis. IV. 94–95. [...]1 Tous les Dieux e´toient aile´s dans la mythologie Phe´nicienne. (Euseb. præp. ev. I. Wagn. 287) Moloch avoit sur un corps d’homme une teˆte de veau (Beyer ad Selden. 257.) Derceto chez les Syriens est d’abord un poisson, puis devient une De´esse, moitie´ poisson, moitie´ femme. l’Oannes des Babyloniens est de meˆme un poisson avec des pieds d’homme & une voix humaine. (Hellad. ap. Phot. Nearissen2 ad Hellad. Chast. p. 24. Selden de D. S. III.) deux des enfans de Schiven aux Indes ont des figures d’animaux, le 1er celle d’un e´le´phant,

10 Les Pretres ... quelques ] 〈Mais il leur〉 Les Pretres ces deux derniers mots e´crits au-dessus des mots biffe´s conservent la marque du pluriel ajoute´e dans l’espace 〈toujours〉 quelques MF1 15 sa ] dans la marge gauche suite de la note une ligne du texte principal 〈be´s dans une erreur maintenant〉 sa MF1 19 M. ] dans la marge gauche note deux lignes du texte principal 〈bien connue. Il[s] ne font que confondre les〉 M. MF1 20 a` ceux ] 〈ainsiqu’a`〉 a` ceux MF1 22 Dieux ] dans la marge gauche note une ligne du texte principal incarnations fre´quentes dans certaines〉 Dieux MF1 25 nombre ] 〈rang〉 nombre MF1 26 de ] dans la marge gauche note une ligne du texte principal 〈religions Sacerdotales avec les a=〉 de MF1 1 2

La fiche 888bis avec le texte de la note n’a pas e´te´ retrouve´e. BC e´crit Nearissen. Il faut lire Ne´ardissen. Voir ci-dessus, p. 252.

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Ils inventent tantot des alle´gories & tantot des fables, pour expliquer ces opiniatres difformite´s. Lors de la guerre des Dieux, disent les Brames, Mahadeva ayant coupe´ la teˆte a` Dachsa, consentit quand la paix fut conclue, a` le rendre a` la vie : Mais la teˆte tranche´e pendant le combat etoit tombe´ dans le feu. Les Dieux en conse´quence prirent celle d’un bouc & la place`rent sur le corps de Dachsa qui ressuscita imme´diatement a ainsi le Sacerdoce proteste toujours contre l’attribution aux Dieux de la forme humaine. Dans les religions qu’il domine, cette forme n’est qu’accessoire. la signification myste´rieuse est l’ide´e essentielle b. Cette lutte constante du sacerdoce imprime a` la figure des Dieux du Polythe´isme Sacerdotal une quadruple empreinte. L’ancien fe´tichisme y contribue de ses vestiges qui sont consacre´s c. Alors la figure des Dieux n’a aucun rapport avec les fonctions qui lui sont attribue´es.

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le 2d celle d’un singe. Le 3e, la Badrakaly Indienne, appartient a` la cathe´gorie moins ancienne & plus complique´e des Divinite´s monstrueuses dont nous parlerons tout a` l’heure. le 4e est un de ces Dieux polyce´phales dont nous aurons aussi a´ parler. As. Res. VI. 476–477. Ainsi encore pour expliquer la figure de la De´esse Ganga (le Gange) moitie´ femme & moitie´ poisson, les Brames racontent tantot que c’est un de´luge ne´ de la sueur du front de Schiven, & me´tamorphose´ en une femme, qu’il a place´e sur sa teˆte, pour qu’elle ne submergeaˆt pas le monde (Mayer, Myth. Lex. Art. Ganga.) tantot que c’est une de´esse a` mille visages epouse de Schiven &ca (Asiat. Res. VI. 476–477. v. pour d’autres fables Indiennes du meˆme genre Hamilton’s new account of the East Ind. I. 268–277. Sonnerat. I. 153–154. Kempfer hist. du Japon, trad. allem. II. 310.) C’est le contraire dans les religions inde´pendantes du sacerdoce. En Gre`ce, p. ex., la beaute´ e´toit le but. le sens symbolique n’e´toit place´ qu’en 2de ligne, & ce sens symbolique e´toit fre´quemment sacrifie´ par l’artiste a´ l’avantage de l’art (V. Winkelmann1.) Chez les Etrusques, peuple puissant & police´, mais domine´ par des corporations de Pontifes, l’introduction des arts de la Gre`ce ne peut changer entie`rement les grossie`res usages de leurs antiques divinite´s. Nous apprenons de Time´e, cite´ pas Denys d’Halicarnasse (I. 15) que les Pe´nates de Lavinium n’e´toient pas repre´sente´s sous la figure de l’homme, mais sous la forme de petits caduce´s de fer ou d’airain. Staro, Dieu que les frisons invoquoient contre les inondations & les tempeˆtes n’e´toit autre chose qu’un morceau de bois. Sulzer. 291.

11 Cette ] 〈de cette re´sistance〉 Cette MF1 16 singe ] Suite de la note puis singe MF1 20 tantot ] dans la marge gauche suite de la note puis tantot MF1 22 Mayer ... Ganga. ] sous forme d’une note au bas de la page ; la note a de BC faisait partie. dans un premier temps, du texte principal MF1 23–25 Asiat. ... 310. ] meˆme observation que pour la variante a` la ligne 22 MF1 29 Chez ] 〈consacre´s (1) Alors la figure des Dieux〉 Chez MF1 32 sous ] dans la marge note puis 〈n’a aucun rapport avec les fonctions qui〉 sous MF1 1

Le renvoi a` Johann Joachim Winckelmann cite son the´ore`me le plus connu que l’on trouve de`s 1755 dans ses e´crits. Il se peut que BC pense ici a` des passages programmatiques affirmant que la beaute´ e´tait le but de l’art grec. Voir p. ex. l’e´crit Versuch einer Allegorie, besonders für die Kunst (Winckelmanns Werke, t. II, Dresden : Walthersche Hofbuchhandlung, 1808, p. 450) : «zu der Zeit, da die Schönheit noch nicht der höchste Endzweck ihrer

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Ainsi Poule´ar, le Dieu Indien du mariage, a, l’on ne sait pourquoi une teˆte d’e´le´phant a. l’esprit symbolique, plus raffine´, exprime les qualite´s divines par des attributs qui les indiquent. la pe´ne´tration est de´signe´e par une teˆte d’aigle, la ve´locite´ par le corps d’un cheval ou par des aıˆles attache´es au corps d’un homme, la force par plusieurs bras, d’autres faculte´s par d’autres embleˆmes b a

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Laflotte, ess. hist. Sur l’Inde, p. 1901. Les animaux qu’on voit toujours a` la suite des Divinite´s Indiennes sont des restes de fe´tichisme. Quand l’adoration des lances tomba en de´sue´tude chez les peuples du Nord, les Dieux furent repre´sente´s une lance en main. Quand d’autres nations abjure´rent le Culte des Animaux, elles place`rent leurs Dieux sur des Animaux. Derma, par exemple, sous la figure d’un bœuf, sert de monture a` Schiven. (Paulin. Syst. Braman. Sonnerat, I.) dans les deux cas, ce qui avait e´te´ la figure du Dieu devient son attribut ou son symbole. (Montfauc. Antiq. expl. I. 22.) Apis & Mnevis, d’abord fe´tiches pour leur propre compte, devinrent les symboles d’Osiris & d’Isis, tantot leurs vivantes images, (Plut. de Isid.) tantot l’enveloppe mate´rielle sous laquelle ces Divinite´s se plaisent a` se´journer. (Diod. I. 85.) Les Indiens de nos jours sont encore tellement imbus de ces ide´es que voyant quelques Saints du Christianisme accompagne´s d’un animal, ils imaginent sur ces Saints des fables analogues. (Gage, voy. en 1625 &ca III. 1092) Porphyre, d’apre`s Bardesanes (de Styge, ap. Stob. phys. I. 4. v. Paulin. Syst. Braman. p. 27.) nous donne une description de Brama qui de´note les efforts de l’esprit Symbolique pour exprimer dans la figure des Dieux toutes leurs fonctions & toutes leurs forces. Ce cre´ateur du monde est repre´sente´, non seule ment comme Hermaphrodite, mais come entoure´ de tous les objets sur lesquels s’e´tend son empire. a´ sa droite le soleil, a´ sa gauche la lune, sur ses deux bras e´tendus en croix, on voit des anges, des e´toiles, les diffe´rentes parties du monde, le Ciel, la terre, la mer, les montagnes, les fleuves, les animaux, les plantes, toute la nature. (Creutz. I. 163–1683) le Saturne Phe´nicien avoit 4 yeux par devant & 4 par derrie`re, deux

1 Ainsi ] 〈leur sont assigne´es.〉 Ainsi MF1 11 d’autres ] dans la marge gauche suite de la note puis 〈L’esprit symbolique, plus refine´,〉 d’autres MF1 14 Antiq. ] dans la marge gauche suite de la note puis 〈exprime les qualite´s divines par des attributs qui les indiquent. la pe´ne´tration est de´signe´e par une teˆte d’aigle, la ve´locite´〉 Antiq. MF1 17 Les ] dans la marge gauche Suite de la note puis Les MF1 19 Gage ... 109 ] ajoute´ au texte sous la forme d’une note ; la phrase pre´ce´dente appartenait a` l’origine au texte principal MF1 20 Porphyre ] dans la marge gauche note puis 〈par le corps d’un cheval ou par des aıˆles attache´es au corps d’un homme, la force par plusieurs bras, d’autres faculte´s par d’autres embleˆmes〉 Porphyre MF1 23 seulement comme ] devant ces deux mots 〈Viennent ensuite les alle´gories〉 seulement comme MF1

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Künstler war». La ne´gation («noch nicht») montre que l’axiome de Winckelmann se preˆte a` de´limiter des e´poques de l’histoire de l’art. La Flotte, Essais historiques sur l’Inde ; BC renvoie a` la le´gende de Vinaguien (pp. 188– 190), dont le nom signifie «qui n’a point de pe`re» (p. 189) et qui porte une teˆte d’e´le´phant parce que Routren lui a coupe´ la teˆte dans un acce`s de cole`re. Thomas Gage, Nouvelle relation, contenant les voyages de Thomas Gage, dans la Nouvelle Espagne, Amsterdam : Paul Marret, 1699, t. II, p. 109, parle des imaginations fabuleuses des habitants des Indes occidentales qui inventent, par analogie a` leur croyance selon laquelle leur esprit familier vit dans une certaine beˆte, des fables sur les saints accompagne´s de leurs beˆtes emble´matiques, «que ces animaux-la` e´toient leurs Esprits familiers». BC supprime ce renvoi dans son e´dition. Bardesanes et Porphyre sont pourtant cite´s

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De la Religion, IV – Textes comple´mentaires

Viennent ensuite les alle´gories Scientifiques, portion cache´e des cultes Sacerdotaux. Le Jupiter Ammon en Ethiopie, avec des cornes de belier, Pan aux pieds de bouc dans l’ancien Latium, le Phallus adhe´rent aux T[h]ermes chez les plumes sur la teˆte, quatre ailes dont deux e´toient replie´es & deux e´tendues ; le nombre de ses yeux signifoit, disoient les Preˆtres, sa surveillance non interrompue. L’une de ses plumes indiquoit sa supre´matie sur le monde intellectuel, l’autre son autorite´ sur l’univers physique ; ses aıˆles e´tendues & replie´es de´signoient qu’il e´toit le principe du mouvement comme du repos. (Görres, II. 4601.) Des explications Sacerdotales de la meˆme subtilite´ pourroient rendre raison de la figure d’Erlick-Khan, le Dieu des Enfers, dans la Mythologie Lamaı¨que, repre´sente´ avec la crinie`re d’un Lion, symbole de la force, le visage d’un Buffle ou d’un bouc, un e´norme Phallus, embleˆme de la fe´condite´ qui puise dans la mort les germes re´producteurs, deux teˆtes, pour indiquer l’intelligence & 4 bras, signe de l’accomplisse ment ine´vitable de sa volonte´. (Pallas, Nachr. ueb. die mongol. Voelkersch. II. 54.) Dagon, dont il est parle´ dans l’e´criture, qui, comme beaucoup d’autres Dieux, e´toit un poisson devenu homme jusqu’a` la moitie´ du Corps, avoit e´te´ traduit en symbole par des preˆtres. Sa queue de poisson de´signoit la qualite´ fecondante. (Selden. de D. S. 262–263. Guasco, de l’usage des Statues) Aux Indes, le Dieu de la guerre, Scando ou Cartikeyo a six bras, (Schleg. p. 1482.) Eswara 16, Dourga 10. (Laflotte p. 2093.) Bhavani en a 8. Elle tient des sabres, des e´pe´es, des piques & des haches. Buddha se montre a´ ceux qu’il favorise avec 4 bras. Agni ou Agnini le Dieu du feu, ou le purificateur en a le meˆme nombre. (Sonnerat. I. 157.) Brama est toujours repre´sente´ avec plusieurs bras & plusieurs teˆtes, & telle est la disposition des indiens a se figurer les intelligences supe´rieures comme Polycephales, qu’ils ont invente´ des Dieux a` 36 teˆtes formant trois e´tages ou trois rangs les une au dessus des autres. Cenrezi, Dieu du Tibet, a onze teˆtes en forme de pyramide. Celle qui en fait la pointe est entoure´e de rayons & a un visage enflamme´, autour duquel flottent des cheveux bleus de Ciel. Il a neuf bras ; quatre portent une fleur, un arc, des fleˆches, & un vase plein d’eau. trois tiennent un chapelet, une roue & une bague. Les deux derniers joignent les mains comme pour prier. (Pallas Samml. hist. Nachr. ueber die Mong. Völk.) Ce penchant a´ se cre´er des divinite´s Polyce´phales n’est point particulier aux peuples du midi & de l’orient. Suantavith, le Dieu du soleil chez les peuples slaves, avoit 4 teˆtes & regardoit a´ la fois les 4 parties du monde. Rugiavith, le Dieu de la guerre, avoit sept visages, Porevith en avoit cinq, & Porenetz, inde´pendament de ses quatre teˆtes avoit un visage sur la poitrine, & tenant son menton de la main droite, il touchoit aux e´toiles de la gauche. (Sax. Grammat. hist. Danic. XIV. 319–327.)

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7 l’autre ] dans la marge gauche suite de la note puis 〈Scientifiques, portion cache´e des Cultes〉 l’autre MF1 14 ment ] dans la marge gauche suite de la note puis 〈Sacerdotaux. Le Jupiter Ammon〉 ment MF1 19 tient ] dans la marge gauche suite de la note puis 〈en Ethiopie, avec des cornes de〉 tient MF1 26 cheveux ] devant ce mot 〈be´lier, Pan aux pieds de bouc dans〉 cheveux MF1 27 neuf ] 〈huit〉 neuf MF1 33 de ses ] devant ces mots 〈l’ancien Latium le Phallus adhe´rent〉 de ses MF1

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d’apre`s Creuzer, Symbolik, t. I, p. 168, n. 210 ; la description de Brama est une traduction du texte de Creuzer qu’on trouve a` cet endroit (pp. 168–169). Renvoi supprime´ dans l’e´dition. Voir Görres, Mythengeschichte, e´d. de 1935, pp. 216–217. BC reprend la description et l’explication du dieu phe´nicien qu’il trouve chez Görres. Renvoi fautif supprime´ dans l’e´dition ; le nom du dieu indien de la guerre y est corrige´ en Scanda et Cartikeya. Voir aussi (p. 88) la variante aux lignes 7–8. Le renvoi est faux. La Flotte ne parle d’aucun des dieux mentionne´s dans cette phrase.

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Gaulois, le Bacchus avec une teˆte de Taureau chez les Egyptiens a. la lune, femme a` trois visages chez les Perses la teˆte entoure´e de serpens monstrueux b,) Mithras son e´poux avec le visage d’un lion c, de´montrent l’amalgame du fe´tichisme avec la Cosmogonie ou les decouvertes astronomiques d. Enfin, ces divers e´le´mens sont mis en œuvre & modifie´s par le desir toujours inhe´rent au sacerdoce, de remplir l’ame du peuple de surprise & de terreur. La figure de Chandica ou Cali, aux Indes, surnomme´e la De´esse aux dents horribles, a manifestement ce but. Lorsqu’on lui offre des sacrifices, dit le Calicapuran e, on doit placer en ide´e a` cote´ d’elle, deux assistans, qui ont trois yeux enflamme´s, le corps jaune, la teˆte rouge, des oreilles monstrueuses, des dents longues & menacantes, un collier de cranes humains, & qui arme´s de Tridens & de haches, tiennent dans la main droite des teˆtes coupe´es, & dans la gauche des vases remplis de sang. a

900ter

b c

900V

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d

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e

Denon Voy. en Eg. pl. 125, no 15. la plupart des Divinite´s Egyptiennes ont une teˆte d’animal. Isis parait quelquefois la teˆte couverte de la queue d’une genisse, ou avec sa teˆte ou ses cornes, (Herod. II. 41–48) & comme pour mieux indiquer la combinaison du fe´tichisme & du Culte Astronomique, on place au dessus & a` cote´ de sa teˆte trois e´toiles. (Dactyl. Stosch. II. Tab. 8. no42.) l’Astarte´ phe´nicienne a la meˆme parure, & comme Isis, de´signe la lune. (Dupuis, III. 471.) firmicus de error. prof. relig. cap. 5. Lactant. in Statio. Saturne, chez les Chalde´ens, a une figure d’homme a` teˆte de singe, & une queue de sanglier. Jupiter a une teˆte d’e´pervier. Le soleil est un homme a deux teˆtes, avec une queue de Dragon. Mercure a le corps & la queue d’un poisson, avec une teˆte de sanglier, surmonte´e d’une couronne. L’un de ses bras est blanc, l’autre noir. On peut voir les explications astronomiques de ces diverses figures dans Görres. I. 291–2951. On adorait a` Ceylan six Statues monstrueuses avec une constellation particulie`re. (Knox, historical relation of the Isle of Ceylan. p. 36) As. Res. V. 371–390.

1 Egyptiens. ] Egyptiens, 〈de´montrent l’amalgame du fe´tichisme avec la Cosmogonie, ou les decouvertes astronomiques.〉 MF1 17 Divinite´s ] dans la marge gauche suite de la note puis, d’abord trois lignes de l’ancien texte principal 〈aux Thermes, chez les Gaulois, le Bacchus avec une teˆte de taureau chez les Egyptiens (1) la lune, femme a` trois visages〉 suit le texte de la 20 on ] note 〈(1)Plutarch. Denon Voy. en Eg. pl. 125 no 15. la plupart des〉 Divinite´s MF1 dans la marge gauche suite de la note puis 〈chez les Perses, la teˆte entoure´e de serpens monstrueux, Mithras, son e´poux, avec le visage d’un lion (2), de´montrent〉 on MF1 22 471. ] au bas de la fiche 900 ter suivent les notes b et c, biffe´es ; BC les copie sur la fiche 900 iv 25 Saturne ] dans la marge gauche note puis 〈l’amalgame du fe´tichisme avec la physique ou l’astronomie (1)〉 Saturne MF1 29 de ces ] dans la marge gauche suite de la note puis 〈C’est la ce qui explique cette foule de figures〉 de ce MF1 1

Voir Görres, Mythengeschichte, e´d. de 1935, pp. 143–146.

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L’habitude de pre´senter ainsi des formes bizarres a` l’adoration publique, entraine les Preˆtres & les Artistes qui travaillent sous leurs ordres a` en introduire de pareilles dans tous leurs ouvrages. Dela` cette foule d’animaux imaginaires qu’on rencontre dans toutes les mythologies Sacerdotales, tandis qu’il n’y en a point qui soient indige´nes dans le Polythe´isme grec a. Le soin que prend le Sacerdoce ne consigne ses de´couvertes ou les doctrines qu’au moyen d’une e´criture que le vulgaire ne puisse comprendre, contribue aussi a multiplier ces representations fantastiques. Les hie´roglyphes sacerdoteaux, exprimant des ide´es par des images, & les animaux fournissent ne´cessairement, dans leur partie comme dans leur ensemble, plusieurs de ces images, elles se combinent entrelles, suivent la se´rie d’ide´es qu’il faut exprimer, & il doit s’ensuivre les amalgames les plus e´tranges & les plus oppose´s entr’eux. Nouvelle preuve que tout est double, triple, quadruple, dans les religions soumises aux preˆtres & que l’erreur est au fond de toute explication unique ou exclusive. Quelquefois, le sentiment religieux, par un e´lan tout a` fait disproportionne´e avec l’e´poque, a le desir & le besoin de rejeter tout simulacre b. L’ame divine ce que l’esprit ne concoit pas. a

903IV

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De la Religion, IV – Textes comple´mentaires

Dans les ruines de Persepolis, ville dont les de´bris attestent un luxe porte´ au plus haut point de rafinement, on ne trouve aucune forme pure & re´gulie`re ; mais partout l’œuil est fatigue´ de combinaisons fantastiques & monstrueuses, d’animaux par exemple qui ont le Corps d’un lion, les pieds d’un cheval, des aıˆles & la teˆte d’un homme a´ longue barbe, coı¨ffe´ d’un Diadeˆme & d’une tiare. (Voy. de Chardin.) Il nous importe peu de savoir si ces figures e´toient indige`nes en Perse ou plutot en Me´die, ou si, pour y arriver, elles traverserent la chaine de montagnes qui separe la Bactriane de l’Inde. L’esprit sacerdotal dominoit egalement dans ces diffe´rens pays. (Heeren I. 295.) V. l’assertion positive d’He´rodote, que les anciens Perses regardoient comme une folie de repre´senter les Dieux par des Simulacres (I. 131. Cicer. de Leg. II.) C’est a` tort qu’on a cru que cette haine des Simulacres etoit particulie`re aux peuples du Nord. Le sentiment religieux etant le meˆme partout, a fait partout les meˆmes tentatives, & les preˆtres se sont preˆte´s a ces tentatives en en profitant & en les interpre´tant. a` Hie´ropolis, ou` tous les autres Dieux avoient des Statues on voyoit deux trones vacans reserve´s au soleil & a` la lune. Lorsque l’auteur du traite´ sur la De´esse de Syrie, attribue´ a´ Lucien, s’informa du motif de cette diffe´rence, on lui re´pondit que ces Divinite´s, toujours visibles au haut des Cieux n’avoient pas besoin d’eˆtre pre´sente´es aux regards des hommes, tandis qu’il falloit des Simulacres pour les Dieux que l’œuil humain n’apercevoit nulle part.

14 amalgames les ] mots ajoute´s dans l’interl. MF1 plus oppose´s entr’eux ] plus 〈chimeriques amalgames〉 oppose´s entr’eux corr. dans l’interl. sup. MF1 24 d’un ] dans la 27 l’Inde ] marge gauche suite de la note puis 〈5o Les hieroglyphes sacerdo=〉 d’un MF1 dans la marge gauche suite de la note puis l’Inde MF1 30 C’est ] dans la marge gauche suite de la note puis 〈Mais l’erreur a commence´, lorsque ces e´cri=〉 suite de la note 〈religieux e´tant le meˆme partout a〉 c’est MF1 34 on ] dans la marge gauche suite de la note puis 〈vains ont voulu transformer en notion〉 on MF1

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Les Preˆtres alors s’emparent de ce mouvement, pour le faconner a´ leur gre´. Il peut leur eˆtre utile, en ce qu’ils sont plus surement les Seuls interme´diaires entre les hommes & des divinite´s invisibles. Mais comme cette notion est hors de toute proportion avec l’e´tat des lumie`res, elle ne sauroit se soutenir. L’usage des simulacres a toujours triomphe´. On ne citeroit pas un exemple d’un peuple qui n’ait jamais eu de Simulacres, bien qu’on en puisse citer plusieurs, chez lesquels la haine des Simulacres e´toit un principe religieux. Ce n’est donc pas une erreur complette que celle des e´crivains qui ont ce´le´bre´ comme une preuve d’ide´e e´pure´es cette repugnance a` donner auc Dieux une forme mate´rielle, repugnance dont on voit des traces chez les Germains, les Gaulois, les Scythes, les Ge´tes & surtout chez les Perses, & qui ne s’arreˆte sur les frontie`res de l’Inde que pour faire place a` l’adoration, non pas de Dieux semblables a´ l’homme, mais de Dieux animaux ou idoles monstrueuses. Mais l’erreur a commence´, lorsqu’ils ont voulu transformer en Notion de l’Esprit un sentiment vague. En examinant la question de plus pre`s, ils auroient vu que l’intelligence n’e´tant pas assez forte pour se maintenir a` cette hauteur, Il n’y avoit aucun avantage a` ce que le Sacerdoce reduisit en maxime la haine des simulacres puisque d’une part cette maxime e´toit constamment dementie par la pratique, & que de l’autre les dieux invisibles valoient beaucoup moins entre les mains des Preˆtres, comme nous le prouverons dans les chapitres suivans que les Dieux visibles du Polythe´isme Grec.

24 nous ... suivans ] nous 〈allons〉 le prouver mot corrige´ pour e´crire prouverons dans les chapitres suivans ces cinq derniers mots ajoute´s dans l’interl. sup. MF1

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De la Religion, IV – Textes comple´mentaires

[Fiches pour le livre

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chapitre X, et le livre XI]

Chap. 10. des notions sur l’autre vie dans les religions domine´es par les Preˆtres1

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IX,

Pour peu qu’on re´fle´chisse sur la nature du Polythe´isme Sacerdotal, On pre´voit aisement que les notions sur l’autre vie doivent y tenir encore plus de place & que cette place doit eˆtre plus importante encore que dans le Polythe´isme inde´pendant de la direction du Sacerdoce. Si l’homme raisonnoit conse´quemment l’ide´e de la mort & celle des chances qui peuvent la suivre seroient toujours presentes a` sa pense´e. L’insouciance avec laquelle il les perd de vue est un des plus grands myste`res de son organisation morale. Chacun sait qu’une heure l’attend qui le separera de tout ce qu’il a vu, & s’il aime quelque chose de tout ce qu’il aime. Chacun sait que cette heure sera terrible, accompagne´e de convulsions d’un funeste augure, & de douleurs inconnues, que nul n’a pu de´crire & qu’aucun eˆtre vivant ne peut conjecturer. ` ces douleurs, a` ces convulsions, apres un dernier effort succe`de un silence A qui ne doit jamais eˆtre interrompu. De ce gouffre, ou` se sont accumule´es depuis tant de siecles tant de cre´atures d’espe`ces diverses, les unes fortes & audacieuses, les autres sensibles & passionne´es, mais toutes attache´es a` cette terre par tant d’inte´reˆts & tant de liens, Aucun cri ne s’est e´chappe´, aucune instruction ne nous est parvenue du sein de l’abyme, si riche d’expe´riences englouties. La terre s’entrouvre & se taıˆt en se renfermant, & sa surface, redevenant uniforme, laisse nos questions sans re´ponse come nos regrets sans cosolation. Cependant l’homme oublie cette mort que tout lui rappelle : chaque nouvel E´tablissement du texte : Manuscrits : 1.) BCU, Co 3267, fos 1045–1199 ; 3.) BnF, NAF 18823, fo 121 [=MF1]. Co 4725, fo 108 ;

2.) BCU,

3 des ... vie ] des 〈meˆmes〉 notions sur l’autre vie les trois derniers mots dans l’interl. sup. MF1 5 encore ] 〈beaucoup〉 encore corr. dans l’interl. sup. MF1 6 eˆtre plus ] eˆtre 〈encore〉 plus le mot biffe´ dans l’interl. sup. MF1 7 du Sacerdoce ] du ce mot ajoute´ dans l’interl. sacerdo〈tale〉ce la dernie`re syllabe dans l’interl. MF1 25 come ] 〈&〉 come corr. dans l’interl. MF1 1

Le texte des fiches de ce chapitre sera redistribue´ dans la version imprime´e. On en trouve des passages dans le livre IX, chap. VII, et dans le livre XI, chap. II.

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exemple semble surprendre, & plutot l’effrayer que le convaincre. La religion se ressent elle meˆme de cette inexplicable insouciance, & nous venons de voir, dans le Polythe´isme Home´rique, la mort envisage´e comme un e´ve´nement extraordinaire, & le se´jour des ombres n’eˆtre que la copie efface´e du monde vivant. Il n’en est pas de meˆme dans le Polythe´isme Sacerdotal. La vie future est en quelque sorte le domaine particulier du Sacerdoce. Comme il en dispose en liberte´, c’est vers lui qu’il dirige tous les regards, toutes les espe´rances & toutes les craintes. On sait que les Egyptiens fesoient profession de dedaigner cette vie. Ils n’attachoient d’importance qu’a` celle qui commence apre`s le tre´pas. Ils conside´roient les maisons que l’homme batit sur la terre comme des hotelleries d’un jour. les tombeaux e´toient pour eux les demeures par excellece, les maisons e´ternelles a. Chez les Gaulois & les Scandinaves, ou` l’esprit belliqueux se combinait avec la domination sacerdotale, la mort parait non seulement le terme, mais le but de cette vie. Ils ne s’efforcent de triompher de leurs adversaires que pour tomber a´ leur tour, environne´s de plus de gloire[.] le succe´s ne fait que les inviter a` chercher ailleurs le tre´pas qu’ils sollicitent, & le guerrier invencible qui n’a pu le recevoir de la main de ses ennemis, est re´duit a´ se le donner se sa propre main. Les Indiens accordent a´ la vie future la meˆme pre´fe´rence sur cette vie : l’ame & le but de toutes leurs institutions, de toutes leurs loix, jusques dans les de´tails les plus minutieux, le motif de´terminant de toutes leurs actions sur la terre, c est la conviction profonde, ine´branlable qu’ils verront s’ouvrir devant eux apre`s leur mort une e´ternite´ de plaisir ou de peine, de re´compenses ou de chatimens. mais cette opinion prend chez eux une autre forme que chez les peuples Septentrionaux. Ni les moyens qu’ils employent, ni le prix qu ils se proposent ne sont les meˆmes. Les moyens ne sont pas une mort guerrie`re, mais une vie centemplative : le prix n’est pas une immortalite´ de plaisirs, de combats & de feˆtes, mais une a

Diod. 1. comparez sur l’e´tat des morts chez les Egyptiens Herodote II. 123, & Pausanias, Menen. 32. 4. que Creutzer dit se contredire.

25–29 l’ame ... chatimens ] passage ajoute´ au bas de la fiche, pre´ce´de´ d’une croix pour marquer la place ou` il doit aller MF1

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De la Religion, IV – Textes comple´mentaires

sorte d’ane´antissement, une e´ternelle apathie, une absence complette de toute individualite´ a. Ce n’est pas aux preˆtres, mais au climats qu’il faut attribuer cette diffe´rence. l’activite´ parait aux hommes du Nord inse´parable meˆme d’une existence ide´ale, tandis que le sentiment de la vie, quelque mollement qu’elle s’e´coule, est encore un fardeau pour les habitans du midi. Cette fatique de l’action de vivre, sous le plus beau ciel, au milieu de toutes les jouissances, est une choses assez remarquable. recommencer pour l’e´ternite´ les occupations terrestres est l’espoir le plus vif des peuples qui luttent sur la terre contre une destine´e rigoureuse, & qui conquie`rent avec effort une subsistance toujours dispute´e a´ travers les pe´rils & les obstacles. Ne plus revenir dans ce monde est l’unique de´sir de ces nations en apparence favorise´es, que la fertilite´ de leur sol & la douceur de leur climat semblent pre´server de toute peine & dispenser de tout travail. C’est que le travail, le besoin, les dangers nous attachent a` la vie, en nous offrant a´ chaque instant des luttes qu’il faut soutenir, un but qu’il faut atteindre, tandis que le repos, nous livrant a` nous meˆmes, nous fait sentir douloureusement le vide d’un bonheur facile, & l’insuffisance de ce que nous posse´dons. Parmi les nations soumises a` des corporations sacerdotales, il en est une cependant qui semble pre´senter relativement a` la vie future, une exception singulie`re. [La loi mosaı¨que garde sur l’immortalite´ de l’ame un silence absolu.]1

a

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La re´compense des bons, dit le Bhaguat-Gita, est d’eˆtre absorbe´s en Dieu, & de participer a´ la nature divine, inaccessible a´ toute e´motion. Les Indoux, observe a´ ce sujet le traducteur anglais de cet ouvrage, font consister le bien supreˆme dans un e´tat d’insensibilite´ qui, dans le fait, e´quivaut a´ l’aneantissement. Toutes les fois qu’ils parlent de l’ame re´unie a` Dieu, ils la peignent comme dans un e´tat d’impassibilite´ parfaite egalement e´tranger a` la peine & au plaisir2.

25 La re´compense ] pre´ce`de dans la premie`re ligne de la fiche note puis La re´compense MF1 26 Les Indoux ] pre´ce`de dans la premie`re ligne de la fiche note puis Les Indoux MF1 28 Toutes ] pre´ce`de dans la premie`re ligne de la fiche note puis Toutes MF1

1 2

Nous restituons hypothe´tiquement le texte. Voir ci-dessus, p. 147, ligne 5. Voir ci-dessus, p. 145, n. b (texte le´ge`rement diffe´rent) et la note 3 (pp. 145–146) qui pre´cise quelques de´tails.

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Elle n’entretient les Juifs que de re´compenses temporelles, & quelquefois les prophe`tes eux meˆmes semblent ne pre´voir au dela` du tombeau que le ne´ant a. nous croyons neanmoins qu’on s’est fort exage´re´ l’absence de tout dogme sur l’existence de l’homme apre`s cette vie, dans la religion Juive b. Les e´crivains sacre´s font au dogme de l’immortalite´ de l’ame des allusions fre´quentes, & Moyse parle dans le Deute´ronome de l’e´vocation des morts c. l’histoire de la Pythonisse d’Endor prouve que l’opinion d’un se´jour des morts n’e´toit pas e´trange`re aux He´breux. Isaı¨ repre´sente le Roi de Babylon comme recu avec des railleries & des sarcasmes par les morts qui l’ont pre´ce´de´. XXVI. 19. Ezechiel compare le re´tablissement des Juifs dans leur ancienne prospe´rite´ a la resurrection des morts. on voit la preuve d’une espe´rance de l’autre vie dans le livre des Macchabe´es. [...] d.

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«Le Se´pulchre ne te ce´le´brera point» dit Ezechias a` l’Eternel. La mort ne te louera point. Ceux qui descendent dans la fosse ne s’attendent plus a` ta ve´rite´.» Isaie Ch. 38. David dit qu’apre`s la mort on ne pense plus a` Dieu on ne le loue plus, on ne le remercie plus. Ps. XXX 9.10. CXVII. 18. Hermon, Ps. LXXXVIII dit nonseulement que les morts ne connoissent plus la bonte de Dieu, & nomme le se´jour des morts la terre de l’oubli ; mais demande a` Dieu feras-tu des miracles ? les morts se reveilleront-ils pour te louer ? je ressemble aux morts continue-t-il, qui sont dans le tombeau, auxquels tu ne penses plus, & dont la main s’est retire´e. Ezechias a` qui l’on annonce qu il va mourir regarde la mort comme une separation d’avec Dieu. Il n’y a, dit l’Eclesiaste ni Science ni sagesse ni projet apre`s la mort. Il met sous ce rapport l’homme sur la meˆme ligne que les animaux. Job Ch. VII. v. 8–9 & XIV. 8–13. semble indiquer de la manie`re la plus positive qu il ne croit ni a l’immortalite´ de l’ame ni a` la resurrection. [...]1 Deuter. XVIII. 11. [... les uns se] rele`veront pour la vie e´ternelle & les autres pour l’opprobre & le chatiment. nous sommes les enfans de Saints, dit Tobie, II, 15–18. & nous comptons sur la vie que Dieu donnera a` ceux qui ont une foi ferme & qui marchent dans ses voyes. Il y a un passage positif dans le meˆme sens au Livre de la Sagesse. III. 1–9. & une peinture du bonheur de la vie future ch. V. Il est aussi parle´ a Belial, le Roi des ombres qui gouverne ceux qui ne sont plus. Wagn. p. 2982.

4 nous ] 〈Malgre´ ces apparences,〉 nous MF1 6 au dogme ... l’ame ] 〈a` ce〉 au corr. dans l’interl. dogme de l’immortalite´ de l’ame ces cinq derniers mots dans l’interl. MF1 11 pre´ce´de´. ... Ezechiel ] pre´ce´de´. XXVI. 19. 〈Isaı¨ XXVI. 19. &〉 Ezechiel MF1 20 auxquels ] 〈illis.〉 auxquels MF1 31 peinture ] lecture hypothe´tique MF1 1 2

La note perdue concernait la the´orie de Warburton. Voir ci-dessus, pp. 147–148, la note b. Pour le contexte de ce raisonnement (texte principal et note), voir ci-dessus, p. 148. Il est impossible de restituer le texte perdu.

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De la Religion, IV – Textes comple´mentaires

On pourroit − Copie bleue a On a vu, dans le culte des Sauvages b, les ce´re´monies cruelles, qui, par une application trop exactes des usages de cette vie au monde futur, accompagnent souvent les hommages rendus a´ la me´moire des morts. les coutumes barbares disparaissent graduellement de la religion des peuples civilise´s, a` moins qu’elles n’y soient conserve´es de force. Bien que les Grecs, comme on l a vu ci dessus, eussent fait de la vie a venir une copie exacte de la vie terrestre, les sacrifices fune´raires destine´s a entourer les heros & les hommes distingue´s d’un corte´ge convenable a´ leur dignite´ dans le se´jour des ombres, tombe`rent bientot en de´sue´tude chez les peuples de la Gre`ce. On ne pourrait sans ignorance conside´rer quelques faits e´pars comme des preuves d’un usage permanent parmi les Grecs. Lorsqu’Achille poignarde sur le bucher de Patrocle douze prisonniers Troyens, cette action barbare n’est ni motive´e ni justifie´e par la religion, & l’horreur qu’en te´moigne le poe`te qui nous la raconte c prouve qu’elle n’e´toit conforme ni aux opinions ni aux mœurs nationales. Mais chez les peuples soumis aux preˆtres, les pratiques de l’homme sauvage, comme les notions de l’homme ignorant, sont transforme´es en loix positives, & traversent toutes les epoques de la civilisation qui s’en effraye & ne s’en affranchit pas. Chez les Scandinaves, non seulement les richesses des princes e´toient consume´es sur leur bucher, avec les armes qui leur avoient servi a` les conque´rir, mais leurs esclaves e´toient massacre´s, & leurs femmes brule´es ou enterre´es avec eux d. Se´gride, reine de Sue`de, se se´para d’Eric son e´poux parce qu’elle avoit appris qu’il n’avoit plus que dix ans a` vivre, & qu’elle auroit e´te´ force´e de a

b c d

Mais il n’a point exclu les notions de recompenses & de punitions futures, & l’espoir d’une existence au dela` du tre´pas, espoir auquel le cœur humain ne renoncera jamais1. Tom. 1. Liv. II. ch. 4. p. 293–294. chez les am (?) – feront. copie bleue2. Iliad. Hist. Norw. passim. Olaus Tryggues. Sag. c. 2. Keysler Antiq. select. p. 147.

1 On pourroit ] 〈Si ce le´gislateur a surtout pre´sente´ a` son peuple la perspective d’une re´nume´ration temporelle, c’est que plus imme´diate, elle excitait plus vivement l’enthousiasme guerrier dont il avoit besoin pour les conqueˆtes qu’il me´ditoit :〉 On pourroit MF1 28 Mais ] pre´ce`de dans la premie`re ligne note puis Mais MF1 1 2

BC renvoie au Grand Quarto bleu, e´vitant ainsi de se recopier. Voir pour le texte ci-dessus, p. 149. BC cite d’abord un passage du premier volume de De la Religion (OCBC, Œuvres, t. XVII, pp. 278–280 (voir ci-dessus, p. 294, n. 4), puis renvoie au Grand Quarto bleu ; la citation n’est pas identifie´e.

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se faire ensevelir dans le meˆme tombeau a. En Perse b & en Ethiopie c, Les Courtisans reveˆtus de certaines dignite´s, devoient mourir avec le Monarque1. Les Ephtalites renfermoient un certain nombre de guerriers dans la tombe de leurs ge´ne´raux morts en combattans d. Chez les Japonais qui conservent soigneusement les formes d’une religion Sacerdotale dont le fonds a disparu, l’on enterre des soldats & des esclaves avec les Chefs des arme´es & les grands seigneurs e. La coutume qui forcoient les femmes a` mourir avec leurs maris avoit e´te´ en vigueur chez les Gaulois, car Ce´sar nous dit que de son tems elle e´toit abolie f. Elle subsistoit chez les He´rules g : nous la retrouvons aux Indes h. Les deux femmes de l’Indien Ce´te´s, officier de l’arme´e d’Eume´nes, apre`s la mort d’Alexandre, furent la proye des flammes qui consume´rent leur e´poux i. Cette pratique de´fie encore de nos jours les efforts des Europe´ens, maıˆtres de ces contre´es k. ce sont les Brames qui trainent au bucher les malheureuses victimes, tantot les enyvrant de parfums & de liqueurs Spiritueuses, & les e´tourdissant d’une musique bruyante, tantot les poursuivant de l’ide´e de l’opprobre, & meˆme employant jusqu’a´ la violence, pour consommer l’affreux sacrifice : Car si la veuve qui a promis de se bruler se retracte, lorsque la ce´re´monie est commence´e, la force est permise, pour la contraindre a´ l’achever l. Chose e´trange ! Ces ce´re´monies & ces pratiques ce combinent avec la me´tempsycose avc laquelle il est impossible de les concilier. Nous avons montre´ ailleurs le germe de ce dogme m. a b c d e f g h i k l

m

Mallet, Introd. p. 300–301. Barthol. Antiq. Soba suiv. Xenoph. Cyrop. VII. 3. Diod. III. 4. Procop. de Persic. Recueil des Voy. qui ont servi a` l’e´tablissement de la Compagnie Holland. des Ind. Orient. de Bello Gall. VI. 19. Pomp. Mela. III. 8. Procop., Goth. II. 14. Solin. XIV. Pomp. Mela. II.2. Val. Maxim. mii. 6. Diod. XIX. 10. Herder, Phil. de l’hist. III. 43. Asiat. Res. IV. 224 Histor. fragm. of the Mogul Empire of the Marattoes, & of the English Concerns in Hindostan. p. 126. Tom. I. Liv. II. ch. 4. p. 297–299.)

3 Monarque. ] Monarque. 1

〈(3)〉

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8 avec ] 〈dans〉 avec MF1

Voir ci-dessus pour le contenu des deux fiches perdues p. 294.

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De la Religion, IV – Textes comple´mentaires

Le Sauvage qui ne re´ussit & ne compare aucune de ses vagues conjectures, n’est point frappe´ de sa propre inconse´quence : mais a` mesure que l’intelligence se de´veloppe, l’incompatibilite´ de la me´tempsycose avec un monde avenir peu different du notre devient plus e´vidente, & cette hypothe`se devroit etre abandonne´e. Aussi ne la retrouvons-nous point chez les peuples qui se sont cre´e´s progressivement & librement leurs formes religieuses Ni les Grecs ni les Romains ne l’ont recue dans leur Culte public, bien qu elle eut pe´ne´tre´ dans leurs syste`mes philosophiques. mais elle a e´te´ consacre´e, de la manie`re le plus positive chez toutes les nations Sacerdotales. & ce seroit a` tort qu’on la relegueroit exclusivement dans la doctrine Secrette des Preˆtres. Sans doute, elle y pe´ne´tra pour se combiner tantot avec des abstractions me´taphysiques, tantot avec des clculs d’astronomie. Ainsi les Indiens la rattachoient plus particulie`rement a´ leurs subtilite´s sur la nature & les purifications des ames, tandis que les Rgyptiens, sans repeter ce systeme d’e´purations graduelles unissoient la me´tempsycose a´ l’astrologie par le Cycle de trois mille anne´es qu’ils assignoient aux transmigrations que les ames devoient subir a. mais inde´pendamment de ces explications scientifiques Il est incontestable que la metempsycose a fait partie de la croyance publique des peuples re´gis par le sacerdoce. Elle a e´te´ favorise´e dans les climats du Midi par la Sympathie & la pitie´ que ces climats inspirent a´ l’home pour tous les eˆtres vivans & souffrans b Elle a e´te´ transplante´e dans ceux du Nord par les Colonies. C’est un des dogmes fondamentaux de la religion des Indes c. Il fait partie des opinions des Gaulois d nous la retrouvons chez les Egyp-

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Herod. II. 123. Herder Phil. der Gesch. III. 42–43. Zerstreut. Blaetter. I. 218. aussitot que l’ame quitte son corps, disent les Indiens, elle se rend devant le juge des morts pour y recevoir sa sentence ; puis elle monte au ciel, ou descend aux enfers, ou suivant ses fautes elle prend la forme d’un oiseau, d’un mine´ral, ou d’un quadrupe`de. As. Res. I. 239–246. Diod. V. 20. Cæs. de B. Gall. VI.

13 Preˆtres. ] au bas de la fiche une note de travail, au crayon : un mot illis. Cop. Bleue MF1

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tiens a, les Perses b & les Ge`tes c, & il n’est point sur qu’il ait toujours e´te´ e´tranger a` la Mythologie des He´breux. Un passage de Josephe semble insinuer le contraire. Toutes les ames sont immortelles, dit-il, suivant l’opinion des Phariseens. celles des hommes vertueux passent dans de nouveaux corps : celle des criminels sont condamne´es a d’e´ternels tourmens d Ainsi, ce qui sert chez les Indiens de punition aux me´chans, se trouve chez les Juifs etre la recompense des bons. Cette prolongation du dogme de la me´tempsycose dans les religions Sacerdotales, malgre´ les contradictions que nous avons indique´es plus haut, nous surprendra moins, si nous re´fle´chissons que ces religions se composoient toujours de plus d’un syste`me. Les Preˆtres y inseroient toutes les opinions qu’ils pouvoient recueillier ; ils y maintenoient toutes celles que le peuple avoit adopte´es. Ils avoient en conse´quence sur chaque sujet plusieurs doctrines qu’ils n’employoient que successivement, suivant l’usage qu’ils vouloient en faire. Chaque opinion isole´e e´toit de la sorte a´ l’abri de toute comparaison dangereuse. Une e´poque arrivoit sans doute ou` il falloit concilier ces opinions discordantes, surtout aux yeux des e´trangers qui, malgre´ les Pretres pe´ne´troient dans les myste`res, & qui, moins dociles que les indigenes poursuivoient le sacerdoce de questions importunes. Il recouroit alors a quelque doctrine philosophique qu’il modifioit conforme´ment a´ la disposition de ses auditeurs. Aussi, pour nous en tenir au point qui nous occupe, il paraıˆt que les preˆtres de l’Egypte, qui enseignoient d’une part la me´tempsycose & de l’autre l’existence d’un monde souterrain, demeure des ames, combinoient ces assertions oppose´es, en les transformant en deux branches du meˆme systeˆme. a

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Plut. de Is. & Os. Herod. II. 53. les Egyptiens admettoient une espe`ce de me´tempsycose gradue´e. les ames, disoient-ils, passoient des reptiles dans les poissons, des poissons dans les animaux, des animaux dans les oiseaux, des oiseaux dans les hommes, des hommes, quand les ames s’etoient suffisamment purifie´es dans les de´mons qui se re´unissent aux Dieux. Goerres, II. 426. ib. cit. Clavier § 10. on retrouve presque les meˆmes ide´es dans le Bhaguat-Gita. Go[e]rres. ib. 427. Porphyr. de abst. IV. Origin. Philos. ap. Gronov1. Thes. Ant. Græc. X. 264. Antiq. Judaic. XVIII. 2.

28 les Egyptiens ] pre´ce`de en teˆte de la fiche note suite de la note 2 puis les Egyptiens MF1 33 retrouve ] pre´ce`de en teˆte de la fiche suite de la note 2 puis retrouve MF1 1

BC cite ici un ouvrage ce´le`bre, Originis ϕιλοσοϕουμενων fragmentum, quod ex Bibliotheca Medicea descripsit, ac notis illustravit Jacobus Gronovius, en renvoyant au Thesaurus Græcarum Antiquitatum, contextus & designatus ab Jacobo Gronovio, Volumen decimum, Venetiis : Typis Jo : Baptistæ Pasquali, M. DCC. XXXV., col. 249–292. Nous ne savons

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Les ames des hommes, suivant eux, e´toient des e´manations de l’ame de l’univers, & sont destine´es a` s’y reunir un jour. Mais, comme, par leur union avec le corps, elles contractent diverses souillures, elles ont diverses manie´res de se rejoindre a´ l’ame du monde. Toutes ont besoin d’etre purifie´es : celles des me´chans doivent subir des purifications plus longues que celle des bons. Ces dernie´res, apre´s de courtes migrations, qui neanmoins remplissent toujours un espace de trente sie`cles, retournent aux demeures e´the´re´es, & traversent le soleil & les astres, pour arriver jusqu’aux Dieux a Les ames criminelles condamne´es a` des peines prolonge´es passent d’une enveloppe mate´rielle a´ l’autre, jusqu’a` ce qu’enfin elles soient dignes de s’identifier avec la divinite´. Le se´jour des morts, l’Amenthe`s b n’est qu un lieu de repos, ou` les ames, imme´diatement apres leur sortie du corps qu’elles ont anime´, vont attendre le signal d’une transmigration nouvelle : & c’est a´ ce se´jour passager, amis qui peut eˆtre de plusieurs milliers d’anne´es, car que sont des milliers d’anne´es en pre´sence de l’e´ternite´, c’est a´ ce se´jours que se rapportent les pratiques qui semblent faire de la vie future une imitation de cette vie c. L’on conc¸oit aise´ment que cette explication syste´matique e´toit beaucoup trop rafine´e pour une religion telle que celle du peuple Egyptien. [...]1 Elle demeura toujours e´trange`re a´ la masse de la nation, qui suivant les enseignemens qu’elle recevoit isole´s & en de´tail, croyoit, a´ telle e´poque a` la a

b c

C’e´toit au nom de ces ames bienheureuses que les Egyptiens prononcoient sur la tombe des morts la prie`re que nous rapporte Porphyre : Soleil maıˆtre de tout & vous Dieux de l’univers, dispensateurs de la vie, recevez nous & rendez nous les compagnons des Dieux e´ternels. (de Abst. IV. 16. v. Goerres. II. 370. Plut. de Is. & Os. Voir sur ce systeˆme des Egyptiens, Görres II. 389–393. Das aber ist die Geschichte − Osiris und Hermes hernieder3.

4 monde. ] au bas de la fiche une note de travail Cr. note cop. Bl. MF1 en teˆte de la fiche note puis C’e´toit MF1

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25 C’e´toit ] pre´ce`de

pas ou` BC a trouve´ le re´fe´rence. Le texte ne parle qu’allusivement de la me´tempsycose en abordant la philosophie des stoı¨ciens. Voir PG, t. XVI, col. 3047–3050. Il est impossible de restituer le texte perdu des fiches *1139 et *1141. BC cite un long passage de l’ouvrage de Görres, Mythengeschichte (e´d. de 1935, pp. 187– 189).

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me´tempsycose, a` telle autre a´ l’Amenthe`s, sans eˆtre frappe´e de l’opposition de deux opinions qu’elle n’avoit pas la pense´e de rapprocher d. [...] c’e´toit sur une contradiction pareille que les Gaulois, tout en croyant a´ la me´tempsycose, e´crivoient aux amis que la mort leur enlevoit, & que pour faire parvenir leurs lettres, ils les jetoient dans les flammes, ajournant aussi, a` leur reunion apre`s cette vie, le re´glement de leurs comptes, avec leurs cre´anciers & leurs de´biteurs a. Ainsi se confirme toujours l’une de nos assertions les plus importantes. Tout ce qui, dans le Polythe´isme inde´pendant de la direction du sacerdoce, ne frappe l’imagination que d’une manie`re vague & passage´re, est enre´gistre´ dans le Polythe´isme Sacerdotal. Les conjectures les plus fugitives, celle qui paraissent ne pouvoir eˆtre admises que par des esprits encore plonge´s dans l’ignorance de l’e´tat sauvage, s’amalgament avec les doctrines moins grossie´res que les progre`s de l’intelligence ame´nent. & s’il ne faut point attribuer la diffe´rence qui n’existe entre les deux espe`ces de Polythe´isme aux inventions spontane´es des Preˆtres, il faut reconnoitre neanmoins qu elle provient en grande partie du soin qu’ils prennent de tout recueillir & d’empeˆcher que rien ne s’oublie ou ne s’efface. Il y a d’ordinaire, dans le Polythe´isme Sacerdotal plus d’une demeure destine´e a´ recevoir les ames des morts. l’Edda nous annonce deux enfers ; chez les Indiens, il y en a tantot trois b tantot quatorze c. chez les Perses, il y en avoit sept les habitans du Thibet en reconnoissent dixhuit d d

a b c d

l’importance que les Egyptiens attachoient a´ la conservation des corps & la rech. qu’ils appt. a les embaum. de laq. de´p. l’e´tat des morts dans la vie future tenait au dogme de l’Amenthe`s. la me´tps servt de motif a d’autres part. du Culte Heeren II. 675. Diod. I. 20. Val. Max. II. 6. no. 10. Bhag. Gita. p. 134. La flotte p. 2261. Turner Voy. au Tib. Voy de Pallas Geogii Alphab. Tibet. Les trois enfers Tibe´tains sont Gnielva, Tangscisangso, & Narme´. le Gnielva est divise´ en deux re´gions, celle du froid & celle du Chaud. chacune de ces regions est subdivise´e en huit autres, ou` les tourmens sont diversifie´s.

26 l’importance ... 675 ] note ajoute´e au bas de la fiche 〈c’e´toit〉 l’importance ... corps la suite ajoute´e dans la marge & la rech. ... embaum. BC revient au texte de laq. de´p. l’e´tat des morts dans la vie future tenait au dogme de l’Amenthe`s. la me´tps. servt de motif a d’autres part. du Culte dans la marge Heeren II. 675. MF1 1

La Flotte, Essais historiques sur l’Inde, le chap. «Sentimens des Indiens sur le paradis», pp. 221–226. Laflotte parle de cinq paradis chez les Indiens.

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De la Religion, IV – Textes comple´mentaires

Dans la religion des Burmas ou habitans de l’isle de Ceylan, on en compte cinq a [...]1 les alle´gories y sont prodigue´es. rien n’est alle´gorique dans l’enfer d’Home`re : mais celui des Scandinaves n’est qu’une longue & terrible alle´gorie. Hela, fille du mal regne sur ce sombre empire. La douleur est son palais, sa table la famine, son glaive la fin, son esclavela lenteur, son vestibule le pre´cipice, son lit la souffrance, sa tente la male´diction. Dix fleuves roulent leurs eaux noiratres a´ travers ce se´jour d’horreur. les noms de ces fleuves sont l’angoisse, le chagrin, le ne´ant, le de´sespoir, le gouffre la tempeˆte, le tourbillon, le rugissement, le hurlement & l’abyme b. Les enfers, disent les livres vertes, sont au bord d’une onde fe´tide, noire comme la poix, froide comme la neige. Les ames condamne´es s’y agitent sans cesse. Une fume´e epaisse sort de cet antre te´ne´breux, & l’inte´rieur est rempli de scorpions & de serpens c. On apercoit dans ces tableaux soigne´s un calcul pre´me´dite´, une volonte´ de faire effet, un arrangement me´thodique, les Preˆtres paraissent n’eˆtre jamais satisfaits de l’impression produite par les dogmes qu’ils enseignent. Ils les multiplient, les diversifient, les e´tendent. Ils traitent le se´jour des Dieux, leur nature, leur nombre, & la destine´e de l’home apre`s cette vie, comme une proprie´te´ qui leur appartient.

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Le premier est la demeure de tous les animaux, de quelque espe`ce qu’ils soient, car tous les animaux sont, d’apre`s l’opinion recue dans un e´tat de malheur. le second enfer renferme tous ceux qui n’ont pas, durant leur vie, donne´ des provisions journalie`res aux preˆtres, qui ne les ont pas [...] crimes. Les 5 crimes principaux sont d’avoir tue´ son pe`re, sa me`re ou un preˆtre, d’avoir frappe´ un Dieu, & d’avoir excite´ des divisions dans l’ordre sacerdotal. Ceux qui commettent l’un de ces forfaits sont cruellement chatie´s pendant la dure´e d’un monde ; mais la punition des incre´dules est plus rigoureuse ; un feu de´vorant les consume & leurs souffrances sont e´ternelles. les sectateurs de Buddha n’e´chappent a´ ces supplices que lorsqu’ils ont soin de re´pandre de l’eau sur la terre en fesant l’Aumone & de sanctifier ainsi leurs bonnes œuvres. Edda 1ere & 6e fable. Hyde, Rel. Pers.

30 crimes ] perte d’au moins une fiche ; en teˆte de la fiche 1151 suite de la note puis crimes MF1 34 de Buddha ] en teˆte de la fiche suite de la note puis de Buddha MF1

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Les deux fiches perdues (1150, avec quelques lignes pour la note a ; 1153 pour le texte) ne peuvent eˆtre reconstitue´es, les de´tails cite´s ne se trouvant pas dans l’imprime´. BC les prend dans un article de Buchanan (Asiatic Researches ; voir ci-dessus, pp. 156, n. 1, 160 et 163).

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Ils retravaillent sans cesse la religion, comme un ouvrier ame´liore ses outils, comme un soldat polit ses armes, & de meˆme que nous verrons dans le livre suivant, placer toujours, au dessus des Dieux adore´s par le peuple, une divinite´ encore supe´rieure, Ils creusent toujours, au dessous de l’abyme, un abyme plus profond encore.

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9. Verso d’un folio numéroté 41, intitule´ «Résultats», constitué de deux fiches abandonnées du manuscrit sur fiches pour le livre X, chapitre III de De la Religion. Les fiches, numérotées ¢[37]8² [12]06 et ¢379² 1207, concernent les différences entre les peuples du Nord et du Midi. Elles sont datables d’avant mars 1827, les extraits d’essais du Baron d’Eckstein qu’on lit au recto de ce folio sont tirés des cahiers XIV et XV du Catholique parus en février et mars 1827. BCU, Co 4727, sans foliotage.

Fiches pour le livre X

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[Fragments du manuscrit sur fiches pour le livre X, chapitres III et IV1]

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mais il repare le tort que cette versatilite´ fait a` sa doctrine en couronnant le somet de sa hie´rarchie mystique par un Dieu inactif, indiffe´rent, inaccessible a` toute e´motion, e´tranger a´ tout changement. le Dieu du Bhaghavat bien que penetrant ainsi que l’air, dans la varie´te´ des eˆtres, est lui-meˆme immuable ; aucune modification ne peut atteindre aucune de ses qualite´s a. [...]2 Ils se trouvent indignes de l’adorer, & les [invoca]tions se dirigent vers les Dieux subalt[ernes.] b. a b

As. Res. II. 2303. Laflotte, Ess. hist. Sur l’Inde. p. 166–?4[.] E´tablissement du texte : Manuscrits : 1.) BCU, Co 3267 (fiches 1199, 1208, 1210) ; 2.) Co 3293 (fiches 1192, 1193, 1226, 399, 452) ; 3.) Co 3468 (fiche 1195) ; 4.) Co 4727 (fiches 1206, 1207, 12..) ; 5.) BnF, NAF 18823, fo 66ro (fiche 1219).

3 1192 ] 〈367〉 1192 Co 3293 3–5 mais ... changement. ] fiche remanie´e ; le de´but du texte ajoute´ dans la partie infe´rieure du folio mais il ... sa doctrine 〈par l’illis.〉 en 〈creant au〉 couronnant le somet de 〈l〉sa ... inactif 〈La divinite´ supreˆme des religions sacerdotales, est donc inactive,〉 indiffe´rent〈e〉, inaccessible a´ toute emotion, e´trange´r〈e〉 a´ tout changement. Co 3293 6 le Dieu du Bhaghavat ... ainsi ] Le Dieu du cette corr. au-dessus des mots lisons dans 〈Nous lisons dans le Bhaguat-Gita〉 Bhaghat 〈que le seigneur de l’univers, de´sirant la conservation des troupeaux, des Brames, des ge´nies, des hommesvertueux, des Ve´des, de la loi & des choses pre´cieuses prend diverses formes corporelles ; mais quoiqu’il〉 pe´ne`tr〈e〉ant ainsi dans la marge gauche de la fiche, au-dessus du nume´ro, l’ancienne nume´rotation 〈368〉 et en dessous un calcul qui se rapporte a` la se´rie des fiches Co 3293 10 1195 ] 〈370〉 1195 1

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Le manuscrit sur fiches reconstitue´ a` partir de documents conserve´s par hasard dans cinq dossiers diffe´rents repre´sente une version nettement diffe´rente du texte correspondant de la version imprime´e. Des recoupements sont perceptibles, les divergences manifestes. Il est impossible de de´signer un passage pre´cis de la version imprime´e pour combler cette lacune importante. Nous supposons qu’il faut compter avec la perte de plusieurs fiches. Le renvoi est faux. BC reproduit la meˆme faute a` plusieurs reprises. Voir ci-dessus, pp. 177– 178, n. 4. Le renvoi a` La Flotte, Essais historiques sur l’Inde, cite un passage du chap. intitule´ «Leurs [i.e. des Indiens] ide´es sur la cre´ation du monde» (pp. 165–167) : «Outre ces principaux Dieux [Virat-pourouchen ; la de´esse Parachatty, me`re de Brama, Vichenou et Routren], les Indiens assuˆrent qu’il y en a encore trente-trois millions qui reconnoissent Devendren

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De la Religion, IV – Textes comple´mentaires

Il est d’une part le tems sans bornes & de l’autre la grande anne´e des douze mille ans a[.] [...]1 Cette notion n’est pas aussi de´veloppe´e dans les religions du Nord. Le despotisme e´tabli chez le[s peuples du] midi a pu contribuer a` l’adop[tion] [...] Les peuples Septentrionaux e´taient moins dispose´s a` des ide´es de supre´matie, parce qu’ils jouissoient d’une liberte´ sauvage, & tout entiers aux orages de la vie, ils ne pouvoient admettre dans leurs hypothe`ses religieuses, un penchant a` la contemplation, une fe´licite´ immobile, contraire a` leurs mœurs & a` leurs habitudes. [...]2 On remarque dans quelques religions sacerdotales, une re´volution singulie`re, par laquelle des eˆtres conside´re´s d’abord comme Divinite´s supreˆmes, redescendent au second rang3.

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Ils flattent le Sentiment par la hauteur & par le myste`re & reveillent l’imagination par la nouveaute´.

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[ils commu]niquent aux hommes les dons qu’ils [...] b

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Chap. 44. Dieux infe´rieurs, ou de la de´monologie sacerdotale Le Dieu supreˆme, place´, comme nous venons de le voir, en dehors du monde, semble avoir e´chappe´ tout a` fait a` l’homme[.] a b

Vendidad, Izechne´, XIX. Ha. Görres. Asiat. Myth. I. 219–2205. [Herme`s ad Tatiu]m. Stobe´e. Jamblich. de Myst. Æg6.

4 1206 ] 〈378〉 1206 5 1207 ] 〈379〉 1207 7 1208 ] 〈380〉 1208 13 1210 ] 〈382〉 1210 16 1219 ] au-dessus de ce chiffre 〈392.〉 19 1226 ] le chiffre re´crit sur un chiffre illis. ; en dessous, calcul qui se rapporte a` la se´rie des fiches Co 3293 20 sacerdotale ] sacerdotale 〈de l’ide´e d’un Dieu me´diateur〉 Co 3293

1 2 3 4 5 6

[roi des dieux subalternes] pour leur Roi. Ils ajoutent qu’ils ne sont pas dignes de rendre hommage, ni au Dieu supreˆme, ni a` Paraprouman [l’esprit ce´leste], & a` Virat-pourouchen [eˆtre d’une grandeur infinie] : c’est pourquoi ils se contentent d’adorer Brama, Vichenou, Routren, & quelques autres Divinite´s subalternes comme ministres des premiers[c’est a` dire de Paraprouman et Virat-pourouchen]» (pp. 166–167). Voir ci-dessus, p. 178, pour lire une suite possible. Voir ci-dessus pour le contexte, p. 178, lignes 12–14. Voir pour le contexte ci-dessus, pp. 180–181. L’ordre des arguments est diffe´rent dans la version imprime´e. Correspond au chapitre III de la version imprime´e. Voir ci-dessus, p. 177, n. 3. Les renvois de cette note sont probablement faux. Voir ci-dessus, pp. 181–182, n. 5.

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Fiches pour le livre X

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Mais dans les cultes dont le sacerdoce dispose, il enre´gistre les conjectures de l’homme & le ge´ne dans ses suppositions a´ venir, par des sanctions dont il reveˆt ses suppositions pre´sentes1.

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L’homme qui veut que ses Dieux [lui soient utiles] les accuse de me´chancete´ quand [ils trompent son] espe´rance2.

4–5 L’homme ... espe´rance. ] restitutions du texte d’apre`s l’imprime´ et en partie hypothe´tiques Co 3293

1 2

Voir ci-dessus, p. 180. Nous avons place´ cette fiche a` la fin en respectant la nume´rotation actuelle. Cette de´cision est pourtant arbitraire au sens ou` elle ne permet pas de tenir compte du contexte de la version imprime´e. L’ide´e qui se lit dans la fiche 452 se trouve ci-dessus, p. 115, ligne 8.

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[Manuscrit sur fiches, livre X] [1826]

Introduction

Le manuscrit sur fiches a e´te´ re´dige´ durant l’e´te´ 1826, comme il ressort des versos de plusieurs fiches qui permettent une datation assez pre´cise : apre`s le 26 juin 18261. Cette date post quem est confirme´e par une entre´e du Carnet de notes qu’on peut dater entre les 25 et 29 juin 1826 et qui pre´cise : «Copier les chap. composant le livre X»2. Le livre X e´tait donc encore conc¸u comme une partie inte´grante du troisie`me volume, hypothe`se confirme´e par la table des matie`res et le Grand manuscrit de 18263. Les fiches pour le livre X, futur livre XI, donnent une version tantoˆt proche, tantoˆt assez diffe´rente des cinq premiers chapitres de la version de´finitive. Le chapitre VI est projete´, mais pas re´dige´ ; nous ne connaissons que le titre. La restructuration du troisie`me volume entraıˆne probablement ce changement. Un argument en faveur de cette hypothe`se est le fait que quelques mate´riaux faisant partie du cinquie`me chapitre passeront dans le sixie`me dans la version de´finitive4. Il s’ensuit que le manuscrit sur fiches, incomplet par rapport a` un plan pre´ce´dent5, n’a jamais atteint un e´tat plus de´veloppe´. Le manuscrit est complet ; les pertes de quelques fiches ne sont pas importantes et sans doute fortuites. Cet e´tat des choses met l’e´diteur dans une situation inconfortable. Il y a dans cette version du texte des passages qu’on aurait pu inte´grer dans l’apparat critique du texte imprime´. Il y en a d’autres, et ils atteignent une e´tendue conside´rable, pour lesquels cette solution n’est pas invisageable. Les diffe´rences sont trop grandes. On aurait duˆ re´diger un apparat critique tre`s complique´ sans pouvoir atteindre la clarte´ indispensable a` une com` cela s’ajoute le fait que cet e´le´ment paraison rapide des deux versions. A aurait cre´e´ des conflits avec les parties de l’apparat auxquelles nous avons accorde´ la pre´fe´rence, a` savoir les variantes entre la version de´finitive et la version manuscrite inte´grale du texte, celle du manuscrit en cahiers, qui pre´ce`de directement l’impression de l’ouvrage. Nous avons pris le parti de 1

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Les versos des fiches 224bis et 225 sont un faire-part de de´ce`s d’un sous-inspecteur des finances, mort le 21 avril 1826. Le verso de la fiche 191 contient une lettre date´e du 20 juin 1826 et les versos des fiches 251, 260, 259, 257, 258, 253, 252, 64, 64ter, 255, 75, 76 et 81 contiennent des fragments du discours du 9 mai 1826. Voir Hofmann, Catalogue, IV/174. OCBC, Œuvres, t. XVII, p. 567. OCBC, Œuvres, t. XIX, pp. 94–99. Voir ci-dessous, p. 578, n. 1. Nous ne le connaissons pas, mais on peut supposer qu’il existait. La note cite´e du Carnet de notes le sugge`re.

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De la Religion, IV – Textes comple´mentaires

reproduire le texte inte´gral du manuscrit sur fiches et de signaler dans des notes les points de repe`re indispensables pour faciliter une consultation paralle`le des deux versions du texte. La solution adopte´e a l’avantage de comple´ter les analyses que nous avons de´veloppe´es en pre´sentant l’historique du texte du troisie`me volume de De la Religion. Les fiches de ce manuscrit, documentation d’une re´daction interrompue, s’inte`grent dans le projet d’e´criture de cet ouvrage. Les fragments te´moignent d’un grand ensemble en cours de construction. E´tablissement du texte Nous reproduisons le texte tel qu’il se trouve dans le manuscrit, en signalant les quelques lacunes. Nous reproduisons le texte fide`lement, corrigeant seulement deux erreurs qui faussent le sens et une ne´gligence grammaticale en profitant d’une variante qui donne la bonne lec¸on. Si les points a` la fin des phrases manquent, nous les ajoutons entre crochets. Manuscrit : Livre X. Du principe fondamental des religions soumises aux preˆtres. BCU; Co 4722, BnF, NAF 18823, fos 67, 124–134, 143–146, Archives d’Estournelles, la fiche 191. Manuscrit sur fiches, 281 fos, 281 pp. a., environ 160 × 110 mm. Les fiches sont nume´rote´es en haut, dans l’angle gauche. Les versos sont souvent blancs, mais il y a aussi des fiches qui portent aux versos des fragments de lettres, de circulaires imprime´es, de factures, de pe´titions, d’un chapitre du Commentaire sur Filangieri ou d’un discours. Manquent les fiches 18, 25, 156, 158, 164bis a` 164XIV et 229. Date propose´e : apre`s le 6 juin 1826. Hofmann, Catalogue, IV/166, IV/168 et IV/169. Nous de´signons ce manuscrit dans les variantes par le sigle MF2.

Manuscrit sur fiches – livre X, chapitre I

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Livre X. du principe fondamental des religions soumises aux preˆtres.

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Ch. I. Expose´ de ce principe.1

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Les diffe´rences que nous avons remarque´es jusqu’a` pre´sent entre le Polythe´isme Sacerdotal & le Polythe´isme livre´ a` lui-meˆme ne sont que partielles[.] Il est tems de remonter au systeme qui fait de ces deux croyances deux systeˆmes entie`rement oppose´s. Dans le Polythe´isme inde´pendant de la direction sacerdotale, les Dieux ont besoin de l’homme[.] Les sacrifices leur sont agre´ables, en ce qu’il leur offre des choses qui, par elle meˆmes, leur procurent des plaisirs & des jouı¨ssances. Le Chasseur leur fait hommage d’une portion de sa chasse, le peˆcheur d’une portion de sa peˆche. Chaque individu pense que les dieux font usage re´ellement de ce qu’il leur consacre, comme il fait usage lui meme de la part qu’il se re´serve. Sans doute, a` mesure que les ide´es de l’home sur la Nature divine deviennent plus rafine´es Il prodigue aux eˆtres qu’il adore des choses plus pre´cieuses[.] mais la manie`re de conside´rer le prix de ce qu’il leur offre est longtems la meˆme[.] Il attribue la satisfaction qu’ils ressentent de ses offrandes a` la valeur intrinse´que de ce qui leur est offert. Dans le Polythe´isme sacerdotal, les Dieux sont repre´sente´s comme investis d’une puissance absolue, reve´tus d’une perfection sans bornes, assure´s d’une fe´licite´ inalte´rable[.] Ce que nous avons dit ailleurs des imperfections & des infirmite´s de ces Dieux n’est point en contradiction avec notre assertion actuelle. Tout en racontant les fables qui en sugge`rent des ide´es diffe´rentes, leurs preˆtres ne conviennent point des vices & des faiblesses, que ces recits semblent indiquer[.] leur doctrine, toujours complique´e, toujours susceptible de plusieurs interE´tablissement du texte : Manuscrit : BCU, Co 4722, fos 1–25. 16 re´ellement ] 〈profitent〉 re´ellement Co 4722 1

Voir ci-dessus, pp. 251–254, la version remanie´e de ce premier chapitre.

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pre´tations oppose´es, leur sert a` e´luder les conse´quences qu’ils ne veulent pas admettre : Et le sentiement religieux, que ces conse´quences blessent & re´voltent, se preˆte avide´ment aux explications qu’il[s] en de´liverent, & qui lui rendent ces notions de perfection, de grandeur, de toute puissance dont il aime a´ se pe´ne´trer. mais des Dieux parfaits, des Dieux tout puissans n’ont aucun besoin de l’homme ni de ses dons. L’univers entier leur appartient. Leur volonte´ suffit, pour leur procurer, inde´pendamment des mortels, tous les plaisirs & toutes les jouı¨ssances. Ils n’en peuvent chercher aucune dans les choses meˆmes qu’on leur offre. les sacrifices n’ont droit a` leur bienveillance que comme te´moignages du de´vouement qui anime leurs adorateurs ; & ces adorateurs ne peuvent faire preuve de de´vouement que par les privations qu’ils s’imposent. [...]1 Cette re´ponse contient l’expose´ de la diffe´rence fondamentale entre les religions sacerdotales & le polythe´isme inde´pendant. Dans celui-ci, les Dieux ne mettent de prix qu’a` leurs jouissances : dans les premie´res ils n’en mettent qu’a` nos privations. Ils n’estiment pas les offrandes en raison de ce qu’elles valent intrinse´quement ; ils les estiment en raison de ce qu’elles coutent a` ceux qui les font. Remarquez la diffe´rence des conse´quences de la meˆme ide´e, quand c’est l’esprit humain qui la concoit & la de´veloppe en liberte´, & quand c’est une classe qui s’en empare & s’en fait un instrument de pouvoir. L’ide´e que les Dieux n’ont pas besoin des offrandes des hommes se trouva dans les Systeˆmes des philosophes grecs, comme dans les Religions sacerdotales. le Dieu qui est vraiment un Dieu n’a besoin de rien, dit Euripide, qui dans les sentences multiplie´es de ses trage´dies, n’est d’ordinaire que l’interpre´te des philosophes de son tems. Mais la conclusion qu’ils en tiroient, c’e´toit que la magnificence des offrandes, le nombre des Victimes, la pompe des sacrifices e´toient inutiles & que les mortels ne plaisoient aux Dieux que par la purete´ du cœur & l’inte´grite´ de la conduite. Les Preˆtres au contraire conduisirent par d’autres conse´quences du meme principe les peuples qui e´toient dans leur dependance d’abord au sacrifice de ce qu’ils posse´doient de plus pre´cieux, bientot a` celui de ce que leurs affections avoient de plus cher, ensuite a` la privation de ce qu’ils e´prou1

La fiche perdue portait probablement une phrase proche de celle qu’on peut lire dans le texte imprime´ ci-dessus, p. 253, lignes 7–10 : «Tel est le principe dominant des cultes sacerdotaux : et tout esprit e´claire´ doit facilement en pre´voir les conse´quences.»

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voient de plus impe´rieux dans leurs penchans les plus le´gitimes, Enfin a la violation de ce qu’il y avoit de plus sacre´ dans les vertus meˆmes, & nous allons voir se succe´der, par une progression de´sastreuse, les sacrifices humains, les mace´rations & les pe´nitences excessives, la continence exage´re´e qui fait souffrir la nature, [...]1

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Voir pour la phrase qui se trouvait sur la fiche perdue ci-dessus, p. 253, lignes 16–19.

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Liv. X Ch. 2. des Sacrifices humains

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De la Religion, IV – Textes comple´mentaires

Nous avons indique´ dans le premier volume les diverses causes qui ont introduit chez [...]1 donne´ naissance a´ la pratique barbare des sacrifices humains. On peut affirmer sans he´sitation qu’aucun peuple ne s’est entie`rement de´robe´ a` l’action de ces causes. Nous voyons les Mexicains immoler dans une seule occasion 5000 prisonniers de guerre a. Les Gaulois honoroient de la meˆme manie´re plusieurs de leurs Divinite´s, Teutates, Taranis & leur Mars qu’ils nommoient Hesus b. Ils n’excluoient pas les Sacrifices d’Animaux, mais regardoient celui de l’homme comme pre´fe´rable c. Ils avoient des simulacres d’une grandeur immense, construits de branches d’osier. Ils les remplissoient de victimes & y mettoient ensuite le feu d. Dans toutes ces ce´re´monies, ils employoient le Ministe`re des Druides e, a

b c d

Mallet, Introd. p. 1192. v. pour plus de de´tails Robertson, hist. d’Ame´rique sur les sacrifices humains chez les Mexicains. Me´m. de l’Ac. des Insc. T. XXIV3[.] Plin. H. N. VI. 2. Pomp. Mel. IV. 24. Cæs. de B. G. VI. 16. E´tablissement du texte : Manuscrits : 1.) BCU, Co 4722, fos 26–159 ; NAF 18823, fo 67ro (fiche 61).

2.) BnF,

5 chez ] lacune, plusieurs mots omis en copiant une autre fiche Co 4722 1

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Les mots oublie´s exprimaient l’ide´e que tous les peuples e´taient soumis a` l’ide´e d’un sacrifice extraordinaire dont re´sultait la pratique barbare des sacrifices humains. Voir cidessus, p. 255, lignes 3–4. Le renvoi a` Mallet vise peut-eˆtre un passage sur les grands sacrifices d’Upsal qui ont lieu tous les neuf ans : «Alors on choisissoit parmi les captifs en tems de guerre, & parmi les esclaves en tems de paix, neuf personnes qui devoient eˆtre immole´es ; la volonte´ des assistans & le sort combine´s ensemble re´gloit le choix» (Mallet, Introduction a` l’Histoire de Dannemarc, ou` l’on traite de la religion, des loix, des mœurs & des Usages des anciens Danois, Copenhague : s.e´d., MDCCLV, p. 83). BC cite une e´tude de l’abbe´ Fe´nel. Voir ci-dessus, p. 259, n. 2. Pomponius Mela, De chorographia. Le renvoi est faux. Il faut lire «III. 2.» Pomponius Mela parle de la Gaule dans ce chap., et au de´but de sa description, on lit la phrase sur les sacrifices humains qui, de son temps, ne se pratiquaient plus.

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Manuscrit sur fiches – livre X, chapitre II 32

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a` Lethra en Se´lande, on sacrifioit tous les 9 ans, 99 homes, autant de chevaux, & un nombre e´gal de chiens & de coqs a. on tiroit au sort a qui subiroit cette destine´e. Les Rois n’e´toient pas excepte´s b. Les Scythes immoloient leurs captifs c, les Taures tous les e´trangers qui tomboient en leur puissance d les He´rules des vieillards e les Thraces des Vierges f[.] Le Sacrificateur chez les Sarmates buvoit le sang des victimes g. Les meˆmes rites e´toient en usage chez les Bretons h & les Espagnols i[.] Les foreˆts de la Germanie, disent les auteurs Romains, e´toient un objet d’epouvante pour les voyageurs, dont les regards etoient frappe´s d’arbres arrose´s de sang, & de squelettes mutile´s suspendus aux branches k.

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Aug. de Civit. Dei. VII. 19. Cæs. loc. cit. Mallet, Intr. 1161. Dithm. Merseb. Chron. I. 12. Keysler, Antiq. 159–326. Mallet. ib. Barthol. p. 323. 393–394[.] Herod. IV. 72. Euseb. praæp. ev. I. Hie´ron. adv. Jovin. II. Vales. ex Nicol. Damasc. & Stob. p. 526. Dio chrys. XIII. 219. Herod. IV. 103[.] Procop. II. 14. Stephan. de urbib. p. 512. Helmold. chron. Slav. I. 532. II. 12. Athe´ne´e IV. Strabon III. Claudian. de laudib. Stilic. I 2283. Pellout. VIII. 14. Tacit. Germ. 2. Annal. XIII.

Sur les sacrifices de Lethra, voir ci-dessus, p. 260, n. a. Disons encore que le renvoi a` Dietmar von Merseburg est copie´ chez Mallet. Keyssler, Antiquitates selectæ septentrionales et celticæ, voir p. 260, n. 3. Il faut lire «I. 52.» Voir ci-dessus, p. 270, n. 4. Le renvoi au livre II, chap. 12 (ce qui correspond au chap. 108 de l’ouvrage) n’est pas tre`s pre´cis. Helmold y parle de la destruction du sanctuaire de la divinite´ slave Zuantevith. On trouve pourtant vers la fin de ce chap. (p. 213) la remarque que les dieux des slaves pre´fe`rent le sang des chre´tiens («huiusmodi cruore deos omnino delectari»). Cette phrase est la seule qui s’accorde avec les re´flexions de BC. Sur Claudien, voir ci-dessus, p. 79, n. 5. La faute corrige´e dans cette note est une faute de copie, comme le prouve le ms. sur fiches. – Le renvoi a` Pelloutier, Histoire des Celtes, t. VIII n’est pas exact. BC pense peut-eˆtre a` ce passage : «Les Auteurs [de l’Antiquite´] citent, a` la ve´rite´, des te´moins, qui disent avoir vu des Foreˆts, ou` les Peuples Celtes faisoient leurs Assemble´es religieuses, des arbres rougis du sang dont on les arrosoit, des teˆtes cloue´es a` ces arbres» (p. 5). Le texte concerne pourtant les Celtes, et non pas les Germains. La description des foreˆts sacre´es des Germains qu’on trouve chez Tacite (voir ci-dessus, p. 96, n. 1) est reproduite par Pelloutier a` la p. 6. Notons que ces observations reviennent partiellement dans le livre X, chap. II de la version imprime´e. Voir ci-dessus, pp. 261–262, n. 2, ou` les fautes des renvois sont corrige´es et les explications de BC rectifie´es.

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De la Religion, IV – Textes comple´mentaires

Dans Denys d’Halicarnasse, les Dieux des Pe´lages d’Etrurie demandent des Sacrifices humains a. Ils en obtenoient en effet, non loin de Rome, dans la foreˆt d’Aricie, ou` le pontife lui-meˆme pe´rissoit souvent sur l’autel b. Les habitans de Sicile en offroient aux Palices, fils d’une Nymphe & de Jupiter c. Diodore raconte qu’Amilcar, assie´geant Agrigente, immola, suivant la coutume des Carthaginois, un enfant a` Saturne d[.] a b

c

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Den. Hal. I. 5. v. aussi Schol. Pind. Pyth. II1. Lucan. III. 86. VI. 74. Ovid. Met. XIV. 331. Serv. ad Æn. II. 1162. Ovid. fast. III. 271–272. Pellout. II. 17. note 783. Serv. ad. Ænid. IX. 6854. Virgile parlant de ces sacrifices dit : Placabilis Ara Palici parce qu’ils avoient e´te´ remplace´s par d’autres, ce qui avoit fait dire que la deesse s’e´toit appaise´e. Diod. Sic. XIII. 24. Herd. Phil. der Gesch. III. 99. 1005. Il jeta cette victime dans la mer, dit Diodore, ce qui paroissoit tenir au culte des e´le´mens6.

13–14 dit Diodore ] mots ajoute´s dans l’interl. Co 4722 1

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Allusion a` Denis d’Halicarnasse, Antiquite´s romaines, livre I, chap. XXIV. Les messagers des Pe´lages envoye´s dans les temps de de´tresse a` l’oracle pour connaıˆtre les sacrifices de´sire´s par les dieux reviennent avec la re´ponse cite´e par BC. «And when some one proposed to ask the god wether it was acceptable to him to receive tithes of human beeings, they sent their messagers a second time, and the god ordered them so to do» (voir Dionysius of Halicarnassus, The Roman Antiquities, Books I-II, with an English Translation by Earnest Cary, Cambridge, Massachusetts, London : Harvard University Press, 51990, p. 779). – Pour la scholie de Pindare voir Scholia vetera in Pindari Carmina, recensuit A. B. Drachmann, t. II, Scholia in Pythionicas, Leipzig : Teubner, 1910, p. 32, lignes 17–19 : «schol. Pyth. II, 2». Le texte commente : «The´ophraste, dans son e´crit sur les Tyrrhe´niens, dit que ceux-ci ont abandonne´ sur l’ordre de Ge´lon les sacrifices humains». BC soutient que le scholiaste parle des Tyrrhe´niens (c’est-a`-dire des E´trusques). Mais Drachmann, s’appuyant sur des paralle`les qu’on trouve chez Plutarque (De sera numinum vindicta, 552 A ; Apophthegmata Regum et Imperatorum, 175 A), semble penser que la scholie ne concerne pas les E´trusques, mais les Carthaginois, vaincus par Ge´lon, le tyran de Syracuse (env. 540–478). Ce qui demeure, c’est que la scholie e´voque effectivement des sacrifices humains. BC renvoie a` la longue note de Servius, Commentarii, qui se rapporte a` la le´gende d’Iphige´nie et au sanctuaire dans la foreˆt d’Aricie (p. 128). Il faut lire «II. 327. note 78.» ou «II. chap. XII. note 78.» Pelloutier parle de la succession du chef des Druides, qui peut se disputer «les armes a` la main» (p. 327). Et il rappelle que cet usage «c’e´toit conserve´ dans un ancien Temple qui e´toit aux environs de Rome» (p. 327), le temple d’Aricie. Dans la note 78, accroche´e a` la phrase cite´e, Pelloutier renvoie a` Servius, Commentarii ad Æneid. VI, 136, a` Ovide, Ars amatoria I, 259 et a` Strabon, V, 239. Il faut lire «IX. 584». Servius raconte la fable des Palices pour commenter le passage de Virgile (Commentarii in Vergilium, p. 533). BC renvoie a` Herder, Ideen zur Philosophie der Geschichte, troisie`me partie, livre XII, chap. IV, qui contient a` la fin une re´flexion sur l’histoire de Carthage. Il n’y est pas question du sie`ge d’Agrigente en Sicile ni du sacrifice d’un enfant, mais des conqueˆtes et guerres cruelles d’une Re´publique commerc¸ante (e´d. Bollacher, Herder, Werke, t. VI, pp. 496–499). Il faut lire : «XIII, 86». Diodore raconte la mort du ge´ne´ral carthaginois Hannibal, le fils de

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Cet historien nous parle aussi d’une statue du meˆme Dieu a` Carthage. On placait entre ses mains, dit-il, les enfans destine´s a` l’holocauste & ils tomboient ensuite dans un brasier allume´ devant elle[.] Par une de ces conformite´s qui feroient croire a´ une origine commune a´ tous les peuples ou a des communications en commun entre eux, Il y a, dans le Palais du Samorin, Roi de Calicut, une idole dans la bouche de laquelle on jette des enfans apre`s l’avoir fait rougir au feu : & nos missionnaires a` la Chine nous apprennent qu’un Prince qu’ils nomment Vou-ye´, y e´rigea un Simulacre a` figure humaine, espece d’Automate, jouant aux e´checs contre ceux qu’on destinoit a` pe´rir, & qui e´toient sacrifie´s, s’ils perdoient la partie a. Le chevalier Jones b, pre´tend que les Chinois avoient autrefois pratique´ des sacrifices humains, regulierement & avec des formes de´termine´es. Il ne cite aucun fait. Cependant, il est probable qu’il n’a pas avance´ une assertion pareille sans quelques preuves qu’il n’a pas eu le tems de produire. Les Chinois, encore aujourd’hui, jettent leurs enfans dans la rivie`re, pour appaiser l’esprit du fleuve c. Les habitans du Tonquin croyent se concilier la faveur des Dieux, en fesant mourir des enfans par le poison d. Ceux de Laos, quand ils baˆtissent un temple, enterrent sous les fondemens des victimes humaines qu’ils saisissent au hazard e. Les livres d’Eusebe de Ce´sare´e de Philon Juif & de Porphyre attestent que les Phe´niciens pratiquoient des rites non moins barbares1. les Perses, dans leur invasion en Gre`ce, enterrerent vivans neuf jeunes garcons & neuf jeunes filles. Herodote qui nous transmet ce de´tail, ajoute que telle etoit parmi ce peuple la coutume e´tablie f. a

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Me´m. du Pe´re Amiot envoye´ a M. de Guignes & inse´re´ dans les observations sur le Chou King. p. 346[.] As. Res. II. 378[.] Me´m. Sur les chinois. II. 400. Ovington, Voyag. II. 52. Sonnerat, Voy. aux Ind. II. 39[.] Il rapporte encore, (Livre VII. 180) que les perses ayant pris un vaisseau Grec, choisirent parmi les prisonniers un jeune homme qu’ils immolerent sur le Tillac. Creutz. IV. 70.

32 Il ] la premie`re ligne porte note. suit a` la ligne suivante le texte Il Co 4722

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Giscon, enleve´ par la peste devant la ville d’Agrigente. Hamilcar, qui apprend par les gardes qu’on avait vu pendant la nuit des esprits des morts, arreˆte la destruction des monuments aux environs de la cite´ et ordonne des sacrifices. «Himilcar, on seeing how the throng was beset with superstitious fear, first of all put a stop to the destruction of the monuments, and then he supplicated the gods after the custom of his people by sacrificing a young boy to Cronos and an multidude of cattle to Poseidon by drowning them in the sea» (Diodors of Sicily, The Library of History, e´d. Oldfather, t. V, 41994, p. 365). L’argument est utilise´ dans le livre XI, chap. II (ci-dessus, p. 263). BC y renvoie e´galement a` l’e´tude de Sonnerat, et poursuit son raisonnement en citant, pour les Phe´niciens, Euse`be de Ce´sare´e qui parle de leurs sacrifices humains, ainsi que Philon de Byblos, qui a traduit

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La Reine Amestre´e, parvenue a` une extreˆme vieillesse, fit mourir ainsi 14 rejetons des plus illustres familles, en signe d’actions de graces aux Dieux infernaux a. On apercoit des figures de victimes enchaıˆne´es dans les ruines de Persepolis b. les Ethiopiens immoloient des hommes en l’honneur du soleil & de la lune c, les Egyptiens en haine de Typhon d. & les basreliefs de leurs temples repre´sentent sous divers embleˆmes ces ce´re´monies e´pouvantables e[.] Le plaisir qu’e´prouve la Divinite´ par le sacrifice d’une tortue, disent les Indiens, ne dure qu’un mois. Celui qu’elle ressent du sacrifice d’un crocodile dure trois mois. une victime humaine lui cause un plaisir de mille ans : trois victimes humaines un plaisir de trois mille ans. Le chapitre de sang du Calicapuran contient de longs de´tails & des pre´ceptes tre`s e´tendus sur la manie`re de proce´der a` ces ceremonies f. Les Sculptures de l’Isle d’Elephanta pre`s de Bombay en retracent l’image g. a

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Herod. VI. 114. Plutarch. Il est bizarre que M. Hyde, qui rapporte l’enterrement des victimes humaines en Perse, come un fait incontestable, n’en mette pas moins un grand inte´reˆt a prouver que les Perses e´toient adorateurs du vrai Dieu. Qu’importe la croyance, quand les pratiques sont telles1 ? Voyages de Chardin. He´liodore, The´age`ne & Charicle´e. Diod. I. 2. 32. voir les notes de Wesseling sur Diodore, relativement aux sacrifices humains chez les Egyptiens & Schmidt, 276–279. Herodote (II. 45) nie les sacrifices humains chez ce peuple. mais Schmidt p. 278 explique tre`s bien la cause de cette erreur d’He´rodote. v. aussi a` ce sujet Larcher philosophie de l’histoire. Marshman, Canon Chron. p. 317 & Jablonsky Panth. Æg. III. ch. 3. § 8. ont e´galement prouve´ l’erreur d’Herodote, & leurs argumens se sont trouve´s confirme´s par les peintures des ruines de Dendera. Denon. Vol. p. 301–3022. Asiat. Res. V. 371–391. As. Res. IV. 424–434[.]

11 dure ] dure〈nt〉 Co 4722 17 Herod. ] la premie`re ligne porte note suit a` la ligne suivante le texte Herod. Co 4722 24 Schmidt ] la premie`re ligne porte Suite de la note. suit a` la ligne suivante Schmidt Co 4722 27 d’Herodote ] la premie`re ligne porte suite de la note. suit a` la deuxie`me ligne d’Herodote Co 4722

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l’Histoire phe´nicienne de Sanchuniathon. Plutarque mentionne Amestre´e dans ses Œuvres morales. Voir De superstitione, chap. 13 ; la phrase en question re´sume le passage d’He´rodote. Celui-ci parle de l’e´pouse de Xerxe`s, Amestre´e, dans le livre VII, chap. 114. – Le renvoi a` Hyde vise probablement le chap. II ou` il est aussi question d’Amestre´e. Dans ce contexte, nous lisons la phrase : «Persicum enim est defodere viventes» (p. 29) ; voir aussi le chap. VI, p. 136. L’autre partie de l’argument se trouve dans le chap. VIII, «De Vesta Persarum», ou` les Perses sont qualifie´s de «vero Deo devotam gentem». Le renvoi a` Denon vise le tome II du Voyage dans la basse et haute E´gypte, pendant les campagnes du ge´ne´ral Bonaparte, Paris : P. Didot l’aıˆne´, an X. = MDCCCII. BC vise la

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En Arabie la Tribu des Kore´ishites sacrifioit des filles a` sa Divinite´ Alura. les Dumatiens immoloient un adolescent au commencement de l’anne´e a. Un roi captif fut e´gorge´ en l’honneur des Dieux, par le chef des Sarrasins, auxiliaires des Romains de´ge´ne´re´s b. Evagrius & Pococke certifient que les Arabes ne renonce`rent a` cet usage qu’a` la venue de Mahomet c. Le pe`re de ce prophe`te avoit lui meˆme e´te´ de´voue´ a` ce genre de mort, & ses parens n’avoient re´ussi qu’avec peine a` faire accepter cent chameaux en e´change de sa vie d[.] Un auteur d’une e´rudition immense & qui a meˆle´ a` des hypothe`ses un peu trop syste´matiques des apercus tre`s neufs & tre`s inge´nieux, a voulu, dans son amour pour les cultes symboliques, faire en faveur de la religion de Lycie, une exception qui nous paraıˆt peu fonde´e. Il a pre´tendu que ce culte, consistant en pures offrandes de fruits & de gateaux, n’avoit jamais e´te´ souille´ par des sacrifices de cre´atures vivantes e : mais pour appuyer cette assertion, il a e´te´ force´ de de´mentir le te´moignage formel de Platon f, qui dit qu’en Lycie on immolait des hommes, & il n’a infirme´ ce te´moignage qu’en proposant une correction grammaticale, triste & facile ressource des e´crivains emporte´s par des suppositions exclusives. Enfin les Grecs, dont nous avons vu & dont nous verrons encore le Polythe´isme se distinguer des religions sacerdotales sous tant de rapports & d’une manie`re si avantageuse, ne me´ritent pas, relativement aux sacrifices humains, l’honorable exception qui doit leur eˆtre accorde´e a` d’autres e´gards. Nous ne parlerons ici ni du sacrifice d’Iphige´nie g, ni de celui des filles d’Erechte´e par leur propre pe`re. a b c d e f g

Porphyre1[.] Procop. de Bello Persico. I. 28[.] Evagrius VI. 21. Pocock. Specim. p[.] 72–86. Gibbon. ch. 50. Creutz. Symb. II. 130–132. Platon, Minos. le sacrifice d’Iphige´nie e´toit la suite d’un vœu qu’Agamemnon avoit fait a` Diane, & par lequel il lui avoit promis de lui immoler le plus beau fruit de l’anne´e. Or, dans cette anne´e Clytemnestre e´toit accouche´e d’Iphige´nie. Eurip. Iph. in Taur. 20–24.

1 sacrifioit ] 〈immoloit un adolescent au〉 sacrifioit Co 4722 4–5 Evagrius ... Arabes ] le meˆme texte sur une fiche abandonne´e, nume´rote´e 57 Co 4722, f o 58v o

1

description d’un bas-relief de Me´dinet-Abou qui repre´sente le sacrifice d’un enfant apre`s la victoire militaire d’un he´ros que Denon ne peut pas nommer. BC cite une phrase de Porphyre, De l’abstinence, livre II, chap. 56, 6 : «Les Doumate`nes d’Arabie sacrifiaient e´galement chaque anne´e un jeune garc¸on ; ils l’enterraient sous l’autel qui leur tient lieu de statue divine» (e´d. Bouffartigue et Patillon, Paris : Belles Lettres, 1979, t. II, p. 119).

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Ces e´ve´nemens qui remontent a` l’e´poque mythologique des annales Grecques peuvent eˆtre rele´gue´es au rang des fables. mais il paraıˆt certain que les Arcadiens a & les habitans de l’Achaı¨e fesoient pe´rir des hommes devant les Statues de Jupiter b & de Diane c[.] Dans les premiers tems de Sparte, les Lace´demoniens immolaient des enfans & des prisonniers de Guerre d. aux siecles les plus re´cule´s d’Athe`nes, lors de l’expiation de la ville, on immoloit un homme & une femme e. Tel fut le sort de 300 Messeniens tombe´s dans les fers. Les Argiens maıˆtres de Myce`nes offrirent en holocauste le dixie`me de leurs prisonniers f. L’universalite´ des sacrifices humains est donc constate´e : mais il est e´galement hors de doute que dans le Polythe´isme inde´pendant, ces pratiques cruelles sont moins fre´quentes & de moins longue dure´e que dans celui qui est soumis aux Preˆtres. Les Grecs les repousserent de tre`s bonne heure & les eurent ensuite toujours en horreur. la superstition les y contraignit de tems a` autre, dans des circonstances extraordinaires. Ainsi le devin Euphrantide`s forca The´mistocle a verser sur les autels de Bacchus g le sang de trois jeunes Princes, neveux du Roi de Perse, & tombe´s au pouvoir des Grecs, durant le sacrifice qu’offroit a

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la notion des furies & l’usage des sacrifices humains ont pris naissance pour les Pelages en Arcadie. Stäudlin. Rel. Mag. I. 4901. August. de Civ. Dei. XVIII. 17. Porphyr. de non edend. animal. I. Pausan. Achaı¨e. c. 19. Pausan. Lacon. c. 16. v. pour les reminiscences mythologiques des Athe´niens, relativement aux plus anciens sacrifices, Theophr. ap. Porph. de abst. II. 5. Euseb. præp. evang. I. Platon, de Legib. clem. Alex. Stromat. VII. Aristoph. in Pace. 10202. Æl. Var. Hist. VII. 3. Diod. Sic. XI. 22. v. dans Rhodoman & autres commentateurs de Diodore si ce fut ve´ritablement un sacrifice humain & rechercher Me´m. Ac. Instr. & Meursius tout ce qui a rapport aux sacrifices humains en Gre`ce3. Bacchus Omeste´s ou se nourissant de chair[e] crue[.]

21 Mag. ] Mag. 〈chiffre illis.〉 Co 4722 1

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31 chaire ] la source porte chair Co 4722

BC cite une phrase du compte rendu de Böttiger, Die Furienmaske par Stäudlin, qui, a` son tour, cite Böttiger : «Arcadien ist die Wiege dieses Mythos, so wie des ganzen blutigen Opferdienstes der Pelasger» (p. 102). Voir ci-dessus, p. 438, n. 1. Voir ci-dessus, p. 271, n. 3. – Pour Aristophane, La Paix, voir ci-dessus, p. 271, n. 4. – Le renvoi a` E´lien n’est pas e´lucide´ (voir p. 271, n. 5). Note de travail. BC veut consulter des notes prises en lisant des e´tudes publie´es dans les volumes de l’Acade´mie des Inscriptions, dont certainement l’e´tude de l’abbe´ Fe´nel cite´e cidessus. – Les publications de Meursius sont plusieurs fois cite´es dans les volumes de De la Religion ; nous indiquons l’ouvrage Græcia feriata. Sive, de festis Græcorum libri VI, Lugduni Batavorum : Ex Officina Elzeviriane, MDCXIX, livre V, article «Λυκαια», pp. 197– 198. Voir pour d’autres titres la liste des ouvrages cite´s par BC. – Rhodoman est l’e´rudit allemand Laurentius Rhodoman, qui a publie´ en 1604 une e´dition commente´e de la Biblio-

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l’arme´e pour se pre´parer a` la bataille de Salamine a[.] mais The´mistocle re´sista longtems aux injonctions de ce Preˆtre sanguinaire, & ce ne fut que pour ne pas jeter ses soldats dans un de´couragement funeste qu’il permit a` regret cette horrible execution b. Les sacrifices humains se prolonge`rent plus longtems en Arcadie que partout ailleurs c la civilisation grecque entouroit l’Arcadie & n’y pe´ne´trait pas. plusieurs vestiges de la Religion des premiers Pelages, religion Sacerdotale, paraissent s’y eˆtre conserve´s. Mais dans tout le reste de la Gre`ce les Divinite´s dont le culte se composoit spe´cialement de sacrifices humains e´toient d’une origine e´trange`re. les rites sanglans ce´le´bre´s en l’honneur de Saturne avoient e´te´ apporte´s par les Phe´niciens d. Diane ou Arte´mis etoit une Divinite´ du Septentrion, peut eˆtre Hertha que nous retrouvons chez les Germains. Cette conjecture se fortifie a´ la fois de la ressemblance des noms & de la ressemblance du Culte. Arte´mis avoit eu la figure des Divinite´s sacerdotales. elle parcouroit la terre avec une teˆte de taureau e[.] Les Lace´de´moniens avoient de leur propre aveu emprunte´ son culte des Scythes de la Tauride f, & ils racontoient que le premier effet de l’apparition de cette De´esse avoit e´te´ une sorte de de´lire, qui avoit produit des rixes sanglantes & des meurtres innombrables. tous ceux qui s’e´toient approche´s de cette idole g etoient devenus furieux : tant elle effrayoit des imaginaa b c d e f g

1

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v. sur ce sacrifice de The´mistocle Creutzer Plut. in Themist. & Aristid1. Bayle Art. Jupiter2[.] Ste Croix des Myste`res[.] Apollod. fragm. Heyne[.] Suidas in Lycurgo3. consulter Creutzer4.

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the`que historique de Diodore de Sicile. Ses notes sont reproduites, comme les commentaires de Wesseling, dans beaucoup d’e´ditions savantes de Diodore des XVIIe et XVIIIe sie`cles. BC cite Plutarque, Vies paralle`les («Aristide», chap. 9 ; «The´mistocle», chap. 13), les e´pisodes fameux de la mort des trois fils de Sandace, sœur de Xerxe`s, faits prisonniers par Aristheides dans l’ıˆle de Psyttalie et sacrifie´s sur ordre du devin Euphrantides qui pre´parait avec The´mistocle le sacrifice avant la bataille navale de Salamine. Le devin, de`s qu’il vit les princes et stimule´ par un signe annonc¸ant la volonte´ de la divinite´, somma The´mistocle de les sacrifier a` Bacchus. The´mistocle, effraye´, dut ce´der a` la volonte´ du peuple qui soutenait les exigences religieuses d’Euphrantides. Voir Bayle, Dictionnaire historique et critique, e´d. de Rotterdam, 1702, t. II, article «Jupiter», p. 1708, note K. Voir ci-dessus, p. 272, la variante a` la ligne 16. Le renvoi n’est pas correct. Voir ci-dessus, p. 273, n. 1. Note de travail. Il est difficile de pre´ciser le passage auquel pense BC. Creuzer parle de cette de´esse dans tous les volumes. Voir l’index, article «Artemis», dans le t. IV.

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tions qui n’e´toient accoutume´s ni a` ses formes monstrueuses ni a` ses rites fe´roces[.] Lucien fait dire a` Junon que Diane en vivant chez les Anthropophages avoit pris leurs mœurs sanguinaires a. Je ne puis croire, dit Iphige´nie dans Euripide b qu’une De´esse se plaise a` voir repandre le sang des hommes. Pausanias raconte fort en de´tail comment les sacrifices humains furent institue´s en Arcadie, & coment ils y furent abolis c[.] La tradition qui attribue leur origine aux amours de Me´nalippe & de Come´tho dans le temple de Diane, & l’avanture d’Euripile qui les fit cesser, en rapportant de Troye une statue de Bacchus sont indiffe´rentes a` notre sujet. Ce qui nous inte´resse c’est de remarquer qu’ils cesse`rent en Achaı¨e au retour des Grecs, apre`s le sie`ge de Troye, c’est a` dire, des les premiers tems de leur histoire. Le meˆme Pausanias, en nous informant que Lycaon immola un enfant a` Jupiter Lycæus, ajoute qu’au milieu de la ce´re´monie, ce prince coupable fut change en loup d. Ce qui prouve que les Grecs croioient leurs Dieux meˆmes indigne´s de ces pratiques inhumaines. Il n’est pas invraisemblable que le 8e Travail d’Hercule, fesant de´vorer Diome`de Roi de Thrace, par ses cavales que ce prince fe´roce nourrissoit de la chair des e´trangers, est encore une tradition defigure´e de l’abolition de ces sacrifices. Cette tradition repose, il est vrai, sur un anachronisme, puis qu’elle fait remonter a´ une e´poque beaucoup trop recule´e cette abolition, qui ne date pour Lace´de´mone que du sie`cle de Lycurgue : mais cet anachronisme n’en de´montre que mieux le desir qu’avoient les Grecs de rejeter dans un lointain obscur des pratiques dont ils rougissoient pour leurs anceˆtres. Lactance e pre´tend qu’a` Salamine dans l’isle de Chypre, on immoloit un homme, jusqu’au regne d’Adrien, en comme´moration d’un sacrifice pareil, institue´ par Teucer f : mais la date seule que Lactance assigne a` l’abolition de ce sacrifice prouve que le fait est faux. Les Romains qui abolirent avec un ze`le extreˆme de`s le tems de Ce´sar les a b c

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e f

Dialog. des Dieux. XXI1. Iphig. en Taur. 385–391. Pausan. Achaie. 19[.] Le sauvage Arcadien Lycaon avoit re´pandu le sang d’un enfant sur les autels de Jupiter : Cecrops ordonna qu’on de´posaˆt des Gateaux sur l’Autel du Jupiter Athe´nien. Pausan. Arcad. 33. Instit. Divin. I. 21. Porphyr. de Abst. II. Euseb. pr. ev. IV. 16[.]

36 sur l’Autel ] sur 〈illis.〉 l’Autel Co 4722 1

BC re´pe`te la faute du renvoi. Voir ci-dessus, p. 273, n. 2.

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sacrifices humains partout ou leurs armes pe´ne´tre`rent ne les ont pas tole´re´s jusqu’au tems d’adrien[.] Tacite qui parle de la construction du temple de Salamine par Teucer ne dit rien de ce sacrifice a & S. Cyrille affirme qu’il cessa sous le re`gne de Diphilus qui e´tablit qu’au lieu d’un homme on immolerait un bœuf b. Tous les sacrifices de ce genre dans l’histoire grecque ou Romaine sont explique´s par des haines nationales, par des dangers pressans, en un mot, par des circonstances qui sortoient de l’ordre habituel. Tout demontre que ce n’e´toit pas une institution consacre´e, mais tantot une deplorable imitation d’usages e´trangers, tantot l’e´garement d’un fanatisme subit & momentane´. l’horreur des Grecs pour ces pratiques se fait remarquer dans toutes les expressions de leurs historiens. Dans la trage´die d’He´cube, on voit un sacrifice humain, celui de Polixe`ne : mais il est repre´sente´ sous des couleurs qui montrent la re´pugnance des Grecs. Me´ne´las, dit He´rodote, ne reconnut les bienfaits des Egyptiens que par des outrages. retenu chez eux par des vents contraires, il osa prendre pour victimes deux enfans du pays c. Age´silas e´tant en Aulide ne voulut offrir a` Diane qu’une biche au lieu d’une vierge, bien que les habitans s’e´criassent que la De´esse exigeoit des hommes pour victimes & non des animaux d. Les pre´sages ayant e´te´ menacans, dans un sacrifice que Pe´lopidas offroit, on lui proposa d’appaiser les Dieux par des Victimes humaines, mais il repoussa ce conseil avec indignation e. Nous voyons partout les Grecs substituer a´ ces pratiques des rites moins sanguinaires. Les enfans de l’Achaı¨e se rendoient aux bord d’un fleuve en habits de victimes, & deposoient aux pieds de Diane les couronnes d’e´pis dont leurs teˆtes e´toient decore´es f. a b c d e

f

Tacit. Ann. III. Cyrill. in Julian IV Bayle Art. Teucer1. Herod. II. 19. v. la note de Larcher. Plutarch. Plutarch. v. sur les sacrifices humains a la bataille de Leuctres, sur le songe de Pe´lopidas & autres faits, Meiners de vero Deo. p. 209–2112. Pausan. Archae¨. 20.

16 les ] 〈aux〉 les Co 4722 1 2

BC cite l’article «Teucer» de Bayle, ci-dessus, p. 274, variante a` la ligne 17. Voir Meiners, Historia doctrinae de vero Deo omnium rerum auctore atque rectore conscripta a Christophoro Meiners [...] Lemgoviae : Impensis Heredum Meyeri, MDCCLXXX. Meiners parle du songe de Pe´lopidas, de sacrifices humains des Athe´niens, de l’oracle de Delphes, etc.

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a` Sparte les jeunes garcons e´toient battus de verges, sur les autels de la meˆme Deesse, qui, disoit-on, accoutume´e a des hommages sanglans, vouloit que son culte en conservaˆt du moins cette faible image a[.] D’autres tribus de race Dorique rougissoient de meˆme d’un peu de sang le tombeau de Pe´lops b. Bacchus avoit approuve´ que les The´bains remplac¸assent par une che`vre les victimes humaines qu’ils lui offroient pre´ce´demment c. Et nous ne serons pas e´loigne´s de reconnoıˆtre un adoucissement de meˆme nature dans la ce´re´monie annuelle de Leucade, ou l’on pre´cipitoit dans la mer, du haut de promontoire un homme qu’on s’efforcoit de sauver en lui attachant des ailes pour le soutenir & en pre´parant des barques pour le recevoir d. Au contraire dans les Gaules, soumises au sacerdoce, ces sacrifices subsiste`rent toujours malgre´ la se´ve´rite´ des loix Romaines e. Les Druides profitoient obstine´ment, pour les renouveller, de l’inde´pendance que rendoient aux peuples subjugue´s les guerres civiles f. Les Francs, dit Procope, observent encore une grande partie de leurs anciennes superstitions. Ils font pe´rir des hommes en l’honneur des Dieux & pratiquent des choses exe´crables g. Cet usage se prolongea chez ces barbares ainsi que les Goths h jusqu’au 9e sie`cle, & ce qui est horrible, mais constate´, les chre´tiens leur vendoient les esclaves qui devoient eˆtre immole´s i[.]

a b c d e

f g h i

Meurs. Miscellan. Lacon. III. 14[.] Paw, Rech. sur les Grecs. II. 337–338. Pausan. Bœot. 8[.] Bayle Art. Leucade1. Tertull. Apolog. 9. Euseb. præp. ev. IV. 15–17. Lactant. Div. Inst. I. 21. Tacit. Ann. XIV. 30. Sueton. in Claud. cap. 30[.] Lucan. Phars. I. 150. Procop. Goth. II. 25. Grotii hist. Goth. p. 617. Gregorii III Papæ epist. ad Bonifac. 122. Pellout. VIII. 592[.]

20 9e ] re´crit sur 8e Co 4722

1 2

Voir Bayle, Dictionnaire historique et critique, e´d. de Rotterdam, 1702, t. II, article «Leucade», pp. 1802–1803, note B. Voir ci-dessus, p. 276, la variante a` la ligne 19. BC indique, en renvoyant a` Pelloutier, Histoire des Celtes, t. VIII, p. 59, la source de la note qui cite la lettre de Gre´goire III. Voir ci-dessus, p. 279, n. 4.

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a` l’e´poque ou les Turcs s’emparerent de l’Egypte, on jetoit encore dans le Nil une vierge pour obtenir une inondation favorable a. Nicephore Calliste b & Sozome´ne c, racontent longuement un fait arrive´ sous The´odose, & qui prouve l’attachement des Egyptiens a´ ces sacrifices ; & Plutarque en transmet un autre mais qu’il place dans une antiquite´ fort recule´e d. Un savant moderne a voulu contester ces nombreux te´moignages e : nous leur trouvons ne´anmoins quelque authenticite´, & le re´cit de Sozome`ne & de Nice´phore surtout nous parait vraisemblable f. De nos jours encore, malgre´ l’influence & les efforts des Anglais vainqueurs, les Indiens pre´cipitent dans le Gange des hommes qui sont de´vore´s a b c d e f

Shaw. II. 148. Pococke. I. 27. Maillet. I. 691. XII. 37. hist. eccle´s. VII. 20[.] Liv. des fleuves. Schmidt. p. 281–2832[.] Photius dans sa bibliothe`que p. 1448 & Sozome`ne, hist. eccle´s. humains offerts a` Mithras dans tout l’Orient.

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III.

2. parlent des sacrifices

2 une inondation favorable ] 〈illis.〉 une inondation ces mots dans l’interl. favorable〈s〉 Co 4722 7 contester ] la source porte constater faute de copie que nous corrigeons Co 4722 1

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Pour le re´cit de Thomas Shaw, voir ci-dessus, p. 266, n. 2. – Le renvoi a` Pococke se rapporte a` l’ouvrage A Description of the East and some other Countries, London : Printed for the Author, by W. Bowyer, MDCCXLIII, t. I, p. 27. Pococke, en parlant de la ce´re´monie qui accompagne l’ouverture du canal a` l’occasion de la crue du Nil, dit ceci : «This is done with great rejoycing, when the Nile is at a certain hight ; and as there is a tradition that they formerly sacrificed a virgin every year when they perform’d this ceremony, so I was shewn a sort of pillar of earth, with gras growing on it, which when the canal is open’d, if I mistake not, is adorn’d with flowers ; and when the Nile is let in, is wash’d away in lieu of the damsel they used to offer to the river God». Dans la traduction franc¸aise, Voyages de Richard Pockocke, Paris : J. P. Costard, MDCCLIIC, t. I, p. 77. – Quant a` Maillet, on consultera Benoıˆt Maillet, Description de l’Egypte, contenant plusieurs remarques curieuses sur la Ge´ographie ancienne et moderne de ce Pays, [...] compose´e sur les Me´moires de Monsieur de Maillet, [...] par M. l’Abbe´ Le Mascrier, La Haye : Isaac Beauregard, MDCCXL. Dans cette e´dition, on trouve : «Ils [= les historiens arabes] racontent, que du tems des anciens Rois d’Egypte, & apre`s eux sous les Grecs, jusqu’a` la conqueˆte de ce Royaume par Omar, l’an 21 ou 23 de l’He´gire, [...] la couˆtume e´toit de parer extraordinairement une jeune fille, qu’on sacrifioit ensuite au Nil, en la pre´cipitant dans ses eaux, comme si on euˆt dessein de lui en abandonner la jouissance» (t. I, pp. 85–86). Dans l’e´dition Paris : Louis Genneau et Jacques Rollin, fils, MDCCXXXV, la citation se lit p. 69. BC s’est servi de cet ouvrage. Schmidt, dans son ouvrage Dissertatio de sacerdotibus et sacrificiis Aegyptiorum, pp. 281– 283, conteste effectivement la valeur des te´moignages que BC cite probablement d’apre`s cet auteur.

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par les Requins. les familles avides de poste´rite´ s’engagent a` rendre de la sorte aux Dieux le cinquie`me des enfans qui leur sont accorde´s, & des matelots Europe´ens ont vu dans ces dernie`res anne´es des parens impitoyables rejeter dans les flots un jeune garc¸on d’environ 12 ans qui s’e´toit sauve´ une 1ere fois a` la nage a. L’on doit conclure de ces faits, a` ce qu’il nous semble, que, bien que le sacerdoce n’ait certainement pas e´te´ l’inventeur des sacrifices humains, il a ne´anmoins toujours e´te´ dans l’esprit sacerdotal de perpe´tuer ces sacrifices. Premie`rement, il est dans cet esprit de ne renoncer a` aucun des usages une fois introduits dans la religion. En second lieu, les Preˆtres, auquels e´toit naturellement confie´e la mission de de´signer les victimes, se trouvoient par la meˆme investis du droit de vie & de mort sur la socie´te´ toute entie`re. Ils attaquoient le Roi sur son trone, le ge´ne´ral vainqueur au sein de son arme´e. Les Goths immoloient leurs Princes pour remercier les Dieux, lorsqu’ils avoient remporte´ une Victoire b, & chez les scandinaves, le monarque a b

As. Res. V. 26–291. Keysler. Antiq. p. 1342[.]

11 e´toit ] e´toi〈ent〉t Co 4722 1

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Nous avons constate´ ci-dessus, p. 279, n. 5, que le renvoi de BC est faux (la meˆme faute se retrouve aux pp. 324 et 579). Mais les faits sont incontestables. BC a pu prendre connaissance du sacrifice d’enfants par les Hindous dans plusieurs publications de l’e´poque. Voir Edward Moor, Hindu Infanticide. An Account of the Measures adopted for Suppressing the Practice of the Systematic Murder by their Parents of Female Infants, London : Johnson and Co, 1811, et les publications officielles de la Chambre des Communes, Parpers &c, (East India Company.) (Third Part.) Session 24 November ... 22 July, 1812–1813, vol. IX, [London] : Ordered, by the House of Commons, to be printed, 3 June 1813. La section qui nous inte´resse est la suivante : «Extracts, or so much of the Correspondence of the Governor General in Council of Bengal, with the Court of Directors of the East India Company, as related to the Abolition of the Practice of Sacrificing Children at Saugor and other Places», pp. 426–430, et plus particulie`rement les nos 2, 5 et 6 (p. 427). On y trouve : «The custom of sacrificing children is confined to the people of eastern districts. The practice arises from vows made by their parents, who, when apprehensive of not having issue, had promised, in the event of their having five children, to devote the fifth, in its infancy, to the Ganges» (no 5). Et le suivant : «Apprehensions being entertained, lest these sacrifices might, at a future period, be prevented by the police, a boy of about twelve years of age, who, we have reason to believe, was not the fifth child, [...] was thrown into the Ganges. The boy having saved himself by swimming, a Go-ayn endeavoured to extend to him his protection ; but, singular and unnatural as it may appear, he was again seized, and committed to destruction by his own parents» (no 6). En ce qui concerne Keyssler, Antiquitates selectæ septentrionales et celticæ, voir ci-dessus, p. 260, n. 5 a` la note b de la p. 259.

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n’e´toit pas plus e´pargne´ que ses sujets a. Nous avons fait ressortir ailleurs l’avantage qui re´sultoit d’un droit pareil pour le sacerdoce. Ce qui de´montre a` la fois & son calcul & son influence a` cet e´gard, c’est que d’ordinaire il se met a` l’abri par une exception spe´ciale. qu’aucun Brame n’offre son propre sang, dit le Calica puran b il ne faut jamais sacrifier un Brame ni le fils d’un Brame. Les grandes calamite´s triomphent quelquefois de cette exception. Dans des tems de guerre, de peste ou de famine, les Indiens recourent au sacrifice des Brames, comme a` celui de victimes plus pre´cieuses que les individus des autres castes c. Il en e´toit de meˆme chez les Albanois qui habitoient entre le Pont euxin & la mer Caspienne. ils immoloient sur leurs autels les Preˆtres eux meˆmes d. les alle´gories Scientifiques & cosmogoniques qui semblent au premier coup d’œiul n’eˆtre qu’imposantes ou profondes, ont contribue´ d’une manie`re qui jusqu’ici n’a pas e´te´ remarque´e, a` la prolongation des sacrifices humains. a

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Loccenii Antiq. Suev Goth. p. 151. les Ne`gres de Widha ont un sacerdoce tre`s puissans. aussi sont-ils de tous les ne`gres ceux chez lesquels les sacrifices humains sont le plus usite´s. (Meiners. C. G. I. 206–2072)[.] Asiat. Res. V. 371–391[.] Sonnerat. I. 1863. On sacrifioit au Mexique, sur le tombeau du Roi, le Preˆtre qui avoit e´te´ plus spe´cialement attache´ a` sa personne. (Acosta hist. nat. & mor. des Ind. occid.) Strabon. XI.

16 les ] a` la premie`re ligne le mot note a` la deuxie`me ligne commence le texte les Co 4722 20 On ] a` la premie`re ligne le mot note a` la deuxie`me ligne commence le texte On Co 4722 1

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BC cite Johannis Loccenii Antiquitatum sueo-Gothicarum liber primus, cap. III, dans lequel il parle des sacrifices. «Illa sedes [=le temple d’Upsala] qvolibet novennio, totius regni incolarum celebritate & conventu freqventabatur. Huc donaria certatim missa, hic sacrificia novem diebus peracta sunt : in qvibus non solum pecorum, sed etiam hominum, imo nonnunqvam propriorum filiorum hostias, ad placandum deos suos, immolabunt» (p. 13 ; ouvrage publie´ a` la suite de Historiæ svecanæ [...] libri novem, Francofurti & Lipsiæ : Impensis Viduæ & Heredum Joachimi Wildii, MDCLXXVI). Nous supposons que BC n’a pas consulte´ l’ouvrage de Loccenius, mais qu’il le cite d’apre`s Pelloutier, Histoire des Celtes, t. VIII, pp. 59–60, n. 90, qui renvoie a` Loccenius : «Les Sue´dois regardoient meˆme comme le plus favorable de tous les auspices, quand le sort tomboit sur le Roi, qui e´toit immole´ au milieu des applaudissemens & des cris de joie de toute la nation». Rien de tout cela chez Loccenius. BC renvoie a` Meiners, Kritische Geschichte, t. I, pp. 205–207. Ce passage est la source de la note a, ci-dessus, p. 258. Disons que BC ne rend pas tout a` fait correctement ce qu’on lit chez Meiners. Le sacerdoce des Widdha ou Juidah est puissant, l’institution transmise d’une ge´ne´ration a` l’autre dans une seule famille. Le grand preˆtre pre´side le culte du serpent sacre´ et a le droit de re´clamer de riches cadeaux. Il peut meˆme exiger des sacrifices humains («im Namen der Gottheit allerley kostbare Waaren, oder Heerden [...] selbst Menschenopfer zu fordern» (p. 205)). Le sujet principal du chapitre de Meiners est pourtant la description du recrutement des preˆtresses. BC renvoie a` l’e´dition allemande de l’ouvrage de Sonnerat. Voir ci-dessus, p. 281, n. 1.

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Celles qui se rapportoient aux forces de la nature, a` la puisance creatrice & destructive ont fre´quemment re´uni ces deux puissances dans la meˆme divinite´. alors, pour exprimer cette combinaison, les sacrifices humains sont devenus un symbole. Ils ont e´te´ l’offrande de la vie a´ la force qui donne tour a` tour la vie & la mort a. Mais le principe que nous avons indique´, comme essentiel aux religions sacerdotales a du favoriser plus qu’aucune autre cause, la prolongation de ces rites, malgre´ l’horreur qu’ils inspiraient. Les rafinemens de cruaute´ qu’on remarque dans les sacrifices humains, chez les nations soumises aux Preˆtres tiennent a´ ce principe. au Mexique, tantot on trainait les victimes par les cheveux jusqu’au haut de la pyramide sur laquelle elles devoient pe´rir ; tantot on les e´corchoit & les preˆtres se reveˆtirent de leur peau sanglante ; tantot on le jetoit dans un brazier ardent pour les en retirer avec des crochets & les sacrifier sur l’autel[.] Ce´sar b & d’apre`s lui plusieurs ecrivains modernes ont affirme´ que les peuples avoient com[m]ence´ par immoler des criminels, & que ce n’e´toit qu’a` leur de´faut qu’ils avoient fait pe´rir des innocens, supposition absolument fausse & contraire a` l’esprit qui pre´sidoit a´ tous les rites de cette nature. Le remplacement des innocens par les criminels n’a jamais e´te´ qu’un effet assez tardif de l’adoucissement des ide´es. le dernier e´diteur de l’histoire des Celtes, par Pelloutier a soigneusement examine´ cette question & l’a de´cide´e comme nous le fesons c. Son autorite´ a d’autant plus de poids a nos yeux que dans l’e´dition qu’il a publie´ de cet ouvrage, il a corrige´ les erreurs & re´fute´ les assertions hazarde´es d’un ecrivain qu’un systeˆme chime´rique avoit souvent e´gare´. Le Chapitre de sang des Indiens de´fend expresse´ment de sacrifier aucun homme coupable d’un crime. les imperfections du corps, les faiblesses de

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Creutz. II. 124–125, & Görres sur le culte de Schiven. II. 557–559. la Deesse Bhavani ou Dourga, est a` la fois la De´esse de la destruction et de la fecondite´, de la mort & de la renaissance. aussi lui offrait-on autrefois des sacrifices humains. de Bell. Gall. VI. 16. Histoire des Celtes VIII. 591.

28 Creutz. ... 559. ] a` la premie`re ligne le mot note a` la deuxie`me ligne commence le texte Creutz. ... 559. cette ligne a e´te´ ajoute´e sur la fiche contenant le reste de la note Co 4722

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Allusion au § IX du livre IV de Pelloutier, e´dite´ par de Chiniac dans le t. VIII de L’histoire des Celtes ; voir pp. 54–59.

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l’ame, les de´lits graves, & meˆme les malheurs accidentels rendent une victime impure, c’est a´ dire indigne d’etre offerte aux Dieux a[.] Loin de consentir a` diminuer par une substitution semblable le me´rite de ces sacrifices, le sacerdoce a cherche´ toujours a´ le rehausser, en exigeant des victimes plus pre´cieuses. Haquin, Roi de Norve`ge b & Dag c, le onzie`me successeur d’Odin, immolent leurs fils. Aune le vieux, pe`re d’une famille nombreuse, livra neuf des siens au couteau sacre´, pour obtenir du Ciel que sa vie fut prolonge´e d[.] Une preuve e´vidente de l’importance que le sacerdoce attachoit a` ces pratiques, c’est qu’il combinoit toujours avec elles la connoissance de l’avenir. les Druides Gaulois jugeoient des choses futures tant par le chute de celui que le devin frappoit d’une e´pe´e, que par les palpitations de ses membres & le ruissellement du sang e. Les Lusitaniens & les Albanois fouloient aux pieds le cadavre, pour provoquer ses convulsions prophe´tiques f. les Pe´ruviens multiplioient le nombre des victimes, jusqu’a` ce que les pre´sages fussent favorables g. les Preˆtresses des Cimbres disse´quoient la victime pour lire dans ses entrailles h. a

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Calicapuran. «L’aveugle, l’estropie´, le de´cre´pit, le malade, l’hermaphrodite, le difforme, le timide, le lepreux, le nain, & celui qui a commis des crimes graves, comme de tuer un Brame, de voler de l’or, ou de souiller le lit de son maıˆtre spirituel, celui qui n’a pas douze ans, celui qui est impur par la mort de ses parens, tous ceux la`, est-il dit, ne peuvent pas eˆtre offerts en sacrifice, meˆme quand ils seroient purifie´s.» Sax. Grammat. X. Barthol. 228[.] Botin, hist. de Sue`de, 2de ep. ch. 9[.] Bot. ub. supr. Barthol. p. 700. Diod. V. Me´m. Ac. Inscr. XXIV1[.] Strabon III. Zarate, hist. de la Conq. du Perou. I. 52. Strabon VII. Mallet, note sur la 8e fable de l’Edda2.

18 Calicapuran ] a` la premie`re ligne le mot note a` la deuxie`me ligne commence le texte Calicapuran Co 4722 1

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En ce qui concerne les druides, BC pense au passage suivant : «They also observe a custom which is especially astonishing and uncredible, in case they are taking thought with respect to matters of great concern ; for in such cases they devote to death a human being and plunge a dagger in to him in the region above the diaphragm, and when the stricken victim has fallen they read the future from the manner of his fall and from the twitching of his limbs, as well as from the gushing of the blood, having learned to place confidence in an ancient and longcontinued practice of observing such matters» (Diodorus of Sicily, The Library of History, Book V, chap. 31, 3 ; e´d. Oldfather, Cambridge, Massachusetts, London : Harvard University Press, 51993, p. 179). Sur Strabon et Mallet, voir ci-dessus, p. 286, n. 2.

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Les Scythes re´pandaient son sang sur un glaive qui chez eux repre´sentoit le Dieu Mars, & le sort se faisait connaıˆtre a` la manie`re dont ce sang coulait a. Chez les Slaves, c’e´tait en le buvant que les Pretres se procuroient une yvresse qui leur re´ve´loit l’avenir b. Lorsque vous sacrifiez un homme, dit le Calica puran, si sa teˆte tombe a` l’Est, elle te promet de la richesse, au sud, elle vous annonce quelque sujet de terreur ; au Sud Ouest, c’est un pre´sage de puissance ; a` l’Ouest, elle indique la re´ussite de vos entreprises, au Nord-Ouest, elle vous pre´dit un fils. Si des larmes s’e´chappent de ses yeux, c’est l’indication de quelque re´volution politique. Si la teˆte sourit, se´pare´e du corps, c’est pour le sacrificateur un garant de bonheur & d’une vie prolonge´e. Si elle parle, vous pouvez croire toutes ses paroles. Certains mouvemens de ses membres sont un augure funeste, d’autres sont des signes de prospe´rite´ c. Ainsi les preˆtres attachoient une signification myste´rieuse a´ toutes les convulsions de l’agonie, a` tous les cris de la douleur, comme pour placer dans ces ce´re´monies barbares tous les appaˆts propres a` rendre la curiosite´ fe´roce & a l’armer contre la nature. Nous ne nierons pas toutefois que dans tous les pays ces sacrifices ne tendent a´ s’adoucir par le laps du tems. Aucune puissance ne re´siste avec un succe`s complet a la marche de l’esprit humain. l’inte´reˆt & la pitie´ se re´unissent contre cette coutume barbare. meˆme dans les religions sacerdotales elle tombe graduellement en de´sue´tude d. Les Peruviens, dit Garcillasso de la Vega, n’e´gorgeoient plus de cre´atures humaines pour le service des autels e. Ils se contentoient de tirer du front des enfans un peu de sang qu’ils re´pandoient sur de la farine, avec laquelle ils pe´trissoient des gateaux qui, dans une solennite´ annuelle e´toient distribue´s au peuple. Les Tolonaques au Mexique adoraient particulie`rement Centeotle, la De´esse de la fecondite´, parce qu’ils croyoient qu’elle n’exigeoit pas de sacrifices humains, & qu’ils espe´roient meˆme qu’elle les de´livreroit un jour de la a b c

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He´rodot. IV. 46 & suiv. Helmold. Chron. 431. As. Res. V. 371–391. voyez sur l’adoucissement des sacrifices humains Creutz. II. 481. hist. des Incas. II. 26[.]

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28 peuple. ] BC re´pe`te l’appel de note qu’il avait accroche´ plus haut au mot «autels» Co 4722 35 voyez ] a` la premie`re ligne le mot note a` la deuxie`me ligne commence le texte voyez Co 4722 341. ] 〈illis.〉 341. Co 4722 1

Il faut lire «I. 52». Voir ci-dessus, p. 270, n. 4.

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tyrannie des Dieux qui en exigeoient a. Les Syriens avoient substitue´ une biche a´ la vierge qu’ils avoient immole´e pre´ce´demment b. Les [...] fesoient approcher de l’autel les hommes de´voue´s aux Dieux, non pour les mettre a` mort, mais pour leur repandre du vin sur la teˆte c. La tradition des Gue´bres porte que les Perses, leurs anceˆtres, fesoient passer leurs fils au dessus du feu sacre´ & le plus pre`s qu’il leur e´toit possible. C’e´toit manifestement une ce´re´monie comme´morative des victimes brule´es autrefois en l’honneur des Dieux. On retrouve la meme coutume chez quelques peuplades voisines des Juifs. les Princes d’Israel qui tomberent dans l’idolatrie s’empresserent de la re´tablir. Achas, Roi de Juda, & Manassez fils d’Ezechias, firent traverser les flammes a` leurs enfans pour les consacrer a` leurs idoles d[.] Amosis abolit a` Heliopolis la coutume de sacrifier des hommes, en ordonnant qu’on jetaˆt dans un bucher des simulacres de Cire e. En d’autres lieux de l’Egypte, ces simulacres meˆmes furent remplace´s par des gateaux comme en Ame´rique f. Plutarque rapporte que les Preˆtres marquoient les animaux qu’ils se preparaient a´ frapper d’un cachet repre´sentant une figure a` genoux, un glaive suspendu sur sa teˆte & les mains lie´s derrie`re le dos g. Un e´rudit moderne a reconnu facilement a` ces traits une re´miniscence de sacrifices jadis en vigueur h. les Egyptiens ont conserve´ de la coutume de sacrifier une vierge au Nil, celle de jeter dans ce fleuve, le jour ou l’on perce la digue, pour que l’Egypte soit inonde´e, un simulacre de terre repre´sentant une vierge i. Il est assez curieux que les chinois aient suivi une progression semblable pour l’immolation des animaux. L’Empereur Kaotzee voulut qu’on les rema

b c d e f g h i

Clavigero. Nezahualcojotl, Roi d’Acolhuacan, de´fendit les sacrifices humains, mais fut oblige´ de les permettre de nouveau, en les bornant a` des prisonniers de guerre. Porphyr. de abst. II. Pomp. Mela. IV. 21. Rois. II ch. 16. v. 3. & ch. 2. v. 6[.] Porphyr. in Euseb. Præp. ev. IV. 16. Theodoret de Sacrificiis. ch. 8. Schmidt. p. 279[.] Athe´ne´e IV. Marshman Can. Chron. Sect. XI. Meurs. de Reg. Ath. I. 9. Schmidt. p[.] 287[.] de Iside. Schmidt. loc. cit. Savary, I. 113. Sicart Me´m. sur l’Eg. lettr. edif. V. 471[.]

3 fesoient ] avant ce mot, lacune pour y mettre le nom d’un peuple Co 4722 1

Le meˆme renvoi fautif se trouve ci-dessus, p. 259, n. a, variante a` ligne 10 et p. 288, la variante aux lignes 2–3.

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placaˆt par de petites images a. Les habitans du Siam ont imite´ par e´conomie ce que d’autres peuples ont fait par humanite´. Ils ne brulent plus de veˆtemens ni de meubles sur les buchers des morts : ils n’enterrent plus de l’or ou de l’argent avec eux : mais ils employent a` cet usage des repre´sentations de toutes ces choses faites de papier & artistement decoupe´es b. Le meˆme adoucissement se remarque chez les Ne`gres. Il y a 200 ans qu’on enterrait a` Bissao des femmes & des esclaves en vie, aux fune´railles des monarques. Mais des la fin du 17e sie`cle, cette pratique e´toit abroge´e c[.] La plupart des re´formateurs de la religion Indienne ont de´sapprouve´ les sacrifices humains. l’Ezour Ve´dam d les condamne & leur abolition est l’un des pre´ceptes que la Divinite´ qui l’incarne re´ite`re le plus souvent. dans les circonstances ou` des sacrifices d’homes de tigres ou de Lions semblent commande´s, il faut, disent plusieurs livres Orthodoxes, que les Brames en fassent des repre´sentations avec de la paˆte, & proce`dent d’ailleurs a` la ce´re´monie comme si ces simulacres e´toient vivans e[.] On n’offre plus meˆme a la Deesse Bhavani en place d’hommes que des coqs & des taureaux. Ainsi le pouvoir sacerdotal fle´chit, malgre´ lui, devant le travail du tems & de la nature. mais ce n’est pas sans opposer a` ces deux adversaires redoutables une re´sistance obstine´e ; ce n’est pas sans remporter sur eux de fre´quentes victoires. en de´pit des loix d’Amosis, nous avons vu que les Egyptiens offrirent longtems encore des victimes humaines. En de´pit des reformateurs Indiens, & malgre´ l’autorite´ des incarnations, le Gange engloutit encore aujourd’hui des enfans & des femmes : & l’histoire nous prouve que le sacerdoce profite de toutes les circonstances pour rea b c d e

Paw. Eg. & Chin. II. 212. Laloube`re I. 367[.] Hist. ge´n. des voy. II. 106–107[.] l’ezourvedam n’est-ce pas le livre apogryphe de Bioche & de Chumontou1 ? As. Res. I. 265.

20–21 redoutables ] 〈quatre lettres illis. ables〉 redoutables Co 4722 1

Note de travail. BC reprend un proble`me dont il a de´ja` parle´ dans le tome pre´ce´dent. Voir OCBC, Œuvres, t. XIX, pp. 200–201, 493, 522, 526 et 568. En ce qui concerne le texte, voir Ludo Rocher (e´d.), Ezourvedam. A French Veda of the Eighteenth Century, edited with an Introduction by L.R., Amsterdam, Philadelphia : John Benjamins Publishing Company, 1984. On consultera le chap. «The Suthor of the Ezourvedam», p. 52. L’auteur du texte n’est pas identifie´ (il peut s’agir d’un converti) ; le traducteur pourrait eˆtre Pierre Martin (1665–1716), un je´suite a` Pondiche´ry. – Bioche et Choumantou sont les deux interlocuteurs de l’Ezourvedam. Voir aussi ci-dessus, p. 483, la variante a` la ligne 13.

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clamer contre des innovations dont il s’irrite, & pour re´tablir en triomphe les pratiques de l’Antiquite´. Car le principe subsiste toujours : le relachement n’est que momentane´ : De`s que les peuples eprouvent quelques malheurs, la superstition reprend son empire. la negligence des anciens usages est peinte comme une coupable tentative pour frauder les Dieux de qui leur est du, & l’homme abjure au milieu des remords un respect impie pour la vie de l’homme, le pe`re une pitie´ sacrile`ge pour les jours de ses enfans. Les Carthaginois n’immoloient plus que de jeunes garcons Achete´s dans l’etranger & nourris en secret par chaque famille qui les livroit aux Preˆtres, en place des siens. Agathocle vient mettre le sie`ge devant Carthage Aussitot le remords s’empare de l’ame des assie´ge´s. Ils se reprochent une criminelle pre´varication dans le culte de leurs anceˆtres & se hatent de reparer leur faute, ils font sacrifier en pre´sence de tout le peuple deux cents enfans choisis parmi les plus nobles de la ville, & que leurs parens empresse´s pre´sentent en pompe a` la mort a[.] Nous voyons chez les Grecs & les Romains des actes de de´vouement volontaires, qui semblent partir d’une ide´e analogue a` celle que nous assignons ici pour Principe au polythe´isme Sacerdotal. Lorsqu’Epime´nide purifie la ville d’Athe`nes, Cratinus, le plus beau des jeunes gens s offrit pour racheter, par son sang, les fautes de ses concitoyens b. Pausanias, ge´ne´ral des Spartiates, a` la bataille de Plate´e, obligea ses guerriers a` rester immobiles, jusqu’a` ce que Callicratidas, le plus beau des Lace´domoniens eut pe´ri c[.] a

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Diod. Sic. XX. 3. le meˆme renouvellement des sacrifices humains fut sur le point d’avoir lieu a` Tyr, par le meˆme motif, lorsqu’Alexandre assie´gea cette ville. (Quinte Curce. IV. 41.)[.] Athe´ne´e XIII. 2. Plutarch.

19 ici ] ajoute´ dans l’interl. Co 4722 25 Diod. ] a` la premie`re ligne le mot note a` la deuxie`me ligne commence le texte Diod. Co 4722 1

BC re´sume le re´cit de Diodore de Sicile, Bibliothe`que historique, livre XX, chap. 14, 4–7. Voir Diodorus of Sicily in twelve Volumes, t. X, with an English Translation by Russel M. Geer, Cambridge, Massachusetts, London : Harvard University Press, 41983, pp. 179– 181. – Consulter Quintus Curtius Rufus, Historia Alexandri Magni, livre IV, chap. IV, qui raconte le sie`ge de Tyr par Alexandre et les cruaute´s qui marquent la conqueˆte de la ville : «Triste deinde spectaculum victoribus ira praebuit regis. duo milia, in quibus occidenti defecerat rabies, crucibus affixi per ingens litoris spatium pependerunt» (e´d. de Leipzig : Tauchnitii, s.d., pp. 66–67 ; e´d. Schmieder, Gottingae : Sumtibus Henrici Dieterich, MDXXXIII, p. 70 ; Quintus Curtius Rufus, Histoires, 2 vol., Belles Lettres, e´d. Bardon, 2003 et 2008).

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Les Athe´niens marchant contre les 30 Tyrans ne les attaque`rent qu’apre`s le tre´pas de Trasybule a. Les Grecs, se reprochant d’avoir mis a mort contre le droit des gens les envoye´s de Darius, & voulant expier le forfait avant de combattre demanderent si quelqu’un vouloit mourir pour la patrie. Deux Lace´de´moniens distingue´s s’offrirent & furent envoye´s a` Darius. mais ce Prince voulant que le crime commis continuaˆt a` peser sur les Grecs, de´fendit qu’ils fussent tue´s b[.] [...] Cependant, ces actes de devouement, usite´s dans le Polythe´isme Grec & Romain, reposent plutot sur l’hypothe`se qu’il falloit expier les crimes qui pouvoient avoir irrite´ les Dieux, que sur la supposition admise dans le Polythe´isme sacerdotal que l’homme ne leur devient agre´able que par le sacrifice de ce qu’il a de plus cher[.] [...] C’est l’ide´e Commune des sacrifices expiatoires & nullement la notion plus myste´rieuse d’une victoire remporte´ par le sacrificateur sur ses penchans & ses affections.

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Xenoph. hist Grecq. He´rod. VII. 134.

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Chapitre 3 des privations contre Nature

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L’observation que nous venons de soumettre a` nos lecteurs, relativement aux sacrifices humains, s’applique e´galement aux privations contre nature. Sans doute, le Polythe´isme inde´pendant n’a pas toujours repousse´ les vœux de chastete´ perpe´tuelle & ces doctrines asce´tiques qui placent le perfection dans l’abstinence des plaisirs des sens a. Mais on ne peut nier que ces choses ne fussent moins fre´quentes & moins consacre´es chez les Grecs que chez les nations de l’Orient & du midi. Parmi les nations soumises aux Preˆtres b il n’en est aucune qui n’aıˆt tantot ordonne´, tantot conseille´ le Ce´libat c, soit en le restreignant a` de certaines

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La Pythie e´toit oblige´e a` la continence. (Heeren. III. 97.) voir sur les vierges sacre´es chez les Grecs Meursius, lectiones atticæ. IV. 21. La Religion Persane semble faire exception. Le Zendavesta de´fend expresse´ment les jeunes les privations & surtout l’abstinence des plaisirs de l’amour1. [...] & tombent souvent dans un ve´ritable Polythe´isme, dont ils repoussent ne´anmoins toute ide´e & toute fable avilissante pour la Divinite´. Il faut ajouter que les pratiques inde´centes qui sont une branche du Culte des organes ge´ne´rateurs sont desapprouve´[e]s par tous ceux qui ne les professent pas. Les Sectateurs de Schiven e´vitent de porter publiquement les signes caracte´ristiques de leur Secte, pour ne pas eˆtre confondus avec la branche inde´cente, & les Tantras, livres sur lesquels le culte inde´cent repose sont ge´ne´ralement me´prise´s. As. Res. VII. 279–282. Il y a, dit le Bhaguat Gita, une passion ennemie de l’homme, un de´sir produit par le principe terrestre & qui est remplis de pe´che´. (Bhag. G. trad. fr. p. 52)[.]

E´tablissement du texte : Manuscrit : BCU, Co 4722, fos 160–179. 6 perpe´tuelle ] 〈& les〉 perpe´tuelle Co 4722 9 chez ] 〈que〉 chez Co 4722 12 La Pythie ] a` la premie`re ligne le mot note a` la deuxie`me ligne commence le texte La Pythie Co 4722 14 La Religion ] a` la premie`re ligne le mot note a` la deuxie`me ligne commence le texte La Religion Co 4722 15 de ] 〈illis.〉 de Co 4722 19 desapprouve´es ] la source porte desapprouve´s Co 4722 23 Il y a ] a` la premie`re ligne le mot note a` la deuxie`me ligne commence le texte Il y a Co 4722

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Voir pour le contexte de cette note, ci-dessus, p. 301, a` partir de la ligne 7 (livre XI, chap. III). Les parties perdues du texte concernaient la religion de Zoroastre et les pratiques des Hindous.

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e´poques a, soit en l’e´tendant a` la vie entie`re des ministres des autels b, soit en le recommandant a` toutes les classes. des pe´nitences sont impose´es aux nouveaux marie´s, comme une expiation ne´cessaire pour les plaisirs permis par la politique, mais de´sapprouve´s par la religion. Les Jaque´es & les Samiasse´es font vœu de continence perpe´tuelle. Les moines du Thibet & ceux de Siam, parvenus aux grades supe´rieurs de leur hie´rarchie, contractent le meme engagement & son infraction est punie de mort. Les sacrifices humains & les privations contre nature e´toient combine´s dans la religion du Perou. Toutes les provinces envoyoient a` la cour un certain nombre de jeunes filles, dont les unes e´toient immole´es & dont les autres, vierges du soleil, e´toient voue´es a` une chastete´ perpe´tuelle c. On connoit les chatimens terribles qui les attendoient, si elles n’e´toient pas inaccessibles a` la se´duction. Le feu les consommoit vivantes, ou la terre qui s’ouvroit pour les recevoir leur pre´paroit une mort plus lente. Le meˆme sort e´toit re´serve´ aux 200 vierges de Caranqua d. Mais, comme le principe qui conduit l’homme a` cette exage´ration n’est pas susceptible d’eˆtre limite´, l’homme bientot s’est inquie´te´ que les privations ne fussent pas suffisamment pe´nibles. leur me´rite consistant dans la douleur qu’elles causent, il a provoque´ ses sens pour que l’abstinence fut plus me´ritoire. Il a recherche´ les tentations, pour que les Dieux lui sussent plus de gre´ d’y re´sister, & dans son de´lire il a cru qu en rendant la chastete´ plus a

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les Japonais, dans leurs pe´le´rinages sont oblige´s de s’abstenir des plaisirs de l’amour, meˆme avec leurs femmes le´gitimes. Les Preˆtres de la De´esse Cente´otle, De´esse de la terre au Mexique, e´toient astreints au Ce´libat. la chastete´ e´toit une condition ne´cessaire pour la Divination chez une classe de Gymnosophistes, les Semnoi : les vierges sacre´es aux Indes observoient les astres & pre´disoient l’avenir. les Bramines qui se vouent au service des Pagodes font, a` l’age de douze ans, vœu de Ce´libat. (Mayer Art. Brama. p. 302. Paulin a St Barth. Syst. Brahman. Kleuker Brahm Syst. Sonnerat. I. 183.) Ceux qui se consacrent a` la vie solitaire apre`s s’eˆtre marie´s peuvent emmener leurs femmes dans leur solitude, mais sans avoir de commerce avec elles. L’une des sectes de la religion Lamaı¨que permet le mariage a` ses preˆtres l’autre le lui interdit comme de raison c’est la plus se´ve`re qui domine : (v. Mayer Art. Gaedsuel ib. art. Gellong1[)]. Acosta. V. ch. 52. Acosta. V. ch. 15.

3 des ] 〈Ainsi〉 des Co 4722 26 Les Preˆtres ] a` la premie`re ligne le mot note a` la deuxie`me ligne commence le texte Les Preˆtres Co 4722 30 Brama ] a` la premie`re ligne les mots suite de la note 4. a` la deuxie`me ligne commence le texte Brama Co 4722 31 Sonnerat ... 183. ] syntagme ajoute´ dans l’interl. Co 4722 1 2

Voir Friedrich Majer, Mythologisches Lexicon, t. II, pp. 144–145 pour l’article «Gaedsuell», et pp. 185–189 pour l’article «Gellong». Sur Acosta, voir ci-dessus, p. 301, n. 1 et p. 317, n. 2.

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difficile, il la rendroit plus pre´cieuse. Ainsi les faquirs de l’Inde, mystiques obsce`nes, s’enorgueillissent, au milieu des caresses de femmes de´votement impudiques d’eˆtre non seulement continens mais impassibles a & qui le croiroit, le christianisme, dans le moyen age, a renouvelle ces honteuses & ridicules epreuves. Qu’il nous soit permis de proposer une conjecture qui n’est pas e´trange`re a` l’objet qui nous occupe. les Egyptiens croyoient que leurs Dieu Apis naissoit d’une genisse feconde´e par le soleil b. Les Scythes rapportoient leur origine a` une vierge qui e´toit accouche´e par un prodige d’un enfant qu’ils nommoient Scytha c. Les chinois dont plusieurs traditions tiennent manifestement a´ des dogmes Sacerdotaux, disent que la naissance de Fo-hi fut miraculeuse, en ce qu’il n’euˆt point de pe`re. Une vierge donna le jour a` Xaca dans l’une de ses apparitions sur la terre, suivant les habitans du Thibet d. Les Indous regardent comme la plus importante & la plus glorieuse des apparitions de Wichnou celle ou` sous le nom de Crishna, il naquit d’une vierge e. Cette ide´e sur laquelle il ne parait gueres naturel a´ l’esprit humain de se remonter, ne seroit-elle pas venue de l’importance attache´e par tous ces peuples a´ la virginite´, importance qui a du re´sulter de la saintete´ attache´e a b c

d e

Anquetil. 365–366. Vogel, Rel. der Æg. p. 175[.] Diodore1. Herodote pre´tend que la me`re de Scytha n’e´toit pas vierge, & lui suppose avec Hercule un commerce secret. On reconnoit ici l’esprit Grec, c’est a` dire anti Sacerdotal, s’efforcant toujours de s’assujettir les fables Sacerdotales2. Georgi, Alphab. Tibet. Præf. p. XVI[.] Roger Pagan. Ind. Liv. II. ch. 3. Creutz. III. 134 Vitzliputzli e´toit egalement ne´ d’une vierge. Clavig3.

2 Ainsi ] Ainsi 〈tous〉 Co 4722 9 e´toit ] e´toi〈ent〉t Co 4722 12 ce ] mot re´pe´te´ par inadvertance Co 4722 19 remonter ] remonter lecture incertaine Co 4722 1

2 3

Allusion au re´cit de Diodore (II, 43, 3) sur l’origine du nom des Scythes : «At a later time, as the Scythians recount the myth, there was born among them a maiden sprung from the earth ; the upper parts of her body as far as her waist were those of a woman, but the lower parts were those of a snake. With her Zeus lay and begat a son whose name was Scythes» (Diodorus of Sicily, The Library of History, e´d. Oldfather, t. II, 61994, p. 27). La vierge ne porte pas de nom chez Diodore. Sur He´rodote, voir ci-dessus, p. 328, n. 2. BC parle de la naissance de Vitzli-Putzli d’une vierge, ci-dessus, p. 329. Cette le´gende n’est pas confime´e par ce qu’on racontait sur le dieu de la Guerre des Mexicains, dont la me`re e´tait Coatlicue et le pe`re un autre dieu ou une touffe de plumes. Le renvoi au deuxie`me livre de l’histoire du Mexique par Clavigero manque dans le texte imprime´. Il y est question de la grande feˆte donne´e en son honneur.

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aux abstinences & a` la privation des plaisirs des sens ? Car il faut remarquer que dans les religions sacerdotales le Continence etoit recommande´e beaucoup plutot comme un sacrifice, come un renoncement au plaisir, comme une victoire sur la nature que comme une perfection morale. La virginite´ elle meˆme n’excitoit pas une grande ve´ne´ration chez les Orientaux. Au contraire la ste´rilite´ qui en re´sulte e´toit conside´re´e comme une malediction & comme une honte. Mais se refuser ce qu’on de´sire & fouler aux pieds ses penchans etoit dans ces meˆmes climats un acte me´ritoire de sagesse & de pie´te´ a. Or les hommes preˆtent toujours a` leurs Dieux leurs mœurs & leurs ide´es. l’union des sexes e´tant sur la terre une impurete´, Ils ont transporte´ cette notion dans le ciel, & n’ont pas voulu que la Divinite´ meˆme en s’incarnant dut sa naissance a` une union impure.

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Mein. Cr. Gesch. I. 2391. Montesquieu qui observe parfaitement, meˆme quand il n’explique point ou qu’il explique mal a eu l’instinct de cette ve´rite´. «dans les pays du midi de l’Europe,» dit-il, «ou` par la nature du climat, la loi du ce´libat est difficile a` observer, elle a e´te´ retenue, dans ceux du Nord, ou` les passions sont moins vives, elle a e´te´ proscrite». Esp. d. Loix. Liv. XXV. 4[.]

14 observe ] a` la premie`re ligne les mots suite de la note a` la deuxie`me ligne commence le texte observe Co 4722

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Voir ci-dessus, p. 331, la variante aux lignes 4–8.

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Chapitre 4 Des Rites licentieux.

Les Rites licentieux remontent jusqu’a` la croyance des sauvages : nous l’avons prouve´ dans notre premier livre, & avons re´fute´ la philosophie superficielle qui d’apre`s des conside´rations fonde´es sur les mœurs du 18 sie`cle contestoit la re´alite´ de ces rites, en d’autres tems & en d’autres lieux[.] Ce n’est donc plus a nier des faits certains c’est a` de´couvrir la cause de ces faits qu’il faut s’appliquer. Leur cause premie`re tient au principe dont nous developperons ici toutes les conse´quences : mais l’action de cette cause est favorise´e dans les religions sacerdotales par une circonstance digne d’attention[.] De`s l’e´poque la plus recule´e des ide´es religieuses, le sacerdoce, quand il parvient a` s’en emparer, y place une doctrine secre`te exprime´e par des symboles & par des embleˆmes. des syste`mes de physique & de cosmogonie font partie de cette doctrine. rien de plus naturel que de prendre pour image de la force productive ou cre´atrice les organes ge´ne´ratives. L’acte de la ge´ne´ration est une chose tre`s importante dans la vie de l’homme, & doit attirer sa me´ditation, des qu il re´fle´chit sur lui-meˆme. c’est par la` qu’il tient d’une part aux races passe´es & qu’il se lie de l’autre aux races futures. Il cesse d’exister isole´ment ; il de´robe aux ravages du tems qui la de´truit une partie de son eˆtre & prend possession de l’e´ternite´. Tout ce qui se rapporte a´ la ge´ne´ration est myste´rieux & e´nigmatique. Cet oubli complet de notre individualite´ d’ailleurs si dominante & si obstine´e, ce renversement momentane´ de toutes les barrie`res qui nous separent toujours des autres & font de chacun de nous son propre centre & son propre but, Ce me´lange d’affection morale & de de´lire physique, cette suspension ou cette confusion inexplicable de toutes nos faculte´, cet amour impe´rieux & sans bornes qui s’e´le`ve en nous pour le fruit inconnu de la plus vive mais de la plus courte de nos jouı¨ssances, tout fait de l’union des sexes le grand myste`re de la nature. Il a fallu toute la corruption qui re´sulte de la socie´te´ pour de´senchanter & degrader ce mys-

E´tablissement du texte : Manuscrits : 1.) BCU, Co 4722, fos 180–229 ; 2.) BnF, NAF 18823, fos 124–134 et 143–146 (fiches 184, 185, 187, 188, 193, 194, 196, 195, 198, 199, 201, 222, 223, 225 et 224bis).

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te`re. elle n’y a re´ussi que par l’ironie & en l’entourant de ridicule. Le ridicule n’est souvent que le sublime de´grade´. Il n’est pas e´tonnant que les Preˆtres des peuples anciens encore e´trangers a´ cet effet de la civilisation aient pris l’acte de la ge´ne´ration pour symbole & pour type de tout ce qu’ils observoient ou imaginoient sur l’origine de cet univers a. De la´ le culte des Divinite´s Hermaphrodites, Divinite´s particulie´res, aux Religions Sacerdotales. Nous montrerons ailleurs que toutes celles que nous rencontrons dans la religion Grecque lui e´toient re´ellement e´trange`res. mais parmi les peuples soumis aux preˆtres il n’en existe peut eˆtre aucun qui n’aıˆt rendu hommage a´ des Divinite´s androgynes[.] l’Aphroditos b & l’Adonis c de Syrie, l’Adagoous re´ve´re´ par les Phrygiens d, en Egypte Phthas & Neith e, en Perse Urania Mithras f, aux Indes Esu’ara, qui passione´ment amoureux de la belle Parwatty lui donna une moitie´ de corps & fut depuis ce tems moitie´ homme & moitie´ femme g. les demons, comme le feu dans les livres du Zend-Avesta h, les astres comme la lune, chez plusieurs nations de l’asie i, tous ces objets de l’adoration reunissoient les deux sexes, & par une suite de cette notion symbolique, les Preˆtres changeoient de veˆtemens & prenoient des habits de femme k dans les a

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v. Gorres. I. 24–271. le culte d’Aphroditos fut transporte´ dans l’Isle de Chypre. Creutz. I. 350–3582. Creutz. II. 102. Herodot. I. 105. Heinrich, Hermaphroditorum origines & causæ. Sect. III. Salmasius Exercit. Plin. p. 248. Jablonsky de lingua lycaonica opusc. p. 64. Creutz. I. 350–358. Creutz. ibid. Julius Firmicus de errore profan. relig. I. 5. Creutz., II. 19–20. Herodote. [ ]. 20. Roger. II. 2. Creutz.. II. 19–20. Spartian. in Vita caracalla. c. 7. Casaub. not. ad eundem Locum. Creutz. I. 364 les Preˆtres de Cybe`le s’habilloient en femmes. Creutz. II. 34–35. dans une feˆte de l’Isle de Cos, les Preˆtres d’Hercule, travestis de la sorte, lui offroient des sacrifices. Creutz. III. 445.

10 soumis aux preˆtres ] 〈Sacerdotaux〉 soumis aux preˆtres corr. dans l’interl. Co 4722 21 le culte ] a` la premie`re ligne le mot notes a` la deuxie`me ligne commence le texte le culte Co 4722 24 p. 64. ] suit la phrase biffe´e 〈Creutz. I. 350–3〉 Co 4722 26 Julius ] a` la premie`re ligne le mot notes a` la deuxie`me ligne commence le texte Julius Co 4722 28 Creutz. ] a` la premie`re ligne le mot notes. a` la deuxie`me ligne commence le texte Creutz. Co 4722 1 2

BC renvoie a` une re´flexion ge´ne´rale de Görres, Mythengeschichte, e´d. de 1935, pp. 25–27. BC cite dans cette note et les suivantes Creuzer, Symbolik, t. I, (pp. 350–359) le grand chap. sur les divinite´s hermaphrodites, et t. II, un passage sur le meˆme sujet. Tous les noms des divinite´s qui apparaissent chez BC, a` l’exception des divinite´s indiennes, ainsi que tous les titres d’e´tudes critiques avec les renvois sont tire´s de Creuzer.

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ce´re´monies institue´es en l’honneur de ces Dieux, pour expliquer la double nature des eˆtres auxquels ils rendoient hommage a.

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Schiven divinite´ Hermaphrodite, sous le nom d’Asta-narissura. Sonnerat. I. 148. Jupiter Hermaphrodite suivant les mages. firmicus, de errore pr. Rel. p. 7. Görres. I, 254. Philostrate, vie d’apollonius, dit que les Indiens concevoient le monde comme Hermaphrodite. III. 34. La statue de Cybele ou de Ve´nus a` Chypre e´toit repre´sente´e avec les attributs des deux sexes. Macr. Sat. III. 8. elle e´toit nue, & avec une grande barbe. Serv. ad Æneid. II. 6321. les hommes lui sacrifioient en habits de femmes, les femmes en habits d’homme. Je suis dit Crishna, le pe`re & la me`re de tout ce qui existe Bhag-Gita. Brama Hermaphrodite. Paulin. Syst. Brahm. p. 195. Porphyre (in Stob. Eclog. phys. 1–4. § 362.) de´crit une idole Indienne de la manie`re suivante. dans une profonde caverne sur une haute montagne de l’Inde se trouve une statue de 10 a` 12 coude´es de haut. Le cote´ droit de la teˆte aux pieds est maˆle, & le cote´ gauche femelle. Ces deux portions sont re´unis avec un art admirable. &ca le reste de la description prouve que c’est une statue de Brama. nous avons la description ailleurs. les Ramanajages l’une des subdivisions de Sectateurs de Wichnou l’adorent comme Hermaphrodite. Macrobe de´crit le Simulacre de Venus ou de Cybele a` Chypre avec une barbe, des habits de femme, une taille d’homme & un sceptre, on croit, ajoute-t-il que cette Divinite´ est a` la fois maˆle & femelle. Aristophane le nomme Aphroditos. Lævius nous dit que son sexe est incertain, & Philochore dans son histoire d’attique, dit qu’elle est la meˆme que la lune. Macr. loc. cit. Suidas parle aussi de la Ve´nus Barbue qui avoit les organes ge´ne´ratives des deux sexes, parce qu’elle pre´sidoit a toute ge´ne´ration, & qui e´toit homme de la ceinture en haut & femme de la ceinture en bas. Horapollo (I. 13.) dit que Minerve & Vulcain, Phthas & Neith, sont les seuls Dieux des Egyptiens qui fussent Hermaphrodites. Ils ne l’e´toient pas en Gre`ce. Wagner. 279–2803. ib. 306. Minerve dans les

BC vise la phrase : «Est enim in Cypro simulacrum barbatae Veneris, (corpore et veste muliebri muliebri, cum sceptro, et natura virili) quod αÆ ϕρο δοτον vocatur, cui viri in veste muliebri, mulieres in virili vestesacrificant ; quanquam veteres deum pro magno numine dicebant». Servius, Commentarii in Vergilium, p. 166. – La note de BC paraphrase aussi Macrobe, Saturnalia, III, 8, 2 : «There’s also a statue of Venus on Cyprus, that’s bearded, shaped and dressed like a woman, with scepter and male genitals, and they conceive her as both male and female. Aristophanes call her Aphroditus, and Laevius says : Worshiping, then, the nurturing god Venus, wether she is male or female, just as the Moon is a narturing goddess. In his Atthis Philochorus, too, states that she is the Moon an that men sacrifice to her in women’s dress, women in men’s, because she is held to both male and female» (Macrobius, Saturnalia, edited and translated by Robert A. Kaster, Cambridge, Massachusetts : Harvard University Press, t. II, p. 56). Macrobe est la source pour le texte perdu d’Aristophane, comme ce passage est aussi la source pour les renvois au poe`te latin Laevius (1er sie`cle av. J.-C.) et l’historien grec Philochorus. Quant a` Paulin, Porphyre et Stobe´e, voir ci-dessus, p. 239, n. 2. BC utilise, pour le re´sume´ des arguments de Wagner, les notes de lecture (Co 3293, dossier Wagner) qu’il avait prises a` Göttingen en consultant Johann Jakob Wagner, Ideen zu einer allgemeinen Mythologie der alten Welt, Frankfurt am Main : In der Andreäischen Buchhandlung, 1808. BC s’arreˆte au caracte`re hermaphrodite de Phtas et Neith chez les E´gyptiens (pp. 279–280), e´voque la nature hermaphrodite de Minerve dans les hymnes orphiques

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mais un symbole beaucoup plus commun, parce qu’il est a` la fois plus facile a` montrer & a` expliquer au peuple, c’e´toit l’organe ge´ne´rateur isole´. nous rencontrons partout le Phallus ou le Lingam, tantoˆt adore´ seul, sous une forme monstrueuse a. tantot combine´ avec le culte des animaux ou

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hymnes Orphiques est hermaphrodite. ib. 308. elle est en meˆme tems un dragon a` diverses formes, allusion aux figures sacerdo tales. toutes les divinite´s, principes des choses, dans les cosmogonies sacerdotales sont androgynes. Le Dieu Cenresi au Thibet a une gorge de femme. ib. 199. Porphyre cite les divinite´s Hermaphrodites de l’Inde. Wagner. 122. Schiven dans une incarnation ou il se nomme Ardhanari ne fait qu’un avec sa femme & est Hermaphrodite. Bagavadam. Le Lingam est son symbole. Wagn. 167. Statues porte´es dans les fetes de l’Egypte avec des organes ge´ne´rateurs mobiles & d’une grandeur disproportionne´e. He´rod. II. 48. On adorait Osiris avec un Phallus monstreux. ib. 49. Maller-Carpe´e n’est autre chose que le Lingam. (As. Res. V. 5071.) l’adoration du Lingam est tellement enracine´e dans les mœurs de l’Inde que les Missionaires ont e´te´ force´s de transiger avec cette idolatrie, & de permettre aux femmes qu’ils convertissent d’en conserver l’image, en y re´unissant celle de la Croix. Sonnerat I. 2. Plusieurs auteurs & parmi eux des hommes fort religieux ont pre´tendu que la croix des chre´tiens avoit e´te´ emprunte´e du simulacre du Phallus. (Jablonsk. Panth. Æg. V. 7. 4. Lacroze hist. du christ. des Ind. p. 431. Carli lettres americaines. I. 499. II. 504. Larcher not. sur He´rod. II. 260–272. dern e´dit. les femmes indiennes portent la figure du Lingam dans leurs cheveux ou se la peignent sur le front. Rog. Pag. Ind. Ch. 32. les femmes Egyptiennes portoient a` leur col dans les feˆtes l’image du Phallus. Bayle Art. Thesmoph. v. Ste Croix Myst. 4263. Il y avoit dans le temple de Ve´nus a` hie´rapolis deux Phallus monstreux, hauts de 300 Coude´es, qu’une inscription disoit avoir e´te´ consacre´s par Bacchus a` Junon (Luc. de Dea Syria4

6 tales. toutes ] a` la premie`re ligne les mots suite de la note a` la deuxie`me ligne commence le texte tales. toutes Co 4722 17 ont ] a` la premie`re ligne les mots suite de la note 1. a` la deuxie`me ligne commence le texte ont Co 4722

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(p. 308) et l’expression «dragon a` diverses formes» («gestaltenwandelnder Drache» p. 308) ; de la description de´veloppe´e du dieu tibe´tain Cenresi, BC ne retient que l’attribut qui sugge`re sa nature hermaphrodite (p. 199) ; il cite la description d’une statue hermaphrodite indienne qu’on trouve chez Porphyre (dans Stobe´e, Eclog. Phys.) qui repre´sente Brahma (p. 122). La dernie`re remarque concerne Schiven, dont parle Wagner dans le chap. sur les divinite´s indiennes (pp. 167–168). Voir ci-dessus, p. 239. Le renvoi est faux. Le volume V des Asiatic Researches ne comprend que 426 pages. BC supprime cette remarque en re´digeant son texte pour l’impression. Nous n’avons pas re´ussi a` corriger l’erreur. Voir ci-dessus, p. 245, ligne 12. BC cite dans la version imprime´e le meˆme passage. Le renvoi vise peut-eˆtre le chapitre sur les Thesmophories. Voir Sainte-Croix, Recherches historiques et critiques sur les myste`res du paganisme, e´d. Silvestre de Sacy, t. II, pp. 3–19. Sur Lucien, De dea syria, voir ci-dessus, p. 94, n. 1.

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des pierres a, ce qui est une preuve qu’il remontoit aux premiers ages de la religion. Car les Preˆtres, comme nous l’avons dit plus d’une fois, rendant les formes des Dieux stationnaires, & prolongeant par conse´quent le culte des pierre & des animaux, ajoutoient a` ce culte suivant leurs ide´es ou leurs alle´gories poste´rieures b. Celui des organes de la ge´ne´ration n’e´toit point inde´cent dans l’origine. Il ne parait pas, dit le chevalier Jones, en parlant de l’Inde, qu’il soit entre´ dans la pense´e des le´gislateurs ou dans celle du peuple, qu’aucune chose naturelle put eˆtre obsce`ne c.

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Mein. Cr. G. I. 254–2561.) Adoration du Phallus chez les Chalde´ens. Paralip. 2. c. 15. v. 16. Les organes ge´ne´rateurs de la femme e´toient e´galement adore´s. On en portoit les repre´sentations (le Myllos) dans les feˆtes publiques de Ce´re´s a` Syracuse. Athenee (Liv. XIV) rapporte cela comme un ancien usage2. les organes des deux sexes sont adores aux Indes re´unis & dans l’acte de la ge´ne´ration (Roger Pag. Ind.) Explication historique de l’adoration Egyptienne du Phallus. l’organe ge´ne´rateur d’Osiris perdu quand il fut mis en pie`ces par Typhon. Osiris Arsaphe`s, le Phallus en e´rection. (Kircher Œdip. Æg. I. Gorres. Zoega de Obelisc. p. 123. Nous trouvons dans le voyage en Egypte par Denon3 Atlas. Pl. 125, no 15 le Phallus adherent aux Thermes. v. pour les modifications progressives du Phallus depuis son adjonction aux pierres consacre´es jusqu’a` son adjonction a` Osiris des details curieux dans le culte du Phallus. p. 49. v. pour les alle´gories exprime´es par les feˆtes licentieuses Creutzer sur celles d’At[t]ys. Attys cherche´ & trouve´. feˆtes de deuil auparavant, transports de joye apre`s, rites licentieux, mutilations. l’organe ge´ne´rateur parle dans cette feˆte en nature au lieu du Phallus. Sens astronomique des feˆtes licentieuses. Creutz. II. 33. fables sacerdotales rapporte´es par Pausanias & Diodore relatives a` Cybele, Attys &ca ib. 39–40. de´tails astronomiques sur la fable d’Attys. ib. 46–474. As. Res. II. 254–256.

14 rapporte ] a` la premie`re ligne les mots suite de la note 2 a` la deuxie`me ligne commence le texte rapporte Co 4722 19 Nous ] a` la premie`re ligne on lit note 2 a` la deuxie`me ligne commence le texte Nous Co 4722 1

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BC re´sume un passage de Meiners, Kritische Geschichte, t. I, pp. 255–256, dont il traduit une phrase : «In späteren Zeiten standen vor dem Tempel der Venus zu Hierapolis zwey ungeheure Phalli, die drey hundert Ellen hoch waren, und von welchen eine Inschrift sagte, daß Bacchus sie der Juno gewidmet habe» (p. 256). Meiners indique a` son tour qu’il exploite Lucien, De dea Syria (e´d. de Reitzius, Amstelodami, 1743, t. III, pp. 463 et 474), renvoi que BC reprend sans consulter le texte. Le renvoi a` Athe´ne´e est copie´ chez Meiners, Kritische Geschichte, I, p. 257, n. k. Meiners cite la p. 647 de l’e´d. de Casaubon de 1612, ajoutant un renvoi a` Sainte-Croix, Recherches sur les myste`res. BC renvoie au petit dessin no 15 de la planche 125 dans l’atlas du Voyage en E´gypte. Denon reproduit les illustrations d’un manuscrit sur toile, une bandelette de momie. BC utilise dans son texte la description de Denon qu’on lit dans le premier volume (explication des planches) : «un homme a` teˆte de loup, pre´sentant a` manger a` une divinite´ en forme de terme ; il porte en meˆme temps la main sur la partie de la ge´ne´ration de cette divinite´». BC re´sume de manie`re provisoire dans cette note ce que Creuzer expose de manie`re plus

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Cette observation doit s’appliquer a´ tous les peuples dans le premier pe´riode de la civilisation. Il y a dans les fables indiennes des traits de pudeur re´unis assez singulie`rement aux hommages rendus a` des repre´sentations qui blessent nos yeux & nos habitudes. Les Bramines de la Pagode de Perwattum racontent qu’une femme s’e´tant approche´e seule, mais nue, du lingam pour l’adorer, un bras en sortit pour la repousser, une voix se fit entendre, qui lui de´fendit de se montrer aux Dieux dans cet e´tat immodeste a. Mais a` mesure que la simplicite´ des mœurs disparut, le culte dut blesser davantage les ide´es de pudeur que developpent les rafinemens de la vie sociale. Alors dut s’e´lever entre cette pudeur & des ce´re´monies qui la re´voltoient une lutte dans laquelle le sacerdoce se fit un devoir & un droit d’intervenir, parce qu’il est dans son esprit de briser toutes les re´sistances. Il avoit ordonne´ la chastete´ pour violenter la nature, il ordonne l’inde´cence pour violenter la pudeur. C’est pour cela que nous voyons en Egypte des femmes formant des danses lascives autour du taureau, divinite´ de Lycopolis b. On a voulu vainement nier la prostitution religieuse des Babyloniennes c. a b c

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As. Res. V. 313. Diod. I. 2. 32. He´rodot. [ ]. 1991. Se´sostris fit e´riger des Phallus partout ou` il pe´ne´tra. He´rodote, imbu de l’esprit Grec, explique cette action de Se´sostris, en disant qu’il vouloit exprimer ainsi le courage viril de ses guerriers & la lachete´ effe´mine´e des peuples qu’il avoit vaincus. Schleg. W. d. I. 1202. indecence de la feˆte de Diane, a` Bubastis, en Egypte. Herod. II. 60. a` The`bes en Egypte. toute feme mande´e dans le temple e´toit oblige´e de ce´der a` ses de´sirs. Mein. C. G. I. 3933. Les Egyptiennes a´ Chemnis se livroient aux embrassemens du bouc Mende`s Symbole de la force productrice. Suidas in Priapo. Jablonsky Panth. Æg. II. 7. Plut Dialog. que les betes ont l’usage de la raison.

27 Les ] a` la premie`re ligne le mot note a` la deuxie`me ligne commence le texte Les Co 4722

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circonstancie´e sur la fable d’Attis. Il faut corriger le renvoi a` He´rodote et lire «II, 102–103 et 106». He´rodote parle de colonnes, non pas de phallus. Les ste`les ce´le`brent ses victoires. Seuls les peuples qu’il avait pu vaincre facilement sont humilie´s en ajoutant a` l’inscription un symbole de leur laˆchete´ effe´mine´e. Schlegel, Weisheit der Indier, commente le passage d’He´rodote, mais rejette l’exe´ge`se morale (courage viril – laˆchete´ effe´mine´e). BC cite une remarque de Meiners, Kritische Geschichte, t. I, p. 393 sur la prostitution religieuse a` The`bes en E´gypte, que celui-ci inte`gre dans une re´flexion sur le dieu Be´lus a` Babylone.

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Des traces de cette Coutume s’apercoivent en Lydie a, dans la Phe´nicie b & a` Carthage c. les Prophe`tes Juifs se plaignent fre´quemment de ce que les Preˆtres des faux Dieux se´duisoient les Israe´lites, par des pratiques impudiques. Ezechiel s’e´le`ve contre la fabrication du Phallus, & reproche aux Juives de rendre a` ce simulacre les honneurs divins d. en effet nous le voyons e´rige´ en pompe dans le temple de Jehovah meˆme e. Lors de l’apostasie d’Abias, Roi de Juda, le Culte de Priape fut introduit dans ce Royaume. Jonas abattit les cabanes des effe´mine´s qui e´toient dans la maison du seigneur. Ces effe´mine´s n’e´toient que des Preˆtres idolaˆtres qui celebroient des rites obscenes f. Des ce´re´monies semblables souilloient la religion du Mexique g. a

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Il y avoit dans cette contre´e des ce´re´monies licentieuses en l’honneur d’Hercule, & ces ce´re´monies ressembloient a la prostitution des Babyloniennes. Creutz. II. 249. Selden de Diis Syr. Synt. II. 7. p. 23. Ac. inscr. XXXVIII, 59. Aug. de Civ. Dei. IV. 10. Culte du Phallus, p. 1701. En Syrie, en Assyrie, & en Phe´nicie, on adorait le Phallus sous le nom de Pe´or ou Phegor, & les jeunes filles lui sacrifioient leur virginite´. Beyer ad Seld. Synt. de Diis Syris 235 & suiv. Michael. Mos. Recht. Vol. [ ] p. 308–309. Rites indiennes a` Babylone (Creutz. II. 21. 22) id. a` Chypre & ailleurs suivant Herodote. idem en Arme´nie & en Cappadoce (Creutz. ib2.) D’apre`s le te´moignage de Duris dans l’Athe´ne´e, (X. 10.) le Roi de Perse ne pouvoit s’enyvrer & danser la danse nationale que le jour de la feˆte de Mithras. Ceci ne seroit-il pas un reste de rites grossiers & licentieux dans la religion de Zoroastre qui, d’ailleurs est beaucoup plus pure que les autres religions Sacerdotales ? cette plus grande purete´ & l’absence presque totale de mace´rations & d’inde´cence dans ce culte pourroient s’attribuer a` la re´forme ope´re´e par Zoroastre. c’est l’opinion du plus savant commentateur du Zend-Avesta. Kleuker Anh. z. Z. II. 3. p. 194[.] Ezech. XVI. 16–17[.] Rois. II. 23. 7. Belphe´gor, l’un des Dieux des peuples idolaˆtres, ennemis des Juifs avoient des formes priapiques & des rites licentieux. Kirch., Œd. Æg. I. 333. Rois. IV. 23. 7. Garcilano de la Vega. Hist. des Inc. II. 6.

16 En Syrie ] a` la premie`re ligne le mot note a` la deuxie`me ligne commence le texte En Syrie Co 4722 20 D’apre`s ] a` la premie`re ligne le mot note a` la deuxie`me ligne commence le texte D’apre`s Co 4722 1

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BC renvoie a` l’ouvrage de Jacques-Antoine Dulaure, Des divinite´s ge´ne´ratrices, ou du culte du Phallus chez les anciens et les modernes. Des cultes du Dieu de Lampsaque, de Pan, de Ve´nus [...], Paris : Dentu, 1805. BC renvoie a` la fin du § 34 et au § suivant, qui parlent de la prostitution au temple de la divinite´ Mylitta a` Babylone, avec des re´percussions jusqu’a` Chypre, enfin jusqu’en Arme´nie et en Cappadoce (Symbolik, t. II, pp: 20–27). Le te´moignage de Duris sur les licences du roi des Perses, conserve´ par Athe´ne´e, Les Deipnosophistes, livre X, chap. 10, est mentionne´ e´galement par Creuzer (p. 21) auquel BC emprunte ses arguments. – Le renvoi a` Kleuker pose proble`me. Voir ci-dessus, p. 484, n. 2. Nous avons essaye´, en vain, de rectifier la faute de la note de BC.

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De la Religion, IV – Textes comple´mentaires

de jeunes Indiennes dansent encore a` pre´sent le sein de´couvert chaque jour devant les Pagodes a. Les nouvelles marie´es offrent a` de hideux simulacres les pre´mices de la virginite´ qu’elles vont perdre ; & il est assez remarquable que leurs pratiques soient pareilles en tout a` celles que les Romains avoient adopte´es lors du me´lange de tous les Polythe´ismes b. Dans les climats Septentrionaux, dont l’aprete´ pre´servoit les habitans de ces e´carts d’une imagination deprave´e, le culte du Phallus, moins Scandaleux, e´toit plus sanguinaire. Cette re´voltante & difforme idole e´toit arrose´e de sang humain c. a

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Laflotte Ess. hist. sur l’inde. p. 216 Inde´cences du Culte Indien. Mein. C. G. I. 263–264. Hamilton, new account of the East Indies. chez quelques peuplades Indiennes, on repre´sentoit dans les feˆtes licentieuses des plaisirs contre nature. Moore’s Narrative of the operations of capt. Little Detachment & of the Mahratta Army. p. 45. Il en e´toit de meˆme dans quelques temples du Mexique. Kirch. Œd. Æg. I. 5. Laet Beschr. v. West Indien. V. 5[.] Lactant. de fals. Relig. Arnob. Adv. Gent. IV sur le Dieu Matumis qui a une analogie complette avec le Lingam sur lequel on met les jeunes marie´es a` cheval. Nous voyons dans une lettre d’Alde´gore, Archeveˆque de Magdebourg aux Eveˆques de Saxe, de Lorraine & de France que les germains offraient au Phallus des victimes humaines. Ampliss. Coll. Vet. Script. I. 625–626. le culte de Dourga combinait aussi les pratiques licentieuses & les rites cruels. Schleg. W. d. I. 119. dans la nuit la plus longue de l’anne´e a` la feˆte de Thor, les Scandinaves se livraient disent les traditions, a` toutes sortes de de´bauches. Il paraıˆtrait, par une saga Sue´doise, (v. Oloff Trygguesons Saga, & Bartholin Antiq. Danica II. 5.) qu’il y a eu en Sue`de quelques traces des rites licentieux : car il est parle´, dans cette Saga, de jeunes filles choisies pour Preˆtresses du Dieu Frey (non pas de la de´esse Freya) & destine´es a` servir aux plaisirs de ce Dieu. Il est vrai que cette Saga est l’ouvrage d’un moine qui repre´sente toujours Frey come le diable & qui a peut-eˆtre attribue´ a` son culte des pratiques qui n’en e´toient pas. Inde´pendamment de cette ide´e du sacrifice, Il paraıˆt y avoir entre la de´votion exalte´e a l’exce`s, & qui, en bouleversant l’imagination, influe sur les sens, & la soif de la volupte´, une relation fort intime. Plusieurs he´re´tiques ont associe´ a` leurs divers fanatismes, des pratiques les plus re´voltantes. les maniche´ens pre´tendoient que l’esprit venoit du bon principe, & la chair du mauvais & qu’en conse´quence, il falloit en haine du mauvais principe, de´shonorer la chair le plus qu’il e´toit possible, & sous ce pre´texte ils se livroient a` mille impurete´s1. (Bayle, Art. Maniche´ens) Prodicus, he´re´tique du second sie`cle, recommandoit la communaute´ des femmes & la copulation en public. (Theodoret. hæret. fab. 1. 6. V. 27.) Sitoˆt apre`s la mort des apotres, la doctrine de l’union

3 Les nouvelles ] on lit, dans la marge gauche de la fiche et e´crite de travers, une phrase biffe´e qui passera dans une note (ci-dessous, p. 307, note b) 〈on voit aussi la re´union des pratiques licentieuses & des rites sanguinaires dans le culte de Dourga aux Indes. Schl. W. d. I. 119.〉 Co 4722 11 Laflotte ... p. 216 ] phrase ajoute´e apre`s coup dans l’interl. ; nous la plac¸ons au de´but de la note Co 4722 16 Matumis ] lecture hypothe´tique Co 4722 21 licentieuses ] la source porte licentieux faute que nous corrigeons d’apre`s la fiche 215 Co 4722 21–22 a` la ] a` la premie`re ligne les mots suite de la note a` la deuxie`me ligne commence le texte a` la Co 4722 35 recommandoit ] 〈deman=〉 recommandoit Co 4722 1

Voir Bayle, Dictionnaire historique et critique, e´d. de Rotterdam, 1702, t. II, article «Maniche´ens», pp. 2022–2027, note B. Voir ci-dessus, p. 311, n. 1.

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Nous n’apercevons rien de pareil dans les religions inde´pendantes des preˆtres, telles quelles e´toient professe´es publiquement. il y avoit bien en Gre`ce des feˆtes inde´centes, ou` des femmes paraissaient nues : mais ces femmes n’e´toient que des courtisanes, tandis que les rites licentieux des religions sacerdotales forc¸oient a´ l’inde´cence ou a´ l’impudicite´ des femmes de toutes les conditions a. S’il y avoit, dans presque tous les myste`res des simulacres inde´cens, c’est que ces myste`res e´toient emprunte´s, comme on le verra, de pays e´trangers

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mystique entre les fide`les fut interpreˆte´e comme impliquant l’union charnelle de l’homme avec la femme, & l’on appela cette union la ce´re´monie de l’initiation. Prodicus croı¨oit les ames envoyees dans le corps, non pour y eˆtre punies, mais pour rendre hommage aux Anges, par toutes sortes de volupte´s (The´od. ib. V. 10 & 20. Bayle, Art. Prodicus l’he´re´tique1). Un grand nombre de sectes chre´tiennes se sont fait un devoir d’une nudite´ comple`te. (les Adamites, les Picards, les Anabaptistes, les Turlupins. V. Bayle, art. Turlupins) Tande´mus, he´re´tique d’Amiens du tems de l’Empereur Henri V, en 1124, soutenait que ce n’e´toit pas un acte de sensualite´, mais de spiritualite´, que de jouir d’une femme en pre´sence de son mari, ou d’une fille devant sa me`re2. (Bayle, art. Tande´mus) On connoit les processions de pe´nitens nus des deux sexes, ou de flagellans jusqu’au 15e sie`cle. Tous les mystiques se sont laisse´s entrainer a` des descriptions, a` des images, a` des alle´gories tre`s sensuelles. Il suffit de lire pour s’en convaincre les ouvrages des mystiques Anglais ou Francais, de Barrow, p. ex., ou de Mde Guyon, & les chants mystiques du poe´te Persan Hafiz. toutes les expressions destine´es a´ de´crire les jouı¨ssances de la devotion sont emprunte´es des plaisirs physiques, & les de´tails deviennent toujours plus libres, en raison de ce que la de´votion devient plus ardente. (As. Res. III. 165–207.) Vision dans laquelle Antoinette Bourignon voit Adam avec les deux sexes, se fecondant lui meˆme avec des de´lices ineffables, lorsqu’il est enflamme´ de l’amour divin. (Bayle Art. Adam) Elle appeloit les conversions qu’elle fesoit des enfantemens spirituels, & disoit ressentir dans ces enfantemens mystiques toutes les douceurs de l’accouchement. v. Vie continue´e par Ant. Bourignon ; Incarnation du Diable par le pe´che´ contre nature suivant la meˆme. Bayle. Art. Bourignon. Strabon rapporte qu’il y avoit a´ Corinthe des femmes voue´es au culte de Ve´nus, qui fesoient trafic de leurs charmes, & qui de´posoient le salaire qu’elles en retiroient dans le tre´sor du temple. Liv. VIII. mais il appelle ces femmes des He´tæres, c. a. d. des courtisanes, au lieu que la prostitution impose´e aux Babyloniennes s’e´tendoit a´ toutes les femmes. Les filles de Sparte dansoient sans veˆtemens avec les jeunes garcons dans les pompes publiques : mais quelle n’e´toit pas la diffe´rence entre ces ce´re´monies ou` la pudeur entourait les vierges depouille´es de leurs habits & les pratiques re´voltantes de l’Egypte & de la Syrie.

13 un devoir ] un devoir 〈d’aller〉 Co 4722 1

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Bayle, Dictionnaire historique et critique, e´d. de Rotterdam, 1702, t. III, article «Prodicus l’he´re´tique», p. 2515. BC inte`gre dans son texte des formulations de Bayle, y compris le renvoi a` The´odoret (note A). Voir Bayle, Dictionnaire historique et critique, e´d. de 1702, t. III, p. 2834, article «Tandemus». BC en cite librement une phrase et la note Z pour sa remarque sur les processions de pe´nitents nus.

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& de religions soumises aux preˆtres a. l’esprit du Polythe´isme grec s’efforc¸a toujours de les repoussser. Le Culte du Phallus fut apporte´ en Gre`ce suivant He´rodote, par Me´lampus que les Egyptiens avoient instruit dans les choses sacre´es b. le meˆme historien ajoute cependant c que l’Herme´s a´ Phallus appartenoit a´ l’ancienne Religion des Pelages & non a´ celle d’Egypte. mais on admettrait la ve´rite´ de cette assertion qui contredit la premie`re qu’il n’en re´sulteroit pas moins que les alle´gories de ce genre sont propres aux religions sacerdotales : car il y a beaucoup de vraisemblances, comme nous l’avons de´ja` dit, que l’ancien culte des Pe´lages, avant qu’ils fussent retombe´s dans le fe´tichisme, e´toit un culte sacerdotal. d’ailleurs, meˆme en adorant la Phallus dans les myste`res, les femmes Grecques ne se prostitue`rent jamais comme les Babyloniennes. [...]1.

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Strabon, Liv. XIII, met Priape au nombre des divinite´s les plus re´centes, inconnues a´ He´siode. Creutz. III. 1072[.] Herod. II. 493[.] ib. II. 51[.]

Voir pour la phrase qui se trouvait sur la fiche perdue ci-dessus, p. 310, lignes 8–9. Il faut lire «II, 107». BC copie la re´fe´rence que Creuzer fournit a` l’endroit indique´ et reproduit son argument. Me´lampus n’est pas mentionne´ dans la version imprime´e. BC renvoie dans cette note et la suivante aux chapitres des Histoires qui racontent les faits dont il est quesion ici.

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Chapitre 5 de la saintete´ attache´e a la douleur a.

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En commencant les chapitres relatifs au principe dominant des Religions sacerdotales, nous avons dit que l’homme, lors qu’une fois il partoit de ce principe ne pouvoit s’arreˆter. 230bis

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a revoir sur ce sujet mes anciens extraits du Phallus no 41. de Bayle, 87, 140, 141, 142. de Hyde, 32, des Rech. Asiat. 73. de Müller, 38. du Calicapuran, 24. des Me´langes, 1. du Paralle`le des Religions. 137, 138, 141, 142, 143, 179. de Schmidt, 21, de St Philippe, 173. Morin, de l’usage du jeune chez les anciens par rapport a` la religion. Ac. Inscr. IV. 29. Roberts hist. d’Ame´r. Sur les tortures volontaires chez les Mexicains1. E´tablissement du texte : Manuscrit : BCU, Co 4722, fos 230–274.

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Cette note de travail nous apprend que BC disposait pour son travail d’un dossier important de notes de lecture que nous ne posse´dons plus, a` l’exception peut-eˆtre de quelques fragments que’lon trouve dans les liasses de Co 3293, si les feuilles volantes avec des notes qui abordent ce domaine appartenaient a` cet ensemble. L’important lot de notes de lecture qu’on trouvera dans le t. XXIV des OCBC, Œuvres ne contient aucun chapitre qui corresponde a` la se´rie des extraits mentionne´s ici. Nous savons aussi que BC a e´tabli, selon le meˆme principe, un dossier semblable lorsqu’il travaillait a` la re´daction du t. III de De la Religion (voir OCBC, Œuvres, t. XIX, «Recherches sur l’Inde», pp. 587–616). La premie`re ligne de ce texte mentionne, comme BC le fait ici, les ouvrages a` relire, sans doute en consultant les extraits, pour rassembler les informations dont il a besoin. Si l’identification des sources est relativement facile pour les extraits du cahier des «Recherches sur l’Inde», elle est autrement plus difficile, parfois impossible, pour la se´rie des ouvrages qu’on trouve dans cette note. Nous ne savons pas ce que contenait le dossier sur le culte du phallus. Les articles de Bayle sont souvent cite´s en en donnant le titre. Les renvois a` l’ouvrage de Thomas Hyde, Historia Religionis veterum Persarum, eorumque magorum, Oxonii : E Typographeo Clarendoniano, 1760 sont parfois difficiles a` identifier, ce qui est vrai aussi pour les articles cite´s des Asiatic Researches. Il cite ensuite Erasmus Müller, De hierarchia et studio vitæ asceticæ in sacris et mysteriis Græcorum Romanorumque latentibus, Havniæ : Joh. Frid. Schultz, MDCCCIII. Le terme «Me´langes» de´signe l’e´tude d’Adamance Coray, qui avait adresse´ a` Simon Chardon de la Rochette un e´crit sur le «Testament secret des Athe´niens», publie´ par celui-ci dans ses Me´langes de critique et de philologie, t. II, pp. 445–460, sous le titre «Lettre du docteur Coray, sur le Testament secret des Athe´niens, dont parle Dinarque dans sa harangue contre De´mosthe`nes». L’ouvrage de l’abbe´ Franc¸ois-Florentin Brunet, Paralle`le des peuples de l’Inde, fournit a` BC beaucoup de renseignements. BC mentionne encore La Monarchie des He´breux, par son excellence le marquis de Saint Philippe, traduit de l’Espagnol par M. A. de Beaumarchais, La Haye : Henri Scheurleer, 1728. On trouve a` la fin William Robertson, The History of America, Vienna : F. A. Schraembl, 1787. L’article d’Henri Morin est correctement cite´ dans cette note. Le texte du «Sanguinary Chapter» du Calica Puran se trouve dans les Asiatic Researches, t. V, pp. 371–391.

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De la Religion, IV – Textes comple´mentaires

Il n’est satisfait d’aucun des sacrifices nombreux & varie´s qu’il se prescrit. Son cœur ne lui paraıˆt pas suffisamment de´chire´ par la perte volontaire de ce qu’il a de plus cher. Ses sens ne lui semblent e´prouve´s que d’une manie`re incomplette par la privation des plaisirs les plus vifs. Il ne croit pas en avoir fait cesser, en abjurant dans les temples des Dieux la purete´ meˆme devant laquelle il a impose´ silence a` ses penchans les plus impe´rieux. Il lui faut des douleurs positives, visibles, qui ne puissent pas eˆtre me´connues, qui ne laissent aucune e´quivoque sur ses intentions. Nous sommes oblige´s de rappeler ici une observation que nous avons de´ja` faite. L’homme est dispose´ naturellement a` croire que sa douleur plaıˆt aux Dieux. les sauvages de l’Ame´rique s’imposent des Mace´rations & des souffrances affreuses a. Les Ne`gres ont recours aux meˆmes moyens pour obtenir que leurs manitous leur apparaissent b. les e´preuves des Jongleurs tiennent en partie au meˆme principe c. Le penchant aux mace´rations est donc dans le cœur de l’homme : mais il est passager comme tous les mouvemens de son imagination diverse & ondoyante. l’action du sacerdoce consiste en ce qu’il s’en empare, le re´gularise & le rend durable. a

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Mein. C. G. II. 161. Auste´rite´s religieuses des Sauvages de la Guyane. ib. 162. les habitans des isles du Sud se coupent les doigts & s’arrachent les dents ainsi qu’a` leurs enfans, pour plaire a` leurs Dieux. Coock 3e voy. & les ne`gres se de´chirent le corps jusqu’au nombril dans le meˆme but. de Bry. Ind. Orient. ch. 551. Mein. C. G. II 140–1422. ib. 143.

21–22 les ne`gres ... 55. ] passage e´crit de travers dans la marge gauche de la fiche Co 4722 1

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BC copie ces exemples avec les notes chez Meiners, Kritische Geschichte, t. II, pp. 164– 165 : «Daß die Bewohner der Südländer und Südsee-Inseln sich selbst oder ihren Kindern zur Versöhnung der Götter Glieder der Finger abschneiden, oder Zähne ausschlagen, ist bekannter, als daß die Neger an der Goldküste sich den Oberleib von den Schultern bis an den Nabel zerschneiden, um ihre Sünden zu büßen». Meiners cite «Cooks letzte Reise, II, 161 S.» et «de Bry India orient. c. 55». Le premier titre de´signe A Voyage to the Pacific Ocean ; undertaken by Command of His Majesty for making Discoveries in the Northern Hemisphere under the Direction of Captains Cook, Clerke and Gore in the Years 1776. 7. 8. 9 and 80, Perth : R. Morison & Son, 1785 (traduction franc¸aise : Paris : 1785). Le second titre est celui d’un recueil de re´cits de voyages publie´ par de Bry, Indiae Orientalis, pars VI, avec le titre Beschryvinge ende Historische verhael van’t Gant koninckrijk van Guinea anders de Goutcustede Mina genaemt, Veram et historicam descriptionem auriferi regni Guineae [...], Francofurti ad Moenum : Bry, 1604. BC cite dans cette note et dans la suivante des re´flexions de Meiners, Kritische Geschichte, t. II, livre VIII qui traitent des mace´rations, sacrifices et jeuˆnes de peuples sauvages. Meiners parle exclusivement de peuples de l’Ame´rique me´ridionale et centrale. BC les applique aussi a` des peuples africains, ce qui est une erreur.

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Dans tous les cultes sacerdotaux, les ministres & ceux des Sectateurs de ces cultes qui veulent s’e´lever au plus haut de´gre´ de perfection religieuse, s’infligent des tourmens volontaires, dont l’exce`s, aujourd’hui que nos ide´es suivent une direction diffe´rente, nous cause une surprise voisine du doute a. Ils se condamnent spontane´ment aux supplices les plus recherche´s que puisse inventer leur imagination effraye´e. les uns se de´chirent les bras a` coups de couteau : d’autres se frappent de verges ou placent sur leur poitrine une meˆche brulante : d’autres se mutilent, croyant se rendre plus agre´ables aux Dieux en perdant la qualite´ d’hommes. Tantot, ils traversent pieds nus des brasiers ardens b : tantot ils se suspendent a´ des crochets de fer c. Tantot, ils trainent sous les poids e´normes, qu’ils font avec soin river autour de leur col d pour se soustraire a` la tentation de les de´tacher. D’autrefois, levant en l’air leurs bras qu’ils ne baissent plus vers la terre, ils attendent qu’une main de´vote porte les alimens a` leur bouche, ou bien immobiles durant des anne´es, ils rec¸oivent sur leurs teˆtes nues, les eaux du ciel & les frimats de l’hyver e. a

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Castration des preˆtres a´ Hierapolis. (Wagn. 210–211.) De´lire & Castration meˆme des assistans aux feˆtes de la De´esse Syrienne. (Lucien. Wagn. 216). Jeunes, mace´rations, mutilations, abstinences, pendant 162 jours, chez les Mexicains (Mayer, Myth. Lex. Art. Cammaxtle. Clavigero, hist. of Mex. I. 363) les Pretres de Baal, dans leurs sacrifices, se de´coupoient le corps en dansant autour de l’autel. v. des details sur les castrations, mutilations, &ca des Preˆtres de Cybele & sur leurs amours inde´cens pour les femmes, apre`s ces mutilations. Creutz. II. 55–571. a` Castabala en Cappadoce dans les feˆtes en l’honneur de certains Dieux, on marchoit pieds nus, sur des charbons ardens. (Strabon XII.) Lacroze, Christ. des Ind. Sonnerat au chap. des Pe´nitens Indiens. Ils s’infligent ce supplice aux feˆtes de Bhadrakaly. Rogers Pag. Indien. Ovington Voy. II. 74. Ægypti Sacerdotes, dit St. Epiphane, III, Saturno dicati, ferreis Collaribus se ipsos alligabant. circulosque sibi nasibus affligebant. Schmidt. p. 652. Les Egyptiens se frappoient eux meˆmes en l’honneur des Dieux, dans des feˆtes myste´rieuses. (Herod. II. 61. Müller de Myst. 192.) ils se flagelloient publiquement a` la feˆte d’Isis (Mein. C. G. II, 165 & 384–385.) Ils regardoient toute jouı¨ssance physique, & meˆme toute condescendance pour les besoins du corps comme une œuvre de te´ne´bres (Phil. Juif.) Fetes ou les Egyptiens se de´coupoient le front. (Herodote II. 52–53. pe´nitences en usage dans la

14 baissent ] mot e´crit au-dessus d’un mot illis. biffe´ Co 4722 23–24 Cybele ... 57. ] passage e´crit de travers dans la marge gauche de la fiche Co 4722 31 Les Egyptiens ] a` la premie`re ligne le mot note a` la deuxie`me ligne commence le texte Les Egyptiens Co 4722 1 2

BC renvoie au § 40 de Creuzer, Symbolik, t. II, pp. 55–63 sur Cybe`le. Voir Frid. Sam. de Schmidt, Dissertatio de sacerdotibus et sacrificiis Aegyptiorum [...] Tubingae : apud Joh. Georg. Cottam. MDCCLXVIII, p. 65. BC ne cite pas litte´ralement la phrase en question «Aegypti ... Saturno dicatos ferreis ... ipsos illigare, circulosque sibi naribus affigere consuevisse». Le renvoi a` St. E´piphane se trouve chez Schmidt («liv. III, t. 2, p. 1092», p. 64).

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La mutilation e´toit en usage chez les Preˆtres de Syrie a. les Perses qui se fesoient initier aux myste`res de Mithras e´toient soumis a` des epreuves & a des tourmens quelquefois mortels b. Les Preˆtres idolatres d’Israel, dans le sacrifice qu’ils font, en opposition avec Elie, se de´coupent la chair & arrosent l’autel de leur sang c. les Pretres de Baal se de´chiroient le corps d. les Pharisiens se flagelloient en public e. Les Preˆtres Mexicains e´toient astreints a` des jeunes fre´quens & se´ve´res. Il y avoit des mois entiers durant lesquels tout le peuple se tiroit du sang de diffe´rentes parties du corps f. Les Vierges Peruviennes se dechiroient le sein & les joues g. La religion populaire des Indes recommande expresse´ment les souffrances volontaires, soit en expiation des fautes qu’on a commises, soit come un moyen d’obtenir les faveurs qu’on desire h.

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a b c d e f

g h

religion Egyp tienne. Creutz. I. 3191. Abstinences & mace´rations des Preˆtres Egyptiens, & leur vie pareille a´ celle des Joghe´es & des Saniasse´es indiens. v. Che´re´mon ap Hieronym. adv. Jovinian. II. 343. Görres II. 3432. les Cariens, e´tablis en Egypte, se de´chiroient le front avec leurs e´pe´es a` la feˆte d’Isis a´ Busiris. Herodot. II. 613. Creutz. IV. 73. Lucian. de Dea Syr. Muller de myst. 59. Mein. C. G. II. 1664. Suidas. Gregor. Nazianz. Ch. 4. Hyde de Rel. Persar. 109[.] Rois II. ch. 18. v. 21. Mein. C. G. II. 165. Rois I. 19. 28. Mein. ib. II. 166. Therapeutes chez les Juifs. ib. II. 118. flagellations & supplices volontaires des Preˆtres Mexicains. (Mein. C. G. II. 164.) ils se flagelloient, se mutiloient, se crevoient les yeux (Acosta. hist. Nat. & mor. des Ind. Orient. V. 14. 15. 17. Zarate, hist. de la conq. du Perou. I. 53[.] Mein. C. G. II. 2235. Pe´nitences e´tonnantes de quelques Bramines Mein. C. G. II. 169–170. idem des Bonzes. ib. 1716.

1 Syrie. ] Syrie. 〈les Perses, e〉 Co 4722 14 tienne. ] a` la premie`re ligne le mot note a` la deuxie`me ligne commence le texte tienne. Co 4722 18 Lucian ] 〈les Per〉 Lucian Co 4722 25 Zarate ] 〈Zante〉 Zarate Co 4722 1

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BC note, sans doute pour approfondir l’argument, une observation laconique de Creuzer :«Unter den religiösen Handlungen kannte das alte Ägypten auch Büssungen» (Symbolik, I, p. 319). BC copie cette re´fe´rence au philosophe stoı¨cien et preˆtre e´gyptien Che´re´mon (Ier sie`cle apre`s J.-C.) chez Görres, Mythengeschichte, a` la page indique´e, dans une longue note. BC parle de la feˆte de Bubastis dans la version imprime´e, mais pas des mutilations des Cariens. Les renvois a` Meiners, Kritische Geschichte, t. II, dans cette note et les notes d-f visent tous un passage du livre VIII cite´ ci-dessus. Meiners e´nume`re les faits dont BC se sert dans le meˆme but, en acceptant e´galement les sources de Meiners (Acosta, Hist. nat. et moral. des Indes occ., et Zarate, Hist. de la conqueˆte du Pe´rou). BC attribue a` des femmes pe´ruviennes ce que Meiners raconte des femmes vivant dans des monaste`res paı¨ens de la capitale du Mexique. La source est le re´cit d’Acosta. Meiners re´sume aux pages indique´es de sa Kritische Geschichte les re´cits d’Abraham Roger et de Franc¸ois Bernier. Voir F. Bernier, Voyages, Amsterdam : Marret, 1699 et Abraham

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l’Ezourvedam ?? indique1 les pe´nitences qui donnent a` l’homme les droits les plus assure´s a` la mise´ricorde divine. C’est de s’exposer au soleil, dans le tems le plus chaud, au milieu de quatre grands feux allume´s ; c’est de se plonger dans l’eau glace´e pendant le plus grand froid, & l’un des interlocuteurs ajoute que ces pratiques sont les propres a` purifier l’homme, & qu’il ne connoit pas d’autres moyens de me´riter l’absolution du pe´che´. Le sang qu’un fide`le tire de son corps pour faire une offrande, est-il dit dans le Calicapuran, plaıˆt a` la Divinite´, en proportion de la grandeur de l’instrument qu’il employe. Celui qui offre son sang & sa chair avec ze`le & ferveur voit ses prieres exauce´es dans le cours de six mois, & celui qui se laisse bruler patiemment par une me´che enflamme´e, est bientot comble´ de richesse & de bonheur a. M. Duncan rend compte, dans les recherches Asiatiques des mace´rations de deux faquirs, qu’il a rencontre´s ; l’un apre`s avoir parcouru toute l’Inde & toute la Perse, e´toit arrive´ jusqu’a` Moscou, tenant toujours ses bras croise´s sur sa teˆte. le second s’e´toit d’abord enferme´ dans une cellule, ou` il avoit fait vœu de supporter douze ans les piquures des insectes dont il se laissoit de´vorer ; en ayant e´te´ retire´ au bout d’une anne´e, il s’e´toit fait construire un lit, he´risse´ de pointes de fer, sur lequel il avoit passe´ 35 ans, a` lire & a´ me´diter les livres sacre´s, en s’exposant de plus pendant quatre mois d’Hyver, a` la pluye & a´ toute l’intemperie des saisons b. Par une suite du meˆme principe, l’on admirait encore il n’y a pas cent ans, St Sime´on Stylite au haut de la colonne, St Francois d’Assise pressant dans a

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As. Res. V. 371–391. As. Res. V. 37–522. Ciceron dit que les Brachmanes alloient l’hyver nus dans la neige sur le Caucase, & Pline, H. N. VII. 2. rapporte qu’ils se tenoient l’e´te´ sur le sable brulant, debout sur un pied regardant fixement le soleil. l’Oupnekat, I. 274, dit la meˆme chose. Radjah Brahdiakeh cum deserto ivit, & mortificationem fecit, & illa mortificatio hæc fuit, quod oculum suum cum sole suerat, & ipso hic modo stans manebat3.

7–11 Le ... bonheur. ] dans la marge on lit cette note Voir si ceci ne se trouve pas de´ja` ailleurs. Co 4722 25 As. Res. ] a` la premie`re ligne le mot note. a` la deuxie`me ligne commence le texte As. Res. Co 4722 29 suerat ] la source porte suerant Co 4722

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Roger, Offene Thür zu dem verborgenen Heydenthum, Nürnberg : Johann Andreas Endters, 1663. Le double point d’interrogation se trouvent sur la fiche. BC avait des doutes relatifs a` l’authenticite´ de la source. Voir ci-dessus, p. 554, n. 1. BC re´sume l’article (orne´ des portraits des fakirs) de Jonathan Duncan, «An Account of two Fakkers, with their Portraits», Asiatic Researches, t. V, 1799, pp. 37–52. Le renvoi a` l’Oupnek’hat doit eˆtre corrige´ ; il faut lire «I. 294». La citation n’est pas litte´rale, comme nous l’avons indique´ ci-dessus, p. 318, n. 1. Radjah Brahdrateh, renonc¸ant au monde, se retire dans un de´sert et commence des mortifications, «et cum deserto ivit, et initium in mortificatione magna fecit». (Oupnek’hat (id est, secretum tegendum) [...] studio et opera Anquetil Duperron, Argentorati : Typis et impensis fratrum Levrault, IX. (1801), t. I, p. 194).

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ses bras des statues de neige, & tant d’autres dont le seul me´rite etoit d’avoir brave´ la douleur. dans le 15e sie`cle, des troupes de flagellans parcouroient en pompe les villes & les Campagnes, & nous retrouvons la meˆme avidite´ de souffrance dans les lettres de nos missionaires a` la Chine & au Japon. Quelquefois les rites licentieux se combinent avec ces auste´rite´s. Les meˆmes jeunes filles Indiennes qui dansent demi-nues devant les Pagodes s’infligent des douleurs cruelles & raffine´es a. Il y a chez les Turcs des Derviches, des Kalenders, des Santons, qui d’un cote´ se font infibuler avec des anneaux d’une pesanteur enorme, ce qui est une ope´ration infiniment cruelle, & qui de l’autre s’accouplent avec des mules & des anesses. le double triomphe sur la douleur & sur la nature leur obtient la ve´ne´ration du peuple b. Ces pe´nitences vont souvent jusqu’au Suicide, qui d’ailleurs pour des raisons que nous developperons plus tard, est toujours de´sapprouve´ dans les religions sacerdotales. Les Anciens nous attestent qu’il e´toit commun de voir des Brachmanes se pre´cipiter dans des buchers enflamme´s c : Aujourd’hui encore, une foule d’Indiens se fait e´craser sous les roues des chars ou sont place´es leurs Divinite´s d ou se noye volontairement dans le Gange e. a b c d

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Laflotte, 216[.] Locke, entendem. humain. I. Voy. de Baumgarten II. 1. Paw. Rech. s. l’Ame´r. II. 125[.] Plutarch. Oneisir. ap. Lucian. Les Devots d’Arrakan en agissent de meˆme, ou se de´chirent avec des crochets de fer, qui tiennent au char qui porte leurs Dieux, pour faire rejaillir leur sang sur ces simulacres. Contradiction singulie`re ! Amida est une Divinite´ apathique & c’est sous les roues du char d’Amida que les de´vots se jettent pour eˆtre e´crase´s. Bernier. II. 103. Hamilton. I. 384–394. Dellavalle III. 22–23. Tieffenthaler. I. 1641.

10 ce ] 〈&〉 ce Co 4722 17 enflamme´s ] la source porte en a` la ligne flamme´s Co 4722 24 ces simulacres. ] a` la premie`re ligne les mots suite de la note 2 a` la deuxie`me ligne commence le texte ces simulacres. Co 4722 1

BC cite, en copiant les renvois dans l’ouvrage de Meiners, Kritische Geschichte, t. II, p. 73, n. x, les titres suivants : Franc¸ois Bernier, Voyages de Franc¸ois Bernier [...] contenant la description des Etats du Grand Mogol, de l’Hindoustan, du Royaume de Kachemire, &c., Amsterdam : Paul Marret, MDCXCIX, t. II, pp. 102–104 (re´cit d’une feˆte religieuse a` Jagannat, ou` des pe´lerins se font e´craser sous les roues du char qui transporte l’idole gigantesque de meˆme nom). – Hamilton, A New Account of the East-Indies (voir ci-dessus, p. 85, n. 3). – Pietro della Valle, dont il cite la traduction franc¸aise, Voyages de Pietro della Valle´, Gentilhomme Romain, dans la Turquie, L’Egypte, la Palestine, la Perse, les Indes orientales & autres lieux, Paris : D’Espilly, 1745. – Joseph Tieffenthaler, Des Pater Joseph Tieffenthaler’s [...] historisch-geographische Beschreibung von Hindustan, [...] an das Licht gestellt von Johann Bernoulli, Berlin : bey dem Herausgeber, Gotha : bey C. W. Ettinger, 1785. Dans le t. I de ce magnifique ouvrage, on trouve la description de suicides motive´s par la religion dans un village Ca´schipor sur le Gange, pre`s de Be´nare`s. Il y avait autrefois une

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Deux matelots anglais furent te´moins il y a peu d’anne´es a, du de´lire religieux de 39 personnes, hommes, femmes & enfans, qui se pre´cipite`rent ainsi dans les ondes b[.] L’ide´e de la chute de l’homme se combine, dans les religions sacerdotales, avec celle de la saintete´ de la douleur. Toutes les affections, tous les penchans terrestres semblent uns suite de la de´gradation que la race humaine a subie. les desirs pour les choses de ce monde, dit le Neadirsen, sont une offense a` Dieu. il faut les dompter par les mortifications & les expier par la pe´nitence. Observons toutefois que sous le re`gne du Polythe´isme, l’ide´e de la saintete´ de la douleur eut toujours besoin pour surmonter, d’une manie`re durable, l’instinct naturel de l’homme, d’eˆtre seconde´e par le climat. Cette ide´e ne put jamais s’empreindre profonde´ment que dans les religions de l’orient & du Midi. L’on confondroit a` tort avec le motif mystique des mace´rations & des tourmens spontane´s les suicides frequens dans le Nord. Ces suicides prenoient leur source dans les habitudes guerrie`res d’apre´s lesquelles une mort violente e´tant seule honorable, les he´ros impatiens s’indignoient d’attendre de la viellesse une degradation lente & progressive[.] Mr de Montesquieu, dans l’esprit des loix c, a releve´ la contradiction qui semble exister entre la molesse des peuples me´ridionaux, & la manie`re dont ils courent au devant de la douleur & dont ils la bravent. Mais il n’a vu qu’une des causes de cette contradiction & l’une de ses causes secondaires. La cause principale fut la religion qui repre´sentoit le plaisir comme un crime & la souffrance comme un me´rite. La crainte du plaisir devint une fureur ve´ritable dans les climats qui portoient impe´rieusement les hommes aux jouı¨ssances physiques. Comme les sens, tourmente´s plutot que soumis par les mace´rations & les pe´nitences, reprenoient sans cesse leur empire indestructible, les consciences timore´es s’e´pouvante`rent de retrouver partout le plaisir qu’elles fuyoient & pour mieux combattre cet invincible adversaire, elles entasse`rent rigueurs sur rigueurs & supplices sur supplices. On peut faire sur les individus la meˆme remarque que sur les Nations. Partout ce sont les Personnes les plus susceptibles d’affections vives & sensuelles, qui se livrent aux auste´rite´s les plus recherche´es & sont comme a b c

en Novembre 1801. As. Res. V. 26–29. Liv. XIV. ch. 3[.] lourde hache suspendue a` une corde qui fonctionnait comme une espe`ce de guillotine pour ceux qui avaient choisi cette mort «heureuse», «in dem Wahn, nachher in bessere Körper zu wandern und einen seegenvolleren Zustand zu erreichen» (chap. 9, «Die Provinz Elahbad», p. 163). Une autre manie`re pour atteindre le meˆme but est de sauter dans le Gange, alourdi d’une grosse pierre (p. 164).

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saisies de l’amour de la douleur. fatigue´es d’une lutte toujours inutile, elles veulent se faire de l’exce`s de la souffrance un rempart contre les faiblesses & les se´ductions de la nature[.] Par un effet remarquable de la tendance de l’esprit humain a` donner aux Dieux les habitudes de l’homme1, les Divinite´s de cultes sacerdotaux s’infligent, comme les adorateurs, des tourmens rigoureux & spontane´s a. Sommonacodom descendit aux enfers pour y souffrir pendant 500 ge´ne´rations succesives b. Esmon se mutile dans la cosmogonie Phe´nicienne c[.] Wichnou dans sa 4e incarnation fait au fond d’un de´sert une severe pe´nitence d. Les Indiens ont suppose´ de tout tems que la nature divine entrait comme partie souffrante dans les sacrifices e. Leurs Dieux s’immolent eux meˆmes sur leurs propres autels, & ils expirent dans une agonie longue & cruelle. Sans doute les mutilations & les souffrances des Dieux, ainsi que leur mort, dont nous avons de´ja` parle´, sont toujours susceptibles d’une interpre´tation alle´gorique. mais ces fables se combinent aussi manifestement avec la saintete´ attache´e a la douleur. le meˆme principe qui engage les adorateurs a` tant de mace´rations qui nous font fre´mir, les porte a` se figurer les objets de leur adoration, s’imposant suivant leur nature des mace´rations plus e´tonnantes encore & plus douloureuses. dans toutes ces mythologies, c’est par sa souffrance que Dieu preˆte a` l’homme une assistance surnaturelle. a

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V. sur les mace´rations & mutilations que s’imposent les Dieux eux-meˆmes, l’histoire d’Esmun, dans Creutz. II. 1482. Il y a des mutilations de Dieux dans toutes les Cosmogonies Orientales. Wagner. 286. v. dans Laloube´re II. 14. des Dieux tourmente´s apre`s leur mort come des criminels dans des lieux de supplices. Mein. Cr. G. I. 70. la mort d’adonis, le symbole du grain enfouı¨ dans la terre & du soleil en hyver. les morts des Dieux, toujours des symboles pareils. mais aussi l’ide´e morale de la mort, agonie, douleur des Dieux. Wagner. 221. Diverses le´gendes sur la mutilation d’Atys. ib. 228. Laloube`re II. 14. Creutz. II. 148[.] v. sur les souffrances & les mutilations de Brama Rogers. II. 1. Sonnerat I. 128–129. & sur les souffrances de plusieurs autres divinite´s Indienes Anquetil, p. 139. v. les notes du traducteur de Sacontala. p. 294.

25 II. 14. ] a` la premie`re ligne les mots suite de la note. a` la deuxie`me ligne commence le texte II. 14. Co 4722 33 de plusieurs ... 139. ] passage e´crit de travers dans la marge gauche Co 4722 1

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Avec la fiche 264 commencent les re´flexions sur les souffrances que les dieux s’infligent eux-meˆmes, y compris leur propore sacrifice. Cette the´matique sera traite´e dans la version imprime´e dans le chap. VI du livre XI. Voir ci-dessus, p. 333. BC renvoie a` l’histoire d’Esmoun, re´sume´e par Creuzer a` l’endroit indique´. La note c re´pe`te ce renvoi. Voir ci-dessus, p. 334, note b.

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de la` les hypothe`ses d’une espe`ce de sacrifice divin, & de la purification du genre humain, par cette expiration myste´rieuse a. Toutes ces suppositions sont e´trange`res au Polythe´isme inde´pendant de la direction des Preˆtres. Si les Dieux de la Gre`ce sont quelquefois expose´s aux douleurs & meˆme a` la mort, c’est une suite de leurs imperfections & de leurs faiblesse[s], & nullement une condescence pour l’homme. les Grecs repousse`rent toujours de leur religion publique les mace´rations que nous avons de´crites. Lorsque, vers le 6e sie`cle de Rome, le culte de Cybe`le y fut porte´ par des Preˆtres de nations sacerdotales, les Romains prohibe`rent les rites sanguinaires & les danses fre´ne´tiques au milieu desquelles les Cure`tes & les Corybantes se de´chiroient & se mutiloient b. Les Philosophes, nourris dans les lettres Grecques, & Romaines, avoient tant de peine a` s’expliquer les auste´rite´s des solitaires de la The´baı¨de, & les chaıˆnes de fer qu’ils portoient, qu’ils les croyoient frappe´s de de´lire, en punition de ce qu’ils avoient abandonne´s le Culte des Dieux c. a

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v. les raisonnemens de Rasusay sur la re´demption. Extr. 22B. 23. 241. Tit. Liv. XXIX. Ch. 10. 11. 14. Appian. de Bello Annibal. XLV. v. sur les rites inde´cens & sanguinaires des Preˆtres de Bellone, de Cybe`le, &c Lactant. Inst. div. I. 21. Bayle art. Comane. Lucret. de nat. Rer. II. Strabon X. Creutz. II. 34. v. un ancien fragment, intitule´ le philosophe, dans le 9e vol. des me´moires eccle´s. de Tillemont. p. 661–662. Gibbon. les meˆmes philosophes cependant, les nouveaux Pythagoriciens & les nouveaux Platoniciens, imposoient des douleurs & des auste´rite´s a` leurs disciples : mais c’e´toit pour e´prouver & fortifier leur caracte`re & sans aucune ide´e d’un me´rite reli gieux. Mein. C. G. II. 145–146. il paraıˆt meˆme que cet usage exista en Gre`ce, beaucoup plus anciennement puisqu’Aristophane en parle. Nue´es v. 38. Lucien Nigrinus2. Celui qui vouloit devenir un philosophe de profession, devoit se soumettre, au moins chez les Stoı¨ciens, a` un noviciat tre`s se´ve`re : & cette manie`re rigoureuse de former les jeunes gens a` la vertu, parait avoir e´te´ encore plus ancienne chez les Grecs que le Stoı¨cisme. Strepsiade, le pre´tendu disciple de Socrate dans Aristophane, se de´clare preˆt a` souffrir tout ce que les philosophes voudront. Je livre volontiers mon corps, dit-il, au fouet, a` la faim, a` la soif, au froid, & quand ils m’e´corcheroient tout vif, j’y consens, pourvu qu’ils me tirent des mains de mes cre´anciers. (Nue´es. 380 suiv.) Pythagore passoit pour avoir e´te´ oblige´ de se soumettre a` toutes sortes de tourmens, afin d’eˆtre admis aux myste`res des Preˆtres d’Egypte, & les Stoı¨ciens essayoient souvent de convaincre leurs e´le`ves, par de pareils exercices, que la douleur n’e´toit pas un mal.

14 Tit. Liv. ] a` la premie`re ligne le mot note. a` la deuxie`me ligne commence le texte Tit. Liv. Co 4722 24 religieux. ] a` la premie`re ligne les mots suite de la note. a` la deuxie`me ligne 31 j’y consens ] a` la premie`re ligne les mots suite commence le texte (reli)gieux. Co 4722 de la note. a` la deuxie`me ligne commence le texte j’y consens Co 4722 1 2

Il s’agit de renvois a` un dossier non identifie´. BC renvoie d’une manie`re impre´cise soit au dialogue de ce titre (Nigrı´noy Filosofı´a, en latin Nigrinus), soit a` un philosophe installe´ a` Rome qui porte ce nom. Il s’agit peut-eˆtre d’un personnage fictif, invente´ par Lucien, qui expose une doctrine platonicienne. Pour le texte, voir l’e´dition anglaise Lucian, in eight volumes, with an English Translation by A. M. Harmon, t. I, London : Heinemann, 1961, pp. 99–139.

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De la Religion, IV – Textes comple´mentaires

Chap. 6. de l’abdication des faculte´s intellectuelles.

[Pas de texte].

E´tablissement du texte : Manuscrit : BCU, Co 4722, fo 275.

Fiche abandonne´e

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[Une fiche abandonne´e]

fo 12vo

Ce n’est qu’a` une e´poque bien plus e´pure´e de la religion que l’on connoit un Dieu qui sait tout, & qui ne´anmoins est lent parce qu’il pardonne, & patient parce qu’il est e´ternel a.

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St Augustin1[.]

E´tablissement du texte : manuscrit : BCU, Co 4722, fo 12vo.

2–4 Ce n’est ... e´ternel. ] le texte est barre´ par une barre verticale, signe qu’il est e´carte´ Co 4722

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Cette fiche non pagine´e a e´te´ e´carte´e d’un manuscrit sur fiches, peut-eˆtre celui qui fait l’objet du pre´sent chapitre. Un contexte possible est le chap. 1, sur le principe fondamental du polythe´isme sacerdotal, ou` BC parle de la toute-puissance de la divinite´. La fiche re´sume des positions the´ologiques re´currentes de Saint Augustin. Voir p. ex. le livre I des Confessions.

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[Manuscrits pour pre´parer le tome IV]

Le manuscrit en cahiers

Introduction

Nous avons constate´ que le manuscrit en cahiers correspond, pour les livres IX a` XI, au texte publie´, et que le livre XII de ce meˆme manuscrit passera dans le volume suivant. Les diffe´rences entre les deux versions sont parfois conside´rables, mais nous avons pu inte´grer les variantes entre le texte publie´ et le manuscrit en cahiers dans l’apparat philologique. Deux passages du livre XI font pourtant exception. Ils auraient exige´ d’alourdir conside´rablement l’apparat des variantes sans atteindre la clarte´ de´sirable. Nous avons pre´fe´re´ les transcrire se´pare´ment et joindre a` la transcription de ces passages des notes pour faciliter une comparaison. La version de ces passages qu’on peut lire dans le manuscrit colle´ montre clairement que Constant a profonde´ment retravaille´ son texte en re´digeant ce dernier manuscrit. E´tablissement des textes Nous transcrivons fide`lement les pages du manuscrit en cahiers et signalons dans l’apparat critique les particularite´s de la re´daction qui attestent un travail de refonte, reconnaissable aux biffures et aux nombreux ajouts.

Livre X, chapitre IV Des divinite´s malfaisantes

p. 126

[...] Le Sacerdoce personnifie cette conception. Loke e´toit le mauvais principe chez les Scandinaves a, Typhon chez les Egyptiens b. Les Chalde´ens

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cette fable de Loke indique la diffe´rence des 2 polythe´ismes. Comme prome´the´e, Loke est enchaine´ sur un rocher. Il est come lui livre´ a` des tortures toujours renaissantes. au lieu du vautour qui devore le fils de Japhet, un serpent verse sur le Dieu du Nord un venin qui le brule. (Edda 31e fable) mais dans mythologie grecque, Promethe´e est un Dieu vaincu, un Dieu ami de l’homme, chez les Scandinaves, Loke est le mauvais principe. b Il est probable que le Nil fut la 1e`re Divinite´ malfaisante, lorsqu’avant la de´couverte de E´tablissement du texte : Manuscrit : BCU, Co 3262/1, pp. 127–132 [= Ms-texte] et Co 3262/2, pp. 75–85 [= Ms-notes]. 5 Scandinaves, ] Scandinaves, 〈Arimane chez les Perses〉 Ms-texte BC accroche au syntagme biffe´ une longue note qui n’est pas utilise´e dans le texte imprime´ les notions des Perses sur le mauvais principe sont enveloppe´es d’assez d’obscurite´s. Ces obscurite´s tiennent a` une cause .) Le 1er polythe´isme des Perses n’e´tant les 4 dont nous avons traite´ ci-dessus (Tom. II. p. derniers mots dans la col. gauche ; il s’agit d’une faute de copie point une religion sacerdotale, n’admettait point de Divinite´s malfaisantes par essence. Ce dogme vint de Me´die, avec les mages appele´s par Cyrus : mais la doctrine des mages ne fut jamais comple`tement adopte´e par la Nation. Dela`, une contradiction frappante entre des auteurs presque contemporains. Les uns, Platon, He´rodote, Xe´nophon, ne parlent en aucune manie`re du Dualisme des Perses : les autres, Eudoxe, ami de Platon, (v. 〈un mot illis.〉 Hermippe dans Dioge`ne Lae¨rce, I. 8.) Aristote, The´opompe, disciple d’Isocrate, en font une mention positive & de´taille´e. Le silence d’He´rodote peut s’attribuer a` sa crainte excessive de s’expliquer indirectement sur les Myste`res ; celui de Xe´nophon a` ce qu’il ne connoisse de la religion Perse que la partie publique. celuide Platon, a` ce qu’il ne s’est occupe´ de cette religion que fort en passant. Il est remarquable qu’aucun historien des guerres Mace´doniennes ne dis que les Perses, dans leurs revers, ayent essaye´ d’appaiser Arimane, tandis que Plutarque nous de´crit les sacrifices terribles ce´le´bre´s en son honneur. Cette circonstance nous porterait a` croire que le dogme du mauvais principe resta longtems e´tranger a` la religion du peuple & concentre´ dans l’ordre des Mages. (Diog. Laert. Loc. cit.) sa publicite´ progressive se manifeste par la haine toujours croissante contre certains animaux nuisibles. Cette haine, d’abord particulie`re a l’ordre sacerdotal, qui savait seul que ces animaux e´toient consacre´s au mauvais principe, se communiqua a` toutes les classes, a` mesure que le Dualisme devint la croyance commune. Ms-notes Typhon chez ] a` la hauteur de ces mots, dans la col. gauche, un ajout sans signe d’appel ; il deviendra la note d, ci-dessus, p. 200 Quatre nuages donnent la pluie, Kambarta et Drona des pluyes fe´condantes, Abarta et Pouch Kara des tempeˆtes & des ouragans. Sept e´le´phans portent les ames aux nuages, 4 sont actifs & bienveillans, 3 paresseux & hostiles. 7 serpens re`gnent sur tous les serpens. Ahanta et Karkata sont en[ne]mis, Maha Padnia, ami de l’homme. DUBOIS, II, 50–52. Ms-texte 6–10 cette fable ... principe. ] note ajoute´e dans la col. de gauche Ms-notes 10 Loke ] 〈illis.〉 Loke mot dans l’interl. Ms-notes

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attribuoient a` deux plane`tes une influence pernicieuse a. Enfin les Germains b & les Gaulois c, a` l’autre extre´mite´ du Globe les Mexicains d re´ve´raient des Divinite´s me´chantes. Si le Panthe´isme des Indiens les a porte´s souvent a´ confondre le principe du mal avec l’eˆtre supreˆme, ils en ont fait ne´anmoins un eˆtre a` part, Moı¨sasour, chef des anges rebelles, qui les entraine a´ la re´volte, & qui est pre´cipite´ avec eux dans l’onde´rat, se´jour des te´ne`bres e. L’ide´e d’une Divinite´ malfaisante n’e´toit point e´trange`re a` la religion juive f v. Job. & le Christianisme lui meˆme, toutes les fois qu’il a e´te´ mal

a b c d

e f

l’agriculture, ses inondations n’e´taient que funestes, & protecteur apre`s cette de´couverte, parcequ’il fertilist le sol cultiv. Plut. de Is. & Os. Helmold. Chron. Slav. ch. 15. Vossius, de Orig. Med. Diss. 8. Me´m. Acad. Inscr. XXIV. 345. Cæs. de Bello Gall. VI. Parmi les Divinite´s malfaisantes, Tlacatecolololt, occupe le 1er rang. C’est un hibou doue d’intelligence, qui se plait a` effrayer les hommes & a` leur faire du mal. Shastabade. on peut voir un expose´ tre`s curieux des de´veloppemens de ce dogme chez les He´breux dans le commentaire d’Eichhorn sur le nouveau Testament II. 159–160.

5 ne´anmois ] ne´anmoins fait le dernier mot re´pe´te´ par distraction Ms-texte 8–9 L’ide´e ... v. Job ] ajoute´ dans la col. gauche pour remplacer un passage sur Pluton et une tre`s longue note Ms-texte 9 & le ] pre´ce`de un passage biffe´, avec trois notes, dont une tre`s longue, e´galement biffe´es 〈Le Pluton de l’Italie antique, nomme´ Juvie ou le destructeur, le Mantus des Sabins,〉 texte de la note 〈Serv. ad Æne´id. X. 198. Mantus e´toit dans la tradition sacerdotale une personification de la mort, & peut-eˆtre un Dieu qui consduisoit les ames de la terre aux enfers, & des enfers au Ciel, comme Se´rapis les Divinite´s qui sont malfaisantes, dans la religion publique des / /cultes/ / peuples Sacerdotaux, prennent fre´quemment dans la doctrine secrette, un sens alle´gorique qui modifie leur caracte`re1. Ainsi le Dieu de la destruction, me´chant par sa nature dans l’opinion populaire, ne l’est que par ne´cessite´ dans le systeˆme cosmogonique, & souvent meˆme il devient un eˆtre bienfaisant, en ce sens qu’il pre´side aux renaissances. mais le peuple s’inquie`te peu de ces subtilite´s, & quand les preˆtres lui parlent du Diable, il ne s’attache qu’au sens litte´ral de leurs paroles.〉 suite du texte principal 〈le Februus Etrusque〉 nouvelle note 〈Anys. apud Lyd. p. 68.〉 suite du texte principal 〈ont plusieurs traits de ressemblance avec le Typhon d’Egypte.〉 dernie`re note 〈Creutz. Symbol. II. 478. 1e`re ed. allem.〉 & le Ms-texte et Msnotes 10 malfaisante ] passage remanie´ malfaisant 〈de l’Egypte〉 ses inondations n’e´toient que funestes, avant 〈l’invention de l’〉 la de´couverte de l’agriculture. Apres cette de´couverte, 〈le Nil devint un Dieu bienfaisant.〉 les corr. pour la version de´finitive dans les interl. BC ajoute un passage a` cette note dans la col. de gauche Typhon e´toit l’objet d’un culte particulier dans plusieurs villes de l’Egypte. ses temples, toujours fort petits, s’e´levoient presque partout a` cote´ des temples magnifiques des autres Divinite´s. on les appeloit des Typhoniums, Τυϕω νεια. Strab. VII. GUIGN. 419. Ms-notes 19–20 on ... 160. ] 〈& l’ide´e d’une Divinite´ malfesante n’est point e´trange`re a` la religion juive.〉 on ... 160 Ms-notes, col. de gauche 1

Dans le passage biffe´ sur les dieux malfaisants de l’Italie antique, BC exploite, comme il le dit dans une des notes, les ide´es de Creuzer, Symbolik, t. II, pp. 478–480.

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compris & rabaisse´ jusqu’aux formes de la logique & aux conceptions de l’esprit, au lieu d’eˆtre conside´re´ comme une communication de la divinite´ avec le sentiment & avec l’ame, n’a pu se de´fendre d’accorder au mauvais principe une place e´minente. les chre´tiens l’ont nomme´ le prince du monde, le dieu de ce sie`cle a. Inventeur du mauvais principe, le sacerdoce sent le besoin de rassurer l’homme contre cette cre´ation qui l’e´pouvante. De la` tantot les promesses, tantot des ce´re´monies solennelles. Le Dieu du mal peut eˆtre de´sarme´, en attendant qu’il soit vaincu. Oromaze devoit remporter une victoire de´finitive, & jusqu’alors Arimane e´toit contenu par les impre´cations des mages. Mais les preˆtres laissent toujours planer sur ce myste`re le doute & l’incertitude. Nul ne sait, dit l’Edda, si Thor a tue´ le grand serpent b. Typhon, charge´ de chaines, & jete´ dans un marais ou` il se cache me´dite les moyens de s’e´chapper c & de´ja` une fois il a re´ussi par l’imprudence d’Isis d. Il est donc ne´cessaire de se pre´munir sans cesse contre le Divinite´ malfaisante, & les pre´cautions sont de nouveaux appuis de pouvoir sacerdotal. On peut toutefois remarquer l’effort du sentiment religieux contre un dogme qui le de´soriente & qui l’afflige. Il ne sauroit admettre l’e´galite´ entre le bon & le mauvais principe. Il cherche donc a` rendre au premier la supre´matie que le Dualisme lui conteste e. a b c d e

Evang. de St Jean. XIV. 30. Epitre aux Corinth. IV. 41. Edda, 27e fable. Mone 208. Jablonsky Panth. Æg. V. 10. 22. Plutarch. de Is. & Os. Diod. 22. Guign. 184 & 709. Les Mages ne croyoient point, dit l’auteur du traite´ sur la religion des Perses (de Rel. Pers. Cap. 1) a` deux principes e´gaux, mais a` un bon principe e´ternel, & a` un mauvais principe cre´e´, & ceux qui les regardoient tous deux comme existant de toute e´ternite´ ne formoient qu’une secte d’he´re´tiques. On les nommoit Magisiens, & leur doctrine Thananez, dualite´. Ce te´moignage de Hyde est un peu suspect, parce que sans le vouloir, il arrangeoit les faits dans le sens le plus favorable a son systeˆme de The´isme. Creutzer moins partial (Symbol. II. 198–199 1re e´d. allem.) reconnoit deux doctrines chez les Perses, l’unite´, Zervan Akerene, cre´ateur d’Oromaze & d’Arimane, l’autre le Dualisme, ou Oromaze & Arimane, premiers principes e´gaux. Mais il fait de l’une de ces doctrines le secret des Preˆtres, de l’autre la croyance populaire, & me´connoit ainsi les fluctuations du sentiment se de´battant contre la logique.

27 ne formoient ] 〈illis.〉 ne formoient Ms-notes 1

Dans le discours d’adieu, Je´sus utilise ce mot («princeps mundi huius»). Dans la seconde e´pıˆtre aux Corinthiens, St. Paul se sert de l’expression «deus huius mundi». – Pour les commentaires des autres notes de ce chap., voir ci-dessus, p. 203.

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Il rencontre alors un nouvel inconve´nient. L’eˆtre e´minemment juste & bon devient le ve´ritable auteur de la malice infernale a : & l’on se demande comment le bon principe a pu cre´er le mauvais b. La difficulte´ reste insoluble, aussi longtems qu’une me´taphysique d’un ordre supe´rieur, placant l’eˆtre infini dans sa ve´ritable Sphe`re, n’adopte point pour but de la cre´ation le perfectionnement & non le bien eˆtre. Mais les religions Sacerdotales condamne´es a ne faire de la Divinite´ que l’instrument de l’ambition & de l’e´goı¨sme, & n’aspirant a` diriger l’homme que par des motifs inte´resse´s, ne trouveront jamais cette solution. Expulse´ de ce poste, le sentiment religieux s’empare d’un autre, ou` sa de´faite est moins e´vidente. Le Dieu dont il se plaıˆt a` concevoir la bonte´ sans bornes aussi bien que la puissance, ne sauroit condamner aucune de ses cre´atures a un malheur sans fin. Ainsi, dans plusieurs religions sacerdotales, le mauvais principe doit se a

b

Le de´mon, dit un e´crivain tre`s religieux, (St Philippe, Mon. des He´br. I. 137) ne peut rien que par Dieu qui seul peut & qui lui accorde par des vues secretes un pouvoir si limite´ que ce n’est pas liberte´ dans le de´mon, mais pure obe´issance qui le fait agir. Il est l’instrument invisible des de´crets de celui qui le pre´cipita dans les enfers1. Il est curieux de voir les Dualistes Perses s’agiter dans ce cercle, sans en pouvoir sortir. Sentant que, si, suivant l’opinion des anciens mages, la lumie`re est e´ternelle & les te´ne`bres cre´e´s, les te´ne`bres sont le produit & par conse´quent le crime de la lumie`re, les uns, les Zeravanites, de´sirent que la lumie`re avoit cre´e´ Zerwan, le tems, duquel Oromaze & Arimane e´toient e´mane´s, rejetant ainsi sur une 2de cause le tort dont ils pre´tendoient disculper la premie`re. Les autres feroient venir de Dieu la lumie`re & les te´ne`bres, mais celle-ci comme l’ombre qui suit ne´cessairement le corps. (Hyde, cap. 1.) d’autres encore accusoient Arimane d’eˆtre pervers par sa volonte´, non par sa nature : (Izechne´ XXX Ha) Sophismes vains, qui laissent toujours peser le reproche sur la toute puissance, responsable, soit des eˆtres auquels elle confie son pouvoir, soit de la ne´cessite´, mot vide de sens la` ou il y a toute puissance.

2 malice infernale ] a` la hauteur de ces mots, un commentaire ste´nographie´ dans la col. gauche qui pourrait signaler un e´largissement du texte elle n’est q son instr. & en bonne log. ce n’est pas l’instr c’est le mot. qui est resp Ms-texte 3 mauvais ¯] le mauvais l’article re´pe´te´ en tournant la page Ms-notes 4 La difficulte´ ] a` la hauteur de ces mots commence dans la col. gauche un ajout que BC utilisera partiellement dans le texte imprime´ Le sentiment religieux, re´pugnant a` l’ide´e de Divinite´s purement malfaisantes, a presque toujours tache´ d’adoucir cette notion en se cre´ant des Divinite´s tour a` tour bienfaisantes & me´chantes. voyez la Wila des Serbes deesse aux longs cheveux a` la robe trainante qui seme des roses en fendant les airs, tantot terrible, tantot 〈protectrice,〉 conduisant les nuages & fesant pleuvoir le sang les lieux the´atre de combats futurs, tour a tour favorable & 〈funeste〉 fatale ce mot dans l’interl. aux amans, parlant aux jeunes filles pour les conduire ou les e´garer, les aider ou leur nuire. d’Eckst. II. 256. suivent encore trois mots dont la place n’est pas indique´e tutelaire qui doivent Mstexte 27 des eˆtres ] 〈d’eˆtr〉 des eˆtres Ms-notes 1

Voir ci-dessus, p. 205, n. 1.

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reconcilier avec le principe bienfaisant a. Lors de la re´surrection ge´ne´rale, apre`s que les me´taux brulans auront purifie´ Arimane dans leur feu liquide, il se levera de´gage´ de toute sa corruption ante´rieure, & louant l’eˆtre cre´ateur & cer Oromaze, objet de sa longue envie, Il entonnera les hymnes celestes & prononcera les mots consacre´s b. Les fluctuations du sentiment religieux sont ici manifestes. tantot Il s’e´lance vers l’e´poque ou` tous les eˆtres doivent se re´unir a` la Divinite´ appaise´e. tantot il introduit dans les dieux me´chans des modifications, des inconsequences qui mitigent leur perversite´[.] Il arrache au sacerdoce des concessions plus ou moins limite´es & place a´ cote´ du de´couragement l’espe´rance, a` cote´ de la terreur la consolation.

a

b

Cette ide´e se reproduit dans certaines fables Egyptiennes, dont nous parlent les poe`tes grecs. Typhon e´toit l’ennemi de l’harmonie. Il se plaisait a` contrarier les Dieux & a` troubler l’ordonnance du monde. Herme`s, inventeur de la musique, l’ayant vaincu, lui laissa la vie ; mais il fit de ses nerfs qu’il lui enleva, les cordes de sa lyre, contraignant ainsi ce qui est discordant a` former des acords, & ce qui est oppose´ a` l’unite´, a` concourir a` cette unite´. (Pindar. Pyth. I. 25–31.) Schol. ib. Plut. de Is. & Osir. 55. Zendavesta, Izechne´ XXX. Boundehesch, p. 104.

6 Les fluctuations ... sont ] 〈L’action〉 Les fluctuations ces deux mots dans l’interl. du sentiment religieux 〈est〉 sont corr. dans l’interl. Ms-texte 6–7 tantot ... les eˆtres ] tantot ajoute´ dans la col. gauche Il s’e`lance 〈toujours〉 vers ... tous les eˆtres les deux derniers mots ajoute´s dans la col gauche Ms-texte 8–9 tantot ... perversite´ ] syntagme ajoute´ dans la col. gauche Ms-texte

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Livre X, chapitre VII [Re´flexion sur la puissance de la parole1]

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Le Dieu me´diateur est souvent nomme´ le verbe. Le verbe, la parole, comme partie essentielle de la Divinite´, se retrouve chez beaucoup de Nations, le Hom des Indiens, le Honover des Perses, le Logos des Platoniciens & des Chre´tiens. l’Universalite´ de cette ide´e ne viendroit-elle pas de l’importance que les hommes ont du attacher a´ la parole, de´s qu’ils ont re´fle´chi sur ses effets ? sur l’inconcevable puissance de cet instrument dont la conqueˆte est inexplicable, sur cette puissance presque magique a´ l’aide de laquelle l’home pe´ne´tre dans l’homme & agit sur un autre & dans un autre francissant les bornes e´troites de son individualite´ : la parole fonde l’empire moral sur le monde physique, de l’esprit sur la matie`re. de la` l’ide´e qu’elle doit dominer toute puissante sur les eˆtres qui en sont sont prive´s. Sur la nature inanime´e & muette. & qui nous dit que cette na ture qui semble muette & inanime´e n’entend pas la parole & ne lui re´pond pas ? Que l’e´cho n’est pas le rocher qui repond, le rocher dont les flancs obscurs e´prouvent la puissance de la parole comme l’inte´rieur du cœur humain. Ces corps qui ne re´sonnent ne fre´missent qu’a` de certains sons, n’indiquent-ils point que pour soumettre toute nature, il ne faut que de´couvrir toute la nature. De la` les impre´cations, les conjurations magiques, les Talismans, les formules. De la` dans le Nord ces Runes qui fesoient pe´rir les hommes, frappoient d’immobilite´ les animaux, les vagues de la mer, ressucitoient les morts, ou jetoient les vivans dans le de´lire. Mais de la surtout l’ide´e du verbe, du Hom, du Logos. Goerres. I. 243–2442.

E´tablissement du texte : Manuscrit : BCU, Co 3262/1, pp. 141–142 [= Ms-texte].

3 Le Dieu ] de´but du texte pre´ce´de´ d’une note technique Ceci dans le chap. des impre´cations lecture hypothe´tique de ce dernier mot Ms-texte

1 2

Cet ajout au chap. VII du livre X est note´ dans la col. gauche des pages indique´es. Le texte ne comporte aucune correction. BC ne l’a pas utilise´ pour le texte publie´. BC exploite dans cette note, en traduisant beaucoup de tournures, un passage de Görres, Mythengeschichte, t. I, pp. 243–244 (e´d. de 1935, pp. 123–124). L’ide´e de voir dans la puissance de la parole la source de la notion du verbe des platoniciens (et par conse´quent des chre´tiens) ne se trouve pas chez Görres.

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[Les manuscrits pre´paratoires du livre

XII]

Introduction

Si nous posse´dons pour les livres IX a` XI des manuscrits qui contiennent des versions diffe´rentes, ne´anmoins assez proches de la re´daction de´finitive du tome IV, de sorte qu’il suffit de re´pertorier les variantes dans l’apparat critique pour offrir une documentation exhaustive de la pre´paration de l’impression, il en va autrement pour le livre XII. La de´cision de bouleverser le plan initial qui ne pre´voyait que quatre volumes pour l’ouvrage sur la religion et d’introduire un nouveau livre XII a` un moment tre`s avance´ de la re´daction du texte oblige Constant a` repousser l’ancien livre XII, tel qu’on le lit encore dans le manuscrit en cahiers, a` un nouveau tome, le cinquie`me, ou` il sera le livre XIII. Cette ope´ration, simple en apparence, exige de Constant un travail de re´daction conside´rable. Il fallait imaginer un plan pour ce nouveau livre XII auquel il attribue une place importante pour la de´monstration des axiomes de son ouvrage. Il fallait aussi re´diger les chapitres a` partir de mate´riaux divers dont il disposait et esquisser des chapitres en utilisant une technique de montage de morceaux choisis. Les arguments e´taient e´labore´s, les de´monstrations re´dige´es, mais inte´gre´es dans un autre contexte. D’ou` le besoin d’une restructuration profonde. Celle-ci consiste a` fabriquer, a` l’aide d’anciens manuscrits ou de feuilles de´coupe´es, un nouveau texte suivi et cohe´rent. Parce que Constant ne disposait pas de beaucoup de temps, une part conside´rable du travail est assume´e par le copiste aux longues barres de t, charge´ de re´diger a` partir de mate´riaux colle´s avec des cachets de cire aux versos des grands folios du manuscrit des Discours a` la Chambre des de´pute´s. Constant reprenait esuite les morceaux copie´s pour les corriger, et ce a` plusieurs reprises. Les fragments conserve´s de ce manuscrit en transformation permanente attestent clairement des efforts redouble´s pour aboutir a` un re´sultat satisfaisant. Le texte e´volue, la pagination des folios change plusieurs fois. Les morceaux de´coupe´s proviennent de manuscrits divers, et des papillons colle´s aux bords contiennent des ajouts ` cela s’ajoutent encore des folios visant a` comple´ter le texte ou les notes. A avec des e´bauches de nouveaux passages ou des esquisses pour le copiste contenant une description des passages a` retravailler ; celles-ci renvoient souvent a` un manuscrit pre´ce´dent, indiquant les incipit et explicit des morceaux a` prendre. Une partie importante des nouveaux mate´riaux manuscrits est pre´sente´e ci-dessus, avec le texte imprime´. Les variantes sont re´pertorie´es dans l’ap-

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De la Religion, IV – Textes comple´mentaires

parat critique au bas des pages, ce qui permettra une e´tude rapide du travail de re´daction. Mais pour un nombre conside´rable de folios, les divergences entre les manuscrits et le texte imprime´ sont trop grandes pour pouvoir inte´grer ces mate´riaux dans l’apparat critique. Nous pre´sentons ces diffe´rents e´tats de la re´daction du livre XII dans les pages qui suivent. L’ordre des chapitres de ce livre XII sera aussi celui des fragments qu’on trouvera ci-dessous. Mais il est force´ment arbitraire dans la mesure ou` il est impossible de restituer la chronologie relative de la re´daction des textes. On trouvera ainsi des textes sur He´siode, Pindare, les tragiques grecs et Aristophane. Quelques pages sur l’Enfer de Virgile sont place´es entre les fragments sur Pindare et les tragiques grecs. La plupart des folios appartiennent au dossier Co 3294, quelques-uns sont classe´s sous les cotes Co 3425 et Co 4725. Les nume´ros du foliotage indique´s dans la marge sont ceux des manuscrits. Ils ne sont pas univoques, mais peuvent donner des renseignements utiles pour l’e´tude des transformations successives lors du travail de la re´daction. Nous renvoyons pour assurer l’identification des documents, a` l’apparat qui donne pour chaque chapitre les informations pour l’e´tablissement des textes. On trouvera en outre les meˆmes nume´ros dans notre tableau synthe´tique pour les folios cote´s Co 32941.

E´tablissement des textes Les 35 fragments ayant servi a` la re´daction du livre XII appartiennent a` plusieurs dossiers manuscrits de la BCU. Nous reproduisons fide`lement les textes, gardant e´galement les passages ste´nographie´s. [Fragments du livre XII de De la Religion] BCU, Co 3294, (dans l’ordre de ce chapitre) fos 4 et 6, 10, 9 et 13, 11, 15, 5, 16, 17 et 18, 25, 14, 8, 21vo et 24, 21, 94, 23, 26, 29 et 30, 41, 42–44, 96, 51/2, 34–39, 39/2, 40, 46 et 47, 45 et 48–49, 61, 68, 65–67 et 69–71, 74. BCU, Co 3425, fos 3ro, 4ro, 1ro. BCU, Co 4725, fos 35 et 93, 81. 56 fos, 56 pp. a. ou de la main du secre´taire aux longues barres de t. Formats variables, le plus souvent des folios de grand format. Date propose´e : entre 1827 et 1830. Hofmann, Catalogue, IV/278, IV/280 et IV/71.

1

Voir ci-dessus, pp. 54–58.

[Fragments du chapitre sur He´siode]

10. Le folio ¢6² 9 du livre IX, chapitre III de De la Religion. Il s’agit d’un folio de grand format de la main du secrétaire aux longues barres de t. Les corrections autographes sont ajoutées dans la marge gauche et dans les interlignes. Le premier ajout n’a pas été retenu. Les notes se trouvent sur une feuille découpée dans un autre manuscrit rédigé par le même copiste. BCU, Co 3294/1, fo 4.

Chapitre 3. que les poe¨mes d’he´siode sont contemporains de la re´volution religieuse que nous de´crivons.

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Les poe¨mes D’he´siode appartiennent spe´cialement a` l’e´poque dont nous traitons. Ces deux poemes sont la The´ogonie & les œuvres & les jours a, Ces poe¨mes nous sont parvenus, comme ceux d’Home`re, par des Rhapsodes qui, les chantant de ville en ville, sur les places publiques, les transmirent d’une ge´ne´ration a` l’autre, jusqu’au moment ou des copistes les rassemble`rent en les re´digeant par e´crit. & en leur fesant subir des interpolations nombreuses qui ont fait souvent revoquer en doute leur authent[icite´] b. on pourrait donc croire au premier coup d’œil, que L’incertitude qui entoure tout ce qui regarde home`re, s’e´tend aussi sur la personne et Les chants d’he´siode. heureusement cette question est moins importante. Si les auteurs des poe¨mes D’he´siode nous sont inconnus, il est certain que chacun de ces poe¨mes fut compose´ a` quelques interpollations pre`s, par un seul individu, car L’auteur a` diffe´rentes reprises, parle de lui meˆme, de sa position, de ses relations, tandisque, soit dans l’Iliade, soit dans L’odysse´e, tout se rapporte au sujet, rien a` L’e´crivain. a b

le bouclier d’Hercule est probablement un fragment de la Theogonie Le Ce´le`bre Heyne, dans sa dissertation sur la The´ogonie (com. Soc. Gœtt.) indique beaucoup de passages manifestement interpole´s. Pausanias confirme de son te´moignage L’assertion du savant moderne. La Tradition qu’Esculape e´tait fils D’Alcinoe¨, dit-il, est un conte imagine´ par he´siode, ou par ceux qui ont pris la liberte´ d’ajouter leurs vers, aux vers de ce poe¨te (Corinth. 26) Pausanias va meˆme plus loin dans ses doutes ; il de´clare qu’apre`s avoir lu la The´ogonie attentivement, il la tient pour suppose´e (Arcad. 18), et il s’appuye de L’opinion des Be´otiens qui pre´tendaient, a` ce qu’il assure, que Les œuvres et les jours e´taient le seul poe¨me qui fut ve´ritablement D’he´siode, encore, ajoute-t-il, ces peuples retranchent l’exode, ou L’invocation aux muses (Bœot. ch. 27 et 31) E´tablissement du texte : Manuscrit : BCU, Co 3294/1, fo 〈6〉 9 et fo 〈7〉 10 (fos 4 et 6).

1 9 ] la nume´rotation du f o re´crite sur 6 5 traitons ] 〈venons de〉 trait〈er〉ons 6 Ces deux ... jours ] ajoute´ dans la marge, y compris la note 9–10 des copistes ... re´digeant ] 〈ils furent〉 des copistes les corr. dans l’interl. rassembl〈e´s〉e`rent 〈et〉 en les ces deux mots dans l’interl. re´dig〈e´s〉e`rent 10 & en ... subir ] 〈ce ne fut pas sans avoir〉 & en leur fesant corr. dans l’interl. subir la marque de l’infinitif ajoute´e dans l’espacement 11–12 qui ont ... authenticite´ ] ajoute´ dans la marge ; le dernier mot est abre´ge´ authent. 16 chacun de ] ajoute´ dans l’interl. 17 fut compose´ ] fu〈rent〉t compose´〈s〉

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De la Religion, IV – Textes comple´mentaires

Nous avons prouve´ ailleurs a que l’individu que la Tradition a nomme´ he´siode e´tait poste´rieur a` home`re. nous ajouterons que la seule ide´e qui pre´side a` la composition de la The´ogonie, prouve cette ve´rite´. cette ide´e, toute didactique et de re´flexion ne peut s’eˆtre offerte a` l’esprit qu’apre`s l’aˆge de la ve´ritable poe´sie. De la` les disproportions qui nous frappent a` la lecture de ces poe¨mes. la manie`re d’he´siode est tantot celle d’un abre´viateur aride, tantot celle d’un Rhe´teur diffus ; il ne subordonne point L’e´tendue des de´veloppemens a` l’ensemble de l’ouvrage ; il ne prend pour re`gle que la quantite´ de mate´riaux qu’il a pu recueillir[.] mais ce caracte`re meˆme est un re´sultat de son sie`cle. Les poe¨tes ont de´ja` pour but de faire effet. ils ne sont plus des peintres fide`les, ils cherchent partout des de´tails brillans, et les puisent dans les traditions les plus discordantes. Le style d’he´siode serait, au besoin, une preuve de plus que ses poe¨sies furent compose´es dans un moment de crise et d’agitation sociale. ce style, bien que sa douceur ait e´te´ remarque´e par Quintilien, est sombre, se´rieux, souvent triste : et, ce qui de´montre que ce caracte`re e´tait celui de L’e´poque, et non des poe¨tes, c’est qu’il saisit toutes les occasions qu’il rencontre ou qu’il fait naıˆtre, pour s’e´tendre en descriptions et en digressions poe¨tiques. mais au milieu de ses efforts pour n’eˆtre que poe¨te, il redevient sans cesse penseur. la terre est pleine de maux, dit-il, La mer en est remplie b. La description des diffe´rens aˆges de L’espe`ce humaine finit par les prophe´ties Les plus sinistres c. c’est a` regret dit-il que les parques filent aux mortels quelques jours heureux, et la douleur, assise aupre`s d’elles, prome`ne sur leurs fuseaux ses yeux mouille´s de larmes. ainsi, La re´flexion reparaıˆt toujours, infatiguable et de´courageante. L’homme avait fait le pas irre´parable, ce retour sur lui-meˆme, sur le malheur de sa condition. il avait de´couvert les pie`ges dont il est environne´, les dangers de la confiance et La Duperie de L’enthousiasme. apre`s cette de´couverte, aucune illusion n’est longtems a b c

T. 3. p. 294 The´ogon. 32 & dq ib. 163–164

4 s’eˆtre ... l’esprit qu’apre`s l’aˆge ] les mots s’eˆtre ... esprit ajoute´ dans la marge 〈eˆtre venue〉 qu’apre`s 〈l’e´poque〉 l’age corr. dans l’interl. 6 10 ] la nume´rotation du f o corrige´e 〈7〉 10 De la` les ] Dela` 〈a`〉 l〈a〉es 7 est tantot celle ] est tantot 〈illis. celle 11 est ] 〈D’he´siode e´tait〉 est corr. dans l’interl. Les poe¨tes ] 〈a` cette e´poque〉 Les poe¨tes 15 au besoin ] 〈illis.〉 au corr. dans l’interl. besoin 16–26 de crise ... larmes. ] passage mis entre crochets 19–20 rencontre ... fait ] 〈peut〉 rencontre〈r〉 ou qu’il ces deux derniers mots dans l’interl. fai〈re〉t 24 dit-il ] ajoute´ dans l’interl. 30 longtems ] ajoute´ dans l’interl.

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Chapitre 3.

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complette, la purete´ d’ame, l’e´lan du sentiment religieux soulevent parfois le fardeau qui pe`se sur l’imagination & le cœur. quelques ge´nies privile´gie´s s’en de´gagent : nous en verrons un exemple dans Sophocle : mais la foule des e´crivains demeure courbe´e sous ce poids. la poe´sie traine alors apre`s elle une arrie`re-pense´e qui est contre Sa nature, et dont elle veut en vain s’affranchir. Elle se de´bat pendant plusieurs sie`cles : elle varie ses formes, elle calcule ses effets, elle reprend des apparences de vie, mais elle porte en elle le germe de mort.

1 la purete´ ... poids. ] passage ajoute´ sur un papillon pour remplacer quatre ou cinq mots biffe´s 〈aucune expression n’est illis.〉 la purete´ ... privile´gie´s 〈le soule`vent〉 s’en de´gagent ... poids. 4 alors ] 〈toujours〉 alors corr. dans l’interl.

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De la Religion, IV – Textes comple´mentaires

[E´bauche d’une page sur He´siode]

chap. 4 Des e´le´mens constitutifs et de l’esprit dominant des poe´sies qui portent le nom d’He´siode

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Apre`s avoir de´termine´ l’e´poque de socie´te´ qui a du imprimer aux ouvrages D’he´siode leur caracte`re, voyons de quels e´le´mens ils se composent, et quel esprit a domine´ celui de l’auteur. Ses deux poemes sont la The´ogonie a et les œuvres et les jours b. La The´ogonie se compose principalement en traditions Mythologiques ; les œuvres et les jours appliquent davantage la religion a` la vie humaine. a

b

Le Bouclier D’hercule est probablement un fragment de la Theogonie car les deux derniers vers annoncent que l’auteur va parler des femmes des he´ros et de leurs enfans. or, c’est pre´cise´ment le fils d’une de ces femmes, qui est le sujet du bouclier D’hercule. ce fragment aura, par quelque hazard e´te´ separe´ du corps du poe¨me. cependant Le grammairien Aristophane ne le regardait pas comme authentique, et le trouvait fort infe´rieur a` la The´ogonie proprement dite. Les œuvres et les jours sont, ainsi que la The´ogonie, compose´ de Rhapsodies plus ou moins longues, dont chacune formait un tout, qu’il est impossible de distinguer. on ne peut douter que la premie`re place, comme antiquite´ ne leur appartienne. c’est un monument pre´cieux de la plus ancienne civilisation. on voit, pour ainsi dire, se developper, avec une activite´ paisible, L’esprit humain encore enfant, dans les bornes e´troites que lui assignent ses travaux recens et sa proprie´te´ pre´caire, aupre`s de ses foyers tout nouvellement construits. E´tablissement du texte : Manuscrit : BCU, Co 3294/1, fo 〈6〉 〈8〉 11 (fo 10).

2 11 ] pagination corrige´e 〈8〉 11 2–4 Ch. 4 ... He´siode ] le titre ajoute´ en teˆte d’une page de texte 5–8 Apre`s ... poemes sont la ] ajoute´ dans la marge pour remplacer une ligne de la premie`re phrase du f o 〈Les deux grans ouvrages attribue´s a` he´siode sont la〉 Apre`s ... l’e´poque de ce mot ajoute´ dans l’interl. socie´te´ 〈des //poe`mes// ouvrages d’He´siode〉 qui ce mot ajoute´ a du imprimer aux ouvrages d’He´siode leur caracte`re syntagnme ajoute´ dans la marge, en-dessous du bloc des corrections voyons ... composent & 〈dans〉 quel ... celui 〈du poe`te〉 de l’auteur[.] Ses deux poemes sont la 11 car ] re´crit sur un mot illis. 17 sont, ainsi ] sont 〈probablement plusieurs mots illis. ainsi Rhapsodies ] Rhapsodies 〈de´tache´es,〉 19 comme antiquite´ ... un monument ] 〈comme antiquite´ plusieurs mots illisibles〉 attribue´s a` he´siode〉, 〈n’〉 ne leur appartienne 〈plusieurs mots illis. œuvres et les jours〉 c’est un monument 21 enfant ] 〈dans l’〉enfan〈ce〉t 21–22 que lui ... nouvellement ] passage remanie´ que lui assignent syntagme ajoute´ 〈de〉 ses travaux recens ce dernier mot ajoute´ et 〈de〉 sa proprie´te´ pre´cairre ce dernier mot ajoute´ 〈pre`s〉 aupre`s ... foyers, tout ce dernier mot ajoute´ nouvellement

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E´bauche d’une page sur He´siode

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On reconnait, dans la The´ogonie, des portions de´tache´es d’un ou de plusieurs syste`mes sacerdotaux, te´ne´breux et mystiques, dont l’ensemble n’e´tait pas compris par le poe¨te qui nous transmettait ces de´tails e´pars. Ses hypothe`ses physiques sur l’origine des choses, le chaos de la matie`re informe sont phe´niciennes a, ses traditions sur la terre, le Tartare, L’amour b, L’engendrement du ciel, des montagnes et de L’oce´an, L’apparition des Titans, dont Saturne est le plus jeune, sont, d’une part, des fragments de cosmogonie, qu’il ne se met point en peine de classer par ordre, mais qu’il accumule au hazard, suivant que chaque notion se pre´sente a` lui, et de L’autre part, le commencement d’une Mythologie historique, ou narrative, car les Cyclopes et les centimanes sont les fre`res des Titans ; or, les centimanes et Les cyclopes sont, dans le langage d’un peuple qui se civilisa, la re´miniscence de L’e´tat sauvage.

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Les alle´gories D’he´siode sont plutoˆt Phe´niciennes, qu’Egyptiennes. dans toutes les Cosmogonies Egyptiennes, on rencontre pour premier principe l’œuf myste´rieux qu’on retrouve dans les alle´gories Grecques emprunte´es des Egyptiens. mais he´siode commence par le Chaos, les phe´niciens sont le seul peuple du Midi qui ait eu l’ide´e du Chaos. [Eros, L’amour Cosmogonique (v. Creutz. II. 367) qu’il ne faut pas confondre avec celui que des poe¨tes poste´rieurs ont donne´ pour fils a` Ve´nus.]

1 reconnait ] reconnait 〈plusieurs mots illis.〉 de´tache´es ] de´tache´es 〈et sans un mot illis.〉 4 Ses ... physiques ] 〈L〉Ses ... physiques 〈d’he´siode〉 15 rencontre ] 〈retrouve〉 rencontre corr. dans l’interl. 15–16 qu’on ... alle´gories ] 〈illis.〉 qu’on retrouve 〈illis.〉 dans 〈illis.〉 alle´gories 17 les phe´niciens ... Chaos. ] 〈et〉 les phe´niciens sont ces trois derniers mots dans l’interl. le seul ... l’ide´e 〈d’un〉 du Chaos, 〈e´tait les phe´niciens〉. le dernier syntagme biffe´ : lecture hypothe´tique 18–19 Eros ... Ve´nus. ] le papillon qui contenait le texte de la note est perdu ; nous restituons d’apre`s la mise au net

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De la Religion, IV – Textes comple´mentaires

[Fragment de la mise au net d’une page sur He´siode]

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Des e´le´mens Constitutifs et de l’esprit dominant des poe¨sies qui portent le nom d’He´siode Apre`s avoir de´termine´ L’e´poque de socie´te´ qui a du imprimer aux ouvrages D’he´siode leur caracte`re, voyons de quels e´le´mens ils se composent, et quel esprit a domine´ celui de l’auteur. Ses deux poe¨mes sont la The´ogonie a et les œuvres et les jours b. La The´ogonie consiste principalement en traditions Mythologiques ; les œuvres et les jours appliquent davantage la religion a` la vie humaine. On reconnait, dans la The´ogonie, des portions de´tache´es d’un, ou de plusieurs syste`mes sacerdotaux, te´ne´breux et mystiques, dont l’ensemble n’e´tait pas compris par le poe¨te qui nous transmettait ces de´tails e´pars. Ses hypothe`ses Physiques sur l’origine des choses, le Chaos et la matie`re informe sont phe´niciennes c, ses traditions sur la terre, le Tartare, L’amour d, a

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Le Bouclier D’hercule est probablement un fragment de la Theogonie, car les deux derniers vers annoncent que l’auteur va parler des femmes des he´ros et de leurs enfans. or, c’est pre´cise´ment le fils d’une de ces femmes, qui est le sujet du bouclier D’hercule. ce fragment aura, par quelque hazard e´te´ separe´ du corps du poe¨me. cependant Le Grammairien Aristophane, ne le regardait pas comme authentique, et le trouvait fort infe´rieur a` la The´ogonie proprement dite. Les œuvres et les jours sont, ainsi que la The´ogonie, compose´s de Rhapsodies plus ou moins longues, dont chacune formait un tout, qu’il est impossible de distinguer. on ne peut douter que la premie`re place, comme antiquite´ ne leur appartienne. c’est un monument pre´cieux de la plus ancienne civilisation. on voit, pour ainsi dire, se developper, avec une activite´ paisible, L’esprit humain encore enfant, dans les bornes e´troites que lui assignent ses travaux re´cens et sa proprie´te´ pre´caire, aupre`s de ses foyers tout nouvellement construits. Les alle´gories D’he´siode sont plutoˆt Phe´niciennes, qu’Egyptiennes. dans toutes les Cosmogonies Egyptiennes, on rencontre pour premier principe l’œuf myste´rieux qu’on retrouve dans les alle´gories Grecques emprunte´es des Egyptiens. mais he´siode commence par le Chaos, et Les Phe´niciens sont le seul peuple du Midi qui ait eu l’ide´e du Chaos. Eros, L’amour Cosmogonique (v. Creutz. II. 367) qu’il ne faut pas confondre avec celui que des poe¨tes poste´rieurs ont donne´ pour fils de Ve´nus. E´tablissement du texte : Manuscrit : BCU, Co 3294/1, fos 11 et 〈11〉 12 (fos 9 et 13).

2 Des e´le´mens ] 〈Chapitre 4〉 Des e´lemens 8 consiste... en ] 〈se compose〉 consiste principalement 〈de〉 en corr. dans l’interl. 14 12 ] le chiffre 2 de la pagination re´crit sur 〈1〉 15 car ] car dans l’interl. corr. e´bauche´e dans les 22 qu’il est ... distinguer ] syntagme re´pe´te´ par inadvertance ; le premier biffe´ 25 que lui assignent ] ajoute´ dans la marge pour remplacer un mot biffe´ 〈de〉

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Fragment de la mise au net d’une page sur He´siode

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L’engendrement du ciel, des montagnes et de L’oce´an, L’apparition des Titans, dont Saturne est le plus jeune, sont, d’une part, des fragments de Cosmogonie, qu’il ne se met point en peine de classer par ordre, mais qu’il accumule au hazard, suivant que chaque notion se pre´sente a` lui, et de L’autre part, le commencement d’une Mythologie historique, ou narrative, car les Cyclopes et les centimanes sont les fre`res des Titans ; or, les centimanes et les cyclopes sont, dans le langage d’un peuple qui se civilisa, la re´miniscence de l’e´tat sauvage.

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De la Religion, IV – Textes comple´mentaires

[Fragment d’une re´flexion sur la The´ogonie]

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Cette rapide analyse prouve l’erreur de ceux qui ont voulu voir dans la The´ogonie un syste`me cohe´rent. cette compilation est un assemblage de notions diverses, sans unite´ de doctrine, ou de but a. elle renferme des opinions de diffe´rents pays, et surtout de diffe´rentes e´poques. mais elle n’en est que plus curieuse et plus ne´cessaire d’examiner, puisque pre´cise´ment par la` meˆme elle nous montre la lutte de ces opinions entr’elles. une seule e´nume´ration de noms propres en remplit la plus grande partie. Ses fables sont pour la plupart confuses et effrayantes. nous voyons la mythologie home´rique si brillante, si varie´e, si attrayante, meˆme dans ses contradictions, retomber dans un vague informe et rebutant. les dieux, dans home`re, occupent la place imme´diatement au dessus des he´ros, et trouvent leur pendant dans la re´alite´ historique de ceux-ci. comme ils n’interviennent qu’accidentellement, ils sortent, sous une forme de´ja` connue et fixe´e, de la nuit dans laquelle ils sont d’ailleurs renferme´s. mais lorsqu’on veut faire de cette mythologie un syste`me poe¨tique a` part, il est ine´vitable que les attributs s’accumulent et que les figures deviennent colossales. la terreur religieuse que nous n’e´prouvons que de tems en tems, et d’une manie`re fort adoucie, lorsqu’home`re e´carte le voile qui entoure les forces mystiques de la nature, devient dans he´siode L’impression dominante. des reˆves entasse´s et cona

Ces notions avaient e´te´ apporte´es en gre`ce par les colonies. elles n’avaient pu devenir partie du culte public, parcequ’elles n’e´taient nullement proportionne´es a` l’e´tat intellectuel des sauvages chez lesquels ce culte s’e´tablissait ; mais a` mesure qu’il se forma chez les grecs une classe d’e´crivains ou de poe¨tes, ceux-ci, sans comprendre les alle´gories de divers genres qui circulaient dans des Traditions anciennes, les retire`rent toutefois de l’oubli qui menacait de Les engloutir. il est a` remarquer qu’au milieu du me´lange les traditions etrangeres & confuses He´siode commence par une invocation aux muses tout a` fait Grecque et Locale, aux muses qui dansent sur L’he´lion, autour de l’autel de Jupiter et qui louent ce Dieu et son e´pouse, la Junon D’argos (Wagner 377.). E´tablissement du texte : Manuscrit : BCU, Co 3294/1, fo 〈11〉 12 (fo 11).

2 12 ] le chiffre 2 de la pagination re´crit sur 〈1〉 Cette ] pre´ce`de la fin d’un paragraphe biffe´ ; la phrase revient quelques lignes plus loin 〈de diffe´rentes e´poques. mais elle n’en est que plus curieuse et plus ne´cessaire a` examiner, puisque, pre´cise´ment, par la` meˆme, elle nous montre La Lutte de ces opinions entr’elles.〉 14 connue ] a` la hauteur de ce mot la pagination de la fiche 29 26–27 il est ... He´siode ] correction peut-eˆtre inacheve´e 〈Car〉 il est a` remarquer suit dans l’interl. qu’au milieu ... confuses retour au niveau de la ligne 〈qu’〉 He´siode

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Fragment d’une re´flexion sur la The´ogonie

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fondus ne peuvent former qu’un monde de fantoˆmes ; et le Chaos que la The´ogonie D’he´siode assigne pour premier principe a` toutes choses, semble pre´sider a` ce poe¨me. Les œuvres et les jours sont un poeˆme agronomique. en conse´quence, il est moins important que la The´ogonie, sous le rapport des fables mythologiques ; mais comme il embrasse L’e´tat social, dans toutes ses relations, il est d’un extreˆme inte´reˆt, sous le rapport de la religion modifie´e par L’e´tat social.

4 Les œuvres ... sont ] 〈nous avons dit que〉 Les œuvres ... 〈e´taient〉 sont 7 d’un extreˆme inte´reˆt ] le ms. porte d’une extreˆme 〈importan〉ce inte´reˆt modifie´e par ] 〈illis.〉 modifie´e par

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De la Religion, IV – Textes comple´mentaires

[Fragment sur les Œuvres et les jours]

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Les œuvres & les jours sont un poe`me agronomique : En conse´quence il est moins important que la The´ogonie, quant aux fables proprement dites : mais comme il embrasse l’e´tat social tout entier, il est d’un inte´reˆt extreˆme, sous le point de vue de la religion, modifie´e par l’e´tat social. Dans l’un & l’autre de ces poe`mes les contradictions que nous avons annonce´es pre´ce´demment frappent nos regards. On y voit, comme dans Home`re Jupiter de´vore´ d’amour pour une mortelle a Minerve encourageant Hercule a` blesser mars b, mars en conse´quence blesse´ et renverse´ par hercule c on retrouve les notions home´riques sur le sort des mortels qui combattaient contre les dieux quiconque attaque le fils de Jupiter, dit he´siode, perd et sa force et sa raison d L’Olympe ne se constitue que par La victoire des dieux sur les Tytans e. Typhoe¨e aurait ine´vitablement saisi l’empire de L’univers, si Jupiter ne l’avait pre´venu en le frappant de la foudre f. Le Tartare D’he´siode g est en tout semblable a` celui de L’Odysse´e. Les Titans y sont renferme´s h Gyge´s Cattus et Briare´e en sont les gardiens i, avec Leurs cent bras et Leurs cinquante teˆtes k. Les crimes d’homme a` homme n’y sont point punis. Les œuvres et Les jours contiennent cette ide´e fondamentale de la premie`re e´poque du polythe´isme, que les dieux et les mortels sont ori-

a b c d e f g h i k

Boucl D’herc. 31–36 Boucl D’herc 331–335 Boucl D’herc 458–462. Boucl D’herc 149–150 The´og. 881. 885. The´og. 820–868. ib. 724–804 ib. 729 731. ib. 734–735 ib. 148–152.

E´tablissement du texte : Manuscrit : BCU, Co 3294/1, fo 12 & 13 (fo 15). 6 contradictions ] 〈traditions〉 contradictions corr. dans l’interl. 8 Jupiter ] 〈home´riques. on voit〉 Jupiter 10 home´riques ] 〈d’home`re〉 home´riques corr. dans l’interl.

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Fragment sur les Œuvres et les jours

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ginairement une meˆme race et qu’ils sont ne´s en meˆme tems a. C’est a` dire, que les dieux ne diffe`rent des hommes, que par la force et par la puissance b.

a b

œuv. et Jours 108. Si nos recherches nous permettaient d’entrer dans tous les de´tails des mythologies, nous remarquerions que celle d’hesiode se rapproche d’avantage de l’odysse´e que de L’iliade. Mercure par exemple, est toujours le messager des dieux et remplace Iris, ce qui fut, ainsi que nous l’avons observe´ plus haut, un changement a` la fable poste´rieure a` L’opinion accre´dite´e par le chantre du Sie`ge de Troyes.

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De la Religion, IV – Textes comple´mentaires

[E´bauche du fragment sur Uranus]

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Uranus mutile´ est un de´bris cosmogonique ; c’est la nature perdant sa force ge´ne´ratrice. nous avons retrouve´ ce symbole dans plusieurs religions sacerdotales, avec cette diffe´rence qu’il est la base de toutes leurs ce´re´monies et ne cesse Jamais d’eˆtre inhe´rent a` Leurs dogmes, pre´sent dans toutes leurs fables, tandis que le polythe´¨ısme grec, apre`s lui avoir rendu un ste´rile hommage, l’e´carte comme un souvenir qui lui est e´tranger et qui l’importune. Du sang D’Uranus, tombe´ sur la terre, naissent les ge´ants et les E´rynnies, Ve´nus est fille du ciel et de l’onde a. L’ide´e primitive reparait sous des denominations nouvelles ; L’amour avait e´te´ repre´sente´ comme fils du Chaos, principe de toutes choses ; Ve´nus qui remplace L’amour, est appele´e fille de la mer, devenue le 1er principe dans des cosmogonies plus re´centes. Cette naissance de Ve´nus sortant des ondes, cette ve´ne´ration pour la mer, me`re de tout, tenoient probablement en partie a` quelque connoissance imparfaite de la philosophie des barbares & en partie aux traditions des co-

a

The´ogon. 187–206.

E´tablissement du texte : Manuscrit : BCU, Co 3294/1, fo 〈8 ?〉 9 (fo 5). 2 9 ] la pagination re´crite sur 〈8〉 Uranus ... un ] 〈trois mots illis.〉 Uranus mutile´ ce dernier mot dans l’interl. est 〈illis.〉 un 3 nous avons retrouve´ ] 〈trois ou quatre mots illis.〉 〈on〉 nous avons ces deux derniers mots ajoute´s dans l’interl. retrouve´ l’accent aigu ajoute´ en corrigeant le texte 4 qu’il ] qu’el〈le〉 le point place´ au-dessus de la lettre «e» en fait un«i» 5 inhe´rent ] inhe´rent〈e〉 5–8 pre´sent ...l’importune. ] pre´sent〈e a`〉 dans ce mot dans l’interl. toutes ... tandisque 〈dans〉 le ... grec, 〈elle ait deux ou trois mots illis. quoique obscure cinq ou six mots illis. indiffe´rente a` la croyance populaire〉 apre´s ... l’importune. corr. dans l’interl. 14 Cette 13 le 1er principe ] 〈un〉 le 1er principe 〈deux mots illis. a` la place du Chaos〉 naissance ] a` la hauteur de ces mots la pagination du folio de l’e´tat pre´ce´dent 〈8〉 14 naissance ... sortant ] 〈origine〉 naissance de Venus 〈qui sort〉 sortant 14-p. 613.1 cette ve´neration ... maritimes. ] passage ajoute´ dans la marge pour remplacer une phrase supprime´e aux souvenirs 〈des colonies et de leurs expe´ditions maritimes.〉 les deux premiers mots de cette phrase auraient duˆ eˆtre biffe´s 15 me`re ] 〈qui la fait conside´rer comme la〉 me`re

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E´bauche du fragment sur Uranus

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lonies & a` la me´moire de leurs expe´ditions maritimes a. Ne´re´e, ce vieillard prophe´tique, fait allusion aux lois de la nature, d’apre`s lesquelles la mer est agite´e en hiver et paisible en e´te´ ; c’est un embleˆme des premie`res observations des navigateurs sur L’ordre des saisons. Les enfans de Phorcys et de Ce´to appartiennent a` la phe´nicie. Les gorgones qui habitent L’occident, doivent leur origine a` L’usage ou` e´taient les e´crivains de la haute antiquite´, de rejeter dans L’occident, partie du monde alors inconnue, tous les monstres et tous les prodiges. Le Sphinx tient aux traditions de l’Egypte.

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Les filles de l’oce´an portent les noms des diverses parties du monde, L’Europe, L’Asie, &ca. He´siode dit qu’il y en a 3000, et s’excuse de ne pas les nommer toutes, en ajoutant que ceux qui habitent aupre`s d’elles, savent assez leurs noms. c’est une allusion manifeste aux de´couvertes des navigateurs Wagner, 388.

5 Ce´to ... phe´nicie. ] Ce´to 〈paraissent eˆtre d’origine〉 appartiennent a` la syntagme e´crit dans l’interl. phe´nicie〈nne〉. 8 de l’Egypte. ] 〈Egyptiennes〉 de l’Egypte. 9 Les filles ] a` la portent ... du monde ] hauteur de ces mots, dans l’angle, la pagination de la fiche 〈22ter〉 〈dans he´siode〉 portent 〈c〉les noms 〈de pays〉 des diverses ...monde. corr. dans l’interl. 10 ajoutant ] 〈disant〉 ajoutant corr. dans l’interl.

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De la Religion, IV – Textes comple´mentaires

[Fragment sur Uranus]

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Uranus mutile´ est encore un de´bris Cosmogonique ; c’est la nature perdant sa force ge´ne´ratrice. nous avons retrouve´ ce symbole dans plusieurs religions sacerdotales, avec cette diffe´rence qu’il est la base de toutes leurs ce´re´monies, et ne cesse Jamais d’eˆtre inhe´rent a` leurs dogmes, pre´sent dans toutes leurs fables, tandis que le polythe´¨ısme grec, apre`s lui avoir rendu un ste´rile hommage, l’e´carte comme un souvenir qui lui est e´tranger et qui l’importune. Du sang d’Uranus tombe´ sur la terre, naissent les ge´ants et les E´rynnies. Venus est fille du ciel et de l’onde a. L’ide´e primitive reparait sous des de´nominations nouvelles ; L’amour avait e´te´ repre´sente´ comme fils du Chaos, principe de toutes choses ; Ve´nus qui remplace l’amour est appele´e fille de la mer devenue le premier principe dans des Cosmogonies plus re´centes. Cette naissance de Ve´nus sortant des ondes, cette ve´ne´ration pour la mer me`re de tout, tenaient probablement en partie a` quelque connaissance imparfaite de la philosophie des barbares, et en partie aux traditions des colonies et a` la me´moire de leurs expe´ditions maritimes b. Ne´re´e, ce vieillard prophe´tique, fait allusion aux lois de la nature, d’apre`s lesquelles la mer est agite´e en hiver, et paisible en e´te´ ; c’est un embleˆme des premie`res observations sur l’ordre des saisons. Phorcys et Ce´to appartiennent a` la Phe´nicie. Les Gorgones qui habitent L’occident, doivent Leur origine a` L’usage ou` e´taient les e´crivains de la haute antiquite´, de rejeter dans L’occident, partie du monde alors inconnue, tous Les monstres et tous Les prodiges. Le Sphinx tient aux traditions de L’Egypte. a b

The´ogon. 187–206. Les filles de l’oce´an portent les noms des diverses parties du monde, L’Europe, L’asie, &ca. He´siode dit qu’il y en a 3,000, et s’excuse de ne pas les nommer toutes, en ajoutant que ceux qui habitent aupre`s d’elles, savent assez leurs noms. l’allusion aux de´couvertes des navigateurs (Wagner, 388) est assez manifeste. E´tablissement du texte : Manuscrit : BCU, Co 3294/1, fo 〈9〉 13 (fo 16).

2 encore ] ajoute´ dans l’interl. 2 13 ] pagination corrige´e 〈9〉 13 15 probablement ] probablement 〈aux souvenirs〉 20 des premie`res ] dans l’interl. peut-eˆtre un ajout des illis. premie`res 20–21 observations ] observations 〈des navigateurs〉 21 Phorcys et Ce´to ] le ms. porte 〈Les enfans de Phorcus〉 Phorcus et de Ce´to corr. inacheve´e 29 l’allusion ] 〈C’est une〉 l’allusion l’article re´crit sur le e final de 〈une〉 〈manifeste〉

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Re´flexions sur He´siode

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[Re´flexions sur He´siode]1

fo 81ro

Le style d’Hes. sert au besn une 3me pr. qu’il e´crivt ds un momt − mouille´s de larmes. Ses plaintes contre la tyrannie − respecter ainsi la reflex. − germe de la mort Les contradict. qui caracterisent l etat social sous l’influence duquel Hesiode e´crivoit frappent a chaque instant tout lecteur attentif des ses ouvrages. On y voit d’abord comme dans Homere Jupiter − la puissance Leur perversite´ − perfide Mais a´ cote´ de ces vestiges d’une religion grossie`re, qui prete a ses idoles toutes les imperfections & ts les vices les maximes − prouvent que deja les Dieux s ett ameliores Jupiter, dit-il − mal acquises Ce n’est pas seulement − diverses Nous pourrions prolonger − abominable Ne´mesis − pudeur C’est surtout dans l’idee de Nemesis q la progression de la religion ¯ Grecque se laisse apercevoir2. encore e´quiv. & dble ds He´siode, les poe`tes E´tablissement du texte : Manuscrit : Co 4725, fo 81ro. 2 sert ] 〈en〉 sert mouille´s ] 〈germe de mort〉 mouille´s 10 On ] a` la hauteur de ce mot, dans la marge de gauche, le chiffre 15 Jupiter ] a` la hauteur de ce mot, dans la marge de gauche, le chiffre 16 11 Leur ] a` la hauteur de ce mot, dans la marge de gauche, le chiffre 17 16 Ce ] a` la hauteur de ce mot, dans la marge de gauche, le chiffre 18 19 C’est ] a` la hauteur de ces mots, dans la marge de gauche, le chiffre 14

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Note ste´nographie´e pour restructurer le chap. III du livre XII, en partant d’un ms. de´ja` re´dige´, mais dont le texte doit eˆtre transforme´. Nous ne savons pas a` quel manuscrit ces notes sont destine´es. Il doit s’agir d’une des pages du manuscrit pour le livre XII. Les chiffres dans la marge pourraient renvoyer a` un manuscrit sur fiches. Il faut lire : «C’est surtout dans l’ide´e de Ne´mesis que la progression de la religion grecque se laisse apercevoir. Encore e´quivoque et double dans He´siode, les poe`tes poste´rieurs la de´gagent de ses attributs doubles.»

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poste´r. la degagent de ses attribs d Elle ne doit plus sa naissance a´ la nuit tenebreuse, elle n’est plus le fleau des mortels ni meme une divinite´ puremt vengeresse c est la deesse − distrib & Mesomedes a la decrit de la maniere suivante1

a

elle est dans la The´og. v. 389 & 397 la fille de la nuit & dans les œuvres & les jours (v. 198) elle habite au haut des cieux avec la pudeur

pp. 615.20–616.1 les poe`tes ... degagent ] les poe`tes poste´r. la ces quatre mots ajoute´s dans la marge de gauche 〈un mot illis.〉 degagent ne doit plus sa ] 〈n’est〉 ne doit ces deux derniers mots dans l’interl. pas 〈ne´e〉 sa 2 le fleau ] 〈un monstre〉 le ce mot dans l’interl. fleau 5–6 elle est ... pudeur ] phrase ajoute´e dans la marge de gauche et a` placer entre parenthe`ses apre`s Mesomedes

1

BC citera les vers du poe`te Me´some`des dans un autre contexte. Voir ci-dessus, p. 406. La phrase entre parenthe`ses doit eˆtre conside´re´e comme une note.

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Fragment sur Saturne

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[Fragment sur Saturne]

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Saturne pre´cipite´ a` son tour dans le Tartare avec les Titans, est un acheminement au Triomphe de la ve´ritable Mythologie Grecque. ici L’aurore de la morale se laisse entrevoir, bien que la Cosmogonie y domine encore. Les enfans de la nuit sont Les songes, le destin, la mort, Le sommeil, L’envie, ou la plainte, Le malheur, Ne´me´sis a, Les parques, La vieillesse et La discorde. La discorde a` son tour, a pour enfans le travail, la faim, La douleur, le meurtre sous diffe´rens noms, soit dans la guerre, soit dans la paix, Le mensonge, L’e´quivoque, Le parjure. a

Les grecs ont e´te´ conduits, par le progre`s des ide´es morales, a` de´velopper beaucoup celle de Ne´me´sis. Elle n’est pas dans leur polythe´isme perfectionne´ une divinite´ purement vengeresse. c’est la De´esse de la mode´ration. elle pre´side a` la justice distributive. Me´some`des, poe`te contemporain d’Adrien mais qui, ainsi que tous les lyriques avoit recueilli les ide´es morales de la religion grecque, de´crit Nemesis de la manie`re suivante. «Ne´me´sis, De´esse voile´e, qui de´cides de la vie humaine, De´esse au regard serieux, qui tiens d’une main severe les re`nes de nos destine´es, a` nous, mise´rables mortels, prompts a` nous e´garer. tu hais l’orgueil qui nous perd, l’envie qui nous de´vore. La roue du sort tourne toujours, sans laisser de traces. Tu la suis invisible, courbant le front superbe qu’e´le`ve une prospe´rite´ excessive, mode´rant le malheur, pe´ne´trant dans les cœurs pour les calmer, & touchant de la main la balance pour re´tablir l’e´galite´. sois nous propice, toi qui distribue[s] la justice, ne´me´sis aile´e au front me´ditatif, inaccessible a` l’erreur, ne trompant jamais les humains & n’ayant que l’e´quite´ pour compagne, l’e´quite´, qui e´tend dans les airs ses ailes blanches, l’e´quite´ puissante, qui nous pre´serve de nous meˆmes, & de tes rigueurs & du Tartare» (Anthologie II. 347). On remarquera facil. ds cette ode la de´ge´ner. de la poesie & de l’art. l’affect. de Mes. a repeter trois fois l’epith. d’aile´es prouve que le gt comt. a se corr. & qu’il perdt sa simpl. mais le fd des idees n’en et. pas ms ne´cessaire a rap E´tablissement du texte : Manuscrit : BCU, Co 3294/1, fos 14 et 15 (fos 17 et 18).

2 14 ] le chiffre 4 re´crit sur 〈9〉 5 Les songes ] a` la hauteur de ces mots, dans la col. gauche, la note dans Pindadre 7 discorde. ] BC pensait ajouter une note 〈The´ogon. 211 213〉 10 celle ] 〈l’ide´e〉 celle 11 pas dans ] pas 〈seulement〉 dans 12–26 Me´some`des ... rap ] passage ajoute´ dans la col. de gauche pour remplacer un texte beaucoup plus court 〈Me´some`des (Anthologie Grecque, II. 347 lui donne pour assistant la Justice (v. Jacobs sur cet hymne a` Ne´me´sis dans L’anthologie ib.) he´siode (œuvr. et jours 200) lui avait donne´ pour compagne la pudeur.〉 18 qu’e´le`ve ] 〈qu’en... quelques lettres illis.〉 qu’e´le`ve 20 re´tablir ] 〈la〉 re´tablir 〈dans〉 24 347) suit une phrase biffe´e, illis. 25–27 On ... a rap ] passage ajoute´ dans la col. gauche, a` la hauteur des mots «Saturne pre´cipite´» nous le plac¸ons hypothe´tiquement a` la fin de la note

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De la Religion, IV – Textes comple´mentaires

Enfin la transition comple`te s’ope`re par l’ave`nement de Jupiter a. arrive´ ainsi a` la partie populaire de la mythologie Grecque, he´siode De´crit les ge´ne´alogies des divinite´s qu’on peut nommer actives, et Le me´lange des dieux avec les mortels b. Ses alle´gories deviennent plus claires, plus agre´ables, plus e´le´gantes ; Les muses sont filles de la me´moire. L’harmonie doit sa naissance aux embrassemens de mars et de Venus c. Les œuvres et Les Jours sont un poeˆme Agronomique, en conse´quence, e´tant moins important que la The´ogonie, quant aux fables proprement dites : mais comme il embrasse L’e´tat social tout entier, il est d’un inte´reˆt extreˆme, sous le point de vue de la religion modifie´e par L’e´tat social. Dans L’un et L’autre de ces poe¨mes, Les contradictions que nous avons annonce´es pre´ce´demment, frappent nos regards. On y voit comme dans Home`re, Jupiter de´vore´ d’amour pour une mortelle d. Minerve encourageant Hercule a` blesser mars e. mars en conse´quence, Blesse´ et renverse´ par Hercule f. on retrouve Les actions home´riques sur le sort des mortels qui combattaient contre les dieux. quiconque attaque le fils de Jupiter, Dit he´siode, perd et sa force, et sa raison g. Typhoe¨e aurait [ine´vitablement saisi l’empire de l’univers, si Jupiter ne l’avait pre´venu en le frappant de la foudre.]

a b

c d e f g

Voyez ce que nous avons dit a` ce sujet, T: II p. 449–450 Les Epithe`tes qu’he´siode donne aux Dieux, ne sont pas de simples exclamations d’eloges, comme dans les hymnes orphiques, mais des e´pithe`tes caracte´ristiques et individuelles (Wagn. 377) on a conclu de la` que le passage s’e´tait fait des ide´es orphiques, a` Travers la mythologie D’he´siode, jusqu’a` l’anthropomorphisme par Home`re. mais au contraire, c’est de l’anthropomorphisme D’Home`re, a` travers Hesiode, aux odes sacerdotales orphiques, que ne´anmoins, comme on le voit il modifie un peu. Boucl. D’her. 31–36. id. 331–335. Id. 458–463. Id. 149–150. Theogon. 881–885.

4 15 ] le chiffre 5 re´crit sur 〈0〉

19 dit ] 〈de´ja`〉 dit

22 (Wagn. ] 〈(Wag〉 (Wagn.

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Fragment sur Saturne

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[Fragment sur Saturne]

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Saturne, pre´cipite´ a` son tour dans le Tartare, avec les Titans, est un acheminement au triomphe de la ve´ritable mythologie grecque. ici l’aurore de la morale se laisse entrevoir, bien que la cosmogonie y domine encore. Les enfans de la nuit sont Les songes, le destin, La mort, Le sommeil, L’envie, ou la plainte, Le malheur, Ne´me´sis a. Les parques, la vieillesse et la discorde. la discorde a` son tour a pour enfans, le travail, la faim, la douleur, le meurtre sous diffe´rens noms, soit dans la guerre, soit dans la paix, le mensonge, l’e´quivoque, le parjure. enfin La Transition comple`te s’ope`re par L’ave´nement de Jupiter b. Son re`gne est l’e´poque de la victoire de´cisive que remporta l’esprit national sur l’esprit et Les re´miniscences conserve´es et de´figure´es par les descendans des colonies. tout ce qui est ante´rieur a` Jupiter, est sombre, incohe´rent, inintelligible, et visiblement compose´ d’opinions e´trange`res. Tout ce qui vient apre`s Jupiter, est e´le´gant, cohe´rent, et d’une application populaire. Les attributs des dieux sont plus pre´cis et mieux constitue´s. ces dieux ne sont plus des puissances abstraites c, et en quelque sorte des formes vagues. ils deviennent de ve´ritables individus, doue´s de volonte´, de faculte´s et de passions personnelles. aussi de nouveaux dieux succe`dent aux anciens. de meˆme que Ve´nus avait de´ja` remplace´ L’amour Cosmogonique, Neptune est un dieu plus individuel. C’est alors que la demeure des dieux est de´termine´e. Ils n’habitent plus le vague de l’air, L’immensite´ de l’onde, la profondeur de l’abıˆme. ils e´tablissent le sie`ge de leur empire sur l’olympe, montagne de Thessalie. a

b c

les Grecs ont e´te´ conduits, par le progre`s des ide´es morales a` de´velopper beaucoup l’ide´e de Ne´me´sis. Mesome`des (Anthologie Grecque, II. 347) lui donne pour assistant la justice. (v. Jacobs, sur cette hymne a` Ne´me´sis dans l’Anthologie. ib. He´siode (Œuvr. & Jours, 200) lui [avait] d[onne´] [pou]r compagne la pudeur. voir ce que nous avons deja dit a` ce sujet T. II. p. 449–450. The´ogon. 211–213 E´tablissement du texte : Manuscrit : BCU, Co 3294/2, fo 〈10 ?〉 19 (fo 25).

2 19 ] le chiffre 9 re´crit sur 〈0〉 4–5 bien ... encore ] ajoute´ dans la marge 5 de la ] mots ajoute´s dans l’interl. 7 discorde. ] BC pre´voit une note ; le texte n’est pas conserve´ 10–24 Son re`gne ... Thessalie. ] passage biffe´ d’un trait vertical 21 des dieux ] a` la hauteur de ces mots, dans l’angle gauche, la pagination de l’ancienne fiche 26 27–28 lui avait ... pour ] restitution hypothe´tique ; le folio est mutile´ 29 voir ... 450. ] la note ajoute´e dans la marge

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De la Religion, IV – Textes comple´mentaires

[Fragment sur les perversite´s des dieux]

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leur perversite´ y est encore une opinion consacre´e. Jupiter envie a` l’espe`ce humaine L’usage du feu, parcequ’elle est L’objet de sa haine a. Il ote la voix aux maladies de peur que les mortels avertis ne leur e´chappent b. il les destine´s a` d’e´ternelles discordes c. Tous les dieux concourent a` embellir Pandora pour la perte des hommes d. Prome´the´e connait si bien Jupiter, qu’il de´fend a` son fre`re Epimethe´e de recevoir aucun pre´sent de ce dieu perfide e. Cependant, quelques nombreux que soient les vestiges de L’ancienne immoralite´ des Dieux, Les maximes e´nonce´es par le poe¨te, prouvent qu’ils s’e´taient ame´liore´s. Jupiter, dit-il, comble de biens Les Rois et les peuples Justes f. il chatie le fourbe et dompte l’orgueilleux g. il a donne´ a` l’homme l’e´quite´ pour supreˆme loi h. Cette de´esse est assise aupre`s de lui i. Trente mille dieux parcourent incessamment La terre, observateurs rigides des vices et des vertus k. Les furies sortent du fond des enfers, pour punir Le parjure l. L’adulte`re, L’inceste, La spoliation des orphelins, L’ingratitude envers les parents subissent des peines se´ve`res m. Les crimes sont punis jusque sur la poste´rite´ des coupables n, car on sent de bonne heure que la a b c d e f g h i k

l m n

Theogon. 563–568. Œuvres & jours. 104 Œuvres & jours. 16. ib. 81–82. ib. 85–88. ib. 224–235. ib. 7. ib. 274–277. ib. 254–260. ib. 250–253. Ces dieux sont des de´mons ou eˆtres interme´diaires. On peut voir ce que nous avons dit dans le livre 10 de la de´monologie Œuvres & jours, ib. 800–802. ib. 236–245. 325–332. ib. 282. E´tablissement du texte : Manuscrit : BCU, Co 3294/1, fo 〈7 ?〉 11 (fo 14).

2 11 ] pagination corrige´e 〈7〉 11 leur perversite´ ] 〈les dieux〉 leur perversite´ corr. dans la marge 3–4 Il ote ... e´chappent. ] ajoute´ dans la marge 28 de´monologie. ] de´monologie 〈d’he´siode〉 29 Œuvres & jours ] ajoute´ dans la marge

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Fragment sur les perversite´s des dieux

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patience de la Justice divine place l’exe´cution de ses arreˆts dans un autre monde, ou dans l’avenir de celui-ci. Les dieux enfin re´compensent le Travail, condamnent la paresse a, enle`vent les richesses mal acquises b.

a b

ibid. 301–308. ib. 319–324.

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De la Religion, IV – Textes comple´mentaires

[Fragment sur les fables]

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[...] alors aussi, l’on voit paraıˆtre un nouvel ordre de fables qui appartiennent en propre au ge´nie des Grecs a. Prome´the´e est une alle´gorie d’espe`ce nouvelle, comme´moration des de´couvertes des arts et des me´tiers, et par conse´quent des premiers pas de la civilisation. Pandore est une alle´gorie philosophique expressive des maux qui re´sultent de l’introduction de la vie sociale. enfin l’on voit apparaıˆtre des traces de l’ancien fe´tichisme des pe´lages, dans le re´cit, par exemple de la ruse de Prome´the´e qui trompe Jupiter dans le partage des victimes, et dans la cole`re qu’e´prouve ce dieu de se voir ainsi trompe´. arrive´ ainsi a` la partie populaire de la mythologie grecque, he´siode de´crit les ge´ne´alogies des divinite´s qu’on peut nommer actives, et le me´lange des dieux avec les mortels b. Ses alle´gories deviennent plus claires, plus agre´ables, plus e´le´gantes ; les muses sont filles de la me´moire L’harmonie doit sa naissance aux embrassemens de mars et de Ve´nus c. a

b

c

Jupiter remplace Uranus. dans Ve´nus, divinite´ individuelle et se´duisante, est personnifie´e la force ge´ne´ratrice e´parse auparavant entre le ciel, la nuit, la discorde, la mer, personnages myste´rieux, sans action directe sur la race humaine. Novus fabularum ordo, et, nisi fallor, a cœteris diversus hellenicæ stirpi proprius versatur, circa genus Japeti (Heyn. In hes.) Des e´pithe`tes q[u]’he´siode donne aux dieux ne sont pas de simples exclamations d’e´loges, comme dans les hymnes orphiques, mais des e´pithe`tes caracte´ristiques et individuelles. (Wag. 977) on a conclu de la` que le passage s’e´toit fait des ide´es orphiques, a` travers la mythologie d’he´siode jusqu’a` L’anthropomorphisme par home`re mais au contraire, c’est de L’anthropomorphisme d’home`re, a` travers he´siode aux ide´es sacerdotales orphiques. mais cette partie meˆme de la The´ogonie se ressent des emprunts sacerdotaux. Nous avons montre´ ailleurs qu’he´siode introduit dans la religion grecque la demonologie orientale. E´tablissement du texte : Manuscrit : BCU, Co 3294/1, fo 〈10〉 11 (fo 8).

8 de la ruse ] a` la hauteur de ces mots la 2 11 ] la pagination du f o re´crite sur 10 pagination de la fiche 27 11 ainsi ] ajoute´ dans l’interl. 15 Ve´nus. ] Ve´nus. suit le de´but d’un paragraphe biffe´ 〈Cet expose´ des dis parties de la The´ogonie prouve l’erreur de ceux qui veulent y voir un syste`me cohe´rent. cette compilation est un assemblage de notions diverses, sans unite´ de doctrine ou de but. de diffe´rens pays La The´ogonie renferme donc des opinions de diffe´rens pays et un mot illis.〉 16 Jupiter ] a` la hauteur de ce mot la pagination de la fiche 〈25bis〉 25–26 Nous ... ailleurs qu’ ] ajoute´ dans la marge 26 orientale. ] orientale. 〈Plutarque le loue d’avoir distingue´ avec plus de pre´cision qu’aucun autre poe¨te, les diverses espe`ces de natures intelligentes, et d’en avoir forme´ quatre classes, les dieux, les de´mons, Les he´ros et Les hommes (Creutz. III. 14)〉

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Fragments sur les contradictions d’He´siode

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[Fragments sur les contradictions d’He´siode]

16vo

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[He´siode] appelle deux fois le Styx une divinite´ incorruptible et quelques vers plus loin, il le nomme un monstre horrible et abominable. Toutes ces contradictions, sans doute, ne sont pas particulieres a` l’e´poque. il y en a qui tiennent au caracte`re de l’auteur. he´siode est un compilateur sans discernement, ambitieux uniquement d’agre´mens poe¨tiques et confondant tous les syste`mes pour rassembler les divinite´s qu’il chante et Les fables qu’il raconte Les notions Les plus disparates. de la proviennent Les disproportions qui nous frappent a` la lecture de ses poe¨sies. Sa manie`re est tantoˆt celle d’un observateur aride, tantoˆt celle d’un Rhe´teur diffus. C’est qu’il ne subordonnait point l’e´tendue des de´veloppemens a` l’ensemble de l’ouvrage ; il ne prenait pour re`gle que la quantite´ de mate´riaux qu’il avait pu recueillir. Ce n’est pas seulement dans ces ide´es ge´ne´rales, qu’he´siode re´unit des notions contradictoires. on trouve le meˆme amalgame dans ses descriptions de divinite´s particulie`res. ici, Jupiter, sujet a` l’erreur, est le Jouet de Prome´the´e a. ailleurs il est appele´ deux fois celui qui connait les de´crets e´ternels b. et le poeˆte se consume en subtilite´s The´ologiques, pour concilier L’omniscience du Dieu, avec le succe`s des artifices de l’homme. Le premier, dit-il, connaissait la ruse, et ne se laissait tromper que parcequ’il voulait du mal aux mortels c. L’anthropomorphisme a introduit dans toutes les mythologies des fictions pareilles.

a b c

Theogon. 535. ib. 550 & 561. ib. 551–552.

E´tablissement du texte : Manuscrit : BCU, Co 3294/2, fos 16vo et 18 (fos 21vo et 24).

2 appelle ] a` la hauteur de ce mot, dans l’angle gauche, la pagination de la fiche 37 incorruptible ] la note pre´vue n’est pas conserve´e ; voir ci-dessus, p. 398, n. a 3 abominable ] la note pre´vue n’est pas conserve´e ; voir ci-dessus, p. 398, n. b 5 il y en a ] il y 〈a〉 en a 8 disparates ] la note pre´vue n’est pas conserve´e ; nous n’avons pu faire une proposition 12 mate´riaux ] mate´riaux 〈e´pars〉 14 18 ] le chiffre 8 re´crit sur 〈0〉 15 notions ] 〈ide´es〉 notions corr. dans l’interl.

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De la Religion, IV – Textes comple´mentaires

Dans le bouclier D’hercule, les parques hideuses, Terribles, ne sont que des ge´nies malfaisantes et sanguinaires a. elles Trainent Les morts a` travers la meˆle´e, elles se disputent Les blesse´s ; elles sacrifient ceux meˆmes qui n’ont rec¸u aucune blessure. dans la The´ogonie elles sont les filles de la Justice b. elles ne poursuivent que les coupables, mais sont inexorables dans leur se´ve´rite´ contre les crimes des dieux et des hommes c. cette expression, les crimes des dieux, dans le vers meˆme ou` le chatiment en est confie´ a` des divinite´s vengeresses, nous semble de´noter e´videmment le me´lange de deux ide´es d’e´poques diverses. Nous pourrions prolonger a` l’infini cette e´nume´ration. He´siode appelle deux fois le Styx une divinite´ incorruptible d, et quelques vers plus loin, il le nomme un monstre horrible et abominable e. On voit donc ici se re´aliser ce que nous avons dit des caracte`res qui distinguent le passage d’une e´poque a` l’autre. Les opinions s’entre-choquent, les e´crivains paraissent coupables des inconse´quences et des contradictions qui sont dans les choses. ces inconse´quences vont disparaıˆtre, Les contradictions se concilier, a` mesure que le pre´sent triomphera du passe´.

a b c d e

Boucl. d’Hercule. 156–162. The´ogon. 904. ib. 218–219. ib. 223. Œuvres & Jours 198.

7 dans ] la lettre d re´crite sur et 8 nous ] 〈ne〉 nous 9 diverses. ] diverses. 〈Ne´me´sis, dans la The´ogonie, note : Theog. 389 & 397. retour au texte dont nous avons parle´ ci dessus, les six derniers mots ajoute´s dans la marge est la fille de la nuit, et le fle´au des mortels. elle verse sur eux les maux indistinctement et se complait au spectacle de leur mise`re. ailleurs c’est une divinite´ qui habite au haut des cieux avec la pudeur. note : Ibid. 775–776.〉 10 e´nume´ration. ] e´nume´ration. 〈he´siode〉 le nom biffe´ est le dernier de la deuxie`me fiche utilise´e pour fabriquer ce folio ; la fiche suivante commence avec la pagination du folio de´coupe´ 〈16〉 puis on lit he´siode

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Fragment de la fin du chapitre sur He´siode

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[Fragment de la fin du chapitre sur He´siode]

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he´siode appelle deux fois le Styx une divinite´ incoruptible a et quelques vers plus loin, il le nomme un monstre horrible et abominable b. On voit donc ici se re´aliser ce que nous avons dit des caracte`res qui distinguent Le passage d’une e´poque a` l’autre. Les opinions s’entrechoquent & Les ecrivains paraissent coupables des inconse´quences et des contradictions qui sont dans les choses. ces inconse´quences vont disparaıˆtre ; ces contradictions se concilier, a` mesure que le pre´sent Triomphera du passe´.

a b

The´og. 389 et 397. ib. 775. 776.

E´tablissement du texte : Manuscrit : BCU, Co 3294/2, fo 16 (fo 21ro).

6 & Les e´crivains ] & ajoute´ dans l’espacement les 〈illis.〉 e´crivains

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[Fragments des chapitres sur Pindare]

11. Ébauche du texte qu’on lit ci-dessus p. 404. Constant utilise pour ce travail une feuille de grand format faisant partie d’un dossier existant, le fo 20 cidvt 23. La première ligne est la fin d’une phrase qui clôt un passage. La suite est esquissée et fréquemment corrigée. On distingue nettement aux traits verticaux les passages utilisés pour une mise au net des mots ou syntagmes éliminés, biffés ou barrés de traits obliques. Les ajouts sont dans les marges ou l’espace resté blanc. Une note prévue n’est pas rédigée. BCU, Co 3294/6, fo 94.

[E´bauche de la fin du chapitre

20

IV

sur Pindare]

[Aussi Pythagore disait-il avoir vu Home`re dans les enfers, tourmente´ comme He´siode,] pour avoir calomnie´ les immortels1. Enfin, dans les deux endroits ou il parle de Ne´me´sis, il choisit entre les deux caracte`res qu’He´siode donne a` cette De´esse le plus instructif & le plus moral (v. ci dessus p. ) Ne´me´sis punit l’abus de la puissance il invite son heros a` ne pas l’irriter, Ne´me´sis juge les actions de hommes & les Hyperboreens sont heureux de ne jamais provoquer sa cole`re. nous remarquerons ici en peu de mots combien clairement la progression de la religion Grecque se fait apercevoir dans cette conception de Nemesis Home`re ne la personnifie pas. c’est pour ce poe`te une exclamation, une espe`ce d’invocation qui detourne les mauvaises pre´sages & le scandale. dans He´siode on a vu qu elle parait a` double, fille de la nuit fle´au des mortels ou habitante des cieux. Pindare repousse ceux de ses attributs qui en font une force malfaisante( ) C’est comme juste que tout a l’heure les Tragiques l’invoqueront a & plut. encore cette justice ne se bornera point a des chatimens mate´riels. elle deviendra la compagne de la modestie, de la mode´ration, de la re´serve. & par une circonstance heureuse, a

Electra 793 E´tablissement du texte : Manuscrit : BCU, Co 3294/6, fo 20 cidvt 23 (fo 94).

3 pour ... immortels. ] a` la hauteur de cette ligne, dans l’angle, une note ou la pagination 20 cidt 23 4–6 deux ... moral ] ajoute´ dans la marge pour remplacer 〈deux traditions d’He´siode〉 6 (v. ci dessus p. ) ] apre`s le renvoi entre parenthe`ses 〈le plus〉 7 Ne´me´sis punit ] deux corr. 〈Il ne parle que〉 〈C’est la〉 Ne´me´sis 〈qui〉 punit de la puissance ] d〈u〉e 〈pouvoir〉 la puissance corr. dans l’interl. 〈& qu’〉 8 Ne´me´sis juge ... & les ] 〈La〉 Ne´me´sis 〈qui〉 juge ... & 〈que〉 corr. en 〈dont〉 les 11 conception ] 〈notion〉 conception 11 Home`re ] 〈dans〉 Home`re 15 malfaisante ] malfaisante BC pre´voit peut-eˆtre une note, mais ne l’e´crit pas 〈plutard, elle les〉 15–16 tout a l’heure ] ajoute´ dans l’interl. 17 plut. encore ] ajoute´ dans l’interl. 18 re´serve. ] BC pre´voyait de continuer ainsi 〈Mesome`des, appel pre´vu pour un note la decrit de la maniere suivante Nemesis − 347〉 18-p. 630.8 & par ... esperances. ] passage ajoute´ dans la marge et au bas du f o a` coˆte´ du texte, dans l’espace libre, une note de travail 520 Avant 76 19 Electra ] la note deux fois dans la marge 1

Nous comple´tons la premie`re phrase en copiant le texte imprime´. Voir ci-dessus, p. 404. La note pre´vue apre`s le mot «malfaisante» (ligne 15) se lit ci-dessus, p. 405, n. b.

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630

De la Religion, IV – Textes comple´mentaires

sa statue meˆme rappelle aux Grecs combien sont funestes les e´garemens d’un orgueil sans borne & l’enyvrement du pouvoir. le bloc de marbre qui sert a phidias est Celui que les Perses, se croiant assure´s de la victoire destinoient a` immortaliser par un monument magnifique le succe`s de leurs armes & l’asservissement de la Gre`ce (Paus. Att. 33) Marathon les vit fuir, pe´rir dans les marais ou rougir de leur sang les ondes ou ils se precipitoient ds leur epouvte & le marbre reconquis sur eux devient la De´esse qui pre´side a` l’e´quite´ dans les entreprises & a la mode´stie dans les esperances. Cette ide´e se transmet, s’e´purant de sie`cle en Sie´cle & Mesomedes 600 ans apres Pindare la celebre encore dans ses vers. oh ne´me´sis, dit-il

3 victoire ] victoire 〈voient un mot illis.〉 7 la De´esse ] la 〈Statue〉 De´esse 8 l’e´quite´ ] 〈la justice〉 l’e´quite´ corr. dans l’interl. 9–10 Cette ... dit-il ] ajoute´ dans la marge 9 Mesomedes ] Mesomedes 〈contemporain d’adrien &〉

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Fin du chapitre sur Pindare

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[Fin du chapitre sur Pindare]

18

Terminons ce chap. par une observation sur le changement progressif de la situation des poe¨tes, observation que la lecture d’he´siode nous a de´ja` sugge´re´e et que celle de Pindare corrobore. Les poeˆtes du tems d’home`re, comme nous l’avons remarque´ plus haut, ne se plaignent point du sort. errans, mais accueillis dans tous les palais, assis aupre`s des princes, ils parlent rarement de leur destine´e parce qu’ils n’ont qu’a` s’en louer. du tems d’He´siode, ils n’ont plus cette existence ide´ale qui les mettoit au dessus des relations communes & pe´nibles de la vie. La chute des Rois leur enle`ve des protecteurs : la naissance des re´publiques est accompagne´e d’orages. Les poe`tes parlent de leur sort parce qu’ils ont a` se plaindre. du tems de Pindare, ils s’interdisent meˆme la plainte. Ce n’est pas qu’ils soient plus heureux, c’est seulement qu’ils sont plus timides. Pindare est occupe´ sans cesse a` demander graˆce. Sous l’effroi il s’e´puise en efforts perpe´tuels pour de´sarmer la malveillance. le talent est devenu de´pendant et subalterne, et par la` meˆme avide et flatteur. Pindare est aux pieds du Tyran de Syracuse, redoutant sa cole`re, mendiant ses bienfaits et lui prodiguant, en e´change, des louanges que de´ment L’histoire a. a

le Roi de Syracuse que Pindare loue, est hie´ron 1er que tous les historiens et notamment Diodore de Sicile repre´sentent comme un mauvais prince.

E´tablissement du texte : Manuscrit : BCU, Co 3294/2, fo 18 (fo 23). 2 Terminons ce chap. ] cinq lignes biffe´es 〈grossiers de puissance et de force L’autre empreint d’ide´es plus nobles et plus morales ; pindare enfin nous offre cette dernie`re espe`ce de polythe´isme dans toute son e´le´gance et toute sa purete´ pour entourer cette notion d’une e´vidence nouvelle, Lorsque nous comparerons L’enfer de Pindare avec celui d’home`re et d’he´siode.〉 Terminons 〈ce chapitre〉 〈ce livre〉 ce chap. la corr. retenue est place´e dans l’interl. devant les mots 〈ce livre〉 4–5 Les poeˆtes ... sort. ] BC remanie son texte et biffe deux lignes ; les corrections qu’il re´dige exigent la premie`re phrase biffe´e ; nous la re´tablissons 〈Les poe`tes ... sort.〉 〈au tems d’He´siode ils un mot illis. plaignent.〉 6–11 errans ... se plaindre. ] passage ajoute´ dans la marge 10 est ] 〈e´tait〉 est ce mot dans l’interl. 11 de leur sort ] 〈plus souvent d’eux-meˆmes〉 de leur sort corr. ajoute´e dans un espace reste´ libre 12 s’interdisent ... plainte ] 〈n’osent pas des (?) plaintes〉 s’interdisent ... plainte corr. dans l’interl. 18 louanges ] 〈e´loges〉 louanges corr. en dessous du mot biffe´

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De la Religion, IV – Textes comple´mentaires

Terminons ce chap − corrobore des poe`tes du tems d’Homere − errans – a` s’en plaindre. Du tems de Pindare − timides L’auteur e´le´gant & superficiel d’Anacharsis ns dis sup. parce q la prof. n est pas ds l’erud. qui comp. mais dans la perspicacite qui apprecie¯ l’aut. d’An. nourri dans la lettre des chefs d’œuvres de la Gre`ce, mais ne penetrant jamais leur esprit nous vante il est vrai les longues prospe´rite´s de Pindare, Sa Statue qui porte un diadeˆme, les honneurs qui lui sont de´cerne´s a` Delphes les oracles rendus en sa faveur, les banquets sacre´s ou il assiste mais il suffit de lire le poe`te pour discerner l’erreur du Pane´gyriste Pindare − la malveillance Il n’y reussit pas. frappe´ d’une amende par ses concitoyens, vaincu 5 fois par Corinne, on le voit aux pieds − l’histoire. le regret sincere ou aff. des jours ou l interet ne souilloit pas le lgge de la poe´sie (Isthm. II. 15) l’eloge de la me´diocr. (P. XI. 76) lieu commun de tous ceux qui n ont pu aq. le pvr ni la richesse n’otent point aux chs de Pind. le car. de depdce qui nous imptune & ns afflige au milieu des beaute´s q nous tr. ¯ & nous ge´miss de vr le talent se resigner a occuper un rg subte & dev. par la meˆme av. & fl1

1–18 Terminons ... & fl. ] l’e´bauche du texte se lit sur le bas du f o ; notation ste´nographie´e 4–5 ns dis ... d’An. ] ajoute´ dans la marge ; re´pe´tition des deux derniers mots 7 esprit nous vante ] esprit ce mot ajoute´ dans la marge 〈un mot illis., & non moins e´tranger a leur esprit que les e´rudits〉 nous vante lecture hypothe´tique 8 de´cerne´s ] 〈prodigue´s〉 de´cerne´s 13 le regret ] deux lignes et demi biffe´es, illis. 〈les profns〉 le regret 16 depdce qui nous ] depdce 〈& de illis.〉 qui suivent cinq ou six mots biffe´s, illis. nous

1

Il faut lire : «Le regret since`re ou affecte´ des jours ou l’inte´reˆt ne souilloit pas le langage de la poe´sie (Istm. II. 15) l’e´loge de la me´diocrite´ (P. XI. 76) lieu commun de tous ceux qui n’ont pu acque´rir le pouvoir ni la richesse n’oˆtent point aux chants de Pindare le caracte`re de de´pendance qui nous importune & nous afflige au milieu des beaute´s que nous trouvons & nous ge´missons de voir le talent se re´signer a` occuper un rang subalterne & devenir par la` meˆme avide & flatteur.»

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E´bauche d’une page sur Pindare

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[E´bauche d’une page sur Pindare]

Ch. 4. de l’Enfer de Pindare compare´ a celui d’Homere & d’He´siode

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La comparaison de l’enfer de Pindare avec celui d’Home`re & d’He´siode est singulie`rement propre a` nous faire bien concevoir les modifications qu’apporte aux fables l’introduction de la morale dans la religion1. Mais cette comparaison demande pour eˆtre utilement faite une attention suivie & un œuil exerce´. Les diffe´rences e´chapperont facilement − bienheureuses. Voyons si tel est en effet l’Enfer de Pindare. Dans une des isles fortune´es charge´ de chaines. 1 − 4 Cependant on doit remarquer que Pindare est subjugue´ par la meˆme loi qui pre´side toujours aux descriptions du monde a venir pour peindre les occupations des justes − sous les dehors meˆme du bonheur.

Ch. 5. de la meˆme progression chez les historiens Phocyllide. 547 Ans avt J.-C. 58e Olympiade The´ognis Pindare 499 − − J.-C. 65 ol. Hesiode 944

E´tablissement du texte : Manuscrit : BCU, Co 3294/2, fo 19 (fo 26).

4 de Pindare ] 〈d’Homere〉 de Pindare dates 944 499 445

1

20 944 ] un peu plus bas un calcul pour fixer les

E´bauche d’un passage qu’on peut lire de´veloppe´ ci-dessus, p. 407.

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[Fragments d’un chapitre sur l’enfer de Virgile]

Chap. 6 De L’enfer de Virgile1.

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L’enfer de Virgile a beaucoup de rapports avec celui de Pindare seulement tout ce qui tient a` la morale y est caracte´rise´ avec une pre´cision plus soigneuse encore. de`s L’entre´e du monde souterrain, Deux routes se pre´sentent, dont l’une conduit au Tartare, l’autre a` l’E´lyse´e a. dans le Tartare, Les dieux continuent a` se venger de leurs ennemis personnels, des Titans, de Salmone´e, D’ixion, de Titye b. mais leur se´ve´rite´ s’e´tend aussi sur les crimes que Les humains commettent entr’eux. Les divers genres de ces crimes sont distingue´s et nuance´s avec une exactitude scrupuleuse et L’e´nume´ration en est de´taille´e c. L’e´quite´ est recommande´e en meˆme tems, et non moins a

b c

hac iter Elysium nobis ; at læva malorum exercet pœnas et ad impia Tartara tendit. Æn. VI. 542. 543. ib. 580–6012. ib. 608–6253. omnis scelerum comprendere formas omnia pœnarum percurrere nomina possim.

E´tablissement du texte : Manuscrit : BCU, Co 3294/2, fos 22 et 23 (fos 29 et 30).

13 tendit ] probablement une faute de copie ; il faut lire mittit Virgile utilise le verbe «tendit» quelques vers plus haut

1

2

3

La pre´sence d’un chapitre sur l’Enfer de Virgile peut e´tonner dans le livre consacre´ exclusivement au polythe´isme grec. Mais le projet de la pre´face pour le tome IV parle encore des deux polythe´ismes qui font unite´. En re´digeant le livre XII, BC a corrige´ le plan dont il partait en e´cartant le chapitre sur Virgile. Les personnages cite´s par BC jouent tous un roˆle dans la mythologie grecque. Le premier exemple cite la Titanomachie, la lutte des Kronides dirige´s par Zeus contre les Titans, dont le chef e´tait Kronos, le plus jeune des Titans et pe`re de Zeus. Salmone´e, fils d’Aiolos, me`ne une lutte rebelle contre Zeus en usurpant son art de lancer les foudres. Ixion, le meurtrier de son beau-pe`re, ne´anmoins admis a` la table des dieux, essaie de violer Junon ; il est puni par Zeus qui le pousse dans le Tartare. Le ge´ant Titye, fils de Zeus et d’E´lare, est lui puni dans le Tartare pour avoir voulu violer Le´to. La citation est tronque´e. BC n’a pas tenu compte de la ne´gation au de´but du passage : «non, mihi si linguæ centum sint oraque centum, ferrea vox, omnis scelerum ,,, possim».

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De la Religion, IV – Textes comple´mentaires

expresse´ment que le respect envers Les dieux a. Si leur justice est ajourne´e jusqu’a` L’autre vie, c’est que c’est une triste ne´cessite´ de la condition humaine b. Le Tribunal ou` Minos Sie`ge avec Rhadamanthe est imite´ des formes Judiciaires en usage a` Rome. il y a un preˆteur, un questeur et des Juges c[.] plusieurs des ide´es de Virgile lui avaient e´te´ manifestement Sugge´re´es par l’e´tat de sa patrie. il fait allusion, tantoˆt aux esclaves, et aux affranchis qui avaient livre´ Leurs maıˆtres, durant Les proscriptions d, tantot aux instrumens mercenaires qui avoient vendu a` L’usurpateur la liberte´ Romaine e. cette hardiesse peut nous e´tonner, dans un poe¨te courtisan d’Auguste. mais jamais le Talent ne re´ussit a` Trahir comple`tement sa nature, et si la Tyrannie veut eˆtre Loue´e, il faut qu’elle pardonne aux regrets qui e´chappent et consolent des louanges. plaignons Virgile et sachons lui gre´ d’avoir ose´ rendre un hommage e´quivoque a` Brutus L’ancien f, un hommage e´clatant a` Caton d’Utique g, et d’avoir garde´ le silence, ce qui etait presque du courage, sur Le meurtrier de Ce´sar. Dans son Elyse´e, le poe¨te de mantoue a voulu re´unir l’e´clat le plus pur, le calme le plus important, aux couleurs Les plus brillantes h. cependant, pour peindre les occupations des justes, il a e´te´ force´ a b

c

d e

f g

h

discite justitiam moniti, et non Temnere divos. ib1. quæ quis apud superos, furto Lætatus inani distulit in seram commissa piacula mortem. Æneid. VI – 568–569. castigat, auditque dolos, subigitque fateri. v. Heyn. excurs XI ad Lib. VI2. æneid. ib. 567[.] nec veriti dominorum fallere dextras. Æneid. VI. 6133. vendidit hic auro patriam dominumque potentem imposuit ib. 621. utcumque ferent ea facta minores ib. 8234[.] iis dantem jura catonem5. Les Romains malgre´ Les progre`s de leur polythe´isme, avaient conserve´ L’usage de mettre dans la bouche des morts une pie`ce de monnaie pour qu’ils eussent de quoi payer le passage du styx. Largior hic Campos æther et Lumine vertit purpureo6.

20 quis ] la source porte quia faute que nous corrigeons illis. 1 2

3

4 5 6

23 567 ] 567 suit un mot abre´ge´

Livre VI, v. 620. BC cite l’e´dition de l’E´ne´ide de Heyne (Publius Virgilius Maro varietate lectionibus et perpetua adnotatione illustratus a Christ. Gottl. Heyne, t. II, Lipsiae : Sumptibus Librariae Hahnianae, 1803), et dans cette e´dition l’«Excursus XI» au livre VI. La source donne un autre ordre des notes (note h, puis les notes a – c de la p. suivante ; ensuite les notes d – g de la p. actuelle). C’est manifestement une erreur (suite au mauvais montage de deux fiches), que nous corrigeons en tenant compte du contenu des citations. Livre VI, v. 823. Il faut lire : «his dantem iura Catonis» (Æne´id. livre VIII, v. 670). Livre VI, vv. 640–641.

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De L’enfer de Virgile

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d’en revenir aux plaisirs de cette vie parmi les ombres, Les unes Luttent a, Les autres dansent b Les guerriers ont a` coˆte´ d’eux Leurs chars, leurs armes et leurs chevaux c. Les poe¨tes chantent, le front [...]

a b c

1

ib. 642–643. ib. 644. Idæumque etiam Currus etiam arma Tenentem. ib 485 et plus loin, 648–653 quæ gratiam currum, armorumque fuit vivis, quæ cura nitentis pascere equos, eadem sequitur tellure repostos. 653–6551.

Livre VI, 653–655.

5

12. Fragment d’un folio de grand format qui portait un texte non identifié sur la religion et dont on voit, en tête-bêche, la fin d’une phrase. Ce manuscrit était rédigé en disposant le texte en colonnes. Constant a découpé les folios pour en faire des fiches. Celle-ci porte un passage sur les tragiques grecs. Les corrections se trouvent dans les interlignes ou au bas de la fiche dans l’espace resté disponible. La première ligne indique l’endroit où ce texte doit être placé. BCU, Co 4725, fo 35.

[Fragments sur les tragiques grecs]

13. Suite du même texte. Les corrections, toutes dans les interlignes et dans les petites marges, suggèrent de voir dans ce texte une première ébauche. BCU, Co 4725, fo 93.

[E´bauche d’un passage du livre

fo 35ro

fo 93ro

XII,

chapitre

VII]

Le Genie des Grecs ne tarda point a` repousser cet amalgame informe1. La mythologie continua de faire le fond des drames : mais ce qu’il y avoit de Sacerdotal, les monstruosite´s des Dieux, les orgies, les luttes cosmogoniques s effacerent toujours davantage[.] on les trouve encore dans un des ouvrages d’Eschyle, on ne les rencontre plus dans Sophocle[.] Les myste`res dont nous parlerons au livre suivant sont pr ces 2 poe`tes comme pr Euripide qui est au reste dans une cate´gorie toute diffe´rente l’occasion d’allusions nombreuses. Mais la partie plus spe´cialement Sacerdotale des myste`res y entre pour beaucoup moins que leur partie morale & celle ci meˆme y est pre´sente´e sous un tout autre jour. les Tragiques l’epurent, sans s’en douter, en prenant ses maximes & sa the´orie, & en la separant des pratiques & des devoirs factices qui dans les myste`res la de´naturoint & la souilloient( ). les grandes bases de la morale religieuse, la soumission aux Dieux, la ne´cessite´ d’une vie sans tache, la doctrine du de´vt

E´tablissement du texte : Manuscrit : Co 4725, fos 35ro et 93ro.

2 Le Genie ] a` la ligne pre´ce´dente BC ajoute ans apre`s Thespis amalgame informe ] 〈alliage〉 amalgame informe ces deux derniers mots dans l’interl. 5 s effacerent ] 〈disparurent〉 s effacerent corr. dans l’interl. 7–9 sont pr ... nombreuses. ] 〈fournissent a`〉 sont pr ces deux derniers mots dans l’interl. ces 2 poe`tes comme 〈a`〉 pr corr. dans l’interl. 〈des〉 l’occasion corr. dans l’interl. d’allusions le mot d’ ajoute´ dans la marge 〈fre´quentes〉 nombreuses. corr. dans l’interl. 8 qui est ... diffe´rente ] syntagme ajoute´ au bas de la page et appele´ par une croix apre`s le mot Euripide 10 morale ] au bas du f o teˆte beˆche la fin d’une phrase 〈illis.〉 par les religions triomphantes 11 les Tragiques ] 〈On verra que〉 les Tragiques 14 souilloient( ) ] 〈corrompoient〉 souilloient( ) corr. dans l’interl. ; BC pre´voyait d’ajouter une note 16 du de´vt & ] syntagme ajoute´ dans la marge

1

E´bauche d’un passage a` inte´grer dans le livre XII. On trouve un texte tre`s proche de cette notice ci-dessus, p. 426. La premie`re ligne (voir la variante a` la ligne 2) indique l’endroit ou` BC voulait ajouter ce raisonnement. La note pre´vue a` accrocher au mot «souilloient» se lit ci-dessus, p. 426, note a. Le dernier mot de la ligne 15 «de´vt» signifie «de´vouement».

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De la Religion, IV – Textes comple´mentaires

& du sacrifice y etoient corrompues par l’alliage de l’esprit sacerdotal. les Tragiques, qui n’etoient point domine´s par cet esprit affranchirent de cet alliage & la morale & la Trage´die. Malheureusement, ces recherches nous conduiroient trop loin.

1 y etoient ] ajoute´ dans l’interl. l’interl. l’alliage

par l’alliage ] 〈par les un mot illis.〉 par ce mot dans

Sur les tragiques grecs

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[Une page du chapitre sur les tragiques grecs]

fo ?

Lorsqu’on passe D’Eschyle a` Sophocle, on croit arriver sous un ciel plus serein, respirer un air plus pur1. on e´prouve envers les dieux une confiance inconnue. Sophocle est le poe¨te le plus religieux de l’antiquite´. en lisant l’œdipe de Colone, et L’antigone, on se sent re´concilie´, pour ainsi dire, avec le polythe´isme ; tant ses formes sont majestueuses, sa morale noble et e´leve´e, ses dogmes utiles et nous dirions presque raisonnables a. Eschyle Bien que son sie`cle l’oblige a` peindre une religion plus douce & des Dieux plus justes que ceux des e´poques pre´ce´dentes, semble regretter en quelque sorte le chaos dont il se voit contraint de sortir. Ces masses informes, ces chocs effroyables, ces convulsions de la nature, ces passions effre´ne´es, transporte´es au monde moral, comme un he´ritage de l’ancien de´sordre du monde physique plaisent a` cette imagination puissante. Elle se sent de force a` les dominer & Titan lui meˆme, Eschyle aime a` se mesurer avec les Titans. cette disposition se manifeste non seulement dans ses conceptions, mais aussi dans son style, apre, saccade´, souvent dur & bizarre. c’est la voix de l’orage qui retentit encore, quand deja l’orage commence a` s’appaiser. a

cette impression doit eˆtre bien forte, puisque Mr. de la Harpe lui meˆme n’a pu s’empeˆcher de la ressentir. E´tablissement du texte : Manuscrit : BCU, Co 3294/3, sans foliotage (fo 41).

3 on ] 〈Je ne sais quel un mot illis. se re´pand dans l’aˆme.〉 on une ] 〈Je ne sais quelle〉 une corr. dans l’interl. 4 inconnue. ] inconnue 〈Jusqu’a`lors〉. 7 nous dirions ] 〈Je dirais〉 nous dirions corr. dans l’interl. 8 sie`cle ] 〈deux mots illis.〉 sie`cle 12–13 de l’ancien de´sordre ... physique ] de 〈l’univers〉 l’ancien de´sordre du monde corr. dans l’interl. et dans la marge physique 〈encore en de´sordre〉 16 cette ] deux tentatives avorte´es qui se suivent pour commencer le paragraphe 〈Plus calme, plus menace´, plus soumis aux illis. de l’olympe qu’il de´gage avec soin de leurs imperfectio〉 〈Non seulement ses conceptions, mais son style se ressentent de〉 cette 17 saccade´ ] saccade´ 〈entrecoupe´〉 18 s’appaiser. ] 〈se calmer〉 s’appaiser 19–20 cette ... ressentir. ] le texte de la note que BC pre´voyait se lit au f o 44 puisque la fiche 102 a e´te´ de´coupe´e ; la partie note a servi, avec le reste du texte de la fiche 102, a` fabriquer le f o 44 1

Le folio 41 est fabrique´ a` partir d’une partie de l’ancienne fiche 102 d’un manuscrit sur fiches, et de morceaux autographes provenant de manuscrits non identifie´s ajoute´s pour entamer une re´flexion sur Sophocle.

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De la Religion, IV – Textes comple´mentaires

Le meme carate`re distingue les pompes dont il accompagne ses repre´sentations the´atrales. ces pompes colossales portent l’empreinte d un univers gigantesque : on sait quel effet terrible produisit sur les spectateurs l’apparition des furies. La nature au contraire reprend dans Sophocle son calme & son harmonie. partout re`gnent l’ordre & la mesure. Si le poete est force´ de rappeler des traditions facheuses pour les dieux, il s’empresse soit de les adoucir soit d’y ajouter un des mots qui en sont l’excuse ou l’apologie. on voit encore Hercule tuer son hote, mais Jupiter s’en indigne, tandis qu’il n’en e´prouve aucune indignation dans Home`re.

1–2 repre´sentations ] repre´sentations 〈illis.〉 2 colossales ] 〈gigantesques〉 colossales 5 son calme ] 〈son ordre〉 lecture hypothe´tique du mot biffe´ son calme 8 en ] ajoute´ dans l’interl. 9 hote ] BC pensait ajouter une note qui n’a pas e´te´ conserve´e

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Sur les tragiques grecs

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[Un passage du chapitre sur les tragiques grecs1]

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[...] encore, Lors-meˆme qu’Eschyle semble adopter des opinions honorables aux dieux qu’il fait agir, ou dont il raconte les actions, il parle sans scrupule des crimes qu’ils ont commis ante´rieurement a. Jupiter, dit-il, prote`ge la dignite´ paternelle, Jupiter qui a lui meˆme attente´ contre son pe`re b quand il repre´sente les furies, comme vengeresses des forfaits, il les peint en meˆme tems comme avides de sang, fe´roces et en horreur aux dieux et aux hommes c, qui ne reconnait ici la mythologie confuse et double D’he´siode. il est vrai, que pour se faire une ide´e Juste des opinions d’Eschyle, il ne faut pas conside´rer isole´ment chacune de ses pie`ces. plusieurs se tiennent, et leur ensemble est ne´cessaire pour former un tout complet et re´gulier. Agamemnon, par exemple, Les Coe´phores et les Eume´nides, composaient ce que les grecs appelaient un Cycle ou une Trilogie, destine´e a` montrer d’abord, le crime Triomphant, puis ce crime puni par un autre crime, enfin a b c

les coe¨phores, Agamemnon, les suppliantes et les Eume´nides. Eume´n. 643–644. Eume´n. E´tablissement du texte : Manuscrit : BCU, Co 3294/3, fos 37–*39 (fos 42–44).

9 il est ] 〈Une circonstance rend la ressemblance D’Eschyle avec ce poe`te encore plus frappante. de sept trage´dies qui nous restent de ce premier des tragiques grecs, il y en a trois, ou` la religion paraıˆt sous les meˆmes traits que dans home`re, et quatre ou` les formes sont beaucoup plus morales et plus douces.〉 il est 10–11 plusieurs ... ensemble ] 〈il y a〉 plusieurs 〈qui〉 se tiennent, et 〈dont l’〉 leur ensemble 1

Les folios 42–44 du grand manuscrit du livre XII, fabrique´s a` partir d’un manuscrit sur fiches. BC utilise les fiches nume´rote´es de 95 a` 103 et trois pages du copiste aux longues barres de t. Ces folios sont comple´te´s par de nombreux ajouts autographes et retravaille´s en supprimant des passages plus ou moins longs. Les folios sont marque´s par des barres verticales, ce qui indique qu’ils ont servi pour une mise au net que nous ne posse´dons pas. Les biffures du texte se reconnaissent aux barres horizontales ainsi qu’aux croix qui effacent des parties. Ce travail de re´daction se distingue par la volonte´ de l’auteur d’arranger les morceaux dont il disposait pour les mettre dans un nouvel ordre, ce qu’il fait par des de´placements multiples, tout en gardant souvent les formulations initiales. Une grande partie des passages se retrouve textuellement dans la version imprime´e. Nous avons pre´fe´re´ ne pas signaler les variantes dans l’apparat critique, mais donner ici l’arrangement du texte pour documenter le travail de re´daction.

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De la Religion, IV – Textes comple´mentaires

L’expiation de ce dernier attentat, et la re´conciliation de la justice ce´leste qui met un terme aux calamite´s et aux forfaits de la famille D’Atre´e. de meˆme, le prome´the´e que nous posse´dons, n’est que la moitie´, ou seulement le tiers de l’histoire de Prome´the´e, mise en action par Eschyle[.] ce poe¨te l’avait repre´sente´ d’abord comme le bienfaiteur de l’espe`ce humaine, ensuite, comme perse´cute´ par les dieux, irrite´s des faveurs qu’il accordait aux mortels, et le Prome´the´e de´livre´ terminait cette fiction inge´nieuse, en nous montrant ce he´ros mis en liberte´ par hercule et faisant avec Jupiter sa paix, et celle des hommes ses prote´ge´s. mais cela meˆme me semble un symbole de la marche du polythe´isme grec. on voit, dans le meˆme poe¨te, les traditions se succe´der, toujours moins grossie`res, en raison des mœurs qui s’adoucissent et des ide´es qui s’e´purent. S’il e´tait vrai, comme le dit Quintilien, que les Athe´niens, trouvant dans Eschyle de grandes beaute´s, mais en meˆme tems, des choses trop re´voltantes, eussent autorise´s les poe`tes poste´rieurs a` corriger les pie`ces d’Eschyle, en les admettant ainsi corrige´es a` concourir comme celles des auteurs vivans a, ce serait une autre explication des maximes diverses qui s y rencontrent, mais elle nous conduirait toujours au meˆme resultat. e´tudiez avec attention le caracte`re de la minerve D’Eschyle, pour la comparer aux minerves pre´ce´dentes, vous pourriez connaıˆtre la progression. la minerve des Eume´nides est le Type du caracte`re ide´al des dieux, tel que le progre`s des lumie`res l’avait fait, comme dans Sophocle celui de The´se´e est le Type du caracte`re ide´al des he´ros. il y a distinctement 3 minerves dans la mythologie Grecque, celle de l’iliade, celle de L’odysse´e, celle D’Eschyle dans Les Eume´nides. Sophocle b, qui n’avait pas, Comme Eschyle, a` s’ouvrir une route, mais a` faire mieux, dans une carrie`re de´ja` fraye´e, adopta plus exactement les ame´liorations du polythe´isme. Si l’on trouve chez lui quelques passages qui rappellent des notions contraires, c’est que, malgre´ le rafinement des mœurs et des ide´es, le besoin de grands effets dramatiques, l’a fait re´trograder a

b

Les Athe´niens disaient a` ce sujet qu’Eschyle avait remporte´ plus de prix apre`s sa mort que pendant sa vie. Voir sur Sophocle Stuzmann, p. 299–3001.

16 en les admettant ] 〈et adoucir (?) ces pie`ces〉 en les admettant corr. dans l’interl. 17 maximes diverses ] 〈contradictions〉 maximes diverses 18 resultat ] 〈but〉 (?) resultat e´tudiez ] 〈si vous〉 e´tudiez 19 pour la comparer ] 〈et que vous la〉 pour la corr. dans l’interl. compare〈z〉r 20 pourriez ] lecture douteuse ; BC avait probablement e´crit vous ne pourriez me´connaıˆtre puis il se corrige en biffant plusieurs mots vous connaıˆtre faute de syntaxe qu’il ne corrige plus ; nous lisons hypothe´tiquement vous pourriez connaıˆtre 26-p. 649.3 Sophocle ... D’iphige´nie ] ce texte, avec les notes, se lit sur la partie infe´rieure de la fiche 99, coupe´e en deux 1

BC cite Johann Josua Stutzmann, d’apre`s ses notes de lecture (Co 3293, no 32).

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Sur les tragiques grecs

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quelquefois vers d’anciennes opinions. Clytemnestre fait encore des sacrifices, pour ce´le´brer le jour ou` elle a tue´ son e´poux a. Latone offense´e de L’orgueil D’Agamemnon, exige le sang D’iphige´nie b, Œdipe est parricide, par la volonte´, et, pour emprunter les propres expressions de L’e´crivain, sous la conduite des dieux c. hyllus se plaint ame`rement de l’injustice de tout l’olympe qui veut ou qui permet qu’hercule d soit perse´cute´. rien au 1er coup d’œuil ne part plus re´voltant que la Sce`ne D’ajax ou Minerve insulte bassement a` son malheur, et ou le he´ros qu’elle prote`ge, donne les signes les plus ignobles d’une lachete´ ridicule. mais avec quel art adm. le poete efface cette impress. pour la remplacer par une autre plus satisfaisante & plus morale, lorsqu’Ulysse, l’ennemi d’Ajax, reclame des Grecs irrite´s la se´pulture du he´ros tombe´ sa propre victime. c’est la mode´ration, l’oubli de l’injure, le respect pour les morts, ce sont tous les sentimens ge´nereux personnifie´s, & sanctionne par la religion sous la figure de Minerve. mais on peut faire sur Sophocle une remarque pre´cise´ment inverse de celle que nous avons faite sur Eschyle[.] dans celui-ci, ce sont les perfectionnemens de la religion, qui semblent e´trangers a` ses ouvrages, et qui en contrarient l’esprit ge´ne´ral. dans Sophocle, ces perfectionnemens sont la baze de ses opinions, et ce qui en de´vie, doit eˆtre attribue´ a` une sorte d’inadvertance dans le poe¨te, et a` des souvenirs de´place´s. si les traditions de´savantageuses aux dieux se perpe´tuent, Sophocle les adoucit, ou bien il ajoute quelques mots, pour justifier les dieux. hercule tue son hoˆte Iphitus e, mais Jupiter en est indigne´. nos lecteurs peuvent se rappeler qu’il n’en e´prouve aucune indignation dans Home`re f. a b c d e f

Electre 277–281. ib. 570. Œdip. Col. 998. Trachin. 1266. Trachin. 38. 274. T. III. p. 398.

3 Œdipe ] dans l’angle gauche la nume´rotation de la fiche 100 〈Le poe¨te propose cette question singulie`re, en partant d’un assassinat ; est-ce un mortel, est-ce un dieux qui a commis ce crime ? BC pre´voit une note Electre 199–200〉 Œdipe 5 dieux ] dieux 〈quand le chœur un mot illis. interroge ajax sur les causes de sa de´mence et lui demande s’il l a me´rite´ en ne´gligeant quelque sacrifice promis par un vœu cette punition d’un sacrifice ne´glige´ rentre (?) dans les ide´es home´riques〉 BC pre´voit une note 〈Ajax 172–177〉 6 perse´cute´. ] perse´cute´. 〈on dirait que Sophocle, remontant a` une mythologie un mot illis. de l amour ante´rieure a` celle d’home`re, a cru pouvoir mettre encore moins de moralite´ dans les dieux.〉 6–7 au 1er ... part ] 〈n’est plus〉 au 1er ... part corr. dans la marge plus ce mot dans l’interl. dans l’angle gauche la nume´rotation de la fiche 101 7 ou ] dans l’interl. 14 sanctionne ] 〈que〉 sanctionne ce mot dans l’interl. 23–24 nos lecteurs ... Home`re ] ajoute´ dans l’espace libre au bas du f o

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De la Religion, IV – Textes comple´mentaires

Le chœur, qui, dans les Trage´dies grecques est toujours L’organe de l’opinion publique, ne manque jamais, dans Sophocle, de de`clarer L’e´quite´ des dieux en exaltant leur puissance a. il promet a` Electre que Jupiter qui voi[t] tout, punira ses oppresseurs b. le crime, dit-il, est toujours atteint par la vengeance de The´mis ce´leste c. Pluton, Proserpine, Mercure, les furies aux chiens terribles, poursuivent en tout lieux, L homicide et L’adulte`re d. Jupiter est le pe`re des lois qui font le bonheur des hommes e. de`s que les immortels vigilans et justes aperc¸oivent le crime, ils en pre´parent le chatiment f. Leur regard ne s’est pas tourne´ vers toi, malheureux polinice, dit Œdipe a` son fils rebelle g, pour juger du polythe´¨ısme grec dans son enfance, il faut s’arreˆter a` l’iliade, pour le connaıˆtre dans sa perfection, c’est Sophocle surtout qu’il faut consulter.

a b c d e f g

Electre 472–515. Electre. 175–178. ib. 1064–1065. ib. 110–115. Œdipe Roi. 865–868. ib. 863–910. Œd. Col. 1370–1371[.]

1 *39 ] foliotage manque ; nous l’ajoutons 1–4 Le chœur ... qui voi[t] ] partie infe´rieure, avec les notes, de la fiche 102 4 tout ] a` la hauteur de ce mot, dans l’angle de la fiche 〈103〉 20 Œd. ] cette note est la dernie`re des six notes nume´rote´es de 3 a` 8 (les chiffres sont re´crits sur 1 a` 6) sur la partie infe´rieure de´coupe´e de la fiche 103 ; on trouve encore a` droite deux notes isole´es et sans rapport avec la partie texte ( ) Jupiter vengeur, Dike´ et Les furies. Ajax 1389–1391 (1) avertissement a` Athe`nes sur la Justice des dieux Œd. col. 1534–1537

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Sur Sophocle

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[Suite d’ide´es pour un passage sur Sophocle1]

fo ?

Sophocle. Athmosphe`re ou ciel plus pure en arrivant a Sophocle. Circonstances heureuses de ce poe`te Sa vie une belle unite´. Son bonheur constant. Sa religion e´pure´e. Comme il repousse les traditions dans lesquelles Eschyle se complaıˆt encore. Ne revient aux opinions Home´riques que pour les rites. Eschyle subjugue´ par son sie`cle. Sophocle en est l’interpreˆte. Combien notre admiration pour Sophocle s’accroıˆt si nous le comparions avec Euripide. Jugement rapide sur Euripide.

E´tablissement du texte : Manuscrit : BCU, Co 3294/6, sans foliotage (fo 96).

12 en est ] ajoute´ dans l’interl.

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BC a note´ la suite d’ide´es sur Sophocle sur une feuille du meˆme papier qui a servi a` re´diger le grand manuscrit. On retrouve les ide´es dans la version imprime´e. Les notes e´parses sur Sophocle ont peut-eˆtre servi a` organiser la copie du grand manuscrit et a` noter des formulations possibles pour certaines ide´es qu’on retrouvera avec des variations dans le texte imprime´.

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De la Religion, IV – Textes comple´mentaires

[Notes pour le chapitre sur les tragiques grecs1]

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Ch. 7. Tragiques2. 1. L on s’e´tonnera − en erreur 37. 40 2. Et remarquons − en matie`re 40 3. Eschyle fleurissoit − les odes du 2d 40 4. Si sa trage´die jusqu’a` l’iliade. 40 5. L’ide´e dominante des heros. 40–46 La carrie`re de Sophocle fut aussi belle que son talent. les Dieux de ce polythe´isme qu’il rendoit si noble & si pure e´prouve`rent envers lui de la reconnoissance car ils le comblerent de tous leurs bienfaits. Citoyen du pays le plus e´claire´ du monde antique, riche, & d’une figure superbe, il parvient a` tous les honneurs, il conquit toutes les gloires choisi dans son adolescence pour celebrer a` la teˆte de ses jeunes compagnons, la victoire de Salamine Archonte & ge´ne´ral, colle`gue de Pe´ricles & de Thycidide ds son age mur il de´fend. illustra gouverna sa patrie la vieillesse en E´tablissement du texte : Manuscrit : BCU, Co 3294/3, fo 49 (fo 51/2). 5 les odes ] 〈de l’Iliade〉 les odes 6 jusqu’a` l’iliade ] 〈illis.〉 jusqu’a` l’iliade 8 belle ] 〈pure〉 belle 9 e´prouve`rent ] 〈semblaient〉 e´prouver corr. en e´prouve`rent 10 car ils ] illis. 〈car〉 ils bienfaits ] 〈dons〉 bienfaits 11 pays ] 〈de la ville〉 du pays du monde antique ] de Gre`ce 13 dans son adolescence ] 〈a` 16 ans〉 la corr. ajoute´e dans l’interl. 14 Archonte ] 〈plutard〉 le mot biffe´ ajoute´ dans la marge Archonte 15 ds son age mur il defend. ] dans son age mur mots ajoute´s dans la marge 〈sa vie fut toujours pure & toujours heureuse〉 il defend. 15 illustra ... patrie ] ajoute´ dans la marge la vieillesse ] 〈illis. le vit〉 la vieillesse 1

2

Le texte est e´crit sur une feuille du manuscrit des Discours a` la Chambre, colle´e au bas du folio 51/1 qui contient la fin du chap. VII sur les tragiques grecs (voir ci-dessus, p. 56). Le brouillon pour ce meˆme chap. commence par des indications destine´es au copiste, puis continue avec des notes autographes et un dessin de Constant. Beaucoup de corrections le distinguent, quelques phrases ne sont pas acheve´es. Le verso contient, outre la page des Discours a` la Chambre, le titre d’un chapitre : «1. Re´capitulation rapide du Polythe´isme des tems he´roı¨ques.» Les cinq renvois ci-dessous (lignes 3–7) se rapportent a` un manuscrit non identifie´. BC cite des passages en indiquant leur de´but et fin respectifs. Il est vraisemblable qu’il vise les premie`res pages du texte imprime´, mais il est impossible de comple´ter cet abre´ge´ qui devait peut-eˆtre servir au travail du copiste.

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Notes pour le chapitre sur les tragiques grecs

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l’atteignant sembla le respecter elle vint seule & sans le corte`ge de ses hideuses infimite´s, l’ingratitude de ses enfans ne fut pour Sophocle que le sujet d’un nouveau triomphe. On dirait que & par un privileg malh. bien rare, la carrie`re de ce poe`te fut aussi heureuse que son talent Eschyle est en qq ste l’ancien testament du polyth Sophocle en est l’evangile les Dieux prononcent un arreˆt revetu de formes presque judiciaires. dans le second, la supre´matie de la cite´ de Minerve penetre plus lentement, mais plus prof. jusqu’au fond de l’ame par

1 sembla ... seule & ] sembla 〈le illis.〉 le respecter ... & syntagme ajoute´ dans la marge 1–2 de ses hideuses ] de〈s〉 ses hideuses les derniers mots dans l’interl. 2 Sophocle ] 〈lui〉 Sophocle corr. en dessous du mot biffe´ 4 un privileg malh. ] un〈e exception〉 privileg. malh. corr. dans l’interl. poe`te ] poe`te 〈admirable〉 heureuse ] 〈belle〉 heureuse 7 revetu ] 〈sous presque〉 revetu 8 penetre plus ] 〈illis.〉 penetre plus corr. dans l’interl. 9 jusqu’au ] 〈ds les〉 jusqu’au

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De la Religion, IV – Textes comple´mentaires

Ch. 8 De la meˆme progression chez les Tragiques Grecs

L’on s’e´tonnera peut-eˆtre de ce que nous cherchons a demeler une marche progressive dans trois auteurs, a` peu pre`s du meˆme tems, car les Tragiques grecs sont morts tous trois dans un espace de soixante anne´es. mais les opinions religieuses se modifient avec une grande rapidite´ chez les peuples, chez lesquels L’esprit humain conserve sur ces opinions sa juridiction naturelle. Chaque modification qui s’est ope´re´e, en entraine une autre : elles se suivent de la sorte avec une vitesse acce´le´re´e et deux auteurs presque contemporains marquent assez souvent deux e´poques successives. Toutefois il doit y avoir plus de contradictions sur le caracte`re des dieux dans les Tragedies, que dans l’epopee. ici ce caracte`re se fait connaıˆtre par des actions, au lieu que chez les tragiques il se manifeste par des axiomes qui, dans la bouche d’interlocuteurs inte´resse´s ou passionne´s, doivent va-

E´tablissement du texte : Manuscrit : BCU, Co 3294/2, fos 31–36 (fos 34–39). 1 31 ] folio fabrique´ avec les fiches nume´rote´es 〈76〉, 〈77〉, 〈78〉 2 De la ... Grecs ] 〈Des〉 De la meˆme progression chez les les six derniers mots ajoute´s au-dessus de la premie`re ligne Tragiques Grecs, 〈et de leurs opinions sur le caracte`re des Dieux〉 suit un aline´a barre´ par une grosse ligne ondule´e 〈Les Tragiques Grecs avaient quelque chose de religieux. les repre´sentations The´atrales fesaient souvent, en gre`ce, partie du culte public. la multitude spectatrice de ces repre´sentations, ne permettait pas volontiers aux poe¨tes de s’e´carter des opinions qu’elle professait. on sait qu’eschyle courut de grands dangers, pour s’eˆtre donne´ cette Licence, et plus d’une fois, L’indignation populaire interrompit les pie`ces D’Euripide qui, comme nous le dirons dans la suite, e´toit entraine´ sans cesse par un esprit frondeur, et par un penchant irre´sistible pour les de´clamations, et pour le Sophisme, a` des allusions contraires aux dogmes rec¸us. / /nous avons plusieurs mots illis. en conse´quence, plusieurs mots illis. des ide´es religieuses dans les tragiques grecs/ / la marche de ces ide´es peut eˆtre en conse´quence ces deux derniers mots dans la marge trace´e pas a` pas, et d’une manie`re plus exacte / /et plus de´taille´e encore/ / dans / /leurs/ / les Trage´die grecques, ce dernier mot dans l’interl. que dans Les autres productions Litte´raires de la Gre`ce. 3–6 nous cherchons ... trois ] syntagme ajoute´ dans l’interl. 〈ces〉 5 anne´es. ] anne´es, 〈nous servent a` distinguer divers changemens dans la religion〉. 11 Toutefois ] ajoute´ dans la marge 12 Tragedies ] Trag〈ique〉die〈s Grec〉s les lettres «die» en surcharge sur «ique» l’epopee. ici ce caracte`re] 〈homere〉 l’epopee. ici ce 〈Le〉 caracte`re corr. dans l’interl. 〈trois ou quatre mots illis.〉 13 chez ... axiomes qui, ] 〈celui que〉 chez ce mot dans l’interl. les tragiques 〈deux mots illis.〉 il se 〈fait connaitre〉 manifeste ce dernier mot dans l’interl. par des axiomes qui, 〈mis surtout〉 14 inte´resse´s ou passionne´s ] l’ordre des mots indique´ par des chiffres suscrits

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rier surtout les passions, ou les inte´reˆts des personnages. tantoˆt ces personnages veulent tromper ceux qui les e´coutent, tantoˆt ils se trompent euxmeˆmes, tantoˆt ils disent autre chose que ce qu’ils croient, tantoˆt ils cherchent a` ne croire que ce qu’ils de´sirent. Le caracte`re des dieux est pratique dans l’e´pope´e et de The´orie dans les Tragiques. Une autre circonstance qui rend le te´moignage de ces poe`tes plus ou moins suspect, ce sont leurs allusions aux passions, aux inte´reˆts, aux abus pre´sens[.] impatiens d’arracher aux Spectateurs des applaudissemens instantane´s, ils preˆtent a` leurs heros des opinions qui ne sont point celles de leur sie`cle. Ainsi nous trouvons, dans les Eume´nides d’Eschyle un effort constant pour e´lever Athe`nes au dessus de Delphes, meˆme sous le rapport religieux, tentative qui s’accorde mal avec le respect de toute la Gre`ce pour la cite´ Sainte, le centre de sa croyance & pour laquelle toutes les Tribus rivalisoient de ze`le & de de´fe´rence. Plus loin le Poe´te prodigue a l’Areopage des e´loges, que le sujet de sa pie`ce n’amenoit point naturellement, mais qui e´toient la de´fense de ce Tribunal auguste, alors menace´ par Pericles a. Sophocle plie les traditions relatives a` Œdipe de manie`re a` faire ressortir la pie´te´ des Athe´niens, la douceur de leurs mœurs & leur respect pour les supplians b. Toute la trage´die d’Œdipe a` Colonne n’a pour but que de ce´le´brer The´se´e, le he´ros favori d’Athe`nes c : Et pour motiver mieux ses a b c

Eumen. 684–713. Œdip. a` Col. 901–902. 961–966. 1005–1007. L’enthousiasme des Athe´niens pour The´se´e leur fait tole´rer les plus absurdes anachronis-

2 ceux ... e´coutent ] ajoute´ dans la marge 5 l’e´pope´e ] 〈home`re〉 l’e´pope´e 6 de ces poe`tes ] de〈s〉 ces ce mot dans l’interl. poe`tes 〈tragiques〉 7 leurs ] le〈s〉urs 8 pre´sens[.] ... d’arracher ] 〈contemporains,〉 pre´sens[.] 〈sous des noms historiques se´duits par le de´sir〉 impatiens ce dernier mot dans l’interl. d’arracher 9 a` leurs heros ] a〈ux personnages qu’ils introduisent sur la sce`ne〉 leurs he´ros l’accent grave ajoute´ en corrigeant le texte 9–10 de leur sie`cle. ] d〈u〉e leur ce mot ajoute´ dans l’interl. sie`cle 〈, ou` l’action se passe〉. 10–11 un effort ... Athe`nes ] 〈deux ou trois mots illis. l’Are´opage.〉 un effort ... Athe`nes corr. dans l’interl., accroche´e a` ce dernier mot une croix pour placer l’ajout biffe´ qu’on lit dans la marge 11–14 au dessus ... Perigauche 〈au dessus de Delphes meˆme sous le rapport religieux〉 cles. ] passage ajoute´ qu’on lit sur un papillon au dessus ... qui 〈ne〉 s’accorde 〈nullement〉 mal corr. dans l’interl. avec ... Sainte, 〈qui e´toit〉 le centre de sa croyance & 〈que〉 pour laquelle corr. dans l’interl. ... Tribus 〈consultoient avec〉 rivalisoient ... mais qui 〈lui〉 e´toient 〈dicte´s par le de´sir de〉 la ce mot re´crit sur «de» de´fen〈dre〉se [de] mot oublie´ par inadvertance ce ... auguste, alors ce mot ajoute´ dans l’inter.l ... Pe´ricle`s. 17–18 plie ... pie´te´ ] 〈un mot illis. dans〉 plie ... relatives a` Œdipe 〈a` Colonne un mot illis.〉 la pie´te´ 19 Toute ... que ] phrase remanie´e Toute 〈cette〉 la trage´die d’Œdipe ce mot dans la marge a` Colonne n’ces trois mots ajoute´s a pour but que ce dernier mot dans l’interl. 20-p. 656.4 Et pour ... couche. ] ajout dans la marge gauche

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louanges, le Poe`te met dans sa bouche des axioˆmes d’une morale e´pure´e, que ne professait assure´ment point le Thesee de la fable Volage adorateur de mille objets divers Allant du Dieu des morts de´shonorer la couche1. C’est bien pis quand nous arrivons a` Euripide. Tantot, dans une pie`ce dont le sujet est ante´rieur de 8 sie`cles a` la guerre du Peloponne`se, il fait allusion a` l’alliance des Argiens avec les Spartiates a tantot il injurie les Orateurs, les de´magogues, la de´mocracie b, choses dont aucune n’existait quand Adraste re´gnoit sur Argos. Plus loin il se jette dans une digression inattendue sur le pouvoir populaire & la monarchie c. Plus loin encore ce meˆme The´se´e que de´ja` Sophocle avoit embelli, & qui vainqueur des monstres & des brigands ne pouvoit connoitre que l’e´tat he´roı¨que, c’est a` dire barbare, fait en vers pompeux l’histoire philosophique de la civilisation d[.] Au reste Euripide ne sauroit eˆtre conside´re´ comme une autorite´ sur la religion grecque Il n’en devient une que, lorsque cette religion s’e´croule. Alors nous nous appuyerons de son te´moignage avec utilite´. Maintenant revenons a` Eschyle & a` Sophocle, apre`s nous eˆtre mis en garde contre ce qui pouvoit meˆme dans ces 2 poe`tes, nous induire en erreur.

a b c d

mes. Polgnote dans son tableau du combat de Marathon, fait assister The´se´e a` cette bataille (Pausan. Attic. 15) Un fait important & qui montre combien les tragiques de´figuroient l’histoire, pour plaire a` la foule, c’est que Me´ne´las, grave, prudent, valeureux dans Home`re est a` la fois laˆche & cruel, dans toutes les trage´dies Atheniennes. c’est un effet de la haine des Athe´niens contre Sparte, & ce qui complette l’e´vidence de notre assertion, c’est que les pie`ces ou Me´ne´las est injurie´ sans cesse, sont en meˆme tems remplies d’inventions contre les coutumes Lace´de´moniennes (Andromaq.) Suppl. 1094–1095. 1181–1182[.] ib. 734–738. 744–749. 864–865. 879–880[.] ib. 339–343. 350–353. 471–493. Bacchant. 249–252. 270–271.

10–3 ce meˆme ... civilisation. ] passage remanie´ 〈c’est〉 ce meˆme dans l’interl. The´se´e la suite ajoute´e dans la marge que ... avoit 〈un mot illis.〉 embelli, & qui 〈un mot illis.〉 vainqueur ... brigand ne pouvoit ce dernier mot dans l’interl. connoitre 〈soit〉 que l’e´tat 〈barbare〉 he´roı¨que ... barbare, retour au folio fait en vers pompeux ces trois mots ajoute´s dans l’espace disponible l’histoire philosophique ce mot dans l’interl. ... civilisation, 〈The´se´e qui de´livrait la Gre`ce barbare des brigands & des monstres.〉 14 Au reste Euripide ] 〈Mais〉 Au reste corr. ajoute´e devant le mot biffe´ Euripide 〈qui〉 le mot biffe´ dans l’interl. 15 Il ... que ] Il n’en devient une, que la tournure «ne ... que» ajoute´e dans l’espace entre les mots et dans l’interl. 17 nous eˆtre mis ] 〈avoir〉 nous eˆtre ces mots dans l’interl. mis 〈nos lecteurs〉 20 Un fait important ] Un 〈autre〉 fait 〈illis., peut-eˆtre le mot remarquable〉 important corr. dans l’interl. 1

Vers ce´le`bres de Racine, Phe`dre, acte II, 5. C’est Phe`dre qui parle en entamant subtilement la se´duction d’Hippolyte. BC cite de me´moire, substituant le participe «allant» a` la tournure originale («qui va»).

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Eschyle fleurissait vers le meˆme tems que Pindare, c’est a dire Dans un tems ou`, comme on l’a vu, la mythologie Grecque s’e´tait de´ja fort e´pure´e mais Eschyle e´tait pour la Trage´die, dans la meˆme situation qu’he´rodote pour l’histoire : il avait a` se frayer une route nouvelle. les grossie`res farces de Thespis lui avaient donne´ l’ide´e d’un genre plus noble et plus re´gulier. pour cre´er ce genre, il fallait L’enrichir des couleurs Les plus e´clatantes et Les plus propres de frapper la multitude. Eschyle se pe´ne´tra donc des traditions home´riques, et dans plusieurs de ses trage´dies, il transporta sur la sce`ne, sans aucune modification, le caracte`re moral des dieux de L’iliade. Il est tre`s naturel a` un poe¨te de prendre pour baze les opinions qu’il trouve e´crites, plutot que celles qui existent re´ellement. non que celles-ci soient sans influence. mais les e´crivains y ce`dent, sans le savoir. c’est dans les de´tails, que cette influence s’aperc¸oit et le fonds du Tableau peut eˆtre d’une autre e´poque. Cependant Les nouvelles ide´es avaient, par leur nouveaute´ meˆme, une e´nergie prodigieuse. Les socie´te´s qui sont dans toute la vigueur de la jeunesse, n’ont pas sur elles-meˆmes, ce de´couragement des socie´te´s vieillies, de´couragement qui les porte a` regarder leurs vices et leurs imperfections comme des choses inhe´rentes a` leur existence, de meˆme que les vieillards ne cherchent plus a` se gue´rir de leurs maux, mais a` transiger avec eux, en souffrant le moins et en vivant le plus long-tems qu’il Leur est possible. il y a, dans la premie`re force de l’e´tat social, un besoin de tout perfectionner, de tout consolider, qui fait que les hommes s’emparent avec avidite´ de tout ce qui leur semble les mener vers ce but. la sanction que le religion peut donner aux lois, aux institutions politiques et a` la morale, e´tant reconnue, chacun veut ajouter a` cette sanction, et prononcer plus fortement L’appui que Les dieux preˆtent a` ce qu’il y a de plus saint chez les mortels. Eschyle domine´ de la sorte par deux impulsions contraires & leur obe´issant avec la ve´hemence qui constitue son caracte`re particulier Eschyle 1 Eschyle ] 〈Chapitre D’Eschyle〉 Eschyle 6 Les ] mot re´pe´te´ par distraction 9 caracte`re moral ] caracte`re 〈et la〉 moral〈ite´〉 10 baze ] baze 〈un ou deux mots illis.〉 11–12 non que celles-ci soient sans influence. mais ] passage remanie´ 〈cela arrive sans cesse aux e´crivains meˆme dont la fonction serait d’observer. a` plus forte raison cela peut-il arriver a` des hommes qui se proposent un tout autre but. ceci ne contredit pas ce que nous disons ailleurs〉 non ce mot dans l’interl. que 〈un mot illis. syste`me environnant n’est jamais〉 celles-ci soient les deux premiers mots de la corr. dans l’interl., le dernier ajoute´ dans la marge sans influence. mais ce mot ajoute´ dans l’interl. les e´crivains y ce`dent 〈mais〉 15–27 Cependant ... mortels. ] passage barre´ par une grosse croix ; BC avait commence´ une correction en notant au-dessus du mot «Cependant» un nouveau de´but de la phrase D’une 28-p. 658.2 Eschyle ... He´siode. ] phrase profonde´ment remanie´e Eschyle 〈plusieurs mots illis. [...]tion ge´ne´rale, et [...] de〉 domine´ ... obe´issant corr. dans l’interl. la ve´he´mence qui 〈fait〉 constitue ce mot dans l’interl. son caracte`re 〈distinctif〉 particulier corr. dans l’interl. 〈mais il en re´sulte qu’il〉 Eschyle ce mot dans l’interl. tombe 〈d’autant plus〉 dans des contradictions plus ce dernier mot ajoute´ dans l’interl. frappantes la suite dans la marge peut-eˆtre que celles d’He´siode.

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tombe dans des contradictions plus frappantes peut eˆtre que celles d’He´siode. Aucun poe¨te ne repre´sente les dieux comme aussi vicieux, et aucun, en meˆme tems, ne parle plus affirmativement de leur amour pour la justice, et des vengeances Terribles qu’ils pre´parent aux criminels. Les citations qui prouvent ces deux portions incohe´rentes du syste`me religieux d’Eschyle, seraient faciles et fatigantes a` multiplier. L’Ide´e dominante de la Trage´die de Prome´the´e est la haine de Jupiter contre l’homme a. ce maıˆtre du Tonnerre est cruel, impitoyable, ingrat, perfide et fe´roce dans ses amours meˆmes b. L’olympe est repre´sente´ comme sa proie c. il le gouverne par des lois Terribles que lui seul a faites, menac¸ant de sa lance les dieux qu’il a renverse´s d. c’est un usurpateur nouvellement e´tabli sur un Troˆne qu’il a conquis par un parricide e. il est de´teste´ des autres dieux f. l’antiquite´ ce`de a` ses de´crets arbitraires et plie, en fre´missant, sous sa volonte´ coupable g, car, nous dit Eschyle, un nouveau maıˆtre est toujours dur h. Les dieux, dans cette pie`ce, sont tellement semblables aux hommes, que la chute de Jupiter y est annonce´e comme de´sirable et comme possible i. le langage de Prome´the´e est celui que pourrait tenir le chef d’une faction vaincue, dans une re´volution politique k. il brave le fils de Saturne, comme ne devant re´gner que passage`rement l. Les tems changeront, s’e´crie-t-il. ils apprendront a` Jupiter lui-meˆme a` connaıˆtre le malheur m. n’ai-je pas de´ja` vu deux souverains chasse´s de l’empire des cieux n ? Jupiter, charge´ de la male´diction paternelle o, perdra cet empire a` son tour, de la main d’un de ses enfans p et j’aime mieux souffrir enchaine´ sur ce roc, qu’eˆtre son esclave q. a b c d e f g h i k l m n o p q

Esch. Prom. 9–11 – 28 – 82–83 – 120–123 – 230–233 – 944–945. id. ib. 304–306 – 734–737 – 903–905 – 1090–1093. ib. 149–151 – 310. ib. 403–406. Prom. 199–203 – 909–911. ib. 1003. ib. 149–151 ib. 34–35. ib. 162. 166. Prom. 199–223 ib. 937–939. ib. 980 ib. 955–958 ib. 909–94–[.] ib. 759–764 – 906–926. prom. 967. 968.

9 le gouverne ] le mot ajoute´ dans l’interl. gouverne 〈L’olympe〉

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Le prome´the´e D’Eschyle pourrait bien avoir fourni a` Milton le caracte`re de Satan : mais ce caracte`re est beaucoup plus absurde, religieusement parlant, quand on se transporte dans le The´isme. Nous convenons au reste que la Trage´die de Prome´the´e ne peut eˆtre conside´re´e comme appartenant comple`tement a` la religion populaire de la Gre`ce sous le rapport de la fable, elle est, comme la The´ogonie D’he´siode, d’une origine e´trange`re, et L’esprit re´publicain s’y manifeste avec force, sous le voile de L’alle´gorie mythologique. Eschyle la composait au moment ou` Le Roi de Perse, a` la teˆte d’un million de barbares, menac¸ait de nouveau d’envahir la gre`ce, et le poe¨te dont Le bras avait a` Marathon si vaillamment combattu pour sa patrie reproduisait dans ses vers cette horreur pour la servitude et cet amour pour la liberte´ qui avaient pre´side´ a` ses exploits. Il ne faut pas croire, toutefois, que ces deux causes particulie`res eussent entie`rement modifie´, dans la Trage´die de Prome´the´e Le caracte`re des dieux. ce caracte`re se retrouve dans les autres Trage´dies D’Eschyle. les dieux y sont toujours preˆts a` trahir leurs adorateurs a. ils emploient contre l’homme la ruse et le mensonge b. ils sortent des villes, quand elles sont prises c. on ne les retient qu’a` force de sacrifices d. Agamemnon, Lorsqu’il reveˆt son manteau de pourpre, craint que ce vain e´clat n’excite leur jalousie. mais ailleurs la morale leur est che`re. la divinite´ que les mortels appelent la justice est La fille de Jupiter e[.] les coupables se flattent en vain que les dieux ne´gligent les choses humaines f. Leur providence veille au contraire sur la maison des hommes vertueux g, les prie`res des me´chants sont impuissantes pour les fle´chir h, et nul n’e´change avec impunite´ L’innocence contre le crime i.

a b c d e f g h i

Les sept devant The`bes. 105–107 – 172–176. Les perses. 93–101. Les sept devant The`bes. 223–224 ib. 76–77 – 186–187 – 309–310. Coeph. 949–954. Suppliant. 365 Agamemn. 378–389 Suppl. 28–29 – 386–389 Coeph. 958–959. ib. 1018–1019.

4 Nous convenons ] 〈Je〉 Nous dans l’interl. conv〈iens〉enons les dernie`res lettres en surcharge 8 la composait ] la ce mot ajoute´ dans l’interl. composait 〈cette Trage´die〉 9 de nouveau [ ajoute´ dans l’interl. 18 sacrifices. ] sacrifices. 〈Aga-〉 19 mais ailleurs ] mais ce mot dans l’interl. ailleurs 〈sans doute〉

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le chant dans lequel les furies annoncent Les maux qui re´sulteront, si on les de´courage, et qu’elles ne punissent plus les forfaits, est un plaidoyer poe¨tique en faveur de L’appui que la religion preˆte a` la morale a. Les notions rec¸ues sur la justice des dieux ne se fondent pas dans L’ensemble des ouvrages D’Eschyle, comme nous les verrons tout a` l’heure se fondre dans l’ensemble des ouvrages de Sophocle. elles s’y font jour par intervalles, plutoˆt qu’elles n’en composent l’esprit ge´ne´ral. la conduite des dieux s’en e´carte souvent. c’est une The´orie que la pratique contredit encore[.] [...]1

a

Coeph. 1018–1019. v. encore pour des maximes de ce genre les Eumenides, v. 536–537. les Coe´ph. 649–650 – Agamemnon 58–59 – 404–406 – 469–470 – Les suppliantes. 418–421 – 433–434. morale dans Eschyle Discerne l’injustice et crains la cole`re de Jupiter. Suppl. 433–434. Les crimes contre les hommes sont la suite ne´cessaire de l’impie´te´ envers les dieux ib. 536–537. La furie Erynnis punit le crime Coeph. 649–650. Erynnis qui punit lentement les ravisseurs. agam. 58–59. Les dieux n’oublient pas les auteurs des meurtres. les noires furies poursuivent enfin celui qui est devenu heureux par le crime. agam. 469– 470. Les dieux n’e´coutent pas les prieres des me´chants agam. 404–406. si je vous livre, vous qui vous eˆtes re´fugie´s dans les temples des dieux je crains d’exciter contre moi un Vengeur Terrible, qui ne m’abandonnera pas, meˆme apre`s ma mort, dans les enfers. Suppl. 418–421 = Jupiter s’est de´charge´ sur les furies du soin de punir les hommes. il ne daigne pas s’occuper lui-meˆme de la race abominable des meurtriers. Coeph. 366–368. mais c’est une loi antique et sacre´e, que le sang qui coule exige et obtient du sang. ib. 398–402. ib. 35–39.

4 Les ] 〈Cependant〉 Les

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20 39 ] 39 〈〈Suppl. 418–421〉

Voir ci-dessus, a` partir de la p. 433, la suite de ce raisonnement.

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Passage pour le chapitre sur les tragiques grecs

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[Passage pour le chapitre sur les tragiques grecs]1

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Nos lecteurs s’apercevront sans peine qu’en parlant d’Eschyle nous avons e´carte´ tout ce qui ne tenoit pas directement au sujet que nous traitons. Ainsi nous ne sommes point revenus sur la portion de sa mytholgie qu’il avoit emprunte´e de l’e´tranger. certainement son Prome´the´e est sous le rapport de la fable dans la meˆme cathe´gorie que la The´ogonie. Mais la manie`re dont il plia les ide´es cosmogoniques, pour les faire servir au triomphe de la justice des Dieux, & pour rendre ceux ci bienveillans envers les hommes dt ils ett nag. les ennemis indique la revolution qui s’e´toit ope´re´e depuis Home`re & He´siode. tand. que son ge´nie quelquefois sauvage le reporte volontiers aux Titans aux Monstres, a` cent bras et a cent tetes sous l’embleme desq. la cosmogonie s etoit plue a` personifier les forces physiques les opinions contemporaines l’obligeant a desarm. ces Tit. & ces monstres, pour offrir aux Grecs des formes moins hideuses & des Dieux meilleurs. Nous n’avons pas voulu non plus nous arreter aux ide´es republicaines qui eclatent dans cette meˆme trage´die de Prom. Eschyle la compos – menacait de nouveau

E´tablissement du texte : Manuscrit : BCU, Co 3294/2, fo 36 (fo 39/2).

7 plia ] 〈a〉 pli〈e´〉a la lettre «a» en surcharge sur «e´» 8–9 dt ... ennemis ] syntagme ajoute´ dans l’interl. 10 tand. que ... quelquefois ] tand. que ces deux mots ajoute´s dans la marge son ge´nie 〈deux ou trois mots illis.〉 quelquefois ce dernier mot dans l’interl. 11–12 sous ... s etoit ] 〈que〉 sous l’embleme desq. corr. dans la marge et dans l’interl. la cosmognie 〈un mot illis.〉 s etoit 12–13 les opinions ... l’obligeant ] 〈mais〉 les opinions contemporaines l’oblige〈oi〉ant la lettre «a» en surcharge sur les lettres «oi»

1

Ce texte autographe se lit de travers au bas d’un folio de grand format qui a servi a` fabriquer, a` l’aide de deux fiches (nume´rote´es 94 et 94bis), un folio de texte pour le chap. VII sur Eschyle. BC utilise l’espace reste´ libre pour re´diger une premie`re mouture du texte dont on trouve une version remanie´e au folio suivant du dossier (fo 40 ; voir ci-dessous, p. 663). Le texte est difficile a` de´crypter parce que les lettres sont mal forme´es et la re´daction partiellement ste´nographie´e. Les dernie`res phrases montrent que BC retravaille un autre texte dont il cite les passages en indiquant pour le copiste les incipit et explicit des phrases a` prendre.

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d’envahir la Grece & le poete – exploits. qq inter. q ces digr. [...] puist part ss le pt de vue hist. ou phil. ou litte´r. ns avs du ns les interdire. ns ne devs rien dire de sup. qd le tems & l’espace nous sont a peine suft pr ce qui est ne´ces1.

1 exploits ] une croix accroche´e a` ce mot digr. ] dans l’interl. un mot abre´ge´ illis. phil. ] mots ajoute´s dans la marge ns ne ] ns ne 〈illis.〉

1

2 ou

Il faut lire : «Quelques inte´ressantes que ces disgressions puissent paraıˆtre sous le point de vue historique ou philosophique ou litte´raire, nous avons duˆ nous les interdire. Nous ne devons rien dire de superflu quand le temps ou l’espace nous sont a` peine suffisants pour ce qui est ne´cessaire».

Fragment du chapitre sur les tragiques grecs

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[Fragment du chapitre sur les tragiques grecs]1

fo ?

Nous avions annonce´ a que nous entrerions dans quelques de´tails sur les emprunts faits par Eschyle aux mythologies e´trangers, surtout dans son Prome´the´e : mais nous [nous] sommes apercus que ces de´veloppemens nous contraindroient a` re´pe´ter inutilement ce qui a e´te´ dit du triomphe de l’esprit grec sur les dogmes importe´s par les colonies ou les navigateurs b & sur les e´le´mens constitutifs du Polythe´isme de la Gre`ce c[.] Certainement le Prome´the´e d’Eschyle est sous le rapport de la fable, dans la meˆme cate´gorie que la The´ogonie d’He´siode ; mais notre inte´reˆt principal est maintenant a b c

v. ci-dessus p. 1702[.] T. II, T. III. E´tablissement du texte : Manuscrit : BCU, Co 3294/2, sans foliotage (fo 40).

2–7 Nous avions ... Gre`ce[.] ] passage ajoute´ par BC dans la col. de gauche, suivi de l’e´bauche ste´nographie´e de la phrase suivante Cert le Prome´the´e d’Eschyle est sous le rapport de la fable, ds la meˆme cathg. q la Theog. mais 2 Nous avions ] pre´ce`de en haut de la feuille une ¯´ but de l’ancienne note 2 〈(1) Les Athe´niens disaient a` ce sujet ancienne note 1 et le de qu’Eschyle avait remporte´ plus de prix, apre`s sa mort, que pendant sa vie.〉 cette note se lit aussi au bas du folio 〈(2) Nos Lecteurs s’apercevront sans peine, qu’en parlant D’Eschyle nous avons e´carte´ tout ce qui ne tenoit pas directement au sujet que nous traitons, ainsi nous ne sommes point revenus sur La portion de sa mytholgie qu’il avoit emprunte´e de l’e´tranger.〉 8 d’Eschyle ] ajout a. dans l’interl. 9 d’He´siode ] ajout a. dans l’interl. 9-p. 664.1 notre inte´reˆt ... ces notions ] corr. a. dans l’interl. au-dessus de 〈nous n’illis. a nous occuper que de la manie`re illis. des ide´es〉 1

2

Le fo 40 est fabrique´ a` partir de deux anciens folios du meˆme texte re´dige´s par le secre´taire aux longues barres de t. La partie supe´rieure est de´coupe´e d’un folio plus grand. BC n’utilise que la partie infe´rieure de cette feuille, c’est-a`-dire la partie notes. Il biffe la premie`re note dont il n’a pas besoin et remplace le de´but de la deuxie`me par un passage qu’il e´crit dans la col. de gauche. L’ancienne note passera ainsi dans la partie principale du texte. Il colle cette nouvelle feuille sur le second folio, couvrant les premie`res lignes de celui-ci pour obtenir un texte cohe´rent. On lit au bas de ces deux folios re´unis quatre notes ajoute´es par BC, dont le premie`re (sur les prix d’Eschyle) est biffe´e. Le texte de ce folio est marque´ par une ligne verticale, sans doute pour signaler qu’il a servi a` la re´daction du chapitre. La phrase biffe´e par des lignes horizontales (voir ci-dessous, p. 666, la variante aux lignes 6–9) a e´te´ e´limine´e, sans doute avant cette ope´ration. – Pour ce qui est du contexte des re´flexions de cette re´daction, voir ci-dessus, pp. 425–440, le chap. VII du livre XII. Renvoi a` une autre page du manuscrit, non e´lucide´. Les deux notes suivantes sont explique´es ci-dessus, p. 426.

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d’expliquer comment il use les notions Cosmogoniques, pour les faire servir au Triomphe de la Justice des dieux, et pour rendre ceux-ci bienveillants envers les hommes dont ils etaient nague`re les ennemis, parceque cela seul indique la re´volution ope´re´e depuis home`re. Tandisque le ge´nie impe´tueux et quelquefois sauvage D’Eschyle, le reporte volontiers aux Titans et aux monstres a` cent bras et a` cent teˆtes sous l’embleˆme desquels l’orient s’est plu a` personnifier les forces physiques, Les opinions qui L’environnaient, L’obligent a` De´sarmer ces Titans et ces monstres, pour offrir aux grecs des formes moins hideuses et des Dieux meilleurs. Nous n’avons pas voulu non plus nous arreˆter aux ide´es re´publicaines qui e´clatent dans cette meˆme Trage´die de Prome´the´e. Eschyle la composait au moment ou` le Roi de Perse a` la teˆte d’un millon d’esclaves menac¸ait de nouveau d’envahir la Gre`ce, et le poe¨te, dont le bras avait, a` Marathon, si vaillamment combattu pour sa patrie, reproduisait dans ses vers cette horreur pour la servitude et cet amour pour la liberte´ qui avaient pre´side´ a` ses exploits. enfin nous avons e´galement repousse´ de nos recherches tout ce qui n’aurait eu de relation qu’avec la secte Pythagoricienne qu’Eschyle, suivant Cice´ron, avait adopte´e de pre´fe´rence, bien que la doctrine de Pythagore ait probalement influe´ sur la conception des furies, e´pargnant Oreste dans le sanctuaire, et Le saisissant de nouveau, quand il veut quitter ce religieux azile. quelqu’inte´ressantes que ces digressions puissent paraıˆtre, sous le point de vue historique, ou philosophique, ou litte´raire, nous avons duˆ nous Les interdire. nous ne pouvons rien dire de superflu quand le tems et L’espace nous suffisent a` peine pour Le ne´cessaire.

4 ope´re´e ] 〈s’e´tait〉 ope´re´e home`re ] home`re 〈et depuis he´siode〉 meilleurs. ] passage biffe´ par des traits horizontaux

6–9 monstres ...

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De´but du chapitre sur Euripide

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[De´but du chapitre sur Euripide]1

fo 1.3ro

Nous nous e´tions propose´s d’abord de ne point parler d’Euripide. C’est un peintre si peu fide`le de la religion Grecque, un auteur si e´tranger a` toute exactitude & a tout scrupule qu’il nous paraitroit naturel d’ajourner tout ce qui le concerne jusqu’a` l’e´poque ou nous de´crirons dec. & la Chute du Polyth. Euripide est un incre´dule & en conse´quence loin de se complaire dans les perfectionnemens de la religion, il aime a en rappeler & a` en exagerer les cotes faibles. Ne´anmoins les lecteurs nous auroient reproche´ une lacune ; & nous n’avons pas voulu encore ce blame, bienqu’il n’eut selon nous pas e´te´ fonde´. Mais pour montrer avec quelle de´fiance Il faut consulter ce 3e des tragiques Grecs & quelle lumie`re il peut cependant repandre sur quelques [de´tails] nous devons faire un mot sur l’etat de la Tr. au moment ou il succed. a Soph. ainsi que sur son caracte`re − donne´.

E´tablissement du texte : Manuscrit : BCU, Co 3425, fo 1.3ro.

4 exactitude ] 〈conscience〉 exactitude 4 tout ] 〈a l’e´poque ou` il se pre´s〉 tout 5 ou nous ] ou deux corrections successives 〈il〉 〈Le Polythe´isme〉 nous dec. & la ] ajoute´ dans l’interl. 6 se complaire ] 〈illis.〉 se complaire 9 nous n’avons ] dans l’interl. pour remplacer je n’ai ces trois mots ne sont pas biffe´s 12–13 & quelle ... de´tails ] & quelle ... il peut 〈ne´anmoins〉 cependant ... de´tails ajoute´ au bas de la page et appele´ par une croix ; le dernier mot ajoute´ d’apre`s l’imprime´ 13 faire un mot ] 〈entrer dans qq de´t〉 faire lecture hypothe´tique un mot la corr. dans l’interl.

1

L’e´bauche des premie`res phrases du chapitre sur Euripide se lit sur l’un des deux placards conserve´s contenant des passage des chapitres II et IV-V du livre XI actuel. Le texte est tre`s proche de la version publie´e, mais pas identique. On y lit des phrases qui ne se trouvent pas dans le volume, et d’autre part, des morceaux importants qui devraient s’y trouver manquent entie`rement. Cela permet de dater ces deux placards. Ils repre´sentent l’e´tat du texte de 1827, plus exactement du texte du Grand manuscrit donne´ a` l’imprimeur. La composition de´ja` commence´e a e´te´ arreˆte´e a` la suite de la de´cision grave de Constant de se lancer dans une restructuration du t. III (voir OCBC, Œuvres, t. XIX, pp. 104–105). Les placards nume´rote´s 10 et 13 sont, ce qu’on appelle, le texte en feuilles (et non en cahiers), donc un e´tat du texte avant la mise en page. Constant ne les a meˆme pas corrige´s, mais les a juge´s de´passe´s par la nouvelle re´daction de cette partie de l’ouvrage.

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[Fragments pour le chapitre sur Aristophane]

Suite d’ide´es sur Aristophane

fo 1.1ro

1. 2. 3. 4. 5, 6. 7. 8. 9. 10.

Objection qu on peut tirer du succe`s des come´dies d’Aristophane. le succe`s meˆme de ses come´dies prouve le perfectionnement progressif des ide´es des Grecs sur la religion. pourquoi les philosophes poursuivis pour avoir nie´ les traditions qu’Aristophane rendait ridicules ? Aristophane e´chappait a` la perse´cution par les desaveux. Amour des Athe´niens pour le plaisir les philosophes, Socrate au moins ne desavouoient rien. Leurs perse´cutions plutot politiques que religieuses. Socrate eut pu e´chapper. Preˆtres sachant gre´ a` Aristophane d’attaquer la philosophie. germe d’incre´dulite´, (non developpe´) dans Aristophane.

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en imitant les Tragiques il rendoit les Dieux ridicules 109.4 15

mais chacune de ses plaisanteries rappellent les Tragiques, les spectateurs trouvoient qu il se moquoit des Tragiques & non pas des dieux. 109.4 Bacchus, & toutes ses souffrances dans les grenouilles, rappelloient Euripide & non Bacchus. 109.5 les grenouilles parodie de la pie´ce ou` Bacchus descendoit aux enfers pour en tirer sa mere Se´me´le´ 109.5 tout en rendant les Dieux ridicules il s’exprimoit magnifiquement sur leur justice & leur majeste 107bis les plaisanteries d’Aristophane portoient plus sur la maniere dont les Tragiques repre´sentaient les Dieux que sur les Dieux meˆmes.

E´tablissement du texte : Manuscrit : BCU, Co 3425, fo 1.1ro. 1 Suite ... Aristophane ] texte qu’on lit en haut, dans la col. de gauche 14 en imitant ... 109.4 ] texte qu’on lit dans la partie infe´rieure de la col. de gauche ; le texte est biffe´ d’un trait vertical 23–24 tout ... 107bis ] ajoute´ dans la marge ; biffe´ d’un trait vertical 25-p. 670.21 les plaisanteries ... 109.7. ] texte qu’on lit dans la col. de droite 25–26 les plaisanteries ... meˆmes. ] biffe´ d’un trait vertical

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De la Religion, IV – Textes comple´mentaires

Il pourroit en arriver autant a` des Chre´tiens religieux, si on mettoit en action le surnaturel du Christianisme d’une manie`re fautive ou inconvenante. Ar. ne parodie jamais Sophocle mais Euripide.

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Ar. inintelligible sans les Tragiques. Bergler dans son commentaire indique a chaque fois l endroit des Tragiques, parodie´s par Arist. 109bis

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presque tous les sujets des tragiques tire´s de la mythologie. 109.ter dans la pie`ce de la paix beaucoup de choses contre les habitans de l’Olympe. Mais c’est une parodie du Bellerophon d’Euripide. 109.6 Tryge´e est repousse´ du commerce des Dieux comme Bellerophon. 109.6. les muses invoquant l’Ether leur pe`re parodie de l’Helene d’Euripide- 109.7 la veracite d’Hercule parodie de Pindare 109.8

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presque tous les sujets des tragiq. e´toient tires de l’ancienne myth. 109.3 Les grenouilles, p. ex. la pie`ce ds laquelle Bacchus traite´ avec le plus d’irreverence est une parodie de la pie`ce d’Euripide ou` Bacchus descendoit aux enfers pour en tirer Semele sa mere. les grenouilles rappelloient donc Euripide & non Bacchus. 109.5. Il est a remarquer qu’Arist. ne parodie jamais Sophocle mais Euripide. dans la pie`ce de la paix − 109.6 Tryge´e. 109.6 les nue´es invoquant l’e´ther 109. 7 Pindare 109.8 Tout en rendant les Dieux ridicules 107bis 5–22 Ar. ... 109.8 ] biffe´ d’un trait vertical 10 Arist. ] 〈Eurip.〉 Arist. 23 presque ... 109.3 ] ajoute´ dans la marge 29–33 dans la ... 107bis ] lignes ajoute´es au bas de la page et appele´es ici par une croix

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Sur Aristophane

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Il est si vrai que les pie`ces d’Arist. sont des parodies des tragiques que ses pie`ces sont intelligibles pour ceux qui ne connoissent pas les Tragiques Note sur Bergler. 109bis

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De la Religion, IV – Textes comple´mentaires

Ch. 8. Aristophane

fo 1.4ro

1. Au milieu − des Athe´niens Si apre`s ce q ns avs dit des Tragiques, ns avons besn d’autres prves pr la ve´rite´ q ns voulons¯ e´tablir, nous les trouverons dans Aristoph. ¯ on s’est frequemment etonne´ de ce que ce poete & d’autres comiques (car − particuliers) repre´sentent les Dieux − ridicules, & de ce que ces peintures − e´toient tole´re´es − populaires. Mais cela meme ne demontre-t-il pas que les absurdite´s de l’ancien polythe´isme fatiguoient − qui avt bes. d’une croy. pl. perfect. demandera-t-on coment il s’est fait, si les Atheniens − revoltaient, que les philosophes de l’ironie, aient e´te´ p suivis exile´s, mis a mort, tandis qu’il demeurt toujours impuni. deux causes expliquent ce phe´nome`ne : l’une l’habilete d’Aristophane qui − desaveux. l’autre : la tenacite´ des philosophes, qui vouloient bien interpreter leurs doctrines, mais non les desavouer. Amant passione´ − pour les preˆtres. Ces pretres − que un mot illis. la raison1. Les comedies d’Arist. − de´truire. Dans quelles traditions − de leur croyance. Il est de plus essentiel de remarquer que c’est contre les Dieux des Tragiques qu’Arist. s’eleve. chacune de ses pieces rappel. les Tr. ce n’e´toit qu’en les imitant qu’il paraissait renverser les Dieux ridicules Il en resultait que les spectateurs trouvaient qu’il se moquoit des [poeˆtes] 109.4

E´tablissement du texte : Manuscrit : BCU, Co 3425, fo 1.4ro.

3–19 Si apre`s ... croyance. ] texte dans la col. de droite 20–23 Il est ... 109.4 ] le texte dans la partie gauche du f o 20 de plus ] ajoute´ au-dessus des mots est essentiel 21 chacune ... Tr. ] ajoute´ dans l’interl. 22 les imitant ] les ce mot dans l’interl. imitant 〈les Tragiques〉 1

BC de´signe un passage a` copier qu’on trouvera dans le texte imprime´. Voir ci-dessus, pp. 461–462, et plus particulie`rement pour la ligne en partie illisible, p. 462, lignes 22–31. Pour comple´ter les deux phrases suivantes, voir ci-dessous, p. 688, lignes 10–11 et p. 676, lignes 14–28.

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Chap. 9 Quelques observations sur Aristophane

Le succe`s d’Aristophane prouve que les Grecs avoient fait des progre`s qui leur rendoient choquante la disproportion des traditions consacre´es. Au milieu de tous les symptomes que nous avons decrits symptomes manifestes d’une religion qui se perfectionne, les Come´dies D’Aristophane semblent un inexplicable phe´nome`ne. Ces meˆmes dieux que tous les poe¨tes, tous les historiens travaillent a` de´gager de ce qui les de´grade, Aristophane et d’autres poe¨tes comiques, (car ce caracte`re n’est pas, comme on l’a cru, particulier a` Aristophane) Les repre´sentent comme les plus vils, Les plus ridicules et les plus vicieux des eˆtres ; et ces peintures avilissantes et outrageantes, sont couvert[e]s d’applaudissements. Comment concilier cette approbation publique avec Les progre`s que nous attribuons a` la religion ? Le plaisir que les Athe´niens trouvaient au pie`ces d’Aristophanes, ne prouve-t-il pas une ve´rite´ directement contraire a` nos assertions ? n’en devons-nous pas conclure que, loin que leur religion fut devenue plus parfaite, leur intelligence plus exerce´e, e´tait fatigue´e des absurdite´s de cette religion, et L’avait tacitement abjure´e ? S’il en eut e´te´ autrement, n’auraient-ils pas E´tablissement du texte : Manuscrit : BCU, Co 3294/3, fos 40–41 (fos 46–47). 3–4 Le ... consacre´es. ] corr. e´crite de travers dans la marge pour remplacer un passage biffe´ 〈nous venons de montrer Le polythe´isme s’e´purant progressivement, dans les Tragiques Grecs. malgre´ beaucoup de notions encore grossie`res, vestiges de la mythologie home´rique, sur la nature et le caracte`re des dieux, La religion s’unit intime´ment avec la morale, dans Eschyle. Sophocle reveˆt la croyance populaire des couleurs les plus majestueuses, et donne au polythe´isme un degre´ de dignite´ dont on ne L’aurait pas cru susceptible. Euripide enfin, bien que dispose´ toujours a` se mettre en lutte avec les institutions et Les dogmes rec¸us, prouve par le genre meˆme de ses insinuations et de ses attaques, que L’opinion ge´ne´rale e´tait en faveur de la justice des dieux, car, c’est en rapprochant de cette opinion Les traditions ante´rieures, qu’il cherche a` e´branler la confiance et a` semer des germes d’incre´dulite´.〉 a` la hauteur du mot 5 Au ] 〈mais〉 Au la «opinion» la pagination de la fiche utilise´e pour fabriquer le f o 105 majuscule re´crite sur la minuscule 5–6 que ... manifestes ] syntagme ajoute´ dans l’interl. 9 Aristophane ] BC pensait accrocher une note qui n’a pas e´te´ conserve´e 14–15 publique ... religion ? ] publique 〈cinq ou six mots illis.〉 avec ... religion, 〈cinq ou six mots illis. augmenter le respect qu’on avait pour elle〉 ? 16 Le plaisir ] a` la hauteur de ces mots la pagination de la fiche utilise´e pour fabriquer le f o 106

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puni L’auteur te´me´raire qui avilissait ce qu’ils e´prouvaient le besoin de respecter ? Il est ne´cessaire d’e´claircir deux questions, pour re´pondre a` cette difficulte´ dont nous avouons toute la force. D’ou vient l’impunite´ dont Aristophane a` joui, impunite´ qui contraste singulie`rement avec la rigueur excerce´e non seulement contre des incre´dules moins hardis que ce poe¨te, mais contre des philosophes religieux, dont le seul crime e´tait d’avoir devance´ Leurs concitoyens dans une route ou` ceuxci marchaient comme eux mais plus lentement, et avec plus de re´serve ? Comment le peuple chez lequel nous pre´tendons que le sentiment religieux s’e´tait de´veloppe´ de manie`re a` inspirer Pindare et Sophocle pouvait-il applaudir Aristophane ? La premie`re question n’est pas difficile a` re´soudre. Il y avait des lois positives contre L’impie´te´, mais de cela meˆme que ces lois e´taient positives, elles e´taient faciles a` e´luder, chez un peuple jaloux de sa liberte´, qui craignait toujours que L’autorite´ n’empie´taˆt sur les droits des individus et qui, lorsqu’il n’e´tait pas entraine´ par des passions politiques, prenait d’instinct et d’inclination le parti des accuse´s, contre les lois et les magistrats. l’on sait qu’il de´pendit de Socrate, de se soustraire a` la peine capitale. ce fut lui qui voulut mourir, beaucoup plutot que ce ne fut le peuple qui voulut sa mort. Aristophane avait d’ailleurs contre ces lois positives un refuge dans les Traditions meˆme qu’il pre´sentait sous des traits si ridicules, car elles e´taient fonde´es toutes sur L’ancien Polythe´isme ; Les modifications qu’il avait e´prouve´es, n’avaient pas change´ les fables, et le poe¨te pouvait se placer sous leur e´gide, et se mettre a` L’abri de la lettre de la loi a[.] en fait d’opinions et de paroles, il n’y a que L’arbitraire qui ne puisse pas eˆtre e´lude´. et certes, si c’est un avantage, il est amplement balance´, car L’arbitraire, en atteignant tous, e´touffe tout, le bien, comme le mal, l’usage comme l’abus. a

Les impie´te´s des poe¨tes n’e´taient pas soumises a` L’are´opage ou aux juges ordinaires, mais a` des Juges particuliers qui avaient sous leur Jurisdiction tout ce qui regardait Le The´aˆtre, et qui, Le plus souvent, traitaient les auteurs avec indulgence. L’exemple D’Euripide qui avoit re´volte´ Le public par le fameux vers D’hyppolite ou` il semble justifier le parjure, fut traduit devant ces juges et absout par eux. V. Walkenaer et Beck Purip III. 2721. Barthelemy anach. t. VI ch. 71

8 dans une ] a` la hauteur de ces mots la pagination du f o re´crite sur celle de la fiche 〈107〉 41 20 soustraire ] a` la hauteur de ce mot la pagination de la fiche utilise´e pour fabriquer le f o 108 1

La source (le copiste aux longues barres de t) porte bien «Purip», mais il faut lire «Eurip». Voir p. 461, n. 2 ; pp. 677 et 685.

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La seconde question est plus complique´e. c’est en vain qu’on explique Les applaudissemens donne´s a` Aristophane, par la licence accorde´e a` L’ancienne Come´die, et par le plaisir qu’e´prouvaient Les Athe´niens a` voir abaisser tout ce qui e´tait au dessus d’eux. Cette licence et cette disposition du peuple pouvaient garantir Aristophane de la vengeance des hommes puissans ; mais elle[s] ne pouvaient faire que le peuple trouvat du plaisir dans l’avilissement de ses dieux. un peuple De´mocrate se plaıˆt a` voir baffouer ceux qui le dominent. mais aucun peuple ne peut se plaire a` ce que de´grade les dieux qu’il adore, a` moins qu’il ne cesse de Les adorer. C’est donc un autre point de vue, qu’il faut envisager les pie`ces d’Aristophane. ces pie`ces e´taient des parodies des Trage´dies Grecques. Le peuple ne voyait point dans les Bouffonneries de L’auteur Comique une attaque contre les dieux, mais une critique juste et [...]

2–3 a` L’ancienne ] a` la hauteur de ces mots la pagination de la fiche utilise´e pour fabriquer le folio 109

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Chap. 9 Quelques observations sur Aristophane

Au milieu de tous les symptoˆmes que nous avons de´crits, symptoˆmes manifestes d’une religion qui se perfectionne, les Come´dies d’Aristophane ne sont-elles pas un inexplicable phe´nome`ne ? Ces meˆmes Dieux, que tous les poe´tes, tous les historiens travaillent a` de´gager des imperfections qui les de´gradent, Aristophane et d’autres poe´tes comiques, (car ce caracte`re n’est point, comme on l’a cru, particulier a` Aristophane) les representent comme les plus vils, les plus ridicules, les plus vicieux des eˆtres, & ces peintures outrageantes sont couvertes d’applaudissemens. Comment concilier cette approbation publique avec les progre`s que nous croyons apercevoir dans le polythe´isme grec ? Pour qui veut y re´fle´chir murement, la reponse a` cette objection sera faite. Dans quelles traditions le poe`te comique puisait-il les fables qui sembloient livrer a` la de´rision des Athe´niens les principaux objets de leur culte ? Dans l’ancienne mythologie qui racontoit les imperfections & les vices des Dieux. Pourquoi ces vices & ces imperfections, qui n’avoient point choque´ les Grecs du tems d’Home`re, choquent ils les contemporains de Pe´ricle´s ? C’est qu une disproportion immense avoit se´pare´ ces notions grossie´res des ide´es plus raffine´es & plus pures qui les avoient remplace´es. Loin que le succe´s d’Aristophane nous portoit a` conclure que la Religion Grecque n’eut pt ft de progre`s, ce succe´s nous prouvent les progre`s incontestables de cette religion. Les Grecs ne pouvoient plus tole´rer des Dieux immoraux, mercenaires, protecteurs inte´resse´s des crimes, achete´s par des sacrifices, en faveur de la fraude & des iniquite´s des mortels. Chaque applaudissement qu’ils accordoient aux plaisanteries mordantes de l’auteur de Plutus, de la paix. Les nue´es e´toient la confrontation des perfection[ne]mens qui s’e´toient introduits dans leur croyance. Une seconde question neanmoins demeure a` re´soudre. Si les Athe´niens voyoient dans Aristophane une reprobation juste d’anciennes & grossie´res traditions qui les revoltoient, d ou vient la rigueur exerce´e contre des phiE´tablissement du texte : Manuscrit : BCU, Co 3294/3, fos 40–42 (fos 45, 48–49). 11 croyons [ 〈illis.〉 croyons 22 prouvent ] les lettres nt ajoute´es dans l’interl. 24 mercenaires ] 〈mercenaires〉 mercenaires achete´s ] 〈illis.〉 achete´s 30 juste ] la source porte justes

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losophes qui attaquoient par le raisonnement, avec plus de precaution & plus de re´serve, une mythologie que le poe`te comique poursuivoit sans relache avec l’arme plus ace´re´e du ridicule & de l’ironie ? La reponse se trouve a` ce qu’il nous semble dans le caracte`re national des Athe´niens, dans l’habilite´ d’Aristophane qui moins consciencieux que les philosophes echappoit a´ la persecution par les de´saveux, & dans l’action du Sacerdoce, limite´ comme on l’a vu dans son autorite´, mais investi pourtant d’assez d’influence. Amant passionne´ de la Science & des nouveaute´s Enthousiaste des arts qui fesoient ses de´lices & qui ont fait sa gloire, le peuple d’Athe`nes avoit soustrait les poe´tes a` l’Areopage & aux juges ordinaires. Un Tribunal particulier exercoit sur eux sa juridiction. Les lois positives contre l’impie´te´ e´toient faciles a` e´luder, comme elles le seront toujours, pour tout ce qui tient a` la pense´e & a` l’expression dont elle est reveˆtue. l’arbitraire seul peut atteindre les delits de ce genre, & certes si c’est un avantage, il est amplement contrebalance´ ; car l’arbitraire en atteignant tout e´touffe tout, le bien comme le mal, l’usage comme l’abus. Le Tribunal juge des poe`tes les traitait avec indulgence[.] Euripide, coupable dans son Hippolite d une celebre apologie du Parjure, fut poursuivi, mais fut absous (Walkenaer & Beck. Eurip. III. 272. Barthel. Anachars. VI. ch. 71) Aristophane, d’ailleurs, se menageoit contre la severite des lois d’adroits subterfuges. Les traditions memes qu’il rendoit ridicules lui servoient de sauvegardes. Elles e´toient litte´ralement dans l’ancienne mythologie Home´rique. Si, dans la bouche de ses interlocuteurs, elles excitoient la gaite´ du peuple, on ne pouvoit l’accuser de les avoir nie´es ou de´figure´es. Ce peuple meˆme, jaloux de sa liberte´ craignoit toujours qu’une autorite´ qu’il ne supportoit qu avec impatience n’empie´taˆt sur ses droits, & lorsqu’il n’e´toit pas entraine´ par une passion politique, il prenoit d’instinct & d’inclination le parti des accuse´s, auxquels il devoit ses amusemens, & dont une approbation bruyante l’avoit en quelque sorte rendu le complice. Il n’en e´toit pas de meˆme des philosophes. en se de´clarant contre les Traditions grossie`res de l’ancien polythe´isme, ils n’avoient ni l’appui de la foule frivole dont ils ne captivoient point les suffrages sur un the´aˆtre, renferme´s qu’ils e´toient dans le sanctuaire de leurs ecoles, ou dans les bosquets de l’acade´mie, ni la ressource d’en revenir aux traditions qu’ils avoient de´sapprouve´es, car ils les nioient, ou les interpre´toient, ce qui n’appaisoit point les de´vots. apres la repre´sentation [d’une com]e´die d’Aristophane, 10 avoit ] la source porte avoient ne´gligence que nous corrigeons 37-p. 678.1 d’une come´die ... restait-il ] de´chirure du folio, perte de texte ; quelques lettres conserve´es dans la marge

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[que restait-]il ? le souvenir d’un spectacle qui avoit provoque´ la gaite´ des assistans, mais auquel on ne pouvoit attribuer ni re´sultat positif, ni conclusion formelle. Les doctrines d’Anaxagore ou les lecons de Socrate conduisoient au contraire a des consequences directes indiffe´rentes pour la multitude, offensantes pour les pretres. Ces preˆtres enfin, malgre´ leur autorite´ borne´e, en posse´doient assez pour perse´cuter Les philosophes qui n’avoient point l’excuse d’une licence the´atrale ou la garantie d’un succe`s populaire : & cependant il faut le dire, les philosophes ne furent gueres plus souvent persecutes sous le rapport politique que sous le rapport religieux. On bannit dans Anaxagore l’ami de Pe´ricle´s : on tua dans Socrate le reformateur des mœurs & des lois, plutot que celui de la croyance. Aristophane ne vouloit rien re´former. Il se moquoit de tout, mais ne proposoit rien. Le peuple apres avoir ri, n’en courait pas moins dans les temples, n en respectoit pas moins les myste`res, n en celebroit pas moins les Thesmophories. Aristophane d’ailleurs attaquoit la philosophie aussi bien que la religion. Sous ce point de vue il redevenoit l’auxiliaire de la religion qu’il sembloit n’avoir blesse´e que par inadvertance. L’esprit sacerdotal, sous diverses formes est toujours le meˆme. Il traite avec assez d’indulgence les ennemis de ses ennemis. Aristophane qui avilissoit tout, lui paraissoit excusable : car il pardonne la licence [&] ne s’acharne que sur la raison. Nous pensons donc que ni les come´dies d’Aristophane ni l’impunite´ dont il a jouı¨ de´truisent notre systeˆme. Elles le confirment au contraire. Le sentiment religieux s’e´toit e´leve´ au dessus des premie`res notions du Polythe´isme, & quand on l’y ramenoit, il e´toit, suivant la forme sous laquelle on lui pre´sentoit ces notions suranne´es, ou se´rieusement indigne´, & alors Sophocle e´toit son interpre´te, ou frappe´ de son ridicule, & alors il applaudissoit Aristophane. Ce n’est pas que nous pre´tendions nier que dans les succes il n’y eut un germe de de´cadence pour la religion e´tablie. tout le comique de ses pie`ces vient de la disproportion qui existait entre les dogmes et les ide´es. Cette disproportion indique un perfectionnement dans les notions religieuses. or, tout perfectionnement pareil, quand la forme exte´rieure reste la meˆme, est

9 plus souvent persecutes ] 〈perse´cute´s〉 plus ... persecutes 〈sous l〉 corr. ajoute´e dans la marge 10 que sous le rapport religieux ] ajoute´ dans la marge 20 & ] nous ajoutons hypothe´tiquement ; signe qui peut avoir disparu sous une tache d’encre 22–23 donc ... de´truisent ] donc la premie`re lettre re´crite sur une autre illis. 〈qu’aucune des objections que nous avons tache´ d’approfondir〉 que ni ... jouı¨ syntagme ajoute´ dans la marge ne de´trui〈t〉sent 26 & alors ] 〈comme dans〉 & alors 27 son ] lecture hypothe´tique 29 Ce n’est pas ] a` la hauteur de ces mots une note pour le copiste hic dernier succes ] succes 〈D’Aristophane,〉

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un germe de de´cadence. car, chaque perfectionnement en pre´pare un nouveau, et par conse´quent rapproche le moment ou` la forme doit eˆtre brise´e. mais il n’en faut pas conclure qu’elle Le soit encore. elle ne L’e´tait point. du tems D’Aristophane, le germe de destruction qu’un œil attentif de´meˆle, n’e´tait point de´veloppe´. nous arriverons bientoˆt a` L’e´poque de son de´veloppement.

2 la forme ] a` la hauteur de ces mots la pagination de l’ancienne fiche 112

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Ch. 8. Quelques mots sur Aristophane

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Au milieu des symptoˆmes d’une religion qui se perfectionne, les come´dies d’Aristophane ne font-elles pas un inexplicable phe´nome`ne ? Ces Dieux, que tous les poe`tes, tous les historiens travaillent a` de´gager de ce qui les de´grade, Aristophane & d’autres comiques, car ce caracte`re ne lui est point particulier, les repre´sentent comme vicieux, abjects, ridicules, & les peintures outrageantes, sont tole´re´es par les magistrats & couvertes des applaudissemens populaires. N’en devons-nous pas conclure que loin que la religion d’Athe`nes fut devenue plus parfaite, ses absurdite´s fatiguoient l’intelligence des Athe´niens ? Pour qui veut y re´fle´chir murement, la re´ponse a` cette objection sera facile. dans quelles traditions le poe¨te comique puisait-il [les fables]1

E´tablissement du texte : Manuscrit : BCU, Co 3294/4, fo 52 (fo 61).

3 des ] 〈de tous les〉 des corr. dans l’interl.

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9 la ] re´crit sur l〈eur〉

Le texte s’arreˆte la` parce que le grand fo a e´te´ de´coupe´. On reconnaıˆt encore quelques restes de lettres qui attestent les premiers mots de la suite. Le morceau de´coupe´ a servi a` comple´ter le fo 65 (ci-dessous, p. 684). On peut meˆme affirmer que cette ope´ration a e´te´ faite par BC lui-meˆme. Il comple`te dans la marge par les mots «puisait-il» le passage autographe de 25 lignes qui se lit au de´but : «Ch. 9. Quelques mots ... le poete comique». Suit le morceau e´crit par le secre´taire aux longues barres de t.

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Fragment sur Aristophane

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[Fragment sur Aristophane]

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Aristophane ne voulait rien re´former1. tout e´tait en but de sa moquerie. il attaquait la philosophie aussi bien que la religion, dont, sous ce point de vue, il redevenait L’auxiliaire et qu’il semblait n’avoir blesse´e que par inadvertance. L’esprit sacerdotal traite avec assez d’indulgence Les ennemis de ses ennemis. il pardonne volontiers a la licence pourvu qu’elle se tourne parfois avec lui contre la raison. Il est certes essentiel de remarquer que les pie`ces d’Aristophane etoient pour la plupart des parodies de quelque œuvre tragique, & principalement des ouvrages d’Euripide. les grenouilles par exemple, l’une de ses come´dies ou` Bacchus est traite´ avec le plus d irre´ve´rence, sont l’imitation burlesque de Se´me´le´ a, ou` ce Dieu descendoit aux enfers pour en retirer la me`re. dans la paix, des railleries sanglantes sont dirige´es contre les habitans de l’Olympe. mais la paix est une parodie du Bellerophon b. les nue´es invoquant a

b

Trage´die d Eschyle v. Fabricius Biblioth. Grecque. ou d’Euripide suivt le P. Brumoy IV. p. 1722. v. les fragmens d’Euripide dans l’e´dition de Leipsic II. 481. Bellerophon est a` cheval sur Pe´gaze, Trygie sur un Scarabe´e. Jupiter s’empare du scarabe´e ainsi que de Pegaze. ni Trygie ni Bellerophon n’arrivent jusqu’aux dieux parce que ceux ci se sont retire´s au haut de l’Olympe E´tablissement du texte : Manuscrit : BCU, Co 3294/4, fo 66 (fo 68).

2 Aristophane ] pre´ce`de un passage biffe´ 〈des institutions, au moins autant que de la croyance. un hommage exte´rieur, une retraction facile auraient sauve´ sa vie.〉 Aristophane 3 aussi ] 〈tout〉 aussi 6 volontiers a ] ajoute´ dans la marge 6–7 licence pourvu ... raison. ] licence 〈quatre ou cinq mots illis.〉 pourvu ... raison. syntagme ajoute´ dans l’espace au bas de cette fiche 8 Il est ] a` la hauteur de ces mots, e´crite de travers, une note de travail, ou un ajout non utilise´ dans ce morceau ; illis. Or il n’en e´toit pas encore la` sans doute, les succe`s d’Arist. certes ] 〈de plus〉 enfin corr. dans l’interl. 8–9 les impliq. ds la rel. un germe de de´cad. pie`ces ... plupart ] 〈la plus〉 les pie`ces ... e´toient le reste ajoute´ dans la marge 10 Euripide. les grenouilles ] Euripide 〈quelquesfois d’Eschyle〉 l’ajout biffe´ dans la marge 〈Dans〉 les grenouilles 14 les nue´es ] 〈l’endroit ou Trygie〉 les nue´es 15–16 Trage´die ... 172. ] ajoute´ dans la marge 17 v. les fragmens ... l’Olympe. ] note ajoute´e dans la marge. 1

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Brouillon de la main du copiste aux longues barres de t et autographe d’une page sur Aristophane, avec de nombreux ajouts, des corrections, des passages supprime´s. La mise au net se lit ci-dessous, p. 687. Nous avons pre´fe´re´ reproduire les deux folios se´pare´ment, meˆme si le texte est identique. Voir ci-dessus, p. 458.

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14a. Un folio de grand format paginé 66 avec l’ébauche d’un texte sur Aristophane. Constant se sert d’une feuille rédigée par le copiste aux longues barres de t qu’il coupe en deux pour pouvoir intercaler les élargissements autographes et les nom-

14b. breux ajouts (texte et notes) qu’on lit dans la colonne de gauche et sur le papillon collé à droite. Les passages qui venaient s’ajouter sont appelés par des signes. Les signes entre parenthèses désignent des notes. BCU, Co 3294/4, fo 68.

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l’Ether en sont une de l’He´le`ne a. quelquefois c’est Pindare qu’Aristophane travestit en meˆme tems qu’Euripide b. Il en re´sultoit que les Spectateurs dans la memoire desquels les vers des trage´dies d’Euripide etoient grave´s c trouvoient qu’Aristophane se moquoit des poe`tes plutot que des Dieux d. Ils etoient confirme´s dans cette opinion par le soin qu’il prenoit de placer a` cote´ de ses ame`res plaisanteries des e´loges de leur justice & des hommages a` leur dignite´ e. Les comedies d’Aristophane, L’impunite´ dont il a joui, appuyent donc notre syste`me, au lieu de le de´truire. Le sentiment religieux s’e´tait e´leve´ au dessus des premie`res notions du Polythe´isme, et, quand on L’y ramenait, il e´tait, suivant la forme sous laquelle on lui pre´sentait ces notions suranne´es, ou domine´s par le besoin de les e´purer, et alors Sophocle e´tait son interpre´te, ou frappe´ de leurs ridicules, et alors il applaudissait Aristophane.

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Bergler, dans son commentaire sur Aristophane, indique a` chaque fois, l’endroit des Tragiques parodie´es. Cet usage de parodier les Trage´dies dura longtems apre`s Aristophane, & la re´forme de la Come´die ancienne comme on le voit par un fragment de Timocle`s dans Stobe´e. la voracite´ d’Hercule est tire´e de ces deux poe`tes. Pind. Olymp. 182. & le passage d’Alceste (747–760) ou l’intendant d’Admete [raconte] combien Hercule a mange´ de viande & bu de vin. Les trage´dies d’Euripide e´taient grave´es dans la me´moire des Grecs. on voit dans Plutarque (in Eticaˆ) que les grecs prisonniers en Sicile les savoient par cœur. Aristophane, dans les nue´es pre´sente Socrate comme abandonnant les Dieux de l’Etat, & adorant le chaos l’air & les nue´es, qui invoquent l’Ether, leur pe`re (568). les Athe´niens voyoient tout de suite l’allusion a` Euripide, donnant a` l’ether une epithete (He´le`ne 872) qu’Aristophane renforce pour la rendre plus ridicule. Quand il montre Bacchus a` la fin des Grenouilles (1469–1471) protegeant le parjure, c’e´toit une autre allusion au vers fameux pour lequel Euripide avoit e´te´ pousuivi (Hyppolyt. 612). v. dans Plutus, comme il s’e´lance contre l’ide´e que les hommes puissent engager les Dieux par des offrandes a` se rendre complices de leurs crimes (Plut. 1122), & comme il parle affirmativement dans les nuees des punitions ce´lestes contre les mechans & les impies (Nue´es, 1456).

1–2 quelquefois ... Euripide. ] l’ajout et la note qui y est accroche´e sur un papillon 3–4 Il en ... grave´s ] 〈Quelquefois ce n’es〉 Il en ... spectateurs la suite dans la marge, la note accroche´e sur un papillon dans ... grave´es la note Les trage´dies ... par cœur. 4 trage´dies ] lecture hypothe´tique 5 des poetes ] des 〈tragiques〉 poetes corr. dans l’interl. 6–7 des e´loges ] de on ajoute un «s» 〈magnifiques〉 e´loges 8 appuyent donc ] 〈n’infirment〉 appuyent donc corr. dans l’interl. 14–17 Bergler ... Stobe´e. ] note ajoute´e dans la marge Bergler ... Tragiques 〈qu’il a〉 parodie´es. ... usage 〈trois mots illis.〉 de parodier ... Stobe´e. 19 raconte ] restitution hypothe´tique du mot perdu 23 comme ] comme 〈adorant〉 29–32 v. dans ... 1456. ] la note ajoute´e dans la marge

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Quelques mots sur Aristophane

Ch. 9. Quelques mots sur Aristophane

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Si apre`s ce que nous avons dit des Tragiques Grecs, nous pensions avoir besoin d’autres preuves, nous les trouverions dans Aristophane1. On s’est fre´quemment e´tonne´ de ce que ce poe`te, & d’autres Comiques, car ce caracte`re ne lui est point particulier representoient les Dieux comme vicieux, abjects, ridicules, & de ce que ces peintures outrageantes e´toient tole´re´es par les magistrats, & couvertes des applaudissemens populaires. Mais cela meˆme demontre que les absurdite´s du polythe´isme Homerique fatiguoient l’intelligence des Athe´niens, qui avoient besoin d’une croyance plus perfectionne´e. Dans quelles traditions en effet, le poete comique puisoit-il Les fables qui semblaient livrer a` la de´rision Les principaux objets du culte ? n’e´tait-ce pas dans l’ancienne Mythologie qui racontoit les imperfections et les vices des dieux ? pourquoi les vices et les imperfections qui n’avoient point choque´ les grecs du tems D’home`re blessaient-ils maintenant les contemporains de Pe´ricles ? c’est qu’une disproportion immense avoit se´pare´ ces notions Des ide´es qui les avoient remplace´es. loin que les succe`s D’Aristophane nous portent a` nier les progre`s de la religion Grecque, ses succe`s nous prouvent les ame´liorations incontestables qui s’e´taient introduites dans les opinions religieuses. Les grecs ne pouvaient plus Tole´rer des dieux sans morale, mercenair[es] protecteurs inte´resse´s du crime et achete´s par des sacrifices, en faveur de la fraude et de l’iniquite´. chaque applaudissement qu’ils accordaient aux plaisanteries mordantes de L’auteur du Plutus, de la paix, des nue´es, e´tait la confirmation du perfectionnement de leur croyance. E´tablissement du texte : Manuscrit : BCU, Co 3294/4, fos 63–68 (fos 65–67 et 69–71). 3 pensions ] 〈croyons〉 pensions 4 preuves ] 〈illis. de la ve´rite´ que nous voulons e´tablir〉 12 puisoit-il ] ajoute´ dans la col. gauche Co 3294/4 17–18 notions ... qui ] notions 〈grossie`res〉 Des ide´es 〈plus rafine´es et plus pures〉 qui 1

Les folios qui contiennent ce chapitre offrent un texte par endroits tre`s proche de la version de´finitive, mais la disposition des pages est pourtant assez diffe´rente de celle adopte´e par BC pour l’impression. D’autres passages ont e´te´ supprime´s. Il serait difficile de tenir compte dans l’apparat critique de toutes les diffe´rences et des e´carts re´dactionnels qui caracte´risent la re´daction pre´paratoire du chapitre.

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mais comment, demandera-t-on, si les Athe´niens voyaient dans Aristophane une re´probation juste des anciennes traditions qui les re´voltaient, comment se fait-il que les philosophes qui attaquoient par le raisonnement, la mythologie que le poe`te comique poursuivoit sans cesse avec l’arme plus ace´re´e de l’ironie & du ridicule, aient e´te´ perse´cute´s, exile´s, mis a` mort, tandis qu’il demeurait toujours impuni ? Il nous semble facile d’expliquer ce phe´nome`ne. Amant passionne´ de la licence et des nouveaute´s, enthousiaste des arts qui fesoient ses de´lices et qui fait sa gloire, le peuple D’Athe`nes avait soustrait Les poe¨tes a` L’are´opage et aux juges ordinaires a. un Tribunal particulier exerc¸ait sur eux sa juridiction. les lois positives contre l’impie´te´ e´taient faciles a` e´luder, comme elles le seront toujours, pour tout ce qui tient a` la pense´e et a` l’expression dont elle est reveˆtue. L’arbitraire seul peut atteindre les de´lits de ce genre et certes, si c’est un avantage, il est amplement contre-balance´ ; car L’arbitraire, en atteignant tout, e´touffe tout, le bien comme le mal, L’usage comme L’abus. Le Tribunal, juge des poe`tes, Les traitait avec indulgence. Euripide, coupable dans son hyppolyte d’une ce´le`bre apologie du parjure, fut poursuivi, mais fut absous b. Aristophane, d’ailleurs se me´nageait contre les se´ve´rite´s le´gales, d’adroits subterfuges. les traditions meˆmes, dont il se jouait, lui servaient de sauvegarde. elles e´taient Litte´ralement dans l’ancienne mythologie home´rique. Si, dans la bouche de ses interlocuteurs, elles excitaient la gaiete´ du peuple, on ne pouvait accuser le poe¨te de les avoir nie´es ou de´figure´es. ce peuple a

b

Les Athe´niens avoient e´tabli une action contre les impies (γραϕηÁ ν αÁ σε ζειας, POLLUX. VIII, 40) & contre les athe´es (α θεον). Cette action se portait devant le second Archonte, charge´ de tout ce qui regardait le culte, & appele´ l’Archonte Roi, parce qu’autrefois l’administration du culte e´toit une pre´rogative Royale. (POLLUX. ib. 90.) L’Archonte soumettoit l’accusation au Tribunal des He´liastes. Mais les lois contre l’impie´te´ n’atteignoient que ceux qui nioient les dieux ou divulguoient les myste`res. les ouvrages dramatiques ne leur e´toient point soumis, & les auteurs introduisoient sans danger des impie´te´s, pour qu’elles fussent dans la bouche de leurs personnages, & non dans la partie du poeme conside´re´ comme appartenant au poete, par exemple dans les chœurs. WALKENAER et BECK., Euripide, III, 272 ; BARTHELEMY, Anacharsis, VI, ch. 71.

1–7 mais comment ... phe´nome`ne. ] passage a. ajoute´ sur une feuille de´coupe´e dans un grand manuscrit qui observait la meˆme disposition du texte en deux colonnes mais ce mot ajoute´ dans l’interl. infe´r., en dessous des mots biffe´s 〈Demandera-t-on,〉 comment 〈il s’est fait〉 demandera-t-on, si ... une 〈juste〉 re´probation ... comment se fait-il ces quatre mots dans l’interl. que les ce mot re´crit sur 〈ces〉 philosophes qui attaquaient par le raisonnement les trois derniers mots dans la col. gauche 〈ces contradictions avec plus de pre´cision & plus de re´serve, une〉 la ce mot dans l’interl. mythologie ... phe´nome`ne. 5 exile´s ] a` la hauteur de ce mot, dans la col. gauche, la note Placerd 1〈4〉6 20 dont il se jouait ] 〈qu’il rendait ridicule〉 dont il se jouait 28 n’atteignoient ] 〈 ne un mot illis.〉 n’atteignoit

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meˆme, Jaloux de sa liberte´, craignait toujours qu’une autorite´, qu’il ne supportait qu’avec impatience, n’empie´taˆt sur ses droits, et, Lorsqu’il n’e´tait pas entraıˆne´ par une passion politique, il prenait, d’instinct et d’inclination, Le parti des accuse´s auxquels il devait ses amusemens, et dont une approbation bruyante L’avait en quelque sorte rendu le complice. Il n’en e´tait pas de meˆme des philosophes. en se de´clarant contre L’ancien polythe´isme, il[s] n’avaient ni L’appui de la foule, dont ils ne captivaient point les suffrages, renferme´s qu’ils e´taient dans Le sanctuaire de leurs e´coles ou dans les bosquets de L’acade´mie, ni la ressource d’un hommage aux fables qu’ils avaient attaque´es ; ils les niaient ou les interpre´taient, ce qui n’appaisait point les de´vots. apre`s les repre´sentations d’une Come´die D’aristophane, que restait-il ? le souvenir d’un spectacle qui avait provoque´ la gaite´ des assistans, mais auquel on ne pouvait attribuer ni re´sultats positifs, ni conclusions formelles. Les doctrines D’anaxagore, ou les lec¸ons de Socrate, conduisaient au contraire a` des conse´quences directes, indiffe´rentes a` la multitude, offensantes pour les preˆtres. Ces preˆtres, malgre´ leur autorite´ borne´e, en posse´daient assez, pour perse´cuter des philosophes, odieux au peuple comme censeurs de la de´magogie, fatigans pour la classe e´claire´e comme de´noncant sa corruption, importuns a` tous comme re´formateurs. Aristophane1 ne voulait rien re´former : tout e´tait en butte a` sa moquerie ; il attaquait la philosophie aussi bien que la religion, dont il redevenait, sous ce point de vue, l’auxiliaire utile, et qu’il semblait n’avoir blesse´e que par

5 bruyante ] 〈brillante〉 bruyante 6–7 contre L’ancien ] contre 〈les traditions de〉 L’ancien 7 il[s] n’avaient ] il n’avai〈t〉ent 9–10 ressource ... ils ] ressource 〈d’un souvenir aux traditions〉 d’hommages aux fables les trois derniers mots dans la col. gauche qu’ils avaient 〈de´sapprouve´es ; car〉 attaque´es ; ils 10–11 interpre´taient ] 〈de´figuraient〉 interpre´taient 16 preˆtres. ] en surcharge sur un mot illis. 16 preˆtres. ] preˆtres 〈enfin〉 18–20 odieux ... re´formateurs. ] passage dans la col. gauche pour en remplacer un autre biffe´ odieux ... fatigans pour 〈importune a`〉 la ... comme 〈deux mots illis.〉 de´noncant ... re´formateurs. le passage biffe´ est le suivant 〈qui illis. point illis. d’une licence The´atrale, ou la garantie d’un succe`s populaire et cependant, il faut le dire, les philosophes furent perse´cute´s sous le rapport politique que sous le rapport religieux. on le voit (?) dans anaxagore, L’ami de Pe´ricles ; on tua, dans Socrate, Le censeur auste`re des mœurs, des habitudes, des institutions, au moins autant que de la croyance. un hommage exte´rieur, une re´traction facile auroient sauve´ sa vie.〉 22 aussi ] 〈tout〉 aussi 23 utile ] omis 22–23 dont ... vue, ] dont, sous ... vue, il redevenait

1

Avec le nom d’Aristophane commence le long passage (p. 687, ligne 21 – p. 689, ligne 15) pour lequel nous posse´dons l’e´bauche, en grande partie autographe sur le fo 68, de ce manuscrit. Voir ci-dessus, pp. 681 et 684.

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inadvertance. L’esprit sacerdotal traite avec assez d’indulgence les ennemis de ses ennemis ; il pardonne volontiers a` la licence, pourvu qu’elle se tourne parfois avec lui contre la raison. Il est enfin essentiel de remarquer que les pie`ces d’Aristophane e´taient, pour la plupart, des parodies de quelqu’œuvre tragique et principalement des ouvrages D’Euripide. Les Grenouilles, par exemple, l’une de ses come´dies ou` Bacchus est traite´ avec le plus d’irre´ve´rence, sont l’imitation burlesque de Se´me´le´ a, ou` ce dieu descendait aux enfers, pour chercher sa me`re. Dans la paix, des railleries sanglantes sont dirige´es contre les habitans de L’olympe, mais la paix est une parodie de Belle´rophon b. Les nue´es invoquant L’e´ther, en sont une de l’Helene c. Quelquefois c’est pindare qu’Aristophane Travestit, en meˆme tems Qu’Euripide d.

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Trage´die d’Eschyle (v. Fabric. Bibliothe`que Grecque), ou d’Euripide, suivant le pe`re Brumoy, T. 6. p. 70. V. les fragmens d’Euripide, dans l’e´dition de Leipzick, T. 2 p. 481. Belle´rophon est a` cheval sur Pe´gase, Trige´e sur un Scarabe´e, Jupiter s’empare du Scarabe´e, ainsi que de Pe´gase. ni Trige´e, ni Belle´rophon n’arrivent jusqu’aux dieux, parce que ceux-ci se sont retire´s au haut de L’olympe BERGLER, dans son commentaire sur Aristophane, indique a` chaque instant Les passages des Tragiques qu’il a parodie´s. L’habitude de ces parodies dura long tems apre`s Aristophane, et la re´forme de la come´die ancienne, comme nous l’apprend un fragment de Timocle`s, dans Stobe´e. La voracite´ D’hercule est emprunte´e de ces deux poe¨tes. V. Pindare, olymp. I. 82, et le passage D’alceste, V. 747–760, ou` L’intendant D’adme`te suppute combien Hercule a bu de vin et mange´ de viande.

2 volontiers a` ] ajoute´ dans la col. gauche 2–3 pourvu ... raison.] 〈plusieurs mots illis. raison〉 pourvu ... raisons. syntagme ajoute´ dans l’espace libre de la dernie`re ligne 4 enfin ] dans l’interl. au-dessus de 〈de plus〉 les pie`ces ] 〈la plus〉 les pie`ces 5 pour la plupart ] dans la col. gauche 8 chercher ] en retirer 10 Les nue´es ] 〈l’endroit ou` Tryge´e〉 les Nue´es 11 l’Helene ] L’heleine 12–13 Quelquefois ... Euripide. ] phrase ajoute´e avec la note sur un papillon ; dans le texte de la note, perte du verbe «suppute» ; a` la fin on trouve a mange´ de viande & bu de vin. 14–15 Trage´die ... 70. ] note ajoute´e dans la col. gauche Tragedie ... 16–19 V. ... L’olympe ] note ajoute´e dans la col. gauche ; BC e´crit Euripide suivt ... 172. toujours Tryge´e 20–23 Bergler ... Stobe´e. ] note ajoute´e dans la col. gauche Bergler ... chaque fois, l’endroit des Tragiques 〈qu’il a〉 parodie´s. Cet usage 〈d’imiter les Trage〉 de parodier les Tragedies dura ... ancienne, comme on le voit par un fragment ... Stobe´e.

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Il en re´sultait que les spectateurs, dans la me´moire desquels les vers du lyrique et surtout du tragique e´taient grave´s a, trouvaient qu’Aristophane se moquait de ces poe¨tes, plutoˆt que des dieux b. ils e´taient confirme´s dans cette opinion, par le soin qu’il prenait de placer a` coˆte´ de ses ame`res plaisanteries, des e´loges de leur justice et des hommages a` leur dignite´. Voyez dans Plutus, comme il s’e´le`ve contre l’ide´e que les hommes puissent engager les dieux par leurs offrandes a` se rendre les complices de leurs crimes c ; et, comme dans les nue´es, il parle affirmativement des punitions ce´lestes contre les me´chans et les impies d. Les Come´dies D’Aristophane, l’impunite´ dont il a joui appuient donc notre syste`me, au lieu de le de´truire. le sentiment religieux des Grecs s’e´tait e´leve´ au-dessus des premie`res notions du polythe´isme, et, quand on l’y ramenait, il e´tait, suivant la forme sous laquelle on lui pre´sentait ces notions suranne´es, ou domine´ par le besoin de les e´purer, et alors Sophocle e´tait son interpre`te, ou frappe´ de leur absurdite´, et alors il applaudissait Aristophane. Cette explication nous parait plus naturelle et plus satisfaisante que celle qu’on cherche dans la jouissance pre´tendue qu’e´prouvaient, dit-on, les Athe´niens a` voir rabaisser ce qui e´tait au-dessus d’eux. Cette disposition garantissait Aristophane de la vengeance des hommes puissans ; mais le peuple ne pouvait se plaire a` l’avilissement de ses dieux. Un peuple de´mocrate aime a` voir Bafouer ceux qui le dominent, mais aucun peuple ne peut se complaire a` ce que l’on de´grade les eˆtres qu’il adore, a` moins qu’il ne cesse de les adorer. or, Les Athe´niens n’en e´taient pas a` ce point. Sans doute a

b

c d

On voit dans Plutarque, Vie de Nicias, que les grecs prisonniers en Sicile savaient par cœur les Trage´dies D’Euripide. Aristophane, dans les nue´es, pre´sente Socrate comme abandonnant les dieux de l’e´tat et n’adorant que le chaos, l’air et Les nues qui invoquent L’E´ther leur pe`re (v. 568), les Athe´niens reconnaissaient tout de suite L’allusion a` Euripide, donnant a` l’E´ther une e´pithe`te qu’Aristophane renforce, pour la rendre plus ridicule (He´le`ne, v. 872). Quand il montre Bacchus (grenouilles, v. 1469–1471) prote´geant le parjure, c’e´tait une autre allusion au vers fameux pour lequel Euripide avait e´te´ poursuivi. Plutus, 1122. nue´es 1456.

1–2 Il en re´sultait ... grave´s ] 〈Quelquesfois il n’es〉 Il en re´sultait ... spectateurs la suite dans la col. gauche dans la memoire desquels les vers du lyr. et surtout d’Euripide e´toient grave´s sur un papillon une autre version du meˆme texte qui passera dans la note Les trage´dies d’Euripide e´toient grave´es dans la me´moire des Grecs. on voit dans Plutarque (in Niciaˆ) que les grecs prisonniers en Sicile les savoient par cœur. 3 de ces poe¨tes ] des 〈tragiques〉 ces poetes corr. incomple`te 5–9 Voyez ... impies. ] passage et notes ajoute´s dans la col. gauche V. dans ... & comme il parle affirmativement dans les nuees des punitions ... impies. 10 donc ] ajoute´ dans l’interl. 26–31 Aristophane ... poursuivi. ] la note sur un papillon Aristophane ... comme 〈illis.〉 abandonnant ... l’air & les nue´es, ... Athe´niens voyoient tout de suite ... ridicule le renvoi a` He´le`ne ajoute´ dans la marge Quand ... Bacchus a` la fin des Grenouilles (1469– 1471) prote´geant ... poursuivi (Hyppolyt. 612).

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Les succe`s D’Aristophane impliquaient un germe de de´cadence dans la religion. le Comique de ses pie`ces e´tait fonde´ sur la disproportion qui existait entre l’immobilite´ du dogme et le perfectionnement de l’ide´e. une disproportion pareille, lorsque la forme reste la meˆme, est un principe de mort pour une croyance ; car chaque perfectionnement en pre´pare un nouveau, et, par conse´quent, rapproche le moment ou` la forme doit eˆtre brise´e. Mais il n’en faut pas conclure qu’elle le soit encore : elle ne l’e´tait point du tems d’Aristophane. Le peuple, apre`s avoir ri, n’en courait pas moins dans les temples, n’en respectait pas moins les myste`res. Le germe de destruction qu’un œil attentif de´meˆle, n’e´tait point de´veloppe´ a.

a

nous e´tions tente´s de placer ici l’examen de l’influence qu’Aristophane exerc¸a sur la perse´cution & la mort de Socrate, influence analyse´e avec beaucoup de sagacite´ par M. Cousin, dans ses fragmens philosophiques, p. 151–159. mais il nous a paru que cet examen entreroit plus naturellement dans le dernier livre de notre ouvrage. La` cherchant a` tirer des ve´rite´s que nous croyons avoir de´montre´es, des re´sultats clairs & applicables, nous aurons occasion de faire voir au lecteur comment la moindre parcelle de l’esprit sacerdotal, se glissant, meˆme par une voye indirecte, dans les religions inde´pendantes des preˆtres, a des effets de´plorables.

11–18 nous e´tions ... de´plorables. ] note ajoute´e au bas de la page par BC ; a` la fin une phrase biffe´e illis. 〈Nous plusieurs mots illis. toute investigation sur les plusieurs mots illis.〉

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Plan du chapitre XI

[Plan du chapitre

XI]

morale. 11.

fo ?

1. 2. 3. 4. 5. 6. 7. 8. 9. 10. 11. 12.

les perfectionnemens du Polythe´isme remarquables en tout1. surtout en morale. la morale s’introduit graduellement dans le Polythe´isme libre la religion y sanctionne, mais n’y modifie pas la morale. Circonstances ou` la morale est sacrifie´e a` la religion. mais elle reste inde´pendante en principe ge´ne´ral La puissance des Dieux toujours borne´e dans le polythe´isme inde´pendant laisse la morale libre. dans le polythe´isme sacerdotal, la morale de bonne heure un corps de doctrine, vendidad, havamaal &ca. alors deux espe`ces de crimes & deux espe`ces de devoirs. faits a` l’appui peu de devoirs factices dans le Polythe´isme grec. Beaucoup dans les religions sacerdotales

70. 70. 70. 70. 70–71. 71–72 72–73 74. 74. 74–75. 75 75.

E´tablissement du texte : Manuscrit : BCU, Co 3294/4, sans foliotage (fo 74). 11 8. ] 〈8. le criminel sait que la religion desapprouve les actions immorales〉 8. le chiffre re´crit sur 9. Co 3294/4 1

Ce folio, fabrique´ de deux feuilles qui ne proviennent pas du lot du manuscrit des Discours a` la Chambre, est pre´cieux pour la chronologie du travail de re´daction du livre XII de l’ouvrage sur la religion. La partie supe´rieure porte au verso une ligne de l’adresse d’une lettre envoye´e a` BC le 12 avril 1830. Ceci de´finit la date post quem pour le texte de BC, et date en meˆme temps certains folios du dossier de ce livre XII. Le plan du chapitre XI sur les rapports de la morale avec la religion cite un certain nombre de folios que nous posse´dons, p. ex. le fo 74 de Co 3459 (= fo 25 de notre foliotage) ou le fo 73 de Co 3294/4 (= fo 77), de sorte que nous pouvons dire que cet e´tat du manuscrit Co 3294 existait avant la date atteste´e par la lettre. Le plan ne cite jamais un folio du manuscrit de grand format (voir ci-dessus, p. 66, no 13) bien que plusieurs folios conserve´s de ce manuscrit concernent la meˆme matie`re. Ce manuscrit est donc datable apre`s le 12 avril 1830, et il est poste´rieur au folio 74 de Co 3294/4. Le plan pourrait eˆtre conside´re´ comme une tentative d’arreˆter de´finitivement la marche de l’argumentation. Nous savons en outre par la page de titre fautive du t. IV qu’on trouve a` la Bibliothe`que universitaire de Tübingen que la composition de ce volume par l’e´diteur Didot e´tait en cours avant la Re´volution de Juillet 1830. Cela sugge`re l’hypothe`se selon laquelle la composition du t. IV de De la Religion e´tait acheve´e avant la Re´volution. C’est avant cette date que le manuscrit pour l’imprimeur (ci-dessus, p. 58) a duˆ eˆtre acheve´.

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13. Inconveniens de cette multiplication des occasions de devenir coupable. 14. Certain avantage pourtant des devoirs inutiles. 15. mais ce mouvement ne doit pas etre soumis a´ une autorite´ exte´rieure 16. Pretres ne se bornant pas a` prescrire des actions inutiles, mais des criminelles. 17. Roi d’Egypte puni pour avoir fait du bien. 18. Les crimes interdits dans le polythe´isme Sacerdotal, avec la reserve d etre commis si les Dieux le veulent. 19. La religion placant l’homme au dessus des devoirs moraux. 20. Influence funeste des vues des Dieux dans le polythe´isme sacerdotal. 21. L’ignorance un crime. 22. agitation & e´garemens de l’homme quand la morale a la merci des pretres 23. Rites & pratiques qui lavent du pe´che´.

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[Fragments du livre XI, chapitre II] 1826

15. Recto d’un folio reconstitué d’un manuscrit de grand format du livre XI, chapitre II, «Des sacrifices humains». Les folios 120vo, 13ro et 12ro tirés du dossier composite Co 4725 représentent la troisième page d’une double-feuille. On voit dans la colonne de droite, en haut, trois lignes du texte principal, puis, dans la colonne de gauche, plus bas, une note de travail sténographiée, sans rapport avec le texte à droite et sans doute postérieur au manuscrit reconstitué. BCU, Co 4725, fos 120vo (col. de gauche), 13ro et 12ro (col. de droite).

Introduction

Les fragments qui suivent appartiennent a` un manuscrit que nous identifions avec celui qui est mentionne´ dans le Carnet des notes. On y lit : «1. Copier les chap. composant le livre X.» Cette note, datable des environs du 25 juin 1826, concerne le travail au tome III de De la Religion, car elle est e´largie par deux autres : «2. relire tout le 3e vol. ainsi re´dige´ & faire une suite exacte d’ide´es. 3. Classer dans ce 3e vol. tout ce qui s’y rapporte dans mes mate´riaux»1. Ce manuscrit de´finit une e´tape du travail de re´daction au sens ou` Constant passe de l’e´tat mobile des manuscrits sur fiches a` une pre´sentation plus livresque de son ouvrage. Nous devons penser qu’un manuscrit de grand format, constitue´ de doubles feuilles plie´es au milieu pour obtenir quatre pages, remplace la pre´sentation provisoire, mais plus souple, des fiches. Les pages sont divise´es en deux colonnes : celle de gauche restera blanche, celle de droite sera consacre´e au texte avec les notes au bas des pages. Les colonnes de gauche e´taient re´serve´es a` des corrections ou des ajouts. La reconstitution de cet arrangement du texte est mate´riellement assure´e par les fragments dont nous disposons. Ce que nous ne pouvons pas reconstituer en revanche est le volume du manuscrit. Comprenait-il le texte inte´gral de l’ancien livre X qui deviendra le livre XI ? C’est possible. Les fragments appartiennent au chapitre II de ce dernier livre. Il y avait donc des pages qui pre´ce´daient et probablement une suite. La restructuration du t. III de l’ouvrage fait de ce manuscrit un outil pour la re´daction du t. IV. Les fragments qui nous sont parvenus prouvent que la formulation des hypothe`ses soutenues par Constant est de´ja` relativement proche de celle que nous lisons dans la version de´finitive, mais que l’arrangement en est encore assez e´loigne´. La refonte du texte qu’on lit dans le manuscrit en cahiers est un pas de´cisif vers la pre´sentation imprime´e. Le manuscrit que nous entrevoyons graˆce aux fiches retrouve´es dans un dossier sans unite´ et qui nous ont permis d’en reconstituer quelques folios sera abandonne´ : Constant le de´coupe pour en faire des fiches de travail.

1

OCBC, Œuvres, t. XVII, p. 567. La suite d’ide´es mentionne´e ici n’est pas conserve´e. Les fragments de documents de ce genre qu’on trouve dans le t. XIX des OCBC (pp. 547–572) concernent le livre VI. La classification des mate´riaux a e´te´ re´alise´e dans le dossier intitule´ Recherches sur l’Inde qu’on trouve dans le meˆme volume, pp. 582–616.

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De la Religion, IV – Textes comple´mentaires

Nous pre´sentons ici ces folios comme un te´moignage des techniques du travail de re´daction d’un texte, exemple typique de l’e´criture de Constant. Les pages n’apportent rien de nouveau par rapport a` ce qu’on lit dans la version imprime´e. Nous renvoyons aux notes des passages de´finitifs pour les explications des de´tails e´voque´s par Constant dans sa de´monstration. E´tablissement du texte Nous reproduisons les fragments du texte du manuscrit reconstitue´ en comple´tant certains passages trop mutile´s par des phrases tire´es du texte publie´ par Constant. [Un manuscrit de´truit du livre XI] BCU, Co 4725, fos 12–15, 120 et 138. 6 fos, 7 pp. a., de formats variables. Les fragments faisaient partie d’un manuscrit de doubles feuilles de grand format, plie´es au milieu pour obtenir quatre pages. Celles-ci e´taient divise´es en deux colonnes par un pli, celle de droite pour le texte, celle de gauche pour des corrections et ajouts. Il s’agit du manuscrit mentionne´ dans le Carnet des notes a` une date autour du 25 juin 1826. Date propose´e : juin 1826. Hofmann, Catalogue, non re´pertorie´.

1

Signalons encore un rapprochement possible avec un folio du meˆme dossier que nous avons transcrit dans le tome pre´ce´dent (OCBC, Œuvres, t. XIX, p. 543, texte no 65). Il s’agit du fo 111 de Co 4725. La dernie`re phrase du fo 15ro («Les Rites Sanglans [...]») sugge`re d’e´tablir un rapport avec ce fo 111 (a` rapprocher dans le t. III de De la Religion au livre VII, chap. V, p. 319) parce que Saturne et les sacrifices sanglants sont e´galement e´voque´s cidessus, livre XI, chap. II, p. 272. L’argumentation traite dans les deux cas des meˆmes faits, bien que les contextes soient diffe´rents. Le folio 111 n’appartient pas au manuscrit de grand format dont nous publions ci-dessous quelques fragments.

Fragments du livre XI, chapitre II

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[Fragments du livre XI, chapitre II]

fo 15ro

fo 14ro

[...] Les sacrifices humains se prolonge´rent plus longtems en Arcadie que partout ailleurs a. La civilisation Grecque entouroit l’Arcadie sans y pe´ne´trer. Plusieurs vestiges de la religion des premiers Pe´lages, religion Sacerdotale, comme on le verra plus loin, paraissent s’y eˆtre conserve´s. Mais dans tout le reste de la Gre`ce, les Divinite´s dont le culte se composoit spe´cialement de sacrifices humains, e´tait d’une origine e´trange´re. Les Rites sanglans [...]1 [...] b [...] c. [...] d. [accoutu] me´es ni a` ses formes monstrueuses ni a` ses rites fe´roces e. a b c d e

fo 13ro

fo 12ro

[Porphyre. De non edend. animal. Lib I.] Apollod. fragm. Heyne. Suidas in Lycurg. Creutzer2 Lucien fait dire a Junon que Diane en vivant chez les Antropophages avoit pris leurs mœurs sanguinaires. Dial. des Dieux. Dial. 21. Je ne puis croire dit Iphige´nie dans Euripide (Iph. en Taur. 3385–389) qu’une De´esse se plaise a` voir re´pandre le sang des hommes Pausanias raconte fort en de´tail comment les sacrifices humains furent institue´s en Gre`ce & comment ils y furent abolis. (Achaie. 19) La traditionqui attribue leur origine aux amours de Me´nalippe & de Cometho dans le temple de Diane, & l’aventure d’Eurypile qui les fit cesser en rapportant de Troye une statue de Bacchus sont e´trange`res a` notre sujet. Ce qui nous inte´resse c’est de remarquer que ces sacrifices cesse`rent en Achaı¨e, au retour des Grecs apre`s le sie´ge de Troye, c’est a` dire de`s les premiers tems de l’histoire Grecque. Le meˆme Pausanias, en nous informant que Lycaon immola un enfant a` Jupiter Lycaon ajoute qu’au milieu de la ce´re´monie ce Prince coupable fut change´ en Loup. (Paus. Arcad. 2) ce qui prouve que les Grecs croyoient leurs Dieux meˆmes indigne´s de ces pratiques inhumaines. E´tablissement du texte : Manuscrit : BCU, Co 4725, fos 15ro, 14ro, 13ro, 12ro, 120ro et 120vo et fo 138ro.

4 religion ] religion 〈sacerdo〉 17 hommes ] BC ajoute apre`s ce mot une croix, symbole pour une correction a` faire ou un ajout a` inte´grer ; nous ne connaissons pas le texte 24 Jupiter ] Jupiter Lycaon BC re´pe`te le nom par inadvertance 1 2

Les passages perdus du texte correspondent, en ce qui concerne le contenu, a` ce qu’on lit cidessus, p. 272. Les notes le prouvent. Nous ne connaissons pas le passage de l’ouvrage de Creuzer auquel BC voulait renvoyer.

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698 fo 13ro

De la Religion, IV – Textes comple´mentaires

Tous les sacrifices de ce genre dans l’histoire Grecque ou Romaine a sont explique´s [par des haines nationales.] [Elle repose a` la ve´rite´ sur un anachronisme, puisqu’elle fait remonter a` une e´poque beaucoup trop recule´e cette abolition, qui ne date, pour Lace´de´mone, que du temps de Lycurgue. Mais cet anachronisme n’en de´montre que mieux le de´sir qu’avaient les Grecs de rejeter dans une antiquite´ fabuleuse des rites dont ils rougissaient pour leurs anceˆtres] b [...]

a b o

o

f 120r

Il n’est pas invraisemblable que le 8e travail d’Hercule fesant de´vorer Diome`de Roi de Thrace par ses cavales que ce Prince fe´roce nourrissoit de la chair des [e´trangers, est encore une tradition de´figure´e de l’abolition de ces sacrifices]1. [...]2 [Lactance (Inst. div. I, 21) pre´tend qu’a` Salamine, dans l’ıˆle de Chypre, on immolait un homme, jusqu’au] re`gne d’Adrien, en me´moire d’un Sacrifice pareil institue´ par Teucer. Porph. de Abst. II. Euseb. præp. evang. IV. 16. Mais la date seule que Lactance assigne a` l’abolition de ce sacrifice prouve que le fait est faux. Les Romains qui prohibe`rent avec tant de ze`le des les tems de Ce´sar les sacrifices humains partout ou` leurs armes pe´ne´tre`rent, ne les auroient pas tole´re´s jusqu’au re`gne de leur 12e Empereur. Tacite qui parle de la construction du temple Salamine par Teucer ne dit rien de ce sacrifice. Tacit. Ann. iii. XI. Cyrille affirme qu’il cessa sous Diphilus qui ordonna qu’au lieu d’un homme on immolerait un bœuf. S. Cyr. in Julian IV Bayle art. Teucer3.

1 genre ] genre 〈que〉

1 2 3

Une grande partie des arguments se retrouvera dans la version de´finitive du texte principal. Les renvois aux sources passeront dans les notes, quand ils ne seront pas supprime´s. Le texte de la note n’est pas conserve´. Nous supposons qu’elle e´tait identique a` la note b, cidessus, p. 274. Le texte perdu correspond probablement au paragraphe qu’on lit ci-dessus, p. 274, lignes 1–5. Le de´but de la note est sans doute identique au de´but de la note a de cette meˆme page. Les restitutions sont hypothe´tiques. Le verso du fo 120 porte une note ste´nographie´e sur les rapports de la religion avec les institutions sociales. Cette note appartient probablement au contexte des analyses des poe`mes home´riques qu’on lit dans le t. III de De la Religion (voir OCBC, Œuvres, t. XIX, pp. 385 et 418, ou` l’on trouve des formulations utilise´es dans cette note). On y lit : «Reprenons maint. le fil de nos recherches, & trois mots illis., peut-eˆtre, apre`s un verbe, les deux mots nos idees puis sur l’et social des Grecs lors des tems home´riq. & sur la forme relig. qui doit re´sulter de cet ett. soc.»

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Fragments du livre XI, chapitre II

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[Tous les sacrifices qui de loin en loin se reproduisent dans l’histoire grecque s’expliquent par des haines nationales,] des dangers pressans, en un mot par des circonstances qui sortoient de l’ordre habituel. Tout de´montre que ce n’e´toit pas une institution consacre´e, mais tantot une de´plorable imitation d’usages e´trangers, tantot l’e´garement d’un fanatisme subit & momentane´. l’horreur des Grecs pour ces pratiques e´clate dans toutes les expressions de leurs historiens. Me´ne´las, dit He´rodote, ne reconut les bienfaits des Egyptiens que par des outrages. retenu chez eux par les vents contraires, il osa prendre pour victimes deux enfans du pays a

a

1

Herod. II. 119. v. la note de Larcher. Age´silas e´tant en Aulide ne voulut offrir a` Diane qu’une biche au lieu d’une vierge, bien que les habitans s’e´criassent que la deesse vouloit le sang des homes & non des animaux. Plutarch. Les pre´sages ayant e´te´ menacans dans un sacrifice que Pelopidas offroit, on lui proposa d’appaiser les Dieux par des victimes humaines. mais il rejeta ce conseil avec horreur. Plutarch. v. sur les sacrifices humains a` la bataille de Leuctres, sur le songe de Pelopidas & sur d’autres faits Mein de vo Deo p. 209– 2111.

Le texte de la note comprend des phrases et des faits qu’on lit dans la version de´finitive du texte principal.

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16. Verso du folio reconstitué (illustration 15), la quatrième page d’une double-feuille. Le bord du papier de la grande feuille est à gauche, le folio 120ro montre à droite l’ancien pli du papier. La colonne de gauche (fos 13vo et 12vo) est blanche, mais le bord droit en haut conserve des traces de lettres du texte porté dans la colonne de droite. Il s’agissait probablement de la note dont on lit un fragment sur le folio 120ro. BCU, Co 4725, fos 13vo, 12vo (col. de gauche) et 120ro (col. de droite).

Pre´face du 4e & dernier volume avant juillet 1830

Introduction

Ce texte, re´dige´ sans doute au moment ou` Constant lanc¸ait l’impression du quatrie`me volume, est un des rares documents qui permettent d’affirmer avec certitude que ce quatrie`me volume de De la Religion devait aussi eˆtre le dernier. Il permet e´galement de dire que la dispositon de la matie`re observait encore sans aucun doute le plan qu’on peut de´duire du manuscrit en cahiers. Le livre XI sur les principes fondamentaux des religions sacerdotales aurait e´te´ suivi du livre XII sur les premiers myste`res de la religion grecque. On peut aussi supposer que Constant pre´voyait de joindre un dernier livre avec les re´sultats de ses recherches. Le fait qu’il inscrive le texte de sa pre´face dans un cahier cousu, comme pour tous les livres du quatrie`me volume, sugge`re l’hypothe`se qu’il travaillait a` la version de´finitive de l’ouvrage avec le manuscrit en cahiers. Le de´but du texte annonce pourtant, en parlant des «deux lacunes», qu’un lecteur attentif pourra ressentir le proble`me qui poussera Constant, alors que l’impression du livre est en cours, a` modifier le plan de son ouvrage. Cette de´cision rappelle les difficulte´s qui ont pese´ sur l’impression du tome III, et entraıˆne les meˆmes conse´quences. Il faut re´diger d’urgence un nouveau livre XII qui exposera «la marche du polythe´isme inde´pendant des preˆtres». La suite du titre, «jusqu’a` son plus haut point de perfectionnement», indique qu’il sera seulement question du polythe´isme grec. La nouvelle structure fait exploser l’ouvrage : il faut pre´voir un cinquie`me volume qui s’ouvrira par l’ancien livre XII, de´sormais XIII, et sera suivi d’un livre traitant de la religion scandinave, e´galement annonce´ par le texte de la pre´face. L’ouvrage se termine par le livre XV, qui exposera les re´sultats de l’ensemble. La pre´face annonce aussi que Constant projette une suite a` ses recherches sur la religion : «Nous ne renonc¸ons point toutefois a` completter notre ouvrage : le travail ulte´rieur qu’il exigeroit est presque acheve´». C’est une allusion a` son e´tude sur le polythe´isme de l’Antiquite´, soit les polythe´ismes grec et romain. Matter e´ditera en 1833 les chapitres sur le polythe´isme romain, et ceux sur le polythe´isme grec passeront dans le quatrie`me volume. Constant pouvait donc, et les manuscrits conserve´s du livre XII l’attestent clairement, utiliser des mate´riaux e´labore´s pour re´aliser les nouvelles structures.

704

De la Religion, IV – Textes comple´mentaires

Cette observation nous sugge`re de proposer pour le texte de cette pre´face une datation d’avant juillet 1830, sans qu’on puisse la pre´ciser davantage. Il peut s’agir du mois de mai ou juin de cette anne´e-la`. E´tablissement du texte Nous reproduisons le manuscrit en respectant les particularite´s de l’orthographe. Les variantes re´pertorient les corrections et changements parfois conside´rables du texte. Nous indiquons dans la marge les nume´ros des pages, bien que le manuscrit ne porte pas de foliotage. Celui de la bibliothe`que est ajoute´ entre parenthe`ses. BnF, NAF 18823, fos 113–120. Pre´face du 4e & dernier volume. 1 cahier cousu du format du manuscrit en cahiers, fabrique´ de 4 folios de grand format plie´s au milieu pour obtenir un cahier de 16 pages, 200 × 150 mm. La disposition du texte est la meˆme que dans le manuscrit en cahiers ; le texte se lit dans la col. de droite, celle de gauche e´tant re´serve´e pour des corrections ou des ajouts. Le texte comprend 8 pp. a., les ` la p. 3, un papier colle´ couvre environ quatre derniers folios sont blanc. A 15 lignes du texte qui n’a pas e´te´ remplace´ par un autre. Date propose´e : avant juillet 1830. Hofmann, Catalogue, IV/227.

Pre´face du 4 e et dernier volume 1 (113ro)

2 (113vo)

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705

Pre´face du 4e & dernier volume

Nous publions enfin le 4e & dernier volume de cet ouvrage. Les personnes qui le liront attentivement s’apercevront peut-eˆtre de 2 lacunes. Pour de´crire tous les de´veloppemens des formes religieuses, nous aurions du traiter des ame´liorations ulte´rieures du polythe´isme Grec, des modifications du polythe´isme Romain, des re´volutions du polythe´isme scandinave, & montrer ensuite le re´sultat de l’action constante du sentiment sur la forme. mais nous n’avons voulu a` aucun prix exe´der le nombre de volumes que nous avions promis, & au fond le cercle que nous nous e´tions trace´ nous semble assez complettement parcouru. L’opposition qui se fait de´ja` remarquer entre les progre`s de la religion grec que, depuis le fe´tichisme des Pelages jusqu’a` la mythologie d’Home`re & l’e´tat stationnaire des croyances soumises aux preˆtres, signale suffisament la marche de l’intelligence quand elle est libre, & son immobilite´ quand elle est esclave. Nous ne renoncons point toutefois a` completter notre ouvrage : le travail ulte´rieur qu’il exigeroit est presque acheve´. Il ne sera pas, nous le pensons, sans quelque importance. Rien alors ne demeurera vague ni obscur. Place´s, par notre e´poque, entre deux e´tats de socie´te´ dont l’un finit & dont l’autre commence nous aurons retrace´ fictivement un passe´ qui n’est plus, & nous indiquerons non moins clairement un avenir qui n’est pas encore. On paraıˆt ne pas le deviner jusqu’ici. Car les Gouvernemens lui resistent, & les peuples meˆmes le redoutent. Re´sistance vaine, terreur chimerique qui si elle e´toit fonde´e seroit inutile. les destine´es doivent s’accomplir. Nous avons apporte´ dans ce dernier volume la meˆme impartialite´ que dans les pre´ce´dens, nous mettant e´galement peu en peine d’eˆtre de´daigne´s par ceux qui se font de l’incre´dulite´ dogmatique je ne sais quelle gloire, ou de´nonce´s par l’autre, qui, vivant de l’autel, voudroient que l’autel, aujourd’hui comme jadis, fut le pouvoir unique & tint l’intelligence captive. E´tablissement du texte : Manuscrit : BnF, NAF 18823, fos 113–120.

5 ulte´rieures ] ajoute´ dans la marge 10 de´ja` ] ajoute´ dans l’interl. 11–12 depuis ... d’Home`re ] syntagme ajoute´ dans la marge 19 fictivement ] mot partiellement couvert d’une tache d’encre

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De la Religion, IV – Textes comple´mentaires

Nous n’avons repousse´ aucune occasion de rendre justice au christianisme, tel que son auteur l’avoit donne´ a` l’homme : mais lorsque nous avons rencontre´ dans les antiques archives du Sacerdoce des dogmes semblables a` ceux que le christianisme a consacre´s, nous n’avons pas cru pouvoir nous en taire : d’abord parce que l’histoire ne doit pas eˆtre falsifie´e ; & en second lieu, parce que tel dogme peut avoir e´te´ introduit dans les croyances sacerdotales, par le calcul, l’inte´reˆt, & meˆme l’imposture, sans eˆtre pour cela moins vrai en lui meˆme. Les Preˆtres, dirige´s par des motifs purement humains, ont pu y arriver par une route : Dieu a pu y conduire l’homme par une autre voye a & celui qu’une investigation libre a convaincu d’une a

6 (115vo)

Loin que le rapprochement des dogmes de l’antiquite´ avec ceux du Christianisme seroit une attaque contre cette religion, les hommes dont la pre´tention 1ere est d’eˆtre religieux & de tout rapporter a` la croyance Chre´tienne, ont e´tabli que cette croyance ne fesoit que re´unir ce qu’avoient enseigne´ aux hommes les divers polythe´ismes. «le Christianisme a dit a` l’homme avec la religion des Helle`nes : tu es esprit & chair. Il y a en toi un monde ide´al & un monde mate´riel : mais tu es toi-meˆme ; tu n’es d’une seule pie`ce ni avec Dieu ni avec la nature. Il lui a dit avec la religion Persanne : le bien & le mal re´sident en toi : mais non comme deux puissances qui te dominent tour a` tour & font un jouet de ton existence. tu peux t’affranchir du joug du mal, tu peux le dompter a` jamais. Elle lui a dit avec la croyance Indienne ; le sauveur s’est incorpore´ a` ta nature, non comme type, comme symbole, mais comme re´alite´. Dieu s’est individualise´, pour te racheter de ta mise`re. Homme tu es & tu resteras homme, au sein meˆme de Dieu qui te jugera d’apre`s tes me´rites.» D’Eckst. XII. 5321.

6–9 tel dogme ... route ] passage ajoute´ dans la col. de gauche pour remplacer un autre biffe´ 〈le fait que tel dogme a e´te´ prete´ (?) d’un dogme sacerdotal, & l’oppose´ des motifs humains qui avoit engage´ les ministres de ce culte a` y plusieurs mots illis. contre la ve´rite´ intrinse`que. L’homme a pu y arriver par une route〉 : Dieu 9–10 Dieu ... & celui ] passage remanie´ Dieu a pu 〈l’y〉 y ce mot ajoute´ dans la col. gauche conduire l’homme ce mot ajoute´ dans l’interl. par une autre voye : 〈Dans le premier cas, le calcul, l’inte´reˆt, l’imposture meˆme ont pu seconder l’impulsion, toujours un mot illis. & fausse´e, que le sacerdoce avoit imprime´e a` l’espe`ce humaine. Dans le second〉 & ce mot ajoute´ dans la col. gauche celui 10-p. 707.2 convaincu ... laisser ] passage remanie´ convaincu 〈de la〉 d’une ces deux mots ajoute´s dans la col. gauche ve´rite´ 〈dans le dogme & du miracle dans les moyens〉 miraculeusement enseigne´ ne ces trois mots ajoute´s dans l’interl. doit 〈les conside´rer a part〉 pas s’enque´rir ces deux mots ajoute´s dans l’interl. et dans la col. gauche des erreurs humaines 〈&〉 n〈e〉i 〈pas〉 laisser 11–23 Loin que ... 532. ] texte ajoute´ dans la col. gauche 1

Le statut de ce texte ajoute´ dans la col. gauche n’est pas clairement indique´ par BC. Il doit s’agir d’une note, comme il ressort de la citation d’Eckstein («Du Beau», Le Catholique, t. IV, cahier XII, de´cembre 1826, pp. 516–557, et plus particulie`rement pp. 532). Elle a e´te´ ajoute´e apre`s les corrections signale´es dans les variantes, qui occupaient trois fois l’espace de la col. gauche, de sorte que BC devait bien distinguer les deux ajouts en me´nageant des espaces ou en encadrant les corrections. Puisqu’un signe pour l’appel manque dans le ms., nous avons accroche´ la note a` un mot qui pourrait convenir. Cette de´cision est arbitraire. Nous ne pouvons savoir si BC aurait maintenu cette note ou pas. Elle ajoute une pie`ce de plus a` la pole´mique contre d’Eckstein.

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Pre´face du 4 e et dernier volume

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ve´rite´ miraculeusement enseigne´e ne doit pas s’enque´rir des erreurs humaines ni laisser e´branler sa foi. Sentiment religieux & liberte´, liberte´ complette, pour qu’il y ait sentiment pur & since`re, voila` notre divise. Nous avons essaye´ de contribuer a` cette noble & heureuse alliance. D’autres feront mieux sans doute. nous applaudirons a` leurs efforts & a` leurs succe`s. Nous appartenons a` la ge´ne´ration qui ce`de ce monde a` une race plus jeune, plus confiante en ses forces, plus pleine d’avenir. Nous lui le´guons la Socie´te´ en meilleur e´tat que nous ne l’avons trouve´e. Elle l’ame´liorera encore. nous l’avons de´livre´e de beaucoup d’obstacles qu’elle auroit eu sans nous a` tourner ou a` vaincre. Nous avons reduit en poussie`re beaucoup de ruines qui encombroient le sol. puissent nos successeurs construire l’e´difice que le tems reclame, & peu nous importe qu’ils oublient que nous avons pre´pare´ les voyes & de´blaye´ le terrain.

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Suite d’ide´es des Livres 9, 10, 11 & 12. 1827 ou 1828

17. La page 21 du second cahier de la Suite d’idées des Livres 9, 10, 11 & 12 avec les dernières entrées relatives au livre XI, chapitre V (706–711) et les premières entrées pour le chapitre suivant. La correction de la numérotation fautive commence avec le chiffre 710, récrit sur 720. Le format des cahiers est identique à celui du manuscrit en cahiers. BCU, Co 3481, p. 21.

Introduction

Le document qui suit est un instrument de travail pour pouvoir surveiller la re´daction finale du tome IV. Il a e´te e´tabli a` partir du manuscrit en cahiers dont il suit exactement la disposition. Nous avons souligne´ dans la description de ce manuscrit qu’il n’y a pas de foliotage qui permette l’orientation. L’avantage de cette solution est qu’on peut e´largir le texte en ajoutant des folios entre les pages cousues sans avoir a` corriger constamment le foliotage. L’orientation pratique dans ce grand dossier se fait dans la suite d’ide´es a` l’aide des titres courants, repris dans ce document de travail, et de la nume´rotation des notes, facilement repe´rable dans les deux se´ries des cahiers. La suite d’ide´es et le manuscrit en cahiers se comple`tent mutuellement. Nous supposons que la premie`re a e´te´ re´dige´e apre`s la re´vision des cahiers, puisque Constant renvoie a` des ajouts, et avant le changement du plan, qui introduit le nouveau livre XII et e´carte l’ancien, qui ouvrira le futur tome V. La pre´sentation des pages est identique a` celle du manuscrit en cahiers. Constant divise chaque page en deux colonnes. Celle de droite est destine´e au texte, celle de gauche n’est jamais utilise´e pour pouvoir y porter d’e´ventuels ajouts ou corrections. Nous observons la meˆme distribution de texte pour la pre´face du t. IV, ce qui souligne l’unite´ de ces trois manuscrits, qui forment ensemble un seul et meˆme instrument de travail.

E´tablissement du texte Nous reproduisons fide`lement les deux cahiers. Les pages n’e´tant pas nume´rote´es, nous avons utilise´ pour le premier cahier le foliotage de la BnF et introduit, pour le second, un foliotage traditionnel, comptant les pages de ce cahier a` partir du nume´ro 1 sans distinguer les rectos des versos. BnF, NAF 18823, fos 20–37 et BCU, Co 3481, fos 1–42. Suite d’ide´es des livres 9, 10, 11, & 12. 2 cahiers cousus, 18 fos, 36 pp. a., et 42 fos, 75 pp. a., env. 220 × 180 mm. Les cahiers portent les nos 43 et 44, ce qui indique un ordre pour le classement des dossiers. Les pages ne sont pas nume´rote´es. Date propose´e : 1827 ou 1828. Hofmann, Catalogue, IV/202 et IV/220.

Suite d’ide´es des Livres 9, 10, 11 & 12.

fo 20ro

Liv. 9. des Religions Sacerdotales compare´es au Polythe´isme inde´pendant Ch. 1. Objet de ce livre 1.

que nous allons rechercher comment les Notions sur la figure & le caracte´re des Dieux se modifient sous l’empire des Preˆtres.

5

Ch. 2. de la figure des Dieux dans les religions Sacerdotales. 2. 3. 4. 5. 6.

fo 20vo

7. 8. 9. 10. 11. 12. 13. 14. 15. 16. 17. 18. 19.

la figure des Dieux stationnaire Note 1. aucune e´poque d’art a` distinguer chez les Egyptiens, les Artistes travaillant toujours sur le meˆme mode`le meˆme fixite´ chez les Gaulois. Motif de cette prohibition. danger du changement dans une chose, comme pouvant amener du changement dans toutes figures des Dieux chez les divers peuples. Note 3. e´nume´ration. Gaulois. Leurs statues dore´es. Notes 4 & 5. Re´pugnance des preˆtres pour donner aux Dieux la figure humaine. les Egyptiens ne l’ont jamais fait. Note 7. sur Anubis. Erreur des e´crivains qui ont cru a` des hommes de´ifie´s chez les Scythes. Note 8. Pelloutier. Zamolxis. Le sacerdoce ce´dant ne´anmoins & repre´sentant ses Dieux sous les traits de l’homme. Exemples de cette progression. Wichnou, Derce´to. Note 9. Il laisse a` la figure humaine des Dieux des restes de fe´tichisme. Preˆtres s’adaptant des membres ou prenant des noms d’animaux. Note 10.

E´tablissement du texte : Manuscrits : 1.) BnF, NAF 18823, fos 20ro–37vo ; Co 3481, fos 1–42.

2.) BCU,

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20. 21. 22. 23. 24. 25. 26. 27. 28.

29. 30. 31. 32. 33. 34. 35. fo 21vo

36. 37. 38. 39. 40. 41.

De la Religion, IV – Textes comple´mentaires

fables qui expliquent les monstruosite´s des Dieux. Dachsa Note 11. Ganga ou le Gange. dans ces religions, la forme l’accessoire, la signification myste´rieuse l’essentiel. Empreinte que cette lutte du sacerdoce contre la tendance de l’homme a´ embellir ses Dieux imprime a` leur figure. Vestiges de fe´tichisme. Animaux a` la suite des Dieux. Note 13. Symboles. Note 14. figure de Brama, d’apre`s Porphyre. autres exemples. le Saturne Phe´nicien. Erlikhan. Dagon. Scanda. Eswara. Dourga. Bhavani. Bouddha. Agni. Brama Dieux a` 36 teˆtes. Cenrzy. Suantavith. Rugiavith. Porevith. Porenetz. Allegories Scientifiques. De´sir de produire la terreur. figure de Chandica. Animaux imaginaires. Dans les ruines de Perse´polis Note 16. Aucune figure monstrueuse n’est indige`ne dans le Polythe´isme Grec. Le Sphinx, la Gorgone, la chime`re inventions e´trange`res a` la Gre`ce. Note 17. Elan du sentiment religieux regrettant tout simulacre. Note 18. Cette haine des simulacres point particulie`re aux peuples du Nord. trones des Dieux vacans a` Hie´rapolis. Lucien, de Deaˆ Syriaˆ. les preˆtres s emparant de ce mouvement. mais aucun peuple sans simulacres. les Dieux invisibles & sans repre´sentations mate´rielles valant moins sous la main des Preˆtres que les visibles & mate´riels des religions libres.

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Ch. 3. du caracte`re des Dieux dans les religions sacerdotales 42. 43. 44.

Question sur la supe´riorite´ des deux religions que la logique re´soudrait a priori contrairement aux faits. Dieux du sacerdoce non moins vicieux que les Dieux Home´riques. Leur caracte´re de´crit suivant l’inte´reˆt des preˆtres a` subjuguer l’espe`ce humaine.

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Suite d’ide´es

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45. 46. 47. 48. 49. 50. 51. 52. 53. 54. 55. 56. 57. 58. 59. 60. 61. 62. 63. 64. 65. 66. 67. 68. 69. 70. 71. 72. 73. 74. 75. 76. 77. 78. 79.

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multitude de pratiques. Servilite´ des modes d’adoration. Exemple. foreˆts de la Germanie. ve´nalite´ de ces Dieux. Note 20. Citation du Bhagvat Gita. l imitation des mœurs des hommes par les Dieux. ceux de l’Inde amis de l’inaction, ceux des Scandinaves actifs & belliqueux. Portrait d’Odin. Note 21. Justice rendue par les Dieux du Nord sous un freˆne. Scada patinant sur les glacons. De´esses du Nord exercant la me´decine. De´esses plus conside´re´es dans le Valhalla que dans l’Olympe. Alimens des Dieux semblables a´ ceux des hommes. Vins dans Home`re, Bierre dans l’Edda. meˆme imitation chez les He´breux. forces physiques des Dieux limite´es. Pomme rajeunissante de la De´esse Iduna. Malheurs & ge´missemens des Divinite´s de l’Inde. Ceinture magique de Thor. Sandales miraculeuses de Veidar. Hother aveugle. les Dieux borne´s dans leurs faculte´s intellectuelles. Gna leur message`re. Corbeaux qui instruisent Odin. Ses craintes d’un Ge´ant plus savant que lui. La source ou` se puise la Science n’est pas au pouvoir des Dieux. fable d’Odin & de Mimis. Passions & vices des Dieux. facilite´ de la de´esse Iduna. Expulsion d’Odin a´ cause de ses amours. Parjure des Dieux envers l’architecte qui avoit construit leur Citadelle. de´fiance d’un guerrier contr’eux. prestige d’Odin qui se`me la discorde entre un Roi de Sue`de & un Roi de Danemarc. Meme tradition chez les Juifs, relativement aux fils d’He´li. Note 46. autres faits pareils dans les livres He´breux. Dieu voulant perdre Achab, & lui envoyant un esprit de mensonge. inspirant de l’amour a` Samson pour Dalila, afin de perdre les Philistins.

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716 80. 81. 82. 83. 84. 85. 86. 87. 88. 89. 90. 91. 92. 93. 94. fo 23vo

95. 96. 97. 98. 99. 100. 101. 102. 103. 104. 105. 106. 107.

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108. 109.

110. 111. 112.

De la Religion, IV – Textes comple´mentaires

Jehovah endurcissant le cœur de Roboam. envoyant un mauvais esprit contre Abimelech & les Sichemites. Admiration du sacerdoce pour les Dieux ruse´s. Passage du Coran a´ ce sujet. les Dieux suspects de mensonge rendent plus indispensable l’intervention des preˆtres. Envie qu’e´prouvent les Dieux. les Dieux Indiens submergent une ville trop magnifique. la tradition de la Tour de Babel a quelque chose d’analogue. Wichnou fait perir un Roi dont la prospe´rite´ l’irrite. Note 49. feˆte des Sectateurs de Wichnou en memoire de cet e´ve´nement. idib. Dieux des Mexicains e´galement envieux. ibid. trahison des Dieux envers leurs adorateurs. le Mercure des Germains se´duit par Marc Aure`le. Xerxe`s essayant de corrompre les Dieux de la Gre`ce. Pre´cautions prises contre les Dieux par les nations Sacerdotales comme par les Grecs. Tyriens enchainant Apollon suspect de faveur pour Alexandre. Explication de cet usage d’enchainer les Dieux, symbolique ou astronomique. parti que tiraient les Preˆtres de ce double sens. mais le sens grossier fesait seul partie de la religion populaire. Peu de ve´ne´ration au fond pour de pareils Dieux. fables qui montrent les hommes prets a` se re´volter contr’eux. Dieux des Scandinaves retranches contre les mortels dans une citadelle dont leur portier gardait l’entre´e. Hothar & Biarcon de´fiant les Dieux au combat. Gylfe brisant la massue de Thor. Dieux de l’Egypte e´chappant aux hommes sous la forme d’animaux. Dieux de l’Inde chasse´s du Ciel & de la terre par un Ge´ant. quelle logique force les preˆtres a´ admettre de pareilles fables. Lutte inutile du sentiment & de la raison contr’elles. Talismans des Sabe´ens. Obstination des pretres a´ les conserver. Manie`re dont ils cherchent a` en e´luder les conse´quences en prodiguant a´ des Dieux vicieux & imparfaits toutes les qualite´s qui appartiennent a´ la perfection & a´ la vertu. contradictions qui en re´sultent. fruit que retire le genre humain de sa soumission au Sacerdoce. Sa religion plus absurde & sa situation plus de´plorable.

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113. Autre re´flexion. 114. Si l’homme a pu adorer de tels eˆtres, cela prouve d’autant mieux son besoin d’adoration. Ch. 4. d’une notion singulie`re dont on n’apercoit dans la religion Grecque que quelques vestiges, mais qu’on trouve de´veloppe´e & re´duite en dogme dans les religions sacerdotales.

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115. Rapidite´ avec laquelle l’ide´e que les Dieux peuvent eˆtre punis par les hommes se de´cre´dite dans le polythe´isme inde´pendant. 116. Achille, dans Home`re accusant Apollon reconnoıˆt sa faiblesse. 117. Pausanias qualifiant de de´mence l’action de Tyndare qui enchaine la Statue de Ve´nus. 118. l’homme revenant a´ cette notion dans les calamite´s impre´vues[.] 119. Romains apre´s la mort de Germanicus & le meurtre de Caligula. 120. mais c’est un elan du de´sespoir, ce n’est plus un dogme consacre´. 121. Ce dogme au contraire consacre´ dans les religions sacerdotales. 122. Cere´monie Egyptienne & sacrifice des Animaux sacre´s rapporte´s par Plutarque. 123. Thraces tirant des fle`ches contre le ciel durant l’orage. 124. Psylles declarant la guerre au Dieu qui pre´sidait au vent du Midi. 125. pourquoi le Sacerdoce conserve un tel dogme. 124. Interme´diaire entre le Ciel & la terre, il doit s’arroger sur les Dieux une certaine jurisdiction. 125. cette jurisdiction va jusqu’a` leur faire violence & leur infliger des peines. 126. Note 63. violences faites aux Dieux par les Mages & les Chalde´ens, aux Saints par les Chre´tiens du moyen age. 127. Talismans des Sabe´ens. 128. Pouvoir des male´dictions sur les Dieux de l’Inde 129. Menaces des preˆtres Egyptiens contre leurs Dieux. 130. Restriction par Jamblique de ces menaces aux de´mons. note 64. 131. Ceci l’explication des traitemens que Xerxe´s fit subir a` l’Hellespont. 132. Etonnement des Grecs a´ ce sujet, parceque leur polythe´isme avoit devance´ le polythe´isme sacerdotal. 133. note 66. Mage pre´tendant dicter des lois aux Dieux. 134. Sapor vaincu par Julien a` Nisibis lance des fle`ches a` ses Dieux. Note 67. 135. Le Culte de la de´esse Dourga au Bengale tenant peut etre a´ cette ide´e. note 68. 136. l’esprit humain libre plus raisonnable que lorsqu’il est dirige´.

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De la Religion, IV – Textes comple´mentaires

Ch. 5. des notions sacerdotales sur la destine´e. 137. 138. 139. 140.

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141. 142. 143. 144. 145. 146. 147. 148.

Difficulte´s particulie`res aux religions sacerdotales, sur cette question. 4 ide´es a` concilier, toute puissance, bonte´, prescience, libre arbitre. Contradictions qui resultent de cette Complication. Les Dieux ayant d’abord de l’autorite´ sur la destine´e, puis lie´s par elle. contradiction a` cet e´gard dans le Bhaguat-Gita. Note 69. Brama soumettant l’homme a´ sa naissance a´ une destine´e irre´vocable, puis le jugeant suivant ses actions. Note 70. 2 destine´es de Crishna[.] meˆmes contradictions dans l’Edda. Supre´matie de la destine´e prouve´e par l’histoire de Balder. note 71[.] Note 72. meˆme contradiction, voile´e sous le pre´texte de la gloire de Dieu. St. Philippe. la gloire de Dieu comme la destine´e une borne a´ sa puissance. Efforts des preˆtres, aussi impuissans que ceux du vulgaire, contre des questions insolubles.

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Ch. 6. des moyens de communication des preˆtres avec leurs Dieux dans les religions sacerdotales.

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149. Communications imme´diates des Dieux avec les hommes devenant criminelles meˆme dans les religions inde´pendantes des preˆtres. 150. A plus forte raison dans celles qui en de´pendent. 151. Impre´cations des mages, des Bonzes & des preˆtres de l’Egypte contre les profanes qui chercheroient de pareilles communications. 152. dedommagement que les preˆtres offrent a´ la multitude en les lui interdisant. 153. Astrologie & divination. 154. Astrologie chez les Egyptiens. 155. Horologues, voue´s exclusivement a´ l’astrologie. 156. liaison de l’astrologie & de la me´decine & la botanique. 157. les diverses professions sous la protection des Plane`tes chez les Chalde´ens. 158. note 80. Enume´ration de ces professions. 159. note 81. Passage de Diodore a´ ce sujet. 160. Astrologie des Mexicains. 161. Pe´riodes chez eux, ayant un signe particulier revelant l’avenir. 162. longueur de ces periodes. Note 82.

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163. Divination encore plus soigne´e que l’astrologie. 164. Enume´ration des divers signes. 165. Note 83. fle`ches prophe´tiques des Arabes, prohibe´es par Mahomet. versets du Coran, employe´s au meˆme usage. 166. note 88. les Perses, interme´diaires entre le Nord & le midi re´unissent l’Astrologie a´ la Divination. 167. Croassemens des Corbeaux interpre´te´s par les preˆtres scandinaves. 168. Paroles des femmes par les Germains. 169. Druides enseignant la signification des signes a´ la jeune Noblesse jusqu’a´ sa 20e anne´e. 170. Divination passant aux nations inde´pendantes des Pretres. 171. Mais n’occupant chez elles qu’un rang subalterne. 172. Enume´ration des divers genres de divination chez les Grecs. 173. qu’il y a moins de traces de la divination dans Home`re. 174. pourquoi. 175. Les e´preuves d’application des moyens divinatoires aux relations des hommes entr’eux. 176. note 97. jugemens de Dieux, sortes apostolorum, &c˙a 177. e´preuves chez les Scandinaves. 178. le Duel de pre´fe´rence. 179. e´preuves chez les Indiens. 180. Dans le temple de Ganeza. Note 99. 181. Singulie`re application des e´preuves au te´moignage en justice. 182. e´preuves chez les He´breux. 183. Aucune chez les Grecs. 184. Passage de Sophocle qui y fait allusion, mais en parlant de nations barbares. 185. Epreuves chez les Romains, he´ri tage de l’Etrurie. 186. Contradiction dans les doctrines Sacerdotales, au sujet de l’astrologie & de la divination. 187. Les preˆtres force´s d etablir le principe & de nier les conse´quences. 188. pourquoi.

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Ch. 7. des notions sur la vie future dans les religions domine´es par les preˆtres. 189. La vie future le domaine du Sacerdoce. 190. Importance que les Egyptiens y attachaient. 191. La mort le but de la vie chez les Gaulois & les Scandinaves.

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192. vers de Lucain sur les Gaulois a´ ce sujet. note 104. 193. Guerriers qui ne pouvaient trouver la mort en combattant se la donnoient. 194. Usages Scandinaves, suicide Rocher d’Odin, & coutume de se de´chirer le corps avant de mourir. Note 105. 195. pre´fe´rence accorde´e de meˆme par les Indiens a´ la vie future sur celle-ci. 196. mais moyens & espoir diffe´rens. 197. Vie contemplative. 198. De´livrance de l’Individualite´. 199. passage de Schlegel sur les ide´es des Indiens sur la vie future. Note 1061. 200. Note 107. Passage du Bhaguat-Gita sur le de´sir d’ane´antissement des Indiens. 201. Singularite´ de cette fatigue de l’action de vivre sous le plus beau ciel, tandis que recom mencer ailleurs la vie terrestre le de´sir ardent de peuples maltraite´s par le climat. 202. c’est que la lutte nous attache a´ la vie. 203. Exception apparente chez les He´breux. 204. Silence absolue de loi mosaı¨que sur l’immortalite´ de l’ame. 205. On s’est exage´re´ la conse´quence qu’on a tire´ de ce Silence. 206. Exage´ration de Warburton refute´e. note 109. 207. pourquoi admise par les The´ologiens. note 109. 208. Endroit du Deute´ronome ou` il est parle´ de l’e´vocation des morts. 209. Autres passages des e´crivains sacre´s impliquant une autre vie. 210. Prophe`tes Hebreux & Psalmiste paraissant croire que la mort finit tout. Note 108. 211. histoire de la Pythonesse d’Endor & autres passages prouvant que les He´breux ne rejetoient pas tous une autre vie. note 111.

2 pouvaient ] la source porte pouvant combattant ] la source porte combattoient 11–14 199. passage ... Indiens. ] deux lignes remonte´es ; elles se trouvent dans le ms. entre les actuels nume´ros 209 et 210 ; 199 re´crit sur 206 et 200 sur 206 15 201. ] re´crit sur 199. 18 202. ] les nume´ros des entre´es 202 a` 209 re´crits sur 200 a` 205 22–23 206. Exage´ration ... The´ologiens. note 109. ] deux lignes remonte´es ; elles se trouvent dans le ms. entre les actuels nume´ros 210 et 211 ; 206 re´crit sur 209 et 207 sur 210 26 210. ] re´crit sur 208.

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BC a corrige´ la suite des entre´es entre les nume´ros 198 et 211. Il s’est trompe´ deux fois et a remarque´ son erreur seulement apre`s avoir atteint l’actuel nume´ro 211. La correction se fait en re´crivant douze nume´ros sur la nume´rotation fautive. Nous avons tenu compte de cette ope´ration en plac¸ant les entre´es dans le bon ordre.

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212. Moyen de concilier cette contradiction. 213. quand l’empire des preˆtres est complet dans ce monde, ils de´daignent l’autre. 214. quand ce monde leur est conteste´, ils appellent l’autre a` leur secours. 215. Or il y a 2 e´poques dans les annales he´braı¨ques. 216. Despotisme sacerdotal inconteste´ jusqu’a` l’e´tablissement de la monarchie & meˆme plus longtems. 217. alors rien sur la vie future. 218. Lutte entre les Rois & les Pretres a dater surtout de1 219. Alors la vie future invoque´e. 220. Mais dans tous les cas, l’autre vie une imitation de celle-ci. 221. femmes egyptiennes enterrant avec elle[s] des pinceaux & des couleurs pour plaire dans l’Amenthe`s. 222. Note 112. de´tails sur l’Amenthe`s. 223. Gaulois ajournant leurs comptes a` l’autre vie. 224. Note 113. Diodore & Valere Maxime sur les Gaulois. Tombeau de Chilpe´ric. Cercueil d’un Germain. Or enfoui avec Hialmar. 225. Perses entourant les tombeaux de leurs Rois des choses ne´cessaires aux vivans. 226. Note 114. description du tombeau de Cyrus par Arrien. usage des Gue´bres. 227. meˆme usage chez les Indiens. 228. habitans du Tonquin pre´parant leurs maisons pour recevoir les morts. 228. Richesses des Scandinaves brule´es sur leurs buchers. 229. Combats des guerriers dans le Valhalla. 230. Note 116. preuves de l’enfer Scandinave e´tant une copie de cette vie par l’histoire de Balder.

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Ch. 8. des demeures des morts & de la description des supplices infernaux dans les religions sacerdotales.

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231. une seule demeure des morts dans le polythe´isme Home´rique, triste, & sur laquelle la morale n’a point d’influence. 232. Enfers plus nombreux & plus soigne´s dans les religions sacerdotales. 233. deux Enfers dans l’Edda. 234. trois quatorze ou 80 chez les Indiens.

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La phrase est incomple`te.

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722 235. 236. 237. 238. 239. 240. 241. 242. 243.

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244. 245. 250. 246. 247. 248. 249. 251. 251. 252. 253. 254. 255. 256. 257. 257. 258. 259. 260. 261. 262.

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263. 264.

De la Religion, IV – Textes comple´mentaires

Sept chez les Perses. Cinq chez les Birmans. trois au Tibet. Note 120. description des enfers des Tibe´tains. Description des enfers dans les livres Zend. De l’Ifurin des Gaulois. Note 122. vers d’un barde a un ennemi qu’il espe`re voir damne´. Supplices e´pouvantables des enfers chez les Indiens. Note 123. Catholiques orthodoxes s’irritant quand on dit que le Christianisme n’admet pas des peines aussi cruelles. Travail des preˆtres sur ces descriptions des enfers. de´sir de produire l’effroi. Calcul qui a` cote´ de cet effroi place l’espe´rance. note 124. Multiplicite´ des paradis comme des enfers. meˆme note. Scandinaves & Indiens. Dieu nouveau pour prononcer les arreˆts. Note 125. Sur Odin. Morts sortant de l’Enfer pour revenir sur la terre. Larunda Mania en Etrurie. Feˆte d’Apherina ghan en Perse. damne´s rachete´s par les dons des fide`les. Observation importante. Morale dans le Polythe´isme Home´rique ne de´cidant en rien de l’e´tat des morts. mais ayant une grande influence a´ cet e´gard dans les religions sacerdotales. Exemples. Jama aux Indes. Juges en Egypte. Tableau de ce Tribunal rapporte´ par Denon. Son erreur. celle de Heeren. note 127. Cause de cette diffe´rence. asservissement de la morale par les Preˆtres. que la morale n’y gagne rien. La soumission aux preˆtres la 1ere vertu. Note 128. Crimes contre les preˆtres punis bien plus se´ve´rement que les autres. As. Res. Holwell. Code moral des preˆtres surcharge´ d’une foule de pratiques inutiles & souvent revoltantes. Note sur les Bouddhistes note 129. Ne´cessite´ de cette observation sur laquelle nous aurons a´ revenir.

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Ch. 9. de la me´tempsycose.

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265. La metempsycose l’une des conjectures du sauvage. 266. disparaıˆt ensuite dans le Polythe´isme inde´pendant. 267. Etrange`re a´ la religion des Grecs & des Romains, bien que recue dans leur philosophie. 268. Toujours consacre´e chez toutes les nations sacerdotales. 269. se combinant dans la partie scientifique avec la me´taphysique & l’astronomie. 270. les Indiens la rattachant a` la purification des ames. 271. Les Egyptiens au Cycle de 3000 ans. 272. mais partie aussi de la croyance publique. 273. Indiens. 274. Note sur la me´tempsycose aux Indes. Note 133. 275. Gaulois. 276. Perses. 277. Ge´tes. 278. He´breux. 279. Note 136. passage de Joseph[e] indiquant que les He´breux admettoient la Me´tenpsycose. 280. double doctrine des preˆtres combinant ce dogme avec d’autres qui auroient du l’exclure. 281. Me´tempsycose & Amenthe`s chez les Egyptiens, deux branches d’un meˆme syste`me. 282. Expose´ de ce Systeˆme. 283. Note 137. Virgile l’a transporte´ dans son Ene´ide. 284. Indiffe´rence de la multitude a´ ces explications. 285. Le vulgaire croyait tantot a` la me´tempsycose, tantot a` l’Amenthe`s, sans les rapprocher. 286. Que ceci re´pond a` une objection de M. de Paw. Note 138. 287. Note 139. Importance de l’embaumement chez les Egyptiens tenant a` l’Amenthe`s. 288. Ainsi tout ce qui est vague & passager dans le Polythe´isme inde´pendant est enre´gistre´ dans le Polythe´isme sacerdotal.

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Livre 10. des dogmes particuliers au Polythe´isme Sacerdotal. Ch. 1. Objet de ce livre. 289. Que nous traitons ici des dogmes appartenant spe´cialement aux religions soumises aux preˆtres.

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Ch. 2. de la supre´matie d’un Dieu sur les autres, dans les Religions sacerdotales. fo 31ro

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290. dans le polythe´isme home´rique les Dieux primitivement e´gaux. 291. Ils de´sobe´issent a` Jupiter malgre´ sa puissance supe´rieure. 292. Note 141. la fiction de la chaine d’Or de Jupiter visiblement e´trange`re. 293. Dieu supreˆme chez les Indiens Schiven, chez les Perses ZervanAkerene, chez les Scandinaves Alfadur, chez les Egyptiens Cneph. 294. Causes de cette diffe´rence entre les deux espe`ces de Religion. 295. Dans les sacerdotales, les Dieux sont des personifications de la nature, ce qui leur ote leur individualite´, les classe comme parties d’un ensemble, & fait de cet ensemble le Dieu supreˆme. 296. Calcul des Preˆtres de re´ve´ler toujours de nouveaux secrets. 297. aussi le Dieu supreˆme un Dieu diffe´rent des Dieux actifs. 298. Chez les Scandinaves, ce n’est pas Odin. 299. Note 142. que cette portion des fables Scandinaves n’est pas une interpolation des chre´tiens. 300. idem en Egypte. 301. Cneph vient planer sur les divinite´s populaires. 312. Diffe´rence de nature entre celles-ci & le Dieu supreˆme. 313. celles-ci actives & imparfaites. 314. celui la` inactif pour eˆtre parfait. 315. Le Dieu supreˆme des Preˆtres une abstraction. 316. Sa de´finition dans le Bhaguat Gita. l’Amida du Japon. Le Dieu supreˆme des Scandinaves. le Jehovah des Hebreux. distinct d’Aleph le Pe`re inconnu. Note 146. 317. Le sacerdoce se dedommage ainsi d’avoir du repre´senter ses Dieux comme semblables a` l’homme.

Ch. 3. des Dieux infe´rieurs ou de la De´monologie Sacerdotale. 318. que l’homme apre`s avoir place´ un Dieu supreˆme au dessus de ses Dieux, place au dessous d’eux des ge´nies. 319. que le sacerdoce s’empare de cette notion & classe ces ge´nies dans un ordre re´gulier. 320. De´monologie des Egyptiens. 321. Rapport de cette de´monologie d’une part avec la religion populaire, de l’autre avec la doctrine scientifique.

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322. 323. 324. 325. 326. 327. 328. 329. 330. 331. 332. 333. 334.

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335. 336. 337. 338.

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sa liaison avec l’astronomie. son retour de l’astronomie a` la croyance du peuple. Demonologie des Perses. meˆme signification double par le rang des ge´nies dans la religion populaire, & leurs attributs astronomiques. mesures du tems personifie´es. fervers. De´monologie Indienne. De´monologie des He´breux. Note 162. la de´monologie des chre´tiens a e´te´ emprunte´e, en partie des He´breux, en partie des Platoniens. toutes ces notions e´trange`res au Polythe´isme Grec. note 163. Creutzer reconnoit cette ve´rite´. Passage d’Home`re sur Pallas. He´siode a puise´ ses notions des Dieux subalternes dans des traditions me´ridionales. Remarque de Creutzer. le regulier dans la religion Perse devient fragmentaire dans He´siode. Note 165. Philosophes Grecs s’emparant de la demonologie des barbares. mais la reconnoissant d’une origine e´trange`re. aveu de Plutarque a cet e´gard note 168. rang subalterne des De´mons ou ge´nies dans le Polythe´isme Grec.

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Ch. 4. des Divinite´s malfesantes. 339. 340. 341. 342. 344. 345. 346. 343. 347. 348.

Les dieux malfesans adore´s de´ja` chez les sauvages. Le progre`s des lumie`res e´carte cette ide´e le bien & le mal intimement lie´s cause & effet l’un de l’autre aucune Divinite´ essentiellement me´chante dans le Polythe´isme Grec. Plutarque indiquant quelques contre´es de la Gre`ce comme connoissant deux principes oppose´s. mais sans preuves & ce´dant a` son de´sir de retrouver partout le Dualisme. Note 172. Circe´e divinite´ malfaisante importe´e d’Egypte en Colchide. Note. 170. passage d’Arnobe prouvant ce fait. Les Titans & les Ge´ans sans relation avec les hommes. Typhon dieu malfaisant chez les Egyptiens n’est en Gre`ce qu’un monstre vaincu par les Dieux.

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349. note sur Typhon. Nonnus qui en parle dans le langage sacerdotal, copiste d’alle´gories orientales. Note 174. 350. He´cate, une divinite´ e´trange`re. 351. Note 175. passage d’He´siode & commentaire de Ste Croix sur He´cate. 352. Que le sacerdoce perpe´tue la notion de divinite´s me´chantes. 353. Deux raisons. 354. le Dieu repre´sentant de la raison rigoureuse naturellement un Dieu me´chant. 355. Difficulte´ que les Religions sacerdotales trouvent de plus que le Polythe´isme libre a` concilier le respect pour la justice des Dieux avec l’existence du mal. 356. travestissement des vices des Dieux en devoir envers leur gloire. 357. Malheur pesant sur les fide`les comme sur les impies. 358. explique´ par l’action de Dieux me´chans. 359. ne´cessite´ de Dieux me´chans plus urgente en raison de la perfection des autres Dieux. 360. Philosophes Grecs se rapprochant du Dualisme pour cette cause. 361. Passage de Maxime de Tyr prouvant notre assertion. 362. le mauvais principe personifie´ dans toutes les religions sacerdotales. 363. Loke, Arimane, Typhon. 355. Bhavani la lune & la force destructive. 356. Note 178. obscurite´ sur les notions des Perses relativement au mauvais principe, & sa publicite´ progressive. 357. note 179. Le Nil probalement la 1ere Divinite´ malfesant[e] de l’Egypte. 358. Plane`tes pernicieuses chez les Chalde´ens. 359. Divinite´s me´chantes chez les Germains, les Gaulois, les Mexicains. 360. Tlacate-cocolotl, hibou malfesant au Mexique. 361. Panthe´isme des Indiens confondant le principe du mal avec l’eˆtre supreˆme, mais n’excluant pas un ge´nie mechant, Moı¨sasour. 369. Dieu me´chant chez les He´breux. 370. Le Christianisme appelant le Dieu du mal le prince du sie`cle. 371. Incertitude que le sacerdoce laisse planer sur ce dogme pour ne pas trop effrayer l’homme. 372. Le Dieu du mal peut-eˆtre tue´, vaincu, desarme´. 373. Arimane contenu par les impre´cations des mages jusqu’a` la victoire de´finitive d’Oromaze 374. Incertitude si Thor a deja tue´ le grand serpent. 375. Typhon charge´ de chaines peut s’e´chapper. 376. Ne´cessite´ de recourir au Sacerdoce, pour le pre´munir contre le Dieu malfaisant.

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377. Effort du sentiment religieux pour rendre au bon principe la supe´riorite´ sur le 2 . 378. Note 192. Hyde sur les mages qu’il nie avoir cru a` deux principes e´gaux. son opinion partiale. 379. Mouvement de la supe´riorite´ du bon principe qui devient alors le ve´ritable Auteur du mauvais. 380. Sophisme de St Philippe a` cet e´gard. Dualistes Perses s’agitant dans ce cercle. vanite´ de toutes ces argumentations Notes 193 & 194. 381. Cette difficulte´ insoluble tant qu’on demeure dans les formes de la logique. 382. Autre effort du sentiment religieux. 383. Re´conciliation future du mauvais principe avec le bon. 384. Note 195. fable Egyptienne de Typhon vaincu par Herme`s. 384. Re´conciliation d’Arimane. Ch. 5. Conse´quence de ce dogme dans les religions sacerdotales

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385. 386. 387. 388. 389. 390. 391. 393. 392. 394 395. 396. 397.

les divinite´s malfaisantes ten[dent] des pie´ges a´ l’homme. passage du Shastah-bade. Ames coupables tentatrices chez les Egyptiens. Cette notion e´trange`re a` la mythologie Grecque. Ide´e de Hyde sur l’occupation ne´cessaire a` donner au Diable. Influence facheuse de cette ide´e sur la morale. L’homme ne sait jamais si ses mouvemens sont bons ou mauvais. Divinite´s corruptrices se´duisantes. Anecdote de L’ami de St. Bruno. Note 200. Dsye´ mauvais ge´nie, d’une figure charmante. Loke plein de grace. Le serpent de´core´ des plus belles couleurs & plein d’e´loquence. De la` des terreurs & des doutes que le sacerdoce peut seul calmer ou re´soudre. Ch. 6. De la notion d’une chute primitive ou d’un pe´che´ originel

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398. Lutte que l’homme e´prouve dans son propre cœur. 399. cette lutte lui donne l’ide´e d’une chute primitive. 14 384. ] nume´ro re´pe´te´ par distraction

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400. Traces de cette ide´e dans toutes les mythologies. 401. Note 202. pe´che´ originel ou chute primitive dans l’inde, au Tibet ; tableau de la progression de ce dogme par Goerres. Penchant au mal, he´ritage d’Adam, Zetzer-hara, d’apre`s les Rabbins. 402. Cette hypothe`se acquiert de l’importance & de la dure´e surtout dans les religions Sacerdotales. 403. Inte´reˆt qu’ont les preˆtres a´ l’accre´diter, pour motiver des expirations qui leur profitent. 404. De´lit ante´rieur a` notre race conciliant la justice divine & les souffrances de l’homme. 405. Note 203. rebellion des Debtahs crime qu’ils doivent expier en animant des corps mortels. 406. Chute de Dieu, pareille a` celle de l’homme. meˆme note. 407. Ce systeme pe´ne´trant dans les Systeˆmes philosophiques des Grecs. 408. Note 204. Citation de Platon dans le Cratyle. Alle´gorie de Saturne dans le dialogue du Politique. Note 204 409. Systeˆmes religieux supposant que la chute de l’homme ne peut eˆtre expie´e que par les souffrances d un Dieu. meˆme note. 410. La meˆme hypothe`se recue dans les myste`res. 411. mais peu accre´dite´e dans la croyance publique de la Gre`ce. 412. fable de Pandore importe´e en Gre`ce de l’e´tranger. 413. note 205. l’age d’Or, d’argent & dans la croyance du Tibet.

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Ch. 7. d’un Dieu me´diateur

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414. Ce dogme pre´sente´ a´ l’homme par le Sacerdoce pour lui rendre le courage possible en meˆme tems que la religion ne´cessaire. 415. Dieux me´diateurs chez tous les peuples sacerdotaux. 416. Fohi dans l’ancienne religion chinoise. 417. Mithra en Perse. 418. Note 207. diverses versions sur cette qualite´ de me´diateur attribue´e a` Mithra. 419. Incarnations dans la religion Indienne. 420. Thor chez les Scandinaves. 421. dans le Polythe´isme Sacerdotal, des Dieux subalternes mais non des Dieux me´diateurs. 422. pourquoi l’ide´e de me´diation une ide´e sacerdotale. 423. le Prome´the´e de´livre´ d’Eschyle empreint de cette Ide´e. 424. Aussi plusieurs traditions d’Eschyle emprunte´es de l’e´tranger.

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Ch. 8. Des divinite´s triples ou ternaires

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425. que les divers notions ont donne´ lieu dans presque toutes les religions sacerdotales a` l’ide´e de la trinite´. 427. on la trouve aux Indes. 426. note 210. Goerres sur la trinite´. 429. dans l’un des systeˆmes de la Perse. 428. note 211. Mot mytique des Indiens. 430. au Tibet. 431. note 213. Georgi sur la Trinite´ Tibetaine. 432. chez les Egyptiens. 433. note 214. Goerres sur la Trinite´ Egyptienne. 434. Tre´pied, embleˆme de la Trinite´ chez les Chinois. 435. Toutes ces formes de Trinite´ expressives du de´sir de trouver une explication a´ l’existence du mal, un me´diateur aupre`s du Dieu supreˆme un expiateur de notre chute primitive 436. Les Dieux triples se re´unissant en un seul. 437. Extrait de Tchin sur la trinite´ de fo. note 215. 438. La loi de Moyse exempte de toute notion de Trinite´. 439. Cependant quelque trace dans la de´monolgie des Hebreux. 440. Ces subtilite´s toujours e´trange`res a` la Religion Grecque.

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Ch. 9. du dogme de la destruction du monde.

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441. Le souvenir des bouleversemens de la Nature empreints dans toutes les Religions. 442. Mais dans le Polythe´isme libre ce souvenir voile´ & e´carte´. 443. dans le Polythe´isme Sacerdotal reproduit & rendu plus terrible. 444. Manie`re dont les preˆtres combinent ce dogme avec leur doctrine scientifique. 445. union du Panthe´isme a` ce dogme. 444. Destruction du monde suivant les Indiens. 445. Note 220. Autre recit de la meˆme Catastrophe. 446. Idem chez les Birmans. 447. note 22[2]. id. des Mexicains, des Tibe´tains, incendie universel des Egyptiens. de´luge des Chalde´ens. meˆme dogme emprunte´ d’eux par les Juifs. 448. Livres sacre´s du Nord sur la destruction du monde. 449. dans ces derniers toutes les ide´es Sacerdotales re´unies. 450. meˆme dogme chez les Perses.

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451. chez les Gaulois. 452. manie`re dont l’e´glise chre´tienne a profite´ de ce dogme. Ch. 10. du Phallus, du Lingam & des divinite´s hermaphrodites.

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453. Dieux particuliers aux religions Sacerdotales, & malgre´ des apparences trompeuses, e´trangers au Polythe´isme inde´pendant. 454. Origine de ces Dieux. 455. Doctrine secre`te des Preˆtres dans laquelle la cosmogonie e´toit exprime´e par des symboles. 456. il e´toit naturel qu’ils prissent pour symboles de la force productive les organes ge´ne´rateurs. 457. Importance de l’acte de la ge´ne´ration dans la vie de l’homme. 458. Les preˆtres ont assez naturellement pris l’acte de la ge´ne´ration pour type de la production des choses. 459. de la` des divinite´s hermaphrodites. 460. elles sont particulie`res au polythe´isme sacerdotal. 461. nous les trouvons point dans la religion populaire de la Gre`ce. 462. note 233. sur les hymnes Orphiques, les Argonautiques & les Androgynes de Platon. 463. Mais nous les trouvons chez tous les peuples soumis aux preˆtres. 464. Aphroditus & Adonis en Syrie. 465. note 234. sur le culte d’Aphroditus & la Ve´nus barbue 465. Adagoous en Phrygie. 466. Phthas & Neith en Egypte. 467. note 237. hymne orphique sur Phthas. Minerve & Vulcain, hermaphrodites en Egypte, pas en Gre`ce. 468. Uranus & Mithra en Perse. 469. Freya en Scandinavie1. 470. Cenrezy au Tibet. 471. Aux Indes, Eswara, Brama, Schiven, Crishna, Wichnou. 472. Note 244. sur Schiven pris pour une amazone. 473. Les e´le´mens chez plusieurs autres peuples. 474. Preˆtres changeant de veˆtemens & prenant des habits de femme dans les ceremonies institue´es en l’honneur de ces Dieux. 475. Un embleˆme plus commun le Phallus & le Lingam. 476. Note 251. Phallus d’Osiris porte´ en Egypte. femmes Egyptien[ne]s l’ayant au Col. autres faits sur ce culte. renvoi a` Dulaure. 477. Ce Culte pas inde´cent dans l’origine 1

Cette entre´e est la premie`re du cahier conserve´ a` la BCU. Les pages ne sont pas foliote´es. Nous les comptons en commenc¸ant par le chiffre 1.

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480. Note 252. de´tails sur l’adoration du Lingam aux Indes. transactions de nos missionnaires avec ce Culte. 478. Erlikhan au Tibet avec le Phallus. Note 253. 479. les Preˆtres le combinent avec le culte des pierres. 481. Remarque du chev. Jones a` cet e´gard. 482. fait prouvant l’union du culte du Lingam avec la pudeur. 483. l’inde´cence s’y me´lant quand la simplicite´ des mœurs se perdit. 484. Aussi ce culte repousse´ par les peuples inde´pendans du sacerdoce. 485. jamais chante´s ni offerts en public par les Grecs. 486. Maintenu au contraire dans les religions sacerdotales.

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Livre 11. du principe fondamental des religions sacerdotales. Ch. 1. Expose´ de ce principe

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487. Ide´e pre´ce´demment soumise a` nos lecteurs, mais dont nous allons de´velopper les conse´quences. 488. Notion du Sacrifice inse´parable de la religion. 489. Note 256. Renvoi a` l’ouvrage de M. de Meister. 490. L’homme toujours rafinant sur cette ide´e. 491. nouveau point de vue sous lequel le sacrifice se pre´sente. 492. Il n’a plus de me´rite par la valeur de l’offrande, mais comme preuve de soumission. 493. Avantage de cette manie`re de conside´rer le sacrifice dans les religions libres. 494. Preuve dans le Polythe´isme de la Gre`ce. 495. qu’il en est autrement dans le Polythe´isme sacerdotal. 496. logique particulie`re du sacerdoce. 497. Les Dieux n’ont pas besoin des hommes. 498. Les sacrifices n’ont donc de valeur que par ce qu’ils coutent a` ceux qui les offrent. 499. Conse´quences de ce principe. 500. Rafinement sans bornes dans les sacrifices. 502. Note 258. Citation du 1er vol. 501. Note 258bis. Citation d’un Shaster Indien, dialogue entre la raison humaine & la sagesse divine. 503. Ainsi conse´quences toutes contraires du meˆme principe suivant que l’esprit humain est libre ou qu’il est esclave. 504. celui sublime chez les philosophes Grecs.

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505. affreux sous l’empire du sacerdoce.

Ch. 2 des sacrifices humains

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506. Cette pratique commune a` tous les peuples. 507. Note 259. Indication des auteurs a` consulter sur les sacrifices humains. 509. ces sacrifices tombant en de´sue´tude dans les religions libres, se perpe´tuant dans les sacerdotales. 510. Note 262. Ne´gres de Widdha. 508. Note 260. Que nous en devons l’abolition au Christianisme. 511. Mexicains. 512. preuves a` l’appui. Robertson &ca. note 263. 513. Gaulois. 514. Note 264. Citations. 515. Scandinaves. 516. tiraient au sort pour les victimes, leurs Rois meˆmes pas excepte´s. 517. citation de Rühs a` l’appui Note 268. 518. Germains. 519. Citations. Culte de Mercure & d’Hertha. Lac de l’isle de Rugen. Note 269. 520. Siciliens. 521. Note 272. Citation de Virgile. 522. Carthaginois. 523. Note 273. Enfant jete´ dans la mer par Amilcar. reste du culte des e´le´mens. Diodore. Statue de Saturne. meˆme usage a` Calicut. Automate auquel on sacrifioit des hommes a` la Chine. 524. Chinois. 525. Note 274. pas en contradicition avec l’athe´isme des Chinois. 525. peuples du Tonquin & du Laos. 526. Phe´niciens. 528. Perses. 529. anecdote de la Reine Amestris. 530. Note 278. Jeune prisonnier Grec immole´ par les Perses sur leurs vaisseaux. 531. repre´sentation de sacrifices humains sur les ruines de Perse´polis. 532. Ethiopiens. 533. Egyptiens. 534. Note 281. Goerres sur les sacri fices humains en Egypte. Anecdote de Busiris. Erreur d’He´rodote prouve´e par Jablonsky & Schmidt. cet

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549. 550. 551. 552. 553. 554. 555. 556. 557. 558. 559. p. 8

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usage subsistant encore a` l’e´poque ou` les Turcs prirent l’Egypte. fait arrive´ sous The´odore & Sozome`ne, nie´ a` tort par Schmidt. Plaisir e´prouve´ par la Divinite´ au sacrifice d’une victime humaine. Re´gles du Calica-puran pour ces sacrifices. Note 282. fe´rocite´ suppose´e des Dieux malgre´ la douceur des hommes. Sculptures de l’Isle de Bombay retracant ces sacrifices. Scythes. Taures. He´rules. Thraces. Frisons. Sarmates. Bretons. Espagnols. Kore´ischites & Dumatuns en Arabie. Note 294. les sacrifices humains porte´s en Arabie par les mages fugitifs. Exception peu fonde´e de Creutzer du Culte de Lycie. Roi captif e´gorge´ par le Roi des Sarrasins. Pe`re de Mahomet de´signe´ pour victime & rachete´ par 100 chameaux. La Gre`ce souille´e par les sacrifices humains dans ses tems recule´s. laissons de coˆte´ le sacrifice d’Iphige´nie & celui des filles d’Erechte´e, qui sont des fables. Note 295. sur le sacrifice d’Iphige´nie. Arcadiens & peuplades de l’Achaı¨e fesant pe´rir des hommes sur les autels de Jupiter & de Diane. un homme & une femme immole´s a` Athe`nes lors de l’expiation de la ville. Lace´de´moniens sacrifiant des enfans & des prisonniers de guerre. 300 Messe´niens immole´s. Argiens offrant aux Dieux la dixme de leurs captifs. mais les Grecs renonce`rent de tre`s bonne heure a` ces pratiques barbares & les eurent ensuite toujours en horreur. de grands pe´rils, un grand effroi les y ramenaient. le devin Euphantides forc¸ant The´mistocle a` immoler 3 jeunes princes Persans. re´sistance de The´mistocle. Sacrifices humains plus prolonge´s en Arcadie, parceque l’Acardie plus sauvage que le reste de la Gre`ce. toutes les Divinite´s auxquel[le]s les Grecs offroient parfois de ces sacrifices venu[e]s de l’Etranger.

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Saturne de Phe´nicie. Diane une divinite´ sacerdotale. ayant parcouru la terre avec une teˆte de taureau. son apparition jetant les Lace´de´moniens dans le De´lire. Note 308. Lucien & Euripide sur Diane. Re´cit de l’e´tablissement & de l’abolition des sacrifices humains en Achaı¨e par Pausanias. tradition relative aux amours de Me´nalippe & de Cometho & avantures d’Euripyle. le fait constant c’est que l’abolition des sacrifices humains en Gre`ce remonte a` leur retour du sie`ge de Troye, c. a. d. aux 1ers tems de leur histoire. Pausanias sur Lycaon. Hercule fesant de´vorer Diome`de par ses cavales antropophages, une tradition de´figure´e de l’abolition des sacrifices humains. Anachronisme dans cette tradition, mais n’importe. Note 311. la supposition du sacrifice d’un homme a` Salancine jusqu’au tems d’Adrien une erreur de Lactance. Tout prouve que si des haines nationales ou de grands dangers ramenaient les Grecs a` ces pratiques, elles n’e´toient pas une institution consacre´e. dans l’Hecube d’Euripide tout l’inte´reˆt se porte sur Polyxe`ne. horreur exprime´e par les historiens Grecs. He´rodote sur Me´ne´las. Plutarque sur Arge´silas, immolant une biche au lieu d’une vierge. Pe´lopidas refusant aux divins de The`bes de pareils sacrifices. les Grecs les remplac¸ant par des rites moins sanguinaires. Enfans de l’Achaı¨e de´posant leurs couronnes aux pieds de Diane. Note 316. Cet adoucissement remarque´ par Pausanias. Lycaon & Ce´crops. Jeunes garcons battus de verges mais pas immole´s a` Sparte. Doriens rougissant d’un peu de sang le tombeau de Pe´lops. Bacchus permettant que les The´bains remplacent la victime humaine par une che`vre. l’homme pre´cipite´ de Leucade & recu dans des barques peut-eˆtre un adoucissement du meˆme genre. qu’il ne faut pas confondre les actes de de´vouements volontaires avec les sacrifices humains. Cratines s’offrant pour que la mort expie les fautes des Athe´niens. Pausanias attendant pour combattre que Callicratidas aıˆt pe´ri.

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592. Athe´niens n’attaquant les 30 tyrans qu’apre`s la mort de Thrasybule. 593. Cadrus se de´vouant. 594. Lace´de´moniens se rendant a` Xerxe´s, pour expier le meurtre des envoye´s Perses. 595. Curtius & De´cius a` Rome. 596. Ces actes reposant bien sur le principe du sacrifice, mais sont volontaires, & point soumis a` l’ascendant des Preˆtres. 597. Point de Victimes traine´es a` l’autel, de devoir pe´riodique, de Culte le´gal. 598. Ces sacrifices subsistent dans les Gaules, malgre´ les efforts des Romains. 599. les Druides profitent des guerres civiles pour les re´tablir. 600. hommes & enfans jete´s dans le Gange par les Indiens. 601. Raisons pour lesquelles le sacerdoce a prolonge´ les sacrifices humains. 602. Son esprit stationnaire. 603. le droit de vie & de mort qu’il retiroit de la de´signation des victimes. 604. l’exception qu’il prononce en sa propre faveur une preuve de la part qu’il a a` la prolon gation des rites. 605. les grandes Calamite´s triomphent de cette exception. 606. Indiens immolant des Brames en tems de guerre, de peste ou de famine. 607. Note 332. meˆme usage chez les Albanais. 608. 3e cause. alle´gories scientifiques & cosmogoniques. 609. force productrice & destructive re´unies. Dans le meˆme Dieu. 610. Alors le sacrifice offrande de la vie au pouvoir qui re´unit la vie & la mort. 611. Note 333. Creutzer & Goerres sur le culte de Schiven. Bhavani en Dourga. 612. Effet funeste d’analogies de mots, ou d’imitations. 613. Hercule, l’anne´e, de´vorant ses enfans. les Carthaginois lui immolent des hommes. 614. Mais la cause spe´ciale de la prolongation des sacrifices humains le principe que nous avons indique´. 615. De la` les enfans immole´s par les Pe`res. 616. Haquin Roi de Norve`ge. 617. Dag, & Aune le vieux. 619. Anonciation de la connaissance de l’avenir avec les sacrifices humains. 32 spe´ciale ] mot re´crit sur principale

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620. Druides. 618. la conjecture de Ce´sar que les innocens n’e´toient immole´s qu’au de´faut de criminels refute´e par la`. le contraire est vrai. les criminels repousse´s des Sacrifices par le Chapitre du Sang des Indiens. Note 337. 621. Pe´ruviens. 622. Cimbres. 623. Lusitaniens. 624. Scythes. 625. Signification prophe´tique des convulsions de l’agonie. 626. Note 243. Re`gles du Calica-puran a´ ce sujet. 627. les sacrifices humains s’adoucissant meˆme dans les religions sacerdotales. 628. Pe´ruviens tirant un peu de sang du front des enfans au lieu de les tuer. 629. Note 345. Roi Mexicain prohibant ces sacrifices, mais force´ de les re´tablir. Peuplades adorant une De´esse qui doit les en de´livrer. 630. Syriens substituant une biche a` une vierge. 631. versant du vin sur la teˆte des hommes de´voue´s aux Dieux. 632. Perses pre´sentant leurs enfans au feu sacre´. 633. Note 348. Meˆme coutume chez les Idolatres voisins des Juifs & chez les Rois Juifs idolaˆtres. 634. Amosis fesant jeter dans un bucher des simulacres de cire. 635. Note 349. Ces simulacres remplace´s par des gateaux comme en Amerique. Animaux marque´s d’un cachet figurant un homme a` genoux Schmidt. 636. Egyptiens jetant dans le Nil l’image d’une vierge. 637. Meˆme progression chez les chinois pour l’immolation des animaux. Economie des habitans de Siam. Note 350. 638. Reformateurs Indiens de´sapprouvant les sacrifices humains. 639. Brames sacrifiant des repre´sentations en paˆte 640. Note 351. Sacrifices a` Bhavani de Coqs & de Taureaux au lieu d’hommes. hommes attache´s a` des pieux & relache´s apre`s une 642. prie`re. Vache des noces pre´sen te´e a´ l’autel & mise en liberte´. 642. Re´sistance du sacerdoce a` cet adoucissement. 643. Egyptiens sacrifiant des hommes malgre´ les loix d’Anobis. 644. La Gange engloutissant des victimes malgre´ les reformateurs.

19 versant ] BC laisse un espace pour pouvoir placer le nom du peuple ; il manque e´galement dans le ms. ; dans la version imprime´e, cette phrase est supprime´e

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645. Au premier revers la fe´rocite´ des anciens usages re´tablie. 646. Sacrifices fune´raires, espe`ce de sacrifices humains disparaissant chez les Grecs. 647. Achille e´gorgeant 12 prisonniers sur le tombeau de Patrocle fait horreur a` Home`re. 648. point de sacrifices sanglans sur le bucher de Mise`ne dans Virgile. 649. Note 354. sur ce passage de Virgile. 650. Lutte du Sacerdoce contre ce progre`s. 651. Esclaves & femmes brule´es sur le tombeau des guerriers scandinaves. 652. Note 655. Anecdote de Sigride. 653. Courtisans Perses mourant avec les Rois. 654. le fre`re du Roi au Mexique & son pretre sacrifie´s sur son tombeau. 655. Note 356. bouffons e´galement immole´s. 656. Concubines & serviteurs enterre´s avec le Roi des Scythes. 657. Idem chez les Ephralites. 658. Idem chez les Japonais. 659. Idem chez les Gaulois & les He´rules. 660. Se retrouve aux Indes. 661. Les 2 femmes de l’Indien Ce´te´s brule´es avec leur mari. 662. Cette pratique subsiste encore malgre´ les efforts des Europe´ens. 663. les Brames entrainent les veuves a` se bruler, ou ils les y forcent. Ch. 3. d’un dogme qui a pu s’introduire dans les religions sacerdotales, comme une conse´quence du principe auquel on doit attribuer la prolongation des sacrifices humains.

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664. Dogme singulier dont le Polythe´isme inde´pendant n’offre aucune trace. 665. L’homme a force de rafinemens ayant pre´fe´re´ les animaux aux plantes, les hommes aux animaux, pre´fe´re des Dieux aux hommes. 666. Dela` chez presque toutes les nations sacerdotales les Dieux mourans sur leurs propres autels. 667. les Divinite´s Indiennes, mourant une ou plusieurs fois pour cre´er ou racheter le monde. Bhavani. Osiris en Egypte, Adonis en Syrie, Achem (??) chez les Druses. Note 367. 668. Cette ide´e admise dans le fe´tichisme, mais rejette´e de bonne heure par le Polythe´isme inde´pendant. 669. favorise´e dans les religions sacerdotales par les alle´gories scientifiques & cosmogoniques.

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l’hyver l’e´poque de la mort des Dieux astronomiques. mais les dogmes sacerdotaux & plus myste´rieux viennent l’appuyer. les Dieux se sacrifiant pour nous relever de la chute primitive. Victime The´andrique. Singulier usage chez les Mexicains. Dieu de pate mis en pie`ces & distribue´ aux assistans qui le mangent. Note 371. feˆte ainsi nommee Teoculas la feˆte du Dieu qu’on mange.

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Ch. 4. des privations contre nature p. 18

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677. ce que nous avons dit des sacrifices humains applicable aux privations contre nature. 678. pas toujours repousse´es par le Polythe´isme Grec. 679. Preˆtresses de Diane, d Hercule de Minerve & de Ceres restreintes a` une continence plus ou moins longue. 680. Note 372. ces divinite´s empreintes de notions sacerdotales. 681. Note 373. les Preˆtresses d’Hercule a` Thespis voue´es a` une virginite´ perpe´tuelles – ce celibat des Preˆtresses introduit apre`s les tems Home´riques – les Preˆtres Grecs l’ayant peut-eˆtre imite´ des pays sacerdotaux. 682. ces privations adoucies dans le Polythe´isme sacerdotal. 683. Plus rigoureuses dans le Polythe´isme sacerdotal. 684. le mariage interdit aux grands preˆtres des pagodes aux Indes. 685. Note 375. la chastete´ une condition de la divination – & de la vie contemplative – & pour les Bouddhistes, de l’obtention de l’e´tat de bienheureux. 686. meˆme obligation pour les Joguis les Saniassys, les moines du Tibet & de Siam 687. Note 376. Secte lamaique de´fendant le mariage – Japonais oblige´s a` la continence durant leurs pe´le´rinages – celibat impose´ aux preˆtres de Centeotle au Mexique. 688. sacrifices humains & privations contre nature combine´es au Pe´rou. 689. Exception dans la religion Persanne. 690. le Boundehesch repre´sentant pourtant l’union des sexes come la cause de la chute de l’homme. 691. Cette contradiction pouvant s’expliquer par la manie`re dont la religion Zoroastre fut forme´e. 692. fide`les provoquant leurs sens pour rendre leurs privations plus pe´nibles.

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693. Christianisme renouvellant ces e´preuves. 694. Note 382. le christianisme de´figure´, car le vrai toujours plus raisonnable que les religions sacerdotales.

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Ch. 5. Conjectures que nous soumettons a` nos lecteurs. 695. Egyptiens croyant Apis ne´ d’une genisse feconde´ par le soleil. 696. Scythes attribuant leur origine a` une vierge. 697. Note 383. Diodore av (??) cette vierge. Herodote lui attribue un commerce secret avec Hercule. esprit Grec. 698. Une vierge me`re de Tage`s. 699. Fohi chez les chinois ne´ d’une vierge. 700. Idem pour Xaca au Tibet, & Mexitli au Mexique. 701. Idem pour Crischna. 702. la me`re de Crischna repre´sente´e aux Indes comme la vierge chez nous. Note 388. 703. cette ide´e venue peut-eˆtre de l’importance attache´e a` la privation des plaisirs des sens. 704. d’ailleurs assez naturelle. l’impurete´ associe´e toujours dans notre pense´e a` l’union des sexes. Une femme toujours fle´trie quand nous l’imaginons dans les bras d’un homme. Elle a besoin de la maternite´ pour se relever. Renvoi au 1er volume. 705. Rien de pareil en Gre`ce. 706. Minerve sortant du Cerveau de Jupiter – Vulcain ne´ de Junon seule. ces deux fables explique´es pre´ce´damment. 707. La continence recommande´e plutot comme sacrifice dans les religions sacerdotales que pour sa valeur intrinse`que. 708. La virginite´ peu estime´e chez les Orientaux. 709. La ste´rilite´ une honte. 710. Note 391. observation de Montesquieu sur le me´rite de la chastete´ plus grand dans le midi que dans le Nord. 711. L’impurete´ dans l’union des sexes transporte´e de la terre au Ciel.

28 710. ] le chiffre 1 re´crit sur 2 l’erreur de nume´rotation concerne toutes les entre´es comprises entre 710 et 751 ; BC s’est aperc¸u de son erreur apre`s avoir re´dige´ l’entre´e 751 ; il se corrige en re´crivant les dixaines, le chiffre 1 sur le chiffre 2, le chiffre 2 sur le chiffre 3, etc.

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Ch. 6. des Rites licentieux.

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712. remontent jusqu’a` la croyance des sauvages, disparaissent dans le polythe´isme inde´pendant, se perpe´tuent dans le sacerdotal. 713. danses lascives des femmes Egyptiennes. 714. Note 393. Inde´cences du culte Egyptien. 715. Prostitution des Babyloniennes. 716. Traces de cette coutume en Lydie, en Phe´nicie, a` Carthage. 717. Jeunes Syriennes sacrifiant au Phallus leur virginite´ – Isis courtisanne – Marie l’Egyptienne. Note 396. 718. Impudicite´s des Pretres Idolatres en Jude´e. 719. Note 398. pratiques licentieuses du Culte de Belphe´gor. 720. Culte de Priape sous Osias. 721. Effe´mine´s de la Bible, ce´le´brant des rites licentieux. 722. idem au Mexique. 723. ce´re´monies obsce`nes aux Indes. 724. Note 403. Indiennes du culte de Schiven & de Dourga. 725. Sacrifices humains, rites licentieux, chants obsce`nes, simultane´s dans le culte de Kali. 726. Note 405. Plaisirs contre nature dans les Rites Indiens – a` Samothrace – Antoinette Bourignon – le pe´che´ contre nature l’incarnation du Diable. 727. Traces des meˆmes rites chez les peuples du Nord. 728. de´bauches aux fetes de Thor. 729. Preˆtresses de Freya servant aux plaisirs des Preˆtres. 730. Note 406. que bien que la saga qui rapporte ce fait soit d’un moine chre´tien, elle a un fonds de ve´rite´. 731. la religion des Perses moins licentieuse. 732. feˆte de Mithras ou` le Roi s’enyvroit & dansoit publiquement re´miniscence peut-eˆtre de quelques rites licentieux. 733. Note 408. autres peuples ce´le´brant ces rites. Calde´ens, Cappadociens, Arme´niens. Isles de Samothrace &ca ou des navigateursetrangers les avoient apporte´es. 734. Significations Scientifiques des rites licentieux. 735. Inde´cences du Culte d’Attys se rapportant a` l’astronomie. 736. Les rites licentieux tendent a` tomber en de´sue´tude. 738. Re´sistance des Preˆtres. 737. Sectes indiennes, adorant le Phallus divise´es en deux, dont l’une repousse les pratiques immodestes. 739. note a` ce sujet.

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740. Rien de pareil dans les Religions Inde´pendantes. 741. femmes paraissant nues dans quelques feˆtes Grecques, mais ces femmes des courtisanes. 742. Note 411. femmes voue´es au culte de Ve´nus a` Corinthe. mais pouvant, quant a` leur me´tier, eˆtre e´trange`res a` la religion. 743. filles de Sparte, dansant sans veˆtemens, mais sans aucune ide´e de rites licentieux. 744. pratiques licentieuses en Gre`ce toujours rattache´es a` des Dieux e´trangers. 745. Note 412. Priape inconnu a` Hesiode. Adonis & Bacchus pe`res de Priape, Dieux e´trangers. 746. Meˆme dans les myste`res, les femmes Grecques ne se prostituant pas. 747. Diagoudas interdisant les fetes nocturnes 748. Aristophane proposant de bannir les Dieux qui exigeoient des rites obsce`nes. 749. Le se´nat de Rome agissant de meˆme. 750. Note 415. Ce principe indique´ portant des he´re´tiques a` des pratiques revoltantes pour sacrifier la chair & pour la souiller – Relation qui semble exister entre la de´votion exalte´e & le besoin de volupte´ – Mytiques anglais & Francais – Prodicus – Taulerus d’Anvers – union mystique des fide`les, d’abord apre`s la mort des apotres, figure´e par l’union des sexes – processions d’hommes & de femmes nus.

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Ch. 7. de la saintete´ de la douleur. 751. 752. 753. 754. 755. 756. 757. 758. 759. 760. 761. p. 26

entraine´ par le principe indique´, l’homme ne s’arreˆte plus. Il lui faut des douleurs positives & visibles. De la´ le penchant aux mace´rations. quelque chose de vrai au fond de cette ide´e. Le sentiment religieux recherche la douleur pour s’y retremper. Le Sacerdoce s’empare de ce mouvement. Mace´rations & tortures volontaires dans tous les cultes sacerdotaux. Description de ces tortures. devots qui se mutilent. Note 418. sur les Hedeschin de la Bible. Note 420. indication des sources sur les mace´rations des anciens, des Mexicains, des Egyptiens, des Syriens, des Perses, des He´breux, des Pe´ruviens, des Indiens – passage du Calica-pouran – loix de Menou – re´cits des auste´rite´s de 2 faquirs – l’Oupnekat sur le Brame RajaBrahdratch – Pline & Ciceron sur les anciens Brachmanes.

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762. St Sime´on Stylites, St Francois d’Assises – 763. Note 421. tortures de St Gudin – Ste Catherine de Cordoue – sœur Ange´lique de la Providence. Bibliothe`que chre´tienne. 764. Missionaires de la Chine & du Japon. 765. Note 422. St Ignace Suppliant les fide`les de ne pas le priver du martyre – devoirs du moine par St Bazile, pareils aux auste´rite´s du Samriasy1. 766. rites licentieux combine´s avec les auste´rite´s. 767. Mace´ration des Indiennes qui dansent devant les Pagodes. 768. Note 423. Anecdote d’une Princesse de Bade. 769. Preˆtres de Cybe`le, mutile´s & impudiques. 770. Note 424. Sur les rites a` la fois obsce`nes & sanguinaires de ces preˆtres. 771. cet afinement dans les tortures va jusqu’au suicide. 772. Brachmanes qui se brulent. 773. Idem des de´vots d’Arrakhan. 774. Adorateurs d’Amida se fesant e´craser. 775. Indiens se noyant dans le Gange. 776. Comment l’ide´e d’une chute primitive contribue a` ces mace´rations. 777. Note 428. Paroles de Mde Guyon. 778. le me´rite attache´ a` la douleur a toujours du eˆtre seconde´ par le Climat. 779. Qu’il ne faut pas confondre avec les tortures volontaires & les suicides du Midi ceux des guerriers du Nord. 780. Observation de Montesquieu sur la contradiction de la molesse du Midi, & le me´pris de la mort de ses habitans. 781. les personnes les plus voluptueuses se livrant aux auste´rite´s les plus recherche´es. 782. Ces exce`s toujours repousse´s par les Grecs. 783. Etonnement des Philosophes Grecs en voyant les auste´rite´s des Solitaires de la The´baı¨de. 784. qu’il ne faut pas objecter que les philosophes eux meˆmes imposoient des auste´rite´s a` leurs disciples. 786. Ces auste´rite´s des e´preuves sans rapport avec la religion. 785. Note 432. preuves de ces auste´rite´s. Aristophane cite´. 787. les nouveaux platoniciens ne doivent pas eˆtre invoque´s, ils empruntoient des auste´rite´s sacerdotales pour combattre le Christianisme.

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BC exploite ses notes de lecture, dossier Stäudlin, Histoire de la morale, nos 188 et 189.

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Ch. 8. d’un dogme que le principe dont il s’agit a pu introduire dans les religions Sacerdotales. 788. 789. 790. 791. 792. 793. 794. p. 29

795. 796. 797. 798. 799.

Sacrifices des Dieux en imitation de ceux des hommes. Dieux naissant de vierges, par ce que l’union des sexes une souillure. Dieux se torturant parceque les hommes se sont torture´s. Sommonacodom. Esmoun. Wichnou. Indiens supposant que la nature divine entre comme partie souffrante dans les sacrifices. c’est par la souffrance que les Dieux preˆtent a` l’homme une assistance naturelle. l’homme purifie´ par les tourmens du Dieu qui l’expie. note 438. cette expiation designe´e a` la chine & au Tibet sous le nom de re´demption. Rien de pareil dans les religions inde´pendantes. Les douleurs des Dieux d’homere une suite de leur nature imparfaite, & n’a rien de myste´rieux qui profite de la race mortelle.

Ch. 9. De´monstration des assertions ci-dessus, tire´e de la composition du Polythe´isme de l’ancienne Rome.

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800. qu’on voit chez les Romains la lutte de l’esprit Sacerdotal contre l’esprit Grec. 801. Gouvernement the´ocratique de l’Etrurie au moment de la fondation de Rome. 802. Note 439. indication des sources de l’histoire ancienne de l’Etrurie – que nous traitons en parlant du Culte Etrusque de la religion de toute l’Italie antique, car malgre´ quelques diffe´rences de de´tail, l’esprit e´toit Etrusque. 803. Caste sacerdotale gouvernant l’Italie a` cette e´poque. 804. Note 440. De´tails sur cette caste & sur les effets de son gouvernement. 805. Jeunes Romains envoye´s vers cette caste, jusqu’au tems de Ciceron, pour s’instruire dans l’art des pre´sages. 806. que nous n’examinons point si cette caste e´toit indigene en Etrurie ou venue de l’Etranger. 807. fait certain, des colle`ges de preˆtres re´pandus sur toute l’Italie, & leur pouvoir sans limites.

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808. note 443. Corporation de preˆtres a` Arde´e. 809. ces colle`ges, les astronomes, les me´decins, les historiens de l’Etrurie. 810. Note 443bis. Connoissances des Etrusques, tre`s pareilles a` celles des Indiens. 811. Note 443ter. en me´decine. 812. Note 444. sur les Annales Etrusques, tre`s pareilles a` celles des Indiens. 813. Instituteurs de la jeunesse. 814. la Religion Italique le Culte des astres & des e´le´mens. 815. Sacrifices offerts aux fleuves, aux lacs, aux fontaines. 816. Note 447. Sur ce culte. 817. fe´tichisme place´ sous l’astrolatrie. 818. Note 448. preuves de cette combinaison. Oracle de Matie`re, ville des aborige´nes, pareil a` Dodone. 819. tous les caracte`res des Religions sacerdotales appartenant a` la Religion Etrusque. 820. Dieux a` figures monstrueuses. 821. Note 449. Ovide sur Janus. 822. He´rilus. 823. Tage`s. 824. ces Dieux reunissent a` ces dehors sacerdotaux les autres qualite´s Sacerdotales. 825. Tage`s ne´ d’une vierge. 826. Janus un me´lange de Science, d’astronomie & de me´taphysique. 827. Note 454. Multiplicite´ des attributs de Janus – Plusieurs communs avec les Dieux de Perse & d’Eygypte – Mari de Vesta ou du feu – autre tradition adopte´e par Virgile qui vouloit tout rapporter a` ses he´ros – Janus le monde, le tems, le principe de tout – aussi un personnage historique. 828. Note 455. Janus hermaphrodite. 829. Note 456. Janus tue´ par des paysans qui avoient appris de lui a` cultiver la vigne. rapports de cette fable avec une autre Grecque : mais re´sultats diffe´rens a cause de la diffe´rence des deux Polythe´ismes. 830. hymen incestueux de Janus. 831. Sa mort expiatrice. 832. Dieu supreˆme dans la religion Etrusque. 833. Note 458. Le Tina Etrusque.

31 Note 456. ] re´pe´te´ par inadvertance

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Note 459. Panthe´isme dans la doctrine Etrusque. Note 460. De´tails sur la de´monologie Etrusque. Divinite´s malfaisantes dans la religion de l’Etrurie. Note 461. Divinite´ malfaisantes chez les Etrusques. Pluton surnomme´ Juvie, le Jupiter Vejovis, le Mantus une personification de la mort, & par la` le conducteur des ames au Ciel, perdant alors sa qualite´ malfesante – en ge´ne´ral Dieux mechans se modifiant dans la doctrine secrete par leur sens alle´gorique. tendent a` l’homme des pie`ges, le plongent dans des abymes dont il ne peut retirer lui meˆme. Alors vient la notion d’un Dieu me´diateur. Note 462. Janus tour a` tour le Dieu supreˆme & un Dieu me´diateur. ce dieu me´diateur a` la fois triple & unique. Destruction du monde suivant les Etrusques. Note 464. Ages des Etrusques & destruction du monde. pre´diction du De´vin Volcatius. Rites saceredotaux en Etrurie. Sacrifices humains. Note 465. Sacrifices humains dans toute l’Italie. Privations contre Nature. Note 466. Institution des Vestales Etrusques. Rites licentieux. Note 467. Ce´re´monies obsce`nes & Dieux inde´cens dans tout l’Italie. Tortures volontaires. Note 468. Mace´rations des Preˆtres Etrusques. Divination. Note 469. Travail des devins toscans sur la divination – division du Ciel en IV parties – des e´clairs en plusieurs classes – 3 e´clairs dans la main de Jupiter. Se´ne`que – analogie de l’interpre´tation de vol des Oiseaux chez les Perses & les Etrusques – leurs oiseaux prophe´tiques – figures d’oiseaux imaginaires remarque´es par Pline – pyromantie a` Pre´ neste – Jurisdiction que les Devins Etrusques s’arrogeoient sur les Dieux. Note 470. violence qu’ils fesoient a` Jupiter – Tullus hostilius. Art augural remontant jusqu’a` Picus, le 1er Roi des Aborige`nes. habilete´ reconnue des devins Toscans. Note 472. passage de Diodore a´ ce sujet- Tite-Live sur Tanaquil – Tanaquil point un personnage historique – mais la fable a un fondement dans l’opinion rec¸ue. Julien consultant dans le 3e sie`cle des Augures Etrusques.

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861. Tel l’e´tat religieux de l’Italie quand les colonies grecques y abordent. 862. Nous laissons de coˆte´ les discussions relatives a` l’e´poque de ces colonies & au mode de leur e´tablissement. 863. qu’il ne faut rejeter en entier les re´cits des historiens. 864. Niebuhr reconnoit lui-meˆme l’existence de colonies grecques avant la fondation de Rome. 865. Note 473. Niebuhr. beaucoup d’arbitraire dans sa division de l’historique & du fabuleux. 866. les 1eres Colonies n’apportoient point la Religion Grecque 867. sorties de Gre`ce avant la re´volution ope´re´e dans le Polythe´isme Grec par les colonie Egyptiennes ou Phe´niciennes. V. T. p. . 868. Note 474. a` refondre dans la 473e 869. Note 475. Arrive´e des Egyptiens en Grece poste´rieure au de´part des 1eres Colonies grecques pour l’Etrurie. 871. Plutard, d’autres colonies grecques commencant a` adoucir les rites Etrusques. 870. Ces 1eres colonies porte`rent plutot des rites sacerdotaux en Italie qu’elles n’en retranchoient de ceux qui existoient. Note 476. 872. ces 2des colonies e´taient parties de Gre`ce apre`s la formation du Polythe´isme Home´rique. 873. Note 477. Sur l’arrive´e de ces 2des colonies en Italie. 874. Villes qu’elles y batirent. 5. Usages religieux qu’elles apporte`rent de Gre`ce. 876. Temple de Junon a´ Phale´ries. 877. Note 480. Note sur autre temple a` Lanuvium bati e´galement par les Colonie Grecques. 878. Note 481. Culte de Ce´re´s, emprunte´ des Grecs. Preˆtresses appele´es pour le Ce´le´brer. Ciceron ce culte apporte´ de Gre`ce par les Tarquins. Ste Croix. 879. Relations e´troites de ces colonies avec leur patrie. envoi de la dıˆme. 880. Trone d’or consacre´ par Arimnus a` Jupiter Olympique. 881. l’influence de ces colonies sensible surtout a` Rome. 882. Pourquoi. 883. Romains puissans e´galement dans le culte Italique & dans le Culte grec importe´. 884. que pour de´crire cette lutte nous allons citer des faits. 885. qu’a´ ces faits nous attacherons des noms propres, pour mieux de´signer des e´poques ; mais que nous consentons a` ce qu’on regarde ces noms propres comme des noms ge´ne´riques. 11 V. T. ] renvoi incomplet

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886. Note 486. Niebuhr sur les noms ge´ne´riques de Romulus & de Latinus. 887. que ce que nous voulons prouver n’en sera pas moins prouve´. 888. Note 487. Niebuhr sur ce qu’il peut y avoir d’historique dans les re´cits concernant Tullus Hostilius. 889. le penchant des Romains pour le culte grec se manifeste de`s Romulus ou des l’e´poque que son nom de´signe. 890. Note 488. Jupiter Fe´re´trien. 891. Temples batis a` d’anciennes divinite´s Italiques par Tatius Rois des Sabins. 892. Note 489. Introduction du culte du feu a` Rome par Numa. 893. Numa adorant Mars sous la forme d’une lance & prohibant les simulacres a` forme humaine. 894. Note 491. cette defense respecte´e pendant 2 sie`cles. 895. Livres de Numa brule´s 4oo ans apre`s sa mort, probablement a` cause de leur opposition a` la religion alors professe´e. 896. Note 492. Manie`re dont ces livres furent brule´s. Conformite´ de la doctrine de Numa & de celle d’Orphe´e. 897. le Culte re´tabli a` Rome par Numa celui des nations sacerdotales. 898. Note 493. Observation de Denys d’Halicarnasse sur les dieux de Tatius. 899. Lutte de Tullus Hostilius contre les preˆtres. 900. Note 494. Traditions sur les evocations de Tullus Hostilius. 901. Note 495. Citation de Titelive a´ ce sujet. 902. l’esprit Grec introduit d’une manie`re decisive dans le polythe´isme Romain par Tarquin l’ancien. 903. Note 496. Tradition relative a´ l’origine des Tarquins – Artistes Grecs qu’on trouve e´tablis a` Rome quelques anne´es apre`s l’explulsion des Rois – la mort de Tarquin l’ancien correspond a´ l’e´poque ou` les Romains commencent a` adorer des simulacres a` forme humaine – passage de Tertullien. 903. construction d’un temple de Jupiter sur le mont Tarpe´¨ıin & expulsion des Dieux Italiques. 904. Note 498. Citation de Tite Live a` ce sujet. 905. ainsi dans Rome naissante il y eut lutte entre les deux espe`ces de Polythe´isme. 906. Vicissitudes & intervalles de ces luttes. 907. les Rois cherchant tantot un appui contre les preˆtres dans les e´trangers, tantot un appui dans les Preˆtres meˆmes. 32 903. ] BC re´pe`te le nume´ro, mais ne se corrige pas

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Romulus fesant venir des pontifes d’Etrurie. Tarquin l’Ancien empruntant des Toscans des jeux sacre´s. Son fils achetant les livres Sybillins. Note 500. il punit de mort un Romain qui avoit donne´ ces livres a´ copier. L’expulsion des Rois terminant cette lutte & la de´cidant en faveur de l’esprit grec. Cette re´volte probablement l’ouvrage des preˆtres, mais tournant contr’eux. Les Preˆtres se re´voltant contre Romulus, contre Tullus Hostilius & contre Tarquin. Coalition qui sans cela se fut probablement forme´e entre les Rois & les Preˆtres. Rapports de la liberte´ & du despotisme avec le pouvoir spirituel. que le ge´nie guerrier des Romains n’auroit pas suffi pour les affranchir du joug sacerdotal. exemple des scandinaves. toutes les re´formes destructives d’usages sacerdotaux eurent lieu apre`s l’abolition de la Royaute´. formes des dieux devenant plus e´le´gantes. Sacrifices humains abolis. Note 505. Note sur l’abolition de ces sacrifices – Traditions relatives a` Hercule – Ce nom un nom ge´ne´rique – autre tradition racontant les suppression des victimes humaines, mais cette tradition toujours Grecque. Enfans remplaces par des teˆtes de pavots, sexage´naires par des simulacres de paille. Ces sacrifices de´s lors de tristes exceptions dans des circonstances extraordinaires. Enterremens de Grecs & de Gaulois vivans. Dialogue curieux entre Jupiter & Numa dans Ovide. Effort universel des Romains contre ces sacrifices. Perse´cution des Druides qui persistoient. Diffe´rence entre les combats de gladiateurs & les sacrifices humains. Rites licentieux e´carte´s du Polythe´isme de Rome. Tentatives du Sacerdoce Toscan pour les y introduire. Note 517. De´cret du Se´nat contre les Bacchanales.

15 n’auroit ] la source porte n’auroient 923 et 924 sans se corriger

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Renaissance des rites licentieux sous les Empereurs. Note 518. le Dieu Mutunus. Adoucissement des privations contre nature. Note 519. Vestales transporte´es d’Albe a` Rome par Numa. Tortures volontaires introduites fort tard dans le Polythe´isme de Rome. Note 520. Prohibition des rites des Corybantes. Re´sultat. opposition fondamentale des 2 espe`ces de Polythe´isme plus frappante a` Rome que partout ailleurs parce qu’elles s’y sont rencontre´es & ont lutte´ ensemble. l’ancienne religion Italique fournissant beaucoup de Divinite´s. noms Etrusques applique´s a´ des Divinite´s Grecques. note 521. beaucoup de rites. Note 522. Musique Etrusque. Colle´ges de pontifes conserve´s, mais refondus politiquement. divination. note 523. Sur la Divination Etrusque. division en Castes, change´e en patronage & en cliente`le. mais l’esprit sacerdotal banni de cette religion. Que ce qui concerne le Polythe´isme Romain ulte´rieurement ne devra eˆtre traite´ que quand nous montrerons le Polythe´isme parvenu a` son plus haut point de perfection.

Livre 12. que les 1ers myste`res e´tablis en Gre`ce furent des institutions tout a` fait e´trangeres a` la religion & a la nation Grecque.

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Ch. 1. combien le sujet de ce livre est he´risse´ de difficulte´s

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948. doctrines & pratiques e´trangeres au polythe´isme inde´pendant se reproduisant dans ses myste`res. 949. nous allons expliquer pourquoi. 950. difficulte´ du sujet. 951. Note 526. Sources que les lecteurs peuvent consulter.

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Ch. 2. De ce qu’e´toient les Myste`res chez les nations soumises aux Preˆtres. 952

Tendance de l’homme a` entourer de myste`res ce qu’il sait comme ce qu’il posse`de.

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953. cette tendance point particulie`re aux preˆtres, mais aussi aux philosophes de l’Antiquite´. 954. Pythagore, Hipparque, Damo. 955. autres philosophes & meˆme les e´picuriens. 956. Idem dans le Christianisme. 957. En conse´quence partie myste´rieuse aussi dans les re ligions sacerdotales. 958. pas compose´ de doctrines abstraites ni de systeˆmes philosophiques. 859. Le sacerdoce combinant sans doute toujours des hypothe`ses & ses de´couvertes avec la religion populaire sous des formes symboliques, mais n’expliquant point les symboles aux profanes, meˆme dans les myste`res. 960. Les myste`res rien que des repre´sentations dramatiques & des re´cits mis en action. 961. Tels sur le lac de Saı¨s. 962. He´rodote admis aux myste`res des Egyptiens & n’ayant aucune connoissance de leur doctrine occulte. 963. dit que les myste`res e´toient la repre´sentation nocturne des avantures des Dieux.

Ch. 3. comment ces myste`res furent transporte´s en Gre`ce & ce qu’ils devinrent. p. 45

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964. Epoque de l’e´tablissement des myste`res indiffe´rente a` nos recherches : il suffit qu’ils vinssent de l’e´tranger. 965. Myste`res d’Eleusis apporte´s de Thrace. 966. Ceux de Samothrace d’Egypte : 967. Les Thesmophories par les filles de Denaüs : 968. Dionysiaques venant de Phe´nicie ou de Lydie. 969. Note 536. Myste`res Cabiriques e´galement Phe´niciens. 670. Myste`res continuant a` venir du dehors, apre`s la formation du Polythe´isme Grec. 971. Note 538. myste´res d’Adonis – danse e´trangere aux Thesmophories. 972. Rites Sabayiens venant de Phrygie. 973. Ce que furent d’abord les myste`res ainsi apporte´s en Gre`ce. 974. des ce´re´monies, des representations, des pantommes des processions. 975. Note 539bis. Goerres sur ces processions. 976. Typhon enle´ve Horus, Pluton Proserpine. 977. Identite´ des rites Egyptiens sur Isis & Osiris & des Grecs sur Ce´re`s d’apre`s Plutarque.

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978. Note 540. Myste`res Lerneens en l’honneur de Bacchus semblables a` ceux d’Osiris. 979. Mort d’Osiris en Egypte, celle de Cadmille dans les Myste`res Grecs. 980. Note 541. fide´lite´ de l’imitation pour les lieux meˆmes – Myste`res de Bacchus ce´le´bre´s a` Athe`nes sur les bords d’un lac – idem des myste`res Lerne´ens – usage Romain emprunte´ des Grecs, qui l’avoient emprunte´ de l’e´tranger – Damia & Anxesia. 981. De´nominations e´trange`res introduites dans les myste`res. 982. Note 542. Noms sanscrits de Ce´re´s & de Proserpine. 983. les trois mots myste´rieux 3 mots Indiens. 984. Note 545. Signification des mots sanscrits. a reunir a` la note 942. 985. que l’Inde nous explique ce qui avant e´toit inexplicable. 986. Comme´moration des malheurs e´prouve´s par les navigateurs dans leur traverse´e jusqu’en Gre`ce. 987. Myste`res maritimes. 988. Cabires de´couvrant l’art de lutter contre les ondes. 989. Myste`res de Samothrace un refuge contre la tempeˆte. 990. grand preˆtre recevant les re´cipiendaires sur le rivage. 991. Myste`res d’Isis Pe´lasgique a` Corinthe. 992. Maintenant, comment les myste`res, d’abord de pures ce´re´monies, offertes aux regards change`rent-ils de nature ? 993. Sacerdoce Grec Sentant combien son autorite´ e´toit limite´e. 994. de´couvrant les institutionsvenant de l’e´tranger, dont il pouvoit s’emparer. 995. combien ces institutions peu remarque´es d’abord les Grecs. 996. Aucune trace dans home`re ni He´siode. 997. Note 550. remarque de Heeren a` ce sujet. 998. d’autant plus faciles a` exploiter pour le Sacerdoce. 999. La proprie´te´, c’est a` dire, l’administration exclusive des myste`res devolue de fait aux familles sacerdotales. 1001. Le Sacerdoce maıˆtre dans ces institutions & subordonne´ dans la religion publique. 1000. Note 552. faits prouvant que toutes les fonctions e´minentes dans les myste`res appartenaient a` la religion publique. a` re´unir a` la note 551. 1002. Travail du Sacerdoce sur ces institutions. 1003. Note 552bis. Analyse inge´nieuse de Creutzer a` ce sujet. 1004. Multiplication des myste`res. 1005. Le Sacerdoce en ayant peuteˆtre d’en introduire les ce´re´monies dans le culte public. 1006. l’entre´e des temples ferme´e.

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les statues des Dieux voile´es. Note 554. sur ces Statues. Noms des Dieux tenus secrets. Meˆme re´ticence en Egypte & en Scandinavie. Note 555. Exclusion de certaines classes ou d’un des deux sexes. Rites re´serve´s aux femmes chez les Germains & les Scandinaves. hommes exclus des Thesmophories en Gre`ce & des feˆtes de la bonne De´esse a` Rome. Efforts des Preˆtres Grecs pour faire entrer dans les myste`res tous les rites & tous les dogmes Sacerdotaux. Que nous ne de´crirons pas leurs efforts en de´tail, mais montrerons dans les myste`res Grecs tous les dogmes & toutes les pratiques Sacerdotales. deux choses a` observer. une explication n’exclut pas l’autre : tous les rites avoient plusieurs sens. Note 555bis. diverses explications des ceremonies les plus minutieuses. Clement d’Alexandrie. 2o. plusieurs faits n’ayant eu lieu que vers les derniers tems de la religion grecque, & les myste`res ne s’e´tant remplis d’emprunts sacerdotaux que graduellement nous avons du quelquefois nous porter vers des e´poques auxquelles d’ailleurs nous nesommes point encore arrive´s, & nous e´carter de la regle que nous nous sommes en ge´ne´ral prescrite, de ne pas citer des auteurs de ces e´poques plus re´centes. Note 556. a` ce sujet.

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Ch. 4. Conformite´ des rites & des dogmes myste´rieux de Gre`ce avec les dogmes & les rites Sacerdotaux.

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figure des Dieux. troncs informes adore´s dans les myste`res de Samothrace. Bacchus repre´nant sa teˆte de Taureau. Note 558. il reprenoit aussi ses ailes. Signification astronomique & me´taphysique de ces deux attributs. 1024. Preˆtres sacerdotaux prenant dans les myste`res le costume de leurs Dieux. Id. aux myste`res. 1025. Note 559. Confusion produite dans les myste`res par cette adoption du costume & du nom des Dieux – ces deguisemens transporte´s quelquefois des myste`res dans les rites publics, en Gre`ce – a` Rome – Commode – vers adresse´s a` un Senateur. Note 562 reunie.

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myste`res Le´ontiques suivant Porphyre. Sacrifices humains dans les myste`res. Te´moignages des Auteurs eccle´siastiques. Idem de Porphyre. Sacrifice d’une fille d’Erechte´e a´ l’e´tablissement des myste`res d’Eleusis. sans effusion de sang. suivant Lampride, mais n’en prouvant que mieux l’existence de ces sacrifices, comme dans le Polythe´isme Sacerdotal. Purifications. Re´cipiendaires passant entre des feux allume´s. suspendus en l’air. Note 568. pourquoi nous citons Virgile. Arrose´s d’une eau consacre´e. Note 568bis doit eˆtre renvoyee a` l’endroit ou` je parle des opinions me´taphysiques enseigne´es dans les myste`res nos . Interdiction de certains alimens. Note 569. fe`ves proscrites en Egypte & repousse´es des Eleusiniens. V. aussi note 570. Animaux dont il e´toit de´fendu aux Initie´s de se nourrir. Syriens s’abstenant de poissons d’un cote´ par souvenir du fe´tichisme, de l’autre par allusion a` la cosmogonie. Renoncement aux plaisirs des sens. Continence impose´e aux Hie´rophantes. Notes 571, a` ce sujet. Serment des preˆtresses des Dionysiens. Note 572 a` ce sujet. Abstinence des Athe´niennes se pre´parant aux Thesmophories. Continence impose´e aux Initie´s des Mithriaques. Note 575. Distinction entre les Mithriaques introduits a` Rome & les myste`res anciens de Mithra en Perse. chastete´ ordonne´e a` Apule´e par Isis. Adoration du Phallus. Passage de Diodore a´ ce sujet. Note 576. a` Samothrace. aux Thesmophories. aux Dionysiaques. le Phallus de bois de figuier.

23 1041. ] BC re´pe`te le nume´ro, mais ne se corrige pas

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1056. les figues chez les Perses un Symbole religieux. 1057. le Phallus plante´ sur les tombeaux aux mysteres Lerne´ens. 1058. Embleˆme, comme en Egypte de l’immortalite´ de l’ame, de la force productive & de la me´tempsychose. 1059. Note 584. le nom de Proserpine signifiant la double ide´e de la vie & de la mort. Invo cation a` Proserpine sous ce point de vue dans les hymnes orphiques. les hymnes orphiques l’expression du passage des alle´gories & cosmogonies sacerdotales dans la poe´sie the´ologique & les myste`res des Grecs. toutes les notions des preˆtres s’y trouvent combine´es avec tous leurs rites. NB. examiner s’il ne faut pas re´unir tout ce que nous disons des poe`mes & de la doctrine orphique dans cette note & dans d’autres, pour placer le tout reserre´ au no de cette se´rie d’ide´es. 1060. Rites licentieux accompagnant le Culte du Phallus. 1061. danses obsce`nes aux feˆtes d’Adonis. 1062. ces feˆtes de´crites par Ovide. 1063. licence des myste`res Sabazeens de´plore´e par les pe`res. 1064: Note 587. l’Aulularia de Plaute. autres faits sur ces inde´censes. plai – sirs contre nature aux myste`res de Samothrace. fe´rocite´ & licence reunies, suivant Cle´ment d’Alexandrie. la fable de Pasiphae´. 1065. Dieux hermaphrodites. 1066. Bacchus reveˆtu des attributs des deux sexes. 1067. Note 588. sur Bacchus hermaphrodite aile´, sur nomme´ Brise´is, & les preˆtres mettant des habits de femmes dans les myste`res d’Hercule. 1068. Adonis une jeune vierge & un adolescent. 1069. Incestes divins. 1070. Liber & Libera, &ca. 1071. Autres conformite´s des Dieux des myste`res & des Divinite´s Sacerdotales. 1072. naissent d’une vierge. 1073. Note 592 sur Sile`ne naissant d’une vierge. 1074. se mutilent, souffrent meurent. NB: Ceci a rapprocher du ch. sur les Dieux se torturant & mourans. 1075. Auste´rite´s & tortures volontaires dans les myste`res. 1076. Jeunes seve`res des re´cipidaires aux myste`res d’Eleusis. 1077. Hie´rophante frappant les assistans dans ceux de Ce´re`s a` Phe´ne´e en Arcadie. 1078. id. dans le culte Sacerdotal a` Busiris en Egypte. 1079. 80 de´gre´s d’e´preuves dans les mithriaques, mettaient la vie des candidats en danger.

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1080. ces pratiques rappellent le dogme de la Saintete´ de la douleur. 1081. passons des rites aux opinions. 1082. Note 599. de´viations du Culte public toujours dans le sens des religions & rites sacerdotaux. bouc remplace´ par le pourceau dans les myste`res parce que tel e´toit l’usage Egyptien. 1083. Sciences attribue´es & re´serve´es aux preˆtres. 1084. idem dans les myste`res. 1085. Agriculture. 1086. navigation. 1087. fusion des me´taux. 1088. rites de´goutans transforme´s en Symboles sublimes. 1089. Bacchantes de´vorant de la chair crue. 1090. Ce repas la comme´moration du passage de la vie sauvage a´ l’e´tat social. 1091. Note 604. ici doit eˆtre rappor te´ tout ce qui est dit sur la Cre´onomie1 & toutes les interpre´tations de ce rite dans la note 611. 1092. Initie´s aux Dionysiaques mangeant de la chair crue. 1093. En meˆme tems ce rite e´toit interpre´te´ de mille manie`res diffe´rentes. 1094. Ceres ou Themis le´gislatrice. 1095. Union de la religion & de la me´decine. 1096. Cornes de Bacchus taureaux attele´s a` la charrue. 1097. Son corps de´chire´, le raisin cueilli & foule´. 1098. Note 610. diverses interpre´tations. v. 1091. 1099. comme´moration de bouleversemens de la Nature physique. 1100. Dionysiaques figurant ces bouleversemens par le massacre du jeune Bacchus. 1101. Note 611. de´tails sur les interpre´tations diverses, v. 1091, 1093, 1098. Expose´ de ces nombreuses explications. Culture de la vigne. Bacchus de´chire´ en sept morceaux allusion aux 7 plane´tes. Chute primitive. me´rite religieux de la douleur. Panthe´isme. le´gende d’Apollon rassemblant les membres e´pars de Bacchus. re´capitulation de toutes ces interpre´tations oppose´es. Six ages du monde point de re´union par l’introduction de Jupiter parmi les Dieux qui y pre´sident, entre la religion populaire & la doctrine orphique. 1102. Dualisme, l’une des explications des Eleusinies. 1103. Note 612 a` ce sujet. 1104. passage de Julien sur le but de Eleusinies pour combattre la puissance te´ne´breuse.

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1105. meˆme hypothe`se dans les mithriaques. 1106. Dieu mort & ressuscite´ dans les myste`res, application du sacrifice a` la nature divine. 1107. Note 615. la fable du massacre de Bacchus encore explique´ de cette manie`re. 1108. Bacchus de´chire´ par les Titans, Cadmille par ses fre`res. 1109. Note 616. Identite´ parfaite de la mort de Bacchus & de celle d’Osiris. 1110. Re´surrection de ces Dieux & joye de´sordonne´e. 1111. Note 617. tous les dieux mourans, e´trangers ou en dehors de la mythologie nationale – transplantation de ces Dieux, & meˆme attribution de ces le´gendes aux Dieux populaires – Jupiter se mutilant luimeˆme. tradition de la mort de Jupiter & de son tombeau emprunte´e des religions sacerdotales. e´trange`re aux ide´es Grecques – est l’origine du proverbe que les Cre´tois sont des menteurs – prise a` la lettre & sugge´rant le systeˆme d’Evhe´me`re – Sert de texte aux plaisanteries de Lucien. point de vue changeant avec les e´poques. 1112. Me´tempsycose. 1113. de´signe´e dans les Mithriaques par l’e´chelle a` 8 portes. 1114. combine´e dans les Dionysiaques avec le retour des ames vers la Divinite´. 1115. dans les myste`res Lerne´ens avec la force indestructible de la Nature 1116. Astronomie. 1117. Les danses Sabasiennes la repre´sentation des mouvemens du soleil. 1118. Preˆtres d’Eleusis figurant les Dieux astronomiques. Note 619. 1119. meˆme note. astrologie : Planeˆtes, dispensatrices de la destine´e. 1120. l’e´chelle a` 8 portes, aussi un symbole astronomique. 1121. Note 619bis. dans les myste`res d’Hercule, le Dieu a` la fois astronomique & pre´sidant a` l’e´puration des ames. 1122. De´monologie 1123. Suite de Bacchus, ge´nies interme´diaires. 1124. demonologie des nouveaux Platoniciens emprunte´e des myste`res & plus de´veloppe´e. Note 619ter. 1125. L’initiation personifie´e. 1126. Note 621 relative a` une statue d’Orphe´e & a` Te´le´te´. 1127. Œuf cosmogonique. 1128. Note 622. Sile`ne pre´sentant un œuf a` Bacchus – les Cosmogonies orphiques tout a` fait emprunte´es des sacerdotales. expose´ de ces cosmogonies – identite´ des de´tails – plusieurs cosmogonies orphiques. 1128. Supre´matie d’un Dieu sur les autres. 40 1128. ] BC re´pe`te le nume´ro, mais ne se corrige pas

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Dieu me´diateur. Note 623. le Logos. La trinite´. Note 624. la trinite´ dans une des cosmogonies orphiques. la chute primitive. Note 624bis. alle´gorie des myste`res pour exprimer cette notion. la re´ascension de l’ame vers la Divinite´. Note 625. Bacchus & Proserpine, les Divinite´s libe´ratrices, aidant l’ame a` sortir de cercle, c’est a´ dire a` ne plus animer le corps mortel – Prie`re orphique – cette doctrine celle des Dionysiaques, suivant Proclus – expression iden tique du Bhaguat-Gita – deux coupes de Bacchus – Ames qui se contemplent dans un miroir – la Maya indienne – Proserpine appele´e Maya – liaison de ce systeˆme avec l’astronomie – beaute´ de ce systeˆme sous un certain rapport – Observation a´ ce sujet. The´isme. Note 626. comment l’unite´ de Dieu e´toit enseigne´e dans les myste`res – erreur de Ste Croix au sujet de cet enseignement du The´isme. Panthe´isme. doctrine fondamentale dans les myste`res, d’apre`s laquelle tous les Dieux ne fesoient qu’un & cet un le grand tout. Note 627. Citation de Villoison sur le Panthe´isme1 – explication Panthe´istique des myste`res – Apollon l’unite´, Bacchus la diversite´ – leur caracte`re respectif – Jupiter renfermant Bacchus dans sa cuisse, lors de la mort de Se´me´le´ – fable de Jupiter & de Phane`s pareille a` une de Bhaguat-Gita – Identite´ du langage des myste`res & des livres sacre´s des Indiens.

Chap. 5. des imitations graduelles, comme imitation de la Hie´rarchie Sacerdotale. 1142. a` l’imitation des rites & des dogmes se joint l’imitation de sa hie´rarchie. 1143. diffe´rens ordres d’initie´s dans les myste`res grecs, comme differens ordres de pretres chez les peuples sacerdotaux. 1144. Eleusinies divise´es en grands & petits myste`res. 1145. Note 624. Sur ces gradations – 3 espe`ces de Dionysiaques – myste`res trienniaux – 5 grades – de´tails sur chacun de ces grades – la doctrine philosophique pas communique´e a´ la foule – Creutzer – Retour sur 31 comme ] un mot illis. comme 1

BC pense probablement a` Ansse de Villoison, De triplici Theologiaˆ Mysteriisque Veterum commentatio, dissertation latine jointe a` M. Le Baron de Sainte-Croix, Recherches historiques et critiques sur les myste`res du Paganisme, seconde e´dition, Paris : chez de Bure Fre`res, 1817.

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1157. 1158. 1160. 1161. 1162. 1163. 1164. 1165. 1166.

De la Religion, IV – Textes comple´mentaires

les explications multiples des myste`res – Goerres – a` placer dans un endroit pre´ce´dent. la presque totalite´ des Grecs initie´s dans les petits myste`res. ces petits myste`res des pantomimes. les grans myste`res moins prodigue´s. consistant en explications alle´goriques & me´taphysiques. pas communique´s en une seule fois. plusieurs subdivisions dans les grands & petits myste`res & changemens de doctrine dans chacune. Que ces variations ne de´truisaient pas le respect des initie´s. que les arrie`res qui les se´paraient leur de´robaient ces variations. que les contradictions e´toient e´lude´es par les explications alle´goriques. que chaque notion & chaque pratique avoit un double sens ou un triple. Ceremonies de la re´ception diversement interpre´te´es. Note 630. explications multiplie´es de la feˆte des rameaux Dieux des myste`res Cabiriques, populaires, restes de fe´tiches, sacerdotaux, symboles me´taphysiques, cosmogoniques, agricoles, mystiques – allusion au Dualisme – NB. tout ceci replace´ en un seul endroit du texte ou des notes, sur les explications multiples des myste`res. Pre´textes des preˆtres pour ajourner les initiations. Ordre des Dieux ne´cessaire. Nul ne pouvant eˆtre initie´ sans une autorisation miraculeuse. Re´cit d’Apule´e. Re´ceptions d’abord gratuites, puis a` prix d’argent. de la soupcon contre les preˆtres d’avidite´ pe´cuniaire. fonde´ peut-eˆtre a` l’e´gard de quelques individus, mais jamais le but de l’ordre. le but la domination par tous les moyens. De plus peuteˆtre le de´sir d’e´carter la classe pauvre.

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Ch. 6. de l’Esprit qui re´gnoit dans les myste`res. 1167. Genie du Sacerdoce presidant aux myste`res. 1168. leur tristesse atteste´e par Plutarque & par Proclus. 1169. Note 638. Toutes les avantures des Dieux dans les myste`res tragiques.

8 1150. ] BC re´pe`te le nume´ro, mais ne se corrige pas

24 1160. ] pas d’entre´e «1159»

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Suite d’ide´es

p. 67

759

1170. femmes aux Thesmophores assises a` terre en signe de deuil – jeunes – gemissemens, danse meme lugubre. 1171. singulie`re preuve de la tristesse de l’Esprit des myste`res – Acception successive du nom de Charon. 1172. Bouffonneries & license dans les myste`res, au moment des plus grandes demonstrations du de´sespoir. 1173. personnages grotesques. 1174. Indication de ces personnages – Momus, un Dieu bouffon dans Lucien. Note 644. 1175. Sile`ne dans les Dionysiaques. 1176. Autre bouffon dans les myste`res Cabiriques. 1177. Ce´re´s dans les Eleusinies. 1178. Explications me´taphysiques, ne changent rien au fait important que ce me´lange de bouffonerie & de tristesse, commun au polythe´isme sacerdotal & aux myste`res. 1179. haine de toute individualite´, comme dans les religions soumises aux preˆtres – renvoi au vol. p. sur l’anonymite´ Egyptienne en note1. 1180. Myste`res des Grecs, compose´s de rites & dogmes sacerdotaux importe´s – a` la fois l’encyclope´die & l apocalypse sacerdotale.

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[Ch. 7.] p. 68

1181. ressemblance des preˆtres de la Gre`ce & de l’orient, sauf le succe`s. 1182. diffe´rence, en ce que les 1ers ne disposoient que de la partie secre`te de la religion, les 2ds de la religion entie`re. 1183. Les myste`res dans le polythe´isme inde´pendant ce qu’e´toit la religion publique dans le polythe´isme sacerdotal. 1184. dans ce dernier, la religion publique & la doctrine secrette 2 cultes a` part. 1185. dans le 1er, un seul culte dans une partie servoit d’introduction a` l’autre. 1186. Co-existence des dogmes & des rites les plus oppose´s. 1187. non seulement contradiction entre les divers dogmes, mais incohe´rence & he´te´roge´nite´ dans les explications de chaque dogme. 20 sacerdotale. ] apre`s cette entre´e, BC aurait duˆ pre´voir un titre interme´diaire «Chap. 7.», etc.

1

BC veut renvoyer au t. II. Voir OCBC, Œuvres, t. XVIII, p. 121, n. a.

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p. 69

p. 70

De la Religion, IV – Textes comple´mentaires

1188. Systeˆmes divers que nous trouvons dans les myste`res de Samothrace – note 650. 1189. combinaison des spe´culations les plus subtiles re´ve´le´es aux initie´s & des moyens les plus grossiers d’agir sur les imaginations. 1190. Repre´sentations dramatiques continue´es. 1191. Note 651. ces repre´sentations combine´es avec un sens abstrait. Danse d’Eleusis. NB. de´ja` mentionne´e ailleurs. a` revoir. 1192. Temoignage de Dion Chrysostome a` cet e´gard. 1193. Que nous ajournons les recherches ulte´rieures sur les myste`res, comme influans sur la philosophie Grecque & comme une des causes de la chute du polythe´isme. 1194. Alors seulement notre jugement sera complet. 1195. Admiration des modernes pour les myste`res anciens – puissance des mots & des traditions – esprit symbolique de l’Antiquite´ mot magique – ne signifiant pourtant rien de plus que le jargon de nos illumine´s – me´pris pour Cagliostre – ve´ne´ration pour les Hie´rophantes.

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Ch. 8. de l’objet re´el du secret des myste`res.

p. 71

1196. Ce sujet ne re´sidant ni dans les traditions ni dans les fables, alle´gories, opinions, progression des doctrines. 1197. Note 654. passage de Lucien prouvant que les ide´es les plus grossie`res meˆme sur la figure des Dieux subsistoient dans les myste`res, & que du tems de Lucien les myste`res e´toient expose´es aux meˆmes railleries que le culte publique. 1198. Le secret ne consistoit pas dans la re´ve´lation, mais dans le mode de re´ve´lation. 1199. Tout ce que l’on re´ve´loit e´toit connu : mais la manie`re de re´ve´ler ces choses connues, les mots, les signes de ralliement, voila` le secret. 1200. Note 655. passage d’Arien – Se´ne`que disant de meˆme. 1201. Impies poursuivis pour profanation des myste`res toujours pour avoir divulge´ des ce´re´monies, ou les avoir imite´es, jamais pour avoir publie´ une doctrine secre`te. 1202. Aristote accuse non d’une philosophie irre´ligieuse mais d’un sacrifice aux manes de la femme avec les rites de Ceres Eleusienne.

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Suite d’ide´es

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Ch. 9. Des explications qu’on a donne´es des Myste`res.

p. 72

1203. 1204. 1205. 1206. 1207. 1208. 1209. 1210. 1211. 1212. 1213.

Erreur de ceux qui nous ont pre´ce´de´. Tout e´toit dans les myste`res, rien exclusivement. re´ve´lations proportionne´es & adapte´es a` chaque initie´. a´ Platon preceptes de morale. a` Varron ve´rite´s physiques. a` Diodore histoire. a` Plutarque, tantot Dualisme, tantot re´compenses & peines a venir. a´ d’autres origine humaine des Dieux. Myste`res appuyant ainsi aux yeux de chacun sa doctrine favorite. Note 662VII Plutarque & Evhe´me`re. Note 663. Sur la diversite´ des explications, a` replacer a` l’endroit ci dessus ou` nous en traitons. 1214. Erreur des anciens comme des modernes. 1215. de Plutarque comme de Warburton, Villoison ou Boulanger.

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Ch. 10. que notre manie`re d’envisager les myste`res explique seule la disposition souvent contradictoire des Grecs envers ces institutions.

p. 73

1216. 1217. 1218. 1219. 1220. 1221. 1222. 1223. 1224. 1225. 1226. 1227. 1228. 1229. 1230. 1231.

Contradiction dans la conduite des Grecs, relativement aux myste`res. loix rigoureuses qui punissent les profanateurs Tribunal compose´ de preˆtres. Sacrile´ge puni de mort. Biens confisque´s & vendus. La teˆte de Diagoras & d’Aristagone mis a` prix. Alcibiade & Aristote proscrits. Eschyle preˆt a` eˆtre de´chire´. deux jeunes Acarnaniens mis en pie`ces. Euripide distinguant avec soin les myste`res de Bacchus des Dionysiaques. philosophes prodiguant aux myste`res les plus grands e´loges. Socrate, Platon, &ca. Note 672. passage d’Isocrate sur les myste`res de Ce´re´s. d’un autre cote´, la participation a` certains myste`res, un sujet de blaˆme. Aristophane insultant aux Thesmophories & aux Dionysiaques. Les myste`res soumis par les Athe´niens a` l’inspection de l’archonte Roi.

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p. 74

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De la Religion, IV – Textes comple´mentaires

1232. Les jugemens des Eumolpides pouvant eˆtre annules par le peuple. 1233. les philosophes qui rendent les plus beaux hommages aux myste`res e´vitent d’eˆtre initie´s. 1234. Note 676. De´tails sur la de´fiance des Romains contre les myste`res 1235. c’est que d’une part les myste`res e´toient favorise´s par le sacerdoce & par l’esprit ge´ne´ral du polythe´isme, & que de l’autre le ge´nie national repoussoit tout ce qui portoit l’empreinte Sacerdotale. 1236. Note 677. passage de Cle´ment d’Alexandrie, relevant l’identite´ des myste`res & des Religion sacerdotales, & leur opposition au ge´nie des Grecs. 1237. Quant aux philosophes, leur fatigue de la grossie`rete´ de la religion vulgaire les poussoit vers les myste`res ; mais a mesure qu’ils y pe´ne´troient, ils en etoient repousse´s par les Dogmes & surtout les rites sacerdotaux. 1238. Que nous terminons ici nos recherches sur les myste`res 1239. Ce que nous aurions a` dire de plus, relatif a` des e´poques auxquelles nous ne sommes point arrive´s. 1240. l’une, la comparaison de la morale entrant librement dans le polythe´isme & de celle que les preˆtres introduisent dans les myste`res : l’autre l’effet des myste`res sur la chute de la religion publique, lors que les preˆtres, voulant d’une part conserver a` cette religion son influence, & de l’autre maintenir leur doctrine secrete au niveau de l’intelligence, perse´cutoient publiquement les philosophes & fesoient entrer dans les myste`res les doctrines meˆmes qu’ils perse´cutoient.

9 opposition ] la source porte opposi= sition

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Fragments de textes non identifie´s

Introduction

Nous re´unissons dans cette dernie`re section des «Textes comple´mentaires» un certain nombre de fragments que nous avons trouve´s dans les dossiers des manuscrits de la BCU et de la BnF. Les pages se rapportent toutes au texte du tome IV de De la Religion, mais nous n’avons pas pu les inte´grer dans les manuscrits que nous avons analyse´s dans ce volume. E´tablissement des textes Nous reproduisons les fragments de plusieurs dossiers en suivant la disposition du texte imprime´. BCU, Co 4725, fos 119ro, 120vo, 87ro, 82ro, 42ro, 61ro, 80ro, 144ro, 124ro, 6ro. BnF, NAF 18823, fos 137ro, 136ro, 68ro, 112ro, fo 64ro. BCU, Co 3293, 2 fos sans foliotage.

[]

fo 119ro

[Les dieux du sacerdoce ont, comme ceux d’Home`re, les mœurs] des peuples qui les encensent, & font de scrupuleux imitations de leurs usages les plus minutieux1. Les Dieux des Indiens placent leur bonheur dans le repos. Ceux des Scandinaves, sont belliqueux & avides de carnage. Les peuples du nord & de l’occident pour les transaction civiles & judiciaires [se rassemblent sous de grands arbres.]

E´tablissement du texte : Manuscrit : Co 4725, fo 119ro.

3 encensent ] encensent 〈mot illis.〉

1

Il s’agit d’un fragment du manuscrit re´dige´ par le secre´taire aux longues barres de t. Un texte tre`s proche se lit dans le livre IX, chap. 3, ci-dessus pp. 97–98. Nous avons comple´te´ hypothe´tiquement les phrases mutile´es en nous servant du texte imprime´.

5

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De la Religion, IV – Textes comple´mentaires

[Note sur l’e´tat social et la religion]

fo 120vo

Reprenons maint. le fil de nos recherches, & suivs ns idees sur l’et social des Grecs lors des tems home´riques & sur la forme relig. qui doit resulter de cet ett soc.

E´tablissement du texte : Manuscrit : Co 4725, fo 120vo.

2 suivs ] lecture hypothe´tique

Fragments de textes non identifie´s

769

[Re´flexions sur les oracles]1

fo 87ro

[...] la diffe´rence que nous avons indique´e entre la religion Lace´de´monienne & la Religion d’Athe`nes, provenant de ce que les Spartiates avoient conserve´ plus de traditions sacerdotales, se fait remarquer dans ce qui a rapport a´ la divination. l’histoire de Sparte est pleine de faits qui prouvent l’importance qu’ils y attachoient. L’autorite´ sous quelque forme qu’elle existe chez un peuple, ne tarde pas a s’apercevoir du parti qu’elle peut tirer de l’interpretation Syste´matique des circonstances les plus communes. plus la croyance est intime´ment unie a` la politique, plus les peuples s’adonnent a´ cette interpre´tation. c’e´toit le cas chez les Spartiates. Toutes leurs expe´ditions etoient entreprises ou abadonne´es, d’apre`s les auspices. dans la 13e anne´e de la guerre du Pe´leponne´se, ils s’e´toient mis en marche contre Lyce´um, puis contre Carye`s. Mais les sacrifices n’e´toient pas d’un heureux pre´sage ils se retire`rent, (Thucyd. V. 54–55.) le meˆme motif porta deux fois Age´silas victorieux, a ne pas poursuivre les Perses vaincus (Xe´noph. hist. Gr. III. 14. Diod. Sic. XIV. 19) Agis s’avancoit contre les Eliens ; un tremblement de terre lui fit licencier ses troupes (Xen. H. G. III. 218.) La flotte Lace´de´monienne qui mettoit a´ la voile pour se rendre a` Chio, fut re´duite de moitie´, apre`s un autre tremblement de terre (Xen. ou Thucyd. VIII. 6.) Des ce´re´monies semblables suspendirent l’entre´e des Spartiates dans l’Attique, bien que leurs forces fussent de´ja` re´unies a` celles de leurs allie´s (Diod. XII. 24) meˆme dans les occasions les plus pressantes, ils ne livroient aucun combat avant la pleine lune (Paus. att. 28) Pendant les Hiabcinthies, feˆtes qui duroient trois jours, ils refusoient toutes les occasions de combattre (Staeudl. Mag. II. 192–208) He´rodote enfin nous transmet une anecdote ou` l’alle´gation sert d’apologie satisfaisante contre une accusation judiciaire. Cle´ome´ne, nous dit-il, (VI. 76–82) n’ayant pas pris la ville d’Argos, quoiqu’il le put sans obstacle, on l’accusa de s’eˆtre laisse´ corrompre. Il re´pondit E´tablissement du texte : Manuscrit : Co 4725, fo 87ro. 10–11 expeditions ] 〈entreprises〉 expeditions corr. dans l’interl. 1

Cette page provient d’un manuscrit de grand format. Les notes pre´vues pour la de´monstration sont mises entre parenthe`ses. Les re´flexions sur les oracles reviennent dans le livre IX, chapitre VI, ou ` il est question de cette proble´matique dans les sources historiques de la Gre`ce. Les faits et he´sitations de Cle´ome`me sont raconte´s ci-dessus, pp. 419–420.

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770

De la Religion, IV – Textes comple´mentaires

que l’oracle qui lui avoit promis qu’il prendrait Argos lui ayant paru accompli, parce qu’il avoit pris un bois consacre´ par les Argiens, il avoit cru ne rien devoir entreprendre sans consulter les Dieux par des sacrifices : que ces sacrifices avoient e´te´ favorables, mais que de la poitrine de la statue etoit sortie une flamme, signe certain que toute tentative ulte´rieure seroit inutile. Car si cette flamme ajouta-t-il, eut brille´ sur la teˆte de la statue, il auroit pris la ville d’assaut. mais en s’e´chappant de sa poitrine, elle annoncoit qu’il avoit fait tout ce que les Dieux lui avoient re´serve´. Cette de´fense fut trouve´e tellement plausible que Cle´ome`ne fut absous tout d’une voix.

5

Fragments de textes non identifie´s

771

[Re´flexions sur les communication avec les dieux]1

fo 82ro

Nous avons remarque´ pre´ce´demment que les communications directes − a´ les discre´diter. p. 181. a` plus forte raison − sont encore ignore´es 181–182 Les Egyptiens − de l’avenir 182–184. mais quelqu’e´tendue & diversifie´e que fut l’application de l’astrologie aux choses humaines, la divination se subdivisoit encore en cathe´gories bien plus varie´es & bien plus nombreuses. Creutzer sur la divination2.

E´tablissement du texte : Manuscrit : Co 4725, fo 82ro.

1

2

Note de travail pour la copie d’un autre manuscrit, destine´e a` un copiste. Les pages indique´es se rapportent a` un manuscrit non identifie´. L’ajout a` la fin esquisse la suite des re´flexions. On trouve le de´veloppement de cette note dans le livre IX, chap. VI, ci-dessus p. 132. Sur Creuzer, voir ci-dessus, p. 138, n. e et n. 1.

5

772

De la Religion, IV – Textes comple´mentaires

[Re´flexions sur la religion grecque apre`s He´siode]1

fo 42ro

2. Prenons maintenant la religion Grecque a´ une e´poque poste´rieure, naturellement fixe´e a´ He´siode, parceque nous n’avons point de monumens que nous puissions placer entre Home`re & He´siode. Extraits du Livre 17. Copie bleue. Tout le Ch. 1er en le comparant avec ce que nous avons dit d’He´siode dans le 3e volume.

E´tablissement du texte : Manuscrit : Co 4725, fo 42ro.

1

Note de travail ou peut-eˆtre un fo d’un ms. sur fiches. Les remarques sur les extraits a` faire ont e´te´ ajoute´es plus tard. La fiche a sans doute e´te´ re´dige´e apre`s la publication du troisie`me volume. La phrase ne revient pas dans les livres IX a` XII.

5

Fragments de textes non identifie´s

773

[Addition au texte]1

Additions

fo 61ro

336. p. 336. n 779. Par un effet des Cosmogonies Sacerdotales, ou les ide´es d’engendrer & de mourir se retrouvent toujours, les rites licentieux se combinent avec les rites cruels[.] o

E´tablissement du texte : Manuscrit : Co 4725, fo 61ro.

1

Fiche avec une addition a` pre´voir. La phrase ne figure pas dans le texte imprime´. Le nume´ro 779 ne renvoie pas non plus a` la «Suite d’ide´es» ci-dessus.

5

774

De la Religion, IV – Textes comple´mentaires

Polythe´isme Sacerdotal1

fo 80ro

Un des caracte´res particuliers au polythe´isme Sacerdotal est de modifier l’ide´e du Sacrifice. Bien que dans ce polythe´isme les dieux ayent autant de passions & de faiblesses que ceux du Polythe´isme inde´pendant, les Preˆtres tachent toujours de les representer comme n’ayant besoin de rien, d’ou` il re´sulte que le sacrifice a du me´rite non dans le plaisir qu’il fait aux Dieux, mais dans la douleur qu’il cause a´ l’homme.

E´tablissement du texte : Manuscrit : Co 4725, fo 80ro.

1

Fiche avec une re´flexion sur les sacrifices dans le polythe´isme sacerdotal. Cette ide´e revient dans le texte du livre XI, chap. I, ci-dessus p. 253. La formulation est tre`s diffe´rente.

5

Fragments de textes non identifie´s

775

[Sur la de´monologie des E´trusques]1

fo 144ro

note. la de´monologie des etrusques n’e´toit pas moins artistement travaille´e, Jupiter avoit chez eux un conseil des 12, dont 6 ett males 6 femelles. on les nomoit consentes & complices, parcequ ils ett ne´s & qu’ils mourt ensble. (Varr. ap. Arn. adv. Gent. III.) d’ou il reste - ce n’est pas des Dx, mais des etres Intermed. servs de Jup.

E´tablissement du texte : Manuscrit : Co 4725, fo 144ro.

7 Jup. ] Jup. 〈(Varro ap. /ib/ Arnob. adv. Gentes

1

III)

d’ou〉

E´bauche de la note b, livre XI, chap. VII (voir ci-dessus, p. 348). La note de la version imprime´e est plus de´veloppe´e et cite encore les e´crits de Creuzer et de Heyne que BC exploite. Pour la source latine, voir Arnobii Afri Adversus Gentes Libri VII. Cum Recensione Viri Celeberrimi, & integris omnium commentariis. Editio novissima atque omnium accuratissima, Lugduni Batavorum : Ex Officinaˆ Ioannis Maire, MDCLI, p. 123 : «Varro, qui sunt introrsus atque in intimis penetralibus cœli Deos esse censet quos loquimur nec eorum numerum, nec nomina sciri. Hos Consentes, & Complices Etrusci aiunt, & nominant, quod una` oriantur, & occidant una` ; sex mares, & totidem fœminas nominibus ignotis, & miserationis parcissimæ : sed eos summi Jovis consiliarios, ac principes existimari.»

5

776

De la Religion, IV – Textes comple´mentaires

[Re´flexion sur les jeux de Sparte]1

fo 124ro

ne se pourroit-il pas que ces jeux ce´le`bres de Sparte, ou les vierges de´pouille´es de leurs habits luttoient avec les jeunes garcons fussent un reste tout a` fait de´figure´ des rites licentieux ? La religion Spartiate, come nous l’avons dit, e´toit beaucoup plus sacerdotale que l’Athe´nienne. Mais Lycurgue avoit plie´ a` sa politique toutes les traditions & tous les rites sacerdotaux. dire peut-eˆtre en note que la religion Lace´de´monienne ressemble a` la Romaine. Le polythe´isme de Sparte e´toit beaucoup plus une institution politique que celui d’Athe`nes, & semble tenir le milieu entre celui-ci & celui de Rome. la Religion Spartiate e´toit a` plusieurs e´gards diffe´rente du Culte Athe´nien, & les points sur lesquels elle s’en e´loignoit la rapprochent de la religion romaine. cela est d’autant plus remarquable que d’un autre cote´ la diffe´rence est tre`s grande entre ces deux cultes quant au Sacerdoce.

E´tablissement du texte : Manuscrit : Co 4725, fo 124ro.

4 La ] 〈Lyc〉 La

1

Il s’agit d’une note de travail. BC a colle´ deux papillons sur un autre folio. Le passage reprend des re´flexions que nous retrouvons dans le livre XI, chap. IV (ci-dessus, p. 310).

5

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777

Fragments de textes non identifie´s

[Re´flexion sur l’appel a` de nouveaux Dieux]1

fo 6ro

Appel a´ de nouveaux Dieux dans des c[ir]constances extraordinaires : Catilina recourt a´ des rites & invoque des Dieux e´trangers a` l’appui de sa conspiration : & l’entreprise de Bomilcar, conjure´ Carthaginois, echoue, au rapport de Diodore, par le nombre meˆme & la complication des ce´re´monies myste´rieuses, a´ l’aide desquelles il veut se concilier la protection des Dieux. mais come le Polythe´isme romain trop avance´ pr que les Dieux accessibles a la seduction[.] ce sont des Dieux e´trangers[.]

E´tablissement du texte : Manuscrit : Co 4725, fo 6ro.

4–6 & l’entreprise ... des Dieux. ] phrase biffe´e par une grande croix e´trangers ] ces deux phrases ajoute´es dans la marge

1

7–8 mais come ...

Cette page appartenait a` un ms. de grand format dans lequel cette question e´tait traite´e. Elle ne joue qu’un roˆle efface´ dans le t. IV de De la Religion (voir ci-dessus, p. 111). L’addition ste´nographie´e dans la marge et le fait que la phrase re´sumant l’histoire du noble numidien Bomilcar soit biffe´e montrent que nous lisons l’e´bauche d’une re´flexion qui est reste´e sans re´sultat.

5

778

De la Religion, IV – Textes comple´mentaires

[Notes sur les privations contre nature]1

fo 137ro

Privations contre nature unies a des rites licentieux ou recompense´es par la permission de se livrer a` la de´bauche[.] le Ranhil ou grand preˆtre du temple de Bhadrinath dans la ville de Manah est oblige´, pendant son se´jour dans cette ville, a` une abstinence totale des plaisirs de l’amour, mais il lui est permis de s’en de´dommager, des qu’il quitte ce se´jour : & les voyageurs anglais attestent qu il profite de la permission[.]

E´tablissement du texte : Manuscrit : BnF, NAF 18823, fo 137ro.

1

Cette note isole´e a e´te´ prise sans doute pour e´toffer le chapitre III du livre XI, mais BC ne l’utilisera pas. La source de ces notes n’est pas identifie´e.

5

Fragments de textes non identifie´s

779

Sacrifices humains1

fo 136ro

Il est probable que les Ce´re´monies fune´raires chez les Egyptiens e´toient accompagne´es du Sacrifice de victimes humaines. les bas reliefs de plusieurs temples dans la Nubie & dans l’Ethiopie nous montrent des sacrifices d’esclaves ou de prisonniers execute´s par un he´ros vainqueur. Gd pl. XLIX. 186b. dans les groupes nombreux le nombre des victimes est toujours de 29 a 33. pl XLIV. Gd explic. p 893.

E´tablissement du texte : Manuscrit : BnF, NAF 18823, fo 136ro.

6 nombreux ] lecture confirme´e par le substantif suivant

1

La note sur les sacrifices humains chez les E´gyptiens a e´te´ prise en consultant un ouvrage non identifie´ avec des planches en vue de fournir un argument pour le chap. II du livre XI. BC ne l’a pas utilise´e.

5

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De la Religion, IV – Textes comple´mentaires

[Re´flexions sur l’immortalite´ de l’aˆme]1

fo 68ro

On peut distinguer deux manie`res de concevoir l’immortalite´ de l’ame. la 1ere la plus simple & qui se pre´sente naturellement aux savages aux Tribus barbares & meˆme aux peuples qui commencent a` se civiliser, consiste dans la supposition que l’homme apre`s sa mort renait dans un autre monde. Il n’y a de change´ que le lien ou` il se trouve transporte´ & ou` il recommence ses occupations. telle est la croyance des Iroquois & des peuplades de la Sibe´rie, & telle fut celle des Grecs jusqu’apre`s les tems home´riques. la seconde manie`re de concevoir l’ame immortelle est de l’imaginer survivant au corps. c’est une ide´e beaucoup plus abstraite, & qui ne pe´ne`tre dans la religion qu’a` l’e´poque ou` la philosophie en devient partie.

E´tablissement du texte : Manuscrit : BnF, NAF 18823, fo 68ro.

1

BC note une ide´e pour le chapitre VII du livre IX, mais ne l’utilse pas sous cette forme.

5

10

Fragments de textes non identifie´s

781

[Re´flexions sur Candaule et Gyge`s]1

fo 112ro

Creutzer dans ses lettres a` Hermann donne un singulier exemple de la manie`re dont les traditions se de´naturent, & ce qui est remarquable, c’est que cet exemple choisi par Creutzer en est un non moins frappant de la fausse route que prennent souvent ceux qui veulent e´claircir ces traditions. L’histoire de Candaule & de Gyge`s dans Plutarque dit-il est un e´ve´nement ordinaire, une re´volution militaire comme on peut en voir tous les jours. Plut. Quæst. Græc. p. 302. dans Herodote l’histoire de Candaule blessant la pudeur de sa femme par sa faiblesse pour son favori prend deja un air plus romanesque. Herod. I. 8. mais il n’y a encore rien de surnaturel. dans Platon ou` le Berger Lydien Gyge`s pe´ne`tre dans un gouffre, trouve un cadavre gigantesque & lui enle`ve un anneau qui rend invisible tout devient e´tranger E´tablissement du texte : Manuscrit : BnF, NAF 18823, fo 112ro. 1

Une note sur un raisonnement de Creuzer, sans doute destine´e a` eˆtre inte´gre´e dans le chap. VI du livre XII, ou` il est question assez rapidement de Candaule et de Gyge`s. Voir Gottfried Hermann, Friedrich Creuzer, Briefe über Homer und Hesiodus, vorzüglich über die Theogonie von G. H. und F. C. Heidelberg : in August Oswald’s Universitäts-Buchhandlung, 1818, pp. 103–106. BC paraphrase le texte de Creuzer qui dit : «Lesen wir die Geschichte vom Schicksal des Lydischen Königs Kandaules bey’m Plutarch (Quaestt. Graecc. p. 236. Wytt.), so haben wir das Ereigniß einer ganz ordinären militärischen Usurpation, die in jeder Europäischen Staatengeschichte ohne Anstoß ihren Platz finden könnte. Bey’m Herodot wird das Alles schon romantischer gehalten, und der schwache König und neben ihm die durch verletzte Schamhaftigkeit beleidigte Königin, zwischen ihnen der Liebling Gyges [...]. Aber doch geht noch alles ganz menschlich her (Herod. I. 8. sqq.) Schreiten wir aber nun zum Plato fort, und lesen dorten von dem Lydischen Hirten Gyges, der des Königs Herden weidet, und wie darauf unter fürchterlichen Regengüssen und Erdbeben ein Schlund sich öffnet, und wie er hinab steigt und von dem Finger des Riesenleichnams im ehernen Roß den unsichtbar machenden Zauberring abzieht, womit er sich Königsfrau und Königsreich erringt, dann gewinnt die ganze Überlieferung ein fremdartiges Ansehen (Plato de Legg. II. 3. p. 359. p. 37. Ast.) Und vergleichen wir dann und merken auf das Einzelne, so wissen wir bald Altes, Mittleres und Neueres zu unterscheiden. Hören wir daß Hercules auf Lydisch Kandaules hieß, und daß dieser Kämpfer auf der Sonnenbahn eben dort in Lydien durch eine Königsfrau um seine Kraft gekommen, [...] schauen wir auf den Grund in den wallenden Fluthen der Sage, und heben endlich den Hort einer einfachwahren Urgeschichte von dem wechselnden Regiment solarischer und neptunischer Kräfte, und wie dieser tellurische Regierungswechsel mit dem Wechsel älterer Dynastien innerlich und nothwendig zusammengeworfen worden.» Mais BC ne reprend pas dans ce contexte le raisonnement esquisse´ par Creuzer.

5

10

782

De la Religion, IV – Textes comple´mentaires

& mysterieux & quand on pense que Hercule en Lydien s’appeloit Candaule, que c’est en Lydie qu’Hercule perd sa force pour une femme, que les Rois Lydiens porterent depuis Hercule une massue au lieu de sceptre, alors nous voyons que cette tradition nous rame`ne a` l’histoire primitive de la lune & du soleil. c’est ainsi, continue Creutzer que nous pouvons distinguer 3 e´poques la plus ancienne l’intermediaire & la plus recente. sans doute mais en renversant l’ordre que Creutzer a adopte´.

5

Fragments de textes non identifie´s

783

Privations contre nature & rites licentieux1

fo ?

Comme dans les climats me´ridionaux, il faut plus de raison pour eˆtre raisonnable, il faut plus de chastete´ pour eˆtre chaste.

E´tablissement du texte : Manuscrit : BCU, Co 3293, sans foliotage.

2–3 raisonnable ] 〈chaste〉 raisonnable Co 3293

1

Cette fiche appartient peut-eˆtre a` un manuscrit sur fiches non identifie´. Il peut s’agir aussi d’une simple note prise en lisant Montesquieu, De l’esprit des lois (livre XXV, chap. 4). Voir ci-dessus, p. 302.

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De la Religion, IV – Textes comple´mentaires

[Note sur le moral dans les climats chauds]

fo 64

l’homme n’est raisonnable, conse´quent, vertueux, qu’autant que le moral l’emporte sur le physique. Or cette victoire est beaucoup plus difficile dans les climats chauds que dans les autres. Comme il faut plus de chastete´ pour y eˆtre chaste, il faut plus de raison pour y eˆtre raisonnable1. localite´s

E´tablissement du texte : Manuscrit : BnF, NAF 18823, fo 64.

1

Variation inacheve´e sur le meˆme sujet que celui du fragment pre´ce´dent. Le contexte n’est pas connu. Voir ci-dessus, p. 302.

5

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Fragments de textes non identifie´s

[Notes pour le livre

XII]1

[...] fo ?

Toutes les Divinite´s morales dans les Lyriques. 5

Punition des mechans, dans l’autre monde, sous terre, suivant Pindare. Passages tre`s importans de Platon & d’He´rodote sur les sacrifices humains en Gre`ce. Hermann III. 289 &s.

E´tablissement du texte : Manuscrit : BCU, Co 3293, sans foliotage.

1

Reste d’un folio avec des notes de lecture. BC les a utilise´es pour re´diger le livre ci-dessus, pp. 406 (lyriques), 409 (Pindare) et 268 (Platon).

XII.

Voir

Instruments bibliographiques

Abre´viations

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Bibliographie

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MAISTRE, Joseph de, De l’E´glise gallicane dans son rapport avec le souverain pontife, pour servir de suite a` l’ouvrage intitule´ Du pape, par l’auteur des Conside´rations sur la France, Lyon : Rusand, 1821. – Les Soire´es de Saint-Pe´tersbourg, ou Entretiens sur le gouvernement temporel de la Providence, suivis d’un Traite´ sur les sacrifices, par M. le Cte Joseph de Maistre, Paris : Librairie grecque, latine et franc¸aise, 1821. – Œuvres comple`tes de J. de Maistre, nouvelle e´dition contenant ses œuvres posthumes et toute sa correspondance ine´dite, Lyon : Vitte et Perrussel, 1884–1886, 14 vol. (Reprint : Gene`ve : Slatkine reprints, 1979). MALLET, Paul-Henri, Edda ou Monumens de la mythologie et de la poe´sie des anciens peuples du nord, Gene`ve : Barde, Maget et Compagnie, et Paris : Buisson, 31787. MANE´ THON DE SEBENNYTOS, Histoire de l’E´gypte – Ægyptiaca. MOI¨SE MAIMONIDE, Führer der Unschlüssigen, ins Deutsche übertragen und mit erklärenden Anmerkungen versehen von Dr. Adolf Weiss, Leipzig : Verlag von Felix Meiner, 1923. MONTAIGNE, Michel Eyquem de, Essais, texte e´tabli et annote´ par Albert Thibaudet, Paris : Gallimard, 1950 (Ple´iade). MONTESQUIEU, Œuvres comple`tes, texte pre´sente´ et annote´ par Roger Caillois, Paris : Gallimard, 1966, 2 vol. (Ple´iade). MOOR, Edward, Hindu Infanticide. An Account of the Measures adopted for Suppressing the Practice of the Systematic Murder by their Parents of Female infants, London : Johnson and Co, 1811. Nalus : Carmen sanscritum e Maha`bha`rato, edidit, latine vertit et adnotationibus illustravit Franciscus Bopp, Londini, Parisiis et Argentorati : apud Treuttel et Würtz, 1819. NAUCK, August, Tragicorum Græcorum Fragmenta, Hildesheim : Georg Olms, 1964. NICOLAS DE DAMAS, Histoires, Recueil de coutumes, Vie d’Auguste, Autobiographie, textes traduits et commente´s par E´dith Parmentier et Francesca Prometea Barone, Paris : Les Belles Lettres, 2011. NIEBUHR, Carsten, Reisebeschreibung nach Arabien und andern umliegenden Ländern, mit einem Vorw. von Stig Rasmussen und einem biographischen Portrait von Barthold Georg Niebuhr, Zürich : Manesse Verlag, 2 1993. NILSSON, Martin P., Geschichte der Griechischen Religion, t. I : Die Religion Griechenlands bis auf die griechische Weltherrschaft, München : Beck’sche Verlagsbuchhandlung, 1976. ORIGINES, De oratione, dans : PG, t. XI, col. 415–562. OVINGTON, John, Voyage to Suratt in the Year 1669, New Delhi : Associated Publishing House, 1976.

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Instruments bibliographiques

Patrologiæ cursus completus sive bibliotheca universalis, integra, omnium ss. patrum, doctorum, scriptorumque ecclesiasticorum, sive Latinorum, sive Græcorum [...] Series Græca : in qua prodeunt patres, doctores, scriptoresque ecclesiæ Græcæ a S. Barnaba ad Bessarione, Lutetiæ Parisiorum : Migne, 1857–1866, 165 vol. Patrologiæ cursus completus sive bibliotheca universalis, integra, uniformis, commoda, oeconomica, omnium ss. patrum, doctorum scriptorum que ecclesiasticorum qui ab ævo apostolico ad usque Innocentii III tempora floruerunt [...] Series Latina : in qua prodeunt patres, doctores scriptoresque ecclesiæ Latinæ a Tertulliano ad Innocentium III, Lutetiæ Parisiorum : Migne, 1844–1865, 221 vol. Der neue Pauly. Enzyklopädie der Antike, hrsg. von Hubert Cancik und Helmut Schneider, Stuttgart et Weimar : Metzler, 2003, 12 vol. PAUSANIAS, Description of Greece, with an English translation by W. H. S. Jones, Cambridge : Harvard University Press, 1918–35, 5 vol. PHILON D’ALEXANDRIE, De vita contemplativa, introduction et notes de Franc¸ois Daumas, traduction de Pierre Miquel, Paris : Les E´ditions du Cerf, 1963. PHILOSTRATE L’ATHE´ NIEN, Vie d’Apollonios de Tyane par Philostrate, avec les commentaires donne´s en anglois par Charles Blount sur les deux premiers livres de cet ouvrage. Le tout traduit en franc¸ois, Berlin : G. J. Decker, 1774, 4 vol. PINDARE, Pindari Opera quæ supersunt, textum in genuina metra restituit, et ex fide librorum manuscriptorum doctorumque coniecturis recensuit, annotationem criticam scholia integra interpretationem Latinam commentarium perpetuum et indices adiecit Avgvstvs Boeckhivs, Lipsiae : Weigel, 1811–1821, 4 vol. – Isthmiques et fragments, texte e´tabli et traduit par Aime´ Puech, Paris : Les Belles Lettres, 1961. – Ne´me´ennes, texte e´tabli et traduit par Aime´ Puech, Paris : Les Belles Lettres, 1967. – Olympiques, texte e´tabli et traduit par Aime´ Puech, Paris : Les Belles Lettres, 1970. – Pindari carmina cum fragmentis, edidit Bruno Snell, Leipzig : Teubner Verlagsgesellschaft, 1989. – Pythiques, texte e´tabli et traduit par Aime´ Puech, Paris : Les Belles Lettres, 1992. PLATON, Œuvres comple`tes, t. I, texte e´tabli et traduit par Maurice et Alfred Croiset, Paris : Les Belles Lettres, 1985. PLINE L’ANCIEN, Histoire naturelle. Livre II, texte e´tabli, traduit et commente´ par Jean Beaujeu, Paris : Les Belles Lettres, 1950.

Bibliographie

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– Histoire naturelle. Livre XXVII-XXX, traduit et commente´ par Alfred Ernout, Paris : Les Belles Lettres, 1959–1963, 4 vol. – Histoire naturelle. Livre X, texte e´tabli, traduit et commente´ par Euge`ne de Saint-Denis, Paris : Les Belles Lettres, 1961. – Histoire naturelle. Livre VII, texte e´tabli et traduit par Robert Schilling, Paris : Les Belles Lettres, 1977. PLUTARQUE, Les œuvres morales et philosophiques de Plutarque, translate´es de grec en franc¸ois, par Messire Jacques Amyot, Paris : C. Morel, 1618. – Plutarch, Moralia, with an English Translation by Frank Cole Babbitt, t. IV, Cambridge, Massachusetts, London : Harvard University Press, 5 1993. – Plutrach’s Moralia in sixteen Volumes, with an English Translation by Benedict Einarson [...] and Philip H. de Lacy, t. XIV, Cambridge, Massachusetts : Harvard University Press, London : William Heinemann, 1986. – Œuvres morales, t. VI : Dialogues pythiques, texte e´tabli et traduit par Robert Flacelie`re, Paris : Les Belles Lettres, 1974. PORPHYRE, De l’abstinence. Livre I, texte e´tabli et traduit par Jean Bouffartigue et Michel Patillon, Paris : Les Belles Lettres, 1977. – De l’abstinence. Livres II et III, texte e´tabli et traduit par Jean Bouffartigue et Michel Patillon, Paris : Les Belles Lettres, 1979. POSSEVINO, Antonio, Antonii Possevini Mantuani Societatis Iesu Bibliotheca selecta de ratione studiorum, [...] Colonia Agrippina : Apud Ioannem Gymnicum, MDCVII [1607]. PTOLE´ ME´ E, Claude, Tetrabiblos. QUINTE-CURCE, Historia Alexandri Magni, Editio Sterotypa, Lipsiæ : Tauchnitii, 1829. – Histoires, texte e´tabli et traduit par H. Bardon, Paris : Les Belles Lettres, 2003 et 2008, 2 vol. instructi a Frid. Schmieder, Gottingæ : Sumptibus Henrici Dieterich, 1803. QUINTUS ENNIUS, The Annals of Quintus Ennius. Edited with Introduction and Commentary by Otto Skutsch, Oxford : Clarendon Press, 21986. The Ramayuna of Valmeeki in the original Sungskrit, with a Prose Translation and Explanatory Notes, by William Carey and Joshua Marshman, Serampore : [Mission Press], 1806–1810, 4 vol., London : J. W. Morris, 1808–1814, 3 vol. RICHARDSON, Nicholas, The Iliad, A Commentary. Volume VI, Books 21–24, Cambridge : University Press, 1993. ROCHER, Ludo, Ezourvedam. A French Veda of the Eighteenth Century, edited with an Introduction by L. R., Amsterdam, Philadelphia : John Benjamins Publishing Company, 1984. ROGERIUS, Abraham, Offene Thür zu dem verborgenen Heydenthum, oder Wahrhafte Vorweisung deß Lebens und der Sitten, samt der Religion und

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dem Gottesdienst der Bramines, auf der Cust Chormandel, und denen herumligenden Ländern, Nürnberg : Johann Andreas Endters, 1663. ROQUEFEUIL, Camille de, Journal d’un voyage autour du monde pendant les anne´es 1816, 1817, 1818 et 1819, Paris : Ponthieu, Lesage, Gide, 1823. SAXON LE GRAMMAIRIEN, Saxonis Grammatici Historiæ Danicæ libri XVI e recensione Ioannis Stephanii cum prolegominis et lectionis varietate edidit Christianus Adolphus Klotzius, Lipsiæ : apud Carolum Gvilielmvm Hollivm, 1771. – Saxonis Grammatici Gesta Danorum, herausgegeben von Alfred Holder, Strassburg : Karl J. Trübner, 1886. – La geste des Danois [...] traduit du latin par Jean-Pierre Troadec, Paris : Gallimard, 1995. SCHLEGEL, August Wilhelm, [C. r. de] Friedrich Bopp, «London, Paris und Straßburg bey Treuttel und Würtz : Nalus, carmen sanscritum e Maha`bha`rato : edidit, latine vertit et adnotationibus illustravit Franciscus Bopp. 1819, 8. pag. XIII et 216.», dans Indische Bibliothek, t. I, Bonn : Eduard Weber, 1823, pp. 97–128. Scholia in Theocritum Vetera, recensuit Carolus Wendel. Editio stereotypa editionis primae (MCMXIV), Stutgardiae : Teubner, MCMLXVII. Scriptores rerum germanicarum in usum scholarum, Hannoveræ et Lipsiæ : Impensis Hahniani, 1917. SELDEN, Johannes, Joannis Seldeni Jurisconsulti Opera omnia tam edita quam inedita, Londini : Impensis J. Walthoe, G. Conyers [...], MDCCXXVI [1726], 3 vol. SE´ NE` QUE, L. Annæi Senecæ Naturalium Quæstionum libri septem, recognovit [...] G. D. Koeler, Gottingæ : sumptibus Vandenhoek et Ruprecht, 1819. Shi-king. Das kanonische Liederbuch der Chinesen. Aus dem Chinesischen übersetzt und erklärt von Victor von Strauß, Heidelberg : Carl Winter’s Universitätsbuchhandlung, 1880. SICARD, Claude, Œuvres, edition critique de Maurice Martin, t. II : Relations et me´moires imprime´s, Le Caire : IFAO et [Paris :] [diffusion Imprimerie nationale], 1982 (Institut franc¸ais d’arche´ologie orientale du Caire, Bibliothe`que d’E´tude, t. LXXXIV). – Œuvres, edition critique de Maurice Martin, t. III : Paralle`le ge´ographique de l’ancienne E´gypte et de l’E´gypte moderne, pre´sentation et notes de Serge Sauneron et Maurice Martin Le Caire : IFAO ; [Paris : diffusion Imprimerie nationale], 1982 (Institut franc¸ais d’arche´ologie orientale du Caire, Bibliothe`que d’E´tude, t. LXXXV). SILIUS ITALICUS, La guerre punique, t. I : Livres I-IV, texte e´tabli et traduit par Pierre Miniconi et Georges Devallet, Paris : Les Belles Lettres, 1979.

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SOLIN, Commentaria in C. Ivlii Solini Polyhistoria, Basileæ : per Henrichum Petri, s.d. [1557]. – Caii Ivlii Solini Polyhistor, Ex Editione Clavdii Salmasii accvvrante M. Andrea Goezio Collectanea rerum Memorabilium, Lipsiæ : Bauer, 1777. SOPHOCLE, Trage´dies, t. I : Les Trachiniennes, Antigone, texte e´tabli par Alphones Dain et traduit par Paul Mazon, sixie`me tirage revu et corrige´ par Jean Irigoin, Paris : Les Belles Lettres, 1989. – Trage´dies, t. II : Ajax – Œdipe Roi – Electre, texte e´tabli par Alphonse Dain, Jean Irigoin, traduit par Paul Mazon, Paris : Les Belles Lettres, 2009. – Œdipe roi – Οιδι πους τυ ραννος. – Philocte`te – Φιλοκτη της. SOZOME` NE, Histoire eccle´siastique. Livres V-VI, introduction et annotation par Guy Sabbah, traduction par Andre´-Jean Festugie`re et Bernard Grillet, Paris : Les E´ditions du Cerf, 2005 (Sources chre´tiennes, 495). – Histoire eccle´siastique. Livres VII-IX, introduction par Guy Sabbah, traduction par Andre´-Jean Festugie`re et Bernard Grillet, annotation par Laurent Angliviel de la Beaumelle et Guy Sabbah, Paris : Les E´ditions du Cerf, 2008 (Sources chre´tiennes, 516). STAE¨ L-HOLSTEIN, Anne-Louise-Germaine de, De la litte´rature dans ses rapports avec les institutions sociales, nouvelle e´dition critique, e´tablie, pre´sente´e et annote´e par Axel Blaeschke, Paris : Classiques Garnier, 1998. STACE, The´baı¨de. Livres I-IV, texte e´tabli et traduit par Roger Lesueur, Paris : Les Belles Lettres, 1990. STEPHANUS BYZANTINUS, Stephani Byzantii Ethnica, recensuit, germanice vertit, adnotationibusque instruxit Margarethe Billerbeck, adiuvantibus Jan Felix Gaertner, Beatrice Wyss, Christian Zubler, Berolini : W. de Gruyter, 2006, 4 vol. STELLER, Ulrich, voir KLOOCKE, Kurt. STE´ SICHORE, The Poems, edited with Introduction, Translation, and Commentary by M. Davies and P. J. Finglass, Cambridge : University Press, 2014. STOBE´ E, Jean, Ioannis Stobaei Eclogarum physicarum et ethicarum libri duo, Gottingæ : apud Vandenhoek et Ruprecht, MDCCXCII [1792], 2 vol. STRABON, Strabonis Rerum geographicarum libri XVII. Isaacus Casaubonus recensuit..., emendavit ac commentariis illustravit. Accessit et tabula, orbis totius descriptionem complectens. Adjecta est etiam Guilielmi Xylandri,... latina versio, cum necessariis indicibus, [Genevæ :] excudebat E. Vignon, 1587, 2 parties en 1 vol. TARQUIN L’ANCIEN, Histoire naturelle, livre XXXV, texte e´tabli, traduit et commente´ par Jean-Michel Croisille, Paris : Les Belles Lettres, 1985. TAULER, Johannes, Die Predigten Taulers aus der Engelberger und Freiburger Handschrift sowie aus Schmidts Abschriften der ehemaligen

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Instruments bibliographiques

Straßburger Handschriften, hrsg. von Ferdinand Vetter, Berlin : Weidmannsche Buchhandlung, 1910. TERTULLIEN, Corpus Christianorum, t. I : Quinti Septimi Florentis Tertulliani Opera, Pars I : Apologeticum, Turnholti : Brepols, MCMLIV [1954]. Thodoreti Episcopi Cyrensis Graecarum affectionum curatio seu evangelicae veritatis ex gentilium philosophia curatio, dans : PG, t. LXXXIII, col. 783–1034. THE´ OGNIS, Poe`mes e´le´giaques, texte e´tabli, traduit et commente´ par Jean Carrie`re, nouvelle e´dition, refondue et augmente´e, Paris : Les Belles Lettres, 1975. Theologiæ cursus completus., [...] accurante J. P. Migne, Paris : apud J. P. Migne, t. XX, 1841. Tre´sor de la langue franc¸aise. Dictionnaire de la langue du XIX e et du XX e sie`cle (1789–1960), publie´ sous la direction de Paul Imbs, Paris : E´ditions du CNRS (t. 1–10) ; Paris : Gallimard (t. 11–16), 1971–1988. VARRON, On the Roman Language, with an English Translation by Roland G. Kent, London : William Heinemann, Cambridge, Massachusetts : Harvard University Press, MCMLXVII [1967], 2 vol. VIRGILE, Publius Virgilius Maro, varietate lectionis et perpetua adnotatione illustratus a Christ. Gottl. Heyne, Editio 4a, Curavit Ge. Phil. Eberard Wagner, Lipsiæ : sumtibus Librariæ Hahnianæ, 1830–1841, 5 vol. VOSS, Johann Heinrich, «Alte Weltkunde», Jenaische Allgemeine LiteraturZeitung, Erster Jahrgang, Zweyter Band, Jena : in der Expedition dieser Zeitung, und Leipzig : in der kurfürstl. sächsischen Zeitungs-Expedition, 1804, pp. I-XXXVI. WILSON, Horace Hayman, Chefs-d’œuvre du the´aˆtre indien, traduits de l’original sanscrit en anglais par M. H. H. Wilson,[...] et de l’anglais en franc¸ais par M. A. Langlois,[...] accompagne´s de notes et d’e´claircissemens et suivis d’une table alphabe´tique des noms propres et des termes relatifs a` la mythologie et aux usages de l’Inde, avec leur explication, Paris : Dondey-Dupre´ pe`re et fils, 1828, 2 vol. – Select specimens of the theatre of the Hindus, translated from the original Sanscrit [...] by Horace Hayman Wilson, second Edition, London : Parbury, Allen, and Co, 1835, 2 vol. WINCKELMANN, Johann Joachim, Versuch einer Allegorie, besonders für die Kunst, dans Winckelmanns Werke, t. II, Dresden : Walthersche Hofbuchhandlung, 1808. WOLFF, Christian, Historisch-politisch-geographischer Atlas der gantzen Welt, t. III, Leipzig : Heinsius, 1745. XE´ NOPHON, Cyrope´die, t. III : Livres VI-VIII, texte e´tabli et traduit par E´douard Delebecque, Paris : Les Belles Lettres, 1978. YOYOTTE, Jean, «He´ra d’He´liopolis et les sacrifices humains», Annuaire de l’E´cole pratique des Hautes-E´tudes, V e section – Sciences religieuses 89, 1980–1981, pp. 29–102.

Bibliographie

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Zend-Avesta, ouvrage de Zoroastre, contenant les ide´es the´ologiques, physiques & morales de ce le´gislateur, les ce´re´monies du culte religieux qu’il a e´tabli, & plusieurs traits importans relatifs a` l’ancienne histoire des Perses, traduit en Franc¸ois sur l’Original zend, avec des Remarques, & accompagne´ de plusieurs Traite´s propres a` e´claircir les Matie`res qui en sont l’objet, par M. Anquetil Du Perron, Paris : N. M. Tilliard, 1771, 2 tomes en 3 vol. ZOSIME, Histoire nouvelle, [...] texte e´tabli et traduit par Franc¸ois Paschoud, Paris : Les Belles Lettres, 1971–1989, 5 vol.

Ouvrages cite´s par Constant

A collection of Voyages and Travels, some now first Printed from Original Manuscripts, Others Translated out of Foreign Languages, and now first Publish’d in English, London : Awnsham and John Churchill, MDCCIV [1704]. ACOSTA, Jose´ de, Historia natural y moral de las Indias, Sevilla : Iuan de Leon, 1590. ADAM DE BREˆ ME, Gesta Hammaburgensis Ecclesiæ Pontificum (1075– 1076). ALCIPHRON, Lettres Grecques ou anecdotes sur les mœurs et les usages de la Gre`ce, avec des notes historiques & critiques, par le rhe´teur Alciphron, Amsterdam, Paris : Nyon l’aıˆne´, 1784. AMMIEN-MARCELLIN, Histoire – Res gestæ. ANONYME, «Advertisement», Asiatic Researches, London : Vernor and Hood et al., t. V, 1799, pp. III-XI. – «Notice sur les Druses», Le Moniteur universel, no 69, 8 mars 1808, pp. 272b–274c. – C. r. de John Bird Sumner, «Ve´rite´ du Christianisme, prouve´e par la nature meˆme de cette religion, et par le fat de son e´tablissement ; par J.-B. Sumner, ministre de la religion anglicane ; traduit de l’anglais, par le viomte P.-E. Lanjuinais», Gazette de France, no 230, 18 aouˆt 1826, pp. 3b–4b. – «Caracte`res», Gazette de France, no 658, 20 octobre 1829, pp. 2a–2b. ANONYME DU IVe SIE` CLE, Minos – Μινως. ANSSE DE VILLOISON, De triplici Theologiaˆ Mysteriisque Veterum commentatio, dissertation latine jointe a` M. Le Baron de Sainte-Croix, Recherches historiques et critiques sur les myste`res du Paganisme, seconde e´dition, Paris : chez de Bure Fre`res, 1817. ANQUETIL-DUPERRON, Abraham-Hyacinthe, voir OUPNEK’HAT. APOLLODORE D’ATHE` NES, Apollodori atheniensis Bibliothecæ libri tres et fragmenta, curis secundis illustravit Chr. G. Heyne, Gottingæ : H. Dieterich, 1803. APOLLONIOS DE RHODES, Argonautiques – ëΑργοναυτικα . APPIEN, Histoire romaine – ëΡωμαιÈκα . APULE´ E, Me´tamorphoses – Metamorphoses. ARISTOPHANE, Aristophanis comœdiæ undecim, Græce et Latine, Ad fidem optimorum Codicum MSS, emendatæ cum nova octo Comœdiarum interpretatione Latina, & notis ad singulas ineditis ästephani Bergleri nec

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Instruments bibliographiques

non Caroli Andreæ Dukeri ad quatuor priores. [...] Curante Petro Burmanno secundo, Lugduni Batavorum : Apud Samuelem et Joannem Luchtmans, MDCCLX [1760]. – Les Grenouilles – Βα τραχοι. – Les Nue´es – Νεϕε λαι. – La Paix – Ειρη νη. ARNOBE L’ANCIEN, Arnobii disputationum adversus gentes libri septem (Adversus nationes). ARRIEN, Anabase ou Expe´dition d’Alexandre. Asiatick Researches : or, Transactions of the Society instituted in Bengal for Inquiring into the History and Antiquities, the Arts, Sciences, and Literature, of Asia, Calcutta : printed at the Honorable Company’s Press, by Thomas Watley. And sold at London by P. Elmsly, 1788–1839, 20 vol. (Reprint : London : Vernor and Hood et al., 1799–1839). ATHE´ NE´ E, Les Deipnosophistes – Δειπνοσοϕισται . AUGUSTIN, La Cite´ de Dieu – De civitate Dei. – Sermons – Sermones. AULU-GELLE, Les Nuits attiques – Noctes atticæ. BACALLAR Y SANNA, Vicente, Monarchia hebrea [...] por Don Vicente Bacallar y Sanna, marques de San Phelippe, Haya : C. Alberts y Van der Kloot, 1727, 2 vol. – La Monarchie des He´breux, par son excellence le marquis de SaintPhilippe. Traduit de l’Espagnol (par A[ntoine de La Barre] de Beaumarchais), La Haye : Alberts et Van der Kloot, 1727 (La Haye : Henri Scheurleer, 1828), 4 vol. Bagavadam ou doctrine divine. Ouvrage indien, canonique sur l’Eˆtre supre`me, les dieux, les ge´ans, les hommes, les diverses parties de l’univers, publie´ par M. Foucher d’Obsonville, Paris : Tilliard & Clousier, 1788. BAILLY, Jean-Sylvain, Histoire de l’astronomie ancienne depuis son origine jusqu’a` l’e´tablissement de l’e´cole d’Alexandrie, Paris : De Bure fils aıˆne´, 2 MDCCLXXXI [1781]. [BARTHE´ LEMY, Jean-Jacques], Voyage du jeune Anacharsis en Gre`ce, dans le milieu du quatrie`me sie`cle avant l’e`re vulgaire, Paris : de Bure aıˆne´, 1788, 6 vol., Paris et Venise : Jacques Storti, 1790, 7 vol. BARTHOLIN, Thomas, Antiquitatum danicarum de causis contemptæ a Danis adhuc gentilibus mortis libri tres ex vetustis codicibus & monumentis hactenus ineditis congesti, Hafniæ : J. P. Bockenhoffer, 1689. BASILE DE CE´ SARE´ E, Contre Eunome – Adversus Eunomium. BAUMGARTEN, Martin von, Martini a Baumgarten in Braitenbach, equitis germani [...] Peregrinatio in ægyptum, Arabiam, Palæstinam et Syriam [...] opera M. Christophori Donaveri, [...] Præfixa est equitis vita, codem auctore, Noribergæ : ex officina Gerlachiana, 1594. BAUMGARTEN, Siegmund Jakob, Historia doctrinæ de statu animarum separatarum, Halæ Magdeburgicæ : Io. Christiani Hendeli, [1754].

Ouvrages cite´s par Constant

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BAYLE, Pierre, «Adam», Dictionnaire historique et critique. – «Comane», Dictionnaire historique et critique. – «Jupiter», Dictionnaire historique et critique. – «Leucade», Dictionnaire historique et critique. – «Maniche´ens», Dictionnaire historique et critique. – «Prodicus l’he´re´tique», Dictionnaire historique et critique. – «Prudence», Dictionnaire historique et critique. – «Tandemus», Dictionnaire historique et critique. – «Teucer», Dictionnaire historique et critique. – «Thesmophories», Dictionnaire historique et critique. – «Turlupins», Dictionnaire historique et critique. BERGER, Johann Gottfried Immanuel, Geschichte der Religionsphilosophie oder Lehren und Meinungen der originellsten Denker aller Zeiten über Gott und Religion, historisch dargestellt, Berlin : im Verlage der Langischen Buchhandlung, 1800. BERNIER, Franc¸ois, Voyages de Franc¸ois Bernier [...] contenant la description des Etats du Grand Mogol, de l’Hindoustan, du Royaume de Kachemire, &c., Amsterdam : Paul Marret, MDCXCIX [1699], t. II. BEYER, Andreas, voir SELDEN, John. Le Bhaguat-geeta, ou Dialogues de Kreeshna et d’Arjoon, contenant un pre´cis de la religion & de la morale des Indiens. Traduit du samscrit la langue sacre´e des Brahmes, en anglois par M. Charles Wilkins, et de l’anglois en franc¸ois par M. Parraud, de l’acade´mie des Arcades de Rome, Londres [Paris :] Buisson, 1787. The Bha˘gva˘t-Geeta˘, or Dialogues of Kre˘e˘shna˘and A˘rjo˘o˘n ; in Eighteen Lectures ; with notes ; translated from the original, in the Sanskreet, or ancient language of the Brahmans, by Charles Wilkins, London : C. Nourse, 1785. La Bible. BLAQUIERE, William Coates, «The Ruhdira´dhya´yaˇ, or sanguinary chapter, translated from the Calica Puran by W. C. Blacquiere, Esq.», Asiatic Researches, London : Vernor and Hood et al., t. V, 1799, pp. 371–391. BLONDEL, David, Traicte´ de la cre´ance des Pe`res touchant l’estat des aˆmes apre`s cette vie et de l’origine de la prie`re des morts et du purgatoire, Charenton : A. Cellier, 1654. BLUNT, James T., «Narrative of a Route from Chunarghur to Yertnagoodum, in the Ellore Circar», Asiatick Researches, London : Vernor, Hood and Sharpe et al., t. VII, 1803, pp. 57–169. BOCHART, Samuel, Hierozoicon sive bipartitum opus de animalibus sacræ scripturæ (1663).

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Instruments bibliographiques

BOTIN, Anders af, Andreas Botins Geschichte der schwedischen Nation, im Grundriß, aus dem Schwedischen ins Deutsche übersetzt von Hartwig Ludwig Christian Bacmeister, Riga, Leipzig : Hartknoch, 1767, 2 vol. BOUDON, Henri-Marie, Vie de Marie Ange´lique de la Providence ou l’Amour de Dieu seul, Paris : Dufour, Boiste fils aine´, Me´quignon, 1826. BOULANGER, Nicolas-Antoine, L’Antiquite´ de´voile´e par ses usages, ou Examen critique des principales opinions, ce´re´monies & institutions religieuses & politiques des diffe´rens peuples de la terre, Amsterdam : chez Marc Michel Rey, 1766, 3 vol. BRITO, Jean de, voir LAINEZ, Franc¸ois. BRUCKER, Johann Jakob, Iacobi Bruckeri Historia critica philosophiæ a mundi incunabulis usque ad nostram ætatem deducta, Lipsiæ : Weidmann, 1742–1767, 6 vol. BRUMOY, Pierre, Le The´aˆtre des Grecs, par le R. P. Brumoy, Nouvelle e´dition, revue, corrige´e et augmente´e, Paris : Libraires associe´s, MDCCLXIII [1763], 6 vol. BRUNET, Franc¸ois-Florentin, Paralle`le des religions, ouvrage publie´ par le P. Franc¸ois-Florentin Brunet, Paris : Knapen, 1792, 3 tomes en 5 vol. BUCHANAN, Francis, «On the Religion and Literature of the Burmas», Asiatic Researches, London : Vernor, Hood et al., t. VI, 1807, pp. 163–308. CAMBRY, Jacques, Voyage dans le Finiste`re, ou E´tat de ce de´partement en 1794 et 1795, Paris : librairie du Cercle Social, an VII [1798], 3 vol. CARLI, J. R., Lettres ame´ricaines, dans lesquelles on examine l’Origine, l’E´tat Civil, Politique, Militaire et Religieux, les Arts, l’Industrie, les Sciences, les Mœurs, les Usages des anciens Habitans de l’Ame´rique ; les grandes E´poques de la Nature, l’ancienne Communication des deux He´misphe`res, et la dernie`re Re´volution qui a fait disparaıˆtre l’Atlantide : pour servir de suite aux Me´moires de D. Ulloa, Paris : Buisson, 21792, 2 vol. CARNAC, John, «An Indian Grant of Land In Y. C. 1018. Literally Translated from the Sanscrit, As Explained by Ra’malo’chan Pandi. Communicated by General Carnac», Asiatick Researches, Calcutta : Vernor and Hood, t. I, 1798, pp. 357–367. CASAUBON, Isaac, Isaaci Casauboni De rebus sacris & ecclesiasticis exercitationes XVI. Ad Cardinal. Baronij Prolegomena in Annales, & primam eorum partem, de D. N: Iesu Christi nativitate, vita, passione, assumtione. [...], cum prolegominis auctoris, in quibus de Baronianis Annalibus candide disputatur [...], Francof[urti] : Ruland, MDCXV [1615]. Le Catholique, ouvrage pe´riodique dans lequel on traite de l’universalite´ des connaissances humaines sous le point de vue de l’unite´ de doctrine, publie´ sous la direction de M. le baron d’Eckstein, Paris : A. Sautelet et Cie, 1826–1830.

Ouvrages cite´s par Constant

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CENSORINUS GRAMMATICUS, De die natali ex recensione et cum annotationibus D. Joannis Sigismundi Gruber, [...], Norimbergi : s.e´d., 1805. CE´ SAR, Jules, Guerre des Gaules – De bello gallico. CHAMBERS, William, «Some Account of the Sculptures and Ruins at Mavalipuram, a Place a few Miles North of Sadras, and known to Seamen by the Name of the Seven Pagodas», Asiatick Researches, Calcutta : Manuel Cantopher, t. I, 1788, pp. 145–170. CHAMPOLLION, Jean-Franc¸ois, L’E´gypte sous les Pharaons, ou Recherches sur la ge´ographie, la religion, la langue, les e´critures et l’histoire de l’E´gypte avant l’invasion de Cambyse, Paris : De Bure fre`res, 1814, 2 vol. CHARDIN, Jean, Voyages de Monsieur le chevalier Chardin en Perse et autres lieux de l’Orient, [...] nouvelle e´dition [...] par L. Langle`s, Paris : Le Normant, 1811, 10 vol. CHARDON, Charles-Mathias, Histoire des sacrements, ou de la Manie`re dont ils ont e´te´ ce´le´bre´s et administre´s dans l’E´glise et de l’usage qu’on en a fait depuis le temps des apoˆtres jusqu’a` pre´sent, Paris : G. Desprez et Cavelier, 1745, 6 vol. CHRYSOSTOME, Jean, saint, In Epistulam ad Hebræos, Homilia XIII. CICE´ RON, De la divination – De divinatione. – De la nature des dieux – De natura deorum. – Des lois – De legibus. – Discours – Orationes. – Tusculanes – Tusculanæ disputationes. CLAUDIEN, E´loge de Stilicon – De laudibus Stiliconis libri tres (De Consulatu Stilichonis). CLAVIER, E´tienne, Histoire des premiers temps de la Gre`ce, depuis Inachus jusqu’a` la chute des Pisistratides, Paris : P. Collin, 1809, 2 vol. (2e e´dition : Paris : impr. de A. Bobe´e, 1822, 3 vol.). CLAVIGERO. Francisco Xavier, Geschichte von Mexico aus spanischen und mexicanischen Geschichtsschreibern, Handschriften und Gemälden der Indianer zusammengetragen und durch Charten und Kupferstiche erläutert, nebst einigen critischen Abhandlungen über die Beschaffenheit des Landes, der Thiere und Einwohner von Mexico, aus dem Italienischen des Abts D. Franz Xaver Clavigero durch Ritter Carl Cullen ins Englische, und aus diesem ins Teutsche übersetzt, Leipzig : im Schwickertschen Verlage, 1789, 2 vol. CLE´ MENT D’ALEXANDRIE, Protreptique (Exhortation aux Grecques) – ΠροτρεπτικοÁ ς προÁ ς ëΕλληνας. – Stromates – ΣτρωματειÄς.

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CLERMONT-LODE` VE, Guillaume-Emmanuel-Joseph Guilhem de, baron de Sainte-Croix, Recherches historiques et critiques sur les myste`res du paganisme, [...], 2e e´dition revue corrige´e par M. le Bon Silvestre de Sacy, Paris : de Bure fre`res, 1817, 2 vol. Codex Theodosianus cum perpetuis commentariis Jacobi Gothofredi, [...] Editio nova in VI tomos [...], Lipsiæ : sumptibus Maur. Georgii Weidmanni, MDCCXXXVI-MDCCXLIII [1736–1743]. COLEBROOKE, Henry Thomas, «On the Duties of a Faithful Hindu Widow», Asiatic Researches, t. IV, London : Vernor, Hood, and Sharpe et al., 1798, pp. 209–219. – «On the Religious Ceremonies of the Hindus, and of the Bramens especially. Essay I», Asiatic Researches, London : Vernor and Hood et al., t. V, 1799, pp. 345–368. – «On the Religious Ceremonies of the Hindus, and of the Bramens especially. Essay II», Asiatick Researches, London : Vernor, Hood and Sharpe et al., t. VII, 31807, pp. 232–311. – «On the Vedas, or Sacred Writings of the Hindus», Asiatic Researches, t. VIII, London : Vernor, Hood, and Sharpe et al., 1808, pp. 377–497 (Calcutta, 1805, pp. 369–476). – «On Sanscrı˘t and Pra´crı˘t Poetry», Asiatic Researches, London : Vernor, Hood, and Sharpe et al., t. X, 1811, pp. 389–474. CONFUCIUS, Le Chou-King, un des livres sacre´s des Chinois, Qui renferme les Fondements de leur ancienne Histoire, les Principes de leur Gouvernement & de leur Morale ; ouvrage recueilli par Confucius, Traduit & enrichi de Notes par Feu le P. Gaubil, Missionnaire a` la Chine, Revu & corrige´ sue le Texte Chinois, accompagne´ de nouvelles Notes, [...] par M. de Guignes, Paris : N.-M. Tilliard, 1770. COOK, James, A Voyage to the Pacific Ocean ; undertaken by Command of His Majesty for making Discoveries in the Northern Hemisphere under the Direction of Captains Cook, Clerke and Gore in the Years 1776. 7. 8. 9 and 80, Perth : R. Morison & Son, 1785, 4 vol. – Troisie`me voyage de Cook, ou voyage a` l’Oce´an Pacifique, ordonne´ par le Roi d’Angleterre, pour faire des de´couvertes dans l’he´misphere nord ... : exe´cute´ sous la direction des capitaines Cook, Clerke et Gore sur les vaisseaux la Re´solution et la De´couverte, en 1776, 1777, 1778, 1779 & 1780, Paris : Hoˆtel de Thou, 1785. CORAY, Adamantios, «Testament secret des Athe´niens», Me´langes de critique et de philologie, par S. Chardon de la Rochette, t. II, Paris : Chez d’Hautel, 1812, pp. 445–460. COUPLET, Philippe, Tabula chronologica Monarchiæ Sinicæ (1686).

Ouvrages cite´s par Constant

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COUSIN, Victor, Fragments philosophiques, Paris : A. Sautelet et Cie, 1826. CREUZER, Symbolik und Mythologie der alten Völker, besonders der Griechen, in Vorträgen und Entwürfen, Leipzig et Darmstadt : Karl Wilhelm Leske, 1810–1812, 4 vol. («Zweite völlig umgearbeitete Ausgabe», Leipzig et Darmstadt : Bei Heyer und Leske, 1819–1820, 6 vol.). – Religions de l’antiquite´, conside´re´es principalement dans leurs formes symboliques et mythologiques ; ouvrage traduit de l’allemand du Dr Fre´de´ric Creuzer, refondu en partie, comple´te´ et de´veloppe´ par J. D. Guigniaut, Paris : Treuttel et Würtz : [puis] J.-J. Kossbühl : [puis] FirminDidot fre`res, 1825–1851, 4 tomes en 10 vol. – voir HERMANN, Martin Gottfried. CTE´ SIAS, Histoire de la Perse – Περσικα (Persica). CUNÆUS, Petrus, Petri Cunæi de Republica Hebræorum libri tres, Variis annotationibus [...] nunc primum publici boni ergo in lucem editi a Johanne Nicolai [...], Lugduni Batavorum : Apud Henricum Teering, MDCCIII [1703]. CYRILLE, saint, Contre Julien – Contra impium Julianum. DALE, Antonius van, De oraculis ethnicorum dissertationes duæ : quarum prior de ipsorum duratione ac defectu, posterior de eorundem auctoribus [...], Amstelædami : apud Henricum & Viduam Theodori Boom, Anno MDCLXXXIII [1683]. DALIN, Olof, Geschichte des Reiches Schweden, aus dem Schwedischen übersetzt durch J. Benzelstierna und J. C. Dähnert, Greifswald : H. J. Struck, 1756–1763, 3 tomes en 4 vol. DAVIES, Edward, The Mythology and Rites of the British Druides, ascertained by National Document, with an Appendix containing ancient Poems and Extracts with some Remarks on ancient British coins, London : J. Booth, 1809. DAVIS, Samuel, «On the Astronomical Computations of the Hindus», Asiatic Researches, London : Vernor and Hood, t. II, 1799, pp. 225–287. DE LAET, Johannes, Nieuwe wereldt, ofte Beschrijvinghe van West-Indien, Leyden : Bij de Elzeviers, 1630. DE MAREES, Pieter, Beschryvinge ende Historische verhael van’t Gant koninckrijk van Guinea anders de Goutcustede Mina genaemt, Veram et historicam descriptionem auriferi regni Guineæ [...], Francofurti ad Mœnum : Bry, 1604 (Indiæ Orientalis, pars VI). DE PAUW, Corne´lius, Recherches philosophiques sur les Ame´ricains, ou Me´moires inte´ressantes pour servir a` l’histoire de l’espe`ce humaine, augmente´e d’une Dissertation critique, par dom Pernety et de la De´fense de l’auteur des Recherches contre cette Dissertation, Amsterdam & Leyde : Barth. Vlam & J. Murray, 1773, 2 vol.

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Instruments bibliographiques

– Recherches philosophiques sur les E´gyptiens et les Chinois, Berlin : C. J. Decker, 1773, 2 vol. («Nouvelle e´dition exactement corrige´e», Londres : Thomas Johnson, Lausanne : Franc¸ois Grasset et Gene`ve : Samuel Cailler, 1774, 2 vol.). – Recherches philosophiques sur les Grecs, Berlin : chez G.-J. Decker et fils, 1788, 2 vol. DELLA VALLE, Pietro, Voyages de Pietro della Valle´, Gentilhomme Romain, dans la Turquie, L’Egypte, la Palestine, la Perse, les Indes orientales & autres lieux, Paris : D’Espilly, 1745. DEMPSTER, Thomas, De Etruria Regali Libri VII, Florentinæ : Apud Joannem Cajetanum Tartinium, et Sanctem Franchium, MDCCXXIII [1723]. DEGRANDPRE´ , Louis-Marie-Joseph, Voyage dans l’Inde et au Bengale, fait dans les anne´es 1789 et 1790, [...] par L. Degrandpre´, Officier de la Marine franc¸aise, Paris : Dentu, an IX. − 1801, 2 vol. DENON, Dominique-Vivant, Voyage dans la Basse et la Haute Egypte, pendant les campagnes de Bonaparte, en 1798 et 1799, Paris : P. Didot aıˆne´, an X, MDCCCII [1802]. DENYS D’HALICARNASSE, Les antiquite´s romaines, de Denys d’Halicarnasse, traduites en franc¸ais par Bellanger, Chaumont : Cousot, an VIII. – Les antiquite´s romaines, de Denys d’Halicarnasse, traduites en franc¸ois, avec des notes historiques, ge´ographiques, chronologiques et critiques, par M.*** [Bellanger], Paris : chez P.-N. Lottin, 1723, 2 vol. DENYS L’ARE´ OPAGITE, Hie´rarchie ce´leste – De cœlesti hierarchia. DIODORE DE SICILE, Diodori Siculi Bibliothecæ libri qui supersunt e recensione Petri Wesselingii [...] nova editio, Argentorati : Ex typographia Societatis Bipontinæ, 1793–1807, 11 vol. DOW, Alexander, The History of Hindostan, London : T. Becket and P. A. De Hondt, 1772, 3 vol. DU HALDE, Jean-Baptiste, Description ge´ographique, historique, chronologique, politique, et physique de l’empire de la Chine et de la Tartarie chinoise, enrichie des cartes ge´ne´rales et particulie`res de ces Pays, de la Carte ge´ne´rale & des Cartes particulie`res du Thibet, & de la Core´e, & orne´e d’un grand nombre de Figures & de Vignettes grave´es en Tailledouce, par le P. J. B. Du Halde, de la Compagnie de Je´sus, Paris : P. G. Lemercier, 1735, 4 vol. (Nouvelle e´dition : La Haye : Henri Scheurleer, 1736). DU PRE´ AU, Gabriel, De vitis, sectis et dogmatibus omnium hæreticorum [...] elenchus alphabeticus compactus per Gabrielem Prateolum, Coloniæ : apud Geruuinum Calenium, & haeredes Ioannis Quentel, MDLXIX [1569]. DUBOIS, Jean-Antoine, Mœurs, institutions et ce´re´monies des peuples de l’Inde, Paris : Imprimerie royale, 1825, 2 vol.

Ouvrages cite´s par Constant

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DULAURE, Jacques-Antoine, Des divinite´s ge´ne´ratrices, ou du culte du Phallus chez les anciens et les modernes. Des cultes du dieu de Lampsaque, de Pan, de Ve´nus [...], Paris : Dentu, 1805. DUNCAN, Jonathan, «An Account of Two Fakeers, With their Portraits», Asiatic Researches, London : Vernor and Hood et al., t. V, 1799, pp. 37– 52. DUPUIS, Charles-Franc¸ois, Traite´ des Myste`res, dans Origine de tous les cultes ou Religion universelle, t. II, Paris : H. Agasse, an III (1795). DURIS DE SAMOS, Histoires – Ιστορι αι. ECKSTEIN, Ferdinand d’, «De l’histoire», Le Catholique, t. I, 1826, pp. 169– 204 et pp. 449–487 et t. II, pp. 116–143. – C. r. de Benjamin Constant, «De la Religion conside´re´e dans sa source, ses formes et ses de´veloppemens ; par M. Benjamin Constant ; Volume 2me. Paris, 1825», Le Catholique, t. I, 1826, pp. 205–242. – «Chants du peuple serbe», Le Catholique, t. I, 1826, pp. 243–269 et t. II, 1826, pp. 373–410. – «De l’e`re primitive des le´gislations sacerdotales», Le Catholique, t. I, 1826, pp. 449–487. – «Coup d’œil sur la re´forme religieuse du seizie`me sie`cle, sur son caracte`re et sur ses conse´quences philosophiques et politiques», Le Catholique, t. II, 1826, pp. 189–260 et 417–485. – «De l’influence des doctrines mate´rielles sur la civilisation moderne», Le Catholique, t. III, 1826, pp. 41–103, 251–312, 389–413. – «De la nature des e´le´mens selon les doctrines philosophiques et religieuses de l’Inde», Le Catholique, t. III, 1826, pp. 414–456 et t. IV, 1826, pp. 23–112 et pp. 192–216. – «Des syste`mes sceptiques depuis la Re´forme», Le Catholique, t. IV, pp. 113–140. – C. r. de Julius Klaproth, «Voyage au Caucase et en Georgie», Le Catholique, t. IV, 1826, pp. 479–494. – «Du Beau», Le Catholique, t. IV, 1826, pp. 516–557. – «Gita Govinda (Le Chant du Pasteur)», Le Catholique, t. V, 1827, pp. 341–384. – [C. r. de] Camille de Roquefeuil, «Journal d’un voyage autour du monde pendant les anne´es 1816, 1817, 1818 et 1819», Le Catholique, t. V, 1827, pp. 399–417. – «Du roˆle que joue le soleil dans la the´ologie de l’Inde», Le Catholique, t. V, 1827, pp. 510–545. – «Nala et Damayanti. E´pisode tire´ de l’e´pope´e indienne de Mahabharata», Le Catholique, t. VII, 1827, pp. 439–474.

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– C. r. de Platon, «Œuvres comple`tes de Platon, Traduites du grec en franc¸ais, accompagne´es de notes, et pre´ce´de´es d’une introduction sur la philosophie de Platon. Par Victor Cousin. Paris, Bossange fre`res, libraires ; 1822. Tome premier», Le Catholique, t. VIII, 1827, pp. 5–55. – «De l’E´tat actuel de la France et de l’Europe et des affaires de la politique exte´rieure, conside´re´e sous le rapport spe´cial des inte´reˆts de la France ; Quatrie`me partie : De la constitution de la socie´te´ franc¸aise, Avant-propos, Chapitres I et II», Le Catholique, t. VIII, 1827, pp. 135–221. – «De la the´ocratie primitive», Le Catholique, t. VIII, 1827, pp. 225–254. – «De l’E´tat actuel de la France et de l’Europe ; Quatrie`me partie : De la constitution de la socie´te´ franc¸aise, Chapitre III : De la migration des peuples, et des causes de´terminantes de cette migration», Le Catholique, t. VIII, 1827, pp. 279–450. – «De la poe´sie dramatique indienne», Le Catholique, t. X, 1828, pp. 426– 493 et t. XI, 1828, pp. 80–132 et 360–405. – «Du Siva Pourana», Le Catholique, t. XIII, 1829, pp. 146–173, 177–229, 358–437, t. XIV, 1829, pp. 70–118, 369–467, t. XV, 1829, pp. 148–167, 210–288 t. XVI, 1829, pp. 5–45, 335–361, 363–401. Die Edda, nebst einer Einleitung über nordische Poesie und Mythologie und einem Anhang über die historische Literatur der Isländer, von Friedrich Rühs, Berlin : in der Realschulbuchhandlung, 1812. EICHHORN, Johann Gottfried, Einleitung in das Neue Testament, Leipzig : Weidmann, 1804–1827, 5 vol. E´LIEN LE SOPHISTE, Variæ historiæ libri XIV, Basileæ : apud Johannem Schweighauser, 1774. E´PIPHANE, saint, Sancti Epiphanii episcopi Constantiæ Cypri contra actoginta hæreses opus [...], Lutetiæ Parisorum : Sumptibus Debastiani Cramoisy, MDCXII [1612]. – Epiphanii Constantiæ [...] episcopi operum omnium tomus secundus Dionysius Petavius Aurelianus [...] ex veteribus libris recensuit, Latine vertit, & animaduersionibus illustrauit, Parisiis : Sumptibus Sonnii, Claudii Morelli, et Sebastiani Cramoisy, MDCXXII [1622]. ESCHYLE, Orestie (Agamemnon, Les Choe´phores, Les Eumenides) – ëΟρε στεια. E´TIENNE DE BYZANCE, De urbibus [...], Amstelodami : Typis Jacobi de Jonge, 1678. EUAGRIOS SCHOLASTIKOS, Histoire eccle´siastique – ’ΕκκλησιαστικηÁ ιÁ στορι α. EURIPIDE, Euripidis Tragœdiæ fragmenta epistolæ, Ex editione Barnesii nunc recusa, tomus III, continens Samuelis Musgravii notas integras in Euripidem [...] curavit Christianus Daniel Beckius, Lipsiæ : Sumtu Engelh. Ben. Svikerti, MDCCLXXXIII.

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– Euripidis tragœdia Hippolytus quam latino carmine conversam a Georgio Ratallero adnotationibus instruxit Ludov. Casp. Valckenaer, Lipsiæ : Sumptibus Hartmanni, 1823. – He´cube – ëΕκα βη. – Iphige´nie en Tauride – ëΙϕιγε νεια ηë εÆ ν Ταυ ροις. EUSE` BE DE CE´ SARE´ E, Præparatio evangelica – Αποδει ζεως Προπαρασκευη . EYVINDR SKA´ LDASPILLIR, Chanson de Haquin – Ha´kornarma´l. FABRICIUS, Johann Albert, Bibliotheca Græca, sive notitia scriptorum veterum Græcorum, [...] editio quarta [...] curante Gottlieb Christophero Harles, volumen secundum, Hamburgi : apud Carolum Ernestum Bohn, MDCCLXXXI [1781]. FENEL, Jean-Basile-Pascal, abbe´, «Plan syste´matique de la religion & des dogmes des anciens Gaulois, avec des re´flexions sur le changement de religion arrive´ dans les Gaules, & ensuite dans la Germanie, entre le temps de Jules Ce´sar & celui de Tacite», Me´moires de Litte´rature tirez des Registres de l’Acade´mie Royale des Inscriptions et Belles Lettres, t. XXIV, 1756, pp. 345–388. FERRAND, Antoine-Franc¸ois-Claude, L’Esprit de l’histoire, ou Lettres politiques et morales d’un pe`re a` son fils sur la manie`re d’e´tudier l’histoire en ge´ne´ral et particulie`rement l’histoire de France, par Antoine Ferrand, Paris : Vve Nyon, 21803, 4 vol. FESTUS GRAMMATICUS, Sex. Pompei Festi et Mar. Verrii Flacci De Verborum significatione Lib. XX. Notis et emendationibus illustravit Andreas Dacerius, in usum serenissimi Delphini. Accedunt in hac Nova Editione notæ integræ Josephi Scaligeri, Fulvii Ursini, & Antonii Augustini, cum fragmentis & schedis, atque indice novo. Amstelodami : Sumptibus Huguetanorum, MDCC [1700]. Fingal, An Ancient Epic Poem in Six Books [...] Composed by Ossian, the Son of Fingal, London : T. Becket and P. A. de Hondt, 1762. FIRDOUSI, Livre des Rois – Shahnameh.FIRMICUS MATERNUS, Julius, Mathesis – Matheseos libri VIII. FLAVIUS JOSE` PHE, Antiquite´s judaı¨ques – Antiquitates Judaicæ. – Guerre des Juifs – De bello iudaico. FOY-VAILLANT, Jean, Nummi antiqui familiarum romanarum perpetuis interpretationibus illustrati, per J. Vaillant Bellovacum, D. M. & S. Ducis Cenom. Antiquarium, Amstelædami : apud G. Gallet, 1703, 2 vol. FRASER, James B., «An Account of a Journey to the Sources of the Jumna and Bhagirathi Rivers», Asiatick Researches, Calcutta : Manuel Cantopher, t. XIII, 1820, pp. 171–249.

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FRENZEL, Abraham, «Abrahami Francelii Commentarius philologico-historicus de Diis soraborum aliorumque slavorum, in quo slavorum antiquitates, multaque hactenus obscura illustrantur, aut minus recte intellecta & scripta corriguntur», Scriptores rerum Lusaticarum antiqui et recentiores, [...], Lipsiæ et Budissæ : Sumpt. Davidis Richteri, Bibliopolæ, t. II, 1719, pp. 85–236. GAGE, Thomas, Nouvelle relation, contenant les voyages de Thomas Gage, dans la Nouvelle Espagne, Amsterdam : Paul Marret, 1699, 2 vol. Gallische Alterthümer oder eine Sammlung alter Gedichte aus dem Gallischen des Ullin, Ossian, Orran, u.s.w. von John Smith ins Engländische und aus diesem ins Deutsche übersetzt, nebst einer Geschichte der Druiden hauptsächlich der Caledonischen, und einer Abhandlung ueber die Aechtheit der Ossianischen Gedichte, Leipzig : Weidmanns Erben und Reich, 1781. 2 vol. GARCILASO DE LA VEGA, Histoire des Yncas, rois du Perou, Amsterdam : Jean Fre´de´ric Bernard, MDCCXXXVII [1737]. GEINOZ, Franc¸ois, «De´fense d’He´rodote contre les accusations de Plutarque. Premier Me´moire», Me´moires de Litte´rature, tire´s des Registres de l’Acade´mie Royale des Inscriptions et Belles-Lettres, t. XIX, MDCCLIII [1753], pp. 115–145. GIBBON, Edward, The History of the Decline and Fall of the Roman Empire, London : Strahan and Cadell, 1776–1788, 6 vol. – Histoire de la de´cadence et de la chute de l’empire romain. Nouvelle e´dition entie`rement revue et corrige´e, pre´ce´de´e d’une notice sur la vie et le caracte`re de Gibbon, et accompagne´e de notes critiques par F. Guizot, Paris : Lefe`vre, 1819, 13 vol. GIORGI, Agostino Antonio, Alphabetum tibetanum, missionum apostolicarum commodo editum. Præmissa est disquisitio qua de vario litterarum ac regionis nomine, gentis origine, moribus, superstitione, ac manichæismo fuse disseritur, Beausobrii calumniæ in sanctum Augustinum aliosque Ecclesiæ patres refutantur. Studio et labore fr. Augustini Antonii Georgii, Romæ : typis Sacæ Congregationis de propaganda fide, 1762. GLÄSENER, Justus Martin, Dissertatio philologico-theologica de Trinitate in scriptis cabbalistarum et rabbinorum non christiana, se mere platonica quam [...] præside Iusto Mart. Glæsenero [...] pastore A. O. R. MDCCXLI D. III mensis iunii [...] publico eruditorum examini subiiciet respondens Jo. Dan. Overbeck Rhetema-Cellensis, Helmæstadii : Schnorrius, 1741. GOLDINGHAM, John, «Some Account of the Cave in the Island of Elephanta», Asiatic Researches, London : Printed für Vernor and Hood, t. IV, 1799, pp. 409–417, 1807, pp. 407–415.

Ouvrages cite´s par Constant

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GÖRRES, Joseph, Mythengeschichte der asiatischen Welt, Heidelberg : Mohr und Zimmer, 1810, 2 tomes en 1 vol. GREGOIRE DE NAZIANZE, Discours. GROTIUS, Hugo, Historia Gothorum, Vandalorum, & Langobardorum, Ab Hugone Grotio partim versa, partim in ordinem digesta. Præmissa sunt ejusdem Prolegomena. Ubi Regum Gotthorum Ordo & Chronologia, cum Elogiis. Accedunt Nomina Appellativa & verba Gothica, Vandalica, Langobardica, cum Explicatione, Amstelodami : Elzevirius, 1655. GRUBER, Johann Gottfried, Wörterbuch der altklassischen Mythologie und Religion, Weimar : im Verlage des Landes-Industrie-Comptoirs, 1810– 1815, 3 vol. GUASCO, Ottaviano, De l’Usage des statues chez les anciens, essai historique, Bruxelles : Chez J. L. De Boubers, MDCCLXVIII [1768]. GUE´ NE´ E, Antoine, Lettres de quelques Juifs portugais et allemands a` M. de Voltaire, avec des re´flexions critiques, etc., et un petit commentaire extrait d’un plus grand, Lisbone [Paris : L. Prault], 1769. GUIGNES, Joseph de, voir CONFUCIUS. GUILLAUME DE JUMIE` GES, Histoire des Normands – Gesta normannorum ducum. GUYON, Jeanne-Marie, La Vie de Madame J. M. B. de La Mothe Guion, e´crite par elle-meˆme (1720). HAMILTON, Alexander, A New Account of the East Indies, Being Observations and Remarks of Capt. A. H., Edinburgh : John Mosman, 2 MDCCXXVII [1727], 2 vol., London : A. Bettesworth and C. Hitch, 1739, 2 vol. HEDERICH, M. Benjamin, Gründliches Lexicon Mythologicum, Worinne So wohl die fabelhafte, als wahrscheinliche und eigentliche Historie derer alten und bekannten Römischen, Griechischen und Egyptischen Götter und Göttinnen, [...] Aus sicheren und zuverläßlichen Auctoribus, mit dieser durchgänglichen und genauen Anführung erfasset, Anbey ein so nöthiges, als nützliches Genealogicon Mythistoricum mit angehänget, [...], Leipzig : Verlegts Joh. Friedrich Gleditschens seel. Sohn, Anno 1770. HEEREN, Arnold Herrmann Ludwig, Ideen über die Politik, den Verkehr und den Handel, der vornehmsten Völker der alten Welt. Zweyte, sehr vermehrte und verbesserte Auflage. Mit einer Charte, Göttingen : Vandenhoe[c]k & Ruprecht, 1804–1812, 3 vol. (Göttingen : J. F. Röwer, 41821– 1826, 3 vol.). HEINRICH, Carl Friedrich, Hermaphroditorum, artis antiquæ operibus illustrium, origines et causæ (1805). HE´ LIODORE D’E´ME` SE, Theagenes und Chariklea. Eine Aethiopische Geschichte in zehn Büchern, Leipzig : in der Dyckischen Buchhandlung, 1767. HELLADIOS, voir PHOTIUS IER.

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HELMOLD VON BOSAU, Chronica Slavorum (1170). HERBELOT DE MOLAINVILLE, Barthe´lemy d’, Bibliothe`que Orientale, ou Dictionnaire universel contenant tout ce qui fait connoıˆtre les peuples de l’Orient. Leurs histoires et traditions tant fabuleuses que ve´ritables. Leurs religions et leurs sectes. Leurs Gouvernemens, politique, loix, mœurs, couˆtumes, et les re´volutions de leurs empires. Les arts et les sciences, [...], les vies de leurs saints, [...] des jugemens critiques et des extraits de leurs livres, [...] par Mr d’Herbelot, A La Haye : Aux de´pens de J. Neaulme et N. van Daalen, MDCCLXXVII-MDCCLXXIX [1777–1779], 4 vol. HERDER, Johann Gottfried, Ideen zur Philosophie der Geschichte der Menschheit, Riga et al. : Johann Friedrich Hartknoch, 1784–1791, 4 vol. – «Über Seelenwandrung», dans Zerstreute Blätter. Erste Sammlung, Gotha : bey Carl Wilhelm Ettinger, 1785, pp. 217–243. – «Nemesis. Ein lehrendes Sinnbild», dans Zerstreute Blätter. Zweite Sammlung, Gotha : bey Carl Wilhelm Ettinger, 1786, pp. 213–272. HERMANN, Martin Gottfried, Handbuch der Mythologie, Erster Band : aus Homer und Hesiod, als Grundlage einer richtigeren Fabellehre des Alterthums, Zweyter Band : enthaltend die Mythen aus den Lyrischen Dichtern der Griechen, Dritter Band : enthaltend die astronomischen Mythen der Griechen, mit erläuternden Anmerkungen begleitet, nebst einer Vorrede des Herrn Hofrath Heyne, Berlin und Stettin : Friedrich Nicolai, 1787–1795, 3 vol. – Briefe über Homer und Hesiodus, vorzüglich über die Theogonie, von Gottfried Hermann und Friedrich Creuzer. Mit besonderer Hinsicht auf des Ersteren Dissertatio de mythologia Græcorum antiquissima und auf des Letzteren Symbolik und Mythologie der Griechen, Heidelberg : August Oswald’s Universitätsbuchhandlung, 1818. HE´ RODOTE, ΗΕΡΟΔΟΤΟΥ ΑΛΙΚΑΡΝΗΣΣΗΟΣ ΙΣΤΟΡΙΩΝ ΛΟΓΟΙ Θ [...] Ηεροδοτι Ηαλιψαρνασσει Ηιστοριαρθμ λιβρι IX, Musarum nominibus inscripti Gr. et Lat. ex Laur. Vallæ interpretatione, cum annotationibus Thomæ Galei et Iacobi Gronovii, Editionem curavit et suis itemque Lud. Casp. Valckenarii notas adiecit Petrus Wesselingius, [...] Amstelodami : Sumptibus Petri Schovtenii, MDCCLXIII [1763]. Saga de Hervör et du roi Heidrekr – Hervarar Saga. HE´ SIODE, Œuvres et jours – ëΕργα καιÁ ëΗμε ραι. – The´ogonie – Θεογονι α. HEYNE, Christian Gottlob, Opuscula academica collecta et animadversionibus locupletata, Gottingæ : apud J. C. Dieterich et H. Dieterich, 1785– 1812, 6 vol. – «Monumentorum etruscæ artis ad genera sua et tempora revocatorum illustratio», Novi commentarii Societatis Regiæ Scientiarum Gottingensis, t. V, Commentationes historicæ et philologicæ, 1775, pp. 37–52.

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– «Commentatio de vestigiis domesticæ religionis patriique ritus in artis etruscæ operibus», Novi commentarii Societatis Regiæ Scientiarum Gottingensis, t. VI, Commentationes historicæ et philologicæ, 1776, pp. 35– 58. – «De Theogonia Ab Hesiodo Condita. Ad Herodot Lib. II, c. 52. commentatio Recitata d. VII. ium MDCCLXXIX», Commentationes Societatis Regiæ Scientiarum Gottingensis, t. II, Commentationes historicæ et philologicæ, MDCCLXXIX [1779], pp. 125–154. – voir APOLLODORE D’ATHE` NES. – voir VIRGILE. HIRT, Aloys Ludwig, Bilderbuch für Mythologie, Archäologie und Kunst, Berlin : Sander, 1805 et Leipzig : G. C. Nauck’s Buchhandlung, 1816. 2 fascicules en 1 vol. Historiæ Augustæ Scriptores VI. Ælius Spartianus. Vulc. Gallicanus. Julius Capitolinus. Trebell. Pollio. Ælius Lampridius. Flavius Vopiscus, cum notis selectis Isaaci Casauboni, Cl. Salmasii et Jani Gruteri, cum indice locupletißimo rerum ac Verborum, accurante Cornelio Schrevelio, Parisiis : s.e´d., 1620 (Lugduni Batavorum : Ex Officina Francisci Hackii, MDCLXI [1661]). HOLWELL, John Zephaniah, Interesting historical Events, relative to the Provinces of Bengal and the Empire of Indostan. With a seasonable Hint and Perswasive to the honourable the Court of Directors of the East India Company. As also the Mythology and Cosmogony, Fasts and Festivals of the Gentoo’s, Followers of the Shastah. And a Dissertation on the Metempsychosis, commonly, though erroneously, called the Pythagorean Doctrine, London : T. Becket and P. A. De Hondt, 1767. – Holwells merkwürdige und historische Nachrichten von Hindostan und Bengalen, nebst einer Beschreibung der Religionslehren, der Mythologie, Kosmogonie, Festen und Festtage der Gentoos und einer Abhandlung über die Metempsychose, aus dem Englischen mit Anmerkungen, und einer Abhandlung über Religion und Philosophie de Indier begleitet von J. F. Kleuker, Leipzig : Weygandsche Buchhandlung, 1788. HOME` RE, Homers Odüssee, übersetzt von Johann Heinrich Voß, Hamburg : auf Kosten des Verfassers, 1781. – Iliade – ëΙλια ς. HORACE, Satires – Satiræ. HORAPOLLON, Hieroglyphes – Hieroglyphica. HUMBOLDT, Alexander von, Vues des Cordillie`res, et monumens des peuples indige`nes de l’Ame´rique, par A. d. H., avec 19 planches, dont plusieurs colorie´es, Paris : N. Maze, 1824, 2 vol.

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HYDE, Thomas, Historia religionis veterum Persarum, eorumque magorum, Oxonii : E Typographeo Clarendoniano, 1760. Hymnes orphiques. Institutes of Hindu Law ; or the Ordinances of Menu according to the Gloss of Culluca, containing the Indian System of Duties, religious and civil. Verbally translated from the original Sanskrit ; with a preface by Sir Will. Jones, Calcutta : printed by Order of the Government et London : reprinted for J. Sewell et al., 1794, 1796. ISIDORE DE SE´ VILLE, saint, Etymologiæ (Originum seu etymologiarum libri XX). JABLONSKI, Paul Ernst, Pantheon Ægyptiorum : sive, de diis eorum commentarius, cum prolegomenis de religione et theologia Ægyptiorum, Francofurti ad Viadrum : Kleyb, 1750–1752, 3 vol. JAMBLIQUE, Les Myste`res d’E´gypte – De mysteriis Ægyptiorum. JAYADEVA, Gita-Govinda, ein indisches Singspiel von Jajadeva, aus der Ursprache ins Englische von W. Jones, und aus diesem ins Teutsche übersetzt und mit einigen Erläuterungen begleitet von Friedrich Majer, Weimar : Landes-Industrie-Comptoir, 1802. JEAN DE LYDIE, Des mois – Liber de mensibus. JE´ ROˆ ME, saint, Contre Jovinien – Adversus Jovinianum. JONES, Owen, The Myvyrian Archaiology of Wales collected out of Ancient Manuscripts, London : printed by S. Rousseau, 1801, 3 vol. JONES, William, «The seventh Anniversery Discourse, Delivered 25 February 1790», Asiatick Researches, Calcutta : Manuel Cantopher, t. II, 1790, pp. 365–381. – «On the Gods of Greece, Italy, and India : Written in 1784», Asiatick Researches, Calcutta : Vernor and Hood, t. I, 1798, pp. 221–275. – «A Supplement to the Essay on Indian Chronology», Asiatick Researches, London : Vernor, Hood, and Sharpe et al., t. II, 51807, pp. 389–403. – voir Institutes of Hindu Law. – voir JAJADEVA. – voir KAˆ LIDAˆ SA. JO´ NSSON, Finnur, Finni Johannæi Historia ecclesiastica Islandiæ, Havniæ : excudit G. G. Salicath, 1778. JUDAH HA-LEVI, Liber Cosri, continens colloquium seu disputationem de religione, habitam ante nongentos annos, inter regem Cosareorum, et R. Isaacum Sangarum Judæum [...] nunc in Lingua Sacra cultorum, recensuit, latinaˆ versione, & notis illustravit Johannes Buxtorfius, Basileæ : Sumptibus autoris, MDCLX [1660]. JULIEN, l’empereur, E´loge de l’empereur Constance. JUSTIN (Marcus Junianus Justinus), Abre´ge´ des Histoires Philippiques de Trogue Pompe´e – Historiæ philippicæ.

Ouvrages cite´s par Constant

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JUVE´ NAL, Satires – Saturæ. KAEMPFER, Engelbert, Engelbert Kaempfers Geschichte und Beschreibung von Japan. Aus den Originalhandschriften des Verfassers herausgegeben von Christian Wilhelm Dohm, Lemgo : Meyer, 1777–1779, 2 vol. KAˆ LIDAˆ SA, Sacontala, ou l’anneau fatal, drame traduit de la langue sanscrit en Anglais, par Sir W[illia]m Jones, et de l’Anglais en Franc¸ais par le Cit. A. Bruguie`re ; avec des notes des traducteurs, et une explication abre´ge´e du syste`me mythologique des Indiens, mise en ordre alphabe´tique, et traduite de l’allemand de M. Forster, Paris : Treuttel et Würtz, 1803. KEYSSLER, Johann Georg, Antiquitates selectæ septentrionales et celticæ : Quibus plurima loca conciliorum et capitularium explanantur, dogmata theologiæ ethnicæ celtarum gentiumque septendrionalium cum moribus et institutis maiorum nostrorum circa idola, aras, oracula, templa, lucos, sacerdotes, regum electiones, comitia et monumenta sepulchralia ; [...], Hannoveræ : Foersterus, 1720. KHAN, Alı` Ibra´hı´m, «On the Trial by Ordeal, among the Hindus, by Alı´ Ibra´hı´m Kha´n, Chief Magistrate at Bena´res. Communicated by Warren Hastings», Asiatick Researches, Calcutta : Manuel Cantopher, t. I, 1788, pp. 389–404. KIRCHER, Athanasius, Œdipus ægyptiacus, hoc est universalis hieroglyphicæ veterum doctrinæ, temporum injuria abolitæ, instauratio, Romæ : ex typographia Vitalis Mascardi, 1652–1654, 4 vol. KIRKPATRICK, Major, «Account of the Pagoda at Perwuttum. Extract of a Journal by Captain Colin Mackenzie, communicated by Major Kirkpatrick», Asiatick Researches, London : Vernor, Hood, and Sharpe et al., t. V, 41807, pp. 303–314. KLEUKER, Johann Friedrich, Anhang zum Zend-Avesta, Leipzig et Riga : Johann Friedrich Hartknoch, 1781–1783, 3 parties en 2 vol. KNOX, Robert, An Historical Relation of the Island Ceylon, in the EastIndies, [...] by R. K., [...] London : Richard Chiswell, 1681. Die Königinhofer Handschrift. Eine Sammlung lyrisch-epischer Nationalgesänge, Aus dem Altböhmischen metrisch übersetzt von Wenzel Swoboda von Nawarow, herausgegeben von Wenzel Hanka, Prag : Gottlieb Haase, 1819. KOSEGARTEN, Joh[ann] Gottfr[ied] Ludw[ig], Nala. Eine Indische Dichtung von Wjasa, Aus dem Sanskrit im Versmaaße der Urschrift übersetzt, und mit Anmerkungen begleitet von J. G. L. K., Jena : Friedrich Frommann, 1820. LA FLOTTE, de, Essais historiques sur l’Inde, pre´ce´de´s d’un Journal de voyages et d’une description ge´ographique de la coˆte de Coromandel, par M. de La Flotte, Paris : He´rissant le fils, 1769 (Paris : Costard fils, 1774).

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Instruments bibliographiques

LA HARPE, Jean-Franc¸ois de, Lyce´e, ou cours de litte´rature ancienne et moderne, par J.-F. Laharpe, t. II, Paris : H. Agasse, an VII [1800]. LA LOUBE` RE, Simon de, Du royaume de Siam, par M. de La Loube`re, envoye´ extraordinaire du Roy aupre`s du Roy de Siam en 1687 et 1688, Amsterdam : A. Wolfgang, 1691, 2 vol. LACTANCE, La Cole`re de Dieu – De ira Dei. – De la fausse religion – De falsa religione. LACTANTIUS PLACIDUS, Commentaire a` la The´baı¨de de Stace – In Statii Thebaida commentum. LAINEZ, Franc¸ois, «Lettre du Pe`re Lainez, de la Compagnie de Je´sus, Supe´rieur de la Mission de Madure´, aux pe`res de sa Compagnie, traduite du Portugais, sur la mort du ve´ne´rable pe`re Jean de Brito, Le 10 Fe´vrier 1693», Lettres e´difiantes et curieuses, concernant l’Asie, l’Afrique et l’Ame´rique, t. II, Paris : Auguste Desrez, 1811, pp. 249–257 (contient la lettre du P. Brito, pp. 255). LANJUINAIS, Jean-Denis, La religion des indoux selon les Ve´dah, ou Analyse de l’Oupnek’hat, Paris : Dondey-Dupre´ pe`re et fils, 1823. LARCHER, Pierre-Henri, Histoire d’He´rodote, traduite du grec, avec des remarques historiques et critiques, un essai sur la chronologie d’He´rodote et une table ge´ographique, Paris : Musier, 1786, 7 vol. («Nouvelle e´dition, revue, corrige´e et conside´rablement augmente´e», Paris : Crapelet, an XI [1802], 9 vol.). LE NAIN DE TILLEMONT, Louis-Se´bastien, Me´moires pour servir a` l’histoire eccle´siastique des six premiers sie`cles (1693). LOCCENIUS, Johannes, Johannis Loccenii Antiquitatum Sueo-Gothicarum, cum hodiernis institutis comparatum, Libri tres, dans Historiæ Svecanæ, A primo Rege Sveciæ usque ad Carolum XI. Regem Sveciæ, Francofurti et Lipsiæ : Impensis Viduæ et Heredum Joachimi Wildii, MDCLXXVI [1676]. LOCKE, John, Essai sur l’entendement humain – An Essay Concerning Human Understanding (1689). LOMEIER, Johannes, De veterum gentilium lustrationibus syntagma, Ultrajecti : Apud Franciscum Halma, 1681. – Epimenides sive de veterum gentilium lustrationibus syntagma, nunc secundis curis auctius [...], Zutphaniæ : sumptibus Johannis a Spyk & Danielis Schutten, 1700. LO´ PEZ DE GO´ MARA, Francisco, Histoire ge´ne´ralle des Indes occidentales et terres neuves qui jusqu’a` pre´sent ont este´ descouvertes, compose´e en Espagnol par Franc¸ois Lopez de Gomara, et traduite en Franc¸ois par le S. de Genille´ Mart. Fume´e, Paris : M. Sonnius, 1605.

Ouvrages cite´s par Constant

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LUCAIN, La Pharsale – Marci Annæi Lucani de bello civili libri decem. LUCIEN, De Dea syria, dans Luciani Samosatensis Opera, cum nova versione Tiber. Hemsterhusii, & Io. Matthiæ Gesneri, Græcis scholiis, ac notis ... Cujus priorem partem summo studio cur. & ill. Tiberius Hemsterhusius. Ceteras inde partes ordinavit, notasque suas adjecit Ioannes Fredericus Reitzius, Amstelodami : Sumptibus Jacobi Wetstenii, 1743, 3 vol. – Histoire vraie – ’ΑληθηÄ διηγη ματα. – La mort de Pellegrine – ΠεριÁ τηÄ ς ΠερεγριÁ νου τελευτηÄ ς. LUCRE` CE, De la nature des choses – De rerum natura. MACLEOD, Alexander, «A Royal Grant of Land in Carnata, communicated by Alexander Macleod, Esq., and translated from the Sanscrit by the President», Asiatick Researches, London : Vernor, Hood, and Sharpe et al., t. III, 51807, pp. 39–53. MACROBE, Saturnales – Saturnalia. MAHONY, Captain, «On Singhala, or Ceylon, and the Doctrines of Bhooddha ; from the Books of the Singhalais», Asiatic Researches, London : Vernor, Hood, and Sharp et al., t. VII, 1803, pp. 32–56. MAILLET, Benoıˆt de, Description de l’Egypte, contenant plusieurs remarques curieuses sur la Ge´ographie ancienne et moderne de ce Paı¨s, sur ses monumens anciens, sur les mœurs, les coutumes & la religion des habitans, sur le gouvernement & le commerce, sur les animaux, les arbres, les plantes, &c., compose´e sur les Me´moires de M. de Maillet, [...] par M. l’Abbe´ Le Mascrier, Paris : chez Louis Genneau et Jacques Rollin, fils, 1735. MAISTRE, Joseph de, E´claircissement sur les sacrifices (1810). MAJER, Friedrich, Allgemeines Mythologisches Lexicon, aus Originalquellen bearbeitet, Weimar : Verlag des Landes-Industrie-Comptoirs, 1803– 1804, 2 vol. – «Die Verkörperungen des Wischnu», Asiatisches Magazin, verf. von einer Gesellschaft Gelehrten und herausgegeben von Julius Klaproth, Weimar : Verlag des Landes-Industrie-Comptoirs, t. I, 1802, pp. 116–138, 221–244 et 395–405. – voir JAJADEVA. MALLET, Paul-Henri, Introduction a` l’histoire du Dannemarc, ou` l’on traite de la religion, des Loix, des Mœurs & des Usages des anciens Danois, par Mr Mallet, Copenhague : imp. des he´ritiers Berling, 1755 («Seconde Edition revue¨ et corrige´e», Gene`ve : s.e´d., 1763). MARINI, Giovanni Filippo de, Relation nouvelle de curieuse des royaumes de Tunquin et de Lao contenant une description exacte de leur Origine, Grandeur, Estendue¨, de leurs Richesses, & de leurs Forces ; des Mœurs,

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& du naturel de leurs Habitans ; de la fertilite´, & des Rivieres qui les arrosent de tous costez, & de plusieurs autres particularitez utiles & necessaires pour l’Histoire, & la Ge´ographie. Ensemble la Magnificence de la Cour des Roys de Tunquin, & des Ceremonies qu’on observe a` leurs Enterremens. Traduite de l’Italien du P. Mariny Romain. Par L. P. L. C. C., Paris : Gervais Clouzier, 1666 (aussi : Histoire nouvelle et curieuse des royaumes de Tunquin et de Lao). MARSHAM, John, Ioannis Marshami Canon chronicus Ægyptiacus, Ebraicus Græcus et disquisitiones, Franequeræ : Ex officina Leonardi Strick, MDCXCVI [1696]. MARTIAL, E´pigrammes – Epigrammaton libri duodecim. MARTIANUS CAPELLA, Noces de Philologie et de Mercure – De nuptiis Philologiæ et Mercurii libri VIII. MEINERS, Christoph, Historia doctrinae de vero Deo omnium rerum auctore atque rectore conscripta a Christophoro Meiners [...] Lemgoviæ : Impensis Heredum Meyeri, MDCCLXXX [1780]. – Historische Vergleichung der Sitten, und Verfassungen, der Gesetze, und Gewerbe, des Handls, und der Religion, der Wissenschaften, und Lehranstalten des Mittelalters mit denen unsers Jahrhunderts in Rücksicht auf die Vortheile, und Nachtheile der Aufklärung, Hannover : Helwingische Hofbuchhandlung, 1793–1794, 3 vol. – Allgemeine kritische Geschichte der Religionen, Hannover : Helwingische Hof-Buchhandlung, 1806–1807, 2 vol. – «Commentatio prima De humanis sacrificiis», Commentationes Societatis Regiæ Scientiarum Gottingensis, Gottingæ : Johann Christ. Dieterich, t. VIII, Commentationes historicæ et philologicæ, MDCCLXXXVII [1787], pp. 68–84. ME´ NANDRE, Excerpta de Legationibus. Me´moires concernant l’histoire, les sciences, les arts, les mœurs, les usages etc. des Chinois, par les missionnaires de Pe´kin, Paris : Nyon, 1776– 1814, 16 vol. MEURS, Jan van, Ioannis Meursi[i] Atticarum Lectionum Libri VI, In Quibus Antiquitates plurimæ, nunc primum in lucem erutæ, proferuntur, Lugduni Batavorum : ex officina Elzeviriana, 1617. – Joannis Meursii Græcia feriata. De festis græcorum libri VI, Lugduni Batavorum : ex officina Elzeviriana, 1619. – Joannis Meursi Regnum Atticum, sive de Regibus Atheniensium eorumque rebus gestis libri III, Amstelodami : apud J. Jansonium, 1633. – Joannis Meursi Miscellanea laconica, sive, Variarum antiquitatum laconicarum libri IV, nunc primum editi curaˆ Samuelis Pufendorfii, Amstelodami : Pluymer, 1661.

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MICALI, GIUSEPPE, L’Italie avant la domination des Romains, par M. J. Micali, Paris : Treuttel et Würtz, 1824, 4 vol. MICHAELIS, Johann David, Mosaı¨sches Recht, Reutlingen : Johannes Grötzinger, 21785, 3 vol. – Johann David Michaelis Moral, herausgegeben und mit der Geschichte der christlichen Sittenlehre begleitet von Carl Friedrich Stäudlin, Göttingen : im Vandenhoeck-Ruprechtischen Verlage, 1799–1803, 2 vol. MILL, James, The History of British India, London : Baldwin, Craddock and Joy, 1817–1818, 3 vol. MINUCIUS FELIX, Marcus, Octavius, dans Christian Friedrich RÖSLER, Bibliothek der Kirchen-Väter. In Übersetzungen und Auszügen aus ihren fürnehmsten, besonders dogmatischen Schriften, sammt dem Original der Hauptstellen und nöthigen Anmerkungen, t. III : Lateinische Väter von Minucius Felix bis auf den Lactantius, Leipzig : bey Christian Gottlieb Hertel, 1777, pp. 1–31. MOEHSEN, Johann Carl Wilhelm, Geschichte der Wissenschaften in der Mark Brandenburg besonders der Arzneiwissenschaft, Berlin et Leipzig : Decker, 1781 (Reprint : Hildesheim : Olms, 1976). MOI¨SE MAIMONIDE, Dux neutrorum – More hanevukhim. MONE, Franz Joseph, Geschichte des Heidentums im nördlichen Europa, Leipzig et Darmstadt : bei Carl Wilhelm Leske, 1823, 2 vol. (tomes V et VI de la Symbolik de Creuzer). MONTESQUIEU, Charles-Louis de Secondat, De l’esprit des lois (1748). MONTFAUCON, Bernard de, L’Antiquite´ explique´e et repre´sente´e en figures, Tome premier. Les dieux des Grecs & des Romains, Paris : Florentin Delaulne, Hilaire Foucault, [...] et Pierre-Franc¸ois Giffard, MDCCXIX [1719]. MOOR, Edward, A Narrative of the Operations of Captain Little’s Detachment and of the Mahratta Army Commanded by Purseram Bhow, London : Printed for the Author, 1794. MORIN, Henri, «De l’usage du jeune chez les Anciens, par rapport a` la religion», Me´moires de Litte´rature tirez des Registres de l’Acade´mie Royale des Inscriptions et Belles Lettres, t. IV, MDCCXXIII [1723], pp. 29–44. MOSER, Georg Friedrich, Nonni Dionysiacorum Libri Sex : Ab octavo ad decimum tertium, res Bacchicas ante expeditionem indicam complectentes, emendavit omnium Nonni Librorum Argumenta et notas mythologicas adjecit Georgius Henricus Moser, præfatus est Fridericus Creuzer, Heidelbergæ : ex Libreria Mohrii et Zimmeri academica, MDCCCIX [1809]. MÜLLER, Peter Erasmus, De hierarchia et studio vitæ asceticæ in sacris et mysteriis Græcorum Romanorumque Latentibus, Havniæ : Joh. Frid. Schultz, MDCCCIII [1803].

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NERRETER, David, Der Wunderwürdige Juden- und Heiden-Tempel, Darinn derselben Gottes- und Götzendi[e]nst eröffnet und gezeigt wird. Anfangs vom Alexander Roßen in Englischer Sprach beschrieben, Nunmehre aber verbessert und mit vielenm Zusatz vermehret, ausgeführt von David Nerreter. Samt dessen Bericht Vom Ursprung der Abgötterey, wie auch von denen Poetischen Fabeln, und deren Bedeutung. Wodurch der Daifel als Gottes Aff mit seiner List und Verführung vorgestellt und alles gründlich untersucht wird, Nürnberg : In Verlegung Wolfgang Moritz Endters, 2 MDCCI [1701], MDCCXVII [1717]. NICE´ PHORE CALLISTE XANTHOPOULOS, Histoire eccle´siastique – Εκκλησιαστικη Ιστορι α (Ecclesiasticæ historiæ). NICOLAS DE DAMAS, Recueil de Coutumes. NIEBUHR, Barthold Georg, Römische Geschichte, Berlin : Realschulbuchhandlung, 1811–1832, 3 vol. (Traduction franc¸aise : Paris : F.-G. Levrault, 1830–1840, 7 vol.) NIEBUHR, Carsten, Carsten Niebuhrs Reisebeschreibung nach Arabien und andern umliegenden Ländern, Kopenhagen et Hamburg : Nicolaus Möller, 1774–1778, 2 vol. NONNOS DE PANOPOLIS, Dionysiaques – Διονυσιακα . OLAF TRYGGVASON ou OLAF IER DE NORVE` GE, voir SNORRI STURLUSON. ONE´ SICRITE, Alexandrope´die (E´ducation d’Alexandre). Oratorum græcorum, quorum princeps est Demosthenes, quæ supersunt, monumenta ingenii, e bonis libris [...] Hieron. Wolfii, Jo. Taylori, Jerem. Mesmandi, aliorum et suis, indicibus denique instructa edidit Joannes Jakobus Reiske, Lipsiæ : typis W. G. Sommeri, 1770–1775, 12 vol. ORIGE` NE, Traite´ des principes – De Principiis. – Originis ϕιλοσοϕουμενων fragmentum, quod ex Bibliotheca Medicea descripsit, ac notis illustravit Jacobus Gronovius, dans : Thesaurus Græcarum Antiquitatum, contextus & designatus ab Jacobo Gronovio, Volumen decimum, Venetiis : Typis Jo : Baptistæ Pasquali, M. DCC. XXXV., col. 249–292. ORME, Robert, Historical Fragments of the Mogul Empire, of the Morattoes, and of the English concerns in Indostan, from the year MDCLIX, London : C. Nourse, 1782 (2e e´dition : London : F. Wingrave, 1805). Oupnek’hat id est Secretum tegendum ad verbum, e` Persico idiomate Samskriticis vocabulis intermixto, in Latinum conversum, dissertationibus et annotationibus difficiliora explanantibus illustratum studio et opera Anquetil Duperron, Argentorati : Levrault, 1801, 2 vol. OVIDE, Les Fastes d’Ovide, traduction en vers... par F. de Saint-Ange, Paris : L. G. Michaud, 1823, 2 vol. – L’art d’aimer – Ars amatoria. – He´roı¨des – Epistulæ heroidum. – Les Me´tamorphoses – Metamorphoses. – Pontiques – Epistulæ ex ponto.

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– Tristes – Tristia. OVINGTON, John, Voyages de Jean Ovington fait a` Surate et en d’autres lieux de l’Asie et de l’Afrique, avec l’histoire de la re´volution du royaume de Golconde, et des observations sur les vers a` soye, traduit de l’anglais, Paris : Ganeau, 1725, 2 vol. PALLAS, Peter Simon, Sammlungen historischer Nachrichten über die Mongolischen Völkerschaften durch P. S. Pallas, [...] St. Petersburg : gedruckt bey der Kayserlichen Akademie der Wissenschaften, 1776 et 1801, 2 vol. – Sammlungen historischer Nachrichten über die Mongolischen Völkerschaften in einem ausführlichen Auszuge, Frankfurt und Leipzig : bey Johann Georg Fleischer, 1779. PATERSON, John David, «Of the Origin of the Hindu Religion», Asiatic Researches, London : Printed at the Honorable Company’s Press, t. VIII, 1808, pp. 44–87. PAULIN DE SAINT-BARTHE´ LEMY (Paulinus a Sancto Bartolomæo), Systema Brahmanicum liturgicum mythologicum civile ex monumentis indicis Musei Borgiani Velitris dissertationibus historico-criticis illustravit Fr. Paullinus a s. Bartholomæo [...], Romæ : apud Antonium Fulgonium, 1791. – Musei Borgiani Velitris Codices manuscripti Avenses Peguani Siamici Malabarici Indostani [...], Romæ : apud Antonium Fulgonium, 1793. PAUSANIAS, Description de la Gre`ce – Περιη γησις. PELLOUTIER, Simon, Histoire des Celtes, et particulie`rement des Gaulois et des Germains, depuis les Temps fabuleux, jusqu’a` la Prise de Rome par les Gaulois, par Simon Pelloutier, [...], nouvelle e´dition, revue, corrige´e et augmente´e d’un quatrie`me Livre posthume de l’Auteur, de´die´e a` Monseigneur le Dauphin, par M. de Chiniac, Avocat au Parlement, de l’Acade´mie Royale des Belles-Lettres de Montauban, Paris : Quillau, 1770– 1771, 8 vol. PENNANT, Thomas, A Tour in Scotland. MDCCLXIX, t. III, London : Benj. White, 4MDCCLXXVI [1776]. PFEFFERKORN ou PFEFFERCORN, Georg Michael, Merkwürdige und auserlesene Geschichte von der berümten Landgrafschft Thüringen / Darinnen das Denkwürdigste von dieses Landes Chroniken Lage / Fruchtbarkeit / Bergen / Gründen / Flüssen / Wäldern / Sitten / Sprache / RegimentsVerfassung / Kirchen- Polizei- Gewerbe- und Haushaltungs-Sachen [...] aus den geschriebenen und gedruckten Uhrkunden allezeit mit Zusetzung der neuesten Begebnisse / biß auf diese Zeit aufs kürzeste und fleissigste in 33. Capiteln mit wahrhaftiger und aufrichtiger Feder beschrieben, Frankfurt et Gotha : Verlegts Augustus Bœtius, 1694. PHILON D’ALEXANDRIE, De la vie contemplative – De vita contemplativa sive supplicium virtutibus.

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PHILON DE BYBLOS, traduction de l’Histoire Phe´nicienne – Φοινικικε Ιστορι α. PHILOSTRATE L’ATHE´ NIEN, Vie d’Apollonios de Tyane – Vita Apollonii. PHOTIUS IER, Myriobiblos (Bibliothe`que) – Μυροβι βλος. PINDARE, Odes (Isthmiques, Ne´me´ennes, Olympiques, Phythiques) – ’ΕπινιÁ κοι. PITISCUS, Samuel, Lexicon antiquitatum romanarum, in quo ritus et antiquitates cum Græcis et Romanis communes, tum Romanis peculiares sacraæ et profanæ, publicæ et privatæ, civiles ac miltares exponuntur, Venetiis : ex typographia Balleoniana, MDCCXIX [1719], 3 vol. PLATON, Apologie de Socrate – ’Απολογι α Σωκρα τοθς. – Euthyphron – Ευ θυ ϕρων. – Les Lois – Νο μοι. – Phe´don – Φαι δων. – Politique – Πολιτικος. – La Re´publique – Πολιτει α. – Symposion – Συμπο σιον. PLINE L’ANCIEN, Histoire naturelle – Naturalis historia. PLUTARQUE, Plutarchi Chæronensis Quæ exstant omnia, cum latina interpretatione Hermanni Cruserii, Gulielmi Xylandri... Accedit nunc primum libellus ejusdem de Fluviorum montiumque nominibus, [...], Francoforti : in officina D. ac D. Aubriorum et C. Schleichii, 1620. – Dialogue sur l’amour – Amatorius. – Le banquet des sept sages – Septem sapientium convivium. – Qu’il est impossible de vivre heureux en suivant les pre´ceptes d’E´picure – Non posse suaviter vivi secundum Epicurum. – Parallela græca et romana. – Que les beˆtes ont l’usage de la raison – Bruta animalia ratione uti. – Questions romaines – Quæstiones romanæ. – Sur Isis et Osiris – De Iside et Osiride. – Sur la disparition des oracles – De defectu oraculorum. – Vies paralle`les des hommes illustres – Vitæ parallelæ. POCOCKE, Edward, Specimen historiæ Arabum, auctore Eduardo Pocockio. Accessit historia veterum Arabum ex Abri’l Feda, cura Antonii-J. Sylvestre de Sacy. Edidit Josephus White, Oxonii : e typogr. Clarendoniano, 1806. POCOCKE, Richard, A Description of the East and some other Countries, London : Printed for the Author, by W. Bowyer, MDCCXLIII-MDCCXLV [1743–1745], 3 vol. – Voyages de Richard Pockocke, [...] en Orient, dans l’Egypte, l’Arabie, la Palestine, la Syrie, la Gre`ce, la Thrace, [...] traduit de l’Anglois sur la seconde e´dition, Paris : J. P. Costard, MDCCLII [1752].

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POLIER, Antoine-Louis-Henri de et Marie-Elisabeth de, Mythologie des Indous, travaille´e par Mdme la Chnsse de Polier, sur les Manuscrits authentiques apporte´s de l’Inde par feu Mr. le Colonel de Polier, Roudolstadt : Librairie de la cour et Paris : F. Schoell, 1809, 2 vol. POLYBE, Histoires – ’Ιστορι αι. POMPONIUS MELA, De situ orbis libri tres, cum notis integris Hermolai Barbari, Petri Joannis Olivarii, Fredenandi Nonii Pintiani, Petri Ciacconii, Andreæ Schotti, Isaaci Vossii et Jacobi Gronovii, Lugduni Batavorum : Apud Samuelem Luchtmans et Fil., 1742. – De chorographia libri tres. PORPHYRE, De l’abstinence – De abstinentia ab esu animalium libri quatuor. – Sur les Images des dieux – De cultu simulacrorum. – L’antre des nymphes – De antro nympharum. POSSEVINO, Antonio, Bibliotheca selecta de ratione studiorum (1593). PROCLUS, Commentaire sur le Time´e – Procli Commentarii in Platonis Timæum. PROCOPE DE CE´ SARE´ E, Histoire des guerres faictes par l’empereur Iustinian contre les Vandales et les Goths, Paris : Michel Sonnius, MDLXXXVII [1587]. PROPERCE, E´le´gies – Sexti Properti Elegiarum libri IV. QUINTE-CURCE, De rebus gestis Alexandrini Magni regis Macedonum libri superstites, [...] instructi a Frid. Schmieder, Gottingæ : Sumptibus Henrici Dieterich, 1803. QUINTUS ENNIUS, Annales. RACINE, Phe`dre (1677). Recueil des voyages qui ont servi a l’e´tablissement et aux progre`s de la Compagnie des Indes orientales, forme´e dans les Provinces Unies des Paı¨s-Bas, A Amsterdam : aux de´pens d’Estienne Roger, MDCCII-MDCCVI [1702–1706], 5 vol. REINHARD, Philipp Christian, Abriß einer Geschichte der Entstehung und Ausbildung der religiösen Ideen, Jena : in der akademischen Buchhandlung, 1794. ROBERTSON, William, Wilhelm Robertson’s [...] Geschichte von Amerika. Aus dem Englischen übersetzt von Johann Friedrich Schiller, Leipzig : bey Weidmanns Erben und Reich, 1777, 2 vol. – The History of America, Vienna : F. A. Schraembl, 1787, 3 vol. ROGERIUS, Abraham, La Porte ouverte pour parvenir a` la connaissance du paganisme cache´ [...], Traduite en Franc¸ois par le sieur Thomas La Grue, Amsterdam : J. Schipper, 1670.

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ROLLIN, Charles, Histoire ancienne des E´gyptiens, des Carthaginois, des Assyriens, des Babyloniens, des Me`des et des Perses, des Mace´doniens, des Grecs, Halle : Gebauer, 1758. ROSINUS, Joannes, Iohannis Rosini Antiquitatum romanarum corpus absolutissimum, cum notis doctissimis ac locupletissimis Thomæ Dempsteri J. C., [...] Amstelædami : Apud Salomonem Schouten, MDCCXLIII [1743]. RÖSLER, Christian Friedrich, Bibliothek der Kirchen-Väter. In Übersetzungen und Auszügen aus ihren fürnehmsten, besonders dogmatischen Schriften, sammt dem Original der Hauptstellen und nöthigen Anmerkungen, Leipzig : bey Christian Gottlieb Hertel, 1776–1786, 10 vol. RÜHS, Friedrich, Versuch einer Geschichte der Religion, Staatsverfassung und Cultur der alten Skandinavier, Göttingen : Johann Friedrich Röwer, 1801. SAGITTARIUS, Caspar, Casparis Sagittarii Antiquitates gentilismi et christianismi Thuringici. Das ist Gründlicher und ausführlicher Bericht von dem Heiden- und Christenthum der alten Thüringer. [...] In drey Bücher abgetheilet und mit nöthigen Kupfern und Registern versehen, Jena : Verlegts Matthäus Birckner, 1685. SAINT-FOIX, Germain-Franc¸ois Poullain de, Essais Historiques sur Paris. Cinquie`me e´dition, Paris (t. V : Londres, Paris) : Chez la Veuve Duchesne, 1765, 7 vol. SALE, George, The Koran, commonly called the Alcoran of Mohammed, Translated into English Immediatly from the Original Arabic ; with explanatery Notes, taken from the most approved Commentators. To which ist prefixed a Preliminary Discourse, London, Dublin, Glasgow, Paris : Thomas Tegg et al., 1825, 2 vol. SAUMAISE, Claude, Funus linguæ Hellenisticæ, sive confutatio exercitationis de hellenisticis et lingua hellenistica, Lugduni Batavorum : Ioannis Maire, 1643. SAVARY, Claude, Lettres sur l’E´gypte, Ou` l’on offre le paralle`le des mœurs anciennes & modernes de ses habitans, ou` l’on de´crit l’e´tat, le commerce, l’agriculture, le gouvernement, l’ancienne Religion du pays, & la descente de S. Louis a` Damiette, tire´e de Joinville & des Auteurs Arabes, avec des Cartes Ge´ographiques, Seconde E´dition revue & corrige´e, A Paris : chez Onfroi, MDCCLXXXVI [1786], 3 vol. SAXON LE GRAMMAIRIEN, Geste des Danois – Gesta Danorum (Historia Danica). SCHLEGEL, Friedrich, Ueber die Sprache und Weisheit der Indier. Ein Beitrag zur Begründung der Alterthumskunde, von Friedrich Schlegel, nebst metrischer Übersetzung indischer Gedichte, Heidelberg : Mohr und Zimmer, 1808.

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SCHMIDT, Friedrich Samuel von, Dissertatio de Sacerdotibus et sacrificiis Ægyptiorum quam illustriss. acad. reg. inscr. et lib. artium Lutetiæ Paris. præmio dignam judicavit a. 1764, Tubingæ : apud J. G. Cottam, 1768. SCHØNING, Gerhard, Norges Riiges Historie, Sorøe : Mumme og Faber, t. I-II, 1771–1773, Kiøbenhavn : Gyldendals Ferlag, t. III, 1781. SELDEN, Johannes, De Diis Syris Syntagmata II, [...] editio [...] omnium novissima, Additamentis & Indicibus copiosissimis locupleta, operaˆ M. Andreæ Beyeri, Amstelodami : apud Lucam Bisterum, MDCLXXX [1680]. SE´ NE` QUE, Lettres – Epistulæ. – Questions naturelles – Naturales quæstiones. SERVIUS, Maurus Honoratus, Commentarii in Virgilium Serviani, sive commentarii in Virgilium, qui Mauro Servio Honorato tribuunter. Ad fidem codicum guelferbytanorum aliorumque recensuit, et potioribus variis lectionibus indicibusque copiossissimis instruxit H. Albertus Lion, Gottingæ : apud Vandenhoeck et Ruprecht, 1826. SHAW, Thomas, Travels, or Observations Relating to Several Parts of Barbary and the Levant, London : Theater, 1737, 21757. – «On the Inhabitants of the Hills near Ra’jamahall, By Lieutenant Thomas Shaw», Asiatic Researches, London : Vernor and Hood, t. IV, 1798, pp. 31–108. SHERWOOD, docteur, «Of the Murderers called P’ha´nsiga´rs. By Doctor Sherwood. Communicated by Colonel McKenzie», Asiatick Researches, Calcutta : Manuel Cantopher, t. XIII, 1820, pp. 250–281. SICARD, Claude, «Discours sur l’E´gypte», Lettres e´difiantes et curieuses, concernant l’Asie, l’Afrique et l’Ame´rique, t. V, Toulouse : Chez Noe¨lE´tienne Sens et Auguste Gaude, 1810, pp. 354–403. SILIUS ITALICUS, Punica (Guerre punique) – Libri Punicorum bellorum. SOLIN, Commentaria in C. Ivlii Solini Polyhistoria, Basileæ : per Henrichum Petri, s.d. [1557]. – Caii Ivlii Solini Polyhistor, Ex Editione Clavdii Salmasii accvvrante M. Andrea Goezio Collectanea rerum Memorabilium, Lipsiæ : Bauer, 1777. SONNERAT, Pierre, Voyage aux Indes orientales et a` la Chine, fait par ordre du Roi, depuis 1774 jusqu’en 1781, dans lequel on traite des mœurs, de la religion, des sciences et des arts des Indiens, des Chinois, des Pe´gouins et des Made´gasses, suivi d’Observations sur le Cap de Bonne-Espe´rance, les isles de France et de Bourbon, les Maldives, Ceylan, Malacca, les Philippines et les Moluques, et de recherches sur l’histoire naturelle de ces pays, par M. Sonnerat, Paris : chez l’Auteur, Froule´, Nyon, Barrois, le jeune, 1782, 2 vol. – Reise nach Ostindien und China, auf Befehl des Königs unternommen, vom Jahr 1774 bis 1781, von Herrn Sonnerat, Zürich : Orell, Geßner, Füßli und Kompagnie, 1783, 2 vol.

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Σουιδασ, Suidæ Lexicon, Græce & Latine. Textum Græcum cum Manuscriptis Codicibus collatum a quamplurimis mendis purgavit, Notisque perpetuis illustravit : Versionem Latinam Æmilii Porti innumeris in locis correxit ; Indicesque Auctorum & Rerum adjecit Ludolphus Kusterus, Cantabrigiæ : Typis Academicis, MDCCV [1705], 3 vol. SNORRI STURLUSON, Histoire des rois de Norve`ge – Heimskringla. – Ynglinga Saga. SOPHOCLE, Antigone – ’Αντιγο νη. – E´lectre – ëΗλε κτρα. – Œdipe a` Colone – Οιδι πους εë πιÁ Κολωνωì . SOZOME` NE, Histoire eccle´siastique – Εκκλησιαστικη Ιστορι α. SPANGENBERG, Ernst Peter Johann, Ernesti Spangenberg de veteris Latii religionibus domesticis commentatio, Gottingæ : Dieterich, 1806. SPANHEIM, Ezechiel, Ezechielis Spanheimii in Callimachi hymnos observationes, Utrajecti : apud F. Halmani, 1697. SPENCER, John, De legibus Hebræorum ritualibus et earum rationibus libri tres, Hagæ-Comitum : apud Arnoldum Leers, MDCXXXVI [1636] (Tubingæ : Sumptibus Johannis Georgii Cottæ, MDCCXXXII [1732]). STELLER, Georg Wilhelm, Beschreibung von dem Lande Kamtschatka dessen Einwohnern, deren Sitten, Nahmen, Lebensart und verschiedenen Gewohnheiten, Frankfurt et Leipzig : J. G. Fleischer, 1774. STOBE´ E, Jean, Johannis Stobbæi Florilegium ad manuscriptorum fidem emendavit et supplevit Thomas Gaisford, Lipsiæ : In bibliopolio Kuehniano, MDCCCXXIII [1823]. SS. Patrum qui temporibus apostolicis floruerunt, Barnabæ, Clementis, Hermæ, Ignatii, Polycarpi opera, vera, et suppositicia : una cum Clementis, Ignatii, Polycarpi actis atque martyriis [...] Recensuit et Notulas aliquot suas et aliorum adspersit Joannes Clericus, Antverpiæ : Huguetanorum, MDCXCVIII [1698], 2 vol. («editio altera», Amstelodami : Apud R. et G. Westenios, MDCCXXIV [1724]). STÄUDLIN, Carl Friedrich, Geschichte der Sittenlehre Jesu, Göttingen : im Vandenhoeck-Ruprechtischen Verlage, 1799–1802, 2 vol. – Magazin für Religions-, Moral- und Kirchengeschichte, Hannover : Gebrüder Hahn, t. I-IV, 1801–1806, 4 vol. – voir MICHAELIS, Johann David. STRABON, Ge´ographie – Rerum geographicarum libri XVII. STUTZMANN, Johann Josua, Philosophie der Geschichte der Menschheit, Nürnberg : Campe, 1808 SUE´ TONE, Vie des douze Ce´sars – De vita Cæsarum. SULZER, Johann Georg, Allgemeine Theorie der schönen Künste, Leipzig : Verlag der Dykischen Buchhandlung, 1800, 4 vol.

Ouvrages cite´s par Constant

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SUMNER, John Bird, The Evidence of Christianity derived from its Nature and Reception, London : John Hatchard, 1824. – Ve´rite´ du christianisme, prouve´e par la matie`re meˆme de cette religion, et par le fait de son e´tablissement, par J.-B. Sumner, ministre de la religion anglicane, traduit de l’anglais, par le vicomte P.-E. Lanjuinais, Paris : Baudouin fre`res, Pillet aıˆne´, 1826. TACITE, Annales – Annalium libri I-XVI. – La Germanie – De origine et situ Germanorum. TAUBE, Friedrich Wilhelm von, Historische und geographische Beschreibung des Königreiches Slavonien und des Herzogthums Syrmien, sowol nach ihrer natürlichen Beschaffenheit, als auch nach ihrer itzigen Verfassung und neuen Einrichtung in kirchlichen, bürgerlichen und militärischen Dingen, aus eigener Beobachtung und im Lande selbst gemachten Wahrnehmungen entworfen von Friedrich Wilhelm von Taube, Leipzig : s.e´d., 1777–1778, 3 vol. TENNANT, William, Indian Recreations, t. I : Consisting Chiefly of Strictures on the Domestic and Rural Economy of the Mahomedans & Hindoos, London, Edinburgh : Longman, Hurst, Rees, and Orme, 1804. TERTULLIEN, Apologe´tique – Apologeticum. THE´ ODORET DE CYR, Theodoriti Cyrenensis episcopi De curatione Græcarum affectionum libri duodecim, Parisiis : In officina Henrici Stephani, 1519. Theodoreti Episcopi Cyri, Vetustissimi scriptoris, de Providentia Sermones decem, Tiguri : Froschauer, 1546. – Discours sur la Divine Providence – Theodoreti Episcopi Cyri de Providentia sermones decem. – Histoire eccle´siastique – Historia ecclesiastica. – Re´sume´ des fables he´re´tiques – Hæreticarum fabularum compendium. THE´ OGNIS DE ME´ GARE, Poe`mes e´le´giaques – Sententiæ elegicæ. THE´ OPHRASTE, Histoire des Plantes – Historia plantarum. – voir PORPHYRE, De abstinentia. TIEFFENTHALER, Joseph, Des Pater Joseph Tieffenthaler’s [...] historischgeographische Beschreibung von Hindustan, [...] an das Licht gestellt von Johann Bernoulli, Berlin : bey dem Herausgeber, Gotha : bey C. W. Ettinger, 1785. THIETMAR VON MERSEBURG, Dithmars, Bischofs zu Merseburg, Chronik in Acht Büchern : nebst dessen Lebensbeschreibung aus der lateinischen in die deutsche Sprache übersezt und mit Anmerkungen erläutert von M. Johann Friedrich Ursinus, Pfarrern in Boritz, Dresden : Walther, 1790. TITE-LIVE, Histoire romaine – Ab urbe condita.

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TOURNEFORT, Joseph Pitton de, Relation d’un voyage du Levant fait par ordre du Roy, contenant l’Histoire Ancienne & Moderne de plusieurs Isles de l’Archipel, de Constantinople, des Coˆtes de la Mer Noire, de l’Arme´nie, de la Ge´orgie, des Frontie`res de Perse & de l’Asie Mineure, [...], Lyon : chez les fre`res Bruyset, MDCCXXVII [1727], 3 vol. TURNER, Samuel, An Account of an Ambassy to the Court of the Teshoo Lama in Tibet, containing a Narrative of a Journey through Bootan, and Part of Tibet, London : Nicol, 1800. VALE` RE MAXIME, Valerii Maximi dictorum factorumque memorabilium libri novem, Biponti : ex Typographia Societatis, MDCCLXXXIII [1785]. VALOIS, Henri de, Polybii, Diodori Siculi, Nicolai Damasceni, Dionysii Halicar., Appiani Alexand., Dionis et Ioannis Antiocheni Excerpta ex Collectaneis Constantini Augusti Porphyrogenetæ, Henricus Valesius nunc primum Græce edidit, Latine vertit, Notisque illustravit Parisiis : Sumptibus Mathurini du Puis, MDCXXXIV [1634]. VARRON, De lingua Latina libri qui supersunt, cum fragmentis ejusdem. Accedunt notæ Antonii Augustin, Adriani Turnebi, Josephi Scaligeri et Ausonii Popmæ, Editio accurata, Biponti : Typographia Societatis, 1788, 2 vol. VEYSSIE` RE DE LACROZE, Mathurin, Histoire du christianisme des Indes, La Haye : les fre`res Vaillant et N. Pre´vost, 1724 (2e e´dition : La Haye : aux de´pens de la Compagnie, 1758, 2 vol.). VIRGILE, P. Virgilii Maronis Opera, varietate lectionis et perpetua adnotatione illustrata a Chr. Gottl. Heyne, Lipsiæ : sumtibus C. Fritsch, 1803, 4 vol. – E´ne´ide – Æneis. – Ge´orgiques – Georgica. VITRINGA, Campegius, Campegii Vitringæ, De Synagoga Vetere libri tres, quibus tum de nominibus structura origine præfectis ministris et sacris synagogarum agitur tum præcipue foram regiminis et ministerii earum in Ecclesiam christianam translatam esse demonstratur, cum prolegominis editio altera emendatior, Leucopetræ : apud Io. Frid. Wehrmannum, MDCCXXVI [1726]. VOGEL, Paul Joachim Siegmund, Versuch über die Religion der alten Aegypter und Griechen, Nürnberg : Frauenholzische Buchhandlung, 1793. VOLNEY, Constantin-Franc¸ois de Chassebœuf, Voyage en Syrie et en E´gypte pendant les anne´es 1783, 1784 et 1785, Paris : Volland, Desenne, 1787, 2 vol. VOLTAIRE, De´fense du Mondain, ou l’Apologie du luxe (1737). VOSS, Johann Heinrich, Antisymbolik, Stuttgart : Metzler, 1824–1826, 2 vol. – «Alte Weltkunde», dans Kritische Blätter nebst geografischen Abhandlungen, Stuttgart : In der J. B. Metzler’schen Buchhandlung, MDCCCXXVIII [1828], Zweiter Band, pp. 245–426.

Ouvrages cite´s par Constant

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VOSSIUS, Gerardus Johannes, Gerardi Ioannis Vossii De Theologia Gentili, Et Physiologia Christiana ; sive De Origine Ac Progressu Idololatriæ, ad veterum gesta, ac rerum naturam, reductæ, Francofurti : Sumptibus Casparis Wæchtleri, 1668, 3 vol. WAGNER, Johann Jakob, Ideen zu einer allgemeinen Mythologie der alten Welt, Frankfurt am Main : in der Andreäischen Buchhandlung, 1808. WARBURTON, William, The Divine Legation of Moses Demonstrated [...], on the Principles of a Religious Deist, From the Omission of the Doctrine of Future State of Reward and Punishment in the Jewish Dispensation, London : Fletcher Giles, 1738–1741, 2 vol. WIASA, Nala, voir KOSEGARTEN. WILFORD, Francis, «On Mount Caucasus», Asiatick Researches, London : Vernor, Hood et al., t. VI, 1801, pp. 455–539. – «An Essay on the Sacred Isles in the West, with other Essays connected with that Work. Essays II-IV», Asiatic Researches, London : Vernor, Hood, and Sharpe et al., t. IX, 1809, pp. 32–243. – «An Essay on the Sacred Isles in the West, with other Essays connected with that Work. Essay V. Origin an Decline of the Christian Religion in India», Asiatic Researches, London : Vernor, Hood and Sharpe et al., t. X, 1811, pp. 28–157. – «An Essay on the Sacred Isles in the West, with other Essays connected with that Work. Essay VI. Of Swetam, or the White Island, called also Sacam», Asiatic Researches, London : J. Cuthrell et al., t. XI, 1812, pp. 11–152. – «On the Ancient Geography of India», Asiatick Researches, Calcutta : Philip Pereira, t. XIV, 1822, pp. 373–470. WILKINS, Charles, «Translation of a Sanscrit Inscription, Copied from a Stone at Booddha-Gaya, by Mr. Wilmot, 1785. Translated by Charles Wilkins, Esq.», Asiatick Researches, Calcutta : Vernor and Hood, t. I, 1798, pp. 284–287. WILSON, Horace Hayman, Select specimens of the theatre of the Hindus, translated from the original Sanscrit [...] by Horace Hayman Wilson, Calcutta : Asiatic Press, 1826–1827, 3 vol. XE´ NOPHONE, L’expe´dition de Cyrus dans l’Asie supe´rieure et la retraite des dix mille. Ouvrage traduit du grec, avec des notes historiques, ge´ographiques & critiques par Larcher, Paris : De Bure, 1778. – Anabase – ëΑνα βασις. – Histoire grecque (Les Helle´niques) – ΕλληνικωÊ ν. XIPHILIN, Jean, Histoire romaine. ZA´ RATE, Augustı´n de, Histoire de la de´couverte et de la conqueˆte du Pe´rou, traduite de l’espagnol d’Augustin de Zarate, par S. D. C., Amsterdam : chez J. L. de Lorme, 1700, 2 vol.

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Zend-Avesta, Zoroasters Lebendiges Wort, worin die Lehren und Meinungen dieses Gesetzgebers von Gott, Welt, Natur, Menschen, ingleichen die Ceremonien des heiligen Dienstes der Parsen u.s.f. aufbehalten sind [...] von J. F. Kleuker, Riga : Hartknoch, 1776–1777, 3 vol. ZOEGA, Georg, De origine et usu Obeliscorum ad Pium Sextum Pontificem maximum, Roma : Lazzarini, 1797. ZOSIME, Histoire nouvelle – ëΙστορι α νε α.

Index des noms de personnes

Index des noms de personnes Cet index contient les noms des personnes re´elles ou fictives mentionne´es dans les textes et dans les notes, a` l’exclusion de ceux des critiques modernes et de celui de Benjamin Constant lui-meˆme. Les graphies ont e´te´ uniformise´es, en principe sous la forme franc¸aise la plus usite´e aujourd’hui. Les noms ne sont suivis de la profession ou de la fonction que lorsqu’il faut distinguer des homonymes ou pre´ciser une identification. L’absence de toute pre´cision signifie, soit que la personne est parfaitement connue, soit au contraire qu’elle n’a pu eˆtre identifie´e.

Æbutius Helva Cornicen, Postumius 377 Abarta, nuage 200, 589 Abijam (ou Abiya), roi de Juda 567 Abimelech, personnage de l’A. T. 108, 716 Abradatas, roi le´gendaire de Susa 295 Achab, roi de Juda 108, , 553, 715 Achille 107, 274–275, 292–293, 397, 455, 516, 717, 737 Acoetes, personnage de la mythologie grecque 293 Acosta, Jose´ de 281, 295, 301, 316–317, 549, 558, 574 Adagous, divinite´ phrygienne 237, 562, 730 Adalgod von Osterburg, archeveˆque de Magdebourg 568 Adam 213, 242, 569 Adam de Breˆme 238, 261 Adiseschen, serpent 227 Adme`te, roi de Phe`res, un des Argonautes 451, 459, 684 Adonis 191, 237, 246, 310, 562, 578, 730, 737, 741, 750, 754 Adraste, guerrier grec 445–446, 656, 191 Agag, personnage de l’A. T. 389 Agamemnon 107, 256, 270, 275, 431–432, 436, 450–451, 647, 649, 659 Agathias, historien grec 141 Agathocle, tyran de Syracuse 555 Agathon d’Athe`nes, poe`te tragique grec 444 Agdestis, he´ros hermaphrodite 237 Agdus, ge´ant 237 Age´silas II, roi de Sparte 275, 422, 545, 699, 769 Agis II, roi de Sparte 769 Agny (ou Agnini), divinite´ hindoue du feu 88–89, 92, 141, 508, 714 Agraulis, nymphe 274 Ahanta, serpent 200, 589 Ahriman, de´mon 484

Ahuitzotl (ou Ahuitzal), roi des Azte`ques 258 Ajax 437, 649 Alamundarus, guerrier sarrasin 267 Alcame`ne, sculpteur 193 Alceste 459 Alcibiade 761 Alcime´don d’E´gine, vainqueur aux jeux olympiques 405 Alcinoe¨, personnage de la mythologie grecque 601 Alcinou¨s, roi des Phe´aciens et hoˆte d’Ulysse 466 Alciphron, rhe´teur grec 246 Alcme`ne 395, 458 Alde´gore voir Adalgod von Osterburg Alastor (ou Alestor), de´mon dans la mythologie romaine 380 Alexandre le Grand 111, 151, 206, 517, 555, 716 Alfadur (ou All-Vater) 97, 175–176, 724 Alura, divinite´ arabe 267, 541 Alzire, personnage de Voltaire 447 Amasis, pharaon 423 Ambigatus, roi des Gaulois 137 Amestris, reine perse 264, 540, 732 Amida 177–178, 324, 479, 576, 724, 742 Amiot, Joseph-Marie, je´suite 262, 539 Ammien Marcellin 121, 256, 343, 417 Ammon, dieu e´gyptien du soleil 176, 222 Amogha, personnage de la mythologie hindoue 330 Amosis, pharaon 265–266, 288, 291, 553– 554, 736 Amphitryon 395 Amyot, Jacques, 190, 266 Anacharsis, philosophe scythe 411, 461, 632 Anacre´on, poe`te lyrique grec 400 Anahid (ou Anaı¨s, Anaı¨tis), divinite´ perse 309

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De la Religion

Ananga, divinite´ indienne 103 Ananta, serpent dans la mythologie indienne 200, 589 Anaxagore, philosophe grec 443–444, 462, 678, 687 Anchise, pe`re d’E´ne´e 167 Andani, personnage de la mythologie indienne 330 Andromaque, personnage d’Euripide et de Racine 428, 450–451 Anna Perenna 352, 354 Anquetil-Duperron, Abraham-Hyacinthe 167, 302, 334, 484, 559, 578 Ansse de Villoison, Jean-Baptiste-Gaspard d’ 757, 761 Ante´nor, personnage de la mythologie grecque 299 Antigone, personnage de Sophocle 141, 434, 438, 456 Anubis, divinte´ e´gyptienne 83, 713, 736 Anxe´sia, de´esse d’E´pidaure 354, 751 Anysius de Thessalonique 349 Apelle de Cos, peintre grec 247 Aphrodite 115, 267 Aphroditos voir Hermaphrodite Apis, divinite´ e´gyptienne 328, 507, 559, 739 Apollodore d’Athe`nes 265, 272, 697 Apollon 97, 99, 111, 115, 370–371, 401, 415, 437, 455, 716–717, 755, 757 Appien d’Alexandrie, historien romain 326, 376 Apule´e 193, 758 Aquiliens, famille des 372 Arce´silas III, roi de Cyre`ne 420–421, 734 Arche´laos de Milet, philosophe athe´nien 443–444 Ardhanari, divinite´ hindoue 239, 564 Are`s, dieu grec de la guerre 286, 395, 434 Arethas, roi des Ghassanides 267 Arimane, dieu persan du mal 141, 202–206, 210, 217, 221, 589, 591, 726–727 Arimnestres (ou Arimnus), roi d’E´trurie 361, 746 Aristagore, tyran de Milet 761 Aristide le Juste, homme d’e´tat athe´nien 277, 543 Aristodicos de Cyme 418–419 Aristophane 58, 64, 237, 271, 310, 327, 391, 426, 444, 457–460, 462–463, 563, 579, 598, 604, 606, 669, 672–678, 680–681, 684–690, 741–742, 761 Aristote 202, 423, 444, 589, 760–761 Arjuna (ou Arjoun), prince hindou 153

Arminius, chef de guerre che´rusque 261 Arnobe, rhe´teur 176, 190, 243, 328, 330, 341, 343, 346, 348, 353–354, 371, 568, 725, 775 Arrien (Flavius Arianus), homme politique de Cappadoce 151, 721, 760 Arsace, roi parthe 152 Arsinoe¨, me`re d’Ascle´pios 393 Artabaze, ge´ne´ral perse 414 Artaxerxe`s, roi de Perse 422 Arte´mis 194, 272–273, 276, 305, 401, 543 Aryandes, satrape perse en E´gypte 421 Arta-Narissura, repre´sentation de Schiva 239, 563 Ascle´pios, dieu grec de la me´decine 393 Astarte´, divinite´ e´gyptienne 82–83, 89, 509 Ate´, divinite´ grecque 430 Athalie, personnage de Racine 449 Athe´na 80, 377, 395 Athe´ne´e, grammairien grec 269, 277, 288, 308–309, 423, 537, 553, 555, 567 Atre´e, roi de Myce`nes 648 Attis (ou Attys), personnage de la mythologie grecque 308–309, 334, 565, 740 Auguste, empereur romain 116, 373, 379, 638 Augustin, saint 168, 259, 270, 283, 305, 345, 353–354, 364, 375, 537, 542, 567, 581 Aulu-Gelle, grammairien latin 337, 378, 444 Aune le vieux, roi le´ge´ndaire sue´dois 285, 551, 735 Aziloth 185, 223 Baal Peor voir Belphe´gor Baal, dieu 108, 259, 308, 316, 573–574 Bacchus 236, 243, 247, 258, 272–273, 276, 282, 295, 310, 332–333, 353, 361, 426, 448, 458–459, 509, 542–544, 546, 564– 565, 669–670, 681, 684, 688–689, 697, 734, 741, 751–752, 754–757, 761 Bade, princesse de, non identifie´e 742 Badrakaly, fille de Shiven 506, 573 Bagapatis, l’inspecteur du se´rail de Darius, fils d’Hystaspe 151 Bagorazus, courtisan de Darius, roi de Perse 151 Bailly, Jean-Sylvain 339, 344 Balbus (ou Balbulus), personnage de Ciceron, De natura deorum 346 Balder (ou Baldur), dieu de la mythologie scandinave 99, 103, 126, 154, 199, 718, 721 Baldorn, ge´ant, personnage de la mythologie scandinave 176

Index des noms de personnes Bardesane d’E´desse, philosophe syrien 87, 239, 507 Barnabas, disciple de saint Paul 233 Barrow, Isaac 312, 569 Barthe´lemy, Jean-Jacques, abbe´ 461, 674, 677, 686 Bartholin, Thomas 260, 284–285, 294, 308, 537, 551, 568 Basile de Ce´sare´e, saint 185, 320, 742 Bassus, Caius Ce´sius, poe`te lyrique latin 217 Battos III, roi de Cyre`ne 420 Baumgarten, Siegmund Jakob 168 Baumgartner (ou Baumgarten) auf Breitenbach, Martin Ritter von 323, 576 Bayle, Pierre 156, 190, 242–243, 272, 274, 276, 311–312, 323, 404, 479–480, 543, 545–546, 564, 568–569, 571, 579, 698 Be´chet, Franc¸ois, dit Be´chet aıˆne´, e´diteur 59 Beck, Christian Daniel 461, 674, 677, 686, 817 Be´lial, de´mon 148, 515 Bellanger, Franc¸ois 467 Belle´rophon, roi de Corinthe 458, 670, 681, 688 Belphe´gor, divinite´ moabite 306, 567, 740 Be´lus, prince babylonien 305, 566, Bergler, Stephan 458, 670–671, 684, 688 Bernier, Franc¸ois 574, 576 Beyer, Andreas 83, 89, 305–306, 505, 567 Beyzla, fille de Baldorn, personnage de la mythologie scandinave 176 Bharata, personnage du Ramayana 307 Bhavani, la tisserane, femme de Shiven 88, 105–106, 194, 282, 290, 398, 508, 550, 554, 714, 726, 735, 737 Biarcon, personnage de la mythologie scandinave 112, 716 Bioche, un des interlocuteurs de l’Ezourvedam 554 Blaquiere, William Coates 90, 280, 287 Blepsiades, les 405 Blondel, David 168 Blunt, James T. 101, 106 Bochart, Samuel 474 Boeckh, August 401 Bomilcar, conjure´ carthaginois 111, 777 Bonald, Louis-Gabriel-Ambroise, vicomte de 196 Boniface de Mayence, saint et martyr 546 Bopp, Friedrich 92 Bore, personnage de la mythologie scandinave 176 Bossuet, Jacques-Be´nigne 389

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Botin, Anders af 144, 285 Böttiger, Karl August 438 Bouddha (ou Buddha) 88, 116, 121, 177– 178, 239, 290, 300, 324, 332, 479, 576, 714, 724, 742 Boudon, Henri-Marie 319 Boulanger, Nicolas-Antoine 225, 761 Bourguignon d’Anville, Jean-Baptiste 140 Bourignon, Antoinette 242, 308, 312, 569, 740 Bourroutta voir Bharata Bragi, dieu de la poe´sie dans la mythologie scandinave 106 Brahma (ou Brama), dieu supreˆme de l’hindouisme 85–89, 106–107, 126–127, 163, 174, 214, 220–221, 227, 239–240, 321, 330, 334, 507–508, 522, 525–526, 558, 563–564, 578, 714, 718, 730 Branhilda (ou Brynhildr), personnage de la mythologie scandinave 294 Briare´e, ge´ant, un des trois He´catonchires 394–395, 610 Brimha Narud, divinite´ indienne 252 Briseus, surnom de Bacchus 754 Brito, Jean de, pe`re 320 Brouma voir Brahma Brucker, Johann Jacob 185 Brumoy, Pierre, pe`re 458, 681, 688 Brunet, Franc¸ois-Florentin 184, 571 Bruno le Chartreux, saint 209, 480, 727 Brutus, Lucius Junius, dit l’Ancien 370, 638 Brutus, Marcus Junius 372 Buchanan, Francis 156, 160, 163, 168, 228, 522 Bulis, lace´de´monien 278 Busiris, roi le´gendaire d’E´gypte 265, 732 Buxtorf, Johann 473–474 Bysatia, fille du roi des Massyliens 351 Cæcina Severus, Aulus, homme politique romain 355 Cadmille, divinite´ cabirique 282, 751, 756 Codros, roi le´ge´ndaire d’Athe`nes 735 Cagliostro, Giuseppe Balsamo, comte de 760 Caius Manlius, consul 357 Calchas, devin, personnage d’une trage´die d’Euripide 270 Caligula 116, 717 Callicratide`s, ge´ne´ral spartiate 277, 555, 734 Callirhoe, personnage de la mythologie grecque 398 Calliste, Nice´phore, historien byzantin 266, 547

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De la Religion

Calpurnius Crassus, lieutenant romain 351 Cama, divinite´ hindoue 86, 220 Camadeva, divinite´ hindoue 106 Cambry, Jacques 79 Candaule, roi semi-le´gendaire de Lydie 415, 418, 781 Carey, William 99 Carl, roi scandinave le´gendaire 151 Carli, J. R. 243, 564 Casaubon, Isaac 119, 241, 562, 565 Cassandre 275, 450–451 Cassius Viscellinus, Spurius 366 Catherine de Cordoue, sainte 319, 742 Catilina, Lucius Sergius 777 Caton (Marcus Porcius Cato), dit le Jeune 337, 638 Ce´crops, fondateur d’Athe`nes 276, 289, 544, 734 Celse, philosophe romain 181 Cenresi, personnage de la mythologie indienne 88–89, 238, 332, 508, 564, 714, 730 Censorinus grammaticus 350 Centeotl, divinite´ azte`que 258, 291, 300, 552, 558, 738 Ce´re`s 101, 103, 150, 258, 299, 410, 414, 738, 565, 746, 750–751, 754–755, 759– 761 Cernojewitsch, Iwan 110 Cernojewitsch, Maxim 110 Ce´saire, e´veˆque d’Arles 168 Ce´sar, Jules 80, 136–137, 167, 200, 230, 259, 274, 285, 296, 350, 372–373, 504, 517–518, 536, 544, 550, 590, 638, 698, 736 Ce´te`s, officier indien 296, 517, 737 Ce´to, divinite´ grecque 398, 613–614 Chambers, William 109, 227 Champollion, Jean-Franc¸ois, dit Champollion jeune 83 Chandica voir Kaˆli, de´esse hindoue Chardin, Jean 93, 133, 152, 264, 472, 510, 540 Chardon de la Rochette, Simon 468–469, 571 Chardon, Charles-Mathias 482 Charicle´e, personnage des E´thiopiques 540 Charlemagne, empereur d’Occident 93 Charlier, Jean 479 Charon, personnage de la mythologie grecque 440, 759 Chateaubriand, Franc¸ois-Rene´, vicomte de 159 Che´re´mon, grammairien d’Alexandrie 316, 574

Che´zy, Antoine-Le´onard de 126 Chilpe´ric Ier, roi des Francs 151, 721 Chiniac de La Bastide, Pierre 335, 550 Chronos 131, 263, 333, 370, 409, 430, 539 Chrysaor, personnage de la mythologie grecque 398 Chrysippe de Soles, philosophe stoı¨cien 346 Chumontou, un des interlocuteurs de l’Ezourvedam 554 Cice´ron 61, 132, 138, 176, 310, 318, 328, 339, 342–343, 346, 355, 360, 373, 379– 380, 418, 427, 510, 575, 664, 741, 743, 746 Cimon, homme d’e´tat athe´nien 431 Cincia, de´esse 354 Cincius Alimentus, Lucius, historien romain 337 Circe´, magicienne de l’Odysse´e 190, 725 Civilis, Caius Julius, chef des Bataves 136 Claude (Tiberius Drusus), empereur romain 278, 373, 546 Claudien (Claudius Claudianus) 79, 537 Clavier, E´tienne 365, 519 Clavigero, Francisco Javier 83,229, 258, 316, 553, 559, 573 Cle´ment d’Alexandrie 138, 256, 271, 408, 410, 542, 752, 754, 762 Cle´ome`ne, roi de Sparte 419–420, 769–770 Clytemnestre 270, 436, 454, 466, 541 Coatlicue, divinite´ azte`que 258, 559 Codrus (ou Codros), dernier roi le´gendaire d’Athe`nes 277 Colebrooke, Henry Thomas 82, 86, 88, 121, 126, 153, 160, 240, 291, 297, 309, 483 Cometho, preˆtresse de Diane 273, 544, 697, 734 Commode, empereur romain 752 Confucius 134 Constance II, empereur romain 123 Coock, James 572 Coray, Adamance (ou Korais, Adamantios) 468 Corinne, poe´tesse grecque 411–412, 632 Corneille, Pierre 444 Cotta, Maximus Messalinus, Marcus Aurelius, se´nateur 256 Cottos, ge´ant, un des trois He´catonchires 394–395, 610 Couplet, Philippe 216 Cousin, Victor 108, 463, 690 Cratinus, jeune athe´nien 277, 555, 734 Cre´on 141–142, 448 Cre´sus 415–416, 418

Index des noms de personnes Creuzer, Georg Friedrich 84, 90, 119, 130, 138, 141, 165, 174, 181, 184–185, 187– 188, 191, 193–194, 204–205, 215, 217, 237, 237, 241, 243–244, 246, 268, 272, 282, 287, 300, 305, 307–309, 323, 329, 334, 337, 342, 346–352, 354, 369, 507, 513, 539, 541, 543, 550, 552, 559, 562, 565, 567, 570, 573–574, 578–579, 590– 591, 605–606, 622, 697, 725, 733, 735, 751, 757, 771, 775, 781–782 Cte´sias, me´decin et historien grec 151 Cunæus, Petrus 470 Curtius, Marcus 278, 735 Cybe`le 82, 242, 305, 308, 323, 326, 334, 341, 562–563, 565, 573, 579, 742 Cyclopes, les 452, 605, 607 Cyre`ne, nymphe 401 Cyrille d’Alexandrie, saint 256, 274, 545, 698 Cyrus, fondateur de l’empire perse 151, 201, 295, 416, 418, 589, 721 Cytisson, personnage de la mythologie grecque 415 Dædalion, personnage de la mythologie grecque 351 Dachsa, beau-pe`re de Schiven, fils de Brahma 84–85, 98, 506, 714 Dag, dieu de la mythologie scandinave 284, 551, 735 Dagon, divinite´ se´mitique 79, 83, 88, 508, 714 Daints voir De´ve´tas Dale, Anton(ius) van 133 Dalila 108, 715 Dalin, Olof von 139 Damayanti, personnage du Mahabharata 92, 104, 126, 202, 213 Damia, divinite´ grecque 751 Damo, philosophe grec 750 Damophilus, peintre grec 366 Daniel 148, 184 Darius Ier, roi des Perses 151, 269, 278, 556 Dascharatha, pe`re de Rama 107, 126, 321 Daspatha, roi indien 125 David, roi d’Israe¨l 149, 515 Davida, ge´ant dans la mythologie indienne 122 Davies, Edward 167, 186 Davis, Samuel 177 Daytias, les, de´mons dans la mythologie indienne 332 De Laet, Johannes 307, 568

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De Pauw, Corne´lius 81, 168, 238, 263, 271, 276, 289, 323, 468, 504, 546, 554, 576, 723 Debtahs, personnages de la mythologie indienne 728 De´cius, Publius Mus 278, 735 De´phobe, personnage de la mythologie grecque 436 De´janire, personnage de la mythologie grecque 435 Della Valle, Pietro 576 De´marate, roi de Sparte 366, 420 De´me´ter 150 De´mosthe`ne 411, 468–469, 571 Dempster, Thomas 337, 361, 376 Denon, Dominique-Vivant 161, 243, 266, 509, 540, 565, 722 Denys d’Halicarnasse 78, 142, 261, 338, 342–343, 351–353, 357, 360, 362–363, 365–366, 368–371, 375–376, 378, 467– 468, 503, 506, 538, 747 Denys l’Are´opagite 185, 221 Derce´to, me`re de Se´miramis 82–83, 87, 94, 505, 713 Devendren, demi-dieu hindou 122, 184 De´ve´tas, les, de´mons dans la mythologie hindoue 184–185 Diagoras de Me´los, poe`te et philosophe grec 761 Diagoudas, le´gislateur des The´bains 310, 741 Diane 87, 192–193, 270, 272, 275–276, 299, 304, 331, 351–352, 454, 541–545, 566, 697, 699, 733–734, 738 Diane Orthia 271 Didon 306 Didot, Firmin, e´diteur 691 Dike´ 650 Dinarque, orateur grec 468–469, 571 Diodore de Sicile 111, 113, 119, 130–131, 137, 143, 151, 161, 167, 176, 203, 262, 265, 271, 285, 295–296, 328, 334, 357, 412, 423–424, 471, 507, 513, 517–518, 521, 538, 540, 542, 551, 555, 559, 565– 566, 631, 718, 721, 732, 739, 753, 761, 769, 777 Dioge`ne Laerce 202, 324, 589 Diome`de, roi d’Argos 273–274, 544, 698, 734 Dion Cassius 111 Dion Chrysostome, rhe´teur grec 268, 537, 760 Dionysos 150, 247, 330, 460

846

De la Religion

Diphilus, roi de Chypre 274, 545, 698 Ditty, e´pouse de Vichnou 334 Domaldi (ou Domaldr), roi scandinave le´gendaire 260 Domitien (Titus Flavius Domitianus) 320 Dorie´e, he´ros grec 423 Dourga, divinite´ hindoue 88, 124, 282, 307, 508, 550, 568, 714, 717, 740 Dow, Alexander 155 Drona, nuage 200, 589 Dsanrasik, divinite´ lamaı¨que 88–89 Dsye´, mauvais ge´nie 210, 727 Du Halde, Jean-Baptiste 216, 222 Du Pre´au, Gabriel (ou Prateolus) 479 Dubois, Jean-Antoine 83, 96–97, 100, 110, 117–119, 122, 126, 130–132, 140–141, 152–153, 156, 160, 162, 164–166, 184, 200, 211–212, 243, 589 Dulaure, Jacques-Antoine 243, 305–306, 567, 730 Duncan, Jonathan 317–318, 575 Dupuis, Charles-Franc¸ois 89–90, 437, 509 Duris de Samos, historien grec 308, 567 Durvasas (ou Duruwassen), sage chez les Indiens 103, 122 Dwapara, divinite´ hindoue 117 E´aque, fils de Zeus 409 Echidna, personnage de la mythologie grecque 399 Eckstein, Ferdinand, baron d’ 31, 48, 85, 90, 92, 103–104, 108, 110, 116–117, 121, 146, 164, 175, 189, 194, 196–199, 206– 207, 213–214, 220–221, 223–226, 236, 239–241, 255, 258, 280, 284–285, 287, 290, 294–295, 299, 304, 312, 325, 333, 359, 362, 481 E´ge´rie, nymphe 365 Egil, roi le´ge´ndaire sue´dois 285 E´glon, roi des Moabites, assassine´ par Ehud 477 Ehud, juge d’Israe¨l 477 Eichhorn, Johann Gottfried 201, 302, 476, 590 E´lare, nymphe 637 E´lectre 450, 650 Eli, juge d’Israe¨l 715 E´lie, prophe`te 148, 574 E´lien (Claudius Ælianus) 133, 188, 271, 371, 443 Elissa, divinite´ phe´nicienne 306 E´ne´e 167, 293, 345, 372 E´ole 637

E´ons, les, substances immate´rielles 185, 223 E´pime´nide, philosophe cre´tois 277, 437, 555 E´pimethe´e, fre`re de Prome´the´e 620 E´piphane, saint 230, 305, 573 E´ratosthe`ne, philosophe grec 265 E´rechte´e, roi le´gendaire d’Athe`nes 541, 733, 753 E´ric, e´poux de Segride, reine de Sue`de 294, 516 E´rinys, furie 433, 435, 660 Erlik-Khan, divinite´ mongole 82, 88, 245, 508, 714, 731 E´ros 220, 246, 391 Eruniakschen, ge´ant 112 Eschine, orateur 411 Eschyle 217–218, 340, 390, 426–432, 434, 437–440, 442, 444, 447, 450, 456, 458, 466, 643, 645, 647–648, 651–652, 654– 661, 663–664, 673, 681, 688, 728, 761 Esculape, divinite´ greco-romaine 351, 601 Eshmoun, dieu phe´nicien 334, 578, 743 E´son, personnage de la mythologie grecque 282 Esus, divinite´ de la mythlogie celtique gauloise 259, 278 Eswara (ou Esu’ara), divinite´ hindoue 88, 238, 508, 562, 714, 730 E´te´ocle, personnage de la mythologie grecque 455 E´tienne de Byzance 269, 369–370, 537 Euagrios Scholastikos 268, 541 Eudoxe de Cnide, philosophe grec 202, 589 Eume`ne de Cardia, chancelier d’Alexandre le Grand 296, 517 Euphrantide, devin 271, 542–543, 733 Euripide 58, 64, 191, 270, 273, 426, 428, 436, 441–456, 458–459, 461, 467, 534, 541, 544, 643, 651, 654, 656, 665, 669– 670, 673–674, 677, 681, 684, 686, 688, 697, 734, 761 Euryple, he´ros grec combattant devant Troie 273, 544, 697, 734 Euse`be de Ce´sare´e 80, 90, 119, 177, 183, 193, 223, 233, 238, 255, 264, 268, 271, 274, 278, 288, 345, 504–505, 537, 539, 542, 544, 546, 553, 698 Eustathe de Thessalonique 299 Euthymus, personnage de la mythologie grecque 371 Eutoria, personnage de la mythologie grecque 351 Euthyphron, personnage du dialogue de Platon 454

Index des noms de personnes E´vandre, he´ros romain 293, 372 E`ve 198 Evhe´me`re, philosophe grec 756, 761 Eyra, divinite´ scandinave 99 Eyvind, cousin du roi Harald 107 E´ze´chias, roi de Juda 147, 515, 553 E´zechiel, prophe`te 99, 148, 306, 515, 567 Fabius Pictor, Quintus, historien romain 337, 345 Fabricius, Johann Albert 458, 681, 688 Faunus, dieu romain 350, 365, 369, 373 Februus, divinite´ e´trusque 349, 590 Fe´nel de Dargny, Jean-Basil-Pascal, abbe´ 200, 232, 259, 536, 542 Fenris, dieu-loup scandinave 225, 231–232 Feronia, divinite´ romaine 83, 342 Ferrand, Antoine-Franc¸ois-Claude, comte 196, 284, 335 Festus, Pompeius 161, 261, 337, 346, 351– 353, 356 Filangieri, Gaetano 310 Firdousi, Abu-al Qasem 104 Firmicus, Julius 237, 509, 562, 563 Flavius Jose`phe 167, 469, 519, 723 Flora, courtisane 375 Fo, nom chinois de Bouddha 222, 318, 483, 729 Fo-Hi, souverain mythique de la Chine, divinite´ chinoise 216, 329, 559, 728, 739 Forster, Georg 335 Foucher d’Obsonville, Paul, abbe´ 158 Franc¸ois d’Assise 317, 742 Frenzel (ou Frentzel, Frencel), Michael Abraham 91 Frey, dieu dans la mythologie scandinave 232, 308, 568 Freya, divinite´ scandinave 101–104, 126– 127, 237, 568, 730, 740 Frigg (ou Frigga), e´pouse d’Odin 103, 126 Frontin (Sextus Iulius Frontinus), consul 344 Gage, Thomas 507 Gagnier, Jean 268 Ganesh (ou Ganesa), divinite´ hindoue 83, 86, 88, 140 Ganga, divinite´ hindoue 85, 506, 714 Garcilaso de la Vega 287, 301, 306, 552, 567 Garmur, personnage de la mythologie scandinave 231–232 Gayatri, divinite´ hindoue 240 Ge´, personnage de la mythologie grecque 399

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Geinoz, Franc¸ois, abbe´ 416 Ge´lon, tyran de Ge´la et de Syracuse 412, 538 Germanicus, ge´ne´ral romain 116, 261, 717 Gerson voir Charlier, Jean Gibbon, Edward 267–268, 541, 579 Giorgi, Agostino Antonio 89, 157, 221, 329, 559, 729 Giscon, carthaginois 539 Gläsener, Justus Marin 185 Glaucos, personnage de la mythologie grecque 419, 443 Gna, personnage de la mythologie scandinave 103, 715 Godric of Finchale, saint 319 Goldingham, John 86 Goutama, sage chez les Indiens 321 Gorgasus, peintre grec 366 Gorgones, les 93, 613–614, 714 Görres, Johann Joseph von 79, 90–91, 148, 165–167, 177, 182–185, 193, 213, 219, 222, 228–230, 237–238, 243, 245, 256, 265, 282, 301, 308, 335, 508–509, 519– 520, 526, 528–529, 550, 562–563, 565, 574, 732, 735, 750, 758 Grævius, Johann Georg 337 Gre´goire III, pape 279, 546 Gre´goire VI, pape 168 Gre´goire de Nazianze 316, 574 Grimm, Wilhelm 294 Gronovius, Jakob 519 Grotius, Hugo 279, 546 Gruber, Johann Gottfried 132 Grym (ou Grymer), roi scandinave le´gendaire 151 Guasco, Ottaviano 88, 508 Gue´ne´e, Antoine, abbe´ 108, 148 Guignes, Jose`phe de 262, 539 Guigniaut, Joseph-Daniel 83, 120, 132, 141, 157, 165, 167, 181, 183–184, 203, 205, 207, 209, 211, 213, 215, 217, 219, 221, 224, 227, 229–230, 232, 236, 238, 243 Guillaume de Jumie`ges, chroniqueur anglonormand 261 Gunnies, fils de Ram, personnage de la mythologie hindoue 85 Guyon, Jeanne-Marie 312, 324, 569, 742 Gyges, personnage de la mythologie grecque 394–395, 415, 610, 781 Gylfe, roi scandinave le´gendaire 112, 716 Gylippos, ge´ne´ral spartiate 111 Hachenberg, Paul 199 Hadrien, empereur romain 274, 406, 544– 545, 617, 630, 698, 734

848

De la Religion

Hafiz, poe`te persan 569 Hakon Ier de Norve`ge 107, 284, 551, 735 Hamilcar Barca, ge´ne´ral carthaginois 262, 538, 732 Hamilton, Alexander 85, 307, 506, 568, 576 Hammer-Purgstall, Joseph von, baron 167 Hanka, Wenzel 100 Hannibal, fils de Giscon, ge´ne´ral carthaginois 538 Hanouman, divinite´ hindoue 84, 330 Harald Ier de Danemark 199 Harald Hildetand, roi scandinave le´gendaire 107 Harec de Biarmie, roi scandinave le´gendaire 151 Harichandra, personnage de la mythologie indienne 104, 202 Harsaphes, divinite´ e´gyptienne a` teˆte de be´lier 243 Hastings, Warren 140 He´cate 192–193, 726 Hector, personnage de la mythologie grecque 453, 455, 488 He´cube, e´pouse de Priam 450, 454–455, 545 Heeren, Arnold Hermann Ludwig 87, 93, 143, 151, 162, 165, 169, 183–184, 239, 299, 304, 307, 510, 521, 557, 722, 751 Heimdall, divinite´ de la mythologie scandinave 112, 231–232 Heinrich, Carl Friedrich 236–237, 247 Hela, divinite´ scandinave 154, 159, 522 He´le`ne 275, 400, 402, 454, 458, 688 He´liodore d’Eme`se 264, 540 He´liogabale, empereur romain 239 He´lios 190, 345 Helladius, grammairien grec 83–84 Helmold von Bosau 199, 269, 537, 552, 590 Henri V, empereur germanique 569 He´phaistos 429 He´ra 273, 288 He´racle`s 370, 436 He´raclide, astronome 423 He´raclite 246 Herbelot de Molainville, Barthe´lemy d’ 133 Hercule 182, 218, 242, 265, 273, 284, 299, 328, 353, 361, 366, 369–371, 391, 395, 397, 416, 429, 432, 435, 454, 459, 544, 559, 562, 567, 601, 610, 618, 646, 648– 649, 670, 684, 688, 698, 734–735, 738, 756, 782 Herder, Johann Gottfried 127, 166, 297, 405, 517–518 He´rilus, personnage de la mythologie grecque 83, 342, 744

Hermann, Martin Gottfried 119, 193, 236, 247, 408, 785 Herme`s Trisme´giste 208 Herme`s 162, 181, 205, 229, 246, 349–350, 359, 429–430, 462, 526, 570, 593, 727 Hermippe de Smyrne 202, 589 Hermodur (ou Hermodr), fils d’Odin, messager 111, 154 He´rodote 80–81, 83, 117, 123, 130, 150, 165, 201–202, 237–238, 243, 256, 264– 265, 268, 275, 278, 286, 295, 304–305, 316, 328, 343, 386, 413–421, 423, 442, 466, 504–505, 509–510, 513, 518–519, 537, 539–540, 545, 552, 556, 559, 562, 564, 566–567, 570, 573–574, 589, 657, 699, 732, 734, 739, 750, 769, 781, 785 Herrain (ou Herjan), autre nom d’Alfadur 97 Hersilia, me`re de Tullus Hostilius 362 Hertha, divinite´ germanique 261, 272, 331, 543, 732 He´siode 187, 191–192, 199, 224, 310, 330, 384, 388, 391–400, 404–405, 407, 411, 413, 415, 418, 421, 432, 437, 442, 456, 473, 570, 598, 601–602, 604, 606, 608, 610, 615, 619, 622–625, 629, 631, 633, 647, 658–659, 661, 663, 725–726, 741, 751, 772 Hermaphrodite (ou Aphroditos), personnage de la mythologie grecque 237, 246, 562– 563, 730 He´sus, divinite´ de la mythologie celtique gauloise 259, 536 He´sychius d’Alexandrie 193, 276, 458 Heyne, Christian Gottlob 132, 272, 337, 346, 348, 361, 375, 385, 393, 543, 601, 622, 638, 697, 775 Hi, divinite´ chinoise 222 Hialmar, roi scandinave le´gendaire 151, 721 Hie´ron Ier, tyran de Syracuse?– 412, 631 Hipparque, astronome grec 750 Hippias, tyran d’Athe`nes 414 Hippodameia, personnage de la mythologie grecque 459 Hippolyte, personnage de la mythologie grecque 351, 450, 656, 674 Hirt, Aloys Ludwig 342 Hispala Fæcenia, esclave libe´re´e 377 Hispallus, C. Corne´lius, pre´teur 310 Hnikar (ou Nikar), autre nom d’Alfadur 97 Holwell, John Zephaniah 163, 722 Home`re 97, 99, 104, 108, 115, 133, 138, 174, 191, 193, 198, 293, 336, 359, 394, 403–405, 407–411, 428, 435–436, 438, 440, 442, 454, 460, 488, 522, 601, 608,

Index des noms de personnes 610, 615, 618, 622, 629, 631, 633, 646– 647, 649, 656, 661, 664, 676, 685, 705, 715, 717, 725, 737, 743, 751, 767, 772 Horace 341, 467 Horapollon, philosophe grec 237, 563 Horatius (Caius Horatius Pulvillus), consul 467 Horus, fils du dieu Osiris 176, 182, 203, 305, 750 Hoschea (ou Ose´e), roi d’Israe¨l 102 Hostus Hostilius, pe`re de Tullus Hostilius 362 Hother, prince danois 101, 112, 715–716 Hugin, l’un des corbeaux de Odin 104 Huirtourhaal, de´esse mexicaine 259 Huitzilopochtli 83, 258, 324, 329, 559 Humboldt, Alexander von 86, 229 Hyde, Thomas 157, 167k 204–205, 209, 316, 471, 522, 540, 571, 574, 591–592, 727 Hyllos, personnage de la mythologie grecque 649 Hystaspe, satrape de Parthe 151 Idunn (ou Iduna), divinite´ nordique 102, 106, 715 Ignace, saint, e´veˆque d’Antioche et martyr 320, 742 Ila, divinite´ hindoue 239 Indra, roi des dieux dans mythologie indienne 92, 99, 107, 126, 174, 184, 204, 286, 290 Io, personnage de la mythologie grecque 90, 505 Iphicle`s, personnage de la mythologie grecque 395 Iphige´nie 256, 270, 273, 275, 454, 538, 541, 544, 649, 697, 733 Iphis, personnage de la mythologie grecque 445 Iphitos, personnage de l’Odysse´e 435, 649 Ire´ne´e, e´veˆque de Lyon 120 Iris, divinite´ grecque 103, 409, 611 Isaı¨e, prophe`te 147, 185, 515 Isidore de Se´ville 343 Isis 90, 101, 150, 163, 176, 193, 203, 243, 265, 304–305, 316, 505, 507, 509, 573, 591, 740, 750–751 Isme`ne, personnage de la mythologie grecque 438 Isocrate, orateur athe´nien 202, 589, 761 Ixion, personnage de la mythologie grecque 637

849

Jablonski, Pawel Ernst 177, 193, 203, 237, 243, 265, 305, 540, 562, 564, 566, 732 Jacob 120, 137 Jacobs, Christian Friedrich Wilhelm 619 Jahel (ou Jae¨l), personnage de l’A. T. 477 Jamblique 121–122, 176, 181, 526, 717 Janus 83, 216–217, 342, 344–347, 349, 744– 745 Japhet 589 Jason 442 Jaswant Singh, maharaja 297 Jayadeva, poe`te indien 290, 312 Jean, saint, apoˆtre 201 Jean Chrysostome, saint 120, 482 Jeanne d’Arc 452 Je´hovah 102, 107, 119, 178–179, 306 Jephte´, personnage de l’A. T. 270 Je´roˆme, saint 268, 316, 537, 574 Je´sus-Christ 148, 359 Job 104, 147 Johilla, esclave de Bhavani 105–106 Jonas, prophe`te 567 Jones, William 130, 165, 245, 263, 290, 312, 539, 565, 731 Jo´nsson, Finnur 261 Jordane`s (ou Jornande`s) 256 Josias, roi de Juda 102, 306 Jovinien, moine 316, 574 Julien (Flavius Claudius Julianus), empereur romain 123, 256, 274, 357, 477, 717, 745, 755 Junon 86–87, 98, 100, 243, 261, 273, 331, 339, 342, 351, 354, 360, 374, 393, 409, 455, 544, 564–565, 608, 637, 697, 739, 746 Jupiter 79, 83, 88, 97, 110, 122, 131, 135, 174, 191–192, 218, 237–238, 261–262, 270, 273–274, 276, 330, 347–349, 355– 357, 361, 363, 366–367, 370–371, 373, 378, 390, 393–398, 401, 409–410, 415– 416, 429–430, 432, 435, 438, 449, 454– 455, 458, 509, 538, 542–544, 608, 610, 615, 618–620, 622–623, 646–650, 658– 660, 681, 688, 697, 724, 733, 739, 745– 748, 756–757, 775 Jupiter Ammon 508 Jupiter Fe´re´trien 363 Jupiter Hermaphrodite 563 Jupiter Latialis 351 Jupiter Metropator 239 Justice, divinite´ romaine 401 Justin (Marcus Junianus Justinus) 137, 350 Juve´nal 376, 419

850

De la Religion

Juvie, divinite´ romaine 201, 349, 590, 745 Kabandha, personnage de la mythologie hindoue 287 Kaempfer, Engelbert 85, 506 Kaiomorts, le premier homme d’apre`s la tradition du Zend-Avesta 238 Kaˆli, de´esse hindoue 90, 109, 117, 194, 259, 281–282, 290, 307, 322, 509, 714, 740 Kamadeva, divinite´ hindoue 103 Kambarta, nuage 200, 589 Kan-tsu (ou Kaotzee), empereur chinois 289, 553 Karkata, serpent 200, 589 Kartikeya voir Scanda Ke´res, les, divinite´s grecques 397 Kerian voir Herrain Keyssler, Johann Georg 259–260, 294, 537, 548 Ki, divinite´ chinoise 222 Kircher, Athanasius 121, 182, 243, 306–307, 565, 567–568 Klaproth, Julius 112 Kleinias, personnage des Lois de Platon 271 Kleuker, Johann Friedrich 210, 217, 308, 484, 558, 567 Klotho, personnage de la mythologie grecque 459 Kneph, divinite´ e´gyptienne 175–177, 222, 724 Knox, Robert 83, 90, 509 Koosha-nabha, sage indien 117 Koronis, personnage de la mythologie grecque 401 Kosegarten, Ludwig 92 Koube´ra, divinite´ hindoue 126 Kriemhild, personnage du Nibelungenlied 198 Krischna (ou Crischna, Crishna) 96, 153, 127, 198, 225–226, 240, 309, 312–313, 329, 559, 563, 718, 730, 739 Kumari, divinite´ hindoue 221 Kycnos, divinite´ grecque 395 Kylon, homme politique athe´nien 277 Lævius, poe`te romain 237, 563 Labe´on (Marcus Antistius Labeo) 378 Lachmi, e´pouse de Vichnou 106 Lactance 181, 195, 274, 278, 323, 350–351, 371, 376, 544, 546, 568, 579, 698, 734 Lactantius Placidus 84, 348 La Fayette, Marie-Joseph-Paul-Yves-RochGilbert du Motier, marquis de 42

Laflotte (ou La Flotte), de 88, 109, 155, 307, 322, 507–508, 525, 568, 576 La Harpe (ou Laharpe), Jean-Franc¸ois de 434, 645 Laı¨us, personnage de la mythologie grecque 452 Lakchmana, personnage du Ramayana 84 La Loube`re, Simon de 289, 334, 484, 554, 578 Lamennais, Hugues Fe´licite´ Robert de 196 Lampride 137, 753 Lanjuinais, Jean-Denis 158, 160 Larcher, Pierre-Henri 243, 265, 275, 305, 386, 414–421, 423, 466, 540, 545, 564, 699 Lares, les, divinite´s romaines 351 Larunda Mania, divinite´ romaine 160, 261, 351, 722 Latinus, roi le´gendaire 747 Latone, me`re d’Apollon et d’Arte´mis 273, 637, 649 Leclerc, Jean (Johannes Clericus) 320 Le´on, matelot 264 Le´to voir Latone Liber, divinite´ romaine 354, 754 Libera, divinite´ romaine 354, 754 Lichas, personnage de la mythologie grecque 415, 435 Lisle, Joseph de 319 Loccenius, Johannes 260, 549 Locke, John 323, 576 Loki, divinite´ de la mythologie scandinave 102–103, 106, 190, 199, 209, 231–232, 589, 726–727 Lomeier, Johannes 476 Lo´pez de Go´mara, Francisco 259 Lord, Henry 105 Lucain 138, 144, 261, 279, 351, 538, 546, 720 Lucien de Samosate 81–82, 94, 151–152, 243, 256, 273, 334, 316, 323, 505, 510, 544, 564–565, 573–574, 576, 579, 697, 714, 734, 759–760 Lucre`ce 315 Lukumo, fils de De´marate 366 Luther, Martin 311 Lycaon, roi d’Acardie 273, 276, 544, 697, 734 Lycophron, poe`te grec 191 Lycurgue 274, 310, 386, 697–698, 776 Lydus 344, 346 Mackenzie, Colin 136 Macleod, Alexander 84, 113

Index des noms de personnes Macpherson, James 98 Macrobe 237, 241–242, 261, 339, 344, 346, 351, 353, 371, 563 Magna mater voir Cybe`le Maha-Padnia, serpent 200, 589 Mahacal, divinite´ hindoue 282 Mahade´va (ou Mahadewa) voir Schiven Mahan-Atma, divinite´ hindoue 223 Mahomet, pe`re de 733 Mahomet, prophe`te de l’Islam 108, 133, 267, 541, 719 Mahony, captain 94, 160 Maillet, Benoıˆt de 547 Maı¨monide, Moı¨se 223 Maistre, Joseph de 31, 195–196, 251, 283– 284, 292, 335, 731 Majer, Friedrich 84, 112, 122, 155, 158, 183–184, 210, 227, 229, 290, 300, 316, 318, 558, 573 Malachie 99 Male´cheren, roi de Mahabalipour 109, 350 Mallet, Paul-Henri 99–100, 103, 105, 112, 134, 144, 151, 217, 220, 260, 284, 498, 517, 536–537, 551 Manasse´, fils d’E´ze´chias 553 Mane´thon de Sebennytos 265–266, 288 Mantus voir Pluton Marc-Aure`le 111, 716 Marcus Fabius, consul 357 Marie l’E´gyptienne 305, 740 Marie, la Vierge 477 Marie-Ange´lique de la Providence 742 Marini, Giovanni Filippo de 152 Mars 131, 191, 199, 256, 270, 342, 352, 392, 395, 536, 552, 610, 618, 622, 747 Marsham, John 266, 288–289, 540, 553 Martial, Marcus Valerius Martialis 350, 352 Martianus Capella 340, 354 Martin, Pierre 554 Matter, Jacques 703 Matumis, divinite´ hindoue 568 Maxime de Tyr 197, 726 Maya 757 Me´de´e 190, 282, 453 Me´dicis, Cosme III de, grand-duc de Toscane 361 Me´duse, une des Gorgones 398 Meiners, Christoph 96, 120, 132, 134, 141, 152, 156, 243, 256, 265, 279, 281, 285– 286, 289–290, 296, 301, 303, 305, 307– 308, 316, 334, 420, 497, 504, 545, 549, 560, 565–566, 568, 572–574, 578–579, 699

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Me´lampos, devin grec 570 Me´nalippe, amant de Come´tho 273, 544, 697, 734 Me´nandre 120, 256 Mende`s, bouc 256, 566 Me´ne´las, roi de Sparte 275, 428, 446, 455, 466–467, 545, 656, 699, 734 Menou 140, 220–221, 223, 236, 238, 317, 468, 483, 741 Mercure 101, 131, 222, 259, 351, 359, 369, 395, 409, 435–436, 458, 509, 611, 650 Mercure de l’E´gypte 345 Mercure de Phe´nicie 79, 88 Mercure des Germains 111, 261, 716 Mermerus, fre`re de Phe´re`s 443 Meschia et Meschiane, anceˆtres du genre humain dans le Zend-Avesta 238 Me´some`de, poe`te cre´tois 406, 617, 619, 630 Meurs, Jan van (ou Meursius) 256, 276, 288, 299, 542, 553, 557 Mexitli, divinite´ azte`que 329, 739 Micali, Giuseppe 377 Michaelis, Johann David 120, 305, 320, 497, 567 Mihera voir Varaha Mill, James 317 Milton, John 659 Mı´mir, personnage de la mythologie scandinave 715 Minerve 98, 236–237, 247, 299, 330, 377– 378, 395, 415, 434, 437, 439, 455, 563, 610, 618, 648–649, 653, 730, 738–739 Minos 409, 638 Minucius Felix, Marcus 256 Mise´, me`re de Bacchus 236, 247 Mitgard, serpent 231 Mithras 83, 177, 213, 216–217, 221, 237, 264, 308, 316, 332, 344, 509, 547, 562, 567, 574, 728, 730, 740 Mnevis, taureau sacre´ 507 Moehsen, Johann Carl Wilhelm 144 Mohanimaya, de´esse indienne 209 Mohi (ou Mihini), forme fe´minine de Vichnou 225 Moı¨sasour, personnage de la mythologie indienne 184, 200, 590, 726 Moı¨se 99, 147, 149, 223, 515, 729 Moloch, divinite´ dans l’Ancien Testament 89, 259, 505 Momos, divinite´ grecque 759 Mone, Franz Josef 99, 107, 199, 203, 231, 238–239, 591, Montaigne, Michel Eyquem de 243

852

De la Religion

Montesquieu, Charles de Secondat, baron de 302, 326, 331, 489, 560, 577, 742, 783 Montfaucon, Bernard de 86, 344, 507 Moor, Edward 307, 548, 568 Morin, Henri 315, 571 Moser, Georg Heinrich 191 Müller, Petrus Erasmus 316, 571, 573–574 Munin, l’un des corbeaux de Odin 104 Mutunus Tutunus, divinite´ romaine 354, 375, 749 Myce´rinus, roi e´gyptien 477 Mylitta, divinite´ babylone 567 Nala, personnage du Mahabharata 91–92, 104, 117, 202 Nanna, divinite´ scandinave 154 Nasmada, divinite´ hindoue 105 Neith, divinite´ e´gyptienne 237, 562–563, 730 Ne´me´sis 398, 404–406, 615, 617, 619, 624, 629 Ne´optole`me, personnage de la mythologie grecque 455 Neptune 109–110, 116, 174, 351, 403, 414, 465, 619 Ne´re´e 392, 613–614 Ne´ron, empereur romain 135, 278, 356 Nerreter, David 91 Nerthus, divinite´ germanique 262 Nezahual-Cololt, roi d’Acolhuacan 291, 553 Nicolas de Damas 268 Niebuhr, Barthold Georg 337, 340, 353, 358, 361–362, 365, 378–379, 746–747 Niebuhr, Carsten 484 Niord (ou Niort), divinite´ scandinave 98 Nirinache´ren, ge´ant 227 Noe´ 336 Nonnos Panopolitanus, poe`te e´pique byzantin 191, 330, 352, 726 Numa Pompilius, roi de Rome 338, 340, 362–365, 369, 373, 747–749 Numoochi, personnage du Ramayana 99 Nyort, petit-fils de Odin 144 O’Hier de Grandpre´, Louis Marie Joseph 124 Oanne`s, divinite´ chalde´enne 83, 505 Oce´an, personnage de la mythologie grecque 392 Ocresia, femme e´trusque, me`re de Servius Tullius 354 Octave voir Auguste Oden (ou Odin), roi le´gendaire scandinave 144

Ocnos, personnage de la mythologie romaine 349 Odin, dieu de la mythologie scandinave 97, 99, 101, 103–107, 112, 127, 135, 144, 154, 159, 163, 176, 231–232, 257, 259, 285, 401, 551, 715, 720, 722, 724 Œdipe, he´ros le´gendaire 434, 436, 448–449, 454, 465–466, 649, 655 Olaf Ier de Norve`ge (Olaf Tryggvason) 294, 308 Omar ibn al Khattaˆb, calife 547 Ombourischa, roi indien 286, 290 One´sicrite, historien grec 323 Onga, divinite´ phe´nicienne 331 Opimia, vestale 376 Ops, divinite´ romaine 371 Oreste 256, 273, 390, 400, 416, 427–428, 436–437, 447, 450, 455, 466–467, 664 Orige`ne 119, 181, 283 Orme, Robert 297 Ormuzd (ou Oromaze), divinite´ iranienne 161, 177, 202–206, 217, 221, 238, 484, 591, 726 Oroites, personnage de la mythologie grecque 423 Orphe´e 188, 212, 237, 747, 756 Osias, roi de Juda 306, 740 Osiris 78, 150, 161–162, 176, 182, 184, 191, 222, 243–244, 265–266, 295, 332, 507, 564–565, 730, 737, 750, 756 Ossian 98 Ouei, divinite´ chinoise 222 Ouranos 430 Ourschirava, cheval 92 Ovide 82, 138, 224, 256, 261, 337, 341–346, 351, 354, 357, 363–364, 371–373, 390, 469, 538, 744, 748, 754 Ovington, John 263, 318, 539, 573 Pactyas, Lydien re´volte´ contre Cyrus, 418 Pagondas, le´gislateur the´bain 310 Pallas, Peter Simon 82, 88, 187, 212–213, 229, 245, 372, 508, 725 Pan 374, 508 Pandore 198, 212, 396, 620, 622, 728 Panhe´e, femmme d’Abradatas 295 Parasara, e´crivain indien 130 Parques, les, personnages de la mythologie grecque 397, 624 Parraud, Joseph-Pascal 146 Parvati, femme de Schiva 98, 101, 122, 238– 239, 562 Pascal, Blaise 319

Index des noms de personnes Pasiphae´ 754 Patrocle 292, 516, 737 Paterson, John David 244, 281–282, 313 Paul, saint 233, 302 Paulinus a Sancto Bartholomæo 86–87, 239, 482, 507, 558, 563 Pausanias 115, 193, 256, 270–271, 273, 276– 277, 299, 361, 371, 393, 405, 411, 428, 440, 443, 513, 542, 544–546, 555, 565, 601, 630, 656, 697, 717, 734, 769 Pe´gase 458 Pe´le´e, pe`re d’Achille 115, 428, 455 Pelloutier, Simon 133, 137, 139, 144, 335, 352, 505, 537–538, 546, 549–550, 713 Pe´lopidas, ge´ne´ral the´bain 275, 545, 699, 734 Pe´lops, roi le´gendaire du Pe´loponne`se 276, 403, 459, 546, 734 Pennant, Thomas 319 Penthe´e, personnage de la mythologie grecque 449 Pe´or (ou Phe´gor), divinite´ syrienne 567 Pe´ricle`s 427, 439, 460, 652, 655, 676, 678, 685, 687 Perrier, Mde, sœur de Blaise Pascal 319 Perse´e, dernier roi de Mace´doine 190 Persica, de´esse 354 Pertunda, de´esse romaine 354 Petau, Denis 305 Pfefferkorn, Georg Michael 91 Phallus 234, 243, 245–247, 306, 310 Pharaon de l’Exode 108 Phe´bus (ou Phœbus), divinite´ greque 455 Phe`dre, e´pouse de The´see 313, 461 Phe`dre, personnage de Racine 656 Phe´re`s, fre`re de Mermerus 443, 451 Phidias 247, 405, 630 Philaret, personnage de Lucien de Samosate 323 Philochore, historien grec 237, 563 Philon d’Alexandrie 264, 317, 539 Philostrate 241, 563 Phle´gyas, personnage de la mythologie grecque 401 Phocylide, poe`te grec 400, 404, 633 Phorcys, divinite´ grecque 613–614 Photius 83–84, 264, 505, 547 Phre´re´time, reine de Cyre`ne 420 Phryxus, personnage de la mythologie grecque 415 Phthas, dieu e´gyptien 176–177, 222, 237, 331, 562–563, 730 Picus, roi le´gendaire romain 356, 365, 373, 745

853

Pindare 206, 247, 261, 305, 351, 400–413, 421, 428, 438–439, 459, 593, 598, 629– 633, 637, 657, 670, 674, 684, 688, 785 Pirithoüs, he´ros grec 440 Pitiscus, Samuel 341, 372 Platon 78, 201–202, 212, 236, 247, 252, 268, 271, 277, 400, 410, 417, 423, 431, 444, 541–542, 589, 728, 730, 761, 781, 785 Placidus Lactantius 83–84, 345, 348, 509 Plaute 754 Pline 123, 135, 138, 144, 259, 318, 337, 341, 348, 356, 366, 372–373, 377, 536, 562, 575, 741, 745 Plutarque 117, 133, 177, 182–183, 188, 190, 199, 202–203, 206, 216–217, 230, 244, 265–266, 275, 277, 288–289, 305, 337, 346–347, 350–352, 357, 363–364, 367, 369, 372–373, 376, 380, 417, 431, 439, 449, 459, 476, 507, 519–520, 540, 545, 547, 553, 555, 566, 576, 589, 622, 684, 689, 699, 717, 725, 734, 750, 758, 761, 781 Pluton 191, 201, 349, 409, 435, 438, 590, 650, 745, 750 Pococke, Richard 133, 266, 268, 541, 547 Polier, Antoine Louis Henri de 184 Pollux, Julius 432, 461, 686 Polybe, historien grec 80, 452, 504 Polycarpe, e´veˆque de Smyrne 219 Polycrate, tyran de Samos 423 Polydamas, he´ros grec 488 Polygnote, peintre grec 428, 440, 656 Polynice, personnage de la mythologie grecque 455, 650 Polyxe`ne, personnage de la mythologie grecque 446, 545, 734 Pompe´e (Cnaeus Pompeius Magnus), dit Pompe´e le Grand 116 Pomponius Mela 256, 296, 517, 536, 553 Porenetz, divinite´ slave 88, 508, 714 Porevith, divinite´ slave 88, 508, 714 Porphyre 80, 87, 122, 140, 165–167, 177, 183, 238–239, 255, 265, 267, 270–272, 274, 278, 288, 345, 504, 507, 519–520, 539, 541–542, 544, 553, 563–564, 698, 714, 753 Pose´idon 466, 539 Possevino, Antonio 479 Postumius Albinus, Spurius 375 Pouchkara, nuage 200, 589 Poule´ar, divinite´ hindoue 83, 507 Poullain de Saint-Foix, Germain-Franc¸ois 319

854

De la Religion

Pourousha, l’eˆtre supreˆme dans l’hindouisme 241, 295 Pourrou, fils de Bouddha 239 Pouvoir, personnage d’E´schyle 429 Pradjapati, divinite´ hindoue 220, 222, 241 Priam, personnage de la mythologie grecque 274 Priape, divinite´ grecque 306, 310, 353, 740– 741 Prithivi, divinite´ hindoue 83 Probus, empereur romain 337 Proclus, philosophe grec 79, 89, 757–758 Procope de Ce´sare´e, historien byzantin 256– 257, 267, 269, 279, 295–296, 517, 537, 541, 546 Procruste 487 Prodicus de Che´os, sophiste 311, 568–569, 741 Prome´the´e 105, 199, 217–218, 396–397, 428, 430, 432, 589, 620, 622–623, 648, 658 Properce 376 Proserpine 83, 193, 342, 435, 650, 750–751, 754, 757 Prote´e 275 Proxe`ne de The`bes, ge´ne´ral grec 422 Prudence (Aurelius Prudentius Clemens) 480 Pruna, divinite´ romaine 354 Ptole´me´e, Claude 199, 281 Ptole´me´es, les, dynastie 78 Publicola, Publius Valerius 372 Pylade, personnage de la mythologie grecque 256, 466 Pyrrhus Ier, roi d’E´pire 455 Pythagore 81, 206, 327, 364, 401, 404, 427, 579, 629, 750 Pythie, preˆtresse a` Delphes 420 Pythonisse, sorcie`re d’Endor 148, 515, 720 Quetzalcoatl, serpent 79, 83 Quinte-Curce 555 Quintilien 394, 434, 602, 648 Racine, Jean 444 Radha, favorite de Vichnou 313 Rahou, dragon tue´ par Vichnou 225 Raja-Brahdratch 318, 741, 575 Rama, dieu hindou 83, 85, 97, 101, 122, 126, 140, 287, 329, 426, 482 Rasusay, non identifie´ 579 Ravana, divinite´ hindoue 107, 109, 126, 198, 321 Reinhard, Philipp Christian 118

Reiske, Johann Jakob 468 Re´mus, personnage de la mythologie romaine 346, 378 Renneville, Rene´-Augustin-Constantin de 296 Rhadamante 409, 638 Rhamar-Ebn-Djaich-el-Selimani, personne Druse 108 Rhea Silvia, me`re de Romulus et Re´mus 352 Rhe´sus, personnage de la mythologie grecque 453, 455 Rhodomann, Lorenz 542 Riemschneider, Adolph Wilhelm 290 Rimabha, divinite´ hindoue 107 Rinda, divinite´ nordique 105 Robertson, William 258, 315, 536, 571, 732 Roboam, roi de Juda 108, 716 Rogerius, Abraham 239, 245, 318, 329, 334, 481, 559, 562, 564–565, 573–574, 578 Rollin, Charles 128 Romulus 337, 346, 352, 362–363, 365, 367, 378–379, 747–748 Roquefeuil, Camille de 300 Rosinus, Johannes 376 Routren (ou Rudra), divinite´ indienne 507, 525–526 Rugiavith, divinite´ vandale 88, 508, 714 Rühs, Friedrich 135, 260, 732 Rukme´ni, personnage de la mythologie indienne 198 Rymer, ge´ant 231 Sacy, Antoine-Isaac, baron Silvestre de 235, 272, 310, 360 Sagara, personnage de la mythologie indienne 103 Sagittarius, Kaspar 91 Saint-Foix, Germain-Franc¸ois Poullain de 319 Saint-Philippe, Vincent Bacalar y Sanna, marquis de 108, 127–128, 205, 477, 718, 727 Sainte-Croix, Guillaume-Emmanuel-Joseph Guilhem de Clermont-Lode`ve, baron de 85, 192, 235, 272, 309–310, 360, 543, 564, 726, 746, 757 Sale, George, orientaliste 133 Sale´s, divinite´ e´trusque 375 Salluste 337 Salmasius, Claudius (ou Claude Saumaise) 237, 562 Salmone´e, personnage de la mythologie grecque 637

Index des noms de personnes Samson 108, 715 Samuel, prophe`te 148, 389, 472 Sanchoniathon, e´crivain phe´nicien 90, 263, 540 Sandace, sœur de Xerxe`s 543 Sapho (ou Sappho) 400 Shapur II, roi de Perse 123, 717 Sarasvati, de´esse indienne 102, 122, 214 Satan 190 Sati, personnage de la mythologie indienne 282 Saturne phe´nicien 87, 714 Saturne, divinite´ italique 83, 107, 131, 199, 212, 243, 262, 272, 344, 350, 353, 370– 371, 391–392, 409–410, 430, 454, 507, 509, 538, 543, 605, 607, 617, 619, 728, 732, 734 Sau¨l, roi d’Israe¨l 148 Savary, Claude 289, 553 Savitar, divinite´ hindoue 240 Saxon le Grammairien 88, 105–107, 112, 284, 508, 551 Scada, femme de Niord 98, 715 Scanda ou Kartikeya 88, 508, 714 Schem-Yobh, rabbin 474 Schiven (ou Shiva, Siva), divinite´ hindoue 83, 85–86, 98, 101, 103, 122, 174–175, 200, 214, 220–221, 227, 239–240, 259, 281–282, 307, 330, 335, 505–507, 550, 557, 563–564, 724, 730, 735, 740 Schlegel, August Wilhelm 92 Schlegel, Friedrich 145, 167, 217, 243–244, 259, 307, 508, 566, 568, 720 Schleiermacher, Friedrich 397 Schmidt, Friedrich Samuel 265, 288, 540, 547, 553, 571, 573, 732 Schøning, Gerhard 139 Scholiaste d’Euripide 443 Scholiaste de Pindare 261, 351 Scholiaste de The´ocrite 468 Scytha, me`re de 328, 559 Scythes 328, 559 Segride, reine de Sue`de 294, 516, 737 Selden, John 83–84, 88, 236, 247, 305, 322, 505, 508, 567 Se´me´le´, personnage de la mythologie grecque 458, 669–670, 688, 757 Se´miramis, reine le´gendaire de Babylone 82 Se´ne`que 337, 355, 357, 488, 745, 760 Se´rapis, dieu e´gyptien 161, 183, 201, 206, 590 Se´rapis, surnom de Dionysos 150 Servius Tullius 353–354

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Servius, Maurus Honoratus 138, 142, 191, 201, 230, 262, 337, 339, 343, 345, 349– 352, 371, 563 Se´sostris, roi e´gyptien le´gendaire 243, 566 Seuse, Heinrich 311 Shivaji Bhonsle, fondateur du royaume marathe 297 Shaw, Thomas 140, 266, 478, 547 Sherwood, docteur 136 Shishupala, personnage du Mahabharata 198 Shriharsha, poe`te indien 109 Shudraka, poe`te indien 323 Sicard, Claude 289 Sieb, personnage de la mythologie indienne 163 Sigourd, he´ros le´gendaire de la mythologie nordique 294 Sigurd Hring, roi scandinave le´gendaire 107 Sile`ne, personnage de la mythologie grecque 188, 754, 759 Silius Italicus 137 Sime´on le Stylite 317, 742 Simon, magicien 120 Sise´ra, personnage de l’A. T. 477 Sita, personnage du Ramayana 84, 97, 126, 140–141, 198, 329 Skrimner, personnage de la mythologie nordique 153 Snorri Sturluson 260 Soane, personnage de la mythologie indienne 105 Socrate 128, 252, 327, 410, 417, 443, 454, 462–463, 579, 669, 674, 678, 687, 690, 761 Solin 144, 256, 296 Solon 416 Sommonacodom, dieu des Siamois 178, 333, 578, 743 Sonnerat, Pierre 85–86, 88, 103, 239, 245, 263, 281, 300, 318, 334, 506–508, 539, 549, 558, 563–564, 573, 578 Sophocle 44, 141–142, 247, 394, 405, 426– 427, 431, 434–440, 442, 444–445, 447– 449, 451–452, 454, 456, 460, 469, 603, 643, 645–646, 648–652, 655–656, 660, 670, 673–674, 678, 684, 689, 719 Sothis (ou Sopdet), divinite´ e´gyptienne 230 Soucra (ou Ousanas), roi d’Aksoum 116, 332 Sougriva, personnage du Ramayana 84 Sozome`ne 266, 477, 547, 733 Spangenberg, Ernst Peter Johann 315, 355

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De la Religion

Spanheim, Ezechiel 344 Spartianus, Ælius 241, 562 Spencer, John 471, 473–474 Sperties, lace´de´monien 278 Staro, dieu des Frisons 79, 506 Stace (Publius Papinius Statius), poe`te latin 84 Stäudlin, Karl Friedrich 120, 124, 148, 230, 233, 272, 320, 438, 542, 769 Stae¨l-Holstein, Anne Louise Germaine, baronne de 311 Steller, Georg Wilhelm 141, 476 Ste´sichore, poe`te grec 400, 402 Stobe´e (ou Johannes Stobaios) 87, 181, 268, 404, 459, 507, 526, 537, 563, 684, 688 Strabon 199, 232, 256, 269, 276, 281, 286, 305, 309–310, 315, 323, 352, 354, 357, 366, 371, 377, 471, 537–538, 549, 551, 569–570, 573, 579 Strepsiade, personnage des Nue´es d’Aristophane 327, 462, 579 Stutzmann, Johann Josua 648 Styrbjörn le Fort (ou Styrbiornus) 294 Styx, divinite´ grecque 398, 623–625 Subigus, divinite´ romaine 354 Sue´ta-De´vi, divinite´ hindoue 219, 221 Sue´tone 80, 116, 278, 367, 504, 546 Suidas 237, 273, 305, 316, 543, 563, 566, 574, 697 Sylla, Lucius Cornelius Sulla 350 Sulmo, personnage de l’E´ne´ide 293 Sulzer, Johann Georg 79, 269, 506 Sumner, John Bird 158 Surt (ou Surtur), personnage de la mythologie nordique 231–232 Sven Ier de Danemark, fils de Harald Ier 199 Svidor, autre nom d’Alfadur 97 Swantevit (ou Swantovit), divinite´ slave 88, 508, 537, 714 Syne´sius de Cyre`ne 78, 503 Tacite 96, 116, 136–137, 261, 274, 278, 366, 497, 537, 545–546, 698 Tage`s, divinite´ e´trusque 83, 138, 328, 343, 357, 378, 739, 744 Talthybios, personnage d’Euripide 275 Tanaquil, femme de Tarquin l’Ancien 358, 745 Tancre`de, personnage d’Euripide 446 Tanchelm (ou Tanchelin), pre´dicateur 569 Tantale, personnage de la mythologie grecque 273, 403, 459 Tapia, Andre´s de 259

Taranis, dieu gaulois 259, 536 Tarouka, demi-dieu hindou 121 Tarquin l’Ancien, roi de Rome 337, 358, 363, 366–367, 747–748 Tarquinius Priscus, Lucius 372 Tarquins, dynastie des 747 Tartare, personnage de la mythologie grecque 395, 399, 406 Tatius, Titus 362–363, 365, 375, 526, 747 Taube, Friedrich Wilhelm von 472 Tauler, Johannes 311, 741 Tchin, philosophe chinois 222, 729 Te´lamon, personnage de la mythologie grecque 274 Tennant, William 475 Terpsichore, muse 412 Tertullien 261, 278, 351, 354, 363, 366, 546, 747 Te´thys, divinite´ grecque 392 Teucer (ou Teucros), personnage de la mythologie grecque 274, 544–545, 698 Teusarpouliet, ge´nie breton 79 Teutates, dieu celte 259, 278, 536 Tezcatlipoca, divinite´ azte`que 258 Thale`s 133, 202 Thanatos 436 The´age`ne, personnage des E´thiopiques 540 The´ano, preˆtresse de Minerve 299 The´mis, personnage de la mythologie grecque 435, 650, 775 The´mistocle 272, 542–543, 733 The´odore le Lecteur 733 The´odoret de Cyr 123, 311, 408, 410, 568– 569 The´odose (Flavius Theodosius Augustus), empereur romain 266, 341, 547 The´ognis de Me´gara, poe`te grec 386, 400, 633 The´ophraste 271, 340 The´opompe, historien grec 188, 202, 353, 589 The´se´e, roi le´gendaire 428, 434, 440, 445, 454, 648, 655–656 Thespis, acteur 426, 657 Thiassi, ge´ant de la mythologie scandinace 102 Thietmar von Merseburg 260, 537 Thomas de Celano 397 Thor 97, 99–100, 112, 203, 217, 232, 238, 261, 308, 401, 568, 591, 715–716, 726, 728, 740 Thrasybule, homme d’e´tat athe´nien 277, 556, 735

Index des noms de personnes Thrymr, personnage de la mythologie nordique 238 Thucydide, historien grec 421, 439, 442, 652, 769 Tibe`re (Tiberius Claudius Nero), empereur romain 116, 278, 373 Tieffenthaler, Joseph 576 Tillemont, Louis-Se´bastien Le Nain de 579 Timocle`s, poe`te grec 459, 684 Tina, dieu e´trusque 347, 349, 744 Tissapherne, satrape 422 Titans, personnages de la mythologie grecque 192, 392, 395, 605, 607, 610, 617, 619, 637, 645, 664, 756 Tite-Live 137, 142, 261, 278, 338, 340, 351, 356, 358, 362–364, 366–367, 376, 378, 579, 745, 747 Titrambo (ou Tithrambo) divinite´ e´gyptienne 193 Titye, he´ros grec, fils de Zeus 637 Tlacatecololotl, divinite´ mexicaine 200, 590, 726 Tobie 148, 515 Tournefort, Joseph Pitton de 471 Trajan, empereur romain 320 Trimurti, divinite´ indienne 265 Triptole`me, he´ros grec 104, 410 Tryge´e, personnage d’Euripide 458, 670, 681 Tuccia, vestale 142 Tullus Hostilius, roi le´gendaire de Rome 122, 356, 362, 365, 369, 745, 747–748 Turner, Samuel 213, 229, 521 Tyndare, roi le´gendaire de Sparte 115, 717 Typhe´e, ge´ant, un des trois He´catonchires 395, 610, 618 Typhon, divinite´ e´gyptienne 83, 182–184, 190–191, 199, 201, 203, 205–206, 244, 264–265, 276, 349, 540, 565, 589–591, 593, 725–727, 750 Tyr, divinite´ nordique 232 Tyrte´e, poe`te grec 400 Ufens, personnage de l’E´neide 293 Ulysse 402–403, 437, 446, 465, 649 Urania, muse 237, 562 Uranus 240, 333, 392, 612, 614, 622, 730 Urbinia, vestale 376 Vaillant, Jean 344–345 Valckenaer, Lodewijk Caspar 414, 417, 461, 674, 677, 686 Vale`re Maxime 151, 296, 360, 517, 721 Valkyrie, les, personnages de la mythologie nordique 153

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Valmiki, auteur du Ramayana 198 Valois, Henri de 268, 537 Varaha, avatar de Vichnou 130 Varoun (ou Varouna), dieu indien 92, 207 Varron (Marcus Terentius Varro) 161, 191, 230, 260, 270, 337, 340, 345–346, 348, 350, 363–364, 371, 375–376, 379, 444, 761, 775 Varus, Publius Quinctilius 261 Vaschitas, personnage du Ramayana 321 Vasthrudnis, personnage de la mythologie nordique 105 Vayou, divinite´ hindoue 117 Ve´, fre`re d’Odin 176 Velle´da, prophe´tesse germanique 136 Vengatta-Souara, dieu indien 97 Ve´nus 115, 131, 237, 246, 309–310, 330, 339, 391–392, 398, 454, 563–564, 605– 606, 612, 614, 618–619, 622, 717, 730, 741 Venus apaturia 416 Vesta 345, 363, 744 Veyssie`re de Lacroze, Mathurin 243–244, 318, 564, 573 Vichnou (ou Vichnou) 82, 101, 103, 106, 109, 174–175, 214, 220–221, 225, 227, 239, 241, 290–291, 329, 334, 481, 525– 526, 559, 563, 578, 713, 716, 730, 743 Vicramaditya, roi le´gendaire indien 322 Vidar, divinite´ nordique 101, 232, 715 Vidrirnir, autre nom d’Alfadur 97 Vili, fre`re d’Odin 176 Vinaguien, dieu indien du mariage 507 Viraj, personnage de la mythologie indienne 241 Virgile 133, 167, 262, 279, 293, 337, 343, 345, 350, 352–353, 372, 377, 436, 538, 598, 637–638, 723, 732, 737, 744, 753 Virginensis, divinite´ romaine 354 Visbur, roi scandinave le´gendaire 260 Vitringa, Campegius 119 Vitzliputzli voir Huitzilopochtli Vogel, Paul Joachim Siegmund 328, 505, 559 Volcatius, devin 230, 350 Volney, Constantin-Franc¸ois de Chassebœuf, comte de 109 Voltaire, Franc¸ois-Marie Arouet, dit 157, 389, 444–449, 452 Voss, Johann Heinrich 101, 246, 292, 391 Vossius, Gerard Johannes 199 Vossius, Isaac 320 Vou-ye´, prince chinois 262, 539

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De la Religion

Vulcain 83, 176, 237, 261,299, 330, 343, 351, 354, 563, 730, 739 Vultejus, Justus 443 Vyasa, auteur du Mahabharata 198 Wagner, Johann Jakob 156, 184, 220, 227, 238–239, 247, 316, 333–334, 515, 563– 564, 573, 578, 608, 613–614, 618, 622 Warburton, William 147, 720, 761 Wellington, Arthur Wellesley, 1er duc de 131 Wesseling, Petrus 176, 265, 417, 540, 543 Wilford, Francis 85, 92, 98, 106, 153, 156, 204, 220–221, 236 Wilkins, Charles 103, 153, 208 Wilson, Horace Hayman 226 Winckelmann, Johann Joachim 506 Wischwamitra, personnage du Ramayana 107, 322 Wizaga, prophe´tesse 136 Wolff, Christian 301 Xaca, divinite´ tibe´taine 329, 479, 559, 739 Xe´nophane 246 Xe´nophon 201–202, 277, 295, 421–422, 517, 556, 589, 769 Xerxe`s Ier, roi de Perse 123, 264, 277–278, 540, 543, 716–717, 735 Xiphilin, Jean 111

Yajnatabada, personnage du Ramayana 126 Yama, divinite´ hindoue 92, 126, 153, 157, 165, 722 Yamman Raya, le Yama des Cingalais 165 Ymer, divinite´ scandinave 99 Yngvis, divinite´ scandinave 107 Zaı¨re, personnage de Voltaire 447, 449 Zaleucus de Locres, le´gislateur grec 385 Zamolxis (ou Zalmoxis), esclave de Pythagore 81, 505, 713 Za´rate, Augustı´n de 286, 316–317, 551, 574 Zervan-Akere`ne, le temps sans bornes dans la mythologie de l’Inde 175, 177, 204–205, 724 Zeus 187, 206, 246, 395–396, 398, 405, 416, 429, 445, 466, 559, 637 Zoe¨ga, Johann Georg 150, 161, 243, 565 Zoroastre (ou Zarathoustra) 163, 184, 188, 301, 308, 557, 567 Zosime, historien grec 123