Poetique de la Priere Dans Les Oeuvres d'Ovide (Recherches Sur Les Rhetoriques Religieuses) (French Edition) 9782503567952, 2503567959


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Poetique de la Priere Dans Les Oeuvres d'Ovide (Recherches Sur Les Rhetoriques Religieuses) (French Edition)
 9782503567952, 2503567959

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POÉTIQUE DE LA PRIÈRE DANS LES ŒUVRES D’OVIDE

RECHERCHES SUR LES RHÉTORIQUES RELIGIEUSES 20 Collection dirigée par Gérard Freyburger Laurent Pernot

Poétique de la prière dans les œuvres d’Ovide

Par Virginie Subias-Konofal

F

© 2016, Brepols Publishers n.v., Turnhout, Belgium. All rights reserved. No part of this publication may be reproduced, stored in a retrieval system, or transmitted, in any form or by any means, electronic, mechanical, photocopying, recording, or otherwise without the prior permission of the publisher.

D/2016/0095/78 ISBN 978-2-503-56795-2 (printed version) ISBN 978-2-503-56796-9 (online version) DOI 10.1484/M.RRR-EB.5.110266 Printed in the EU on acid-free paper.

Remerciements Ce travail n’aurait pu être mené à son terme sans le soutien, exigeant et chaleureux à la fois, de Mme Franchet d’Espèrey. Grâce à la confiance dont elle m’a honorée et à l’aiguillon stimulant de ses corrections, ce qui avait été entrepris a été achevé. Qu’elle reçoive ici l’expression de ma plus sincère reconnaissance. Je souhaiterais également rendre hommage à Jacqueline Dangel, qui m’a tant apporté, par ses séminaires très riches, ses entretiens toujours fructueux et son immense culture. Être de ses disciples a été pour moi une grande chance, et une belle aventure intellectuelle. J’exprime aussi ma profonde gratitude aux professeurs qui ont eu la générosité de suivre l’élaboration de ce travail et de me faire profiter de leurs critiques et de leurs conseils. En premier lieu M. John Scheid, qui a corrigé un premier état de mon manuscrit et m’a accordé un long entretien, au cours duquel ont été soulevées de nombreuses questions, puis M. Charles Guittard, inépuisable source de connaissances sur la religion et la mentalité romaines. Je ne saurais oublier M. Antoine Foucher dont la lecture fine et les reprises avisées de la partie métrique de ce travail m’ont été d’un grand bénéfice. Mes proches savent tout ce que je leur dois. Leur patience a été infinie, et cette page en fera mémoire.

Préface La prière a été le thème fondateur et demeure le thème privilégié de la collection Recherches sur les Rhétoriques Religieuses : le premier tome de la collection a été la Bibliographie de la prière grecque et romaine, répertoriant les études parues de 1898 à 1998, qui a connu une refonte incluant les études parues de 1999 à 2003, puis un supplément répertoriant celles parues de 2004 à 2008 et bientôt un autre supplément, mentionnant et analysant les travaux publiés de 2009 à 2013. Le deuxième tome de la collection a été le Corpus de prières grecques et romaines réalisé par F. Chapot et B. Laurot : cet ouvrage comporte une introduction nourrie sur les principaux caractères de la prière en Grèce et à Rome, puis en présente un grand nombre d’échantillons concrets, traduits et commentés. D’autres volumes de la collection ont ensuite traité des cas particuliers de prières : ainsi le tome 3 de J.-F. Cottier sur Prières privées et textes de dévotion du Moyen Âge latin, le tome 5 sur Nommer les dieux (textes édités par N. Belayche et alii), le tome 6 de Ch. Guittard sur Carmen et prophéties à Rome, le tome 7 sur L’hymne antique et son public (textes édités par Y. Lehmann), le tome 11 de J. Goeken sur La rhétorique de la prière dans l’Antiquité grecque et le tome 17, du même auteur, sur Aelius Aristide et la rhétorique de l’hymne en prose. Le présent ouvrage se situe dans cette ligne. Son auteur, Virginie SubiasKonofal, s’y attache à l’expression poétique de la prière dans le champ d’investigation qu’est l’œuvre ovidienne. Elle étudie en particulier la typologie du corpus ovidien, la mise en scène de la prière et sa scénographie verbale chez le poète latin, par des examens rigoureux du texte et des contextes faisant intervenir les acquis actuels de la narratologie et de la stylistique notamment en ce qui concerne les rythmes, les sonorités, les effets métriques. Elle fait ainsi apparaître le rôle moteur de la prière dans l’écriture d’Ovide et, au-delà, un aspect de la religiosité et de la réalité culturelle romaines, car ces prières, si elles sont littéraires, ne se situent pas moins dans le prolongement et dans l’esprit de celles qu’on prononçait réellement à Rome. Cet ouvrage s’adresse donc non seulement à des lecteurs intéressés par les procédés et les mises en œuvre littéraires, mais encore à ceux qui étudient la prière elle-même, dans ses fonctions proprement religieuses et ses aspects historiques. 

Gérard Freyburger & Laurent Pernot

Introduction Homme de tous les contrastes, à la fois élitiste et populaire, subtil et excessif, courtisan et irrévérencieux, Ovide est l’un des poètes au sujet desquels on a peut-être le plus écrit. Célébré par ses contemporains, aimé au travers des âges par les gens de culture comme par la foule qui toujours prit plaisir à ses récits, Ovide conserve pourtant, comme un grand nombre d’Anciens qui se sont effacés derrière leur œuvre, une silhouette mystérieuse et mouvante. Qui fut-il exactement ? Peu de renseignements sur sa vie, et surtout sur sa personnalité, au contraire des auteurs modernes tels Montaigne, Rousseau, Leiris ou Morand ; point de programme théorique comme ceux de Ronsard ou de Zola ; point d’écrit méta-littéraire comme ceux de Flaubert, Gracq ou Giraudoux. Mais des poèmes qui ont traversé les siècles et qui ont conservé leur puissance, et leur beauté. On eût pu croire que tout avait été dit sur eux, tant est vertigineuse la bibliographie savante qui leur est consacrée, et pourtant il nous a semblé que certaines facettes de leur art avaient été laissées dans l’ombre. C’est l’une de ces facettes qui a retenu notre attention. P. Boyancé avait consacré une monographie à La religion de Virgile. Une telle monographie ne serait pas inconvenante au sujet de celui qui se présente comme ‘le chantre des Dieux’, en même temps qu’il est celui de l’Amour. Vates deorum et uates dierum : si les Fastes apparaissent comme l’œuvre la plus religieuse d’Ovide, par leur forme et leur contenu, les autres poèmes de sa jeunesse et de sa maturité sont aussi le lieu de ce que l’on pourrait appeler une ‘poétique du sacré’. Suauis Ouidius, doux et sapide, réjouissant par sa complexité même : la poésie ovidienne est un mélange inattendu qui produit une saveur complexe. Et dans tout mélange, il convient de prêter attention aux ingrédients : le mélange de l’érotique et du religieux provoque une réaction dont on nous avons tenté d’observer l’étonnante alchimie. En décrivant des rituels et en recomposant des prières, Ovide propose un discours sur la religion tout en élaborant une esthétique du sacré, et de son langage tout particulièrement. « Pour les Anciens, la prière désigne toute démarche par laquelle l’homme ou bien s’adresse à la divinité, ou bien tente de recourir à des puissances supérieures pour obtenir un résultat ». « Elle constitue une parole par laquelle l’homme veut établir un contact avec le

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divin, s’adresse à une divinité pour requérir sa présence ou son aide, pour la remercier, la supplier, la prendre à témoin. Si une telle définition suppose une force agissante de la parole, la prière peut donc aussi être considérée comme un discours et faire l’objet d’une analyse rhétorique »1. Le discours religieux que l’on peut rencontrer chez Ovide a été étudié en tant que tel mais aussi en tant que discours persuasif, selon une approche rhétorique. Mais la rhétorique s’appuie sur une relation horizontale, qui s’enrichit d’une dimension verticale, transcendante, lorsqu’elle s’adresse aux dieux. Alors le poète devient cette voix « qui s’élève jusqu’aux cieux » (Bucolique I, 56, sic alta sub rupe canet frondatur ad auras). Le lien entre chant sacré et chant poétique s’impose chez Ovide, tout en restant mystérieusement peu étudié, occulté par d’autres aspects de son art. La prière à Rome est un sujet que l’on croit connaître, car il a été au centre de nombreuses études au cours des siècles, et cependant, il ne peut que surprendre celui qui l’aborde. Rien ne devrait être aussi simple que de faire l’exposé clair des pratiques cultuelles des Romains, étant donné qu’ils se définissaient eux-mêmes comme les hommes les plus pieux de la terre2. Et pourtant les discussions restent vives, et l’on n’a de cesse de revenir sur ce que certains présentent parfois comme des vérités, et qui ne sont le plus souvent que des généralisations. Force est de constater que la réalité est complexe, nuancée, et que la plus grande prudence s’impose lorsque l’on doit tirer quelques conclusions. Affirmer péremptoirement une réalité unique au sujet de la religion romaine, c’est faire fi des influences multiples qu’elle a subies, des évolutions historiques, de la coexistence d’écoles et de sectes diverses, du rapport entre la personnalité de chacun et sa pratique religieuse. La prudence élémentaire qu’impose la complexité du sujet est d’autant plus impérative que l’on se confronte à des œuvres littéraires. Le premier problème que nous pouvons rencontrer, avant celui des sources et celui de l’appréhension du fait religieux, est celui de la définition même de la prière. Qu’est-ce, en effet, qu’une prière ? Dans leur compilation 1. D. Aubriot-Sévin, citée par Johan Goeken dans l’avant-propos de La rhétorique de la prière dans l’Antiquité grecque, Brepols, coll. RRR, 2010. 2. Que l’on repense, par exemple, à la célèbre déclaration de Cicéron dans le De Haruspicum Responsis 9, 19 : « pietate ac religione atque hac una sapientia, quod deorum numine omnia regi gubernarique perspeximus, omnis gentis, nationesque superauimus » – « c’est par la piété et par la religion, par cette sagesse privilégiée qui nous a fait comprendre que tout est dirigé et gouverné par la puissance des dieux, que nous avons montré notre supériorité sur tous les peuples et toutes les nations. » (traduction de R. Schilling pour son article « Religion et Magie à Rome », Annuaire de l’EPHE, 75, 1967, p. 54-55).

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commentée des prières grecques et romaines, F. Chapot et B. Laurot tentent une définition : « Elle est la parole qui vient tout à la fois compléter, mettre en valeur et sacraliser l’acte. A ce titre, elle est bien elle-même un acte religieux, qui relie, par l’intermédiaire du verbe, l’homme au divin et suppose une force agissante de la parole. »3 Par cette définition, deux points sont posés, qui tous deux sont sujets à débat. Le premier point est que la prière est liée à une « acte religieux », qui lui serait au départ étranger. Cet acte doit être le sacrifice, auquel on a longtemps indissociablement lié la prière romaine. Saloustios affirmait en effet dans Des Dieux et du Monde4 que « sans sacrifices, les prières ne sont que des mots ; avec sacrifices, elles sont des mots vivants. » Cette affirmation est pour le moins à limiter au cas des prières liturgiques, effectuées dans le cadre d’un rituel établi, qu’il soit public ou privé. Elle ne concerne pas les prières individuelles, « les prières plus personnelles, jaculatoires », par lesquelles « l’homme antique invoque spontanément les dieux » et qu’il peut « formuler d’une manière plus originale et adaptée à sa sensibilité du moment. »5 De ces prières spontanées, il ne nous reste rien, et pour cause, hors des réécritures littéraires. Mais les autres, les prières rituelles intégrées au déroulement d’une action liturgique, sont-elles impérativement dépendantes de l’action religieuse ? Comme le présume J. Champeaux, « n’y a-t-il pas de prière sans sacrifice ? »6 Elle oppose à la prière sacrificielle les prières « nues », celles « qui jaillissent, au fil du quotidien, dans les moments d’émoi. »7 Hors de ces moments d’exception, « où le fidèle est contraint par la nécessité »8, « l’offrande à la divinité s’impose comme un dû. […] C’est que l’acte essentiel de la vie religieuse n’est pas la prière, mais le sacrifice, […] autrement dit la consécration d’une offrande. »9 Si la liturgie est codifiée et ritualisée, elle peut parfaitement coexister avec une mystique personnelle passant par des actes de foi spontanés et éphémères, qui pourront dans certains contextes rester purement verbaux. Ces qualités mêmes empêcheront qu’ils soient consignés et conservés pour les générations ultérieures, comme les prières muettes attestées dans les Tables Eugubines, et suggérées par la formule tases persuimu « qu’il prie en silence »10. La prière 3. F. Chapot et B. Laurot (332), Corpus de prières grecques et romaines, introduction. 4. Saloustios, Des Dieux et du Monde, 16. 5. F. Chapot et B. Laurot (332), Corpus de prières grecques et romaines, introduction. 6. J. Champeaux (324), « La prière du Romain », p. 273. 7. ibid. 8. ibid. p. 274. 9. ibid. p. 275. 10. Ch. Guittard (413), Recherches sur le carmen, Thèse dactylographiée, p. 113.

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ovidienne, avec toutes les spécificités que nous allons essayer de faire ressortir, pourrait être définie comme un acte verbal par lequel un locuteur utilise la puissance du langage poétique pour entrer en relation avec une divinité afin d’obtenir sa faveur. S’il est juste d’attribuer aux Romains une croyance, relative cependant, en l’efficacité intrinsèque du langage, tout est question de contexte, de nuance et d’angle de vue. En ce qui concerne le contexte, nous nous intéresserons aux circonstances d’émission des prières, ainsi qu’à la personnalité de l’orant et de son interlocuteur, les deux éléments ayant leur importance. Nous partirons d’une réalité historique et sociologique  : les hommes cherchent à entrer en communication avec leurs dieux et la prière est un de leurs moyens de communication. A cela nous ajouterons qu’Ovide propose de très nombreux exemples de cette communication dans ses œuvres, et qu’il choisit souvent la forme dialoguée : chez lui, comme chez de nombre de poètes depuis Homère, les hommes parlent aux dieux, et ceux-ci parlent aux hommes11. Ce dialogue est libre et fréquent, contrairement aux affirmations d’A. Dubourdieu, qui limite à leur part congrue les conditions de ce dialogue, et qui décrète que « les hommes ne répondent pas à la parole divine, et sont pour les dieux des auditeurs, pas des interlocuteurs. »12 Selon elle, « les hommes ne parlent aux dieux que quand ils ne les ont pas reconnus. »13 A. Dubourdieu souligne que « la parole divine établit une communication immédiate dont témoigne le fait que les dieux parlent latin. »14 Il semble à tout le moins normal qu’une divinité vénérée des Romains parlât latin ; on ne peut attendre moins du divin. Aucun des grands peuples de l’humanité n’a postulé des dieux qui ne parleraient pas sa langue, et avec lesquels il ne saurait communiquer. Les catholiques français prient en français, comme les catholiques polonais en polonais, quand ils ne le font pas en latin, et il semblerait que Dieu soit polyglotte, comme la Vierge qui n’a pas choisi de s’adresser dans une langue incompréhensible à la jeune Bernadette de Lourdes ou aux bergers de Fatima. Si les dieux décident d’entrer en contact avec les hommes, 11. Hors du champ de la littérature, ou de la fiction de manière générale, l’histoire de tous les peuples est jalonnée de rencontres entre des hommes – héros, élus ou simples particuliers, et des représentants du monde divin. Le traitement de ces événements, quelle que soit l’époque, dépend essentiellement de l’idéologie propre de l’historien et du point de vue qu’il adopte. On peut par exemple penser aux divers traitements historiques appliqués à la geste de Jeanne d’Arc. 12. A. Dubourdieu (346), « Paroles des Dieux », p. 48. 13. ibid. p. 48. 14. ibid. p. 46.

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ce n’est pas fantaisie de poète que de les faire s’exprimer dans la langue de leur destinataire, ou dans une langue compréhensible par lui ; que l’on soit croyant ou non, c’est une question de bon sens. Ce qui est toutefois plus intéressant à Rome, c’est la subsistance d’éléments archaïques dans la langue des rituels publics les plus vénérables. Les rituels des Saliens comme le Chant des Arvales défient l’analyse moderne comme «  ils déconcertaient déjà l’érudition antique  »15 et leur restitution est encore aujourd’hui un sujet de controverse. Quintilien estimait que «  ces formules [étaient] à peine intelligibles pour les prêtres qui les pronon[çaient] »16. D. Porte nie, dans ce contexte, la primauté du sacrifice, que nous avons vue affirmée par d’autres savants, et insiste sur le fait que « toute la religion reposait sur la force efficace du mot, à lui seul porteur de réussite ou d’échec. L’on ne concevait pas d’immolation ou de consultation des dieux sans une formule de prière. »17 Elle s’appuie, pour affirmer cela, sur Pline l’Ancien18, qui s’interroge sur le pouvoir des incantations : Ex homine remediorum primum maximae quaesionis et semper incertae est, polleantne aliquid uerba et incentamenta carminum. Quod si uerum est, homini acceptum fieri oportere conueniat ; sed uiritim sapientissimi cuiusque respuit fides, in uniuersum uero omniubus horis credit uita nec sentit. Quippe uictimas caedi sine precatione non uidetur referre aut deos rite consuli. Les prières archaïques dont la signification est devenue obscure sont conservées car « les Anciens étaient convaincus qu’il y avait des formules tellement efficaces et puissantes que si on les prononçait exactement et sans y changer un seul mot, le dieu ne pouvait pas résister à la demande de l’homme. »19 G. Freyburger confirme cela : « Si […] la Rome du IIIème siècle après J.-C. conservait scrupuleusement ces naïfs textes archaïques, à peine compréhensibles, ce ne pouvait être que parce qu’elle croyait en l’efficacité propre, magique de leurs termes »20. C’est cette puissance intrinsèque du langage qui permet à Acontius de séduire Cydippe, 15. D. Porte (496), Les donneurs de sacré, p. 34. 16. Quintilien (16), Institution Oratoire, I, 6, 40. 17. D. Porte (496), id., p. 35. 18. Pline l’Ancien, Histoire Naturelle, 28, 3 (traduit par M. Dubouchet, 1850) : « Au sujet des remèdes fournis par l’homme, il s’élève d’abord une grande question toujours pendante : Les paroles et les charmes magiques ont-ils quelque puissance ? S’ils en ont, il conviendra de les rapporter à l’homme. Consultés en particulier, les gens les plus sages n’en croient rien ; et cependant, en masse, les actes de tous les instants impliquent, sans qu’on s’en aperçoive, la croyance à cette puissance. Ainsi on pense que sans une formule de prière il serait inutile d’immoler des victimes, et que les dieux ne pourraient être convenablement consultés. ». 19. Fustel de Coulanges, La Cité Antique, p. 176. 20. G. freyburger (371), « Prière et Magie à Rome », p. 11.

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par un vœu involontaire, comme nous le rapporte Ovide dans les Héroïdes21. Virgile indique aussi, dans l’Enéide22, comment réduire la malveillante Junon à l’impuissance : Enéide, III, 427-429 Iunonis magnae primum prece adora ; Iunoni cane uota libens, dominamque Potentem supplicibus supera domis « Adore avant tout en tes prières la divinité de la grande Junon, offre avec empressement tes vœux à Junon, et fléchis la puissante souveraine par tes suppliantes offrandes. »

Fustel de Coulanges tente d’expliquer la genèse de cette croyance en l’efficacité absolue des formules rituelles : « Telle prière, composée de tels mots, avait été suivie du succès qu’on avait demandé ; c’était sans doute qu’elle avait été entendue du dieu, qu’elle avait eu de l’action sur lui, puisqu’il n’avait pas pu lui résister. On conserva donc les termes mystérieux et sacrés de cette prière. […] C’était une arme que l’homme emploierait contre l’inconstance des dieux. »23 Nous tenterons pour notre part de mettre en relation cet usage proprement poïétique du langage qui exerce sua ui une action sur le monde, et même une action surnaturelle, avec les théories orphiques et pythagoriciennes, qui nous semblent entretenir des liens étonnamment étroits avec la pensée et l’esthétique ovidiennes. Il existe donc deux univers différents pour nous, l’univers des poètes et le petit fragment de réalité historique que nous transmettent les textes que nous 21. ovide, Héroïdes, XX, 29-32 : « C’est par une adroite combinaison de mots, si toutefois il y a de l’art dans ce que j’ai fait, que l’ingénieux Amour t’a liée à moi. J’ai écrit sous sa dictée les paroles de nos fiançailles. ». te mihi compositis, siquid tamen egimus, a me.   Adstrinxit uerbis ingeniosus Amor. Dictatis ab eo feci sponsalia uerbis.   Consultoque fui iuris Amore uafer. ovide, Héroïdes, XXI, 212-213 : par la simple lecture des paroles inscrites par Acontius sur une pomme, Cydippe se trouve engagée par serment devant la déesse Diane :. (…) malum. Verba ferens doctis insidiosa notis. Quod quia sit lectum sancta praesente Diana. 22. Virgile, Enéide, III, 427. 23. Fustel de Coulanges, La Cité Antique, p. 195.

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conservons, et qui ne reflète qu’une part de ce qu’a été la vie des Romains. On peut supposer que leur pratique religieuse était plus variée, riche et libre qu’on ne l’a souvent admis à l’époque moderne, et que s’y mêlaient des types de prières variés. Notre projet est de comparer les prières des œuvres ovidiennes avec les prières historiques que l’on a pu conserver et qui nous donnent un aperçu de la pratique religieuse romaine. La tradition savante crédite certains auteurs d’une belle confiance et en discrédite d’autres. C’est ainsi que Caton se voit gratifier d’une sérieuse fidélité qui fait de lui une source précieuse pour l’historien, quand Ovide a dû attendre une époque assez récente pour qu’on accordât quelque crédit à ses descriptions rituelles et à ses prières. S. d’Elia considère les Fastes comme « des documents de seconde main », dans lesquels les informations recueillies ne sont pas critiquées, et refuse donc de les prendre en considération comme document historique24. Et lorsque G. Dumézil compose un ouvrage sur La religion romaine archaïque25, il ne propose pas d’entrée à Ovide dans l’index final, tout en le citant en plusieurs occasions. Toutefois les historiens manifestent la même méfiance envers tout témoignage mis en forme, hors des inscriptions. Ainsi K. Latte affirme-t-il que « la prudence est particulièrement de rigueur quand il s’agit d’utiliser des documents insérés dans la tradition annalistique. Ils ont été, pour l’essentiel, fabriqués par l’historien lui-même ou par le modèle auquel il les a directement empruntés, avec l’aide de formules religieuses ou juridiques destinées à donner une coloration archaïque »26. Même le témoignage de Tite-Live, pourtant accepté par G. Pighi27 ou par E. Norden28, est ici pris en défaut ou rejeté comme source historique. G. Dumézil discute les arguments apportés par K. Latte pour discréditer Tite-Live, et revalorise son témoignage29. Lorsque les historiens eux-mêmes sont contestés, il est inévitable que les poètes soient l’objet d’une suspicion encore plus grande. J. Champeaux résume le problème qui se pose au chercheur moderne : « Nous possédons très peu de textes liturgiques anciens, et ceux que nous avons nous ont été conservés (à un seul cas près – celui du Chant des Arvales dont le texte complet […] 24. S. D’Elia, Ovidio, Naples, 1959, p. 324 : « Si tratta di notizie di seconda mano […] le notizie raccolte non sono vagliate. ». 25. G. Dumézil (352), La religion romaine archaïque, 1987. 26. cité par G. Dumézil, ibid. p. 104. 27. G. B. Pighi (703), La metrica latina, 1968. 28. E. Norden (470), Aus altrömischen Priesterbüchern, Leipzig, 1939. 29. G. Dumézil (352), ibid, p. 107.

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nous a été transmis par un document épigraphique – Acta de 218, CIL, VI, 2104a, I 32-38) non par des sources sacerdotales, mais par des sources littéraires. La conséquence, paradoxale, est que plus le rite est exceptionnel, mieux nous connaissons la prière qui l’accompagnait, plus les écrivains ont pris soin de nous la transmettre. »30 Ce verbe, ‘transmettre’, serait à nuancer, tant est grande la part de la réécriture personnelle dans les œuvres littéraires, même chez Tite-Live, comme de nombreux auteurs l’ont montré. J. Champeaux déplore qu’en revanche « les formules courantes, récitées par les pontifes et les autres prêtres dans les liturgies ordinaires, nous ne les [ayons] plus »31 et qu’ainsi nous échappe « le quotidien, public et privé, de la prière romaine. »32 Pourtant nous verrons que les œuvres d’Ovide, et d’autres poètes, ne sont pas si fantaisistes qu’une certaine tradition savante l’a prétendu, et que « la terrible gaminerie d’Ovide » que fustigeait R. Pichon33 n’est peut-être pas si puérile et joueuse qu’on l’a écrit. Peu fourni est donc le corpus des prières cultuelles qui nous ont été transmises, si l’on exclut celles conservées par le truchement d’œuvres littéraires, qu’il s’agisse des écrits de Caton ou de Tite-Live. On a amplement montré que la fidélité historique de Tite-Live était toute relative, surtout lors de la retranscription de données relevant de l’oralité, et qu’on se devait d’être prudent dans l’exploitation de ses informations. Les prières catoniennes sont généralement considérées comme plus fidèles. Serait-ce qu’elles sont plus obscures ? Avant d’aborder le corpus ovidien, nous devrons donc au préalable donner un aperçu du corpus dit « historique » qui a servi de pierre de touche à nos analyses. Ces textes qui échappent dans une large mesure à la réécriture littéraire, nous les trouvons chez les antiquaires, les compilateurs et les savants, ainsi que dans les inscriptions. Ils ont été recollés par G. Pighi dans un inestimable ouvrage qui mêle les inscriptions aux textes littéraires anciens qu’il a considérés comme fréquentables par un historien. On en trouve aussi de nombreuses traductions, assorties de références précises, dans Le prêtres à Rome de D. Porte, qui a puisé à de multiples sources, parmi lesquelles sont privilégiés Varron, Verius Flaccus, Festus, Aulu-Gelle, Macrobe, Servius le grammairien, à côté de Cicéron, Caton, Tite-Live, Pline, Plutarque, Cassius Dion, Denys d’Halicarnasse ou Quintilien. L’autre source majeure sont les poètes34. 30. J. Champeaux (324), La prière du Romain, p. 268. 31. ibid. 32. ibid. 33. cité par R. Schilling (530), « Quel crédit accorder à Ovide… », p. 13. 34. Ce terme recouvre en réalité les écrivains de fiction, poètes mais aussi dramaturges et romanciers.

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Le premier écueil auquel nous sommes confrontés est donc celui des sources et nous sommes obligés de composer avec des textes variés, dont la langue présente des différences considérables, et dont nous devons tenter de faire une synthèse permettant d’identifier une pierre de touche à laquelle évaluer l’œuvre d’Ovide. Le deuxième problème vient de la diversité extrême des regards que la recherche moderne pose sur la religion romaine. Les positions tenues sont parfois inconciliables et induisent des considérations opposées au sujet du phénomène précatif. Deux grandes écoles peuvent être schématiquement discernées, au sein desquelles coexistent toutefois de nombreuses nuances. La première tendrait à refuser à la religion romaine tout mysticisme et à nier, par voie de conséquence, toute prière personnelle et spontanée. Les innombrables exemples fournis par les textes littéraires seraient à rattacher à une tradition purement poétique, détachée de toute réalité sociologique. John Scheid écrit ainsi que « cette religion n’a rien à voir avec la foi, avec l’émotion, l’imagination ou la spéculation préalables et intimes de l’individu. »35 D. Porte confirme cette opinion en écrivant que « la religion romaine est une religion de vivants, non de futurs morts, de corps, non d’esprits, conçue pour organiser, sur terre, le modus vivendi d’une communauté face au monde divin, et tout entière orientée vers les exigences et les intérêts de la collectivité. »36 « De toute façon », poursuit-elle, « l’idée même d’un attachement sentimental aux divinités de Rome, d’une communication directe avec elles était, par essence, inconcevable. »37 « Quand bien même le croyant aurait ressenti le besoin de s’adresser directement aux dieux pour les supplier en cas de péril urgent, pour implorer leur bienfaisance envers sa famille, ses récoltes ou ses entreprises, il ne pouvait laisser libre cours à sa spontanéité créatrice, ou du moins n’attendait de sa prière improvisée aucun résultat tangible. Certes poésie et théâtre offrent de nombreux témoignages d’une prière impromptue qui cherchait à atteindre l’obscur et redoutable séjour des dieux. L’on savait bien pourtant que l’action divine était déclanchée seulement par la prière exacte, prononcée selon sa formulation ancestrale, à la virgule près. »38 Certains savants nuancent cette opinion, tout en la partageant : sans revenir sur le ritualisme extrême de la religion romaine, ils ne rejettent pas les improvisations. Ainsi G. Dumézil écrivait-il que « dans le domaine privé, comme 35. J. Scheid (526), Religion et piété, p. 12. 36. D. Porte (496), Les donneurs de sacré, p. 10. 37. ibid. p. 12. 38. ibid. p. 16.

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pour le compte de l’Etat, la plupart des actes sacrés se font à des temps ou dans des circonstances prévus, parce que le ius sacrum les y requiert. D’autres sont improvisés, dans des formes régulières, certes, mais pour répondre à un besoin nouveau et sur l’initiative de celui ou ceux qui ont qualité pour en décider. »39 J. Le Gall, en revanche, réhabilite la religion personnelle : « Pourtant les Romains ont connu l’oraison jaculatoire, c’est-à-dire la prière spontanée, informelle, que le fidèle formule souvent en lui-même sans la prononcer à haute voix. Quelques expressions comme Mehercle = par Hercule, dont l’usage avait érodé le sens au point d’en faire de simples interjections, avaient été à l’origine des invocations adressées à une divinité. »40 A la difficulté d’appréhender le fait religieux à Rome s’ajoute celle de distinguer entre des catégories que les Romains opposaient, et que toute époque a opposées en Europe, mais dont les critères de définition restent malaisés à établir. On oppose religion et superstition, ainsi que religion et magie. Nous nous attarderons ultérieurement sur le long et vif débat que nourrit toujours la thématique magique. Pour l’analyse du rapport entre superstition et religion, nous renvoyons à la discussion que J. Scheid41 consacre au sujet dans Religion et Piété à Rome sans partager toutefois toutes ses conclusions. Nous n’aborderons pas dans notre travail le problème de la ‘superstition’, qui ne nous paraît pas valide chez Ovide, lequel n’utilise jamais ce terme pour l’opposer à ce qui pourrait être l’orthodoxie religieuse et le juste comportement42. L’opposition entre religion et magie est tout aussi problématique. J. Annequin le concède : « La justice romaine, comme aujourd’hui l’historien, éprouvait en effet le plus grand mal à distinguer la magie et la religion. Renonçant à une définition de la magie, elle se contentait de condamner un certain nombre de pratiques suspectes. »43 Car c’est bien le champ des définitions notionnelles qui apparaît comme particulièrement glissant. J. Annequin critique la position d’E. Massonneau qui, dans sa thèse consacrée au crime de magie dans le droit romain, ne « considère que les pratiques reconnues comme magiques par les Romains eux-mêmes et laisse échapper, de ce fait, celles qui, pour faire légèrement partie de la religion, n’en sont pas moins magiques. »44 Or cette prudence d’E. Massonneau nous paraît salutaire, en 39. G. Dumézil (352), La religion romaine archaïque, p. 547. 40. J. Le Gall (448), La religion romaine, p. 41. 41. J. Scheid (526), Religion et Piété, p. 129sq. 42. A-M. Tupet (561), « Les pratiques magiques à la mort de Germanicus ». 43. J. Annequin (275), Recherches sur l’action magique, p. 13. 44. ibid. p. 14.

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raison même de l’absence de définition claire et acceptée par tous de la notion même de magie. L’idée de « sympathie universelle », de « cette nécessité qui préside à tout le corps des événements en les attachant les uns aux autres par une chaîne continue »45 semble commune à la religion et à la magie, et ne peut être retenue comme critère distinctif. De nombreux auteurs reprennent la distinction frazérienne qui se fonde sur l’opposition entre coercition (pour la magie) et liberté divine (pour la religion). Suivant G. Freyburger, « nous distinguerons […] avec N. Turchi et R. Schilling d’une part ce que nous appellerons la magie en tant que telle, c’est-à-dire la tentative de l’orant de soumettre les dieux à sa volonté (dans le cadre de la religion privée ou dans celui de la religion officielle), tentative qui affleure encore dans certains rites archaïques ; d’autre part la magie vue par les Romains, c’est-à-dire la même tentative de s’imposer aux dieux, mais en dehors du cadre de la religion officielle »46. J. Annequin fait une proposition intéressante, qui peut apparaître comme une modulation nuancée de l’idée frazérienne de coercition. « Le but de la magie », écrit-elle, « est la recherche du pouvoir ». Cette affirmation justifie l’importance de l’incantation dans les rites magiques, car « le pouvoir, c’est le verbe. Le logos, au centre de toutes les théories philosophiques, est le véritable médiateur entre la créature et son créateur. »47 Mais le reste de son étude montre que ce souci d’efficacité et de pouvoir n’épargne pas la religion, et que cette dernière partage avec la magie une grande part de ses rituels, de ses prières, de sa liturgie. La question initiale se pose alors à nouveau : comment les distinguer ? La frontière entre les deux paraît fuyante, alors même que certaines divinités sont définies comme magiciennes, telle Isis ou Cybèle48. Selon M. Garcia-Tejeiro, « nous avons tous une idée approximative de ce qu’est la magie, et nous utilisons ce nom pour évoquer certaines pratiques et certains rites qui aspirent à atteindre des buts dépassant notre compréhension. Si nous essayons de définir la magie scientifiquement, nous rencontrons de grandes difficultés. »49 Nous abritant derrière une prudente réserve, nous ne considèrerons comme magiques que les rites ou prières identifiés comme tels par Ovide, et nous intègrerons le reste dans le fait religieux pris dans 45. Corpus Hermeticum, X, 22. 46. G. Freyburger (371), « Prières et Magie à Rome », p. 7. 47. J. Annequin (275), Recherches sur l’action magique..., p. 25. 48. cf. Apulée, Métamorphoses, XI, 53. 49. M. Garcia-Tejeiro (385), « Religion and Magic », Kernos, 6, 1993, p. 123 : « We all have an approximative idea of what magic is, and we use this name to refer to certain practices and rites which aspire to obtain certain goals beyond our understanding. If we try to define magic scientifically, we meet with great difficulties. ».

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une définition large. La prudence s’impose en effet car, comme le rappelle J. Rudhardt50, « celui qui étudie une religion antique rencontre une difficulté fondamentale : il peut en énumérer les dieux, en recenser les croyances, en analyser les rites, mais comme il ne croit pas à l’existence de ces dieux, à la vérité de ces croyances, ni à l’efficacité de ces rites, ils lui demeurent étrangers et, dans cette étrangeté, incompréhensibles. » La frontière est à la fois floue et perméable qui sépare à Rome le rituel ancestral de la magie. Les grands et anciens rituels, dont la dimension symbolique se perdait parfois en des détails incompris, permettaient d’établir un lien (*lig-) entre les dieux et la communauté des hommes. La magie se fonde elle aussi - et c’est le point central de tout ésotérisme - sur la tentative de compréhension - et de domination - de ces liens profonds qu’on sent unir les diverses forces de la nature. De nombreux rituels ésotériques ou magiques ont recours à deux procédés pour attirer l’univers dans le champ clos de leur influence : le symbole et la métonymie. Tels sont les procédés auxquels ont recours les frères Arvales lorsqu’ils se passent de main en main, d’abord de droite à gauche puis de gauche à droite, des épis de blé sec puis des épis de blé vert. La dimension symbolique du geste et des objets choisis est patente, mais le grand respect voué à l’ancienneté de la sodalité a empêché qu’on taxât son rituel de l’infâmant qualificatif de magique. Il apparaît pourtant étrange de renier à tout rituel une dimension magique qui seule peut justifier son existence même. A partir du moment où l’on accepte l’idée qu’un mot ou un geste puisse avoir un effet particulier autre que son effet concret et immédiat, on présuppose l’existence de liens imperceptibles mais bien réels entre les éléments, d’une interpénétration du divin et de l’humain, d’un réseau invisible qui relierait toutes choses. Le fait même de respecter un rituel, dont les gestes n’auraient d’efficacité que symbolique et différée, fait entrer l’officiant dans le vaste domaine de la magie. La dimension symbolique de la gestuelle religieuse est patente dans de nombreux rituels romains. Lors des sacrifices par exemple, les victimes étaient consacrées au moyen d’une farine sacrée que confectionnaient les Vestales elles-mêmes, en broyant sous les meules du sanctuaire des épis que les trois plus âgées d’entre elles étaient allées cueillir la nuit, entre le 7 et le 14 mai (D. Porte, les donneurs de Sacré, p. 32). Elles y ajoutaient du sel grillé (sal coctum) et du sel dissous (muries), cuits dans un pot d’argile, ainsi que de l’eau puisée à la source des Camènes et rapportée dans une amphore à fond pointu, le futtile, qui jamais ne devait entrer en contact avec le sol. Tous ces ingrédients étaient cuits dans un moule d’argile dont le couvercle scellé devait être brisé pour que fût ensuite réduit 50. J. Rudhardt (518), « Sur la possibilité de comprendre une religion antique », p. 189.

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en poudre le gâteau qu’il contenait (Servius, S.B., 8 ; 82). La fabrication de la mola salsa qui vient d’être décrite a de nombreux points communs avec un rituel magique. Il est très malaisé de définir avec précision ce qu’est la magie, et ce qui relève de son domaine. A-M Tupet51 oppose, à la suite de A. Bard dont elle reprend les propos, le religieux et le magique comme on oppose le bon grain et l’ivraie (A. Barb, The survival of magic arts, Ethnos, 1956, p. 1 : « Il n’est pas toujours aisé de tirer une ligne entre le bon et le mauvais, entre le magique et le religieux ») et elle affirme que « les lois simplistes de la magie, produits d’une mentalité puérile, restent sans rapport avec la réalité. […] Elles se résument à peu de choses : c’est d’abord la loi d’analogie, de sympathie ou de similitude, selon laquelle le semblable engendre le semblable. Elle fonde toutes les opérations inspirées par le symbolisme » (p. 10). Et de longs paragraphes suivent qui critiquent l’absence de méthode qui présiderait aux rites magiques. Il ne nous paraît pas recevable de considérer comme « simpliste » et « puéril » le jeu des symboles et des analogies. Le symbole est ce lien que l’esprit tisse entre des réalités distinctes et en apparence inconciliables, c’est la recherche d’alliances mystérieuses et secrètes qui compenseraient l’éclatement disparate du monde. Cette attitude révèle un esprit adulte, qui s’oppose à l’esprit d’enfance, naïf et donc acceptant justement le monde tel qu’il se donne. La recherche d’une cohérence par-delà la disparité des formes est le fondement de toute foi religieuse et une des justifications de la croyance au divin. A-M Tupet affirme que « dans la mesure où la divinité peut accomplir n’importe quel miracle au gré de sa volonté et par sa simple intention, et où elle le réalise une seule fois, dans des circonstances particulières, le merveilleux divin, loin d’être nécessairement de nature magique, doit plutôt être considéré comme une manifestation opposée, celle d’une divinité exerçant librement son pouvoir sans contrainte […] » (A-M. Tupet, p. XI). Il semble tout d’abord contestable que les dieux antiques pussent exercer leur pouvoir « par leur simple intention ». Il apparaît au contraire qu’ils ont recours pour la plupart à des procédés, tels que ceux qu’A-M. Tupet reconnaît à la Circé magicienne. Ni les dieux grecs, ni les dieux romains ne sont omnipotents au sens du dieu unique des monothéismes ; ils ne créent pas ex nihilo. Il suffit pour s’en convaincre de mettre en regard le récit de la Genèse et celui, parallèle, de la Création de Pandore par Zeus et les autres grands dieux du Panthéon grec. Si d’un côté on trouve une création absolue (voir Genèse I, 27), on lit de l’autre : « Ainsi parla, avec un grand rire, le père 51. Tupet A-M. (564), La magie dans la Poésie latine, p. 9.

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des hommes et des dieux ; puis il donna ses ordres : l’illustre Héphaïstos devait sur-le-champ pétrir de la terre en la mouillant, la douer de la voix et de la forme d’un être humain, la former à l’image des déesses immortelles, avec le charme d’une belle jeune fille. […] Ainsi parla Zeus, fils de Chronos, et les dieux obéirent à leur souverain ; sur-le-champ, l’illustre Héphaïstos modela en terre l’image d’une pudique jeune fille » (Hésiode, Les Travaux et les Jours, traduction de P. Walz). La ceinture d’Aphrodite matérialise dans l’Iliade le pouvoir de séduction de la déesse, ce qui laisse à penser que la puissance divine s’appuie sur des objets qui la supportent et la rendent efficiente. Les déplacements des dieux dans l’espace sont aussi marqués du sceau de la magie : quelle différence entre les chaussures ailées de Mercure et le cheval merveilleux de Bellerophon ? Quelle différence encore entre le char d’Apollon et celui de Médée, ou entre les brumes qui dissimulent les divinités aux yeux des hommes et les vagues fumées des magiciens ? Que dire encore de l’anneau de Gigès, du voile d’Harmonie ou du μολυ que donne Hermès à Ulysse ? Les contes et autres récits traditionnels ont reconnu dans ces objets des supports magiques que l’on retrouve dans toutes les mythologies et les ont réadaptés ; nombreux sont en effet les philtres, bagues et autres baguettes dont usent les héros (que l’on pense à la cape et à l’anneau du Niebelungen Lied) et les fées, derniers avatars d’une représentation anthropomorphique du divin. Ensuite, si la pratique magique se veut coercitive, et tend à ôter au dieu la liberté de refuser son aide, la plupart des prières latines essaient d’obtenir avec assurance l’acquiescement de la divinité.. On distingue donc généralement magie et religion, pour ce qui est de la prière et du rituel, non par leur forme, mais par l’intention, la disposition d’esprit et de cœur de l’orant : s’il s’abandonne avec confiance à la volonté libre du dieu, il est dans une démarche religieuse, mais s’il met sa confiance davantage dans sa propre puissance et dans les rites qu’il accomplit, alors il est plutôt dans une démarche magique. Mais dans les rituels comme celui de la dévotion par exemple, l’orant a une telle foi dans la réalisation de son vœu qu’il met sa vie dans la balance et l’offre d’abord, de manière à rendre le pacte irrémédiable. Dans toute religion, il est nécessaire de concéder un pouvoir propre à certains rites, sans que ceux-ci dussent être considérés comme magiques : le catholicisme confère par exemple au rite du baptême un pouvoir propre si toutes les conditions prescrites sont réunies. La volonté divine, si elle reste libre, s’exerce cependant nécessairement lors de ce rite. Le rite efficace peut être vu comme une sorte de pacte immuable entre les fidèles et la divinité. Dans tous les cas le problème des carmina et de leur puissance reste essentiel, et la cause n’est pas encore entendue…

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La prière, en tant qu’énoncé poétique codifié, efficace et destiné à dépasser, à transcender les frontières de l’humain, peut être un espace esthétique et thématique propice à une réflexion sur l’art et sur le sacré à la fois. En nous intéressant à ‘la poétique de la prière dans les œuvres d’Ovide’, nous avons poursuivi initialement deux objectifs principaux. Nous avons cherché à clarifier, à définir précisément la conception que le poète avait de son art, à travers une réflexion sur la frontière qui sépare le langage poétique du langage sacré. Dans le même temps que la langue des prières, avec son lexique, ses rythmes et ses codes, entretient des liens étroits avec la poésie, dans le cadre de laquelle elle s’inscrit et dont elle emprunte la puissance, dans le même temps la langue poétique d’Ovide se nourrit de la langue religieuse de Rome. Avant d’essayer de dégager les traits propres à l’écriture ovidienne, il convenait de présenter un tableau synthétique de la prière romaine historique, en rappelant ses caractéristiques stylistiques majeures. De ses œuvres de jeunesse jusqu’aux poèmes de l’exil – que nous n’intégrons pas à notre corpus en raison de leur dimension non fictionnelle, qui peut interférer sur l’élaboration du langage précatif et qui modifie les structures narratologiques et énonciatives – Ovide a progressivement construit une langue poétique propre, entremêlant en un savant opus mixtum des stylèmes religieux appartenant à la langue liturgique de l’époque augustéenne, et des stylèmes purement poétiques, parfois repris à la tradition littéraire, parfois personnels : il joue ainsi de la frontière qui sépare le carmen religieux du carmen poétique en faisant s’élever un chant nouveau, total, par lequel il sacralise la poésie, qui est bien alors la musique du monde, la musique créatrice, proprement poïétique, dont le souffle donne son sens, sa forme et sa beauté (forma) au monde52. Loin de jouer de manière parodique avec le discours religieux, qu’il subvertirait à des fins érotiques et humoristiques, comme l’ont si souvent écrit les partisans d’une élégie immanente, Ovide nous semble sublimer par un souffle sacré la poésie élégiaque de manière à en faire le chant qui rejoue la création du monde en même temps qu’il la dit. Ce n’est pas un chant centré sur l’homme et enfermé dans sa finitude, mais une élégie resacralisée, cherchant à faire résonner les cordes secrètes de la beauté du monde, qui lui donnent son sens et sa valeur. La prière poétique antique se distingue de la prière chrétienne en ceci qu’elle n’a pas de référent ontologique réel. La prière chrétienne s’appuie sur 52. L’élégie grecque avait cette dimension holistique, qu’elle a perdue à Rome avant qu’Ovide ne la restaure.

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la foi de l’orant en un Dieu qui Est (Je suis celui qui est). Or on a beaucoup réfléchi sur la foi que les hommes de l’Antiquité, et surtout les Romains, pouvaient avoir en leurs dieux. Gaston Boissier53 affirme que « la religion est tout à fait absente des lettres que s’écrivent Cicéron et ses amis. On n’y trouve pas un seul mot qui la rappelle. Elle tenait sans doute une certaine place dans la vie de ces grands personnages, qui appartenaient d’ordinaire à quelque collège de prêtres et qui accomplissaient régulièrement leurs fonctions sacrées, mais elle n’en avait pas dans leur cœur ; ils étaient presque tous sceptiques ou indifférents. […] Both reading and personal experience made Roman nobles clear-sighted about the social function of religion ». Mais J. H. Liebeschuetz, qui écrit ces mots en 1979, met en garde son lecteur de ne pas trop généraliser ce scepticisme. « Cicéron, César et Varron ne sont peut-être pas représentatifs de la nobilitas », et la majorité du peuple était très certainement beaucoup plus ouverte à la foi religieuse54. Quelle était la position d’Ovide ? Elle ressortira en filigrane des pages suivantes. Il est certain qu’il ne composait pas les prières des Fastes ou des Métamorphoses avec l’esprit d’Augustin rédigeant ses Confessions. Mais en s’adressant aux dieux, en définissant leur être et en les attirant vers l’existence par la nomination et l’invocation, en élaborant note par note une musique du sacré, Ovide ouvre, à travers les dieux et au-delà de leur potentielle inconsistance religieuse, une perspective qui s’inscrit dans une grande tradition logocratique et qui n’est pas étrangère au champ de réalisation premier de l’élégie. Car le discours sacré d’Ovide est auto-référentiel : si les dieux n’existent guère, s’ils se réduisent (mais c’est déjà beaucoup) à ce que les hommes disent d’eux, la Parole peut alors s’épanouir sans l’obstacle du réel, et elle peut retrouver la musique primordiale. « Ce sont les poètes », proclame Heidegger, « qui sont les créateurs de l’être, qui ont en charge les pulsations de lumière du logos »55. La poésie précative nous est apparue comme une métaphore de la création poétique, ou plus exactement comme son emblème, et c’est en ce sens que son étude, au-delà de son intérêt pour l’histoire religieuse et l’histoire de la littérature, s’est avérée particulièrement stimulante. La prière mettant en jeu au moins deux instances, l’émetteur et le destinataire, nous avons étudié les jeux de mise en scène qu’Ovide a choisis pour que s’échange cette parole si particulière. Ses contextes d’émission et les gestes qui l’accompagnent peuvent

53. G. Boissier, La religion romaine d’Auguste aux Antonins, Paris, 1874, Préface au tome I. 54. J. H. Liebeschuetz, Continuity and change…, Oxford, 1979, p. 33. 55. G. Steiner, Les Logocrates, L’Herne, Paris, 2003/2008, p. 38.

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aussi retenir l’attention, tout comme leurs effets sur son efficacité et sa composition poétique. Si l’on cherche à savoir dans quelle mesure Ovide innovait en ce qui concerne les lieux de prières, leurs circonstances et leurs occasions, il faut étudier conjointement l’histoire religieuse romaine, domaine dans lequel la recherche récente a considérablement évolué, ainsi que les œuvres littéraires antérieures ayant pu servir d’hypotexte, au sens genettien du terme, aux passages précatifs. En effet, il existe une tradition religieuse littéraire – fonctionnant selon des codes propres et distincts – parallèle à la tradition religieuse historique, et il faut parfois distinguer nettement les deux. Une fois le décor historique posé, l’organisation interne des poèmes ovidiens et l’agencement narratologique des prières sont étudiés selon deux angles d’approche : l’identité des orants et des destinataires des prières, et les modalités d’intégration des prières dans les œuvres. L’identité de l’orant conditionne en effet nécessairement l’expression de sa prière, de même que l’identité de son destinataire en modèle la forme comme le contenu. Des études synthétiques permettent de mettre en lumière les différences de traitement des orants et destinataires humains et divins, des hommes et des femmes, des individus et des groupes56. Survient alors la question de la piété de l’orant, et des relations qu’entretiennent les personnages impies et les hommes pieux avec la parole active qu’est la prière. Conformément à l’habitude établie de longue date par la tradition poétique, depuis Hésiode jusqu’à Virgile, Ovide se présente à travers son œuvre comme entretenant une relation privilégiée avec le monde des dieux. Il importe donc d’étudier de façon particulière la place du narrateur dans ses œuvres, et la spécificité de sa parole précative. Cette parole de prière est mise en scène selon un code propre, composé de constantes et de variantes, ce qui nous permet d’analyser le jeu des instances narratives ainsi que l’agencement du discours dans les passages précatifs (modalités d’ouverture et de clôture du discours, emploi de verbes déclaratifs spécifiques, oralité fictive, récit dans le récit). L’étude de l’encadrement narratif des prières mène nécessairement, par le choix des verbes de clôture, à répondre à la question de l’efficacité de la prière dans le monde poétique ovidien. 56. Pour ce qui est des œuvres ovidiennes, nous ne distinguerons pas systématiquement la prière adressée à un dieu de la prière adressée à un homme, comme la supplicatio. J. Goeken (« Pour une rhétorique de la prière grecque », avant-propos de La rhétorique de la prière dans l’Antiquité grecque, p. 11) donne un certain nombre d’éléments « sur lesquels se fonde une analyse rhétorique de la supplication » et qui « justifient le rapprochement instauré entre supplication et prière ».

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Après cette analyse de la mise en scène narratologique de la prière, il convenait d’étudier la mise en mots de la prière, en commençant par son élément le plus caractéristique, à savoir l’invocation. L’influence de la tradition cultuelle et de la tradition littéraire, plus précisément générique, sur le choix des épiclèses et leur modulation métrique est tout à fait sensible. Le goût ovidien se caractérise toutefois par une sorte de gourmandise nominative, un attrait poétique fort pour les noms dont il exploite le potentiel musical et sémiotique. L’usage des pronoms personnels en revanche, ainsi que le choix des verbes de prière est propre à Ovide, qui délimite son espace poétique entre fidélité cultuelle, intertextualité et originalité créatrice. Ovide est résolument moderne, et on ne compte plus les études portant sur la fluidité de son style, les métaphores liquides de son œuvre, la fragmentation ou la métamorphose comme incessant mouvement. Maxence Caron souligne que « la modernité spéculative dans laquelle nous vivons peut se définir par ce symptôme […], le symptôme d’une passion immédiatement bienveillante pour le multiple, le transitif, le fluent » (Pages, 2010). Cela est vrai, certainement, et Ovide est moderne. Mais il est aussi, en même temps et sans contradiction, purement Romain, et éternel à la fois. Nous avons délaissé les volutes, les pirouettes et ce que l’on a déjà tant admiré, pour nous attacher non aux variations, mais aux leitmotivs, non aux transitions et aux mouvements, mais aux structures et aux reprises, non aux métamorphoses mais aux identités et aux formes qui ne changent pas, alors qu’elles le pourraient. Ces formes sont avant tout verbales et l’essentiel de notre travail a consisté en analyses métriques et stylistiques, qui font le cœur de notre dernière partie. L’observation des verbes choisis par le poète pour porter ses prières est très intéressante, car elle permet d’illuminer un peu plus le mystère de la création poétique ovidienne. On voit qu’Ovide recrée un langage rituel personnel, fixe et récurrent, à partir d’une fusion d’éléments réels repris au rituel romain et de stylèmes poétiques qu’il partage parfois avec certains de ses prédécesseurs, et qui parfois lui sont propres. Ces études stylistiques sont complétées par des analyses métriques (sur la place et la métrique des mots longs et des intermots trochaïques et sur l’emploi de certains mots particuliers, comme les monosyllabes, les pyrrhiques ou les molosses) qui permettent de dégager un tableau précis des usages ovidiens. Car « tout est rythme » ; « le destin tout entier de l’homme est un rythme céleste, de même que toute œuvre d’art est un rythme unique, et tout prend élan depuis les lèvres poétiques du dieu, et là où l’esprit de l’homme s’ajointe à lui, ce sont les destins transfigurés dans lesquels se montre le génie : le dire poétique est une lutte pour la vérité… Et ainsi le dieu

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utilise le poète comme flèche, pour tirer de son arc le rythme… » Cette définition que Friedrich Hölderlin, cité par Walter Friedrich Otto dans L’esprit de la religion grecque ancienne, donne de l’art du poète apollinien peut correspondre à la poétique d’Ovide, qui croit en la sacralité de l’art et en sa capacité à reproduire l’écho de la Parole qui structure le monde. Ovide n’est pas seulement le poète léger dont on a si souvent loué, ou dénigré, la facilité ; il est aussi un homme ayant profondément réfléchi à la religion de son temps et au rapport étroit et mystérieux que la langue, et particulièrement la parole poétique, entretient avec le sacré. Loin de tourner la religion en dérision, il resacralise la poésie, et particulièrement la poésie élégiaque, en lui imprimant les marques de l’efficacité rituelle. L’élégie reprend alors sa fonction holistique et peut redevenir le « chant du monde »57. « Le poète prépare l’arrivée des dieux et institue ce qui demeure »58.

57. Ovide retrouve alors, par delà les restrictions formelles et thématiques de l’ère augustéenne, que la lecture moderne a sans doute exagérées, les principes hellénistiques de l’élégie, qui lie astronomie, physique, musique et poésie, dans un récit du monde qui est en même temps son explication. 58. E. Brito, Heidegger et l’Hymne du Sacré, 1999, p. 117.

Partie I Typologie de la prière Ovide face au miroir des prières romaines traditionnelles 

Si non omnia uates ficta reliquerunt

Ovide, Métamorphoses, XIII, 733-734

Chapitre Premier Corpus Romanum : quel modèle choisir ? Pour dresser un tableau des prières ovidiennes, il est nécessaire d’établir avant toute chose un corpus strict, et d’organiser le corpus ainsi défini en catégories. Or, comme le concède D. Aubriot, « il n’est jamais aisé, dans un texte, d’isoler nettement les prières. »1 S’ajoute à cela le fait que les Romains eux-mêmes peinaient à organiser structurellement leurs prières, quand ils entreprenaient de le faire. Ch. Guittard a étudié la classification des prières proposée par Pline2, qui se présente comme une classification tripartite. Mais il reconnaît que « toute classification des prières dans une religion donnée ne peut être qu’arbitraire. »3 C’est toutefois « une exigence qui s’impose à l’historien des religions »4. Peu de témoignages subsistent sur les codifications romaines de « la precatio dans l’organisation du culte »5. Seules les propositions de Pline l’Ancien et de Valère Maxime nous ont été conservées ; le reste, s’il a existé, est pour nous perdu. Nous renvoyons donc au passionnant article de Ch. Guittard pour une analyse approfondie de ces classifications. Nous ne saurions cependant les retenir pour le corpus ovidien, en raison de la chatoyance qu’il reçoit de sa forme littéraire. Ch. Guittard souligne, dans la conclusion de cet article, que la « présence de la flûte » – réaffirmée par Pline, observateur attentif des rites – lors des célébrations rituelles et de l’émission publique de prières, met en lumière « le caractère lyrique et musical de la prière romaine »6, caractère la rendant propre à devenir un objet poétique. La première distinction à opérer nous a paru devoir séparer culte public et culte privé, avec une acception particulière pour celui-ci. La notion de culte public recouvre les cérémonies officielles de la communauté, auxquelles participent des groupes nettement identifiés (pour lesquels nous avons parfois perdu les documents qui nous en auraient donné une pleine connaissance) et qui 1. D. Aubriot (281), « Prière et rhétorique », p. 148. 2. Ch. Guittard (410), « Pline et la classification des prières ». 3. ibid. p. 158. 4. ibidem. 5. ibid. p. 159. 6. ibid. p. 170.

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Partie I : Typologie de la prière

sont codifiées dans un rituel établi. Pour connaître ces rituels liturgiques, les Libri Pontificales, dans lesquels ils étaient consignés, nous font défaut. « C’est dans les Livres Pontificaux qu’étaient inclus les célèbres Indigitamenta, recueil indispensable précisant quelles divinités le fidèle devait invoquer dans chaque activité et dans chaque circonstance de sa vie. »7 Grâce aux antiquaires, tels Varron ou Aulu-Gelle, l’existence de Livres Anciens nous est connue, ainsi que celle des sodalités et autres collèges de prêtres. Mais rares sont les poètes qui les évoquent dans leurs œuvres. Il faudra aussi s’interroger sur l’identité du célébrant, en distinguant les rituels et prières collégiaux des rituels et prières individuels, et en se demandant si la distinction entre célébrant masculin et célébrant féminin est signifiante chez Ovide. Dans le cadre du culte privé, il faut distinguer entre culte domestique – lui aussi fermement codifié, mais réalisé par des particuliers, à la différence des cultes publics, effectués par des prêtres ou par des êtres temporairement revêtus d’une aura sacrée et autorisés par la communauté à célébrer au nom du groupe – et culte individuel, c’est-à-dire toute pratique religieuse vraiment personnelle, effectuée hors de tout cadre préétabli et laissant l’initiative à l’individu8. Nous nous intéresserons d’abord aux absences ovidiennes, à ces cérémonies importantes de la vie de la cité qui ne sont pas évoquées par le poète, ou pour lesquelles il ne nous livre pas de prière, puis nous observerons la manière dont il s’est approprié des cultes historiques. Ces distinctions n’affecteront pas nos études de détail, études lexicales, métriques, narratologiques ou stylistiques portant sur notre corpus, mais elles lui serviront d’introduction. Car nous pensons, comme D. Aubriot, que « la distinction entre prière cultuelle et prière libre n’a rien d’inéluctable », et que « vouloir fonder sur elle des différences dans la nature des prières exigerait une justification dont nous n’apercevons pas les fondements. »9 7. ibid. p. 167. 8. Là encore, ces distinctions ont pour raison d’être la clarté de la présentation de notre corpus et des remarques liminaires nécessaires, plus qu’une réelle influence sur la compostition même des prières, dont la forme, dans le cadre éminemment littéraire que sont les œuvres d’Ovide, est souvent justifiée par des considérations esthétiques. En effet, comme le rappelle D. Feeney au sujet des Fastes, dans son ouvrage Religion and Literature in Rome, « le poème d’Ovide est un amalgame de traditions religieuses, intellectuelles, et poétiques variées.  » (« Ovide poem is an amalgam of various religious, intellectual and poetical traditions. »). Même pour les Fastes, et a fortiori pour les autres œuvres, l’entrée religieuse ne peut, à elle seule, être structurante. 9. D. Aubriot (280), « Prière et conception religieuse en Grèce Ancienne », p. 25.



Chapitre Premier : Corpus Romanum : quel modèle choisir ? 33

De plus, une prière n’est peut-être jamais totalement libre, comme le rappelle justement H. Limet : « une prière, en fait, n’est jamais personnelle, même si elle est individuelle car, pour marquer son respect à l’égard de la divinité, pour la supplier, pour lui témoigner sa gratitude, le fidèle coule sa pensée dans les limites traditionnelles permises. »10 Si cette position paraît à nuancer, tant dans la réalité que dans le domaine littéraire, il est vrai toutefois qu’existent des formes fixes de la prière, intégrées par tout fidèle, et qu’il va utiliser pour donner à son invocation une forme lui paraissant convenable. Il nous faut donc évaluer la place des rituels publics dans notre corpus, afin de mettre en lumière tant ce qui, dans la religion de ses contemporains, a retenu l’attention d’Ovide, que ce qu’il a négligé. Nous ne nous intéresserons pas aux évocations rituelles d’une manière générale, mais seulement aux passages assortis d’une prière.

Les rituels publics romains au miroir de l’œuvre d’Ovide On pourrait s’attendre, considérant l’intérêt vif qu’Ovide porte aux rituels et aux problèmes liturgiques dans leur ensemble, à trouver dans son œuvre l’évocation des rituels majeurs de la religion romaine. Notre propos n’est pas ici de revenir sur la représentation exacte des rituels dans l’œuvre d’Ovide. Nous ne nous attacherons, comme nous l’avons dit, qu’aux rituels assortis d’une prière ou, à l’inverse et anecdotiquement, à certains rituels traditionnellement accompagnés d’une prière, d’un hymne ou d’un chant fameux et qu’Ovide passe sous silence.

Les textes de référence On ne trouve pas trace chez Ovide des chants des Saliens, des Luperques ou des Arvales11.

10. H. Limet, « L’expérience de la prière dans les grandes religions », Actes du Colloque de Louvain-la-Neuve et de Liège, 1978, p. 15, cité par D. Aubriot, « Prière et conception religieuse en Grèce Ancienne jusqu’à la fin du Vème siècle avant JC. », p. 25. 11. Leurs noms mêmes sont d’ailleurs à peine évoqués. Les Saliens, par exemple, n’apparaissent que deux fois dans les Fastes, au livre III, pour toute l’œuvre d’Ovide. Mais c’est une constante poétique, puisqu’ils n’apparaissent ni chez Catulle, ni chez Properce, ni chez Tibulle. On peut toutefois trouver trace de leur évocation dans le Salisubsuli de Catulle (17, Pankoucke).

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Partie I : Typologie de la prière

Les œuvres d’Ovide ne font pas de place aux antiques rituels latins confiés aux soins des principales sodalités de Rome. Les frères Arvales ne sont pas mentionnés, tandis que les Saliens ne sont que brièvement sollicités. Or ces deux sodalités sont restées célèbres pour leurs chants, qui aujourd’hui encore demeurent de passionnants témoignages des rites religieux comme du langage archaïques. Les Luperques sont mieux traités, mais seuls leurs gestes et la dimension physique de leur rituel intéressent le poète, qui se consacre aux origines mythiques de la sodalité12. L’antiquité de ces confréries religieuses s’alliait au conservatisme romain, épris de pureté et de perfection, pour laisser dans les rituels un écho des anciens temps. Voici les textes restitués du chant des Arvales et de l’hymne des Saliens : Chant des Arvales13 : e nos, Lases, iuuate e nos, Lases, iuuate e nos, Lases, iuuate Neue lue rue, Marmar, suis incurrere in pleore Neue lue rue, Marmar, suis incurrere in pleore Neue lue rue, Marmar, suis incurrere in pleore Satur fu, fere Mars, limen sali, sta ber ber, Satur fu, fere Mars, limen sali, sta ber ber, Satur fu, fere Mars, limen sali, sta ber ber, Semunis alternei aduocapit conctos Semunis alternei aduocapit conctos Semunis alternei aduocapit conctos E nos, Marmor, iuuato, E nos, Marmor, iuuato, E nos, Marmor, iuuato, triumpe, triumpe ! triumpe, triumpe ! triumpe, triumpe ! « Aidez-nous, ô Lares, aidez-nous, ô Lares, aidez-nous, ô Lares ! Mars, ô Mars, ne laisse pas dissolution et destruction fondre sur le peuple ! Mars, 12. L’ouverture même des Fastes laissait présager la place qu’y occuperait l’étiologie : Tēmpŏră cūm cāusīs Lătĭūm dīgēstă pĕr ānnūm. Lapsaque sub terras ortaque signa canam. « Les fêtes qui jalonnent l’année romaine et leurs origines, les constellations qui glissent sous l’horizon ou qui se lèvent, voilà ce que je vais chanter. ». 13. Voir G. B. Pighi (703) ou D. Porte (496) p. 34.



Chapitre Premier : Corpus Romanum : quel modèle choisir ? 35 ô Mars, ne laisse pas dissolution et destruction fondre sur le peuple ! Mars, ô Mars, ne laisse pas dissolution et destruction fondre sur le peuple ! Sois rassasié, sauvage Mars ; saute à la frontière, prends position ! Sois rassasié, sauvage Mars ; saute à la frontière, prends position ! Sois rassasié, sauvage Mars ; saute à la frontière, prends position ! Vous invoquerez tour à tour les Semones, tous ensemble. Vous invoquerez tour à tour les Semones, tous ensemble. Vous invoquerez tour à tour les Semones, tous ensemble. Aide-nous, Mars, ô Mars ! Aide-nous, Mars, ô Mars ! Aide-nous, Mars, ô Mars ! Victoire ! Victoire ! Victoire ! Victoire ! Victoire ! Victoire !14 »

Hymne des Saliens : O Zuel ad oreso omnia uerom ad patulcie cosmis es ianeos ianes es duonos ceros es manos po meliosom regom Quonne tonas Leucesie prai tet tremonti quot ibei tet dinei audiisont tonase «  Glorieux Consévius, fais tourner toutes choses, Patulcius  ; tu es l’unique, tu es le portier, Janus ; tu es le bon Créateur, le bon Janus. Il viendra, de loin, le meilleur des rois. Lorsque tu tonnes, dieu de la lumière, devant toi tremblent tous les dieux qui t’ont entendu là tonner15. »

On comprend que de tels chants soient difficilement adaptables au cadre poétique que s’était choisi Ovide. Et Quintilien nous apprend que même si « ces formules sont à peine intelligibles pour les prêtres qui les prononcent, […] le scrupule religieux en bannit toute modification. »16 Une traduction poétique paraissait donc appropriée, tant en raison de la sacralité de la formule, que de son obscurité. Les frères Arvales étaient de plus voués à Dea Dia17 et s’adressaient dans leur prière aux Semones, divinités qui n’apparaissent pas

14. traduction R. Schilling, édition du texte John Scheid (Corpus de prières grecques et romaines, Brepols). 15. édition et traduction L. Havet, avec les corrections de G. Capdeville et G. B. Pighi (Corpus de prières grecques et romaines, Brepols). 16. Quintilien (16), Institution oratoire, 1, 6, 60. 17. D. Porte (496), Les donneurs de sacré, p. 107.

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dans les œuvres d’Ovide. Toutefois, on peut penser que certaines formules récurrentes dans les prières ovidiennes reprennent des stylèmes de ces chants. D’autres prières traditionnelles, si elles ne sont pas reprises textuellement, servent cependant de référent stylistique aux prières des Fastes. Leur analyse succincte peut permettre d’identifier des stylèmes précatifs dont nous trouverons des échos chez Ovide et qui sont autant de marqueurs conférant aux prières ovidiennes une couleur religieuse et un vernis traditionnel. Quelques rituels célèbres auraient pu trouver leur place dans l’œuvre ovidienne, et en sont pourtant absents. Nous pensons en particulier à la prière d’euocatio - qui s’inscrit dans le cadre d’un rituel visant à attirer à Rome une divinité présente dans une autre cité -, à celle de deuotio, par laquelle un général offre sa vie aux dieux en échange du salut de la cité et de la victoire de son armée18, et à un exemple de prière ponctuelle adressée à un dieu lors d’une cérémonie particulière. Voici le texte de la prière de lustration que l’on trouve chez Caton, adressée au dieu Mars19 : Mars pater, te precor quaesoque, uti sies uolens propitius mihi domo familiaeque nostrae. Quoius rei ergo agrum terram fundum meum suouetaurilia circumagi iussi, uti tu morbos uisos inuisosque, uiduertatem uastitudinemque, calamitates intemperiasque prohibessis defendas auerruncesque, utique tu fruges frumenta, uineta uirgultaque, grandire beneque euenire siris, pastores pecuaque salua seruassis, duisque bonam salutem ualetudinemque mihi domo familiaeque nostrae : 18. Il est à signaler qu’aucun de ces deux rituels n’apparaît chez Ovide, qui aurait pourtant pu être sensible à leur dimension spectaculaire comme à leur solennité. Les termes eux-mêmes de deuotio et d’euocatio ne sont pas cités dans son œuvre. 19. Caton l’Ancien, De Agricultura, 141, éd. R. Goujard, Paris, 1975.



Chapitre Premier : Corpus Romanum : quel modèle choisir ? 37 harunce rerum ergo, fundi terrae agrique mei lustrandi lustrique faciendi ergo, sicuti dixi macte hisce suouetaurilibus lactentibus immolandis esto20. « Mars Père, je te prie et t’implore d’être bienveillant et propice à moimême, à ma maison et à nos gens ; et pour cette raison j’ai donné l’ordre que tout autour de mon champ, ma terre et mon fonds on mène des suovétauriles, pour que, toi, tu écartes repousses et éloignes les maladies visibles et invisibles, la stérilité et la dévastation, les calamités et les intempéries et pour que, toi, tu permettes aux récoltes, aux céréales, aux vines et aux jeunes pousses de grandir et d’arriver à bonne fin, que tu préservez saufs les bergers et les troupeaux et accordes une bonne sauvegarde et une bonne santé à moi-même, ma maison et nos gens ; en raison de ces actes, en raison de la lustration et de l’accomplissement de la lustration de mon fonds, ma terre et mon champ, comme je l’ai dit, sois honoré par l’immolation des suovétauriles de lait que voici. »

Elle repose sur un réseau de procédés stylistiques qui transforment le texte en un canevas nettement structuré selon une armature fixe et non originale sur laquelle sont brodées des variations. Une variation propre à cette prière est par exemple le lexique technique du monde agricole, tandis qu’on retrouve des constantes de l’écriture précative, telles que les répétitions, phoniques ou syntagmatiques. Cette prière est caractérisée par une « redondance verbale fondée sur la synonymie (precor quaesoque ; […] defendas auerrunces ; […] salutem ualetudinemque) »21 et « organisée en rythmes binaires, voire ternaires. Et lorsque l’on semble avoir un groupe quaternaire, les jeux phoniques invitent à un double recoupement qui fait de l’ensemble une séquence binaire complexe : ainsi en va-t-il dans l’énumération fruges frumentaque uineta uirgultaque où une allitération contrastive (fru- / -ui-) invite à coupler les mots deux par deux. »22 Les récurrences phoniques sont un des éléments de structuration caractéristiques de l’écriture précative, qui joue ainsi du martèlement des sons pour s’arrondir en cercle magique. L’orant semble psalmodier un

20. Texte cité par Caton, Agr., 141 ; Festus, 230 ; J. Dangel (335), « Le carmen latin », p. 116. 21. J. Dangel (335), ibid., p. 116. 22. idem, p. 117.

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texte où les échos sont nombreux, que créent les allitérations, les rimes, assonances ou homéotéleutes23. Similaire est la procédure langagière et expressive de cette prière de deuotio, même si l’on y remarque certains agencements plus élaborés : Tite-Live, VIII, 9,4-8 (Deuotio) : Iane, Juppiter/, Mars pater/, Quirine, Bellona, Lares/, diui Nouensiles, di Indigetes /, diui quorum est potestas nostrorum hostiumque /, dique Manes/, uos precor, ueneror, ueniam peto feroque / uti populo Romano Quiritium / uim uictoriam prosperetis  / hostesque populi Romani Quiritium /terrore formidine morteque adficiatis /. Sicut uerbis nuncupaui /, ita pro re publica populi Romani Quiritium /, exercitu, legionibus, auxiliis  / populi Romani Quiritium / legiones auxiliaque hostium mecum / deis Manibus Tellurique / deuoueo. «  Janus, Jupiter, Mars père, Quirinus, Bellone, Lares, Divinités Nouvelles, Dieux Indigetes, Divinités qui avez puissance sur nous et nos ennemis et Dieux Mânes, je vous prie et implore, supplie la supplique et propose qu’au peuple Romain des Quirites vous accordiez en grâce force, victoire et que les ennemis du peuple Romain des Quirites, vous les frappiez de terreur, d’effroi et de trépas. Comme je le déclare par ces mots, ainsi pour l’Etat du peuple Romain des Quirites, l’armée, les légions, les auxiliaires du peuple romain des Quirites, je voue les légions et les auxiliaires de l’ennemi, avec moi, aux Dieux Mânes et à la Terre24. »

Dans cette invocation de plusieurs divinités, l’orator – qui prie et argumente en même temps, conformément aux jeux polysémiques permis par le radical de orare – utilise les ressources musicales qu’offre une structuration rythmique fondée sur les reprises phoniques, de l’allitération à la rime, ainsi que sur les associations binaires ou ternaires25. « Tous ces procédés de redondance ou d’intensification verbale », écrit A. Deremetz dans son étude sur « la prière en représentation à Rome »26, « sont censés augmenter la force contraignante de la demande ou de l’engagement. De ce point de vue, ils relèvent […] de deux des fonctions mises en évidence par Jakobson, la phatique et la conative, puisqu’ils expriment l’effort auquel le 23. Nous en avons indiqué quelques uns en gras dans le texte de la prière. 24. J. Dangel (335), « Le Carmen Latin », p. 117. 25. Pour une étude lumineuse de ces structures, nous renvoyons à J. Dangel (335), ibid., p. 116-117. 26. A. Deremetz (336), « La prière en représentation à Rome », p. 152.



Chapitre Premier : Corpus Romanum : quel modèle choisir ? 39

locuteur se livre pour accroître l’intensité de l’action que la prière exerce sur son interlocuteur divin. » Nous voyons apparaître dans cette deuotio la formule de requête complète : precor, ueneror, ueniam peto feroque, que certains savants, comme K. Latte, avaient contestée. G. Dumézil a montré que « l’utilisation conjointe des verbes petere et ferre répondait à des raisons qui tenaient à la nature même, exceptionnellement contraignante, du rituel »27. Dans « la procédure extraordinaire, violente et hâtive, qu’est la deuotio, », explique G. Dumézil28, « […] l’orant ne veut pas douter que les dieux ne l’exaucent, ou, surtout, il n’attend d’autre signe de leur acceptation que […] sa propre mort, payant en quelque sorte le prix d’avance dans une transaction qui ne peut pas, qui ne doit pas être un marché de dupes ; il ne dit pas seulement ‘Je demande votre acceptation, votre faveur’, mais bien ‘Je demande et j’emporte, j’obtiens déjà, j’en suis sûr, votre acceptation votre faveur.’ » De cette formulation, on ne trouve pas trace dans l’œuvre ovidienne, alors qu’elle parcourt – parfois sous une forme abrégée – les prières traditionnelles de la religion romaine, comme la prière à Mars ou la precatio Moeris : precatio Moeris facta ab Auguste k. iun. noctu in Campo ludis saecularibus quintis29 Moerae ! uti uobis in illeis libris scriptum est, quarumque rerum ergo quodque melius siet populo Romano Quiritibus, uobis nouem agnis feminis et nouem capris feminis propiis sacrum fiat, uos quaeso precorque, uti uos imperium maiestatemque populi Romani Quiritium duelli domique auxitis, utique …

La formulation complète, qui structure aussi l’euocatio deorum Carthagine facta citée plus loin, est organisée selon «  une disposition quaternaire (precor ueneror ueniam peto feroque) qui se subdivise en deux 27. A. Deremetz (336), ibid, p. 153. 28. G. dumézil (352), La Religion Romaine Archaïque, p. 104. 29. éd. G. B. Pighi.

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Partie I : Typologie de la prière

séquences unies en leur centre. En effet, tandis que deux verbes déponents (precor ueneror) sont opposés à deux formes actives (peto feroque), une allitération et un lien sémantique établissent un pont phonique et verbal de ueneror à ueniam. »30 Ces verbes de supplique sont développés le plus souvent par une « subordonnée complétive objet plus ou moins longuement étoffée. […] Or […] les phrases dont la trame syntaxique majeure repose sur le développement plus ou moins grossi de l’objet […] sont propres au meilleur commentaire explicatif et ont une valeur didactique autant que dogmatique »31. Quelques remarques s’imposent ici - qui seront applicables au style ovidien tel qu’il se met en scène dans les prières des œuvres de fiction. Souvent les requêtes sont formulées par une phrase unique sinuant en une succession de subordonnées complétives qui constituent la quasi-totalité de l’énoncé. Cette hypertrophie de l’objet du verbe dans la structure phrastique est caractéristique des phrases énonciatives à développement explicatif32. Il faut garder à l’esprit que le texte d’une prière rituelle doit être mémorisable, restituable aisément et compréhensible par l’assistance et le destinataire, ce qui justifie l’organisation structurelle et le martèlement phonique que constituent les reprises sonores et les répétitions verbales. Grande est donc la dimension oratoire de ce type d’énoncé. Dans les phrases à développement explicatif, « une ou plusieurs subordonnées, employées avec la fonction d’objet ou adossées voire apposées à l’objet, permettent à l’orateur de développer le contenu du procès. Chargé ainsi d’apporter au verbe le plus de renseignements possible, l’objet en parachève si bien le sens que la phrase paraît être construite uniquement en vue de commenter la portée exacte du verbe. » Les prières n’usent que de verbes performatifs (precor, obtestor, obsecror, uoueo…) qui nécessitent une définition du procès par leur objet. Cet objet peut suivre l’énonciation du verbe, selon le schéma le plus fréquent33, mais aussi le précéder, comme dans la prière de « dévouement » des ennemis34 :

30. J. Dangel (335), ibid., p. 117. 31. J. Dangel (335), ibid., p. 118. 32. Nous empruntons les analyses suivantes à J. Dangel, La phrase oratoire chez Tite-Live, Paris, Les Belles Lettres, 1982, p. 32-34. Des guillemets signalent les citations textuelles. 33. L’organisation verbale est alors dite centrifuge. Voir J. Dangel, ibid., p. 89-94. 34. Le texte est donné par Macrobe, Saturnales III, 9, 10-11, éd. J. Willis, Stuttgart, 1963. La traduction est reprise au Corpus des prières grecques et romaines.



Chapitre Premier : Corpus Romanum : quel modèle choisir ? 41 Dis pater, Veiouis, Manes, siue quo alio nomine fas est nominare ! ut omnes illam urbem Carthaginem exercitumque, quem ego me sentio dicere, fuga formidine terrore compleatis, quique aduersum legiones exercitumque nostrum arma telaque ferent ; uti uos eum exercitum eosque homines, urbes agrosque eorum, et qui in his locis regionibusque, agris urbibusue habitant, abducatis, lumine supero priuetis, exercitumque hostium, urbes agrosque eorum, quos me sentio dicere ; ut uos eas urbes agrosque, capita aetatesque eorum deuotas consecratasque habeatis, ollis legibus quibus quandoque sunt maxime hostes deuoti ; eosque ego uicarios pro me fide magistratuque meo pro populo Romano exercitibus legionibusque nostris, do deuoueo, ut me meamque fidem imperiumque, legiones exercitumque nostrum, qui in his rebus gerendis sunt, bene saluos siritis esse. «  Dis Père, Véiovis, Mânes, ou quel que soit l’autre nom sous lequel il est conforme au droit religieux de vous appeler, inspirez à tous, à la ville que voilà, Carthage, et à l’armée que j’ai conscience de nommer, la fuite, la terreur et l’effroi, ainsi qu’à ceux qui prendront les armes et les traits contre nos légions et notre armée ; cette armée, ces ennemis et ces

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Partie I : Typologie de la prière hommes, leurs villes et leurs champs, et ceux qui habitent dans ces lieux et ces contrées, ces champs et ces villes, vous, emportez-les, privez-les de la lumière d’en haut ; l’armée des ennemis, leurs villes et leurs champs que j’ai conscience de nommer, ces villes et ces champs, ces personnes avec l’âge qui est le leur, vous, tenez-les pour voués et consacrés selon les règles par lesquelles un jour précisément les ennemis ont été voués. Moi, je les donne et les voue en remplacement, à la place de ma vie, de ma loyauté et de ma charge, à la place du peuple romain, de nos armées et de nos légions, afin que vous permettiez que ma vie, ma loyauté et mon pouvoir, nos légions et notre armée engagées dans ces opérations soient bien sains et saufs. Si vous accomplissez cela de telle faon que je le sache, en aie conscience et le comprenne, alors quel que soit celui qui aura accompli ce vœu et où que ce soit, que le sacrifice de trois moutons noirs soit réputé valable. Terre mère et toi Jupiter, je vous prends à témoin. »

« La répétition d’un même subordonnant, dont on approfondit le sens à chaque passage, est une technique propre à la phrase oratoire. Son rôle mnémotechnique et didactique est exploité […] dans le but d’informer le plus complètement possible ». Nous verrons un peu plus loin comment Ovide parvient à tirer parti de toutes ces composantes du carmen traditionnel et du style oratoire. Une autre formule est reprise avec diverses variantes dans la plupart des prières dont le texte nous a été conservé ; il s’agit de l’évocation du bénéficiaire commun de toutes ces requêtes : le peuple romain. On le retrouve partout35 : – ritus foederis feriendi : Rex, facisne me tu regium nuntium populi Romani Quiritium, uasa comitesque meos ?

– deditio luendae sponsionis : Quando hisce homines iniussu populi Romani Quiritium foedus ictum iri spoponderunt atque ob eam rem noxam nocuerunt

35. Ed. G. B. Pighi.



Chapitre Premier : Corpus Romanum : quel modèle choisir ? 43

– ritus bellum indicendi : quod populi Priscorum Latinorum hominesque Prisci Latini aduersus populum Romanum Quiritium fecerunt deliquerunt, quod populus Romanus Quiritium bellum cum Priscis Latinis iussit esse senatusque populi Romani Quiritium censuit consensit consciuit ut bellum cum Priscis Latinis fieret

– deuotio P. Deci Muris : Agedum, pontifex publicus populi Romani praei uerba, quibus me pro legionibus deuoueam

Cette même formule scande le développement de la precatio iunoni reginae, très proche de la precatio Moeris : – facto, a matronis praeeunte Agrippa supplicantibus IV non. iun. diu in Capitolio ludis saecularibus quintis36 Iuno Regina ! ast quid est quod melius siet populo Romano Quiritibus, nos matres familiae centum decem populi Romani Quiritium nuptae, genibus nixae, te, uti faxis, precamur oramus obsecramusque, uti tu imperium maiestatemque populi Romani Quiritium duelli domique auxis, utique semper Latinus obtemperassit, incolumitatem sempiternam, uictoriam, ualetudinem 36. éd. G. B. Pighi, De ludis saecularibus populi Romani Quiritium, Amsterdam, 1965, p. 157.

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Partie I : Typologie de la prière populo Romano Quiritibus duis, faueasque populo Romano Quiritibus legionibusque populi Romani Quiritium, remque publicam populi Romani Quiritium saluam serues maioremque faxis, uti sies uolens propitia populo Romano Quiritibus. Quindecimuiris sacris faciundis nobis domibus familiis. Haec matres familiae centum decem populi Romani Quiritium nuptae genibus nixae precamus, oramus obsecramusque « Junon Reine, s’il y a quelque chose qui soit mieux pour le peuple romain et les Quirites, permets que nous te priions, te sollicitions, nous, cent dix mères de famille du peuple romain et des Quirites, mariées, et t’adjurions pour que toi, tu augmentes l’empire du peuple romain et des Quirites, en temps de guerre et de paix, pour que toujours le Latin obéisse, que tu accordes une préservation perpétuelle, la victoire et la santé au peuple romain et aux Quirites, et favorises le peuple romain et les Quirites, et les légions du peuple romain et des Quirites, et que tu gardes l’Etat du peuple romain et des Quirites sauf et le rendes plus grand, et sois bienveillante et propice au peuple romain et aux Quirites, aux Quinze préposés aux cérémonies, à nous, nos maisons et nos gens. Voilà comment nous, cent dix mères de famille du peuple romain, mariées, agenouillées, nous te prions, te sollicitons et t’adjurons. »

Mais si l’on observe le corpus précatif ovidien, on ne trouve que deux mentions de la communauté. Au livre XV des Métamorphoses, le plus romain de l’ensemble de l’œuvre, Cipus, homme très-pieux et très-vertueux, prononce un vœu au bénéfice du peuple romain : Métamorphoses XV, 571-573 « quicquid, » ait « superi, monstro portenditur isto, seu laetum est//T, patriae //P laetum //H populoque Quirini, siue minax, mihi sit. » Viridique e caespite factas



Chapitre Premier : Corpus Romanum : quel modèle choisir ? 45 «  Ce qu’annoncent les dieux par un tel prodige, que ma patrie et le peuple de Quirinus en tirent bénéfice si c’est un événement heureux, que j’en sois la seule victime si c’est une menace. »

Dans les Fastes, c’est le narrateur lui-même qui demande à Janus, au début du poème, d’être favorable au peuple romain : Fastes I, 69-70 dēxtĕr ădēs //T pătrĭbūsquĕ //F tŭīs //H pŏpŭlōquĕ Quĭrīnī,   ēt rĕsĕrā nūtū // cāndĭdă tēmplă tŭō. « Sois propice à tes sénateurs et au peuple de Quirinus, et, d’un signe de tête, ouvre les temples étincelants. »

On aurait pu s’attendre, pourtant, à une plus forte présence de Rome dans les prières ovidiennes, et a fortiori dans celles de son calendrier rituel. Mais le poète - comme à son habitude - leurre notre attente et présente son récit sous un jour surprenant. On peut ainsi être étonné d’entendre, dans les Fastes, le flamine de Quirinus invoquer Robigo sans que jamais le nom de Rome ne soit prononcé37. De même, lorsqu’Auguste demande à Mars de l’assister au combat, il ne glorifie pas Rome victorieuse mais lui seul : Fastes V, 577 Tēmplă fĕrēs //T ēt mē // P uīctōrĕ uŏcābĕrĭs Ūltōr. « Tu obtiendras des temples, et grâce à moi, après ma victoire, tu seras appelé Vengeur. »

Seul Metellus prend des précautions pour que sa cité ne subisse pas les conséquences de son audace personnelle : Fastes VI, 452 Si scelus est, in me commissi poena redundet ;   Sit capitis damno // Rōmă sŏlūtă mĕī ! « Si c’est un crime, que la punition en retombe sur moi ; que Rome soit lavée de ce mal que je paierais de ma vie. »

Sur ce point, le contraste est donc très fort entre le texte ovidien et les référents stylistiques que constituent les prières traditionnelles, qui, d’une manière générale, sont tournées vers la collectivité nationale. 37. Fastes IV, 511-532.

Chapitre II Corpus ovidianum : aperçu typologique Typologie ovidienne : présentation De nombreux types d’énoncés précatifs sont représentés dans notre corpus. Tâchons de synthétiser ces données en établissant un classement, malgré les inconvénients de toute catégorisation trop rigide, et l’imprécision inévitable des critères de distinction. Il est en effet malaisé de proposer une classification des prières d’un poète, en raison de l’interpénétration de certaines catégories. Nous nous sommes donc fondée sur le sens le plus prégnant de chacune des invocations pour organiser notre corpus. Les distinctions opérées par Pline au livre 28 de son Histoire Naturelle, et étudiées par Ch.  Guittard dans l’article que nous avons déjà mentionné38, ne pourraient pas être reprises ici, en dépit de leur indéniable intérêt historique, car elles ne permettraient pas une étude assez fine de la pratique ovidienne. Pline répartissait les prières39 en « uerba impetritis  », «  uerba depulsoriis  » et «  commendationis  ».40 Modulant cette répartition, Ch. Guittard répartit « les prières en trois catégories » : « la precatio (prière de demande), le uotum (contrat avec la divinité) et le carmen (hymne en l’honneur des dieux). » Nous conserverons ces catégories, tout en les détaillant en sous-catégories, et en les complétant par quelques groupes mineurs qui ne leur sont pas superposables mais qui mettent en jeu des stylèmes comparables (serments, déplorations, souhaits…). Nous pouvons alors construire le tableau suivant à partir des 212 prières de notre corpus :

38. Ch. Guittard (410), « Pline et la classification des prières dans la religion romaine ». 39. Ch. Guittard (410), ibid. p. 157-158. 40. Pline l’Ancien, Histoire Naturelle, 28, 11.

48

Partie I : Typologie de la prière

Type de prière Vœu Hymne Demande / pétition variée (dont expiation) Demande d’aide/ faveur ; prière propitiatoire Demande de faveur pour son œuvre Demande de renseignements Prière longue au propos varié Prière amoureuse Plaintes Serment Malédiction Ordre Invitation Conseil Apostrophe Souhait TOTAL

Héroïdes Amours 3

1 4 6

Ars Métamor­ Fastes Ibis Amatoria phoses

1

6 5 20

6 5 5

4

21

17

1

1

10

2

38

4

12

6

2

3 2 4 5

1

1 1 1 2

1

86

90

1

1 4 1

1 2 27

6

1

1 2

3

Quelques précisions s’imposent. Les extraits ici appelés « prières » sont des textes précatifs composites, et qui font apparaître des stylèmes et des requêtes diversifiés. Lorsque la requête est plus aisée à cerner, qu’elle porte sur un objet unique, ou constitue un ensemble cohérent et bref, nous l’avons classée dans les pétitions simples, au sein desquelles il nous semble falloir distinguer entre les demandes diverses, les demandes de renseignements, les demandes d’aide ou de faveur et les demandes de faveur pour l’œuvre poétique entreprise par le poète ou par l’un de ses personnages. Pourquoi ne pas discriminer entre demande d’aide et demande de faveur ? Les deux pétitions étant fréquemment associées dans le même passage, voire dans le même vers, il nous paraissait difficile, et hautement artificiel, de les dissocier alors qu’elles semblent fondamentalement liées dans les textes.

Chapitre II : Corpus ovidianum : aperçu typologique 49



Nous avons regroupé sous le nom « uotum » les prières identifiées comme des vœux dans le texte lui-même41, mais aussi celles qui nous paraissaient être une sommation respectueuse par laquelle la divinité est engagée malgré elle dans un contrat dont les termes sont définis par l’orant42. Avant de proposer une analyse synthétique des stylèmes précatifs ovidiens, donnons un exemple, brièvement commenté, de chacun des types de prière que nous venons d’identifier, afin que leurs différences apparaissent.

Les Vœux Voici les extraits que nous plaçons dans cette catégorie : Héroïdes IV, 15-16   Phèdre souhaite que Cupidon embrase le cœur d’Hippolyte VI, 75-76 évocation des vœux d’Hypsipyle pour Jason XVIII, 203-204 Léandre demande à Héro de prier pour l’apaisement de la mer

Amours III, 2, 80

le narrateur veut favoriser une jeune fille aux jeux

Métamorphoses II, 692-694 Mercure déguisé adresse au berger Battus un vœu ironique IV, 370-372 Salmacis ne veut pas qu’Hermaphrodite soit séparé d’elle VIII, 350-351 Mopsus requiert l’aide de l’archer Apollon VIII, 707-710 Philémon et Baucis demandent à devenir prêtres XII, 201-203  Céné demande à Neptune de la transformer en homme XV, 571-573 Cipus prie les dieux de favoriser sa patrie 41. Et il faut remarquer ici qu’Ovide est bien plus souple que les savants modernes dans les délimitations de ses catégories. Le terme uotum est souvent utilisé pour qualifier des prières qui ne répondent pas aux critères choisis par la critique pour définir le vœu. Nous avons choisi d’intégrer systématiquement dans la catégorie des vœux les extraits dans lesquels ce terme apparaissait. 42. Il faut remarquer ici qu’Ovide est assez généreux dans l’attribution de cette étiquette.

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Partie I : Typologie de la prière

Fastes IV, 319-324 Claudia Quinta en appelle à Cybèle IV, 525-526 Célès prie Cérès d’entrer en sa demeure IV, 893-894 Enée demande la victoire à Jupiter V, 573-577 Mars est invoqué par Auguste VI, 159-162 Craniè chasse les Stryges VI, 449-452 Metellus sauve du feu les objets sacrés du temple de Vesta

L’aventure de Claudia Quinta, relatée au livre IV des Fastes, offre une formulation votive intéressante, et propre, selon nous, à illustrer cette prière particulière. C’est un réel pacte que Claudia Quinta contracte avec la Grande Mère des Dieux lors de sa réception à Rome. Les conditions en sont définies au moyen d’un balancement symétrique qu’orchestre la conjonction si construite avec l’indicatif : Fastes IV 321-324 Cāstă nĕgōr ://T sī tū //P dāmnās,//H mĕrŭīssĕ fătēbōr ;   Mōrtĕ lŭām //T pōenās // iūdĭcĕ uīctă dĕā. Sēd sī crīmĕn ăbēst,//P tū nōstrāe pīgnŏră uītāe   Rē dăbĭs ēt cāstās // cāstă sĕquērĕ mănūs. «  On prétend que je ne suis pas chaste  : si toi, tu me condamnes, je confesserai ma faute ; convaincue par le jugement d’une déesse, je m’acquitterai de ma faute par la mort. Mais s’il n’y a pas faute, tu donneras par cet acte une preuve de mon innocence et, chaste toi-même, tu suivras de chastes mains. »

L’origine du drame est très clairement identifiée : elle est la mise en doute par ses concitoyens de la pureté de mœurs de Claudia Quinta43. Cette dernière insiste sur ce thème : l’adjectif casta ouvre le vers 321 et la calomnie en occupe la première partie, résumée en une formule d’une densité exemplaire. La césure trihémimère en marque la borne. Et ce même adjectif est repris dans la clôture du contrat, encadrant en polyptote la césure centrale du vers (cāstās //P cāstă). L’alternative est simple : ou Claudia est chaste ou elle est corrompue. C’est cette simplicité, et la confiance de Claudia en sa propre moralité, qui justifient l’emploi de l’indicatif dans les subordonnées comme dans les 43. Cet épisode ovidien a été très finement analysé par D. Porte dans son article « Claudia Quinta et la cérémonie de la lavatio dans les Fastes » (482), p. 93-103.



Chapitre II : Corpus ovidianum : aperçu typologique 51

principales. L’aspect comminatoire du vœu apparaît de façon patente dans l’emploi du futur : tu …dabis…et sequere. Enfin le rôle de la divinité, dans cette justification, est mis en relief par l’importance accordée au pronom personnel de la 2ème personne, qui jouxte toujours un jalon central de l’hexamètre : Fastes IV, 321 //T sī tū //P dāmnās,//H Fastes IV, 323 Sēd sī crīmĕn ăbēst,//P tū

Similaire est la construction de la plupart des vœux que nous lisons chez Ovide. La formulation des termes du contrat se conforme souvent au même modèle : Mét. XV, 572-573 seu laetum est, patriae laetum populoque Quirini,   siue minax, mihi sit. » Viridique e caespite factas Mét. VIII, 350 …//P si te coluique coloque Fastes IV, 323 Sed si crimen abest,//P tu…dabis Fastes VI, 451 si scelus est //T in me poena redundet Fastes V, 573 si mihi bellandi pater es //H

La principale, dans ce dernier cas, fait apparaître deux verbes dont le mode est aussi comminatoire que pouvait l’être l’indicatif futur : il s’agit du subjonctif présent, à rapprocher ici du subjonctif d’ordre : Fastes V, 576

stetque fauor causa pro meliore tuus

« Que ta faveur aille toujours à la cause la meilleure. »

Dans ce type de prière, sorte de « négociation verbale », selon l’expression d’A. Deremetz44, nul choix n’est laissé au dieu de refuser le pacte que l’orant contracte avec lui, étant donné que la réalisation du vœu est subordonnée à une connaissance que la divinité - qui est dans l’intimité des cœurs et des lignées de ses fidèles - ne peut manquer d’avoir. L’orant a d’ailleurs pleine conscience de la contrainte qu’il exerce, comme le prouve la présence de verbes au futur dans la clôture des vœux : Fastes IV, 324 Re dabis et castas casta sequere manus Fastes IV, 894 Iuppiter, e Latio palmite musta feres Fastes V, 577 Templa feres et me uictore uocaberis Vltor

44. A. Deremetz (336), « La prière en représentation à Rome », p. 155.

52

Partie I : Typologie de la prière

La formulation des autres types d’énoncés précatifs que nous avons isolés est d’une manière générale moins comminatoire, et peut même ne contenir parfois aucune demande explicite.

L’Hymne L’hymne, en effet, se caractérise, généralement, par sa gratuité, car il ne recouvre souvent aucune demande concrète et explicite, hors la sollicitation de la faveur du dieu. « A l’origine […] étroitement lié à la musique et à la danse, [c’est] un chant de louange adressé à une divinité, dont on raconte avec gratitude les bienfaits »45. C’est en quelque sorte une profession d’allégeance envers le dieu, spontanée et intransitive, qui a pour seul dessein sa glorification46. 45. F. Chapot, « Prière au Dieu Suprême et apologétique chez Arnobe », in La prière en latin de l’Antiquité au XVIème siècle, Formes, évolutions, significations, Collection d’études médiévales de Nice, volume 6, p. 149. 46. Sur l’hymne, on consultera avec profit les ouvrages et articles suivants : M. von Albrecht, « Les dieux et la religion dans les Métamorphoses d’Ovide », Mélanges Le Bonniec, Latomus, CCI, éd. D. Porte, Bruxelles, 1988, p. 1-9 ; G. Appel, De Romanorum precationibus, Giessen, A.  Toepelmann (Religionsgeschichtliche Versuche und Vorarbeiten, 7,  2), 1909,  222  p.  ; D. Aubriot, « Hymne et prière à travers Homère et quelques autres poètes. La démarche religieuse à l’époque archaïque », in Entretiens sur l’Antiquité gréco-romaine, Liège, 1996 ; N.  Boels, «  Formules rituelles et formules littéraires  », in Les structures de l’oralité en Latin, colloque du centre Alfred Ernout, Textes réunis par J. Dangel et C. Moussy, P. U. Sorbonne, 1996, p. 281-289 ; K. Buchholz, De Horatio hymnographo, Dissert., Königsberg, 1912, 84 p. ; Cahen E., Introduction aux Hymnes de Callimaque, CUF, Les Belles Lettres, 1922 ; C. Calame, « Narration légendaire et programme poétique dans l’hymne à Apollon de Callimaque », Etudes de Lettres, 1992, 4, p. 41-66 ; Cancik H., « Carmen und sacrificium : das Saecularlied des Horaz in den Saekularakten des Jahres 17 v.Chr. », Festschrift für B. Kytzler, 1996, p. 99-113 ; P. Charvet, La prière, les hymnes d’Orphée, Paris, Nil, 1995, 161 p. ; Corpus de Prières Grecques et Latines, textes réunis, traduits et commentés par Frédéric Chapot et Bernard Laurot, Brépols, coll. « Recherches sur les rhétoriques religieuses » ; P. Dandrey, L’éloge paradoxal, de Gorgias à Molière, PUF, Paris, 1997 ; J. Danielewicz, « Ovid’s hymn to Bacchus (Mét., IV, 11 sqq) : tradition and originality », Euphrosyne, 18, 1990, p. 73-84 ; W.  Fauth, «  Mercuri te canam (Hor., Carm., I, 10)  », Gymnasium, LXIX, 1962, p.  1222 ; W. D. Furley, « Praise and persuasion in Greek hymns », Journal of Hellenic Studies, 115, 1995, p. 29-46 ; P. Hummel, L’épithète pindarique. Etude historique et philologique, Berne, 1999 ; R. Jeanneret, Recherches sur l’hymne et la prière chez Virgile. Essai d’application de la méthode d’analyse tagménique à des textes littéraires de l’Antiquité, Thèse, Faculté des lettres de Neuchâtel, Bruxelles, Aimav (Collection d’études linguistiques, 11), 1973, 247 p. ; G. La Bua, L’Inno nella letteratura poetica latina, San Severo, 1999 ; R. Lazzeroni, « Lingua degli



Chapitre II : Corpus ovidianum : aperçu typologique 53

Il débute, en règle générale, par une invocation qui identifie le destinataire de la louange et qui s’amplifie en une définition des qualités du dieu, et par le récit de son enfance et de ses exploits. Ses acta constituent ainsi une sorte de geste sacrée dont la relation est à la gloire de la divinité. C’est le schéma des hymnes homériques. Les hymnes orphiques remplacent généralement les acta par une série d’épiclèses et d’épithètes ou de relatives qui sont plus allusives quant aux éléments concrets, mais plus chargées sur le plan théologique et encomiastique. Certains hymnes comportent toutefois une demande, et se rapprochent alors de l’énoncé des prières longues et complexes47. Notre corpus compte 11 hymnes, ainsi répartis  : 5 hymnes dans les Métamorphoses, 2 dans les Amours et 4 dans les Fastes48. Le narrateur ovidien, différent dans chacune des œuvres, assume 8 hymnes sur les 11 que réunit notre corpus. 2 des 3 hymnes restants sont chantés par un groupe (le peuple d’Erechthée) ou par le représentant d’un groupe (Calliope pour les Muses). Seule Vénus choisit individuellement la parole hymnique pour s’adresser en son nom propre à son fils Cupidon, dans les Métamorphoses. Les deux exemples d’écriture hymnique que nous proposerons dans cette typologie sont extraits des Fastes.

dei e lingua degli uomini », Annali della Scuola Normale Superiore di Pisa, 26, 1957, p. 1-25 ; G. Mater, « Panegyric and persuasion in Ovid, Tr II, 317-366 », Latomus, L, 1991, p. 139-149 ; J. F. Miller, « Propertius hymn to Bacchus and contemporary poetry », American Journal of Philology, 112, 1991, p. 77-86 ; Nommer les dieux. Théonymes, épithètes, épiclèses dans l’Antiquité, Textes réunis et édités par N. Belayche, P. Brulé, G. Freyburger, Y. Lehmann, L. Pernot, F. Prost, le CARRA et les Presses Universitaires de Bretagne, 2005, 665 p. ; A. Novara, « Un hymne tibullien au dieu amour », Vita Latina, 116, 1989, p. 2-10 ; L. Pernot, La rhétorique de l’éloge dans le monde gréco-romain, tome I, Histoire et Technique, Institut d’Etudes Augustiniennes, Paris, 1993 ; Race W. H., « Aspects of rhetoric and form in Greek hymns », Greek, Roman and Byzantine Studies, 23, 1982, p. 5-14 ; H. Riesenfeld, « Remarques sur les hymnes magiques », Mélanges G. Rudberg, 1946, p. 156-160 ; N. A. Rubcova, « La prière et l’hymne dans L’Iliade d’Homère », in Interconnection and influence mutuelle des genres dans le développement de la littérature antique, éd. S. Averincev & S. Gasparov, Moskva, 1989, p. 26-53 ; D. W. Tandy, Callimachus, Hymn to Zeus, introduction and commentary, Ann Arbor Mich, London, 1982 ; L. P. Wilkinson, « Greek Influence on the Poetry of Ovid », in L’influence grecque sur la poésie latine de Catulle à Ovide, Genève, 1956 (Entretiens sur l’antiquité classique 2) ; F. Williams, « Callimachus hymn to Apollo », a Commentary, Oxford, 1978. 47. Quand on s’adonne à l’étude attentive du style, les différences entre l’hymne et les autres types de prières apparaissent assez nettement. 48. La liste détaillée et référencée de ces extraits peut être trouvée dans les annexes 1 et 2. Les destinataires des hymnes sont Bacchus (x2), Cérès (x2), Cupidon (x2), Terminus, Mercure, Thésée, Pythagore, et Germanicus.

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Partie I : Typologie de la prière

L’hymne à Terminus du chant II des Fastes est, quant à sa forme, conforme dans une large mesure à la composition hymnique traditionnelle. Le nom du dieu apparaît au vers introducteur, dans une formule qui acquiert chez Ovide le rang de formulaire, comme nous le verrons un peu plus loin : Fastes II, 658 et cantant laudes, Termine sancte, tuas

Le pronom personnel de la deuxième personne est jeté en tête de l’hymne, dont le sujet est ainsi clairement posé dès l’abord. Ce pronom revient d’ailleurs trois fois sous trois flexions différentes au cours des trois premiers vers, et on le retrouvera trois fois au cours des six derniers vers : Fastes II, 659-678 « Tu populos urbesque et regna ingentia finis :   omnis erit sine te litigiosus ager. Nulla tibi ambitio est, nullo corrumperis auro,   legitima seruas credita rura fide. Si tu signasses olim Thyreatida terram,   corpora non leto missa trecenta forent, nec foret Othryades congestis lectus in armis.   O quantum patriae sanguinis ille dedit ! Quid, noua cum fierent Capitolia ? Nempe deorum   cuncta Ioui cessit turba locumque dedit ; Terminus, ut ueteres memorant, inuentus in aede   restitit et magno cum Ioue templa tenet. Nunc quoque, se supra ne quid nisi sidera cernat,   exiguum templi tecta foramen habent. Termine, post illud leuitas tibi libera non est :   qua positus fueris in statione, mane ; nec tu uicino quicquam concede roganti,   ne uideare hominem praeposuisse Ioui : et seu uomeribus seu tu pulsabere rastris,   clamato ‘tuus est hic ager, ille tuus’. » « Toi, tu définis les limites des peuples, des villes et des vastes royaumes ; tout champ serait sans toi objet de litige. Tu n’as aucune ambition, tu n’es pas sensible à la corruption de l’or, tu gardes les champs qui te sont confiés avec loyauté et justice. Si tu avais marqué jadis les limites de la terre de Thyrée, trois cents hommes n’auraient pas été envoyés à la mort



Chapitre II : Corpus ovidianum : aperçu typologique 55 et le nom d’Othryades ne se lirait pas sur un trophée d’armes49. Ô combien de sang ce guerrier a donné à sa patrie ! Qu’advint-il, quand le nouveau Capitole fut édifié ? Si la foule des dieux tout ensemble céda devant Jupiter et lui donna ce lieu, Terminus – les Anciens nous en gardent mémoire – resta dans le sanctuaire où il avait été trouvé50 et est maître du temple avec le grand Jupiter. Maintenant encore, afin qu’il ne voie rien d’autre au dessus de lui que les étoiles, le temple est percé en son toit d’une étroite ouverture. Terminus, après cela, tes mouvements ne sont plus libres : reste à l’endroit où tu as été posé. Et ne concède rien si un voisin sollicite quelque chose, afin de ne pas sembler donner à un homme la primauté sur Jupiter. Et si tu es heurté par un soc ou un hoyau, dis bien haut : ‘Le tien, c’est ce champ-ci, tandis que ce champ-là est à toi.’ »

Ovide commence par l’exposé du rôle de Terminus, qu’il interpelle au moyen d’un vocatif qu’il est le seul, dans toute la littérature latine classique, à utiliser51. La phrase prend la forme d’une définition du dieu, qui est avant tout borne, frontière (finis). L’encadrement du vers par ces deux termes propose 49. Othryades fut le seul survivant d’une bataille opposant 300 Spartiates à 300 Argiens, pour la possession de la ville de Thyrée, en Laconie. Pour épargner de lourdes pertes à leurs armées, les deux parties avaient décidé de se faire représenter chacune par 300 guerriers : « Les deux armées se retirèrent après cet accord, et il ne resta que les guerriers choisis de part et d’autre. Ils combattirent des deux côtés avec tant d’égalité, que de six cents hommes il n’en resta que trois : Alcénor et Chromius du côté des Argiens, et Othryades de celui des Lacédémoniens ; et encore fallut-il que la nuit les séparât. Les deux Argiens coururent à Argos annoncer leur victoire. Pendant ce temps-là, Othryades, guerrier des Lacédémoniens, dépouilla les Argiens tués dans le combat, porta leurs armes à son camp, et se tint dans son poste. Le lendemain, les deux armées arrivent : instruites de l’événement, elles s’attribuent quelque temps la victoire : les Argiens, parce qu’ils avaient l’avantage du nombre ; les Lacédémoniens, parce que les combattants d’Argos avaient pris la fuite tandis que leur guerrier était resté dans son poste, et qu’il avait dépouillé leurs morts. Enfin, la dispute s’étant échauffée, on en vint aux mains ; et, après une perte considérable de part et d’autre, les Lacédémoniens furent vainqueurs. […] Quant à Othryades, resté seul des trois cents Lacédémoniens, on dit que, honteux de retourner à Sparte après la perte de ses compagnons, il se tua sur le champ de bataille, dans le territoire de Thyrée » (Hérodote, I, 82). Une autre tradition enjolive la fin de l’histoire, et montre Othryadès écrivant avec son sang son nom sur le trophée composé des armes des ennemis et attribuant ainsi la victoire à Sparte. 50. L’épisode est raconté par Tite-Live, I, 55. 51. La recherche a été menée sur la base électronique de l’Université de Louvain, qui réunit un nombre important d’auteurs latins, parmi lesquels, par ordre alphabétique : Catulle, Cicéron, César, Horace, Lucain, Lucrèce, Ovide, Pétrone, Phèdre, Plaute, Pline l’Ancien, Pline le jeune, Properce, Quintilien, Salluste, Sénèque, Servius, Suétone, Silius Italicus, Stace, Tacite, Térence, Tibulle,Tite-Live, et Virgile. Aucun de ces auteurs n’emploie le vocatif Termine, dont Ovide use 5 fois dans les Fastes, seule de ses œuvres dans laquelle il apparaît.

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Partie I : Typologie de la prière

une synthèse de l’essence de la divinité, en un cercle dont la dimension rituelle est renforcée par la triple mention des bénéficiaires de l’action divine : populos urbesque et regna ingentia. Le lien qui unit ces trois termes redondants pour en faire une formule unique et synthétique est noué par l’effacement de la césure penthémimère qui glisse sur une élision, comme le fait peu après l’improbable hephthémimère. J. Lucot considère qu’une « élision qui obscurcit la coupe suggère une impression de masse et de grandeur »52, impression adaptée tant au propos tenu ici qu’à la fonction laudative de l’hymne. Vient alors un développement oratoire qui use abondamment de la définition négative. L’énoncé de la vertu principale du dieu se compose de deux vers divisés en trois segments, deux négatifs et symétriques qui fusionnent en s’inversant dans le troisième, lequel se clôt sur le terme le plus important, la loyauté divine : v. 661-662

nulla tibi ambitio (e)st,//P nullo corrumperis auro, legitima servas credita rura fide.

Dans cet hymne composé de trois parties, les deux premières peuvent donc étonner, puisque le lecteur n’oublie pas que cette prière est prononcée collégialement par des habitants de la campagne, autour de deux propriétaires fonciers. En effet, la première de ces trois parties reçoit une nette coloration juridique en faisant apparaître une terminologie technique et précise (finis, litigiosus, ambitio, corrumperis, legitima seruas credita rura fide) tout en traçant en quelque sorte le portrait du dieu. C’est pourquoi on peut être surpris par le commentaire dans lequel R. Schilling, dans son édition des Fastes pour la CUF, apprécie « la simplicité de ton adoptée dans la première partie de cette prière ‘rustique’ »53. Nous pensons qu’il évoquait plutôt la ‘dernière partie’ de cette prière, à savoir la pétition, qui contraste effectivement, par sa simplicité et son prosaïsme, avec le reste de l’hymne. Terminus appartient à cette classe divine désincarnée qui distingue la religion romaine de la mythologie grecque. Il est une fonction divinisée, une abstraction sacralisée, et représentée sous la forme d’un objet statique (la borne) « ce qui paralyse la naissance de fables sacrées, d’histoire sainte ou de mythologie »54, mais justifie l’emploi d’un vocabulaire juridique et technique, en place d’une évocation plus poétique ou mystique. Cette absence de mythologie rend très artificielle l’évocation érudite de l’aventure d’Othryadès, qui 52. J. Lucot (677), « Le molosse en rejet », p. 86. 53. R. Schilling (10), Les Fastes, CUF, Les Belles Lettres, Paris, p. 133, note no 165 (II, 663). 54. D. Porte (496), Les donneurs de sacré, p. 14.

Chapitre II : Corpus ovidianum : aperçu typologique 57



constitue le traditionnel argument épique (pars epica) des hymnes. Cet argument est ici réduit à une reconstruction historique à l’irréel du passé, qui se développe elle aussi en négatif : v. 663-665 si tu signasses olim Thyreatida terram, corpora non leto missa trecenta forent, nec foret Othryades congestis lectus in armis.

Sénèque le Rhéteur a pu être sensible à la rhétorique de ce passage et s’en souvenir lorsqu’il évoqua comme sujet de suasoire l’épisode d’Othryadès : Ovide Fastes II, 666 o quantum patriae sanguinis ille dedit !

Sénèque le Rhéteur, Suasoriae, II, 16 o dignum [in] Spartano atramentum, (o) virum, cuius ne litterae quidem fuere sine sanguine ! « Ô encre digne de Sparte, ô héros dont les lettres mêmes qu’il traça ne furent pas dépourvue de sang ! »

L’hymne se clôt sur une sorte de prosopopée par laquelle le dieu exprime son rôle de justicier, en une triple mise en abîme, qui inscrit dans la parole du poète la parole des hommes célébrant le culte, dans laquelle s’inscrit à son tour la parole du dieu. Là encore l’hymne se referme sur lui-même, en un retour astucieux de la deuxième personne, dans deux contextes totalement différents : v. 659 v. 678

tu populos urbesque et regna ingentia finis clamato « tuus est hic ager, ille tuus ».

Terminons par une interprétation osée, qui aurait pu faire sourire l’ingénieux poète qui aimait tant, lui-même, jouer avec les textes de ses prédécesseurs. Ovide a choisi pour les Fastes un mètre jusqu’alors quasi exclusivement réservé à la poésie élégiaque. Mais il ne faut pas dissocier à l’excès l’élégie et le sérieux, et qu’il ne fallait pas cantonner le distique élégiaque à la légèreté. Properce avait d’ailleurs montré à Rome, avant Ovide, que le mètre élégiaque était propre à porter une parole solennelle et sérieuse, entre autres au livre IV de ses Elégies. On peut voir derrière la figure de Terminus, une évocation en filigrane de l’élégie, petite voix qui parvient à porter de grands projets, comme celui de Properce ou comme celui-là même des Fastes. Cette petite

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Partie I : Typologie de la prière

voix se loge au cœur même du grand style hexamétrique, comme Terminus se loge au sein du temple de la triade Capitoline, évoquée ici très solennellement par le seul Jupiter, qualifié de magnus. Malgré les retractationes réitérées des poètes, la petite voix élégiaque s’enfle de grand vent et s’ouvre d’ambitieux horizons, semblables à cette ouverture pratiquée dans le toit au dessus de l’autel de Terminus, ouverture qui, quoique modeste, donne sur le ciel. Et si l’on veut rester malicieux, on peut aussi voir Ovide grimé en Terminus, le chantre du calendrier comme le poète de l’amour et des métamorphoses, qui reste solidement à sa place à l’ombre du grand Auguste. Car Ovide délimite en quelque sorte la frontière de l’idéologie augustéenne telle qu’elle se construit progressivement : il est au-delà de la frontière par ses œuvres de jeunesse, prônant un jeu amoureux contraire à la morale que tente de restaurer le régime, il enveloppe la frontière avec les Métamorphoses, qui évoluent jusqu’au livre XV, et il franchit la frontière avec les Fastes, qui célèbrent Rome, ses rites et celui qui les restaure. Après les Fastes, effectivement, la défense qu’Ovide adresse au dieu des bornes vaudra pour lui : Termine, post illud levitas tibi libera non est. Ovide n’aura plus la liberté d’être léger. Et il ne faudra pas attendre longtemps pour qu’il n’ait plus de liberté du tout. Le dernier hymne des Fastes, chanté à la louange de Mercure, retiendra lui aussi notre attention dans cette présentation rapide de l’hymnique ovidienne. Il se compose d’une longue célébration du dieu, construite sur trois phrases. La première se développe sur 6 vers, et est donc trois fois plus longue que chacune des deux autres phrases, qui prennent chacune la forme d’un distique : Fastes V, 663-672 Clārĕ nĕpōs //T Ātlāntĭs,//F ădēs,//H quēm mōntĭbŭs ōlīm    Ēdĭdĭt Ārcădĭīs // Plēĭăs ūnă Iŏuī,   Pācĭs ĕt ārmōrūm //P sŭpĕrīs īmīsquĕ dĕōrūm    Ārbĭtĕr, ālātō // quī pĕdĕ cārpĭs ĭtēr,   Lāetĕ lўrāe pūlsū,//P nĭtĭdā quŏquĕ lāetĕ pălāestrā    Quō dĭdĭcīt cūltē // līnguă dŏcēntĕ lŏquī ;   Tēmplă tĭbī //T pŏsŭērĕ //F pătrēs //H spēctāntĭă Cīrcūm    Īdĭbŭs ; ēx īllō (e)st // hāec tĭbĭ fēstă dĭēs.   Tē quīcūmquĕ sŭās //P prŏfĭtēntūr uēndĕrĕ mērcēs   Tūrĕ dătō,//T trĭbŭās // ūt sĭbĭ lūcră rŏgānt. « Viens m’inspirer, illustre petit-fils d’Atlas, toi que jadis, sur les monts d’Arcadie, une Pléiade donna pour fils à Jupiter ! Toi, l’arbitre de la paix et de la guerre pour les dieux du ciel comme pour ceux des enfers, toi qui voyages d’un pied ailé, toi qui aimes le son de la lyre, qui aimes aussi la



Chapitre II : Corpus ovidianum : aperçu typologique 59 palestre luisante, toi dont les leçons enseignent à parler avec art, le sénat t’a dédié, aux Ides, un temple qui regarde le Cirque : depuis, ce jour est celui de ta fête. Quiconque fait profession de vendre des marchandises t’offre de l’encens et te demande de lui faire gagner de l’argent. »

L’invocation du dieu est particulièrement soignée. Son nom n’apparaît pas dans l’hymne, mais il est suggéré, par un subtil jeu phonique et étymologique, à travers le terme merces. Ovide interpelle le dieu au moyen d’épithètes et de propositions relatives : vocatif : clare nepos Atlantis relative : quem pleias edidit vocatif : arbiter pacis et armorum relative : qui carpis iter vocatif : laete… quoque laete relative : quo

La symétrie extrême de la construction est allégée par les effets de uariatio qu’introduisent les flexions des relatifs. Cette longue phrase initiale - dont le seul verbe principal tient dans la forme ades, iambe engoncé dans un schéma de triple a propre à la célébration du sacré et au récit mythique - répond bien aux exigences de l’énoncé de définition, qui constitue la première partie d’un hymne. Les épithètes que choisit Ovide reprennent en écho celles par lesquelles Horace avait célébré Mercure : Horace, Odes, I, 10 Mercuri, facunde nepos Atlantis, Qui feros cultus hominum recentum Voce formasti catus et decorae   More palestrae, Te canam, magni Jouis et deorum Nuntium curuaeque lyrae55 parentem, Callidum, quicquid placuit, jocoso   Condere furto. Te, boues olim nisi reddidisses Per dolum amotas, puerum minaci Voce dum terret, uiduus pharetra   Risit Apollo. Quin et Atridas duce te superbos IIio diues Priamus relicto 55. cf. Fastes, V, 104 : inuentor curuae, furibus aptis, fidis.

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Partie I : Typologie de la prière Thessalosque ignes, et iniqua Trojae   Castra fefellit. Tu pias Laetis animas reponis Sedibus uirgaque leuem coerces Aurea turbam, superis deorum   Gratus et imis.

« Mercure, éloquent petit-fils d’Atlas, toi qui eus l’art d’adoucir par ta voix et d’embellir par l’habitude de la palestre les premiers hommes au caractère sauvage, je veux te chanter, messager du grand Jupiter et des dieux, inventeur de la lyre creuse, habile à cacher tout ce que tu t’es amusé à dérober. C’est toi qui, par ruse, as enlevé ses bœufs à Apollon ; tu étais tout jeune, et il prenait une voix menaçante pour t’effrayer, si tu ne les lui rendais pas ; mais il se mit à rire quand tu lui dérobas son carquois. C’est toi qui conduisais le riche Priam quand, au sortir d’Ilion, il réussit à tromper l’attention des Atrides orgueilleux et échappa aux feux de garde des Thessaliens et au camp des ennemis de Troie. C’est toi qui mènes dans les demeures des bienheureux les âmes pieuses et qui, avec ta verge d’or, rassembles leur troupe légère : tu es cher aux dieux d’en haut et à ceux d’en bas. » L’inspiration horatienne est nette dans cette invocation qui est plus une habile et référentielle propédeutique à la prière qu’un hymne réel. Ovide reprend son illustre prédécesseur mais, après l’énoncé des qualités du dieu, il omet le récit du vol des bœufs d’Apollon, qui constitue la pars epica de l’hymne homérique à Hermès et qu’Horace rapporte lui aussi (v. 9-12). Et lorsqu’il place en tête de vers le pronom te, comme Horace le fait trois fois dans son poème, c’est pour introduire un personnage original, qui appartient au monde fictionnel des Fastes : le marchand auquel il fera prononcer la prière à Mercure que cet hymne annonce. Le silence fait sur les récits mythiques inspirés des Hymnes Homériques permet à Ovide de recentrer son poème sur le dieu latin Mercure, qu’il évite ainsi de trop assimiler au grec Hermès. Les trois premiers distiques sont donc inspirés d’Horace et imprégnés de mythes littéraires56, tandis que le distique suivant sollicite des notions purement romaines :

56. On y retrouve deux fois le schéma métrique DSDS, absent des hymnes des Fastes hors cette occurrence et dont J. Collart a montré la connotation solennelle (cf. J. Collart, « Sentences et formules monostiques chez Virgile et Horace. Quelques remarques de métrique » (596), p. 205-212).



Chapitre II : Corpus ovidianum : aperçu typologique 61 v. 669-672 Tēmplă tĭbī //T pŏsŭērĕ //F pătrēs //H spēctāntĭă Cīrcūm Īdĭbŭs ; ēx īllō (e)st // hāec tĭbĭ fēstă dĭēs.

Le dernier distique introduit enfin, comme nous l’avons dit, le personnage du marchand, propre à Ovide. L’hymne progresse donc de la référence horatienne - et, au-delà, homérique - vers une évocation romaine qui aboutit à l’originalité ovidienne. Mais la louange désintéressée, ou présentée comme telle, ne constitue pas la norme de la prière, qui s’appuie plus généralement sur une demande.

Les demandes de renseignements Cet énoncé spécifique est présent quasi exclusivement dans les Fastes et y répond à des impératifs de uariatio narrative. Il est rendu possible par le statut particulier du poète dans cette œuvre, chantre des dieux, médiateur inspiré des mystères divins, qu’il est chargé de révéler et d’expliquer aux hommes. Le poète u du stratagème du dialogue avec la divinité pour mettre en scène ses récits étiologiques ou ses relations religieuses, et les questions qu’il pose participent alors de l’écriture dynamique choisie pour cet ambitieux calendrier rituel. L’objet de ces questions est souvent un paradoxe. « Ovide s’étonne de tout, et pose le doigt […] sur les points délicats de la liturgie romaine, en légitimant sa curiosité grâce à l’énoncé d’une idée reçue, d’un jugement populaire contrariés par le dogme religieux. »57 Arrêtons-nous sur la formulation propre de ces interrogations qui permettent au poète d’alterner récits mythiques et explications étiologiques, car nous n’en tiendrons pas compte, par la suite, dans nos analyses stylistiques de détail, étant entendu que, si elles prennent l’apparence d’un énoncé précatif, elles n’en ont pas véritablement la teneur, et qu’elles se positionnent en réalité en marge du champ religieux. Les demandes de renseignements sont au nombre de 40,  2 dans les Métamorphoses et 38 dans les Fastes, et le narrateur en est presque toujours l’émetteur (1/2 pour les Métamorphoses, 36/38 pour les Fastes). Deux personnages, seuls, interrogent les dieux. Le locuteur qui interroge Persée, dans les Métamorphoses, n’est pas identifié. Le second personnage est

57. D. Porte (495), L’étiologie religieuse dans les Fastes d’Ovide, p. 56.

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Partie I : Typologie de la prière

Numa, fils et conjoint de divinités, ce qui lui confère une aura mythique et sacrée58. Numa demande conseil aux dieux : Fastes III, 309-311 Tūm Nŭmă : « Dī nĕmŏrūm,//P fāctīs īgnōscĭtĕ nōstrīs,   Sī scĕlŭs īngĕnĭō // scītĭs ăbēssĕ mĕō ; Quōquĕ mŏdō pōssīt //P fūlmēn,//H mōnstrātĕ, pĭārī. » « Dieux des bois, pardonnez mon audace : s’il est vrai que toute intention criminelle est loin de ma pensée – et vous le savez bien – montrezmoi quelle expiation peut détourner la foudre. »

Fastes III, 333-336 Ūt rĕdĭīt ănĭmūs,//P « dā cērtă pĭāmĭnă » dīxīt   « fūlmĭnĭs, āltōrūm // rēxquĕ pătērquĕ dĕūm, sī tŭă cōntĭgĭmūs //P mănĭbūs dōnārĭă pūrīs,   hōc quŏquĕ, quōd pĕtĭtūr,// sī pĭă līnguă rŏgāt. « Enseigne-moi, dit-il, un rite expiatoire pour détourner la foudre, roi et père des dieux d’en haut, si j’ai toujours touché tes autels d’une main pure. »

Avec une science consommée de l’invocation, il use de formules solennelles (āltōrūm rēxquĕ pătērquĕ dĕūm) et sature ses vers d’échos phoniques : Tūm Nŭmă : « Dī nĕmŏrūm,//P fāctīs īgnōscĭtĕ nōstrīs,   Sī scĕlŭs īngĕnĭō // scītĭs ăbēssĕ mĕō ; Quōquĕ mŏdō pōssīt //P fūlmēn,//H mōnstrātĕ, pĭārī. » Ūt rĕdĭīt ănĭmūs,//P « dā cērtă pĭāmĭnă » dīxīt   « fūlmĭnĭs, āltōrūm // rēxquĕ pătērquĕ dĕūm, sī tŭă cōntĭgĭmūs //P mănĭbūs dōnārĭă pūrīs,   hōc quŏquĕ, quōd pĕtĭtūr,// sī pĭă līnguă rŏgāt. »

L’objet de la demande est porté par les mots de la famille de pius, dont le retour permet une caractérisation du personnage : piari, piamina, pia. Le

58. Voir l’invocation à Egérie, III, 261-262 :    Nymphă, mŏnē,//T nĕmŏrī //P stāgnāqu(e) ŏpĕrātă Dĭānāe ;.   Nymphă, Nŭmāe //T cōniūnx,//P ād tŭă fāctă uĕnī. C’est la nymphe qui est présentée par rapport à Numa.



Chapitre II : Corpus ovidianum : aperçu typologique 63

rite apotropaïque qu’il veut qu’on lui enseigne est soumis à conditions, mais l’emploi de l’indicatif dit qu’elles sont déjà remplies : III, 310

Sī scĕlŭs īngĕnĭō // scītĭs ăbēssĕ mĕō

III, 334-335

sī tŭă cōntĭgĭmūs //P mănĭbūs dōnārĭă pūrīs, hōc quŏquĕ, quōd pĕtĭtūr,// sī pĭă līnguă rŏgāt.

Les deux formulations différentes recouvrent en fait la même idée et rapprochent cette demande de renseignements des uota. Les autres demandes de renseignements sont toutes le fait du narrateur luimême. Il interroge le plus souvent les dieux au sujet des rites qu’il s’emploie à décrire. Ces invocations ne sont que des modalités du récit, destinées à le redynamiser. Ce sont donc des effets de uariatio au même titre que les incessantes réactualisations du discours que nous signalons dans les tableaux portés en annexes. Il faut cependant nuancer ce rapprochement : un détail sépare ces demandes de renseignements de simples réactualisations du discours ; il tient dans l’invocation elle-même, par laquelle Ovide interpelle le dieu, et dans le dialogue qui s’instaure alors. Parallèlement aux demandes sporadiques qui jalonnent les Fastes, deux longs dialogues font se succéder de nombreuses demandes de renseignements. Le premier interlocuteur privilégié est Janus, auquel le narrateur des Fastes va adresser successivement 10 questions dans les 300 premiers vers du premier livre. Le second interlocuteur privilégié est Erato, qui répondra elle aussi à 10 questions, ou séries de questions, au livre IV. Le narrateur ovidien, se plaçant dans la longue tradition hésiodique, a donc le privilège rare de s’entretenir directement avec les dieux59 – une fois vaincue la légitime frayeur qui saisit tout homme confronté au divin. J-M. Frécaut rappelle60 que ces dialogues ne sont pas une invention d’Ovide. Il les rattache principalement à la tradition callimaquéenne, qui présente, dans les Aitia, de longs dialogues entre le poète et les Muses, dont Clio, « qui donne l’explication d’un rite particulier à l’île de Paros ». Ovide trouve là « une précieuse suggestion » qu’il enrichit « grâce à sa fantaisie et à son humour »61. Le narrateur de l’Art d’Aimer, en d’autres temps et d’autres circonstances, avait affirmé n’avoir nul besoin des

59. Nous verrons plus loin la place tenue par le corps des dieux dans ces échanges. 60. J-M. Frecaut (115), L’humour et l’esprit chez Ovide, p. 275. 61. ibid. p. 276.

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Partie I : Typologie de la prière

Muses, ou de quelque autre divinité, pour composer son manuel d’instructions amoureuses ; seule l’expérience l’inspirait : Art d’Aimer I, 25-28 Non ego, Phoebe, datas a te mihi mentiar artes,   Nec nos aeriae uoce monemur auis, Nec mihi sunt uisae Clio Cliusque sorores   Seruanti pecudes uallibus, Ascra, tuis ; Vsus opus mouet hoc ; uati parete perito. « Phoebus, je ne mentirai pas en disant que je reçois de toi mon talent, et je n’ai pas été inspiré par le chant des oiseaux aériens, et ni Clio ni les sœurs de Clio ne me sont apparues alors que je paissais un troupeau dans tes vallons, Ascra. C’est l’usage qui fait naître cet ouvrage ; écoutez un poète expérimenté ! »

Ovide se pose ici malicieusement en contre-Hésiode, l’évocation d’Ascra étant parfaitement explicite. Le didactisme de l’Art d’Aimer est donc purement humain, et touche à un domaine profane dans lequel l’expérience humaine suffit, et dépasse même sûrement l’expérience divine, qui n’a pas besoin de tant d’art ni d’artifices pour parvenir à ses fins. Le monde érotique des dieux n’est pas un monde de séduction, mais de violence, et n’a pas l’usage des préceptes d’un praeceptor amoris. Ce praeceptor amandi62 de l’Art d’Aimer s’oppose donc au praeceptor arandi63 qu’est Hésiode, et qui a eu la grâce d’une épiphanie instructive. Le renversement de situation opéré dans les Fastes est total, au moment où Ovide « cherche à élargir […] son inspiration » « [sans renoncer] à sa verve d’antant, à son esprit, à son humour »64. De toutes les Muses, qu’il interroge à plusieurs reprises, c’est Erato qu’il va privilégier, car « elle tire son nom de l’amour » nam tu nomen amoris habes65. Nous restons donc dans le réseau vénusien, si cher à Ovide, même lorsqu’il troque son masque le praeceptor amoris contre celui de uates operosus dierum66. Ces questions, qui permettent l’exposé des rites ou de leur étiologie, c’est-à-dire « la résurrection, l’explosion du passé dans le présent »67, par62. Art d’Aimer II, 161. 63. Par cette expression, Ovide désigne Hésiode dans un épisode assez nettement parodique qui verra s’opposer, dans une version revue du jugement de Pâris, trois déesses se disputant l’étymologie du mois de juin (Fastes, VI, 13). 64. J-M. Frécaut (115), ibid., p. 273. 65. Art d’Aimer II, 16. 66. Ovide est appelé ainsi par Janus Fastes I, 101, puis par Mars Fastes III, 177. 67. D. Porte (485), « fas est … Fasti », p. 134.



Chapitre II : Corpus ovidianum : aperçu typologique 65

ticipent de la dimension didactique des Fastes, que de nombreux savants ont analysée, mais qu’il conviendrait peut-être de relativiser, comme l’a montré D. Porte dans un article dans lequel elle rappelle, avec bon sens, que « le public romain […] n’attendait pas plus les instructions d’Ovide, pour régler sa vie religieuse, que le paysan latin n’attendait, pour labourer, semer, enter ou moissonner, les instructions de Virgile »68. Le didactisme d’Ovide, qui n’est nulle part plus explicite que dans ces demandes de renseignements, serait plutôt à rattacher à l’ambition du projet d’Auguste, à son « dessein mondial »69 d’étendre Rome « à l’échelle de l’univers »70. Car « l’heure n’est plus à la conquête, mais à l’organisation d’un monde immense, dont il s’agit d’harmoniser […] les particularités »71. Cette perspective permet de mieux comprendre la question que le narrateur des Fastes pose à Janus au début de leur dialogue : I, 89-90 Quem tamen esse deum te dicam, Iane biformis ?   nam tibi par nullum Graecia numen habet. « Qui dirai-je que tu es, Janus au double visage ? Car la Grèce n’a aucune divinité qui te soit comparable. »

et qui trouve son prolongement en Fastes I, 141-144 : Ora uides Hecates in tres uertentia partes,   Seruet ut in ternas compita secta uias ; Et mihi, ne flexu ceruicis tempora perdam   Cernere non moto corpore bina licet. « Hécate, tu le vois, peut tourner ses visages dans trois directions, afin de surveiller les trois branches du carrefour ; et à moi, afin que je ne perde pas de temps à tourner le cou, est donnée la possibilité de voir de deux côtés à la fois, sans que mon corps ne bouge. »

L’explication de l’épithète biformis passe par une comparaison qui ne se justifie pas dans un contexte purement romain, dans lequel elle n’a pas de réelle utilité didactique. Les Romains, en effet, n’ont pas besoin d’être instruits de l’apparence d’une de leurs divinités les plus anciennes, représentée encore sur 68. 69. 70. 71.

ibid. p. 125. ibid. p. 126. ibid. p. 126. ibid. p. 127.

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Partie I : Typologie de la prière

certaines pièces de monnaie. Les Grecs en revanche, ou autres habitants de l’Orient, pouvaient avoir besoin de ce recours à Hécate pour se figurer Janus. Nombreuses sont les demandes de renseignements construites selon un même schéma. Elles sont en général des étiologies, des recherches de causes, selon le projet qu’Ovide s’était fixé dans les vers introductifs des Fastes. L’interrogatif causal apparaît de manière constante, dans une structure d’interrogation directe ou indirecte. Les 36 extraits que nous avons isolés et qui sont attribuables au narrateur, se répartissent en 26 interrogations directes et 13 interrogations indirectes. La frontière qui sépare les deux n’est pas toujours nette. Un signe distinctif de cette dernière pourrait être l’emploi du subjonctif. Mais l’absence de subjonctif nous amène à reconsidérer la construction des phrases qui auraient semblé l’appeler. Ainsi : Fastes I, 91-92 ede simul causam, cur de caelestibus unus   sitque quod a tergo sitque quod ante uides. « Dis moi en même temps la raison pour laquelle tu vois, seul parmi les dieux du ciel, ce qui est dans ton dos et ce qui est devant toi. »

Le verbe de la subordonnée interrogative est resté à l’indicatif, tandis que les verbes des subordonnées de second rang – les deux relatives symétriques – sont au subjonctif. Il semble donc que la principale (ede causam) ne joue pas le rôle d’introducteur d’un style indirect, mais soit considérée comme une indépendante à laquelle s’accolle la question qu’elle annonce seulement. De même, dans cette autre demande, l’indicatif est utilisé là où l’on attendrait le subjonctif : Fastes I, 149-150 Dīc, ăgĕ, frīgŏrĭbūs //P quārē nŏuŭs īncĭpĭt ānnūs Quī mĕlĭūs //T pēr uēr // īncĭpĭēndŭs ĕrāt ? « Allons, dis pourquoi l’année nouvelle commence avec les froids, elle qui eût dû commencer par le printemps. »

Les deux impératifs initiaux jouent le rôle de quasi interjections chargées d’attirer l’attention du destinataire sans que leur construction grammaticale soit complétée.



Chapitre II : Corpus ovidianum : aperçu typologique 67

Les mots interrogatifs se répartissent ainsi : Mot interrogatif

Interrogation directe

Interrogation indirecte

Total

cur quare unde quis/quae/quid quantus An quia ex quo tempore Total

13 0 1 3 0 4 1 0 22

9 3 3 6 1 1 0 1 24

22 3 4 9 1 5 1 1 46

constructions autres avec COD nominal

3

Ces interrogatifs sont généralement mis en valeur dans le vers : – par la proximité de la césure P (ou de la césure centrale du pentamètre), au prix, parfois, de la disjonction grammaticale de la phrase : Fastes I, 91 ēdĕ sĭmūl cāusām,//P cūr dē cāelēstĭbŭs ūnūs

Fastes I, 257 Cūm tōt sīnt iānī,//P cūr stās sācrātŭs ĭn ūnō

Fastes III, 170 Dīc mĭhĭ, mātrōnāe // cūr tŭă fēstă cŏlānt.

Fastes IV, 194 gāudĕăt āssĭdŭō // cūr dĕă māgnă sŏnō.

Fastes IV, 350 Dīc » īnquām, « pāruā // cūr stĭpĕ quaērăt ŏpēs. »

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Partie I : Typologie de la prière

Fastes I, 149 Dīc, ăgĕ, frīgŏrĭbūs //P quārē nŏuŭs īncĭpĭt ānnūs

Fastes III, 771 Rēstăt, ŭt īnuĕnĭām,//P quārē tŏgă lībĕră dētūr

Fastes II, 270 Āttĭgĕrīnt //T Lătĭās // ūndĕ pĕtītă dŏmōs.

Fastes VI, 799 « Dīcĭtĕ, Pīĕrĭdēs,//P quīs uōs ădiūnxĕrĭt72 īstī

– par la proximité de la césure T : Fastes I, 171

Mōx ĕgŏ, cūr,//T quāmuīs //P ălĭōrūm nūmĭnă plācēm Fastes V, 191 Īpsă dŏcē //T quāe sīs ://P hŏmĭnūm sēntēntĭă fāllāx

– par leur présence dans la clausule : Fastes II, 269 Dīcĭtĕ, Pīĕrĭdēs,//P sācrōrūm quāe sĭt ŏrīgō,

Fastes IV, 247 Hōc quŏquĕ, dūx ŏpĕrīs,//P mŏnĕās,//H prĕcŏr, ūndĕ pĕtītā

– ou encore par une place à l’initiale de vers : Fastes I, 185 Quīd uōlt pālmă sĭbī rūgōsăquĕ cārĭcă ? Dīxī

Fastes V, 355 Cūr tămĕn ūt dāntūr uēstĕs Cĕrĕālĭbŭs ālbē

72. ou addixerit (Loeb).



Chapitre II : Corpus ovidianum : aperçu typologique 69

Fastes V, 371 Cūr tĭbĭ prō Lĭbycīs claūdūntūr rētĕ lĕaēnīs

Fastes IV, 219 Āt cūr tūrrĭfĕrā căpŭt ēst ŏnĕrātă cŏrōnā ?

Fastes VI, 694 Cūr sīt Quīnquātrūs īllă uŏcātă dĭēs ?

Fastes VI, 653 Cūr uăgŭs īncēdīt tōtā tībīcĕn ĭn Ūrbē ?

Métamorphoses XV, 624 Ūndĕ Cŏrōnīdēn cīrcūmflŭă Thbrĭdĭs āltī

Que l’interrogation soit directe ou indirecte, la place du verbe de la subordonnée paraît codifiée. On le trouve, le plus souvent, soit en fin de proposition/fin de vers, soit en début de vers, par un frappant effet d’anticipation ou de rejet : fin de vers : I, 89-92 ; I, 149-150 ; I, 165 ; I, 171-172 ; I, 257-258 ; III, 170 ; III, 771 ; IV, 367 ; IV, 361 ; IV, 219 ; IV, 247 ; V, 355 ; V, 357 ; V, 693-694 ; VI, 653 début de vers : IV, 194 ; V, 357 ; II, 269-270 ; IV, 247-24873

L’impératif est fréquemment utilisé pour enjoindre au dieu de parler. Une rapide étude lexicale fait apparaître le retour constant des mêmes verbes, à des modes variés, comme pandere (3 occurrences), dicere (7 occurrences), monere (3 occurrences), ou docere et dare (2 occurrences), parfois aux mêmes places dans le vers : 73. Les vers II, 269-270 et IV, 247-248 ont les Muses pour destinataires, et sont très proches dans leur formulation :. Fastes II, 269-270    Dīcĭtĕ, Pīĕrĭdēs,//P sācrōrūm quāe sĭt ŏrīgō,.     Āttĭgĕrīnt //T Lătĭās // ūndĕ pĕtītă dŏmōs. Fastes IV, 247-248    Hōc quŏquĕ, dūx ŏpĕrīs,//P mŏnĕās,//H prĕcŏr, ūndĕ pĕtītā.     uēnĕrĭt. Ān nōstrā // sēmpĕr ĭn ūrbĕ fŭīt ?

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Partie I : Typologie de la prière

Fastes II, 269-270 Dicite, Pierides,//P sacrorum quae sit origo,   attigerint //T Latias // unde petita domos

Fastes VI, 799 Dicite, Pierides,//P quis uos adiunxerit isti

Fastes V, 7-874 Dicite, quae fontes Aganippidos Hippocrenesque75,   Grata Medusiaei signa tenetis equi. « [Vous demandez d’où le mois de mai tient, selon moi, son nom ? […] J’ai la possibilité de donner plusieurs raisons, et  […] cette possibilité même me gêne.] Parlez, vous qui occupez les sources d’Hippocrène et d’Aganippe, [sources qui vous sont consacrées], traces agréables laissées par le cheval issu de Méduse. »

La dimension artificielle et purement littéraire de ces dialogues avec les dieux apparaît bien dans l’échange que le narrateur des Fastes engage avec Bacchus au livre III, et au cours duquel il propose lui-même les réponses aux questions rituelles qu’il pose : Fastes III, 771-778 Rēstăt, ŭt īnuĕnĭām,//P quārē tŏgă lībĕră dētūr   Lūcĭfĕrō //T pŭĕrīs,// cāndĭdĕ Bācchĕ, tŭō : Sīuĕ quŏd īpsĕ pŭēr //P sēmpēr //H iŭuĕnīsquĕ uĭdērīs,   ēt mĕdĭā (e)st āetās // īntĕr ŭtrūmquĕ tĭbī ; sēu, quĭă tū //T pătĕr ēs,//P pātrēs sŭă pīgnŏră, nātōs,   cōmmēndānt cūrāe // nūmĭnĭbūsquĕ tŭīs : sīuĕ quŏd ēs lībēr,//P uēstīs quŏquĕ lībĕră pēr tē   sūmĭtŭr ēt uītāe // lībĕrĭōrĭs ĭtēr.

74. En marge de notre corpus, car la formulation de la question n’est pas franche. 75. La scansion de ce vers est problématique. Le o de Hippocrenes est donné comme bref par F. Gaffiot et L. Quicherat. Quoique l’attestation ovidienne soit un hapax dans la littérature latine, on peut choisir de conserver la scansion étymologique du mot, mais on doit alors ajouter à la fin du vers une particule –que qui rend seule la métrique du vers correcte. Si l’on conserve le vers en l’état, on doit scander long le o de Hippocrenes, et l’on se trouve alors devant un vers à clausule spondaïque, vers dont L. Nougaret recense seulement 59 exemples dans toute la poésie ovidienne (Traité de Métrique Latine, § 114). Nous préférons ajouter une copule finale.

Chapitre II : Corpus ovidianum : aperçu typologique 71



An quĭa, cūm cŏlĕrēnt prīscī stŭdĭōsĭŭs agros   et faceret patrio rure senator opus et caperet fasces a curuo consul aratro   nec crimen duras esset habere manus, rusticus ad ludos populus ueniebat in Vrbem « Il me reste à trouver pourquoi la toge de liberté est donnée aux jeunes gens le jour de ta fête, radieux Bacchus : est-ce parce que toi-même nous te voyons toujours sous les traits d’un enfant ou d’un jeune homme et que tu tiens le milieu entre ces deux âges ? Est-ce parce que tu es père et que les pères confient leurs enfants chéris à ta solitude et à ton pouvoir divin ? Ou encore, est-ce parce que tu es Liber que tu présides à la prise de la toge libre ? Ou parce que, au temps où nos ancêtres cultivaient leurs champs avec plus de soin, où le sénateur travaillait la terre de ses pères, où le consul passait du soc recourbé aux faisceaux du pouvoir, où le fait d’avoir des mains calleuses n’était pas motif de grief, les paysans venaient à Rome assister aux jeux ? »

La symétrie de construction du début de cet échange est remarquable, ainsi que les rimes et assonances finales qui le structurent : detur tuo uideris tibi natos tuis te

assonance rime écho

paranomase

iter

Les mêmes jeux se retrouvent au centre des vers : ipse puer // aetas // pater es // curae // liber // uitae //

tandis que la seconde partie des vers est le lieu d’un accroissement du volume verbal : iŭuĕnīsquĕ / īntĕr ŭtrūmquĕ / nūmĭnĭbūsquĕ / lībĕrĭōrĭs.

72

Partie I : Typologie de la prière

L’art d’Ovide se rapproche ici de la célébration hymnique, comme dans cette autre demande de renseignements : Fastes V, 183-192 Mātĕr, ădēs,//T flōrūm,//P lūdīs cĕlĕbrām dă iŏcŏsīs.   Dīstŭlĕrām pārtēs // mēnsĕ prĭōrĕ tŭās ; Incĭpĭs Āprīlī,//P trānsīs īn tēmpŏră Māiī :   Āltēr tē //T fŭgĭēns,// cūm uĕnĭt, āltĕr hăbēt. Cūm tŭă sīnt //T cēdāntquĕ //F tĭbī //H cōnfīnĭă mēnsūm,   Cōnuĕnĭt īn lāudēs // īllĕ uĕl īllĕ tŭās. Cīrcŭs ĭn hūnc ēxīt //P clāmātăquĕ pālmă thĕātrīs ;   Hōc quŏquĕ cūm Cīrcī // mūnĕrĕ cārmĕn ĕāt. Īpsă dŏcē //T quāe sīs ://P hŏmĭnūm sēntēntĭă fāllāx ;   Ōptĭmă tū //T prŏpĭī // nōmĭnĭs āuctŏr ĕrīs. « Viens, Mère des Fleurs, toi que nous devons célébrer par des jeux plaisants. J’avais différé ce qui te revenait en part, le mois précédent. Tu commences en avril, et te prolonges au mois de mai. L’un des deux mois te voit fuir, quand l’autre te voit arriver. Comme les frontières de ces mois sont tiennes, et le cèdent devant toi, l’un ou l’autre de ces mois convient à ta louange. En ce mois se terminent les jeux du Cirque et la palme est décernée dans les théâtres ; que mon chant accompagne aussi les jeux du Cirque. Apprends-nous toi-même qui tu es : car la science des hommes est trompeuse. Tu seras la plus à même de nous donner le nom qui te convient le mieux. »

Pour s’adresser à la mère des fleurs, Ovide introduit la seule césure trochaïque troisième de ces demandes de renseignements, et choisit une structure que l’on retrouve fréquemment dans ses œuvres : il encadre sa demande de deux prières par lesquelles il sollicite la bienveillance de la déesse : v. 183 v. 192

Mātĕr, ădēs,//T flōrūm,//P lūdīs cĕlĕbrām dă iŏcŏsīs Ōptĭmă tū //T prŏpĭī // nōmĭnĭs āuctŏr ĕrīs

Enfin le terme laudes (v. 188), qui constitue comme un centre autour duquel évoluerait l’invocation, la fait glisser vers l’hymne, qui se surimpose ici à l’artificielle demande de renseignements.



Chapitre II : Corpus ovidianum : aperçu typologique 73

Demande de faveur pour une œuvre littéraire Si la demande de renseignements reste à la marge du religieux, un autre procédé narratif utilisé par Ovide pour dynamiser son récit offre, quant à lui, plus d’épaisseur spirituelle. Il s’agit des demandes de faveur pour une œuvre littéraire. Ces demandes sont le fait du narrateur ovidien, quelle que soit l’œuvre dans laquelle elles apparaissent. Ce type de requête, comme les demandes de renseignements, est quasi circonscrit aux Fastes76, seule œuvre ovidienne à ne pas en proposer une occurrence unique. Ovide place donc de manière sporadique son œuvre sous la bienveillante protection de divinités traditionnellement proches des arts. Il invoque les Muses, Bacchus et Minerve, ainsi que les allégories Elégie et Tragédie : Fastes II, 359-360, Muse Āddĕ pĕrēgrīnīs //P cāusās,//H mĕă Mūsă, Lătīnās īnquĕ sŭō nōstēr // pūluĕrĕ cūrrăt ĕquūs. « Ajoute, ô ma Muse, à ces traditions étrangères, une cause Latine, et que mon coursier courre sur son propre sable. »

Fastes VI, 798, Muses Pīĕrĭdēs cōeptīs // āddĭtĕ sūmmă mĕīs ! « Soutenez-moi, Piérides, jusqu’à la fin de mes chants. »

Fastes VI, 483-484, Bacchus Bācchĕ răcēmĭfĕrōs //P hĕdĕrā rĕdĭmītĕ căpīllōs, Sī dŏmŭs īllă tŭā (e)st,// dērĭgĕ uātĭs ŏpūs ! « Ô Bacchus à la cheveflure ceinte de lierre et de pampres, s’il est vrai que cette famille est la tienne, dirige l’entreprise du poète. »

Fastes III, 789-790, Bacchus Mītĕ căpūt,//T pătĕr, hūc //P plācātăquĕ cōrnŭă uērtās ēt dēs īngĕnĭō // uēlă sĕcūndă mĕō. «  Tourne vers moi ta tête, ô Père, et montre-moi des cornes apaisées. Donne à la voile de mon génie un vent favorable. »

76. Corpus : 10 extraits des Fastes, 1 des Métamorphoses, 1 des Amours et 1 de l’Ars Amatoria.

74

Partie I : Typologie de la prière

Fastes VI, 652, Minerve Nūnc ădĕs ō, cōeptīs,// flāuă Mĭnēruă, mĕī ! «  Maintenant assiste-moi, bonde Minerve, dans l’œuvre que j’ai entreprise ! »

Amours III, 1, 61-68 Elégie et Tragédie Desierat. Coepi : « per vos utramque rogamus,   in vacuas aures verba timentis eant. Altera me sceptro decoras altoque cothurno ;   iam nunc contacto magnus in ore sonus. Altera das nostro victurum nomen amori,   ergo ades et longis versibus adde brevis ! Exiguum vati concede, Tragoedia, tempus !   Tu labor aeternus ; quod petit illa, breve est. » « Je commençai : ‘Je vous en prie, toutes deux, que les paroles de celui qui les prononce avec crainte tombent dans dex oreilles disponibles. L’une m’affuble d’un sceptre et de hauts cothurnes ; désormais, un son distingué s’élève de ma bouche ainsi touchée. Mais l’autre me donne d’être appelé vainqueur dans ma lutte amoureuse  : assiste-moi et ajoute un vers bref aux vers longs. ! Accorde au poète un petit morceau de temps, Tragédie ! Le travail que tu nous demandes est éternel, mais ce qu’elle demande, elle, est bref.’ »

Mais l’attrait d’Ovide pour les douceurs de l’amour l’engage à solliciter aussi les faveurs de ses divinités tutélaires : Fastes IV, 1, Vénus Ālmă făuē,//T dīxī,//P gĕmĭnōrūm mātĕr Ămōrūm. « Douce Mère des Amours, sois moi propice. »

Fastes V, 377-378, Flore Flōrĕăt ūt tōtō //P cārmēn //H Nāsōnĭs ĭn āeuō, Spārgĕ, prĕcōr,//T dōnīs // pēctŏră nōstră tŭīs ! « Pour que le chant de Nason fleurisse dans toute l’étendue des siècles, répands, je t’en prie, tes dons sur mon cœur. »

Ars Amatoria I, 30 Vera canam ; coeptis, mater Amoris, ades.



Chapitre II : Corpus ovidianum : aperçu typologique 75 « La vérité, voilà ce que je chanterai ; Mère de l’Amour, favorise l’œuvre que j’ai entreprise. »

Une autre organisation peut aussi être choisie pour l’interprétation de ces courtes prières. M. von Albrecht rappelle, dans l’article qu’il consacre aux « Dieux et [à] la religion dans les Métamorphoses d’Ovide »77, qu’Ovide « aime à exalter l’importance des fils de Vénus […] à partir du dieu Amour jusqu’à César »78. Et, par une subtile démonstration, il rattache Bacchus au monde vénusien, par l’intermédiaire d’abord de la ville de Thèbes, « sa ville natale, dont les divinités tutélaires sont Mars et Vénus », divinités tutélaires de Rome également. « Comme César, il est un descendant de Vénus », et est aussi « une divinité de l’inspiration poétique »79. Quoi qu’il en soit, l’analyse finale fait toujours ressortir la place centrale de Vénus, qui est le noyau cohérent autour duquel évolue une nébuleuse de divinités favorisées par Ovide. La situation des Fastes est, à cet égard, un peu particulière. La thématique amoureuse y est – de même que dans le Contre Ibis – bien plus discrète que dans les autres œuvres ovidiennes, et d’autres divinités, à la fois plus solennelles et plus romaines, prennent de l’importance. Chacun des chants des Fastes est placé sous le patronnage d’une divinité. Le chant inaugural est ainsi placé sous un double regard, celui de Janus et de Carmenta, dont le rôle est particulièrement amplifié par le poète : I, 287-288, Janus Iānĕ făc āetērnōs //P pācēm pācīsquĕ mĭnīstrōs Nēuĕ sŭūm, //T prāestā,// dēsĕrăt āuctŏr ŏpūs. « Janus, rends éternels la paix et ceux qui l’établissent et fais, je t’en supplie, que l’auteur n’abandonne pas son œuvre. »

I, 467-468, Carmenta Īpsă mŏnē,//T quāe nōmĕn //F hăbēs //H ā cārmĭnĕ dūctūm, Prōpŏsĭtōquĕ făuē,// nē tŭŭs ērrĕt hŏnōr. « Instruis-moi toi-même, toi qui tires ton nom du chant poétique, et sois propice à mon entreprise, afin que l’honneur que je te rends ne s’égare pas. »

77. M. von Albrecht (272), « Les dieux et la religion dans les Métamorphoses d’Ovide ». 78. ibid., p. 7. 79. ibid. p. 8.

76

Partie I : Typologie de la prière

Ovide s’était déjà présenté dans les Amours comme un contempteur de la guerre, à laquelle il préférait les combats amoureux. Or Janus accepte, dans la religion romaine, la charge symbolique de gardien de la paix, qui s’épanouit quand se closent les portes de son temple. C’est sur cette fonction du dieu qu’insiste Ovide par la reprise en polyptote du terme pax, qu’il enserre dans un syntagme dont une composante est antéposée en facteur commun : Iānĕ făc āetērnōs pācēm pācīsquĕ mĭnīstrōs. On retrouve ici les jeux phoniques si fréquents dans les prières, où s’imbriquent homéotéleutes et allitérations, la fin et le commencement, dans un cercle magique mis en mouvement par le verbe introducteur, monosyllabique et irrégulier. Le rôle confié à Janus par Ovide, qui s’engage avec lui dans un long dialogue maïeutique, n’étonne pas si l’on garde à l’esprit une des premières questions que pose au dieu le poète : Fastes I, 171-172 Mōx ĕgŏ, « Cūr,//T quāmuīs //P ălĭōrūm nūmĭnă plācēm Iānĕ, tĭbī //T prīmūm // tūră mĕrūmquĕ fĕrō ? » « Pourquoi, alors même que je veux me concilier d’autres divinités, estce à toi, Janus, que j’offre d’abord l’encens et le vin ? »

Cette primauté de Janus, assez nettement établie dans la religion romaine et son rituel précatif80, justifie la place que lui accorde Ovide au début des Fastes, même si le poète n’adopte pas – comme nous le verrons lorsque nous nous intéresserons au corps des dieux et à leur présence physique lors de l’émission des prières ovidiennes – une attitude révérencieuse et exempte de malice. « Le début des Fastes est indissociable de [l’] éloge du Prince comme pacificateur (vs. 277-288). Ovide présente ce dieu comme le maître d’un cosmos duel qui fait régner la Paix sur la terre tandis que les maîtres du monde et de l’heure le désirent. Le Livre est mis sous le signe de ce dieu, Chaos-Janus

80. On pourra consulter la synthèse que propose à ce sujet B. Liou-Gille, Une lecture religieuse de Tite-Live, p. 150, ainsi que les pages que consacrent à cette question P. Grimal, Le Dieu Janus et les origines de Rome, Lettres d’Humanité, 4, 1945 ; G. Dumézil, De Janus à Vesta, dans Tarpeia, Paris, 1947, p. 31-113 ; R. Schilling, « Janus, le dieu introducteur, le dieu des passages », MEFR 72, 1960, p. 89-131 ; G. Capdeville, « Les épithètes cultuelles de Janus », MEFR 85, 1973, p. 395-436 ; R. Syme, « Problems about Janus », American Journal of Philology, 100, 1979, p. 188-212 ; P. Hardie, « The Janus episode in Ovid’s Fasti », Materiali e discussioni par l’analisi dei testi classici, 26, 1991 p. 47-64 ; et la synthèse faite par J. Haudry devant les membres de la Société des Etudes Latines, publiée dans la R.E.L. 83 (2005), p. 36-54.



Chapitre II : Corpus ovidianum : aperçu typologique 77

devenu Cosmos, le premier dieu de la terre ausonienne, le premier dieu du calendrier romain »81. L’honneur fait à Carmenta pourrait en revanche parraître excessif. Elle est pourtant la figure divine dominante de la seconde partie du chant inaugural des Fastes. Ovide propose une étymologie de son nom qui semble être correcte, et qui justifierait alors, par une reconnaissance spéculaire, l’attention qu’il lui porte : Fastes I, 467 Īpsă mŏnē,//T quāe nōmĕn //F hăbēs //H ā cārmĭnĕ dūctūm

Vieille divinité que l’on a rattachée au panthéon étrusque, protectrice des femmes, déesse accoucheuse et prophétesse, Carmenta devait intéresser le poète de l’amour et des rites sacrés. Il lui demande donc de lui être favorable. Cette idée est portée par l’impératif faue que l’on retrouve dans un certain nombre de ces prières spécifiques : Fastes I, 468, Ovide à Carmenta Prōpŏsĭtōquĕ făuē,// nē tŭŭs ērrĕt hŏnōr

Fastes IV, 1, Ovide à Vénus Ālmă făuē,//T dīxī,//P gĕmĭnōrūm mātĕr Ămōrūm

Fastes VI 249, Ovide à Vesta Vēstă, făuē ://T tĭbĭ nūnc //P ŏpĕrātă rĕsōluĭmŭs ōrā82

Carmenta et Janus sont, selon A. Deremetz, caractéristiques de la « dimension sui-référentielle »83 de la prière. « Le panthéon divin regroupe, en effet, des dieux qui semblent appartenir à au moins trois classes énonciatives distinctes. Il y a ceux qui relèvent du dit […] et ceux qui relèvent du dire […]. Les uns sont concernés par le procès qu’évoque l’énoncé (l’objet de la demande, ses auteurs…), les autres par celui de son énonciation, à savoir la prière ellemême comme acte de parole. Certains enfin le sont par les deux à la fois »84. A. Deremetz rattache Carmenta à la deuxième catégorie, comme une « abstraction verbale divinisée », et Janus à la troisième, de même qu’Apollon et 81. A. Videau (255), La poétique d’Ovide, p. 203. 82. Il faut y ajouter l’hymne à Bacchus, III, 714 : Bacche, faue uati, dum tua festa cano. 83. A. Deremetz (336), « La prière en représentation à Rome », p. 160. 84. ibid., p. 160.

78

Partie I : Typologie de la prière

Vesta. « Des liens rituels et théologiques étroits relient la déesse »85 Carmenta et Janus, tous deux associés à l’idée de procréation, de production. Ovide interroge donc deux divinités qui ont partie liée avec la création poétique, ou du moins avec l’acte de parole, et en particulier avec l’acte de parole ritualisé et performatif qui se réalise dans la prière.

Demandes d’aide ou de faveur Si l’on excepte la prière de louange, les hommes mêlent les dieux à leur destin quand ils sont confrontés à une difficulté qui leur semble insurmontable, ou pour se concilier, d’une manière générale, une faveur surnaturelle. Ils peuvent aussi demander de l’aide à des mortels dont l’action peut leur être utile ponctuellement. Les femmes par exemple doivent avoir recours à des forces supérieures qui les protègent. Ainsi Dioné et Ino : Fastes II, 469-470, Dioné Ūtquĕ sĭnū//T tĕnŭīt //P nātūm,//H « sūccūrrĭtĕ, nymphāe, ēt dīs āuxĭlĭūm // fērtĕ dŭōbŭs ! » ăīt

Fastes VI, 517, Ino Dique uirique loci, miserae succurrite matri !

La proximité des deux formulations est patente, ainsi que celle des circonstances qui provoquent l’émission de l’appel : plus que pour leur propre vie, ces mères craignent pour l’existence de leur enfant. C’est en effet cette dimension maternelle que met en relief la métrique verbale : //P natum,//H « sūccūrrĭtĕ  succurrite matri.

Cette formule désespérée trouve un écho dans un certain nombre d’invocations, dans lesquelles Ovide utilise la désinence de l’impératif pluriel en premier terme de la clausule de l’hexamètre86 : Fastes III, 309 Tūm Nŭmă : « Dī nĕmŏrūm,//P fāctīs īgnōscĭtĕ nōstrīs,

85. ibid. p. 161. 86. Il faut y ajouter Fastes I, 677 ; I, 681 ; I, 685.

Chapitre II : Corpus ovidianum : aperçu typologique 79



Fastes III, 311 Quōquĕ mŏdō pōssīt //P fūlmēn,//H mōnstrātĕ, pĭārī.

Fastes IV, 829 Quōsquĕ pĭūm (e)st//P ădhĭbērĕ //F dĕōs,//H āuērtĭtĕ cūncī.

Les verbes employés ici sont pour certains purement ovidiens, comme l’impératif ignoscite, qu’Ovide est le seul à utiliser en poésie et qu’il fait toujours entendre à la même place métrique, en fin de vers, avant un dissyllabe final. Les autres appartiennent au vocabulaire poétique de la prière, comme auertite que l’on retrouve chez Virgile en contexte précatif87. Le corpus de demandes d’aide ou de faveur se compose comme suit : Destinateur

Locus

Mars et Auguste Jupiter

Narrateur

Ars amat. I, 203-204 Ars amat. II, 38

2

h→d

1

h→d

Apollon Phoebus, Bacchus et les Muses Muse

Narrateur

Ars amat. III, 347-348

2

h→d

Narrateur

2

h→d

Janus

Narrateur

Ars amat. III, 467-468 Fastes I, 65-70

6

h→d

Paix et gens Iulia Junon Lucina Nymphes

Narrateur

Fastes I, 7ll-722

12

h→d

Narrateur

Fastes II, 449-452

4

h→d

Dioné

Fastes II, 469-470

2

h→d

dieux pour César

Narrateur

Fastes II, 63-66

4

h→d

Destinataire

Dédale

Nbe Dieu/ de vers humain

Type de prière demande de faveur demande d’aide/faveur demande de faveur demande d’aide demande de faveur demande de faveur demande d’aide demande d’aide demande de faveur

87. Virgile, Enéide, III, 265 : « Di, prohibete minas ; di, talem auertite casum » et Enéide, III, 620 : « (sidera) Di talem auertite pestem ! ».

80

Partie I : Typologie de la prière

Destinateur

Locus

Mars

Narrateur

Fastes III, 1-10

10

h→d

Junon Lucina dieux des buissons Vesta

Narrateur/ Femmes Numa

Fastes III, 256

1

h→d

3

h→d

Narrateur

Fastes III, 309-311 +C Fastes III, 426 + C

1

h→d

Pallas

Narrateur

Fastes III, 847-848

2

h→d

Vénus

Narrateur

Fastes IV, 161-162

2

h→d

étoiles

Cérès

Fastes IV, 577-579

3

d→/

Palès

Narrateur

Fastes IV, 723-724

2

h→d

Quirinus

Narrateur

Fastes IV, 807-808

2

h→d

Jupiter, Mauors et Vesta Vesta

Romulus

Fastes IV, 827-832 +C

6

h→d

Narrateur

Fastes VI, 249-250

2

h→d

Ino

Fastes VI, 517

1

h→d

8

h→d

Destinataire

Dieux Ino

Prophétesse Fastes VI, 541-548

Nbe Dieu/ de vers humain

Di

Narrateur

Ibis, 641-642

2

h→d

Thémis

Deucalion

Méta I, 377-380 +C

4

h→d

Père de Daphné Battus

Daphné

Méta I, 545-546

2

d→d

Mercure

Méta II, 699-701

3

d→h

Acétès (Bacchus)

Méta III, 611-614 +CC’

4

h→d

Bacchus

Type de prière demande de faveur Demande d’aide Demande d’aide Demande d’aide Demande d’aide Demande d’aide demande d’aide demande de faveur (+rituel) demande de faveur demande de faveur demande de faveur demande d’aide demande de faveur demande de faveur demande d’expiation et de secours demande d’aide demande d’aide demande de faveur

Chapitre II : Corpus ovidianum : aperçu typologique 81



Destinateur

Locus

Autonoé

Penthée

2

h→h

Neptune

Vénus

Méta III, 719-720 +C Méta IV, 532-538 +C

7

d→d

Destinataire

Nbe Dieu/ de vers humain

Cérès

Aréthuse

Méta V, 489-497 +C

9

d→d

Diane

Aréthuse

3

/d → d

3

h→d

3

/d → d

Dieux (di)

Ilionée

Hécate

Médée

Méta V, 618-620 +C Méta VI, 262-264 + CC’ Méta VII, 176-178

Jupiter magne pater Isis

Eaque

Méta VII, 620-621

2

/d → d

Méta IX, 773-781 + C’ Méta X, 320-324 +CC’ Hippomène Méta X, 640-641 +C Hippomène Méta X, 673 +C

9

h→d

5

h→d

2

h→d

1

h→d

Méta XII, 120-121 +C Méta XIII, 669 + CC’ Méta XIII, 880881 + C Méta XV, 39-40

2

/h → d

1

h→d

2

h→d

2

h → /d

Dieux (Di) Vénus Vénus

Téléthuse (Iphis) Myrrha

NC

Achille

Bacchus Galatée

Filles d’Anius Acis

Hercule

Myscelos

Type de prière demande d’aide demande d’aide/ intervention demande d’expiation/ pitié demande d’aide demande d’aide demande d’assistance et de faveur demande de faveur demande d’aide demande d’aide demande d’aide/faveur demande d’aide/faveur demande d’aide demande d’aide demande d’aide demande d’aide

Que demande-t-on aux dieux et aux hommes dont on sollicite l’aide ou la bienveillance ? On requiert d’abord leur présence (ades), leur secours (succurrite, auertite), leur conseil (monstrate), leur faveur générale (faue). Dans les Métamorphoses, Vénus est la seule divinité qui recourre ouvertement à ce procédé. Elle sollicite Neptune afin qu’il la seconde dans son action :

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Partie I : Typologie de la prière

Métamorphoses IV, 532-538 sic patruo blandita suo est « o numen aquarum, proxima cui caelo cessit, Neptune, potestas, magna quidem posco, sed tu miserere meorum, iactari quos cernis in Ionio inmenso, et dis adde tuis. Aliqua et mihi gratia ponto est, si tamen in medio quondam concreta profundo spuma fui Graiumque manet mihi nomen ab illa. » « Elle flatta ainsi son oncle : ‘ô divinité des eaux, toi dont la puissance le cède de peu à celle du Ciel, ô Neptune, je demande certes beaucoup, mais prends pitié des miens, que tu vois ballotés dans l’immense mer Ionienne, et ajoute-les au nombre de tes divinités. J’ai moi-même quelque affinité avec la mer, s’il est vrai que, écume, j’ai été formée jadis au milieu de ses profondeurs et que de là me reste le nom grec que je porte.’ »

Tous les autres orants sont des hommes ou des héros, ou encore des divinités déguisées en humains, dont elles adoptent le langage. Dans les Fastes, la situation est nettement différente, en raison principalement du rôle prépondérant du narrateur, qui assume 12 demandes de ce type sur 18. Les demandes de faveur du narrateur reçoivent la même formulation que celles des personnages88 alors que leur contexte et leurs motivations sont très différents : le narrateur ne sollicite jamais les dieux dans une situation de danger, mais leur adresse des prières de propitiation vagues, dont l’objet récurrent est rattaché à la trame de son récit plus qu’à sa situation propre d’individu. C’est bien le narrateur des Fastes qui prononce ces prières, et non Ovide en tant que personnage historique réel, quoique ces deux identités, ces deux « personnes » ne soient pas inconciliables. Un rapide aperçu de ces énoncés permet de voir la place qu’y tient l’écriture en formulaire, dont nous verrons qu’elle relève autant du carmen ancien et traditionnel que de l’intertextualité poétique et de l’écriture ovidienne dans sa singularité. On demande aux dieux une aide active : Métamorphoses I, 377-380 prière de Deucalion Atque ita « Si precibus » dixerunt « numina iustis uicta remollescunt, si flectitur ira deorum, dic, Themi, qua generis damnum reparabile nostri arte sit, et mersis fer opem, mitissima, rebus ! » 88. Voir plus loin, l’analyse du lexique précatif ovidien.



Chapitre II : Corpus ovidianum : aperçu typologique 83

Métamorphoses I, 545-547 demande de Daphné à son père « Fer, pater, » inquit « opem ! Si flumina numen habetis, qua nimium placui, mutando perde figuram ! »

Métamorphoses II, 699-701 demande de Mercure à Battus « Rustice, uidisti si quas hoc limite » dixit « ire boues, fer opem furtoque silentia deme ! Iuncta suo pretium dabitur tibi femina tauro. »

Métamorphoses III, 719-720 demande de Penthée à sa mère Autonoé saucius ille tamen « Fer opem, matertera » dixit « Autonoe ! Moueant animos Actaeonis umbrae ! »

Métamorphoses V, 618-620 demande d’Aréthuse à Diane fessa labore fugae « Fer opem, deprendimur, » inquam « armigerae, Diana, tuae, cui saepe dedisti ferre tuos arcus inclusaque tela pharetra ! »

Métamorphoses VIII, 601 demande d’Achéloüs à Neptune Adfer opem mersaeque precor feritate paterna

Métamorphoses IX, 773-781 demande de Téléthuse à Isis « Isi, Paraetonium Mareoticaque arua Pharonque quae colis, et septem digestum in cornua Nilum : fer, precor, » inquit « opem, nostroque medere timori !

Métamorphoses XIII, 669-672 demande des filles d’Anius à Bacchus bracchia « Bacche pater, fer opem ! » dixere, tulitque muneris auctor opem, si miro perdere more ferre uocatur opem, nec qua ratione figuram perdiderint, potui scire aut nunc dicere possum ;

Métamorphoses XIII, 880-881 demande d’Acis à Galatée et « Fer opem, Galatea, precor, mihi ! Ferte, parentes, » dixerat « et uestris periturum admittite regnis ! »

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Partie I : Typologie de la prière

Métamorphoses XV, 39-40 demande de Myscelos à Hercule « O cui ius caeli bis sex fecere labores, fer, precor » inquit « opem ! Nam tu mihi criminis auctor. »

De cette dernière formule, on ne peut manquer de rapprocher la demande qu’adresse Junon à Flore, au moment où elle met à exécution son projet de parthénogénèse, Fastes V, 249-250 : « Fer, precor, auxilium » dixit « celabitur auctor Et Stygiae numen testificabor aquae. » « ‘Apporte-moi ton aide, je t’en prie’, dit-elle, ‘et je ne le révèlerai pas, j’en ferai le serment par les eaux du Styx.’ »

Cette formulation, dont nous étudierons plus en détail les occurrences dans une autre partie, est emblématique de la demande d’aide de l’œuvre cohérente que sont les Métamorphoses. La retrouve-t-on dans les autres œuvres ovidiennes ? On la retrouve seulement sous une forme équivalente dans une prière des Héroïdes (XXI, 175-176), par laquelle Cydippe supplie Diane de lui venir en aide : Daque salutiferam iam mihi fratris opem

Mais sous une forme proche89, dans le fil de la narration, une telle demande est pléthorique dans l’œuvre ovidienne, et se retrouve aussi en abondance chez d’autres auteurs (principalement Salluste, Tite-Live et Sénèque), ce qui fait d’elle une posture essentielle du dialogue précatif. Toutefois, on peut remarquer qu’1/4 des emplois recensés dans la base de donnée de la Faculté de Louvain – qui recense une grande partie de la littérature latine classique – sont ovidiens : sur 422 occurrences du terme opem, 97 apparaissent 89. Quelques exemples, non exhaustifs : opem tulit (Amours III, 11 ; Métamorphoses VIII, 177 ; Fastes VI, 625), opem ferret ou ferrent (Tite-Live XXI, 56 ; Fastes 2, 400), opem ferat (Métamorphoses XI, 399), orat opem (Héroïdes XII, 60), opem ferre (Tite-Live III, 17 ; 22, 56 ; Métamorphoses XIII, 671 ; Héroïdes X, 20 ; 20, 230), exposcit opem (Tristes I, 11, 20), poscit opem (Métamorphoses X, 213), tulisset opem (Amours I, 7), opem querebaris (Fastes VI, 760), promittere opem (Fastes V, 245), ferebat opem (Fastes III, 670 ; Tristes, I, 5, 70), temptat opem (Fastes III, 795), edat opem (Fastes III, 855), opem sustulit (Cicéron, de Natura Deorum, 1, 43), opem laturos (Tite-Live III, 6) ad ferendam opem (Tite-Live 2, 33 ; 22, 13), opem petisse (Tite-Live V, 8), et d’autres formes encore, en d’autres lieux. Sénèque reprendra dans ses tragédies l’impératif cher à Ovide : Phèdre, 940 : Fer abominandam nunc opem gnato, parens ; 720 : fer opem nefandi raptor Hippolytus stupri ; Œdipe, 1050 : Ite, ferte depositis opem.



Chapitre II : Corpus ovidianum : aperçu typologique 85

dans des œuvres ovidiennes ; et pour le terme opemque, la proportion est plus élevée encore, puisque sur 19 occurrences, 10 sont ovidiennes. D’autres verbes sont caractéristiques de la demande d’aide ou de faveur (adesse – par les formes ades et adsis, principalement – fauere – par les formes faue, fauete, faueas – et les verbes plus précis, tels que succurere (succurite), aduertere (aduertite), supprimere (supprime), respicere, tuere, prohibere, parcere, et la liste n’est pas exhaustive), mais nous retardons leur étude, étant donné qu’ils seront au cœur des analyses qui tenteront de définir les caractéristiques formelles des énoncés précatifs ovidiens. Cette écriture formulaire, au-delà de sa charge rituelle, permet d’établir au sein de chaque œuvre ovidienne, et entre les œuvres elles-mêmes, des jeux d’écho qui sont autant de fils invisibles tissant touche par touche la magnifique toile arachnéenne de la poésie ovidienne.

Les Pétitions variées, et les prières longues et complexes Elles pourraient apparaître comme le modèle par excellence de la prière. A. Ernout et A. Meillet90 apparentent en effet le lexème prex au verbe posco, demander91. Dans la formulation des pétitions, les disparités entre les œuvres sont patentes. Les Fastes, par exemple, sont quasi exempts de pétitions variées, tandis qu’ils abondent en demandes de renseignements et en demandes de faveur, le plus souvent assumées par le narrateur92. Dans les œuvres d’une plus dense coloration fictionnelle, en revanche, les personnages prennent plus volontiers la parole pour adresser des requêtes aux dieux, ou à d’autres mortels.

90. A. Ernout & A. Meillet (764), Dictionnaire étymologique. 91. De même oro, orare, acceptait deux sens anciens : d’une part « prononcer une formule religieuse, prier », d’autre part « plaider ». 92. Celui qui, dans les Fastes, adresse aux divinités le plus grand nombre de suppliques brèves est incontestablement le narrateur lui-même. Sur les 90 prières que compte l’œuvre, 84,4 % sont des demandes circonstanciées, soit 76 pièces qui se divisent en 18 demandes d’aide ou de faveur, 38 demandes de renseignements et 10 demandes que le narrateur adresse aux dieux pour qu’ils soutiennent son œuvre. Sur ces 76 prières, 67 sont à attribuer au poète lui-même, ou au narrateur qui incarne sa voix. Seules 9 sont assumées par des personnages : Numa (3), Ino (2), Cérès, Dioné, Romulus et une prophétesse.

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Partie I : Typologie de la prière

C’est ainsi dans les Amours et dans les Métamorphoses que l’on trouve le plus grand nombre de pétitions. Si le narrateur-persona des Amours en prononce la majeure part, les Métamorphoses multiplient quant à elles les personnages, dans un mouvement conforme au foisonnement de l’œuvre : Métamorphoses II, 35-39 Phaeton demande à Jupiter des gages de sa filiation IV, 154-161 Thisbé demande à être unie au tombeau de son amant Pyrame III, 405 Sémélé veut voir Jupiter en gloire VII, 164-168 Jason prie Médée de prolonger la vie de son père mourant VI, 482-483 Minos requiert d’Eaque une aide militaire VII, 627-628 Eaque, émerveillé par un prodige, prie Jupiter VII, 615-618 Eaque supplie Jupiter lors de la peste d’Egine VII, 852-856 Procris demande à Céphale de lui rester fidèle VIII, 724  Lelex demande aux dieux de prendre soin de Philémon VIII, 778-778  Les Dryades demandent à Cérès l’expiation d’Erysichtho VIII, 850-851 Mnestra prie Neptune de lui permettre d’échapper aux effets de la voracité de son père X, 274-276 Pygmalion voudrait que Vénus lui donnât femme X, 320-324 Myrrha veut expier son forfait XI, 102-103 Midas fait la folle demande du toucher d’or XI, 132-133 Le même roi demande à en être délivré XIV, 586-591 Vénus requiert l’immortalité pour Iule, son descendant XIV, 729-732 Iphis demande aux dieux de rendre possible son mariage

Amours I, 14, 27-30 Que Corinne épargne ses cheveux ! II, 8, 19-20 Le narrateur demande à Vénus d’oublier son serment II, 16, 47-50 Pour le retour de Corinne II, 17, 23-25 Le narrateur demande à Corinne de l’accueillir III, 3, 47-48 Le narrateur demande à la jeune femme d’éviter de se parjurer



Chapitre II : Corpus ovidianum : aperçu typologique 87

Comme ces listes permettent de le voir, les pétitions simples ont des objets variés, et peuvent couvrir tous les champs de la demande93. Leur lexique sera, par voie de conséquence, lui aussi très diversifié, ce qui n’est pas le cas des types particuliers de pétitions que sont les demandes de renseignements, les demandes d’aide et de faveur, ou les demandes de faveur pour une œuvre littéraire. Les trois œuvres majeures de notre corpus, les Amours, les Métamorphoses et les Fastes, offrent des prières d’une certaine ampleur, prononcées soit par le narrateur soit, le plus souvent, par un personnage. Nous donnerons ici deux exemples enchâssés, qui permettront de présenter dans le même temps deux catégories de notre corpus, la prière complexe et la prière amoureuse, la seconde n’étant bien évidemment qu’un sous-groupe thématique de la première, dont aucune différence stylistique marquante ne la distingue. Une brève analyse de la prière que Vertumne, dieu protéiforme et amoureux, adresse à Pomone au chant XIV des Métamorphoses, permettra de poser d’importants jalons, tels que le rôle et la construction de l’argumentation dans la prière, l’humour d’Ovide qui s’exerce jusque dans ces énoncés pourtant plus sérieux que d’autres topiques de ses œuvres, la place occupée par les rythmes et les sonorités dans ces vers incantatoires, et la dimension souvent réflexive et métapoétique de l’énoncé précatif ovidien. Cette prière peut être prise comme emblème des prières longues que l’on peut trouver dans l’œuvre ovidienne. Vertumne et l’Anio Les prières des dieux masculins semblent étonnamment inefficaces  : Apollon implore Daphné sans réussir à arrêter sa fuite, Polyphème compose un long chant pour Galatée sans parvenir à attendrir son cœur94, et la prière de l’Anio restera infructueuse. Seul Vertumne sera plus heureux et saura gagner le consentement de Pomone. Mais cette prière de Vertumne n’est que la conclusion d’une longue parabole qui constitue autant un exemplum frappant qu’une menace manifeste. Le dieu souligne d’ailleurs la leçon que la jeune femme courtisée doit lire dans le récit qu’elle vient d’entendre : Métamorphoses XIV, 759-764 Neue ea ficta putes, dominae sub imagine signum seruat adhuc Salamis, Veneris quoque nomine templum 93. Mais on peut remarquer aussi qu’en dernière instance la plupart de ces demandes sont des appels à l’aide, et sont très proches des prières que nous avons classées dans ce groupe. 94. Pour une analyse stylistique partielle de ce chant, voir notre article « L’eau et le rocher ou le double portrait paradoxal du chant de Polyphème (Métamorphoses XIII, 789-869) », REL, 2005.

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Partie I : Typologie de la prière prospicientis habet. Quorum memor, o mea, lentos pone, precor, fastus et amanti iungere, nymphe : sic tibi nec uernum nascentia frigus adurat poma, nec excutiant rapidi florentia uenti ! « Mais ne pense pas que ce soient des fables ! Salamine conserve encore aujourd’hui une statue à l’image de sa maîtresse [Anaxarète] et aussi un temple de Vénus, dite Vénus Contemplatrice. Souviens-toi, ma chère nymphe, de cette aventure, renonce à tes éternels dédains et unis-toi à celui qui t’aime. Alors, puissent les gelées du printemps ne pas brûler tes fruits naissants, et les vents violents ne pas emporter leurs fleurs. »

Cette aventure se distingue nettement de l’atmosphère élégiaque qui nimbait celles d’Apollon et Daphné, ou de l’Anio et Ilia. Cette dernière s’oppose aux paroles de Vertumne et met en relief leur particularité. Quel langage l’Anio tient-il à la triste Ilia, qui se désole sur ses rives après l’attentat de Mars ? Amours, III, 6, 49-66 Illa gemens patruique nefas delictaque Martis   errabat nudo per loca sola pede. Hanc Anien rapidis animosus uidit ab undis   raucaque de mediis sustulit ora uadis atque ita « quid nostras » dixit « teris anxia ripas,   Ilia, ab Idaeo Laumedonte genus ? Quo cultus abiere tui ? Quid sola uagaris,   uitta nec euinctas inpedit alba comas ? Quid fles et madidos lacrimis corrumpis ocellos   pectoraque insana plangis aperta manu ? Ille habet et silices et uiuum in pectore ferrum,   qui tenero lacrimas lentus in ore uidet. Ilia, pone metus ! Tibi regia nostra patebit,   teque colent amnes95. Ilia, pone metus ! Tu centum aut plures inter dominabere nymphas ;   nam centum aut plures flumina nostra tenent. Ne me sperne, precor, tantum, Troiana propago ;   munera promissis uberiora feres. » «  Gémissant sur le crime de son parent et sur l’attentat de Mars, elle [Ilia] errait pieds nus en des lieux solitaires. Du fond de ses flots rapides, l’impétueux Anio l’aperçut, du milieu des eaux il fit sortir sa voix 95. Nous préférons la leçon du manuscrit de Saint-Gall (Sangallensis 864), amnes, à celle (omnes) adoptée par l’édition de la CUF d’après le manuscrit P. (Puteanus 8242).



Chapitre II : Corpus ovidianum : aperçu typologique 89 retentissante et parla ainsi : « Pourquoi foules-tu, inquiète, mes rives, Ilia, descendant de Laumédon l’Idéen ? Où est ta parure ? Pourquoi erres-tu seule, et pourquoi une bandelette blanche ne retient-elle plus attachée ta chevelure ? Pourquoi pleures-tu, pourquoi abîmes-tu tes yeux baignés de larmes et frappes-tu de ta main insensée ta poitrine découverte ? Il a du roc ou du fer pur dans le cœur celui qui reste insensible au spectacle de ces larmes sur ton tendre visage. Ilia, cesse d’avoir peur. Mon palais s’ouvrira pour toi et les fleuves te rendront hommage. Ilia, cesse d’avoir peur. Tu seras la maîtresse de cent nymphes, et plus encore ; car c’est plus de cent nymphes que recèlent nos eaux. Ne me dédaigne pas, je t’en prie, c’est tout ce que je demande, fille de Troie, car tu recevras des présents plus abondants encore que mes promesses. »

Le dieu connaît la Vestale, qu’il apostrophe par son nom dès le début de son discours. Les six premiers vers sont une suite de sept questions se répartissant en trois distiques, structurés par des anaphores. Tous ces éléments stylistiques sont au centre des énoncés précatifs : Amours III, 6, 53 atque ita « Quid nostras » dixit « teris anxia ripas,   Ilia, ab Idaeo Laumedonte genus ? Quo cultus abiere tui ? Quid sola uagaris,   uitta nec euinctas inpedit alba comas ? Quid fles et madidos lacrimis corrumpis ocellos   pectoraque insana plangis aperta manu ?

La dernière de ces interrogatives recouvre à elle seule trois questions complémentaires, qui décrivent l’attitude désespérée d’Ilia. Ses gestes sont traditionnels et trouvent de nombreux échos dans les œuvres ovidiennes, et surtout dans les Métamorphoses, où sont fréquents les tableaux de la douleur féminine : Amours III, 6, 57-58 Quid fles et madidos lacrimis corrumpis ocellos   pectoraque insana plangis aperta manu ?

Ouvrons ici une parenthèse. Le motif de la jeune femme manifestant sa douleur par la meurtrissure de sa poitrine et de ses bras (ou des oiseaux la manifestant par les coups de leurs ailes) revient comme un leitmotiv au travers de l’œuvre ovidienne. Quelques exemples suffiront à attester cette récurrence quasi obsessionnelle, à l’origine d’un formulaire poétique :

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Partie I : Typologie de la prière

Métamorphoses II, 584-585 plangere nuda meis conabar pectora palmis

Métamorphoses III, 481 nudaque marmoreis percussit pectora palmis

Métamorphoses V, 473 et repetita suis percussit pectora palmis

Métamorphoses X, 723 rupit et indignis percussit pectora palmis

Amours II, 6, 3 Ite, piae uolucres, et plangite pectora pinnis

On peut citer encore : Métamorphoses IV, 138 percutit indignos claro plangore lacertos

Métamorphoses VI, 248 aspicit Alphenor laniataque pectora plangens

Métamorphoses VI, 533 lugenti similis, caesis plangore lacertis

Métamorphoses VIII, 525-526 uulgusque proceresque gemunt scissaeque capillos

Planguntur matres Calydonides Eueninae Métamorphoses III, 125 sanguineam tepido plangebat pectore matrem

Héroïdes XI, 100 exierat thalamo. Tunc demum pectora plangi



Chapitre II : Corpus ovidianum : aperçu typologique 91

Héroïdes X, 157 Has tibi plangendo lugubria pectora lassas

Le retour de cette topique établit des ponts entre les diverses histoires et crée une mélodie caractéristique. On peut rapprocher ces vers de précédents virgiliens : Enéide XI, 877 puluis, et e speculis percussae pectora matres

Enéide VII, 503 Siluia prima soror, palmis percussa lacertos Enéide IV, 590 terque quaterque manu pectus percussa decorum

Comme le fait remarquer S. Viarre, « Ovide pratique une forme sophistiquée d’imitation qui consiste à s’imiter soi-même à travers d’autres imitations. »96 Mais P. Valéry donne une autre explication, analyse poétique séduisante de ce qui peut apparaître soit comme un phénomène, soit comme un procédé : « Ce sont, au fond, toujours les mêmes problèmes – c’est-à-dire toujours les mêmes attitudes : l’oreille intime tendue vers le possible, vers ce qui va se murmurer ‘tout seul’, et murmuré, redevenir désir ; le même suspens et les mêmes précipitations verbales ; la même orientation de la sensibilité du vocabulaire implexe, comme si tous les mots de la mémoire guettaient leur occasion de tenter leur chance vers la voix. »97 Le goût esthétique d’Ovide l’amène à apprécier le spectacle touchant des larmes et à y rendre sensibles ses personnages masculins. Cette esthétique perdurera longtemps et trouvera chez les auteurs du XVIIIème siècle des amateurs d’un genre particulier, autour de Jean-Jacques Rousseau et des lecteurs de Clarisse Harlowe. Choderlos de Laclos, grand admirateur de La Nouvelle Héloïse, fera par exemple décrire par l’un de ses roués une « charmante figure, embellie encore par l’attrait puissant des larmes » (Les Liaisons Dangereuses, lettre XXIII du vicomte de Valmont à la marquise de Merteuil). 96. «  Doublets mythologiques chez Ovide  : de l’Art d’Aimer aux Métamorphoses  », Mélanges Le Bonniec, Latomus CCI, édition D. Porte, Bruxelles, 1988, p. 444. 97. P. Valéry, Variations sur les Bucoliques, Folio, p. 307.

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Partie I : Typologie de la prière

La question que pose le dieu fleuve au centre de ses interrogations est divisée par une sentimentale césure trochaïque troisième, qui s’intègre parfaitement à la tonalité élégiaque du passage, l’amant s’abaissant humblement devant la femme aimée. Les métaphores du cœur de pierre ou de fer qu’il utilise sont, elles aussi, topiques et viennent prendre place auprès du tenero ore de la jeune femme pour composer un tableau charmant de convention. Le prétendant de la Vestale se veut rassurant et protecteur, et adopte une structure encadrante, qui peut aussi apparaître comme serpentine : Amours, III, 6, 61-64 Ilia, pone metus ! Tibi regia nostra patebit,   teque colent amnes. Ilia, pone metus ! Tu centum aut plures inter dominabere nymphas

Sa générosité est un de ses arguments amoureux : Amours, III, 6, 65-66 Ne me sperne, precor, tantum, Troiana propago ;   munera promissis uberiora feres.

Le munus est une thématique élégiaque récurrente, mais son association avec l’adjectif uberior fait naître l’image de la maternité : les plus beaux présents que donne l’amour sont les enfants, mais – Anio l’ignore – Ilia porte déjà en elle des cadeaux plus grands que tout ce qu’il peut lui promettre : les Jumeaux divins de Mars. On retrouve le même vers dans les Héroïdes 17, 224, sous le stylet d’Hélène : dona promissis uberiora feram. Ces deux vers, qui ouvrent et ferment respectivement l’épisode troyen (les promesses de Pâris attireront Hélène, et permettront, par voie de conséquence, la maternité d’Ilia sur le sol italien), sont les seules attestations poétiques de cette forme. Aux autres cas, ce comparatif est d’ailleurs utilisé par le seul Ovide en poésie. La famille de uber est liée à la notion de fécondité, et plus précisément de maternité. Le mot est utilisé pour désigner les mamelles gonflées de lait des animaux : Virgile, Bucoliques, IX, 31 : Sic cytiso pastae distendant ubera uaccae « et que les vaches paissant du cytise gonflent leurs mamelles » (cf. Géorgiques III, 394-396) ; Horace, Satires, I, 110 : Quodque aliena capella gerat distentius uber. « (qu’il se consumme de jalousie) si sa chèvre a le pis moins gonflé que celle du voisin ». Cette interrogation morale est transposée par Ovide sur le mode érotique dans l’Ars Amatoria I, 349-350 : Fertilior seges est alienis semper in agris / uicinumque pecus grandius uber habet. « La moisson est toujours plus riche dans le champ d’autrui et le troupeau du voisin a les mamelles plus



Chapitre II : Corpus ovidianum : aperçu typologique 93

gonflées. »). La lactation se joint donc à la maternité, et elle est symbole de pureté et d’abondance : Virgile, Géorgiques, 524-525 Casta pudicitiam seruat domus : ubera uaccae Lactea demittunt « Sa chaste maison respecte les lois de la pudeur : le lait des troupeaux écume entre ses doigts. »

Horace, Epodes, II, 45-46 Claudensque testis cratibus laetum pecus Distenta siccet ubera « enfermant entre les claies tressées les brebis grasses, elle épuisait leurs mamelles distendues »

Horace, Epodes, XVI, 49-50 Illic iniussae ueniunt ad mulctra capellae   Refertque tenta grex amicus ubera « là, sans être commandées, les chèvres viennent vers les jarres à traire et le troupeau rapporte de bonne amitié ses mamelles distendues »

Tibulle, Elégies, I, 3, 45-46 (…) ultro ferebant   Obuia securis ubera lactis oues « et les brebis venaient d’elles-mêmes offrir aux hommes confiants leurs mamelles pleines de lait »

Ars Amatoria II, 375 nec lea cum catulis lactantibus ubera praebet « la lionne, lorsqu’elle présente sa mamelle aux petits qu’elle allaite »

Métamorphoses XV, 472 Vbera dent saturae manibus pressanda capellae « que les chèvres repues offrent leurs mamelles aux mains qui doivent les traire »

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Partie I : Typologie de la prière

Cela rappelle Virgile, Bucoliques, III, 99 frustra pressabimus ubera palmis « nous les trairions en vain »

On peut voir également Métamorphoses VII, 321 (lactantiaque ubera), Fastes IV, 769 (ubera plena premam). La poitrine chargée de lait des femmes peut aussi être évoquée, et non plus celle des animaux : Métamorphoses IV, 324 siqua tibi soror est et quae dedit ubera nutrix « ta sœur, si tu en as une, et la nourrice qui t’a donné le sein »

De même en Métamorphoses IX, 357-358 (materna uber…nec sequitur…lacteus umor) et Fastes II, 419-420 sur les Jumeaux et la Louve (promissi lactis). Et de même que Vertumne, comme nous le verrons, est un deus fallax dont l’apparence changeante ne révèle pas son être profond, de même Ilia est une apparence trompeuse : alors qu’elle apparaît à l’Anio comme une jeune fille pure et éplorée, elle est en réalité une mère féconde au sein déjà lourd d’un poids sacré ; alors qu’il l’appelle encore Ilia, Troiae propago, elle est déjà tournée vers l’avenir de Rome ; et alors qu’elle pourrait apparaître comme l’image étymologique de l’élégie (eu-legeîn : pleurer en se lamentant), elle est en réalité porteuse de grandeur et de gloire. Mais le distique élégiaque lui aussi, tout léger et fragile qu’il puisse paraître, peut porter de grands récits ou d’ambitieux projets. Le nom de la jeune fille apparaît deux fois dans cette sorte de péroraison sentimentale, ce qui porte à trois le nombre d’occurrences de ce nom dans la prière de l’Anio. Et les trois vers par lesquels le dieu-fleuve la rassure et lui demande de se départir de la crainte qu’une épiphanie divine ne manque pas de provoquer chez un mortel, entrelacent ce nom, Ilia, à des variations polyptotiques du pronom personnel de la deuxième personne, toujours placées en tête de proposition et d’hémistiche, voire de vers : Ilia, pone metus !//PTibi regia nostra patebit,   teque colent amnes. Ilia, pone metus ! Tu centum aut plures inter dominabere nymphas

DDDD DS SSSD DS

Le fleuve joue ici sur des répétitions colométriques à effet persuasif, son assurance quasi paternelle transparaissant dans ces retours insistants :



Chapitre II : Corpus ovidianum : aperçu typologique 95 Ilia, pone metus ! Tibi regia nostra patebit,   3      2        2           2       3         2          3   teque colent amnes. Ilia, pone metus !         2         2          2         3      2        2

La locution, pone metus, a d’ailleurs chez Ovide, par soi-même, une valeur formulaire, et appartient à ce réseau d’obsessions verbales qui parsèment l’œuvre du poète. Ouvrons ici une nouvelle et brève parenthèse. Cette expression quasi absente chez les prédécesseurs d’Ovide98 fleurit dans son œuvre dans de multiples contextes, au point de ressurgir sous sa plume d’exilé : Art d’Aimer I, 554 Pone metum : Bacchi, Cnosias, uxor eris

Héroïdes 20, 1 (Acontius à Cydippe) Pone metum ! nihil hic iterum iurabis

Héroïdes 16, 68 (Pâris à Hélène) Cum mihi pone metum ! nuntius ales ait

Remedia Amoris Hunc tu si quaeres ponere, pone metum

Métamorphoses I, 735 Pone metus » inquit : numquam tibi causa

Métamorphoses III, 634 Pone metum » Proreus et quos contingere

Métamorphoses V, 226 (Pone metum !) tribuam : nullo uiolabere ferro

Métamorphoses XI, 390 Pone metus ! Plena est promissi gratia 98. On la trouve une fois chez Tibulle (III, 10, 16 ; corpus de Sulpicia), mais jamais chez Catulle, ni chez Horace, Virgile, ou Properce, ni même chez Tite-Live. En revanche Ovide, qui affectionne cet impératif, emploie l’expression à 14 reprises.

96

Partie I : Typologie de la prière

Métamorphoses XIV, 110 Pone tamen, Troiane, metum ; potiere petitis

Métamorphoses XV, 658 Pone metus ! Veniam simulacraque nostra

Fastes II, 759 Pone metum, ueni » coniunx ait ; illa

Tristes V, 2, 3 Pone metum, ualeo ; corpusque quod ante

Comme le montre le jeu d’encadrement élaboré dans les Amours à partir de ce groupe colométrique, la musicalité de la poésie ovidienne est dans une certaine mesure en place dès les œuvres de jeunesse, et participe profondément de l’identité même du poète, identité largement musicale. Revenons à la prière de l’Anio, dont l’étude sert de propédeutique à l’analyse de la prière de Vertumne. La reprise formelle de tu centum aut plures, toujours en répétition colométrique, permet un glissement fluide d’un vers à l’autre et la régularité verbale de ces vers leur confère une belle et solennelle harmonie. Loin des amants fougueux et passionnés, l’Anio apparaît comme un protecteur sage et posé, qui offre un amour humble à une jeune fille qu’il respecte. Le savant agencement métrique du passage culmine sur deux vers dont la rythmique verbale est significative, le premier en raison de sa forte résonnance saturnienne, due à l’accroissement régulier du volume métrique, caractéristique de ce vers archaïque99 : Ne me sperne, precor, tantum Troiana perago 1      1        2          2             2              3           3

le second en raison de son resserrement verbal autour de mots longs, rares dans cet extrait et pouvant souligner l’abondance des biens offerts : 99. Pour une vision synthétique des caractéristiques métriques sur vers saturnien, on consultera A. De Groot (776), « Le vers saturnien littéraire », ainsi que G. B. Pighi (703), Studi di ritmica e metrica et G. Pasquali, Préhistoire de la poésie romaine, 1936, réédité en 1980 avec une nouvelle préface. Et pour une introduction : L. Nougaret (691), Traité de métrique latine classique, p. 14-24.



Chapitre II : Corpus ovidianum : aperçu typologique 97 munera promissis uberiora feres       3              3               5           2

Mais l’humilité délicate de l’Anio ne conquerra pas la belle Ilia, et c’est le désir de mort de la jeune femme qui en fera son épouse.

Vertumne et Pomone La stratégie adoptée par Vertumne (Métamorphoses, XIV) est bien différente. Le dieu des vergers et des fruits entreprend, après une longue attente, vaine autant que passionnée, une action décisive qui doit lui gagner les faveurs de Pomone, belle Hamadryade plus courtisée qu’Hélène, Pénélope ou « celle pour qui se battirent les Lapithes » (Métamorphoses XIV, 669-671). Après s’être présenté sous le costume d’un moissonneur, d’un bouvier, d’un émondeur, d’un pêcheur ou d’un soldat, Vertumne revêt l’apparence d’une femme vieille et peut, par ce stratagème, pénétrer dans le jardin, convoité mais interdit aux hommes, qu’entretient la nymphe. C’est alors, sous ce déguisement trompeur, qu’il adresse à la dryade un discours par lequel il se prône, et qu’il va assortir d’étonnantes menaces, encadrant le long exemplum d’Iphis et Anaxarète : Métamorphoses XIV, 675-697 Sed tu si sapies, si te bene iungere anumque hanc audire uoles, quae te plus omnibus illis, plus, quam credis, amo : uulgares reice taedas Vertumnumque tori socium tibi selige ! Pro quo me quoque pignus habes : neque enim sibi notior ille est, quam mihi ; nec passim toto uagus errat in orbe, haec loca sola100 colit ; nec, uti pars magna procorum, quam modo uidit, amat : tu primus et ultimus illi ardor eris, solique suos tibi deuouet annos. Adde, quod est iuuenis, quod naturale decoris munus habet formasque apte fingetur in omnes, et quod erit iussus, iubeas licet omnia, fiet. Quid, quod amatis idem ? Quod, quae tibi poma coluntur, primus habet laetaque tenet tua munera dextra ? Sed neque iam fetus desiderat arbore demptos 100. Nous adoptons la leçon loca sola bien représentée dans les manuscrits, au lieu de la leçon loca magna choisie par G. Lafaye pour l’édition de la CUF.

98

Partie I : Typologie de la prière nec, quas hortus alit, cum sucis mitibus herbas nec quicquam nisi te : miserere ardentis et ipsum, qui101 petit, ore meo praesentem crede precari. Vltoresque deos et pectora dura perosam Idalien memoremque time Rhamnusidis iram ! Quoque magis timeas, (etenim mihi multa uetustas scire dedit) referam tota notissima Cypro facta, quibus flecti facile et mitescere possis. « Mais si tu es sage, si tu veux faire un bon mariage, et si tu veux m’écouter, moi une vieille grand-mère, moi qui t’aime plus que tous ceux-là, plus que tu ne crois, rejette les unions vulgaires, et choisis Vertumne pour partager ta couche. Je me porte garante de lui ; car il ne se connaît pas mieux que je ne le connais. Il n’erre pas, inconstant, par toute la surface de la terre : ce sont ces lieux seuls qu’il fréquente. Contrairement à ce que fait une grande partie de tes prétendants, ce n’est pas celle qu’il a vue en dernier qu’il aime : toi, tu seras son premier et son dernier amour, et c’est à toi seule qu’il voue sa vie. Ajoute à cela qu’il est jeune, que la Nature lui a fait don de la beauté, et qu’il sait adopter parfaitement toutes les apparences. Enfin tu n’as qu’à ordonner ce que tu veux ; il fera ce dont tu lui auras donné l’ordre. Eh quoi ! N’aime-t-il pas ce que tu aimes ? Ces fruits que tu cultives, il en a les prémices, et c’est d’une main joyeuse qu’il reçoit tes offrandes, n’est-ce pas ? Mais ce ne sont plus les fruits cueillis dans ton verger qu’il désire, ni les plantes que ton jardin fait croître avec une douce sève, mais rien d’autre que toi seule. Prends pitié d’un homme qui se consumme d’amour et sois sûre que, présent en personne, c’est lui-même qui parle par ma bouche. Crains les dieux vengeurs, la déesse d’Idalie qui punit les cœurs insensibles, et la colère de la déesse de Rhamnonte, à la mémoire implacable. Et pour que tes craintes s’accroissent encore, je vais te raconter (car mon grand âge m’a beaucoup appris) une histoire fameuse dans toute l’île de Chypre, par laquelle tu pourras facilement être fléchie et amenée à de plus doux sentiments. »

L’humour d’Ovide se délecte des possibilités qu’offre la double énonciation créée par le travestissement de Vertumne. En effet, il « aime » Pomone « plus que tous (ceux-là), plus qu’[elle] ne croit ». Il peut répondre de luimême en s’engageant pas un terme juridique (pignus), et «  il se connaît bien »102 : 101. Ici encore, nous modifions la leçon de la CUF et choisissons qui petit en place de quod petit, conformément à l’édition de Villenave (Paris, 1836). 102. Nous retrouverons le même jeu au livre III des Métamorphoses, lorsque Bacchus déguisé en Acétès conseille à d’impies marins de lui rendre un culte.



Chapitre II : Corpus ovidianum : aperçu typologique 99   (…) Pro quo me quoque pignus habes : neque enim sibi notior ille est, quam mihi ;

Vertumne va avoir l’audacieuse malicie de prononcer son propre éloge, dont la saveur est relevée par le jeu de double énonciation. Viennent d’abord ses vertus morales, fidélité et constance, puis ses qualités physiques, jeunesse, beauté et faculté de métamorphose. Les contradictions qui tissent en apparence ce portrait sont patentes : comment Vertumne peut-il être dans le même temps constant et métamorphique ? Est-il fiable, et donc fidèle, celui qui change sans cesse d’apparence, et qui change même plus que son apparence, puisqu’il change même de sexe ? Mais cette fluidité de Vertumne, cette faculté de se couler dans n’importe quelle forme – fût-elle opposée à ce qu’il est (quoi de plus opposé à un beau et jeune dieu qu’une vieille entremetteuse ?) – est son être profond : il est un deus fallax, c’est-à-dire un dieu dont l’apparence ne révèle pas l’être réel et dont la raison d’être est le changement, au même titre que l’élégie est un opus fallax, œuvre trompeuse qui cache de grandes profondeurs sous une apparente légèreté. Vertumne lui aussi pourrait dire, « comme Rimbaud, que ‘Je est un autre’ »103, de même que l’élégie se révèle autre que ce à quoi on l’a souvent réduite, et ce à quoi son nom même semble la restreindre. Le livre IV des Elégies de Properce, où Vertumne apparaît comme narrateur d’une élégie entière – dont A. Deremetz a bien montré la dimension réflexive104 – est l’image lumineuse de cette ambivalence profonde de l’élégie, au même titre que les Fastes dont le contenu a longtemps paru mal approprié au distique élégiaque choisi par Ovide. Mais A. Deremetz note que « pour Properce, l’élégie est […] un genre éminemment problématique qui ne cesse de se présenter et de se définir comme une forme poétique où se rencontrent et se fondent les constituants les plus divers et les plus hétérogènes »105. P. Veyne soulignait cette polyvalence thématique de l’élégie lorsqu’il affirmait qu’elle « était donc toute poésie écrite dans le rythme élégiaque, qu’elle traitât de deuil, d’amour, de politique, de religion, d’histoire ou de philosophie »106. Vertumne, dieu à l’apparence trompeuse mais au cœur constant et sincère, image de l’élégie ? C’est l’hypothèse soutenue par A. Deremetz et à laquelle nous souscrivons pour Ovide. Et de même que la littérature est un énoncé 103. A. Deremetz (760), Le Miroir des Muses, p. 334. 104. ibid. p. 328-334. 105. ibid. p. 332. 106. P. Veyne, Comment on écrit l’histoire, Seuil, 1971, p. 94.

100

Partie I : Typologie de la prière

trompeur qui imite la réalité tout en la transformant et en s’interrogeant sur son propre pouvoir de transformation, de même le langage précatif intégré à l’élégie est-il une image parlante de cette interrogation sur le pouvoir du langage et sur l’efficience de sa mise en forme esthétique. « Ce qui compte, en définitive », selon A. Deremetz, « est cette aptitude du poète à forger des fabulae, à convertir en langage poétique toute expérience de vie. »107 Vertumne, et son nom en témoigne108, est l’incarnation de cette conversion, conversion de la réalité en objet d’art, mais aussi, dans ces morceaux de bravoure particulièrement ciselés que sont les prières ovidiennes, conversion d’un langage codifié en un autre langage, un langage poétique enrichi d’une nouvelle dimension grâce à laquelle il portera encore plus haut le potentiel sublimant de la parole créatrice. Car la fusion de la langue poétique élégiaque – protéiforme et nourrie de multiples influences – et du carmen religieux permet à Ovide de travailler sur la puissance de la poésie, sur sa capacité divine à créer le monde autant qu’elle le dit, à agir sur un monde qu’elle transforme, et dont elle n’est plus seulement un admirable eidolon. Le ton adopté par Vertumne est fortement sentimental et l’éloge confine à la déclaration amoureuse la plus pure : « tu seras son premier et son unique amour – tu primus et ultimus illi // amor eris – à toi seule il consacrera sa vie – solique suos tibi deuouet annos. » Ce dernier verbe est très fort et semble annoncer une dévotion quasi mystique à l’objet adoré. Les trois qualités physiques mises en avant par la fausse vieille femme, avocate partiale d’une cause entendue, dessinent un portrait de perfection qui complète l’intégrité morale du prétendant favorisé, et qui a déjà, de toute manière, pénétré dans le lieu interdit. Cet homme parfait n’est-il pas d’ailleurs le double même de la nymphe ? Trois questions rhétoriques soulignent cette identité profonde de la nymphe et du dieu, qui constitueraient les deux faces d’un même être, devant être réunies : Quid, quod amatis idem, quod, quae tibi poma coluntur, primus habet laetaque tenet tua munera dextra !

Le plaidoyer est habile, mais on pourrait objecter que Pomone sait déjà tout cela, car Vertumne lui est connu, lui qui depuis longtemps compte parmi 107. A. Deremetz (760), Le Miroir des Muses, p. 327. 108. uerto est l’étymologie que Properce retient dans l’élégie qu’il consacre au dieu, IV, 2, 47-48 :.    At mihi, quod formas unus uertebar in omnis.     Nomen ab euentu patria lingua dedit. « C’est parce que moi seul je pouvais me changer en toutes les formes que la langue de ma patrie m’a choisi ce nom ».



Chapitre II : Corpus ovidianum : aperçu typologique 101

la troupe nombreuse de ses soupirants. Ce long monologue aurait dû culminer, et se clore, sur quelque remarque soumise et enflammée, qui serait venue corroborer l’éloge parfait du dieu. Mais tout autre est la suite que la vieille femme donne à son discours : le miserere amantis (ardentis) élégiaque apparaît bien mais en fin de vers et pour être annihilé par une puissante et comminatoire mise en garde, portée par le dernier des trois impératifs, qui s’étire en compléments sur deux vers entiers : (…) miserere ardentis et ipsum, qui petit, ore meo praesentem crede precari. Vltoresque deos et pectora dura perosam Idalien memoremque time Rhamnusidis iram !

La présence du dieu, fortement affirmée par un vers nettement allitérant (qui petit, ore meo praesentem crede precari), n’est plus humblement suppliante, mais se fait maintenant plus pressante, voire menaçante. Les fléaux dont il effraie la pauvre puella, pour le cas où elle s’obstinerait à rester insensible, sont triples, et leur autorité est renforcée par l’emploi de noms propres rares, amples et à consonnance étrangère (Idalien, Rhamnusidis). Le motif élégiaque est manifestement perverti par l’usage du syntagme pectora dura, qui convoque et fustige la figure traditionnelle de la dura puella. Et ce n’est pas un amoureux éconduit que le dépit pousse à maudire sa maîtresse, mais un soupirant qui utilise par anticipation la menace comme pièce nodale de sa stratégie de persuasion. Les dieux vengeurs qu’il convoque ici ne peuvent manquer de rappeler le Mars Vltor protecteur des jeunes vengeurs de César lors de la guerre civile qui suivit l’assassinat de l’Imperator. Cette allusion ne serait pas déplacée dans un cadre si nettement bucolique, et par là-même ironiquement virgilien, que le verger de Pomone. La parabole que Vertumne intègre à son discours a un but déclaré, celui de faire naître chez l’auditrice un effroi sacré propre à la faire céder aux instances du dieu : Quoque magis timeas,//P(etenim mihi multa vetustas scire dedit) referam tota notissima Cypro facta, quibus flecti facile et mitescere possis. « Pour que tes craintes soient plus grandes (mon grand âge m’a donné à connaître de nombreuses histoires), je vais te raconter une histoire bien connue à Chypre, par laquelle tu pourras facilement être fléchie et amenée à des sentiments plus doux. »

102

Partie I : Typologie de la prière

L’histoire d’Iphis et d’Anaxarète, que conte la vieille femme, se termine mal et la pétrification de la jeune insensible doit servir de leçon à Pomone, car la véracité du récit est affirmée : neue ea ficta putes. Que la jeune fille ne s’abuse pas : son châtiment est certain si elle persiste dans son refus ! De même que la divinité vengeresse n’oublierait rien (memorem time Rhamnusidis iram, XIV, 694), de même Pomone doit-elle se souvenir de ces menaces : Quorum memor, o mea, lentos Pone, precor, fastus et amanti iungere, nymphe.

L’allitération en -m tisse un lien entre memor et la partie ‘tendre’ de l’apostrophe, disjointe de son cœur (o mea […] nymphe) : la femme sera sienne si elle est memor. Le pone fastus de Vertumne sonne comme un écho perverti du pone metus élégiaque que l’on retrouvait dans la respectueuse déclaration de l’Anio. L’invitation est ici plus pressante et plus cavalière, et la force persuasive du dieu transparaît dans l’usage des consonnes occlusives qui soulignaient déjà sa présence derrière le masque de la diserte aïeule : v. 692

…petit… … praesentem… precari

v. 762

pone, precor, …………nymphe109

Il termine sa farouche prière par deux vœux, qui sont autant de menaces détournées : Sic tibi nec uernum nascentia frigus adurat poma, nec excutiant rapidi florentia uenti !

Cela sous-entend assez clairement qu’un refus de la nymphe entraînerait un déchaînement de ces maux, que son consentement pourrait écarter. Mais ces menaces du dieu ne portent pas seulement sur les productions naturelles dont s’occupe la nymphe : elles reçoivent aussi une connotation érotique nette, et recouvrent en fait une menace de viol, le désir ardent du dieu s’apprêtant à 109. Sur la prononciation du ph, nous renvoyons à la synthèse proposée par J. Dangel dans son Histoire de la langue latine, Que Sais-Je ?, p. 57-59, où elle rappelle que « la lettre h semble relever ici d’autant plus du graphème que les grammairiens la définissent comme une nota ». On privilégiait donc « le traitement occlusif (des consonnes) au détriment de l’aspect spirant ». Et Quintilien (I.O., I, 5, 20) précise qu’ « on a longtemps veillé à ne pas aspirer Graeci et triumpi ». Il semble donc vraisemblable de considérer la triple allitération en p du vers 762, encadrante et soulignée par une paronomase (pone/nymphe), comme avérée.



Chapitre II : Corpus ovidianum : aperçu typologique 103

détruire la fleur fragile de la jeune fille, comme les vents impétueux arracheraient les jeunes bourgeons des arbres110. Ces vœux négatifs sont au nombre de deux. On en attendrait trois, surtout dans un tel contexte précatif. Peut-être faut-il chercher l’ombre d’une troisième menace dans le rejet de poma en tête du dernier vers : Poma/Pomona, la proximité paronomastique peut suggérer – comme nous y invite l’exemple d’Anaxarète – que Pomone elle-même pourrait se mettre en danger en s’obstinant dans un refus inconsidéré. Malgré son originalité et son habileté rhétorique, ce n’est pas ce discours du dieu qui fera fléchir la nymphe mais, plus prosaïquement, sa beauté physique, lorsqu’il se départira de ses multiples déguisements pour apparaître dans son divin éclat, « tel que se montre le soleil resplendissant » – talis apparuit illi // qualis […] nitidissima solis imago (v. 767-768). Les paroles sont donc inefficaces, et parmi elles les prières, là où l’image seule se révèle puissante. C’est alors l’échec du langage qui est constaté, et l’échec de ce langage particulier qu’est la prière poétique et amoureuse : ni le portrait poétique qu’a façonné Vertumne en ses volutes musicales, ni sa rhétorique amoureuse n’ont su convaincre la nymphe, qui sera séduite en un éclair par la réalité, qui reste ici inégalée par l’art – ce qui est rare dans l’esthétique ovidienne. Mais c’est que Vertume est l’art lui-même, l’art métamorphique de l’élégie ovidienne111. De même que la statue de Vertumne était l’élégie de Properce en tant qu’œuvre, de même le dieu Vertumne – malicieuse surenchère ! – sera, chez Ovide, l’art poétique lui-même, l’écriture comme puissance.

110. Les deux verbes (adurat / excutiant florentia) disent sans ambiguïté le désir violent et la défloration. 111. Pour compléter cette analyse sous un autre angle, nous renvoyons aux pages 335-349 du Miroir des Muses d’A. Deremetz (760).

Deuxième partie La mise en scène de la prière 

Qui est qui nesciat quanta Romani fuerint religione ?



Georgius Appel

Chapitre Premier Les acteurs de la prière : les narrateurs et leurs personnages La prière est une parole et, à ce titre, elle nécessite un locuteur, quel que soit son mode de composition et d’émission. Nous allons tenter de proposer une classification synthétique des choix ovidiens, en commençant par les orants.

Les orants L’identité de l’orant conditionne-t-elle le contenu et la forme de la prière ? Nous avons déjà rencontré des dieux qui condescendaient – en des situations exceptionnelles – à supplier une autre divinité afin qu’elle leur vînt en aide. Nous avons aussi entendu des prières amoureuses par lesquelles certains dieux – le plus souvent – tentaient de séduire leurs amantes. Essayons à présent de faire apparaître nettement les choix ovidiens quant à l’émetteur de cet énoncé si particulier et si codifié qu’est la prière.

Hommes, héros et divinités Le tableau suivant reprend de manière synthétique la répartition de la parole de prière entre les mortels et les dieux, et entre les hommes et les femmes. On remarque que les humains n’ont pas l’exclusivité de la prière, loin s’en faut, et que les dieux savent user du pouvoir des mots pour se concilier les autres divinité. Il apparaît toutefois que la prière est avant tout une arme humaine et que les dieux n’en usent qu’avec parcimonie.

108

Deuxième partie : La mise en scène de la prière

Destinateurs

Immortels

Mortels

Grands Dieux

Divinités secondaires

Descendants de dieu

Simples Humains

Hommes

Apollon Jupiter Mercure x2 Neptune

Achéloüs Anio Glaucus Polyphème Rhoetus (centaure) Vertumne

Achille Acis Céyx Deucalion Eaque x3 Enée Hippomène x2 Jason x2 Minos x2 Orphée Pandion Phaeton Rémus Romulus

Acontius Dédale x2 Flamine de Quirinus Ilionée Léandre x3 Lélex Un marchand Metellus Midas x2 Mopsus Myscelos Narrateur x108

Identité ambiguë

Bacchus (déguisé en Acétès)

Cadmus Auguste Cipus

Sexe ambigu Femmes

Cérès Isis Junon Pallas Terre Vénus x4

Numa x3 Paysan de Lycie Penthée Peuple d’Erechtée Phinée Polymestor Prêtre Pygmalion Pyrénée Un berger Un vieil homme

Aréthuse x2 Aurore Calliope Carmenta Craniè Daphné Dioné Dryades Latone x2 Salmacis

Herma­phrodite

NC x2 Philémon et Baucis

Ariane x2 Canacé x2 Circé Héliades Médée x3 Phèdre x2 Procris

Althée Céné Claudia Quinta Cydippe Didon x4 Filles d’Anius Hermione Héro Ino x2

Iphis Laodamie x4 Mère de Cydippe Mère de Phaeton Mnestra x2 Myrrha x2 Oenone x2 Prophétesse Sappho x2 Sémélé Téléthuse Thisbé

Les dieux qui prient sont donc assez peu nombreux ; c’est à eux que nous devons d’abord nous attacher. Dieux et déesses se répartissent ainsi les prières de notre corpus : 16 déesses émettent 21 prières et 11 dieux en émettent 12. Nous avons choisi d’isoler dans nos tableaux le groupe des Olympiens des



Chapitre Premier : Les acteurs de la prière 109

autres divinités, en raison des rapports ambigus que ces dernières entretiennent parfois avec l’humanité : Achiloüs est un dieu, mais il partage la société des hommes, auxquels il offre volontiers l’hospitalité, et le récit de ses mésaventures. De même les nymphes et autres Dryades, quoique dotées d’un numen spécifique, ne peuvent se soustraire seules à la violence de leurs soupirants et sont plus proches de jeunes filles effarouchées que de puissantes divinités1. Glaucus a même été un homme, « ante tamen mortalis eram » (Métamorphoses, XIII, 920), avant la métamorphose qui lui fit dépouiller sa forme humaine pour une autre nature, soumise à d’autres lois. Il adopte d’ailleurs une rhétorique amoureuse dont l’humilité surprendrait chez un Olympien, et qui transforme ce passage des Métamorphoses en élégie : quid tamen haec species, quid dis placuisse marinis, // quid iuuat esse deum, si tu non tangeris istis ?2. Et c’est dans les prodigiosa antra d’une magicienne que le dieu ira chercher un recours contre les dédains de sa dura puella. Quels dieux prient dans le corpus que nous avons établi ? Le tableau suivant propose une vue synthétique des orants, à partir du tableau des destinateurs déjà inséré :

1. Elles semblent même soumises à la mort, si l’on se réfère à l’histoire d’Erysichton qui abat un chêne sacré cachant une dryade : Métamorphoses VIII, 758-762 & 771-773.     Contremuit gemitumque dedit Deoia quercus ;.     et pariter frondes, pariter pallescere glandes.     coepere ac longi pallorem ducere rami.     Cuius ut in trunco fecit manus impia uulnus,.     haud aliter fluxit discusso cortice sanguis […].     « Nympha sub hoc ego sum Cereri gratissima ligno.     quae tibi factorum poenas instare tuorum.     uaticinor moriens, nostri solacia leti. ». « Et le chêne de Cérès chancela et émit un gémissement ; son feuillage se mit à pâlir en même temps que ses glands et ses longues branches devinrent d’une même pâleur. Au moment où la main impie infligea au tronc une blessure, un flot de sang jaillit de l’écorce fendue […] « Je suis là, sous ce bois, moi la Nymphe chérie de Cérès, et je prédis en mourant que tu seras sans tarder puni pour tes forfaits : ce sera une consolation pour ma mort. ». 2. « mais à quoi me sert cette apparence, à quoi me sert-il d’avoir plu aux dieux marins, à quoi me sert d’être un dieu, si tu n’en es pas émue ? ».

110

Deuxième partie : La mise en scène de la prière

Hommes

Femmes

Couples ou individus de sexe indifférencié

Total

4 6

6 10

0 0

26

14

7

1

64

20

21

1

4 48

0 44

2 4

Dieux Dieux secondaires Descendants de dieux Simples mortels Cas ambigus Total

6 96

96 intervenants se répartissent donc la parole dans notre corpus. Un rapide regard sur ces résultats permet de voir que les hommes et les femmes sont presque égaux face à la prière (48 versus 44). L’inégalité entre humains et immortels est en revanche patente. Les raisons en sont multiples. On peut d’abord évoquer la simple différence de nature qui oppose les mortels, désemparés ou impuissants face à certains obstacles, et les divinités pourvues d’une certaine puissance. Mais il est d’autres raisons qui peuvent justifier cette répartition, et particulièrement les contraintes génériques. La répartition de la parole tient en effet du genre même de l’œuvre observée. Les Héroïdes mettent en scène des amours humaines et introduisent donc exclusivement des personnages humains. Les Amours, s’inscrivant dans la réalité romaine, repoussent les dieux à la marge et ne leur offrent guère d’espace de parole comme locuteurs actifs dans la progression dramatique. Seul l’Anio, fleuve épris de la vestale Ilia, y prononce une longue prière, qui s’intègre à une construction spéculaire dans laquelle sa propre prière est le reflet inversé de l’élégie dont elle forme le cœur, et qui est une longue supplique adressée par le narrateur dépité à un fleuve qui se dresse entre lui et l’objet de son amour3. De même l’Ars Amatoria est enveloppé d’une étoffe historique et sociale peu propice à l’intrusion trop vive du surnaturel et du divin. Une justification thématique et narratologique peut aussi être avancée, qui tient compte du sujet même de chacune des œuvres. La chatoyance narrative des Métamorphoses, qui font se succéder les récits encadrants et se multiplier les locuteurs, contraste avec la sobriété des Fastes, dont le narrateur principal 3.

Amours, III, 6, 53-66.



Chapitre Premier : Les acteurs de la prière 111

délègue moins la parole en contexte précatif que dans les œuvres que l’on pourrait qualifier de ‘romanesques’, que sont les Métamorphoses et les Héroïdes. Dans les Métamorphoses, 86 prières sont prononcées par 63 personnages différents ; dans les Fastes, les 91 prières de notre corpus se répartissent entre 19 locuteurs différents seulement, et le narrateur en prononce 68 à lui seul, soit près de 75%. Hors Dédale, personne d’autre que le narrateur ne prononce de prière dans l’Ars Amatoria, ce qui est cohérent avec le projet de cette œuvre didactique, et renforce le statut professoral et supérieur de celui qui se présente comme un maître tentant de transmettre son savoir, son ars si particulière. Enfin l’Ibis, œuvre jouant sur des gammes très personnelles dans sa partie purement précative, laisse la parole à son narrateur-auteur pour le début, avant le développement de la longue suite d’exempla qui convoqueront abondamment la mythologie et circonscriront l’œuvre entre des bornes religieuses et culturelles codifiées et identifiables. De fait, la place accordée au narrateur dans les prières ovidiennes est très ample, quoique les disparités soient grandes d’une œuvre à l’autre :

Héroïdes Art d’Aimer Amours Métamorphoses Fastes Ibis Total

Personnages

Narrateur

Nombre total d’extraits retenus

27 2 1 79 23 0 132

0 4 26 7 68 3 108

27 6 27 86 91 3 240

On aurait pu s’attendre à ce que les femmes eussent plus largement recours à la prière que les hommes. Mais on remarque un assez sensible équilibre entre les deux sexes, équilibre qui peut même surprendre à une si grande échelle : Ovide, poète inépuisable, est en mesure de conserver un tel équilibre à travers des milliers de vers courant sur de nombreuses années. Cela révèle que, pour lui, la prière n’est pas marquée sexuellement et que tout individu peut y avoir recours. Elle n’est pas le refuge des femmes ou des faibles mais surgit en des occasions suffisamment diversifiées pour servir à tous. Le seule œuvre dans laquelle l’équilibre soit rompu (équilibre restauré par la profusion des Métamorphoses) est les Héroïdes, et cette fois encore une explication générique peut être avancée : les Epistulae Heroidum sont

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Deuxième partie : La mise en scène de la prière

originellement des lettres de femmes et les dernières, attribuées à des épistoliers, semblent être largement postérieures au premier corpus. Les héroïnes ovidiennes sont généralement des jeunes femmes, voire des jeunes filles. Myrrha, Téléthuse, Mnestra, Thisbé, Héro, Procris ou Cydippe vivent leurs premiers émois amoureux et ne sont pas encore devenues mères, ce qui révèle leur jeune âge. La jeunesse est, dans un tel contexte, une faiblesse lorsqu’elle est associée à la féminité, car elle prive l’héroïne de ressources que l’expérience, un statut social mieux établi ou encore une plus grande autorité pourraient lui offrir. Enfin, un seul enfant recourt à la prière, le jeune Ilioné, fils infortuné de Niobé qui sera châtié d’une faute maternelle.. Etonnamment, on ne décèle pas de différence de formulation entre les prières des hommes et celles des femmes, ni entre celles des humains et celles des dieux. Tous usent des mêmes invocations, des mêmes verbes, des mêmes formules. Seules les épiclèses et les formules de prudence diffèrent parfois : les dieux ont moins à craindre que les humains, et identifient avec une plus grande certitude leur destinataire. Il semblerait donc que la codification de la prière dépasse les clivages de l’identité de l’orant et que ces énoncés soient assez fortement typés pour ne pas se modifier quel que soit le personnage qui les prononce.

Prêtres et Fidèles Les prêtres sont presque quasiment absents de notre corpus, et cela ne doit pas laisser d’étonner, alors même qu’une des œuvres qui le composent est un calendrier religieux recensant les grandes cérémonies sacrées de Rome. Seules trois prières sont effectivement prononcées par un prêtre, auxquelles on peut adjoindre les prières de Numa, roi-prêtre ayant une profondeur sacrée remarquable, et celle de Claudia Quinta, qui intervient lors d’une cérémonie publique à laquelle la jeune femme participe. Tous les autres orants de notre corpus sont de ce que l’on pourrait appeler, en commettant un anachronisme mais en confrontant par lui deux réalités comparables quoique distinctes, des laïcs, priant le plus souvent de manière spontanée, quoique certains le fassent à l’occasion de cérémonies privées4. Cela confirme en un sens l’affirmation 4. Nous pensons par exemple à la prière que les propriétaires adressent à Terminus au cours des Terminalia, lors d’une cérémonie privée prévue par le calendrier rituel et devant consacrer les bornes qui délimitent leurs champs (Fastes II, 659-678).



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de J. Carcopino selon laquelle « il est logique qu’Ovide, qui privilégie une religiosité intime et spontanée, fondée sur une certaine foi – littéraire – en l’efficacité de l’intervention divine, néglige les personnages de prêtres au profit de simples individus. »5 Seuls le prêtre d’Esculape, le pontife Metellus, et le flamine de Quirinus offrent au lecteur d’Ovide une prière. Les Fastes ne sont pas la seule œuvre représentée, Les deux derniers apparaissent dans les Fastes, tandis que la prière à Esculape intervient au livre XV des Métamorphoses, qui est toutefois le plus sérieux et le plus Romain de l’ouvrage. Cette parcimonie appelle deux remarques. La première est que le prêtre, malgré la dimension sacrée de son état sacerdotal, est traité dans les œuvres ovidiennes comme un personnage comme les autres. Cette absorption par la littérature des prêtres, figures centrales de la religion et de la société civile romaines, est facilitée par leur statut original chez les Romains, statut qui n’est guère comparable aux exigences du sacerdoce dans les religions monothéistes. La prêtrise étant une charge temporaire, et à forte résonnance politique, le prêtre n’est pas intrinsèquement élevé au-dessus des autres hommes, dont il diffèrerait fortement comme en diffère un prêtre catholique. Il n’est qu’un citoyen qui accepte pour un temps de se charger d’une fonction, parfois exigeante, certes, mais qui ne transforme pas définitivement sa nature. La seconde remarque porte sur la liberté qu’Ovide prend avec le langage religieux. On a dit que la langue religieuse romaine était extrêmement codifiée, que le texte des prières officielles était figé et non modulable, que son intégrité devait être scrupuleusement respectée par l’officiant lors de toute cérémonie. L’épisode d’Acontius et Cydippe, qui fait l’objet de deux Héroïdes successives et dont le cœur est la puissance sui causa du langage précatif6 révèle l’intérêt qu’Ovide portait dès sa jeunesse à cette question, intérêt qui n’a fait que croître avec le temps. Reproduire textuellement une prière rituelle eût été soit risqué – étant donné que l’on amenait alors chaque lecteur à reproduire malgré lui l’acte engagé par ce langage performatif – soit sacrilège, dans le cas d’une remise en cause implicite de la puissance de cet élément rituel. Le moyen de contourner cette difficulté ? Faire prier des prêtres eût été se confronter directement à un problème sensible au moment où le régime s’engageait fermement dans une restauration religieuse. Ovide a opté dans ses œuvres pour la prière libre, l’oraison jaculatoire d’individus dégagés de toute responsabilité sacerdotale. 5. J. Carcopino, La vie quotidienne à Rome à l’apogée de l’Empire, Paris, 1939, p. 151. 6. La jeune fille se trouve liée malgré elle par un serment inscrit sur une pomme, dont elle a fait lecture à haute voix (Héroïdes, XX et XXI).

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Deuxième partie : La mise en scène de la prière

Le prêtre d’Esculape qu’il nous donne à voir dans les Métamorphoses (XV, 677-679) n’apparaît pas d’ailleurs dans une cérémonie traditionnelle mais lors d’un rite exceptionnel qui va amener l’émission d’une prière libre et improvisée. Le cas de la prière que le flamine de Quirinus adresse à Robigo, déesse de la rouille du blé, au livre IV des Fastes est plus problématique. Elle est bien motivée par la fête que la cité organise chaque année au mois d’avril afin de favoriser l’abondance des moissons. Le flamine, revêtu d’une autorité sacerdotale reconnue, peut vraisemblablement célébrer le rite, et la prière qu’il prononce est le juste complément du sacrifice qui la précède dans le rituel. Le flamine de Quirinus pour les Robigalia ? Le texte d’Ovide est le seul, parmi ceux que nous avons conservés, à préciser l’identité de l’officiant. Force nous est donc de nous en remettre, tant qu’un témoignage nouveau ne viendra pas l’invalider, à sa parole. Mais Ovide est aussi le seul à évoquer une déesse, là où toutes nos sources (des Fastes de Préneste 901-48n à Varron, Res Rusticae 1.6.0) parlent d’un dieu Robigus. « Festus distingue entre le masculin Robigus, le dieu auquel l’offrande était faite, et le féminin robigo (que l’on retrouve chez Virgile, Géorgiques I, 150-151 et Columelle, De Re Rustica 10, 342), la maladie contre laquelle le dieu protège les céréales. »7 Cette irrégularité a été vue par R. Schilling comme une potentielle confusion faite par Ovide avec la fête mobile de l’Augurium Canarium8. Mais on pourrait penser aussi que ces modifications, suffisamment légères pour ne pas entraver l’identification du rituel par le lecteur, ont été introduites par Ovide afin de s’affranchir du corset de la langue religieuse véritable : il peut ainsi créer l’illusion parfaite de la prière rituelle, qu’il livre dans son intégralité, en son lieu et avec le rite qui l’accompagne, mais dont il biaise la réception en brouillant son émission, en transformant le dieu en déesse et en détournant un flamine dont rien ne nous permet d’affirmer qu’il était réellement l’officiant des Robigalia. E. Fantham note d’ailleurs que « l’apostrophe du dieu Quirinus, dont le flamine est concerné », semble une moquerie ; « cette relation des paroles du prêtre à son maître divin premier, son patron, fait apparaître la prière à Robigo comme une petite infidélité. »9 Cette ‘disloyalty’ est en fait une infidélité à la 7. E. Fantham (99), Ovid’s Fasti Book IV, p. 265 : « Festus 325 Lindsay distinguishes between masc. Robigus, the god to whom the offering was made, and fem. robigo (as in 911, so Virg. Georg. 1.150-151 mala…robigo, and Colum. 10.342 cited below), the disease against which the god protected the crops. ». 8. Note de son édition pour la CUF au vers 936. 9. E. Fantham (99), op. cit., p. 266 : « In addressing the god Quirinus whose flamen is concerned, O. seems to mock the device of apostrophe ; his report of the priest’s word to his primary divine master and patron treats the prayer to Robigo as if it were a minor disloyalty. ».



Chapitre Premier : Les acteurs de la prière 115

religion traditionnelle qui permet à Ovide d’absorber la prière dans le champ du poétique, tout en conservant une apparence de rituel. Maître du fauxsemblant et du cosmétique, comme il l’a prouvé dans ses œuvres de jeunesse, il transforme légèrement le miroir dans lequel il fait se refléter la religion romaine de telle manière que le reflet que nous en voyons, tout en conservant l’apparence du vrai, soit en réalité un simulacre poétique, mais un simulacre libre, assez libre, assez détaché de son original – auquel il ressemble pourtant – pour pouvoir s’enrichir de tous les plans de l’écriture poétique, une écriture qui – à Rome plus qu’ailleurs – se développe en surface mais surtout en profondeur, en strates successives. Même dans les Fastes, ce calendrier rituel en apparence fidèle à la religion traditionnelle, la prière est transformée par la langue poétique nouvelle qu’élabore Ovide, et va lui servir de miroir pour son art poétique. On pourra ainsi retrouver dans cette prière, prononcée par un flamine lors d’une cérémonie religieuse traditionnelle, une demande caractéristique du langage élégiaque, et qui fleurit en abondance chez Tibulle, comme expression d’un cœur souffrant : Fastes IV, 921-922 Pārcĕ, prĕcōr,//T scābrāsquĕ //F mănūs //H ā mēssĭbŭs āufēr   Nēuĕ nŏcē //T cūltīs ;// pōssĕ nŏcērĕ săt ēst.

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« Sois indulgente, je t’en supplie, éloigne tes mains râpeuses de nos moissons et ne nuis pas à nos cultures ; il est assez de pouvoir nuire. »

La métaphore filée de la rouille qui corrompt les armes comparée à celle qui gâte les blés contribue, elle aussi, à subvertir cette prière, qui aurait dû être un morceau technique, en un succédané élégiaque s’enrichissant d’accords empruntés au Virgile des Géorgiques : Fastes IV, 923-926 Nēc tĕnĕrās sĕgĕtēs //P sēd dūr(um) āmplēctĕrĕ fērūm   Quōdquĕ pŏtēst //T ălĭōs //P pērdĕrĕ,//H pērdĕ prĭōr. Ūtĭlĭūs glădĭōs //P ēt tēlă nŏcēntĭă cārpēs :   Nīl ŏpŭs ēst īllīs ;//P ōtĭă mūndŭs ăgīt. « Ne t’en prends pas aux moissons, mais au fer dur ; ce qui peut perdre les autres, perds-le d’abord. Tu attaqueras plus profitablement les glaives et les traits blessants : nous n’avons nul besoin d’eux, puisque le monde vit en paix. »

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Deuxième partie : La mise en scène de la prière

Cette célébration élégiaque de la paix10, est aussi un éloge du régime augustéen, qui permet aux poètes de rêver et d’écrire loin des combats et du bruit des armes. On voit donc ici qu’Ovide, dans la seule prière que les Fastes font prononcer à un représentant de la religion officielle, contourne le carmen romain et la langue rituelle pour faire de sa prière un objet. Il enrichit ainsi la vieille terre rituelle d’un engrais poétique nouveau grâce auquel elle reverdira en une génération vigoureuse et féconde.

Piété et impiété La dernière distinction que nous souhaitions opérer sépare les orants impies de ceux qui prient avec leur âme et leur cœur, ou du moins avec respect. L’impiété peut intervenir à deux niveaux. Elle peut être consciente et assumée, et motiver la posture même du personnage qui émet la prière. Mais elle peut aussi être inconsciente et subvertir les propos de l’orant sans que son intention soit d’offenser la divinité. Nous avons cherché si, dans notre corpus, apparaissait telle de ces prières, dont le contenu pourrait sembler impie à un observateur scrupuleux. Il est en effet des énoncés qui viennent à l’esprit, et l’un d’eux est encore extrait des Fastes, ce qui ne devrait pas laisser d’étonner. Le marchand qui demande à Mercure, au livre V des Fastes (V, 681-690), de le seconder dans son négoce, tient des propos quelque peu étranges. Ecoutons-le : « Āblŭĕ//d prāetĕrĭtī//p pēriūrĭă tēmpŏrĭs, īnquīt,  Āblŭĕ//d prāetĕrĭtāe// pērfĭdă//(h) uērbă dĭē ! Sīu(e) ĕgŏ//d tē fēcī //p tēstēm//h fālsōuĕ cĭtāuī   Nōn āudītūrī // nūmĭnă//(h) māgnă Iŏuīs Sīuĕ dĕūm//t prūdēns//P ălĭūm//h dīuāmuĕ fĕfēllī,  Ābstŭlĕrīnt//(t) cĕlĕrēs // īmprŏbă//(h) uērbă Nŏtī ; Ēt pătĕānt//t uĕnĭēntĕ//f dĭē pēriūrĭă nōbīs   Nēc cūrēnt//(t) sŭpĕrī // sī quă lŏcūtŭs ĕrō. Dā mŏdŏ//d lūcră mĭhī, //P dā fāctō gāudĭă lūcrō   Ēt făc ŭt ēmptōrī // uērbă dĕdīssĕ iŭuēt ! »

DDSD DD DSSS SS DSDS DD DDDS SD DDSS DS

«  Lave mes parjures passés, dit-il, lave mes tromperies d’hier  ! Si je t’ai pris à témoin, ou si j’ai invoqué faussement le grand pouvoir d’un Jupiter qui ne devait pas m’entendre, si j’ai sciemment trompé un autre 10. Il est notable que cette évocation de la paix retrouvée – otia mundus agit – vienne clore le pentamètre du distique, partie la plus légère et la plus douce de vers élégiaque.



Chapitre Premier : Les acteurs de la prière 117 dieu ou une autre déesse, puissent les vents rapides avoir emporté mes paroles malhonnêtes, et puisse le jour qui vient me donner l’occasion de nouveaux parjures, sans que les dieux d’en haut se soucient de ceux que j’aurai commis ! Accorde-moi seulement de gagner de l’argent, accorde-moi la joie que donne le gain, et fais que j’aie le plaisir de duper l’acheteur ! »

Le sérieux et la solennité apparents de cette prière sont attestés par le rituel qui la précède, minutieusement décrit par Ovide et conforme en tout point aux prescriptions religieuses : Est aqua Mercurii portae uicina Capenae ;   Si iuuat expertis credere, numen habet. Huc uenit incinctus tunica mercator et urna   Purus suffita, quam ferat, haurit aquam. Vda fit hinc laurus, lauro sparguntur ab uda   Omnia quae doitos sunt habitura nouos. Spargit et ipse suos lauro rorante capillos   Et peragit solita fallere uoce preces : « Il y a une fontaine de Mercure proche de la porte Capène ; si on veut en croire les gens qui en ont fait l’épreuve, elle possède une vertu. C’est ici que se rend le marchand, sa tunique retroussée ; il fait ses ablutions et, avec une cruche purifiée par fumigation, il puise de l’eau pour l’emporter. Il y trempe une branche de laurier et avec le laurier trempé il asperge tous les objets qui attendent de nouveaux maîtres. Il s’asperge lui-même les cheveux avec le laurier ruisselant et de sa voix habituée à la tromperie il récite cette prière […] »

Que demande le marchand ? Rien que de très-malhonnête. Le lexique de la tromperie abonde ici et pourrait choquer dans une prière. Mais le marchand qui admet ses fautes dans cette confession malicieuse le fait avec sincérité et franchise, et n’a nulle intention de tromper ni d’offenser la divinité à laquelle il s’adresse et qui est même bien apte, si l’on en croit l’Hymne Homérique à Hermès, à le comprendre et à accéder à ses demandes avec une indulgence amusée. Nul repentir chez ce marchand qui espère en la faveur du dieu pour poursuivre dans la même voie. Le narrateur souligne, dans la requête qu’il adresse lui même au dieu peu après, la bassesse des sollicitations du marchand : tanto meliora petenti « à moi dont les requêtes sont plus nobles » (Fastes V, 693). Mais Mercure, selon lui, a souri en entendant la prière du marchand :

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Deuxième partie : La mise en scène de la prière Talia Mercurius poscentem ridet ab alto   Se memor Ortygias subripuisse boues. « Mercure a souri du haut du ciel à celui qui présentait de telles requêtes, se souvenant qu’il avait lui-même dérobé les vaches d’Ortygie. »

Cette scène digne des Métamorphoses et qui peut surprendre le lecteur moderne n’est toutefois en rien opposée aux traits religieux traditionnels de la figure de Mercure, dieu des voleurs, rusé et prompt au mensonge et à la dissimulation. On peut donc parler ici de prière immorale, mais non réellement de prière impie, puisqu’elle ne remet en cause ni l’autorité du dieu ni le respect que doivent lui manifester les fidèles. Un passage des Amours paraît très proche de cette étonnante prière à Mercure. Au livre II des Amours, le narrateur est soumis à un interrogatoire jaloux de Corinne, qui le soupçonne de la tromper avec une de ses esclaves, la coiffeuse Cypassis. Le narrateur regagne finalement la confiance de son amante par un serment à Vénus : Amours II, 7, 27-28 Per Venerem//T iuro //P puerique uolabilis arcus   Me non admissi// criminis//H esse reum

DSDD SS

« Je jure par Vénus et par l’arc de son fils voletant que je ne suis pas coupable du crime dont on m’accuse. »

Le serment est solennel et place aux jalons métriques signifiants les mots essentiels. Toutefois, le dernier mot du poème, reum, prépare le coup de théâtre de l’élégie suivante. Car qu’y apprend-on ? Le narrateur est parjure, et bien coupable. Et il va conjurer son serment menteur par une invocation à Vénus11 : Amours II, 8, 19-20 Tu, dea, tu iubeas animi periuria nostri   Carpathium tepidos per mare ferre Notos

11. Ailleurs dans les Amours, le narrateur rappelle que Vénus est indulgente envers ceux qui se parjurent :     Nec, siquem falles, periurare timeto ;.     commodat in lusus numina surda Venus. « Si tu trompes quelqu’un, ne recule pas devant un faux serment ; car, dans les jeux de l’amour, Vénus fait en sorte que les dieux soient sourds. (Amours, I, 8, 85-86) ».



Chapitre Premier : Les acteurs de la prière 119 « Toi, déesse, toi, ordonne que les vents tièdes du Notus emportent par la mer des Carpathes le parjure de mon esprit. »

Vénus et Mercure associés pour seconder les menteurs et les parjures ? On sait que Vénus est la divinité favorite d’Ovide, qui instille sa présence et son influence dans toute son œuvre. Vénus favorise la poésie élégiaque, et règne sur un cercle divin composé des divinités les plus aimées d’Ovide : les Muses, Flore, Cupidon, Bacchus. Mercure appartient quant à lui à l’autre grand cercle divin structurant l’œuvre ovidienne, le cercle apollinien. Apollon est en effet l’autre héros de l’Hymne Homérique à Hermès et, comme dieu musicien, il doit ses instrument, lyre et flûte, à l’ingéniosité du petit Mercure. Le dieu des voleurs auquel s’adresse le marchand des Fastes est donc aussi créateur d’instruments, inventeur de nouvelles potentialités musicales, découvreur de sons inouïs. Une corde ténue se tend alors entre les Amours et les Fastes, aux deux extrémités de la première carrière d’Ovide, corde musicale du beau mensonge qu’est la poésie12. Mais il existe toutefois chez Ovide quelques personnages d’une impiété réelle, bien qu’ils soient peu nombreux. Cinq exemples peuvent en être donnés dans notre corpus et à ses marges, tous dans les Métamorphoses : Penthée, les marins Tyrrhéniens, les paysans de Lycie, Pirithoüs et Erysichton. L’impiété de Penthée est traitée par Ovide avec une certaine fidélité par rapport aux Bacchantes d’Euripide. Mais il rompt le fil du récit par une longue parenthèse rapportant l’histoire fictive d’Acétès, seul homme pieux d’un équipage de marins Tyrrhéniens qui seront transformés en dauphins pour avoir voulu vendre comme esclave le jeune Bacchus. Acétès, qui n’est autre que Bacchus déguisé, raconte cet épisode d’impiété punie pour convertir le cœur de Penthée. Il imagine donc une prière à son adresse propre, prière qui n’a pas de visée efficiente ni surnaturelle, mais qui tend à avoir une influence prosélyte sur ses auditeurs : Métamorphoses, III, 611-614, prière à Bacchus encore adolescent : et sensi et dixi sociis : « quod numen in isto corpore sit, dubito ; sed corpore numen in isto est ! 12. En Métamorphoses XIII, 733-734, Ovide s’interroge sur le témoignage des poètes : si non omnia uates / ficta reliquerunt « si tout n’est pas mensonge dans ce qu’ont laissé les poètes ». Cette capacité à fingere, à imaginer mais aussi à mettre en forme, use donc des prières comme de tout autre matériau pour créer un monde poétique total, miroir entier de la réalité, à la fois complet et autre, fait de mots et de musique.

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Deuxième partie : La mise en scène de la prière quisquis es, o faueas nostrisque laboribus adsis ; his quoque des ueniam ! » « pro nobis mitte precari ! » Dictys ait,(…) « ‘Je ne sais quel dieu est dans ce corps, mais dans ce corps, pour sûr, est un dieu ! Qui que tu sois, ô sois nous favorable et seconde nos peines. Pardonne aussi à ces hommes !’ ‘cesse de prier pour nous !’ dit Dyctis »

Le procédé est théâtral et relève dans une certaine mesure de la double énonciation ; il n’est pas déplacé dans la geste d’un dieu qui aime les travestissements et qui préside aux jeux dramatiques. L’histoire que raconte Bacchus déguisé en Acétès, et qui met prétendument en scène le vieil homme et une jeune figuration de Bacchus, est une fiction, un mensonge forgé par le dieu afin de provoquer, par la terreur sacrée et l’exemple, la conversion des mécréants. La construction du récit est donc ici très subtile, car le discours enchâssé crée une mise en abyme, mais il le fait de manière fictive, artificielle, en s’appuyant sur un récit inventé de toute pièce par le locuteur et qui n’est qu’une copie déformée de la situation dans laquelle se développe l’énonciation13. Le message est saturé de procédés que nous identifierons plus loin comme les procédés caractéristiques de l’énoncé précatif : les expressions verbales les plus usitées par Ovide sont présentes (adsis – faueas – des ueniam), l’expression quisquis es introduit l’indétermination prudente et à visée exhaustive que l’on rencontre dans de nombreux énoncés précatifs, et la répétition est largement employée comme élément structurant du discours, dans son sens comme dans sa dimension musicale :   quod numen in isto corpore sit, dubito ; sed corpore numen in isto est !

Ovide évite la réduplication conforme en variant la construction syntaxique : la première séquence s’organise selon un ordre tout à fait traditionnel, mais le verbe qui porte à la fois le sens et l’humour de l’énoncé (car Bacchus sait bien qui il est, et ce qu’il est) est rejeté en fin de phrase et comme en hyperbate, et le démonstratif isto est disjoint de son régime par un enjambement audacieux. Le positionnement en fin de vers du démonstratif, que l’on retrouvera au vers suivant, insiste sur la proximité du dieu, sur sa présence physique, matérielle et palpable, et est à la fois un clin d’œil rieur et une mise 13. Le faux Acétès, au moment où il parle, est prisonnier de Penthée comme le jeune homme qu’il met en scène est prisonnier des marins. Les deux se révèleront dans le dénouement de chaque histoire comme des figures de Bacchus déguisé.



Chapitre Premier : Les acteurs de la prière 121

en garde adressée à ceux qui ne savent pas voir. L’allusion se fait pressante avec la présence à la fin du vers suivant du subjonctif adsis, qui peut recouvrir ici son double sens, abstrait (faveur) comme concret (présence réelle). La dislocation du groupe prépositionnel in isto corpore dans le deuxième vers permet le retour par deux fois de la même clausule nūmĕn ĭn īstō / nūmĕn ĭn īstō (e)st, qui prend alors réellement une valeur de mise en garde véhémente. Mais l’auditoire ne saura comprendre et persistera dans son aveuglement. Ces marques d’impiété, celle de Penthée refusant de rendre un culte à Bacchus et des marins voulant le vendre comme esclave, sont à la marge de notre corpus, étant donné qu’elles ne se réalisent pas en une prière impie. Toute l’hostilité obstinée de Penthée est contenue dans un seul vers : Perstat Echionides (Métamorphoses III, 701). Un mot de cinq mores dans le premier hémistiche d’un hexamètre est chose rare, et même exceptionnelle, et cette longueur, associée au préverbe intensif per et à la brièveté de la phrase construite en parataxe, dit bien le défaut qui perdra Penthée. L’attitude des paysans de Lycie, au livre VI des Métamorphoses, est l’occasion d’un prodigium. On retrouve dans cet épisode le verbe qui marquait l’obstination fatale de Penthée : Métamorphoses VI, 361-362 Hi tamen orantem perstant prohibere minasque Ni procul abscedat, conuiciaque insuper addunt. «  Eux cependant persistent à la repousser, malgré ses prières, et ils ajoutent des menaces, et même des injures, si elle ne s’éloigne pas. »

Mais cette « méchanceté » (le mot est d’Ovide, vers 365) s’adresse à une femme dont ils n’ont pas reconnu la divinité, qu’elle ne manifestera que dans sa vengeance, en les métamorphosant en grenouilles. Là encore nous restons en marge, l’impiété n’étant ni consciente, ni verbalisée explicitement. Restent deux vrais exemples d’impiété évoqués tous deux au livre VIII des Métamorphoses, à la suite l’un de l’autre. Le premier est le fait de Pirithoüs, fils d’Ixion, déjà puni par les dieux pour son audace impie. Alors que l’auditoire réuni autour de Thésée dans le palais du dieu fleuve Achéloüs vient de s’émerveiller au récit de la métamorphose de Périmèle, Pirithoüs s’exclame que « ce sont des fables ; [Achéloüs] attribue trop de puissance aux dieux, s’il croit qu’ils donnent et retirent aux corps leurs figures » : Métamorphoses VIII, 614-615 « Ficta refers nimiumque putas, Acheloe, potentes Esse deos », dixit, « si dant adimuntque figuras »

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Deuxième partie : La mise en scène de la prière

Un tel discours frappe les invités de stupeur et ils réprouvent ces propos (obstipuere omnes, nec talia dicta probarunt). C’est en réponse à cette provocation impie que Lelex va raconter l’histoire de Philémon et Baucis, qui s’achève sur une remarquable et double épiphanie et sur une belle prière, opposant le farouche fils d’Ixion aux pieux et respectueux fidèles : Métamorphoses VIII, 612-613   (…) Irridet credentes utque deorum Spretor erat mentisque ferox Ixione natus « Le fils d’Ixion, comme il était un contempteur des dieux et un homme rempli d’orgueil, se moque de leur foi14. »

Métamorphoses VIII, 724 Cura deum //T di sint//P et qui coluere colantur

DSSD

« Que les protégés des dieux soient des dieux et que ceux qui ont manifesté de la piété soient l’objet de notre piété. »

Mais tout ceci sert d’introduction à l’épisode d’Erysichton, point culminant de cette gradation. C’est Acheloüs qui narre cette aventure à un auditoire attentif parmi lequel Pirithoüs pourra tirer les leçons qui s’imposent. Erysichton a porté la main en toute connaissance de cause contre un bois sacré de Cérès. « Il méprisait la puissance des dieux et ne brûlait aucun parfum sur leurs autels » : Métamorphoses VIII, 639-640   Pater huius erat qui numina diuum Sperneret et nullos aris adoleret odores. Alors qu’il s’attaque au chêne sacré de Cérès, Erysichton s’exclame :

Métamorphoses VIII, 755-756 Non dilecta deae solum sed et ipsa licebit SDSD Sit dea, iam tanget frondente cacumine terram.

DSSD

L’affront commis est porté par le rythme du premier vers, qui prend le contre-pied du vers solennel DSDS dans une inversion caractéristique du 14. L’enjambement abrupt qui disjoint deorum et spretor marque bien l’impiété de Pirithoüs, qui l’éloigne des dieux, de même que la césure trochaïque 3ème rappelle sa généalogie, par laquelle il se rattache aux grands mythes grecs.



Chapitre Premier : Les acteurs de la prière 123

sacrilège et de l’impiété  ; et le deuxième vers dit la volonté de puissance d’Erysichton par le schéma encadrant DSSD et l’isolement du verbe tanget entre les deux césures. Cette impiété sera sévèrement punie par Cérès, comme l’avait annoncé la Dryade mourant sous la hache du brutal (uaticinor moriens, v. 773). Le supplice d’Erysichton sera la faim, châtiment très-cruel inventé par la déesse des moissons. Hors de ces exemples, les personnages ovidiens, comme ses narrateurs, affichent une grande piété, ou du moins un certain respect des dieux. Certains sont plus favorisés par la grâce divine (nous pensons par exemple à Numa, ou à Cipus), mais nul ne peut rivaliser, de fait, avec le narrateur ovidien, qui entretient une relation tout à fait privilégiée avec le monde céleste.

Les Destinataires Hommes, héros et divinités De multiples raisons peuvent amener un homme à adresser à un autre mortel une prière digne d’un dieu. Il peut vouloir l’honorer par l’effet d’une admiration réelle, mais il peut aussi être poussé par des motifs courtisans. L’ironie peut aussi teinter ses propos, voire la provocation ou le sacrilège. De la même manière, un homme peut prier une divinité avec une réserve et une modestie indignes de sa gloire, et cela par naïveté ou par l’effet d’une simplicité véritable, mais aussi par humour, esprit de défi, orgueil ou encore volonté de sacrilège. Pour pouvoir étudier les tons divers adoptés par les personnages et les narrateurs ovidiens, il faut au préalable dresser la liste des destinataires de prières de notre corpus.

124

Deuxième partie : La mise en scène de la prière

Destinataires

Hommes

Immortels

Mortels

Grands Dieux

Divinités secondaires

Fils de dieu

Simples Humains

Apollon x8 Bacchus x10 + 1 Gradiuus Janus x8 Jupiter x12 Mars x3 Mauors Mercure x7 Neptune x6 Quirinus

Achéloüs Amour x8 Anio Esculape Fleuve Hyménée x2 Vertumne Polyphème x2 Terminus Tibre Xanthe

Céyx Eaque Minos Orphée Persée x2 Phaeton Picus

Auguste Battus x2 Cadmus Céphale César Enée Germanicus Glaucus Hippolyte x2 Ibis Macarée

Alcyone Circé Dardanides Médée x4 Harmonie x2

Arachné Autonoé Corinne x5 Cydippe x2 Dipsas Femmes Hécube Héro Ilia Ino Mère des Héliades Scylla Sémélé

Non connu (x4) Argo Dieux x19 Eléments Etoiles Flammes Mûrier Objets sacrés du temple de Vesta Vent Femmes

Cérès x5 Cybèle Diane x3 Isis x2 Junon x2 Luna Minerve Paix Palès x2 Pallas x2 Robigo Terre Thémis Vénus x12 (+1 ?) Vesta x3

Carmenta Daphné Egérie Elégie x2 Erinyes Euménides Flore x2 Galatée x3 Harmonie Ilithye Latone Muse x4 Muses x6 Nymphe Nymphes Pommone Stryges Tragédie Victoire

Mari de Corinne Oreste Pâris Paysans de Lycie Père de Daphné Phaon Portier Pythagore Térée Thésée x2

66

4 3 3 25/5* 31/6

Hommes

40

1 10/6 3/2 9/4 16/6

Femmes

Grands dieux

11

3 2

6/3

Hommes

44

2 11/10 29/9

2

Femmes

Dieux secondaires

Immortels

8/7 12/11 14/6 10/9 2

Allégories

18

10/8 7/6

1

Hommes

4

1 1 2

Femmes

Descendants de dieux

18

1 3 1 7/5 5/3 1 14

6/2 1 6 1

Femmes

Simples mortels Hommes

Mortels

*  Ce système de notation nécessite peut-être une explication : les nombres entiers sont employés lorsque le nombre d’invocations concorde avec le nombre de destinataires. Nous utilisons une présentation fractionnée pour indiquer une discordance, lors d’invocations multiples adressées à un même destinataire. Ainsi, dans les Métamorphoses, 25 invocations sont adressées à 5 divinités majeures différentes.

TOTAL

Ars Amatoria Amours Héroides Métamorphoses Fastes Ibis

Œuvre

 Chapitre Premier : Les acteurs de la prière 125

Nous donnons dans le tableau suivant une autre répartition, par œuvre cette fois-ci :

126

Deuxième partie : La mise en scène de la prière

Les dieux apparaissent comme les destinataires privilégiés des prières ovidiennes (161 prières sur 215 leur sont adressées, soit près de 75%15). Le monde divin incarne donc aux yeux des personnages ovidiens le pouvoir, le pouvoir d’agir en faveur des hommes et d’infléchir leur destin. Comme ils sont les moins nombreux, observons en premier lieu les destinataires humains. Quels sont les mortels qui sont suffisamment glorieux ou influents auprès de leurs compagnons pour que ceux-ci aient recours à eux par la prière ? Ce sont tout d’abord ceux qui détiennent un pouvoir, qu’il semble dérisoire comme celui du portier dont dépend le plaisir de l’amant des Amours, ou suprême comme celui de César : Amours, I, 6, v. 1-48, prière au portier (janitor16) Ianitor – indignum ! – dura religate catena,   difficilem moto cardine pande forem ! Quod precor, exiguum est ; aditu fac ianua parvo   obliquum capiat semiadaperta latus. Longus amor tales corpus tenuavit in usus   aptaque subducto pondere membra dedit. Ille per excubias custodum leniter ire   monstrat : inoffensos derigit ille pedes. At quondam noctem simulacraque vana timebam ;   mirabar, tenebris quisquis iturus erat. […] Forsitan et tecum tua nunc requiescit amica –   heu, melior quanto sors tua sorte mea ! Dummodo sic, in me durae transite catenae !   Tempora noctis eunt ; excute poste seram ! « Portier entravé, quelle honte !, par une dure chaîne, ouvre la lourde porte après avoir fait jouer ses gonds. Ce dont je te prie est peu de chose : fais que la porte entrebaîllée, par une étroite ouverture, me laisse passer de côté. Un amour qui dure a amainci mon corps pour de tels mouvements, et a rendu mes membres aptes en réduisant mon poids. C’est lui qui montre comment aller sans bruit à travers les veilles des gardiens, et il dirige nos pieds pour qu’ils ne commettent pas d’erreur. Autrefois j’avais peur de la nuit et des ombres vaines. J’admirais que l’on osât marcher dans les ténèbres. […] Peut-être ton amie repose-t-elle maintenant avec toi – hélas, alors combien ton sort est préférable au mien ! Pour qu’il soit semblable, passe-moi tes chaînes. Les heures de la nuit passent : dégage la barre de la porte ! » 15. Nous exceptons de ce calcul le cas complexe des prières adressées à des divinités non identifiées, à des allégories ou à des objets personnifiés. 16. Nous ne citons que les 10 premiers vers et les 4 derniers.



Chapitre Premier : Les acteurs de la prière 127

La tonalité propre à chaque œuvre influence fortement le choix des destinataires. Ainsi la tonalité politique domine les Fastes : Fastes I, 3-26, hymne à Germanicus (sont cités les vers 7-14) Sacra recognosces annalibus eruta priscis   et quo sit merito quaeque notata dies. Inuenies illic et festa domestica uobis ;   saepe tibi pater est, saepe legendus auus, quaeque ferunt illi, pictos signantia fastos,   tu quoque cum Druso praemia fratre feres. Caesaris arma canant alii : nos Caesaris aras   et quoscumque sacris addidit ille dies. « Tu reconnaîtras les rites sacrés exhumés des antiques annales et tu te rappelleras l’événement qui a rendu chaque jour digne d’être inscrit au calendrier. Tu y trouveras aussi les fêtes de ta maison : souvent tu pourras y lire le nom de ton père, souvent aussi celui de ton aïeul ; mais des lauriers qui ornent le front de ces grands hommes et marquent de leur empreinte nos calendriers peints, ton front aussi en sera orné, ainsi que le front de Drusus ton frère. Les guerres de César, que d’autres les célèbrent : moi, je célèbrerai les autels de César, et tous les jours qu’il a ajoutés au calendrier sacré. »

Fastes II, 637, souhait pour la santé d’Auguste Et : « Bene uos, bene te, patriae pater, optime Caesar ! » « A votre santé, à ta santé, père de la Patrie, César, le Meilleur d’entre tous ! »

Fastes II, 1-18, du narrateur à Auguste (ne sont cités que les vers 15-16)17 At tua prosequimur studioso pectore, Caesar,   Nomina, per titulos ingredimurque tuos.

17. On peut ajouter Fastes I, 711-722, Fastes II, 127-144 et Fastes II, 63-66 :.    Tēmplōrūm //T pŏsĭtōr, //P tēmplōrūm sānctĕ rĕpōstōr,.     Sīt sŭpĕrīs //T ōptō // mūtŭă cūră tŭī.    Dēnt tĭbĭ cāelēstēs,//P quōs tū //H cāelēstĭbŭs ānnōs,.     Prōquĕ tŭā //T mănĕānt // īn stătĭōnĕ dŏmō. « Fondateur de temples, saint restaurateur des temples, je souhaite que les dieux du ciel te témoignent à leur tour leur sollicitude. Que les divinités célestes te donnent autant d’années que tu en assures toi-même aux divinités du ciel et qu’elles montent la garde devant ta maison. ».

128

Deuxième partie : La mise en scène de la prière «  Je m’empresse, César, de mettre mon inspiration au service de ton nom, et je m’engage sur le chemin ouvert par tes titres de gloire. »

tandis qu’une plus grande légèreté nimbe les Amours, dans lesquels la rhétorique élégiaque tient, comme il est naturel, une grande place : Amours, I, 14, 27-30, demande d’Ovide à Corinne pour qu’elle épargne sa chevelure Clamabam : « scelus est istos, scelus urere crines !   Sponte decent ; capiti, ferrea, parce tuo ! Vim procul hinc remoue ! Non est, qui debeat uri ;   erudit admotas ipse capillus acus. » « C’est un crime, un crime de brûler ces cheveux. Naturellement, ils te vont bien ; épargne ta tête, cruelle. Eloigne d’ici une telle violence ! Ce n’est pas par cela que tu dois être brûlée. Ton cheveu lui-même guide les aiguilles dans leur mouvement. »

Amours, II, 16, v. 47-50, demande de l’amant à sa maîtresse Siqua mei tamen est in te pia cura relicti,   incipe pollicitis addere facta tuis, parvaque quamprimum rapientibus esseda mannis   ipsa per admissas concute lora iubas ! « Si quelque tendre souci te reste pour moi, que tu as abandonné, commence à ajouter l’action à tes promesses, et le plus tôt possible sur un char étroit tiré par des chevaux rapides, toi-même frappe de ton fouet leurs crinières flottantes. »

Mais si les premiers livres des Fastes sont en apparence très politiques – la geste de Numa au livre III comme celle de Carmenta et Evandre au livre II participent de cette coloration politique, qui s’ajoute à la dimension religieuse et poétique – les derniers, en revanche, adoptent un ton plus léger, plus printanier, et se consacrent aux divinités de l’amour et de son chant, Vénus, Cupidon, Erato et ses sœurs les Muses. Même le grand calendrier d’Ovide est marqué profondément par des préoccupations méta-poétiques, préoccupations à la fois réflexives et politiques, qui se concentrent principalement autour de quelques figures, auxquelles nous allons nous intéresser maintenant. Pour ne pas nous perdre dans le foisonnement ovidien, nous avons attaché notre atention à trois pôles distincts, lesquels sont les objets d’enjeux divers :



Chapitre Premier : Les acteurs de la prière 129

le pôle jupitérien, auquel nous rattachons les figures de Quirinus, Evandre et Numa, dans leurs fonctions régaliennes, mais aussi Vesta et Minerve ; le pôle apollinien, auquel se rattachent les Muses, les prophétesses et magiciennes, Médée et Circé, mais aussi, dans une certaine mesure, Diane, Neptune et Mercure, ainsi que Janus ; et enfin le pôle vénusien, le plus important chez Ovide, auquel viennent s’agréger Cupidon et Enée, ainsi que les Muses autour d’Erato, les allégories telles que l’Elégie, et surtout Mars et Bacchus, divinité centrale du monde ovidien dont nous verrons qu’elle établit des ponts fermes et solides entre les trois pôles évoqués18. Toutes ces divinités sont porteuses d’une charge religieuse forte à Rome, mais sont aussi traditionnellement enrichies de profondes dimensions métapoétiques, dont Ovide exploite avec art les ressources, même dans les Fastes, et peut-être là plus que partout ailleurs.

Le pôle jupitérien Jupiter est invoqué à 14 reprises dans notre corpus. Seuls les Amours et l’Ibis ne contiennent aucune prière qui lui soit adressée. Ceux qui sollicitent le roi des dieux sont de nature et de statut multiples. Lorsque la Terre embrasée lui demande de mettre fin à la course de Phaeton (Métamorphoses II, 279-300), Jupiter apparaît humanisé, sensible, capable d’amour paternel et de pitié. Il n’agit contre Phaeton que dans un but régalien et charitable en même temps, pour sauver le monde, ce dont la Terre asphyxiée le supplie. Pour Tellus, il est le ‘summus deum’ (v. 280), un ‘pater omnipotens’ pour le narrateur qui commente la scène (v. 304). Il veille au salut du monde (‘rerum consule summae’ v. 300), et pour agir, il monte au lieu le plus élevé de l’Empyrée ‘summam arcem’ (v. 306). Il restera sensible et triste en l’exercice de sa puissance lorsqu’il nuira à Sémélé (Métamorphoses III, 293-295). Il est alors ‘maestissimus’ (v. 298), mais toujours très puissant, puisque « d’un signe de tête il attire à sa suite les nuées, auxquelles il ajoute les orages et les éclairs, mêlés aux vents, et le tonnerre, et la foudre inévitable » :

18. Ces trois pôles ne sont pas indépendants les uns des autres, mais entretiennent bien évidemment entre eux des relations ténues. Cette classification, qui comporte nécessairement une part d’arbitraire, se justifie par des rapprochements, d’ordre stylistique ou ontologique, propres au monde ovidien.

130

Deuxième partie : La mise en scène de la prière

Métamorphoses III, 298-301 (…) Ergo maestissimus altum aethera conscendit uultuque sequentia traxit nubila, quis nimbos inmixtaque fulgora uentis addidit et tonitrus et inevitabile fulmen.

Jupiter apparaît également lors du récit de la peste d’Egine. Ovide offre une merveilleuse description en hypotypose de l’épidémie qui décime la ville et contre laquelle la piété reste impuissante. Les dieux semblent avoir abandonné la ville. Le récit, terrible et pathétique, est selon nous un des plus beaux passages de l’œuvre ovidienne. Les sacrifices sont vains : Métamorphoses VII, 587-605 Templa uides contra gradibus sublimia longis ; Iuppiter illa tenet ; quis non altaribus illis Irrita tura dedit ? Quotiens pro coniuge coniunx Pro gnato genitor, dum uerba precantia dicit, Non exoratis animam finiuit in aris Inque manu turis pars inconsumpta reperta est ! Admoti quotiens templis, dum uota sacerdos Concipit et fundit purum inter cornua uinum, Haud expectato ceciderunt uulnere tauri ! Ipse ego sacra Ioui pro me patriaque tribusque Cum facerem natis, mugitus uictima diros Edidit et subito collapsa sine ictibus ullis Exiguo tinxit subiectos sanguine cultros. Exta quoque aegra notas ueri monitusque deorum Perdiderant ; tristes penetrant ad uiscera morbi. Ante sacros uidi proiecta cadauera postes ; Ante ipsas, quo mors foret inuidiorior, aras Pars animam laqueo claudunt mortisque timorem Morte fugant ultroque uocant uenientia fata. « Tu vois ce temple, là-haut, au sommet de cette longue suite de marches ? Il est consacré à Jupiter ; qui n’a pas brûlé en vain de l’encens sur ses autels ? Que de fois, alors même que l’époux prie pour son épouse, que le père prie pour son fils, ont-ils rendu l’âme au pied de ces autels sourds aux prières, et a-t-on retrouvé dans leurs mains un peu d’encens non consumé ? Que de fois les taureaux conduits au temple, alors que le prêtre commence les récitations et verse le vin pur entre leurs cornes, se sont-ils effondrés avant d’avoir reçu le coup attendu ? Tandis que j’offrais moi-même à Jupiter un sacrifice pour moi, pour ma patrie et pour mes trois enfants, la victime fit entendre de



Chapitre Premier : Les acteurs de la prière 131 terribles mugissements, et, s’étant effondrée sans avoir reçu aucun coup, teignit d’un sang pauvre les couteaux qui l’égorgeaient. Ses entrailles malades avaient perdu les indices de la vérité et les avertissements des dieux ; les tristes maladies pénétraient ses viscères. Devant les portes saintes j’ai vu des monceaux de cadavres ; devant les autels eux-mêmes, où la mort est plus odieuse encore, certains mettent un terme à leur vie par un lacet et chassent la peur de la mort au moyen de la mort elle-même : ils appellent la venue du destin. »

Eaque est « foudroyé par un tel ouragan de malheurs » (v. 614) : attonitus tanto miserarum turbine rerum

Le lexique choisi par le poète est parfaitement approprié à une supplique jovienne, tout en étant vraisemblable dans un contexte d’une telle intensité dramatique. La première prière, presque intime, s’appuie sur les liens privilégiés qui unissent l’orant à son destinataire : Métamorphoses VII, 615-618 « Iuppiter o ! » dixi, « si te non falsa loquuntur dicta sub amplexus Aeginae Asopidos isse, nec te, magne pater, nostri pudet esse parentem, aut mihi redde meos aut me quoque conde sepulcro ! » « Ô Jupiter, s’ils ne mentent pas ceux qui disent que tu as connu les caresses d’Egine et s’il ne te fait pas honte, ô père suprême, d’être mon parent, ou bien rends moi les miens, ou bien mets-moi aussi au tombeau ! »

Jupiter agrée sans tarder la prière de son fils, en lui envoyant un « éclair favorable » : Métamorphoses VII, 619 Ille notam fulgore dedit tonitru secundo «  Il fit signe qu’il avait entendu en envoyant un éclair et un tonnerre favorable. »

Eaque ne se trompe pas, qui y voit des signes divins et propices, felicia signa (v. 620-621). Le Jupiter de Philémon et Baucis est aussi un dieu bon et généreux : Métamorphoses VIII, 703-705 Talia cum placido Saturnius edidit ore « Dicite, iuste senex et femina coniuge iusto Digna, quid optetis. »

132

Deuxième partie : La mise en scène de la prière « Et le Saturnien, avec un visage bienveillant, émit ces paroles : ‘Dites, juste vieillard et toi, digne femme d’un juste époux, ce que vous souhaitez’ ».

L’autre grand interlocuteur jupitérien sera Numa19. Jupiter a été amené sur Terre par Faunus et Picus, et la Terre a subi la pression de son poids : Fastes III, 330 Terraque subsedit pondere pressa Iouis

Numa ressent l’horror diuus que tous les hommes pieux connaissent en présence du sacré. Après un dialogue de comédie, digne d’une négociation de marché20, et qui contraste avec la personnalité de Numa et le ton solennel de l’horror sacer qui précède, le dieu disparaît dans un tour qui n’est pas sans rappeler les spectacles de magie enfantine : Fastes III, 347-348 Dixit et ingenti tonitru super aethera motum  Fertur. « Il dit, et s’envola vers le haut des cieux dans un immense vacarme. »

Jupiter confirma à Numa son soutien, le lendemain, en lui donnant l’omen attendu : trois éclairs, assortis de trois coups de tonnerre dans un ciel serein : ter tonuit sine nube deus, tria fulmina misit (II, 369).21 Romulus appartient aussi à ce pôle jupitérien. Ovide adoucit sa figure pour préparer son apothéose et se conformer aux choix idéologiques d’Auguste, qui s’assimilait lui-même à la figure de Romulus divinisé.22 En Fastes IV, 827-832, 19. Nous ne commenterons pas ici deux autres prières jupitériennes : Métamorphoses VIII, 586-591, par laquelle l’Aurore supplie Jupin, ‘summe deum rector’ (v. 599), après le mort de son fils Memnon, et Métamorphoses XIV, 586-599, par laquelle Vénus demande, et obtient, l’immortalité pour Enée. 20. B. Liou-Gille nous dit que le « rapport du colloque » se lit chez Ovide, Plutarque et Arnobe (Plut. Numa 15, 3 ; Arn. Adv. Nat. 5, 1) ; il remonte, d’après ce dernier, à Valérius Autias, un annaliste de l’époque de Sylla. G. Dumézil (352, p. 54) comme J. Scheid (526) et B. LiouGille (456, p. 164-185) se sont intéressés à cet épisode et à la figure de Numa d’une manière plus générale. D. Porte propose elle aussi une analyse de l’épisode, avec une orientation différente, dans l’article qu’elle consacre à « Jupiter Elicius ou la confusion des magies » (486). 21. Elaine Fantham a consacré d’intéressantes analyses au personnage de Numa chez Ovide dans son article « Ovid’s Fasti : politics, history and religion », particulièrement aux p. 222-227. 22. Il faut toutefois rappeler, comme le fait E. Fantham dans l’article mentionné à la note précédente, p. 222, que « Hinds, Boyle and other recent students of Fasti have offered eloquent arguments hinging on Ovid’s disrespect for Rome’s firts king. ».



Chapitre Premier : Les acteurs de la prière 133

Romulus n’est pas seulement un guerrier et l’opposition entre lui et Numa est moins sensible qu’aux premiers livres du recueil23. Romulus adresse aux dieux une prière propitiatoire, afin qu’ils soutiennent son action fondatrice. La locution qu’il emploie, hoc mihi surgat opus, se retrouve à plusieurs reprises sous le stylet d’Ovide en contexte réflexif : elle renvoie à l’activité créatrice du poète qui érige son œuvre. Or l’œuvre des poètes est fiction. C’est beaucoup, mais ce n’est aussi que cela. Tandis que ce que Romulus s’apprête à ériger, ce n’est pas un monument littéraire – conformément à l’exegi monumentum d’Horace – mais un monument historique, la Rome éternelle qu’Auguste, nouveau Romulus, a su restaurer en sa gloire. Pour compléter l’analyse séduisante que proposait S. Hinds quant au traitement très ambigu de la figure de Romulus par le chantre des Fastes, nous nous demanderons si l’assimilation de l’œuvre de Romulus à une œuvre poétique – en même temps qu’elle glorifie la poésie en lui donnant l’ampleur et la puissance d’un fait historique – n’est pas une manière de mettre au jour les cordages de la propagande augustéenne et de dénoncer sa dimension fictive, ou de montrer, du moins, que les poètes n’en sont pas dupes. La fondation de Rome par Romulus et sa refondation par Auguste sont présentées comme des mythes – au sens noble du terme, mais avec la charge artificielle qu’on peut y attacher, et tout ce que la mise en lumière de cet artifice peut comporter de danger politique – c’est-à-dire des ensembles poétiques construits, semblables à ce qu’Ovide lui-même propose dans ses œuvres, et plus précisément – ultime réflexivité – dans ce passage des Fastes. Autre personnage adressant une prière au roi des cieux, Enée fait vœu d’offrir au roi des dieux le premier moût des vendanges s’il remporte la victoire sur Mézence (Fastes IV, 893-894). Jupiter accède à sa demande. L’anecdote prend place au cours de l’évocation des Vinalia, fête associée à la fois à Jupiter et à Vénus, comme le rappellent G. Dumézil et R. Schilling24. Tibère avait choisi ce jour des Vinalia pour dédicacer une statue au diuus Augustus au théâtre de Marcellus, comme l’attestent les Fastes de Preneste25. Numa, personnage central des Fastes, avait instauré un culte à Jupiter Fulgur ainsi qu’à Jupiter 23. Pour une analyse du traitement de la figure de Romulus en regard de celle de Numa, nous renvoyons au très intéressant article de S. Hinds, « Arma in Ovid’s Fasti », Arethusa, 25, 1992, p. 81-153 et plus particulièrement aux p. 118-149. 24. R. Schilling (534), La religion romaine de Vénus, p. 91-115 et 248-262. 25. Les Fastes de Preneste sont un calendrier inscrit sur des colonnes de marbre sur le forum de la ville de Preneste, et que l’on considère comme une expression des travaux de Verrius Flaccus, à l’époque augustéenne. Ils ont été complétés par la suite, sous Tibère par exemple, et nous sont parvenus à l’état fragmentaire. On pourra consulter M. Beard, Religions of Rome, p. 64-67.

134

Deuxième partie : La mise en scène de la prière

Elicius, qu’Ovide évoque au livre III. Auguste se fait donc son successeur en instaurant, à la suite d’une anecdote que les historiens se plaisent à reprendre, un culte de Jupiter Tonans26. En le faisant toujours apparaître au cœur d’un réseau lexical évoquant le tonnerre, Ovide choisit donc, parmi toutes les figures romaines de Jupiter (Stator, Feretrius, Hospitalis, Optimus…), celle qui correspond le mieux au projet et au goût augustéen. Et conformément à la volonté d’Auguste, le princeps est à plusieurs reprises assimilé ou comparé à Jupiter : Métamorphoses I, 200-206   (…) sic, cum manus impia saeuit sanguine Caesareo Romanum exstinguere nomen, attonitum tantae subito terrore ruinae humanum genus est totusque perhorruit orbis ; nec tibi grata minus pietas, Auguste, tuorum quam fuit illa Ioui. Qui postquam uoce manuque murmura conpressit, tenuere silentia cuncti. «  Ainsi, lorsqu’une main impie a cruellement éteint le nom romain dans le sang de César, le genre humain fut frappé du subit effroi d’une si grande ruine et la terre tout entière frémit d’horreur ; et la piété n’a pas été moindre, Auguste, envers les tiens, que ne fut celle de Jupiter, lui qui réduisit tous les hommes au silence, après avoir fait taire les murmures de sa voix et de sa main. »

Métamorphoses XV, 858-860 Sic et Saturnus minor est Ioue. Iuppiter arces Temperat aetherias et mundi regna triformis, Terra sub Augusto ; pater est et rector uterque. « C’est ainsi que Saturne est inférieur à Jupiter. Jupiter gouverne les palais éthérés, et les royaumes du monde aux trois formes, la terre quant à elle est sous l’autorité d’Auguste ; chacun d’eux est père et souverain. »

Dans les Métamorphoses, le narrateur demande aux dieux, et plus particulièrement aux dieux très Romains que sont Quirinus, Gradiuus, Phoebus, Vesta et Jupiter, de retarder l’apothéose d’Auguste et de prolonger ainsi sa vie. Jupiter est encore ici le dieu des summa, qui vit en haut de la citadelle du ciel qui tenes altus Tarpeias arces (XV, 866). Selon A. von Albrecht, cette prière finale des Métamorphoses « reflèt[e] dans le miroir de la theologia ciuilis 26. Le temple du Capitole fut dédicacé par Auguste en 22 av JC.



Chapitre Premier : Les acteurs de la prière 135

quelques divinités que nous connaissons par la theologia fabulosa. »27 mais contrairement à ce qu’il affirme, cette prière n’est pas la seule mention de Vesta dans les Métamorphoses : Métamorphoses XV, 730-731, Vesta la Troyenne obuia turba ruit, quaeque ignes, Troica, seruant, Vesta, tuos, laetoque deum clamore salutant. « La foule se précipite à ta rencontre, ainsi que les gardiennes de ton feu, Vesta la Troyenne, et ils saluent le dieu d’une clameur joyeuse. »

Métamorphoses XV, 777-778 quos prohibete, precor, facinusque repellite neue caede sacerdotis flammas exstinguite Vestae ! « Ecartez-les, je vous en prie, empêchez ce forfait, et n’éteignez pas les flammes de Vesta dans le sang de son prêtre ! »

Mais il est vrai que toutes ces évocations de la déesse sont circonscrites au dernier chant de l’œuvre, le plus Romain. Dans les Fastes, la présence de Vesta comme destinataire d’une prière est plus diffuse : Fastes III, 426 Numina : cognatum, Vesta, tuere caput. « Protège, Vesta, la tête de ton parent »

Fastes IV, 827-832 Vox fuit haec regis « Condenti, Iuppiter, urbem   Et genitor Mauors Vestaque mater, ades, Quosque pium est adhibere deos, aduertite cuncti   Auspicibus uobis hoc mihi surgat opus ! « Assiste, ô Jupiter, celui qui va fonder une ville, et vous aussi, Mars notre père, et Vesta notre mère. Vous tous, qu’il est pieux de compter parmi les dieux, tournez vers nous vos auspices pour que mon œuvre sorte de terre ! »

27. M. von Albrecht (272), « Les Dieux et la Religion dans les Métamorphoses d’Ovide », p. 6.

136

Deuxième partie : La mise en scène de la prière

Fastes VI, 249-250 Vesta, faue : tibi nunc operata resoluimus ora,   ad tua si nobis sacra uenire licet. « Vesta, sois moi favorable : c’est pour te servir que nous parlons maintenant, s’il nous est permis d’assister à tes rites sacrés. »

L’origine troyenne de Vesta est soulignée par Ovide tant dans les Métamorphoses (XV, 730) que dans les Fastes (iliacis focis VI, 227 ; VI, 365 ; III, 29 ; III, 142 ; III, 418 ; VI, 456), conformément à la tradition virgilienne selon laquelle l’ombre d’Hector, apparue en songe à Enée, lui aurait remis « la puissante Vesta, ses bandelettes et le feu éternel » (Enéide, II, 296-297). Vesta est donc une divinité emblématique de Rome, mais elle est aussi, par l’entremise d’Enée, une divinité liée à la gens Iulia et à son puissant représentant, Auguste. Elle est d’ailleurs associée fortement au livre III des Fastes avec l’empereur, avec lequel elle compose les deux gages de la souveraineté de Rome, imperii pignora v. 410. Vesta est alors priée de protéger la tête de son parent, cognatum Vesta tuere caput v. 426. Le vœu pour la vie du Prince exprimé au livre III des Fastes rappelle la prière finale des Métamorphoses. L’adjectif inextincti apparaît dans les deux passages, alors qu’Ovide est le seul poète à l’utiliser. Il le reprend au livre VI des Fastes pour décrire le feu de Vesta, ignis inextinctus (VI, 297), feu qui est la seule matérialisation de cette déesse non anthropomorphe. Et comme le rappelle E. Fantham après Fraschetti (1988, 956-957), « as a descendant of Eneas, Augustus descends from Jupiter through Venus and so is cognatus, ‘collateral kinsman’, of Vesta. As Aeneas’ descendant he also has a hereditary claim to tend the fire which maintained by its perpetual flame continuity with the ashes of Troy (cf. I, 528-529) »28. Ovide indique d’ailleurs en Fastes IV, 949-954 qu’Auguste avait accueilli Vesta au sein même de son palais, rendant ainsi publique une partie de sa propre demeure, et la sacralisant par le même moyen. Dans cette évocation, Ovide associe Vesta et Apollon, ce qui nous permet de souligner le lien ténu unissant les deux premiers des trois pôles divins que nous avons séparés, dans le seul but d’une présentation plus claire de ce qui forme le centre de la nébuleuse divine des œuvres ovidiennes : Fastes IV, 949-954 aufer, Vesta, diem : cognati Vesta recepta est limine ; sic iusti constituere patres. Phoebus habet partem : Vestae pars altera cessit : quod superest illis, tertius ipse tenet. 28. E. Fantham (94), « Ovid’s Fasti, Politics, History and Religion », p. 275.



Chapitre Premier : Les acteurs de la prière 137 State Palatinae laurus, praetextaque quercu stet domus : aeternos tres habet una deos. « Vesta, prends ce jour. Vesta a été accueillie dans la maison de son descendant : ainsi en ont décidé les Sénateurs et leur justice. Phoebus en a une partie, à Vesta a été cédée l’autre part. Ce qui reste, César lui-même l’occupe. Que le laurier du Palatin fleurisse et que la maison ornée de chêne se dresse : une seule maison renferme trois dieux éternels29. »

Ce passage, à travers les termes tertius et tres établit une sorte de triade tout à fait adaptée au projet augustéen : Apollon, Vesta, Auguste, triade qui, si l’on remplace Auguste par Vénus (mais n’est-il pas son descendant, sa réalisation contemporaine ?), pourrait être la triade ovidienne. La fête des Vestalia est le sujet d’un long développement au livre VI reprenant l’introduction de la déesse à Rome par Numa, rex placidus (v. 259). Vesta réunit donc en elle deux faisceaux historico-mythiques qui convergent vers la personne d’Auguste : d’une part l’héritage romuléen, et d’autre part l’influence active de Numa, dont Auguste s’inspire en tant que restaurateur de l’ancienne religion de Rome. Vesta était en effet invoquée par Romulus comme déesse tutélaire de la ville qu’il entreprenait de fonder, en Fastes IV, 828, et elle réapparaît auprès des mêmes divinités en VI, 375-376 pour soutenir une nouvelle fois Rome : Tunc Venus et lituo pulcher trabeaque Quirinus Vestaque pro Latio multa locuta suo est. Alors Vénus, Quirinus paré du sceptre augural et de la trabée et Vesta parlèrent longuement en faveur de leur cher Latium.

A qui parlent-ils ? A Jupiter qui développera une stratégie salvatrice pour la ville. A ce pôle jupitérien, on pourrait intégrer Janus, destinataire privilégié du narrateur des Fastes au livre I du recueil, en raison des fonctions régaliennes qui lui sont attachées par son historicisation romaine, associée à la geste de Saturne. Selon certaines versions du mythe en effet, Janus aurait été roi du Latium et aurait accueilli Saturne après qu’il eût été chassé de Grèce par son fils Jupiter. Roi civilisateur, Janus aurait été divinisé après sa mort. Mais un article d’A. Deremetz 29. Le laurier et le chêne rappellent le triple triomphe d’Auguste en 29 av JC, mais s’inscrivent dans la tradition virgilienne et non dans l’histoire, puisque le temple n’était pas encore dédicacé au moment du triomphe. Pour une analyse de ces jeux par lesquels les poètes ont servi l’imagerie augustéenne, voir E. Fantham, « Ovid’s Fastes, Politics, History and Religion » (96), p. 204205. L’auteur y replace Enéide VIII, 720-722 et Properce II, 3 en perspective avec l’extrait des Fastes.

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Deuxième partie : La mise en scène de la prière

nous a convaincue de le faire entrer plutôt dans le pôle apollinien, en raison « de la fonction énonciative qui confère au dieu la position initiale de [son] nom dans le carmen. »30 Janus est le dieu des prima, au même titre que Jupiter est celui des summa. « En invoquant en premier le nom du dieu, la prière énonce donc réflexivement dans son propre énoncé sa qualité d’acte de parole : elle se désigne elle-même dans ce qu’elle est et dans ce qu’elle fait. »31 Le long dialogue entre Janus et le narrateur qui ouvre les Fastes et qui commence par une prière hymnique en l’honneur des dieux est donc particulièrement intéressant. Selon A. Deremetz, les dieux Janus, Vesta et Apollon se regroupent en « trois classes énonciatives distinctes » mais appartiennent à une même catégorie : ils sont concernés par « le procès qu’évoque l’énonciation elle-même, à savoir la prière comme acte de parole ».32 A. Deremetz compare le rôle qu’Ovide fait jouer à Janus à l’ouverture des Fastes au rôle que tient le « Prologue du théâtre comique ».33 « Comme tel Janus appartient donc bien à la catégorie pragmatique des indicateurs de sui-référentialité qu’ont identifiés les théoriciens de l’énonciation »34. Cette perspective d’étude renouvelle la réception que l’on peut avoir des Fastes, et éloigne de l’orientation nettement historique, ou structurelle, des études anglosaxonnes. Les Fastes seraient donc dès l’abord marqués du sceau de la réflexivité, et les prières, en tant qu’actes de parole à la fois hors-texte et intégrés à la trame de l’énoncé, à la fois traditionnels et originaux, à la fois codifiés et libres, seraient les lieux privilégiés de cette réflexivité, par laquelle le poète attire notre attention sur son art lui-même et la puissance créatrice de son verbe. Pour B. Liou-Gille, « Janus est le dieu qui donne forme à l’informe, parce que c’est lui qui ordonne le Chaos »35 : n’est-il pas alors une image vivante de la poésie, qui donne forme au langage et l’ordonne pour créer à la fois du sens et de la beauté ?

Le Pôle apollinien Apollon lui aussi est le dieu de l’ordre qui s’oppose au chaos36. Vainqueur du monstre archaïque Python, il inaugure une ère nouvelle qu’il place sous le 30. A. Deremetz (336), « La prière en représentation à Rome », p. 162. 31. A. Deremetz (336), ibid., p. 163. 32. A. Deremetz (336), ibid., p. 160. 33. A. Deremetz (336), ibid., p. 164. 34. ibidem. 35. B. Liou-Gille (456), Une lecture religieuse de Tite-Live, p. 146. 36. Pour une vision générale de ce dieu, on pourra consulter les ouvrages sur lesquels nous avons appuyé notre étude : J. GagÉ, L’Apollon romain. Essai sur le culte d’Apollon et le développement



Chapitre Premier : Les acteurs de la prière 139

signe du culte de l’ordre et de la beauté. Dieu cosmique au sens étymologique du terme, il est le dieu tutélaire d’Auguste après la bataille d’Actium et sa figure se transforme progressivement, pour se solenniser en se départissant de ses ambiguïtés premières. D’innombrables études ont été consacrées à la fascinante figure d’Apollon, et même, plus précisément, à l’Apollon ovidien. Notre propos n’est pas ici de reprendre ces études, ni de les commenter. Nous tenterons simplement de mettre à jour avec clarté les liens qui unissent les dieux que nous avons regroupés autour d’Apollon, et de montrer que leurs qualités propres, leurs particularités poétiques infléchissent le ton des prières qui leur sont adressées et doivent orienter notre réception de ces passages. Apollon est invoqué dans toutes les œuvres de notre corpus, à l’exception des Fastes : Métamorphoses II, 35-39, par Phaéton Métamorphoses IV, 192-208, par le narrateur Métamorphoses VIII, 350-351, par Mopsus « Phoebe, » ait Ampycides, « si te coluique coloque, da mihi, quod petitur, certo contingere telo ! »

Métamorphoses XII, 586-596, par Neptune « o mihi de fratris longe gratissime natis, inrita qui mecum posuisti moenia Troiae, ecquid, ubi has iamiam casuras adspicis arces, ingemis ? aut ecquid tot defendentia muros milia caesa doles ? ecquid, ne persequar omnes, du « ritus Graecus » à Rome des origines à Auguste, Paris, 1955 (BEFAR, 182) ; P. Boyancé, «  L’interprétation solaire d’Apollon  », RHR, 1960, CLVII, p.  129-130  ; P.  Boyance, « L’Apollon solaire », Mélanges Carcopino, p. 149-170 ; G. Miroux, « Sur quelques épithètes d’Apollon et d’Artémis », DHA, VII, 1981, p. 107-125  ; H. Le Bonniec, « Apollon dans les Métamorphoses », Journées Ovidiennes de Parménie, 1985, p. 145-174 ; A. Novara, « Un hymne tibullien au dieu Amour (Elégies II, 1, v. 67-90) », Vita Latina, 1989, 116, p. 2-10 ; C. Calame, « Narration légendaire et programme poétique dans l’hymne à Apollon de Callimaque », Etudes de Lettres, 1992, 4, p. 41-66 ; L. Calviet, « Les prières à Apollon dans les traités grecs de musique », Actes du colloque organisé par le centre Prière-A. Février, 2-3 avril 1998, p. 103-114 ; C-F. Roguin de, « Apollon Lykeios dans la tragédie : dieu protecteur, dieu tuteur, ‘dieu de l’initiation’ », Kernos, 12, 1999, p. 99-123 ; A. Jacquemin, « Panthéon et épiclèses delphiques : Apollon et les autres dieux », in Nommer les dieux (469), p. 241-253.

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Deuxième partie : La mise en scène de la prière Hectoris umbra subit circum sua Pergama tracti ? cum tamen ille ferox belloque cruentior ipso uiuit adhuc, operis nostri populator, Achilles. Det mihi se : faxo, triplici quid cuspide possim, sentiat ; at quoniam concurrere comminus hosti non datur, occulta necopinum perde sagitta ! » Adnuit atque animo pariter patruique suoque Delius indulgens nebula uelatus in agmen peruenit Iliacum ; […]

Métamorphoses XV, 868, par le narrateur

et cum Caesarea tu, Phoebe domestice, Vesta

Amours III, 2, 51, par le narrateur

auguribus Phoebus, Phoebe venantibus adsit !

Ars Amatoria III, 347-348 , par le narrateur

O ita, Phoebe, uelis, ita uos, pia numina uatum,   Insignis cornu Bacche nouemque deae.

Héroïdes XV, 181-184, par Sappho

Inde chelyn Phoebo, communia munera, ponam,   Et sub ea uersus unus et alter erunt : « grata lyra posui tibi, Phoebe, poetria Sappho ;   conuenit illa mihi, conuenit illa tibi. »

La moitié de ces prières sont le fait du narrateur (4/8), tandis que les quatre autres sont attribuées à des personnages mythiques, tous liés directement au dieu par des attaches familiales – Phaeton est son fils et Neptune son oncle – ou par leur nature propre. La poétesse Sappho invoque le dieu de la poésie et souligne par une allitération marquée leur proximité artistique : Héroides XV, 183 Grata lyram posui tibi, Phoebe, poetria Sappho

La symétrie du vers suivant renforce encore l’union de la poétesse et de son dieu, les deux pronoms mihi tibi étant métriquement interchangeables : Conuenit illa mihi, conuenit illa tibi

Mopsus, quant à lui, ne s’adresse pas au dieu musicien, mais à l’archer, à l’Apollon e0kathbalov de la tradition, au dieu chasseur frère de Diane, et qui



Chapitre Premier : Les acteurs de la prière 141

saura guider sa flèche contre le terrible sanglier de Calydon. Mais par sa qualité de devin, qu’il avait mise au service des Argonautes lors de leur éxpédition, il se rattache à la mantique apollinienne, et donc au carmen religieux et poétique. La première invocation du narrateur, au livre IV des Métamorphoses, est une description élégiaque de la peine d’amour chez le dieu aux multiples conquêtes, en une variation sur l’éclipse du soleil. Il faut attendre la fin du livre XV, bien Romain, pour voir apparaître explicitement l’Apollon d’Auguste, Phoebe domestice, toujours invoqué dans les Métamorphoses, dont on a pourtant si souvent commenté l’hellénisme, par son nom latin. Ce ‘Phoebus domesticus’ est celui qui habite en la demeure du Prince, et il est invoqué dans un vœu à la fois poétique et politique, dont l’objet est la préservation d’Auguste. La prière du narrateur de l’Ars Amatoria doit attirer notre attention. En voici le contenu : Ars Amatoria, III, 347-348 «  Que ce soit ta volonté, ô Phoebus, et la vôtre, divinités sacrées des poètes, toi noble Bacchus au front cornu, et vous les neuf déesses. »

Dans cette prière pour la diffusion des œuvres d’Ovide, sont associées trois entités divines caractéristiques du pôle apollinien : Apollon lui-même, les Muses qui l’accompagnent dans la tradition mythique et lui valent l’épithète de Musagète – et dont la dimension métapoétique n’est plus à démontrer – et Bacchus, dont la présence rayonne dans toute l’œuvre ovidienne, jusqu’à obombrer Apollon dans le poème des Fastes. Car nous avons dit qu’Apollon n’était le destinataire d’aucune prière dans ce recueil dont nous avons déjà signalé – à la suite d’autres savants – la forte coloration à la fois romaine et, dans une large mesure, augustéenne. Ce qui est remarquable, c’est cette fidélité d’Ovide à une figure de Bacchus lumineuse et poétique, que l’on retrouve dès l’orée de sa carrière littéraire (Ars Amatoria) et qui apparaît dans toutes ses œuvres jusqu’aux Fastes, où il éclipse Apollon (dans notre corpus, du moins), alors qu’il eût été plus prudent, semble-t-il, de rompre avec une divinité si fortement attachée, dans l’imaginaire romain, à Marc-Antoine et aux influences orientales. Proposons, avant toute chose, un aperçu chronologique de la présence de Bacchus dans notre corpus : Ars Amatoria III, 347-348 par le narrateur Amours III, 2, 45-57 par le narrateur Métamorphoses III, 611-614 par Acétès Métamorphoses IV, 9-32 par le narrateur (Hymne, chanté juste avant un hymne à Apollon IV, 192-208)

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Deuxième partie : La mise en scène de la prière Métamorphoses XI, 102-103 Métamorphoses XI, 132-133 Métamorphoses XIII, 669 Fastes III, 463-506 Fastes III, 771-783 Fastes III, 789-790 Fastes III, 714-732 Fastes VI, 483-484

par Midas par Midas par les filles d’Anius par Ariane par le narrateur par le narrateur par le narrateur (hymne) par le narrateur

On voit que le narrateur ovidien assume la majeure part des prières adressées à Bacchus, et qu’il entretient ainsi avec le dieu une relation privilégiée (7/12). Les personnages qui invoquent le dieu le voient tous, hors de l’épisode tragique mettant en scène Penthée et Bacchus lui-même déguisé en Acétès, comme une divinité bénigne, généreuse quoique puissante. Le vœu que Bacchus offre à Midas de formuler est un gratum muneris arbitrium, un geste de remerciement aimable (Métamorphoses XI, 100-101) et le dieu sera plein de pitié devant l’inconscience du roi : Liber indoluit quod non meliora petisset (v. 105). Et lorsque Midas se repentira de son vœu inconsidéré, le narrateur des Métamorphoses célèbrera la générosité de cœur de Bacchus : mite deum numen : Bacchus peccasse restituit pactique fide data munera soluit37 (v. 134-135). La présentation du dieu est très positive dans cet extrait : bienveillant et miséricordieux, il est propre à faire éclore au cœur de l’homme un réel amour mystique. Le conseil que donnera Bacchus s’apparente d’ailleurs à une pénitence et recouvre une réelle profondeur spirituelle : « Va-t-en vers le fleuve proche de la grande Sardes et, en remontant ses eaux par le sommet de la montagne, poursuis ta route jusqu’à ce que tu arrives à l’embouchure du fleuve. Là, mets ta tête au-dessous de la cascade que forme en jaillissant la source, et, en même temps que ton corps, lave ainsi ta faute. » : v. 141

Subde caput corpusque simul simul elue crimen

Ce vers peut prendre un sens autonome et renverrait alors à l’humilité de l’homme qui baisse le front devant la divinité. Ce que Bacchus demande avant tout aux hommes, c’est qu’ils reconnaissent sa puissance. Les filles de Minyas s’y refusent (Métamorphoses, IV) et sont transformées en chauves-souris, dans une histoire très proche de celle d’Arachnè, dont la tradition savante a depuis longtemps montré la dimension réflexive et métapoétique. Mais la punition que le dieu oppose à leur attitude sacrilège n’est pas excessive, et il leur laisse le 37. ‘Douce est la puissance du dieu. Bacchus pardonna à celui qui confessait avoir fauté, et annula la faveur donnée par loyauté envers sa parole.’



Chapitre Premier : Les acteurs de la prière 143

temps de raconter quatre contes magnifiques (l’adultère de Mars et Vénus, la mort de Leucothoé et la métamorphose de Clythie en tournesol, le conte de Pyrame et Thisbé et la métamorphose d’Hermaphrodite) avant de punir les propos impies dont elles les ont entourés. De la même manière Bacchus offre à Penthée l’occasion de se repentir et de changer de conduite. Par l’invention du personnage d’Acétès, double humain sous lequel se dissimule le dieu, et par la mise en abîme exemplaire qu’il propose dans le récit du châtiment des marins thyrréniens, Ovide modifie la tradition – on ne retrouve en effet rien de tel chez Euripide – afin d’adoucir la figure du dieu et de mettre en avant sa mansuétude et sa générosité. Il ne punit que lorsque l’outrecuidant entêtement des hommes les pousse au sacrilège, hors de tout repentir. L’épisode des filles d’Anius souligne cette mansuétude de Liber, et son amour pour ses fidèles : il accède sans délai à leur invocation lorsqu’elles sont en danger à cause d’une faveur dont il les a gratifiées, et il leur vient en aide par une métamorphose. Est-ce là l’intervention qu’elles eussent souhaitée ? Le narrateur de l’histoire semble en douter, qui commente ainsi l’action divine : Métamorphoses XIII, 669-672 illae tollentes etiamnum libera caelo bracchia « Bacche pater, fer opem ! » dixere, tulitque muneris auctor opem, si miro perdere more ferre uocatur opem […] « Elles, levant leurs bras libres au ciel dirent ‘Bacchus, ô Père, aide nous !’ L’auteur du présent leur vint en aide, si perdre quelqu’un par un prodige peut être appelé lui venir en aide. »

Il qualifie lui-même de ‘malheur’ (mali v. 673) leur aventure. Mais il ne faut pas oublier que ce narrateur n’est autre que le père éploré des jeunes filles-oiseaux et que sa douleur humaine, tout à fait vraisemblable, s’exprime dans ces vers. Ovide respecte ici l’éthos de son personnage et on ne peut lui imputer ses propos. Le dernier personnage qui adresse à Bacchus une prière est Ariane, abandonnée pour la seconde fois à Naxos. Mais là encore Bacchus ne reste pas indifférent. Ce n’est pas un dieu débauché et jouisseur que nous montre Ovide, un dieu inaccessible au sentiment, mais au contraire un dieu plein de pitié et de douceur, qui pleure avec Ariane et la console par des paroles caressantes : Fastes III, 509 Occupat amplexu lacrimasque per oscula siccat « Il court l’embrasser et sèche ses larmes sous ses baisers. »

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Deuxième partie : La mise en scène de la prière

Et dans l’apothéose d’Ariane, il envoie aussi au ciel son collier qui scintillera en neuf étoiles nouvelles, lesquelles ne peuvent manquer d’évoquer pour le lecteur les neuf Muses apolliniennes. L’œuvre d’Ovide est toute tendue dans cette rivalité tacite entre Apollon et Bacchus, rivalité qui disparaît paradoxalement, nous l’avons vu, dans les Fastes au profit de Bacchus, quoique le pôle apollinien y soit fortement représenté par les Muses et par celle d’entre elles qui est la plus chère à Ovide, Erato, protagoniste du livre IV des Fastes, mais que l’on peut aussi rattacher au pôle vénusien. L’épisode des filles d’Anius est raconté à Enée alors qu’il entre dans « la ville d’Apollon » apollineam urbem, XIII, 631, et Anius, qui en est le conteur, est luimême prêtre d’Apollon (XIII, 632-633) et reçoit d’ailleurs le fils de Cythérée et ses compagnons dans le temple même du dieu (XIII, 633). C’est pourquoi Anchise l’apostrophe en des termes propres à souligner son attachement à Phoebus (XIII, 640) : O Phoebi lecte sacerdos ‘ô ministre choisi de Phoebus’. L’hymne que le narrateur des Métamorphoses adresse à Bacchus (IV, 9-32) – hymne détourné, certes, mais qui reste le premier des Métamorphoses – précède de peu un hymne à Apollon (IV, 192-208), entonné par le même narrateur. Nietzsche a longuement développé cette dichotomie centrale chez l’homme, le philosophe comme l’artiste, qui doit trouver un équilibre entre son tempérament dionysiaque et son caractère apollinien, plus ordonné et discipliné38. En politique, on se souvient de l’allégeance dionysiaque de Marc-Antoine, qui culmina dans sa royauté égyptienne aux côtés de Cléopâtre et se vit opposer la propagande apollinienne d’Octave-Auguste. Mais il nous semble que l’œuvre d’Ovide ne se situe pas dans une telle opposition et que la perspective qu’il adopte pour approcher le dieu Bacchus est originale. Elle semble liée intimement à son art poétique. Ovide fait entendre deux hymnes à Bacchus, l’un dans les Métamorphoses et l’autre dans les Fastes. L’hymne à Bacchus apparaît presque comme un topos élégiaque, depuis l’Ode 2, 19 d’Horace reprise par Properce (III, 17) et Tibulle (III, 1, 3). Ces poèmes, complétés par tout un corpus élégiaque, se répondent en écho l’un à l’autre, en un dense réseau intertextuel39. Comme le rappelle

38. On se reportera plus précisément aux développements de La naissance de la tragédie. 39. Les reprises ne sont pas nécessairement verbales, mais peuvent être plus allusives, comme l’affirme G-B. Conte : « Allusion will occur as a literary act if a sympathetic vibration can be set up between the poet’s and the reader’s memories when these are directed to a source already stored by both. Reference should be made to a poetic setting rather than to individual lines. A single word will often be enough to condense a whole poetic situation and to revive its mood. » (G-B. Conte, The Rhetoric of Imitation. Genre and Poetic Memory in Virgil and other Latin Poets. Ithaca and London, 1986, p. 35).



Chapitre Premier : Les acteurs de la prière 145

H. de la Ville de Mirmont40, « à la fin du principat d’Auguste, le chorus poetarum, dont Ovide était devenu le personnage important, avait fait choix d’une autre divinité protectrice41. Apollon qui, en Grèce, inspirait et soutenait les poètes, était devenu le protecteur personnel de l’Empereur, qui aimait à se faire représenter avec le costume du dieu, et « dont l’assimilation apollinienne était une donnée politique »42. C’est le dieu Bacchus que la société des poètes avait pris pour patron ». C’est donc naturellement à Bacchus, protecteur du chorus poetarum romanorum qu’Ovide demandera, pendant son exil à Tomes, d’intercéder auprès de l’implacable empereur : Tristes V, 3, 43-46 « O le plus beau des dieux, sois-moi propice, soulage ma misère, songe que je suis au nombre de tes fidèles ! Les dieux sont liés entre eux par un commerce perpétuel : que ta divinité, ô Bacchus, essaie de fléchir la divinité d’Auguste43. »

En reprenant la constatation d’A. Bruhl44, on peut affirmer que « tous ces vers montrent à quel point Ovide rattache à Dionysos la source de son inspiration ». Mais le dieu dont il est question dans notre corpus recèle de multiples facettes, qu’il emprunte à des divinités que seul un synchrétisme relativement tardif est parvenu à assimiler totalement. M. von Albrecht rappelle que « comme César, il est un descendant de Vénus, né dans une ville même qui est protégée par Mars et Vénus. Ovide aime à exalter l’importance des fils de Vénus à travers son ouvrage – à partir du dieu d’Amour jusqu’à César. En effet, dans le premier tiers de l’ouvrage c’est l’Amour, fils de Vénus, dont le pouvoir universel est en danger (livres I et V) ; à un autre descendant, Bacchus, est attribué un rôle dominant, et dans le dernier tiers enfin, c’est un autre fils, Enée, qui fonde l’empire romain. Ainsi, le parallélisme entre les événements mythiques et historiques, concernant Thèbes aussi bien que Rome, est renforcé par l’emploi des noms de dieux, par la généalogie et le rôle que jouent Vénus et Bacchus. »45 Chez Ovide, Bacchus punit les Ménades pour avoir tué Orphée, qui est ainsi mis en relation avec le 40. H. de la Ville de Mirmont (75), La Jeunesse d’Ovide, p. 220-221. 41. Leur divinité tutélaire première était Minerve. 42. A. Videau (255). La poétique d’Ovide, p. 530. 43. Traduction d’H. de la Ville de Mirmont. 44. A. Bruhl, Liber Pater, Origine et expansion du culte dionysiaque dans le monde romain, 1953, p. 141. 45. M. von Albrecht (272), « Les Dieux et la religion dans les Métamorphoses d’Ovide », p. 7.

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Deuxième partie : La mise en scène de la prière

dieu nouveau, alors qu’il appartient traditionnellement au cercle apollinien. « Dieu à mystères et dieu de la poésie », « sa compétence surpasse de loin celle d’un dieu à caractère politique »46 et il se trouve de fait être l’un des points de contact principaux entre les trois grands cercles divins du monde ovidien.

Le Pôle vénusien Mais la divinité centrale de l’œuvre ovidienne, celle dont le charme et la puissance nimbent ses vers et en constituent le sujet le plus fréquent tout en les colorant d’une teinte si particulière, c’est Vénus. De nombreuses études ont été consacrées à cette divinité complexe. Nous nous restreindrons à la seule implication de Vénus dans les prières ovidiennes. Vénus apparaît dans toutes les œuvres de notre corpus, comme destinataire de prières variées (14) mais aussi comme émetteur (4, toutes dans les Métamorphoses). Nous ne nous attarderons pas sur ce rapport, amplement développé par la critique moderne, entre élégie et thématique érotique. Nous retiendrons seulement la synthèse que propose Elaine Fantham dans son édition du livre IV des Fastes lorsqu’elle aborde les « transformations de l’élégie romaine. »47 Dans ce court chapitre de son introduction, elle rappelle l’évolution de l’élégie dans les œuvres de Properce, où l’on voit le vers d’amour, le distique lyrique de l’élégie se lester de pensées patriotiques ou religieuses, s’enrichir d’ors sérieux qui, loin de le déparer, l’ornent au contraire de reflets nouveaux. Nouveaux ? Peut-être pas tant que cela. Le confinement de l’élégie à la sphère de l’intime a été éphémère, et son élargissement, son épanouissement comme art total, capable de tout dire, du rire à l’élan mystique, n’est qu’un retour à la source callimaquéenne : « When Roman elegy departed from its central concern with love and friendship, it was to follow Callimachus’ model. »48 Cette redécouverte du potentiel de l’élégie est donc antérieure aux œuvres de la maturité d’Ovide, qui, lorsqu’il établit son plan pour les Fastes, « showed his cognition that both the potential of elegy and the nature of didactic poetry had changed, and could be developped so as to encompass large ‘patriotic’ themes without straining or falsifying his talent. »49 Le narrateur est l’émetteur principal des prières à Vénus (6/14). Certaines, toutefois, sont prononcées en contexte par des personnages ayant à se plaindre 46. M. von Albrecht (272), ibid. p. 8. 47. E. Fantham (99), Fasti, Book IV, p. 20. 48. ibid. p. 23. 49. ibid. p. 25.



Chapitre Premier : Les acteurs de la prière 147

de l’amour ou demandant une faveur à la puissante déesse  : Hippomène (Métamorphoses X, 640-641 et X, 673), Didon (Héroïdes, VII, 31-34 et VII, 105), Hermaphrodite, son fils né de Mercure (Métamorphoses IV, 383-386) et Pygmalion (Métamorphoses X, 274-276). La dimension métapoétique de l’épisode de Pygmalion n’est plus à démontrer50, et éclaire la puissance créatrice de Vénus, telle que la célébrait déjà à une autre échelle, le poème de Lucrèce. Cette puissance créatrice s’incarne, se réalise dans le carmen, et plus encore dans la poésie telle que la conçoit et la pratique Ovide, création virtuelle et pourtant musicale dont le pouvoir est grand sur les âmes mais aussi – pourquoi pas ? – sur le monde et sur les dieux. La figure de Vénus est ambivalente. R. Schilling a analysé l’étymologie du nom et les ambiguïtés de cette racine, qui ne pouvaient que ressurgir sur la déesse elle-même et ses incarnations poétiques. Une facette de la déesse est légère et souriante ; elle est la reine couronnée de roses des amours ludiques et volages, qui aime les rires et les chants, et préside aux banquets des hommes et à leurs jeux. Entourée de ‘Muses légères’, elle badine avec son fils ailé et est une déesse bienveillante et pacificatrice. Mais une autre facette nous la montre violente et cruelle, jalouse de son pouvoir et prête à l’exercer par l’encouragement au viol et la domination. Vindicative, elle trame d’ambitieuses stratégies dont les victimes sont manipulées comme des pions sur un échiquier. C’est ainsi que Patricia Johnston analyse les épisodes de Cyané et Aréthuse/Proserpine dans les Métamorphoses51, par lesquels « Venus was graduated from the traditional role as the inspirer of love in latin elegiac poetry to become a rapacious empire-builder, with cupid as her agent ». Cet « imperium » sur lequel réfléchit P. Johnston est à rattacher à la généalogie vénusienne d’Auguste – et Properce lie explicitement Vénus et Auguste en III, 4, 19-2052. Comme le rappelle P. Johnson, « in Fasti IV on the month of April, the strongest emphasis is placed upon Venus’ relationship to the Julians. » La figure de Vénus est donc complexe, et même très ambiguë, dans l’œuvre ovidienne et l’étude des épiclèses et épithètes choisies par le poète confirmera cette belle chatoyance.

50. On peut se reporter, entre autres, à D. F. Bauer (46), « The function of Pygmalion in the Metamorphoses », TAPhA, XCIII, 1962, p. 1-21 ; F. Spaltenstein (225), « Pygmalion et sa statue (Ovide, Métamorphoses 10, 243 sqq.) », Die Sprache der Liebe, 2000, p. 209-212. 51. P. Johnson (426), « Constructions of Venus ». 52. On peut aussi rapprocher ce passage d’Horace, Odes, IV, 15, 31-32.

« Les dieux meurent avec leurs derniers fidèles. De nouveaux dieux naissent probablement parmi nous, sans que nous nous en apercevions. Ils n’attendent qu’un nom pour que nous les adorions. » Vintila Horia, Dieu est né en exil, Fayard, 1960

Chapitre II Circonstances et lieux de la prière Les Lieux de prière Les échanges de paroles entre les hommes et les dieux s’effectuent souvent en des lieux particuliers, parfois codifiés par le rituel, parfois choisis en fonction de topiques littéraires, de références intertextuelles, ou selon l’arbitraire du poète. Mais ces lieux sont toujours liés par quelque trait au dialogue qu’ils abritent. Comme nous l’avons rappelé, l’espace sacré est défini à Rome, et chaque culte, chaque célébration même, a son lieu propre. Ovide va bien évidemment prendre des libertés avec ces contraintes liturgiques, sans toutefois s’en affranchir totalement. Comme ses prédécesseurs, qu’ils soient Grecs ou Romains, Ovide n’aborde pas avec désinvolture aux rivages du sacré. S’il joue, c’est sérieusement, à ce jeu mystérieux de la poésie, dans lequel tout est permis, mais où tout doit rester reconnaissable, et où de nombreux codes forment des structures contraignantes. La diversité foisonnante de l’imaginaire ovidien pourrait décourager les tentatives de synthèse, tant sont multiples les lieux évoqués à l’occasion des prières de notre corpus. Tâchons toutefois de faire ressortir quelques catégories.

Lieux sacrés inaugurés : temples et autels Il nous a paru important de commencer par les lieux les plus attendus, à savoir les lieux dédiés précisément au culte, à sa réalisation dans des gestes ou des prières, à savoir les temples et autels inaugurés. John Scheid redéfinit, dans La Religion des Romains, ce qu’est un templum1 : c’est un lieu inauguré, c’est-à-dire approuvé par les auspices pour une définition particulière. Un templum, pour devenir sacré, doit être consacré. Or « comme beaucoup de temples ont été construits dans des templa et que leur surface se confondait même avec eux, ils ont été appelés eux-mêmes ‘temples’. » Plusieurs prières de 1. p. 55.

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Deuxième partie : La mise en scène de la prière

notre corpus sont émises dans des lieux ou à proximité de lieux définis par le poète selon les termes de l’architecture sacrée traditionnelle (templum, aedes, sacellum, delubrum principalement). – Deucalion et sa femme, après le déluge, adressent une prière à Thémis dans un environnement dévasté : Métamorphoses I, 372-374 (…) flectunt uestigia sanctae ad delubra deae, quorum fastigia turpi pallebant musco stabantque sine ignibus arae. « Ils dirigent leurs pas vers le sanctuaire de l’auguste déesse, dont le toit se détériore sous la mousse indigne et dont les autels se dressent sans feux. »

– Un homme de Lydie parcourt des pacages avec un compagnon qui lui sert de guide : Métamorphoses VI, 324-326   (…) cum quo dum pascua lustro, ecce lacu medio sacrorum nigra fauilla ara uetus stabat, tremulis circumdata cannis. « Comme je visitais avec lui les pâturages, voici que surgit à ma vue un autel ancien, noirci par les fumées des sacrifices, qui se dressait au milieu de l’étang, entouré du frémissement des roseaux. »

– Les prières de Jason et de Médée s’élèvent au cours d’une cérémonie à laquelle participe une foule nombreuse. L’encens et les offrandes apportées suggèrent la présence d’autels rituels (Métamorphoses VII, 159-162). – Une cérémonie privée est organisée, en Métamorphoses VII, 427-433, pour célébrer l’échec de la tentative d’empoisonnement de Thésée par Médée : (…) fouet ignibus aras muneribusque deos implet feriuntque secures colla torosa boum uinctorum cornua uittis. «  Il ranime le feu sur les autels, comble les dieux de dons et les haches frappent les cous musculeux des bœufs aux cornes ceintes de bandelettes. »



Chapitre II : Circonstances et lieux de la prière 151

– La cabane de Philémon et Baucis se change en temple (Métamorphoses VIII, 700) (parua casa) / Vertitur in templum. – Sont encore évoqués l’autel d’Isis en Métamorphoses IX, 771-772, et l’autel fumant d’encens duquel Pygmalion s’approche pour prononcer sa folle demande (Métamorphoses X, 270-274). De la même manière, les Fastes évoquent l’autel de la Paix, auquel son récit conduit naturellement le narrateur avant la grande prière qu’il adresse à la déesse (Fastes I, 709 deduxit Pacis ad aram). La prière à Terminus s’inscrit dans un long rituel précisément décrit, au cours duquel sont offerts de l’encens, du miel et du vin (Fastes II, 645). Servent aussi de cadre à une prière un sanctuaire de Minerve, parua delubra Mineruae, Fastes III, 847-848, un temple à Vénus, Fastes VI, 161-162 (templa iubet fieri) ainsi qu’un autel à Palès, lieu d’un rituel long et précis, Fastes IV, 731sqq (I, pete uirginea, populus, suffimen ab ara). On peut imaginer que la cérémonie célébrée par le flamine de Robigo (Fastes IV) dans le bois sacré de la déesse a donné lieu à l’érection d’un autel temporaire, ou a été effectuée sur un autel préexistant2. Les flammes dans lesquelles sont purifiées les exta supposent en effet un appareil liturgique traditionnel. L’évocation d’un temple ou d’un autel est propice à la description du rituel qu’accompagne la prière. Lors de ces occasions apparaissent les seuls prêtres en prière de notre corpus. Les célébrants de rites codifiés et officiels peuvent être adjoints ici au groupe des prêtres, qu’il s’agisse du berger lors des fêtes de Palès, du marchand lors des fêtes de Mercure, ou des officiants de la cérémonie offerte à Terminus (Fastes II).


Lieux naturels Ovide semble toutefois privilégier les lieux naturels, au premier rang desquels les bois et les rivages. Ces lieux frontaliers, qui délimitent deux mondes et les séparent tout en les rapprochant sont propices à l’éclosion d’une parole qui n’est plus tout à fait humaine, sans être autre pour autant. Elle évolue dans un espace mal défini, l’espace probable et pourtant incertain de la communication entre les hommes et les dieux.

2.

Nous ne nous arrêtons pas ici sur ces rituels, auxquels un chapitre sera consacré.

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Deuxième partie : La mise en scène de la prière La Nature est un temles où de vivants piliers Laissent parfois sortir de confuses paroles…3

Certains bois sont seulement des lieux naturels, comme celui dans lequel se cache Salmacis pour surprendre Hermaphrodite (Métamorphoses IV, 339), ou le bois surveillé par Battus (Métamorphoses II, 689-690). C’est le lieu privilégié de la chasse, activité fort représentée dans les œuvres ovidiennes : il y a la forêt dans laquelle Picus chasse et se perd (Métamorphoses XIV, 360 & 364.), celle dans laquelle Céphale tue par accident sa femme Procris, qu’il prend pour un gibier (Métamorphoses VII, 805 uenatum in siluas iuuenaliter ire solebam ; 836 egredior siluamque peto uictorque per herbas), où celle que Mopsus, Méléagre et leurs illustres compagnons parcourent à la poursuite du terrible sanglier ‘de Calydon’ (Métamorphoses VIII, 328-329 silua frequens trabibus, quam nulla ceciderat aetas / incipit a plano deuexaque prospicit arua4). Daphné, avant d’être poursuivie par Apollon, fréquente elle aussi les forêts giboyeuses, qui sont l’image de sa virginité farouche : Métamorphoses I, 475-476 Siluarum latebris captiuarumque ferarum Exuuiis gaudens innuptaeque aemula Phoebes « Aimant à se cacher dans les bois et à porter les peaux des bêtes qu’elle a chassées, elle imite la vierge Phoébé. »

Métamorphoses I, 480 Impatiens expersque uiri nemora auia lustrat «  Ne voulant pas connaître de mari, elle parcourt sans cesse les bois impénétrables. »

La forêt est donc à la fois un lieu de danger et d’aventure, comme elle le restera dans l’imaginaire médiéval européen, mais elle est aussi un lieu de transgression, que celle-ci soit religieuse ou sexuelle (comme dans l’histoire de Philomène). La transgression religieuse est possible car les bois peuvent être des bois sacrés, les luci que les Romains respectaient en tant que lieux voués à une

3. Charles Baudelaire, « Correspondances », Les Fleurs du Mal. 4. « Une forêt qui abonde en grands arbres, et qu’aucun siècle n’a abîmée par des coupes, part de la plaine et domine les pâturages en espaliers. ».



Chapitre II : Circonstances et lieux de la prière 153

divinité. « Le lucus est à proprement parler une clairière dans un bois sacré »5. Notre corpus nous en donne à voir de nombreux : – Tandis que Calliope développe son chant sur le Parnasse (Métamorphoses V, 278, extrait no 27 de notre corpus), les Bacchantes choisissent le Mont Cythéron pour la célébration des mystères de Bacchus. Elles évoluent dans une clairière à flanc de montagne, bordée par la forêt : Métamorphoses III, 708-709 Monte fere medio est cingentibus ultima siluis Purus ab arboribus spectabilis undique campus

– L’un des plus beaux passages, très évocateur grâce à un usage constant et émotionnel de l’hypotypose, est celui décrivant l’attaque du bois de Cérès par Erysichthon : Métamorphoses VIII, 741-779 Ille etiam Cereale nemus uiolasse securi dicitur et lucos ferro temerasse uetustos.
 Stabat in his ingens annoso robore quercus, una nemus ; uittae mediam memoresque tabella sertaque cingebant, uoti argumenta potentis. Saepe sub hac dryades festas duxere choreas, saepe etiam manibus nexis ex ordine trunci circuiere modum, mensuraque roboris ulnas
 quinque ter implebat, nec non et cetera tanto silua sub hac omnis quanto fuit herba sub omni.  Non tamen idcirco ferrum Triopeius illa abstinuit famulosque iubet succidere sacrum robur, et ut iussos cunctari uidit, ab uno
 edidit haec rapta sceleratus uerba securi :
 «Non dilecta deae solum, sed et ipsa licebit  sit dea, iam tanget frondente cacumine terram.»
 Dixit, et obliquos dum telum librat in ictus,
 contremuit gemitumque dedit Deoia quercus,
 et pariter frondes, pariter pallescere glandes
 coepere ac longi pallorem ducere rami.  Cuius ut in trunco fecit manus impia uulnus,
 haud aliter fluxit discusso cortice sanguis,
 quam solet, ante aras ingens ubi uictima taurus
 5. J. Scheid, La Religion des Romains, Paris, 2002, p. 65.

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Deuxième partie : La mise en scène de la prière concidit, abrupta cruor e ceruice profundi.
 Obstipuere omnes, aliquisque ex omnibus audet  deterrere nefas saeuamque inhibere bipennem. Aspicit hunc « mentis » que « piae cape praemia ! » dixit Thessalus inque uirum conuertit ab arbore ferrum
 detruncatque caput repetitaque robora caedit,
 redditus e medio sonus est cum robore talis : « Nympha sub hoc ego sum Cereri gratissima ligno,
 quae tibi factorum poenas instare tuorum
 uaticinor moriens, nostri solacia leti. »
 Persequitur scelus ille suum, labefactaque tandem
 ictibus innumeris adductaque funibus arbor  corruit et multam prostrauit pondere siluam.
 Attonitae dryades damno nemorumque suoque, omnes germanae, Cererem cum uestibus atris
 maerentes adeunt poenamque Erysichthonis orant.
 « On dit même qu’il avait profané une forêt sacrée de Cérès avec sa hache et souillé de son arme les antiques bois. Là se dressait un chêne immense, au bois séculaire, une forêt à lui seul. Des bandelettes le ceignaient en son milieu, ainsi que des tablettes commémoratives et des guirlandes, témoignages de vœux exaucés. Souvent sous ses branches les Dryades menaient leurs chœurs joyeux, souvent aussi elles joignaient leurs mains en cercle autour du tronc, et quinze brasses couvraient la circonférence de l’arbre. Il dépassait les autres arbres autant que les autres arbres dépassent l’herbe qui pousse à leur pied. Malgré tout cela, le fils de Tripoas ne s’abstient pas de porter contre lui le fer, et il ordonne à ses serviteurs d’abattre le tronc sacré ; comme il voit que ceux à qui il a donné cet ordre hésitent, le scélérat arrache sa hache à l’un d’entre eux et s’exclame : « Même s’il n’est pas seulement cher à la déesse, mais s’il est la déesse elle-même, il va toucher la terre de sa cime verdoyante. Il dit, et tandis que, le fer levé, il s’apprête à porter les premiers coups, le chêne sacré tremble et gémit, et ses feuilles et ses glands au même instant commencent à pâlir, une sueur froide parcourt les longues branches. Dès que la main impie a infligé au bois la première blessure, le sang jaillit, exactement comme de la tête d’un taureau immense, lorsqu’il s’abat, offert en sacrifice, devant l’autel. Tous frémissent, et un seul, au milieu de tous, ode s’effrayer du crime impie, et tenter d’arrêter la cruelle hache double. Il le regarde et dit : « Reçois les prémices de ta piété ! ». Il détourne le fer de l’arbre et le tourne contre l’homme, qu’il décapite, et il frappe avec une force redoublée. Mais un son sort du cœur de l’arbre, avec puissance  : ‘Une nymphe vit sous ce bois, et c’est moi, très chère à Cérès, qui te prédis en mourant que tu recevras le châtiment de tes crimes, ce qui me consolera dans la mort.’



Chapitre II : Circonstances et lieux de la prière 155 Mais il poursuit son forfait. L’arbre tombe sous les coups innombrables, entraîné par des câbles, et une partie de la forêt est écrasée sous son poids. Toutes les Dryades, frappées de stupeur par ce crime qui les touche et qui touche les bois sacrés, en gémissant s’en vont vers Cérès, drapées dans des vêtements de deuil, et la supplient de châtier Erysichton. »

Les deux termes qui reviennent le plus souvent dans les Métamorphoses semblent donc être nemus et silua. La transgression semble moins présente dans les autres œuvres ovidiennes, ce qui corrobore son lien propre avec la thématique de la métamorphose. Dans les Fastes par exemple, les bois sacrés sont davatage évoqués pour leur atmosphère spirituelle particulière, lieux mystiques où l’homme ressent plus profondément l’existence du divin et son interaction avec le monde des hommes. – La source dans laquelle se cache le pius Numa, et que nous avons déjà évoquée, est au milieu d’une clairière, dans un bois sacré qui sera propice au sentiment religieux du personnage6 : Fastes III, 295-296 Lucus Auentino suberat niger ilicis umbra   Quo posses uiso dicere « Numen inest ». « Sur l’Aventin était un bois sacré, noir de l’ombre des peupliers, dont la vue faisait dire : ‘Il y a là un Dieu’ »

Une formulation très proche se retrouve dans les Amours, lors de la description de la cérémonie à laquelle Ovide assiste au pays des Falisques : Amours III, 13, 7-8 Stat uetus et densa praenubilus arbore lucus ;   Aspice, concedas numen inesse loco. « Il y avait là un bois sacré antique et assombri par la densité des arbres qui le peuplaient. Regarde et tu devras admettre qu’une divinité habite ce lieu. »

Picus et Faunus y attirent, sur la demande de Numa, Jupiter Elicius, et « le sommet boisé de l’Aventin frissonne » :

6. D. Aubriot évoque tous ces lieux dans Prière et conception religieuse en Grèce Ancienne (280), p. 87-99 principalement.

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Deuxième partie : La mise en scène de la prière

Fastes III, 329 Constat Auentinae tremuisse cacumina siluae Numa ressent alors les effets traditionnels de la terreur sacrée :

Fastes III, 331-332 Corda micant regis totoque e corpore sanguis Fugit et hirsutae derigere comae « Le cœur du roi tressaille, son sang quitte son corps et ses cheveux se dressent. »

Pourtant, il sera audacieux et mènera une négociation intraitable avec un Jupiter bienveillant et souriant. Cette audace sera récompensée, et il sera uir conloquio non abigende deum, ‘homme qui ne craint pas de s’entretenir avec les dieux (v. 344)’. – La nymphe Egérie, quant à elle, est liée au bois sacré de Diane, associé à un lac, lesquels sont tous deux mentionnés dans l’invocation religieuse que lui adresse le narrateur en Fastes 261-262. C’est aussi un bois sacré qui accueille la cérémonie célébrée par le flamine de Quirinus en l’honneur de Robigo : Fastes IV, 907 Flamen in antiquae lucum Robiginis ibat   Exta canis flammis, exta daturus ouis. « Le flamine de l’antique Robigo vint dans un bois sacré pour offrir aux flammes la fressure d’un chien, et la fressure d’une brebis. »

– Enfin, Ino sera sauvée de la noyade à l’embouchure du Tibre traversé de tourbillons et bordé d’un bois sacré (lucus erat, Fastes VI) Comme on peut le voir, parfois la prière surgit près du bois sacré de la divinité invoquée, parfois même le dieu auquel le bois est voué n’est pas mentionné, et seule la sensation qu’ont les hommes de la présence d’un numen révèle sa dimension religieuse. L’évocation de ces bois donne parfois lieu à la description d’un locus amoenus, image d’une entente sereine entre les hommes et les dieux, que les rites vont entretenir, ou tenter de restaurer, comme dans l’épisode de Picus et Faunus :



Chapitre II : Circonstances et lieux de la prière 157

Fastes III, 295-298 Lucus auentino suberat niger ilicis umbra   Quo posses uiso dicere ‘numen inest’ In medio gramen muscoque adoperta uirenti   Manabat saxo uena perennis aquae. « Sur l’Aventin était un bois sacré, noir de l’ombre des peupliers, dont la vue faisait dire ‘il y a là un dieu’. Au milieu se trouvait une étendue d’herbe, et, caché sous la mousse verte, un ruisseau coulait d’un rocher sans jamais se tarir. »

Le bois peut aussi être une ‘simple’ forêt, lieu de chasse et d’aventure, ou refuge pour ceux qui sont traqués. Ainsi Dionè fuit devant le ‘terrible Typhon’ : Fastes II, 460-468 Terribilem quondam fugiens Typhona Dione   (Tunc cum pro caelo Iuppiter arma tulit) Venit ad Euphraten comitata Cupidine paruo   Inque Palaestinae margine sedit aquae. Populus et cannae riparum summa tenebant   Spemque dabant salices hos quoque posse tegi. Dum latet, insonuit uento nemus : illa timore   Pallet et hostiles credit adesse manus. « Un jour Dionè qui fuyait le terrible Typhon (au temps où Jupiter prit les armes pour la défense du ciel), arriva auprès de L’Euphrate, accompagnée de Cupidon encore petit, et s’installa sur la berge du fleuve de Palestine. Peupliers et roseaux occupaient le bord des rives, et les saules laissaient espérer qu’ils pourraient eux aussi se mettre à l’abri. Tandis qu’elle se cache, le bois résonne du souffle du vent : elle blémit de peur, et croit que cela est dû à des mains ennemies. »

Dans les Métamorphoses se concentrent les scènes de chasse de notre corpus  : Apollon poursuivant Daphné alors qu’elle chasse en forêt (Métamorphoses I), Mopsus invoquant Apollon au cours d’une chasse au sanglier (Métamorphoses VIII), Picus chassant dans un bois (Métamorphoses XIV). La chasse est un motif topique dans l’œuvre ovidienne d’une manière générale, en raison, entre autres, à la fois de sa symbolique érotique et de son potentiel métapoétique7. 7. Le motif a été analysé en profondeur par H. Casanova-Robin, Actéon… (751). Une bibliographie complémentaire à ce sujet peut être trouvée dans mon article paru en 2008 dans la revue Euphrosyne, « La ronde d’Apollon et Daphné, prière et poésie au seuil des Métamorphoses ».

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Deuxième partie : La mise en scène de la prière

Les rivages renvoient eux aussi souvent l’écho de prières. La rive est un lieu dangereux, espace-frontière entre deux mondes inconciliables. Le danger peut venir de la terre, comme dans l’histoire de Daphné, qui cherche son salut dans les eaux paternelles uicta labore fugae, spectans / Peneidas undas ‘vaincue par l’effort de la fuite, elle tourne les yeux vers les eaux du Pénée’ (Métamorphoses I, 544). Mais il peut aussi venir de la mer : Cénis est violée par Neptune, alors qu’elle ‘se promenait sur une plage déserte’ : Métamorphoses XII, 196-197 (…) secretaque litora carpens Aequorei uim passa dei est. « Alors qu’elle errait sur un rivage écarté, elle subit la violence du dieu. »

Le danger peut enfin être lié à l’eau elle-même, qu’elle soit le lieu de la noyade (celle dont la prière d’Achéloüs doit sauver Perimélé en Métamorphoses VIII, 595-602, ou celle qui permettrait à Ino de rejoindre son fils dans la mort, sans une intervention divine, Métamorphoses IV, 528-530), ou qu’elle soit le lieu mystérieux de la fusion des contraires, comme dans l’aventure d’Hermaphrodite, contée par Ovide au chant IV des Métamorphoses. Hermaphrodite se plaît à vagabonder et se réjouit de voir des fleuves inconnus, ignota flumina (IV, 294-295). En Carie, il découvre un étang à l’eau transparente, souillé d’aucune plante, pur en son eau déserte. Une nymphe y a son logis, nymphe élégiaque attirée seulement par la langueur, la beauté et son reflet dans l’onde : Métamorphoses IV, 297-303 (…) uidet hic stagnum lucentis ad imum usque solum lymphae ; non illic canna palustris nec steriles uluae nec acuta cuspide iunci ; perspicuus liquor est ; stagni tamen ultima uiuo caespite cinguntur semperque uirentibus herbis. Nympha colit, sed nec uenatibus apta nec arcus flectere quae soleat nec quae contendere cursu […] « Là, il voit un étang dont les eaux claires laissaient le regard pénétrer jusqu’au fond ; il n’y a en ce lieu ni roseaux des marais, ni algues stériles, ni joncs aux pointes aiguës ; l’eau est transparente ; cependant les bords de cet étang sont entourés d’un gazon gras et d’herbes toujours vertes. Une nymphe occupe les lieux, mais elle n’est pas habile à la chasse, elle qui n’a pas l’habitude de tendre un arc, ni de poursuivre les proies […]. »

Cette nymphe utilise la surface de l’eau comme un miroir, alors qu’Hermaphrodite en sondait le fond :



Chapitre II : Circonstances et lieux de la prière 159 IV, 312

et quid se deceat spectatas consulit undas

« et pour savoir ce qui lui sied, elle consulte les eaux du regard »

Le jeune homme sera à la merci du désir de la nymphe quand il se fera lui aussi prendre au piège de la surface spéculaire. De son pied, il éprouve l’eau dont seule la surface est alors évoquée (v. 342-343). Alors, par un très-subtil jeu métaphorique, Ovide compare les yeux brillants de la nymphe, non pas à l’orbe du soleil, mais à son reflet dans un miroir, et ce reflet, cher aux poètes alexandrins et aux neoteroi romains, évoque autant la luisante surface de l’étang que l’insondable texte poétique, double et reflet du monde qu’il recrée en même temps qu’il le représente. Ce reflet sera pour Hermaphrodite l’occasion de la fusion et de la recréation par la métamorphose : Métamorphoses IV, 347-349 flagrant quoque lumina nymphae, non aliter quam cum puro nitidissimus orbe opposita speculi referitur imagine Phoebus «  Les yeux de la nymphe brillaient de l’éclat éblouissant par lequel Phoebus se reflète en son orbe pur dans un miroir tourné vers lui. »

A aucun moment, dans les extraits des Métamorphoses de notre corpus, cette eau n’est vue comme rituelle, ni même comme lustrale. Même dans les Fastes, l’environnement aquatique n’est guère plus ritualisé. Il semble qu’Ovide privilégie la dimension esthétique et référentielle, dans le champ littéraire, de ses paysages, au détriment de leur potentielle puissance évocatrice dans la sphère de la réalité liturgique. C’est ainsi que la source dans laquelle se cache Numa lorsqu’il prétend surprendre Faunus et Picus, et à laquelle il sacrifiera une brebis après le succès de son entreprise (Fastes III, 300) fait davantage penser à la grotte de Thétys (Métamorphoses XI, 229-237), locus amoenus propice à la violence amoureuse agréée par les dieux, qu’à un bassin lustral. De la même manière, les plaintes qu’Ariane adresse au rivage désert après l’infidélité de Bacchus (Fastes III, 469) sont l’écho désolé de celles qu’elle adressait déjà à Thésée dans une situation similaire, et non des invocations prononcées devant un élément caractéristique du numen de la divinité invoquée8.

8. contrairement à ce que nous observons lorsque les orants tendent les bras vers les cieux, demeures des dieux qu’ils invoquent. Toutefois Myrrha tendra les bras vers la mer pour prier Neptune, en Métamorphoses VIII, 864-868.

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Deuxième partie : La mise en scène de la prière

Comme nous l’avons vu, les lieux choisis par Ovide comme théâtres de ses prières sont variés, quoique l’on puisse tenter une imparfaite répartition synthétique. En est-il de même des circonstances des prières ?

Circonstances et efficacité des prières L’une des premières questions que l’on peut se poser, après celle de l’identité des orants, est celle de leur environnement : prient-ils seuls, seuls face à un groupe ou collectivement ? Dans une religion comme celle des Romains, où les prêtres faisaient partie du corps social et officiaient en tant que membres de ce corps, et pour le bénéfice de la communauté, une telle question peut avoir son intérêt pour mettre en lumière le positionnement de l’œuvre ovidienne par rapport à son référent historique et social.

Le corps des dieux Par leur nature épistolaire, les Héroïdes empêchent tout contact physique entre le locuteur et le destinataire de sa prière, hors des cas de récit rapporté d’une scène antérieure ou imaginaire. Comportant peu de séquences narratives intégrant des prières, ce recueil ne sera pas pris en compte dans cette tentative de synthèse. Il en va presque de même des Amours, dont la structure narrative amène, comme on l’a vu, une survalorisation du narrateur-poète par rapport à tout autre personnage. Ce narrateur invoque le plus souvent des êtres absents, en raison du naturel décalage temporel des pièces élégiaques. Mais il raconte parfois des saynètes vivantes, et rapporte à cette occasion les prières adressées à ses interlocuteurs, dont la présence physique est soulignée, dans une mise en scène de type théâtral, ou romanesque. De la même manière les Fastes proposent d’étonnants dialogues animés entre le narrateur et les divinités qu’il invoque, divinités qui lui apparaissent en de longues épiphanies grâce auxquelles ce calendrier poétique pourra figurer aux côtés des Métamorphoses, qui restent bien évidemment le poème présentant la plus grande variété de situations. Si les divinités acceptent de dialoguer avec le poète, c’est en raison de son statut exceptionnel, ainsi que du sujet particulier qu’il a choisi de traiter.



Chapitre II : Circonstances et lieux de la prière 161

Mars et Janus soulignent tous deux cette fonction du poète, par deux apostrophes quasi identiques9 : Janus, Fastes, I, 101-102 dīscĕ mĕtū pŏsĭtō //Puātēs //H ŏpĕrōsĕ dĭērūm   quōd pĕtĭs ēt //Tuōcēs // pērcĭpĕ mēntĕ mĕās.

Mars, Fastes, III, 177-178

dīscĕ Lătīnōrūm //P uātēs //H ŏpĕrōsĕ dĭērūm   quōd pĕtĭs ēt //Tmĕmŏrī // pēctŏrĕ dīctă nŏtā.

DDSD DS DSSD DD

Est-ce par son carmen, propice aux incantations et aux chants rituels, qu’Ovide sait se concilier la grâce des dieux ? Car ceux-ci n’ont de cesse qu’ils n’aient répondu à toutes ses questions. Le poète fait appel à eux pour qu’ils confirment, de leur auguste autorité, ses étymologies parfois audacieuses ou les explications étiologiques qu’il suggère. Par ces échanges, Ovide entraîne les divinités dans une dialectique lui permettant de mettre en scène avec vivacité son récit, et il se façonne ainsi à travers les Fastes un personnage à forte dimension maïeutique, dont la fonction serait de révéler aux hommes une partie du secret des dieux. Et les dieux se font complices de l’historien Ovide10. Flore encourage en effet le poète qui la contemple avec admiration : Ius tibi dicendi, si qua requires. Dans les Fastes, et grâce à la souriante complicité des dieux qu’Ovide se concilie, le ποιητης fait place au uates. Au-delà de ses maîtres révérés, c’est avec Hésiode qu’Ovide s’affronte sur le champ de poésie. Et il emporte peut-être la victoire, car les Muses qui souriaient au chantre d’Ascra à l’ouverture de son poème, applaudissent aux dernières notes du chant ovidien. Ces saynètes qui mettent en scène les dieux sont en réalité assez étranges car on peut y remarquer une inversion frappante par rapport aux perceptions communes. Des deux interlocuteurs de ces dialogues, l’un est un homme et l’autre une divinité. Le schéma courant des apparitions divines met en scène physiquement un mortel qui perçoit la présence d’un dieu par sa seule voix le plus souvent. Or dans les Fastes, Ovide inverse ce schéma. Son corps est absent

9. Il faut remarquer la grande proximité de ces deux séquences, alliée cependant à une habile inversion du schéma métrique : DD – DS pour les premiers hémistiches des vers de Janus, DS – DD pour ceux des vers du distique de Mars. 10. Car c’est bien œuvre d’historien que fait ici Ovide, qui enquête sur sa propre religion, selon le sens du terme istoria..

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Deuxième partie : La mise en scène de la prière

et il n’est qu’un narrateur, une voix suspendue qui nous parle11. Le corps des dieux est en revanche bien présent. Chaque livre des Fastes, à l’exception du deuxième, contient au moins un de ces dialogues qui font la particularité du poème. Ovide s’entretient ainsi avec Janus au livre I, Mars au livre III, Vénus et Erato au livre IV, Flore au livre V et Minerve au livre VI. Le dialogue est remplacé au livre II par une longue description rituelle de la cérémonie offerte à Terminus, que la prière du narrateur vient compléter. Ces épiphanies sont plus légères que solennelles : les dieux y apparaissent comme des partenaires privilégiés du poète, familiers avec lui et souriants, et encouragent l’audace du questionnement étiologique. Cette familiarité est induite principalement – outre la bonhommie de l’attitude divine – par l’intégration du corps des dieux au corps du texte poétique. Ainsi Janus s’appuie-t-il sur son bâton12, qu’il tient dans la main gauche, et caresse sa barbe13 tandis que les clefs de sa main droite viennent justifier l’épithète clauigerum, : ces gestes appaisent la frayeur sacrée du narrateur, réaction humaine traditionnelle lors du contact avec le divin : Fastes I, 97-98 Extimui sensique metu riguisse capillos   Et gelidum subito frigore pectus erat « Je fus saisi de peur et sentis mes cheveux se dresser de frayeur, et mon cœur était glacé d’un froid subit. »

La dimension parodique de l’extrait est assez patente, ou du moins sa légèreté, qui va conditionner la réception du recueil par l’atmosphère ainsi créée à 11. Ovide n’apparaît que deux fois physiquement dans les Fastes :. – en tant que personnage mobile lors de la célébration de Robigo par le flamine de Quirinus (IV, 905-906 & 909 :.    Hac mihi Nomento Romam cum luce redirem,.      obstitit in media candida turba uia : […].    Protinus accessi, ritus ne nescius essem. « ce jour-là, alors que je revenais de Nomentum à Rome, je rencontrai à mi-chemin une foule vêtue de blanc. […] Je m’approchai aussitôt, pour m’enquérir du rite. ». – et par sa peur lors de la première apparition de Janus (I, 97-98) :.    Extimui sensique metu riguisse capillos,.      et gelidum subito frigore pectus erat. « la terreur me saisit et je sentis mes cheveux se dresser sous l’effet de la peur, et ma poitrine se glaça d’un froid subit. ». 12. I, 177 : tum deus incumbens baculo quem dextra gerebat. 13. I, 259 : ille, manus mulcens propexam ad pectora barbam.



Chapitre II : Circonstances et lieux de la prière 163

l’ouverture de l’œuvre. De la même manière l’attitude de Mars, qui aurait dû en imposer au poète vantant le seruitium amoris au détriment du chant des armes, et ayant donc déserté le camp martial du carmen grande, apparaît très relâchée et amène un sourire sur les lèvres du lecteur. Le divin guerrier vient se reposer de ses efforts auprès du poète et ôte son casque pour engager avec lui la conversation : Fastes III, 171-172 Sic ego. Sic posita dixit mihi casside Mauors   Sed tamen in dextra missilis hasta fuit « Ainsi parlé-je. Après avoir déposé son casque, tout en gardant son javelot dans la main droite, Mauors me fit cette réponse […] »

Une expression similaire se retrouve à la fin du poème, lorsque le poète interroge Minerve : Fastes VI, 655 Sic ego. Sic posita Tritonia cuspide dixit

ce qui établit un pont cohérent entre ces deux figures guerrières, l’une masculine à l’entrée des Fastes, l’autre féminine à leur clôture. Cela suit l’évolution des dialogues de l’œuvre : deux divinités masculines dans les trois premiers livres, trois divinités féminines dans les trois derniers. Un vers de l’épisode au cours duquel Ovide s’entretient avec la déesse armée établit la fiction d’une parole rélévée par les dieux, et hausse ces dialogues au-dessus de simples artifices narratifs. Comme se plaît à le rappeler John Scheid, les dieux apparaissent alors vraiment comme des partenaires des hommes, qui viennent leur révéler des vérités qu’ils ne peuvent entrevoir seuls, mais qui les leur livrent par l’intermédiaire de leur corps, et d’une manière tout humaine. Ce compagnonnage avec les dieux n’est pas sans rappeler le monde épique, dans lequel les hommes sont rarement seuls face à l’adversité alors qu’il est assez étranger à l’univers élégiaque, plus volontiers ancré dans une réalité prosaïque et profane. Les autres divinités féminines qui viennent seconder le poète dans sa quête étiologique sont douces et séduisantes. Vénus le charme par son regard et son sourire, incarnation de la grâce raffinée d’une séduction élégante. Elle tourne vers lui son regard – ad uatem uoltus rettulit illa suos IV, 2 –, elle lui offre un sourire qui rassérène le ciel – risit et aether / protinus ex illa parte serenus erat, IV, 5-6 – et elle le touche même – mota Cytheriaca leuiter mea tempora myrto / contigit, IV, 15-16.

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Deuxième partie : La mise en scène de la prière

La bouche de Flore exhale un parfum enivrant – dum loquitur uernas efflat ab ore rosas, V, 194 – parfum caractéristique de ce monde féminin qui fascine et attendrit la sensibilité ovidienne, tout en rappelant la suave atmosphère des banquets érotiques : Fastes V, 359-360 Adnuit et motis flores cecidere capillis,   Accidere in mensas ut rosa missa solet. « Elle acquiesça et, secouant sa chevelure, elle en fit tomber des fleurs, à la manière des roses qu’on fait habituellement tomber sur les tables des banquets. »

Le lecteur perçoit d’ailleurs nettement au livre V la sympathie d’Ovide avec les premiers souffles printaniers et l’accord de tout son être sensible à cette renaissance du monde. Les fleurs sont le symbole du monde qui revient à la joie et à la beauté, et Ovide lie cette atmosphère mystique de l’élan vital ressuscitant la nature avec l’activité humaine et sociale des banquets, dans un resserrement topique purement élégiaque. Flore disparaît à la fin du dialogue, mais l’air garde l’empreinte parfumée de son corps, et cette disparition du corps de la déesse est explicitement liée à l’apparition du chant poétique, comme s’il y avait entre les deux une transition fécondante : Fastes V, 375-378 Omnia finierat ; tenues secessit in auras, Mansit odor : posses scire fuisse deam. Floreat ut toto carmen Nasonis in aeuo Sparge, precor, donis pectora nostra tuis ! «  Elle avait terminé. Elle disparut dans l’air limpide, seul son parfum resta : on pouvait croire que la déesse était encore là. Pour que le chant de Nason fleurisse à tout jamais, répands, je t’en prie, tes dons sur mon cœur ! »

Un corps toutefois se dérobe aux sens du poète : celui de Vesta, déesse non incarnée dont il perçoit seulement le numen. Cette évocation malicieuse du non-corps de la déesse permet à Ovide une nouvelle mise en perspective ironique de son art, art de la fiction et du mensonge : si ualeant mendacia uatum, ‘si toutefois les mensonges des poètes ont quelque valeur’. De telles réserves sont assez fréquentes dans la poésie d’Ovide, cette poésie qui incessamment revient sur elle-même et s’analyse, que ce soit pour souligner sa dimension illusoire, ou sa puissance créatrice.



Chapitre II : Circonstances et lieux de la prière 165

Les Métamorphoses font, par leur nature générique même, apparaître en de multiples occasions des corps divins, car les dieux y sont des personnages presque comme les autres, participant directement et physiquement aux actions racontées par les récits mythologiques. Nous ne nous intéresserons ici, rapidement, qu’aux corps des dieux auxquels est adressée une prière ou qui en prononcent une eux-mêmes. Et nous nous arrêterons à quelques extraits particuliers, tant est fréquente et banale dans cette œuvre la rencontre des hommes et des dieux. On peut distinguer deux situations principales faisant intervenir le corps d’un dieu : le dieu est le destinataire de la prière et reçoit à ce titre des marques de supplication, ou signifie son assentiment par une manifestation physique ; ou bien le dieu s’entretient avec un autre dieu (ou exceptionnellement un mortel), et leurs corps apparaissent comme dans tout échange entre des personnages. Il est à noter que nulle part dans notre corpus des Métamorphoses n’est évoquée la terreur sacrée qu’inspirent ordinairement les épiphanies divines. Il existe ici une proximité étonnante entre les hommes et les dieux, jusque dans le contexte pourtant sacral et ritualisé de la prière. En d’autres lieux des Métamorphoses les hommes ressentiront l’horreur, au sens étymologique, du sacré mais non dans l’environnement des prières, qui établissent peut-être un lien rassurant entre l’humain et le divin, un lien équilibré car contractualisé, où l’orant devant verbaliser sa requête ne peut se terrer dans une vénération mutique. – Lorsque la divinité est le destinataire de la prière Lorsque Phaeton s’adresse à son père pour lui demander de lever les doutes qui entachent sa naissance, celui-ci dépose sa couronne de lumière, ce qui révèle la proximité physique unissant les deux hommes lors de leur dialogue : Métamorphoses II, 40-42 dixerat, at genitor circum caput omne micantes deposuit radios propiusque accedere iussit amplexuque dato […] « Son père déposa la couronne de rayons étincelants qui ceignait sa tête, lui ordonna d’approcher et, l’ayant embrassé… »

Apollon s’humanise par ces gestes : il ôte les ornements dont l’éclat surhumain dépasse le seuil de tolérance du jeune homme et il entre en contact

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Deuxième partie : La mise en scène de la prière

physique avec celui qui l’approche et qu’il embrasse avec affection. Sont ainsi levées les barrières qui séparent l’homme du divin, et qui avaient été suggérées par la description du palais du soleil : Métamorphoses II, 1-5 & 22-32 Regia Solis erat sublimibus alta columnis, clara micante auro flammasque imitante pyropo, cuius ebur nitidum fastigia summa tegebat, argenti bifores radiabant lumine ualuae. (…) consistitque procul ; neque enim propiora ferebat lumina : purpurea uelatus ueste sedebat in solio Phoebus claris lucente smaragdis. A dextra laeuaque Dies et Mensis et Annus Saeculaque et positae spatiis aequalibus Horae Verque nouum stabat cinctum florente corona, stabat nuda Aestas et spicea serta gerebat, stabat et Autumnus calcatis sordidus uuis et glacialis Hiems canos hirsuta capillos. Ipse loco medius rerum nouitate pauentem Sol oculis iuuenem, quibus adspicit omnia, vidit « Le palais du Soleil se dressait en haut de colonnes qui touchaient au ciel, étincelant de l’éclat de l’or et du pyrope semblable aux flammes. L’ivoire resplendissant en couvrait le faîte, et les portes irradiaient de l’éclat de l’argent. L’art surpassait les matériaux  […]. [Phaeton entre] mais il se tient à distance, car il ne pouvait soutenir cet éclat de plus près. Vêtu d’un mantau de pourpre, Phébus était assis sur un trône brillant de la clarté des émeraudes. A droite et à gauche se tenaient le Jour, les Mois, l’Année, les Siècles et les Heures, placées à intervalles réguliers, ainsi que le Printemps Nouveau, ceint d’une couronne de fleurs, et s’y tenait aussi l’Eté nu qui portait des épis entrelacés, et s’y tenaient encore l’Automne, souillé par les raisins foulés, et l’Hiver glacial, hérissé de cheveux blancs. Au milieu d’eux le Soleil voit, de ses yeux qui voient tout, le jeune homme qui pâlit de peur devant un spectacle si nouveau pour lui. »

Ce sont donc les signes mêmes de sa puissance qu’Apollon dépose pour permettre à son fils de l’approcher, et de lui présenter la requête qui s’avèrera si funeste. Par un processus inverse, Jupiter sera contraint par son amante Sémélé à revêtir ses attributs étincelants, dont il s’était dépouillé pour entretenir avec elle un commerce amoureux. Là encore ce dépouillement est un acte



Chapitre II : Circonstances et lieux de la prière 167

d’humanisation, qui permet le contact charnel entre deux entités de nature différente mais de forme semblable. Le corps de Sémélé ne put supporter (on retrouve ici le même verbe (ferebat / tulit) que dans l’épisode de Phaeton) le fracas qui ébranlait les airs – corpus mortale tumultus / non tulit aetherios (Métamorphoses III, 308-309) – et ce verbe qui dit la faiblesse humaine est comme écrasé, enchâssé par l’évocation de la puissance céleste. L’épisode de Sémélé survient au livre III, qui se concentre sur la famille de Cadmus, homme entretenant des liens très forts avec le monde divin. Sémélé est fille de Cadmus, et c’est pour sauver sa sœur Ino, petite-fille de Vénus par sa mère Harmonie, que la déesse de l’Amour adressera à Neptune des paroles caressantes.

Vénus destinataire de la prière : le corps bienveillant Le corps de Vénus n’est mentionné qu’une fois dans les Métamorphoses dans une telle situation, mais l’épisode est très particulier, puisqu’il s’agit de celui, maintes fois commenté, au cours duquel Pygmalion demande que la vie soit insufflée à sa statue. Il s’adresse à la déesse de Cythère lors de fêtes données en son honneur et, trait caractéristique de cet homme du détour, il n’invoque pas la déesse directement mais sa statue d’or. La chasteté de Pygmalion est évoquée dès l’abord, lui qui vivait sine coniuge caelebs (Métamorphoses X, 245-246) et qui était dépourvu de compagne de lit, thalamique diu consorte carebat. La dimension sensuelle du mariage est ici soulignée en creux, et c’est elle que refuse Pygmalion, dont la pudeur a été offensée par le comportement des Propétides. Pour s’abstraire de la nature qui « a donné de très nombreux vices aux femmes » (v. 244, offensus uitiis quae plurima menti / feminae natura dedit), il évolue dans un univers marqué du sceau de la chasteté et va s’enflammer pour cette pureté même, qui elle aussi, paradoxalement, relève du règne de Vénus. Le marbre de sa statue est semblable à la neige, matière non-sensuelle symbolisant la pureté et la virginité, et la forme qu’il sculpte est non simplement celle d’une femme, mais explicitement celle d’une vierge, précision improbable pour une statue qui apparaît alors comme la réalisation d’un rêve à la fois esthétique, sentimental et sexuel. Nous nous attacherons à la seule présence du corps de Vénus. La déesse est présente en son temple par sa statue, statue radicalement opposée à la vierge éburnéenne façonnée par Pygmalion. Cette statue est au centre de la fête que Chypre célèbre en l’honneur de Vénus, Venus aurea (X, 277). Le poète fusionne, en un procédé permis par la religion antique, la déesse et sa statue, et

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Deuxième partie : La mise en scène de la prière

montre ainsi la Cythérienne assistant à sa fête en son temple même : ipsa suis aderat Venus aurea festis, X, 277. L’or est une matière sensuelle, aux tons fauves comme la flamme, et il est intimement lié au monde élégiaque. Lorsque ses sentiments étaient apparus pour sa statue vierge, Pygmalion l’avait couverte de bijoux, dont certains devaient être en or, comme les bagues et les chaînettes des vers 264-265 : dat digitis gemmas […] redimicula pectore pendent, et cette parure, proche certainement de celle de la Venus aurea, avait ébauché le processus de transformation que l’action divine devait parachever : c’est par le contact de l’or, dans une certaine mesure, que la pierre devint chair, contact physique tout d’abord, puis surnaturel, par l’action de Vénus agissant en et par sa statue. C’est ainsi que la virginité, dont la louange est assez rare dans l’œuvre ovidienne, a réalisé le renversement de la malédiction des Propétides, qui avaient été transformées en pierres par Vénus en punition de leur impudicité (X, 238-242). Contrairement à ce que nous avions vu dans les Fastes, le corps de Vénus n’est donc guère invoqué comme destinataire des prières des Métamorphoses. En revanche la déesse est elle-même une instance précative importante. – Vénus en prière : le corps suppliant Vénus use de son charme dans ses prières. Elle adresse à son «  oncle Neptune » des « paroles caressantes » afin qu’il vienne en aide à Ino, dont le sort l’a émue, sic patruo blandita suo est, (Métamorphoses IV, 532). Le verbe blandiri renvoie ici autant au ton de sa voix qu’à l’attitude générale de la déesse, qui est souvent décrite ainsi par le poète. En une nouvelle démarcation par rapport aux récits épiques, les caresses de l’amour apparaissent comme l’opposé exact, quoique complémentaire, des gestes guerriers et virils qui remplissent les descriptions de combats. Ce sont les mêmes gestes caressants que l’on retrouve lorsqu’elle prie Cupidon de soumettre tous les êtres à sa puissance, et de n’en pas excepter Pluton, qu’elle vient d’apercevoir errant à la surface de la terre. Elle l’embrasse avant de formuler sa requête : natumque amplexa uolucrem, V, 364, ‘elle embrasse son fils ailé’. Le corps de Vénus qui apparaît au début des Métamorphoses dans les extraits de notre corpus est donc un corps pudique et tendre à la fois, maternel ou filial, qui recourt à la douceur et au charme des caresses pour porter une parole de prière. Envers son père, elle adopte la même tactique : elle entoure



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son cou de ses bras, comme le font toutes les filles aimantes, de Philomèle à Daphné : Métamorphoses XIV, 585-586 Ambieratque Venus superos colloque parentis Circumfusa sui […] « Vénus avait sollicité les suffrages des dieux d’en haut et, ayant entouré de ses bras le cou de son père […] »

Ces caresses semblent en effet une stratégie féminine : Procné « se fait caressante » pour demander à son époux Térée d’aller chercher sa chère sœur (VI, 440 cum blandita uiro Progne) et Philomèle « entoure de ses bras caressants les épaules de son père » pour obtenir l’autorisation de partir en voyage (VI, 475-476 quid quod idem Philomela cupit patriosque lacertis / blanda tenens umeros). De la même manière Daphné « s’était suspendue de ses bras caressants au cou de son père » pour lui demander de respecter son vœu de virginité perpétuelle : inque patris blandis haerens ceruice lacertis, I, 485. Vénus adopte donc ici l’attitude des filles chastes et pieuses14, au lieu de mettre en avant son autorité divine, ou tout autre argument qui eût pu soutenir et renforcer sa prière. Toutes ces prières mettant en scène le corps des dieux étaient, par voie de conséquence, des prières in praesentia. Si l’on tente une synthèse présentant les destinataires selon le critère de la présence, on obtient le tableau suivant : Destinataire présent

Métamorphoses Fastes Total

Destinataire absent

devant un public

sans public orant seul

devant un devant un public qui public qui entend n’entend pas

17 5 22

22 11 33

14 7 21

20 4 24

5 1 6

14. On retrouvera toutefois la terminologie de l’extrait vénusien dans le passage dans lequel Byblis, éperdue d’amour, évoquera ses gestes équivoques envers son frère Caunus, objet de ses désirs : quod sua fraterno circumdet bracchia collo, IX, 459 ; inuito potui circumdare bracchia collo, IX, 605.

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Deuxième partie : La mise en scène de la prière

Les situations choisies par Ovide paraissent donc à la fois variées et équilibrées, avec une prévalence toutefois des prières intimes, faites sans témoins, ainsi que des prières directes, adressées à un destinataire présent. On peut remarquer que seules les situations portées en gras sont de potentielles situations liturgiques réalistes, et qu’elles sont de fait minoritaires dans notre corpus. Deux des prières faites dans la solitude comptent parmi les plus longues des Fastes et s’accompagnent d’un rituel extrêmement précis et détaillé. On eût pu s’attendre à les voir intégrées à des cérémonies collégiales, dans lesquelles elles eussent trouvé leur place et on peut être surpris de les voir ainsi sorties de leur contexte liturgique pour être établies comme prières personnelles et directes unissant un homme et son dieu favori.

Efficacité de la prière15 Les dieux, si proches des hommes, leur sont particulièrement propices dans les Fastes et Ovide exalte la puissance de la prière en nous la montrant généralement efficace. Jupiter exauce les vœux des hommes qui ont sa préférence, tel Enée - auquel il donne la victoire contre Mézence et les Rutules en IV, 895-896 - ou Romulus - qui reçoit des signes manifestes de son assentiment : Fastes IV, 833-834 Ille precabatur, tonitru dedit omina laeuo   Iuppiter et laeuo fulmina missa polo. « Tandis qu’il priait, Jupiter envoya un présage par un coup de tonnerre sur la gauche et fit jaillir des éclairs, du côté gauche du ciel. »

Lorsque Dioné timore pallida en appelle aux nymphes pour qu’elles lui portent secours16 et s’élance dans les flots, c’est le miracle d’Arion qui se répète17 et les pisces gemelli ressemblent fort au dauphin providentiel. Un même procédé stylistique vient signifier l’accès des dieux aux prières d’Auguste, de Metellus et de Claudia Quinta :

15. Cette courte étude ne portera que sur les Fastes. 16. Fastes II, 471. 17. Ovide l’avait d’ailleurs rapporté quelques vers auparavant, en Fastes II, 79-118.



Chapitre II : Circonstances et lieux de la prière 171

Fastes VI, 456 (vœu de Metellus adressé aux objets sacrés du temple de Vesta) Dīxĭt ĕt īrrūpīt ://P fāctūm dĕă rāptă prŏbāuīt Il dit et fit irruption dans le temple : la déesse qu’il volait approuva son acte

Fastes V, 578 (vœu d’Auguste, adressé à Mars) Vōuĕrăt ēt fūsō // lāetŭs ăb hōstĕ rĕdīt Il avait prononcé ce vœu et il revint heureux après la dispersion de l’ennemi

Fastes IV, 325 (vœu de Claudia Quinta, adressé à Cybèle) Dīxĭt ĕt ēxĭgŭō //P fūnēm cōnāmĭnĕ trāxīt Elle dit et tira sur la corde sans grand effort

Si la récurrence de la fricative f dans les trois vers relève plus sûrement du hasard que de l’effet stylistique maîtrisé, il n’en va probablement pas de même de la structure de chaque vers en quasi versus aureus. Cette disposition circulaire et donc fermée dit à la fois l’efficacité de la prière qui a touché – et peutêtre lié – le dieu et la perfection de la volonté divine ainsi manifestée. Tout ceci est exprimé en IV, 327, au sujet de Cybèle dont l’action a justifié Claudia : Mōtă dĕā (e)st //T sĕquĭtūrquĕ //F dŭcēm //H lāudātquĕ sĕquēndō La déesse s’est mise en mouvement, elle suit son guide et en le suivant elle le justifie

La présence de trois verbes conjugués, renforcée par la duplication du dernier en polyptote, par l’usage d’une double copule – que, à connotation épique et solennelle, connotation soulignée par le choix de la coupe ‘triple a’, isole ce vers pour en faire l’attestation musicale de l’alliance des hommes pieux et de leurs dieux. Il est à remarquer que le verbe mouere est à prendre ici au sens propre, dans un détournement humoristique d’une formule souvent utilisée par Ovide pour dire l’acquiescement d’une divinité à une prière qu’elle agrée. Numa est lui aussi favorisé par les dieux. Epoux de la divine Egérie, antique Camène, il apprend aux hommes brutaux le respect des dieux. Mais il est désemparé face à la violence des éléments que déchaîne le maître des Cieux et il cherche quels rites expiatoires (da certa piamina dira-t-il à Jupiter) peuvent prémunir son peuple. Il adresse donc à Jupiter un vœu, que celui-ci accepte : Fastes III, 337 ādnŭĭt ōrāntī //P

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Deuxième partie : La mise en scène de la prière

Jupiter accède à la requête de Numa et lui promet un signe qui manifeste leur alliance. Voici le signe que rapporte Ovide : Fastes III, 367-369 Dum loquitur, totum iam sol emouerat orbem,   et grauis aetherio uenit ab axe fragor. tēr tŏnŭīt //Tsĭnĕ nūbĕ //Fdĕūs,//Htrĭă fūlgŭră mīsīt. Tandis qu’il parlait, le soleil avait déjà fait émerger son disque entier, et du haut de la voûte céleste un grand bruit se fit entendre : trois fois le dieu tonna dans un ciel sans nuage, trois fois il lança la foudre.

La puissance en acte du dieu est soulignée par la place accordée aux verbes d’action, soit qu’ils se trouvent avant une coupe soit qu’ils terminent le vers, ainsi que par le jeu de découpage qu’opère dans le vers la coupe triple a, mimant trois éclairs zébrant le vers et isolant le terme deus ainsi mis en valeur, et encadré en outre par un réseau d’allitérations (ter tonuit tria / sine deus misit). C’est alors qu’Ovide rapporte l’exceptionnel, avec quelques prudentes précautions cependant : Fastes III, 370-374   Credite dicenti : mira, sed acta, loquor. A media caelum regione dehiscere coepit ;   summisere oculos cum duce turba suo. Ecce leui scutum uersatum leniter aura   dēcĭdĭt. A populo //Pclamor ad astra uenit. Croyez-moi sur parole18  : ce sont des prodiges, mais des faits réels que je raconte. Le ciel en son milieu commença à s’ouvrir ; la foule leva les yeux en même temps que son chef. Voici que, doucement balancé par une brise légère, un bouclier tombe. Le peuple pousse un cri, qui monte jusqu’aux astres.

Au mouvement descendant du présent divin, accentué par de rejet du verbe decidit, répond l’ascension de la voix des hommes (clamor ad astra 18. Nous reprenons ici la traduction proposée par Henri Le Bonniec pour la collection La roue à livres. L’expression d’Ovide insiste bien sur la confiance que l’on doit avoir en lui malgré l’étonnement que peut provoquer son récit. Il anticipe sur la réaction potentielle de son lecteur pour se réapproprier sa confiance. Ovide se met lui-même en avant et se présente comme un conteur auquel on peut se fier : « apportez foi à mon récit : je rapporte des choses exceptionnelles, mais qui ont réellement eu lieu ».



Chapitre II : Circonstances et lieux de la prière 173

uenit), dans un vers où se retrouve encore une disposition verbale encerclante. Cet échange, telle une échelle de Jacob païenne, concrétise le lien qui unit les dieux aux hommes qui ont foi en leur puissance. Mais si Jupiter s’est intéressé aux mortels, c’est que deux divinités l’y ont forcé. Ce n’est pas sans médiateur que Numa s’adresse au plus influent des dieux, mais avec l’aide active de Faunus et Picus, auxquels il a eu recours en premier lieu. Ce sont leurs incantations qui attirent l’attention de Jupiter et le subjuguent. Ils le font descendre des Cieux et exercent donc sur lui un grand empire par la simple incidence de leur parole. Mais ici apparaît une facette mystérieuse d’Ovide, qui adopte une attitude ambiguë et définit sa fonction en tant que uates operose dierum : Fastes III, 323-326 emissi laqueis quid agant, quae carmina dicant,   quaque trahant superis sedibus arte Iouem, scire nefas homini : nobis concessa canentur   quaeque pio dici uatis ab ore licet. « Ce qu’ils font, une fois dégagés de leurs liens, quelles incantations ils prononcent et par quel art ils font sortir Jupiter de sa haute demeure, il n’est pas permis à l’homme de le savoir. Nous ne chanterons que ce qui est autorisé, ce que peut dire la bouche pieuse du poète. »

Trois relatives - encore - définissent le processus magique que pratiquent les deux divinités sylvestres : le premier hexamètre en compte deux, que le pentamètre reprend en une formule synthétique. Faunus et Picus utilisent donc des gestes (quid agant) qu’ils assortissent d’incantations (quae carmina dicant), le tout constituant un rituel magique complet (qua arte). Cette ars - magica à n’en pas douter - est assez dangereuse pour qu’Ovide se refuse à en livrer le secret : scire nefas homini19. Mais il est permis au lecteur de se demander si le poète n’a pas lui-même parfois bravé l’interdit, même si le secret, comme nous le verrons, reste toujours célé en-deçà la barrière de ses lèvres.

19. C’est bien la connaissance elle-même (scire) qui est sacrilège et non seulement la divulgation du mystère.

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Deuxième partie : La mise en scène de la prière

Les rituels : Ovide chroniqueur ou créateur ? La prière comme actio Comme le rappellent F. Chapot et B. Laurot, « à côté des prières d’usage, l’homme antique invoque spontanément les dieux dans des prières plus personnelles, jaculatoires, dans telle ou telle circonstance un peu particulière de sa vie, et peut les formuler alors d’une manière plus originale, adaptée à sa sensibilité du moment, tout en respectant, dans les cas les plus courants, certaines règles générales d’argumentaire et de formulation »20. Cette vision nuancée de la religion romaine peut aussi s’appliquer au rituel. A côté de rituels liturgiques à proprement parler, liés à une cérémonie à laquelle participe un groupe social défini, voire la cité tout entière, existaient certainement, en plus des rituels du culte privé, eux aussi nettement codifiés, un recours spontané et personnel au rituel pour soutenir et compléter une prière jaculatoire, libre et improvisée. Dans notre corpus ovidien, nous retrouvons la liturgie de la cité, à laquelle nous allons nous intéresser, ou des rituels hérités de la tradition littéraire, par exemple ceux qui se transmettent dans les œuvres épiques, mais nous trouvons aussi des mises en scène rituelles novatrices, propres à l’esthétique et à la sensibilité ovidiennes, qui reprennent certains éléments traditionnels mais les refondent en une forme originale et unique. Que ce soient Catulle, Virgile, Properce, Tibulle ou Ovide, aucun poète de l’âge classique de la religion romaine ne se refuse l’élan personnel vers les dieux, un élan mystique et passionné - souvent désespéré. Qu’ils se mettent en scène eux-mêmes ou qu’ils donnent la parole à des héros fictionnels, les mêmes procédés se retrouvent : le créateur prend des distances avec le rite traditionnel, tout en le reflétant en une image à la fois ressemblante et nouvelle. Parfois des prières jaculatoires surgissent, seules, dans le silence ; parfois des éléments rituels les annoncent. Elles entrent alors dans le déroulement d’une scène plus vaste, sorte de saynète religieuse où chaque détail fait sens, dans lesquelles les gestes rituels servent d’écrin aux mots que l’on adresse aux dieux. A chaque dieu, à chaque fête semble correspondre un rituel particulier dans la liturgie officielle. La surinterprétation de la célèbre formule de Cicéron définissant la religion comme le « cultus deorum » a amené certains savants à affirmer que la piété romaine se réduisait à une somme d’actes dénués de dimension spirituelle. John Scheid21 semblait lui aussi rejeter à un moment 20. F. Chapot & B. Laurot (332), Corpus de prières grecques et romaines, introduction. 21. J. Scheid (526), Religion et Piété à Rome, p. 129.



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dans le champ de la superstition « tout ce qui concerne la religiosité intime de l’individu », et Jérôme Carcopino dénonçait « l’incuriosité métaphysique » et « l’indifférence à la valeur morale » de la religion romaine qui « glaçait les élans de la foi »22. S’il est incontestable que la religion romaine est fondée sur des rituels actifs codifiés, immuables et pour la plupart collectifs, on ne peut exclure de son champ les pratiques individuelles que nous rapporte Ovide. Il semble que la religion romaine comporta deux dimensions parallèles dans sa manifestation historique (que nous dissocions de son expression littéraire) : une dimension sociale, politique et traditionnelle - à l’échelle de la cité ou de communautés plus réduites - et une dimension individuelle, privée mais tout aussi traditionnelle. Il ne s’agit pas là de la distinction entre culte public et culte domestique, car ces derniers relèvent tout autant que les premiers d’une conscience politique, au sens étymologique du mot. La religiosité individuelle est celle qui se manifeste à travers les rituels - et non plus les rites - que chaque Romain pouvait être amené à effectuer en de certaines circonstances, et elle se retrouve sous des formes diverses dans toutes les sociétés humaines. Observons tout d’abord les gestes rituels qui composent la part physique de la prière. Il semble, en effet, que le corps doive, pour porter la prière, adopter une position particulière. Ces gestes qui soutiennent la parole, et facilitent aussi l’élan sacré, peuvent être rapprochés de l’actio oratoire, cette mise en scène physique de la parole rhétorique qui vient l’appuyer et la renforcer. F. Chapot et B. Laurot proposent une claire synthèse de ces positions du corps retrouvées fréquemment : « Tout comme la diction, la position et les gestes du corps doivent répondre à des règles assez précises. Le Grec et le Romain prient habituellement debout, les bras tendus, paumes des mains dirigées vers le ciel ou vers la statue du culte : c’est une façon d’établir une relation avec la divinité, qui peut aller jusqu’à toucher ou embrasser l’autel ou la statue, voire leur donner un baiser. »23 Appel décrivait lui aussi ces gestes avec une grande précision. Le rite public était, nous l’avons dit, célébré par un prêtre dont les paumes devaient s’élever vers le ciel s’il priait les dieux d’en haut, ou se tourner vers le sol et s’apposer à lui en cas de prière aux dieux infernaux. D. Porte24 écrit que « pendant le sacrifice le prêtre devait rester en contact d’une main avec

22. J. Carcopino, La vie quotidienne à Rome à l’apodée de l’Empire, Paris, 1939, p. 147. 23. F. Chapot & B. Laurot (332), Corpus de prières grecques et romaines, introduction. 24. D. Porte (496), Les donneurs de sacré, p. 33.

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Deuxième partie : La mise en scène de la prière

l’autel25, dont il devait faire le tour, une fois les opérations achevées, avant de porter sa main droite à sa bouche, geste qui donnait l’étymologie du mot ad-oratio ». Cette « pirouette rituelle » n’est jamais décrite dans notre corpus, où seules les magiciennes, Médée et Circé, tournent sur elles-mêmes au moment où elles prononcent leurs incantations. Nous avons vu qu’Ovide répugnait à mettre en scène des prêtres et leur préférait de simples particuliers, conformément à la tradition littéraire. Quelle posture adoptent ses personnages au moment de leur prière ? Il faut distinguer entre le geste simple qui accompagne seulement la prière, qui la signale en quelque sorte et n’a d’autre fonction que d’encadrer la parole, et les rites gestuels qui sont porteurs de sens par eux-mêmes et ajoutent une dimension à la parole. Les personnages ovidiens, suivant une tradition autant liturgique que littéraire, lèvent généralement les bras lorsqu’ils prononcent une prière, leur corps et leur âme étant pris dans cette tension vers le divin, ou vers un destinataire dont on attend une réponse active, car « la prière est un acte total, engageant des postures, des gestes, […] et non seulement un rite oral »26. D. Aubriot pense que dans le monde grec subsiste une ambiguïté quant à la position exacte des bras de l’orant27. Les tend-on ou les lève-t-on ? Un doute, semble-t-il, persiste. Le débat n’est guère valide chez Ovide, car la plupart du temps, comme le montreront nos exemples, le poète précise la destination de la tension de bras. Faisons un bref recensement des évocations corporelles survenant dans l’environnement d’une prière. Il apert que certaines formules reviennent de manière systématique, avec une récurrence étonnante, et fonctionnent comme des formulaires qui permettent au lecteur d’identifier immédiatement les scènes de supplication et de tisser entre elles des liens verbaux et musicaux28. Certaines de ces formules sont propres à Ovide et forment des stylèmes personnels. D’autres formules, parfois très stéréotypées, telles que tendens ad sidera palmas, sont des échos intertextuels et courent de poème en 25. Ovide rapporte ce geste dans les Fastes, III, v. 335. Numa prie Jupiter et précise que le dieu doit agréer son vœu, « si tua contigimus manibus donaria puris » (si j’ai toujours touché tes autels avec des mains pures). C’est bien un contact physique direct qui semble évoqué. 26. D. Aubriot (280), Prière et conception religieuse en Grèce ancienne, p. 138. 27. D. Aubriot (280), ibid., p. 132. 28. Nous évoquerons ici quasi exclusivement les prières ayant forme de supplication, qui sont stylistiquement les plus représentatives. La plupart des prières ovidiennes prennent cette forme, qu’adoptent même la plupart des vœux. Les pures actions de grâce sont extrêmement rares dans notre corpus.



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poème et de poète en poète : elles renvoient pour le lecteur moderne essentiellement à l’œuvre de Virgile, et à l’Enéide plus particulièrement, mais elles pourraient être la résurgence de formules plus anciennes que Virgile lui-même reprendrait. Quelques exemples permettront de faire ressortir nettement ces formulaires : – dans notre corpus Métamorphoses VI, 286 a quibus ad caelum liuentia bracchia tollens Métamorphoses VI, 368 uerba minora dea tollensque ad sidera palmas Métamorphoses VII, 580 membraque pendentis tendunt ad sidera caeli, Métamorphoses XI, 131 ad caelumque manus et splendida bracchia tollens Métamorphoses XI, 541 bracchiaque ad caelum, quod non uidet, inrita tollens Métamorphoses XV, 570 ad caelumque oculos et eodem bracchia tollens Métamorphoses XV, 38 squalidus ad superos tollens reus ora manusque

– hors de notre corpus Métamorphoses IX, 210 montibus aut patrio tendentem bracchia caelo Métamorphoses IX, 293 fessa malis, tendensque ad caelum bracchia, magno Métamorphoses IX, 175 tabe liquefactis tollens ad sidera palmas Métamorphoses XIII, 411 non profecturas tendebat ad aethera palmas

– que l’on peut rapprocher de : Virgile, Enéide, I, 93  ingemit, et duplicis tendens ad sidera palmas Virgile, Enéide, II, 405 ad caelum tendens ardentia lumina frustra29 Virgile, Enéide, II, 153 sustulit exutas uinclis ad sidera palmas Virgile, Enéide, V, 256 longaeui palmas nequiquam ad sidera tendunt Virgile, Enéide, IX, 16 Adgnouit iuuenis duplicisque ad sidera palmas / sustulit Virgile, Enéide, X, 845 ad caelum tendit palmas et corpore inhaeret Virgile, Enéide, XII, 196 suspiciens caelum tenditque ad sidera dextram Virgile, Enéide, III, 390 procedit supplexque manus ad litora tendit30

29. Nous intégrons cet exemple en raison de la proximité phonique entre sidera et lumina. 30. Même remarque, entre sidera et litora.

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Deuxième partie : La mise en scène de la prière

D’autres formulations expriment le même mouvement des bras : dans notre corpus : Métamorphoses V, 215 confessasque manus obliquaque bracchia tendens Métamorphoses VI, 262 bracchia sustulerat « di » que « o communiter omnes, » Métamorphoses VI, 358-359 hi quoque uos moueant, qui nostro bracchia tendunt  parua sinu,  » et casu tendebant bracchia nati. […] Métamorphoses VII, 188 sidera sola micant : ad quae sua bracchia tendens Métamorphoses VIII, 849 uicina suas tendens super aequora palmas Métamorphoses XIII, 668-669 Illae tollentes etiamnunc libera caelo  bracchia « Bacche pater, fer opem ! » dixere, tulitque Métamorphoses XIV, 734 umentes oculos et pallida bracchia tollens Métamorphoses XV, 38 squalidus ad superos tollens reus ora manusque Fastes, I, 505 et procul in dextram tendens sua bracchia ripam Fastes, V, 571  Ille manus tendens, hinc stanti milite iusto

hors de notre corpus : Métamorphoses IV, 581 bracchia iam restant : quae restant bracchia tendit Métamorphoses, VI, 533-534 lugenti similis caesis plangore lacertis  intendens palmas « o diris barbare factis Métamorphoses VII, 347 tot medius gladios pallentia bracchia tendens Métamorphoses X, 580 obstipuit tollensque manus ‘ignoscite,’ dixit Métamorphoses XI, 397 inde manus tendens in aperti litora ponti Métamorphoses XIII, 5 intendensque manus «  agimus, pro Iuppiter ! » inquit Amours 1, 2  metuent ; ad te sua bracchia tendens

Les compléments ajoutés par les poètes viennent lever, pour le monde latin, l’ambiguïté dénoncée par D. Aubriot : le ciel, les astres sont bien pour les Romains les demeures des dieux vers lesquelles tendent leurs gestes de supplication31. Un autre geste de supplication et de déploration, exprimé lui aussi par un formulaire, est en général dépourvu d’accompagnement verbal articulé et intelligible, et ne se trouve donc que rarement dans l’environnement d’une 31. Mais ce mouvement apparaît être un geste rituel spontané chez la plupart des humains, que l’on retrouve autant dans les religions solaires précolombiennes que dans le sacrifice de la Messe catholique, au cours de laquelle les Saintes Espèces, lors de leur consécration, sont brandies à bout de bras par le célébrant, qui tend ainsi tout son être dans la communication active avec le divin.



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prière. Il mérite toutefois d’être mentionné, pour que ressorte bien la récurrence du procédé dans l’écriture ovidienne. Il s’agit du geste par lequel on se frappe la poitrine, pour manifester sa tristesse, son horreur ou son désespoir. Nous n’avons relevé que les descriptions de ce geste de type formulaire, c’est à dire celles qui utilisaient la formule plangere pectora palmis en fin de vers. Bien d’autres formulations sont évidemment possibles, mais ce qui nous importe ici est de voir que d’une formule utilisée une seule fois dans l’Enéide et absente de l’œuvre de Tibulle comme de l’œuvre de Properce, Ovide avait fait un refrain poétique caractéristique de scènes qu’il affectionne particulièrement. Voyons quelques exemples : Virgile, Enéide, I, 481 suppliciter tristes et tunsae pectora palmis

Métamorphoses II, 342 et repetita suis percussit pectora palmis

Métamorphoses II, 585 plangere nuda meis conabar pectora palmis

Métamorphoses III, 482 nudaque marmoreis percussit pectora palmis

Métamorphoses V, 474 et repetita suis percussit pectora palmis

Métamorphoses X, 723 rupit et indignis percussit pectora palmis

Héroïde X, 27 protinus adductis sonuerunt pectora palmis

Fastes II, 803 Effugiat ? positis urgentur pectora palmis

Comme on le voit, à la formule virgilienne Ovide ajoute une alitération en p et un rythme ternaire venant souligner la dimension musicale du geste de

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Deuxième partie : La mise en scène de la prière

détresse, et qui en fait une sorte de percussion violente et funeste qui scande les saynètes. Comme souvent le texte ovidien est travaillé comme une partition32. Lorsque le destinataire de la requête est humain, ou aisément abordable, le geste s’adapte et les bras peuvent alors tendre à l’enlacement : Métamorphoses I, 762 dixit et inplicuit materno bracchia collo

Métamorphoses III, 389 ibat, ut iniceret sperato bracchia collo

Métamorphoses VI, 480 osculaque et collo circumdata bracchia cernens

Métamorphoses IX, 459 quod sua fraterno circumdet bracchia collo

Métamorphoses IX, 607 Inuito potui circumdare bracchia collo

Métamorphoses XIV, 585-586 ambieratque Venus superos colloque parentis circumfusa sui « numquam mihi » dixerat « ullo

32. Le formulaire trouve son apogée dans la reprise métrique quasi identique d’un vers dans deux situations analogues, comme c’est le cas lors des transformations de Coronis en corneille et de Callisto en ourse au livre II des Métamorphoses :.    Métamorphoses II, 476-479 (Callisto).     dixit et aduersam prensis a fronte capillis.    strauit humi pronam. Tendebat bracchia supplex :.    bracchia coeperunt nigris horrescere uillis.     curuarique manus et aduncos crescere in unguis.    Métamorphoses II, 579-584 (Coronis).     uox mea mortalem : mota est pro uirgine uirgo.    auxiliumque tulit. Tendebam bracchia caelo :.    bracchia coeperunt leuibus nigrescere pennis ;.     reicere ex umeris uestem molibar, at illa.     pluma erat inque cutem radices egerat imas.



Chapitre II : Circonstances et lieux de la prière 181

Ces formulations se retrouvent ailleurs : Ovide, Héroïde XVI dumque tuo possem circumdare bracchia collo

mais aussi : Lygdamus Nec uos aut capiant pendentia bracchia collo

On voit bien ici la dimension musicale et poétique forte de ces formulaires, qui créent comme un refrain dans l’œuvre ovidienne et établissent les saynètes précatives en réseau dense aisément identifiable par l’auditeur-lecteur. De plus, la reprise formelle mime la codification liturgique du geste, sorte de réflexe rituel soutenant une parole plus libre, plus personnelle, et que le geste peut servir à rattacher au champ de la prière par des liens plus ténus. Or, ces gestes qui accompagnent, complètent, et parfois même remplacent la prière peuvent être rapprochés de l’actio oratoire, cette ultime partie de l’art oratoire sans laquelle le discours reste en quelque sorte ‘lettre morte’. La parole eucologique doit par essence être une parole vivante, et active. Il est donc normal que le corps, dans sa dimension matérielle, soutienne l’être verbal, avec sa part immatérielle, ses émotions, ses désirs, ses attentes. La prière est en outre une parole persuasive, et entre en cela dans le champ de la rhétorique33. C’est peut-être pour cette raison que les mentions du corps sont plus fréquentes lors des supplications que lors des actions de grâce ou des vœux, car alors l’urgence persuasive est plus vive et l’orant use de son corps comme d’un signe et dans le même temps comme d’un outil émotionnel propre à toucher son destinataire. En cela la génuflexion peut être un geste particulièrement expressif. Diverses sont les interprétations, comme les étymologies, du terme supplex, qui exprime cette attitude. Deux écoles étymologiques principales s’affrontent, l’une rattachant le terme à la racine plicare et privilégiant l’attitude corporelle, l’autre le rattachant à la racine placare et privilégiant la dimension psychologique d’un geste destiné à se concilier le destinataire en l’apaisant. G. Freyburger défend cette étymologie, la plus traditionnelle dans 33. On pourra consulter à ce sujet les belles études de D. Aubriot, « Prière et rhétorique en Grèce ancienne, quelques jalons », Métis, 6, 1991, p. 147-165 et de L. Pernot, « Le lieu du nom dans la rhétorique religieuse des Grecs », in Nommer les dieux (469), p. 29-39, et « Prière et rhétorique », Papers on Rhetoric III, Bologne, éd. Par L. Calboli Montefuso, CLUEB, 2000, p. 213-232, ainsi que l’article essentiel de J. Dangel, « Le carmen latin : rhétorique, poétique et poésie », Euphrosyne, XXV, 1997, p. 113-131.

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Deuxième partie : La mise en scène de la prière

l’Antiquité, tandis qu’E. Benvéniste soutient la première (II, p. 250-252), à laquelle nous nous rallions plus volontiers pour le corpus ovidien. En effet, il nous semble que chez Ovide, il s’agit bien d’une posture qui est autant physique que psychologique, signe de respect et d’humilité, mais aussi de sollicitation. Il semble que la génuflexion, assez étrangère au monde grec selon F. Chapot et B. Laurot34, ait été plus aisément pratiquée à Rome, malgré sa faible attestation iconographique. Dans tous les cas, il paraît évident au lecteur des poètes augustéens que la position décrite est bien cette génuflexion que la tradition rapporte pour les supplications et ou les ‘supplications gratulatoires’ telles que celles évoquées par Cassius Dion et auxquelles participèrent César puis Claude35. On voit que se dessine de plus en plus nettement une tradition religieuse littéraire, s’intégrant à un monde poétique autonome, reflet déformé de la réalité, régi par ses propres lois et ses propres référents. On évolue alors dans un monde de l’illusion, illusion rituelle, illusion liturgique qui renvoie en fait à un univers autonome, plus orientalisé que ne l’est la société romaine de la fin de la République et du début du principat. Le terme supplex doit avoir, en raison de sa sonorité, une charge poétique et musicale particulière pour un Romain, car il est presque toujours employé au nominatif par les auteurs. On le trouve à 6 reprises dans l’Enéide en contexte précatif, et 4 autres occurrences s’inscrivent dans des scènes de supplication ou de requête fervente : Enéide I, 64 ad quem Iuno supplex his uocibus usa est

Enéide I, 666 ad te confugio et supplex tua numina posco

Enéide, IV, 205 multa Iouem manibus supplex orasse supinis

Enéide VIII, 382 ergo eadem supplex uenio et sanctum mihi numen

34. Corpus de prières grecques et latines (445), introduction p. VIII et IX. 35. Dion Cassius, XLIII, 21 et LX, 23.



Chapitre II : Circonstances et lieux de la prière 183

Enéide IX, 624 constitit, ante Iouem supplex per uota precatus

Enéide XII, 930 ille humilis supplexque oculos dextramque precantem

Enéide X, 523 et genua amplectens effatur talia supplex

Enéide III, 592 procedit supplexque manus ad litora tendit

Enéide VIII, 60-61 Iunoni fer rite preces iramque minasque Supplicibus supera uotis. Mihi uictor honorem

Enéide I, 481 suppliciter tristes et tunsae pectora palmis

Le terme apparaît 31 fois chez Ovide au nominatif, contre 3 occurrences chez Horace, et 2 occurrences chez Properce. Tibulle ne l’emploie qu’une seule fois, quand Virgile en use 16 fois dans la seule Enéide. On voit donc qu’Ovide reste le poète évoquant le plus fréquemment cette posture de supplication36. L’agenouillement n’est étonnamment guère détourné de son usage religieux par Ovide, et reste une attitude spécifique propre aux contextes précatifs, alors qu’il eût aisément pu prendre sens lors de scènes amoureuses. Mais cette posture chevaleresque de l’amant agenouillé devant sa dame, si familière aux Européens modernes, semble étrangère à la rhétorique amoureuse des Romains. Ainsi, des 3 occurrences des Héroïdes, 2 sont environnées d’une terminologie eucologique : Héroïdes IV, 140 non ego dedignor supplex humilisque precari

36. Amours 2, Ars Amatoria 2, Tristes 2, Héroïdes 3, Métamorphoses 22.

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Deuxième partie : La mise en scène de la prière

Héroïdes, II, 10 saepe deos supplex ut scelerate ualeres

On retrouvera le même contexte dans les Métamorphoses : Métamorphoses VII, 850 perque deos supplex oro superosque meos

Métamorphoses VI, 490 perque fidem cognataque pectora supplex per superos oro

Métamorphoses VIII, 270 sollicita supplex petiit prece

Métamorphoses VI, 3037 deae ueniamque tuis temeraria dictis supplica uoce roga ; uniam dabit illa

Métamorphoses XIII, 850 tantum miserere precesque / supplicis exaudi

Dans les Métamorphoses, l’agenouillement est souvent associé à la tension des bras, en une posture faite à la fois d’humilité et de sollicitation : Métamorphoses I, 634-635 illa etiam supplex Argo cum bracchia uellet tendere, non habuit quae bracchia tenderet Argo

Métamorphoses II, 477 strauit humi pronam. Tendebat bracchia supplex

Métamorphoses V, 214-215 corpora : marmor erant. Auertitur atque ita supplex Confessaque manus obliquaque bracchia tendens

37. On retrouve une formule comparable chez Tite-Live, VII, 4 : ita adorari ueniamque supplex poposci.



Chapitre II : Circonstances et lieux de la prière 185

Métamorphoses IX, 700 puras ad sidera supplex / cressa manus tendens

Et Ovide donne parfois des précisions qui prouvent que cette supplicatio s’apparente bien à une prosternation, à une descente du corps vers le sol : Métamorphoses X, 415 tendit et ante pedes supplex procumbit alumnae

Métamorphoses III, 240 et genibus pronis supplex similisque roganti

Métamorphoses XIII, 856 supplicis exaudi ! tibi enim succumbimus uni

Mais ces gestes qui accompagnent, ou parfois remplacent, la prière ne sont qu’une réalisation dans l’espace de l’acte de prier. Autre est le statut des gestes rituels, dont Ovide nous donne de nombreux exemples38.

Les gestes rituels Les Fastes offrent de passionnantes descriptions rituelles. Voici d’abord quelques mises en scènes de prières, assorties de gestes particuliers : Fastes I, v. 503-508, Carmenta et son fils Evandre : utque erat, immissis puppem stetit ante capillis   continuitque manum torua regentis iter, et procul in dextram tendens sua bracchia ripam   pinea non sano ter pede texta ferit ; « Alors, sans apprêt, les cheveux épars, elle saisit la main du pilote, puis tendant les bras vers la rive droite, au loin, elle frappe trois fois du pied, dans son délire, la charpente de pin. »

38. N’entrent dans notre étude que les rituels assortis de prières rapportées explicitement par le poète.

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Deuxième partie : La mise en scène de la prière

Fastes IV, 313-318 Claudia Quinta Haec ubi castarum processit ab agmine matrum   et manibus puram fluminis hausit aquam, ter caput inrorat, ter tollit in aethera palmas   (quicumque aspiciunt, mente carere putant) summissoque genu uoltus in imagine diuae   figit et hos edit crine iacente sonos : … « Elle quitte la procession des chastes mères, puise avec ses mains de l’eau pure au fleuve, s’asperge trois fois la tête, élève trois fois ses paumes vers le ciel (tous les spectateurs pensent qu’elle a perdu la raison) et, se mettant à genoux, fixe les yeux sur l’image de la déesse ; puis, les cheveux épars, elle prononce ces mots : […] »

Fastes VI, 449 sauvetage des objets sacrés du temple de Vesta par Metellus Haurit aquas tollensque manus : « … » « Il puise de l’eau et, levant les mains, il s’exclame : […] »

Le syntagme haurit aquam est repris dans cet autre extrait : Fastes V, 673-680 prière d’un marchand à Mercure Est aqua Mercurii portae uicina Capenae ;   Si iuuat expertis credere, numen habet. Huc uenit incinctus tunica mercator et urna   Purus suffita, quam ferat, haurit aquam. Vda fit hinc laurus, lauro sparguntur ab uda   Omnia quae dominos sunt habitura nouos. Spargit et ipse suos lauro rorante capillos   Et peragit solita fallere uoce preces :… « Il y a une fontaine de Mercure proche de la porte Capène ; si on veut en croire les gens qui en ont fait l’épreuve, elle possède une vertu. C’est ici que se rend le marchand, sa tunique retroussée ; il fait ses ablutions et, avec une cruche purifiée par fumigation, il puise de l’eau pour l’emporter. Il y trempe une branche de laurier et avec le laurier trempé il asperge tous les objets qui attendent de nouveaux maîtres. Il s’asperge lui-même les cheveux avec le laurier ruisselant et de sa voix habituée à la tromperie il récite cette prière : […] »

Citons les trois derniers récits que nous étudierons de manière synoptique : Fastes IV, 731-746 & 777-782 : préparation de la prière du berger à Palès



Chapitre II : Circonstances et lieux de la prière 187 I, pete uirginea, populus, suffimen ab ara.  Vesta dabit, Vesta munere purus eris. Sanguis equi suffimen erit uitulique fauilla,   tertia res durae culmen inane fabae. Pastor, oues saturas ad prima crepuscula lustra.   Vnde prius spargat uirgaque uerrat humum, frondibus et fixis decorentur ouilia ramis   Et tegat ornatas longa corona fores. caerulei fiant puro de sulphure fumi   tactaque fumanti sulphure balet ouis. Vre mares oleas taedamque herbasque Sabinas   et crepet in mediis laurus adusta focis. Libaque di milio milii fiscella sequatur :   rustica praecipue est hoc dea laeta cibo. Adde dapes mulctramque suas dapibusque resectis   siluicolam tepido lacte precare Palem. (…) His dea placanda est : haec tu conuersus ad ortus   dicque ter et uiuo perlue rore manus. Tum licet, apposita ueluti cratere camella,   lac niueum potes purpureamque sapam ; moxque per ardentes stipulae crepitantis aceruos   traicias celeri strenua membra pede. [expositus mos est …] « Peuple, va demander les éléments de lustration à l’autel virginal. Vesta te les fournira, tu seras pur grâce au don de Vesta. Ces éléments seront le sang de cheval, la cendre de veau, et en troisième lieu les tiges creuses de la fève dure. Berger, purifie les brebis repues au début du crépuscule ; répands d’abord de l’eau, puis balaie le sol avec une branche ; décore la bergerie en y fixant des rameaux de feuillage ; et orne les portes de longs festons de fleurs. Procède à des fumigations bleuâtres de soufre pur : au contact de la vapeur de soufre la brebis doit bêler. Brûle de l’olivier mâle, du bois de pin et des herbes sabines et fais crépiter le laurier roussi au milieu du foyer ; présente ensuite des galettes de millet avec une corbeille de millet : la rustique déesse aime particulièrement cette nourriture. Ajoute un vase de lait et les mets qui lui reviennent de droit ; les parts une fois découpées, invoque, en lui offrant du lait tiède, Palès qui habite les forêts. […] C’est par ces paroles qu’il faut se concilier la déesse : en te tournant vers l’orient, prononce-les à trois reprises et purifie tes mains à l’eau courante. Ensuite, en te servant d’une écuelle en guise de cratère, tu peux boire du lait blanc comme neige et du moût couleur pourpre ; puis, d’un pas vif, saute lestement par-dessus les meules enflammées de paille crépitante. »

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Deuxième partie : La mise en scène de la prière

Fastes IV, 933-936  : rituel post-précatif du flamine de Quirinus priant Robigo Dixerat. A dextra uillis mantele solutis   cumque meri patera turis acerra fuit. Tura focis uinumque dedit fibrasque bibentis   turpiaque obscenae – uidimus – exta canis. « Il avait terminé. Il y avait à sa droite un chiffon effiloché, une coupe de vin pur et une cassolette d’encens. Il répandit sur le foyer l’encens et le vin, ainsi que les viscères d’une brebis et la fessure répugnante d’une chienne immonde – j’en ai été témoin. »

Fastes VI, 155-158 & 163-166 : Craniè contre les Stryges Protinus arbutea postes ter in ordine tangit   fronde, ter arbutea limina fronde notat, spargit aquis aditus (et aquae medicamen habebant)   extaque de porca cruda bimenstre tenet (…) Sic ubi libauit, prosecta sub aethere ponit   quique adsint sacris respicere illa uetat ; uirgaque Ianalis de spina subditur alba,   qua lumen thalamis parua fenestra dabat. « Aussitôt elle touche trois fois à la suite les montants de la porte avec un rameau d’arbousier, trois fois elle marque le seuil avec un rameau d’arbousier ; elle asperge l’entrée avec de l’eau, une eau qui avait une propriété curative ; elle tient en mains les viscères crues d’un goret femelle de deux mois. […] Après cette offrande, elle découpe les viscères qu’elle pose à ciel ouvert ; elle interdit à tout participant à la cérémonie de se retourner ; elle dépose le rameau d’aubépine de Janus à l’endroit où une petite fenêtre laissait pénétrer la lumière dans la chambre. »

Le premier détail à noter est la récurrence du chiffre trois à travers ces rituels. Présent dans le texte, il est généralement mis en valeur par la métrique verbale : en I, 506 (Carmenta), ter est placé après la penthémimère : pīnĕă nōn sānō //P tēr pĕdĕ tēxtă fĕrīt



Chapitre II : Circonstances et lieux de la prière 189

comme en IV, 315 (Claudia Quinta), en doublet à l’initiale avec un effet d’allitération en r, de paronomase et d’assonance en a : Tēr căpŭt īnrōrāt, //P tēr tōllĭt ĭn aēthĕră pālmās

En VI, 155 (Craniè), il est après l’hephthémimère dans un vers dont l’allitération en t prolonge l’écho du chiffre : Prōtĭnŭs ārbŭtĕā pōstēs //H tĕr ĭn ōrdĭnĕ tāngīt

Et en VI 156, on le trouve après un mot en rejet isolé par une ponctuation placée à l’intermot trochaïque : Frōndĕ, tĕr ārbŭtĕā līmĭnă frōndĕ nŏtāt

S’il n’est pas énoncé directement dans le récit de chacun de ces rituels, le chiffre trois n’en conditionne pas moins leur déroulement. Ainsi la mère d’Evandre effectue trois actions avant de prononcer sa prière39. La structure de la phrase qui dit ces actions est très particulière. Il y a trois verbes conjugués à un mode personnel et trois actions, mais ces entités ne se superposent pas. Nous trouvons en effet trois verbes conjugués dont l’un dit l’immobilité, et un participe présent qui décrit une action : utque erat, immissis puppem stetit ante capillis   continuitque manum torua regentis iter, et procul in dextram tendens sua bracchia ripam   pinea non sano ter pede texta ferit ;

Voici les trois verbes conjugués à un mode personnel de la principale : utque erat, immissis puppem stetit ante capillis   continuitque manum torua regentis iter, et procul in dextram tendens sua bracchia ripam   pinea non sano ter pede texta ferit

Et voici les termes portant le sens de l’action : utque erat, immissis puppem stetit ante capillis   continuitque manum torua regentis iter, et procul in dextram tendens sua bracchia ripam   pinea non sano ter pede texta ferit 39. Fastes I, 503-506.

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Deuxième partie : La mise en scène de la prière

Deux réseaux de trois termes s’entrelacent donc pour donner sa forme définitive au passage. De la même manière, Claudia Quinta40, que Properce range « aux côtés de la vertueuse Cornelia dans sa galerie des matrones romaines exemplaires (IV, 2, 51-52) »41, effectue trois rites successifs avant de supplier la déesse phrygienne : elle se purifie avec de l’eau42, elle adopte une position de prière et elle s’adresse à la déesse. La rupture en parataxe entre les vers 315 et 316 nous invite à dissocier les deux actions énoncées et à isoler la seconde partie de la première. Jusqu’au moment où elle puise de l’eau, on peut imaginer que Claudia Quinta a quitté la procession pour se rafraîchir ou se désaltérer, ce qui ne laisserait pas d’être étrange en soi, sans que pour autant le lecteur - comme le spectateur de la scène - pût imaginer ce qui se préparait. La rupture est introduite par l’ouverture du vers 316 sur l’adverbe multiplicatif ter en parataxe. Si l’on observe les gestes de Claudia Quinta à partir de ce moment-là, on remarque qu’elle effectue trois fois deux actions successives : trois fois elle se purifie (ter caput inrorat) et trois fois elle lève au ciel ses paumes (ter tollit in aethera palmas). Les deux actions sont dites dans le même vers et tiennent chacune un des hémistiches que délimite la césure penthémimère. En toute logique, force est de remarquer qu’il manque un geste, qui serait lui-même répété trois fois pour que le cercle magique fût complet : on aurait alors eu un rituel parfait, fondé sur la triplication successive de trois gestes. Que nous dit Ovide ? Il ajoute à ce moment trois vers - dont l’un est constitué d’une parenthèse qui n’a d’autre fonction que d’attirer l’attention du lecteur sur le rituel lui-même -, trois vers qui décrivent trois gestes successifs : genu summisso ; uoltus in imagine figit ; edit. Le rituel est amplifié, mais achevé43.

40. Fastes IV, 313-318 . 41. D. Porte (482), « Claudia Quinta et la cérémonie de la lavatio dans les Fastes », p. 95. 42. On peut se reporter, pour les ablutions rituelles, aux articles de J. Champeaux (322), « Pietas. Piété personnelle et piété collective à Rome », p. 263-279 ; (323) « Religion romaine et religion latine : le culte de Jupiter et de Junon à Préneste », p. 71-104 ; (324) « La prière du Romain », p. 267-283 ; ainsi qu’à son ouvrage La religion romaine (325). On pourra consulter aussi l’article de J. F. Miller (181), « Ovid’s elegiac festivals : studies in the Fasti » et les ouvrages de J. Scheid, et en particulier J. Scheid (525), Quand faire, c’est croire. Les rites sacrificiels des Romains, et J. Scheid (526), Religion et piété à Rome, ainsi que Les donneurs de sacré de D. Porte (627). 43. Nous renvoyons au très stimulant article de D. Porte pour une analyse de la dimension politique de cet extrait.



Chapitre II : Circonstances et lieux de la prière 191

On retrouve cette présence du chiffre trois dans d’autres rituels des Fastes, comme lors du sacrifice offert à Tacita44 qu’Ovide intègre aux fêtes des dies Parentales et ajoute aux Feralia, qui marquent la limite de la fête des Morts. Ce sacrifice est relié au reste de la narration de façon très ténue et n’apparaît pas dans les calendriers qui ont été établis45. Ce rituel magique se fonde sur la triplication comme acte de ligature46. Si l’on observe maintenant la longue préparation que conseille Ovide aux bergers souhaitant invoquer Palès, on remarque les mêmes procédés sous le stylet du poète - qui se définit en de nombreuses occurrences des Fastes comme un uates. Le poète enjoint tout d’abord au peuple de se munir des éléments de lustration (suffimen). Ce terme47 est répété deux fois et il sera repris deux fois par un jeu étymologique à travers les termes fumi et fumanti. La répétition est l’un des éléments caractéristiques des rituels magiques, des prières, comme du carmen. Nous avons vu que revenaient des syntagmes entiers (haurit aquam, tendens manus) sous des formes peu modifiées. Nombreux sont aussi les termes qui se répètent au sein d’un même rituel (suffimen après la césure hephthémimère du vers 731 et avant la coupe trochaïque troisième du vers 733, sulphure en premier pied de clausule ou après la penthémimère du pentamètre dans la préparation de la prière à Palès, fronde en ouverture de vers et en premier membre de clausule dans les gestes de Craniè) ou d’un rituel à l’autre48. Nombreuses sont aussi les récurrences phoniques qui prolongent par écho l’effet d’un terme ou qui créent une similitude avec nos rimes : rimes croisées pour Palès (ara/fauilla/lustra) ou rimes assonancées (ortus/manus/ 44. Fastes II, 571-582. Le passage est nettement structuré puisqu’il s’ouvre sur la formule « ecce anus » en tête du vers 571, et se clôt sur « exit anus » en clausule du dernier pentamètre. 45. Au sujet de la déesse Tacita, lire A-M. Tupet (564), La magie dans la poésie latine, p. 413. A-M Tupet y commente ce passage à la lumière du texte de la tablette de Kempten. 46. On pourra observer aussi l’attitude d’Anna après la mort de Didon (Fastes, IV, 563-575 - la disposition des vers est sujette à controverse -). Dans ce récit se retrouvent la réduplication de l’adverbe ter à deux jalons du même vers (en P1 et à proximité de la césure hephthémimère) ainsi que la triplication du terme tertia dans trois vers successifs. 47. Félix Gaffiot donne cette seule occurrence des Fastes comme référence unique au mot suffimen, pour le sens duquel il renvoie à suffimentum : fumigation, parfum. Les deux termes sont à rattacher au verbe suffio qui signifie « fumiger, parfumer, purifier par fumigation ». L’emploi de ce terme - surtout au singulier et avec une valeur collective - reste problématique dans le contexte des Fastes. James Frazer le traduit pour son édition de la Loeb Classical Library par « materials for fumigation » et H. Le Bonniec propose, pour la collection La Roue à Livres : « ingrédients de fumigation ». 48. Ce sont en effet les mêmes gestes et les mêmes objets qui sont repris d’un rituel à l’autre : la fumigation, l’aspersion d’eau, l’usage du bois et des fèves….

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Deuxième partie : La mise en scène de la prière

camella/sapam), rimes plates pour Robigo (solutis/fuit/bibentis/canis), succession étonnante de verbes pour les deux quatrains de Craniè (tangit/notat/ habebant/tenet […] ponit/uetat/(alba)/dabat). Ovide donne donc des conseils pour qu’une prière soit agréée par Palès. Il faut utiliser trois éléments - le suffimen - qui sont du sang de cheval (sanguis equis), de la cendre de veau (uituli fauilla) et des tiges creuses de fève dure (inane durae fauae culmen). Ce sont les trois éléments qui purifieront l’officiant49 ; mais nulle indication ne nous est donnée quant à leur usage précis, et aucun de ces éléments ne réapparaîtra dans la suite du récit50. En effet le poète décrit ensuite la lustration des brebis, qui se fait au moyen d’une aspersion d’eau51. L’évocation de la purification de la bergerie est le lieu pour le poète d’un jeu constant sur les échos sonores. Le geste rituel semble soutenu par cette répétion des sons, que vient renforcer encore un jeu sur le rythme. Ovide interpelle le berger qui entre en scène après la purification du peuple. Le vocatif en tête du vers 735 ouvre la série de conseils au moyen desquels le uates des Fastes va décrire un rituel nettement codifié. Ce vers qui s’ouvre sur un vocatif se clôt sur un impératif : on ne peut mieux encercler par la parole celui à qui on s’adresse. La progression du rythme du vers vient mettre en relief cet impératif final par un effet de contraste ; l’accroissement du volume des mots qui composent ce vers-phrase se heurte et chute sur le dissyllabe qui en marque la borne finale : 2 2 3 3 4 2. Le destinataire est ainsi lié par son conseiller et ne peut que lui obéir.

49. R. Schilling affirme alors, dans une note (no 235) de son édition de la CUF, aux vers IV, 725-726, que « la participation d’Ovide à la cérémonie fait la valeur de son témoignage. Ces substances purificatoires sont au nombre de trois. Pour le uitulo cinerem, il s’agit des cendres des veaux qui ont été arrachés aux entrailles des vaches pleines et brûlés par la Vestale la plus ancienne lors des Fordicidia (cf. Fastes, IV, 640) ; elles ont été mises en réserve pour être utilisées aux Parilia (cf. v. 731). Pour stipulas fabales, l’expression est précisée par culmen inane falbae : ces tiges creuses […] pourraient, selon Dumézil, faire entendre, par magie sympathique, l’ « anéantissement des souillures ». Quant au sang du cheval, il a souvent été mis en relation avec le sacrifice de l’equus october au 15 octobre : cette relation manque de bases. (G. Dumézil, RRA, p. 388 et 231 sqq) ». Sur la participation d’Ovide au rite, E. Fantham est en revanche réservée : elle l’analyse comme étant « purely an autheticating device (cf. North, J. A. « Religion in Republican Rome », Cambridge Ancient History, VII, 2, p. 141) », Fasti Book IV (139), p. 229. 50. Ovide a cependant insisté sur le fait que ces éléments étaient au nombre de trois en plaçant à l’ouverture du dernier vers les évoquant l’ordinal tertia. 51. Sur les huit récits étudiés ici, quatre mentionnent l’eau comme outil de lustration, et un cinquième se déroule sur un bateau.



Chapitre II : Circonstances et lieux de la prière 193

Les trois vers suivants décrivent quatre actions successives :   Vnde prius spargat uirgaque uerrat humum, Frondibus et fixis decorentur ouilia ramis   Et tegat ornatas longa corona fores.

et sont fondés chacun sur une reprise phonique particulière : une récurrence de la semi-voyelle u pour le premier : Vnde prius spargat uirgaque uerrat humum

une assonance en i pour le second, qui mime peut-être la finesse des rameaux fixés aux murs de la bergerie : Frondibus et fixis decorentur ouilia ramis

une assonance en o pour le dernier, apte à représenter la rondeur des couronnes évoquées52 : Et tegat ornatas longa corona fores.

On retrouve ici une composition semblable à celle que nous avions remarquée dans l’évocation de la gestuelle de Carmenta : Ovide utilise quatre verbes pour décrire trois actions réellement distinctes (l’aspersion, le balayage, la décoration) et nous invite à relier trois verbes unis par leur forme (spargat, uerrat, tegat) dont il isole le quatrième, placé en troisième position dans la suite de ces verbes : decorentur. Or, par leur sens, les verbes sont à réunir comme suit : spargat / uerrat / decorentur et tegat (ces deux verbes recouvrent une action similaire). Ovide sépare donc ce qui devrait être lié (decorentur et tegat) et unit artificiellement ce qui n’entretient qu’un lien ténu. Il fait ainsi éclater une triade trop nettement unie au moyen d’un quatrième verbe en rupture, mais qui conserve cependant des liens forts avec la triade tant par son sens que par la troisième place qui lui est donnée dans la suite ainsi formée. Suivent deux vers isolés et symétriques dont la clausule du premier se retrouve redistribuée sous une forme proche autour de la césure penthémimère du second53 : 52. R. Schilling a su rendre ces jeux dans sa traduction : « orne les portes de longs festons de fleurs. ». 53. E. Fantham écrit à propos de ces vers, Fasti Book IV (99), p. 231 : « For sulphur in ritual purification cf. Met. 7.261 terque senem flamma, ter aqua, ter sulp(h)ure lustrat, Juv. 2.157-158 (728n.). Bömer compares the ritual fumigation of Odysseus’ palace after the killing of the

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Deuxième partie : La mise en scène de la prière Caērŭlĕī fīānt pūrō dē sūlphŭrĕ fūmī  Tāctăquĕ fūmāntī //P sūlphŭrĕ bālĕt ŏvīs.

Ce sont ensuite quatre végétaux différents qui sont sollicités pour leurs vertus dépuratives. Mais encore une fois ce chiffre quatre est obtenu par l’adjonction d’un élément étranger à la triade traditionnelle. Ici les trois premiers éléments évoqués sont tous des termes féminins de la première déclinaison, utilisés dans un même vers et à un même cas : oleas taedamque herbasque. Le lien unissant ces termes est renforcé par l’usage particulier de la copule -que rédupliquée dans un vers se fermant sur un nom propre (Sabinas), le tout conférant au vers une grandeur quasi-épique que renforce l’homéotéleute en -as venant accentuer le rythme psalmodié, soutenu par la régularité du volume des mots : 2 2 3 2 (par élision) 3 3. Survient alors l’étranger, le laurier54, mot de la féminin deuxième déclinaison auquel est consacré un vers entier, ce qui ne saurait surprendre de la part d’un poète dévoué à Apollon et à ses Muses. C’est ce même laurier que trempe dans l’eau - l’inversion du geste est ici à remarquer - le marchand qui souhaite invoquer Mercure : Fastes V, 677 ūdă fĭt hīnc //T laūrūs,//P laūrō //H spārgūntŭr ăb ūdā

Ce vers spéculaire trouve son reflet en IV, 743, dans le vers qui suit l’évocation du laurier dans le rituel du berger : Lībăquĕ dī //T mĭlĭō //P mĭlĭī //H fīscēllă sĕquātūr

Mais le rite ne se réduit pas ici à la préparation de la prière : les paroles sont en effet encadrées par des gestes qui le portent vers l’efficacité et ajoutent du sens, et parfois un sens absent des mots eux-mêmes. Le berger qui aura prononcé trois fois sa prière en regardant vers l’Orient devra encore effectuer trois actions : il se purifiera les mains dans de l’eau claire - ce qui était fait à l’ordinaire en début de rituel - puis il boira du lait blanc et du moût pourpre55 et il sautera enfin par dessus un feu de paille, ce qui semble correspondre à de nombreux rites agraires - dont les moins connus ne sont pas nos traditionnels feux de la Saint Jean. suitors, Od. 22.481-482, 23.50ff. […]. There is more sound-play on fumi/fumanti, puro / sul-pure (assuming O. did not write and pronounce sulphure to increase assonance on fu.) » . 54. Ce vers et ceux qui l’entourent ne sont que la reprise de Fastes IV, 725-728. 55. lac niueum potes purpureamque sapam : il faut remarquer ici encore la symétrie de la composition (N1 A1 V A2 N2).



Chapitre II : Circonstances et lieux de la prière 195

La complexité de ce rituel apotropaïque doit être remarquée, comme celle de sa relation poétique. Chacun de ces rituels met donc en scène des groupes formés toujours de trois objets. Les suites de la prière qu’adresse à Robigo le flamine de Quirinus (Fastes IV, 933-936) ne dérogent pas à cette règle. On voit le flamine garder à sa droite « un chiffon effiloché, une coupe de vin et une cassolette d’encens » (uillis mantele solutis, meri patera (uini), turis acerra), soit trois objets. Selon un procédé que nous avons déjà mis en lumière, Ovide évoque le sacrifice en mentionnant trois objets décomposés en quatre entités : l’encens, le vin et les viscères de deux animaux. L’étoffe disparaît donc d’un distique à l’autre. Deux éléments sont repris et donc justifiés, puisqu’ils sont utiles. On se demande alors pourquoi Ovide avait pris soin de mentionner cette étoffe dont l’usage n’est pas spécifié et à laquelle il offre pourtant un vers entier. Une explication peut être trouvée dans la proximité de ce passage avec une scène de la quatrième Géorgique de Virgile. Protée vient consulter sa mère Cyrène56 : [Cyrene], manibus liquidos dant ordine fontes Germanae, tonsisque ferunt mantelia uillis. pars epulis onerant mensas, et plena reponunt pocula : Panchoeis adolescunt ignibus arae.

La belle traduction de Jacques Delille, pour infidèle qu’elle soit, souligne la proximité entre les deux textes : « Les nymphes sur ses mains épanchent de l’eau pure, Offrent pour les sécher de fins tissus de lin ; On fait fumer l’encens, on fait couler le vin »

Quoique séduisant, ce rapprochement ne suffit peut-être pas à expliquer un phénomène qui se retrouve dans d’autres rituels ovidiens, au point d’en constituer presque une caractéristique. Chaque fois que le rituel est décrit avec suffisamment de détails pour que le lecteur puisse en concevoir une représentation précise, Ovide prend soin d’introduire un mystère qui rend l’évocation non reproductible. On aborde ici aux rives sinueuses qui marquent la frontière entre le religieux et le poétique. Jusqu’où le poète peut-il s’aventurer ? Où sont les bornes de sa liberté, lesquelles franchies il risque de divulguer des mystères sacrés ? On se souvient des motifs allégués pour justifier la relégation du poète. Les Fastes étaient un sujet dangereux car la sacralité des rituels devait 56. Virgile, Géorgiques, IV, 376-379.

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Deuxième partie : La mise en scène de la prière

être préservée et respectée par celui-là même qui se disposait à les décrire. La tâche était difficile, et le péril était le même qu’avec les prières, dont la parole performative ne pouvait pas être livrée dans son intégrité au risque de transformer tout lecteur en orant, mais dont le texte ne pouvait être non plus totalement modifié. Il reste donc une part d’ombre dans tous les rituels que les Fastes nous dévoilent. R. Schilling rapporte, dans le commentaire que nous avons cité, que, parmi les trois éléments composant le suffimen requis pour la célébration de Palès, l’un était nettement identifié - les cendres du veau brûlé par une Vestale lors des Fordicidia -, un autre pouvait trouver une justification - les tiges creuses des fèves - tandis que le dernier restait mystérieux - le sang du cheval dont on ne connaît ni l’origine ni la fonction. De même le berger doit offrir trois mets à Palès : du millet, du lait et « les mets qui lui reviennent de droit » et qui ne sont pas autrement définis. Le poète insiste cependant sur ces mets puisqu’il répète dans un même vers le mot qui les évoque et qu’il le disjoint, lors de sa première occurrence, de l’adjectif possessif qui lui est rattaché57 : Fastes IV, 745 āddĕ dăpēs //T mūlctrāmquĕ //F sŭās //H dăpĭbūsquĕ rĕsēctīs

Les viscères de chienne offertes à Robigo par le flamine de Quirinus sont eux aussi intriguants. Nous reprenons R. Schilling commentant ce vers : « Si le sacrifice du chien est rare, il n’en est pas moins attesté dans la liturgie romaine ; ainsi en est-il pour les petits chiens sacrifiés à Genita Mana (Pline, NH, 29-58), pour le chien sacrifié aux Lupercalia par les Luperques (Plutarque, Rom., 21, 8 ; Q.R, 68) ou pour le petit chien sacrifié, à titre expiatoire, lors d’un travail urgent accompli un jour de fête (Colummelle, R.R., 2, 21, 4). Il est à noter que cette fête comporte un double sacrifice, ouis et canis. Ovide a glissé du féminin (v. 936) au masculin (v. 941) pour désigner la victime canine (par lui-même le mot canis est épicène). Selon les règles de la liturgie qui connaît le dieu Robigus et non une déesse Robigo (cf. Fasti Praenest. à la date du 25 avril), Ovide aurait dû nommer le chien pour le sacrifice des Robigalia. Mais comme il parle d’une déesse Robigo, l’emploi du féminin s’explique ; d’où 57. G. Dumezil s’interroge à ce sujet : « Que désignent les mots dapes suas ? Peut-être s’agit-il, étroitement joints au lait frais, de produits laitiers plus élaborés, fromages, beurre, petit lait ? » (Idées Romaines (351), p. 286). Le lecteur moderne en est réduit aux conjectures, lorsque le lecteur contemporain savait d’évidence, par son expérience propre, ce que recouvre l’allusive formule ovidienne.



Chapitre II : Circonstances et lieux de la prière 197

notre traduction ‘brebis’ pour ouis et bidens (v. 908 & 935). On peut aussi se demander si Ovide n’a pas commis une confusion entre deux fêtes. En effet, à côté de la fête fixe des Robigalia existait, vers la même date, la fête mobile de l’Augurium Canarium (qui comportait le sacrifice des chiennes rousses (rutilae canes) afin de préserver les moissons des rigueurs de la canicule (Festus, P. 358, 27 L.). » Il est peu probable qu’Ovide ait commis une confusion involontaire. Mais une confusion volontaire est en revanche tout à fait envisageable. Autre rituel, autres zones d’ombre. La vertu de l’eau puisée à la fontaine de Mercure58 n’est pas précisée par le poète, non plus que celle qu’utilise Craniè contre les Stryges59. Ovide ne nous explique pas enfin le choix de l’arbousier dans le rituel apotropaïque qu’exécute Craniè, mais la structure de ses vers est là pour nous signifier son importance60 : Prōtĭnŭs ārbŭtĕā //P pōstēs tĕr ĭn ōrdĭnĕ tāngīt   Frōndĕ, tĕr ārbŭtĕā //P līmĭnă frōndĕ nŏtāt,

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S’il nous livre de nombreux éléments propres à faire naître dans nos esprits le spectacle de ces prières rituelles, Ovide préserve donc cependant une part de mystère qui prouve son respect pour les rites dont il porte témoignage. Le même mariage entre respect traditionnel et originalité poétique se retrouve dans le texte-même des prières qu’Ovide offre à son lecteur, auxquelles on pourrait appliquer les remarques qu’Emile Cahen émettait au sujet du Callimaque des Hymnes : « L’hymne de Callimaque n’est pas un simple divertissement littéraire. Si aucune de ces pièces ne paraît avoir été récitée au cours d’une cérémonie religieuse, chacune d’elle […] s’applique et s’adapte à une fête ou à un certain rituel, et ne se comprend pas à part d’eux. […] Trait commun à toutes ces pièces : un sentiment religieux complexe et bien particulier. C’est de la religiosité plutôt que de la religion. C’est d’abord, à l’égard des mythes et des histoires divines, une attitude de curiosité et d’humour. Mais c’est aussi un certain sentiment du religieux et du divin. »61 Les rituels sont donc des gestes et des actes qui théâtralisent le corps pour créer du sens à partir d’objets ou de mouvements assemblés dans un contexte déterminé. La partie du corps la plus fréquemment mentionnée avec les mains et les bras est la tête, partie noble de l’être humain symbolisant son être entier, physique et spirituel. Et sur la tête, les cheveux sont l’objet d’une attention 58. 59. 60. 61.

Fastes V, 674. Fastes VI, 157. Fastes VI, 155-156. Introduction aux Hymnes de Callimaque, C.U.F., p. 30 & 32.

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Deuxième partie : La mise en scène de la prière

toute particulière. Selon la divinité à laquelle on va s’adresser, on les noue ou on les dénoue. Bacchus, dont Ovide mentionne de nombreuses épiclèses parmi lesquelles Lyaeus, Thyoneus indetonsus, Lenaeus et Liber, qui présagent toutes son action libératrice, requiert de ses zélateurs une chevelure dénouée. Au livre IV des Métamorphoses, alors qu’il relate l’histoire de Penthée, Ovide décrit le rituel demandé par le prêtre en l’honneur du dieu né du feu, deux fois engendré, ignigenumque satumque iterum, solum bimatrem (IV, 12) : Métamorphoses IV, 4-6   (…) festum celebrare sacerdos inmunesque operum famulas dominasque suorum pectora pelle tegi, crinales soluere uittas

L’ornement de la coiffure, rendue ainsi à son naturel, se réduira à une couronne, suggérée de manière implicite au vers suivant par le participe serta dans la formule serta coma. La chevelure mise au premier plan redevient essentielle. De la même manière la mère d’Iphis, Téléthuse, dénouera ses cheveux et ceux de sa fille pour invoquer Isis, déesse orientale comme Bacchus : Métamorphoses IX, 771-772 Crinalem capiti uittam nataeque sibique detrahit […] « elle dénoua la bandelette qui retenait sa chevelure ainsi que celle de sa fille »

Le molosse crinalem ouvre le vers et rebondit sur le contre-rythme anapestique capiti pour dire avec solennité l’inversion rituelle d’une situation normale : l’acte religieux vient renverser l’ordre social traditionnel, qui veut la chevelure des femmes disciplinée et coiffée, et amène ainsi les femmes à s’extraire de l’ordinaire afin d’entrer dans le temps et l’espace propices à la communication sacrée. Ces deux vers constitués, pour leurs composantes vocaliques, quasi exclusivement de a et de i, préparent musicalement l’invocation éclatante à Isis :  (…) at illa crinalem capiti uittam nataeque sibique detrahit, et passis aram complexa capillis



Chapitre II : Circonstances et lieux de la prière 199

Les rituels des Métamorphoses présentent quelques constantes. Ils se déroulent dans l’environnement immédiat d’un autel explicitement évoqué : Métamorphoses IV, 753-755 Dis tribus ille focos totidem de caespite ponit, laeuum Mercurio, dextrum tibi, bellica uirgo, ara Iouis media est ; mactatur uacca Mineruae, « Persée élève à trois dieux autant d’autels de gazon ; celui de gauche à Mercure, celui de droite à toi, vierge guerrière, celui du milieu à Jupiter »

Métamorphoses VII, 427 committi potuisse nefas : fouet ignibus aras « il allume la flamme sur les autels des dieux »

Métamorphoses VII, 588-595 Iuppiter illa tenet. quis non altaribus illis inrita tura dedit ? Quotiens pro coniuge coniunx, pro gnato genitor dum uerba precantia dicit, non exoratis animam finiuit in aris, inque manu turis pars inconsumpta reperta est ! Admoti quotiens templis, dum uota sacerdos concipit et fundit durum inter cornua uinum, haud exspectato ceciderunt uulnere tauri ! «  [Le temple] est consacré à Jupiter. Qui de nous n’a point porté sur ses autels un encens inutile ? Que de fois l’époux, en récitant une prière pour son épouse, le père pour son fils, ont expiré au pied de ces autels inexorables ! Que de fois on a trouvé dans leur main une portion de leur encens, qu’ils n’avaient pas brûlée ! Que de fois devant le temple, alors que le prêtre prononçait les paroles sacrées et répandait un vin pur entre les cornes des taureaux, ils se sont abattus sous un coup inattendu ! »

Métamorphoses IX, 772 & 782-783 detrahit, et passis aram complexa capillis (…) uisa dea est mouisse suas (et mouerat) aras, et templi tremuere fores, imitataque lunam

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Deuxième partie : La mise en scène de la prière « [Alors Téléthuse] les cheveux épars entoura de ses bras l’autel d’Isis. […] Il lui sembla que la déesse avait agité ses autels. Elle les avait agités en effet ; un tremblement secoua les portes du temple. »

Métamorphoses X, 2 turaque fumabant, cum munere functus ad aras « L’encens fumait de toutes parts ; alors, après avoir déposé son offrande, Pygmalion, debout devant l’autel […] »

Métamorphoses XI, 577-579 omnibus illa quidem superis pia tura ferebat, ante tamen cunctos Iunonis templa colebat proque uiro, qui nullus erat, ueniebat ad aras « elle offrait un pieux encens à tous les dieux ; mais c’étaient surtout les temples de Junon qui recevaient ses hommages ; elle allait au pied des autels prier pour celui qui n’existait déjà plus »

Ces autels reçoivent le feu sur lequel sera brûlé l’encens liturgique. Cet encens est, selon D. Aubriot, « une offrande et non un rite préliminaire à la prière »62 : Métamorphoses IV, 753 Dis tribus ille focos totidem de caespite ponit,

Métamorphoses VII, 427-429 committi potuisse nefas : fouet ignibus aras muneribusque deos inplet, feriuntque secures colla torosa boum uinctorum cornua uittis. « [Quant au père, malgré la joie qu’il éprouve d’avoir conservé son fils, il n’en est pas moins saisi d’horreur à la pensée] qu’il s’en est fallu de bien peu qu’un crime si monstrueux fût consommé ; il allume la flamme sur les autels des dieux et les charge d’offrandes ; les haches frappent l’encolure musculeuse des bœufs, ornés de bandelettes entrelacées à leurs cornes. »

62. D. Aubriot (280), Prière et conception religieuse en Grèce ancienne, p. 106.



Chapitre II : Circonstances et lieux de la prière 201

Métamorphoses VI, 161-164 cum prece tura pia lauroque innectite crinem : ore meo Latona iubet. » Paretur, et omnes Thebaides iussis sua tempora frondibus ornant turaque dant sanctis et uerba precantia flammis. « ‘Femmes de l’Isménus, allez en foule offrir à Latone et aux deux enfants de Latone de l’encens et de pieuses prières, enlacez à vos cheveux les feuilles du laurier ; c’est Latone qui vous l’ordonne par ma bouche.’ On obéit ; toutes les Thébaines ornent leur tête du feuillage prescrit et offrent de l’encens, avec leurs prières, sur les flammes sacrées. »

Métamorphoses VII, 159-162

Haemoniae matres pro gnatis dona receptis grandaeuique ferunt patres congestaque flamma tura liquefaciunt, inductaque cornibus aurum uictima uota cadit, sed abest gratantibus Aeson «  Les mères de l’Hémonie et les pères chargés d’ans, heureux d’avoir retrouvé leurs fils, portent des offrandes aux dieux  ; par leurs soins l’encens amoncelé fond sur les flammes, pour acquitter leurs vœux, ils abattent les victimes aux cornes revêtues d’or ; mais au milieu de ceux qui célèbrent des actions de grâce, on ne voit point Eson. »

Métamorphoses VII, 588-592 Iuppiter illa tenet. Quis non altaribus illis inrita tura dedit ? Quotiens pro coniuge coniunx, pro gnato genitor dum uerba precantia dicit, non exoratis animam finiuit in aris, inque manu turis pars inconsumpta reperta est ! « Qui de nous n’a point porté sur ses autels un encens inutile ? Que de fois l’époux, en récitant une prière pour son épouse, le père pour son fils, ont expiré au pied de ces autels inexorables ! Que de fois on a trouvé dans leur main une portion de leur encens, qu’ils n’avaient pas brûlée ! »

Métamorphoses IV, 11 turaque dant Bacchumque vocant Bromiumque Lyaeumque « elles offrent de l’encens au dieu qu’elles appellent Bacchus, Bromios, Lyeus »

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Deuxième partie : La mise en scène de la prière

Métamorphoses X, 273 turaque fumabant, cum munere functus ad aras « L’encens fumait de toutes parts ; alors, après avoir déposé son offrande, Pygmalion, debout devant l’autel […] »

Métamorphoses X, 681-683 Dignane, cui grates ageret, cui turis honorem ferret, Adoni, fui ? Nec grates inmemor egit, nec mihi tura dedit. « Ne méritais-je pas, Adonis, qu’il m’offrît ses actions de grâce et l’hommage de son encens ? Oubliant mes bienfaits, il ne m’offrit ni ses actions de grâce, ni son encens. »

Métamorphoses XI, 248 et pecoris fibris et fumo turis adorat « et il brûle la chair d’une brebis et fait fumer l’encens »

Métamorphoses XI, 577 omnibus illa quidem superis pia tura ferebat « elle offrait un pieux encens à tous les dieux »

Et à l’encens est parfois adjoint le vin, que l’on répand sur le foyer, ou sur la victime que l’on s’apprête à offrir en sacrifice : Métamorphoses VII, 593-595 admoti quotiens templis, dum uota sacerdos concipit et fundit durum inter cornua uinum, haud exspectato ceciderunt uulnere tauri ! « Que de fois les taureaux conduits au temple, au moment où le prêtre prononçait les formules sacrées en versant entre leurs cornes le vin pur, ont-ils succombé, mais non de la blessure qui était attendue ! »

Métamorphoses XI, 247 Isque deos pelagi uino super aequora fuso Et pecoris fibris et fumo turis adorat



Chapitre II : Circonstances et lieux de la prière 203 «  Il implore les dieux de la mer avec du vin répandu sur les flots, des entrailles de brebis et la fumée de l’encens. »

Etonnamment, le vin n’est pas évoqué dans la fête de Bacchus à laquelle, pour leur malheur, les filles de Minyas refusent de participer : ni dans les prescriptions du prêtre, ni lors de l’épiphanie du dieu n’apparaissent le vin ou la vigne. Le vin ne semble pas avoir ici de valeur rituelle particulière ; du moins n’est-elle pas soulignée. Il est dans notre corpus l’un « des fruits de la terre », fruges quas coluit, que Pythagore reprochera aux hommes, au livre XV des Métamorphoses, de ne pas offrir seuls aux dieux  : le sacrifice sanglant qui accompagne leur offrande est selon lui une monstruosité dont les hommes devraient impérativement se détourner, et qui pourrait sans peine être remplacée par les libations : Métamorphoses XV, 116-142 Quid meruistis oues, placidum pecus inque tuendos natum homines, pleno quae fertis in ubere nectar, mollia quae nobis uestras uelamina lanas praebetis uitaque magis quam morte iuuatis ? Quid meruere boues, animal sine fraude dolisque, innocuum, simplex, natum tolerare labores ? Inmemor est demum nec frugum munere dignus, qui potuit curui dempto modo pondere aratri ruricolam mactare suum, qui trita labore illa, quibus totiens durum renouauerat aruum, quot dederat messes, percussit colla securi. Nec satis est, quod tale nefas committitur : ipsos inscripsere deos sceleri numenque supernum caede laboriferi credunt gaudere iuuenci ! Victima labe carens et praestantissima forma (nam placuisse nocet) uittis insignis et auro sistitur ante aras auditque ignara precantem inponique suae uidet inter cornua fronti, quas coluit, fruges percussaque sanguine cultros inficit in liquida praeuisos forsitan unda. Protinus ereptas uiuenti pectore fibras inspiciunt mentesque deum scrutantur in illis ; inde ( fames homini uetitorum tanta ciborum) audetis uesci, genus o mortale ! quod, oro, ne facite, et monitis animos aduertite nostris ! Cumque boum dabitis caesorum membra palato, Mandere uos uestros scite et sentite colonos.

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Deuxième partie : La mise en scène de la prière « Mais en quoi l’avez-vous mérité, brebis, paisible bétail, né pour être propices aux hommes, vous qui portez un nectar en vos mamelles pleines, vous qui nous procurez votre laine comme doux vêtement, vous qui nous êtes plus utiles vives que mortes ? En quoi l’ont mérité les bœufs, animal sans ruse et sans malice, inoffensif, simple, né pour supporter les travaux ? C’est un ingrat, un homme indigne des dons de la terre, celui qui peut frapper son laboureur après l’avoir déchargé du poids de sa charrue recourbée, qui frappe de sa hache un cou usé par le travail, grâce auquel tant de fois il a retourné la dure glèbe, et qui lui a donné tant de moissons. Et il ne lui suffit pas encore de commettre un tel crime ; on croit que les dieux eux-mêmes ont prescrit le crime et que les divinités supérieures se réjouissent de la mort d’un taureau travailleur. Une victime sans tache, que distingue sa beauté (car avoir plu est pour elle un malheur), parée d’or et de bandelettes est amenée devant les autels ; sans se douter de ce qui s’apprête, elle entend réciter des prières ; elle voit poser sur son front, entre ses cornes, les fruits de la terre, dont la culture est son ouvrage, et quand elle a reçu le coup fatal, elle teint de son sang le couteau qu’elle avait peut-être aperçu dans une eau limpide. Aussitôt on arrache ses viscères de son sein encore palpitant, on les examine, on y cherche la volonté des dieux. Et après (tel est l’appétit de l’homme pour les aliments défendus !) vous osez, ô mortels, en faire votre nourriture ! Arrêtez, je vous en supplie, écoutez mes avis : quand vous donnerez en pâture à votre palais les membres des bœufs égorgés, comprenez, dans votre esprit et dans votre cœur, que vous mangez vos cultivateurs. »

Cette condamnation pythagoricienne reprend le déroulement traditionnel d’un sacrificium selon le ritus romanus, rite utilisé pour la plupart des cultes de la cité, et auquel président les pontifes. La description du sacrifice que donne Jean-Luc Lamboley dans son Lexique d’Histoire et de Civilisation Romaine, reprend exactement l’évocation ovidienne : « Lors des sacrifices publics, la fête commence par un cortège qui conduit jusqu’à l’autel la bête à immoler. Celle-ci est choisie sans défaut, ses cornes sont dorées et ornées de rubans. La tête de l’animal est ensuite aspergée de vin et d’un gâteau sacré (mola salsa)63 avant d’être assomée et égorgée, le sacrificateur gardant la tête voilée. Le sang est recueilli et versé sur l’autel. L’animal est ensuite dépecé, et ses entrailles grillées sur l’autel. Les os et la graisse sont brûlés pour les dieux, puis le reste de la viande est cuit et servi à la communauté, à moins qu’il ne s’agisse d’un holocauste, auquel cas la bête est entièrement brûlée sur l’autel. » 63. On peut trouver la description précise des modalités de fabrication de la mola salsa par les Vestales dans Les Donneurs de Sacré de D. Porte (496).



Chapitre II : Circonstances et lieux de la prière 205

Rares sont dans les Métamorphoses les offrandes non sanglantes, les libations offertes seules aux dieux, alors qu’elles abondent dans les Fastes : les perspectives des deux ouvrages sont nettement distinctes et l’attention que porte Ovide aux rituels semble plus faible dans les Métamorphoses. Il évoque un monde aux contours plus flous, qui n’appartient à aucun temps ni à aucun lieu. Ce n’est pas une excursion dans le monde grec, comme on l’a souvent dit, et l’univers décrit n’est pas plus grec que romain pour ce qui est des scènes de prière et des rituels. Ovide cultive d’ailleurs une sorte d’imprécision qui lui permet de suggérer simplement une atmosphère religieuse et rituelle, selon des codes qui sont propres à son esthétique et que son lecteur identifie. Cette atmosphère reste un environnement émotionnel et esthétique, et l’écriture qui y est mise en œuvre relève d’une technique presque impressionniste, fonctionnant par petites touches imprécises, juxtaposées de telle sorte que l’ensemble crée une impression générale que l’on peine parfois à retrouver réellement lorsque l’on effectue une micro-lecture. Ainsi l’offrande de Pygmalion n’est-elle pas précisée, seules sa dévotion et sa folle espérance étant matérialisées par son acte : Métamorphoses X, 270-274 Festa dies Veneris tota celeberrima Cypro uenerat, et pandis inductae cornibus aurum conciderant ictae niuea ceruice iuuencae, turaque fumabant, cum munere functus ad aras constitit […] «  La fête de Vénus, célébrée par toute l’île de Chypre, était venue, et les génisses blanches étaient tombées, frappées à la nuque après avoir été conduites à l’autel avec leurs cornes recouvertes d’or, et l’encens fumait, lorsque, son devoir accompli, [Pygmalion] se tint devant l’autel […] »

Le poète ne précise pas ce qu’était ce ‘devoir’ à accomplir lors de la fête de Vénus : cette précision liturgique n’entre pas dans son propos et l’imagination du lecteur romain, très avisé en matière de rites, sait façonner une scène religieuse adéquate, sans qu’Ovide ait à se préoccuper de vraisemblance historique, quant aux cultes propres de l’île de Chypre à l’époque théorique de l’existence du sculpteur. De la même manière ne sont pas identifiées les « victimes » des sacrifices sanglants offerts en action de grâce par les mères et les pères d’Hémonie au retour des Argonautes :

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Deuxième partie : La mise en scène de la prière

Métamorphoses VII, 159-162 Haemoniae matres pro gnatis dona receptis grandaeuique ferunt patres congestaque flamma tura liquefaciunt, inductaque cornibus aurum uictima uota cadit, sed abest gratantibus Aeson « Les mères Hémoniennes et les pères âgés qui ont retrouvé leurs enfants apportent des offrandes  ; l’encens accumulé fond sur la flamme et on amène pour le sacrifice une victime aux cornes d’or. Mais Aeson est absent de ces actions de grâce. »

Parfois, cependant, le poète est plus précis : Persée offre à Minerve une génissse, à Mercure un veau, et à Jupiter un taureau (Métamorphoses IV, 753764) ; des bœufs sont évoqués en Métamorphoses VII, 429, des génisses lors de la fête de Vénus à Chypre (Métamorphoses  X, 271-272), une brebis en Métamorphoses XI, 246-248, et les victimes du sacrifice apotropaïques devant détourner d’Egine la peste qui la décime sont des « taureaux » qui « mugissent » sous les coups des victimaires (Métamorphoses VII, 595-597). Mais on ne retrouve en rien ici la diversité des offrandes évoquées dans les Fastes, et la quasi absolue domination des bovins contraste fortement avec l’extrême variété rituelle du culte romain historique, et même du culte grec. Là encore il ne s’agit pas de décrire une réalité, qu’elle fût grecque ou romaine, mais de mettre en place une atmosphère, dont les composantes soient identifiables par le lecteur et opératoires pour suggérer une scène codifiée. L’uniformisation est alors une stratégie poétique efficace, qui n’engendre toutefois pas la monotonie étant donné l’espacement de ces épisodes dans l’œuvre. Il n’est dans les Amours qu’un seul rituel décrit longuement et avec précision, et il a pour cette raison été étudié en détail par plusieurs savants. Il s’agit de la fête de Junon de Faléries, décrite au livre III et qui fait apparaître un narrateur tout jeune et manifestant pourtant déjà un grand intérêt pour la chose liturgique. Dans la rapide synthèse sur le sacrifice que propose Pythagore, au livre XV des Métamorphoses, apparaîtront un certain nombre de victimes qui n’auront jamais été évoquées auparavant dans notre corpus, comme le porc et le bouc. Mais même alors, la chatoyance du culte romain est affadie et uniformisée, puisque ne sont mentionnés ni les coqs, chiens ou oiseaux attestés dans les rites, ni tous les autres animaux qui pouvaient sporadiquement être offerts aux dieux.



Chapitre II : Circonstances et lieux de la prière 207

Ce qui distingue encore les Métamorphoses des deux autres œuvres ovidiennes les plus importantes de notre corpus, les Fastes et les Amours, c’est l’absence d’évocation, dans l’environnement des prières, de rituels de purification. Seul le silence rituel, si fréquemment attesté dans les ouvrages consacrés à la religion romaine64, apparaît dans notre corpus. Et il apparaît en un formulaire qu’on retrouve une fois dans chacune des trois œuvres, mais ni chez Catulle, ni chez Properce, ni chez Tibulle. Il se rencontre une seule fois, et sous une forme modulée qu’Ovide reprendra dans l’Ibis, chez Virgile : Amours III, 2, 43 sed iam pompa ; animis linguisque fauete

Métamorphoses XV, 679 et deus en, deus est ! animis linguisque fauete

Fastes I, 71 prospera lux oritur : linguis animisque fauete

Ibis, 98 quisquis ades sacris, ore favete, meis ;

Enéide, V, 71 Ore fauete omnes et cingite tempora ramis

La présence de cette formule atteste encore une fois de la grande attention qu’Ovide portait, dans son esthétique personnelle, au langage rituel et aux codes langagiers de sa cité, avec laquelle sa poésie n’est pas si en rupture qu’on l’a dit souvent. Si le silence rituel n’est prescrit que sporadiquement dans notre corpus, il en va de même des ablutions purificatrices, et de la pureté rituelle d’une manière générale, qui apparaissent le plus souvent en contre-point, dans des évocations négatives et purement suggestives servant un propos érotique : Amours I, 8, 73-74 saepe nega noctes ; capitis modo finge dolorem,   et modo, quae causas praebeat, Isis erit. 64. ainsi que dans de nombreuses œuvres littéraires ou philosophiques, par exemple chez Cicéron (De div. II, 40), Horace (Odes, III), Sénèque (La vie heureuse, 26).

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Deuxième partie : La mise en scène de la prière « Souvent refuse tes nuits ; tantôt contrefais la migraine, et tantôt Isis sera là pour te fournir une bonne raison. »

Amours III, 7, 53-54 A tenera quisquam sic surgit mane puella,   protinus ut sanctos possit adire deos ? « Quitte-t-on le matin une tendre jeune fille, pour s’approcher aussitôt des dieux saints ? »

Cela se retrouve chez Tibulle II, 1, 11-14 : Vos quoque abesse procul iubeo, discedite ab aris,   Queis tulit hesterna gaudia nocte Venus. Casta placent superis ; pura cum ueste uenite,   Et manibus puris sumite fontis aquam. « Et vous, éloignez-vous, je vous l’ordonne, gardez-vous d’approcher des autels, vous à qui Vénus a donné du plaisir la nuit dernière. Les mains chastes plaisent aux dieux d’en haut ; venez avez un vêtement pur et puisez avec des mains pures l’eau d’une fontaine. »

et Properce II, 33, 1, qui fait écho à l’extrait des Amours, I, 8 cité plus haut : Tristia iam redeunt iterum sollemnia noctis :   Cynthia iam noctes est operata decem. « Voici que reviennent encore les tristes sollennités : Cynthie leur a déjà consacré dix nuits. »

Revenons un instant au silence rituel. La notion de silence est d’une manière évidente une thématique intéressante pour un poète, être de parole qui met en mots, ici, des cérémonies en grande partie visuelles et qui met en vers, c’est-à-dire en parole musicale, les prières des hommes. G. Appel nous dit : antequam ipsa precatio incipiebatur, silentium praesentibus imperabatur. Ac praesentes tacere et silentium religiosum ideo obtinere decebat, ne malo uerbo temere dicto malum inueniret omen.65 Il s’appuie sur le témoignage de TiteLive, VI, 6, 4 : Silentio facto, templa deorum immortalium, quae foro imminent, Capitolium intuentem et manus nunc in caelum, nunc in patentes terrae hiatus ad deos manes porigentem se deuouisse. L’expression consacrée est validée par Sénèque dans le De Vita Beata : ‘Fauete Linguis’ hoc uerbum non ut plerique 65. G. Appel, De Romanorum Precationibus (276), p. 187.



Chapitre II : Circonstances et lieux de la prière 209

existimant a fauore traditur, sed imperatur silentium, ut rite peragi possit sacrum nulla uoce mala obstrepente. Cette expression se retrouvant chez Ovide rappelle le silence qui sert d’écrin à la parole sacrée, afin qu’aucune parole profane ou de mauvais effet ne vienne la parasiter et compromettre son efficacité. Ce silence ne semble pas avoir de réelle épaisseur sacrée par lui-même et ressemble plus au silence des théâtres modernes qu’au silence méditatif des fidèles des religions monothéistes. Mais par l’utilisation du formulaire, Ovide solennise un vers évoquant une situation rituelle réelle, et lui donne un espace musical propre, qui allonge la fin du vers en l’emplissant de ce silence nécessaire à la réception poétique comme à la réception religieuse.

Troisième Partie La mise en mots de la prière  

Ac posterioribus temporibus progrediente eloquentia immortales quoque uerborum ambagibus artificiosis gaudebant.



Georgius Appel

 

Le poète nomme les Dieux et nomme toutes choses en ce qu’elles sont. Il dit la parole essentielle.



Emilio Brito

Chapitre Premier La mise en scène du récit : études narratologiques et métriques Introduction et clôture des prières Rituellement, la prière s’inscrit dans le silence, qu’elle vient à la fois rompre et remplir. Mais il n’est pas de silence poétique, et s’il peut se dire, le silence ne peut guère se réaliser autrement que par de courtes pauses qui appellent une nouvelle parole. L’écrin poétique de la prière doit donc être autre, dans le cadre du carmen deductum/perpetuum ovidien, et nous allons à présent observer de quelle manière Ovide insère dans le cours de ses poèmes les énoncés eucologiques.

Formules introductives Notre approche narratologique des invocations ovidiennes s’attachera seulement à leur mode d’insertion dans le cours global du récit - et non à leur formulation intrinsèque, qui sera étudiée ultérieurement. Comment les dialogues avec les dieux sont-ils mis en scène par Ovide ? Sont-ils des irruptions de la parole dans l’espace de la narration ou sont-ils préparés et intégrés à des scènes construites ? Quels mots Ovide utilise-t-il pour les encadrer ? Nous tenterons de répondre à ces questions en nous fondant sur l’observation d’une sélection d’invocations directes. Les tableaux suivants présentent les encadrements identifiés dans les Fastes.

I, 278 III, 171 IV, 195

Ø Ø Ø

(suite du dialogue)

I, 276 III, 166 IV, 192

V, 637 V, 695 V, 698 VI, 801 IV, 2 I, 93 IV, 15

me fugit : ex aliquo est inuenienda deo

Ø

Ø Ø Ø Ø

V, 634

V, 692 V, 696 VI, 798 IV, 1 I, 64 IV, 6

1.

IV, 249 V, 193 V, 449

Le signe Æ signifie qu’aucun vers significatif n’encadre le passage.

inque meo primus carmine Ianus habet Ø

Ø

IV, 246 V, 183 V, 444

« … » tunc sic ego nostra resolui   uoce mea uoces eliciente dei

Ø

I, 161 I, 173 I, 177 I, 259

uerbaque sum spectans pauca locutus humum mox ego : « … »

I, 148 I, 171 I, 174 I, 255-256

Ø

ad uatem uoltus rettulit illa suos (arrivée du dieu)

Ø

nec mora, quaesiti reddita causa mihi est Sic ego. Sic posita dixit mihi casside Mauors Sic ego. Sic Erato (mensis Cythereius illi)   Cessit, quod teneri nomen amoris habet.) réponse directe Sic ego. Sic nostris respondit diua rogatis  uenit adoratus Caducifer. Accipe causam   hominis : ex ipso est cognita causa deo. Thybris harundiferum medio caput extulit alueo,   raucaque dimouit talibus ora sonis (réponse immédiate) causam facundo reddidit ore deus

Ø

quaesieram multis : non multis ille moratus (réponse directe) tum deus incumbens baculo quod dextra gerebat

vers de clôture Citation

vers introducteur Citation

Tableau 1. Encadrement des invocations directes adressées par le narrateur1 des Fastes 214 Troisième Partie : La mise en mots de la prière

IV, 910 IV, 524 V, 680 IV, 892 V, 572 VI, 159 VI, 449 IV, 826

I, 508 IV, 745-746

II, 468 III, 309 IV, 319 VI, 516 VI, 541 III, 333 IV, 575-576

(mouvement) tum Numa : « … » (figit) et hos dedit crine iacente sonos quos ignorat adhuc, inuocat illa deos Ø ut rediit animus : « da certa piamina » dixit errat et in caelo liquidique inmunia ponti   adloquitur gelido proxima signa polo Ø adde dapes mulctramque suas, dapibusque resectis   siluicolam tepido lacte precare Palem edidit haec flamen uerba, Quirine, tuus equibus haec iusti uerba fuere senis et peragit solita fallere uoce preces induit Aeneas adloquiturque Iouem hinc coniuratis, talia dicta dedit Ø haurit aquas tollensque manus, « ignoscite », dixit uox fuit haec regis : « … » Talibus ut dictis nostros descendit in annos His dea placanca est dixerat : a dextra uillis mantele solutis cui dea : … talia Mercurius poscentem ridet ab alto uota ualent meliora. (Cadit Mezentius ingens) uouerat et fuso laetus ab hoste redit Sic ubi libauit, prosecta sub aethere ponit dixit et irrupit. Factum dea rapta probauit ille precabatur, tonitru dedit omina laeuo   Iuppiter et laeuo fulmina missa polo

IV, 933 IV, 527 V, 691 IV, 895 V, 578 VI, 163 VI, 453 IV, 833

nec mora prosiluit. Pisces subiere gemelli Sic Numa. Sic quatiens cornua Faustus ait dixit et exiguo funem conamine traxit clamor Auentini saxa propinqua ferit adnuerat, promissa fides… adnuit oranti… dixerat. Huic Helice talia uerba refert

I, 537 IV, 777

II, 471 III, 312 IV, 325 VI, 518 VI, 549 III, 337 IV, 580

Tableau 2. Encadrement des invocations adressées par des personnages des Fastes

 Chapitre Premier : La mise en scène du récit 215

216

Troisième Partie : La mise en mots de la prière

Il apparaît tout d’abord une nette différence entre l’encadrement des invocations assumées par le narrateur et celui des prières des personnages. Le narrateur des Fastes interrompt le plus souvent brutalement sa narration pour apostropher un dieu. Nous avons vu que ce narrateur-poète n’introduisait guère son corps dans les Fastes, hors de quelques scènes particulières ; il n’est donc pas un narrateur-personnage, mais une parole active, et comme désincarnée, et n’a d’autre ressource que d’apostropher directement les dieux lorsqu’il souhaite intégrer leur parole à son récit. Sur 19 invocations dialoguées réunissant le narrateur et un dieu, seules deux sont intégralement encadrées (par une phrase d’introduction et une phrase de clôture marquant la fin du dialogue), soit 10,5 %. Un de ces deux dialogues est la longue discussion qui ouvre les Fastes, au cours de laquelle le narrateur pose de multiples questions à Janus. Nous avons déjà remarqué que le narrateur y notait une de ses réactions physiques - ce qui est là encore exceptionnel dans notre corpus, si l’on excepte le cas très particulier des Amours. Le narrateur intègre donc de manière très fluide les invocations à la trame même du récit. Les invocations des personnages sont quant à elles bien mieux encadrées, étant donné que 81,2 % d’entre elles sont introduites et terminées par une phrase ou une expression spécifique. Ovide utilise ici des procédés de type narratif permettant à son lecteur de réattribuer aisément la parole à son émetteur et de comprendre la structure du dialogue. Le rôle de ces expressions introductives ou conclusives est en effet de délimiter le discours et de le faire identifier. On peut donc s’attendre à y voir bien représenté le champ lexical de la parole. Les termes relevant de ce champ lexical ont été soulignés dans les deux tableaux précédents. Leur représentation est encore plus imposante dans les Métamorphoses, comme l’atteste le tableau suivant.



Chapitre Premier : La mise en scène du récit 217

Tableau 3. Introduction des invocations des Métamorphoses2 M1, M13, M17, M19, M33, M41bis, M85, M86, M88, M90, M93 Inquit En fin de premier vers : M51, M59, M65, M73 En cours de premier vers : M4, M5, M18, M56, M63, Au deuxième vers : M87 dixi M14, M36, M45, M46bis, M47, M52, M54 En milieu de vers : dixit M37, M76, M81, M91 En fin de vers, ou dans la clausule : M10, M12, M16, M20, M25, M26bis, M28, M32, M36, M58, M83 Dixerat M80, M84 Dicens M15 Dixere M78 dixerunt M1 dictum, dicta, dictis Talia dicta refert M44 Talia dicta auditaque uerba notaui M79 Compellat dictis M74 Dicebat M92 Avant le discours : M21, M29, M57, M64, M70 En incise au vers 1 : M9, M11, M26, M42, Ait M50, M71, M72 En incise au vers 2 : M62 En incise au dernier vers : M50 Verbes de la famille de dicere

Aucune

11 4 5

10

1 7 4 11

2 1 1 1 3

31

1 5 7 14 1 1

Varia : neque reuocantis ad haec uerba resistit M3 ; ille refert M6 ; locuta est M7 ; clamat M8 ; blandita est M22 ; subiungit carmina percussis neruis M27 ; precando bracchia sustulerat M35bis ; affata M36bis ; commendat M38 ; cum sic Aesonides M41 ; canunt M43 ; haec se paca loqui M48 ; respondit M49 ; iudicium aperit M53 ; est resecuta rogantem M55bis ; est tales complexa preces M61 ; has addere uoces M77 2. La numérotation des extraits (M1 à M93) correspond à celle utilisée dans le tableau général de notre corpus, présenté en annexe 1.

218

Troisième Partie : La mise en mots de la prière

Formules de clôture Deux procédés stylistiques récurrents liés à la prise de parole peuvent être relevés comme formules de clôture du discours : l’isolement en ouverture du vers qui suit l’invocation d’une forme conjuguée du verbe dicere et, plus spécifiquement pour les Fastes, la structuration du vers par une répétition symétrique de la formule sic…sic…

Aucun

dicere

moueor*

Autre forme

M8, M9, M10, M12, M17, M19, M27, M33, M41bis, M46, M51, M55, M73, M80, M87, M88, M90, M93, M56, M57, M59, M61, M63, M64, M70, M73, M89 En tête de vers : M18, M48, M49, M85 Au milieu d’un vers dixit (césure bucolique) : M28, M44 Toujours en TV : dixerat M6, M7, M13, M35bis, M83 M4 post talia matris dicta dictis, dicta M26bis dictis et tempore motae M21 finis erat dictis M2 mota dea est M30 mota est dea… que mota M41 mota est pietate rogantis M62 motaque sum motus M21 (TV) M57 talia dicentem neruosque ad uerba mouentem M92 talia uerba iacit superosque mouet

27

6

5

14

3

4

1 2

5



Chapitre Premier : La mise en scène du récit 219

Verbes en P1

Talia

Autre

Ait Adnuit

M5 emicat M38 mandabat M42 aderat M54 desierat M55bis credidit M58 sensit M84 assensere dei M4 post talia matris dicta M26bis talia dicenti M57 talia dicentem neruosque ad uerba mouentem M78 Talibus dictis M79 talia nequiquam questus M81 talia uerba refert M92 talia uerba iacit superosque mouent M3, plura locuturum ; M4 uix prece finita ; M20, M86, M32, M36, M37, M52, dum loquor ; M33, M71, sic fatur…que ; M76 truculenta loquentem falsaque iurantem Dyctis ait M14 M22, M50, M64, M72, M74, M77, M84, M91

7

7

1 8

* Tout en n’étant pas à proprement parler un verbe déclaratif, moueor en prend les emplois dans ces clôtures de prières. Le sentiment intime du destinataire fonctionne comme un signe, et semble se révéler à celui qui a prononcé la prière.

Les temps du passé formés sur le radical du parfait ont un aspect accompli qui peut faire comprendre à l’auditeur ou au lecteur que là s’achève une parole et que le fil de la narration reprend. Ovide utilise donc des verbes au parfait et au plus-que-parfait liés par leur sens au champ lexical du langage pour signaler le silence d’un personnage après qu’il a parlé. Ces verbes tenaient donc lieu

220

Troisième Partie : La mise en mots de la prière

en quelque sorte de signes diacritiques et remplaçaient les guillemets que les éditeurs modernes introduisent dans les textes antiques. On trouve ainsi dans les Fastes, autour des prières que nous observons : Fastes IV, 325 Dixit et exiguo funem conamine traxit

Fastes VI, 453 Dixit et irrupit. Factum dea rapta probauit

Fastes IV, 580 Dixerat. Huic Helice talia uerba refert

Fastes IV, 933 Dixerat : a dextra uillis mantele solutis

Relevé auquel on peut ajouter : Métamorphoses IV, 162 Dixit et aptato pectus mucrone sub imum

Métamorphoses VII, 857 Dixit et errorem tum denique nominis esse

Métamorphoses VIII, 101 Dixit et ut leges captis iustissimus auctor

Métamorphoses XIV, 733 Dixit, et ad postes ornatos saepe coronis

Métamorphoses II, 40 Dixerat ; at genitor circum caput omnes micantes

Métamorphoses II, 301 Dixerat haec Tellus ; neque enim tolerare uaporem



Chapitre Premier : La mise en scène du récit 221

Métamorphoses III, 406 Dixerat ; adsensit precibus Rhamnusia iustis

Métamorphoses VI, 263 Dixerat ignarus non omnes esse rogandos

Métamorphoses XIV, 377 Dixerat ; ille ferox ipsamque precesque relinquit

Métamorphoses V, 379 Iunge deam patruo. » Dixit Venus ; ille pharetram

Le relevé complémentaire placé en note suffit à montrer que cette présence verbale en tête de vers n’est pas spécifique à la parole précative, mais qu’elle se retrouve dans de très nombreux contextes de prise de parole3. Il en est de même de la formule elliptique sic…sic…qui est utilisée pour redistribuer la parole4. On en trouve 5 occurrences après les invocations dialoguées de notre corpus, ce qui promeut cette tournure au rang de stylème signifiant. Elle permet d’affronter dans le même vers les deux interlocuteurs du dialogue et constitue une charnière légère et maniable. Sur les 5 occurrences de cette tournure, 4 apparaissent après une remarque du narrateur, et une seule vient

3. L’usage métrique de ces formes n’est pas non plus spécifique aux contextes de prière. Par exemple, sur les 12 occurrences de la forme dixerat dans les Fastes, 10 apparaissent à l’initiale d’un vers (et de la phrase en même temps), parmi lesquelles les deux occurrences de notre corpus. De la même manière la forme dixit apparaît à 64 reprises. 13 de ces occurrences sont à l’initale d’un vers. Une fois encore ces tournures stéréotypées rappellent les vers-types de l’épopée. On retrouve d’ailleurs le procédé chez Virgile, qui place systématiquement dixerat en tête de vers-tête de phrase dans les 25 emplois qu’il fait de la forme dans l’Enéide. Outre sa place fixe dans le vers, la forme verbale est suivie de schémas verbaux récurrents : dixerat Aeneas (3/25) ; dixerat et (8/25 – à comparer à Métamorphoses IV, 162, VII, 857, VIII, 101 et XIV, 733) ; dixerat at ou atqu(e) (3/25 – à comparer avec Métamorphoses II, 40) ; dixerat haec (2/25 – à comparer avec Métamorphoses II, 301) ; dixerat ille (6/25 – à comparer avec Métamorphoses XIV, 377). 4. Une nuance doit être apportée cependant. Si la tournure présentant une forme passée de dicere est bien attestée dans les autres œuvres d’Ovide et chez Virgile, il n’en va pas de même de la double formule sic…sic… qui n’apparaît aucune fois au cours des trois premiers chants de l’Enéide ni des livres VI et VII des Métamorphoses. Cette tournure n’est donc pas si fréquente que sa forme pourrait le laisser penser.

222

Troisième Partie : La mise en mots de la prière

clore l’intervention d’un personnage5. Si l’attaque du vers est toujours identique, son développement accueille des variations, qui recouvrent cependant des jeux de mise en valeur récurrents. Voici les cinq vers quasi formulaires : Fastes III, 171 sīc ĕgŏ. Sīc pŏsĭtā //Pdīxīt mĭhĭ cāssĭdĕ Māuōrs

Fastes IV, 195 sīc ĕgŏ. Sīc Ĕrătō //P(mēnsīs Cўthĕrēĭŭs īllī […])

Fastes V, 193 sīc ĕgŏ. Sīc nōstrīs //Prēspōndīt dīuă rŏgātīs

Fastes V, 801 sīc ĕgŏ. Sīc Clīō : //P « … »

Fastes III, 312 sīc Nŭmă ; sīc quătĭēns //Pcōrnŭă Fāustŭs ăīt

Une remarque liminaire s’impose : seul le vers faisant apparaître le personnage de Numa a une structure de pentamètre, alors que les quatre autres sont de forme hexamétrique. J. Dangel se plaisait à analyser l’hexamètre comme le lieu de la raison et le pentamètre comme celui de l’émotion. Si l’on accepte cette réception, il n’est guère étonnant de voir l’hexamètre utilisé comme espace d’information pragmatique sur la transmission de la parole. L’attaque des cinq vers est identique. Ils s’ouvrent chacun sur un monosyllabe long accentué et un pyrrhique qui composent ensemble une formule synthétique et frappante apte à ponctuer un discours6. Cette phrase brève et 5. Encore ce personnage est-il Numa Pompilius, qui occupe une place toute particulière dans les Fastes, en raison peut-être de son rôle fondateur pour la religion romaine. 6. On reconnaît une tournure similaire dans :.    Fastes I, 171 mōx ĕgŏ ….    Fastes I, 255 prēssĕrăt ōră dĕūs. //P Tūnc sīc ĕgŏ nōstră rĕsōluī.    Fastes I, 177 tūm dĕŭs īncūmbēns //P băcŭlō quōd dēxtră gĕrēbāt. Ce n’est qu’une variation métrique sur la structure que nous avons déjà identifiée : dīxĭt ĕt suivie d’un mot à voyelle initiale, mais une variation notable en raison du déplacement de l’intermot et de son changement de nature (intermot central / intermot trochaïque). Ces tournures quasi interchangeables permettent un enchaînement fluide et stéréotypé, proche des vers-types de l’écriture épique.



Chapitre Premier : La mise en scène du récit 223

elliptique occupe le premier pied du vers, qu’il soit pentamètre ou hexamètre, et ménage une pause dans l’espace de laquelle peut s’introduire le second personnage du dialogue. Ovide joue alors des jalons métriques du vers pour mettre en valeur le second pôle de parole. Soit il insiste sur l’acte de parole en plaçant le verbe qui en porte le sens juste après la césure penthémimère : Fastes III, 171 sīc ĕgŏ. Sīc pŏsĭtā //Pdīxīt mĭhĭ cāssĭdĕ Māuōrs

Fastes V, 193 sīc ĕgŏ. Sīc nōstrīs //Prēspōndīt dīuă rŏgātīs

soit il donne du relief au nom de son interlocuteur en l’antéposant par rapport à la penthémimère (Sīc Ĕrătō //P ; Sīc Clīō : //P), ou encore en lui donnant la première place de la clausule, place propice aux noms propres dans la poésie dactylique (cōrnŭă Fāustŭs ăīt ; cāssĭdĕ Māuōrs)7. Par ces procédés, Ovide encadre le discours précatif et sait aussi mettre en valeur les divers intervenants, comme lorsqu’il laisse glisser vers lui le regard de Vénus : Fastes IV, 2   Ād uātēm uōltūs //P rēttŭlĭt īllă sŭōs

La gravité du devin et de sa tâche est inscrite dans les longues du premier hémistiche, qui est assourdi pas l’allitération en u dans laquelle le nom de la déesse trouve un écho. Mais l’éclaircie survient avec le mouvement de la Mère d’Amour et l’allitération en liquide vient nimber de douceur la fin du vers. Toute la tendresse d’Ovide pour cette figure divine apparaît dans ce vers, qui est comme encadré par le visage de Vénus (uōltūs //P rēttŭlĭt īllă sŭōs), et justifie la grâce particulière dont la déesse illumine le poète. Une dernière formule de clôture nous semble remarquable : l’emploi de la forme adnuit en tête du vers qui suit la prière. Cette forme verbale, que l’on 7. Ce rejet du nom propre en fin de vers est fréquent chez Ovide, comme chez de nombreux autres poètes, la fin du vers étant l’aboutissement du souffle, de l’élan de la phrase ; elle est donc une place de choix avant tout autre. Sur les 500 premiers vers du dernier livre des Fastes, 38 se terminent sur un nom propre (7,6 %), 65 se terminent sur un mot court précédé d’un nom propre (7 %) et 3 finissent sur une succession de deux noms propres. Le phénomène n’est donc pas rare.

224

Troisième Partie : La mise en mots de la prière

retrouve une fois dans notre corpus des Fastes et 8 fois dans nos extraits des Métamorphoses, semble appartenir au langage poétique. En effet, alors que Tite-Live ou Tacite n’en offrent chacun qu’un emploi unique, que Ciceron l’emploie 3 fois et qu’aucun autre auteur classique n’en use, la forme se trouve 5 fois chez Virgile, dans l’Enéide, 2 fois chez Tibulle et 18 fois chez Ovide, qui est son plus fervent partisan. Des 10 occurrences des Métamorphoses, 8 appartiennent à notre corpus. Les Fastes offrent quant à eux 6 occurrences, les Amours une seule, comme les Héroïdes. Rien chez Catulle, Properce ou Horace. Là encore Ovide use d’une récurrence métrique et verbale étonnante, comme si les mots recevaient dans le vers une place privilégiée, propre, apte à les mettre en valeur et à les accueillir mieux que tout autre : 15 occurrences sur 18 surviennent en tête de vers, selon l’usage virgilien qui plaçait systématiquement (5/5) la forme à l’initiale d’un vers. La destination de ce geste est souvent précisée au datif : ‘adnuit his’ Métamorphoses VIII, 780 et XV 683 ; ‘adnuit precibus’ Métamorphoses VIII, 351 ; ‘adnuit optatis’ Métamorphoses XI, 104 ; ‘adnuit oranti’ Métamorphoses IV, 539, Fastes III, 300 et Virgile, Enéide, XI, 797. Ces rapides synthèses mettent en lumière la singularité des actes de parole dans l’œuvre ovidienne, qui sont encadrés par des formulations stéréotypées aptes à leur ouvrir dans l’esprit du lecteur un espace propre, ressortant comme en relief de la narration. Elles soulignent dans le même temps l’absence d’originalité réelle dans l’encadrement des prières en particulier, qui ne se distinguent guère de tout autre insertion de discours direct dans le fil de la narration.

Le monde ovidien : une scénographie verbale rythmée et dynamique Métrique verbale : monosyllabes initiaux, mots pyrrhiques et mots longs Du point de vue mélodique et métrique, les vers précatifs se distinguentils ? Quelques traits stylistiques particuliers sont propres, par leur récurrence et leur expressivité, à donner une bonne idée du style qu’Ovide met en œuvre dans ses prières. Une structure verbale récurrente dans les prières est l’ouverture d’un vers sur un monosyllabe long que complète immédiatement un mot pyrrhique, l’ensemble formant le dactyle initial que l’on retrouve très majoritairement



Chapitre Premier : La mise en scène du récit 225

en tête des vers latins, et ovidiens tout particulièrement8. Dans notre corpus des Métamorphoses, un vers sur trois environ s’ouvre sur un monosyllabe long. La chance que se rencontre la structure monosyllabe + pyrrhique est donc importante, mais il ne faut pas oublier que de nombreux autres schémas seraient théoriquement possibles : on pourrait ainsi trouver, après le monosyllabe initial, un mot anapestique, un autre monosyllabe, un mot spondaïque, un molosse, un péon 3ème (uu-u), un dispondée ou encore une forme uu-uu. Or il apparaît qu’Ovide use avec prédilection des mots pyrrhiques, dont J. Dangel rappelle la « portée expressive », car « ces variantes quantitatives allégées d’un monosyllabe long confèrent un élan à la diction. »9 On trouve ainsi, dans notre corpus10 : Métamorphoses I, 379 dic Themi ; I, 513 non ego ; I, 516 et Claros ; I, 523 et mihi ; I, 545 fer pater ; I, 547 quae facit ; I, 548 uix prece ; I, 768 per iubar ; I, 772 se mihi ; I, 775 si modo ; II, 279 si placet ; II, 290 sed tamen ; II, 298 si freta ; II, 299 in chaos ; III, 289 cui deus ; III, 294 te solet ; III, 295 da mihi ; III, 405 si amet ; III 614 his quoque ; IV, 159 nunc tegis ; nec tibi ; IV, 202 nec teget ; IV, 205 non tamen ; IV, 371 tu puer ; IV, 537 si tamen ; IV, 385 et pater ; IV, 769 qui simul ; IV, 592 et color ; IV, 593 et color ; IV, 594 me quoque ; V, 373 et tamen ; VI, 285 quam tibi ; VI, 560 et date ; VI 115 te quoque ; VII, 18 si potes ; VII, 19 sed trahit ; VII, 23 haec quoque ; VII, 26 quem nisi ; VII, 27 et genus ; VII, 32 hoc ego ; VII, 39 atque ope ; VII, 42 si facer ; VII, 44 non ea ; VII, 46 et dabit ; VII, 49 te face ; VII, 51 erg(o) ego ; VII, 58 hic quoque ; VII, 59 qu(em) ego ; VII, 167 si tamen ; VII, 210 uos mihi ; VII, 215 nunc opus ; VII 596 ipse ego ; VII, 618 aut mihi ; VII, 627 tu mihi ; VIII, 100 quis meus ; VIII, 351 da mihi ; VIII, 596 huc ades ; VIII, 597 huic ego ; VIII, 598 si pater ; IX, 774 quae colis ; IX, 775 fer precor ; IX, 776 te deae ; IX, 779 quod uidet ; X, 19 si licet ; X, 29 uos quoque ; X, 30 per Chaos ; XI 439 quod tua ; XI, 446 me quoque ; XI 669 surg(e) age ; XII, 120 atqu(e) ait ; XII, 586 o mihi ; XI, 592 cum tamen ; XII 594 det mihi ; XII, 596 non datur ; XIII, 587 nam mihi ; XIII, 589 des mihi ; XIII, 590 sit tamen ; XIII, 593 nunc status ; XIII, 597 da precor ; XIII, 808 at bene ; XIII, 810 sunt mihi ; XIII, 819 nec tibi ; XIII, 820 hoc pecus ; XIII, 824 nil mihi ; XIII, 828 sunt quoque ; XIII, 829 lac mihi ; XIII, 831 nec tibi ; XIII, 838 iam modo ; XIII, 840 cert(e) ego ; XIII, 846 nec mea ; XIII, 853 sol uidet ; XIII, 855 hunc tibi ; XIII, 859 atqu(e) ego ; XIV, 373 quae mea ; XIV, 374 quae facit ; XIV, 13 tu potes ; XIV, 15 quam mihi ; XIV, 763, sic tibi ; XIV, 729 si tamen ; 8. L. De Neubourg (619) donne ainsi une prévalence de 81% dans les Métamorphoses pour un dactyle à l’initiale de vers, alors qu’elle est de 60% dans l’Enéide, et d’environ 54% dans les œuvres horatiennes. 9. J. Dangel, « L’hexamètre latin, une stylistique », (606), p. 73. 10. Nous ne donnons que les deux mots en tête de vers.

226

Troisième Partie : La mise en mots de la prière XV, 40 fer precor ; XV, 61 et Samon ; XV, 62 sponte erat ; XV, 65 cumqu(e) anim(o) ; XV, 69 quid deus ; XV, 861 di precor ; XV, 869 qua caput ; XV, 677 et deux ; XV, 769 quam modo ; XV, 770 nunc male ; XV, 776 non sinit.

Les mots pyrrhiques se font aussi une place au milieu du vers, contre les césures sur lesquelles ils s’appuient pour créer une sorte de rebond. Comme le montre le relevé suivant, qui n’est qu’une illustration et non un relevé systématique et exhaustif, la césure privilégiée est l’hephtémimère : II, 279 /h tua ; II, 701 /h tibi ; II, 293 /h mea ; III, 295 /h deus ; III, 291 /h deus ; III, 689 /h deus ; IV, 19 /p tibi ; IV, 203 /p facit ; V, 216 /h tua ; V, 220 /h tua ; V, 222 /h tua ; V, 345 /h dea ; IV, 383 /h date ; VI, 30 /h tibi ; VI, 327 /h mihi ; VI, 328 /h ego ; VII, 19 /p noua ; VII, 28 /h mea ; VII, 38 /h ego ; VII, 44 /h ea ; VII, 49 /h sibi ; VII, 617 /h pudet ; VII, 618 /h quoque ; VII, 621 /h mihi ; VII, 627 /h pater ; IX, 776 /h tuaqu(e) ; IX, 778 /h tua ; X, 26 /h deus ; X, 274 /h dare ; X, 276 /h mea ; XII, 201 /h facit ; XIII, 823 /h tibi ; XIII, 880 /h mihi ; XIII, 841 /h mea ; XIII, 844 coma ; XIII, 849, /h sua ; XIII, 851 /h mihi ; XIV, 18 /p pudor ; XIV, 372 /h tua ; XIV, 374 tibi /h dea ; XIV, 732 /h date ; XIV, 738 /p facit(e) ; XIV, 737 /p nihil ; XV, 767 /h mihi ; XV, 679 /h tua.

Au livre XIII, Polyphème, au lieu d’utiliser le pyrrhique dynamique pour les pronoms personnels, choisit systématiquement un contre-rythme iambique, dans une structure ternaire qui évoque le trio tragique qu’il forme avec Acis et Galatée. Et le uersus aureus du vers 861, associé à l’isolement du pronom personnel de première personne renvoyant à Polyphème avant le couple de pronoms désignant les amants qui le narguent, souligne la victoire sentimentale d’Acis, qui causera sa mort : Métamorphoses XIII, 861-863 Acin amas praefersque mĕīs complexibus Acin ? Ille tamen placeatque sĭbī, placeatque licebit, Quod nollem, Galatea, tĭbī : modo copia detur C’est Acis que tu aimes, et à mes embrassements tu préfères Acis ? J’admets toutefois qu’il se complaise à lui-même et qu’il te plaise aussi à toi, Galatée, quoique cela me déplaise.

La grande quantité de pyrrhiques que comptent les distiques élégiaques semble liée à l’écriture même d’Ovide, et ne semble pas recevoir de coloration particulière dans les prières. Cela vaut pour les Amours et les autres œuvres érotiques mais aussi pour les Fastes.



Chapitre Premier : La mise en scène du récit 227

Ce qui est toutefois notable dans l’usage ovidien, tel qu’il apparaît dans notre corpus, c’est la fixité colométrique des hémistiches commençant par la suite monosyllabe-pyrrhique. Par un effet de rythme marquant, Ovide leur adjoint très fréquemment un mot long, soit un molosse soit un mot choriambique. Cette structure rythmique est une constante de l’écriture ovidienne puisque sur les 530 mots molosses des chants I, VI et XII des Métamorphoses, 52,26 % sont à cette place du vers (BbC)11 alors que Virgile, comme Horace, n’en placent là qu’un tiers. Quelques exemples illustreront cet usage : Métamorphoses XV, 769 Quām mŏdŏ Tydīdaē Calydonia uulneret hasta

Métamorphoses XV, 770 Nūnc mălĕ dēfēnsaē confundant moeniae Troiae

Métamorphoses XV, 861 Dī, prĕcŏr, Aēnēaē comites quibus ensis et ignis

Métamorphoses IV, 205 Nēc tĕnĕt Aēnēaē genetrix pulcherrima Circes

Métamorphoses I, 548 Vīx prĕcĕ fīnītā torpor grauis occupat artus

Métamorphoses III, 294 Tē sŏlĕt āmplēctī Veneris cum foedus initis

Métamorphoses IV, 18 Tū pŭĕr aētērnūs tu formosissimus alto

Métamorphoses III, 723 Nōn hăbĕt īnfēlīx quae matri bracchia tendat

11. Nous reprenons ici le schéma de découpage de l’hexamètre dactylique qu’utilisent De Neubourg (619) ou Lucot (677).

228

Troisième Partie : La mise en mots de la prière

Métamorphoses IV, 159 Nūnc tĕgĭs ūnīūs mox es tectura duorum

Métamorphoses V, 622 Mē sŭpĕr īniēcīt. Lustrat caligine tectam

Métamorphoses IV, 594 Mē quŏquĕ caēlēstēs in eandem uertitis anguem

Métamorphoses VI, 115 Tē quŏquĕ mūtātūm toruo Neptune iuuenco

Métamorphoses VI, 160 Et dătĕ Lātōnaē Latonigenisque duobus

Métamorphoses VII, 49 Tē făcĕ sōlēmnī iunget sibi perque Pelasgas

Métamorphoses XIII, 593 Nūnc stătŭ Aūrōraē meritos ut poscat honores

Dans les environs de ce dernier vers apparaît un autre schéma métrique fréquent chez Ovide, la succession monosyllabe – mot pyrrhique – mot choriambique à l’initiale d’un vers : dēs mĭhĭ sācrĭfĭcōs, si tamen adspicias (v. 589 et 590), que l’on retrouve aussi, par exemple, en Métamorphoses XIII, 819 nēc tĭbĭ cāstănĕaē me coniuge nec tibi deerunt, v. 825 nīl tĭbĭ crēdĭdĕrīs : praesens potes ipsa uidere, v. 831 nēc tĭbĭ dēlĭcĭaē faciles uulgataque tantum. Mais il ne semble pas que cet usage soit propre aux prières. Il nous apparaît plutôt comme une constante rythmique de l’écriture ovidienne, liée à un goût musical pour le contre-rythme, mais non à un contenu thématique particulier. Ovide compose en effet ses vers, d’une manière générale, comme des phrases musicales et il ne faut pas manquer de lire ses poèmes comme des partitions. Un des éléments rythmiques les plus importants dans l’écriture des prières est la répartition des partages trochaïques.



Chapitre Premier : La mise en scène du récit 229

Les partages trochaïques Le «  partage trochaïque des brèves est porteur d’un effet d’accélération […] et de dramatisation »12. Cet intermot est opportun dans les prières car il fournit un élément supplémentaire d’intensité, particulièrement lorsqu’il se démultiplie dans un vers13. WF Jakson Knight affirme ainsi que « the energy of Ovidian hexameters can be traced, at least in part, to Ovid’s readiness to place the breaks between words after the third or second short syllable of a dactyl »14. J. Hellegouarc’h15 indique que le partage trochaïque est fréquent au 5ème pied de l’hexamètre, mais se fait plus rare aux autres, et notamment au 4ème. L’étude qu’il mena sur « les aspects stylistiques de l’expression de la douleur et de la tristesse dans les poèmes ovidiens de l’exil », lui permet d’affirmer que souvent chez Ovide la tristesse et le désespoir s’expriment de cette façon. Or nous avons remarqué que souvent les prières des Fastes avaient un ton mélancolique, du moins réservé. Peu d’actions de grâces dans les Fastes, de remerciements enthousiastes pour les dons des dieux ; plus fréquents y sont les cris de désespoir, les appels pathétiques ou les demandes formulées sur le mode de la défense. Les tableaux suivants ont été établis afin d’observer les partages trochaïques ménagés dans les vers des prières des Amours, de l’Art d’Aimer, de l’Ibis, des Fastes, des Métamorphoses. On peut ainsi comparer, à partir de ce seul critère, la structure rythmique de ces extraits avec les chiffres donnés par Gérard pour les 37500 vers latins qu’il a étudiés.

12. J. Dangel, « L’hexamètre latin, une stylistique », (606), p. 73. 13. J. Perret, « Mots et fins de mots trochaïques dans l’hexamètre latin », REL, 32, 1954, p. 183-199. 14. W. F. Jackson Knight (665), Ovid’s Meter and Rhythm, p. 112. 15. J. Hellegouarc’h (647), « Les structures stylistiques de la poésie latine », p. 236.

230

Troisième Partie : La mise en mots de la prière

Partages trochaïques multiples Distiques élégiaques16 HEXAMETRES locus Amours Total % Art d’Aimer Total % Ibis Total %

nombre de vers

vers ayant 1 part. troch.

2 part. troch.

3 part. troch.

0 part. troch.

136

57 41,9

36 26,5

5 3,7

37 27,2

6

3 50

0

1 15

2 30

31

16 51,6

6 19,3

0

8 25,8

PENTAMETRES locus Amours Total % Art d’Aimer Total % Ibis Total %

nombre de vers

vers ayant 1 part. troch.

2 part. troch.

3 part. troch.

0 part. troch.

137

68 49,6

61 44,5

8 5,8

0

8

3 37,5

4 50

1 12,5

0

32

15 46,9

13 40,6

4 12,5

0

16. Il est important de rappeler que nous scandons le pentamètre à la manière moderne (6 pieds isolés) et non en suivant les indications suggérées par Quintilien (Institution Oratoire, livre IX), et exposées par Jacqueline Dangel dans son article « Intertextualité et intergénéricité dans les Héroïdes d’Ovide : la métrique à l’œuvre » (p. 33). Selon cette scansion, le pentamètre ferait apparaître une « ligne dactylo-spondaïque des trois premiers pieds suivie d’un retournement anapestique » = -uu/-uu/-- /uu-/uu-.



Chapitre Premier : La mise en scène du récit 231

partages trochaïques multiples dans les hexamètres du corpus des Fastes

locus* I, 509-536 V, 681-694 I, 675-694 IV, 747-776 IV, 911-932 Vœux Faveur faveur pour œuvre TOTAL %

nombre de vers 14 5 10 15 11 12 38 7 112

vers ayant 1 part. troch.

2 part. troch.

3 part. troch.

0 part. troch.

3 3 4 9 5 4 17 1 46 41,1%

6 1 1 3 2 4 13 5 35 31,2%

1 0 0 1 0 0 2 0 4 3,6%

4 1 5 2 4 4 6 1 27 24,1%

* Voir l’annexe 1 pour l’identification précise des extraits.

partages trochaïques multiples dans les pentamètres du corpus des Fastes

locus I, 509-536 V, 681-694 I, 675-694 IV, 747-776 IV, 911-932 Vœux faveur faveur pour œuvre TOTAL %

nombre de vers 14 5 10 15 11 11 39 8 113

vers ayant 1 part troch

2 part troch

3 part troch

0 part troch

4 3 7 7 5 5 18 2 51 45,1%

8 1 2 6 4 4 16 6 47 41,6%

1 1 0 2 2 1 5 0 12 10,6%

1 0 1 0 0 1 0 0 3 2,6%

232

Troisième Partie : La mise en mots de la prière

Hexamètres seuls Locus Métamor­ phoses TOTAL

vers ayant nom­bre de vers 1 part. troch. 2 part. troch. 3 part. troch. 0 part. troch.

575

nom­bre

%

nom­bre

%

nom­bre

%

nom­bre

%

267

46,4

139

29,4

24

4,2

144

25

Une première remarque s’impose : le rythme de l’hexamètre varie selon qu’il est seul ou qu’il appelle un pentamètre. Et le pentamètre lui-même se révèle être un vers plus haché, plus haletant, moins fluide que l’hexamètre, ce qui peut corroborer sa réception plus émotionnelle. Il faut toutefois faire un sort à part à l’Art d’Aimer, qui se distingue par une rythmique plus contrastée, qui pourrait certainement s’expliquer par sa date, ainsi que par sa spécificité générique. Comparaison avec un groupe témoin : Fastes VI partages trochaïques multiples dans les hexamètres du groupe témoin (Fastes)

locus VI, 1-22 VI, 23-46 VI, 47-70 VI, 71-94 VI, 95-115 VI, 116-138 VI, 139-162 VI, 163-186 VI, 187-210 VI, 211-231 VI, 232-250 VI, 251-274 VI, 275-300 TOTAL %

Nombre de vers 11 12 12 12 10 12 12 12 12 10 10 12 13 150

vers ayant 1 part. troch.

2 part. troch.

3 part. troch.

0 part. troch.

6 7 6 7 5 9 3 8 7 4 4 5 8 71 52,7%

3 5 5 4 4 2 7 4 4 5 4 7 4 58 38,7%

0 0 1 1 1 1 2 0 1 1 2 0 1 11 7,3%

2 0 0 0 0 0 0 0 0 0 0 0 0 2 1,3%



Chapitre Premier : La mise en scène du récit 233

partages trochaïques multiples dans les pentamètres du groupe témoin (Fastes)

locus VI, 1-22 VI, 23-46 VI, 47-70 VI, 71-94 VI, 95-115 VI, 116-138 VI, 139-162 VI, 163-186 VI, 187-210 VI, 211-231 VI, 232-250 VI, 251-274 VI, 275-300 TOTAL %

nombre de vers 11 12 12 12 11 11 12 12 12 11 9 12 13 150 100%

vers ayant 1 part. troch.

2 part. troch.

3 part. troch.

0 part. troch.

6 9 4 6 7 2 9 5 6 6 3 5 8 68 50,7%

2 2 3 4 3 4 1 4 2 1 3 5 4 38 25,3%

2 0 0 0 1 1 1 1 0 0 0 0 0 6 4%

1 1 5 2 0 4 1 2 4 4 3 2 1 30 20%

La mise en regard des tableaux portant sur les Fastes peut arrêter l’attention. Qu’en ressort-il ? Une sorte d’inversion rythmique, comme si, dans la prière, les modulations métriques s’effectuaient en contre-point par rapport au rythme habituel du vers ovidien. Alors que dans les énoncés précatifs, les hexamètres sont plus fluides que les pentamètres, dont la structure mélodique est plus fragmentée (24-25% de vers sans partage trochaïque), le livre VI des Fastes, qui sert de témoin, fait apparaître une autre dynamique du vers : ce sont alors les hexamètres qui s’accélèrent et se déstructurent (98,7% ont au moins un partage trochaïque), tandis que les pentamètres s’apaisent et viennent achever le mouvement mélodique avec une plus grande concordance de la métrique verbale (20% des vers sans partage trochaïque). L’énoncé précatif apparaît donc bien comme foncièrement différent du corps du poème sur le plan rythmique. Quel que soit le sens que l’on peut donner à la présence dans un vers de partages trochaïques, dont certains sont imposés par des lois métriques tandis que d’autres sont l’effet de la liberté du poète, on ne peut pas ne pas remarquer l’inversion en miroir des rythmes du groupe témoin et du corpus de prières. Cette inversion est ryhtmique, et donc musicale. La

234

Troisième Partie : La mise en mots de la prière

musique elle-même marque ainsi, hors même de tout contenu sémantique, la différence entre une prière et les autres types d’énoncés. Elle fait ressortir les prières et les distingue. Or la musique est par soi-même un langage signifiant. On peut penser ici aux recherches pythagoriciennes sur e rythme, les nombres et la musique comme expression de l’harmonie cosmique et en même temps moyen d’accès, pour qui en maîtrise les lois, au sens qui structure et justifie l’univers. C’est ce qui explique, selon P. Boyancé17, la primauté, par certains aspects étonnante, de la musique dans la paidéia platonicienne : « La musique est à ses yeux quelque chose de divin, un don des Dieux »18. Plus récemment, Maxence Caron a montré la profondeur des conceptions selon lesquelles la musique peut être considérée comme le parachèvement quintessencié de l’activité philosophique vue comme la recherche de la Vérité, c’est-à-dire de la restauration en l’âme et l’esprit de l’homme de l’harmonie avec le divin19. Or la poésie est l’exquise musique, celle qui unit rythme, mélodie et logos. Ajoutons quelques précisions, sur deux œuvres centrales et quasi contemporaines. Agencement métrique : place des partages trochaïques dans les vers Métamorphoses nombre de vers TOTAL % des vers

575

Emplacement du partage trochaïque P1

P2

P3

P4

P5

150

99

73

42

252

7,3

43,8

26,3 17,2 12,7

17. P. Boyancé (302), Le culte des Muses, p. 170sqq. 18. ibid. p. 172. 19. M. Caron, Pages, Séguier, Paris, 2009.

TOTAL

614

2 3 part. part. 139

24

24,2

4,2

9 7 2 2 0 2 1 1   9 3 6 20 7 13 41

1

2 1 1 1 1 0 1 1   2 0 2 7 2 5 13

2

1 1 0 0 0 0 0 0   2 0 2 14 5 9 17

3

prières*

12 5 7 2 2 0 1 1   4 1 3 24 9 15 43

4 5 1 4 0 0 0 2 2   6 1 5 15 5 10 28

5 6 2 4 4 3 1 1 1   3 1 2 14 5 9 28

vœux 28 18 10 7 4 3 3 3   22 8 14 54 16 38 114

faveur 8 6 2 2 0 2 1 1   2 0 2 13 5 8 26

faveur pour son œuvre 71     18     10     50     161     310

Total   41     10     10     14     54   129

hexa

Total     30     8           36     107 181

penta

Total 31,50%     8,00%     4,40%     22,20%     71,60%      

Total   36,70%     8,90%     8,90%     12,50%     48,20%    

Hexa

%     26,50%     7,10%           31,90%     94,70%  

Penta

* Nous reprenons ici les 5 prières des tableaux précédents, à savoir Fastes I 509-536, V 681-694, I 675-694, IV 747-776 et IV 911-932. Les indications précises peuvent être trouvées en annexe 1.

P1 total Hexa Penta P2 total Hexa Penta P3 total Hexa Penta P4 total Hexa Penta P5 total Hexa Penta TOTAL

Fastes

 Chapitre Premier : La mise en scène du récit 235

49 66 53 21 191

380

P1 total P2 total P3 total P4 total P5 total

TOTAL

Ennius

260

52 44 33 0 131

Catulle

831

112 132 70 22 495

Lucrèce

807

156 150 114 35 352 884

171 131 111 33 438

Bucoliques Géorgiques

991

134 166 123 52 516

Enéide

relevés de J. Gérard

Agencement métrique : comparaisons avec des groupes témoins

240 177 125 97 469 1108

21,7% 16% 12,3% 8,7% 42,3%

Métamorphoses

1091

170 193 209 41 478

Lucain

6352

1084 1059 838 301 3070

Total

236 Troisième Partie : La mise en mots de la prière

3 1 2 20 8 12

3 2 1 18 9 9

28

TOTAL

30

4 1 3 1 1 0 2 2

23 à 46

4 2 2 2 2 0 1 1

1à 22

29

7 2 5 16 4 12

5 3 2 1 1 0 0 0

47 à 70

32

5 2 3 18 6 12

6 3 3 2 2 0 1 1

71 à 94

locus (chant VI des Fastes)

P1 total Hexa Penta P2 total Hexa Penta P3 total Hexa Penta P4 total Hexa Penta P5 total Hexa Penta

Groupe témoin

32

4 1 3 16 6 10

7 6 1 3 1 2 2 2

95 à 115

29

4 2 2 17 5 12

5 4 1 2 1 1 1 1

37

8 2 6 17 5 12

6 1 5 2 2 0 4 4

32

4 1 3 20 8 12

5 4 1 2 2 0 1 1

28

7 2 5 16 4 12

2 1 1 2 2 0 1 1

25

3 0 3 15 5 10

3 1 2 4 2 2 0 0

27

7 3 4 12 2 10

7 3 4 1 1 0 0 0

34

7 1 6 17 5 12

7 6 1 3 3 0 0 0

35

6 1 5 23 10 13

4 3 1 2 2 0 0 0

116 à 139 à 163 à 187 à 211 à 232 à 251 à 275 à 138 162 186 210 231 250 274 300

Un tableau plus détaillé permettra une appréciation plus fine :

398

225

68

13

27

65

170

77

20

13

22

38

228

148

48

5

27

75,0

22,7

9,0

21,7

51,3

13,3

87,0

14,7

25,3

Hexa penta total hexa

Total Total Total % des vers

98,7

32,0

3,0

18,0

Penta

 Chapitre Premier : La mise en scène du récit 237

238

Troisième Partie : La mise en mots de la prière

Que ressort-il de cette confrontation ? Il apert qu’Ovide a recours au partage trochaique pour structurer ses vers : ainsi découpés, ils sont plus dynamiques, et plus dramatiques à la fois. Mais toutes les œuvres ne reprennent pas les mêmes divisions. Assez étonnamment les Fastes apparaissent comme une œuvre plus sobre que les Métamorphoses, dans lesquelles un plus grand nombre de vers compte deux voire trois intermots trochaïques. Certaines places du vers y sont davantage codées, comme le P5 du pentamètre, ou la P1 spécifiquement pour les vers énoncés dans un environnement eucologique. On peut aussi penser que les partages trochaïques sont pour Ovide des outils d’émotion ou de dramatisation. Les différences entre les œuvres restent subtiles, et nous ne devons peut-être pas chercher à leur donner un sens qui ne serait que la projection de notre propre lecture. Pourtant, comme le remarque Annie Dubourdieu20 « la prière, comme la parole divine, se produit dans des moments difficiles, des périodes de crise ». Elle doit donc porter les marques qui ont été identifiées comme signes de l’émotion, du drame, de l’angoisse. Ovide utilise le potentiel émotionnel des partages trochaïques multiples, qui découpent le vers en petites unités rythmiques et viennent entraver la fluidité de l’oratio uincta. Cette diction, plus hachée, discontinue, est aussi moins artificielle et se rapproche de l’oratio numerosa des déclamations rhétoriques. Or Sénèque le Rhéteur nous dit qu’Ovide fut un brillant élève dans ses classes de rhétorique et qu’il avait su tirer tout le fruit d’un enseignement parvenu alors à une grande maîtrise. Peut-être faut-il lier à leur nature hautement rhétorique l’abondance relative de partages trochaïques dans les prières des œuvres ovidiennes, et plus particulièrement dans les œuvres les plus tardives ? Ce qui est surtout remarquable dans la pratique ovidienne, c’est la forte proportion de vers structurés autour de deux ou trois partages trochaïques. Les stylisticiens notent la rareté de cette construction, et son fort potentiel expressif, même si, comme tout phénomène stylistique, elle n’a pas de signification en soi mais demande à être actualisée en contexte. Ovide use du pouvoir émotionnel de ces pauses répétées dans le vers, qui peuvent le faire hoqueter comme un sanglot dans le long chant d’Orphée (Métamorphoses X, 17-39) dans lequel, sur 23, 19 vers présentent au moins un partage trochaïque, parmi lesquels 8 en ont deux ou plus (34,5%) : Sic ait : « o positi sub terra numina mundi, in quem reccidimus, quicquid mortale creamur, si licet et falsi positis ambagibus oris uera loqui sinitis, non huc, ut opaca uiderem Tartara, descendi, nec uti uillosa colubris 20. A. Dubourdieu (346), « Paroles des Dieux », p. 46.



Chapitre Premier : La mise en scène du récit 239 terna Medusaei uincirem guttura monstri : causa uiae est coniunx, in quam calcata uenenum uipera diffudit crescentesque abstulit annos. Posse pati uolui nec me temptasse negabo : uicit Amor. Supera deus hic bene notus in ora est ; an sit et hic, dubito : sed et hic tamen auguror esse, famaque si ueteris non est mentita rapinae, uos quoque iunxit Amor. Per ego haec loca plena timoris, per Chaos hoc ingens uastique silentia regni, Eurydices, oro, properata retexite fata. Omnia debemur uobis, paulumque morati serius aut citius sedem properamus ad unam. Tendimus huc omnes, haec est domus ultima, uosque humani generis longissima regna tenetis. Haec quoque, cum iustos matura peregerit annos, iuris erit uestri : pro munere poscimus usum ; quodsi fata negant ueniam pro coniuge, certum est nolle redire mihi : leto gaudete duorum. » « Il se mit à chanter : ‘Ô puissances du monde souterrain Où tous, créatures mortelles, nous retournons, S’il m’est possible, si vous me permettez de dire sans détour et franchement la vérité, je ne suis pas ici descendu Pour voir le ténébreux Tartare ni enchaîner les trois gorges Hérissées de serpents du monstre parent de Méduse ; La raison de ce voyage est mon épouse : une vipère Qu’elle avait écrasée l’a infectée, emportée dans la fleur de l’âge. J’ai voulu supporter la douleur et je ne nierai pas avoir essayé : Amour a triomphé, ce dieu bien connu dans les régions d’en haut ; L’est-il de même ici, je l’ignore, mais toutefois je le suppose, Et si l’enlèvement d’autrefois n’est pas un bruit mensonger, Amour vous a unis vous aussi. Je vous en prie, par ces lieux Emplis d’épouvante, par ce Chaos immense et les vastes silences De ce royaume, renouez le fil du destin si bref d’Eurydice ! Tout dépend de vous et, après une courte halte, nous nous hâtons Un peu plus tôt, un peu plus tard, vers le même séjour. C’est vers quoi, tous nous nous dirigeons, c’est là notre ultime demeure Et votre empire sur le genre humain s’étend éternellement. Quant à elle, après une durée de vie normale, au moment voulu Elle sera soumise à vos lois ; ce que je réclame n’est pas faveur Mais nécessité. Si le destin refuse sa bienveillance à mon épouse, Je ne repartirai certes pas ; vous vous réjouirez de la mort de deux êtres’. »21

21. Traduction de Danièle Robert pour Actes Sud, 2001.

240

Troisième Partie : La mise en mots de la prière

Où surviennent ces partages ? Le premier, significativement, vient séparer deux mots essentiels du chant d’Orphée, deux mots qui sont au cœur de son chant paradoxal, à la fois désespéré et plein d’espérance : quicquid mortale creamur. Il vient souligner la folle ambition d’Orphée qui prétend, par l’émotion que suscite son chant, modifier le cours du monde et rappeler la vie. Le premier vers dans lequel le lecteur rencontre deux intermots trochaïques évoque le Tartare cruel et la descente d’Orphée. Le rythme des intermots associé à l’agencement métrique choisi (DSDS DS) dit l’étrange solennité de cette catabase exceptionnelle. Le double partage suivant survient encore à un moment de grande émotion, alors qu’Orphée rappelle la cause de sa descente aux enfers : il lie ainsi cette aventure à la morsure qui a tué Eurydice : causa uiae … calcata uenenum. Le rythme renforce le jeu symétrique des allitérations. Puis ce sont ses propres actions qui sont associées : posse pati…temptasse negabo. Et le poème culmine sur la sollicitation directe, très émouvante, de Pluton et Proserpine, non en tant que dieux mais en tant que couple : uos quoque uinxit amor – per ego haec loca plena timoris. Comment mieux évoquer, d’ailleurs, le couple, que par ce partage qui relie en même temps qu’il sépare ? En revanche la prière à proprement parler, c’est-à-dire la formulation de la demande, se fait sur un mode lent, comme sur un mode mineur, alourdi de larmes, écrasé par la pesanteur infernale, dans un vers saturé de mots longs avec un seul partage au P4, le plus recherché : Eūrydĭcēs ōrō prŏpĕrātă rĕtēxĭtĕ fātā.

Le verbe spondaïque est particulièrement mis en relief par son incrustation dans cet écrin de mots longs, dont les schémas métriques révèlent une belle diversité (choriambe, péon 3ème, péon 2nd, qui est un type de mot très rare, comme le rappellent les travaux de Drexler et de De Neubourg), et l’unique partage trochaïque vient joindre les deux mots signifiant l’action, l’action négative de la mort trop pressée d’emporter l’aimée, et l’action salvatrice des dieux qui renversent l’ordre du destin), quand les autres mots du vers fonctionnent presque comme des cartouches thématiques.

Mots longs et métrique verbale Chez Ovide, le début de la clausule accueille fréquemment des mots de 3, 4 ou 5 syllabes se terminant par un –e qui en adoucit la finale. Cette constante rend la place propice aux impératifs, qui ouvrent ainsi la clausule, comme ce



Chapitre Premier : La mise en scène du récit 241

péon 2nd, retexite, que nous avons relevé dans la prière d’Orphée. En voici quelques autres22, relevés parmi les prières des Métamorphoses : Métamorphoses I, 546 Qua nimium placui mutando perde figuram

Métamorphoses II, 39 Credar et hunc animis errorem detrahe nostris

Métamorphoses II, 283 Presserat ora uapor « tostos en adspice crines […] »

Métamorphoses II, 299 In chaos antiquum confundimur eripe flammis

Métamorphoses II, 300 Si quid adhuc superest et rerum consule summae

Métamorphoses III, 614 His quoque des ueniam. Pro nobis mitte precari.

Métamorphoses III, 689 Corpore uixque meum firmat deus « excute » dicens

Métamorphoses IV, 534 Magna quidem posco sed tu miserere meorum 22. mais le procédé ne se réduit pas aux impératifs, puisque l’on trouve aussi les clausules suivantes, le relevé n’étant pas exhaustif, et se limitant aux prières des quatre premiers livres des Métamorphoses : dicere formas (I, 1) ; reparabile nostri (I, 379) ; trepidante columbae (I, 506) ; indignaue laedi (I, 508) ; eritque fuitque (I, 515) ; pectore fecit (I, 518) ; opiferque per orbem (I, 519) ; sub imagine celat (II, 37) ; insigne coruscis (I, 768) ; auditque uidetque (I, 769) ; (ipse uidendum (I, 771)) ; nosse penates (I, 772) ; auctore leuare (II, 281) ; (ipse laborat (II, 296)) ; limite dixit (II, 699) ; patiere repulsam ( III, 289) ; dextramque precanti (III, 721) ; matresque nurus (IV, 9) ; Bromiumque Lyaeumque (IV, 11) ; solumque bimatrem (IV, 12) ; indetonsusque Thyoneus (IV, 13) ; satyrique sequuntur (IV, 25) ; bipenniferumque Lycurgum (IV, 22) ; foramine buxus (IV, 30) ; improbe dixit (IV, 370) ; corpore toto (IV, 369) ; Hyperione nate (IV, 192) ; cernere debes (IV, 195) ; (iste colorem (IV, 202)) ; miserabile corpus (IV, 158) ; o fortissime dixit (IV, 769) ; uirtute quibusque (IV, 770) ; umerique manusque (IV, 592) ; Neptune potestas (IV, 533).

242

Troisième Partie : La mise en mots de la prière

Métamorphoses IV, 584 Dumque aliquid superest de me, me tange manumque

Métamorphoses IV, 591 Cadme, mane teque infelix, his exue monstris !

Métamorphoses V, 490 Et frugum genetrix immensos siste labores

Métamorphoses VI, 159 Vaticinata uias : Ismenides ite frequentes

Métamorphoses VI, 161 Cum prece tura pia lauroque innectite crinem

Métamorphoses VII, 70 Inponis, Medea, tuae ? Quin adspice quantum

Métamorphoses VII, 168 Deme meis annis demptos adde parenti

Métamorphoses VII, 71 Adgrediare nefas et dum licet effuge crimen

Métamorphoses VII, 618 Aut mihi redde meos aut me quoque conde sepulcro

Métamorphoses VIII, 482 Eumenides sacris uultus aduertite uestros !

Métamorphoses IX, 780 Consilium munusque tuum est. Miserere duarum

Métamorphoses X, 31



Chapitre Premier : La mise en scène du récit 243 Eurydices, oro, properata retexite fata

Métamorphoses X, 39 Nolle redire mihi : leto gaudete duorum

Métamorphoses X, 321 Hoc prohibete nefas scelerique resistite nostro

Métamorphoses X, 646 Mortuaque exstinctos, ambobus pellite regnis

Métamorphoses XI, 102 Ille male usurus donis ait « effice quicquid […] »

Métamorphoses XI, 132 Sed miserere, precor, speciosoque eripe damno

Métamorphoses XI, 669 Surge age, da lacrimas lugubriaque indue nec me

Métamorphoses XII, 596 Non datur, occulta necopinum perde sagitta

Métamorphoses XIII, 840 Iam Galatea ueni nec munera despice nostra

Métamorphoses XIII, 855 Hunc tibi do socerum, tantum miserere precesque

Métamorphoses XIII, 880-881 Et « fer opem, Galatea, precor mihi ! ferte, parentes » Dixerat « et uestris periturum admittite regnis »

244

Troisième Partie : La mise en mots de la prière

Métamorphoses XIV, 374 Quae facit ut supplex tibi sim dea, consule nostris

Métamorphoses XIV, 376 Accipe nec durus Titanida despice Circen

Métamorphoses XV, 777-778 Quos prohibete precor facinusque repellite neue Caede sacerdotis flammas exstinguite Vestae

On peut retrouver la même métrique verbale dans les Fastes (nous ne donnons que la fin des vers) : I, 509 saluete locorum ; I, 677 satiate colonos ; I, 681 aperire serenis ; I, 685 parcite granis ; II, 469 succurrite nymphae ; II, 673 concede roganti ; II, 676 pulsabere rastris ; III, 2 solue comas ; III, 309 ignoscite nostris ; III, 311 monstrate piari ; III, 426 tuere caput ; IV, 162 tuere nurus ; IV 579 monstrate parenti ; IV, 759 ignoscite nymphae ; IV, 829 auertite cuncti ; VI, 161 sumitte fibras VI, 545 uocabere nostris ; VI, 483 redimite capillos ; VI, 517 succurrite matri. Mais le trait n’est pas à proprement parler ovidien, quoi qu’il en fasse un usage si systématique qu’il se distingue des autres poètes. On le trouve par exemple chez Tibulle, lorsqu’il décrit des cérémonies sacrées : II, 1, 1-4 ; 17 ; 2723 – II, 5, 7, 8, 9 Ces impératifs sont souvent des mots longs, de 4 syllabes ou plus, dont l’apparition en poésie est toujours remarquable. Appuyons-nous sur la prière à la Terre et Cérès, au premier livre des Fastes, pour étudier ces mots longs qui lestent le vers et le ralentissent, en le solennisant. La prière à Cérès et Tellus que nous rapporte Ovide est très proche de celle à Robigo ; en voici le texte : Fastes I, 675-694, prière à la Terre et Cérès Cōnsōrtēs ŏpĕrīs, //P pēr quās cōrrēctă uĕtūstās   quērnăquĕ glāns uīctā (e)st // ūtĭlĭōrĕ cĭbō, frūgĭbŭs īmmēnsīs //P ăuĭdōs sătĭātĕ cŏlōnōs,   ūt căpĭānt cūltūs // prāemĭă dīgnă sŭī. Vōs dătĕ pērpĕtŭōs //P tĕnĕrīs sēmēntĭbŭs āuctūs,   Nēc nŏuă pēr gĕlĭdās // hērbă sĭt ūstă nĭuēs. cūm sĕrĭmūs,//T cāelūm //P uēntīs ăpĕrītĕ sĕrēnīs ; 23. On peut associer, sur un plan purement phonique, Fastes II, 38-39 ; 40 ; 41 ; 42.



Chapitre Premier : La mise en scène du récit 245   cūm lătĕt, āethĕrĭā // spārgĭtĕ sēmĕn ăquā. Nēvĕ grăuēs cūltīs //P Cĕrĕālĭă rūră căuētē  āgmĭnĕ lāesūrō // dēpŏpŭlēntŭr ăuēs. Vōs quŏquĕ, fōrmīcāe,//P sūbiēctīs pārcĭtĕ grānīs :   pōst mēssēm prāedāe // cōpĭă māiŏr ĕrīt. Īntĕrĕā //T crēscāt //P scābrāe //H rōbīgĭnĭs ēxpērs   nēc uĭtĭō cāelī // pāllĕăt ūllă sĕgēs, ēt nĕquĕ dēfĭcĭāt //P măcĭē nēc pīnguĭŏr āequō   dīuĭtĭīs pĕrĕāt // lūxŭrĭōsă sŭīs ; ēt cărĕānt lŏlĭīs //P ŏcŭlōs uĭtĭāntĭbŭs āgrī,   nēc stĕrĭlīs cūltō // sūrgăt ăuēnă sŏlō ; trītĭcĕōs fētūs //P pāssūrăquĕ fārră bĭs īgnēm  hōrdĕăqu(e) īngēntī // fēnŏrĕ rēddăt ăgēr. « Compagnes de labeur, grâce à qui les usages antiques ont été amendés et le gland du chêne supplanté par une nourriture plus profitable, comblez d’immenses récoltes les paysans avides, pour qu’ils reçoivent la juste récompense de leurs travaux. Accordez aux tendres semis une croissance ininterrompue, faites que les jeunes pousses ne soient pas brûlées par les neiges glacées. Quand nous semons, dégagez le ciel par les vents qui amènent le beau temps ; quand la semence est enfouie, arrosez-la de l’eau du ciel. Faites que les oiseaux, fléaux des cultures, ne dévastent pas les champs de Cérès, en troupes destructrices. Vous aussi, fourmis, épargnez les grains enfouis ; après la moisson, votre butin sera plus abondant. Cependant puisse la récolte croître, préservée de l’âpre rouille, et que les intempéries ne lui donnent pas, lorsqu’elle est mouillée, une pâleur maladive ; qu’elle ne s’étiole pas dans une terre trop maigre, qu’elle ne se développe pas non plus sans mesure et ne meure pas de sa richesse luxuriante ; que les champs soient exempts de l’ivraie qui trouble la vue, et que la folle avoine ne se dresse pas sur les terres cultivées ; que le champ rende au centuple les épis de blé, l’orge et l’épeautre qui par deux fois subira le feu ! Voilà ce que je demande pour vous, voilà ce que vous devez demander, paysans ; puissent l’une et l’autre déesses exaucer nos prières ! »

L’invocation à Cérès et Tellus a ceci de particulier qu’elle compte un grand nombre de mots longs (de quatre syllabes et plus). Observation des mots longs dans les prières des Fastes

246

Troisième Partie : La mise en mots de la prière

nombre de vers

nombre de mots

mots de 4 syllabes

mots de 5 syllabes

PRIERES de Carmenta, I, 509-536 d’un berger à Palès IV, 747-776 à la Terre et à Cérès I, 675-694 à Robigo IV, 911-932 à Mercure, V, 681-690 sous-total 1 VŒUX Ensemble HYMNES Hymne à Bacchus III, 714-732 Hymne à Terminus II, 659-678 Hymne à Germanicus I, 3-26 Hymne à Mercure V, 663-672 sous-total 2 FAVEUR-AIDE Ensemble

  28 30 20 22 10 110

  73 181 124 112 61 551

  10 15 11 8 6 50

  1 2 5 1 1 10

23

142

8

4

19 20 24 10 73

110 123 148 63 444

10 8 15 4 37

2 5 1 0 8

77

474

42

3

Total

283

954

137

25

Dans la prière à Cérès, les mots de quatre syllabes sont équitablement répartis dans le vers, étant donné que 50 % d’entre eux apparaissent avant la penthémimère et 50 % après. Aucune place métrique n’est privilégiée, si ce n’est peut-être la P1, qu’affectionnent les mots à structure choriambique. Les mots de cinq syllabes sont en revanche circonscrits dans la seconde moitié du vers, alors que rien ne rend nécessaire cette disposition. Place des mots longs en P1 mots de 4 syllabes : ˉˉˉ˘ ˉ ˘˘ ˉ ˉ ˉ ˘˘ ˘ ˉ ˘˘ ˘˘ ˉ ˘

avant P

après P

après H

avant P6

total 10

3

2 1

2 1

1



Chapitre Premier : La mise en scène du récit 247

en P1 ˘˘ ˉ ˉ ˘ˉˉˉ mots de 5 syllabes : ˉ˘˘ˉ˘ ˘˘ˉ˘˘

avant P

après P

après H

avant P6

total

5 3 1

1

On peut remarquer la grande sobriété de cette prière, qui ne fait pas apparaître les noms des deux divinités - dédoublement de la Nature productrice - auxquelles elle est adressée. Ovide évite toute allusion à la liste que donne Varron - citant les Libri iuris pontificii de Fabius Pictor - « des entités spécialistes dont le flamine de Cérès récite les noms quand il lui sacrifie ainsi qu’à Tellus. Chacun des noms à suffixe d’agent correspond à un moment de la culture : Vernacor (pour le retournement de la jachère), Reparator (pour la remise en état de la jachère), Imporcitor (pour le labour à gros sillons), Iusitor (pour les semailles), Obarator (pour le labour de la surface), Occator (pour le hersage), Sarritor (pour le sarclage), Sudruncinator (pour le binage), Messor (pour la moisson), Conuector (pour le charriage), Conditor (pour l’emmagasinement), Promitor (pour le dégrangement) »24. On pourrait penser qu’Ovide évolue dans le champ du poétique au détriment de la dimension purement technique de la prière. Pourtant la prière rituelle est bien là, en filigrane. Cette prière à Cérès accepte un développement intéressant. Elle commence par une célébration des qualités des deux déesses, dispensatrices de biens vitaux pour les humains. Ovide leur demande donc de poursuivre leur œuvre bénéfique : satiate – date – aperite – spargite. Tous ces impératifs occupent le deuxième hémistiche du vers, conformément à l’usage que nous avons mis en lumière. Mais progressivement la prière se nuance ; on ne demande plus aux dieux d’avoir une action positive, mais une action négative : cauete ne aues depopulentur ; parcite. C’est donc leur protection que l’on sollicite dans un rite à forte coloration apotropaïque. Et alors l’impératif s’efface peu à peu devant le subjonctif : nec palleat…neque deficiat…nec pereat…et careant…nec surgat.

24. G. Dumézil (352), La Religion Romaine Archaïque, p. 51.

248

Troisième Partie : La mise en mots de la prière

Les demandes, et les verbes qui les supportent, se multiplient en une litanie de subjonctifs, qui remplace d’une certaine manière la liste technique dont nous avons remarqué l’absence.

Modes verbaux Impératif et subjonctif sont les deux modes privilégiés du style précatif. L.  Deschamps rappelle le caractère subjectif de ce dernier mode, qui est en réalité un subjonctif-optatif, comme nous l’avons déjà signalé25. J. Hellegouarc’h insiste sur « la grande fréquence des emplois de ce mode chez (Tibulle) : 431 pour 1368 vers […], soit à peu près un subjonctif tous les trois vers, ou 31,74 % de vers contenant un subjonctif, alors qu’il n’y en a que 11 % dans l’Aen. 1-100 et un peu moins dans d’autres parties du poème de Virgile »26. Il faut distinguer entre les emplois imposés du subjonctif - ceux qui sont justifiés par les règles grammaticales, en subordonnée principalement - et les emplois « positifs »27. Bien que les emplois absolus soient aptes à rendre des nuances particulières de la sensibilité, il nous a paru que les emplois dits « positifs » étaient plus à même de porter une prière. Ovide fait naturellement un grand usage de ces deux modes, tout en nuançant leur emploi en fonction du type de prière qu’il exprime.

25. L. Deschamps (337), « Le rêve et la prière chez Tibulle », p. 49. 26. J. Hellegouarc’h (652), « Parce precor ou Tibulle et la prière », p. 53. 27. L. Deschamps (337), art. cit., p. 49-50.

Prières Hymnes Vœux Faveur faveur pour son œuvre Total

 

28 11 8 28 12

87

298

29,2%

25,5% 15,1% 34,8% 36,4% 80%

% des vers

impératifs

nom­bre

110 73 23 77 15

Nom­bre de vers

Etude des modes verbaux injonctifs dans les Fastes

4

4 0 0 0 0

nom­bre

4,6%

14,3% 0 0 0 0

% des impératifs

dont défenses

61

38 4 2 12 5

nom­bre

20,5%

34,5% 5,5% 8,7% 15,6% 33,3%

% des vers

subjonctifs seuls

10

10 0 0 0 0

nom­bre

16,4%

26,3% 0 0 0 0

% des subjonctifs

dont défenses

 Chapitre Premier : La mise en scène du récit 249

250

Troisième Partie : La mise en mots de la prière

On remarque un fort usage du subjonctif en emploi « positif », soit en indépendante soit en principale (mais les systèmes conditionnels sont quasi inexistants dans notre corpus), dans les prières comme dans les demandes de faveur pour son œuvre. En revanche les hymnes forment un groupe à part. Nous avons déjà dit que l’hymne était une célébration intransitive et gratuite, qui ne demandait que peu de chose à son destinataire. Ces relevés confirment cette assertion, et isolent les hymnes des autres prières. C’est la raison pour laquelle ils n’apparaîtront plus dans les tableaux et leur analyse. Il semble que les résultats de ce tableau justifient le découpage de notre corpus. Les prières développées sont nettement injonctives et les dieux y sont fortement sollicités, étant donné qu’un vers sur 4 y contient un impératif et plus d’un sur trois un subjonctif. Il s’avère donc que 60 % des vers contiennent un de ces modes. Les demandes de faveur que le poète adresse pour que les dieux le soutiennent dans son œuvre sont un cas extrême, puisque 80 % des vers y portent un impératif, et 33,3 % un subjonctif : certains vers font donc apparaître simultanément les deux modes, en une saturation injonctive très expressive. Il apparaît enfin qu’un nombre considérable de ces verbes s’intègrent à des structures de défense, et ceci dans les seules prières développées. Les dieux sont donc soit des protecteurs contre des forces que les hommes ne peuvent pas dominer seuls, soit des forces négatives dont la prière a pour fonction de prévenir l’action (c’est le cas de Robigo par exemple). Le tableau suivant détaille la répartition de ces modes dans les prières longues, les hymnes et les vœux, toujours dans les Fastes28 :   PRIERES I, 509-536 I, 675-694 IV, 747-776 IV, 911-932 V, 681-690

nombre d’impératifs par extrait

nombre de subjonctifs par extrait

  5 6 6 6 5

  2 8 18 7 3

28. Le corpus de référence reste celui qui est détaillé dans l’annexe 1.



Chapitre Premier : La mise en scène du récit 251

  HYMNES I, 3-26 III, 714-732 V, 663-672 II, 659-678 VŒUX IV, 319-324 IV, 525-526 IV, 893-894 V, 573-577 VI, 159-162 VI, 449-452 TOTAL

nombre d’impératifs par extrait

nombre de subjonctifs par extrait

  7 1 1 2   1 2 0 2 2 1 47

  1 0 0 3   0 0 0 1 0 1 44

Un certain équilibre apparaît dans l’ensemble, mais un chiffre ressort nettement : l’invocation à Palès qu’Ovide conseille à un berger est d’une richesse rare en subjonctifs. En voici le texte29 : « Cōnsŭlĕ, dīc, pĕcŏrī părĭtēr pĕcŏrīsquĕ măgīstrīs.   Ēffŭgĭāt stăbŭlīs nōxă rĕpūlsă mĕīs. sīuĕ săcrō pāuī sēdīuĕ sŭb ārbŏrĕ sācrā   Pābŭlăqu(e) ē būstīs īnscĭă cārpsĭt ŏuīs, Sī nĕmŭs īntrāuī uĕtĭtūm nōstrīsuĕ fŭgātāe   Sūnt ŏcŭlīs nymphāe sēmĭcăpērquĕ dĕūs, Sī mĕă fālx rāmō lūcūm spŏlĭāuĭt ŏpācō,   Ūndĕ dătā (e)st āegrāe fīscĭnă frōndĭs ŏuī, Dā uĕnĭām cūlpāe ; nēc dūm dēgrāndĭnăt, ōbsīt   Āgrēstī fānō sūppŏsŭīssĕ pĕcūs. Nēc nŏcĕāt tūrbāssĕ lăcūs : ignōscĭtĕ, nymphāe,   Mōtă quŏd ōbscūrās ūngŭlă fēcĭt ăquās. Tū, dĕă, prō nōbīs fōntēs fōntānăquĕ plācā   Nūmĭnă, tū spārsōs pēr nĕmŭs ōmnĕ dĕōs. Nēc Drўădās, nēc nōs uĭdĕāmūs lābră Dĭānāe,   Nēc Aāunūm, mĕdĭō cūm prĕmĭt āruă dĭē. Pēllĕ prŏcūl mōrbōs ; uălĕānt hŏmĭnēsquĕ grĕgēsquē  Ēt uălĕānt uĭgĭlēs, prōuĭdă tūrbă, cănēs. Nēuĕ mĭnūs mūltōs rĕdĭgām quām mānĕ fŭērūnt, 29. Fastes IV, 747-776.

252

Troisième Partie : La mise en mots de la prière  Nēuĕ gĕmām rĕfĕrēns uēllĕră rāptă lŭpō. Ābsĭt ĭnīquă fămēs ; hērbāe frōndēsquĕ sŭpērsīnt,  Quāequĕ lăuēnt ārtūs, quāequĕ bĭbāntŭr, ăquāe. Ūbĕră plēnă prĕmām, rĕfĕrāt mĭhĭ cāsĕŭs āerā   Dēntquĕ uĭām lĭquĭdō uīmĭnă rāră sĕrō ; Sītquĕ sălāx ărĭēs cōncēptăquĕ sēmĭnă cōniūnx   Rēddăt ĕt īn stăbŭlō mūltă sĭt āgnă mĕō ; Lānăquĕ prōuĕnĭāt nūllās lāesūră pŭēllās,   Mōllĭs ĕt ād tĕnĕrās quāmlĭbĕt āptă mănūs. Quāe prĕcŏr ēuĕnĭānt ēt nōs făcĭāmŭs ăd ānnūm   Pāstōrūm dŏmĭnāe grāndĭă Lībă Pălī. » « Veille à la fois sur le troupeau et sur les maîtres du troupeau : écarte, repousse tout dommage, loin de mes étables. Si j’ai fait paître dans un lieu sacré, si je me suis assis sous un arbre sacré, si mes brebis inconscientes ont brouté sur des tombeaux, si je suis entré dans un bois interdit, ou si mes regards ont mis en fuite les Nymphes et le dieu à moitié bouc, si ma serpette a dépouillé un bois sacré de quelques rameaux touffus, pour donner une corbeille de feuillage à une brebis malade, accorde ton pardon à ma faute, et ne m’en veuille pas non plus d’avoir abrité mon troupeau, pendant une averse de grêle, dans quelque sanctuaire rustique. Qu’on ne me fasse pas un crime d’avoir troublé l’eau des étangs ; pardonnez-moi, Nymphes, si les sabots de mes bêtes ont terni la limpidité des eaux. Toi, déesse, apaise pour nous les sources et les divinités des sources, apaise les dieux épars dans tous les bois. Puissions-nous ne voir ni les Dryades, ni Diane au bain, ni Faunus, quand au milieu du jour il est couché dans les champs. Chasse loin de nous les maladies ; donne la santé aux hommes et aux bêtes, la santé aux chiens de garde, troupe vigilante. Fais en sorte que je ne ramène pas moins de bêtes que je n’en comptais le matin, et que je ne gémisse pas en rapportant des toisons arrachées au loup. Éloigne de nous la faim cruelle : donne-nous en abondance herbes et feuillages, et des eaux bonnes pour le bain, bonnes à boire. Fais que je presse des mamelles pleines, que mon fromage me rapporte de l’argent, que les clayons à larges mailles laissent passer le petit-lait clair ; que le bélier soit ardent, que la femelle conçoive et mette bas et que les agneaux soient nombreux dans ma bergerie ; que leur laine moelleuse ne blesse pas les jeunes filles et convienne aux mains les plus délicates. Puisse ma prière être exaucée, et nous offrirons dans un an de grands gâteaux à Palès, la maîtresse des bergers. »

Cette prière compte 30 vers, 181 mots et 24 verbes précatifs. Un mot sur 7,5 est donc un verbe injonctif, qu’il soit à l’impératif ou au subjonctif. Elle



Chapitre Premier : La mise en scène du récit 253

utilise une formule qui est caractéristique du carmen religieux archaïque : da ueniam culpae. On ne peut qu’admirer l’art avec lequel Ovide a mêlé ici sa propre poétique aux rythmes traditionnels du carmen. Une autre prière agricole peut être mise en regard de celle adressée à Tellus et Cérès. Il s’agit de la prière par laquelle le flamine de Quirinus implore Robigo d’épargner les moissons. Fastes IV, 910-932 Āspĕră Rōbīgō,//P pārcās Cĕrĕālĭbŭs hērbīs   Ēt trĕmăt īn sūmmā //P lēuĕ căcūmĕn hŭmō. Tū sătă sīdĕrĭbūs //P cāelī nūtrītă sĕcūndī   Crēscĕrĕ dūm fīānt //P fālcĭbŭs āptă sĭnās. Vīs tŭă nōn lĕuĭs ēst ://P quāe tū //H frūmēntă nŏtāstī,  Māestŭs ĭn āmīssīs //P īllă cŏlōnŭs hăbēt. Nēc uēntī tāntūm //P Cĕrĕrī //H nŏcŭērĕ nĕc īmbrēs,   Nēc sīc mārmŏrĕō //P pāllĕt ădūstă gĕlū, Quāntūm sī cūlmōs //P Tītān //H īncālfăcĭt ūdōs :   Tūnc lŏcŭs ēst //T īrāe,//P dīuă tĭmēndă, tŭāe. Pārcĕ, prĕcōr,//T scābrāsquĕ //F mănūs //H ā mēssĭbŭs āufēr   Nēuĕ nŏcē //T cūltīs ;//P pōssĕ nŏcērĕ săt ēst. Nēc tĕnĕrās sĕgĕtēs //P sēd dūr(um) āmplēctĕrĕ fērūm   Quōdquĕ pŏtēst //T ălĭōs //P pērdĕrĕ,//H pērdĕ prĭōr. Ūtĭlĭūs glădĭōs //P ēt tēlă nŏcēntĭă cārpēs :   Nīl ŏpŭs ēst īllīs ;//P ōtĭă mūndūŭs ăgīt. Sārcŭlă nūnc //T dūrūsquĕ //F bĭdēns //H ēt uōmĕr ădūncūs,   Rūrĭs ŏpēs,//T nĭtĕānt ;//P īnquĭrĕt ārmă sĭtūr. Cōnātūsqu(e)//T ălĭquīs //T uāgīnā dūcĕrĕ fērūm.   Ādstrīctūm //T lōngā //P sēntĭăt ēssĕ mŏrā. Āt tū nē uĭŏlā //P Cĕrĕrēm //H sēmpērquĕ cŏlōnūs.   Ābsēntī //T pōssīt //P sōluĕrĕ uōtă tĭbī. « Âpre Robigo, épargne les jeunes pousses de Cérès, et laisse leur pointe lisse frissonner à la surface de la terre. Permets aux récoltes, nourries par les astres d’un ciel favorable, de croître jusqu’à ce qu’elles soient mûres pour la faucille. Ce n’est pas un faible pouvoir que le tien : les blés que tu as marqués, le paysan affligé les tient pour perdus ; ni les vents ni les pluies ne font autant de mal à Cérès ; elle ne pâlit pas autant, brûlée par la gelée marmoréenne, que lorsque le Titan échauffe les chaumes humides : c’est alors, déesse redoutable, l’heure de ta colère. Grâce, je t’en prie ! éloigne des moissons tes mains rugueuses, ne nuis pas aux cultures ; il suffit que tu aies le pouvoir de leur nuire. Au lieu des tendres récoltes, saisis-toi du fer dur ; ce qui peut perdre autrui, perds-le la première ! Mieux vaudra que

254

Troisième Partie : La mise en mots de la prière tu ronges les glaives et les traits meurtriers ; nous n’en avons plus besoin : le monde est en paix. Que brillent aujourd’hui le sarcloir, le dur hoyau et le soc recourbé, richesses des campagnes ! Que la rouille salisse les armes, et quand on voudra tirer le fer du fourreau, qu’on sente qu’une longue inaction l’y tient attaché. Mais toi, n’outrage pas Cérès, et que toujours le paysan puisse, en ton absence, s’acquitter de ses vœux envers toi ! »

Robigo, la déesse de la rouille est invoquée de manière préventive. Elle est plutôt connue dans la tradition sous une forme masculine, et Ovide est le seul à la féminiser. On lui prêtait des vertus apotropaïques et on l’invoquait pour que les céréales fussent protégées de la rouille : « Robigo deo suo, quem putabant robiginem auertere, sacrificabant »30. Ovide invite donc les paysans à prier Robigo de suspendre son action. La prière se développe en négatif, en creux, et la plupart des demandes sont en fait des défenses, d’où la récurrence de la coordination négative nec : v. 922 neue noce

v. 923 nec amplectere

L’implication de la déesse dans la défense se fait aussi par la répétition psalmodiée du pronom qui la désigne, même dans des contextes où sa présence est superfétatoire : v. 312-313 Tū sătă sīdĕrĭbūs //P cāelī nūtrītă sĕcūndī   Crēscĕrĕ dūm fīānt //P fālcĭbŭs āptă sĭnās.

v. 314 Vīs tŭă nōn lĕuĭs ēst ://P quāe tū //H frūmēntă nŏtāstī

v. 931 Āt tū nē uĭŏlā

30. Paulus-Festus, cité par R. Schilling en note de son édition des Fastes, p. 134, note 292.



Chapitre Premier : La mise en scène du récit 255

Le pouvoir de la déesse se lit enfin dans la crainte qu’elle inspire : v. 921 Pārcĕ, prĕcōr,//T scābrāsquĕ //F mănūs //H ā mēssĭbŭs āufēr

Là encore nous retrouvons la clôture circulaire des paroles de prières : s’ouvrant sur une apostrophe rituelle de la déesse (aspera Robigo), la supplique s’évanouit sur le pronom divin (tibi). Au centre de ce cercle apparaît une formule que J. Hellegouarc’h31 a identifiée comme une caractéritique du style précatif des poètes élégiaques (v. 921). La structure proche du uersus aureus renforce l’impact de ces impératifs. Ce vers cumule les effets stylistiques : vers formulaire encadré par un uersus aureus, il reçoit une connotation émotionnelle, et solennelle à la fois, de la coupe triple a qui vient s’ajouter au schéma DSDS. Le mot intercalé entre la trihémimère et la trochaïque troisième est allongé par la copule -que et suivi par un mot iambique, en une structure dont nous avons montré qu’elle relevait elle aussi du formulaire, du moins au sein des œuvres d’Ovide. L’allitération en m qui étouffe la fin du vers et constraste avec l’éclatante assonance en a, participe enfin de la saturation stylistique du vers pour en faire un cri particulièrement pathétique propre à émouvoir la divinité. Les mots longs, auxquels s’ajoutent les mots molosses32 qui sont une sorte d’écho traînant donné au sombre Rōbīgō, appesantissent la prière en une sourde plainte. L’opposition entre les deux déesses, l’une de la stérilité et l’autre de la fécondité, s’épanouit dans les rythmes contraires : Rōbīgō / Āt tū nē uĭŏlā Cĕrĕrēm. Enfin, un grand nombre de répétitions, souvent duelles, organise cette invocation apotropaïque  : noce/nocentia en polyptote, acumen/aduncus, Cerealibus/Ceres, colonus deux fois. Or de nombreux auteurs ont insisté sur l’importance de la répétition et des reprises phoniques dans les textes des prières qui nous ont été conservées. Le poète des Fastes a saturé son invocation à Palès (IV, 747-776) d’échos

31. Il faut se reporter ici aux travaux de J. Hellegouarc’h (643, 649, 651 et 654). 32. Les mots molosses ont été soulignés en pointillés, tandis que les mots longs sont soulignés d’un trait continu.

256

Troisième Partie : La mise en mots de la prière

phoniques qui lui assurent une connotation sacrée tout en renforçant sa structure interne33. Le nom de la déesse n’apparaît qu’au dernier vers de la prière, mais l’imbrication de ce vers et du dernier confèrent au texte une circularité parfaite : Fastes, IV, 747 Cōnsŭlĕ, dīc,//T pĕcŏrī //P părĭtēr //H pĕcŏrīsquĕ măgīstrīs.

Fastes IV, 776 Pāstōrūm //T dŏmĭnāe //P grāndĭă //H Lībă Pălī

L’inversion est partout : les allitérations en p s’imbriquent tandis que la dernière penthémimère est encadrée par deux mots métriques en contrerythme : uu- / -uu, qui préfigurent l’inversion phonique finale (Lībă Pălī) et corrigent le quasi piétinement du premier vers : uu- / uu-, lequel produisait un schéma peut-être unique dans notre corpus. Cet encadrement délimite donc l’espace sacré de la prière, qui est cependant organisé intrinsèquement par d’autres jalons. Le berger émet par exemple trois hypothèses successives, qui trouvent leur aboutissement dans une principale de trois mots dont nous avons déjà signalé le caractère archaïque : da ueniam culpae. D’autres éléments archaïques apparaissent, comme l’usage de syntagmes binaires dont les deux membres sont liés par une forte allitération : v. 759

Tū, dĕă, prō nōbīs fōntēs fōntānăquĕ plācā

Les binômes sont parfois formés sur des associations phoniques seulement : v. 754 Ūndĕ dătā (e)st āegrāe fīscĭnă frōndĭs ŏuī v. 757 Nēc nŏcĕāt tūrbāssĕ lăcūs : ignōscĭtĕ, nymphāe v. 763 Pēllĕ prŏcūl mōrbōs ; uălĕānt hŏmĭnēsquĕ grĕgēsquē v. 764 Ēt uălĕānt uĭgĭlēs, prōuĭdă tūrbă, cănēs

Mais les allitérations se font parfois plus amples : v. 749 sīuĕ săcrō pāuī sēdīuĕ sŭb ārbŏrĕ sācrā v. 765 Nēuĕ mĭnūs mūltōs rĕdĭgām quām mānĕ fŭērūnt,

33. pour une analyse du rôle des répétitions poétiques, nous renvoyons à J. Marouzeau (681), W. Moskalew (788) et J. Hellegouarc’h (640, 642, 648 et 653).



Chapitre Premier : La mise en scène du récit 257

Ovide cultive aussi la symétrie structurelle : v. 768

Quāequĕ lăuēnt ārtūs, quāequĕ bĭbāntŭr, ăquāe.

ainsi que l’homéotéleute : v. 773

Lānăquĕ prōuĕnĭāt nūllās lāesūră pŭēllās,

Encore une fois nous constatons que les prières sont, dans les Fastes, comme dans les autres œuvres ovidiennes, des poèmes stylisés et ciselés avec le plus grand soin. Elles constituent des morceaux de bravoure par lesquels le poète manifeste son génie musical et la capacité d’enchantement de ses vers. C’est aussi le lieu d’un effort de uariatio qu’il ne faut pas méconnaître. Car de telles empreintes stylistiques font courir le risque de la monotonie et des stylèmes aussi marqués que ceux du carmen poétique peuvent tourner au simple procédé, s’ils ne sont pas maniés d’une main de maître. Mais Ovide entretient l’attention de son lecteur en variant toujours ses effets et en ménageant des espaces aérés qui permettent la construction de réseaux d’échos. Ainsi sur les cinq prières développées des Fastes, deux surgissent à la fin du premier Livre, tandis que les trois autres prennent place bien plus loin, aux IVème et Vème Livres. Et les trois prières centrales de ce groupe (I, 675-694 ; IV, 747-776 ; IV, 911-932) sont adressées à trois déesses agraires. Tout ceci confère à l’œuvre d’Ovide une charpente solide, qui a peut-être été trop négligée dans les analyses de ce calendrier poétique. Schémas métriques L’effort de uariatio est sensible dans le choix des schémas métriques des distiques. J. Hellegouarc’h affirme34 que la structure DSSS est la plus courante en latin. C’est ce qui ressort de l’analyse du corpus témoin que nous avons dépouillé (Fastes VI) :     DDDD DDDS DDSD DSDD

Hexamètre

Pentamètre

150 8 9 22 9

150        

34. J. Hellegouarc’h (647), « Les structures stylistiques de la poésie latine », p. 235.

258

Troisième Partie : La mise en mots de la prière

  DDSS DSSD DSDS DSSS SSSS SSSD SSDS SDSS SSDD SDDS SDSD SDDD DD DANS SD SS

Hexamètre

Pentamètre

21 21 14 24 3 3 1 7 1 4 2 1        

                        31 90 10 19

On retrouve la même prévalence chez Virgile, selon les comptes établis par L. De Neubourg35. Mais l’ordre de fréquence est modifié dans notre corpus : Etude des schémas métriques du livre VI des Fastes   DDDD DDDS DDSD DSDD DDSS DSSD DSDS DSSS SSSS SSSD

Hexamètre

Pentamètre

11 11 9 8 13 19 13 16 1 2

                   

35. L. De Neubourg (619), La base métrique de la localisation des mots dans l’hexamètre latin, p. 160 : un tableau rapporte la fréquence des combinaisons rythmiques chez Virgile, et indique que l’ordre fréquentiel est le suivant : (1) DSSS ; (2) DDSS ; (3) DSDS ; (4) SDSS ; (5) DDDS ; (6) SSSS ; (7) DSSD ; (8) SDDS ; (9) SSDS ; (10) DDSD ; (11) SDSD ; (12) DSDD ; (13) SSSD ; (14) SSDD ; (15) DDDD ; (16) SDDD.



Chapitre Premier : La mise en scène du récit 259

  SSDS SDSS SSDD SDDS SDSD SDDD DD DS SD SS total

Hexamètre

Pentamètre

0 6 2 1 0 0         112

            32  59  12  10  113

L’ordre fréquentiel dans notre corpus est donc le suivant (pour les six schémas les plus fréquents) : 1. DSSD 2. DSSS 3. DDSS / DSDS 4. DDDD / DDDS Il faut donc remarquer la promotion de deux schémas, qui viennent s’intercaler à des rangs inhabituels : le schéma encadrant DSSD, propre à mimer la circularité du verbe magique, et le schéma holodactylique, qui entraîne une accélération du débit propre à dire l’émotion. En revanche un schéma semble ne pas correspondre à la musique propre à la prière selon Ovide : DDSD. Le grand nombre de partages trochaïques que nous avons relevé est à corréler à la fréquence du schéma DSSD, qui peut provoquer les intermots. L’étude de la fréquence des pieds dactyliques dans notre corpus révèle la même radicalisation des emplois ovidiens :     total dactyles en P1 total dactyles en P2 total dactyles en P3 total dactyles en P4

Hexamètre

Pentamètre

112 93 48 43 46

113  87 41 113 113

260

Troisième Partie : La mise en mots de la prière

Ovide choisit donc à 83 % le dactyle pour ouvrir ses hexamètres, alors que les tableaux de L. De Neubourg donnent une fréquence de 81,2 % pour les Métamorphoses36. Ovide est l’auteur qui, d’Ennius à Pétrone, fait le plus grand usage du dactyle initial. Et dans les textes de prière, cet écart se creuse encore, quoique très légèrement. L’attaque des pentamètres s’allonge en revanche, peut-être pour compenser l’élan de l’hexamètre et le poids d’un second hémistiche fixe et holodactylique. Même au niveau de la métrique verbale et du rythme, les prières se distinguent, parfois légèrement, certes, du reste des œuvres d’Ovide.

36. L. De Neubourg (766), La base métrique de la localisation des mots dans l’hexamètre latin, p. 159.

L’Éternel Dieu forma de la terre tous les animaux des champs et tous les oiseaux du ciel, et il les fit venir vers l’homme, pour voir comment il les appellerait, et afin que tout être vivant portât le nom que lui donnerait l’homme. Et l’homme donna des noms à tout le bétail, aux oiseaux du ciel et à tous les animaux des champs. Genèse, 2, 19-20 Et obscur dans les nuages doit m’être leur nom. Hölderlin, L’Archipel

Chapitre II L’invocation Noms, épiclèses, épithètes Du nom des dieux L’usage1 du nom des dieux pose, dans toute langue mais plus spécifiquement dans les langues à flexion et dans leur modulation particulière qu’est la poésie, plusieurs problèmes spécifiques, que nous regrouperons en trois catégories : un problème d’ordre lexical (choix du nom lui-même), un problème d’ordre métrique et poétique (choix de certains cas au détriment d’autres, choix de certaines places dans le vers, positionnement par rapport aux césures, organisation rythmique dans le vers), et un problème d’ordre sémantique et théologique (quelle forme pour quel sens et quel usage, dans quel contexte ?). Nicole Belayche, s’appuyant, dans l’introduction à la première partie du colloque Nommer les Dieux2, sur l’argument du Cratyle de Platon, rappelle que « le nom propre ne se limite pas à identifier un homme ou un dieu. Il recèle une véritable signification qui vient lui donner du sens et qui, tel un surnom, exprime un supplément d’information sur 1. Des extraits de ces pages ont été publiés, avec quelques remaniements, dans la revue Camenulae (livraison 2013), à la suite d’une communication orale présentée dans le cadre d’une journée d’étude doctorale intitulée « Noms de Dieux, Noms de Lieux » (Université Paris IVSorbonne, Ecole Doctorale I, juin 2012). 2. Nommer les dieux. Théonymes (469), p. 17.

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Troisième Partie : La mise en mots de la prière

sa nature même. […] ». La « célèbre étymologie du nom de Zeus » par exemple « (Dieu par qui il est donné de vivre, di’on zên) est une définition contenue dans le nom, ce qui implique que le nom définit, donc fait le dieu »3. L’invocation semble être, dans la religion antique, la part essentielle de la prière, plus importante que la demande elle-même, qui reste souvent assez générale, ou facilement déductible en fonction du contexte. Dans les textes ovidiens, les prières, d’une manière assez générale, tendent à adopter une allure hymnique, avec une invocation amplifiée et la suppression de l’offrande. Or, c’est dans l’invocation qu’apparaît le nom du dieu le plus fréquemment. Rappelons les analyses de Gabriele Fois-Kaschel4 : « Le nom propre présente la particularité d’établir une relation directe entre l’existence d’une personne ou d’une chose et le signe verbal. Il fonctionne un peu à la manière d’un déictique qui suppose des repères concrets avant de pouvoir être interprété. Mais à l’inverse des déictiques qui reflètent déjà notre mode de structuration de la réalité, un nom propre ne véhicule pas d’autre message que l’unicité de l’objet qu’il nomme et qu’il identifie. […] Il remplit en quelque sorte les conditions d’un signe verbal à l’état pur5. Autrement dit, il ressemble à un réceptacle vide ne pouvant être investi que par un être unique et contingent. Le nom propre exprime le principe de la singularité absolue d’un sujet ou d’un objet avant d’en raconter l’histoire. […] La signification complète d’un nom propre implique l’inventaire de l’ensemble des événements qui accompagnent l’existence de l’être ou de la chose nommés ». Dans cette perspective, la pars epica des hymnes grecs et latins ne serait en quelque sorte que le développement explicatif du nom propre identifiant le dieu loué, une hypertrophie de l’invocation avec une explicitation de son contenu sémantique propre. Pour invoquer une divinité, le préalable nécessaire est de connaître son nom, comme le souligne Georg Appel : necessarium est precantem dei, quem aliquid rogare uult, scire nomen6. G. Appel était de ceux qui défendaient l’idée de la puissance intrinsèque de la nomination. Selon lui en effet : cum nomine illum deum ipsum eiusque uim habet in potestate sua eumque in quadam magica ad ea, quae uelit, perficienda cogere potest7. La nomination exercerait alors en 3. ibid. 4. Analyse linguistique de l’hermétisme et des libertés poétiques chez Hölderlin, Trakl et Celan, Paris, L’Harmattan, 2002, p. 170. 5. et à ce titre on comprend qu’il puisse fasciner les poètes. 6. G. Appel (276), De Romanorum Precationibus, p. 75 : « Il est nécessaire que celui qui veut prier un dieu, auquel il veut demander quelque chose, sache son nom. ». 7. ibid. p. 75 : « avec son nom, il a en son pouvoir le dieu lui-même, et sa force active, et il peut l’obliger à faire ce qu’il veut par certaines pratiques magiques. ».



Chapitre II : L’invocation 263

elle-même une force coercitive qui pourrait contraindre le dieu. On retrouve la même idée dans la tradition orphique, pour laquelle « le nom est un reflet de l’essence divine »8. De là viendrait l’attention portée à la connaissance du ‘vrai nom du dieu’. Nam deus non nisi recto nomine appellatus cogi potest sacra accipere precesque audire, ajoute-t-il9. La critique moderne est longuement revenue sur ce problème, et reste assez partagée. La question est debattue par Simon Pulleyn dans The Power of Names10 ainsi que dans l’ouvrage qu’il a consacré à la prière dans la religion grecque11. Il distingue nettement quatre pensées qui s’éclairent mutuellement mais ne doivent pas être considérées uniment : les pensées égyptienne, grecque, romaine et judaïque, dans laquelle les théories cabbalistiques doivent être isolées, selon lui, de la pensée générale. Pour l’époque romaine, il s’appuie sur le témoignage de Servius : « There are some grounds for attributing a literal belief in the power of names to the Romans, although we may want to call it legalistic rather than magical. Servius tells us that the identity of the deity who looked after the city of Rome was a secret known only to the Pontifices (on Aen 2, 351 ; cf. Macrobius Sat, 3, 9.4). This was so that the enemy could use the Roman weapon of euocatio and charm the deity over to their side. Clearly this is an example of name having power »12. S. Pulleyn suit l’argumentaire de M. Nilsson et tend à montrer que, si l’on peut trouver des attestations d’une foi en un pouvoir spécifique de la nomination, elles restent marginales en Grèce, mais sont un peu plus fréquentes à Rome. G. Freyburger13 rappelle que, selon G. Radke, « la connaissance du nom donne un certain pouvoir ». On retrouve ces théories dans de nombreuses religions, hors de la sphère polythéiste, où l’importance de la nomination peut être à un premier degré prosaïquement rendue nécessaire par la profusion de dieux. Comme le signale avec bon sens S. Pulleyn, « knowledge of the names is an 8. A-F. Morand, « Les assimilations des dieux dans les hymnes orphiques », in La rhétorique de la prière dans l’antiquité grecque, Turnhout, Brepols, 2010, p. 153. 9. ibid. p. 76 : « car on ne peut contraindre un dieu, si on ne l’appelle pas par son nom juste, à recevoir des offrandes ni à écouter une prière. ». 10. S. Pulleyn (501), « The Power of Names in Classical Greek Religion », p. 17-25. 11. S. Pulleyn (502), Prayer in Greek Religion. 12. ibid., p. 100 : « On peut être fondé à attribuer aux Romains une croyance littérale dans le pouvoir des noms, même si nous l’appellerions plus légaliste que magique. Servius nous dit que l’identité de la divinité qui veillait sur Rome était un secret connu des seuls Pontifes (note sur Enéide 2, 351 ; cf. Macrobe Sat, 3, 9.4). C’était ainsi pour que l’ennemi ne puisse pas utiliser l’arme romaine de l’euocatio pour charmer la divinité et l’attirer de son côté. C’est clairement un exemple d’un nom ayant du pouvoir ». 13. Georg Radke est cité par Gérard Freyburger, qui présente sa théorie dans sa contribution au colloque Nommer les Dieux (469), p. 105 sqq.

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Troisième Partie : La mise en mots de la prière

essential prerequisite to any form of communication. There need not necessarly be anything magical about it »14. Mais les monothéismes ont eux aussi réfléchi à la puissance intrinsèque du nom. Que l’on se souvienne du début de la Genèse, lorsque Dieu confère à Adam le pouvoir sur toute créature en lui donnant pour mission de les nommer (Genèse 2, 10-20), ou encore des spéculations juives et cabalistiques sur le nom de Dieu15. Représentante d’un autre courant de pensée, D. Aubriot s’appuie sur les démonstrations de S. Pulleyn16 pour affirmer que « l’idée d’une puissance intrinsèque des noms est en réalité un phénomène appartenant au syncrétisme postclassique »17. Elle poursuit en affirmant que « nommer n’est pas une formule mécanique irrémédiablement indispensable dans certains cas, absolument prohibée dans d’autres : c’est avant tout une politesse flatteuse, recommandée quand les circonstances le permettent. » « Nommer les dieux n’avait pas pour but de les obliger à se rendre à une ‘convocation’ impérieuse. C’est le souci de persuader la divinité qui occupe une place prépondérante dans la prière de requête. […] Le nom, assurément utile à l’identification du dieu prié, mais non indispensable, servait surtout grandement à l’honorer. » Nous nous attacherons, pour la poésie ovidienne, à la dimension encomiastique de la nomination, ainsi qu’à son rapport avec la connaissance de la nature-même du dieu invoqué et à sa dimension proprement poïétique. Il ne faut pas négliger l’idée selon laquelle « le nom est un reflet de l’essence divine »18. « Nommer c’est faire exister »19. C’est vrai au sens social et littéraire, pour ce qui est de l’inscription d’un personnage dans un récit, mais c’est aussi vrai religieusement, et poétiquement. Les nominations d’Adam au jardin d’Eden sont « ontologiquement déterminantes »20 et Pierre Boutang va jusqu’à juger cette nomination comme « emblématique de la primauté ontologique de la

14. S. Pulleyn (502), Prayer in Greek Religion, p. 97. 15. U.  Eco, Le pendule de Foucault, Paris, Grasset, 1990 (1ère édition Milan, 1988), partie II, chapitre 5. A ce sujet on peut consulter MD. Schwartz, Mystical prayer in ancient Judaism, Tübingen, 1992 et A. C. Thiselton, « The supposed power of words in the Biblical Writings », JThS, 25/2, 1974, p. 282-299. G. Scholem fait quant à lui un point sur le Golem, auquel la vie est insufflée par la prononciation ou l’inscription d’un des noms de Dieu (On the Kabbalah and its Symbolism, New York, 1965, p. 158-204). 16. S. Pulleyn (502), ibidem. 17. D. Aubriot, Actes du colloque Nommer les Dieux (469) : renvoi à S. Pulleyn, Prayer in Greek Religion, 1997, p. 111. 18. A-F. Morand, « Les assimilations des dieux dans les hymnes orphiques », in La rhétorique de la prière dans l’Antiquité grecque, p. 153. 19. S. Franchet d’Espérey, « Anchise poète de l’histoire romaine », Stylus, p. 663. 20. G. Steiner, Les Logocrates, l’Age d’Homme, 2003, p. 17.



Chapitre II : L’invocation 265

parole »21. Nous nous attacherons à la dimension encomiastique de la nomination, ainsi qu’à son rapport avec la connaissance de la nature-même du dieu invoqué. L. Pernot rappelle en effet que les orateurs semblaient croire « en la vérité des noms » et qu’ils « reprenaient » certainement « cette croyance au monde qui les entourait. Ils s’appuyaient sur les mentalités courantes et sur les analyses des savants, en faisant appel à la fois à des idées admises quant au pouvoir de la nomination (idées selon lesquelles les noms ont une valeur intrinsèque, sont porteurs d’une vérité sur les choses et permettent par là même de mieux connaître et faire connaître ce qu’ils désignent), à des convictions largement diffusées en matière religieuse (efficacité du nom divin, nomen omen,…) et à des théories philosophiques sur le langage »22. L’intervention de Paolo Scarpi au colloque que nous venons de mentionner apporte un éclairage intéressant sur ce problème de la nomination dans le cadre d’un système polythéiste. « Le nom est le mot servant à désigner un individu, à le distinguer, et il est donc le principe d’individuation par lequel l’identité est déterminée. […] Ainsi l’action de nommer, en imposant ou en donnant un nom, fait partie de l’activité ordonnatrice par laquelle le chaos est séparé du cosmos, c’est-à-dire la nature de la culture. »23 Nicole Belayche corrobore cette analyse : « Si le nom ne se limite pas à désigner le dieu, c’est qu’il remplit son rôle non pas dans la construction identitaire de ce dieu, mais aussi dans le système théologique auquel il participe. […] Le nom d’un dieu n’est pas une simple objectivation de la genèse de celui-ci. Il est aussi, nous l’avons vu à la suite d’H. Usener, un système. Théonymie et théologie entretiennent des liens puissants, qui prennent des formes variées selon les époques, les civilisations et les contextes historiques »24. Elle identifie deux types de « réseaux » auxquels les théonymes appartiendraient : « un réseau vertical, celui de sa parenté, de son lignage, de ses relations en amont ou en aval ; un réseau horizontal, celui de ses multiples formes, ses avatars, dont les épiclèses, ces épithètes qui déterminent une nature du dieu et le culte afférent, fournissent d’excellents indicateurs »25. 21. P. Boutang, L’Ontologie du secret, PUF 1973 (1988), p. 175, cité par G. Steiner, op.cit., p. 31. 22. L. Pernot, « Le lieu du nom dans la rhétorique religieuse des Grecs », in Nommer les dieux (469), première partie : penser et écrire le nom. « Sur l’importance des noms (propres et communs) et des définitions dans la rhétorique antique en général », L. Pernot renvoie à B. Schouler, « Nom et définition chez les rhéteurs et sophistes », in Sens et pouvoir de la nomination dans les cultures hellénique et romaine, éd. Par S. Gély, Montpellier, 1988, p. 47-70. 23. P. Scarpi, « Des Grands dieux aux dieux sans nom : autour de l’altérité des dieux de Samothrace », in Nommer les Dieux (469), p. 213-218. 24. Nommer les dieux (469), introduction à la deuxième partie, p. 113. 25. ibidem.

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Troisième Partie : La mise en mots de la prière

Mais la nomination par le poète est particulière. « Le dire du poète sert (in den Gebrauchen genommen) à laisser apparaître, en la montrant (voilant-dévoilant) l’advenue des dieux. Ceux-ci ont besoin de la parole du poète pour leur propre apparition afin d’être enfin, dans l’apparition (im Erscheinen) ce qu’ils sont. »26 « Le poète est nécessité à un dire qui est seulement une nomination en silence (ein stilles Nennen). […] De quel genre est-ce ‘nommer’ ? Le verbe ‘nommer’ dérive du substantif nomen, onoma. La-dessus persiste la racine « gno », gnosis, c’est-à-dire connaissance. Le nom fait faire connaissance. Nommer dévoile, libère de l’abritement (entbirgt). »27 La parole ovidienne permet-elle aux dieux « d’advenir », pour reprendre les termes d’E. Brito, et, dans le même temps, de révéler ce qu’ils sont ? Si l’on se rappelle nos remarques sur l’importance du pôle apollinien dans la poésie augustéenne, on comprendra sans peine ce qu’une telle perspective peut avoir de stimulant dans l’étude poétique de la prière élégiaque. Avant de nous attacher en détail à l’usage poétique que fait Ovide des noms de dieux, à la gourmandise dont il fait preuve à leur égard et à la manière dont il utilise leur potentiel évocatoire et musical, tentons une synthèse de ses emplois. « Dans la religion romaine, comme dans toute religion, la prière, qui établit une relation entre l’homme et la divinité, comprend trois parties : une invocation, un verbe de demande et l’objet de cette demande, ou la définition du contenu de cette prière. Dans cette structure, l’invocation est l’élément invariable, qui jouit à la fois d’une primauté et d’une priorité »28. Charles Guittard rappelle avec évidence la nécessité de l’invocation dans une religion polythéiste où « l’orant doit établir avec la plus rigoureuse exactitude l’identité de la divinité dont il souhaite obtenir un avantage »29. La forme d’invocation la plus fréquente et la plus simple est l’usage du théonyme au vocatif. « Dans l’adresse au dieu, le nom fait le dieu », affirme même Nicole Belayche30. « Tout langage est ici performatif : le nom du dieu a une fonction conjuratrice, incantatoire, mais il a une prétention opératoire avant tout ». Ch. Guittard précise que « l’adjonction d’une épiclèse au nom d’une divinité oriente l’invocation vers une fonction, un attribut spécifique de la divinité. […] Invoquer Jupiter en soi n’aurait pas grand sens sans préciser à quel aspect de sa souveraineté on fait appel. »31 Toutefois, Ovide s’adresse souvent aux dieux par leur théonyme seul, sans y adjoindre d’épiclèse ni d’épithète particulière, et c’est à cet usage que nous nous intéresserons en premier lieu. 26. 27. 28. 29. 30. 31.

E. Brito, Heidegger et l’hymne du sacré, Peeters, 1999, p. 99 (citation textuelle). E. Brito, ibidem, p. 97. Ch. Guittard (397), « Invocations et structures théologiques », p. 72. ibid., p. 72. Nommer les Dieux (469), introduction à la cinquième partie, p. 469-471. ibid. p. 82.



Chapitre II : L’invocation 267

Apostrophe par le nom seul La première caractéristique qui ressort de l’observation de cette forme d’apostrophe, bien représentée dans notre corpus, est sa position métrique particulière. L’initiale de vers a, d’une manière patente, les préférences d’Ovide, et plus particulièrement l’initiale absolue, celle du premier vers de la prière32 : Métamorphoses IV, 591-594 « Cadme, mane teque, infelix, his exue monstris ! Cadme, quid hoc ? ubi pes, ubi sunt umerique manusque et color et facies et, dum loquor, omnia ? cur non me quoque, caelestes, in eandem uertitis anguem ? »

Métamorphoses VII, 179-180 « Nox » ait « arcanis fidissima, quaeque diurnis aurea cum luna succeditis ignibus astra,

Métamorphoses VII, 615 « Iuppiter o ! » dixi, « si te non falsa loquuntur

Métamorphoses VIII, 350-351 « Phoebe, » ait Ampycides, « si te coluique coloque, da mihi, quod petitur, certo contingere telo ! »

Métamorphoses IX, 773-774 « Isi, Paraetonium Mareoticaque arua Pharonque quae colis, et septem digestum in cornua Nilum :

Amours II, 7-8 Isi, Paraetonium genialiaque arua Canopi  quae colis et Memphin palmiferamque Pharon,

Fastes IV, 577 Parrasides stellae namque omnia nosse potestis

32. Les exemples donnés forment une sélection non exhaustive, mais significative.

268

Troisième Partie : La mise en mots de la prière

Fastes V, 635 Thybri doce uerum : tua ripa uetustior Vrbe est

Fastes VI, 249 Vesta faue : tibi nunc operata resoluimus ora

Fastes I, 65 Iane biceps anni tacite labentia origo

Fastes IV, 723 Alma Pales, faueas pastoria sacra canenti

Fastes IV, 910 Aspera Robigo, parcas Cerealibus herbis

Fastes VI, 483 Bacche racemiferos hedera redimite capillos

Fastes VI, 798 Pierides coeptis addite summa meis

Fastes I, 287 Iane fac aeternos pacem pacisque ministros

Ars Amatoria I, 203 Marsque pater Caesarque pater, date numen eunti

Héroïdes V, 31 Xanthe retro propera uersaeque recurrite lymphae !

Ce choix stylistique corrobore ce qui a été dit précédemment de l’importance de la nomination dans toute invocation, le nom propre apparaissant comme l’identification la plus claire et la plus efficace du destinataire. La divinité ou le mortel invoqués sont ainsi interpellés dans une relation dialoguée propice à l’échange, et la précision du nomen rassure l’orant sur l’efficacité de



Chapitre II : L’invocation 269

sa prière. On peut ainsi remarquer que les Fastes, œuvre plus liturgique que les autres poèmes ovidiens, sont fortement représentés dans les exemples que nous venons de mentionner. L’initiale de vers est une place tout indiquée pour l’invocation, même hors du premier vers. On voit alors l’interférence des rythmes poétiques dans le langage liturgique : le poète établit sa partition selon des modalités particulières et peut user de toute la gamme métrique pour mettre en valeur les mots qui doivent frapper l’oreille de l’auditeur. Ovide utilise par exemple l’initiale de vers, mais dans d’autres vers que le premier de la prière : Métamorphoses III, 719-720 saucius ille tamen « fer opem, matertera » dixit « Autonoe ! moueant animos Actaeonis umbrae ! »

Métamorphoses II, 35-36 ille refert : « o lux inmensi publica mundi, Phoebe pater, si das usum mihi nominis huius […]

Métamorphoses VIII, 481-482 « poenarum » que « deae triplices, furialibus, » inquit « Eumenides, sacris uultus aduertite uestros !

Fastes I, 171-172 Mox ego, « Cur quamuis altorum numina placem Iane tibi primum tura nerumque fero ?

Fastes I, 711-712 Frondibus Actiatis comptos redimita capillos Pax ades, et toto mitis in orbe mane

Fastes III, 1-2 Bellice depositis clipeo paulisper et hasta Mars ades et nitidas casside solue comas

Fastes II, vers 671, intégré à la prière se développant du vers 657 au vers 676 Termine, post illud euitas tibi libera non est

270

Troisième Partie : La mise en mots de la prière

Fastes V, 573-575 « Si mihi bellandi pater est Vestaeque sacerdos Auctor et ulcisci numen utrumque paro Mars ades et satia scelerato sanguine ferrum

Ovide joue aussi des césures pour ouvrir sa prière sur une apostrophe ou pour encadrer un nom propre : Métamorphoses VI, 159 uaticinata uias ://P « Ismenides, ite frequentes […]

Métamorphoses X, 640 inuocat Hippomenes : //P « Cytherea, » que « conprecor, ausis

Métamorphoses XI, 131 « da ueniam,//T Lenaee //F pater !//H peccauimus » inquit

Métamorphoses XIII, 556 « Tolle moras,//T Hecabe, »//P dixit « da munera nato !

Métamorphoses XIII, 669 bracchia //D« Bacche pater,//P fer opem ! »//H dixere, tulitque

Métamorphoses XIII 863 quod nollem,//T Galatea,//F tibi //H ; modo copia detur

Fastes III, 167 Cum sis officiis //P Gradiue//H uirilibus aptus

Fastes IV 827-828 Vox fuit haec regis « Condenti,//clausule Iuppiter, urbem   Et genitor //T Mauors //P Vestaque //H mater, ades,

Fastes III, 426 Numina : cognatum //P Vesta tuere caput



Chapitre II : L’invocation 271

Fastes II, 449 Parce precor grauidis //P facilis //H Lucina puellis

Ars Amatoria II, 38 Da ueniam coepto //P Iuppiter //H alte meo

La force intrinsèque du nom est ainsi accrue par les effets rythmiques et métriques. La fin du vers peut aussi accueillir un nom que le silence viendra solenniser avant le rebond du vers suivant : Métamorphoses VII, 434 ingenium faciente canunt : « te, maxime Theseu […]

Fastes I, 89 Quem tamen esse deum te dicam, Iane biformis ? Fastes II, 15 at tua prosequimur studioso pectore, Caesar

Fastes III, 334 fulminis altorum //P rexque paterque deum

Fastes III, 772 Lucifero pueris //P candide Bacche meo

Fastes III, 847 A quacumque trahis ratione uocabula, Pallas

Fastes IV, 193 Pandite, mandati memores, Heliconis alumnae

Fastes IV, 808 Venit ; ades factis, magne Quirine, tuis !

272

Troisième Partie : La mise en mots de la prière

Fastes VI, 652 Nunc ades o, coeptis, flaua Minerua, mei !

Fastes II, 451 Parce, precor, grauidis facilis Lucina puellis

Fastes, I, 3 Excipe pacato Caesar Germanice uoltu

Fastes IV, 541 Laeta canam ; gaude defuncta laboribus Ino

Ars Amatoria, II, 25 Sit modus exilio, dixit //H iustissime Minos

Héroïdes VI, 164 Viuite deuoto //P nuptaque uirque toro

Héroïdes XI, 103 Tolle procul de caede //F faces //H Hymenaee maritas

On voit là encore les Fastes se distinguer des autres œuvres ovidiennes par une pratique particulière et plus systématique. Cette œuvre apparaît de plus en plus nettement comme ayant une atmosphère unique, très travaillée et harmonieuse, différant, dans le domaine de la poétique rituelle du moins, des autres œuvres du poète. Nous verrons ultérieurement que ces singularités des Fastes ne sont pas nécessairement héritées de la tradition religieuse, qu’elle soit historique ou littéraire, mais qu’elles relèvent parfois, et même très souvent, de la pure création poétique. Certains noms propres n’apparaissent – parfois étonnamment – que sous le stylet d’Ovide. Ainsi, si Terminus est évoqué par de nombreux auteurs, de Lucrèce, Virgile et Horace à Stace, Sénèque et Claudien, seul Ovide use de la forme vocative Termine. 5 occurrences du vocatif surgissent au cours du dialogue que le narrateur du livre II des Fastes entretient avec le dieu, et



Chapitre II : L’invocation 273

ce sont les seuls emplois de cette forme dans la littérature classique33. De la même manière, Ovide est le seul auteur latin à apostropher Thémis au vocatif, au premier livre des Métamorphoses (I, 379) : Dic Themi qua generis damnum reparabile nostri. Intéressant est aussi le traitement réservé au nom de Vénus. Repris comme un leitmotiv dans son œuvre, ce nom propre revient très fréquemment, bien plus fréquemment que chez les autres élégiaques, et même chez Virgile, dont l’un des héros, pourtant, est fils de la déesse. Un tableau reprend ces emplois. Une attention particulière devra être portée aux occurrences du nominatifvocatif34, forme utilisée dans l’invocation35 : Ovide

Catulle

Virgile

Horace

Properce

Tibulle

Venus Venusque Venerem Veneremque Veneris Venerisque Venere Veneri Venerique

68 5 25 1 44 3 2 18 0

7 0 2 0 4 0 0 1 0

21 0 9 0 10 0 0 4 1

17 1 0 1 6 1 0 2 0

17 0 4 0 8 0 3 1 0

25 0 2 0 7 0 1 1 1

Total

166

14

45

28

33

37

On retrouve la même prédominance ovidienne dans l’usage de certaines épiclèses vénusiennes, comme Cytherea :

Cytherea

Ovide

Catulle

Virgile

Horace

Properce

Tibulle

13

0

6

1

1

1

33. Il faut remarquer qu’Ovide ne respecte pas dans ses prières la primauté de Janus confirmée par les travaux de recherche contemporains. Janus n’apparaît chez Ovide que dans les prières lui étant nomément adressées, et il n’ouvre jamais de manière automatique une invocation multiple. 34. Nous utilisons ce terme pour recouvrir les deux formes identiques de nominatif et vocatif singulier, que nous n’avons pas discriminées dans notre tableau. 35. Les analyses suivantes s’appuient sur les concordances électroniques proposées par l’Université de Louvain-la-Neuve à travers son logiciel Itinera Electronica, complétées par la concordance en ligne Perseus Digital Library, Tufts University.

274

Troisième Partie : La mise en mots de la prière

Ovide décline l’épiclèse en variantes, qu’il est seul à utiliser le plus souvent : Cythereia, qu’il emploie une fois, et qui n’est pas attestée avant lui36 en latin, Cythereiadas (1 occurrence), Cythereiade (1), Cythereius (4), Cythereiaca (1), Cythereiacis (1). Il est aussi le seul auteur latin à user de l’épiclèse Clusius pour Janus, épiclèse pourtant attestée par l’épigraphie et les textes officiels37, et le seul poète à apostropher Quirinus au vocatif (4 occurrences)38. Tout cela atteste chez lui une bonne connaissance liturgique, la volonté d’intégrer à la poésie la réalité cultuelle de son temps, et un fort intérêt pour la richesse et la variété des noms, qui nous « offrent l’image de l’Inconnaissable que nous avons versé en eux »39. Il est encore le seul auteur latin à user du vocatif hellénisant Hecabe, et ce à trois reprises au livre XIII des Métamorphoses. On voit que ces originalités ne concernent pas seulement des divinités proprement romaines (comme Janus, ou Terminus) qu’on aurait pu croire mal intégrées à une mythologie littéraire fortement hellénisée. Ovide manifeste donc, hors même de l’invocation, un goût prononcé pour les noms propres, goût ‘proustien’ comparable à une gourmandise verbale qui se délecte des mots charnus, au sens profond et riche, et qui ne dédaigne pas une certaine originalité. Quelques exemples de noms divins illustreront cela. Ainsi Ovide évoque d’abondance le dieu Mars :

Mars Marsque Martem Martemque Martis Martisque Marti* Marte Mauors

Ovide

Catulle

Virgile

Horace

Properce

Tibulle

20 5 4 2 20 0 14 30 7

0 0 0 0 0 0 0 0 1

5 0 5 3 11 1 2 12 5

0 0 1 0 2 0 2 5 0

1 0 0 0 1 1 0 2 1

1 0 1 0 2 0 1 3 0

36. Le terme sera repris ensuite par Stace, Martial, Silius Italicus et Claudien. 37. On peut consulter à ce sujet G. Capdeville, « Les épithètes cultuelles de Janus », MEFR 85, 1973, p. 395-436. 38. On retrouve, en prose, la forme chez Tite-Live (3 occurrences), Tacite (1) et Martial (1). 39. M. Proust, Le Côté de Guermantes, Paris, Gallimard, 1919, p. 11.



Chapitre II : L’invocation 275

Mauortis Mauortisque Total

Ovide

Catulle

Virgile

Horace

Properce

Tibulle

3 0 105

0 0 1

2 0 46

0 1 11

0 0 6

0 0 8

* Les formes Mauorsque, Mauortem, Mauortemque, Mauorti, Mauortique, Mauorte et Mauorteque ne sont pas représentées chez les élégiaques, ni chez Virgile, Horace ni Catulle.

Autre divinité essentielle, Jupiter :

Iupiter/ Iuppiter Iupiterque/ Iuppiterque Ioue Ioueque Iouem Iouemque Iouis Iouisque Ioui Iouique Total

Ovide

Catulle

Virgile

Horace

Properce

Tibulle

110

8

39

16

15

3

0

0

0

0

0

0

72 0 32 4 103 2 48 1 372

0 0 1 0 4 0 0 0 13

8 0 9 1 35 1 5 0 98

7 0 6 0 14 0 8 0 51

2 0 7 0 13 0 3 0 37

1 0 0 0 3 0 5 0 12

Ovide aime tout particulièrement la forme vocative, assez rare chez les autres poètes, ce qui révèle l’abondance, dans son œuvre entière, et non seulement dans les Fastes, de l’invocation et du dialogue avec les dieux. Cet élément devrait lui aussi, ajouté aux autres, amener les lecteurs à revoir leur jugement sur le regard sceptique et irrévérencieux qu’Ovide porterait sur le monde divin, et à repenser la dimension spirituelle de la poésie ovidienne, qui est une tension permanente vers un monde supérieur, incarné par l’Art et, dans une moindre mesure, par les dieux, et non l’ironique immanence trop souvent évoquée. Observons maintenant l’emploi ovidien de quelques vocatifs divins (parfois non dissociés du nominatif, quand la forme est la même métriquement) :

276

Troisième Partie : La mise en mots de la prière

Quirine Neptune Lucina Nymphae Nymphaque Nymphaeque Nymphe Flora Pierides* Pieridesque Pales Phoebe** Bacche Iane Ianus Gradiue Vesta Vestaque Indigetes Robigo Ilithyia

Ovide

Catulle

Horace

Virgile

Properce

Tibulle

5 8 8 40 3 1 16 1 6 1 3 26 19 5 10 3 6 1 1 1 1

0 0 1 0 0 0 0 0 1 0 0 1 0 0 0 0 0 0 0 0 0

0 0 1 2 0 0 0 0 1 0 0 2 3 2 1 0 0 0 0 0 0

0 4 1 19 0 1 0 0 5 0 3 6 3 0 2 1 1 1 1 1 0

0 2 1 0 0 0 0 0 1 0 0 3 5 0 0 0 5 0 0 0 0

0 0 1 0 0 0 0 0 2 1 1 10 4 0 0 0 0 0 0 0 0

* Pour ce nom, une nuance est à apporter : le nominatif-vocatif et l’accusatif ne sont pas discriminés, ce qui amène à prendre ces chiffres avec une très grande prudence. Il en va de même pour nymphae et nymphaeque, qui peuvent être des formes de nominatif-vocatif mais également des datifs. ** Masculin et féminin confondus.

Ces tableaux comparatifs attestent que la pratique ovidienne se différencie nettement de celle des poètes contemporains, par un usage très abondant du vocatif, usage qu’on ne peut circonscrire à quelques noms propres en particulier mais qui se généralise à de nombreux noms de lieux. Ovide joue avec la musique de ces noms comme avec les notes d’une gamme, il utilise les modulations qu’offre la déclinaison pour ouvrir ses vers à l’univers poétique et religieux que ces noms concentrent en eux, qu’ils évoquent en même temps qu’ils le contiennent, en une sorte de profondeur infinie.



Chapitre II : L’invocation 277

« Seul Iâo, le dieu aux trois voyelles, qui, par ses lettres, tenait à la structure même du langage, aux chants des sphères et à l’origine du monde, pouvait être dit, appelé et chanté dans tout l’univers »40. Le recours au nom propre n’apparaît toutefois pas comme le type d’invocation le plus fréquent dans l’œuvre ovidienne. Ovide alterne avec des périphrases, ou des substantifs au vocatif, parfois remplacés par des adjectifs substantivés qui suffisent à identifier le destinataire, et qui peuvent parfois être reçus comme des noms propres. Cette catégorie grammaticale est d’ailleurs assez problématique. Il n’entre pas dans notre propos d’en développer une analyse linguistique fine ; nous renvoyons simplement aux travaux de Jean Molino, qui donnent un bon aperçu de la question. Selon lui, deux théories principales s’opposent, l’une voyant le nom propre comme une simple « étiquette » vide, pur objet phonique, et l’autre le voyant comme « le mot dont la signification est la plus vaste » : « d’un côté les théories selon lesquelles le nom propre n’a pas de connotation [Mill], est une étiquette dont toute la signification s’épuise dans sa réalité phonique (« so und so Genanntsein » de Funke et Marty), un mot « qui est reconnu comme identifiant son objet en vertu de la distinctivité exclusive de sa constitution phonique » [Gardiner, 1954] ; de l’autre côté les théories pour lesquelles les noms propres « sont les plus significatifs de tous, étant les plus individuels » [Bréal, 1897, p. 198 ; cf. aussi Jespersen, Dauzat, cités in Sorensen, 1963]. »41 Les adjectifs substantivés étudiés ici tiennent lieu d’épiclèses, puisqu’ils servent à appeler la divinité, à attirer son attention bienveillante sur les prières des hommes. Mais ils ne sont pas à proprement parler liturgiques, et ne reprennent que rarement des épiclèses religieuses, qu’elles soient toponymiques, mythologiques ou cultuelles. L’imagination et l’originalité du poète s’adaptent au contexte fictionnel de chaque prière : si l’on retrouve parfois des termes fréquents dans les prières tant liturgiques que littéraires, comme pater ou l’épithète alma, Ovide innove très souvent, en usant de vocatifs originaux.

Epithètes et épiclèses « Les dénominations – entendons par là toutes les manières de désigner le dieu autres que son nom propre – sont tout le contraire de vains ornements. Même si elles touchent l’essence de moins près que ne font les noms euxmêmes, elles jouent un rôle décisif dans l’expression des croyances religieuses, 40. M. Philonenko, « Nommer le dieu Iaô »Nommer les Dieux (469), p. 426. 41. J. Molino, « Le nom propre dans la langue », Langages, 66, 1982, p. 5-20 (p. 13).

278

Troisième Partie : La mise en mots de la prière

parce qu’elles permettent de mieux connaître les dieux et de définir leurs pouvoirs, et aussi parce qu’elles servent à instaurer des rapports entre les dieux (notamment grâce au partage d’une même dénomination), point qui est fondamental dans le polythéisme »42. Certaines divinités aux multiples facettes, dont on a évoqué la forte présence dans l’œuvre d’Ovide, comme Bacchus, Apollon ou Vénus, inspirent le poète par le fréquent retour de leurs invocations, et l’invitent à la variété. Apollon est ainsi lux immensi publica mundi (Métamorphoses II, 35), Phoebe pater (ibidem), aussi bien que Phoebe, tout simplement (Métamorphoses VIII, 350). Vénus est la genitrix d’Hermaphrodite, selon les règles de l’éthos poétique, mais elle est aussi désignée en Métamorphoses X, 641 par l’épiclèse toponymique hellénisante Cytherea et par la périphrase dea numinis auctor, en X, 673. Elle est la déesse par excellence en Amours II, 8, 19, tu dea – ce qui ne surprend guère en cette œuvre élégiaque – de même qu’en Amours III, 2, 56, diua, sa bienveillance et sa douceur étant alors soulignées par l’épithète blanda. Une autre épiclèse toponymique apparaît en Amours III, 15, 15, Amathusia, qui révèle, au sein de notre corpus, le souci de uarietas souvent présent chez Ovide. Les Fastes soulignent le lien particulier qui unit le poète à la déesse inspiratrice de son chant. Elle est le guide de son œuvre, dux operis (Fastes IV, 247), la toute divine et la très-belle (Fastes IV, 16143) et elle est associée à son fils dans la périphrase de Fastes IV, 1 alma faue geminorum mater Amorum comme en Ars Amatoria I, 30, mater Amoris. L’épithète alma, traditionnelle pour Vénus – que l’on songe à la très-célèbre invocation lucrétienne44 – convient également très bien à d’autres divinités nourricières, qui s’en voient qualifiées par Ovide, comme Palès ou Tellus. Comme le dit Servius (ad Aen. X, 252) alma prope est tellus ab eo quod nos alat, abusiue etiam aliis numinibus hoc epitheton datur45. G. Appel donne plusieurs exemples vénusiens, puis mentionne Cerès (Virgile, Géorgiques, I, 7), Cybèle (Virgile, Enéide, X, 252 et Ovide Fastes IV, 819), Diane (Virgile, Enéide, XI, 42. L. Pernot, art. cit in Nommer les dieux (469). 43. Par cette épithète, Ovide honore aussi la puissance de Vénus, et non sa seule beauté, comme le montre l’application du même terme à Picus (Métamorphoses XIV, 373) et Esculape (Métamorphoses XV, 678). G. Appel rappelle d’ailleurs une des étymologies de l’adjectif pulcher, qui se rattacherait au verbe pollere, « olim non deorum uenustas sed potestas praedicata fuisse uidetur » (p. 100). 44. Rappelons le vers d’ouverture du De Rerum Natura : Aeneadum genetrix, hominum divomque voluptas,
alma Venus…. 45. voir G. Appel (276), De Romanorum precationibus, p. 99.



Chapitre II : L’invocation 279

557) mais aussi des divinités masculines, ce qui justifie dans une certaine mesure l’adverbe abusiue de Servius : Priape (Anthologie Latine, II, 1504, 31), Sol (Horace, Carmen Saeculare 9), Annus et ‘Fons quidam’ chez Ausone (III, 6, 7 et XI, 20, 1). Mais ces qualifications masculines sont toutes tardives, et Ovide se conforme à l’usage traditionnel et contemporain en n’appliquant l’adjectif qu’à des divinités féminines. Dans ses invocations ou ses évocations divines, Ovide fait alterner les noms propres avec des périphrases, ou des substantifs au vocatif, parfois remplacés par des adjectifs substantivés qui identifient le destinataire, et qui peuvent parfois être reçus comme des noms propres. Cette catégorie grammaticale est assez problématique. Pour son analyse linguistique, nous renvoyons aux travaux de Jean Molino.46 Les adjectifs substantivés étudiés ici tiennent lieu d’épiclèses, puisqu’ils servent à appeler la divinité, à attirer son attention bienveillante sur les prières des hommes, en la singularisant au moyen de l’une de ses qualités ou de ses particularités. Mais ils ne sont pas à proprement parler liturgiques, et ne reprennent que rarement des épiclèses religieuses, qu’elles soient toponymiques, mythologiques ou culturelles. L’imagination et l’originalité du poète ne sont arrêtées par aucun frein, et s’adaptent au contexte fictionnel de chaque prière : si l’on retrouve parfois des termes fréquents dans les prières tant liturgiques que littéraires, comme pater, summe deum ou l’épithète alma, Ovide innove très souvent, en usant d’un lexique original. Nous ne nous attacherons qu’à quelques exemples. L’épiclèse Paraetonium apparaît à deux reprises chez Ovide (dans des prières à Isis), alors que hors de ses œuvres le mot n’est attesté qu’à trois reprises chez Pline l’Ancien, dans ses études consacrées à l’Egypte, et une fois chez Vitruve, dans un contexte identique. Au niveau métrique, l’usage du mot est une gageure : Ovide l’emploie deux fois à la même place métrique, en deuxième position du vers, après le vocatif Isi, exploitant ainsi sa forme étonnante u-uu-, qui ressemble à une suite dynamique iambe-anapeste, caractéristique des sénaires iambiques de théâtre. Et il l’associe à d’autres termes tout aussi rares et imposants : Métamorphoses IX, 770 Isi, Paraetonium Mareoticaque arva Pharonque Amours II, 13

Isi, Paraetonium genialiaque arva Canopi quae colis et Memphin palmiferamque Pharon

46. J. Molino, « Le nom propre dans la langue », Langages, 66, 1982, p. 13.

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Troisième Partie : La mise en mots de la prière

Mareoticaque n’apparaît qu’ici dans toute la littérature latine, et aucun mot de cette famille n’apparaît avant Ovide, sauf Mareoticus, une fois, chez Horace. On trouve quelques emplois descriptifs de Mareotis chez Pline. Genialiaque est aussi un hapax…sachant que même la forme simple genialia n’est pas recensée avant Ovide (et qu’elle ne reçoit que 5 occurrences d’une manière générale, dont 2 chez Ovide). Palmiferamque est également un hapax, les deux seules autres formes attestées étant palmiferae (une fois chez Properce) et palmiferos (une fois chez…Ovide). Pharon enfin n’apparaît qu’une fois avant Ovide, dans un commentaire de César sur la Guerre d’Alexandrie, mais est souvent repris après, par exemple par Lucain dans la Pharsale. Lucain est encore avec Ovide le seul auteur latin à utiliser la forme Pharonque. On est donc confronté à ce qui apparaît comme un usage poétique tout à fait particulier de théonymes existant pourtant bien dans la réalité historique. On assiste à l’élaboration d’un nouveau langage poétique du sacré, et cela n’a peut-être pas été suffisamment souligné par la critique ovidienne. Les mots que le poète crée et qu’il utilise dans ses invocations sont, assez majoritairement, d’une longueur étonnante et constituent donc des défis métriques (qu’on pense à l’hapax immansuetissime qui apparaît dans les Héroïdes, et que personne n’a osé reprendre)47. Ovide use, outre les épiclèses traditionnelles que nous venons d’évoquer, de quelques épithètes ou épiclèses rares, par lesquelles s’illustre son souci de l’innovation et de l’originalité, tout autant que l’attention théologique qui lui permet de mettre en lumière de manière créative des informations très intéressantes sur la représentation des dieux, leur pouvoir ou même leur identité réelle. Ainsi Janus est-il biceps. Cette épithète se rattache à la représentation physique conventionnelle du dieu. Pourtant Ovide est le seul poète augustéen à en faire usage, et ce à quatre reprises, dans les Métamorphoses, les Fastes, et les Pontiques. Il est aussi biformis, et là encore Ovide se distingue : l’adjectif apparaît 7 fois dans son œuvre, pour une seule apparition chez Horace et une autre chez Virgile ; il rappelle le dimorphon de l’hymne orphique à Dionysos (30). De même, certaines épithètes liées à la douceur et à la fécondité ont sa préférence : blanda apparaît 22 fois chez lui, contre une occurrence chez Catulle, Horace, Virgile, Properce et Tibulle. L’épithète pulcherrime, que nous avons déjà évoquée et que G.  Appel associe à l’idée de puissance, apparaît à 10 reprises dans son œuvre, alors qu’elle n’apparaît qu’une fois chez Virgile, seul autre poète à en faire usage. 47. Ovide, Héroïdes, 18, 37.



Chapitre II : L’invocation 281

Le féminin pulcherrima est plus apprécié, quoique rare chez les poètes : 10 occurrences chez Ovide et 14 chez Virgile, mais seulement une chez Properce, et aucune chez Horace, Catulle ou Tibullle. Autre superlatif, fortissime n’apparaît que chez Ovide parmi les poètes augustéens : 9 occurrences chez lui, aucune chez les autres. Et son usage du très célèbre et traditionnel alma est lui aussi amplifié : on en trouve 22 occurrences dans ses œuvres, pour 16 chez Virgile mais une seule chez Tibulle, Properce et Horace. Catulle ne l’utilise pas. On retrouve la même particularité pour flaua48, épithète traditionnelle de Cérès, de Minerve et d’autres divinités amicales : 15 occurrences chez Ovide, 3 chez Virgile, 1 chez Horace et Tibulle, aucune chez les autres poètes. De la même manière enfin, Mars est bellice, ce qui se justifie et se comprend aisément ; pourtant le vers dans lequel apparaît cette épithète en donne l’unique occurrence à la fin de la République et à l’époque augustéenne. Encore une fois, Ovide est isolé, alors que son usage paraît en parfaite cohérence avec l’atmosphère religieuse de son époque. Et c’est peut-être même pour cette dernière raison que ses choix poétiques sont si particuliers, parce qu’il est plus proche que les autres poètes des habitudes et des réalités liturgiques49 : la création épiclétique ovidienne porte une charge ontologique et théologique, en plus de sa portée poétique. Le dieu avec lequel Ovide entretient la relation la plus profonde est Bacchus, avec qui il noue les liens particuliers que nous avons déjà évoqués. Il est pater selon l’épiclèse rituelle que l’on retrouve dans de très nombreuses prières adressées à des dieux masculins, dans les textes historiques comme dans les textes littéraires50 : ainsi sont désignés Janus et Jupiter – conformément à l’usage – en Métamorphoses XIV, 587, Métamorphoses VII, 627 et F6 (M78, F48), mais aussi Apollon (Métamorphoses II, 36) ou Mars (Ars Amatoria I, 203). Mais certaines caractéristiques contextuelles peuvent être soulignées : il est ainsi Lenaee pater dans un vers à la métrique remarquable (Métamorphoses  XI, 131)51, mais il est aussi, dans le grand hymne que lui adressent ses fidèles en Métamorphoses IV, 9-32, Bromius et Lyaeus, seul à avoir

48. Il faut ajouter ici les occurrences de flauaque : 3 chez Ovide, 1 chez Virgile et Tibulle. 49. Au sujet de l’épithète ultor, nous renvoyons à la belle étude que Maud Pfaff-Reydellet lui a consacrée dans les actes du colloque Nommer les Dieux (VIème partie)(212). 50. A ce sujet, on consultera avec intérêt les pages 101 à 103 de G. Appel (276), De Romanorum precationibus. 51. Da ueniam Lenaee pater peccauimus inquit : DSDSDS, avec une césure trochaïque troisième encadrée par une trihémimère et une hephthémière, selon le schéma nommé ‘triple a’.

282

Troisième Partie : La mise en mots de la prière

bénéficié d’une double matrice, Nysaeus, indetonsus Thyoneus, cum Lenaeo52 genialis consitor uuae, Nyctelius et Eleleus parens, Iacchus, Euhan, et enfin Liber, ‘au milieu des noms encore plus nombreux que lui donnent les nations de la terre’ (v. 16-17). Relisons cet hymne : Métamorphoses IV, 9-32 turaque dant Bacchumque uocant Bromiumque Lyaeumque Ignigenamque satumque iterum solumque bimatrem Additur his Nyseus indetonsusque Thyoneus et cum Lenaeo genialis consitor uvae Nycteliusque Eleleusque parens et Iacchus et Euhan, et quae praeterea per Graias plurima gentes nomina, Liber, habes. tibi enim inconsumpta iuventa est,  tu puer aeternus, tu formosissimus alto conspiceris caelo ; tibi, cum sine cornibus adstas, virgineum caput est ; Oriens tibi victus, adusque decolor extremo qua tinguitur India Gange. Penthea tu, venerande, bipenniferumque Lycurgum sacrilegos mactas, Tyrrhenaque mittis in aequor corpora, tu biiugum pictis insignia frenis colla premis lyncum. bacchae satyrique sequuntur

Faisons quelques remarques sur les noms et épiclèses par lesquels le dieu est invoqué et chanté. Les épiclèses à tendance syncrétique offrent du dieu une image quasi universelle, couvrant de vastes territoires et recoupant diverses cultures, de l’Orient à l’Occident. Elles ne sont pas des créations ovidiennes, comme le rappelle Jerzy Danielewicz, dans l’article qu’il consacre à cet hymne : « it has been long accepted (by Lobeck, Peterson, Wünsch, Keydell) that Ovid’s hymns, like the later Orphic hymns, may be based on earlier Greek poems addressed to Dionysos […]. The most stricking common feature is the accumulation of cult epithets. »53 Et il rattache ces épithètes cultuelles à la tradition orphique, dans laquelle elles trouvent leur contrepoint (p. 74). Selon lui, il serait possible de traduire ce passage de l’hymne ovidien en grec « using almost exclusively words occurring in the Orphic hymns » (p. 74). Toutefois il ne tient pas pour une nature orphique de l’hymne ovidien, mais plutôt 52. Midas usera aussi de cette épiclèse lorsqu’il suppliera Bacchus de le délier de son vœu funeste : Métamorphoses IX, 131-133. Bacchus est, là encore, celui qui libère et délivre. 53. J. Danielewicz (71), « Ovid’s hymn to Bacchus (Mét., IV, 11 sqq) : tradition and originality », Euphrosyne, 18, 1990, p. 73-84.



Chapitre II : L’invocation 283

pour un modèle formel commun. Selon lui, et nous partageons cette opinion, « Bacchus, as conceived by Ovid, is not a rather impersonal deity » […] ; « one can observe here a more refined principle of grouping related epithets together » (p. 75). Les trois premières épithètes feraient office ‘d’épithètes cultuelles’ et en même temps de « proper names », le premier, Bacchus, en Grec et en Latin, les deux autres, Bromios et Lyaios, dans l’usage grec. « Ces termes remplissent la fonction d’identification du destinataire »54, à laquelle il faut ajouter une détermination théologique. Les épithètes Nyseus et Thyoneus se rattachent « à la naissance du dieu » « which is a traditionnal hymnic theme to be found in this very position in some of the Homeric hymns »55. Puis vient l’identification de Bacchus comme dieu du vin, par les épithètes Lenaeus genialis consitor uuae. « The orgiastic aspect of the cult is emphasized in line 15 Nyctelius, Eleleus, Iacchus, Euhan »56. Ces choix ovidiens dessinent une image particulière du dieu, introduite, comme dans la tradition des hymnes homériques, par les épiclèses initiales : Bromius et Lyaeus. J. Danielewicz rattache cette polyonymie à la technique narrative ovidienne, le poète aimant à apostropher ses destinataires pour montrer ainsi « qu’il n’appartient pas au monde commun »57. Mais le point de vue final adopté par Ovide reste latin, et s’oppose aux noms usités per Graias gentes. Ces noms ne sont pas propres à Ovide et semblent tous appartenir à la tradition, et pourtant ils apparaissent étonnamment peu dans la littérature, si l’on excepte les formes Liber et Lenaeus (ici Lenaeo) qui fleurissent chez presque tous les élégiaques. Le nom Nyseus n’apparaît que chez Ovide, comme Nyctelius, qui s’allonge en Nycteliusque dans l’unique autre attestation du terme (si l’on excepte une reprise sénèquienne de Nyctelius58) Nycteliumque (Art d’Aimer I). Hapax aussi l’épithète indetonsusque, seule forme de cette famille de mots à être attestée dans la littérature latine. Elle est formée sur l’adjectif déverbatif detonsus, qui est quant à lui bien attesté, et on reconnaît encore dans cette création ovidienne (ou cette reprise ?) un goût pour l’emphase et le volume verbal. De la même manière, le participe inconsumptus n’est attesté que chez Ovide : deux fois sous la forme inconsumpta (Métamorphoses IV, VII), reprise une fois par Stace, une fois sous la forme inconsumpto (Ibis) et une fois sous la forme 54. 55. 56. 57. 58.

« fulfilling the function of indicating the addressee » p. 75. ibid. ibid. « the narrator does not belong to the presented world » p. 76. Œdipe, vs 492.

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Troisième Partie : La mise en mots de la prière

inconsumptum (Pontiques I), tout comme ignigenus, attesté seulement sous cette forme ignigenam chez Ovide, cité par Boccace, et repris encore sous la forme ignigena (Généalogie des Dieux). Eleleusque est la seule attestation du terme dans toute la littérature latine, sans aucune occurrence d’un quelconque terme de la même famille, et Euhan n’apparaît que chez trois auteurs, chez Ovide (ici) et chez Stace, à 13 reprises… et chez Ennius, dans une évocation bacchique qui fait entendre un certain nombre de noms évoqués ici, et qui atteste leur existence dans la langue religieuse romaine : Q. Ennius59 IX 123 His erat in ore Bromius, his Bacchus pater, Illis *** Lyaeus *** vitis inventor sacrae : 125 Tum pariter euhan euhoe euhoe euhium 126 Ignotus iuvenum coetus alterna vice Inibat, alacris Bacchico insultans modo.

Bromiumque est un hapax, alors que l’appellation est liturgique puisqu’on la trouve, outre chez Ennius, au vocatif chez Plaute : Eoe Eoe Bromie (Les Ménechmes, V, 2). Bromius n’apparaît que chez Martial et Arnobe (et à la Renaissance chez Ange Politien et Boccace), tandis que la forme grecque Bromios, attendue, n’apparaît qu’une fois, chez Claudien, dans une évocation des thyases bacchiques60. De même Lyaeus est rarissime, alors que c’est encore un terme liturgique attesté chez Virgile, puis Stace à l’accusatif, chez Ennius au nominatif et chez Martial seulement au vocatif, et qu’il abonde sous la forme Lyaeo (Virgile, Horace, Properce, puis Lucain, Silius Italicus, etc.). Ovide a, semble-t-il, forgé l’adjectif bipennifer, qu’il est le seul à utiliser, et ce à trois reprises (bipennifer en Métamorphoses VIII, 391, bipenniferi en Tristes V, 3, 39 mais jamais pour Bacchus), tout comme l’adjectif bimatrem, attesté nulle part ailleurs, et qui dérive d’une forme bimater qu’on ne trouvera que chez Boccace, dans sa Généalogie des Dieux très fortement inspirée d’Ovide. Formosissimus est virgilien, mais reste rarissime : il n’apparaît qu’une fois dans les Bucoliques, avant de revenir chez Ovide (dont une fois dans l’Art d’Aimer dans une pure reprise virgilienne) puis de s’épanouir chez les auteurs ultérieurs (surtout chrétiens). De même le vocatif uenerande, qui est pourtant liturgique, n’apparaît qu’une fois chez Virgile, et 3 fois chez Ovide. Ensuite, il est repris 59. Ennius, Tragoediarum fragmenta (in aliis scriptis seruata), vs 123, p. 138. 60. La forme Bromioque apparaît chez Lucain, dans une association avec Apollon Phébus (Pharsale, V, 73).



Chapitre II : L’invocation 285

à foison par les auteurs postérieurs, de Martial à Stace et Claudien, et tout particulièrement par les auteurs chrétiens (Augustin, Corippe). Quelles hypothèses fait naître ce rapide survol de l’hymne qu’adresse Ovide au début des Métamorphoses à une divinité qui est au cœur de sa poésie et de sa vision du monde ? Aucune divinité ne suscite dans l’œuvre ovidienne une telle floraison verbale, une telle créativité, respectueuse pourtant de la tradition puisqu’elle s’appuie, comme on l’a vu, assez souvent sur des précédents enniens ou virgiliens, non repris par les autres poètes. Seules Isis et Vénus bénéficient sporadiquement de ce qu’on pourrait appeler une ‘solennisation nominale’. Bacchus est au centre de l’œuvre ovidienne, au même titre qu’Apollon et Vénus, et peut-être davantage encore. Or il est maintenant bien connu que Bacchus est, avec Dionysos et Zagreus – les trois divinités constituant en quelque sorte les hypostases d’un même dieu –, le dieu central du culte orphique : la source poétique du foisonnement créatif ovidien en matière de nomination divine pourrait être à chercher dans l’hymnique et la pensée philosophico-poétique, qui me semblent être extrêmement proches de l’esthétique ovidienne, véritable ‘pensée de la Parole’. La poétique des noms de dieux participe de manière éminente au « chant du monde » qu’est en profondeur la poésie ovidienne. Dans tous les cas, la πολυωνυμιᾳ est « de nature à accroître le prestige d’une divinité »61. En effet, poursuit D. Aubriot, « interpeller un dieu au moyen de plusieurs noms est assurément lui octroyer un surcroît de puissance, dès l’instant que le déclarer πολυωνυμος (ou le traiter comme tel) est reconnaître que ses pouvoirs sont multiples ou étendus, que ses fonctions sont diverses, et ses lieux de culte nombreux. Ainsi voit-on les épiclèses s’accumuler, se redoubler de participes ou de subordonnées qui viennent gonfler l’invocation jusqu’à lui faire occuper une place importante (voire essentielle) de la prière ou de l’hymne. Un tel procédé était déjà en germe non seulement dans les Hymnes Homériques, même anciens, mais aussi dans l’Iliade […]. Cependant c’est dans les Hymnes Orphiques que ce procédé est exploité méthodiquement. […] Les épiclèses accumulées en système paraissent » alors « porteuses d’une autre signification : ces énumérations aboutissent à la recherche d’une manière de définition de la personne divine, comme pour mieux embrasser son ‘être’. Tout en présentant une louange agréable à la divinité, elles contribuent à construire une sorte de théologie ».

61. D. Aubriot, « L’invocation au(x) dieu(x) dans la prière grecque : contrainte, persuasion ou théologie ? », in Nommer les dieux (469), p. 473-490.

286

Troisième Partie : La mise en mots de la prière

Si nous avons cité ce long extrait de l’article que D. Aubriot consacre aux hymnes grecs, c’est qu’il nous semble éclairer d’un jour intéressant l’hymne ovidien à Bacchus. Au-delà des analyses littéraires et intertextuelles que l’on a proposées (en les rattachant par exemple aux hymnes callimaquéens), il nous paraît important de voir que les Métamorphoses, dont on a tant exposé la légèreté, et tout particulièrement à l’égard des dieux, participent ici du même processus religieux que les Fastes, dont elles sont plus proches qu’on ne le dit souvent, et que cette densité religieuse s’accompagne d’une dimension métapoétique qui s’attache à faire de la figure de Bacchus, divinité complexe et fascinante, une divinité tutélaire pour les jeunes poètes. Nous revenons là à la ‘mystique poétique’ propre à Ovide, qui resacralise d’une certaine manière le monde des dieux, en insufflant à certaines divinités une énergie qui les redessine et leur redonne corps, par l’intercession de la Poésie. Pour clore cette étude de l’invocation chez Ovide, voyons un exemple synthétique, l’hymne à Mercure des Fastes. Il se compose d’une longue célébration du dieu, construite sur trois phrases. La première de ces phrases se développe sur 6 vers, et est donc trois fois plus longue que chacune des deux autres phrases, qui prennent respectivement une forme de distique : Fastes V, 663-672 Clārĕ nĕpōs //T Ātlāntĭs,//F ădēs,//H quēm mōntĭbŭs ōlīm   Ēdĭdĭt Ārcădĭīs // Plēĭăs ūnă Iŏuī, Pācĭs ĕt ārmōrūm //P sŭpĕrīs īmīsquĕ dĕōrūm   Ārbĭtĕr, ālātō // quī pĕdĕ cārpĭs ĭtēr, Lāetĕ lўrāe pūlsū,//P nĭtĭdā quŏquĕ lāetĕ pălāestrā   Quō dĭdĭcīt cūltē // līnguă dŏcēntĕ lŏquī ; Tēmplă tĭbī //T pŏsŭērĕ //F pătrēs //H spēctāntĭă Cīrcūm   Īdĭbŭs ; ēx īllō (e)st // hāec tĭbĭ fēstă dĭēs. Tē quīcūmquĕ sŭās //P prŏfĭtēntūr uēndĕrĕ mērcēs   Tūrĕ dătō,//T trĭbŭās // ūt sĭbĭ lūcră rŏgānt. « Viens m’inspirer, illustre petit-fils d’Atlas, toi que jadis, sur les monts d’Arcadie, une Pléiade donna pour fils à Jupiter ! Toi, l’arbitre de la paix et de la guerre pour les dieux du ciel comme pour ceux des enfers, toi qui voyages d’un pied ailé, toi qui aimes le son de la lyre, qui aimes aussi la palestre luisante, toi dont les leçons enseignent à parler avec art, le sénat t’a dédié, aux Ides, un temple qui regarde le Cirque : depuis, ce jour est celui de ta fête. Quiconque fait profession de vendre des marchandises t’offre de l’encens et te demande de lui faire gagner de l’argent ».



Chapitre II : L’invocation 287

L’invocation du dieu est particulièrement soignée. Son nom n’apparaît pas dans l’hymne, mais il est suggéré, par un subtil jeu phonique et étymologique, à travers le terme merces. Ovide interpelle le dieu au moyen d’épithètes et de propositions relatives : 5. vocatif : clare nepos Atlantis 6. relative : quem pleias edidit 7. vocatif : arbiter pacis et armorum 8. relative : qui carpis iter 9. vocatif : laete… quoque laete 10. relative : quo La symétrie extrême de la construction est allégée par les effets de uariatio qu’introduisent les flexions des relatifs. Cette longue phrase initiale - dont le seul verbe principal tient dans la forme ades, iambe engoncé dans un schéma de ‘triple a’ propre à la célébration du sacré et au récit mythique - répond bien aux exigences de l’énoncé de définition, qui constitue la première partie d’un hymne. Elle correspond aussi à l’esthétique des hymnes orphiques, dans lesquels la pars epica est remplacée par une suite de relatives laudatives, pouvant en reprendre le contenu. Les épithètes que choisit Ovide reprennent en écho celles par lesquelles Horace avait célébré Mercure dans ses Odes (I, 10) : Mercuri, facunde nepos Atlantis, Qui feros cultus hominum recentum Voce formasti catus et decorae More palestrae, Te canam, magni Jouis et deorum Nuntium curuaeque lyrae62 parentem, Callidum, quicquid placuit, jocoso Condere furto. Te, boues olim nisi reddidisses Per dolum amotas, puerum minaci Voce dum terret, uiduus pharetra Risit Apollo. Quin et Atridas duce te superbos IIio diues Priamus relicto Thessalosque ignes, et iniqua Trojae Castra fefellit. Tu pias Laetis animas reponis Sedibus uirgaque leuem coerces 62. cf. Fastes, V, 104 : inuentor curuae, furibus aptis, fidis.

288

Troisième Partie : La mise en mots de la prière Aurea turbam, superis deorum Gratus et imis. « Mercure, éloquent petit-fils d’Atlas, toi qui eus l’art d’adoucir par ta voix et d’embellir par l’habitude de la palestre les premiers hommes au caractère sauvage, je veux te chanter, messager du grand Jupiter et des dieux, inventeur de la lyre creuse, habile à cacher tout ce que tu t’es amusé à dérober. C’est toi qui, par ruse, as enlevé ses bœufs à Apollon ; tu étais tout jeune, et il prenait une voix menaçante pour t’effrayer, si tu ne les lui rendais pas ; mais il se mit à rire quand tu lui dérobas son carquois. C’est toi qui conduisais le riche Priam quand, au sortir d’Ilion, il réussit à tromper l’attention des Atrides orgueilleux et échappa aux feux de garde des Thessaliens et au camp des ennemis de Troie. C’est toi qui mènes dans les demeures des bienheureux les âmes pieuses et qui, avec ta verge d’or, rassembles leur troupe légère : tu es cher aux dieux d’en haut et à ceux d’en bas. »

L’inspiration horatienne est nette dans cette invocation qui est plus une habile et référentielle propédeutique à la prière qu’un hymne réel. Ovide reprend son illustre prédécesseur mais après l’énoncé des qualités du dieu, il omet le récit du vol des bœufs d’Apollon, qui constitue la pars epica de l’hymne homérique à Hermès et qu’Horace rapporte lui aussi aux vers 9-12. Et lorsqu’il place en tête de vers le pronom de deuxième personne, comme Horace le fait trois fois dans son poème, c’est pour introduire un personnage original, qui appartient au monde fictionnel des Fastes : le marchand auquel il fera prononcer la prière à Mercure que cet hymne annonce. Le silence fait sur les récits mythiques inspirés d’Homère permet à Ovide de recentrer son poème sur le dieu latin Mercure, qui s’affranchit ainsi quelque peu du grec Hermès. Les trois premiers distiques sont inspirés d’Horace et imprégnés de mythes littéraires63, mais le distique suivant sollicite des notions purement romaines : Fastes v. 669-672 Tēmplă tĭbī //T pŏsŭērĕ //F pătrēs //H spēctāntĭă Cīrcūm   Īdĭbŭs ; ēx īllō (e)st //P hāec tĭbĭ fēstă dĭēs.

Le dernier distique introduit enfin, comme nous l’avons dit, le personnage du marchand, propre à Ovide. L’hymne progresse donc de la référence 63. on y retrouve deux fois le schéma métrique DSDS, absent des hymnes des Fastes hors cette occurrence et dont J. Collart a montré la connotation solennelle (cf. J. Collart (596), « Sentences et formules monostiques chez Virgile et Horace »).



Chapitre II : L’invocation 289

horatienne - et, au-delà, homérique - vers une évocation romain, l’originalité ovidienne résidant dans cette romanisation et cette épuration progressives.

Usage de la particule élégiaque Les invocations au vocatif sont souvent introduites par une ‘particule élégiaque’, qui peut sembler un élément attendu du style précatif. Recensons quelques emplois de notre corpus : Métamorphoses II, 35 Ille refert : o lux immensi publica mundi

Métamorphoses II, 279 Si placet hoc meruique, quid o tua fulmina cessant

Métamorphoses IV, 532 Sic patruo blandita suo est « o numen aquarum

Métamorphoses IV, 583 Accede, o coniunx, accede, miserrima, dixit

Métamorphoses IV, 769 Qui simul edocuit, « nunc o fortissime » dixit

Métamorphoses V, 489 Atque ait « o toto quaesitae uirginis orbe

Métamorphoses VI, 262 Bracchia sustulerat « di » que « o communiter omnes

Métamorphoses V, 221 Non cessisse piget, nihil, o fortissime, praeter

Métamorphoses VIII, 97 Di te summoueant, o nostri infamia saecli

290

Troisième Partie : La mise en mots de la prière

Métamorphoses XII, 586 O mihi de fratris longe gratissime natis

Métamorphoses X, 483 Est tales complexa preces : « o si qua patetis

Amours II, 9a, 1 O numquam pro re satis indignande Cupido

Métamorphoses XIV, 372 Nacta locum tempusque « per o, tua lumina » dixit

Métamorphoses XIV, 729 Si tamen, o superi, mortalia facta uidetis

Métamorphoses XIV, 761 Prospicientis habet. Aequorum memor, o mea, lentos

Métamorphoses XV, 678 Quisquis ades » dixit « sis, o pulcherrime, uisus

Ars Amatoria III, 347 O ita, Phoebe, uelis, ita uos pia numina uatum

Héroïdes XV, 93-94 O nec adhuc iuuenis, nec iam puer, utilis aetas   O decus atque aeui gloria magna tui

Héroides XV, 175 Ibimus, o nymphe, monstrataque saxa petemus

Héroides XI, 123 Tu tamen, o frustra miserae sperate sorori

Héroides XII, 81 O uirgo, miserere mei, miserere meorum



Chapitre II : L’invocation 291

Là encore, les différences entre les œuvres ovidiennes sont patentes : les particules élégiaques sont fortement représentées dans les Métamorphoses alors qu’elle sont très rares dans les Fastes, malgré la métrique élégiaque du recueil, si souvent commentée. Une seule particule apparaît dans notre corpus : Fastes VI, 652 Nunc ades o, coeptis, flaua Minerua, mei.

Les disjonctions métriques entre la particule et le vocatif qu’elle appelle peuvent parfois être remarquables, comme dans les exemples suivant, qui peuvent nous amener à réfléchir sur l’héritage des vers français du XIXème siècle, dont la dite modernité tient parfois à l’introduction de telles disjonctions : Métamorphoses II, 279-280 « si placet hoc meruique, quid o tua fulmina cessant summe deum ? liceat periturae uiribus ignis […] »

Métamorphoses IV, 769-770 Qui simul edocuit « nunc, o fortissime, » dixit  « Fare precor Perseu quanta uirtute quibusque […] »

Métamorphoses VI, 262-263 Bracchia sustulerat : « di » que « o communiter omnes Dixerat ignarus non omnes esse rogandos […] »

Métamorphoses VII, 615 « Iuppiter o ! » dixi « si te non falsa loquuntur […] »

Métamorphoses VIII, 595-596 Excepi nantemque ferens « o proxima mundi Regna uagae » dixi « sortite, Tridentifer, undae […] »

Métamorphoses XIV, 372-373 Nacta locum tempusque « per o tua lumina, » dixit « quae mea ceperunt, per hanc, pulcherrime, formam […] »

Amours II, 9a, 1 O numquam pro satis indignande Cupido

292

Troisième Partie : La mise en mots de la prière

Indétermination du destinataire et indéfinis Malgré son goût certain pour la nomination et l’identification, Ovide use parfois de termes génériques, ou imprécis, dans ses invocations. S’il ne se conforme pas à l’usage rituel des invocations multiples, qui donne à Janus la première place et à Vesta la dernière64, Ovide reprend toutefois, en cas d’incertitude quant à l’identité de la divinité à invoquer, des formules assez abondamment documentées, comme celle centrée sur le pronom indéfini quisquis, la formule codifiée siue deus siue dea ou encore l’invocation généralisante au moyen du collectif di. Ch. Guittard évoque en ces termes ce dernier usage : « La nécessité d’organiser l’ensemble de la religion romaine face à la complexité d’un système polythéiste, la réfléxion pontificale et le rôle prépondérant du Pontifex Maximus allaient conduire le ritus romanus à développer la place de l’invocation dans la prière. […] Cette tendance était favorisée par des processus d’élargissement et de synthèse propres à l’esprit religieux des Romains. […] Elle est confirmée par la formule généralisante di deaeque omnes introduite par les pontifes dans le rituel. »65 Ch. Guittard considère toutefois que « dans une religion ritualiste comme l’était celle des Romains qui établissaient des relations toutes contractuelles avec leurs dieux, les conditions d’emploi des formules substitutives étaient très rares et exceptionnelles. »66 Evidemment, la situation est différente en poésie, où la liberté du poète et sa sensibilité particulière ont l’espace de s’exprimer. Ovide use à plusieurs reprises dans notre corpus d’une formule généralisante : ita, di, iubeatis (Métamorphoses IV, 371), di, que, o communiter omnes (Métamorphoses  VI, 262)67, di precor (Héroides XIII, 49). Parfois l’invocation est plus précise, tout en restant collégiale : di Aeneae comites (Métamorphoses XV, 861), dique omnes nemorum, dique omnes noctis adeste (Métamorphoses VII, 185), dique uirique loci (Fastes VI, 516), di nemorum 64. voir ce qu’en dit Ch. Guittard (397), « Invocation et structures théologiques de la prière à Rome », p. 73-74. 65. Ch. Guittard (397), art.cit. p. 81. Cela est confirmé par Servius, Ad Georg., I, 10 : Hoc enim in sacris fieri solebat ut post specialia ad eam rem de qua agebaturonuocata numina, omnes dii uel deae confusae inuocarentur. 66. Ch.  Guittard (401), «  Invocation et présence divine dans la prière à Rome  », in Nommer les Dieux. 67. Mais le jeune garçon qui prie ainsi est ignarus selon les termes du poète, car non omnes esse rogandos. C’est bien par l’effet d’une ignorance prudente que le jeune fils de Dioné utilise une formule généralisante, quand le narrateur sait, quant à lui, que seul Apollon est en cause.



Chapitre II : L’invocation 293

(Fastes III, 309), di petitorum locorum (Fastes I, 509), di maris et terrae (Ibis, 67). Toutefois, plus qu’une prudente, voire frileuse, généralisation, ces prières sont généralement les élans d’un vaste souffle qui tirent une partie de leur densité et de leur énergie précisément de cette ouverture de l’invocation, de cet élargissement de leur horizon. Elles révèlent la conscience qu’ont ces personnages d’une sorte d’univocité du monde surnaturel derrière la pluralité des individuations divines, et d’une action commune possible – et pas seulement possible, mais aussi naturelle et même évidente – des forces qui le composent. On est peut-être ici en présence d’un regard théologique porté sur le monde réel, lieu d’exercice d’une puissance divine cohérente, et non espace de guerre d’influence entre des dieux soumis à des passions toutes humaines. Ovide use aussi de l’indéfini quisquis, vu par Ch. Guittard comme « une variante littéraire »68 des expressions rituelles si deus si dea « attestées dans une dizaine d’inscriptions qui s’échelonnent de la fin du IIème siècle avant J-C au début du IIIème siècle de notre ère ». Laurent Pernot rappelle, dans l’intervention qu’il consacre, au cours du même colloque, au « Lieu de la prière dans la rhétorique religieuse des Grecs », que « le nom […] représente pour la rhétorique un « lieu » (topos), au sens technique de ce terme, c’est-à-dire un champ ouvert à l’orateur, une rubrique prédéfinie permettant de trouver les idées, un point de départ pour l’argumentation ». On voit que le poète peut faire usage du nom de la divinité pour établir le contenu de la prière fictive qu’il insère dans son œuvre. Une invocation réduite à un indéfini va donc conditionner aussi dans une certaine mesure le contenu de la prière, et peut-être sa forme, l’ensemble étant étroitement lié. Dans tous les cas il apparaît nettement qu’il existe un usage métrique spécifique de ce relatif indéfini masculin, qui se retrouve tant chez Virgile que chez Ovide et les autres élégiaques. En théorie quisquis, comme tout autre relatif, peut être suivi de n’importe quel verbe, et n’en appelle aucun en particulier. Il ne devrait pas non plus conditionner la longueur de la subordonnée qu’il introduit. Or il ressort d’une simple observation des usages poétiques de l’époque augustéenne que la construction de ce relatif est extrêmement codifiée : il apparaît quasi exclusivement dans des relatives très courtes, réduites le plus souvent au subordonnant et au verbe, et ce verbe même se révèle être presque toujours une forme vocalique du verbe esse, ou une forme du verbe adesse. Virgile, Properce et Tibulle sont très stricts dans 68. Ch.  Guittard (401), «  Invocation et présence divine dans la prière à Rome  », in Nommer les Dieux.

294

Troisième Partie : La mise en mots de la prière

leur pratique ; l’indéfini est chez eux toujours en tête de vers dans ce type de construction : Properce I, 9 Quisquis es, assiduas tu fuge blanditias !

Virgile, Enéide, I, 387 Quisquis es, haud, credo, inuisus caelestibus

Virgile, Enéide, II, 148 Quisquis es, amissos hinc iam obliuiscere

Virgile, Enéide, IV, 577 Quisquis es, imperioque iterum paremus ouantes.

Virgile, Enéide, VI, 388 Quisquis es, armatus qui nostra ad flumina tendis

Tibulle I, 4, 60-69 Quisquis es, infelix urgeat ossa lapis.

Tibulle II, 2, 1-9 Quisquis ades, lingua, uir mulierque, faue.

Tibulle II, 1, 1 Quisquis adest, faueat : fruges lustramus et

Ovide semble plus libre, même s’il se conforme assez fréquemment à cette métrique verbale : Métamorphoses I, 679 Quisquis es, hoc poteras mecum considere

Métamorphoses I, 32 Sic ubi dispositam quisquis fuit ille deorum



Chapitre II : L’invocation 295

Métamorphoses II, 692 Quisquis es, hospes ait, si forte

Métamorphoses III, 454 Quisquis es, huc exi ! quid me,

Métamorphoses III, 613 Quisquis es, o faueas nostrisque laboribus

Métamorphoses IV, 597 Quisquis adest aderant comites) terretur ;

Métamorphoses VIII, 864 Quisquis es, ignoscas ; in nullam lumina

Métamorphoses XI, 721 Quisquis es, et siqua est coniunx

Métamorphoses XII, 176 Quisquis adest, narretque rogant : quos inter

Métamorphoses XII, 80 Quisquis es, o iuuenis, dixit solamen

Métamorphoses XIII, 468 Quisquis is est, quem caede mea

Métamorphoses XV, 678 Quisquis ades ! dixit sis, o pulcherrime,

Métamorphoses XV, 680 Quisquis adest, iussum ueneratur numen, et

296

Troisième Partie : La mise en mots de la prière

Art d’Aimer I, 440 Verba ; nec exiguas, quisquis es, adde preces69.

Art d’Aimer II, 144 Quisquis es, aut aliquid corpore pluris

Ibis, 98 Quisquis ades sacris, lugubria dicite uerba,

Ibis, 99 Quisquis ades sacris, ore fauete, meis ;

Ibis, 9 Quisquis is est nam nomen adhuc utcumque tacebo

Fastes II, 202 ire per hanc noli quisquis es ; omen habet.

Fastes III, 417 quisquis ades castaeque colis penetralia Vestae,

Fastes III, 352 exitus : en audi crastina, quisquis ades.

Fastes IV, 301 Quisquis adest operi, plus quam pro

Fastes VI, 731 Reddita, quisquis is est, Summano templa feruntur,

Mais quelques exemples plautiniens viennent ouvrir le champ temporel et générique de cet usage, et le font apparaître comme une constante dans la 69. On peut ajouter Art d’Aimer I, 500, Et faueas illi, quisquis agatur amans ; et Art d’Aimer I, 144, Nec mora, quisquis erit, cui fauet illa, faue.



Chapitre II : L’invocation 297

langue latine orale. En effet la plupart de nos exemples s’inscrivent dans un dialogue, comme le montre l’emploi de la deuxième personne du singulier (P2). Plaute Ménechmes 2,2 qui mihi molestus homini ignoto, quisquis es. 3,2 uidi neque gnoui ; uerum certo, quisquis es, aequum si facias, […] 5,7 At tibi di semper, adulescens, quisquis es, faciant bene. 5,9 adulescens, salue, qui me seruauisti, quisquis es.

Ce sont, chez le dramaturge, les seuls emplois de cette forme, dont on voit qu’elle s’inscrit dans une construction stéréotypée, quel que soit le contexte d’usage. Cette formule codifiée semble toutefois appartenir plus au monde littéraire, ou à l’oralité littéraire, qu’au langage rituel à proprement parler, dans lequel elle est remplacée, comme l’attestent les inscriptions étudiées par J. Alvar et Ch. Guittard, par siue deus siue dea et siue quo alio nomine fas est nominare70. Mais ces formules rituelles ne se retrouvent pas dans notre corpus et n’apparaissent dans aucune des prières ovidiennes que nous avons étudiées. Hors de l’invocation, la prière se développe en dialogue entre l’orant et son destinataire.

Le « Du Stil » Dans les contextes eucologiques, les locuteurs dialoguent en général directement, que leur destinataire soit réellement présent auprès d’eux, que sa présence soit suggérée (par une statue par exemple), ou qu’il ne soit qu’en pensée dans l’esprit de l’orant. Une synthèse des emplois du pronom de la deuxième personne dans les prières permet de voir comment se matérialise verbalement cette corde tendue par l’énoncé précatif entre les deux pôles ainsi reliés. Prenons un exemple, l’hymne à Terminus du chant II des Fastes, que nous avons déjà cité et traduit71. Le nom du dieu y apparaît au vers introducteur, dans une formule qui acquiert chez Ovide le rang de formulaire : Fastes II, 658 et cantant laudes, Termine sancte, tuas 70. Ces formules sont sujettes à variations. On consultera J. Alvar (274), « Matériaux pour l’étude de la formule siue deus siue dea », et Ch. Guittard (411), « Siue deus siue dea : les Romains pouvaient-ils ignorer la nature de leurs divinités ? ». 71. dans la première partie.

298

Troisième Partie : La mise en mots de la prière

Le pronom personnel de la deuxième personne est jeté en tête de l’hymne, et sa récurrence est notable, puisqu’il revient trois fois au cours des six derniers vers : Fastes II, 659-678 « tu populos urbesque et regna ingentia finis   omnis erit sine te litigiosus ager. nulla tibi ambitio est, nullo corrumperis auro,   legitima seruas credita rura fide. si tu signasses olim Thyreatida terram   corpora non leto missa trecenta forent, nec foret Othryades congestis lectus in armis.  (…) Termine, post illud leuitas tibi libera non est :   qua positus fueris in statione, mane ; nec tu uicino quicquam concede roganti,   ne uideare hominem praeposuisse Ioui : et seu uomeribus seu tu pulsabere rastris,   clamato ‘tuus est hic ager, ille tuus’. »

La mise en abîme complexe sur laquelle se referme le cercle de l’hymne, inscrivant dans la parole du poète la parole des paysans célébrant le culte, dans laquelle s’inscrit à son tour la parole du dieu lui-même, s’appuie sur un astucieux retour de la deuxième personne, dans deux contextes différents : v. 659

tu populos urbesque et regna ingentia finis

v. 678

clamato « tuus est hic ager, ille tuus ».

Cette récurrence de la deuxième personne et l’attention portée à sa place métrique participent de l’esthétique hymnique et de sa musique particulière. La base de notre synthèse sera notre corpus des Fastes. Deux tableaux présentent les données essentielles72 :

72. Le corpus d’étude est celui indiqué en annexe.



Chapitre II : L’invocation 299

Emploi de la P2   Hymnes Vœux Prières Total

nombre de vers

tu

te

tui

tibi

possessif

73 23 110 206

7 0 5 12

5 0 1 6

1 0 0 1

6 1 0 7

8 1 2 11

Places particulières73  

Au Pied 1

en fin de P1

Tu 5 3 Te 2 0 Tui 0 0 Tibi 0 2 Total 7 5 % des occurrences totales 26.9% 19.2%

-uu // x

x//T

x//P

x//H

//Hx

fin de vers

0 2 0 0 2

2 1 0 1 4

0 1 0 0 1

2 0 0 1 3

0 0 0 1 1

0 0 1 0 1

7.7%

15.4%

3.8%

11.5%

3.8%

3.8%

On observe que les formes monosyllabiques sont particulièrement prisées et sont souvent placées soit en tête de vers (à 38,9 %), soit dans le premier pied, ou dans son environnement proche (à 66,7 %). On remarque aussi que la forme nominative du pronom surgit à 41,7 % en tête de vers, ce qui constitue une attaque particulièrement forte. Comparons à présent ces tableaux avec un tableau général des occurrences de la P2 dans les deux œuvres de la maturité d’Ovide, les Fastes et les Métamorphoses :

73. P1 = Pied 1 ; -uu//x = la forme de 2ème personne se trouve après une césure, succédant à un premier mot dactylique (diérèse initiale du vers) ; x//T = la forme de 2ème personne précède une coupe trihémimère ; x//P = elle précède ; x//H = la forme précède une coupe hephtémimère ; //Hx = la forme suit une coupe hephtémimère.

300

Troisième Partie : La mise en mots de la prière

Tu occurrences En tête de vers % En tête de phrase phrase & vers Te occurrences En tête de vers % Tui occurrences En fin de vers % Teque Occurrences en tête de vers

Fastes

Métamor­ phoses

67 19 28,3 18

34 8 23,5 6

17

4

66 12 18,2

65 11 16,9

9 8 88,9

3 0 0

3 3

4 2

Tibi occurrences avant D1 avant T après T avant P après P entre F et H Avant clausule Dans clausule avant H fin de vers Tuque Occurrences en tête de vers en fin de vers Tibique

Fastes

Métamor­ phoses

75 29 8 3

81 21 7 4

3 1 0 20 0 6 5

4 9 2 33 1 0 0

2 0 2 0

0 0 0 2

Quelles remarques cela appelle-t-il ? On se rend compte tout d’abord que les extraits de notre corpus tiennent une belle place dans l’ensemble des occurrences des pronoms de la deuxième personne : Occurrences Tu Te Tui Tibi

Corpus des Fastes 12 6 1 7

Ensemble des Fastes 67 66 9 75

Place en TV*

Corpus des Fastes

Ensemble des Fastes

Ensemble des Métamorphoses

41,8 % 33 %

28,3 % 18,2 %

23,5 % 16,9 %

Tu Te

18 % 9% 11 % 9,3 %

* TV = tête de vers. Tui ne se trouve jamais en tête de vers dans notre corpus des Fastes mais toujours en fin de vers (100%). Il se trouve à 80 % en fin de vers dans le reste des Fastes. De la même manière tibi n’ouvre jamais un vers.



Chapitre II : L’invocation 301

Une rapide comparaison de ces chiffres avec les usages virgiliens et horatiens, à travers trois œuvres complètes, pourra faire apparaître la spécificité des choix ovidiens dans les passages précatifs :   Tu Occurrences en tête de vers % Te Occurrences en tête de vers % avant T entre F et H Tuo occurrences en fin de vers % Tuos occurrences en fin de vers % Tuas occurrences en fin de vers % Tuae occurrences en fin de vers entre F et H avant P % Tuis occurrences en fin de vers %

Virgile Enéide

Virgile Géorgiques

Horace Epodes

73 27 37

10 3 30

11 2 18

192 22 11,4 1 1

34 8 23,5 0 0

16 1  6,2 0 0

5 0 0

1 0 0

4 4 100

6 0 0

1 0 0

0 0 0

2 0 0

0 0 0

0 0 0

0 0 0 0 0

0 0 0 0 0

11 1 9,1

1 0 0

1 0 0 0 0 1 en tête de vers 2 1 0

302

Troisième Partie : La mise en mots de la prière

 

Virgile Enéide

Virgile Géorgiques

Horace Epodes

12 5 41,6

3 2 66,6 

0 0 0

11 3 27,3

2 1 50

0 0 0

Tuque occurrences en tête de vers % Teque occurrences en tête de vers %

Dans les prières ovidiennes, l’invocation est donc scandée par des reprises de la deuxième personne, dont les pronoms et les adjectifs possessifs sont utilisés comme autant de liens devant retenir l’attention du destinataire, qui se retrouve alors au centre d’un réseau, d’un filet verbal le reliant à l’orant. C’est l’établissement de cette relation qui justifie peut-être les emplois superfétatoires de pure insistance rhétorique qui abondent dans les prières. Le pronom peut ainsi doubler un impératif : Métamorphoses VII, 628 Tu mihi da ciues et inania moenia supple

Métamorphoses IV, 534 Magna quidem posco sed tu miserere meorum

Métamorphoses V, 378-379 At tu pro socio, si qua est ea gratia regno Iunge deam patruo

Métamorphoses XIV, 20-21 At tu, siue aliquid regni est in carmine carmen ore moue sacro […]

ou un verbe tout à fait clair : Métamorphoses XIV, 12-13 Diua, dei miserere, precor ! Nam sola leuare Tu potes hunc » dixit « uidear modo dignus amorem



Chapitre II : L’invocation 303

Amours II, 13, 16 Nam uitam dominae tu dabis illa mihi

Amours II, 8, 19 Tu dea tu iubeas animi periuria puri

Amours II, 13, 19-21 Tuque laborantes utero miserata puellas   Quarum tarda latens corpora tendit onus Lenis ades precibusque meis faue, Ilithyia.

Fastes III, 775 Seu quia tu pater es, patres sua pignora natos

Cette invocation psalmodiée est particulièrement remarquable dans l’hymne, qui célèbre une louange et s’appuie sur plusieurs effets d’emphase, dont celui-là. Prenons en exemple l’hymne à Bacchus des Métamorphoses (IV, 9-32) : uaticinatus erat : parent matresque nurusque telasque calathosque infectaque pensa reponunt turaque dant Bacchumque uocant Bromiumque Lyaeumque ignigenamque satumque iterum solumque bimatrem ; additur his Nyseus indetonsusque Thyoneus et cum Lenaeo genialis consitor uuae Nycteliusque Eleleusque parens et Iacchus et Euhan, et quae praeterea per Graias plurima gentes nomina, Liber, habes. Tibi enim inconsumpta iuuenta est,  tu puer aeternus, tu formosissimus alto conspiceris caelo ; tibi, cum sine cornibus adstas, uirgineum caput est ; Oriens tibi uictus, adusque decolor extremo qua tinguitur India Gange. Penthea tu, uenerande, bipenniferumque Lycurgum sacrilegos mactas, Tyrrhenaque mittis in aequor corpora, tu biiugum pictis insignia frenis colla premis lyncum. Bacchae satyrique sequuntur, quique senex ferula titubantis ebrius artus sustinet et pando non fortiter haeret asello. Quacumque ingrederis, clamor iuuenalis et una femineae uoces inpulsaque tympana palmis concauaque aera sonant longoque foramine buxus.

304

Troisième Partie : La mise en mots de la prière « Mères et jeunes filles obéissent. Elles laissent-là leurs métiers à tisser, leurs corbeilles et sans avoir achevé Leur ouvrage, brûlent l’encens, invoquent Bacchus sous les noms de Bromius, Lyaeus, né-dans-le-feu, Deux-fois-engendré, Seul-enfant-de-deux-mères ; Elles ajoutent Enfant de Nysa, de Thyoné aux longs cheveux, Ainsi que Lénaeus, planteur de la vigne féconde, Nyctélius, Eléleus-notre-père, et Iacchus, et Euhan, Et enfin tous les noms que tu portes, Liber, chez les nombreux Peuples de Grèce ; car ta jeunesse est inaltérable, Toi, l’éternel enfant, toi le plus beau que l’on puisse contempler Dans le ciel immense. Quand tu te tiens debout, sans tes cornes, Ta tête est celle d’une vierge ; à toi est soumis l’Orient Jusqu’aux confins du Gange qui entoure les Indiens au teint mat ; Toi, l’auguste, qui punis Penthée et Lycurgue à la hache bipene, Ces sacrilèges, et précipites dans la mer le corps Des Thyrrhéniens, toi qui serres de près l’encolure – remarquable A ses rênes colorées – de ton attelage de lynx ; suivent les Bacchantes, Les Satyres et le vieil ivrogne dont le corps chancelant s’aide D’une férule et qui tient assez peu fermement sur son âne voûté. Partout où tu t’avances résonnent les cris des jeunes gens Ainsi que les voix de femmes, les tambourins que l’on frappe de la main, Les cymbales de bronze et la flûte de buis à large pavillon74. »

Dans l’invocation proprement dite abondent les épiclèses par lesquelles les orants tentent d’embrasser l’essentiel des multiples facettes de ce dieu mouvant et insaisissable, et le poète lui-même semble renoncer à en retranscrire la liste complète et use d’une formule généralisante, qui reprend peut-être une formule équivalente qui aurait pu, de manière vraisemblable, être utilisée par les fidèles : siue quo alio nomine fas est tibi nominare75. Liber est l’incarnation divine de la poésie chez Ovide, il est le dieu total, à la fois enfant et homme, 74. Nous reprenons la belle traduction de Danièle Robert chez Actes Sud, coll. Thesaurus, 2001. 75. Ch. Guittard signale que « l’emploi rituel de la formule siue quo alio nomine fas est nominare est formellement attesté par le carmen deuotionis que prononça Scipion Emilien en 146 avant J.-C. […] Les pontifes eux-mêmes, Selon Servius, lorsqu’ils s’adressaient à Jupiter Optimus Maximus, employaient dans leurs invocations une expression analogue, sous la forme siue quo alio nomine te appellari uolueris (Seru., ad Aen. II, 351) ; cette précision nous prouve que la précaution concerne les épiclèses multiples et les divers attributs de la puissance de Jupiter et qu’elle n’exprime en rien un doute sur l’identité du dieu », in « Siue deus siue dea » (411), p. 38.



Chapitre II : L’invocation 305

homme et femme (tu puer aeternus ; tibi uirgineum caput est). Après sa généalogie et le début de l’hymne clétique qui loue le dieu par le chant même de ses noms innombrables, survient la louange elle-même qui s’articule autour de la répétition des deux formes tu et tibi. Dans cette litanie des noms de Bacchus, inégalée dans les œuvres ovidiennes et organisée selon une structure rythmique régulière, les épiclèses sont groupées par deux ou par trois en un fin réseau d’homéotéleutes et de paronomases, de manière à aboutir à un total de 12 noms, auxquels il faut ajouter les deux noms encadrants, Bacchus et Liber, et la formule généralisante qui ouvre la liste sur l’infini : 2 : Bromiumque Lyaeumque 3 : ingenamque satumqu(e) iterum solumque bimatrem 3 : Nyseus indetonsusque Thyoneus Lenaeo genialis 2 : Nycteliusqu(e) Eleleusque parens 2 : et Iacchus et Eulan

Quatre pronoms au nominatif, trois au datif : on retrouve les deux facteurs de 12 qui rattachent ces pronoms à la litanie des noms et à sa structure verbale. On a beaucoup écrit sur le pythagorisme réel ou rêvé d’Ovide, et les avis restent aujourd’hui encore partagés. Sans entrer dans ce débat historique et philosophique, force est toutefois de remarquer l’importance des rythmes et des nombres dans la poésie ovidienne, dont la musicalité est éminemment mathématique. La récurrence des pronoms de deuxième personne assure le glissement de l’éloge vers la pars epica qui célèbre les hauts faits de Bacchus à travers l’évocation de trois terribles histoires d’impiété châtiée : Penthée, Lycurgue et les marins thyrréniens. Un étonnant vocatif à valeur d’obligation vient clore la série des pronoms de deuxième personne et donne la leçon que l’on doit tirer de ces rappels : Bacchus doit être révéré (uenerande)76.

76. Accius propose également la deuotio de Decius (cf. J. Dangel (335), p. 125) : te sancte uenerans precibus inuicte inuoco. « Toi, Dieu saint, par l’hommage de mes prières, toi l’invincible, je t’invoque ».

Chapitre III Les verbes de la prière Après les noms propres, épiclèses et épithètes, et les pronoms d’appel, le verbe apparaît comme le troisième élément central de l’invocation. Plusieurs études de synthèse ont été consacrées, tout au long du siècle dernier, aux verbes de prière. Nous limiterons nos investigations à un recensement commenté des choix ovidiens les plus significatifs, dont nous verrons l’obsédante rigueur et la cohérence poétique. La particularité ovidienne se manifeste encore ici, dans un usage verbal qu’il n’invente pas, certes, mais qu’il systématise et qu’il hausse quasiment au rang de formulaire. On s’attend à juste titre à voir apparaître dans les textes de prière le lexique même de l’oraison. Precari, orare, uenerari semblent appelés à former le cœur de ces énoncés. Pour autant leurs représentations respectives sont très inégales chez Ovide. R. Schilling distingue « deux pôles de la piété romaine », autour des deux verbes precari et uenerari1. Le verbe uenerari partage la même racine que ‘Vénus’ et signifie, selon R. Schilling, « exercer la uenus », « pratiquer le charme religieux »2. Il conserverait une forte « valeur magique ». On aurait pu penser qu’Ovide, comme Virgile, usât avec prédilection de ce verbe, rattaché à l’une des figures divines qu’il affectionne tout particulièrement. Mais le verbe n’apparaît presque pas dans son œuvre3, où cette racine vénusienne n’est représentée que par le substantif ueniam. Ovide lui préfère l’autre « pôle de la piété », celui de la fides, très romain4, qui met longtemps à s’extraire du monde profane – comme uenerari du monde magique. Le verbe precari « a pour racine *prek-, d’où dérive posco, qui n’implique aucune idée religieuse à l’origine (le sanskrit prât, correspondant au latin precem, est un mot juridique) ».5 R. Schilling ajoute que « l’emploi de precor appartient encore, dans le théâtre de Plaute, presque exclusivement au domaine profane ». Cette 1. R. Schilling (536), Rites, cultes et Dieux, p. 38. 2. R. Schilling (538), La religion de Vénus, p. 30. 3. On recense 3 occurrences, ce qui est peu : 2 dans les Tristes et 1 en Métamorphoses XIV, dans un sens profane, mais en association avec la figure vénusienne d’Enée. 4. Caton n’use par exemple d’aucun terme se rattachant au radical vénusien (R. Schilling, op.cit. p. 54). 5. R. Schilling (538), La religion de Vénus, p. 54.

308

Troisième Partie : La mise en mots de la prière

distinction nous paraît très intéressante dans le cas d’Ovide. R. Schilling en tire toutefois des conclusions qui peuvent faillir à convaincre, si on veut les appliquer au langage poétique de l’époque agustéenne, dont le code est assez neuf et largement auto-référentiel. Pour R. Schilling en effet, « la prière inspirée par l’espit de fides est strictement conditionnée. Elle énonce de façon expresse la contrepartie proposée en échange de la demande », alors que la prière « vénusienne affecte une allure inconditionnée ». Cette interprétation s’adapte difficilement à l’œuvre ovidienne, mais R. Schilling nuance lui-même son propos et explique que les deux courants tendent à fusionner à la fin de la République. Commencons par un verbe caractéristique de la prière, à savoir precari. Dans le carmen et dans les formules de prière historiques, ce verbe apparaît souvent dans des structures binaires ou ternaires, en association avec d’autres verbes précatifs, tels quaesere ou uenerari. On retrouve aussi des groupes récurrents et stéréotypés, à la fois bien documentés et savamment étudiés6 : precor quaesoque, qui structure la prière à Mars citée par Caton, De Agri Cultura, 141 : Mars pater, te precor quaesoque uti sies tu uolens propitius mihi domo familiaeque nostrae.

ou encore precor ueneror ueniam peto feroque que reprend Tite-Live, VIII, 9, 4, 8 : Iuppiter, Mars Pater, Quirine, Bellona, Lares diui Nouensiles, di Indigetes, diui quorum est potestas nostrorum hostiumque, di Manes, uos precor ueneror ueniam peto fero que uti…

Chez Ovide, jamais ne surviennent de telles suites verbales, même dans les prières les plus codifiées des Fastes. En revanche il utilise très fréquemment une formule identifiée par J. Hellegouarc’h comme caractéristique du style élégiaque, et plus particulièrement de l’écriture tibullienne. Dans l’étude qu’il a menée sur l’expression parce precor chez Tibulle, J. Hellegouarc’h relève 19 occurrences de precor dans le Corpus Tibullianum, 6. On pourra aller consulter J. Dangel (335), « Le carmen latin : rhétorique, poétique et poésie », Euphrosyne, XXV, 1997, p. 113-131 ; Ch. Guittard (403), « L’expression du verbe de la prière dans le carmen latin archaïque », Recherches sur les religions de l’Antiquité classique, 10, 1980, p. 395-403 ; C. de Meo, Lingue techniche del Latino, Bologne, 1986.



Chapitre III : Les verbes de la prière 309

dont 17 sous la forme de la P1 de l’indicatif présent7. Et il annonce qu’il n’y a aucune occurrence de cette forme chez Catulle, ni chez Lucrèce. La totalité de l’œuvre de Virgile ne compte que 41 occurrences du verbe, dont 11 precor. Or dans notre corpus, qui n’est qu’un échantillon, nous relevons 5 occurrences de ce verbe à la P1 du présent de l’indicatif (II, 451 ; IV, 921 ; VI, 160161 ; VI, 548 ; V, 347). J. Hellegouarc’h affirme8 que « l’examen des emplois (chez Tibulle) montre que (la prière) tend à prendre des formes déterminées, voire figées. Les deux brèves de precor devant un mot suivant à initiale vocalique sont souvent celles du 2ème demi-pied d’un dactyle initial de vers, dont le premier demi-pied est par conséquent formé par un monosyllabe long ». Cette disposition se retrouve sporadiquement chez Ovide : Fastes V, 249 « Fer, precor, auxilium » dixit, « celabitur auctor »

Métamorphoses IX, 775 « Fer precor » inquit « opem nostroque medere timori !

Métamorphoses X, 320 Di precor et pietas sacrataque iura parentum

Métamorphoses XIII, 597 Da precor huic aliquem solacia mortis honorem

Métamorphoses XV, 40 Fer precor inquit opem nam tu mihi criminis auctor

Il semble qu’Ovide apprécie cet usage métrique, qui peut apparaître comme marqué génériquement, et propre à l’élégie (il représente en effet 100% des occurrences de precor dans les Remedia Amoris tandis qu’il ne se retrouve qu’une fois dans les Fastes). On le trouve 2 fois sur les 8 occurrences de la forme dans les Amours, 7 fois sur les 24 occurrences des Métamorphoses, 8 fois sur les 27 occurrences des Héroïdes, 1 fois sur les 17 occurrences des Fastes et 7 fois sur les 14 occurrences des deux premiers livres des Tristes.

7. J. Hellegouarc’h (652), « Parce precor ou Tibulle et la prière », p. 64. 8. J. Hellegouarc’h (652), art. cit., p. 65.

310

Troisième Partie : La mise en mots de la prière

Qu’en est-il des autres auteurs ? Tibulle place une fois sur deux un monosyllabe long en tête de vers avant precor dans les deux premiers livres de ses Elégies (7/14), comme Virgile (4/8 pour l’Enéide). Si Tibulle et Virgile ont un emploi souple du verbe, malgré la présence de quelques constantes métriques ou l’association avec parce en une formule stéréotypée, on remarque une plus grande rigidité dans l’usage ovidien. Le verbe precor est utilisé dans des suites précatives très chargées sémantiquement et vient renforcer une pétition ou une invocation, avec des syntagmes associés tels que fer opem ou di. Ovide est d’ailleurs le poète augustéen qui a le plus fréquemment recours à ce verbe : sur les 151 emplois que l’on recense chez les poètes contemporains, 129 surviennent dans l’une de ses œuvres. Cet emploi massif dénote l’importance de la prière dans son œuvre, et révèlent un style propre, reconnaissable car fortement stéréotypé et contribuant à élaborer un univers poétique spécifique. Si Ovide intègre des stylèmes élégiaques (comme parce precor) à un contexte précatif marqué, ce n’est ni pour le détourner ni pour le désacraliser, comme on pourrait le penser, mais au contraire pour resacraliser ce langage efficace et beau, rendu efficace à la fois par sa structure métrique (appuyée sur une succession iambe-trochée à laquelle s’ajoute une allitération) et monétisé, si l’on peut dire, par l’usage élégiaque des autres poètes, qui a rendu ce leitmotiv signifiant pour le lecteur. Les quêtes, mêmes amoureuses, sont ainsi hissées au niveau de paroles sacrées. Cela participe de la grande entreprise de valorisation du langage poétique qu’entreprend Ovide à travers son œuvre. Quand Tibulle, Properce et Virgile usent respectivement 17 fois, 5 fois et 8 fois9 de la forme precor, Ovide l’emploie 27 fois dans les Héroïdes, 2 fois dans les Remèdes à l’Amour, 8 fois dans les Amours, 24 fois dans les Métamorphoses, 17 fois dans les Fastes, 5 fois dans l’Ibis, 32 fois dans les Tristes et 26 fois dans les Pontiques. L’emploi qu’il affectionne particulièrement adjoint precor à un impératif de schéma trochaïque devant un mot à initiale consonantique. L’association la plus fréquente est parce precor, dont Joseph Hellegouarc’h dit qu’elle « constitue une formule plus intense encore que les autres, parce que les deux éléments participent du vocabulaire de la prière et de la supplication et que à l’allitération en p s’en ajoute une seconde en c ; elle semble être un cliché précatif, puisque nous la trouvons à deux reprises chez Lucain, à l’intérieur du vers :

9.

Pour l’Enéide.



Chapitre III : Les verbes de la prière 311

Pharsale VI, 773 fortis adit. Ne parce, precor : da nomina rebus

Pharsale VII, 540 Istis parce, precor : uidant Galataeque Syrique

mais surtout chez Horace, au début de l’Ode IV, 1, dans une prière à Vénus où son intensité est renforcée par le redoublement de precor :   Intermissa, Venus, diu   Rursus bella moues ? Parce, precor, precor.

Nul doute, par conséquent, qu’en utilisant la formule parce, precor, et d’autres analogues, Tibulle tirait profit d’un procédé d’expression dont il avait reconnu toute la valeur et l’efficacité ». C’est certainement en raison de cette efficacité toute particulière qu’Ovide reprend si fidèlement la formule : Fastes IV, 921 Parce, precor, scabrasque manus a messibus aufer

Fastes II, 451 Parce, precor, grauidis, facilis Lucina, puellis

Héroïdes XVI, 11 Parce precor fasso nec ulutu cetera duro

Héroïdes XVIII, 45 Parce precor facilemque moue moderatius auram

Héroïdes VII, 163 Parce precor domui quae se tibi tradit habendam

Très proches en sont les autres vers faisant apparaître cette forme : Fastes VI, 548 ite, precor, nostris aequue uterque locis !

312

Troisième Partie : La mise en mots de la prière

Fastes V, 378 sparge, precor ; donis pectora nostra tuis

Héroïdes VII, 31 parce Venus nurui durumque amplectere fratrem

Il semble qu’Ovide ait été un lecteur consciencieux de Tibulle, dont il s’inspire lorsque le pathétique d’une situation amène sur les lèvres des hommes des suppliques désespérées. La présence de l’impératif parce, commutable avec sparge ou ite, entraîne nécessairement un intermot trochaïque en raison de sa structure prosodique. Cet intermot est fort opportun puisqu’il fournit un élément supplémentaire d’intensité. Quelles demandes sont soutenues par cette prière insistante, qui souligne elle-même sa tonalité particulière ? D’une manière générale, on relèvera des verbes ou locutions verbales requérant la faveur du dieu (fauere, propitius esse) ou sollicitant son assistance (adesse, opem ferre). Les verbes d’assistance (adesse, auxilium ferre, opem ferre) sont très représentés dans notre corpus. Ch. Guittard rappelle que « les formes qui ont recours aux impératifs des verbes adesse ou uenire ne sont attestées que chez les poètes : on ne peut affirmer qu’elle aient connu des emplois rituels définis par le Ritus Romanus. Elles n’en reflètent pas moins les croyances des Romains et un aspect important de leur vie religieuse ».10 Adesse est une formule d’appel qui, par son sens premier, requiert la présence physique du dieu. Mais le corps du dieu ne se matérialise pas nécessairement, et vaut pour son esprit et sa puissance agissante. Des verbes comme adspice ou respice sollicitent plus directement le corps de la divinité, alors qu’adesse évoque plutôt une bienveillante attention. Là encore Ovide se distingue nettement des autres poètes latins : sur la soixantaine d’occurrences de la forme ades que les concordances permettent de relever de Catulle à Ovide, 36 sont à chercher dans les œuvres de l’auteur des Fastes. Cette prédominance surprenante vient confirmer l’intérêt qu’il porte au langage de la prière, et la ritualisation qu’il fait subir à la parole poétique par le truchement de formules récurrentes. Parmi les œuvres ovidiennes, les Fastes se distinguent encore, avec 16 occurrences sur les 36 relevées.

10. Ch. Guittard, « Invocation et présence divine dans la prière à Rome », in Nommer les Dieux, (401), p. 494.



Chapitre III : Les verbes de la prière 313

Fastes I, 65-70 Iānĕ bĭcēps,//T ānnī //P tăcĭtē lābēntĭs ŏrīgō,    sōlūs dē sŭpĕrīs // quī tŭă tērgă vĭdēs, dēxtĕr ădēs //T dŭcĭbūs,//P quōrūm sēcūră lăbōrē   ōtĭă tērră fĕrāx,// ōtĭă pōntŭs hăbĕt : dēxtĕr ădēs //T pătrĭbūsquĕ //F tŭīs //H pŏpŭlōquĕ Quĭrīnī,   ēt rĕsĕrā nūtū // cāndĭdă tēmplă tŭō.

Fastes I, 5 En tibi deuoto numine dexter ades

Fastes I, 711-712 Frōndĭbŭs Āctĭătīs //P cōmptōs rĕdĭmītă căpīllōs,  Pāx, ădĕs ēt tōtō // mītĭs ĭn ōrbĕ mănē.

Fastes II, 17-18 Ērg(o) ădĕs ēt plăcĭdō //P pāulūm mĕă mūnĕră uōltū   rēspĭcĕ, pācāndō // sī quĭd ăb hōstĕ uăcās.

Fastes III, 1-2 Bēllĭcĕ, dēpŏsĭtīs //P clĭpĕō pāulīspĕr ĕt hāstā,  Mārs, ădĕs ēt nĭtĭdās // cāssĭdĕ sōluĕ cŏmās.

Fastes III, 415 Quīsquĭs ădēs//T cāstāequĕ//F cŏlīs//H pĕnĕtrālĭa Vēstāe

Fastes III, 350 Exitus : en audi crastina quisquis ades

Fastes III, 255 Dicite tu uoto parturientis ades

Fastes IV, 807-808 Īpsĕ lŏcūs //T cāusās //P uātī //H făcĭt. Ūrbĭs ŏrīgō  uēnĭt. Ădēs //T fāctīs,// māgnĕ Quĭrīnĕ, tŭīs.

314

Troisième Partie : La mise en mots de la prière

Fastes IV, 827-828 Vōx fŭĭt hāec rēgīs ://P « Cōndēntī, Iūppĭtĕr, ūrbēm   Ēt gĕnĭtōr Māuōrs // Vēstăquĕ mātĕr, ădēs ;

Fastes V, 183-184 Mātĕr, ădēs,//T flōrūm,//P lūdīs cĕlĕbrām dă iŏcŏsīs.   Dīstŭlĕrām pārtēs // mēnsĕ prĭōrĕ tŭās ;

Fastes V, 575 Mars, ades, et satia scelerato sanguine ferrum

Fastes V, 660 Clare nepos Atlantis ades, quem montibus olim

Fastes VI, 541-542 « Lāetă cănām ;//T gāudē,//P dēfūnctă lăbōrĭbŭs Īnō »,   Dīxĭt, « ĕt hūic pŏpŭlō // prōspĕră sēmpĕr ădēs !

Fastes VI, 652 Nūnc ădĕs ō, cōeptīs,// flāuă Mĭnēruă, mĕī !

Cet impératif entre assez régulièrement en composition de formules dont certaines dont des stylèmes repris de poème en poème par les élégiaques. Ainsi le trouve-t-on très fréquemment après le monosyllabe huc en tête de vers. C’est un usage virgilien : Bucoliques II, 45 huc ades, o formose puer, tibi lilia plenis

Bucoliques VII, 9 huc ades, o Meliboee ; caper tibi saluus et haedi

Bucoliques IX, 39 huc ades, o Galatea : quis est nam ludus in undis ?



Chapitre III : Les verbes de la prière 315

Bucoliques IX, 43 huc ades ; insani feriant sine litora fluctus

Mais aussi tibullien : Elégies I, 7, 49 huc ades et Genium ludis centumque choreis

Elégies II, 1, 35 huc ades aspiraque mihi, dum carmine nostro

Elégies III, 10, 1-2 Huc ades et tenerae morbos expelle puellae, huc ades, intonsa Phoebe superbe coma ;

Ovide le reprend et le systématise : Amours I, 6, 54 huc ades et surdas flamine tunde foris !

Amours III, 2, 46 huc ades et meus hic fac, dea, uincat amor !

Amours II, 12, 16 huc ades et meus hic fac, dea, uincat amor !

Tristes V, 3, 40 huc ades et casus releues, pulcherrime, nostros

Héroïdes 15, 95 huc ades inque sinus, formose, relabere nostros

Métamorphoses 8, 597 huc ades atque audi placidus, Neptune, precantem

En revanche, on n’en trouve aucun exemple dans les Fastes, ce qui, rattaché à l’exemple unique des Métamorphoses, confirme la faible tonalité élégiaque

316

Troisième Partie : La mise en mots de la prière

de ces deux œuvres, du moins au sens érotique et lyrique de l’élégie. On remarquera l’habitude métrique d’Ovide, déjà présente chez Tibulle, mais de manière moins systématique, de faire suivre le syntagme huc ades d’une conjonction de coordination qui l’isole en tête de vers et en fait un premier pied dactylique quasi autonome. Chez Ovide, ce verbe est sorti de son usage lyrique et reprend sa charge religieuse : il est une vraie invocation ; il est d’ailleurs même parfois l’unique verbe de la prière, qu’aucune demande plus précise ne vient définir. Il représente à lui seul la tension des hommes vers le sacré et leur attente, attente indéfinie dont eux-mêmes ne souhaitent – ni ne peuvent, peut-être – préciser l’objet et par laquelle ils laissent au dieu toute liberté pour manifester sa puissance. « L’appel rend ce qu’il appelle plus proche. Mais il n’arrache pourtant pas ce qu’il appelle au lointain. Qu’appelle la première strophe du poème de Trackl ? Elle appelle des choses et leur dit de venir. Où ? Le site de la venue, évoqué dans l’appel, est une présence logée au cœur de l’absence »11. « Une présence logée au cœur de l’absence », comparable à « l’absente de tout bouquet » mallarméenne, c’est ce que sait susciter la poésie. Cette attente imprécise des hommes porte sur la bienveillance et la faveur des dieux. Ades est alors souvent renforcé par un adjectif, dexter, en une formule qui, assez généralement, ouvre ou clôt le vers : Fastes I, 6 en tibi devoto numine dexter ades.

Fastes I, 67 dexter ades ducibus, quorum secura labore

Fastes I, 69 dexter ades patribusque tuis populoque Quirini

Cette prière des Fastes mérite que l’on s’arrête quelques instants pour l’étudier, car elle éclairera d’un jour particulier l’usage ovidien du stylème dexter ades. Il s’agit de la prière à Janus qui ouvre le recueil. Rappelons son texte : Fastes I, 65-70 Iānĕ bĭcēps,//T ānnī //P tăcĭtē lābēntĭs ŏrīgō,   sōlūs dē sŭpĕrīs //P quī tŭă tērgă vĭdēs, 11. E. Brito, Heidegger et l’Hymne du Sacré, Peeters, 1999, p. 106.



Chapitre III : Les verbes de la prière 317 dēxtĕr ădēs //T dŭcĭbūs,//P quōrūm sēcūră lăbōrē   ōtĭă tērră fĕrāx,//P ōtĭă pōntŭs hăbĕt : dēxtĕr ădēs //T pătrĭbūsquĕ //F tŭīs //H pŏpŭlōquĕ Quĭrīnī,   ēt rĕsĕrā nūtū //P cāndĭdă tēmplă tŭō.

Par sa forme, elle se rapproche des compositions hymniques, dont elle est un reflet fuyant. Elle s’ouvre sur une invocation du dieu faisant apparaître dès l’abord son nom - « selon un schéma habituel du style sacré archaïque »12 - et l’épithète qui donnera lieu à l’exposition d’une de ses particularités. En effet Janus est le dieu au double visage, auquel sont donc prêtés des dons de divination. Parcourant du regard le passé comme l’avenir, Janus est un interlocuteur de choix pour le poète qui recherche les « causes » des rites de la cité. Il est en outre le portier céleste dont un simple nutus, manifestation de son numen, ouvre les portes des temples, ce qui permet à Ovide de glorifier l’œuvre de paix dont se prévaut Auguste, accompagné de Drusus et de Germanicus, sur la louange duquel s’est ouvert le poème. Chaque membre du premier distique, tel qu’il est partitionné par les césures, recouvre une partie de la définition du dieu. Ovide sollicite ici les trois constructions possibles, à savoir une apposition (anni…origo) et une subordonnée relative (qui …uides), de laquelle il a extrait un adjectif au nominatif qu’il antépose, créant ainsi artificiellement trois membres de phrase en apparence distincts. Nous retrouvons donc ici l’utilisation incantatoire du chiffre trois, toujours obtenu par d’habiles subterfuges stylistiques. Les uoces magicae ne servent pas à contraindre la divinité à agir, mais elles font partie de l’invocation13. Elles recommandent le uates, l’orant ou le magicien auprès du dieu et servent à mettre en relief son statut privilégié, fondé sur la possession de connaissances secrètes, principalement liées, en ce qui concerne Ovide, à la puissance du langage poétique. Comme dans les épitaphes funéraires, « un soin particulier est mis sur le moyen visant à établir la communication, à capter l’intérêt et à susciter l’attention. On comprend ainsi la place importante de l’interpellation »14. La formulation de l’adresse à la divinité doit être précise, mais elle doit aussi faire transparaître les liens qui unissent l’orant et son dieu. Ici, Ovide flatte Janus en insistant sur une caractéristique qu’il est seul parmi tous les dieux à avoir : c’est la justification de l’extraction de l’adjectif solus et

12. J. Dangel (335), « Le carmen latin : rhétorique, poétique et poésie », p. 124. 13. cf. F. Graf (389), « Prayer in magical and religious ritual », p. 188-213. 14. J. Dangel (335), « Le carmen latin », p. 121.

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Troisième Partie : La mise en mots de la prière

de sa propulsion en tête de phrase, dans le même hémistiche que l’autre terme de la quasi comparaison ainsi établie (superis), avec lequel il allitère en outre. Après les deux vers d’invocation constitués exclusivement de périphrases de définition survient la demande : dexter ades. Ovide se préoccupe ici du sort de la communauté, mais il n’oublie pas toutefois les préséances : viennent d’abord les chefs, dont il faut toujours se concilier la bienveillance, puis les sénateurs et le peuple de Rome. Les deux parties, quoique glorifiées toutes deux, sont discrètement mises en opposition. En effet Auguste et son entourage sont évoqués par un terme unique (ducibus), amplifié cependant par une proposition relative adjective qui enjambe la bordure des vers et qui expose leur action bénéfique au moyen d’un balancement symétrique à vertu totalisatrice : v. 67-68 dēxtĕr ădēs //T dŭcĭbūs,//P quōrūm sēcūră lăbōrē   ōtĭă tērră fĕrāx,//P ōtĭă pōntŭs hăbĕt :        3       2        2             3         2         2

L’autre camp, pourrait-on dire, est développé sur un seul hexamètre, introduit par le même groupe verbal : v. 69 dēxtĕr ădēs //T pătrĭbūsquĕ //F tŭīs //H pŏpŭlōquĕ Quĭrīnī

Mais ce vers mobilise de nombreux effets concourant à exprimer la vénérable solennité des entités évoquées. Quatre sections sont distinguées par une coupe ‘triple a’ qui donne à elle seule au vers une connotation archaïque, propre à rappeler l’auguste autorité du Sénat. Le nom des sénateurs tient le centre du vers et est allongé d’une copule dont la réduplication en fin de vers renforce le caractère épique. Isolé en milieu de vers par le jeu des césures, l’adjectif possessif de la deuxième personne fait le lien entre les différents membres du vers. Car cette quadripartition se recompose de fait en deux binômes, chacun uni par des jeux phoniques : dēxtĕr ădēs //T …………//F tŭīs //H……………… ………. //T pătrĭbūsquĕ //F … //H pŏpŭlōquĕ Quĭrīnī

tandis qu’un regroupement grammatical s’opère au centre du vers :   ………. //T pătrĭbūsquĕ //F tŭīs //H ………………



Chapitre III : Les verbes de la prière 319

Les bénéficiaires de la prière d’Ovide rivalisent donc d’honneur, que les uns doivent à leur activité guerrière et politique et que les autres reçoivent de leur antique majesté. D’autres verbes servent aux hommes à implorer la faveur des dieux ou leur aide active. Parmi eux, faue et fer opem tiennent une place toute particulière. Comme le souligne G. Appel, fere omnibus mos est cupiendi ut dii fauenti propitioque appareant numine.15 Ovide n’utilise pas l’adjectif propitius, qui est pourtant attesté dans les inscriptions16 et que Plaute reprend. Il lui préfère l’impératif faue/fauete et les adjectifs placatus/pacatus. Il peut même établir autour de ces deux termes un fin réseau d’échos, qui lui permet de rappeler avec élégance la filiation vénusienne de la dynastie régnante. Ovide souligne cette parenté en reprenant en écho dans l’invocation à César du chant II des Fastes, v. 11-18, une construction du présent hymne : Fastes I, 3-4 Excipe pacato, Caesar Germanice, voltu   hoc opus et timidae derige navis iter

Fastes II, 17-18 Ērg(o) ădĕs ēt plăcĭdō //P pāulūm mĕă mūnĕră uōltū   rēspĭcĕ, pācāndō // sī quĭd ăb hōstĕ uăcās.

Ainsi se trament au travers des Fastes de fins réseaux de références, qui participent de l’unité de l’œuvre. Car on retrouve encore un écho de ces deux vers dans l’invocation à Vénus, dont on doit se rappeler l’importance pour les Julii : Fastes IV, 161-162 Sēmpĕr ăd Āenĕădās //P plăcĭdō,//H pūlchērrĭmă, uōltū   rēspĭcĕ, tōtquĕ tŭās,// dīuă, tŭērĕ nŭrūs.

Des impératifs faue/fauete Ovide fait un usage bien plus important que ses contemporains. Quand la forme faue apparaît une fois chez Virgile et chez Properce, et quatre fois chez Tibulle, Ovide en use six fois, dont quatre dans les Fastes. Et la forme fauete, que l’on trouve une fois chez Horace et chez Virgile, revient à six reprises dans ses œuvres. Ovide apparaît donc comme le poète latin le plus familier de cette posture précative dont nous avons vu 15. G. Appel (276), De Romanorum Precatione, p. 119. 16. on peut consulter G. Appel (276), op.cit., p. 122-123.

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Troisième Partie : La mise en mots de la prière

qu’elle utilisait un langage particulier. Seul Tibulle a recours de manière récurrente à cette racine de la faveur, qu’il conjugue à tous les temps et même – chose unique – à l’impératif futur : Tibulle, Elégies, IV, 5, 9 Magne geni cape tura libensuotisque faueto

Mais ses emplois, quoique nombreux, restent inférieurs aux emplois ovidiens : Forme Faue Fauete Faues Fauet Faueo Faueto Fauerit Faueat Faueatque Faueatis Faueas Faueant Total des formes employées

Ovide

Tibulle

6 6 3 15 1 0 1 1 1 0 11 5 50

4 0 0 3 1 1 0 1 0 1 2 0 13

L’ampleur de l’œuvre ovidienne, en comparaison avec l’œuvre tibullienne, ne peut suffire à rendre compte de cette suprématie, qui révèle plutôt un goût propre du poète, et une tournure d’esprit particulière. On voit par ces exemples combien l’écriture d’Ovide s’appuie sur des formules codifiées, mais selon un code propre, qu’il partage, certes, avec d’autres poètes de son temps, mais qu’il systématise et structure, en une architecture fine et solide à la fois, où la parole sacrée peut paraître une poutre maîtresse. Comme s’il élaborait sa propre langue poétique, on remarque chez lui « la convergence répétitive des constantes » que J. Dangel relevait au sujet du carmen latin17. Selon elle, « l’écriture littéraire ne dévoile jamais mieux sa puissance infinie de création que dans les usages singuliers et les réécritures originales de ces

17. J. Dangel (335), « Le carmen latin », p. 123.



Chapitre III : Les verbes de la prière 321

formulaires ».18 Et Ovide excelle à ces réécritures dans lesquelles s’exprime tout particulièrement son sens musical de la langue. Parfois la demande de l’orant se fait plus pressante. En danger ou en proie au désespoir, il va solliciter de l’aide, et à nouveau nous voyons surgir une formule stéréotypée : fer opem. Cette « formule positive » « qua dei subsidium oratur »19 est très mobile dans le vers et jouit d’une faveur étonnante dans l’œuvre ovidienne. L’impératif adfer opem lui est même quasi exclusif, puisque ni Catulle, ni Virgile, Properce, Horace ou Tibulle ne l’emploient, alors qu’il apparaît six fois chez Nason. Pour solliciter l’assistance d’autrui dans une situation délicate, les personnages ovidiens usent donc de la racine de l’opulence, de la fortune, de ce qui peut être apporté en surplus. Nous reviendrons uniquement sur la forme d’accustaif opem, car elle est à elle seule caractéristique des les pétitions ovidiennes. Elle n’apparaît qu’une fois chez Catulle, quatre fois chez Horace et deux fois chez Properce. Tibulle n’en fait pas usage. En revanche, on en rencontre 96 occurrences dans l’œuvre ovidienne, dont un très grand nombre en contexte précatif, en association avec le verbe ferre. On peut même dire que la formule se fige dans ses emplois à l’impératif. Il semble que nous soyons là en présence d’une tournure qui, pour n’être pas propre à Ovide, reçoit chez lui une coloration poétique toute particulière et se hisse au rang de stylème caractéristique. Et une fois encore ce stylème récurrent et reconnaissable intervient dans un contexte religieux au sens large. La forme opem apparaît donc 3 fois dans les Amours et l’Art d’Aimer, 11 fois dans les Héroïdes, 26 fois dans les Métamorphoses, 13 fois dans les Fastes, 12 fois dans les Tristes, 10 fois dans les Pontiques et 2 fois dans l’Ibis. Elle apparaît dans des prières de demande, au moyen desquelles un orant sollicite une aide nécessaire20 : Tristes I, 5, 76 bellatrix illi diua ferebat opem

Fastes V, 62 Consilio patriae saepe ferebat opem

Tristes I, 2,110 fallere quos non est, hanc mihi fertis opem 18. ibid. 19. G. Appel (276), p. 127. 20. les exemples qui suivent ne sont pas exhaustifs.

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Troisième Partie : La mise en mots de la prière

Tristes I, 2, 4 saepe premente deo fert deus alter opem.

Amours I, 7, 48 ad mediam ? mediae zona tulisset opem.

Métamorphoses VIII, 177 Amplexus et opem Liber tulit utque perenni

Métamorphoses XIII, 670 Ferre uocatur opem : nec qua ratione figuram

Tristes V, 2, 16 Si non, quae nocuit, dextra tulisset opem

Fastes, VI, 626 Ignis ; opem nato Mulciber ipse tulit

Cicéron, De Natura Deorum, I, 43 Cum dis immortalibus et opem et gratiam sustulit

Cicéron, De Divinatione I Ciues ferte opem et restinguite !

Ciceron, Tusculanes, 4, 43 Te Apollo sancte, fer opem teque amnipotens Neptune inuoco

Fastes II, 400 In tam praecipiti tempore ferret opem

Pontiques, 2, 7, 40 et nihil inueni quod mihi ferret opem



Chapitre III : Les verbes de la prière 323

Héroïdes, 12, 2 Ars mea cum peteres ut tibi ferret opem

Métamorphoses IV, 696 Tempora uos poterunt : ad opem breuis hora ferendam est

Tristes III, 2, 4 Docta sacerdoti turba tulisti opem

Métamorphoses V, 23 Et nullam quod opem patruus sponsusue tulisti

Tristes I, 2, 110 Fallere quos non est, hanc mihi fertis opem

Quelques verbes peuvent se substituer à ferre : Fastes VI, 146 At puer infelix uagit opemque petit

Fastes VI, 298 Mittite quam minime mittere uoltis opem

Tristes I, 11, 22 Exposcit uotis immemor artis opem

Métamorphoses XI, 542 Poscit opem ; subeunt illi fraterque parensque

Métamorphoses V, 213 Poscit opem credensqur parum sibi proxima tangit

Héroïdes XXI, 176 Daque salutiferam iam mihi fratris opem

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Troisième Partie : La mise en mots de la prière

Mais la tournure emblématique des demandes d’assistance ovidiennes, celle qui doit rester dans la mémoire du lecteur attentif est l’association fer opem. Elle paraît la plus propre à porter une demande et semble naturelle. Pourtant on ne la trouve chez aucun des poètes avec lesquels on a coutume de comparer l’écriture ovidienne. L’impératif fer n’est pas utilisé par Catulle, Tibulle ni Properce et Virgile, qui en use à six reprises, ne l’associe jamais avec les termes opem ou auxilium ni même simplement avec l’idée d’assistance. L’expression est toutefois bien en usage dans la langue latine et sert aux prières puisqu’on la trouve chez Plaute, Cicéron, Térence et Sénèque. Si l’on peut penser ce dernier inspiré par Ovide, les emplois des premiers attestent l’usage de l’expression. Servius la reprend même dans son commentaire de l’Enéide, en commentant une réplique des Adelphes de Térence, dans un contexte hautement précatif : tantum singulari auxilium ut fer opem, serua, me obsecro. Dans le Soldat Fanfaron, Plaute faisait déjà dire à l’un de ses personnages : teque expectans expetit amanti fer opem quid stas ? (49), tandis que Cicéron s’adressait ainsi à Apollon, dans les Tusculanes : Te Apollo sancte fer opem teque amnipotens Neptune inuoco (IV)21. Chez Ovide, en revanche, l’usage est massif, d’une abondance qui ne peut qu’attirer l’attention. Il est même l’auteur qui, dans toute la littérature latine, utilise le plus cet impératif, avec une fréquence de 17 occurrences pour fer opem et 10 pour ferte opem (contre 3 pour Properce, 2 pour Cicéron, 3 pour Tibulle et 9 pour Virgile, mais jamais en relation avec une demande d’aide). Ovide utilise également à 9 reprises l’impératif adfer qui n’apparaît ni chez Virgile, ni chez Properce, ni chez Tibulle ou Cicéron, mais une seule fois chez Horace et trois fois chez Plaute. Enfin adferte est propre, pour la poésie de cette époque, à Ovide, et son unique emploi se trouve associé à l’objet operam, ce qui confirme la dimension formulaire de l’emploi de ces impératifs. En effet, Ovide marque sa prédilection pour une formule stylisée et récurrente qui vient structurer la prière et porter la demande22. Métamorphoses I, 380 Arte sit, et mersis fer opem mitissima rebus ! 21. On peut trouver des formules comparables dans le Pro Ligario et dans la Première Académique, au livre II. 22. Dans les trois premiers exemples, la scansion du vers, qui s’organise autour d’une césure trochaïque troisième venant renforcer un agencement de césures déjà très structuré (PFH pour le premier, DPFH pour les deux autres), renforce l’émotion de la prière et sa dimension dramatique. La prière agit ici comme un élément pathétique dans le fil narratif, étant donné qu’elle contribue à l’action tout en introduisant de l’émotion.



Chapitre III : Les verbes de la prière 325

Métamorphoses III, 719 Saucius ille tamen : « fer opem, matertera, dixit

Métamorphoses V, 618 Fessa labore fugae « Fer opem, deprehendimur » inquam

Métamorphoses XIII, 669 Bracchia « Bacche pater, fer opem ! » dixere, tulitque

Pontiques I, 6 At nunc, quod superest, fer opem, precor, eminus unam

Métamorphoses II, 700 « ire boues, fer opem furtoque silentia deme ! »

Métamorphoses XIII, 880 « Et fer opem Galatea precor mihi ! Ferte parentes »

Héroides XIV, 125 Vel fer opem uel dede neci ; defunctaque uita

Métamorphoses I, 545 « Fer, pater » inquit « opem ! Si flumina numen habetis

Métamorphoses IX, 775 Fer precor » inquit « opem nostroque medere timori !

Métamorphoses XV, 40 Fer, precor » inquit « opem ! Nam tu mihi criminis auctor ! »

Fastes V, 249 « Fer precor auxilium » dixit « celabitur auctor

Ovide est également presque le seul auteur à utiliser la forme allongée opemque, que l’on trouve chez lui à 10 reprises, alors qu’elle n’apparaît que 3

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Troisième Partie : La mise en mots de la prière

fois dans toute l’œuvre virgilienne, et jamais chez la plupart des autres poètes, ou auteurs contemporains. Trois vers s’offrent comme un condensé de la prière ovidienne : Métamorphoses IX, 699-701 tollere quicquid erit. Dea sum auxiliaris opemque exorata fero ; nec te coluisse quereris ingratum numen. » monuit, thalamoque recessit23. Je suis une déesse secourable et j’apporte de l’aide à qui m’implore ; tu n’auras pas à te plaindre d’avoir honoré une divinité ingrate.

Art remarquable que celui de cette écriture obsessionnelle et psalmodique dans laquelle la faiblesse appelle à l’aide au moyen de formules stéréotypées, répétitives, incantatoires. Quelle que soit la situation, quels que soient la ‘parlure’ du personnage ou son éthos, Ovide façonne les mêmes formules, qui parcourent toute son œuvre, sautant d’un poème à l’autre et tissant ainsi un réseau musical dont le lecteur peut suivre la partition. La fixité métrique des emplois ovidiens est particulièrement remarquable. Le terme occupe trois places privilégiées : la dernière du vers, l’espace séparant une césure trochaïque troisième d’une hephthémimère, et le chevauchement des deux premiers pieds après un mot trochaïque. Dans les Fastes par exemple, 9 sur les 13 occurrences de la forme opem terminent un vers. Lorsqu’il n’est pas à l’une de ces trois places fortes du vers, le mot opem vient finir le premier hémistiche, avant une césure penthémimère, et ce principalement dans les Métamorphoses24, ou il suit cette césure penthémimère25. La théologie d’Ovide s’appuie donc sur des divinités bienveillantes, de même que sa vision de l’humanité souligne l’entraide qui doit unir les hommes. Mais de si abondantes demandes d’aide révèlent aussi les insuffisances des hommes, leur incapacité à affronter les dangers qui les menacent ou à réaliser seuls les tâches ambitieuses dont leur esprit a élaboré le rêve. C’est ainsi que le poète sollicite l’assistance de divinités inspiratrices pour créer une œuvre digne de ses espérances, pour faire naviguer sa barque poétique sans risque de tempête, selon la célèbre métaphore élégiaque.

23. C’est Io, identifiée à Isis, qui s’exprime ainsi. 24. Quelques exemples peuvent être trouvés en Métamorphoses I, 545 ; II, 700 ; VIII, 177 ; IX, 775 ; XV, 40. 25. Comme en Métamorphoses I, 380 ; III, 719 ; V, 618 ; XIII, 669, la liste n’étant pas exhaustive.



Chapitre III : Les verbes de la prière 327

L’omniprésence de ces recours à une puissance extérieure concourt aussi à atténuer l’image d’un poète sûr de lui et d’une abondance facile, au profit de l’image plus nuancée d’un créateur inquiet qui, sans douter de son génie, a besoin d’absorber une énergie extérieure pour renouveler et entretenir sa création. Dans les derniers extraits que nous avons cités, la formule fer opem est associée à l’incise precor dont nous avons déjà étudié les emplois ovidiens, et dont J. Hellegourac’h avait analysé l’usage tibullien et élégiaque, d’une manière plus large. Il apparaît donc ici qu’Ovide intègre des stylèmes élégiaques à un contexte précatif, non pour le détourner comme on l’a souvent dit, ni pour le désacraliser mais au contraire pour resacraliser ce langage efficace, efficace en soi par sa puissance métrique et renforcé encore par la tradition littéraire qui le leste d’une charge intertextuelle signifiante. Les quêtes, même amoureuses, sont ainsi hissées au niveau d’un langage sacré qui, tout en disant la faiblesse de la créature, dit aussi la puissance du Verbe qui tisse des liens intangibles, et pourtant réels, entre les différentes forces du monde et ainsi le modèlent. Il n’est pas négligeable d’ailleurs, dans cette optique, qu’Ovide soit si présent dans son œuvre, en tant que poète écrivant et narrateur, mais aussi en tant que personnage, comme dans de nombreux épisodes des Fastes qui le mettent en scène à proprement parler, ou comme dans les Amours, où il est confronté à un autre être de pur langage, Corinne. Quelques autres verbes sont marqués par un codage métrique récurrent, parmi lesquels succurrite ou iuuate peuvent être pris comme exemples. En revanche les verbes rituels attendus, ceux qui sont identifiés par les historiens modernes comme les centres signifiants de la prière antique, sont absents des œuvres ovidiennes. Il en est ainsi de ueneror, obsecro, obtestor. Pourtant ces verbes auraient pu trouver une place choisie dans l’imaginaire linguistique d’Ovide. R. Schilling a en effet montré le lien unissant ueneror et la divinité qui est au centre du monde ovidien. Ovide utilise donc le même verbe que Caton, chez qui « nous trouvons toujours precor quaesoque ou bien bonas preces precor mais jamais ueneror ni ueniam ».26 S’appuyant sur l’opposition qu’il décèle entre les deux grands groupes lexicaux qui structuraient la parole religieuse romaine, R. Schilling peut affirmer que « tout se passe comme si deux courants idéologiques avaient modelé l’expression des invocations religieuses à Rome : un courant fondé sur fides, et un courant fondé sur uenus. A chacun correspond respectivement un vocabulaire, qui reflète une mentalité spécifique »27. Mais il nuance en26. R. Schilling (538), La religion romaine de Vénus, p. 54. 27. ibidem p. 54.

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Troisième Partie : La mise en mots de la prière

suite son propos : les deux types de prière qu’il associe à ces deux courants fusionneraient après Caton, comme le montreraient les prières d’euocatio et de deuotio. On trouve ce mélange chez Ovide, qui n’utilise qu’exceptionnellement la forme ueneror, alors que ce verbe est présenté comme étant « le mot caractéristique de la prière par excellence »28. Alors que l’on a vu l’omniprésence de certains termes, comme precor principalement utilisé en incise, on doit remarquer l’absence de formes telles que obtestor ou obsecro ainsi que de séries doubles telles que peto/oro quaesoque. Si l’on trouve de nombreux exemples de telles associations, ce qui prouve leur authenticité, on est surpris de n’en voir quasiment aucune trace dans les œuvres ovidiennes, qui se replient sur des codes propres, de manière à élaborer touche après touche un univers verbal original. Les prosateurs comme les poètes reprennent pourtant aisément dans leurs œuvres ces formules héritées du carmen, qui introduisent à elles seules une note sacrée : Horace, Epitres, I, 1, 7 Dextram deosque Penatis obsecro obtestorque

Quinte-Curce, Histoire d’Alexandre, 5, 11 oro et obtestor

Quinte-Curce, Histoire d’Alexandre, 5, 8 oro et obtestor

Pline, Panégyrique de Trajan, 94 oro et obtestor

Cicéron, Pro Sexto, 69 Qua re uos obtestor atque obsecro

Cicéron, Pro Rabinius, 12 Vos omnis oro atque obtestor hortorque

Cicéron, Pro Flacco, 11 Vos oro et obtestor ut 28. R. Schilling (527), « L’originalité du vocabulaire religieux latin », p. 37.



Chapitre III : Les verbes de la prière 329

Cicéron, In Verrem, 25, 72 Deos deasque omnis imploro et obtestor

Tite-Live, Ab Vurbe Condita, XXX, 12 Vindices ab Romanorum arbitrio oro obtestorque

On retrouve des associations comparables avec quaeso : Quinte-Curce, Histoire d’Alexandre, X, 8 alia concordiae spes est, oro quaesoque eligite potiorem. Obortis deinde lacrimis

Quinte-Curce, Histoire d’Alexandre, IX, 2 merita, quibus inuicti contendimus, oro quaesoque ne humanarum rerum terminos adeuntem

Quinte-Curce, Histoire d’Alexandre, III, 6 me uitam mihi dederis. Oro  quaesoque omisso metu patere medicamentum concipi

Tite-Live, Ab Vrbe Condita, XXIII, 9 quaecumque iura liberos iungunt parentibus, precor quaesoque ne ante oculos patris facere et pati omnia infanda uelis

Tite-Live, Ab Vrbe Condita, XXIX, 27 uos precor quaesoque uti quae in meo imperio gesta sunt geruntur postque gerentur

Tite-Live, Ab Vrbe Condita, XXX, 12 sed si captiuae apud dominum uitae necisque suae uocem supplicem mittere licet, si genua, si uictricem attingere dextram, precor quaesoque per maiestatem regiam, in qua paulo ante nos quoque fuimus, per gentis Numidarum nomen, quod tibi cum Syphace commune fuit, per huiusce regiae deos, qui te melioribus ominibus accipiant quam Syphacem hinc miserunt, hanc ueniam supplici des ut ipse quodcumque fert animus de captiua tua statuas neque me in cuiusquam Romani superbum et crudele arbitrium uenire sinas

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Troisième Partie : La mise en mots de la prière

Caton, De Agricultura 141 Mars pater, te precor quaesoque uti sies uolens propitius mihi

Ovide n’utilise jamais la forme quaesoque, qu’aucun autre poète n’utilise d’ailleurs, sans qu’aucune impossibilité métrique ne vienne imposer ce choix. La forme simple quaeso n’apparaît que dans les œuvres de l’exil, si l’on excepte les 3 occurrences des Héroïdes. L’absence de la forme dans les œuvres de la maturité pourrait résulter d’un choix raisonné du poète, qui exclurait de ses œuvres ce vocabulaire prosaïque et juridique, chargé de références intertextuelles. Il crée son propre vocabulaire précatif, en marge de la langue religieuse historique, mais en marge aussi du monde poétique contemporain, dont il récrit les codes.

Conclusion La prière ovidienne a été abordée sous des angles différents, dont la complémentarité nous paraissait évidente. Elle a d’abord été réinscrite dans la tradition historique contemporaine, de manière à faire ressortir les points communs qu’elle entretenait, au niveau stylistique principalement, avec les prières connues de la religion romaine, puis les extraits ont été organisés en catégories, de manière à faciliter le réflexion ultérieure. Les prières ont ensuite fait l’objet d’analyses thématiques et narratologiques. Quelques divinités sont ressorties comme ayant les faveurs d’Ovide, parmi lesquelles essentiellement Vénus et Apollon, mais aussi les divinités proprement romaines (Vesta, Carmenta, Janus…) et surtout Bacchus, qui a particulièrement retenu notre attention et dont le traitement ovidien a réorienté certaines perspectives de notre travail. Ce panorama de la prière ovidienne devait, après l’identification des acteurs, s’intéresser aux lieux et circonstances dans lesquels ces énoncés particuliers étaient émis, puis aux rituels qui les accompagnaient. Il est apparu qu’Ovide intégrait fortement le corps des dieux à la trame narrative de ses œuvres, et façonnait des saynètes presque théâtrales dans lesquelles les figures divines s’inscrivaient, mais auxquelles elles conféraient toutefois une verticalité indéniable, étant investies d’une charge théologique manifeste. Ovide n’est pas seulement un poète facétieux entretenant avec le divin un rapport ludique, voire irrévérencieux. Bien au contraire de nombreux extraits étudiés, et surtout leur mise en relation, ont révélé chez lui une pensée religieuse précise et profonde, qui laisse son empreinte dans sa poétique. Sa description des rituels romains est d’ailleurs fort précise, et conforme à la réalité historique, bien qu’il parvienne dans le même temps à en faire un objet poétique original. Après cette mise en contexte, la formulation même des prières ovidiennes, cœur – et point de départ – de notre travail, pouvait être étudiée, et elle a fait l’objet de nombreuses analyses métriques et stylistiques. Une attention toute particulière a été portée aux deux pôles structurants de l’énoncé précatif, le verbe et le nom propre, assorti d’épiclèses, portant l’invocation. La pratique ovidienne de l’invocation se différencie nettement de celle des poètes contemporains, par un usage très abondant du vocatif tout d’abord, ainsi que par des choix lexicaux particuliers. Ovide joue avec la musique des noms divins comme avec les notes d’une gamme, il utilise les modulations

332

Conclusion

qu’offre la déclinaison pour ouvrir ses vers à l’univers poétique et religieux que ces noms concentrent en eux, qu’ils évoquent en même temps qu’ils le contiennent, en une sorte de profondeur infinie. On assiste, dans les prières ovidiennes, à l’élaboration d’un nouveau langage poétique du sacré, et à une création théonymique qui fera date, puisqu’une grande part des introductions ovidiennes sera reprise par les poètes ultérieurs. Pour ce qui ressortit à la métrique, les prières se distinguent assez nettement du reste de l’œuvre ovidienne. La question des partages trochaïques a été plus précisément approfondie, et la spécificité des énoncés précatifs a pu être établie. Des récurrences verbales et métriques ont été identifiées et analysée, en relation avec les usages des autres poètes élégiaques, comme de Virgile, pour mettre en évidence la forte particularité du style ovidien : fer opem, parce precor, ades ; et les absences ont aussi été soulignées, par exemple l’absence notable de certaines formulations caractéristiques du discours précatif historique, comme obtestor ou oro quaesoque. De ses œuvres de jeunesse jusqu’aux poèmes de l’exil, Ovide a donc progressivement construit une langue poétique propre, qui entremêle des stylèmes religieux appartenant à la langue liturgique de l’époque augustéenne, et des stylèmes purement poétiques, tantôt repris à la tradition littéraire, tantôt originaux : il joue ainsi de la frontière qui sépare le carmen religieux et le carmen poétique en faisant s’élever un chant nouveau, total, par lequel il sacralise la poésie, qui est bien alors « le chant du monde », la musique créatrice, proprement poïétique, dont le souffle donne son sens, sa forme et sa beauté (forma) à l’univers. Le discours élégiaque redevient bien plus qu’un simple propos érotique, ou même métapoétique. Si Ovide nous parle d’amour, il nous parle surtout de poésie, dans une perspective transcendante par laquelle le poète tente de contempler – et de maîtriser ? – le verbe divin. Conteur merveilleux, Ovide se place de lui-même dans l’héritage des traditions religieuses de sa cité et dans une filiation poétique dont l’influence ne se dément pas dans ses œuvres. Son monde existe, comme la fée d’Anatole France, qui affirme avec provocation à Sylvestre Bonnard que « rien n’existe que ce qu’on imagine ». Et cette existence leste son œuvre d’une charge historique, esthétique et philosophique qu’il est impossible de négliger. Le langage élégiaque de l’amour est par lui ritualisé et, ainsi transformé et comme essentialisé, il est mis au service d’une parole plus profonde et plus générale, plus grande, une parole qui dit le monde et qui redéfinit la place de l’homme, être de mots et quêteur de sens, en son sein. Loin de se moquer de

Conclusion 333

la religion, d’exercer sur elle son esprit léger et irrévérencieux, Ovide réalise à travers ses poèmes une œuvre d’écriture étonnante, l’élaboration progressive d’une langue sacrée qui marquera les générations postérieures, d’une langue de prière qui utilise la puissance incantatoire et mystique de la poésie. La Poésie est ce dialogue ininterrompu entre les hommes et le divin, et entre les générations mortelles qui s’immortalisent en la pérennité et la puissance du Verbe auquel elles ont, seules parmi les créatures, la gloire de participer. En intégrant les codes essentiels du carmen, elle sanctifie la langue humaine pour qu’elle se perpétue, comme le dit la jubilation prophétique de Carmenta, qui représente de manière allégorique le chant religieux : sacrabor perpetuis in aris. Ce verbe merveilleux, sacrabor, représente le rêve de tout poète. Ovide a su assimiler les codes religieux de son temps, qu’il a mêlés à la langue sacrée littéraire élaborée par quelques poètes antérieurs, au premier rang desquels Ennius et Virgile, avant de les fondre dans le creuset de sa sensibilité et de les passer au feu de ses conceptions philosophico-religieuses. Revenons brièvement sur chacun de ces éléments afin de fixer l’image que nous avons tenté d’esquisser de la poétique de la prière ovidienne. Les prières ovidiennes s’appuient sur trois réseaux stylistiques s’entremêlant : les constantes de la prière religieuse historique – qui nous ont été conservées par les inscriptions, les historiens et les antiquaires (Caton, TiteLive, Varron, les Tables Eugubines, Macrobe…) –, les stylèmes élaborés par les poètes antérieurs qu’Ovide se réapproprie et enfin les stylèmes que l’on peut identifier comme lui étant propres, au niveau métrique, théonymique ou rythmique. Ovide reprend par exemple à ses prédécesseurs, au premier chef desquels Tibulle, la pétition parce precor dans des contextes de forte émotion, mais il ne reprend guère l’impératif audi pourtant cher à Virgile qui ouvre ainsi plusieurs prières. Il lui préfère ades, qui est lui aussi liturgique mais nettement moins virgilien et qui connaît grâce à Ovide une promotion notable. Ces reprises, ces influences, fortes parfois, servent de cadre à la liberté du poète, de code de reconnaissance avec les lecteurs cultivés, de ‘base’, comme on parle de ‘préparation de base’ en cuisine ou en cosmétique, avant l’adjonction des ingrédients particuliers qui vont modifier la recette. Ovide formule au moyen de l’indéfini quisque l’indétermination du destinataire de la prière, bien attestée dans la religion romaine, mais il dédaigne la formule traditionnelle siue deus siue dea. Ces éléments, auxquels nous avons consacré quelques études systématiques, montrent où se situe la ligne frontière sur laquelle Ovide élabore sa poétique précative, en architecte choisissant dans les édifices l’environnant les plus beaux matériaux pour construire son œuvre.

334

Conclusion

Comme le rappellent Frédéric Chapot et Bernard Laurot dans l’introduction au Corpus des prières grecques et romaines, « la prière antique », « message des hommes adressé aux dieux », « ne laisse que peu de place à l’improvisation et à l’originalité, du moins dans le cadre liturgique. L’orant use d’un langage codifié en formules (certa uerba) ancestrales, qui à la fois sépare l’orant de la vie quotidienne et l’enracine dans un passé lointain. Il instaure par là un temps nouveau […] »1. Ce sont ces formules qui inspirent Ovide, dont l’écriture, pour respecter les codes du carmen, se fait colométrique et s’appuie sur une rythmique nettement symétrique et répétitive. La musique poétique joue alors pleinement son rôle d’envoûtement, par un usage maîtrisé de la répétition, de l’écho et de la triplication. Pour le fond, il faut distinguer deux plans : ce que la prière expose comme contenu informatif direct – au sein du cadre fictionnel des œuvres – et ce qu’elle révèle de la théologie ovidienne. Les prières ovidiennes respectent dans l’ensemble la structure identifiée par les historiens des religions comme étant celle de la prière romaine : « ainsi la prière de demande fait généralement se succéder trois parties, l’invocation – qui nomme et appelle la divinité –, l’argument – qui indique les raisons pour lesquelles on s’adresse à telle divinité et mérite d’obtenir une réponse favorable – et la demande proprement dite (precatio) »2. Chez lui aussi, « l’argumentaire, qui doit convaincre la divinité d’intervenir favorablement, est généralement emprunté à l’un des trois schémas suivants : da quia dedi, accorde-moi ta faveur parce que j’ai su être généreux envers toi ; da ut dem, accorde-moi ta faveur pour qu’en échange je me montre généreux envers toi ; da quia dedisti, accorde-moi ta faveur puisque tu l’as déjà fait en d’autres occasions »3. Elles tirent leur originalité de certaines caractéristiques formelles, que nous avons analysées, mais aussi de choix théologiques, qui se révèlent par divers signes, parmi lesquels les choix théonymiques et verbaux. Nous avons consacré de longs développements à ces deux points, en regroupant les analyses autour de la question des verbes de la prière et de celle des noms des dieux, à laquelle doivent être associées les études narratologiques centrées sur les personnages mis en scène dans les prières. Ovide passe tout cela au feu de sa conception philosophico-religieuse, teintée de pythagorisme dans sa version spirituelle, proche par certains côtés des théories orphiques, pour une révélation alchimique qui transforme tout ce creuset poético-religieux en un Poème. 1. 2. 3.

Corpus des prières grecques et romaines (332), p. 5. ibid. p. 6. La ponctuation a été modifiée. Ibid. p. 7.

Conclusion 335

Se dessine alors une théologie propre à Ovide, dans laquelle Vénus et Bacchus tiennent chacun une place prépondérante. Dans les prières ovidiennes, on peut percevoir en effet l’influence de la pensée et des rites pythagoriciens et orphiques sur les innovations introduites en matière de poétique religieuse. Le traitement réservé au dieu Bacchus, par exemple, devrait être revu dans cette optique. L’hymne à Bacchus du livre IV des Métamorphoses est étonnamment riche en théonymes et épiclèses dont Ovide fait un usage extrêmement original. Aucune divinité ne suscite dans l’œuvre ovidienne une telle floraison verbale, une telle créativité, respectueuse pourtant de la tradition puisqu’elle s’appuie assez souvent sur des précédents enniens ou virgiliens, étonnamment non repris par les autres poètes. Bacchus est au centre de l’œuvre ovidienne, au même titre qu’Apollon et Vénus, et peut-être davantage encore. Or Bacchus est, avec Dionysos et Zagreus – les trois divinités constituant en quelque sorte les hypostases d’un même dieu – le dieu central du culte orphique : la source poétique du foisonnement créatif ovidien en matière de nomination divine pourrait être à mettre en relation avec l’hymnique et la pensée philosophico-poétique de la tradition orphique – influencées par la pensée pythagoricienne telle qu’elle était connue à Rome. Ces systèmes philosophiques et religieux à la fois, bien représentés à Rome à l’époque d’Ovide et pouvant parfaitement s’associer à une vision platonicienne mettant le Logos au centre du monde, nous semblent extrêmement proches de l’esthétique ovidienne, véritable ‘pensée de la Parole’. Une analyse systématique des théonymes, épiclèses et autres modalités de l’invocation chez Ovide paraît essentielle pour entrer dans la pensée théologique du chantre de Sulmo. Nous avons ébauché ce travail, et les premiers résultats obtenus sont extrêmement encourageants, car ils révèlent des usages tout à faits originaux et signifiants. Les recherches permettant d’étayer cette hypothèse concerneraient à la fois la philosophie et les mentalités religieuses, et la poétique dans sa dimension musicale, autour d’analyses métriques principalement (étude des césures, des intermots trochaïques, des rythmes (longueur des mots, accentuation, schémas métriques), des choix lexicaux envisagés autant sur le plan thématique et historique que sur le plan de la métrique verbale, des jeux phoniques et des clausules) comme dans sa dimension historique (mise en relation avec les poètes antérieurs et contemporains). L’originalité ovidienne reste dans une large mesure à interpréter, sur le plan religieux, de manière à comprendre pourquoi elle a tant marqué les poètes ultérieurs, jusqu’au XVIème siècle. Dans la pensée des Anciens, la poésie, si elle tend vers le carmen, et lui emprunte les codes qui en font la langue des Dieux, n’est pas vaine ni vide

336

Conclusion

mais chargée de la mémoire des siècles et des traditions des hommes ; elle ne s’évanouit pas dans le silence mais se répercute en écho d’un vers à l’autre par les jeux de répétition, et d’un poète à l’autre par la reprise, en formulaire et en reflet, d’un texte immuable ; elle n’est pas un joli petit objet à usage particulier, mais la grande aventure de l’homme qui se réapproprie un feu créateur qu’il vient disputer aux Dieux.

Annexes

Thémis

Daphné Père de Daphné Phaeton Apollon/Phébus Jupiter Mère des Héliades Battus Battus Sémélé Jupiter (NC) Bacchus Acétès (Bacchus)

M2

M3 M4 M5 M6 M7 M8 M9 M10 M11 M12 M13 M14 M15

Apollon/Phébus Daphné Mère de Phaeton Phaeton Terre (embrasée) Héliades Mercure Mercure Jupiter Sémélé NC Acétès (Bacchus) Bacchus

Deucalion

Narrateur

Destinateur

Méta I, 504-524 Méta I, 545-546 Méta I, 768-775 Méta II, 35-39 + C Méta II, 279-300 Méta II, 361-363 + C’ Méta II, 692-694 Méta II, 699-701 Méta III, 289-291 +C Méta III, 293-295 +CC’ Méta III, 405 Méta III, 611-614 +CC’ Méta III, 689-690 + CC’

Méta I, 377-380 + C*

Méta I, 1-4

Localisation

C = la prière ne commence pas au début du vers / C’ = elle se termine au cours d’un vers.

Dieux (di)

M1

*

Destinataire NC = non cité

No

21 2 8 5 22 3 3 3 3 3 1 4 2

4

4

Nbre de vers

d→d d→d h→h h→d d→d d→d d→h d→h d→h h→d h→d h→d d→h

h→d

h→d

Dialogue H=Homme D=Dieu

Demande de faveur pour son œuvre Demande d’expiation et de secours Prière amoureuse Demande d’aide Serment Pétition Prière Plaintes Vœu ironique Demande d’aide Serment Pétition Malédiction Demande de faveur Ordre (crainte religieuse)

Classification

Annexe 1. Corpus servant de référent général aux études stylistiques et métriques

Destinataire NC = non cité

Autonoé Bacchus Pères puis Mûrier Apollon/Soleil Dieux (di) Mercure et Vénus Neptune

Sa femme Cadmus Persée

Persée Muses Cérès Cupidon Cérès

Diane Pallas Arachné

No

M16 M17 M18 M19 M20 M21 M22

M23 M24 M25

M26 M26bis M27 M28 M29

M30 M31 M32 bis

Aréthuse Arachné Pallas

Phinée Pyrénée Calliope Vénus Aréthuse

Cadmus Femme de Cadmus NC

Penthée Narrateur Thisbé Narrateur Salmacis Hermaphrodite Vénus

Destinateur

Méta V, 618-620 + C Méta VI, 25 Méta VI, 28-33 + C

Méta V, 216-222 Méta V, 280-283 +C’ Méta V, 341-345 Méta V, 365-379 +C’ Méta V, 489-497 +C

Méta IV, 583-585 Méta IV, 591-594 Méta IV, 769-771 +C

Méta III, 719-720 + C Méta IV, 9-32 +C Méta IV, 154-161 Méta IV, 192-208 +CC’ Méta IV, 370-372 + C Méta IV, 383-386 + C Méta IV, 532-538 +C

Localisation

3 1 6

7 4 5 15 9

3 4 3

2 24 8 17 3 4 7

Nbre de vers

/d → d h→d d→h

h → /d h→d d→d d→d d→d

h→h h→h h → /d

h→h h→d h → h&o h→d /d → d d→d d→d

Dialogue H=Homme D=Dieu Demande d’aide g détourné Pétition Hymne Vœu Malédiction Demande d’aide/ intervention Demande Demande Demande de renseignement Demande de pitié Invitation Hymne (début) Prière hymnique Demande d’expiation/ pitié Demande d’aide Défi Conseil

Classification

Annexes 339

Destinataire NC = non cité

Arachné Neptune

femmes Dieux (di) Latone Latone (Latone) Paysans de Lycie Paysans de Lycie Térée Térée

Médée Médée

Médée Hécate

Multiples Thésée

No

M32 M33

M34 M35bis M35 M35ter M36 M36bis M37 M38 M38bis

M39 M40

M41 M41bis

M42 M43

Médée Peuple d’Erechthée

Jason Médée

Médée Jason

prophétesse Ilionée Dioné Dioné Paysan de Lycie Latone Latone Père de Philomèle Philomèle

Pallas Narrateur

Destinateur

Méta VII, 192-219 Méta VII, 433-450 + C

Méta VII, 164-168 + C Méta VII, 176-178

Méta VII, 11-71+C Méta VII, 94-97 +C

Méta VI, 159-161 + C Méta VI, 262-264 + CC’ Méta VI, 280-285 Méta VI, 299-300 + C Méta VI, 327-328 + CC’ Méta VI, 349-359 +C’ Méta VI, 369 Méta VI, 496-503 Méta VI, 533-548

Méta VI, 136-138 +C Méta VI, 115-120

Localisation

28 18

5 3

61 4

3 3 6 2 2 11 1 8 16

3 6

Nbre de vers

/d → d h → /d

h → /d /d → d

h → /d

h→h h→d h→d h→d h→d d→h d→h h→h

d→h h→d

Dialogue H=Homme D=Dieu Malédiction Apostrophe narrative (tapisserie) Ordre Demande d’aide Défi (x2) Demande Demandes de faveur (2) Prière Malédiction Prière Menaces avec lexique précatif Dialogue intérieur Serment (discours indirect) Pétition Demande d’assistance et de faveur Prière + rituel (179-191) Hymne

Classification

340 Annexes

Destinataire NC = non cité

Eaque Céphale Jupiter Jupiter magne pater Jupiter Céphale Scylla Apollon/Phébus Euménides

Neptune

Jupiter et Mercure NC Cérès Neptune Neptune/maître Téléthuse Isis Dieux infernaux Vénus

No

M44 M45 M46 M46bis M47 M48 M49 M50 M51

M52

M53 M54 M54bis M55 M55bis M55ter M56 M57 M58

Philémon et Baucis Lélex (vs 617) Dryades Mnestra Mnestra Isis Téléthuse (Iphis) Orphée Pygmalion

Minos Eaque Eaque Eaque Eaque Procris Minos Mopsus Althée (mère de Méléagre) Achéloüs

Destinateur

Méta VIII, 595-602 (vs extrapolés peut-être) +C Méta VIII, 707-710 Méta VIII, 724 Méta VIII, 778-781 Méta VIII, 850-851 + C’ Méta VIII, 864-868 Méta VIII, 696-701 Méta IX, 773-781 + C’ Méta X, 17-39 +C Méta X, 274-276 + C

Méta VII, 482-483 Méta VII, 588-605 Méta VII, 615-618 Méta VII, 620-621 Méta, VII, 627-628 + C Méta VII, 852-856 + C Méta VIII, 97-100 Méta VIII, 350-351 Méta VIII, 481-485

Localisation

4 1 4 2 5 6 9 23 3

9

2 19 4 2 2 5 4 2 5

Nbre de vers

h→d h → ? /d → d h→d d→h h→h h→d /d → d h→d

d→d

/d → /d HC /d → d /d → d /d → d h→h /d → h h→d h→d

Dialogue H=Homme D=Dieu

Vœu Prière avec offrandes Pétition au style indirect Pétition Serment Conseil Demande d’aide Prière/chant aux enfers Pétition

Prière

Pétition Rituel : peste d’Egine Pétition Demande de faveur Pétition Pétition Malédiction Vœu Prière d’expiation

Classification

Annexes 341

Destinataire NC = non cité

Dieux (Di) Myrrha

Dieux (numina) Vénus Vénus Bacchus Bacchus Psalmathé Céyx Dieux (numen)

Dieux et Junon Alcyone NC Neptune NC

Apollon/Phébus Sacrificateurs Hécube

No

M59 M60

M61 M62 M63 M64 M65 M66 M67 M68

M69 M70 M71 M72 M73

M74 M75 M76

Alcyone Céyx Achille Céné Rhoetus (un centaure) Neptune Polyxène Polymestor

Myrrha Hippomène Hippomène Midas Midas Pélée Alcyone Compagnons de Céyx

Myrrha Nourrice de Myrrha

Destinateur

Méta XII, 586-596 Méta XIII, 465-473 Méta XIII, 556-558 + C’

Méta XI, 578-582 Méta XI, 658-670 Méta XII, 120-121 + C Méta XII, 201-203 + C’ Méta XII, 285-286 + C

Méta X, 483-487 + C Méta X, 640-641 + C Méta X, 673 +C Méta XI, 102-103 + C Méta XI, 132-133 Méta XI, 394-401 Méta XI, 439-441 Méta XI, 539-543

Méta X, 320-324 +CC’ Méta X, 395-401 + C

Localisation

11 5 3

5 13 2 2 2

5 2 1 2 2 8 3 5

5 7

Nbre de vers

d→d HC h→h

HC h→h /h → d ? h→d /d → d ?

h→d h→d h→d h→d h→d HC HC HC

h→d HC

Dialogue H=Homme D=Dieu

Prière Demande Serment

Demande d’aide Evocation de procédés magiques Pétition Demande d’aide/faveur Demande d’aide/faveur Pétition Prière d’expiation Lexique précatif Plaintes Rituel et prière (style indirect) Prière (style indirect) Plaintes Demande d’aide Vœu Souhait ironique

Classification

342 Annexes

Picus Jupiter

Dieux (Superi) Pommone Hercule Pythagore Dieux (Superi) Muses

Esculape

Dieux (Superi) Vénus Dieux (Superi) (pour Narrateur Auguste)

M85 M86 M87 M88 M89 M90

M91

M92 M93

Prêtre

Iphis Vertumne Myscelos Narrateur Cipus Narrateur

Aurore Filles d’Anius Polyphème Acis Glaucus Circé Circé Vénus

Jupiter Bacchus Galatée Galatée Circé

M77 M78 M79 M80 M81 M82 M83 M84

Destinateur

Destinataire NC = non cité

No

Méta XV, 765-778 Méta XV, 861-870

Méta XV, 677-679

Méta XIV, 729-732 Méta XIV, 759-764 Méta XV, 39-40 Méta XV, 60-74 Méta XV, 571-573 + C’ Méta XV, 622-625

Méta XIII, 586-599 Méta XIII, 669 + CC’ Méta XIII, 789-869 Méta XIII, 880-881 + C Méta XIV, 12-24 Méta XIV, 55-58 Méta XIV, 372-376 + C Méta XIV, 586-591 + C

Localisation

14 10

3

4 6 2 15 3 4

14 1 81 2 13 4 5 6

Nbre de vers

d→d h→h

h→d

h→d d → /d h → /d h→h h→d h→d

d→d h→d d → d h→d h→d HC d → /h d→d

Dialogue H=Homme D=Dieu Prière Demande d’aide Prière amoureuse Demande d’aide Prière Magie de Circé Prière amoureuse Demande d’action (immort.) Pétition Souhait Demande d’aide Hymne Vœu Demande de renseignements Demande de faveur propitiation Prière Prière

Classification

Annexes 343

Destinataire NC = non cité

Cupidon Vénus Mari de Corinne Portier / janitor Dipsas Corinne (corinne) Vénus Amour Cupidon Dieux Argo Isis Ilithye Corinne éléments Femme

Mari de Corinne Corinne

No

A1 A2 A3 A4 A5 A6 A7 A8 A9 A10 A11 A12 A13 A14 A15 A16 A17

A18 A19

Narrateur Narrateur

Narrateur Narrateur Narrateur Narrateur Narrateur Narrateur Narrateur Narrateur Narrateur Narrateur Narrateur Narrateur Narrateur Narrateur Narrateur Narrateur Narrateur

Destinateur

Amores II, 19, 37-44 Amores II, 17, 23-25

Amores I, 2, 19-52 Amores I, 3, 1-6 Amores I, 4, 2 Amores I, 6, 1-48 Amores I, 8, 113-114 Amores I, 14, 27-30 Amores II, 7, 27-28 Amores II, 8, 19-20 Amores II, 9a, 1-16 Amores II, 9b, 47-52 Amores, II, 10, 29-38 Amores II, 11, 5-6 Amores II, 13, 7-18 Amores II, 13, 19-25 Amores II, 16, 47-50 Amores II, 16, 51-52 Amores II, 19, 19-22

Localisation

8 3

34 6 1 48 2 4 2 2 16 8 10 2 12 6 4 2 4

Nbre de vers

HC h→h

h→d h→d h→h h→h h→h h→h h→h h→d h→d h→d h→d h→ h→d h→d h→h h → ? hC

Dialogue H=Homme D=Dieu Hymne Prière de l’amant Malédiction Prière Imprécations Demande pour cheveux Serment Demande Apostrophe Ode Souhait Imprécation Prière Prière (suite de A13) Demande Ordre Conseils pour se faire aimer Conseils/demande Demande

Classification

344 Annexes

Corinne Fleuve Ilia

Elégie Tibulle

Cérès Corinne Vénus Vénus et Cupidon Janus

A26 A26bis

A27 A28 A29 A30 F4

Elégie et Tragédie Victoire, Vénus, Cérès, Bacchus, Minerve, Castor, Pollux, Phoebus, Phoebe, Neptune

A20 A21

A23 A24 A25 A25bis

Destinataire NC = non cité

No

Narrateur Narrateur Narrateur Narrateur Narrateur

Narrateur Narrateur

Narrateur Narrateur Narrateur Anio

Narrateur Narrateur

Destinateur

Amores, III, 10, intégral Amores III, 11b, 45-48 Amores III, 15, 1 Amores III, 15, 15-16 Fastes I vs 149-150

Amores III, 2, 80 Amores III, 3, 47-48 Amores III, 6 (intégral) Amores III, 6, 53-66 Inclus dans extrait A25 Amores III, 9, 1-3 Amores III, 9, 66-68

Amores III, 1, 61-68 + C Amores III, 2, 45-57

Localisation

48 4 1 2 2

3 3

1 2 106 14

8 2

Nbre de vers

h→d hC hC h→d h→d

h→d h→d

→ h→h h→d d→h

h→d h→d

Dialogue H=Homme D=Dieu

Apostrophe Souhait (precor / culte/ requiescete) Hymne Demande Apostrophe Prière Demande de renseignements

Vœu Demande Prière puis imprécation Prière amoureuse

Faveur pour son œuvre Prière

Classification

Annexes 345

Destinataire NC = non cité

Janus

Janus

Janus

Janus

Janus

Janus

Janus

Janus

Janus

Germanicus Carmenta (non citée)

No

F5

F6

F7

F8

F9

F10

F12

F13

F14

F1 F15

Narrateur Narrateur

Narrateur

Narrateur

Narrateur

Narrateur

Narrateur

Narrateur

Narrateur

Narrateur

Narrateur

Destinateur

Fastes I vs 3-26 Fastes I vs 467-468

Fastes I vs 287-288

Fastes I vs 277

Fastes I vs 257-258

Fastes I vs 229-230

Fastes I vs 189-190

Fastes I vs 185-187

Fastes I vs 175-176

Fastes I vs 171-172

Fastes I vs 165

Localisation

24 2

2

1

2

2

2

2

2

2

1

Nbre de vers

h→h h→d

h→d

h→d

h→d

h→d

h→d

h→d

h→d

h→d

h→d

Dialogue H=Homme D=Dieu Demande de renseignements Demande de renseignements Demande de renseignements Demande de renseignements Demande de renseignements Demande de renseignements Demande de renseignements Demande de renseignements Demande de faveur pour son œuvre Hymne Demande de faveurpour son œuvre

Classification

346 Annexes

Destinataire NC = non cité

Dieux locaux Janus Janus

César Terre et Cérès Paix et gens Iulia César César Muses (Piérides)

Muse

Junon Lucina Nymphes Hyménée dieux pour César Terminus Mars Gradiuus

No

F16 F2 F3

F17 F18 F19 F20 F22 F23

F24

F25 F26 F27 F21 F28 F29 F30

Narrateur Dioné Narrateur Narrateur Narrateur Narrateur Narrateur

Narrateur

Narrateur Narrateur Narrateur Narrateur Narrateur Narrateur

Carmenta Narrateur Narrateur

Destinateur

Fastes II vs 449-452 Fastes II vs 469-470 Fastes II vs 561-562 Fastes II vs 63-66 Fastes II vs 659-678 Fastes III vs 1-10 Fastes III vs 167-170

Fastes II vs 359-360

Fastes I vs 637 + C Fastes I vs 675-694 Fastes I vs 7ll-722 Fastes II vs 1-18 Fastes II vs 127-144 Fastes II vs 269-270

Fastes I vs 509-536 Fastes I vs 65-70 Fastes I vs 89-92

Localisation

4 2 2 4 20 10 4

2

1 20 12 18 18 2

28 6 4

Nbre de vers

h→d h→d h→d h→d h→d h→d h→d

h→d

h→h h→d h→d h→h h→h h→d

d→d h→d h→d

Dialogue H=Homme D=Dieu Prière demande de faveur demande de renseignements Souhait Prière demande de faveur Prière Hymne demande de renseignements demande de faveur pour son œuvre demande d’aide demande d’aide demande variée demande de faveur Hymne demande de faveur demande de renseignements

Classification

Annexes 347

dieux des buissons Jupiter

Jupiter Vesta Flammes Bacchus Bacchus

Bacchus

Bacchus

Minerve

Pallas Narrateur Vénus (+ 7-14 & 91- Narrateur 132 en parallèle)

F33 F34

F35 F36 F37 F38 F39

F40

F41

F42

F43 F44

Narrateur

Narrateur

Narrateur

Numa Narrateur Narrateur Ariane Narrateur

Numa Numa

Narrateur/femmes Narrateur

Junon Lucina Egérie

F31 F32

Destinateur

Destinataire NC = non cité

No

Fastes III vs 847-848 Fastes IV vs 1

Fastes III vs 834

Fastes III vs 7l4-732

Fastes III vs 789 -790

Fastes III vs 375-366 + C Fastes III vs 426 + C Fastes III vs 427-428 Fastes III, 463-506 + C Fastes III vs 771-783

Fastes III vs 309-311 + C Fastes III vs 333-336 + C

Fastes III vs 256 Fastes III vs 261-262

Localisation

2 1

1

19

2

2 1 2 44 13

3 4

1 2

Nbre de vers

h→d h→d

h→d

h→d

h→d

h→d h→d h → /d h→d h→d

h→d h→d

h→d h→d

Dialogue H=Homme D=Dieu Demande d’aide Demande de renseignements Demande d’aide Demande de renseignements Pétition Demande d’aide Pétition Plainte élégiaque Demande de renseignements Demande de faveur pour son œuvre Hymne (suit récit hymnique) Demande de faveur pour son œuvre Demande d’aide Demande de faveur pour son œuvre

Classification

348 Annexes

Destinataire NC = non cité

Vénus Cybèle

Erato alumnae Heliconis Erato

Erato

Erato

Camène d’Aonie

Cybèle Erato

Erato

Erato

No

F46 F47

F48

F49

F51

F51

F52

F53 F54

F55

F56

Narrateur

Narrateur

Claudia Quincta Narrateur

Narrateur

Narrateur

Narrateur

2

2

2

2 2

Nbre de vers

Fastes IV vs 357-358 + C’

Fastes IV vs 353-354

Fastes IV vs 319-324 Fastes IV vs 350

Fastes IV vs 247-248

2

2

6 1

2

Fastes IV vs 221-222+CC’ 2

Fastes IV vs 219-220

Fastes IV vs 215-216 +C

Fastes IV vs 193-194

Narrateur

Narrateur

Fastes IV vs 161-162 Fastes IV vs 191-192

Localisation

Narrateur Narrateur

Destinateur

h→d

h→d

h→d h→d

h→d

h→d

h→d

h→d

h→d

h→d h→d

Dialogue H=Homme D=Dieu Demande d’aide Demande de renseignements Demande de renseignements Demande de renseignements Demande de renseignements Demande de renseignements demande de renseignements vœu Demande de renseignements Demande de renseignements Demande de renseignements

Classification

Annexes 349

Erato

Erato

Cérès (voeu pour qu’elle retrouve sa fille) étoiles Palès

F57

F58

F59

Palès Quirinus Jupiter, Mauors et Vesta par Romulus) Muse Jupiter Robigo Flore

Flore

F45 F65 F66 F67

F68

F62 F63 F64

F60 F61

Destinataire NC = non cité

No

Narrateur

Narrateur Enée Flamine de Quirinus Narrateur

Un berger Narrateur Romulus

Cérès Narrateur

Un vieil homme

Narrateur

Narrateur

Destinateur

Fastes V vs 277

Fastes IV vs 83-84 Fastes IV vs 893-894 Fastes IV vs 911-932 Fastes V vs 183-192

Fastes IV vs 747-776 Fastes IV vs 807-808 Fastes IV vs 827-832 + C

Fastes IV vs 577-579 Fastes IV vs 723-724

Fastes IV vs 525-526

Fastes IV vs 367-368

Fastes IV vs 361-362

Localisation

1

2 2 22 10

30 2 6

3 2

2

2

2

Nbre de vers

h→d

h→d h→d h→d h→d

h→d h→d h→d

d→/ h→d

h→d

h→d

h→d

Dialogue H=Homme D=Dieu

Pétition Voeu Prière demande de renseignements Demande de renseignements

demande d’aide demande de faveur (+rituel) Prière demande de faveur demande de faveur

Demande de renseignements Demande de renseignements voeu

Classification

350 Annexes

Destinataire NC = non cité

Flore

Flore

Flore

Celer Mercure

Mars Tibre

Mercure Mercure Mercure

Mercure

Stryges Vesta

No

F69

F70

F71

F72 F73

F74 F75

F76 F77 F78

F79

F80 F81

Craniè Narrateur

Narrateur

Narrateur Marchand Narrateur

Auguste Narrateur

Rémus Narrateur

Narrateur

Narrateur

Narrateur

Destinateur

Fastes VI vs 159-162 + C Fastes VI vs 249-250

Fastes V vs 697

Fastes V vs 663-672 Fastes V vs 681-690 Fastes V vs 693-694

Fastes V vs 573-577 Fastes V vs 635-636

Fastes V vs 469-470 Fastes V vs 447-448

Fastes V vs 377-378

Fastes V vs 371-372

Fastes V vs 355-358

Localisation

4 2

1

10 10 2

5 2

2 2

2

2

4

Nbre de vers

d→d h→d

h→d

h→d h→d h→d

h→d h→d

h→h h→d

h→d

h→d

h→d

Dialogue H=Homme D=Dieu Demande de renseignements Demande de renseignements Demande de faveur pour son œuvre Malédiction Demande de renseignements Voeu demande de renseignements Hymne Prière demande de renseignements demande de renseignements voeu demande de faveur

Classification

Annexes 351

Destinataire NC = non cité

objets sacrés du temple de Vesta Bacchus

Dieux Prophétesse Ino

Minerve

Minerve

Minerve

Muses (Piérides)

Muses (Piérides)

Vénus

Mars et Auguste

No

F82

F83

F84 F85 F86

F87

F88

F89

F90

F91

AA1

AA2

Narrateur

Narrateur

Narrateur

Narrateur

Narrateur

Narrateur

Narrateur

Ino Ino Prophétesse

Narrateur

Metellus Pontife

Destinateur

Ars amat. I, 203-204

Ars amat. I, 30

Fastes VI vs 799-800

Fastes VI vs 798

Fastes VI vs 693-694

Fastes VI vs 653-654

Fastes VI vs 652

Fastes VI vs 517 Fastes VI vs 535-536 Fastes VI vs 541-548

Fastes VI vs 483-484

Fastes VI vs 449-452

Localisation

2

1

2

1

2

2

1

1 2 8

2

4

Nbre de vers

h→d

h→d

h→d

h→d

h→d

h→d

h→d

h→d /d → h h→d

h→d

h→d

Dialogue H=Homme D=Dieu voeu Cf Ciceron Pro scauro 48 demande de faveur pour son œuvre demande d’aide Pétition demande de faveur par une prophétesse demande de faveur pour son œuvre Demande de renseignements Demande de renseignements demande de faveur pour son œuvre demande de renseignements demande de faveur pour son œuvre Demande de faveur

Classification

352 Annexes

Minos Jupiter Apollon Phoebus, Bacchus et les Muses Muse Multiples (dieux de la mer et de la terre, astres, mer, terre, monde souterrain, fleuve, foule des dieux d’en haut, satyres, faunes, lares, nymphes, fleuves, race des demi-dieux, dieux antiques et nouveaux… (ibis) di

Amour / Hippolyte Hippolyte

AA3 AA4 AA5

Ibis 2 Ibis 3

H1 H2

AA6 Ibis 1

Destinataire NC = non cité

No

Phèdre Phèdre

Narrateur Narrateur

Narrateur narrateur

Dédale Dédale Narrateur

Destinateur

IV, 15-16 IV, 167-176

Ibis vs 476 Ibis vs 641-642

Ars amat. III, 467-468 Ibis vs 67-126

Ars amat. II, 25-30 Ars amat. II, 38 Ars amat. III, 347-348

Localisation

2 10

1 2

2 60

6 1 2

Nbre de vers

h→h h→h

h→d h→d

h→d h→d

h→h h→d h→d

Dialogue H=Homme D=Dieu

imprécation Demande de faveur (être exaucé) Vœu / demande Prière amoureuse

Demande d’aide Deuotio

Pétition Demande d’aide/faveur Demande de faveur

Classification

Annexes 353

Peuplier/Xanthe/ ondes Pâris ( Jupiter non cité) Vénus / amour Pudor/iura uiolata (Vénus ?) Enée Oreste Thésée Hyménée / Erinyes Macarée Médée Di Dardanides Ø Mea numina / tuo Phaon Nymphe / air / amour / Phoebus Vent

H3

H20

H4 H5 H6 H7 H8 H8bis H9 H10 H11 H12 H13 H14 H15 H16 H17 H18 H19

Destinataire NC = non cité

No

Léandre

Oenone Médée Didon Didon Didon Didon Hermione Ariane Canacé Canacé Jason Laodamie Laodamie Laodamie Laodamie Sappho Sappho

Oenone

Destinateur

XVIII, 50 environ

V, 157-158 VI, 151-164 VII, 31-34 VII, 97-98 VII 105 VII, 157-163 VIII, 117-122 X, 148-150 XI, 103-106 XI, 123-130 XII, 73-88 XIII, 49-50 XIII, 77-78 XIII, 88 XIII, 157-162 XV, 93-98 XV, 175-184

V, 27-28 + 31

Localisation

14

2 14 4 2 1 7 6 3 4 7 16 2 2 1 6 6 10

3

Nbre de vers

h → ?

h→h h→d h→d h→d h→h h→h h→h h→h h→d h→h h→h h→d h→h h→h h→d h→h h→d

h→h

Dialogue H=Homme D=Dieu

Demande / imprécation

Demande : prière Apostrophe / demande Demande Prière + serment Prière Prière Vœu Serment Demande / prière Prière + don

Prière amoureuse Vœu/imprécations

Prière

Classification

354 Annexes

Destinataire NC = non cité

Lune Héro Neptune Cydippe Cydippe Diane

No

H21 H22 H23 H24 H25 H26

Léandre Léandre Héro Acontius Mère de Cydippe Cydippe

Destinateur

XVIII, 61-74 XVIII, 203-204 XIX, 141-142 XX, 117-122 XX, 217-219 XXI, 175-176

Localisation

14 2 2 8 2 2

Nbre de vers h→d h→h h→d h→h h→h h→d

Dialogue H=Homme D=Dieu Prière Demande Demande Vœu Prière prière

Classification

Annexes 355

Destinataire NC = non cité

Vénus / amour Pudor/iura uiolata (Vénus ?) Enée Oreste Amour Elégie Vénus Hyménée / Erinyes Neptune

Arachné Téléthuse Femme

Mari de Corinne Pallas Latone

No

H6 H7 H8 H8bis H9 A9 A26 A29 H11 M33

M32bis M55ter A17

A18 M31 M35

Narrateur Arachné Dioné

Pallas Isis Narrateur

Didon Didon Didon Didon Hermione Narrateur Narrateur Narrateur Canacé Narrateur

Destinateur

Amores II, 19, 37-44 Méta VI, 25 Méta VI, 280-285

Méta VI, 28-33 + C Méta VIII, 696-701 Amores II, 19, 19-22

VII, 31-34 VII, 97-98 VII 105 VII, 157-163 VIII, 117-122 Amores II, 9a, 1-16 Amores III, 9, 1-3 Amores III, 15, 1 XI, 103-106 Méta VI, 115-120

Localisation

8 1 6

6 6 4

4 2 1 7 6 16 3 1 4 6

Nbre de vers

HC h→d h→d

d→h h→h hC

h→d h→d h→h h→h h→h h→d h→d hC h→d h→d

Dialogue H=Homme D=Dieu

Apostrophe Apostrophe Apostrophe Apostrophe / demande Apostrophe narrative (tapisserie) Conseil Conseil Conseils pour se faire aimer Conseils/demande Défi Défi (x2)

Classification

Annexe 2. Corpus complet trié en fonction du type de prière ou d’invocation

Destinataire NC = non cité

Sa femme Cadmus Latone Sacrificateurs Vénus Corinne Corinne Corinne Corinne Macarée Héro Neptune Flore

Thésée Vent Phaon Nymphes dieux des buissons Dieux

No

M23 M24 M35ter M75 A8 A15 A19 A24 A28 H12 H22 H23 F71

H10 H20 H18 F26 F33 F84

Ariane Léandre Sappho Dioné Numa Ino

Cadmus Femme de Cadmus Dioné Polyxène Narrateur Narrateur Narrateur Narrateur Narrateur Canacé Léandre Héro Narrateur

Destinateur

X, 148-150 XVIII, 50 environ XV, 93-98 Fastes II vs 469-470 Fastes III vs 309-311 + C Fastes VI vs 517

Méta IV, 583-585 Méta IV, 591-594 Méta VI, 299-300 + C Méta XIII, 465-473 Amores II, 8, 19-20 Amores II, 16, 47-50 Amores II, 17, 23-25 Amores III, 3, 47-48 Amores III, 11b, 45-48 XI, 123-130 XVIII, 203-204 XIX, 141-142 Fastes V vs 377-378

Localisation

3 14 6 2 3 1

3 4 2 5 2 4 3 2 4 7 2 2 2

Nbre de vers

h→h h → ? h→h h→d h→d h→d

h→h h→h h→d HC h→d h→h h→h h→h hC h→h h→h h→d h→d

Dialogue H=Homme D=Dieu Demande Demande Demande Demande Demande Demande Demande Demande Demande Demande Demande Demande Demande de faveur pour son œuvre Demande : prière Demande / imprécation Demande / prière demande d’aide Demande d’aide demande d’aide

Classification

Annexes 357

Destinataire NC = non cité

Jupiter

Père de Daphné Battus Autonoé Diane Dieux (di) Isis Dieux (Di) NC Bacchus Galatée Hercule Junon Lucina Junon Lucina Vesta Pallas Vénus étoiles Muse

No

M84

M4 M10 M16 M30 M35bis M56 M59 M71 M78 M80 M87 F25 F31 F36 F43 F46 F60 AA6

Daphné Mercure Penthée Aréthuse Ilionée Téléthuse (Iphis) Myrrha Achille Filles d’Anius Acis Myscelos Narrateur Narrateur/femmes Narrateur Narrateur Narrateur Cérès Narrateur

Vénus

Destinateur

Méta I, 545-546 Méta II, 699-701 Méta III, 719-720 + C Méta V, 618-620 + C Méta VI, 262-264 + CC’ Méta IX, 773-781 + C’ Méta X, 320-324 +CC’ Méta XII, 120-121 + C Méta XIII, 669 + CC’ Méta XIII, 880-881 + C Méta XV, 39-40 Fastes II vs 449-452 Fastes III vs 256 Fastes III vs 426 + C Fastes III vs 847-848 Fastes IV vs 161-162 Fastes IV vs 577-579 Ars amat. III, 467-468

Méta XIV, 586-591 + C

Localisation

2 3 2 3 3 9 5 2 1 2 2 4 1 1 2 2 3 2

6

Nbre de vers

d→d d→h h→h /d → d h→d h→d h→d /h → d ? h→d h→d h → /d h→d h→d h→d h→d h→d d→/ h→d

d→d

Dialogue H=Homme D=Dieu Demande d’action (immort.) Demande d’aide Demande d’aide Demande d’aide Demande d’aide Demande d’aide Demande d’aide Demande d’aide Demande d’aide Demande d’aide Demande d’aide Demande d’aide demande d’aide Demande d’aide Demande d’aide Demande d’aide Demande d’aide demande d’aide Demande d’aide

Classification

358 Annexes

Destinataire NC = non cité

Vénus Vénus Jupiter Neptune

Hécate

Thémis

Cérès

Bacchus Jupiter magne pater Janus Paix et gens Iulia dieux pour César Mars Quirinus

No

M62 M63 AA4 M22

M41bis

M2

M29

M14 M46bis F2 F19 F21 F29 F63

Acétès (Bacchus) Eaque Narrateur Narrateur Narrateur Narrateur Narrateur

Aréthuse

Deucalion

Médée

Hippomène Hippomène Dédale Vénus

Destinateur

Méta III, 611-614 +CC’ Méta VII, 620-621 Fastes I vs 65-70 Fastes I vs 7ll-722 Fastes II vs 63-66 Fastes III vs 1-10 Fastes IV vs 807-808

Méta V, 489-497 +C

Méta I, 377-380 + C

Méta VII, 176-178

Méta X, 640-641 + C Méta X, 673 +C Ars amat. II, 38 Méta IV, 532-538 +C

Localisation

4 2 6 12 4 10 2

9

4

3

2 1 1 7

Nbre de vers

h→d /d → d h→d h→d h→d h→d h→d

d→d

h→d

/d → d

h→d h→d h→d d→d

Dialogue H=Homme D=Dieu Demande d’aide/faveur Demande d’aide/faveur Demande d’aide/faveur Demande d’aide/ intervention Demande d’assistance et de faveur Demande d’expiation et de secours Demande d’expiation/ pitié Demande de faveur Demande de faveur demande de faveur demande de faveur demande de faveur demande de faveur demande de faveur

Classification

Annexes 359

Jupiter, Mauors et Vesta par Romulus) Vesta Mars et Auguste Apollon Phoebus, Bacchus et les Muses Palès

di

Ino

Dieux (di)

Janus

Carmenta (non citée) Muse

F64

F81 AA2 AA5

Ibis 3

F86

M1

F14

F15

F24

F61

Destinataire NC = non cité

No

Narrateur

Narrateur

Narrateur

Narrateur

Prophétesse

Narrateur

Narrateur

Narrateur Narrateur Narrateur

Romulus

Destinateur

Fastes II vs 359-360

Fastes I vs 467-468

Fastes I vs 287-288

Méta I, 1-4

Fastes VI vs 541-548

Ibis vs 641-642

Fastes IV vs 723-724

Fastes VI vs 249-250 Ars amat. I, 203-204 Ars amat. III, 347-348

Fastes IV vs 827-832 + C

Localisation

2

2

2

4

8

2

2

2 2 2

6

Nbre de vers

h→d

h→d

h→d

h→d

h→d

h→d

h→d

h→d h→d h→d

h→d

Dialogue H=Homme D=Dieu

demande de faveur (+rituel) Demande de faveur (être exaucé) demande de faveur par une prophétesse Demande de faveur pour son œuvre Demande de faveur pour son œuvre Demande de faveur pour son œuvre demande de faveur pour son œuvre

demande de faveur Demande de faveur Demande de faveur

demande de faveur

Classification

360 Annexes

Minerve

Vénus (+ 7-14 & 91- Narrateur 132 en parallèle) Bacchus Narrateur

Minerve

Muses (Piérides)

Vénus

Esculape

Persée Persée

Muses

F42

F44

F83

F87

F90

AA1

M91

M26 M25

M90

Narrateur

Phinée NC

Prêtre

Narrateur

Narrateur

Narrateur

Narrateur

Narrateur

Bacchus

F40

Destinateur

Destinataire NC = non cité

No

Méta XV, 622-625

Méta V, 216-222 Méta IV, 769-771 +C

Méta XV, 677-679

Ars amat. I, 30

Fastes VI vs 798

Fastes VI vs 652

Fastes VI vs 483-484

Fastes IV vs 1

Fastes III vs 834

Fastes III vs 789 -790

Localisation

4

7 3

3

1

1

1

2

1

1

2

Nbre de vers

h→d

h → /d h → /d

h→d

h→d

h→d

h→d

h→d

h→d

h→d

h→d

Dialogue H=Homme D=Dieu Demande de faveur pour son œuvre Demande de faveur pour son œuvre Demande de faveur pour son œuvre demande de faveur pour son œuvre demande de faveur pour son œuvre demande de faveur pour son œuvre demande de faveur pour son œuvre Demande de faveur propitiation Demande de pitié Demande de renseignement Demande de renseignements

Classification

Annexes 361

Destinataire NC = non cité

Janus

Janus

Janus

Janus

Janus

Janus

Janus

Janus

Janus

Janus

Muses (Piérides)

No

F4

F5

F6

F7

F8

F9

F10

F12

F13

F3

F23

Narrateur

Narrateur

Narrateur

Narrateur

Narrateur

Narrateur

Narrateur

Narrateur

Narrateur

Narrateur

Narrateur

Destinateur

Fastes II vs 269-270

Fastes I vs 89-92

Fastes I vs 277

Fastes I vs 257-258

Fastes I vs 229-230

Fastes I vs 189-190

Fastes I vs 185-187

Fastes I vs 175-176

Fastes I vs 171-172

Fastes I vs 165

Fastes I vs 149-150

Localisation

2

4

1

2

2

2

2

2

2

1

2

Nbre de vers

h→d

h→d

h→d

h→d

h→d

h→d

h→d

h→d

h→d

h→d

h→d

Dialogue H=Homme D=Dieu Demande de renseignements Demande de renseignements Demande de renseignements Demande de renseignements Demande de renseignements Demande de renseignements Demande de renseignements Demande de renseignements Demande de renseignements demande de renseignements demande de renseignements

Classification

362 Annexes

Destinataire NC = non cité

Gradiuus

Egérie

Jupiter

Bacchus

Cybèle

Erato alumnae Heliconis Erato

Erato

Erato

Camène d’Aonie

Erato

No

F30

F32

F34

F39

F47

F48

F49

F51

F51

F52

F54

Narrateur

Narrateur

Narrateur

Narrateur

Narrateur

Narrateur

Narrateur

Narrateur

Numa

Narrateur

Narrateur

Destinateur

2

2

2

2

13

4

2

4

Nbre de vers

Fastes IV vs 350

Fastes IV vs 247-248

1

2

Fastes IV vs 221-222+CC’ 2

Fastes IV vs 219-220

Fastes IV vs 215-216 +C

Fastes IV vs 193-194

Fastes IV vs 191-192

Fastes III vs 771-783

Fastes III vs 333-336 + C

Fastes III vs 261-262

Fastes III vs 167-170

Localisation

h→d

h→d

h→d

h→d

h→d

h→d

h→d

h→d

h→d

h→d

h→d

Dialogue H=Homme D=Dieu demande de renseignements Demande de renseignements Demande de renseignements Demande de renseignements Demande de renseignements Demande de renseignements Demande de renseignements Demande de renseignements Demande de renseignements demande de renseignements Demande de renseignements

Classification

Annexes 363

Destinataire NC = non cité

Erato

Erato

Erato

Erato

Flore

Flore

Flore

Flore

Mercure

Tibre

Mercure

No

F55

F56

F57

F58

F67

F68

F69

F70

F73

F75

F78

Narrateur

Narrateur

Narrateur

Narrateur

Narrateur

Narrateur

Narrateur

Narrateur

Narrateur

Narrateur

Narrateur

Destinateur

Fastes V vs 693-694

Fastes V vs 635-636

Fastes V vs 447-448

Fastes V vs 371-372

Fastes V vs 355-358

Fastes V vs 277

Fastes V vs 183-192

Fastes IV vs 367-368

Fastes IV vs 361-362

Fastes IV vs 357-358 + C’

Fastes IV vs 353-354

Localisation

2

2

2

2

4

1

10

2

2

2

2

Nbre de vers

h→d

h→d

h→d

h→d

h→d

h→d

h→d

h→d

h→d

h→d

h→d

Dialogue H=Homme D=Dieu Demande de renseignements Demande de renseignements Demande de renseignements Demande de renseignements demande de renseignements Demande de renseignements Demande de renseignements Demande de renseignements Demande de renseignements demande de renseignements demande de renseignements

Classification

364 Annexes

Destinataire NC = non cité

Mercure

Minerve

Minerve

Muses (Piérides)

Corinne Hyménée (Latone) Multiples (dieux de la mer et de la terre, astres, mer, terre, monde souterrain, fleuve, foule des dieux d’en haut, satyres, faunes, lares, nymphes, fleuves, race des demi-dieux, dieux antiques et nouveaux…

No

F79

F88

F89

F91

A6 F27 M36 Ibis 1

Narrateur Narrateur Paysan de Lycie narrateur

Narrateur

Narrateur

Narrateur

Narrateur

Destinateur

Amores I, 14, 27-30 Fastes II vs 561-562 Méta VI, 327-328 + CC’ Ibis vs 67-126

Fastes VI vs 799-800

Fastes VI vs 693-694

Fastes VI vs 653-654

Fastes V vs 697

Localisation

4 2 2 60

2

2

2

1

Nbre de vers

h→h h→d h→d h→d

h→d

h→d

h→d

h→d

Dialogue H=Homme D=Dieu demande de renseignements Demande de renseignements Demande de renseignements demande de renseignements Demande pour cheveux demande variée Demandes de faveur (2) Deuotio

Classification

Annexes 365

Destinataire NC = non cité

Médée Myrrha

Elégie et Tragédie Apollon/Soleil Thésée Pythagore Cupidon Cérès Germanicus César Terminus Mercure Cérès Bacchus

Bacchus Argo (ibis) Dipsas Muses

No

M39 M60

A20 M19 M43 M88 A1 A27 F1 F22 F28 F76 M27 F41

M17 A12 Ibis 2 A5 M26bis

Narrateur Narrateur Narrateur Narrateur Pyrénée

Narrateur Narrateur Peuple d’Erechthée Narrateur Narrateur Narrateur Narrateur Narrateur Narrateur Narrateur Calliope Narrateur

Médée Nourrice de Myrrha

Destinateur

Méta IV, 9-32 +C Amores II, 11, 5-6 Ibis vs 476 Amores I, 8, 113-114 Méta V, 280-283 +C’

Amores III, 1, 61-68 + C Méta IV, 192-208 +CC’ Méta VII, 433-450 + C Méta XV, 60-74 Amores I, 2, 19-52 Amores, III, 10, intégral Fastes I vs 3-26 Fastes II vs 127-144 Fastes II vs 659-678 Fastes V vs 663-672 Méta V, 341-345 Fastes III vs 7l4-732

Méta VII, 11-71+C Méta X, 395-401 + C

Localisation

24 2 1 2 4

8 17 18 15 34 48 24 18 20 10 5 19

61 7

Nbre de vers

h→d h→ h→d h→h h→d

h→d h→d h → /d h→h h→d h→d h→h h→h h→d h→d d→d h→d

HC

Dialogue H=Homme D=Dieu Dialogue intérieur Evocation de procédés magiques Faveur pour son œuvre Hymne Hymne Hymne Hymne Hymne Hymne Hymne Hymne Hymne Hymne (début) Hymne (suit récit hymnique) Hymne détourné Imprécation imprécation Imprécations Invitation

Classification

366 Annexes

Destinataire NC = non cité

Psalmathé

(NC) Mercure et Vénus Arachné Paysans de Lycie Scylla Mari de Corinne Celer Térée

Cupidon femmes éléments Acétès (Bacchus) Apollon/Phébus Jupiter Pères puis Mûrier Médée Eaque

No

M66 M82 M13 M21 M32 M37 M49 A3 F72 M38bis

A10 M34 A16 M15 M6 M12 M18 M41 M44

Narrateur prophétesse Narrateur Bacchus Phaeton Sémélé Thisbé Jason Minos

Pélée Circé NC Hermaphrodite Pallas Latone Minos Narrateur Rémus Philomèle

Destinateur

Amores II, 9b, 47-52 Méta VI, 159-161 + C Amores II, 16, 51-52 Méta III, 689-690 + CC’ Méta II, 35-39 + C Méta III, 293-295 +CC’ Méta IV, 154-161 Méta VII, 164-168 + C Méta VII, 482-483

Méta XI, 394-401 Méta XIV, 55-58 Méta III, 405 Méta IV, 383-386 + C Méta VI, 136-138 +C Méta VI, 369 Méta VIII, 97-100 Amores I, 4, 2 Fastes V vs 469-470 Méta VI, 533-548

Localisation

8 3 2 2 5 3 8 5 2

8 4 1 4 3 1 4 1 2 16

Nbre de vers

h→d h→h h → ? d→h h→d h→d h → h&o h → /d /d → /d

HC HC h→d d→d d→h d→h /d → h h→h h→h

Dialogue H=Homme D=Dieu Lexique précatif Magie de Circé Malédiction Malédiction Malédiction Malédiction Malédiction Malédiction Malédiction Menaces avec lexique précatif Ode Ordre Ordre Ordre (crainte religieuse) Pétition Pétition Pétition Pétition Pétition

Classification

Annexes 367

Destinataire NC = non cité

Jupiter Jupiter Céphale Neptune Vénus Dieux (numina) Bacchus Dieux (Superi) Jupiter Flammes Muse Prophétesse Minos Cérès Bacchus Mère des Héliades Céyx Alcyone Jupiter Paysans de Lycie

No

M46 M47 M48 M55 M58 M61 M64 M85 F35 F37 F45 F85 AA3 M54bis F38 M8 M67 M70 M7 M36bis

Eaque Eaque Procris Mnestra Pygmalion Myrrha Midas Iphis Numa Narrateur Narrateur Ino Dédale Dryades Ariane Héliades Alcyone Céyx Terre (embrasée) Latone

Destinateur

Méta VII, 615-618 Méta, VII, 627-628 + C Méta VII, 852-856 + C Méta VIII, 850-851 + C’ Méta X, 274-276 + C Méta X, 483-487 + C Méta XI, 102-103 + C Méta XIV, 729-732 Fastes III vs 375-366 + C Fastes III vs 427-428 Fastes IV vs 83-84 Fastes VI vs 535-536 Ars amat. II, 25-30 Méta VIII, 778-781 Fastes III, 463-506 + C Méta II, 361-363 + C’ Méta XI, 439-441 Méta XI, 658-670 Méta II, 279-300 Méta VI, 349-359 +C’

Localisation

4 2 5 2 3 5 2 4 2 2 2 2 6 4 44 3 3 13 22 11

Nbre de vers /d → d /d → d h→h h→d h→d h→d h→d h→d h→d h → /d h→d /d → h h→h /d → d h→d d→d HC h→h d→d d→h

Dialogue H=Homme D=Dieu Pétition Pétition Pétition Pétition Pétition Pétition Pétition Pétition Pétition Pétition Pétition Pétition Pétition Pétition au style indirect Plainte élégiaque Plaintes Plaintes Plaintes Prière Prière

Classification

368 Annexes

Térée Neptune

Apollon/Phébus Jupiter Circé Dieux (Superi) Dieux (Superi) (pour Auguste) Portier / janitor Isis Victoire, Vénus, Cérès, Bacchus, Minerve, Castor, Pollux, Phoebus, Phoebe, Neptune Vénus et Cupidon Dieux locaux Terre et Cérès César Palès

M38 M52

M74 M77 M81 M92 M93

A30 F16 F18 F20 F62

A4 A13 A21

Destinataire NC = non cité

No

Narrateur Carmenta Narrateur Narrateur Un berger

Narrateur Narrateur Narrateur

Neptune Aurore Glaucus Vénus Narrateur

Père de Philomèle Achéloüs

Destinateur

Amores III, 15, 15-16 Fastes I vs 509-536 Fastes I vs 675-694 Fastes II vs 1-18 Fastes IV vs 747-776

Amores I, 6, 1-48 Amores II, 13, 7-18 Amores III, 2, 45-57

Méta VI, 496-503 Méta VIII, 595-602 (vs extrapolés peut-être) +C Méta XII, 586-596 Méta XIII, 586-599 Méta XIV, 12-24 Méta XV, 765-778 Méta XV, 861-870

Localisation

2 28 20 18 30

48 12 2

11 14 13 14 10

8 9

Nbre de vers

h→d d→d h→d h→h h→d

h→h h→d h→d

d→d d→d h→d d→d h→h

h→h d→d

Dialogue H=Homme D=Dieu

Prière Prière Prière Prière Prière

Prière Prière Prière

Prière Prière Prière Prière Prière

Prière Prière

Classification

Annexes 369

Robigo Mercure Peuplier/Xanthe/ ondes Di Dardanides Lune Cydippe Diane Dieux et Junon Ilithye Nymphe / air / amour / Phoebus Multiples Médée Daphné Galatée Picus Ilia

Hippolyte

F66 F77 H3

M42 H13 M3 M79 M83 A25bis

H2

H14 H15 H21 H25 H26 M69 A14 H19

Destinataire NC = non cité

No Localisation

Phèdre

Médée Jason Apollon/Phébus Polyphème Circé Anio

Laodamie Laodamie Léandre Mère de Cydippe Cydippe Alcyone Narrateur Sappho Méta VII, 192-219 XII, 73-88 Méta I, 504-524 Méta XIII, 789-869 Méta XIV, 372-376 + C Amores III, 6, 53-66 Inclus dans extrait A25 IV, 167-176

XIII, 49-50 XIII, 77-78 XVIII, 61-74 XX, 217-219 XXI, 175-176 Méta XI, 578-582 Amores II, 13, 19-25 XV, 175-184

Flamine de Quirinus Fastes IV vs 911-932 Marchand Fastes V vs 681-690 Oenone V, 27-28 + 31

Destinateur

10

28 16 21 81 5 14

2 2 14 2 2 5 6 10

22 10 3

Nbre de vers

h→h

/d → d h→h d→d d → d d → /h d→h

h→d h→h h→d h→h h→d HC h→d h→d

h→d h→d h→h

Dialogue H=Homme D=Dieu

Prière amoureuse

Prière + rituel (179-191) Prière + serment Prière amoureuse Prière amoureuse Prière amoureuse Prière amoureuse

Prière Prière Prière Prière prière Prière (style indirect) Prière (suite de A13) Prière + don

Prière Prière Prière

Classification

370 Annexes

Destinataire NC = non cité

Pâris NC Euménides

Bacchus Vénus Cupidon Fleuve Dieux infernaux Céphale Dieux (numen)

Phaeton Sémélé Neptune/maître Hécube (corinne) Mea numina / tuo Médée

Pommone

No

H4 M54 M51

M65 A2 M28 A25 M57 M45 M68

M5 M11 M55bis M76 A7 H17 M40

M86

Vertumne

Mère de Phaeton Jupiter Mnestra Polymestor Narrateur Laodamie Jason

Oenone Lélex (vs 617) Althée (mère de Méléagre) Midas Narrateur Vénus Narrateur Orphée Eaque Compagnons de Céyx

Destinateur

Méta XIV, 759-764

Méta I, 768-775 Méta III, 289-291 +C Méta VIII, 864-868 Méta XIII, 556-558 + C’ Amores II, 7, 27-28 XIII, 157-162 Méta VII, 94-97 +C

Méta XI, 132-133 Amores I, 3, 1-6 Méta V, 365-379 +C’ Amores III, 6 (intégral) Méta X, 17-39 +C Méta VII, 588-605 Méta XI, 539-543

V, 157-158 Méta VIII, 724 Méta VIII, 481-485

Localisation

6

8 3 5 3 2 6 4

2 6 15 106 23 19 5

2 1 5

Nbre de vers

d → /d

h→h d→h d→h h→h h→h h→d h → /d

h→d h→d d→d h→d /d → d HC HC

h→h h → ? h→d

Dialogue H=Homme D=Dieu

Prière d’expiation Prière de l’amant Prière hymnique Prière puis imprécation Prière/chant aux enfers Rituel : peste d’Egine Rituel et prière (style indirect) Serment Serment Serment Serment Serment Serment Serment (discours indirect) Souhait

Prière amoureuse Prière avec offrandes Prière d’expiation

Classification

Annexes 371

NC

Cérès (voeu pour qu’elle retrouve sa fille) Jupiter Mars Stryges Dieux (di) Apollon/Phébus Jupiter et Mercure Neptune Dieux (Superi)

M73

F59

Cybèle Ø Cydippe

Dieux César Tibulle

A11 F17 A26bis

F65 F74 F80 M20 M50 M53 M72 M89 A23 F53 H16 H24

Destinataire NC = non cité

No

Enée Auguste Craniè Salmacis Mopsus Philémon et Baucis Céné Cipus Narrateur Claudia Quincta Laodamie Acontius

Rhoetus (un centaure) Un vieil homme

Narrateur Narrateur Narrateur

Destinateur

Fastes IV vs 893-894 Fastes V vs 573-577 Fastes VI vs 159-162 + C Méta IV, 370-372 + C Méta VIII, 350-351 Méta VIII, 707-710 Méta XII, 201-203 + C’ Méta XV, 571-573 + C’ Amores III, 2, 80 Fastes IV vs 319-324 XIII, 88 XX, 117-122

Fastes IV vs 525-526

Méta XII, 285-286 + C

Amores, II, 10, 29-38 Fastes I vs 637 + C Amores III, 9, 66-68

Localisation

2 5 4 3 2 4 2 3 1 6 1 8

2

2

10 1 3

Nbre de vers

h→d h→d d→d /d → d h→d h→d h→d h→d → h→d h→h h→h

h→d

/d → d ?

h→d h→h h→d

Dialogue H=Homme D=Dieu

Voeu Voeu voeu Vœu Vœu Vœu Vœu Vœu Vœu vœu Vœu Vœu

voeu

Souhait Souhait Souhait (precor / culte/ requiescete) Souhait ironique

Classification

372 Annexes

Amour / Hippolyte objets sacrés du temple de Vesta Battus ( Jupiter non cité)

H1 F82

M9 H5

Destinataire NC = non cité

No

Mercure Médée

Phèdre Metellus Pontife

Destinateur

Méta II, 692-694 VI, 151-164

IV, 15-16 Fastes VI vs 449-452

Localisation

3 14

2 4

Nbre de vers

d→h h→d

h→h h→d

Dialogue H=Homme D=Dieu Vœu / demande voeu Cf Ciceron Pro scauro 48 Vœu ironique Vœu/imprécations

Classification

Annexes 373

M6 M50 M74

M70 A9 H1 AA5

M82 A23 A7 Ibis 2 H5 M36 M13 H8 M15

No

Alcyone Amour Amour / Hippolyte Apollon Phoebus, Bacchus et les Muses Apollon/Phébus Apollon/Phébus Apollon/Phébus

(corinne) (ibis) ( Jupiter non cité) (Latone) (NC) (Vénus ?) Acétès (Bacchus)

Destinataire NC = non cité

Phaeton Mopsus Neptune

Céyx Narrateur Phèdre Narrateur

Circé Narrateur Narrateur Narrateur Médée Paysan de Lycie NC Didon Bacchus

Destinateur

Méta II, 35-39 + C Méta VIII, 350-351 Méta XII, 586-596

Méta XI, 658-670 Amores II, 9a, 1-16 IV, 15-16 Ars amat. III, 347-348

Méta XIV, 55-58 Amores III, 2, 80 Amores II, 7, 27-28 Ibis vs 476 VI, 151-164 Méta VI, 327-328 + CC’ Méta III, 405 VII 105 Méta III, 689-690 + CC’

Localisation

5 2 11

13 16 2 2

4 1 2 1 14 2 1 1 2

Nbre de vers

h→d h→d d→d

h→h h→d h→h h→d

HC → h→h h→d h→d h→d h→d h→h d→h

Dialogue H=Homme D=Dieu

Annexe 3. Corpus de prières classé par destinataire

Pétition Vœu Prière

Ordre (crainte religieuse) Plaintes Apostrophe Vœu / demande Demande de faveur

Magie de Circé Vœu Serment imprécation Vœu/imprécations Demandes de faveur (2) Malédiction

Classification

374 Annexes

Destinataire NC = non cité

Apollon/Soleil Arachné Arachné Argo Autonoé Bacchus Bacchus Bacchus Bacchus Bacchus Bacchus Bacchus

Bacchus

Bacchus

Bacchus

Battus Battus

No

M19 M32bis M32 A12 M16 M14 M17 M64 M65 M78 F38 F39

F40

F41

F83

M9 M10

Mercure Mercure

Narrateur

Narrateur

Narrateur

Narrateur Pallas Pallas Narrateur Penthée Acétès (Bacchus) Narrateur Midas Midas Filles d’Anius Ariane Narrateur

Destinateur

Méta II, 692-694 Méta II, 699-701

Fastes VI vs 483-484

Fastes III vs 7l4-732

Fastes III vs 789 -790

Méta IV, 192-208 +CC’ Méta VI, 28-33 + C Méta VI, 136-138 +C Amores II, 11, 5-6 Méta III, 719-720 + C Méta III, 611-614 +CC’ Méta IV, 9-32 +C Méta XI, 102-103 + C Méta XI, 132-133 Méta XIII, 669 + CC’ Fastes III, 463-506 + C Fastes III vs 771-783

Localisation

3 3

2

19

2

17 6 3 2 2 4 24 2 2 1 44 13

Nbre de vers

d→h d→h

h→d

h→d

h→d

h→d d→h d→h h→ h→h h→d h→d h→d h→d h→d h→d h→d

Dialogue H=Homme D=Dieu Hymne Conseil Malédiction Imprécation Demande d’aide Demande de faveur Hymne détourné Pétition Prière d’expiation Demande d’aide Plainte élégiaque Demande de renseignements Demande de faveur pour son œuvre Hymne (suit récit hymnique) demande de faveur pour son œuvre Vœu ironique Demande d’aide

Classification

Annexes 375

Carmenta (non citée) Celer Céphale Céphale Cérès Cérès

F15

F17 F20 F22 M67 M81

M54bis A27 F59

Cérès Cérès Cérès (voeu pour qu’elle retrouve sa fille) César César César Céyx Circé

Cadmus Camène d’Aonie

M24 F52

F72 M45 M48 M27 M29

Destinataire NC = non cité

No

Narrateur Narrateur Narrateur Alcyone Glaucus

Dryades Narrateur Un vieil homme Fastes I vs 637 + C Fastes II vs 1-18 Fastes II vs 127-144 Méta XI, 439-441 Méta XIV, 12-24

Méta VIII, 778-781 Amores, III, 10, intégral Fastes IV vs 525-526

Fastes V vs 469-470 Méta VII, 588-605 Méta VII, 852-856 + C Méta V, 341-345 Méta V, 489-497 +C

Fastes I vs 467-468

Narrateur

Rémus Eaque Procris Calliope Aréthuse

Méta IV, 591-594 Fastes IV vs 247-248

Localisation

Femme de Cadmus Narrateur

Destinateur

1 18 18 3 13

4 48 2

2 19 5 5 9

2

4 2

Nbre de vers

h→h h→h h→h HC h→d

/d → d h→d h→d

h→h HC h→h d→d d→d

h→d

h→h h→d

Dialogue H=Homme D=Dieu

Souhait Prière Hymne Plaintes Prière

Demande demande de renseignements Demande de faveur pour son œuvre Malédiction Rituel : peste d’Egine Pétition Hymne (début) Demande d’expiation/ pitié Pétition au style indirect Hymne voeu

Classification

376 Annexes

Destinataire NC = non cité

Corinne Corinne Corinne Corinne Corinne Cupidon Cupidon Cupidon Cybèle

Cybèle Cydippe Cydippe Daphné Dardanides di

Di Diane Diane Dieux

No

A6 A15 A19 A24 A28 M28 A1 A10 F47

F53 H24 H25 M3 H15 Ibis 3

H14 M30 H26 A11

Laodamie Aréthuse Cydippe Narrateur

Claudia Quincta Acontius Mère de Cydippe Apollon/Phébus Laodamie Narrateur

Narrateur Narrateur Narrateur Narrateur Narrateur Vénus Narrateur Narrateur Narrateur

Destinateur

XIII, 49-50 Méta V, 618-620 + C XXI, 175-176 Amores, II, 10, 29-38

Fastes IV vs 319-324 XX, 117-122 XX, 217-219 Méta I, 504-524 XIII, 77-78 Ibis vs 641-642

Amores I, 14, 27-30 Amores II, 16, 47-50 Amores II, 17, 23-25 Amores III, 3, 47-48 Amores III, 11b, 45-48 Méta V, 365-379 +C’ Amores I, 2, 19-52 Amores II, 9b, 47-52 Fastes IV vs 191-192

Localisation

2 3 2 10

6 8 2 21 2 2

4 4 3 2 4 15 34 8 2

Nbre de vers

h→d /d → d h→d h→d

h→d h→h h→h d→d h→h h→d

h→h h→h h→h h→h hC d→d h→d h→d h→d

Dialogue H=Homme D=Dieu Demande pour cheveux Demande Demande Demande Demande Prière hymnique Hymne Ode Demande de renseignements vœu Vœu Prière Prière amoureuse Prière Demande de faveur (être exaucé) Prière Demande d’aide prière Souhait

Classification

Annexes 377

Dieux Dieux (di)

Dieux (di) Dieux (di) Dieux (Di) Dieux (numen)

Dieux (numina) Dieux (Superi) Dieux (Superi) Dieux (Superi) Dieux (Superi) (pour Auguste) dieux des buissons Dieux et Junon Dieux infernaux Dieux locaux dieux pour César Dipsas Eaque

F84 M1

M20 M35bis M59 M68

M61 M85 M89 M92 M93

F33 M69 M57 F16 F21 A5 M44

Destinataire NC = non cité

No

Numa Alcyone Orphée Carmenta Narrateur Narrateur Minos

Myrrha Iphis Cipus Vénus Narrateur

Salmacis Ilionée Myrrha Compagnons de Céyx

Ino Narrateur

Destinateur

Fastes III vs 309-311 + C Méta XI, 578-582 Méta X, 17-39 +C Fastes I vs 509-536 Fastes II vs 63-66 Amores I, 8, 113-114 Méta VII, 482-483

Méta X, 483-487 + C Méta XIV, 729-732 Méta XV, 571-573 + C’ Méta XV, 765-778 Méta XV, 861-870

Méta IV, 370-372 + C Méta VI, 262-264 + CC’ Méta X, 320-324 +CC’ Méta XI, 539-543

Fastes VI vs 517 Méta I, 1-4

Localisation

3 5 23 28 4 2 2

5 4 3 14 10

3 3 5 5

1 4

Nbre de vers

h→d HC /d → d d→d h→d h→h /d → /d

h→d h→d h→d d→d h→h

/d → d h→d h→d HC

h→d h→d

Dialogue H=Homme D=Dieu

Demande d’aide Prière (style indirect) Prière/chant aux enfers Prière demande de faveur Imprécations Pétition

demande d’aide Demande de faveur pour son œuvre Vœu Demande d’aide Demande d’aide Rituel et prière (style indirect) Pétition Pétition Vœu Prière Prière

Classification

378 Annexes

Destinataire NC = non cité

Egérie

Elégie Elégie et Tragédie éléments Enée Erato

Erato

Erato

Erato

Erato

Erato

Erato

No

F32

A26 A20 A16 H8bis F49

F51

F51

F54

F55

F56

F57

Narrateur

Narrateur

Narrateur

Narrateur

Narrateur

Narrateur

Narrateur Narrateur Narrateur Didon Narrateur

Narrateur

Destinateur

2

3 8 2 7 2

2

Nbre de vers

Fastes IV vs 361-362

Fastes IV vs 357-358 + C’

Fastes IV vs 353-354

Fastes IV vs 350

2

2

2

1

Fastes IV vs 221-222+CC’ 2

Fastes IV vs 219-220

Amores III, 9, 1-3 Amores III, 1, 61-68 + C Amores II, 16, 51-52 VII, 157-163 Fastes IV vs 215-216 +C

Fastes III vs 261-262

Localisation

h→d

h→d

h→d

h→d

h→d

h→d

h→d h→d h → ? h→h h→d

h→d

Dialogue H=Homme D=Dieu

Demande de renseignements Demande de renseignements Demande de renseignements Demande de renseignements Demande de renseignements Demande de renseignements Demande de renseignements

Demande de renseignements Apostrophe Faveur pour son œuvre Ordre

Classification

Annexes 379

Destinataire NC = non cité

Erato

Erato alumnae Heliconis Esculape

étoiles Euménides

Femme

femmes Flammes Fleuve Flore

Flore

Flore

No

F58

F48

M91

F60 M51

A17

M34 F37 A25 F67

F68

F69

Narrateur

Narrateur

prophétesse Narrateur Narrateur Narrateur

Cérès Althée (mère de Méléagre) Narrateur

Prêtre

Narrateur

Narrateur

Destinateur

Fastes V vs 355-358

Fastes V vs 277

Méta VI, 159-161 + C Fastes III vs 427-428 Amores III, 6 (intégral) Fastes V vs 183-192

Amores II, 19, 19-22

Fastes IV vs 577-579 Méta VIII, 481-485

Méta XV, 677-679

Fastes IV vs 193-194

Fastes IV vs 367-368

Localisation

4

1

3 2 106 10

4

3 5

3

2

2

Nbre de vers

h→d

h→d

h→h h → /d h→d h→d

hC

d→/ h→d

h→d

h→d

h→d

Dialogue H=Homme D=Dieu

Conseils pour se faire aimer Ordre Pétition Prière puis imprécation demande de renseignements Demande de renseignements Demande de renseignements

Demande de renseignements Demande de renseignements Demande de faveur propitiation demande d’aide Prière d’expiation

Classification

380 Annexes

Destinataire NC = non cité

Flore

Flore

Galatée Galatée Germanicus Gradiuus

Hécate

Hécube Hercule Héro Hippolyte Hyménée Hyménée / Erinyes Ilia

Ilithye

No

F70

F71

M79 M80 F1 F30

M41bis

M76 M87 H22 H2 F27 H11 A25bis

A14

Narrateur

Polymestor Myscelos Léandre Phèdre Narrateur Canacé Anio

Médée

Polyphème Acis Narrateur Narrateur

Narrateur

Narrateur

Destinateur

Méta XIII, 556-558 + C’ Méta XV, 39-40 XVIII, 203-204 IV, 167-176 Fastes II vs 561-562 XI, 103-106 Amores III, 6, 53-66 Inclus dans extrait A25 Amores II, 13, 19-25

Méta VII, 176-178

Méta XIII, 789-869 Méta XIII, 880-881 + C Fastes I vs 3-26 Fastes III vs 167-170

Fastes V vs 377-378

Fastes V vs 371-372

Localisation

6

3 2 2 10 2 4 14

3

81 2 24 4

2

2

Nbre de vers

h→d

h→h h → /d h→h h→h h→d h→d d→h

/d → d

d → d h→d h→h h→d

h→d

h→d

Dialogue H=Homme D=Dieu

Prière (suite de A13)

Demande de renseignements Demande de faveur pour son œuvre Prière amoureuse Demande d’aide Hymne demande de renseignements Demande d’assistance et de faveur Serment Demande d’aide Demande Prière amoureuse demande variée Apostrophe / demande Prière amoureuse

Classification

Annexes 381

Destinataire NC = non cité

Ino

Isis Isis Janus

Janus

Janus

Janus

Janus

Janus

Janus

Janus

No

F86

M56 A13 F4

F5

F6

F7

F8

F9

F10

F12

Narrateur

Narrateur

Narrateur

Narrateur

Narrateur

Narrateur

Narrateur

Téléthuse (Iphis) Narrateur Narrateur

Prophétesse

Destinateur

Fastes I vs 257-258

Fastes I vs 229-230

Fastes I vs 189-190

Fastes I vs 185-187

Fastes I vs 175-176

Fastes I vs 171-172

Fastes I vs 165

Méta IX, 773-781 + C’ Amores II, 13, 7-18 Fastes I vs 149-150

Fastes VI vs 541-548

Localisation

2

2

2

2

2

2

1

9 12 2

8

Nbre de vers

h→d

h→d

h→d

h→d

h→d

h→d

h→d

h→d h→d h→d

h→d

Dialogue H=Homme D=Dieu demande de faveur par une prophétesse Demande d’aide Prière Demande de renseignements Demande de renseignements Demande de renseignements Demande de renseignements Demande de renseignements Demande de renseignements Demande de renseignements Demande de renseignements

Classification

382 Annexes

Destinataire NC = non cité

Janus

Janus

Janus Janus

Junon Lucina Junon Lucina Jupiter Jupiter Jupiter Jupiter Jupiter Jupiter

Jupiter

Jupiter Jupiter Jupiter

No

F13

F14

F2 F3

F25 F31 M7 M12 M46 M47 M77 M84

F34

F35 F65 AA4

Numa Enée Dédale

Numa

Narrateur Narrateur/femmes Terre (embrasée) Sémélé Eaque Eaque Aurore Vénus

Narrateur Narrateur

Narrateur

Narrateur

Destinateur

Fastes III vs 375-366 + C Fastes IV vs 893-894 Ars amat. II, 38

Fastes III vs 333-336 + C

Fastes II vs 449-452 Fastes III vs 256 Méta II, 279-300 Méta III, 293-295 +CC’ Méta VII, 615-618 Méta, VII, 627-628 + C Méta XIII, 586-599 Méta XIV, 586-591 + C

Fastes I vs 65-70 Fastes I vs 89-92

Fastes I vs 287-288

Fastes I vs 277

Localisation

2 2 1

4

4 1 22 3 4 2 14 6

6 4

2

1

Nbre de vers

h→d h→d h→d

h→d

h→d h→d d→d h→d /d → d /d → d d→d d→d

h→d h→d

h→d

h→d

Dialogue H=Homme D=Dieu Demande de renseignements Demande de faveur pour son œuvre demande de faveur demande de renseignements demande d’aide Demande d’aide Prière Pétition Pétition Pétition Prière Demande d’action (immort.) Demande de renseignements Pétition Voeu Demande d’aide/faveur

Classification

Annexes 383

Jupiter et Mercure Jupiter magne pater Jupiter, Mauors et Vesta par Romulus) Latone Latone Lune Macarée Mari de Corinne Mari de Corinne Mars Mars Mars et Auguste Mea numina / tuo Médée Médée

Médée Médée Mercure

M53 M46bis F64

M41 H13 F73

M35 M35ter H21 H12 A3 A18 F29 F74 AA2 H17 M39 M40

Destinataire NC = non cité

No

Jason Jason Narrateur

Dioné Dioné Léandre Canacé Narrateur Narrateur Narrateur Auguste Narrateur Laodamie Médée Jason

Philémon et Baucis Eaque Romulus

Destinateur

Méta VII, 164-168 + C XII, 73-88 Fastes V vs 447-448

Méta VI, 280-285 Méta VI, 299-300 + C XVIII, 61-74 XI, 123-130 Amores I, 4, 2 Amores II, 19, 37-44 Fastes III vs 1-10 Fastes V vs 573-577 Ars amat. I, 203-204 XIII, 157-162 Méta VII, 11-71+C Méta VII, 94-97 +C

Méta VIII, 707-710 Méta VII, 620-621 Fastes IV vs 827-832 + C

Localisation

5 16 2

6 2 14 7 1 8 10 5 2 6 61 4

4 2 6

Nbre de vers

h → /d h→h h→d

h → /d

h→d h→d h→d h→h h→h HC h→d h→d h→d h→d

h→d /d → d h→d

Dialogue H=Homme D=Dieu

Défi (x2) Demande Prière Demande Malédiction Conseils/demande demande de faveur Voeu Demande de faveur Serment Dialogue intérieur Serment (discours indirect) Pétition Prière + serment Demande de renseignements

Vœu Demande de faveur demande de faveur

Classification

384 Annexes

Destinataire NC = non cité

Mercure Mercure Mercure

Mercure

Mercure et Vénus Mère des Héliades Minerve

Minerve

Minerve

Minerve

Minos Multiples

No

F76 F77 F78

F79

M21 M8 F42

F87

F88

F89

AA3 M42

Dédale Médée

Narrateur

Narrateur

Narrateur

Hermaphrodite Héliades Narrateur

Narrateur

Narrateur Marchand Narrateur

Destinateur

Ars amat. II, 25-30 Méta VII, 192-219

Fastes VI vs 693-694

Fastes VI vs 653-654

Fastes VI vs 652

Méta IV, 383-386 + C Méta II, 361-363 + C’ Fastes III vs 834

Fastes V vs 697

Fastes V vs 663-672 Fastes V vs 681-690 Fastes V vs 693-694

Localisation

6 28

2

2

1

4 3 1

1

10 10 2

Nbre de vers

h→h /d → d

h→d

h→d

h→d

d→d d→d h→d

h→d

h→d h→d h→d

Dialogue H=Homme D=Dieu Hymne Prière demande de renseignements demande de renseignements Malédiction Plaintes Demande de faveur pour son œuvre demande de faveur pour son œuvre Demande de renseignements Demande de renseignements Pétition Prière + rituel (179-191)

Classification

Annexes 385

Muses (Piérides)

Muses (Piérides)

F23

F90

Narrateur

Narrateur

Narrateur Narrateur Pyrénée Narrateur

Muse Muse Muses Muses

F45 AA6 M26bis M90

F24

Multiples (dieux de narrateur la mer et de la terre, astres, mer, terre, monde souterrain, fleuve, foule des dieux d’en haut, satyres, faunes, lares, nymphes, fleuves, race des demi-dieux, dieux antiques et nouveaux… Muse Narrateur

Ibis 1

Destinateur

Destinataire NC = non cité

No

Fastes VI vs 798

Fastes II vs 269-270

Fastes IV vs 83-84 Ars amat. III, 467-468 Méta V, 280-283 +C’ Méta XV, 622-625

Fastes II vs 359-360

Ibis vs 67-126

Localisation

1

2

2 2 4 4

2

60

Nbre de vers

h→d

h→d

h→d h→d h→d h→d

h→d

h→d

Dialogue H=Homme D=Dieu

demande de faveur pour son œuvre Pétition Demande d’aide Invitation Demande de renseignements demande de renseignements demande de faveur pour son œuvre

Deuotio

Classification

386 Annexes

Muses (Piérides)

Myrrha

NC NC NC

Neptune

Neptune

Neptune

Neptune Neptune Neptune Neptune/maître Nymphe / air / amour / Phoebus Nymphes

F91

M60

M54 M71 M73

M22

M33

M52

M55 M72 H23 M55bis H19

F26

Destinataire NC = non cité

No

Dioné

Mnestra Céné Héro Mnestra Sappho

Achéloüs

Narrateur

Lélex (vs 617) Achille Rhoetus (un centaure) Vénus

Nourrice de Myrrha

Narrateur

Destinateur

Fastes II vs 469-470

Méta VIII, 595-602 (vs extrapolés peut-être) +C Méta VIII, 850-851 + C’ Méta XII, 201-203 + C’ XIX, 141-142 Méta VIII, 864-868 XV, 175-184

Méta VI, 115-120

Méta IV, 532-538 +C

Méta VIII, 724 Méta XII, 120-121 + C Méta XII, 285-286 + C

Méta X, 395-401 + C

Fastes VI vs 799-800

Localisation

2

2 2 2 5 10

9

6

7

1 2 2

7

2

Nbre de vers

h→d

h→d h→d h→d d→h h→d

d→d

h→d

d→d

h → ? /h → d ? /d → d ?

HC

h→d

Dialogue H=Homme D=Dieu

demande d’aide

Pétition Vœu Demande Serment Prière + don

Demande d’aide/ intervention Apostrophe narrative (tapisserie) Prière

demande de renseignements Evocation de procédés magiques Prière avec offrandes Demande d’aide Souhait ironique

Classification

Annexes 387

Ø objets sacrés du temple de Vesta Oreste Paix et gens Iulia Palès

Palès Pallas Pallas Pâris Paysans de Lycie Paysans de Lycie Père de Daphné Pères puis Mûrier Persée

Persée Peuplier/Xanthe/ ondes Phaeton

H16 F82

F62 M31 F43 H4 M36bis M37 M4 M18 M25

M26 H3

M5

H9 F19 F61

Destinataire NC = non cité

No

Mère de Phaeton

Phinée Oenone

Un berger Arachné Narrateur Oenone Latone Latone Daphné Thisbé NC

Hermione Narrateur Narrateur

Laodamie Metellus Pontife

Destinateur

Méta I, 768-775

Méta V, 216-222 V, 27-28 + 31

Fastes IV vs 747-776 Méta VI, 25 Fastes III vs 847-848 V, 157-158 Méta VI, 349-359 +C’ Méta VI, 369 Méta I, 545-546 Méta IV, 154-161 Méta IV, 769-771 +C

VIII, 117-122 Fastes I vs 7ll-722 Fastes IV vs 723-724

XIII, 88 Fastes VI vs 449-452

Localisation

8

7 3

30 1 2 2 11 1 2 8 3

6 12 2

1 4

Nbre de vers

h→h

h → /d h→h

h→d h→d h→d h→h d→h d→h d→d h → h&o h → /d

h→h h→d h→d

h→h h→d

Dialogue H=Homme D=Dieu

Serment

demande de faveur demande de faveur (+rituel) Prière Défi Demande d’aide Prière amoureuse Prière Malédiction Demande d’aide Pétition Demande de renseignement Demande de pitié Prière

Vœu voeu Cf Ciceron Pro scauro 48

Classification

388 Annexes

Destinataire NC = non cité

Phaon Picus Pommone Portier / janitor Prophétesse Psalmathé Pudor/iura uiolata Pythagore Quirinus Robigo Sa femme Sacrificateurs Scylla Sémélé Stryges Téléthuse Térée Térée

Terminus

No

H18 M83 M86 A4 F85 M66 H7 M88 F63 F66 M23 M75 M49 M11 F80 M55ter M38 M38bis

F28

Narrateur

Sappho Circé Vertumne Narrateur Ino Pélée Didon Narrateur Narrateur Flamine de Quirinus Cadmus Polyxène Minos Jupiter Craniè Isis Père de Philomèle Philomèle

Destinateur

Fastes II vs 659-678

XV, 93-98 Méta XIV, 372-376 + C Méta XIV, 759-764 Amores I, 6, 1-48 Fastes VI vs 535-536 Méta XI, 394-401 VII, 97-98 Méta XV, 60-74 Fastes IV vs 807-808 Fastes IV vs 911-932 Méta IV, 583-585 Méta XIII, 465-473 Méta VIII, 97-100 Méta III, 289-291 +C Fastes VI vs 159-162 + C Méta VIII, 696-701 Méta VI, 496-503 Méta VI, 533-548

Localisation

20

6 5 6 48 2 8 2 15 2 22 3 5 4 3 4 6 8 16

Nbre de vers

h→d

h→h d → /h d → /d h→h /d → h HC h→d h→h h→d h→d h→h HC /d → h d→h d→d h→h h→h

Dialogue H=Homme D=Dieu

Hymne demande de faveur Prière Demande Demande Malédiction Serment voeu Conseil Prière Menaces avec lexique précatif Hymne

Demande / prière Prière amoureuse Souhait Prière Pétition Lexique précatif

Classification

Annexes 389

Thésée Thésée Tibre

Tibulle

Vent Vénus Vénus Vénus Vénus Vénus Vénus Vénus Vénus

M43 H10 F75

A26bis

H20 M58 M62 M63 A2 A8 A29 F46 AA1

Léandre Pygmalion Hippomène Hippomène Narrateur Narrateur Narrateur Narrateur Narrateur

Narrateur

Peuple d’Erechthée Ariane Narrateur

Narrateur Deucalion

Destinateur

XVIII, 50 environ Méta X, 274-276 + C Méta X, 640-641 + C Méta X, 673 +C Amores I, 3, 1-6 Amores II, 8, 19-20 Amores III, 15, 1 Fastes IV vs 161-162 Ars amat. I, 30

Amores III, 9, 66-68

Méta VII, 433-450 + C X, 148-150 Fastes V vs 635-636

Fastes I vs 675-694 Méta I, 377-380 + C*

Localisation

C = la prière ne commence pas au début du vers / C’ = elle se termine au cours d’un vers.

Terre et Cérès Thémis

F18 M2

*

Destinataire NC = non cité

No

14 3 2 1 6 2 1 2 1

3

18 3 2

20 4

Nbre de vers

h → ? h→d h→d h→d h→d h→d hC h→d h→d

h→d

h → /d h→h h→d

h→d h→d

Dialogue H=Homme D=Dieu Prière Demande d’expiation et de secours Hymne Demande : prière demande de renseignements Souhait (precor / culte/ requiescete) Demande / imprécation Pétition Demande d’aide/faveur Demande d’aide/faveur Prière de l’amant Demande Apostrophe Demande d’aide demande de faveur pour son œuvre

Classification

390 Annexes

Vénus (+ 7-14 & 91132 en parallèle) Vénus / amour Vénus et Cupidon Vesta Vesta Victoire, Vénus, Cérès, Bacchus, Minerve, Castor, Pollux, Phoebus, Phoebe, Neptune

F44

H6 A30 F36 F81 A21

Destinataire NC = non cité

No

Didon Narrateur Narrateur Narrateur Narrateur

Narrateur

Destinateur

VII, 31-34 Amores III, 15, 15-16 Fastes III vs 426 + C Fastes VI vs 249-250 Amores III, 2, 45-57

Fastes IV vs 1

Localisation

4 2 1 2 2

1

Nbre de vers

h→d h→d h→d h→d h→d

h→d

Dialogue H=Homme D=Dieu

Prière Demande d’aide demande de faveur Prière

Demande de faveur pour son œuvre

Classification

Annexes 391

Bibliographie Textes anciens 1. Aelius Théon, Progymnastata, CUF, éd. et trad. M. Patillon, 1997 2. Anonyme, La rhétorique à Hérennius, Les Belles Lettres, ét. et trad. par G. Achard, Paris, 1989 3. Horace, Carmen Saeculare, in Odes, traduction de F. Villeneuve, éd. Garnier Frères, E. Richard, 1944 4. Isidore de Séville, Origines, Les Belles Lettres, éd. et trad. par M. Reydellet, Paris, 1984 5. Lucain, La Pharsale, Les Belles Lettres, éd. et trad. par A. Bourgerie, Paris, 1967 6. Ovide, Amores, Les Belles Lettres, éd. et trad. par H. Bornecque, Paris, 1968 7. Ovide, Ars Amatoria, Les Belles Lettres, éd. et trad. par H. Bornecque, Paris, 1967 8. Ovide, Contre Ibis, Les Belles Lettres, éd. tt trad. Par J. André, 1963 9. Ovide, Les Fastes, édition du texte par G. P. Goold, traduction par J. G. Frazer, Loeb Classical Library, Harvard University Press, London, 1996 10. Ovide, Les Fastes, livres IV-VI, Collection des Universités de France, éd. et trad. par Robert Schilling, Les Belles Lettres, Paris, 1993 11. Ovide, Les Fastes, traduit et annoté par Henri Le Bonniec, La roue à Livres, Les Belles Lettres, Paris, 1990 12. Ovide, Les Métamorphoses, Les Belles Lettres, ét. et trad. par G.  Lafaye, (Publius Ouidius Naso), Tomes I, II, III, Paris, 1930 13. Ovide, Les Métamorphoses, traduit et annoté par Danièle Robert, Actes Sud, 2001 14. Ovide, Tristes, Les Belles Lettres, éd. et traduit par J.André, Paris, 1968 15. Properce, Elégies, Les Belles Lettres, ét. et trad. par D. Paganelli, Paris, 1970 16. Quintilien, Institution Oratoire, Les Belles Lettres, texte établi et traduit par J. Cousin, Paris, 1979 17. Tibulle, Elégies, éd. et trad. par M. Ponchont, Les Belles Lettres, Paris, 1968 18. Tite-Live, Histoire romaine, éd. et trad. par E. Lasserre, Classiques Garnier, 1958 19. Virgile, L’Enéide, Les Belles Lettres, Paris, 1970, Livres  I-VI, texte établi parc H.Goelzer et traduit par A.Bellessort, Livres  VII-XII, texte établi par R.Durand et traduit par A.Bellessort

394



20. Virgile, Les Bucoliques, Les Belles Lettres, ét. et trad. par E. de Saint-Denis, Paris, 1970 21. Virgile, Les Bucoliques, traduction de Paul Valéry, annotations de Florence Dupont, Folio Classique no 2980, édition bilingue 22. Virgile, Les Géorgiques, Les Belles Lettres, texte établi et traduit par E. de Saint-Denis, Paris, 1982 23. Virgile, Les Géorgiques, traduction de Jacques Delille, annotations de Florence Dupont, Folio Classique no 2980, édition bilingue

Etudes ovidiennes Les ouvrages et articles abordant une question religieuse chez Ovide apparaissent dans la rubrique « Religion antique, langage religieux, rituel et magie » 24. Ahl F., Metaformations, soundplay and wordplay in Ovid, Cornwell Univ. Press, 1985 25. Albrecht M. von, « Dichter und Leser – am Beispiel Ovids », Gymnasium 88, 1981, p. 222-235 26. Albrecht M. von, « Les comparaisons dans les Métamorphoses d’Ovide », Bulletin de l’association Guillaume Budé, 1, 1981 27. Albrecht M. von, « Ovide imitateur de Tibulle », Les Etudes Classiques, 51, 1983, p. 117-124 28. Albrecht M.  von, «  Ovids Humor, ein Schlüssel zur Interpretation der Metamorphosen », AU, VI, 2, p. 47-72 29. Albrecht M. von, « Qua arte narrandi Ovidius in ‘Amoribus’ usus sit », in Acta conventus omnium gentium Ovidianis studiis fovendis, Bucarest, 1976 30. Allen K., « The Fasti of Ovid and Augustean Propaganda », AJPh, 43, 1922 31. Allen P. L., « The structure of Orpheus’ song, Metamorphoses X », Papers of Lang. And Lit., Edwardsville, Southern Illinois Univ., XVII, 1981, p. 23-32 32. Anderson W. S., « The Orpheus of Virgil and Ovid ; flebile nesquio quid », Orpheus, 1982, p. 25-50 33. André J., « Ovide helléniste et linguiste », RPh 49, 1975, p. 191-195 34. Arcellaschi A., « Médée ou le mariage forcé », REL, 2001, 79, p. 152-162 35. Arcellaschi A., « Ovide le tragique », Pallas, 49, 1998, p. 91-100 36. Arcellaschi A., « Sur un itinéraire ovidien, de la declamatio à la recitatio », in La rhétorique à Rome : colloque des 10-11 déc.1977, Paris, Les Belles Lettres, p. 71-81 37. Arias A., « Albus-candidus, ater-niger, ruber-rutilius in Ovid’s Metamorphoses. A structural research », Latomus, 43, 1984, p. 111-117 38. Barchiesi A., « Discordant Muses », PCPhS, 37, 1991, p. 1-21

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396



58. Boyd B. W., « Celeus resticus : A Note on Ovidian Wordplay in Fasti 4 », CPh, 95, 2000, p. 190-193 59. Boyd B.  W., «  Non hortamine longo  : an Ovidian ‘correction’ of Vergil  », AJPh, CXI, 1990, p. 82-85 60. Briquel D., « Le personnage de Mézence dans les Fastes : érudition et poésie ou Ovide entre Verrius Flaccus et Virgile », REA, 100, 1998, p. 401-416 61. Brunelle C., « Pleasure, Failure and Danger. Reading Circe in the Remedia amoris », Helios, 29, 2002, p. 55-68 62. Burrow C., «  Full of the Maker’s Guile  : Ovid on Imitating and on the Imitation of Ovid », in Ovidian Tranformations : Essays on the Metamorphoses and its reception. Cambridge Philological suppl. 23. Cambridge Philological Society, 1999 63. Cahen R., Le rythme poétique dans les Métamorphoses d’Ovide, Geuthner, 1910 64. Cahoon L., «  Calliope’s Song  : Shifting Narrators in Ovid, Metamorphoses V », Helios, 23.1, 1996, p. 43-66 65. Cahoon L., «  The Parrot and the Poet. The Function of Ovid’s Funeral Elegies », CJ, 80, 1984, p. 27-35 66. Capelle Ph., Esthétique et idéologie des Fastes, microforme, TMC 89-1136 (BIU Sorbonne) 67. Cizek E., «  Ovide et le goût littéraire à l’époque impériale  », Bulletin de l’Association Guillaume Budé, 4, 1983, p. 277-283 68. Claassen J.-M., « Ovid’s exilic vocabulary », Akroterion, 43, 1998, p. 67-98 69. Claassen J. M., recension pour Bryn Marw Classical Review de Verdiere R., Le secret du voltigeur d’amour ou le mystère de la relégation d’Ovide. 70. Crahay R., « La vision poétique d’Ovide et l’esthétique baroque », Atti del Conv. intern. Ovidiano, I, p. 91-110 71. Danielewicz J., « Ovid’s hymn to Bacchus (Mét., IV, 11 sqq) : tradition and originality », Euphrosyne, 18, 1990, p. 73-84 72. Danielewicz J., «  Some observations on the technique and contextual role of the scenery descriptions in Ovid’s Metamorphoses  », Eos, 59,  1971, p. 301-307 73. Darcos  X., «  Ovide et le numen d’Auguste  », Hommages Le Bonniec, 1988, p. 135-143 74. Davis J. T., « Risit Amor. Aspects of Literary Burlesque in Ovid’s Amores », ANRW, II.31.4, 1982, p. 2460-2506 75. Davis P. J., « Ovid’s Amores. A Political Reading », CPh, 94, 1999, p. 431-449 76. Debrohun J.  B., «  Centaurs in Love and War  : Cyllarus and Hylonome in Ovid’s Metamorphoses, XII, 393-428  », American Journal oh Philology, 125, 3, 2004, p. 417-452 77. DeCola M., Callimaco e Ovidio, Studi Palermitani, Palerme, 1937

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98. Fantham E., «  Rewriting and Rereading the Fasti  : Augustus, Ovid and Recent Classical Scholarship », Antichthon, 29, 1995, p. 42-59 99. Fantham E., Fasti, Book  IV, New York, Cambridge University Press, éd. 1998 100. Fantham E., recension dans Classical Review, 47.1, p. 46-48 de Newlands C. E., Playing with Time : Ovid and the Fasti 101. Fantham E., Sunt quibus in plures ius est transire formas : Ovid’s self- transformers in the Métamorphoses », TCW, LXXXVII (2), 1993, p. 21-36 102. Farrel J., « The Ovidian Corpus : Poetic Body and Poetic text », in Ovidian Tranformations  : Essays on the Metamorphoses and its reception. Cambridge Philological suppl. 23. Cambridge Philological Society, 1999 103. Farrell J., «  Dialogue of Genres in Ovid’s ‘Lovesong of Polyphemus’ (Metamorphoses 13.719-897) », AJPh, 113.2, 1992 104. Farrell J., Review of Ovid and the Fasti. An Historical Study, by HerbertBrown G., In American Journal of Philology 118.4, 1997, p. 641-644 105. Feeney D.  C., «  Si licet et fas est  : Ovid’s Fasti and the Problem of Free Speech under the Principate », in Roman Poetry and Propaganda in the Age of Augustus, éd. by Anton Powell, 1992, p. 1-25 106. Feeney D., «  Mea tempora  : patterning of Time in the Metamorphoses  », in Ovidian Tranformations  : Essays on the Metamorphoses and its reception. Cambridge Philological suppl. 23. Cambridge Philological Society, 1999 107. Ferguson J., « Some verbal effects in Ovid’s Métamorphoses », Mus. Afr., IV, 1975, p. 17-26 108. Ferrarino P., « Laus Veneris », in Ovidiana. Recherches sur Ovide, publiées à l’occasion du bimillénaire de la naissance du poète par N. I. Herescu, Paris, 1958, p. 301-316 109. Fishwick D., « Ovid and Divus Augustus », CPh, 86, 1991, p. 36-41 110. Fraenkel H., Ovid, a poet between two worlds, Sather Classical Lectures, University of California Press, 1945 111. Frécaut J.  M., «  La part du grotesque dans quelques épisodes des Métamorphoses  », in Mélanges Le Bonniec, Latomus, CCI, éd. Porte D., Bruxelles, 1988, p. 198-219 112. Frécaut J. M., « L’épisode de Pasiphae dans l’Art d’Aimer d’Ovide (1,289326) », Caesarodunum, XVII bis, 1982, p. 17-30 113. Frécaut J-M., « Echos de quelques vers de Properce dans les Métamorphoses d’Ovide », Latomus, 35, 1976, p. 747-760 114. Frécaut J-M., « Humour et imaginaire dans un épisode des Métamorphoses : les paysans lyciens (VI 313-381) », Latomus, 43, 1984, p. 540-553 115. Frécaut J-M., L’humour et l’esprit chez Ovide, Presses Universitaires de Grenoble, 1972

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Index adesse 85, 157, 293, 312 ades 59, 74, 81, 85, 135, 207, 225, 269, 270, 271, 272, 287, 290, 291, 294, 295, 296, 303, 312, 313, 314, 315, 316, 318, 332, 333 adsis 85, 120, 121 Amours 48, 49, 53, 73, 74, 76, 84, 86, 87, 88, 89, 90, 92, 96, 110, 111, 118, 119, 125, 126, 128, 129, 140, 141, 155, 160, 178, 183, 206, 207, 208, 216, 224, 226, 229, 230, 267, 278, 279, 290, 291, 303, 309, 310, 315, 321, 322, 327, 397, 434 Apollon 22, 49, 52, 60, 77, 79, 87, 88, 108, 119, 124, 136, 137, 138, 139, 140, 141, 144, 145, 152, 157, 165, 166, 194, 278, 281, 284, 285, 288, 292, 324, 331, 335, 338, 339, 341, 342, 353, 360, 366, 367, 369, 370, 372, 374, 375, 377, 408, 409, 412, 415, 416, 419 apollinien 27, 119, 129, 138, 141, 144, 146, 266 apollinienne 141, 144, 145 Apulée 19 Ars Amatoria 48, 74, 92, 93, 110, 111, 125, 140, 141, 268, 271, 272, 278, 281, 290, 393, 401, 402, 404 Art d’Aimer 63, 64, 91, 95, 111, 229, 230, 232, 283, 284, 296, 321, 398, 403, 406 Auguste 24, 39, 45, 50, 58, 65, 79, 108, 124, 127, 132, 133, 134, 136, 137, 139, 141, 144, 145, 147, 170, 171, 317, 318, 343, 351, 352, 360, 369, 372, 378, 384, 396, 401, 412, 419, 421 autel 58, 150, 151, 154, 175, 176, 187, 199, 200, 202, 204, 205

autels 62, 122, 127, 130, 131, 149, 150, 176, 199, 200, 201, 204, 208 Bacchus 52, 53, 70, 71, 73, 75, 77, 79, 80, 81, 83, 98, 108, 119, 120, 121, 124, 129, 141, 142, 143, 144, 145, 153, 159, 198, 201, 203, 246, 278, 281, 282, 283, 284, 285, 286, 303, 304, 305, 331, 335, 338, 339, 342, 343, 345, 348, 352, 353, 358, 359, 360, 361, 363, 366, 367, 368, 369, 371, 374, 375, 391, 396, 417 Dionysos 145, 280, 282, 285, 335 Bucoliques 92, 94, 236, 284, 314, 315, 394, 426, 428, 432 Bucolique I 10 carmen 11, 12, 23, 37, 42, 47, 82, 100, 116, 138, 141, 147, 161, 163, 164, 181, 191, 213, 253, 257, 302, 304, 308, 317, 320, 328, 332, 333, 334, 407, 410, 413, 414, 432 Caton 15, 16, 36, 37, 307, 308, 327, 330, 333, 416 Catulle 33, 53, 55, 95, 174, 207, 224, 236, 273, 274, 275, 276, 280, 281, 309, 312, 321, 324, 399, 406, 426, 432, 433, 434 chant 10, 23, 27, 33, 34, 52, 54, 64, 72, 74, 75, 77, 87, 128, 135, 153, 158, 161, 163, 164, 237, 238, 240, 278, 285, 297, 305, 319, 332, 333, 341, 371, 378, 413 Chant des Arvales 15, 34 Cicéron 10, 16, 24, 55, 84, 174, 207, 322, 324, 328, 329 Cupidon 49, 53, 119, 128, 129, 157, 168, 339, 344, 345, 366, 367, 369, 371, 377, 391

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Index

da 139, 171, 215, 225, 243, 253, 256, 267, 270, 302, 311, 334, 433 deditio luendae sponsionis 42 demande de faveur 48, 79, 80, 81, 347, 350, 351, 352, 359, 360, 361, 375, 378, 382, 383, 384, 385, 386, 388, 389, 390, 391 Demande de faveur 48, 73, 338, 341, 343, 346, 348, 352, 353, 359, 360, 361, 374, 375, 376, 377, 378, 380, 383, 384, 385, 391 deuotio P. Deci Muris 43 élégie 23, 24, 27, 57, 94, 99, 100, 103, 109, 110, 118, 146, 309, 316, 395, 397, 406, 428, 434 élégiaque 23, 27, 57, 58, 88, 92, 94, 99, 100, 101, 102, 115, 116, 119, 128, 141, 144, 158, 163, 164, 168, 266, 278, 289, 291, 308, 310, 315, 326, 327, 332, 348, 368, 375, 406, 434 Elégies 57, 93, 99, 139, 310, 320, 393, 408 Enée 50, 108, 124, 129, 132, 133, 136, 144, 145, 170, 307, 350, 354, 356, 372, 379, 383 Enéide 14, 79, 91, 137, 177, 179, 182, 183, 207, 221, 224, 225, 236, 263, 278, 294, 301, 310, 324, 393, 416, 424, 425, 427, 433 épiclèse 266, 274, 278, 279, 281, 282, 403, 417 épiclèses 26, 53, 112, 139, 147, 198, 261, 265, 273, 277, 279, 280, 282, 283, 285, 304, 305, 307, 331, 335, 403, 407, 411, 413, 415, 416, 417, 418, 420 épiclétique 281 Erato 63, 64, 128, 129, 144, 162, 214, 349, 350, 363, 364, 379, 380 euocatio deorum Carthagine facta 39

Fastes 9, 15, 24, 32, 33, 34, 36, 45, 48, 50, 51, 53, 54, 55, 56, 57, 58, 59, 60, 61, 62, 63, 64, 65, 66, 67, 68, 69, 70, 72, 73, 74, 75, 76, 77, 78, 79, 80, 82, 84, 85, 87, 94, 96, 99, 110, 111, 112, 113, 114, 115, 116, 117, 119, 125, 127, 128, 129, 132, 133, 135, 136, 137, 139, 141, 142, 143, 144, 146, 151, 155, 156, 157, 159, 160, 161, 162, 163, 164, 169, 170, 171, 172, 173, 176, 178, 179, 185, 186, 188, 189, 190, 191, 192, 194, 195, 196, 197, 205, 206, 207, 213, 214, 215, 216, 218, 220, 221, 222, 223, 224, 226, 229, 231, 232, 233, 235, 237, 238, 244, 245, 249, 250, 251, 253, 254, 255, 256, 257, 258, 267, 268, 269, 270, 271, 272, 275, 278, 280, 286, 287, 288, 291, 292, 296, 297, 298, 299, 300, 303, 308, 309, 310, 311, 312, 313, 314, 315, 316, 319, 321, 322, 323, 325, 326, 327, 345, 346, 347, 348, 349, 350, 351, 352, 357, 358, 359, 360, 361, 362, 363, 364, 365, 366, 367, 368, 369, 370, 372, 373, 375, 376, 377, 378, 379, 380, 381, 382, 383, 384, 385, 386, 387, 388, 389, 390, 391, 393, 396, 397, 401, 403, 407, 408, 410, 416, 418, 419, 420, 429 Fastes de Preneste 133 fer opem 82, 83, 84, 89, 92, 115, 143, 154, 178, 183, 225, 226, 243, 253, 254, 269, 270, 310, 319, 321, 322, 324, 325, 327, 332 fer auxilium 84, 309 opem 82, 83, 84, 143, 178, 243, 269, 270, 309, 310, 312, 319, 321, 322, 323, 324, 325, 326, 327, 332 Fer opem 83, 325 filles de Minyas 142, 203 Géorgiques Virgile Géorgiques 92, 93, 114, 115, 195, 236, 278, 301, 394, 408, 420

Index 437 Hérodote 55 Héroïde 179, 181, 405 Héroides 125, 140, 290, 292, 325, 404 Héroïdes 14, 48, 49, 84, 90, 91, 92, 95, 110, 111, 113, 140, 147, 160, 183, 184, 224, 230, 268, 272, 280, 290, 309, 310, 311, 312, 315, 321, 323, 330, 395, 400, 404, 406, 428, 432 Hésiode 22, 25, 64, 161 Horace 55, 59, 60, 92, 93, 95, 133, 144, 147, 183, 207, 224, 227, 272, 273, 274, 275, 276, 279, 280, 281, 284, 287, 288, 301, 311, 319, 321, 324, 328, 393, 424, 427, 431, 432 Odes 59 hymne hymnique 53, 54, 58, 72, 138, 262, 285, 298, 335, 339, 348, 366, 371, 375, 377 Hymne 27, 35, 48, 52, 117, 119, 141, 246, 316, 339, 340, 343, 344, 345, 346, 347, 348, 351, 366, 375, 376, 377, 381, 385, 389, 390, 407 hymnes 52, 60, 197, 249, 285, 299, 409 Hymne des Saliens 35 Hymne Homérique à Hermès 117, 119 Ibis 48, 75, 80, 111, 124, 125, 129, 207, 229, 230, 283, 293, 296, 310, 321, 353, 360, 365, 366, 374, 377, 386, 393, 395, 400, 405, 406 Janus 35, 38, 45, 63, 64, 65, 66, 75, 76, 77, 79, 124, 129, 137, 161, 162, 188, 216, 273, 274, 280, 281, 292, 316, 317, 331, 345, 346, 347, 359, 360, 362, 382, 383, 409, 413, 414, 421 jovienne 131 Jupiter 38, 42, 50, 55, 58, 60, 79, 80, 81, 86, 108, 116, 124, 129, 130, 131, 132, 133, 134, 135, 136, 137, 155, 156, 157, 166, 170, 171, 172, 173, 176, 190, 199, 206, 266,

275, 281, 286, 288, 304, 338, 341, 343, 348, 350, 353, 354, 358, 359, 360, 363, 367, 368, 369, 371, 372, 373, 374, 383, 384, 389, 409, 418 jupitérien 129, 132, 137 Lygdamus 181 magie magique 13, 18, 19, 20, 21, 22, 37, 76, 173, 190, 191, 259, 263, 307, 407 magiques 13, 18, 19, 20, 21, 22, 53, 191, 262, 342, 366, 387, 419, 422 Magie 10, 13, 19, 343, 367, 374, 407, 408, 410, 412, 413, 415, 417, 421 Mars 34, 36, 37, 38, 39, 45, 50, 64, 75, 79, 80, 88, 92, 101, 124, 129, 135, 143, 145, 161, 162, 163, 171, 269, 270, 274, 281, 308, 314, 330, 347, 351, 352, 359, 360, 372, 384, 418, 419 Mercure 22, 49, 53, 58, 59, 60, 80, 83, 108, 116, 117, 118, 119, 124, 129, 147, 151, 186, 194, 197, 199, 206, 246, 286, 287, 288, 338, 339, 341, 351, 358, 364, 365, 366, 367, 370, 372, 373, 375, 384, 385, 410, 419 Métamorphoses 19, 24, 29, 44, 48, 49, 51, 52, 53, 58, 61, 69, 73, 75, 81, 82, 83, 84, 86, 87, 89, 90, 91, 93, 94, 95, 96, 97, 98, 109, 110, 111, 113, 114, 118, 119, 121, 122, 125, 129, 130, 131, 132, 134, 135, 136, 139, 140, 141, 142, 143, 144, 145, 146, 147, 150, 151, 152, 153, 155, 157, 158, 159, 160, 165, 166, 167, 168, 169, 177, 178, 179, 180, 184, 185, 198, 199, 200, 201, 202, 203, 205, 206, 207, 216, 217, 220, 221, 224, 225, 226, 227, 228, 229, 232, 234, 236, 238, 241, 242, 243, 244, 260, 267, 269, 270, 271, 273, 274, 278, 279, 280, 281, 282, 283, 284, 285, 286, 289, 290, 291, 292, 294, 295, 299, 300, 302, 303, 307, 309, 310, 315, 321, 322,

438

Index

323, 324, 325, 326, 335, 393, 394, 395, 396, 397, 398, 399, 400, 401, 404, 405, 406, 407, 411, 416, 417, 420, 421 métrique 5, 26, 60, 70, 78, 79, 96, 161, 180, 188, 221, 222, 224, 228, 230, 233, 234, 236, 240, 244, 246, 258, 260, 261, 267, 269, 279, 281, 288, 291, 293, 294, 298, 309, 310, 316, 326, 327, 330, 332, 333, 335, 423, 424, 425, 426, 427, 429, 430, 431 métriques 26, 32, 96, 118, 213, 223, 233, 240, 256, 257, 258, 271, 280, 291, 310, 331, 332, 335, 424, 425, 427, 428, 431 Minerve 73, 74, 124, 129, 145, 151, 162, 163, 206, 281, 345, 348, 352, 361, 365, 369, 385, 391 Muses 53, 63, 64, 69, 73, 79, 99, 100, 103, 119, 124, 128, 129, 141, 144, 147, 161, 194, 234, 339, 343, 347, 352, 353, 360, 361, 362, 365, 366, 374, 386, 387, 394, 401, 408, 424, 432 Neptune 49, 81, 82, 83, 86, 108, 124, 129, 139, 140, 158, 159, 167, 168, 228, 241, 276, 315, 322, 324, 339, 340, 341, 342, 345, 355, 356, 357, 359, 368, 369, 371, 372, 374, 387, 391 Numa 62, 80, 85, 108, 112, 123, 128, 129, 132, 133, 137, 155, 156, 159, 171, 172, 173, 176, 215, 222, 348, 357, 363, 368, 378, 383 ovide Héroïdes 14 Ovide Amours 74 Ars Amatoria 73, 183 Fastes 74 Métamorphoses 29, 168, 183 Tristes 183

Palès 80, 124, 151, 186, 187, 191, 192, 196, 246, 251, 252, 255, 278, 350, 360, 369, 388, 411 Plaute 55, 284, 297, 307, 319, 324, 430 Pline 13, 16, 31, 47, 55, 196, 279, 280, 328, 414 Pline l’Ancien 13 Plutarque 16, 132, 196 Pontiques 280, 284, 310, 321, 322, 325, 395 precatio iunoni reginae 43 precatio Moeris 39 precor 36, 37, 38, 39, 40, 83, 84, 88, 92, 96, 102, 126, 135, 164, 225, 243, 244, 248, 271, 272, 291, 292, 302, 307, 308, 309, 310, 311, 312, 325, 327, 329, 330, 332, 333, 345, 372, 390, 427 prière 9, 10, 11, 12, 13, 14, 16, 17, 18, 22, 23, 24, 25, 26, 29, 31, 32, 33, 35, 36, 37, 38, 40, 47, 48, 49, 50, 51, 52, 56, 60, 61, 77, 78, 79, 82, 84, 85, 87, 94, 96, 102, 103, 105, 107, 110, 111, 112, 113, 114, 115, 116, 117, 118, 119, 121, 122, 123, 126, 129, 131, 133, 134, 135, 136, 138, 141, 143, 149, 150, 151, 156, 157, 158, 160, 162, 165, 167, 168, 169, 170, 171, 174, 175, 176, 179, 181, 185, 186, 189, 190, 191, 192, 194, 195, 199, 200, 201, 205, 211, 213, 219, 221, 223, 233, 238, 240, 241, 244, 246, 247, 248, 250, 252, 253, 254, 255, 256, 259, 260, 262, 263, 264, 266, 267, 269, 270, 277, 279, 285, 288, 292, 293, 297, 307, 308, 309, 310, 311, 312, 316, 319, 324, 326, 327, 328, 331, 333, 334, 338, 342, 354, 355, 356, 357, 359, 370, 371, 377, 378, 389, 390, 407, 409, 410, 411, 412, 413, 414, 415, 420, 427 prières 9, 11, 12, 13, 14, 15, 16, 19, 22, 23, 24, 25, 26, 29, 31, 32, 35, 36, 39, 40, 42, 45, 47, 48, 49, 53, 72, 75, 76, 77, 82, 85, 87, 100, 103, 107, 108, 111, 112, 113, 116, 119, 121, 123, 126, 130, 132, 138, 139, 140,

Index 439 142, 146, 149, 150, 158, 160, 165, 168, 169, 170, 174, 175, 176, 182, 185, 191, 196, 197, 201, 204, 207, 208, 213, 216, 219, 220, 224, 226, 228, 229, 233, 234, 235, 238, 241, 245, 250, 255, 257, 260, 262, 273, 277, 279, 281, 293, 297, 302, 305, 308, 321, 324, 328, 331, 332, 333, 334, 335, 374, 408, 414 Properce 33, 55, 57, 95, 99, 100, 103, 137, 144, 146, 147, 174, 179, 183, 190, 207, 208, 224, 273, 274, 275, 276, 280, 281, 284, 293, 294, 310, 319, 321, 324, 393, 398, 408, 422, 431, 432 propitius 36, 308, 312, 319, 330 quaeso 39, 329, 330 quaesoque 36, 37, 308, 327, 328, 329, 330, 332 Quinte-Curce 328, 329 Quintilien 13, 16, 35, 55, 102, 230, 393, 432 Quirinus 38, 45, 80, 108, 113, 114, 124, 129, 134, 137, 156, 162, 188, 195, 196, 253, 274, 350, 359, 370, 389, 408, 419 rituel 11, 20, 22, 26, 32, 34, 36, 39, 45, 61, 76, 80, 112, 113, 114, 115, 117, 149, 151, 170, 173, 174, 178, 181, 188, 190, 191, 192, 194, 195, 197, 198, 206, 207, 208, 292, 297, 304, 340, 350, 360, 370, 385, 388, 394, 407, 413, 414 rituelle 27, 40, 56, 85, 113, 114, 116, 159, 162, 176, 182, 198, 203, 205, 206, 207, 209, 247, 255, 272, 281, 416, 418 ritus bellum indicendi 43 ritus foederis feriendi 42 Robigo 45, 114, 124, 151, 156, 162, 188, 192, 195, 196, 244, 246, 250, 253, 254, 255, 268, 276, 350, 370, 389

sacré 156 sacrée 20, 32, 53, 62, 112, 113, 120, 150, 154, 156, 162, 165, 198, 209, 256, 320, 328, 333, 418 sacrées 24, 56, 112, 141, 199, 201, 202, 244, 310 sacrifice 11, 13, 42, 114, 130, 154, 175, 178, 191, 192, 195, 196, 202, 203, 204, 206 Saloustios 11 Sénèque 84 Sénèque le Rhéteur 57 supplex 180, 181, 182, 183, 184, 185, 244 supplicatio 25, 185 supplication 25, 165, 176, 178, 182, 183, 310, 412 Tables Eugubines 11 temple temples 45, 127, 149, 200, 317 Terminus 53, 54, 55, 56, 57, 112, 124, 151, 162, 246, 272, 274, 297, 347, 366, 389 théonymes 265, 280, 335 Tibulle 33, 55, 93, 95, 115, 144, 174, 179, 183, 207, 208, 224, 244, 248, 273, 274, 275, 276, 280, 281, 293, 294, 308, 309, 310, 311, 312, 316, 319, 320, 321, 324, 333, 345, 372, 390, 393, 394, 410, 427, 431 Elégies 315 Tite-Live 15, 16, 38, 40, 55, 76, 84, 95, 138, 184, 208, 224, 274, 308, 329, 333, 393, 414, 416 Tristes 84, 96, 145, 284, 307, 309, 310, 315, 321, 322, 323, 393, 395, 397, 404, 406, 431 Vénus 53, 74, 75, 77, 80, 81, 86, 88, 108, 118, 119, 124, 128, 132, 133, 137, 143, 145, 146, 147, 151, 162, 163, 167, 168, 169, 205, 206, 208, 223, 273, 278, 285, 307, 311, 319, 327, 331, 335, 339, 341, 342, 343, 344, 345, 348, 349, 352, 354, 356, 357,

440

Index

358, 359, 361, 367, 368, 369, 371, 374, 377, 378, 383, 385, 387, 390, 391, 420, 421 Vesta 50, 76, 77, 78, 80, 124, 129, 134, 135, 136, 137, 138, 140, 164, 171, 186, 187, 268, 270, 276, 292, 331, 348, 350, 351, 352, 358, 360, 373, 384, 388, 391 Virgile 9, 14, 25, 52, 55, 60, 65, 79, 92, 93, 94, 95, 114, 115, 174, 177, 179, 183, 195, 207, 221, 224, 227, 248, 258, 272,

273, 274, 275, 276, 278, 280, 281, 284, 288, 293, 294, 301, 307, 309, 310, 319, 321, 324, 332, 333, 393, 394, 396, 408, 410, 415, 423, 424, 425, 427, 428, 431, 432 Bucoliques 91 Enéide 79, 136

Table des matières Remerciements 5 Préface 7 Introduction 9 Partie I Typologie de la prière, Ovide face au miroir des prières romaines traditionnelles Chapitre I : Corpus Romanum : quel modèle choisir ? Les rituels publics romains au miroir de l’œuvre d’Ovide Les textes de référence

31 33 33

Chapitre II : Corpus ovidianum : aperçu typologique 47 Typologie ovidienne : présentation 47 Les Vœux 49 L’Hymne 52 Les demandes de renseignements 61 Demande de faveur pour une œuvre littéraire 73 Demandes d’aide ou de faveur 78 Les Pétitions variées, et les prières longues et complexes 85 Vertumne et Pomone 97 Partie II La mise en scène de la prière Chapitre I : Les acteurs de la prière : les narrateurs et leurs personnages Les orants Hommes, héros et divinités Prêtres et Fidèles Piété et impiété Les Destinataires Le pôle jupitérien

107 107 107 112 116 123 129

442

Table des matières

Le Pôle apollinien Le Pôle vénusien

138 146

Chapitre II : Circonstances et lieux de la prière Les Lieux de prière Lieux sacrés inaugurés : temples et autels Lieux naturels Circonstances et efficacité des prières Efficacité de la prière Les rituels : Ovide chroniqueur ou créateur ? Les gestes rituels

149 149 149 151 160 170 174 185

Partie III La mise en mots de la prière Chapitre I : La mise en scène du récit : Études narratologiques et métriques Introduction et clôture des prières Formules de clôture Le monde ovidien : une scénographie verbale rythmée et dynamique

213 213 218 224

Chapitre II : L’invocation Noms, épiclèses, épithètes Usage de la particule élégiaque Indétermination du destinataire et indéfinis Le « Du Stil »

261 261 289 292 297

Chapitre III : Les verbes de la prière

307

Conclusion 331 Annexes 337 Bibliographie 393 Index 435

Volumes parus 1 Bibliographie analytique de la prière grecque et romaine (1898-1998), par les membres du C.A.R.R.A., sous la direction de Gérard Freyburger et Laurent Pernot. Deuxième édition complétée et augmentée (1898-2003), par les membres du C.A.R.R.A., sous la direction de Gérard Freyburger, Laurent Pernot, Frédéric Chapot, Bernard Laurot. Supplément à la deuxième édition (années 2004-2008), par les membres du C.A.R.R.A., sous la direction de Yves Lehmann, Laurent Pernot, Bernard Stenuit. Deuxième Supplément à la deuxième édition (années 2009-2013), par les membres du C.A.R.R.A., sous la direction de Bernard Stenuit 2 Corpus de prières grecques et romaines, Textes réunis, traduits et commentés par Frédéric Chapot et Bernard Laurot. 3 Anima mea. Prières privées et textes de dévotion du Moyen Age latin, par Jean-François Cottier. 4 Rhétorique, poétique, spiritualité. La technique épique de Corippe dans la Johannide, par Vincent Zarini. 5 Nommer les Dieux. Théonymes, épithètes, épiclèses dans l’Antiquité, Textes réunis et édités par Nicole Belayche, Pierre Brulé, Gérard Freyburger, Yves Lehmann, Laurent Pernot, Francis Prost. 6 Carmen et prophéties à Rome, par Charles Guittard. 7 L’hymne antique et son public, Textes réunis et édités par Yves Lehmann. 8 Rhétorique et littérature en Europe de la fin du Moyen Age au xviie siècle, Textes réunis et édités par Dominique de Courcelles. 9 L’étiologie dans la pensée antique, Textes réunis et édités par Martine Chassignet. 10 Supplicare deis. La supplication expiatoire à Rome, par Caroline Février. 11 La rhétorique de la prière dans l’Antiquité grecque, Textes réunis et édités par Johann Goeken. 12 Julius Valère, Roman d’Alexandre, Texte traduit et commenté par JeanPierre Callu. 13 L’enseignement de la rhétorique au iie siècle après J.-C. à travers les discours 30-34 d’Ælius Aristide, par Jean-Luc Vix. 14 Rhétorique et poétique de Macrobe dans les Saturnales, par Benjamin Goldlust. 15 Ælius Aristide et la rhétorique de l’hymne en prose, par Johann Goeken. 16 Lessico, argomentationi e strutture retoriche nelle polemica di età cristiana (III-V sec.), a cura di Alessandro Capone. 17 Aristoteles Romanus. La réception de la science aristotélicienne dans l’Empire gréco-romain, Textes réunis et édités par Yves Lehmann.

18 La déesse Korè-Perséphone: mythe, culte et magie en Attique, par Alexandra Dimou. 19 Aelius Aristide écrivain. Textes réunis et édités par Laurent Pernot, Giancarlo Abbamonte, Mario Lamagna, avec l’assistance de Maria Consiglia Alvino.