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French Pages 263 [133] Year 2000
MUSÉE SANS FRONTIÈRES
LE MAROC ANDALOU
À LA DÉCOUVERTE D'UN ART DE VIVRE
L'ART ISLAMIQUE EN MÉDITERRANÉE Les Expositions Musée Sans Frontières: une nouvelle manière de vivre une exposition
LE MAROC ANDALOU raconte le mouvement incessant d 'échanges et d 'interpénétrations qui donnera naissance, en ce Maghreb extrême, à l'un des foyers les plus brillants de la civilisation islamique. En plus de constituer un ouvrage scientifique de référence, les catalogues des Expositions Musée Sans Frontières, sont de véritables guides de voyage thématique à entreprendre individuellement ou en groupe. Richement illustrés, ils sont rédigés par des chercheurs et universitaires du pays à visiter et permettent ainsi de découvrir un pays à travers le regard de ceux qui y vivent. Les Expositions Musée Sans Frontières proposent une nouvelle manière de vivre une exposition d 'art, d 'architecture et d 'archéologie. Les ceuvres ne sont pas exposées dans un espace fermé, mais monuments, sites et objets sont présentés sur le lieu d 'origine, dans leur contexte historique et culturel.
782 illustrations en quadrichromie 23 plans de monuments 265pages
A paraître dans la c ollection «L 'Art Islamique en Méditerranée» PORTUGAL Dans les Terres de la Maure Enchantée L'art islamique au Portugal TURQUIE Genèse de I' Art Ottoman L'héritage des emirs TUNISIE Ifriqiya Treize siècles d 'art et d 'architecture en Tunisie ESPAGNE 1 L' Art Mudéjar L'esthétique musulmane dans /'art chrétien JORDANIE Les Omeyyades Naissance de /'art islamique ÉGYPTE L' Art Mamelouk Splendeur et magie du règne des sui~ AUTORITÉ PALESTINIENNE Pélerinage, Sciences et Soufisme L'art islamique en Cisjordanie et à G ISRAËL Partageant le Sacré Lieu de vie et de prière de trois civilis ITALIE L' Art Arabo-Normand La c ulture Islamique en Sicile médiévale ALGÉRIE Eau et Architecture du Désert La pentapole du Mzab
Réalisé dans le cadre du programme Euromed Héritage de l'Union Européenne
ESPAGNE Il Les traces de l' islam en Catalogne Charnière culturelle d 'une région frontalière
BPB I 1111111111 li Ill li Ill li Ill li Ill 111111111111111
0225 112 5872
MAROC
Cycle international d'Expositions Musée Sans Frontières
L'ART ISLAMIQUE EN MÉDITERRANÉE
LE MAROC ANDALOU À LA DÉCOUVERTE D'UN ART DE VIVRE
EDDIF
ÉDISUD
Ill
UNION EUROPÉENNE Programme MEDA Euromed I leritage
La réalisation d e l'Exposition Musée Sans Frontières "LE MAROC ANDALOU: À la d éco uve rte d'un art de vivre" a é té cofinancée par l'Union Européenne dans le cadre du Programm e MEDA-Euromed Héritage
Idée et conception générale du Programme Musée Sans Frontières
Catalogue
Coordination tec hnique
Nadia Hachimi Alaoui No uria Cherracli
Directeurs du proj e t
Introductions à I' Exposition Abde laziz Tou ri Naïma EI-Khatib Boujibar Moham ed Mezzine
Abdelaziz Tou ri
Présentat.ion des circuits
Direct.eu, du Patrimoi ne Culturel,
Comité Scientifigue
Eva Schubert
et a bé néfici é du soutien d es institutions marocaines et inte r nationales suivantes:
Secrétariat
Ministère des 1ljfaires Culturelles, Rabat
MINISTÈRE DES AFFA IRES cu~ruRELLES
Ministère des Affaires Culturelles du Royaume du Maroc
li M INISTÈRE DU TOURISME DU ROYAUME DU MAROC OFFICE NATIONALE MAROCAIN
Ministè re du Tourisme du Royaume du Maroc Office atio nale Marocain du ~lourisme
DU TOUR ISME
•
MINISTERIO DE EDUCACIÔN Y CULTURA
Abde lkader Retnani Vicé -1,résidem de /'OING Musée Sans Fromières, Casablanca
Comité scientifique
MAROC
SECRETARiA DE ESTADO DECULTURA
© 2000 Ministère des AITaires Cu lture lles du Royaume du Maroc, Rabat, Maroc & O ING Musée Sans Frontières, Vienne, Autriche (Textes et illustrations)
Ministère de !'Éducation et de la Culture de l'Espagne gui a financé la coordinatio n scientifique du cycle inte rnational "L' Art Islam igue en Méditerranée" et contribué à l'élaboration du programme scientifigue des différentes expositions, en collaboration avec: le Ministere des Affaires Étrangères, Autriche le Ministère des Biens et Affaires Cu lturelles (Musée National des Arts Orientaux, Rome), Itaü e le Secrétariat d' État au Tourisme, Portugal le Musée des Antic1uités de la Méditerranée et du Proche Orient, Stockholm, Suède
Espagne & 0 1 G Musée Sans Frontières, Vie nne, Autriche.
Informations: www.mwnf.org
2000 Éditions Édisud , Aix-enProvence, France ISBN: 9981-09-054-9 (Eddif) D. L.: 338-2000 (Edclif) ISBN: 2-7449-0 165-2 (Édisud) Ail Rights Reserved Printed in Spain
Introduction 9énéralec'L'Art Islamique en Méditerranée"
Eva Schubert, Vi enne- Madrid-Rome
Jam il a Binous, Tunis Mahmoud Hawari , Jérusalem-Est Manuela Marin, Madrid Géinül Ôney, Izmir
Secrétariat international Museo Sin Fronteras Barguillo, 158 - 4°G 28004 Madrid Espagne Te l. + 3491 5312824 Fax.+ 34 91 523 57 75 msf. madrid@ tcleline.es
Coordination 9énérale
Coordination comités scientifiques,
traductions, édition et production des catalo9ues
Saki na Missoum , Madrid Édition Naïma EI- Khatib Boujibar Nad ia Hachimi Alaoui Nouria Cherradi Photographie Khalil Nemmaoui Ca rt e généra le
José Antonio Davila Buitr6n Tracé des circuits Rachid Tecljini Sergio Viguera
Agustina Ferna.ndez
Secrétariat au Maroc Musée Sans Frontières cl o Carrefour des Arts Rue Essanaan.i - angle rue Daguerre Casablanca Maroc Tel. + 2 12 2 26 05 0 I - 29 43 64 Fax. + 2 12 2 25 87 8 1 rnsf. [email protected]. m a
Coordination internationale du cycle "L' Art Islam igue en Médite rranée"
Maquette et desi9n
© 2000 Éditions EDD IF, Casablanca, Maroc
Mhammad Benaboud, T étouan Naïma EI-Khatib Boujibar, Casablanca Kama! Lakhdar, Rabat Mohamed Mezzine, Fès AbdelazizTouri, Rabat
Lamia MoukhHss
"Textes techniques adia 1-l ac himi Alao ui
Plans ~akir Çal...-mak Yekta Demiralp
© 2000 Electa Espana, Madrid,
Directri ces de Production
Production
S.E. Electa Espaiia S.A.
Coordinati on administrative et documentation
Si lvia Victoria Ronza, Rome
Remerciements
Préface
Nous rem ercions pour leur collaboration et soutien les personnes et institutions sans lesquelles ce proj et n' aurait pu être
Les grandes expositions d'art sont des événements culturels et scientifiques de grande envergure qui, au cours des années ont converti l' Art dans toutes ses form es et manifestations, en un élé ment porteur pour déterminer l' image d'un pays. L'événement culturel est ainsi devenu le scénario privilégié d ' importantes réalisations politiques et les grandes entreprises investissent dans l' art pour mieux placer lew-s produits sur le marché.
réalisé: Archives du Ministère des Affaires Culturelles , Rabat Association Ader-Fès Bibliothèque Générale et Archives, Rabat Bibliothèque Royale al-Hassania, Rabat Le Carrefour des Arts, Casablanca Légation américaine de Tanger La Villa des Arts, Fondation ONA, Casablanca Les collectivités local es Les délégués régionaux du Ministère du Tourisme et du Ministère des Affaires Culturelles ainsi que les conse rvate urs des musées suivants:
Musée Jamaï, Meknès Musée Batha, Fès Musée Ethnographique, Chefchaouen Musée Ethnographique, Tétouan Musée Archéologique, T étouan École des Arts et Métiers, Tétouan Musée de la Casbah, Tanger Musée des Oudayas, Rabat Musée Archéologique, Rabat et Royal Air Maroc
La participation active des pays méditerranéens dans ce processus de mise en valeur économiqu e et politiqu e de leur patri moin e culturel est l'objectif du programme Mu sée Sans Fronti ères et d e son cycl e d 'Ex posi tions "L' Art Islamiqu e en Médite rranée".
Basé sur une nouvelle form e d' exposition où les œ uvres d 'art restent à leur place pour être exposées dans leur contexte d'origine, le programme· Musée Sans Frontières combine la recherche sur des thèm es spéci fiques avec la médiatisation du patrimoine artistique afin de promouvoir les investissements dans le domaine de sa restauration et préservation. L' Exposition Musée Sans Frontières est conçue autour d ' un thème et pour une zone géographique bien déterminée (l 'espace d 'exposition) et s'articule suivant des circuits spécifiques (les salles d' expositions) dont chacun traite un aspect particulier du thème général. Le visiteur ne se déplace plus dans un espace fermé, mais peut désormais aller à la rencontre d ' objets d 'art , de monuments, de sites archéologiques , de noyaux urbains, de paysages et de lieux qui ont été le scénario d 'événements historiques marquants, guidé par le catalogue de l' exposition et un système de signalétique conçu par Musée Sans Frontières pour faciliter l' identification des œ uvres exposées. Le finan cement de l'Union Européenne dans le cadre du programm e MEDA - Euromed Héritage (programme régional d'appui à la valorisation du palTimoine culturel euro-m éditerranéen) a permis de réaliser le cycle sur "L' Art Islamique en Méditerranée" et de mettre en place les Expositions en Algérie, dans les Territoires Palestiniens, en Égypte, Israël, Jordanie, Maroc, Tunisie et Turquie; se sont joints à cet effort l'Espagne, l' Italie et le Portugal où le projet compte sur un financement propre à ces pays. D' autres finan cements de l' Union Européenne octroyés dans le domaine de la politique communautaire en matière de tourism e, de patrimoine (programme RAPHAEL) et de coopération inter -régionale (action pilote de coopération Espagne- Portugal -Maroc) ont contribué à la réalisation d 'activités spécifiques dans différentes étapes du projet.
Par ailleurs, Musée Sans Frontières remerci e
a
le Ministère des AfT~res étrangères Espagnol pour avoir manifesté son soutien au projet dès ses débuts , à travers l' Agence espagnole pour la coopération internationale (AECI) et les Ambassades d'Espagne dans les pays méditerranéens participant, ainsi que le Gouvernem ent de la Région du Tyrol (Autriche) - où a été mis en place le proj et pilote Musée Sans Frontières - pour avoir contribué à la formation des directeurs de productions chargés de la coordination technique des Expositions dans les pays participant au cycle "L' Art Islamique en Méditerranée".
Références photographiques voir page 5 ainsi que Ann & Peter Jousiffe (Londres), Citadelle d' Alep, page 20 Archives Oronoz photographes (Madrid), Alhambra, Grenade, page 23 Bibliothèque de l' Université de Cambridge, Lettre de Maimonide, page 141 .
Les opinions exprim ées dans le présent ouvrage ne reflètent pas nécessairement la position de l' Union Européenne ou de ses États membres.
Au nom de Musée Sans Frontières ,j'aimerais remercier de tout cœur toutes les personnes qui , titre personnel ou comme représentants cl ' Wle des nombre uses institutions qui soutiennent notre o rganisation et ce proje t, ont contribué à réaliser ce
musée sans fronti ères sur l'art islamique en Méditerranée.
Eva Schubert Secrétaire Générale Musée Sans Fronti ères
Avertissement
Q u e lq u es p récisions d'ordre p ratique
Translittération de l'arabe:
Chaque circuit, composant l' expositi6n "LE MAROC ANDALOU: à la découverte d ' un art de vivre", sont indépendants les uns des autres, et il est ainsi possible de les visiter selon l'ordre que l'on souhaite. Le cir cuit Yll , intitulé "Les Ports du Détroit" s'articu le sur trois journées, cette répartition s'est faite selon un critère géograp hique, la distance entTe les étapes étant trop grande. En revanche, le circuit VIII , "Flux et reflux , rayonnement et écUpse" s'étale sur deux journées car le nombre de monum e nts à visiter y est important .
No us avons conser vé l'orthographe usue ll e des mots arabes passés dans l' usage et introduits dans le dictionnaire tels que "fondouk", ''koubba", "maghreb", "oued", "souk", "zaouïa", etc., et respecté la transcription phonétique des termes de 1'arabe dialectal parlé dans les différentes régions du Maroc, d o nnée par les auteurs eux -mêmes . Pour tous les autres mots, nous avons utilisé un systèm e d e transcription simplifié pour lequel nous avo ns choi si de ne pas transcrire la hamza in_itiale et ri e ne pas faire de différ ence entre les voyell es brèves et longues qui sont transcrites par a, i, ou I u. La ta' marbuta est représentée par a ( état absolu) et at ( état construit) et la transcription des 28 consonnes arabes est indi quée dans le tableau ci-dessous:
C
':--'
b
..::,
t
..:., (
th j l clj
t _)
h kh cl clh
i..r
r
~
j
.;,
z
ch
cr'
cl
l,
t
J
q
h
.!;
cl
..!l .J
k
ou/w y/i
t.
t__.
gh f
Î
.:,
J \hclallah ( 1140 / 1728 - 11 70/ 1757) qui , hic n q ue déposé par trois fo is, réussit à 1l'· tablir l'ordre. Son œ uvre sera poursui \ il' avec ténacité, intelligence et sagesse par , on fils et successeur Sicli Mo hamed ou Mohamecl III ( 11 70 / 1757-1204/ 1790). l"rès au fa it des g rand es affaires de so n l1·m ps, ce sultan entreprend d 'o uvrir le p,1ys sur l' Europe en m êm e temps que sur l' Amérique. Sur le pl an dipl o matiqu e, il H'Connaît l'indépend ance des États-Unis, ,·ntretient d es re latio ns ami cales avec (;eo rge Washingto n , auqu e l il rend des w rvices à Tuni s et à Tri po li g râce à ses .11nbassacles. Sur le p lan éco no mi q ue, il , 1gne des traités établis sur le pr incipe de l.1 rcciprocité et qui fo urnissent aux com 111t•rçants les gar anties essenti elles po ur ll'lirs mar chandises et leurs perso nnes. Au Maroc m êm e, il choisit de s'appuyer s11r le réseau des por ts atlantiques. Il entreprend donc le développement cl ' Anfa, l' acl11(' lle Casablanca, et de Tanger. Il reprend Mazagan aux Portugais ( 1079 / 1769). Il limcle sur tout Essaouira, qu' il conçoit sur
le modèle français de Saint-Malo , et l'élève au rang de premier po rt du royaume. Le XIXe siècle po uva it ainsi être abord é avec des forces retrouvées et une situation r ééquilibrée. Mais des diffi cultés intérieures dues à une lo ngue séc her esse de sept ans ( 11 90 / 1776-11 96/ 1782), suivie d ' un e terribl e é pidémi e de p este (1211 / 1797-1214/ 1800) arrêtèr ent net l 'élan de redressement amor cé et provoqu èr ent d e profo nd s boul ever sem ents. Ceux-ci affectèr ent principale m ent le d om aine dé m ographique puisqu e dan s l'ensemble du pays, plus de la moitié de la populati o n a dû m o ur ir. Le Maro c n 'eut clon e ni la fo rce po litique , ni la capacité éco no miqu e et mili ta ire pour affronter le XIXe siècl e d o nt les événem ents de la première m oitié allaient être déterminants po ur son avenir. Malgr é les grands effo r ts déployés par les trois m o narques qui se succédèrent sur le trône de 1206/ 1792 à 1289/ 1873, Moulay Slimane , ( 1206/ 1792 - 1237 / 1822), Mo ulay Abcle r rahm an ( 1237 / 1822 1275/ 1859), et Sidi Mohamecl o u Moham ed IV ( 1275/ 1859- 1289/ 1873), les d éfi s étaient trop impo r ta nts p o ur êtr e tous r elevés. Le danger cette fo is-ci est principalem ent extérieur.
Médersa Cherraline, partie supérieure du
mur de la galerie, Fès.
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Aperçu historique
Aperçu hisiorique
En 18 30 , en effet, les tro upes fran çaises prennent Alger. L'ère des impéri alism es européens est inaugurée et le Maroc s'est t ro uvé en co nfro ntation directe avec la France. Au premi er co nflit qui éclate entre les deux nations, la bataille d ' lsly près d'Ouj da ( 1260 / 1844), les troupes m arocaines so nt vaincues. Ce fut la première défaite marocaine d e puis de ux siècl es. Elle fut lo urd e de co nséqu ences, car l'E urop e, qui voyait en lui un puissant empire do nt les fro nti è res arrivai ent jusqu 'a u fl e uve Sénégal , se rendit compte de sa fragilité. En 1859-60 , l' Espagne put ain si conquérir Tétouan après une guerre où la désorganisati on des for ces m arocaines eut r aiso n de la bravo ure des ho mm es. Le Maroc se vit imposer d 'énormes indem nités de guerre qui l'obligèrent, pour la premi ère fo is de son histoire, à co ntracter un emprunt auprès de la Grande- Bretagne. Aupar avant, et sous la pressio n anglaise, appuyée par la Fr ance et l'Es pagne, le
ÉiaL du Royaume de
Fès, 1140/I728, Bibliothèque Générale de Rabat.
Maroc fut obligé de signer un traité très désavantageux po ur lui . Au -delà des dispositions commer ciales et de nav igati on dé favo rables, le traité de 1856 po rta atteinte en effet à la liberté d ' initiative du sultan et à sa souveraineté dans le do maine juridique. Le Maroc aband o nna "ses droits de justi ce à l'é9a rd des Européens et d' une parti e de ses sujets''. en reconnaissant
le principe d 'extraterritorialité et le régime de la protectio n . La pression euro pée nn e ét ait d 'autant plus gr and e qu e le Maroc co mmand ait l' un e d es ri ves du détroit de Gibraltar, "passa9e dont la valeur s'est accrue depuis l'o u verture du ca nal de S uez". Mais le plus g rave problèm e dans
les relations avec l'E uro pe a été celui de la protection. La substitu tio n de 1' auto rité étrangère à l'auto i-ité m ar oca in e sur ses pro pres citoye ns qu e le régime de la protectio n instaura fut un séri e ux o bst acle à to ute tentative de progr ès. La première tâche de Moulay Hassa n !"' ( 187 3- 1894) fut donc de tenter de r ésoudre ce problèm e. Mais to utes ses tentatives furent vouées à l'échec. Bien plus, la Confé rence Internationale de Madri d, en 1880, "crée un dan9ereux précédent: désormais aucu n chan9ement ne peut être in troduit au Ma roc sans l'accord des pu issances". Et bien
qu e, en 1906, la confér ence d 'Algés iras ait reco nnu l'in tégrité de l'Empire Chérifi en , placé sous la gar antie des puissan ces européennes signatai res, le Maroc est placé sous une sor te de Protectorat inter nati o nal o ù la Fr ance appar aît co mm e prépo nd érante . Le tr aité du Protectorat pro prem e nt dit sera sig né le 30 ma rs 19 12 , à Fès. Cet événem ent q ui, aux yeux des puissances, m ettait un terme à des décenni es de tergiversatio ns politico-dipl omatiques entre elles, en même temps qu 'il fini ssait 48
p,tr réduire le Maroc défin itivem ent, allu111.1, au contr aire, la fl amm e d ' une rés is1.1ncc faro uche. Pendant les quarante-qua1tT ans q ue d ura la présence étrangè re au M,1roc, par l'entremise de la Fr ance et de l '1:spagne, cette flamme ne dut jamais s'éll'i ndre. Après avo ir été ar mée d urant vingt-deux ,111s ( 19 12 à 193 4 ), et do nn é lie u à des ,·pisodes héroïq ues te ls que la guerre d u l{if, la résistance du Moyen Atlas, de I 'A nti -Atlas et des co nfi ns sahari ens ,111 lo ur des Aït Baamran, etc., la lutte dn int politiq ue et le resta, sans relâche, 1usqu ' à l'indépendance en 1956 obtenue so us la co nduite d u Su ltan Mohamed V ( 192 7 - 196 1), q ui d ir igea lui -mê m e la politique d' indépendance au point de prékrer la déposition et l'exil à la soumission ,·t au maintien d u Protectorat. Le 16 11ovembre 1955, Moham ed V et sa fa mi lll' e ffectuent un r eto ur tr iomphal au M,1 roc. Le souver ain légitime r etr o uve ,on trône et l' indépendance du Maroc est proclamée en mars 1956 . 1>,rn s tout ce qu 'elle entreprit, la dynas1tl' alaouite régnante fut donc le défenseur ,k l'unité nationale, la garante de l'affertuisse ment d' une spécificité maroca ine. l 1• champ poli tiq ue nous a donné la uws ure de la lutte engagée par les diffé, ,• nts mona rques po ur l'indépendance et l.1 liberté. Sur le plan de la civi lisation, ces
mêm es monarq ues ont su per pétuer dans la fo rm e com m e dans l' esprit les acqui s des époq ues précédentes. L'art alao uite est en effet un ar t de fi délité et de perpét uel retour aux sou rces. Mais il est aussi, dans plusieurs de ses réalisations, la manifestation de nouvelles orientations, celleslà même q ui se ront la marque de la création alao ui te: goût de la grandeur, uni té des thèm es, adjoncti on de no uve lles for mules avec de nouveaux procédés.
Mausolée Mohamed V, vue 9énéra/e, Rabat.
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Le Maroc Andalou
LE MAROC ANDALOU
Naï ma El-Khatib Bo ujibar, Mohamed Mezzine
l'architecture et dans le mobilier liturgiRythmée par le va-et-vient des homm es partis islamiser la Péninsul e ibé rique au qu e. Mêm e au siècl e suivant, lorsque le Maro c s'est trouvé en proie aux luttes lie /vme siècle et fuyant sept siècles plus tard la r econqu ête chrétienn e, l'histoire d'influence que se livraient, au Maghreb, d 'al-Andalous s'est confondue avec celle Omeyyades de Cordoue et Fatimides d ' Ifriqi ya, les cr éation s architecturales et du Maroc. Si l'histoire politique, qui a uni les deux rives, fut mouvem entée, le mou - artistiques restent so us la domination de ces co nfrontations. vement in cessant d' échanges culture ls, humains et co mm erciaux permit l' éclo- En e ffet, pendant la pé riode idrissid e sion d' un art florissant dont les plus belles ( 171 /788-363/974), les relations enb·e les deux rives du Détroit furent dominées réalisations trouvèrent le jour au Maroc. Les spécialistes s'accord ent pour dire que par le conflit entre les grand es dynasties la double fondation, dans la ville de Fès de l'I slam de l'époque: les Omeyyades au mili e u du III° / IXe siècle, des de ux d 'al-Andalus et les Abbassides de Baghgrands sanctuaires que sont les mosquées dad, puis plus tard les Fatimides d ' Ifriqi Qaraouiyine et celle des Andalous mar- ya et d'Égypte . La dynasti e idrisside, insque les débuts vér itables de l'art islami - tallée au Maroc, joua, quant à e ll e, les que au Maroc. Comm e le urs nom s l' in- arbitres, les intermédiai res, les tem poridique nt, ils sont l 'œuvre d'es immigrants sateurs, durant près de deux siècles. Ifriqiyens, pour le premier, et Cordouans Cette période de luttes intestin es se révépour le seco nd. De ce fait, ils portent la la bénéfique pour la création artistique au Maro c. Chaque dynastie rivalisant avec marque de la double origine de le urs l'a utre, dota le pays, notamment sur le auteurs, qui se manifeste à la fois dans
Mosquée des Anda lous, cour, Fès.
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pl,111 des fondations pieuses, d'œuvres ,11 ch itecturales et mobili ères qui marqu e1lllll de leur sceau l'art marocain et introduiro nt ainsi les pre mi e rs é lém ents de l',1rl andalou. ( "1•st ainsi que les Fatimides élevèrent les d,·ux mosquées de Fès au rang de Jama ', '111osquées-cathédral es", où était pro 11011 c le prêche du vendredi . Le Calife d ' 1·. spagne, Abd errahman e II, fera pour ,1 par t agra ndir la sall e de pri è re de la < ),1rao uiyine et édifi er le minaret. Cette lour bâtie en pierres de ta.ill e , recouver1,· de chaux à l'époque Mérinide, et prét•ntant ce rtains dé ta ils, bandea u e n 1t·licf, dôme hémisph é riqu e , encad re1111·n l de la po rte d 'accès, la rattachant 111 x trad itions ifriqi yenn es et orientales, 11 '1•11 deme ure pas moin s un ouvrage de 1 le andalou. De base car rée et d ' un e lr,rute ur égale au quadrupl e d e sa base, pl.111 e t proportions qui rappe ll e nt les 111urs des mosquées de Cordoue, e ll e ol,•v icndra le prototyp e de tous les mina1,·ts ultérie urs du Maroc. l lne au tre œ uvre maîtresse verra le jour ., n·lle même époque. Il s'agit de la chai11 · d la mosquée des Andalous. Ce m eu1,11· liturgique d ' un e g rand e fin esse d 'nccution, tout en témoignant de façon , lm1uente de la lutte d ' influence ent1·e l ,1ti mides et Om eyyades , révèle l' ex is1,·1H.: e d'un ate lier de bo is à Fès, le pre1111\' r se mbl e-t- il au Maroc, ca pabl e de 111,\Îlriser les différentes techniques déco1,1t iv s du bois: sculpture, assemblage, l1111 rnage et peinture. Ce minbar, offert p,1r le vassal des Fatimides, le Ziride Boul1111ghin, à la m osqu ée d es Andalous e n lr,9/980 lorsqu'il s'empara de la ville de I , s, fut en partie détruit au no m de l'art lwdox ie musulman e. Ré paré sur les drrl'C t ives du gouverneur o m eyyade en 175/ 986, il fut doté d ' un nouvea u dos -
sier où furent introduits des motifs d' inspiration orientale. Au Ve /xi° siècle, avec l'arrivée au pouvoir des Almoravides, on assiste à une très large ouverture du Maghreb occidental aux influences andalouses et un e vér itable "hispanisation" de l' architecture, de la culture et de l'a rm ée se fait sentir, particulièrem ent à Fès et à Marrakech. Si, dans le domaine architectural, les Almoravides n 'ont pas été, à proprement parler, les initiateurs o u les pre mi ers introducte urs de l'art architectural anda-
Mosquée Q..Eraou~ine, minaret, Fès.
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Le Maroc Andalou
Le Maroc Andalou
Mosquée Qgraouiyine, plan de la mosquée sous Ali Ibn Youssef, Fès.
~
Om
lou au Maroc, ils ont, toutefois, large ment contribué à sa diffusion à travers l'ensemble des régions . Grands bâtisseurs, ils ont marqué leur passage par la fondation de forteresses et de sanctuaires. Marrakech, capitale de leur royaume, a été la premiere à bénéficier de leur mécé-
Mosquée Qgraouiyine, travée du mihrab, Fès.
52
nat. Quant à Fes, des sa conquête en
IH'r vurées , est d ' une parfaite exécution,
461/1069, Youssef Ibn Tachfin y édifie
, t prouve la virtuosité des artisans maro -
une forteresse, la casbah d e Boujloud. Il ordonne la construction de mosquées dans chaque quartier et décide d 'agrandir la Qaraouiyine. Son fils Ali, né à Sebta (Ceuta) d'une esclave chrétienne, poursuivra son œuvre. Ayant passé une grande partie d e sa vie en Espagne, il fut particulierement séduit par la beauté de l'architecture et d e la décoration andalouses et introduisit dans les monuments qu 'il fit ériger les nouvell es formules que les architectes andalous de cette é poque avaient intégrées à l'h é ritage cordouan tels qu e l'arc outrepassé, l'arc rectilign e et les coupoles à nervures. De 528/ 1134 à 538/1144, la mosqu ée Qaraouiyine est r éam énagée; sa salle de prierc est agrandie de trois n e fs et un nouveau mihrab, précé dé d e coupoles couvrant la travée axiale, est édifié. Cette partie de la mosquée, où l'influence andalouse est manifeste, r eçoit un soin particuli er, tant sur le plan architectural que sur le plan décoratif. Les chapiteaux qui coiffent les nouveaux piliers s'apparent e nt aux chapiteaux composites de l'art omeyyade occidental en comportant un cavet, quart de cercle concave, au-dessus de deux rangées de feuilles d'acanthe stylisées. Les arcatures qui reposent sur les piliers revête nt d es formes variées, empruntées au r é pertoire andalou, où domine l'arc en plein cintre outrepassé, simple ou adouci de lobes et d e lambrequins. Toujours sous la mêm e influence, est introduite pour la premiere fois au Maroc et dans un monument religieux la sculpture sur plâtre. Le décor floral sur enduit de stuc, qui encadre l'arcature du mihrab, et où s'entremêlent harmonieusement des tiges, des rinceaux, associés aux palmes simples ou doubles, lisses ou
, ,t in s et leur assimilation complete des lt'c hniques importées. Le stuc est éga le lttl' nl utilisé pour orner la coupole pré, i'·dant imm édiatement le mihrab, et .111 lo ur de laquelle se d éveloppe une ins, 1iption sculptée en caracteres coufiques lh- uris, qui mentionne le nom de Ali Ibn Youssef. Ces décors, rehaussés de polych1o mi e , évoquent par leur délicatesse e t lt·ur foisonnement les lambris des monu1111•nts arabes de la Péninsule ibérique. Le 1110me soin a été apporté dans le travail du l,o is réalisé selon la même source d ' ins piratio n. Tel le magnifique panneau en l,o is de cedr e, dé posé au musée Batha de 1/-s, où le décor superpose, sur deux pl,rns, des motifs floraux e t des figur es ,i'· o métriques, qui s'entremêlent pour , 1 {·c r des formes nouvelles flattant le 11 •ga rd. Ioules les réalisations artistiques des prin' ,·s Almoravides présentent ainsi de noml11'l· uses similitudes avec l'art de la Pénin, 11 lc ibérique. Mais il faut attendre l',11-rivée au pouvoir des Almohades pour \oÎ r éclore un art de symbiose maroco,111dalou . i l ' S Almohades, e n raison du rigorisme 11•lig ieux qu'ils prônaient, étaient appa1 11s à leur avenement comme des ennemis d,· tous les arts d 'agrément, et provoque11•nt la peur d es habitants de Fes , faisant , ,·co uvrir d'un épais enduit de chaux le 1 1chc décor andalou du mihrab de la Qara011 iyine. Cependant, ils ne tarderent pas ,, d •ven ir les m e ille urs propagate urs de l' ,t rl andalou au Maroc et dans toute l' Afriq ue du Nord. 1 11 possession d e ressources financi er es im portantes, prélevées clans les provinces d, · leur vaste empire, qui s'étendait ,l ' ,11 Andalus à la Tripolitaine, ils consacre-
rent à l'art monumental d e gros moyens matériels. Leurs villes et capitales, Séville, Rabat et Marrakech, entre autres, se couvrirent de grands ensembl es architecturaux, au milieu desquels s' éleverent des monuments grandioses d e vastes dimensions: enceintes massives en pisé, portes en pierres de taille, et sanctuaires, "expri mant à la fois la bea uté andalouse et la force cifricaine". Ces dimensions nouvelles imposées aux monuments vont renouveler, en les améliorant, les formules artistiques héritées cl'al - Andalus. Et c'est dorénavant, pourpres d'un de mi -s iecle, le Maro c qui ex portera vers l'Espagne musulmane et les autres provinces ses nouvelles conceptions esthétiques. Les portes d'acces des solides enceintes d e la ville d e Rabat et de la casbah des
Remparts almohades, Bab Rouah, arcature et encadrement, Rabat .
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Le Maroc Andalou
Le Maroc Andalou
Esplanade de la Tour
Casbah des Oudayas,
Oudayas ne s'ouvriront plus sur un cou loir direct comm e les portes Andalo uses, mais sur un passage co udé; plan qui d eviendra un e r ègle générale pour les portes des villes. Les baies de leurs faça des, en pier res de taille, suppo rtent une série d 'ar cs sup erp osés, encadrés d'un bandeau rectangulaire où se loge un e inscription en caractères coufiques, aux lettres puissantes et régulières; écriture que privilégièrent les Almohades, aussi bien
porte de la casbah, détail desformes architectoniques,
Rabat.
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sur les monum ents que dans la transcription des livres saints. Entre l'encad rement et les arcs s'étale un déco r floral abstrait, fait de larges palmes lisses, aux li gn es é purées, sur lequ el se détache a chaqu e écoinçon une palmette creusée d'ombres douces. Ce type de palme, aux traits épais et aux co nto ur s d'une netteté si parfai te qu 'elle se mbl e presqu e surnaturelle, prendra un e grand e ample ur dans l' o rnem entation de t o us les monum ents almohades. li engendrera mêm e de no uvelles formes ar chitectoniques, consoles, arcs et chapiteaux, que l'on peut admirer sur les façades des portes de la casbah des Oudayas, et qui caractér isent l'art aJmo hade, et contribuent po ur une large part a so n élégan ce et a sa beauté . Dans le urs sanctuaires, les Almohades , tout en imitant le plan basilical en T de la mosquée de Cordoue, appo rtero nt tous leurs soins aux deux nefs perpendi culaires, celle jouxtant le mur de la qibla , ou transept, et la nef axiale. Plus larges que les autres nefs, elles sero nt embellies de co upoles décorées. Le minaret, seul élém ent de l' édifice religieux visible de l' extérieur, est mis en valeur. Les trois fameuses tours co nstruites par le prince Ya 'coub al -Mansour, la Giralda de Séville, la Koutoubiya de Marrakech , et la Tour Hassan de Rabat, qui présentent w1e unité remarquabl e, projettent très haut le ur silho uette élancée au -dessus des toitures a tuil es vertes des nefs de la salle de prière . Bien qu e différ entes par la taille et la bâtisse, elles semblent avo ir été co nçues par le même ar chitecte. Le déco r qui o rne leurs faces, réparti en registres hi érarchisés, recourt aux motifs des arcs polylobés o u a lambrequins et surto ut a l'entrelacs géométriqu e . Ce de rni er m otif, qui co uvre d ' un treillis losangé d 'autres monuments almohades te ls que
l,·s portes, deviendra un décor classique. 1 irant so n origine des entrecroisem ents d('s arcs de la m osqu ée de Co rdou e, il pre ndra plus d 'am ple ur dans la décoraIto n et se renouvellera par l'introductio n d'é léments végétaux . 1 l'S Almohades introd uiront égalem ent, ,·t po ur la première fo is au Maroc, les , ,•vêtements en car reaux de faïence polychrome en les plaçant sur le bandeau supérieur des minarets comme celui de la "outo ubiya. Ce procédé d écoratif déja rnnn u a la Qgl'a des Beni Hammad , prin, ipauté zi rid e d'Algé ri e, sera développé ,· t abondamment utili sé ultéri e urem ent .,ussi bien en Espagne par le royaume nas, ide que par la dynasti e m érinide au Ma roc. 1 n succédent aux Almohades, les Méri nides q ui régneront sur le Maroc reno uè1l' nl d'étro ites r elati ons avec al-Andalus rn ise a mal par le dé but de la reco nquête , hrétienne. Et ce fut l' apogée de l' art .m