Le charbon de terre en Europe occidentale avant l'usage du coke 250350891X, 9782503508917

Tout au long du XIXe siècle et pendant une partie du XXe siècle, la houille a été la plus importante source d'énerg

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Le charbon de terre en Europe occidentale avant l'usage du coke
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LE CHARBON DE TERRE EN EUROPE OCCIDENTALE AVANT L'USAGE INDUSTRIEL DU COKE

DE DIVERSIS ARTIBUS COLLECTION DE TRAV AUX

COLLECTION OF STUDIES

DEL' ACADÉMIE INTERNATIONALE

FROM THE INTERNATIONAL ACADEMY

D'HISTOIRE DES SCIENCES

OF THE HISTORY OF SCIENCE

DIRECTION EDITORS

EMMANUEL

ROBERT

POULLE

HALLEUX

TOME 44 (N.S. 7)

BREPOLS

PROCEEDINGS OF THE XX1h INTERNA TI ON AL CONGRESS OF HISTORY OF SCIENCE (Liège, 20-26 July 1997)

~ ~

VOLUMEIV

LE CHARBON DE TERRE EN EUROPE OCCIDENTALE AVANT L'USAG E INDUSTRIEL DU COKE Edité par Paul BENOIT et Catherine VERNA

BREPOLS

The XX1h International Congress of History of Science was organized by the Belgian National Committee for Logic, History and Philosophy of Science with the support of : ICSU Ministère de la Politique scientifique Académie Royale de Belgique Koninklijke Academie van België FNRS FWO Communauté française de Belgique Région Wallonne Service des Affaires culturelles de la Ville de Liège Service de !'Enseignement de la Ville de Liège Université de Liège Comité Sluse asbl Fédération du Tourisme de la Province de Liège Collège Saint-Louis Institut d'Enseignement supérieur "Les Rivageois" Academic Press Agora-Béranger APRIL Banque Nationale de Belgique Carlson Wagonlit Travel lncentive Travel House

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© 1999 Brepols Publishers n.v., Turnhout, Belgium

Ali rights reserved. No part of this publication may be reproduced, stored in a retrieval system, or transmitted, in any form or by any means, electronic, mechanical, photocopying, recording, or otherwise, without the prior permission of the publisher. D/2000/0099/9 ISBN 2-503-50891-X Printed in the E.U. on acid-free paper

TABLE DES MATIÈRES

Introduction .................................................................................................... 7 Paul BENOIT et Catherine VERNA

Première partie LES PREMIERS TEMPS Early Mining in Yorkshire ........................................................................... 13 Margaret LINDSAY FAULL Medieval Coal Industry at Liège ................................................................. 21 Horst KRANZ Medieval Coalmining in the Seigneury of Boussagues .............................. 31 Catherine VERNA L'utilisation du charbon de terre à Rouen à la fin du Moyen Age ............. 41 Philippe LARDIN Le charbon de terre dans la France médiévale ........................................... 49 Paul BENOIT

Deuxième partie UN ESSOR CONTRASTÉ Times of Feast, Times of Famine. A Critical Examination of Recent British Research Conceming Market Structures and Trends in the Production of Carboniferous Fuels, 1450-1850 .................................... 61 Ian BLANCHARD Experiments Based on Coal from Liège. The Innovation of Coalfiring in the German Saltem Industry in the Late l61h Century ........................... 77 Peter PIASECKI Sel et charbon de terre en Franche-Comté du XVIe au XIXe siècle. Modèle économique et source d'innovations techniques ............................ 85 Denis MORIN L'exploitation de la houille du bassin de La Machine de l'époque romaine à la Révolution ............................................................................... 99 Alain BOUTHIER

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TABLE DES MATIÈRES

L'utilisation massive du charbon de terre pour les travaux de Versailles sous Louis XIV : l'aqueduc de Maintenon et la machine de Marly ........ 111 Eric SOULLARD Le charbon de terre et l'industrie en Galles du Sud avant 1700 .............. 125 lan COWBURN When and How Did Mining Labour Become a Commodity ? The Proletarianisation of Colliers in l 71h and l 81h Century Lancashire ... 141 John LANGTON

Troisième partie LE PREMIER TRIOMPHE DU CHARBON DE TERRE

L'exploitation charbonnière en Provence et dans les Alpes du Sud avant l'industrialisation .............................................................................. 153 Bruno ANCEL Le charbon " épuré " vers 1780 : un essai manqué .................................. 169 Denis WORONOFF Le charbon de terre : un combustible de remplacement pour la forge à la catalane (XVIIl0 -début du XIX 0 siècles) ? ......................................... 177 Jean CANTELAUBE L'essor de l'usage industriel du charbon en France au XVIIIe siècle ...... 187 Jean-François BELHOSTE Les machines d'exhaure Newcomen dans les bassins houillers du Hainaut belge ........................................................................................ 199 Marinette BRUWIER et Assunta BIANCHI

Conclusion : Le charbon de terre en Europe occidentale, nouvelles approches, nouvelles données .................................................................... 217 Paul BENOIT et Catherine VERNA Table des auteurs ........................................................................................ 223

INTRODUCTION

Paul BENOIT ET Catherine VERNA

Au cours des siècles, l'Europe occidentale s'est affirmée comme un haut lieu de la production charbonnière: le XIXe siècle constitue l'apogée d'une longue histoire. En 1900, le Royaume-Uni, l'Allemagne, la France et la Belgique produisaient plus de 394 millions de tonnes de houille sur une production mondiale d'environ 700 millions de tonnes. Cette prépondérance reposait sur un passé fort ancien. Dès !'Antiquité romaine, en Grande-Bretagne, en France, en Belgique, sans doute ailleurs, les hommes extrayaient et brûlaient le charbon de terre. Durant le haut Moyen Age, cette activité semble s'être éteinte pour ne réapparaître qu'au xne siècle, début d'un essor qui a duré plus de huit siècles. La croissance de la production houillère coïncide ainsi avec celle de l'industrie et accompagne la progressive mainmise européenne sur une partie du monde. L'histoire de cette lente affirmation se répartit en deux temps et s'articule autour de l'irruption d'innovations qui, à la fin des Temps modernes, impose la houille comme un combustible indispensable à la croissance industrielle : la machine à vapeur et l'usage du coke en sidérurgie. Même si les premières tentatives pour utiliser la force de la vapeur sont anciennes, il a fallu attendre Savery, au tournant des XVIIe et XVIIIe siècles, Newcomen et surtout Watt, à la fin du xv111e siècle, pour que ces machines deviennent d'importantes consommatrices de charbon. Mais déjà en 1735, Abraham Darby avait réussi la première réduction du minerai de fer au coke, seconde innovation déterminante dans l'histoire du charbon et de ses usages. Cependant, l'emploi du coke a mis un temps certain à se diffuser hors de Grande-Bretagne. Ainsi, la limite chronologique choisie comme butoir à l'étude que nous avons souhaité consacrer au charbon de terre dans le cadre du XXe Congrès international d'Histoire des Sciences et des Techniques ne correspond pas à une date unique, valable pour toute l'Europe, mais à un moment variable, mobile selon les lieux et les pays. Elle inaugure un changement considérable de la demande auquel la mine a su répondre. Même s'il reste encore

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PAUL BENOIT- CATHERINE VERNA

beaucoup à découvrir, les traits essentiels de cette histoire sont connus. Il n'en est pas de même pour celle du charbon avant l'usage du coke. Les études menées de longue date tant en Grande-Bretagne qu'en Belgique permettent de saisir certaines modalités d'extraction, des usages et l'importance économique du charbon dès le Moyen Age. Mais pour la majeure partie de l'Europe continentale, les données sont plus ténues, sinon carrément absentes. Oubli, désintérêt des historiens ou bien manifestation patente d'une lacune des sources ? Il va de soi que certaines régions ont longtemps ignoré l'usage de la houille et des autres combustibles fossiles faute d'en posséder dans leur sous-sol ou de participer à des circuits économiques facilitant l'emploi de ces pondéreux. Ainsi, en est-il de l'Italie, dépourvue de bassins d'approvisionnement, trop éloignée des ports anglais d'exportation, et qui a pourtant joué un rôle de premier plan dans l'économie européenne. Il est évident que les pays qui se sont les premiers intéressés à leur histoire du charbon et sur lesquels on dispose des travaux les plus récents, Grande-Bretagne et Belgique, sont aussi ceux qui bénéficient de sources abondantes et sérielles. Dans les autres espaces européens qui ont connu la houille, la documentation disponible sur son histoire est généralement réduite et dispersée. C'est le cas en France, où les travaux qui lui sont consacrés datent souvent du XIXe siècle, en un temps où érudits locaux et historiens se sont penchés avec d'autant plus de curiosité sur le charbon qu'il était un des facteurs de puissance des plus grandes nations du moment. Depuis les recherches se sont considérablement raréfiées. Le XXe Congrès international d'Histoire des Sciences et des Techniques offrait l'occasion idéale de dresser un constat et, peut-être, de favoriser l'éclosion de nouvelles recherches. Occasion idéale puisque les thèmes retenus par les organisateurs du Congrès, dont le Professeur Robert Halleux, associaient étroitement sciences et techniques, technologie et industrie ; idéale aussi puisque cette réunion se tenait à Liège, cité où fut signalée, dés 1195 dans les Annales de Rénier de Saint-Jacques, la première manifestation de la reprise de l'extraction en Europe, associée à l'usage du mot" houille". Liège s'imposait, dès lors, comme un lieu d'innovations techniques majeur, laboratoire où s'épanouissait un capitalisme minier. Un regret cependant: la très faible place occupée par le monde germanique

et cela malgré les efforts des organisateurs. Une seule contribution traitant de

l'emploi de la houille dans l'élaboration du sel au xv1e siècle lui a été consacrée et encore faut-il remarquer que la communication a été présentée dans une autre session du Congrès. Si le symposium a permis des échanges très fructueux, ils se sont donc limités à un " trilogue " regroupant historiens de la Grande-Bretagne, de la France et de la Belgique. Au terme de cette introduction, nous nous devons de rendre hommage à la mémoire de J.R. Harris, Emeritus Professor de l'Université de Birmingham qui nous a quittés alors qu'il préparait l'intervention qu'il souhaitait présenter au cours de ce symposium. Il avait choisi pour thème Coal as a Positive Force in

INTRODUCTION

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Technical Change. Sa très large culture en histoire générale des techniques, tout autant que ses connaissances approfondies dans le domaine de la houille, nous faisaient attendre une brillante synthèse. Le temps ne lui a pas été donné de la prononcer.

PREMIÈRE PARTIE

LES PREMIERS TEMPS

EARLY MINING IN YORKSHIRE

Margaret LINDSAY FAULL

Yorkshire is one of the great coalfields of England and also has substantial reserves of lead and ironstone. However, mining did not develop as a major industrial process in the region until the seventeenth century, although there is documentary evidence showing that mining in the High Middle Ages was more extensive and more sophisticated than was once thought 1 . The utilisation of the coal reserves seems first to have begun in the Roman period, then not recommencing until after the Norman Conquest. The iron reserves on the other hand, are likely to have been exploited through the Dark Ages. THE ROMAN PERIOD

Coal In Yorkshire Professor Webster lists only York amongst his fifty-one UK sites where there is evidence for Roman coal usage2 . Dr Deame and Professor Branigan of Sheffield University, however, identify some 200 Roman-British sites as having yielded stratified coal, of which nineteen are in Yorkshire 3 . The study of coal usage in Yorkshire is bedevilled by the dearth of Roman sites in the areas where coal was most likely to be employed as a fuel. In places like south-westem Britain, coal was used especially in villa hypocausts to provide heating. Only the wealthier sectors of society could afford the Romanised form of heating with mosaic pavements and underfioor and wall heating. The second place where coal especially tends to be found are the !. S.A. Moorhouse, "The rural medieval landscape ", in M.L. Pauli, S.A. Moorhouse, Wakefield (eds), West Yorkshire: an Archaeological Survey to AD 1500, Ill, 1981, 778. 2. G. Webster," A note on the use of coal in Roman Britain ", Antiquaries Journal, 35 (1955),

200-217. 3. M.J. Deame and K. Branigan, "The use of coal in Roman Britain ", ibid., 75 (1955), 71105; see also A.H.V. Smith, "Provenance of coals from Roman sites in England and Wales ", Britannia, 28 (1997), 297-299.

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MARGARET LINDSAY FAULL

Roman forts where it was used both for heating and smithing4 . In Yorkshire, villas are found mainly on the better soils, in particular on the East Riding chalk worlds and in the Howardian Hills, with only scattered examples elsewhere5 . Most of the forts were located in the western half of the historie county to control the Brigantes. Identified native sites are mostly in the eastem area, especially in the East Riding occupied by the Parisi, or in the Dales. It is only possible to differentiate between Iron Age, Roman and postRoman hut circles by the presence of material of specifically Roman origin, such as commercially produced pottery or brooches. Very few Roman period native sites have so far been identified on the West Riding millstone grit and Coal Measures 6 . Coal reserves are known in many parts of Yorkshire, not just those parts which formed the nineteenth and twentieth-century mining areas. As a result of the pushing up of the Pennines, the coal seams in Lancashire slope downwards from east to west and on the other side of the Penniiles in Yorkshire slope downwards from west to east. The coal outcrops especially in western Yorkshire, and moving eastwards the coal deposit becomes progressively deeper, so that it has only been in the later-twentieth century that the technology has been available to locate and work the East Riding coal of the Selby coalficld. Small amounts of coal do outcrop clscwhcre in Yorkshire, for example being eroded out of the cliffs above the sea at Bridlington, while Leland records " ther be some Vaynes of Coles found in the upper Part of the West Mountaines of Richemontshire, but they be not usyd for Incommoditie of cariage to the lower Parte " 7 . This means that there is a mismatch between find sites and where the easily accessible coal is. Coal is a dirty, bulky commodity, large quantities of which are necessary for use for heating or smelting. As was shown with the enormous growth of the Yorkshire coal industry in the nineteenth century following the development of the canal and railway systems, coal is most effectively moved in bulk by water or rail. This was equally the case in the Roman period when the cost of moving goods by road was some two hundred times that of moving the same items by water8 . It would not have been feasible to move any bulky goods, whether coal, wheat or other, by water from the West Riding to the vil4. D. Strong, D. Brown, Roman Crafts, London, 1976, 131. 5. M.L. Faull "Roman and Anglo-Saxon settlement patterns in Yorkshire: a computer-generated analysis ", Landscape History, 5 (1983). 21-40. 6. M.L. Faull, "Roman and Anglian settlement patterns in Yorkshire", Northern History, 9 (1974), 1-25. 7. T. Bragshaw, "The Yorkshire portion of Leland's Itinerary ", Yorkshire Archaeological Journal, 10 (1889), 476. 8. W.H. Manning, " Economie influences on land use in the military areas of the Highland Zone during the Roman period ", in J.G. Evans, S. Limbrey and H. Cleere (eds), The Effect of Man on the Landscape: the Highland Zone, Council for British Archaeology Research Report, 11, 1975, 112-116, esp. 114.

EARLY MINING IN YORKSHIRE

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las of the East Riding. As they leave the West Riding the network of rivers (the Wharfe, Aire, Calder, etc.) cross the narrow Magnesian Limestone belt, running north south approximately along the line of the modem Al and dividing the millstone grits and Coal Measure to the west from the moraine of the Yale of York to the east. The Magnesian Limestone stands proud as a ridge above the adjacent area and so the rivers drop over the eastem side of the ridge. This made river navigation from one side of the Magnesian Limestone to the other difficult: in the Middle Ages the westemmost port in Yorkshire was at Knottingley on the eastem side of the ridge, at that time the highest point which could be reached by sea going vessels 9 . It was only with the construction of Vemuyden's Canal in the seventeenth century 10 that bulky goods were able to be moved easily out of the West Riding, thus facilitating the industrial development of the region. For heating, wood has always been a major fuel source in competition with coal and would have been preferred for smithing 11 . Indeed the development of the Industrial Revolution in some areas may have been precipitated by the recorded pressures on woodland 12, forcing a move to other forms of fuel. Wood was readily available to both the villas and the forts of Yorkshire. In A.D. 730, the Venerable Bede refers to the area of the West Riding of Yorkshire as silva Elmete" the wood ofElmet " 13 . The heavily wooded nature of the area is confirmed by the concentration over the whole of the West Riding of Old English and Scandinavian place-name elements referring to woodland and recorded by 1086 14 . These names can only have been formed after the settlement of the Anglo-Saxons, which in this area dates from the seventh century, and of the Vikings from the late ninth. Even the East Riding wolds, where many of the villas were located, were wooded in the Anglo-Saxon period, to judge from the name, which derives from OE wold" woodland " 15 . There was therefore no pressure on the villa owners to try to obtain coal. In Roman Yorkshire coal appears to have been used in industrial processes, such as at the pottery at Norton 16 and for heating in domestic contexts, as in 9. T. Spencer," Knottingley's maritime history ",in D. Blanchard (ed.), Knottingley: its Origins and Industries, JI, Knottingley, 1979, 72-133. 10. G.D. Gaunt, "The artificial nature of the River Don north of Thorne, Yorkshire", Yorkshire Archaeological Journal, 47 (1975), 15-22, esp. 15. 11. Strong and Brown, op. cit. (fn. 4), 144. 12. [D. Defoe], A Tour thro' the Whole Island of Great Britain, II, 3rct ed., London, 1742, 28. 13. B. Colgrave and R.A.B. Mynors (eds), Bede' s Ecclesiastical History of the English People, Oxford, 1969, II, 14. 14. A.H. Smith, map of" Yorkshire West Riding woodland before 1500 ",in The Place-Names of the West Riding of Yorkshire, VII, English Place-Name Society, 36, Cambridge, 1962. 15. A.H. Smith, The Place-Names of the East Riding of Yorkshire and York, ibid., 14, Cambridge, 1937, 13-14. 16. Unless otherwise stated ail references to Roman sites producing coal are to be found in M.J. Dearne and K. Branigan, op. cit. (fn. 3).

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MARGARET LINDSAY FAULL

the hut circle at Helwith Bridge in Ribblesdale 17 . One centre of Roman use of coal was for cremations found amongst the inhumations at the Trentholme Drive cemetery in York. Most of the cremations were carried out using wood, but with isolated examples where the fuel was coal, apparently from the Garforth area to the east of Leeds. The size of Roman York means that wood supplies in the immediate area may well have been exhausted relatively quickly so that fuel for heating, cooking and cremations would have had to have been brought from a distance. The Romans did move the fine white magnesian limestone from the area around Tadcaster (known to the Romans as Calcaria "limestone " 18 ) for the construction of civic buildings in York. The systems used in transporting the building stone may have been utilised in moving the quite small amounts of coal which would have been needed for the cremations. Sometimes the use of coal is quite unequivocal, for example the large pile against a wall in the fourth-century Templeborough fort, but many cases are much less clear eut. Of the examples given by Dr Deame and Professor Branigan, the deliberate use of coal is quite certain in six cases (the Brough fort, Crossgates settlement, Dalton Parlours villa, Norton pottery, Templeborough fort and the York colonia, plus the Helwith Bridge native settlement). In nine cases insufficient detail has been published to make a judgement (Catterick fort, Catterick town, Catterick annexe, Doncaster, Hull, Newton Kyme, North Cave, Rossington Bridge and Rudston). In four cases, however, the presence of the coal appears to be coincidental. At the Elmswell settlement there were only a few small pieces on one floor and at the Cantley industrial site the upper fill of the chimneyed ironworking feature produced wood ash and only one small fragment of coal. In the Slack fort annexe only one single piece of coal was identified. At these three sites, there were pits or earthworks whose cutting could have thrown up the tiny amounts of coal found. The problems of establishing whether coal found on a site was there accidentally or actually being used are well illustrated by the excavations of the Castleford fort and annexe. Coal was found at a number of places on the site, and analysis suggested that, with the exception of only one or two samples which could have originated from near Leeds, all was of local origin 19 . Coal outcrops less than 200 yards west of the fort and the Institute of Geological Sciences considered it likely that the evacuations had in fact detected a veneer of First Terrace Deposits actually on site20 , meaning that use of coal here is not definite.

17. A. King," Horton-in Ribblesdale, W. R. ",Yorkshire Archaeological Journal, 42 (1970), 4. 18. A.L.F. Rivet and C. Smith, The Place-Names of Roman Britain, London, 1979, 288-289. 19. Persona! communication from the West Yorkshire Archaeology Service, 26 March 1998. 20. Correspondence dated 3 April 1978 in the archives of the West Yorkshire Archaeology Service.

EARLY MINING IN YORKSHIRE

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Where the likely source of the coal has been ascertained, it is believed that it was probably from outcrop coal. Elsewhere in the Roman world there is certainly evidence for the actual mining of coal 21 ; for example in Spain there is a tombstone in the National Museum in Madrid of a coal miner killed at the age of five. So the technology for underground mining was potentially available, and indeed there is an underground iron ore drift mine known at Lydney22. But sufficient wood and outcrop coal were available in Yorkshire for there to be no need to undertake the risky process of underground working. This only became necessary in the Middle Ages, when the surface outcrops were starting to be exhausted and it became necessary to go deeper to obtain reasonable amounts of the minerai. This was especially the case in the view of the large amounts of wood available in most of Yorkshire at the time. Le ad

In the Roman period, only relatively small valuable items were moved by road, such as lead from the West Riding Dales. Stamped pigs of lead have been found near Brough on Humber, the Roman port of Petuaria, from which they were presumably being shipped to the Continent23 . At this same period, the native settlements in the Dales begin to be able to acquire Romanised metalwork and commercially produced pottery. It may well be the exploitation of the Dales lead reserves which gave the financial resources to acquire this material. Lead, although heavy, is less bulky than coal, and there is no effective alternative to lead. THE POST-ROMAN PERIOD

The problems of moving bulky items from the west to the east were magnified in the post-Roman period. The East Riding was under the control of the pagan English in the settlement period of the fifth to seventh centuries, whereas most of the West Riding formed the Christian British kingdom of Elmet, with Craven in the Dales probably forming an unrecorded second British kingdom. It was not until the seventh century that the English King Edwin took Elmet. As Edwin was soon after converted to Christianity, and with him his kingdom, the bulk of the English settlement of the West Riding cornes after the abandonment of pagan practices, such as burial with grave goods. This makes it as difficult to identify Dark Age sites in this region, whether British or Anglo-Saxon, as it is to isolate native sites of the Roman period. With so few sites known, it is difficult to comment on the possibility of exploitation of 21. D. Strong, D. Brown, op. cit. (fn. 4), 12. 22. Ibid., 129. 23. T.A. Richmond, R.P. Wright, "Roman Britain in 1957 '', Journal of Roman Studies, 48 (1958), 152; J.A. Smythe, "Roman pits of lead from Brough ", Transactions of the Newcomen Society, 20 (1939-40), 139-145.

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MARGARET LINDSAY FAULL

the mineral resources in Yorkshire in the period up to the Norman Conquest in 106624 . Anglo-Saxons of the pagan period were certainly using large quantities of metal goods, in particular bronze and iron. Most women fastened their clothes with bronze brooches and, depending on the fashion, also used other bronze items such as girdle hangers and wrist clasps, but ironwork was even more ubiquitous. It can be assumed that everyone in the Dark Ages, men and women alike, would have had an iron knife. While nobles (thegns) carried a sword, it was the mark of the freeman that he was entitled to carry an iron spear. The working, and possibly also the gaining, of iron was important to the AngloSaxon economy. It was still regarded as a semi-mystical enterprise, even though the Germanie peoples had been using iron implements for hundreds of years before they came to Britain. Iron working involves a relatively complex technology, so its production was a skilled task; Anglo-Saxon custom and legends still retained some idea of the awe with which it had been regarded when first introduced at the beginning of the Iron Age. For example, Old English recipes for medicines, which involve a considerable amount of ritual, sometimes specify that the herbs involved must be eut butan irenne" without iron " 25 . The semi-mystical aspect of the smith's craft is shown in the legend of Weland the Smith, who took revenge on Nithhad for hamstringing him to force him to work by raping Nithhad's daughter and killing his sons before escaping by means of artificial wings. Weland was certainly venerated in Britain, as the prehistoric megalithic tomb near the White Horse in Berkshire was identified as Wayland Smith's Cave26 , while in Yorkshire he is shown on several of the Anglo-Saxon carved stone crosses of the West Riding 27 . These ninth-century crosses are, of course, Christian in origin, so that Weland's depiction suggests that by that date he had become a folk rather than a divine hero. It is from the West Riding that the first reference to iron workers cornes. In 1086, twenty years after the end of the Anglo-Saxon period, Domesday Book records sixferarii" ironworkers" in Hessle 28 , the only indication in the Yorkshire folios of any industrial activity29 . The working of iron in the immediate area is confirmed by archaeological evidence from the eleventh to the four24. M.L. Faull "Late Anglo-Saxon settlement patterns in Yorkshire'', in M.L. Faull (ed.), Studies in Late Anglo-Saxon Settlement, Oxford, 1984, 129-142, esp. 129-130. 25. O. Cockayne (ed.), Leechdoms, Wortcunning and Starcraft ofEarly England, 1, Chronicles and Memorials of Great Britain and Ireland During the Middle Ages, 35, London, 1864, 71. 26. M. Gelling, The Place-Names of Berkshire : Il, English Place-Name Society, 50, Cambridge, 1974, 347. 27. J.T. Lang, "Sigurd and Weland in pre-Conquest carving from northem England ", Yorkshire Archaeological Journal, 48 (1976), 83-94; A. McGuire, A. Clark, The Leeds Crosses, Leeds, 1987, 11, 33-35. 28. Domesday Book: Yorkshire, 1, M.L. Faull, M. Stinson (eds), Chichester, 1986, 9W53. 29. I.S. Maxwell, "Yorkshire: the West Riding ", in H.C. Darby, I.S. Maxwell (eds), The Domesday Geography of Northern England, Cambridge, 1962, 1-84, esp. 39.

EARL Y MINING IN YORKSHIRE

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teenth centuries in the adjacent township of Hemsworth 30 . CONCLUSIONS

Yorkshire's reserves of coal, lead and ironstone were certainly being exploited at various times in the Norman and pre-Conquest periods. The evidence is at present relatively sparse and needs to be subjected to rigorous analysis, especially where there are suggestions of material being moved over distances. Excavators need to be aware of the importance of identifying such material on archaeological sites and, where possible, obtaining analyses of their source of origin. Only when a body of evidence has been compiled will it be possible to assess the extent of the exploitation of Yorkshire's minerai resources.

30. S.A. Moorhouse, op. cit., 776.

MEDIEVAL COAL INDUSTRY AT LIÈGE

Horst KRANZ

The origins of modem coal mining on the European continent can be traced back to the river Maas 1. In 1195 the annalist Renier de St-Jacques recorded the discovery of black earth, terra nigra, in the Liège area2 . In fact, it was a rediscovery only, as the inhabitants of an ancient Roman villa at Liège had already used coal in their hypocaustum3. Undoubtedly, the conversion to coal was caused by the increasing price of wood as the commonly used fuel. In other words : about 1200 a new era began as regards the supply of the city with fuel as well as the history of the industries at Liège. That era ended after almost eight centuries with the closing down of the last coalpit in 1980. There is no other industry which has shaped the city and area of Liège as strongly as coal mining. In the 13th century the episcopal city started to tum from a clerical centre into a city of coal. She was able to look back on a mining tradition of some 500 years, when the introduction of coke lead to a rapidly increasing demand for coal at the beginning of the 18th century4 . Let's touch upon a few aspects of medieval extraction of coal at Liège.

1. In this concise contribution only selected sources and scientific studies are cited. For more details see the monograph appearing in 1999: H. Kranz, Lütticher Steinkohlenbergbau im Mittelalter. 2. Reineri Annales sancti Jacobi Leodiensis a. 1195, Monumenta Germaniae Historica, Scriptores, vol. 16, G.H. Pertz (ed.), Hanover, 1859, 652. 3. E. Polain, La vie à Liège sous Ernest de Bavière (1581-1612), Tongres, 1938, vol. 2, 425427. 4. Earliest scientific study : F. Henaux, La houillerie du pays de Liège sous le rapport historique, industriel et juridique, 2e éd., Liège, 1861; Modem survey: C. Gaier, Huit siècles de houillerie liégeoise, Liège, 1988 ; For the history of medieval Liège see, J.L. Kupper, " Le village était devenu une cité, portrait d'une cité", in J. Stiennon (ed.), Histoire de Liège, Toulouse, 1991, 33102.

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HORSTKRANZ

GEOGRAPHICAL CONDITIONS

Two favourable geographical conditions were of great significance for the development of the medieval coal mining area : 1. The problem of drainage : the countryside of Liège is very hilly and highly favourable for a natural drainage of mines. In the west and north the slopes reach heights of more than 180 metres 5 . This supported the draining of many deposits above the level of the river Maas by adits. In the beginning the medieval miners did not need any machine to solve the problem of drainage. The continuity of mining was secured for a longer period. 2. The export : the immediate access to a navigable river was equally important to the development of the coal industry. From the middle of the 13rh century onwards hard coal of Liège was shipped via the river Maas to the Netherlands. The nearby city of Maastricht, for instance, was one of the earliest importers of coal6 . Later on, two city gates at the river were called after the coal: the porta carbonaria superior and the porta carbonaria inferior7 . Liège and the greatest English coal mining district shared a highly suitable geographical location8 . Coal from Newcastle was transported via the river Tyne, the North Sea and the river Thames to London and to other cities. In the Middle Ages " sea coal " from Newcastle and houille et charbon from Liège competed with each other at the channel area9 . In short: since the very beginning of the exploitation Liège coal trade covered a great commercial radius, corresponding with the fiow of the river Maas. WRITTEN RECORDS

Coal mining at medieval Liège is better recorded than in most of the other European areas 10. A lot of churches and convents, which had properties in the mining district, were involved with coal mining. The clerical archives contain many diplomatie sources, mostly treaties between the clerical landowners and the entrepreneurs. Up to the year 1425 there are more than 230 charters. The richest archives are those of the cistercian abbey of Val St-Lambert 11 . Because 5. M. Gewelt, "Le relief", in J.A. Sporck (ed.), Liège prépare son avenir, Liège, 1980, 2933; B. Merenne-Schoumaker, "Un site de rencontre", in J. Stiennon (ed.), op. cit. (fn. 4), 8-20. 6. J. Koreman, De stadsrekening van Maastricht over het jaar 1399-1400, Assen, 1968, 32-36, 95, 97. 7. L.-J. Morreau, Bolwerk der Nederlanden, de vestingwerken van Maastricht sedert het begin van de 13e eeuw, Assen, 1979, 14, 26-27. 8. J. Hatcher, The History of the British Coal Industry, Oxford, 1993, vol. 1, 2-3. 9. J.U. Nef, The Rise of the British Coal lndustry, London, 1932, vol. 1, 13. 10. J.U. Nef, op. cit. (fn. 9), 7-8; 288, fn. 5; H. Pirenne, Histoire de Belgique, 3e éd., Bruxelles, 1923, vol. 3, 256. 11. J.O. Schoonbroodt (éd.), Inventaire analytique et chronologique des archives de!' abbaye du Val Saint-Lambert, lez-Liège, Liège, 1875-1880, 2 vols.

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of its outstanding initiatives in coal mining, Val St-Lambert is also called the coal-convent, le couvent charbonnier 12 . Up to the late Middle Ages the municipal Liège archives and the charters of the guilds, however, are unfortunately lost 13 . EPOCHS OF MEDIEVAL COAL MINING AT LIÈGE

The chronology of medieval coal mining at Liège is parted by three periods 14 : 1. The first period lasted from the re-discovery of coal in 1195 until approximately 1280. Although just a few documents have been left, we know that during these years the landowners themselves were engaged in direct exploitation. They carefully planned the extraction of coal as well as the construction of adits. Around 1280 almost the whole geographical extension of the medieval coal basin was known. At that time, more fuel was produced in the mines than was used at Liège. The surplus was exported to the Netherlands. 2. ln the 1270s the situation changed considerably. Coal mining tumed from a direct to an indirect exploitation of minerai resources. This was due to the fact that coal mining needed much capital, compared with other industries. At the end of the 13th century the landowners were not able to increase the production or to improve the infrastructure. In these very years the bourgeois of Liège committed themselves to making investments and thus gave strong impulses to the young industry. The patriciate and other rich citizens invested in coal mines as well as in adits, i.e. the infrastructure. Besides, in the 1280s the échevins de Liège founded a special colliery jury consisting of four miners with legal and technical competence. These voirjurés des charbonnages supervised the whole coal mining at Liège until the end of the Ancien Régime 15 . 3. The infrastructural investments of the bourgeoisie and the Cistercians of Val St-Lambert were very successful. The third phase, the period of establishing the coal industry and its first expansion around 1315, was marked by several developments : - The bourgeois dedicated themselves increasingly to coal mining. 12. T. Gobert, Eaux et.fontaines publiques à Liège, depuis la naissance de la ville jusqu'à nos jours, Liège, 1910, 93; D. Van Derveeghde, "Note sur l'exploitation de la houille dans le domaine de l'abbaye liégeoise du Val-Saint-Lambert au XIVe siècle", Le Moyen Age, 52 (1946), 73-83; D. Van Derveeghde, Le domaine du Val Saint-Lambert de 1202 à 1387, Paris, 1955, 132148. 13. E. Poncelet, E. Fairon (éds), Liste chronologique d'actes concernant les métiers et confréries de la cité de Liège, Liège, 1942, vol. 1, 101-107, coal miners' corporation. 14. For that classification see H. Kranz, op. cit. (fn. !), chap. 4. 15. J. Rouhart-Chabot, Inventaire des archives des cours des voir-jurés des charbonnages, des eaux, du cordeau de la cité et du pays de Liège, Liège, 1961, 95-97, introduction containing a short survey of the older literature.

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- The coal mining laws were laid down. - Extraction of coal became one of the main pillars of the Liège economy in addition to the old traditional industries, like change of money and the wine and cloth trade 16 . - And the métier des houilleurs became the greatest professional corporation of Liège at that time 17 . CONSUMERS

Let's say a few words about the early consumers of hard coal. For the year 1213 historiography mentioned two groups : a) consumers and b) producers. Consumers were the poor, the pauperes, producers were the blacksmiths and other crafts men, thefabri etfabriles 18 . However, burning of coal soon became common in the households of wealthy secular and clerical people, too 19 . The brewers and bakers of Liège never lacked fuel 20 . On the contrary, the abundance of coal even constituted an attraction for other fuel consuming industries, e.g. the metal industry 21 . Also, burning of coal was generally accepted, in contrast to London22 , for instance. Critical remarks on the smoke are always made by strangers, mainly foreign visitors and physicians 23 . THE MINING LAW

At Liège the mining law developed from the 13th century onwards on its own, without any external influences. Three significant codifications of customs in medieval coal mining, the so-called coutumes, are known. The voirjurés des charbonnages ensured the writing down of statutes in 1318-1330 and 1377. Eventually, a third codification was made in 1487. This so-called Paix de St-Jacques was in force for more than three centuries until the end of the Ancien Régime. In the first place, the medieval coal mining law determined the juridical claims of the constructors of adits, in the second place the claims of the landowners. Investments in the infrastructure of coal mining were highly 16. 1.-L. Kupper, op. cit. (fn. 4), 77-82. 17. E. Poncelet, Les bons métiers de la cité de Liège, Liège, 1900, 108-112. 18. Reinerus, op. cit. (fn. 2), 670. 19. J. Lejeune, La formation du capitalisme moderne dans la principauté de Liège au 16e siècle, Paris, 1939, 171-176. 20. R. Van Santbergen, Les bons métiers des meuniers, des boulangers et des brasseurs de la cité de Liège, Liège, 1949, 235. 21. J. Lejeune, op. cit. (fn. 19), 173. 22. J. Hatcher, op. cit. (fn. 8), 25. 23. T. Gobert, Liège à travers les âges: les rues de Liège, Liège, 1976, vol. 6 (nouv. imp.), 171, fn. 698.

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favoured. Thus, the financiers of drainage canals and their heirs possessed an " etemal" claim to interest for the use of the tunnels24 . PRIVA TE ORGANIZATION OF MEDIEVAL COAL MINING

The question of ownership of the mineral resource was especially important for the general organization of the coal mining at Liège. Following the Roman example the principle was : Qui possède le comble possède le fond. That meant : The one who possessed the surface was also the owner of the coal. On his land the owner could either mine the coal himself or let it be mined by companies. Thus, during the next centuries coal mining developed into a private law industry. There never was a " govemmental " coal mining under the Ancien Régime 25 . Usually, the landowners gave permission to an entrepreneur to mine coal on a particular plot of land. In retum the entrepreneur paid a part of the mined coal, the so-called terrage, to the landowner. The receiver of terrage was called terrageur. The level of the terrage often was 20 percent, sometimes more or less. A second quota was charged for the use of drainage canals. The constructors, the owners or partners of these areines were called arniers. An entrepreneur paid fees for the use of an areine, the so-called cens d' areine to the arnier. This interest usually was four, five or six percent of the mined coal 26 . The annual output of the medieval coal mines unfortunately cannot be quantified, due to lack of statistical data27 . Three groups dominated the coal mining : - The landowners, i.e. the terrageurs. - The owners of adits, i.e. the arniers. - The entrepreneurs, i.e. the ouvriers, parcheniers or maîtres des houillères. However, the entrepreneurs had the weakest position. They alone had to carry all the burdens of coal mining, including the construction of shafts, the extension of adits, the restoration of the surface and of the vines and, finally, the reimbursement of farmers.

24. E. Pirmez, Des areines et du cens d' areine dans l'ancienne jurisprudence liégeoise, Liège, 1880, annex, 3-15: synoptic impression of the medieval coal mining customs; L. De Jaer, "Contribution à l'étude de l'ancien droit minier liégeois", Annales des mines de Belgique, 45 (1945-1946), 885-916. 25. D.-F. de Sohet, Instituts de droit pour les pays de Liège, de Luxembourg, Namur & autres, Namur, 1770, book 2, titel 53, no. 4, 45b; M. Haversin de Lexhy, "Les houillères liégeoises au temps des princes-évêques", La Belgique judiciaire, (1931), 5. 26. G. Jars," Notice de la jurisprudence du pays de Liège", dans Voyages métallurgiques (de G. Jars), Lyon, 1774, vol. 1, 376; L. De Jaer," Notes sur l'exploitation de la houille dans l'ancien pays de Liège", Annales des mines de Belgique, 24 (1923), 446-447; C. Gaier, op. cit. (fn. 4), 120-122. 27. R. Leboutte, "L'exploitation charbonnière dans le pays de Liège sous l'Ancien Régime'', in E. Westermann (ed.), Vom Bergbau zum Industrierevier, Stuttgart, 1995, 380.

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ENTREPRENEURS AND INVESTORS

The documents which have corne down to us provide information about the group of entrepreneurs and investors involved in coal mining. The clerical and secular elites of Liège obviously did not have any dislike of coal. On the contrary, among the shareholders of mines, among the comparcheniers, there were clerics, aristocrats, patricians and members of highly regarded industries such as canons, priests, members of the episcopal jurisdiction of Liège, knights and mayors. Bankers, merchants of wine and cloth invested into the mining industry, too. The bakers and brewers among the shareholders of mines were merchants and industrial users of fossil fuel at the same time. Despite high contributions and great risks the mining and trading of coal was very attractive and lucrative. Surely, companies were increasingly formed. In the late Middle Ages seams were mined which sometimes laid deeper than 1OO metres below the surface 28 . The deeper the coal mining ventured, the higher were the expenses. Therefore, risks were shared with as many persons as possible. Companies comprising eight, ten or more shareholders can be found 29 . The medieval companies did not have anything in common with modern joint-stock companies. For instance, the shares of mines could not be sold freely. The companies did not possess any capital of their own, either30 . COAL MINING AND ENVIRONMENT

Naturally, coal mining had its impacts on the environment. Only two of them will be sketched briefty here : 1. The medieval roads were not suitable for the transport of heavy goods. The coal-waggons made bridges, houses and churches in the city of Liège shake. Thus, why in the 151h century - among other things - the capacity of the carts was limited. The transportation from the mines to the loading places at the Maas was diverted around the city31 . Also, the waggoners must not let the horses trot or gallop32 . 2. The conftict between coal mining and water supply was yet of even more importance. As early as in the I3th century coal mining caused the first rivers to dry out. The loss was compensated by leading on four drainage canals into the city of Liège. Through this system of canals water was collected in the hills 28. E. Polain, op. cit. (fn. 3), 463 : table of seams mined in the 17th century. 29. J.G. Schoonbroodt (ed.), op. cit. (fn. 11), vol. 1, no. 975 (8 september 1418): coal mining company comprising eleven shareholders. 30. J. Lejeune, op. cit. (fn. 19), 233-237. 31. E. Fairon (éd.), Régestes de la cité de Liège, Liège, 1939, 5, no. 865 vol. 4 (11april1457). 32. St. Bormans (éd.), Recueil des ordonnances de la principauté de Liège, Brussels, 1878, vol. 1, 463, art. 18 (10/17 july 1414).

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west and north of Liège. These quatre franches areines soon became indispensable as providers of drinking water and as driving force for mills. Therefore they were put under the special juridical protection and made practically inviolable. In the area surrounding the franches areines the entrepreneurs had to work especially cautious, water must not be divert into deeper canals in order to avoid a loss of water. The close link between drainage of mines and water supply of Liège was like a brake on the coal mining. The miners were soon forced to lift the water - with the help of mechanical means - up to the level of the franches areines 33 . The ancient conflict between water supply and coal mining began in the 13th century and only ended in the 19th century. The example of coal mining clearly shows, that economic, technical and social changes did not only set in with the Industrial Revolution in the l 8th century, but as early as in the Middle Ages, here at Liège in the 13th century. BIBLIOGRAPH Y

St. Bormans (éd.), Recueil des ordonnances de la principauté de Liège, vol. 1, Bruxelles, 1878. L. De Jaer, "Notes sur l'exploitation de la houille dans l'ancien pays de Liège", Annales des mines de Belgique, 24 (1923), 413-505. L. De Jaer, "Contributio n à l'étude de l'ancien droit minier liégeois", Annales des mines de Belgique, 45 (1945-1946), 885-916. E. Fairon (éd.), Régestes de la cité de Liège, vol. 4, Liège, 1939. C. Gaier, Huit siècles de houillerie liégeoise. Histoire des hommes et du charbon à Liège, Liège, 1988. M. Gewelt, "Le relief", in Liège prépare son avenir, J.A. Sporck (éd.), Liège, 1980, 29-33. T. Gobert, Eaux et fontaines publiques à Liège, depuis la naissance de la ville jusqu'à nos jours, Liège, 1910. T. Gobert, Liège à travers les âges : les rues de Liège, vol. 6, Liège, 1976. J. Hatcher, The History of the British Coal Industry, vol. 1, Oxford, 1993. M. Haversin de Lexhy, " Les houillères liégeoises au temps des princesévêques ",La Belgique judiciaire, (1931), 1-30. F. Henaux, La houillerie du pays de Liège sous le rapport historique, industriel et juridique, 2e éd., Liège, 1861. G. Jars, "Notice de la jurisprudence du pays de Liège", in Voyages métallurgiques (de G. Jars), vol. 1, Lyon, 1774, 371-381. J. Koreman, De stadsrekening van Maastricht over het jaar 1399-1400, Assen, 1968. 33. For a survey of the quatre franches areines see T. Gobert, op. cit. (fn. 12), 79-234.

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J.-L. Kupper, "Le village était devenu une cité, portrait d'une cité", in J. Stiennon (éd.), Histoire de Liège, Toulouse, 1991, 33-102. R. Leboutte, " L'exploitation charbonnière dans le pays de Liège sous l'Ancien Régime", in E. Westermann (ed.), Vom Bergbau zum Industrierevier, Stuttgart, 1995, 379-404. J. Lejeune, La formation du capitalisme moderne dans la principauté de Liège au XVI' siècle, Paris, 1939. L.J. Morreau, Bolwerk der Nederlanden, de vestingwerken van Maastricht sedert het begin van de 13e eeuw, Assen, 1979. J.U. Nef, The Rise of the British Coal Industry, vol. 1, London, 1932. H. Pirenne, Histoire de Belgique, vol. 3, 3e éd., Bruxelles, 1923. E. Pirmez, Des areines et du cens d'areine dans l'ancienne jurisprudence liégeoise, Liège, 1880. E. Polain, La vie à Liège sous Ernest de Bavière ( I 58I-1612 ), vol. 2, Tongres, 1938. E. Poncelet, Les bons métiers de la cité de Liège, Liège, 1900. E. Poncelet, E. Fairon (éds), Liste chronologique d'actes concernant les métiers et confréries de la cité de Liège, vol. 1, Liège, 1942. Reineri Annales sancti Jacobi Leodiensis, Monumenta Germaniae Historica, Scriptores, vol. 16, G.H. Pertz (ed.), Hanover, 1859, 651-680. J. Rouhart-Chabot, Inventaire des archives des cours des voir-jurés des charbonnages, des eaux, du cordeau de la cité et du pays de Liège, Liège, 1961. J.G. Schoonbroodt (éd.), Inventaire analytique et chronologique des archives de l'abbaye du Val Saint-Lambert, lez-Liège, 2 vols, Liège, 1875-1880. D.-F. de Sohet, Instituts de droit pour les pays de Liège, de Luxembourg, Namur & autres, Namur, 1770. D. Van Derveeghde, "Note sur l'exploitation de la houille dans le domaine de l'abbaye liégeoise du Val-Saint-Lambert au XIVe siècle", Le Moyen Age, 52 (1946), 73-83. D. Van Derveeghde, Le domaine du Val Saint-Lambert de 1202 à 1387, Paris, 1955. R. Van Santbergen, Les bons métiers des meuniers, des boulangers et des brasseurs de la cité de Liège, Liège, 1949.

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FIGURE

The surrounding area of Liège (Ferraris 1777)

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MEDIEVAL COALMINING IN THE SEIGNEURY OF BOUSSAGUES

Catherine

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Up until the first half of the twentieth century, coalmining provided a livelihood for the inhabitants of Boussagues (France, department of Hérault) and the surrounding villages. The miners at that time were unaware that they were acting out the final stages in the long history of coalmining ; a history in which the medieval period is particularly well documented. We owe the remarkable preservation of our sources for Boussagues to the inclusion of the Thézan-Poujol family's documents into the collection of charters which have long been under protection in the castle of Leran (France, department of Ariège). From these, can be seen the emergence of coalmining, which was carried out by the villagers under the direction of firstly, the village notables, and later but with less vitality, the lords themselves, all this without any urban investment, at least until the beginning of the sixteenth century. Boussagues indisputably provides us with a new case study of the village mine, which recent research has restored to its place in a rural economy where matters were not being run solely by the lords. As in the iron industry, the villagers made their presence felt, showing surprising dynamism 1. Medieval coalmining in Boussagues is not a new discovery. It has long aroused the curiosity of the historians who have collected part of the documentation consulted for this article 2 . This ancient corpus consistes of sixteen acts of which several were published at the end of the nineteenth and the beginning 1. M. Arnoux, Mineurs,férons et maîtres de forge, étude sur la production du fer dans la Normandie du Moyen Age, XIe-XV' siècles, Paris, 1993; C. Verna," Fer et pouvoir: la politique sidérurgique des comtes de Foix (XIff-XVe siècles)", in Mélanges Claude Domergue, Pallas, (1997), 297-309. 2. J. Poux, "Notes et documents sur les mines de charbon de Boussagues aux XIIIe-x1ve siècles ",Bulletin historique et philologique, (1899), 326-353 ; F. Pasquier, S. Olive, Le fonds Thézan aux archives du château de Léran (Ariège), Montpellier, 1913-1914, 2 vol.; most recently, P.J. Hesse, La mine et les mineurs en France de 1300 à 1550, Paris, 1968, Micro-éditions universitaires and F. Journot, "Notes sur l'exploitation des ressources minières en montagne héraultaise au Moyen Age", Archéologie et Histoire des hauts Cantons del' Hérault, (1992), 43-52, dealing with the Boussagues mines from documents published by their predecessors.

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of the twentieth century 3 . Despite irretrievable losses, the unpublished texts quoted by our predecessors have for the most part been found. The initial work has been enriched by the addition of twenty-five previously unknown documents which concentrate exclusively on coalmining. Out of the total forty-one documents, thirty-seven are dated. To these have been added many more on village life which allow us to see the important position mining held both socially and economically in the village. Thus, the corpus of Boussagues is one of the rare ones to throw light on village mining to which testimony, at least in the Kingdom of France, is limited to a few scattered texts. Three phases of mining can be identified using the dated documents. The 4 first period from 1302 to 1348 is the best documented . The bulk of this documentation is made up of deeds of sale for mine shares. These papers are proof of dynamic activity illustrating the entrepreneurial character of the villagers or, more precisely, the peasants who owned these shares. There follows a long silence from 1348 to 1376 due to the circumstances created by the Hundred Years' War. These years were among the worst for the region. If mining continued, we have no account of it. The third and final phase goes from 1376 to 1493. Documents from this period are diverse: alongside deeds of sale for mine shares, are found legal documents and long leases (bail emphytéotique)s. Unfortunately, the documentation thins out over the one hundred and seventeen years, with a gap of over ten years at one point. Even though mining by the villagers continued, it was also in this period that the lords began intervening and tuming mining to their benefit. The year 1482 saw a reversal of the balance of power as far as coalmining was concemed. This was no doubt linked to an improvement in the economic situation. By the requirement of a payment levied on mining for seigniorial rights, some of the more powerful lords in Boussagues managed to gain control of mining. This year marked the end of the 3. J. Poux, op. cit. ; F. Pasquier, S. Olive, op. cit. From recent works on the history of mines, it eau be affirmed that out of the seventeen texts indicated by J. Poux, six are relevant to silvermining and not coalmining. 4. All these documents, unless otherwise stated, are kept in the Archives of the department of Ariège: 46 J 641, liasse 102, n°S (1302, June); 644, liasse 106, n°44 (1302, November); 641, liasse 102, n°S (1302, December); 641, liasse 102, n°S (1310, May); 66S, liasse 129, n°S and 12 (1316); 668, liasse 129, n°12 (1320); 641, liasse 102, n°S (1330, September); 644, liasse 106, n°46 (1332, June); 644, liasse 106, n°47 (1333); 66S, liasse 129, n°12 (1337); 641, liasse 102, n°S (1344, April); 638, liasse 100, n°10 (134S, April); 644, liasse 106, n°4S (134S, June); 644, liasse 106, n°3S (1347 Il.St., January); 644, liasse 106, n°SO (134S Il. St., March). S. J. Poux, op. cit., 3Sl-3S3, (1376, June); F. Pasquier, S. Olive, op. cit., 170, (13S4 n. st., March); 46 J 66S (13S6); 644, liasse 106, n°7 and S (1392-1394); 66S, liasse 129, n°12 (1394, December); 641, liasse 102, n°S (1396, July); 641, liasse 102, n°S (1400, February); 641, liasse 102, n°12 (1403); 638 (lS'h Century); 641, liasse 102, n°S (1413, March); 640, liasse lOlbis, n°16 (1429, December); 641, liasse 102, n°S (1434, August); 641, liasse 102, n°S (1436); 66S, liasse 129, n°9 (l4SS n.st., March); 66S, liasse 129, n°9 (146S, September); 66S, liasse 129, n°S (147S-14S4); 641, liasse 102, n°S (14S2, June); 641, liasse 102, n°8 (1483 Il. st., January); 641, liasse 102, n°10 (1493); 66S, liasse 129, n°14 and lS (IS'h Century) and four undated texts, 641, liasse 102, n°S. Due to the specific publication requirements, any further reference should be made using the above two lists.

MEDIEVAL COALMINING IN THE SEIGNEUR Y OF BOUSSAGUES

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period in which the village notables controlled the mines. The aim of this article is to present the distinctive featureS of this period and to conclude with the industrial activities with which mining was associated. " COAL PICKING "

Coalmining first appears in documentation at the beginning of the fourteenth century6 . Thus began a new chapter in the long mining history of Boussagues and the upper valley of the Orb where silver had been mined since the twelfth century. In 1302 "coal picking" done by the villagers, who had up to then been absent from all documentation, succeeded to silver mining, which was carried out under the direction of the lords of Boussagues. This "new world" got under way in the north of Boussagues. Coalmining appears to have started in Alzou (fig. 1) and in the region between Alzou and the Orb valley, where it seems to have continued until the fifteenth century. In 1333 it spread to Campnègre which we believe to have been located at the summit of Cap Nègre, a little hill in the centre of the seigneury. This area remained active until at least 1429. Thus, coalmining moved exclusively and definitively to the west of the seigneury. From 1345 onwards, it operated regularly at Camplong close to the stream, at Espaze and beyond Graissessac heading towards Riols ; it appears to have persisted there until the end of the Middle Ages: the last existing account dating from 1468. The site of medieval coal mining activity corresponds closely to the existing coal outcrop area which stretches over several kilometres from the west of the seigneury, where it narrows drastically beyond Graissessac, to the east of Alzou where it disappears under red sandstone at Permien7 . lt seems evident that the inhabitants of Boussagues mined the coal only where it was both plentiful and accessible. From the same texts we can also deduce the technical modes of mining used and even the landscape which developed from it. The term balma was traditionally used to refer to a mine, but here it was usually in association with carbonarium, carbonaria or carbo lapideis. From 1333 on, balma was rivalled by gazanatgium or gazanatgium carbonis which, rarely used in isolation, was most often affixed to balma or carbonarium perfecting their meanings. In the langue d'Oc gazanatge or gazanhatge had three meanings ; it referred to the income from an exploitation, a territory or cultivable land. The latter two meanings are found in two acts from the middle of the fourteenth century where both the area and the dependency of the gazanatge are being referred to. 6. Coalmining may have begun as early as the end of the thirteenth century. See note n°13. About silver exploitation at Boussagues, C. Duhamel Amado, " La seigneurie des mines en pays de Béziers et en Razès, analyse de trois documents de la seconde moitié du xne siècle ", in Mines et mineurs en Languedoc Roussillon et régions voisines, Montpellier, 1977, 126-140. 7. Pomier-Leyrargues, "Note sur le bassin houiller de Graissessac", Bulletin de la Société géologique de France, (1868), 993-1002.

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From a 1455 act, we can even reconstruct mining activity which was closely associated with farming, whereby the leasee of the gazanatge could draw coal while at the same time cultivating wheat and vines. The texts never refer to any work underground though the villagers from Boussagues must have been aware of what had been practiced in the regions' silver mines from the thirteenth century onwards. In the case of Boussagues' coal mines, the word balma is no doubt used to signify a shallow hole or hollow, and not a tunnel. So from Alzou to Graissessac, never far from cultivated land, the coal field was formed by a series of holes scattered over the coal outcrop. From the end of the fourteenth century, the increase in place names and the extent to which text writers at the time went to mention the boundaries of each mine brings us to several conclusions : that there must have been an increase in the number of pits, that the mines were closer to one another than before and that mining land was already mixed with farming land. As the coal was on the surface, it was as easy to harvest as any other crop. Undoubtedly, the relative ease with which mining was carried out is to be linked with a strong peasant presence : for each villager to draw coal from the bottom of the field was both physically and financially possible, even though certain notables invested more time and money in it. COAL AND THE VILLAGE NOTABILITY

The men and women of Boussagues owned, bought and sold setzènes, half setzènes or even quarter setzènes of coal. What exactly was a setzène ? The word itself, which came from silvermining, was widely used in the region in the thirteenth and fourteenth centuries. Buying a setzène meant buying a mine share. This gave the buyer the right to 1/16 of the amount extracted and also the use of the infrastructures 8 . Coal mining vocabulary was very much inftuenced by that of silver mining. The word setzène leads us to suppose that the miners formed themselves into companies, quite common in the mining world, especially in the region's silver mines. The setzènes for sale on the Boussagues market varied in value. From 1302

to 1348 their price ftuctuated from 40 to 420 sous tournois. This large difference was due to the varying quality of the setzènes. Their value depended on the quality and the amount of coal extracted and on the equipment put at the disposition of the holder. Thus, the owners of these shares, independent of all seigniorial power, formed themselves into companies of varying size and strength. The objectives of these companies must be understood in a completely different context to silver mining: undoubtedly, the peasants' modest 8. C. Bonami, "Dans la haute vallée de !'Orb: les mines de Ceilhes et Rocozels", in Mines ... , op. cit., 93-105.

MEDIEVAL COALMINING IN THE SEIGNEUR Y OF BOUSSAGUES

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incomes necessitated their grouping together to mine, even though their rudimentary techniques did not call for huge investments. We do not know how these companies actually functioned nor the various activities of the members. Nonetheless, we can suppose that most of these villagers from Boussagues and the surrounding hamlets possessed only one setzène or even less such as a quarter of a setzène, enough to allow them to extract the necessary amount of coal to meet their needs. From all of these pariers, i.e. members of these coal companies, the Moliniers, a family of notables, emerged during the dynamic phase of the fourteenth century. They first appeared in 1302 and remained heavily involved in mining until 1429. From 1302 to 1348 the Moliniers bought at least 92 livres worth of setzènes, quite a sizeable figure. Sources for the Montagne Noire, a region close to Boussagues (France, department of Tarn) help us put this figure into perspective. At that time, 92 livres was also the amount of money needed to pay for the yearly lease of a mouline, a water-powered bloomery furnace. Who the lessees were, in this case, we do not know ; they may have corne from an urban milieu 9 . Nevertheless, there can be no doubt that paying 92 livres over forty-six years was a lot for a village family involved in both mining and farming. Indeed, in the fourteenth century, and again in the fifteenth century, the Moliniers had fields, vines and mills sometimes located at quite a distance from the seigneury 10 . Unfortunately, it is not possible to calculate how much of their entire assets was made up of mining. Their comfortable financial status at the village level put them in an intermediary position between the village community and the lords. Consuls, provosts and representatives of the lords, in 1397 they rented out a part of the seigneury's revenue for a number of years 11 . They drew the local lords into mining matters. lt was through their intervention that the lords of Sénégra and the Villemagne and Joncels monasteries got a foot-hold in coalmining. They went into partnership: in 1376 Pierre de Sénégra, like the Moliniers, held shares in the Campnègre coalmine. Up to 1482 seigniorial activity in relation to mining was modelled on that practised by the Moliniers and other notables, the only difference being that the lords rented out part of their mines. As a result, in 1455 the Sénégras demanded half of the extracted coal from their leasees in their mine at Carrarigues near Graissessac.

9. R. Fawtier, F. Maillard, Comptes royaux (1285-1314), Paris, 1961, t. II, 562-565; C. Verna, "Aux origines de la forge à la catalane: les moulines du comté de Foix (vers 1300-1349) '',in Estanislau Tomas i Morera (ed.), La farga catalana en el marc de l'arqueologia siderurgica, Govern d'Andorra, 1995, 51-59. 1O. 46 J 645, liasse 107, n°4. 11. 46 J 638, liasse 100, n°1 l ; 46 J 638, liasse 100, n°15; 46 J 642, liasse 103, n°1.

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CATHERINE VERNA COAL AND INDUSTRY

From coalmining much can be learned about industrial activities otherwise difficult to apprehend when set in rural settings. Its sudden appearance in documentation at the beginning of the fourteenth century may have been the result of the increase in the price of charcoal in a region where silver production could have led to massive deforestation. We have proof that the Boussagues coal was sold, at least in the beginning of the fourteenth century 12 . It may also have been exported. A legal document dating from 1270-1273 refers to the payment of atoll on coal going through Sérignan on the Orb estuary (fig. 2) 13 . The origin of this coal remains a mystery, though it is highly probable that this coal was mined up the river. In this case, Boussagues would be a likely place of origin. The quality of the coal, bituminious and semi-bituminious, justifies its exportation. Boussagues' coal undoubtedly found more regular markets locally. We have some indication as to the uses to which the coal was put. A 1380 act, relating to the Fouzilhon mine (France, department of Hérault), mentions the use of fuel : the higher quality coal was used ad fabricandum ferrum and the more common adfaciendum calcem 14. It is likely that the coal from Boussagues was put to similar use. A type of limestone paiticularly well suited to lime production was also found in the seigneury. As regards ironmaking, we have no proof that the coal was used in bloomery furnaces : it is known that the sulphur contained in coal is detrimental to iron production. However, we do know that it was commonly used in the forge : the mention ad fabricandum ferrum no doubt referring to these particular practices. We also know from a later source (1510) that the locksmiths and farriers of Languedoc commonly used coal, and indeed, that nineteenth century locksmiths' manuals particularly recommended the use of bituminious and semi-bitouminious coal such as that mined in Boussagues15. It is true that this quality of coal facilitated blacksmith welding. A fifteenth century roll of rents kept for the hamlet of Graissessac shows that out of a total of seventeen registered homesteads, twelve belong to people called Fabri 16. We know that people's surnames originate from the profession practised by them or by their ancestors, and in fact, Guillaume Fabri was a black-

smith in Graissessac in 1392-1393; we do not know the professions of the

other family members 17 . Nonetheless, this strong onomastic stamp cannot be

15.

12. 46 J 638 liasse 129, n°5 and 12. 13. J. Combes, "Le port de Sérignan au XIVe et début XVe siècle", Annales du Midi,(1950),

14. Arch. dép. Hérault, lEl 12. 15. Arch. mun. Rouen, AlO, fol. 177 serrurier, manuel Roret, Paris, 1977, 59. 16. 46 J 668, liasse 129, n°14. 17. 46 J 644, liasse 106, n°6.

v0 ,

180-184. H. Landrin, Nouveau manuel complet du

MEDIEVAL COALMINING IN THE SEIGNEURY OF BOUSSAGUES

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ignored in a part of the seigneury where the best bituminous coal was to be found close to the iron-ore works of Saint-Gervais-sur-Mare which began development in the eighteenth century. Until this late date, we do not know where the iron worked in the seigneury came from. However, this coal belt is not far from the Brusque region (France, department of Aveyron; fig. 2) a major area of iron production which in the fifteenth century was, like Boussagues, controlled by the lords of Clermont 18 . At the end of the fifteenth century, there was also a mouline in operation in Saint-Pons-de-Thomières (France, department of Hérault) 19 . In coal mining terms, Boussagues is an excellent case-study. Undoubtedly, the coal mining industry for the most part, at least in the Kingdom of France, was made up of these small companies, which were often dynamic and had an impact on the economy not just locally, but over a wider area too. Furthermore, Boussagues helps shed light on the industrial activities associated with coalmining and also on the undertaking of economic matters by the villagers themselves. Therefore it increases our knowledge of the medieval countryside which, it must not be forgotten, was also the site of industrial production.

18. J. Delmas, "Les moulines à fer de la région de Brusque (1479-1558, hypothèse longue, début du XIV 0 siècle-1608) ",Revue du Rouergue, (1980), 193-206. 19. M. Portal," Une mine de fer des environs de Lacaune (Tarn) au XV 0 siècle", Bulletin historique et philologique du Comité des Travaux historiques et scientifiques, (1904), 455.

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CATHERINE VERNA

FIGURES

Carnpnègre• (677 m)

•Alzou (41 m)

• Sénégra

•Camplong (373 m) orb

Map 1 : The coal-field of Boussagues

(XIVth-XVth Centuries) •

Coalmine



Village lkm

MEDIEVAL COALMINING IN THE SEIGNEUR Y OF BOUSSAGUES

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Fouzilhon•

Méditerranée Béziers

: Uses of coal in the Boussagues area (XJVth-XVth Centuries) 15 km --~=---

L'UTILISATION DU CHARBON DE TERRE À ROUEN À LA FIN DU MOYEN AGE

Philippe LARDIN

Les nombreuses comptabilités normandes qui nous sont parvenues pour les deux derniers siècles du Moyen Age font fréquemment allusion à l'utilisation de charbon par les travailleurs du fer, les chafourniers ou les plâtriers sans jamais préciser s'il s'agit de charbon de bois ou de charbon de terre. Dans l'immense majorité des cas, le contexte permet de dire avec certitude qu'il s'agit de charbon de bois fabriqué par des ouvriers plus ou moins spécialisés appelés " charbonniers ". Ces derniers - qui étaient généralement avant tout des bûcherons - abattaient le bois " à faire carbon " et le transformaient pour des bourgeois rouennais ou même parisiens 1, leur production étant ensuite écoulée par des marchands de bois. Il est pourtant possible que le mot " carbon " ait parfois désigné aussi de la houille. En effet, le commerce du charbon de terre existait déjà au milieu du XIVe siècle. En 1359, à la suite d'une affaire assez confuse qui avait opposé les bourgeois de Rouen à Jean de Buyville, sire du Vivier, dont les biens avaient été détruits, le futur Charles V, alors régent, avait instauré un tarif pesant sur les denrées qui passaient par la Seine devant Rouen afin de permettre le remboursement par la ville, des dégâts subis par ce seigneur. Or, dans ce tarif, il était notamment fait mention d'une taxe de 3 sous 4 deniers par "poise" de charbon de terre 2 . Cette mention ne permet évidemment pas de savoir quelle pouvait être l'importance du trafic de la houille, mais son utilisation est attestée en 1383 et en 1384 au Clos des Galées de Rouen. Ces annéeslà, en effet, 51 puis 27 boisseaux de houille furent achetés " pour forgier ", sans qu'on puisse connaître plus précisément leur utilisation, mais ce qui, de toute façon, ne représentait sans doute pas une très grande quantité de combus1. En 1392 et 1393, le bourgeois parisien Gilles de Clamecy intervient dans ce type de contrat, notamment dans la forêt de la Londe, Arch. dép. Seine-Maritime, 2 E 1I154, fol. 207 et 231. 2. Arch. mun. Rouen, Tiroir n° 10, liasse n° 1, pièce n° 7.

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tible 3 . De même, en 1397, le marchand rouennais Robert Parisse sollicita et obtint de la municipalité l'autorisation de décharger " un pou de charbon de terre4 ". Il est pratiquement certain que ce charbon venait d'Angleterre. En 1390, les responsables de la ville autorisèrent un navire anglais à décharger à Rouen des meules à couteaux et du charbon de terre qui devait sans doute être utilisé par les couteliers 5 . On notera aussi que dans la demande d'autorisation de Robert Parisse, on trouvait, outre le charbon, un certain nombre de "bors d'Illande ", c'est-à-dire d'un bois de résistance supérieure qui venait des Iles britanniques ou du nord de l'Europe. Il est incontestable que l'utilisation du charbon de terre était liée à la relative pénurie de bois qui frappait alors la région rouennaise comme d'ailleurs toute la Normandie. Les fortifications qui avaient dans un premier temps utilisé des quantités considérables de bois pour édifier des enceintes provisoires, la mise en place de fortifications de bois ainsi que les innombrables " guerites " installées sur les murs d'enceinte et sur les châteaux et enfin, la croissance considérable des constructions de bateaux au Clos des Galées de Rouen, avaient abouti à une raréfaction du bois et sans doute à une augmentation de son prix6 . C'est pourquoi il était nécessaire d'essayer de le remplacer par un autre combustible, même si l'approvisionnement en charbon de terre était relativement aléatoire en cette période de tensions entre les royaumes de France et d'Angleterre. A ma connaissance, plus aucun document normand ne mentionne l'utilisation de houille au cours du XVe siècle. Elle n'a pas forcément brusquement disparu au début de l'occupation anglaise puisque que, désormais, les relations commerciales entre les deux pays étaient plus faciles et un dépouillement exhaustif des registres de tabellionage couvrant les années 1420-1430 permettrait peut-être de repérer quelques transactions. Au lendemain de l'occupation anglaise, les Treaty Rolls utilisés par Michel Mollat font état de quelques envois de charbon depuis Newcastle vers la Normandie en 1465-1466, mais là encore les quantités expédiées restent très médiocres 7 .

3. Ch. Bréard, Le compte du Clos des Galées de Rouen (1382-1384), Rouen, 1893, 69, 98. 4. Arch. mun. Rouen, A4, fol. 32. 5. Arch. mun. Rouen, Al, fol. 123. 6. En 13 86, le duc de Bourgogne fit don de seize chênes à la cathédrale de Rouen, mais le responsable du Clos des Galées essaya de les réquisitionner pour achever un navire en construction, Arch. dép. Seine-Maritime, G 2483, fol. 74. De même, en 1398, la pénurie de bois entraîna des difficultés dans la fabrication des tuiles, ce qui obligea les maîtres des oeuvres de maçonnerie et de charpenterie à réquisitionner la production, Bib. nat., ms. fr., 26029, n° 2735 et n°2741. 7. M. Mollat, Le commerce de la Haute Normandie au xve siècle et au début du XVI' siècle, Paris, 1952, 97, 150-151. Ces exportations qui n'étaient pas toutes destinées à Rouen, avaient apparemment cessé depuis le règne de Henry IV (1399-1413), Ibid, n. 36, 97.

L'UTILISATION DU CHARBON DE TERRE À ROUEN À LA FIN DU MOYEN AGE

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Cela s'explique par le fait que la pénurie de bois s'est atténuée. Selon un dicton de l'époque, les bois seraient venus en France par les Anglais 8 . Il est probable que la dépopulation qui s'accentue à partir du milieu des années 1430, la destruction volontaire de nombreux châteaux par les Anglais (qui a entraîné à la fois la récupération de bois de chauffage ou de charpente ainsi que la disparition des réparations coûteuses en bois) ont permis aux arbres des forêts de se remettre à croître sans être coupés trop tôt9. Au cours des premières décennies de la reconstruction qui suit l'occupation anglaise, les textes ne font pas état de difficultés d'approvisionnement, ni pour le bois de construction, ni pour le bois de chauffage. Mais cette accalmie est d'assez courte durée. Dès la fin de l'année 1500, se manifestent les premiers symptômes d'une nouvelle crise dans l' approvisionnement en bois. Cette année-là, est promulgué un règlement concernant les marchands de bois qui sont " contraints de fournir la ville de bois et de faire la declaration des ventes et marchés qu'ilz tiennent cz foretz 10 ". La pénurie de bois ne fit pourtant qu'empirer par la suite. Elle était due à des facteurs multiples que les conseiijers de la ville évoquent tour à tour. La croissance de la population, les détournements plus ou moins tolérés de bois par les marchands ou les responsables locaux, les difficultés faites par les seigneurs des terres traversées par les cours d'eau sur lesquels on faisait flotter le bois, les exportations de bois en dehors de la province, en particulier " en Flandres, à Paris ou ailleurs", expliquent largement le problème, d'autant plus que le développement économique et les changements techniques venaient y ajouter leurs effets. En février 1518, lors d'une réunion des conseillers municipaux de Rouen, le lieutenant du bailli mit en cause pour la première fois " les forges à fer qui usent beaucoup de boys et en font grant dégast ". Il évoqua aussi les "ouvriers fesant la chaulx" parce qu'ils en fabriquaient "en grande abondance ( ... ) où ilz usoient beaucoup de boys 11 ". C'est à cette pénurie que fait allusion le conseiller de la ville Jean Deschamps lors de la discussion du 24 septembre 1510 qui est rapportée plus bas 12 . A son avis, il serait étrange de se 8. J. Fortescue, Governance of England, Londres, 1885, cité par M. Devèze, La vie de la forêt française au XVIe siècle, Paris, 1961, t. 1, 76, n. 5. Toutefois, dans les régions où les combats avaient été particulièrement disputés, les bois avaient souvent été volontairement détruits, soit pour renforcer les fortifications, soit pour gêner l'approche des ennemis. A Louviers, en 1441, le roi Charles VII accorda aux habitants le droit de prendre du bois dans la forêt royale voisine de Bord, "attendue( ... ) la destruction des bois prouchains de lad. yille ". Th. Bonnin, Cartulaire de Louviers, Evreux, 1870-1879, 3 vol., Il, 2e partie, DXLI, 147-151. 9. En 1446, l' Anglais Guillaume Ouldall, maître des Eaux et Forêts de Normandie, se plaignait de coupes sauvages de bois effectuées par les habitants des régions voisines de l'actuelle Arquesla-Bataille, mais il notait également qu'il ne demeurait" à l'occasion des guerres que très peu de gens au pays " et que " avoient creu plusieurs saules et autres bois es camps et es villages dudit pays", Bib. nat., ms. fr., 26074, n° 5386. JO. Arch. mun. Rouen, A9, fol. 346v 0 et 347. 11. Arch. mun. Rouen, Al 1, fol. 159. 12. Voir pièces justificatives, lignes 55-56.

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passer du charbon de terre comme combustible puisque son utilisation devrait avoir pour premier effet de faire baisser les prix du charbon de bois qui avaient nettement grimpé dans les années précédentes. Cet usage de la houille, ou au moins l'ampleur de cet usage, prend donc au début du xv1e siècle des proportions nouvelles 13 . C'est pourquoi les réactions à son utilisation sont relativement vives comme le montre le texte que l'on trouvera en annexe. Un conflit assez vif semble, en effet, avoir éclaté entre le curé de la paroisse de Saint-Maclou et un serrurier - en réalité un travailleur du fer très actif à Rouen 14 - qui employait du charbon de terre dans sonatelier situé à proximité du presbytère, à cause de la " puanteur" des fumées. L'église Saint-Maclou est située comme l'indiquent plusieurs des intervenants au débat, " es bonnes rues ", à quelques dizaines de mètres de la cathédrale. A cette date, son curé, Artus Pillon, était un notable de la ville, puisqu'il était également chanoine de la cathédrale et qu'il avait été le représentant du clergé local lors des Etats Généraux de 1494 15 . Dès lors, on comprend que les conseillers de la ville et les autres personnages officiels qui participaient au conseil aient été sensibles à sa plainte. Michel le Cherf avait sans doute moins de poids que le curé de Saint-Maclou, mais il appartenait à l'élite de son métier. Il était le fournisseur attitré de l'archevêché et de la municipalité et avait, en particulier, livré l'essentiel du fer nécessaire aux travaux de transformation du château de Gaillon au cours des années 1506-1507. Il préparait les pièces de fer, notamment des barres, dans son atelier rouennais et les envoyait par bateau sous la conduite de ses aides qui se chargeaient ensuite de les mettre en place 16 . Son activité était donc assez importante et on comprend qu'il ait été amené à utiliser du charbon de terre plutôt que du charbon de bois plus coûteux et d'un pouvoir calorique plus réduit. Le problème des fumées de houille, c'est-à-dire avant tout, un problème d'odeur, permit aux conseillers de poser d'autres problèmes. Lors d'une brève discussion le 10 juillet 1510, puis lors d'une séance plus longue et à laquelle participèrent davantage de personnes, le 24 septembre suivant, on évoqua le moyen de mettre fin aux " senteurs " dont on ne voulait pas, qu'elles provinssent des fondeurs de graisse, des vendeurs de volaille ou des ateliers qui utilisaient le charbon comme combustible. C'est toutefois ce dernier problème qui fut le plus débattu, les autres n'étant le plus souvent évoqués que pour 13. M. Mollat, op. cit., n. 7, 151, constate également que c'est au début du XVIe siècle que les exportations de charbon de Newcastle à destination de la Normandie prennent une ampleur remarquable. 14. Il est qualifié tantôt de serrurier, tantôt de" fèvre ", corurne dans le compte de la ville de Rouen de 1502, Arch. mun. Rouen, Tiroir 142. 15. Arch. mun. Rouen, A9, fol. 155 v0 (24 sept. 1494). C'est également lui qui dirigeait la délégation des chanoines chargée de demander une aide financière à la ville pour réparer la toiture de la cathédrale qui avait brûlé en 1514, Arch. mun. Rouen, AlO, fol. 350. 16. Arch. dép. Seine-Maritime, G 628, passim, notamment semaines du 3 avril et du 15 mai 1507.

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mémoire, De cette longue discussion ressortent plusieurs conclusions, L'ampleur de l'utilisation du charbon de terre est nouvelle, puisque désormais elle semble insupportable. Le lieutenant général du bailli, Aoustin Louys, qui se rend sur place pour constater le fait, donne l'impression de découvrir, pour la première fois, les effets et l'odeur de la fumée de houille, alors qu'il est probable qu'il habitait lui aussi "es bonnes rues" (l. 11-15). Il est non moins évident que cet usage du charbon de terre n'est pas encore très répandu, puisque Aoustin Louys peut aussi affirmer, sans être pour l'instant démenti, que le fer forgé à la houille est de moins bonne qualité que celui qui l'est au charbon de bois (l. 17-18). Néanmoins, les débats montrent qu'il n'y a pas que les serruriers qui utilisent la houille, mais que les maréchaux ainsi que d'autres qui ne sont pas précisés (sans doute les couteliers et les fabricants de plâtre ou de chaux) s'en servent également. On notera, au passage, que l'existence de cette discussion infirme l'idée qui avait été avancée par Michel Mollat, puis reprise par d'autres historiens 17 , selon laquelle la réaffirmation des organisations de métier au tournant du xvre siècle aurait abouti à un départ des artisans, notamment des artisans du fer, vers les forêts voisines. Les conseillers favorables à l'utilisation du charbon considèrent, au contraire, qu'il serait particulièrement incommode de devoir se rendre au-delà de la porte Cauchoise (à l'ouest) ou de la porte Martainville (à l'est) pour trouver un serrurier ou un maréchal. La délibération montre également que, contrairement à une idée reçue, les hommes du début du XVIe siècle - en tous cas, les Rouennais - n'appréciaient pas certaines odeurs et étaient déjà sensibles aux conséquences néfastes de la pollution de l'air, qu'elle provienne de la fumée de la houille, de celle des graisses, ou de la pourriture des volailles sur les " membres nobles de l'individu", c'est-à-dire ceux qui le font vivre comme les poumons ou le coeur (l. 22). Ce faisant, ils annonçaient les théories aéristes qui eurent une particulière autorité au XVIII< siècle 18 . L'autre apport de ce texte est de constater que l'utilisation du charbon au début du XVIe siècle n'est pas propre à la Normandie. Plusieurs conseillers (l. 41, 47, 55 et 65) qui semblent avoir beaucoup voyagé se refusent à en condamner l'usage parce qu'il est utilisé "en tous pays" (l. 55). Plus précis, Jean Lamy indique qu'il a pu voir utiliser la houille 17. L'idée d'une opposition croissante entre les ouvriers des villes et les ouvriers ruraux échappant aux organisations professionnelles avait été avancée en 1899 par H. Hauser, Ouvriers du temps passé xve-xvr siècles, Paris, 1898, XXXVI, avant d'être reprise avec vigueur par M. Mollat, op. cit., n. 7, 280-285, lui-même repris par N. Monteillard, "Artisans et artisanat du métal à Rouen", dans Hommes et travail du métal dans les villes médiévales, études réunies par P. Benoît et D. Caillaux, Paris, 1988, 109-126 et par B. Chevalier, Les bonnes villes de France du XIV" au XVIe siècle, Paris, 1982, 167. 18. Ph. Lardin," De l'air! de l'air! L'hygiène dans les villes en France au XVIIIe siècle'', dans Pratiques du corps. Médecine, hygiène, alimentation, sexualité, C.R.L.H. et C.I.R.A.O.I., A. Jacquemin (dir.), Publications de l'Université de la Réunion, Didier-Erudition, Saint-Denis de la Réunion, 1985, 73-86.

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aussi bien en Flandre qu'en Languedoc, c'est-à-dire dans deux autres régions où l'insuffisance en bois était ancienne 19 . Finalement, la seule décision qui fut prise fut de demander aux utilisateurs de charbon de terre de surélever leurs cheminées qui devaient être assez basses, mais l'utilisation de charbon de terre ne fut évidemment pas interdite. Elle ne fit, au contraire, que s'amplifier par la suite puisque la pénurie de bois ne s'atténua pas 20 . Les registres du Parlement de Rouen mentionnent en particulier la venue du navire anglais Le George, au Havre, en 1526, pour y apporter du " charbon de terre pour subvenir à la construction du grand navire (la Françoise) et de son artillerie " 21 . PIÈCE JUSTIFICATIVE

Extraits du registre des délibérations municipales (Arch. mun. Rouen A 10) 11 juillet 1510: "En assemblée des XXIIII ( ... )pour délibérer ce qui est à faire ( ... ) touchant ceulx qui usent de charbon de terre pour ce qu'il semble que ce soit chose dangereuse [et] d'aucuns qui fondent gresses et autres ordures deffendues. A quoi fut dit que on devoit en parler [à] ceulx qui usent dudict charbon que d'y mettre bon ordre et police et touchant ceulx qui fondent lesd. gresses, fu dit qu'il y avoit ordonnance laquelle on devoit faire garder et ne soufrir aucunes senteurs en cested. ville " (fol. 177 v 0 ). Le mardy 24 septembre 1510: "En assemblée des XXIIII faicte en l'ostel commun de la ville de Rouen ( ... ) devant Monsieur de Bapaumes, président en la court de l'Eschiquier, presens Monseigneur Daon, Monseigneur l'archevesque, conseillers en ladite court, appellez de chacun cartier douze notable personnes, les centenyers et cinquanteniers de ladite ville et aussi Mes Robert Malaprins, Jehan Bulletot, Pierres de la Place, Guillaume du Bois et Guillaume Morellet, medechins, en laquelle assemblée a esté fait remonstrance par led. president que proces est pendant en lad. court entre venerable discrète personne Me Artus Pillon, curé de Sainct Maclou, les trésoriers et les paroissiens dudit lieu à l'encontre de Michel le Cherf, serrurier, touchant les fumées et puanteurs qui viennent du charbon de terre dont use led. le Cherf en sa forge qui est joignant du presbytaire de lad. eglise de sainct Maclou. ( ... ) 19. Sur le manque de bois en Flandre, voir J.-P. Sosson, Les travaux publics de la ville de Bruges aux XIVe et xve siècles, Bruges, 1977. Le charbon de terre venait surtout du Hainaut, G. Espinas, La vie urbaine à Douai au Moyen Age, Paris, 1913, 4 vol., t. II, 386-387; pour la pénurie de bois dans les régions du Midi, on pourra se reporter à Ph. Bernardi, Métiers du bâtiment et techniques de construction à Aix-en-Provence à !afin de l'époque gothique (1400-1550), Aixen-Provence, 1985, notamment 125-142. 20. En 1534, les autorités rouennaises procédèrent à" un essay de bois de trois arpents" dans la forêt de Roumare pour savoir combien une telle surface pouvait produire, afin de discuter avec les marchands de bois en connaissance de cause, Arch. mun. Rouen, Tiroir 325. 21. Arch. dép. Seine-Maritime, 1 B 394, 29 mars et 17 avril 1526.

L'UTILISATION DU CHARBON DE TERRE À ROUEN À LA FIN DU MOYEN AGE

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Et premierement a esté demandé à Me Aoustin Louys, lieutenant général de Monseigneur le bailly de Rouen, lequel dès que lad. matière a esté pendante devant luy estait allé sur le lieu en presence dudit Pillon, après feist mettre le feu en la forge ( ... ) dont il yssu de grans fumées et puanteurs en hostel dudit Pillon, il dit que pour reins ne vouldroit avoir un tel voisin et luy semble que on doit mettre demourer tous ceulx qui usent dudit charbon es lieux louaintains et remotz22 et ne doit estre permys qu'ilz soient doresenavant es bonnes rues. Plus a dit qu'à son advis le fer qui est forgé dud charbon de terre n'est pas si bon ne d'aussi grande dureté que est le fer qui est forgé de charbon de bois. (il évoque ensuite les puanteurs causées pas les fondeurs de graisse ainsi que les pollutions dues aux bouchers, aux mégissiers, aux tanneurs, aux corroyeurs et aux teinturiers de peaux ) Maistre Robert Malaprins, docteur en medechine, a dit que les membres nobles seuffrent de sentir mauvaises oudeurs ; que ne doit en pouvoir user ne besongner de choses puantes es bonnes rues pour envoyer ceulx qui en usent en lieux louaintains, remotz. ( ... ) Maistre Guillaume du Boys, medechin, a dit qu'il n'a pouaint veu advenir dommagement pour user dud. charbons de terre, mais lui semble qu'il n'y aurait pas grant mal de les mettre demourer en lieux remotz et louaintains des bonnes rues. ( ... ) Maistre Pierre de la Flache, medechin, dit qu'il ne doit estre permis ne seuffert user dudit charbon de terre es bonnes rues et doivent estre mys ceulx qui en usent es lieux louaintains et remotz. ( ... ) Maistre Guillaume Morellet, medechin, dit que la fumée qui vient dudit charbon de terre est mauvaise et dangereuse en ce qu'elle sent le soufre et qu'il n'est aucunes personnes qui pourraient porter lad. senteur et à cause de ce pourraient tomber en un sepamme 23 ou mourir soudainement et luy semble que on doit mettre ceulx qui usent du charbon de terre en lieux louaintains hors des bonnes rues. ( ... ) Maistre Jehan Bulletot, medechin, (après voir évoqué les "poulaillers qui gardent leurs mortuaires tant qu'ils viennent à putrefaction "), a dit que les mareschaulx, serruriers et autres qui usent dudit charbon doyvent fere lever leurs chemynées s'ilz veulent user dudit charbon et les lever au dessus de leurs maisons. ( ... ) Maistre Robert Raoulin, advocat du ray, ( ... ) dit aussi qu'il luy semblerait estrange qu'on deffendist user en ceste ville dud. charbon de terre et serait au grant dommage de la chose publicque alors que en tous lieux il est permis en user tant dela les monts que deça. 22. A l'écart, éloignés. 23. Spasme ou pâme.

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Maistre Jehan Lamy dit qu'il luy sembleroit estrange que on wydast hors de leurs maisons ceulx qui usent dudit charbon de terre et que ce seroit choses estrange que on allast chercer un mareschal, l'un en la porte Martinville et l'autre en la porte Cauchoise, et mesmement les serreuriers, et que en tous les païs où il a esté tant en Flandres, Languedoc et autres païs, où ilz usent dudit charbon de terre, ilz ne sont divisez, ne mis en lieux remotz. Bien a dit que bon sera leur faire lever leurs cheminées jusques au dessus de leurs maisons affin que les fumées se puissent évacuer en l'air. ( ... ) Maistre Jehan Courault, lieutenant general du vicomte, dit qu'il luy semble que on doit faire haucher les chemynées de ceulx qui usent dudit charbon de terre et leur permettre en user. ( ... ) Jehan Mustel a dit qu'on doit permettre user dud. charbon pourveu qu'iceulx qui en usent hauchent leurs chemynées jusques au dessus de leurs maisons. ( ... ) Maistre Robert Deschamps a dit que en tant que est led. charbon, il en est uzé en tous pays et qu'il luy sembleroit estrange que on le deffendist en cested. ville plus que es autres considerant que tout ce qui seroit fait de charbon de boys vauldra et ne seroit plus vendu que la moitié que n'est de present. Guillaume Hamelin dit qu'il luy semble que myeulx seroit mettre demourer ceulx qui usent dud. charbon de terre es lieux remotz que les laisser par les bonnes rues sy ilz ne hauchent leurs chemynées si hault par dessus leurs maisons que la fumée se puisse aller et departir en l'air et si fait luy semble qu'ilz doivent estre permis user dudit charbon. ( ... ) Jehan du Four ( ... ) dit à son oppinion en tant que sont ceulx qui usent dud. charbon de terre estre permis en user en hauchant leurs chemynées ainsi qu'il est fait en plusieurs pays tant dela les monts que deça où ilz n'usent que dudit charbon de terre mais n'a veu ne oi parler qu'il en soit advenu aucun inconvenient et luy semble que la chose publicque souffriroit s'il estoit deffendu en user. ( ... ) [Les autres intervenants estiment dans l'ensemble qu'il doit être permis d'utiliser le charbon de terre, puisque qu'on s'en sert en beaucoup d'autres lieux à condition que ceux qui s'en servent rehaussent les cheminées ou qu'ils soient installés dans des lieux éloignés.] Et ce fait, aprez les oppinions eues dit le president qu'il en fera rapport à la court. Aucune décision n'est donc finalement prise puisque c'est à la cour de !'Echiquier de décider. Malheureusement ses conclusions ne nous sont apparemment pas parvenues. " (fol. 180 à 184 v 24 . 0

)

24. Quelques extraits de cette délibération ont été publiés par L.-R. Delsalle, Vivre à Rouen, 1450-1550. Documents choisis et commentés, Rouen, C.R.D.P., 1975, 17-18.

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Paul BENOIT

La France n'a jamais été considérée comme un pays très riche en houille, ni au XIXe siècle, ni encore moins au XXe siècle. Mais ce potentiel insuffisant en charbon à l'époque industrielle était-il déjà sensible au Moyen Age ? Il faut le croire puisque, à la fin du XVe siècle dans le Débat des Héraults d'armes de France et d'Angleterre, le Français affirmait: "Nous usons du charbon de pierre pour les forges et les mareschaulx, mais Dieu mercy, le royaume de France est si bien porcionné que l'on y trouve par tous pays blé, vin et boys duquel boys l'on se chauffe et en ajuste l'on à tous usages qui est chose trop plus plaisante que n'est votre charbon de pierre " 1. Ainsi, dès la fin du Moyen Age, la propagande vantant le royaume affirmait que la France était un pays exploitant la houille mais en quantité limitée par rapport à son voisin anglais. Quelle valeur, au-delà de son aspect provocateur, peut-on attribuer à ce texte? Pour répondre à cette question la documentation est rare. Quelques chartes et actes notariés permettent de saisir les conflits, les donations ou les ventes, quelques tarifs de péage et de rares comptes donnent une idée de la circulation et de l'usage du charbon, mais à l'exception des fonds d'Alès et de Boussagues, il ne s'agit le plus souvent que de documents isolés. Cette faiblesse documentaire explique, en partie, pourquoi les historiens français n'ont jamais porté qu'un intérêt limité à la houille avant le XIXe siècle. Pour le Moyen Age, l'essentiel des connaissances provient de monographies datant des quarante années qui encadrent 1900. Depuis les travaux sont rares. Cependant deux auteurs ont tenté une vision d'ensemble avec des buts très différents. Le premier, M. Devèze, dans son Histoire de la forêt française cherchait à montrer comment la houille n'avait joué un rôle que très secondaire !. Le débat des hérauts de France et d'Angleterre, suivi de The debate between the heralds of England and France, John Coke, L. Pannier et P. Meyer (éds), Paris, 1877, XLIV, 219 p., cité par Levasseur, Histoire des classes ouvrières et de l'industrie en France avant 1789, Paris, t. 2, 1901, 662.

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dans l'histoire énergétique de la France d' Ancien Régime. Il apportait cependant des données qui n'avaient jamais été rassemblées auparavant2 . Plus riche, la thèse de Philippe-Jean Hesse, La mine et les mineurs en France de 1300 à 1550, voulait présenter un état complet de la production, de la circulation et des usages des produits extraits des mines. Mais, malgré toutes ses qualités, cette oeuvre est essentiellement consacrée aux mines métalliques ; la houille n'y tient qu'une place subalterne3 . Depuis la publication de cette thèse, très peu de travaux ont été consacrés à la houille dans la France médiévale4. Tout juste peut-on saisir quelques allusions dans certains ouvrages et compter sur les résultats de trop rares fouilles archéologiques5 . GÉOGRAPHIE ET CHRONOLOGIE : UNE PRODUCTION DISPERSÉE

Le champ géographique choisi recouvre les limites de la France actuelle et non du seul royaume de France au Moyen Age, la Provence sera donc prise en compte6 . Les cartes de l'exploitation des mines de charbon au XIXe siècle et au début du xxe siècle montrent que les gisements abondent mais aussi que leur nature varie beaucoup. Ils diffèrent par les produits. Le territoire national possédait aussi bien des gisements de houille que de lignite. Ils diffèrent par leur ampleur et leur position stratigraphique. Les grands gisements du Nord et de Lorraine, qui ont fait la richesse de la France à l'époque contemporaine, n'étaient pas exploités au Moyen Age. En revanche, les mines de SaintEtienne, d'Alès, de Graissessac, de très nombreux gisements du Massif Central, le sud des Vosges ont fait l'objet d'exploitation tout comme le lignite de Provence. Ces bassins contiennent, ou contenaient, des charbons de qualités très diverses. La facilité d'accès caractérise ces gîtes médiévaux. Les tout petits gisements échappent, sauf découverte due à un hasard particulièrement heureux, au médiéviste, historien ou archéologue. Ils ont dû cependant fournir une part non négligeable de la consommation médiévale. Si durant l' Antiquité, la Gaule romaine a connu l'usage de la houille, cet emploi, sans doute très limité, semble avoir disparu au Haut Moyen Age7 . Aucun texte connu n'y fait allusion et les fouilles à ce jour n'ont pas livré de 2. M. Devèze, Histoire de la forêt française, Paris, 1961, 2 t., en particulier t. 1, 136-137. 3. Ph.-J. Hesse, La mine et les mineurs en France de 1300 à 1550, Paris, Micro-éditions A.U.D.1.R., 1968. 4. A retenir cependant, CL Billot, " Les mines du bassin d'Alès dans le chartrier de Castries (1290-1785) ",Annales du Midi, (1991), 183-190. 5. Deux fouilles de sites miniers polymétalliques, Brandes-en-Oisans et Pampailly, ont mis en relief l'usage de la houille dans les forges minières. 6. Il est très probable que la Franche-Comté ait déjà produit de la houille même si la documentation actuellement connue ne remonte pas au-delà du XVI 0 siècle. 7. A. Bouthier, "Un sous-sol/cave du 11° siècle à Cosne-sur-Loire (Nièvre). Une preuve de l'utilisation de la houille à l'époque gallo-romaine", Revue archéologique de l'Est et du CentreEst, (1972), 385-433.

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trace de charbon de terre dans les habitats ou les installations artisanales. Alors qu'à Liège, à proximité immédiate du royaume, l'extraction de la houille est citée comme un fait nouveau en 1195 8 , en France les premières dates avancées demeurent très incertaines. Si quelques auteurs du XIXe siècle ou du début du xxc siècle donnent, sans références sérieuses, des dates qui remontent au début du XIIIe siècle, les premiers textes attestés pour la France sont de la décennie 1240-1250. En 1240, l'abbé de Cendras, monastère situé à environ 2,5 km au nord-ouest d'Alès, attribue une rente de cent sous prise sur le revenu que lui versaient les fermiers d'une mine de charbon, première citation assurée d'une houillère en France9 . Presque contemporain, un texte de 1247 attesterait de l'extraction en Lyonnais 10 . La première mention de trafic vient aussi du sud de la France, en 1245, sur le pont d'Albi, le carbo de peira payait 1 denier la charge de bête, taxe équivalente à celle qui pesait sur le charbon de bois 11 . Les traces écrites d'exploitation et de commerce se multiplient entre 1250 et 1350. Dans le bassin de Saint-Etienne, en 1278, Etienne de Saint-Priest vend le quart de la mine de Saint-Genis-Terrenoire pour la somme, élevée, de 40 livres de viennois. Ce texte manifeste déjà l'existence d'une organisation économique et la valeur reconnue à la houille 12 . A Boussagues, dans le bassin de Gaissessac, la majorité des actes s'échelonne entre 1302 et 1348 13 . Au total, si le petit nombre de documents incite à la prudence, il faut remarquer que les textes de la fin du XIIIe siècle et du début du XIVe siècle apparaissent suffisamment nombreux pour être considérés comme le signe incontestable d'une activité naissante. Les sources se raréfient avec le choc démographique et économique du milieu du XIVe siècle. La fin du XVe siècle marque l'apparition de documents en plus grand nombre. Ils signalent des bassins houillers jusque là ignorés pour leur production médiévale. A La Machine, des textes mettent en évidence une reprise de l'activité houillère en 1481 14 . En Auvergne, dans le bassin de Brassac, deux actes attestent une exploitation en 1472 et 1489 15 . En Anjou, le bassin de Montjean traversé par la Loire, apparaît alors en activité 16 tout comme 8. H. Kranz, "Medieval coal industry at Liège", dans ce volume. 9. A. Bardon, L'exploitation du bassin houiller d'Alais sous l'Ancien régime, Nîmes, 1889, 3. 10. Ph.-J. Hesse, op. cit., 144. 11. E. Jolibois, Albi au Moyen Age, Albi, 1871, 56-57. 12. E. Fournial, Les villes et l'économie d'échange en Forez aux XIVe et XV siècles, Paris, 1967, 426. 13. C. Verna, "Medieval coalmining in the seigneury of Boussagues ",dans ce volume. 14. A. Bouthier, "L'exploitation de la houille du bassin de La Machine de l'époque romaine à la Révolution", dans ce volume. 15. Bib. mun. Clermont, ms. 1174, 77 à 81et1489, Baudin, Description historique, géologique et topographique du bassin houiller de Brassac, Paris, 1851, 2-3, cités par J. Dutilloy, Inventaire des mines du département du Puy-de-Dôme de /'Antiquité à la Révolution, Mémoire de maîtrise, Université de Paris 1, 1986 (multicopié). 16. O. Couffon, "Les mines de charbon en Anjou", Revue d'Anjou, nouvelle série, LVIII (1909), 553-570.

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celui de Gardanne. Les premiers documents écrits concernant les mines du Bourbonnais sont du XVIe siècle, mais leur historien, Claudon, avait certainement raison de les faire remonter à la fin du Moyen Age 17 . STRUCTURES DE PRODUCTION: DE PETITES EXPLOITATIONS

Dans la bassin de Saint-Etienne, les premières traces d'exploitation apparaissent à Roche-la-Molière, là où les couches affleurent, l'exploitation, une perreria carboneria, était à ciel ouvert. A Boussagues, dans le bassin de Graissessac, on extrayait le charbon dans les secteurs où les couches de houille venaient au jour. En règle générale, les gisements houillers mis en valeur dans la France médiévale se situent sur ou à proximité d'affleurements. Il en est ainsi du gisement angevin, de ceux de Brassac, de Gardanne ou d'Alès. Sur ce dernier bassin cependant, des textes attestent de cas d'extractions souterraines comme sans doute aussi en Anjou 18 . Ces exploitations de surface ou de faible profondeur n'exigeaient pas un équipement considérable ni la maîtrise de techniques comparables à celles qui se rencontrent dans les mines argentifères. Ici, la petite exploitation dominait. En Anjou, les plus importantes des houillères ne comptaient que quatre ouvriers au fond et trois en surface 19 . Signe, sans doute, de la médiocrité de ces exploitations, le faible intérêt qu'y attachaient les grands. Jamais au Moyen Age, le roi de France n'a émis la volonté d'imposer la production de houille, position qui diffère radicalement de sa politique envers les mines de non-ferreux. Les droits des seigneurs variaient considérablement d'une région à l'autre et d'un siècle à l'autre. Aucune règle ne s'est imposée 20 . L'étude précise menée par Catherine Verna, à Boussagues, montre cependant une volonté beaucoup plus nette de faire valoir des droits sur la houille dans les dernières décennies du xve siècle. Manifestation d'une réaction seigneuriale sensible à bien d'autres égards. En règle générale, les seigneurs fonciers ou les détenteurs de l'usage de la terre donnaient les houillères à ferme. Les prix des fermages indiquent la modicité des productions et de leurs valeurs. Dans le bassin d'Alès, les mines du Mas-Dieu rapportaient, en 1344, 22 livres par an, celle d' Abilhon seulement 4 livres 21 . De 1473 à 1476, les mines de Baume, Crozols, Broussous et Mercoirol, au nord d'Alès 22 , étaient affermées pour 18 livres, en 1500 la somme 17. F. Claudon, " Etude sur les anciennes mines de charbon du Bourbonnais ", Bulletin de la Société d'Emulation et des Beaux-Arts du Bourbonnais, VIII (1900), 45-49. 18. O. Couffon, op. cit. 19. O. Couffon, op. cit. 20. La question des droits des seigneurs sur les mines de houille a fait l'objet d'une étude poussée de Ph.-J. Hesse, op. cit., 126, 145, 253. 21. A. Bardon, op. cit. ; O. Couffon, op. cit. 22. Abbé A. Albouy, Le Martinet et la vallée de /'Auzonnet à travers les âges, Nîmes, 1957, 59.

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tombait à 10 livres. Une évolution comparable est sensible en Anjou où les mines du bois de Malécot virent leur fermage s'effondrer de 100 sous en 1495 à 20 sous en 1501 puis à néant en 150223 . De telles variations n'indiquent nullement une baisse d'intérêt pour le charbon, mais la médiocrité d'exploitations vite abandonnées faute de moyens techniques pour vaincre les obstacles. Les fermiers des houillères appartenaient à des groupes sociaux très divers. Dans la région d'Alès, des capitaux urbains s'investissaient dans la houille, alors qu'à Boussagues l'exploitation se trouvait largement aux mains de paysans. Même si la mine de charbon ne nécessitait pas d'investissements importants, l'exploitation minière est toujours source de risques et l'association un moyen pour les répartir. Les textes signalent un grand nombre de ces associations regroupant quelques hommes 24 . Boussagues présente un cas qui paraît tout à fait particulier. Ici les mines se divisaient en parts, les " setzènes ", donnant droit à un pourcentage de la production, qui s'achètent et se vendent librement. On peut y voir l'influence de l'organisation économique des mines d'argent qui fonctionnaient sur place avant que le charbon n'apparaisse dans les textes 25 . Propriétaires de "setzènes" ou membres d'associations plus traditionnelles, les hommes qui possédaient la mine y travaillaient-ils ? Les fermiers se distinguent le plus souvent des mineurs. Un notaire d'Alès prend des mines pour vingt-sept mois contre 20 livres, il en donne l'exploitation à un mineur pour 30 livres 26 . A travers les rares textes qui permettent de les appréhender, les ouvriers n'apparaissent jamais comme des mineurs à plein temps. Plusieurs sont qualifiés de laboureurs 27 . Vivant dans des communautés rurales, ils partageaient leur temps entre la mine et les champs. Les sources manquent de précision pour indiquer la part de temps qu'ils consacraient à la mine, pas plus qu'il n'est possible de savoir quelle part occupait l'exploitation du charbon dans leurs revenus, mais il apparaît à peu près certain qu'à la différence des grandes mines d'argent, l'extraction du charbon a été un travail à temps partiel complétant les revenus paysans 28 . USAGES: FORGE ET CHAUX

Les données sont tout aussi rares que pour la production 29 . Il est certain que 23. A. Marchegay, "Note sur l'exploitation de charbon de terre en Anjou, 1494-1514 ",Revue d'Anjou, (1876), 105-108. 24. A. Bardon, op. cit., 5, 7; E. Fournial, op. cit., 428. 25. C. Verna, op. cit. 26. A. Bardon, op. cit. 27. Id., Ibid, 5 ; A. Bouthier, "L'exploitation ... ", op. cit. 28. C. Verna, op. cit. ; A. Bouthier, "L'exploitation ... ", op. cit. ; A. Bardon, op. cit., 5. 29. On peut cependant estimer que c'est dans le domaine des usages que les sources sont le plus nombreuses mais elles sont très dispersées au hasard des comptes et des péages comme des vestiges archéologiques.

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le charbon de terre, houille ou lignite, n'était guère prisé des citadins. Considéré comme polluant par bien des français du Moyen Age, son usage a parfois été interdit par les autorités urbaines. La mesure portait sur les usages artisanaux. A Arles, en 1306, les forgerons devaient cesser d'utiliser du charbon sous peine d'amende30 . Deux siècles plus tard, c'est un serrurier normand qui fut accusé de polluer31 . Trop peu apprécié pour avoir été d'un usage domestique courant, le charbon de terre servait essentiellement à la production artisanale ou industrielle, surtout à la forge et à la fabrication de chaux. Les interdictions à Arles et à Rouen correspondent à une pratique qui se retrouve ailleurs, en particulier dans les forges des villages et des bourgs des pays charbonniers. Les sources sont rares mais là où elles existent, elles manifestent un emploi constant. Le charbon de terre était utilisé par les forgerons de la région d'Alès au XIVe siècle32 comme par ceux de Decize et de ses environs au XVe siècle 33 . Dans la forge de la mine de Pampailly, au milieu du xvc siècle, site d'exploitation du plomb argentifère à une trentaine de kilomètres à l'ouest de Lyon, les forgerons utilisaient le charbon de terre pour forger les pointerolles, ces outils avec lesquels les mineurs abattaient le minerai. En revanche, le charbon de bois servait à la cémentation 34 . Utile à la fabrication et à l'entretien des outils des mineurs, la houille l'était aussi pour ceux des artisans du bâtiment. Dès le début du XIVe siècle, elle apparaît dans les comptes de construction de l'abbatiale de Bonlieu (Loire )35 . Au-delà de ces exemples ponctuels, le charbon est un des facteurs qui expliquent le développement, dès l'époque médiévale, de zones de métallurgie différenciée dans les bourgs des bassins houillers, aussi bien sans doute à Boussagues qu'autour de St-Etienne, en particulier dans la vallée du Furan36 . La fabrication de la chaux est l'autre grande consommatrice de charbon de terre. Mélangé au calcaire dans un four démarré au bois, il élève la température de manière suffisante pour obtenir de la chaux. La qualité du charbon compte peu, ce qui explique qu'à Alès on ait distingué deux qualités de houille très différentes, séparées par des écarts de prix qui semblent considérables, le charbon 30. B. Gille, "Notes d'histoire de la technique métallurgique", Métaux et Civilisations, vol. 1,

n° 5, 99-104. 31. Ph. Lardin, "L'utilisation du charbon de terre à Rouen à la fin du Moyen Age", dans ce volume. 32. A. Bardon, Histoire de la ville d'Alais de 1250 à 1461, Nîmes, t. II, 1896, 341. 33. A. Bouthier, "L'exploitation ... ", op. cit. 34. P. Benoit, La mine de Pampailly, XVe-XVIIIe siècles. Brussieu-Rhône, Lyon, D.A.R.A., 1997, n° 14, 58. 35. E. Fournial, Les villes et l'économie d'échange en Forez aux XIVe et XV' siècles, Paris, 1967, 429. 36. E. Fournial, op. cit., 426-429; C. Verna, op. cit. Sur la métallurgie différenciée à Boussagues à l'époque moderne, J.-F. Belhoste, "L'essor de l'usage industriel du charbon en France au xvnre siècle ,, dans ce volume.

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" gros " pour la forge, à 3 deniers tournois la salmée, et le charbon " menu " pour la chaux à seulement 1 denier tournois. Un lien étroit unissait la production de chaux à la mine, des marchands de la ville afferment ensemble le four à chaux communal et les " charbonnières 'm. Le même usage se retrouvait partout38 . TRANSPORT ET CIRCULATION: L'IMPORTANCE DE LA VOIE D'EAU

La présence de forges utilisant la houille dans les villes signifie déjà un trafic. Le transport pouvait être terrestre, comme les charges des animaux de bât qui passaient sur le pont d'Albi ou les charrettes qui circulaient deux siècles plus tard sur celui de Rouen 39 . Ces transports terrestres se sont limités à quelques kilomètres, voire quelques dizaines de kilomètres, en raison du coût du transport d'un produit de faible valeur40 . A Decize, les marchands et les fèvres locaux faisaient venir par charroi la houille de La Machine, mais il n'y a que 6 km entre les deux agglomérations 41 . Les forges de Pampailly brûlaient de la houille de deux types, selon les analyses. Le premier type peut provenir du gisement de Sainte-Foy-1' Argentière à environ 8 km de la mine d'argent, mais cette possibilité n'est pas une certitude tant ce type de charbon est répandu. En revanche, le charbon mat du second type est incompatible avec la production locale, on en trouve de comparable à Lucenay situé à un peu plus de 25 km par la route. Quoiqu'il en soit, la houille de Pampailly devait provenir de mines jamais éloignées de plus de quelques dizaines de kilomètres42 . Pour les plus longues distances, le transport terrestre ne servait, vu son coût, qu'à compléter la voie d'eau. Des charrettes portaient une partie du charbon extrait à La Machine vers le port des Loges où il était embarqué sur la Loire43 . On peut penser que la Loire inférieure portait aussi des bateaux chargés de charbon dès le xve siècle même si les tarifs de péage ne le signalent qu'au cours du XVIe siècle44 . Marseille, ville importante dans une région où le bois a très tôt manqué, a consommé du charbon arrivé aussi bien par mer que par terre. Au XIVe siècle, des barques venues d' Aigues-Mortes, débouché du Rhône, apportaient du charbon expédié sans doute par voie fluviale d'Alès. En 1477, deux chargements arrivaient des Baumettes dans le Var. Il est très probable que déjà, comme à l'époque moderne, le lignite de Gardanne ait emprunté 37. A. Bardon, "L'exploitation ... ", op. cit., 7. 38. C. Verna, op. cit. ; A. Couffon, op. cit. 39. E. Jolibois, op. cit. 40. Cl. Billot, op. cit. 41. A. Bouthier, "L'exploitation ... ", op. cit. 42. P. Benoit, op. cit. 43. A. Bouthier, "L'exploitation ... ", op. cit. 44. Ph. Mantelier, Histoire de la communauté des marchands fréquentant la rivière Loire, Orléans, t. 1, 1864, 244 et 251.

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la voie terrestre45 . Le transport fluvial et maritime possédait tous les avantages pour un produit pondéreux. Mais il faut se garder de considérer que le transport de la houille ait nécessité des voies d'eau importantes. Au Moyen Age, des cours d'eau très médiocres ont porté des produits lourds, ainsi l'Orb. A son embouchure, le péage de Sérignan taxait le passage de charbon de terre. Selon toute probabilité, il s'agissait de charbon de Boussagues descendu par le petit fteuve 46 . De même la consommation de charbon à Arles, son passage à AiguesMortes, n'étaient possibles que parce qu'il avait atteint le Rhône en descendant le Gard. Le trafic à longue distance le plus important venait de l'extérieur du royaume. En 1295, la ville de Calais reçoit le droit de lever une taxe sur les importations de charbon d'Angleterre ou d'autres pays 47 . Mais c'est la Normandie qui a reçu le plus de houille d'Outre-Manche. Dès 1313, un tarif douanier signale qu'à Dieppe le charbon anglais était taxé. En 1315, on en débarque à Rouen48 . Il semble bien que les importations relativement importantes au XIVe siècle aient ensuite décliné pour reprendre dans les dernières décennies du xve siècle49 . Mais des régions plus lointaines importaient aussi du charbon britannique. En 1324, du charbon de Newcastle est débarqué à Guérande50 . A Bordeaux, la houille anglaise sert parfois de fret de retour pour les bateaux portant du vin51 . Les données manquent pour pouvoir affirmer que d'autres ports de l' Atlantique, comme Nantes ou La Rochelle recevaient du charbon anglais dès la fin du Moyen Age comme ils en ont reçu au XVIe siècle52 . CONCLUSION

Ces mentions de production, d'usage ou de commerce ne doivent pas tromper. Le charbon n'a joué qu'un rôle très restreint dans la France médiévale. Les structures de production, aussi bien techniques qu' économiques, restèrent très artisanales voire paysannes. Son emploi s'est limité à quelques activités, essen45. E. Baratier, F. Reynaud, Histoire du commerce de Marseille, t. II, de 1291 à 1480, Paris, 1951, 286-287 et 661 ; B. Ance!, "L'exploitation charbonnière en Provence et dans les Alpes du Sud avant l'industrialisation'". dans ce volume. 46. C. Verna, op. cit. 47. P. Bougard, C. Wyffels, Les finances de Calais au XIII' siècle, Bruxelles, 1966, 251, n° 3890. 48. Ch.-E. Fréville de l'Orme, Mémoire sur le commerce maritime de Rouen depuis les origines les plus reculées jusqu'à !afin du XVIe siècle, Rouen, t. 2, 1857, 115-119. 49. Ph. Lardin, op. cit. ; M. Mollat, Le commerce maritime normand, à la fin du Moyen Age, Paris, 1952, en particulier 149-151. 50. H. Touchard, Le commerce maritime breton, Paris, 1967, 26, n. 182. 51. J. Bernard , Navires et gens de mer à Bordeaux à la fin du Moyen Age, Paris, 1968, 833. 52. E. Trocmé, M. Delafosse, Le commerce roche lais de la fin du XVe siècle au début du XVIIe, Paris, 1952, 140; J. Tanguy, Le commerce du port de Nantes au milieu du XVI' siècle, Paris, 1956, 36.

LE CHARBON DE TERRE DANS LA FRANCE MÉDIÉVALE

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tiellement à la forge et à la fabrication de la chaux, et à quelques régions, les bassins houillers et certaines villes bien placées sur des voies d'eau y conduisant. Beaucoup de lieux, et non des moindres, semblent avoir ignoré tout usage de la houille, ainsi Paris, alors la première ville d'Occident53 . Face au nombre limité des textes, il faut conserver une extrême prudence si on veut tenter une chronologie. Cependant, la multiplication des documents entre 1250 à 1350 semble manifester le recours au combustible minéral, là où il est disponible, à proximité des gisements et dans certains ports. La consommation de houille serait une réponse à la disette de bois dans un monde surpeuplé où les défrichements ont trop largement fait reculer la forêt54 . A partir du milieu du x1ve siècle, le ralentissement de la production et des échanges correspond au temps de la grande crise mais la reprise de la demande en charbon de terre s'est faite attendre jusqu'à la fin du XVe siècle. La diminution du nombre des hommes, le retour de la friche et de la forêt ont rendu l'accès au bois facile 55 .

53. La première citation de la houille dans les statuts de métier parisiens n'apparaît qu'au siècle dans un règlement concernant les serruriers, daté de 1676, R. de Lespinasse, Les métiers et corporations de la ville de Paris, Paris, t. 2, 1892, 586. 54. G. Fourquin, "Le revers du développement", dans G. Duby, A. Wallon (dir.), Histoire de la France rurale, Paris, 1975, 561-566. 55. A. Bardon," L'exploitation ... ". op. cit., 8; Ph. Lardin, op. cit.

xvne

58

PAUL BENOIT

FIGURE

Localisation des gisements cités

0

....i:===....i:===...., 2ookm 11111111 bassin houiller

DEUXIÈME PARTIE

UN ESSOR CONTRASTÉ

TIMES OF FEAST, TIMES OF FAMINE

A CRITICAL EXAMINATION OF RECENT BRITISH RESEARCH CONCERNING MARKET STRUCTURES AND TRENDS IN THE PRODUCTION OF CARBONIFEROUS FUELS, 1450-1850

lan BLANCHARD

At the beginning of the eighteenth century, the British coal industry, with an annual output of some 2.2 million tons, enjoyed a dominant (ca. seventy per cent) position in the domestic market for carboniferous fuels 1. A hundred and fifty years earlier in ca 1550 the situation had been very different. Coal output had been then diminutive, no more than 227 ,000 tons a year2 , or sufficient to provide about a quarter of the nation's energy supplies derived from carboniferous fuels 3 . During the intervening years, from 1550 to 1700, the coal industry had prospered mightily. lt had been able to virtually completely displace those who had previously supplied domestic and industrial consumers with firewood4 , thereby appropriating their share (ca. forty per cent) of a market which, as a result of income and population changes, increased some 3.5-fold5 . lt had, however, been unable to make any significant inroads in that other sector of the market, which was the preserve of the " coaler" or maker of charcoal. In 1700, the "coaler ", having increased output some 3-fold since 1550, still held almost a third of the British carboniferous fuel market 6 . In this paper, accordingly, an attempt will be made to explain why the coal industry could !. J. Hatcher, The History of the British Coal Industry, vol. 1. Before 1700, Oxford, 1993, 55, 549. 2. Ibidem, 68. 3. As a weighted index of carboniferous fuel prices reveals that these increased (six-fold) at a comparable rate with the general price level it is unlikely that the product increased its share in per capita consumption which may have doubled during the years 1550-1700. 4. Ibidem, 409-458. 5. Total coal output thus increasing ca. 10-fold. 6. Or about 0.9 million tons coal-equivalent of which slightly more than half was consumed by the iron industry. G. Hammersley, "The Charcoal Iron Industry and its Fuel, 1540-1750 ", Economie History Review, Second Series, XXVI, 4 (1973), 605.

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IAN BLANCHARD

make such heavy inroads into the markets of one sector - firewood cutting of the timber-based fuel industry. It will also attempt to explain why it was unable to displace producers in another sector of that industry - coaling who continued to expand output and maintain their market share. In part, producers in the timber-based carboniferous fuel industry lost market share to those who exploited minera! fuel reserves for reasons, which were rooted in the fondamental differences in the nature of their respective industrial resource bases. Operating in conditions of an "open mining frontier ", the British coal industry during the two hundred years 1550-1750 displayed an almost infinitely elastic long-term supply curve. Output expanded by simply applying more labour in an increasing number of broadly similar coal pits7 , price changes reftecting alterations in the marginal cost of labour. Wood, as a renewable resource, similarly experienced no long-term depletion problems. Like other crops, however, changing growth rates related to climatic variations (fig. 1), significantly affected production levels and prices. For nearly two centuries prior to ca. 1580 high growth rates, creating tree-rings which ftuctuated in size about a 1.0-1.2 mm. norm, and a low opportunity cost for the land devoted to timber production ensured plentiful and cheap wood supplies. High labour costs, moreover, favoured minimal fabrication. Only with a cyclical decrease in tree-growth rates from 1580-1630, associated with the petit âge glaciaire, did this age of plenty end. With tree-ring sizes falling to as little as 0.77 mm and maturation periods for trees extending from some twelve to twenty-four years 8 a veritable "wood famine" prevailed. Prices9 rocketed upwards, increasing some 10-fold or by about twice as much as changes in the general price level. Then with the subsequent réchauffement tree growth rates again increased and from ca. 1630-1680 prices fell until they were once more in conformity with the general price level. Once more wood was plentiful and cheap but not for long. Over the two hundred years 1630-1830 "times of plenty ", associated with periods of high tree growth (in ca. 16301680 and ca. 1710-1750) and low prices, largely in conformity with those of the general price level, alternated with " times of famine ", associated with low growth rates and long maturation periods (inca. 1680-1700 and 1750-1800/ 30), when prices rose above the general price level.

7. J. Hatcher, The History of the British Coal ... , op. cit., 65-7, 377-408. 8. Public Record Office, London (henceforth P.R.O.), E. 407/50 f' 399 r 0 SP. 18/157B. 9. For sources of price data see appendix.

;

E. 178/6080 and

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63

Figure l. Tree growth and (deflated) timber prices, 1545-1750

-0-Trœgr""1h

rrm. ring-gr""1h

-Tm-00- Priœ (deflalfd) s,121.3 cubicft in 1760 gerera1 priœs

1545

1570

1595

1620

1645

1670

HIIS

1720

1745

Measured between periods (1580, 1630-1680 and 1700-1750) when woodlands yielded a plentiful harvest, timber prices moved in conformity with the general price level, increased coppicing raising productivity and maintaining the marginal rate of retum of woodland in relation to arable-pasture usage 10 . In such circumstances, wood accordingly remained largely competitive with the products of the coal industry. When "famine" conditions prevailed, however, prices rose far above the general level and wood ceded ground to coal on carboniferous fuel markets. Thus during the late sixteenth century wood prices rapidly increased and from ca. 1590, in terms of units of standard coal energy equivalence, regularly exceeded the price of coal (fig. 2) 11 . Nor during subsequent years did this situation significantly change, although during the periods 1630-1680 and 170010. Whilst during the years 1610-1660 unimproved woodland supported about 1.68 trees

(= 4.67 cords) per acre, managed coppice sustained 10.52 trees (= 30 cords) an acre, at an annual

growth rate of 1.25-1.5 cords per acre per annum and maturation period of 20-24 years. Such improved woodland yielded an annual rent of lüs. Od.-13s. 4d per acre and annual gross return of ca. i l per acre: B.L. Additional Ms. 11052, n° 75 ; Har!eian Ms. 583878, fO 33; Lansdowne Ms. 166 F 348 r 0 in addition, G. Hammersley, "The Crown Woods and their Exploitation in the Sixteenth and Seventeenth Centuries", Bulletin of the lnstitute of Historical Research, XXX (1957), 148. Such productivity increases allowed the rent of woodland to increase at a similar rate to the 6-8 fold increase in arable-pasture rents on which see E. Kerridge, " The movement of rent, 15401640 " ,Economie History Review, Second Series, VI, 1(1953), 16-34. 11. For sources of price data on charcoal-1 and wood see appendix ; charcoal-2, C.K. Hyde, Technological Change and the British Iron lndustry 1700-1870, Princeton, N. J., 1977, 44, 58-9. Coal-! & 2 : J. Hatcher, The History of British .. ., op. cil., 577-586; B.R. Mitchell and P. Deane, Abstract of British Historical Statistics, Cambridge, 1962, 481 -2 and M.W. Flinn The History of the British Coal lndustry. vol. 2. 1700-1830 The Jndustrial Revolution, Oxford, 1984.

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IAN BLANCHARD

1750 there was some closing of price differentials and associated brief periods when the two products enjoyed price parity. Overpriced, from ca. 1590 sales of eut firewood, accordingly, steadily diminished. lts place in the market for carboniferous fuels was replaced by coal. Output in the coal industry, already growing, now increased rapidly, ensuring producers that dominant position in the market which, they would ultimately assume in 1700. In the late sixteenth century, it appeared as though the " coaler " would suffer the same fate. Increasing wood prices were almost paralleled by increasing charcoal prices, the latter first rising to the level of its coal equivalence in 1570 and then regularly exceeding the price of coal from ca. 1590-1630. The "coaler's" fate seemed sealed. Then the price of charcoal fell heavily and subsequently shadowed at a discounted value the price of coal. The "coalers ", having lost ground in the face of competition from the mineral coal producers during the years 1590-1630, were thus now able to stabilise their position, ensuring themselves a thirty percent share of the carboniferous fuel market in 1700.

Figure 2. Carboniferous fuel prices 1545-1800

800 700 600 500

Coal-!

400

Coal-2 Charcoal-1 Charcoal-2

300

-

Wood

200 100

Unit

=2-ton coal energy equivalence

0-Fri"TTT"TTTTTTTTT"TTT"TTTTTTTTTTTT"rrrrrrrrr~~~~

1545 1570 1595 1620 1645 1670 1695 1720 1745 1770 1795

TIMES OF FEAST, TIMES OF FAMINE

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To maintain their position in the carboniferous fuel industry the " coalers " had been forced to innovate, From ca. 1630, they introduced a new, and far more productive, method of producing charcoal. Until that time the production of charcoal had involved " coalers " in the use of three distinctive types of wood supplied in units described as " cords " which in the Kentish unit of measurement, were 128 cubic feet 12 in size and comprised elements of "logwood ", "cleftwood" and "bow-wood" (fig. 3) 13 . Having cleared a round even place or " small pit ", appropriate in size to the specific rate of production, the " coaler " placed the greatest logs endwise in the centre, leaving only a space or " chimney " one foot square to receive the fire. Then he laid about them " flatlings " - another course of " clefts " to the height of the former. Upon this " nether loft " thus piled he put another of the shorter and straightest " clefts " so that every chink in the " nether loft " was filled and the " upper loft " rose round and sharp towards the top in a form resembling a molehill. Then he covered this with the " trowse " or " bow-wood " which was covered with the chips of the fellers. All this was finally covered with fern, which was said to be far better for the purpose than turves, and with "slack" (coaldust and sand) upon the fern. Fire was then put in the chimney and (char-) coal was piled upon this to the top of the chimney, so that the fire started at the bottom and then ascended. Smoke was evacuated by the insertion of a staff, the resultant hole in the cover being subsequently filled on the windward side with wood-chips. " Chawning " then took some ten days during which an intense fire raged in the chimney, slowly consuming the " logwood " from the centre outward. The intense heat passing from the chimney outward through the remaining unburned " logwood " served to turn the " cleft " and " bow-wood " into charcoal without the latter being subject to the damaging effects of direct exposure to ftame. At the end of the firing of the "pit" and before the "logwood" was finally totally reduced to charcoal dust, the "pit" was "drawn ". This involved the " coaler " initially pulling down ca. two loads of charcoal about the " pit " which was spread on the ground until cool, the rest following thereafter. In such a manner three kinds of charcoal were made. First, there was " bell coal " made from the outer " bow " - " crop " wood which, was of fine quality but small in size. Second there was that made from " cleft " wood, which was great, strong and hard charcoal and finally " heart of pit ", or " braile " coal made of the greatest logs, which produced small coal dust.

12. The Kentish and Stafford measure: British Library (henceforth B.L.) Lansdowne MS. 56,

f" 102 v 0 and C.J. Harrison, "The Cannock Chase Ironworks of 1590 : An Assessment ", North Staffs. Journal of Field Studies, XIX (1979), 8 ft. x 4 ft. x 4ft. = 128 cubic feet. The Dean measure = 155 cubic feet and Welsh cord = 175 cubic feet: G. Hammersley, "The Charcoal Iron Indus-

try ... ",op. cit., 609. 13. C.J. Harrison," The Cannock Chase Ironworks of 1590 ... ", op. cit.

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IAN BLANCHARD

Figure 3. Technology 1

A= Chimney. B= Logwood. C=Netller Loft: Cleftwood. D= Shortest, Straightest Cleft E= Bow-wood. F =Fern. G= Sand and Coal-dust.

From the 30 or so "cords" (39 tons) of wood used to construct the pit, "coaling "produced some 7.5 loads (or 6 tons, or about 15 percent by weight) of charcoal, at a conversion rate of 4 ± 37 % 14 "cords" (each of 1.3 tons) 15 of wood per load of charcoal (measuring 12 quarters or 0.8 tons) "bannister

measure "16 . In these circumstances, with wood (including the cost of cutting

and cording) utilised in this " technology I" comprising ca. 55-75 per cent of the " pit-price " of charcoal (i.e. without carriage costs), its acquisition cost exerted a dominant influence upon the final sales price of the charcoal. Increasing wood prices during the years ca 1540-1630 were accordingly paralleled by 14. Inversely related to the rate of tree growth. 15. D. Mendeleev' (red.), Ura/'skaya Zheleznaya Promishlennost v' 1899, St. Petersburg, 1900, ch.l , g. 2, 44. 16. For sources of information concerning technical data see appendix.

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rising charcoal prices, the rate of increase only being reduced by the higher conversion rates obtained from slowly maturing wood. Grotesquely overpriced in relation to coal, in 1630, the fate of the" coaler's" product seemed sealed. Figure 4. Technology II

Then - in Kent in ca. 1640 and in Dean in ca. 1660 - as a new "great pit" technology II was introduced, productivity within the industry was markedly enhanced and the price of charcoal fell heavily and subsequently shadowed at a discounted value the price of coal. This new technology involved a completely new method of "pit" construction (fig. 4) 17 . The "coaler" first levelled a piece of ground between 20 and 30 feet in diameter, delineating the parameters of the "hearth " or "pit ". In the centre, a pole was erected around which the wood was laid, some horizontally and others sloping outward from the centre to form a ftattened cone. The abject was to obtain a free circulation of air from under the heap to communicate with a central chimney formed by the withdrawal of the central pole. The heap of cordwood was then covered with layers of small brushwood and turf, and sometimes with earth on the outside. With the handle of a rake, vent holes were pierced through the outer layer. When the heap was sufficiently fired the top opening, including the aperture of the chimney was closed with pieces of turf. As the fire spread most rapidly on the side facing the wind, a protective screen 8-9 feet high was made from 17. J. Evelyn, Silva , London, 1664, 100-3 reprinted in E. Straker, Wealden Iron, London, 1931, 132-139 and precised in H.R. Schubert, History of the British Iron and Steel lndust1y from 450 B.C. to AD. 1775, London , 1957, 223-224.

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IAN BLANCHARD

hurdles of brushwood. The " coaler's " main task was now to see that the tire spread evenly throughout the heap, and to stop the process by closing the vents as soon as the wood was sufficiently coaled. The timing of closure was revealed when the smoke ceased to evacuate through the vent holes. If the tire was allowed to bum too fiercely, the charcoal would be ruined and accordingly the earth cover was kept in good shape. If fi.ring was too slow, driving new vents could accelerate it. At the end of the fi.ring, the " pit " was again " drawn " and after cooling, the charcoal was " dressed ", separating the larger pieces from the small and dust by riddling with a sieve. In the new technology, the previously employed " logwood " was no longer required. The mechanical control in the fi.ring process it had provided was now ensured by the " coaler's " manipulation of the draught, which was allowed to enter the "hearth ". Accordingly, the logs, which had formally been reduced to small coal dust, could now be sold 18 for purposes other than charcoal manufacture. The "cleft-cord wood" and "bow-wood ", which comprised the principal components of the " hearth ", was all transformed into utilisable charcoal distinguishable only by the size of the pieces. Consequently, conversion rates were markedly improved. From ca. 1640/60-1720 and in Britain for many years thereafter only 2.25 ± 25 % "cords" of wood (each of 1.3 tons) were required for the manufacture of one load of charcoal (measuring 12 quarters/ 0.8 tons or 27 per cent by weight) 19 . Coaling costs were enhanced. The new technology, however, utilised only slightly more than half as much wood as its predecessor. Unit labour costs of cutting and cording, therefore, fell proportionately to the amount of wood used. The share of wood utilised in this "technology II" thus fell to some 25-45 per cent of the "pit-price" of charcoal (i.e. without carriage costs), productivity increased and the substitution of relatively " cheap " labour for " expensive " wood ensured that both total costs and the price of charcoal were heavily reduced. Probably first introduced into England from France20 the new process was rapidly universalized throughout Europe. Everywhere " coalers " enjoyed a new competitive position in relation to alternative suppliers in the carboniferous fuel market. Nowhere was this truer than in Britain where their ability to consistently undercut the price of coal from 1640/60-1720. This allowed them to stabilise their position, ensuring to themselves that thirty per cent share of the carboniferous fuel market in 1700, which they had enjoyed a hundred and fifty years before. Nor did the situation of the charcoal maker significantly change during the course of the eighteenth century. Wood prices continued to ftuctuate in accord with the state of the timber harvest. A period of high tree growth in 1700-1750 18. eg. P.R.O. E178/5304/41; B.L. Additional Ms. 33155, f' 131 r0 • 19. For sources of information concerning technical data see appendix. 20. H.R. Schubert, op. cit., 224.

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and low prices, which moved largely in conformity with the general price level, was followed by a " time of famine ", associated with low growth rates, long maturation periods and high prices in 1750-1800/30 (fig. 1 above). "Coalers ", who operated, on the basis of technology II, experienced parallel changes in raw material costs and were forced to make corresponding price increases. So also from ca. 1750, however, did those exploiting reserves of mineral coal as they began to experience for the first time acute resource depletion problems, which necessitated heavy capital investments on winding, or drainage equipment21 . From the mid-eighteenth century consumers of carboniferous fuels, whether they utilised charcoal or coal, experienced prices which,

increased at a rate which was only slightly less than the rise in the general price level. Those who had substituted coal for firewood as a domestic or industrial fuel, accordingly, now increased their consumption of mineral coal only slightly. The rise in the prices of both coal and charcoal, which was not markedly less than the increase in the general price level, ensured that coal sales increased only some 3-fold in a market which, as a result of income and population changes, more than doubled in size22 . Ironmasters, who constituted in 1750 the principal consumers of charcoal, suffered a similar fate. From ca. 1630 until the mid-eighteenth century, " coalers " had adopted the new technology II. The " real " price of charcoal had fallen. Coupled with the introduction of fuel-saving techniques in iron production, this led to a reduction in the amount of timber used from 4.65-7 m 3/ cwt. to 2.8-5.3 m 3/cwt. of iron23 . There was, accordingly, only a slow increase in the iron industry's fuel costs in comparison with both input prices and the general price level. Such was not the case, however, during the next timbergrowth cycle, which, as far as the timber trade was concemed, reached its nadir inca. 1830. With the gains from technological change to conserve on charcoal consumption spent, there seemed an imminent possibility that the decrease in timber growth rates and resultant rise in prices from about 1750 would be transmitted into fuel costs. The onus of cost reduction had passed from the utilising industry, working within the existing technology, to its primary supplier. The failure of that supplier in England, outside of the Weald, to affect such a technological transformation meant that imminent possibility became present reality. The rise in timber prices was transmitted to charcoal prices and rising charcoal prices resulted in higher fuel costs. A resource crisis of no mean dimensions was emerging which engendered its own technological response. 21. J. Hatcher, The History .. ., op. cit., 555. 22. I.e. Non-iron industry coal sales increased from ca. 4.2 to 12.4 million tons (or 2.95-fold) between 1750-1800 in a market which saw population double and per capita income increase by about fourteen percent (or 2.28-fold in ail). 23. G. Hammersley, "The Charcoal Iron Industry ... ",op. cit., 604, table 2.

70

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In England this involved, during the years 1750-1770, the adoption of a preexisting high cost technology - coke smelting 24 . Apposite to the high timbercharcoal prices prevailing at the time of its introduction, the new coke technology had been left stranded by the cyclical downswing in input prices 17001750. During these years the Coalbrookdale complex survived only by crosssubsidising its wrought iron sales from the returns on speciality products and it was not until the anachronistic achievement of externat economies through transport improvements during the 'forties that it once more became competitive in wrought iron markets. Other producers, however, faced with only a limited speciality market and denied the transport cost advantages of the Shropshire producer continued in the old, low cost, ways until the period 17501770 when rising charcoal prices again made coke smelting attractive. Thereafter one by one ironmasters adopted the new technology, the low consumption South Wales producer, utilising high carbon content coals first, and the Scots smelter last. Yet, even having established ascendancy, the new coke technology did no more than stabilise rising costs at a lower level than those of the contemporary charcoal producer but one, which was still above the level of 175025 . Moreover, as minerai coal prices began to rise after 1750 it was by no means self-evident that the ascendancy of the coke producer would continue. The Wealden "coaler ", by again innovating and improving wood-charcoal conversion rates by as muchas 33 percent (fig. 6), was once more able to render his product price competitive with coal. The Lancashire charcoal smelter, benefiting from a short-term upswing in timber growth rates and resultant lowering of charcoal prices, was again able to reduce his unit fuel consumption during the years 1790-181026 . The cost differential between the two ironsmelting technologies was thus again closing. Until the opening years of the nineteenth century charcoal and coal producers thus vied to gain control of supplying fuel to the British iron industry. The rise in carboniferous fuel prices, which was only slightly less than the increase in the general price level, however, ensured that sales only slightly more than doubled in a market which, as a result of income and population changes, had also doubled in size. Only from the 1790s did coke iron producers corne to enjoy a marked reduction in fuel costs as they were able to secure the external economies

engendered by the dissemination of the transport improvements pioneered at Coalbrookdale fifty years earlier. Thereby they isolated themselves from the effects of rising coal prices. The fate of the British charcoal iron industry was now finally sealed and the new coke technology established its supremacy. Subsequent fuel economy improvements through the introduction of hot blast 24. On the introduction and diffusion in England of coke smelting see C.K. Hyde, Technological Change .. ., op. cit., 53-68. 25. Ibidem, 59-60. 26. B. Boethius, "Swedish Iron and Steel, 1660-1955 ", Scandanavian Economie History Revinv, VI (1958), 155.

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merely served to equilibrate regional differences in consumption27 . With the last bastion of charcoal consumption stormed, the " coaler " no longer had any significant vent for his wares. The producer of minerai coal had finally taken his place in carboniferous fuel markets. But the latter's position in supplying the iron industry was entirely predicated on those extemal economies which the ironmasters had achieved through fuel transport improvements which had a once and for all effect in reducing coal prices. By the utilisation of coal, moreover, they had tied themselves to a pattern of resource depletion and diminishing retums inherent in the use of a minerai fuel. Having reaped the rewards of their actions during the years 1790-1830, and having destroyed charcoal production in the process, accordingly, they began from ca. 1840 to experience the costs in rising fuel prices. Those who remained constant in their adherence to a charcoal technology experienced a somewhat different fate. Even in the relatively favourable conditions, prevailing during the early eighteenth century the Russian " coaler " had been a high-cost producer of charcoal. Adverse regional climatic conditions, resulted in long timber maturation periods and necessitated that Uralian ironmasters " set aside wood for the whole works that is not less than thirty years 28 , being near to the factory in which it is adjacent "29 . The relatively fastgrowth characteristics of the arboreal varieties - pine, fir, birch, aspen and larch - which made up the nation 's woodland cover, moreover, produced wood which was converted into charcoal at lower conversion rates 30 than English beech or oak (fig. 5) 31 . Thus whilst Russian wood was cheap 32 the " coaler's " raw material costs were about forty per cent higher than those of their English counterparts. Russian unit labour costs, for " coalers " employing 27. C.K. Hyde, Technological Change ... , op. cit., 146-165. 28. I.e. thirty-fold the annual consumption of the works, in order that supplies would be renewable and iron masters would not have to buy charcoal from out with the bounds of their estates. 29. Wil'helm de Hennin, Opisanie ural' skikh i sibirskikh zavodov 1735, edited by M.A. Pavlov, Moskva, 1937, 354-371. 30. In 1704 whilst English "coalers ", employing technology Il, used ca. 10m3 of timber to produce a ton of charcoal their Russian counterparts, employing technologies 1 and Il used 28 and 18 m 3 respectively: fig. 5. 31. Sources of information conceming price and technical data on British and Russian charcoal production are listed in the appendix. On tree ring growth in Russia see the articles of Professor Schvedov," -Les' kak' letopis zasukh- ", Meteorologicheskii Vestnik, V (1892) and D. Mendeleev, "-Izmereniya derev' i drugiya danniya o prirost lesov' v ural'skikh krayakh- ", in D. Mendeleev (red.), Ural'skaya zheleznaya promishlennost' v 1899 g., St Petersburg, 1900, 24. 32. At some 56 d. sterling equivalance (= 4.625 kop.) for one Kentish cord (=.37 cubic sazhen) at the current exchange rate in 1704 [Jennifer Newman," 'A Very Delicate Experiment' : British Mercantile Strategies for Financing Trade in Russia, 1680-1780 ",in I. Blanchard, A. Goodman and J. Newman (eds), Industry and Finance in Early Modern History. Essays presented to George Hammersley on the occasion of his 74th Birthday, Stuttgart, Franz Steiner Verlag, VSWGBeihefte, 98, 1992, 140] and allowing for differences in the relative purchasing power of silver in England and Russia [Jennifer Newman, Russian Foreign Trade, 1680-1780: The British Contribution, Unpublished Ph.D. thesis, Edinburgh University, 1985, 165]. In 1704 the Kentish price of a cord was 72 d : see appendix for sources providing English price data.

72

IAN BLANCHARD

the prevailing technologies (1 33 and Il), were also higher34 . With the "real " resource cost of their charcoal being more than twice that of their English counterparts 35 , therefore, Russian ironmasters were seriously disadvantaged when, in the early 1730s, they began for the first time to attempt a penetration of international markets 36 . Figure 5. Technology: Wood-Charcoal Conversion Rates

Technology 25

- - • - - England -I

20

---0--- Russia-II

15

- - • - - England-II

10

---Russia-III Russia-I

5 0-f'T'1TTTT"rTT'M'T"rTT'M'T"rTTTT"MT,.,..,T"T'r,.,..,,..,.,....,.....,..,.,....,.....,..,.,..~~~

0.77

0.87

0.97

1.07

1.17

1.27

Tree rings (mm.)

Their response was to innovate (fig. 6) 37 . In this instance, the wood utilised again comprised both felled trees and wind-fallen timber. Felling was in the spring or early summer to give the timber time to dry out during the hottest summer months. In late summer the trees were barked and eut up into suitable lengths. Only when the temperature in the pit was high enough, about 270°C, did the timber begin to disintegrate by so-called dry distillation. A single charcoal-bumer usually operated 2-4 pits at once. He followed the carbonization 33. Because of the small expenditures involved and cheaper labour costs in firing, technology

1, which had been rendered obsolete in the West in the 1630s, was able to maintain its position against technology II in Russia until ca. 1724. S.G. Stumilin, Istoriya chernoi metallurgii .. ., op. cit., 64 n. 34. At some 297 d. sterling equivalance (= 22.86 kop.) per Joad of charcoal, Russian labour inputs were 1.8-times and wage rates 2-times greater than in England. 35. Russian charcoal, at some 447 d. sterling equivalance a Joad(= 36.8 kopecks a Joad or 10 kopecks a koroba) in 1704 was more than double the cost of English charcoal (207 d. per Joad). 36. A. Kahan , "Entrepreneurship in the early development of iron manufacturing in Russia ", Economie Development and Cultural Change , X, 4 (1962). 37. Wil'helm de Hennin, Opisanie ural' skikh i sibirskikh zavodov 1735, edited by M.A. Pavlov, Moskva, 1937, 354-371 and N.l. Pavlenko, " Materiali o razvitii ural'skoi promyshlennosti v 20-40kh godakh XVIII v ", lstoricheskii Archiv, IX (1953).

TIMES OF FEAST, TIMES OF FAMINE

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process by keeping an eye on the way it " sweated " and shrank, and on the colour of the smoke coming out of the smokeholes. A medium-size pit, which was some 15 feet in diameter and contained some 53 "cords" (= 20 sazhen3) of wood, was allowed to bum itself out after 3-6 weeks. lt was then permitted to stand closed for a few days before the hot charcoal could be dragged out and extinguished. The pit could also be damped down. Violently beaten with a club, it was covered with sand and soaked in water, after which it was allowed to stand and cool for 20-30 days . Figure 6. Technology III

Horizontal

Vertical

74

IAN BLANCHARD

From the 50 or so "cords" (= 20 sazhen3 or 70 tons) of wood used to construct the pit, "coaling" produced some 31.25 loads (= 64 koroba of 9.5 chertverts or 21.34 tons , i.e. about 30 percent by weight) of pine charcoal, at a conversion rate of 2 ± 46 % "cords" (each of 1.3 tons) of wood per load of charcoal. Accordingly, when Russian "coalers" were faced from ca. 1760-90 with a rise in timber prices of even greater dimensions than in the West 38 , unlike their English counterparts, they had the means to compensate. With the diffusion of the new technology III, Russian charcoal prices were stablized at a level below those prevailing in the West. Thereby Russian ironmasters established a competitive advantage over charcoal producers elsewhere. They also secured lower fuel costs than those prevailing in the English coke-smelting industry. Indeed so successful was the Russian iron industry that until ca. 1815, if unimpeded by war or commercial restrictions, it could undersell even its most efficient English competitor on the London market39 . With the contemporary transference of this technology to Sweden40 and England (the Weald), moreover, it began to appear that charcoal iron would perhaps once more corne to dominate world iron markets and that the " coaler " would be able to re-establish his position in carboniferous fuel markets. In the event, the imposition in the West after 1790 of steadily increasing tariffs against charcoal iron products prevented this being realized. lt was only when the extemal economies gained by transport improvements lowered coal and ore input prices, however, that the English coke iron producer could dispense with tariff protection and enter upon that phase of expansion which would establish Britain's world supremacy. That supremacy, moreover, was only based upon a reduction of input prices. It was not due to a greater efficiency in smelting. In the 1840s, accordingly, when English input prices once more began rise, Russian and Swedish charcoal iron producers, who in the interim had continued to reduce charcoal costs and effect, through the use of the Ekman gas generator and reheating furnace, improvements in fuel input consumption, remained competitive with their English rivais. In terms of best practice in 1850 Russian charcoal iron and Scottish coke iron production costs were indistinguishable41 . In the l 750s it was only in England that the charcoal industry was finally

ousted from carboniferous fuel markets. Elsewhere for more than another century thereafter, in spite of discrimination against its products, by a continuai 38. Boris N. Mironov," 'Revolyutsiya tsen' v Rossii v XVIII v ", Voprosi /storii, 11 (November, 1971), 54-55. 39. C.K. Hyde, Technological Change ... , op. cit., 104-105. 40. K.-G. Hildebrand, Svenskt Jarn. Sexton och sjuttonhundratal Exportindustri fore industrialismen, Stockholm, Jemkonterets Bergshistoriska Skiftserie, 20, 1988, 77-88. 41. V.K. Iatsunskii, "Materialy pravitel'stvennago obsledovaniia zavodov chemoi metallurgii Rossii v pervoi polovine 50-kh godov XIX v. kak istoricheskii istochnik' ", Voprosi sotsial'noekonomicheskoi istorii i istochnikovedennia perioda feodalizma v Rossii. Sbornik statei k 70-letuiu A. A Novosel' skogo, Moscow, 1961. 352-362.

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process of innovation that industry was not only able to survive but actually flourished, APPENDIX

Sources of information concerning price and technical data on British charcoal production Dean British Library, Harleian Ms. 6839 Lansdowne Ms., 166 Public Record Office, State Papers, SP. 18/130, 157B Chancery, C. 54/2103; C. 66/1904, 2060, 2258, 2740; C. 99/22 Exchequer, E. 178/3874, 5304, 6080/1; E. 407/50 Weald D.W. Crossley (ed.), Sidney lronworks Accounts, 1541-1576, London, Camden Society, 1975, Fourth Series, XV. Pelham Papers : British Library, Additional Mss., 33, 154-33, 156. Stafford Burghley Papers : British Library, Lansdowne Ms. 56. Wales Scudamore Papers, vol. XII: British Library, Additional Ms. 11052, n° 60-65, 67-71, 75, 78. Sources of information concerning price and technical data on Russian charcoal production S.G. Stumilin, lstoriya chernoi metallurgii v SSSR, Moscow, 1954, 64. B.F.J. Hermann, Statistische Schilderung von Russland in Rucksicht auf Bevolkerung Landesbeschaffenheit, Naturprodukte, Landwirthschaft, Bergbau, Manufakturen und Handel, St Peterburg & Leipzig, 1790, 415. Wil'helm de Hennin, Opisanie ural' skikh i sibirskikh zavodov 1735, M.A. Pavlov (ed.), Moskva, 1937, 354-371. N.I. Pavlenko, "Materiali o razvitii ural'skoi promyshlennosti v 20-40kh godakh XVIII v. ", lstoricheskii Archiv, IX (1953), 55 ff. 1. Herman, Sochineniya o sibirskikh' rudnikakh' i zavodakh, St. Peterburg, 1797, 2 vol., I, 95.

EXPERIMENTS BASED ON COAL FROM LIÈGE THE INNOVATION OF COALFIRING IN THE GERMAN SALTERN INDUSTRY IN THE LATE lfrhCENTURY

Peter PIASECKI

INTRODUCTION

This paper deals with the introduction of the coal-firing technique into the German saltern industry 1. It focuses on the one hand on the first experiments of this type in Germany at the Allendorf saltern in the 1560s, and on the other hand on progress and inventions relating to this technology as recorded in drawings by Heinrich Schickhardt at the saltern at Saulnot, which in the late 16th century was part of Württemberg. An invention by Schickhardt dating from 1634 and documenting clear-cut progress in the development of the fi.ring technique for salt boiling is also presented. To approach the above issues, access was obtained to previously unused sources from Stuttgart State Archives and from the Manuscripts Department of the Murhardt Library in Kassel 2 . Another issue of relevance in this context is the extent to which the demand for coal by the salterns had a crucial impact on the prospecting for and exploitation of deposits in the late 161h and early l 71h century. The theory to be put forward here is that - like the development in Scotland3 - the salt industry as a dominant economic branch on the consumer side played a major role in promoting the beginnings of coal mining in Germany too. 1. M. Fessner, "Der markische Steinkohlenbergbau vor der Industrialisierung: 1600-1806/07. Ein Forschungsproblem ",Der Anschnitt, 44 (1992), 150-162, and 45 (1993), 84-100; P. Piasecki, Das deutsche Salinenwesen 1550-1650. Invention, Innovation, Diffusion, Idstein, 1987. See also P. Piasecki, "Territorialherrschaft und die Diffusion von Innovationen im deutschen Salinenwesen der frühen Neuzeit ", Technikgeschichte, 57 (1990), 165-188. 2. Hauptstaatsarchiv Stuttgart, NachlaB Heinrich Schickhardt, Signature N 220 ; Murhardtsche Bibliothek Kassel, Handschriftenabteilung, New Saltzbuch, Signature 2° Ms Hass 186. 3. Ch.A. Whatley, The Scottish sait industry 1570-1850: an economic and social history, Aberdeen, 1987, 13-15.

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PETER PIASECKI

Technology transfer for the use of coal in the salt-boiling process apparently ran from England to Germany, though the names of those involved in the transfer and the exact route remain unknown. With respect to Scotland, Christopher Whatley confirms that coal was used for boiling sea water as early as the 15th century : " From the fifteenth to the nineteenth centuries, the vast bulk of Scottish salt was made in coal-fired iron pans, most of which were situated on or near the coal-bearing land which stretched along both banks of the river Forth "4 . And with reference to England, Robert Multhauf states: "A sea water boiling industry reemerged after 1546 around the coal-mining centers near the mouths of the Tyne and Clyde, at Whitehaven on the Irish Sea and, in other places where coal was cheap enough to justify its use in boiling down sea water "5 . The boom in the saltem industry in England was fundamentally due to the new technology centering on the use of coal, because the energy requirement for boiling sea water was exceptionally high. It was because of the prohibitive costs of wood as a fuel that most of the sea-water saltems had been abandoned in the 14th century, leaving England largely dependent on imports of salt, primarily from France. However, this situation had eased completely by the late l 7th century, restoring England's fundamental self-sufficiency 6 . THE BEGINNINGS OF COAL FIRING AT ALLENDORF SALTERN

In Germany, coal-fired salt boiling started at Allendorf saltem, where one of the most outstanding 16th century saltem specialists, the clergyman and Salzgrafe (saltem principal) M. Johannes Rhenanus 7 , was active from 1556 having been vicar since 1555 - until his death on 13th May 1589. Rhenanus is among the few l 6th century salt experts of whom something more than just the name has been passed down to us, yet our knowledge of him is fragmentary8. He was not only one of the pioneers of the innovation era in the saltem industry in the 16th century but also one of the trailblazers in coal-mining in Germany, a fact that has remained virtually unacknowledged in the literature on the mining industry9 . Initial experiments involving the use of coal in saltems date back to the year 1560 according to Engels and Koch-Stemfeld. In this context, Koch-Stemfeld writes:" ... und seit 1560 wurden dort die Steinkohlen benutzt; man hatte von 4. Ibid., 10. 5. R.P. Multhauf, Neptune' s Gift. A History of Common Salt, Baltimore-London, 1978, 57. 6. J.F. Bergier, Die Geschichte vom Salz (Fribourg 1982 in French Language), Frankfort-New York, 1989, 89. 7. H. Cramer, Johannes Rhenanus der Pfarrherr und Salzgriife zu Allendo1f an der Werra. Ein Beitrag zur Bergwerksgeschichte Pommerns an dem 16. Jahrhundert, Halle, 1879. 8. See Ibid., A General Biography about Johannes Rhenanus is missing until today. 9. About coal-mining see R. Slotta, Technische Denkmiiler in der Bundesrepublik Deutschland, vol. I., Selb, 1975 and Engels, "Rechtsgeschichte der Saline Sooden bei Allendorf an der Werra '', Zeitschriftfür Bergrecht, 21 (1881), 178-220.

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den uralten und ungheuer ausgebeuteten Kohlenwerken bey Lüttich Kunde erhalten " 10 . A similar statement is made by Engels, though without any actual proof being found, as is reftected in his guarded formulation : " Die ersten Versuche mit Kohlenheizung sollen 1560 gemacht worden sein " 11 . The coal used by Rhenanus for this purpose was brought along by salt carriers as homeward freight. Multhauf states, with reference to Willekop : " Coal firing was introduced in the 1550s with coal from Liège " 12 . However, the coal supplies from Liège were unable to meet the demand even at the initial stage of the experiments. For this reason Rhenanus began exploiting the coal deposits at the Meissner 13 , not far from Allendorf. The experiments carried out in subsequent years must indeed have produced positive results, for Rhenanus reported them to his state sovereign who then decreed on 7th June 1571 : "So seind wir des Vorhabens, solch Kohlenbergwerk im namen Gottes uns selbst und unsern armen Unterthanen zum Pesten crbawen und vorsetzen zu lassen " 14 . It was not until 1578, however, that a continuous supply of serviceable coal was finally mined. Additional, newly driven galleries were not always a success, so that it is hardly surprising that no real breakthrough with the new technology had been achieved even by 1588, 28 years after the initial experiments. At that time Rhenanus was using coal for firing in 18 of 87 salt-boiling houses. In the same year he developed an iron grid to increase the efficiency of his firing technique 15 . There is a reference to this iron grid in the approximately 2000-page long manuscript by Johannes Rhenanus - known in the literature as the Salt Bible-, which has not previously been registered. Rhenanus reports that a grid for coal-firing must have 23 iron bars weighing a total of 23 to 24 hundredweight16. Moreover, five girders are required, each of them weighing 3 hundredweight. The total weight of the grid was thus 39 hundredweight. The life of one such grid was 11/2 years, and the scrap iron was sold for 10 albus and 8 groschen per hundredweight. While the grid was in use, the iron bars were subject to burning, with a consequent loss in weight of 4 to 5 hundredweight17. One iron bar weighing about one hundredweight would have a cross section measuring one-quarter of an inch and a length of about 0.8 meters. The 10.

Koch-Stemfeld, Die teutschen insbesondere die bayerischen und osterreichischen München, 1836, 77. 11. Engels, op. cit. (note 9), 210. 12. Multhauf, op. cit. (note 5), 69. 13. Slotta, op. cil. (note 9), 44 explains that coal-mining at Meissner starts in 1560. 14. Engels, op. cil. (note 9), footnote 43. 15. Cramer, op. cit. (note 7), 37. 16. New Saltzbuch, op. cit. (note 2), Der erste Appendix, 269. 17. Ibid., Der erste Appendix, 269R. J.L.

Salzwerke,

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PETER PIASECKI

cross sections were selected with reference to the hearth constructions later recorded at the Saulnot saltem 18 . Rhenanus and Thülde 19 documented the coal consumption. According to Rhenanus, the quantity used under a pan in which 3 to 4 boiling operations (Sude) took place every week was 18 to 20 measures (MaB) per boiling house or work (Sud), with one measure (MaB) of coal involving costs of 5 albus inclusive of haulage charges 20 . Rhenanus obviously failed, however, to make his coal-fired pans economically viable, for his state sovereign demanded reports from Rhenanus and simultaneously from other saltem officials because of the lack of clear-cut success. The appraisal made by the other officials was eventually found to have marked deviations from that submitted by Rhenanus. Another important indicator from the Rhenanus manuscript shows in this context that the coal supplies in Allendorf must have assumed a substantial scope during the 1580s. For instance, Rhenanus issues an instruction on how the coal measuring is to be done at the saltem. He stipulates that the delivered baskets are not only to be recorded by each salter but that each carrier should compare the number of " notches " made in his " register " with the records kept by the salters every Saturday, so that payment could be made on that basis 21 . FURTHER EXPANSION OF THE COAL-FIRING TECHNIQUE IN THE 16th CENTURY

At the same time as the salt-boiling facilities near Unna, previously known under the name Brockhauser Salzwerke, were under construction, various technical innovations such as pre-warming pans and trickling works 22 and, of course, the use of coal were implemented. A specialist with extensive experience in the new technology, Jacob Philips from Allendorf, had been acquired for implementation of the coal-firing technique 23 . By 1600, directly after construction of the salt-boiling facilities 24 , coal had been purchased to a total value of about 1000 Reichstaler, and especially during the Thirty Years' War the high rise in the price of salt had made coal winning, above all from the Harde and Unna mines, into a profitable business for salt works 25 . Coal from 18. Hauptstaatsarchiv Stuttgart, Nachla6 Heinrich Schickhardt, N 220 T 58. 19. J. Thülde, Haliographia, Eissleben, 1603. 20. Engels, op. cit. (note 9), 212. 21. New Saltzbuch, op. cit. (note 2), Der erste Appendix, S. 229. 22. Piasecki, op. cit. (note !), 120-138 and 184-203. 23. Fessner, op. cit. (note 1), 1992, 158; W. Timm, Salz aus Unna. Von den Brockhauser Salzwerken zu Saline und Bad Konigsborn, Unna, 1989, 11. 24. Concernig the difficult property system see e.g. Timm, op. cit. (note 23), 5-20. 25. Fessner, op. cit. (note 1), 1992, 159.

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the Dortmund area, however, was supplied not only to Unna but also to the nearby saltems at Werl 26 . Further saltems experimenting with coal-firing for the boiling process were the Juliushall saltem at Bad Harzburg, where experiments were carried out from 1584 onwards with coal from the Hohenbüchen ward on the Hilfe 27 , and the Salzhemmendorf saltem, which also belonged to the Duchy of Brunswick and which used coal from the Osterwald mine to the north of the saltem28 . Similar experiments, often using frugal coal deposits from the vicinity of saltems, are recorded in Salzhausen29 in the Wetterau, in Nauheim 30 and at the Gottesgabe saltem near Rheine with coal from Lingen31 . THE SAULNOT SALTERN AND HEINRICH SCHICKHARDT'S INVENTION

More detailed information on the coal-firing technique is provided by the Saulnot saltem (see D. Morin fig. 2 and 4). lt was at this saltem in the county of Montbilard, which formed part of Württemberg in the l 61h century, that Heinrich Schickhardt produced a technically advanced drawing of the hearth system with pan, hood and iron grid for coal-firing32 . lt was this very iron grid which formed an essential feature of the construction, because the bars aligned in parallel had to be placed very close together to prevent the coal from dropping through. Schickhardt noted in the margin of this drawing, which shows the hearth in horizontal projection and in cross-section : der Rost hat 22 eisern stangen, die ligen wegen der stein kolen nur ein zol von einand33 . Although this pan was in existence in 1593, it must have dated from only just before Schickhardt's report, for in 1587 the saltem and the community had been destroyed by tire in the invasion by the Catholic army under the Duke of Guise. In 1591, Nicolaus Vassenheim from Basle was awarded the right to set up at the saltem new ovens and pans which would require only half the firing wood 34 required by conventional hearths. 26. F.V. Klocke, Das Patriziatproblem und die Werler Erbsiilzer, Münster, 1965, 75-80. 27. F. Tenner, "Der Pfarrer und Salzgrafe Rhenanus aus Allendorf und seine Beziehungen zu Herzog Julius von Braunschweig und zum Salzwerk Juliushall ", Braunschweigisches Magazin, 19 (1913), 141-149. 28. Engels, "Geschichte der ehemaligen Saline zu Salzhemmendorf ", Zeitschrift für Bergrecht, 21(1881),194-219. 29. E. Blücher, Sa/inen und Salzhandel in der Wetterau mit besonderer Berücksichtigung von Nauheim im 17. Und 18. Jahrhundert, Diss. Marburg, 1931, 30 and footnote 102. 30. Ibid., 30. 31. M. Murdfield, Geschichte der Saline Gottesgabe bei Rheine in Westfalen, Diss. Münster, 1925, 127. 32. Hauptstaatsarchiv Stuttgart, NachlaB Heinrich Schickhardt, N 220 T 58. 33. Ibid. 34. W. Carié, "Die Geschichte der ehemaligen Saline Saulnot in der Grafschaft Miipelgard ", in W. Carié (ed.), Beitriige zur Geschichte der württembergischen Salinen, Stuttgart, 1968, 95104.

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As early as 1590, Duke Friedrich of Württemberg had encouraged coalprospecting activities in the area around the saltern, and in 1593 coal was being mined, though only with a moderate yield, as we known from Schickhardt35 . However, the situation must have improved by 1606, for in that year a gallery was driven, where "eitel fiele kolen" was found 36 . Further records by Schickhardt, dating from 1620, provide information on the efficiency of coal in the salt-boiling process. He reports, for example, that Duke Friedrich set up an imposing coal mine, with whose coal boiling was done with great benefit in covered pans at the Saulnot saltern. The costs of the new firing medium were moreover only half those previously spent on wood, so that he came to the conclusion : Darbey siehet man, dafi nit alle newerungen zu we1fen seindt37 . His constant dealings with salterns and coal mines gave Schickhardt a good overview of the technical developments in that field. It is hardly surprising, then, that he dealt with the design for a new boiling pan in a manuscript dating from 1634. Before detailing the technical specifications, he wrote that he wished to boil salt with less wood, peat or coal with his new pan and that he had not yet seen such a construction (fig. 1) 38 . He then describes the second drawing in great detail: In solchem werk salle zwo pfannen handereinander und al! so gesetzt werden, das in die hinder pfanne F beji G das kallt wasser laufft welches vonn der hitz die aufien nur vergeblich im Rauchhen geht, gewermbt würdt, solch wasser sol! aufi der pfanne F beji H in den Canal K und aufi dem Canal in alle aufrechte Ror lauffen 39 . The further course of the brine through the piping system is described according to the drawing. With reference to coal firing, he then adds that a larger hearth construction with many pipes one beside the other has to have an iron grid placed over the pipes, sonst wirden zuvil kolen in den wendofen M herunder fallen 40 . Coal and ashes which have fallen down can, however, be withdrawn through such a pipe. It is not known whether Schickhardt's design was put into practice.

35. 36. 37. 38. 39. 40.

Ibid., 100. Hauptstaatsarchiv Stuttgart, NachlaB Heinrich Schickhardt, N 220 T 174. Carié, op. cit. (note 34), 100. Hauptstaatsarchiv Stuttgart, NachlaB Heinrich Schickhardt, N 220 T 256. Ibid. Ibid.

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Figure 1 : New sait boiling pan system designed by Heinrich Schickhardt in 1634 (Hauptstaatsarchiv Stuttgart, NachlaB Heinrich Schickhardt N 220 T 58)

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SEL ET CHARBON DE TERRE EN FRANCHE-COMTÉ DU

XVIe AU XIXe SIÈCLE

MODÈLE ÉCONOMIQUE ET SOURCE D'INNOVATIONS TECHNIQUES

Denis

MORIN

Face à la pénurie de bois et pour maintenir leur niveau de production, les salines européennes commencèrent à réduire leur consommation de charbon de bois dès la première moitié du XVIe siècle 1. D'autres combustibles, comme le lignite keupérien, sont alors utilisés. Innovation technologique importante, l'élan donné à l'exploitation du lignite en Franche-Comté, devait se prolonger et se développer au cours du xvne siècle pour donner naissance à une industrie, qui se pérennisera jusqu'à la fin du XIXe siècle (fig. 1). La production de lignite servait principalement aux salines pour le chauffage des poêles à évaporation des eaux salées. CONTEXTE GÉOLOGIQUE

Dans le nord de la Franche-Comté, le Trias, souvent masqué par des formations fluvio-glaciaires, affleure autour de l'extrémité occidentale du massifvosgien2. Composé des grès à roseaux du Keuper, il renferme des filets et des bancs charbonneux d'épaisseur variable. Le lignite keupérien, de qualité inférieure à celle de la houille, est présent, en particulier au nord de Villersexel dans la région de Saulnot, favorisé par une tectonique locale 3 . La puissance des bancs de lignite varie de 0,20 m à 0,90 m. L'extraction de ce combustible, relativement friable aux affleurements et dur en profondeur, nécessitait l'emploi de la poudré. 1. A. Bouvard, Les économies de bois de chauffage dans les salines européennes à la fin du XVI' et au début du XVII' siècle, fasc. 111, Belfort, 1989, 256-307. 2. B.R.G.M., Synthèse géologique du sud-est de la France, mémoire, n° 125, 1984, 72-74. 3. E. Thirria, "Notice géologique sur les environs de Saulnot-Haute-Saône", Annales des Mines, tome XI, 6e livret (1825), 391-416. 4. E. Thirria, Statistique minéralogique et géologique du département de la Haute-Saône, Besançon, 1833, 353 p.

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DENIS MORIN

SAULNOT : SEL ET HOUILLE

A 15 km à l'ouest de Montbéliard, le village de Saulnot doit son nom à des sources d'eaux salées situées sur son territoire. Attestée dès le milieu du XIIe siècle, leur exploitation cessa au début du XIXe siècle. Saulnot est l'une des premières salines européennes à avoir expérimenté la houille pour l'évaporation de ses eaux salées. Plusieurs facteurs sont à l'origine de cette mutation technologique: la pénurie de charbon de bois avec l'exploitation intensive des forêts aggravée par la création du haut fourneau de Chagey à moins de 10 km du village; la découverte en avril 1590 d'un gîte houiller dans la montagne d'Ossemont, situé sur le territoire de la commune de Corcelles à proximité de la saline5 ; la politique économique dynamique du comte Frédéric de Montbéliard, duc de Wurtemberg, et l'ingéniosité de son architecte, Heinrich Schickhardt (1558-1635) qui diligenta les transformations techniques entreprises à la saline de Saulnot. A Stuttgart, dans le fond Schickhardt de l'Hauptstaatsarchiv, cinq dessins "aquarellés ",réalisés par l'architecte Heinrich Schickhardt entre 1593 et 1608 6 présentent les principales innovations de la saline (fig. 2, 3, 4) 7 . La première mention d'une exploitation du sel à Saulnot apparaît dans deux actes de 1147-1149, qui attestent l'existence d'une chaudière où l'on fabrique le sel. L'entreprise connaît une phase d'expansion jusqu'au milieu du XIIIe siècle. La mise en service du puits principal alimentait alors six chaudières. Puis, jusqu, au milieu du xve siècle, la saline traverse une longue période de récession marquée par l'abandon du puits principal, noyé par des infiltrations d'eau douce et par la réduction à trois du nombre des chaudières. De nouveaux procédés d'extraction de la muire sont mis à l'essai: les pompes à bras, attestées en 1586, sont abandonnées au profit de norias. Les fourneaux reçoivent de nombreux perfectionnements comme, par exemple, l'adjonction de cheminées. Mais l'innovation la plus originale est l'utilisation du charbon8 . Une première cuite à la houille eut lieu pendant l'hiver 1590-1591. "Trois berniers allemands nouveaux venus du pais de Hesse " installèrent les chaudières à houille en juin 1593. A la fin de l'année 1593, deux chaudières sur trois utilisaient le charbon. En 1598, la plupart des cuites seront réalisées avec ce combustible. 5. Hauptstaatsarchiv, Stuttgart, fond Schickhardt N 220, T 174. 6. Hauptstaatsarchiv, Stuttgart, fond Schickhardt N 220, T 58. 7. H. Schickhardt, Reiss in Italien (Voyage en Italie), réédition avec traduction française par la Kulturkreiss d'Herrenberg en 1986. 8. Arch. dép. Haute-Saône, E 216, "Il y a trois chaudières, deux d'icelles cuisant avec de la houille et l' aultre avec du bois et facquines, servant à combouillir et à parachever de cuire et rendre en sel la muire des deux aultres chaudières ; et que de quinze jours et trois sepmainnes au plus tard il est nécessaire de nettoyer, battre et secouer lesdites chaudières suivant l'ordinaire, et ainsy faisant 1' on perd par chaque fois six et sept quartes de sel, plus tost plus que moings ; l'on paye par sepmainnes aux mineurs tirans la houille en la montagne, et en fornissant pour lesdites deux chaudières, la somme de vingt francs huictz gros, avec six libvres de chandelles, avec ce ilz sont fournis de tous instrumens à ce requis et nécessaires avec l'entretient et réparation d'iceulx ... ".

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Exploitée par des mineurs originaires, pour la plupart, de Giromagny, la mine d'Ossemont employait dix-neuf mineurs et un bergmaister en 1594, puis vingt-sept mineurs en 1595. En 1610, elle était composée de deux stalles ou galeries d'une longueur totale de 930 met de deux schachtes ou puits dont l'un servait à l'aérage et l'autre à l'extraction9 . Après une période d'apogée très brève (1593-1605), la mine entra dans une longue phase d'incertitude provoquée par l'épuisement des veines, la mauvaise qualité du charbon et les infiltrations d'eau qui obligèrent à creuser de coûteuses galeries d'exhaure. Les galeries boisées utilisaient une quantité importante de bois comme le montre un schéma représentant un boisage de la houillère d'Ossemont 10 (fig. 5). En 1601, les comptes des revenus et dépenses de la seigneurie de Granges font mention de dépenses " pour les réparations de la ramure de la saulnerie du Saulnot, couverture de tavaillons et autres bastiments faicts pour la nouvelle invention faite par le sieur Bournestre des fourgs et cheminées, à l'effet de tirer la houille bruslée par dessous de terre pour empescher les chauldières et éviter l'interrest qu'en provenoit, ayant le tout ressorti à l'advancement de ladite saulnerie et au profite de Son Altesse". La mine d'Ossemont est alors le théâtre de plusieurs accidents dus aux émanations de gaz: en 1615, dans les comptes de la même seigneurie, de l'argent et des quartes de blé sont accordés en aumône aux mères, femmes et soeurs d'ouvriers" suffoqués par le mauvais air", dans les houillères d'Ossemont 11 . En 1616, des secours sont donnés aux parents de deux jeunes gens, asphyxiés dans les houillères de Saulnot et à celui qui a retiré le cadavre de l'un d'eux au péril de sa vie 12 . En 1624, des infiltrations d'eau douce entraînèrent la perte du deuxième puits salé situé à l'intérieur de la saline. Partiellement détruite en 1789, la saline cessa son activité. Au début du XIXe siècle, elle fut concédée à la Compagnie des Salines de l'Est. Faute de rentabilité, elle ferma définitivement en 1826 13 . XVIIIe ET XIXe SIÈCLES, LE DÉVELOPPEMENT DU COUPLE LIGNITE-SEL

Durant la deuxième moitié du XVIIIe siècle, des gisements de charbon de terre furent découverts et ne tardèrent pas à être exploités à Courchaton, Chauvirey, Gouhenans, Saulx, Varigney, Faucogney, Champagney et Ronchamp. Si la houille était connue et extraite dans la région depuis le XVIe siècle, son utilisation ne se généralisa que dans la seconde moitié du XVIIIe siècle. En 1759, un arrêt du Conseil d'Etat autorisa les sieurs Sigismond de Reinach et 9. Arch. dép. Haute-Saône, E 205. 10. Hauptstaatsarchiv, Stuttgart, fond Schickhardt N 220, T 174. 11. Arch. dép. Haute-Saône, E 159. 12. Arch. dép. Haute-Saône, E 534. 13. Archives D.R.I.R.E. Franche-Comté.

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d' Andlaw, co-seigneurs de Ronchamp, à exploiter une mine de houille découverte au lieu-dit Autonson sur le territoire de leur seigneurie 14 . En 1763, l'abbaye de Lure obtint la permission d'exploiter une mine de houille dans le bois du Chavanne!, territoire de Champagney, dépendant de la seigneurie de Passavant et propriété de l'abbaye 15 . Pourtant, les fabriques destinées à produire du noir de fumée de bitume et d'alun à partir de ce charbon de terre, ne devaient guère prospérer. Chargé par le ministre Bertin d'inspecter les principales mines de France, Jars vint visiter celles de Ronchamp. Dans son rapport, il conseille à M. Guy, maître de forge, " de ne faire usage du meilleur charbon exempt de pyrites pour essayer de fondre ses mines de fer, au lieu et place de charbon de bois " 16 . La mine de Corcelles, qui succéda aux premières exploitations du XVe et siècles, fut instituée par ordonnance royale du 28 novembre 1826 en faveur de MM. Noblot, Méquillet et Cie, industriels à Héricourt. Exploitée jusqu'en 1849, cette mine sera abandonnée par suite de la concurrence des houilles de Ronchamp. Elle fut reprise en 1916, pendant la guerre, lorsque la mine de lignite de Gouhenans fut de nouveau abandonnée. La couche avait une puissance comprise entre 0,30 à 0,75 m. De 1916 à 1921, l'exploitation se pratiquait à l'aide d'un puits de 26 m de profondeur. Le lignite de Corcelles 17 était transporté à la saline de Gouhenans, distante de 15 km, par un raccordement relié à la ligne de Vesoul à Héricourt des chemins de fer vicinaux de la HauteSaône. Cette mine rendit de grands services à la saline pendant la guerre, mais lorsque les charbons de la Sarre parvinrent jusqu'à Gouhenans, le prix de revient du lignite de Corcelles parut trop élevé et la mine fut abandonnée le 31 mars 1921. La dimension des galeries était de 1,90 m de hauteur, 1 m de largeur au sol et 0,60 m au toit. Le toit de la couche en grès dur ne nécessitait pas de boisage. Pour exploiter la couche de houille, on pratiquait sur le côté de la galerie, de pendage diagonal, des galeries distantes de 16 à 18 m les unes des autres, en entaillant le mur de la couche. On exploitait la houille de chaque côté de ces galeries au moyen de " fours de 20 pouces de hauteur " dans lesquels les ouvriers travaillaient allongés sur le côté ; ces " fours " ou tailles établissaient la communication entre deux galeries parallèles et progressaient dans

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la même direction qu'elles. Les remblais provenant du percement des galeries étaient entassés derrière les ouvriers ; ils étaient associés aux matières stériles 14. Arch. dép. Haute-Saône, H 592 - H 599. 15. Arch. dép. Haute-Saône, C 558 - C 559. 16. "Je leur ay dit la meilleure manière d'en préparer exprès pour cet usage, lorsqu'il en faudra une plus grande quantité. J' ay conseillé à ces messieurs de faire chercher des mines de fer aux environs pour établir un fourneau, pour les fondre uniquement avec les coaks ; ils ont fort goûté ma proposition. Je les ay fort engagés à permettre à M. Guy d'ériger deux martinets pour travailler ses fers au charbon de terre et encourager des établissements de quincaillerie", Arch. dép. HauteSaône, C 559. 17. Arch. dép. Haute-Saône, 299 S 2 : concession de Corcelles, houille, 1826.

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résultant du tri dans les "fours ". Huit ouvriers mineurs et rouleurs y étaient journellemen t employés 18 . Le 24 mai 1773, une extraction de houille est attestée sur le territoire d'une commune proche, à Abbenans 19 . Dès le XVIIIe siècle, la région fut le théâtre de nouveaux sondages reprenant d'anciens travaux d'extraction, comme ceux de Gemonval20 . En 1778, les premières recherches de houille furent effectuées à Melecey, pour répondre aux besoins de la saline proche, qui utilisait des systèmes d'évaporation sophistiqués par serpentins21 . La qualité médiocre du charbon obligea très vite la saline, dès 1865, à importer son combustible de la houillère de Vy-les-Lure. En juillet 1862, à Fallon, au lieu-dit Buisson brûlé, le fonçage d'un puits de 23,10 m atteignit une couche de houille 22 . De mauvaise qualité, par suite du peu d'épaisseur du terrain de recouvrement, elle se trouvait parfois altérée au point de ne pouvoir être utilisée. La couche de houille avait une épaisseur de 0,30 m divisée en deux veines par un lit de schiste. Le gîte était découpé en piliers de 2,50 m de largeur par des galeries transversales partant de la galerie principale. On enlevait la houille de chaque côté de ces recoupes et on remblayait avec les parties stériles qu'on était forcé d'abattre au toit pour faciliter l'accès dans les tailles et dans la galerie principale. Le 2 juillet 1861, un puits fut foncé à quelques mètres du mur d'enceinte de la saline pour y exploiter la houille. La couche est atteinte à 9,30 m. Les galeries entièrement boisées avaient une section carrée de 0,70 m. Les eaux d'exhaure étaient retirées au moyen d'une pompe manuelle et utilisées pour le lavage de la houille dans un lavoir à bras établi dans le voisinage du puits. Jusqu'en 1862, l'exploitation du sel eut lieu par abattage souterrain; elle fournissait une moyenne de 10.000 à 15.000 quintaux de sel par an. Le puits à muire se trouvait à l'intérieur même du bâtiment de la saline. Le sel était dissout au jour et les eaux saturées étaient soumises à évaporation au moyen de serpentins : la saline de Melecey-Fallon utilisait une technologie avancée pour l'époque, voire expérimentale. Les mauvaises conditions d'exploitation , la relative impureté du sel remonté à la surface, la conjoncture économique locale ne permettront pas de poursuivre ce type de traitement. Le 23 mars de la même année, le directeur de la saline demanda l'autorisation de faire fonctionner une chaudière et une machine à vapeur pour l'extraction de l'eau salée: la roue hydraulique ne suffisait plus à entraîner le mécanisme. La concession de Vyles-Lure fut instituée par ordonnance royale du 10 août 1842 en faveur de MM. 18. Arch. dép. Haute-Saône, 295 S 5-6, rapports généraux des ingénieurs, procès-verbaux de visite, 1817-1845 et 1850-1880. 19. Arch. dép. Haute-Saône, 1 C 1383. 20. Arch. dép. Haute-Saône, 299 S 5: concession de la mine de Gemonval, Doubs, 1826-1877. 21. Arch. dép. Haute-Saône, 303 S 10. 22. Arch. dép. Haute-Saône, 299 S 12, concession de Melecey, sel gemme et houille, 18181882.

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Favre, Conrod, Sallot et Didier23 . Un décret présidentiel du 14 mars 1879 autorisa la réunion des quatre concessions de Gouhenans, Athesans, Corcelles et Vy-les-Lure pour la Compagnie des salines, houillères et fabriques de produits chimiques de Gouhenans 24 . Elle appartint par la suite à la Société minière et industrielle de Gouhenans, qui possédait également les trois autres concessions25. Le lignite de la Grange-du-Vaux était consommé par la saline de Gouhenans et exporté en partie vers les salines du Jura. La concession de houille de Gouhenans fut instituée par ordonnance royale du 30 juillet 1828 en faveur de MM. Parmentier, Grillot et Cie 26 . La découverte de ce gisement devait entraîner la mise au jour d'un important gisement de sel gemme et son exploitation jusqu'en 1936. Depuis l'obtention de la concession jusqu'en 1863, l'exploitation eut lieu principalement par le puits n ° 4 situé au sud-est de la saline. L'exécution du puits 15 rencontra le charbon en novembre 1893 à 68 m de profondeur. Il était situé dans la partie sud de la concession, dans la forêt de Villafans (fig. 6). A partir de 1895, l'exploitation eut lieu par ce puits. En 1899, une venue d'eau de 750 m cubes par jour, rencontrée à 46 m de profondeur, à la base de la dolomie, décida les concessionnaires à abandonner ce puits. La dépense en explosifs employés dans ce charbon dur, était très onéreuse. En 1906, une nouvelle exploitation fut reprise dans la concession de Gouhenans au moyen d'une descenderie. Elle dura jusqu'en 1916, époque à laquelle la mine de Corcelles put fournir du lignite à la saline27 . CONCLUSION Les premières exploitations de houille en Franche-Comté datent de la fin du XVIe siècle. Le lignite a d'abord été employé dans les salines en remplacement du bois. Pourtant, la pénurie de bois n'explique pas, à elle seule, l'ensemble de cette mutation. Il semble bien qu'une émulation réciproque ait eu lieu à partir de la Renaissance entre la découverte de la houille et l'adaptation technologique qui en découla. Les flux d'approvisionnement des trois salines démontrent cette relation. Les transformations technologiques, dont bénéficièrent la saline de Saulnot, se traduisirent par l'ouverture de plusieurs puits de mine dans la Montagne

d'Ossemont près de Corcelles. Là, les techniques de fonçage, utilisées dans les mines polymétalliques, furent directement adaptées au terrain houiller. L'apparition de nouvelles exploitations par traçages et longues tailles à Abbenans, Gemonval, Fallon et Melecey, au XVIIIe siècle, la multiplication 23. Archives D.R.I.R.E. Franche-Comté, fonds non classés. 24. Arch. dép. Haute-Saône, 299 S 27, concession Vy-les-Lure, houille, 1838-1842. 25. Arch. dép. Haute-Saône, 299 S 5, concession houille, 1864-1883. 26. Archives D.R.I.R.E. Franche-Comté, fonds non classés. 27. Arch. dép. Haute-Saône, 299 S 10, Gouhenans, salines, 1841-1893.

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des forages, provoqueront à terme à la fois la découverte et la mise en exploitation d'importants gîtes de sel gemme: Gouhenans et Melecey, lesquels, à leur tour, favoriseront le développement et la recherche de nouvelles exploitations houillères proches : Vy-les-Lure et Corcelles et ce malgré la faible puissance des gîtes. A Melecey, la mise en place de chaudières à serpentins, puis l'utilisation d'une chaudière à vapeur, constitua une réponse transitoire aux problèmes de pénurie locale 28 . Longtemps associées à l'industrie du sel, les houillères franc-comtoises bénéficièrent de l'existence de gisements complémentaires (fig. 7) associant lignite et formations salifères correspondant à la base du Keuper (marnes irisées inférieures). Stimulé par les conditions économiques et gîtologiques, le couple sel gemme-lignite continuera de fonctionner jusqu'à la fin du XIXe siècle, dans un rapport économique souvent défavorable, mais perpétuant une tradition et un savoir-faire quasi ininterrompus dans le nord de la Franche-Comté depuis la fin du xv1e siècle.

28. D. Morin," La saline de Melecey-Fallon (Haute-Saône) dernier vestige de l'épopée industrielle des salines de Franche-Comté. (XVI1Ie-x1xe siècles). Etude historique et archéologique ", Bulletin de la Société d'Agriculture, Lettres, Sciences et Arts de la Haute-Saône, nouvelle série, n° 24 (1992), 149-198.

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FIGURES

1. Sel et houille dans le Nord Franche-Comté (XVI•-XIX• siècles)

Localisation de l'étude

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2. Saline de Saulnot (département de Haute-Saône, France) Vue générale d'un fourneau à houille (fin XVIe siècle)

Chaudière à tué. Le tué ou hotte pyramidale en bois est disposé sur la chaudière à houille. Il permettait d'économiser le combustible. Les volets latéraux permettaient d'accéder aux chaudières. (Cliché Hauptstaatsarchiv Stuttgart)

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3. Saline de Saulnot (département de Haute-Saône, France) Fourneau à houille (fin XVIe siècle), plan et coupe

La grille de combustion était composée de 22 barres métalliques. En bas, égouttage du sel. Des échelles maintiennent les corbeilles en osier tressé dans lesquelles on égoutte le sel après l'avoir retiré des chaudières. (Cliché Hauptstaatsarchiv Stuttgart)

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4. Saline de Saulnot (département de Haute-Saône, France) Fourneau à houille, plan (XVIe siècle)

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Les chaudières en tôle sont posées sur les bords du foyer et consolidées par des crochets métalliques suspendus à des poutres transversales : les travottes, qui reposent sur les bords de la chaudière. Le fourneau est constitué d'un cendrier et d'un foyer aux parois inclinées pour que le charbon brûle toujours au centre. Un système d'ouvertures réglait le tirage au niveau des deux cheminées. Dessin du bas : égouttage du sel (coupe). (Cliché Hauptstaatsarchiv Stuttgart)

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5. Corcelles sur Saulnot (département de Haute-Saône, France) Minière d'Ossemont. Mines de houille (1606)

" A la mine de charbon de Saulnot a été conclu un marché pour le creusement d'une galerie longue de 80 toises pour la somme de 130 francs monnaie de Bourgogne, un bichot de blé pour l'éclairage et pour le matériel. On a trouvé un charbon médiocre ( ... ) ". Détail du cadre de boisage de la galerie d'exploitation ou stolle. (Photocopie Hauptstaatsarchiv Stuttgart)

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6. Mine de Houille des Epoisses (Gouhenans, Haute-Saône, France) Groupe de mineurs avant la descente (fin XIXe siècle)

Cliché d'après une ancienne photographie, fonds privés, D. Morin

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7. Sel et Houille dans le Nord Franche-Comté (XVIe-XIXe siècles)

1. Saline de Saulnot 2. Mine de houille de Corcelles-surSaulnot (Mines d 'Ossemont) 3. Mines de Gemonval 4. Mines d 'Abbenans 5. Mines de Melecey Fallon

6. Saline de Melecey 7. Mines de Gouhenans - Vuillafans 8. Saline de Gouhenans 9. Mines de Vy-les-Lure 10. Mines de Ronchamp (Cartographie D. Morin)

L'EXPLOITATION DE LA HOUILLE DU BASSIN DE LA MACHINE DE L'EPOQUE ROMAINE À LA RÉVOLUTION

Alain BOUTHIER

Le gisement de La Machine comprend quatre ou cinq veines de houille à pendage variable, épaisses de 0,65 à 1,65 m, affectées par de nombreuses failles, contrecoups du plissement alpin. Cette disposition tectonique en synclinal a entraîné celle des veines affteurantes (" elles viennent sopper au jour ") ou sous-jacentes (" le charbon souffle ou prend vent "). La présence du charbon était donc repérable. Il ne serait utilisable que vers 8 à 20 m de profondeur1. Son utilisation est prouvée à l'époque gallo-romaine vers la fin du ne siècle: en 1970, une fouille de sauvetage à Cosne-sur-Loire a permis la découverte, au fond d'un sous-sol/cave comblé après incendie, d'un fragment de houille dont l'analyse sporo-pollinique a montré l'origine machinoise 2 . Cosne est à 95 km de Decize par la voie d'eau de la Loire, moyen commode pour le transport aval : production et exportation allaient de pair. L'exploitation s'est-elle poursuivie régulièrement? Deux actes isolés de la fin du XVe siècle montrent qu'existait depuis quelque temps, aux Ecots, une charbonnière appartenant au comte de Nevers. Du premier acte ne subsiste qu'une mention dans un dépouillement ancien; datée de 1481, elle concerne les droits de justice sur " une perrière de charbon proche des Escots, au lieudit le Crot-Chantereau " 3 . Laconique, elle révèle l'intérêt financier de cette exploitation bien établie. Le second acte, conservé et daté de 1489, intéresse la même charbonnière, dite Huguenin Coquille4: elle est exploitée par deux paysans de la Meulle, à Moutier-en-Glénon, qui s'engagent envers deux bourgeois 1. J.-Fr. Cl. Morand," L'Art d'exploiter les mines de charbon de terre", dans Description des Arts et Métiers, Paris, Imp. Roy., 1768, 3 vol., I, 161. 2. A. Bouthier, "Un sous-sol/cave du ne siècle à Cosne-sur-Loire (Nièvre). Une preuve de l'utilisation de la houille à l'époque gallo-romaine", Annexe, J. Doubinger," Etude palynologique du charbon", Revue archéologique de /'Est, 23 (1972), 385-433. 3. Abbé M. de Marolles, Inventaire des Titres de Nevers, Publication de la Société Nivernaise, Nevers, 1873, col. 460. 4. Arch. dép. Nièvre, 3 E 1 82, fol. 96-97, Piga, 4 mai 1489.

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de Decize à transporter chaque semaine pendant un an au port de la Loge, en bord de Loire, dix charretées de charbon, avec une clause d'exclusivité évinçant les charbonniers et maréchaux de Decize et des Amognes, servis sur place avec transport par charroi, les marchands de Decize se réservant l'exportation par la Loire. A partir de 1514, on voit des baux pour" tirer des charbons de pierre": d'abord à la Meulle, le bailleur étant l'abbé de Saint-Germain d'Auxerre, prieur de Saint-Pierre-les-Decize, et les preneurs deux marchands de Decize5 , puis aux Ecots donnés à bail pour huit ans par Jean du Vernet à un autre marchand de Decize6 , et ensuite au Crot Sautereau et aux Marizis (transaction sur litige entre ce marchand et la famille Coquille)7 . Une partie du fief des Ecots sera vendue par Jean du Vernet8 , puis saisie en retrait féodal par Marie d'Albret, comtesse de Nevers, avec adjudication ratifiée le 20 août suivant9. La comtesse tente ensuite de s'emparer, encore par retrait féodal, d'une autre partie du fief vendue en 1500 par Jacques du Vernet, père de Jean, puis d'une autre portion aliénée en 1520 par Jean aux mêmes acheteurs; mais cette fois le différend porté en justice se termine par une transaction, la comtesse érigeant en fief les acquisitions et se réservant les charbonnières : " & fut convenu que tout le charbon de pierre & mine luy demeurerait & à ses successeurs " 10 . La comtesse a ainsi évincé les seigneurs des Ecots et limité à deux le nombre des exploitants autorisés : le prieur et elle-même. Dans tous ces actes, on parle, sans précision, de mines, minières ou " crots " (en patois nivernais un " crot " est un trou creusé, " creuté ", de main d'homme et souvent rempli d'eau). Plus tard, on trouve des pièces comportant des détails techniques. Ainsi, deux tireurs de charbon de pierre ont extrait avec leurs aides, en neuf mois, environ 650 charretées de charbon (soit 650 tonneaux) pour les deux accenseurs de la mine de la Meulle 11 . Trois marchands associés passent un accord avec trois ouvriers locaux pour faire un " crot " neuf aux Ecots : deux tarifs sont prévus, l'un jusqu'à 10 toises (environ 20 m) de profondeur, l'autre au-delà avec déplacement de la fouille en cas d'échec 12 . Puis les mêmes associés font affaire avec treize charbonniers des environs auxquels s'en ajoutent quatorze pour " tirer charbon esd. charbonnières des Ecots " avec un salaire calculé par 100 de tonneaux extraits 13 . L'un des accenseurs passe

ensuite marché avec trois hommes de deux hameaux voisins pour" crotter un 5. Foucher notaire, Arch. dép. Nièvre, H 274, fol. 148 v 0 , 16 décembre 1514. 6. Arch. dép. Nièvre, 3 E 1 86, J. Durant, 3 mars 1515. 7. Terrier Picar, Arch. dép. Nièvre, E, de Flamare, 30 septembre 1520. 8. Marolles, op. cit., col. 472, 20 mars 1524. 9. Arch. dép. Nièvre, 3 E 1 120, Desbœufs et Nolau. 10. Arch. dép. Nièvre, 3 E 1 120, Desbœufs et Nolau. 11. Arch. dép. Nièvre, H 274, fol. 149 v 0 -150, 3 février 1536. 12. Arch. dép. Nièvre, 3 E 1 91, Decray, fol. 34, 22 juillet 1557. 13. Arch. dép. Nièvre, 3 E 1 91, fol. 44, 5 et 22 octobre 1557.

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crot" aux Ecots 14 . Un marché est conclu par deux marchands avec cinq charbonniers pour " tirer du charbon aux Agots ", tâche payée au 1OO de tonneaux de 12 tinées, les ouvriers devant séparer le charbon des " baulmes " (" terre douce interstitielle entremêlée de bandes " avec empreintes de fougères, selon Morand) et" affondrer le crot de l'enfonceure à la mode accoustumée ", les accenseurs fourniront câbles, engins, poinçons et autres outils 15 . Trois marchands engagent deux charbonniers de Trois-Vêvres pour " tirer et nectoyer les eaux estant aux crotz" des Ecots avec trois engins mus, semble-t-il, par des chevaux fournis par les accenseurs comme les câbles, poinçons et autres engins, la graisse et les encherons 16 . "Quelquefois faut que les fosses & puys soient bien profons, & selon les saisons se font grands fraiz à tirer les eauës dont lesdites fosses se remplissent" dira plus tard 17 l'historien juriste nivernais Guy Coquille, parent des anciens accenseurs des charbonnières. Conjointement, on rencontre plusieurs marchés de voiture de charbon jusqu'au port de la Loge-les-Decize à Saint-Léger-des-Vignes. Ils montrent une pratique commerciale régulière avec emploi de mesures spécifiques : 1OO "tonneaux de houille à la mesure des mariniers" (22 pour 20) 18 , "trois fournitures de charbon à la mesure des marchands" pour un marchand de Tours 19 . Le terme " fourniture " sera toujours employé ensuite au lieu de " mesure des marchands". La zone d'exploitation s'est déplacée à en croire le terme " vieille accense " 20 et un contrat indique " une grosse montagne de terre " (découvert de stériles?) à la Meulle21 . En 1573, un voiturier par eau de Nevers s'engage à mener trois fournitures de charbon au port d'Orléans 22 . En 1588, on découvre du charbon dans les bois de Druy 23 ; l'exploitation perdurera pendant le xvne siècle et cessera ensuite 24 . En 1596, le prieur donne à bail la Bichetée à Moutier-en-Glénon, accense ancienne en ruine 25 , et une transaction intervient entre l'ancien preneur, qui fait faire un" crot ",et les nouveaux accenseurs du prieuré: les parties s'entendent pour faire creuser ensemble un " crot " devant celui du Débat et faire tirer 14. Arch. dép. Nièvre, 3 E 1 91, fol. 49, 16 janvier 1558. 15. Arch. dép. Nièvre, 3 E 1 91, fol. 187, 26 décembre 1558. 16. Arch. dép. Nièvre, 3 E 1 91, fol. 208, 23 mars 1561. 17. G. Coquille, Histoire du pays et duché de Nivernois, Paris, Vve Abel L' Angelie, 1612, 353. 18. Fond Gros, 13 avril et 11 novembre 1562, dans P. Destray, " Les Houillères de la Machine au XVIe siècle'', dans Mémoires et Documents pour /'Histoire du Commerce et de l'industrie en France, 4e série, Paris, Hachette, 1916, 161-182. 19. Ibid. 20. Arch. dép. Nièvre, ibid., dans Destray 1916, 18 mai 1563. 21. Paillet notaire, Arch. dép. Nièvre, H 274, fol. 151 et sq., li novembre 1569. 22. Arch. dép. Nièvre, 3 E 1 95, fol. 246, Decray, 6 mai 1573. 23. Arch. dép. Nièvre, 17 J 87, Terrier de Druy (Girerd), fol. 7. 24. J.-Fr. CL Morand," L' Art d'exploiter les mines de charbon de terre", dans Description des Arts et Métiers, Paris, Imp. Roy., 1768, 3 vol., 1, 161. 25. Arch. dép. Nièvre, H 274, fol.154, 10 décembre 1596.

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à frais communs, charroyer et vendre le charbon des deux "crots " 26 . Par la suite, les actes ne concernent que le domaine du prieuré, sauf une vague mention d'accense vers 1577 27 et un marché d'extraction en 1581 28 . L'exploitation s'est donc poursuivie sur les propriétés comtales, puis ducales, et sur celles du prieuré. Cependant, ces baux ne sont connus que par des dépouillements ; le premier bail original (1618) dénote une exploitation anarchique: "tirer telle quantité de charbon a tant de crotz que bon luy semblera " 29 . Une transaction entre fermiers nous apprend que six " crots " sont alors en service à la Meulle, dont un pourvu d'un" engin " 30 . Les rôles du péage par eau de Myennes (en aval sur la Loire) mentionnent cinq passages de bateaux chargés de charbon de pierre de Decize entre juillet 1614 et juin 1617 31 . Peu après un fermier vend à deux marchands voituriers par eau trois fournitures de charbon qu'ils doivent revendre aux chalands au fil de la Loire à échéance du 11 novembre 32 . L'achèvement du canal de Briare (1642) ouvre au charbon nivernais le marché parisien : dès 1644 un marchand orléanais envoie trente et une fournitures à Paris 33 .

L'exploitation du charbon, source de profits, donne lieu à des procès, surtout du fait des R.P. Minimes de Decize, successeurs en 1621 du prieur qui, à l'exemple de la comtesse de Nevers, s'était réservé pour lui et ses successeurs "le droit de traite du charbon de pierre " 34 . Les procès se terminent souvent par la saisie du charbon extrait, stocké près des puits ou sur le port de la Loge, rebaptisé port de la Charbonnière vers 1644, nom marquant une banalisation de ce commerce. Depuis 1620, les fermiers ne sont plus des marchands mais des officiers du grenier à sel ou des avocats de Decize, descendants des anciens accenseurs, qui, malgré leur promotion, conservent cette source de revenus. A partir de 1663, Marguerite Olivier, dame de Montigny-sur-Canne et des Ecots, casse le monopole d'exploitation du duc et des religieux en s'appropriant le bois Jolly, partie du bois des Glénons, propriété du duc, et en faisant tirer du charbon dans les " crots " faits par les précédents fermiers du duc ; plainte est déposée le 24 mai 1666, un procès oppose le duc de Nivernais à la spoliatrice ; un charpentier avoue avoir posé sur ces "crots " des engins pour tirer le charbon. En 1668 est rendu un arrêt de transport sur place avec procès-verbal de 26. Coppin et Maulais notaires, Arch. dép. Nièvre, H 274, fol. 154 v 0 , 5 novembre 1601. 27. Marolles, op. cit., col. 461. 28. Arch. dép. Nièvre, 3 E 1 97, Decray, 22 avril 1581. 29. Arch. dép. Nièvre, 3 E 1 135, Deschamps, 10 janvier 1618. 30. Arch. dép. Nièvre, 3 E 1 136, Deschamps, 9 février 1619. 31. F. Billacois, "Un indicateur du commerce intérieur au début du XVII" siècle: le péage de Myennes, 1614-1617 ",Revue d'Histoire moderne et contemporaine, 41 (1994), 101-120 et communication personnelle. 32. Arch. dép. Nièvre, 3 E 1 144, Paquier, 13 juin 1622. 33. Arch. dép. Nièvre, 3 E 1 151, Paquier, 23 janvier 1644. 34. Paillet notaire, Arch. dép. Nièvre, H 274, fol. 157 v0 , 22 janvier 1558.

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visite 35 . Un autre arrêt intervient en faveur du duc en 1669, un plan des lieux est alors dressé : il a été perdu, mais il en subsiste une copie de 1719, complétée depuis 36 (fig. l ). La concentration de la métallurgie opérée par la Compagnie du Nivernais se traduit, en mai 1676, par un contrat d'approvisionnement en charbon de la manufacture de Cosne par les Minimes 37 . Le bail général des revenus du duché de Nivernais est affermé pour neuf ans, à partir du premier octobre 1682, par le partisan parisien François Abraham, sieur de la Framboisière38 . On ignore s'il a affermé l'exploitation du charbon avant sa mort, le 19 mai 1684, mais sa veuve donne à bail le droit de tirage des charbons au cosnois Grégoire 39 et une société est constituée entre Grégoire, Raffias, contrôleur du grenier à sel de Cosne et trois bourgeois de Paris 40 . Un nouveau bail est accordé aux associés par le duc 41 . La société change de structure: le frère de Raffias remplace un parisien, un associé décède42 . Les associés voient grand, acquièrent des équipements coûteux sous-employés et d'efficacité douteuse43 . L'activité n'en est pas assurée alors que celle des puits des Minimes débouche sur un marché vers Cosne, Orléans et Paris 44 . La société exploitant la mine du duc disparaît, le duc accorde un bail pour vingt-sept ans à une société au nom de Martin, un bourgeois de Paris prêtenom du partisan Landry, bien introduit dans le milieu versaillais, trois actionnaires (deux parisiens d'origine flamande, Van Isendoren et de Bie, et Faure, actionnaire de la Compagnie d'Afrique) et peut-être deux dirigeants des forges de Cosne45 . Après résolution des baux des Minimes, désintéressement des anciens associés et éviction des cosnois, un nouveau bail est passé pour vingtcinq ans avec les religieux par Van Isendoren et Landry 46 : ainsi les associés 35. Arch. dép. Nièvre, 3 E 1 120, Desbœfs et Nolau. 36. Arch. dép. Nièvre, 11 F 100. 37. Arch. dép. Nièvre, H 274, fol. 158 v 0 • 38. Acte sans minute Pavyot 21 juin 1682, Arch. nat., M. C. Et. XXXV 454 Touvenot du 6 janvier 1683 (cote 43 de l'inventaire après décès La Framboisière, Arch. nat., M. C. Et. XX 402 Sainfray). 39. Boquard et Micault notaires à Nevers, 9 septembre 1685, déficit, cité dans Arch. nat., M.C. Et. IX 492 Auvray. 40. 6 octobre 1685, cité dans Arch. dép. Nièvre, 3 E 1 110/5, Decray, et Arch. nat., M.C. Et. XXX 103 Blanchard fol. 5 v0 , inventaire après décès Vincent Chossande, 26 août 1686 et Et. IX 492 Auvray. 41. Arch. nat., M.C. Et XXX 101 Blanchard, 18 mars 1686. 42. Inventaire après décès Chossande, op. cit. 43. Requeste au Roy sur l'etablissement fait en 1689, sur les ordres de Sa Majesté, pour la Recherche, la Foüille & le Tirage des Charbons de Terre du Nivernois, Paris, 1698, Bibl. mun. Nevers, Fond Morion, 1053, n° 9. 44. Arch. dép. Nièvre, 3 E 7 203, Dagot. 45. Arch. nat., M.C. Et. XC 277 Raymond en déficit, 30 avril 1689. 46. 20 octobre 1690, acte confirmé le 3 janvier suivant, Cousin notaire à Decize, cité dans Arch. nat., M.C. Et. XX 388 Sainfray, inventaire après décès Henry Landry, 14 mars 1696.

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contrôlent tout le domaine exploitable. Ils passent alors un traité de société en 20 sols : 6 à Landry, 1 à Rennequin Sualem et 13 à Van Isendoren qui en rétrocède 3 à Faure et 3 et 9 deniers à son beau-frère Ziernel47 . Pour 100.000 livres, on ouvre un chemin pavé carrossable long de 2 lieues et de 10 m de large pour transporter le charbon (achevé en 1692); on achète en quatre mois cent chevaux dressés au travail de la mine qu'on fait venir de Liège avec des travailleurs, des outils, des chaînes et autres ustensiles. On fait faire quantité de machines et d'instruments à Paris, Decize et Nevers (Landry rachète douze vieux corps de pompe de la machine de Marly, on ignore s'ils ont été montés sur les puits )48 . Louvois autorise Rennequin à venir en Nivernais : aidé de l'ingénieur Daniel Michel, il y fait ouvrir deux puits où l'on travaille jour et nuit avec de nouvelles machines pour tirer en même temps eaux et charbon. On atteint le charbon à près de 70 m de profondeur au bout de trois mois en octobre 1689. En moins de 18 mois, 150.000 livres sont dépensées et on prévoit de dépenser 100.000 livres par an pour creuser de nouveaux puits en perçant les couches de grès (de 30 m d'épaisseur !) et en épuisant les eaux. On a foré six ou sept puits inutiles, en délaissant un autre inondé, on fait travailler plus de deux cents hommes (des Liégeois qui font souche sur place) et de soixante chevaux. Il a fallu blinder les puits, y placer cintres et étais, construire les machines, les couvrir, poser des pompes, faire des aqueducs ... 49 . Depuis 1694, le site minier a pris de façon officieuse le nom de La Machine. Après essai, le charbon nivernais est jugé aussi bon que celui d'Angleterre. La machine de Marly va constituer, avec les forges de la Marine du Ponant, un débouché majeur du charbon de Decize. La production augmente : quarante bateaux chargés arrivent à Nantes en 1691 50 et, en 1692, on règle à Landry 53.775 livres pour 254 muids à 21 barriques par muid 51 . Les livraisons se succèdent, les états de paiement le prouvent. La société a un caissier correspondant à Paris. Landry meurt en mars 169652 . En 1701, sa veuve, pour régler ses dettes envers le roi, cède son intérêt à Etienne-Pierre Cornette, secrétaire du roi 53 . Les commandes d'Etat diminuent beaucoup après 1700 et il faut recourir à la clientèle privée : un marché providentiel s'ouvrira avec l'épanouissement des sucreries d'Orléans, grosses consommatrices de charbon. Van Isendoren meurt 47. Arch. nat., M.C. Et. XIV ou XCIV Despriez et Boursier en déficit. 48. Guiffrey, Comptes des Bâtiments du Roy, III, col. 239, 18 nov. 1689. 49. Requeste au Roy sur l'etablissement fait en 1689, sur les ordres de Sa Majesté, pour la Recherche, la Foüille & le Tirage des Charbons de Terre du Nivernois, Paris, 1698, Bibl. mun. Nevers, Fond Morlon, 1053, n° 9. 50. Arch. nat., Mar. B3 64, fol. 343, lettre de Landry, novembre 1691. 51. Arch. nat., Mar. E 8, 25 août 1692. 52. Inventaire après décès Landry, op. cit. 53. Arch. nat., M.C. Et. XV 376 Gaillardie, 16 février 1701.

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en novembre 1708 54 , après son beau-frère Siernel à qui sa veuve a succédé. D'autres Liégeois viennent travailler aux mines (deux meurent " escrassés par une masse de charbon dans le crot de La Machine ")55 . En 1733, les enfants Siernel cèdent leur participation à Pinet des Ecots, trésorier de la Généralité de Moulins 56 , concessionnaire des Minimes depuis 171057 . Les deux concessions sont exploitées par deux personnes (Cornette et Pinet des Ecots) qui abandonnent vite les mines ducales pour celles des Minimes. En 1753, un partage a lieu 58 entre Cornette qui va mourir en 1755 et Pinet des Ecots qui rachète alors leur part aux héritiers Comette59 , avant de mourir en mars 1762. En février 1760, Sébastien François et ses deux frères, fils du premier échevin mayeur de Charleroi, viennent avec trois ouvriers sonder le terrain du duc avec son autorisation, mandatés par Guignard, un avocat parisien, qui en novembre cautionne Isaac Mauduit, un négociant de la Rochelle fixé à Paris, pour prendre à bail les mines ducales 60 . Mauduit, incompétent et acariâtre, se fâche avec François, continue l'exploitation de la mine des Boudras avec un "maître ouvrier" venu de La Queusne (Allier); la mine, enflammée par malveillance, brûle plusieurs mois durant avant d'être abandonnée en 1768. Carey qui donne ces détails 61 ajoute qu'ici les paysans étayent les galeries selon "la Méthode des Liegeois ", mais qu'" ils ne sçavent ... faire circuler l'air, ... n'entendent rien aux epuisemens ", il n'y a vu aucune galerie d'exhaure et les anciens ouvrages sont des réservoirs d'eau communiquant avec les puits en activité. De cette époque, on trouve des vestiges d'extraction dans les fonds des Minimes, du duc, des héritiers des Ecots, de Mme de Soudeilles à Druy et de l'abbesse de Nevers, mais on n'a ni plan ni état des anciens ouvrages. La concession ducale est reprise par Dubois 62 qui la transmet à Sorin de Bonne. Les héritiers Pinet des Ecots associés à Blaise Gounot, contrôleur au grenier à sel et ancien directeur de leurs mines 63 , reprennent à bail la concession des Minimes en 177 464 et celle du duc en 177 665 . Ce dernier bail est assorti de prescriptions cherchant à rationaliser l'exploitation par puits et galeries : 54. Arch. dép. Nièvre, 3 E 39 6 Griffet, 28 novembre 1708 et sq., inventaire après décès Guillaume Vanisandoren. 55. Arch. dép. Nièvre, 4 E 055 1, registre paroissial Champvert, 9 juillet 1733. 56. Arch. nat., M.C. Et. XLVII 39 Vatry, 22 avril 1733. 57. Barleuf notaire, Arch. dép. Nièvre, H 274, fol. 159, 10 août 1710. 58. Juillet 1753, inventaire après décès Etienne-Pierre Cornette, Arch. nat., M.C. Et. LXXIX 87 Langlard, 19 février 1755. 59. Arch. nat., M.C. Et. LXXIX 105 Lang!ard, août 1759. 60. Arch. nat., M.C. Et. LXXXVIII 531 Bronod, 15 mars 1762. 61. Carey, Mémoire sur les mines de charbon de terre de Decize en Nivernois, 30 août 1767, 30 p., ms. Arch. nat., F 14 7809. 62. Arch. nat., M.C. Et. LVII 482 Cordier, 19 janvier 1768. 63. Arch. dép. Nièvre, 11 F 99, 1ec juin 1764. 64. Roux notaire à Decize, 6 septembre 1774, déficit. 65. Arch. nat., M.C. Et. LVII 531 Cordier, 23 novembre 1776.

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exploiter les puits ouverts, en ouvrir de nouveaux après autorisation en bouchant les anciens; remettre chaque année un état raisonné et toisé de l'exploitation, indiquant profondeur des puits et puisarts, nombre, direction, hauteur et largeur des galeries, ainsi que direction et inclinaison des filons de mines ; possibilité d'établir une pompe à feu pour l'enlèvement des eaux avec subvention de 20.000 livres. Ces prescriptions ont sûrement été respectées, mais les documents techniques exigés ont disparu. La machine à vapeur de provenance inconnue (anglaise ou production Périer?) va être installée sur un puits de la Haute Meule ; elle fonctionnera peu de temps (dès mai 1780, il est dit " à partir du puits principal ou la pompe à feu étoit établie ") et ne sera jamais remontée (en août 1789, on répertorie " une machine à feu demontée, composée d'un cilindre de 22 pouces de diamètre, de trois corps de pompe, d'une chaudière de cuivre, d'environ 300 pieds de tuyaux de fer de 4 pouces de diamètre") (fig.2). La mécanisation de l'épuisement des eaux va rendre possible l'exploitation des couches profondes. Le 13 mai 1780, un privilège pour extraire le charbon de terre est accordé par le roi aux associés pour trente ans. En 1782, les héritiers de Pinet des Ecots vendent participation, effets mobiliers et privilège à Baudard de Sainte-James, trésorier général de la Marine 66 , qui signe sous la raison Périer et Compagnie un traité avec Jacques-Constantin Périer, ingénieur mécanicien, et Gounot, fayencier à Nevers 67 . En 1784, le duc de Nivernais accorde un nouveau bail pour vingt-sept ans à commencer début 178668 (un bail de neuf ans avec les Minimes courait depuis 178269 ). L'exploitation et les expéditions par bateau sur la Loire reprennent ; un commis, Lamy, siège dans un bureau avec magasin et chantier au port de la Rapée, à Paris : " tous les ans à Paris et dans les villes voisines arrivent 11.000 voyes de charbon; Lamy chargé ... du débit de ces charbons fournit ... tous les chapelliers, teinturiers, salpètriers et brasseurs, l'arsenal, les potiers de terre, quelques platriers et les manufactures de chaux, la manufacture royale de Jouy, l'hopital général et grand nombre de particuliers [ ... ], du 21 décembre 1785 au 21 février 1787 trois cent six bateaux chargés de charbon sont arrivés à Paris. Depuis plus de quatre mois au moins quarante bateaux sont au Port " ; la mine approvisionne aussi la verrerie voisine 70 . Cette belle mécanique va se gripper : début février 1787, Baudard de SainteJames meurt brutalement. Les ennuis commencent : le défunt est accusé de malversations et détournement de fonds par ses ennemis de l'administration, il 66. 67. 68. 69. 70. 1795).

Arch. nat., M.C. Et. XXX 476 Lormeau et Arch. dép. Nièvre, 11 F 99, 14 août 1782. Arch. nat., M.C. Et. XXX 476 Lormeau, 26 août 1782. Girardin notaire à Paris, 20 septembre 1784, déficit. Arch. dép. Nièvre, 3 E 39 38, Grenot, 27 juillet 1782, cité dans Arch. nat., Z 1" 854. Arch. nat., F 14 7806, 30 décembre 1787, 17 juin 1788 n° 423 et 2 ventose an III (20 février

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est déclaré en faillite, ses biens sont mis sous séquestre, un syndicat de créanciers est créé à Paris, sa famille conteste l'accusation (l'action judiciaire va durer jusqu'en 1842). Le syndicat des créanciers se substitue aux associés, poursuit l'exploitation, maintient en place Gounot à Decize et Lamy à Paris, mais Périer refuse sa collaboration et réclame des actions de la Compagnie de Montcenis en gage de désintéressement71 . On demande à Sage, directeur de l'Ecole royale des Mines, d'envoyer un élève (Lelièvre) pour visiter les installations, mais son rapport est introuvable72 . Il reste un mémoire de Duhamel fils 73 : " on comptait le 17 juin 1788 quatre grandes fosses pour l'extraction du charbon, sans y comprendre un ancien puits où étoit cy-devant établie une machine à feu en partie démontée ; une fosse que l'on approfondit pour aller couper une veine à la profondeur de 60 toises et une autre semblable pour la communication de l'air et l'extraction des eaux. Tous ces puits sont faits sur quatre veines parallèles, disposées deux à deux et séparées par un intervalle, en forme de petite gorge, de 200 toises de largeur. Le toit des veines est un schiste dur & lamelleux. Le mur est d'une nature de tene glaise, compacte & onctueuse. Les montagnes voisines, plus élevées que le vallon qui renferme les veines, sont de granite. On élève ... par jour des divers puits huit fournitures (soit) quatre-vingt quinze poinçons 2/3, mesure du Bourbonnais. Cette entreprise a été entièrement suspendue dans le courant de l'été de 1788 ". Lamy, gestionnaire douteux, est licencié et remplacé 74 . La production baisse, les livraisons se raréfient, mais frais fixes et avances à Gounot restent identiques ; les syndics, au vu du rapport Lelièvre, décident, malgré l'opposition de Périer, de vendre Decize75 : le syndicat a dépensé 797.555 livres dans les mines et 223 .419 livres dans la venerie et évalue la perte aux trois quarts 76 ! Périer accepte de céder tous ses droits 77 et le syndicat demande à la Cour des Aides la publication de la vente. Le 5 août 1789 la mine est finalement adjugée au greffe de la Cour des Aides à Mintier, maître menuisier à Paris, pour 265.080 livres 2 sous 78 . "Le tenein est formé de petits monticules au dessous de la tene végétale ou remonte le grès a gros grain qui sert ... d'indication au charbon de tene, ce grèz occupe une très grande surface, indice ... de l'abondance de la mine, au 71. Premier cahier de délibérations des créanciers de la succession Baudard de Sainte-James, Arch. nat., M.C. Et. IX 813 Silly, 6 septembre 1787: délibération du 12 juin 1788. 72. Id., 12 avril 1788. 73. Arch. nat., F 14 7806, 30 décembre 1787, 17 juin 1788 n° 423 et 2 ventose an III (20 février 1795). 74. Ibid., 31 juillet 1788. 75. Ibid., 13 décembre 1788. 76. Arch. nat., Z 1a 854. 77. Arch. nat., M.C. Et. IX 821 Silly, déficit, et 2e cahier de délibérations des créanciers de la succession Baudard de Sainte-James; Arch. nat., M.C. Et. IX 820 Silly, 19 décembre 1788: délibération du 17 janvier 1789. 78. Arch. nat., Z 1a 854.

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dessous du grèz on trouve le charbon de terre, il n'en est separé que par une veine d'argile bleuatre de 3 ou 4 pouces d'epaisseur. L'exploitation comprend deux zones : celle de la Racherie, au couchant, avec six crots ou puits, dont trois sont munis d'une grande machine a molette mue par quatre chevaux et deux autres avec une petite machine a molette mue seulement par deux chevaux et celle des Marais à environ 600 toises au levant ''. Mintier, prête-nom impécunieux, ne règle pas son achat, vend à son profit les charbons extraits, ne paye pas les ouvriers, ne nourrit pas les animaux ; les créanciers sont obligés d'y pourvoir et, finalement, Mintier revend les mines à Louis Charles François de Mallevault (représentant des sieurs Périer et Compagnie) pour 265.080 livres 2 sous 79 . Le 23 février, un arrêt de la Cour des Aides permet à l'union d'assigner l'adjudicataire pour voir prononcer sa déchéance. En avril 1790, le comte de Marconnay, fondé de procuration de Mallevault, prend possession du château de la Charbonnière 80 . Les Minimes accordent un bail de neuf ans à Mallevault et Marconnay avec effet à la Saint-Martin 1791 81 . Les associés émigrent et la mine est affermée à Vyard de Veaumoine82 . En 1795, sur les six puits de la Racherie un seul est encore en activité avec cent quarante ouvriers au lieu de trois cents 83 . REMERCIEMENTS

Je tiens à remercier ici pour leur aide, à divers titres, le personnel des Archives départementales de la Nièvre, ainsi que MM. Fr. Billacois, J. Bottin, J. Montamal.

79. 1790. 80. 81. 82. 83. 1795).

Arch. dép. Nièvre, 1 Q 1406 ; Arch. nat., M.C. Et. XLI 743 Lambert et Le Go, 25 janvier Arch. Arch. Arch. Arch.

dép. dép. dép. nat.,

Nièvre, 3 E 39 46, Grenot, 23 mai 1790. Nièvre, 3 E 39 46, Grenot, 23 mai 1790. Nièvre, 1 Q 1406 ; Arch. nat., M.C. Et. XLI 750 Predicant, 20 mars 1792. F 14 7806, 30 décembre 1787, 17 juin 1788 n° 423 et 2 ventose an III (20 février

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FIGURES

1. Vue de détail de la zone d'extraction de la Machine sur la copie de 1719 du plan de 1669. A chapelle de la Machine, B plusieurs loges et bâtiments, I les charbonnières halles et crots contentieux (Arch. dép. Nièvre, 11 F 100)

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2. Détail d' un plan de 1795 avec em 1 . p acement de la (Arch d, " . ep. N'èvre, 1 L 424) pompe à feu ..

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L'UTILISATION MASSIVE DU CHARBON DE TERRE POUR LES TRAVAUX DE VERSAILLES SOUS LOUIS XIV : L'AQUEDUC DE MAINTENON ET LA MACHINE DE MARLY

Eric SOULLARD

Le charbon de terre a été massivement employé pour le chantier de Versailles sur deux sites : la machine de Marly et l'aqueduc de Maintenon. Deux sites qui concernent les Eaux de Versailles et non la construction du château 1. L'usage de la houille fut énorme. Il se compte en milliers de tonnes pour les fours à chaux nécessaires à la construction de l'aqueduc de Maintenon et en centaines de tonnes pour les forges de la machine de Marly. Si de tels usages n'ont rien de novateur au xvne siècle, de telles quantités de charbon de terre sont, en revanche, exceptionnelles pour la France d' Ancien Régime. L'AQUEDUC DE MAINTENON

L'aqueduc de Maintenon fut le plus grand chantier des Eaux de Versailles et la consommation de charbon de terre y fut massive. Ainsi Louvois, surintendant des Bâtiments du Roi, ordonnait, dès le début du chantier de "fer (faire) ce mois ou dans le 15 du mois prochain quelques fours à chaux" et d'" escrire ... pour avoir ... vingt mil barres de charbon de Nieucastel et du Souderland et pour fer descendre à Maintenon un bateau de charbon d'Auvergne "2 . L'usage de la houille fut essentiellement consacré à la fabrication et la réparation des outils des tailleurs de pierre et surtout à la cuisson de la chaux et des briques ; la cendre de charbon était employée comme liant dans la composition du mor1. Sur les Eaux de Versailles, voir E. Soullard, Les Eaux de Versailles. Origines, techniques, société, mémoire de maîtrise d'histoire, Université de Paris I, 1985 et mémoire de D.E.A., idem, 1993. 2. Mémoire pour Maintenon, 22 février 1685, Service historique del' Armée de Terre, Minutes de la correspondance de Louvois, vol. 742, fol. 45, cité dans P. Couturier, "Le canal de l'Eure", Histoire locale, Beauce et Perche, 37 (1972), 21.

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tier 3 (fig. 1 et 2). La provenance du charbon fut exclusivement l'Angleterre, via Amsterdam. Comme pour tous ses grands travaux, le roi s'approvisionna en charbon de terre auprès de deux personnes : le marchand de Rouen Vanderhulst et le banquier Clerx qui à lui seul toucha 410.326 livres toumois 4 de 1685 à 1689 pour 125.882 barils 5 2/3 de charbon de terre d'Angleterre livrés à Maintenon, soit près de 14.000 tonnes de houille. Au total, de 1685 à 1689, les fours à chaux, briqueteries et forges du chantier de construction de l'aqueduc sur arches de Maintenon consommèrent 17 .225 tonnes et demie de houille anglaise. Un tel chiffre est colossal et semble unique dans l'histoire de la construction sous l'Ancien Régime en France. Le plus surprenant est que la construction du château de Versailles ne fait apparaître aucun usage du charbon de terre. Pourquoi aurait-on utilisé des milliers de tonnes de houille pour l'aqueduc de Maintenon et aucune sur le site de construction du palais de Versailles ? La réponse tient certainement au fait que le palais de Versailles fut construit principalement sous Colbert et par une administration civile des Bâtiments du roi qui n'avait pas l'habitude d'employer la houille. En revanche, le chantier de l'aqueduc de Maintenon était dirigé par le corps des Fortifications, car à l'époque Louvois était à la fois surintendant des Bâtiments et secrétaire d'Etat à la Guerre. Ainsi, le maître d'oeuvre du chantier du canal de l'Eure, l'auteur du Devis des Ouvrages de Massonerie 6 de l'aqueduc de Maintenon n'est autre que Vauban, maréchal de camp des armées du roi et commissaire général des Fortifications. Non seulement le grand ingénieur passa au total cinq mois sur place et fit, dans son Devis, toute l'étude des matériaux de construction, projets d'ouverture de carrières de pierre, proportion des mortiers ... pour la construction de l'aqueduc de Maintenon7 mais surtout il avait une grande habitude de l'usage du charbon de terre dans le bâtiment. Par exemple, en 1668, pour la construction de la for3. On trouve facilement dans le mortier des piles de l'aqueduc de Maintenon des débris de charbon de terre mal brûlé, des morceaux de houille cokéfiée qu'il est aisé de prélever. L'analyse spectrométrique dispersive en énergie sur microscope électronique à balayage de ces prélèvements a été effectuée par Philippe Dillmann à l'U.T.C. de Compiègne et démontre qu'il s'agit bien de charbon de terre avec des traces infimes de soufre, silice et calcite. 4. J. Guiffrey, Comptes des Bâtiments du roi sous le règne de Louis XIV, Paris, 1881-1901. 5. Le baril de charbon d'Angleterre vaut 250 livres poids de France soit 122,25 kg, Arch. nat. Fl4 7760 cité dans P. Dardel, "Commerce, industrie et navigation li Rouen et au Havre au XVIIIe siècle", Société libre d'émulation de la Seine-Maritime, (1966). Nous devons ce renseignement à J.-F. Belhoste. D'après les Comptes des Bâtiments du roi, la voye de charbon vaut 4 muids soit 1072,92 litres et en évaluant la houille à une densité de 1 on obtient l'équivalent en tonne. 6. S. Le Prestre, maréchal de Vauban, Devis des Ouvrages de Massonerie qu'il convient faire pour la construction du grand Aqueduc que le Roy a ordonné de faire pour conduire à Versailles les Eauës de la Rivière d' Eure, suivant les plans, élévations & profils, pour ce faits de l'ordre de sa Majesté, publié par A. Corréard, Le Génie Civil, XIV (1846), 38-72. 7. En rédigeant ce devis, Vauban ne fait qu'obéir à la législation du corps des fortifications, laquelle prévoit depuis le grand règlement de 1604 que la prévision des oeuvres, le toisé des matériaux, l'évaluation des dépenses, la surveillance des travaux en cours et la réception des travaux en fin de construction reviennent à l'ingénieur militaire alors que la construction des ouvrages revient à un entrepreneur privé, A. Blanchard, Vauban, Paris, 1996, 105.

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teresse de Lille, la reine des citadelles, il avait fait établir quatre fours à briques fonctionnant au charbon de terre, le combustible transporté par eau venait de Mons et passait par Condé-sur-Escaut, pourtant aux mains des Espagnols 8 . Vauban qui fut le plus grand ingénieur civil et militaire du siècle de Louis XIV a même expliqué son intérêt personnel envers le charbon de terre dans sa correspondance administrative, lors de la construction de la citadelle de Montdauphin dans les Alpes : " sans le secours du charbon de terre, on aurait bien de la peine à exécuter ces projets sans achever la ruine des bois de ce pays qui attirera infailliblement celle des peuples. Je sais qu'il y en a bien sûrement en plusieurs endroits de ces montagnes. J'en ai fait chercher et j'ai même répandu

quelque argent pour cela et promis de petites récompenses pour ceux qui en trouveraient de bon, pour lesquels j'ai consigné. Il s'en est trouvé à plusieurs endroits ... de très bon et qui brûle bien; je l'ai essayé. Cela sera d'un très grand secours pour la chaux, pour les forges ... " 9 . L'utilisation massive du charbon de terre pour la construction de l'aqueduc de Maintenon s'explique donc par la présence, à la conception et direction du chantier, de Vauban et de toute son équipe: le directeur de chantier Robelin, l'ingénieur général de Mesrigny, l'architecte Vollant... Ceux que le maréchal appelait sa " bande d'Archimède " du corps des Fortifications. LA MACHINE DE MARLY

La machine de Marly fut le second site des Bâtiments du roi où l'on utilisa le charbon de terre mais cette fois à des fins exclusivement métallurgiques. De 1681 à 1689, dès la construction et la mise en route de la machine, on a de grosses livraisons de charbon de terre d'Angleterre avec pratiquement la même provenance, les mêmes marchands et les mêmes prix que pour l'aqueduc de Maintenon mais en quantité moindre. Le charbon se compte seulement par dizaines de voyes ou centaines de barils. L'usage du charbon était destiné aux forges chargées de la réparation et de l'entretien des pièces de mécanisme en fer de la machine. Les Comptes des bâtiments sont d'ailleurs explicites: 1688 "26 may, au sieur Vanderhulst, marchand, pour cent barils de charbon d'Angleterre qu'il a livré pour la forge des serruriers à la journée du Roy : 275 livres " 10. La machine de Marly comprenait au total trois forges, chacune située à un étage de pompes : les " forges d'en bas ", en bord de Seine, juste à côté desquelles étaient accolés le 8. L. Trénard, Actes du colloque Charbon et science humaine, organisé par la Faculté des Lettres de l'Université de Lille en mai 1963, Paris-La Haye, 1966, 57. Nous tenons à remercier M. Bruwier de nous avoir fourni ce précieux renseignement. 9. A. de Rochas d'Aiglon, Vauban. Sa famille et ses écrits. Ses oisivetés et sa correspondance. Analyse et extraits, Paris, 1910; lettre du 25 septembre 1700 au directeur général des Fortifications Le Peletier de Souzy, II, 494. 10. J. Guiffrey, Comptes des Bâtiments du roi, op. cit., III, 175.

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"magasin au charbon de terre", les "forges à mi-pente", à côté du puisard intermédiaire, les "forges et fonderie d'en haut", près du grand puisard (fig. 3, 4 et 5). Le grand défaut de la machine de Marly était l'usure excessive et surtout la rupture de ses engrenages, mouvements et tringleries ce qui obligeait à de fréquentes réparations. C'est ainsi que les magasins de la machine conservaient en réserve et en permanence vingt huit bielles de manivelle, soit autant qu'il y en avait en activité sur les quatorze roues à aubes de la machine. A cause de la casse fréquente des pièces du mécanisme de la machine de Marly, les forges faisaient une grosse consommation de charbon de terre et le duc d' Antin, surintendant général des Bâtiments du Roi, n'hésitait pas à faire écrire dans ses instructions et règlements pour le garde du magasin de la Machine : " Le charbon de terre est d'une grande consommation, il est nécessaire d'en faire la recette sur le registre du garde magasin " 11 . En effet, les nombreux états de dépenses annuelles de la machine ne prévoient pas moins de 70 à 80 tonnes de charbon par an. Par exemple un Etat et dépense annuelle de l'entretien de la Machine de Marly de 1773 12 montre que les trois premiers "matériaux employés annuellement pour l'entretien de la machine " sont, par ordre décroissant de dépense : Bois de charpente 4 milliers (2 tonnes) à 450 l. 18.000 1. Fers 25 milliers (12,5 tonnes) à 20 l. le cent. 5.000 1. Charbon de terre 80 voyes (80 tonnes) à 50 l. la voye 4.000 1. En bref, le charbon de terre est vraiment, pour les forges de la machine de Marly, un produit de consommation courante. Il faut cependant noter, en 1690, l'apparition de charbon de terre de Decize qui approvisionne ensuite régulièrement les forges de la machine et simultanément l'arrêt momentané de l'approvisionnement en charbon d'Angleterre. Plusieurs raisons expliquent ce changement de source d'approvisionnement. D'abord, la France est en guerre depuis 1689 avec l'Angleterre. En mai 1693, le secrétaire d'Etat à la Marine, Phélypeaux de Ponchartrain, ordonnait dans son Mémoire pour servir d'instruction au sieur Jean Bart, commandant de !'escadre que le Roi fait armer à Dunkerque que " Sa Majesté lui recommande de faire en sorte d'enlever quelque flotte de charbonnier de Nieucastel. Elle sait qu'une telle expédition ferait fort crier le peuple de Londres et cela conviendrait à la conjoncture présente " 13 . Par conséquent, le commerce maritime du charbon anglais vers le continent, devenu la cible des corsaires français, est fortement perturbé et même interrompu. 11. Arch. nat., 01 1493 n° 2, instructions diverses au brouillon, sans date [1708], du duc d'Antin pour le garde-magasin de la Machine Chevery. 12. Arch. nat., 01 1496 n° 524. 13. Arch. nat., Marine, B4 15 fol. 334 cité dans A. de Wismes, Jean Bart et la guerre de course, Paris, 1965, 121.

UTILISATION DU CHARBON DE TERRE POUR LES TRAVAUX DE VERSAILLES 115

Ensuite les mines de Decize viennent juste d'être reprises en 1689 par la compagnie Martin. Or cette compagnie, puissante et fortunée, s'engage dans de gros travaux et investissements pour exploiter le charbon, obtient même un quasi monopole de fourniture du charbon aux arsenaux de la Marine du Ponant et surtout Rennequin Sualem, le maître charpentier liégeois d'exhaure minier créateur de la machine de Marly, a été appelé par les directeurs des houillères de Decize pour construire la machine d'exhaure nécessaire à l'ouverture de leur mine. Lorsque sous la direction de Rennequin, on découvrit le charbon " on envoia aussitôt de ce charbon à la machine de Marly, pour y en faire l'essay, et rendre compte de sa qualité au Sieur de Louvois, qui l'avoit ainsi ordonné à Rennequin. Et après qu'il y eut esté trouvé aussi bon que celui d'Angleterre, les ordres furent donnez pour en faire conduire à Paris et à Nantes " 14 . Rennequin fut même associé aux bénéfices des mines et un de ses parents, l'ingénieur liégeois Daniel Michel, fut chargé par la suite de l'entretien permanent de la machine qu'il avait construite. Il convient de préciser que Rennequin Sualem était très au fait en matière de houille. Dans sa ville natale, à Jemeppe-sur-Meuse, sa famille possédait des parts dans l'exploitation d'une fosse de houille. Rennequin et son père Renard, Gilles Lambotté, gendre de Rennequin, étaient tous maîtres charpentiers des mines de Liège, membres de la " Confrérie de monseigneur Saint Joseph du bon métier des charpentiers de la ville de Liège". Rennequin et son frère Paulus avaient aussi des connaissances en métallurgie, sachant parfaitement couler la fonte au point d'être mandatés dans le cas de Rennequin par l'administration des Bâtiments du roi pour surveiller sur place, aux forges de Conches en Normandie, la fabrication de corps de pompe en fonte pour la machine de Marly. Une dernière raison favorable à l'apparition du charbon nivernais de Decize à Marly, en bord de Seine, est la création, au XVIIe siècle, de canaux de navigation qui permettent enfin la navigation entre Loire et Seine. Les lettres patentes de Louis XIII, datées de 1638, qui permettent l'achèvement du canal de Briare en 1642 expliquent que la" communication de Seine et de Loire" est avantageuse au public " pour le commerce et transport des marchandises et denrées de province en autres et particulièrement en notre bonne ville de Paris ... de quoy elle tirera la commodité d'avoir à bon compte les marchandises de nos provinces d'Auvergne, Forest, Bourbonnais, Nivernais ... " 15 . Ensuite est construit, de 1676 à 1691, toujours entre Loire et Seine, le canal d'Orléans que les lettres patentes de Louis XIV datées de 1678 désignent pour " porter le commerce et l'abondance en notre bonne ville de Paris qui est le 14. Requeste au Roy sur!' Etablissement fait en 1689, par les ordres de Sa Majesté, pour la recherche, la foüille & le tirage des charbons de terres du Nivernois. MDCXCFIII, citée dans G. Thuillier, Aspects de /'économie nivernaise au X/Xe siècle, Paris, 1966, 438-441 et "Les houillères de La Machine en 1689-1698 ",Le marteau-pilon, 4 (1994), 89-93. 15. P. Pinseau, Le canal Henri IV ou de Briare, Paris, 1943.

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centre de toutes les provinces ... " 16 . Il se trouve justement qu'Henry Landry, receveur général des finances de Bourgogne et gros financier du règne de Louis XIV au temps de la guerre de la Ligue d' Ausbourg, était, à la fois, le second actionnaire principal des mines de Decize mais aussi intéressé à l'exploitation du canal d'Orléans 17 . Toujours est-il que durant toute la guerre de la Ligue d'Ausbourg, de 1689 à 1697, la machine de Marly fut exclusivement approvisionnée en charbon de Decize, à raison de 5 à 16 tonnes par an, le charbon de terre d'Angleterre ayant alors totalement disparu de l'approvisionnement des Bâtiments du Roi. Sur la fin du règne de Louis XIV, en pleine guerre de succession d'Espagne, la houille anglaise est toujours absente et surtout on voit apparaître, à partir de 1706, en plus du charbon de Decize, des livraisons annuelles de 40 à 70 tonnes de charbon de "la fosse d'Auvergne " et même de Saint-Etienne en Forez, ce qui n'a rien de surprenant. A l'époque la région de Saint-Etienne compte près de vingt-six mines en activité et, en 1709, elle produit 100.000 charges de 250 livres soit 12.225 tonnes de houille qui se consomment à Saint-Etienne et aux environs pour les deux tiers et, pour le tiers restant, à Lyon, le long de la Loire et jusqu'à Paris 18 . Les guerres terrestres et maritimes de la fin du règne de Louis XIV ont donc eu, en France, des conséquences très importantes sur le plan houiller. On assiste d'abord, de la part des Bâtiments du Roi, à une volonté d'indépendance énergétique vis-à-vis de l'Angleterre. Ensuite, on voit naître sur les bords de Seine, à Port-Marly, à seulement deux lieues de Paris, un commerce et un transport fluvial de houille en provenance des mines du centre de la France : Decize en Nivernais, Brassac en Auvergne et Saint-Etienne en Forez. Ces mines approvisionnent donc la machine de Marly et aussi Paris dès le début du xv111e siècle, c'est-à-dire bien avant la révolution industrielle, époque à laquelle elles prennent vraiment leur essor (fig. 6a et 6b). Pour conclure, l'usage du charbon de terre sur le chantier de Versailles fut courant, massif et même impressionnant dans le cas de la construction de l'aqueduc de Maintenon. Cependant, il faut reconnaître, au plus fort du règne du Roi Soleil, la dépendance totale de la France de Louis XIV vis-à-vis de l'Angleterre pour son approvisionnement en charbon de terre et vis-à-vis du

pays de Liège pour la main d'oeuvre spécialisée en exhaure minier houiller. Toutefois, il semble, à partir de ce que l'on constate pour la machine de Marly, que la fin du règne et ses longues années de conflit, puissent être considérées comme une période charnière dans l'histoire houillère de la France avec l'arrêt momentané de l'approvisionnement en charbon d'Angleterre dans 16. R. Dion," A propos du canal de Briare", Etudes rhodaniennes, XIII (1937). 17. Sur le personnage d'Henry Landry, voir sa notice biographique dans D. Dessert, Argent, pouvoir et société au Grand siècle, Paris, 1985, 619. 18. E. Lavisse, Louis XIV, Paris, 1989, 952.

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les commandes de l'état. L'administration royale française est alors obligée, à la fin du xvne siècle, de mettre en place une politique d'approvisionnement houiller strictement national qui fait appel exclusivement au charbon des gisements français de Decize, d'Auvergne et même de Saint-Etienne. Le charbon de terre anglais ne réapparaît sur le marché qu'une fois la paix revenue, au xvme siècle. Pour finir, il convient de préciser que l'usage du charbon à la machine de Marly ne se limite pas au seul règne de Louis XIV. Il se poursuit avec l'approvisionnement régulier des forges en charbon de Saint-Etienne au XVIIIe siècle puis avec la machine à vapeur de Marly qui, de 1827 à 1859, consomma 9 tonnes de charbon par journée de marche.

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FIGURES

1. 1re feuille contenant les profils et élévation généralle de l'aqueduc tels qu'ils doivent êstre dans le fond de Maintenon du Devis des Ouvrages de Massonerie du maréchal de Vauban

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L'aqueduc projeté devait faire 5 kilomètres de long et 67 mètres de haut au fond de la vallée de l'Eure. La pierre à chaux nécessaire à la construction était extraite dans les carrières toutes proches de Germonval et transformée dans les fours à chaux, au pied de l'aqueduc, avec du charbon de terre d'Angleterre qui remontait la Seine puis l'Eure pour arriver directement, par voie d'eau sur le chantier.

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2. Carte de l' Aqueduc Royal dans le fond de Maintenon 1687. Gravure de Le Paultre

Situées au bord de la rivière de l'Eure et au pied de l'aqueduc en construction, ces fours à chaux construits sur ordre personnel de Louvois consommèrent en quatre ans, de 1685 à 1689, plus de 17.000 tonnes de houille.

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3. Vue générale de la Machine de Marly d'après un tableau de P.D. Denis le Jeune, 1724

1. Forges d'en bas et magasin au charbon de terre 2. Forges à mi pente 3. Forges d'en haut

Les forges de la machine de Marly consommaient en moyenne 80 tonnes de charbon de terre par an pour les réparations des pièces faussées ou cassées des mécanismes.

UTILISATION DU CHARBON DE TERRE POUR LES TRAVAUX DE VERSAILLES 121

4. Vue détaillée des forges d'en bas, 1724

1. Forges 2. Magasin au charbon de terre 3. Logement des forgerons

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S. Plan des forges d'en bas de la machine de Marly d'après Arch. nat. 0 1 1507 n°43 et 0 1 1493 n°319

n 5 6

rr J

1. 2. 3. 4. 5. 6.

0

10

10

3ûm

1

1

1

Forges Magasin au charbon de terre Logement des forgerons Appentis de stockage des bois Chantiers des charpentiers Logement des charpentiers

UTILISATION DU CHARBON DE TERRE POUR LES TRAVAUX DE VERSAILLES 123

6a. L'approvisionnement en charbon de terre pour la Machine de Marly lors des guerres de la fin du règne de Louis XIV 1688-1697/1701-1713 ou l'apparition du charbon français de Decize, d'Auvergne et de Saint-Etienne tonnes 130

304 t. en 1685

120 110 100 90 80 70 60 50 40 30 20 10 0

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1 Charbon d'Anglcten IJ de Deciz•

Dd'Auvergm

Dde Saint-Etienne

6b. Répartition de l'approvisionnement total en charbon de terre de la Machine de Marly

Saînt-Etienni

42

tonnes

5%

Angleterre

328 tonnes 43%

LE CHARBON DE TERRE ET L'INDUSTRIE EN GALLES DU SUD AVANT 1700

lan COWBURN

INTRODUCTION (BIBLIOGRAPHIE, SECTION 2A) 1

Cette communication est consacrée à l'étude du bassin houiller du sud du Pays de Galles, et notamment à la région de Neath, dans un contexte de diffusion de nouvelles techniques à une époque où elles interviennent de façon décisive sur l'extraction et le traitement du combustible et des minerais, non seulement la houille, mais aussi, et en étroite relation avec celle-ci, les métaux non ferreux. LE BASSIN HOUILLER DU SUD DU PAYS DE GALLES (2B)

Le bassin houiller, de forme ovoïde, affleure sur tout son pourtour, sauf là où il passe sous la mer dans la région de Neath (fig. 1). Il est large de 25 km au milieu, mais de 7 km au plus dans la péninsule du Pembrokeshire. Celle-ci a été exploitée dès le XIVe siècle, mais les couches sont déformées par des plissements hercyniens, ce qui explique que la partie principale l'ait dépassée en production dès que l'avancée des techniques l'a permis. On trouve trois types de charbon dans le bassin : de l'anthracite au nord-ouest et dans le Pembrokeshire (le culm), des charbons volatils au sud-est, et les meilleurs charbons à coke et à vapeur de Grande-Bretagn e entre les deux. LA WELSHRY ET LA MARCHE DE GALLES AVANT 1536 (2B)

Au Moyen Age, les vallées étaient occupées par une dense couverture forestière et les hommes se sont installés sur les hauteurs où se trouvaient les voies 1. Les références bibliographiques sont reportées en fin d'article et regroupées par sections ; dans les paragraphes suivants, seuls seront indiqués les numéros de section.

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de transport praticables. Ces groupements de pasteurs, tentés par la " razzia " des basses terres pour compenser leur situation économique marginale, étaient assujettis au tribut envers les seigneurs des plaines qui ont dû, à intervalles réguliers, l'imposer de force. Leurs places fortes encerclaient et entrecoupaient ces Welshries, de culture et d'économie différentes (fig. 1). Avant l'Acte d'Union entre l'Angleterre et le Pays de Galles (1536), l'existence de ces juridictions féodales quasi souveraines (palatinates), regroupées sous le nom de la " Marche de Galles ", empêchait le développement de l'extraction de la houille. Les droits appartenaient au seigneur, qui les baillait à des mineurs chefs d'équipe. Ceux-ci reversaient un pourcentage de leur production au titre du droit régalien. L'extraction se limitait aux pourtours du bassin ou sur des affleurements localement élevés, car l'exhaure n'était pas encore maîtrisée. C'étaient de simples trous creusés sur l'affleurement (drift ou patch), ou des galeries courtes à faible pente (slant ou slope). Sur le pourtour sud, il y avait des travaux, particulièrement dans la région de Neath et de Llanelly où les couches passent sous la mer. Mais les travaux précoces les plus importants se trouvaient dans la partie détachée du bassin, dans le Pembrokeshire (fig. 2). LE CULM DE PEMBROKESHIRE (2C)

On trouve des traces d'exploitation à partir de 1324 dans les comptes du comté de Pembroke. L'extraction se généralise à partir de 1530, d'abord sous le comte Jasper Tudor, frère d'Henry VII, et ensuite sous les comtes Herbert, que nous retrouverons à Neath. Vers la fin du XVIe siècle, on creuse des puits jusqu'à 200 m de profondeur, servis par des treuils. Une équipe comprend trois mineurs au front de taille, sept porteurs de panier, un remplisseur de tonneau au puits, quatre hommes de treuil et deux trieurs en surface. L'exportation vers l'Irlande, la Bretagne, l'Aquitaine, le Portugal et même les Iles Canaries correspondait à une part importante de la production. Elle a augmenté considérablement à partir des années 1630: les chargements entre 1630 et 1700 ont été multipliés par dix pour les deux ports de Milford et de Tenby, pour être de 13.000 tonnes en 1710. C'était les agriculteurs eux-mêmes qui exploitaient les puits: l'un des résultats de cette particularité est le nombre élevé de terrils disséminés dans le paysage. Ce privilège a été révoqué en 1772, en faveur du système des concessions. L'exploitation continua cependant à se différencier du reste du bassin en employant des mineurs paysans, à bas salaires, mais bénéficiant de l'appoint de la production agricole, ce qui leur permettait de mieux réagir aux crises de la demande que les mineurs immigrés et" mono actifs" de l'Est.

LE CHARBON DE TERRE ET L'INDUTRIE EN GALLES DU SUD AVANT 1700

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LA RÉGION CENTRALE, DE KIDWELL Y À SWANSEA (2D)

Une exploitation importante s'est développée vers la fin du XIVe siècle à Llansamlet, au nord de Swansea. Ici, les propriétaires s'impliquèrent directement dans le système d'exploitation jusqu'à ce que la demande de capitaux et d'investissements techniques devienne trop pressante et complexe, demande notamment liée à la montée de l'industrie du cuivre à partir de 1737. Pour eux, la production agricole, l'extraction du charbon, ou la création d'une installation métallurgique étaient des activités normales du domaine. Les équipes de mineurs étaient payées" à la pesée" (wey), au moment de la vente, en cela, ils partageaient les risques des investissements. Dans les faits, ils recevaient un fixe hebdomadaire, l'accumulation du surplus leur permettait de faire face aux crises de la demande. En 1707, le nouveau Lord Mansel leur devait f750: c'était aussi un motif d'abandon de l'exploitation directe. A Llanelly, la production annuelle a augmenté, évoluant de 20.000 tonnes en 1551 à 200.000 en 1668. L'extraction était concentrée sur le plissement synclinal où le charbon affleure (fig. 3); l'exhaure et le transport jusqu'aux criques adaptées au chargement de bateaux côtiers en étaient facilités. A partir de 1600, deux familles de propriétaires ont dominé ce bassin: les Vaughan et les Mansel. Les Vaughan doublèrent leur production en trente ans, avant la Guerre Civile, à partir de laquelle, ayant pris parti pour le Roi, leurs entreprises souffrirent. Le domaine fut divisé en 1688, mais l'extraction resta indivise, dans les mains de locataires expérimentés (armateurs de bateaux, fondeurs de plomb) jusqu'en 1754. A cette date, les droits furent baillés à un entrepreneur de Swansea, qui les laissa " dormir " pendant 20 ans pour protéger sa propre production. L'exhaure par des seaux devenait trop ardue et coûteuse en main d'oeuvre; une machine " Newcomen " fut installée par les Mansel en 1717, avec des waggonways en bois à l'extérieur et à l'intérieur de la mine, suite à leur mise en place à Neath par Sir Humphrey Mackworth en 1697 (voir infra). Mais l'élévation du propriétaire au rang de Lord en 1719, entraînant des absences dues à ses séjours à la Cour, eut pour conséquence, en 1752, l'abandon des droits au même entrepreneur que celui qui avait acquis ceux concédés par les Vaughan, et avec le même résultat. Vers le milieu du XVIIIe siècle, donc, les propriétaires commencèrent à se désengager de l'exploitation directe, au moyen de baux conclus avec des entrepreneurs anglais riches de l'expérience acquise ailleurs, notamment à Bristol et dans les Midlands. LES NON-FERREUX ET LA VENUE DES TECHNICIENS GERMANIQUES (2F)

La demande en métaux pour les armes était élevée au XVIe siècle car aux ambitions continentales se joignait la crainte d'une invasion ; mais les sources en métaux étrangers étaient en voie d'épuisement, ou contrôlées par les enne-

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mis. Aussi, les Tudor ont-ils entrepris le développement d'une industrie autochtone. S'ensuit un processus exemplaire d'intégration industrielle à Neath, où le charbon affleure à proximité de la mer, entraînant l'introduction d'innovations techniques dans les domaines de l'extraction, du transport, et du traitement. Il fallait trouver des prospecteurs et fondeurs, inexistants en Grande-Bretagne. Ceux de Schwaz, en Autriche, étaient au chômage ; la mise en exploitation des mines du Potosi au Pérou, jetant sur le marché un argent abondant, s'ajoutait à la situation instable créée par la Réforme. Tout contribuait à réduire considérablement la rentabilité des mines autrichiennes. En 1564, le monopole de la recherche et du traitement du cuivre, du plomb et de l'argent au Pays de Galles, en Cornouailles et dans le nord del' Angleterre fut concédé à un certain Daniel Hochstëtter. S'ensuit la création en 1568 de la première " maison " capitaliste britannique, la Company of Mines Royal. LA COMPANY OF MINES ROYAL À NEATH

(2F, 2G)

La première exploitation de cuivre se situe dans le nord, dans la région des Lacs. On y expérimente de nouvelles méthodes de traitement, car une donnée fondamentale est apparue alors : il n'y a pas assez de bois pour la demande en charbon de bois. On doit apprendre à utiliser le" charbon de terre"; en 1569, on constate déjà "le grand bénéfice que nous (y) trouvons". La Compagnie diversifia aussi sa production, car cette zone n'est pas très accessible. La région du plomb argentifère, nécessaire pour le traitement du cuivre, du Perfedd (côte ouest de Galles), est prise à bail en 1580. En 1582, le cuivre argentifère de Cornouaille est baillé, et un technicien allemand, Ulrich Frose, qui doit créer un établissement de traitement, arrive à Neath en 1584. Pourquoi cette stratégie nouvelle? La main d'oeuvre était moins chère dans un bassin houiller majeur et comme il fallait au moins trois fois plus de charbon que de minerai pour produire un cuivre pur, il était plus rentable de s 'installer sur le combustible. La région de Neath produisant des charbons adaptés à l'usage domestique, les bateaux de minerai pouvaient en charger au retour, évitant des traversées à vide.

L'abondance de charbon a facilité la production d'un métal très pur, en introduisant plusieurs étapes de raffinage dans le processus de fonte. Ce processus s'est appelé la " méthode galloise ", et fut utilisé, à Bristol, pour l' élaboration de bronze à l'étain qui exigeait un cuivre de haute qualité. Ce processus mettait déjà en œuvre le four à réverbère. L'établissement fut créé à Aberdulais, en amont de Neath, où les chutes de la rivière Dulais fournissaient une énergie hydraulique abondante. Ce choix peut surprendre, car l'endroit est éloigné des puits et nécessite le déchargement des bateaux qui ne pouvaient dépasser le pont de Neath. Les sources sont peu précises. Aujourd'hui, même l'archéologue qui fouille le site qui a connu de

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multiples réutilisations depuis, peut douter de cette localisation2 . Le critère fondamental est, peut-être, effectivement la présence de cette source d'énergie. On peut aussi se demander, en comparant l'installation de techniciens étrangers dans d'autres régions rudes et éloignées des grands centres, au Moyen Age notamment, si l'on ne cherchait pas à les isoler de tout contact. Mais examinons d'abord les charbonnages de cette partie privilégiée du bassin (fig. 4) 3 . LES CHARBONNAGES DE NEATH ET LE DOMAINE DU GNOLL (2E)

A l'est de Neath, le charbon affleure dans les pâturages communaux. La première mention d'extraction date de 1273. Au XVIe siècle, les tenanciers des pâturages la poursuivent de façon anarchique mais, à la fin du siècle, cette exploitation chaotique n'est plus possible. Les détenteurs du sol baillent alors l'exploitation et la commercialisation à Evans du Gnoll, nom qui vient d'une éminence (gnoll, en anglais) qui domine la ville. Leur propre approvisionnement était garanti, et pour chaque wey embarqué au Pill de Neath, Evans versait un shilling à la ville, qui reversait la moitié aux seigneurs Herbert. Plus au sud, l'extraction s'étendit sur les terres d'Eaglebush et sur celles des Mansel de Margam. LA" MÉTHODE GALLOISE" DE LA FONTE (2F, 2G, 2H)

A Schwaz, on grillait le minerai au contact direct de la source de chaleur pour libérer le soufre. Le produit du grillage était fondu avec du plomb pour dégager l'argent du cuivre. Celui-ci était refondu dans un creuset, tandis que le plomb argentifère était oxydé dans un four à coupellation. L'oxyde de plomb, ou litharge, était écumé pour ne laisser que l'argent. Le combustible était le charbon de bois et le bois. A Aberdulais, le processus devait tenir compte de l'utilisation du charbon de terre. Cette " méthode galloise " consistait en une alternance de calcinations et de fontes dans des fours à réverbère, inventés à Bristol, mais perfectionnés à Neath. Des difficultés sont apparues dans l'approvisionnement en minerai, car la traversée était délicate en hiver, et l'accumulation de stocks impossible. Les mines étaient menacées par l'eau et d'une structure géologique complexe, situation qui interdisait l'augmentation de la production. Des conflits de personnes s'ajoutant, l'exploitation a été interrompue. En 1598, suite à une augmentation du loyer par le propriétaire des terrains, l'installation de Neath a été reprise par Thomas Myddleton de Chirk, membre d'une famille d'orfèvres gallois établie à Londres. Son frère, Sir Henry, reprendra en 1620 les mines du 2. Conversation personnelle, mai 1997. 3. D'après une gravure publiée dans 2G 1.

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Perfedd, en installant des pompes d'exhaure et des bocards hydrauliques. Il semblerait que ces innovations soient dues encore à la présence de techniciens germaniques, car d'autres entrepreneurs ont envoyé des "espions industriels" pour essayer d'en savoir davantage et éventuellement embaucher ces techniciens4. Après lui, Lord Godolphin, exploitant de charbon du Pembrokeshire, a repris ces installations, mais la Guerre Civile lui a été fatale, comme elle a été fatale à Neath. MACKWORTH ET LA COMPANY OF MINES ADVENTURERS

(2G, 2H)

Ces troubles ont eu pour effet de ralentir fortement l'activité de toutes les exploitations. Beaucoup des propriétaires étaient royalistes, les mineurs se faisaient réquisitionner pour les armées, et le transport des minerais devenait problématique par manque de bateaux et pour cause d'insécurité. A la restauration de la monarchie en 1660, l'industrie avait besoin d'une restructuration profonde pour redémarrer. Nous savons qu'à cette époque, l'installation d' Aberdulais a été transférée en aval, à côté du site de l' Abbaye de Neath. La Company était moribonde, mais son monopole freinait la mise en place d'une industrie adaptée à l'explosion du commerce et au développement du capitalisme. Dans les Midlands, d'autres ont remis en route l'extraction du charbon pour le traitement de non-ferreux, et l'un d'eux, Sir Humphrey Mackworth, de la région de Coalbrookdale, s'est marié avec l'héritière du Gnoll en 1686, en acquérant en même temps les installations des Mines Royal (fig. 5). Mackworth les a remises en état en utilisant des engins hydrauliques. La fonderie a été modernisée, et une nouvelle créée à Melyncryddan pour traiter le plomb argentifère du Perfedd; car le "Potosi gallois" d'Esgair Hir vient d'être découvert par Sir Carbery Pryse de Gogerddan, petit-fils de Sir Henry Myddleton par sa mère. Sir Carbery fait libérer l'extraction et la métallurgie des non-ferreux du monopole en 1690. On entre dans une période de trente ans durant laquelle ces industries connaîtront une révolution. L'ensemble des exploitations de Mackworth se développa, l'idée dominante était celle d'une exploitation intégrée de toutes les ressources : - des amenées d'eau desservant les engins des puits de charbon et les machines de traitement et de fabrication des produits non ferreux, arrosant aussi les jardins de Gnoll Castle, avec retenus et réservoirs dont l'un servait de vivier; - une aire de réception des minerais ; le pill transformé en quai et on aménagea l'arrivée en canal (Mackworth's Cut, 1699); - un réseau de waggonways fut installé, pour la première fois au Pays de Galles, entre les puits, les fonderies et les quais ; ce système intégré de trans4. Voir J. Bennett et R. Vernon, Mines of the Gwydyr Forest, Londres, II, 1990, 18.

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port possédant ses propres voies remplaça les charrois en surface et pénétra même dans les galeries jusqu'au front de taille (fig. 6). Les waggonways, voies en bois permettant le roulement de berlines primitives connues sous le nom de "chiens'', existaient déjà dans le domaine germanique depuis le XVe siècle. Il semblerait que la Compagnie les ait utilisés dans les Lacs au XVIe siècle5, mais nous n'avons aucune information sur un usage éventuel à Aberdulais. D'écartement étroit à Schwaz (44 cm hors-tout), ils se développent à Newcastle à partir des années 1620, mais à grand écartement, celui qui a donné naissance à l'écartement des voies ferrées actuelles. Par contre, dans le bassin de Coalbrookdale, d'où venait Mackworth, l'écartement était plus petit (Shropshire gauge, 69 cm), et c'est ce type de voie qu'il a installé à Neath. Les berlines portaient une tonne de minerai (fig. 6). Signalons qu'à partir de 1710, cet entrepreneur installe des machines d'exhaure Newcomen à la place des engins hydrauliques. Entre-temps, dans le " Potosi gallois '', après la mort de Sir Carbery Pryse survenue en 1695, les travaux n'avançaient plus par manque de capital. L'ingénieur Waller a rencontré Mackworth dans une taverne à proximité ... et de leur discussion est née la Company of Mines Adventurers en 1698, dernier acte de cette proto-industrialisation en Pays de Galles du sud, et matrice des grandes compagnies du xvrne siècle qui prépareront l'explosion du x1xe siècle. La période de 1699 à 1709, date à laquelle la Compagnie a fait faillite, a vu la remise en place du système intégré du siècle précédent. Le cuivre de Cornouailles était traité à Neath, les bateaux chargeant du charbon en retour. De même, le plomb argentifère du Perfedd partait d' Aberdovey pour Melyncryddan. Le charbon servait de fret de retour vers les ports de Galles du Nord. En 1705, la somme de f'.16.689 est sortie des coffres du Copper House de Neath en salaires et en charges de fonderie. Mackworth anticipait même les industriels philanthropes du siècle suivant en créant un réseau d'écoles libres en 1699. Mais la fin était proche. LA FIN DE L'AVENTURE

(2G, 2H)

La rivalité entre Mackworth et les autres charbonniers de la région, Evans d'Eaglebush et Mansel de Margam, était arrivée à son apogée, exacerbée par la politique. Mackworth était élu comme High Tory (conservateur), tandis que Thomas Mansel l'était comme Whig (libéral). Mansel attaquait les droits de passage des waggonways, notamment là où la voie principale traversait la route de Londres sans autorisation. Il rameutait le pays autour de la question des employés de Mackworth qualifiés de repris de justice, pirates ... car, comme dit un courrier d'un des employés de Mansel, "Mackworth paie mal", et l'exploitation ne pouvait garder ses techniciens expérimentés, qui partaient vers Swan5. Voir 2H3, 7.

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sea. Ces rivalités n'expliquent pas tout, la rivière se comblait aussi; le port de Swansea commençait à accaparer le trafic. En 1709, les Mines Adventurers ont fait faillite ; en 1712, Mansel a repris Melyncryddan. Mais en 1750, son fils, attiré par la vie de la Cour, a baillé ses exploitations à l'entrepreneur de Swansea que nous avons déjà rencontré à Llanelly, avec les mêmes résultats. L'industrie des non-ferreux s'implantera plus à l'ouest, à Swansea et à Llanelly 6 ; ou au sud, avec la création de Port Talbot sur les terres des Mansel reprises par les Talbot. L'installation de Neath reste spectaculaire dans son développement des usages et des innovations techniques charbonnières. Le combustible minéral fut non seulement exporté, mais également utilisé pour le traitement des métaux non ferreux. C'est le premier exemple en Grande-Bretagne d'une intégration industrielle de produits, et de régions de production, unis par un montage commercial et faisant l'objet d'innovations techniques inspirées par des techniciens étrangers. SOURCES ET BIBLIOGRAPHIE

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FIGURES

1. La Marche de Galles avant l'Union de 1536

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