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French Pages 65 [64] Year 2014
L’ Accueillance® Une nouvelle écologie de la relation aux malentendants
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L’ Accueillance® Une nouvelle écologie de la relation aux malentendants Collectif JNA
17, avenue du Hoggar – P.A. de Courtabœuf BP 112, 91944 Les Ulis Cedex A
Composition et mise en pages : Patrick Leleux PAO, 14000 CAEN Crédits photos : iStock/JNA (pages 11 et 37), Fotolia/JNA (pages 23 et 31)
Imprimé en France ISBN : 978-2-7598-1102-1
Tous droits de traduction, d’adaptation et de reproduction par tous procédés, réservés pour tous pays. La loi du 11 mars 1957 n’autorisant, aux termes des alinéas 2 et 3 de l’article 41, d’une part, que les «-copies ou reproductions strictement réservées à l’usage privé du copiste et non destinés à une utilisation collective-», et d’autre part, que les analyses et les courtes citations dans un but d’exemple et d’illustration, « toute représentation intégrale, ou partielle, faite sans le consentement de l’auteur ou de ses ayants droit ou ayants cause est illicite » (alinéa 1er de l’article 40). Cette représentation ou reproduction, par quelque procédé que ce soit, constituerait donc une contrefaçon sanctionnée par les articles 425 et suivants du code pénal. © EDP Sciences, 2014
PRÉAMBULE
Depuis bientôt 17 ans, l’association JNA organise les campagnes Journée nationale de l’audition. Il s’agit de pallier au manque d’informations du public en matière d’audition. Le besoin réel est de faire prendre conscience que l’audition est un enjeu collectif de santé publique. À travers chacune des campagnes réalisées, l’association valorise les métiers des différents professionnels : médecins ORL, audioprothésistes, orthophonistes, psychologues, gérontologues… La complémentarité de chacune des expertises est ainsi expliquée afin de rassurer et de permettre d’oser consulter, de réaliser un test de l’audition et le cas échéant d’agir. Aussi, afin de favoriser le lien entre les professionnels d’une part, et entre les professionnels et le public d’autre part, l’association souhaite par cet essai apporter une réflexion sur la prise en charge des patients et clients ayant des pertes de l’audition. Au-delà de l’expertise et des réglages, il y a l’humain dans sa souffrance. Perdre en audition n’est psychologiquement pas anodin. L’âge moyen du premier appareillage étant de 70 ans, nombre de malentendants sont déjà entrés dans des mécanismes de repli sur soi et de retrait social. Les connexions neuronales sont modifiées et les aides 3
PRÉAMBULE
auditives ne pourront être aussi efficaces que si l’équipement était arrivé plus tôt. Nous pouvons éviter cela en assurant et en suscitant l’envie. La miniaturisation et les nouvelles technologies intégrées peuvent y aider. L’enquête JNA – Ipsos 2013 « Les seniors et l’audition : la fin d’un tabou ? » le montre : très vite derrière le frein du prix arrive celui de la confiance. Les membres du Comité scientifique de la JNA ont travaillé sur le concept de « l’Accueillance® » exposé dans ce livret. Ils vous invitent à découvrir une réflexion sur la manière de prendre en compte le patient et client dans la relation : l’écouter au-delà des mots, au-delà de ce qui ose se dire, dans ce qui se cache lorsque l’audition touche l’image intérieure, une part d’intime. C’est bien régulièrement que les personnes viennent accompagnées dans les centres d’audioprothèses pour éviter d’affronter seul : affronter quoi ? Le concept de « l’Accueillance® » sera ce que vous voudrez. Libre à chacun d’entre vous de le faire vôtre ou non, de l’enrichir, le critiquer, le rejeter, le délaisser puis vous replonger dedans. Pour ceux qui auront envie d’aller plus loin, des petits déjeuners sur « l’Accueillance® » pourraient venir compléter ce livret. Si l’envie vous en dit, un programme de formation en cinq modules a été pensé. L’ensemble des membres du Comité scientifique vous souhaite une bonne lecture. Pour le collectif JNA, Jean Stanko Président
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UNE NOUVELLE ÉCOLOGIE DE LA RELATION AUX MALENTENDANTS
SOMMAIRE
Préambule ...................................................................................
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« L’Accueillance® », définition .........................................................
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PARTIE 1 – L’ACCUEILLANCE®, UN NOUVEAU LEVIER DE DÉVELOPPEMENT ET DE FIDÉLISATION
1. Le soin à la personne au centre de la relation ........................... 2. La confiance, un investissement immatériel au cœur de l’enjeu ... 2.1 Les Émotions, premiers capteurs de la connexion à autrui .......... 2.2 Une nouvelle écologie de la relation audioprothésiste-client : être en relation dès le premier contact ....................................
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PARTIE 2 – L’ACCUEILLANCE®, UN ART DE VIVRE LE MÉTIER DE L’AUDITION
1. Être audioprothésiste : les raisons du choix ............................. 2. La quête personnelle dans la relation aux clients ...................... 3. L’assise intérieure personnelle, socle de la véritable confiance en soi dans la relation aux autres .............................................
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PARTIE 3 – TRANSFORMER SON CENTRE EN CENTRE DE L’ACCUEILLANCE®
1. La relation psychique à l’espace ............................................... 1.1 Exigence d’intimité ...............................................................
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SOMMAIRE
1.2 Exigence de perméabilité....................................................... 1.3 Exigence d’appropriation ....................................................... 2. Un centre de l’Accueillance® ....................................................
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PARTIE 4 – TRANSMETTRE L’ACCUEILLANCE® À SON ÉQUIPE
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1. Manager l’Accueillance® ........................................................... 2. Communiquer l’Accueillance® ................................................... 2.1 La méthode 5 W + H ............................................................. 2.2 La technique du bâton de parole ........................................... 2.3 Acquérir la métaposition et prendre des décisions plus « justes » ...
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Conclusion ..................................................................................
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Pour aller plus loin ........................................................................
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Bibliographie ...............................................................................
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« L’ACCUEILLANCE® », DÉFINITION
« L’Accueillance® » est un mot issu du français ancien. Selon le Centre national de ressources textuelles et lexicales, ce mot était utilisé au XIIIe siècle. Faire « accueillance » signifiait alors « accueillir quelqu’un, le gagner à sa cause ». Dans cette acception, « accueillance » porterait donc l’intention de convaincre en accueillant autrui d’une certaine manière. Au milieu du XVe siècle, on retrouve le terme « accueillance » avec l’idée de l’action d’accueillir et de manière courtoise d’accueillir. Mettre l’art et la manière ne suffit pas. Car nul n’est longtemps dupe des roueries lorsqu’elles n’ont d’autre but que le bénéfice personnel. Dans l’art de convaincre, il s’agit avant tout de créer un climat de confiance, de gagner la confiance de l’autre. Divers stratagèmes peuvent être employés. Pour autant, un seul sera réellement thérapeutique. Celui d’atteindre autrui par empathie, par une écoute de ce qu’il est et de ce qu’il ressent avec bienveillance et compassion. Il s’agit d’aller TOUCHER autrui dans son for intérieur pour qu’il ait le sentiment d’être entendu et compris. Que le miroir soit le moins possible pollué de jugements et de parades toutes faites. Pouvoir évoquer la douleur sans jugements, sans crainte que cela soit utilisé contre soi. Parfois, entendre « Oui c’est 7
« L’ACCUEILLANCE® », DÉFINITION
dur et vous avez raison d’être en colère contre la Terre entière » est plus constructif que d’appliquer la méthode Coué. Toute proportion gardée de personnes s’enfermant dans des mécanismes de complaisance. Lorsqu’un organe vient à devenir source de problèmes, c’est une part de soi qui se transforme. Cet évènement modifie l’équilibre de l’ensemble, tant physiquement que psychologiquement. Un équilibre qui permettait un sentiment d’unicité et de socle est modifié, morcelant l’image de soi et touchant l’intime. La relation avec soi-même à l’instant présent ne sera sûrement plus jamais la même. Ce qui se vérifie lorsque le système auditif vieillit et que la perception du monde sonore s’en trouve modifiée. Tous les repères changent. Ceux avec son propre corps, ceux dans l’image intérieure de soi-même et ceux a fortiori avec les autres. Les aides auditives pourront apporter un confort et empêcher une dégradation précoce mais au fond de soi, rien ne sera plus jamais comme avant. Au-delà de la fierté et de l’orgueil, il est nécessaire d’admettre que son image s’en trouve profondément changée, à jamais. Un deuil de l’ancien « moi » est à réaliser pour accueillir un nouveau « moi » et en accepter à la fois ce qui en émane et ce qui en est renvoyé par autrui. Assumer, accepter sont des mots très à la mode. Pour autant, cela demande un cheminement personnel pour continuer à profiter de la vie avec les autres, un effort au début. Ce qui est pour certains plus facile que pour d’autres en fonction des expériences de vie et de la capacité à rebondir, de l’élan général de vie. L’Accueillance® invite à accueillir l’autre et à le prendre en compte dans ce cheminement où se livre un combat entre laisser faire et agir, envie de se laisser porter et se prendre en charge, envie de crier sa haine et jouir de la vie quoi qu’il advienne. Prendre soin de l’autre, c’est aussi cela et « l’Accueillance® » invite à le mettre en pratique.
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UNE NOUVELLE ÉCOLOGIE DE LA RELATION AUX MALENTENDANTS
« L’ACCUEILLANCE® », DÉFINITION
Lorsque « l’Accueillance® » est en place, la confiance est gagnée et plus de 50 % du chemin est réalisé pour que les solutions fonctionnent et amènent la personne à sentir les gains de ce qui a été mis en place. C’est ainsi par la qualité de la coordination des émotions dans l’interaction à l’autre (la synchronie) que se créé un point de connexion où l’autre me reçoit dans ce que je suis. Une dose de bienveillance fera le reste pour se sentir aussi bordé, comme un parent borde le lit de son enfant le soir. Geste simple qui apporte beaucoup d’amour et de sentiment de sécurité intérieure. Comment créer cette relation de « l’Accueillance® » ?
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PARTIE 1
L’Accueillance®, Un nouveau levier de développement et de fidélisation
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La particularité du métier d’audioprothésiste est de concilier l’accompagnement de la personne et de réaliser un acte de vente pour assurer le bon fonctionnement financier de son centre. Cette part commerciale marque la relation. Selon l’enquête JNA – Ipsos 2013 « Les seniors et l’audition : la fin d’un tabou ? » les personnes interrogées manquent d’information sur les prix et ne savent pas en qui avoir confiance. La confiance se travaille à deux niveaux : – la transparence dans les informations commerciales et l’accompagnement associé, – la relation intuitu personae. La campagne Journée nationale de l’audition contribue à une meilleure information et à la connaissance des métiers de l’audition et des complémentarités entre eux. Elle renforce le travail effectué en ce sens par les professionnels de l’audition et les syndicats professionnels : le SNORL, l’UNSAF et la FNO. L’Accueillance® propose d’affiner la relation intuitu personae.
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UNE NOUVELLE ÉCOLOGIE DE LA RELATION AUX MALENTENDANTS
1. Le soin à la personne au centre de la relation
L’Accueillance® est une invitation à recentrer l’accompagnement sur le soin à la personne. Dans sa thèse de médecine soutenue en 1943, Essai sur quelques problèmes concernant le normal et le pathologique, G. Canguilhem distingue le fait d’être un sujet souffrant et celui de devenir l’objet d’une investigation. Le patient est une personne qui souffre mais qui ne se réduit pas à cette souffrance. Dans la philosophie canguilhemienne, le pathologique consiste en l’expérience négative et répulsive que fait l’individu de la restriction de sa capacité propre d’action. La clinique consiste alors, à travers l’examen du corps du patient et la prise en compte de sa parole, à comprendre l’expérience subjective de sa maladie, en deçà de la recherche scientifique de ses causes objectives. Le travail clinique de traduction entre le vécu du corps subjectif et le langage médical du corps objectif implique l’adoption par le médecin du point de vue du patient ; il inscrit d’emblée le médecin dans une démarche soignante. Par conséquent, la thérapeutique vise la restauration ou l’instauration d’« une normalité individuelle qui, si elle ne peut être identique au normal, à la santé perdue, doit néanmoins être conforme aux attentes du patient ». 13
L’ACCUEILLANCE®, UN NOUVEAU LEVIER DE DÉVELOPPEMENT ET DE FIDÉLISATION
G. Canguilhem définit la médecine comme le soin de l’individu. Il anticipe le profond renouvellement de la philosophie, de l’anthropologie et de la sociologie de la maladie et de la médecine qui, à partir des années 1950, placent en leur centre le patient considéré comme personne et comme un sujet de soins. Une philosophie développée dans le cadre de la loi de 2002. À travers l’Accueillance® appliquée au métier d’audioprothésiste, il s’agit d’accentuer l’information sur le soin à la personne et de développer des capacités à prendre en compte le client comme une personne qui souffre. Le rapport à son corps, à ses capacités et à son être psychique en est modifié. Il est alors important de développer l’écoute subjective. Les résonances affectives entre les êtres constituent souvent un frein, créant une barrière relationnelle. Pour autant, dépasser ces freins amènent à découvrir de nouvelles possibilités relationnelles et à retrouver de la spontanéité émotionnelle dans les relations, de l’authenticité.
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UNE NOUVELLE ÉCOLOGIE DE LA RELATION AUX MALENTENDANTS
2. La confiance, un investissement immatériel au cœur de l’enjeu 2.1 LES ÉMOTIONS, PREMIERS CAPTEURS DE LA CONNEXION À AUTRUI Que nous le voulions ou non, au premier stade d’une rencontre, « [la confiance] se fait ou elle ne se fait pas ». Dans une relation socialisée, le contact s'établit malgré le message intérieur « je fais confiance/ je ne fais pas confiance ». Au premier abord, la confiance est un sentiment issu de nos capteurs sensoriels reliés à nos émotions. Spontanément, un mécanisme sensoriel se met en place et fixe nos premières impressions. Ces dernières ne seront pas dénuées de jugements et vont amener à se forger une opinion. De là naîtra la décision de faire confiance ou non. C’est donc une réaction émotionnelle située dans le non-verbal qui va déclencher « je peux faire confiance » / « je ne peux pas faire confiance ». Il s’agit là d’un système réflexe acquis dès les premiers stades de développement. À ce niveau non verbal, juste dans l’interaction, les quatre sens que sont le visuel, l’olfactif, l’auditif et le kinesthésique vont être sollicités et fonctionner en simultané pour ensuite envoyer des messages au cerveau. Puis, intervient un niveau plus rationnel, fruit quant à lui, des usages de la socialisation acquis depuis la naissance. 15
L’ACCUEILLANCE®, UN NOUVEAU LEVIER DE DÉVELOPPEMENT ET DE FIDÉLISATION
La relation est teintée de ces premières impressions. De ce fait, il est nécessaire d’inspirer confiance dès le premier contact. Dans le cas contraire, une énergie plus ou moins grande sera à déployer : – soit pour convaincre et rassurer puis enclencher une relation amenant la satisfaction du client, – soit pour accepter cette méfiance qui freinera l’atteinte de satisfaction et la rendra laborieuse. Cette dernière solution risque d’entacher votre réputation. La défiance reflète avant tout un comportement de résistance au changement. Vous êtes celui qui amène au changement, un changement qui nécessite une gestion du sentiment d’impuissance et d’injustice. En effet, votre client ne peut être totalement détendu du fait de devoir accepter une situation qui s’impose à lui, malgré lui : celle de devoir être face à vous. Devoir « gagner » la confiance amène à un système relationnel consommateur d’énergie. Il est également chronophage. La charge émotionnelle est lourde et risque de vous amener à penser que vous n’avez pas les compétences de conviction nécessaires, que vous n’arrivez pas à atteindre vos objectifs… Bien souvent, le client ayant fait le pas d’entrer dans votre centre accompagné de son (sa) conjoint(e) ou d’un membre de sa famille. Ce tiers est également en interaction avec vous et joue un rôle par rapport à ce système de confiance et de méfiance. Votre client peut d’ailleurs utiliser ce tiers pour mettre une distance entre vous et lui. Mais ce tiers a aussi agi par son interaction avec votre client. Il a pu insister des mois ou des années pour motiver son conjoint ou proche, votre client, à réagir. Bien souvent en utilisant, malgré sa bonne intention, des pollueurs émotionnels : « tu es sourd comme un pot », « tu n’entends rien mon pauvre vieux », « tu ne comprends rien tellement tu es bouché » et communiquer avec agacement. Ce tiers n’est pas forcément un ami comme on pourrait le penser, il a pu devenir un « agresseur », appuyant là où cela fait mal : le 16
UNE NOUVELLE ÉCOLOGIE DE LA RELATION AUX MALENTENDANTS
2. LA CONFIANCE, UN INVESTISSEMENT IMMATÉRIEL AU CŒUR DE L’ENJEU
changement de soi vécu comme une dégradation physique, renvoyée comme un boomerang. La question se pose alors de laisser ce tiers entrer dans votre bureau ou de le faire patienter dans la salle d’attente. Une stratégie relationnelle consiste à laisser entrer ce tiers. Pour vous, il s’agira de gérer une relation à trois et de prendre en compte les états émotionnels propres à chacun et celui issu de leur interaction quotidienne. Le poids émotionnel est lourd. N’oublions pas l’objectif premier : celui de créer la relation avec celui qui va porter les aides auditives et mettre en place une dynamique positive. Par conséquent, vous dépenserez probablement moins d’énergie à créer cette connexion avec votre véritable interlocuteur, votre client, en l’aidant à gérer ce cap de l’appareillage avec vous dans un espace qui touche l’intime de l’être. Il peut donc être préférable d’inviter la personne qui accompagne votre client à attendre dans l’espace réservé à cet effet. L’Accueillance® vous invite à développer cette connexion.
2.2 UNE NOUVELLE ÉCOLOGIE DE LA RELATION AUDIOPROTHÉSISTE-CLIENT : ÊTRE EN RELATION DÈS LE PREMIER CONTACT La question sous-jacente est : comment influer sur les capteurs émotionnels qui risquent de polluer la relation ? Au cœur du générateur relationnel réside l’intention. Et bien que votre identité professionnelle et sociale vous classe dans les acteurs de soin à la personne, votre intention, celle qui va émaner de votre manière d’être, n’est pas forcément évidente au sens du visible. Elle va dépendre de votre construction identitaire, de votre assise émotionnelle personnelle. Par nature, votre identité professionnelle est visible de manière intellectuelle et déontologique. La manière dont vous vivez cette identité, elle, peut être cachée par nombre d’artifices et notamment l’illusion de soi-même. 17
L’ACCUEILLANCE®, UN NOUVEAU LEVIER DE DÉVELOPPEMENT ET DE FIDÉLISATION
2.2.1 L’impact de la disponibilité émotionnelle dans la relation Être disponible pour l’autre n’est pas une affaire de temps, d’argent, d’artifice relationnel (offrir du chocolat, un café…), de décoration de votre centre, c’est un ÉTAT D’ÊTRE ou plus précisément UN ÉTAT DE VOTRE ÊTRE. Le problème réside en la disponibilité de votre être au moment présent de la relation. De là va découler « je suis là pour vous ; je me consacre à vous ». Être assis et calme face à votre client ne suffit pas pour obtenir une qualité relationnelle. Si vous êtes émotionnellement dispersé par trop de questionnements liés au développement, à l’appareil qui vous a posé souci dans les réglages, au client précédent qui était en colère de ne pouvoir mieux entendre, alors votre présence à l’autre n’est pas de qualité. Il en va de même dans la relation à un enfant. Être présent physiquement dans la maison ne signifie pas s’occuper de lui. « Je suis là pour vous » est un message envoyé par votre qualité de présence à autrui. De là s’ensuivra votre écoute verbale et non verbale, votre accueil d’autrui en vous et chez vous comme un hôte à part entière. 2.2.2 La qualité de la présence de son ÊTRE À chaque extrémité de la relation, il y a votre état d’être et celui de votre interlocuteur. L’un et l’autre sont supposés se rejoindre. Mais dans cette relation particulière au sein de votre centre, il vous appartient en grande partie que la connexion se crée. Vous êtes celui ou celle qui amène à accepter le changement. C’est à vous de créer en vous les conditions de la connexion. Votre interlocuteur prendra la main que vous lui tendrez ou non. Vous devez devenir « son ami », celui qui va l’aider à ne plus se sentir seul dans l’espace psychique et émotionnel de lui-même, là où il est en difficulté. Un endroit où ses proches ne l’accompagnent plus, malgré eux. Si vous lui offrez cela, alors vous avez 99 % de chance qu’il saisisse votre proposition relationnelle. 18
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2. LA CONFIANCE, UN INVESTISSEMENT IMMATÉRIEL AU CŒUR DE L’ENJEU
C’est à cette condition : – que votre client acceptera le changement, – que les solutions apportées ne finiront pas dans un tiroir, – que votre client redécouvrira des plaisirs sociaux, – qu’il parlera de vous autour de lui. Rappelez-vous que le malentendant ou la malentendante vient à votre rencontre parce qu’il ou elle vit quelque chose qui a modifié et modifie son être. Ses proches ont certainement longuement insisté par des messages répétitifs « tu deviens sourd comme un pot ». Bien que partant de l’intention de faire réagir, ces messages agissent comme des polluants émotionnels ouvrant la porte à des sentiments de rejet affectif. Aussi, votre rencontre peut offrir un espace « ami », un cadre sur lequel votre client pourra s’appuyer pour gérer les transitions liées aux transformations que son corps et son organisme lui font subir. L’Accueillance® vise à ce que vous puissiez accueillir émotionnellement autrui et à offrir à votre client ce lien particulier de résilience et de mue de la relation à lui-même. Si ce cheminement est trop douloureux alors votre patient peut être invité à rencontrer un professionnel psychologue.
2.2.3 Le point de communion relationnel : atteindre le degré optimal de la relation Un appui pour gérer la transition entre ce qu’il a été et ce qu’il est et devient grâce aux aides auditives est ce que votre client vient aussi chercher dans votre centre. Vous êtes l’élément d’étayage lui permettant d’accepter et de se projeter dans une vie sociale avec les aides auditives. Pour être « ce support de résilience », en toute confiance et de manière bien centrée (non polluée de pensées vagabondes n’appartenant pas à l’instant et à l’espace présents), il est opportun de se poser 19
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la question de ce que nous-mêmes, nous attendrions du professionnel auquel nous devons livrer l’affaiblissement de nos capacités. La réponse vous viendra certainement très rapidement : pouvoir compter sur lui. Et cela dans plusieurs dimensions : – sur le plan déontologique, – sur le plan technique, – sur le plan relationnel et émotionnel. Nous considérons ici les deux premiers plans acquis. En cas de coup dur de la vie, pouvoir s’appuyer sur l’autre sans jugement et sans le faire faillir semble réconfortant. « Je suis là pour prendre soin de toi et tu peux t’appuyer sur moi. » Il s’agit là d’un pacte moral renvoyant à une expérience archaïque réelle et fantasmée dès les premiers mois de la vie fœtale. En fonction de la charge émotionnelle due au stress, aux inquiétudes, à la fatigue d’une longue journée, vous vivrez ce message intérieur de manière « mentale » (impulsion de la volonté mentale) ou « incarnée » (impulsion de votre moi émotionnel). Tout dépend donc de votre état de présence à vous-même, à votre capacité à vous centrer sur le moment présent dans la relation qui est là et maintenant. Plus l’étage est de l’ordre de celui de l’incarné et plus votre communication non verbale agit. À l’inverse, vous risquez de montrer des signes d’incohérence entre ce que vous voulez que la relation soit et ce qu’elle est à l’instant t dans vos comportements. Plus l’intention est incarnée et moins vous prenez le risque de prendre en charge l’autre car vous ne jouez pas à être, vous êtes. Vous ne portez pas un costume d’audioprothésiste mais vous êtes audioprothésiste. Par conséquent, plus le message est incarné, plus il sera porteur de connexions créant une émulation positive, le point de communion non verbal créant la connexion recherchée. Cette dynamique 20
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2. LA CONFIANCE, UN INVESTISSEMENT IMMATÉRIEL AU CŒUR DE L’ENJEU
relationnelle aura pour effet que le client se sente « allégé » (gain = sentiment qu’il a un problème s’éloigne), et pour vous une consommation d’énergie personnelle moindre. Le tonus psychique de l’un et de l’autre s’en trouvent considérablement améliorés et l’énergie peut être projetée dans une vision positive de la vie avec les aides auditives. Les gains pour le client : le fait d’être équipé d’aides auditives se détache d’une représentation négative, il gagne en ressource psychique pour dépasser les effets d’une image de soi altérée. Il est en voie de TRANSFORMATION de la situation vers un meilleur profit personnel. Il s’inscrit en lui qu’il est accompagné par « quelqu’un de solide qui lui fait du bien » et il parlera de vous ainsi à son entourage. Tout ce que vous lui proposerez sera supposé lui faire du bien. Les gains pour l’audioprothésiste : de votre côté, vous gagnez en satisfaction personnelle et vous garantissez un développement de votre activité par fidélisation et « bouche à oreille ». Vous garantissez que les contraintes liées aux aides auditives sont aisément dépassées. Attention, à l’égo ! Un trop fort égo décentre et induit un message mental (volonté) et non incarné. Une incohérence entre ce que vous dites et ce que vous faites se creuse alors. De rendez-vous en rendez-vous, vos échanges porteront sur les gains, les bénéfices relationnels procurés par le port des aides. Vous inviterez votre client à les exprimer. Attention aux marqueurs de pollueurs émotionnels qui sont rendus visibles par le jeu du « Oui mais ». 2.2.4 Le frein au changement : le jeu du « Oui mais » Le jeu du « Oui mais » est l’expression d’une résistance au changement. Entrer dans ce jeu vous amène à batailler contre une résistance. Vous déploierez beaucoup d’énergie à chercher les arguments pour convaincre. Il ne s’agit pas forcément d’un manque de volonté de la part de votre client. Le « Oui mais » cache bien souvent une certaine complaisance à la situation antérieure. Bien que pouvant apparaître moins satisfaisante, celle-ci apportait des avantages pour votre client : les bénéfices secondaires. 21
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Les bénéfices secondaires reposent : – sur des gains immédiats de la situation : ne plus entendre son conjoint, être pris en charge dans certains aspects de la vie quotidienne, se reposer sur l’autre ; – sur des mécanismes de protection contre la douleur permettant de faire et de vivre l’inconfort, la dégradation, la dureté d’une situation. Il appartient aux professionnels formés en psychologie d’accompagner les personnes à prendre conscience des bénéfices secondaires. Pour autant, afin d’éviter que le « Oui mais » ne vous englue dans les méandres de la subjectivité et vous consomme beaucoup d’énergie psychique, vous pouvez garder la maîtrise de l’échange en cassant le jeu que votre interlocuteur essaie de mettre en place avec vous. Un jeu se joue à deux. Il existe au moins deux façons de casser le jeu : – ramener aux gains : qu’avez-vous pu faire avec ? Êtes-vous allé au club ? Avez-vous échangé avec vos petits-enfants ? Avez-vous vu hier soir l’émission d’untel à la télévision ? Poussez votre interlocuteur par le « Et encore ? » ; – sortir physiquement de l’échange en prétextant le réglage ou le nettoyage de l’appareil.
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PARTIE 2
L’Accueillance®, un art de vivre le métier de l’audition
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Plus vous allez vivre « l’Accueillance® », plus vous allez y prendre goût. Tout est question de curseur. Il s’agit là d’un levier relationnel puissant qui amène à développer la bienveillance ou la manipulation (technique pour obtenir ce que l’on cherche). L’orientation va dépendre de l’intention incarnée – faire du bien ou avoir – donc de la finalité de l’intention. « POURQUOI JE FAIS CE QUE JE FAIS ? », « POURQUOI JE CHERCHE CE QUE JE CHERCHE DANS LA RELATION » sont deux questions simples qui aideront à un premier positionnement de soi. Le but étant : comment puis-je faire autrement ?
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UNE NOUVELLE ÉCOLOGIE DE LA RELATION AUX MALENTENDANTS
1. Être audioprothésiste : les raisons du choix
« Chaque individu est unique. Il détient au plus profond de lui sa propre vérité, sa vie et le tracé potentiel de son chemin, qu’aucune science du psychisme ne peut enfermer… Il peut accéder à ses ressources s’il se sent compris, accepté, non jugé. »
Carl Rogers
Pour reprendre la proposition de Jacques Salomé, nous sommes responsables de ce qui se passe à notre extrémité. À notre extrémité, nous devons prendre en charge l’intention première que nous instillons dans nos actes et notre manière de communiquer. Le simple manque de cohérence entre ce que je dis et ce que j’exprime peut susciter des doutes chez mon interlocuteur. Carl Rogers, cofondateur de l’approche centrée sur la personne, désigne cet alignement par le vocable « congruence ». La congruence, c’est montrer un alignement cohérent entre ce que nous ressentons et les actions que nous menons, les idées que nous avons et les paroles que nous formulons. Si nous demeurons dans un cadre professionnel, il s’agit de comprendre ce qui impulse la motivation à vivre ce métier. Quelles ont 25
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été les composantes du choix qui ont amené à vivre ce métier et à en endosser l’identité professionnelle ? « Ai-je réellement fait le choix ? » Bien des personnes ont le sentiment de ne pas avoir choisi leur parcours, de s’être laissé porter. Un non-choix est aussi un choix. Chaque lecteur professionnel de l’audition trouvera sa raison d’être audioprothésiste ou d’être devenu audioprothésiste en fonction de son chemin personnel. Ainsi, certains le sont, d’autres le sont devenus ou le deviendront : – parce que des membres de leur famille sont malentendants, – parce que l’un de leurs parents effectue ou effectuait ce travail, – par curiosité personnelle, pour allier la technologie et l’humain, – pour accompagner des personnes en souffrance, – par possibilité de développer des affaires… Parfois ces raisons s’enchevêtrent. Bien que chacune d’entre elles soient louables, elles vont colorer l’impulsion et créer une emprunte originelle à laquelle vous reviendrez par réflexe. En effet, l’impulsion à l’origine du choix va se refléter dans votre façon de communiquer avec les clients et les collaborateurs. Pour y voir plus clair, nous vous invitons à tracer votre parcours avec ce critère : « J’ai fait le choix ». Au pire, ce cheminement vous permettra de renforcer votre identité personnelle, voire de la réincarner pour ceux qui vivent le métier depuis quelques années déjà. Afin de bien identifier le levier initial, il est nécessaire d’intégrer le cycle des études et de le croiser avec les événements survenus dans votre vie (familiaux, voyages…). Pour ce faire, vous pouvez utiliser le tableau ci-contre sur une feuille A3 et revisiter votre parcours avec le focus : « qu’est-ce qui est à la source de ce choix ? ».
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UNE NOUVELLE ÉCOLOGIE DE LA RELATION AUX MALENTENDANTS
1. ÊTRE AUDIOPROTHÉSISTE : LES RAISONS DU CHOIX
PARCOURS DE VIE (PROFESSIONNELLE) Date
Événement
Choix effectué
Études
Diplômes
Expérience professionnelle
À l’issue de ce travail, vous découvrirez LA RAISON. Celle qui vous porte et imprègne votre relationnel.
Cette réflexion personnelle permet : – de faire le tri dans ce qui peut émotionnellement déborder de soi dans la relation à autrui, – de se renforcer dans son identité professionnelle, – d’être plus à l’aise avec ce qui se passe à l’autre extrémité.
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2. La quête personnelle dans la relation aux clients Par la mise en conscience de votre quête dans la relation à votre client, vous serez en mesure de mieux maîtriser votre investissement émotionnel. Cette meilleure connaissance de soi libère des zones de confort dans la relation à autrui. L’autre n’est plus perçu comme un éventuel envahisseur susceptible de déstabiliser votre intégrité. Il ne peut plus prendre le leadership de la relation en vous amenant dans vos zones d’inconfort affectif ; vos limites relationnelles dues à votre construction émotionnelle relevant quant à elles de vos expériences.
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UNE NOUVELLE ÉCOLOGIE DE LA RELATION AUX MALENTENDANTS
3. L’assise intérieure personnelle, socle de la véritable confiance en soi dans la relation aux autres En réalisant ce tri personnel, vous allez rendre plus accessible ce qui se passe à l’autre bout de l’extrémité de la relation, c’est-à-dire ce qui bouillonne en votre interlocuteur. Aussi étrange que cela puisse paraître, ce mécanisme permet d’éclaircir les capteurs de la connexion Wi-Fi. Cette assise intérieure constitue un socle intérieur personnel (fondement de la confiance en soi). Dans la relation à autrui, ce dernier offre une zone d’appui sur laquelle votre client peut lui-même se reposer. À ce contact-là, il sait alors qu’il peut compter sur vous pour affronter l’acceptation de la perte de ses capacités auditives et l’introduction des aides auditives dans sa nouvelle vie. Il se sentira épaulé et trouvera avec vous un espace relationnel SÉCURE pour partager cette intimité ? Les mots pour le dire jailliront naturellement. Ses émois intérieurs ne vous mettront plus mal à l’aise et vous serez alors à même d’aller à sa rencontre pour lui tendre une main intérieure, sans qu’il n’ait à craindre pour son intégrité. Il aura alors le sentiment de pouvoir COMPTER affectivement sur vous. Cette sensation est très importante car les parcours de vie sont jalonnés de sentiments d’abandon et de solitude, de petites trahisons du quotidien. Première preuve flagrante de ce terrain de confiance gagné : le client qui a l’habitude de venir accompagné vient désormais seul. Second indicateur : « Je viens de la part de ». 29
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PARTIE 3
Transformer son centre en centre de l’Accueillance®
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Ce que vous êtes transpire de votre être à travers les comportements, les actes et les paroles, mais également à travers l’espace que vous avez créé. L’espace que vous offrez à vos clients reflète votre intention. Votre client vient dans votre centre, un « dedans » que vous avez créé pour le recevoir. Dès la vie fœtale, le développement relationnel se construit sur la base de la gestion du dedans et du dehors. Toute la relation aux autres et à l’espace en est empreinte. Aussi, la prise en compte de cette réalité permet de réfléchir à la disposition des espaces, à ce que vous y induisez et à ce que vous laissez refléter de votre intention.
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UNE NOUVELLE ÉCOLOGIE DE LA RELATION AUX MALENTENDANTS
1. La relation psychique à l’espace Dans les situations d’interaction réalisées dans un espace, plusieurs mécanismes psychosociaux entrent en jeu, afin de remplir des exigences fondamentales par rapport à l’environnement : – exigence d’intimité, – exigence de perméabilité, – exigence d’appropriation.
1.1 EXIGENCE D’INTIMITÉ Selon A. Loncan, dans un espace intermédiaire d’échange, l’intime en soi et l’intime complicité entrent régulièrement en tension, en conflit du fait de la crainte de la perte d’identité de soi, d’une dilution de ses limites dans celles du groupe. Dans la relation, votre client va dévoiler une part intime de lui, et outre votre manière d’être et de communiquer, votre espace doit contribuer à ce qu’il puisse se livrer sans être trahi, c’est-à-dire sans intrusion dans son espace intime qu’il accepte de partager avec vous. Pour autant, votre espace ne doit pas inviter à livrer ses émois du passé (par des marqueurs de temps) ou à partager votre propre espace intime (vos voyages, vos hobbies, photos de famille…). L’espace que vous offrez donne des indicateurs sur ce que vous voulez que la relation soit.
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TRANSFORMER SON CENTRE EN CENTRE ACCUEILLANCE®
1.2 EXIGENCE DE PERMÉABILITÉ La perméabilité de l’environnement peut concerner différentes composantes de ce dernier, et principalement les regards, les sons, les odeurs. Il est donc nécessaire de disposer de filtres pour choisir ce que l’on veut montrer, laisser voir, cacher afin d’établir des limites. Ces filtres vont aider au sentiment d’intimité. Trop prégnants, ils invitent à la crainte d’une volonté d’intrusion dans l’espace intime (en soi) ; pas suffisamment présents, ils marquent une possible indifférence et un non-respect de l’espace que le client souhaiterait partager avec vous, mais limité par des intrusions. Il peut penser que les clients vous indiffèrent et que seuls les appareils et les rentrées budgétaires associées vous intéressent.
1.3 EXIGENCE D’APPROPRIATION En psychologie de l’environnement, il s’agit d’un processus d’investissement plus ou moins durable d’un espace par un individu (ou un groupe) qui s’en affecte tout ou partie, lui permettant de structurer et/ou maîtriser cet espace en lui donnant un sens personnel. Selon le sociologue P. Santot : « je m’approprie ce à quoi j’aime m’identifier, ce que je consens à reconnaître comme mien […]. Nous situerons la notion d’appropriation plutôt du côté de la sphère affective que de l’agir. » Un client va venir régulièrement dans votre centre. Si celui-ci est trop marqué de vos objets personnels, il ne pourra suffisamment investir l’espace. Soit il n’arrivera pas à réaliser des projections pour avoir le sentiment qu’il est en partie le sien, soit il s’appropriera les marqueurs personnels que vous lui offrez. Dans le second cas, il investira votre relation avec des projections fantasmatiques, qui peuvent nuire au véritable objectif : améliorer sa qualité de vie grâce aux aides auditives. 34
UNE NOUVELLE ÉCOLOGIE DE LA RELATION AUX MALENTENDANTS
1. LA RELATION PSYCHIQUE À L’ESPACE
Cette notion d’appropriation sera d’autant plus forte que votre client ou patient livrera une part de ses difficultés. Ces nouvelles clés permettent ainsi de définir un espace de l’Accueillance®. Votre espace offre un SAS de transition. Il est un tremplin vers une vie différente mais tout aussi riche et intense. Il doit être le reflet de cette dynamique : tout marqueur de temps, de vie sociale personnelle, de réussite matérielle ostentatoire sont à éviter dans l’espace « centre » que vous créez pour recevoir votre client. La seule projection à réussir est celle de lui heureux grâce aux solutions qu’il met en place avec vous. De l’esthétisme, de la douceur, de la performance et de la joie.
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2. Un centre de l’Accueillance® Dans le domaine de l’audition, les centres sont aussi des espaces transitionnels pour les clients. Ils vont potentiellement utiliser votre lieu pour se rassurer, exprimer des frustrations, des joies liées à leur utilisation des aides auditives et supporter l’évolution de leurs relations sociales. Des étapes de vie importantes pour eux. Bien que ne se rendant pas dans un cabinet de psychiatre ou de psychologue, ils vont aussi y déposer une part d’eux et vivre une relation réelle et fantasmée avec votre lieu. La limite est alors le curseur de cet investissement et de ce qu’ils y déposent. Si l’on reprend un concept développé par Donald Wood Winnicot, un centre de l’Accueillance® est un centre suffisamment agréable et sécurisant pour que le client puisse gérer des étapes de transformation sans crainte.
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PARTIE 4
Transmettre l’Accueillance® à son équipe
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1. Manager l’Accueillance® Manager une équipe signifie prendre en main une équipe. Différentes façons de prendre en main existent. Pour autant, les professionnels du management visent à développer le management de coopération. Dans le contexte de l’Accueillance®, il s’agit d’offrir un espace suffisamment agréable à vos collaborateurs pour qu’ils aient envie de travailler chez vous et avec vous. Il ne s’agit pas de créer une relation d’amitié, mais une relation de confiance qui repose sur cette simple intention de permettre à son collaborateur de se sentir bien dans son travail et d’y évoluer sereinement. Tout ne repose pas sur le salaire et les possibilités d’évolution professionnelle. D’autres leviers de motivation interviennent. L’ambiance relationnelle en est un.
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2. Communiquer l’Accueillance® Votre manière de communiquer avec vos collaborateurs donnera des indications sur l’ambiance relationnelle que vous entretenez au sein de votre centre. Les changements réguliers de collaborateurs sont également un indicateur de l’état de santé relationnelle.
2.1 LA MÉTHODE 5 W + H Afin de veiller au respect des personnes, une règle simple est à mettre en place. Quand je communique, je dois veiller à : – quoi : quelle information je communique ; – pourquoi je veux la transmettre ; – comment : la manière de la transmettre. Suis-je dans une communication « klaxon : tut tut » (communication reproche) ou dans une communication constructive ; – qui et à qui : à qui l’information est-elle destinée ; – quand : est-ce bien le moment pour moi ou pour mon interlocuteur ; – où : est-ce bien l’endroit. En prenant compte de ces simples règles, la relation s’en trouvera responsabilisée. Marshall Rosenberg, père de la communication non violente, nous explique : « Les jugements que nous portons sur les autres sont l’expression 39
TRANSMETTRE L’ACCUEILLANCE® À SON ÉQUIPE
tragique de nos besoins non satisfaits. Choisir de demander plutôt que d’exiger ne signifie pas qu’il nous faille baisser les bras face à un refus, mais implique que nous ne tenterons pas de persuader l’autre avant d’avoir écouté avec empathie ce qui l’empêche de répondre favorablement à notre demande. » Pour cela, il faut différencier la cause et le facteur déclenchant. Il est courant d’attribuer à l’autre la responsabilité de ce qui nous arrive : « elle m’a mis en colère en faisant ceci ». Le comportement d’autrui peut être le facteur déclenchant, mais il ne reste que le déclencheur de la colère (par exemple). Car il n’est en aucun cas la cause de nos sentiments. À chacun de prendre en charge son extrémité.
2.2 LA TECHNIQUE DU BÂTON DE PAROLE Stephen R. Covey, auteur de La 3e voie, invite à utiliser la technique du bâton de parole. Chacun ayant à tour de rôle le bâton de parole afin de purger ce qu’il a à dire et ensuite passer à la construction d’une solution qui ne sera ni celle du collaborateur ni celle du manager : la 3e voie. Chacun aura le sentiment d’avoir contribué à créer cette solution et une coresponsabilité de la réussite de cette démarche. On atteint alors des gains relationnels supérieurs à ceux issus d’un jeu gagnant-gagnant où l’un comme l’autre doit faire des concessions pour sortir du désaccord. Le sentiment d’être lésé peut être fort dans ce type usuel de gestion de la relation. Le manager est alors en position haute, ayant le dernier mot car il est institué comme supérieur hiérarchique et/ou employeur.
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2. COMMUNIQUER ACCUEILLANCE®
2.3 ACQUÉRIR LA MÉTAPOSITION ET PRENDRE DES DÉCISIONS PLUS « JUSTES » Un management équilibré demande des capacités à observer sans juger, à prendre le temps du recul, à se positionner en haut de la montagne pour observer la plaine et décrypter : – ce que la relation a éveillé en vous, – ce que l’autre a voulu faire et vous dire. Le courant de la programmation neuro-linguistique (PNL) s’appuie sur un outil créé par Robert Dilts : le SCORE. Cet outil va servir à diagnostiquer les causes d’une situation insatisfaisante et à trouver de nouvelles solutions. Pour atteindre un bon niveau de métaposition, le SCORE peut être agrémenté d’une gymnastique intellectuelle appelée DANSE DU SCORE, à l’aide des cartes suivantes : M Moi
1
A Ami coach
2
S
E EFFET RECHERCHE
SITUATION C
R
CAUSES
RESSOURCES O OBJECTIFS
Je positionne l’ensemble des cartes face à moi sur le bureau (manière statique) ou face à moi sur le sol (manière dynamique).
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TRANSMETTRE L’ACCUEILLANCE® À SON ÉQUIPE
Je démarre la danse sur le M = moi et j’appelle en moi un ami, mon meilleur ami (celui que j’imagine) afin de m’aider à clarifier la situation. Le « meilleur ami » va jouer le rôle du « coach » et poser des questions simples. Le A – pour ami coach – va aider à prendre du recul en se dissociant. Il va vous guider pour vivre les différentes étapes.
■ Travailler S = situation.
1/ Au centre, M et A échangent. Questions de A : « Qu’est-ce qui se passe ? », « Explique-moi. », « Et encore ? », « Oui et encore ? ». Il s’agit là de décrire la situation. L’échange avec A doit amener à préciser la description. Comme sur un sentier de montagne, on prend de la hauteur au fur et à mesure de la marche. 2/ M (moi) va sur le S et l’ami coach reste au centre. M résume l’échange avec son ami coach et valide avec A. 3/ M (moi) revient au centre aux côtés de A.
■ Travailler C = causes.
Retour de M en position au centre aux côtés de l’ami coach. Ce dernier demande : « Qu’est-ce qui est à l’origine de cela ? », « Qu’est-ce qui provoque cela ? », « C’est selon toi à cause de quoi ? De qui ? », « Oui et encore ? », « Et encore ? », « Est-ce que cela te plaît ? », « Peutêtre trouves-tu des bénéfices dans cette situation ? », « Es-tu certain que non ? », « Lesquels ? ». N.B. : il peut être intéressant d’enrichir l’analyse en intégrant un outil complémentaire qui va servir de filtre, les niveaux logiques. Environnement : est-ce que quelque chose dans l’espace qui m’entoure provoque une gêne en moi et/ou en mon interlocuteur ? Comportement : y a-t-il quelque chose qui me gêne dans le comportement de mon interlocuteur ? Qu’est-ce que mon interlocuteur génère sur mon comportement ? 42
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2. COMMUNIQUER ACCUEILLANCE®
Capacités : ce que je demande est-il dans les capacités de mon interlocuteur ? Moi-même, si l’on me le demandait, serais-je certain d’atteindre ce niveau d’attente ? Valeurs/croyances : est-ce que quelque chose dans l’échange ou le comportement vient entrechoquer mes valeurs ? Quelles sont-elles ? Est-ce que je les respecte moi-même ? Identité : est-ce que la situation que j’ai vécue, ou que je vis, et dont je suis insatisfait perturbe le sentiment de moi, mon intégrité ? Mon identité professionnelle ? Quelle est mon identité professionnelle ? Mission : quelle mission je donne à mon interlocuteur et quelle mission je me donne ? Et là, de même, différents niveaux d’échange entre M et A : au centre, puis M va seul sur le « C = cause », dont le rôle est de jouer « la mouche du coche » et M revient au centre pour ensuite examiner l’objectif qu’il pourrait se fixer et formaliser à son interlocuteur. Une fois O (objectif) réalisé, au centre A demande à M : « Quelles ressources (capacités) peux-tu aller chercher en toi ? », « Et encore ? », « Encore ? », « Est-ce qu’il y a une situation où tu as été chercher cette ressource ? », puis mouvements 1 et 2. E = effet recherché. Au centre, A demande à M : « Donc pour gérer cette situation que tu as décrite, qui en est là où elle en est à cause de C et en te fixant l’objectif à atteindre en puisant dans les ressources formulées, tu atteindras une situation meilleure. « Est-ce bien cela ? », « En es-tu certain ? », « Et encore ? », « Peux-tu aller chercher une ressource complémentaire ? En toi ? Une autre personne qui va t’aider grâce à ses ressources ? », « L’as-tu déjà expérimenté ? », « Quel résultat obtiendras-tu ? », « En es-tu sûr ? ».
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TRANSMETTRE L’ACCUEILLANCE® À SON ÉQUIPE
Puis mouvements 1 et 2 pour validation. En effectuant les mouvements 1 et 2, dynamique de la danse, un sentiment s’affirme lors de l’analyse de chaque item. Le mental rencontre peu à peu l’émotionnel. L’intuition rejoint l’expérience. Une évidence jaillit. En cela cette démarche amène à un travail de centration, de congruence. La pertinence de l’évidence s’affûte d’elle-même au fur et à mesure de l’utilisation de la méthode.
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CONCLUSION
« L’Accueillance® » repose sur le respect de l’autre. Elle met au cœur de la relation l’intention. Celle-ci va orienter l’énergie, la dynamique de l’action. Bien que l’éducation amène à être policé, certains réflexes vont laisser entrevoir la véritable intention. Celle parfois inavouable et qui provoque la culpabilité. Depuis la nuit des temps, l’autre que soi est à la fois ami et ennemi. La relation à lui nous confronte dans nos idées, nos représentations et nos certitudes. En cela, il devient contrainte et limitant dans la liberté de penser ce que l’on veut où l’on veut. La difficulté est alors d’être clairvoyant sur la manière de vivre cette contrainte, ce qu’elle génère en soi. Il s’agit de définir si cet émoi nous appartient ou appartient à notre interlocuteur. Cette clairvoyance sur soi-même démontre une souplesse personnelle amenant une meilleure connaissance de l’assise de son être. Celle-ci sera d’une infinie richesse dans l’accompagnement des patients qui viennent s’équiper et compter sur le professionnel pour lui proposer un avenir meilleur. Lui, qui subit la nécessité de trouver une solution externe peut continuer à vibrer dans la vie. Jamais auparavant il n’aurait pensé être dépendant d’appareils pour jouir de la vie. L’Accueillance® est une invitation à développer une approche humaniste, chaleureuse, dans un métier qui doit concilier différentes
CONCLUSION
dimensions : économique, technologique et humaine à travers le soin à la personne. Et lorsque la routine quotidienne amène à (s’) oublier, à perdre le sens, alors l’Accueillance® peut aider à revenir à l’essentiel. Un essentiel partagé par l’ensemble des professionnels du secteur, et ce, dès la première pierre du développement des aides auditives posée ; apporter des solutions pour que la personne reste en contact et puisse s’épanouir de ce lien.
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LES FONDEMENTS DE L’ACCUEILLANCE La synchronie sur laquelle repose l’Accueillance® est difficile parfois à gérer. Il s’agit là de veiller à la frontière entre l’empathie et la sympathie. La synchronie par le système de résonances psychiques peut effectivement amener à créer une relation fusionnelle et à prendre en charge les affects d’autrui, tant elle peut faire miroir avec nos propres affects et nos propres schémas émotionnels. La synchronie renvoie également à la synchronicité dans le lien mère-enfant/parent-enfant dans les étapes de développement. Il est donc nécessaire de mieux comprendre ce qui créé l’interrelation dans la communication humaine.
1/ Le cerveau social – Apports des Neurosciences sociales La neuroscience sociale a révélé que notre cerveau est inexorablement entraîné à établir un « arrimage » intime de cerveau à cerveau chaque fois que nous sommes en relation avec une autre personne. Cette passerelle neuronale fait que nous affectons le cerveau – et aussi le corps –de chaque individu que nous rencontrons et vice versa. 47
POUR ALLER PLUS LOIN
Pour Giacomo Rizzolatti, le neurologue italien qui a découvert les neurones miroirs, « ces systèmes nous permettent de « piger » l’autre non par un raisonnement conceptuel mais par une stimulation directe ; par le ressenti, par la pensée ». Les neurologues appellent « résonance empathique » cet état de réverbération mutuelle, ce lien de cerveau à cerveau qui forme un circuit à deux. Il existe dans le cerveau de multiples systèmes de neurones miroirs servant non seulement à imiter les actions mais aussi à déchiffrer les intentions, à extraire les implications sociales de ce que fait un tiers et à lire les émotions. Selon Daniel Stern, psychiatre américain, spécialiste du développement dans la lignée de Jean Piagiet, « nous ne pouvons plus voir nos esprits comme aussi indépendants, séparés, isolés. Il faut les voir comme perméables, en interaction permanente comme s’ils étaient reliés par des fils invisibles. Au niveau inconscient, nous sommes en dialogue constant avec notre interlocuteur et nos sentiments, nos manières de bouger, sont en phase avec les siens. Tant que nous sommes ensemble, notre vie mentale est co-créée dans la matrice formée par notre interconnexion ».
2/ L’intelligence relationnelle selon Daniel Goleman Cette notion d’interconnexion est également développée par Daniel Goleman, auteur de Cultiver l’intelligence relationnelle. Il indique que les neurones miroirs rendent les émotions contagieuses en laissant les sentiments que nous observons se répandre en nous, en nous aidant à nous mettre en synchronie et à sentir ce qui se passe. Nous « sentons » l’autre en éprouvant ses sentiments, ses mouvements, ses sensations, ses émotions de l’intérieur. Le talent relationnel repose, selon Daniel Goleman, sur les neurones miroirs.
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■ 2.1 Les circuits du cerveau émotionnel
L’hippocampe : il joue un rôle clé dans les mécanismes de mémorisation, d’apprentissage et de conditionnement. C’est lui qui enregistre les circonstances sensorielles d’un événement donné (forme, odeur, mouvement, couleur…). Il enregistre les faits bruts. Il est capital pour la rétention des données récentes et pour leur mise en mémoire. Il est comme une boîte noire capable de garder la trace d’expériences passées dont nous sommes incapables de retrouver les circonstances ou la nature même mais qui, un jour, ressurgissent spontanément à l’occasion de la stimulation spécifique d’un organe des sens, ayant un rapport direct avec une circonstance ancienne dont le cortex n’a aucune idée. L’amygdale : partie du système limbique qui donne la couleur émotionnelle aux événements vécus (agréables, stressants ou indifférents) et aux actes décidés par le cortex frontal. L’hippocampe, quant à lui, sert de banque de données. L’amygdale reconnaît immédiatement le danger déjà enregistré par le passé par l’hippocampe. Le système limbique : substance blanche de la partie inférieure du cerveau, centre d’intégration émotionnelle de toutes les informations que nous recevons. Il emmagasine tous les clichés de notre vécu, mémorisant nos plaisirs et nos aversions, réagissant de façon réflexe quasi immédiate devant toute agression, pour tempérer ou exacerber la cascade des réactions neurohormonales. Dès la naissance, le cerveau limbique imprime les émotions bonnes ou mauvaises avant même que le cortex puisse mettre en route le système cognitif ! Le rôle des lobes frontaux : ils sont le siège de la mémoire dite « active » qui permet à la pensée d’être efficace et productive. Quand l’esprit est calme, les lobes frontaux peuvent travailler avec des informations variées venues de toutes les zones du cerveau. L’humeur, en revanche, est dictée par l’amygdale et influence les décisions prises par l’aire frontale. 49
POUR ALLER PLUS LOIN
Selon Daniel Goleman, les ingrédients de l’intelligence relationnelle peuvent être divisés en deux grandes catégories : la sensibilité sociale et la compétence sociale.
■ 2.2 La sensibilité sociale et la compétence sociale chez Daniel Goleman
La sensibilité sociale désigne un processus allant de la perception immédiate de l’état intérieur d’autrui à la compréhension de ses sentiments et pensées, et à l’intuition de situations sociales complexes. Elle comprend : – l’empathie primaire : identification à l’autre, détection des signaux émotionnels non verbaux ; – l’écoute : attention et réceptivité, mise en phase avec l’autre ; – la finesse empathique : compréhension des pensées, sentiments et intention d’autrui ; – la cognition sociale : compréhension du fonctionnement du monde social. La compétence sociale : le simple fait de ressentir ce que ressent une autre personne, de savoir ce qu’elle pense ou de deviner ses intentions ne garantit pas qu’une interaction soit féconde. La compétence sociale se fonde sur la sensibilité sociale pour rendre l’interaction aisée et efficace. Le processus de la compétence sociale inclut : – la synchronie : elle favorise, au niveau non verbal, une interaction aisée ; – la présentation de soi : elle doit être faite efficacement ; – l’influence : elle permet de peser sur l’issue de l’interaction ; – la sollicitude : elle consiste à tenir compte des besoins des autres et à agir en conséquence.
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POUR ALLER PLUS LOIN
3/ La prise en compte des besoins d’autrui dans la relation Le psychologue Abraham Maslow a développé l’idée que le bonheur dépend de la satisfaction de différents besoins et que certains besoins fondamentaux doivent être satisfaits avant de penser à en satisfaire d’autres. Ce concept est appelé « hiérarchie des besoins » et il est souvent présenté sous la forme d’une pyramide à cinq niveaux. Nous vous en proposons une déclinaison adaptée aux besoins dans la relation à autrui. La pyramide (voir page suivante) sert dans l’entreprise : ainsi, la performance d’un collaborateur (niveau 5) peut se dégrader si celui-ci ne se sent pas reconnu par son équipe (niveau 3) ou tout simplement s’il n’a pas bien dormi (niveau 1) ! La non-satisfaction des besoins s’exprime par les sentiments suivants : Sentiment
Besoin
Peur
Besoin de sécurité, de protection
Tristesse
Besoin de consolation, de proximité
Colère
Besoin de respect de son territoire
Joie
Besoin de partage, de communion
Dans la communication, la prise en compte des besoins de l’interlocuteur est une façon de prendre soin de lui et de chercher à créer une relation épanouissante. Il ne s’agit pas de confondre besoin et utilité. L’autre me devient utile lorsque mon intention est d’avoir, de posséder. Le besoin demande de l’humilité et de la modestie pour accepter que l’on ne peut pas tout faire, tout seul. Il est parfois nécessaire de reconnaître que l’on a besoin de se sentir épaulé, soutenu pour gérer les aléas 51
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Besoins inférieurs
Besoins supérieurs
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Besoins physiologique Comment l’interrelation peut m’aider à répondre à mes besoins physiologiques
Besoins de sécurité Se sentir en sécurité dans la relation à autrui – Sentir que le groupe est générateur de ce sentiment de sécurité. Être dans la relation sans craindre pour son intégrité physique et morale.
Besoins d’estime Respect de soi, confiance, indépendance, liberté, respect des autres. Être un élément de valeur et accepté dans ses ressources et défauts sans jugement hâtif. Besoins d’appartenance Sentiment de communauté : être un acteur parmi les autres acteurs du groupe et avoir le sentiment de faire partie de ce groupe.
Accomplissement de soi S’accomplir et évoluer dans son être grâce à l’interaction.
Niveau 1
Niveau 2
Niveau 3
Niveau 4
Niveau 5
POUR ALLER PLUS LOIN
POUR ALLER PLUS LOIN
de la vie. L’humilité réside en la capacité à exprimer que l’on ne peut pas réaliser seul non par impuissance ou fragilité, mais parce que humain. 4/ Le quotient relationnel selon Jacques Salomé Selon Jacques Salomé, la notion de quotient intellectuel a fait l’objet d’études approfondies et fait partie aujourd’hui du patrimoine des sciences humaines. Les notions de quotient émotionnel et de quotient relationnel sont venues compléter la compréhension de l’être humain et de sa dynamique. Pour Jacques Salomé, « le Quotient Relationnel est lié à la capacité plus ou moins développée chez une personne, à proposer pour ellemême et pour autrui, des relations qui participent à la croissance et à son épanouissement ». Comme ni l’éducation ni notre environnement ne nous préparent à des relations vivantes et de qualités, seul un travail de conscientisation et un travail sur sa propre dynamique relationnelle permet d’améliorer ses capacités relationnelles pour créer une émulation positive. Qu’on le veuille ou non, le quotient relationnel est perceptible dès les premières rencontres. Sa mise en jeu, son impact suscitent chez l’interlocuteur divers sentiments et ressentis immédiatement perceptibles : lâcher prise sur le système défensif, écoute active, disponibilité à une implication personnelle plus grande, amplification des ressentis, ouverture aux résonances, développement d’une plus grande responsabilisation pour gérer ce qui se passe à son « bout » de la relation. Jacques Salomé considère qu’une relation a toujours deux extrémités et que nous sommes responsables de ce qui se vit, de ce qui se passe à notre extrémité. La qualité de la relation va donc dépendre de ce qui se passe à mon extrémité, et à cet endroit je suis confronté à mon vécu, mes affects associés, ma culture, mes quêtes personnelles trahissant mon intention. 53
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5/ L’intention « Aucun mortel ne peut garder un secret, si les lèvres restent silencieuses, ce sont les doigts qui parlent. »
Sigmund Freud
Marie-Louise Pierson, auteure de L’intelligence relationnelle aux Éditions d’organisation, et intégrant la lecture du langage du corps, reprend à son actif cette information du grand maître de la psychanalyse : « Les silencieuses paroles du corps accompagnent toujours le flot des mots, et ce sont elles que nous entendons prioritairement. Nous sommes d’abord dans l’ordre : Vus, Entendus, Compris. L’image de soi est un enjeu. » Pour cette auteure, l’Homme se construit dans un double bind – notion développée par l’école de Palo Alto – et signifiant « double contrainte contradictoire ». Le paradoxe est ici celui incité par le monde social depuis JeanJacques Rousseau invitant à être sincère et authentique dans la relation. Pour Marie- Louise Pierson, l’Homme entretient une relation ambiguë avec son image et se demande souvent s’il en est bien le possesseur, ou s’il est possédé voire dépossédé, trahi. « Nous sommes lancés dans l’espace comme des cosmonautes sans capsule, et la première tâche de notre corps, pour arriver à bon port est de s’orienter. Où donc est l’ami ? Où donc est l’ennemi ? » Ce clivage est présent dans notre construction dès les premiers mois de notre vie. En effet, Mélanie Klein explique que le bébé peut se sentir envahi par des introjections positives ou négatives issues de la relation des adultes référents. Dans cette relation, la voix, les gestes, l’investissement émotionnel, etc., vont agir comme des envahissements extérieurs et être source de sensations agréables ou désagréables. Celles-ci créent des tensions sur l’intégrité du moi pouvant amener le bébé à vivre une phase de dépression, voire même induire une construction schizoïde.
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Ainsi donc l’Homme construirait son relationnel sur ce filtre binaire : mon interlocuteur est-il bien veillant ou malveillant ? Pour autant, sommes-nous l’un ou l’autre ? Selon C. G. Jung, l’Homme est fait d’ombre et de lumière. L’Homme serait donc capable d’unir ses forces pour se développer ou se détruire, et vivrait des stades de développement en se confrontant à des archétypes de l’inconscient collectif : archétype de superman, archétype de l’hybris (qui exprime la démesure de l’Homme qui se prend pour un géant, un Dieu…). Dans cette conception de la nature humaine, l’Homme est réduit à un animal politique dont la socialisation aurait pour finalité l’atteinte de ses intérêts individuels. Sortir de ce schème est un vaste travail de conscientisation pour s’extraire des réflexes archaïques qui ramènent l’Homme à des instincts grégaires de défense, d’agression… L’histoire n’est que le reflet de ces allers-retours. Et si la finalité de la vie était de se développer par et grâce à la relation à autrui ; si la richesse de la vie était l’expérience d’autrui. Alors autrui ne serait plus perçu comme une contrainte, un envahisseur, mais comme un besoin fondamental permettant d’accéder à une forme d’épanouissement grâce à l’interaction. La notion de prendre soin retrouverait ou trouverait son essence. Cela pourrait être et devenir l’INTENTION originelle. « Béni soit qui me hait, béni soit qui m’aime... Moi je ne veux qu’aimer ! », disait Victor Hugo.
6/ Ouvertures ■ 6.1 La notion de « Grand Nous » proposée par l’honorable Dalaï-Lama et Stephen Hessel
Dans Déclarons la paix ! Pour un progrès de l’esprit aux Éditions Indigène, le Dalaï-Lama et Stephen Hessel évoquent la notion de « grand nous ». « Rien n’est totalement indépendant. 55
POUR ALLER PLUS LOIN
Tout est interdépendant. Tout est le résultat de causes et de conditions. […] Nous ne devons pas seulement penser, mais aussi agir avec compassion. Penser que nous ne faisons pas les choses bonnes ou mauvaises tout seuls, mais avec les autres. Si nous sommes liés par le souci du bien-être des autres, alors peut-être qu’ensemble nous pourrons aller de l’avant. » À cela, le Dalaï-Lama ajoute : « Nous pouvons développer cette pratique de l’interdépendance, développer ce grand « Nous » plutôt qu’un grand « Tout ». Mais actuellement nous restons encore dans un système régi par une démarcation entre « nous » et « eux ». Et cette ligne reste inscrite dans notre mental. Ce qui nous pousse à être dans l’intérêt personnel… »
■ 6.2 Le Care développé par Pascale Molinier
Le care traduit des préoccupations qui sont aussi les nôtres, ici comme ailleurs, des préoccupations humaines. L’importance du care est évidente lorsqu’il n’y a plus rien – ni personne, ni cadre – pour l’assurer. L’absence de care fait alors apparaître que notre autonomie dépend du travail des autres. La perspective du care souligne l’interdépendance et la vulnérabilité de tous : nul ne peut prétendre à l’autosuffisance. L’interdépendance est difficile à accepter, car celle-ci ne signifie pas seulement que nous dépendons des autres pour nos besoins élémentaires, mais que nous dépendons des autres dans tous les domaines de l’existence, y compris ceux qui sont les plus singularisés. La reconnaissance de ce que l’on doit au care des autres impose de notre part une modestie. Mon émotionnel va être rapidement empreint des sensations provenant des différents cycles de ma vie et marqués de mes affects. Ces derniers agissent comme des mémoires émotionnelles qui se réactivent lors des relations tout au long de la vie.
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UNE NOUVELLE ÉCOLOGIE DE LA RELATION AUX MALENTENDANTS
POUR ALLER PLUS LOIN
■ 6.3 Créer une 3e voie relationnelle
L’Accueillance® est aussi une invitation à construire une 3e voie dans laquelle la relation ne sera pas ce que je veux ni ce que mon interlocuteur veut, mais le fruit d’un avenir cocréé sans pour autant devoir être dans la concession ou la résignation au désir de l’autre. Selon Stephen R. Covey, cette issue amènera à une solution supérieure où chacun trouvera un gain supérieur à celui obtenu lorsque le jeu relationnel applique les règles de la négociation. À travers l’Accueillance®, il s’agit donc de prendre soin de ce « grand nous » et, pour ce faire, de mieux comprendre ce qui se joue dans l’interdépendance : ce que je mets de moi dans la relation et ce que mon interlocuteur met de lui. Plutôt que de chercher à trouver en l’autre quelque chose pour assouvir un besoin et que mon interlocuteur cherche à remplir un besoin dans sa relation à moi, il s’agit d’emblée de poser le postulat que nous sommes en relation pour se faire du bien, que nous sommes indispensables les uns aux autres. La relation se déplace alors sur une recherche d’accomplissement d’un projet commun : se permettre mutuellement de s’épanouir. De l’intention va dépendre l’orientation de nos agissements.
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