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French Pages 111 [112] Year 1976
GY. GYÒRFFY
Système des résidences d'hiver et d'été chez les nomades et les chefs hongrois au Xe siècle
LISSE
THE PETER DE RIDDER PRESS 1976
© Copyright Gy. GyOrffy No part of this work may be translated or reproduced in any form, by print, photoprint, microfilm, or any other means, without written permission from the author. ISBN 90 316 0098 9
The text of this article is reprinted from ARCHIVUM EURASIAE MEDII AEVI I (1975), pp. 45-153
Printed in Belgium
L'étude qui suit est une tentative de saisir le système selon lequel les peuples des steppes s'établirent sur leur territoires et d'illustrer les lois qui régirent, en fonction des nécessités économiques, les changements d'habitat des seigneurs. Pour ce faire, j'analyserai les conditions géographiques de la Hongrie du X e siècle et les toponymes remontant aux noms des chefs de ce temps. Cette méthode semble permettre de fixer les centres ayant existé au X e siècle et aider à dater les fortins de terre antérieurs à l'instauration de la royauté. Je me propose dans cette étude de fournir des bases historiographiques aux recherches sur les fortins de terre, tâche que l'archéologie hongroise s'est assignée comme une des plus importantes et dont la première grande entreprise est le dégagement partiel du fortin de terre de Szabolcs que suivront-d'autres fouilles. L'exemple polonais nous suggère que ces fouilles élargiront considérablement nos connaissances sur la société hongroise du X e siècle et sur l'organisation de l'Etat stable hongrois dont le millième anniversaire approche. Il est bien connu que le mode de vie des éleveurs nécessite le changement régulier des pâturages. La raison n'en est pas seulement l'épuisement des pâturages et la recherche de terres fraîches. L'entretien du bétail demande, lui aussi, différents entourages naturels en hiver et en été. Le passage se fait donc d'une manière régulière entre le pâturage d'été et l'hivernage. Nous savons pertinemment qu'il faut tenir compte de ce fait en traitant le mode de vie des anciens Hongrois. Nous nous en rendons compte depuis environ le début de ce siècle où les sources musulmanes sur les Hongrois de l'Atelkouzou furent publiées et les relations des voyageurs en Asie sur la vie des Nomades furent prises en considération.1 1
Gy. Pauler, A magyar nemzet tôrténete Szent Istvánig [L'histoire de la nation
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Istvân Gyôrffy a suggéré l'existence, fort vraisemblable, au temps des Àrpâd, de campements faisant pendant et servant d'habitat d'hiver et d'été. Il indiqua en effet qu'il y avait des couples de toponymes dont l'un correspondait à un village le long de la rivière Tisza, l'autre à un village dans les montagnes. Il écrivit : "L'établissement des Hongrois conquérants était fort conditionné par l'élevage nomade. Les campements d'hiver étaient choisis dans les régions le long du Danube et de la Tisza, pouvant servir également de pâturage d'hiver ... Dans les régions de la Tisza moyenne il y a des villages comme Tiszandwa, Tiszaszalôk, Tiszaszederkény, Tiszavârkony, Tisza tarjân, Mez ôtârkâny (mezô= 'champ'), Mezôkôvesd, Mezônyârâd. Ces noms se répètent à des distances d'un ou de deux jours de marche, dans les montagnes Matra et Bùkk : Felsôndna (felsô 'supérieur'), Egerszalôk, Màtraszederkény, Sajôvârkony, Gyôngy ôstarjdn, S'Agôtarjdn, Fels ôtârkâny, "Erâôkôvesd (erdô 'forêt'), Felsônyârâd, etc. Ces noms désignent probablement les campements d'hiver et d'été du même clan ou du même seigneur domanial." 2 Cette observation précieuse est restée sans suite et cette question ne fut soumise à aucune analyse détaillée tenant compte des méthodes et des cadres géographiques de l'élevage nomade d'une part et des territoires peuplés par les clans hongrois ainsi que des types toponymiques de l'autre.
hongroise jusque'à Saint Etienne], Budapest, 1900, 17, 160, il estimait encore que les Hongrois étaient, à l'époque de la conquête, des pasteurs nomades. En décrivant leur nomadisation dans l'Atelkouzou il réunit les indications de Gardizi avec les descriptions de Roubrouk sur les Mongols et situa leur campement d'été au nord et celui d'hiver au sud, près de l'embouchure du Dniéper et du Don, dans des régions de pêche. Traitant l'établissement des Hongrois il cita l'excellente observation de Roubrouk, qui notait que les Mongols partageaient la Scythie de manière à ce que chaque capitaneus connût les limites de ses pâturages et sût où il devait faire paître ses troupeaux en hiver, en été, en automne, et au printemps (cf. A. van den Wyngaert, Sinica Franciscana, Florence, 1929, I, 172). B. Hóman, A magyarok honfoglalása és elhelyezkedése [La conquête du pays par les Hongrois et leur établissement], Budapest, 1923, 26-27, 43, souligne déjà le caractère semi-nomade des Hongrois, il suppose des campements d'hiver comprenant des maisons, et des campements d'été consistant en tentes, nommés tous les deux d'après le chef du clan ou de la famille. Il supposa en outre qu'à l'intérieur du territoire appartenant à la tribu les clans avaient des campements d'hiver et d'été (cf. Magyar torténet [Histoire hongroise] I 6 , Budapest, 1939, 124). I. Gyorffy suppose, partant d'analogies qarakhirghizes, bachkirs et tatares de Kazan, que les ecampments d'hiver des Hongrois comprenaient des constructions stables ("Az Alfôld ôsi településmódja" ["L'établissement ancestral dans la Grande Plaine"], Magyar Szemle 2 (1928), 316; Magyar falu—magyarház [Village hongrois— maison hongroise], Budapest, 1943, 80). 2 A magyarság néprajza [Ethnographie hongroise], Budapest, sans date [1934], II, 108-109.
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De l'analyse toponymique il s'ensuit clairement que des noms communs géographiques, comme par exemple Nydrdd, formé du mot nyâr 'peuplier', ou Kôvesd, provenant de l'adjectif kôves 'pieurreux', ne se prêtent pas à de telles recherches. N'y sont pas appropriés non plus les noms de tribu rencontrés dans le pays entier comme Tarjân et Vârkony. Il est par contre pleinement justifié de considérer l'existence d'un habitat d'été et d'hiver attestée par l'application double du nom de seigneurs domaniaux vivants aux X-XI e siècles, comme Szalôk ou Nâna.
En parlant, à propos de ces toponymes, "d'habitats d'hiver et d'été du même clan ou du même seigneur domanial", Istvân Gyôrffy donna au mot clan le sens de lignées aristocratiques désignées par "de genere", comme en était par exemple la lignée des Szalôk. Celles-ci descendent en général d'un seigneur domanial de l'époque de Saint Etienne (9971038),3 leur double propriété pourrait donc remonter â un habitat d'hiver et un habitat d'été. Il serait pourtant erroné d'interpréter cette lignée aristocratique comme un sous-groupe de la tribu, même si telle ou telle lignée descend en effet d'un chef de clan qui dominait au X e siècle un sous-groupe de tribu. Dans la suite il convient de faire une distinction très nette entre deux manières de 'nomadiser' : d'une part, la transhumance du peuple semi-nomade organisé dans les cadres de la tribu, et de l'autre, le changement d'habitat d'hiver et d'été des aristocrates. Le mode de vie des Hongrois à l'époque de la conquête du pays peut être caractérisé par le terme 'semi-nomade'. Cela ressort d'une manière incontestable des informations fournies sur les Hongrois de l'Atelkouzou par les géographes musulmans. Selon eux, les Hongrois passent l'hiver à la pêche, le long des rivières et nomadisent en été menant leur bétail à de nouveaux pâturages. En outre, ils ont beaucoup de champs arables.4 A l'aide d'analogies ethnologiques, Istvân Szabô expliqua les données de ces sources. Il en ressort que les habitats constants d'hiver des Hongrois s'alignaient le long des rivières; au printemps ils labouraient les terres voisines et y semaient le blé; ensuite, ils menaient le bétail à des pâturages d'été bien déterminés et, pour la moisson, revenaient près 3 Gy. Gyôrffy, Tanulmânyok a magyar âllam eredetérôl [Etudes sur les origines de l'Etat hongrois], Budapest, 1959 (dans la suite : Tanulmânyok), 14. 4 Gy. Pauler - S. Szilâgyi, A magyar honfoglalâs kutfôi [Sources sur la conquête du pays par les Hongrois], Budapest, 1900 (dans la suite : MHK), 168-169; K Czeglédy, A magyarsâg âstôrténete [La préhistoire des Hongrois], réd. : L. Ligeti, Budapest, 1943, 106-107; Ibn Rusteh, Les atours précieux, trad. G. Wiet, Le Caire, 1956, 160.
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de l'habitat d'hiver.5 Dans les steppes du Sud de la Russie, sillonées de rivières, et dans le bassin des Carpathes, ce mode d'exploitation s'accompagnait de déplacements perpendiculaires à la rivière, entre l'habitat d'hiver au bord des eaux et les pâturages d'été à l'intérieur du pays. Comme la brève période d'été se passait en déplacements, il ne se développa pas d'habitat d'été permanent. C'est de cette manière que nomadisait le commun peuple khazar. Les déplacements des seigneurs se faisant dans le sens contraire, parallèlement à la rivière, entre un habitat d'hiver plus en aval et un habitat d'été plus en amont, les deux étant séparés en général par une assez grande distance. Les voyageurs de l'époque mongole fournissent un tableau plastique des changements d'habitat des seigneurs, eux-mêmes ayant participé pendant un certain temps aux déplacements réglés des khans mongols. De son voyage en 1246 Plan Carpin écrivit ainsi sur la Comanie : "habet quatuor flumina magna. Primum Neper [Dniéper] appellatur, iuxta quod ex parte Rustie ambulabat Corenza, et ex parte altera per illa campestria Mauci, qui est maior quam Corenza; secundum Don, super quod ambulai quidam princeps, qui habet sororem Bati in uxorem, qui Carbon appellatur; tercium Volga, istud flumen est valde magnum, super quod vadit Bati; quartum Iaec [Ural] appellatur, super quod millenarii duo, unus ex une parte fluminis et alter ex altera parte vadunt. Omnes isti in hyeme ad mare descendunt, et in estate super ripam eorumdem fluminum ascendunt ad montes."' Aux deux extrémités de ce camp mobile, des colonies permanentes s'étaient créées comme annexes aux habitats des seigneurs. Selon Roubrouk, en 1253, Sartaq, fils de Batou, nomadisait le long du Don : aux deux points extrêmes ils instaurèrent deux villages avec des Russes qui transportaient dans leurs barques les ambassadeurs et les commerçants : "In ilio loco ... fecerunt Baatu et Sartach fieri quoddam casale de Rutenis in ripa orientali, qui transferunt nuncios et mercatores cum naviculis... Ultra locum illum non ascendunt Tartari versus aquilonem, quia tune temporis circa introitum augusti incipiunt redire versus meridiem, unde aliud est casale inferius ubi transeunt nuncii tempore hyemali."7 Sur la rive gauche de la Volga, deux colonies permanentes s'étaient également établies. Au terme septentrional de ses déplacements Batou
5 A falurendszer kialakulâsa Magyarorszâgon, X-XV. sidzad [La naissance du système des communes en Hongrie, X-XV" siècles], Budapest, 1966, 14-35. 6 Wyngaert, I, 107-108. 7 Ibid., 196-198.
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constitua un nouveau village (nova villa)8 avec des passeurs russes et des Musulmans. Cette colonie est probablement le village d'Ükek près de Saratov, village qui, sous le règne des khans de la Horde d'Or, était le point extrême des déplacements nomades en amont et où, avant 1923, trois idoles mongoles furent trouvées, dont une en argent.. Le mot ükek signifie 'tour flanquante' selon le dictionnaire de turc moyen de Mahmüd-al-Käsgari, datant du XI e siècle. Cela témoigne de la fortification du lieu de passage.9 Au point extrême en aval, à l'endroit où la Volga se divise en plusieurs bras, Batou fit construire un palais qui fut appelé Sarai. A proximité, dans le delta de la Volga, s'étendit une ville ancienne Soumerqènt (aujourd'hui Astrakhan). Si l'on en juge d'après les habitants alains et musulmans et quelques Allemands qui s'y étaient établis, elle était peuplée d'artisans et de commerçants qui devaient être au service du souzerain. 10 (Voir Carte 1.) Les références faites aux princes khazars et bulgars permettent de conclure que les déplacements des princes le long des rivières n'étaient pas une particularité mongole. Jehudah ha-Levi, dans son ouvrage écrit en arabe (1140), dit, en parlant de la conversion du qaghan khazar et du grand vizir, qu'ils se déplaçaient au bord de la mer jusqu'aux montagnes Varsân, à l'extrémité orientale du Caucase.11 Ibn Fadhlân relate que, pendant son séjour parmi les Bulgares de la Volga (922), le prince longeait la rive de la Volga vers les Bolghars Souvars.12 Ces déplacements, dont on fait mention occasionnellement, font vraisemblablement partie de la nomadisation régulière le long des cours d'eau. Les habitants des villes khazares déménageaient également en été, ' Wyngaert, 212. 9 Pour les données relatives à Ükek et aux cours ultérieures des khans voir : B. Spuler, Die Goldene Horde, Die Mongolen in Russland, Leipzig, 1943, 264-270 et sous 553 de l'Index, où l'interprétation comme Südpunkt de la donnée contenue dans Abü'1-Fida (265, note 8) est basée sur une erreur. Cf. C. Brockelmann, Mitteltürkischer Wortschatz (Leipzig, 1928), 235. 10 Wyngaert, I, 315. 11 J. Marquart, Osteuropäische und ostasiatische Streifzüge, Leipzig, 1903, 19; D. M. Dunlop, The History of the Jewish Khazars, New York, 19672, 116-119. Des recherches sont encore nécessaires pour savoir si la capitale Itil, à l'embouchure de la Volga, et Balangar, dans le Caucase à l'embouchure de la Kouma, que Mas'ûdï affirme être un ancien siège, ne marquent pas un itinéraire de ce genre (cf. Marquart, op. cit., 15-16, 490; K. Czeglédy, Névtudomânyi vizsgdlatok [Recherches onomastiques], réd. S. Mikesy, Budapest, 1960, 120, 122). Il est par contre fort probable que la ville de Taman tarkan à l'embouchure du Kouban fût la résidence d'hiver d'un dirigeant turc du même nom. Cf. Gy. Németh, A honfoglalô magyarsäg kialakuldsa [La formation du peuple hongrois], Budapest, 1930 (dans la suite : HMK), 81. 12 A. Zeki Validi Togan, Ibn Fadlän's Reisebericht, Leipzig, 1939, 75.
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mais seulement pour se rendre dans les champs entourant les villes où ils labouraient et ensemençaient leurs terres. 13 Le mode de vie nomade en Asie centrale était fort différent. Sans vouloir aborder cet immense sujet 1 4 j'en ferai ressortir quelques traits typiques. Contraint par les conditions naturelles de la Haute Asie, le peuple entier s'engagea dans de longs déplacements nomades. Les clans nomadisaient en général le long d'une rivière, passant l'été vers les sources, dans les montagnes et l'hiver vers l'aval, dans la plaine. Dans Y Histoire Secrète des Mongols nous trouvons plusieurs références à ce fait, par exemple : "Du flanc nord du mont Düiren un groupe de peuple descendit ici le long de la rivière Töngheliq, en faisant paître son bétail." Les prédécesseurs de Gengis-khan soumirent ce peuple, ou clan : "...continuez votre chemin. C'est ce qu'ils dirent et le lendemain matin les tayitchi'out Targhouta-Qiriltouq, Tödöyen Girtè et les autres tayitchi'out se mirent en route vers l'aval de la rivière Onon." l s Radloff écrivit au siècle dernier à propos de Qara-khirgiz qu'ils ne nomadisaient pas dispersés par auls, mais que les jourtes de chaque clan s'alignaient en hiver au bord d'une rivière en une rangée ininterrompu, parfois d'une longueur de 20 verstes. En été par contre, tout en gardant la même ordonnance, ils se dirigeaient vers les montagnes, toujours plus haut, jusqu'à atteindre les pâturages d'été du clan. 16 Les rivières jouèrent un certain rôle aussi dans l'itinéraire des déplacements des khans de la Haute Asie. Selon l'Histoire Secrète, l'habitat d'été de Gengis-khan était à l'extrémité orientale de la montagne Burqanqaldoun où prennent leur source le bras Sengür de la rivière Onon et le bras Büri de la rivière Kerulen. 17 Voilà pourquoi, selon Roubrouk, la première cour de Gengis-Khan se trouvait à un endroit appelé OnonKerulen. 18 Le lieu d'assemblée du clan était l'île de Ködeye sur la rivière Kerulen, au sud de la montagne, dans la plaine. Une partie de l'île était la possession du clan Djurkin, apparenté au clan de Gengis-khan. C'est 13
MHK, 154-155, 226. Dans son ouvrage cité, I. Szabô étudie en profondeur les types de la nomadisation sans pourtant analyser la différence éventuelle du point de vue social entre la nomadisation des aristocrates et celle du commun du peuple. 15 L. Ligeti, A mongolok titkos torténete [Histoire secrète des Mongols], Budapest, 1962 (dans la suite : Ligeti, MTT), No 28, 72. 16 W. Radloff, Aus Sibirien, Lose Blätter aus dem Tagebuch eines reisenden Linguisten (Leipzig, 1894), I 2 , 527. 17 Ligeti, MTT, No. 96-99, 106-108, 122, 142, 151, 177. 18 Wyngaert, I, 29, 208, 243, 268. 14
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sur cette île que se rassemblèrent en 1228, afin d'élire le khan Ôgôdeï, les princes et princesses gengiskhanides, les gendres du prince, les chefs de tumens (dix-mille) et des milliers, c'est là que se réunit le qouriltaï où l'auteur de YHistoire Secrète finit son œuvre. Un des habitats d'hiver de Ong-khan et ensuite de Gengis-khan, Kuba qaya, s'étendit probablement non loin de là, dans la plaine.19 Gengis-khan instaura en outre d'autres campements en territoires conquis. C'est ainsi qu'il s'empara du palais-yourta d'Ong-khan dans la forêt de la rive noire près de Tola où il passait l'hiver; après la défaite des Naïmans il passait ainsi l'été près des sources de l'Irtych et sur la montagne Alasan, après avoir vaincu le prince tangout. 20 Lorsque Plan Carpin assista à l'élection de Guyuk-khan, cela se passa près de Qaraqoroum, au siège de la cour nommée Orde d'or, sur la rivière Orkhon. A trois-quatre lieues de là se trouvait le campement impérial, la Sira orda que l'on peut traduire par 'cour blanche' ou 'jaune'. Guyuk possédait en outre une autre cour plus loin, vers l'ouest, à une distance de trois semaines de trajet à cheval, où habitait sa première femme. Ce campement revenait, selon Roubrouk, au fils de Guyuk. 21 Il est à noter que le centre où se tenait le prince reçut dans d'autres cas aussi l'épithète 'd'or'. C'est de là que provient le nom 'Horde d'Or'. Il est caractéristique que dans le nouveau Saraï, au bord de la Volga, au XIV e siècle, le palais sera nommé Altïn tas 'pierre d'or'. 22 Nous sommes mieux informés sur les déplacements de Mongka-khan, successeur de Guyuk. Son campement d'hiver, où arriva Roubrouk en 1254, était situé dans une plaine, à un point d'où vingt jours de marche conduisaient en Chine. Au printemps ils se mirent en route vers le Nord, en passant par Qaraqoroum, sur la rivière Orkhon où le grand khan séjournait deux fois par an, interrompant sa marche d'automne et de printemps. Il passait l'été plus haut vers le Nord. 23 En ce qui concerne les campements permanents, les fils du grand khan se créèrent différentes cours dans les différents territoires conquis. Selon Plan Carpin, c'est dans le pays des khitaï noirs que "siège Ordou qui est l'aîné de Batou et même le plus âgé de tous les chefs tatares. C'est là que se dresse l'ordou, c'est à dire, l'habitat de son père que dirige une de ses femmes. Chez les Tatares en effet coutume veut que l'on ne démonte « Ligeti, MTT, No. 136, 148, 269, 282. 2» ¡bld., No. 264, 266. 21 Wyngaert, I, 118-120, 242. 23 B. Spuler, op. cit., 268. 23 Wyngaert, I, 268, 276, 278.
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pas l'habitat des chefs ou des seigneurs, mais on y délègue quelques femmes pour le diriger. On leur remet une partie des redevances, comme le faisait aussi leur mari." 24 La première femme hérite en général de ces cours princières; après elle, en général, le cadet des fils reçoit l'habitat paternel. Vu les conditions géographiques spéciales de la Mongolie, la nomadisation le long des rivières ne pouvait pas avoir les formes classiques qu'elle revêtait en Europe, car le changement complet de direction des cours d'eau et leur assèchement par endroits forcèrent les Nomades à se diriger vers d'autres eaux. Les conquêtes à leur tour augmentèrent le nombre des résidences et cours. Il est pourtant aisé de distinguer l'alternance des campements d'été dans les montagnes et de ceux d'hiver dans le plat pays où les conditions économiques des habitats se faisaient également valoir. Quelles étaient les conditions économiques qui déterminèrent le choix d'une cour (orda)? Le souverain et sa nombreuse suite avaient toujours besoin d'un bétail abondant : des chevaux à selle et à lait, des bœufs qui tirent les chars et des moutons qui fournissent la nourriture principale. Les besoins en eau de ce cheptel déterminaient à eux seuls la marche le long des cours d'eau, ou à proximité. Ils déterminaient en même temps le choix de l'habitat d'été dans les montagnes qui n'était possible qu'aux endroits propices au pacage, où la vallée s'élargissait ou d'où il était aisé de se rendre à un pâturage dans les montagnes. L'autre exigence concernait les produits industriels. En Asie centrale, d'anciennes villes, développées grâce à des colons, pourvurent à ce besoin. L'itinéraire des khans s'adaptait à ces villes où ils dressèrent des cours. C'est de cette manière qu'Ôgôdei développa la ville d'Imil, lui-même et plus tard Guyuk et Mongka, Qaraqoroum, tandis que Batou patronnait Saraï près de Soumerqènt.25 Ils firent entourer leurs cours d'artisans qui travaillaient en redevance. C'est ainsi que les mineurs et les armuriers allemands emmenés de Radnabânya (Hongrie) furent mis au service du prince Buri et ensuite à celui de Mongka-khan. Quelques noms de localité formés de la désignation turque d'un métier, comme par exemple Jaicï 'fabricant d'arcs' montrent que la Haute Asie connut également le système des villages dont les habitants, artisans, fournis24
Wyngaert, I, 118-120. 54, 114, 207-208, 236, 253, 285-286, 315. Cf. encore Index et Ligeti, MTT, No. 274.
» Ibid.,
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saient des redevances, système qui se répandit au X e siècle en terre hongroise, bohémienne et polonaise.26 La troisième exigence, concernant surtout les souverains, était le besoin en articles de luxe. Ceux-ci ne servaient pas seulement à satisfaire aux demandes du souverain et de sa famille, ils constituaient aussi un des moyens du gouvernement, puisque le khan s'en servait pour récompenser ses fidèles ou pour les offrir en cadeau, ce qui était un instrument indispensable des relations diplomatiques. La source principale des articles de luxe était le commerce à longue distance. C'est pourquoi les khans établirent leurs cours sur les grandes routes marchandes, par exemple Mongka sur la route menant en Chine; c'est pourquoi Batou évinça son frère Bèrkè de la route de Derbend 27 près de la mer Caspienne que fréquentaient les Musulmans. Pour la même raison Batou et son fils s'emparèrent des passages principaux sur la Volga et sur le Don pour y établir des passeurs russes et des commerçants musulmans. Ceux-ci percevaient des taxes, probablement à la manière des Bulgares de la Volga, le dîme sur chaque marchandise transportée, par exemple un esclave sur dix.28 Puisque le souverain nomade imposait aux 'peuples paisibles' des contributions en or et en argent ou en articles artisanaux, et que ses sujets lui payaient également des redevances en bêtes ou en peau, il pouvait pratiquement pourvoir à ses besoins sans achats. Les foires des Nomades où l'on menait du bétail et où l'en vendait souvent du blé et des produits artisanaux, satisfaisaient aux besoins du peuple plutôt qu'à ceux des princes. Il y avait des foires dans les villes agrandies par des colons. Ces villes avaient pour la plupart des relations avec les campements des princes, par exemple Qaraqoroum, Qayaligh. Même le camp itinérant de Batou était toujours accompagnée le long de la Volga d'une foire itinérante.29 Le système économique et les déplacements des cours princières nous sont connus surtout grâce aux exemples mongols, sur lequels les sources écrites sont abondantes. Toutefois, des sources écrites anciennes sur les peuples nomades contiennent des références éparses selon lesquelles ce système des cours itinérantes était général parmi les peuples 26 Wyngaert, 1,154,244; I. Kúnos, Sejx Sulejman Efendi's... Wôrterbuch, Budapest, 1902, 96; G. Heckenast, Fejedelmi (királyi) szolgálónépek a korai Árpádkorbart [Prestataires au service du prince {du roi) aux débuts de l'époque des Árpádiens], Budapest, 1970, 52-68; Gy. Gyôrffy, Tôrténelmi Szemle 1972, 261-320. 27 Wyngaert, I, 209. 28 Zeki Validi Togan, Ibn Fadlâris Reisebericht, Leipzig, 1939, 80. 2 » Wyngaert, I, 209, 224-225, 285-286.
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nomades et semi-nomades.30 De plus, les princes des peuples déjà sédentaires, comme les anciens Germains et Slaves, avaient mené le même genre de vie, aussi n'est il pas impossible que dans leurs déplacements réguliers on découvre l'alternance de type nomade des habitats d'hiver et d'été. Par la suite je me propose d'exposer que le système des campements itinérants caractérisa aussi le mode de vie de la couche dirigeante hongroise au X e siècle. Aucune source écrite contemporaine ne nous est parvenue qui puisse nous informer sur la vie de cette société. La littérature européenne de l'époque ne parle que de l'impression produite par les Hongrois au cours de leurs incursions. C'est sur cette base que Regino identifia les Hongrois aux Scythes et décrivit leur vie d'après les extraits de Justin sur les Scythes (Exordia Scythica). La même impression guida Léon le Philosophe qui, pour caractériser les Hongrois, appelés Turcs, recourut à la description des Turcs du début du VII e siècle.31 Cependant, quelques sources contemporaines, utilisant des renseignements reçus directement des Hongrois, exposent le système du gouvernement chez eux. La première est une description d'un voyageur musulman ayant séjourné chez les Hongrois de l'Atelkouzou et qui nous est parvenue, grâce à Djaihànï, dans plusieurs sources des X-XI e siècles. Selon cette description, les Hongrois ont deux princes, l'un est le souverain nominal dont le titre est kende (k.n.d.h), l'autre le prince qui détient le pouvoir effectif et la direction militaire et qui s'appelle gyula (dj.l.h).32 L'autre source authentique contemporaine est le rapport fait par le continuateur de la chronique de Georgios Monachos sur l'ambassade à Byzance à la veille de la guerre bulgaro-hongroise de 895, et selon laquelle le patrice grec Niketas Scleros eut des négociations sur le Bas-Danube avec les princes des Hongrois Àrpâd et Kusan. 33 Les deux sources, musulmane 30
Voir par exemple l'inscription turque de Tonyuquq : Cuyai quzyn, Qara qumuy olurur ârtimiz : C. E. MajiOB, IlaMiimHUKU dpeeneimopcKou nucbMemocmu, MocKBaJleHHHrpafl, 1951, 65. Cf. A magyarok elôdeirôl és a honfoglalâsrôl kortàrsak és krànikàsok hiradàsai [Communications de contemporains et de chroniqueurs sur les ancêtres des Hongrois et sur la conquête du pays par eux, réd. Gy. Gyorffy, Budapest, 1958 (dans la suite : MEH), 29. Cette indication de deux endroits peut se rapporter aux campements d'hiver et d'été. Pour la détermination des endroits voir K. Czeglédy dans Acta Orient. Hung. 15 (1962), 55-69. 31 MGH. Script, rer. Germ. Reginonis chron., rec. F. Kurze, 1890, 131-132; Gy. Moravcsik, Studia Byzantina, Budapest, 1967, 221-239. 32 MHK, 167; cf. Ibn Rusteh..., trad. G. Wiet, 160. 33 MHK, 106; cf. Gy. Moravcsik, Byzantinoturcica, II, Budapest, 1943, 151.
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et grecque, d'une authenticité incontestable, concordent pour dire que les Hongrois ont deux princes. Lequel des deux, Àrpâd ou Kusan était le souverain nominal et lequel avait le pouvoir effectif comme chef militaire? C'est le Notaire Anonyme (vers 1200), qui donne la réponse, en disant que Curzan était le fils de Cundu.si Kurszân (Curzan) étant une évolution régulière de Kussàn, et Kiindii (Cundu) une variante du titre kende, force nous est d'en conclure qu'au moment de la conquête de de la nouvelle patrie, Kusan était le prince nominal et Ârpâd le chef militaire, détenant le pouvoir réel.35 Ces connaissances sont complétées par une note contemporaine dans les Annales Alemannici, selon laquelle le prince des Hongrois, Kussal fut traîtreusement tué par les Bavarois au cours d'un banquet en 904.36 A partir de cette date, pendant près d'un demi-siècle, aucune source ne nous apporte de nouvelles lumières sur les conditions du gouvernement. Seul Liudprand, évèque de Crémone, parle dans son Antapodosis, écrite vers 960, des chefs hongrois qui firent incursion en Lombardie et eurent des contacts avec les grands du royaume. Son récit ne porte pas de date mais peut relativement bien être daté, vu les circonstances historiques : en 921 il s'agit des 'rois' Dursac et Bugat, en 924 de Salard chef militaire, en 947 du 'roi' Taxis (c'est-à-dire Taksony).37 L'inconséquence dans l'emploi du titre 'rex' rend incertain leur classement dans la hiérarchie des princes et chefs.
34 Scriptores rerum Hungaricarum, ed. E. Szentpétery, Budapest, 1937-1938 (dans la suite : SRH), I, 41. 35 Gy. Gyôrffy, Budapest Régiségei, 16 (1955), 9-40; Tanulmányok, 127-160. 36 Les Annales Alemannici, qui gardent les formes plus originales des noms (Ungari, Bauguarii, Chussal), notent la mort du prince Chussal en l'an 904 (Monumento Germaniae histórica, Scriptores; dans la suite : MGH. SS), I, 54, de même les Annales Heremi : ibid., III, 140; erroné : A. F. Gombos, Catalogus fontium historiae Hungaricae, Budapest, 1937-1938 (dans lasuite : Gombos), 1,91,140; les Annales Sangallenses Maiores, qui reproduisent les noms sous leurs formes secondaires (Agareni, Baioarii, Chussol), donnent la date de 902 (ibid., 199). Selon les annales que nous connaissons dans les extraits de l'humaniste Aventin, les généraux du roi Kusa perdirent en 901 la bataille sur la rivière Fischa contre les Allemands (ibid., 915). Si cette note s'était trouvée dans l'original et n'était pas dûe à une combinaison d'Aventin, elle se rapporte à la défaite en 901 et non pas au meurtre en 904. Cf. K. Reindel, Die bayerischen Luitpoldinger 893-989, Munich, 1953, 51-52. 37 Gombos, 1473-1474. Les données communiquées par Liudprand furent incorporées sous une forme concise dans les annales de Sigebertus Gemblaciensis, 150 ans plus tard (ibid., III, 2126), et de Albericus, religieux des Trois Fontaines, trois siècles après (ibid., I, 25); les dates qu'ils donnent ont aussi peu de valeur que les combinaisons sur l'élection des rois hongrois Dursac et Bugoth, contenue dans l'œuvre de l'humaniste Aventin qui se servait de Liudprand (ibid., 346, 353-354).
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De notre point de vue nous trouvons les plus abondantes informations dans De administrando imperio de l'empereur Constantin Porphyrogénète. En 948, à Byzance, l'empereur a en effet noté l'information verbale que le chef Bulcsu et l'arrière-petit-fils d'Árpád, le prince Tormás, lui ont donné sur la maison régnante et sur les rapports du pouvoir. Ces informations se rapportent à des temps partiellement historiques, partiellement contemporains. La valeur très différente de la tradition et des paroles du contemporain sont à l'origine de la grande différence de crédibilité que l'on peut accorder à Constantin selon qu'il parle des circonstances d'avant la conquête du pays ou de celles des alentours de 948. Il faut y ajouter l'exposé tendancieux du passé et, dans une certaine mesure, du présent, qui se manifeste surtout dans le silence sur certaines personnalités importantes et sur les conflits intérieurs. Le plus étonnant est que ce récit passe sous silence l'existence de deux princes et de la personne de Kursan. Il est vrai que tout ce qu'il dit à ce propos recèle la réalité que l'on peut dégager des informations puisées dans des sources contemporaines. Selon cette information, avant la conquête il y avait un 'premier voevode' nommé Levedi à qui, "vu la magnificence de sa lignée", le qaghan khazar maria une femme khazare. Il y avait en outre un autre voevode, Álmos, dont le fils, Árpád, était né pour régner.38 Il est à noter que même l'informateur de la maison árpádienne ne fît pas croire que son ancêtre était le premier voevode descendant d'une haute lignée, mais reconnut qu'il y avait une autre dynastie de princes plus notable. Ceci concorde avec la tradition hongroise selon laquelle Árpád ne possédait pas le titre de 'kündü'. En 948, date où les souvenirs des vivants remontaient encore jusqu'en 880, c'était une chose bien connue des Hongrois, aussi les informateurs de Constantin n'osaient-ils pas le nier. Ils inventèrent par contre un conte pour expliquer, quand et comment Árpád fut revêtu du pouvoir absolu : le voevode Levéd, n'ayant pas d'enfant, abdiqua de son propre gré au titre de premier prince en faveur d'Álmos et de son fils Árpád. Sachant qu'avant la conquête du pays, Kursán traita encore aux côtés d'Árpád avec les Byzantins, qu'après la conquête il établit sa cour dans le Castrum Curzan à Óbuda et qu'en 904, dans la région proche du bassin viennois il fut tué par les Bavarois, il est clair que Bulcsu et Tormás ne désiraient pas informer l'Empereur sur l'extension du pouvoir d'Árpád et voulaient rendre plausible l'affirmation, selon laquelle "Avant cet Árpád les 38 Constantine Porphyrogenitus De administrando imperio, ed. Gy. Moravcsik R. J. H. Jenkins, Budapest, 1949, 172-173. Pour la date 948 de l'ambassade voir : Gy. Moravcsik, Studia Byzantina, Budapest, 1967, 329.
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Turcs n'avaient jamais eu d'autre prince et depuis, et jusqu'à maintenant, sa descendance donna les princes à Turquia". 39 Des problèmes surgissent aussi à propos du passage où Constantin mentionne Levente en rapport avec l'énumération des huit tribus et Atelkouzou et avec la campagne bulgare : "A cette époque-là Liuntika, fils d'Àrpâd était le prince." Or, à cette époque-là Liuntika n'était pas prince, c'étaient Àrpâd et Kursan. En général, on interprète ce passage comme un malentendu car, en réalité, il s'agit probablement de Liuntika, fils d'Àrpâd, qui était le chef de l'armée envoyée contre les Bulgares. Cette explication est possible, mais en tout cas elle n'est pas en accord avec les autres passages de la même source où les quatre fils d'Arpâd sont énumérés alors que Liuntika n'y figure pas. On peut supposer que les deux informations proviennent de différents informateurs, et que Tormâs et Bulcsu n'ont énuméré que ceux des fils d'Àrpâd dont les descendants vivaient encore de leur temps. En tout cas il est difficile de séparer Liuntika de la maison d'Àrpâd, la tradition familiale ayant perpétué son nom, et c'est d'après lui qu'au début du XI e siècle le troisième fils de Vazul fut nommé Levente (Luenta ~ Leventé).ia L'erreur dans l'évocation des événements historiques est évidente, par contre, sur la généalogie de la maison d'Arpâd, où figurent quatre fils, quatre petits-fils et un arrière petit-fils, l'informateur Tormâs, est parfaitement digne de foi. Le passage s'y rapportant est le suivant : "... Arpâd ÇApTTah-qs), grand-prince de Turquia eut quatre fils : le premier est Tarhos (TOV TAPKAR^OVV), le deuxième Ullô Jelô : TOV 'IEXEX), le troisième Jutas (TOV 'IOVTOT£Ô.V), le quatrième Zolta
»• Ed. Gy. Moravcsik, 172-173. Cf. note 35. Tandis qu'en 948, Levedi était dit être originaire d'une lignée prestigieuse, selon la chronique de Zagreb, qui reflète la tradition ayant cours à la fin du XI e siècle, c'est Âlmos qui fut, parmi tous les dux, élu grand prince à cause de sa 'noblesse et de ses vertus' (propter nobilitatem et virtutem electus). SRH, I, 206. 40 SRH, I, 173, 177, 334 et passim. Pauler (op. cit., 149) avança l'hypothèse que le nom Levente n'est qu'une épithète et que Levente n'est autre que Tarhos mentionné comme fils aîné d'Àrpâd. Récemment D. Pais tenta de soutenir cette hypothèse, en disant que Levente, dérivant du verbe lesz 'être', doit signifier la même chose qu'en turc Tarqac ~ Taryuc si tant est que celui-ci dérive du verbe tara- 'se disséminer, se répandre, se produire' etc. (Études onomastiques, red. S. Mikesy, Budapest, 1960, 94-95). Toutefois, l'identification des sens n'est pas vraisemblable. Le dérivé correspondant du verbe est taryadzi 'Auswanderertruppe, ein aus seinem Lande in ein anderes Land ziehender Stamm' (I. Kunos, Sejx Sulejman Efendi's... Wörterbuch, Budapest, 1902, 183), par conséquent le sens se rapporte à des déplacements. D'après l'opinion bien fondée de J. Marquart (Streifzüge, 52-53, 522) Liuntika était le prince des Khabars qui se sont rattachés aux Hongrois au IX e siècle.
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(TOV ZaXrâv), ... Tarhos eut un fils Tevel (TOV TefSéXrf), Jelô eut un fils Ezelech (TOV 'EÇEXEX), Jutas eut un fils Fajsz (roi' (PAXIRÇIV) le prince actuel, ... Zolta eut un fils Taksony (TOV TaÇlv). Il est connu que les fils d'Àrpâd sont tous morts, mais ses petits-fils Fajsz ( 6 3 4 ; c f . csánki, II, 604. 108 I. K. Tkalíic, Monumento histórica episcopatus Zagrabiensis, Zagreb, 18731874, I, 176, II, 47, 117. Le nom slave parallèle au Hongrois Fajsz est Kraljevec 'royal'. Cela corrobore que l'endroit fût dénommé d'après le souverain car, les peuples voisins appelaient rois les grands-princes des Hongrois conquérants, comme on le voit dans la biographie de Méthode où celui-ci est nommé Kopojn. et rex. La même chose ressort de la transformation du village en possession de castrum après la mise en place des nouvelles structures de l'Etat. Pour les conditions politiques régnant dans cette région aux X e - X I e siècles voir mon étude sur la formation de la Slavonie dans les Mélanges Szabolcs de Vajay, Braga, 1971, 297-313. 109 Csánki, V, 876.
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prince régnant est en accord avec cela. Le village de Fajsz, en face de Tarhacsi, et du fort de Tolna garde jusqu'à nos jours le souvenir de sa résidence d'hiver, tandis que sa résidence d'été, tout comme celles de Kurszân et d'Arpâd, était dans une grande île danubienne de la Petite Plaine Pannonique où il garda également ses troupeaux de chevaux. Au Moyen Age il y avait un village de Fajsz (1443 : Fayz) 110 dans le Szigetkôz, près de Hédervâr, presqu'en face d'Àrpâd, village du Csallôkôz. Par rapport aux déplacements des résidences d'Àrpâd l'itinéraire de Fajsz se modifia dans le sens qu'il céda au prince ârpâdien Tormâs le trajet longeant le Danube de Tolna à Baranya et si Fajsz était vraiment, à l'époque, une localité sur la rive gauche du Danube, il devait passer sur cette rive en aval de l'île de Csepel, à Szigetfô. D'ailleurs, les sections de rive occupées par les dirigeants connus à l'époque de Constantin se complétaient, puisque la section de Tas commençait justement à Szigetfô. (Voir Carte 4.) Le cadet des fils d'Arpâd était le quatrième, Zolta. Bien que la Geste primitive ne le mentionne pas parmi les princes régnants, le Notaire Anonyme, qui prend l'arbre généalogique pour une liste chronologiques des souverains, en fit le successeur d'Arpâd. Toutefois, les toponymes conservant le souvenir de ses résidences sont loin de le prouver. Le village de Zolta (1404 : Zoltha) se trouvait dans le comitat de Bâcs, quelque part aux confins de Bodrog, sur le Vajas qui coule sur une longue distance parallèlement au Danube. 111 Cela devait être un territoire étranger à l'apanage tribal primitif d'Arpâd que l'on peut rattacher à la tribu Tarjân, vu que selon toute vraisemblance, le comitat de Bâcs entrait dans l'apanage de la tribu Jenô. En effet, parmi tous les noms de tribu hongrois, seul celui de Jenô ne se rencontre pas dans le comitat de Bâcs.112 Les déplacements de résidences de Zolta se déroulaient probablement sur la rive du Vajas. Le Vajas, long de 150 km, se sépare du Danube près de Kalocsa. Son cours traversant le comitat de Bodrog est mentionné par le Notaire Anonyme comme campement d'Àrpâd. La toponymie garde également le souvenir de Taksony, fils de Zolta. Dans les marécages de Sârkôz il y a un lieu dit Taskony113 qui, avant la modification du
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Csânki, III, 548. Ibid., II, 168. Cf. I. Ivânyi, Bàcs-Bodrog vârmegye helynévtâra [Liste des localités du comitat de Bàcs-Bodrog, Szabadka, 1907, V, 134. 112 Gyôrffy, I, 202. 113 Carte 1:75 000, No. 20-XIX; cf. Gy. Gyôrffy, dans Kôrôsi Csoma Archivum, I. Erg. Bd. (1939), 473. Pour le nom Taksony voir L. Râsonyi Nagy dans Magyar Nyelv 23 (1927), 274-275. 111
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lit du Danube, devait se trouver dans le comitat Bodrog et était vraisemblablement sa première résidence d'été. (Voir Carte 3.) Il est certain que Taksony devint grand-prince après la défaite de Lechfeld (955). A cette époque une attaque venue de l'Occident étant à craindre, le nouveau prince s'établit sur les rives orientales du Danube. II fixa sa résidence d'été à l'entrée orientale de l'île de Csepel, dans le village actuel de Taksony. La dépendence économique de cette résidence doublement protégée était le fort de Pest que le prince céda à des commerçants musulmans. Au passage voisin du fleuve il délégua des bateliers dont la nationalité slave est révélée par le nom du batelier Mutimir dont il est fait mention en 1046.114 Cet arrangement, conforme aux règles des nomades, se répète au Sud, dans les environs de la ville actuelle Apatin. Le nom médiéval, Apâti, est dû au fait que, vers 1090, le prince David en fit don à l'abbaye de Tihany (abbé—apât). La résidence princière qui s'y étendit ne porta pas de nom de personne, mais s'appelait Aranyân, en latin Aureuslocus,115 ce qui, conformément à des analogies orientales, indique la présence d'une cour du souverain. Le village limitrophe d'Apos était, avant l'incursion des Tatares (1240), une colonie de Khwarezmiens musulmans. 116 Il se trouvait près de Tôlrév (rév 'passage du fleuve') 117 conduisant à travers le Danube en amont du confluent de la Drave et du Danube. Par conséquent, la rive occupée par Taksony se délimite entre sa résidence d'été de l'île de Csepel et sa résidence d'hiver d'Aranyân. (Voir Carte 5.) Après avoir été élu grand-prince, le fils de Taksony, Géza, envoya en 973 ses ambassadeurs à Quedlinburg, auprès de l'empereur Othon I. 118 Comme suite à ce tournant dans la politique extérieure, Géza fixa sa résidence permanente à Esztergom 119 qui, au lieu d'être une résidence d'été ou d'hiver, fut désormais le siège du souverain où celui-ci séjournait probablement deux fois par an. Le règne de Géza marque une nouvelle ère dans le domaine des résidences des souverains. Géza soumit les uns après les autres les chefs de tribu et de clan résistants, et l'extension de son règne signifia cer114
SRH, I, 115, 342. Traité plus en détail dans Budapest tôrténete, I, Budapest,
1973. 115
116 117 118 III
Gyôrffy, I, 706.
Ibid., 705. Ibid., 237.
Gombos, I, 91-92. Cf. SRH, 394; cf. A. Lepold, Szl. Eml., II, 487-524.
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tainement l'expropriation d'une série de forts et de résidences des chefs de tribu. Par exemple, l'encerclement par des auxiliaires militaires et par des fortifications de l'apanage de Koppâny montre avec certitude que Géza posséda Fehérvâr, pour la protection duquel il construisit Ûrhida, ainsi que Zalavâr que devait protéger le fort de Kolon, nouvellement construit, tandis que sa femme Sarolt siégeait dans Veszprém, assiégé par Koppâny. 1 2 0 Outre les résidences dont il s'emparait par force armée, il contrôlait dans le pays entier les principales sources économiques, les mines de sel et de métaux précieux. Devicse (1256 : Dyuche, plus tard un centre de domaine royal) 121 au pied sud-est des monts de Selmecbânya (Banskâ Stiavnica) assura le monopole du souverain sur les mines d'argent, tandis que celui du sel était assuré par les deux villages nommées Décse en Transilvanie, dans le voisinage des mines de sel de Dés et de Torda (comitat du Szolnok Intérieur : 1267 : Dyche, et comitat de Torda : 1355 : Deyche).122 Quant à l'organisation des cours de Géza, il convient de les approcher sous un autre aspect. Aux débuts de l'organisation des nouvelles structures de l'Etat nous voyons un trait caractéristique, notamment que les premières fondations royales furent faites à des résidences royales, ou grâce à des cessions de ces résidences. Une des plus importantes de cellesci au début du règne de saint Etienne était Pécsvârad où le roi fonda un monastère. 123 Elle servait de résidence depuis le temps de Géza; dans le voisinage du fort, une charte du XIII e siècle a conservé le nom de Géza sous forme de Geycheyd,12i forme qui, malgré le diminutif -d, garde vraisemblablement le nom du grand-prince. Le siège du roi étant à Esztergom, c'est Devicse, dans le comitat de Hont, qui paraît s'offrir comme résidence d'été la plus favorable, c'est par là que passe la route vers le bassin de Zolyom qui devint la résidence d'été principale des rois ârpâdiens. (Voir Carte 5). Dans ce qui précède, nous avons examiné le système de campements le long du Danube de Kurszân, des souverains et des princes ârpâdiens. Malgré quelques détails restés obscurs en ce qui concerne certains 120
Gy. Gyôrffy, "Der Aufstand von Koppâny", dans Studia Turcica, Budapest, 1971, 199-204. 121 Knauz, I, 424; cf. E. Mâlyusz, Turôc megye kialakulâsa [La formation du comitat de Turôc], Budapest, 1922, 14. 122 J. Kâdâr - L. Réthy - K. Tagânyi, Szolnok-Doboka vârmegye monogrâfidja [Monographie du comitat de Szolnok-Doboka], Deés, 1900 (dans la suite : Kâdâr), II, 546; Csânki, V, 698. 123 Gy. Gyôrffy dans Archivum Historiae Pontificiae 7 (1969), 98-100. 12 < Gyôrffy, I, 257.
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princes, nous pouvons constater que ce qui est valable pour les campements des princes nomades, est également valable pour celui des souverains hongrois. En automne et au printemps ils font la navette le long d'un cours d'eau entre les campements d'été et d'hiver, au cours de leurs déplacements ils visitent leurs principales sources de revenu, les places de douane et les centres de commerce et d'artisanat. Ce système est valable pour tous ceux qui, au cours du X e siècle, furent princes régnants en Hongrie et l'on peut prouver avec plus ou moins de certitude que les membres de la famille d'Arpâd possédaient des résidences sur un court secteur ou sur un affluent du Danube (sur son cours Nord-Sud), sans compter les résidences princières dans les ducatus. Par conséquent, si la validité de ce système peut être constatée et pour les princes régnants et pour les fils d'Arpâd (quoique dans une mesure plus restreinte), il s'ensuit que le mode de déplacement des princes régnants, connus avec certitude, et des fils d'Arpâd était différent. Kurszân, Arpâd, Fajsz et Taksony nomadisaient en tant que princes régnants, Tarhos, Ullô, Jutas et Zolta en leur qualité de princes de la famille régnante. Si, au temps des guerres de rapine, un fils d'Arpâd était devenu prince régnant, il aurait alors pris possession de l'itinéraire princier du Danube et le souvenir de sa cour aurait survécu dans les toponymes. D'où vient le fait que les fils d'Arpâd n'établirent des résidences que dans les régions des affluents du secteur moyen du Danube, sur les terres occupées par la tribu et dans les zones extérieures des ducatus, et que Fajsz est le premier qui, dans les années quarante, organisa des résidences durables au pied de fortifications? Comment expliquer que le territoire occupé par Arpâd dans le Baranya, dont le climat ensoleillé favorisait l'établissement d'une résidence d'hiver, resta inutilisé jusqu'à ce que, dans les années quarante, le prince Tormâs en ait pris possession? Est-ce, parce que Arpâd vécut jusqu'à un âge de Mathusalem et qu'entre lui et Fajsz il n'y eut pas d'autres princes régnants? Ou est-ce parce que le successeur se blottit modestement dans la résidence de son père sans en construire une nouvelle, digne de recevoir son nom? Contre cette dernière hypothèse plaide la coutume des nomades, selon laquelle la femme principale héritait de la résidence du grand-prince, et faisait son possible pour faire accéder l'un de ses fils au trône afin de garder son influence et de ne pas s'exposer aux affronts d'un beaufrère. Or, en gardant la résidence de son mari, elle poussait par là ses fils à s'en construire de nouvelles. Le cadet de ceux-ci, même s'il attendait dans la résidence paternelle la mort de sa mère, n'avait pas d'accès
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au trône où ses frères le devançaient conformément au droit coutumier des nomades. Selon le Notaire Anonyme, Zolta succéda sur le trône à Ärpäd. Cependant, selon l'empereur Constantin, Zolta était le fils cadet d'Ârpâd, devancé au moins par trois ayants droit. Le règne de Zolta est contredit non seulement par Constantin, selon qui Fajsz était le prince régnant avant Taksony, mais aussi par le fait que son nom est totalement absent dans la toponymie de la Transdanubie. Comme je l'ai déjà dit, la liste des princes régnants de la maison d'Ärpäd n'est pas autre chose qu'un arbre généalogique et on attribua la souveraineté à Zolta grâce à une interprétation erronée des traditions dynastiques. Des historiographes ont avancé la possibilité du règne de Tarhos et de Jutas. 125 Toutefois, le souvenir des cours de Tarhos et de Jutas n'a survécu en Transdanubie que dans les territoires plus restreints où habitaient aussi leurs descendants, cela veut dire que ce sont les terres héritées par cette branche. Ce fait rend fort contestable la possession par eux de la rive et des passages du Danube de Gyôr à Baranya, ce qui leur aurait assuré les avantages économiques offerts par le contrôle des rives et des 'vieilles villes' avec leurs artisans et leurs marchands à longue distance. Par conséquent, dans la liste des souverains il y a une lacune entre Ârpâd et Fajsz qui ne peut pas être comblée par les fils d'Ärpäd. Selon le système nomade de succession, valable aussi chez les Hongrois, l'aîné des mâles de la famille succédait au souverain sur le trône. Cela veut dire que les fils d'Ârpâd étaient devancés par ses frères et neveux. La question à résoudre est donc celle de savoir si Ärpäd avait un frère ou cousin, supérieur en rang à ses fils. Selon le Notaire Anonyme, les deux fils de l'oncle d'Ärpäd, Hülek (Hulec), jouèrent un rôle important dans la conquête du pays. Il écrit de ces deux princes, Zuard et Cadusa, qu'ils avaient pris le fort de Nyitra. Toutefois, le nom Hülek peut être considéré comme une variante du mot turc ilik 'souverain, prince', 126 donc le même nom que Üllö et Jelô. Il s'ensuit que Hülek n'était pas le frère d'Âlmos, mais le fils d'Ârpâd. Quant à Zuard, il n'était pas non plus de la génération d'Ärpäd, le Notaire Anonyme l'a créé en réunissant deux traditions divergentes. 125 Cf. G. Nagy dans Turul 32 (1914), 19 et suiv.; Györffy, Tanulmânyok, 84; G. Heckenast, Fejedelmi (kiràlyi) szolgâlô népek a korai Arpâdkorban, Budapest, 1970, 40-43; Sz. Vajay, Der Eintritt des ungarischen Stämmebundes in die europäische Geschichte (862-933), Mayence, 1968, 45, 54, 64-65 et suiv. 126 SRH, I, 74; cf. G. Bârczi, Régi magyar nyelvjdrdsok [Anciens dialectes hongrois], Budapest, 1947, 11.
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D'une part, Zuard est la personnification légendaire des Hongrois Savards séparés dans la patrie primitive du tronc commun et échoués au sud du Caucase; d'autre part Zuard est l'ancêtre du clan du même nom qui vécut au temps de Saint Etienne. 127 Toutefois, la généalogie qui le fait descendre d'Ullô ne doit pas entièrement manquer de fondement. Vu que le fils d'Ullô était Tas; que le Notaire Anonyme, conformément à une autre tradition, affirme que le fils de celui-ci était Lél, et que les chroniques font descendre de Lél le clan Zovârd {Zuard), la généalogie qui fait remonter Zuard à Hiïlek doit en fin de compte être juste. Tout comme Hiilek ou Ûllô ne peut pas entrer en ligne de compte comme successeur d'Ârpâd pour les raisons exposées ci-haut, Zuard et Cadusa doivent également être écartés des successeurs possibles.128 Les chroniques révèlent encore une relation de famille. Selon leur récit, Àlmos était le fils d'Elôd, 129 selon la tradition notée par le Notaire Anonyme par contre le clan Csâk descendait de Szabolcs, fils d'Elôd. 130 Par conséquent, la maison d'Ârpâd et le clan des Csâk descendent du même ancêtre et le chef Szabolcs était l'oncle d'Arpâd. Dans ce qui suit, je démontré que la parenté entre Ârpâd et Szabolcs peut être prouvée et qu'Ârpâd fut suivi sur le trône par l'aîné de la dynastie qui était Szabolcs. Avant tout, il convient d'examiner les contradictions qui existent autour des débuts de la maison d'Ârpâd. Selon la généalogie contenue dans les chroniques hongroises du XIII e siècle, Ârpâd est le fils d'Âlmos (Almus), celui-ci le fils d'Elôd (Eleud), lui-même fils d'Ûgek (Ugek). Dans la Ges ta du Notaire Anonyme nous trouvons la généalogie Ugek —»• Âlmos —>- Ârpâd. 131 Dans mon étude sur les chroniques hongroises, parue en 1948, j'ai résolu cette contradiction de la façon suivante : la tradition selon laquelle le premier souverain hongrois, Âlmos, était le fils d'Elôd fut transmise par la geste primitive, écrite dans la seconde moitié du XI e siècle. Le Notaire Ano127
Gyôrffy, Krônikâink, 31-34, Tanulmânyok, 62-63, 69. II n'est pas clair si le clan Zovârd (Zuard), ainsi que le clan Sârtvâny-Vecse, qui semblent avoir la même origine, remontent à la maison d'Ârpâd. Il est possible que cette descendance soit vraie et que les chroniqueurs aient parlé de Zuard comme oncle d'Âlmos ou comme le descendant 'd'une chef' Lél, pour anéantir tout fondement à la prétention au trône du clan Zovârd, mais il est également possible que les Zovârd ou les Sârtvâny-Vecse étaient des descendants par la ligne féminine, et que les familles aient par la suite amplifié cette tradition. 129 Kézai : Arpadfilius Almifilii Elad (SRH, I, 165); dans les chroniques détaillées : Almus qui fuit Eleud (ibid., 284); Arpad filius Almus filii Eleud~Elev (ibid., 287). 130 Eleud, pater Zobolsu, a quo genus Saac descendit (ibid., 4); Zobolsu filius Eleud (ibid., 61); Zobolsum filium Eleud (ibid., 112). 131 Ibid., 35-41, 165, 284, 287. 128
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nyme par contre, qui, vers 1200, s'appuie sur une autre tradition, affirme qu'Àlmos était le fils d'Ugek. Ces deux traditions furent fondues par le chroniqueur du XIII e siècle en introduisant la généalogie Ûgek - > Elôd - > Âlmos. 132 Tout en considérant comme évidente cette solution, j'interprète différemment le rôle d'Elôd que je ne l'ai fait plus tôt, en me tenant à des vues généralement adoptées. Depuis que, au XVIII e siècles, l'œuvre de l'empereur Constantin fut connue des historiens hongrois et qu'ils y apprirent que le prédécesseur d'Ârpâd sur le trône était le voevode Levsdi, la majorité des historiens identifia celui-ci à Eleud.133 Je l'avais moi-même admis et ma position dans cette question était que la généalogie Elôd —> Âlmos —*• Ârpâd devait être une liste de souverains, tandis que chez le Notaire Anonyme il y avait la vraie généalogie. Pourtant, cette vision, fort répandue, se heurte à de grandes difficultés. Tout d'abord, du point de vue linguistique, les noms Levedi et Eleud sont impossibles à identifier. Selon l'explication généralement admise, le nom Levedi provient de la racine lev- du verbe lenni 'être', 134 tandis que le nom Elôd est une formation dénominative de elô 'pré-' à l'aide du suffixe diminutif -d.135 La présence des deux noms parmi les noms de personne de l'époque ârpâdienne confirme également qu'il s'agit ici de deux noms différents : dans le registre des propriétés de Dômôs (1138) nous trouvons le nom Levedi,136 dans la première moitié du XIII e siècle on rencontre deux personnes nommées Eleud, et ce nom a survécu également dans le nom d'une localité du comitat de Csanàd. 137 Vu que la descendance Elôd - > Almos remonte à la geste primitive, nous sommes forcés de lui donner la préférence en face de la tradition 132
Gyôrffy, Krônikdink, 45, 108. K. Szabô, A magyar vezérek kora Ârpâdtôl Szent Istvânig [Vépoque des princes hongrois d'Arpâd à Saint-Etienne], Pest, 1869, 30; G. Kuun, Relationum Hungarorum ... historia antiquissima, Claudiopoli, 1892, I, 119, 208; J. Thûry, dans Irodalomtôrténeti Kozlemények 1897, 421; G. Fehér, dans Keleti Szemle 19 (19201922), 92-94; D. Pais, Magyar Anonymus [L'Anonyme en Hongrois], Budapest, 1926, 113; B. Hôman, Magyar tôrténet, I 6 , 70; Szent Istvân, Budapest, 1938, 53; C. A. Macartney, The Magyars in the IX. Century, Cambridge, 1930, 93. — Opinions contraires dans Z. Gombocz - J. Melich, Magyar etymologiai szôtâr [Dictionaire étymologique de la langue hongroise], Budapest, 1914 (dans la suite : EtSz.), I, 1532. 134 Gy. Németh, H M K , 281; Z. Losonczi, Szl. Eml., II, 343; M. Gyôni, A magyar nyelv gorogfeljegyzéses szôrvdnyemlékci, Budapest, 1943, 78; D. Pais, Névtudomânyi vizsgâlatok... (1960), 94; cf. Gy. Moravcsik, Byzantinoturcica, Budapest, 1943, I, 157135 EtSz., I, 1532. 136 E. Jakubovich, dans Magyar Nyelv 14 (1918), 230; D. Szabô, ibid. 32 (1936), 131. 137 Wenzel, VII, 174; PRT, X, 511; Csânki, I, 696. 133
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ultérieure fixée par le Notaire Anonyme, qui veut qu'Âlmos soit le fils d'Ugek. Le nom de celui-ci fut noté en relation avec la légende totemique du turul (oiseau légendaire), Ugek peut donc être considéré comme ancêtre mythique. Les généalogies traditionnelles contenues dans l'œuvre du Notaire Anonyme ont une certaine valeur, parce qu'elles sont en général puisées dans les communications faites par les grands du royaume vivant à la fin du XII e siècle. (Dans le cas ci-dessus, il s'agissait probablement de l'évêque Ugrin de genere Csâk.) Ces ancêtres étaient en général de vrais ascendants de la famille en question qui, selon la tradition familiale, avaient participé à la conquête du pays. Pourtant, les trois siècles écoulés pouvaient conduire à des écarts de dates et à des identifications erronées. En ce qui concerne la tradition relative à la genus Csâk, nous pouvons admettre qu'Elôd était le plus ancien des ancêtres connus, Szabolcs l'ancêtre du temps de la conquête du pays, et Csâk l'ancêtre du temps de Saint Etienne, celui qui acquit les domaines de la famille. En prenant à la lettre la généalogie du Notaire Anonyme, selon laquelle Szabolcs était le fils d'Elôd, ce dernier appartenait à la génération précédant celle d'Ârpâd. Ce n'est pas impossible car un enfant puîné, comme par exemple 'Etienne le Puîné', fils du roi André II, peut causer des écarts dans les générations, mais ce sont des cas trop rares pour en tenir compte. Connaissant la valeur des affirmations du Notaire Anonyme sur les relations père-fils, il est plus probable que Szabolcs était le cousin d'Ârpâd, donc également le petit fils d'Elôd. Quels sont les autres faits qui prouvent que Szabolcs, et par conséquent la lignée des Csâk, descend de la maison d'Arpâd ? Tout d'abord il est frappant de voir que l'apanage de Szabolcs et de ses descendants, les Csâk, le comitat de Fejér, était entouré de terres appartenant aux membres de la famille d'Ârpâd. Comme nous venons de le voir, Baranya était le domaine du prince régnant, Tolna celui de l'héritier du trône, Veszprém et la rive gauche du Danube celui des autres princes du sang, et après la mort de Kurszân, les environs de Buda devinrent également propriété d'Arpâd. Les terres occupées par Szabolcs s'intègrent organiquement dans les domaines familiaux de la maison d'Arpâd. C'est si évident que déjà Hôman remarqua : "Jugeant d'après les terres qu'il occupa, Szabolcs était également apparenté à la famille régnante." 138 Il s'ensuit en outre que Szabolcs n'était pas le chef d'une tribu auto138
Szent Istvân, Budapest, 1938, 60.
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nome. Il n'est pas concevable qu'au moment de l'occupation du pays, un troisième chef de tribu, en dehors d'Arpâd et de Kurszân, eût pu établir son campement sur ce court secteur du Danube. Pour quelles raisons Szabolcs fut-il inséré parmi les sept chefs de tribu aussi bien dans la liste des chefs des chroniques que dans la geste du Notaire Anonyme, et, de plus, toujours à la seconde place? A mon avis, la tradition de l'époque ârpâdienne a conservé le souvenir d'Àrpad comme premier et celui de Szabolcs comme deuxième chef, mais cet ordre ne doit pas s'entendre comme liste des sept chefs de tribu conquérants, mais comme ordre chronologique des princes régnants. Par conséquent, lorsque à la fin du XI e siècle une tentative fut faite pour établir la liste des septem duces (problématique même quant au chiffre sept) on a mis, à la place du deuxième dux, le nom qui était chronologiquement le deuxième. On n'a pas remplacé par un autre nom ceux de Szabolcs et de Fajsz dans la liste des chefs, c'est pourquoi, dans la geste primitive Àrpâd fut suivi de Taksony, et il manque un demi siècle dans la liste des souverains. Une question se pose à ce propos. Si les deux premiers noms de la liste des chefs furent pris à la liste chronologique des souverains, la suite pourrait également comprendre des noms d'autres souverains. Cette hypothèse récèle bien des possibilités tentantes de faire des combinaisons, je pense néanmoins que d'une généralisation de ce genre surgiraient plus de contradictions que de conclusions solides. La liste des chefs dans les chroniques (Àrpâd — Szabolcs — Gyula — Kund — Lél — Vérbulcsu — Ors) dont Kézai n'a modifié que l'ordre de succession (Arpâd — Szabolcs — Gyula — Ôrs — Kiind — Lél — Vérbulcsu) doit être interprétée avant tout comme une compilation ultérieure sur la base des récits traditionnels relatifs à la conquête du pays et aux guerres de rapine : Gyula et Kiind sont des noms communs de titulature indiquant la dignité des deux princes dirigeant la conquête du pays, mais ils sont aussi héros principaux de légendes. Lél et Bulcsu à leur tour sont les protagonistes de la légende de cor de Lehel (Lél). Nous avons encore moins de raisons de chercher une liste de princes régnants dans la liste des chefs donnée par le Notaire Anonyme (Almus pater Arpad, Eleud pater Zobulsu, ... Cundu pater Curzan, Ound pater Eté, ... Tosu pater Lelu, Huba, ... Tuhutum pater Horca, cuius filii fuerunt Gyyla et Zombur), liste établie en connaissance de la geste primitive et de sa liste que l'auteur modifia conformément à des traditions de famille. 139 138
SRH, I, 41, 165-167, 287-292; cf. Gyôrffy, Krônikàink,
97-124.
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L'emplacement des cours des chefs et des cours dans les ducatus témoignent aussi de la succession de Szabolcs à Àrpâd. Il faut d'abord noter une chose qui peut apparaître comme une lacune dans nos connaissances. C'est que dans les environs de la résidence d'Ârpâd, dans le comitat de Baranya, aucune trace n'est restée des résidences de ses fils. Tormâs est le premier descendant, dont on puisse démontrer qu'il était au temps de Fajsz, le seigneur de ce territoire. Or, les résidences d'hiver et d'été de Szabolcs ont laissé dans le Baranya des traces classiques : dans la région des sources du cours d'eau de Pécs se trouve Mecsekszabolcs (vers 1290 : Zobolch), aujourd'hui faubourg de Pécs, 140 et à son confluent nous avons Drâvaszabolcs (1216/1550 : Zobulsu, 1395 : Zabolch).141 (Voir Carte 6.) Cette double résidence le long d'un cours d'eau, à petite distance, dans les limites du même comitat, n'est pas celle d'un prince régnant. Il est possible que Szabolcs, encore prince héritier, se vît octroyer le droit de nomadiser à proximité de la résidence d'hiver du prince régnant, surtout si la femme d'Ârpâd était, conformément à la loi du lévirat, la mère de Szabolcs. Il serait difficile de dire comment cette nomadisation coïncida avec la possession du ducatus. Il est certain pourtant que dans le ducatus de Bihar aucun des successeurs de l'héritier du trône Szabolcs n'a laissé des traces aussi évidentes que lui. Je pense avant tout au fort de Szabolcs qui, quant à ses dimensions, était le plus grand des fortins de terre du X e siècle. S'il porte le nom de l'héritier d'Ârpâd c'est que Szabolcs en était le constructeur et, en même temps, l'organisateur du ducatus de Bihar. Le Notaire Anonyme, originaire de cette région, a, paraît-il, entendu raconter des traditions sur l'origine du fort. Dans le récit de la conquête du pays il dit que Szabolcs, Tas et Tétény occupèrent le ducatus de Bihar et, à ce propos, il dit sur Szabolcs : " A ce moment-là Szabolcs, cet homme bien sage, visita un endroit sur la Tisza et, voyant comment il était, en conclut qu'il était propice pour y construire un fort. Par conséquent, se tenant aussi au conseil commun de ses compagnons, il y rassembla le commun peuple, fit creuser un grand fossé et construire un fort de terre bien solide. Celui-ci s'appelle maintenant fort de Szabolcs." 142 Les dimensions de ce fort, construit à proximité de la route de Verecke permettent de supposer que son constructeur avait en vue le danger 140
Gyôrffy, I, 380. J. Karâcsonyi - S. Borovszky, Regestrum la suite : Reg. Var.), 211; Csânki, II, 523. 142 S R H , I, 62. 141
Varadiense,
Budapest,
1903 (dans
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du côté des Petchénègues, danger le plus menaçant à ce moment-là. Sa construction demanda certainement un temps prolongé. Il s'ensuit d'une part que Szabolcs se trouva longtemps à la tête du ducatus de Bihar et de l'autre qu'Ârpâd fut prince régnant au moins aussi longtemps. Le fort de Szabolcs sur la Tisza était certainement une résidence d'hiver. Le souvenir de la résidence d'été est conservé dans la vallée du Sebes Kôrôs, au-dessus de Nagyvârad (Oradea), par Mezôszabolcs (1256; Zabolch).li3 A côté de lui, le nom topographique Jenô, provenant d'un nom de tribu, et le nom du village Battyân 144 (figurant ailleurs parmi les noms de tribus) montrent qu'il s'agit d'une colonie militaire de haute époque. (Voir Carte 6.) Cette double résidence ne fut pas établie sur les rives du même cours d'eau. Sans compter que la rive gauche de la Tisza n'entra pas en ligne de compte à cause des immenses inondations, le tracé des territoires du ducatus ne suivait pas les fleuves et, ainsi, les résidences du ducatus montrent rarement cette alternance que l'on observe dans les autres régions du pays. Dans le cas de Szabolcs, les noms des deux résidences ont survécu probablement parce que, lors de l'occupation des terres, il était le premier à fonder ses résidences. Ses changements réguliers de résidences sont marqués, aux limites du Nyirség, par les cours d'eau Jôszâs, Kôsely et Kadarcs qui relient le Sebes Kôrôs et la Tisza. Son itinéraire toucha, dans le croisement des principales routes, les villages Szabolcs (1453 : Zabolch) près de la rivière Hortobagy et Hajdûbôszôrmény (1332 : Bezermen etc.),145 colonie musulmane où le prince pouvait percevoir des taxes sur le commerce à longue distance vers l'Est. Szabolcs posséda encore une résidence qui peut s'expliquer par le commerce oriental, si en tout cas elle n'est pas un reste de la première résidence provisoire. Audesssu de Szolnok, dans le terroir de Besenyszôg, se trouvait un village, Szabolcs (1393 : Zabolch),146 non loin de Tiszabô, qui, avant l'incursion des Tatares, était une colonie musulmane. 147 Le passage voisin sur la Tisza, disparu aujourd'hui, explique le groupe de résidences de Szabolcs et des princes suivants (Ullô, Taksony, Décse). i « Gyôrffy, I, 663. 144 Ibid., 628; Csânki, I, 603; Zs. Jakô, Bihar megye a torôk pusztitàs elôtt [Le comitat de Bihar avant les dévastations turques], Budapest, 1940, 204. 145 L. Zoltai, Debreceni halmok, hegyek [Les noms des collines de Debrecen], Debrecen, 1936, 47; Csânki, I, 506. 146 Ibid., I, 69. 147 G. Fejér, Codex diplomaticus Hungariae..., Budae, 1826- (dans la suite : Fejér), IV/2, 425.
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L'accession de Szabolcs au trône se confirme aussi par ses résidences en Transdanubie car leur emplacement suggère la possession de la rive qui appartenait au prince régnant. Comme il ressort avec évidence des chroniques et des possessions du clan Csâk, lors de l'établissement des conquérants, Szabolcs occupa le territoire du comitat de Fejér. Conformément aux domaines que possédait vers 1200 la lignée des Csâk, descendants de Szabolcs, le Notaire Anonyme affirme que le mont Vértes, ainsi que Csâkvâr à ses pieds, étaient leurs possessions primitives. Selon les chroniques, les champs autour de Csâkvâr devinrent leur domaine où Szabolcs fit construire un fort appelé de son nom, mais que Csâk rebaptisa du sien (primo ... Zoboley dicebatur).14" La forme Zobolei ~ Zoboley qui figure dans ce passage n'étant qu'une déformation de la forme archaïque Zobolei, qui a survécu jusqu'en environ 1200, il est certain qu'il ne s'agit pas d'un passage ajouté au XIII e siècle. En partant de cela, nous sommes en droit de supposer que Csâkvâr devait être la résidence d'été de Szabolcs dans le comitat de Fejér, et que sa résidence d'hiver se trouvait à la place actuelle de Pusztaszabolcs (1302 : Zabouch),149 à proximité de Lôrév menant à l'île Csepel. Pour répondre à la question de savoir si elle fut fondée par lui pendant son règne comme résidence d'hiver, ou si elle était sa résidence de prince de sang conservée après son accession au trône, il semble que cette dernière hypothèse soit plus probable. En ce qui concerne les résidences de Szabolcs dans le comitat de Fejér, nous devons retenir une autre possibilité. Fehérvar, ('Albe royale), que les chroniques attribuent à Ârpâd comme résidence, 150 était construit sur le territoire occupé par Szabolcs. Il est pourtant prouvé que Fehérvâr se trouva plutôt dans le campement de Szabolcs que d'Ârpâd. 1 5 1 Si les fouilles archéologiques futures ne le contredisent pas, nous sommes en droit d'attribuer la construction et la dénomination de Fehérvâr au prince régnant sur l'apanage duquel il se trouvait, c'est à dire à Szabolcs. Si déjà en tant que prince de sang il se fit connaître par la con148
SRH, I, 90, 290; cf. J. Karâcsonyi, M. Nemz., I, 291 et suiv.; L. Glâzer, Kelet Dunàntul a honfoglalds és a vezérek korâban, Fejér vârmegye kialakulâsa [La Transdanubie orientale à l'époque de la conquête du pays et des chefs, Formation du comitat de Fejér], Cegléd, 1937, 25 et suiv.; Gyôrffy, Krônikâink, I., 102-103, 109-110 (modification de mes positions sur l'endroit du stagnum Ferteu, sur l'origine du motif Eleud, et sur les origines du fort Szabolcs); Tanulmdnyok, 20. 149 Anjou-kori okmdnytâr, Codex dipl. Andegavensis, Budapest (dans la suite : Anjou), I, 25; Csânki, III, 345. 150 SRH, I, 166, 290. 151 Cf. Gyôrffy, Krônikdâink, 102. Voir encore 1193 : vallem Arpad (Fejer, II, 286).
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struction d'un fort considérable, il est probable que pendant son règne il éleva à sa résidence d'hiver un fort digne de son rang. Fehérvâr se présente par ailleurs comme un îlot inaccessible, il se prêta donc aux préparatifs de défense qui étaient nécessaires dans la situation de Szabolcs entouré des prétendants au trône. Il devait prendre ses précautions envers les fils d'Ârpâd qui entouraient ses terres du comitat de Fejér du côté des comitats de Tolna, de Veszprém, de Pest et les autres régions d'au-delà du Danube. Aucun de ses prédécesseurs ou successeurs n'était à ce point concerné pour construire à cet endroit un fort imprenable sur les marécages. Tout cela ne nous empêche pas de considérer Géza comme le grand constructeur de ce fort à l'époque de l'organization des nouvelles structures de l'Etat. 152 Enfin, Saint Etienne y installa sa cour vers 1018 et en fit une ville au sens européen du terme. 153 Il est incontestable que Szabolcs posséda la région le long du Danube entre Pécs et Lorév (entrée de l'île de Csepel), région ayant, à l'origine, appartenu à Àrpâd. Il existe en outre des indices qui attestent que, pour un temps, ou régulièrement, il allongeait cette zone vers l'ouest et le sud-est. Dans la vallée de la rivière Siô (Nikics), qui prend sa source dans les monts du comitat de Sopron, il y avait un village de Szabolcs (1326 : Zabolch).154 Il est intéressant de noter que près de chaque cours d'eau parallèle à cette rivière nous rencontrons le nom d'une résidence d'un chef du début du X e siècle avec le nom de son successeur. Ainsi sur la rivière Gyôngyôs se trouve Bogât, sur le Répce Huba, sur l'Ikva Harka, et sur le lac Fertô Kâl, dont la prolongation vers l'est est probablement le camp à'Eté, fils d'Ônd, dans le Csallôkôz. 155 Cet arran152 Alân Kralovânszky, chercheur éminent de l'histoire de Székesfehérvâr, a appuyé dans une série d'études la thèse selon laquelle la ville, avec ses premières églises, fut construite sous le règne du prince Géza (972-997) (voir dernièrement dans Székesfehérvâr évkônyvei, 1 (1967), 7-18, 35-47; cf. Gy. Gyôrffy, ibid., 19-25, et E. Fugedi, ibid., 27-34). K. Bakay dans Tôrténelmi Szemle, 12 (1969), 121, recule les débuts d'une ou deux générations, en partant de la datation des cimetières autour de Székesfehérvâr. 153 Gy. Gyôrffy, Székesfehérvâr évszâzadai 2 (1972), 38. 154 Csânki, III, 629. 155 Je ne mentionne ici que les chefs dont les successeurs légaux possédaient des campements dans la même vallée de rivière (Tevel au dessous de celui de Bogât, Szemere au dessous de celui de Huba, Gyula au dessus de celui de Harka, Bâr à côté de celui d'Eté; cf. encore les noms Karcsa et Abony sur le territoire du campepement d'Ond); outre ceux-ci, dans d'autres vallées se rencontrent parfois des noms qui peuvent être rattachés aux chefs de tribu énumérés par le Notaire Anonyme, par exemple Acsdd, Edve (1264 : Edw, voir Csânki, III, 606), Und (1225 : Vnd, 1408 : Ond, ibid., 633); sans analyse linguistique et topographique approfondie ils ne peuvent pas être classés parmi les autres. Sur le village Kâl voir Wenzel, VII, 89.
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gement spécial semble corroborer la communication de l'empereur Constantin (40 c., 45) selon laquelle un accord existait entre les tribus hongroises pour lutter ensemble près des rivières en cas de guerre. Il est probable que le rassemblement des tribus dans le cas d'une attaque venant de l'ouest se serait fait le long des rivières marquées par les résidences des chefs. On peut supposer, sans toutefois le prouver, que, de temps à autre, Szabolcs visitait même en été sa résidence dans cette région. Le prolongement vers le sud-est de l'itinéraire royal de Szabolcs peut être découvert dans le village de Szabolcs du comitat de Valkô (1395 : Sabowch, 1477 : Szabolcsi).156 Cette résidence se trouvait sur le flanc sud-ouest de la Fruska-Gora et, parallèlement à la résidence de Fajsz sur la Save, contrôla la voie militaire et marchande conduisant en Bulgarie et vers Byzance. (Voir Carte 6.) Après avoir passé en revue les campements désignés sous le nom de Szabolcs, j'arrive à la conclusion qu'ils appuient parfaitement les données selon lesquelles il était l'aîné des parents mâles d'Àrpâd, qu'il lui succéda sur le trône et était par conséquent le deuxième dans l'ordre chronologique des princes régnants. Ses résidences montrent également que tant qu'il n'était que prince héritier il possédait le ducatus, pendant son règne il contrôlait la région de la ligne du Danube et, si l'on en juge d'après ses constructions, il était un souverain de grande envergure à l'époque des incursions, au point que même la propagande des chroniqueurs attachés à la branche de Taksony ne put passer son renom sous silence. La puissance de ses descendants, les Csâk, toujours suffisant pour faire des prétendants au trône, explique largement pourquoi les chroniqueurs de la maison d'Arpâd avaient exclu le nom de Szabolcs de la liste des princes régnants et pourquoi il fut inséré parmi les sept chefs de tribu. Les chroniques détaillées contiennent de vagues références à des procédés de ce genre employés après la mort de Saint Etienne. Par exemple, dans un passage relatant que Csâk donna au fort de Szabolcs son propre nom (Csâkvâr), le chroniqueur de la branche de Vazul ajoute que les Hongrois communi consilio détruisirent ce fort au temps d'Endre, Béla et Levente.157 La raison en est évidente : la famille de Csâk s'opposa au retour de ces trois princes dans le pays. Il est parfaitement 158
Csànki, II, 350. SRH, I, 290. Bien que dans les chroniques détaillées Szâr Lâszlô soit indiqué à cet endroit comme le père des princes Endre, Béla et Levente, je ne pense pas que le phrase entière soit un complément ultérieur, tout au plus le nom de Vazul fut changé en Szâr Lâszlô à l'instar d'autres endroits dans les chroniques. 157
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imaginable qu'après l'éviction du rois Pierre Orseolo ils aient prétendu au trône. Après l'extinction de la maison ârpâdienne, Maté Csâk ne pouvait plus faire valoir ses prétentions au trône puisque la déformation des faits dans les chroniques le privait de toute possibilité de prouver son appartenance à "la branche d'or de la lignée de Saint Etienne". Pourtant, fort de la tradition familiale, il savait bien que ses prétentions étaient justifiées par le droit successoral. 158 Les souverains descendant de la branche de Taksony étaient sous plusieurs aspects intéressés à ce que les souverains ayant régné entre Àrpâd et Taksony fussent oubliés et à ce que leur généalogie f û t acceptée comme liste de souverains. Tandis que les origines et le rôle historique de Szabolcs peuvent être élucidés sans ambiguïté, l'ombre continue à planer sur les événements survenus après sa mort. Y eut-il d'autres princes de sang qui, par l'âge ou par la valeur, devancèrent les fils d'Ârpâd. Le système du séniorat fut-il respecté ou donna-t-on la préférence à la primogéniture ou aux valeurs personnelles? Il faut bien les prendre en considération, car partout où nous avons plus d'amples connaissances du système de succession chez les nomades, nous voyons souvent la primogéniture et les capacités personnelles prendre le dessus sur le système du séniorat. L'institution du séniorat chez les nomades a des sources socio-économiques. Cette société toujours en déplacement avec tous ses biens a notamment besoin d'un chef mûr et expérimenté: qui soit capable de protéger et défendre son peuple avec tous ses biens et pâturages. Il ne s'ensuit pas seulement que c'est toujours le membre le plus âgé de la famille régnante qui est revêtu du droit de régner, mais aussi que celui qui en est incapable est forcé de céder sa place à celui qui possède les qualités requises. C'est en général le souverain lui-même qui, après délibérations en conseil, décide de la personne qu'il juge qualifiée. Un exemple pertinent en est donné dans l'Histoire Secrète des Mongols avec la succession de Gengis-khan, dans une note presque contemporaine. Selon ce récit, avant la campagne de Khwàrezm (1219), l'une des femmes du khan dit à son mari qu'il devait désigner son successeur. Le 158 L'emblème au lion du clan Csâk ne s'oppose pas à son descendance du clan d'Ârpâd (J. Csoma, voir J. Karâcsonyi, M. Nemz., III/2, 61-63). Le lion entrait en général dans l'emblème des familles descendant des chefs de tribu, mais il servait aussi de signe de pouvoir aux Ârpâdiens, par exemple sur le globe en cristal du sceptre royal (cf. Gy. Lâszlô, Szl. Eml., III, 550 et suiv.; Gyôrffy, Tanulmânyok, 5-6).
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khan fit venir ses fils dont les deux aînés, Djôtchi et Djaghataï, engagèrent une dispute, mais, lorsque l'on les sépara, ils renoncèrent en faveur du troisième et Djaghataï dit : " . . . Ôgôdèi ... est un homme calme. Nous élisons Ôgôdèi. Il serait bon qu'il restât auprès de notre père le khan qui lui enseignerait à bien se comporter et à porter le grand bonnet." Le quatrième fils, Toloui, y consentit également. Le khan, tout en attirant deux fois leur attention sur Djôtchi, l'aîné, accepta leur proposition qui correspondait certainement à son opinion, et prit sa décision en conséquence. Le récit de Rasîdu-'d Dîn sur l'élévation d'Ogôdèi au trône complète ce passage. Selon lui, les princes présents, se référant à l'ordre de Gengis-khan, l'invitèrent à l'unanimité à prendre le pouvoir. Ôgôdèi, après s'être montré réticent et avoir recommandé à sa place Toloui qui, en tant que cadet était le gardien du foyer paternel, finit par céder aux arguments et accepta la dignité de grand khan. 159 L'autre point de vue qui devait jouer était le mot qu'avait à dire, à propos de la succession, la première femme du khan. Là où celle-ci était plus énergique que son mari et où la succession n'était pas réglée sans équivoque, elle pouvait faire entrer en jeu son influence, d'autant plus qu'au temps de l'interrègne qui suivait provisoirement la mort du khan, elle exerçait un pouvoir temporaire. Or, elle tentait toujours de faire monter au trône un de ses fils afin de pouvoir garder son influence. U n bon exemple est offert par Tôreghènè, veuve d'Ogôdèi qui, en 1246, arriva à faire élire son fils Guyuk en écartant plusieurs princes du sang plus âgés. 160 Les sources chinoises relatives à l'histoire des Turcs de l'Orkhon prouvent que ce système était connu dans d'autres sociétés que celles des Mongols. Chez les Turcs de l'Asie Centrale, le séniorat et la primogéniture alternaient dans la succession et provoquaient souvent des conflits intérieurs. 161 Les documents écrits permettent de suivre dans l'histoire hongroise la lutte entre les principes du séniorat et de la primogéniture, à partir de la révolte de Koppâny (997) jusqu'aux combats entre le roi Imre et son frère Endre (1203). Il est clair que ces deux tendances se heurtaient au X e siècles aussi, mais à défaut de sources écrites, elles se révèlent à nous par la présence ou l'absence des noms de résidence sur le territoire du ducatus.
159 160 161
Ligeti, N o . 254-255; cf. les notes. P. Pelliot, Les mongols et la papauté, Gyôrffy, Tanulmànyok, 137.
Paris, 1923, 193-195.
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En tout cas, compte tenu de ce qui précède, il faut s'attendre à ce que la succession ne se fît pas toujours conformément au principe du séniorat et que le prince désigné par le souverain comme son successeur devançât ses frères et reçût le ducatus, territoire revenant de droit à l'héritier du trône. Le problème suivant est présenté par la division territoriale du ducatus en Hongrie. En 948 Constantin écrivit que les trois tribus khabares qui se joignirent aux sept tribus hongroises étaient soumises à un seul chef tandis, que les tribus hongroises avaient chacune leur chef. Ce seul fait montre que la royauté chez les Khabares n'était pas le résultat d'une évolution organique, mais que c'était une institution établie grâce à l'intervention du pouvoir princier. Au X e siècle, la royauté sur les trois tribus khabares revenait à l'héritier du souverain et c'est ce qui est à la base de l'institution du ducatus,162 Toutefois, outre l'héritier, le prince qui le suivait en rang et quelques grands du pays avaient également leur part dans le ducatus, ce qui est une contradiction apparente à la soumission des Khabares à un seul chef. Il faut donc examiner la pratique des nomades en ce qui concerne l'unité ou la division des territoires soumis à l'héritier du trône. Dans le système nomade du gouvernement nous connaissons la pratique selon laquelle le souverain cédait à l'héritier du trône et à ses frères cadets la royauté sur les peuples et territoires conquis. D'une part ils en tiraient leurs revenus et de l'autre y acquéraient l'expérience du gouvernement. Un peuple ou une province qui s'était soumis était en général cédé à l'héritier dans son ensemble, tandis que les peuples et tribus résistants étaient 'aménagés', c'est à dire répartis entre les membres de la famille régnante.163 Les données relatives aux Turcs et aux Khazars ne permettent pas de connaître plus profondément la manière dont ces peuples et territoires conquis étaient répartis territorialement. Nous connaissons par contre la division du Qiptchaq, pays des Comans, conquis par les Mongols, qui était faite suivant les cours d'eau. Après l'incursion des Tatares, le Qiptchaq échoua à Batou-khan muni des pleins pouvoirs. Batou était le deuxième fils de Djôtchi, luimême l'aîné des fils de Gengis-khan. (Le premier fils, frère de Batou, Ordu, régnait sur la Sibérie occidentale conquise précédemment.) 162
E. Mâlyusz, dans Melich Emlékkônyv, Budapest, 1942, 254-262. les Gyôrffy, Tanulmânyok, 77-79, 137-138. Pour l'organisation ou la dispersion des populations voir MEH, 33, 42; Ligeti, MTT, No, 186, 188.
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Batou divisa le Qiptchaq de la manière suivante. 11 se réserva les deux rives de la Volga bien qu'il ne nomadisât que sur la rive orientale, plus protégée. Il céda à son frère cadet Bèrkè la côte occidentale de la mer Caspienne jusqu'à Derbend, passage du Caucase. Cependant, Bèrkè ayant exigé des dons des Musulmans venant de la Perse vers le territoire de celui-ci le muta en le déplaçant à l'est de la Volga. Selon Plan Carpin, en 1246 Karbon, mari de la sœur de Batou, nomadisait dans la région du Don, tandis que, selon Roubrouk, en 1256 Sartaq,filsde Batou, y séjournait et avait avec lui à sa cour, sur la rive orientale du Don, l'aîné de ses fils. Il est possible que ces deux communications correspondent à un écart de temps et que le gendre du khan fût suivi, au bout de dix ans, par le fils du prince régnant. Il est pourtant également possible que la rive droite ait appartenu au gendre du khan et la rive gauche, plus protégée, à Sartaq et son fils. Sur la rive orientale, plus protégée, du Dniéper nous trouvons en 1246 Motchi, premier-né de Djaghataï, tandis que Qorenza nomadisait sur la rive occidentale et était chargé d'assurer la défense des frontières. Qorenza est mentionné comme ayant un rang inférieur à Motchi. Sur chacune des deux rives de la rivière Oural un millenier se déplaçait. (Voir Carte 1). Il s'ensuit que la royauté sur une province n'empêche pas celui qui y gouvernait de faire participer au gouvernement les membres de sa famille (frère, fils, beau-frère, cousin) et même ses subordonnés. C'est sous cet aspect que nous devons interpréter le fait que l'héritier du trône en Hongrie, à qui revenait de droit le ducatus, céda une partie plus éloignée de son territoire à son frère cadet, ce qui devint une pratique courante, et qu'il en fit éventuellement autant pour d'autres aussi. Dans cette division, la pratique principale était que le chef du ducatus se réservait la partie qui fournissait le plus de revenu. Cela explique qu'à l'époque de l'essor du commerce musulman l'héritier se choisît les provinces de Bihar, et qu'après la chute, en 965, de l'empire khazar, lorsque le delta du Danube devint un centre commercial,164 il se choisit Krassé sur le Bas-Danube et que, lorsque les échanges avec l'ouest s'intensifièrent, ses territoires furent dans la région de Nyitra. Parmi les sources qui font connaître la division territoriale du ducatus hongrois, nous prenons comme point de départ la tradition de la cour transmise par le Notaire Anonyme, selon laquelle lorsque le successeur d'Àrpàd reçut le ducatus de Bihar, un parent par la branche masculine, Hulek, occupa à son tour Nyitra. Les troupes du ducatus consistaient en 1M
Hoeecmb BpejueHHbtx jtem, MocKBa-JIeHHHrpafl, 1950.
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unités fournies par les comitats. En 1074, le noyau de l'armée du prince Géza comprenait des troupes de Nyitra, celui du prince Lâszlô des troupes de Bihar. Outre celles-ci, on ne nomme que les troupes de Nyir (comitat de Szabolcs). Pourtant, le récit des événements dans la chronique permet de supposer qu'entre les comitats de Nyitra et de Szabolcs, certains autres comitats devaient entrer dans le ducatus,165 Sous ce rapport il est frappant de voir que la plupart des noms des résidences princières, connus dans le Bihar et dans le Nyir, se répètent dans le comitat Heves (Szabolcs, Tarhos, Ùllô, Tas, Décse) qui, par conséquent, pourrait également compter comme partie du ducatus de Bihar. De la même façon, l'apparition des noms des princes en territoire du comitat de Pozsony (Tevel, Taksony) rend probable le fait que celui-ci entrait dans le ducatus de Nyitra. Le rôle que le prince Géza avait joué dans la région du Bas-Danube, les mesures concernant le comitat de Krasso prises par le prince Kâlmân en sa qualité d'évêque de Bihar, prouvent que le ducatus de Bihar s'étendait sur les régions du Sud, ce qui est corroboré par le fait que des toponymes gardent dans le Krasso et le Zarând le nom du prince Zerind, porteur de la dignité du duc. 166 (Voir Carte 8.) C'est probablement l'élargissement des apanages de la maison d'Àrpâd qui aboutit à la constitution du ducatus de Somogy ayant figuré dans certains cas (Fajsz, Koppâny) comme troisième ducatus. La nomination par Saint Etienne d'Erdôelvi Zoltân en Transylvanie suggère que, dans le cas de ce territoire, il faut également compter avec l'existence de l'institution du ducatus. Si, en égard à ce qui précède, nous voulons nous servir des résidences dans le ducatus pour en tirer des conclusions historiographiques, il convient de tenir compte d'un autre facteur négligé jusqu'ici. Outre ses fils, Arpâd pouvait avoir d'autres parents masculins dont les noms ne furent pas notés par Constantin. On peut penser aux autres neveux d'Almos, mais surtout aux fils de Szabolcs qui, en vertu de la primogéniture, pouvaient devancer les fils d'Arpàd. Il faut également tenir compte des lacunes possibles dans la généalogie donnée par Constantin. L'énumération des fils à partir de Tarhos est certainement complète, ce qui n'est certainement pas le cas pour les petits-fils et surtout pour arrière petits-fils. A propos de la famille élargie d'Almos, une question de grande im165 166
Gyôrffy, Tanulmdnyok, 38-40. Heckenast, op. cit., 32-51.
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portance se pose. C'est de savoir si la pratique nomade des Gengiskhanides se maintenait, et dans quelles mesures, au IX e siècle et surtout pendant la période des modifications dans les rapports du pouvoir qui suivit la conquête du pays. Selon cette pratique, le souverain plaçait les membres de sa propre famille à la tête des tribus ou au moins dans les dignités principales. Déjà Hóman a tenu compte de cette possibilité quand, sans chercher de plus amples preuves, il établit des relations familiales entre les Gyula, la famille de Bulcsu (portant la dignité de karchas), les Aba et la lignée d'Árpád. 1 6 7 Même s'il est justifié d'y penser en certains cas, il n'est pas possible d'en faire des généralisations et de faire remonter tous les chefs de tribu au même clan. Le gouvernement partagé entre deux souverains appartenant à deux clans de différente origine contredit en tout premier lieu cette théorie, et aussi le fait que les descendants des chefs du X e siècle ne portaient pas toujours les mêmes emblèmes totemiques. Certes, le lion, emblème du pouvoir, revient chez plusieurs chefs de tribu, et derrière le motif répété de l'aigle aux ailes déployées, il est impossible de discerner les différentes espèces d'oiseaux rapaces. Mais outre ces emblèmes, il en existe aussi d'autres. La lignée de Tétény, descendant du chef Tétény (Tuhutum), ainsi que deux clans établis entre le Danube et la Tisza (Beche-Gregor et Dorozsma) avaient pour emblème un serpent. 168 Chez les nomades, la parenté n'est pas comptée par la seule ligne masculine; le mari d'une princesse à l'égalité en droit avec les princes pour la participation au pouvoir. Chez les Mongols, le gendre du khan appelé í gürighèn , a parfois devancé les princes de sang. En 1246 par exemple, lorsque Batou nomadisait le long de la Volga, Karbon, le 'gürighérí dominait la rive du Don. En Hongrie les liens de sang, comme justification de la participation au pouvoir, peuvent entrer en considération surtout à propos de la dignité de gyula. Lors de la conquête du pays cette dignité, représentant le pouvoir réel, revint à Árpád. Selon une donnée datant de 948, gyula signifiait le grand-juge, poste héréditaire, mais qui n'était pas rempli par les descendants des quatre fils d'Árpád. Conformément à la coutume des nomades, il était peu probable que la dignité du gyula, même avec un pouvoir restreint, fût cédée à un chef de tribu étranger; 169 il semble des plus probables qu'après Árpád cette dignité échouât à un parent. Si
187
Hóman, Szent István, Budapest, 1938, 60. íes Gyôrffy, Tanulmányok, 4-5. 169 J'ai déjà avancé cette possibilité : ibid., 84.
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ce n'était pas un des fils, on peut supposer qu'un gendre du grand-prince en fut revêtu. U n exemple de cette participation au pouvoir est fourni par Aba Samuel, fils du beau-frère de Saint Etienne, qui reçut la dignité du comte-palatin. Après la mort d'Àrpâd c'est Tétény qui devint probablement gyula. Comme je vais le montrer dans la suite, le chef Tétény reçut les rivages possédés précédemment par Kurszân, sur lesquels Àrpâd étendit son pouvoir en 904. La possession par Tétény de cette dignité explique la tradition erronée transmise par le Notaire Anonyme, selon laquelle Tétény était "l'ancêtre" des Gyula. Dans la tradition des clans Tétény et Maglôd, établis dans les environs de Pest, Tétény devait vivre comme gyula, ce qui poussa le Notaire Anonyme à faire descendre de lui les Gyula. Le chef (rex) suivant du début du X e siècle est Bogât, auquel on a, non sans fondement, attribué les dignités de gyula 170 et de karchas,171 mais que l'emplacement de ses terres met plutôt en rapport avec la branche du séniorat des Arpâd établie sur la rive droite du Danube. En relatant les événements de 921, Liudprand écrit que les deux 'rois' des Hongrois, Dursac et Bugat, arrivés à Vérone, étaient en bons termes avec le roi Bérenger sur la demande duquel ils attaquèrent ses ennemis en Italie. 172 Dans le nom de Dursac M. Géza Nagy croit reconnaître le nom déformé de Tarhos (Tarkacsu), 173 tandis que M. Sz. de Vajay est allé plus loin et, tenant compte du texte de l'Aventin (1520) sur ce sujet, supposa qu'il s'agissait du prince régnant Tarhos et du gyula Bogât. 174 Or, même si le texte de l'Aventin n'offre pas assez de fondement pour arriver à cette conclusion, on peut avancer la thèse que Bogât fût mis plus tard à la tête de la Transylvanie. Le Notaire Anonyme mentionne également Bogât en s'inspirant probablement d'un chant héroïque. Il écrit que dans les combats pour la conquête du pays, ainsi que dans les incursions en Europe qui les
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Vajay, op. cit., 45, 54 et suiv. Voir note 167. 172 Gombos, II, 1473. 173 Turul 32 (1914), 23. Il y a de grandes divergences entre les deux noms. L'identification de la première syllabe est facilité par le diplôme de Zobor (1113) à orthographe française où le nom de Tormocs est reproduit sous la forme Durmuz~ Durmusc (voir note 207), par contre la forme -sac de la fin du mot -kacsu ne s'explique que par la détérioration du texte ou par interversion. 174 Voir note 170. 171
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suivirent, Bulcsu, fils de Bogât,175 joua un rôle considérable près de Lél. Il est certain qu'il fait figurer ici, d'une manière anachronique, Lél et Bulcsu qui jouèrent un rôle en 955, et que la liaison établie entre Bogât et Bulcsu est erronée. Bogât ne pouvait pas être le père de Bulcsu, l'empereur Constantin ayant noté que le père de celui-ci, venu à sa cour, était Kâl qui, d'ailleurs, devait être à peu près contemporain de Bogât. L'emplacement géographique des noms de localité Bogât mérite notre attention. En les passant en revue, il convient de ne pas négliger qu'à l'époque des Ârpâdiens il existait une grande famille Bogât-Radvâny, dont un membre nommé Bogât vivait vers 1200.176 Il tirait son nom d'un Bogât ayant vécu au X-XIe siècles. Il est vrai que vers 1283 Kézai affirme que cette famille avait immigré de la Bohême,177 mais cette affirmation est aussi peu digne de foi que les autres de ce genre qui se trouvent dans les chroniques, par exemple sur l'origine française des Beche-Gregor ou l'origine allemande des Jâk. 178 C'est probablement une étymologie de Kézai, puisqu'en tchèque il y a un mot bogat (riche) 179 et le nom de personne Radovan est bien courant parmi les Slaves.180 Toutefois, l'emblème à aigle caractéristique 181 montre que cette famille était hongroise, tout comme il est incontestable que le chef Bogât était hongrois. Nous n'avons aucune raison de considérer le comte palatin Rodowan (vers »« SRH, I, 82, 86, 107. 176 Karâcsonyi, M. Nemz., I, 249, 253. 177 SRH, I, 190. Il s'agit tout simplement d'un complément ajouté par Kézai. Le nom des Bogât-Radvâny ne figure pas dans la liste des immigrés dressé par le maître Âkos. 178 Gyôrffy, Tanulmànyok, 5, 13; Studia Turcica, Budapest, 1971, 206. J'y réfute la descendance de la famille Jâk de Vecelin. Toute la lignée est caractérisée par une préférence donnée aux noms hongrois païens (comme Ebed, Csuna, Baksa, Tapasz, Szabolcs, Uz) et par l'absence totale de noms allemands, ce qui montre leur origine hongroise et, ainsi, l'emblème du lion n'est pas originaire d'Occident. Le nom du clan est parfois écrit sous forme Ghak, Tyak, Thyak, Chak (Karâcsonyi, M. Nemz., II, 244); tenant compte des mêmes variantes dans la notation du nom du clan Tùrje (Jiirle, Tyiirle, Csurle), habitant la même région (ibid., III, 119), nous pouvons interpréter le nom Jâk comme variante ou doublet du nom Csdk. La question demande certes d'être encore étudiée; toutefois, les données citées ci-haut prêtent assez de plausibilité à l'hypothèse que, dans le cas des Jâk, nous avons affaire au clan d'un chef de tribu. 179 EtSz., I, 443; G. Bârczi, A tihanyi alapitôlevél [La charte de fondation de Tihany], 46; G. Nagy et D. Pais contestent avec beaucoup de fondement l'origine slave du nom de Bogât (ibid.). 180 F. Mikosich, Die Bildung der Ortsnamen aus Personennamen im Slavischen, Vienne, 1864, 53. 181 J. Csoma, op. cit., 45-47.
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1067) comme étranger en partant uniquement de son nom slave, puisqu'à l'époque c'était à la mode parmi les Hongrois (par exemple Ladislav, Bonuzlo, Prokui, etc.). Même sans tenir compte, par prudence, des comitats de Zemplén et du nord de Zala, domaines des Bogât-Radvâny, 182 l'analyse des toponymes Bogât montre l'emplacement typique des résidences d'un chef du début du X e siècle. Avant tout, on remarquera le Bogath mezee (champ) mentionné en 1055, que l'on peut localiser entre le fort de Tolna et de Fadd, 183 dans le voisinage de Tarhacsia, au confluent de Sârviz-Kapos. Passant le long de cette rivière jusqu'aux sources, nous arrivons près de Somogyvâr au lieu-dit Bogât (1229 : Bagat; 1336 : Bugat; 1458 : Bogad).wi qui peut être une résidence d'été correspondant à la résidence d'hiver de Tolna. En passant par contre le long de Siô, autre affluent du Sarviz, jusqu'audessus d'Ozora, nous arrivons au lieu-dit Bogârd (jadis dans le comitat de Veszprém), dont le nom ancient était Bogât(vârà) (1482 : Bogath, 1491 : Bogathwara).1*5 L'emplacement de ces résidences rappelle celui de Jut ~ Juta ~ Jutom et relie Bogât avec certitude à la lignée d'Ârpâd. Les toponymes du Baranya qui peuvent être rattachés à Bogât confirment la même chose. A l'est de Pécs, dans la vallée supérieure de la rivière Hôdos, se trouve le village de Puspôkbogâd (1295 : Bogad ~ Bogach). Près des eaux de Pécs, sur la plaine, on trouve Bogâdmindszent (1276 : Bugad; 1290 : Bagad), et même avant le confluent de Karasica (dans lequel se jette le Hôdos) il y avait un Bogâdtelke (1330 : Bogadteluke),186 peut-être un village abandonné. Même en négligeant ce dernier, la situation des deux premiers rappelle les résidences de Szabolcs dans le Baranya au moment où il n'était pas encore grand-prince. En y ajoutant encore que dans le ducatus de Bihar, le village Nyirbogât (début du XIV e siècle : Bogath)187 se situe sur la rivière qui, de Ûllô, coule vers Tas et Zolta, cela peut suggérer que pendant un certain temps Bogât posséda le ducatus. Si le nom de Sârbogârd (comitat de Fejér) recèle le nom de Bogât, il est possible qu'il fût le fils de Szabolcs. La carrière remarquable de Bogât se situe dans les années qui suivirent 920, sous le règne de Szabolcs. On ne peut pas démontrer qu'il posséda la ligne du Danube ou qu'il accéda à la dignité de prince régnant. i8z p o u r je Bogât dans la vallée du Hernâd voir Gyôrffy, I, 70. 183
Erdélyi, PRT, X, 420, 492. Csânki, II, 594. 185 Cf. B. lia - J. Kovacsics, Veszprém megye helytôrténeti lexikona [Dictionnaire toponymique du comitat de Veszprém], Budapest, 1964, 145, 206, sans identification. 188 Gyôrffy, I, 287. 187 Csânki, I, 512. 184
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L'unique toponyme que l'on connaisse dans l'Ouest de la Hongrie, dans comitat de Vas, le village de Bogdt sur la rivière Gyôngyôs (1281 : Bogâd; 1339 : Bagathy),iaa non loin de la résidence du prince Tevel sur la même rivière, atteste plutôt la résidence d'un prince ârpâdien que celle d'un prince régnant. L'activité de Bogât laissa des vestiges sûrs dans la topographie transylvaine. Dans le comitat de Belsô-Szolnok (Szolnok intérieur), il y a, près de la mine de sel de Dés, Alsô Bogât, devenu plus tard Bogâta (1315 : Bogath, 1325 : Bagath),189 et, près de la mine de sel de Torda (Aranyos-szék), un village abandonné de Bogât (1291 : Bagath).190 Leur situation rappelle fort celles des deux résidences de Géza en Transylvanie, nommées Décse. Cependant, il ne s'agit pas seulement du contrôle des salines par la maison d'Àrpâd. Cela ressort des deux autres villages du nom de Bogât : Marosbogât dans le comitat de Torda (1295 : Bagach, 1332 : Bogath) et Oltbogât (1406 : Bogath) dans le comitat de Felsô-Fehér et Nagykukullô. 191 Les deux emplacements se trouvent sur une rive, propice au pâturage d'été, par rapport à laquelle Gyulafehérvâr (Alba Julae) peut être considéré comme résidence d'hiver. (Voir Carte 7.) Cela appuyerait l'hypothèse selon laquelle Bogât finit ses jours comme seigneur de Transylvanie. Les données historiques et topographiques relatives à Bogât rappellent une fois de plus que la généalogie de la maison d'Àrpâd contenue dans l'œuvre de Constantin ne peut pas être considérée comme complète. En tout cas, elle suffit à elle seule pour nous permettre de suivre l'ordre de possession du ducatus. Comme nous l'avons déjà vu, au temps de la souveraineté d'Arpâd, le ducatus revenant à l'héritier du trône était en possession de Szabolcs, qui avait une résidence au confluent de la Zagyva, au passage de la Tisza, près des Musulmans de Tiszabô. Les résidences princières ultérieures, attachées à ce passage, se situaient sur la rive gauche, dans les régions de Kemej. Csânki, II, 737. Oklevéltâr a ... Bânffy csalâd tôrténetéhez [Recueil de diplômes relatifs à l'histoire de la famille Bânffy], réd. E. Varju, Budapest, 1908 (dans la suite : Bânffy okl.), I, 42, 60. 190 Székely oklevéltâr [Recueil de diplômes des Sicules], réd. K. Szabô, Kolozsvâr, 1872 (dans la suite : Székely okl.), I, 27; B. Orbân; A Székelyfôld leirâsa [Description de la terre sicule], Pest, 1871), 124 et suiv. 191 Wenzel, V, 31; Csânki, V, 694; Hazai okl. 366. Olâhbogât ne peut pas être y classé car au Moyen Age, il s'appelait Kerék ou Kerecsnuk, voir E. Iczkovits, Az erdélyi Fehér megye a kôzépkorban [Le comitat de Fehér de la Transylvanie au Moyen Age], Budapest, 1939, 59. 189
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Près de Becse, le passage de la basse Tisza, où il y avait également des Musulmans, 192 devait appartenir à Tarhos, vu la proximité de la localité de Tarras. Il le posséda probablement dès le temps où Szabolcs était à la tête du ducatus. (Voir Carte 6.) Le problème de la succession peut visiblement trouver une solution dans l'hypothèse que le prince régnant Szabolcs désigna à sa succession les fils d'Arpâd. Tarhos se trouve sur l'un des bras du Fekete Kôrôs, 193 qui conduit, près du village d'Àrpâd, à Târkâny, village portant le nom du forgeron sacré des nomades (tarqan), et au lieu-dit Kovâcsi (également 'forgeron'). Il désigne en outre l'un des bras du Sebes-Kôrôs. Une autre localité, Tarhosfertô, se trouve encore dans le territoire de Tiszafured, vers Zâm. 194 (Voir Carte 8.) Le nom du second fils, Jelech (Hùlek, Ullo), est conservé dans deux noms de localité du comitat de Nyitra : à proximité du passage de la rivière Vâg à Vecse, dans le terroir de Tormocs (plus tard Tornôc), une localité Jelec est mentionnée en 1211. Près de Nyitra, dans le voisinage de Tormos, on connaît en 1156 le village de Jeleu, dont le souvenir a survécu dans le lieu-dit Elôd.195 (Voir Carte 9.) A la mort de Tarhos, Ullo devint le chef du ducatus de Bihar. Dans le Nyirség, près d'Encsencs, sur le ruisseau conduisant à Érmellék, se trouvait le village d'Ùllô (1321 : Jlleu).196 Dans le comitat de Heves, sur la rive gauche de la Tisza, nous trouvons deux localités du nom d'Ullô, l'une près de Kunmadaras, l'autre (1349 : piscina Jllev) dans le territore de Tiszabura. 197 Le troisième fils était Jutas. Nous avons parlé ci-dessus de ses résidences dans le Veszprém et de celles, hypothétiques, dans le Somogy, qui sont à proximité de la cour de la famille. Il n'a laissé aucune trace sûres dans la toponymie des deux ducatus. Le quatrième fils d'Àrpâd, Zolta, apparut dans le ducatus de Bihar, mais sans laisser de traces sûres dans la toponymie de Nyitra. 198 Le Gyôrffy, I, 217. Ibid., 572. Cf. I. Dienes, "Ârpâd fia Tarhos ijjàszainak nyomâban" ["À la recherche des archers de Tarhos, fils d'Àrpâd"], Élet és Tudomâny 1969, No. 13, 610-615. 194 Carte de 1830. Orszâgos levéltâr [Archives Nat.] (dans la suite : Arch. Nat. Hung.) Helytartôtanâcsi térképek, 11, No. 61, et Pesty gyiijt. 195 p r x , I, 622, 629; I. Kniezsa dans Szàzadok 1939, 175. 198 Arch. Nat. Hung.., Dl. 1045. 197 Carte de 1830 (voir note 194); Bânffy okl., I, 164, et Pesty gyiijt. les a l'ignorance des campements éventuels de Zolta peut contribuer l'interprétation de son nom, dans les régions slaves, comme Zlato. Dans les dérivés du genre de Zlatovce nous n'avons plus le droit de chercher des noms de personnes. 193
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souvenir de ses résidences dans le Nyirség a survécu dans le nom du cours d'eau Zolta (1325, 1333 : piscina Zultha)199 près de Demecser, dans le voisinage de Tas. Le Notaire Anonyme à son tour a gardé le souvenir de son ducatus en Bihar. (Voir Carte 8.) Tout cela survint probablement encore sous le règne de Szabolcs à supposer qu'il ait survécu à ses neveux âgés. L'époque où leurs descendants jouèrent un rôle peut nous donner des indications sur l'âge des fils d'Àrpad. Entre l'aîné Tarhos et le cadet Zolta il y a un décalage de près d'une génération, si nous prenons comme base l'activité de leurs petits-fils d'âge adulte. C'est en 948 que Tormâs se rendit à Byzance. Géza, prince régnant tout jeune, envoya ses ambassadeurs à Quedlinbourg en 973. Si nous tenons compte qu'à cette époque les générations se suivaient à un intervalle de 28 ans, Tarhos était un homme jeune vers 892 et Zolta vers 917. Comme je l'ai déjà dit, non seulement la geste primitive et les données de Constantin contredisent le fait que Zolta fût prince régnant, mais la situation de ses résidences, ainsi que le nombre restreint de celles-ci, le réfutent aussi. Parmis les princes régnants dont nous sommes certains, Szabolcs possédait huit résidences, Fajsz six, tandis que le souvenir de Zolta n'a survécu que dans deux noms de localité. C'est à l'époque ou Zolta possédait le ducatus de Bihar que Tevel fut nommé à la tête de celui de Nyitra. Sa résidence se trouvait à Tevel (1223 : Tewel), terre appartenant au fort de Pozsony, à l'est de Pusztafôdémes sur le Dudvâg. 200 (Voir Carte 9.) A supposer qu'entre Szabolcs et Fajsz il n'y eût pas d'autre prince régnant, Fajsz précéda sur le trône son oncle Zolta et son cousin Tevel. Il semble qu'avant d'accéder au trône Fajsz posséda le ducatus de Somogy qui avait, pendant les incursions, une plus grande importance que ceux de Bihar ou de Nyitra. Après la mort de Zolta, Tas acquit le ducatus de Bihar. Un témoignage en est le village de Tas dans le Nyirség, appelé selon le Notaire Anonyme Forum Thosu.201 Tas possédait encore une résidence dans le comitat Heves, aux contreforts de la Matra, au lieu-dit actuel Tas (1406 : Thas).202 A la même époque Taksony reçut le ducatus de Nyitra, comme en témoigne le village de Taksony du comitat Pozsony (1214 : Tohcsun),203 189 200 201
202
Anjou, II, 230; Zichy okmt., I, 412. Wenzel, II, 172. SRH, I, 63; cf. Csânki, I, 527.
Ibid., 73. 203 P R T > If 629.
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près de Tevel, sur la rivière Dudvâg. Après la mort de Tas survenue après 948, Taksony reçut le ducatus de Bihar. Le souvenir en est conservé par le lieu-dit Taksony (1371 : Taxon) près de Tiszabura, sur la rive gauche de la Tisza, dans le comitat de Heves.204 (Voir Carte 8.) Dans le ducatus de Nyitra, Taksony fut suivi par Lél, fils de Tas. Selon les chroniques, la résidence de Lél se trouvait dans le comitat de Nyitra.205 Dans son cas, nous avons des indices topographiques classiques sur les points inférieurs et supérieurs de ses navettes. Sa résidence d'hiver devait être le village de Lél (1075/1217 : Lelu) 206 à l'ouest de Komârom, tandis que le point supérieur de ses nomadisations est certainement marqué par le village de Lelôc ou Lelôc (1232 : Lelevch)207 à l'entrée au bassin de Privigye. Lelôc (slovaque Lelovcé) n'est pas autre chose que la forme de Lél [Lelu) pourvu du suffixe slave -ovce indiquant la possession.208 L'itinéraire de Lél partait d'en haut, passait le long de la rive occidentale de la Nyitra jusqu'au fort Nyitra et, comme le confluent était inaccessible sur cette rive à cause des marécages, à Vâgvecse (où précédemment se trouvait la résidence de Jelek et de Tormocs) il passait la rivière Vâg pour descendre le long de la rive occidentale jusqu'au Csallôkôz. Le prince Lél doit sa célébrité au fait d'avoir été l'un des chefs de l'armée hongroise vaincue en 955 à Lechfeld. Selon les Annales Sangallenses maiores, le rex Lele ne fut pas fait prisonnier avec Bulcsu mais dans une autre bataille qu'il livra en même temps aux Tchèques.209 Selon le Chronicon Eberspergense, qui contient plus de détails, Leli dux et Sur rex furent faits prisonniers ensemble au fort d'Ebersberg et conduits par les soldats du seigneur du château, le prince Eberhard, à l'échafaud dressé à Ratisbonne.210 (Les sources ultérieures déformèrent le nom de Sur à l'antique ce qui donna Assur.) 211 La campagne entreprise en commun par Lél et Sûr s'accorde bien avec la nomadisation du chef Sur sur le territoire du comitat de Pozsony, voisin de Nyitra, que l'on peut suivre dans les noms topographiques. Sa résidence d'été devait être à la place de la ville Szentgyôrgy (Svàti Jur) où la grande 204
Csânki, I, 72. SRH, I, 166, 291. Knauz, I, 59. 207 Hazai okmt., VII, 21. 208 p o u r c e s u fgxe voir I. Kniezsa, Recherches onomastiques, red. S. Mikesy (1960), 21; voir note 11. 208 Gombos, I, 199. 210 Ibid., 552-553. 211 Ibid., 266; iii, 2205, 2439. 205 208
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forêt Sûr et le pré Sûr gardent son nom.212 En descendant le ruisseau, Fekete viz, qui y prend sa source, on arrive aux villages de Hegysûr et de Pénteksûr (1253 : Sur) et plus loin au confluent des rivières Fekete viz et Dudvâg a terra Sur (1297).213 La rivière Dudvâg arrive de son côté du nord d'un lieu où se trouve un groupe de quatre villages : Nagysur, Nemessûr, Valtasûr, Varrasûr (1291 : quinque terre Sur).214 (Voir Carte 9.) Il s'ensuit avec évidence que la partie du ducatus s'étendant sur Nyitra était, avant 955, partagée entre le prince Lél et le chef Sûr, et le corps d'armée sous leur commandement était l'armée du ducatus de Nyitra. Le chroniqueur occidental, ignorant la hiérarchie des Hongrois, voulait peut-être exprimer une différence d'âge en intitulant le jeune Lél dux et Sur rex. En faveur de la possible descendance ârpâdienne de Sûr on peut se référer au souvenir de sa résidence à la frontière est du comitat de Veszprém, vers les sources de la Gaja, confluent de Sârviz Sûr (1436 : Swr), tandis que le village de Surd (1258 : Surd) se trouve au sud-ouest du comitat de Somogy.215 Or, ces deux comitats furent très tôt acquis par les Àrpâdiens et, en 955, ils constituaient l'apanage du prince régnant Fajsz. La disparition du souvenir de Sûr des traditions peut être mise en parallèle avec l'effacement du souvenir de Fajsz et cela pourrait même suggérer que Sur était apparenté à Fajsz. Sa tradition a pourtant survécu dans les noms donnés dans la famille des Osl.216 Sur cette base, j'ai émis la possibilité de faire descendre de Sûr la lignée des Osl habitant dans le comitat de Sopron.217 Cependant, le manque total dans ce comitat de noms toponymiques n'est pas en faveur de cette hypothèse. Après la défaite de Lechfeld, Taksony devint prince régnant; Zerind, père de Koppâny, acquit le ducatus de Bihar où les villages de Zerind (1326 : Zerend), dans la vallée du Fekete Kôrôs, et de Szôrénd, dans le comitat Krassô (1363 : Zeurend; 1414 : Zerend),21* gardent le souvenir de ses résidences. Dans le ducatus de Nyitra, le tour était à Tormâs. Comme je l'ai déjà dit, son nom survécut à deux endroits, près du fort
218 Magyarorszdg vârmegyéi és vârosai [Comitats et villes de la Hongrie], réd. S. Borovszky, Pozsony vârmegye [Le Comitat de Pozsony], Budapest, sans date, 6. 213 Wenzel, II, 243; A Pécz nemzetség Apponyi âgânak... okl. [Diplômes de la branche Apponyi du clan Pécz], I, 40; voir note 220. 214 Wenzel, XII, 516. 216 Csânki, III, 251. 216 Karâcsonyi, M. Nemz., II, 416. 217 Tanulmânyok, 201. 218 Csânki, I, 748, II, 107.
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de Nyitra, dans le village Tormos, et dans le nom d'un cours d'eau (1075/1217 : acqua Tarmas, 1264 : Turmas),219 et près de Vâgvecse dans celui de Tormocs, plus tard Tornôc (1113 : Durmuz, Durmusc, 1248 : Tormoch, 1317 : Turmuch, 1323 : Tormuch).220 Ces deux localités n'étaient pas les limites inférieure et supérieure de son parcours, mais deux résidences près d'un fort et près d'un passage de rivière. Après lui, le prince Géza (Décse) le jeune fut à la tête du ducatus de Nyitra. Le nom de sa résidence est gardé par le lieu-dit Décs (1276, 1319 : Gyuche)221 sur la rivière qui se jette dans le Nyitra en amont du fort de Nyitra. (Voir Carte 9.) Après la mort de Zerind, Géza reçut le ducatus de Bihar. Une de ses résidences était le lieu-dit Décs ou Décsi sur le Kôrôs (1138 : Geyca ~ Geysce ~ Geiche) dans le comitat Békés. Même vers 1110 c'était le domaine du prince royal et, en tant que tel, il fut donné par le prince Âlmos à la collégiale de Dômôs.222 L'autre résidence était le village de Gyécse dans le comitat de Krassô (1458 : Gewche),223 dont le nom a probablement survécu dans le nom de village de Divics, sur le BasDanube. La troisième résidence, sur la rive gauche de la Tisza, a laissé des traces dans les 'régions de Kemej', près de Tiszapiïspôki, au lieu-dit Décse,224 (Voir Carte 8.) A cette occasion je note que le chef petchénègue Thonouzoba,225 immigré à l'époque de Taksony (955-971), reçut certainement un domaine dans les 'régions de Kemej' à cause de sa parenté par mariage avec Taksony. Selon le Notaire Anonyme, la femme de Taksony était de terra Cumanorum. Or, les Comans dits Qiptchaq n'entrèrent en Europe qu'en 1055, et les Hongrois donnèrent le nom de kun 'Coman' à tous les nomades, entre autres aux Petchénègues aussi.226 Comme c'est la topographie du comitat Heves qui garde le plus grand nombre de noms des princes ârpâdiens, et que leurs domaines peuvent être dénombrés ici à partir de Szabolcs jusqu'à Géza, et qu'en 219
Knauz I, 54, 514-515. Le nom du village voisin reflète l'intermédiaire d'une autre langue, par exemple 1274 : Thermus (Dl. 40116); 1270-1277 : Teremech (ibid., 30356). 220 I. Kniezsa, A zobori apàtsâg... [L'abbaye de Zobor], Budapest, 1949, 11; A Pécz nemzetség Apponyi âgânak... oklevelei, Budapest, 1906, I, 3, 50, 57 et suiv. 221 Arch. Nat. Hung. Dl. 896, 95607. Cf. encore le nom d'un terroir sur la rivière Vâg près de Patvarôc (Potvorice) Kis-Décs (1263 : Kusdeuch, PRT, II, 324). 222 Magyar Nyelv 32 (1936), 133, 204. 223 Csânki, II, 99. 224 Carte de 1830, voir note 194. 225 SRH, I, 116. 224 Gyorffy, dans Antiquitas Hungarica 2 (1948), 154-176.
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outre, même dans la seconde moitié du XI e siècle, le prince Domozlo y avait ses possessions,227 il semble probable que le gendre royal, Aba Samuel, en devint le propriétaire grâce à son alliance avec la famille royale. Certes, selon le Notaire Anonyme, les domaines de Aba sont dûs à un don fait par Ârpâd à Ed et à Edemen, 228 mais les noms de ces deux prétendus ancêtres n'ont laissé aucune trace dans le comitat. Dans ce qui précède nous avons passé en revue les résidences établies dans les apanages primitifs des Àrpâdiens, dans les territoires rattachés plus tard grâce à des conquêtes et dans les ducatus. Nous avons accordé une attention toute particulière à la question de savoir s'il s'agissait de limites inférieures (hivernales) et supérieures (estivales) des déplacements réguliers le long d'une rivière ou bien de résidences intermédiaires près des passages des rivières, ou d'autres. Comme le système des campements itinérants des Nomades s'observe le mieux dans l'emplacement des premières résidences des princes régnants, il convient encore de soumettre à un examen la concordance qui doit exister entre ce système et les résidences des chefs de tribu. Sous ce rapport, nous nous heurtons à de sérieuses difficultés à cause des deux listes de chefs, notées ou plus exactement rédigées deux ou trois cents ans après la conquête du pays, et qui sont dignes de crédit pour autant que les traditions de certaines grandes familles ont correctement transmis le souvenir de leurs ancêtres. S'il est vrai que dans la plupart des cas les traditions familiales ont gardé les noms et les résidences d'ancêtres réels, ayant vécu à l'époque de la conquête du pays ou au X e siècle, leur qualité de chef de tribu par contre, ainsi que le temps de leur activité et leur parenté (par exemple, père-fils) sont sujets à caution. C'est d'autant plus regrettable que seule la connaissance de parenté permet de reconstituer en gros le système des résidences des Àrpâdiens. Si nous n'avions connaissance que des généalogies contenues dans les chroniques et dans l'œuvre du Notaire Anonyme (Àrpâd — Zolta — Taksony — Géza et Michael) nous ignorerions tout sur les branches de Tarhos, Jutas et Ullô ainsi que sur les terres occupées par celles-ci. Certes, la navette le long du Danube ainsi que le ducatus pourraient même ainsi être tracés, mais l'établissement des générations consécutives sur des territoires correspondant en surface à autant de comitats ne se ferait pas remarquer. Dans deux cas seulement nous avons de plus amples connaissances »*' Mon. Vat., 1/4, 579. 2a8 SRH, I, 73.
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sur des filiations établies avec certitude dans les familles des chefs de tribu. Ces généalogies fragmentaires sont toutefois suffisantes pour prouver que le système décrit ci-dessus de l'occupation des terres était largement répandu. Comme je l'ai déjà mentionné, l'empereur Constantin note que le fils du karchas Kàl, le karchas Bulcsu, lui rendit visite à Byzance.229 Les chroniques incluent Vér-Bulcsu parmi les sept chefs de tribu et affirment que son campement se trouvait sur le Balaton.230 Le Notaire Anonyme, ignorant les traditions de la famille Yér-Bulcsu et affirmant à tort que Bulcsu était fils de Bogât, ne classa aucun d'eux parmi les sept chefs de tribu et n'indiqua pas leurs résidences. La résidence sur le Balaton est corroborée par le fait que la famille Vér-Bulcsu, de son autre nom Lad, avait au XIII e siècle des propriétés dans le village de Lad du comitat de Zala, aujourd'hui appelé Badacsonylâbdi.231 Il en ressort clairement que Lad, ancêtre de cette famille ayant vécu à l'époque de Saint Etienne, était un descendant, à la troisième ou quatrième génération de Kâl, qui parvint à l'âge adulte entre 920 et 927, et de Bulcsu, qui est mentionné en 948-955 comme porteur d'une haute dignité. Certes, nous ne connaissons pas le père de Kâl qui devait être adulte au moment de la conquête du pays, et nous ne savons pas non plus s'il avait porté, conformément aux sources grecques, la dignité de karchas, dont la lecture et l'identification avec des toponymes hongrois sont encore discutées.232 Pourtant, nous sommes à même de reconstituer l'itinéraire de ses nomadisations. Sa résidence d'été se trouvait probablement dans la vallée de Kâl, s'ouvrant sur les bords du Balaton, où son nom a survécu jusqu'à nos jours dans les villages de Kôveskâl et Mindszentkâlla (1171 : Kal).233 Non loin de cette valée, sur le flanc occidental du Badacsony, dans un site pittoresque, se trouve Lâbdi (1340 : Laad ~ Lad),23i resté longtemps propriété des descendants appauvris. Il se trouvait vraisemblablement près du lieu du culte du clan. En suivant les bords du Balaton, autant que les marécages le permettaient, Kâl arriva à Zalavâr (Mosaburg au IX e siècle) dans le voisinage
229
Ed. Moravcsik, 178-179. SRH, I, 167, 292. 231 Karâcsonyi, M. Nemz., II, 343-345. 232 Voir note 246. 233 E. Jakubovich - D. Pais, Ômagyar ohasôkônyv [Recueil de textes vieux-hongrois], Pécs, 1929, 42; Csânki, III, 66; D. Pais - L. Râsonyi Nagy, dans Magyar Nyelv 25 (1929), 121. 231 Csânki, III, 76. 230
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duquel Diôskâl garde son nom (1256 : Kaal).23b Son site méridional permet de supposer qu'il était la résidence d'hiver de Kâl. Son fils Bulcsu, en accèdent à la dignité de karchas, établit sa résidence d'hiver près d'une ville antique en ruines tout comme Ârpâd et Kurszân. Audessus de Savaria (aujourd'hui Szombathely), le village Bûcsu sur le Perint (1433 : Bwlchu) 236 garde le souvenir de la résidence de Bulcsu, fils de Kâl. Longeant la rivière Zala à partir de Zalavâr et ensuite, après une courbe brusque, un de ses affluents, Bulcsu pouvait suivre un trajet relativement rectiligne pour arriver au cours d'eau Sorok-Perint, tributaire de le Raab. (Voir Carte 10.) En examinant la présence dans le pays des noms topographiques Kâl et Bulcsu,23V nous voyons qu'à part le comitat de Zala, ils se rencontrent souvent aux mêmes endroits que les résidences de Bogât. Le village Bulcsô (1327 : Bulchu) se trouvait dans le comitat de Baranya, près de Bogâttelke,238 En y ajoutant le Bulcsu (1250 : Bulsuch)239 dans le comitat de Tolna, près de Vârong, ces emplacements suggèrent des rapports avec le prince régnant. Ceux-ci s'expliquent de plusieurs manières : ils peuvent signifier la dépendance du vassal de son suzerain, si le karchas pouvait posséder une résidence près de la cour du souverain. Le Notaire affirme expressément qu'à la résidence d'Àrpâd à Csepel chaque chef avait sa curia et villa.240 Il peut également s'agir de relations de famille, sinon par agnation, du moins par alliance. Le village de Kâl du comitat de Heves (1352 : Haromkaal ('Trois Kâl'), partie des domaines de Debrô de la famille Aba, 241 est situé dans une région où d'autres gendres et 235
Csânki, III, 66; Magyar Nyelv 25 (1929), 121. Csânki, II, 739. 237 D. Pais a établi ces noms (pour Kâl voir Magyar Nyelv 25 (1929), 121-122, pour Bulcsu, ibid. 51 (1955), 442-444) et Imre Szântô en a établi la carte géographique (Az Egri Pedagogiai Fôiskola Évkônyve 7 (1961), 487). L'appartenance à ce groupe du Kàl en comitat Sopron (1234 : Cal, Csânki, III, 591) n'est pas incontestable vu que selon un diplôme de 1212, d'authenticié douteuse, un hospes allemand nommé Kaal reçut de Saint Etienne des terres dans cette région, le village appelé plus tard Kyal (Urkundenbuch des Burgenlandes, ed. H. Wagner (Graz-Cologne, 1955) (dans la suite : Bgl.) I, 62-63). Dans le comitat de Fejér, dans le Soltszék, le lieu dit Kâl (1464 : Kall, Csânki, III, 333), mentionné vers 1163 sous la forme Coll (Hazai okmt., VI, 3) ne doit guère appartenir ici. Le village Kâl du comitat Ternes (1221 : Kaal, Bgl. I, 61) classe par contre dans ce groupe. En ce qui concerne le rattachement du nom de localité Bulcsu au nom propre Bulcsu nous sommes obligé à une certaine prudence vu de la fréquence de ce nom à l'époque des Ârpâdiens (voir Pais, dans Magyar Nyelv 51 (1955), 434-443). 238 Gyorffy, I, 476; Csânki, II, 476. 23 » Hazai oklt., 18. 240 SRH., I, 88. 241 Csânki, I, 64; Karâcsonyi, M. Nemz., I, 53. 236
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beaux-frères du souverain avaient leurs apanages. Dans le comitat de Torda, à l'ouest de Torda il y avait un Bu{l)cs(telke) (1358 : Buch, Buchtelku, 1440 : Bulchtelké) 242 ce qui, en soi, ne signifierait pas grande chose s'il n'y avait un village Kál (1332 : Kaal) 243 à Marosszék ayant originairement appartenu à Torda, sans parler encore des deux Bogát dans la même région. La présence des Kál et Bulcsu peut être interprétée comme un vestige d'une première résidence transylvaine provisoire. En tout cas, on peut établir des rapports entre les résidences du karchas dans le comitat de Torda et ses besoins en sel. A partir du XI e siècle, les églises principales de Hongrie possédaient des villages de transporteurs de sel autour de Torda, les comités des forts frontaliers (par exemple celui de Vasvár) devaient par contre pourvoir eux-mêmes au transport qu'effectuaient les villages soumis au fort et qui en portaient souvent le nom (par exemple Bodrog, Bolgyán, Vasvár).244 C'est certainement la raison qui explique les résidences portant le nom de Bulcsu le long de la grande route entre Torda et le Balaton : dans la vallée du Maros, près d'Arad Bules (1225 : Bulch), près de Zenta sur la Tisza terre de Bulcsu (1224 : terra Bulsu), près de Bodrogvár sur le Danube Bulcsuszéke (1416 : Bwchw Zeke) 245 ce qui conduit déjà au Bulcsó du comitat de Baranya. Si nous connaissions les noms du père, des frères et des fils de Kál, nous y verrions plus clair pour juger si le clan était resté cantonné dans le comitat de Zala. Si la prononciation hongroise et slave du nom de dignité karchas nous était connue, peut-être pourrions-nous trouver encore d'autres résidences plus éloignées. Malheureusement, ce mot n'a pas d'explication étymologique acceptable ce qui empêche de le découvrir dans les toponymes. 246 «a Csánki, V, 696. 243 T. Ortvay, Magyarország egyházi foldleirása [Géographie ecclésiastique de la Hongrie], Budapest, 1892, II, 657. 244 Csánki, I, 767; Gyôrffy, I, 876-892. 245 Ibid., 174; Csánki, II, 195. 246 Pour la bibliographie sur le mot karchas, voir Gy. Moravcsik, Byzantinoturcica, II2, 155. En général on l'identifie au nom de chef Horca fils de Tuhutum selon le Notaire Anonyme. Il se retrouve pour la plupart dans des noms topographiques Harka. Ceci est encore moins démontré que l'idée avancée par Hóman, selon laquelle le nom Karhán est une variante de la dignité tarhán (Szent István, Budapest, 1938, 60). Si par rapport au mot de titulature tar%an correspond en hongrois Tarjan, dans ce cas Kapxâs, qui peut en effet être un nominatif grec du mot karchan peut donner en hongrois karján. En effet, on trouve ce nom de localité en comitat Bodrog (1211 : Karian, voir Gyôrffy, I, 722) tout près des terres Bulcsu. Seule une connaissance étymologique sûre peut résoudre définitivement cette question.
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En ce qui concerne l'établissement des résidences de gyula, nous nous trouvons dans une situation malaisée puisque les sources mentionnent en général leur dignité, sans indiquer leur nom propre. L'empereur Constantin parle de la dignité du grand-juge qui suivait en rang le grandprince. Il l'appelle yvXâs. Skylitzes à son tour affirme que le yvXâs, suivant l'exemple du chef Bulcsu, se rendit à Byzance pour embrasser le christianisme (vers 953),247 mais il ne mentionne pas le nom propre de celui-ci. Les chroniques détaillées, dans leurs parties rédigées à la fin du XI e siècle, reproduisent certaines traditions orales intéressantes sur l'histoire de la Transylvanie de la haute époque. Sur le chef Gyula, énuméré parmi les sept chefs, il est dit qu'en Transylvanie, au cours d'une chasse, il découvrit une grande ville construite jadis par les Romains. 248 Cette phrase mélange singulièrement la réalité et la légende. Tout comme Àrpâd établit sa résidence d'hiver près des ruines de Sopianae, Kurszân près de celles d'Aquincum et Bulcsu de Savaria, le gyula s'établit près des ruines d'une ville romaine Apulum. La découverte d'un nouveau foyer au cours d'une chasse relève des motifs légendaires eurasiens et est en rapport avec la légende du cerf pourchassé. Les descendants de Gyula et de Kâl racontaient certainement la découverte d'une ville romaine au cours de la chasse, tout comme le Notaire Anonyme relate que le chef Bors avait trouvé son fort en chassant. 249 Selon la chronique, le gyula qui s'y installa fut le père de Sarolt, femme de Géza (971-997). Cependant, le Notaire Anonyme situe, très correctement, le père de Sarolt dans la troisième génération après la conquête du pays. Par conséquent, celui qui s'installa en Transylvanie devait être "le frère" de Zombor résidant dans la vallée de la Tisza. La ville de Fehérvâr en Transylvanie (de son nom roumain d'origine slave Bâlgrad, depuis le XIII e siècle Gyulafehérvâr, Alba Julae, aujourd'hui Alba Julia) fut construite approximativement en même temps que Székesfehérvâr (Alba Regia). Le gyula établi en Transylvanie avait une fille nommée Sarolt, qui fut, la mère de Saint Etienne.250 Un contemporain, l'allemand Thietmar puisant dans une source polonaise, mentionne la mère de Saint Etienne en lui donnant le nom slave Beleknegini, qui est, en fin de compte, la traduction du turc Saroltu < sar-aldy 'dame (ou) martre blanche', 261 et 247 248 249 250 251
Voir Moravcsik, Studia Byzantina, 328-330 et Byzantinoturcica, II2, 115. SRH, I, 290. Cf. Gyôrffy, Krônikâink, 35-38; Tanulmdnyok, 113-114. SRH, I, 291. Gombos, III, 2203; cf. Melich, Honf. Mg., 247-257.
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il donne un nom slave aussi à son père qu'il appelle Procui, identifiable peut-être au dernier gyula. Quel est le nom propre hongrois qui se cache derrière ce nom noté d'après un intermédiaire slave, cette question ne peut pas être résolue d'une manière sûre.252 Dans le chapitre 24 de son œuvre, le Notaire Anonyme parle du Gyula (Gyla) mineur, insurgé contre Saint Etienne, ainsi que de ses deux fils qu'il nomme Biuia, plus correctement Buua (gén. Bue) et Bucna (gén. Bucne).253 L'auteur de la Gesta primitive nomme les mêmes personnes Bua et Buhna et leur attribue le rôle que les Annales Altahenses attribuent, au temps du roi Péter, à Stoizlo et à Pezili,254 Parmi les toponymes du comitat médiéval de Kiikiïllô, les noms de Bua, Buhna et Sarolt se rencontrent sous des formes singulières. Deux villages situés sur un passage de rivière portaient le nom de Bua. L'un Nyârâdtô-bua (1435 : Nyaradteubua) en aval du confluent du Nyârâd et du Maros, dans le territoire de Kukiillô. L'autre Bénye-bua (1431 : Benyebua, 1664 : Bényebuva, 1681 : Szpin alias Bénye Buja) 255 au confluent du Kis Kùkullô et de la rivière Sôspatak venant de la direction de Kisakna, où on trouve sur une rive Bénye (en roumain Biia) et sur l'autre Szpin, jadis Buja (Kistôvis, aujourd'hui Lunca Tîrnavei). Il semble que l'aîné des fils du gyula, Buja, se déplaçait entre ces deux localités, son itinéraire longeant en gros la rive septentrionale du Kiskukullô, et qu'il passait deux fois par an près de l'ancien fort de Kiikùllô sur la rive droite. Le nom de Buhna, fils cadet, a survécu dans celui du village de Bonyha (1291 : Bahna) 256 sur la rive méridionale du Kiskùkullô. Nous pouvons par conséquent tenir pour certain qu'il se déplaçait sur la rive gauche. Sur la rive septentrionale du Nagykukiillô, à la limite des terres des Sicules, nous trouvons le nom du troisième membre de la famille que nous connaissons avec certitude, celui de Sarolt, dans le nom du village
252
En suivant Miklosich, Melich découvre dans ce nom le mot slave prokb 'reste' pourvu du suffixe -uj {ibid., 253-255); pour l'emploi de ce genre du mot slave uj 'oncle' voir K. Fehértôi dans Magyar Nyelv 66 (1970), 327; on peut supposer un nom Prok avec le diminutif hongrois -d, qui donnerait régulièrement Prokd> Prohd> Projd> Parajd~ Pardd. Vu qu'on ne possède pas de mentions provenant du Moyen Âge et qu'en Transylvanie on ne le trouve qu'une fois, c'est improuvable. SRH, I, 67, 69. 254 Ibid., 336. Pour le rôle de Stoizla et Pezili voir E. Jakubovich dans Magyar Nyelv 23 (1927), 228-250. 255 Csânki, V, 869, 888; K. Tagânyi, Emlék Szily Kâlmânnak [A la mémoire de Kâlmdn Szily], Budapest, 1918, 84. 258 Bânffy okmt., I, 27.
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Sarold de 1301.257 Ses déplacements le long de la rivière conduisent, comme dans le cas de Buja et de Bonyha, au confluent des deux Kukûllô où se trouvait encore la colonie musulmane de Bôszôrményszancsal (1350 : Bezermen Zanchal).258 Par conséquent, les cours d'eau du comitat de Kùkiillô devenaient la part des membres de la famille stricte du gyula. En accord avec ce fait, après la défaite en 1002 du dernier gyula par le roi Saint Etienne, celui-ci mit à sa place son parent Erdôelvi Zoltân qui eut comme part la rive méridionale du Nagykùkiillô, à la frontière des terres des Sicules, à un endroit (1341 : Zoltan) 259 qui est par excellence une résidence d'été. L'extrémité d'hiver de la navette effectuée par Zoltân devait être Gyulafehérvâr, ou, en face, Vâradja 'fortin de terre'. (Voir Carte 11.) Comme Bogât avait, lui aussi, une résidence d'été sur l'Oit, Zoltân possédait également des résidences sur cette rivière. Deux noms topographiques ont gardé son souvenir dans la courbe de l'Oit : Zoltângyepu (1349 : Zoltangypew) entre Hidvég et Bôlôn, et le village de Zoltân (1366 : Zoltam, 1439 : Soltan) 260 au Nord près de Sepsiszentgyôrgy. Il n'est pas question de dénominations ultérieres mais de la prise en possession des pâturages des gyula. Ceci est confirmé par la présence répétée dans cette région des noms de localité Zsombor et Doboka. Selon le Notaire Anonyme, le père de Sarolt, Gyula, avait un frère Zumbor dont le campement se situait d'après lui aux environs d'Eskullô, dans le comitat de Doboka où, pendant le règne des Ârpâdiens, le clan Zsombor (gen. Sumbur) avait des domaines. Même s'il est impossible d'établir l'identité entre le Zombor qui vécut en Hongrie vers 950 et le Zsombor ayant vécu vers 1000, et même si nous ne pouvons pas accepter la généalogie selon laquelle Buja et Bonyha étaient les petitsfils de Zombor, 281 il convient d'admettre la parenté du Zsombor du temps de Saint Etienne avec les gyula et avec Zombor. Avant 1002, Zsombor était le chef d'un clan (sous-groupe tribal) du Nord de la Transylvanie, où trois villages Zsombor gardent le souvenir de ses résidences. Comme je l'ai déjà exposé par ailleurs, c'est le roi Saint Etienne qui expropria les deux tiers des terres occupées par Zsom257
Zimmermann-Werner, II, 6. Anjou, V, 411. 259 RI, 1929, 148. 2 «° Székely okl., I. 57, 66, 139. 291 Les descendants de Zombor vécurent en Hongrie. Si par contre Boja et Bonyha avaient été les petits-fils de Zsombor, leurs campements seraient à retrouver surtout dans le comitat de Doboka. 258
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bor et ses forts pour y installer son comes Doboka qui donna à son tour son nom au fort et au comitat Doboka (Dobîca). 262 Connaissant le système de campement nomade le long des cours d'eau, nous pouvons supposer que Zsombor avait des résidences alternantes le long du Szamos et de ses tributaires, les ruisseaux Almás et Mélyes. Nous n'avons pourtant aucune indication selon laquelle il aurait possédé la mine de sel de Dés et ses environs. Kisdoboka (1553 : Doboka) 263 sur le Szamos devait probablement marquer la fin de ses itinéraires le long du Szamos. Il peut en même temps être considéré comme la résidence d'été de Doboka dans cette région. Cependant, Doboka et Zsombor, en tant que désignations de campement, se répètent à la courbe de l'Oit également. Székelyzsombor (1481 : Sombor) sur le Homoród et le lieu-dit Zsombor au-dessus de Sepsiszentgyôrgy (1342 : Sumbur) 264 sont reliés entre eux par un secteur de l'Oit où nous trouvons le village de Datk, jadis Doboka (1235 : Dubucha) 265 ainsi que les deux Zoltán dont il a déjà été question. (Voir Carte 11.) Tout cela rend plausible l'hypothèse selon laquelle Zsombor était le frère du gyula vaincu et qu'après leur soumission, en 1002, les pâturages sur l'Oit, partie de leur apanage, furent donnés d'une part au père de Csanád, Doboka, et à Erdóelvi Zoltán de l'autre. Les généalogies fragmentaires des karchas et des gyula, auxquelles on peut ajouter foi, s'offrent, aussi bien que celles des Árpádiens, à l'analyse du système de campement des grandes familles nomades et elles permettent de tirer les mêmes conclusions. L'itinéraire entre les résidences alternatives transmet de père en fils, même si le fils, devenu indépendant de ses parents, établit pour lui-même une nouvelle résidence. Les frères adultes de leur côté, nomadisaient et établissaient leurs résidences sur les rives d'autres rivières. Il est naturel que leurs noms n'aient pas survécu dans tous les cas. Le cadet des fils, resté à la résidence du père, héritait en général, avec le nom du père, sa résidence. Mais, dès le X e siècle, il y eut des noms géographiques généralement admis (par exemple Fehérvár, Varad) qui ne changèrent pas avec le changement de propriétaire. Ajoutez les modifications des toponymes au cours d'un millénaire et il sera étonnant de voir la persistance des 262
Gyôrffy, Tanulmányok, 32-33. Kádár, III, 34. Székely okl., I, 237, VIII, 18. La région des sources de la rivière Oit devait servir à Zsombor de pâturage d'été. A travers la vallée supérieure du Maros un chemin conduisait au campement d'hiver établi dans la région du Szamos. 265 Zimmermann-Werner, I, 63. 363
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noms des résidences datant du X e siècle. Cela s'explique en premier lieu par le fait qu'à part quelques anciennes villes, les habitations ont changé de nom au moment de la conquête du pays et les nouvelles désignations indiquèrent les propriétaires des terres nouvellement occupées et les institutions qui s'y sont établies. Enfin, j'essaierai de résumer combien la connaissance de ce système d'occupation des terres contribue à vérifier l'authenticité des "sept chefs de tribus hongroises" dont parlent les chroniques. Dans son énumération, le Notaire Anonyme met à la troisième place, après Àrpâd fils d'Àlmos et Szabolcs fils d'Elôd, le chef Eté fils d'Ônd (Ound ~ Oundu). C'est à lui qu'il fait remonter la lignée de Kalan et des Colsoy. Dans la suite il indique qu'Ônd reçut des domaines près de la Tisza, dans le comitat de Csongrâd; c'est que vers 1200 la famille des Kalân y était propriétaire. 266 Ici, le Notaire Anonyme puise à deux genres de traditions. D'une part, l'évêque Kalân de genere Kalan dirigeait la chancellerie de Béla III où le Notaire Anonyme travaillait lui aussi. D'autre part, dans la région de la Takta, d'où il était vraisemblablement originaire, il existe, de nos jours encore, un village Ônd (1247 : Ound) 267 dont le fondateur éponyme est entouré de légendes. Les recherches dans la toponymie médiévale montrent qu'Ônd possédait une région fluviale dont la longueur égalait presque celle des Ârpâdiens et qui s'étendait en gros sur les territoires qu'occupait, avant la conquête des Hongrois, le pays du Salan dux, comme le raconte le Notaire Anonyme. Les toponymes conservant les noms d'Ond et de ses descendants se situent dans deux secteurs, dont le premier se limite au comitat de Zemplén et le deuxième s'étend sur la rive droite de la Tisza, approximativement d'Alpâr à Titel. A l'extrémité sud du comitat de Zemplén se trouve le village d'Ônd, situé sur la pente abritée du mont Hegyalja, donc, probablement, résidence d'hiver. En remontant la rive droite du Bodrog, nous arrivons 286
SRH, I, 41, 83-84; Gyôrffy, I, 882-883. En général on établit l'analogie entre le nom du clan Colsoy et le nom Kôlcsej. Pourtant, le vocalisme de ces deux noms est divergent et, en outre, nous ne connaissons pas de clan Kôlcse. Ce nom correspond tout d'abord à un nom propre ou topographique de la forme de Kalsa ou Kalcsa, mais nous n'avons encore trouvé de nom de clan de cette forme sinon nous y classons le nom de clan Kalocsa dans le comitat Doboka. (Cf. Karâcsonyi, M. Nemz., III, 71, et I, 139.) Wenzel, VII, 223; Csânki, I, 358.
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au confluent de YOndava, dont déjà Melich a constaté que son nom provenait du nom propre hongrois Ônd complété d'un suffixe possessif slave -ava ~ -ova.268 Il ne fait aucun doute que la population slave désignait la rivière du nom d'Ônd qui y résidait en été. En outre, parallèlement à l'Ondava coule le Laborc, dont un bras latéral, VUdava, s'embranche dans le village d'Udva (1451 : Wdwa).269 Le nom Udava correspond au même nom, dénasalisé, conservé par des Slaves, comme l'a déjà montré Melich. Le long et étroit comitat de Zemplén favorisait les déplacements nomades des chefs de clans. Il garde toute une série de noms doubles, en hongrois et en slave, des noms de résidences. Au confluent du Sajo il y a un village de Crées (1316 : Chech),270 dont le pendant sur l'Ondava est Csicsva (1350 : Chychwa).271 Il est à noter que le village de Csécs (1281 : Chech) sur le confluent du Sajô dans le comitat de Borsod a également son doublet dans les montagnes, le village de Csécs (1317 : Cech) 272 dans des cours d'eau attenant à Bôdva, confluent du Sajô. On peut supposer que le nom de ce même Csécs se cache dans le nom de l'étang de Csecstô, sur la Tisza, près de Zenta (1224/1389 : Chechtow, aujourd'hui Csésztô ~ Csesztô).273 Dans cette région, en effet, les descendants du chef Ônd étaient propriétaires. Les toponymes faisant doublet, situés le long du Ronyva, affluent du Bodrog, méritent l'attention. Au confluent on trouve Borsi, village natal du prince François Râkôczi et, en remontant le Ronyva, on arrive au village de Bôzsva sur la rivière du même nom qui, à l'époque des Àrpâdiens, s'appelait Borsova (1264/1324 : fluvius Borsoa ~ possessio Borsua).274 (Voir Carte 12.) Si le propriétaire éponyme était le célèbre chef JSors, dont le Notaire Anonyme fait descendre la ligné des Miskolc et dont le nom se rencontre en Haute Hongrie dans des toponymes Bors et Borsova,275 c'est parce qu'il reçut une des vallées latérales de l'apanage d'Ônd. Membre d'un autre clan, il pouvait y accéder grâce à des alliances par mariage. A propos de la répartition des terres du comitat de Zemplén au X e 268 Honf. Mg., 128-129. La rivière Ondava était appelée au Moyen Âge plutôt Bodrog et le nom Ondava était probablement pris à l'Ondavka venant de la Tavarna. 269 Csânki, I, 364. 270 Ibid., 344-345. 271 Ibid., 344-345. 272 Gyôrffy, I, 76, 766.
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Ibid., 715. Ibid., 71.
Ibid., 414, 431, 520; cf. Melich, Honf. Mg., 208, 361-462.
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siècle, il est à remarquer que ni les noms des princes de la maison d'Àrpâd, ni ceux des ancêtres des Aba (Ed et Edemen) ne s'y retrouvent. Peut-être est-ce parce que les terres connues comme domaines ancestraux des Aba dans la région de la Takta n'appartenaient pas à l'époque des Ârpâdiens au comitat de Zemplén mais au comitat de Szabolcs. Aussi, la tombe hongroise de l'époque ârpâdienne dégagée dans le Zemplén a des rapports avec la famille d'Ônd plutôt qu'avec celle d'Àrpâd ou des Aba.276 En tout cas, le fort de Zemplén était un fort de chef de clan près duquel Ônd et son successeur passaient deux fois par an. En ce qui concerne le début du XI e siècle, apparemment des grands seigneurs de l'époque de Saint Etienne y possédaient également une double résidence. La plupart des noms employés par les grandes familles remontent à des noms de personne de l'époque de Saint Etienne.277 Dans le nom du clan Kalân (de son autre nom Bor ou Bar), descendant d'Ônd, le nom Kalân (Colan) remonte certainement à l'ancêtre de l'époque de Taksony et Géza, tandis que le nom Bor ou Bar (Bor ~ Boor) remonte à celui ayant vécu sous Saint Etienne.278 Dans le comitat de Zemplén c'est probablement le village de Bari près de Sâtoraljaujhely (1332 : Bary) 279 qui garde ce nom. Le village de Zombor (1316 : Zumbur) dans le comitat de Zemplén a gardé le nom de l'ancêtre éponyme de la lignée Gyula-Zombor. Ce village est mentionné au moment où mourut Erdô, fils de Sebret, dernier membre masculin du clan.280 Sa résidence d'été devait se trouver aux sources du Topla, affluent de l'Ondava, à Zborô, ce nom étant la forme dénasalisée d'un original slave *Zomborov.isl Les doubles dénominations, hongroises et slaves, des résidences primitives ne se limitent pas au comitat de Zemplén. D'autres exemples en sont : Karcsa dans le Bodrogkôz (1443 : Karacha) et Karcsava dans le comitat d'Ung (1405 : Korchwa);282 dans le comitat de Borsod, près 276
Pour les débats sur la tombe de Zemplén voir Archeologiai Értesitô 93 (1966), 278-283, 96 (1969), 109-125. 277 Gyôrffy, Tanulmânyok, 14. 278 Karâcsonyi, M. Nemz., I, 139 et suiv.; Gyôrffy, I, 882-883; Ethnographia 76 (1965), 421 = Nouvelles Études Historiques, Budapest, 1965. 279 Csânki, I, 342; Bâri; I. Lipszky, Repertorium..., Budae, 1808, donne le nom sous la forme Bari. 280 L. Bârtfai Szabô, Pest megye okleveles emlékei [Diplômes sur le comitat de Pest],Budapest, 1938, 33; Csânki, I, 367. 281 Les dérivations du mot slav zobr dans la toponomie, voir V. Smilauer, Handbuch der slavischert Toponomastik, Prague, 1970, 198. 282 Csânki, I, 351, 393.
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de Muhi, le village disparu de Bôd (1269 : Bold) 283 a deux doublets slaves : la rivière Bôdva (vers 1200 : Bulduà) et le village Boldva (1293 : Buldoa); dans le comitat d'Abauj, sur la rive gauche du Hernâd, le village et le fort Boldva (vers 1295 : possessio et castrum Boldva) dont le nom se modifia en Boldôkô ~ Bodôkô pour aboutir, grâce à une étymologie populaire, au Boldogkô actuel 284 (boldog 'heureux' et ko 'pierre'. (Voir Carte 12.) Pour ce qui est de la population slave à qui nous devons ces toponymes, il faut avoir en vue que dans cette région de la Haute Tisza vivait la population bulgaro-slave dont le Notaire Anonyme affirme qu'avant la conquête par les Hongrois le qaghan bulgar les avait fait établir dans cette contrée (Keanus magnus, dux Bulgarie ... usque ad confinium Ruthenorum et Polonorum fecisset ibi habitare Sclauos et Bulgaros).285 La rédaction reflète l'époque du Notaire Anonyme. Toutefois, l'auteur, propriétaire dans cette région et versé dans la langue slave, devait avoir quelques connaissances sur l'appartenance ethnique de cette population slave. Les toponymes du comitat du Bars montrent également qu'en Haute Hongrie, des résidences d'été et d'hiver doivent se trouver dans les régions plates et montagneuses des vallées fluviales. Selon le Notaire Anonyme, le chef Bors occupa ce comitat et fit construire sur le Garam le fort Bars. Selon lui, le même chef fit construire aussi dans la vallée supérieure du Garam le fort Bors-séd Zôlyom (Borssed Zouolvn, Zvolen).288 (Voir Carte 9.) Des recherches poussées sur le peuplement de cette région peuvent répondre à la question de savoir dans quelle mesure les résidences d'été établies sur les cours supérieurs des rivières devinrent, aux X-XI e siècles, des habitats permanents et dans quelle mesure leurs noms furent conservés par la population sédentaire du bas pays qui utilisait les forêts et les eaux de la vallée. Les doublets Ônd - Ondava ou Udva dans le comitat de Zemplén, qui se rattachent au chef Ônd, offrent les exemples topographiques les plus classiques de la nomadisation le long d'une rivière de montagne. 263
Gyôrffy, I, 759. Ibid., 70, 760. 285 SRH, I, 48. as« ibid., 76. L'hypothèse selon laquelle Borssed est une forme détériorée de Borsod n'est pas satisfaisante. Séd signifie 'ruisseau', et l'un des bras de la rivière dont le confluent est à Zôlyom (Zvolen) est nommé Burzovo sur une carte de 1881. Cf. encore Gyôrffy, I, 414-415, 737. 284
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Cette nomadisation se répète visiblement sur la moyenne et la basse Tisza, apanage, selon le Notaire Anonyme, d'Ônd et de son fils Eté. Dans la partie nord du comitat de Csongrâd, quelque part dans les sables entre Alpâr et Nagykôrôs, se trouvait le village à'Eté (1266 : Etey, 1276 : Eté),287 tandis qu'en descendant la rive droite de la Tisza on arrive au comitat de Bacs, où il y était fait mention de terres appartenant au fort d'Ônd (1267 : duas terras Ond).2SS Nous ignorons leur emplacement exact, mais nous savons qu'en 1267 Andréas, fils d'Ivan, ostiaire du roi les reçut avec le domaine "au pied d'or" dans le même comitat,289 qui s'étendait dans les environs de Pétervârad et Ujvidék (Novi Sad). Elles se situaient donc dans le coin sud-est du comitat Bacs, vers le confluent de la Tisza. Pour établir le rapport entre les terres supérieures et inférieures occupées par Ônd, la solution la plus vraisemblable est de supposer qu'elles furent héritées par différents fils. Cependant, à défaut de connaissance exacte de sa descendance, nous ne pouvons pas suivre la succession des apanages. Aucun toponyme n'a gardé le nom de Kalân, mais le clan Bâr-Kalân était propriétaire dans le comitat de Hunyad 290 où, dans la vallée du Strigy, des noms de village gardent les noms aussi bien de Bâr (1453 : Baar) que de Kalân (1387 : Kalanteluk ~ Chalanteluch),291 ce qui indiquerait que vers 1000 c'était leur pâturage d'été. Cela expliquerait un passage de la chronique, où il est relaté que Kulan avait promis sa terre à Beliud intervenant en faveur des Gyula, s'il engageait la lutte contre son frère Kajàn (Kean).292 Dans le comitat de Hunyad, dans la région de la source du Fehér Kôrôs et en aval du confluent des Kôrôs,293 les toponymes Kajân désignent les campements alternants des frères ainsi que la berge de rivière par laquelle ils pouvaient aborder leur pâturage d'été. (Voir Carte 13.) Partant de ce qui précède on peut considérer que les traditions transmises par le Notaire Anonyme sur le genus Kalân sont dignes de foi et que le chef Ônd, au moment de son établissement, possédait la dignité de chef de tribu. En même temps, l'identification des terres soumises au chef Ônd sur la rive droite de la Tisza appuie l'opinion des historiens 28
' S R H , I, 895. Ibid., 228. 289 Ibid., 230. 290 Cf. Gârdonyi, I, 90. 291 Csânki, V, 72, 99. 292 SRH, I, 291. Je le traite plus amplement dans le II e tome de Géographie Historique, dans l'introduction au comitat de Hunyad. 293 Csânki, V, 99, I, 736; Arch. Nat. Hung. carte de 1830 (voir note 194). 288
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qui pensent que le Notaire Anonyme, pour reconstituer les pays que les Hongrois conquérants avaient trouvés sur ce territoire, partait des terres occupées par les chefs de tribu du X e siècle. Dans notre cas il s'agit du pays du chef Csalân (Salan) sur la rive droite de la Tisza, qui se serait étendu sur la région du Bodrog par les possessions de son prétendu cornes Laborc (Laborcy).294 Le Notaire Anonyme connaissait bien Szemere, cornes de Sempte, qui vivait vers 1177. Conformément aux traditions de cette famille, il affirma que leur ancêtre Huba était un des sept chefs de tribu conquérants à qui Àrpâd avait accordé des terres entre la rivière Zsitva et la forêt de Tôrzsôk (Tursok), et de qui descendait de la lignée des Szemere — apparemment ancêtres du Szemere qui avait vécu vers 1000. En effet, les domaines de la famille Szemere s'étendaient au XIII e siècle à l'endroit indiqué, dans la partie nord-est du comitat Komârom où se trouvait des villages Hoba et Szemere.2™ Ces deux noms n'offrent que de faibles repères pour les recherches, pourtant cette tradition peut être appuyée. Ces toponymes apparaissent sur trois cours d'eau de la Petite Plaine Pannonique. Vers la source de Marcal, au-dessus de Sùmeg, se trouvait le village de Hobaj (1382 : Hobay, 1495 : Hwba), résidence d'été typique d'après son site, tandis que, vers le confluent du Marcal, le village de Szemere (1430 : Zemere)296 témoigne de la résidence d'hiver des descendants de Huba. A proximité de ces deux villages se trouvent des villages Gyômôrô : au-dessus de Sùmeg Zalagyômôrô (1427 : Gemerew) et sous Gyôr Gyômôre (1411 : Gemerew).297 Ils conservent probablement le souvenir des résidences d'été et d'hiver sur la rive droite du Marcal d'un parent ou d'un successeur légal. Le troisième village, Hobaj (1250 : Hoboy, 1265 : Hubay), se trouve dans les environs de Bô et Csepreg sur la rivière Répce, et à environ vingt kilomètres au sud, on trouve le village de Répceszemere (1265 : Zemere).298 La faible distance entre les deux ne peut pourtant guère indiquer une alternance de résidences. On peut se demander où était la résidence d'hiver correspondant aux résidences d'été qui ont 2M Gyôrffy, Ethnographia 76 (1965), 421-422. Une Gy. Moravcsik, Revue des Études Sud-est Européennes 295 SRH, I, 41, 75; Karâcsonyi, M. Nemz., III, 57; 43 (1947), 247; Gyôrffy, Krônikâink, 112-113; Magyar 29 « Csânki, III, 62, 513. 297 Ibid., 57, 549. 298 Ibid., 611, 641.
interprétation discutable voir 7 (1969), 169. L. Szilâgyi dans Magyar Nyelv Nyelv 47 (1951), 47-48.
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conservé le nom de Huba. Le cours du Marcal et du Répce, conduit à Gyôr et, suivant l'itinéraire des princes régnants sur la rive droite du Danube, à Szôny (Brigetio des Romains). Là même se trouve le confluent de la rivière Zsitva, dans une des vallées latérales de laquelle se trouvait le centre des domaines Hoba et Szemere. (Voir Carte 14.) Avant tout, c'est en aval de Szôny que l'on pourrait chercher la résidence d'hiver, mais ici, sur la rive des princes régnants, on n'en trouve aucune trace. Il est donc possible que la tradition ait raison de placer la résidence d'hiver permanente dans la région de la Zsitva. Les résidences d'été fort éloignées les unes des autres permettent l'hypothèse que Huba était chef de tribu. Ce serait confirmé par sa possession d'une vallée de rivière vers la frontière occidentale, parmi d'autres chefs de tribu. Cependant, les noms qui y ont survécu, Kâl, Bogât, Szabolcs, Harka et Eté, ne se rapportent pas aux chefs de tribu du temps de la conquête, mais à la génération suivante. Il nous semble donc que Huba fût, au début du X e siècle, le chef des clans habitant la Petite Plaine Pannonique, à l'exclusion des habitants du ducatus de Nyitra. Dans le bassin du Sajô et du Hernâd, nous rencontrons également plusieurs de ces noms : dans le comitat de Gômôr, Hubô (1330 : Hobou), dans Abauj et Borsod, Szemere. Pourtant leur appartenance à la lignée des Szemere ne peut pas être prouvée.299 Selon le Notaire Anonyme, le septième chef de tribu était Tétény (Tuhutum), dont le fils Harka (Horca) fut le père de Gyula (Geula) et de Zombor (Zumbur). Dans le chapitre de son œuvre sur la 'Pannonie', il fait descendre de ces personnages le clan Maglôd (Moglout), tandis que, dans les chapitres sur la Transylvanie, il en fait descendre les familles des Gyula transylvains et de Zsombor, dont l'habitat était selon lui dans la région du comitat de Doboka.300 Dans ce récit, le Notaire Anonyme a réuni les traditions de deux grandes familles conformément à leur alliance d'une part et à l'analogie de leurs noms de l'autre. Ce sont la famille Maglôd (plus tard Gyula-Zombor) du Nord de la Grande Plaine, et celle de Zsombor de Transylvanie.301 299 Kârolyi csalâd okmânytâra [Recueil de diplômes des comtes Kârolyi], réd. K. Géresi, Budapest, 1882-, I, 76; B. lia, Gômôr megye [Le comitat de G.], Budapest, 1944-, III, 416, avec une étymologie différente; Gyôrffy, I, 144, 805. 300 SRH, I, 41, 61, 65, 69. 301 Cf. Z. Tôth dans Szâzadok 79-80 (1945-1946); Gyôrffy, Krônikdink, 113-115; Tanulmânyok, 32; Ethnographia 76 (1965), 427. Aujourd'hui j'estime déjà acceptable l'origine commune des deux clans.
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En Hongrie, il existait deux villages Tétény dans deux régions différentes : sous Buda Nagytétény (1270/1272 : Thetum) et dans le comitat de Moson, Tettény ou Tétény, aujourd'hui Tadten (1357 : Tetun). On peut y ajouter Tattendorf (1312 : Tetendorf) 302 dans le bassin viennois qui est situé à l'endroit où la rivière Triesting, venant de la montagne, débouche sur la plaine. (Voir Carte 15.) Ceci montrerait l'existence d'un itinéraire nomade sur la rive droite du Danube, dont une des résidences d'été se serait trouvée dans le bassin viennois, l'autre près du lac Fertô, la résidence d'hiver par contre se serait située sous la ville de Buda. Comme ce tracé des rives coïncide avec l'itinéraire de Huba, il n'est pas facile de définir le rôle de Tétény. Le nom Tétény (< Tùhùtùm) dérivé de la forme mongole teghit du mot turc teghin 'prince', 303 probablement avec un suffixe possessif -m qui s'ajoute souvent aux noms de la titulature turque et hongroise (cf. turc kanym 'mon Khan', ancien hongrois urum 'mon prince'). Ce que l'on peut affirmer avec certitude, à propos de Tétény, c'est qu'il n'était membre ni du clan de Kurszân, ni de celui d'Àrpâd. La lignée Tétény dont il était ancêtre avait dans son emblème totémique un serpent, tandis que l'emblème du clan Kartal-Kurszân représentait un ange, celui des Ârpâd un turul ( < turc toghrul 'autour') et, comme évolution secondaire, un lion, signe de dignité.304 Si Tétény acquit malgré tout un trajet princier le long d'une rivière, cela s'explique, référence faite sur des analogies prises aux nomades, par sa qualité de 'gendre du souverain' ou de beau-frère. Il pouvait se trouver sur le principal itinéraire conduisant à l'ouest parce que son clan occupait des terres dans le Moson et dans le bassin viennois d'une part, et de l'autre parce qu'il occupait un poste militaire comme gyula. C'est dans un rôle de ce genre que le Notaire Anonyme parle de lui. En ce qui concerne le temps d'activité de Tétény, conformément aux terres occupées par lui ainsi qu'à ses relations de famille, je peux admettre qu'il vécût au début du X e siècle.305 Selon le Notaire Anonyme, son fils était Harca, dont le nom a survécu dans des toponymes Harka. L'hypothèse s'offre que les noms de localités Hartyân, sous leur vieille forme Harkian, sont des dérivés de ce 302 Zichy okmt., I, 72; Csânki, I, 36, III, 687; F. W. Weiskern, Topographie von Niederôsterreich, Vienne, 1770, III, 223. 303 J. Melich dans Magyar Nyelv 21 (1923), 126-127; Gy. Németh, M H K , 295. 304 Gyôrffy, Tanulmânyok, 5-6. 305 Précédemment, je l'ai situé à la fin du X e siècle, voir Ethnographia 76 (1965), 427.
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nom à l'aide d'un suffixe étranger -ian (par example As-ian). En effet, ces noms se rencontrent toujours dans les régions où se trouvaient les domaines de la famille Gyula-Zsombor. Dans les terres originairement occupées par Harka, au sud-ouest du lac Fertô, dans la vallée du ruisseau Ikva, se trouve le village de Harka (1245 : Harka). Le village de Lépesfalu-Lapusbach, dans les environs des sources de l'Ikva, se nommait jadis Gyula (1265 : Gyula). La tradition connue par le Notaire Anonyme, qui veut que Maglôd (Moglout) remonte à eux, semble être confirmée par le nom du village près du Hansâg, Maglôca (1220 : Magluca), qui serait formé à l'aide du suffixe slave -zca.306 Tétény gyula devait avoir, sous le règne de Szabolcs, la rive occupée par Kurszân, et ses successeurs devaient avoir des domaines aussi bien sur les rives transdanubiennes (genus Tétény) que sur l'autre rive, dans la ligne du village de Maglôd (1461 : Maglod) où les descendants, probablement sous l'influence du Notaire Anonyme, se donnaient le nom de clan Gyulazombor. Cette famille possédait Szôd, Gôd, Dunakeszi dans le comitat de Pest, et Zombor dans le comitat de Zemplén. Leurs domaines expliquent que nous trouvons Vâchartyân (1227 : Harkyan) près de Szôd, Hartyân (1325 : Harkyan) près de Dunakeszi, Hartyân (1368 : Harkyan) au sud de Maglôd, et Harkâly (jadis Hartyân) (1405 : Harkyan ~ Harchyan) sous Zombor, dans le comitat de Zemplén.307 (Voir Carte 15.) Les apanages situés dans le comitat de Zemplén pénétrèrent dans les territoires d'Ônd tout comme ceux de Csongràd où, dans les environs du lieu-dit Harka, existait des possessions des clans Dorozsma et Becsegergely dont le totem était également le serpent. Lorsque Fajsz occupa les rives ayant appartenu à Tétény, son fils Harka et son petit-fils Zombor ou 'Gyula' devaient occuper les rives de la Tisza, c'est ce qui expliquerait la découverte dans ces régions des monnaies byzantins qui sont en rapport avec la conversion de Gyula au christianisme. En ce qui concerne les chapitres du Notaire Anonyme relatifs à la Transylvanie et au chef blak Gyalu (Gelou), qui y apparaît sans aucun précédent, les recherches de M. Zoltân I. Tôth prouvent d'une façon incontestable que l'auteur avait inventé le pays de Gelou sur le modèle du pays du Gyula (Geula) soumis. Dans son modèle il avait tout aussi bien suivi les territoires des chefs hongrois que dans le cas de Mén308
Csânki, III, 609, 617, 618. L. Bârtfai Szabô, Pest megye, 5, 58; Arch. Nat. Hung., Dl. 69 723; Csânki, I, 28-29, 31, 349; cf. en Nôgrâd aussi, ibid., 99. 307
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marôt en Bihar, de Glad dans la région du Ternes, de Salan sur la rive droite de la Tisza, et de Zobor en Nyitra.308 La repartition géographique des noms Gyalu éclaircit les circonstances qui sont à l'origine du toponyme ayant servi de source au Notaire Anonyme Dans le comitat de Szolnok, en amont du confluent du Kôrôs, on trouve sur la rive droite le lieu-dit Gyalu qui était jadis un village (1333 Galo).309 Ce devait être la résidence d'hiver d'un chef de clan hongrois. Dans le comitat de Kolozs, le village de Gyalu (1246 : Golou) 310 est relié au précédent par les rivières Sebes Kôrôs et Kapus; il pouvait donc être la résidence d'été du même chef de clan. (Voir Carte 15.) Les campements d'hiver et d'été de Gyalu n'étaient pas limitrophes, ils étaient même séparés par le ducatus de Bihar. Ce phénomène n'est pas unique. Le clan Csolt du comitat de Békés (dont descendait le chef de la révolte païenne en 1046, Vata) possédait des résidences d'été dans le comitat de Kraszna.311 On y arrivait le long de la rivière Berettyô, en traversant le territoire du ducatus. Le clan Bor-Kalân du comitat de Csongrâd possédait, comme je l'ai déjà dit, des pâturages d'été dans le comitat de Hunyad qu'il pouvait atteindre en suivant le Fehér Kôrôs. Le Notaire Anonyme avait très peu entendu parler du chef du clan Gyalu qui vécut au X e siècle, son imagination était frappée par le nom du fort Gyalu au confluent du Kapus et du Szamos en Transylvanie. Ce nom évoquait le nom du gyula de Transylvanie et fit naître la légende du chef blak de Transylvanie Gyalu, légende dépourvue de tout fondement réel.312 308 Z. Tôth dans Szâzadok 79-80 (1945), 21-84; cf. Gyôrffy, Tanulmânyok, 97-100; Ethnographia 76 (1965), 419-431; Nouvelles Etudes Hist., Budapest, 1965, 37. 30l> Bârtfai Szabô, op. cit., 510; Csânki, I, 668. 310 Zimmermann-Werner, I, 72; Csânki, V, 304. 311 Karâcsonyi, M. Nemz., I. 380. 312 Dans les communications sur les fouilles récentes effectués dans le fort de Doboka (St. Pascu, M. Rusu, Acta Musei Napocensis 5 (1968), 153-404) les auteurs attribuent ce fort au prétendu chef roumain Gelou (Gyalu). Sans même prendre en considération que le Notaire Anonyme indique le fort de Gyalu ailleurs qu'à Doboka, et qu'il créa le personnage de Gelou en partant du nom topographique Gyalu en Transylvanie, l'identification ethnique est exclue par le nom turco-hongrois de Gelou (Gyalu) et par l'immigration des Roumains dans cette région, commencée au début du XIV e siècle. Le nom Doboka n'est pas d'origine slave, comme ils l'affirment; il est impossible de le faire dériver du mot serbe duboka 'profond', car sa forme plus ancienne dluboka dérive de l'ancien slave glambokb (cf. F. Miklosich, Die slavischen Ortsnamen aus Appellativen, Vienne, 1874, II, 21; J. Melich dans Magyar Nyelv 23 (1927), 240, et supra note 262). Dans la toponymie médiévale de la Transylvanie c'est Glimboka qui s'y rattache (voir S. Suciu, Dictionat istoric..., Bucarest, 1967,_I, 266).
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Le tableau que nous venons de tracer serait incomplet sans l'examen de quelques problèmes relatifs à certains apanages tribaux dont les chefs ne figurent pas parmi les 'sept Hongrois' du Notaire Anonyme, mais qui sont cités dans d'autres sources en tant que chefs de tribu. [En connexion avec les pendentifs d'argent en forme de clochette, trouvées à la limite des I-II strates des remparts, les rapports des fouilles exécutées dans le fort de Doboka (Dabîca) (de St. Pascu, M. Rusu, P. Iambor, N. Endreiu et autres) ont soumis à révision la question de l'origine, de l'interprétation, et de la datation du trésor de Darufalva (Drassburg). Avant tout, ils avancent de nouveau la possibilité qu'il ne s'agissait pas d'un trésor, mais d'une riche tombe païenne. Ils estiment que cette question ne peut être résolue que par la publication du vase trouvé avec les bijoux d'argent. Aux perles d'argent du type 'Darufalva-Jurkovci' trouvées à Darufalva, ils donnent le nom 'type de Veligrad' (c'est à dire, Stare Mèsto), et considèrent qu'elles sont un travail morave, ou sous influence morave, du IX e siècle. Quant aux pendentifs en forme de clochette de type Darufalva-Doboka, ils cherchent à les rattacher aux pendentifs à panier de la culture de Keszthely et supposent une origine pannonique ou 'byzantine' du IX e siècle. Il reconnaissent que les seuls objets analogues, à datation sûre, furent trouvés dans le trésor de Maszenice (Pologne), sans mentionner que celui-ci fut caché après 1039! Mais, sur la base des dirhem trouvés dans ce trésor, ils mettent en question sa valeur de datation en tant qu'ensemble. Partant des dirhem ils datent les pendentifs de Maszenice du IX e siècle. Ces arguments, d'apparence cohérente, soutiennent parfaitement l'hypothèse historico-archéologique des auteurs selon laquelle le fort de Doboka fut construit au IX e siècle, par conséquent les objets trouvés entre les première et deuxième strates peuvent être datés du tournant des IX e et X e siècles, c'est à dire de l'époque de la conquête du pays par les Hongrois (Acta Musei Napocensis 5 (1968), 175-177; fig. 3). Cette nouvelle interprétation du problème de Darufalva, qu'ils trouvent définitivement éclairci, demanderait une réponse plus développée. A l'intention de M. Gyôrgy Gyôrffy, je ne résume que les arguments les plus importants. Tous les points de l'argumentation de ces rapports des fouilles de Doboka sont inacceptables : 1. Les circonstances des fouilles sont claires et univoques, des trésors et ensembles de bijoux de ce genre furent trouvés par centaines dans des conditions identiques, il ne peut donc être question d'une 'tombe païenne' (I. Bòna, "Der Silberschatz von Darufalva", Acta Arch. Hung. 16 (1964), 154). Le vase contenant le trésor ne sera jamais publié, comme le savent très bien les critiques, vu qu'il n'a jamais été déposé dans un musée, comme le souligne avec regret chacun des rapporteurs. Même s'il était à notre disposition, il ne prouverait pas qu'il s'agit de tombe. L'imagination de M. Nândor Fettich a créé un 'rite d'inhumation' à propos de la tombe qu'il attribue à une princesse de l'époque 'hunnique tardive', du VI e siècle. Les critiques admettent cette invention, qui peut rendre probable le fait qu'il s'agit d'une tombe d'une riche femme slave A'avant l'arrivée des Hongrois, et du même coup ils renvoient parmi les 'hypothèses' plaisantes la datation du trésor de Darufalva du XI e siècle, datation qui a des fondements archéologiques et historiques solides. 2. Jusqu'à nos jours aucune fouille n'a produit d'objets qui puissent réfuter ce que notre publication a souligné, à savoir qu'aucun des objets d'argent du trésor de Darufalva n'a d'analogie en territoire tchèque ou morave des IX e -XI e siècles. Les bijoux typiques sont originaires des régions mitoyennes des Slaves orientaux et des Slaves occidentaux (I. Bòna, op. cit., 145, 158). Pour être dénommées 'du type Veligrad' les perles d'argent ne deviendront ni moraves, ni faites sous influence morave et encore moins faites au IX e siècle.
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Avant tout, il est à noter que les toponymes ne confirment pas l'existence d'un 'chef de tribu' appelé Botond. Selon la légende transmise par la chronique hongroise, Apor (Opour) 3. Les pendentifs en forme de clochette du type Darufalva-Doboka sont encore sûrement utilisés dans la première moitié du XI e siècle (voir le trésor de Maszenice après 1039), ils n'ont, et ne peuvent certainement, rien avoir de commun avec la culture de Keszthely, culture isolée de l'Antiquité tardive, finissant à la fin du VIII e siècle. Si, en effet, ils étaient originaire de cette région, ils seraient mis au jour dans les cimetières des IX e -X e siècles des environs de Keszthely et du Sud de la Transdanubie et non en Grande-Pologne, en Pologne Centrale, en Transylvanie, et en Bulgarie. L'hypothèse erronnée sur l'origine ne peut donc pas servir de base à une datation du IX e siècle. 4. C'est un fait par contre, et ce fait était un des fondements de notre datation, que les analogies des pendentifs en forme de clochette du type Darufalva-Doboka, se retrouvent dans le trésor de Maszenice caché après 1039 (I. Bòna, op. cit., 158, 164). La modification de la datation du trésor de Maszenice est simplement stupéfiante du point de vue méthodologique. Les bijoux furent mis à jour avec 483 pièces de monnaie byzantines, anglaises, italiennes, allemandes, polonaises, tchèques, et hongroises, toutes contemporaines et bien datables. La plus ancienne date d'après 962 et la plus récente d'avant 1059, la grande majorité provient du tournant des X e -XI e siècles. En face de cette base chronologique d'une solidité incontestable, les critiques partent de quelques dirhem fragmentaires (figurant comme débris d'argent) d'âge indéfinissable (éventuellement du milieu du X e siècle), qu'ils estiment provenir du IX e siècle. 5. Cependant, dans la datation du trésor de Darufalva, celui de Maszenice ne joue pas un rôle décisif vu que la datation de ce trésor du dernier tiers du X e -premier tiers du XI e siècle est, sans ambiguïté, corroborée par son rapport avec 22 ensembles de trouvailles polonaises, russes, tchèques, danoises, suédoises, datées à l'aide de monnaies (I. Bòna, op. cit., 163-165). Les bracelets de Prerow cités comme contreargument ne peuvent pas servir à dater les pendentifs en forme de clochette, puisque, à Prerow, on n'a trouvé ni pendentifs en forme de clochette, ni perles du type Darufalva-Jurkovci. Que les bracelets du type Darufalva (scandinaves) aient eu une longue existence est un fait qu'à notre tour nous avons bien souligné (Bónis, op. cit., 164). 6. Vingt-deux trouvailles, datées à l'aide de monnaies, ont prouvé jusqu'à nos jours que les perles, pendentifs et collier d'argent mis à jour à Darufalva, ont été faits et utilisés dans la période comprise entre la seconde moitié du X e et la première moitié du XI e siècles. Ceci est corroboré par de nouvelles fouilles et analogies : des perles du type 'Darufalva-Jurkovci' provenant de Sejkowice (Pologne centrale) ont été publiées. Ce trésor, que l'on peut dater à l'aide de deniers de Haithabu, de monnaies polonaises et tchèques, fut caché après 1012, les monnaies peuvent être datées d'entre 966 et 1034 (A. Gupieniec - R. Kiersonwscy, Wczesnosredniowiecne skarby srebrne z Polski Srodkowej, Mazowsza i Podlasia, Varsovie-Wroclaw-Cracovie, 1965, 50-51, t. XIX/1). Des pendentifs du type Darufalva-Doboka furent trouvées à Preslave-Seliste dans une maison. Les autres locaux de la maison sont datés par le monnaies de Johannes Tzimiskes (969-976). (A. tangova, Bulletin de l'Institut d'Arch. 31 (1969), 212-230, fig. 21.) Une variante en fut trouvée à Olesnica (Pologne centrale). D'après 378 monnaies anglaises, allemandes, polonaises et tchèques, bien datées, ce trésor caché après 1034 est daté d'après 978 (A. Gupieniec - R. Kiersnowscy, op. cit., 40-41, t. XI.). Entre temps, on a retrouvé une excellente analogie du collier de Daru-
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fut à la tête (capitaneus) de l'armée qui, en 958, marcha sur Constantinople pour exiger le tribut annuel. 313 Le chroniqeur appliqua le terme capitaneus non seulement aux sept chefs hongrois, mais aussi au grandprince Àrpâd ainsi qu'aux chefs de la bataille de Lech : le karchas Bulcsu et le prince Lél. 314 Le toponymes et la répartition des domaines des successeurs d'Apor confirment pleinement le rôle considérable qu'Apor joua dans l'histoire. 1. Il posséda le tracé du grand prince sur la rive droite du Danube à partir de Szentendre près d'Apor-ûgy (1009 : rivus Opurig) qui devait être sa résidence d'été, jusqu'à sa résidence d'hiver d'Apor (1342 : Apour, Apur) dans le comitat de Tolna. 2. Il possédait aussi deux résidences nommées Apor dans le comitat de Tolna, dans la région où, avant lui, se trouvaient les résidences de Tarhos, Tevel et Tormas, et après lui celles des princes héritiers. 3. Les descendants d'Apor, grande famille seigneuriale de l'époque ârpâdienne, d'une part possédaient des domains dans le comitat de Tolna, où ils aviant leur monastère dans un des villages nommés Apor, et, de l'autre assez loin dans les environs de Gyôr. 314 4. Il semble que le chef Apor installa des campements le long des grands passages militaires du Sud et de l'ouest, en contre-bas des monts de Zagreb, dans le village d'Apor (1217 : Opor, 1328 : Oprouch, falva qui avait provoqué tant de débats et d'erreurs (Fettich), notamment dans le trésor de Gniezdovo de 1868 (A.C. Tywjm, IlaMJimHUKU xydooKecmeemozo peMecAa dpeeuelt Pycu X-XIII. bb., MocKBa-JIeHHHrpaa, 1936, t. I I / l , 53-57), où cette analogie fut mise à jour entre autres avec des perles du type Darufalva-Jurkovci (voir Gouchtchine, op. cit., t. II/l). Vu les dirhem de 953-954, le trésor fut caché après cette date. Cela marquerait la présence la plus ancienne de ce type de collier, sa variante étant trouvée même dans le trésor de Hajtcha datant du XI e siècle (Bôna, op. cit., 162). Le cercle est donc encore plus élargi, la concordance de 26 fouilles date sans ambiguïté le trésor de Darufalva. En résumant ce qui précède nous pouvons constater que, grâce à une argumentation inacceptable dans chacun de ses points, les archéologues datent d'un siècle plus tôt les pendentifs en forme de clochette trouvés à Darufalva. L'époque réelle dont ils proviennent se situe au tournant des X e et X I e siècles. Les autres objets trouvés dans la même strate confirment la même chose. Les pointes de flèche plates, en forme de losange ou de laurier, des Hongrois conquérants sont inimaginables avant le X e siècle. Le mors, l'instrument à battre le feu, le collier torsadé sont d'un type hongrois accusé de l'époque de la conquête du pays, et le collier à coupe carrée s'intègre bien au X e siècle. Les recherches datent avec sûreté au X e siècle le type D o b o k a des pendentifs en forme de croissant (Â. Kralovânszky, dans Arch. Értesitô 86 (1959), 78; la meilleure analogie fut mise à jour à Szolnok-aérodrome et Szob-Koliba, ibid. XIII, 4-5). Il est difficile de se prononcer sur la céramique, dont seul le croquis est publié mais, à mon avis, elle s'intègre sans difficulté à la céramique du X e siècle dans le bassin des Carpathes. — Istvdn Bôna] 818 S R H , I, 310. 8 " Ibid., 116-117, 290-292.
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aujourd'hui Oprovec) près de Fajsz (Kraljevec), d'où part la voie stratégique vers l'Italie, ainsi qu'à Apor-séd (s. XIV : Oporsed) près de Valkovâr (Vukovar),315 sur la route vers Byzance. (Voir Carte 16.) Il nous est permis d'en conclure que ce fut le chef Apor qui, après la défaite de Lech (955), assuma la défense de la Pannonie, en vue d'une attaque possible du côté de l'ouest. Selon la légende de Saint Gérard, Ajtony (Achtum) était le seigneur de Marosvâr, devenu par la suite Csanâdvâr, et son pays s'étendait du Kôrôs jusqu'au Bas-Danube et à la Transylvanie. Lorsqu'il s'insurgea contre Saint Etienne et perçut des taxes sur le sel du roi transporté sur le Maros, le roi envoya contre lui le général Csanâd (auparavant général d'Ajtony) et Gyula, qui le soumirent (après 1002). Csanâd devint le cornes de Marosvâr. 316 Le Notaire Anonyme affirme que le neveu du roi Saint Etienne vainquit Ajtony (Ohtum). Selon lui, l'ancêtre de ce dernier était le chef Glad, dont le pays s'étendait entre le Maros et le Bas-Danube dès avant la conquête par les Hongrois et qui fut vaincu par les généraux d'Ârpâd près de Fôvényrév.317 Il en ressort que le modèle sur lequel le Notaire Anonyme créa le pays de Glad était un territoire appartenant au X e siècle à une tribu hongroise.318 Comme dans le comitat de Ternes, il y existait deux villages Galâd (1382 : Galod, Galad; 1462 : Galad Monostra, Rewgalad)319 et que l'un d'eux se trouvait près de Fény (qui conserve le nom de Fôvényrév), le Notaire Anonyme, se conformant à la topographie, fit vaincre Glad à cet endroit. Bien que, pour moi, cette circonstance rende contestable jusqu'à l'existence de Glad, le contexte qu'offre la topographie permet de supposer qu'Ajtony pouvait en effet avoir un ancêtre de ce nom, au X e siècle. Le nom d'Ajtony est conservé au moyen âge par Ajtonymonostor. Il se situe au-dessus de Csanâd, sur la rive droite du Maros. En remontant cette rive, au point où la rivière quitte les montagnes, nous trouvons le village de Kalodva ou Kladova, jadis Galadva (1333 : Galadua, 1333/1520 : Kalodwa), qui est une variante du nom Galad pourvu du suffixe possessif slave -ova. 315 Hazai okmt., VI, 1; Csânki, III, 414; Karâcsonyi, M. Nemz., I, 127; TkalCii, op. cit., II, 107, 117. 318 SRH, I, 489-490. Cf. P. Vâczy, Szentpétery emlékkônyv, Budapest, 1938, 502. »" SRH, I, 50, 89. 318 Gyôrffy dans Ethnographia 76 (1965), 423-424. 319 Csânki, II, 38.
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Les deux villages Galâd se trouveaient dans la partie plate du comitat médiéval de Ternes. L'un a laissé son nom à Galaczka Bara, situé au nord des marécages de la Béga, l'autre à Gilâd sur la rive gauche du Ternes. Dans la vallée supérieure de la Béga (jadis Ternes), sur la rive droite, au nord de Lugos, on trouve également un village Klad(o)va (1454 : Cladwa), qui pouvait servir de résidence d'été.320 Dans le sud du Bânât, des villages de ce nom sont inconnus, mais, dans la partie qui peut être rattachée au ducatus, dans le comitat de Krassô, il y a un village Ajtony (1458 : Ahthon) à proximité de Décse et Szôrénd.321 On peut expliquer cela soit parcequ'Ajtony avait étendu son contrôle sur cette région, soit parcequ'il en était originaire. (Voir Carte 17.) Le souvenir des campements d'Ajtony a laissé également des vestiges en Transylvanie. Dans le comitat de Kolozs, le village Ajton (1320 : Ohthunth, Ohtun) 322 se situe sur la pente du côté de Torda, à mi-chemin entre les mines de sel de Kolozs et de Torda. C'est l'une des raisons pour lesquelles Hôman a proposé d'identifier Ajtony avec Gyula, ou, du moins, de supposer entre eux une relation étroite.323 Cependant, des faits s'opposent à cette hypothèse. D'une part, les sources écrites établissent une nette distinction entre Ajtony et Gyula. D'autre part, on peut démontrer que l'apanage de la famille des Gyula s'étendit entre le comitat Kolozs et la région du Ternes. Enfin, Gyula participa à la guerre contre Ajtony. 324 Il est par contre vraisemblable qu'Ajtony possédait, à proximité d'une mine de sel transylvaine, un campement qui n'avait pas de continuité avec ses autres domaines. S'il se trouvait dans le comitat de Torda, il peut-être mis en rapport avec Erdôcsanâd (jadis Csanâd, 1332 : Chonad etc.),325 en tant que campement du chef Csanâd, que ce soit du vivant d'Ajtony quand, selon la légende, Csanâd était à son service, ou après la soumission d'Ajtony quand Csanâd reçut ses domaines. Dans la région ayant appartenu à Ajtony, le seul Csanâdvâr (jadis Marosvâr) garde le nom de Csanâd, ce qui met en question le haut poste occupé par celui-ci auprès d'Ajtony. Les noms toponymes en Hongrie par contre appuient l'affirmation du Notaire Anonyme, selon laquelle Csanâd était le neveu et le général du roi. Nous connaissons 320
Gyôrffy, I, 179; Csânki, II, 46. Csânki, II, 99; voir cependant on Galâds dans le sud les données nouvelles par T. Halasi-Kun, Studies in Honour of Julius Németh, Budapest, 1975 (sous presse) and Archivum Ottomanicum 8 (1976) (sous presse). 322 Csânki, V, 326. 323 Magyar tôrténet, I6, 178-179. 324 P. Vâczy (voir note 316). 325 Csânki, V, 697. 321
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Csanâd (1629 : Csanad) près de Dunavecse et, Érsekcsanâd (1391 : Chanad) 326 en aval de Kalocsa. Cela indique la possession de la ligne des princes sur la rive gauche du Danube. Csanâd possédait des résidences même dans le Szigetkôz, à peu près dans le voisinage de celle de Fajsz (1443 : Chanad),327 ce qui ne peut que confirmer cette hypothèse. Toutefois, notre ignorance demeure en ce qui concerne le degré de parenté entre Saint Etienne et Csanad, fils de Doboka. Deux problèmes historiques de grande importance se rattachent à Ajtony, mais nous n'avons pas la possibilité de les traiter ici en détail. L'un est le problème des 'Hongrois noirs'; l'autre, l'origine du trésor de Nagyszentmiklôs. Bruno de Querfurt, en religion Boniface, écrit que, venant de Germanie, il descendit en bateau jusqu'au pays des Hongrois noirs (Nigris Ungris) pour les évangéliser. Selon la légende majeure de Saint Etienne, le 'martyr Boniface' se rendit dans les parties inférieures de la Hongrie (in inferiores Ungarie partes) pour y évangéliser. Ces deux témoignages rendent fort vraisemblable que, dans les territoires d'Ajtony, habitaient des Hongrois noirs, 328 ce qui ne signifie pas pour autant que ceux-ci ne pouvaient pas habiter ailleurs aussi, ou qu'ils étaient seuls à habiter cette région. L'autre problème qui, peut-être, n'en est pas indépendant, est l'appartenance du trésor de Nagyszentmiklôs. Le trésor fut découvert dans les terres occupées par Ajtony, les inscriptions sont turques et les caractères sont proches des caractères runiques des Sicules. Les noms de personnes inscrits sur deux plats grecs, et dont la lecture est sûre, sont : BOYHAA Buila, c'est à dire Bojla, et BOYTAOYA Butaul, c'est à dire 'fils de Bota\329 Pour analyser l'emploi de ces deux noms de personne en Hongrie, il faut tenir compte de l'alternance possible des sons B et V. D'une part, la prononciation du /3 en grec moyen était v, d'autre part, en Hongrie un dialecte turco-bulgare (souvar?) pouvait être parlé où le b turc était proncé v, et, troisièmement, l'alternance b>v est fréquente dans 326
Szarka, op. cit., 61; Csânki, II, 195. lbid., III, 546. Gombos, III, 2569; SRH, II, 382; cf. D. H. G. Voigt, Brun von Querfurt, Stuttgart, 1907, 100; Gy. Gyôrffy dans Archivum historiae pontificiae 7 (1969), 100-101. 329 BudapestGy. Németh, Die Inschriften des Schatzes von Nagyszentmiklôs, Leipzig, 1932, 9-12, 34; Acta Linguistica Acad. Scient. Hung. 21 (1971), 1-52. Pour cette interprétation du trésor cf. G. Fehér dans Arch. Értesitô 1950, 34-49; Gy. Lâszlô, Folia Archaeologica 1957, 141-151, D. Csallâny, dans Nyiregyhàzai Jàsa A. Muzeum évkônye 10 (1967), 31-74. 327
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les noms propres au temps des Ârpâdiens (cf. Bezprem > Veszprém, Boyta > Vajta etc.).330 Comme je l'ai déjà fait remarquer, dans le comitat de Krassô, dans les environs de la rivière Néra où se trouvait le village Ajtony, il y avait aussi un village de Bojla (1355 : Baiola, 1362 : Boila), tandis que, sur le Bas-Danube, on trouvait un Vojla, aujourd'hui lieu-dit Vojlovica (1230, 1231, 1247 : Woyla) qui appartenait au fort de Krassô. 331 Ils peuvent être considérés comme résidences d'été et d'hiver. (Voir Carte 16.) Je ne peux pas m'étendre ici sur le problème compliqué et peu clair que présentent les noms Bata ^ Veto, et VQj(o)la, rencontrés ailleurs, dans la Hongrie de l'Est.332 Dans la Hongrie médiévale il y avait encore deux régions où, selon la liste des chefs des chroniques, se trouvaient des apanages de deux chefs ayant participé à la conquête du pays, Kiind (Cund) et Ors (Urs). Sur Kiind il est dit que ses fils Kusyd (Cusid) et Cupan (chez Kézai : Cupian) campaient près de la contrée Nyir où, après s'être convertis au christianisme, ils fondèrent un monastère.333 Vu que Cusid, fils de Cund, est l'un des héros principaux de la légende sur la conquête du pays, l'auteur de la liste des chefs a certainement puisé cette singulière paire de noms dans les traditions légendaires, tout comme les noms de Lél et de Bulcsu.334 On peut opposer plusieurs arguments à l'authenticité de cette donnée. 1. Le Notaire Anonyme reproduit ces noms sous la forme de Curzan fils de Cundu, ce qui est confirmé par les documents étrangers. Il indique que leur campement se trouvait aux alentours de Budapest actuel, ce qui ressort pleinement des recherches sur le peuplement du pays. 2. Dans les régions à l'est du Nyirség, dans le comitat de Szatmâr, on peut trouver, à l'époque des Arpâdiens, un groupe de la peuplade Kék-kend (Kendbleu), qui étaient des gardes-frontières, mais l'établissement de ceux-ci sur cette frontière est secondaire.335 3. Le nom de Cusid se lit Kiisid. Comme toponyme il ne se rencontre pas dans la région du Szamos, mais seulement dans le comitat de Bacs, entre Ujvidék (Novi Sad) 330
331
Cf. Gyôrffy, Tanulmànyok,
Ibid., Csânki, II, 98, 143.
62-63, 109.
332 Aux toponymes dans les comitats d'Arad, Békés et Kolozs on peut ajouter le comitat de Borsod, où se trouvent les villages voisins de Vatta et Vajla. 333 S R H , I, 166, 291.
331
Gyôrffy, Krônikàink, 104-105.
335
Ibid. et Tanulmànyok,
145 et suiv.
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et Titel, comme Kisdi (pron. : Kisdi), aujourd'hui lieu-dit Kusdin (1332/ 40 : Cussidi ~ Cusidi).336 4. Le nom Cupan ~ Cupian correspond tout d'abord à Koppâny, dérivé du turc qapyan, nom de dignité. Par exemple, Koppânytelke, près de Hodâsz, dans le comitat de Szatmâr, était connu au XV e siècle sous le nom de Koppan teleke ~ Kopyanthelke.337 Du mot turc qaplan 'panthère' dérive le nom de clan et de localité Kaplony, qui se rencontre sous les formes Cupulon en 1213/1550, Cuplon en 1231/ 1297, Caplon en 1234, Caplyon en 1236/1239, et Koplan en 1300/1360.M8 Malgré cela, il est à peine contestable que l'auteur de la liste des chefs pensait à Kaplonymonostor en situant le campement de Cupan ~ Cupian dans le Nyirség. 5. L'emblème totemique des Kaplony est un aigle. Cela ne corrobore pas l'hypothèse qu'ils descendent de Kurszân, ou d'un chef de tribu, car cet emblème s'écarte à la fois l'ange aux ailes déployées, emblème des Kurszân-Kartal qui conserve la conscience de l'origine céleste, et du lion des chefs de tribu. L'ancêtre du genus Kaplony, ayant vécu au temps de Saint Etienne, avait sa résidence à Kaplony près des marécages d'Ecsed. C'est probablement lui qui a donné son nom au village de Kaplyon, près de Dés, qui, dans le registre des terres de Dés dressé vers 1300 conformément à la situation en 1261, est inclus comme terre du genus Coplon.33S Vu sa situation géographique, il suggère l'emplacement d'une résidence d'été. Dans les terres des Kaplony, dans le comitat de Szatmâr, il y a un autre couple de résidences entre lesquelles il y a la même distance. C'est, sur le Szamos, Mzgy-'grand' et /fo-'petit' Kolcs (1312 : Kulch, 1366 : Kocli) et Kolcsva (1300/1360 : Kulchua), qui est mentionné comme appartenant à la même possession dans la même région. Le Kôcs (1329 : Koch) transylvain au confluent du Szamos et du Sajô y correspond probablement. 340 Bien que, sur la base des couples de résidences à grande distance, nous ne nous hasardions pas à considérer le genus Kaplony comme descendant d'un chef de tribu ayant habité cette région, et encore moins comme 336
Gyôrffy, I, 225. Gy. Németh, dans Magyar Nyelv 24 (1928), 149; F. Maksay, A kôzépkori Szatmârmegye [Le comitat de Szatmâr au Moyen Age], Budapest, 1940, 162. 338 Z. Gombocz, Arpâdkori torôk személyneveink [Noms propres turcs dans la Hongrie de l'époque des Ârpâdiens], Budapest, 1915,17-18; VR, p. 158; Hazai okmt., VI, 29, 30; Sztâray oklevéltâr, Budapest, 1887,1, 37; Karâcsonyi, M. Neraz., II, 289; Maksay, op. cit., 155. 339 Csânki, I, 477: Zimmermann-Werner, I, 85; Kâdâr, IV, 198. 340 Anjou, I, 249; Sztâray okl., I, 37, 346; Teleki csalâd oklevéltâra [Recueil de diplômes de la famille Teleki], Budapest, 1895, 1, 42. 337
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descendant du kiindù, nous pouvons toutefois le considérer comme descendant d'un chef de clan établi dans le Szatmar qui était soumis à un chef de tribu dont nous ignorons le nom.341 L'existence historique du chef Ôrs (Urs) dont parlent les chroniques fait également surgir des problèmes. Sa résidence est indiquée comme étant dans les alentours du Sajo. Certes, le Notaire Anonyme affirme que le chef Ousad, père d'Ôrsur (Ursuur, Ursuuru), s'était établi dans cette région, plus exactement sur le flanc sud du Biikk, et, aux XIIIXIV e siècles, le clan Ôrs, autrement dit Ôrsur (ùr 'prince, seigneur') avait en effet des possessions dans cette contrée. Mais, selon le Notaire Anonyme, Ôrsur n'était pas hongrois mais un chef 'coman'. 342 Le problème se complique par le fait qu'en Hongrie il y a près de vingtcinq toponymes Ôrs dispersés comme des noms de tribu.343 Mais comme ils sont absents justement dans le territoire du ducatus (voir Carte 18), nous avons des raisons sérieuses de supposer que l'une de tribus khabares était appelée Ôrs.344 Il est certainement rare que, dans les couches dirigeantes hongroises, des noms de tribu aient servi de noms de personne, mais des exemples turcs peuvent être cités.345 Dans le cas des noms de personne dérivés de noms de tribu ou de mots de titulature comme Tiirk-sad, Yaglakar kan ata, la personne était un des dirigeants de la tribu dont il portait le nom. Ainsi, Ôrsur pouvait être le seigneur, le chef de la tribu Ôrs. Dans notre cas, il ne s'agit pas d'un nom de personne, mais d'un nom de dignité conservé par la tradition, à l'instar du nom de Gyula qui cache au X e siècle des noms de personne. Il serait aussi vain de discuter l'époque où vécut Ors que de le faire à propos du 'Gyula'. Ce caractère de nom de dignité peut expliquer que, dans la 341 II est possible qu'immédiatement après la conquête du pays, le kiindii Kurszân se soit établi là pour u n certain temps (895-900). Dans ce cas on pourrait découvrir une variante en langue étrangère (khabare?) du nom Kuszân, notamment Kusal, dans les noms de village Kosdly (près de la mine de sel de Dés) et Kusaly (comitat Szilâgy). L'extension sur cette région de l'évéché de Transylvanie, ainsi que la présence des noms de localité Erked qui se répètent sur les cours supérieurs de Kùkullô, du Szamos et de la Kraszna comme des résidences d'été, peuvent suggérer l'idée qu'à la fin du X e siècle cette région était aussi soumis au gyula (peut être appelé Erked). 342 SRH, I, 166, 292; ibid., 43, 46, 72-73; cf. Gyôrffy, Krônikâink, 107, 116. 343 A l'Écriture ancienne des noms Ôrs voir Z. Gombocz dans Magyar Nyelv 22 (1926), 6-8; 1230 : Vrs (Hazai okmt., VII, 18); 1249 : Wrswr (ibid., VI, 50); il en ressort incontestablement que la forme Ùrs est primaire et les variantes Ûriïs~ Veriis sont ultérieures. 344 Gyôrffy, Tanulmânyok, 59; Studia Turcica, Budapest, 1970; D. Pais dans Magyar Nyelv 58 (1962), 133, donne une autre explication peu convaincante. 345 Németh, H M K , 83-84.
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région du Sajó, nous ne connaissons pas de localité nommée Ôrs ou Ôrsûr. On rattache Ôrôs (1319 : Ewres) sur le Sajó 346 au nom Ôrs (Urs ~ Urus), mais c'est étymologiquement impossible. La tradition conservée par le Notaire Amonyme n'est pas corroborée par l'absence, ici comme ailleurs, de toponymes qui puissent remonter au nom du chef Ousad qui était le premier occupant. La lecture même du nom est encore discutée.347 La solution est peut-être que Ousad, qui est mentionné dans la même génération qu'Álmos, et ait un chef khabar dans l'Atelkouzou, le chef de la tribu Ôrs, et que nous ne connaissons pas les noms de ses successeurs. Si la tradition des chroniqueurs a correctement gardé le souvenir de leur résidence dans le Borsod, le nom propre de quelque 'ôrsur' est peut-être conservé dans des noms de localité indiquant quelque résidence d'été ou d'hiver des environs. La toponymie de la région du Sajó et du Hernád contient des couples de résidences à distances réduites correspondant à un comitat, comme, dans le Borsod, les couples Sajólád et Szendró/á¿f, et dans l'Abauj, les couples Bud et B3d.3ii Il existe par contre des couples qui se situent parfois dans plusieurs comitats, comme par exemple les Csécs dont nous avons déjà parlé, comme Han dans le comitat de Heves et Hanva dans le comitat de Gômôr.349 Il y a également le couple Bód (Bold ~ Boldva) qui, vu la dénomination slave des rivières, peut-être classé, avec Ónd et Bors, dans la couche la plus ancienne et conserve peut être le nom du chef établi dans la région du Sajó. Enfin, la question se pose de savoir quels étaient les habitats que ces réisdences et campements anciens désignaient. Puisqu'il s'agit d'un phénomène nomade, il faut chercher des analogies avant tout chez les peuples nomades. Aux débuts, la cour du grand-prince devait être une agglomération établie d'une manière assez dispersée sur un terrain étendu, comme l'était Bolghary vers 922. Elle comprenait les tentes du princes et, plus loin, près de la place du marché, un fortin avec des constructions pour 348
Gyôrffy, I, 797; Csánki, I, 177. Karácsonyi (M. Nemz., II, 419) l'a lu Acsád, Pais (SRH, I, 72) par contre Ócsád, comme forme diminutive du nom topographique connu dans les comitats de Komárom et de Pest. La chronique publiée sous le nom d'Ortilo de Lilienfeld et qui mentionne un Urzus dux comme ayant régné avant le grand prince Géza (Gombos, II, 1754) est un faux du XVIII e siècle fait par Hanthaler Chrysostom. 348 Gyôrffy, I, 784. L'éponyme de Ládháza vécut au XIII e siècle (ibid., 795); ibid., 72, 74. Csánki, I, 62, 136. 347
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entreposer les marchandises. Elle était complétée par les habitations des gens de service (serfs) avec leurs tentes et cabanes. Le tout devait ressembler à Yorda mongole ou du sérail 350 dans leur premier état. Les résidences d'hiver des dirigeants de rang moins élevé avaient des analogies avec les campements d'hiver semi-nomades qu'a décrits Istvân Szabô.351 Les cours d'été dans les îles du souverain et dans les vallées principales devaient également être des habitats de caractère permanent, avec peu d'édifices stables, tandis que les résidences d'été les chefs de clan, à la source des rivières de montagne, n'étaient certainement habitées que temporairement. Des serfs étaient attachés à chaque genre de cour ou de résidence nomade. Leur statut juridique différait de celui du commun du peuple. Dans la société mongole on appelait bool les esclaves qui ne pouvaient pas quitter leur seigneur et servaient sa famille de génération en génération.352 Dans la société hongroise ancienne il faut certainement supposer la présence d'esclaves domestiques,353 qui suivaient le seigneur été comme hiver, mais aussi des prestataires sédentaires qui habitaient autour de telle ou telle résidence comme des accessoires dépendant de celle-ci. Le résultat était qu'au moment de l'organisation des nouvelles structures, où un grand nombre de résidences, avec tout leur appareil économique, changèrent de propriétaire, des chevaliers immigrés de l'Ouest acquirent des résidences d'été et d'hiver et que celles-ci reçurent le nom du nouveau propriétaire. Tel est par exemple le cas dans le comitat de Fejér, du couple de villages portant le nom du chevalier Pâzmâny, le village Pâzmând (1459 : Paznari), au pied du mont Meleg, d'où, en suivant les anciens cours d'eau, l'on arrive au lieu-dit Pâzmând sur le Danube, ainsi que les deux Pâzmâny sur le territoire du ducatus de Bihar, dont l'un se trouve au bord des marécages de Sârrét (1299 : Paznari) et l'autre sur les sables du Nyirség (1349 : Pozman).3bi Tels sont encore les couples de résidences conservant les noms du chevalier Orci et de Vencelin et son fils Râd. (Voir Carte 19.) De telles résidences, avec leur appareil économique, avec leurs agglomérations dans les 350 Pour les villes des nomades voir Gy. Gyôrffy, Cahiers de civilisation médiévale 12 (1969), 255-256. 361 Voir note 5. 362 L. Ligeti, MTT, N° 180, 185, 186 et surtout P. Pelliot - L. Hambis, Histoire des campagnes de Gengis Khan, I, 85-86. 853 Les preuves archéologiques en sont données par Dienes dans Mâra Ferenc Muzeum Évkônyve 1964-1965, 98-99. Csânki III, 342; J. Lipszky, Repertorium; Gyôrffy, I, 511; Csânki, I, 523.
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montagnes et dans le plat-pays, étaient aussi accordées aux églises. Au début du règne des Ârpâdiens, le don de ces résidences était un mode très répandu de fondation d'églises.355 Acquises par le nouveau propriétaire, elles recevaient en général un nouveau nom. Toutefois, la persistance du système des doubles résidences, ainsi que la transformation de nombre de résidences d'hiver en domaines de famille, montrent que la propriété des domaines en Hongrie se constitua organiquement sur la base de la propriété de caractère nomade, des pâturages et des résidences où la classe dirigeante des beg (en vieux-hongrois : bo), propriétaire des pâturages et des résidences, aidée de sa suite militaire des iobagiones, obligeait les semi-libres et les prestataires, qui dépendaient d'elle, à fournir régulièrement des contributions en produits et en travail.356. 356 356
Gyôrffy, Archivant Historiae Pontificiae 7 (1969), 99. Cf. I. Dienes, Les Hongrois conquérants, Budapest, 1972, 32 et suiv.
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GY. GYÖRFFY
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SYSTÈME DBS RÉSIDENCES D'HIVER ET D'ÉTÉ
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99
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# O
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Résidences des fils d'Ârpâd Résidences des membres de la famille Fort
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GY. GYÓRFFY
\Hoba 'Szemere
)Arrabona Gyór
Szemere
Raba,
r^M Szemere jT" / •• •• " / *Gyomoro
O" Brigef/o Szony
108
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SYSTÈME DES RÉSIDENCES D ' f f l V E R ET D'ÉTÉ
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110
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