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French Pages [94] Year 2013
Michel-Alain Mombo
mort et ascension de pharaon en Égypte ancienne (2778-2263 av. J.-C.)
MORT ET ASCENSION DE PHARAON EN ÉGYPTE ANCIENNE (2778-2263 av. J.-C.)
Du même auteur, chez L’Harmattan : Le pouvoir du roi d’Égypte d’après la spiritualité pharaonique (2778-1085 av. J.-C.).
© L’Harmattan, 2013 5-7, rue de l’École-polytechnique ; 75005 Paris http://www.librairieharmattan.com [email protected] [email protected] ISBN : 978-2-343-00519-5 EAN : 9782343005195
Michel-Alain MOMBO
MORT ET ASCENSION DE PHARAON EN ÉGYPTE ANCIENNE (2778-2263 av. J.-C.)
Collection IREA Collection dirigée par David Gakunzi Fournir des clés permettant de mieux comprendre l'Afrique, son histoire, ses réalités et mutations actuelles, ainsi que sa géopolitique, voilà l'ambition de cette collection de l'IREA (Institut de recherche et d'études africaines). La collection - qui réunit aussi bien des essais, des monographies que des textes littéraires issus des travaux et des débats animés par l'Institut - a pour vocation de faire connaître au grand public les travaux d'auteurs confirmés mais également ceux de jeunes talents encore méconnus. Les ouvrages de la collection sont rédigés dans une langue conviviale, vivante et accessible.
Dernières parutions Méthode GAHUNGU, Burundi et Rwanda : réconcilier les ethnies, 2012. Emmanuel Nguélondélé Mongo, Au service du Congo. Entretien avec Cyriaque Mongo Dzon, Tome 1, 2012. Emmanuel Nguélondélé Mongo, Au service du Congo. Entretien avec Cyriaque Mongo Dzon, Tome 2, 2012. René N’Guettia KOUASSI, Les défis du développement de l’Afrique contemporaine, 2012. Joao Maria Futi, Essai de morphologie lexicale du Cisuundi du Cabinda (Angola), 2012. Philippe Duval, Côte d’Ivoire. Chroniques de guerre 2002-2011, 2012. Brian Tourré, De la « Francafrique » à la « Chinafrique », 2012. Théophile Obenga, L’État fédéral d’Afrique noire : la seule issue, 2012. Jean-David N’Da, Le nouvel ordre ivoirien, 2012. Roger Gballou, Côte d’Ivoire : souveraineté bafouée, 2011. Calixte Baniafouna, La démocratie de l’ONU en Côte d’Ivoire, 2011.
A mes enfants
« Regardez en haut, vous, les dieux qui êtes dans l’au-delà. Le roi Ounas est arrivé, devenu un grand dieu, de sorte que vous puissiez le voir. » Textes des Pyramides des anciens Egyptiens, formule 252, chapitre 272-274.
AVANT-PROPOS L’épreuve, quelles que soient les circonstances dans lesquelles elle se produit, a une dimension qui l’apparente au sacré, en ce sens qu’elle attire et repousse en même temps. Il n’est pas inutile de souligner que la facette sacrée de l’épreuve ne fait pas appel à notre force physique, même si celle-ci peut se révéler nécessaire. Pour être vécue intensément et être surmontée, l’épreuve sollicite, en premier, la force mentale et par-delà tout, l’étincelle spirituelle qui couve en nous tout en nous rappelant le devoir de nous élever au niveau de la divinité. Dans les Textes des Pyramides des anciens Egyptiens, une formule invite pharaon à se lever pour « voir ce qu’Horus, son fils, a fait pour lui »1. La perfection ou les caractéristiques du dieu 1
Textes des Pyramides des anciens Egyptiens, formule 670, chap. 1975. Nous savons qu’Horus est le fils d’Osiris et d’Isis, des personnages de l’Ennéade d’Héliopolis. Il s’agit, par conséquent, des membres de la lignée divine, selon la cosmogonie d’Héliopolis. Ce qui signifie en clair que le roi se rattache, par ce fait même, à la lignée divine, d’autant plus qu’il prend la place d’Osiris, ce qui fait de lui – symboliquement - le père d’Horus. Il acquiert la perfection et toutes les autres caractéristiques d’Osiris. Pour approfondir la question des liens entre Horus et pharaon, lire: Thomas George Allen, Horus in the Pyramid Texts, A Private Edition Distributed by The University of Chicago Libraries, 1916. Tout récemment (03 décembre 2012), une thèse a été soutenue à Paris, à l’Ecole Pratique des Hautes Etudes (EPHE), portant sur l’œil-Oudjat. Nous savons que cet œil est étroitement lié à Rê et Horus (œil d’Horus). Cette étude a bien montré que l’œil-Oudjat est en rapport avec la bonne marche de l’Egypte et du monde. Il a donc une dimension cosmique qui le rattache à Hathor et Horus. Or, nous savons aussi que l’une des prérogatives majeures de pharaon est de protéger l’Egypte et veiller sur son rayonnement sur la terre et dans l’univers. Pour plus de détails sur l’œil-Oudjat, cf. Noémi Villars, L’offrande de l’œil-oudjat dans les temples d’Egypte gréco-romaine, thèse de doctorat, Paris, EPHE, 2012.
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Osiris sont intégrées dans la physiologie de la personne de pharaon qui devient, par la magie des rites2, le père d’Horus. Ce qui revient à dire que la perfection émanant de la divinité est indispensable dans l’exercice du pouvoir. Trois mille ans après la civilisation pharaonique, Jésus le Christ demandait à ses disciples « d’être parfaits comme leur père céleste est parfait »3, afin de mériter le royaume de Dieu. Si la perfection4 n’était pas nécessaire, cette recommandation n’aurait pas été formulée en des termes aussi directs. Pour ce faire, tout porte à croire que l’épreuve imprime en l’homme la détermination d’aspirer à plus grand que lui. Un proverbe asiatique stipule que « l’homme est le fils de l’obstacle ». C’est en surmontant les épreuves (obstacles) que l’homme acquiert la force nécessaire pour aller au-delà de l’humain et s’apparenter à la divinité. De même que l’oiseau, pour avancer, est condamné à voler surtout lorsque les vents sont contraires, de même pharaon se rattache à la lignée divine pour s’approprier les qualités démiurgiques. Les récits mythologiques5 y contribuent ; l’action des clergés6 l’y aide.
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Sur le rite, nous préférons l’approche de P. Legendre : « […] Stipuler le rite en tant qu’ordre, mais non pas sous un statut vaguement qualifié de juridique, mais en tant qu’ordre de la parole. […] ». In « Légalité du rite », Essai sur le rituel II, Colloque du centenaire de la Section des sciences religieuses de l’Ecole Pratique des Hautes Etudes, sous la direction de : Anne-Marie Blondeau et Kristofer Schipper, LouvainParis, 1990, p. 17-18. Le groupe de mots « ordre de la parole » s’applique bien à la civilisation de l’Egypte ancienne où la parole joue un rôle déterminant à toutes les étapes de la vie. 3 Bible, Evangile selon Saint Matthieu, chap. 5, verset 48. 4 La divinité, dans toutes les théologies, est toujours présentée comme un modèle de pureté et de perfection. Le roi acquiert cette perfection par sa filiation divine. 5 Le mythe de Rê qui se crée lui-même ; le mythe d’Osiris et Seth ; le mythe du meurtre et de la résurrection d’Osiris, etc.
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Toutefois, il est impossible de s’approcher de la nature divine sans fournir le moindre effort. L’effort devient alors une pièce théâtrale qui se joue sur une scène truffée d’embûches : ce sont les épreuves qui élèvent l’être humain et font de lui un dieu. Dans notre approche, la gestion de la nature divine devient la septième épreuve de pharaon, au sens où ce statut implique des responsabilités à assumer, si le roi veut continuer à tenir la barre du navire du pouvoir. Ces responsabilités, assumées véritablement, confèrent au souverain d’Egypte le statut d’ancêtre pour l’ensemble des Egyptiens et de nsw7 non seulement pour l’Egypte, mais aussi pour l’ensemble de l’univers. La septième épreuve débouche donc sur la réalisation d’un projet immense : l’éveil de la parcelle divine en l’Homme ; d’abord dans la personne du roi, ensuite dans l’âme du peuple tout entier. Dans l’Egypte ancienne, cette donnée prend une tournure exceptionnelle. En effet, pharaon n’est pas seulement roi d’Egypte, il est le souverain maître de toutes les nations et de tous les peuples parcourus par la lumière de Rê, le dieu soleil qui préside à la création de toutes choses. Le roi égyptien a une vocation universelle. La septième épreuve est un programme de souveraineté : l’Egypte est la propriété privée des dieux. Par conséquent, seuls des êtres divins peuvent la diriger.
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Pharaon est le grand prêtre de la religion égyptienne. Comme il ne peut pas être partout à la fois, il nomme des grands prêtres qui le représentent à la tête des temples. 7 C’est le roi en égyptien ancien.
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INTRODUCTION Dans les Textes des Pyramides des anciens Egyptiens, les formules magiques rivalisent en précision pour dire que le roi d’Egypte ne meurt pas, il est un excellent candidat à la résurrection. Le message spirituel de ce corpus peut être résumé par la formule suivante : « Osiris le roi, les âmes de Pe t’applaudissent ; elles te disent : Osiris le roi, tu es parti, mais tu reviendras, tu t’es endormi, mais tu t’éveilleras ; tu es mort, mais tu vivras. Lève-toi et vois ce qu’Horus, ton fils, a fait pour toi »8.
Dans cet extrait des Textes des Pyramides, apparaît déjà la personne d’Osiris, « […] Une autorité dépositaire de la puissance monarchique dans le domaine funéraire et détenteur d’une fonction éminemment juridique. »9.
Osiris émerge sur la scène politico-religieuse de l’Egypte à l’aube de la Ve10 dynastie et tout défunt, pour survivre, doit s’approprier l’héritage rituel de ce dieu. Pharaon en est le premier héritier en tant que représentant des dieux et maillon invisible de l’Ennéade.
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Textes des Pyramides des anciens Egyptiens, formules 670, chapitres 1975-1976. 9 B. Mathieu, « Mais qui est donc Osiris ? Ou la politique sous le linceul de la religion », ENIM 3, 2010, p. 79. 10 B. Mathieu, op. cit., p. 78.
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Dès l’Ancien Empire (2778-2263 av. J.-C.), les textes religieux relatifs à la vie après la vie11 présentent l’au-delà comme le lieu de la continuation de la vie terrestre. Toutefois, cet au-delà n’est réservé qu’à pharaon et aux membres de sa famille, à cette phase de l’histoire de l’Egypte. Pharaon, fils et représentant des dieux sur le trône d’Egypte, rejoint – tout naturellement – ses parents dans l’autre monde. Or, l’univers baigne dans les eaux primordiales du Noun12. Le roi d’Egypte se voit dans l’obligation de prendre les barques13 de Rê pour effectuer le voyage de l’au-delà. Assimilé au Nil14, pharaon distribue la vie au même titre que les eaux nourricières de ce fleuve unique. Ainsi, comme le fleuve auquel il se configure, le roi ne rentre pas dans la vie en éternité sans surmonter les obstacles qui se dressent sur son chemin. D’ailleurs, les rites funéraires des anciens Egyptiens jouent le rôle d’un sacrifice propitiatoire, en ce sens qu’ils doivent déblayer au maximum le chemin menant à la vie en éternité. Pour le Nil, ces obstacles s’appellent
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Pour les anciens Egyptiens, la mort physique n’est pas la mort, elle est le passage d’une vie à une autre ; de la vie terrestre à la vie en éternité dans l’au-delà. C’est pourquoi, au lieu de dire « la vie après la mort », il est judicieux de dire « la vie après la vie ». La mort physique n’est qu’une césure entre la vie (terrestre) et la vie (dans l’au-delà). Elle ne les arrête pas. Seule la seconde mort ou la mort définitive qui a lieu dans les salles d’abattage de l’au-delà, met fin aux fonctions vitales du corps. 12 Le Noun est considéré par les anciens Egyptiens comme le fleuve primordial d’où surgit Rê qui s’est créé lui-même. 13 Rê, le démiurge d’Héliopolis, dispose de deux barques : la barque diurne et la barque nocturne. Ces barques sont utilisées par les défunts qui font le voyage de la vie après la vie. Pour accéder à ces barques, il faut connaître les noms des entités divines qui les régissent. 14 Pharaon est assimilé au Nil par le biais de la personne d’Osiris dont le retour était symbolisé par la venue annuelle de la saison de l’inondation.
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cataractes ; pour le roi, ils revêtent divers noms15 se rapportant tous à la mort, mais aussi à la mythologie qui est une dimension essentielle de la civilisation égyptienne. De même le Nil ne devient réellement le dieu Hâpy et un fleuve tranquille qu’après avoir vaincu les six cataractes, de même pharaon n’atteint la condition divine qu’en déjouant les pièges tendus sur le chemin menant à l’audelà. Des rites tels que le replacement et le témoignage du cœur du défunt16, la pesée de l’âme17… rappellent qu’il n’y a pas de vie éternelle sans épreuves. Dans cette perspective, Lanczkowski écrit : « Dans le cartouche des pharaons tels que Horemheb, Ramsès II, Amenmes... se trouve gravée l’expression Sétépen-Râ « est éprouvé par Râ »18.
Hiéroglyphe sétépen-Râ « est éprouvé par Râ ».
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Les obstacles que le roi rencontre sur le chemin menant au ciel lumineux de Rê sont multiformes. Il s’agit, entre autres, des génies malfaisants, de la faim, de la soif, du crocodile sobek, d’Apophis, etc. 16 « Formule pour empêcher qu’on enlève à N. son cœur dans l’empire des morts. Paroles dites par N. : O vous qui enlevez les cœurs, vous qui dérobez les viscères du cœur, vous qui faites se manifester le cœur de l’homme dans ce qu’il a fait, alors qu’il ne se reconnaît pas par suite de ce que vous avez fait, salut à vous, maîtres de l’éternité, organisateurs de la pérennité ! […] ». P. Barguet, Le Livre des Morts des anciens Egyptiens, Paris, Cerf, 1967, p. 72-73. 17 La psychostasie présidée par Osiris assisté par Thot, est une étape redoutable de la vie après la mort dans l’Egypte ancienne. 18 Lanczkowski, Zur ägyptischen Religionsgeschichte des mittleren Reiches. Das Gespräch zwischen Atum und Osiris. Leiden-Cologne, 1953, p. 32.
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Le symboole du soleiil (le cercle avec un poiint en son milieuu) est bien présent. p
R Lee dieu Rê ou Râ.
Khepri
Nous propossons ci-dessus la transscription hiéroglyphiquue N d mot Kheppri19, l’une des appellaations du diieu Rê. On y du l signes suivants : le trrouve, clairrement meentionnés, les p placenta qui renvoiee à la naissaance de toutt être vivantt ; lee scarabée , le symbbole égyptieen de la traansformation, siigne solairre par exccellence. Ill indique que par lees l sse trransformatioons (en égyptien Khprw), l’homme reenouvelle et finit par aatteindre l’éttat divin. Poour les autrees siignes, le leecteur pourrra consulteer, à toutess fins utilees, C ou redécouvrrir n notre contribution inttitulée « Couvrir p pharaon »20. s processuus Si pharaon ne S n subissait aucune épreuve dans son mention (m mis à l’épreeuve par Rââ) d divinisatiion, cette m de nt au côté des noms dde n n’aurait pas figuré ausssi clairemen certains roiss. Mieux, uun adage cité dans pllusieurs payys d d’Afrique nooire stipule : « Les éprreuves forggent l’âme dde
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Le mot Khepri est beauucoup plus uttilisé pour déésigner le soleeil leevant. 200 p : une M.-A. Mombo, M Couuvrir ou reedécouvrir pharaon gypte d’après la spiritualiité innterprétation du pouvoir du roi d’Egy phharaonique (22778-1085 av.. J.-C.), Paris,, L’Harmattann, 2013.
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l’initié ». C’est en surmontant les obstacles que pharaon devient réellement fils de Rê. Par ailleurs, en analysant les formules des Textes des Pyramides, nous découvrons que les pyramides21 à degrés symbolisent aussi les marches que pharaon devait gravir pour accéder au ciel, à l’image d’un escalier dont on se sert pour atteindre les hauteurs qui nous éloignent du traintrain quotidien. Mais, peut-on gravir des marches sans fournir d’efforts22 ? Est-on réellement seul lorsque la volonté d’aller plus haut que soi s’impose ? Pour cette raison, il ne serait pas maladroit d’établir un lien, sur ce point précis, entre les marches des pyramides23 et l’échelle du songe de Jacob24. L’échelle est le signe visible de la 21
Nous rappelons que la pyramide est un attribut solaire, au même titre que l’obélisque qui est la matérialisation du soleil sur la terre. 22 Nous aurions pu écrire « sans avoir le sentiment d’être mis à l’épreuve » ? Ici, l’épreuve a pour, entre autres missions, de tester les connaissances (le degré de divinité) du roi. C’est par l’effort (l’épreuve) que l’on s’élève. Le système éducatif en vigueur dans de nombreux pays francophones, a donc raison de mentionner sur les polycopiés d’examens la mention « épreuve d’Histoire, de philosophie, de mathématiques, etc. ». Car il s’agit bien d’épreuves destinées à vérifier le savoir et les connaissances des apprenants. 23 Si tant est que nous puissions considérer la pyramide comme un gigantesque escalier. 24 Le récit de l’échelle de Jacob est rapporté dans le livre de la Genèse au chapitre 28, verset 12. Cette échelle dont le sommet touchait le ciel avec les anges qui montaient et descendaient, est aussi le lieu où Yahvé se tenait devant Jacob. Si nous admettons l’hypothèse selon laquelle le Pentateuque (les cinq premiers livres de la Bible) est l’œuvre de Moïse, le lien entre l’échelle de Jacob et les marches de la pyramide à degrés, peut être établi. En effet, la culture et l’éducation égyptiennes de Moïse ne sont plus à démontrer. Moïse fut un prince égyptien, élevé dans la cour de pharaon, initié aux mystères d’Osiris. Par conséquent, en écrivant ces récits, Moïse ne pouvait que puiser dans le fonds culturel qui était le sien : la civilisation de l’Egypte ancienne. Peut-on, honnêtement, nier cette vérité historique ?
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détermination de l’homme à s’élever, à sortir de l’ordre humain pour atteindre la condition divine. Elle est aussi, pour cette raison, le lieu de la rencontre de l’homme avec les entités divines. Au sujet de l’échelle de Jacob, il est question des anges qui montent et descendent. Pour pharaon, lors du voyage de l’au-delà, les entités divines Hou et Sia25 sont constamment présentes dans les barques de Rê. L’échelle implique donc un changement physiologique s’exprimant au travers d’un mouvement ascensionnel qui met pharaon sur le sillage du divin : c’est la voie d’Osiris, débouchant sur la résurrection du roi qui se sert d’un moyen (l’échelle, l’escalier, l’aile d’oiseau, etc.) présent dans le monde des vivants sur la terre. Pour illustrer notre propos, cet extrait des Textes des Pyramides vient à point nommé : « Le potier divin Khnoum a également fabriqué une échelle qui permet au roi de grimper au ciel en son nom de « montée au ciel ». Râ fabrique aussi pour le roi une échelle de lumière…A la fois « échelle de Dieu », « échelle d’Horus », « échelle de Seth », elle comporte sur son côté gauche, l’aile de Thot… »26
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Hou représente le verbe et Sia la connaissance. L’un ne va pas sans l’autre. Car, ne peut se servir du verbe que celui qui a la maîtrise de la connaissance. Le verbe qui crée présuppose des connaissances bien assises, dans toute l’acception de ce mot. Le binôme Hou et Sia vient nous confirmer la dualité en vigueur tout au long de l’histoire de la civilisation de l’Egypte pharaonique : la Haute et la Basse Egypte, l’Orient et l’Occident, la terre et l’au-delà, la vie et la mort, etc. Nous pourrions ajouter avec Charles Mopsik que ce verbe est l’incarnation d’une parole « faite rectrice, capable de manifester ici-bas la volonté divine ». C. Mopsik, « Pensée, voix et parole dans le Zohar », Revue de l’histoire des religions, tome 213, fascicule 4, Paris, PUF, octobre – décembre 1996, p. 398. 26 Extrait des Textes des Pyramides, in Dieter Muller, « An early egyptian Guide to the Hereafter », JEA 58, p. 102.
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Thot, le greffier des dieux, est aussi le patron des scribes et des hommes de culture. Il est l’incarnation parfaite de la connaissance. Sa présence sur le côté gauche de l’échelle témoigne des connaissances assimilées par pharaon avant d’entreprendre le voyage de l’au-delà. C’est également la preuve qu’Osiris a jugé positivement le roi. L’aile gauche, faut-il le rappeler, dans l’anatomie du corps humain, est aussi le côté du cœur, l’organe siège de la vie. C’est pourquoi notre préoccupation majeure est de susciter la réflexion en mettant en exergue les points de questionnement que tout lecteur averti et attiré par l’égyptologie, peut observer en lisant les Textes des Pyramides et tous les commentaires qui s’y rapportent. Nos préoccupations sont immenses. Elles sont à l’image des Textes des Pyramides, un corpus parfois complexe, au contenu polychrome et difficile à cerner dans une seule étude. Toutefois, pour orienter27 la réflexion, la démarche impose que soient mentionnées les interrogations d’où partent l’analyse et l’effort de réflexion. - L’échelle et les autres moyens d’ascension sont clairement mentionnés dans les Textes des Pyramides des anciens Egyptiens : quelles sont leurs attributions ? - Les moyens d’ascension illustrés dans les Textes des Pyramides renvoient-ils à la résurrection de pharaon cachée sous l’allégorie d’un mouvement ascensionnel ? - Ces moyens d’ascension visent-ils un changement de statut social et physiologique sur la personne de pharaon ou renferment-ils un contenu plus composite? - Pharaon doit-il devenir dieu ? Pour quel but ? - Le statut divin conféré à pharaon par la voie d’Osiris, ne représente-t-il pas une épreuve supplémentaire, que nous appelons ici « la septième épreuve du roi » ou la marche 27
Orienter dans le sens d’indiquer la direction d’où émane la lumière qui viendrait éclairer les débats.
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invisible de l’échelle, si tant est que l’échelle à six marches soit un symbole renvoyant à six épreuves ? Ces indications n’ont rien de dogmatique ; elles ne font qu’indiquer un chemin.
Pour apporter des réponses pertinentes à ces questions, notre analyse s’appuie sur le document de base que sont les Textes des Pyramides des anciens Egyptiens28 qui ont fait l’objet de plusieurs traductions. La version utilisée ici est la traduction anglaise de R. O. Faulkner29. Nous avons enrichi notre réflexion par l’examen d’autres versions30 et, surtout, en transcrivant et traduisant nous-mêmes31 plusieurs passages en hiéroglyphes. Le recours aux Textes des Sarcophages32 et au Livre des Morts des anciens Egyptiens33 a été utile, dans le but de mettre en exergue les textes parallèles renvoyant aux moyens d’ascension. Aux fins de donner plus de clarté à l’analyse, l’exploration d’un 28
Les Textes des Pyramides, faut-il le rappeler, furent gravés sur les murs des pyramides du roi Ounas de la fin de la Ve dynastie et figurent dans les règles des souverains de la VIe dynastie. Ils sont le plus ancien corpus relatif à la littérature religieuse et funéraire de l’Egypte ancienne connu de nos jours. La version hiéroglyphique reconstituée existe et bénéficie de nombreuses traductions toujours aussi pertinentes les unes que les autres. 29 R.O. Faulkner, The Ancient Egyptian Pyramid Texts, Oxford, Clarendon Press, 1969. 30 C. Carrier, Textes des Pyramides de l’Egypte ancienne. 3 tomes, Paris, Cybèle, 2009. Nous avons aussi fait recours à quelques ouvrages de références et de concordances : R. Grieshammer, Die altägyptischen Sargtexte in der Forschung seit, 1936. // Cl. CrozierBrelot, Textes des Sarcophages. Index des citations, Paris, 1972. 31 Les extraits des Textes des Pyramides rapportés en français ont été traduits par nous. Lorsque la traduction française n’est pas de nous, les références de l’ouvrage d’où elle est extraite sont tout de suite données. 32 P. Barguet, Textes des Sarcophages Egyptiens du Moyen Empire, Paris, Cerf, 1986. 33 P. Barguet, Le Livre des Morts des anciens Egyptiens, Paris, Cerf, 1967.
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nombre important de documents spécialisés, œuvres d’égyptologues34 de renom, s’est avérée nécessaire. Les commentaires et les traductions se rapportant aux Textes des Pyramides sont nombreux et apportent de la matière à la réflexion. Ils indiquent que la civilisation pharaonique est presqu’insondable. Ceci constitue une difficulté pour l’historien, en raison de la quantité écrasante de sources et de la multidisciplinarité des approches. Aucun chercheur ne peut donc afficher la prétention d’avoir épuisé une question relative à un trait de la vie des anciens Egyptiens. Cette contribution tente, avec les moyens qui sont les siens, de suivre le chemin sinueux de la réflexion qui rapproche du fond du puits, dans le but de débusquer, peut-être, le trésor qui fait avancer la connaissance.
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Nous pouvons citer quelques-uns d’entre eux : D. Valbelle, B. Mathieu, J. Vercoutter, S. Morenz, C. Lalouette, C. Zivie-Coche, C. des Roches Noblecourt, P. Vernus, etc.
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CHAPITRE I La vie après la mort physique sous l’Ancien Empire (2778-2263 av. J.-C.) La principale caractéristique de cette période, est que l’audelà est exclusivement réservé à pharaon. Les membres de sa famille sont intégrés dans ce processus aux fins de respecter le principe de la continuation de la vie terrestre après la mort physique. L’Ancien Empire est aussi la période de l’affirmation d’Osiris35 comme patron de la résurrection et détenteur légitime du trône de l’Egypte. Pharaon est alors présenté comme le fils d’Osiris, un nouvel Horus. Dans le chapitre 553 des Textes des Pyramides nous pouvons lire la formule suivante :
jr n f jr .t n jt f Wsjr A été accompli pour lui ce qui avait été accompli pour son père Osiris36. Enfin, l’Ancien Empire est le temps de la montée en puissance du clergé de Rê à Héliopolis sous la Ve dynastie composée de rois « d’origine solaire », autrement dit fils de Rê. Ce clergé a élaboré les Textes des Pyramides où pharaon et Osiris se complètent37 et s’affirment. Il donne aussi des indications sur la direction à suivre pour atteindre l’autre monde, le ciel lumineux de Rê. Les rois de la Ve dynastie (2563-2423 av. J.-C.) soutenaient que la 35
B. Mathieu, op. cit., p. 77. Textes des Pyramides, formule 553. 37 Pharaon crée Osiris et Osiris crée pharaon. En réalité, leurs pouvoirs s’interpénètrent et finissent par signifier une seule et même chose. 36
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vie n’est possible qu’en Rê. Il est d’ailleurs clairement indiqué que le dernier roi de cette dynastie a un nom chargé de symbole. En effet, Ounas, dernier roi de la Ve dynastie, a un nom formé de la racine oun (wn) qui signifie existence et de la particule enclitique is employée pour renforcer une affirmation ou mettre en valeur un substantif. Oun-is (wn-is) signifie donc « c’est l’existence même »38. Le récit de la naissance des rois de la Ve dynastie est rapporté dans le Papyrus Westcar39, conservé au British Museum à Londres. Cette profusion d’images propres à la civilisation de l’Egypte ancienne, cette dilation de l’analogie, ne doit pourtant pas masquer le fond de la conception qui l’anime. Elle est, en réalité, sous-tendue par l’idéologie du pouvoir en Egypte qui fait de pharaon l’image vivante de la divinité40 sur terre. Il est en mission pour les dieux maîtres de la création. Dès lors, la création ne peut plus être perçue comme un accident qui se surajouterait au démiurge (créateur), elle est ce par quoi et ce en quoi celui-ci accède à l’existence. En un mot, la beauté et le caractère composite de la création témoignent de l’existence du démiurge. Dans cette perspective, le roi devient l’être le plus sublime de la création, le témoignage vivant de la présence du démiurge au milieu de son œuvre. C’est pourquoi, le roi ne meurt pas ; il monte, se fond dans sa source première où il retrouve les dieux, ses parents.
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Pour le comprendre avec force détails, l’on peut se référer aux documents de la grammaire de l’égyptien classique, publiés par la Bibliothèque d’Etudes de l’Institut Français d’Archéologie Orientale (IFAO). 39 Les faits du Papyrus Westcar sont rapportés par : P. du Bouguet, Contes de la Vallée du Nil, Paris, C. Tchou, éditeur, 1968, pp. 85-90. 40 Le nom du roi Tout-Ankh-Amon est très illustratif sur ce point, car il signifie « image vivante du dieu Amon ».
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La situation géographique de l’au-delà selon les Textes des Pyramides Pour situer géographiquement le lieu où se déroule la vie de l’homme après la mort physique, il importe d’examiner les deux principales données de la religion égyptienne. Il s’agit de : - La synthèse solaire élaborée à Héliopolis, qui rapportait toute la théologie du salut au dieu Rê. Selon cette synthèse, le défunt ne peut savourer la vie éternelle qu’en contemplant Rê chaque jour. Cette synthèse est largement développée dans les Textes des Pyramides, d’autant plus qu’ils sont l’œuvre du clergé d’Héliopolis. Ici, l’homme a besoin de la lumière du soleil pour vivre par-delà la mort. Cette synthèse corrobore l’idée selon laquelle, vu de la terre, aucune vie n’est possible sans le soleil. - La synthèse osirienne établit une ligne directe entre le salut éternel et Osiris. Celle-ci est également mentionnée dans les Textes des Pyramides, puisque par la magie des rites, tout défunt devient un Osiris en puissance. Les Textes des Sarcophages et le Livre des Morts ne déparent pas sur ce point. A y regarder de près, on conviendrait volontiers que Rê et Osiris finissent par désigner une seule et même entité, au sens où ils rappellent l’Ennéade d’Héliopolis et possèdent la faculté de conférer la vie en éternité. De l’action conjuguée de Rê et d’Osiris découle le salut pour tout défunt qui aura respecté leurs principes durant sa vie terrestre.
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De l’étude de ces deux synthèses41 et en nous basant sur les textes funéraires élaborés à Saqqara (Textes des Pyramides), il ressort que la vie post mortem se déroule tantôt dans le monde souterrain, tantôt dans le monde céleste ou astral. Il y a d’une part l’au-delà souterrain ou la Douat (l’empire des morts) et, d’autre part, l’au-delà céleste, le lieu d’expression de la splendeur de Rê42. Toutefois, il n’y a qu’un seul au-delà dont le souterrain et le céleste ne constituent que des étapes43. Il convient de signaler que dans les Textes des Pyramides c’est l’au-delà céleste qui prime : le roi veut siéger au côté de son père Rê. L’au-delà souterrain correspond au lieu où le soleil se couche, disparaît à l’horizon, pour paraître, demain, renouvelé. L’au-delà céleste serait donc l’équivalent du point où le soleil brille dans toute sa splendeur, c’est le siège de la communion avec les dieux. Ainsi, s’agissant de la première étape de la vie après la mort (la Douat), elle symbolise les ténèbres du tombeau, le déclin du soleil, le lieu d’une nouvelle naissance44. Dans la Douat, avec l’aide 41
Pour notre part, nous pensons que ces deux synthèses sont complémentaires et indissociables : Rê ouvre les portes de son royaume au défunt ; Osiris lui confère le statut d’un ressuscité. 42 Il s’agit bel et bien de deux lieux distincts intégrés dans un même ensemble géographique (au-delà), d’autant plus que d’un point à l’autre, Rê se sert de ses barques (diurne et nocturne) pour se déplacer. 43 Ces étapes de l’au-delà soulèvent, en filigrane, la notion de paysage religieux, d’autant plus que la description du pays où se déroule la vie après la mort épouse les contours du paysage agraire de la vallée du Nil. Pour J. Scheid et F. de Polignac, « La notion de paysage religieux naît de la constatation que le culte et les rites n’existent qu’en tant qu’ils sont ancrés dans l’espace, que ce soit de manière stable ou provisoire ». In Revue de l’histoire des religions, tome 227, fascicule 4, octobre – décembre 2010, p. 431. 44 R.O. Faulkner, op. cit., utterance 218, §165-166, p. 45. La Douat étant le lieu d’une nouvelle naissance, à l’époque prédynastique (3500 av. J.-C.) déjà, les anciens Egyptiens enterraient leurs morts dans la position fœtale. L’homme porté en terre était alors assimilé au fœtus dans le ventre de sa mère, attendant une nouvelle naissance.
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des rites et des formules funéraires, le défunt lutte pour se débarrasser des impuretés de la mort, renouveler ses énergies et renaître au jour au même moment que le soleil. Pour sortir de la Douat et accéder à l’au-delà céleste, le défunt doit faire usage des barques de Rê, pourvu qu’il parvienne à ouvrir la porte45 : « […] Ouvrez-moi le chemin, gardiens de la Douat ! Je suis quelqu’un à la parole efficace, à la puissance magique intacte, maître d’offrandes nourricières lors de la réception des dons […] »46.
En effet, selon la synthèse solaire, l’homme ne peut triompher de la mort qu’une fois plongé dans la nuit du tombeau47, à l’image de Rê (le soleil) qui entre dans le ventre de Geb48 pour paraître renouvelé chaque jour. L’état de gestation dans la Douat doit conduire le défunt de l’univers des ténèbres à celui de la vie totale. Cet aspect de la religion de l’Egypte pharaonique nous rappelle que l’homme ne peut mieux définir la lumière qu’après avoir assumé l’expérience de l’obscurité. Ainsi s’exprime la fameuse théorie de la conciliation des contraires véritables piliers de la vie sous toutes ses formes. Au sujet des contraires, il s’agit, en réalité, de deux blocs qui se complètent, car l’un ne peut pas réellement fonctionner
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Ce sont les connaissances (symbolisées par l’entité divine Sia) qui confèrent au défunt la capacité d’ouvrir les portes. 46 P. Barguet, Les Textes des Sarcophages égyptiens du Moyen Empire, Paris, Cerf, 1986, spell 237, p. 55-56. 47 C’est la théologie chtonienne, celle qui met en exergue la place du tombeau dans l’accession à l’au-delà. Pour cette théologie, le tombeau doit être bien entretenu, il est la « maison des millions d’années », selon les anciens Egyptiens. 48 Geb, c’est la déesse terre, c’est la terre tout simplement.
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sans l’autre, et c’est l’union des deux qui harmonise l’ensemble49. Ainsi, Rê peut combattre Apophis, le mettre hors d’état de nuire, le repousser sans cesse, mais il ne peut pas le supprimer. L’image du serpent géant (Apophis) devient le symbole à travers lequel s’expriment la force et la capacité de Rê à maintenir l’ordre dans l’univers. Apprivoiser continuellement le mal donne sens à l’effort de renouvellement de la vie sous toutes ses formes, car c’est de la prise de conscience de la présence de l’impureté que naît la volonté de se purifier et de se surpasser. Par ailleurs, pour montrer que la vie après la mort ne s’arrête pas au monde souterrain, les textes funéraires égyptiens50 nous apprennent que le défunt est aussi appelé à 49
Ce principe s’applique aussi dans les équations de Boole en Mathématiques. Il faut une parfaite adéquation entre l’énoncé de l’équation et sa solution. « On dit qu’une équation est vérifiée, ou satisfaite, pour certaines valeurs des inconnues si, lorsque les inconnues sont remplacées par ces valeurs, les expressions situées de part et d’autre du signe égal sont équivalentes. Par exemple, l’équation 2x + 5 = 13 est vérifiée pour x = 4. […] ». Cf. dictionnaire Encarta. Dans tous les cas, il importe que les deux parties de l’équation situées de part et d’autre du signe égale aient un sens et se valent. 50 Voici quelques textes qui montrent l’arrivée du défunt au ciel de Rê : - «The messengers of your double come for you, the messengers of your father come for you, the messengers of Re come for you, so go after your sun and cleanse yourself, for your bones are those of the divine falcons who are in the sky […].» R. O. Faulkner, op. cit., utterance 214, §§136-137, p. 41. - « […] Quand tu montes au ciel, tu grimpes derrière Chou. Monte, monte ! Monte vers ta maison en étoile qui est sur ta maison ! Arrache tes enfants au deuil ! Fais croître ton jardin sur terre, éternellement. » In P. Barguet, Textes des Sarcophages, op. cit., spell 516, p. 137. - « […] Tu es monté au ciel, tu as traversé les eaux célestes, tu t’es associé aux étoiles, et on fait pour toi des acclamations dans la barque ; tu as été appelé dans la barque du jour, (de sorte que) tu
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séjourner dans le ciel de Rê. C’est à cet instant, nous semble-t-il, que le défunt acquiert véritablement le titre d’Osiris N51. Il devient, de ce fait, un dieu cosmique capable de distiller la lumière autour de lui, comme Rê. Cette interprétation nous met de plain-pied avec la synthèse osirienne, cette autre facette de la religion égyptienne. Comme nous pouvons le constater, l’au-delà égyptien est à la fois souterrain et céleste ; ténèbres et lumière. Par sa détermination et l’appui des rites funéraires, le défunt finit par atteindre d’abord la Douat, puis le ciel lumineux de Rê. Nous comprenons, par ce fait même, l’usage des barques de Rê et des divers moyens d’ascension qui font l’objet de cette contribution. La divinité est en haut52. La résurrection prend forme à travers l’ascension. Pour atteindre la divinité, l’homme doit donc s’élever au-dessus de la condition humaine. Le respect des rites funéraires l’y aide ; sa détermination personnelle et l’usage de l’échelle y contribuent. La symbolique de l’échelle Planche n°1 Symbole de l’échelle céleste dans la tombe de Pépi Ier (Ancien Empire, VIe dynastie, 22432263 av. J.-C.). Il s’agit d’une échelle à six marches. Le premier signe hiéroglyphique (en partant du bas), en forme de drapeau, est la transcription de ntr (dieu). contemples Rê dans sa cabine, tu rends hommage à son disque chaque jour […] ». In P. Barguet, Le Livre des Morts, chap. 15, p. 53. 51 N. est une variable remplaçant le nom du mort. 52 La hauteur, dans notre texte, renvoie beaucoup plus à la pureté et à l’élévation qui indiquent le dépassement de l’ordre humain. C’est quitter le vulgaire pour intégrer le sacré, en allant au-delà des limitations personnelles et parfois trop humaines.
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La situation géographique de l’au-delà se dégage aussi à travers la signification symbolique que les textes funéraires donnent au mot échelle. A ce sujet, Tj. Bruinsma écrit : « L’échelle, maqet en égyptien, est constamment présente dans les récits relatifs à l’ascension, et cela ne présente pas d’ambiguïté. Le message qui en émane c’est l’utilisation d’un objet de la vie terrestre pour permettre au mort d’atteindre le ciel »53.
Dans les textes funéraires que nous citerons, le mot échelle est parfois remplacé par les termes escalier ou cordages. En effet, des Textes des Pyramides au Livre des Morts, en passant par les Textes des Sarcophages égyptiens du Moyen Empire, plusieurs textes54 font mention de l’usage de l’échelle, pour caractériser les déplacements incessants du défunt de l’au-delà souterrain vers l’au-delà céleste ou 53
Tj. Bruinsma, « Some literary aspects of Coffin Texts », sp. 38, Acta Orientalia Neerlandica, Leiden, 1971, p. 12. 54 Nous donnons ici quelques textes funéraires se rapportant à l’usage de l’échelle : - « Le roi monte au ciel à l’aide d’une échelle : une échelle est dressée par Rê devant Osiris ; une échelle est dressée par Horus devant son père Osiris, quand il va à la rencontre de son esprit. Deux d’entre eux étant assis de part et autre de l’échelle, pendant que je (roi) me trouve au milieu d’eux. » Textes des Pyramides, formule 305, chap. 472. - « Est nouée l’échelle, est dressée l’échelle, sont déliés les cordages de proue par les dieux de Pe, et les cordages de poupe par les dieux de Nekhen, jusqu’à ce que N. soit monté sur elle au ciel […] ». In P. Barguet, Les Textes des Sarcophages, op. cit., spell 550, p. 284. - « […] Salut à toi ! Redresse-toi, Osiris, maître de l’escalier, qui est sur son … debademedj (désignation du soleil), qui est devenu Rê, roi de la Douat, régent du royaume des morts, vieillard vénérable, chef de la couronne blanche […] ». In, P. Barguet, Le Livre des morts, op. cit., chap. 168, p. 246-247.
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l’horizon de Rê. Il est dit que le roi invoque l’échelle pour monter au ciel : « Hail to you, Ladder of the God! Hail to you, Ladder of Seth. Stand up, Ladder of the God! Stand up, Ladder of Seth! Stand up, Ladder of Horus, which was made for Osiris that he might ascend on it to the sky and escort Re […]. Now let the ladder of the god be given to me, let the ladder of Seth be given to me (King) that I may ascend on it to the sky and escort Re as a divine guardian […] »55.
L’échelle traduit l’effort que le roi doit fournir pour atteindre le ciel56. Elle nous permet de comprendre l’importance accordée par les anciens Egyptiens à l’horizon de Rê. Selon la théologie élaborée à Héliopolis, la vie après la mort ne peut être pleinement vécue que si le défunt trouve sa place au côté de Rê au sommet de sa gloire. C’est pourquoi, pour se sentir à l’abri de tout danger, le défunt affirme que son échelle est soutenue par Rê lui-même57. Le clergé, par la magie des rites, noue cette échelle près de Rê parmi les dieux, afin que le défunt monte au ciel58. Le fait que l’échelle soit nouée près de Rê prouve qu’il s’agit d’un au-delà céleste59. Le défunt doit donc se surpasser pour sortir de l’ordre humain et accéder au statut divin. Tel est aussi le message de la symbolique 55
R. O. Faulkner, op. cit., utterance 478, p. 165-166. M.-A. Mombo, L’au-delà des anciens Egyptiens d’après une analyse des écrits funéraires (2563-1085 av. J.-C.), Thèse pour l’obtention du Doctorat en histoire, Université de Cocody (Abidjan, Côte-d’Ivoire), UFR des Sciences de l’Homme et de la Société, 2001, p. 188. 57 R. O. Faulkner, op. cit., utterance 305, §§472-475, p. 93-94. 58 P. Barguet, Les Textes des Sarcophages, op. cit., spell 21, pp. 167168. 59 Le céleste, ici, ne renvoie pas forcément à un ciel physique, palpable. Il s’agit d’une réalité, d’un état qui s’oppose à l’ordre humain et aux vibrations basses de la terre. 56
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de l’échelle qui prend une dimension gigantesque au profit du défunt. Par l’usage de l’échelle, l’homme passe d’un état plus petit à un état plus grand. En outre, pour bien signifier que Rê (le soleil) constitue la destination privilégiée, l’échelle illustrée dans les Textes des Pyramides prend parfois l’aspect d’un rayon de lumière. Il est question d’un rayon solaire, car le soleil demeure la source de tout rayonnement. La formule 508 des Textes des Pyramides stipule : « […] Le roi a posé pour lui ce tien rayon de lumière comme escalier sous ses pieds, afin de monter vers sa mère, l’Uraeus vivant qui est au front de Rê [...] »60.
Le rayon solaire devenu échelle pour l’ascension du roi, témoignage d’un voyage qui conduit l’homme des ténèbres à la lumière, de la mort à la vie, de l’humanité à la divinité, de l’éphémère à l’éternel. L’uraeus, la déesse cobra, dressée sur le front de Rê, devient la mère du roi. Cette déesse est aussi la protectrice du pouvoir pharaonique61. C’est pourquoi le roi doit s’élever au moyen d’une échelle ayant l’aspect d’un rayon de lumière, d’autant plus que la vie en éternité se nourrit de la lumière émanant de Rê. Osiris étant présenté comme la première divinité ayant fait l’expérience de la mort et de la résurrection, il est celui qui soutient l’escalier dans le Livre des Morts : « Salut à toi ! Redresse-toi, Osiris, maître de l’escalier […] »62. 60
Textes des Pyramides, formule 508, chap. 1108-1109. L’Uraeus, déesse cobra, est toujours présenté dressé sur le front de pharaon, prêt à attaquer les ennemis du pouvoir. 62 P. Barguet, Le Livre des Morts, op. cit., chap. 168, p. 247. 61
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Osiris est celui qui a inauguré le chemin menant au ciel glorieux de Rê où l’homme contemple la lumière de vie. Il est aussi celui qui permet ou non au défunt de se rapprocher de Rê dans la vie en éternité. Ainsi, mourir pour l’Egyptien ancien, c’est être privé de la lumière du soleil. L’échelle utilisée par le roi est donc le symbole de la quête de lumière, au sens où l’homme accède à la connaissance de sa vraie nature. C’est la nature de l’homme qui découvre qu’une parcelle de sa personne le rattache à la divinité. La symbolique de l’échelle vient matérialiser ce lien. La divinité rejoint sa créature là où elle l’a placée63, en trouvant comme point de jonction l’échelle, un objet en usage dans le monde humain. L’échelle indique une direction, montre un chemin à l’homme qui est habité par le désir ardent de voir bien haut au-dessus de lui. Ce désir suscite un effort physique et mental : c’est l’épreuve qui pousse l’homme vers le divin. Cette échelle n’est pas un moyen d’enfermement dans le mythe d’Osiris ; car, dès le moment où une image est perçue comme un mythe, elle ne peut plus entrer dans un processus d’élucidation rationnelle. C’est pourquoi nous préférons adopter un point de vue différent et appréhender les images des Textes des Pyramides comme des analogies renvoyant à des réalités bien précises et derrière lesquelles il convient de retrouver un discours rationnel. A défaut du discours rationnel, l’on pourrait retrouver un sens intelligible dissimulé sous le foisonnement des objets issus de la vie quotidienne.
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La divinité a placé l’homme dans la posture de la créature appelée à se battre pour grandir, à l’image du disciple qui se perfectionne sans cesse pour faire aussi bien que son maître, et même plus.
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Toutefois, il est nécessaire de rappeler que les Textes des Pyramides font mention d’autres moyens matériels d’ascension visant divers objectifs qui sont, en réalité, des convergences pour le bien de pharaon, de son empire et de son peuple. L’orientation spirituelle des autres moyens d’ascension La main La main joue plusieurs rôles dans le domaine spirituel d’une manière générale, et en particulier dans la religion égyptienne. La main peut apporter la bénédiction, elle construit et détruit. Dans le nom de Rê en hiéroglyphes, la main renvoie à l’action et à l’œuvre créatrice associée au pouvoir du Verbe64. Dans les textes funéraires, la main contribue au salut éternel. Elle consacre et aide à accéder à l’horizon de Rê. C’est dans cette perspective que le roi, traversant la rivière de la mort, demande à Rê de lui poser sa main : « […] Si tu poses ta main à l’Ouest, tu poseras ta main
sur moi ; si tu poses ta main à l’Est, tu poseras ta main sur moi […] »65.
La main de Rê permet au roi d’échapper au pouvoir maléfique de l’Ouest et de l’Est. Dans le but de sortir du monde souterrain (le monde des ténèbres), le roi tend ses 64
M.-A. Mombo, « Le règne de pharaon revisité : une interprétation du pouvoir du roi d’Egypte d’après la spiritualité pharaonique (27781085 av. J.-C.) ». In Cahiers d’Histoire et Archéologie, Université Omar Bongo, Faculté des Lettres et des Sciences humaines, Libreville, n° 12, 2010, p. 369-371. 65 Textes des Pyramides, formule 363, chap. 608. Cette formule mentionne clairement les deux principales directions de l’astre du jour, à savoir l’Orient et l’Occident.
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mains vers l’au-delà et celui-ci les saisit66. Il en est de même de Rê qui prend la main du roi, afin de l’introduire dans son ciel lumineux. La vie en éternité ne devient possible pour le roi que quand Rê prend sa main : « This Great One has fallen on his side; he who is in Nedit is felled. Your hand is taken by Re, your head is lifted up by the Two Enneads [...] »67.
Si nous admettons que Rê (le soleil) est en haut et que le roi est sur la terre, la main de Rê tendue dans le sens haut – bas, représente véritablement un moyen d’ascension. Rê, le maître du ciel, tend sa main au roi, afin de le sortir du puits de la mort et de l’ignorance en le tirant vers lui. Suivant l’orientation des mains de Rê, il s’agit bel et bien d’une ascension. Mieux, le roi demande au dieu Geb de lui tendre la main pour qu’il monte au ciel : « […] O Horus, ne me laisse pas sans barque. Je suis venu à toi, mon père, je suis venu à toi, ô Geb ; puissestu me donner ta main afin que je monte au ciel auprès de ma mère Nout »68.
Les dieux interviennent, saisissent la main du roi défunt et le conduisent au pays de la vie sans fin, l’horizon de Rê. La main soutient, aide et favorise l’accession du défunt dans la sphère céleste. Pour cette raison, elle est aussi le moyen qui sauve, à l’image de la main que Jésus le Christ tend à Pierre dans les évangiles, pour le sauver des eaux69.
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R. O. Faulkner, op. cit., utterance 437, §803, p. 144. R. O. Faulkner, op. cit., utterance 442, §819, p. 147. 68 Textes des Pyramides, formule 485A, chap. 1030-1031. 69 « […] Mais, voyant le vent, il prit peur et, commençant à couler, il s’écria : Seigneur, sauve-moi ! Aussitôt Jésus tendit la main et le saisit, en disant : Homme de peu de foi, pourquoi as-tu douté ? […] ». 67
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Réconforté par la main salvifique de Rê, le défunt proclame : « […] J’ai chanté et adoré le Disque, et je me suis joint aux cynocéphales en jubilation, car je suis l’un d’eux ; j’ai été le second d’Isis et j’ai renforcé ses incantations magiques […] ; j’ai noué les cordages ; j’ai repoussé Apophis, j’ai arrêté sa marche, et Rê m’a tendu ses mains sans que son équipage70 puisse me repousser »71.
Les cordages, les mains, l’escalier, l’échelle, renferment la même allégorie dans les textes funéraires égyptiens. Leur but est de favoriser la montée du roi défunt vers le ciel. Quant à Apophis, le serpent géant qui cherche à renverser les barques de Rê, il est l’allégorie des dangers de la vie de tous les jours, qui peuvent déboucher sur la mort. En le repoussant et en bénéficiant des mains de Rê qui sont tendues vers lui, le défunt remporte la victoire de la vie en éternité. D’où la possibilité qui lui est offerte de chanter et d’adorer le Disque solaire72. Le roi défunt est aussitôt intégré dans la communauté des bienheureux, nous en voulons pour preuve le fait que « l’équipage de Rê »73 ne Bible de Jérusalem, Paris, Editions du Cerf, 1999, Evangile selon Saint Matthieu, chap. 14, versets 22-33, p. 1465. 70 Des indications pertinentes sur l’équipage de la barque de Rê sont données dans la contribution ci-après : G. Jéquier, « L’équipage primitif de la barque solaire d’Héliopolis », Egyptian Religion 3, London, 1935, pp. 18-26. Voir aussi : M. Chatelet, « Le rôle des deux barques solaires », BIFAO XV, 1918, pp. 140-150. 71 P. Barguet, Le Livre des Morts, op. cit., chap. 100, pp. 137-138. 72
est la base de Le Disque solaire appelé en égyptien Aton, l’Atonisme, la religion exclusivement monothéiste du pharaon Aménophis IV ou Akhenaton, roi de la XVIIIe dynastie au Nouvel Empire. 73 Cet équipage est composé des entités divines qui voguent dans les barques du dieu Rê. Ces barques, sans cesse en mouvement, assurent
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le repousse pas. Grâce aux aptitudes émanant de l’entité divine Sia, pharaon a la connaissance des noms des accompagnateurs du soleil. Ceci est un critère rédhibitoire pour bénéficier des faveurs des dieux et prendre place dans la barque. La sandale Parmi les moyens d’ascension utilisés par le roi d’Egypte pour atteindre le ciel, figurent en bonne place les sandales. Celles-ci appartiennent aussi bien au roi qu’à la déesse du ciel, Nout. En réalité, qu’il s’agisse du roi ou de Nout, nous avons affaire à la même réalité. En effet, dans les Textes des Pyramides, la déesse Nout se présente comme étant la mère du roi. Cette déclaration est la première formule des Textes des Pyramides : « Recitation by Nut, the greatly beneficent: The King is my eldest son who split open my womb; he is my beloved, with whom I am well pleased »74.
Nous connaissons la charge symbolique du fils aîné dans l’exercice du pouvoir en pays d’Egypte. Celui-ci est l’héritier présomptif sur lequel reposent les espoirs de la famille royale75. Nout étant la déesse du ciel, l’usage de ses sandales par le roi pour atteindre l’horizon de Rê, est une indication forte sur la situation géographique de l’aule renouvellement de la vie dans ses dimensions terrestre et céleste. C’est en cela que Rê mérite le nom de Khépri, puisqu’il est le patron des transformations qui conduisent l’homme à l’état divin. 74 R. O. Faulkner, op. cit., utterance 1, p.1. 75 La notion du dieu-fils est bien définie dans le contribution suivante : M.-A. Mombo, « D’Horus à pharaon et au peuple égyptien : la symbolique du dieu-fils dans la civilisation de l’Egypte pharaonique (2778-1085 av. J.-C.) » In Res Antiquae IX, Bruxelles, éditions Safran, 2012, p. 217-231.
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delà. Mieux, le lien étroit entre Rê et Nout n’est plus à démontrer. En effet, comme l’attestent les Textes des Pyramides, la déesse Nout avale le soleil et l’enfante entre ses cuisses formant l’océan primordial séparé en deux. Les liens biologiques qui unissent Nout au roi sont à eux seuls une preuve de l’ascension du roi défunt. C’est pourquoi le roi se doit de s’agripper sur les sandales de Nout pour monter au ciel : « I ascend to the sky upon the sdsd76 which is in the space which separates; the sandal of Nut is grasped by my uplifted hand »77.
La formule 331 va dans le même sens : I ascend to the sky upon the sdsd which is in the space which separates, and I grasp the sandal of Nut. I am a nose which breathes; this face of mine sees my uplifting78.
Dans cette formule, le roi tient à prouver qu’il est bien en vie et peut amorcer sa montée vers le ciel. Il est un nez qui respire79, et son visage voit son ascenseur. La sandale devient un moyen d’ascension efficace. Toutefois, il ne s’agit guère de n’importe quelle sandale. Celle utilisée par le roi appartient à Nout, sa mère. A l’instar des autres moyens d’ascension, la sandale vient accentuer la détermination du roi à monter au ciel. C’est près de sa mère Nout et du dieu Rê qu’il entrera en 76
Ce mot est la représentation d’un symbole du culte de la déesse Wepwawet. Cf. R. O. Faulkner, op. cit., note n° I de l’utterance 330, p. 100. 77 R. O. Faulkner, op. cit., utterance 330, §539, p. 100. 78 Utterance 331, §540, p. 107. 79 Preuve qu’il est bien en vie.
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possession des attributs qui feront de lui un dieu faisant office d’ancêtre pour les Egyptiens au pays des dieux. Encore une fois, l’ascension du roi a pour point d’appui un objet en usage dans le monde des humains, comme si avant d’atteindre la condition divine, l’homme doit d’abord prendre conscience de son humanité. Il n’y a que celui qui sait d’où il vient et quelle créature il est, qui peut avoir la capacité de cartographier les espaces de vie auxquels il aspire. L’oiseau et les ailes d’oiseau Les Textes des Pyramides, faisant explicitement mention de l’ascension du roi, précisent que la montée au ciel s’effectue aussi au moyen d’ailes d’oiseau. Dans certains cas, le roi prend la forme même de l’oiseau pour monter au ciel. Dans cette dernière circonstance, il ne s’agit que d’oiseaux ayant une grande valeur symbolique dans l’exercice du pouvoir pharaonique. Dans la formule 335 des Textes des Pyramides, le roi d’Egypte dit son bonheur de monter au ciel au moyen d’une plume de faucon80. Grâce à cette plume, le roi rentrera au ciel et y sera parmi les dieux ses semblables. Nous savons que le faucon est l’oiseau royal par excellence. Il est souvent présenté, les ailes déployées, protégeant le trône de pharaon. Le faucon est aussi le symbole d’Horus, le fils d’Osiris et d’Isis, l’héritier du trône. Par conséquent, par sa montée au ciel au moyen d’une plume de faucon, le roi assume tout l’héritage politique et religieux de l’Egypte et mérite sa résurrection. C’est pourquoi Tj. Buinsma précise :
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Textes des Pyramides, formule 335, chap. 546.
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« Le faucon occupe une place de choix dans les transformations du ressuscité. La forme du faucon offre au défunt la souveraineté sur les espaces célestes »81.
Par ailleurs, les Textes des Pyramides rapportent que le roi monte au ciel sur les ailes de Thot. Thot, patron des scribes et greffier des dieux lors du jugement d’Osiris. Dans la spiritualité de l’Egypte ancienne, Thot joue un rôle déterminant dans le processus du salut. La déclaration du roi se présente comme suit: « […] O you gods who cross over on the wing of Thoth to yonder side of the Winding Waterway, to the eastern side of the sky, in order to dispute with Seth about this Eye of Horus: I will cross with you upon the wing of Thoth to yonder side of the Winding Waterway to the eastern side of the sky, and I will dispute with Seth about this Eye of Horus […] »82.
Le roi réclame les ailes de Thot pour circuler dans le ciel. Comme les dieux, il affiche sa détermination à aller en guerre contre Seth. Nouvel Horus, il entend prendre part activement à la lutte entre Osiris et Seth. Pharaon est en mouvement et en pleine activité. Ceci est la preuve de sa vitalité. Il n’est pas mort. Il vit et participe à la vie des dieux. Il n’est pas sans barque, car il est en possession de l’œil d’Horus, qui peut faire office de barque83. A y regarder de près, il n’est pas question d’une simple ascension ; il s’agit d’un réel retour à la vie qui fait de pharaon un roi et une entité céleste. Comme nous pouvons le constater, c’est un pharaon vivant qui entreprend
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Tj. Bruinsma, « Some literary aspects of Coffin Texts », sp. 38, Acta Orientalia Neerlandica, Leiden, 1971, p. 17. 82 R. O. Faulkner, op. cit., utterance 359, §§595-596, p. 116. 83 Utterance 566, §1429, p. 221.
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l’ascension. Il y a eu changement de vie84 et changement de lieu85, avec la mort physique comme césure indispensable. C’est pourquoi le roi d’Egypte ne se contente pas des ailes de Thot. Grâce aux formules magiques, il peut prendre la forme d’un héron, d’une oie, muni d’ailes d’un faucon divin, pour monter au ciel : « The King soars as a divine falcon, the King flies heavenward like a heron, the King flies up as a goose, the King’s wings are those of a divine falcon, the King’s wing-feathers are those of a divine falcon »86.
Dans le langage des Textes des Pyramides, c’est sous la forme du héron que le défunt prend son envol vers le ciel et voyage dans les espaces de l’au-delà87. Il appert que l’oiseau constitue l’une des formes privilégiées adoptées par le roi pour aller vers le ciel lumineux de Rê. Mieux, dans la spiritualité de l’Egypte pharaonique, l’âme appelée ba, possède la forme d’un oiseau à tête humaine. Nous en déduisons que cette forme confère au roi défunt plus de liberté pour explorer les paysages célestes et acquérir l’état divin. Il s’agit d’un mouvement ascensionnel, qui arrache le défunt de la terre pour l’élever physiquement et physiologiquement. La loi de la pesanteur s’efface face à la force divine source de tout rayonnement. En définitive, la forme de l’oiseau dans laquelle se moule la personne du roi, cache l’allégorie de la 84
Le roi quitte son corps physique par la mort. Le souverain quitte la terre pour le royaume d’Osiris. 86 Utterance 682, §§2042-2043, p. 293. 87 Kees, Totenglauben und Jenseitsvorstellungen der alten Ägypter, 2e édition, Berlin, 1956, p. 260. 85
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transformation88 : le roi s’approprie une forme subtile qui le place au-dessus de la terre qu’il peut désormais surplomber et dominer, car il baigne dans une sphère supérieure. Il est le maître qui domine tout. Mieux, sur le sens du mot maître en égyptien ancien, Roland Laffitte rappelle : « On notera avec intérêt que le signe égyptien est employé pour dire nb, « chacun / pluriel : tous », mais aussi « seigneur, souverain », et intervient comme raccourci pour dire nb.t […], « demi-sphère »89. Il est frappant que les idées de « maîtrise », proche de celle de « souveraineté », celle de « totalité » et celle de « sphéricité » y soient liées à des degrés divers »90.
Pharaon est donc le seigneur, le souverain, le maître de tout91. Pour le démontrer, les Textes des Pyramides lui reconnaissent le pouvoir de s’élever au-dessus de la terre, afin de tout voir et tout dominer à l’image de son père. Bien au-delà de la symbolique de la domination, le roi est perçu comme le garant de l’ordre et de la discipline. Pour cette raison, l’intronisation devient la cérémonie où se concentrent les puissances militant en faveur du retour de
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Thème récurrent dans les écrits funéraires égyptiens. A. Erman et H. Grapow, Aegyptisches Handwörterbuch, Berlin, 1921, p. 78-79. 90 R. Laffitte, « A propos de la naissance de la notion de sphère dans l’Antiquité. », In Res Antiquae IX, Bruxelles, Editions Safran, 2012, p. 209. 91 Dans la chefferie traditionnelle des Mossi, dans l’actuel BurkinaFaso, le roi ou le naaba (le seigneur, le maître. On y retrouve les consonnes nb du mot égyptien. La ressemblance est frappante), est le possesseur légitime de toutes choses. L’adage mossi stipule : « Le crapaud et le contenu de son ventre appartiennent au serpent. » Le crapaud symbolise l’ensemble des biens disponibles ; le serpent est une allusion directe au roi mossi. 89
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la hiérarchie, donc de l’ordre et de l’unité qui dissipent le doute. Dans cette perspective, Claude Tardits écrit : « Dans les sociétés monarchiques, ces rites de passage sont particulièrement importants, puisqu’ils mettent fin à la période d’incertitude, voire de crise et de luttes, ouverte par le décès du monarque. Ils intéressent donc toute la société et, dans les royaumes africains […], l’intronisation apparaît indispensable à l’acquisition du statut royal »92.
Ainsi donc, la tendance générale qui se dégage est que les Textes des Pyramides nous apportent un éclairage suffisant pour la connaissance de la situation géographique de l’au-delà égyptien, lieu où culmine toute la force de pharaon. Il n’est pas question d’une simple élévation physique. Pour la théologie égyptienne de l’époque pharaonique, il s’agit de quitter réellement la faiblesse pour la force, la mort pour la vie dans la communion des dieux. La terre et le ciel paraissent liés, fixés au même point géométrique, et les deux finissent par revêtir une dimension immatérielle. Dès lors, il nous paraît judicieux de nous poser les questions suivantes pour mieux comprendre la symbolique de l’ascension de pharaon: l’au-delà égyptien, est-ce un lieu ? Est-ce un état ? Si nous définissons le lieu comme un espace géographiquement localisable et habitable conformément aux règles de la biogéographie, en faisant allusion à la Douat et à l’horizon de Rê que le défunt atteint grâce à la barque de Khépri (le soleil levant), nous pouvons dire que l’au-delà égyptien est un lieu. 92
C. Tardits, « Le roi et ses ancêtres », in Essais sur le rituel II, colloque du centenaire de la section des sciences religieuses de l’Ecole Pratique des Hautes Etudes, sous la direction d’Anne-Marie Blondeau et Kristofer Schipper, Louvain-Paris, Peeters, 1990, p. 107.
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Toutefois, il importe d’insérer dans le contenu sémantique du mot lieu une dimension immatérielle. A ce moment-là, nous pouvons dire que l’au-delà est un lieu, au sens où il serait l’effort que tout défunt, en premier lieu pharaon, doit fournir pour devenir dieu après avoir surmonté les obstacles, afin de vivre par-delà la mort physique une vie qui n’aura pas de fin. En un mot, la mort physique devient une renaissance, le commencement d’une nouvelle vie dans un autre lieu93. En ce qui nous concerne, nous pensons que l’au-delà égyptien est aussi un état qui permet aux défunts d’échapper aux souffrances terrestres, pour savourer au côté des dieux une vie exclusivement tournée vers le bien, l’abondance et le bonheur94. La pyramide à degrés donne la même indication ascensionnelle. La pyramide La pyramide à degrés est l’étendard de l’Egypte sous l’Ancien Empire. Bien au-delà du rôle réducteur de tombe royale que tendent à lui donner les analyses peu fouillées, la pyramide est pour le roi un véritable outil d’ascension. Elle est un énorme escalier destiné à faire rentrer pharaon dans le ciel de Rê, tout en prenant en compte les notions de géométrie et d’astronomie. E. M. Antoniadi écrit :
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Peu importe si ce lieu côtoie le monde des mortels, pourvu que la
, y soit possible en harmonie avec les dieux et les vie, Ankh ancêtres devenus dieux. Car dans l’Egypte ancienne et dans toutes les traditions africaines, lors des rites d’accession au trône, les ancêtres ne sont jamais loin, le futur roi aspire même à bénéficier de leur bienveillance. Cf. C. Tardits, op. cit., p. 117. 94 Cet état de bien-être n’exclut pas la présence des dangers qui peuvent nuire à la vie, d’autant plus que les forces du mal sont toujours à l’affût, selon les écrits funéraires égyptiens. La vigilance reste donc de mise, parce que le bien-être implique aussi l’état d’éveil.
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Le caractère partiellement astronomique des pyramides est établi par les faits suivants : 1° Elles sont intentionnellement, sur le 30e parallèle de latitude Nord. 2° Elles sont orientées sur les points cardinaux. […] 3° Leurs couloirs inclinés étaient, avant leur fermeture, des instruments méridiens colossaux95. […]
La base de la pyramide96, remarquablement horizontale, permet à pharaon de s’élever progressivement vers la cime. Ce mouvement doit se faire progressivement, strate après strate, sans perturbation, car il est aussi le symbole de la paix, principale caractéristique du règne pharaonique, et de la plus grande stabilité97. La progressivité est symbolisée par les degrés de la pyramide. Pharaon atteint la cime de la pyramide en s’élevant, comme l’on gravit une montagne qui donne l’illusion – fondée – de se rapprocher du ciel et d’avoir une vue panoramique des réalités terrestres. Aussi, Etant donné que la construction d’une pyramide exige des années de dur labeur98 et d’importants moyens matériels, au Nouvel Empire les anciens Egyptiens choisissent un objet du relief qui se rapproche de la pyramide : la montagne. C’est ainsi que la montagne de Thèbes, en Haute Egypte, est devenue la pyramide 95
E. M. Antoniadi, L’astronomie égyptienne. Paris, Gauthier Villars, 1934, p. 119. 96 A. Piankoff, The Pyramid of Unas, Egyptian Religion Texts and Representations. Princeton, 1968, vol. 4, p. 242. 97 La stabilité symbolise la perpétuation de l’ordre sacré établi. L’instabilité serait donc une discontinuité, une rupture d’avec les forces qui régissent la sacralité du pouvoir de pharaon. Empêcher la stabilité du pouvoir c’est gêner l’ascension du roi. 98 Pour avoir des informations sur la construction de la pyramide de Khéops, la plus grande du plateau de Gizeh, l’on peut lire : Hérodote, Histoire. Livre II.
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éternelle de l’Egypte. Les L rois et les reines (les épousees d rois) furrent enterrés sur les flaancs de cettte montagnne. des D D’où les apppellations mondialeme m ent connuess de « valléée d rois »99 et « valléee des reinees », pour désigner lees des cimetières érrigés sur less flancs de la l montagnee de Thèbess. Dans la traddition spirittuelle de l’Egypte phaaraonique, la D n naissance et la renaissaance de dieu u ou de phharaon étaient m matérialisées s par le sym mbole de Rêê (image n°°1, en partant d la gauchhe) ou le triangle de la de l pyramidee, situé entrre d deux montaggnes (imagee n°2, imag ge placée auu milieu), oou siimplement par le trianngle de la pyramide p (iimage n°3, à l’’extrême droite).
Planche n°2 Source : E. M. M Antoniadi, L’astronomiee égyptienne. Paris, P Gauthieer Villlars, 1934, p. 119.
Le sommet de L d la pyram mide devientt un trempliin susceptibble d propulserr pharaon daans la gloirre céleste prrès de Rê. L de La p pyramide esst donc un moyen d’aascension auu même titre q l’échelle ou les ailes que a d’oiseaau, au senss où elle eest seensée préseerver l’imm mortalité dee pharaon qui, q selon la sppiritualité de l’Egyppte ancienn ne, doit continuer c dde 999
La vallée des d rois est unne nécropole égyptienne située sur la rivve occidentale duu Nil, face à Louxor, au u nord-ouest de l’anciennne T Thèbes, renferm mant les sépuultures des ph haraons égypttiens du Nouvvel E Empire (1550-1075 av. J.-C., XVIIIe à XX Xe dynastie). Aménophis Ieer, e phharaon de la XVIII X dynasttie, inaugure cette c tradition en construisaant soon temple prèès du fleuve et sa tombe dans les falaaises situées au nord-ouest. Sess successeurs l’imitent.
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protéger son peuple au-delà de la mort physique. Une telle mission, on s’en doute, ne peut être assurée que par un être qui a suivi avec succès la trajectoire ascendante menant à la divinisation. La pyramide s’apparente, in fine, à la ligne subtile qui sépare la vie humaine de pharaon de sa vie divine. Pour ce faire, elle renferme en son sein les signes de la mort (la sépulture de pharaon) et les marques de la résurrection matérialisées par les marches à gravir pour monter au ciel, en suivant la voie d’Osiris.
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CHAPITRE II La voie d’Osiris et les moyens immatériels d’ascension La voie d’Osiris et tous les moyens immatériels d’ascension, forment un tout débouchant sur la résurrection et la montée de pharaon au ciel. Si l’échelle, l’escalier, les sandales, la main, utilisés par le roi pour réaliser son ascension représentent la réalité terrestre, la voie d’Osiris et les moyens immatériels d’ascension incarnent la tradition spirituelle de l’Egypte. Ces moyens relèvent de l’ordre divin et ne sont pas à la portée des vivants sur la terre. La voie d’Osiris ou la septième épreuve de pharaon Les moyens d’ascension (échelle, escalier, sandale, mains, etc.) qui rappellent les réalités de la vie terrestre, permettent à pharaon d’atteindre l’au-delà. Arrivé dans le ciel, pharaon revendique son héritage de fils des dieux, rappelle aux principales divinités de l’Egypte que ce sont elles qui l’ont engendré100. Par sa détermination assortie d’une application rigoureuse des rites funéraires et avec l’appui des prières du clergé, le roi d’Egypte accède au statut divin. Il ne fait plus qu’un avec les dieux. Ce statut a pour corollaire la transformation du roi en étoile, en Rê, en Atoum, en personnage né de nouveau (résurrection). Dans cette étude, nous appelons ces transformations, moyens immatériels d’ascension, car elles permettent à pharaon 100
« […] Votre parfum est parvenu jusqu’à moi, ô dieux ; puisse mon parfum arriver jusqu’à vous, ô dieux ; puissé-je être avec vous, dieux ; puissiez-vous être avec moi, vous les dieux ; puissiez-vous vivre avec moi, vous les dieux […] ». Textes des Pyramides, formule 269, chap. 376-377.
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de sortir de la nature humaine et d’entrer dans l’éternité des dieux en s’élevant. La voie d’Osiris est, par conséquent, le processus qui conduit à la divinisation de pharaon101. Il s’oppose au processus d’hominisation tout en le complétant102. Elle est voie d’Osiris, parce que ce dernier est considéré dans la spiritualité de l’Egypte pharaonique comme la première divinité ayant expérimenté la mort et la résurrection. Il a tracé la voie que tout Egyptien devait suivre pour accéder à la vie en éternité. E. M. Antoniadi confirme : La voie d’Osiris, personne ne l’impose : c’est la réalité naturelle qui parle. Du moment qu’un homme naît sur terre, il entre dans le cycle dont il ne peut sortir qu’après épuisement des causes de désharmonie engendrées par lui-même103.
Par ce processus, pharaon est dorénavant une créature d’essence divine104. Mieux, il a pouvoir sur les dieux, puisqu’il est consubstantiel à eux105. A ce titre, il a le droit de manger les mêmes mets exquis que les dieux dans l’audelà106. Devenu dieu, pharaon rentre, selon notre étude, dans la septième épreuve.
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Pharaon doit devenir dieu, afin d’assumer la totalité de son héritage. 102 Ce processus complète l’hominisation au sens où il enrichit l’Homme et fait éclore l’Homme total, celui qui est en harmonie avec lui-même, avec les lois de la nature et avec les divinités. 103 E. M. Antoniadi, op. cit., p. 293. 104 Textes des Pyramides, formule 589. 105 TP 592, chap. 1623-1625-6. 106 Utterance 610, §1717, p. 253.
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En effet, il lui faut prouver qu’il a la capacité de plaider pour son peuple resté sur la terre107. Ici, la terre peut aussi renvoyer à un lieu de souffrance où la misère et l’incertitude menacent encore la vie des hommes. Un lieu enfermé dans les pesanteurs et les impondérables de l’existence. Ce sont ces réalités basses à plus d’un titre que pharaon quitte en suivant la voie d’Osiris. La souffrance étant encore l’entité dominante de cette terre, le roi d’Egypte doit s’ériger en porte-flambeau désigné par les dieux pour maintenir l’équilibre. Cet équilibre a un programme précis : placer le bien au-dessus d’isefet108, ankh au-dessus de la mort, Rê au-dessus d’Apophis. Alors, pharaon peut physiologiquement changer de statut. Il prend possession de la vie dans sa globalité glorieuse et bienfaisante. Devient-il réellement un ancêtre pour l’ensemble de la population de l’Egypte ? La condition divine a conduit le roi dans le repos éternel des dieux agissant directement sur le vécu des Hommes. C’est un repos spirituel destiné à maintenir et entretenir les relations entre l’homme divinisé et les dieux primordiaux de l’Egypte. C’est pourquoi ce que nous appelons ici la « septième épreuve » peut être assimilé au repos en dieu, comme le repos de Dieu au septième jour de la création, à en croire les Saintes Ecritures109. Le roi d’Egypte a revêtu les caractéristiques de la divinité. Dès lors, il est digne de prendre part au processus de la transformation de la création et de la protection de celle-ci.
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Il s’agit d’abord de l’Egypte avec toutes ses réalités géographiques ; ensuite, de l’ensemble de l’univers chargé de toutes ses richesses dont pharaon est le possesseur légitime. 108 C’est le mot égyptien servant à designer le mal. 109 Bible, Livre de la Genèse, chap. 2, versets 2-3. Le roi a travaillé en dirigeant l’Egypte au nom des dieux. Il peut désormais veiller sur son œuvre. Ce changement d’activité est une forme de repos qui a lieu parmi les dieux.
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La septième épreuve consiste, pour Pharaon, à assumer les responsabilités, autrement dit, le maintien de l’Egypte en ordre et en paix. Cette épreuve est celle de la vie en dieu ; c’est la gestion de la condition divine s’illustrant par la transformation de la personne du roi en lumière pour l’ensemble de la population égyptienne, mais aussi pour l’univers tout entier. Pour cette raison, le roi d’Egypte doit affronter l’adversité afin d’accéder à la suprême récompense que seul l’effort peut conférer : devenir luimême lumière divine. Dans la septième épreuve, la vie en dieu, pharaon ne se distingue plus de son créateur : il fait partie du dieu. Des fois, il est dieu lui-même110. L’accomplissement de la création devient aussi son œuvre et une partie de lui. Il est associé à l’œuvre immense par laquelle toute chose vient à l’existence et s’insère dans l’architecture du château divin. La personne du roi devient à la fois chair des dieux et maison de la manifestation glorieuse de toutes les forces démiurgiques qui contribuent à l’exaltation de l’Egypte. Par ailleurs, au sujet du chiffre sept caractérisant cette épreuve, les appuis scripturaires ne manquent pas, et les Textes des Pyramides en parlent111. La septième heure du jour (12h-13h), illustrée dans la tombe de Ramsès VI (1160-1134 av. J.-C., XXe dynastie), a un nom, un qualificatif chargé d’une signification profonde. Pour les textes funéraires, elle « est celle qui se lève pour Horus112 »113, en présence de Hou et Sia. En effet, le 110
C’est ce message que les Textes des Pyramides nous livrent. Cf. TP. utt. 219, p. 46-47.; utt. 252, p. 62, etc. 111 « There is serpent, the Bull who leads, who swallowed the seven uraei and his seven neck-vertebrae came into being, who gives orders to his seven Bows and who gives orders to the monarch. [...] » Cf. R. O. Faulkner, op. cit., utt. 318, p. 100-101. 112 Horus est aussi la preuve de la vitalité d’Osiris. Tué par son frère Seth, Osiris renaît à travers Horus. La septième heure devient aussi
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chiffre 7 et le nombre 70 (7 + 0 = 7), dans la symbolique de l’Egypte ancienne, correspondent à la mort et la résurrection de pharaon. En un mot, à la septième épreuve, pharaon meurt à la vie humaine pour naître à la vie en dieu, autrement dit, il entreprend le voyage du retour à l’invisible. Il est venu au visible par la naissance, et retourne à l’invisible par la mort apparente qu’est la mort physique. Il n’appartient plus à la terre ; il n’est plus soumis à l’ordre du temps et à la pression de la matière. Son deuil doit s’arrêter. C’est pourquoi les soixante-dix jours renvoient à la durée du deuil en pays d’Egypte. Pour tout dire, la septième épreuve est celle du changement de statut physiologique : le corps de pharaon devient le corps de Rê, un corps de lumière. Il doit contribuer à l’équilibre social, à l’ordre de Maât114 et à la bonne marche de l’Egypte tant terrestre que céleste. Dans cette septième épreuve, pharaon est habilité à utiliser les moyens immatériels d’ascension. La transformation de pharaon en étoile En géographie, la planète n’émettant pas de lumière, elle est définie comme un astre éteint. Quant à l’étoile, elle est un astre, parce qu’elle émet de la lumière. Rappelons tout de suite que l’astre est aussi et surtout un élément céleste. Par conséquent, la transformation du roi en étoile est une ascension réelle, parce qu’elle est une preuve de divinisation. L’étoile est placée dans la catégorie des l’heure du mûrissement de la vie. C’est pourquoi cette heure se situe entre 12h et 13h, le moment où l’astre du jour (le soleil) est au maximum de sa puissance. 113 E. M. Antoniadi, op. cit., p. 213. 114 Toute l’information sur Maât est contenue dans l’ouvrage suivant : J. Assmann, Maât, l’Egypte pharaonique et l’idée de justice sociale. Paris, Julliard, 1989.
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moyens (immatériels) d’ascension, parce qu’elle indique clairement que pharaon n’est plus sur terre, il est en haut, dans le ciel, là où doivent être les étoiles. Mieux, l’étoile émet de la lumière que l’univers entier voit. A ce titre, pharaon mérite son statut d’ancêtre de l’ensemble de la population d’Egypte. Dans les Textes des Pyramides, nous pouvons lire : « The King becomes a star. Do not break up the ground, O you arms of mine which lift up the sky Shu; my bones are iron and my limbs are the Imperishable Stars. […] I am a star which illumines the sky, I mount up to god that I may protected, for the sky will not be devoid of me and this earth will not be devoid of me forever. I live beside you, you gods of the Lower Sky, the Imperishable Stars […] »115.
Certaines affirmations du roi contenues dans cet extrait sont assez illustratives. En effet, pharaon déclare qu’il a des jambes en fer, signe de la résistance au temps. Quant aux étoiles impérissables appelées aussi étoiles indestructibles, qui composent certaines parties du corps du roi, ce sont des étoiles circumpolaires symboles d’éternité116. Aussi le souverain est-il une étoile qui illumine le ciel. Nous le savons, le ciel surplombe toute l’Egypte. En illuminant le ciel d’Egypte, le roi devient lumière pour tout homme, parce qu’il vit avec les dieux. A ce titre, il a le devoir de veiller sur l’Egypte et de contribuer à sa prospérité. Il peut alors traverser le ciel117, autrement dit étendre son pouvoir d’essence divine sur l’ensemble des terres parcourues par le soleil. Il est donc 115
R. O. Faulkner, op. cit., utterance 570, §§1454-1457, p. 224. W.Barta « Funktion und lokalisierung der Zirkumpolarsterne in den Pyramidentexte », ZAS 107, 1980, pp. 10-25. 117 Textes des Pyramides, formule 615. 116
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une nouvelle créature ou mieux, un né de nouveau118. Il reçoit une nouvelle vie à travers la réhabilitation de son corps119 rendu impérissable par la momification présidée par le dieu Anubis. Devenu une étoile, pharaon apporte la preuve de la présence de la nuit (la mort) qui sollicite les sens de l’homme pour l’aider à trouver la bonne orientation. Cependant, cette nuit est appelée à prendre fin, en cédant sa place au jour (retour de la vie) placé sous l’éclairage du soleil. Le passage de pharaon du statut d’étoile à celui de Rê fait de la résurrection un possible. Cette phase de la vie cesse d’être une fiction ou une étape exclusivement enfermée dans la phraséologie du mythe. C’est pourquoi les rites rigoureusement appliqués par les prêtres120 des collèges funéraires121, apportent au roi d’Egypte la vitalité nécessaire et le placent parmi les familiers de Rê122.
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TP, formule 627. R. O. Faulkner, op. cit., utterance 631, p. 262; utterance 638, p. 264. 120 Les prêtres capables de les appliquer ne sont présents qu’en Egypte. D’où ces paroles du roi à son serviteur Sinouhé, exilé volontaire : « Fais donc retour en Egypte ! Tu reverras le pays où tu as grandi […]! Aujourd’hui, en effet, tu as commencé le grand âge, et as laissé derrière toi la virilité. Pense donc au jour de l’enterrement et au passage à l’état de mort vénérable : on t’assignera une nuit dans la résine de pin, et des bandelettes comme tissées par les propres mains de Tayt. » Cf. « Les aventures de Sinouhé », in Contes de l’Egypte ancienne, traduits de l’égyptien ancien par P. Grandet, Paris, éditions Khéops, 2005. 121 Il y a donc un lien, pour les anciens Egyptiens, entre le salut éternel et l’émigration. En effet, pour accéder à la vie éternelle, il faut être en Egypte où travaillent les prêtres, serviteurs des dieux dans les temples. 122 Les familiers de Rê ce sont les défunts habités par la détermination de recouvrer la vie au travers de la recherche de la lumière du soleil. 119
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Pharaon devient Rê Il est important de rappeler que les Textes des Pyramides sont l’œuvre des prêtres d’Héliopolis et que, pour ce clergé, le dieu Rê est au centre de l’univers. Pharaon est donc fils de Rê. Au moment où les fonctions vitales se désintègrent dans son corps, le roi n’a qu’une aspiration : amorcer un mouvement ascensionnel qui le conduirait au ciel, près de Rê. En débarquant au ciel, il revendique son héritage123 : tout ce qui est à Rê est à lui, et il est de nature divine. Pour atteindre Rê, pharaon doit monter, quitter la terre pour s’élever en direction des étoiles. C’est en cela que la transformation en Rê constitue une ascension. L’immortalité de l’âme devient une réalité palpable au travers des sorties au jour et des mouvements incessants des barques du soleil, devenues barques du roi, soleil de l’Egypte. L’hymne matinal au soleil124 dont parlent les Textes des Pyramides n’est qu’une exaltation de la condition physiologique de Rê à laquelle le roi aspire. Rê supervise tous les dieux et, en s’unissant au soleil levant, le roi ne fait plus qu’un avec son créateur. Il devient Rê. Il a rempli toutes les conditions nécessaires125 pour intégrer en lui les 123
TP, formule 218, chap. 161-162; formule 224, chap. 222-224, etc. The morning hymn to the sun. May you wake in peace, O Purified, in peace! May you wake in peace, O Horus of the East, in peace! May you wake in peace, O Soul of the East, in peace! May you wake in peace, O Harakhti, in peace! May you sleep in the Night-bark, May you wake in the Day-bark, For you are he who oversees the gods, There is no god who oversees you! Cf. utterance 573, §§1478-1479, p. 228. 125 La première condition à respecter c’est l’application des rites funéraires et la régularité du service rendu aux dieux dans les temples. 124
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propriétés du démiurge. C’est pourquoi les dieux l’invitent à briller comme le soleil : May you shine as Re […], shine every day for him who is in the horizon of the sky. Open the gates which are in the Abyss.126
Comme le roi brille à l’image de Rê, il peut bénéficier de toute chose bonne et pure127 réservée au dieu.
Toute chose bonne et pure. Il est question d’une pureté semblable à celle des dieux. Le signe hiéroglyphique en forme de drapeau placé à la fin de la phrase en témoigne. Cf. J. Kamrin, op. cit., p. 141.
Tout ceci est une suite logique de la théologie solaire128, car c’est Rê lui-même qui a consacré le roi sur terre129. Arrivé dans l’autre monde, le roi ne fait plus qu’un avec son père (Rê). Elu de Rê sur terre, le souverain affirme dans l’au-delà qu’il est de la lignée solaire : […] Je suis conçu la nuit, je suis né la nuit, j’appartiens à ceux qui sont dans la suite de Rê, ceux qui sont en avant de l’Etoile du Matin […]130.
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Utterance 586, §§1582-1583, p. 238. J. Kamrin, Ancient Egyptian Hieroglyphs. A practical guide. New York, Abram, 2004, p. 141. 128 La théologie solaire c’est le discours spirituel qui rattache tout homme ou tout défunt au dieu Rê. 129 Textes des Pyramides, formule 205, chap. 120-121. 130 TP, formule 211, chap. 131-132. 127
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A partir cet instant, le roi devient fils de Rê-Atoum, c’està-dire le fruit de l’ensemble des attributions se rapportant aux qualités démiurgiques du soleil en tant que force génératrice de toutes les formes de vie131. Nous remarquerons que les appellations Atoum et Rê ont pour point d’encrage la même zone géographique à savoir Héliopolis, à l’extrémité sud du delta du Nil. Cette filiation précise l’origine divine et solaire de pharaon (sur terre), et sa divinisation ou sa solarisation dans l’au-delà. Pour ce faire, la théologie solaire voudrait que, dans l’audelà, le roi devienne une étoile solitaire132. Il est alors habilité à occuper le trône de Rê dans le ciel133. L’accession du roi au pouvoir céleste près de Rê, parmi les étoiles impérissables, est l’aboutissement de l’idéologie sur laquelle sont bâties toutes les phases de la royauté en Egypte ancienne. C’est aussi la confirmation de la théologie solaire134. Toutefois, avant d’occuper le trône céleste, le roi est appelé à décliner son identité devant Rê : 131
Textes des Pyramides, formule 217, chap. 152-153. Textes parallèles : Textes des sarcophages, op. cit., spell 730, p. 108 ; Le Livre des morts, chap. 64, p. 105. En réalité, Atoum et Rê constituent la même entité divine. Le mot Atoum renvoie au soleil couchant et devient, surtout à la Ve dynastie, une forme du dieu soleil Rê. Mieux, le nom Héliopolis n’est que la traduction grecque des mots égyptiens Pr-r‘ (la maison de Rê). 132 Textes des Pyramides, formule 245, chap. 251. L’Etoile solitaire est l’autre nom donné à l’astre du matin, en l’occurrence le soleil ou Rê. Le roi devient une étoile solitaire signifie qu’il devient Rê luimême. Ceci est l’étape suprême de la solarisation. 133 R. O. Faulkner, op. cit., utterance 267, §§366-367, p. 76. 134 La théologie solaire nous fait découvrir un autre pan de la conception égyptienne de l’au-delà sous l’Ancien Empire. Nous apprenons que l’entrée de pharaon dans l’autre monde consacrait sa transformation en Rê. Sur terre, il est le fils de Rê ; dans l’au-delà, il devient Rê. L’autre monde est donc l’espace où pharaon quitte la condition de simple mortel pour celle des dieux maîtres de la vie avant et après la mort physique.
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Salut à toi Rê, qui parcours le ciel et traverse Nout (…). J’ai moi-même attrapé la tresse, en ma qualité de dieu et fils d’un dieu, et je suis une fleur issue du Nil135.
La déclaration de pharaon dans l’autre monde rappelle les paroles prononcées par le clergé d’Héliopolis à la naissance des trois premiers rois de la Ve dynastie136, et lors des rites d’intronisation. La séquence présentant pharaon comme une fleur issue du Nil, le propulse aux origines du monde selon la cosmogonie d’Héliopolis, où il est dit que Rê s’est créé lui-même en surgissant des eaux du Noun, le fleuve primordial. Par cette transformation ascensionnelle, pharaon revêt des propriétés démiurgiques qui lui confèrent la livrée d’ancêtre légitime de toute la population de l’Egypte. Cette étape lui ouvre les portes de la transformation en Atoum, l’autre facette du dieu Rê. C’est, dans une certaine mesure, l’opportunité offerte au roi pour accéder à la totalité de la lumière issue du soleil. La symbolique de la transformation en Atoum Atoum (soleil couchant) et Khépri (soleil levant) rappellent les sorties au jour par lesquelles le défunt se renouvelle, en se chargeant d’énergies revitalisantes au travers de la lumière du soleil. Dès son arrivée dans l’audelà, le roi affirme avoir succédé à Geb, à Atoum137. Dans les Textes des Pyramides, le roi est présenté assis sur le trône d’Horus, les dieux naviguant vers lui pour 135
Textes des Pyramides, formule 334, chap. 543-545. P. du Bourguet, Contes de la Vallée du Nil. Textes recueillis et présentés par P. du Bourguet, Paris, Claude Tchou, Editeur, 1968, pp. 85-90. 137 I have succeeded to Geb, I have succeeded to Geb; I have succeeded to Atum, I am on the throne of Horus the first-born, and his eye is my strength, I am protected from what was done against him (…). Cf. R. O. Faulkner, op. cit., utterance 256, §§301-302, p. 66. 136
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l’adorer138. Cet extrait des écrits funéraires confirme la divinité du roi d’autant que les dieux ne peuvent courber l’échine que devant leur égal. Cette dimension divine commence sur la terre où pharaon porte le qualificatif de fils des dieux139, puis se poursuit dans l’au-delà, lieu de la consécration suprême et de la divinisation vraie. Mieux, Atoum, présenté comme le père de pharaon, saisit la main de ce dernier pour le placer parmi les dieux excellents, les étoiles impérissables140. Or, Atoum ou Toum, un démiurge, est considéré dans la théologie égyptienne comme le chef de l’Ennéade141 d’Héliopolis. Ceci confirme l’intégration du roi dans la généalogie divine. Il devient à la fois Osiris et nouvel Horus. Ce statut le place au-dessus de celui de simple représentant des dieux sur terre. Un texte hiéroglyphique de la grande Ennéade présente les neuf dieux comme suit : « O grande Ennéade (psdj.t) des Neter qui est dans Héliopolis : Toum, Shou, Tefnout, Geb, Nout, Osiris, Isis, Seth, Nephthys, que Toum met au monde par protection (pdj) de son cœur, comme sa propre naissance, en votre nom de neuf arcs (psdjt pdj.t) aucun d’entre vous ne se sépare de Toum […] »142
138
TP, formule 257, chap. 304-307. TP, formule 724, chap. 2247. Ce qualificatif a pour support les scènes de théogamie et de hiérogamie qui jalonnent l’histoire du pouvoir pharaonique. 140 Textes des pyramides, formule 269, chap. 380. 141 L’union de neuf dieux. 142 J. Kamrin, op. cit., p. 251. 139
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Texte hiéroglyyphique de laa Grande Enn T néade : dès laa première lignne de ce texte hiiéroglyphique, nous voyonss apparaître les neuf dieux à travers les neeuf signes de l’alphabet l hiérroglyphique ayant a la formee d’un drapeeau. C’est le mot m ntrw (plurriel) signifiantt les dieux. Cf. J. Kamrin, K op. citt., p. 251
Le mouveement ascensionnel consistannt en la L trransformatioon de pharaon en Ato oum complèète et achèvve laa transform mation en Rê. R Dès lorrs, le roi dispose d d’unne p parfaite maîîtrise des barques b de Rê et dess entités quui l’’occupent. Il I accède paar ce fait même à une connaissancce élargie des réalités r fondamentales de la vie prise p dans ssa g globalité. Ceette compléttude permet au roi d’hhériter de touut ce qui appaartient au démiurge. d L’extrait L dess Textes dees P Pyramides ci-après menntionné illusstre bien cettte tendancee : […] Atum m has given you (the Kin ng) his heritaage, he has given to you y the asseembled Ennea ad, and Atum m himself is with them m, whom hiss eldest twin children joinned to you; […] he sees s you pow werful, with your heart proud and yourself able in yourr name of Cllever Mouth, chiefest of the gods,, you standinng on the earrth that you may m govern at the heead of the Ennead […]143.
Parmi les moyens immatérriels d’asccension, la P trransformatioon de pharraon en Attoum se réévèle être uun syymbole puuissant de la théolog gie politiqque en terrre 1443
R. O. Faulknner, op. cit., utterance u 592, §§1617-16199, p. 243.
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d’Egypte. Il s’agit bel et bien d’une ascension qui bouleverse les métabolismes du corps de roi, devenu corps de lumière, corps divinisé, paradigme indispensable pour l’ensemble du monde vivant. Prenant la place du démiurge, le roi d’Egypte devient Tout144 et se confond avec l’univers. Il s’érige en symbole-étendard de l’Egypte éternelle. Ces sorties au jour sont complètes, d’autant mieux qu’il a revêtu toutes les formes des apparitions du soleil. Il participe avec une hauteur de vue certaine à la direction de l’Egypte et de l’univers. Sa purification est à la fois celle d’Horus, de Seth, de Thot145, bref, de toutes les divinités égyptiennes.
144
Nous entendons par TOUT, l’ensemble des composantes renvoyant à la matérialité de la vie. En d’autres termes, le roi d’Egypte s’apparente à une complétude. Par son union parfaite avec la divinité,
, autrement dit le signe de la vie, mais pharaon devient Ankh aussi le signe qui donne la vie. 145 TP, formule 36, chap. 28-29.
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CHAPITRE III La septième épreuve de Pharaon comme support du développement durable dans l’Egypte pharaonique Toute la vie socioéconomique de l’Egypte ancienne repose sur une gestion rigoureuse des quelques ressources disponibles dans la vallée du Nil. La peur des lendemains faits de disettes et de sécheresse n’était jamais loin. Il fallait donc la présence d’une autorité absolue investie par les dieux tutélaires de l’Egypte. Cette autorité, c’est pharaon devenu dieu, muni du pouvoir de faire jaillir l’eau sur la terre aride, d’en superviser la consommation, et de conduire le grain à la germination. Une telle approche implique – forcément - l’impératif de consommer les ressources tout en pensant à demain. C’est en cela que la septième épreuve de pharaon peut devenir un chemin conduisant à la notion de durabilité dans la conception du concept développement. Aujourd’hui, les spécialistes des questions de progrès définissent le développement durable comme suit : « C’est un développement qui répond aux besoins des générations du présent sans compromettre la capacité des générations futures à répondre aux leurs, s’appuyant sur des valeurs (responsabilité, participation et partage, débat, innovation). »146
Comme l’Homme est au cœur de tous types de progrès, il est même judicieux de parler de « développement humain durable ». En effet, en son acception la plus noble, le 146
Source : www.lexilogos.org.
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développement doit apporter une note positive dans l’amélioration des conditions de vie de l’être humain et dans la consommation des ressources qui concourent à la protection de la vie sur terre. La religion de pharaon, la première ressource pérenne Les anciennes civilisations orientales y compris l’Egypte pharaonique, étaient toutes construites sur la conception d’un ordre supérieur qui dominait tous les aspects de la vie humaine et qui devait être gardé intact de génération en génération sous peine de voir périr la société.147 L’Egypte appartient aux dieux maîtres de l’univers, l’Egyptien n’est là que pour gérer les biens de ces derniers tout au long des âges ; car ces biens doivent être éternels comme les dieux qui les ont suscités. C’est aussi au nom de tous ces biens de l’univers qui appartiennent à son père Rê que pharaon se lance dans la conquête, pour rapporter en Egypte tous les produits des pays étrangers. Souvenons-nous de ce conseil de Petah-Hôtep, vizir de Djedkarê148 et philosophe : « […] Homme, tu n’es que l’intendant des biens des dieux. »149
147
C. Dawson, op. cit., p. 16. Dans l’Egypte ancienne, fouler aux pieds cet ordre supérieur, aurait entraîné aussitôt le retour du monde au chaos originel. Ce chaos est synonyme d’absence totale de toute forme de vie. 148 Djedkarê est un roi de la Ve dynastie (2563-2423 av. J.-C.). 149 www.egyptos.net/egyptos/citations. Pour plus de détails sur la morale égyptienne de l’époque pharaonique, l’on peut se référer à l’ouvrage suivant : E. Amélineau, La morale égyptienne. Quinze siècles avant notre ère. Etude sur le papyrus de Boulaq n°4, Paris, Ernest Leroux, éditeur, 1892. Les maximes reconstituées dans ce papyrus montrent bien que la morale égyptienne était fondamentalement dominée par la religion.
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Pour cette raison, la religion de l’Egypte pharaonique est perçue aussi bien comme un principe de continuité et de conservation, que comme source d’une nouvelle conception de l’Homme et de la vie en société. Nous comprenons pourquoi la religion est la seule puissance demeurant inchangée dans la civilisation de l’Egypte ancienne150. En effet, le long des âges, elle est demeurée le principal levier de commande du pouvoir pharaonique. Le discours religieux pouvait évoluer et même subir des modifications, mais la religion dominait toujours le peloton de tête dans tous les aspects de la vie en terre d’Egypte. L’une des preuves de cette stabilité est que les Textes des Sarcophages du Moyen Empire et le Livre des Morts151 des anciens Egyptiens ne sont que des recensions émanant des Textes des Pyramides de l’Ancien Empire. Mieux, à toutes les phases de l’Histoire de l’ancienne Égypte, pharaon est toujours considéré comme le descendant d’Atoum et le nouvel Horus. Pour rendre pérennes les valeurs et les bienfaits engendrés par leur religion, les Egyptiens de l’époque pharaonique ont fait de la vie de l’au-delà la continuation de la vie terrestre. Les réalités de la terre sont transférées dans un espace sans limites, une façon parmi tant d’autres de les fixer dans la mémoire visuelle collective pour l’éternité. C’est pour les anciens Egyptiens l’une des voies indiquées pour faire profiter aux générations de tous les temps les grands 150
La religion est le soubassement de l’édifice Egypte. Tous les auteurs anciens et modernes l’ont attesté dans leurs écrits. La phrase d’Hérodote permet de les résumer : « Les Egyptiens sont les plus religieux des hommes. » In Histoires, Livre II, Euterpe. 151 Le Livre des Morts qui contient des formules permettant au défunt de quitter les ténèbres de la mort pour accéder à la lumière de la vie, est en réalité appelé « Livre de la sortie vers la lumière ». Cf. G. Roulin, (1996) : Le livre de la nuit. Une composition égyptienne de l’au-delà. Fribourg, Editions Universitaires., p. 38.
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principes qui conduisent à l’amélioration des conditions de vie et à la divinisation progressive de l’humain. Cette divinisation doit se dérouler dans un espace entretenu, maîtrisé et protégé par les dieux qui s’appuient sur pharaon, le médiateur par excellence, pour achever l’œuvre tout en la transformant perpétuellement. Préserver l’environnement pour une vie et un au-delà meilleurs Conscient de la dimension austère et précaire de son environnement, l’ancien Egyptien, sous l’aiguillon de l’institution religieuse dirigée par le grand prêtre pharaon, imprime en son subconscient le réflexe de gérer, rubis sur l’ongle, les eaux du Nil152. Cette eau devait être consommée parcimonieusement en pensant à demain. L’Egyptien était obsédé par la crainte d’une crue insuffisante qui aurait généré des mauvaises récoltes, donc la famine, la soif, la disette. Cette obsession trouve sa parfaite illustration dans le refus extériorisé par l’Egyptien de manger les excréments et de boire les urines dans l’audelà : « O enfant des excréments, ne me propose pas tes excréments que voici ! - De quoi vivras-tu ? - Je suis le taureau de la ville Hennet qui est aux confins du ciel. Je suis le maître de cinq portions auprès d’Osiris, (car) on a préparé cinq portions au ciel et sur terre […] ».153 152
La première richesse de l’Egypte. P. Barguet, Textes des Sarcophages, op. cit., spell 191, p.389. Textes parallèles : « […] O Grand, maître des aliments ! O Grand qui préside aux demeures d’en haut ! Vous qui donnez le pain à Ptah le grand qui est dans la grande place, donnez-moi le pain, donnez-moi la bière, et que mon déjeuner soit un gigot et un pain sacheret […] ». Cf.
153
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En clair, l’Egyptien ne veut pas se livrer à une consommation désordonnée des biens terrestres (biens du présent) au risque que ceux-ci viennent à manquer dans l’au-delà (réalités futures). Pour que la vie continue audelà de la mort physique, les ressources et réalités d’aujourd’hui doivent être sauvegardées. En outre, l’aménagement du Fayoum au Moyen Empire (2160-1785 av. J.-C.) représente l’une des meilleures illustrations du développement durable selon l’Egypte ancienne.154 Il s’agit en effet, d’une dérivation du Nil, pénétrant à l’ouest, dans une oasis toute proche de la vallée, le Fayoum, qui fut aménagé au cours du Moyen Empire comme un réservoir pour les eaux du Nil pendant la crue annuelle. Une façon efficace de gérer les eaux du Nil en pensant à demain. Fait hautement symbolique et significatif, l’eau du Fayoum provient d’un bras du Nil, le dieu Hâpy, pourvoyeur éternel de nourriture à l’ensemble de la population égyptienne et à l’univers entier par sa dimension céleste telle que dépeinte dans les écrits funéraires155. Ce trait du développement durable selon l’Egypte pharaonique est donc tuteuré par la religion. La préservation de la flore et de la faune n’est pas ignorée dans le développement durable selon l’Egypte ancienne. La végétation qui meurt et renaît chaque année est associée à Osiris, le dieu qui brise les liens de la mort au travers du retour de la crue et instaure la stabilité, donc la P. Barguet, Livre des morts, op. cit., chap. 106, p. 141 ; chap. 52, p. 89 ; chap. 53, p. 89-60 ; spell 195, p. 391. 154 Petrullo, A. : « Le Fayoum, bourgeon du Nil ». In L’Egypte ancienne. Les secrets du Haut Nil, Dossier Historia, Paris, Editions Tallandier, 1998, p. 41 155 Les Textes des Pyramides, les Textes des Sarcophages, le Livre des Morts.
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pérennité, par l’érection de son pilier.156Certaines espèces végétales157, en l’occurrence l’acacia, représentant directement Osiris, ne doivent pas mourir. Leur dessèchement symboliserait la mort de l’ensemble de la civilisation égyptienne. Par conséquent, ces plantes constituent des espèces protégées susceptibles de contribuer au rayonnement de la vie des générations futures. N’est-ce pas là une façon pertinente de dire le développement durable avant l’émergence de nos canons modernes ? Au sujet de la préservation de la faune, le panthéon égyptien, largement zoomorphe, en est la parfaite illustration. Du dieu Anubis (patron de la momification) à tête de chacal au faucon protecteur du trône royal, en passant par Khnoum dieu à tête de bélier, la déesse cobra (l’uræus), le taureau Apis, etc. les cas d’association des dieux égyptiens au règne animal surabondent. L’abattage de ces animaux divins était forcément ritualisé et réglementé, ce qui est une arme efficace pour la protection de la faune. Diodore de Sicile rapporte avoir vu, pendant son voyage en Egypte, la foule lyncher un Romain dans sa maison parce qu’il avait tué un chat par mégarde158. Le chat, symbole de l’intelligence, bénéficiait d’une grande attention dans la société de l’Égypte ancienne. La divinité étant par essence éternelle, ces animaux ont fini par devenir familiers des générations d’Egyptiens le long des
156
Le pilier djed renvoie à la colonne vertébrale d’Osiris qui se redresse pour briser les chaînes de la mort. Eriger ce pilier, c’est ramener la stabilité dans l’ensemble de la société égyptienne et, par ricochet, dans l’univers tout entier. 157 Quant au papyrus, principal support pour l’écriture, son importance n’est plus à démontrer. Le rouleau de papyrus fait également partie des signes hiéroglyphique. 158 Drioton, E. (1969) : L’Egypte pharaonique. Paris, A. Colin, p. 197.
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âges. Sur l’attention que les Egyptiens portaient sur le cadavre d’un animal, Diodore de Sicile renchérit : « Si une bête meurt, ils (Egyptiens) mènent le deuil comme s’ils avaient perdu des enfants chéris et l’ensevelissent non pas selon leurs moyens mais bien au-delà de la valeur de leur fortune […] »159.
Tout porte à croire que Diodore de Sicile était surpris par l’importance accordée par les Egyptiens à l’ensevelissement des animaux considérés comme sacrés. A l’occasion des funérailles du taureau Apis, le deuil prenait des proportions encore plus considérables160. La déification des animaux confère une dimension éternelle à l’animal au sens où par la religion de pharaon, son souvenir se fixe dans la mémoire collective et traverse le temps161. Les vignettes du Livre des Morts162 représentent une masse considérable d’animaux rendus pérennes par la magie des rites et de l’écriture hiéroglyphique. Celle-ci comprend, d’ailleurs, un nombre important de lettres représentant des animaux163 : ... 159
Diodore I. LXXIV, traduction de M. Casevitz. Pour plus de détails sur le deuil et les lamentations en Egypte ancienne, lire : Y. Volokhine, « Tristesse rituelle et lamentations funéraires en Egypte ancienne. », in Revue de l’histoire des religions, tome 225, Fascicule 2, Paris, A. Colin, avril – juin 2008, p. 163-197. 161 Nous pouvons en dire autant sur le bélier d’Amon à Thèbes et sur l’ensemble du territoire égyptien. 162 P. Barguet, Le livre des morts, op. cit., chap. 32, 33, 34, 35, 37, pp. 77-79 163 Vautour, chouette, vipère, etc. représentent des lettres de l’alphabet hiéroglyphique. 160
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Or, chaque lettre de l’alphabet hiéroglyphique est chargée d’une vie qui se transmet d’âge en âge, parce qu’elle repose sur des piliers indispensables et incontournables : la flore et la faune au-dessus desquelles se trouve le Nil. Quant au Nil, il dépend totalement du soleil qui régule son régime annuel. Le dieu Rê est donc celui qui sustente la faune, la flore, l’hydrographie, les canaux par lesquels passe la vie sur la terre d’Egypte. C’est ce pouvoir que le dieu transmet à pharaon, son fils, afin que la tradition se perpétue à jamais. Ainsi, grâce à la septième épreuve surmontée par le roi, tout se tient, l’Egypte évolue et imprime ses marques en s’élevant au-dessus de toutes les terres. Elle est emportée dans le sillage de la septième épreuve qui fait d’elle la contrée éternelle, la terre des dieux chargée de soumettre toutes les nations. Le corps humain, premier support du développement durable Le corps humain n’a pas échappé à la préoccupation de tout préserver en vue d’une éternité innommable. Pour y répondre, la religion de pharaon met sur pied une technique chargée de défier le temps : la momification. Par elle, toutes les parties du corps physique devaient être conservées en vue des réalités de l’au-delà, car le corps humain est, pour les anciens Egyptiens, le premier support de la vie éternelle. Le rituel funéraire élève le corps humain en le plaçant à l’abri de la putréfaction. Pour les anciens Egyptiens, être en bonne santé c’est avant tout jouir de l’intégrité de son corps. La première ressource de l’Homme, c’est son propre corps physique (donc luimême) qui devait être sauvegardé le plus longtemps possible.
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Nous rappelons que toutes les formes du progrès passent par le développement humain : la protection de la vie et du corps physique de l’Homme d’où jaillissent les réflexions qui engendrent le développement au sens large du terme. La septième épreuve de pharaon indique que l’Homme est un descendant des dieux. Son corps physique doit s’élever au-dessus du précaire, afin que de lui émanent les lumières qui transforment la vie dans une perspective d’éternité. L’Homme acquiert la capacité de concevoir et s’approprie ainsi le pouvoir créateur du dieu qui l’a admis à son éternité. Au travers du rituel religieux concocté par le grand prêtre pharaon, le corps physique de l’Homme devient corps de lumière se confondant avec celui de la divinité créatrice. La terre164 est bien loin. Ainsi donc, au sujet de la consommation des biens que la nature a mis à sa portée, l’Egyptien du temps des pharaons est préoccupé par l’avenir qui devait être placé à l’abri de toute misère et de toute forme d’ignorance.165 L’écriture hiéroglyphique a fixé les grandes orientations morales, spirituelles et économiques (le fonctionnement de la crue du Nil) utiles aux générations futures ; le grenier national166, directement rattaché au palais royal, devient un bouclier robuste face aux assauts de la famine et de la disette.
164
La terre est assimilée ici à la précarité et la putréfaction qui corrompent le corps et l’empêchent d’accéder à l’état divin. 165 Connaître les rites et les noms des habitants de l’au-delà, peut contribuer à la protection de la vie. Cf. P. Barguet, Textes des Sarcophages, op. cit., spell 553, pp. 205-206 ; Livre des morts, op. cit., chap. 1B, p. 40 166 Chaque nome d’Egypte devait envoyer au moins le dixième de sa récolte annuelle à pharaon qui stockait tout dans un grenier. Son contenu permettait de repousser la famine, mais aussi de protéger les espèces végétales pour les semailles futures.
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CONCLUSION De la royauté terrestre à la septième épreuve, le constat qui se dégage est que la vie post mortem de pharaon est bien balisée. Dès que survient sa mort, le corps physique de pharaon est transformé par les rites rigoureusement appliqués par le clergé. Ces rites funéraires jouent un rôle technique qui permet au roi de briser les liens de la mort. Il est régénéré, ressuscite et amorce sa montée vers le royaume de Rê, siège de la vie sans fin. C’est à cet instant précis qu’interviennent les moyens matériels et immatériels d’ascension. L’au-delà étant céleste, pharaon doit monter tout en utilisant tous les supports que lui offre l’institution religieuse. Cette ascension culmine sur la transformation de pharaon en dieu, signe fort à plus d’un titre. Par cette réflexion axée sur les moyens d’ascension illustrés dans les Textes des Pyramides, nous constatons que la résurrection de pharaon est le point d’orgue de la voie d’Osiris. Sur cette voie, le désir de vivre se conjugue à l’infini. L’application rigoureuse des rites funéraires assortie d’une boulimie de vivre par-delà la mort physique une vie qui ne s’arrête pas, tourne la mort en dérision. C’est alors que l’on comprend, en réalité, que pharaon est presque exclusivement un symbole de vie. Il est l’incarnation de la volonté qui consiste à refuser la faiblesse pour libérer la force ; à bannir les étroitesses pour garder les yeux fixés sur la grandeur de l’Homme qui n’est autre que la parcelle divine en chacun de nous. Cette dimension divine est désorganisée par l’action de la mort. Les formules rituelles viennent la restaurer, en brisant les liens de l’enfermement dans l’éphémère. L’échelle et les autres moyens d’ascension dont parlent les Textes des Pyramides des anciens Egyptiens traduisent la 75
détermination de l’Homme à accéder à plus grand que lui. Ils représentent un symbole conduisant à une physiologie nouvelle. C’est une indication donnée à l’Homme de tous les temps, pour lui montrer la porte par laquelle il peut sortir des limitations qui l’avilissent et l’empêchent de réaliser sa vraie vocation : faire un avec le démiurge. Telle est, selon nos analyses, la principale caractéristique de la voie d’Osiris, véritable chemin de force, de la victoire d’Osiris sur Seth, de la défaite des forces du mal face aux entités du bien, du dépassement de soi sur la désertion des lieux des combats les plus légitimes. C’est pourquoi, l’iconographie égyptienne de l’époque pharaonique présente le pharaon Akhenaton, le regard tourné vers le disque solaire, les bras levés en signe d’adoration-offertoire, et les mains du dieu Rê descendant vers le roi, comme pour l’inonder de lumière. Cette lumière est aussi porteuse du souffle de vie, car le roi porte sur ses narines Ankh, le signe qui communique la vie.
Akhenaton et Néfertiti offrent de l’encens à Aton (le disque solaire) dans le temple. Aton leur envoie le souffle de vie par le signe Ankh dans les narines. Les bras d’Aton sont tendus vers eux (Musée du Caire).
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Toutes les formules des Textes des Pyramides sont un hymne au retour de la vie et à la mort de la mort. Elles proclament l’anéantissement des forces négatives par la magie des rites. Le roi d’Egypte en tant que fils des dieux, est au-dessus de tout. Comme son père Rê, il surplombe tout grâce à son union avec les énergies vitales disponibles dans l’univers. En triomphant de la mort, le roi devient un être universel, et la terre représente le piédestal de son trône. C’est cela, selon nous, le contenu spirituel de l’ascension du roi, rendue possible par l’usage de l’échelle céleste sous toutes ses formes (matérielle et immatérielle). La septième épreuve devient aussi l’instant de la consécration de l’Egypte céleste et éternelle sous la houlette de pharaon. Cette modeste contribution tend à montrer, in fine, que l’échelle de pharaon est en nous, raison pour laquelle les Textes des Pyramides l’assimilent aussi au rayon solaire, qui transforme le souverain en lumière divine, lumière vive de la septième heure, que chaque être humain doit intérioriser afin de répondre en vérité à l’appel du Cosmos : devenir dieu comme le créateur.
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Drioton, E. (1968) : L’Egypte pharaonique. Paris, A. Colin. Du Bouguet, P. (1968) : Contes de la Vallée du Nil. Paris, C. Tchou, éditeur. Erman, A. et Grapow, H., Aegyptisches Handwörterbuch, Berlin, 1921. Faulkner, R. O. (1969): The Ancient Egyptian Pyramid Texts. Oxford University, Clarendon Press. Grieshammer, R. (1936): Die altägyptischen Sargtexte in der Forschung seit. Jéquier, G. (1935) : « L’équipage primitif de la barque solaire d’Héliopolis », Egyptian Religion 3, pp. 18-26. Kamrin, J. (2004): Ancient Egyptian Hieroglyphs. A practical guide. New York, Abram, 2004. Kees (1956) : Totenglauben und Jenseitsvorstellungen der alten Ägypter, 2e edition, Berlin. Lanczkowski, Zur ägyptischen Religionsgeschichte des mittleren Reiches. Das Gespräch zwischen Atum und Osiris. Leiden-Cologne, 1953. Lefebvre, G. (1955) : Grammaire de l’égyptien classique. Le Caire, IFAO, Bibliothèque d’Etudes. Mathieu, B. (2010) : « Mais qui est donc Osiris ? Ou la politique sous le linceul de la religion », ENIM 3, p. 77107.
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Mombo, M.-A. (2010) : « Le règne de pharaon revisité : une interprétation du pouvoir du roi d’Egypte d’après la spiritualité pharaonique (2778-1085 av. J.-C.) ». In Cahiers d’Histoire et Archéologie n°12, Université Omar Bongo (Libreville), FLSH, pp. 359-379. Mombo, M.-A. (2001) : L’au-delà des anciens Egyptiens d’après une analyse des écrits funéraires (2563-1085 av. J.-C.). Thèse pour l’obtention du Doctorat en histoire, Université de Cocody (Abidjan, Côted’Ivoire), UFR des Sciences de l’Homme et de la Société. Muller, D. (1972) : « An early Egyptian Guide to the Hereafter », JEA 58, 99-125, Oxford. Piankoff, A. (1968): The Pyramid of Unas, Egyptian Religion Texts and Representations. Princeton, volume 4. Res Antiquae IX, Bruxelles, Editions Safran, 2012. Revue de l’histoire des religions, « Langue et Kabbale », tome 213, fascicule 4, Paris, A. Colin, octobre – décembre 1996. Revue de l’histoire des religions, tome 225, fascicule 2, Paris, A. Colin, avril – juin 2008. Revue de l’histoire des religions, tome 227, fascicule 4, Paris, A. Colin, octobre – décembre 2010. Zabkar (1968): A Study on the Ba-concept in ancient Egypt Texts, Chicago. Zandee, J. (1960): Death as an enemy, Leiden. 81
TABLE DES PLANCHES Figure 1 ............................................................................ 31 Figure 2 ............................................................................ 76
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TABLE DES MATIÈRES Avant-propos .................................................................. 11 Introduction .................................................................... 15 Chapitre I : La vie après la mort physique sous l’Ancien Empire (2778-2263 av. J.-C.) ...................................................... 25 La situation géographique de l’au-delà selon les Textes des Pyramides ................................. 27 La symbolique de l’échelle ....................................... 31 L’orientation spirituelle des autres moyens d’ascension................................................................ 36 La main ..................................................................... 37 La sandale ................................................................. 39 L’oiseau et les ailes d’oiseau .................................... 41 La pyramide .............................................................. 46 Chapitre II : La voie d’Osiris et les moyens immatériels d’ascension ...................................................................... 51 La voie d’Osiris ou la septième épreuve de Pharaon................................................................. 51 La transformation de pharaon en étoile .................... 55 Pharaon devient Rê ................................................... 58 La symbolique de la transformation en Atoum ........ 61 Chapitre III : La septième épreuve de pharaon comme support du développement durable dans l’Egypte pharaonique .. 65 La religion de pharaon, première ressource pérenne ...................................................................... 66 85
Préserver l’environnement pour une vie et un au-delà meilleurs .............................................. 68 Le corps humain, un support indispensable du développement durable ........................................ 72 Conclusion ...................................................................... 75 Bibliographie .................................................................. 79 Table des planches ......................................................... 83
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L’histoire aux éditions L’Harmattan Dernières parutions mensonges (Les) de l’Histoire
Monteil Pierre
Chaque génération hérite des a priori et des idées reçues de la génération précédente. Ainsi, nombreux sont les mensonges de l’Histoire qui ont survécu jusqu’à nos jours. Nos ancêtres les Gaulois ? Napoléon était petit ? Au Moyen Age, les gens ne se lavaient pas ? Christophe Colomb a découvert l’Amérique ? Ce livre revient sur 80 poncifs considérés par beaucoup comme une réalité... (Coll. Rue des écoles, 28.00 euros, 282 p.) ISBN : 978-2-336-29074-4, ISBN EBOOK : 978-2-296-51351-8 Flavius Josèphe – Les ambitions d’un homme
Cohen-Matlofsky Claude
Quelles furent les ambitions cachées de Flavius Josèphe, historien Juif de l’Antiquité ? Il prône, à travers ses écrits, le retour à la monarchie de type hasmonéen, à savoir d’un roi-grand prêtre, comme réponse à tous les maux de la Judée. La question fondamentale est la suivante : comment les élites locales ont-elles géré leurs relations avec la puissance romaine et quel rôle les membres de l’élite ont-ils assigné à leurs traditions et constitution politique dans cet environnement d’acculturation ? (Coll. Historiques, série Travaux, 15.50 euros, 152 p.) ISBN : 978-2-336-00528-7, ISBN EBOOK : 978-2-296-51387-7 mer (La), ses valeurs
Groupe «Mer et valeurs» Sous la direction de Chantal Reynier – Préface de Francis Vallat
La mer, plus que jamais, est la chance des hommes et la clef de leur avenir. Elle leur apprend la responsabilité, suscite l’esprit d’initiative, mais elle oblige tout autant à rester humble devant ses forces naturelles. Le groupe de réflexion «Mer et Valeurs», réunissant navigants et universitaires, examine l’influence de ces valeurs rapportées à toutes les activités humaines. Des références historiques et géographiques illustrent le développement intellectuel et économique des pays qui se sont tournés vers la mer. (21.00 euros, 188 p.) ISBN : 978-2-336-00836-3, ISBN EBOOK : 978-2-296-51412-6 Métamorphoses rurales – Philippe Schar : itinéraire géographique de 1984 à 2010
Sous la direction de Dominique Soulancé et Frédéric Bourdier
Philippe Schar était convaincu que la géographie ne saurait exister sans la dimension du temps et la profondeur de l’histoire, seules capables de mettre
pleinement en lumière le présent et de le restituer dans toutes ses dimensions. On retrouve en filigrane dans ses recherches concises et pointues la volonté de replacer les opérations de développement à l’interface des logiques promues par les décideurs d’un côté et par les populations de l’autre. Cet ouvrage présente une sélection de ses écrits. (33.00 euros, 320 p.) ISBN : 978-2-296-99748-6, ISBN EBOOK : 978-2-296-51501-7 Pouvoir du Mal – Les méchants dans l’histoire
Tulard Jean
L’Histoire n’est pas une magnifique suite d’actions héroïques et de gestes admirables. Sans le Mal pas d’Histoire. Et il faut l’avouer, les méchants sont les personnages les plus fascinants de la saga des peuples. En voici treize, présentés à travers des dramatiques interprétées jadis sur les ondes. Treize portraits où l’on retrouve méchants célèbres comme Néron ou Beria et héros insolites comme Olivier Le Daim ou le prince de Palagonia. Ils illustrent le pouvoir du Mal. (Coédition SPM, 25.00 euros, 270 p.) ISBN : 978-2-917232-01-9, ISBN EBOOK : 978-2-296-51010-4 vies (Les) de 12 femmes d’empereur romain Devoirs, intrigues et voluptés
Minaud Gérard
Grâce à un méticuleux travail de recherche se redéploie ce que furent les vies de 12 femmes d’empereur et leur influence, non seulement sur leur mari mais aussi sur le destin de Rome. Les pires informations se mêlent. Un amour maternel allant jusqu’à l’inceste, un amour conjugal virant au meurtre, un amour du pouvoir justifiant tout. D’un autre côté, un sens du devoir exceptionnel, une habileté politique remarquable, un goût du savoir insatiable. (34.00 euros, 332 p.) ISBN : 978-2-336-00291-0, ISBN EBOOK : 978-2-296-50711-1 monde (Le) des morts – Espaces et paysages de l’Au-delà dans l’imaginaire grec d’Homère à la fin du Ve siècle avant J.-C.
Cousin Catherine
Ce livre propose d’étudier l’évolution des conceptions que les Grecs ont pu se former des espaces et des paysages de l’au-delà, jusqu’à la fin du Ve siècle avant J.-C. Monde invisible, interdit aux vivants, mais sans cesse présent à leur esprit, les Enfers relèvent pleinement de l’imaginaire. Une comparaison entre productions littéraires et iconographiques enrichit cette étude et laisse entrevoir l’image mentale que les Grecs se forgeaient du paysage infernal. (Coll. Kubaba, série Antiquité, 39.00 euros, 402 p.) ISBN : 978-2-296-96307-8, ISBN EBOOK : 978-2-296-50624-4 Corps et âmes du mazdéen Le lexique zoroastrien de l’eschatologie individuelle
Pirart Eric
Selon les conceptions mazdéennes, l’individu posséderait plusieurs types d’âmes. Est-ce vrai ? Et qu’advient-il de telles âmes au-delà de la mort ?
De quel sexe sont-elles ? Et le corps ? Pour répondre à de telles questions, Éric Pirart analyse les textes zoroastriens des diverses époques anciennes ou médiévales et y décrypte le lexique de l’eschatologie individuelle. (Coll. Kubaba, 29.00 euros, 294 p.) ISBN : 978-2-296-99286-3, ISBN EBOOK : 978-2-296-50580-3 3000 ans de révolution agricole Techniques et pratiques agricoles de l’Antiquité à la fin du XIXe siècle
Vanderpooten Michel
De la Grèce et la Rome antiques à l’Andalousie arabe, des campagnes gauloises à la France des Lumières et de la Révolution industrielle du XIXe siècle, l’évolution des connaissances et des pratiques agricoles est ici retracée à travers l’étude de près de 4000 documents. Les étapes de la production agricole, à différentes époques, sont étudiées, ainsi que l’entrée de l’agriculture dans l’ère de la chimie et du machinisme. (Coll. Historiques, série Travaux, 34.00 euros, 332 p.) ISBN : 978-2-296-96444-0, ISBN EBOOK : 978-2-296-50329-8 Antiquité (L’) moderne
Wright Donald
Ce livre étudie le regard que l’homme de la Belle Époque porte sur l’Antiquité. Il analyse la modernité de la Troisième République et ce que celle-ci doit à une interprétation systématique et scientifique des apports grecs et romains. Au travers des textes littéraires et scientifiques ainsi que de nombreux documents ensevelis puis retrouvés dans les archives françaises, ce livre est une étude sociologique d’une époque moderne par excellence qui se veut «classique». (Coll. Historiques, série Travaux, 27.00 euros, 274 p.) ISBN : 978-2-296-99168-2, ISBN EBOOK : 978-2-296-50407-3 Grandeur et servitude coloniales
Sarraut Albert - Texte présenté par Nicola Cooper
Albert Sarraut fut l’un des maîtres-penseurs du colonialisme de la période de l’entre-deux-guerres. Cet ouvrage de 1931 est l’un des meilleurs exemples de la justification du colonialisme français : il touche à tous les impératifs coloniaux de la France, du tournant du siècle aux débuts de la décolonisation. C’est essentiellement Sarraut qui façonna le langage avec lequel les Français parlaient de leur empire colonial. (Coll. Autrement mêmes, 24.00 euros, 200 p.) ISBN : 978-2-296-99409-6, ISBN EBOOK : 978-2-296-50121-8 Homo Sapiens (L’) et le Neandertal se sont-ils parlé en ramakushi il y a 100000 ans ? Paléontologie génétique et archéologie linguistique
Diagne Pathé
Cet ouvrage présente les découvertes qui permettent pour la première fois d’éclairer de manière factuelle la révolution culturelle et linguistique, qui a planétarisé avec l’avènement de la parole de Sapiens, voire de Néandertal, le monothéisme et les cultes bachiques de bonne fortune et de fécondité, à partir de 300000 et 200000 ans av. J.-C. Les faits qui rendent compte de manière précise
de cette révolution sont portés par le ramakushi et son vocabulaire comme langage datable matériellement entre 8000 et 10000 ans av. J.-C. (Editions Sankoré, 14.50 euros, 138 p.) ISBN : 978-2-296-99334-1, ISBN EBOOK : 978-2-296-50189-8 Histoire des peuples résilients (Tome 1) Traumatisme et cohésion VIe-XVIe siècle
Benoit Georges
Ce livre revient sur l’histoire de communautés éparses qui, surmontant le traumatisme de leur naissance improbable, firent preuve de résilience collective. Histoire particulière, marginale, de rescapés et de fuyards qui se prirent en charge pour se sauver, trouvant en eux-mêmes, dans leur cohésion intime, cette énergie qui les hissa au-dessus de l’ordinaire. Histoire de petites sociétés horizontales qui, vivant en périphérie du continent européen, irradièrent au loin jusqu’à se poster en économies-monde, quand la société médiévale, toute pétrie de verticalité hiérarchique, clouait la population au sol. (Coll. Historiques, série Essais, 23.00 euros, 222 p.) ISBN : 978-2-296-99201-6, ISBN EBOOK : 978-2-296-50168-3 Histoire des peuples résilients (Tome 2) Confiance et défiance XVIe-XXIe siècle
Benoit Georges
Au XVIe siècle, la Contre-Réforme déclara le meilleur de la bourgeoisie persona non grata et, poussant des communautés entières à l’exil, elle les contraignit à se réfugier dans une Eglise plus sociétaire, à tramer du lien social - source de cohésion et de puissance, à faire preuve de cette résilience collective qui fit la fortune de l’Amérique puritaine. Dans ce second tome, cette histoire dit aussi ce que - privées d’une aventure commune - l’Inde des castes et l’Italie du Mezzogiorno ne furent pas ; ce que - par esprit de défiance - l’Amérique des temps modernes pourrait ne plus être. (Coll. Historiques, série Essais, 23.00 euros, 224 p.) ISBN : 978-2-296-99200-9, ISBN EBOOK : 978-2-296-50167-6 vagabond (Le) en occident. Sur la route, dans la rue (Volume 1) – Du Moyen Age au XIXe siècle
Sous la direction de Francis Desvois et Morag J. Munro-Landi
Les textes ici réunis se proposent de fixer une image du vagabond dans les cultures occidentales. Du Moyen Age à nos jours, les sociétés occidentales ont hésité entre fascination et répulsion pour le nomadisme, enviable quand il est choisi, détestable et harassant quand il est imposé. Ces contributions reviennent sur l’histoire de ce phénomène, son accueil et sa pénalisation, ainsi que sur ses représentations dans la littérature et les arts plastiques. (38.00 euros, 378 p.) ISBN : 978-2-296-99153-8, ISBN EBOOK : 978-2-296-50110-2
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mort et ascension de pharaon en Égypte ancienne (2778-2263 av. J.-C.)
Les Textes des Pyramides des anciens Égyptiens, source fondamentale pour la connaissance de la civilisation de l’Égypte pharaonique, affirment que le roi d’Égypte ne meurt pas : il quitte la vie terrestre pour l’au-delà où l’attendent les dieux, ses parents. À l’instar du Nil qui doit affronter six cataractes avant de devenir un fleuve tranquille, l’ascension de pharaon est jalonnée d’épreuves symbolisées par une échelle à six marches figurant dans les tombes de certains rois égyptiens de l’Ancien Empire. L’ascension, précédée par la résurrection de pharaon, se fait au moyen d’un certain nombre d’objets rappelant le monde terrestre : échelles ou escaliers, ailes d’oiseau, sandales, mains de Rê tendues du haut vers le bas. Ces moyens d’ascension doivent conduire pharaon dans l’au-delà où il atteindra l’état divin. La septième épreuve réside en la gestion de ce nouveau statut social et physiologique ; car pharaon, revêtu de la gloire divine, a désormais la possibilité de s’adresser directement aux dieux et le devoir de plaider en faveur de la population de l’Égypte et de l’univers dont il est devenu l’ancêtre et l’intercesseur immédiat. Michel-Alain Mombo est enseignant-chercheur au département d’ histoire de la faculté des lettres et des sciences humaines de l’université Marien Ngouabi à Brazzaville (Congo). Égyptologue, il est également l’auteur de plusieurs articles et d’un livre, Le Pouvoir du roi d’Egypte d’après la spiritualité pharaonique (2778-1085 av. J.-C.), chez L’Harmattan.
ISBN : 978-2-343-00519-5
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